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Supplément
Les arts de la couleur en Grèce ancienne… et ailleurs Approches interdisciplinaires sous la direction de Philippe JOCKEY
B U L L E T I N
D E
C O R R E S P O N D A N C E
H E L L É N I Q U E
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
É C O L E
F R A N Ç A I S E
D ’ AT H È N E S
Directeur des publications : Alexandre Farnoux Responsable des publications : Géraldine Hue, puis Bertrand Grandsagne
Ce volume présente les actes du colloque international tenu à Athènes les 23-25 avril 2009. Ouvrage publié avec le soutien de l’UMR 7041 - Archéologies et Sciences de l’Antiquité (ArScAn) et de l’équipe « Archéologie du monde grec et systèmes d’information » (université Paris I Panthéon-Sorbonne, université Paris Nanterre, CNRS, ministère de la Culture), www.arscan.fr
Révision des textes : Marie Valente, Jacky Kozlowski-Fournier ; EFA, Sophie Duthion, Pauline Gibert-Massoni Conception graphique de la couverture : EFA, Guillaume Fuchs Mise en page : Italiques, Virginie Teillet (Tourrettes-sur-Loup, France) Photogravure, impression et reliure : Corlet Imprimeur (Condé-sur-Noireau, France) Dépositaire : de Boccard Édition-Diffusion – 11, rue de Médicis, F – 75006 Paris, www.deboccard.com © École française d’Athènes, 2018 – 6 Didotou, GR – 106 80 Athènes, www.efa.gr ISBN 978-2-86958-290-3 Reproduction et traduction, même partielles, interdites sans l’autorisation de l’éditeur pour tous pays, y compris les États-Unis.
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LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS Approches interdisciplinaires
sous la direction de Philippe Jockey
À Jean Marcadé †, inlassable défenseur des couleurs et de l’or de la sculpture grecque, in memoriam
Remerciements Le présent ouvrage n’aurait vu le jour sans le concours des deux institutions suivantes et le soutien bienveillant de leurs directeurs : pour l’École française d’Athènes, Dominique Mulliez puis Alexandre Farnoux, pour l’Unité Mixte de Recherche 7041 ArScAn (Archéologies et Sciences de l’Antiquité – université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, université Paris Nanterre, CNRS, ministère de la Culture), Francis Joannès puis François Villeneuve.
Introduction Philippe Jockey
Dans le champ de l’exploration des couleurs des sociétés présentes et passées, l’interdisciplinarité n’est pas un vain mot, mais bien une réalité vécue aujourd’hui au quotidien par les chercheurs qui en font le préalable épistémologique à toute recolorisation de mondes disparus, « filmés » jusqu’à présent trop souvent en noir et blanc, faute de moyens ou d’audace. Les progrès rapides et décisifs opérés par la physique, l’optique et la chimie dans notre connaissance des matériaux mêmes de la couleur, permettent, en effet, d’approcher au plus près la réalité des techniques et des gestes mobilisés dans cette opération décisive des sociétés que représente leur « colorisation ». N’allons pas croire, en effet, que la polychromie ait toujours été circonscrite à quelques sphères seulement, telle celle de l’art. L’un des contre-exemples les plus spectaculaires est celui de la Grèce antique. Le croisement des données historiques, philologiques, archéologiques et physico-chimiques a étendu à tous les domaines des sociétés helléniques la réalité d’une polychromie qui investissait tout autant les champs du sacré, du politique que la seule aire des arts figurés. Au point d’être l’objet d’une économie originale, dont l’étude est, ici comme ailleurs, rendue possible par le jeu de cette interdisciplinarité des couleurs. Bien loin du mythe d’une Grèce blanche construit de toutes pièces au fil des siècles. Au nombre des progrès accomplis dans notre connaissance 1 des couleurs elles-mêmes, pigments et colorants, et de leurs modes de production et d’application, liants, diluants, colles, on retiendra qu’ils mettent définitivement à bas l’idée reçue d’une palette grecque réduite à quelques couleurs seulement. La précision quasi nanométrique, aujourd’hui, des mesures opérées sur les vestiges de matière colorée, non seulement en révèle la présence, mais elle en identifie aussi la composition et en met en évidence la subtilité. Outre un enrichissement en nombre de variétés d’une même couleur, on observe en effet une virtuosité dans leur production puis dans leur choix même, à l’instar des verts ou des jaunes. Moins bien conservés jusqu’à présent que les rouges et autres bleus, par exemple, ils sont désormais décelables et analysables. Ils bouleversent notre lecture des gestes qui les produisaient et les appliquaient et des discours qu’ils portaient. Degrés 1.
Ph. Jockey, Le mythe de la Grèce blanche. Histoire d’un rêve occidental 2 (2015).
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LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
de dilution ou de broyage, transparences, glacis et superpositions s’offrent désormais au regard du spécialiste. Au point d’en arriver à ce paradoxe, pour prendre les seuls exemples des moulures architecturales et surtout de la sculpture, quelles qu’en fussent les formes, haut et bas-reliefs, ronde-bosse, résumable dans la formule suivante : en Grèce ancienne, « sculpter c’est peindre ». Le parachèvement des modelés par les jeux d’ombre et de lumière, mais aussi de transparence, est une réalité archéologique, mise en évidence par les approches physico-chimiques, et invite à une relecture technique, esthétique et symbolique de ses témoins matériels. Plus que tout autre matériau, l’or et la pourpre se distinguent évidemment par les valeurs symboliques qu’ils portaient. Encore fallait-il les mettre en évidence quoique à l’état de traces infimes à la surface des objets les plus divers. Le degré de finesse, une fois encore, des mesures physico-chimiques convoquées pour cela rend désormais impossible les généralités. Il faut s’habituer à lire les valeurs que ces deux matériaux de prestige portaient à l’aune de leurs modes de fabrication, d’application et d’entretien. Tenir un compte précis aussi des variations dans les tonalités que la pourpre permettait, dans notre analyse du discours que de telles nuances véhiculaient, aux yeux des commanditaires comme de leurs cibles privilégiées. Un tel bouleversement épistémologique et conceptuel justifiait que l’on consacrât une attention toute particulière aux Arts de la couleur en Grèce ancienne… Et ailleurs. Un « ailleurs » compris dans une acception spatio-temporelle. Non seulement à titre de comparaison, mais parce qu’il s’y est produit, là aussi, une évolution décisive. Comment, en effet, ne pas prendre en compte les aventures polychromes propres à l’Étrurie ou à la Thrace, ces deux terres aux confins des couleurs de la Grèce ? Interaction, contamination, emprunts en sont quelques-uns des ressorts principaux. On ne s’étonnera pas, non plus, d’une incursion conduite au-delà du seul paradigme grec. L’enquête libanaise illustre bien cette rencontre des couleurs et du sacré dans le monde contemporain. C’est bien la dynamique des couleurs qui confère ici au rite son efficience. Ces « pèlerinages » polychromes contemporains aident, par exemple, à la compréhension d’une procession grecque qui faisait toute sa place aux couleurs. La redécouverte de la polychromie de la frise des Panathénées, via les études conduites au British Museum ces toutes dernières années, intervient à un moment heureux. Mais n’y voyons pas le fruit du hasard. Le fruit était mûr, si l’on peut dire. Le caractère international de ces recherches, comme on le voit, s’ajoute aujourd’hui à cette interdisciplinarité exigeante et requise. Elle répond à une triple nécessité : le croisement de données matérielles et textuelles toujours plus riches et nombreuses, d’une région à l’autre, d’une rive de la Méditerranée à l’autre, d’un continent à l’autre ; la comparaison des cultures scientifiques propres aux différents acteurs de leur production ; la confrontation dynamique des regards. L’enquête sur les arts de la couleur exige en effet le concours de tous les acteurs engagés dans les divers métiers dits du patrimoine. Conservateurs de musées et de sites, restaurateurs, scénographes et architectes engagés dans la modélisation 3D participent
INTRODUCTION
pleinement aux progrès de la recherche et de sa restitution au public. C’est en effet l’une des caractéristiques les plus originales de ce champ de recherche que cette exigence de « donner à voir », pour mieux comprendre. Elle correspond à une attente très vive. Et fort légitime. À la restitution 3D virtuelle des monuments et des objets s’ajoute un nouveau défi, rendu possible tout à la fois par les progrès technologiques et l’intérêt heuristique qu’elle représente pour tous les acteurs : leur reconstitution dynamique et non plus seulement statique, comme l’étaient les anastyloses des siècles passés. Il faut nous en réjouir : nous disposons aujourd’hui, pour la toute première fois dans l’histoire, de l’ensemble des technologies permettant la reconstitution de ces scénographies passées, dans lesquelles les couleurs du mobilier d’apparat, des peintures murales, des mosaïques et de la sculpture interagissaient pour produire sur ceux qui les recevaient l’effet voulu par leurs commanditaires, publics ou privés. Le temps n’est plus à la simple étude d’un type d’artefact, d’un matériau ou d’une technique en particulier, mais bien à celle des réseaux que définissaient leurs couleurs partagées, qui ne prennent sens que rapportées les unes aux autres. Plus immatérielle, mais pas moins fondamentale, la reproduction dynamique des gestes associés à la couleur, fondée sur l’analyse des matériaux qu’ils ont produits et transformés, est l’un des enjeux actuels de la recherche. Isoler des gestes, en évaluer la variété, d’une société à l’autre, d’une civilisation à l’autre et d’une temporalité à l’autre, occupe aujourd’hui le monde des chercheurs et de sa valorisation. Les contributions réunies dans cet ouvrage relèvent de l’un ou l’autre des grands champs d’étude évoqués ci-dessus. Il s’agissait, dans le projet du colloque international qui les a suscités comme dans celui de cette publication, de leur donner toute leur place. Ils ne sont pas seulement les témoins plus convaincants, à un moment donné de cette belle aventure polychrome internationale, de l’état de la recherche. Ils visent aussi, dans une perspective dynamique, à susciter de nouveaux croisements disciplinaires. Au-delà, l’enjeu est d’une tout autre importance : ouvrir les portes d’une nouvelle discipline, qui serait aussi une clef de lecture privilégiée des sociétés anciennes et contemporaines. L’étude de leurs couleurs ouvre sur l’histoire. Allons plus loin : elle est l’actrice par excellence de la redéfinition contemporaine de celle-ci. Au point que l’on pourrait affirmer qu’histoire sans couleurs n’est que ruine de la conscience historique. Cet ouvrage a pour ambition d’en convaincre ses lecteurs.
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ENTRER EN MATIÈRES : TECHNIQUES DE FABRICATION, PRODUCTION, ÉCONOMIE DE LA COULEUR
La production du bleu égyptien durant l’époque hellénistique et l’Empire romain (iiie s. av. J.-C.-ier s. apr. J.-C.) Laëtitia Cavassa
RÉSUMÉ Le bleu égyptien, premier pigment de synthèse mis au point, est le seul pigment de couleur bleue à avoir été utilisé pour la peinture murale durant l’Antiquité. Après une présentation générale concernant ce pigment (technique de production, usages), nous insisterons sur les divers ateliers connus (Égypte, Italie). Enfin, une partie sera consacrée aux données apportées par les fouilles du Centre Jean Bérard à Cumes (Campanie, Italie), ce qui nous permettra de mieux cerner la production du pigment dans les Champs Phlégréens durant le ier s. apr. J.-C. MOTS-CLEFS
Pigment, creusets, Memphis, Cumes.
SUMMARY Egyptian blue production from the Hellenistic period to the Roman Empire (3rd BC – 1st AD) Egyptian blue, the first synthetic pigment created, is the only blue pigment used for mural painting during Antiquity. Our paper aims at a general overview of this pigment (its techniques of production, its various uses), based on locations where it was produced (Egypt, Italy). According to our findings, several elements lead us to believe that the Phlegreens Fields harboured several workshops in which the pigment was produced between the first century BC and the first century AD. Finally we will conclude by describing the excavations works carried out by the Centre Jean Bérard in Cumes, during which the crucibles used to produce the pigment were studied. KEYWORDS
Pigment, crucibles, Memphis, Cumes.
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LAËTITIA CAVASSA
à propos de l’auteur L. Cavassa, ingénieur d’études, céramologue, Centre Jean Bérard, USR 3133 CNRS - EFR, Naples, Italie / Aix-Marseille université, CNRS, ministère de la Culture et de la Communication, CCJ, Aix-enProvence, France.
note liminaire Cette étude a été effectuée dans le cadre du projet « Artifex » soutenu par l’Agence nationale de la Recherche et a débuté lorsque je travaillais pour le Centre Jean Bérard (CNRS, USR 3133, École française de Rome) lors des fouilles de la nécropole septentrionale de Cumes. Nous remercions particulièrement Jean-Pierre Brun et Marie-Dominique Nenna d’avoir pris le temps de relire, de commenter et d’apporter des corrections au texte.
LA PRODUCTION DU BLEU ÉGYPTIEN DURANT L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’EMPIRE ROMAIN (IIIe S. AV. J.-C.-Ier S. APR. J.-C.)
Hsbd iryt, kyanos, caeruleum, bleu d’Alexandrie, bleu de Pouzzoles, bleu de Pompéi ou bleu de Vestorius ne sont que quelques-unes des appellations utilisées pour désigner un seul et même pigment de couleur bleu, le bleu égyptien, premier pigment de synthèse à avoir été mis au point. Dès le xixe s., ce pigment d’une intense couleur bleue attira la curiosité des chimistes qui tentèrent d’en découvrir la formule exacte 1. Cette contribution, à vocation historique et non chimique, tentera d’apporter de nouvelles données concernant la production de ce produit de synthèse, à partir des textes et de la documentation archéologique.
LE
BLEU ÉGYPTIEN
Le bleu égyptien est un pigment artificiel obtenu par mélange de sable, de cuivre, de calcium et d’éléments alcalins (sodium ou potassium). Du point de vue chimique, il s’agit d’un matériau composite constitué d’une phase vitreuse dispersée dans une phase cristalline correspondant à un minéral très rare à l’état naturel : la cuprorivaïte (de formule CaCuSi4O10) 2. Les expériences réalisées ont montré que ce pigment résulte de plusieurs cuissons 3 à la température maximale de 950 °C durant 24 à 48 h. Ses origines Il s’agit du premier pigment de synthèse mis au point par l’Homme. Par tradition, et comme son nom l’indique, c’est un produit d’origine égyptienne. Selon une hypothèse couramment acceptée, les Égyptiens auraient cherché à obtenir, pour la décoration pariétale, une teinte bleue égalant l’éclat du lapis-lazuli, minéral que sa rareté et sa préciosité réservaient à la bijouterie. Cette explication découle de l’existence d’inscriptions hiéroglyphiques mentionnant un produit appelé hsbd iryt, que l’on traduit littéralement par « lapis-lazuli fabriqué » et que l’on identifie comme le pigment bleu égyptien 4. La date de mise au point de ce produit reste incertaine, mais les plus anciennes attestations d’utilisation du pigment remontent au milieu du IIIe millénaire av. J.-C. Le monument le plus ancien utilisant ce pigment est la stèle fausse-porte de Méry, provenant
1.
2.
3.
4.
Voir l’article de Fr. Delamare retraçant bien cette question : Fr. Delamare, « Le bleu égyptien. Essai de bibliographie critique », dans S. Colinart, M. Menu, La couleur dans la peinture et l’émaillage de l’Égypte ancienne (1998), p. 143-161. Ce minéral a été découvert en 1938 en Italie, sur les pentes du Vésuve. C. Minguzzi, « Cuprorivaïte: un nuovo minerale », Periodico di mineralogia 3 (1938), p. 333-345. Son utilisation durant l’Antiquité n’est en aucune façon attestée. D. Ullrich, « Egyptian Blue and Green Frit: Characterization, History and Occurrence, Synthesis », dans Fr. Delamare, T. Hackens, Br. Helly (éds), Datation-Caractérisation des peinture pariétales et murales, PACT 17 (1987), p. 323-332 (plus précisément p. 331) ; et G. D. Hatton, A. J. Shortland, M. S. Tite, « The Production Technology of Egyptian Blue and Green Frits from the Second Millennium BC Egypt and Mesopotamia », Journal of Archaeological Science 35 (2008), p. 1591-1604. R. O. Faulkner, A Concise Dictionary of Middle Egyptian (1962), s.v. p. 197.
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LAËTITIA CAVASSA
de Saqqara 5 et datée de la IVe dynastie (2500-2300 av. J.-C.). L’analyse de cette stèle conservée au musée du Louvre (inv. B49) a confirmé l’identification visuelle. La plupart des travaux publiés s’accordent pour faire de la période de la IVe dynastie le moment de l’apparition du bleu égyptien 6, mais récemment G. D. Hatton a proposé de remonter cette date à la Ire dynastie : la décoration picturale de la tombe 3121 à Saqqara, datée vers 2900 av. J.-C., emploierait déjà ce pigment 7. Cela repousserait donc de quatre cents ans « l’apparition » du bleu égyptien, au minimum car A. Kaczmarczyk mentionne la présence de perles en bleu égyptien massif sur le site d’Abydos, dans des contextes funéraires de la période de Nagada II 8, soit du IVe millénaire (3500-3300 av. J.-C.). Toutefois une question demeure ouverte : s’agit-il d’un produit égyptien ou mésopotamien ? En 1985, P. R. S. Moorey proposait une origine mésopotamienne du bleu égyptien 9. Cette hypothèse fut reprise en 1987 par D. Ullrich qui mentionne la découverte sur le site de Kish d’un coquillage contenant du bleu 10 daté des environs de 3000 av. J.-C. 11. Les sources textuelles Hormis les textes hiéroglyphiques que nous avons mentionnés plus haut, aucune source d’époque pharaonique ne nous renseigne sur le pigment. Les sources littéraires sont plus tardives. Au ive s. av. J.-C., Théophraste mentionne dans son traité De Lapidibus (Traité sur les pierres) un kyanos artificiel originaire d’Égypte que l’on identifie au bleu égyptien 12. Le texte le plus détaillé est dû à Vitruve qui décrit les pigments artificiels dans le livre VII de son traité De Architectura : « la fabrication du bleu céruléen a été mise au point à Alexandrie, et plus tard Vestorius en a fondé une fabrique à Pouzzoles. C’est un produit tout à fait étonnant par les ingrédients à partir desquels il a été mis au point. On broie en effet du sable avec de la fleur de nitre, assez finement pour obtenir une sorte de farine ; et, lorsqu’on y mélange du cuivre à l’état de limaille à l’aide de grosses limes, on arrose le tout, pour qu’il s’agglomère ; puis en le roulant dans ses mains, on en fait des boulettes que l’on rassemble pour les faire sécher ; une fois sèches, on les met dans un pot de terre cuite, et les pots sont portés dans des fours : ainsi, quand le cuivre et le sable entrant en effervescence sous la violence du feu se sont fondus ensemble, en se donnant l’un à l’autre
5. 6.
7. 8. 9. 10.
11. 12.
S. Colinart, S. Pagès-Camagna, E. Delange, « Le bleu et le vert égyptien. Les blocs de grès de la chapelle d’Eléphantine », Technè 7 (1998), p. 36. A. Lucas, Ancient Egyptian Materials and Industries (1989) ; H. Jaksch et al., « Egyptian Bluecuprorivaite. A Window to Ancient Egyptian Technology », Die Naturwissenschaften 70 (1983), p. 525535 ; D. Ullrich (n. 3). G. D. Hatton, A. J. Shortland, M. S. Tite (n. 3), p. 1591. A. Caubet (éd.), Faïences et matières vitreuses de l’Orient ancien (2007), p. 14. P. R. S. Moorey, Materials and Manufacture in Ancient Mesopotamia. The Evidence of Archaeology and Art. Metals and Metalwork, Glazed Materials and Glass, BAR International Series 237 (1985), p. 190. Toutefois, il n’est pas précisé que le bleu découvert dans le coquillage du site de Kish soit du bleu égyptien. Il pourrait tout aussi bien s’agir de l’azurite utilisée comme fard, comme cela est le cas en Égypte. D. Ullrich (n. 3), p. 326. Théophraste, De Lapidibus 55-56.
LA PRODUCTION DU BLEU ÉGYPTIEN DURANT L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’EMPIRE ROMAIN (IIIe S. AV. J.-C.-Ier S. APR. J.-C.)
et en recevant l’un de l’autre leurs sueurs ils abandonnent leurs caractères individuels, et, leur être propre anéanti par la violence du feu, ils sont réduits à l’état de couleur bleue 13 ». Quelques décennies plus tard, Pline l’Ancien présente lui aussi les pigments, dont plusieurs variétés de bleu, parmi lesquels se trouve « le lomentum vestorien […] qui tire son nom de celui de son inventeur » et qui s’obtient de la partie la plus fine du caeruleum égyptien 14. Enfin, au tout début du ive s. apr. J.-C., l’édit du Maximum fixe le prix du cyaninum Vestorianum de 80 à 150 deniers la livre 15. La fin d’une production ? Les ive s. et ve s. apr. J.-C. ont longtemps été considérés comme la période de « ralentissement » de la production du pigment qui aurait pris fin vers la fin du ixe s. et qui s’expliquerait par la perte de la recette. Jusqu’aux années quatre-vingt-dix, la décoration de l’église San Saba sur l’Aventin (datée de la première moitié du viiie s. apr. J.-C.) 16 et celle de la basilique San Clemente à Rome 17 (datée du ixe s.) faisaient office de derniers témoignages d’utilisation du pigment. C’est également le cas dans la région de Naples, à San Vincenzo al Volturno, où la décoration de l’église, datée du début du ixe s. apr. J.-C., a révélé la présence de bleu égyptien. Toutefois d’autres exemples permettent d’affirmer que l’utilisation du pigment perdure de manière plus ou moins intensive jusqu’au xiiie s., voire de façon beaucoup plus localisée jusqu’au xvie s. L’article de M. C. Gaetani, U. Santamaria et Cl. Seccaroni montre la persistance de l’usage du bleu égyptien durant le Moyen Âge, en présentant les exemples suivants. Deux sculptures polychromes peintes au bleu égyptien de l’abbaye de Saint-Augustin à Canterbury sont datées entre le début du viie s. et le ixe s. La peinture du Jugement dernier 18 due à Nicolò et Giovanni et conservée à la Pinacothèque du Vatican est datée entre la fin du xie s. et la seconde moitié du xiie s. 19. À Trévise, dans la Loggia dei Cavalieri datée du xiiie s., les analyses (non publiées) ont également révélé la présence de bleu égyptien. La décoration polychrome des sculptures de la porte centrale de la cathédrale de Gênes datées du début du xiiie s. utilise aussi ce pigment 20. Enfin, le bleu égyptien est employé dans l’enluminure d’un
13. 14. 15. 16.
17. 18. 19.
20.
Vitruve, De Architectura VII 11 (trad. B. Liou, M. Zuighedau, CUF, 2003). Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXIII 161-164. M. Giacchero, Edictum Diocletiani et Collegarum de pretiis rerum uenalium (1974), p. 218, nos 34, 84 et 85. Il s’agit d’un cas tout à fait intéressant, car les analyses ont permis de constater l’usage contemporain et en mélange (donc usage volontaire) de bleu égyptien et de lapis-lazuli. M. C. Gaetani, U. Santamaria, Cl. Seccaroni, « The Use of Egyptian Blue and Lapis Lazuli in the Middle Ages. The Wall Painting of the San Saba Church in Rome », Studies in Conservation 49 (2004), p. 14, 20. L. Lazzarini, « The Discovery of Egyptian Blue in a Roman Fresco of the Medieval Period (Ninth Century A.D.) », Studies in Conservation 27 (1982), p. 84-86. Il s’agit d’une peinture a tempera sur bois, conservée à la pinacothèque du Vatican, no inv. 40526. Il semblerait qu’elle soit plus vraisemblablement datée de la seconde moitié du xiie s. Voir le site internet du Vatican (http://mv.vatican.va/5_FR/pages/x-Schede/PINs/PINs_Sala01_07_008.html). Consulté le 11 novembre 2016. M. C. Gaetani, U. Santamaria, Cl. Seccaroni (n. 16), p. 19.
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manuscrit latin daté de 780-783 apr. J.-C. 21, ainsi que dans deux autres du xe s. provenant du Sud de l’Angleterre 22. Mais une question demeure : s’agit-il de bleu produit durant la période médiévale ou bien de l’utilisation de boules de bleu antiques récupérées par les artistes ? G. Hatton a tenté de répondre à cette question en démontrant que, pour la fresque de l’église San Clemente à Rome, pas moins de trente-cinq boules de bleu auraient été nécessaires pour sa réalisation. Cela impliquerait donc d’avoir à disposition un gisement assez important 23. Le doute demeure toutefois.
LES
UTILISATIONS
Un pigment La principale utilisation de ce produit est celle d’un pigment : le « bleu égyptien » fut le plus important pigment bleu en usage durant toute l’Antiquité 24. Malgré les différents débats concernant son apparition, le bleu égyptien devint rapidement l’unique pigment bleu pour la peinture murale. Les exemples sont nombreux et nous nous bornerons dans la présente contribution à ne citer que quelques cas pour cerner l’étendue de son utilisation en le replaçant dans un contexte chronologique. Entre 1989 et 1991, plus de 1 380 échantillons de pigments (bruts et prélèvements sur des peintures) provenant de monuments égyptiens datés entre la Ve dynastie et l’époque romaine ont été analysés dans le cadre d’un programme de recherche dirigé par l’Institut de physique nucléaire Max-Planck d’Heidelberg, avec la collaboration de
21.
22. 23.
24.
J. Vezin, P. Roger, « Étude des matériaux de la couleur dans les manuscrits médiévaux : emploi inédit de bleu égyptien dans trois manuscrits des viiie et xe s. », Comptes rendus de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, janvier-mars (2007), p. 68. J. Vezin, P. Roger (n. 21), p. 78-81. G. D. Hatton, « Production of Egyptian Blue and Green Frits », dans M. S. Tite, A. J. Shortland (éds), Production Technology of Faïence and Related Early Vitreous Materials, Oxford University School of archeology, Monograph 72 (2008), p. 149. À l’heure actuelle, trois exemples attestent l’utilisation du lapis-lazuli en tant que pigment durant l’Antiquité. Un premier cas est cité par Fr. Delamare (Fr. Delamare, G. Monge, M. Repoux, « À la recherche de différentes qualités marchandes dans les bleus égyptiens trouvés à Pompéi », Rivista di Studi Pompeiani XV [2004], p. 89). Il s’agit de la décoration d’une statue en terre cuite mise au jour en Gaule dans un contexte daté du iie s. av. J.-C. H. Brecoulaki en cite deux autres exemples : la décoration peinte d’un astragale provenant d’un contexte daté entre le vie s. av. J.-C. et la période hellénistique (M. P. Colombini et al., « Integrated Analytical Techniques for the Study of Ancient Greek Polychromy », Talanta 63 [2004], p. 839-848). Un autre cas se reconnaît en application sur une pyxide (D. C. Smith et al., « The in situ MRM First Discovery of Lazurite on a Painted Marble Pyxis at the National Archaeological Museum, Athens », dans J. M. Madariaga [éd.], 5th International Congress on the Application of Raman Spectroscopy in Art and Archaeology, Bilbao, Spain [14-18 September 2009] [2009]). Nous remercions H. Brecoulaki de nous avoir transmis ces références.
LA PRODUCTION DU BLEU ÉGYPTIEN DURANT L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’EMPIRE ROMAIN (IIIe S. AV. J.-C.-Ier S. APR. J.-C.)
l’Institut d’égyptologie de l’université d’Heidelberg (1980-1982), l’Institut d’histoire ancienne de l’université de Konstanz (1982-1984) et le Roemer- und Pelizaeus-Museum d’Hildesheim (1989-1991). Ces analyses ont révélé que la couleur bleue est exclusivement représentée par le bleu égyptien 25. En Grèce, les études menées par A. Dandrau sur la peinture murale minoenne du xie s. av. J.-C. mentionnent l’usage important du bleu égyptien (employé seul ou en mélange) 26. Pour le Ier millénaire av. J.-C., signalons en Italie du Sud, l’analyse des échantillons prélevés sur 21 tombes provenant d’Apulie, de Lucanie, de Campanie et de Tarquinia datées entre le ve s. et le iiie s. av. J.-C., dont les résultats montrent que le bleu égyptien est l’unique pigment bleu employé pour la décoration picturale 27. En Macédoine, l’étude menée par H. Brecoulaki sur la composition des pigments utilisés pour la peinture funéraire n’a révélé que la présence de bleu égyptien pour la teinte bleue 28. Les échantillons ont été prélevés sur les peintures d’une soixantaine de monuments funéraires et stèles datés entre le ive s. et le iie s. av. J.-C. La même constatation est faite par Ph. Walter pour les stèles alexandrines d’époque hellénistique (datées entre le ive s. et le iie s. av. J.-C.) conservées au Louvre 29. C’est également ce que révèlent les analyses de J. Kakoulli effectuées sur la décoration de trois hypogées de la nécropole de Gabbari située dans la partie occidentale d’Alexandrie 30, datés de la période hellénistique. En ce qui concerne l’époque romaine, S. Augusti a effectué en 1967 une série d’analyses sur les pigments retrouvés et conservés à Pompéi et à Herculanum. Sur 221 échantillons analysés, 46 sont de couleur bleu et se révèlent être tous du bleu égyptien 31. Quelque trente ans plus tard, Fr. Delamare en arrive aux mêmes conclusions en ayant analysé toute une série de pigments mis au jour sur le site de Pompéi 32. En Gaule aussi, le bleu égyptien est le principal pigment bleu utilisé pour la décoration pariétale 33. Outre
25. 26. 27. 28. 29. 30. 31. 32. 33.
L. Lee, S. Quirke, « Painting materials », dans P. T. Nicholson, I. Shaw (éds), Ancient Egyptian Materials and Technology (2000), p. 104-120. A. Dandrau, « La peinture murale minoenne. I. La palette du peintre égéen et égyptien à l’âge du Bronze. Nouvelles données analytiques », BCH 123 (1999), p. 15-17. H. Brecoulaki, L’esperienza del colore nella pittura funeraria dell’Italia preromana. V-III sec. A.C. (2001), p. 11. Id., La peinture funéraire de Macédoine. Emplois et fonctions de la couleur, IVe-IIe s. av. J.-C., (2006), p. 423. Ph. Walter, « Contribution à l’étude des techniques de la peinture hellénistique », dans A. Rouveret, Peintures grecques antiques. La collection hellénistique du musée du Louvre (2004), p. 140. J. Kakoulli, « Scientific Investigations of Three Graeco-Roman Painted Stone Slabs », dans J.-Y. Empereur, M.-D. Nenna (éds), Nécropolis 1 (2001), p. 215-223. S. Augusti, I colori pompeiani (1967), p. 65. Fr. Delamare, G. Monge, M. Repoux (n. 24). J.-M. Croisille, La peinture romaine (2005), p. 290 ; A. Barbet, La peinture murale en Gaule romaine (2008), p. 30.
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les fresques, divers supports sont attestés : la statuaire 34, les décorations architecturales 35, la terre cuite 36, le bois 37, la céramique 38 ou encore les petits objets, etc. Une matière brute Le bleu égyptien est également une matière brute. De nombreuses mentions d’objets en bleu égyptien massif existent. Il est généralement utilisé pour la fabrication de perles, de sceaux, d’amulettes, de petits objets divers, ainsi que de vases ou de statuettes. La collection publiée la plus importante à ce jour provient de Ras Shamra-Ougarit (Syrie). La fouille de la cité antique et de son port (Minet el-Beida) a livré un grand ensemble de matériaux vitreux se répartissant en plus de 20 000 pièces entre verre, faïence, céramique argileuse à glaçure et bleu égyptien. Le bleu égyptien est représenté par 266 pièces (perles, sceaux, scarabées, pions de jeu, vases) et une vingtaine de blocs de matière brute datés du Bronze récent final (xive s.-xiiie s. av. J.-C.) 39. Il semble que le site ait abrité une production d’objets en bleu égyptien suivant un principe simple. La matière brute est broyée, réduite à l’état de poudre, puis mélangée à un liant et mise à chauffer dans un moule. À Ras Shamra-Ougarit, le bleu égyptien est aussi utilisé comme colorant. Des analyses archéométriques ont été réalisées sur les objets en faïence, révélant l’utilisation de cuprorivaïte pour la coloration de la glaçure d’un pion de jeu : autrement dit, ce jeton a été coloré au bleu égyptien. Il semble que cette utilisation du bleu égyptien en tant que colorant ne soit à l’heure actuelle répertoriée qu’à Ras Shamra-Ougarit, ce qui incite V. Matoïan à émettre l’hypothèse d’une production locale. L’ensemble de ces indices – présence d’objets en bleu égyptien, de blocs bruts de pigment, d’objets en faïence colorés à la cuprorivaïte – plaide en faveur d’un lieu de production du bleu égyptien. Toutefois, comme nous le verrons par la suite, la présence de blocs, de pains et de boules de bleu, n’indique pas forcément l’existence d’un lieu de production primaire. Ils peuvent néanmoins être le signe d’un atelier secondaire travaillant une matière brute importée, ou bien indiquer simplement un lieu de consommation privilégié. V. Matoïan dit justement que ces blocs bruts (verre et bleu égyptien) ont été mis au jour dans le palais qui joue le rôle, au Proche-Orient, « de lieu de stockage, de concentration des richesses à
34.
35. 36. 37. 38. 39.
Br. Bourgeois, Ph. Jockey, « Le marbre, l’or et la couleur : nouveaux regards sur la polychromie de la sculpture hellénistique de Délos », dans S. Deschamps-Lequime (éd.), Peinture et couleur dans le monde grec antique. Actes du colloque, Musée du Louvre (10 et 27 mars 2004) (2007), p. 163-191, ainsi que les nombreuses contributions dans ce volume. O. Rayet, « Le temple d’Apollon didyméen », Gazette des Beaux-Arts 14 (1876), p. 232-254 ; A. Hermary, « Un nouveau chapiteau hathorique trouvé à Amathonte », BCH 109 (1985), p. 657-703. Par exemple, le bleu égyptien entre dans la composition de la décoration des statuettes tanagréennes. Voir V. Jeammet (éd.), Tanagra. Mythe et archéologie, Exposition Paris, Louvre 2003-2004 (2003), p. 299. S. Colinart, S. Pagès-Camagna, E. Delange (n. 5), p. 39-40. Intervention orale de S. Sotiropoulou lors du présent colloque. Le bleu égyptien est mentionné dans la décoration d’une hydrie provenant de la nécropole de Rhodes (iiie s.-iie s. av. J.-C.). V. Matoïan, A. Bouquillon, « Le “bleu égyptien” à Ras Shamra-Ougarit (Syrie) », dans P. Matthiae et al. (éds), Proceedings of the First International Congress on the Archaeology of the Ancient Near East, Rome (18-23 mai 1998) (2000), p. 983-1000.
LA PRODUCTION DU BLEU ÉGYPTIEN DURANT L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’EMPIRE ROMAIN (IIIe S. AV. J.-C.-Ier S. APR. J.-C.)
des fins de prestige et de luxe ». Elle ajoute que « la matière première (brute) pouvait y être conservée dans l’attente de son utilisation ou de son exportation » et précise qu’aucun atelier n’a été retrouvé in situ 40. Elle précise également que l’un des blocs de verre brut analysé, de couleur bleue, se distingue par la présence d’impuretés assez caractéristiques de la vallée du Nil : il s’agit donc d’une importation égyptienne. Cela pourrait très bien être le cas également des pains de bleu. Il est certain que les pains bruts et les boules de bleu voyagent 41 : des blocs de verre brut ont été trouvés dans l’épave d’Ulu Burun coulée durant le Bronze récent 42. Les 175 lingots de verre brut devaient être destinés à la fabrication des objets au port de débarquement. Il convient donc de nuancer et de considérer l’existence, comme pour le verre, d’ateliers primaires fabriquant la matière brute et d’ateliers secondaires produisant des objets. Suivant cette logique, Ras Shamra-Ougarit serait plutôt un atelier secondaire et non un lieu de fabrication de la matière première. En Occident, des objets en bleu égyptien brut sont mentionnés au moins à partir du viiie s. av. J.-C. Plusieurs synthèses répertorient ces trouvailles en Italie, en Sardaigne 43 et dans le bassin méditerranéen 44 : un collier de perles à Cumes du viie s. av. J.-C. 45, un scarabée sur le site de Monte Iato en Sicile dans un contexte du vie s. av. J.-C. 46, ou encore une perle en Angleterre sur le site de Runnymede dans un contexte daté entre 900 et 700 av. J.-C. 47. La mosaïque Un autre usage attesté du bleu égyptien est la mosaïque dans laquelle les boules de bleu sont employées entières ou cassées en deux morceaux et sont directement insérées dans le mortier. Un exemple est particulièrement intéressant. Il s’agit de la copie d’une œuvre de Sophilos datée du iie s. av. J.-C. et mise au jour en Égypte, à Thmuis dans le delta du Nil,
40. 41. 42.
43. 44. 45. 46.
47.
V. Matoïan, « Matières vitreuses au royaume d’Ougarit », Les annales archéologiques arabes syriennes. Revue d’archéologie et d’histoire XLV-XLVI (2002-2003), p. 158. Nous savons que cela sera le cas à l’époque romaine, avec les exemples des épaves de la Madrague de Giens, de Planier III au large de Marseille, de Mljet en Croatie. Cette épave est datée de 1300 av. J.-C. et les blocs de verre brut contenus dans la cargaison ont certainement été fabriqués en Égypte. C. Pulak, « The Uluburun Shipwreck: an Overwiew », The International Journal of Nautical Archaeology 27.3 (1998), p. 202-203. G. Hölbl, Ägyptisches Kulturgut im phönikischen und punischen Sardinien (1986). A. F. Gorton, Egyptian and Egyptianizing Scarabs. A Typology of Steatite, Faience and Paste Scarabs from Punic and Other Mediterranean Sites (1996). G. Hölbl (n. 43), p. 198. M. Bürge, H. P. Isler, « Monte Iato. Indigènes et Grecs à l’époque archaïque », dans F. Spatafora, St. Vassallo, Des Grecs en Sicile… Grecs et indigènes en Sicile occidentale d’après les fouilles archéologiques, Exposition Marseille 2006 (2006), p. 77-80 et notices p. 81-97. S. P. Needham, M. Bimson, « Late Bronze Age Egyptian Blue at Runnymede », The Antiquaries Journal LXVIII.II (1988), p. 314-315.
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attestant l’usage de boules de bleu égyptien pour la mosaïque de pavement. Il semble que cela soit, à l’heure actuelle, le seul exemple connu pour ce type de mosaïque 48. Toutefois, un siècle et demi plus tard, le bleu égyptien est à nouveau attesté dans des mosaïques murales. Il s’agit de l’opus musivum. Cet opus était utilisé pour décorer les grottes, les voûtes ou les parois de lieux souterrains ou abrités, ainsi que pour la décoration de fontaines. On retrouve le bleu égyptien associé à d’autres types de matériaux (les coquillages, des tesselles ou fragments de verre, des fragments de céramique, etc.). H. Stern date de la fin de la République les premières utilisations de cet opus dans les grottes-nymphées et dans les plus anciennes fontaines pompéiennes 49. Pour le ier s. apr. J.-C., S. B. Sear 50 dénombre huit demeures pompéiennes 51 décorées avec du bleu égyptien, deux à Herculanum 52 et une à Baïes 53. Dès le ier s., le bleu égyptien est remplacé par les tesselles de verre 54. La transition d’une technique à l’autre se fait progressivement, avec dans un premier temps, l’utilisation simultanée des deux matériaux comme dans la décoration du nymphée de la Maison de l’Ancre à Pompéi (Reg. VI, ins. X, 7) 55.
LES
LIEUX DE PRODUCTION
Les données archéologiques permettent de localiser trois zones de production clairement identifiées : l’Égypte, le monde égéen et l’Italie du Sud. L’Égypte L’Égypte est par tradition le pays d’origine de la mise au point du bleu égyptien. Les découvertes de pigment à travers l’ensemble du territoire sont évidemment nombreuses. Toutefois, les sites de production attestés sont rares : deux voire trois pourraient avoir abrité un ou plusieurs ateliers. En 1894, W. M. Flinders Petrie publiait l’ouvrage Tell el Amarna dans lequel il citait la présence d’un atelier de bleu égyptien 56. Il y publiait la reconstitution d’un four où
48. 49. 50. 51.
52. 53. 54. 55. 56.
A.-M. Guimier-Sorbets, M.-D. Nenna, « Réflexions sur la couleur dans les mosaïques hellénistiques : Délos et Alexandrie », BCH 119 (1995), p. 534-537. H. Stern, « Origine et débuts de la mosaïque murale », dans Études d’archéologie classique II (1959), p. 101-121. F. B. Sear, Roman Wall and Vault Mosaics (1977). Maison de l’Ancre, no 14 ; Maison du Taureau de bronze, no 16 ; Maison du grand-duc de Toscane, no 27 ; Maison de la Grande Fontaine, no 32 ; Maison des Scientifiques, no 35 ; Maison des Colonnes de mosaïque, no 48 ; Maison du Centenaire, no 50 ; Maison de Julia Felix, nos 67 et 68. Maison du Squelette nos 26 et 45 ; Maison de Neptune et Amphitrite, no 71. Les thermes de Sosandra, no 70. H. Lavagne, Operosa antra. Recherches sur la grotte à Rome de Sylla à Hadrien, BEFAR 212 (1988), p. 431. F. B. Sear (n. 50), no 14. W. M. Flinders Petrie, Tell el Amarna (1894), p. 25-26.
LA PRODUCTION DU BLEU ÉGYPTIEN DURANT L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’EMPIRE ROMAIN (IIIe S. AV. J.-C.-Ier S. APR. J.-C.)
étaient utilisés des pots dans lesquels était mis à cuire le mélange permettant l’obtention du pigment. Cette reconstitution s’est révélée erronée. Toutefois, la présence d’un atelier ayant produit du bleu égyptien est confirmée par celle de fragments céramiques recouverts de restes de bleu qui doivent être interprétés comme des creusets de production du pigment, ainsi que par de nombreux restes de pigments 57. Les fouilles de ce site ont aussi révélé la présence d’ateliers ayant produit de la faïence et du verre durant la XVIIIe dynastie (1550-1295 av. J.-C.) 58. En 1886, W. M. Flinders Petrie s’intéressa au site de Memphis, à quelques dizaines de kilomètres au Sud du Caire. Il y repère des vestiges de fours affleurant à la surface, dans le secteur de la ville appelé « Kom el Helul ». Il n’obtiendra une autorisation de fouilles qu’à partir de 1909, mais entre temps, le site aura été quelque peu perturbé 59. Malgré cela, il y a fouillé au moins six fours ayant produit de la faïence (dont l’étude a été reprise par P. T. Nicholson 60) et du bleu égyptien. Dans ces fours, il met au jour de nombreux fragments de pots dans lesquels les objets destinés à être glaçurés étaient disposés, puis mis à chauffer 61, ainsi que de nombreux déchets de production du bleu égyptien consistant en des fragments céramiques portant sur les parois des restes de bleu sous forme d’une fine croûte ou de boulettes (fig. 1a) qui s’avèrent, tout comme ceux de Tell el-Amarna, des creusets ayant servi à la fabrication (cuisson) du bleu égyptien. W. M. Flinders Petrie explique très bien le processus de fabrication : « les boules de “bleu” étaient mises dans ces pots qui étaient ensuite hermétiquement fermés par des boudins d’argile. Pour cela, les pots étaient mis les uns sur les autres et fixés entre eux par de l’argile 62 » (fig. 1b). Ces creusets sont aujourd’hui conservés au Petrie Museum à Londres et tout ce que W. M. Flinders Petrie avait observé concernant les creusets est toujours visible. Grâce à une autorisation délivrée par la direction du Petrie Museum, nous avons pu étudier et dessiner quelques-uns de ces creusets 63. De forme ovoïdale, avec un petit pied en anneau (fig. 2), ils sont caractérisés par la présence sur les parois interne et externe de restes de bleu et de boulettes. Comme W. M. Flinders Petrie l’avait bien vu, ils étaient empilés les uns sur les autres dans le four et scellés entre eux à l’argile. Cette fixation scellait hermétiquement les creusets lors de la cuisson 64. De même, certains fonds sont recouverts de boulettes de bleu sur leur paroi extérieure. Cela implique que les boulettes étaient collées sur le creuset supérieur, venant recouvrir un autre
57. 58.
59. 60. 61. 62. 63. 64.
Ce matériel est conservé au Petrie Museum of Egyptian Archaeology, University College London. P. T. Nicholson, « Petrie and the Production of Vitreous Materials », dans B. Mathieu, D. Meeks, M. Wissa, L’apport de l’Égypte à l’histoire des techniques (2006), p. 207-216 ; P. T. Nicholson, Brilliant Things for Akhenaten. The Production of Glass, Vitreous Materials and Pottery at Amarna. Site O45.1, Excavations Memoir 80 (2007). W. M. Flinders Petrie, « The Pottery Kilns at Memphis », Historical Studies X (1911), p. 34. P. T. Nicholson (n. 58, 2007). W. M. Flinders Petrie (n. 59), p. 35. Ibid., p. 36. Nous remercions Ivor Pridden et Richard Langley (Petrie Museum) pour nous avoir délivré cette autorisation ainsi que pour nous avoir concédé le droit d’en publier les données. Cela se voit particulièrement sur les échantillons UC 47290 et UC 47311 conservés au Petrie Museum.
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Fig. 1 — Les creusets mis au jour par W. M. Flinders Petrie à Memphis : a. Fond de creuset (UC 33569, cl. Petrie Museum). b-c. Fond de creuset (UC 47311, cl. Petrie Museum). d. Bord de creuset comportant encore l’argile permettant de fixer un autre creuset sur son embouchure (UC 47290, cl. Petrie Museum).
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Fig. 2 — Les creusets de Memphis, éch. 1/4 (dessins L. Cavassa, Petrie Museum).
10 cm
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creuset (fig. 1c-d). La chronologie du fonctionnement de ces fours reste assez vague : entre la période ptolémaïque et la période romaine (iiie s. av. J.-C.-ier s. apr. J.-C.). Certains restes de bleu (aussi bien les boulettes que le revêtement sur les creusets) ont été analysés par M. S. Tite et G. Hatton (université d’Oxford). Les analyses ont confirmé qu’il s’agissait bien de bleu égyptien (dont la composition est constituée de sable riche en calcium, de cuivre et de natron comme élément alcalin) 65. La Grèce Bien que les mentions de découverte de bleu égyptien en Grèce et en mer Égée soient nombreuses, les indices de production du pigment sont rares. Un site est régulièrement mentionné comme ayant abrité un atelier de production : l’île de Cos. La documentation concernant cette découverte repose sur un article de Ch. Kantzia 66. L’atelier, fouillé à partir de 1984, est situé dans la partie Sud-Ouest de l’agora de la cité de Cos et aurait abrité plusieurs fours de petites dimensions, quatre-vingt-dix boulettes de bleu égyptien, de litharge et d’autres éléments de plomb. L’atelier aurait fonctionné à la fin de la période hellénistique. La prudence est ici de mise quant à l’interprétation comme lieu de production de ce site. Comme nous l’avons avancé ci-dessus, la présence de creusets est déterminante pour localiser avec certitude un lieu de production du pigment. De plus, les fours décrits nous semblent trop petits pour une telle production. L’Italie L’Italie présente à l’heure actuelle des lieux de production assurés et bien documentés. Trois centres de production sont attestés en Campanie sur lesquels nous renseignent les sources littéraires, les sources archéologiques et les analyses archéométriques. Pouzzoles Dès le ier s. av. J.-C., la cité de Puteoli/Pouzzoles est associée à la fabrication du bleu égyptien. Plusieurs éléments sont à notre disposition. Vitruve, comme nous l’avons mentionné dans la précédente partie, fournit trois éléments capitaux concernant la fabrication du bleu égyptien : un lieu de production (Pouzzoles, fig. 3), le nom d’un producteur (Vestorius) et la recette du produit. Pouzzoles fut fondée en 194 av. J.-C. en tant que colonie romaine pour les vétérans de Scipion. Rapidement, la cité devint le principal port de Rome jusqu’à l’aménagement du port d’Ostie sous le règne de Claude. Les sources parlent d’ailleurs de Puteoli comme d’une « seconde Délos » 67, plaque tournante du commerce en Méditerranée orientale. De ce fait, la plus grande partie des marchandises 65.
66. 67.
M. S. Tite, G. D. Hatton, « The Production Technology of, and Trade in, Egyptian Blue Pigment in the Roman World », dans C. Gosden, H. Hamerow, P. De Jersey, G. Lock (éds), Communities and Connections: Essays in Honour of Barry Cunliffe (2007), p. 75-92. Ch. Kantzia, « ƊƴƧƥƶƷƢƴƭƲƳƥƴƥƶƮƩƸƢƵƺƴƼuƠƷƼưƶƷƫưƥƴƺƥƣƥƥƧƲƴƠƷƫƵƏƼƘƲƥƭƧƸƳƷƭƥƮƿuƳƯơ », AAA XX (1987), p. 211-255. Lucilius, Satires III 9.
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Volturne
Liternum Naples Cumes Pompéi
Pouzzoles
N
0
25 km
Fig. 3 — Plan des Champs Phlégréens (dessin L. Cavassa).
forum
N 0
100m
Emplacement probable de la porta Erculea di Pozzuoli
Via Campana
bâtiment fouillé par G. De Criscio
no
cia Via Lu
Localisation de la Regio vici Vestoriani et Calpurniani
Vi a
Pe rg o
les
i
grei
Via Campi Fle
0
100m
Fig. 4 — Plan de la Regio vici Vestoriani et Calpurniani avec localisation du bâtiment fouillé par G. De Criscio (dessins L. Cavassa).
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en provenance de Méditerranée orientale transitait par Pouzzoles, qui entretenait des relations privilégiées avec l’Orient et plus particulièrement avec Alexandrie. Son rôle de port de commerce en faisait un lieu d’importation et de développement des techniques venues d’Orient. La ville joua ainsi un grand rôle dans la fabrication et la distribution des productions campaniennes (vins, parfums 68, verre 69, pigments 70, colorants 71, céramique sigillée 72, fer 73, etc.) vers Rome. Vitruve mentionne le nom du propriétaire de la fabrique de bleu : Vestorius. Il porte le nom d’une gens bien connue à Pouzzoles. Dans vingt-trois de ses lettres (datées entre 56 et 44 av. J.-C.), Cicéron mentionne un certain Vestorius, citoyen de Pouzzoles, qu’il décrit comme un homme d’affaire, mais ne le lie en aucune façon à la fabrication du pigment. Cicéron et Vitruve mentionnent-ils le même personnage ? La période chronologique semble correspondre. Comme l’a écrit J.-P. Morel : « ce qui, en fait, est extraordinaire, voire peut-être unique, c’est que Vitruve et Pline citent le nom d’un producteur de biens artisanaux 74 ». Nous sommes en face d’un cas tout à fait exceptionnel d’un producteur qui sort de l’anonymat, à cause certainement de la spécificité de la production représentant une innovation technologique. La gens Vestoria est bien ancrée dans la vie de la cité putéolane : Puteoli était divisée en différents quartiers et l’un d’eux, identifié par une inscription datée de 92-93 apr. J.-C. 75, se nomme Regio vici Vestoriani et Calpurniani 76. Ce quartier a été localisé dans le secteur Nord-Ouest de la ville moderne (fig. 4). Dans cette zone, à la fin du xixe s., l’abbé de Pouzzoles nommé Giuseppe De Criscio, pense avoir découvert et fouillé l’atelier de Vestorius. Il fournit des indications très précises quant à la localisation même de cet « atelier » ainsi que des découvertes qu’il y a réalisées. Il donne tout d’abord des indications topographiques : le point de départ pour le localiser est une porte, la Porta Erculea di Pozzuoli (Celle) qui a aujourd’hui disparu mais dont Ch. Dubois précise qu’elle était encore visible « au siècle dernier 77 », c’est-à-dire au xixe s. Les ruines de l’atelier se situeraient à environ 100 m à l’Ouest de cette porte. 68. 69.
70. 71.
72. 73.
74.
75. 76. 77.
G. Camodeca, « L’ordinamento in Regiones e i vici i di Puteoli », dans Puteoli. Studi di storia antica (1977), p. 65. C. Gialanella, « Una fornace per il vetro a Puteoli », dans C. Piccioli, F. Sogliani (éds), Il vetro in Italia meridionale e insulare, Atti del Primo convegno multidisciplinare, Napoli (5-7 marzo 1998) (1999), p. 151-160. Outre le bleu égyptien, la litharge et le réalgar auraient été également fabriqués à Pouzzoles. Pline l’Ancien (Histoire naturelle XXXV 26) mentionne la pourpre de Pouzzoles comme étant celle qu’il préfère. De plus, une inscription mise au jour à Pouzzoles (CIL X 540) mentionne un fabricant de pourpre appelé Cn. Haius Doryphorus, purpurarius. Ch. Dubois, Pouzzoles antique, BEFAR 98 (1907), p. 120-121. Diodore de Sicile (Bibliothèque historique V 13) mentionne le travail du métal à Pouzzoles, et une inscription (CIL X 1931) cite un certain P. Caulius Coeranus comme étant commerçant dans le fer et négociant en vin. J.-P. Morel, « Les producteurs de biens artisanaux en Italie à la fin de la République », dans Les « bourgeoisies » municipales italiennes aux IIe s. et Ier s. av. J.-C., Centre Jean Bérard, Institut français de Naples (7-10 décembre 1981) (1983), p. 29-30. G. Camodeca (n. 68), p. 73. CIL X 1631. Ch. Dubois (n. 72), p. 242.
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Il s’agit d’une série de grandes salles voûtées indépendantes les unes des autres et comportant un étage construit de la même manière mais de plus petites dimensions 78. Voilà ensuite ce qu’il écrit : « Depuis de nombreuses années, j’observe que ratissant et creusant le terrain à proximité des dites ruines, chaque année, sont découverts des restes de vases antiques et d’amphores dont les parois internes sont toutes teintes, et bien souvent par une croûte épaisse de bien 30 millimètres, de l’antique couleur bleue fabriquée à Pouzzoles, Coeruleum Pigmentum, bleu de Pouzzoles, ainsi que de nombreux morceaux de couleurs indurés 79 ». Cette description de l’abbé De Criscio mérite quelques précisions. En ce qui concerne les restes d’amphores recouverts de bleu, il nous semble qu’il s’agit de fragments de creusets, l’épaisseur des parois rappelant l’épaisseur de panses d’amphores. Il n’y a donc aucun doute que l’abbé De Criscio a mis au jour, durant le xixe s., des restes de creusets ayant servi à fabriquer le bleu égyptien. Ces données seront reprises quelques années plus tard par Ch. Dubois. Il ajoute que les fabriques (de bleu égyptien) se trouvent « non loin des ruines appelées “Pondera” 80 ». Dans le dernier chapitre consacré aux ruines visibles à Pouzzoles 81, il s’attarde sur ce même bâtiment 82 dont il fait la description et donne les dimensions. Il s’agit d’un bâtiment long de « 52 m où se succèdent 8 pièces rectangulaires (8,06 × 7,55 m), toutes closes au fond par un mur parallèle à la via Domitienne, et s’ouvrant du côté de la mer. Elles étaient voûtées. Elles communiquaient par de grandes ouvertures, larges de 5,20 m, avec d’autres, ayant la même largeur (7,55 m), mais, à en juger d’après les vestiges de murailles, longues au moins de 9,10 m ». La disposition de ces ruines rappelle la disposition habituelle des horrea : ces pièces pourraient correspondre à des magasins et non à un atelier de production. Ce bâtiment est le même que G. De Criscio aurait fouillé et interprété un peu rapidement comme un atelier de production. Malgré tout, il ne fait aucun doute que le secteur fouillé se trouvait à proximité d’un atelier. Ces théories ont été récemment confirmées par la découverte d’un four 83, dans le secteur de la Regio vici Vestoriani et Calpurniani, réalisée en 2005 par la Surintendance archéologique de Naples, qui est en cours de publication. Liternum Le site de Liternum (fig. 3) a été fouillé par la doctoresse P. Gargiulo, inspectrice de la Surintendance archéologique de Naples et de Caserte à partir de 1995. Lors de ces fouilles, un important lot de matériel daté du ier s. apr. J.-C. a été mis au jour. Il contenait, 78. 79. 80. 81. 82. 83.
G. De Criscio, Notizie istoriche archeologiche topografiche dell’antica città di Pozzuoli e dei suoi acquedotti serino e campano (1881), p. 15-16. Ibid., p. 16. Ch. Dubois (n. 72), p. 128-129. Ibid., p. 286-360. Ibid., p. 357-358. Le four a été fouillé par la Surintendance archéologique de Naples, sous la direction scientifique de C. Gialanella.
LA PRODUCTION DU BLEU ÉGYPTIEN DURANT L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’EMPIRE ROMAIN (IIIe S. AV. J.-C.-Ier S. APR. J.-C.)
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entre autres, des panses de vases de grande taille caractérisées par la présence, sur leurs parois internes et quelquefois externes, d’une « croûte » bleue, ainsi que de petites boules de couleur bleue 84. Ces fragments céramiques ont été identifiés comme des creusets, ayant servi à la fabrication du pigment bleu égyptien. Des analyses chimiques réalisées sur les restes de « bleu » collés aux panses des creusets ont confirmé qu’il s’agissait de bleu égyptien 85. Durant ces campagnes de fouilles, ont été découvertes en outre plusieurs tombes, datées des ier-iie s. apr. J.-C. Parmi celles-ci, deux enterrements d’enfant en enchytrismos ont été effectués dans deux exemplaires complets de ces Fig. 5 — Un creuset de Liternum creusets (inv. 284242 et inv. 284243) 86. Préservés dans leur (inv. 284242), éch. 1/10 (dessin intégralité, les creusets n’ont jamais servi et ne portent donc L. Cavassa). pas de traces du pigment. Ils mesurent 51 cm de hauteur pour 37 cm de diamètre à l’ouverture et 39 cm à la base. La forme est assez simple, ouverte, avec un fond plat et un bord caractérisé par une lèvre très légèrement épaissie (fig. 5) 87. La pâte est réfractaire et de couleur beige clair. Ces découvertes, creusets non utilisés et déchets de production, indiquent donc une activité de production du pigment sur le site même de Liternum. Cumes Les fouilles du site de Cumes (fig. 3, 6) conduites ces dernières années ont livré de nombreux fragments de céramiques recouverts de restes sableux de couleur bleue. Il est aujourd’hui clairement établi qu’un ou plusieurs ateliers de fabrication de bleu égyptien y ont fonctionné durant le ier s. apr. J.-C. Les recherches du Centre Jean Bérard ont permis de mieux cerner cette production. À partir de 1994, dans le cadre d’un projet de recherche appelé « KYME », la Surintendance archéologique de Naples et de Caserte a confié au Centre Jean Bérard la recherche des ports grecs et romains ainsi que des études
84.
85.
86. 87.
P. Gargiulo, « Contenitori con depositi di colore blu egiziano e officine vetrarie nell’area dell’antica Liternum e nel territorio Flegreo. Aspetti tecnologici e prospettive di studio », dans Il vetro dall’antichità all’età contemporanea: aspetti tecnologici, funzionali e commerciali, Atti 2e giornate Nazionali di studio AIHV-Comitato Nazionale Italiano (14-15 dicembre 1996) (1998), p. 61. A. Montenero, B. Ferrari, G. Gnappi, C. Piccioli, A. Biavati, P. Lottici, « Ipotesi sulle origine e valutazioni strutturali di campioni di caeruleum provenienti da Liternum e Pompei », dans C. Piccioli, F. Sogliani (éds), Il vetro in Italia meridionale e insulare, Atti del Primo convegno multidisciplinare, Napoli (5-7 marzo 1998) (1999), p. 403-409 ; G. F. Guidi, F. Schiano Lomoriello, G. Trojsi, « Studio archeometrico di alcuni contenitori fittili con pigmenti provenienti dai siti archeologici di Baia e Liternum », dans Cl. D’Amico (éd.), Atti del convegno di Caserta dell’Associazione Nazionale di Archeometria (febbraio 2005) (2006), p. 243-251. P. Gargiulo, « Liternum », dans P. Miniero, F. Zevi (éds), Catalogo generale, Museo archeologico dei Campi Flegrei. Liternum, Baia, Miseno (2009), p. 47 et 51. Nous remercions P. Gargiulo pour nous avoir autorisée à étudier, à dessiner et à publier ce creuset.
30
LAËTITIA CAVASSA
0
400 m
fouilles du Centre Jean Bérard Via
Do
mi
tia
na
Porta Nord (Scavo dell'IUO)
Tempio di Giove Stazione di Cuma
Terme Tempio di Apollo Capitolium
Tempio dei Giganti
Cripta romana
Antro della Sibilla
Arco Felice
N
Anfiteatro
Fig. 6 — Plan de Cumes (plan Centre Jean Bérard).
géomorphologiques destinées à restituer le paysage du site. Depuis 2001, les recherches conduites par J.-P. Brun et P. Munzi se sont concentrées au Nord de la ville, à proximité du rempart de la cité mettant ainsi au jour un tronçon de la voie Domitienne bordée de nombreux monuments funéraires 88. Parmi les divers monuments fouillés, deux secteurs nous intéressent. Le premier est un dépotoir dont le comblement est daté de l’époque flavienne (fig. 7). Parmi le matériel mis au jour, de nombreux fragments de céramique ayant une épaisseur moyenne de 2 cm, recouverts à l’intérieur d’une « croûte » d’aspect sableux de couleur bleue, ont été inventoriés et aisément interprétés comme des creusets ayant servi à la cuisson du bleu égyptien. Outre les creusets, de nombreux échantillons de pigment, sous forme de boulettes ou de fragments détachés des parois ont également été mis au jour. Comme à Liternum, il s’agit de vases de grandes dimensions. La pâte renferme des inclusions grossières (argile, sable, cailloux, etc.) ainsi que des particules volcaniques
88.
J.-P. Brun, P. Munzi, « Alla ricerca del porto di Cuma. Relazione preliminare sugli scavi del Centre Jean Bérard », AION, Nuova Serie 7 (2003), p. 131-155 ; eid., « Activités archéologiques de l’École française de Rome, Chronique, Cumes », MEFRA 118-1 (2006), p. 342-349 ; eid., « Activités archéologiques de l’École française de Rome, Chronique, Cumes », MEFRA 119-1 (2007), p. 287-299 ; eid., « Activités archéologiques de l’École française de Rome, Chronique, Cumes », MEFRA 120-1 (2008), p. 229-232.
50 m
5.82
A62
6.16
A
A2
Fig. 7 — Plan des fouilles du site de Cumes (plan Centre Jean Bérard).
0
A63
escalier
3.65
2.77
Secteur
7.36
4.71
dépotoir
A41
D43
D35
D36
Secteur D
LA PRODUCTION DU BLEU ÉGYPTIEN DURANT L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’EMPIRE ROMAIN (IIIe S. AV. J.-C.-Ier S. APR. J.-C.) 31
Canal
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0
10 cm
0
0
5 cm
0
10 cm
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5 cm
5 cm
Fig. 8 — Creusets et restes de pigments mis au jour à Cumes (cl. L. Cavassa).
caractérisant une production certainement régionale 89. La grande majorité de ces fragments ont les parois recouvertes d’une substance bleue dont l’intensité de la couleur est plus ou moins forte. D’autres portent des traces de cuisson se traduisant par des parois déformées et des traces de pigments sur la partie extérieure des creusets (fig. 8).
89.
C. Grifa et al., « Beyond Vitruvius: New Insight in the Technology of Egyptian Blue and Green Frits », Journal of the American Ceramic Society 99.10 (2016), p. 3467-3475.
LA PRODUCTION DU BLEU ÉGYPTIEN DURANT L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’EMPIRE ROMAIN (IIIe S. AV. J.-C.-Ier S. APR. J.-C.)
0
10 cm
Fig. 9 — Un creuset de « forme ouverte » provenant des fouilles de Cumes, éch. 1/5 (dessin L. Cavassa).
0
10 cm
Fig. 10 — Un creuset de « forme fermée » provenant des fouilles de Cumes, éch. 1/5 (dessin L. Cavassa).
Les fragments de creusets issus des fouilles du dépotoir sont de deux types. Le premier type est identique au creuset mis au jour à Liternum. Nous le qualifierons de « forme ouverte » : il a un diamètre d’ouverture et de base variant entre 32 et 34 cm (fig. 9). Le second type, qualifié de « forme fermée », est caractérisé par une lèvre à ourlet aplati et un pied en anneau. Les diamètres d’ouverture varient entre 18 et 20 cm, les diamètres du fond entre 19 et 20 cm (fig. 10). Comme pour la forme précédente, ces creusets se distinguent par la présence sur les parois internes (et quelquefois externes en débordement) d’un résidu de couleur bleue. Bien qu’ayant un aspect sableux, ce dépôt est très compact et adhère aux parois. Ce second type de creuset, de « forme fermée », est typologiquement identique à ce que W. M. Flinders Petrie a mis au jour à Memphis (fig. 11), ce qui constitue un élément tout à fait intéressant. Le second contexte étudié est le comblement, à la fin du ier s. apr. J.-C., de l’escalier d’accès à la chambre funéraire d’un mausolée (MSL A63) daté de l’époque augustéenne (fig. 7). Contrairement au matériel du dépotoir, seuls des fragments de creusets de « forme ouverte » ont été mis au jour. À ces deux contextes, ajoutons la présence de creusets relevés en divers points de la cité 90. Par exemple, un nombre important de creusets a été trouvé dans la destruction d’un mausolée du iiie s. apr. J.-C., abandonné durant l’Antiquité tardive 91. Bien qu’il s’agisse certainement d’un mobilier résiduel, sa présence confirme l’existence d’un atelier à proximité.
90.
91.
33
P. Caputo, L. Cavassa, « La fabrication du bleu égyptien à Cumes », dans J.-P. Brun (éd.), L’artisanat antique en Italie méridionale. Mélanges offerts à Maria-Francesca Buonaiuto, Collection Centre Jean Bérard 32, Archéologie de l’artisanat antique 2 (2009), p. 169-179. J.-P. Brun, P. Munzi, « Activités archéologiques de l’École française de Rome, Chronique, Cumes », MEFRA 121.1 (2009), p. 318-322.
34
LAËTITIA CAVASSA
Memphis 47281
Memphis 33569
300020-01
0
10 cm
300020-14
Fig. 11 — Les creusets de « forme fermée » provenant des fouilles de Memphis (UC 47281 et UC 33569) et de Cumes (300 020-1 et 300 020-14), éch. 1/5 (dessins L. Cavassa).
Enfin, des analyses chimiques ont été réalisées sur les échantillons de Cumes 92. En les étudiant, nous nous étions posé la question de savoir pourquoi les creusets avaient deux formes différentes. Avaient-ils servi à la fabrication de produits différents ? Les résultats ont montré que les creusets de Cumes, tout comme ceux de Liternum, ont été utilisés pour la fabrication du bleu égyptien 93. La présence de creusets est déterminante pour identifier un atelier de production de bleu égyptien. La mention seule de pains ou de boulettes est insuffisante. À l’heure actuelle, deux zones géographiques sont clairement identifiées comme productrices de bleu égyptien : l’Égypte et l’Italie du Sud.
92.
93.
L. Cavassa, Fr. Delamare, M. Repoux, « La fabrication du bleu égyptien dans les Champs Phlégréens à l’époque romaine », dans P. Chardron-Picault (éd.), Aspects de l’artisanat en milieu urbain : Gaule et Occident romain, Actes du colloque international d’Autun (20-22 septembre 2007), RAE Suppl. 28 (2010), p. 235-249. Aucune différence n’a été décelée concernant les échantillons provenant de ces deux types de creusets.
Scientific Research on Purple Mollusc Pigments on Archaeological Artifacts Zvi C. Koren
SUMMARY The optimal technique for determining the chemical compositions of archaeological purple pigments and dyes from molluscan sources is the high-performance liquid chromatography (HPLC) method. This technique has been applied to the qualitative and quantitative multi-component fingerprinting of purple pigments extracted from various Mediterranean Muricidae molluscs, commonly known as Murex sea snails. The results on modern and archaeological purple pigments show that the colourants in these samples belong to three related chemical groups: indigoids, indirubinoids, and isatinoids. Discoveries on archaeological artifacts from the ancient Near East made by this laboratory include: decoding the ancient optimal method of purple-dyeing; detection of the purple pigment painted on a 2500-year old King Darius I marble jar; identifying 2000-year old biblical Argaman and Tekhelet dyeings from Masada. KEYWORDS Purple pigment, Muricidae, Hexaplex trunculus, HPLC, archaeometry, dibromoindigo, Herod, Darius, Tel Dor, Tel Kabri. RÉSUMÉ Recherches sur les pigments issus de mollusques appliqués sur les objets archéologiques La meilleure méthode pour déterminer la composition chimique des pigments et des teintures archéologiques pourpres issus de mollusques est la chromatographie en phase liquide haute performance. On a utilisé cette technique pour l’analyse qualitative et quantitative des différents éléments constituant la signature de la pourpre extraite des différentes variétés de mollusques du type Muricidae rencontrées en Méditerranée, plus communément connues sous le nom de Murex. Les résultats montrent que les colorants rentrant dans la composition de la pourpre appartiennent à trois classes chimiques : les indigoïdes, les indirubinoïdes et les isatinoïdes. Au nombre des découvertes réalisées par notre laboratoire sur des objets archéologiques provenant du Proche-Orient, on retiendra la mise en évidence du procédé antique optimal pour obtenir la teinte pourpre ; la découverte d’un pigment pourpre sur une jarre royale de marbre vieille de 2 500 ans et datant de l’époque du roi perse Darius Ier ; l’identification de l’Argaman et du Tekhelet bibliques vieux de 2 000 ans et provenant de Masada. MOTS-CLEFS Pourpre, Muricidae, Hexaplex trunculus, CLHP, archéométrie, indigoïdes, Hérode, Darius, Tel Dor, Tel Kabri.
36
ZVI C. KOREN
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about the author Z. C. Koren, Director of the Edelstein Center for the Analysis of Ancient Artifacts, Shenkar College of Engineering and Design, Ramat-Gan, Israel.
acknowledgements The author would like to express his sincere appreciation to the Edelstein Foundation for its support of this work, and to Philippe Jockey and Dominique Cardon for inviting him to present this paper. A version of this paper, limited to the use of purple pigments and dyes from mollusc sources for the dyeing of royal and priestly textiles, as also cited in the Bible, was first published in https://doi. org/10.1557/opl.2012.1376
bibliographical abbreviations For journal names, we use the Chemical Abstracts Service Source Index abbreviations (http://cassi.cas.org/ search.jsp) (05/17/2017). All-Murex… = Z. C. Koren, “The First Optimal All-Murex All-Natural Purple Dyeing in the Eastern Mediterranean in a Millennium and a Half ”, Dyes Hist Archaeol 20 (2005), pp. 136-149. Darius… = Z. C. Koren, “Archaeo-Chemical Analysis of Royal Purple on a Darius I Stone Jar”, Microchim Acta 162 (2008), pp. 381-392. HPLC-PDA… = Z. C. Koren, “HPLC-PDA Analysis of Brominated Indirubinoid, Indigoid, and Isatinoid Dyes”, in Indirubin… Indirubin… = L. Meijer et al. (eds), Indirubin, the Red Shade of Indigo (2006). Purple Dyeing Vat = Z. C. Koren, “High-Performance Liquid Chromatographic Analysis of an Ancient Tyrian Purple Dyeing vat from Israel”, Isr J Chem 35 (1995), pp. 117-124.
SCIENTIFIC RESEARCH ON PURPLE MOLLUSC PIGMENTS ON ARCHAEOLOGICAL ARTIFACTS
The purple of the ancients is undoubtedly the most fascinating and mystifyingly complex pigment of all the natural organic colorants. In the past two decades, this mollusc pigment has been the focus of increased historical and chemical research. Classical authors, such as the 4th century BC Greek philosopher Aristotle 1 and the 1st century AD Roman historian and naturalist Pliny 2 wrote about it. Much more recently, D. Cardon 3 and R. Haubrichs 4 have reviewed its history. The chemistry of this purple pigment has been reviewed by C. J. Cooksey, 5 and analytical methods have been developed for multi-component identifications of Muricidae pigments via liquid chromatography. 6 These purple pigments were extracted from the hypobranchial glands of certain Muricidae sea snails inhabiting the Mediterranean and nearby waters. The three main mollusc species that have been associated with purple dyeing in the Mediterranean region have appeared in the literature under various nomenclatures, and are Hexaplex (= Murex = Phyllonotus = Trunculariopsis) trunculus, Bolinus (= Murex = Phyllonotus) brandaris, and Stramonita (= Purpura = Thais) haemastoma. 7 They are shown in fig. 1. The extracted colorants were used as a paint pigment and as a textile dye, though the former usage probably chronologically preceded the latter. Purple and violet garments bestowed upon the owner an aura of power and sanctity and therefore these textiles were the prerogative of sovereigns, generals, eminent officials and high priests. Consequently, these textile dyes have been referred to as “royal purple”, “imperial purple”, “priestly purple”, and, most commonly of all, “Tyrian purple”, after one of the main cities of the Phoenicians, who are credited with at least the development of this dye and its trade.
1. 2. 3. 4.
5. 6.
7.
Aristotle, History of Animals V. Pliny the Elder, Natural History IX. D. Cardon, Le monde des teintures naturelles (2003), p. 418; ead., Natural Dyes – Sources, Tradition, Technology and Science (2007), ch. 11. R. Haubrichs, “L’étude de la pourpre : histoire d’une couleur, chimie et experimentations”, in M. A. Borrello (ed.), Conchiglie e Archeologia. Preistoria Alpina 40, Suppl. 1 (2004), pp. 133-160; R. Haubrichs, “Natural History and Iconography of Purple Shells”, in Indirubin…, ch. 6, p. 55. C. J. Cooksey, “Tyrian Purple: 6,6’-Dibromoindigo and Related Compounds”, Molecules 6 (2001), pp. 736-769; id., “Tyrian Purple: the First Four Thousand Years”, Sci Prog 96 (2013), pp. 171-186. J. Wouters, A. Verhecken, “High-Performance Liquid Chromatography of Blue and Purple Indigoid Natural Dyes”, J Soc Dyers Colour 107 (1991), pp. 266-269; J. Wouters “A New Method for the Analysis of Blue and Purple Dyes in Textiles”, Dyes Hist Archaeol 10 (1992), pp. 17-21; Z. C. Koren, “HPLC Analysis of the Natural Scale Insect, Madder and Indigoid Dyes”, J Soc Dyers Colour 110 (1994), pp. 273-277; Purple Dyeing Vat, pp. 117-124; id., HPLC-PDA…, ch. 5, pp. 45ff.; I. Karapanagiotis et al., “Identification of Indigoid Natural Dyestuffs Used in Art Objects by HPLC Coupled to APCI-MS”, Amer Lab 38 (2006), pp. 36-40; I. Karapanagiotis et al., “Identification of the Coloring Constituents of Four Natural Indigoid Dyes”, J Liq Chrom Rel Tech 29 (2006), pp. 1491-1502; S. Sotiropoulou, I. Karapanagiotis, “Conchylian Purple Investigation in Prehistoric Wall Paintings of the Aegean Area”, in Indirubin…, ch. 7, pp. 71ff. D. Cardon (n. 3, 2003), p. 418; ead. (n. 3, 2007), ch. 11; R. Haubrichs (n. 4, 2004); E. Spanier, N. Karmon, “Muricid Snails and the Ancient Dye Industries”, in E. Spanier (ed.), The Royal Purple and the Biblical Blue: Argaman and Tekhelet. The Study of Chief Rabbi Dr. Isaac Herzog on the Dye Industries in Ancient Israel and Recent Scientific Contributions (1987), pp. 179ff.; All-Murex..., pp. 136ff.
37
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Fig. 1 — Three Muricidae sea snails inhabiting the Mediterranean sea and processed in Antiquity to extract the purple pigment (from left to right): Bolinus brandaris, Hexaplex trunculus and Stramonita haemastoma (Courtesy of Eretz Israel Museum, Tel-Aviv).
As this paper was originally delivered in Athens, it is interesting to note the interconnection between the Hebrew and Greek versions of the two biblical forms of purple. As such, the names of these two “purples” mentioned in the Hebrew Bible are first cited in Exodus 25:4 and are denoted in Hebrew as Tekhelet and Argaman. According to traditional accounts, the first translation of the Hebrew Bible into another language –Greek– was begun in the 3rd century BC. Furthermore, as this project was undertaken by about seventy Rabbis who knew Greek, this body of work is known as the Septuagint. In that translation, Tekhelet is rendered as ȻƠƮƭưƬƲư (yakinthon), that is, a hyacinth colour, and Argaman as ƳƲƴƹǀƴƥư (porphyran), a purple. There is an interesting Talmudic legend, from some time in the first two centuries AD, regarding this literary venture, and it is described in the Babylonian Talmud (Tractate Megillah 9a) as follows: “it is related of King Ptolemy that he gathered seventy-two Elders and placed them in seventy-two [separate] houses, without revealing to them why he gathered them. He entered each one’s house and said to them: ‘Write [i.e. translate] for me the Torah of Moses your master’. God then gave wisdom in the heart of each one and they all concurred in one identical erudition [i.e. translation]”. The references to these two biblical chromatic names are with respect to the colours of woollen dyes produced from the pigments extracted from certain sea snails. The exact colours of these two textile dyes have been disputed for nearly two millennia, although the past century has seen more intensive discussions of this topic, thanks, in part, to the advances made in modern analytical instrumentation. This laboratory has conducted intensive research on the purple mollusc pigment for about a quarter of a century in order to decipher the colours and chemical constitutions of these two biblical dyes, as well as, in general, to have a better scientific understanding of the production and usage of this pigment in Antiquity. The analytical investigations involve a multi-stage approach consisting of the following steps:
SCIENTIFIC RESEARCH ON PURPLE MOLLUSC PIGMENTS ON ARCHAEOLOGICAL ARTIFACTS
– Extraction of the purple pigment from the glands of modern sea snails; – Dissolution of the sample with an optimal solvent; – Development of an analytical HPLC separation method for the colorants constituting the pigment; – Building a chromatographic and spectral data base of all the components; – Application of the method to modern and archaeological pigments; – Determining the malacological provenance of the ancient pigment.
EXTRACTION
OF THE PURPLE PIGMENT FROM THE MURICIDAE FAMILY OF SEA SNAILS
The Hexaplex trunculus molluscs produce considerably more pigment than either Bolinus brandaris or Stramonita haemastoma sea snails. The latter two produce red-purple pigments, and the H. trunculus can also produce similarly coloured reddish-purple pigments, but other H. trunculus snails can produce bluish-purple or violet pigments. Analytical research has shown that in ancient times it was the H. trunculus that was mainly used for either red-purple or blue-purple dyes, and is thus the most historically important purple-producing sea snail. The chromogenic precursors to the final purple pigment are actually colourless in the hypobranchial glandular fluid of the live snail. This gland can be reached by breaking the snail’s shell with a hard object (e.g. stone or hammer) and exposing the vein. Upon excising the gland with a sharp object (knife or scissors) or by simply puncturing it, the enzyme that is present in a different compartment of the gland comes into contact with the precursors. Consequently, in the presence of air and light, this enzyme transforms the colourless precursors via various complex photo-oxidative processes into the final purple pigment. 8 In the H. trunculus mollusc, the first short-lived colour of the exposed chromogens is white, which then spontaneously turns to yellow, then green, and finally purple. The development of the final purple colour stage is greatly hastened if it is exposed to direct sunlight as opposed to room lighting conditions. The next step is to analyze this pigment qualitatively and quantitatively.
FINDING
THE OPTIMAL SOLVENT FOR THE DISSOLUTION OF PURPLE PIGMENTS
In order to perform any chromatographic analysis via the HPLC method, the sample must be dissolved prior to its injection into the instrument. The major problem with the water-insoluble purple pigment, which has been shown to consist of various indigoids and related colorants, 9 listed in table 1, is that these compounds are only sparingly soluble, even in hot organic solvents. In general, the solubilities of the indigoid dyes decrease 8. 9.
C. J. Cooksey (n. 5, 2001 et 2013). Darius…, p. 381.
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from indigo to monobromoindigo to dibromoindigo. Previously, in order to dissolve the primarily indigoid-based pigment, glacial acetic acid, pyridine, and dimethyl formamide (DMF) were used for this purpose. However, since 2001, this laboratory has found that dimethyl sulfoxide (DMSO) is the optimal solvent at the elevated temperature of 150oC. The laboratory had already observed that DMSO is an excellent solvent for red safflower dyeing, 10 which led to its application to indigoids as well. 11 This solvent has a high normal boiling point (189oC) and, with the regular necessary laboratory precautions, is relatively safe to use. This high temperature, for the duration of 5 minutes, increases the dissolution of the sparingly soluble dibromoindigo and, when performed under subdued lighting conditions, this treatment does not cause any detectable amount of debromination. For a typical analysis, a micro-sample whose mass can be even less than 10 μg (barely visible to the naked eye) is placed in a 2-mL glass vial; 100-400 μL of DMSO is added to it and placed in a dry-block heater set to 150oC and heated for 5 minutes. Subsequently, microfiltration of the solution is accomplished via centrifugation for 5 minutes by means of a centrifuge tube assembly composed of a nylon filter of 0.2 or 0.45 μm pore size housed in a polypropylene body and inserted into the accompanying Eppendorf vial.
ANALYTICAL
METHOD DEVELOPMENT FOR THE HPLC SEPARATION AND DETECTION OF ALL THE COLOURANTS CONSTITUTING THE PURPLE PIGMENT
The method by which components are extracted or washed out of a chromatographic column is known as “elution”, and the mobile phase (the solvent) that performs this task is termed the “eluent”. A suitable elution method –combining solvents, concentrations, and gradient times– is needed for the separation and detection of all the possible colorants constituting the purple pigment. For this purpose, a ternary solvent system was developed, consisting of methanol, water, and phosphoric acid (5% w/v, pH of 1.50 at 25oC). 12 This linear step-wise gradient elution method was developed for ten standard purple-related dyes, and it produces good separation for all of the major dyes investigated. The common and abbreviated names for these dyes are listed in table 1. The resulting chromatogram –a graph of the chromatographic separation– is produced in less than 30 minutes, and is shown in fig. 2. The time that each component is retained
10.
11.
12.
Z. C. Koren, “Where Have All the Safflower Reds Gone? Part I”, in 17th Meeting of Dyes in History and Archaeology, National Maritime Museum, Greenwich, UK, November (1998); id., “A Successful TalmudicFlavored High-Performance Liquid Chromatographic Analysis of Carthamin from Red Safflower Dyeings”, Dyes Hist Archaeol 16/17 (2001), pp. 158-166. Z. C. Koren, “The Purple Question Reinvestigated: Just What is Really in That Purple Pigment?”, in Abstracts of the 20th Meeting of Dyes in History and Archaeology, Department of Conservation Research, Netherlands Institute for Cultural Heritage, Amsterdam, Holland; November (2001), pp. 10ff. HPLC-PDA…, ch. 5, pp. 45ff.; Z. C. Koren, “A New HPLC-PDA Method for the Analysis of Tyrian Purple Components”, Dyes Hist Archaeol 21 (2008), pp. 26-35.
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Abbreviation Isatinoids IS 4BIS 6BIS Indigoids IND MBI DBI Indirubinoids INR 6MBIR 6’MBIR DBIR
Common Name Isatin 4-bromoisatin 6-bromoisatin indigo 6-monobromoindigo 6,6’-dibromoindigo indirubin 6-monobromoindirubin 6’-monobromoindirubin 6,6’-dibromoindirubin
Table 1 — Common and abbreviated names of the dyes.
Fig. 3 — UV/Vis spectra of the isatinoids in DMSO solution (Graph: Z. C. Koren).
Fig. 2 — HPLC chromatogram showing the separation of the dyes, where the left vertical scale is for the first three isatinoids, and the right scale is for the other dyes; the abbreviations are explained in table 1 (Graph: Z. C. Koren).
Fig. 4 — UV/Vis spectra of the indigoids in DMSO solution (Graph: Z. C. Koren).
Fig. 5 — UV/Vis spectra of the indirubinoids in DMSO solution (Graph: Z. C. Koren).
in the separation column before eluting out is called the retention time, and labelled as tR or R.T. Under appropriate conditions, it is characteristic of that component and is an aid to its identification. The advantage of this method over those previously published is that it produces a good separation of the smaller isatinoid molecules that may be present in the pigment, whereas other methods did not include this group in their separation scheme. Although
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isatin (IS) from H. trunculus snails has been shown to be a truly minor component in the raw unprocessed purple pigment and in dyes subsequently produced from these pigments, 13 the raw B. brandaris and S. haemastoma pigments analyzed by this method contain a major quantity of the brominated isatin, 6BIS, which may be useful in differentiating such pigments from the H. trunculus ones. 14 With this method, a spectrometric detection of the eluting components is made by the photodiode array (PDA) detector (also abbreviated as DAD: diode array detector). It produces a UV/Vis absorption spectrum for each dye detected. These are shown in figs. 3-5 for the three related chemical groups that constitute the purple pigment, the isatinoids, indigoids, and indirubinoids. Included in the figures are the molecular formulas and abbreviations of these dyes. From the respective spectra, it can be seen that the isatinoids maintain their colour when dissolved, producing yellowish solutions with a wavelength corresponding to the maximum absorption of visible light, Ưmax, of about 415 nm. Similarly, the indirubinoids in DMSO-solution retain their reddish-purple hue in the dissolved state as in the solid state, with an average wavelength at maximum absorption of about 540 nm. While the navy-blue indigo produces blue DMSO-solutions, as expected, however, contrary to expectations, the violet MBI and red-purple DBI both produce bluish solutions when dissolved, and are visually nearly identical in colour to indigo solutions. The Ưmax values from these three indigoid solutions hover at around 605 nm. The two properties produced from the HPLC-PDA methodology, the chromatographic retention time and the spectrometric UV/Vis absorption spectrum provide a dual means of positive identification of each dye. Thus, by comparing the retention time and the spectrum of each peak in the chromatogram produced from a real sample with those two properties from a standard component, the identity of the unknown component can be identified with a high level of confidence.
APPLICATION
OF THE ANALYTICAL HPLC METHOD TO THE CHROMATIC FINGERPRINTING OF MODERN MURICIDAE PIGMENTS In order to determine the zoological provenance of purple archaeological pigments produced from Muricidae snails, it is important to identify and characterize the presence of all the detectable colorants produced from each zoological species. This unique “chromatic fingerprinting” is important in order to perform archaeomalacological provenance determinations of ancient purple pigments and dyes. It is of course assumed that the living species available today were also in existence in Antiquity. Such a
13.
14.
Darius…; Z. C. Koren, “Non-Destructive vs. Microchemical Analyses: The Case of Dyes and Pigments”, in Proceedings of ART2008, 9th International Conference, Non-destructive Investigations and Microanalysis for the Diagnostics and Conservation of Cultural and Environmental Heritage, May 25-30, Jerusalem, Israel (2008), pp. 37.1-37.10. Darius…; Z. C. Koren (n. 13).
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chromatographic multi-component characterization of selected samples from modern Muricidae species, H. trunculus, B. brandaris, and S. haemastoma, has already been performed and published. 15 The application of the analytical HPLC method to study the pigments from modern Muricidae snails has led to the following advances and discoveries made in this laboratory: – Analysis of a raw unprocessed snail pigment; 16 – Identification of DBIR 17 in a H. trunculus snail; 18 – Separation and detection of ten colorants that could constitute a mollusc purple pigment; 19 – Detection of the following four dyes in H. trunculus snails: IS, 6BIS, 6MBIR, 6’MBIR; 20 – Detection of 6BIS in B. brandaris and S. haemastoma. 21 In addition, the optimization of the all-natural fermentation dye vat consisting of H. trunculus snails that would have been practised in Antiquity was determined and reconstructed. 22 A related natural process was also independently rediscovered by the late J. Edmonds 23 and by I. Boesken-Kanold. 24
ARCHAEOMETRIC
ANALYSES OF RESIDUAL PURPLE PIGMENTS AND DYES Tel Dor – th century BC pigment at a Phoenician dyeing installation
A dark residual stain on a small pebble-sized piece of limestone, which was found in the conduit between two pits at the 6th century BC site of Tel Dor in north-central Israel (fig. 6), was analyzed by dissolving it in hot DMF. 25 After about a minute, the solution’s colour turned pale blue, indicative of the presence of an indigoid in the residue. A blue colour in a DMF extract may be due to the presence of indigo alone, which would thus indicate that this site was a dyeing installation for producing blue-dyed textiles from a flora source, most probably from the leaves of the woad plant, Isatis tinctoria. Alternatively, if the solution’s blue colour was also a result of the presence of brominated
15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22. 23. 24. 25.
Darius… Purple Dyeing Vat. Common and abbreviated names of the dyes are listed in table 1 (see below, p. 41). Purple Dyeing Vat. Purple Dyeing Vat; HPLC-PDA…, ch. 5, pp. 45ff.; Darius…, pp. 381ff.; Z. C. Koren (n. 11). HPLC-PDA…, Ch. 5, p 45; Z. C. Koren (n. 11). Darius... All-Murex..., pp. 136ff.; Z. C. Koren (n. 11). J. Edmonds, Tyrian or Imperial Purple Dye: The Mystery of Imperial Purple Dye, Historic Dye Series 7 (2000). I. B. Kanold, “The Purple Fermentation Vat: Dyeing or Painting Parchment with Murex Trunculus”, Dyes Hist Archaeol 20 (2005), pp. 150-154. Z. C. Koren, “Methods of Dye Analysis used at the Shenkar College Edelstein Center in Israel”, Dyes Hist Archaeol 11 (1993), pp. 25-33.
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Fig. 6 — The two-pit installation connected via a conduit at Tel Dor (Photo: Z. C. Koren). Fig. 7 — Purple-stained potsherd excavated at Tel Kabri (Courtesy of the Tel Kabri Expedition). Fig. 8 — The King Darius I stone jar (Courtesy of the Bible Lands Museum, Jerusalem).
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indigoids (see above), which can originate only from malacological sources, then this would indicate that the vat installation was for the production of purple mollusc dyes. Prior to HPLC analyses, this solution was then analyzed via visible spectrophotometry, whereby a spectrum of light absorption is obtained at various wavelengths for the dissolved sample. While limited in its powers of discernment, it was nevertheless a simple instrumental tool and useful when carefully interpreted. The results of the analyses show a spectrum for the dissolved archaeological residue with a visible wavelength at maximum absorption, lmax, of 600 nm. Comparing this value with the comparable wavelength for indigo (613 nm) and with that for DBI (59 nm) shows that the now soiled residual pigment was much richer in the red-purple DBI than in indigo, and hence the source for this pigment is in fact molluscan. The possible presence of MBI (absorbing at 607 nm) can also not be ignored. Hence, this installation served in fact for the dyeing of real purple textiles. The limestone found between the pits may have been used for the production of an alkaline environment, which is necessary for the reductive dissolution of the dye to its leuco form during the dyeing stage.
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This type of visible spectrophotometric analysis was, as noted above, not detailed enough, and hence the advent of the HPLC method provided the fine qualitative and quantitative tuning that was essential for a complete determination of the dyes constituting archaeological pigments. Tel Kabri – th century BC purple-stained potsherd The first HPLC method to study an archaeological pigment from a dyeing vat was published in 1995. 26 The beautiful potsherd sample, excavated at the Phoenician site of Tel Kabri in the North of Israel, is depicted in fig. 7. For this analysis, the detector was a variable wavelength detector, which measured the chromatogram at a fixed wavelength chosen at the beginning of the run. While this detector lacked the universality of the more modern photodiode array (PDA) detectors, it nevertheless provided accurate data for the most optimal wavelength, which in this case is about 600 nm. As previously noted, brominated indigoids and indigo have their absorption maxima near this wavelength. It is gratifying to note that at this wavelength (600 nm) the existence of DBIR is still detected, even though its wavelength at maximum absorption is about 540 nm. This was the first time that DBIR was found in an archaeological pigment. Purple-painted royal jar of King Darius I – mid-th century BC The photodiode detector was used for the detection of an unusual royal object. 27 This unique marble jar with the name of King Darius carved on it has scattered purple stains on its exterior and even on the base (fig. 8). Upon closer inspection, it can be deduced that the entire object was painted with a purple pigment in either a fresco or secco technique. The mortar used was probably kaolinite, painted afterwards with the purple pigment. The detailed chromatographic fingerprint showed that this pigment was obtained from a H. trunculus snail (or very similar species) that is rich in DBI and poor in IND (indigo). During the Persian Achaemenid period, the kings controlled a vast empire with easy access to Mediterranean and other shores where Muricidae snails were found. The function and purpose of this object are not entirely certain, but it was probably a gift from the king to a person whom he favoured. It is interesting to note a biblical parallel here. In the sixth chapter of the Book (or Scroll) of Esther in which, according to tradition, the story unfolds in the royal court of one of the Achaemenid kings, probably Xerxes, it states: “in this manner shall be done to the man whom the king desires to honour”.
26. 27.
Purple Dyeing Vat. Darius…, pp. 381ff.
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Fig. 9 — The miniscule purple fabric found at Masada (Photo: Z. C. Koren). Fig. 10 — Chromatogram at 600nm of the dye extracted from the purple yarn from the Herodian fabric (Graph: Z. C. Koren). 10
Herodian fabric – late st century BC One of the more pleasantly surprising discoveries made in this laboratory was the discovery that a miniscule piece of fabric, measuring about 4×2 mm (fig. 9), found in a refuse ditch at the top of the palatial fortress of Masada in the Judean desert, probably belonged to the royal purple mantle of King Herod. 28 This king was undoubtedly one of the most memorable kingly characters who reigned in Judea in ancient Israel. He built a number of palaces and other building projects, which some say were verging on megalomaniacal in size. 29 One of his most outstanding landmarks was the refurbishment of the Second Temple in Jerusalem, of which the famous external Western Wall still survives with its Herodian stone “grandeur”. The chromatographic result of an HPLC analysis (fig. 10) on a small dyed yarn from that weave bears the hallmark of a dye produced from a molluscan source. Comparing this dye composition with that of other snails, it is clear that the marine zoological source of this pigment is the H. trunculus snail (or some other species that is nearly indistinguishable from it). This pigment is rich in DBI, which is responsible for its reddishpurple hue. This then is also the colour of the biblical Argaman dye mentioned above, the first such dye found in ancient Israel.
28.
29.
Z. C. Koren (n. 13); id., “The Unprecedented Discovery of the Royal Purple Dye on the Two Thousand Year-old Royal Masada Textile”, in The Textile Specialty Group Postprints 7 (1997), pp. 23-34; id., “Color my World: A Personal Scientific Odyssey into the Art of Ancient Dyes”, in A. Stephens, R. Walden (eds), For the Sake of Humanity: Essays in Honour of Clemens Nathan (2006), pp. 155-189. N. Kokkinos, The Herodian Dynasty (2010).
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Biblical Tekhelet dye Recently, this author analyzed a bluish-purple (violet) textile from Masada and determined that the dyestuff source is the IND-rich H. trunculus sea snail. This, then, is the only biblical Tekhelet dye so far discovered. More details about this analysis will be provided in a future publication. The analytical study of purple molluscan pigments and dyes on archaeological artifacts from more than two and a half millennia has shown major advances, especially within the last two decades. The archaeometric discoveries made in this laboratory can be summarized as follows: – Decipherment of the method by which the ancients performed purple-dyeing by natural means; 30 – HPLC analysis of a raw unprocessed purple archaeological snail pigment; 31 – HPLC identification of DBIR in a molluscan archaeological pigment; 32 – Discovery of the purple pigment as the sole paint pigment on a royal objet d’art from King Darius I; 33 – Discovery of the royal purple mantle of King Herod I –the biblical colour Argaman produced from DBI-rich H. trunculus sea snails; 34 – Discovery of the biblical blue-purple Tekhelet dye produced from IND-rich H. trunculus snails.
30. 31. 32. 33. 34.
All-Murex..., pp. 136ff. Purple Dyeing Vat. Purple Dyeing Vat. Darius..., p. 381. Z. C. Koren (n. 13); id. (n. 28, 1997 and 2006).
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La pourpre en Égypte romaine. Récentes découvertes, implications techniques, économiques et sociales Dominique Cardon, Witold Nowik, Adam Bülow-Jacobsen, Renata Marcinowska, Katarzyna Kusyk, Marek Trojanowicz
RÉSUMÉ Sont présentés ici les résultats d’analyses de colorants ayant permis d’identifier de la vraie pourpre, extraite de mollusques marins, dans dix textiles archéologiques des trois premiers siècles de notre ère découverts dans les dépotoirs du site de Didymoi, dans le désert Oriental d’Égypte. Ces résultats sont discutés du triple point de vue des sources biologiques de ces teintures, des lieux de production et des procédés techniques mis en œuvre. Sont ensuite exposés les résultats de calculs des quantités de laine teinte en pourpre nécessaires pour décorer les vêtements dont faisaient originellement partie les fragments analysés. Ils ont permis d’évaluer le coût supplémentaire entraîné par l’emploi de vraie pourpre dans les éléments de base de l’habillement masculin et féminin de l’époque. En comparant ce coût avec d’autres prix de denrées ou de services, on peut se former une idée plus précise des possibilités de diffusion de cette teinture prestigieuse dans les différentes couches de la société égyptienne des trois premiers siècles de notre ère. MOTS-CLEFS Vraie pourpre, textiles d’Égypte romaine, analyses de colorants, coût de la pourpre, diffusion sociale de la pourpre.
Purple in Roman Egypt: recent discoveries and their technical, economical and social implications We present the results of dye analyses of archaeological textiles from the first three centuries BCE and discovered in the rubbish dumps of Didymoi, a military site in the Eastern Desert of Egypt: true purple from marine molluscs has been identified in ten fragments. These results are discussed from the point of view of their possible biological sources, their production centres and the technical processes that might be involved. Calculations of the quantities of purple-dyed wool necessary to decorate the types of garments from which the fragments originally came from are then presented. Such calculations permit estimation of the extra cost of using true purple in basic elements of both male and female clothing of the time. Comparisons of such costs with other prices and wages in Roman Egypt give new insight into the diffusion of purple –this most prestigious of ancient dyes– in the different strata of society. SUMMARY
KEYWORDS True purple dye, textiles in Roman Egypt, dye analyses, economy of purple, social importance of purple.
DOMINIQUE CARDON ET AL.
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à propos des auteurs D. Cardon, CIHAM, UMR 5648 du CNRS, ISH, université Lumière-Lyon 2, France. W. Nowik, Laboratoire de recherche des monuments historiques, France. A. Bülow-Jacobsen, Institut de papyrologie, université Paris I Panthéon-Sorbonne, France. R. Marcinowska, K. Kusyk, M. Trojanowicz, Laboratoire d’analyse des flux et de chromatographie, université de Varsovie, Pologne.
note liminaire Nous adressons tout d’abord nos remerciements à Hélène Cuvigny, directrice des fouilles de Didymoi, pour tous les commentaires et suggestions que sa connaissance approfondie des textes des ostraca découverts dans le désert Oriental d’Égypte lui a permis de nous apporter au cours de la rédaction de cet article ; et à Hero Granger-Taylor, non seulement pour sa précieuse collaboration à l’étude des textiles de Didymoi, mais aussi pour l’inspiration que nous ont fournie nos nombreuses discussions au sujet de la pourpre et de son importance dans le monde méditerranéen antique. Nous remercions aussi les collègues et amis qui nous ont communiqué des informations sur des découvertes pas encore publiées, ou qui ont pris la peine de nous faire part de leur point de vue sur les processus biochimiques complexes à l’œuvre dans les cuves de pourpre antiques, ainsi que sur l’extrême finesse des fils dans certains textiles archéologiques découverts en Égypte et dans d’autres pays de Méditerranée orientale ; merci, en particulier, à Lise Bender Jørgensen, Inge Boesken Kanold, William Cooke, Christopher Cooksey, Lena Hammarlund, Rolf Haubrichs, Zvi C. Koren, Fleur Letellier-Willemin et John Peter Wild. Merci également à Iris Brémaud et Pierre Cabrolier pour leur collaboration gracieuse pour les diagrammes et les dessins.
abréviations bibliographiques Cuvigny 2003 = H. Cuvigny (éd.), La route de Myos Hormos. L’armée romaine dans le désert Oriental d’Égypte. Cuvigny 2011 = H. Cuvigny (éd.), Didymoi. Une garnison romaine dans le désert Oriental d’Égypte I, Praesidia du désert de Bérénice IV. Drexhage 1991 = H.-J. Drexhage, Preise, Mieten/Pachten, Kosten und Löhne im römischen Ägypten. Johnson 1936 = A. C. Johnson, An Economic Survey of Ancient Rome II. Roman Egypt to the Reign of Diocletian. Segrè 1928 = A. Segrè, Metrologia e circolazione monetaria degli Antichi.
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
L’identification de vraie pourpre, extraite de mollusques marins, dans les éléments décoratifs de fragments de vêtements découverts en Égypte dans des sites d’époque romaine, ouvre de nouvelles perspectives de recherche interdisciplinaire. Sources biologiques de ces teintures de pourpre, filière de production d’un vêtement orné de pourpre, prix à payer pour se parer de vraie pourpre : toutes ces questions connexes, concernant la teinture la plus prestigieuse et la plus chargée de sens symbolique du monde antique, doivent être reconsidérées en confrontant les données fournies par les sources écrites, exploitées dans les travaux antérieurs sur la pourpre, et les résultats des analyses techniques et chimiques des textiles archéologiques. Rendre compte en détail des différentes étapes de ces recherches n’est pas possible dans le cadre de cet article. Nous présentons ici, tout d’abord, les résultats des analyses ayant permis d’identifier de la vraie pourpre dans dix textiles archéologiques découverts dans les dépotoirs du site de Didymoi, dans le désert Oriental d’Égypte, et ce que ces résultats indiquent, ou invitent à chercher encore, sur les différentes espèces de coquillages ayant pu être utilisées et sur les provenances possibles de ces teintures. Sont résumés ensuite les résultats de nos calculs des quantités de laine teinte en pourpre nécessaires pour décorer les différents vêtements dont faisaient originellement partie les fragments analysés, travail qui a fait l’objet d’une publication distincte 1. Il permet, dans la présente étude, d’évaluer le coût supplémentaire entraîné par l’emploi de vraie pourpre dans les éléments de base de l’habillement masculin et féminin de l’époque. En comparant ce coût avec d’autres prix de denrées ou de services en Égypte à des dates proches de celles où ont été confectionnés ces vêtements, on peut se former une idée plus précise des possibilités de diffusion de cette teinture prestigieuse dans les différentes couches de la société égyptienne des trois premiers siècles de notre ère.
LES
PRAESIDIA DU DÉSERT ORIENTAL D’ÉGYPTE, NOUVELLES MINES DE TEXTILES ARCHÉOLOGIQUES
Didymoi, ainsi que deux autres sites où ont récemment été découverts des textiles dans lesquels a été identifiée de la vraie pourpre, sont des praesidia, petites forteresses édifiées dans la seconde moitié du ier s. apr. J.-C., qui jalonnaient deux des principales routes de caravane reliant les ports de la mer Rouge à la vallée du Nil, en l’occurrence Myos Hormos d’une part, et Bérénice d’autre part, à Koptos (Quft) (fig. 1) 2. Ce réseau de places fortes tenues par de petites garnisons avait pour rôle d’assurer la sécurité et le ravitaillement 1.
2.
D. Cardon et al., « Who could Wear True Purple in Roman Egypt? Technical and Social Considerations on Some New Identifications of Purple from Marine Molluscs in Archaeological Textiles », dans C. Alfaro et al. (éds), Tejidos y tintes en la ciudad antigua/Tissus et teintures dans la cité antique, Purpureae Vestes III (2011). Les fouilles se succèdent le long de ces deux routes depuis 1994, sous la direction d’H. Cuvigny, papyrologue (CNRS et Institut de recherche sur l’Histoire des Textes, Paris) ; elles sont financées par le ministère des Affaires étrangères et l’Institut français d’archéologie orientale au Caire (IFAO). La fouille des sites dont il est question ici (Maximianon, Krokodilô, Didymoi) a été assurée par J.-P. Brun (Collège de France, Paris) et M. Reddé (École pratique des hautes études, Paris). Les ostraca ont essentiellement été étudiés par H. Cuvigny et A. Bülow-Jacobsen, et les textiles, par D. Cardon, H. Granger-Taylor
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DOMINIQUE CARDON ET AL.
Fig. 1 — L’Égypte : routes de caravanes entre la mer Rouge et le Nil et sites des praesidia (cartes J.-P. Brun, M. Leguilloux).
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
en eau des caravanes. Parmi les praesidia, ce sont ceux où subsistent encore de grands dépotoirs, comme Maximianon, Krokodilô et Didymoi, qui se révèlent fructueux pour les spécialistes de l’étude des textiles, comme pour les papyrologues. Ces dépotoirs livrent en effet de très nombreux ostraca, morceaux de poteries cassées sur lesquels les habitants des fortins ont écrit au quotidien l’histoire de la vie dans leurs petites communautés isolées dans le désert 3. Ils ont également livré des centaines de textiles, pour la plupart des fragments de vêtements usagés, presque tous en laine. L’étude de ces chiffons apporte des informations de première importance sur la production textile du monde antique des trois premiers siècles de notre ère, particulièrement en ce qui concerne le développement de certaines techniques de fabrication et la variété des produits alors en circulation 4. Ces découvertes sont rendues encore plus précieuses par les méticuleuses méthodes appliquées à la fouille de ces dépotoirs et par l’analyse fine de leur stratigraphie 5 : ce travail de patience permet de dater précisément la plupart des fragments textiles, parfois à vingt ans près, ce qui fournit enfin des jalons sûrs pour divers types de productions et de vêtements, dont ceux pour lesquels ont été identifiées des teintures de vraie pourpre. Grâce, en effet, aux autorisations de prélèvements accordées par le Conseil suprême des Antiquités d’Égypte et au soutien de l’IFAO, de petites séries d’analyses de colorants ont pu être effectuées sur des groupes de textiles sélectionnés, provenant des trois sites mentionnés ci-dessus 6.
3.
4.
5.
6.
(chercheur indépendant, Londres), W. Nowik (pour l’analyse des colorants) et D. Nadal (restauratrice, association Materia Viva, Toulouse). Cuvigny 2003 ; H. Cuvigny (éd.), Ostraca de Krokodilô. La correspondance militaire et sa circulation (2005) ; ead., Didymoi. Une garnison romaine dans le désert Oriental d’Égypte (2012) ; A. Bülow-Jacobsen, « The Traffic on the Road and the Provisioning of the Stations », dans Cuvigny 2003, p. 399-426 ; J.-L. Fournet, « Langues, écritures et culture dans les praesidia », dans Cuvigny 2003, p. 427-502. D. Cardon, « Textiles archéologiques de Maximianon-Al Zarqa : exemples précoces de teinture par réserve sur laine », Bulletin du CIETA 75 (1998), p. 14-20 ; ead., « Les damassés de laine de Krokodilô (100120 apr. J.-C.) », Bulletin du CIETA 76 (1999), p. 6-21 ; ead., « On the Road to Berenike: A Piece of Tunic in Damask Weave from Didymoi », dans P. Walton Rogers, L. Bender Jorgensen , A. Rast-Eicher (éds), The Roman Textile Industry and its Influence. A Birthday Tribute to John Peter Wild (2001), p. 12-20 ; ead., « Chiffons dans le désert : textiles des dépotoirs de Maximianon et Krokodilô », dans Cuvigny 2003, vol. 2, p. 619-659, 667-669 ; ead., « Haillons précieux – Développements du tissage et de la teinturerie en Égypte romaine d’après de récentes découvertes de textiles archéologiques », dans B. Mathieu, D. Meeks, M. Wissa (éds), L’apport de l’Égypte à l’histoire des techniques. Méthodes, chronologie et comparaisons (2006), p. 45-61 ; D. Cardon, H. Granger-Taylor, W. Nowik, « How Were They Dressed? Fragments of Clothing Found at Didymoi: Case Studies », dans Cuvigny 2011, p. 273-395. J.-P. Brun, « Méthodes et conditions de fouille des fortins et des dépotoirs ou les affres d’un Gallo-Romain en Égypte », dans Cuvigny 2003, vol. 1, p. 61-72 ; J.-P. Brun, M. Reddé, « L’architecture des praesidia et la genèse des dépotoirs », dans Cuvigny 2003, vol. 1, p. 73-136 ; J.-P. Brun, H. Cuvigny, M. Reddé, « De Vespasien à la crise du iiie s. – Chronologie générale de Didymoi », dans Cuvigny 2011, p. 17-113. Que les directeurs du Conseil suprême des Antiquités et les directeurs et directrice successifs de l’IFAO soient assurés de notre gratitude pour leur intérêt pour nos recherches et leur soutien. Merci, en particulier, à Laure Pantalacci et à Michel Wuttmann (†), directeur du laboratoire de recherche et de conservation à l’IFAO, d’avoir accueilli W. Nowik au sein de ce laboratoire. Merci également aux membres du Conseil de laboratoire du CIHAM, UMR 5648, Lyon, et à son directeur, Denis Menjot, pour le financement par le CIHAM d’une partie des fournitures nécessaires pour les analyses de colorants.
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DOMINIQUE CARDON ET AL.
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ANALYSES
DE TEXTILES À FOND OU DÉCOR POURPRE
La pourpre – tant la teinture que son importance économique et sociale – étant l’un des thèmes de recherche auxquels ces analyses avaient pour but d’apporter un nouvel éclairage, des prélèvements furent effectués sur des textiles présentant un fond « pourpre » uni ou un décor « pourpre », ainsi que sur des fragments de vêtements à bandes ou à motifs « pourpres » sur fond teint ou non teint. Il faut préciser tout d’abord que pour cet échantillonnage, nous avons pris comme hypothèse qu’une très large gamme de nuances avait pu être perçue et désignée comme « pourpre » par les anciens et, dans l’état présent de conservation des textiles archéologiques retrouvés dans les dépotoirs, qu’elle s’étend de gris mauve à des violet presque noir, en passant par des rouge violacé ou des rose vif. C’était déjà le point de vue de L. Bellinger et de R. Pfister qui, dans leur étude des textiles archéologiques de Doura-Europos, interprétèrent toutes ces nuances, prédominantes dans le décor des textiles, comme « représentant de la pourpre 7 ». Une première série d’analyses, qui concernait dix-sept textiles provenant des sites de Maximianon et de Krokodilô, permit d’identifier la vraie pourpre, extraite de mollusques marins, sur trois d’entre eux 8. Employée seule pour la trame pourpre d’un clavus décorant un fragment de tunique à fond non teint blanc ivoire de Maximianon, elle est, en revanche, nuancée d’une autre teinture, par un colorant rouge, dans la trame rose violacé d’un motif en forme de gamma décorant un fragment de pallium bleu-vert du même site. La teinture rouge utilisée en combinaison avec la pourpre dans ce fragment est le kermès, colorant écarlate extrait des femelles adultes séchées du Coccidé Kermes vermilio (Planchon, 1864) 9. Enfin, dans un fragment de tunique à fond rouge de Krokodilô, la vraie pourpre, identifiée dans la trame du clavus gris-mauve ornant la tunique, est employée en combinaison, non pas avec une, mais deux teintures rouges différentes : le kermès et la garance des teinturiers, R. tinctorum L. Tous les autres résultats d’analyses de cette série indiquent l’emploi d’un procédé très maîtrisé d’imitation de la pourpre mettant en œuvre deux colorants grand teint – l’indigo et la garance – expertement préparés et diversement dosés suivant les nuances désirées 10. Une seconde série d’analyses a concerné soixante-deux textiles découverts à Didymoi 11. Ces analyses bénéficièrent d’un processus analytique optimisé, mis au point entre-temps, dans le cadre d’un programme international de recherche sur l’identification des composés
7. 8.
9. 10. 11.
Ils les décrivent comme un ensemble de couleurs « intended for purple », dans R. Pfister, L. Bellinger, The Excavations at Dura-Europos, Final Report IV, part II. The Textiles (1945), p. 4, 11. D. Cardon et al., « Aperçus sur l’art de la teinture en Égypte romaine : analyses de colorants des textiles des praesidia du désert Oriental », AntTard 12 (2004), p. 101-111 ; J. Wouters et al., « Dye Analysis of Selected Textiles from Three Roman Sites in the Eastern Desert of Egypt: A Hypothesis on the Dyeing Technology in Roman and Coptic Egypt », Dyes in History and Archaeology 28 (2008), p. 1-16. Sur le kermès, voir D. Cardon, Natural Dyes. Sources, Tradition, Technology and Science (2007), p. 609-619. Voir les références mentionnées n. 12. Résultats de ces analyses, intégrés à la publication des textiles, dans D. Cardon, H. Granger-Taylor, W. Nowik (n. 4).
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
indigoïdes dérivés de différentes espèces de Muricidae dans les objets patrimoniaux, programme auquel participaient plusieurs auteurs de la présente contribution 12. Dans la plupart des cas, les nuances de « pourpre » de ces textiles se révélèrent être, comme dans la précédente série d’analyses, des imitations de pourpre véritable dues à la combinaison de deux teintures, en proportions diverses : de l’indigo d’origine végétale (extrait soit du pastel Isatis tinctoria L., soit d’un indigotier poussant en Égypte, Indigofera sp.) et de la garance, le plus probablement R. tinctorum L. Comme déjà remarqué dans les textiles de Maximianon et de Krokodilô, la garance, dans ces imitations de pourpre, semble avoir été préparée de façon à en éliminer le plus possible les composants orangés, telle l’alizarine, et faire prédominer les colorants violacés, telles la pseudopurpurine et la purpurine 13. Cependant, dix textiles de Didymoi, sur les soixante-deux analysés, ont révélé contenir de la pourpre véritable (tabl. I.1-2). Celle-ci est identifiée – on le voit d’après les compositions chimiques indiquées – grâce à la présence de composés indigoïdes contenant un ou deux atomes de brome, dus à l’environnement marin des mollusques à pourpre (fig. 12) 14. On trouve des fils de trame teints en deux nuances distinctes, toutes deux dues à de vraies pourpres de composition différente, dans le fragment D99.2511.44, une très belle bande ombrée en dégradé de violets : ce sont donc onze identifications de vraie pourpre qui ont pu être faites au sein de l’échantillonnage sélectionné. Dans deux des textiles analysés, la pourpre n’a pas été identifiée seule, mais combinée à des colorants rouges, comme cela avait déjà été trouvé dans deux textiles de Maximianon et de Krokodilô : il s’agit du kermès, pour le clavus rose-pourpre d’un fragment de tunique à fond bleu-vert, et du kermès additionné de garance, pour la large bande rouge-pourpre d’un fragment de cape (tabl. I.2). On a donc au total un échantillonnage de teintures à la pourpre qui, bien que restreint, offre l’avantage – rare dans ce domaine de recherche – d’être constitué de textiles datés avec une précision relative, et qui ont pu être analysés en série, selon un même processus
12. 13.
14.
Programme PHC « Polonium » no 13848 QC, financé par les ministères de la Recherche de France et de Pologne. Le chimiste israélien Z. C. Koren avait déjà remarqué cette particularité dans les pourpres d’imitation de textiles archéologiques des sites de Masada (légèrement antérieurs à ceux de Didymoi) et d’En Rahel, un fortin nabatéen sur la route des épices entre Pétra et Gaza (contemporains des textiles de Didymoi), Z. C. Koren, « Analysis of the Masada Textile Dyes », dans J. Aviram, G. Foerster, E. Netzer (éds), Masada IV. The Yigael Yadin Excavations 1963-5 Final Reports (1994), p. 257-264 ; id., « Microscopic and Chromatographic Analyses of Decorative Band Colors on Nabatean En Rahel Textiles–Kermes and Shaded Bands », Atiqot 38 (1999), p. 129-136. Mais il l’avait attribuée à l’emploi de garance sauvage, Rubia peregrina L., une espèce dont la racine ne contient qu’une proportion faible à infime d’alizarine. Cette espèce n’est pas présente actuellement en Égypte et rien n’indique qu’elle y ait poussé ou y ait été cultivée dans l’Antiquité. Nous penchons plutôt pour l’emploi en Égypte d’une seule espèce de garance, Rubia tinctorum L., employée selon des procédés différents pour donner, soit des rouges et des orangés, soit les tons plus violacés souhaitables pour nuancer les bleus d’indigo dans les pourpres d’imitation. Sur la biologie et la composition chimique des différentes espèces à pourpre d’importance historique, voir D. Cardon (n. 9), p. 553-606.
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analytique mis au point spécialement pour ce type de teintures. Ceci assure la pertinence des comparaisons faites ci-après entre les compositions des pourpres trouvées dans les différents fragments. 15 16 17 18 I.1. Pourpre de mollusque employée comme seule source de couleur Référence
Date apr. J.-C.15
Type de vêtement, type de décor16
Système de filage17
Composition18
D99.2511.2.1
96
Tunique, fond non teint, motif de H pourpre
S/Z, S
42,3 % DBI, 36,5 % MBI, 18,9 % IND ; 0,7 % BR-ISA, 0,4 % ISA ; 0,6 % DBINR, 0,3 % BR-INR, 0,2 % BR’-INR, 0,1 % INR
78-85
Tunique, fond non teint, clavus pourpre
S/S, S
19,5 % DBI, 61,9 % MBI, 12,9 % IND ; 2,5 % BR-ISA, 1,9 % ISA ; 0,5 % DBINR, 0,5 % BR-INR, 0,2 % BR’-INR, 0,1 % INR
115-120
Tunique, fond non teint, clavus pourpre
S/S, S
22,12 % DBI, 66,51 % MBI, 7,2 % IND ; 2,54 % BR-ISA, 1,3 % ISA ; 0,1 % DBINR, 0,2 % BR-INR, 0,1 % INR
225-250
Tunique, fond non teint, clavus pourpre
S/S, S
11,8 % DBI, 85,6 % MBI, 1,2 % IND ; 0,6 % BR-ISA, 0,4 % ISA ; 0,1 % DBINR, 0,1 % BR-INR, 0,1 % BR’-INR, 0,1 % INR
96
Pallium, fond non teint, gamma pourpre
S/S, S
20,4 % DBI, 69,6 % MBI, 7,8 % IND ; 0,6 % BR-ISA, 0,8 % ISA ; 0,3 % DBINR, 0,3 % BR-INR, 0,2 % BR’-INR, 0,1 % INR
Fig. 2
D99.2436.1A
Fig. 3
D99.3322.8
Fig. 4
D2000.12015.1
Fig. 5
D99.2511.1.2
Fig. 6
15. 16.
17.
18.
Date à laquelle le fragment a été abandonné dans le dépotoir. Définitions et descriptions des principaux types de vêtements et de décors représentés parmi les textiles des dépotoirs des sites archéologiques du désert Oriental d’Égypte dans D. Cardon, H. GrangerTaylor, W. Nowik (n. 4). Système de filage, explication de la notation : S/S, S = chaîne filée en S/trame de fond filée en S, trame de décor filée en S ; S/S, S-S = chaîne filée en S/trame de fond filée en S, trame de décor filée en S, double ; Z2S = filage en Z, retors 2 bouts S ; S/S, Z = chaîne filée en S/trame de fond filée en S, trame décor filée en S ; S/Z, Z = chaîne filée en S, trame de fond filée en Z, trame de décor filée en Z ; S/Z, S = chaîne filée en S / trame de fond filée en Z, trame de décor en S ; Z/Z, Z = chaîne filée en Z/trame de fond filée en Z trame de décor filée en Z). Publication détaillée des méthodes analytiques en cours. Abréviations : IND = indigotine ; DBI = 6,6’-dibromoindigotine ; MBI = 6-bromoindigotine = (?) monobromoindigotine ; INR = indirubine ; DBINR = 6,6’-dibromoindirubine ; BR-INR = 6-bromoindirubine ; BR’-INR = 6’-bromoindirubine ; ISA = isatine ; BR-ISA = monobromoisatine ; KA = acide kermésique ; FKA = acide flavokermésique ; Al = alizarine ; P = purpurine.
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LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
I.1. Pourpre de mollusque employée comme seule source de couleur D99.4306.2
176-210
Pallium, fond orange, gamma pourpre
S/S, Z
21 % DBI, 59,4 % MBI, 17,1 % IND ; 1,1 % BR-ISA, 0,5 % ISA ; 0,5 % DBINR, 0,3 % BR-INR, 0,1 % BR’-INR, 0,1 % INR
176-210
Cape à capuchon, fond non teint, bande verticale pourpre
S/S, S-S
26 % DBI, 66,1 % MBI, 6,1 % IND ; 0,6 % BR-ISA, 0,4 % ISA ; 0,3 % DBINR, 0,1 % BR-INR, 0,1 % BR’-INR, 0,1 % INR
96
Pallium ou tenture (?), fond mauve, bande ombrée
Z/Z, Z
42 % DBI, 48,9 % MBI, 7,1 % IND ; 0,6 % BR-ISA, 1,2 % ISA ; 0,1 % DBINR
96
Pallium ou tenture (?), bande ombrée
Z/Z, Z
44,1 % DBI, 52,9 % MBI, 2,1 % IND ; 0,6 % BR-ISA ; 0,2 % DBINR
Fig. 7
D98.4404.1A
Fig. 8
D99.2511.44B Trame violet foncé
Fig. 9 D99.2511.44A Trame rose pourpre
I.2. Pourpre de mollusque combinée avec des teintures rouges D98.1410.3 Fig. 10
125-140
Tunique, fond vert, clavus poupre
S/Z, Z
Indigoïdes : 1,1 % DBI, 15,5 % MBI, 81,6 % IND 0,5 % BR-INR, 1,1 % INR Autres : + KA, FKA Proportion indigoïdes / colorants rouges : 59 % / 41 %
D99.1516.1 Fig. 11
125-140
Cape à capuchon, fond non teint, bande horizontale pourpre
Z2S/Z, Z
Indigoïdes : 0,6 % DBI, 4,8 % MBI, 89,4 % IND, 2,7 % ISA, 2,2 % INR Autres : + KA, FKA, P, Al (traces) Proportion indigoïdes / colorants rouges : 52 % / 20 % KA + FKA, 28 % P
Tabl. I — La vraie pourpre dans les textiles de Didymoi.
Du point de vue chronologique, ces identifications de pourpre véritable présentent le double intérêt de concerner une longue période – du ier s. au iiie s. apr. J.-C. – et de s’échelonner assez régulièrement. On voit, d’après les endroits où ils ont été trouvés dans les dépotoirs et les datations qui en découlent, qu’il n’y a pas eu de dépôt groupé de textiles précieux ornés de vraie pourpre. Ils auraient, dans ce cas, pu tous appartenir à un même individu, ou à un groupe d’occupants temporaires du fort, particulièrement fortuné(s). En fait, à Didymoi, des textiles ornés de pourpre ont été abandonnés séparément tout au
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3
Fig. 2 — Angle de tunique D99.2511.2.1 (fin d’usage en 96 apr. J.-C.), à motif pourpre en forme de H (cl. A. Bülow-Jacobsen). Fig. 3 — Fragment de tunique D99.2436.1A (fin d’usage en 78-85 apr. J.-C.) (cl. D. Cardon). Fig. 4 — Fragment de tunique D99.3322.8 (fin d’usage en 115-120 apr. J.-C.) (cl. A. BülowJacobsen). Fig. 5 — Fragment de tunique D2000.12015.1 (fin d’usage en 225-250 apr. J.-C.) (cl. D. Cardon). Fig. 6 — Fragment de pallium D99.2511.1.2 (fin d’usage en 96 apr. J.-C.) (cl. D. Cardon).
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Fig. 7 — Fragment de pallium D99.4306.2 (fin d’usage en 176-210 apr. J.-C.) (cl. D. Cardon). Fig. 8 — Fragment de cape D98.4404.1A (fin d’usage en 176-210 apr. J.-C.) (cl. D. Cardon). Fig. 9 — Fragment de pallium ou de tenture D99.2511.44B (fin d’usage en 96 apr. J.-C.) (cl. D. Cardon). Fig. 10 — Fragment de tunique D98.1410.3 (fin d’usage en 125-140 apr. J.-C.) (cl. D. Cardon). Fig. 11 — Fragment de cape D99.1516.1 (fin d’usage en 125-140 apr. J.-C.) (cl. D. Cardon).
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H N C
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H N C
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C
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NH
C C
N H
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g
O
Br
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O
O N H
NH
C
N H
O Br
N H
O
Fig. 12 — Structures moléculaires des composés indigoïdes des pourpres identifiées dans des textiles de Didymoi ; a. Indigotine ; b. 6,6’-dibromoindigotine ; c. 6-bromoindigotine ; d. Indirubine ; e. 6,6’-dibromoindirubine ; f. 6-bromoindirubine ; g. 6’-bromoindirubine ; h. Isatine ; i. 6-bromoisatine.
long de la période d’occupation du site : on les retrouve dès les couches les plus anciennes du grand dépotoir, de même que dans les petits dépotoirs de l’intérieur du fort, dans les bâtiments abandonnés des secteurs Sud et Ouest où les dernières garnisons de Didymoi accumulaient leurs ordures. Les plus anciens de ces échantillons de pourpres pourraient même dater de la première moitié du ier s. apr. J.-C., puisque parmi les fragments abandonnés le plus tôt, se trouvent des textiles usagés et réutilisés à plusieurs reprises (D99.2511.2.1 et D99.2511.1.2), ce qui implique qu’ils ont pu être tissés assez longtemps – peut-être des dizaines d’années – auparavant 19. Autre constatation remarquable : bien que les fragments sélectionnés pour ces analyses aient assez bien représenté la diversité des productions textiles trouvées dans les dépotoirs, la pourpre véritable n’a été identifiée que dans des restes de vêtements : cape, tunique, pallium ou palla (un rectangle de tissu qu’hommes et femmes portaient drapés par-dessus la tunique). La pourpre y est utilisée avec économie, puisqu’elle est présente uniquement dans les fils de trame des bandes ou motifs géométriques, de couleur contrastant avec le fond du tissu, qui constituent le décor caractéristique de chacun de ces types de vêtement. Que nous apporte, du point de vue de l’histoire des techniques, cette série d’exemples de l’utilisation de la pourpre dans trois types de vêtements d’usage courant à l’époque, en Égypte comme dans presque tout l’Empire romain ? Que nous apprend-elle sur la
19.
Sur le recyclage des textiles et l’importance de la production des centones/kentrones, voir D. Cardon, H. Granger-Taylor, W. Nowik (n. 4).
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
place de la pourpre dans la société égyptienne durant les trois premiers siècles après son intégration dans l’Empire romain ? C’est ce que nous allons tenter d’analyser ci-dessous, en complétant et en nuançant ces résultats par les informations dispersées dans des papyri et des ostraca contemporains des textiles.
LES
CUVES DE TEINTURE À LA POURPRE : UN MYSTÈRE TECHNIQUE PAS ENCORE COMPLÈTEMENT ÉCLAIRCI Les progrès remarquables qui ont été faits depuis une vingtaine d’années dans les techniques d’analyse des indigoïdes de la pourpre ont mis en évidence l’extrême complexité chimique de ces teintures qui se développent à partir de divers précurseurs, contenus en proportions variables dans les glandes hypobranchiales des différentes espèces de mollusques, selon des processus chimiques variant eux-mêmes selon les conditions d’oxygénation et d’éclairage auxquelles est soumise la matière première tinctoriale durant sa mise en œuvre. À ces variabilités d’ordre biologique et technique, s’en ajoutent d’autres, également biologiques mais aussi environnementales : les variations parfois importantes dans les proportions des différents indigoïdes obtenus d’une même espèce, selon le sexe des individus récoltés, la saison de la récolte et le lieu de celle-ci 20.
Dans l’état actuel des recherches, ironiquement, les progrès réalisés dans la connaissance de la chimie de la pourpre ont donc surtout pour résultat de rendre assez risqué pour les archéologues et les historiens de proposer des identifications de l’espèce (ou des espèces) de Muricidés qui a, ou ont, pu être utilisée(s) par les teinturiers pour produire la pourpre détectée sur un document ancien donné, qu’il s’agisse d’un textile ou d’une peinture. Une exception paraît, heureusement, concerner l’ensemble des pourpres détectées à Didymoi. La présence dans tous les échantillons d’une proportion importante de monobromoindigotine (fig. 13) semble indiquer que le poivre, Hexaplex trunculus (Linné, 1758), un des Muricidés principaux exploités pour la pourpre dans le monde méditerranéen antique, a été utilisé pour ces teintures, soit seul, soit peut-être avec d’autres espèces à pourpre, ajoutées en proportions variables. La monobromoindigotine constitue de 36,5 à 85,6 % des indigoïdes dans les échantillons où la pourpre est employée seule et, bien que présente en moindres proportions, c’est l’indigoïde bromé qui prédomine dans les deux cas de teinture à la pourpre combinée avec des teintures rouges. C’était le seul indigoïde bromé détecté dans les pourpres de Maximianon et de Krokodilô (en proportions de 28 %, 11 % et 1 % respectivement dans chacun des trois textiles pourpres mentionnés plus haut) 21. 20.
21.
On trouvera une synthèse de l’historique de ces recherches et de leurs résultats jusqu’en 2007 dans J. Wouters et al. (n. 8). Des publications plus récentes confirment l’importance de cette variabilité dans la composition chimique des pourpres : C. Westley, K. Benkendorff, « Sex-Specific Tyrian Purple Genesis: Precursor and Pigment Distribution in the Reproductive System of the Marine Mollusc, Dicathais Orbita », Journal of Chemical Ecology 34 (1) (2008), p. 44-56 ; Z. C. Koren, « ArchaeoChemical Analysis of Royal Purple on a Darius I Stone Jar », Microchimica Acta 162 (2008), p. 381-392. D. Cardon et al. (n. 8).
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62
Fig. 13 — Diagramme des compositions des pourpres identifiées dans les fragments regroupés dans le tabl. I. Les abréviations correspondent à celles du tableau (diagramme I. Brémaud).
Fig. 14 — Proportions de monobromoindigotine obtenues des principales espèces à pourpre de Méditerranée (diagramme I. Brémaud).
Or, on n’a trouvé jusqu’ici de monobromoindigotine en proportions importantes, supérieures à 7 %, que dans les analyses des teintures ou pigments extraits d’H. trunculus 22. Dans une étude récente nous avons confirmé ces résultats sur une série de teintures de référence obtenues avec les principales espèces à pourpre méditerranéennes : vingttrois échantillons teints avec H. trunculus, cinq avec le rocher épineux, Bolinus brandaris (Linné, 1758) et quatre avec la pourpre à bouche de sang, Stramonita haemastoma (Linné, 1766) 23. La monobromoindigotine était présente dans les teintures par H. trunculus en quantités allant de 20,4 à 59,3 %, tandis que les proportions étaient de 0 à 6,4 % pour S. haemastoma et de 0,2 à 5,7 % pour B. brandaris (fig. 14). Les indices D.M.I. (dibromoindigotine/monobromoindigotine), un modèle proposé par Z. C. Koren pour distinguer les types de pourpres 24, sont respectivement, pour notre échantillonnage, de 22. 23. 24.
Z. C. Koren (n. 20), p. 389. Étude menée en 2007-2008 dans le cadre du programme mentionné n. 9. Publication des résultats détaillés en cours. Z. C. Koren (n. 20), p. 390.
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
0,1 à 2,4 pour H. trunculus, de 15,9 à 413,4 pour B. brandaris et de 11,7 à 48,9 pour T. haemastoma. Il semble donc que la différenciation des deux dernières espèces manque potentiellement de précision. La différence entre H. trunculus et les autres espèces paraît nette. Le seuil de qualification semble se situer entre 6,4 et 20,4 % de monobromoindigotine au minimum (cohérent avec les résultats publiés par Z. C. Koren), ce qui correspondrait à un D.M.I. entre 11,7 et 2,4. Dans les cas intermédiaires, l’identification peut être ambiguë. Les particularités biochimiques de cette espèce la rendent particulièrement précieuse pour le montage des cuves de teinture en pourpre. Cela avait déjà été mis en évidence par l’archéologie expérimentale. De ses expériences répétées de reconstitution de la cuve de pourpre, à échelle réduite, décrite par Pline l’Ancien, le chimiste libanais J. Doumet avait conclu, non seulement que l’on pouvait plus ou moins facilement teindre de la laine en pourpre avec H. trunculus seul, dans un bain alcalin d’eau de mer et de lessive de cendres, mais aussi que l’addition d’une petite quantité (de l’ordre de 10 % en poids) de ce mollusque paraissait indispensable pour obtenir une cuve permettant de teindre en pourpre avec les deux autres Muricidés à pourpre méditerranéens, le rocher épineux, B. brandaris et la pourpre à bouche de sang, S. haemastoma 25. Pour lui, cet effet était dû aux précurseurs et enzymes propres à H. trunculus, qui permettent d’amorcer la fermentation bactérienne des cuves et d’y maintenir les indigoïdes des pourpres produites par les deux autres espèces sous une forme réduite et soluble, nécessaire pour pouvoir imprégner la laine et la teindre durablement. Des expériences plus récentes, à plus petite échelle, ont permis à plusieurs reprises la reconstitution de cuves de pourpre utilisant H. trunculus comme seule source de teinture, avec des résultats satisfaisants 26. La probabilité que H. trunculus ait été la principale source des pourpres identifiées dans les textiles de Didymoi, ou en tout cas, l’une des espèces employées, revêt pour nous une importance spéciale. Elle exclurait en effet la possibilité que ces pourpres aient été teintes dans un atelier situé sur la côte de la mer Rouge, où ce coquillage n’a jamais été signalé ; autrement dit : aucune d’entre elles ne pourrait être de la « pourpre de Bérénice », mentionnée dans un papyrus du iiie s. apr. J.-C. 27, même si abondent sur cette partie de la côte égyptienne plusieurs espèces de Muricidés à pourpre 28. Les pourpres de Didymoi 25.
26.
27.
28.
J. Doumet, Étude sur la couleur pourpre ancienne et tentative de reproduction du procédé de teinture de la ville de Tyr décrit par Pline l’Ancien (1980) ; id., « De la teinture en pourpre des anciens par l’extraction du produit colorant des Murex Phyllonotus trunculus, Phyllonotus brandaris et de la Pourpre Thais haemastoma », dans D. Cardon (éd.), Teintures précieuses de la Méditerranée. Pourpre, Kermès, Pastel (1999-2000), p. 46-57. J. Edmonds, The Mystery of Imperial Purple Dye (2000) ; I. Boesken Kanold, « The Purple Fermentation Vat: Dyeing or Painting Parchment with Murex Trunculus », Dyes in History and Archaeology 20 (2005), p. 150-154 ; Z. C. Koren, « The First Optimal All-Murex All-Natural Purple Dyeing in the Eastern Mediterranean in a Millennium and a Half », Dyes in History and Archaeology 20 (2005), p. 136-149. P.Oxy. XX 2273, 10, mentionné dans K. A. Worp, « On the Meaning of ƕƔƖƚƙƖƆƕƔƖƚƙƖƎƔƒ in Greek Documentary Papyri », Münstersche Beiträge z. antiken Handelsgeschichte XVI, H.1 (1997), p. 57-66. En particulier Murex forskoehlii (Röding, 1798) et Chicoreus virgineus (Röding, 1798), appelé aussi Chicoreus erythraeus (Fischer, 1870), dont plusieurs exemplaires ont d’ailleurs été découverts dans le
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pourraient, en revanche, représenter des variétés de pourpre « de la mer » ou « locale », voire une version égyptienne de la pourpre « Tyrianthine », mentionnées dans d’autres papyri, si l’on envisage des centres de production situés sur la côte méditerranéenne de l’Égypte, qui auraient donc pu être approvisionnés en H. trunculus 29. La plupart des textiles où sont identifiées ces pourpres ne se distinguent pas, en effet, par leurs autres caractéristiques techniques – notamment le système de filage – de la majorité des textiles retrouvés dans les dépotoirs des praesidia, et ils ont, comme eux, très probablement été produits en Égypte. Les deux cas où la pourpre est combinée à une ou deux teinture(s) rouge(s) pourraient être des exemples de « vraie pourpre mélangée », mentionnée dans un papyrus 30. Ils posent une autre question technique, à cause de la forte prédominance de l’indigotine dans ces teintures (tabl. I.2). Celle-ci a dû donner à la laine, au sortir de la cuve de pourpre, une nuance trop bleue que les teinturiers ont cherché à corriger par une surteinture en rouge, destinée à rapprocher la couleur finale de celle de la pourpre rouge (purpura oxytyria), production renommée de la ville de Tyr, mentionnée dans l’édit de Dioclétien sur les prix 31. Mais à quoi donc attribuer de telles proportions d’indigotine dans ces teintures ? Elles sont, en effet, largement supérieures aux proportions les plus élevées d’indigotine jamais quantifiées dans des teintures ou pigments extraits de H. trunculus, pourtant la plus riche source marine d’indigotine actuellement connue. Une des explications envisageables serait que ces deux teintures aient été obtenues de cuves de pourpre – où H. trunculus aurait pu être employé seul ou combiné avec d’autres espèces à pourpre – ayant déjà été utilisées pour teindre d’autres lots de laine. D’une part, ceux-ci auraient absorbé une grande partie de la leuco-dibromoindigotine présente dans le bain, l’affinité de celle-ci pour la laine étant supérieure à celle de la leuco-indigotine 32. D’autre part, ces manipulations, nécessitant un minimum d’éclairage pour le teinturier, auraient déclenché une réaction photochimique de débromination progressive des bains de teinture dans lesquels furent teintes les laines de ces deux bandes pourpres de Didymoi. Ces bains n’auraient plus alors contenu que des traces de leuco-dibromoindigotine et de faibles quantités de leuco-monobromoindigotine, le reste de la cuve consistant désormais en leuco-indigotine 33. Par conséquent, on aurait là des « fins de cuves », des pourpres de qualités inférieures, conservant pourtant encore suffisamment du prestige attaché à cette teinture pour que l’un des colorants sélectionnés afin de rectifier leur couleur soit la plus estimée des teintures après la pourpre, le kermès.
29. 30. 31. 32. 33.
grand dépotoir de Didymoi, M. L. Rusmore-Villaume, Seashells of the Egyptian Sea. The Illustrated Handbook (2008), p. 88-96. « De la mer », BGU VI 1300, 25 ; « locale », P.Oxy. VIII 1153, 26, LIV 3765, 3, SB XVI 12628, ii, 40 ; « Tyrianthine », P.Hamb. I 20, 23, références rassemblées dans K. A. Worp (n. 27), p. 57-58, n. 27. SB XII 11075, 8. M. Giacchero, Edictum Diocletiani et collegarum de pretiis rerum venalium (1974), p. 182. Z. C. Koren (n. 26), p. 143. Chr. J. Cooksey, R. S. Sinclair, « Colour Variations in Tyrian Purple Dyeing », Dyes in History and Archaeology 20 (2005), p. 127-135 ; l’hypothèse présentée ici est jugée plausible par Chr. Cooksey, communication personnelle, juillet 2009.
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
On mesure, dans ces quelques commentaires de la composition des pourpres de Didymoi, quelle part on est encore obligé de faire des tentatives d’explications qui reposent principalement sur des hypothèses. On voit toutes les recherches encore à mener sur la variabilité biochimique des espèces à pourpre – des plus étudiées de la Méditerranée à celles de la mer Rouge qui ne sont pas encore analysées – et toutes les expérimentations encore à tenter, pour reconstituer avec succès et reproductibilité les cuves de pourpre par fermentation bactérienne que semblent décrire les bribes de procédés anciens conservées par les textes. Même si l’on ne peut en définir les causes avec certitude, les différences que l’on constate dans la composition des différentes pourpres identifiées dans des textiles de Didymoi offrent un parallèle intéressant à la diversité de sortes et de prix de pourpres rencontrée dans les papyri. Ces identifications sont également précieuses, parce qu’aux éléments d’ordre qualitatif apportés par l’analyse chimique des pourpres, l’analyse technique des textiles où l’on trouve de la pourpre ajoute des données quantitatives qui viennent compléter celles disséminées dans les textes souvent fragmentaires des papyri ou des ostraca. Elles permettent, par exemple, de calculer les quantités de laine teinte en pourpre nécessaires pour la décoration des différents types de vêtements, données essentielles pour estimer le coût supplémentaire occasionné par l’emploi de vraie pourpre dans le décor d’un vêtement, mais qu’on ne trouve nulle part dans les textes.
COMBIEN
DE LAINE POURPRE FALLAITIL POUR TISSER LES ÉLÉMENTS DU DÉCOR DES TUNIQUES, PALLIA ET CAPES DE DIDYMOI ? On a vu que dans les soixante-deux textiles de Didymoi analysés, on ne trouve pas une seule fois la pourpre véritable utilisée pour teindre les fils du fond d’un tissu. Elle est seulement identifiée dans des trames de décors de tuniques, de pallia et de capes. Dans ces vêtements, les zones pourpres représentent des surfaces assez réduites, où cependant la couleur de la pourpre peut être mise en valeur au maximum grâce à des procédés de tissage qui permettent de tasser localement la trame teinte, si densément qu’elle cache presque entièrement les fils non teints, ou teints d’une autre couleur, de la chaîne 34.
Longueurs de fil pourpre nécessaires Il est possible de calculer assez précisément les longueurs de fil de trame pourpre qui ont été employées pour la décoration de ces vêtements, en multipliant la surface des ornements par le compte en trame dans ces zones du tissu, c’est-à-dire par le nombre de fils de trame que la tisserande ou le tisserand a réussi à y tasser par centimètre. Nous ne présentons ici que les bases de ces calculs dont on peut trouver les détails dans une autre publication 35. Puis nous en commentons les résultats, rassemblés dans le tabl. II (3e colonne). 34. 35.
Sur les procédés de groupage des fils de chaîne pour les zones de décor dans les textiles des praesidia, voir D. Cardon (n. 4, 2003), p. 626-627 et fig. 323-324. D. Cardon et al. (n. 1).
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Type de vêtement Référence
Hauteur/surface du motif décoratif Compte en trame
Longueur de trame pourpre nécessaire
Titrage minimum requis 36
Titrage estimé d’après le compte en trame Longueur correspondante pour 1 statère
Tunique D99.2436.1A
Clavus 0,6 cm c. 100 f/cm
– tunique courte 240 m – longue 300 m
– courte : Nm 18 – longue : Nm 22
Nm 138 = 1 856 m/statère
Fig. 4
Clavus 0,5 cm 80 f/cm
– tunique courte 160 m – longue 200 m
– courte : Nm 12 – longue : Nm 15
Nm 88 = 1 183 m/statère
Tunique D2000.12015.1
Clavus 3 cm 74 f/cm
– tunique courte 888 m – longue 1 110 m
– courte : Nm 66 – longue : Nm 82
Nm 75 = 1 008 m/statère
Clavus 2,2 cm 58 f/cm
– tunique courte 510,4 m – longue 638 m
– courte : Nm 38 – longue : Nm 47
Nm 46 = 618,7 m/statère
Gamma ou barre indentée, longueur conservée 2,2 cm 75 f/cm
98,7 m
Nm 7
Nm 78 = 1 049 m/statère
Gamma ou barre indentée, hauteur conservée 1 cm 34 fils doubles/cm = 68 f/cm
89,48 m
Nm 7
Nm 64 = 860 m/statère
Bande 0,7 cm 72-84 fils doubles/cm = 144-168 f/cm (moyenne 156 f/cm)
363,68 m
Nm 27
Nm 336 = 4 519 m/statère
Bande 3,25 cm 90-100 f/cm (moyenne 95 f/cm)
1 028 m
Nm 76
Nm 125 = 1 681 m/statère
Fig. 3 Tunique D99.3322.8
Fig. 5 Tunique D98.1410.3
Fig. 10
Pallium D99.2511.1.2
Fig. 6 Pallium D99.4306.2
Fig. 7 Cape à capuchon D98.4404.1
Fig. 8 Cape à capuchon D99.1516.1
Fig. 11
Tabl. II — Longueurs de trame pourpre nécessaires à la décoration des vêtements dont faisaient originellement partie les fragments textiles de Didymoi ornés de pourpre véritable − Titrages permettant d’obtenir les longueurs nécessaires avec un statère de laine teinte en pourpre.
Bases des calculs 36 La hauteur donnée, lors du tissage, aux bandes décoratives des tuniques et des capes, ainsi que leur compte en trame, ont été mesurés lors de l’analyse technique des fragments. Comme les dépotoirs ne livrent presque jamais de vêtements entiers, une donnée nous 36.
Pour les tuniques, on obtient deux titrages différents suivant que l’on fonde le calcul sur la longueur de trame pourpre nécessaire pour une tunique courte ou sur la longueur nécessaire pour une tunique longue.
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
manquait et a dû être estimée : la hauteur de ces vêtements entre la ligne d’épaule et le bord inférieur ; pour les capes à capuchon, il faut y ajouter la hauteur et la profondeur de celui-ci. Pour les dimensions des ornements de tapisserie, en forme de barres ou d’angles indentés, qui décoraient les quatre coins des pallia, il a fallu également adopter des valeurs estimées car aucun des fragments de pallia de Didymoi ornés de vraie pourpre n’incluait un motif décoratif entier. Les valeurs adoptées pour toutes ces estimations sont plausibles car fondées, soit sur la moyenne des dimensions mesurées sur des exemples de tuniques et de capes quasiment entières, découvertes sur des sites de nécropoles, contemporains ou un peu plus tardifs, en Égypte ou dans des pays voisins ; soit, dans le cas des motifs décoratifs des pallia, sur la moyenne des dimensions d’ornements entiers, en forme de gammas indentés, préservés sur d’autres fragments de pallia de Didymoi. Les tuniques Les tuniques, qu’elles soient tissées en deux morceaux (fig. 15) ou en une seule pièce avec des manches (fig. 16), pouvaient être de deux longueurs : descendant jusqu’au genou, comme les portaient le plus souvent les hommes, ou jusqu’à la cheville, comme on en voit figurées sur des linceuls de femmes ou d’hommes ornés de portraits des défunts, découverts en Égypte 37. Pour les premières, une hauteur de 100 cm entre la ligne des épaules et le bas du vêtement paraît avoir été assez courante : c’est la hauteur (c’est-à-dire la largeur au tissage) d’une tunique d’homme en deux morceaux, sans manche, de la nécropole d’El-Deir, au Nord de l’oasis de Kharga et de plusieurs tuniques de forme similaire découvertes dans la grotte des Lettres en Israël ; c’est aussi la hauteur (demi-largeur en trame) d’une autre tunique, en une pièce, de la même tombe d’El-Deir et d’une tunique « copte » de même forme, de provenance inconnue, conservée à la Fondation Abegg, à Riggisberg (Berne, Suisse) 38. Pour les secondes, on peut proposer une hauteur moyenne de 125 cm : c’est la hauteur d’une tunique découverte dans la nécropole de Qustul en Nubie ancienne 39, et d’une autre tunique « copte » de provenance inconnue tissée en une pièce, conservée à la Fondation Abegg 40. 37.
38.
39.
40.
Par exemple, portrait d’un adolescent provenant probablement de Saqqara, daté de la fin du ier s. au début du iie s. apr. J.-C., conservé au musée du Louvre, N 3076, M.-Fr. Aubert, R. Cortopassi, Portraits funéraires de l’Égypte romaine (2008), p. 138 ; portrait de femme adulte provenant probablement d’Antinoupolis, daté de 170-200 apr. J.-C., conservé au Metropolitan Museum of Art, Rogers Fund, 1909 (09.181.8), S. Walker, M. Bierbrier, Ancient Faces. Mummy Portraits from Roman Egypt (1997), p. 108. Tunique d’El-Deir, provisoirement datée de la fin du iiie s. au ive s. apr. J.-C., communication personnelle de Fl. Letellier-Willemin de juillet 2009 ; tuniques de la grotte des Lettres (130 apr. J.-C.), Y. Yadin, The Finds from the Bar Kokhba Period in the Cave of Letters (1963), p. 212-219, nos 6-22, pl. 66, 75-77 ; tunique no 4219 de la Fondation Abegg, D. De Jonghe, C. Verhecken-Lammens, « Le vêtement damassé 4219 de la fondation Abegg à Riggisberg », Riggisberg Berichte 2 (1994), p. 41-43. Tunique no 29 de Qustul (époque méroïtique = 0-350 apr. J.-C.), C. Mayer Turman, B. Williams, Ancient Textiles from Nubia. Meroitic, X-Group and Christian Fabrics from Ballana and Qustul (1979), p. 69. Tunique T31, C. Verhecken-Lammens, « Two Coptic Wool Tunics in the Collection of the AbeggStiftung: A Detailed Analysis of the Weave Techniques Used », Riggisberg Berichte 2 (1994), p. 74-75.
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a
b
c
Fig. 15 — La tunique sans manche tissée en deux morceaux : a. La tunique telle que sur le métier ; b. Deux morceaux sont cousus côte à côte le long d’une lisière latérale pour former les épaules ; c. Les cordelières de début et de fin de pièce sont assemblées par une couture sous les ouvertures laissées pour les bras (dessin P. Cabrolier).
trame
b
trame
chaîne
a
Fig. 16 — La tunique à manches tissée en une seule pièce : a. La tunique telle que sur le métier ; b. Le vêtement est terminé par des coutures le long des côtés et sous les manches (dessin P. Cabrolier).
chaîne
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Pour chaque fragment de tunique de Didymoi, notre calcul de la longueur de fil pourpre nécessaire pour la trame des clavi prend en compte les deux hypothèses, c’est-à-dire que le fragment peut avoir fait partie d’une tunique courte (de 100 cm de hauteur de l’épaule au bas du vêtement) ou longue (de 125 cm de hauteur). Ce calcul intègre donc les données suivantes : hauteur estimée de la tunique (100 cm ou 125 cm) × hauteur/largeur du clavus × compte en trame dans le clavus × quatre clavi (un de chaque côté de l’encolure, sur le devant et sur le dos du vêtement). Les pallia Pour calculer la longueur de trame pourpre nécessaire pour orner un pallium d’homme (himation en grec) ou une palla de femme, il n’est pas nécessaire de connaître les dimensions de ce rectangle de tissu, mais seulement celles d’un des signes de tapisserie qui en ornaient chacun des coins (fig. 17). D’après les exemples entiers retrouvés – à la grotte des Lettres, par exemple – on sait que ces signes avaient le plus souvent la forme de barres ou d’angles (appelés « gammas » par Fig. 17 — Un pallium décoré de signes en forme de gamma, d’après le l’archéologue israélien Y. Yadin, en référence à la lettre pallium 43 de la grotte des Lettres, Israël grecque de même forme), fréquemment indentés, à (dessin P. Cabrolier, d’après Y. Yadin 41 une de leurs extrémités ou aux deux . À Didymoi, [n. 38], p. 238, fig..78). les seuls motifs entiers figurant sur les nombreux fragments de pallium retrouvés sont des gammas. Nos calculs sont donc fondés sur la surface moyenne des gammas entiers de Didymoi, soit 32,9 cm2. Cette valeur est très proche de la moyenne des surfaces des gammas entiers retrouvés sur d’autres sites. Le calcul de la longueur de trame pourpre nécessaire pour décorer chaque pallium intègre donc : surface moyenne d’un gamma à Didymoi (32,9 cm2) × compte en trame dans chaque gamma × quatre motifs. Les capes à capuchon Les fragments de Didymoi correspondant à ce type de vêtement ont pu être identifiés d’après un ensemble de caractéristiques techniques qui les apparentent à un exemple presque entier, retrouvé dans une tombe à Ballana, en Nubie ancienne, pour lequel une
41.
Y. Yadin (n. 38), p. 219-240.
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Fig. 18 — Cape à capuchon à bande de pourpre, d’après la cape 1A de la tombe B188 de Ballana, telle que reconstituée par H. Granger-Taylor et N. Kajitani (dessin J. M. Farrant, H. Granger-Taylor).
datation du ier s. apr. J.-C. a été proposée (fig. 18) 42. Cette cape a été tissée en forme, d’une seule pièce et ses dimensions originales devaient être d’environ 170 cm de hauteur (capuchon inclus) par 290 cm de largeur 43. Ce sont les dimensions de la cape de Ballana que nous avons utilisées pour compléter les données mesurées sur les bandes ornant les fragments de capes découverts à Didymoi. Ces calculs intègrent les données suivantes : – longueur totale des bandes décoratives = longueur des deux bandes horizontales de la cape de Ballana, de part et d’autre du capuchon (127,34 cm × 2) + longueur des trois côtés du capuchon (26,12 cm × 3) ; – longueur de trame pourpre nécessaire pour décorer les capes à capuchon de Didymoi = longueur totale de bande pourpre d’après la cape de Ballana × hauteur de la bande pourpre dans chaque exemple de Didymoi × compte en trame dans la bande de chaque fragment.
42. 43.
Textile 1A de la tombe B188, C. Mayer Turman, B. Williams (n. 39), p. 60-61. D’après le récent réarrangement des fragments par N. Kajitani, du Metropolitan Museum of Art, New York, et H. Granger-Taylor, Londres, H. Granger-Taylor, « A Fragmentary Roman Cloak Probably of the 1st c. CE and Off-cuts from Other Semicircular Cloaks », Archaeological Textiles Newsletter 46 (2008), p. 6-16.
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Commentaires sur les résultats On constate que les longueurs de fil nécessaires pour enrichir un vêtement d’un décor en pourpre véritable ne sont pas très grandes, en particulier dans un pallium/himation ou une palla. Même pour une tunique ou une cape, elles n’excèdent que de peu 1 000 m de fil, et cela à partir d’une largeur de bande de pourpre égale ou supérieure à 3 cm. De fait, le paramètre-clé, celui qui peut introduire des différences importantes dans la longueur de laine pourpre nécessaire pour décorer une tunique ou une cape, est la hauteur donnée au clavus de la tunique ou à la bande décorative de la cape lors du tissage (leur largeur quand on regarde le vêtement porté). Cette importance est due au fait qu’il s’agit de parties du tissu où – comme déjà souligné – la trame est très densément tassée : par exemple avec un compte en trame de cent fils par centimètre, comme dans le fragment D99.2436.1A, chaque demi centimètre ajouté à la hauteur/largeur du clavus nécessite une longueur supplémentaire de trame pourpre égale à deux cents fois la hauteur de la tunique. Quels poids de laine pourpre fallait-il pour obtenir de telles longueurs de fils de trame ? Cette question s’impose parce que les données quantitatives fournies dans les sources écrites ne sont pas des longueurs de fil mais des poids de pourpre commandés, expédiés ou à payer, accompagnés, dans de trop rares cas, du prix correspondant. Ces mentions de « pourpre », ƳƲƴƹǀƴƥƳƲƴƹǀƴƭƲư, ont été rassemblées par K. A. Worp dans un article qui cherchait à définir si, dans ces textes, elles s’appliquent à de la laine teinte en pourpre ou au produit tinctorial 44. Cette dernière hypothèse, inspirée sans doute par les faibles quantités indiquées, soulève des questions d’ordre technique que l’auteur ne soupçonnait peut-être pas mais qui ont été mises en évidence par l’archéologie expérimentale 45 : sous quelle forme se serait présenté ce produit tinctorial ? Un pigment en poudre ? Des glandes à pourpre conservées par salaison pour leur commercialisation ? Il n’est pas du tout évident de produire un pigment stable à partir des mollusques à pourpre, ni d’exciser des millions de glandes hypobranchiales pour les conserver. Aucune source écrite ne livre d’informations invitant à retenir ces deux possibilités qui impliquent de multiples et inutiles complications. Certes, le silence des sources ne permet pas non plus de les exclure, mais nous penchons plutôt pour la première hypothèse, selon laquelle la laine en toison aurait été teinte à la pourpre dans des centres côtiers pour être expédiée ensuite dans tout le pays et filée aux titrages requis pour les utilisations prévues : quand les textes parlent de commandes ou d’achats de ƳƲƴƹǀƴƥƳƲƴƹǀƴƭƲư, il s’agirait de laine teinte. Quoi qu’il en soit, les résultats de nos calculs révèlent qu’il serait parfaitement possible d’obtenir les longueurs de fil nécessaires avec des poids de laine pourpre de l’ordre de grandeur que l’on trouve dans les textes.
44. 45.
K. A. Worp (n. 27). La précipitation du produit colorant se fait sous forme colloïdale impossible à filtrer, J. Doumet (n. 25, 1980), p. 10 ; expérimentation avec des glandes hypobranchiales de H. trunculus conservées par salaison, I. Boesken Kanold (n. 26), p. 152.
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Ce qui est intéressant, en effet, dans ces textes, c’est que les poids indiqués dans les papyri semblent être des quantités standards. Dans deux textes, le poids de pourpre mentionné est de un statère 46. Le premier texte étant d’époque ptolémaïque, le statère, multiple de la drachme pondérale, pesait alors 14,4 g. Le second texte étant daté du iie s. apr. J.-C., la référence est devenue la livre romaine de 323 g, le statère (= 1/2 once ou 1/24 de livre) pesant désormais plus ou moins 13,45 g 47. Trois autres documents mentionnent une quantité double de la précédente : deux statères dans l’un, une once dans les deux autres, soit plus ou moins 26,9 g 48. Un ostracon et un papyrus du iie s. apr. J.-C. donnent un prix à payer pour trois statères de pourpre, soit plus ou moins 40,35 g 49. Deux papyri concernent la vente ou l’envoi respectivement de quatre statères et de deux onces, soit plus ou moins 53,8 g 50. Le statère semble donc être l’unité de base usitée pour la pourpre. Adoptant l’hypothèse la moins favorable, nous avons cherché à estimer si un statère de laine teinte en pourpre permettait d’obtenir les longueurs de trame pourpre qui ont été utilisées pour les vêtements dont proviennent les fragments de Didymoi, en calculant le titrage (la grosseur) des fils correspondant à ce poids fixe et à ces longueurs de fil et en les comparant à nos observations sur le compte en trame et la finesse des fils pourpres dans ces fragments. Dans le système du poids fixe, usité pour la laine depuis la plus haute Antiquité et jusqu’à présent 51, pour un poids de laine donné – ici un statère –, plus le fil est filé fin, plus on en tirera de longueur. Actuellement, on exprime couramment ce rapport en Numérotage métrique, où Nm est égal au nombre de kilomètres par kilogramme. Nm 1 est le titrage d’un fil dont 1 000 g mesurent 1 000 m ; Nm 2 est celui d’un fil dont 1 000 g mesurent 2 000 m. Ce dernier, s’il est filé avec le même type de laine et la même torsion, est deux fois plus fin que le premier (son diamètre est inférieur de moitié). Et ainsi de suite : plus le numéro métrique d’un fil est élevé, plus le fil est fin. Nous avons donc calculé, d’une part, des titrages donnant la finesse minimum, ou grosseur maximum, de fil qui aurait permis d’obtenir la longueur de fil requise à partir d’un statère de laine teinte en pourpre, en divisant cette longueur nécessaire (L), par la masse d’un statère, ce qui donne la longueur de fil qu’il faudrait obtenir d’1 g de laine, puis en multipliant cette valeur par 1 000 pour obtenir le titrage du fil, selon la formule : Nm = L × 1 000 13,45 g 46. 47.
48. 49. 50. 51.
BGU VI 1300, 25 (iiie-iie s. av. J.-C.) ; P.Mert. III 114, 20 (iie s. apr. J.-C.). Chapitre métrologique dans les Cestes de Julius Africanus (180 av. J.-C.-240 apr. J.-C.), De mensuris : « aujourd’hui on se sert communément du système italique […] la livre romaine est composée de 24 statères », dans J. R. Vieillefond, Les Cestes de Julius Africanus. Étude sur l’ensemble des fragments avec édition, traduction et commentaires (1970), p. 268. P.Grenf. I 43, 11 = W.Chrest. 57 (iie s. av. J.-C.) ; P.Oxy. VI 931, 4 (iie s. apr. J.-C.) ; P.Oxy. XXXIII 2679, 9 (iie s. apr. J.-C.). O.Florida 16, 3 ; P.Stras. 531, 9 et 20. P.Oxy. XX 2273, 10 (iiie s. apr. J.-C.) ; P.Oxy. III 520, 18 (iie s. apr. J.-C.). Exemples les plus anciens dans D. Cardon, La draperie au Moyen Âge. Essor d’une grande industrie européenne (1999), p. 278.
73
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
D’autre part, nous avons essayé d’estimer le titrage des fils de trame utilisés dans les motifs pourpres des fragments d’après le compte en trame observé qui nous indique approximativement leur diamètre maximum. En effet, si l’on parvient à tasser 100 fils par centimètre, cela montre que leur diamètre est de l’ordre d’1/100 de cm au plus ; ils devaient en réalité être plus fins – et donc avoir un titrage supérieur – car, théoriquement, il faudrait tenir compte de l’espacement nécessaire pour les entrecroisements des fils de la trame avec les fils de chaîne sur 1 cm 52. Le calcul de titrage d’un fil en fonction de son diamètre s’effectue selon la formule suivante 53 : Nm = (
1 )2 10 × c × df (en cm)
Où c = constante pour la laine = 0,85 et df = diamètre des fils = dans le cas présent
1 cm compte en trame
Les résultats permettent de calculer ensuite quelle longueur de fil de chacun de ces titrages pouvait être obtenue avec un statère de laine teinte en pourpre en toison. Les résultats de tous ces calculs sont regroupés dans les trois colonnes de droite du tabl. II. Bien qu’approximatifs – inévitablement – ces résultats, obtenus par deux approches, semblent converger et se vérifier mutuellement. Ils indiquent clairement qu’un statère de laine fournissait la bonne quantité de fil de trame de décor pour une tunique à bandes moyennement larges. On le voit bien dans le cas des tuniques dont proviennent les fragments D2000.12015.1 et D98.1410.3, où le titrage du fil de trame pourpre permettrait, avec un statère de laine, d’obtenir une longueur suffisante pour tisser les quatre clavi d’une tunique courte et même, à très peu près, ceux d’une tunique longue. Pour des tuniques à clavi étroits, des capes à fines bandes pourpres et toutes les sortes de pallia, un statère de laine semble avoir été beaucoup plus que suffisant. Si on le souhaitait, il devait être possible, avec une telle quantité de laine pourpre, de faire filer suffisamment de longueur de trame de décor pour plusieurs vêtements, par exemple un ensemble composé d’une tunique et d’un pallium 54. Ces résultats nous permettent, enfin, de mieux situer dans leur contexte économique et social les quelques mentions de prix de pourpre fournies par les papyri.
52. 53. 54.
Nous n’avons pas pris la peine d’intégrer cette donnée dans nos calculs qui cherchent simplement à établir des ordres de grandeur. Formule communiquée par L. Hammarlund (Suède), tisserande et spécialiste du filage dans les textiles archéologiques, d’après A. Kärrman, Varukonstruktion väv, dessinering (1996). Les textes latins mentionnant de tels ensembles (tunicopallium, synthesis, cenatoria) sont discutés dans L. M. Wilson, The Clothing of the Ancient Romans (1938), p. 167-172.
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PRIX
DE LA POURPRE EN ÉGYPTE DURANT LES TROIS PREMIERS SIÈCLES DE NOTRE ÈRE
On ne trouve de mentions de prix correspondant à des poids de pourpre déterminés que dans cinq documents : – P.Mert. III 114 (iie s. apr. J.-C.) : mention d’1 statère de pourpre, au prix de 4 drachmes ; – P.Stras. VI 531 (iie s. apr. J.-C.) : 1 statère au prix de 4 drachmes ; – O.Florida 16 (iie s. apr. J.-C.) : 3 statères au prix de 19 drachmes, soit 6 drachmes et 2 oboles pour 1 statère ; – P.Giss. 47 (iie s. apr. J.-C.) : 1/2 livre (= 12 statères) au prix de 252 drachmes, soit 21 drachmes pour 1 statère ; – P.Bon. 38 (iiie-ive s. apr. J.-C.) : 1 talent (= 1 500 statères) au prix de 600 drachmes, soit 2 drachmes et 3 oboles pour 1 statère. À la lumière des informations apportées par les analyses des pourpres de Didymoi, on comprend mieux, à présent, que ces différences de prix, bien marquées, ne s’expliquent pas nécessairement par des fluctuations du marché de la pourpre dans le temps, suivant la conjoncture. Elles peuvent aussi refléter des différences de sortes et de qualités de pourpres : la diversité de compositions des pourpres identifiées dans le corpus textile de Didymoi nous en avait déjà fourni des exemples, qui, selon toute probabilité, ne représentent pourtant pas toute la gamme des pourpres. Il se pourrait que chacun des prix qui ont été conservés dans ces papyri ait correspondu à un niveau de qualité ou à un type de pourpre bien défini. On trouve une telle échelle de qualités et des prix correspondants dans l’édit de Dioclétien (301 apr. J.-C.) sur les prix et les salaires. La gamme des pourpres véritables, au moins partiellement teintes avec des mollusques marins, comprend, en ordre décroissant de prix, la blatta, l’hypoblatta, l’oxytyria, l’haplia ou monobapha, et l’hysgina ou Nicaea ou coccinea, ces derniers qualificatifs désignant vraisemblablement une pourpre nuancée par un bain supplémentaire au kermès 55. La composition et l’apparence de ces différentes sortes de pourpres devaient être familières à tous les amateurs de cette teinture prestigieuse. Rien, malheureusement, ne nous permet de situer, ni les pourpres de Didymoi, ni celles des papyri, dans l’échelle des qualités et des prix de pourpres de l’édit, à l’exception, peut-être, des fragments de Didymoi où ont été identifiés des mélanges de pourpre et de kermès qui pourraient correspondre à la dernière catégorie de l’édit. C’est dans l’hypothèse que les prix indiqués dans les papyri pourraient représenter différents degrés d’une telle gamme des pourpres que nous avons cherché à situer le coût de ces pourpres par rapport à celui d’autres denrées et de certaines rémunérations en Égypte, durant la période où ont été tissés les vêtements dont nous avons trouvé les restes à Didymoi (tabl. III.1-2). C’est pourquoi, dans ce tableau, nous avons conservé les quatre niveaux de prix indiqués dans les papyri.
55.
S. Lauffer, Dokletians Preisedikt (1971), p. 166-168 (chap. 24, prix des pourpres), 176-178 (chap. 27, prix de différents vêtements ornés des différentes qualités de pourpres) ; M. Giacchero (n. 31), p. 182, 292 (chap. 24) et p. 202-206, 302-304 (chap. 27).
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LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77
III.1. Nourriture, vie quotidienne Prix d’un statère de pourpre
Prix d’autres denrées (multiples ou prix voisins de ceux des pourpres)
Achat ou location de force de travail, salaires (multiples ou prix voisins de ceux des pourpres)
21 dr.
– 1 âne = 200-208 dr.56 – 1 chameau = 200-208 dr.57 – 1 artaba58 de blé = 12 à 20 dr. (21 mentions dans cette fourchette de prix en Basse-Égypte entre 112 et 26059) – 1 jeune truie = 20 dr.60 – 300 œufs = 20 dr.61 – 1/2 artaba de jujubes = 20 dr., 2 ob.62
– achat d’1 esclave = 2 000-2 200 dr.63
6 dr., 2 ob.
– 1 cotyla 64 de myrrhe = 12 dr.65 – 1 keramion 16 de vin = 12 dr.67 – 1 artaba de cumin = 7 dr.68 – 1 keramion de vin = 6 dr.69 – 1 artaba d’orge = 6 dr.70 – 1 chous71 d’huile d’olive = 6 dr.72
4 dr.
– 1 artaba d’orge = 4 dr.73 – 1 chous d’huile d’olive = 4 dr.74 – 1 keramion de vin = 4 dr.75 – 1 kg de viande = 4 dr.76 – 1 poule ou 1 coq = 4 dr.77
56. 57. 58. 59. 60. 61. 62. 63. 64. 65. 66.
67. 68. 69. 70. 71. 72. 73. 74. 75. 76. 77.
Drexhage 1991, p. 283-284. Ibid., p. 289, 291. L’artaba est une mesure de capacité dont l’équivalence métrique est controversée (Drexhage 1991, p. 10-11) ; d’après Johnson 1936, p. 466, 1 artaba = 29,2 litres et 1 artaba de blé = environ 22,42 kg. Drexhage 1991, p. 14-17. Ibid., p. 308. Ibid., p. 57. Johnson 1936, p. 191, 194, 195. Drexhage 1991, p. 265-267. 1 cotyla = 0,24 litres, Segrè 1928, p. 33. Drexhage 1991, p. 390. Autre mesure de capacité dont l’équivalence métrique est controversée ; d’après Segrè 1928, p. 33 et Johnson 1936, p. 466 : 1 keramion = 34,95 litres, mais H.-J. Drexhage a rassemblé des arguments en faveur d’autres équivalences : 1 keramion = 18 litres ou 1 keramion = 24 litres (ibid., p. 58-59). Ibid., p. 62. Ibid., p. 41. Ibid., p. 61. Ibid., p. 25-26. 1 chous = 12 cotylae = 2,91 litres, Segrè 1928, p. 32-33. Drexhage 1991, p. 48. Ibid., p. 25. Ibid., p. 47. Ibid., p. 61. Ibid., p. 55 : prix calculé d’après un texte du iie s. apr. J.-C. indiquant un prix de 3 drachmes et 3 oboles pour 1,5 mina de viande. Ibid., p. 309-310.
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76 78 79 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94
III.1. Nourriture, vie quotidienne 2 dr., 3 ob.
– 1 poule = 2 dr.78 – 2 doubles jarres de poisson salé = 2 dr.79 – 1/2 artaba de fèves pour les poulets et pigeons = 2 dr., 3 ob.80 – 1/2 artaba de lentilles = 2 dr., 3 ob.81
– salaire journalier de 3 hommes pour tailler la vigne = 2 dr., 3 ob.82 – salaire journalier de 6 garçons pour désherber = 2 dr., 3 ob. – salaire journalier de 2 hommes pour charrier du fumier et le tamiser = 2 dr., 4 ob.83 – 3 jours de location d’un bœuf pour battre le grain = 2 dr. 3 ob.84
III.2. Textile et autres artisanats Prix d’un statère de pourpre
Prix de produits (multiples ou prix voisins de ceux des pourpres)
21 dr.
Textile : – 1 matelas = 120 dr.85 – 1 tunique non teinte, non foulée = 60 dr.86 – 1 himation fond non teint = 40 dr.87 – 2 toisons = 40 dr.88 – métiers à tisser = 20 dr., 24 dr., 28 dr.89 – 1 tunique = 20-24 dr. (6 mentions dans cette fourchette de prix entre 93-94 et la fin du iie s. apr. J.-C.)90 Autres : – 1 selle de cheval = 40 dr.91
6 dr., 2 ob.
78. 79. 80. 81. 82. 83. 84. 85. 86. 87. 88. 89. 90. 91. 92. 93. 94.
– laine pour 1 tunique = 8 dr.94
Ibid., p. 309. Ibid., p. 53. Johnson 1936, p. 191, 194, 195. Drexhage 1991, p. 35. Johnson 1936, p. 180. Ibid., p. 198. Ibid., p. 205. Ibid., p. 472. Drexhage 1991, p. 356. Ibid., p. 358. Ibid., p. 352. Ibid., p. 370. Ibid., p. 355-362 et 449. Johnson 1936, p. 470. Ibid., p. 319. Drexhage 1991, p. 449. Ibid., p. 352.
Salaires (multiples ou prix voisins de ceux des pourpres)
– tissage d’une tunique = 20 dr., 20 ob.92 – 1 tunique à 20-24 dr. = 20 à 28 jours de travail (d’après le salaire moyen calculé par H.-J. Drexhage)93
77
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE 95 96 97 98 99 100
III.2. Textile et autres artisanats 4 dr.
Textile : – 1 himation = 4 dr.95 Autres : – 1 pétrin = 4 dr.96 – 1 mina 97 de ciseaux pour tailler la pierre, trempés = 4 dr.98 – 1 mina de pelles et de pioches = 4 dr.99
2 dr., 3 ob.
– 1 selle = 2 dr. – 1 mina de clous = 2 dr.100
Tabl. III — Prix de pourpres dans le contexte des prix d’autres denrées et de divers services aux ier-iiie s. apr. J.-C. (dr. = drachme, ob. = obole).
Précisons d’emblée que ce tableau n’a d’autre but que de rassembler, pour la commodité des lecteurs, une série d’exemples de produits ou de services dont le coût peut être facilement comparé au prix d’un statère de différentes qualités de pourpre. Ces exemples ont été sélectionnés dans les listes de prix et de salaires extraits par A. C. Johnson, puis plus récemment, par H.-J. Drexhage, de la vaste documentation papyrologique déjà publiée 101. Il est clair que de telles tentatives de comparaison sont très risquées et peuvent être très trompeuses, pour de multiples raisons : subjectivité inhérente à toute sélection d’exemples ; incertitudes dues à la coexistence en Égypte de plusieurs systèmes métrologiques et monétaires ; longue durée de la période considérée, au cours de laquelle le coût de la vie a forcément fluctué ; possibles inégalités de prix et de niveaux de vie entre différentes régions d’un immense pays, etc. Sous ces réserves, on retire tout de même de ces comparaisons l’impression que les prix les moins élevés indiqués dans les papyri pour un statère de pourpre (deux drachmes, trois oboles et quatre drachmes) mettaient certaines qualités de pourpre à la portée des bourses de couches moyennement aisées de la société égyptienne – à moins, bien sûr, qu’ils n’aient concerné des pourpres d’imitation. Cependant, même le prix le plus élevé cité dans les papyri, qui, lui, correspond très vraisemblablement à de la pourpre véritable, ne dépasse pas le prix moyen proposé par H.-J. Drexhage pour une tunique ordinaire 102. L’emploi d’une telle pourpre pour décorer une tunique pouvait doubler le prix du vêtement par le seul coût d’achat de la laine teinte, indépendamment du surcoût éventuel entraîné par le filage approprié à une matière première aussi précieuse (on a vu dans
95. 96. 97. 98. 99. 100. 101. 102.
Ibid., p. 355. Johnson 1936, p. 191, 194, 195. 1 mina = 582 g, ibid., p. 467. Ibid., p. 471. Ibid. Ibid., p. 471. Ibid. et Drexhage 1991. Drexhage 1991, p. 449.
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le tabl. II l’extraordinaire finesse des fils de trame dans lesquels a été identifiée la pourpre à Didymoi). Le coût total, impossible à évaluer avec suffisamment de probabilité, devait cependant rester nettement inférieur à celui de l’achat d’un âne ou d’un chameau et a fortiori d’un(e) esclave. Cette impression d’ensemble, suggérée par ces tableaux, n’est pas démentie par un document inédit grâce auquel une commande de pourpre, pour une somme fixée d’avance, peut être mise en relation avec un salaire mensuel. Le texte, conservé sur un ostracon du Mons Claudianus, inv. 4313 (iie s. apr. J.-C.), est une entolè, c’est-à-dire une lettre d’instructions concernant l’un des ouvriers – carrier ou, moins probablement, forgeron 103 – recrutés parmi les artisans de la vallée du Nil et engagés pour extraire le granit au Mons Claudianus. Chaque mois, ils faisaient coucher sur ostracon les instructions relatives à leur salaire mensuel, qui consistait en une somme d’argent (généralement quarante-sept drachmes) et un artabe de blé que leur femme, restée dans la vallée, transformait préalablement en pain. Ils confiaient ces instructions à l’un d’entre eux, qui était détaché de son travail avec le titre de kibariatès 104 pour aller retirer l’argent et les rations frumentaires dans la vallée et procéder à diverses commissions dont les dépenses étaient déduites des salaires 105. L’ouvrier dont il est question ici, Kasios, a décidé de s’offrir le luxe d’une tunique ornée de pourpre. Voici la traduction de ce texte : Pachôn. Pour Kasios : 47 drachmes. Vendre le blé ; acheter 12 matia de bon 106. À la boulangère : ce qu’il (= le kibariatès) donnera. Huile : 6 cotyles ; pour l’entretien (scil. du kibariatès) : 1 drachme ; vin : 1 amphore ; panier : 5 oboles ; prix du tissage d’un chitôn : ce qu’il en coûtera ; pourpre : 2 drachmes.
Kasios n’ayant apparemment ni femme, ni mère, ni sœur à Kainè (Qena), fait faire ses pains par une anonyme. Comme, du Mons Claudianus, il ne peut pas savoir à l’avance ce que demandera cette boulangère, il ne peut indiquer de somme précise à déduire de ses quarante-sept drachmes. Il en va de même pour le salaire du tisserand qui va lui confectionner une tunique, et pour le prix de l’huile et du vin. Le prix du panier (dans lequel on mettait les pains) est en revanche invariable. Quant au prix qu’il est prêt à débourser pour la pourpre, il est deux fois supérieur à la commission qu’il verse au kibariatès et représente un peu plus de 4 % de son salaire mensuel. D’après tout ce qui précède, on voit qu’il est probable que cette somme a suffi pour acheter un statère de laine teinte en pourpre, de la qualité la moins chère mentionnée dans les papyri, ou bien un demi-statère de la qualité immédiatement supérieure. Dans ce second cas, les clavi pourpres de la tunique de Kasios ont simplement dû être plus étroits comme les clavi de vraie pourpre des fragments de tuniques D99.2436.1A et D99.3322.8 de Didymoi. 103. 104. 105. 106.
Les forgerons étaient beaucoup moins nombreux sur le site. Kibariatès est un technonyme hybride tiré du latin cibaria, « nourriture » avec le suffixe grec -tès. H. Cuvigny, « The Amount of the Wages Paid to the Quarry-Workers at Mons Claudianus », JRS 86 (1996), p. 139-145. Comme l’empereur avait tendance à fournir du blé de mauvaise qualité, beaucoup d’ouvriers faisaient revendre leur ration officielle et demandaient au kibariatès d’acheter à la place du bon blé (12 matia = 1 artabe ou un peu plus, l’artabe contenant tantôt 10, tantôt 12 matia).
LA POURPRE EN ÉGYPTE ROMAINE
Car, dans le désert Oriental d’Égypte, les messages des textiles viennent heureusement compléter ceux des textes. Des lambeaux décorés de pourpre véritable achevant leur long cycle d’usage dans des dépotoirs de modestes garnisons ; dix textiles ornés de vraie pourpre sur soixante-deux analyses effectuées : ces exemples sont d’infimes aperçus de la diffusion beaucoup plus large que dut avoir la pourpre dans l’Égypte de cette époque. Avant les résultats des analyses de colorants des textiles des praesidia, l’absence de preuves archéologiques avait laissé croire à de nombreux historiens et spécialistes des textiles qu’il n’y avait d’autres pourpres en Égypte que des imitations habiles, obtenues de plantes tinctoriales. Ce n’était pas l’opinion de M. Reinhold qui, dans son étude sur la pourpre comme symbole de prestige dans l’Antiquité, s’est attaché au contraire à montrer que l’Égypte des premiers siècles du Principat n’avait pas échappé au « fol engouement pour la pourpre » (purpurae insania 107) qui régnait dans le reste de l’Empire. Pour lui, la production et la circulation, à l’époque, d’une large gamme de qualités de pourpres, de toutes nuances, véritables, mélangées, imitées, des plus chères aux relativement peu onéreuses, était le signe d’un « large accès des classes moyennes et inférieures à cette couleur de l’élite 108 ». Les récentes découvertes archéologiques et les études archéométriques dont nous rendons compte ici semblent lui donner raison.
107. 108.
L’expression est de Pline l’Ancien, Histoire naturelle IX 60, 127. « … Made possible the widespread arrogation by middle and lower classes of the elite colour », M. Reinhold, History of Purple as a Status Symbol in Antiquity (1970), p. 53.
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Un marché de la couleur ? Quelques considérations sur les enjeux économiques de la polychromie
Véronique Chankowski
RÉSUMÉ Si les textes antiques ont fourni matière à plusieurs analyses du système des couleurs et des échelles de valeurs que recouvraient aux yeux des Anciens les différents types de pigments, fort peu de données nous sont parvenues sur la dimension économique de la couleur. À côté de quelques mentions chez Pline l’Ancien, les textes épigraphiques, et plus particulièrement les comptes des sanctuaires, comportent quelques mentions d’achats de pigments destinés à l’activité architecturale et à diverses réparations. Les données sont rares mais, croisées avec d’autres informations, elles permettent de reconstituer les bribes d’une économie de la couleur, plus particulièrement dans le monde grec classique et hellénistique. On s’intéressera ici aux indications des prix des pigments dans les comptes de construction des sanctuaires, à la rémunération des artisans-décorateurs et peintres, pour s’interroger enfin sur les caractéristiques d’un possible marché de la couleur correspondant à certaines catégories de matériaux destinés à la décoration. MOTS-CLEFS Comptes des sanctuaires, économie de la couleur, prix des pigments, marché de la couleur.
Towards a market of colours? Some reflections on the economic aspects of ancient polychromy Ancient literary texts have transmitted information allowing several analyses of the system of colours and the scale of values the different types of pigments had for the Ancients. But we have very little data about the economic aspects of colour. In addition to some passages of Pliny the Elder, epigraphic texts and especially the accounts of sanctuaries provide some indications concerning the purchase of pigments for architectural activity or restorations. Combined with other pieces of information, these rare data allow us to reconstruct fragments of a colour economy, specifically in the Greek classical and Hellenistic world. This paper will analyse information relevant to the prices of pigments and to the wages of painters and craftsmen-decorators in the building accounts of sanctuaries. It also aims to examine the features of a hypothetical market for colours, structured around certain categories of materials for decoration. SUMMARY
KEYWORDS
Accounts of sanctuaries, economy of colour, prices of pigments, market for colours.
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VÉRONIQUE CHANKOWSKI
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à propos de l’auteur V. Chankowski, université Lumière-Lyon 2, UMR 5189 HiSoMA, Lyon, France.
abréviations bibliographiques Feyel 2006 = Chr. Feyel, Les artisans dans les sanctuaires grecs aux époques classique et hellénistique à travers la documentation financière en Grèce, Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome 318. Chankowski 2011 = V. Chankowski, « Divine Financiers. Cults as Consumers and Generators of Value », dans Z. H. Archibald, J. K. Davies, V. Gabrielsen (éds), Hellenistic Economies, Demand Creation and Economic Flows, p. 142-165.
UN MARCHÉ DE LA COULEUR ? QUELQUES CONSIDÉRATIONS SUR LES ENJEUX ÉCONOMIQUES DE LA POLYCHROMIE
Il peut paraître étrange de vouloir relier art et économie, qui plus est pour l’Antiquité, tant est discutée, d’abord, la question de la nature des économies antiques, et tant le lien reste incertain entre les productions artistiques et leur valeur marchande. Rien ne dit donc qu’art et économie antiques puissent faire bon ménage. Néanmoins, dans les analyses sur les arts de la couleur en Grèce ancienne et ailleurs telles qu’elles sont apparues au cours de ce colloque, il est une perspective à la jonction de ces deux domaines qui mérite d’être éclairée : celle de la notion de luxe dans les produits de l’art. Il s’agit non pas tant de la valeur des œuvres produites que du coût des matériaux nécessaires à leur fabrication et de leurs modes d’acquisition. La notion de luxe reste difficile à apprécier pour l’Antiquité dès lors que l’on ne dispose guère d’indications que l’on pourrait confronter avec d’autres données : pour les produits utilisés dans les créations artistiques, on connaît très peu de prix qui puissent être mis en série et comparés avec d’autres, très peu d’indications sur les provenances. Inversement, il convient aussi de l’envisager en creux, c’està-dire de s’interroger sur la disponibilité de certains produits dans une logique d’offre et de demande. La couleur est-elle rare et chère ou au contraire accessible et diffusée ? Sans prétendre à l’exhaustivité, j’ai cherché à rassembler quelques données issues de la documentation épigraphique afin de montrer ce que ces sources peuvent apporter à une analyse économique de la peinture et de la couleur dans les sociétés grecques anciennes.
PEINTRES,
ARTISTES ET ARTISANS DANS LES SANCTUAIRES GRECS
Les comptes de construction et d’entretien des grands sanctuaires constituent une documentation assez riche sur cette dimension de l’artisanat grec que représente la peinture. L’éclairage en est toutefois limité aux activités financées par la caisse des sanctuaires et à quelques grands sanctuaires pour lesquels des comptes ont été gravés sur pierre. Dans beaucoup d’autres cas, la documentation financière était tenue sur des supports périssables qui ne nous sont pas parvenus 1. Cette documentation austère est souvent négligée alors qu’elle comporte des indications intéressantes sur les matériaux de construction et les fournitures qui sont liées aux activités d’entretien des sanctuaires. Elle est également riche d’informations sur les artisans qui ont été employés par les sanctuaires pour ces travaux d’entretien ou de construction. Les cas que l’on peut étudier sont assez limités dans l’espace et dans le temps mais représentatifs de différentes régions. Ce sont d’abord, chronologiquement, les comptes des sanctuaires de l’Attique qui font état d’un grand nombre de constructions aux ve s. et ive s. av. J.-C. : comptes de construction du Parthénon (IG I3 436-451 dans le troisième quart du ve s.), des Propylées (IG I3 462-466 entre 437 et 433 av. J.-C.), de l’Érechthéion (IG I3 474-479 et IG II2 1654, entre 408 et le début du ive s. av. J.-C.), comptes d’Éleusis (IG II2 1672-1673a-1673 dans les années 330 jusqu’à la fin du ive s. av. J.-C.), mais également comptes relatifs à la fabrication de statues au ve s. av. J.-C. (IG I3 435 pour l’Athéna Promachos, IG I3 472 pour les statues d’Héphaïstos et d’Athéna). En dehors de 1.
Sur les limites de la gravure des comptabilités des sanctuaires, voir Chankowski 2011.
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l’Attique, les dossiers de comptes d’Épidaure et de Delphes documentent de véritables programmes de construction réalisés au cours du ive s. av. J.-C., l’un pour l’aménagement des sanctuaires d’Épidaure, l’autre pour la reconstruction du temple d’Apollon delphien. Il faut y ajouter deux séries importantes : les comptes de Délos, dont la gravure n’est pas liée uniquement aux constructions entreprises dans le sanctuaire puisque c’est l’intégralité de la comptabilité établie d’année en année qui était gravée, de la fin du ve s. au milieu du iie s. av. J.-C., et les comptes de Didymes, gravés à l’époque hellénistique. Ces comptes peuvent être étudiés dans plusieurs perspectives : l’histoire des œuvres qu’ils documentent, le coût des matériaux, le statut de la main-d’œuvre 2. Quelques mentions rendent compte de l’usage et du coût de la couleur. Parmi celles-ci, plusieurs se réfèrent à des travaux d’entretien. Il s’agit de travaux de peinture à l’encaustique (ȆƧƮƥƸƶƭƵ) qu’il fallait renouveler régulièrement pour protéger les monuments, en particulier en raison du climat marin à Délos mais également dans d’autres sanctuaires. Les comptes des hiéropes de Délos regorgent d’exemples de ce genre d’activité de peinture ou de badigeon : bien qu’elle n’ait guère à voir avec la grande peinture 3, elle nous intéressera ici car elle rend compte de l’usage de certains matériaux. Le travail d’encaustique va de pair avec l’enduit de poix appliqué sur les boiseries, en particulier à Délos où l’opération était renouvelée chaque année. Les comptes des hiéropes en ont conservé de nombreux témoignages. Par exemple, en 246 av. J.-C., les hiéropes versent aux artisans Néogénès et Euelthôn une somme de 69 drachmes chacun pour avoir encaustiqué les portes du temple d’Apollon (ȂƴƧƲƯƥƦƢƶƥưƷƭ […] ƷɖƵ ƬǀƴƥƵ ȂƧ[Ʈ]ƥ˅ƶƥƭ, ID 290, l. 144-146). On trouve également mention de cette opération d’encaustique dans les comptes de Delphes pour l’entretien du temple de Déméter aux Pyles (compte de Diôn, printemps 335 av. J.-C. : CID II 76, col. III, l. 13-14) : la pose d’un enduit (ƮƲưƣƥƶƭƵ) coûte 210 drachmes et est suivie de la peinture (ȆƧƮƥƸƶƭƵ) pour 33 statères (soit 66 drachmes). Mais les sanctuaires commandent aussi, lors des constructions, des travaux de peinture pour la décoration de moulures architecturales et sa réfection régulière. Il s’agit là aussi de peinture à l’encaustique et parfois de dorure. On en trouve plusieurs exemples dans les comptes inscrits. Ainsi à l’Érechthéion, la liste des travaux financés en 408/7 av. J.-C. mentionne deux paiements à un peintre encaustiqueur, l’artisan Dionysodôros, métèque du dème de Mélitè, pour la peinture de 130 pieds de moulures verticales (kymation) à 5 oboles le pied (IG I3 476, frag. XIII, col. I, l. 46-53 et frag. XVII, col. II, l. 270-280). À Éleusis en 329/8 av. J.-C., un autre métèque de Mélitè, Dexithéos, reçoit 5 drachmes pour la peinture de moulures en forme de kymation du sanctuaire
2.
3.
Voir Feyel 2006 et les références bibliographiques citées en note, en particulier p. 11-27. L’ouvrage de Chr. Feyel comporte (p. 31-318) un catalogue fort utile des artisans identifiés dans les comptes de Delphes, Délos, Épidaure et dans les comptes attiques, dans lequel il répertorie les activités pour lesquelles ces artisans ont reçu une rémunération. De façon caractéristique, certains comptes, comme ceux de l’Érechthéion qui proposent une dénomination plus fine des catégories d’artisans, distinguent la profession de peintre ƧƴƥƹƩǀƵ) de celle d’encaustiqueur ȂƧƮƥƸƶƷƢƵ) : Feyel 2006, p. 370.
UN MARCHÉ DE LA COULEUR ? QUELQUES CONSIDÉRATIONS SUR LES ENJEUX ÉCONOMIQUES DE LA POLYCHROMIE
de Pluton (IG II2 1672, l. 187-188). Les comptes d’Épidaure mentionnent eux aussi un paiement de 372 drachmes pour la peinture d’acanthes à l’encaustique (IG IV2 1, 102 A1, l. 51-52). Un des artisans de cette équipe peint également à l’encaustique le sèkos du temple d’Asklépios pour 140 drachmes (IG IV2 1, 102 A1, l. 30-31) 4. Un autre artisan peint à l’encaustique le modèle des chéneaux à tête de lion du temple d’Asklépios pour 16 drachmes et une demi-obole (IG IV2 1, 102 B3, l. 303). Un autre encore peint l’ensemble des chéneaux à tête de lion et nettoie le temple pour un total de 563 drachmes (IG IV2 1, 102 B1, l. 108-110). Plus tard, à Délos, vers 275 av. J.-C., les hiéropes du sanctuaire d’Apollon payent à un artisan 197 drachmes pour peindre 1 773 pieds de kymation au plafond du Pythion (IG XI 2, 165, l. 23), soit moins d’une obole le pied, et 50 drachmes pour peindre des ornements floraux sur des moulures (IG XI 2, 165, l. 24), puis à un autre artisan la peinture de 40 pieds de moulures au Pythion pour 1,5 obole le pied (IG XI 2, 199 A, l. 80-81, a. 274), soit 10 drachmes. Pour certains de ces travaux, il faut se demander si l’on a affaire à un travail de peinture répétitif ou à une véritable création. À Délos, lors de la construction du théâtre qui est bien documentée dans les comptes des hiéropes, une dépense très importante concerne la peinture de panneaux (skènai et paraskèniai) de bois formant un équipement scénique mobile, indépendant du bâtiment de scène 5, réalisée par deux artisans pour la somme de 2 500 drachmes, payées en 274 av. J.-C. (199 A, l. 96-99). Mais ces deux artisans ne sont pas connus par ailleurs et on ignore l’ampleur du travail à réaliser pour pouvoir situer ce coût sur une échelle de valeurs. Les pinakes du proskénion de ce même théâtre font également l’objet d’une dépense importante. En 282 av. J.-C., les hiéropes rémunèrent deux artisans pour ce travail (IG XI 2, 158 A, l. 67-69) en payant 100 drachmes la peinture d’un pinax, confectionné et préparé par un charpentier. Alors que l’importance de la somme pourrait laisser penser à une rémunération d’artiste, on est frappé de constater que les deux artisans qui y ont travaillé sont connus dans les comptes déliens comme artisans de menus travaux (métallurgie, menuiserie, peinture, fourniture et transport de matériaux) sans présenter un profil d’artiste peintre. L’un d’entre eux semble plutôt spécialisé dans le travail du métal mais accepte à l’occasion des travaux de peinture. L’autre est connu pour avoir blanchi les lys et doré les rosettes du plafond de l’Asklépieion dans un autre compte de travaux 6. Chacun d’entre eux a peint deux pinakes et a reçu 200 drachmes, une somme comparable à celle qui est versée dans les mêmes années par les hiéropes déliens pour la peinture des 1 773 pieds de moulure au plafond du Pythion (IG XI 2, 165, l. 23) à un artisan qui est lui aussi polyvalent.
4. 5. 6.
Feyel 2006, p. 121 (EPI 14) et 137 (EPI 100) du catalogue. Ph. Fraisse, J.-Ch. Moretti, Le théâtre, EAD XLII (2007), p. 179 pour l’analyse du dispositif. Ibid., p. 164 ; Feyel 2006, p. 230-232, 379-380.
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Il convient alors de se demander ce que la rémunération prend en compte dans l’évaluation du coût de tels travaux. Les couleurs semblent fournies par les artisans eux-mêmes car aucune autre dépense n’est mentionnée à ce sujet. Leur coût doit donc entrer dans le calcul final, tout autant que le temps de travail ou la valeur du produit fini 7.
LE
COÛT DES FOURNITURES
Ce sont les attestations relatives à la peinture et à la dorure de statues, fournies par les comptes des hiéropes, qui permettent surtout de se faire une idée du coût des matériaux. Dans la majorité des cas, les artisans fournissent eux-mêmes leurs produits, mais il arrive aussi que le sanctuaire intervienne directement sur le marché. En effet, les comptes montrent que les sanctuaires achètent régulièrement des produits d’entretien (comme la poix) ou accumulent des denrées comme le bois, stocké sous différentes formes (poutres, rondins, fagots, etc.). Les comptes des hiéropes déliens font régulièrement état de ces stocks qui font l’objet d’inventaires. Qu’en est-il de la couleur ? Est-elle un produit courant sur le marché ? Le sanctuaire de Délos achète régulièrement deux produits qui sont inséparables pour faire de la couleur : un pigment et un liant. On trouve de façon récurrente dans les comptes des hiéropes des achats de uƣƯƷƲƵ et ƮƿƯƯƫƵ (gomme) ou de uƣƯƷƲƵ et ƮƫƴƿƵ (cire) : c’est en effet l’association de ces deux produits qui permettait de préparer la peinture à l’encaustique dont on a vu qu’elle était régulièrement utilisée pour l’entretien des bâtiments. Ce mélange est ancien : on en trouve la mention dans un compte des naopes de Délos en 359/8 av. J.-C. où il est, de la même façon, acheté par le sanctuaire pour les travaux prévus ces années-là (ƮƫƴƿƵ, uƣƯƷƲƵ : ID 104-5, l. 4). Les deux produits devaient être vendus ensemble car c’est toujours un prix unique qui est indiqué, ce qui laisse penser que le mélange devait être vendu déjà préparé. Il est vendu à la mine (soit 454 g pour une mine attique), mais on ignore quels étaient les contenants. Vers 280 av. J.-C., les hiéropes ont ainsi acheté 32 mines de uƣƯƷƲƵ Ʈƥì ƮƫƴƿƵ pour le plafond du Pôrinos Naos, au prix de 2,4 drachmes la mine (IG XI 2, 165, l. 26-27) 8. Dans un autre compte daté de 169 av. J.-C., la formule est différente et il est question de uƣƯƷƲƵ Ʈƥì ƺƴǁuƥƷƥ (ID 461 Ab, l. 21). Dans ce passage fragmentaire de dépenses, il est question de la fabrication de l’agalma de Dionysos qui consistait en un oiseau de bois et de plumes réalisé chaque année pour le char processionnel des Dionysies. Les hiéropes enregistrent séparément un paiement de 10 drachmes à un artisan qui a confectionné la statue, puis un second paiement de 10 drachmes à un autre artisan qui l’a peinte. Les couleurs sont payées séparément du travail réalisé mais aucune indication de quantité n’est fournie : Ʒ˒ƭ ƮƥƷƥƶƮƩƸƠƶƥưƷƭ Ʒɞ ǶƧƥƯ]uƥ Ɖ· Ʒ˒ƭ ƧƴƠƻƥưƷƭ Ɖ· ƮƫƴɞƵ Ʈƥɜ ƺƴǁuƥƷƥ Ƚപപ· Les mots ƮƫƴƿƵ Ʈƥì ƺƴǁuƥƷƥ sont habituellement, dans d’autres comptes, remplacés par la formule
7. 8.
Sur les critères de rémunération des artisans, voir Feyel 2006, p. 416-421, qui considère toutefois que le temps de travail n’est pas la variable principale de la rémunération. Voir IG XI 2, 145, l. 13 ; 146 A, l. 68 ; 163 A, l. 11 ; 165, l. 26-27 ; 287 A, l. 62.
UN MARCHÉ DE LA COULEUR ? QUELQUES CONSIDÉRATIONS SUR LES ENJEUX ÉCONOMIQUES DE LA POLYCHROMIE
ƩȞƵ Ʈƿƶuƫƶƭư ƷƲ˅ DzƧƠƯuƥƷƲƵ (par exemple IG XI 2, 161 A, l. 90 ; 287 A, l. 51-52 ;
ID 338 Aa, l. 58, etc.). Ailleurs, c’est un prix global de fabrication de la statue qui est indiqué (ID 440 A, l. 31 ; 442 A, l. 198 ; 444 A, l. 29-30) 9. Le miltos est un produit que l’on trouve dans les comptes d’Éleusis et d’Épidaure de façon récurrente, ainsi que dans des devis, comme celui de Lébadée en Béotie (IG VII 3073) au iie s. av. J.-C. puisqu’il était utilisé en architecture et en menuiserie pour vérifier l’horizontalité, autant que comme enduit pour les boiseries. Le miltos est vendu au poids pour 3,5 oboles le statère à Éleusis en 329/8 av. J.-C. (IG II2 1672, l. 12) : les épistates achètent 25 statères de miltos et se procurent dans le même temps d’autres ingrédients liés à la fabrication de couleurs : du noir de cordonnier (uƩƯƥưƷƫƴƣƥ), de la noix de galle (ƮƫƮƣƵ) et de la poix (ƳƣƷƷƥ). Le noir est vendu au médimne (51,8 litres), pour 8 drachmes l’unité (IG II2 1672, l. 114-115). Les épistates en achètent 2 médimnes. Une partie de ces produits est fournie par un marchand régulier, Pamphilos, qualifié de ƶƮƫưƣƷƫƵ (l. 13, 15). La suite du compte (l. 69-70) mentionne d’autres noms de vendeurs pour ces produits. Le poids exprimé en statères doit signifier que les épistates ont obtenu, non pas les 8,60 g d’or d’un statère, mais plutôt son équivalent de 20 drachmes attiques pesant chacune 4,32 g, soit un rapport de 24,6 g de miltos pour une obole (soit 0,04 obole pour un gramme). Le tarif est donc assez proche de celui qu’enregistrent les comptes de Délos vers 280 av. J.-C. puisque le tarif de 2,4 drachmes la mine fournit un rapport de 30 g pour une obole (soit 0,03 obole pour un gramme). Dans ce dernier cas, il s’agit toutefois, comme on l’a vu, d’un mélange de miltos et de liant. À Épidaure, une inscription donne un prix de 50 drachmes pour du miltos pur mais sans indication de quantité (IG IV2 1, 115, l. 19, vers 335-325 av. J.-C.). Les épistates d’Éleusis et les hiéropes de Délos ont acheté plusieurs kilogrammes de miltos, mais les unités pondérales utilisées (le statère, alors que le total de 25 statères pouvait aussi être exprimé par 5 mines, et la mine, alors que le total de 32 mines équivalait à un demi-talent) laissent penser que les marchands avaient l’habitude de détailler ce produit en petites quantités. Une autre couleur, le blanc de céruse (ƻƭuǀƬƭƲư), connue comme base de maquillage, est achetée par les hiéropes de Délos pour la peinture du plafond et des colonnes du Pythion pour une quantité de 40 mines, soit l’équivalent de 17 kg (IG XI 2, 165, l. 25-26) : ƻƭuƸƬƣƲƸ ƩȞƵ Ʒɚư ȮƴƲƹɚư Ʈƥɜ ƩȞƵ ƷƲɠƵ ƮƣƲưƥƵ ƷƲɠƵ Ȃư Ʒ˒ƭ ƕƸƬƣƼƭ Ƴƥƴɖ ƑưƫƶƣƯƩƼ uưƥʶ [ƷƩƷ]Ʒ[ƥƴƠƮƲ]ưƷ[ƥ] 10. Le prix n’est pas conservé. Le fournisseur est différent du vendeur à qui les hiéropes achètent, la même année, l’habituel mélange de uƣƯƷƲƵ Ʈƥì ƮƫƴƿƵ. Il est peut-être possible d’identifier ce Mnèsiléôs avec Mnèsiléôs fils de Pyrrhi-, locataire d’ateliers proches de la mer, réservés à des travailleurs de sexe masculin (voir IG XI 2, 199 B, l. 93-94) 11. Une activité de production de couleurs expliquerait la locali-
9. 10. 11.
Voir la liste complète des références dans Ph. Bruneau, Recherches sur les cultes de Délos à l’époque hellénistique, Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome 217 (1970), p. 312-314. Ce blanchissage est connu également à Épidaure : voir par exemple IG IV2 1, 102 B3, l. 304-305 (Feyel 2006, p. 151 [EPI 183]). Cl. Vial, Délos indépendante (314-167 avant J.-C.). Étude d’une communauté civique et de ses institutions, BCH Suppl. X (1984), p. 352 et Index II.
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sation de l’atelier en bord de mer pour éviter les nuisances dans les quartiers d’habitation, mais on est là dans le domaine de l’hypothèse. La pourpre fait elle aussi l’objet de quelques rares mentions dans les comptes déliens 12. En 269 av. J.-C., un certain Agathôn fournit au sanctuaire 2 mines de pourpre destinées à la teinture du vêtement de Létô, au tarif très élevé de 100 drachmes la mine (ID 203 A, l. 73). Hormis cette mention, les autres attestations concernant la pourpre ne sont guère utilisables pour la question qui nous occupe ici car elles enregistrent le revenu d’une taxe qui était perçue par le sanctuaire sur la pêche du murex : il ne s’agit donc pas d’indications de prix 13. Les métaux, or et argent, faisaient également partie des matériaux utilisés dans la décoration des œuvres. Un passage d’un compte attique témoigne de l’usage de l’argent : vers 450 av. J.-C., dans une liste de dépenses pour l’Athéna Promachos, il est question à deux reprises d’argent non frappé utilisé pour l’ornement de la statue [DzƴƧǀƴƭƲư ǶƶƩuƲư ȂƵ] ƳƲƭƮƭƯƣ[ƥư ƷƲ˅ DzƧƠƯuƥƷƲƵ], mais aucune quantité n’est conservée et la formule est en partie restituée (IG I3 435, l. 56-57, 79-80). Les comptes déliens comportent quant à eux des mentions d’achat de feuilles d’or (ƳơƷƥƯƥ) pour la dorure des statues. Il est intéressant de constater qu’elles sont généralement achetées par le sanctuaire, indépendamment du paiement à l’artisan qui n’avait donc pas à fournir le produit dans ce cas. Un de ces artisans mérite que l’on s’arrête sur ses déboires avec le sanctuaire. Ophélion a d’abord doré et décoré la statue d’Hécate pour 12 drachmes en 250 av. J.-C. (IG XI 2, 287 A, l. 114-115). Quelques années plus tard, en 246 av. J.-C., il prend en adjudication trois chantiers de décoration : la décoration de la statue d’Artémis de la Nèsos pour 25 drachmes (ID 290, l. 148-149), la décoration avec peinture à l’encaustique de la statue cultuelle d’Aphrodite de Stésiléôs pour 115 drachmes (l. 151-153) et la peinture et réparation de la décoration de trois statues cultuelles du Pythion avec application de feuilles d’or (l. 229-231). Les hiéropes achètent eux-mêmes les 1 500 feuilles d’or nécessaires. L’adjudication, d’un montant de 450 drachmes, correspond uniquement à la fourniture de la peinture et au travail du décorateur. Bien que l’on ignore le coût exact de ces matériaux, les ordres de grandeur mentionnés précédemment permettent de penser que c’est largement le savoir-faire et le temps de travail du peintre qui est rémunéré ici 14. Au cours du travail, un supplément de 760 feuilles d’or s’avère nécessaire. Les hiéropes l’achètent et versent un complément de salaire de 125 drachmes à Ophélion pour ce travail réalisé en sus, mais un désaccord s’élève et il est, en fin de compte, probablement payé pour chaque statue séparément, mais le texte est mutilé à cet endroit (l. 241-244). Le tarif du petalon semble varier selon l’importance de la commande : 5 oboles l’unité 12.
13.
14.
À Épidaure, un artisan est rémunéré pour avoir fourni de la peinture pourpre (ȂƴƸƬƴƲ), dans un fragment de compte mutilé et difficile à interpréter : SEG XV 208, l. 60 ; voir Feyel 2006, p. 151 (EPI 182) et 177 (EPI 332). V. Chankowski, Athènes et Délos à l’époque classique. Recherches sur l’administration du sanctuaire d’Apollon délien, Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome 331 (2008), p. 295-296 ; Cl. Prêtre et al., Nouveau choix d’inscriptions de Délos. Lois, comptes et inventaires, Études épigraphiques 4 (2002), p. 115. Voir Feyel 2006, p. 421, sur le fait que les commanditaires rémunèrent un produit fini dont l’achèvement dépend d’un savoir-faire.
UN MARCHÉ DE LA COULEUR ? QUELQUES CONSIDÉRATIONS SUR LES ENJEUX ÉCONOMIQUES DE LA POLYCHROMIE
pour une commande de 4 petala (IG XI 2, 287 A, l. 149), 4 oboles l’unité pour 19 petala (l. 114), 3 oboles l’unité pour 15 petala (ID 290, l. 151-153). On ignore le prix payé par les hiéropes pour les 2 260 feuilles d’or qu’ont nécessité les statues du Pythion mais il devait avoisiner les 1 500 drachmes. Lors des grosses commandes, les feuilles d’or sont fournies par des artisans différents, la commande se trouvant ainsi partagée entre deux, voire trois fournisseurs. L’un deux, Echestratos, est nommé lors de deux commandes, en 250 et en 246 av. J.-C. Les hiéropes achètent également de la colle pour fixer les feuilles d’or (ƮƿƯƯƫ), à 7,5 drachmes la mine. 2,5 mines (environ 1 kg) sont nécessaires pour la réparation des trois statues du Pythion (ID 290, l. 236-237). Les données chiffrées que l’on repère dans d’autres corpus de comptes sont plus limitées en ce qui concerne les achats de feuilles d’or. Des artisans sont payés pour des travaux de dorure sans que soient mentionnés les quantités et les produits nécessaires. Ainsi, un artisan d’Épidaure est payé 64 drachmes et 1 obole pour dorer des étoiles (IG IV2 1, 102 B1, l. 86-87). À Délos, les hiéropes rémunèrent 44 drachmes un artisan qui a doré des rosettes et blanchi des lys en 279 av. J.-C. (IG XI 2, 161 A, l. 72-73) et 4 drachmes la dorure d’une offrande en forme de poisson en 250 av. J.-C. (IG XI 2, 287 A, l. 94). La seule indication de prix unitaire du petalon se trouve dans le compte de l’Érechthéion de 408/7 av. J.-C. où un petalon coûte une drachme dans un achat de feuilles d’or destiné à la décoration de statues de bronze (IG I3 476, frag. XVII, col. II, l. 292-296 et 299-303). La différence par rapport aux prix déliens, pour un achat de 166 feuilles d’or à l’Érechthéion, est importante, quand les hiéropes obtenaient au maximum 5 oboles le petalon pour l’achat de plus faibles quantités, mais on ignore toutefois la taille de ces feuilles d’or, qui pouvait être différente de celles de la commande délienne. On constate donc que les sanctuaires, dans plusieurs cas, n’achètent pas les couleurs : ils procèdent par adjudication et par contrat, laissant aux artisans le soin de se fournir en matériaux. Cette façon de procéder était dans l’intérêt du sanctuaire, qui parvenait ainsi à bénéficier des effets positifs de la concurrence et à baisser autant que possible ses frais de fonctionnement 15. Toutefois, lorsque des intérêts financiers sont en jeu, les administrateurs n’hésitent pas à se fournir eux-mêmes sur le marché. Pour des travaux de réparation et d’entretien en particulier, ils achètent en stock de la couleur de façon à ce que des hommes à tout faire puissent en disposer. Un approvisionnement régulier au marché est donc avéré pour des produits courants, purs ou en préparation, comme le miltos, le noir de cordonnier, le blanc de céruse, qui servaient à l’entretien et à la parure des bâtiments. Il est également frappant de constater que la dorure des statues, qui correspond à un artisanat plus complexe, donne lieu à la fourniture des feuilles d’or indépendamment de la rémunération de l’artisan. Quant aux autres couleurs utilisées pour l’ornement des statues, elles étaient manifestement fournies par l’artisan lui-même puisqu’aucun achat particulier n’est mentionné en dehors des feuilles d’or, comme en témoigne l’affaire d’Ophélion avec le sanctuaire délien, détaillée dans les comptes.
15.
Feyel 2006, p. 469-510 ; Chankowski 2011.
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Lorsqu’ils sont mentionnés dans les inscriptions et connus par ailleurs, les fournisseurs sont tantôt des marchands, tantôt des artisans polyvalents. À Éleusis, Diokleidès fournit de la poix, du noir et du rouge (IG II2 1672, l. 15-16). Il est sans doute, comme Pamphilos, un skènitès. À Délos, les achats de miltos par le sanctuaire semblent être des achats réalisés sur le marché et non auprès d’un artisan. Toujours à Délos, les achats de feuilles d’or se font auprès d’individus qui ne sont pas connus mais qui semblent spécialisés dans cette activité. Les artisans décorateurs qui se chargent des travaux dans le sanctuaire sont parfois aussi fournisseurs de certains produits, comme la poix, utile à leur activité : c’est par exemple le cas d’Hérakleidès ou de Nannakos qui sont mentionnés dans les comptes 16. D’autres artisans-peintres à Délos, comme Néogénès, sont également des graveurs 17. En effet, le travail du miltos va souvent de pair avec la gravure puisqu’on l’utilisait pour rehausser les lettres. Les « artisans de la couleur » font donc le plus souvent preuve d’une certaine polyvalence. Plus qu’à une spécialisation, on a affaire à un domaine d’activité qui semble lié à la fourniture des produits plus qu’à l’activité artisanale en elle-même. Lorsque le sanctuaire ne se les procure pas lui-même, les artisans doivent avoir un accès privilégié aux matériaux, que ce soit comme intermédiaires ou comme producteurs. On notera d’ailleurs le nombre important de peintres encaustiqueurs et doreurs originaires du dème attique de Mélitè, présents dans les comptes de l’Érechthéion aussi bien que dans les comptes d’Éleusis.
COÛTS
ET CIRCUITS DE DISTRIBUTION DE LA COULEUR
À la lecture des témoignages littéraires (plus particulièrement Théophraste et Pline l’Ancien) sur la provenance des couleurs, on pourrait avoir le sentiment d’un grand marché méditerranéen faisant circuler des matériaux rares : miltos de Sinope et de Kéos, blanc de Mélos, ocre de Lemnos, gomme arabique, bleu d’Égypte, etc. En réalité, la célébrité de certaines provenances et de certains produits passée à la postérité n’engage pas un commerce exclusif, car beaucoup de ces produits pouvaient être remplacés par des fabrications régionales. Ces célébrités fonctionnaient surtout comme des appellations contrôlées permettant de se protéger de la contrefaçon : Pline l’Ancien (XXXV 33) rappelle ainsi que l’ocre de Lemnos s’appelait sphragis parce qu’elle n’était vendue que cachetée. Son exploitation est d’ailleurs encore attestée par les voyageurs au xvie s. 18. Dans la même perspective, le devis de construction pour le temple de Lébadée en Béotie précise que la vérification de l’horizontalité des lits de pose devra se faire uniquement avec du miltos de
16.
17. 18.
Feyel 2006, p. 230-232 (DEL 224) et 256-257 (DEL 370). Sur le circuit d’approvisionnement de la poix, voir V. Chankowski, « Le sanctuaire d’Apollon et le marché délien : une lecture des prix dans les comptes des hiéropes », dans J. Andreau, P. Briant, R. Descat (éds), Économie antique. Prix et formation des prix dans les économies antiques. Entretiens d’archéologie et d’histoire de Saint-Bertrand-deComminges (1997), p. 73-89. Feyel 2006, p. 257 (DEL 371). P. Brun, Les archipels égéens dans l’Antiquité grecque, Ve-IIe siècles av. notre ère (1996), p. 127.
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Sinope sous peine d’amende et d’obligation de refaire le travail (IG VII 3073, l. 155-159). Sinope n’était pourtant pas la seule cité à fournir du miltos, dont la production est connue également à Kéos et à Lemnos 19. Dans le domaine de la grande peinture, la dimension régionale de la fabrication des couleurs a été bien montrée par H. Brecoulaki pour le cas de la peinture funéraire en Macédoine. D’après les analyses réalisées, elle déduit dans ces peintures l’existence d’autres gommes que la gomme arabique venant d’Égypte ou d’Asie : des gommes végétales issues d’arbres fruitiers locaux de Grèce du Nord sont fréquemment utilisées, ainsi que des colles animales. Les pigments inorganiques naturels sont pour la plupart de provenance locale. Pour les autres couleurs de la palette, il faut noter qu’à côté des exportations indispensables, les mélanges et la dilution des couleurs permettent, à partir de l’ocre, d’obtenir une grande variété de teintes : souvent, les ocres sont les seuls pigments rouges rencontrés sur certains sites 20. Il n’est donc pas étonnant que le miltos soit presque la seule couleur rencontrée dans les achats des sanctuaires : ce produit avait un usage large, qui entre dans la gamme des produits d’entretien aussi bien que de la décoration des monuments, et se prêtait à des applications diverses. La demande en miltos était donc assurée en quantités abondantes. Aussi les Athéniens avaient-ils cherché à s’en arroger le monopole à l’époque classique, comme en témoigne le célèbre dossier épigraphique sur le vermillon de Kéos (IG II2 1128). Cette affaire est connue par deux inscriptions fragmentaires d’une même stèle, retrouvées sur l’Acropole d’Athènes, qui font connaître les dispositions prises par les Athéniens face aux exportations de miltos de Kéos 21. D’après la paléographie, ces deux fragments sont antérieurs à 350 av. J.-C. : ils pourraient donc suivre de quelques années la révolte de 364-362 lors de laquelle Kéos fit défection, trois des quatre cités de l’île s’unissant en sympolitie pour faire alliance avec Histiée et Érétrie. La stèle fragmentaire se présente comme la reproduction des décrets émanant de trois des quatre cités de Kéos : Karthaia (l. 1-8), Korésia (l. 9-24, le plus complet) et Ioulis (l. 25-37). La quatrième, Poiessa, manque et la pierre ne permet pas de supposer la disparition d’un quatrième décret. Elle ne devait donc pas participer à ce commerce. Prévoyant que le miltos ne pourrait être exporté qu’à Athènes sur un bateau désigné par les Athéniens, ces décrets instaurent clairement la mainmise d’Athènes sur les ressources stratégiques d’une île qui se trouve dans son orbite. Ces dispositions ont généralement été interprétées en fonction des besoins de la marine de guerre athénienne car le miltos servait à enduire la
19.
20. 21.
De la même façon, la fabrication de bleu hors de l’Égypte est sans doute attestée à Cos, comme l’a montré la découverte d’un atelier dont l’exploration resterait toutefois à reprendre : Ch. Kantzia, K. Kouzeli, AAA XX (1987), p. 211-224. On notera cependant que cette hypothèse est contestée par L. Cavassa dans le présent volume, p. 25. H. Brecoulaki, La peinture funéraire de Macédoine : emplois et fonctions de la couleur, IVe-IIe s. av. J.-C. (2006), p. 417-423. Sur cet ensemble de documents, voir J. Vélissaropoulos, Les nauclères grecs. Recherches sur les institutions maritimes en Grèce et dans l’Orient hellénisé (1980), p. 184-188 ; A. Carrara, « À la poursuite de l’ocre kéienne (IG II2, 1128) : mesures économiques et formes de domination athénienne dans les Cyclades au ive s. a.C. », dans G. Bonnin, E. Le Quéré (éds), Pouvoirs, îles et mer. Formes et modalités de l’hégémonie dans les Cyclades antiques (2014), p. 295-316.
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coque des trières 22. Cet usage militaire n’est pas exclusif : Hérodote (III 58) cite en effet les trières samiennes décorées de rouge (uƭƯƷƫƯƭƹƩơƵ), mais les usages de ce produit sont plus larges, tant en construction qu’en décoration. Les décrets athéniens visent bel et bien l’instauration d’une situation de monopole commercial, tel que le décrit Aristote dans la Politique (I 20, 1259a), sur un produit de nécessité courante dont le commerce était avantageux, dans une ambiance de recherche de développement économique que traduisent quelques années plus tard les Poroi de Xénophon. Le miltos de Kéos acheminé à Athènes devait probablement être ensuite vendu à des détaillants qui le commercialisaient sur les marchés de l’Attique. Il existait donc bien un marché du rouge, du blanc, du noir, de la dorure, qu’il était possible de se procurer auprès de divers fournisseurs et en fonction d’une unité de mesure définissant un prix. Quant aux autres couleurs, force est de constater que le peintre se confond alors avec le fournisseur et l’on ignore ce qui, dans sa rémunération, correspond à la part du coût du produit et ce qui correspond à la part du travail. Ce qui est payé est le produit fini : c’est le principe même de l’adjudication. Ce mode de contrat était tout à fait à l’avantage des sanctuaires : il permettait de faire supporter le poids de l’achat des fournitures par les artisans, mais aussi d’aboutir à une évaluation globale du coût, associant matériaux et temps de travail, qui avait tendance à contraindre à la baisse générale des coûts 23. Lorsque les administrateurs ont, au contraire, la possibilité de bénéficier de meilleures conditions d’achat en intervenant eux-mêmes sur le marché, ce sont eux qui fournissent les matériaux : c’est le cas pour les feuilles d’or mais aussi pour la poix et le miltos ; la demande d’un sanctuaire, en quantités notables, pesait fortement sur un marché local et pouvait contraindre les circuits d’approvisionnement 24. Les indications sur le coût des matériaux et sur la qualité professionnelle des intervenants laissent encore dans l’ombre la question de la valeur des œuvres réalisées. Les dépenses de peinture engagées par les sanctuaires correspondent à un véritable investissement. Si l’on garde en mémoire qu’une paire de bœufs ou un esclave valent, entre le ive s. et le iie s., entre 150 et 200 drachmes, on mesurera l’ampleur des dépenses d’ornement consenties par les caisses sacrées : à Délos en 274 av. J.-C., 2 500 drachmes pour la peinture des skènai et paraskèniai du théâtre et 400 drachmes pour la peinture des pinakes à 100 drachmes le pinax ; pour des travaux de peinture réalisés vers 275 av. J.-C. sur les moulures du Pythion, 257 drachmes ; pour la réfection de la peinture et de la dorure des trois statues du Pythion, 575 drachmes auxquelles il faut ajouter l’achat de 2 260 feuilles d’or qui ont dû coûter entre 1 200 et 1 500 drachmes en fonction du tarif du petalon 25. Ces documents, dont on a vu le caractère fragmentaire, se prêtent difficilement à la mise en série et aux comparaisons. On mettra toutefois en parallèle ces dépenses de peinture avec d’autres, du même ordre de grandeur, consenties à l’Érechthéion en 408/7 pour la
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J. Vélissaropoulos (n. 21), p. 188 et les références citées dans les notes. Feyel 2006, p. 469-510 ; Chankowski 2011. Chankowski 2011, p. 161-162. Voir supra, p. 89.
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sculpture de figures représentant un cheval et un personnage, qui sont payées entre 60 et 240 drachmes la figure ou la scène (IG I3 476, l. 161-173) 26. Avec ces créations et ces travaux d’embellissement dans les sanctuaires grecs, on est loin, bien entendu, des valeurs transmises pour des tableaux d’artistes célèbres, qui pouvaient avoisiner les cent talents comme Pline l’Ancien en a conservé le souvenir à travers quelques anecdotes 27. Il faut d’ailleurs se demander dans quelle mesure ces prix, si les témoignages qui nous les ont transmis représentent un ordre de grandeur réel, ne sont pas étroitement dépendants du contexte des cours hellénistiques, dans lesquels les rapports de valeur diffèrent des relations du marché. Les chiffres transmis par les comptes de construction rendent compte bien plus certainement de l’échelle de valeur dans les sanctuaires grecs. À l’intérieur de la catégorie des travaux de peinture, les tarifs appliqués à la peinture de moulures sont les seuls qui permettent d’esquisser une comparaison entre les différents sites documentés. On constate que l’on paye à l’Érechthéion, en 408/7, 5 oboles le pied pour la peinture d’un kymation sur l’architrave intérieure (la longueur totale était de 130 pieds) 28 tandis qu’au Pythion de Délos entre 280 et 273 av. J.-C., la peinture de 1 773 pieds de moulures (ƮƸuƠƷƭƥ) au plafond coûte 0,9 obole le pied et celle de 40 pieds de moulures de la chapelle intérieure (ƬƠƯƥuƲƵ) coûte 1,5 obole le pied 29. Le système de l’adjudication permet assurément aux hiéropes déliens d’obtenir un meilleur tarif pour une grande longueur à peindre. Mais on constate également, comme pour le prix unitaire de la feuille d’or, que les coûts à l’Érechthéion sont supérieurs à ceux pratiqués à Délos un peu plus d’un siècle plus tard. Nous avons également constaté que le miltos coûtait légèrement plus cher dans les comptes de l’Érechthéion que dans les comptes déliens, bien que la comparaison soit faussée par le fait qu’il s’agisse dans un cas de miltos pur, dans l’autre de miltos mélangé à un liant 30. Étant donné le peu de prix et de données chiffrées comparables que nous ont conservés les comptes, il serait illusoire de vouloir y trouver une quelconque évolution et d’interpréter globalement des hausses ou des baisses de prix. En 1941, M. Rostovtzeff, dans son Histoire économique et sociale du monde hellénistique, postulait une inflation due à un commerce accru entre la Grèce et l’Orient et à une forte demande en Grèce même au début de l’époque hellénistique. Certains de ces aspects mériteraient encore d’être réenvisagés à la lumière de nouvelles sources mais des études menées sur la demande dans les sociétés préindustrielles amènent à révoquer en doute l’idée d’une inflation globale 26.
27.
28. 29. 30.
Sur les gains des artisans, voir Feyel 2006, p. 415-421, qui montre que les sculpteurs sont au sommet de l’échelle des salaires dans la catégorie des artisans. Voir également N. Himmelmann, « Zur Entlohnung künstlerischer Tätigkeit in klassischen Bauinschriften », JDAI 94 (1979), p. 127-142. Par exemple Pline l’Ancien, Histoire naturelle VII 126 (Aristides Thebani pictoris unam tabulam centum talentis rex Attalus licitus est) et XXXV 100 à propos d’un tableau du peintre thébain Aristide, acquis par le roi Attale II pour 100 talents ; VII 127 à propos de tableaux du peintre Timomachos, achetés par César pour 80 talents. IG I3 476, frag. XIII, col. I, l. 46-53 et frag. XVII, col. II, l. 270-280. IG XI 2, 165, l. 23 ; 199 A, l. 80-81. Voir supra, p. 88.
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dans l’Antiquité 31. On peut tout du moins émettre l’hypothèse d’une baisse de certains coûts, pour les catégories que nous avons pu observer (miltos, feuille d’or, peinture de moulures), entre l’Athènes de la fin du ve s. et la Délos du milieu du iiie s. av. J.-C., mais cet élément demande à être lui-même inséré dans des analyses d’ensemble pour prendre un sens économique. Il semble surtout que l’on ait affaire à des marchés régionaux, avec des principes de régulation qui leur sont propres. Dans ces mécanismes, la demande d’un grand sanctuaire joue un rôle important 32. L’économie de la couleur est donc certainement davantage à comprendre dans une logique régionale et dans une dimension plurielle : en fonction des lieux et des produits en jeu, les modalités d’accès au marché pouvaient être différentes. Il existait en tout cas pour des produits de base comme le miltos, un véritable marché accompagné d’enjeux économiques, comme le montrent les ambitions athéniennes à l’égard de la production de Kéos. Le miltos était une denrée accessible à l’approvisionnement parce qu’elle faisait l’objet d’une demande, que ce soit dans les Cyclades, dans le Péloponnèse ou en Attique : non un produit de luxe mais une denrée entrant dans les circuits des produits d’entretien comme la poix, la cire, la colle, la gomme, dont les sanctuaires devaient être les plus gros consommateurs et pour lesquels ils avaient sans doute créé eux-mêmes des circuits d’approvisionnement. Cette économie de la couleur apparaît ainsi structurée autour des produits beaucoup plus que des artisans, qui sont eux-mêmes polyvalents : c’est une économie de la demande. En revanche, les relations de marché semblent laisser de côté une série de produits plus spécifiques comme certaines couleurs utilisées par les peintres, qui n’apparaissent jamais dans les comptes des sanctuaires. Elles faisaient partie de la palette du peintre et l’on ignore s’il les fabriquait lui-même ou s’il était dépendant de circuits de distribution qui pourraient alors relever davantage du réseau que du marché proprement dit. Cette partie de l’approvisionnement est toutefois occultée par la forme contractuelle que prend, dans les relations de commanditaire à artisan, la rémunération des travaux de peinture. C’est bien, dans tous les cas, d’une relation commerciale dont il s’agit.
31.
32.
Voir par exemple J.-Y. Grenier, « Modèles de la demande sous l’Ancien Régime », Annales 42 (1987) p. 497-527 ; id., « Économie du surplus, économie du circuit. Les prix et les échanges dans l’Antiquité gréco-romaine et dans l’Ancien Régime », dans J. Andreau, P. Briant, R. Descat (éds), Économie antique. Prix et formation des prix dans les économies antiques. Entretiens d’archéologie et d’histoire de SaintBertrand-de-Comminges (1997), p. 385-404. Voir pour Délos la démonstration de la dimension régionale de la plupart des prix pour les denrées de nécessité courante dans G. Reger, Regionalism and Change in the Economy of Independent Delos (1994) et voir supra, p. 90, à propos du système des adjudications et contrats comme instruments de cette régulation.
ARTS POLYCHROMES ET DORÉS, SYNTHÈSES ET ÉTUDES DE CAS
The Emergence of Polychromy in Ancient Greek Art in the 7th Century BC
Elena Walter-Karydi
SUMMARY While in the Mycenaean period most works of art were distinguished by a rich polychromy, about 1000 BC polychromy was abandoned in favour of a light/dark polarity that became the colour principle of the Geometric age. This was transformed in the 7th century BC through the addition of a third value, red, to the Archaic polychromy. It is on vase paintings that we can follow the process of this transformation, but it applies to all major art forms. The so-called monumental sculpture in stone that emerged in the middle of that century was from the very start polychrome, as were the monumental temples in stone; polychrome wall paintings, architectural members, mouldings and sculptures also appeared. Egyptian polychrome painting, which Pliny assumes exercised a decisive influence on Archaic Greek painting and polychromy, in fact played an at best incidental role in the genuinely Greek process of creating polychromy in art. On the contrary, the change of meaning of the word ƺƴǁƵ (ƺƴƲƭƠ, ƺƴƲƭƢ), which in the Homeric poems means “skin” (there is no Homeric term for “colour”), and in the seventh century became the term for “colour”, significantly echoes the transformation of the colour concept displayed in Geometric works of art into the polychromy found in those of the 7th century. KEYWORDS Polarity, Geometric age, Archaic polychromy, vase painting, red, monumental sculpture in stone, wall painting, polychrome architectural members, mouldings, sculptures, Egyptian polychrome painting, Pliny the Elder, ƺƴǁƵ, ƺƴƲƭƠ, ƺƴƲƭƢ, Homeric poems, skin. RÉSUMÉ L’apparition de la polychromie dans l’art de la Grèce ancienne au cours du VIIe s. av. J.-C. Tandis qu’à l’époque mycénienne une riche polychromie distingue la plupart des œuvres d’art, vers 1000 av. J.-C., la polychromie est abandonnée en faveur d’un clair-obscur bipolaire qui devient le principe du coloris de l’art géométrique. Ce principe se transforme au viie s. avec l’addition d’une troisième valeur, le rouge, ce qui devient la polychromie archaïque. Ce sont surtout les peintures de vases qui montrent la formation de la polychromie archaïque au cours du viie s., mais un procédé analogue a dû avoir lieu aussi dans d’autres arts. Ainsi la sculpture en pierre, dite monumentale, née au milieu du siècle, a été dès ses débuts polychrome. Cela vaut aussi pour le temple monumental en pierre : il y a des peintures murales polychromes ainsi que des éléments architecturaux et des sculptures polychromes. Pline considère la peinture polychrome égyptienne comme ayant une influence décisive pour la naissance de la peinture polychrome grecque, bien qu’il parle aussi, ce qui est un peu contradictoire, des « inventeurs » grecs. Mais si la peinture égyptienne a joué un rôle dans ce procédé, ce rôle était négligeable. Au contraire, il faut considérer un phénomène de langage : le mot ƺƴǁƵ (ƺƴƲƭƠ, ƺƴƲƭƢ), qui dans les poèmes homériques signifie « peau », un mot homérique pour la couleur n’existant
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pas, devient dans la poésie du viie s. le mot qui désigne la couleur. Ce changement de sens trouve son équivalent dans la transformation du coloris des œuvres de l’époque géométrique à la polychromie des œuvres archaïques. MOTS-CLEFS Polarité, époque géométrique, polychromie archaïque, vases peints, rouge, sculpture monumentale en pierre, peinture murale, éléments architecturaux polychromes, moulures, sculptures, peinture égyptienne polychrome, Pline l’Ancien, ƺƴǁƵ, ƺƴƲƭƠ, ƺƴƲƭƢ, poèmes homériques, peau. ƕƊƖƎƐƌƜƌ
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about the author E. Walter-Karydi, Professor of Classical Archaeology, University of Saarbrücken, Germany; Dr h. c.
bibliographical abbreviations Amyx 1988 = D. A. Amyx, Corinthian Vase-Painting of the Archaic Period. Kübler 1943 = K. Kübler, Kerameikos IV. Neufunde aus der Nekropole des 11. und 10. Jahrhunderts. Schaus 1988 = G. P. Schaus, “The Beginning of Greek Polychrome Painting”, JHS 108, pp. 107-117. Tiverios 1996 = M. Tiverios, ƊƯƯƫưƭƮƢƷơƺưƫƆƴƺƥƣƥƥƧƧƩƣƥ. Walter-Karydi 1986 = “Prinzipien der archaischen Farbgebung”, in K. Braun, A. Furtwängler (eds), Studien zur klassischen Archäologie Friedrich Hiller zum 60. Geburtstag, pp. 23-41. Walter-Karydi 1991 = E. Walter-Karydi, “ƛƖƝƗ – Die Entstehung des griechischen Farbwortes”, Gymnasium 98, pp. 517-533.
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Ancient Greek art did not always boast a variety of colours. Of course, Mycenaean artefacts display polychromy: the wall paintings in the palaces of the rulers, such as a life-size richly clad female (fig. 1), are famous. 1 Mycenaean sculptures too can be polychrome; a well known example is the stucco head from the 13th century BC from the acropolis at Mycenae. 2 Polychrome paintings are also found on gravestones 3 as well as on terracotta vases; even on bronze weapons inlaid gold, silver and niello were used to create manycoloured images. 4 About 1000 BC a fundamental colour change took place: polychromy was abandoned in favour of a polarity of light and dark values that became the colour principle of Greek art for the following archaic Age. Since the Mycenaeans were Greeks, there is no way of explaining this event through the incursion of a new ethnic group, and it certainly was not an artistic impoverishment. I propose to look at this in connection with the simultaneous disappearance of figured scenes as well as of plant and spiral
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10 cm
Fig. 1 — Mycenaean woman. Wall painting from the cult centre at Mycenae. Late 13th century BC. Athens, Nat. Mus. (Photo: Nat. Mus.). 1.
2. 3. 4.
S. A. Immerwahr, Aegean Painting in the Bronze Age (1990), pp. 119-120, fig. 32h, pp. 165-166, no. 3 (with further references), colour pl. XX. For a new interpretation of the figure, see B. R. Jones, “New Reconstructions of the ‘Mykenaia’ and a Seated Woman from Mycene”, AJA 113 (2009), pp. 309-337, figs. 1, 2, 20-22, 26, 27 (right). Athens, Nat. Mus. R. Hampe, E. Simon, The Birth of Greek Art from the Mycenaean to the Archaic Period (1981), p. 235, colour pl. 373. E.g. a gravestone from Mycenae in Athens, Nat. Mus.: R. Hampe, E. Simon (n. 2), p. 37, colour pl. 53 (13th-12th century). See A. Xenaki-Sakellariou, C. Chatziliou, “Peinture en métal” à l’époque mycénienne (1989).
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2 Fig. 2 — Attic amphora from the Kerameikos. 10th century BC. Athens, Kerameikos Mus. (Photo: D-DAI-Ath neg. KERAMEIKOS 4244). Fig. 3 — Attic amphora from the Kerameikos. c. 850 BC. Athens, Kerameikos Mus. (Photo: D-DAI-Ath neg. KERAMEIKOS 4288).
3
ornaments; as is well known, all these were richly represented in Mycenaean imagery. 5 The lack of figured scenes in the 10th and 9th centuries (the few human or animal figures that have been found cannot change the overall picture) goes hand in hand with the new ornaments: compass-drawn circles, straight lines, and rectangular patterns (figs. 2-3). 6 These motifs are not abstractly reduced images of Mycenaean ornaments but primary geometric forms, and A. Furtwängler aptly chose the term “Geometric” for the art of the three centuries after 1000 BC. 7 The abandoning of polychromy, of figured scenes and 5.
6.
7.
The following arguments are more fully presented in E. Walter-Karydi, “Der ungegenständliche Aufbruch am Beginn der griechischen Kunst”, in K. Möseneder, A. Prater (eds), Aufsätze zur Kunstgeschichte, Festschrift für H. Bauer (1991), pp. 33-42. Fig. 2: Kübler 1943, p. 40, pl. 12 inv. 2131 (grave 39). Fig. 3: id., Kerameikos V 1. Die Nekropole des 10. bis. 8. Jahrhunderts (1954), p. 235, pl. 46 inv. 2146 (grave 41); N. Coldstream, Greek Geometric Pottery (1968), p. 14. He used the term for bronzes of this period and then for the period as a whole (“Die Bronzefunde aus Olympia und deren kunstgeschichtliche Bedeutung”, AbhAkWissBerlin 1879; reprinted in J. Sieveking, L. Curtius [eds], Kleine Schriften I [1912], pp. 339-421). Cretan art does not always adhere to the rules
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Fig. 4 — Attic amphora from the Dipylon. Prothesis. c. 760-750 BC. H. c. 1.55m. Athens, Nat. Mus. 804 (Photo: D-DAI-Ath neg. Nat. Mus. 1578).
of plant and spiral ornaments, marks a new artistic beginning, indicating a fundamental change in mentality. It is very clear that this new beginning owed nothing to foreign influence. The polarity of light and dark is still found in the figured scenes (dark silhouettes on a light ground) that became frequent in the eighth century, mainly in Attic vase painting (fig. 4). 8 It is significant that this polarity reflects the concept of colour in the Homeric poems. 9 Philological research has indeed shown that some Homeric words did not denote colour until later. For instance, ƺƯƼƴƿƵ is used of plants and trees, meaning “moist”; the sense of “green” developed only later, since living vegetation has this colour. In general, Homer mostly foregoes indicating colour in favour of stating how light or dark something is; for this he uses a great number of words. Those denoting the light value are related to brightness and can be translated as “brilliant”, “glittering”, “sparkling”, “flashing”, “dazzling” and so on; thus in the Homeric poems ƯƩƸƮƿƵ (“white”) can be used of water or a bronze vessel. A leukaspis warrior (Il. 10.294) is one with a brilliant shield. The tripod cauldrons that are the most prestigious offerings in Geometric sanctuaries, reaching a height of over 4m in the 8th century, 10 can also be considered to be “white” in a Homeric sense; decorated with incised geometric ornaments, without the colour effect from inlay work that Mycenaean bronze daggers had, 11 they would have shimmered in the sunshine as they stood in the open air in the sanctuary.
8. 9. 10. 11.
that apply to Geometric art in other regional schools and follows its own course; it will be excluded from the following discussion. N. Coldstream (n. 6), pp. 29-30, no. 1, pl. 6; Tiverios 1996, p. 239, colour pl. 2. See Walter-Karydi 1986, pp. 34-35, with further references. See M. Maas, Die geometrischen Dreifüsse von Olympia, Olympische Forschungen 10 (1978). See A. Xenaki-Sakellariou, C. Chatziliou (n. 4).
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5
Fig. 5 — Attic amphora from Eleusis; on the neck Odysseus and his companions blinding Polyphemus. c. 670 BC. Eleusis Mus. (after Tiverios 1996, p. 242, colour pl. 6). Fig. 6 — Attic krater from the Kerameikos. Sphinx. c. 640 BC. Athens, Kerameikos Mus. 801 (after M. Robertson, La peinture grecque [1959], p. 52 colour pl.).
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The value “dark” is expressed with adjectives like uơƯƥƵ (“black, dark”), ƮƸƠưƩƲƵ (“blue, dark”) and so on. Dark is related to the night and the underworld, but the sea can also be called dark, as a menacing force, or alternatively bright and shining: as a rule, Homeric colour terms do not denote an unchangeable quality of the things to which they are applied. Without going into the various peculiarities of the Homeric concept of colour, it must be stressed that the poet was not “colour-blind”, as he has been called; rather, he saw in the world a polarity of light and dark. This concept of colour is connected to the way of thinking in pairs of contrasts that was established in the Homeric poems and remained valid in the Archaic age. 12 In vase paintings of the first half, and mainly the second quarter, of the 7th century, a new feature consists of white applied over reserved areas of the figures, as in the scene showing Odysseus and his companions blinding Polyphemus (fig. 5); 13 one of the Greeks is wholly white, while the others have white faces and Polyphemus a reserved one. About the middle of the century red was added as a third value, and Archaic polychromy was created; the artists discovered the impact of colourful images. An example is the sphinx (fig. 6), 14 and it is telling that Beazley attributed this vase to the first painter in his “Earliest Black Figure”: 15 the colour triad (light, dark, red) 16 introduces the most characteristic Archaic technique in vase painting, the so-called black figure. 17 The new colour principle retained the polarity of the colour values. While, as a rule, we think of hues when we consider colour in painting, in this art there existed not hues but values. Thus to the value “light” may be assigned colours that look different to the modern viewer, such as white and beige on the sphinx (fig. 6). The value-based concept in Archaic art is not to be approached with assumptions based on hue. On Protocorinthian vase paintings, the triad of light, dark and red is accompanied by masterly incision that contributes to elaborate miniature images, for example on animal friezes (fig. 7). 18 On early Attic black figure vases, the incision is more large-scale (fig. 6), 12. 13. 14. 15. 16.
17.
18.
See H. Fränkel, Wege und Formen frühgriechischen Denkens 2 (1960), p. 206, n. 2; id., Dichtung und Philosophie des frühen Griechentums2 (1962), pp. 59, 603-604. Tiverios 1996, p. 242, colour pll. 6-7. K. Kübler, Kerameikos VI 2. Die Nekropole des späten 8. bis frühen 6. Jahrhunderts (1970), pp. 505-506, no. 115 inv. 801 pll. 87-88. ABV 2, p. 1, no. 2: Painter of Berlin A 34. In European painting a triad of primary colours (red, blue and yellow) is also found; see E. Strauss in L. Dittmann (ed.), Koloritgeschichtliche Untersuchungen zur Malerei seit Giotto und andere Studien 2 (1983), pp. 115ff., but the Archaic Greek triad has characteristic traits of its own. See Walter-Karydi 1986, pp. 26-28. See Fr. Villard, “La céramique polychrome du viie siècle en Grèce, en Italie du Sud et en Sicile et sa situation par rapport à la céramique protocorinthienne”, ASAtene n. s. 43 (1981), p. 136: “le type le plus fréquent de polychromie, vers 640 ou dans les années qui suivent est celui qui, sous diverses formes, associe la polychromie à la technique des figures noires”. Fig. 7: one of the three fragments. W. Kraiker, Aigina. Die Vasen des 10. bis 7. Jahrhunderts (1951), p. 60, no. 341 pll. B, 27, with new finds. Amyx 1988, p. 35, no. 8 (The Sacrifice Painter) pl. 12; J. L. Benson, Earlier Corinthian Workshops. A Study of Corinthian Geometric and Protocorinthian Stylistic Groups (1989), p. 61, no. 2 (The Sacrifice Workshop). E. Walter-Karydi, “Shapes, Colours, Images:
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and on Cycladic ones it is as a rule less consistent, as for instance on the well known Parian krater-amphora (fig. 8). 19 Finally, in East Ionian vase paintings of the 7th century there is no incision at all: see for example the Lévy Oinochoe of c. 640-630 BC. 20 The different use of incision in the various regional schools reveals that they were not all interested to the same degree in precise articulation –this interest is most marked in the Corinthian vases of the second half of the 7th century. But the colour triad is found in all pottery schools. A short article by H. Jantzen that appeared in 1913 marked the beginning of art historical research on the visual character of colour in painting. 21 He distinguished the representational value of colour (Darstellungswert) from its intrinsic value (Eigenwert). It is indeed noteworthy that, with the emergence of Archaic polychromy in the mid-7th century, colour acquired a representational value for the first time in Greek art of the first millennium. There is no need to go here into the distinctive traits of this value in Archaic art, 22 but it must be stressed that its appearance is related to another significant innovation in these years: the connection of the surface of a figure with the substantial body of which it is a part. On the surface of a Protogeometric terracotta deer (fig. 9), 23 nothing represents the hide; in this age, geometric patterns cover every available surface, whether the article is an animal, a chest 24 or a vase (fig. 2). The surface of the deer statuette appears not to be, as it were, associated with the substantial body of which it is a part. The same applies to two Attic terracotta birds of the mid-8th century: 25 the painted patterns certainly do not represent feathers. The order underlying the nonrepresentational motifs on such figures may be called ƮƿƶuƲƵ, in the Homeric sense of the word. 26 Obviously, the surface of the geometric figures is autonomous, so that even
19.
20. 21. 22. 23. 24. 25. 26.
Ventures of the Chigi Master and his Corinthian Contemporaries”, in E. Mugione (ed.), L’Olpe Chigi. Storia di un agalma (2012), p. 73, fig. 11b (with other fragments of this vase). Tiverios 1996, p. 246 colour pl. 15. Such vases were once called “Melian” but N. Kontoleon recognized them as Parian (“Theräisches”, AM 73 [1958], pp. 133-136); he was followed by Fr. Salviat, “La colonisation grecque dans le nord de l’Egée. Céramique parienne orientalisante, céramiques précoloniales à Thasos”, in Le Rayonnement des civilisations grecque et romaine. VIIIe congrès international d’archéologie classique (1963), pp. 299-303; id., “La céramique thasienne orientalisante et l’origine des vases ‘méliens’ ”, in Les Cyclades. Table ronde Dijon – 1982 (1983), pp. 185-190; H. Walter, Samos V. Frühe samische Gefäße. Chronologie and Landschaftstile ostgriechischer Gefäße (1968), p. 80; E. Walter-Karydi, Samos VI 1. Samische Gefäße des 6. Jahrhunderts v. Chr. Landschaftstile ostgriechischer Gefäße (1973), pp. 74-76, and so on. New finds in Paros about this workshop’s location dispelled the last doubts some scholars still harboured (e.g. P. Zaphiropoulou, “ƑƸƬƲƯƲƧƭƮƢƳƥƴƠƶƷƥƶƫƶƩƥƧƧƩƣƲƷƲƸƲƸƥƭƳƛ”, AEphem 147 [2008], pp. 225-246). M. Denoyelle, Chefs-d’œuvre de la céramique grecque dans les collections du Louvre (1994), p. 24, no. 7. “Über Prinzipien der Farbengebung in der Malerei”, reprinted in H. Jantzen, Die Aufsätze (1951), pp. 61-68. See Walter-Karydi 1986, pp. 31-32. Kübler 1943, p. 40, pl. 26. E.g. an Attic chest model from the Kerameikos (Walter-Karydi 1991, p. 520, pl. XVII 2). K. Kübler 1954 (n. 6), p. 245, inv. 1308 and 1309, pl. 144. See Walter-Karydi 1991, p. 520.
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Fig. 7 — Protocorinthian oinochoe from the sanctuary of Apollo at Aegina. Animal friezes. c. 640-630 BC. Aegina Mus. 1754 (Photo: E. Walter-Karydi). Fig. 9 — Attic terracotta deer from the Kerameikos. 10th century BC. H. 26.6 cm. Athens, Kerameikos Mus. 641 (Photo: D-DAI-Ath neg. KERAMEIKOS 4407).
Fig. 8 — Parian krater-amphora. Apollo on a chariot drawn by winged horses, escorted by two females, is welcomed by his sister Artemis. c. 650-640 BC. Athens, Nat. Mus. 911 (Photo: Nat. Mus.).
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a
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Fig. 10 — Attic krater from Aegina (drawing). a. Orestes stabbing Aegisthus; b. Artemis, Apollo (?). c. 670 BC. Berlin, Antikensammlung A 32 (after CVA Berlin 1, pll. 20-21).
figured images may appear on late Geometric statuettes, for instance incised birds on the neck of a bronze horse. 27 It is consistent with this quality of the Geometric figures’ surface that, in the dark silhouettes on vase paintings, male skin is not differentiated from female, since no skin as such is represented at all. Likewise, when late Geometric human figures have reserved faces, this occurs with both males and females, 28 just as the added white of the first 27. 28.
Bonn, Akadem. Kunstmus.: N. Himmelmann, “Die Lanzenschwinger – Bronzen Olympia B 1701 und 1999”, AA 1974, pp. 544-554, figs. 1-7; Walter-Karydi 1991, fig. 1. E.g. the dancing men and women on the neck of an Attic hydria from c. 700 BC (CVA Berlin 1, p. 10, fig. 1). This still occurs in the early 7th century, e.g. on the lutrophoros of the Analatos Painter: M. Denoyelle (n. 20), p. 22, colour pl.
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half of the 7th century is not used for gender differentiation: male figures may be white (fig. 5). On fig. 10a Orestes, who is stabbing Aegisthus, is dark, while his victim is white, like Klytaimnestra who, appalled, turns away; on the other side of the vase (fig. 10b) 29 a female with a bow, obviously Artemis, has a dark arm and a white face, while the male facing her, probably Apollo, is wholly white. It is evident that the added white had no representational value; it merely enhances the polarity of dark and light shortly before the vase painters begin to use red, creating the Archaic colour triad. The independant quality of the figures’ surface may explain the infrequent representation of clothing in Geometric images. 30 For instance, in the prothesis scene shown in fig. 4 the gender of the figures around the corpse on the bier is indicated mainly through their gestures of ritual lament, the women with both arms raised to tear their hair, and the men raising only one arm in salutation of the dead. Accordingly, it is not only the long-gowned figures in this scene who are female, but also those performing the female gesture of lamentation –and they are certainly not to be thought of as nude. In this scene, only the two figures on the left, who raise one arm and have a dagger strapped on, are male. Surprising as it may be to a modern viewer, there is no intentional rendering of clothing or nudity in Geometric art. In the second quarter of the 7th century, some pioneers among the vase painters throughout Greece attempted to distinguish male skin through colour. For instance, on the Argive krater (fig. 11) Polyphemus and the Greeks blinding him have reddish skin. 31 On an Attic oinochoe of c. 670 BC from the sanctuary of Apollo at Aegina, 32 Odysseus and his companions, who are leaving Polyphemus’ cave tied under his rams so that when the Cyclops feels blindly he will not find them, have reddish skin too, while the rams’ hide, rendered in its particular texture through parallel reddish brush strokes, is distinguished from the human skin: this is never the case in Geometric painting. In the Naxian scene shown in fig. 12 33 there is a team of two galloping horses; the one in the foreground is black with a reddish head, and applied white and reddish alternate on the mane enhancing its lushness, while the second horse has a reddish body and mane and a white head. The horses overlap a second chariot, of which the black-clad driver has a reddish skin. Part of the vase painter’s signature is preserved, but not his name. On a contemporary Naxian krater-amphora, 34 the male god standing on a chariot with
29. 30.
31. 32. 33. 34.
CVA Berlin 1, pll. 18-21. That clothing is seldom represented in this art has been often remarked upon N. Coldstream (n. 6), p. 39; N. Himmelmann, Ideale Nacktheit in der griechischen Kunst, JdI 26. Ergh. (1990), pp. 19-20, 29-34; id., “Klassische Archäologie – kritische Anmerkungen zur Methode”, JdI 115 (2000), pp. 298-300; A. Stewart, Art, Desire and the Body in Ancient Greece (1997), p. 38. P. Courbin, “Un fragment de cratère protoargien”, BCH 79 (1955), pp. 1-49. See Walter-Karydi 1991, p. 529. Aegina Mus. 1754. W. Kraiker (n. 18), pp. 87-88, no. 566, pll. 44-45; The Human Figure in Early Greek Art, Exhibition Washington (1988), pp. 97-98, no. 22, colour pl. N. Kontoleon, Prakt 1960, pp. 259-260, pl. 196a. Naxos Mus.; C. Karusos, “Eine naxische Amphora des früheren siebenten Jahrhunderts”, JdI 52 (1937), pp. 166-197.
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Fig. 11 — Argive krater from Argos. Odysseus and his companions blinding Polyphemus. c. 670-660 BC. Argos Mus. (Photo: EFA, Ph. Collet). Fig. 12 — Naxian krater from Naxos. Chariot race. c. 660 BC. Max. h. 14cm. Naxos Mus. 2154 (after O. Philaniotou [ed.], The Two Naxos Cities. A Fine Link between the Aegean and Sicily [exhibition University of Athens, 2001], pp. 46-47, no. 22 colour pl.). Fig. 13 — Cycladic plate from Thasos. Bellerophon flying on his winged horse Pegasos against the Chimaira. c. 660 BC. Thasos Mus. ƕ 2085 (Photo: EFA, Ph. Collet). 12
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winged horses likewise has reddish skin (while that of the female, labelled Aphrodite, is reserved) and the same is the case with Bellerophon on the plate fig. 13. 35 This distinguishing of male skin by colour is also found on mid-7th century vases from Megara Hyblaea in Sicily. 36 Some isolated experiments in Attic vase painting of the late second quarter of the century are noteworthy. An amphora from c. 660-650 BC from Kynosarges has scenes in black figure technique, but the male figures have white skin; 37 on a contemporary krater there are birds displaying the colour triad but without incision. 38 There is even a shortlived attempt at polychrome matt-painted white-ground on some vases of c. 660 BC from the Kerameikos. 39 Such experiments bear witness to a creative restlessness in the Attic workshops shortly before black figure was established. In this style, male skin is as a rule dark, and female skin white, for instance in the vivid scene of Athena bringing her protégé Herakles to Olympus and introducing him to Zeus on a cup by the Phrynos Painter of c. 550-540 BC. 40 Creating gender differentiation through colour polarity was an achievement of the Archaic age. Even after the mid-7th century, reddish colour is (instead of black) used to depict male skin on non-Attic vases. For instance, on the Parian vase shown in fig. 8 Apollo has reddish skin, as have the men on the later Parian vases shown in figs. 14a and b 41 (the women have white skin) and fig. 15. 42 These warriors are Achaean heroes, since one of them is labelled M[e]nel[aos and another one probably Sthen[elos, and they are marching to battle together with those on the chariot behind them, fellow warriors (or gods?). 43 The Parian painter of the Potnia, fig. 16, 44 gifted though he was, has mistakenly given the goddess red feet (that is, a male skin colour), while on her face and arms the skin is reserved, and therefore female.
35. 36. 37.
38. 39. 40. 41. 42. 43.
44.
Fr. Salviat, N. Weill, “Un plat du viie siècle à Thasos : Bellérophon et la Chimère”, BCH 84 (1960), pp. 347-386, pll. IV-VI; Fr. Salviat (n. 19, 1983), p. 185. Fr. Villard (n. 17), pp. 134-135, pll. II.1, 2. See Schaus 1988, p. 108. Athens, Nat. Mus. 14497. C. Smith, “A Proto-Attic Vase”, JHS 22 (1902), pp. 29-45, pll. 2, 3 (colour reconstructions); J. M. Cook, “Protoattic Pottery”, ABSA 35 (1934-1935), pp. 196-198, 201-202, 209-211, pll. 56-58; CVA Athens 2, III, He pll. 3-4, fig. 4. K. Kübler (n. 6), pp. 527-528, no. 176, fig. 62, pl. 110. Ibid., pp. 147-149 frontispiece (colour reconstructions of the oinochoai inv. 149 pl. 41 and inv. 140 pl. 53). ABV, pp. 168-169, 3; Tiverios 1996, pp. 257-258, colour pl. 34. See J. Boardman, LIMC 4 (1988), s.v. “Herakles”, p. 1690. Y. Kourayos, “ſưƥươƲƭƩƴƿƷƲƸƆƳƿƯƯƼưƥƶƷƲƉƩƶƳƲƷƭƮƿ”, AAA 38 (2002-2005), pp. 78-79, fig. 45. I thank Yannos Kourayos for allowing me to illustrate this high quality vase from his excavations. Menela[o]s’ name also appears in a procession of long-gowned, bearded Achaean dignitaries holding spears as signs of authority on an Attic stand of c. 670 BC (CVA Berlin 1, pll. 31-33; L. Giuliani, Bild und Mythos. Geschichte der Bilderzählung in der griechischen Kunst [2003], pp. 123-125, fig. 18). They are white skinned, as is usual in this time (See figs. 5 and 10). C. Karusos (n. 34), p. 173, figs. 13-14; E. Walter-Karydi, “Bronzes pariens et imagerie cycladique du haut archaïsme”, in Y. Kourayos, F. Prost (eds), La sculpture des Cyclades à l’époque archaïque. Colloque international Athènes, 1998, BCH Suppl. 48 (2008), pp. 25, 28, 31, fig. 11.
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a
b
Fig. 14 — Parian krater-amphora “from Melos”; a. Herakles and his bride Deianeira taking leave of her parents; b. detail (neck): Hermes and a female. c. 600 BC. Colour reconstructions by K. D. Mylonas. Athens, Nat. Mus. 354 (after K. D. Mylonas, “ƕƢƯƭưƲƵƥuƹƲƴơƥƵƩƮƑƢƯƲƸ”, AEphem 1894, pp. 226-238, pll. 13-14).
0
5 cm
Fig. 15 — Parian dinos from the Apollo sanctuary at Despotiko. Achaean warriors marching to battle. Later 7th century BC. Paros, Mus. 4083, 4084, 4085 (Photo: Y. Kourayos).
Fig. 16 — Krater-amphora, detail (neck). Potnia with a lion. Max h. 30 cm. c. 640-630 BC. Berlin, Antikensammlung F 301 (after a museum postcard).
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THE EMERGENCE OF POLYCHROMY IN ANCIENT GREEK ART IN THE 7th CENTURY BC
Fig. 17 — Thasian plate from Thasos. Rider. c. 640-630 BC. Thasos Mus. ƕ 2057 (Photo: EFA, Ph. Collet).
Fig. 18 — Protocorinthian oinochoe from the sanctuary of Apollo at Aegina. Animal frieze; preparation of a bull’s sacrifice; warrior and Amazon (labelled) who stretches out her right hand begging for mercy while holding the bow in her left; head of a satyr; rest of the fight with the Hydra (part of the Hydra and a red shoe of Herakles or rather Iolaos). c. 640-630 BC. Aegina Mus. 1379 and new fragments without nos. (Photo: E. Walter-Karydi).
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On Thasian vases reddish male skin is as frequent as on the Parian vases, e.g. on the rider fig. 17. 45 Finally, the East Dorian workshop uses a reddish colour for male skin too, as in the scene of Menelaus fighting Hector over the body of Euphorbus on the famous plate in the British Museum from Rhodes. 46 Reddish male skin is also found in a small group of Protocorinthian masterpieces of the third quarter of the 7th century. In these black figure scenes, colour has an articulating function that is strikingly more effective than in any other Archaic vase paintings. Thus, on the celebrated Chigi olpe of c. 640-630 BC, 47 incision and colour, even some yellow, articulate the closely knit marching warriors and their armour with a striking precision. In another proto-Corinthian masterpiece (fig. 18), even the horses’ feet are differentiated in colour, black and reddish, while the heron flying to the left has a reddish neck and head and black-figured wings; the male figures have reddish and the Amazon reserved skin. 48 Yellow, a light value, is frequent in the black-polychrome vases, as on an oinochoe that is decorated entirely with flawlessly incised tongues and compass-drawn incised scales in red, dark and yellow, as well as rosettes in applied white. 49 The Protocorinthian vase painters’ ability to combine colour and incision brings about a stunning decorative effect. It is true that it is in vase painting, where so much is preserved, that we can best follow the emergence of polychromy, but a corresponding process must have taken place in free painting too. Only wall paintings of the years shortly after the mid-7th century are known: a battle scene in the cella interior of the temple at Kalapodi 50 and fragments in full polychromy from the temple of Poseidon at Isthmia, most probably the cella interior as well. 51 These wall paintings are firm evidence for the beginning of monumental polychrome painting in the mid-7th century.
45. 46.
47. 48.
49. 50.
51.
Fr. Salviat (n. 19), pp. 185-190, figs. 1, 2; Y. Grandjean, Fr. Salviat (dir.), Guide de Thasos2 (2000), p. 25, colour pl. 4. Tiverios 1996, p. 245, colour pl. 13. On the East Dorian character of the Euphorbus plate see H. Walter (n. 19), p. 79, pll. 129, 623; E. Walter-Karydi (n. 19), p. 91; R. Attula, “Archaic Greek Plates from the Apollo Sanctuary at Emecik, Knidia. Results and Questions Regarding Dorian Pottery Production”, in A. Villing, U. Schlotzhauer (eds), Naukratis: Greek Diversity in Egypt. Studies in East Greek Pottery and Exchange in the Eastern Mediterranean, Brit. Mus. Research Publ. 162 (2006), p. 86. Amyx 1988, p. 32, no. 3 (Chigi Painter); J. L. Benson (n. 18), p. 57, no. 3 (Chigi Painter); Tiverios 1996, pp. 243-244, colour pll. 9-10; E. Mugione (n. 18). W. Kraiker (n. 18), pp. 59-60, no. 340, pl. 27; Amyx 1988, p. 35, no. 8, pl. 12.1 (The Sacrifice Painter, very close to the Chigi Painter); J. L. Benson (n. 18), p. 61, no. 1 (The Sacrifice Workshop) [fig. 18] with newfound fragments of the vase ; E. Walter-Karydi (n. 18). R. Hampe, E. Simon (n. 2), pp. 159-160, colour pl. 251 ; Amyx 1988, p. 40, no. 1, p. 540. See W. D. Niemeier, JHS ArchRep 127 (2007), p. 42, fig. 50; W. D. Niemeier, B. Niemeier, A. Brysbaert, “The Olpe Chigi and New Evidence for Early Archaic Greek Wall-Painting from the Oracle Sanctuary of Apollo at Abai (Kalapodi)”, in E. Mugione (n. 18), pp. 79-86, pll. XIIIa, XIV. O. Broneer, Isthmia I. The Temple of Poseidon (1971), pp. 33-34, colour pll. A-C; W. D. Niemeier, B. Niemeier, A. Brysbaert (n. 50), pp. 81-83, pll. XIIa-d.
THE EMERGENCE OF POLYCHROMY IN ANCIENT GREEK ART IN THE 7th CENTURY BC
Turning to sculpture, we may establish that the so-called monumental sculpture in stone emerging in the mid-7th century was from the very start polychrome: Nikandre, as the first example of such a female statue, proves the point. 52 Thus, to the qualities distinguishing this sculpture –such as its coordinated proportions, stable stand and so on– we must add its colourful appearance. The emergence of polychromy in sculpture is linked to another significant innovation of these years, mentioned above: 53 the surface of a figure is now connected to the substantial body of which it is a part. Accordingly, intelligible visual formulae for animal’s hides, bird’s feathers and so on appear, and these formulae are polychrome. On the earliest large-scale stone lion, a limestone sculpture at Olympia from c. 660 BC, the mane is rendered with incised scales, drawn with a compass and alternately painted red, blue, and a light colour (perhaps yellow). 54 Obviously, as with painting of the Archaic period (see above), colour acquires a representational value in sculpture. Therefore, it is not surprising that from now on clothing and nudity are clearly indicated, and there is no doubt as to whether a figure is nude or not. Two terracotta females in funeral lamentation may illustrate the point: on the Attic statuette of c. 700 BC, 55 the late Geometric patterns in dark on light do not represent clothing. There is even a lamenting female painted on the independant surface of its front and rear, while the Cycladic statuette of c. 600 BC from Thera wears a belted black and red dress that is rendered unambiguously. 56 The colour triad dominates in Archaic sculpture: light (white or yellow), dark (black or blue), and red. Green is found occasionally, for instance on the narrow framing ornament of an Attic grave stele, from c. 530 BC, 57 but it is used only for details, not on large surfaces. Archaic stone architecture is polychrome too, as is well known. Bronze decoration was applied on Geometric temples, which were constructed mainly of mudbrick and wood, with stone being used only for thresholds, beds for wall timbers and socles, 58 as the
52. 53. 54.
55.
56.
57.
58.
See G. Kokkorou-Alevras in this volume, pp. 115-130. See above, pp. 104-105. G. Treu, Olympia III (1897), p. 26, pll. 5.1-2; J.-F. Crome, “Löwenbilder des siebenten Jahrhunderts”, in Mnemosynon Theodor Wiegand (1938), pp. 47-50, pll. 7, 9, 10. See Walter-Karydi 1991, pp. 530-531, pl. XXIV.2. R. S. Young, “Late Geometric Graves and a Seventh Century Well in the Agora”, Hesperia Suppl. 2 (1939), pp. 53-54, XI 18, figs. 35-36 (a similar figure from the same vase: p. 55, XI 19, fig. 35); WalterKarydi 1991, pp. 523-524, 528, pl. XXI.2. H. Dragendorff (ed.), Thera II (1903), p. 24, fig. 56; The Human Figure in Early Greek Art. Exhibition Washington (1988), p. 100, no. 23, colour pl. Of course, in the first half of the century female clothing was much more frequently rendered than in the Geometric age. New York, Metropolitan Mus. of Art. L. F. Hall, “Notes on the Colors Preserved on the Archaic Gravestones in the Metropolitan Museum”, AJA 48 (1944), pp. 334-35, pl. IX; G. Richter, The Archaic Gravestones of Attica (1961), no. 45, figs. 126-128, 179. See H. Drerup, Griechische Baukunst in geometrischer Zeit, Archaeologia Homerica II O (1969), pp. 131132 and passim.
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brilliance of this material was highly appreciated in this age. 59 If these temples also had paintings, they must have followed the Geometric colour principle of dark on light. The painted decoration of the well-known small votive models of this age 60 is not, of course, identical to that of contemporary temples, but may suggest how their decoration could have looked. The evidence of the excavated buildings is meagre: in the Toumba building at Lefkandi, the walls above the stone socle were built of mud bricks of brown clay preserved in two, three or four courses; between courses a pale, sometimes almost white, mud mortar was visible. 61 There were also alternate courses of brown and yellow bricks. 62 Apparently this patterned brickwork was an intentional decoration, as the excavators realized; not being polychrome, since there is no red, it follows the colour principle of the Geometric period. It seems that the realization of the role polychromy may play in architecture goes hand in hand with the discovery of the potential uses of stone as a building material in the 7th century. 63 The temple of Apollo at Corinth of the first half, or more specifically the second quarter, of the century does not seem to have had polychrome decoration; its embellishment, focused on the roof, consisted in the tiles being arranged in stripes, “a pattern of dark stripes on the roof at regular intervals”. 64 This pattern still follows the Geometric colour principle of temple decoration. It is true that it is not before the second quarter of the 6th century that a complete colour reconstruction of a temple can be achieved. 65 All mouldings, lion heads and other forms of water-spouts and so on were polychrome, the vertical elements such as the triglyphs, mutuli and guttae being blue, the horizontal elements red. The sculptures, whether in relief or in the round, were of course polychrome. While there is rich evidence for temple polychromy in the 6th century, we know little about the 7th. Nevertheless, the wall paintings of the temples at Kalapodi and Isthmia, mentioned above, 66 suggest that already in the mid-7th century the use of colour was introduced on the temple buildings themselves; Archaic stone architecture must have been polychrome from the very start.
59. 60. 61. 62. 63.
64. 65. 66.
See above, p. 99. T. G. Schattner, Griechische Hausmodelle, AM 15 Beih. (1990). J. Coulton, H. W. Catling, Lefkandi II. The Excavation, Architecture and Finds, ABSA Suppl. 23.2 (1993), pp. 37-38. J. Coulton, H. W. Catling (n. 61), p. 55. I thank B. Schmaltz for mentioning this example to me. On the pioneer role of Corinthian masons in this process see R. F. Rhodes, “The Earliest Greek Architecture in Corinth and the 7th-Century Temple on Temple Hill”, in C. N. Williams II, N. Bookidis (eds), Corinth. The Centenary 1896-1996, Corinth XX (2003), pp. 85ff. P. Sapirstein, “How the Corinthians Manufactured their First Roof Tiles”, Hesperia 78 (2009), p. 201, fig. 3 (reconstruction of the pattern). See R. F. Rhodes (n. 63), p. 92. See for instance the colour reconstruction by E.-L. Schwandner, Der alte Porostempel der Aphaia auf Aegina (1985), frontispiece. See above, n. 49-50. Another example might be the mid-7th century painted frieze of a procession of warriors, attributed to the second Hecatompedos of the Samian Heraion (G. Gruben, Griechische Tempel und Heiligtümer5 [2001], pp. 351-352, fig. 267). The frieze was probably polychrome but no colours are preserved.
THE EMERGENCE OF POLYCHROMY IN ANCIENT GREEK ART IN THE 7th CENTURY BC
To sum up, polychromy emerged in the mid-7th century and was found in all major art forms. Of course, each artistic genre followed its own rules; for example, as Beazley has pointed out, “Black-figure is a vase-technique”. 67 It is in principle that the colour language of the Archaic age was strikingly uniform. 68 This uniformity did not last; already in the early Classical art a differentiation set in, but that is beyond the scope of this paper. In the above discussion, the role that some scholars attribute to Egyptian art for Greek painting and the emergence of polychromy has not featured. Pliny twice mentions Egypt as the originator of painting (N.H. 7.205; 35.16), suggesting that from there the idea came to Greece, although he goes on to mention “inventors” in Greece. 69 It is well known that the concept of a single individual inventing an art form or a technical device or similar (protos euretes) was deeply rooted in early Greece. In this paper, I have tried to trace Pliny’s Greek “inventors” not as the single personalities he mentions, but as a reflection of a genuinely Greek process revealed by the preserved works themselves: the transformation of the dark/light polarity, the colour principle in Geometric art, into the light/dark/red triad of Archaic art, was a panhellenic event of the mid-7th century. For instance, it cannot be seriously considered that the Athenian Eumaros was the first to distinguish male and female through colour in painting, as Pliny (N.H. 35.56) declares, since it is possible to follow the attempts of the vase painters in the various regional workshops to do just that (see above). The steps the vase masters take towards polychromy show that its emergence was not an isolated “invention” of one artist. This evidence is significant, since these pot-bound images have an importance of their own; Archaic vase painting was not dependent on free painting, but a self-sufficient art. As such, it bears a strong affinity to free or largescale painting, being, as E. Pfuhl put it, “ein wertvoller Teil der Gesamtmalerei des Archaismus”. 70 Therefore it is redundant to ask whether polychromy was invented in free painting or vase painting. 71 Besides, polychromy is not limited to painting, whether free/large-scale or pot-bound, but emerged in stone sculpture and presumably in stone architecture of the mid-7th century as well. Moreover, the Greeks, as a seafaring and merchant people, had contact with Egypt long before the mid-7th century, when “the opening up of Egypt to Greeks” 72 took place.
67. 68. 69. 70. 71.
72.
J. D. Beazley, The Development of Attic Black-Figure (1951), p. 1. See Walter-Karydi 1986. See Schaus 1988, p. 110 with further references. E. Pfuhl, Malerei und Zeichnung der Griechen (1923), p. 492. Fr. Villard (n. 17), p. 137, thinks that the polychrome technique “est d’origine purement céramique” and the free painters took it over from the vase painters; on the contrary, Schaus 1988, p. 109 postulates that “it seems most economical to suppose that this style came directly into Greek ’free’ painting, rather than through Greek vase painting first”. D. A. Amyx, “Archaic Vase-Painting vis-à-vis ‘Free’ Painting at Corinth”, in W. G. Moon (ed.), Ancient Greek Art and Iconography (1983), pp. 38bff. argues convincingly against the assumption that Protocorinthian vase painting, above all the polychrome images of the Chigi olpe (n. 47 above), was derived from mural paintings. Schaus 1988, p. 110, n. 34. See M. M. Austin, Greece and Egypt in the Archaic Age, PCPhS Suppl. 2 (1970), pp. 11-14.
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There is of course some Egyptian influence to be discerned in Greece, for instance in the fabrication of small objects, but this does not mean that a crucial new beginning such as the emergence of polychromy should be interpreted in this way. Egyptian polychrome painting, of which the influence Pliny joins with the achievement of Greek inventors in a slightly contradictory manner, played at best an incidental role in the genuinely Greek process of creating polychromy in art. It is worth recalling how, in c. 1000 BC, Mycenaean polychromy (of which Pliny knew nothing) was relinquished and a polarity of dark and light values created as the colour principle of Geometric art. A similar phenomenon, which likewise marked the beginning of a new age in art, was the emergence of polychromy in the mid-7th century; in this case too, there is no need to postulate foreign influence. There is a further factor to consider. The Homeric poems have no term for “colour”, which is not surprising and ƺƴǁƵ means “skin”. 73 The word ƺƴǁƵ as the term for colour begins to comes up as H. Fränkel pointed out, after Homer. 74 It is significant that the word denoting “skin” becomes the one for “colour” in the same period that, as was remarked above, the surface of a figure is aligned to the substantial body of which it was a part. All this reveals a process in the Greek language that corresponds to the emergence of polychromy in the art of the 7th century. There was clearly a change in the way the Greeks perceived what surrounded them, and the artists reacted in their own way as they explored the world of colour. Pliny’s statements, which have caused much controversy among scholars, do contain some truths amongst the contradictory information that he drew from his various sources, but they cannot be dealt with in the focus of this paper. I have instead tried to present the emergence of polychromy (in the form of the light/dark/red Archaic colour triad) as a mid-7th century event taking place in all major art forms –painting, sculpture, architecture and vase painting– and finding a striking parallel in early Greek poetry.
73.
74.
See B. Snell, Die Entdeckung des Geistes4 (1975), p. 17: for Homer ƺƴǁƵ is “die Haut; freilich nicht die Haut im anatomischen Sinn, die Haut, die man abziehen kann – das ist Derma –, sondern die Haut als Oberfläche, als Grenze des Menschen”. For the following see Walter-Karydi 1991, pp. 517-518, 531-532.
The Painted Decoration on the Garment of the Nikandre Statue
Georgia Kokkorou-Alevras
SUMMARY Already in 1882, in the presentation of the Nikandre statue in the Archäologische Zeitung by A. Furtwängler, mention was made of the existence of painted decoration on the garment of the figure. The author speaks specifically of seven to eight wide bands of meander, the typical Greek motif, which can be discerned on the dress of the statue of Nikandre underneath the belt. Since then, no progress has been made on this matter; on the contrary, the decoration of the garment of the Nikandre statue has almost been forgotten. In the meantime, the well-preserved decoration of the dress of a number of female Daedalic statues has been adequately published, such as that of the Lady of Auxerre and of the seated statue of Gortyna. A new study of the Nikandre statue has revealed some engraved motifs, which, with the help of these parallels, throw new light on this matter and allow us to reconstruct with more certainty the painted decoration of the dress of the Nikandre statue. KEYWORDS Delos, Nikandre, Lady of Auxerre, female daedalic figures, dress, engraved motifs, meander, Gortyna. RÉSUMÉ Le décor peint sur la robe de la statue de Nikandrè En 1882 déjà, lors de la présentation par A. Furtwängler dans Archäologische Zeitung de la statue offerte par la naxienne Nikandrè à Délos, il était question de l’existence d’un décor peint sur la robe de la statue. Plus précisément, l’auteur rapportait l’existence de sept à huit larges bandes décorées de méandres peints sur la robe de la jeune femme, sous la ceinture. Depuis, non seulement le sujet n’a pas eu de suite, mais l’existence d’une décoration sur la robe de Nikandrè a de surcroît été presque oubliée. Entre-temps, la décoration – cette fois-ci bien conservée – des robes de quelques statues dédaliques féminines comme la Dame d’Auxerre et la Déesse assise de Gortyne a été suffisamment publiée. Une étude récente de la statue de Nikandrè a, en outre, mis en évidence quelques incisions qui nous permettent, toujours avec l’aide des parallèles mentionnés ci-dessus, d’éclairer à nouveau la question de la décoration de sa robe et de la restituer avec une plus grande crédibilité. MOTS-CLEFS Délos, Nikandrè, Dame d’Auxerre, statues féminines dédaliques, robes, incisions, méandre, Gortyne. ƕƊƖ*ƐƌƜƌ
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GEORGIA KOKKOROU-ALEVRAS
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about the author G. Kokkorou-Alevras, Emeritus Professor of Classical Archaeology, Department of Archaeology and History of Art, School of Philosophy, National & Kapodistrian University of Athens, Greece.
acknowledgements I would like to thank the organisers of this very interesting conference, especially Professor P. Jockey, for inviting me to participate. Furthermore, I thank my friend Ms E. Walter-Karydi for her encouragement to present my research on the decoration of the kore of Nikandre at this symposium, and Professor G. Despinis for the fruitful discussions that we had on this very topic. See G. Despinis, N. Kaltsas (eds), ƏƥƷƠƯƲƧƲƵ ƈƯƸƳƷǁư Ǝ ƈƯƸƳƷƠ ƷƼư ƆƴƺƥƽƮǁư ƛƴƿưƼư ƥƳƿ ƷƲư Ʋ ƥƭǁưƥ ơƼƵ ƷƲ Ƴƛ (2014). I also thank Ms A. Antonakos for the translation of my Greek text into English, Professor Pl. Petridis for the translation of the summary into French and Ms A. Drigkopoulou for the drawings of the statue of Nikandre, figs. 10-11, 17. I am also grateful to Dr K. Karakasi for providing me with the photos in figs. 1, 3-5, 8. Professor Dr N. Kourou for the photos in figs. 14-15, the Archaeological Museum of Herakleion, Crete and M. Koutsoumbou for the photos in figs. 6-7, 12-13, the Museum of Classical Archaeology, Cambridge for the photo in fig. 18, and Dr J.-L. Martinez for the photo in fig. 5.
bibliographical abbreviations Bieber 1967 = M. Bieber, Entwicklungswgeschichte der griechischen Tracht. Davaras 1972 = C. Davaras, “Die Statue aus Astritsi”, AntK Suppl. 8. Donohue 2005 = A. A. Donohue, Greek Sculpture and the Problem of Description. Kaminski 2002 = G. Kaminski, “Dädalische Plastik”, in P. C. Bol et al., Die Geschichte der antiken Bildhauerkunst I. Frühgriechische Plastik, pp. 71-95. Karakasi 2001 = K. Karakasi, Archaische Koren. Freyer-Schauenburg 1974 = B. Freyer-Schauenburg, Bildwerke der archaischen Zeit und des strengen Stils, Samos 11. Maas 2002 = M. Maas, “Der orientalisierende Stil”, in P. C. Bol et al., Die Geschichte der antiken Bildhauerkunst I. Frühgriechische Plastik, pp. 45-69. Meyer, Brüggemann 2007 = M. Meyer, N. Brüggemann, Kore und Kouros: Weihegaben für die Götter. Raubitschek 1975 = I. and T. Raubitschek, “Der kretische Gürtel”, in Wandlungen. Studien zur antiken und neueren Kunst. Ernst Homann-Wedeking gewidmet, pp. 49-52. Richter 1968 = G. M. A. Richter, Korai. Archaic Greek Maidens.
THE PAINTED DECORATION ON THE GARMENT OF THE NIKANDRE STATUE
The statue that the aristocratic Naxian woman Nikandre dedicated at the sanctuary of Artemis on Delos is very well known, and has been much discussed by scholars (fig. 1). What has not been especially emphasized and sufficiently clarified up to now is the fact that this statue, the oldest surviving marble statue of a kore of natural size, also displays painted decoration. In fact, it is strange that, even though A. Furtwängler explicitly referred to the existence of remnants of coloured decoration in 1882, 1 this was in time forgotten and ignored or in any case not mentioned. But recently attention has once again been paid to the existence of colour, although without a new study, which would add to our knowledge about certain details and would give a fuller picture of the decorative motifs of the garment as well as the colours that were used. 2 However, during the thorough re-examination of the statue undertaken when compiling an academic catalogue of sculptures in the National Archaeological Museum, supervised by Professor Emeritus G. Despinis and the museum’s director N. Kaltsas, I focused intensively on the painted decoration of this statue’s garment. Not only were traces of painted decorative bands observed, but the incised outlines of decorative motifs arranged in bands on the garment were also detected, albeit with great effort and difficulty. Furthermore, there was decoration on the belt that holds the garment at the waist. Nevertheless, before we systematically examine all these new data, some things must be said about the garment of the Nikandre statue itself. It is of the kind usually found on Daedalic statues, statuettes and clay figurines of korai of the 7th century BC. It is a foldless garment reaching to the feet that is supported at the waist by a wide belt and possibly sewn without an open side, since there is no evidence of an opening anywhere. The absence of folds and the invisibility of the body beneath the garment led researchers to identify it with the Doric peplos. The peplos (fig. 2) was a large rectangular piece of thick woollen fabric, which was fastened only by pins or fibulae on the shoulders and with a belt at the waist. 3 The peplos was always characterized, in the 6th century and during the Classical and subsequent periods, by the overfold (apoptygma): the folding of the fabric on the upper torso, which was related to its length, as well as to the height of the female or youthful figure that wore it. 4 The garment worn by the female figure of Nikandre appears thick, as peploi usually are (at least during the early years), although it does not have any of the other features
1. 2.
3.
4.
A. Furtwängler, “Von Delos”, AZ 1882, p. 322. See P. Kavvadias, ƈƯƸƳƷƠ ƷƲƸ ƊƬưƭƮƲǀ ƑƲƸƶƩƣƲƸ ƏƥƷƠƯƲƧƲƵƳƩƴƭƧƴƥƹƭƮƿƵ (1890-1892), p. 48. J. Marcadé, “La pélerine de l’Artémis de Nikandré”, in J. Servais, T. Hackens, B. Servais-Soyez (eds), Stemmata. Mélanges de philologie, d’histoire et d’archéologie grecques offerts à Jules Labarbe (1987), pp. 369-375; Vorster 2002, p. 98. Donohue 2005, p. 203: decoration with colour alone. Frequently, one of its sides, usually the right, remained open, with the leftover cloth creating thick folds which concealed the opening: Bieber 1967, pp. 27-31; M. Bieber, “Charakter und Unterschiede der griechischen und römischen Kleidung”, AA 88 (1973), pp. 430-431; A. Pekridou-Gorecki, Mode im antiken Griechenland. Textile, Fertigung und Kleidung (1989), pp. 77-82, 92, figs. 51-53. Sometimes the peplos had a long and sometimes a short overfold (apoptygma), sometimes it was belted above the overfold (Attic style) and sometimes below (Argive style), while the so-called Laconian peplos was completely unbelted: Bieber 1967, pp. 33-34.
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Fig. 1 — Statue of Nikandre. Front view (Photo: K. Kontos).
Fig. 2 — Archaic garments of korai (after J. Boardman, ƊƯƯƫưƭƮƢ ƕƯƥƶƷƭƮƢ ƆƴƺƥƽƮƢ ƕƩƴƣƲƨƲƵ [trans. E. SimantoniBournia, 1982], p. 82).
of the garment known as the peplos. Thus, the overfold (apoptygma) is missing, while the cape (epiblema) covers the figure’s shoulders and therefore we cannot discern to what degree pins or fibulae, which would have held the garment together if it was a peplos, were present there. In addition, sleeves (cheirides) are not visible on the figure’s hands, which would be necessary if the garment were a chiton. Only the end of the cape, which is as a rule worn by female figures of the Daedalic period, is visible at the rear side of the right hand. This is due partly to the intensive weathering of the statue’s skin but mainly to the reworking of the surface of the arms and forearms, which is attested by the traces of flat chiselling visible on these points. 5 Finally, the absence of folds should be attributed 5.
For a detailed description see G. Kokkorou-Alevras in G. Despinis, N. Kaltsas (eds), ƏƥƷƠƯƲƧƲƵ ƈƯƸƳƷǁưƊƬưƭƮƲǀƆƴƺƥƭƲƯƲƧƭƮƲǀƑƲƸƶƩƣƲƸƎƈƯƸƳƷƠƷƼưƥƴƺƥƽƮǁưƺƴƿưƼưƥƳƿƷƲưƲƥƭǁưƥƼƵƷƲ Ƴƛ (2014), cat. 1.
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to the early date of the statue, that is, to the Daedalic years of its creation, during which time folding of garments was not rendered. Nevertheless, the possibility that the garment was actually made of a thick woollen fabric cannot be excluded. 6 On the other hand, the garment known as the chiton consisted of two 7 rectangular pieces of fabric, the two vertical sides of which were sewn to form a cylinder, which women wore without an overfold, at least in the early and Archaic periods. 8 The belt was also a necessary piece of the chiton to hold the garment in place, while some of its characteristic features include the sleeves, that were formed either with buttons or with a stitch, and the kolpos, which varied in length and width. Taken as a whole, female statuettes of the 7th century 9 wear a sewn garment that reaches to the feet with short sleeves, without an overfold and with no indication of folding of any kind, as has already been mentioned. The lack of folds, however, could possibly be a chronological and not a typological element, which could help us to identify the garment as one type or another, given that, even on the peplos, folds are formed at least from the Classical period onwards, although they are certainly sparser and wider. All these features show that the female figure represented in the dedication of Nikandre, most likely the goddess Artemis, is wearing a chiton and not a peplos –or, at least, is a type of garment more similar to the chiton of the 6th century BC. Other Daedalic female figures also wear this garment, such as the Lady of Auxerre (figs. 3-5), the goddesses of Prinias (figs. 6-7), the goddess from Astritsi and so on, 10 as do Daedalic figures on clay plaques or figurines of korai from the Daedalic period, on some of which
6.
7. 8. 9. 10.
Folds only just start to appear during the second quarter of the 6th century BC on both female and male garments, initially through the use of incisions and later through plastic rendering. For this reason and others it is very doubtful whether the statue of the new, unpublished kore of Thera (Karakasi 2001, pl. 76) should be dated to the Daedalic period, as might initially seem correct, since at the sides there are plastically rendered vertical folds that are reminiscent of folds on the garments of Samian korai of the second quarter of the 6th century BC. The earliest appearance of folds on the garments of korai is on two upper torsos from Chios (around 580 BC), where the folds are rendered with wavy incisions, while systems of parallel, carved folds similar to the folds of the new kore of Thera first appear on korai from the Heraion of Samos, such as on the lower torso of a kore statue (Mus.Vathi no. III P 78, c. 575 BC): Freyer-Schauenburg 1974, pp. 20-21, no. 5, pl. 3; Karakasi 2001, no. 5, p. 14, p. 153, table 4, pl. 3; Meyer, Brüggemann 2007, p. 80, no. 177). They are much more “calligraphic” on the korai of Cheramyes (570-560 BC): Richter 1968, p. 46, nos. 55 and 56, figs. 183-185 and 186-189; FreyerSchauenburg 1974, pp. 21-27, no. 6, pll. 5-6; pp. 27-31, no. 7, pll. 7-8; Karakasi 2001, pp. 13-20, 24-28, 30-34, no. 6, no. 6A, pll. 4-9; Meyer, Brüggemann 2007, p. 78, no. 166, no. 167, p. 82, no. 194, while the lower part of a kore with similar folds from Didyma of Miletus is dated to c. 560 BC (Karakasi 2001, pp. 41, 60, 167 table, pl. 31, K 37a-37b; Meyer, Brüggemann 2007, p. 85, no. 216). M. Bieber (n. 3, 1973), p. 431; A. Pekridou-Gorecki (n. 3), pp. 72-77. It is not unlikely that the chiton was sewn out of a single piece of fabric: see n. 20 below. The peplos and chiton start to look similar in the second half of the 5th century BC; see Bieber 1967, p. 34. See n. 12. See Davaras 1972, pp. 26 -27, figs. 1-7, 9-10, 50-56; J. Floren, Die grieschische Plastik I (1987), pp. 124-128, pls. 6.3 and 7.1-2; J.-L. Martinez, La dame d’Auxerre (2000), p. 18, figs. 1-4; Kaminski 2002, pp. 85-86, 89-90, 92-93, figs. 160, 162, 167; Meyer, Brüggemann 2007, p. 74, no. 141.
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sleeves are clearly visible. 11 The same view, that Nikandre’s Artemis is wearing a chiton, has been set out by B. Schmaltz in his recent study of the representation of the peplos on female painted and sculpted figures, in which he refers to even more examples of female figures of the 7th century who wear a chiton. 12 The suggestion of E. Harrison, recently followed by G. Kaminski, that the cape (epiblema) is not a separate garment on female Daedalic figures, but that they wear a uniform garment, a chiton or peplos, the rear side of which is drawn over the shoulders and fastened in front of the chest with pins or fibulae, seems unlikely and, moreover, not practical at all. The reason for this is that the rear side of the dress, according to this hypothesis, would have to be longer than the front, while compensating for this asymmetry would require the creation of a kolpos to cover the belt in the front view, which does not occur in female Daedalic figurines and statues. 13 Conversely, H. Kyrieleis argues for the existence of a cape already in Minoan female dress, and specifically on the sarcophagus of Hagia Triada. 14 The same garment, that is, the chiton with short sleeves, although without the cape, is worn by the so-called perirrhanterion korai. M. Sturgeon also believes that many female figures of the 7th century wear this garment, and she identifies it with the Ionic chiton of Herodotus, also known as Carian. 15 Another characteristic element of the long (poderes) female garment of the 7th century, the chiton rather than the peplos, as already mentioned, is its decoration with a wide 11.
12. 13.
14. 15.
For example, the terracotta statuettes: Richter 1968, pp. 33-34, nos. 23-27, figs. 86-102: second half of the 7th century BC. See also the ivory plaque EAM inv. no. 15 502 with Potnia Theron, “mistress of the animals”, from a Laconian workshop: Richter 1968, p. 36, no. 34, fig. 114. See also B. Schmaltz, “Peplos und Chiton – Frühe Griechische Tracht und ihre Darstellungskonventionen”, JdI 113 (1998), pp. 4-9, 10. Also, on the statue of the Lady of Auxerre the incised lines visible on her wrists, which have been interpreted as bracelets, possibly depict the ends of sleeves that would have been accentuated with bands of painted decoration: Richter 1968, figs. 78-79. See Donohue 2005, p. 139, fig. 19; p. 202. Opposed to this view is J.-L. Martinez (n. 10), p. 18. B. Schmaltz (n. 11), p. 10. Indeed, if we exclude the female figures of the Triad of Dreros (Richter 1968, p. 32, nos. 16-17, figs. 70-75. Kaminski 2002, pp. 83-84, figs. 157 a-e), where in fact the belt is not visible on the front but neither is the kolpos, on all other female Daedalic figures, it is very clear that the existence of a belt is emphasized on the front, and certainly the kolpos is completely missing. Even more recently, Donohue 2005, pp. 216-218, figs. 34-37, argues that the Lady of Auxerre wears two garments or, more correctly, “skirts”, one with folds on the inside and another heavy, rigid one, rather like the Greek and Balkan aprons worn as traditional clothing more recently. This view is comparable to that of V. Brinkmann of the garment of the “Peplophoros” on the Acropolis of Athens (an eastern type of garment: ependytes): V. Brinkmann, R. Wünsche (eds), Bunte Götter. Die Farbigkeit antiker Skulptur. Staatliche Antikensammlungen und Glyptothek (2004), p. 56. H. Kyrieleis, “Holzfunde aus Samos”, AM 95 (1980), pp. 97-98. On the garment of perirranterion korai see M. Sturgeon, Isthmia IV. Sculpture I: 1952-1967 (1987), pp. 31-54, esp. 41-43. The lack of a cape (epiblema) on perirranterion korai is possibly due to the preservation of the traditional appearance of these korai: the long dress, however, of these korai also seems to be the sewn cylindrical chiton: G. Kokkorou-Alewras, “Caryatid Head in the Sparta Archaeological Museum and the Provenance of the Archaic Greek Perrirhanteria”, in Proceedings of the International Symposion “ƒơƥƊƸƴƢuƥƷƥƆƴƺƥƽƮƢƵƕƯƥƶƷƭƮƢƵƥƳƿƊƯƯƫưƭƮƠƎƩƴƠƮƥƭƒƩƮƴƲƳƿƯƩƭƵ” Athens 2-3 of November 2007 (2012), pp. 25-28.
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Fig. 3 — Lady of Auxerre. Front view (after Karakasi 2001, pl. 53a). Fig. 4 — Lady of Auxerre. Left side view (after Karakasi 2001, pl. 53d). Fig. 5 — Lady of Auxerre (Drawing: I. Bradfer). Fig. 6 — Goddess of Prinias. Front view (Photo: Archaeological Museum of Herakleion, Crete. © Ministry of Culture. TAP Archaeological Receipts Fund). Fig. 7 — Goddess of Prinias. Three quarter view from the left side of the statue (Photo: Archaeological Museum of Herakleion, Crete. © Ministry of Culture. TAP-Archaeological Receipts Fund).
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Fig. 8 — Kore. Museum of Delos A 4062 (Photo: G. Karatzas).
Fig. 9 — “Peplophoros” (after ArchEphem 1887).
vertical band at the centre of the dress on the front as well as at the hem. As can be seen very clearly on the statuette of the Lady of Auxerre (figs. 3-5), the lower part of the garment, which today we could call the skirt, bears an incised decoration at the centre of its front consisting of a wide vertical band divided into rectangular decorative fields, metopes, which in turn are decorated with squares or rectangles. These incisions were surely the base on which ornaments were painted with vivid colours. At the hem of the garment of the Lady of Auxerre there is a wide band with incised decorations similar to the above which run all the way around the garment (figs. 3-5). However, beneath
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this hem vertical incisions are regularly spaced so as to give the impression of schematic folds, which led some researchers to hypothesize that there are two or even three dresses, together with the cape, on this statue and on other female Daedalic statues as well. 16 V. Brinkmann considers this an ependytes, while Donohue believes it to be a kind of dress made out of a hard, rigid cloth which is reminiscent of the aprons of Thessalian women. 17 However, this type of decoration is not found on all female Daedalic figures. It could be interpreted as the rendering of schematic folds at the end of the long dress or as a fringe. 18 In any case, characteristic of the type of garment that interests us is the fact that even on korai of the 6th century, who are clearly wearing a sleeved chiton, there are similar decorative incised bands that were enlivened with colours (fig. 8). 19 There are numerous examples of statues of korai, to which can be added even more contemporary figurines, that attest that ultimately this type of decoration was very closely connected with the garment called a chiton. 20 However, the peplos of the well-known “Peplophoros” at the Acropolis of Athens (fig. 9), as well as those of the few other peplophoroi attested to in the Archaic period, are also decorated with a vertical band at the centre of the front that bears a painted meander or other type of decoration. 21 This is also attested by Archaic
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20.
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Raubitschek 1975, p. 50; Donohue 2005, pp. 216-218, figs. 34-37. Similar vertical incisions on the hem appear on other representations of female Daedalic figures, which Donohue 2005, pp. 210-218, esp. 213-218, figs. 38-40, assembles, especially on ivory plaques from the sanctuary of Ortheia in Sparta, though not on all. On the steles from Prinias there are horizontal bands on the garments that seem to belong to an inner, narrower dress: Donohue 2005, fig. 41. Above, n. 13. For such fringes on Cretan garments see A. Lembessi, “ƗƺơƶƩƭƵ ƗƠuƲƸ Ʈƥƭ ƏƴƢƷƫƵ ƷƲư Ʋ ƥƭ”, in N. C. Stambolidis (ed.), ƚƼƵ ƏƸƮƯƥƨƭƮƿư ƑưƢuƫ ƒƭƮƲƯƠƲƸ ƋƥƹƩƭƴƿƳƲƸƯƲƸ (1999), p. 150; the plates in A. Lembessi, ƘƲƎƩƴƿƷƲƸƊƴuƢƮƥƭƷƫƵƆƹƴƲƨƣƷƫƵƶƷƫƗǀuƫƇƭƠưưƲƸƎƘƥƛƠƯƮƭưƥƘƲƴƩǀuƥƷƥ (1985), especially pl. 30 A 51, where the selvedge of the himation bears a meander band and fringes underneath, exactly in the same manner as the long skirts of the Cretan Daedalic korai. In my opinion, this proves that the dress of the Daedalic korai did not consist of three pieces of garment. Sleeved chitons of statues of korai of the early 6th century, such as the kore in the Museum of Delos, no. 4062, from Aegina (Athens, Nat. Arch. Mus. inv. no. 73), Moschato (Athens, Nat. Arch. Mus. inv. no. 3859) and Paros (Paros Mus. inv. no. 802), have this central decorative band which continues to be found on the chitons of korai of the late Archaic period: Karakasi 2003, pll. 64, 79, 214, 234, 235-237, 248-260. In fact, it is very likely that this central decorative band was woven into one end of the fabric of which the chiton was sewn, that is, it comprised the selvedge and thus it covered or concealed the existence of the vertical seam. It is, in other words, very likely that the seam of the chiton did not sit at one or both sides of the woman who wore it but rather was found at the centre of the front part. In this case, the central vertical decorative band would have arisen as a functional necessity. Karakasi 2001, pll. 245, 238. Recently, V. Brinkmann, in V. Brinkmann, R. Wünsche (n. 13), pp. 53-58, drawing on the remarks of B. S. Ridgway, The Archaic Style in Greek Sculpture (1977), pp. 91-92, suggests that the overfold (apoptygma) of the “Peplophoros” is closed on the right arm and, based on his own observation that the decoration of her garment with a wide vertical band also continues on the upper torso but only beneath the overfold (apoptygma), argues that the “Peplophoros” is actually wearing an ependytes and a type of cape on her upper torso. Indeed, the continuation of the selvedge with its ornaments on the upper torso is the rule in similarly woven chitons (see n. 20 above). It is strange that this selvedge does not continue in the central part of the overfold (apoptygma), as we would expect if in fact the overfold (apoptygma) comprised a continuation of the fabric of which the peplos
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peplophoroi on painted Archaic vases. 22 Therefore, we must assume that all the fabrics for sewing female garments were woven with wide selvedges that bore linear-geometric designs or figurative representations of animals. 23 This conclusion corresponds in all respects to the other important finding that was mentioned at the beginning of this discussion. As already noted, in 1882 A. Furtwängler referred to traces of seven to eight painted bands bearing meanders lower than the belt of the statue of Nikandre, which certainly would have been visible in the years immediately after the statue’s discovery. However, even today three uneven but parallel bands are distinguishable in the right light, because of their lighter surface colour, as is usually the case with ancient sculpture when, at some point long after the creation of the statue, the colours that covered these surfaces are effaced (fig. 1). The existence of incised guidelines for the separation of these horizontal bands confirms our finding. The observation of all the decorations here presented was made possible after light sprinkling of the surface of the statue with water, under the light of a strong spotlight at a low angle, as well as through the use of a Leica stereomicroscope (maximum magnification 4.0 x). 24 The application of more conclusive and advanced methods such as ultraviolet fluorescence and ultraviolet reflection, even if they had been desirable, was not possible, for technical reasons. 25 Using these methods, I was able to discover a wider band at the lower part of the garment with a width of 11-13 cm (figs. 10-11). Next, two thin incised lines 3.5 cm apart separate this band from the next band, which has a width of 8-10.5 cm. Two horizontal lines 1.5 cm apart, once again engraved, separate the second decorative band, which is clearly narrower than the lower one already mentioned, from the third even narrower horizontal decorative band 5-6.5 cm in width that follows. The fact that these bands are parallel to one another and perfectly horizontal is noticeable. That is, they do not follow the semicircular edge –the hemline– of the garment, as
22. 23. 24. 25.
was made. However, as we know from the chitons and diagonal himatia of Archaic korai, the lower part of the chiton often had the same decoration as the diagonal Ionic himation, in contrast to the top part of the chiton, which was painted in one colour. Although there have been proposals for the existence of three pieces of clothing (J. Schäffer, “The Costume of the Korai: A Re-Interpretation”, Californian Studies in Classical Antiquity 8 [1975], pp. 241-250), ultimately the view has prevailed that the chiton was uniform from top to bottom and that the differing decoration of the two parts, as we described, is due to the artistic freedom of the Archaic painter rather than to a realistic element: Richter 1968, p. 8. See J. Boardman, Greek Sculpture. The Archaic Period (1978), p. 81. See for example B. Schmaltz (n. 11), p. 5, figs. 1-2. See Raubitschek 1975. The collaboration of the conservator of the National Archaeological Museum, Ms D. Bika, and of the artist, Ms A. Drigkopoulou, was invaluable. I thank them both very much. Unfortunately, in order for these methods to be used, full darkening of the area in which the statue is exhibited is necessary, which is not possible (at least for the time being) in the National Archaeological Museum, for security reasons. In fact, after getting permission from the director of the museum, Dr N. Kaltsas, and the curator of the Sculpture Collection, Dr E. Kourinou, whom I thank warmly, with the physicist Dr G. Antonopoulos (a specialist in optoelectronics) I attempted to use a fluorescent lamp (370 nm) at night, but the security lights that remained on did not permit an effective use of this method. I owe warm thanks to Dr Antonopoulos for his eager and selfless collaboration, as well as to the entire staff of the museum for their help.
THE PAINTED DECORATION ON THE GARMENT OF THE NIKANDRE STATUE
Fig. 10 — Drawing showing the traces of the decoration left on the dress of the statue of Nikandre (A. Drigkopoulou).
Fig. 11 — Reconstruction of the painted decoration on the dress of the statue of Nikandre (A. Drigkopoulou).
would be expected if we assume that woven decorative bands are shown. This is possibly due to the fact that the craftsman who painted the decoration of the garment ignored this naturalistic element, which would point to the artistic freedom of the Archaic painter. According to Donohue, 26 however, this may be because the painted bands constitute the decoration of another garment, perhaps a type of apron made of hard, inflexible fabric worn over the pleated chiton, whose folds would have been depicted with short vertical incisions, similar to those which are in fact visible at the lower end of the garment of the Lady of Auxerre (figs. 3-5). Unfortunately, I detected traces of a meander only in the lowest band, which would have been painted on the entire band (figs. 10-11). On the other two bands there are no visible details, that is, no traces of the decorative motifs 26.
Donohue 2005, pp. 216-218, fig. 42.
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Fig. 12 — Goddess of Gortyna. Front view (Photo: Archaeological Museum of Herakleion, Crete. © Ministry of Culture. TAP-Archaeological Receipts Fund). Fig. 13 — Goddess of Gortyna. 3/4 view of the left side (Photo: Archaeological Museum of Herakleion, Crete. © Ministry of Culture. TAP-Archaeological Receipts Fund). Fig. 14 — Figurine of Siphnos. Rear and right side view (Photo: M. Gkili-Kofinaki). 14
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Fig. 15 — Figurine of Siphnos. Front view (Photo: M. Gkili-Kofinaki).
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that I assume were painted on these bands. Furthermore, on the dress of Nikandre’s Artemis there is no visible wide vertical central band, as there is on the garments of the seated goddess of Gortyna (figs. 12-13), the Lady of Auxerre (figs. 3-5), the seated goddesses of Prinias in Crete (figs. 6-7), and the hammered (sphyrelaton) statues from Olympia, 27 but it is very possible that it was rendered with colour. The rendering of small rosettes in a vertical arrangement near the sides of the skirt of Nikandre’s Artemis is, on the other hand, certain (figs. 10-11). At least five incised rosettes were discovered on the left and two on the right, and they give the impression that they were arranged in vertical bands, columns, as occurs with the rosettes that also decorate vertical bands on either side of the wide central band on the seated goddess of Gortyna in the Museum of Heraklion (figs. 12-13). 28 This motif, on the other hand, is missing from the Lady of Auxerre (figs. 3-5) and the new kore of Eleutherna, and also from the seated goddesses of Prinias (figs. 6-7). 29 The existence of one more decorative motif, a meander cross, which I discerned with even greater difficulty to the left of the column of rosettes (as the viewer faces it), shows that the guilloches (plochmoi) in the corresponding position on the seated statue of Gortyna (figs. 12-13) have been replaced on the statue of Nikandre by this motif, which most likely also was arranged in a vertical column. For symmetrical reasons, we must assume there was a corresponding vertical band on the left side of the kore’s skirt (figs. 10-11). These columns of ornamentation, in any case, would flank a central decorative band, on which the meanders that Furtwängler noted would have most likely been depicted. In fact, strong lighting from a low angle enabled us to discern traces of meander on the upper part of the central section of the skirt, and based on these I reconstructed meanders in zones on the vertical central decorative band in the drawing (fig. 11). This reconstruction is also based on Furtwängler’s information mentioned above, as well as on the garment of the daughters of Proetus, Lysippe and Iphianassa as depicted on the painted clay metope from Thermos (625 BC). 30 Meander ornaments, moreover, decorate the skirt worn by the large-sized clay figurine from Siphnos which has been associated with Naxos (figs. 14-15). 31 A meander ornament is also found on the garment of the sphyrelaton female figure from Olympia that E. Walter-Karydi has associated with Parian art. 32 However, the connection of the decoration of the garment of the Nikandre kore in its general conception and structure with that of the seated goddess of Gortyna is 27. 28. 29. 30. 31.
32.
Maas 2002, pp. 65-67, fig. 136. J. Boardman (n. 21), fig. 30; J. Floren (n. 10), pp. 125-126, pl. 7.1. Kaminski 2002, pp. 92-93, fig. 167. See n. 11 above. For a drawing of the new kore of Eleutherna see J.-L. Martinez (n. 10), p. 44, fig. 43. J. Boardman, J. Dorig, W. Fuchs, Die griechische Kunst (1966), fig. 142. N. Kourou, ˦ƘƥƊƣƨƼƯƥƷƫƵƗƣƹưƲƸƆƳƿƷƫưƑƩƧƠƯƫƍƩƠƶƷƫưƕƿƷưƭƥƍƫƴǁưƮƥƭƶƷƫưƆƴƷơuƭƨƥ”, in ƕƴƥƮƷƭƮƠ ƷƲƸ "Ż ƉƭƩƬưƲǀƵ ƗƭƹưƥƽƮƲǀ ƗƸuƳƲƶƣƲƸ ƆŻ ƗƣƹưƲƵ ƎƲƸưƣƲƸ (2000), p. 353, figs. 1-2. For the Naxian provenance see N. Weill, La plastique archaïque de Thasos. Figurines et statues de terre cuite I, ÉtThas XI (1985), p. 74 with n. 4, fig. 22 a-b; G. Kokkorou-Alewras, Archaische Naxische Plastik (Diss. Munich 1975), p. 88 K 3, 109, n. 6. E. Walter-Karydi, “Bronzes pariens et imagerie cycladique du haut archaïsme”, in Y. Kourayos, Fr. Prost (eds), La sculpture des Cyclades à l’époque archaïque. Histoire des ateliers, rayonnement des styles, BCH Suppl. 48 (2008), pp. 29-30, fig. 20, where there are other examples of meander decorations on
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obvious. This therefore confirms the Cretan origin, which has been generally accepted by scholars, of the female Daedalic garment, and possibly also of its decoration. 33 The belt that holds the garment on the Artemis of Nikandre together also has painted decoration (figs. 10-11). Rectangular motifs are visible, which have been very badly preserved but quite likely belonged to the so-called battlement ornament. Similar bronze belts, dated by context to the 7th century, have actually been found as dedications at sanctuaries, such as those from the sanctuary of the harbour at Emporio on Chios that J. Boardman published. Even more interesting is the fact that these belts were decorated with ornaments –meanders, “guilloches” (plochmoi), and battlement ornaments– comparable to those painted on the belt of the Artemis of Nikandre. 34 Furthermore, the belt of the statue of Gortyna, with a central buckle, is decorated with a painted continuous spiral (figs. 12-13). 35 On Nikandre’s Artemis, however, there is no buckle to be seen on the belt, though it probably existed. Nevertheless, on the middle part of the belt and all along its length a type of band is formed on the marble surface that is darker than the parts above and below it, so that ultimately two lighter bands are visible both above and below, on which the battlement ornament was depicted. In fact, on the lower lightcoloured band of the belt I noticed minor traces of red colour. This shows that there was another lighter colour, possibly yellow, on the middle part of the belt, but there is no indication of a buckle. 36 A decorative band with geometrical decoration, as known from the cape of the Lady of Auxerre, 37 or with rosettes, as on the cape of the kore from Eleutherna, 38 would have
33. 34.
35. 36. 37.
38.
garments. See H. Kyrieleis, “Sphyrelata. Überlegungen zur früharchaischen Bronze-Großplastik in Olympia”, AM 123 (2008), pp. 177-198, esp. p. 187 with n. 32. See also fig. 1. Raubitschek 1975; H. Kyrieleis, “Archaische Holzfunde aus Samos”, AM 95 (1980), pp. 97-98; A. Lembessi (n. 18), pp. 149-150. J. Boardman, Excavations in Chios 1952-1955. Chios. Greek Emporio (1967), p. 63, pll. 88-90, especially pl. 88 no. 279, c. 660-630 BC and no. 317, c. 630-600 BC (similar meanders to that on the belt of the statue of Nikandre). For Ionian belts, their provenance and meaning, see G. Klebinder, in U. Muss (ed.), Der Kosmos von Artemis (2001), pp. 111-120. For Cretan belts of the 7th century BC and their origin, see Davaras 1972, pp. 27-29, 64-65; Raubitschek 1975, pp. 49-52. M. D’Acuntho, “L’Attributo della cintura e la questione degli inizi della scultura monumentale a Creta e a Naxos”, Ostraka 9 (2000), pp. 289-326. E. Walter-Karydi, “A Man, a God, a Hero: The Greek Kouros”, in G. KokkorouAlevras, K. Kopanias (eds), Methods of Approach and Research in Ancient Greek and Roman Sculpture (2007), p. 32; A. Hermary, “Kouroi à ceinture de la Crète aux Cyclades”, in Y. Kourayos, Fr. Prost (n. 32), pp. 183-192, pll. I-V, figs. 1-7, esp. 185-187. Although his assumption that only unmarried women wore these belts may be confirmed by the identification of the kore of Nikandre with the virgin goddess Artemis, the belts were nevertheless objects of everyday use, necessary to unmarried and married women alike, to hold the chiton at the waist. This does not exclude the possibility of the dedication of belts to goddesses before a wedding: J. Boardman (n. 34), p. 63. Davaras 1972, pp. 18-19, figs. 23-24. For the ways of fastening the belts on Cretan korai see Raubitschek 1975, pp. 49-52: figs. 4-5. See other ways of fastening bronze belts in J. Boardman (n. 34), p. 215, figs. 140-141; G. Klebinder (n. 34). See Donohue 2005, p. 139, fig. 19, where the hem of the cape with the incised decoration is more visible. On this figure the incised scale pattern that decorates the chiton on the upper torso is also visible, being mainly conspicuous in the area of the breasts. Davaras 1972, p. 26, fig. 38; Kaminski 2002, pp. 93-94, fig. 168.
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Fig. 16 — Traces of red colour on Nikandre (Photo: D. Bika). Fig. 17 — Coloured reconstruction of the painted decoration on the dress of the statue of Nikandre (A. Drigkopoulou). Fig. 18 — Coloured cast of the Lady of Auxerre (© Museum of Classical Archaeology, Cambridge).
possibly decorated the selvedge of the cape of the Artemis of Nikandre. Today, however, nothing at all is visible due to severe weathering. Unfortunately, I was able to discern only a few traces of red colour on the lower right side of the kore’s skirt, much higher than the hemline (fig. 16), and on two more points, as mentioned, on the lower band of the belt. Nevertheless, it is most likely that the basic colours used in sculpture at this time were applied to the decoration of the garment of the kore of Nikandre (fig. 17): red for the chiton, as for example on many clay figurines of the 7th century, 39 such as on the chiton of the “Berlin Goddess” and of Phrasikleia, 40 and blue for the motifs themselves. The coloured representation of the Lady of Auxerre in the Cambridge cast is characteristic (fig. 18). Black would have been used to accentuate 39.
40.
E.g. figurine of a mourning woman from Boeotia: J.-L. Martinez (n. 10), fig. 25, but also on a marble statuette from Aegina (end of the 7th century: V. Brinkmann, Die Polychromie der archaischen und frühklassischen Skulptur [2003], p. 109, no. 1). For the basic colours of early Greek painting see I. Scheibler, “Die Vier Farben der griechischen Malerei”, AntK 17 (1974), 2, pp. 99-102; E. WalterKarydi, “Prinzipien der archaischen Farbgebung”, in K. Braun, A. E. Furtwängler (eds), Studien zur klassischen Archäologie. Friedrich Hiller zu seinem 60. Geburtstag am 12. März 1986 (1986), pp. 23-41; V. Manzelli, La Policromia nella Statuaria Greca Archaica (1994), pp. 285, 287, 289-290, figs. 1-10. For the reasons behind the use of this trio of colours, see E. Walter-Karydi, “ƛƴƼƵ Die Entstehung des griechischen Farbwortes”, Gymnasium 98 (1991), pp. 518-519. See V. Manzelli (this note), pp. 273-293, where the symbolic meaning of colours is perhaps overemphasized. V. Brinkmann, R. Wünsche (n. 13), p. 33, pl. 33 (Berlin goddess); p. 182, fig. 326 (Phrasikleia).
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the locks of the hair and the lashes, red probably for the lips and the iris, and finally blue for the pupils of the eyes. 41 Thus the general picture that would have emerged would have enlivened the statue and softened the sense of flatness that predominates today. With the artist A. Drigkopoulou, I attempted to reconstruct the painted decoration, conjecturally as regards the colours, but in a close approximation as far as the ornaments were concerned (fig. 17). In the coloured reconstruction, the chiton is red and all the ornaments are depicted in blue, while the middle section of the belt and the soles of the closed shoes are yellow. Also, based on the multi-coloured principle of ancient statues and the intense coloured contrasts, we adopted yellow for the background of the bands with the rosettes, as well as for the cape, in a manner analogous to the light-colored himation of the Berlin goddess. 42 It is quite possible that this multi-coloured version approaches the spirit of the Daedalic and Archaic periods. Certainly, our reconstruction is experimental and hypothetical in character, but we do hope that it will serve as inspiration for further examination. Addendum About the rests of red colour on the dress of the statue of Nikandre, see recently D. Ƈika, ƑƩƯơƷƫƷƫƵ ƳƲƯƸƺƴƼuƣƥƵƷƫƵƥƴƺƥƽƮƢƵƧƯƸƳƷƭƮƢƵ (Diss. Athens, 2015), pp. 218, 221, fig..AK1-3.
41.
42.
See the Anavyssos kouros (N. Kaltsas, ƘƲ ƊƬưƭƮƿ ƆƴƺƥƭƲƯƲƧƭƮƿ ƑƲƸƶƩƣƲ [2007], pl. 240), Berlin goddess and “Peplophoros”, V. Brinkmann, R. Wünsche (n. 13), figs. 33 and 68. However, also see V. Manzelli (n. 39), pp. 280-281, who believes that the red of the iris visible today is due to the iron oxides contained in another colour. For the light-coloured himation, see the Berlin goddess: V. Brinkmann, R. Wünsche (n. 13).
The Acropolis Kore 682 from Athens. An Approach to the Reconstruction of a Greek Late Archaic Sculpture of a Girl Bernhard Schmaltz
SUMMARY The most important evidence we have for ancient polychromy are the relics of painted sculpture excavated in the 1880s on the Athenian Acropolis. At that time, quite often brilliant colours were still preserved, which since then have been to a large extent lost. The best preserved kore was Acro.682, as we learn by watercolours from the time and from a cast made in 1910 and painted shortly afterwards using watercolours and the remains of the colours still existing at that time. This cast was stored in the Athens National Museum. It was cleaned in 2005 and used for a further cast, which gives a lot of information about the decoration. This new cast was used to complete the missing parts, such as the broken curls, arms, hands and plaits. Looking at all the traces of the painted decoration on the marble, the cast, and the watercolours, it was possible to gain a full reconstruction of an example of a significant type of late Archaic sculpture. KEYWORDS
Greek polychromy, late Archaic Attic sculpture, kore with diagonal mantle.
La korè 682 de l’Acropole d’Athènes. Essai de reconstitution d’une statue de jeune fille grecque de la fin de l’époque archaïque Pour se faire une idée de la polychromie ancienne, les éléments les plus significatifs dont nous disposions sont les restes de la sculpture colorée mis au jour sur l’Acropole d’Athènes dans les années 1880. À l’époque, existaient encore souvent des couleurs brillantes, à présent largement perdues. D’après des aquarelles contemporaines et un moulage daté de 1910 et coloré peu après à partir des aquarelles et des traces de polychromie autrefois encore visibles, la korè la mieux préservée était Acro 682. Ce moulage, conservé au musée national d’Archéologie à Athènes, a été nettoyé en 2005 et utilisé pour un moulage ultérieur, qui nous informe amplement sur la décoration. Nous avons utilisé ce nouveau moulage pour compléter les parties manquantes comme les boucles cassées, les bras, les mains et les plis. En examinant tous les vestiges de la décoration sur l’original, sur le moulage et sur les aquarelles il est possible de reconstituer un exemple d’un type significatif de la sculpture tardive archaïque. RÉSUMÉ
MOTS-CLEFS ƕƊƖƎƐƌƜƌ
Polychromie grecque, sculpture attique archaïque tardive, korè à manteau oblique.
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about the author B. Schmaltz, Professor i.r. of Greek Archaeology, University of Kiel, Germany.
bibliographical abbreviation Karakasi 2001 = K. Karakasi, Archaische Koren.
THE ACROPOLIS KORE 682 FROM ATHENS
Looking back at the past, we may consider the problems that we Europeans had and still have when thinking about painted ancient sculpture. When, in the 15th century, ancient sculpture was rediscovered, generally in the form of rather broken and weathered statues, people were nevertheless fascinated by the marble material, the high standards of workmanship in carving, and the vivid representations of the human body, so often presented naked. So, as no colour was preserved, nobody entertained the possibility of coloured sculpture at all, and all admired the shining white marble surface, which in its uniformity shows so clearly the modelling of bodies and clothes. By the beginning of the 19th century we learned that ancient architecture was, to a large extent, decorated in vivid colours –we may remember Haller von Hallerstein’s 1811 drawing of the ornaments of the temple at Aegina with written reference to the preserved colours, or, for example, G. Semper’s reconstruction of the Parthenon from 1836– but it was hard to believe that the delicately modelled surface of sculptures was painted and coated by a second skin of its own aesthetic value. Only in the course of the excavations on the Athenian Acropolis, which started in 1885, when some dozen broken marble statues with ample remains of brilliant colours were unearthed, did people come to believe that ancient marble sculpture was indeed painted. But very soon the archaeologists on the Acropolis realized that the newly excavated marbles lost their brilliant painted decoration within a few hours, owing to the effects of sunshine and wind. So they asked artists such as L. É. Gilliéron to produce watercolours of the most impressive pieces in order to preserve at least a faint idea of the Greek painted marbles. 1 About twenty years later, when most of the colours had vanished, permission was given to produce casts of eleven of these statues and, shortly afterwards, five of these casts were painted, probably by Gilliéron’s son. His aim, however, was not to try a full reconstruction of what had existed two and a half millennia before, but to reconstruct the post-excavation state: the colours as they had been when the broken statues were unearthed. Looking back now, we clearly realize that at the very same time European art had discovered the aesthetic charm of the fragment, the fascination of the torso –we may recall artists such as Maillol and Rodin– and for this reason the archaeologists declined to restore the figure and the painted decoration in order to get an idea of what had been set up on the Acropolis in Archaic times. A mere half century later, new interest in antique polychromy arose, which initially focused on the material of the colours itself and the technique used to paint the marble. Following this line, V. Brinkmann studied the remnants of colours by means of new photographic techniques, revealed and recorded all these remains, and created some reconstructions as well, which are well known from his exhibition “Bunte Götter”. 2 But he was primarily concerned with the character of the design and the variation of the
1. 2.
I. Kader, “Täuschende Spielereien”, in V. Brinkmann, R. Wünsche, Bunte Götter: die Farbigkeit antiker Skulptur. Ausstellung Basel 2005 (2005), pp. 264ff. V. Brinkmann, Die Polychromie der archaischen und frühklassischen Skulptur (2003), on which see the review of B. Schmaltz, Göttingische gelehrte Anzeigen 257 (2005), pp. 9-33; V. Brinkmann, R. Wünsche, Bunte Götter. Ausstellung München 2003/2004 (2003).
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different colours, and paid very little attention to one aspect, the interdependence of shape, design and colour. It is this point in which I am interested, and for this purpose a reconstruction that is as neat as possible is essential. Among the eleven casts produced in 1911 is that of the kore Acro.682. This figure was nearly complete (the feet were added by H. Schrader in 1907: fig. 1) and in 1886 so much of the painted decoration had remained that the statue was praised as the best preserved kore of all, and a watercolour of it was published in a distinguished publication as early as 1891 (fig. 2). 3 Since then it has often been cited as giving a good impression of Archaic polychromy. For this figure Gilliéron’s son produced a kind of copy. Looking to the original and to the watercolours of his father, he transferred the decoration, the motifs, the design and the colours to the cast, and so created a kind of three-dimensional copy of this broken statue of a girl dressed in a typical diagonal mantle. This coloured cast was stored in the National Museum at Athens, cleaned in 2005 and used for a further mould and a further cast; this new cast proved to be most informative. The unpainted white surface shows a lot of the incised ornaments of the garment borders including the battlement, the small stars of pointed leaves and the dots along the incised meander; furthermore, some colours, especially blue, have oxidized in the form of thin Fig. 1 — Kore Acro.682 (around 1910) crusts, which are reproduced by the cast as a very (reproduction of the photograph Alinari low relief (fig. 3). All these details, which are hard 24644). to recognise on the painted surface of the coloured cast, originate from the original statue of 1911. By means of these details it was possible to reconstruct directly the system of the decoration and its exact location. It was reasonable to use this cast for a reconstruction. To achieve this, it was necessary to look for parallels and to consider the lines of the drapery, the layers of the plaits, and the swelling of the surface. For example, to supply the left hand of the kore, we had to consider two different postures shown by other statues. Some korai have the left hand clasped into a fist, and the thumb lies at the side of the forefinger, seizing at the
3.
AD I (1889), pl. 39.
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2
Fig. 2 — Watercolour of part of kore Acro.682 (L. É. Gilliéron ; after Antike Denkmäler I [1889], pl. 39). Fig. 3 — Detail of the cast of Acro.682 in Kiel, Antikensammlung. Upper part of the central border below the waist (Photo: B. Schmaltz).
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same time the tip of the garment, so that the back of the hand is turning away from the figure’s side. 4 Other korai have the back of the hand turned to the front, and three extended digits together seize the tip of the drapery, the forefinger and the middle finger from the front and the thumb from the back. 5 On the kore Acro.682, the fracture near the wrist clearly shows that the back of the hand was turned to the front, so that the attitude was rather similar to that of the “Antenor-kore”. As in the lower part of the figure, the large border with the magnificent meander turns into a broad curve to the side without becoming narrower, and the outer contour of the vertical border cannot be reconciled with the seizing fingers, but has to stand rather outside the figure. The result is that the contour of the garment on the top of the vertical border must have turned to the fingers in a way that seems rather strange to our understanding of natural textiles. Aside from some other details of the reconstruction, one characteristic should be discussed first, because of its importance for the shape of the statue. To her right side, the himation hangs freely in long, zigzag-lined folds, the shorter one ending near the right knee, the other below the middle of the calf. Large parts of these folds are restored. But looking to the back of the figure it is possible to follow the zigzag for some way from one layer of the garment to the other, 6 and from the step of the lowest and longest zigzag the length of the following three zigzags and of the total fold can be roughly calculated. A comparative example is offered by a similar marble kore from Aegina, 7 which has even longer folds. It is obvious that such rich drapery decorated with a colourful border would have intensified the splendour of the figure and modulated the formal concept of the statue. But now let us proceed to the most interesting step of the reconstruction, the painting of the decoration. As mentioned above, immediately after the excavation of the kore much of the decoration was preserved, although to a large extent it has vanished since then. But, as we have seen, we could restore most of the patterns by following the traces on the cast itself. Only the lowest border of the garment above the feet and the diagonal border crossing the breast are painted without using the evidence of the preserved statue itself, but are rather borrowed from similar statues or fragments. So the reconstruction of the statue itself may at least somewhat resemble the original, and this applies to the system of decoration too. The colours reported at the time of excavation were red, blue and green, with the latter two generally not preserved in their original tone, but oxidized. 8 As in the case of other korai from the Acropolis and elsewhere, the colours were mineral colours, i.e. cinnabar, malachite and azure or Egyptian blue. What is not known is the matrix that was used to mix the powdery colours to make them fit for brushing and to fix them to the marble surface. Essentially there are two possibilities, an organic matrix or an inorganic one. As organic material, egg, casein or gum arabic, for example, most frequently in some 4. 5. 6. 7. 8.
Karakasi 2001, pll. 144ff. Ibid., pll. 254ff., “Antenor-K.”, p. 264. Karakasi 2001, pl. 146. D. Ohly, Die Aeginete II / III (2001), pll. 201ff. See P. Wolters, AD I (1889), text to pl. 39; W. Lermann, Altgriechische Plastik (1907), pp. 87ff.
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combination, could have been used. In a few cases, an inorganic material has been identified: a calcareous matrix such as lime-water, usually mixed with organic materials like casein. The organic material is water-soluble, as tests have shown, so that after six weeks of rain and sunshine (of course in the rainy northern part of Germany) the tested colour had obviously vanished. On the contrary, the inorganic matrix was so solid that after even fourteen weeks the colour was still in fairly good condition. Another effect of the limewater was that it made the colour lighter, i.e. red became somewhat pink. To compensate for this effect we had to add more pigments, but this rendered the brushing of the material more difficult. It also has to be remembered that, for example, cinnabar was rather expensive in Antiquity. Of course, colour gradation is not only affected by the matrix, but also by the size of the pigment-crystals and the size of the grains; the former depends on regional circumstances, the latter on the workshop that worked up the pigments. So, without serial analyses of samples from the korai of the Acropolis, it is impossible to get an idea of how the colours of our kore really looked. Two more factors should be considered now, because they affect the tone of the colours and their stability. As our experiments have shown, the same matrix mixed with different colours reacted differently to sunshine and rain. Therefore we might suppose that, in order to achieve maximum stability for the overall decoration in Antiquity, different colours were mixed with different matrices –varying either in concentration only or in composition of the ingredients. But in fact we do not currently know either the components of the matrix or the mixture, and this fact may be illustrated by two heads. In the one case, 9 cinnabar has been used for the lips, iris and hair, but here the same colour has vanished almost totally; in the second case, 10 the mineral hematite is wonderfully preserved on the hair, eye and eyebrows, but no colour at all has been preserved on the lips, although cinnabar, which might have been used, is said to be more resistant. There is no way of explaining the current state of these two heads. Finally, in the course of our experiments we learned that there is a significant difference between applying colour to a marble slab purchased in a shop and to a marble carved by a chisel, as in Antiquity. In the first case, the marble is sawn and its surface is rather sealed off, while in the other case each strike of the chisel damaged the crystals and caused very thin fissures, so that the colour cinnabar could be applied easily as one nearly homogeneous coating that adhered very well. For azure the result was not so good, but six weeks later the same colour could be brushed very easily, nearly as easily as cinnabar previously. Again, the result affects the colour gradation. To sum up: even if we do not know the exact tone of the original colours of the painted kore Acro.682, we have plenty of other evidence available, such as the motifs and composition of the ornaments, the basic colours, and their distribution. So it seems appropriate to try a reconstruction as a working hypothesis (fig. 4). 9. 10.
V. Brinkmann, Die Polychromie der archaischen und frühklassischen Skulptur (2003), fig. 107. T. Karagiorga-Stathakopoulou, AD 51/52 (1996/1997), A, pll. 2ff.
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Fig. 4 — Reconstruction of kore Acro.682 (Kiel, Antikensammlung), front view (Photo: B. Schmaltz).
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Fig. 5 — Reconstruction of kore Acro.682 (Kiel, Antikensammlung), view upright to the feet (Photo: B. Schmaltz).
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Fig. 6 — Reconstruction of kore Acro.682 (Kiel, Antikensammlung), view facing the breast (Photo: B. Schmaltz).
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Fig. 7 — Reconstruction of kore Acro.682 (Kiel, Antikensammlung), rear (Photo: B. Schmaltz).
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It is obvious, I think, that the painted decoration, the brightness of the colours painted on the white marble-ground, the variety of the ornaments, and the composition of the continuous borders and the scattered small motifs all intensify the splendour of the drapery and enhance the representation of the young lady, creating a kind of “epiphany”. At the same time, it is striking that from the foot up to the diadem two colours prevail on the white marble, red and blue, the latter with the addition of its “neighbouring colour” green. That colour chart predominates on the entire figure, even on the hair and the eyes: as is the case with about 80% of all painted heads of korai from the Acropolis, both hair and iris are red, 11 which to us seems to be rather unnatural. Interestingly, a multitude of small terracottas of the same type and from the same excavation all have black hair and black eyes, reinforcing the point that the choice of colour was not a matter of naturalism, but a convention of art: 12 using only three colours contributed to the unity of the statue. Furthermore, the splendour of the garment is now so dominant that the human body beneath it is almost totally hidden. It can be imagined, of course, that the breast, chest, waist and hip are below the drapery, but the natural forms of all these parts are not visible. Only the legs from below the knees can be seen. This lack of interest in the human body concerns the concept of the figure too, because there is no central line reflecting the natural symmetry of the human body. Predominant, on the contrary, are the splendour of the garments and of the jewellery, of the colours and of the variety of ornaments, and the vivacity of the oblique or diagonal borders. With that in mind, we may remember what is said in the Homeric Hymn to Aphrodite about the goddess of beauty and love (hymn.Ven. 61ff.), around one hundred years prior to this statue’s creation. Aphrodite fell in love with Anchises and, to bewitch him, she went to Cyprus, where the Graces beautified her. They washed the goddess and applied ambrosial salve to her, and then beautiful garments and golden adornments. The shape and the appearance of the goddess of beauty, of her body itself, which might be of interest to us, are not referred to at all. The text seems to reflect a conception of female beauty quite different from ours, but rather near to that of the reconstructed statue from the Acropolis. But let us consider once more the conception of the reconstructed statue. Standing directly in front of the feet (fig. 5), we realize that the upper part of the body is turned a little to its left side; we can estimate the turn by concentrating on the coloured curls and their symmetrical design; and going further on, so that we look vertically at the breast (fig. 6), we become aware that the head itself counteracts to a slight extent this turn. So it is obvious that the entire figure is twisted, turned around its longitudinal axis, from the feet up to the shoulders, and the head responds with a partial reversion. When we take the middle view as the main view of the figure (fig. 4), facing the head directly, we notice that the upper part of the figure rotates a little to the side of the hand seizing the drapery, whereas the lower part rotates clearly to the other side. At the same
11. 12.
G. Dickins, Catalogue of the Acropolis Museum 1 (1912), pp. 40ff. D. Brooke, “Terracottas”, in S. Casson (ed.), Catalogue of the Acropolis Museum 2 (1921), p. 337.
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time we observe that, just at that side, to which the part of the body is turned, the body reveals its distinct natural roundness. The chiton’s blue borders lead around the calf, and similarly the painted border at the left shoulder marks the roundness of the arm and of the shoulder. On the contrary, the other side is defined by a closing contour, and no line and no form indicate the three-dimensional character of the sculpture. By these differences in design on each side the torsion of the figure is intensified, which could perhaps be seen as a manifestation of vitality. This impression is intensified when we look at the figure a little from below, as it certainly stood on a rather high base (the position of the camera was fixed at the level of the sandals, which carefully treated presumably should have been to be seen). This view shows that it is obvious that the statue rises as an inseparable unity of body and garment, rising on both feet without any reference to gravity; it rises from a very narrow basis and expands like a slim wedge to the square, somewhat masculine shoulders, framed in the lower part by the verticals of the paryphe and the long zigzag folds. At the same time the statue seems to lift the chest in a kind of breath, or as a reflection of energy and vitality –without any visible support from the physical axis of the body or a symmetrical composition of the garment. Archaic Greek sculpture often has been characterized with terms like symmetry, “blockiness”, axial structure and tectonic disposition, and even the categories of weight and support have been mentioned (usually exemplified by male statues). But to me none of these terms seems helpful with regard to our reconstructed figure. This is even more striking when we look at the back of the statue (fig. 7). Here it is surprising to see that the garment is not the dominant factor, but the natural human shape: the roundness of the legs is elaborately carved out from the heel up to the full buttocks, and these are framed from above and from the side by the bordered edge of the mantle and are accentuated in their plasticity by this plain surrounding, with only the ample coloured border of the back. Just above the hair ends, which flows down all the way from the crown of the head as a homogeneous, exuberant, but natural mass. The zigzag border of the mantle culminates a little above the right buttock, and from this point the broad central pleat starts, a little overlapped by the hair, emphasizing the vertical dynamic of the right leg and elongating it up to the slightly raised right shoulder, as if the right side of the figure is dominated by a continuous axis, from which all the fine lines of the chiton and the border of the diagonal mantle lead to one point of the left side, to the grasping left hand, a motif which signals activity; this intensifies the torsion of the figure and points the viewer to the front, to the space around it. This uneven construction of the figure is obviously enhanced by the painted decoration, which in its distribution and its blue-red restriction is not so much a reflection of life as an allusion to vitality. If we consider again a male statue, a kouros, with its strict symmetry, once more we realize the different concepts of these two prototypes of Archaic Greek sculpture.
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On the other hand it is obvious that there is a link in the basic character of both these types; perhaps we could describe this common characteristic in terms of the standing of the figures. Both the kore and the kouros stand equally balanced on both legs, and rise up in a kind of powerful vertical motion without any sign of gravity; they seem to represent an image of independent, self-supporting standing, which might be in this very period the characteristic of the human being, of human self-confidence. There is a Greek term, which might point out this special quality: ƥȺƷƠƴƮƩƭƥ, which seems to be used for the first time a little later by Democritus. 13 Addendum Since the preparation of the present publication, some complementary aspects of the restoration of the polychromy of the kore Acro.682 in a recent article, by the author: B. Schmaltz, “Zur Rekonstruktion der spätarchaischen Mädchenfigur Akro. 682. Zum Aussagewert einiger Gewandornamente”, in K. B. Zimmer (Hrsg.), Von der Reproduktion zur Rekonstruktion – Umgang mit Antike(n) II. Summerschool vom 16. – 19. Juni 2014 in Tübingen (2016).
13.
See Democr. fr. 246 (ed. H. Diels, Die Fragmente der Vorsokratiker II [1956]). The term seems to be used here more in the sense of modesty than in the sense of self-sufficiency.
Ombres et Lumières. La sculpture hellénistique polychrome et dorée de Délos : bilan méthodologique et historique
Brigitte Bourgeois, Philippe Jockey
RÉSUMÉ Notre connaissance de la polychromie de la sculpture hellénistique de Délos bénéficie aujourd’hui des fruits d’une recherche interdisciplinaire conduite pendant près de dix ans. On esquisse ici un bilan critique des méthodes utilisées pour la caractériser, en matière de détection, d’analyse et d’interprétation des vestiges chromatiques. Le recours systématique et conjoint au vidéomicroscope et à la spectrométrie de fluorescence X a fait ses preuves. Ce protocole permet aujourd’hui d’apprécier dans toute sa richesse la « palette délienne ». L’observation microstratigraphique des couches et des sous-couches picturales mises en évidence documente les gestes du peintre comme du doreur à la feuille. Elle permet aussi de reconnaître dans certains cas de vraies techniques picturales, au sein desquelles les jeux d’ombre et de lumière occupent une place inédite et inattendue. Une telle virtuosité oblige à poser en des termes nouveaux les questions des contextes de réception de ces sculptures peintes et dorées. Pour autant, en dépit des « lumières » qu’apporte le recours aux différentes méthodes précitées, bien des questions restent aujourd’hui encore dans l’ombre. On en dresse ici la liste, appelée à disparaître progressivement au fil des progrès de la recherche. MOTS-CLEFS Délos, sculpture hellénistique, polychromie, dorure, feuille d’or, bleu, vert, jaune, vidéomicroscopie, spectrométrie de fluorescence X, palette, jeux d’ombre et de lumière, microstratigraphie, techniques picturales.
Lights and shades. The Hellenistic polychrome and gilded sculpture of Delos: a methodological and historical review About ten years of an interdiciplinary research on the polychromy of the Hellenistic sculpture in Delos led to a broader understanding of its success, richness and subtleness during the Hellenistic Period. It also gives our methodology for evidencing, analyzing and interpretating polychrome or gold remains on marble the opportunity to be evaluated. Videomicroscopy and X-ray fluorescence spectrometry had proved their efficiency. By combining them, we better know the colour palette used by painters in Delos. A systematic microstratigraphic close examination of layers and underlayers evidenced both antique painting and gilding processes on marble and stone. The high definition observation of coloured remains revealed in some cases the presence of real pictorial techniques, such as light and shadow effects, which were much more present and central than one would expected. Such virtuosity leads to new questions like the contexts in which these hight quality polychrome and or gilded statues were exhibited. However, despite these progresses, many questions remain today in the shadow. We list them below, hoping that the progress of such researches in the future will elucidate them. SUMMARY
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KEYWORDS Delos, Hellenistic sculpture, polychromy, gilding, gold leaf, blue, green, yellow, videomicroscopy, X-ray fluorescence spectrometry, light and shadow effects, microstratigraphy, pictorial techniques. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƗƮƭƠ Ʈƥƭ ƹƼƵ ƌ ƳƲƯǀƺƴƼuƫ Ʈƥƭ ƩƳƣƺƴƸƶƫ ƩƯƯƫưƭƶƷƭƮƢ ƧƯƸƳƷƭƮƢ ƷƫƵ ƉƢƯƲƸ uƩƬƲƨƲƯƲƧƭƮƿƵƮƥƭƭƶƷƲƴƭƮƿƵƥƳƲƯƲƧƭƶuƿƵ ƌ Ƨưǁƶƫ ƳƲƸ ƨƭƥƬơƷƲƸuƩ ƶƢuƩƴƥ Ƨƭƥ Ʒƫư ƳƲƯƸƺƴƼuƣƥ ƷƫƵ ƩƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƵ ƧƯƸƳƷƭƮƢƵ ƷƫƵ ƉƢƯƲƸ ƩưƭƶƺǀƬƫƮƩ ƥƳƿ uƭƥ ƨƭƩƳƭƶƷƫuƲưƭƮƢ ơƴƩƸưƥ ƳƲƸ ƨƭƩƱƥƧƿƷƥư Ƨƭƥ ƨơƮƥ ƶƺƩƨƿư ƺƴƿưƭƥ ƏƠưƲƸuƩ Ʃƨǁ ơưƥư ƮƴƭƷƭƮƿ ƥƳƲƯƲƧƭƶuƿ ƷƼư uƩƬƿƨƼư ƳƲƸ ƺƴƫƶƭuƲƳƲƭƢƬƫƮƥư Ƨƭƥ ƷƲư ƩưƷƲƳƭƶuƿ Ʒƫư ƥưƠƯƸƶƫ Ʈƥƭ Ʒƫư ƩƴuƫưƩƣƥ ƷƼư ƮƥƷƥƯƲƣƳƼư ƷƼư ƺƴƼuƠƷƼư ƌ ƶƸƶƷƫuƥƷƭƮƢ ƺƴƢƶƫ ƷƲƸ ƦƭưƷƩƲuƭƮƴƲƶƮƲƳƣƲƸ Ʈƥƭ ƷƫƵƹƥƶuƥƷƲƶƮƲƳƣƥƵƹƬƲƴƭƶuƲǀƥƮƷƣưƼưƛ ƥƳơƨƩƭƱƩƷƫƺƴƫƶƭuƿƷƫƷƠƷƫƵƘƲƳƴƼƷƿƮƲƯƯƲƥƸƷƿuƥƵ ƩƳƭƷƴơƳƩƭƶƢuƩƴƥưƥƩƮƷƭuƢƶƲƸuƩƶƩƿƯƲƷƫƵƷƲƹƠƶuƥƷƲưƳƯƲǀƷƲƷƫƵƨƫƯƭƥƮƢƵƳƥƯơƷƥƵƺƴƼuƠƷƼưƌ uƭƮƴƲƶƷƴƼuƥƷƲƧƴƥƹƭƮƢƳƥƴƥƷƢƴƫƶƫƷƼưƪƼƧƴƥƹƭƮǁưƶƷƴƼuƠƷƼưƮƥƭƸƳƲƶƷƴƼuƠƷƼưƳƲƸƢƯƬƥưƶƷƲ ƹƼƵ ƷƩƮuƫƴƭǁưƩƭ Ʒƫư ƩƴƧƥƶƣƥ ƷƲƸ ƪƼƧƴƠƹƲƸ Ʈƥƭ ƷƲƸ ƩƳƭƺƴƸƶƼƷƢ ƗƩ uƩƴƭƮơƵ ƳƩƴƭƳƷǁƶƩƭƵ uƠƯƭƶƷƥ ƩƳƭƷƴơƳƩƭưƥƥưƥƧưƼƴƣƶƲƸuƩƥƯƫƬƭươƵƷƩƺưƭƮơƵƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵ ƶƷƥƳƯƥƣƶƭƥƷƼưƲƳƲƣƼưƷƲƳƥƭƺưƣƨƭƷƫƵ ƹƼƷƲƶƮƣƥƶƫƵƮƥƷơƺƩƭuƭƥƳƴƼƷƿƧưƼƴƫƮƥƭƥưƥƳƠưƷƩƺƫƬơƶƫƑƭƥƷơƷƲƭƥƨƩƱƭƲƷƩƺưƣƥuƥƵƸƳƲƺƴƩǁưƩƭ ưƥƬơƶƲƸuƩƶƩươƩƵƦƠƶƩƭƵƷƲƪƢƷƫuƥƷƫƵơƮƬƩƶƫƵƷƼưƺƴƼuƥƷƭƶƷǁưƮƥƭƩƳƭƺƴƸƶƼuơưƼưƥƸƷǁưƧƯƸƳƷǁư ƝƶƷƿƶƲ Ʈƥƭ ƳƥƴƠ Ʒƫ ƶƸuƦƲƯƢ ƷƼư uƩƬƿƨƼư ƳƲƸ ƳƴƲƥưƥƹơƴƬƫƮƥư ƳƲƯƯƠ ƩƴƼƷƢuƥƷƥ ƳƥƴƥuơưƲƸư ƶƢuƩƴƥ ƥưƥƳƠưƷƫƷƥ Ƙƥ ƩƴƼƷƢuƥƷƥ ƥƸƷƠ ƥƳƥƴƭƬuƲǀưƷƥƭ Ʈƥƭ ƳƭƶƷƩǀƲƸuƩ ƿƷƭ Ƭƥ ƥƳƥưƷƫƬƲǀư ƿƶƲ ƫ ơƴƩƸưƥƩƱƩƯƣƶƶƩƷƥƭ ƐƊƓƊƎƗƏƐƊƎƉƎƆ ƉƢƯƲƵ ƩƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƧƯƸƳƷƭƮƢ ƳƲƯƸƺƴƼuƣƥ ƩƳƭƺƴǀƶƼƶƫ ƹǀƯƯƲƺƴƸƶƲǀ ƧƥƯƠƪƭƲ ƳƴƠƶƭưƲ ƮƣƷƴƭưƲ ƩƱơƷƥƶƫ uƩ ƦƭưƷƩƲuƭƮƴƲƶƮƿƳƭƲ ƹƥƶuƥƷƲƶƮƲƳƣƥ ƹƬƲƴƭƶuƲǀ ƥƮƷƣưƼư ƛ ƳƥƯơƷƥ ƹƼƷƲƶƮƣƥƶƫ uƭƮƴƲƶƷƴƼuƥƷƲƧƴƥƹƣƥ ƪƼƧƴƥƹƭƮơƵƷƩƺưƭƮơƵ
à propos des auteurs Br. Bourgeois, conservateur général du patrimoine au Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF), Paris, France. Ph. Jockey, professeur d’histoire de l’art et d’archéologie du monde grec, université Paris Nanterre, UMR 7041 ArScAn (Archéologie et Sciences de l’Antiquité), Nanterre, France.
abréviations bibliographiques Bourgeois, Jockey 2005 = Br. Bourgeois, Ph. Jockey, « La dorure des marbres grecs. Nouvelle enquête sur la sculpture hellénistique de Délos », Journal des Savants (juillet-décembre), p. 253-316. Bourgeois, Jockey 2007 = Br. Bourgeois, Ph. Jockey, en collaboration avec H. Brecoulaki et A. Karydas, « Le marbre, l’or et la couleur. Nouveaux regards sur la polychromie de la sculpture hellénistique de Délos », dans S. Descamps-Lequime (dir.), Peinture et couleur dans le monde grec antique, Actes du colloque Louvre (10 et 27 mars 2004), p. 163-191. Brecoulaki 2000 = H. Brecoulaki, « Sur la technè de la peinture grecque ancienne d’après les monuments funéraires de Macédoine », BCH 124, p. 189-216. Brecoulaki 2006 = H. Brecoulaki, La peinture funéraire de Macédoine. Emplois et fonctions de la couleur, IVe s.-IIe s. av. J.-C. MD = J. Marcadé, Au Musée de Délos. Essai sur la sculpture hellénistique en ronde bosse trouvée sur l’île, BEFAR (1969). ScD = J. Marcadé (éd.), Sculptures déliennes (1993).
OMBRES ET LUMIÈRES. LA SCULPTURE HELLÉNISTIQUE POLYCHROME ET DORÉE DE DÉLOS
LES
CONDITIONS INITIALES DE L’ÉTUDE
La mise en place effective de l’étude de la polychromie des sculptures hellénistiques de Délos a pris en compte trois paramètres majeurs qui ont influé, quoique à des degrés divers, sur la bonne réalisation de nos travaux de recherche. Le premier d’entre eux était lié aux difficultés logistiques très particulières que présente le travail de terrain sur une île comme Délos. La deuxième tenait à l’importance du corpus d’étude, avoisinant la centaine d’objets. Cette ampleur requérait le choix de techniques d’examen et d’analyse performantes et rapides, capables de couvrir le plus large champ d’investigations durant les campagnes d’étude inscrites au programme. La troisième enfin, et non des moindres, tenait à l’état de conservation souvent très ruiné des vestiges de polychromie. La disparition rapide des traces de couleur sur les marbres trouvés dans l’île inquiétait déjà les archéologues du temps de la Grande Fouille. Dès 1897, L. Couve n’écrivait-il pas à propos de la Petite Herculanaise, une œuvre dont il était l’inventeur : « Ce qui fait le prix de l’exemplaire délien, ce sont les restes de polychromie qu’il a conservés. C’est très peu de chose, et peut-être, aujourd’hui, les traces de couleurs que j’avais soigneusement notées au moment de la découverte ont-elles complètement disparu 1 ». Si l’une des œuvres les plus emblématiques et les mieux conservées de la sculpture délienne suscitait un tel jugement, que dire alors du reste du corpus ? Vouloir retrouver ce que d’autres avant nous avaient vu dans de bien meilleures conditions, aller au-delà, en dépassant les limites du visible à l’œil nu, chercher à substituer aux descriptions anciennes, souvent sommaires et dépourvues d’illustrations, une documentation photographique détaillée et rigoureuse permettant à d’autres chercheurs de juger sur pièces de l’état de la question, soumettre enfin les vestiges à l’analyse scientifique sans nuire encore à leur conservation, autant de visées qui pouvaient s’apparenter à une gageure. La réponse à pareil défi est venue d’une solution innovante, fondée principalement sur deux techniques de terrain totalement non invasives : l’examen en vidéomicroscopie et l’analyse élémentaire par spectrométrie de fluorescence de rayons X (XRF), opérée in situ au moyen d’un spectromètre portable. L’appareillage de vidéomicroscopie, dont le potentiel avait été testé au préalable dans les ateliers du Centre de recherche et de restauration des musées de France 2, offrait de réels avantages en termes de maniabilité, de rapidité d’examen et de puissance de grossissement, par rapport aux loupes binoculaires traditionnelles. Couplé à un ordinateur, il permettait la saisie et le traitement informatisé d’une importante base de données, associant images et commentaires pour chaque point de la surface examinée. Quant à l’analyse XRF in situ, elle devait permettre, grâce à une collaboration fructueuse nouée avec deux chercheurs déjà engagés dans de telles
1. 2.
L. Couve, « Note sur une statue de femme trouvée à Délos », RA XXXI (juillet-décembre 1897), p. 24. Appareil Keyence VH-2000, fonctionnant avec un capteur vidéo de 470 000 pixels et équipé d’une lentille zoom (grossissant de 25 à 175 fois en continu) et d’un endoscope. Pour une première utilisation de ce dispositif, Br. Bourgeois, A. Pasquier, Le Gladiateur Borghèse et sa restauration (1997).
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recherches, H. Brecoulaki 3 et A. Karydas 4, d’étudier la nature des matériaux de la couleur employés par les artisans antiques sur quelque trente-deux objets. Ce long travail d’étude directe des objets, sur le terrain, s’est conclu par la collecte de dix micro-échantillons de matière picturale, prélevés par H. Brecoulaki et confiés aux laboratoires d’Ormylia (S. Sotiropoulou) et de Pise (M.-P. Colombini). Les analyses pratiquées 5 ont livré de nouveaux résultats sur la nature des colorants et des liants organiques entrant en jeu dans la peinture des effigies en marbre sculptées.
UNE
SYNERGIE ESSENTIELLE : VIDÉOMICROSCOPIE ET ANALYSE XRF IN SITU Disposer de techniques performantes ne suffisait pas. Il fallait en outre les associer, sur le terrain, et en faire deux des maillons-clés d’une chaîne opératoire qui organisât de manière efficace les étapes du travail et l’échange de données – de la prospection à la détection, du relevé à l’identification et à la restitution des couleurs ou des dorures ainsi avérées. La synergie qui s’est créée entre l’examen vidéomicroscopique et l’analyse par fluorescence X s’est révélée ici essentielle. Des traces de peinture ou de dorure, indécelables à l’œil nu, ont pu être détectées et aussitôt soumises au verdict de l’analyse directe, sans prélèvement, tandis que l’affichage immédiat des résultats de la mesure, sur l’écran de contrôle, permettait de conforter ou non les données de l’examen.
Ainsi, sur une petite statue d’Apollon (fig. 1) provenant de la Maison des Masques (musée de Délos, A 4135) 6, des grains 7 ressemblant, à l’œil nu, à des dépôts terreux se sont avérés correspondre aux derniers vestiges d’un liseré doré, large d’un centimètre environ, bordant le pan inférieur de la chlamyde que portait le dieu sur l’épaule gauche (fig. 2). À grossissement élevé (supérieur à 90 fois), le faciès très usé d’un reste de feuille d’or, appliqué sur un substrat de couleur brune, est redevenu lisible (fig. 3). L’analyse pratiquée ensuite par A. Karydas confirma la présence du métal précieux ainsi que la nature ferrugineuse de l’assiette. Elle détectait aussi un pic marqué d’un composé du plomb, correspondant à une couche préparatoire dont il sera question plus loin 8 (fig. 4).
3. 4. 5. 6. 7. 8.
Chercheuse à l’IIE (Athènes, Grèce). Institut de physique nucléaire « Démokritos » (Athènes, Grèce). Par microspectrométrie Raman, microspectrométrie infrarouge à transformée de Fourier (μFTIR), chromatographie en phase liquide (HPLC-PDA) et en phase gazeuse (GC/MS et Py-GC/MS). MD, p. 178 ; ScD, p. 106-107, no 43. On emploie ici le terme « grain » dans son acception la plus large, pour rendre compte tout à la fois de la morphologie des vestiges de couleur détectés et de leur taille. Voir infra, p. 147, 154, 155.
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Fig. 1 — Apollon A 4135 (cl. EFA, Ph. Collet). Fig. 2 — Apollon A 4135 : pan inférieur de la chlamyde (cl. EFA, Ph. Collet). Fig. 3 — Fragment de feuille d’or sous vidéomicroscopie (X 90) (cl. EFA et C2RMF). Fig. 4 — Spectre d’analyse XRF (diagramme EFA et C2RMF, A. Karydas).
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DE
NOUVEAUX ACQUIS
L’étude fine de la stratigraphie, superposition de couches peintes, état premier et réfection de polychromie sur marbre De cette approche micro-archéologique de la surface, au plus près des vestiges et de leur conservation, ont surgi de nouvelles lumières non seulement sur la mise en couleurs originelle des sculptures, mais aussi sur des pratiques de réfection antiques des traitements de surface, attestées jusque-là à Délos uniquement par des témoignages épigraphiques. Désormais, il est possible de mettre en regard de ceux-ci des données matérielles. Incontestablement, cette avancée n’aurait pu se faire sans l’exploration fine de la stratigraphie des vestiges polychromes. Cette dernière a révélé, dans un premier temps, sur un nombre limité d’objets, l’existence de couches de couleurs différentes, superposées les unes aux autres, preuve, parmi d’autres, de la dimension véritablement picturale de cette fameuse circumlitio des marbres évoquée par Pline l’Ancien 9. Loin en effet d’être un simple aplat monochrome, la couleur était alors « montée » par couches successives afin de produire un effet chromatique particulier. Ainsi, sur un petit hermès d’Héraclès barbu d’une qualité pourtant sommaire (musée de Délos, A 3795) 10 (fig. 5), la peinture brune de « l’himation en étoffe dont un pan vient couvrir l’arrière du crâne 11 » résulte de l’application d’un brun foncé sur une première couche de jaune (fig. 6). Sur une œuvre d’une qualité bien supérieure comme la Tychè provenant de la Maison des Cinq Statues (musée de Délos, A 4129), on a relevé que le ton bleu violacé de la bande inférieure du manteau avait été produit par la superposition d’une couche de bleu égyptien sur une première couche de rose de garance, elle-même posée sur une préparation blanche (fig. 7) 12. Ce procédé pictural rappelle celui que H. Brecoulaki a mis en évidence dans son étude du décor peint de la Tombe des Palmettes, datée de la fin du ive s. ou du premier quart du iiie s. av. J.-C. à Lefkadia : dans la décoration peinte des éléments architecturaux de la façade, un violet foncé avait été obtenu de la sorte « par superposition, effectuée très probablement au cours du travail et non pas à l’avance sur la “palette” du peintre, puisque l’on arrive à distinguer une première couche de laque mauve-violette à laquelle se superpose une deuxième couche de bleu égyptien 13 ». Quand elle n’est pas imputable à cette technè picturale, la superposition de couches de couleurs peut aussi se révéler l’indice d’une réfection antique des traitements de surface d’origine. De telles pratiques n’avaient été observées jusqu’à présent à Délos que sur des figurines en terre cuite publiées en leur temps par A. Laumonier 14. Ces fines observations formulées par cet illustre savant sont désormais corroborées et recoupées par un 9. 10. 11. 12. 13.
14.
Voir infra, p. 151 et n. 18. MD, p. 456 et pl. XX. MD, p. 456. Observation illustrée dans Bourgeois, Jockey 2007, p. 167, fig. 2d-e. Brecoulaki 2006, I, p. 177 et 420, II, pl. 70,1-2 et tableaux 5.1 et 5.3 : échantillon LB 5, prélevé sur le kymation dorique de l’ante. La laque mauve-violette est dans ce cas de la pourpre conchylienne, et non de la garance. A. Laumonier, Les figurines de terre cuite, EAD XXIII (1956).
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Fig. 5 — Petit hermès barbu A 3795 (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 6 — Brun foncé sur première couche jaune pour obtenir la tonalité brune de l’himation (cl. EFA et C2RMF).
Fig. 7 — Bleu violacé de la statue A 4129 (cl. EFA et C2RMF).
Fig. 8 — Dorure sur assiette jaune recouvrant des restes de peinture rose sur la statuette A 4134 (cl. EFA et C2RMF).
certain nombre de clichés qui attestent la fréquence de telles reprises de polychromie dans l’Antiquité. N’allaient-elles pas en effet jusqu’à faire se succéder trois états différents, superposés les uns aux autres ? L’état de conservation bien plus ruiné des couleurs appliquées sur le marbre semblait exclure tout espoir de découverte dans ce domaine jusqu’à ce que l’étude approfondie de la statuette féminine dorée trouvée dans la Maison des Masques (musée de Délos, A 4134) 15 livre des indices, certes ténus mais indubitables, d’une réfection antique de sa kosmèsis. En effet, l’examen au vidéomicroscope a mis en évidence, sous les vestiges de dorure déjà connus, des restes de peinture rose, posée sur 15.
MD, p. 114, 258, n. 1, p. 417, pl. VII.
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Fig. 9 — Émission d’une fluorescence rouge de la statue A 4134 en fluorescence d’ultraviolet (cl. EFA, Ph. Collet).
une sous-couche blanche (fig. 8). Ce phénomène a été observé en plusieurs emplacements sur le bord du manteau, dans la zone latérale de plis en zigzag sous le bras gauche, ainsi qu’en d’autres endroits du drapé. Un cliché de la statuette, réalisé au préalable sous rayonnement ultraviolet, suggérait déjà la présence sur le manteau de restes d’un état antérieur à la dorure, sous forme de plages émettant une fluorescence rouge caractéristique de la garance (fig. 9). On en conclura que le manteau avait, dans un premier temps, été peint en rose, par application d’une laque de garance sur une préparation blanche, avant que, par la suite, la statuette n’ait été transformée pour être cette fois dorée. L’artisan avait appliqué ici la feuille d’or sur une assiette d’ocre jaune, elle-même posée sur une nouvelle couche de préparation en blanc de plomb 16 – autrement dit sur des couches opaques masquant totalement les restes du premier état. La statuette délienne rejoint ainsi le très petit corpus des reprises de peinture et/ou de dorure avérées à ce jour sur des marbres antiques.
Une méthode à parfaire Une telle méthode a ainsi largement fait ses preuves. Elle souffre encore, cependant, de quelques limites, touchant à l’analyse XRF ou à l’interprétation des images vidéomicroscopiques. Les spectres de dispersion d’énergie obtenus par l’analyse XRF permettent de détecter les principaux éléments des composés minéraux présents dans les couches de surface ; mais ils le font sous forme d’un résultat global qui prend en compte un volume défini par le diamètre du faisceau (< 3 mm) et la profondeur analysable (environ 20-100 um). Ils ne sont donc pas adaptés à l’étude fine de superpositions ou de mélanges de couleurs. Par ailleurs, l’identification minéralogique des pigments nécessite des analyses complémentaires telles que la diffraction de rayons X. Quant à la vidéomicroscopie, les problèmes récurrents de manque de profondeur de champ, sur des objets tridimensionnels observés à fort grossissement, peuvent rendre malaisée la lecture d’états de surface complexes. Au fil des campagnes, certains réglages des enregistrements vidéo (rendu des couleurs et balance des blancs) ont dû être modifiés en fonction de mauvaises conditions opératoires 17 ; la documentation obtenue manque donc parfois de cohérence entre des prises de vue à dominante trop bleutée ou, au contraire, trop jaune.
16. 17.
Voir infra, p. 155-156. Comme, par exemple, la surexposition ambiante du fait de l’ensoleillement des salles du musée.
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Enfin, des phénomènes de brillances parasites, dus à la réflexion de la lumière sur les cristaux du marbre ou sur des particules de dépôts résiduels d’enfouissement ont pu générer des « pollutions visuelles » gênantes. Pour autant, l’application systématique de cette méthode de travail a produit une moisson de résultats, certains plus ou moins attendus, d’autres plus surprenants, qui obligent à « opérer une révolution du regard » comme nous avons pu l’écrire, et à revisiter bien des jugements établis.
LUMIÈRES
SUR UN ART PICTURAL
L’un des faits majeurs qui se dégagent de cette minutieuse enquête de terrain est bien l’attestation qu’à Délos, aux iiie-ier s. av. J.-C., l’embellissement final des effigies sculptées au moyen de la couleur relevait d’une véritable pratique picturale. Loin de la notion qui a longtemps prévalu d’un simple coloriage, de technicité et de portée somme toute restreintes, celle-ci requérait un savoir-faire bien défini, maîtrisant la délicate application d’une peinture sur marbre, sachant exploiter les propriétés des matériaux de la couleur et multipliant les procédés visant à accentuer l’illusionnisme pictural des effigies sculptées, au moyen de jeux d’ombre et de lumière. Les résultats obtenus par un croisement systématique des techniques de prospection et d’analyse invitent en effet aujourd’hui à repenser totalement les rapports entre sculpture et peinture antiques. Au-delà d’une simple complémentarité entre les deux arts, on observe entre eux l’expression d’une rivalité conçue comme une émulation positive – définie en grec par le mot agôn – qui réunit plus peintre et sculpteur qu’il ne les oppose sur une même œuvre sculptée. Pline l’Ancien nous invitait déjà à prendre en compte cette complémentarité, dans cette observation célèbre, souvent citée : « C’est ce Nicias dont Praxitèle, quand on lui demandait lequel de ses ouvrages de marbre il plaçait le plus haut : “ceux où Nicias a mis la main”, si grande était l’importance qu’il attribuait à son procédé de coloration des détails. 18 » Les expressions de cette complémentarité des savoir-faire du peintre et du sculpteur furent multiples. Dans bien des cas, ces deux talents durent être réunis en une seule et même personne. À l’inverse, le concours de deux artistes fut probablement requis dès lors qu’il s’agissait d’œuvres d’exception auxquelles l’apposition de deux signatures conférait une valeur plus grande encore 19. Une illustration minimale de cette complémentarité des deux savoir-faire se reconnaît, tout d’abord, dans la substitution totale ou partielle du trait peint au volume sculpté en
18.
19.
« Hic est Nicias, de quo dicebat Praxiteles interrogatus, quae maxime opera sua probaret in marmoribus : quibus Nicias manum admouisset ; tantum circumlitioni eius tribuerat » (Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 133). Pour une analyse des ressorts de cette émulation artistique dans l’univers de la sculpture athénienne archaïque, D. Viviers, Recherches sur les ateliers de sculpteurs et la Cité d’Athènes à l’époque archaïque : Endoios, Philergis, Aristoklès (1992).
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a
b
Fig. 10 — a. Pied d’une effigie virile chaussé d’une sandale A 228 (cl. EFA, Ph. Collet). b. Détail : où la peinture se substitue à la sculpture (cl. EFA, Ph. Collet). a
b
Fig. 11 — a. Bottine droite de l’Artémis A 449 en fluorescence d’ultraviolet (cl. EFA, Ph. Collet). b. Vue de face en fluorescence d’UV (cl. EFA, Ph. Collet).
relief (fig. 10). Faut-il reconnaître dans ce procédé l’application du seul principe d’économie ? Manifestement, le trait peint évitait toute solution de continuité visuelle dans les zones les moins travaillées de l’œuvre pour leur difficulté d’accès ou leur position de second plan. Preuve, s’il en était encore besoin, du refus grec de laisser sans traitement pictural toute zone, si secondaire fût-elle, de la sculpture. J. Marcadé l’avait déjà observé et souligné à propos des vestiges de couleurs encore visibles à la surface de l’Hermès éponyme de la Maison où il avait été retrouvé 20. À quoi s’ajoutaient effets de perspective et de profondeur, suggérés par l’estompement progressif du relief. 20.
« Indifférente négligence de l’artiste pour l’arrière moins visible […] on est surpris de trouver là les deux extrémités pendantes de la bandelette verte dont l’enroulement sur le cercle qui maintient la coiffure était
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Il arrivait que la couleur se substituât totalement au ciseau du sculpteur (fig. 11). Manifestement, le trait peint avait été jugé supérieur au relief, soit que le choix de la peinture convînt mieux à la représentation d’une bottine de peau, de faible relief, soit que le traitement pictural seul du faible relief des œillets et des lanières participât, une fois encore, de l’amenuisement progressif des volumes, améliorant encore l’inscription de la sculpture dans l’espace, en redoublant l’effet de profondeur. Au-delà de cette première forme de complémentarité des deux savoir-faire du peintre et du sculpteur, certaines sculptures, à Délos, à l’époque hellénistique, paraissent avoir été peintes selon les techniques picturales propres à la peinture et, plus spectaculaire encore, sur le modèle d’un tableau. Les techniques picturales On observe en effet à Délos, à l’époque hellénistique, et plus précisément au tournant du iie s. et du ier s. av. J.-C., une très forte parenté, quoique à plus de deux siècles d’intervalle dans certains cas, avec les techniques picturales de la peinture funéraire macédonienne du ive s. au iie s. av. J.-C. L’étude archéologique et picturale systématique de cette dernière, conduite tout récemment 21, conjuguée à la collecte et à l’analyse des sources textuelles antiques 22, offre désormais aux chercheurs un corpus exceptionnel de comparaison, jamais rassemblé jusqu’à présent. Composition et application des couleurs Les principaux caractères de cette parenté, outre une identité de nature des pigments et colorants identifiés dans les deux cas 23, résidaient également dans les différents modes de combinaison entre eux. Aristote en avait dès le ive s. av. J.-C. dressé la liste, en distinguant les couleurs et tons obtenus par juxtaposition (ȏ Ƴƥƴ´ǶƯƯƫƯƥ ƬơƶƭƵ), par mélange (uƣƱƭƵ) ou par superposition (ȂƳƭƳƲƯƢ ȂƳƭƳƿƯƥƶƭƵ) de deux couches picturales 24. La puissance expressive de telles techniques picturales était encore évoquée, à l’époque impériale, par Lucien qui notait que « l’essentiel de l’art […] réside notamment dans la précision du mélange des couleurs et l’heureuse superposition de celles-ci 25 ».
21. 22.
23. 24. 25.
indiqué par des raies peintes en oblique […] Rehaussées de couleur encore très vive […] dans une partie dont il est clair qu’elle n’était pas destinée à être regardée » (J. Marcadé, « Trouvailles de la Maison dite de l’Hermès », BCH 77 [1953], p. 501). Brecoulaki 2006. Voir les travaux pionniers d’A. Rouveret : Histoire et Imaginaire de la peinture ancienne (V e s. av. J.-C.-I er s. ap. J.-C.), BEFAR 274 (1989) ; le site « Peinture et couleur dans le monde grec antique », hébergé par l’École normale supérieure de Lyon, réunit sources textuelles et archéologiques, http://arts.ens-lyon.fr/ peintureancienne/antho/menu2/partie1/antho_m2_p1_04.htm, consulté le 26/04/2017. Observation déjà faite par H. Brecoulaki, voir n. 21. Aristote, De sensu et Sensibilibus 439b20 sq., 440a5, 440b15. ƘɚưȱƯƫưȆƺƩƭƨǀưƥuƭưƷʨƵƷơƺưƫƵƲȡƲưƷɞDzƳƲƷƩʶưƥƭƷɖƵƧƴƥuuɖƵȂƵƷɞȂƸƬǀƷƥƷƲưƮƥɜƷ˒ưƺƴƼuƠƷƼư DzƮƴƭƦʨƷɚưƮƴʙƶƭưƮƥɜƩȾƮƥƭƴƲưƷɚưȂƳƭƦƲƯɚưƳƲƭƢƶƥƶƬƥƭ
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À Délos, chacune de ces trois techniques fut mise en œuvre, qu’il s’agisse de la juxtaposition de « couleurs pures », du mélange des couleurs entre elles, ou, enfin, de la superposition des couches picturales. Cette parenté des savoir-faire déliens avec la peinture macédonienne fut également étendue à la dorure, à la feuille, observée déjà en Macédoine, près de deux siècles et demi plus tôt 26. Toutes ces techniques supposaient, en amont, une préparation de la couche picturale proprement dite. Elle prit à Délos, la forme de l’application d’une sous-couche uniformément blanche, au blanc de plomb, à quoi s’ajoutait généralement, dans le cas de la dorure, un bol d’ocre jaune ou rouge. Peindre et dorer sur marbre : une technique systématique, celle de l’emploi du blanc de plomb Il est tout d’abord frappant de constater que les ateliers actifs à Délos à l’époque hellénistique pratiquent une même technique d’application de la polychromie sur marbre, qu’il s’agisse de peindre ou de dorer celui-ci, et quels que soient la taille, la qualité, le type ou le style de l’effigie sculptée. Cette koinè technique, codifiée dirait-on, se caractérise par un usage omniprésent du blanc de plomb, que ce soit sous forme d’une couche préparatoire sur laquelle est appliqué le traitement coloré de la surface, sous forme d’une charge mêlée aux autres matériaux de la couleur afin d’obtenir le degré de dilution recherché, ou sous forme de pigment pur. Sans développer ici en détail tous ces aspects, il convient de souligner quelques points importants. La technique de peinture sur préparation en blanc de plomb se trouve fréquemment associée à l’emploi de tons lumineux tels que le rose de garance. Les documents produits par l’étude scientifique de l’Aphrodite de la Maison de l’Hermès (musée de Délos, A 4200) 27 illustrent de manière particulièrement explicite les caractéristiques de cette couche d’apprêt : fine au point d’être quasiment imperceptible à l’œil nu, elle se signale en revanche, sur les clichés pris sous lumière ultraviolette, par une fluorescence jaune marquée. Elle apparaît ainsi de manière nette sur le manteau où les vestiges de peinture rose émettent, pour leur part, une forte fluorescence rouge orangée, typique de la garance (fig. 12). L’examen au vidéomicroscope révèle son homogénéité et sa finesse de grain (fig. 13), tandis que l’analyse XRF y détecte un signal massif du plomb (fig. 14). Cependant, l’emploi de cette préparation n’était pas réservé aux pigments chers ni aux couleurs à base de colorants organiques, puisqu’on la retrouve également sous des matériaux traditionnels au pouvoir couvrant et à la tenue parfaite tels que les ocres. 26.
27.
« Sur le trône de la “tombe d’Eurydice”, la feuille d’or est appliquée au moyen d’un liant à base de gomme arabique, sur une sous-couche d’ocre jaune. Une technique similaire fut employée sur la kliné de la “tombe de Philippe II” pour la création du fond doré, à cette différence près que, dans ce dernier cas, l’ocre jaune est mélangée à de la kaolinite et appliquée sur une sous-couche composée de kaolinite et de calcite, qui sert de préparation aux couleurs. » (Brecoulaki 2000, p. 212). Rappelons que le bon état de conservation de la polychromie sur cette œuvre doit beaucoup aux conseils de prudence prodigués par son inventeur, J. Marcadé, en matière de nettoyage, et aux soins apportés par les responsables grecs à suivre ces recommandations.
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Fig. 13 — Vue au vidéomicroscope de l’Aphrodite A 4200 (cl. EFA et C2RMF).
Fig. 12 — Aphrodite A 4200 en fluorescence d’ultraviolet (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 14 — Analyse XRF de l’Aphrodite A 4200 (diagramme EFA et C2RMF, A. Karydas).
En témoigne, parmi d’autres exemples, le tambourin, peint en un rouge puissant, que tient l’un des Papposilènes exhumés de la Chapelle de Dionysos (musée de Délos, A 4122) (fig. 15). Plus frappant encore, l’emploi d’un apprêt en blanc de plomb caractérise également la technique de dorure à la feuille et « au bol » majoritairement attestée sur les marbres de Délos 28 : sur les fragments de la statuette d’Anoubis provenant du Sarapieion A (musée de Délos, A 5280) comme sur la statuette féminine drapée de la Maison des Masques (musée de Délos, A 4134), la feuille d’or a été posée sur une assiette ferrugineuse d’une chaude couleur jaune, elle-même appliquée sur la préparation blanche au plomb. On portera enfin attention au fait que l’analyse aux rayons X a détecté des traces de blanc de plomb jusque sur la petite tête féminine trouvée dans le quartier marchand (musée 28.
Dernière mention : Br. Bourgeois, Ph. Jockey, « The Polychromy of Hellenistic Marble Sculpture in Delos », dans V. Brinkmann, O. Primavesi, M. Hollein (éds), Circumlitio. The Polychromy of Antique and Mediaeval Sculpture (2010), p. 225-239. Voir p. 226 et la fig. 168.
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Fig. 15 — Tambourin du Papposilène A 4122 (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 16 — Tête féminine dorée A 5355 (cl. EFA, Ph. Collet).
de Délos, A 5355), à l’origine entièrement dorée (fig. 16). La feuille d’or a ici été posée, pour une fois, sur une très fine assiette ferrugineuse de couleur rouge. Sous celle-ci, l’apprêt blanc est si léger qu’il faut l’observer à fort grossissement pour en déceler des traces. Ce choix délibéré et constant d’exploiter les propriétés picturales du blanc de plomb (ou céruse, en grec psimythion) s’inscrit dans un horizon technique de tradition grecque dont on perçoit de mieux en mieux la consistance, grâce aux travaux de différents auteurs 29. Grecque est cette kosmèsis des marbres où les effigies, une fois taillées et finies par la main du sculpteur, sont « fardées » de céruse, à l’image de cet autre art de la cosmétique qu’est le maquillage des femmes 30. Les qualités de mise en œuvre et de durabilité du blanc de plomb, ses propriétés pour renforcer l’accroche des fragiles couches picturales et mettre en valeur la luminosité des tons préparés à partir de colorants organiques, ont certainement joué en faveur de cette prédilection technique, sans compter des facteurs d’ordre économique comme l’évoquent V. Chankowski et Ph. Walter dans ce même volume 31. Le jeu des matériaux de la couleur, la science des mélanges Nous avons déjà eu l’occasion de présenter, dans d’autres publications, la « boîte de couleurs » du musée de Délos, formée de pigments bruts trouvés dans l’île, et nous n’y
29. 30. 31.
Sur ce point, voir Brecoulaki 2000 et 2006, avec bibliographie. Bourgeois, Jockey 2005, p. 297-302. Voir les réflexions de Ph. Walter, dans ce même volume, p. 241-261. Voir p. 87 (V. Chankowski) et p. 252-253 (V. Adrymi et al.).
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reviendrons pas ici 32. De même, nous ne développerons pas les considérations que nous avons déjà faites sur l’apparente « banalité » de la palette délienne, banalité qu’a démentie une étude plus approfondie du corpus sculpté, avec la mise en évidence de pigments bien plus rares, tels qu’un jaune à base de vanadate de plomb 33. En revanche, nous consacrerons quelques lignes à de nouvelles données confortant ces mêmes notions d’inventivité et de recherche d’effets chromatiques, de la part des artisans antiques. Considérons le vert, couleur rare, fréquemment altérée qui plus est. L’enquête a révélé sur ce point une gamme de solutions techniques moins limitée qu’il n’y semblait de prime abord : on trouve en effet de la terre verte, attestée sous forme de pigment brut (figurant dans la boîte de couleurs) et peut-être dans un emploi pictural sur marbre, si l’on peut considérer que les quelques traces détectées sur la chevelure de l’Artémis de la Maison des Cinq Statues, près de la naissance de la raie médiane sur le front, correspondent bien à une touche picturale intentionnelle 34. Mais on trouve aussi un précieux vert de cuivre, correspondant sans doute à la malachite, détecté sur une tête imberbe de fût hermaïque (musée de Délos, A 4256), sous forme de rares grains encore en place sur la bandelette qui entoure le strophion (fig. 17). Mieux conservée, la malachite mêlée au blanc de plomb en une teinte vert pâle forme l’une des bandes multicolores qui ornent la bordure inférieure du chiton de l’Artémis chasseresse (musée de Délos, A 449) (fig. 18), affirmant ainsi la préciosité de l’œuvre et de sa parure peinte 35. Enfin, il arrive que l’on préfère à ces deux premières options une solution moins onéreuse, le recours à un mélange de bleu égyptien et d’ocre jaune, formule attestée sur la chlamyde que porte sur l’épaule gauche un petit torse masculin (musée de Délos, A 6323) (fig. 19), comme sur la ténie de l’hermès imberbe trouvé dans la Maison de l’Hermès (musée de Délos, A 5637) (fig. 20). Dans ce dernier cas, la peinture n’existe plus qu’en traces minimes où l’on peine à deviner, même sous microscope, la couleur verte dont la présence avait été si clairement reconnue par J. Marcadé, l’inventeur de l’œuvre 36. La couleur bleue fournit de son côté un cas d’étude intéressant où la « pauvreté » de la palette, ou au moins son uniformité répétitive, sont compensées par la science des dilutions que pratiquent les artisans chargés de la peinture des marbres. À Délos, comme dans tant d’autres sites de la koinè hellénistique, le bleu égyptien est l’unique pigment qui a servi à la teinte « bleu de ciel » que mentionnaient si souvent les descriptions des archéologues du temps de la Grande Fouille. Mais les peintres savaient en moduler la tonalité (à moins qu’ils n’aient acheté des matériaux préparés déjà selon un nuancier de couleurs ?) 32. 33.
34.
35. 36.
Bourgeois, Jockey 2007, p. 174-175. Sélection moderne de matériaux bruts dont certains ont pu servir à des fins médicales ou cosmétiques plutôt que picturales. Sur la bande inférieure du manteau de la Petite Herculanaise (musée national d’Archéologie d’Athènes, MN 1827) et sur la bordure du péplos de l’Artémis de la Maison des Cinq Statues (musée de Délos, A 4126), voir Bourgeois, Jockey 2007, p. 176-179. Et non à une pollution secondaire liée à l’enfouissement ; mais le caractère isolé du vestige, observé à fort grossissement oblige à la prudence. En revanche, l’identification d’un vert à base de terre ferrugineuse a été acquise via l’analyse XRF. Bourgeois, Jockey 2007, p. 187-188. MD, p. 112.
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Fig. 17 — Tête imberbe A 4256 (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 18 — Bordure inférieure du chiton de l’Artémis chasseresse A 449 (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 19 — Petit torse masculin A 6323 (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 20 — Hermès imberbe A 5637 (cl. EFA, Ph. Collet).
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Fig. 21 — Apollon A 4125 (cl. EFA et C2RMF).
Fig. 22 — Papposilène A 4123 (cl. EFA et C2RMF).
Fig. 23 — Artémis A 449 (cl. EFA et C2RMF).
en jouant sur le degré de broyage, tantôt fin, tantôt grossier, et sur la dilution opérée avec du blanc de plomb. Ils ont ainsi produit toute une gamme chromatique, depuis le bleu soutenu qui orne le chiton long de l’Apollon de la Maison des Cinq Statues (musée de Délos, A 4125), à base de gros grains dont l’éclat vitreux est bien visible en microscopie (fig. 21), jusqu’au blanc bleuté très dilué dont subsistent quelques traces (fig. 22), sur le manteau du second Papposilène trouvé dans la dite Chapelle de Dionysos (musée de Délos, A 4123), en passant par le bleu très lumineux qui orne le vêtement de nombreuses effigies : Artémis élaphébole (musée de Délos, A 449) (fig. 23), Tychè de la Maison des Cinq Statues (musée de Délos, A 4129) par exemple. La matière picturale est alors formée par une dilution, dans du blanc de plomb, de bleu égyptien finement broyé, avivée par l’ajout de grains bleus de calibre plus important. On n’oubliera pas d’ajouter à ces remarques les propos que nous avons déjà développés 37 sur la riche gamme des tons roses, mauves, lilas, violets, si prisés à Délos et obtenus par mélanges de couleurs opérés sur la palette. Imitant les étoffes de pourpre, ces tons florides associaient l’emploi d’un colorant organique (le rose de garance) à des composés minéraux : bleu égyptien principalement, mais aussi grains d’ocre rouge ou d’oxyde de fer, blanc de plomb, voire, comme de précédentes analyses l’avaient démontré 38, terre verte dans le cas de la paryphè mauve qui orne le péplos de l’Aphrodite de la Maison de l’Hermès (musée de Délos, A 4200). Ombres et lumières Cette parenté de l’art de la composition et de l’application des couleurs avec l’art de la peinture se reconnaît dans les jeux d’ombre et de lumière qu’il a été possible de mettre en évidence sur certaines sculptures de Délos. L’observation de ces jeux recoupe ce que nous
37. 38.
Bourgeois, Jockey 2007, p. 178-180. Voir l’étude menée par Y. Chryssoulakis, Fr. Queyrel et V. Perdikatsis sur un échantillon préparé en lame mince, étudié au microscope polarisant et analysé par microsonde électronique : Y. Chryssoulakis, Fr. Queyrel, V. Perdikatsis, « Étude systématique des couches picturales trouvées sur quelques portraits en marbre conservés au musée de Délos », dans Archaeometry, Proceedings of the 25th International Symposium, Amsterdam-Oxford-New York-Tokyo (1989), p. 231-236, voir p. 234-235.
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savons par les sources textuelles antiques du rôle capital que les Anciens leur prêtaient en peinture, à commencer par Pline l’Ancien : L’art finit par acquérir sa propre autonomie et découvrit la lumière et les ombres, le contraste entre les couleurs étant réciproquement souligné par leur juxtaposition. Ensuite vint s’ajouter l’éclat, qu’il faut distinguer ici de la lumière. L’opposition entre ces valeurs lumineuses et les ombres fut appelée tonos ; quant à la juxtaposition des couleurs et au passage de l’une à l’autre, on leur donna le nom d’harmogè 39.
Il ne fait nul doute que la maîtrise des jeux d’ombre et de lumière, la recherche picturale et la figuration de l’éclat, la splendor – que celle-ci vienne des couleurs même ou de l’or – n’aient représenté, pour le célèbre naturaliste, des étapes décisives dans la conquête par la peinture antique de son autonomie. À quoi s’ajoute une définition particulièrement précieuse ici des notions de tonos et d’harmogè. D’autres auteurs antiques ont mentionné, eux aussi, de tels procédés, tel Plutarque qui évoque les jeux de « dégradé et [de] modelé de l’ombre… », ou encore Quintilien qui note qu’une « peinture dans laquelle la couleur ne souligne pas les contours est dépourvue de relief 40 ». Cette observation (à valeur impérative ?) fait de la couleur l’agent modelant par excellence, au-delà de sa seule fonction « colorante », si l’on peut dire. Chacun de ces caractères trouve un écho direct dans la sculpture polychrome et dorée de Délos. Le trait de couleur pouvait venir en simple renfort d’un volume approché au ciseau, comme l’attestent plusieurs exemples. Ainsi, une touche plus sombre de couleur recreusait encore l’interstice laissé entre les deux lèvres rouges d’une statue de Silène (musée de Délos, A 4270) (fig. 24). D’un usage plus subtil, c’est un véritable modelage par la peinture que l’on observe parfois, qui venait compléter le ciseau du sculpteur ou entrer en concurrence avec lui. Une enquête minutieuse au vidéomicroscope, image après image, de la surface peinte de la statuette polychrome et dorée d’Aphrodite (musée de Délos, A 4200), a permis d’isoler et de replacer sur l’œuvre même toute une série de petites touches de couleur, plus sombres ou plus claires, qui parachevaient le travail de sculpture proprement dite. On y découvre un véritable « modelage par la couleur » (fig. 25). Ici, une touche de blanc de plomb venait estomper l’arête trop vive d’un pli ; là, un trait de bleu égyptien, à l’inverse, recreusait davantage encore le fond d’un pli. Un procédé, répété autant de fois que nécessaire, qu’on n’hésitera pas à rapprocher de la définition que Pline donnera, un peu moins d’un siècle après la date supposée de réalisation de l’œuvre délienne, du tonos, cette « opposition entre ces valeurs lumineuses et les ombres 41 ». On en observe une autre illustration sur une sculpture peinte et dorée d’Apollon, sur laquelle, de nouveau, 39.
40. 41.
Tandem se ars ipsa distinxit et inuenit lumen atque umbras, differentia colorum alterna uice sese excitante. Postea deinde adiectus est splendor, alius est quam lumen. Quod inter haec et umbras esset, appellarunt tonon, commissuras uero colorum et transitus harmogen (Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 11 [trad. J.-M. Croisille, CUF, 1985]). Nec pictura in qua nihil circumlitum est eminet… (Quintilien, Institution oratoire VIII 5, 26 [trad. A. Rouveret, Histoire et Imaginaire de la peinture ancienne (1989), p. 285]). Voir supra, n. 39.
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a
b
Fig. 24 — a. Silène A 4270 (cl. EFA). b. Le modelé des lèvres du Silène A 4270 (cl. EFA).
des jeux d’ombre et de lumière ont pu être mis en évidence, au terme d’un quadrillage serré de la surface du marbre peint (fig. 26). Ajoutons qu’ici, la splendor de l’éclat doré des parties nues contrastait à l’origine fortement avec la vivacité des couleurs des parties drapées du dieu. Ces quelques exemples contredisent absolument l’idée reçue ancienne et tenace qui dénie à la peinture toute participation dans les jeux d’ombre et de lumière de la statue. Un déni qui frappe depuis sa redécouverte jusqu’aux spécialistes les plus férus de polychromie des marbres, tel M. Collignon, qui notait que « pas plus à cette date […] qu’à une époque plus reculée, nous n’observons de tons rompus, de modelage par la couleur [...] Le peintre ne modèle pas : il colore avec des teintes plates des surfaces sculptées qui ont par elles-mêmes leurs jeux d’ombre et de lumière 42 ». Les premiers résultats de telles recherches conduites systématiquement invitent même, le cas échéant, dès lors que le nombre d’indices et de vestiges de couleur est suffisant, à retrouver l’option d’éclairage choisie par le peintre-sculpteur et à en déduire l’origine de la source de lumière théorique – ou réelle – établie pour peindre sur le marbre sculpté lui-même. On approche alors de cette manière, au plus près, et très concrètement, la technè mise en œuvre pour en animer la surface. Sur la base des indices chromatiques collectés, on propose, dans le cas de la statuette d’Aphrodite A 4200, de restituer un éclairage oblique gauche haut (fig. 27) qui permet le mieux, à ce jour du moins, de rendre compte des touches de couleur plus sombre ou plus claire repérées à la surface de l’œuvre 43. Ces divers exemples attestent que sculpture et peinture, à Délos, à l’époque hellénistique, ont bien fait techniques picturales communes.
42. 43.
M. Collignon, La polychromie dans la sculpture grecque (1898). Étude proposée par F. Fauquet, sur la base des résultats de l’observation au vidéomicroscope.
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Aphrodite (A 4200)
Fig. 25 — Aphrodite A 4200 : cartographie du modelage pictural (cl. EFA et C2RMF, Archeomed). a
b
Fig. 26 — a. Jeux d’ombre et de lumière sur l’Aphrodite A 4200, touche de blanc sur le genou gauche (cl. EFA et C2RMF). b. Vestige de bleu dans le creux d’un pli (cl. EFA et C2RMF).
OMBRES ET LUMIÈRES. LA SCULPTURE HELLÉNISTIQUE POLYCHROME ET DORÉE DE DÉLOS
Fig. 27 — Essai de restitution d’un éclairage oblique gauche haut (cl. EFA et C2RMF, Archeomed).
Mais il est des cas où le groupe sculpté, en soi, rivalisait très probablement avec l’art du tableau même, qu’il s’agît du thème, de sa transposition en trois dimensions, ou, enfin, des techniques picturales mises en œuvre. Il semble bien que le groupe d’Artémis élaphébole (musée de Délos, A 449) (fig. 28) témoigne à Délos de cette mimésis, définie justement par les anciens non point comme l’imitation servile d’un modèle, mais bien comme l’expression agonistique de domaines et de talents complémentaires sinon toujours rivaux. Le modèle en était ici, manifestement, un tableau, dont la composition remonte, au moins, au ive s. av. J.-C. On le trouve reproduit à différentes échelles, sur différents supports, à différentes époques, preuve de son succès 44. Le groupe sculpté de Délos empruntait aux techniques picturales des tableaux ce qu’elles avaient de meilleur, qu’il s’agisse du réalisme du rendu du pelage de la bête, par touches de couleurs (fig. 29), du raffinement des étoffes aux liserés et galons brodés ou que l’on ait affaire, de nouveau, à des jeux d’ombre et de lumière. Mais le groupe sculpté témoigne surtout de cette fameuse harmogè qui, près de deux siècles plus tard, sera définie par Pline, on l’a vu 45, comme « la juxtaposition des couleurs et le passage de l’une à l’autre ». Les attestations d’une telle virtuosité picturale se reconnaissent en maints endroits de l’œuvre. Le caractère précieux du vêtement porté par la déesse était suggéré, à ses extrémités inférieures, par la superposition des couleurs
44. 45.
Bourgeois, Jockey 2007, p. 187-188. Voir supra, p. 160 et n. 39.
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a
b
Fig. 28 — Le groupe d’Artémis élaphébole A 449 en fluorescence d’ultraviolet (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 30 — a. L’harmogè et ses nuances (A 449) (cl. EFA, Ph. Collet). b. Détail au vidéomicroscope du groupe de l’Artémis élaphébole A 449 (cl. EFA et C2RMF).
Fig. 29 — Rendu du pelage de la bête (A 449) (cl. EFA et C2RMF).
Fig. 31 – Incarnat de l’Artémis A 449 au vidéomicroscope (cl. EFA et C2RMF).
Fig. 32 — Petite Herculanaise conservée au musée national d’Archéologie d’Athènes (cl. EFA, Ph. Collet).
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et leur enchaînement sur le mode du fondu enchaîné (fig. 30). Pas moins de onze unités chromatiques composaient cette bande luxueuse dont la syntaxe a pu être retrouvée. L’incarnat de la déesse avait aussi été l’objet d’un traitement de grande qualité, par les nuances qu’on observe encore aujourd’hui (fig. 31). Les touches de couleur plus rouges ou plus orangées devaient conférer à l’incarnat divin ce hâle subtil qui est celui des grandes chasseresses 46. Le soin extrême apporté au traitement pictural des carnations se reconnaît sur bien d’autres œuvres, quoique les indices en soient souvent des plus ténus. Le traitement pictural des carnations Cette enquête minutieuse nous permet de mieux approcher les réalités perdues d’une peinture bien éloignée de nos schémas mentaux et de notre goût forgé par des siècles d’une esthétique fondée sur la négation des couleurs de l’antique. Si les progrès qu’on lui doit sont infimes dans certains cas, si les hypothèses qu’elle permet de formuler sont fragiles lorsqu’elles ne reposent que sur quelques « grains » de couleurs, de cet ensemble de données, patiemment collectées, se dégage néanmoins des éléments de certitude. La question si délicate du traitement des carnations a bénéficié au premier chef d’une telle collecte. On le sait, elle a conservé longtemps sa part d’ombre. Le haut degré de polissage du support en marbre ainsi que la ferveur des nettoyages modernes en ont en général effacé toute trace. À quelques exceptions près, néanmoins. À fort grossissement, en effet, certains épidermes ont repris de la couleur. Ainsi, l’Héraclès de la Maison du Lac (musée de Délos, A 721) a conservé quelques vestiges de son ton de chair haut en couleur, à base d’ocre rouge orangé, qu’on rapprocherait volontiers de certains exemplaires déliens en terre cuite, ou du ton de chair, andreikelon, de l’Hermès de la mosaïque du Jugement de Pâris. Dans d’autres cas, le traitement des carnations masculines devait plutôt consister en rehauts, en quelque sorte graphiques, de peinture rouge (de nouveau des ocres) soulignant les détails du visage, sourcils, yeux, narines et bouche. Il en était ainsi du visage du malheureux Kerdon, disparu dans un naufrage, et du visage de l’hermès juvénile de la Maison de l’Hermès, comme J. Marcadé avait pu l’observer dans les années cinquante, au sortir de terre 47. Pour les chairs féminines il faut risquer un regard – si l’on ose dire ! – dans le nombril d’une sensuelle petite Aphrodite à la cape (musée de Délos, A 5222), pour y découvrir quelques restes de peinture rose. Et il nous faut revenir une dernière fois à la Petite Herculanaise pour admirer, sur les belles photographies prises par Ph. Collet, la délicatesse du traitement pictural de l’œil ainsi que les vestiges d’un ton à base d’ocre jaune et de rose pour les chairs (fig. 32). La carnation ivoire rosé que certaines Tanagréennes du Louvre ont conservée n’en était peut-être guère éloignée.
46. 47.
À comparer aux fards roses analysés par Ph. Walter, dans ce même volume, p. 250-251. J. Marcadé (n. 20), p. 512.
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Fig. 33 — Recontextualisation en imagerie 3D de l’exposition initiale du groupe d’Artémis élaphébole A 449 (cl. EFA et C2RMF, Archeomed).
Raffinement et préciosité caractérisent cette œuvre, avec le délicat motif des postes ornant le bas du chiton, le jeu précieux d’un liseré, sur le manteau, mariant l’or et un splendide violet (peut-être de pourpre ?), avec, enfin, le fin travail pictural des mèches entremêlant traits de peinture brun rouge et de jaune. Sculpture et peinture sont ici associées en un art total jouant en maître de l’illusionnisme de la couleur. Ombres et lumières et contexte d’exposition de la statue peinte Il est rare que l’on puisse attribuer avec certitude à une œuvre antique son lieu d’exposition originel. Trop de contextes imprécis, trop de dépôts secondaires ou de remplois de l’œuvre étudiée s’opposent généralement à toute tentative de ce type. Le cas du groupe d’Artémis élaphébole n’en est que plus remarquable. Il est pratiquement assuré, en effet, qu’il se dressait à l’origine sur une base légèrement surélevée, au fond du corridor d’accès à la maison III S du Quartier du théâtre 48. Son lieu d’exposition final déterminait-il pour la statue un traitement pictural qui le prît en compte ? Les conditions d’éclairage réelles obligeaient-elles à des retouches chromatiques sur l’œuvre même, in situ, visant à compenser des ombres trop prononcées ou des lumières trop éclatantes ou, à l’inverse, trop ternes ? Cette interrogation, qui invite à reconsidérer l’ensemble du processus de fabrication d’une sculpture, depuis la commande initiale jusqu’à sa mise en place finale, chez le commanditaire, est désormais rendue possible par le degré de finesse d’analyse du traitement pictural que les méthodes contemporaines permettent d’atteindre. La mise en évidence d’un véritable modelé pictural de l’œuvre sculptée invite à confronter ce 48.
M. Kreeb, Untersuchungen zur figürlichen Ausstattung delischer Privathaüser (1988).
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dernier aux données matérielles de l’exposition. Pour cela, la réalisation d’un modèle numérique virtuel 3D s’est révélé un outil indispensable 49. La souplesse de son utilisation a permis d’éprouver la validité des hypothèses formulées et de proposer, sur la foi des indices concurrents du modelé pictural et de la scène d’exposition, une restitution de cette dernière (fig. 33). Une telle image se veut d’abord une invitation à mieux prendre en compte, dans les études ultérieures, dès lors que les données recueillies le rendent possible, le croisement des résultats de l’analyse picturale sur l’œuvre et les contraintes de son lieu d’exposition final. Souhaitons qu’elle nous donne aussi une idée du goût des Déliens du début du ier s. av. J.-C. pour la mise en scène plus ou moins luxueuse de répliques partielles de chefs-d’œuvre de la sculpture (ou de la peinture) classique.
49.
Voir infra, l’article de F. Fauquet, Ph. Jockey, p. 387-402.
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Greek Contributions to Tomb Paintings in Etruria and Southern Italy: Colours, Painting Techniques, Workshops and Iconography
Stephan Steingräber
SUMMARY In two historical periods in particular, Greek cultural and artistic influences manifested themselves very strongly in pre-Roman Italy: in the late Archaic period (mid-6th century – beginning of the 5th century BC) and in the late Classical and early Hellenistic periods (mid-4th century – mid-3rd century). In the first period, Etruscan tomb painting (mainly in Tarquinia) displayed many common characteristics with East Greek/Ionian painting –the expression of a kind of cultural and artistic koine. The presence of Greek painters in Etruria is proved by finds of colour pigments as a votive gift in Gravisca, Tarquinia’s harbour town with the character of a Greek emporion. In the second period, we can observe both in southern Etruria (Tarquinia, Orvieto, Vulci, Cerveteri) and in different parts of southern Italy –Apulia (Arpi, Canosa, Egnazia), Campania (Naples, Capua, Nola) and Lucania (Paestum)– the strong influence of Greek and particularly Macedonian painting as regards colours, painting techniques, iconographic programmes and ideological intentions. In this paper I present and examine several characteristic tomb paintings of good quality in Tarquinia (e.g. Tomba dei Festoni), Arpi (Ipogeo della Medusa), Naples (Ipogeo Cristallini) and Paestum (Necropoli Spinazzo). Recent research on and restorations of Etruscan and South Italian painted tombs have contributed to a much better level of knowledge.
KEYWORDS Pre-Roman Italy, Etruria, Tarquinia, Etruscan tomb painting, Greek painters, Macedonia, painting techniques, iconographic programs, ideological intentions. L’apport grec à la peinture funéraire en Étrurie et en Italie méridionale : couleurs, techniques picturales, ateliers et iconographie L’influence de la culture et de l’art grec sur l’art de l’Italie préromaine se manifeste de façon particulièrement décisive pendant deux périodes historiques : l’archaïsme tardif (du milieu du vie au commencement du ve s. av. J.-C.) et du classicisme tardif à la haute époque hellénistique (du milieu du ive au milieu du iiie s. av. J.-C.). Pendant la première période, la peinture funéraire étrusque (surtout à Tarquinia) montre beaucoup de similitudes avec la peinture de la Grèce d’Asie (ionienne) – une espèce de koiné culturelle et artistique. La présence de peintres grecs en Étrurie est prouvée par des trouvailles de pigments en tant qu’offrande votive à Gravisca, le port de Tarquinia au caractère d’emporion grec. Pendant la seconde période, on peut observer en Étrurie du Sud (Tarquinia, Orvieto, Vulci, Cerveteri) de même que dans différentes régions de l’Italie méridionale, notamment en Apulie (Arpi, Canosa, Egnazia), en Campanie (Naples, Capoue, Nola) et en Lucanie (Paestum) une influence marquée de la peinture grecque, et particulièrement macédonienne, en ce qui concerne les couleurs, les techniques RÉSUMÉ
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STEPHAN STEINGRÄBER
picturales, les programmes iconographiques et les intentions idéologiques. On présente et on examine ici quelques peintures funéraires caractéristiques de haute qualité à Tarquinia (par exemple la Tomba dei Festoni), à Arpi (l’hypogée de la Méduse), à Naples (l’hypogée Cristallini) et à Paestum (la nécropole Spinazzo). Les recherches récentes et la restauration des tombes peintes de l’Étrurie et de l’Italie méridionale ont considérablement contribué à l’amélioration de nos connaissances dans le domaine de la peinture antique. MOTS-CLEFS Italie préromaine, Étrurie, Tarquinia, peinture funéraire étrusque, peintres grecs, Macédoine, techniques picturales, programme iconographique, idéologie. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƊƯƯƫưƭƮơƵ ƶƸuƦƲƯơƵ ƶƷƲ ƧƴƥƳƷƿ ƨƭƠƮƲƶuƲ ƷƠƹƼư ƶƷƫư ƊƷƴƲƸƴƣƥ Ʈƥƭ Ʒƫ ưƿƷƭƥ ƎƷƥƯƣƥƺƴǁuƥƷƥ ƷƩƺưƭƮơƵƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵ ƩƴƧƥƶƷƢƴƭƥƮƥƭƩƭƮƲưƲƧƴƥƹƣƥ ƌƩƯƯƫưƭƮƢƳƲƯƭƷƭƶƷƭƮƢƮƥƭƮƥƯƯƭƷƩƺưƭƮƢƩƳƭƴƴƲƢơƧƭưƩƭƨƭƥƣƷƩƴƥƹƥưƩƴƢƶƷƫưƳƴƲƴƼuƥƽƮƢƎƷƥƯƣƥ ƮƸƴƣƼƵƶƩƨǀƲƭƶƷƲƴƭƮơƵƳƩƴƭƿƨƲƸƵƶƷƫưǀƶƷƩƴƫƥƴƺƥƽƮƢƩƳƲƺƢ uơƶƥƷƲƸƲƸ˝ƥƴƺơƵƷƲƸƲƸƥƭƳƛ ƮƥƭƶƷƫưǀƶƷƩƴƫƮƯƥƶƭƮƢƮƥƭƳƴǁƭuƫƩƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƳƩƴƣƲƨƲ uơƶƥƷƲƸƲƸ˝uơƶƥƷƲƸƲƸƥƭƳƛ ƏƥƷƠ Ʒƫư ƳƴǁƷƫ ƳƩƴƣƲƨƲ ƫ ƩƷƴƲƸƶƮƭƮƢ ƪƼƧƴƥƹƭƮƢ ƷƼư ƷƠƹƼư ƮƸƴƣƼƵ ƶƷƫư Tarquinia ƩƣƺƩ ƳƲƯƯƠ ƮƲƭưƠ ƺƥƴƥƮƷƫƴƭƶƷƭƮƠ uƩ Ʒƫư ƥưƥƷƲƯƭƮƢ ƩƯƯƫưƭƮƢƭƼưƭƮƢ ƪƼƧƴƥƹƭƮƢ ˝ơƮƹƴƥƶƫ ƩưƿƵ ƩƣƨƲƸƵ ƳƲƯƭƷƭƶƷƭƮƢƵ Ʈƥƭ ƮƥƯƯƭƷƩƺưƭƮƢƵ ƮƲƭưƢƵ ƌ ƳƥƴƲƸƶƣƥ ƊƯƯƢưƼư ƪƼƧƴƠƹƼư ƶƷƫư ƊƷƴƲƸƴƣƥ ƥƳƲƨƩƭƮưǀƩƷƥƭ ƥƳƿ Ʒƫư ƥưƩǀƴƩƶƫƺƴƼƶƷƭƮǁưƸƯǁưƼƵƥưƥƬƫuƠƷƼưƶƷƫưGravisca ƷƲƩƳƣưƩƭƲƷƫƵTarquinia ƳƲƸƯƩƭƷƲƸƴƧƲǀƶƩ ƼƵƩƯƯƫưƭƮƿƩuƳƿƴƭƲưƏƥƷƠƷƫƨƩǀƷƩƴƫƳƩƴƣƲƨƲ uƳƲƴƲǀuƩưƥƳƥƴƥƷƫƴƢƶƲƸuƩƷƿƶƲƶƷƫưƿƷƭƥƊƷƴƲƸƴƣƥ (Tarquinia, Orvieto, Vulci, Cerveteri) ƿƶƲ Ʈƥƭ ƶƩ ƨƭƥƹƲƴƩƷƭƮƠ uơƴƫ ƷƫƵ ưƿƷƭƥƵ ƎƷƥƯƣƥƵ ˝ƆƳƲƸƯƣƥ (Arpi, Kanosa, Egnazia) ƏƥuƳƥưƣƥ ƒƠƳƲƯƫ ƏƥƳǀƫ Nola ƮƥƭƐƲƸƮƥưƣƥ ƕƲƶƩƭƨƼưƣƥ ˝ƷƫưƭƶƺƸƴƢ ƩƳƣƨƴƥƶƫƷƫƵƩƯƯƫưƭƮƢƵƮƥƭƩƭƨƭƮƿƷƩƴƥƷƫƵƑƥƮƩƨƲưƭƮƢƵƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵ ƶƩƿ ƷƭƥƹƲƴƠƶƷƥƺƴǁuƥƷƥ ƷƭƵ ƷƩƺưƭƮơƵ ƷƫƵ ƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵ Ʒƥ ƩƭƮƲưƲƧƴƥƹƭƮƠ ƳƴƲƧƴƠuuƥƷƥ Ʈƥƭ ƷƭƵ ƭƨƩƲƯƲƧƭƮơƵ ƳƴƲƬơƶƩƭƵ ƗƷƲ ƠƴƬƴƲ ƥƸƷƿƳƥƴƲƸƶƭƠƪƼƮƥƭƩƱƩƷƠƪƼƲƴƭƶuơưƩƵƺƥƴƥƮƷƫƴƭƶƷƭƮơƵƮƥƯƢƵƳƲƭƿƷƫƷƥƵƷƲƭƺƲƧƴƥƹƣƩƵƷƠƹƼưƶƷƫư Tarquinia Ƴƺ Tomba dei Festoni
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about the author S. Steingräber, Professor of Etruscology and Italian Antiquity – Università di Roma Tre, Roma, Italy.
acknowledgements I would like to thank most warmly the French School at Athens for the kind invitation to the conference and H. Walter-Karydi for her friendly suggestions.
bibliographical abbreviations Steingräber 1985 = S. Steingräber (ed.), Etruskische Wandmalerei. Steingräber 2006 = S. Steingräber, Etruskische Wandmalerei. Von der geometrischen Periode bis zum Hellenismus.
GREEK CONTRIBUTIONS TO TOMB PAINTINGS IN ETRURIA AND SOUTHERN ITALY
There is no doubt that Etruscan art was very colourful –not only in its wall and tomb paintings but also other categories of art such as stone and terracotta sculptures and reliefs. In many cases, the original polychromy is still at least partly preserved, as we can see in the cases of the famous late Archaic statue of Apollo from the Portonaccio Temple in Veii, and the equally famous 4th century pair of winged horses from the “Ara della Regina” temple in Tarquinia. In both cases, recent restorations using sophisticated methods have allowed an even better reconstruction of the original polychromy. 1 Many Etruscan sarcophagi and urns with and without reliefs show remnants of the original colourful decoration too. In contrast to Greek and Roman art, Etruscologists have never had a problem about the existence or non-existence of colours on sculptures and reliefs. We have also to remember that the use of marble in Etruria was very rare. In two historical periods in particular, Greek cultural and artistic influences were particularly strong in Etruria and other parts of pre-Roman Italy: in the late Archaic period (from the middle of the 6th century to the beginning of the 5th century) and in the late Classical and early Hellenistic period (from the middle of the 4th century to the middle of the 3rd century). In the first period, Etruscan tomb painting –mainly in Tarquinia– displays many common characteristics with eastern Greek/Ionian painting, the expression of a kind of cultural and artistic koine. 2 The presence of Greek painters –not only vase-painters– in Etruria is proved by the find of a collection of colour pigments in vessels beneath votive offerings in Gravisca –Tarquinia’s harbour town, which had a true cosmopolitan atmosphere and the partial character of an (East) Greek emporion. Gravisca reached its fullest extent of vitality or akme during the second half of the 6th and the early 5th century, when Tarquinian tomb painting also reached its first and main highpoint. Foreign artists, craftsmen and merchants, above all East Greeks, especially after the destruction of Phocaea in 546, settled in Gravisca and had their own sanctuaries dedicated to the Greek gods Hera, Aphrodite and Demeter. Many Greek ceramics and inscriptions have been found during the excavations carried out since the 1970s by M. Torelli and F. Boitani. Famous names like Sostratus from Aegina 3 and Pactyes (connected with King Croesus of Lydia) are documented here. Unfortunately the colour pigments have never really been published. 4 In the recent exhibition “Etruschi. Le antiche metropoli del Lazio” in Rome, a selection of the colour pigments was on display but not described in the catalogue. 5 Unpublished analysis shows that in case of blue we are dealing with the so-called Egyptian blue (a composite of copper silicate and natron, i.e. sodium carbonate, which was not very common in Italy but more so in North Africa).
1. 2. 3. 4. 5.
F. Boitani, M. Diana, S. Guido, “Il restauro dell’Apollo di Veio”, Kermes 17 (2004), pp. 41-60. Steingräber 2006, pp. 281-282. Mentioned by Herodotus, 4.152. There are only brief comments by M. Torelli in NSc 1971 and PP 1977. F. Boitani, “Gravisca. Profilo storico-topografico”, in M. Torelli, A. M. Moretti Sgubini (eds), Etruschi. Le antiche metropoli del Lazio (2008), pp. 148-153.
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Some archaeologists even attribute some of the most outstanding Tarquinian tombs from the last decades of the 6th century to immigrant Ionian painters, among them the Tombe degli Auguri, delle Leonesse, della Caccia e Pesca and del Barone, all of which present true megalographies and figural programmes. In terms of style, it is possible to discern definite links between certain late Archaic tomb paintings in Tarquinia and specific regions or cities of the Ionian East. The Tombe del Barone and delle Iscrizioni, for example, betray a strong North Ionian influence, the Tombe degli Auguri and dei Giocolieri show borrowings from Aeolian Phocaea, and certain features of the Tomba della Caccia e Pesca can be traced to Samos. 6 There are close similarities in style (head profiles), in some iconographic elements (e.g. predatory cats, banquets, seascapes with ships, processions of people), and sometimes also in painting techniques, between late Archaic Etruscan tomb painting on the one hand and various examples of late Archaic tomb and wall painting in Asia Minor on the other, for example in Gordion (Phrygia), Usak (Lydia), and in Elmali/Karaburun (Lycia), which are also distinctly Ionian influenced. 7 We should also mention the painted Clazomenaen sarcophagi, painted terracotta relief slabs like those from Larisa, and various vase groups such as those of the Little Masters/Kleinmeister from Samos. 8 Thus we can speak about a kind of “international Ionicism” or “Ionian koine”, which is clearly reflected in wall, tomb and vase painting in different areas of the eastern and central Mediterranean, including Etruria, from where we can cite a great number of tomb paintings, the painted Campana terracotta panels, the Hydriae from Caere, the Campana Dinoi, and the Pontic vases from Vulci. 9 As it is well known, in general we can distinguish three different periods as regards the painting techniques used in Etruscan tombs. These differences were at least partly recognized by G. Dennis as early as the mid-19th century. 10 In the last five decades, L.Vlad Borrelli in particular contributed significantly to a better technical understanding of Etruscan tomb painting. 11 In the Orientalizing period, the 7th and early 6th centuries –starting with the Tomba dei Leoni Ruggenti discovered in 2005 at Veii, which dates to the first quarter of the 7th century– the three basic colours of red, black, and yellow were applied directly to the hollowed out and smoothed stone walls. These are in effect more coloured drawings than real paintings. In the Archaic period, however, beginning in the second quarter of the 6th century, we can recognize a rudimentary form of fresco 6. 7. 8. 9. 10. 11.
M. Cristofani, “Storia dell’arte e acculturazione. Le pitture tombali arcaiche di Tarquinia”, Prospettiva 7 (1976), pp. 2ff; Steingräber 2006, pp. 64-65. O. Bingöl, Malerei und Mosaik der Antike in der Türkei (1997), pp. 33-57. Steingräber 2006, pp. 281-282. Steingräber 2006, pp. 122-126. L. Branzani, “Le pitture murali degli Etruschi. Osservazioni sulla loro tecnica”, StEtr 7 (1933), pp. 335ff. L.Vlad Borrelli, “Proposte per il restauro e la conservazione delle pitture murali”, BRest 1965, pp. 21ff.; ead., “Rapporto sulle cause di deperimento delle pitture murali di Tarquinia”, StEtr 42 (1974), pp. 161ff.; ead., “Nota sulla tecnica nella pittura parietale etrusca”, DArch 1 (1983), 2, pp. 89ff.; ead., “Technik und Konservation der etruskischen Grabmalerei”, in Steingräber 1985, pp. 91-100; ead., “Cartoni, modelli, disegno preparatorio nelle pitture delle tombe etrusche”, ArchCl 43 (1991), pp. 1179ff.
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Fig. 1 — Tarquinia, Tomba dei Leopardi: detail of the rear wall with preliminary incisions (Photo: S. Steingräber).
painting, including a thin, light intonaco (from 1 to 3 mm thick), made of clay, stone powder (macco in case of Tarquinia), and even vegetable fibres and peat; then a thin layer of lime paste (which reacts chemically with the moist backing to form a light coating of calcium carbonate, which acts as a fixative for the colours); and then a preliminary incision with a stick or pointed metal instrument (in some tombs there is no incision at all), red, dark brown or black outline drawings, and a richer palette of colours, now including blue and green. These innovations were probably sparked significantly by immigrant, mainly East Greek, painters and artists. The tombs were clearly painted very rapidly –without a binding medium– and, due to the air’s high humidity, the walls would never completely dry. The outline drawing did not always precisely follow the preparatory incisions, as demonstrated, above all, by highlight photographs (fig. 1). 12 In the course of the 4th century, a further basic change occurred with the application of a much thicker “intonaco” –a genuine plaster– (up to 3 cm) that could have as many as three layers: “tufo pozzolanico” at the bottom, siliceous sand and lime (2:1 ratio) in the middle, and calcium carbonate blended with colour pigments and sand at the top.
12.
J. De Wit, “Die Vorritzungen der etruskischen Grabmalerei”, JdI 44 (1929), pp. 31ff.
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Fig. 2 — Tarquinia, Tomba dell’Orco I: detail of the right wall with preliminary incisions (Photo: S. Steingräber).
Preliminary incisions were reduced (fig. 2) or completely omitted, 13 and a still more varied and nuanced palette of colours came into use, including a number of blended colours that could produce more subtle plastic effects. Research intended to identify components of the pigments, the support, the plaster on which the colour was laid, and the adhesives used (obtained in part from egg white) has recently been carried out in more detail. In this context, H. Brecoulaki’s research in Macedonia, southern Italy (Paestum, Campania, Apulia) and Etruria 14 is particularly noteworthy, as are, for example, the tempera paintings on the famous Amazon sarcophagus from Tarquinia (now in the Archaeological Museum of Florence), recently restudied by A. Bottini 15 and most probably to be attributed to a painter from Magna Graecia, perhaps from Taras. In Etruria the pigments were mainly obtained from earths/ iron oxides and ferruginous hydroxides/hematite (red and yellow = red and yellow ochre),
13. 14. 15.
S. Steingräber, “Beobachtungen zu Vorritzungen in der etruskisch-hellenistischen Grabmalerei”, AA 1988, pp. 71ff. H. Brecoulaki, L’esperienza del colore nella pittura funeraria dell’età preromana V – III sec. a.C. (2001). A. Bottini, E. Setari, Il sarcofago delle Amazzoni (2007).
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lime or kaolin (white), charcoal or charred bones (black), cinnabar/“minium” = brilliant red (mercury sulphide) and malachite (basic copper carbonate) or celadonite (green). Only the blue was made of an artificial mixture of heated smashed malachite or copper, lime powder and sand, the so-called Egyptian frit or caeruleum aegyptium. Theophrastus, Pliny and Vitruvius in particular refer to the three varieties of this very special colour. The much more expensive raw material lapis lazuli was not normally used in Etruria, probably mainly for economic reasons. In 1979, the Soprintendenza Archeologica per l’Etruria meridionale started a programme, which continues today, of restoration of many painted tombs in Tarquinia, but also at some other sites such as Veii and Chiusi, of which the condition of preservation was alarming. 16 The restorers used more sophisticated and less invasive techniques than in the past, with good results. In part, they had to use micro-drills and ultrasound scanners to remove old aids to restoration such as metal cramps and grey cement, and then clean and consolidate the painted surfaces with acrylic resins. In any case, after some less positive experiences in the 1950s and 1960s, efforts are now made to conserve the tomb paintings in situ and not to detach them from the walls. The very famous and equally discussed Tomba dell’Orco of Tarquinia, discovered already in 1868, 17 has been the subject of restorations and several kinds of investigation since the 1980s, especially from 1981 to 1983 and from 2005 to 2006. These analyses were carried out partly in situ and partly in the laboratory. “Sezioni lucide”/glossy sections, Raman spectroscopy and X-ray fluorescence were employed as techniques. Using ultraviolet light made it possible to obtain better information about the use of organic adhesives. The walls are covered with a first layer of “tufo pozzolanico” (between 2.5 and 6 mm thick), a second grey layer of siliceous sand and lime (2:1 ratio; about 10 mm thick) and a third exterior layer of calcium carbonate containing some crystals of powdered marble (about 2 mm thick). The colours red, yellow, white, black, green and blue that were used have been analysed but the final results have still to be published. In my opinion, the use of the so-called Egyptian blue by itself and some other observations are not enough to postulate a Greek painter or workshop in case of the Tomba dell’Orco, as was proposed by e.g. M. Torelli (from Attica or Magna Graecia). The illustrations show some details of the paintings in the two rooms (Tomba dell’Orco I and II) (figs. 2-5) and the space linking them (so-called Tomba dell’Orco III) (fig. 6) after the recent restorations. Recent restorations and research (using multispectral methods) in the Tomba dei Demoni Azzurri discovered in 1985 at Tarquinia and not yet securely published are also 16.
17.
M. Paribeni, Cause di deperimento e metodi di conservazione delle pitture murali delle tombe sotterranee di Tarquinia (1970); C. Bettini, C. Giacobini, M. Marabelli, “Gli ipogei dipinti della necropoli di Veio: Indagine sullo stato di conservazione e sulle tecniche pittoriche”, StEtr 45 (1977), pp. 239ff.; C. Bettini, “Primi risultati di recenti restauri effettuati su tombe dipinte a Veio, Cerveteri e Tarquinia”, in Archeologia nella Tuscia II. Atti degli Incontri di Studio organizzati a Viterbo 1984 (1986), pp. 296ff. M. Torelli, Elogia Tarquiniensia (1975); Steingräber 1985, pp. 337-340; Steingräber 2006, pp. 207-210.
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Fig. 3 — Tarquinia, Tomba dell’Orco I: detail of the right wall with inscription (Photo: S. Steingräber).
Fig. 4 — Tarquinia, Tomba dell’Orco II: detail of the rear wall with head of Phersipnei/Persephone (Photo: S. Steingräber).
Fig. 5 — Tarquinia, Tomba dell’Orco II: detail of the right wall with kylikeion (Photo: S. Steingräber).
Fig. 6 — Tarquinia, so-called Tomba dell’Orco III: detail of the head of Polyphemus (Photo: S. Steingräber).
of great interest. 18 Its wall paintings, which date from the late 5th century and show for the first time Etruscan death demons, are extremely important and innovative in the matter of iconography and ideology (figs. 7-8). 18.
M. Cataldi, L. Marras, A. Pelagotti, R. Carmagnola, G. Adinolfi, “La signora dei Demoni Azzurri”, Archeo XXV 10 (2009), pp. 79-85.
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Fig. 7 — Tarquinia, Tomba dei Demoni Azzurri: detail of the right wall with blue demon (Photo: S. Steingräber).
Fig. 8 — Tarquinia, Tomba dei Demoni Azzurri: detail of the right wall with Charon and his boat (Photo: S. Steingräber).
In the second –more recent– period (second half of the 4th and first decades of the 3rd century) we can observe both in southern Etruria (Tarquinia, Orvieto, Vulci, Cerveteri) and in different parts of southern Italy –Apulia (Arpi, Canosa, Egnazia), Campania (Naples, Capua, Nola) and Lucania (Paestum)– the strong influence of Greek and particularly Macedonian painting as regards colours, painting techniques, iconographic programmes and ideological intentions. Generally this period was characterized by a kind of koine, much discussed during the last two decades by several scholars, including myself. 19 It was intended mainly for the dominant classes (“linguaggio dei ceti dominanti”, according to Angela Pontrandolfo), when a number of different regions, not only Greek territories and colonies, and some of them remote from each other (including Etruria), shared a common style and iconography that is seen in such diverse artistic genres as wall painting, mosaics, vase painting, architecture and architectural decoration, terracottas, toreutics, and jewellery. Specific iconographic motifs (above all ornaments), forms, and stylistic and technical features can be seen more or less contemporary in many regions –and that is not to mention ideological and religious elements. It was precisely in this period that tomb painting, generally in combination with monumental tomb architecture, came into full flower in a number of regions around the Mediterranean, including southern Etruria, Rome, southern Italy (Apulia, Campania, and Lucania), Macedonia, Thrace, Crimea, Alexandria and parts of Asia Minor. From Greece, especially Macedonia, a new type of aristocratic dwelling, with andrones, peristyles, and 19.
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S. Steingräber, “Gab es eine Koinè in der mediterranen Malerei der frühhellenistischen Zeit?”, in A. Barbet (ed.), La peinture funéraire antique, IVe siècle av. J.-C. - IVe siècle ap. J.-C., Actes du VIIe colloque de l’AIPMA, Saint-Romain-en-Gal/Vienne 1998 (2001), pp. 201ff.; Steingräber 2006, pp. 281-301.
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Fig. 9 — Arpi, Ipogeo della Medusa: gorgoneion in the pediment of the tomb façade (Photo: S. Steingräber).
Fig. 10 — Vulci, Tomba François: back wall of the rear chamber with architectural painting (Photo: S. Steingräber).
Fig. 11 — Tarquinia, Tomba 5512: detail of the painted ceiling with crenellation motifs (Photo: S. Steingräber).
Fig. 12 — Tarquinia, Tomba degli Anina: detail with kymation and scroll frieze (Photo: S. Steingräber).
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Fig. 13 — Taras, Tomba dei Festoni: detail with garlands (Photo: S. Steingräber).
rich decoration (with stucco, painting and mosaics), 20 was transmitted to other cultural areas like Daunia (Arpi, Salapia), Campania (Buccino), Sicily (Gela, Morgantina) and southern Russia. The early Hellenistic mosaics found in aristocratic houses in Arpi and made using three different techniques can most probably be attributed to northern Greek workshops, as M. Mazzei has also proposed. On the subject of monumental aristocratic tomb architecture, the so-called Macedonian type with its characteristic barrel vault had great success in many areas around the Mediterranean, including Apulia, Campania and Etruria. 21 The most impressing example of this type in pre-Roman Italy remains the Ipogeo della Medusa in Daunian Arpi (excavated and published by the late M. Mazzei) with its imposing temple-like façade (fig. 9), three barrel-vaulted chambers, and its rich painted and mosaic decorations of high quality. 22 Another striking example of Macedonian influence is found in Naples in the Ipogeo Cristallini recently republished by I. Baldassare. 23 A number of motifs are documented in tomb paintings from different cultural areas, including architectural motifs (the so-called zone or structural style [fig. 10]), ornamental motifs such as crenellation (fig. 11), draperies, scrolls (fig. 12), garlands (fig. 13), bucrania (at times combined with rosettes and paterae) (fig. 19), perspective meander friezes and kymatia, figural motifs such as weapons and weapon friezes (fig. 14), gorgoneia (fig. 9), animal fights, sea creatures such as Nereids riding seahorses or other marine animals, female heads (at times combined with scroll or flower decorations), chariot races, some including a Nike, and various versions of the deductio ad inferos (the journey to the 20. 21. 22. 23.
E. Walter-Karydi, The Greek House. The Rise of Noble Houses in Late Classical Times (1998). Steingräber 2006, pp. 40-45. M. Mazzei, Arpi. L’ipogeo della Medusa e la necropoli (1995). I. Baldassarre, “Documenti di pittura ellenistica a Napoli”, in A. Rouveret (ed.), L’Italie méridionale et les premières expériences de la peinture hellénistique. Actes de la table ronde organisée par l’École française de Rome 1994 (1998), pp. 95-159.
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Fig. 14 — Tarquinia, Tomba Giglioli: detail of the rear wall with shield and emblem (Photo: S. Steingräber).
Fig. 16 — Tarquinia, Tomba dei Festoni: detail of the painted ceiling with putto (Photo: S. Steingräber).
Fig. 15 — Tarquinia, Tomba Giglioli: detail of the left wall with himation (Photo: S. Steingräber).
Fig. 17 — Tarquinia, Tomba dei Festoni: detail of the painted ceiling with putto (Photo: S. Steingräber).
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underworld). Also of great interest are representations of historical events, e.g. battle scenes in Macedonian, Thracian, Etruscan, Roman and Paestanian tomb paintings, on Apulian red-figure and Daunian polychrome vases, and in terracotta “appliqués” of Canosa vases. 24 Several representations on monumental Apulian red-figured vases –especially of the Darius Painter– show clear pro-Macedonian (and in the same moment anti-Persian) tendencies. The manifold influences from Macedonian art and culture in Italy from the reigns of Philipp II and Alexander the Great onwards, and particularly after the presence of Alexander Molossus in southern Italy, were also discussed during a recent symposium in June 2009 at the Getty Villa in Malibu. Macedonia had become a new ideological and cultural model for the rulers and aristocrats in different areas of Italy before definite Romanization, and influenced palatial, house, and tomb architecture, mosaics, paintings, tomb stelae, coins and weapons, and also iconographic themes such as battle and weapon friezes and funeral rites. 25 In late Etruscan tomb painting we find different echoes of the main achievements of Greek painting of the 4th century. Most probably, Magna Graecia and its leading political and cultural centre, Taras, played an important intermediary role in the transmissions of techniques, motifs and patterns between different parts of the Greek world and Etruria and Rome/Latium. On the one hand, we should emphasize the chiaroscuro technique and use of shading and often of a dark background with strong three-dimensional effects (e.g. in the Tomba Giglioli at Tarquinia) 26 (figs. 14-15), on the other hand the “pittura a macchia”, a technique of painting with coloured patches that is almost impressionistic, and the addition of white highlights (splendor and lumen, according to Pliny). The best example of “pittura a macchia” is documented in the Tomba dei Festoni in Tarquinia, which dates from approximately 270 and probably belonged to the influential Curunas family. Its long rectangular –kymatia-framed– ceiling coffers (lacunaria) are decorated with small pinkish Erotes, sea creatures (kete), and scrolls against a dark blue ground (figs. 16-17). 27 This highly impressionistic, almost Tachist technique, with its pinkish colour spots and applied white highlights, was probably adopted in Etruria via Magna Graecia (Taras). It is also seen in the equally blue-ground battle friezes on the pilaster capital in the roughly contemporary Tomba del Cardinale in Tarquinia (fig. 18), 28 in the blue-ground frieze with bucrania and paterae of a half-chamber elite tomb (Tomba 8) on the acropolis of Monte Sannace in Peucetian Apulia (fig. 19), 29 and on Pocola vases from central Italy.
24. 25. 26. 27.
28. 29.
S. Steingräber, Arpi – Apulien – Makedonien. Studien zum unteritalischen Grabwesen in hellenistischer Zeit (2000), pp. 163-166. M. G. Canosa, “Una tomba principesca da Timmari”, Monumenti Antichi 65 (2007). Steingräber 1985, pp. 317-318; Steingräber 2006, pp. 253-254. Steingräber 1985, pp. 311; S. Steingräber, “Die Tomba dei Festoni in Tarquinia und die Deckenmalereien der jüngeren etruskischen Kammergräber”, JdI 103 (1988), pp. 217ff.; Steingräber 2006, p. 256. A. Morandi, Le Pitture della Tomba del Cardinale (1983); Steingräber 1985, pp. 305-307; Steingräber 2006, pp. 257-258. G. Andreassi, A. Ciancio, Tombe a semicamera sull’acropoli di Monte Sannace (1986), pp. 56-70.
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Fig. 18 — Tarquinia, Tomba del Cardinale: detail of the painted capital of the pillar with battle scene and scroll frieze (Photo: S. Steingräber).
Fig. 19 — Monte Sannace – Acropoli, Tomba 8: detail of frieze with bucrania and paterae (Photo: S. Steingräber).
Of special interest for a number of reasons is the so-called Tomba della Nike, a tomb with a dromos, house-like façade with pediment, and tomb chamber with barrel vault, excavated in Arpi in 2003 by M. Mazzei a year before her premature death. 30 It dates from the end of the 4th or the beginning of the 3rd century. The painted decoration in tempera technique on the pediment of the façade is now displayed in the Museo Civico of Foggia. The representation includes a victorious cavalryman –apparently a Daunian from Arpi– with lance, helmet, and shield, who is being crowned with a wreath by a floating winged Nike, and with a vanquished enemy collapsed at his feet (fig. 20). Both the iconography of this unique façade painting and the way tempera was applied to the pinkish ground compare favourably with contemporary polychrome vases from Canosa and especially Arpi which were published mainly by M. Mazzei. 31 One could postulate that this dramatic scene reflects some real historical event of the Second Samnite War or the battle of Ausculum (Ascoli Satriano) between the Romans and Pyrrhus, in which Daunian soldiers, including Arpians, fought on the Roman side. In a group of painted chamber tombs in Paestum’s Spinazzo necropolis dating from the turn of the 4th century to the 3rd century and showing large-format figural scenes –true megalographies– we can observe clearly the influence of innovative Greek painting 30.
31.
M. Mazzei, “L’ipogeo della Nike di Arpi”, AION 9-10 (2002-2003), pp. 153-158; S. Steingräber, “Fliegende Nike und berittener Krieger – Neue Grabmalereien aus Arpi beleuchten die frühhellenistische Kulturgeschichte Apuliens”, Antike Welt 36.1 (2005), pp. 72-74. M. Mazzei, “Nota su un gruppo di vasi policromi decorati con scene di combattimento, da Arpi”, AION, ArchStAnt. IX (1987), pp. 168-188.
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Fig. 20 — Arpi, Tomba della Nike: detail of the painted façade with warrior and winged Nike (Photo: S. Steingräber).
techniques and styles such as shading, chiaroscuro effects, colour spots and highlights, an expanded palette of colours, and attempts at perspective (fig. 21). 32 At the conclusion of this discussion, a brief announcement is in order concerning Tarquinia and its necropolis, with its unique heritage of Etruscan tomb paintings, which in 2004 (together with Cerveteri) was recognized by the UNESCO as a World Heritage Site. There are plans by the Comune di Tarquinia, the Regione Lazio and a group of colleagues to emphasize this role of Tarquinia as the “capitale della pittura italiana preromana con la pinacoteca sotterranea più grande del Mediterraneo”. 33 According to these plans, the next years would see the creation of a study centre with a specialized library in the Palazzo Bruschi-Falgari located in the heart of the historical medieval city, and new didactic routes to the large tumuli of the Orientalizing period (a so-called Via dei Principi) and to the Arcatelle and Secondi Archi-areas of the Monterozzi necropolis, with 32. 33.
A. Pontrandolfo, “L’Italia meridionale e le prime esperienze della pittura ellenistica nelle officine pestane”, in A. Rouveret (n. 23), pp. 223-241. S. Steingräber, “Tarquinia. La più grande pinacoteca del mondo preromano”, in M. Torelli, A. M. Moretti Sgubini (eds), Etruschi. Le antiche metropoli del Lazio (2008), pp. 94-103.
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Fig. 21 — Paestum, Necropoli Spinazzo, Tomba “Taranto”: detail of the left wall with horses (Photo: S. Steingräber).
the possibility of opening to the public (behind a glass door, of course) a series of other painted tombs. There would then follow a series of publications and small exhibitions, conferences and “convegni”, which would consider the connections between Tarquinian and Etruscan painting on the one hand and, on the other, other important areas and cultures of the Mediterranean, including southern Italy, Macedonia, Thrace, Asia Minor and so on, that are significant owing to their remains of wall and tomb paintings. November 2009 coincided with the 100th birthday of the late Massimo Pallottino, to whom we owe his still important doctoral thesis of 1937 on ancient Tarquinia, 34 which will perhaps be reprinted, and the first history of Etruscan painting, published in 1952. 35 There is no doubt that this leading Etruscologist of the last century would support with great enthusiasmos this revaluation of Tarquinia and its colourful underground heritage.
34. 35.
M. Pallottino, “Tarquinia”, MonAnt 36 (1937), pp. 1ff. M. Pallottino, La peinture étrusque (1952); A. Cecchini, Le tombe dipinte di Tarquinia. Vicenda conservativa, restauri, tecnica di esecuzione (2012).
Les couleurs du visible et de l’invisible dans la peinture grecque et étrusque (ve-ive s. av. J.-C.)
Agnès Rouveret
RÉSUMÉ La question posée dans cette étude est de savoir dans quelle mesure les recherches sur le clair-obscur et l’expression de l’apparence dans sa matérialité physique ont ouvert des voies inédites à la figuration de phénomènes à la limite du représentable, voire à la suggestion, grâce aux couleurs de la peinture, mais par des moyens autres que la forme narrative, d’un « ailleurs » non perceptible par nos sens. Après avoir proposé une définition des notions mêmes de visible et d’invisible, à partir des sources écrites, on s’est attaché à trois thèmes, en prenant essentiellement appui sur la céramique italiote et sur la peinture funéraire étrusque : la représentation des phénomènes atmosphériques, celle des petits édifices en trompe-l’œil (naïskoi) interprétés comme des formes allégoriques de la valeur (arétè) du défunt, celle enfin des Enfers, figurés dans les tombeaux de l’aristocratie étrusque qui montrent une réélaboration d’un imaginaire grec de l’au-delà, façonné en partie par les poèmes homériques. Malgré la perte irrémédiable des chefs-d’œuvre de la peinture grecque classique, la documentation conservée nous permet de définir plusieurs stratégies de figuration de l’invisible dans la peinture du ive s. av. J.-C. Le travail sur le clair-obscur et l’éclat y figure à côté de signes métaphoriques associant couleur et dessin, tels l’arcen-ciel ou les édicules en trompe-l’œil (naïskoi). La comparaison entre les images grecques et étrusques fait apparaître des points communs mais aussi des orientations différentes, notamment dans l’usage de procédés graphiques suggérant la présence d’un espace derrière l’image. MOTS-CLEFS Clair-obscur, apparence, visible, invisible, céramique italiote, peinture funéraire étrusque, naïskoi, arétè, imaginaire grec, trompe-l’œil.
The colors of the visible and of the invisible in Greek and Etruscan painting (5th – 4th centuries BC) The question raised in this study is to determine to what extent research on chiaroscuro and the expression of outward appearance in its physical materiality have opened new paths for the representation of phenomena at the limit of what can be represented, even for the suggestion through colors, but by means other than the narrative form, of an “elsewhere” not perceptible by our senses. After proposing a definition of the concepts of visible and invisible, from written sources, we focused on three themes, essentially relying on South Italian vase-painting and Etruscan funerary painting: the representation of atmospheric phenomena, that of small buildings painted in trompe l’oeil (naïskoi) and interpreted as allegorical forms of the value (arétê) of the deceased, and that of the Underworld, depicted in the tombs of the Etruscan aristocracy, which shows a rethinking of the Greek conception of the Underworld, partially shaped by the Homeric poems. Despise the irretrievable loss of the masterpieces of classical Greek painting, the remaining documentation allows us to identify several strategies of representation of the invisible in the painting of the fourth century BC. Work on chiaroscuro and brightness stands beside metaphorical signs combining color and design, such as the rainbow or small temples painted SUMMARY
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in trompe l’oeil (naïskoi). The comparison between the Greek and Etruscan pictures revealed common but also different orientations, including the use of graphic processes suggesting the presence of a space behind the image. KEYWORDS Chiaroscuro, appearance, visible, invisible, South Italian vase-painting, Etruscan funerary painting, naïskoi, arétê, Greek imaginary, trompe l’oeil. ƕƊƖƎƐƌƜƌ Ƙƥ ƺƴǁuƥƷƥ ƷƲƸ ƲƴƥƷƲǀ Ʈƥƭ ƷƲƸ ƥƿƴƥƷƲƸ ƶƷƫư ƩƯƯƫưƭƮƢ Ʈƥƭ ƩƷƴƲƸƶƮƭƮƢ ƪƼƧƴƥƹƭƮƢ ƲƵ˝ƲƵƥƭƳƛ ƘƲ ƩƴǁƷƫuƥ ƳƲƸ ƷƣƬƩƷƥƭ ƶƷƫư ƳƥƴƲǀƶƥ uƩƯơƷƫ Ʃƣưƥƭ ƶƩ ƳƲƭƲ ƦƥƬuƿ Ʋƭ ơƴƩƸưƩƵ Ƨƭƥ Ʒƫ ƹƼƷƲƶƮƣƥƶƫ Ʈƥƭ Ʒƫư ơƮƹƴƥƶƫ ƷƫƵ ƩƱƼƷƩƴƭƮƢƵ ƩuƹƠưƭƶƫƵ ƶƷƫư ƸƯƭƮƿƷƫƷƠ ƷƫƵ ƠưƲƭƱƥư ươƲƸƵ ƨƴƿuƲƸƵ ƶƷƫư ƩƭƮƲưƲƧƴƠƹƫƶƫƹƥƭưƲuơưƼưƶƷƥƿƴƭƥƩƮƩƣưƲƸƳƲƸƢƷƥưƨƸưƥƷƿưưƥƥưƥƳƥƴƥƶƷƥƬƩƣ ƢƶƷƫưƸƳƲƨƢƯƼƶƫ ƺƠƴƫ ƶƷƥ ƺƴǁuƥƷƥ ƷƫƵ ƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵ ƥƯƯƠ uƩ uơƶƥ ƨƭƥƹƲƴƩƷƭƮƠ ƥƳƿ Ʒƫư ƥƹƫƧƫuƥƷƭƮƢ uƲƴƹƢ ƩưƿƵ ˦ƥƯƯƲǀ˧ƳƲƸƨƩưƧƣưƩƷƥƭƥưƷƭƯƫƳƷƿƥƳƿƷƭƵƥƭƶƬƢƶƩƭƵuƥƵƆƹƲǀƳƴǁƷƥƳƴƲƷƥƬƩƣơưƥƵƲƴƭƶuƿƵƷƼư ƣƨƭƼư ƷƼư ƩưưƲƭǁư ƷƲƸ ƲƴƥƷƲǀ Ʈƥƭ ƷƲƸ ƥƿƴƥƷƲƸ uƩ ƥƹƩƷƫƴƣƥ ƷƭƵ ƧƴƥƳƷơƵ ƳƫƧơƵ ƩƱƩƷƠƪƲƸuƩ Ʒƴƣƥ ƬơuƥƷƥ ƦƥƶƭƪƿuƩưƲƭƮƸƴƣƼƵƶƷƫưƭƷƥƯƭƮƢƮƩƴƥuƩƭƮƢƮƥƭƶƷƫưƩƳƭƷǀuƦƭƥƩƷƴƲƸƶƮƭƮƢƪƼƧƴƥƹƭƮƢƷƫư ƥưƥƳƥƴƠƶƷƥƶƫ ƥƷuƲƶƹƥƭƴƭƮǁư ƹƥƭưƲuơưƼư ƩƮƩƣưƫ ƷƼư uƭƮƴǁư ƮƷƫƴƣƼư ưƥƅƶƮƲƭ ƳƲƸ ƥƳƲƨƣƨƲưƷƥƭ ƷƴƭƶƨƭƠƶƷƥƷƥuƩƲƹƬƥƯuƥƳƠƷƫƮƥƭƩƴuƫưƩǀƲưƷƥƭƼƵƥƯƯƫƧƲƴƣƩƵƷƫƵƥƴƩƷƢƵƷƲƸưƩƮƴƲǀ ƩƮƩƣưƫ ƷơƯƲƵ ƷƲƸƏƠƷƼƏƿƶuƲƸ ƳƲƸƩƭƮƲưƣƪƲưƷƥƭƶƩƷƠƹƲƸƵƷƫƵƥƴƭƶƷƲƮƴƥƷƣƥƵƷƼưƊƷƴƲǀƶƮƼư ƳƲƸƹƥưƩƴǁưƲƸư uƭƥươƥƩƳƩƱƩƴƧƥƶƣƥuƭƥƵƩƯƯƫưƭƮƢƵƩƭƮƲưƲƧƴƥƹƣƥƵƷƲƸƩƳơƮƩƭưƥ ƳƲƸƨƭƥuƲƴƹǁƬƫƮƩƩưuơƴƩƭƥƳƿƷƥ ƲuƫƴƭƮƠƳƲƭƢuƥƷƥƕƥƴƠƷƫưƥưƩƳƥưƿƴƬƼƷƫƥƳǁƯƩƭƥƷƼưƥƴƭƶƷƲƸƴƧƫuƠƷƼưƷƫƵƩƯƯƫưƭƮƢƵƮƯƥƶƭƮƢƵ ƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵ Ʒƥ ƶƼƪƿuƩưƥ ơƴƧƥ uƥƵ ƩƳƭƷƴơƳƲƸư ưƥ ƨƭƥƮƴƣưƲƸuƩ ƳƲƯƯƲǀƵ ƷƴƿƳƲƸƵ ƥưƥƳƥƴƠƶƷƥƶƫƵ ƷƲƸ ƥƿƴƥƷƲƸ ƶƷƫ ƪƼƧƴƥƹƭƮƢ ƷƲƸ ƲƸ ƥƭ Ƴƛ ƌ ƹƼƷƲƶƮƣƥƶƫ Ʈƥƭ ƫ ƯƠuƻƫ ƺƴƫƶƭuƲƳƲƭƲǀưƷƥƭ uƥƪƣ uƩ uƩƷƥƹƲƴƭƮƠ ƶƫuƩƣƥ ƳƲƸ ƶƸƶƺƩƷƣƪƲƸư ƺƴǁuƥ Ʈƥƭ ƶƺơƨƭƲ ƿƳƼƵ ƷƲ ƲƸƴƠưƭƲ ƷƿƱƲ Ƣ Ʒƥ ƮƷƢƴƭƥ ƳƲƸ ƥƳƲƨƣƨƲưƷƥƭ ƷƴƭƶƨƭƠƶƷƥƷƥ uƩ ƲƹƬƥƯuƥƳƠƷƫ ưƥƅƶƮƲƭ ƌ ƶǀƧƮƴƭƶƫ ƥưƠuƩƶƥ ƶƷƭƵ ƩƯƯƫưƭƮơƵ Ʈƥƭ ƷƭƵ ƩƷƴƲƸƶƮƭƮơƵƩƭƮƿưƩƵƹƥưƩƴǁưƩƭƮƲƭưƠƶƫuƩƣƥƥƯƯƠƮƥƭƨƭƥƹƲƴƩƷƭƮƲǀƵƳƴƲƶƥưƥƷƲƯƭƶuƲǀƵ ƭƨƭƥƣƷƩƴƥ ƶƷƫƺƴƢƶƫƶƺƩƨƭƥƶƷƭƮǁưƨƭƥƨƭƮƥƶƭǁư ƳƲƸƸƳƲƨƫƯǁưƲƸưƷƫưǀƳƥƴƱƫƩưƿƵƺǁƴƲƸƳƣƶƼƥƳƿƷƫưƩƭƮƿưƥ ƐƊƓƊƎƗƏƐƊƎƉƎƆ ƚƼƷƲƶƮƣƥƶƫ ƹƥƣưƩƶƬƥƭ ƲƴƥƷƿ ƥƿƴƥƷƲ ƭƷƥƯƭƮƢ ƮƩƴƥuƩƭƮƢ ƩƷƴƲƸƶƮƭƮƢ ƩƳƭƷǀuƦƭƥƪƼƧƴƥƹƭƮƢ ưƥƅƶƮƲƭ ƥƴƩƷƢ ƩƯƯƫưƭƮƿƵƮƿƶuƲƵƷƫƵƹƥưƷƥƶƣƥƵ ƲƹƬƥƯuƥƳƠƷƫ
à propos de l’auteur A. Rouveret, UMR 7041 du CNRS, ArScAn, université Paris Nanterre, France. NOTE LIMINAIRE
Je remercie vivement les responsables des collections qui ont généreusement autorisé la publication des photographies utilisées dans l’article : le British Museum, T. E. Cinquantaquattro (Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei), K. Lapatin et J. Burns (The J. Paul Getty Museum), A. Lui (musée d’Art et d’Histoire de la ville de Genève), L. La Rocca (Soprintendenza per i Beni Archeologici della Puglia). Ma reconnaissance va également à C. Pouzadoux, directrice du Centre Jean Bérard, et à G. De Palma pour leur aide précieuse et leur disponibilité.
abréviations bibliographiques Aellen 1994 = Chr. Aellen, À la recherche de l’ordre cosmique. Formes et fonctions des personnifications dans la céramique italiote. RVAp I = A. D. Trendall, A. Cambitoglou, The Red-Figured Vases of Apulia I. Early and Middle Apulian (1978). RVAp Suppl. II = A. D. Trendall, A. Cambitoglou, The Red-Figured Vases of Apulia, Bulletin Supplement Institute of Classical Studies 60 (1991). Taplin 2007 = O. Taplin, Pots and Plays. Interactions between Tragedy and Greek Vase-Painting of the Fourth Century BC.
LES COULEURS DU VISIBLE ET DE L’INVISIBLE DANS LA PEINTURE GRECQUE ET ÉTRUSQUE (Ve-IVe S. AV. J.-C.)
Au cours des vingt-cinq dernières années, les découvertes archéologiques et les progrès sans précédent des méthodes d’analyse physico-chimiques des matériaux ont profondément modifié notre approche de la peinture classique et permis le développement de recherches interdisciplinaires où l’étude de la couleur occupe une place de premier plan 1. D’autres découvertes récemment publiées, comme le livre d’épigrammes de Posidippe de Pella 2, renouvellent notre approche du milieu artistique et littéraire de la fin du ive s. et des premières décennies du iiie s. av. J.-C., qui donna naissance aux premières histoires de l’art dont les auteurs étaient jusqu’ici essentiellement connus par la critique des sources pliniennes 3. À côté de l’historien et disciple de Théophraste, Douris de Samos 4, la figure la plus clairement identifiée, grâce à l’étude fondatrice de B. Schweitzer 5, est celle du sculpteur et philosophe Xénocrate d’Athènes, dont l’œuvre aurait été poursuivie par un autre sculpteur, Antigone de Carystos 6. Exaltant l’« art nouveau » illustré par Apelle et Lysippe, ce milieu d’artistes et de poètes, marqué par l’essor des arts de cours, élabore une histoire des sculpteurs et des peintres fondée sur des critères techniques. Une section du recueil de Posidippe, la « fabrique des statues », DzưƨƴƭƥưƷƲƳƲƭƭƮƠ, confirme les conclusions de B. Schweitzer sur l’histoire des sculpteurs selon Xénocrate en les enrichissant de nouveaux concepts. Pour l’histoire des peintres, nous dépendons encore avant tout des classements conservés dans l’encyclopédie plinienne. Nous savons cependant que ces premières histoires de l’art grec mettaient en parallèle peintres et sculpteurs, ce qui permet de prendre appui sur les nouveaux indices apportés par les épigrammes pour approfondir aussi l’enquête sur la peinture.
1.
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La bibliographie sur le sujet est immense. On se reportera aux bibliographies rassemblées dans ce volume, ainsi qu’à J. J. Pollitt (éd.), The Cambridge History of Painting in the Classical World (2014), et A. Rouveret, « L’imaginaire entre objets et textes », dans S. de Beaune, H.-P. Francfort (éds), L’archéologie à découvert (2012), p. 123-129, 310-313.. G. Bastianini, C. Galazzi, Posidippo di Pella. Epigrammi (P. Mil. Vogl. VIII, 309), Papiri dell’Università degli Studi di Milano VIII (2001) ; C. Austin, G. Bastianini (éds), Posidippi Pellaei quae supersunt omnia (2002) ; K. Gutzwiller (éd.), The New Posidippus. A Hellenistic Poetry Book (2005) ; É. Prioux, Regards alexandrins. Histoire et théorie des arts dans l’épigramme hellénistique, Hellenistica Groningana (2007) ; ead., Petits musées en vers. Épigramme et discours sur les collections antiques (2008) ; P. Linant de Bellefonds, E. Prioux, A. Rouveret (éds), D’Alexandre à Auguste. Dynamiques de la création dans les arts visuels et la poésie (2015) avec bibliographie. A. Rouveret, « La peinture retrouvée. Découvertes de Macédoine et textes antiques », dans S. Descamps-Lequime (éd.), Peinture et couleur dans le monde grec antique (2007), p. 69-79 ; ead., « Ce que Pline l’Ancien dit de la peinture grecque : histoire de l’art ou éloge de Rome ? », CRAI 2007, p. 621-631 ; J. Tanner, The Invention of Art History in Ancient Greece. Religion, Society and Artistic Rationalisation (2006), p. 212-246. V. Naas, M. Simon (éds), De Samos à Rome : personnalité et influence de Douris (2015). B. Schweitzer, « Xenocrates von Athen, Beiträge zur Geschichte des Antiken Kunstforschung und Kunstanschauung [1932] », dans Zur Kunst der Antike: ausgewählte Schriften I (1963), p. 105-164. L’artiste, qui œuvra à Pergame, se confondrait avec l’auteur, homonyme, de biographies des philosophes, voir T. Dorandi, Antigone de Caryste. Fragments, CUF (1999), p. LXXXIII-CXXIII qui reprend en la précisant l’hypothèse d’U. Wilamowitz-Moellendorff (1881).
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LIMITES
DE L’ART, FRONTIÈRES DU VISIBLE
Les développements consacrés par Pline l’Ancien dans le livre XXXV de l’Histoire naturelle à la nature des couleurs puis à l’histoire des peintres grecs suggèrent que l’éloge du peintre Apollodore d’Athènes, le premier à « exprimer l’apparence » (species exprimere) grâce à la technique des ombres et des lumières 7, à la 93e olympiade (408-405 av. J.-C.), garde sans doute la trace des jugements portés par Xénocrate et ses contemporains sur les peintres classiques. L’« invention » de la technique des ombres et des lumières marquait à leurs yeux une césure majeure dans l’histoire de la peinture monumentale au ve s. av. J.-C. Pline l’Ancien 8 lui-même souligne les discordances dans ses sources grecques à ce propos et rappelle l’admiration suscitée par des œuvres plus anciennes comme les grands cycles de Polygnote et de Mikon, loués pour leur contenu civique et éthique par Aristote et Théophraste 9. Nous avons peu de données sur l’œuvre d’Apollodore. Pline mentionne deux tableaux, un prêtre en prière et Ajax frappé par la foudre (Ajax fulmine incensus) 10, conservé à Pergame, qui serait le premier tableau capable d’« accrocher » le regard du spectateur. Ce détail livre un indice sur le goût qui prévaut à l’époque de Pline et de ses sources hellénistiques dans l’appréciation d’un tableau classique et que résument deux critères constamment associés dans leur évaluation des artistes : la précision dans le rendu des corps et des objets (DzƮƴƣƦƩƭƥ) et la prise en compte de la subjectivité du spectateur dans la construction de l’œuvre peinte ou sculptée, ce qu’exprime le terme latin de species, dont l’équivalent dans les sources grecques est celui d’une image construite ƳƴɞƵ ƹƥưƷƥƶƣƥư 11. Il nous aide aussi à mieux cerner certains sujets, comme la fulguration et l’embrasement d’un corps, où la technique du clair-obscur, fondée sur une échelle qui s’étend entre les deux extrêmes du blanc figurant la lumière (ƹ˒Ƶ, lumen), auquel s’ajoute l’éclat lumineux (DzƸƧƢ ƯƥuƳƴƿư, splendor), et du noir, équivalent des ténèbres (ƶƮƿƷƲƵ, obscurum), offrait de nouveaux moyens d’expression aux artistes qui rivalisaient pour dépasser les « limites de leur art 12 ». L’anecdote la plus intéressante pour notre propos est celle du concours de 7. 8. 9.
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Histoire naturelle XXXV 60. Histoire naturelle XXXV 54. Histoire naturelle VII 205. Pour Aristote, voir surtout les commentaires de la Poétique 1448a1 ; 1450a25 ; Politique 1340a35 ; A. Rouveret, Histoire et imaginaire de la peinture ancienne (1989), p. 129-133. Cette dichotomie dans le palmarès des peintres célèbres trouve un écho dans la confrontation entre le canon de Polyclète et l’« art nouveau » de Lysippe évoqué dans l’épigramme 62 de Posidippe. Histoire naturelle XXXV 60 : Ajax fulmine incensus quae Pergami spectatur hodie neque ante eum tabula ullius ostenditur quae teneat oculos. Voir le commentaire de S. Ferri sur l’esthétique du tableau sensible dans ce passage, en opposition avec la conception des peintures monumentales de Polygnote et de Mikon : S. Ferri, Plinio il Vecchio, Storia delle arti antiche, Naturalis Historia (libri XXXIV-XXXVI) (2000), p. 181. J. J. Pollitt, The Ancient View of Greek Art: Criticism, History and Terminology (1974), p. 293-297, 436-439. Liés à la pratique des signatures, renforcés par l’usage des épigrammes, les défis entre artistes et artisans, bien attestés dès l’époque archaïque, sont omniprésents dans les notices biographiques sur les peintres de la génération d’Apollodore, à commencer par l’accusation portée par ce dernier contre Zeuxis, coupable de lui avoir « dérobé son art » (Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 62) ; pour les signatures de Zeuxis et de Parrhasios : Aristide, Orationes XLIX 386 (II, p. 520-521, éd. Dindorf ); XXVIII 88-90 (éd. Keil) ;
LES COULEURS DU VISIBLE ET DE L’INVISIBLE DANS LA PEINTURE GRECQUE ET ÉTRUSQUE (Ve-IVe S. AV. J.-C.)
lignes entre Apelle et Protogène. Le tableau qui se serait trouvé dans les collections des Césars avant de périr dans un incendie, mais que Pline l’Ancien dit avoir vu, « ne contenait rien sur sa vaste surface que des lignes qui échappaient à la vue ; il paraissait vide au milieu de beaucoup d’œuvres remarquables et pour cette raison même, il attirait le regard et était plus célèbre que tout autre ouvrage 13 ». Or l’interrogation sur les limites de la visibilité est également présente, sous une autre forme, dans la réflexion sur les premiers décors de théâtre en trompe-l’œil créés, selon le témoignage de Vitruve 14, par le peintre Agatharchos pour une tragédie d’Eschyle (ou de Sophocle). Ces décors qui reposaient sur la construction d’architectures fictives auraient suscité les commentaires des philosophes Démocrite et Anaxagore. Mais pour Démocrite, à qui l’on attribue un traité d’actinographie et un traité sur les couleurs, la couleur est un épiphénomène, propre à la perception humaine. Seuls existent les atomes et le vide dépourvus de qualités sensibles 15. La variation des couleurs est ramenée à la structure atomique des corps qui reflètent différemment la lumière, non à une coloration intrinsèque des atomes, comme nous l’apprend le traité de Théophraste Sur les Sensations qui a conservé le développement le plus important sur ce sujet. Le passage de la préface du livre VII du De Architectura de Vitruve, d’interprétation difficile et controversée, concentre l’attention du lecteur sur le tracé géométrique sur lequel se fonde l’effet de trompe-l’œil 16. Mais la couleur joue un rôle tout aussi important dans ce dispositif, comme le montre la brève définition du premier livre 17. Le principe d’explication de la perception colorée élaboré par Démocrite, qui prend le contre-pied de nos intuitions premières et « naturelles » sur la couleur, pouvait trouver de ce point de vue aussi un terrain d’application privilégié. Plus généralement, un ensemble de travaux sur les théories de la couleur chez les philosophes grecs des ve s. et ive s. av. J.-C., d’Empédocle à Aristote, mettent l’accent sur leur haut degré d’élaboration et d’originalité, et sur la force d’innovation qu’elles manifestent. Il suffit de mentionner l’acuité des observations d’Aristote sur la perception colorée et sur la nature de la couleur dans ses traités psychologiques, De Anima et De Sensu et Sensibilibus 18 ou sur les couleurs
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16. 17. 18.
Athénée, XII 543c. Anecdotes et ecphraseis sont souvent des variations sur le thème de la limite : par exemple dans l’art de la tromperie (Zeuxis et Parrhasios, Histoire naturelle XXXV 64-65) ; pour la centauresse de Zeuxis, Lucien, Zeuxis ou Antiochus 3-8 ; pour le supplice de Prométhée de Parrhasios et son tempérament mélancolique : Sénèque le Père, Controverses X 5 ; A. Rouveret, « Parrhasios ou le peintre assassin », dans C. Levy, B. Besnier, A. Gigandet (éds), Ars et Ratio. Sciences, art et métiers dans la philosophie hellénistique et romaine (2003), p. 184-193. Histoire naturelle XXXV 83. De Architectura VII, praef. 11. Les représentations sont appelées ƩȢƨƼƯƥ : S. Saïd, « Deux noms de l’image en grec ancien : idole et icône », CRAI 1987, p. 314 ; M. M. Sassi, « Entre corps et lumière : réflexions antiques sur la nature de la couleur », dans M. Carastro (éd.), L’Antiquité en couleurs. Catégories, pratiques, représentations (2009), p. 286. A. Rouveret (n. 9), p. 89-93. De Architectura I 2, 2. Pour les théories aristotéliciennes de la lumière et de la couleur, nous suivons les analyses de R. Sorabji, « Aristotle, Mathematics and Colour », ClQ 22 (1972), p. 293-308 ; id., « Aristotle on Demarcating
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atmosphériques, instables et éphémères, dans son étude de l’arc-en-ciel, du halo et du parhélie dans le troisième livre des Meteorologica. En particulier, sa définition de la couleur comme « la limite du transparent dans un corps déterminé 19 » nous permet de mieux cerner le propos de cet article : les couleurs du visible et de l’invisible. En effet le visible qui est l’objet propre de la vue est essentiellement constitué par la couleur 20. C’est donc elle qui active le milieu (l’air, l’eau) et permet à l’œil de percevoir l’objet. Pour expliquer le mécanisme d’interaction entre le milieu et celui qui perçoit, Aristote a recours à la notion de « transparent » ou « diaphane » et propose une théorie tout à fait nouvelle de la lumière. Le transparent n’est pas visible en lui-même, il est une qualité soit des milieux sans limite apparente comme l’air et l’eau, soit des corps déterminés 21. La lumière, quant à elle, est l’actualisation du milieu transparent en présence du feu ou de quelque agent similaire comme les corps célestes 22. Ainsi la lumière est-elle « l’actualisation du transparent lorsque celui-ci est la qualité du milieu qui n’a pas de limites définies » et « de même, la couleur est l’actualisation du transparent lorsque ce dernier se trouve, dans une mesure plus ou moins grande, dans les corps 23 ». À l’inverse, la potentialité du transparent est l’obscurité. Ainsi lumière et obscurité dans le medium de l’air correspondent-ils au blanc et au noir dans les autres corps 24, les autres couleurs résultant de leur mélange dans des proportions différentes 25. Ces textes, auxquels on peut joindre ceux de la médecine hippocratique, notamment pour l’étude des carnations 26, sont autant de symptômes de l’intérêt porté à l’exploration du monde sensible par les savants et les artistes de l’époque classique. Ils témoignent aussi des croisements qui existent entre les deux milieux. Ainsi les philosophes se référent-ils aux arts visuels – comme au théâtre et à ses décors – pour appuyer certaines de leurs propositions. À l’inverse, le groupe des artistes de Sicyone, auquel se rattachent Apelle et Lysippe, posait un lien privilégié entre leur art et les arts libéraux, en particulier la géométrie et l’arithmétique 27. Il nous semble de ce fait intéressant de comparer les
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27.
the Five Senses », dans J. Barnes, M. Schofield, R. Sorabji (éds), Articles on Aristotle 4. Psychology and Aesthetics (1970), p. 76-92 ; id., Aristotle on Memory (1972) ; M. M. Sassi (n. 15), p. 284-285 ; K. Ierodiakonou, « Aristotle on Colours », dans D. Sfendoni-Mentzou et al. (éds), Aristotle and Contemporary Science (2001), p. 211-225 auxquelles nous renvoyons pour la bibliographie. Pour les commentaires d’Alexandre d’Aphrodise : R. W. Sharples (éd.), Alexander of Aphrodisias. Supplement to on the Soul (2004), p. 211-225. De Sensu 439b11 ; M. M. Sassi (n. 15), p. 293. De Anima 418a26-9 et 419a1-9 (pour les objets phosphorescents) ; 422a20 et 425b20-2 (pour la vision de l’obscurité). De Anima 418b7-20 ; 418b28-419a1 ; 439b14-18. Dans le De Sensu (439b2), Aristote en arrive à dire que le transparent du medium a sa propre couleur, l’éclat, ce qui semble être la lumière elle-même. De Anima 418b4-9. M. M. Sassi (n. 15), p. 284. De Sensu 439b15. De Sensu 439b18-440b25 ; Catégories 12a17-19 ; Physique 188b3-6 ainsi que les études citées n. 18. L. Villard (éd.), Couleur et vision dans l’Antiquité (2002) ; ead., « L’essor du chromatisme au ive siècle : quelques témoignages contemporains », dans A. Rouveret, S. Dubel, V. Naas, Couleurs et matières dans l’Antiquité. Textes, technique et pratiques (2006), p. 43-54. Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 76 (à propos de Pamphilos, le maître d’Apelle).
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tentatives d’explication des processus visuels présents dans les traités philosophiques avec les effets que nous observons dans les œuvres peintes ou sculptées. Nous pouvons par exemple souligner l’intérêt constant dans ces ouvrages pour certains phénomènes comme celui de l’éclat lumineux et de l’éblouissement 28. Enfin, au-delà des phénomènes sensibles, j’aimerais attirer l’attention, dans ces remarques liminaires, sur un dernier groupe de textes liés à la figure de Socrate où se trouve posé un tout autre lien entre le visible et l’invisible. Il s’agit, d’une part, du célèbre passage des Mémorables 29 dans lequel le philosophe amène le peintre Parrhasios à reconnaître que la peinture n’est pas seulement la représentation à l’aide des couleurs de ce que l’on voit, mais qu’elle parvient, par la représentation des corps, les expressions du visage et surtout des yeux, les attitudes et les mouvements, à rendre sensible ce qui ne relève pas de l’ordre du sensible : sentiments, émotions, disposition de l’âme et au-delà de la beauté des corps, la beauté idéale et l’expression morale de l’âme. La couleur n’est mentionnée qu’au départ de la discussion et le choix de Parrhasios, considéré comme le maître dans l’art des contours, alors que son rival Zeuxis était passé maître dans l’art du clair-obscur, mérite d’être souligné. D’autre part, les mythes platoniciens sur le voyage de l’âme après la mort nous permettent d’appréhender un autre imaginaire des lieux invisibles et des couleurs qui les caractérisent. Des trois récits, celui du Phédon est le plus intéressant pour notre propos. Juste avant de mourir, Socrate imagine au-dessus des creux de la terre où nous habitons, les couleurs de la vraie terre, celle d’en-haut que baigne l’éther et où vivent des êtres exceptionnels. Les couleurs de la terre de ce monde supérieur sont pures et brillantes, celles des peintres n’en sont qu’une pâle copie : « Tantôt, en effet, elle est pourpre (dzƯƲƸƴƧʨ) et d’une étonnante beauté, tantôt elle ressemble à de l’or (ƺƴƸƶƲƩƭƨʨ), ailleurs, elle a tout l’éclat de la blancheur (ƯƩƸƮƢ), elle est plus blanche que la craie ou que la neige, et toutes les couleurs qui la constituent également sont encore plus nombreuses et plus belles que toutes celles qu’il nous fut donné de voir 30 ». De même, l’éclat des pierres précieuses ici-bas n’est qu’une approximation de l’éclat des pierreries du monde d’en haut. On notera que Platon utilise les profondeurs marines comme métaphore de la corruption et considère que la vision troublée et imparfaite que nous avons des beautés supérieures est semblable à celle d’un homme qui verrait ce monde à travers le filtre de l’eau. Ainsi cette brève incursion dans les textes philosophiques nous permet-elle de dégager plusieurs définitions possibles des rapports entre le visible et l’invisible, la plus paradoxale étant sans doute la fulgurante intuition de Démocrite qui confère à l’invisible la matérialité des atomes et du vide, refusant à la couleur toute existence réelle. À l’opposé, l’analyse aristotélicienne des sensibles, presque phénoménologique avant la lettre, conforte un concept « naturel » de la couleur dotée d’une réalité objective qui existe indépendamment de notre perception. Au-delà du sensible, les réflexions attribuées à Socrate permettent de définir d’autres formes d’un « ailleurs » non visible, tel celui qui concerne la destinée des âmes après la mort. 28. 29. 30.
Voir par exemple l’analyse de Platon dans le Timée 67e-68a. Xénophon, Mémorables III 10, 1-5. Platon, Phédon 110c.
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Si l’on en vient aux peintres, les jugements critiques portés sur leurs œuvres laissent entrevoir une approche centrée sur la quête de la ressemblance des êtres et des objets du monde sensible grâce à la capture de la lumière et de l’ombre. Certains jugements sembleraient indiquer que ces innovations dans les arts de la couleur se feraient aux dépens de l’expression éthique illustrée par les tableaux des maîtres plus anciens, Polygnote et Mikon. Nous savons, grâce aux descriptions de Pausanias, que les sujets des tableaux placés dans les monuments publics ou religieux d’Athènes ou de Delphes prenaient appui sur les récits épiques, les mythes et l’histoire contemporaine en accord avec le lien étymologique inscrit dans le nom même de la peinture comme ƧƴƥƹƭƮɚ ƷơƮưƫ. Ainsi la Nekuia peinte par Polygnote dans la Lesché de Delphes 31 prenait-elle appui sur la description homérique du chant XI de l’Odyssée, même si elle plaçait au cœur du tableau la figure d’Orphée et des représentations inspirées par les croyances liées aux Mystères. La question posée est donc de savoir dans quelle mesure les nouvelles recherches sur le clairobscur et l’expression de l’apparence dans sa matérialité physique ont ouvert des voies inédites à la figuration de phénomènes à la limite du représentable, voire à la suggestion, grâce aux couleurs de la peinture, mais par des moyens autres que la forme narrative, d’un « ailleurs » non perceptible par nos sens. Les chefs-d’œuvre de la peinture grecque classique sont irrémédiablement perdus et l’essentiel de la documentation conservée pour la période que nous étudions est constituée par des peintures murales, essentiellement à destination funéraire. Dans quelle mesure cette documentation nous rend-elle accessibles des cas où les peintres ont cherché à donner une forme sensible aux réalités invisibles que nous avons tenté de définir ? L’emploi des couleurs et du clair-obscur occupe-t-il un rôle spécifique dans cette exploration du non-sensible ?
APPORTS
ET LIMITES DE LA DOCUMENTATION ARCHÉOLOGIQUE
Une difficulté de l’enquête tient au caractère discontinu des corpus archéologiques sur lesquels nous fondons notre analyse. En effet, les peintures murales récemment mises au jour dans l’ensemble du bassin méditerranéen éclairent surtout les aboutissements, dans la seconde moitié du ive s. av. J.-C., de l’exploration des ressources de la technique des ombres et des lumières mise en œuvre au siècle précédent. Mais pour ces phases plus anciennes nous dépendons toujours dans une large mesure du témoignage de la céramique figurée attique et italiote. Certains corpus ont été distingués depuis longtemps pour leur valeur heuristique dans les thèmes abordés ici et il semble intéressant de reprendre certains documents à la lumière des nouvelles découvertes. Ainsi, les représentations d’édifices en trois dimensions figurés dans la céramique italiote, dès la première moitié du ive s. av. J.-C., constituent un exemple classique dans les travaux sur l’histoire
31.
Pausanias, X 28-31 (trad. A. Reinach, Recueil Milliet. Textes grecs et latins relatifs à l’histoire de la peinture ancienne [1921, rééd. 1985], no 107b).
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de la perspective d’E. Panofsky à J. White 32. Il suffit de citer pour mémoire les fragments attribués au groupe de Konnakis, conservés à Würzburg, qui sont une pièce majeure des réflexions sur l’image et la théâtralité 33. Le corpus des céramiques figurées produites en Grande Grèce et en Sicile s’est accru dans des proportions considérables et les recherches archéologiques développées depuis les années 1970 34 ont permis de placer cette documentation exceptionnelle dans des contextes régionaux toujours mieux datés et circonscrits, malgré la persistance des fouilles clandestines qui entravent durablement le progrès de nos connaissances. Pour notre propos, deux points méritent d’être soulignés. D’abord, ces productions connaissent une phase expérimentale, associant la technique de la figure rouge avec celle des couleurs superposées. Elle se situe entre la fin du ve s. et les années 360 av. J.-C., et livre des aperçus précieux sur la période qui précède la phase la mieux documentée par les découvertes récentes. Ensuite, la construction de figures en trompe-l’œil par la couleur et le dessin constitue un critère de classification très net entre les différents lieux de production. L’Apulie, Tarente en particulier, offre pour l’Italie du Sud, les exemples les plus achevés de ces expériences sur la couleur qui définissent ce que P. Moreno a appelé la « manière tarentine 35 ». On mentionnera, à titre d’exemple, les deux fragments du cratère, découvert en 1984, dans un dépotoir de la via Minniti à Tarente 36, qui livrent une forme d’expression bilingue des ressources de la ligne et de la couleur et de leur adéquation avec le sujet figuré : force expressive de la ligne découpant sur le fond noir la musculature du corps du jeune satyre, rôle de la touche colorée dans l’évocation du mouvement (ondulation de la chevelure, jet de vin dans le cratère), peinture ombrée des carnations qui accentuent la sensualité des corps dénudés de la flûtiste et du vieux Silène. Le frag-
32. 33. 34.
35. 36.
E. Panofsky, Die Perspektive als symbolische Form. Vorträge der Bibliothek Warburg (1924-1925, 1927, trad. française 1975) ; J. White, Perspective in Ancient Drawing and Painting (1956). Martin von Wagner Museum H 4698 et H 4701 : Fr. Villard, Grèce classique (1969), p. 309-310, fig. 360 ; Taplin 2007, avec bibliographie. M. Denoyelle et al. (éds), La céramique apulienne. Bilan et perspectives, Table ronde, Naples (30 novembre-2 décembre 2000) (2005) ; M. Denoyelle, M. Iozzo, La céramique grecque d’Italie méridionale et de Sicile (2009) et les contributions dans J. de La Genière (éd.), Le cratère à volutes. Destination d’un vase de prestige entre Grecs et non-Grecs, Cahiers du CVA, France 2 (2014), avec bibliographie. P. Moreno, Pittura Greca. Da Polignoto a Apelle (1987), p. 169-198. Tarente, Museo Archeologico Nazionale (inv. 51580) : S. Fozzer, « La ceramica sovraddipinta e la documentazione della necropoli di Taranto », dans E. Lippolis (éd.), Catalogo del Museo Archeologico Nazionale di Taranto III,1. Taranto la necropoli: aspetti e problemi della documentazione archeologica dal VII al I sec. A.C. (1994), p. 325-335, pl. XXIII ; A. D’Amicis, « La ceramica policroma: Taranto », dans E. Lippolis (éd.), Arte e artigianato in Magna Grecia, Exposition Tarente 1996 (1996), p. 433-445, fig. p. 426-427, cat. 368. Voir également : J. R. Green, « Some Gnathia Pottery in the J. Paul Getty Museum », dans Greek Vases in the J. Paul Getty Museum (1986), p. 116-138 ; id., « Gnathia and Other Overpainted Wares of Italy and Sicily: A Survey », dans É. Geny (éd.), Céramiques hellénistiques et romaines III (2001), p. 57-103 ; A. D’Amicis, « Ceramica apula a figure rosse e sovraddipinta: rapporto di produzione e cronologia », dans M. Denoyelle et al. (n. 34), p. 163-172 ; M. Denoyelle, M. Iozzo (n. 34), p. 207-212.
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ment, attribué au Peintre de la Furie Noire, qui figure l’enlèvement de Céphale par Éos 37 montre, grâce à la chute partielle des couches de couleurs, comment le peintre jouait sur la palette restreinte à sa disposition pour intensifier les contrastes de couleurs par le jeu des superpositions, ici en interposant entre le rouge de la figure réservée et le blanc rehaussé de jaune, figurant la tunique et les ailes d’Éos, une couche de vernis dilué de teinte grisâtre. Sur ce fragment, le peintre manifeste le caractère surnaturel de la scène par la couleur qui oppose le corps lumineux et ailé de la déesse à celui de Céphale peint dans la technique normale de la figure rouge. Un deuxième élément est le nimbe. Composé de trois cercles concentriques, blanc, noir décoré d’un zigzag blanc, et rouge bordé de pointes, à la manière de rayons, il forme l’arrière-plan sur lequel se détachent les deux figures. Ce motif occupe une place centrale dans l’étude pionnière que Chr. Aellen a consacrée aux personnifications et aux allégories de l’« ordre cosmique » dans la céramique figurée de Grande Grèce 38. Ses analyses mettent en évidence l’originalité et la fécondité des peintres italiotes dans la création de ces figures qui manifestent la volonté divine auprès des humains. La mise en image des phénomènes lumineux y occupe une place essentielle et nous offre un point d’appui privilégié pour approfondir le rôle de la couleur dans un type de représentation dont les sources écrites nous ont signalé l’importance pour les peintres classiques.
PHÉNOMÈNES
ATMOSPHÉRIQUES
En effet, le choix du tableau d’Apollodore figurant Ajax foudroyé correspondait sans doute à une forme particulière de sensibilité de la critique hellénistique attentive à la force d’évidence (ȂưƠƴƧƩƭƥ, euidentia) du tableau, capable de « mettre sous les yeux du spectateur » une réalité absente. Mais il prenait aussi appui sur l’exploration bien réelle par les peintres classiques des potentialités offertes par le travail de la couleur pour capturer la lumière et l’éclat dans l’espace du tableau. La popularité de deux chefs-d’œuvre d’Apelle en offre un autre témoignage. À propos du tableau figurant Alexandre tenant le foudre conservé dans le temple de Diane à Éphèse, les sources insistent sur l’effet de relief créé par le contraste entre les chairs et l’éclat lumineux 39. Le second tableau est une représentation de l’« orage », un thème majeur du récit épique, depuis Homère, considéré comme
37. 38.
39.
A. Cambitoglou, J. Chamay, Céramique de Grande Grèce. La collection de fragments Herbert A. Cahn, Hellas et Rome VIII (1997), p. 102-104, no 38, fig. couleur p. 103. Aellen 1994, p. 83-84 ; Chr. Aellen soulignait lui-même (p. 141) qu’il serait « urgent de faire une recherche exhaustive sur tous les phénomènes lumineux qui apparaissent dans l’art vasculaire italiote, recherche qui permettrait certainement de mieux comprendre le symbolisme de cette céramique funéraire ». Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 92 (trad. A. Reinach [n. 31], no 456) : Digiti eminere uidentur et fulmen extra tabulam esse (« les doigts y semblent être en saillie et le foudre sortir du tableau ») ; la suite du passage joue sur l’opposition entre les couleurs « pauvres » du peintre « tétrachromatiste » et la rémunération du chef-d’œuvre en pièces d’or « non pas comptées, mais alignées sur la mesure du tableau ». Voir aussi Plutarque, Vie d’Alexandre 4.
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une réalité impossible à peindre 40. Le peintre avait sans doute eu recours à des personnifications de Bronté (tonnerre), d’Astrapè (éclair) et de Ceraunobolia (coup de foudre), un mode de figuration dans lequel il était aussi passé maître. Autant qu’une difficulté technique pour rendre l’éclat et la fulgurance de l’éclair, le transfert de l’attribut de Zeus au portrait d’Alexandre représentait une forme de transgression dans la construction de l’image royale, fort sensible dans les cours hellénistiques 41 tout comme à Rome. Avant même les excès du colosse de Néron, Virgile 42 évoque à propos de Salmonée, jeté au fond du Tartare, la folie de celui qui voulut imiter par l’airain et le choc des sabots, les « nuées et le foudre inimitables » : Demens ! qui nimbos et non imitabile fulmen/Aere et cornipedum pulsu simularat equorum. Cette tension entre ordre humain et ordre divin est exprimée dans la scène d’enlèvement de Perséphone de la tombe de Vergina où le peintre a joué sur le fond blanc de la paroi pour figurer, dans l’angle supérieur, trois éclairs sortant d’un petit pan de bleu, devant Hermès, figuré en vol et tenant les rênes de l’attelage 43. Le peintre joue avec un art consommé sur un schéma bien attesté des scènes d’enlèvement et couronne une représentation virtuose du mouvement des corps dans l’espace par quelques touches de couleur qui ouvrent sur des espaces inaccessibles à notre perception. C’est ce que souligne le geste d’Hermès avec le caducée pointé vers le haut. Les traits ondulés figurant l’éclair, signe de l’assentiment de Zeus, se superposent à la baguette. Le motif de la foudre tombant du ciel pour signifier la volonté de Zeus est attesté dans la céramique figurée, depuis la fin du ve s. av. J.-C. Nous reviendrons brièvement sur trois cratères italiotes figurant Alcmène au bûcher qui offrent des variations intéressantes, au cours du ive s. av. J.-C., sur le thème de l’orage qui, au terme de la « longue nuit », marque à la fois la délivrance d’Alcmène et la colère de Zeus contre Amphitryon, sourd à ses avertissements. Sur les représentations les plus anciennes ainsi que sur le cratère, fragmentaire, provenant de Tarente, attribué au Peintre de la Naissance de Dionysos 44 (fig. 1), la couleur ne joue pratiquement aucun rôle, à part les petites touches de jaune qui soulignent l’éclat 40.
41.
42. 43. 44.
Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 96 (trad. A. Reinach [n. 31], no 455) : Pinxit et quae pingi non possunt, tonitrua, fulgetra, fulguraque ; Bronten, Astrapen, Ceraunobolian appellant. A. Reinach (p. 345, n. 2) évoque le tableau décrit par Philostrate, Imagines I 14 (Sémélé) où figurent Bronté et Astrapé. C’est au cours d’un orage, déclenché par Athéna, qu’Ajax est foudroyé : Odyssée IV 499-500 ; Virgile, Énéide I 43-44. Sur la différence entre l’éclair (qui est positif ) et la foudre punitive, Aellen 1994, p. 125-127. Le sculpteur Lysippe aurait reproché à Apelle cette innovation en l’opposant à son propre chef-d’œuvre où il avait maintenu l’attribut de la lance, « dont le temps ne saurait enlever la gloire qui est bien réelle et personnelle » : Plutarque, De Iside et Osiride 24 ; Ad principem ineruditum 3 ; De Alexandri fortuna II 2. Virgile, Énéide VI 585-595. M. Andronikos, Vergina II. The Tomb of Persephone (1994), p. 49-54, 100-101, pl. V, fig. 13 et 15. M. Andronikos mentionne aussi le parallèle avec la céramique italiote. Tarente, Musée archéologique national, inv. 4600 (vers 400 av. J.-C.) : RVAp I, 2/11, p. 36 ; Taplin 2007, p. 171, no 57 ; A. D. Trendall, LIMC I, 1 (1981), s.v. « Alkmene », p. 552-556 ; P. Linant De Bellefonds, LIMC Suppl. (2009), p. 45-46. À Lipari, Alcmène est figurée sur le bûcher mais sans représentation de l’éclair : L. Bernabò Brea, M. Cavalier, La ceramica figurata della Sicilia e della Magna Grecia nella Lipàra del IV sec. A.C. (1997), fig. 46, p. 52-54.
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5 cm
Fig. 1 — Cratère de Tarente attribué au Peintre de la Naissance de Dionysos : Alcmène et Amphitryon (Tarente, Museo Archeologico Nazionale, inv. 4600) (su concessione del Ministero per i Beni e le Attività CulturaliSoprintendenza per i Beni Archeologici della Puglia, Cl. Pouzadoux).
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10 cm
Fig. 3 — Cratère en calice, attribué au Peintre de Darius : Alcmène et Amphitryon (Boston 1989.100) (cl. Museum of Fine Arts, Boston).
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Fig. 2 — Cratère de Paestum en cloche portant la signature de Python : Alcmène et Amphitryon (British Museum, Department of Greek and Roman Antiquities, F 149) (cl. Trustees of the British Museum).
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Fig. 4 — Loutrophore attribuée au Peintre du Louvre MNB 1148 : Zeus et Léda, en haut, à gauche, personnification d’Astrapè (The J. Paul Getty Museum Malibu, 86 AE 680) (cl. The J. Paul Getty Museum).
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du foudre ailé. L’arme de Zeus, flanquée à gauche de la figure d’Éros aux ailes déployées, s’interpose dans le champ de l’image entre les deux époux. Alcmène, assise dans une pose affligée, est figurée au-dessus du bûcher dont l’assemblage de rondins est souligné par des traits d’ombre qui en accentuent le réalisme. Amphitryon recule devant le prodige en portant sa main droite vers son menton. À droite de l’époux interdit, on voit la figure lacunaire d’Hermès, le caducée à la main. Un cas plus intéressant encore se trouve sur le cratère de Paestum, signé Python, découvert à Sant’Agata Dei Goti, l’antique Saticula, en 1793, et conservé au British Museum (fig. 2) 45. Alcmène, assise sur l’autel, tend un bras suppliant vers le ciel matérialisé, suivant les conventions de la céramique paestane, par les bustes des dieux, ici Zeus et Éos (Aos), disposés au-dessus d’une ligne de sol ondulée. Zeus répond à sa prière, d’abord, par l’envoi de deux foudres, placés au contact du bûcher qui entoure l’autel, puis par l’orage manifesté par la personnification des Nuées (Nephelai) 46. Le peintre a choisi de représenter l’arc-en-ciel, peint en blanc et en pourpre, qui naît de la rencontre entre le feu et les eaux déversées des hydries tenues par les Nephelai. Autel et bûcher sont peints avec minutie grâce aux couleurs superposées qui associent le blanc, le jaune et le brun dilué pour les détails et le rendu de l’ombre. Amphitryon et Anténor, les torches à la main, tentent en vain de mettre le feu aux rondins. En superposant les flammes des torches aux deux foudres tombés du ciel, le peintre a souligné la vanité de leur geste 47. Le peintre a simulé les gouttes d’eau par les petits points blancs qui parsèment le champ noir du vase. L’arc-en-ciel marque une forme d’héroïsation de la future mère d’Héraclès 48. Certes l’arc-en-ciel ainsi construit n’est qu’un lointain équivalent du phénomène naturel analysé par Aristote 49. Cependant la tentative est originale 50 et elle transcrit en image le mélange d’eau et de feu qui produit le phénomène, ce qui correspond à l’interprétation aristotélicienne de l’arc-en-ciel comme le produit de la réflexion des rayons du soleil dans les particules d’eau 51. Enfin, sur un cratère conservé à Boston
45. 46. 47.
48.
49. 50.
51.
Londres, British Museum, F. 149 : A. D. Trendall, Paestan Pottery (1936), p. 56-58, pl. XV ; id., The Red Figured Vases of Paestum (1987), p. 139, 2/239, pl. 88. Cette identification est préférable à celle des Hyades : Aellen 1994, p. 141. Plaute, Rudens 86, témoigne de la célébrité de cet orage dans la pièce perdue d’Euripide, Alcmène. Ainsi Virgile à propos de Salmonée (Énéide VI 592-593) : At pater omnipotens densa inter nubila telum / contorsit, non ille faces nec fumea taedis / lumina (« Mais le père tout puissant du sein des épaisses nuées, lança un trait – non pas une torche certes ni les fumeux éclats d’un brandon », trad. J. Perret, CUF). Héraclès est une figure paradigmatique pour la représentation des processus d’héroïsation : Fr. Lissarrague, « Présence de l’invisible : deux images du Peintre de Cadmos », dans S. Estienne et al. (éds), Image et religion dans l’Antiquité gréco-romaine, Actes du colloque de Rome (11-13 décembre 2003) (2008), p. 19-24. Le cratère de Tarente (inv. 4600) provient d’une sépulture à incinération : E. Lippolis (n. 36), p. 374, cat. 352. Aristote, Meteorologica 371b25-372a10, souligne que les trois couleurs principales de l’arc-en-ciel (rouge, violet et vert) sont d’une nature telle « que les peintres ne savent pas les reproduire ». On relève un autre exemple de l’arc-en-ciel sur une amphore campanienne (Londres, British Museum, F. 193, provenant de Capoue, Peintre du Louvre K 491, groupe du Peintre de Cassandre), A. D. Trendall, The Red-Figured Vases of Lucania, Campania and Sicily (1967), 231/36, pl. 90, 7. Le paradoxe de la jonction de l’eau et du feu ouvre encore les Imagines de Philostrate de Lemnos, comme une sphragis de son origine (le feu lemnien) mais aussi comme l’expression des limites de la figuration en peinture. Ce serait sans doute surévaluer l’interprétation de l’image que de voir dans le miroir tenu par
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(fig. 3) 52, le Peintre de Darius a eu recours au motif du nimbe, qui accentue l’héroïsation de la figure d’Alcmène. Cette dernière est assise sur l’autel. Le bûcher n’est plus construit mais évoqué par quelques troncs dispersés au pied de l’autel. Amphitryon, assisté par un jeune garçon, s’apprête à les enflammer. Alcmène n’exprime plus ni l’affliction, ni la supplication. La main gauche ramenée sur son voile, et la droite, paume ouverte vers le spectateur, elle se donne à voir dans son statut d’élue de Zeus. Le grand nimbe, devant lequel sa figure se détache 53, se compose de cercles concentriques qui découpent une succession de bandes lumineuses blanches et rouges alternant avec le fond noir. L’effet de rayonnement est renforcé par le cercle de flammèches blanches qui termine le halo. Dans les scènes de rapt amoureux d’un être mortel par un dieu, le nimbe enveloppe les deux figures selon une convention déjà en œuvre dans la première moitié du siècle, comme nous l’avons vu sur le fragment attribué au Peintre de la Furie Noire. Le Peintre de Darius continue à utiliser ce signe conventionnel, par exemple sur la loutrophore figurant l’enlèvement d’Amphithéa par Poséidon 54. Ici, le Peintre de Darius a associé sous une autre forme les éléments du monde réel et les signes métaphoriques de la manifestation divine. Le nimbe isole Alcmène des autres protagonistes et le dieu prend la forme d’un aigle d’une taille démesurée, planant au-dessus de l’autel, les ailes largement déployées, dans tout l’éclat doré de ses plumes 55. La lance d’Amphitryon en dépassant du registre inférieur et en couvrant partiellement l’oiseau pointe dans sa direction selon un procédé qui n’est pas sans rappeler le lien posé entre le caducée d’Hermès et les éclairs de la tombe de Perséphone 56. Ici la lance souligne, comme les torches sur le cratère de Python, la démesure de son acte. La loutrophore, conservée à Malibu, qui représente l’étreinte de Léda et du cygne (fig. 4) 57 apporte un parallèle intéressant de la figuration de l’union entre Zeus et une
52. 53.
54. 55.
56.
57.
Éos autre chose que le signe des grâces de l’aurore qui marque la venue au monde du fils de Zeus, peutêtre sur le modèle de l’Aurore latine, Mater Matuta. Boston 1989.100 : RVAp Suppl. II, p. 151, 18/65b, pl. 37-3 ; Taplin 2007, p. 172-174, no 58 ; P. Linant de Bellefonds (n. 44), p. 45. On trouve deux types de nimbes dans la céramique italiote : le petit qui entoure seulement la tête et souligne le statut particulier voire divin de la figure, et le grand nimbe, signe de l’épiphanie : Aellen 1994, p. 83-84. Chr. Aellen, A. Cambitoglou, J. Chamay, Le Peintre de Darius et son milieu. Vases grecs d’Italie méridionale (1986), p. 124-136 ; RVAp Suppl. II, p. 149, 18/56a. Voir le succès de la statue de Léocharès figurant l’enlèvement de Ganymède par Zeus (Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXIV 79) et l’usage d’une telle représentation dans l’art funéraire en Apulie, par exemple dans l’hypogée de Ganymède à Arpi : M. Mazzei, Arpi. L’ipogeo della Medusa e la necropoli (1995), p. 131-142, fig. p. 138. Sur la façade de la tombe d’Aghios Athanasios, près de Thessalonique, on observe un procédé d’association similaire entre les sarisses des deux gardiens et les épisèmes des boucliers suspendus au-dessus d’eux, notamment pour celui de droite, orné du foudre : M. Tsimbidou-Avloniti, ƑƥƮƩƨƲưƭƮƲƣƷƠƹƲƭƶƷƲư ƚƲƣưƭƮƥƮƥƭƶƷƲưŽƧƭƲƆƬƥưƠƶƭƲƍƩƶƶƥƯƲưƣƮƩƵ (2005), pl. 36-37, 40-41 ; H. Brecoulaki, La peinture funéraire de Macédoine. Emplois et fonctions de la couleur (IVe-IIe s. av. J -C.) (2006), p. 287-292. Loutrophore attribuée au Peintre du Louvre MNB 1148, conservée au J. Paul Getty Museum (Malibu, 86 AE 680) figurant l’union de Zeus et de Léda : RVAp. Suppl. II, p. 180, 20/278.2, pl. XLVII, 2 ; Taplin 2007, p. 229, no 89 ; W. Felten, LIMC Suppl. (2009), s.v. « Zeus », p. 518, add. 103.
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mortelle d’où naquirent des êtres promis à l’immortalité, Héraclès, Castor et Pollux. Ces derniers sont, avec Ajax et Achille, des modèles d’excellence pour les mortels, comme le souligne le fragment d’un hymne composé par Aristote pour le tyran Hermias 58. Si, dans le cas d’Alcmène, la composition crée une interférence entre le monde des dieux et celui des hommes, dans celui de Léda, la composition de l’image en deux registres bien distincts sépare de façon claire le divin de l’humain. La différence dans la représentation du signe atmosphérique de la volonté divine, nimbe ou personnification, alors que, dans le deuxième cas, Zeus a pris une forme animale, nous semble renforcer le contraste entre les deux modes de figuration. Au registre supérieur, Zeus assis, le sceptre à la main, se tourne vers Aphrodite qui se tient debout, le petit Éros perché sur son bras droit, l’iunx à la main. Un édicule peint en trois dimensions figure la demeure céleste. De part et d’autre de l’édifice, se tiennent les personnifications de l’éclair (Astrapè) et de l’année (Éniautos) dont les noms sont inscrits dans le champ comme ceux des dieux et de Léda. Astrapé, les ailes déployées, la tête ceinte d’un nimbe tient le foudre de la main gauche et une torche de la main droite. Au registre inférieur, en présence d’Hypnos qui étend sur le couple sa baguette, Zeus sous la forme du cygne s’unit à Léda. Par le jeu de la couleur superposée, la blancheur de ses plumes et le baiser de son bec rouge contrastent avec le corps de Léda et tissent des liens avec les représentations allégoriques et divines du registre supérieur : ailes et nimbe d’Astrapè, corps d’Éros, palais de Zeus, sphinx aux ailes déployées sur le col. Dans le prolongement des expériences de la première moitié du ive s. av. J.-C., l’usage des couleurs superposées dans la technique à figures rouges n’a pas une simple fonction décorative et cosmétique, et joue un rôle actif dans la construction du sens de l’image.
FORMES
ALLÉGORIQUES DE LA VALEUR ARÉTÈ
De fait, les travaux récents sur les céramiques polychromes apuliennes mettent en évidence les liens étroits entre les groupes de pionniers, comme celui qu’on rattache au cercle du Peintre de Konnakis, et plusieurs peintres des débuts de la figure rouge apulienne, tels le Peintre de la Naissance de Dionysos et le groupe du Peintre de la Furie Noire 59. Il s’agit d’un ensemble d’expériences dans lesquelles les recherches sur la couleur et sur la représentation d’architectures en trois dimensions vont de pair. Parmi les édifices figurés, on distingue deux ensembles en fonction du lien référentiel que l’on peut établir avec des types déterminés de constructions. Ces identifications sont renforcées par la nature des personnages placés à l’intérieur des architectures ou disposés autour d’elles. À côté des images de temples ou de palais, qui correspondent chaque fois à un type particulier de construction en trompe-l’œil, on rencontre, en effet, une forme spécifique d’édicule, dénommée conventionnellement naïskos, propre à la production italiote, et notamment apulienne, dont les premières attestations se trouvent chez le Peintre de l’Ilioupersis (fig. 5). Ces édicules, souvent couplés sur un même vase avec une seconde 58. 59.
Diogène Laërce, 5, 7 et Athénée, XV 696b ; C. Pouzadoux, Éloge d’un prince daunien, Mythe et Image en Italie méridionale au IVe s. av. J.-C. (2013), p. 181. A. D’Amicis (n. 36), p. 163-172 ainsi que les références de la n. 37.
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scène, de nature identique, mais centrée sur une stèle 60, mettent en valeur la figure des défunts et des actes cultuels qui leur sont consacrés sans renvoyer, dans l’état actuel des connaissances, à un type déterminé de monument funéraire puisque de telles architectures ne sont documentées qu’à date plus tardive, notamment à Tarente. La construction en trompe-l’œil, en tant que telle, semble constituer le signe visuel de la valeur (arétè) du défunt. Dans une étude précédente, j’ai proposé de rapprocher l’image du naïskos d’une métaphore développée par Platon dans la République (365b) dans la discussion sur l’homme juste et l’homme injuste 61. Adimante, citant Pindare, oppose deux voies vers la « forteresse où l’on se retranchera pour passer sa vie ». Comme il est plus avantageux de paraître vertueux que de l’être, Adimante propose de tracer autour de lui, à l’aide du compas, une « skiagraphie de vertu » (ƶƮƭƥƧƴƥƹƣƥ DzƴƩƷʨƵ) qui prendra la forme d’un accès monumental (mais trompeur) (ƳƴƿƬƸƴƥ). La même métaphore architecturale est employée de façon positive par Socrate dans la discussion du Philèbe (64c) sur le mélange idéal d’où résulte le vrai bien afin de souligner qu’il a atteint une étape décisive dans la quête de la définition juste. Dans ce passage, la métaphore du porche est précédée par une première définition du principe directeur qui structure l’homme de bien : « une sorte d’ordonnance incorporelle faite pour gouverner un corps qu’anime une belle vie 62 ». Les figures idéales placées dans l’écrin du naïskos me semblent transcrire en image cette métaphore de l’homme juste et vertueux : on pourrait dire qu’elles en constituent la forme allégorique. Dans cette composition, le jeu des couleurs est indissociable de la construction des architectures en trompe-l’œil et les peintres ont mis au point des codes de représentation qui reposent sur le contraste entre les figures rouges réservées et la palette restreinte de couleurs superposées dont ils disposent. Images intermédiaires entre les hommes et les dieux, entre les vivants et les morts, ces figures sont colorées en blanc. Par rapport au rouge des figures réservées, le blanc rapproche la figure humaine du corps lumineux des dieux et s’oppose à l’ombre obscure des démons. Cette échelle chromatique peut être illustrée par deux cas d’école : d’une part, le fragment du Peintre de la Naissance de Dionysos, conservé à Amsterdam, figurant Apollon devant son propre temple 63, d’autre part, le cratère figurant la purification d’Oreste à Delphes, attribué au Peintre de la Furie Noire 64. Ce peintre a pour trait caractéristique d’évoquer par le surpeint noir la chair 60. 61. 62. 63.
64.
A. Pontrandolfo et al., « Semata e naiskoi nella ceramica italiota », dans La Parola, l’Immagine, la Tomba, AION, ArchStAnt. X (1988), p. 181-202. A. Rouveret (n. 9), p. 57-59. Philèbe 64b (trad. A. Diès) : ... ƮƿƶuƲƵƷƭƵDzƶǁuƥƷƲƵǶƴƱƼưƮƥƯ˒ƵȂuƻǀƺƲƸƶǁuƥƷƲƵ... Allard Pierson Museum (2579) : RVAp I, 2/2, pl. 9, 2 ; Fr. Villard (n. 33), p. 309, fig. 361. Encadrée par les deux battants de la porte largement ouverts, la statue colossale du dieu, l’arc dans la main gauche et la patère posée dans la main droite, est figurée dans l’éclat doré du métal, grâce au travail des ombres et des lumières appliqué à la couleur jaune superposée, suivant une technique attestée dans la céramique attique de la fin du ve s. av. J.-C., en particulier sur le cratère éponyme du Peintre de Talos. RVAp I, p. 167, 7/13 (Museo Archeologico Nazionale de Naples, inv. 82 270 [H. 3249]), provenant de Ruvo ; Aellen 1994, p. 24, 34 et 81. Voir aussi le cratère conservé à Saint-Petersbourg (musée de l’Ermitage, B 1743 [St 349], Peintre de Konnakis) : Taplin 2007, p. 64, no 9. Une trace de ces recherches sur la création paradoxale de figures à partir du noir est présente dans la notice sur le tableau de Pausias
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a
b
Fig. 5 — a. Cratère à volutes attribué au Peintre de l’Ilioupersis (face A) : jeune homme dans un naïskos entouré de visiteurs masculins et féminins (British Museum, F 283) (cl. Trustees of the British Museum). b. Cratère à volutes attribué au Peintre de l’Ilioupersis (face B) : visite au tombeau en forme de stèle (British Museum, F 283) (cl. Trustees of the British Museum).
sombre des Furies, faisant en quelque sorte surgir l’ombre de l’ombre 65. Quant aux figures placées dans les naïskoi, on peut ajouter que du point de vue de l’artisan qui construit une telle image, le blanc évoque aussi les matériaux de prix qui composent l’effigie, renforçant ainsi l’aura de l’image « statufiée » du défunt. Au cours du ive s. av. J.-C., plusieurs peintres jouent sur l’ambiguïté d’une telle représentation en montrant la pétrification partielle du corps de Niobé 66. Les variations de cette image au cours du siècle rappellent
65. 66.
figurant le sacrifice des bœufs, exposé à Rome dans le portique de Pompée : Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 127. Les prolongements de ces recherches dans l’art décoratif hellénistique et romain, sous forme de frises ou de panneaux sur fond noir, sont bien attestés de Délos à Pompéi. Voir le fragment éponyme conservé à Amsterdam : RVAp I, 7/7, pl. 53, 3 (Amsterdam 3525 A). L. Giuliani, « Contenuto narrativo e significato allegorico nell’iconografia della ceramica apula », dans Fr. de Angelis, S. Muth, Im Spiegel des Mythos. Bilderwelt und Lebenswelt, Palilia 6 (1999), p. 43-51 ; M. Schmidt, LIMC VI, 1 (1992), s.v. « Niobe », p. 908-914 : voir en particulier l’amphore du Peintre Varrese conservée à Bonn (Akademisches Kunstmuseum 99 ; RVAp I, p. 338, 13/3) ; la loutrophore du Peintre du Louvre MNB 1148, conservée à Malibu (J. Paul Getty Museum, 82 AE 16), A. D. Trendall, Red Figure Vases of South Italy and Sicily (1989), p. 85-86, fig. 183 ; M. Denoyelle, M. Iozzo (n. 34), p. 145, fig. 212 et l’hydrie du Peintre de Darius conservée à Genève (HR 282bis) ; Chr. Aellen, A. Cambitoglou, J. Chamay (n. 54), p. 150-57 ; RVAp Suppl. II, 18/63e ; Taplin 2007, p. 76, no 16.
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celles que l’on a pu observer, dans un autre registre, à propos d’Alcmène au bûcher. Malgré les nombreux travaux qui leur ont été consacrés, il serait intéressant de reprendre en détail les modes de construction des naïskoi apuliens pour en préciser encore la genèse et l’évolution, à la lumière des découvertes récentes 67. Une telle image évoque aussi le rôle que l’on peut attribuer à certaines architectures feintes des tombes monumentales de Macédoine. L’interprétation de la façade en trompe-l’œil de la tombe du Jugement Dernier de Lefkadia, vers 300 av. J.-C., comme entrée du palais d’Hadès, a été proposée depuis longtemps 68. Cette interprétation est renforcée par la présence dans les entrecolonnements du défunt, précédé d’Hermès, qui le présente aux juges des Enfers, Éaque et Rhadamanthe. Le témoignage apporté par la tombe d’Eurydice de Vergina, la plus ancienne à ce jour des grandes tombes figurées découvertes sur le site, permet de saisir une autre manifestation de l’usage symbolique des fausses architectures dans un décor où la représentation de la figure humaine est strictement limitée au décor peint du trône de marbre. Comme le souligne A. Kottaridou 69, la couleur blanche domine dans la tombe, à l’exception du pourpre des étoffes et du faux plafond qui cachait la voûte, dont la couleur dominante semble avoir été le bleu ciel. Sur la paroi du fond, l’effet architectural du faux porche d’accès est construit avec une telle minutie que les pilleurs de la tombe ont attaqué la porte comme si elle était vraie. Le faux porche constitue donc un écrin qui met en valeur non pas la représentation figurée de la défunte mais le trône rouge resplendissant de marbre, d’or et de rouge cinabre, emblème de son rang, sur lequel était posé le coffret en or contenant les cendres. La tombe nous paraît donc doublement significative. D’une part, la représentation figurée est limitée à l’ornement du trône. Pourtant sa signification est fondamentale puisqu’il s’agit de l’épiphanie d’Hadès et de Perséphone. Ce trait rappelle le fonctionnement des grandes statues chryséléphantines de Phidias dont les détails sculptés livraient une forme de commentaire des traits caractéristiques du dieu. D’autre part, la recherche de couleurs pures et brillantes trouve un écho dans le texte du Phédon cité au début de cette étude. L’évocation de la morte repose sur la figure de l’absence.
67.
68. 69.
Une telle enquête dépasse de loin le cadre de cette étude. On signalera simplement le cas intéressant d’une amphore panathénaïque attribuée au Peintre de Talos, découverte à Tarente, figurant d’un côté, l’apothéose d’Héraclès montant vers l’Olympe sur son quadrige et, de l’autre, un édifice en trois dimensions devant lequel Héraclès est assis, face à Athéna, et sur lequel repose un plateau d’offrandes : Tarente, Museo Archeologico Nazionale, inv. 143544 : A. D’Amicis, « L’apotesi di Eracle », dans Catalogo del Museo Archeologico di Taranto I, 3. Atleti e guerrieri. Tradizioni aristocratiche a Taranto tra VI e V sec. a. C. (1997), p. 123-136. L. Bacchielli, « ‘Unità di luogo’ fra architettura e megalografie nella facciata della grande tomba di Leukadià », Rend. Lincei 38 (1983), p. 13-38 repris dans Parole d’Oltremare (2002), p. 283-312. A. Kottaridou, « Couleur et signification : l’usage de la couleur dans la tombe de la reine Eurydice », dans A.-M. Guimier-Sorbets, M. B. Hatzopoulos, Y. Morizot (éds), Rois, Cités, Nécropoles : institutions, rites et monuments en Macédoine, Actes des colloques de Nanterre 2002 et Athènes 2004, Mélétémata 45 (2006), p. 155-168 ; ead., « L’épiphanie des dieux des Enfers dans la nécropole royale d’Aigai », dans S. Descamps-Lequime (n. 3), p. 27-46.
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REGARDS
ÉTRUSQUES SUR LES ENFERS GRECS
Sur le vase apulien attribué au Peintre de la Furie Noire figurant la purification d’Oreste à Delphes, le corps de l’Érynie est coupé par la colonne qui délimite l’espace du sanctuaire (fig. 6). Sur la céramique paestane, par exemple sur l’amphore du Peintre de l’Oreste de Genève, figurant les retrouvailles d’Électre et d’Oreste sur la tombe d’Agamemnon 70, les deux Érinyes, qui surplombent la scène, sont représentées avec les mains posées sur le relief ondulé qui délimite le registre supérieur (fig. 7). Cet effet est construit par un procédé simple et efficace qui repose sur la manière usuelle de marquer les lignes de terrain par un trait dont la couleur contraste avec celle du fond. Ici, un trait noir détache les doigts, à l’exception du pouce, de la surface du buste, de manière à créer l’illusion de deux êtres qui surgissent du fond de l’image. Ce procédé, bien attesté dans la production céramique de Paestum, apparaît également sur des sarcophages étrusques, sculptés ou
Fig. 6 — Cratère à volutes attribué au Peintre de la Furie Noire : Oreste à Delphes (Museo Archeologico Nazionale de Naples, inv. 82 270 [H. 3249]) (cl. Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei, Cl. Pouzadoux). 70.
Fig. 7 — Amphore à col attribuée au Peintre de l’Oreste de Genève : rencontre d’Électre et Oreste à la tombe d’Agamemnon (musée d’Art et d’Histoire de la ville de Genève, HR 29) (cl. Musée d’Art et d’Histoire de la ville de Genève, B. Jacot Descombes).
Musée d’Art et d’Histoire de Genève, HR 29 : Chr. Aellen, A. Cambitoglou, J. Chamay (n. 54), p. 264-269, pl. couleur p. 28 ; A. D. Trendall (n. 45), p. 57, 2/1, pl. 15.
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peints (fig. 8) 71. La prise de conscience du rôle dynamique des fonds trouve une autre expression dans la première chambre de la tombe de l’Ogre de Tarquinia où les convives se détachent sur un fond de nuages noirs (fig. 9) qui situe leur rencontre dans l’au-delà. Dans la deuxième chambre de ce même hypogée, réalisée dans la seconde moitié du ive s. av. J.-C., l’au-delà prend la forme du royaume souterrain d’Eita et de Phersipnai. Sur la paroi du fond, les souverains des Enfers se détachent sur le fond rocheux d’une caverne dont une des entrées est gardée par le triple Géryon. Sur la paroi à gauche de la porte d’entrée, des inscriptions permettent d’identifier Agamemnon (Achmemrun), l’ombre de Tirésias (hinthial Teriasals) et Ajax (Eivas) (fig. 10) 72. Le terme étrusque hinthial 73 accompagne quatre représentations d’ombres de l’Hadès. Tirésias est figuré deux fois sur la tombe de l’Ogre et sur un miroir de Vulci conservé au Vatican 74, Patrocle une fois sur la scène de sacrifice des prisonniers troyens dans la tombe François de Vulci. Enfin, sur un cratère de Vulci, conservé à la Bibliothèque nationale, il s’agit d’un personnage féminin nommé Turmuca, inconnu par ailleurs 75. Comme l’a établi G. Colonna, le parallèle avec le cratère conservé à Munich 76, provenant de l’hypogée Monterisi Rossignoli de Canosa 77, dont le thème est la vengeance de 71.
72.
73. 74. 75. 76.
77.
Ce procédé est analysé par L. Haumesser, Le décor funéraire étrusque à l’époque hellénistique : images eschatologiques et imaginaire de l’au-delà, Thèse de doctorat, université Paris-X Nanterre (2006), p. 366-373. Voir par exemple le sarcophage sculpté de la tombe des Inscriptions de Vulci (A. M. Sgubini Moretti, Vulci e il suo territorio [1993], p. 95-96, fig. 97-99 ; O. J. Brendel, Etruscan Art [1978], p. 384) ou l’Amazonomachie peinte sur le Sarcophage du Prêtre, provenant de la tombe des Partunu, à Tarquinia (H. Blanck, « Die Malereien des sogenannten Priester-Sarkophages in Tarquinia », dans Miscellanea archeologica Tobias Dohrn dedicata, Archaeologica 26 [1982], p. 11-28, pl. 1-12 ; id. « Le pitture del “Sarcofago del Sacerdote” nel Museo nazionale di Tarquinia », dans Ricerche di Pittura Ellenistica [1985], p. 79-84). M. Torelli, « Ideologia e rappresentazione nelle Tombe tarquiniesi dell’Orco I e II », dans Ricerche di Pittura Ellenistica (1985), p. 7-17 ; id., « Linguaggio ellenistico e linguaggio “nazionale” nella pittura ellenistica etrusca », dans Pittura ellenistica in Etruria, Atti del convegno, Perugia (17-18.3.2006), Ostraka 16-1 (2007), p. 149-170 ; M. Cristofani, « Pittura funeraria e celebrazione della morte. Il caso della Tomba dell’Orco », dans M. Bonghi Jovino, C. Chiaramonte-Tréré (éds), Tarquinia: ricerche, scavi e prospettive, Atti Conv. Milano (1986) (1988), p. 191-202 ; M. Morandi, G. Colonna, « La gens titolare della tomba tarquiniese dell’Orco », SE 61 (1995), p. 95-102 ; Fr. Roncalli, « Iconographie funéraire et topographie de l’au-delà en Étrurie », dans Fr. Gaultier, D. Briquel, Les Étrusques, les plus religieux des hommes (1997), p. 37-54 ; St. Steingräber, Les fresques étrusques (2006), p. 188-189 ; ainsi que A. Rouveret, « Etruscan and Italic Tomb Painting: c. 400-200 B.C. », dans J. J. Pollitt (n. 1), p. 242-245. G. Colonna, « Note di lessico etrusco », SE 48 (1980), p. 174-179. M. Harari, LIMC VIII, 1 (1997), s.v. « Turms », p. 106, no 103. J. D. Beazley, Etruscan Vase Painting (1947), p. 9, 136-137, pl. 31, 2. Munich 3296 attribué au Peintre des Enfers : RVAp I, p. 533, 18/283, pl. 195. Sur l’autre cratère du Peintre des Enfers (Munich 3297) placé dans la même tombe, figurant les Enfers : RVAp I, 18/282, pl. 194. Plusieurs traits relient l’hypogée de Canosa et la tombe étrusque de l’Ogre. Le choix de groupes semblables, dans les scènes figurant les Enfers, par exemple le couple de Thésée et de Pirithoüs, semble indiquer l’existence d’un stock d’images et de thèmes-clés, fonctionnant sur le modèle des exemples rhétoriques, qui circulent de l’Apulie vers l’Étrurie par l’intermédiaire des milieux indigènes fortement hellénisés. Dans la céramique italiote, l’élément organisateur de la scène est l’édifice en trompe-l’œil qui figure le
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Fig. 8 — Sarcophage provenant de la tombe des Inscriptions de Vulci : amazonomachie (Rome, Museo Nazionale di Villa Giulia) (cl. Soprintendenza per i Beni Archeologici dell’Etruria Meridionale).
Fig. 9 — Tombe de l’Ogre I de Tarquinia : Velia (cl. Soprintendenza per i Beni Archeologici dell’Etruria Meridionale).
Fig. 10 — Tombe de l’Ogre II de Tarquinia : l’ombre de Tirésias (hinthial Teriasals) entre Agamemnon (Achmemrun) et Ajax (Eivas) (cl. Soprintendenza per i Beni Archeologici dell’Etruria Meridionale).
palais d’Hadès et de Perséphone. Ces représentations ont donné lieu à de nombreuses exégèses depuis le xixe s. On se reportera aux études de J.-M. Moret, « Les départs des Enfers dans l’imagerie apulienne », RA 1993-2, p. 293-351 ; M. Schmidt, « Aufbruch oder Verharren in der Unterwelt? Nochmals zu den apulischen Vasenbildern mit Darstellungen des Hades », Antike Kunst 43 (2000), p. 86-101, avec bibliographie ; voir aussi C. Pouzadoux, LIMC Suppl. (2009), s.v. « Hadès », p. 234-236.
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Médée, montre que l’équivalent de hinthial est le grec eidôlon, « fantôme ». En marge de la scène, un personnage, vêtu comme un roi oriental, est perché sur un rocher (qui est aussi un marqueur paysager de l’au-delà). Une inscription le désigne comme eidolon Aetou. L’eidôlon est la manifestation visuelle de ce qui reste du vivant après la mort, comme l’ont bien établi les études désormais classiques de J.-P. Vernant 78. Et c’est sous ce terme que sont aussi nommées les apparitions dans le théâtre grec. Dans les deux peintures funéraires étrusques, contemporaines, où le terme hinthial apparaît, il serait difficile de justifier certains détails sans supposer une connaissance du récit homérique de la part de ceux qui conçurent ces images. Et cette hypothèse peut s’étendre à la conception d’ensemble du décor de la tombe de l’Ogre II, même s’il est clair qu’en raison même de son thème (sacrifice et évocation des morts), il répond à des formes locales de rites et de croyances dont l’essentiel nous échappe. La tombe de l’Ogre se compose de deux chambres, creusées séparément à des dates différentes, au cours du ive s., et qui furent reliées dans la première moitié du iiie s. av. J.-C. par un corridor. Elle présente d’importantes lacunes dues à ces remaniements et à la conservation très imparfaite de son décor dès sa découverte en 1868. Certaines difficultés seront levées par l’édition complète du monument en cours de réalisation, mais d’autres données sont perdues de façon irrémédiable et augmentent la marge hypothétique des interprétations. Il en est ainsi pour la scène figurée sur la paroi à gauche de l’entrée. Pour M. Cristofani et Fr. Roncalli 79, les traces conservées permettraient d’identifier la scène de sacrifice des victimes par Ulysse qui rend possible la communication avec l’au-delà et la consultation du devin Tirésias 80. Si l’on retient cette hypothèse, deux stratégies de représentation seraient à l’œuvre dans la disposition du décor : celle du banquet et celle du sacrifice. La première est signalée, sur la paroi à droite de l’entrée, par la table sur laquelle se dresse la vaisselle dont l’éclat précieux est souligné de façon remarquable par le jeu des ombres et des lumières. Un tel dispositif, sur lequel il n’y a pas lieu de s’attarder ici, trouve un parallèle dans la tombe Golini I de Volsinies (Orvieto) 81. Pour le sacrifice, la tombe de l’Ogre II, à la différence de la figuration réaliste des animaux sacrifiés et chassés dans la tombe Golini I, prendrait le récit homérique comme trame pour construire le décor infernal, en conformité avec l’ordre des épisodes narrés par Ulysse, lors du banquet chez les
78.
79. 80.
81.
En particulier : « De la présentification de l’invisible à l’imitation de l’apparence », dans Image et Signification (1983), p. 25-37, repris dans Mythe et Pensée chez les Grecs 3 (1996), p. 339-349 ; et « Naissance d’images », dans Religions, histoires, raisons (1979), p. 105-137 ; on se reportera également aux études publiées dans la première section « Montrer l’invisible » des actes du colloque Image et religion (n. 48), p. 15-85. Pour l’histoire du mot, voir S. Saïd (n. 15). Contra M. Torelli (n. 72). Odyssée XI 23-36 et pour la peinture de Polygnote à Delphes : Pausanias, X 29, 1. Voir aussi le sarcophage volsinien de Torre San Severo : F.-H. Pairault Massa, Iconologia e politica nell’Italia antica. Roma, Lazio, Etruria dal VII al I secolo a.C. (1992), p. 126-130, fig. 111. A. E. Feruglio et al., Pittura Etrusca a Orvieto. Le tombe di Settecamini e degli Hescanas a un secolo dalla scoperta. Documenti e materiali (1982) ; F.-H. Pairault Massa, « Problemi di lettura della pittura funeraria di Orvieto », dans Ricerche di Pittura Ellenistica (1985), p. 19-42 ; St. Steingräber (n. 72), p. 211-214, fig. p. 225-227.
LES COULEURS DU VISIBLE ET DE L’INVISIBLE DANS LA PEINTURE GRECQUE ET ÉTRUSQUE (Ve-IVe S. AV. J.-C.)
Phéaciens. Le premier est l’épisode du Cyclope 82, la Nekuia précède les dernières péripéties du douzième chant. Les éléments paysagers de la grotte créent un lien visuel (et métaphorique) manifeste entre les deux thèmes et font écho aux nuages noirs de la première chambre. Sur la paroi gauche de la tombe, grâce au sacrifice, les héros de la guerre de Troie se matérialisent aux yeux d’Ulysse 83. Ils sont représentés sur la rive de l’Achéron, bordée de roseaux, par deux d’entre eux : Agamemnon, qui apparaît en premier chez Homère, et Ajax qui se manifeste en dernier dans le récit et refuse tout contact avec Ulysse 84. Au centre, se tient l’ombre de Tirésias, la seule à être désignée comme hinthial Teriasals. Or le texte homérique marque une hiérarchie entre les ombres. Le devin Tirésias est le seul à avoir gardé, par la volonté de Perséphone, la force de son esprit et sa clairvoyance prophétique 85 . L’ombre de Patrocle était à sa ressemblance mais son esprit ne l’habitait plus et il en va de même pour toutes les ombres qui apparaissent à Ulysse dans la Nekuia 86. Cette tradition homérique n’est peut-être pas sans incidence sur la scène figurée dans la tombe de l’Ogre II. On y voit, en effet, plusieurs degrés de matérialisation physique des ombres : les trois héros d’Homère ont un corps ressemblant, conforme à leur apparence. Agamemnon et Ajax portent autour de la poitrine le bandage qui couvre leur blessure. Leurs corps partiellement dénudés contrastent avec celui de Tirésias, en appui sur son bâton, vêtu d’une tunique blanche bordée de motifs géométriques noirs et rouges, et la tête voilée dans un manteau bleu sombre qui retombe sur ses épaules et s’enroule autour de son bras gauche. La bande blanche rehaussée de motifs rouges en dents de loup qui le décore crée une sorte d’aura autour de son visage. La présence du terme hinthial dans sa didascalie est l’élément qui le différencie des deux autres. Par contre, les trois figures, comme tous les personnages qui peuplent le royaume d’Hadès, sont cernés d’un trait noir accentué qui détache leur contour et souligne, peutêtre, leur caractère fantomatique 87. Le peintre a eu recours à un autre contraste : à côté des héros qui ont repris des couleurs, vives et variées, les petits eidola sautant sur les roseaux devant Tirésias concrétisent un autre détail du récit d’Ulysse. Pour atteindre Tirésias, il doit écarter la foule bruissante des morts informes qui se pressent autour de lui. On voit donc comment le récit homérique et plusieurs conventions figuratives grecques 82.
83. 84. 85. 86. 87.
L’épisode est placé dans la niche du fond de la partie droite de la deuxième chambre, qui sera ensuite réaménagée par le percement du corridor reliant les deux tombes. Ce motif est souvent considéré comme postérieur à l’évocation des Enfers, voir cependant les remarques de M. Morandi, G. Colonna (n. 72), p. 100. Odyssée XI 387-466. Odyssée XI 543-564. Odyssée X 493-495. Voir la description d’Achille, Odyssée XI 475-76. On pourrait rapprocher ce procédé de la femme cernée de noir peinte sur l’avant-dernière métope de la tombe de la Balançoire de Cyrène, conservée au musée du Louvre (Ma 4909) qui pourrait représenter une apparition de Déméter : A. Rouveret, Ph. Walter, Peintures grecques antiques. La collection hellénistique du musée du Louvre (2004), p. 103-109 et cat. p. 123-124. Le contraste est total entre la tête d’Eita dont l’invisibilité est marquée par sa coiffure en forme de tête de loup (transcription de l’ʰƆƽƨƲƵƮƸưʨ) tandis qu’à Vergina, dans la tombe de Perséphone, à peu près contemporaine, les touches de couleurs non mélangées soulignent l’inquiétante étrangeté du visage sans regard du dieu de l’invisible.
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sont retravaillées dans le contexte étrusque, sans doute pour mettre en évidence le statut bienheureux des propriétaires du tombeau. Les mises en scène théâtrales évoquant l’audelà, populaires à la même époque et dénoncées par Aristote dans la Poétique 88, pourraient jouer un rôle non négligeable dans la construction de telles représentations tout comme l’existence de tableaux figurant les supplices des Enfers dans un but d’édification morale mentionnés par Démosthène et par Plaute 89. Dans la tombe François (fig. 11), l’adjonction d’hinthial au nom de Patrocle ne souligne pas la nature différente des eidôla, comme nous l’avons proposé pour la tombe de l’Ogre II. Elle signale la présence de l’ombre du défunt au cœur de la scène de sacrifice qui lui est consacrée. Il est situé légèrement en arrière par rapport à Achille et aux autres guerriers, comme les démons Vanth et Charu qui transposent allégoriquement l’expression récurrente dans le récit des funérailles de Patrocle des « portes de l’Hadès 90 ». Le sacrifice monstrueux permettra de les ouvrir pour Patrocle comme pour Achille puisque leur destin est indissociable. C’est ce point qui est marqué, comme l’a souligné F.-H. Pairault Massa 91, par les ailes déployées de Vanth qui relient le vivant Achille à l’ombre (hinthial ) de son ami. Ici, les ombres ne sont pas projetées au premier plan par la force du trait et l’éclat des couleurs. La reprise de la gamme chromatique fondée sur le contraste de l’ocre rouge et du bleu, traditionnelle depuis l’archaïsme, souligne avec subtilité les liens entre les morts et les vivants. Les rappels de bleu (chairs de Charu, épée, bracelets de métal et tunique d’Achille, plumes bleutées de Vanth et manteau de Patrocle) suggèrent une porosité entre les deux mondes qui s’exprime par l’affleurement des ombres à l’arrière-plan de l’image. Ce procédé s’inscrit dans une stratégie figurative fondée sur une conception dynamique des fonds que les peintres étrusques semblent avoir particulièrement explorée. Ainsi avons-nous dégagé, au cours de l’analyse, plusieurs formes de manifestation de l’invisible dans la peinture du ive s. av. J.-C. : travail sur le clair-obscur et l’éclat, signes métaphoriques associant couleur et dessin (arc-en-ciel et nimbe, naïskoi), travail sur les fonds (nuages ou procédés graphiques suggérant la présence d’un espace derrière l’image). Dans le domaine funéraire, un trait s’est confirmé de façon nette. En Étrurie – et la remarque peut s’étendre à l’ensemble du monde italique –, on relève l’importance des stratégies figuratives et narratives, fondées sur une large intégration du mythe grec. Par contre, on trouve une certaine réticence, dans le domaine grec, pour la représentation figurative par rapport à la prégnance de la structure architecturale qui organise le décor. On voit ainsi 88. 89. 90.
91.
Poétique 1456a et 1453b9. Démosthène, Contre Aristogiton 52 ; Plaute, Captifs 998-1000. A. Rouveret, « Figurer le corps ennemi : quelques remarques sur le thème du sacrifice des prisonniers troyens dans l’art funéraire étrusque et italique au ive siècle av. J.-C. », dans Chr. Müller, Fr. Prost (éds), Identités et cultures dans le Monde méditerranéen antique (2002), p. 345-366. À côté des exemples italiotes brièvement évoqués, on rappellera que dans la Nekuia de Polygnote figurait le démon Eurynomos aux chairs bleues et au bec d’oiseau de proie (Pausanias, X 28, 7). Plutarque choisit la Lesché de Delphes comme cadre de son traité Sur la disparition des oracles, un traité dans lequel il est aussi débattu de l’existence et de la fonction des démons dans la divination. F.-H. Pairault Massa (n. 80), p. 118.
LES COULEURS DU VISIBLE ET DE L’INVISIBLE DANS LA PEINTURE GRECQUE ET ÉTRUSQUE (Ve-IVe S. AV. J.-C.)
Fig. 11 — Tombe François de Vulci : sacrifice des prisonniers troyens par Achille en présence de l’ombre de Patrocle (hinthial Patrucles) (détail d’après les Monumenti Inediti VI [1859]).
se dessiner par l’effet des architectures et la centralité des objets sculptés ou peints qui s’y insèrent, un langage allusif d’une grande puissance d’évocation. Comme on l’a vu pour la tombe d’Eurydice à Vergina, les couleurs jouent un rôle essentiel dans la dynamique d’un tel décor. Dans ce cas, il s’agit du contraste entre la dominante blanche et les effets de chatoiement des corniches architecturales et du trône où la feuille d’or s’associe à l’éclat des couleurs. Deux motifs de l’hypogée C de la via des Cristallini à Naples 92 nous permettent d’appréhender un autre type de travail sur l’apparence colorée où le pouvoir évocateur des ombres et des lumières, au-delà de l’effet de réel, laisse affleurer en jouant sur l’imagination du spectateur, des images à demi invisibles mais pourtant essentielles. 92.
I. Baldassarre, « Documenti di Pittura Ellenistica da Napoli », dans L’Italie méridionale et les premières expériences de la peinture hellénistique (1998), p. 95-160, pour le détail de la coupe p. 138 et pl. 5.1, et pour la Gorgone p. 140-141 et pl. 4.1 ; V. Valerio, « Observations sur le décor peint de la tombe C du complexe monumental des Cristallini, Naples », dans S. Descamps-Lequime (n. 3), p. 149-162, en particulier p. 159 sqq.
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Fig. 12 — Naples, hypogée C de la via des Cristallini, chambre inférieure : tête de Méduse (su concessione della Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei, A. Pelle).
C’est le détail, presque invisible, de Dionysos et d’Ariane sculptés sur la coupe figurée en trompe-l’œil accrochée sur la paroi d’entrée de la chambre inférieure, qui évoque la félicité des bienheureux pour qui sait le discerner dans les reflets du métal et lui donner un sens. C’est aussi, sur la lunette du fond de la salle, l’incarnat délicat du visage sculpté de la « belle » Gorgone (fig. 12), les yeux fixes, la bouche entr’ouverte sur les dents qui évoquent son cri strident, qui se détache en relief sur le chatoiement de l’égide. Cette dernière est délimitée par une bande d’un rouge éclatant qui se mue en rose vif au contact de la zone sombre, sur laquelle se détachent les feuilles imbriquées, vertes, jaunes et blanches alternées, dont les nervures sont accentuées par un trait de blanc. De petits serpents dont les corps sinueux se dressent en bordure de cette couronne lumineuse font écho à ceux qui ornent la coiffure de la Gorgone et accentuent le contraste entre la fixité du visage sculpté de face et le miroitement des couleurs qui le nimbent, à la façon d’un arc-en-ciel. Placée au seuil de l’invisible dont elle est la gardienne, cette épiphanie de la tête coupée de Méduse, nous semble répondre de façon saisissante à la définition aristotélicienne de la couleur comme « la limite du transparent dans un corps déterminé ».
Le verre incolore dans l’Antiquité : de l’histoire de la production à l’histoire du goût Marie-Dominique Nenna
RÉSUMÉ Le verre brut, à l’issue de la phase de la production primaire, présente une coloration bleutée ou verte due aux impuretés contenues dans le sable employé. Pour obtenir un verre incolore, les Anciens avaient recours à la décoloration à l’aide de manganèse ou d’antimoine, ou bien sélectionnaient des sables particulièrement purs. Entre la seconde moitié du IIe millénaire av. J.-C. et le ier s. apr. J.-C., le verre incolore est utilisé de manière sporadique, le goût pour les couleurs vives étant dominant aussi bien aux époques classique et hellénistique, qu’au début de l’époque impériale après l’invention du verre soufflé. Dans le dernier tiers du ier s. apr. J.-C., un renversement s’opère et le verre incolore devient pour deux siècles un matériau de prix, comme en témoigne l’édit du Maximum. Employé aussi bien dans le service de table que dans le verre architectural, il semble être le support idéal des gravures en creux et en relief, mais aussi des décors appliqués, eux-mêmes incolores, ou bien de couleurs variées. Son emploi se restreint au ive s. et il semble disparaître dans le courant du ve s. apr. J.-C. On tentera ici d’expliquer l’origine de ces grands mouvements qui relèvent d’un faisceau de données conjuguant production et approvisionnement, imitation et rivalité avec le cristal de roche, goût pour la transparence et le miroitement de la lumière. MOTS-CLEFS Verre brut, bleuté, vert, verre incolore, décoloration, verriers antiques, verre soufflé, édit du Maximum, service de table, verre architectural, gravure en creux, gravure en relief, décor appliqué, cristal de roche, transparence, miroitement de la lumière. SUMMARY Colourless glass in Antiquity. From the history of production to the history of taste Raw glass, after the phase of primary production, presents a bluish or greenish colour due to the impurities of the sand. To obtain a colourless glass, the ancient glassworkers had to decolourize the glass using manganese or antimony, or selecting particularly pure sands. Between the second half of the second millennium BC and the first century AD, colourless glass was sparsely used, the fashion for coloured glass being dominant in Classic and Hellenistic periods as well as at the beginning of the Imperial period, after the invention of glassblowing. In the last third of the first century AD, there was a shift and colourless glass became for two centuries a highly priced material, as attested by the Edict of the Maximum. Used for tableware as well as for architectural glass, colourless glass is the ideal medium for engraved decoration and applied decoration, colourless itself or of various colours. Its use becomes more limited in the fourth century and it seems to disappear during the fifth century. We will try to explain the origin of these shifts which are related to a cluster of data: production and supply, imitation and competition with rock crystal, fashion for transparency and the glittering of light.
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KEYWORDS Raw glass, bluish or greenish colour, colourless glass, ancient glassworkers, glassblowing, Edict of the Maximum, tableware, architectural glass, engraved decoration, applied decoration, rock crystal, fashion for transparency, glittering of light. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƘƲ ƠƺƴƼuƲ ƧƸƥƯƣ ƶƷƫư ƥƴƺƥƭƿƷƫƷƥ ƥƳƿ Ʒƫư ƭƶƷƲƴƣƥ ƷƫƵ ƳƥƴƥƧƼƧƢƵ ƶƷƫư ƭƶƷƲƴƣƥ ƷƲƸ`ƧƲǀƶƷƲƸ ƘƲƥƮƥƷơƴƧƥƶƷƲ ƧƸƥƯƣ ƶƷƲƷơƯƲƵƷƫƵƳƴƼƷƲƧƩưƲǀƵ ƹƠƶƫƵƳƥƴƥƧƼƧƢƵ ƳƥƴƲƸƶƭƠƪƩƭ ơưƥƧƥƯƥƪƼƳƿ Ƣ ƳƴƠƶƭưƲƺƴƼuƥƷƭƶuƿ ƳƲƸƲƹƩƣƯƩƷƥƭƶƷƭƵƥƮƥƬƥƴƶƣƩƵƳƲƸƳƩƴƭơƺƲưƷƥƭƶƷƫưƠuuƲƳƲƸƺƴƫƶƭuƲƳƲƭƩƣƷƥƭ ƈƭƥƷƫưƳƥƴƥƧƼƧƢƠƺƴƼuƲƸƧƸƥƯƭƲǀ ƲƭƥƴƺƥƣƲƭƮƥƷơƹƩƸƧƥưƶƷƲưƥƳƲƺƴƼuƥƷƭƶuƿuƩƷƫƦƲƢƬƩƭƥƷƲƸ uƥƧƧƥưƣƲƸƢƷƲƸƥưƷƭuƲưƣƲƸƢƨƭƠƯƩƧƥưƳƲƯǀƮƥƬƥƴƢƠuuƲƆưƠuƩƶƥƶƷƲƨƩǀƷƩƴƲuƭƶƿƷƫƵƨƩǀƷƩƴƫƵ ƺƭƯƭƩƷƣƥƵ Ƴƛ Ʈƥƭ ƶƷƲư Ʋ ƥƭ uƛ ƷƲ ƠƺƴƼuƲ ƧƸƥƯƣ ƺƴƫƶƭuƲƳƲƭƩƣƷƥƭ ƶƳƲƴƥƨƭƮƠ ƮƥƬǁƵ ƮƸƴƭƥƴƺƩƣ ƫƳƴƲƷƣuƫƶƫƧƭƥƷƥơưƷƲưƥƺƴǁuƥƷƥƷƿƶƲƶƷƫưƮƯƥƶƭƮƢƮƥƭƩƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƩƳƲƺƢ ƿƶƲƮƥƭƶƷƫưƥƴƺƢ ƷƫƵ ƴƼuƥƽƮƢƵ ƥƸƷƲƮƴƥƷƲƴƭƮƢƵ ƩƳƲƺƢƵ uƩƷƠ Ʒƫư ƩƹƩǀƴƩƶƫ ƷƲƸ ƹƸƶƫƷƲǀ ƧƸƥƯƭƲǀ ƗƷƲ ƷƩƯƩƸƷƥƣƲ ƷƴƣƷƲ ƷƲƸ ƲƸ` ƥƭ uƛ ƳƥƴƥƷƫƴƩƣƷƥƭ uƭƥ ƥưƷƭƶƷƴƲƹƢ ƷƫƵ ƷƠƶƫƵ ƥƸƷƢƵ Ʈƥƭ ƷƲ ƠƺƴƼuƲ ƧƸƥƯƣ ƧƣưƩƷƥƭ ƳƲƯǀƷƭuƲƸƯƭƮƿƧƭƥƨǀƲƥƭǁưƩƵ ƿƳƼƵuƥƴƷƸƴƩƣƷƲƨƭƠƷƥƧuƥƷƲƸƑƠƱƭuƲƸƛƴƫƶƭuƲƳƲƭƩƣƷƥƭƷƿƶƲƧƭƥ ƩƳƭƷƴƥƳơƪƭƥ ƶƮƩǀƫ ƿƶƲ Ʈƥƭ Ƨƭƥ Ʒƫư ƮƥƷƥƶƮƩƸƢ ƥƴƺƭƷƩƮƷƲưƭƮƲǀ ƧƸƥƯƭƲǀ Ʈƥƭ ƹƥƣưƩƷƥƭ ƿƷƭ ƥƳƲƷƩƯƩƣ ƭƨƥưƭƮƿ ƸƳƿƦƥƬƴƲ Ƨƭƥ ƮƲƣƯƲ Ʈƥƭ ơƱƩƴƧƲ ƶƮƠƯƭƶuƥ ƮƥƬǁƵ Ʈƥƭ Ƨƭƥ ƩƳƣƬƩƷƲ ƨƭƠƮƲƶuƲ ƳƲƸ ƢƷƥư Ʈƥƭ ƥƸƷƿƵƠƺƴƼuƲƵ ƢƳƲƯǀƺƴƼuƲƵƌƺƴƢƶƫƷƲƸƠƺƴƼuƲƸƧƸƥƯƭƲǀƳƩƴƭƲƴƣƪƩƷƥƭƶƷƲưƲƥƭ ƩưǁƹƥƣưƩƷƥƭ ưƥƩƧƮƥƷƥƯƩƣƳƩƷƥƭƮƥƷƠƷƫƨƭƠƴƮƩƭƥƷƲƸƲƸƥƭuƛƊƳƭƺƩƭƴƲǀuƩƩƨǁưƥƩƱƫƧƢƶƲƸuƩƷƫưƥƭƷƣƥƷƼư uƩƧƠƯƼư ƥƸƷǁư ƥƯƯƥƧǁư ƳƲƸ ƲƹƩƣƯƲưƷƥƭ ƶƩ ơưƥ ƶǀưƲƯƲ ƳƥƴƥƧƿưƷƼư ƳƲƸ ƶƸưƨƸƠƪƲƸư ƳƥƴƥƧƼƧƢ ƮƥƭƳƴƲuƢƬƩƭƥ ƥƳƲuƣuƫƶƫƮƥƭƥưƷƥƧƼưƭƶuƿuƩƷƫưƲƴƩƣƥƮƴǀƶƷƥƯƯƲ ƳƴƲƷƣuƫƶƫƧƭƥƨƭƥƹƠưƩƭƥƮƥƭ ƥưƷƥưƠƮƯƥƶƫƷƲƸƹƼƷƿƵ ƐƊƓƊƎƗƏƐƊƎƉƎƆ ƆƮƥƷơƴƧƥƶƷƲ ƧƸƥƯƣ ƧƥƯƥƪƼƳƿ ƳƴƠƶƭưƲ ƠƺƴƼuƲ ƧƸƥƯƣ ƥƳƲƺƴƼuƥƷƭƶuƿƵ ƥƴƺƥƣƲƭƸƥƯƲƸƴƧƲƣ ƹƸƶƫƷƿƧƸƥƯƣ ƨƭƠƷƥƧuƥƷƲƸƑƠƱƭuƲƸ ƩƳƭƷƴƥƳơƪƭƥƶƮƩǀƫ ƥƴƺƭƷƩƮƷƲưƭƮƿƧƸƥƯƣ ƮƲƣƯƲƶƮƠƯƭƶuƥ ơƱƩƴƧƲƶƮƠƯƭƶuƥ ƩƳƣƬƩƷƲƵƨƭƠƮƲƶuƲƵ ƲƴƩƣƥƮƴǀƶƷƥƯƯƲƵ ƨƭƥƹƠưƩƭƥ ƥưƷƥưƠƮƯƥƶƫ ƷƲƸƹƼƷƿƵ
à propos de l’auteur M.-D. Nenna, directrice de recherche, USR 3141 du CNRS, Centre d’études alexandrines, Alexandrie, Égypte.
LE VERRE INCOLORE DANS L’ANTIQUITÉ : DE L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION À L’HISTOIRE DU GOÛT
Cette contribution consacrée au verre incolore dans l’Antiquité pourrait paraître incongrue dans un volume portant sur la couleur, mais nous essaierons de démontrer le contraire car d’un côté produire un verre incolore requiert des opérations particulières et, de l’autre, choisir un verre incolore pour sa vaisselle de table ou ses vitres est autant une affaire d’offre que de demande, de moyens que de goûts. Depuis une vingtaine d’années, l’étude du verre antique a fait des progrès considérables aussi bien dans le domaine des conditions de production, que dans celui des objets finis. On a en effet reconnu que les tâches de production se divisaient en deux étapes avec, d’un côté, les ateliers dits primaires qui produisent la matière brute à partir de deux composants principaux, le sable et le fondant – natron ou cendres végétales –, et de l’autre les ateliers dits secondaires qui refondent le verre brut pour en faire des objets. Jusque vers les années 30 av. J.-C., production du verre brut et production d’objets finis restent l’apanage de la partie orientale de la Méditerranée. Avec l’invention du verre soufflé, d’objet de luxe, le verre devient un matériau commun et la diffusion de la technique ellemême s’opère dans l’ensemble de l’Empire 1. Les analyses chimiques qui se sont fortement développées ces dernières années 2 ont permis d’un côté de montrer que, lorsqu’il s’agissait de rechercher la provenance d’un verre, il fallait remonter aux caractéristiques du sable employé, de l’autre qu’obtenir un verre incolore requérait des opérations supplémentaires. En effet, le verre issu d’un simple mélange de sable et de fondant, le natron principalement pour l’époque gréco-romaine, présente une coloration bleutée ou verte due aux impuretés apportées par l’oxyde ferreux ; ainsi dans les verres qui sont fabriqués avec le sable de la rivière Bélus, la concentration moyenne en oxyde de fer (compté en Fe2O3) est de 0,6 %, ce qui n’est pas très élevé, mais elle est de 1,1 % dans les verres du Wadi Natrun et de 1,7 % dans ceux de Maréotide.
1.
2.
Pour les nouveaux acquis dans la recherche sur le verre antique, voir E. M. Stern, « Glass Production », dans P. Oleson (éd.), Engineering and Technology in the Classical World (2008), p. 520-547 ; M.-D. Nenna, « Production et commerce du verre à l’époque impériale : nouvelles découvertes et problématiques », FACTA. A Journal of Roman Material Culture 1 (2007), p. 159-181 ; ead., « Nouveaux acquis sur la production et le commerce du verre antique entre Orient et Occident », dans H. Amrein, E. Deschler-Erb, S. Deschler-Erb (éds), Congrès International Crafts 2007, Artisanat et Société dans les provinces romaines (Zurich, 2007), Zeitschrift für Schweizerische Archäologie und Kunstgeschichte 65.1-2 (2008), p. 61-65. La recherche analytique sur le verre incolore a surtout porté sur des verres d’époque romaine, voir parmi d’autres C. M. Jackson, M. J. Baxter, H. E. M. Cool, « Identifying Group and Meaning, An Investigation of Roman Colourless Glass », dans D. Foy, M.-D. Nenna (éds), Échanges et commerce du verre dans le monde antique, Aix-en-Provence, Marseille (2001) (2003), p. 33-39 ; D. Foy, V. ThirionMerle, M. Vichy, « Contribution à l’étude des verres antiques décolorés à l’antimoine », Revue d’archéométrie 28 (2004), p. 169-177 ; M. J. Baxter, H. E. M. Cool, C. M. Jackson, « Further Studies in the Compositional Variability of Colourless Romano-British Vessel Glass », Archaeometry 47.1 (2005), p. 47-68 ; C. M. Jackson, « Making Colourless Glass in the Roman Period », Archaeometry 47.4 (2005), p. 763-780 ; S. Paynter, « Analyses of Colourless Glass from Binchester, County Durham », Journal of Archaeological Science 33 (2006), p. 1037-1057 ; V. Thirion-Merle, M. Vichy, « Annexe – Note sur la composition chimique des verres de l’épave des Embiez », RAN 40 (2007), p. 253-268.
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Le mélange vitrifiable doit être donc décoloré si l’on veut obtenir un verre incolore 3. Trois solutions ont été découvertes par les verriers antiques, ils ont pu : – Ajouter au mélange vitrifiable de l’antimoine, issu de la stibine : les verres incolores antiques présentent des concentrations allant de 0,5 à 2 %. À des taux d’environ 5 à 10 %, on obtient un blanc opaque avec les verres alcalins ; – Ajouter au mélange vitrifiable du manganèse : les verres incolores antiques présentent des concentrations allant de 0,3 à 1,7 %. À des taux entre 1 à 3 %, on obtient un verre violet ; – Choisir un sable contenant le moins de fer possible, ce qui, néanmoins, pose des problèmes au niveau de l’apport en agent stabilisant, autrement dit en calcium. L’évolution générale au cours du temps de ces deux décolorants présente une large domination de l’antimoine aux périodes les plus anciennes, et du manganèse aux périodes plus récentes, celui-ci étant pratiquement le seul représenté à partir du ve s. apr. J.-C. La décoloration du verre s’effectue dès les ateliers primaires, comme l’ont montré les découvertes du Wadi Natrun et de Maréotide 4 et le chargement de l’épave des Embiez 5. Les blocs de verre brut livrés dans les ateliers secondaires peuvent être mêlés à du verre recyclé, et l’on obtient donc parfois des résultats d’analyses témoignant de la présence conjointe d’antimoine et de manganèse. Ajoutons enfin que le verre dit incolore est souvent à l’œil teinté de violet, de vert ou de jaune, en raison de ses composantes et de son épaisseur.
LE VERRE
ASSYRIEN
Tout au long du IIe millénaire, le verre est aussi bien dans le monde mésopotamien que dans le monde égyptien ou égéen un substitut aux pierres semi-précieuses colorées, comme la turquoise, le lapis-lazuli ou le jaspe. La première floraison du verre incolore s’effectue dans le courant du viiie s. et au début du viie s. av. J.-C. dans le monde assyrien avec des pièces de vaisselle et des éléments d’incrustation 6. Cette apparition du verre incolore a pour corollaire la recherche de la translucidité et, degré supplémentaire, de la transparence. La présence du verre incolore est régulièrement mise en rapport avec une
3. 4.
5. 6.
M. Picon, « In vitro veritas », dans D. Foy, M.-D. Nenna, Tout feu, tout sable : mille ans de verre antique dans le Midi de la France, Exposition Marseille 2001 (2001), p. 21-33. M.-D. Nenna, M. Vichy, M. Picon, « Ateliers primaires et secondaires de verriers en Égypte à l’époque gréco-romaine », dans M.-D. Nenna (éd.), La route du verre : ateliers primaires et secondaires, Actes de la table ronde de 1997, Travaux de la Maison de l’Orient 33 (2000), p. 97-112 ; M.-D. Nenna, « Primary Glass Workshops in Graeco-Roman Egypt: Preliminary Report on the Excavations on the Site of Beni Salama (Wadi Natrun) », dans I. C. Freestone, J. Bailey, C. M. Jackson (éds), Glass in the Roman Empire, in Honour of Jennifer Price (2015), p. 1-22. S. D. Fontaine, D. Foy, « L’épave Ouest-Embiez 1, Var. Le commerce maritime du verre brut et manufacturé en Méditerranée occidentale dans l’Antiquité », RAN 40 (2007), p. 235-265. A. von Saldern, « Other Mesopotamian Glass Vessels (1500-600 B.C.) », dans Glass and Glassmaking in Ancient Mesopotamia (1970), p. 203-228 ; D. Barag, Catalogue of Western Asiatic Glass in the British Museum I (1985), p. 52-53.
LE VERRE INCOLORE DANS L’ANTIQUITÉ : DE L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION À L’HISTOIRE DU GOÛT
volonté d’imitation du cristal de roche, à cette époque, comme à des époques bien postérieures 7. Le site de Nimrud a ainsi livré, à côté de vases non décolorés en verre bleu-vert ou colorés en verre violet et bleu turquoise, une série de bols incolores, le plus souvent sans décor 8. Les analyses effectuées sur le mobilier de Nimrud attestent une composition aux cendres de plantes décolorée à l’aide d’antimoine 9. Cette production de luxe a essaimé vers l’Ouest, avec des exemples en Crète (Fortetsa) et en Italie 10, mais aussi vers le Sud avec un bol profond en verre incolore découvert à Abydos 11. À côté des vases de table, signalons toujours à Nimrud, l’emploi du verre incolore dans de petites appliques de meuble peintes de motifs égyptisants 12. Les centres de production de certaines catégories de vases ou d’éléments de parure qui partagent ce même goût pour la transparence et l’incolore sont discutés et certains plaident pour des ateliers régionaux, même si le très petit nombre d’objets conservés ne peut que pousser à laisser la question ouverte. Ainsi, deux exemples de bols à omphalos mis au jour à Gordion et datés de la première moitié du viiie s. av. J.-C. 13, l’un connu depuis longtemps, l’autre fragmentaire publié récemment, suscitent des questionnements. La coupe complète a été trouvée dans le tumulus P, brisée à la suite de la chute de la table sur laquelle elle reposait à l’intérieur d’une coupe en bronze. D’une épaisseur atteignant 1 cm par endroits, elle présente un décor de calice de pétales sur ses faces interne et externe. Le décor est obtenu par moulage pour la face externe, mais probablement retravaillé après moulage pour la paroi interne. En raison de la qualité exceptionnelle de son verre incolore, de sa forme à omphalos, et de sa décoration proche de celle de la vaisselle en bronze phrygienne, J. Duncan Jones s’interroge sur son lieu de production et y verrait volontiers un atelier local.
7.
8. 9.
10. 11. 12. 13.
M. Vickers, « Rock Crystal: The Key to Cut Glass and Diatreta in Persia and Rome », JRA 9 (1996), p. 48-65 ; E. M. Stern, « Glass and Rock Crystal: A Multifaceted Relationship », JRA 10 (1997), p. 192-206. A. von Saldern, « Appendix III: Glass », dans E. M. L. Mallowan, Nimrud and its Remains (1966), p. 623-634 ; D. Barag (n. 6), nos 26-33, 37-40. J. J. Orchard, R. H. Brill, « Some Miniature Painted Glass Plaques from Fort Shalmanaser, Nimrud Part I: Description and a Restoration; Part II: Laboratory Studies », Iraq 40 (1978), p. 1-39 ; pour des analyses récentes : W. Reade, I. C. Freestone, St. J. Simpson, « Innovation or Continuity? Early First Millenium BCE Glass in the Near East: The Cobalt Blue Glasses from Assyrian Nimrud », dans Annales du 16e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Londres (2003) (2005), p. 23-27 ; pour l’antimoine, communication de I. C. Freestone, 20 avril 2009. V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna, Les verres antiques du musée du Louvre I. Contenants à parfum en verre moulé sur noyau et vaisselle moulée, VII e siècle av. J.-C.-I er siècle apr. J.-C. (2000), no 195. V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna (n. 10), no 196. J. J. Orchard, R. H. Brill (n. 9) ; J. Curtis, « Glass Inlays and Nimrud Ivories », Iraq 61 (1999), p. 59-69. J. Duncan Jones, « Glass Vessels from Gordion: Trade and Influence along the Royal Road », dans L. Kealhofer (éd.), The Archaeology of Midas and the Phrygian: Recent Works at Gordion (2005), p. 101-116 ; ead., « Did the Phrygians Make Glass? Sources of Molded Glass at Iron Age and Hellenistic Gordion », dans Annales du 17e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Anvers (2006) (2009), p. 21-26.
215
216
MARIE-DOMINIQUE NENNA
On s’interroge aussi sur le lieu de production de palettes à cosmétique, dont un exemplaire provenant d’Égypte, conservé au Louvre 14, et un autre découvert sur l’acropole d’Amathonte 15 viennent d’être publiés récemment. Ces pièces appartiennent à une toute petite série (sept exemplaires connus au total) en verre moulé verdâtre, bleuté, vertjaune, bleu opaque, mais aussi incolore, produite entre le viiie s. et le vie s. av. J.-C. 16. Les palettes à cosmétique de ce type étaient réalisées le plus souvent en pierre – certaines étaient ornées d’éléments d’incrustation en verre 17, mais on connaît aussi quelques exemplaires en faïence. Parmi les pièces en verre, deux ont été mises au jour à Megiddo dans un contexte datant de la fin du viiie s. ou du viie s. av. J.-C., deux ont été achetées en Israël, la dernière (collection Ernesto Wolf ) a été acquise sur le marché de l’art. La palette découverte à Amathonte provient d’un contexte perturbé, mêlant des éléments de la fin de l’époque hellénistique et d’autres datant du moment du pillage du temple, qui ne peut donc fournir aucune indication chronologique fiable. L’origine de ces pièces est encore imprécise et on ne possède pas d’éléments qui permettent de trancher entre le Levant, où ces pièces semblent avoir été le plus souvent découvertes, et l’Assyrie. Enfin on s’interroge sur le lieu de production d’une série de perles sphériques incolores d’un verre de belle qualité, que l’on trouve depuis l’Italie jusqu’à l’Urartu. Elles sont particulièrement abondantes à Rhodes dans des contextes votifs et funéraires allant du viiie s. au début du vie s. av. J.-C. 18, plus de 3 500 exemplaires proviennent du dépôt votif du temple d’Athéna à Camiros 19. Leur lieu de production reste inconnu, mais on ne peut exclure qu’à côté de l’Assyrie, des centres de production aient vu le jour au Levant et peut-être à Rhodes.
14. 15. 16.
17. 18.
19.
V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna, Les verres antiques du musée du Louvre II. Vaisselle et contenants, du I er siècle au début du VIIe siècle apr. J.-C. (2005), p. 504, no Add. 10. M.-D. Nenna, « Contenants et vaisselle de verre », dans S. Fourrier, A. Hermary (éds), Le sanctuaire d’Aphrodite à Amathonte de l’époque archaïque à la fin du Ier siècle apr. J.-C. (2006), p. 142-143, no Ve1. D. Barag, « Cosmetic Glass Palettes from the Eighth-Seventh Centuries B.C. », JGS 24 (1982), p. 11-19 ; E. M. Stern, B. Schlick-Nolte, Early Glass of the Ancient World, 1600 B.C.-A.D. 50, Ernesto Wolf Collection (1994), no 23. D. Barag, « Glass Inlays in Phoenician Ivories Glass and Stone Vessels », dans Annales du 12e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Vienne (1991) (1993), p. 1-9. P. Triantafyllidis, « The Art and the Craft of Glass in South-East Aegean », dans G. Kordas (éd.), First International Conference Hyalos, Vitrum, Glass, History, Technology and Conservation of Glass and Vitreous Materials in the Hellenic World, Rhodes (2001) (2002), p. 25-26 ; id., « ,ǀƥưƲƵ ƐƣƬƲƵƛƸƷƢ ƃƥƯƲƵƮƥƭ 7JUSVNƥƳƿƷƫưƏƼƮƥƭƷƫƖƿƨƲ », dans ƛƠƴƭƵƛƥƣƴƩƑƩƯơƷƩƵƶƷƫƑưƢuƫƷƫƵƛƠƴƫƵƏƠưƷƪƭƥ 1 (2004), p. 164-165. Une partie est conservée au British Museum : M. Spaer, Ancient Glass in the Israel Museum: Beads and Other Small Objects (2001), p. 62, nos 40-42, fig. 34 ; ead., « Some Ubiquitous Glass Ornaments of the Early Centuries of the First Millenium BC », dans G. Kordas (supra), p. 58-59 ; d’autres ont été mises au jour lors des fouilles italiennes, G. Jacopi, « La stipe votiva », Clara Rhodos VI (1933), p. 333-343, fig. 68-79.
LE VERRE INCOLORE DANS L’ANTIQUITÉ : DE L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION À L’HISTOIRE DU GOÛT
VERRES
DE STYLE DIT ACHÉMÉNIDE ET VERRES MACÉDONIENS ET RHODIENS
Entre le viie s. et le deuxième quart du ive s. av. J.-C., on ne dispose pas de pièces de vaisselle assez bien datées pour attester la continuité de la production de vaisselle, en revanche, les éléments de parure, comme les intailles en verre scaraboïdes qui apparaissent dans la seconde moitié du ve s. av. J.-C. 20, ou les éléments de décor des statues chryséléphantines d’Olympie et d’Élée en verre incolore décolorés à l’antimoine 21, témoignent de la continuité d’un apport en matière brute incolore dans le monde égéen. Les études minutieuses de D. Ignatiadou 22 ont montré que la renaissance de la vaisselle en verre incolore se fait au plus tôt dans le deuxième quart du ive s. av. J.-C. et que ses témoins les plus anciens en sont le mobilier funéraire en verre de Mausole et d’Artémise morts respectivement en 353 et 351 av. J.-C. À partir du matériel très fragmentaire, il a été possible d’identifier au moins huit vases aux formes et au décor d’inspiration métallique 23 : deux gobelets en calice, quatre gobelets coniques, une situle à protomé d’animal et un bol. Les analyses chimiques montrent qu’il s’agit d’un verre au natron décoloré à l’antimoine 24. Le centre de production de cette vaisselle reste inconnu. Mais deux foyers de production semblent se développer dans la seconde moitié du ive s. av. J.-C., l’un en Macédoine et l’autre à Rhodes. L’atelier macédonien fournit les tombes royales et princières, et plus largement les tombes dites riches de formes de vases ouverts assez variées, skyphos, bols à bord droit ou évasé à décor de calice végétal, coupelles à couvercle concave 25. Il emploie du verre incolore, décoloré à l’antimoine comme l’ont montré les analyses effectuées sur les verres de Vergina 26 et de Pydna 27, et développe des décors peints et des décors à l’or et à l’argent aussi bien pour les vases que pour les éléments d’incrustation de meubles et d’armes d’apparat. 20. 21.
22.
23. 24.
25.
26. 27.
G. Platz-Horster, « Herstellung und Wert von Glas-Skarabäoiden », dans Annales du 14 e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Venise-Milan (1998) (2000), p. 25-29. W. Schiering, Die Werkstatt des Pheidias in Olympia II. Werkstattfunde, Olympische Forschungen XVIII (1991) ; R. H. Brill, « Laboratory Studies of Some Glass from Vergina », JGS 36 (1994), p. 11-23, 16-18, tabl. 3. D. Ignatiadou, « Catalogue Raisonné of Finds from the Cavity in the Tomb Chamber of Maussollos and the Tomb-Robbers’ Mine, Part 2, Glass Vessels », dans J. Zahle, K. Kjeldsen, The Maussolleion of Halikarnassus 6. Subterranean and Pre-Maussollan Structures on the Site of the Maussolleion (2004), p. 181-201. M. Vickers (n. 7) voit dans ce que l’on a coutume d’appeler la vaisselle achéménide des imitations des vases en cristal, tandis que E. M. Stern (n. 7) met en évidence une inspiration métallique. J. A. Stratis, E. Mirtsou, « Catalogue raisonné of Finds from the Cavity in the Tomb Chamber of Maussollos and the Tomb-Robbers’Mine, Part 2. Chemical Analysis of the Colourless Glass Vessels from the Mausolleion of Halikarnassos », dans J. Zahle, K. Kjeldsen (n. 22), p. 201-202. Voir D. Ignatiadou, « Colorless Glass in Late Classical and Early Hellenistic Macedonia », JGS 44 (2002), p. 11-24 et la communication de D. Ignatiadou à ce colloque et depuis ead., Hyalos. Colourless Glass for the Élite in Ancient Macedonia, Archaiologiko Institouto Makedonikon kai Thrakikon Spoudon 13 (2013). R. H. Brill (n. 21), p. 11-23. D. Ignatiadou, « Three Cast Vessels from a Macedonian Tomb at Pydna », dans Annales du 14e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Venise-Milan (1998) (2000), p. 35-38.
217
218
MARIE-DOMINIQUE NENNA
L’atelier rhodien a recours au verre incolore et au verre bleu-vert non décoloré pour réaliser entre le deuxième tiers du ive s. et le début du iie s. av. J.-C. des bols hémisphériques profonds ou peu profonds et des coupes basses à décor de calice végétal, ainsi que des assiettes de différents types, coupelle convexe et alabastre sans décor 28. Les analyses chimiques montrent qu’il s’agit, pour les pièces incolores, d’un verre au natron décoloré à l’antimoine 29. Dans les deux cas, l’origine de la matière brute elle-même est encore inconnue.
VERRES
DE L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE
Les verreries de la fin du iiie s.-début du iie s., appartenant au groupe dit de Canosa 30, sont, elles aussi, faites essentiellement en verre incolore, même si l’on note quelques pièces en verre bleu foncé ou vert. On y rencontre des formes diverses de vases à boire : cratère, skyphos, bol conique à fond convexe ou aplati, bol hémisphérique profond ou peu profond à bord évasé, ainsi que quelques vases à servir : assiette à bord droit ou évasé, coupelle carrée. L’emploi du décor à l’or se poursuit avec des peintures à l’or, mais aussi des vases où des feuilles d’or découpées en motifs géométriques, végétaux et figurés sont insérées entre deux parois de verre. Associées à ce groupe, on trouve des bagues entièrement réalisées en verre incolore, parfois décorées à l’or, et par opposition quelques-unes en verre bleu foncé, seconde couleur en ordre d’apparition dans ce groupe, mais bien derrière le verre incolore 31. C’est à cette époque que se développe pour la première fois dans la vaisselle de table le goût pour la polychromie et l’opacité, avec les vases en verre mosaïqué et reticelli, façonnés à partir d’éléments préfabriqués. Ce goût pour la polychromie va se maintenir pendant toute la période hellénistique et trouver une splendide et abondante floraison dans la Rome augustéenne 32. Depuis le viiie s. av. J.-C. jusqu’à cette époque, la vaisselle de verre est un produit de luxe dont les attestations ne dépassent guère la centaine pour chacun des groupes. Les contenants à huile parfumée, à l’exception de quelques alabastres, sont des vases polychromes, aux couleurs opacifiées par le bas niveau de fusion du verre brut qui ne dévoilent en rien la couleur de leur contenu. À ma connaissance, aucune analyse n’a été effectuée sur le groupe de Canosa, mais le verre
28. 29. 30.
31.
32.
P. Triantafyllidis, ƖƲƨƭƥƮƢƙƥƯƲƸƴƧƣƥ I (2000). Ibid., p. 106-115, 200. On ne dispose pas de synthèse récente sur ce groupe, pour de premières indications, voir V. ArveillerDulong, M.-D. Nenna (n. 10), p. 174-178. Pour un état des lieux récent sur l’étude de la verrerie hellénistique, voir M.-D. Nenna, Topoi 18 (2013), p. 639-650. M.-D. Nenna, « Le mobilier en verre », dans M.-D. Nenna, J.-Y. Empereur (éds), Nécropolis 1, Études Alexandrines 5 (2001), p. 505-507 avec des compléments dans V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna, Les verres antiques du musée du Louvre III. Éléments de parure, éléments d’incrustation et instruments en verre, VIIe siècle av. J.-C.-VIIe siècle apr. J.-C. (2011), p. 246-247. La collection Gorga constituée à la fin du xixe s. en offre un exemple des plus démonstratifs, voir A. Petrianni, Collezione Gorga. Vetri I. Il vasellame a matrice della prima età imperiale (2003) : 14 852 fragments répertoriés (ca 31 av. J.-C.-ca 40 apr. J.-C.) par rapport aux ca 300 d’époque hellénistique.
LE VERRE INCOLORE DANS L’ANTIQUITÉ : DE L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION À L’HISTOIRE DU GOÛT
incolore employé à la même époque dans l’atelier des perles de Rhodes 33 (dépotoir du terrain Kakoula) est décoloré à l’antimoine 34. Dans la seconde moitié du iie s. av. J.-C., on constate un accroissement notable de la production de vaisselle de verre, dont témoignent les découvertes levantines de Maresha (200 individus) 35 et de Tell Anafa (500 individus) 36 et du monde égéen, notamment à Délos (700 individus) 37 et à Cos (236 individus) 38. Il s’agit de bols coniques, ovoïdes, hémisphériques profonds ou peu profonds, le plus souvent à fond convexe ; ils sont pourvus d’un simple décor de rainures ou, plus rarement, d’un décor taillé plus élaboré (cannelures, calice végétal). Quelques formes rares sont à signaler comme les coupelles, les assiettes, les pyxides, les skyphos et les cratères, et c’est à cette époque qu’apparaissent des formes fermées, particulièrement difficiles à réaliser par moulage (lagynos, amphores). Le site de Maresha est détruit et abandonné en 112 ou 108 av. J.-C. ; le mobilier de Délos décompté ici appartient aux niveaux d’occupation antérieurs à 69 av. J.-C. ; le dépotoir de Cos est daté entre la fin du iie s. et le troisième quart du ier s. av. J.-C. On est peut-être là entre Maresha et Délos-Cos à un moment de transition qui est marqué d’un côté par l’apparition de couleurs rares dans la vaisselle comme les rouges et bleus opaques, de l’autre par la montée en puissance des couleurs bleu clair, ambre et vertes au détriment du verre incolore (tabl. 1). La décoloration au manganèse 39 est présente à cette époque, comme le montrent les analyses effectuées sur le matériel délien 40 et aussi les veines violettes qui apparaissent sur certains objets dont la coloration en violet ou la décoloration a été imparfaite. L’apparition du manganèse n’exclut pas pour autant l’utilisation de l’antimoine, comme le montrent d’autres analyses 41 et parfois même l’utilisation conjuguée des deux décolorants.
33. 34. 35.
36.
37. 38. 39. 40. 41.
Gl. Davidson Weinberg, « Glass Manufacture in Hellenistic Rhodes », ArchDelt Meletai 24 (1969), p. 144-151. R. H. Brill (n. 21), p. 16-18, tabl. 3 ; id., Chemical Analyses of Early Glasses 2. The Table Analyses (1999), sections IV B. R. Jackson-Tal, « A Preliminary Survey of the Late Hellenistic Glass from Maresha (Marisa), Israel », dans Annales du 16e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Londres (2003) (2005), p. 49-53. D. Grose, « Glass », dans A. M. Berlin, Sh. C. Herbert (éds), Tell Anafa II, ii. Glass Vessels, Lamps, Objects of Metal and Groundstone and Other Stone Tools and Vessels, Kelsey Museum Fieldwork Series (2012), p. 1-99. M.-D. Nenna, Les verres, EAD 33 (1999). P. Triantafyllidis, « Late Hellenistic Glass from Kos, Dodecanese, Greece », JGS 48 (2006), p. 145-161. M. Vichy, M. Picon, V. Thirion-Merle, « Le manganèse comme impureté, décolorant ou colorant des verres au natron », Bulletin de l’Association française pour l’archéologie du verre 2002-2003, p. 15-16. E. Mirtsou, M. Kessissoglou, « Analyse des verres découverts à Délos », dans M.-D. Nenna (n. 37), p. 206-212. D. Foy, V. Thirion-Merle, M. Vichy (n. 2), p. 170-172, no VR511 (skyphos) et 661 (bol à décor végétal).
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Couleurs
Maresha
Délos
Cos
Marron
6%
28 %
26 %
Incolore
53 %
25 %
36 %*
Vert
23,50 %
19,70 %
17,40 %
Jaune
13,50 %
10 %
4%
Bleu clair
2%
6,60 %
10 %
Bleu opaque
0%
4,50 %
0,10 %
Violet
1,50 %
1,70 %
0,20 %
Bleu foncé
0%
0,60 %
0,10 %
Rouge opaque
0%
0,30 %
0,10 %
Vert émeraude
0%
0%
0,10 %
* Comprend 30 % de pièces qualifiées de « colourless with yellow or green tints »
Tabl. 1 — Comparaison des couleurs employées dans la vaisselle de verre de Maresha, de Délos et de Cos. LA
FIN DE L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE ET L’ÉPOQUE AUGUSTÉENNE
La montée en puissance de l’ambre et du vert olive est attribuée par certains à la volonté d’imiter la vaisselle métallique 42 ; elle a probablement aussi à voir avec la découverte d’un procédé de cuisson qui permet d’obtenir sans ajout un verre ambre dont la coloration résulte de la formation en milieu réducteur de polysulfures, principalement alcalins 43. Elle continue à se manifester dans les couleurs choisies pour une nouvelle catégorie de vases à boire, les bols à côtes travaillées, qui apparaissent au Levant, à l’extrême fin du iie s. av. J.-C. et sont diffusés plus largement dans le deuxième quart du ier s. av. J.-C. À Délos 44, tous ses représentants, une cinquantaine d’objets, sont dans un verre variant entre l’ambre et le vert avec différentes teintes de vert-jaune. On ferait la même constatation sur le mobilier découvert à Beyrouth (chantier Bey 002) dans un contexte d’atelier de verrier 45 du milieu du ier s. av. J.-C., dans le mobilier découvert à Jérusalem 46, ou encore dans la cargaison de l’épave de la Tradelière 47. Cette domination du verre ambre se rencontre aussi dans une catégorie de verre contemporaine, les linear cut, nouvelle 42.
43. 44. 45. 46.
47.
M. O’Hea, « Late Hellenistic Glass from Some Military and Civilian Sites in the Levant, Jebel Khalid, Pella and Jerusalem », dans Annales du 16e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Londres (2003) (2005), p. 44-48. M. Picon (n. 3), p. 28. M.-D. Nenna (n. 37), p. 103-107. D. Foy, « Une production de bols moulés à Beyrouth à la fin de l’époque hellénistique et le commerce de ces verres en Méditerranée occidentale », JGS 47 (2005), p. 11-35, en particulier 21-23. Y. Gorin-Rosen, « Glass Vessels from Area A, Addendum, Glass Vessels from Areas W and X-2 », dans H. Geva, Jewish Quarter Excavations in the Old City of Jerusalem Conducted by N. Avigad II. The Finds from Areas A, W, and X-2 (2003), p. 378-379 ; ead., « Glass Vessels », dans H. Geva, Jewish Quarter Excavations in the Old City of Jerusalem III. Area E and Other Studies (2006), p. 246-248. D. Foy, M.-D. Nenna (n. 3), p. 105.
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LE VERRE INCOLORE DANS L’ANTIQUITÉ : DE L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION À L’HISTOIRE DU GOÛT
VASES “LINEAR-CUT”
Séries 1
1200 1000 800 600 400 200
v vio iol let et bl cla eu ir pa o bl n eu b t bl leu é eu ci p el bl étro e bl u le eu fo tu nc rq é uo is am e br e jau ne jau gr ne is ve ver ve rt-b t rt leu in te v ve ert nse rt p ém ao er n a ve ude to rt c ns la in de ir co v lo in re inc ert co te o lo in lor in re te té v e co in iol in lore té ja et co te u lo in ne re té tei gr nt is év er t
0
Tabl. 2 — Répartition des couleurs dans les bols linear cut à partir de l’échantillonnage de la collection Gorga.
génération des bols moulés monochromes à décor de rainures qui s’inscrit encore dans la tradition hellénistique, mais connaît une plus ample diffusion vers la Méditerranée occidentale 48. Le verre incolore est réduit à la portion incongrue : il ne représente dans l’échantillonnage de la collection Gorga 49 que 127 objets sur 2 506, soit 5 % du total (tabl. 2). Si l’on continue à suivre la piste du verre incolore à l’époque augustéenne en se servant des données provenant des décomptes que l’on peut faire sur la collection Gorga, avec des productions qui sont désormais proprement italiennes, on constate un nouveau changement de goût dans la vaisselle moulée qui imite des formes attestées dans la vaisselle métallique ou céramique (coupelles et assiettes à panse carénée, plateau). Il fait écho aux dires de Strabon : « Et en effet à Rome il s’invente chaque jour, paraît-il, de nouvelles compositions, de nouveaux procédés, pour colorer le verre et pour simplifier la fabrication. » Les mêmes formes de vases sont fabriquées en verre polychrome, en verre opaque et en verre translucide. Dans la gamme de couleurs en verre translucide, on note toujours une faible présence du verre incolore, 115 objets sur 2 886, soit 3,9 %, mais aussi plus généralement, le développement de verres de couleurs vives, peu répandues jusque-là, telles le bleu foncé, les bleu vert paon, le bleu turquoise et le vert émeraude. Ce pourcentage s’abaisse à 1,77 % si l’on fait un décompte en intégrant les verres opaques 48. 49.
D. Foy (n. 45), p. 24-32 ; S. Jennings, Vessel Glass from Beirut (BEY 006, 007 and 045), Berytus 48-49 (2004-2005), p. 42-47. A. Petrianni (n. 32), p. 44-45, tabl. 5.
v vio iol let et bl cla eu ir pa o bl n eu b t bl leu é eu ci p el b étr bl leu ole eu fo tu nc rq é uo is am e br e jau ne jau gr ne is ve ver ve rt-b t rt leu in te ve vert nse rt p ém ao er n a ve ude to rt c ns la in de ir co v lo in re inc ert co te o lo in lor in re te té v e co in iol in lore té ja et co te u lo in ne re té tei gr nt is év er t
vio viol le et bl t cl eu air pa o bl n bl euté bl eu eu c pé iel bl bleu trol eu f e tu onc rq é uo i am se br jau e ne jau g ne ris ve -ver ve rt-b t rt le in u t v ve er ense rt t p ém ao er n ve aud to rt c e ns la in co de ir in lore in ver co te co t lo in l in re t té ore co ein vio in lore té let co t ja lo ein un re té e t ve ver ein gris rre res té s p op ver ol aq t yc u hr es om es
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MARIE-DOMINIQUE NENNA
COULEURS DE LA VAISSELLE IMITANT LES FORMES CÉRAMIQUES ET MÉTALLIQUES
2500
COUPES CÔTELÉES
Séries 1
2000
1500
1000
500
0
Tabl. 3 — Répartition des couleurs dans la vaisselle moulée augustéenne à partir de l’échantillonnage de la collection Gorga.
4500
Séries 1
4000
3500
3000
2500
2000
1500
1000
500
0
Tabl. 4 — Répartition des couleurs dans les bols côtelés à côtes régulières à partir de l’échantillonnage de la collection Gorga.
LE VERRE INCOLORE DANS L’ANTIQUITÉ : DE L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION À L’HISTOIRE DU GOÛT
et les verres polychromes (tabl. 3) 50. L’accroissement des verres bleu clair et vert-bleu, le recours donc à un verre non décoloré, se poursuit dans la catégorie des coupes à côtes régulières qui ont une durée de vie plus longue jusqu’à la fin du ier s. apr. J.-C. Le verre incolore est toujours faiblement présent dans le groupe en verre translucide : 216 objets sur 9 045, soit, 2,4 % (tabl. 4) 51.
LES
DÉBUTS DU VERRE SOUFFLÉ
On ferait les mêmes constatations à partir des découvertes effectuées dans des contextes d’ateliers, où l’on soufflait le verre dans la seconde moitié du ier s. apr. J.-C., à Lyon et à Avenches. La pesée des fragments de verre brut provenant de trois dépotoirs de l’atelier de Lyon 52 et d’un dépotoir d’Avenches 53 donne les résultats suivants (tabl. 5) : le verre incolore en est pratiquement absent, mais les couleurs vives sont bien présentes. La couleur vive représente alors certainement un plus, par rapport à l’usage plus commun du verre bleu-vert. Le verre incolore employé à cette époque est décoloré par l’adjonction de manganèse 54. Cette configuration semble correspondre à un goût italien qui s’étend dans les provinces occidentales 55 et dans le monde égéen 56, mais qui ne semble adopté ni au Proche-Orient ni en Égypte. On dispose, il est vrai, d’assez peu de contextes datés du milieu du ier s. apr. J.-C. dans ces régions, mais il semble bien que le goût pour les couleurs vives en soit absent et que les verriers proche-orientaux 57 se soient cantonnés dans des verres bleutés non décolorés. En Égypte, en revanche, les productions se partagent volontiers entre verre incolore réservé à la gobeleterie et au flaconnage de luxe, tandis que les vases plus communs sont en verre bleu-vert 58. 50. 51. 52.
53. 54. 55. 56. 57.
58.
A. Petrianni (n. 32), p. 53-89 décompte sur les tabl. 23 à 132. Ibid., p. 49, tabl. 12. S. Motte, S. Martin, « L’atelier de verrier antique de la Montée de la Butte à Lyon et ses productions », dans D. Foy, M.-D. Nenna (éds), Échanges et commerce du verre dans le monde antique, Aix-en-Provence, Marseille (2001) (2003), p. 310-312. H. Amrein, L’atelier de verriers d’Avenches. L’artisanat du verre au milieu du Ier siècle apr. J.-C., Aventicum XI (2001), p. 17-18. M.-D. Nenna, M. Vichy, M. Picon, « L’atelier de verrier de Lyon du ier siècle après J.-C. et l’origine des verres “romains” », Revue d’Archéométrie 21 (1997), p. 81-87. Voir par exemple les verres de la nécropole de Saint-Paul-Trois-Châteaux, D. Foy, M.-D. Nenna (n. 3), p. 124-125. Voir par exemple V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna (n. 14), p. 270-289 et pl. en couleur. Y. Gorin-Rosen (n. 46, 2003), p. 370-373 (Jérusalem) ; S. Jennings (n. 48), p. 244-251 ; R. E. Jackson-Tal, « Early Roman Glass in Context: Gamla (Gamala) Destruction of 67 AD », dans Annales du 17e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Anvers (2006) (2009), p. 157-162, site de Gamla détruit en 67 apr. J.-C. et non réoccupé, en attendant la publication des verres de Masada. C. Meyer, Glass from Quseir al Qadim and the Indian Ocean Trade (1992), p. 15-42 ; M.-D. Nenna, « Ateliers de production et sites de consommation en Égypte, ve s. av. J.-C.-viie s. apr. J.-C. », dans Annales du 14e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Venise-Milan (1998) (2000), p. 20-24.
223
224
MARIE-DOMINIQUE NENNA
Couleur
Lyon Poids verre brut
Avenches Poids verre brut
bleuté
32,20 %
35,50 %
bleu foncé
17,80 %
32 %
jaune/ambre
16,20 %
18,51 %
bleu turquoise
3,20 %
0,70 %
vert
9,50 %
6,60 %
vert émeraude violet
7,35 % 13,44 %
bleu opaque blanc opaque
À
Tabl. 5 — Répartition des couleurs des blocs de verre brut des ateliers d’Avenches et de Lyon.
5,50 % 1% 0,95 %
PARTIR DE L’ÉPOQUE FLAVIENNE
Néanmoins, à la fin du ier s. apr. J.-C., aussi bien en Occident 59 qu’en Orient 60, on constate une unification des goûts et une disparition des couleurs vives. Le partage se fait désormais entre verre bleu-vert et verre incolore. Le verre incolore est réservé à la vaisselle de table et apparaissent des pièces ouvragées comme les gobelets taillés à facettes, qui se rencontrent dans toutes les provinces de l’Empire, et jusqu’en Afghanistan comme en témoigne le trésor de Begram 61. Il va être jusqu’à la fin du ive s. apr. J.-C. le support dominant des vases décorés à froid, taillés en haut-relief ou en creux 62. Cela est vrai aussi des verres peints, qui, après avoir eu jusqu’en 70 apr. J.-C. des supports souvent bleu foncé ou vert émeraude 63, vont être préférentiellement en verre incolore 64. Mais au-delà de ces pièces de luxe produites en quelques points de l’Empire et voyageant à longue distance, auxquelles on pourrait ajouter les verres à décor appliqué élaboré, qui, pour 59.
60.
61. 62. 63. 64.
Ce fait est bien attesté depuis longtemps à partir des fouilles de contextes funéraires et de contextes d’habitat, voir par exemple H. E. M. Cool, J. Price, Roman Vessel Glass from Excavations at Colchester 1971-1985, Colchester Archaeological Reports 8 (1995). On ne dispose de contextes d’habitat bien datés pour le Proche-Orient que depuis peu pour cette période, voir N. Katsnelson, « Early Roman Glass from Judea−Locally Produced Glass? A Preliminary Report », dans Annales du 17e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Anvers (2006) (2009), p. 163-169, pour le mobilier du site de Shu’fat près de Jérusalem datant entre 70 et 135 apr. J.-C., ou D. Keller, Petra Ez Zantur III. Ergebnisse der Schweizerisch-Liechtensteinischen Ausgrabungen I. Die Gläser aus Petra (2006), p. 42-50 ; pour les contextes funéraires, voir V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna (n. 14), p. 182, n. 2. M.-D. Nenna, « Verres gravés d’Égypte du ier au ve siècle apr. J.-C. », dans D. Foy, M.-D. Nenna (n. 52), p. 359-360. Ibid., p. 359-375. M.-D. Nenna, « Un bol en verre peint du ier siècle après J.-C. à représentation nilotique », JGS 50 (2008), p. 15-29. M.-D. Nenna, « De Douch (oasis de Kharga) à Grand (Vosges) : un disque en verre peint à représentations astrologiques », BIFAO 103 (2003), p. 355-376.
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LE VERRE INCOLORE DANS L’ANTIQUITÉ : DE L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION À L’HISTOIRE DU GOÛT
certains, s’ornent de couleurs vives 65, le verre incolore s’impose aussi dans une vaisselle plus simple. Un des meilleurs témoins en est la cargaison de l’épave des Embiez de la fin du iie s.-début du iiie s. qui réunit verre brut, verre à vitre en calotte et plat, et bols et gobelets, tous incolores 66. La répartition que l’on constate à partir du matériel archéologique entre verre bleu-vert et verre incolore et le prix plus coûteux de ce dernier est établi par l’édit du Maximum de Dioclétien daté de 301 apr. J.-C., aussi bien pour le verre brut, que pour les vases sans décor et les verres à vitre, tous vendus au poids 67. Les vases décorés semblent, eux, avoir été vendus à la pièce. POUR LE VERRE Verre alexandrin, la livre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Verre de Judée verdâtre, la livre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Coupes et vases sans décor en verre alexandrin, la livre . . . . . . . . . . . Coupes et vases sans décor en verre de Judée, la livre . . . . . . . . . . . . Verre à vitre, première qualité, la livre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Verre à vitre, seconde qualité, la livre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
24 deniers 13 deniers 30 deniers 20 deniers 8 deniers 6 deniers
Le basculement, à la fin du ier s. apr. J.-C., peut être mis en partie au compte de l’histoire de la technique elle-même. De fait, les contemporains de ce changement l’ont eux-mêmes noté. Ainsi Pline, dans le passage qu’il consacre au verre (Histoire naturelle XXXVI 194) oppose les ateliers de Sidon, jadis glorieux, à la nouvelle manière de procéder qui permet d’obtenir un verre pur et incolore (vitrum purum ac massa vitri candidi). Il ajoute, plus loin (XXXVI 199), que « le plus estimé est le verre incolore et transparent, parce qu’il ressemble le plus au cristal ». Il note aussi la ressemblance entre le verre de son époque et le cristal (XXXVII 29) : « Présentement on fait des vases de verre qui ressemblent merveilleusement au cristal ; et néanmoins, chose étonnante, le cristal, loin de diminuer de prix, a augmenté ». Écho aussi de ce changement de goût, les épigrammes de Martial 68. Même si le verre incolore était rare sans être absent à l’époque augustéenne et dans la première moitié du ier s. apr. J.-C., et que les techniques de décoloration à l’antimoine et au manganèse étaient connues et pratiquées, il est manifeste, aussi bien aux yeux des Anciens qu’à nos propres yeux guidés par les découvertes archéologiques, que l’on quitte, dans la seconde moitié du ier s. apr. J.-C., la tradition de la polychromie hellénistique et de l’emploi du verre comme un substitut de pierres colorées ou de métal, pour entrer dans un monde où la transparence et l’absence de couleur sont en faveur. C’est aussi à partir du milieu du ier s. apr. J.-C. que la technique du verre soufflé, cantonnée depuis son invention au milieu du ier s. av. J.-C. à la production de balsa-
65. 66. 67. 68.
A.-B. Follmann-Schulz, « Randbemerkungen zu figürlichen Schlangenfadendekor auf römischen Gläsern », BJb 204 (2004), p. 93-116. S. D. Fontaine, D. Foy (n. 5), p. 235-265. Pour une présentation commentée de l’édit, voir E. M. Stern, « Roman Glassblowing in a Cultural Context », AJA 103 (1999), p. 460-464. D. Whitehouse, « Glass in the Epigrams of Martial », JGS 41 (1999), p. 73-81.
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MARIE-DOMINIQUE NENNA
maires et de quelques types de vases de table, se diffuse plus largement et que les verriers rivalisent dans l’invention de nouvelles formes de vases à boire, à présenter et à verser 69. Le lieu d’origine de ce changement est discuté. Pline attribue aux ateliers des Provinces occidentales cette nouvelle manière et parle des sables du Volturne, des Gaules et des Espagnes ; cette assomption qui a fortement influencé les recherches sur le verre, dans le passé et encore aujourd’hui 70, n’est guère confirmée pour l’instant par les analyses chimiques, mais ne peut être entièrement réfutée 71. On pourrait aussi penser, au vu de l’édit de Dioclétien, que l’origine en est égyptienne, avec l’emploi de l’adjectif alexandrinum pour désigner le verre incolore, plus coûteux, qui pointe vers une indication géographique, même s’il relève à l’époque de l’édit autant du qualitatif que du topographique 72, et de fait, des compositions à l’antimoine ont été relevées dans les ateliers de Maréotide et du Wadi Natrun, dont l’activité est datée du Haut-Empire 73. Mais, le lieu de production du verre incolore à l’antimoine, à la composition la plus répandue, n’a pu encore être déterminé 74. À côté de ce qui fut ressenti par les Anciens comme une innovation technique, quelle que soit son origine, il est aussi raisonnable de penser que cette diffusion généralisée de la vaisselle incolore témoigne d’un changement dans les goûts, car il n’y a pas eu d’arrêt de la production des couleurs vives, comme en témoignent à la fois les vases eux-mêmes, mais aussi leurs décors appliqués. Comme on l’a vu plus haut, on met couramment le verre incolore et sa faveur à différentes époques, en relation avec le cristal de roche 75, même si les types de décor qui vont avec le développement de l’utilisation de ce type de verre à l’époque impériale doivent être mis au compte de différentes influences : vaisselle
69. 70.
71.
72. 73.
74. 75.
H. E. M. Cool, J. Price (n. 59) p. 223, tabl. 13.1, repris par E. M. Stern (n. 67), p. 480-481, tabl. 2. Ainsi, dans A. Silvestri, G. Molin, G. Salviulo, R. Schievenin, « Sand for Roman Glass Production: An Experimental and Philological Study on Source of Supply », Archaeometry 48 (2006), p. 415-432, on trouvera un procédé pour faire du verre avec du sable du Volturne, mais la complexité des opérations qui sont orientées pour arriver au résultat souhaité et posé par avance laisse pantois. I. C. Freestone, « Pliny on Roman Glassmaking », dans M. Martinon-Torres, Th. Rehren (éds), Archaeology, History and Science: Integrating Approaches to Ancient Materials (2008), p. 77-100, pour une nouvelle interprétation du texte de Pline à la lumière des découvertes récentes. Le sable actuel du Volturne, est connu pour être chimiquement inutilisable pour faire du verre en raison de ses hauts pourcentages d’alumine, de calcium et de Fe2O3, mais on ne peut exclure le recours à des sables géologiques, dont les carrières ne sont plus connues aujourd’hui, voir aussi P. Degryse, J. Schneider, « Pliny the Elder and Sr–Nd isotopes: Tracing the Provenance of Raw Materials for Roman Glass Production », Journal of Archaeological Science 35.7 (2008), p. 1993-2000. D. Whitehouse, « Glass in the Price Edict of Diocletian », JGS 46 (2004), p. 189-191 ; D. Barag, « Alexandrian and Judean Glass in the Price Edict of Diocletian », JGS 47 (2005), p. 184-186. M.-D. Nenna, M. Vichy, M. Picon, V. Thirion-Merle, « Ateliers primaires du Wadi Natrun, nouvelles découvertes », dans Annales du 16e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Londres (2003) (2005), p. 62. D. Foy, V. Thirion-Merle, M. Vichy (n. 2), p. 169-177 ; V. Thirion-Merle, M. Vichy (n. 2), p. 253-268. M. Vickers (n. 7), p. 48-65.
LE VERRE INCOLORE DANS L’ANTIQUITÉ : DE L’HISTOIRE DE LA PRODUCTION À L’HISTOIRE DU GOÛT
d’argent, vaisselle en cristal de roche ou décor propre aux verres 76. Néanmoins, la raison même du changement de goût à l’époque flavienne reste inexpliquée. La transparence du verre a séduit largement les décorateurs d’intérieur et leurs clients, de même que les peintres spécialisés dans les portraits funéraires. Les peintures de Pompéi ou d’Oplontis jouent également de cette transparence 77. Ses qualités d’agrandissement, de réduction et de réflexion étonnaient déjà les Grecs de l’époque classique, même si elles furent réellement exploitées par les ingénieurs alexandrins, quelques siècles plus tard 78. Peut-être faut-il explorer la piste plus générale d’un goût pour le blanc et l’absence de couleurs, donc l’incolore, qui se traduit par exemple dans le discours moralisateur de Pline : sa préférence va aux marbres blancs dont il vante la pureté, l’éclat et la simplicité 79. Ce qu’il y a de sûr, c’est que cette valeur donnée à l’incolore et sa floraison dans la vaisselle de table se maintiennent jusqu’à la fin du iiie s. apr. J.-C. À partir de ce moment, on assiste à un retour de la couleur, notamment dans les ateliers syro-palestiniens qui font appel à de nouvelles couleurs, vert, jaune, marron, violet ainsi qu’à de nouvelles manières de travailler le verre, tandis que l’emploi du verre incolore se restreint, notamment aux pièces gravées en creux ou en haut-relief. À la fin du ive s. apr. J.-C., s’imposent des couleurs plus uniformes, avec l’arrivée d’un matériau égyptien vert-jaune 80, parfois volontairement assombri, qui va rivaliser pendant deux siècles avec les verres bleutés syro-palestiniens.
76. 77. 78. 79.
80.
E. M. Stern (n. 7). Fr. Naumann-Steckner, « Depictions of Glass in Roman Wall Paintings », dans Roman Glass: Two Centuries of Art and Invention (1991), p. 86-98. E. M. Stern (n. 1), p. 528-529. V. Maugan-Chemin, « Les couleurs du marbre chez Pline l’Ancien, Martial et Stace », dans A. Rouveret, S. Dubel, V. Naas (éds), Couleurs et matières dans l’Antiquité, Études de littérature ancienne 17 (2006), p. 103-125. M.-D. Nenna, « Egyptian Glass Abroad: HIMT Glass and its Markets », dans D. Keller, J. Price, C. M. Jackson (éds), Neighbours and Successors of Rome. Traditions of Glass Production in Use in Europe and the Middle East in the Later First Millenium AD (2014), p. 177-193.
227
A Lidded Glass Phiale with Reverse-Painted Decoration Despina Ignatiadou
SUMMARY A lidded glass phiale was found in the looted Macedonian tomb at Makrygialos (ancient Pydna) in northern Greece. It consists of a colourless undecorated phiale and a colourless decorated plate as its lid. The decoration on the underside of the wide rim is typical of the early Hellenistic period in Macedonia: a wave pattern, running clockwise, to be viewed from above, through the transparent glass. A triangle of pink colour fills the base of each curl. It is possible that the decoration was complemented by the addition of a thick gold foil, which, however, does not survive. This unique vessel is the earliest decorated example of the very few lidded phialae surviving today, and also an early example of reverse painting. Its combination of shape and decoration is most probably the creation of a master craftsman, who was active in Macedonia in the late 4th century BC; a production center that influenced the evolution of the craft throughout the Hellenistic period.
KEYWORDS
Lidded phiale, glass, purple, Pydna, reverse painting, wave pattern.
RÉSUMÉ Une phiale à couvercle avec peinture sous verre inversé On présente ici une phiale en verre à couvercle trouvée dans une tombe macédonienne pillée à Makrygialos (l’antique Pydna). Il s’agit d’une phiale incolore et sans décor. Elle avait pour couvercle une assiette également incolore mais décorée. Le décor de la face inférieure de sa large lèvre est caractéristique du début de la période hellénistique en Macédoine : un motif de postes, tracé dans le sens des aiguilles d’une montre, destiné à être vu d’en haut, à travers le verre transparent. Un triangle de couleur rose remplit la base de chaque boucle. Il est possible que ce motif décoratif ait été parachevé par l’addition d’une feuille d’or épaisse. Nous n’en avons plus la trace, cependant. Ce vase exceptionnel est le plus ancien exemple attesté à ce jour d’une série limitée de phiales à couvercle. Il est aussi un témoignage ancien d’une peinture appliquée à l’envers. Cette association originale d’une telle forme à ce type de motif décoratif est très probablement l’œuvre d’un maître artisan, actif en Macédoine à la fin du ive s. av. J.-C., centre de production qui a exercé son influence sur cet artisanat durant toute l’époque hellénistique. MOTS-CLEFS Phiale à couvercle, verre, pourpre, Pydna, peinture inversée, poste. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƈƸƠƯƭưƫƹƭƠƯƫuƩƳǁuƥƮƥƭuƩƲƳƭƶƬƲƧƴƥƹƫuơưƫƨƭƥƮƿƶuƫƶƫ Ƒƣƥ ƧƸƠƯƭưƫ ƹƭƠƯƫ uƩ Ƴǁuƥ ƦƴơƬƫƮƩ ƶƷƲ ƶƸƯƫuơưƲ uƥƮƩƨƲưƭƮƿ ƷƠƹƲ ƶƷƲ ƑƥƮƴǀƧƭƥƯƲ ƥƴƺƥƣƥ ƕǀƨưƥ
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DESPINA IGNATIADOU
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about the author D. Ignatiadou, Head Curator, Sculpture Collection, National Archaeological Museum, Athens, Greece.
bibliographical abbreviation Stern 1999 = M. Stern, “Ancient Glass in Athenian Temple Treasures”, Journal of Glass Studies 41, pp. 19-50.
A LIDDED GLASS PHIALE WITH REVERSE-PAINTED DECORATION
The lidded phiale is a very rare find, found from the 4th century BC to the Roman period. It is a composite vessel, consisting of a phiale and a plate-like lid. Only glass examples survive. There are several Roman finds, but the pre-Roman examples are very rare and most are without or of uncertain provenance. 1 The only early find from an scientific excavation is the lidded phiale from the Macedonian tomb at Makrygialos, in northern Greece. 2 The Macedonian tomb had been used for three successive burials, dated to the 4th and 3rd centuries BC. The tomb had been recently looted, but small precious finds survived the looting. The lidded phiale was part of the last burial, on a built funerary bed, and was found along with the skeleton and a ceramic unguentarium, dated to the beginning of the 3rd century BC. 3 The glass vessel is probably older and dated to the 4th century BC. The innumerable fragments of transparent colourless glass with a slight green tinge were reassembled to almost complete three vessels, two of which belong together to comprise the lidded phiale. 4 Both parts of the vessel are also atypical (figs. 1-2). The lower part, the phiale (Py 6435) is a simple bowl, 15.4 cm wide, 4.5 cm high and 3-4 mm thick. It has a convex profile, with an outsplayed rim and the rim lip entirely missing, and a slightly convex bottom without an added base. It is undecorated, but there may have been some decoration on the rim. Despite its simple shape, it has no parallels either in pottery or in metalware. Other phialae of that period are quite different, as they do not present a continuously curving body but a rather articulated profile. The upper part, the lid (Py 6436), is a shallow plate, 18 cm wide, 1.8 cm high and 3-4 mm thick; its rim is 2 cm wide. It has a convex body and a wide horizontal rim that ends in a vertical, but rounded,
1.
2.
3. 4.
On the shape see Stern 1999, pp. 33-35 and 46-50; V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna, Les verres antiques I. Contenants à parfum en verre moulé sur noyau et vaisselle moulée, VII e siècle avant J.-C.-I er siècle après J.-C. (2000), pp. 168-172. On the Roman finds see L. A. Scatozza Höricht, “Phlegräische Glasfunde und die Verlagerung von Gashütten aus dem östlichen Mittelmeer nach Campanien”, AA (1990), pp. 428-431, figs. 7-8. The modern town of Makrygialos, in the Pieria region, has been identified with ancient Pydna, a large ancient Macedonian city with an important port. Pydna flourished in the Classical and Hellenistic periods, as is evident from the quality of the grave-goods unearthed in her cemeteries, which have been extensively excavated; M. Bessios, ƕƭƩƴƣƨƼưƶƷơƹƥưƲƵƕǀƨưƥ ƑƩƬǁưƫƮƥƭƲƭƥƴƺƥƭƿƷƫƷƩƵƷƫƵƦƿƴƩƭƥƵ ƕƭƩƴƣƥƵ (2010). M. Bessios, AD 38 (1983), Chron., p. 276, fig. 116 Ơ. All three vessels were published as individual finds, before the shape of the lidded phiale was identified; see D. Ignatiadou, “Three Cast Glass Vessels from a Macedonian Tomb in Pydna”, in Annales du 14e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Venezia - Milano, 1998 (2000), pp. 35-38, with an appendix by E. Mirtsou on the chemical analysis of the finds. Later, it was discussed in the author’s thesis; see D. Ignatiadou, ƉƭƥƹƥươƵ ƧƸƥƯƣ Ƨƭƥ Ʒƫư ƥƴƭƶƷƲƮƴƥƷƣƥ ƷƫƵ ƥƴƺƥƣƥƵ ƑƥƮƩƨƲưƣƥƵ (2013), pp. 141-150, pl. 17, MLP 1. In the first publication, the date assigned to the find was the early 3rd century BC, as it was assumed it was contemporary with the burial. But research shows that the colourless glass vessels were at the time so special and precious that they remained in use for several years before they accompanied their owners to the grave. The vessel was also assumed to have been “cast and rotary polished”. Today, thanks to the inspired research of R. Lierke (n. 9), we know that this is not true; “cast” must be assumed to mean not poured but moulded, and the rotary marks described are an obvious indication of the use of the rotary pressing technique.
231
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DESPINA IGNATIADOU
0
3 cm
Fig. 1 — Lidded phiale, Pydna (Photo: Th. Stoupiadis).
Fig. 2 — Lidded phiale, Pydna. Profile and section of the lid, and section of the set (Drawing: A. Faklari).
Fig. 3 — Lidded phiale, Hermitage Museum (after N. Kunina, Ancient Glass in the Hermitage Collection [1997], p. 13).
Fig. 4 — Lidded phiale, Hermitage Museum. Reverse of the lid and drawing of the decoration (after Stern [1999], fig..22).
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overhanging lip. Its shape seems to be familiar and similar to the existing ceramic fishplates, mainly due to the existence of the vertical drop of the lip. Yet ceramic plates differ in profile, as those are conical rather than concave and they also feature an added ring base. Other glass plates from this period do not survive, if they existed at all. The first glass plates appear almost a century later and they are very different, as they result from the evolution of the articulated Achaemenid-type phiale. 5 Several lidded phialae can be compared with the Pydna find. An almost complete example from, probably, the late 4th or early 3rd century BC is in the Kunstmuseum, Düsseldorf. It is undecorated but clearly shows the shape of this kind of vessel. 6 A mid-Hellenistic example was found in the Tomba degli Ori in Canosa. It is fragmentary and undecorated, and the two parts present a critically close difference in diameter to be able to fit. Its identification as a lidded phiale is somewhat uncertain but rather probable. 7 Hellenistic examples, in the Hermitage and the Louvre, are decorated with painting and gilding. The Hermitage find is from the Black Sea region. Its angular contours and the phiale’s flat rim probably indicate a date well into the 3rd century BC (fig. 3). It has decoration on the reverse of the lid. Gold lozenges on a red background are on the outer edge of the rim. Then, on a light blue background, a wreath of myrtle (or olive) circles the rim. The wreath is applied in gold leaf and shown tied with red ribbons. Then there is a band of short gold lines on a red background. The phiale preserves remains of a gold leaf decoration, perhaps a flower (fig. 4). 8 The Classical and early Hellenistic lidded phialae (Pydna, Dusseldorf ) were probably made by rotary pressing, as is indicated by their angular contours and also by rotary marks evident on the surface of the Pydna find. 9 From the mid-Hellenistic period lidded phialae appear to have been made by slumping. The Hermitage find is not only less angular but also has a very irregular rim-lip. In the late Hellenistic period the shape evolves to a non-angular, flowing version. Four finds associated with lidded phialae are in the Louvre collection: one set, and additionally one phiale and one lid. 10 They all preserve traces of decoration. The set, of unknown provenance, has decoration both on the phiale and the lid (fig. 5). Their 5. 6. 7. 8.
9. 10.
For the Canosa finds, see D. B. Harden, “The Canosa Group of Hellenistic Glasses in the British Museum”, Journal of Glass Studies 10 (1968), pp. 21-47, nos. 3, 4, 8. No. P 1984-31; H. Ricke, Reflex der Jahrhunderte: Die Glassammlung des Kunstmuseums Düsseldorf. Eine Auswahl. Grassinmuseum, Leipzig, 1989-1990 (1989), p. 19, no. 6; Stern 1999, p. 49, no. 10, fig. 13. No. 40.072 (phiale) and no. 40.073 (lid); E. M. De Juliis (ed.), Gli ori di Taranto in etá ellenistica, Catalogo mostra (1985), p. 450, nos. 52-53; Stern 1999, p. 48, no. 5, fig. 24. No. E 805; M. Rostovzev, “Vasi di vetro dipinto del periodo tardo hellenistico e la storia della pittura decorativa”, Archeologica Classica 15 (1963), pp. 151-179, at 172-173; N. Kunina, Ancient Glass in the Hermitage Collection (1997), pp. 13 and 289-290, no. 181; Stern 1999, pp. 46-47, no. 1, fig. 22. The find is part of a private collection and its provenance from Olbia is not at all secure. N. Kunina dated it to the 1st century BC. R. Lierke, Antike Glastöpferei, Ein vergessenes Kapitel der Glasgeschichte (1999). See also n. 4 above. The isolated finds are the lid CP9194 from Italy (?) and the phiale NIII3169 from Egypt (?). V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna (n. 1) date all four to the 3rd century BC.
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Fig. 5 — Lidded phiale, Louvre Museum (after V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna [n. 1], no. 197).
Fig. 6 — Lidded phiale, Louvre Museum. Section and drawing (Th. Stoupiadis after V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna [n. 1], no. 197).
Fig. 7 — Lidded phiale, Louvre Museum. Reverse of the lid (after Stern 1999, fig.v23).
Fig. 9 — Lidded phiale, Pydna. The wave pattern as seen from the obverse (Photo: Th. Stoupiadis).
Fig. 8 — Lidded phiale, Pydna. The underside of the lid (Photo: Th. Stoupiadis).
Fig. 10 — Lidded phiale, Pydna. The wave pattern as seen from the reverse (Photo: Th. Stoupiadis).
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flowing contours and the phiale’s slightly curved rim indicates a date not before the 2nd century BC (fig. 6). The phiale preserves a faint design executed in red and blue paint and gold leaf. The lid is reverse painted. The main frieze on it is composed of gold leaf palmettes (placed on the side) to form a kind of wreath. This is bordered by two sets of red and gold bands decorated with gold squares (fig. 7). 11 The rim of the Pydna lid is also decorated. The decoration is executed on the underside so that it is visible from above, through the transparent glass (fig. 8). The design is that of a wave pattern, running clockwise (figs. 9-10). A purple triangle occupies the central part of each triangular unit of the wave pattern. Most triangles are filled with a smooth layer of pigment, but in a few places a thick layer, like a blob, is encountered (fig. 11). Initial examination of the pigment in a polarizing microscope, 12 under incident light, showed it does not present a crystalline structure. It must therefore be an organic pigment, either purple or madder lake. Recently, the pigment was scientifically analysed and the results proved that it is definitely purple. 13 The pattern is outlined by a white line, 1-2 mm wide, which is neither painted on nor incised on the glass. It is not very clear how this was made, or if it is intentional at all. It consists of a series of uneven pits and it looks like the result of some kind of deterioration on the borders of the wave pattern. It also appears on a sandwich gold glass from Canosa, on areas where the glass foil does not survive. Scholars have described it as a kind of “etching”. 14 On the Canosa find, as well as on the Pydna find, the area outlined by this “etching” appears to be less weathered than its adjacent areas. This Fig. 11 — Lidded phiale, has led to the idea that the non-weathered surface was perhaps Pydna. Details of the originally concealed under some kind of attached decoration. This painted decoration (Photo: could not have been a painted decoration, because it would have Th. Stoupiadis). survived, even in traces. The only other possibility is the assumed existence of a thick gold foil, continuous over extensive lengths of the wave pattern. In that case the white line could have been created as a preliminary etching to define the area where the foil would be applied. There is also an alternative explanation. The foil alone would have protected the surface, causing only a local chemical or electrochemical
11. 12. 13. 14.
No. S2584; V. Arveiller-Dulong, M.-D. Nenna (n. 1), p. 169, no. 197. Stern 1999, pp. 47-48, fig. 23. By the chemist S. Vivdenko, 16th Ephorate of Classical and Prehistoric Antiquities, Thessaloniki. By Professor E. Varella, Aristotle University of Thessaloniki; see Appendix below. M. Bimson, A. E. Werner, “The Canosa Group of Hellenistic Glasses in the British Museum: Technical Observations on the Sandwich Gold-Glass Bowls”, Journal of Glass Studies 11 (1969), pp. 125-126.
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reaction just underneath its borderline: what we see as a white line. Additionally, we may think that the surface to be covered with the gold foil was previously treated in some way or simply that glue somehow varnished and protected the surface. It is not clear whether the foil covered the pigment or if the pigment was applied on triangular openings cut in the foil. In any case the red triangles would have been visible from above on a gold background. The gold foil was not found in the tomb. It must have come off fairly intact and perhaps was picked up by the looters who entered the tomb in the 1990s. This perhaps explains also the absence of the phiale’s rim. Although even minute glass fragments were gathered from the tomb, we cannot identify among them any pieces from the phiale’s rim. If gold foil was attached to it and the phiale was already shattered, then perhaps the looters picked up the whole foil along with the vessel’s rim. Reverse painting on colourless glass was practised on a small scale in Assyria, where colourless glass was invented. In Nimrud, in the 8th century BC, the decoration of couches and chairs consisted of ivory elements and colourless glass plaques, approximately 3 by 4 cm. Those were decorated with reverse painting in black outline with red and blue details. The theme was either vegetal or winged figures or winged sphinxes. It has been supposed that the painting was covered with gold foil, which created a background to it when seen from the obverse (fig. 12). 15 Four centuries later, in the 4th century BC, that same principle resurfaced in Macedonia, where the combination of colourless glass and gold became very popular during the reigns of Philip and Alexander. Glass plaques, of similar size to that of the Assyrian finds, were used for the decoration of couches and were also backed with cut-out silver-gilt foil to be viewed from above (fig. 13). 16 The plaque and the foil were not line painted, but there is evidence that the background on which the plaques were placed was painted red. This was either the wooden part of the furniture, or a second, quadrangular, silver-gilt foil. The manner is evident on a two-layered foil like that from Korinos in Pieria: two cut-out figures placed on the bigger foil, which has been used as a background and has therefore been painted red (fig. 14). 17 The foil is thick enough to survive away from the glass plaques, even when it is very delicately cut; the same would be, therefore, possible for a wave pattern foil, if it existed on the Pydna vessel. The gold foil on the Pydna find would have been very similar to that on the Canosa bowls of the 2nd century BC (fig. 16). 18 A contemporary gold glass bowl was also found in
15.
16. 17.
18.
D. P. Barag, “The Prelude to Hellenistic Gold Glass”, in Annales du 11e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, Bâle, 1988 (1990), pp. 19-25, 22-23, fig. 3. H. Tait (ed.), Five Thousand Years of Glass (1991), p. 39, fig. 41. D. Ignatiadou, “Glass and Gold on Macedonian Funerary Couches”, in Annales du 15e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre, New York, 2001 (2003), pp. 4-7. D. Ignatiadou, “Le verre incolore, élément du décor polychrome du mobilier funéraire de Macédoine”, in S. Descamps-Lequime (ed.), La couleur dans le monde grec antique (2007), pp. 219-227 (esp. 227, fig. 7.) D. B. Harden (n. 5), pp. 23-25, 38-39.
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Fig. 12 — Painted glass plaque, Nimrud (after H. Tait [n. 15], fig.v41).
Fig. 13 — Glass inlay with gold foil, Vergina (after V. Andronikos [n. 21], fig.v140).
Fig. 15 — Gold glass phiale, Tresilico (after R. Agostino [n. 19]).
Fig. 17 — Ivory shield, Vergina (after A. Kottaridi [n. 21], fig.v72).
Fig. 14 — Gold foil from the decoration of a couch, Korinos, Pieria (Photo: D. Ignatiadou).
Fig. 16 — Gold glass bowl, Canosa (after R. Lierke [n. 9], fig.v98).
Fig. 18 — Glass situla, Metropolitan Museum of Art (Photo: D. Ignatiadou).
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Tresilico, Calabria, and its shape resembles that of the Pydna phiale, the only difference being the existence of a curved rim. Additionally, this one is also decorated with a double wave-pattern on the rim. The main decoration on the floor of the bowl is a hunting scene (fig. 15). 19 The Tresilico and Canosa bowls are sandwich gold glass, with the gold foil encased between two layers of transparent glass. This technique appears one century later than the Pydna vessel, so it could not apply in the case of our find. Nevertheless, there is a line of evolution connecting the colourless glass production in 4th century BC Macedonia to that of the late 3rd century BC in Magna Graecia. We notice common shapes, common techniques of manufacture and decoration, commercial contacts and national identities but, above all, burial customs indicating the proximity of religious beliefs. This has led me to suggest elsewhere that the glassworking tradition, which flourished in Macedonia, but was discontinued there, was perhaps transplanted to Magna Grecia. 20 The combination of gold and glass in a wave pattern exists on a remarkable find in Macedonia, the Vergina shield. There are two bands of wave pattern. Its outline is cut in strips of ivory and on both sides of those strips the space left is filled with triangular plaques of colourless glass, placed over gold foil (fig. 17). 21 The only colourless glass vessel, nearly contemporary to the Pydna one, that is decorated with a painted wave pattern is an outstanding find fairly recently bought by the Metropolitan Museum of Art. It is a situla, with silver handles and painted decoration. A wave pattern “in purplish red, with a thin line of light (Egyptian) blue below” is reverse painted on the rim (fig. 18). 22 The similarity of the fabric, shape, style, and decoration of this situla to Macedonian finds of both glass and metal is striking. It is a true masterpiece. So are the Pydna vessels, as the lidded phiale was not the only glass vessel in the tomb. It came as a set with another unique shape: a colourless kylix-kantharos. 23 We do not know how and where the shape of the lidded phiale appeared, and we can only speculate about its use. It has been associated with a reference in the sources mentioning an exaleiptron, and, consequently, with a possible survival of the Classical shape into the Hellenistic period. 24 But Hellenistic exaleiptra do exist and they are manufactured in the traditional shape. 25 We could consider the lidded phiale a pyxis, 26 but the typical pyxis
19. 20. 21. 22. 23. 24. 25. 26.
R. Agostino, Un vetro ellenistico da Varapodio in Vetro in Calabria (2003), pp. 235-238. D. Ignatiadou (n. 4, 2013). A. Kottaridi, Macedonian Treasures. A Tour Through the Museum of the Royal Tombs of Aigai (2011). C. S. Lightfoot, “Ancient Glass at the Metropolitan Museum of Art: Two Recent Acquisitions”, in Annales du 15e congrès de l’Association internationale pour l’histoire du verre (n. 16), pp. 18-22. D. Ignatiadou (n. 4, 1998), pp. 35-38. Stern 1999, pp. 33-35. A different interpretation of the source is found in M.-D. Nenna, Les verres, EAD XXXVII (1999), p. 10. B. Niniou-Kindeli, K. Tzanakaki, ƏƩƴƥuƭƮƢ uƩ ƷƲƳƭƮơƵ ƭƨƭƥƭƷƩƴƿƷƫƷƩƵ ƥƳƿ Ʒƫư ƳƩƴƭƲƺƢ ƷƫƵ ƔuƲƶƳƲưƨƣƥƵƷƼưƔƴƩƣƼư ƗƘŻƊƯƯƏƩƴ (2004), pp. 341-356, figs. 139-152. Also suggested by Stern 1999.
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has a convex not a concave lid. The only other vessels based on the same principle, of a receptacle with a concave lid, are the Macedonian silver so-called salt cellars. 27 The Pydna lidded phiale is the earliest decorated example of the very few lidded phialae surviving today, and one of the earliest examples of reverse painting. Its combination of shape and decoration is most probably the creation of a master craftsman, who was active in Macedonia in the late 4th century BC; a production center that influenced the evolution of the craft throughout the Hellenistic period. The wave pattern on the underside of its rim is an expression of the desire for polychromy; desirable even by a society that valued very highly the transparency of colourless glass, and its prototype, rock crystal. Today’s technological advances permit us to identify and investigate exceptional manifestations of polychromy on colourless glass. It is my belief that these finds will not remain isolated and rare, and that many more will come to light.
APPENDIX Identification of the colouring agent The coloured sample was subject to a selective solubility test, permitting extraction of indigo with dichloromethane or dimethylformamide, and of indirubin with ether; 6,6’-dibromoindigo was isolated using quinoleine.
indigo
Indirubin
6,6’-dibromoindigo
After elimination of the non-brominated dimers, the micro chemical test based on the redox reaction of ammonia and sodium bisulphite under ultraviolet radiation was performed. Development of a bluish violet hue pointed to the formation of indigo, thus suggesting the initial presence of 6,6’-dibromoindigo. High performance liquid chromatography analysis, using a diode array detector and a C18 inversed phase column, of a DMSO extract resulted in the identification of indigo and 6,6’-dibromoindigo, followed by a minor quantity of indirubin. The large concentration in indigo points to Hexaplex trunculus L. as the sole or a constituent source material. Combined use of micro-FT infrared and micro-Raman spectroscopy respectively yielded characteristic N-H and C=O stretching peaks, and C=C, N-H and C=O stretching peaks. Comparison with a commercial standard sample (Kremer Pigmente) confirmed the identification of purple as the colouring agent. 27.
P. G. Themelis, G. P. Touratsoglou, ƔƭƷƠƹƲƭƷƲƸƉƩƴƦƩưƣƲƸ (1997), p. 67.
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1. Micro-FT infrared spectroscopy (© E. A. Varella, Assistant Professor, Organic Chemistry Laboratory, University of Thessaloniki).
2. Micro-Raman spectroscopy (© E. A. Varella, Assistant Professor, Organic Chemistry Laboratory, University of Thessaloniki).
3. UV-vis reflectance (© E. A. Varella, Assistant Professor, Organic Chemistry Laboratory, University of Thessaloniki).
Les flacons à fard à l’époque hellénistique. Exemples de la région de Thessalie Vassiliki Adrymi, Elissavet Nikolaou, Stamatia Alexandrou, Sofia Kravaritou, Philippe Walter, Elisabetta Welcomme, Elsa Van Elslande, Georges Tsoucaris
RÉSUMÉ Les matières employées pour la beauté durant l’Antiquité grecque sont aujourd’hui assez bien connues. Comme le sont aussi les textes qui décrivent les pratiques liées à la beauté et leurs relations avec le monde religieux, celui de la séduction et du paraître ou bien celui des soins du corps, lié aux pharmacopées et à la médecine. On s’intéresse ici plus particulièrement aux cosmétiques retrouvés dans des flacons découverts lors de fouilles récentes en Thessalie, et contenant encore de la matière, notamment des fards blanc et roses employés pour les joues. Les analyses chimiques montrent que ces deux couleurs étaient obtenues le plus souvent à partir de matières synthétisées chimiquement ou bien élaborées en mélangeant plusieurs composés. Nous comparerons les résultats de ces analyses aux textes anciens. MOTS-CLEFS Beauté grecque, soins du corps, fards blanc et roses, cosmétiques, kommôtike technê, Thessalie. SUMMARY Make-up containers during the Hellenistic period in Thessaly The use of cosmetic materials in Ancient Greece is today relatively well known, as are the texts which described practices linked to cosmetics and their association with religion, the world of seduction and appearance or of bodily care, connected to pharmacology and medicine. Here we will be interested in make-up substances discovered during recent excavations in Thessaly in containers in which white and pink materials used for cheeks has been preserved. The chemical analysis of these products shows that these two colors were most often synthesized chemically or were developed by mixing several compounds. We will compare the results of these analyses with the ancient texts. KEYWORDS Thessaly.
Greek beauty, body care, make-up, white and pink materials, kommôtike technê,
ƕƊƖƎƐƌƜƌ Ƙƥ ƨƲƺƩƣƥ ƻƭuƸƬƣƼư ƶƷƫư ƩƯƯƫưƭƶƷƭƮƢ ƩƳƲƺƢ ƕƥƴƥƨƩƣƧuƥƷƥ ƥƳƿ Ʒƫư ƳƩƴƭƲƺƢ ƷƫƵ ƍƩƶƶƥƯƣƥƵ ƗƢuƩƴƥƧưƼƴƣƪƲƸuƩƥƴƮƩƷƠƮƥƯƠƷƥƮƥƯƯƸưƷƭƮƠƳƲƸƺƴƫƶƭuƲƳƲƭƲǀưƷƥưƮƥƷƠƷƫưƩƯƯƫưƭƮƢƥƴƺƥƭƿƷƫƷƥ ƘƲƣƨƭƲƭƶƺǀƩƭƮƥƭƧƭƥƷƥƮƩƣuƩưƥƳƲƸƳƩƴƭƧƴƠƹƲƸưƷƭƵƳƴƥƮƷƭƮơƵƳƲƸƶƺƩƷƣƪƲưƷƥƭuƩƷƫưƲuƲƴƹƭƠƮƥƭ ƷƭƵƶƺơƶƩƭƵƷƲƸƵuƩƷƫƬƴƫƶƮƩƣƥ ƷƫưƥƳƲƳƯƠưƫƶƫƮƥƭƷƲƹƥƣưƩƶƬƥƭƢuƩƷƫưƳƩƴƭƳƲƣƫƶƫƷƲƸƶǁuƥƷƲƵ ƶƩƶƺơƶƫuƩƷƫƹƥƴuƥƮƲƳƲƭƣƥƮƥƭƷƫưƭƥƷƴƭƮƢƕƭƲƶƸƧƮƩƮƴƭuơưƥ ƥƶƺƲƯƲǀuƥƶƷƩƩƨǁuƩƷƥƮƥƯƯƸ ưƷƭƮƠƳƲƸƦƴơƬƫƮƥưƶƩƨƲƺƩƣƥ ƷƥƲƳƲƣƥƥưƥƮƥƯǀƹƬƫƮƥưƶƩƳƴƿƶƹƥƷƩƵƥưƥƶƮƥƹơƵƶƷƫƍƩƶƶƥƯƣƥ Ʈƥƭ ƷƥƲƳƲƣƥƳƩƴƭƩƣƺƥưƥƮƿuƫƸƯƭƮƿ ƮƸƴƣƼƵƯƩƸƮƿƮƥƭƴƲƪƻƭuǀƬƭƲƧƭƥƷƥuƠƧƲƸƯƥƆƳƿƷƫưƳƯƩƸƴƠƷƫƵ ƶǀƶƷƥƶƫƵƷƼưƳƴƲƽƿưƷƼưƥƸƷǁư ƩƣưƥƭƥƱƭƲƶƫuƩƣƼƷƲƿƷƭƷƥƨǀƲƥƸƷƠƺƴǁuƥƷƥƳƥƴƠƧƲưƷƥưƶƸưƢƬƼƵ
VASSILIKI ADRYMI ET AL.
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Note liminaire Les études des sites grecs hors de Thessalie ont été permises grâce au soutien de D. Grammenos (Musée archéologique de Thessalonique), N. Kaltsas et Ch. Avronidaki au musée national d’Archéologie à Athènes, K. Papageli à Éleusis et nous les remercions chaleureusement. Nous remercions également pour leur aide durant la réalisation de certaines mesures Cl. Coupry (laboratoire LADIR, Thiais), Fr. Albarède, Ph. Teleouk et Ch. Douchet (Laboratoire de sciences de la Terre de l’École normale supérieure de Lyon) et P. Bleuet (European Synchrotron Radiation Facility, Grenoble).
à propos des auteurs A. Adrymi, directrice émérite de l’Institut archéologique d’études thessaliennes, Volos, Grèce. St. Alexandrou, E. Nikolaou, éphorie des Antiquités de Magnésie, Volos, Grèce. S. Kravaritou, Faculté des Lettres, université d’Oxford, Royaume-Uni. Ph. Walter, E. Van Elslande, G. Tsoucaris, Laboratoire d’archéologie moléculaire et structurale (LAMS), UMR 8220 du CNRS, université Paris-VI Pierre-et-Marie-Curie, Paris, France. E. Welcomme, Commissariat à l’énergie atomique, Marcoule, Bagnols-sur-Cèze, France.
LES FLACONS À FARD À L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE. EXEMPLES DE LA RÉGION DE THESSALIE
Les matières employées pour la beauté dans le monde antique hellénistique puis romain sont aujourd’hui mieux comprises par les textes que par les données archéologiques. Les auteurs anciens nous ont fourni de nombreuses informations en décrivant les pratiques liées à la beauté et leurs relations avec le monde religieux, celui de la séduction et du paraître ainsi que celui des soins du corps, en relation avec les pharmacopées et la médecine 1. Les Grecs distinguaient, durant la toilette du visage, d’une part les soins de la peau qui permettent de préserver la beauté (l’art de se parer, celui de la toilette : kosmêtikê technê) et d’autre part l’usage des fards, dont le but est de colorer le visage, de le maquiller (l’art de se farder, celui du maquillage : kommôtike technê). La kommôtike technê concerne donc l’usage des fards et du maquillage, qui se proposent d’embellir un visage artificiellement, de lui conférer un éclat qu’il n’a pas au naturel. Dans cette étude, nous allons nous intéresser à ce dernier aspect grâce aux fards retrouvés en plus ou moins grande quantité dans des flacons découverts lors de fouilles récentes en Thessalie 2. Cette recherche est l’expression du travail effectué ces dernières années par plusieurs équipes de physico-chimistes pour déterminer la nature des résidus de fards, de parfums et d’onguents de l’Antiquité, préservés dans des récipients de formes variées, lors de leurs découvertes dans des tombes, des villas ou des dépotoirs 3. D’après les commentaires antiques, la pratique du maquillage consistait à recouvrir le visage du fard blanc psimythion et à ajouter sur les joues une poudre de fard rose. Cette application de pigment blanc était certainement le geste le plus symbolique des pratiques de parure du visage et son usage restera prédominant pour le maquillage 4 (et la peinture artistique) jusqu’à l’époque moderne. Son emploi était parfois décrié dans les 1. 2.
3.
4.
Voir à ce sujet B. Grillet, Les femmes et les fards dans l’Antiquité grecque (1975) ; I. Bardies-Fronty, Ph. Walter, M. Bimbenet-Privat (éds), Le Bain et le Miroir (2009). Les résultats sont issus d’une collaboration entre l’ancien Institut archéologique des études thessaliennes, l’ancienne XIIIe éphorie des Antiquités préhistoriques et classiques de Volos (aujourd’hui, éphorie des Antiquités de Magnésie) et le Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF) pour mieux comprendre la nature et l’origine des fards en Thessalie, à l’époque hellénistique. Pour une présentation préliminaire, voir Ph. Walter et al., « ƘƥƸƷƲƳƲƣƫƶƫƷƲƸƥƴƺƥƣƲƸƩƯƯƫưƭƮƲǀ˦Ɯƭu u ƸƬƣƲƸ˧ ƶƷƫƍƩƶƶƥƯƣƥ », dans oƉƭƩƬươƵƗƸươƨƴƭƲƎƶƷƲƴƣƥƵƕƲƯƭƷƭƶuƲǀƷƫƵƍƩƶƶƥƯƣƥƵƕƴƥƮƷƭƮƠƗƸưƩƨƴƣƲƸ ƒƲƩuƦƴƣƲƸ ƍƩƶƶƥƯƲưƣƮƫ (2008), p. 289-301. La plupart de ces recherches ont concerné l’époque romaine. Il s’agit notamment des travaux menés par le laboratoire du C2RMF (ministère de la Culture et de la Communication, CNRS), en collaboration avec L’Oréal Recherche, mais aussi ceux concernant Pompéi qui sont coordonnées par P. Baraldi à l’université de Modène, Italie (2008) : M. C. Gamberini et al., « MicroRaman and Infrared Spectroscopic Characterization of Ancient Cosmetics », Vibrational Spectroscopy 47 (2008), p. 82-90. Sur les parfums : N. Garnier, « Evidence of Ancient Perfumes Found in Ceramics », dans Meetings with the Past: Treasures for the Future, Exposition Amman 2005 (2005), p. 65-66 ; N. Garnier, D. Frère « Une archéologie de l’évanescent », dans Parfums de l’Antiquité : la rose de l’encens en Méditerranée, Exposition Mariemont 2008 (2008) ; E. Ribechini et al., « Gas Chromatographic and Mass Spectrometric Investigations of Organic Residues from Roman Glass Unguentaria », Journal of Chromatography A 1183, 1-2 (2008), p. 158-169. Et sur l’époque romaine, J. Perez-Arantegui, J. A. Paz-Peralta, E. Ortiz-Palomar, « Analysis of the Products Contained in Two Roman Glass Unguentaria from the Colony of Celsa (Spain) », Journal of Archaeological Science 23, 5 (1996), p. 649-655 ; P. W. Huq et al., « Combined Technique Analysis of the Composition of Punic Make-up Materials », Applied Physics A 83 (2006), p. 253-256. C. Lanoe, La Poudre et le Fard : une histoire des cosmétiques de la Renaissance aux Lumières (2008).
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commentaires médicaux qui soulignaient la toxicité de cette substance à base de plomb et ses effets secondaires 5, ou par les philosophes et les auteurs des pièces de théâtres parmi lesquels on distingue en particulier Platon, Aristophane, Xénophon, Plutarque et Athénée 6. C’est pour attirer le regard des hommes qu’elles « s’emplâtraient les joues de céruse et s’enduisaient la figure de fard rouge », conclut Euboulos 7, poète athénien du ive s. av. J.-C. La première utilisation grecque de ce pigment est attribuée à Thespis, au ive s. av. J.-C., afin d’enduire les visages des acteurs à l’occasion des représentations des tragédies 8. Les analyses effectuées sur ces produits montrent que les deux couleurs n’étaient pas issues de produits naturels, mais qu’elles étaient obtenues le plus souvent, comme nous allons le voir, à partir de matières synthétisées chimiquement ou bien élaborées en mélangeant plusieurs composés.
LES
NÉCROPOLES DE THÈBES DE PHTHIOTIDE ET DE DÉMÉTRIAS
Cette étude se fonde principalement sur les ensembles archéologiques fouillés, ces dernières années, par la XIIIe Éphorie des antiquités préhistoriques et classiques de Volos dans la région maritime Sud-Est de la Thessalie. Des fards blancs et roses ont été retrouvés sous forme de poudre à l’intérieur des pyxides qui accompagnaient les morts en tant qu’offrandes, sur deux sites anciens, Thèbes de Phthiotide et Démétrias. À l’époque classique, la position stratégique de la « très splendide » ville de Thèbes de Phthiotide 9 (située à l’extrémité Nord de la plaine de « Krokion » qui correspond à celle de la ville moderne d’Almyros, à l’ouverture de la plaine thessalienne vers la mer) ainsi que l’économie florissante qui s’ensuit, lui ont permis d’occuper la première place parmi les villes de Phthiotide et de créer sa propre monnaie 10. Les fondations de son important port à Pyrassos 11 sont encore conservées dans la bourgade contemporaine de Nea Anchialos. Ce port s’est développé au milieu du ive s. av. J.-C., quand les Thessaliens et les Phéraiens l’utilisaient comme unique port de Thessalie, puisque Pagasée était devenue alors port des Macédoniens. Par ailleurs, le nom de la ville est mentionné par des auteurs grecs de ce même ive s., après le synœcisme des villes et des bourgades de la région (Pyrassos, Phylakè, etc.). À la fin du ive et au début du iiie s. (vers 293 av. J.-C.), Démétrios Poliorcète rassembla les communes du fond du golfe Pagasétique pour fonder,
5. 6. 7. 8. 9. 10. 11.
T. L. Shear, « Psimythion », dans Classical Studies Presented to Edward Capps on his Seventeenth Birthday (1936), p. 314-317. Voir par exemple Platon, Lysis 1, 14 ; Aristophane, L’Assemblée des femmes, 878-880 ; Xénophon, Économique X 2, 3 ; Plutarque, Alceste XXXIX 3, 1 ; Athénée, Deipnosophistes XIII 6, 3. Euboulos, Comicorum atticorum fragmenta II, p. 198, no 98. Souda, s.v. « ƻƭuǀƬƭƲư ». Pour la psimythion trouvée dans la tombe d’un acteur, voir U. Knigge, Der Kerameikos von Athen. Führung durch Ausgrabungen und Geschichte (1988), p. 114, fig. 111. Strabon, IX 431, 433, 435. W. M. Leake, Travels in Northern Greece IV (1835), p. 358. A. Arvanitopoulos, PAE 1907, p. 161 ; PAE 1908, p. 163. E. Rogers, The Copper Coinage of Thessaly (1932), p. 174, fig. 306. Strabon, IX 435, 14.
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par synœcisme, Démétrias 12 qui devint rapidement un port de commerce international 13, avec des habitants venant de toute la Grèce ainsi que de la Méditerranée. Par la suite, l’antagonisme entre Thèbes de Phthiotide et Démétrias, la nouvelle ville puissante du golfe Pagasétique, fut la cause de la conquête de Thèbes de Phthiotide par Philippe V de Macédoine, en 217 av. J.-C., fait qui provoqua sa décadence progressive 14. Les fouilles effectuées ces dernières décennies ont révélé de larges secteurs des deux villes 15. Thèbes de Phthiotide Le site ancien a été localisé, en 1835, par W. M. Leake d’après les témoignages de Strabon 16. Plusieurs fouilles, de sauvetage notamment, ont été entreprises dans les nécropoles de Thèbes de Phthiotide 17 qui s’étendent autour des vestiges de la ville ancienne. La durée de l’usage de ces cimetières est extrêmement longue, couvrant les époques du Bronze Moyen, puis les époques archaïque, classique, hellénistique, romaine et paléochrétienne. Les fouilles ont mis au jour un ensemble d’environ 500 tombes correspondant à une typologie particulièrement riche – des tombes à ciste de pierre, des tombes à tuiles, des sépultures en forme de coffret (larnakès) de terre cuite, des sépultures dans
12.
Strabon, IX 5, 14-15. Plutarque, Démétrios 53, 3. Voir A. Batziou-Eustathiou, « ƉƫuƫƷƴƭƠƨƥƎƶƷƲƴƭƮƠ ƶƷƲƭƺƩƣƥƁƨƴƸƶƫƷƫƵƳƿƯƫƵ », dans E. Kontaxi (éd.), ƆƴƺƥƣƥƉƫuƫƷƴƭƠƨƥƌƨƭƥƨƴƲuƢƷƫƵƶƷƲƺƴƿưƲ ƕƴƥƮƷƭƮƠ)uƩƴƣƨƥƵƒƲƩuƦƴƣƲƸ ƇƿƯƲƵ (1996), p. 11-14 ; B. Intzesiloglou, « ƔƶƸưƲƭƮƭƶuƿƵ Ʈƥƭ ƫ ƳƲƯƭƷƭƮƢ ƲƴƧƠưƼƶƫ ƷƫƵ ƉƫuƫƷƴƭƠƨƥƵ Ʈƥƭ ƷƲƸ ƏƲƭưƲǀ ƷƼư ƑƥƧưƢƷƼư ƮƥƷƠ Ʒƫư ƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƢ ƳƩƴƣƲƨƲ », dans E. Kontaxi, op. cit., p. 91-109.
13.
Tite-Live, XXXIX 25. Polybe, V 100, 8. Thèbes de Phthiotide : murailles, sanctuaire d’Athéna et d’Asclépios, théâtre, habitats, cimetières, voir AD 46 (1991), Chron., p. 208. Démétrias : agora, sanctuaires, théâtre, habitats, cimetières, voir AD 36 (1981), p. 249-250 ; AD 37 (1982), p. 227-229 ; AD 40 (1985), Chron., p. 185-186 ; AD 42 (1987), Chron., p. 251-253 ; AD 43 (1988), Chron., p. 241 ; AD 44 (1989), Chron., p. 241-242, 227-228 ; AD 45 (1990), Chron., p. 197-199 ; AD 47 (1992), Chron., p. 229 ; AD 48 (1993), Chron., p. 229-230 ; A. Batziou-Eustathiou, « ƊƴƧƥƶƣƩƵ ƶƷƲ ƆưƠƮƷƲƴƲ ƉƫuƫƷƴƭƠƨƲƵ 1991-1997 », dans P. Kalogerakou (éd.), ƕƴƥƮƷƭƮƠ ƫƵ ƊƳƭƶƷƫuƲưƭƮƢƵ ƗƸưƠưƷƫƶƫƵ k5Ʋ ſƴƧƲ ƷƼư ƊƹƲƴƩƭǁư ƆƴƺƥƭƲƷƢƷƼư Ʈƥƭ ƒƩƼƷơƴƼư ƑưƫuƩƣƼưƷƲƸƙƕƕƔƶƷƫƍƩƶƶƥƯƣƥƮƥƭƶƷƫưƩƸƴǀƷƩƴƫƳƩƴƭƲƺƢƷƫƵ » (2000), p. 293-300 ; A. Batziou-Eustathiou, P. Triantaphyllopoulou, « ƒƩƿƷƩƴƥƨƩƨƲuơưƥƥƳƿƷƲưƆƴƺƥƭƲƯƲƧƭƮƿƺǁƴƲ ƷƫƵƉƫuƫƷƴƭƠƨƲư», dans P. Kalogerakou, op. cit., p. 301-307 ; A. Batziou-Eustathiou, « ƉƫuƫƷƴƭƠƵ 1998-2000 », dans A. Dimoglou (éd.), ƑưƫuƩƣƥƷƫƵƑƥƧưƫƶƣƥƵƕƴƥƮƷƭƮƠƗƸưƩƨƴƣƲƸƆưƠƨƩƭƱƫƷƲƸ
14. 15.
ƨƭƥƺƴƲưƭƮƲǀ uưƫuƩƭƥƮƲǀ ƳƯƲǀƷƲƸ ƷƲƸ #ƿƯƲƸ Ʈƥƭ ƷƫƵ ƩƸƴǀƷƩƴƫƵ ƳƩƴƭƲƺƢƵ ƇƿƯƲƵ ƑƥƅƲƸ 16. 17.
(2002), p. 108-115. Strabon, IX 431, 433, 435. W. M. Leake (n. 9), p. 358. Pour la nécropole Est, voir D. R. Theocharis, AD 16 (1960), p. 183 ; D. R. Theocharis, G. Chourmouziades, « ƆưƥƶƮƥƹƥƣ ƷƠƹƼư ƚƬƭƼƷƣƨƼư ƍƫƦǁư », AAA III (1970), p. 204-207. Pour la nécropole Ouest, voir V. Adrymi-Sismani, « ƆƧƴƿƵƗƥƮƲuƢƷƴƲƸ », AD 47 (1992), Chron., p. 225-226 ; AD 48 (1993), Chron., p. 235-236. V. Adrymi-Sismani, « ƘƥƹƭƮƠƶǀưƲƯƥƥƳƿƷƲƨƸƷƭƮƿƒƩƮƴƲƷƥƹƩƣƲ ƷƼư ƚƬƭƼƷƣƨƼư ƍƫƦǁư », dans ƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƢ ƏƩƴƥuƭƮƢ ƥƳƿ Ʒƫ ƍƩƶƶƥƯƣƥ (2000), p. 133-146 ; V. Adrymi-Sismani, St. Alexandrou, « ƘƥƹƭƮƠƶǀưƲƯƥƥƳƿƷƲưƩƮƴƲƷƥƹƩƣƲƷƼưƚƬƭƼƷƣƨƼưƍƫƦǁư », dans ƕƴƥƮƷƭƮƠƗƘˣƊƳƭƶƷƫuƲưƭƮƢƵƗƸưƠưƷƫƶƫƵƧƭƥƷƫưƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƏƩƴƥuƭƮƢ ƇƿƯƲƵ ƆƳƴƭƯƣƲƸ (2004), p. 73-88.
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des vases, et de simples fosses – ainsi qu’un mobilier abondant, notamment des vases, des figurines en terre cuite, des strigiles, des monnaies, des miroirs, des couronnes d’or, etc. Cet ensemble comprend également un grand nombre de pyxides de terre cuite 18 ou de plomb 19, ainsi que des lékanès. La plupart de ces pyxides étaient utilisées en tant que boîtes pour la conservation des bijoux des défunts, comme le montrent les représentations en relief sur les stèles funéraires. Néanmoins, il semble qu’une catégorie de pyxides de terre cuite, en forme de fuseau et à couverture plate, était fabriquée exclusivement pour l’usage des fards. La pyxide A11 (fig. 1a), notamment, est remplie de produits cosmétiques sous forme de poudre blanche compacte en excellent état de conservation. Cette pyxide à vernis noir était contenue dans une urne de terre cuite elle-même fermée. Elle a été trouvée avec d’autres offrandes qui accompagnaient les corps de deux adultes dont la sépulture date du milieu du iiie s. av. J.-C. 20. Démétrias, nécropole Nord Les vestiges architecturaux actuels appartenant à la ville hellénistique de Démétrias comprennent l’acropole, le théâtre du secteur Ouest, un palais et l’agora du secteur Est, ainsi que plusieurs nécropoles. La nécropole Nord de la ville s’étend en dehors des murailles situées sur la colline nommée « Palatia » 21. Le cimetière est localisé aux pieds de la colline, sur le sol argileux ; il comporte des sépultures situées dans les cavités du rocher naturel, tout au long de la source de « Bourboulithra ». Les fouilles de sauvetage, qui ont été effectuées en 1995-1996, dans le cadre du projet d’épuration biologique du secteur urbain de Volos 22, ont révélé 919 tombes, ainsi qu’un mobilier de 3 600 objets. L’usage de la nécropole couvre une période longue, qui s’étend de l’époque classique jusqu’à l’époque romaine. Les tombes du ve et du ive s. av. J.-C. appartiennent, en fait, à la ville de Pagasée qui précède celle de Démétrias. Les tombes qui datent du iiie s. av. J.-C. et jusqu’au ive s. apr. J.-C. témoignent de la continuité de l’occupation de la ville. Le cimetière comporte plusieurs types de tombes le plus souvent individuelles, parmi lesquelles on distingue des tombes à fosse creusées dans le sol naturel, qui sont les plus communes, ou encore des tombes à tuiles, des tombes à ciste, et des sépultures dans des vases – surtout des amphores – qui ont été placées en couches superposées de 40 à 80 cm sous la surface. Des stèles funéraires de marbre y ont été trouvées, portant des inscriptions qui indiquent 18. 19. 20. 21.
22.
A38, A44, A20, A11, A15, A36. Les pyxides A38 et A36 ne contiennent aucun produit. A32, A27. La pyxide A27 ne contient pas de produit. Terrain Tokalis, tombe 3. La datation de la pyxide a été effectuée à l’aide des autres trouvailles de la tombe : voir infra, p. 249. Voir A. Intzesiloglou, AD 36 (1981), p. 249 ; AD 37 (1982), p. 226 ; AD 39 (1984), p. 144. A. Batziou-Eustathiou, AD 37 (1982), p. 229 ; AD 45 (1990), p. 199-201 ; E. Nikolaou, AD 51 (1996), p. 336-337. Voir aussi id., « ƆưƥƶƮƥƹƢƷƲƸƇƲƴƩƣƲƸ/ƩƮƴƲƷƥƹƩƣƲƸƷƫƵƥƴƺƥƣƥƵƉƫuƫƷƴƭƠƨƥƵ », dans P. Kalogerakou (n. 15), p. 309-314 ; id., « ƘƲƇƿƴƩƭƲƒƩƮƴƲƷƥƹƩƣƲƷƫƵƆƴƺƥƣƥƵƉƫuƫƷƴƭƠƨƥƵ », dans ƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƏƩƴƥuƭƮƢ(n. 17), p. 45-58 ; id., « ƔƭƳƢƯƭưƲƭƯǀƺưƲƭƥƳƿƷƲƇƿƴƩƭƲƒƩƮƴƲƷƥƹƩƣƲƷƫƵ ƆƴƺƥƣƥƵƉƫuƫƷƴƭƠƨƥƵ», dans ƕƴƥƮƷƭƮƠƗƘˣƊƳƭƶƷƫuƲưƭƮƢƵƗƸưƠưƷƫƶƫƵ(n. 17), p. 47-66. E. Nikolaou (n. 21, dans P. Kalogerakou).
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a
b
c
d
Fig. 1 — a. Pyxide remplie de fard blanc provenant de Thèbes de Phthiotide (A11). b. Pyxide remplie de fard blanc provenant de Démétrias (BE15544). c. Détail du contenu du flacon provenant de Démétrias. d. Fard rose provenant d’une lékanè brisée (BE22624) de Démétrias (Cl. V. Adrymi).
l’identité des morts. D’une façon générale, la quantité considérable des éléments découverts, les représentations figurées sur les stèles et les éléments livrés par les inscriptions témoignent du caractère important et panhellénique de la ville qui reçoit et héberge des citoyens de plusieurs régions du monde grec. Les offrandes accompagnant les morts étaient riches et variées. Les tombes ont livré de nombreux vases de terre cuite (askoi et biberons, puisettes et amphores, cruches, canthares, bols sans anse, assiettes et pyxides, lampes, unguentaria), des figurines, des monnaies et des miroirs 23. Parmi ces trouvailles, on note la présence d’un grand nombre de pyxides de terre cuite, de cuivre et de plomb 24. Elles sont souvent accompagnées d’instruments particuliers destinés aux soins de beauté, tels que des spatules ou des tiges pour les oreilles. Certaines pyxides (comme à Thèbes de Phthiotide) contiennent des produits cosmétiques. Elles ont été trouvées, dans certains cas, hermétiquement fermées par un couvercle (fig. 1b). Elles contiennent des poudres blanches, blanchâtres ou roses, 23. 24.
E. Nikolaou, dans ƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƏƩƴƥuƭƮƢ. E. Nikolaou, dans ƕƴƥƮƷƭƮƠƗƘˣƊƳƭƶƷƫuƲưƭƮƢƵƗƸưƠưƷƫƶƫƵ.
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en parfait état de conservation 25. D’autres pyxides ne présentent pas uniquement des traces de cosmétiques 26. Certaines appartiennent à des ensembles bien datés. Elles sont du type D de l’Agora, qui remonte à la seconde moitié du ve s. av. J.-C. et se perpétue jusqu’au milieu du iiie s. av. J.-C. 27. Leur utilisation dans les tombes de Démétrias daterait, d’après les autres découvertes, de la fin du ive s. jusqu’à la première moitié du iiie s. av. J.-C. 28. Néanmoins, l’une d’elles est datée d’après le milieu du iiie s. av. J.-C. Nous notons que le mauvais état de conservation des squelettes ne permet pas de tirer des conclusions fermes pour l’identification du sexe des morts, même si des pyxides semblables ont été trouvées majoritairement dans des tombes de femmes dans le monde grec. Par exemple, de tels objets ont été découverts en Macédoine, dont une contenant des restes de pigment blanc 29. Leur ergonomie – qui rappelle par ailleurs la forme du récipient utilisé aujourd’hui pour la conservation de certains produits de beauté – est unique et les différencie des autres pyxides utilisées pour conditionner les bijoux ou des ossements.
ANALYSE
DES PRODUITS COSMÉTIQUES
Les échantillons Des prélèvements de poudre ont été réalisés à l’aide d’un scalpel. Un échantillon d’une dizaine de milligrammes permet le plus souvent une caractérisation fine de ses constituants. L’étude s’est focalisée sur cinq tombes : 25.
26. 27.
28.
29.
C’est le cas des pyxides BE15544 et BE15545 qui proviennent des tombes 393 et 417 ; voir E. Nikolaou, « ƕƢƯƭưƩƵƳƸƱƣƨƩƵƥƳƿƷƫưƥƴƺƥƣƥƉƫuƫƷƴƭƠƨƥ», dans ƕƴƥƮƷƭƮƠƋŻƊƳƭƶƷƫuƲưƭƮƢƵƗƸưƠưƷƫƶƫƵƧƭƥƷƫư ƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƏƩƴƥuƭƮƢ ƆƣƧƭƲ (2011), p. 799-802. Comme les pyxides BE16158 et BE16683 provenant de la tombe 771, ainsi que BE22624 de la tombe 439. B. A. Sparkes, L. Tallcott, Black and Plain Pottery of the 6th, 5th and 4th Centuries B.C., Agora XII 1 (1970), p. 173, 177-178, nos 1311-1312 ; XII 2, fig. 11 ; S. I. Rotroff, Hellenistic Pottery: Athenian and Imported Wheelmade Table Ware and Related Material, Agora XXIX (1997), p. 363, nos 1247, 1249, fig. 93. Voir M. Lilibaki-Akamati, ƐƥƱƩƸƷƲƣ ƍƥƯƥuƼƷƲƣ ƘƠƹƲƭ ƕơƯƯƥƵ (1994), p. 242, nos 149-152, fig. 21. St. Drougou, G. Touratsoglou, ƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƲƣ ƯƥƱƩƸƷƲƣ ƷƠƹƲƭ ƇƩƴƲƣƥƵ (1980), p. 83-84. C. W. Blegen, H. Palmer, R. S. Young, The North Cemetery, Corinth XIII (1964), p. 291, tombe 491, no 8, fig. 76. A. Doulgeri-Intzesiloglou, « ƘƥƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƠƯƸƺưƠƴƭƥƷƼưƚƩƴǁư », dans ƕƴƥƮƷƭƮƠ ƈŻƗƸưƠưƷƫƶƫƵƧƭƥƷƫưƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƏƩƴƥuƭƮƢ ƆƬƢưƥ (1994), p. 366, tombe 10 et n. 13. Pour plus de détails, voir E. Nikolaou, dans ƕƴƥƮƷƭƮƠƗƘˣƊƳƭƶƷƫuƲưƭƮƢƵƗƸưƠưƷƫƶƫƵ, p. 47-66 ; E. Nikolaou (n. 25). Une pyxide à couvercle, semblable aux pyxides les plus anciennes de Démétrias a été trouvée à Aineia en Macédoine, dans une tombe à ciste très riche en mobilier funéraire qui appartenait à une femme adulte décédée dans la force de l’âge, voir à ce propos I. Vokotopoulou, ƘƥƹƭƮƲƣƘǀuƦƲƭƆƣưƩƭƥƵ (1990), p. 69, no 7702, et p. 51-52, n. 97 (tumulus I, tombe III). Par ailleurs, un grand nombre de pyxides – dont une contient des traces de poudre blanche − a été découvert dans des tombes à chambre appartenant à des femmes de Véroia, datées des iiie et iie s. av. J.-C. (V. Alamani, K. Tzanavari, « ƕƢƯƭưƩƵƳƸƱƣƨƩƵƥƳƿ ƷƫƇơƴƲƭƥƛƴƲưƲƯƲƧƭƮơƵƩưƨƩƣƱƩƭƵ », dans ƇˣƊƳƭƶƷƫuƲưƭƮƢƗƸưƠưƷƫƶƫƧƭƥƷƫưƊƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƏƩƴƥuƭƮƢ [1990], p. 151-159).
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– la tombe 3 du terrain Tokalis, dans la nécropole Est de Thèbes de Phthiotide (où 20 autres tombes ont été découvertes), est une tombe à tuiles datée de la fin du ive ou du début du iiie s. av. J.-C. La tombe a livré une pyxide de céramique (A11) ainsi que des tessons d’une seconde pyxide, des unguentaria, un canthare à vernis noir, un bol à vernis rouge, une lampe à embouchure unique qui porte des traces de feu. La première pyxide préserve une poudre compacte blanche en grande quantité. Bien que le couvercle ait disparu, la matière est extrêmement bien conservée et remplit entièrement le récipient ; – la tombe 396 de la nécropole Nord de Démétrias est une tombe à fosse datée de la fin du ive s. av. J.-C., contenant le squelette relativement mal conservé d’une personne d’une hauteur de 1,60 m. Un alabastre, un vase ouvert, une lampe ont été retrouvés associés à une pyxide de céramique (BE15544). La boîte est presque totalement remplie d’une poudre blanche et compacte qui a été d’autant mieux préservée qu’un couvercle ajusté est toujours présent. La partie supérieure du contenu est de forme concave, portant des traces d’utilisation pour l’application du fard sur le visage ; – la tombe 417 de la même nécropole est une tombe à fosse un peu plus riche que la précédente, avec une pyxide (BE15545), un miroir de bronze, sept petits vases (dit lacrymatoires), deux têtes de femme de terre cuite, un anneau de bronze et une monnaie de bronze. Elle date de la première moitié du iiie s. av. J.-C. La pyxide contient un petit bloc de poudre blanche légèrement grisâtre ; – la tombe 439 de la même nécropole, couverte de tuiles est datée de la fin du iiie s. av. J.-C. Une lékanè fragmentaire (BE22624) contient dans sa partie inférieure de petits blocs de poudre blanche ou rose (fig. 1c). Le produit rose se présente sous la forme de fragments de pastilles de 20 mm de diamètre au maximum. Les blocs blancs plus ou moins dispersés semblent avoir été préparés sous une autre forme et ont été associés au pigment rose dans cette tombe ; – la tombe 771 de la même nécropole contient un petit vase et deux pyxides datant du début du iiie s. av. J.-C. (BE16683 et BE16158). Les deux pyxides ne possèdent pas de couvercle et ne présentent que très peu de matière (blanc jaunâtre ou grisâtre) sur les parois internes, essentiellement sous forme de petites concrétions. Elles sont toutes les deux très altérées. Les techniques analytiques Une procédure analytique complète doit être mise en œuvre pour comprendre la nature de la matière et la distinguer des pollutions issues de l’enfouissement. Le prélèvement est, dans un premier temps, examiné par microscopie optique pour déterminer son caractère homogène ou hétérogène, la couleur de ses éléments constitutifs ainsi que leurs tailles. Cet examen est complété par une observation sous lumière ultraviolette qui permet de mettre en évidence la présence de certains liants, de colorants organiques ou de minéraux à la fluorescence caractéristique. Un microscope Nikon, Labophot-2, muni d’une source Xénon, est utilisé.
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L’échantillon est alors étudié par microscopie électronique à balayage (MEB, modèle Philips XL30CP) muni d’un système d’analyse élémentaire des rayons X pour déterminer la morphologie et la composition chimique de chaque constituant de la poudre : il est possible d’en déduire des informations sur les pratiques de synthèse ou de broyage ; la finesse de la poudre est un paramètre important pour son application cosmétique et sa capacité à se fixer sur la peau. La présence de matières minérales nécessite une analyse par diffraction des rayons X pour l’identification et la détermination quantitative des composés cristallins. Il a été possible de réaliser les mesures directement sur les poudres, sans préparation particulière. En laboratoire, ont été utilisés un diffractomètre D5000 Brüker ou bien les lignes de faisceau ID22 et ID31 de l’installation européenne de rayonnement synchrotron de Grenoble 30. Enfin, la microspectroscopie Raman complète cette panoplie d’outils pour l’identification d’autres produits minéraux et surtout des molécules colorantes. Cette technique d’analyse structurale vibrationnelle est particulièrement utile pour caractériser les molécules colorantes issues de plantes (microscope Raman Dilor XY équipé d’un laser violet à 457,9 nm du Laboratoire de dynamique, interactions et réactivités de Thiais). Ces différentes méthodes d’analyse conservent l’intégrité de l’échantillon. Il est parfois ensuite nécessaire d’employer d’autres méthodes qui nécessitent sa destruction. Une partie minuscule de l’échantillon est placée, sans aucune préparation préalable, dans une cellule de compression en diamant pour l’analyse par spectrométrie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR). Cette technique d’analyse conduit à la caractérisation des fonctions chimiques à la fois des produits organiques et inorganiques : son emploi permet de mettre en évidence la présence (ou l’absence) de liant organique dans la matrice minérale. Cette méthode est également employée pour préciser la nature des liants après extraction des fractions solubles de l’échantillon dans différents solvants. Les techniques de chromatographie prennent en dernier lieu le relais pour une identification précise des molécules.
LA
NATURE DES PRODUITS
Le fard rose Aux époques grecque et romaine, les fards roses les plus souvent mentionnés dans les textes sont des pigments laqués, c’est-à-dire des produits synthétiques élaborés à partir de minéraux riches en aluminium (comme l’alunite, un sulfate d’aluminium et de potassium) et de colorants extraits de plantes telles que la garance, l’orseille, l’acanthe (dont un certain type fournissant un colorant violet) ou d’autres substances tel le jus de mûre. Les analyses chimiques 31 de l’échantillon de Démétrias confirment cet emploi 30. 31.
E. Welcomme et al., « Investigation on White Pigments Used as Makeup during the Greco-Roman Period », Applied Physics A 83, 4, (2005), p. 551-556. Ces analyses ont été réalisées grâce au développement de méthodologies analytiques nouvelles (MALDI-ToF et SERS) mises en œuvre en collaboration avec l’Institut de chimie des substances naturelles du CNRS à Gif-sur-Yvette et le Laboratoire de dynamique, interactions et réactivité de Thiais.
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et permettent d’identifier des marqueurs moléculaires caractéristiques de la substance végétale à l’origine de la couleur rose. Ici, des anthraquinones sont détectées et elles sont caractéristiques de l’emploi des plantes de la famille des Rubiacées, comme la garance des teinturiers (Rubia tinctorum L.), la garance sauvage (Rubia perigrina L.), la garance indienne (Rubia cordifolia L.), le gaillet vrai (Galium verum L.) ou encore de l’aspérule des teinturiers (Asperula tinctoria L.). La nature des molécules d’anthraquinones détectées (pseudopurpurine, purpurine et munjistine) et l’absence de l’une d’entre elles (alizarine) conduisent à penser que de la garance sauvage fut utilisée dans ce cas. Il est difficile d’aller plus loin dans l’interprétation, car des différences de concentration de colorants peuvent être observées selon la partie de la plante utilisée (la partie ligneuse de la racine ou son écorce), son âge et son environnement, ou encore le mode de préparation du pigment laqué (le temps de macération des racines, la composition de la solution, son alcalinité et la température des bains d’extraction). En fait, ce type de pigment était synthétisé selon des protocoles décrits par divers auteurs, notamment par Vitruve : « On compose encore des couleurs pourprées, en teignant la craie avec les racines de la garance et de l’hysginum. Les fleurs produisent aussi d’autres couleurs. Lorsque les teinturiers veulent imiter l’ocre jaune de l’Attique, ils mettent dans un vase plein d’eau des violettes sèches, qu’ils font bouillir sur le feu. Lorsque l’infusion est achevée, on verse le tout dans un linge, d’où l’on exprime avec les mains l’eau colorée par les violettes. On la reçoit dans un mortier, on y répand de la craie érétrienne, et en la broyant on obtient la couleur de l’ocre jaune de l’Attique 32 ». Il semble donc que la maîtrise de l’extraction des colorants était détenue par les teinturiers qui pouvaient imprégner de couleur des argiles ou de la craie en même temps que des étoffes à traiter avec de la pourpre ou de la garance 33. Une économie spécifique s’est sans doute organisée autour de ces produits, les artisans cherchant vraisemblablement à tirer profits de leur savoir-faire en revendant au prix fort pour la peinture et les cosmétiques des pigments laqués roses de très belle couleur et si stables dans le temps qu’ils sont parvenus jusqu’à nous. D’autres analyses effectuées sur des échantillons provenant de sites de l’époque romaine (Trèves, Pompéi, Cologne) ont également montré l’emploi de ces pigments laqués. En Grèce, à la même période, les matières retrouvées dans les tombes à Derveni, à Érétrie ou au cimetière du Céramique à Athènes ont révélé la préparation de rose en éclaircissant des pigments rouges tels que le cinabre (sulfure de mercure HgS), l’hématite (oxyde de fer Fe2O3) ou l’ocre (argile rouge riche en oxydes de fer) par des pigments blancs (argile, craie ou céruse) 34. 32. 33. 34.
Vitruve, De Architectura VII 14 (trad. Ch. L. Maufras). Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 26-27. E. Van Elslande, S. Lecomte, A.-S. Le Hô, « Micro-Raman Spectroscopy (MRS) and SurfaceEnhanced Raman Scattering (SERS) on Organic Colourants in Archaeological Pigments », Journal of Raman Spectroscopy 39, 8 (2008), p. 1001-1006. E. Van Elslande et al., « Analysis of Ancient GrecoRoman Cosmetic Materials Using Laser Desorption Ionization and Electrospray Ionization Mass Spectrometry », Analytical and Bioanalytical Chemistry 390, 7 (2008), p. 1873-1879. Les échantillons proviennent de la tombe E de Derveni, du mobilier de la tombe d’Érétrie conservé au musée du Louvre
251
VASSILIKI ADRYMI ET AL.
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Le fard blanc La nature des produits Les observations par microscopie électronique à balayage des fards blancs montrent que ces poudres sont homogènes et se présentent sous la forme de petits grains de diamètre souvent inférieur au micromètre et de forme parfois légèrement aplatie. Elles sont principalement composées de deux carbonates de plomb, la cérusite PbCO3 et l’hydrocérusite PbCO3.2Pb (OH)2, révélés par une analyse quantitative des constituants minéraux par diffraction des rayons X. Les échantillons BE15544 et BE15545 sont de compositions très proches. Ils sont majoritairement constitués d’hydrocérusite avec une faible proportion de cérusite. Les autres échantillons blancs ne contiennent quasiment que de la cérusite (tabl. 1). Ni liant ni aucune substance organique n’ont été détectés par les analyses. Ces dernières correspondent bien au produit le plus symbolique des fards de cette époque, le psimythion, qui était synthétisé à partir de plomb. On note que les formules des produits égyptiens de maquillage (certains datant du IIIe millénaire av. J.-C.) étaient élaborées également avec des substances minérales à base de plomb, incluant la cérusite, mais aussi des minéraux de natures différentes telles que la galène, la laurionite et la phosgénite 35. Le carbonate neutre de plomb ou cérusite est un composé que l’on trouve également dans la nature comme minerai de plomb. Par contre, le carbonate basique du plomb ou hydrocérusite est plus rare. Il faut donc se poser la question de l’origine naturelle ou synthétique de ces fards archéologiques. La morphologie des grains de pigment donne une première indication (fig. 2) : l’homogénéité de la taille des grains est remarquable et n’aurait pu être que très difficilement obtenue à partir d’une substance naturelle. En effet, un broyage du minerai naturel induit une grande variabilité de taille de grains et souvent des cristaux facettés dus aux clivages des minéraux selon des orientations particulières. Il s’avère que la présence d’hydrocérusite indique également qu’une origine synthétique est vraisemblable puisque qu’elle ne peut provenir de la dégradation accidentelle de la cérusite étant donné le parfait état de conservation des pyxides. La seconde indication de l’origine synthétique est liée aux nombreuses descriptions du mode de préparation du psimythion, appelé aussi céruse ou blanc de plomb. Cette synthèse chimique, qui restera quasi inchangée jusqu’au milieu du xixe s., est décrite dès le ive s. av. J.-C. par Théophraste 36, puis par Vitruve 37, Dioscoride 38 et Pline l’Ancien 39. Ainsi, ces textes nous apprennent que la préparation du pigment blanc est fondée sur la transformation de briquettes ou de lames de plomb en une substance blanche sous
35.
36. 37. 38. 39.
(Ca508) et de la tombe 64, zone 24 du cimetière du Céramique à Athènes. Voir ici même infra, n. 48 à 51. G. Tsoucaris, Ph. Walter, « Ancient Crystalline Materials for the Arts of Beauty: Egyptian versus Greek Cosmetics », dans Congrès international de cristallographie, Florence, Italie (Août 2005), Acta Cryst. (2005), A61, c43 ; G. Tsoucaris, J. Lipkowski, Molecular and Structural Archaeology. Cosmetic and Therapeutic Chemicals (2003). Théophraste, De Lapidibus 56. Vitruve, De Architectura VIII 6, 1. Dioscoride, 5, 88, 1-6. Voir supra, n. 33.
253
LES FLACONS À FARD À L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE. EXEMPLES DE LA RÉGION DE THESSALIE
Origine
Échantillon
Aspect
Démétrias
Tombe 396 - BE15544 Tombe 417 - BE15545 Tombe 439 - BE22624 Tombe 771 - BE16158 Tombe 771 - BE16683 Tombe 3 - pyxide A11
Poudre compacte Poudre compacte Poudre compacte Traces de poudre Traces de poudre Poudre compacte
Thèbes de Phthiotide
Composition (fraction massique %) Cérusite Hydrocérusite PbCO3 2PbCO3.Pb(OH)2 82 84 0 5 5 10
18 16 100 95 95 90
Tabl. 1 — Composition des échantillons de Thessalie analysés par diffraction des rayons X quantitative. a
b
Fig. 2 — a. Observations au microscope électronique à balayage de la morphologie des grains de céruse : cérusite, pyxide A11, Thèbes de Phthiotide (cl. V. Adrymi). b. Observations au microscope électronique à balayage de la morphologie des grains de céruse : cérusite et hydrocérusite, pyxide BE15544, Démétrias (cl. V. Adrymi).
l’action de vinaigre, du gaz carbonique et d’une chaleur modérée. En détail, la préparation du blanc de plomb suit les étapes suivantes : tout d’abord, une attaque chimique du plomb métallique (sous forme de feuilles, de copeaux ou de grilles) par les vapeurs d’acide acétique issues du vinaigre, ensuite une transformation en carbonate dans un milieu en fermentation (fumier, tannée). Par la suite, cette substance est séchée, grattée, broyée, jusqu’à ce qu’elle soit réduite en poudre de couleur blanche. Parfois une mise en forme de la poudre permet d’obtenir des pastilles. Les qualités de la céruse La céruse est d’un blanc éclatant et d’un pouvoir couvrant exceptionnel, tant à cause de ses propriétés intrinsèques (indice élevé de réfraction de la lumière) que de sa technique de synthèse chimique qui peut conduire, dans certaines conditions, à la formation de très petits grains en forme de plaquettes très fines capables de recouvrir aisément la surface de la peau 40. C’est certainement ces propriétés qui ont fait que la céruse est devenue la matière de référence pour le maquillage mais aussi pour la peinture, malgré la menace pour la 40.
I. Bardies-Fronty, Ph. Walter, M. Bimbenet-Privat (n. 1).
VASSILIKI ADRYMI ET AL.
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santé. Pline l’Ancien ne soulignait-il pas que la céruse a les mêmes propriétés que les autres produits blancs employables comme fards « mais c’est la plus douce de toutes ; en outre, les femmes l’emploient pour se blanchir le teint. Pour l’usage interne, c’est un poison 41 ». Les dangers de cet usage de composés de plomb sont fréquemment signalés et participent à la controverse sur l’intérêt d’un produit qui fait que le visage des femmes peut s’abîmer. De plus, des réactions induites sur la peau nécessitaient des usages toujours croissants de matière pour les cacher. Le médecin Galien rapportait ainsi une anecdote : « Une fois lors d’un banquet, Phryné, ayant aperçu des femmes maquillées de céruse et de fard rose, a demandé, comme jeu, qu’on apporte de l’eau et que l’on se lave le visage, puis, que l’on s’essuie aussitôt avec un tissu – ce qu’elle-même a fait. Le visage de toutes les femmes était plein de vilaines taches, tel un épouvantail. Elle seule, Phryné est apparue encore plus belle, authentiquement, sans avoir besoin d’aucune ruse cosmétique 42 ». Notons que du carbonate de plomb a été découvert et analysé dans différents cas, provenant de sites datés de la même période : une matière extraite d’un vase en verre daté du iiie-ive s. av. J.-C. qui a été examiné à l’Antikenmuseum de Berlin 43 ; un échantillon découvert dans une tombe à proximité du musée national d’Archéologie d’Athènes 44 ; un autre dans la tombe d’une femme datant du début du ive s. av. J.-C. et mis au jour lors de fouilles réalisées à Corinthe 45 ; d’autres analyses ont montré l’emploi de ce pigment dans du matériel funéraire de tombes d’Attique datant du ve s. av. J.-C. 46. Pour notre part, nous avons également identifié du blanc de plomb, majoritairement constitué de cérusite, dans un échantillon provenant de la tombe E de la nécropole de Derveni (fin du ive s. av. J.-C.) 47, trois échantillons provenant de blocs découverts durant des fouilles récentes à Éleusis et datés de la fin ve s. av. J.-C. 48, deux échantillons provenant de la tombe 24, zone 64 du cimetière du Céramique à Athènes (fin ve s. av. J.-C.) 49 et un échantillon conservé au musée du Louvre et provenant d’une tombe de jeune fille dans la nécropole située à l’Ouest de la ville antique d’Érétrie 50.
41. 42. 43. 44. 45. 46. 47. 48. 49. 50.
Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXIV 54. Galien, Adhortatio ad artes addiscendas 10. Voir, à ce propos, G. Platz-Horster, Antike Gläser, Exposition Berlin 1976-1977 (1976), p. 56, no 99. O. A. Rhousopoulos, Beitrage aus der Geschichte der Chemie den Gedachtnis von Georg W. A. Kahlbaum (1909), p. 193. T. L. Shear (n. 5) ; W. Foster, « Grecian and Roman Stucco, Mortar, and Glass », Journal of Chemical Education XI (1934), p. 225-223. E. R. Caley, « The American Excavations in the Athenian Agora: Twenty-Sixth Report, Ancient Greek Pigments from the Agora », Hesperia XIV (1945), p. 153-155. Échantillon E32a. Il s’agit de bloc de pigments blanc de 2,9 cm de diamètre. Voir à ce sujet P. G. Themelis, I. P. Touratsoglou, ƔƭƷƠƹƲƭƷƲƸƉƩƴƦƩưƣƲƸ (1997). Échantillons EL01 et EL02 provenant d’un sarcophage féminin (no 14, OM130i et OM130k des fouilles de 1988) et EL12 provenant d’un autre sarcophage (OM137.23 des fouilles de 1988). Il s’agit de la tombe de Makareus, un jeune acteur et poète. Voir à ce sujet U. Knigge (n. 8), p. 114, fig. 111 ; W. K. Kovacsovics, De Eckterrasse an der Gräberstrasse des Kerameikos (1990). Musée du Louvre, CA508. Le blanc de plomb participe ici à la formulation d’un fard rose, par mélange avec un oxyde de fer.
255
LES FLACONS À FARD À L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE. EXEMPLES DE LA RÉGION DE THESSALIE
Nom latin
Nom moderne
Nature
Lieu de découverte
Cerusa
Céruse, blanc de plomb
Carbonates de plomb
Athènes, Démétrias, Thèbes de Phthiotide, Éleusis, Paestum, Pompéi
Melinum candidum
Terre de Mélos, terre de Samos
Argile blanche
Derveni
Eretria creta
Terre d’Érétrie
Argile blanche
Chia terra candicans
Terre de Chios
Argile blanche
Selinusia creta
Terre de Sélinonte
Argile blanche
Cimolia creta
Terre de Kimolos
Argile blanche
Éleusis
Creta
Craie, calcaire
Carbonate de calcium
Cythère, Derveni, Sindos, Amiens, Alésia, Strasbourg, Pompéi
Gupsum
Gypse
Sulfate de calcium
Éleusis, Cologne, Pompéi
Tabl. 2 — Liste des matières blanches décrites dans les textes romains et lieux de découverte déterminés par nos analyses de sites grecs et romains.
Un fard blanc de nature différente car composé de carbonate du calcium (craie) a été identifié dans le contenu d’un unguentarium de la tombe 21 de la nécropole Ouest d’Oropos 51. D’autres analyses 52 effectuées pour caractériser des fards de l’époque romaine montrent que cet usage important du blanc de plomb l’est peut-être surtout à l’époque hellénistique. La céruse n’a été identifiée que dans de rares cas alors que le gypse, la craie (carbonate de calcium) et des argiles blanches sont fréquemment découverts (tabl. 2). Par exemple, deux flacons à fard en forme d’oiseaux trouvés à Pompéi dans la tombe B de la porte de Stabies sont encore remplis d’une quantité importante de fard blanc constitué exclusivement de gypse (sulfate de calcium hydraté), sans aucun ajout de matière organique. La relation avec le gisement du Laurion On peut alors se demander pourquoi les Grecs ont procédé à la synthèse chimique du psimythion. Cette préparation artificielle d’un pigment largement employé pour la peinture et pour le maquillage peut en effet paraître surprenante alors que des minerais naturels pouvaient également être exploités. Nous pouvons considérer que l’importance économique des mines de plomb du Laurion 53, situées au Sud de l’Attique, a pu contribuer au développement de la production du blanc de plomb. Les minerais du Laurion, essentiellement de la galène, contenaient 51. 52. 53.
Voir M. I. Pologiorgi, ƑưƫuƩƣƥ ƷƲƸ ƉƸƷƭƮƲǀ ƒƩƮƴƲƷƥƹƩƣƲƸ ƷƲƸ ƔƴƼƳƲǀ (1998), p. 92, 97, fig. 39Ʃ (à droite). Ph. Walter, E. Van Elslande, « L’analyse des fards », dans I. Bardies-Fronty, Ph. Walter, M. Bimbenet-Privat (n. 1), p. 126-141. E. Ch. Kakavogiannis, ƑơƷƥƯƯƥƩƴƧƠƶƭuƥƮƥƭƶƸƧƮƩƺƼƴƫuơưƥƌƲƴƧƠưƼƶƫƷƫƵƩƮuƩƷƠƯƯƩƸƶƫƵƷƲƸ ƲƴƸƮƷƲǀƳƯƲǀƷƲƸƷƫƵƐƥƸƴƩƼƷƭƮƢƵƥƳƿƷƫưƆƬƫưƥƽƮƢƉƫuƲƮƴƥƷƣƥ (2005).
VASSILIKI ADRYMI ET AL.
256
des teneurs importantes en argent qui ont conduit à une exploitation intense du gisement, le plomb étant alors considéré comme un sous-produit 54. D’après les estimations issues des découvertes archéologiques 55, les Grecs anciens ont pu obtenir dans ce gisement, par le procédé de coupellation, environ 3 500 tonnes d’argent après avoir fondu près de 4 millions de tonnes de minerais entre les viie et ier s. av. J.-C. La procédure d’extraction du métal précieux par coupellation nécessitait la transformation des minerais de plomb par oxydation (formation de l’oxyde PbO) pour obtenir l’argent sous forme métallique. L’oxyde de plomb ou litharge 56 était ensuite retraité lors d’une étape de réduction pour permettre la production de plomb métallique destiné à toutes sortes d’applications (le renforcement des carènes de navires, les conduites d’eau, des objets manufacturés comme de grandes pyxides, etc.), à la fabrication du pigment blanc et à d’autres produits dérivés, notamment des médicaments. À ce sujet, Pline l’Ancien s’étonnait des développements des pratiques de transformation chimique des matières : « Admirons l’expérience humaine, qui n’a rien laissé sans l’essayer de mille façons, pas même la lie et les résidus dégoûtants des choses 57 ! ». C’est certainement cette production très importante du métal qui a pu conduire à la recherche de méthodes de préparation de nouveaux pigments. On estime que les opérations minières du Laurion ont abouti à la production de 1,75 million de tonnes de litharge et à 1,4 million de tonnes de plomb métallique. La mesure des éléments traces dans les échantillons de fard peut fournir des informations sur la nature des gisements de plomb qui ont été à l’origine de la matière première pour la synthèse, car la présence d’argent peut confirmer que les échantillons cosmétiques sont à relier aux activités métallurgiques de coupellation. Des études antérieures 58 des scories anciennes du Laurion ont montré que la concentration résiduelle en argent s’élève à 125 ppm après la première étape de coupellation et à 100 ppm après la seconde étape. Des concentrations similaires peuvent donc être attendues ici. L’analyse de grains de poudre a été effectuée par spectrométrie de fluorescence des rayons X (XRF) par rayonnement synchrotron sur cinq fards de Thessalie. On remarque de manière générale une très grande pureté des composés de plomb 59, les principaux éléments traces décelables étant l’argent, le fer, le cuivre et le zinc. Trois échantillons (BE15544, BE15545 et A11) contiennent des teneurs en argent comprises entre 50 et 100 ppm, qui sont comparables, bien que légèrement inférieures, à la concentration dans les scories de plomb après la
54. 55.
56. 57. 58. 59.
E. Ch. Karavogiannis (n. 53), p. 261-281, 290-292. C. E. Conophagos, Archaeometry (1989). Ces estimations sont fondées sur les analyses du minerai de plomb d’origine, de la litharge alors produite par le procédé de coupellation et du plomb métallique de l’époque classique. Dioscoride, V 87, 1. Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXIV 51, 1 (trad. É. Littré). C. E. Conophagos (n. 55), p. 271. Les concentrations en argent dans les différents échantillons archéologiques de poudres cosmétiques étudiés sont déterminées à partir de mesures du signal de fluorescence X en sélectionnant une énergie au-delà du seuil d’absorption K de l’argent (28keV), avec un faisceau microfocalisé à l’European Synchrotron Radiation Facility à Grenoble, sur la ligne ID18F.
LES FLACONS À FARD À L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE. EXEMPLES DE LA RÉGION DE THESSALIE
seconde étape de coupellation. On peut cependant supposer que l’étape de synthèse chimique du pigment à partir du plomb métallique peut conduire à cette diminution : durant les lavages successifs du produit en milieu légèrement acide, une partition des éléments chimiques a pu avoir lieu. Au contraire, les échantillons BE16158, BE16683 et BE22624 contiennent moins de 10 ppm d’argent et peuvent être considérés comme issus d’un plomb provenant d’autres gisements non argentifères. De nombreuses sources de plomb sont en effet connues dans l’Est de la Méditerranée. Nous avons poursuivi cette étude par une mesure des rapports isotopiques du plomb qui peuvent permettre de préciser cette origine, dans la mesure où des mélanges du métal provenant de sources variées n’ont pas été réalisés 60. Une telle approche a été également effectuée pour des fards de l’ancienne Égypte et a permis d’obtenir des résultats intéressants concernant l’exploitation des gisements de la mer Rouge mais aussi l’importation de galène provenant sans doute du Yémen ou d’Érythrée 61. Les mesures ont été effectuées en collaboration au Laboratoire de sciences de la Terre de l’École normale supérieure de Lyon par spectrométrie de masse à double focalisation (analyseur électrostatique puis secteur magnétique et multicollecteurs Nu Plasma 500 HR). Les échantillons sont introduits sous forme liquide en milieu légèrement acide (HNO3 0,05 N). Cet instrument possède un haut pouvoir d’ionisation et permet une analyse rapide et précise. L’erreur sur les mesures est évaluée à 0,025 %, 0,001 % et 0,05 % respectivement pour les rapports 208 Pb/206Pb, 207Pb/206Pb et 204Pb/206Pb. Les rapports isotopiques sont reportés dans le tabl. 3, et sont complétés par des analyses correspondant à d’autres échantillons de fard blanc découvert à Éleusis, à Athènes, à Érétrie et à Derveni et décrits rapidement précédemment. La fig. 3 montre qu’une grande partie des échantillons se regroupe et que ceux-ci proviennent vraisemblablement des mêmes gisements d’origine. La base de données à laquelle nous nous sommes référés répertorie de nombreuses analyses réalisées entre 1967 et 1997, sur divers minerais de plomb méditerranéens, constitués en grande majorité de galènes 62. On peut
60.
61.
62.
Les variations de la composition isotopique de certains éléments, tels que le plomb, ont des significations géologiques qui reflètent l’histoire de la formation des roches et des minerais. De nombreux travaux ont été réalisés pour retrouver l’origine du plomb contenu dans des objets en plomb ou en bronze, et fournissent une large base de données permettant le rapprochement des résultats obtenus sur des échantillons d’origine inconnue à des gisements de référence. Voir à ce sujet N. H. Gale, Z. A. Stos-Gale, « Le plomb et l’argent dans la mer Égée à l’âge du Bronze », Pour la Science 176 (1981), p. 70-81 ; Z. A. Stos-Gale, N. H. Gale, « The Sources of Mycenaean Silver and Lead », Journal of Field Archaeology 9 (1982), p. 467-485 ; I. L. Barnes et al., « The Possible Change of the Lead Isotope Ratios in the Manufacture of Pigments: A Fractionation Experiment », Archaeological Chemistry II (1978), p. 273-277. Ph. Walter et al., « Making Make-up in Ancient Egypt », Nature 397 (1999), p. 483-484 ; P. Martinetto et al., « Approvisionnement et usage cosmétique de la galène dans l’Égypte Ancienne », ABC Mines 19 (2001), p. 13-19. La base de données est disponible sur le site internet : http://www.brettscaife.net/lead/data/, consulté le 21 novembre 2016. Des études spécifiques ont également permis d’éclairer nos résultats tels que les travaux de N. H. Gale et de Z. A. Stos-Gale (voir n. 60), ou encore ceux qui décrivent plus particulièrement les résultats concernant les mines du Laurion : I. L. Barnes et al., « Isotopic Analysis of Laurion Lead Ores, Archaeological Chemistry », American Chemical Society (1974), p. 1-10.
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258
Échantillon
Localisation
208
Pb/206Pb
BE15544
Démétrias
2,061875
207
Pb/206Pb
0,832260
206
Pb/204Pb
18,845437
207
Pb/204Pb
15,684330
208
Pb/204Pb
38,855823
204
Pb/206Pb
0,053060
BE15545
Démétrias
2,063626
0,832622
18,834510
15,682197
38,866780
0,053091
BE15683
Démétrias
2,068355
0,834978
18,776867
15,677860
38,833333
0,053254
BE15158
Démétrias
2,067037
0,834425
18,789330
15,678953
38,837790
0,053218
BE22624
Démétrias
2,064412
0,833374
18,810947
15,677557
38,833717
0,053157
A11
Thèbes de Phthiotide
2,061487
0,831904
18,853373
15,684350
38,864967
0,053038
E32A
Derveni
2,062128
0,832228
18,843833
15,682967
38,858303
0,053065
EL01
Éleusis
2,060791
0,831954
18,851323
15,683313
38,846853
0,053043
EL02
Éleusis
2,060708
0,831840
18,852903
15,682690
38,849317
0,053039
EL12
Éleusis
2,060590
0,831575
18,862747
15,686713
38,870947
0,053011
Ker1
Athènes
2,061563
0,832153
18,849013
15,685693
38,858043
0,053050
Ker3
Athènes
2,061248
0,832250
18,844453
15,683740
38,842700
0,053064
Ca508a
Érétrie
2,061082
0,832047
18,847407
15,682590
38,846577
0,053056
Tabl. 3 — Résultats des mesures isotopiques effectuées sur les échantillons de cosmétiques grecs après correction par rapport au standard interne introduit (Tl, 5 ppb) et au matériau de référence (NBS 981).
voir que certains échantillons provenant des sites de Thessalie, mais aussi d’Éleusis, d’Athènes (cimetière du Céramique) et d’Érétrie se trouvent, dans l’ensemble, constitués de minerais plombifères provenant des mines du Laurion. S’il existe de nombreux gisements au Laurion, il est assez délicat de les différencier à partir des bases de données dont nous disposons. Trois échantillons, déjà observés comme ne contenant que très peu de plomb (BE22624, BE15683 et BE15158) proviennent d’une ou plusieurs autres sources, peutêtre de Chalcidique, de l’île d’Eubée ou de Thasos. Les deux premières hypothèses, proches géographiquement de Démétrias, semblent vraisemblables, mais aucune conclusion claire ne peut être établie du fait du fort recouvrement des ensembles d’origines dans cette zone du graphique. De plus, les gisements de plomb de ces régions étaient également souvent riches en argent et nous avons du mal à comprendre la grande pureté du blanc de plomb produit. Si l’approvisionnement des différents sites grecs en plomb provenant des mines du Laurion était attendu, il est vérifié ici qu’il est prépondérant sur les autres sources de provenance. La grande importance de ce fard blanc a nécessité la mise en place d’un commerce. Les petites pyxides pouvaient être aisément transportées remplies de matière. Une autre manière consistait à mettre en forme la poudre en blocs compacts. C’est ce que l’on retrouve pour l’échantillon BE22624 par exemple. Cette préparation avant commercialisation a semble-t-il été perfectionnée à partir de la fin du ve s. av. J.-C., comme
LES FLACONS À FARD À L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE. EXEMPLES DE LA RÉGION DE THESSALIE
Fig. 3 — Compositions isotopiques (208Pb/206Pb en fonction du rapport 207Pb/206Pb et 208Pb/206Pb en fonction du rapport 204Pb/206Pb) des fards archéologiques comparés à celles de minerais de plomb provenant de différents gisements de Grèce et de Turquie (gisement turcs : Altinoluk, Gumuldur, Sofular, Taurus). Les échantillons archéologiques sont représentés en rouge (), les échantillons de Thessalie sont précisés par leur numéro d’inventaire (graphique V. Adrymi).
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VASSILIKI ADRYMI ET AL.
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l’indiquent des découvertes d’Athènes 63, de Derveni (tombe E, no 32) mais aussi de Tanagra 64 : le fard était alors façonné en pastilles de 27 à 29 mm de diamètre, placées ensuite dans de grandes pyxides tripodes ou dans des lékanès de céramique à couvercle bombé et ajusté, plus large que haut, dépassant rarement 10 cm de hauteur (fig. 4). Nous avons vérifié que la masse de chaque pastille est sensiblement identique et l’on peut donc penser que les ateliers de production de céruse ont pu rechercher une certaine standardisation pour la Fig. 4 — Lékanè en céramique contenant des pastilles commercialisation de leurs produits. Une de blanc de plomb, cimetière du Céramique, tombe 64, étude plus poussée considérant le système zone 24, Athènes, musée du Céramique (cl. V. Adrymi). pondérale et éventuellement des textes reliés aux achats et inventaires permettra peut-être de mieux comprendre ce système économique. L’identification de fards dans de petites pyxides de formes particulières indique une association de cette forme avec les activités liées à la toilette. Leur ergonomie permet un usage très facile pour prélever un peu de poudre et la conserver dans les meilleures conditions. Au-delà de cet aspect, la découverte de blancs de plomb de bonne qualité sur deux sites maritimes de Thessalie, connus pour leurs échanges commerciaux avec le monde grec, peut être interprétée comme une conséquence d’un processus commercial d’importation à partir d’autres régions décrites pour la grande qualité de préparation de ce cosmétique – telles que Rhodes, Corinthe ou Sparte – ou liée à des immigrants qui auraient amené avec eux le pigment. On peut aussi se demander si la présence de psimythion dans des tombes d’adultes de Thèbes de Phthiotide et à Démétrias pourrait signifier que les défunts étaient des femmes. Toutefois, il est connu que l’habitude très répandue des femmes d’utiliser ce fard – ainsi que d’autres cosmétiques – a suscité des remarques négatives dès l’époque classique 65. Ces commentaires renvoient à l’inefficacité de ces substances pour couvrir les défauts que provoque le temps 66, ainsi qu’aux résultats artificiels en contraste avec la
63.
64. 65. 66.
Deux pyxides tripodes à figures rouges, musée national d’Archéologie à Athènes, inv. 13676 α et β (410-400 av. J.-C.). Diamètre des pastilles dans chaque pyxide : 2,90 ± 0,09 cm (8,45 ± 1,19 g) et 2,72 ± 0,19 cm. Ensemble de blocs de céruse sous forme de pastilles de 6,48 ± 0,96 g et de 2,90 ± 0,07 cm. Musée national d’Archéologie à Athènes, inv. 11332. Xénophon, Économique X 7, 2. Aristophane, L’Assemblée des femmes 878.
LES FLACONS À FARD À L’ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE. EXEMPLES DE LA RÉGION DE THESSALIE
beauté naturelle 67. Il est vrai que l’usage du psimythion par les hetairai est mentionné à partir du ive s. av. J.-C., comme l’atteste le poète comique Alexis, qui décrit l’usage du fard blanc comme un des artifices adoptés par les hetairai dans le but d’améliorer leur physique 68. Plus tard, Athénée 69 témoigne, selon la morale de son époque, que les femmes mariées ou sur le point de se marier et que celles qui attendaient des enfants n’utilisaient pas de maquillage. Néanmoins, il faut souligner que les textes de l’époque archaïque, classique et hellénistique n’associent en aucun cas l’usage du psimythion à des hetairai de la Grèce antique, contrairement aux textes des scholiastes tardifs qui caractérisent le produit comme la « couleur utilisée par des hetairai » (ƺƴǁuƥ ƩƷƥƭƴƭƮƿư) 70, sous l’influence sans doute de la morale de leur époque. Preuve d’usage plus général est fournie, parmi d’autres, par le décret de Dymè 71, qui a interdit, au iiie s. av. J.-C., l’usage de psimythion par des femmes qui participaient aux Démétria locales, alors que les fêtes de Déméter étaient ouvertes à la totalité des femmes grecques. En somme, les données archéologiques récentes de la région de Thessalie témoignent que l’usage du psimythion, qui s’avère être une habitude chère aux femmes de la Grèce, était répandue également en Thessalie.
67. 68. 69. 70. 71.
Platon, Lysis 217 ; Anthologie Palatine XI 408, 3. Le texte d’Alexis est cité par Diodore de Sicile, II 23, 1, 9. Athénée, Deipnosophistes XIII 6, 3. Voir, par exemple, Souda, s.v. « ƻƭuǀƬƭƲư ». Fr. Sokolowski, Lois sacrées des cités grecques (1978), no 88.
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L’utilisation d’or dans les mosaïques de pavement hellénistiques de la Maison de Fourni à Délos Nikolaos Tolis
RÉSUMÉ La Maison de Fourni à Délos offre au chercheur des trouvailles exceptionnelles. L’étude des fragments de ses mosaïques de pavement a révélé des traitements et des techniques d’un grand intérêt artistique et historique. Leur excellente qualité, du substratum aux effets picturaux de leur surface et plus particulièrement de leur embléma, composé de tesselles de pierre et de pâte de verre de couleurs et de tons variés, suggère l’intervention dans cette riche demeure d’artisans mosaïstes hautement qualifiés. L’étude minutieuse des fragments a révélé la présence, à la surface de certaines tesselles, à l’état de traces, de feuilles d’or, témoignant de leur utilisation non seulement pour recouvrir la surface des statues mais aussi dans l’art de la mosaïque, marque de richesse que les textes historiques mentionnaient déjà (Athénée de Naucratis, Égypte). MOTS-CLEFS Délos, mosaïques hellénistiques, Maison de Fourni, tesselles, mosaïques de pavement, mosaïques fragments, mosaïques emblémata, mosaïques ciment, or, Athénée de Naucratis, Callixène, opus tessellatum, opus vermiculatum.
The discovery of the use of gold on mosaics of Hellenistic period. The “House of Fourni” on Delos The isolated “House of Fourni” on Delos offers the researcher rare findings. Study of the fragments of its mosaic floors revealed parts of works of special artistic and historical significance. The excellent quality of construction, from the substrata to the “painting effect” of the surface and especially the emblems, with their use of stone and glass tesserae of numerous colour shades, show that highly skilled mosaic artists worked at this rich house. The micro-study of details of the fragments revealed a unique finding: on some tesserae surfaces there are traces of gold leaf, a fact that leads to the conclusion that, at this period, gold leaf was not only used to cover statues but also to cover mosaic surfaces, in order to achieve an impressively rich decoration, as is already mentioned in historical texts (Athineos from Nafkratis-Egypt). SUMMARY
KEYWORDS Delos, Hellenistic Period mosaics, House of Fourni, tesserae, mosaic floors, mosaic fragments, mosaic emblems, mosaic substrata, gold, opus tessellatum, opus vermiculatum, Athineos Nafkratis, Kallixeinos. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƌƺƴƢƶƫƷƲƸƺƴƸƶƲǀƶƷƥƩƯƯƫưƭƶƷƭƮƠƻƫƹƭƨƼƷƠƨƠƳƩƨƥƷƫƵƔƭƮƣƥƵƷƼưƚƲǀƴưƼư ƶƷƫƉƢƯƲ )ƥƳƲuƲưƼuơưƫƔƭƮƣƥƷƼưƚƲǀƴưƼưƶƷƫƉƢƯƲƳƴƲƶơƹƩƴƩƶƳƠưƭƥƩƸƴƢuƥƷƥƶƷƲưƩƴƩƸưƫƷƢƌuƩƯơƷƫ ƷƼưƶƳƥƴƥƧuƠƷƼưƷƼưƻƫƹƭƨƼƷǁưƨƥƳơƨƼưƷƫƵƥƳƲƮƠƯƸƻƩƷuƢuƥƷƥơƴƧƼưƭƨƭƥƣƷƩƴƫƵƮƥƯƯƭƷƩƺưƭƮƢƵ Ʈƥƭ ƭƶƷƲƴƭƮƢƵ ƶƫuƥƶƣƥƵ ƌ ƩƱƥƭƴƩƷƭƮƢ ƮƥƷƥƶƮƩƸƥƶƷƭƮƢ ƳƲƭƿƷƫƷƠ ƷƲƸƵ ƥƳƿ Ʒƥ ƳƴƲƳƥƴƥƶƮƩƸƥƶƷƭƮƠ
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à propos de l’auteur N. Tolis, conservateur des mosaïques et des antiquités, éphorie des Antiquités d’Attique orientale, Athènes, Grèce.
abréviation bibliographique EAD XXIX = Ph. Bruneau, Les mosaïques, EAD XXIX (1973).
L’UTILISATION D’OR DANS LES MOSAÏQUES DE PAVEMENT HELLÉNISTIQUES DE LA MAISON DE FOURNI À DÉLOS
La mosaïque de pavement de la Maison de Fourni à Délos, publiée dans l’Exploration archéologique de Délos XXIX sous le no 336, a révélé l’utilisation exceptionnelle d’or dans cet art à l’époque hellénistique. Le complexe architectural de la maison dite « de Fourni » se trouve au centre de l’île, à environ 1 200 m au Sud du site archéologique (fig. 1). Les mosaïques de la Maison de Fourni constituent déjà un ensemble remarquable pour le nombre et la variété des types. Mais leur importance vient aussi de la qualité de la fabrication des formes les plus complexes de l’opus tessellatum et de l’opus vermiculatum. Ces mosaïques composent un ensemble unique, révélateur de la qualité des productions de Délos à l’époque hellénistique. Les fouilles de cette demeure ont permis de mettre au jour quinze mosaïques de pavement dont six sont aujourd’hui encore in situ (fig. 2) : elles couvrent les pavements de l’Oecus maior AB (EAD XXIX, 325), des pièces AC (EAD XXIX, 326) et AH (EAD XXIX, 327), de l’exèdre AN (EAD XXIX, 328), des latrines AL et D (EAD XXIX, 329 et 330). Les neuf autres, déplacées au musée de Délos, représentent des ensembles fragmentaires plus ou moins nombreux. Elles couvraient à l’origine certains des pavements de l’étage de la maison dont l’emplacement exact demeure, aujourd’hui encore, inconnu.
DESCRIPTION DES MOSAÏQUES La mosaïque EAD XXIX 325 (fig. 3a) est le pavement le plus grand qui soit conservé in situ. Elle est réalisée en opus tessellatum, même si les deux représentations, dans la partie Ouest du pavement, sont faites de tesselles de plus petites dimensions qui inviteraient à les classer plutôt dans la catégorie opus vermiculatum. De l’extérieur vers l’intérieur, le décor se compose comme suit : – un fond blanc qui couvre l’espace entre le décor central et les murs de la pièce ; – une bande noire (13 cm) ; – une bande blanche (51 cm) ; – une bande noire (8,5 cm) ; – une bande blanche (6,5 cm) ; – une bande de spirales courantes noires et blanches (25,5 cm) ; – une bande noire (2,3 cm) ; – une bande de losanges rouges et jaunes (dans des tons différents) qui suggère une cordelière en relief (4,5 cm) ; – une bande noire (2,3 cm) ; – une bande de spirales courantes noires et blanches (25,5 cm) ; – une bande blanche (7 cm) ; – une bande de doubles méandres polychromes en perspective (48 cm) qui dessine trois panneaux carrés dont deux étaient couverts de tesselles blanches ; seul celui du centre, qui n’est pas conservé, portait très vraisemblablement un embléma qui avait été détaché du pavement dans l’Antiquité.
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Fig. 1 — Vue d’ensemble de la Maison de Fourni (© Google Earth).
Fig. 2 — Plan de la Maison de Fourni sur lequel sont reportées les pièces avec les mosaïques in situ (d’après L. Fadin, M. Fincker, V. Picard, Atlas de Délos, EAD XLIII [2011], pl. 44 [archives EFA]).
L’UTILISATION D’OR DANS LES MOSAÏQUES DE PAVEMENT HELLÉNISTIQUES DE LA MAISON DE FOURNI À DÉLOS
Dans la partie Ouest du pavement, correspondant aux panneaux carrés, trois quadrilatères avaient été dessinés. Les deux placés aux extrémités avaient été décorés de losanges à trois couleurs formant le motif bien connu des cubes en trompe-l’œil. Le parallélogramme central portait une représentation aujourd’hui presque entièrement détruite. D’après les descriptions de A. Plassart (1916) et de J. Coupry (1935) 1, on y reconnaissait la magnifique représentation peinte d’une table vue en perspective, avec des jeux d’ombre et de lumière rendus par des couleurs. Les extrémités des pieds étaient probablement des pattes de griffon-lion. À la surface de la table étaient représentés une série d’objets dont trois couronnes d’olivier et une bourse. Les pavements EAD XXIX 326 et 327 sont en opus signinum. Sur le premier, le décor se limite à l’utilisation de tesselles noires et blanches qui dessinent des croix (fig. 3b) ; sur le second, qui reprend les mêmes couleurs, le tapis comprend un filet de losanges (fig. 3c). La mosaïque EAD XXIX 328 (fig. 3d) présente une partie extérieure qui devait être couverte d’un opus segmentatum qui reliait le décor central aux trois murs de la pièce. En revanche, une partie de l’entrée et l’intérieur du pavement avaient été couverts d’un opus tessellatum blanc. À l’intérieur de celui-ci, un tapis comprenait une succession de bandes noire (9 cm), blanche (28-29 cm) puis de nouveau noire (6-7 cm) et blanche (25 cm) entourant le motif central qui constituait un embléma. De cette représentation centrale qui avait été exécutée en opus vermiculatum, il ne reste malheureusement plus aujourd’hui qu’une toute petite partie. On y distingue le dessin fragmentaire d’un poisson sur fond noir. La disposition des rares tesselles conservées sur le côté Ouest du poisson suggère la présence d’un second poisson ou d’un organisme marin quelconque. La mosaïque EAD XXIX 329 est en opus segmentatum et le pavement EAD XXIX 330 composé de tuileaux. Les segments des neuf autres mosaïques (EAD XXIX 331-339), dont le nombre de fragments varie suivant le cas entre un et plusieurs dizaines, ornaient les pavements des étages. De ces pavements, sept relèvent de l’opus tessellatum (EAD XXIX 331-334, 336-338), un de l’opus vermiculatum (EAD XXIX 335) et un fragment est en opus signinum (EAD XXIX 339). Du pavement EAD XXIX 331, sont conservés seize fragments (fig. 4a), sur lesquels on distingue le dessin d’un simple méandre courant qui utilise des tesselles de pierre blanche, noire et jaune. La mosaïque EAD XXIX 332 se compose de trente-huit fragments (fig. 4b) qui portent le décor d’un méandre courant polychrome en perspective, utilisant des tesselles de pierre et de pâte de verre. Le motif géométrique des carrés divisés en quatre triangles a été choisi pour le décor de la mosaïque EAD XXIX 333 (fig. 4c). Les couleurs des tesselles (le blanc, le noir, le jaune clair et le jaune foncé, le vert clair et le vert foncé, le rose et le bordeaux) intensifient
1.
EAD XXIX.
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Fig. 3 — Mosaïques in situ (cl. N. Tolis) : a. EAD XXIX 325 ; b. EAD XXIX 326 ; c. EAD XXIX 327 ; d. EAD XXIX 328.
la riche décoration du pavement, car elles sont composées aussi bien de pierre que de pâte de verre. Le décor des losanges polychromes qui dessinent des cubes en trompe-l’œil a également été adopté pour la mosaïque EAD XXIX 334 (fig. 4d). Pour la coloration des losanges, des tesselles blanches, noires, roses, jaunes et bleues ont été utilisées. La mosaïque EAD XXIX 335 se compose de trois fragments (fig. 5a). Elle est faite de tesselles très petites (opus vermiculatum) et présente une polychromie particulière. Sur la petite surface du décor conservé, on distingue la représentation d’une scène nilotique. Sur les rares fragments du pavement EAD XXIX 337 apparaît le motif des écailles polychromes (fig. 5c). Les couleurs des tesselles utilisées sont le noir, le blanc, le vert clair et le vert foncé, le jaune clair et le jaune foncé, le rouge et le bordeaux. De la mosaïque EAD XXIX 338, il ne reste qu’un pan (fig. 5d), sur lequel est conservé une bribe seulement du dessin en forme de Ƽ, très probablement une ancre faite de tesselles noires sur fond blanc. Du pavement EAD XXIX 339, seule une partie est conservée (fig. 5e). Il s’agit d’un opus signinum sur lequel on distingue des tesselles blanches inclinées de 45° dessinant deux lignes et un cadre, à l’intérieur duquel se place une tesselle de couleur noire.
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Fig. 4 — Mosaïques sous forme de fragments (cl. N. Tolis) : a. EAD XXIX 331 ; b. EAD XXIX 332 ; c. EAD XXIX 333 ; d. EAD XXIX 334.
La mosaïque EAD XXIX 336 occupe une place importante dans l’étude des mosaïques de la Maison de Fourni. En effet, comme nous l’avons dit, c’est elle qui a permis de découvrir l’utilisation d’or sur la surface des décors de pavements (fig. 5b-6). Du pavement initial, sont aujourd’hui conservés au moins cinquante-six fragments, dont le décor comprend : – une bande blanche de 3,5 cm de large ; – une bande noire de 3,5 cm ; – une partie sur fond blanc avec : – un cadre de tesselles alternativement blanches, noires, jaune clair et jaune foncé, disposées avec une inclinaison de 45° ; – un décor géométrique de trapèzes qui ont pour base la bande noire précédente, sont coupés sur le petit côté et se réduisent au fur et à mesure que le motif se déploie. Le motif a été rendu avec des tesselles noires et contraste avec le fond blanc qui l’entoure ; – une bande noire de 3 cm de large ; – une bande blanche de 3 cm ; – un cadre noir d’une épaisseur de 7 cm sur lequel se déploie une tresse polychrome.
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Fig. 5 — Mosaïque sous forme de fragments (cl. N. Tolis) : a. EAD XXIX 335 ; b. EAD XXIX 336 ; c. EAD XXIX 337 ; d. EAD XXIX 338 ; e. EAD XXIX 339.
Fig. 6 — Mosaïque EAD XXIX 336. Ensemble des fragments (cl. N. Tolis).
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Fig. 7 — Mosaïque EAD XXIX 336. Détail du pavement. On distingue le riche décor coloré avec l’utilisation de tesselles polychromes, de lames de plomb entourant les tesselles et de ciments colorés en surface (cl. N. Tolis).
Fig. 8 — Mosaïque EAD XXIX 331. Fragment du pavement où l’on distingue le ciment coloré support des tesselles (cl. N. Tolis).
Fig. 9 — Mosaïque EAD XXIX 336. Fragment sur lequel on distingue l’utilisation du stucage de la surface (cl. N. Tolis).
Fig. 10 — Mosaïque EAD XXIX 336. Fragment du pavement où l’on observe l’utilisation d’or (cl. N. Tolis).
Il s’agit d’un opus tessellatum, dont certaines parties ont été recouvertes par des tesselles de petites dimensions (tresse). Sur la petite surface des fragments, on reconnaît les remarquables techniques de fabrication et la richesse des matériaux dont disposaient les mosaïstes qui travaillèrent à la Maison de Fourni, observation d’ailleurs confirmée dans la plupart des mosaïques de la maison. Cette virtuosité technique se reconnaît tant dans la fabrication et la pose des ciments que dans les processus de composition et dans le choix des matériaux des mosaïques (fig. 7). On donnera comme exemples caractéristiques : – la coloration de surface du ciment-support (nucleus) pour définir la couleur de base (fig. 8) ; – l’utilisation de fines lames de plomb cernant les tesselles pour former les dessins ; – le choix de tesselles de pierre polychromes (blanches, noires, brunes, brun-jaune, jaunes, jaunâtres, rouges, bordeaux et mauves), de même que l’utilisation de pâtes de verre (bleu foncé, bleues et vert-bleu) ; – la découpe parfaite des tesselles ; – la disposition particulièrement harmonieuse des tesselles (rythme de la pose) ; – l’usage de ciments polychromes correspondant à la couleur des tesselles pour couvrir les joints et donner davantage d’intensité aux représentations (fig. 7-9).
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Fig. 11 — Mosaïque EAD XXIX 336. Agrandissement de la surface d’une tesselle présentant des restes d’or (cl. N. Tolis).
Vu le soin et la richesse de la surface de la mosaïque, la découverte importante offerte par le pavement de mosaïque EAD XXIX 336 apparaît presque comme une suite logique. Il s’agit de l’utilisation d’or pour couvrir certaines parties du décor, pour que la présentation esthétique du pavement frappe encore davantage. En août 2000, et alors que l’étude des mosaïques de la Maison de Fourni était en cours, il fut possible d’observer des fragments au microscope, grâce à la présence de Ph. Jockey (École française d’Athènes) qui étudiait la polychromie des sculptures de Délos avec sa collègue Br. Bourgeois (C2RMF). Sur un fragment du pavement en question, on observa la présence d’or, et plus précisément sur une bande de 3 cm de large faite de 5 rangées de tesselles blanchâtres (fig. 10).
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Fig. 12 — Mosaïque EAD XXIX 332. Partie du pavement avec des ciments de surface colorés couvrant les tesselles (cl. N. Tolis). Fig. 13 — Partie d’un pavement avec du ciment coloré recouvrant totalement les tesselles (cl. N. Tolis).
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Fig. 14 — Mosaïque EAD XXIX 336. Le fragment du pavement avec reconstitution de la partie qui avait été couverte d’or (cl. N. Tolis).
L’observation microscopique de la mosaïque a permis de discerner les restes d’or dans de petites cavités de la surface des tesselles de pierre. Il s’agissait de fines feuilles d’or, comme on en trouve sur les sculptures et les surfaces architecturales (fig. 11). Par conséquent, l’usage d’or sur les pavements de mosaïque ne constitue pas, pour l’époque, une innovation technique, mais illustre l’adoption dans l’art de la mosaïque d’une technique déjà appliquée sur d’autres surfaces (statues, fragments architecturaux). Cependant, si l’on songe à la très faible épaisseur du métal précieux, on peut s’étonner qu’il soit aujourd’hui encore conservé, le pavement ayant été utilisé. Mais la même remarque s’applique aux fins ciments colorés qui, dans bien des cas, devaient recouvrir des pans de surfaces avec mosaïques à Délos, comme la mosaïque de Lycurgue et Ambrosia dans l’Îlot des bijoux (EAD XXIX 69), celle de Dionysos dans la maison qui porte son nom (EAD XXIX 293), des fragments de la Maison de Fourni (fig. 12-13) et bon nombre d’exemples de mosaïques plus modestes en opus segmentatum et en opus signinum (fig. 5e). Visiblement, le besoin de créer des surfaces de couleurs vives qui mettaient en valeur d’une part les capacités techniques des ateliers de mosaïstes à une époque où l’art de la mosaïque était florissant et, d’autre part, attestaient du rang économique élevé des propriétaires, conduisait à des applications qui faisaient peu de cas de la résistance des matériaux utilisés (fig. 14). Ne l’oublions pas non plus, l’entretien régulier des œuvres était une pratique particulièrement répandue dans le monde antique, bien attestée tout à la fois par les textes et par une évidence archéologique en constant accroissement.
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En outre, on pourrait trouver dans les sources textuelles une confirmation de la combinaison de l’art de la mosaïque et de l’utilisation d’or, à l’époque hellénistique déjà. On pense ici à la citation bien connue d’Athénée de Naucratis en Égypte, dans le livre V des Deipnosophistes 2 : on y parle de vaisseaux construits par Ptolémée Philopator (240203 av. J.-C.). Certes, Athénée a vécu à la charnière du iie et du iiie s. apr. J.-C. (vers 170-230 apr. J.-C.). Cependant, cette mention revêt une importance particulière du fait qu’elle repose sur une citation antérieure. Il est question en effet ici de Callixène qui vécut, lui, au iiie s. av. J.-C., soit en pleine période hellénistique. Dans le premier livre de son ouvrage ƕƩƴƣ ƆƯƩƱƥưƨƴƩƣƥƵ, Callixène rapporte que Ptolémée Philopator avait construit un bateau fluvial, appelé « thalamège » (ƬƥƯƥuƫƧƿƵ), d’une longueur d’un demi-stade (environ 92 m). La description du « thalamège » montre qu’on avait affaire à une construction d’une grande richesse. Sur l’association de l’or et de la mosaïque, la description est en effet particulièrement claire : « en allant vers la proue on rencontrait un oikéma dédié à Bacchus doté de treize klinés et d’une colonnade, avec une corniche dorée jusqu’à l’épistyle qui l’entourait ; son toit correspondait à l’esprit du dieu. À l’intérieur, à droite, il y avait un antre dont la surface portait un décor de pierres véritables et d’or 3 ». Le fait que les feuilles du précieux métal aient pu être facilement récoltées d’une part, et le fait que l’on n’ait pas trouvé, lors de la fouille, de tesselles d’or (sous la forme d’un sandwich de pâte de verre et de feuilles d’or), lesquelles furent créées à l’époque romaine et largement utilisées à l’époque byzantine, rendent la citation d’Athénée à laquelle nous nous sommes référés difficile à comprendre. Pour conclure, la découverte, à la Maison de Fourni, à date haute (si l’on en croit la tradition) de l’utilisation de feuilles d’or comme élément complémentaire du décor des pavements de mosaïque, nous invite à reconsidérer l’étude des mosaïques hellénistiques désormais à la lumière de cette évidence matérielle inédite. Comme autre « leçon » de l’étude archéologique des mosaïques de Fourni, on retiendra la nécessité de prêter une égale attention à tous les types de vestiges mosaïqués, sans hiérarchie aucune et au-delà, donc des seules représentations exceptionnelles que constituent d’habitude les emblémata des mosaïques les plus abouties.
2. 3.
Athénée, Deipnosophistes V 38. Athénée, Deipnosophistes V 38 (d’après la traduction en grec moderne de Th. G. Mavropoulos, 1997).
RÔLES, VALEURS ET SYMBOLES DES COULEURS ET DE L’OR
Les noces de l’or et de la pourpre dans le monde grec. À la recherche du juste accord chromatique Adeline Grand-Clément
RÉSUMÉ L’une des notions-clefs permettant de pénétrer au sein de l’imaginaire grec de la couleur est celle de poikilia. Elle renvoie à une bigarrure générée par l’alliance de matières, de textures et de couleurs contrastées et prend de multiples formes. L’assemblage de l’or et de la pourpre, pour composer des parures somptueuses, en est une. L’étude se propose d’analyser les contextes dans lesquels ces deux matières colorées particulièrement valorisées par les Grecs se trouvent associées, et la signification que revêt alors cette bigarrure de l’excellence. Pour ce faire, deux dossiers principaux sont examinés. D’une part, le livre XII d’Athénée, consacré au plaisir, permet d’explorer la relation que le couple or-pourpre entretient avec la truphè, le luxe, dans sa dimension sociale et politique. D’autre part, la documentation épigraphique liée aux sanctuaires met en lumière la façon dont il contribue à la glorification des dieux et aux manifestations de l’eusebeia. MOTS-CLEFS
Poikilia, polychromie, pourpre, or, kosmèsis, Athénée, truphè, offrandes, agalma.
SUMMARY Marrying gold and purple in ancient Greek world: towards the right chromatic chord Poikilia is a fundamental notion for understanding of Greek conceptions of colour. The word refers to a variegated combination of contrasting materials, textures and colours. It may assume various shapes. One of them is the association of purple and gold to craft splendid garments and ornaments. This paper aims at analyzing the contexts in which these two highly prized colours are mixed and matched, and the significance of this symbol of excellence in Greek cities. Two cases are studied. On the one hand, Athenaeus’ 12th Book, devoted to pleasure, sheds light on the link between gold, purple and truphè, luxury, from a social and political point of view. On the other hand, inscriptions issuing from sanctuaries expound its role in the glorification of gods and its importance in expressions of eusebeia. KEYWORDS agalma.
Poikilia, polychromy, purple, gold, kosmèsis, Athenaeus, truphè, votive offerings,
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à propos de l’auteur A. Grand-Clément, UFR Histoire, Arts et Archéologie, université Jean Jaurès, Toulouse, France.
abréviations bibliographiques Bruneau 1970 = Ph. Bruneau, Recherches sur les cultes de Délos à l’époque hellénistique et à l’époque impériale. Mansfield 1985 = J. Mansfield, The Robe of Athena and the Panathenaic Peplos, Ph.D., University of Berkeley.
LES NOCES DE L’OR ET DE LA POURPRE DANS LE MONDE GREC
L’imaginaire grec de la couleur se déploie autour de deux notions fondamentales : d’un côté le khrôs, la peau-couleur, surface unie exposée au regard 1 ; de l’autre, la poikilia, l’assemblage de couleurs, ce chatoiement fascinant cher à J.-P. Vernant 2. Le champ sémantique de l’adjectif poikilos est plus large que celui de notre mot « polychrome » qui, du reste, est d’usage récent 3. Les Grecs rattachent à la sphère du poikilon toute forme de bigarrure générée par l’alliance de matières, de textures et de couleurs contrastées. La poikilia est résolument polymorphe et ambivalente : tantôt signe d’excellence prisé dans les cités archaïques et susceptible de fournir l’image parfaite de l’harmonie du monde organisé, le kosmos 4 ; tantôt symptôme d’anarchie et d’excès, spectacle séduisant mais trompeur, à l’instar du manteau démocratique platonicien 5. Coexistent ainsi dans l’imaginaire grec plusieurs types de « polychromie » qui n’incarnent pas toujours le modèle du juste accord chromatique, mais dénotent parfois la confusion, la surcharge, le superficiel et l’excès. Tout est affaire de contexte. Par exemple, certaines formes de bigarrure, parce qu’elles sont associées à l’Orient, font régulièrement l’objet d’un rejet ou d’un contrôle, au gré de l’évolution des relations entretenues par les cités grecques avec leurs voisins de l’Est. Ajoutons que les différents types de poikilia ne tirent pas seulement leur signification des couleurs et matières qui la composent. Souvent, la bigarrure induit la présence de motifs, dont la forme et le mode d’agencement en orientent le sens : fleurs et végétaux, animaux, figures humaines, rayures, losanges, tâches, points, rosettes, damier, constellations d’étoiles, frises de méandres, etc. La fonction de ces signes visuels gagne en importance sur les images vasculaires, car ils pallient les insuffisances d’une palette chromatique que les conditions de cuisson de la céramique rendent conventionnelle et limitée. La variété des motifs se substitue alors aux effets de couleur pour donner à voir des genres de poikilia distincts 6. 1.
2.
3.
4.
5. 6.
Sur le khrôs, enveloppe du corps et composante de la personne homérique, voir M. Carastro, « La notion de krhôs chez Homère. Éléments pour une anthropologie de la couleur en Grèce ancienne », L’Antiquité en couleurs. Catégories, pratiques, représentations (2009), p. 301-313. La poikilia est l’une des façons dont se manifeste la mètis, intelligence astucieuse : voir J.-P. Vernant, M. Détienne, Les ruses de l’intelligence, la mètis des Grecs (1974). C’est à l’étude de l’imaginaire grec de la couleur, polarisé par le khrôs et le poikilon, qu’a été consacrée une large part de ma thèse de doctorat, portant sur la période archaïque, aujourd’hui publiée : A. Grand-Clément, La fabrique des couleurs. Histoire du paysage sensible des Grecs anciens (2011). En effet, il n’est attesté qu’à partir de la fin du xviiie s. (dans le Voyage du jeune Anacharsis de l’abbé Barthélémy, où il s’applique à Boularchos de Lydie, peintre qui aurait le premier usé de plusieurs couleurs pour composer ses œuvres) et c’est au début du xixe s. qu’il prend le sens que nous lui connaissons aujourd’hui (« décoré de plusieurs couleurs »), pour finalement donner naissance au mot « polychromie » (1834). Je me permets ici de renvoyer à mon étude : A. Grand-Clément, « Mettre en couleurs, un acte cosmogonique : quand tissus, métaux et chants s’entrelacent. Essai d’interprétation du mot poikilos », dans I. Milliat-Pillot (éd.), Texte du Monde, Monde du Texte (2010), p. 69-88. Voir N. Villacèque, « De la bigarrure en politique (Platon, République VIII, 557c 4 sqq.) », JHS 130 (2010), p. 137-152. N. Kei a consacré une belle étude à la signification des motifs floraux sur les images vasculaires athéniennes d’époque classique : N. Kei, « Poikilia et kosmos floraux dans la céramique attique », dans L. Bodiou, F. Gherchanoc, V. Huet, V. Mehl (éds), Parures et Artifices : le corps exposé dans l’Antiquité gréco-romaine (2011).
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Je me propose ici de circonscrire la réflexion à une polychromie d’un type particulier, à savoir celle qui naît de l’alliance de l’or et de la pourpre. Pourquoi ce choix ? Car, plusieurs communications du colloque l’ont montré, il s’agit de deux matières colorées chargées de puissantes résonances symboliques en Grèce ancienne. Au lieu de les examiner séparément, nous porterons attention aux éléments qui les réunissent, afin de comprendre les significations nouvelles qui émergent de leur utilisation conjointe. À quel résultat conduit l’union du métal doré avec la teinture éclatante ? Comment sont-ils associés et dans quels contextes ? Pourquoi se marient-ils si bien et, d’ailleurs, s’accordentils toujours à la perfection ? Les sources littéraires fournissent des éléments de réponse : l’analyse des mots et la recension de leurs occurrences éclairent l’imaginaire construit autour des couleurs 7. La documentation épigraphique, plus abondante pour l’époque hellénistique, offre de surcroît un éclairage utile et complémentaire. En revanche, le matériel archéologique fait souvent défaut, en particulier dans le domaine textile, en raison de la fragilité des fibres végétales et animales 8. On essaiera malgré tout de cerner les affinités qu’entretiennent l’or et la pourpre, dans la culture grecque, et la façon dont les Anciens ont appris à les marier, avant d’explorer deux voies : la relation que le couple or-pourpre entretient avec la truphè, le luxe, dans sa dimension sociale et politique, puis la façon dont il contribue à la glorification des dieux et aux manifestations de l’eusebeia.
FAÇONS
DE MARIER LE ROI DES MÉTAUX ET LA FLEUR DES TEINTURES
Si l’or et la pourpre s’accordent bien aux yeux des Grecs, c’est qu’ils présentent un certain nombre de caractéristiques communes. Les propriétés chromatiques et physiques de ces deux matières se conjuguent à leur rareté pour en faire des marqueurs de statut social 9. La richesse sémantique, symbolique et affective qui en résulte se manifeste de manière
7.
8.
9.
Les Grecs emploient principalement deux termes pour désigner les étoffes teintes de pourpre : porphureos et alourgès (ou alourgos). Le second, davantage utilisé en prose, ne possède pas la même richesse sémantique et affective que le premier et dénote probablement une nuance plus précise, proche du violet. Quant à phoinikeos, que certains traduisent parfois par « pourpre », je pense qu’il désigne plutôt une autre teinture : l’écarlate, issu de la cochenille ou de la racine de garance, qui fournit une large gamme de rouges et de bruns. Sur l’orfèvrerie grecque, voir par exemple D. Williams, The Art of the Greek Goldsmith (1998) et J. Ogden, Classical Gold Jewellery and the Classical Tradition (1991). La meilleure synthèse sur les textiles antiques reste E. Barber, Prehistoric Textiles. The Development of Cloth in the Neolithic and Bronze Ages with Special Reference to the Aegean (1991). Pour la période classique, on peut consulter l’étude de G. Losfeld, fondée principalement sur les témoignages littéraires : G. Losfled, Essai sur le costume grec (1991). Bien entendu, les propriétés physiques n’expliquent pas à elles seules la prééminence accordée à l’or et à la pourpre : celle-ci résulte de choix culturels propres à la société grecque. On lira à ce sujet la remarque pleine de justesse de G. Clarke, Symbols of Excellence: Precious Materials as Expressions of Status (1986), p. 82. Sur la question de la valeur attribuée aux couleurs, en particulier à la pourpre, je renvoie à la fine analyse de H. Brecoulaki, « Colours in Ancient Greek Painting and Polychromy: Material Aspects and Symbolic Values », RA 2014/1, p. 1-36.
LES NOCES DE L’OR ET DE LA POURPRE DANS LE MONDE GREC
sensiblement analogue et se recoupe partiellement. D’un côté, le processus spécifique de fabrication de la pourpre, extraite de coquillages et fixée sur des tissus, a contribué à charger la teinture d’un certain nombre de valeurs. Celles-ci oscillent entre les notions de transformation, de métamorphose et de mouvement d’une part, et celles d’éternité et de permanence d’autre part 10. Le suc du murex confère en effet aux fibres textiles, en particulier à la laine, une coloration durable et d’excellente qualité, dont les nuances fleuries varient du rose et du rouge au bleu violacé 11. Dotés d’un puissant pouvoir de persuasion, associés à la charis, les tissus pourpres interviennent dans l’univers de la séduction, se rattachent au domaine d’Aphrodite et d’Éros, mais aussi à l’ombre inquiétante de la mort qu’il s’agit de conjurer. Comme l’écarlate, la pourpre s’apparente parfois au sang, fluide vital 12. L’or, d’un autre côté, renvoie au rayonnement solaire, à l’éclat rougeoyant 13. Ce métal flamboyant, à la teinte inaltérable, présente des affinités avec la nature radieuse des Immortels et sert à construire l’apparence de ces corps supérieurs. Ainsi, dans les poèmes, les termes khruseos et khrusos entrent dans la composition de nombreuses épithètes divines. Dieux et déesses possèdent des yeux ou des cheveux d’or, des attributs, parures et vêtements en or – jusqu’à devenir eux-mêmes entièrement d’or, telle Aphrodite dont l’une des épithètes homériques est « dorée », khruseè 14. Les formules des poètes rejoignent d’ailleurs les pratiques des artisans. En effet, la technique chryséléphantine, consistant à mêler or et ivoire, s’applique principalement – voire exclusivement – aux effigies divines 15. Or et pourpre incarnent donc, l’un dans le champ des objets en métal, l’autre dans le champ des textiles, l’éclat incorruptible et durable, la luminosité et la saturation intenses. Ces deux substances précieuses occupent, au sein de la sensibilité grecque, le sommet de la hiérarchie des valeurs en matière de couleurs – une hiérarchie chromatique qui n’est pas fondée sur une gradation tonale, mais privilégie le degré de saturation et la luminosité de la couleur. La connivence qui existe entre les deux substances est palpable dans le chant des poètes. Leurs œuvres regorgent en effet de jeux d’échos et de correspondances entre les termes khruseos et porphureos, parfois interchangeables. Ainsi l’Aphrodite « toute dorée »
10. 11.
12.
13. 14.
15.
Voir L. Soverini, « Su alcuni simbolismi della tintura nella Grecia antica », dans M. M. Sassi, I colori nel mundo antico: esperienze linguistiche e quadri simbolici (2003), p. 67-80. Je renvoie ici aux différentes communications du colloque qui ont porté sur la pourpre antique, ainsi qu’aux études rassemblées dans O. Longo (éd.), La porpora: realtà e immaginario di un colore simbolico (1998), et D. Cardon (éd.), Teintures précieuses de la Méditerranée (1999). Sur les résonances affectives de la pourpre, voir A. Grand-Clément, « Histoire du paysage sensible des Grecs à l’époque archaïque : Homère, les couleurs et l’exemple de porphureos », Pallas 65 (2004), p. 123-143. Chez Théognis, l’or pur est eruthron, « rouge » (I 450). Voir Homère, Iliade III 64 et V 427 ; Odyssée VIII 337 et XVII 37, etc. Sur la relation entre l’or et la divinité dans les textes grecs, voir H. L. Lorimer, « Gold and Ivory in Greek Mythology », dans Greek Poetry and Life: Essays Presented to Gilbert Murray on his Seventieth Birthday (1956), p. 14-33. Sur cette technique, voir K. Lapatin Shapiro, Chryselephantine Statuary in the Ancient Mediterranean World (2001). On pourrait également évoquer la dorure des statues, qui possède des vertus « divinisantes » : Br. Bourgeois, Ph. Jockey, « La dorure des marbres grecs. Nouvelle enquête sur la sculpture hellénistique de Délos », Journal des savants 2005 (2), p. 253-316.
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d’Homère devient-elle chez Anacréon 16 « de pourpre », porphureè – une autre manière de souligner l’éclat désirable qui émane de l’instance divine. Dans certains mythes, en particulier lorsqu’il s’agit de justifier la prétention d’un individu à la royauté, il est fréquent de rencontrer l’association entre un tissu pourpre et une pièce de métal travaillé – vase ou bijou – en or. L. Gernet a montré qu’il s’agit de deux types d’agalmata qui circulent et constituent des marques de valeur qualifiantes pour le pouvoir royal 17. Ces objets précieux sont le produit de deux activités artisanales complémentaires : d’un côté la toreutique, l’orfèvrerie, et de l’autre le travail textile, tissage et teinture. La présence conjointe de l’or et de l’étoffe pourpre sollicite donc à la fois le savoir-faire des hommes et l’habileté des femmes. Elle constitue alors un gage d’excellence et fournit l’image de la complétude. En témoigne la parure du roi d’Ithaque : Ulysse est reconnaissable au manteau pourpre qui drape sa tunique brillante et à l’agrafe en or richement ouvragée qui sert à le fermer 18. L’alliance de l’or et de la pourpre dénote également l’opulence et augure de la prospérité et de la fécondité des mariages. Sappho dépeint ainsi la profusion de richesses qui caractérise les noces d’Hector et d’Andromaque : « beaucoup de bracelets d’or et de vêtements de pourpre parfumés, des parures bigarrées, d’innombrables coupes d’argent, et de l’ivoire 19 ». La mention spécifique de l’or et de la pourpre, placée en tête de l’énumération, souligne leur importance et leur prééminence au sein des richesses présentes lors des festivités. Les épinicies de Pindare regorgent de références à l’or et à la pourpre, qui permettent de souligner l’excellence des vainqueurs et d’en faire les protégés des dieux 20. Si le tissu pourpre et le bijou en or concourent à former une parure d’exception, l’association entre la prestigieuse teinture et le métal précieux se fait parfois plus intime. C’est le cas sur certaines étoffes, lorsque des fils d’or se mêlent à ceux de pourpre. Entrecroisés par la broderie ou le tissage, ils génèrent alors une bigarrure somptueuse. Les fouilles du grand tumulus de Vergina, en Macédoine, en ont livré un magnifique exemple. Il s’agit de la pièce de tissu qui entourait les restes de la femme incinérée dans l’antichambre de la tombe attribuée à Philippe II. Relativement bien conservée, l’étoffe possède un fond pourpre rehaussé de motifs végétaux tissés au fil doré 21. On ignore si ce type de vêtement était spécifiquement réservé à la famille royale et s’il possédait une fonction proprement funéraire. Quoi qu’il en soit, il semble qu’il agissait comme un instrument de consécration de la personne incinérée. L’usage de fils d’or, pour décorer des vêtements prestigieux, ne date pas du ive s. av. J.-C., il est attesté dès le début du IIe millénaire en Anatolie 22. Une belle découverte dans une tombe de Koropi, en Attique, a permis d’établir que 16. 17. 18. 19. 20. 21. 22.
Anacréon, frag. 12, 3 (éd. D. L. Page, Poetae melici Graeci, 1962). L. Gernet, « La notion mythique de valeur en Grèce », dans Anthropologie de la Grèce antique (1982), p. 121-179. Homère, Odyssée XIX 225-226, 232 et 242. Sappho, frag. 44, 8-10 (éd. E. Lobel, D. Page, Poetarum Lesbiorum fragmenta, 1955). Voir par exemple J. Duchemin, « Essai sur le symbolisme pindarique : or, lumière et couleurs », REG 65 (1952), p. 46-58. M. Andronikos, Vergina, the Royal Tombs and the Ancient City (1984), p. 195, fig. 156-157. En témoigne le vêtement découvert à Acemhöyük, en Anatolie centrale, et qui date des environs de 1800 av. J.-C. : il s’agit d’une pièce de lin blanc orné de perles de faïence bleue cousues avec du fil d’or (E. Barber [n. 8], p. 171). Sur la broderie avec fils d’or, voir H. Blümner, Technologie und Terminologie
LES NOCES DE L’OR ET DE LA POURPRE DANS LE MONDE GREC
les Grecs connaissaient la broderie de fils métalliques dès l’époque classique. En effet, une urne funéraire en bronze a livré les restes d’une pièce de lin datant de la fin du ve s. av. J.-C., finement décorée. Des fils d’argent et d’or y dessinent des losanges renfermant en leur sein des figures de lions 23. Il existe une autre façon de marier l’or et la pourpre : en fixant des clinquants et des pièces métalliques sur les tissus. Démocrite d’Éphèse mentionne, parmi les différents vêtements des Ioniens, ceux connus sous le nom d’aktaiai, de facture perse, qui sont cousus de perles d’or retenues par un fil pourpre 24. Il stipule d’ailleurs qu’il s’agit des spécimens les plus fins et coûteux, particulièrement prisés par les Éphésiens. Bien entendu, cette technique n’est nullement réservée aux étoffes pourpres, mais lorsque c’est le cas, elle accroît d’autant leur valeur et leur prestige. L’usage de sequins et d’ornements métalliques aurait une origine orientale. Connue dès le milieu du IIe millénaire av. J.-C. en Mésopotamie, la technique est reprise par les Babyloniens et les néo-Assyriens, chez qui les « vêtements d’or » distinguent les dieux et les rois 25. Les Perses ont également réinvesti cette tradition de l’ornementation des vêtements par des pièces rapportées en or. C’est peut-être par leur entremise que les Grecs se sont familiarisés avec cette technique 26 – même si elle était connue et pratiquée par les Mycéniens 27. M. Miller donne l’exemple de deux petites plaques en or ciselées figurant un lion en marche, qui ont été retrouvées dans les sanctuaires de Dodone et de Samothrace. L’iconographie et le style suggèrent une origine achéménide. Les plaques proviendraient donc, selon elle, de vêtements perses consacrés aux dieux sur le butin des guerres médiques 28. Mais les Grecs usaient déjà de fines plaques en or pour rehausser leurs propres étoffes, ou plutôt celle des dieux. Dans une favissa située sous l’aire sacrée, à Delphes, ont été retrouvés les vestiges de trois statues chryséléphantines du vie s. av. J.-C., qui représentent peut-être Apollon, Létô et Artémis. Elles étaient accompagnées de nombreux éléments décoratifs en or finement ciselé, dont certains devaient être appliqués sur le trône en bois, et d’autres sur des pièces d’étoffe 29. Les sources épigraphiques d’époque classique fournissent également un témoignage éclairant. Le terme pasmation, qui figure dans les listes d’offrandes de vêtements à
23.
24. 25. 26. 27.
28.
29.
der Gewerbe und Künste bei den Griechen und Romern I2 (1912), p. 168-170, 218-222, et A. PekridouGorecki, Mode im antiken Griechenland (1989), p. 44-51. J. Beckwith, « Textile Fragments from Classical Antiquity. An Important Find at Koropi, near Athens », Illustrated London News 224 (1954), p. 114-115 ; E. Barber (n. 8), p. 206. Le tissu se trouve aujourd’hui à Londres, au Victoria and Albert Museum (T220t0B-1953). Cité par Athénée, Deipnosophistes XII 525e. A. L. Oppenheim a examiné le dossier des sources écrites et iconographiques, pour les viie-vie s. av. J.-C. : « The Golden Garments of the Gods », JNES 8 (1949), p. 172-193. Voir M. Miller, Athens and Persia in the Fifth Century. A Study in Cultural Receptivity (1997), p. 167. Les fouilles de Schliemann, dans les tombes à fosses de Mycènes ont livré de nombreux éléments décoratifs en or, de formes variées, destinés à être cousus ou fixés sur les vêtements : E. Barber (n. 8), p. 172-173. M. Miller (n. 26), p. 42, fig. 7-8. Ces plaques étaient rehaussées d’inclusions, aujourd’hui manquantes, sans doute en pâte de verre colorée ou en pierres semi-précieuses, qui accentuaient l’effet de poikilia. Les lions ressemblent en tous points à ceux brodés avec du fil d’or sur le tissu de Koropi. P. Amandry, « Rapport préliminaire sur les statues chryséléphantines de Delphes », BCH 63 (1939), p. 86-119 (notamment p. 88-89).
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Artémis Brauronia, désigne probablement des attaches et ornements métalliques prenant la forme de sequins ou de clinquants ; les adjectifs epitektos et epikhrusos précisent qu’il s’agit d’or 30. L’association entre l’or et la pourpre nous oriente donc vers le domaine de l’aristeia, le monde des dieux et l’univers oriental, mais il ne faut pas se méprendre : ce type de polychromie ne revêt pas une signification univoque et universelle. Sa réception a varié au cours du temps et en fonction des lieux. Ce sont les contextes d’élaboration des discours ou de fabrication et d’emploi des objets qui déterminent les résonances sociales, politiques, religieuses et symboliques, attribuées à l’alliance des deux couleurs. Prenons ici l’exemple du rôle joué par les parures d’or et de pourpre dans les stratégies des élites et du pouvoir politique au sein des cités.
TRUPHÈ
ET POUVOIR : DU BON USAGE DE LA CHARIS
L’alliance de l’or et de la pourpre apparaît comme un topos de littérature grecque quand il s’agit d’évoquer la truphè et l’habrosunè, ce mode de vie luxueux associé à l’Orient, qui semble avoir gagné la faveur des aristocrates de l’époque archaïque, notamment en Ionie 31. Un témoignage précieux concernant l’histoire de la truphè réside dans le livre XII des Deipnosophistes d’Athénée. Les discussions des banqueteurs savants portent sur le thème du plaisir, envisagé sous toutes ses formes : la truphè en est une. Inventée par les Perses, les Mèdes et les Lydiens, elle se manifeste de multiples manières, notamment à travers les pratiques vestimentaires et cosmétiques. Les bijoux en or et les tissus pourpres, souvent combinés à l’utilisation du parfum et du maquillage, en constituent un signe fort. Lorsque l’on examine en détails les informations recueillies par Athénée dans ce livre XII, on s’aperçoit qu’arborer or et pourpre ensemble apparaît à bien des égards comme un acte proprement politique et une démonstration de puissance surtout lorsqu’il s’agit pour un individu de se distinguer de ses concitoyens. Athénée fournit une liste de peuples et de cités qui ont fait usage de l’or et de la pourpre. Souvent, le jugement porté sur de telles habitudes est négatif. L’apparat vestimentaire est interprété comme un signe d’hubris, d’amollissement, de corruption et de décadence. Néanmoins, le port d’une parure d’or et de pourpre n’est pas répréhensible en soi ; tout est affaire de contexte et de point de vue. Athénée mentionne en effet quelques rares cas où il peut être considéré comme un signe d’élégance et de raffinement. Il cite notamment le témoignage d’Héraclide du Pont, à propos des Athéniens vainqueurs à Marathon en 490 av. J.-C. Dans son livre Sur le Plaisir, ce philosophe du ive s. av. J.-C. écrit : « La cité d’Athènes, tant qu’elle fut éprise du luxe, fut florissante et engendra une galerie de personnages de la plus haute valeur. Les Athéniens d’alors s’enveloppaient dans 30.
31.
Pour les références, voir L. Cleland, The Brauron Clothing Catalogues (2005), p. 113, 123. Sur la signification des mots pasmation, epitektos et epikhrusos, voir aussi L. Cleland, G. Davies, L. LlewellynJones, Ancient Greek Costume from A to Z (2007), s.v. Sur l’ornementation métallique des vêtements grecs, on lira une courte mise au point dans A. Pekridou-Gorecki (n. 22), p. 49-51. Sur l’habrosunè, voir L. Kurke, « The Politics of dzƦƴƲƶǀưƫ in Archaic Greece », CA 11 (1992), p. 91-120.
LES NOCES DE L’OR ET DE LA POURPRE DANS LE MONDE GREC
des manteaux de pourpre (dzƯƲƸƴƧʨ […] ȟuƠƷƭƥ), et revêtaient en-dessous des tuniques bariolées ; les cheveux relevés dans des bandeaux, ils portaient autour du front et des tempes des cigales d’or […]. Tels étaient les hommes qui triomphèrent à Marathon, les seuls qui pourfendirent la puissance de l’Asie 32 ». Héraclide estime donc que le goût pour l’or et la pourpre constitue une marque de noblesse, d’aristeia, voire même d’eleutheria. Il ne dénote nullement la mollesse mais manifeste au contraire avec éclat l’aretè et la supériorité des valeureux combattants de Marathon, victorieux des Perses. Le témoignage fourni par Héraclide recoupe celui de Thucydide, mais le jugement que l’historien porte sur ce changement vestimentaire diverge radicalement. En effet, il estime que l’abandon récent par ses concitoyens des longues tuniques et des cigales d’or qui ornaient leur chevelure, au profit d’un vêtement plus sobre, constitue un progrès 33. Une telle modification des pratiques vestimentaires des Athéniens pourrait s’expliquer par l’instauration du régime démocratique, au sein duquel les aristocrates doivent réfréner l’ostentation par laquelle ils affirment leur statut 34. Le port de l’or et de la pourpre serait donc l’un de ces signes d’excellence revendiqués par les élites, en particulier à l’époque archaïque, mais devenus inappropriés dans une cité démocratique, qui, de surcroît, se veut le fer de lance de la lutte contre les Perses, que les Grecs associent à la profusion de ces deux matières précieuses 35. Le jugement positif porté par Héraclide, un Grec d’Asie Mineure installé à Athènes, sur cette pratique vestimentaire – qui lui est familière 36 – renvoie ainsi à une tradition aristocratique, sans doute d’origine ionienne. Cependant, dans la majorité des exemples retenus par Athénée, le port de l’or et de la pourpre dénote un comportement déviant, corrompu et condamnable, signe de décadence ou de (trop) grande perméabilité à l’influence des Barbares. Cela explique que les cités du monde grec les plus réceptives à cette truphè vestimentaire soient précisément situées dans des régions « périphériques » du monde grec : en Occident 37 et en Orient. Au premier rang des amateurs de pourpre et d’or figurent les habitants des cités d’Ionie, qui se sont laissé gagner par l’influence de leurs voisins lydiens et perses, crédités de l’invention de la truphè 38. Dès le vie s. av. J.-C., Xénophane fustige l’apparat de ses concitoyens 32. 33. 34.
35.
36.
37. 38.
Athénée, Deipnosophistes XII 512b-c. Thucydide, Histoire de la guerre du Péloponnèse I 6. Voir A. Geddes, « Rags and Riches. The Costume of Athenian Men in the Fifth Century », CQ 37 (1987), p. 307-331. Sur la délicate question de la définition du mot « aristocrate » et la nécessité d’envisager le groupe des élites, en quête permanente de nouveaux signes de distinction sociale, sous l’angle d’une identité performative, voir l’introduction d’A. Duplouy, Le prestige des élites : recherches sur les modes de reconnaissance sociale en Grèce entre les Xe et Ve siècles avant J.-C. (2006). Ainsi, les principales mentions d’or et de pourpre, chez Hérodote, concernent les butins pris aux Perses. Sur la pourpre et le rejet dont elle fait temporairement l’objet à Athènes entre 490 et 420 av. J.-C., suite aux guerres médiques, voir M. Reinhold, The History of Purple as a Status Symbol in Antiquity (1970), p. 25-26. Diogène Laërce rapporte qu’installé à Athènes, il avait pris l’habitude de porter des vêtements raffinés, de telle sorte que les Athéniens ne l’appelaient jamais « homme du Pont », mais « homme de pompe » (Vies des philosophes illustres V 86). Voir A. Brugnone, « Tessuti costumi e mode in Sicilia tra il VI e il IV seccolo a.C. », Pan 18-19 (2001), p. 53-67. Voir Athénée, Deipnosophistes XII 513f.
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de Colophon se rendant sur l’agora, parfumés et apprêtés d’une façon scandaleuse : leurs cheveux sont retenus par des peignes d’or et leur corps est drapé dans des « manteaux entièrement pourpres » (ƳƥưƥƯƲƸƴƧơƥ ƹƠƴƩƥ), alors même qu’ils n’ont pas encore à subir « l’odieuse tyrannie 39 ». Ici, la parure d’or et de pourpre ne dénote pas la liberté mais au contraire la soumission et l’esclavage, suggérant aux yeux de Xénophane les dérives tyranniques et l’influence pernicieuse des Lydiens. Autres Grecs associés aux vêtements chamarrés : les habitants de Grande Grèce. Athénée signale par exemple qu’à Crotone, après la destruction de sa rivale Sybaris, en 510 av. J.-C., les principaux magistrats de la cité, les archontes, se présentaient en public vêtus d’une alourgis (un vêtement pourpre), couronnés d’or et chaussés de blanc 40. Il livre deux explications possibles à cet usage : soit une arrogance et un relâchement des mœurs, qui font des habitants de Crotone les dignes successeurs des Sybarites 41, soit une influence orientale, consécutive aux péripéties qui mirent aux prises l’un d’entre eux, Démokédès, avec les Perses. Ce qui est intéressant, c’est que ce vêtement d’apparat semble avoir été réservé à ceux qui exerçaient une fonction officielle, dans le cadre du partage du pouvoir qui caractérise la polis grecque. Le port de l’or et de la pourpre ne se réduit pas à un phénomène collectif. La tradition recueillie dans le livre XII des Deipnosophistes livre également quelques exemples d’individus qui se sont distingués par leur truphè vestimentaire. Il importe peu de savoir si l’inventaire d’Athénée est exhaustif et si les personnages mentionnés sont les seuls à avoir agi de la sorte au cours de l’histoire grecque. Les noms cités ont de la valeur car ils témoignent de ce que la tradition en a conservé le souvenir de façon durable. Il s’agit dans la majorité des cas de figures politiques associées aux différentes formes de pouvoir personnel : royauté ou tyrannie. Le meilleur exemple est celui d’Alexandre III de Macédoine qui adopte après la mort de Darius III une partie de l’apparat et du cérémonial achéménides. Or, ceux-ci ménageaient une place de choix à l’or et à la pourpre. Ainsi, le trône du Grand Roi était, si l’on en croit Héraclide de Cumes, en or massif et entouré de quatre colonnettes d’or serties de pierres précieuses, le tout recouvert d’une étoffe de pourpre chamarrée 42. Le costume du Grand Roi était également splendide, depuis la mise en place d’une étiquette inspirée des traditions mèdes par Cyrus le Grand 43. Alexandre reprend une partie de la truphè perse. Par exemple, lors des mariages célébrés à Suse, il fait 39.
40. 41.
42. 43.
Athénée, Deipnosophistes XII 526a et Xénophane, frag. 3 (éd. H. Diels, W. Kranz, Die Fragmente der Vorsokratiker10, 1961). Le plus choquant pour Xénophane est peut-être que ces vêtements soient entièrement pourpres et non simplement bordés ou décorés de pourpre. Athénée, Deipnosophistes XII 522a. Plus loin, il rapporte que, au quotidien, les gens de Cumes portaient des ornements en or et des vêtements gaiement colorés (XII 528d-e). Athénée rapporte aussi qu’à Sybaris, les jeunes garçons, avant d’atteindre l’âge adulte, portaient habituellement des manteaux de pourpres (alourgidas) et avaient les cheveux retenus par des bijoux en or (Deipnosophistes XII 518e). Athénée, Deipnosophistes XII 514c. Voir le témoignage de Xénophon sur la première sortie royale qu’il aurait effectuée : « Après eux, alors, sortant de la porte, en char, Cyrus attirait les regards ; il portait la tiare droite et une tunique de pourpre avec une bande blanche (ƺƭƷ˒ưƥƳƲƴƹƸƴƲ˅ưuƩƶƿƯƩƸƮƲư) – sauf lui personne n’a le droit d’avoir une bande blanche – le pantalon bouffant teint d’écarlate autour des jambes, et une kandys entièrement pourpre (ƮƠưƨƸưȯƯƲƳƿƴƹƸƴƲư) » (Cyropédie VIII 3, 13).
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dresser un décor somptueux autour des quatre-vingt-douze chambres nuptiales préparées pour l’occasion. L’or y domine, aux côtés de la pourpre, de l’argent et de l’écarlate 44. Au quotidien, Alexandre lui-même endosse une partie du costume royal achéménide, en particulier la tunique pourpre rayée de blanc 45. On voit alors apparaître les premiers signes d’une réglementation royale visant à contrôler et à moduler l’accès à la pourpre. En effet, le vêtement pourpre permet désormais de distinguer le roi et ses compagnons : si l’on en croit Athénée, Alexandre demande aux cités d’Ionie de lui fournir de cette prestigieuse porphura, car il désire en revêtir tous ses hetairoi 46. Diodore apporte un témoignage complémentaire et permet surtout de préciser un point important. Les compagnons du roi ont droit à des étoffes « bordées » de pourpre et non entièrement pourpres, à la différence du souverain. Il existe ainsi une hiérarchie, matérialisée sur le tissu par la présence de la teinture 47. Rien, en revanche, n’est précisé au sujet de l’or. Alexandre ouvre la voie aux monarques hellénistiques. Ainsi, Démétrios Poliorcète, fils du diadoque Antigone le Borgne et roi de Macédoine, reprend à son compte la truphè promue par le Macédonien. Athénée rapporte en effet qu’il se plaisait à arborer une mitre « parsemée de paillettes d’or » (ƺƴƸƶƿƳƥƶƷƲƵ), qui entourait une kausia pourpre (dzƯƲƸƴƧƢ). Cette coiffure « mixte » symbolisait la fusion entre l’apparat oriental et la tradition macédonienne. Il se drapait en outre dans des chlamydes éclatantes, ornées d’astres et de constellations dorés, soulignant la dimension cosmique de son pouvoir et ses prétentions universalistes 48. Mais Athénée précise que Démétrios se singularisait surtout de ses prédécesseurs par le port de souliers particulièrement somptueux. Il s’agissait de bottines de feutre et de pourpre précieuse, ornées de motifs tissés de fil d’or 49. Le corps du roi antigonide rayonnait ainsi de mille feux, des pieds jusqu’au sommet du crâne. Pourtant, le spectacle radieux qu’il offrait ne suscitait nul plaisir à ses contemporains. Ceux-ci
44. 45. 46.
47.
48.
49.
Athénée, Deipnosophistes XII 538d (Athénée cite le témoignage de Charès de Mytilène). Un tel faste rivalise avec celui que Sappho prête aux noces d’Andromaque et d’Hector (voir supra, p. 280). Alexandre remplace la kandys « entièrement pourpre » (voir Xénophon, n. 43) par une chlamyde pourpre (ƳƲƴƹƸƴʙư) : Athénée, Deipnosophistes XII 537e-f. Athénée, Deipnosophistes XII 539f-540a : Alexandre veut faire porter à ses compagnons des « vêtements pourpres » (dzƯƲƸƴƧƠƵ […] ƶƷƲƯƠƵ). L’utilisation de laque à base de pourpre, dans la peinture funéraire macédonienne de l’époque, témoigne également de l’engouement pour ce précieux pigment et de son rôle dans les stratégies d’affirmation des nouvelles élites (voir H. Brecoulaki [n. 9], p. 24-27). Diodore, Bibliothèque historique XVII 77 : « Ensuite il ceignit le diadème perse et revêtit la tunique rayée de blanc, la ceinture et le reste de l’accoutrement perse, sauf les anaxyrides et la kandys. Il distribua également à ses compagnons des vêtements bordés de pourpre (ƳƩƴƭƳƲƴƹǀƴƲƸƵƶƷƲƯƠƵ)… ». Athénée, Deipnosophistes XII 535f-536a. Sur ce manteau, voir A. J. B. Wace, « The Cloaks of Zeuxis and Demetrius », Jahresheft des österreichischen archäologischen Institutes in Wien 39 (1952), p. 114-118 (l’auteur fournit l’exemple de quelques éléments décoratifs de laine tissée d’or datant du iiie-ive s. apr. J.-C. et conservés au musée de Boston pour appuyer sa réflexion). Les vêtements chamarrés de Démétrios ne vont pas sans rappeler le manteau richement historié d’Alkimène (ou Alkisthène) le Sybarite, qu’Athénée (Deipnosophistes XII 541a-b) mentionne sans le décrire (voir J. Heurgon, « Sur le manteau d’Alkisthène », Mélanges K. Michalowski [1966], p. 445-450), ou encore le manteau double de pourpre, richement diapré (mais sans or) confectionné par Athéna pour Jason (Apollonios de Rhodes, Argonautiques I 721-767). Athénée, Deipnosophistes XII 535f.
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étaient même choqués par une telle débauche d’artifices 50. L’or et la pourpre, parce qu’ils ne renvoyaient plus, comme dans le cas d’Alexandre, au mérite et à l’excellence, n’étaient que poudre aux yeux. Ils se conjuguaient alors pour former un déguisement ridicule, celui d’un personnage à l’orgueil démesuré. Au fond, Démétrios ressemblait fort au paon vaniteux de la fable ésopique qui, sous des dehors somptueux et séduisants, cache sa médiocrité. L’oiseau parade devant la grue et, pour lui prouver sa supériorité, lui assène : « Moi, je suis vêtu d’or et de pourpre » (ȂƧɢ uɘư ƺƴƸƶɞư Ʈƥƣ ƳƲƴƹǀƴƥư ȂưƨơƨƸuƥƭ). La morale de la fable donne tort au paon : mieux vaut une vie glorieuse, sous une apparence modeste, qu’une existence médiocre, au milieu des richesses 51. Ici, les couleurs de l’or et de la pourpre symbolisent le comble de la vanité, l’ornement inutile et superficiel, opposés au mérite intérieur. Cela explique pourquoi, lorsqu’ils sont associés au pouvoir politique, or et pourpre peuvent basculer du côté de la tyrannie. En effet, au témoignage précédemment cité de Xénophane, on peut ajouter celui d’Aristophane. Dans l’une de ses comédies, représentée en 425 av. J.-C., Les Cavaliers, le marchand d’andouilles flatte Demos et lui promet un destin de monarque, en le dépeignant debout sur un char doré, vêtu d’une « robe de pourpre pailletée » (dzƯƲƸƴƧƣƨƥ […] ƮƥƷƠƳƥƶƷƲư) et une couronne sur la tête 52. Le public athénien avait sans doute à l’esprit la figure négative du tyran ou du despote oriental. Il pouvait songer aussi à l’arrogance de certains de ses concitoyens issus des grandes familles athéniennes, qui n’hésitaient pas à parader sur la place publique, tel un Alcibiade, qui, selon Plutarque, choquait ses contemporains par son exubérance, « la profonde mollesse de son mode de vie, ses excès de boisson et d’amour, ses vêtements efféminés – des robes pourpres qu’il traînait à travers l’agora –, son luxe effréné 53 ». Le biographe ajoute qu’il s’était fait fabriquer un bouclier incrusté d’or, choisissant pour épisème un motif inhabituel : un Éros portefoudre. Le choix de la divinité associée à Aphrodite indique clairement que le jeune aristocrate se situait dans le registre de la séduction. Instruments de légitimation aux mains des élites et des monarques, l’or et la pourpre pouvaient ainsi servir une stratégie reposant sur l’usage de la charis en politique 54. Quelques rares individus choisissent de s’inscrire dans cette tradition d’origine aristocratique, afin d’afficher une forme de supériorité qui ne relève plus du champ de la responsabilité politique. Le seul exemple relevé par Athénée est celui du peintre Parrhasios d’Éphèse. Installé à Athènes à partir de la fin du ve s. av. J.-C., il arbore fièrement un manteau de pourpre et une couronne d’or 55. Son comportement fantasque, excentrique, 50.
51. 52. 53. 54.
55.
Voir le témoignage de Plutarque (Vie de Démétrios 41, 4), qui évoque lui aussi son manteau, « de pourpre et bordé d’or » (ƺƴƸƶƲƳƥƴǀƹƲƭƵ dzƯƲƸƴƧƣƶƭư), ainsi que ses chaussures « feutrées de pourpre pure et brochées d’or » (ȂƮƳƲƴƹǀƴƥƵDzƮƴƠƷƲƸƶƸuƳƩƳƭƯƫuơưƫƵƺƴƸƶƲƦƥƹƩʶƵƳƩƳƲƭƫuơưƲưȂuƦƠƨƥƵ). Ésope, Fables 333 (éd. É. Chambry, CUF, 1927). Aristophane, Cavaliers 967-968. Plutarque, Vie d’Alcibiade 16, 1. Sur la charis et son utilisation en politique, voir V. Azoulay et son étude sur Xénophon : Xénophon et les grâces du pouvoir : de la charis au charisme (2004), en particulier la section consacrée à « La politique de l’éclat » (p. 418-428). Athénée, Deipnosophistes XII 543c.
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et le souvenir qui en a été conservé, participent sans doute de l’émergence d’une figure nouvelle au sein de la cité, celle de l’artiste, qui tente de gagner une reconnaissance sociale et remploie pour ce faire les codes vestimentaires de l’élite traditionnelle. Pline rapporte que Zeuxis, son rival, avait amassé de telles richesses qu’il avait exhibé à Olympie des manteaux sur lesquels son nom était tissé en lettres d’or 56. En fait, les philosophes de Grande Grèce avaient ouvert la voie. Déjà, au milieu du ve s. av. J.-C., en Sicile, le philosophe Empédocle n’hésitait pas à adopter un vêtement de pourpre et une ceinture d’or. Le fait, rapporté par Diogène Laërce 57, s’accorde bien avec les traditions qui entourent sa mort d’un mystère et en font un véritable héros. En effet, si le port des matières colorées les plus prestigieuses par certains individus a marqué, voire heurté les contemporains, c’est qu’il les plaçait au-dessus du reste de la communauté, les rapprochant du monde divin. Réunis, l’or et la pourpre offrent en effet une image de l’harmonie et de l’excellence qui sied d’abord aux Immortels. Ils servent à tracer des frontières entre le monde des hommes et celui des dieux. Le plaisir visuel que génèrent les parures chamarrées est d’abord destiné à satisfaire les Bienheureux.
PARER
ET GLORIFIER LES DIEUX
L’éclat de l’or conjugué à celui de la pourpre est à l’image de la splendeur divine. Les deux matières interviennent ainsi fréquemment dans les rituels qui entourent les effigies des dieux, en particulier les opérations de kosmèsis documentées par l’épigraphie. Associée à la ganôsis et à la khrusôsis, qui consistent à lustrer et à dorer l’agalma, cette « mise en ordre par la parure 58 » se présente avant tout comme un geste d’eusebeia. Elle permet en effet de revivifier la charis de l’effigie qui sert de médiateur avec la divinité. Les inscriptions des sanctuaires fournissent des indications détaillées sur les éléments de la parure divine, périodiquement renouvelée par les offrandes publiques et les actes de dévotion de riches particuliers. Les inventaires athéniens du début du ive s. av. J.-C. ont consigné dans le détail le kosmos de l’Athéna Polias en bois d’olivier conservée dans l’Érechtheion, sur l’Acropole. Il comprend une stephanè, des boucles d’oreille, plusieurs colliers, une chouette d’or, une égide d’or, un gorgoneion d’or, une phiale d’or, un bracelet 59. Athéna possède donc une parure entièrement dorée. Que sait-on de ses vêtements, et notamment du fameux peplos, qui lui est porté en procession chaque année lors des grandes fêtes de la cité ? Selon Euripide, il serait teint de safran – une teinture qui possède l’éclat de l’or – et bigarré 56. 57.
58. 59.
Pline, Histoire naturelle XXXV 62. Diogène Laërce, Vies des philosophes illustres VII 73. Il faut toutefois relativiser le caractère exceptionnel de ce type d’accoutrement : la présence de motifs dorés sur les vêtements était sans doute plus fréquente qu’on ne le croit. En témoignent les inventaires des offrandes à Artémis Brauronia (voir infra, p. 290), mais aussi l’exemple de Démosthène, qui avait porté dans l’atelier d’un orfèvre de l’agora un himation diakhruson à confectionner, avec une couronne d’or à arranger (Démosthène, Contre Midias 22). Voir LSJ, s.v. « ƮƿƶuƫƶƭƵ » (« ordering, arrangement » ; « adornment »). IG II/III2 1424, l. 11-16 ; 1425, l. 307-312 ; 1426, l. 4-8 ; 1428, l. 176-180 ; 1429, l. 42-47. Sur les éléments de cette parure, voir Mansfield 1985, p. 144-147.
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de motifs aux nuances fleuries 60. Une scholie précise que le peplos en question est aussi « couleur d’hyacinthe » (ȻƥƮƣưƬƭưƲƵ). On peut donc supposer qu’une pourpre violette servait à composer les dessins ornant le fond safrané, aux reflets dorés 61. Athéna n’est pas la seule divinité de la cité à avoir droit à un vêtement richement coloré. En effet, une inscription datée de 287/6 av. J.-C. stipule que les effigies d’Aphrodite Pandemos et de Peithô, situées dans le sanctuaire proche de l’agora, doivent être revêtues d’un vêtement porphureos – aucune mention dans ce cas n’est faite d’un éventuel décor figuré 62. À Délos, les informations sont plus nombreuses. Certes, on ignore si l’effigie d’Apollon confectionnée par Tektaios et Angélion a droit à un vêtement spécifique. On sait simplement qu’elle est en or et possède, de surcroît, une couronne et un anneau d’or 63. On dispose en revanche d’indications plus précises pour Artémis, dont le temenos est contigu à celui de son frère. On sait qu’en 145/4 les Athéniens parent son agalma d’un vêtement de pourpre rehaussé d’or (ȂƶƬʨƷƥ ƳƲ[ƴ]ƹƸƴʙư […] ȂƳƣƺƴƸƶƲư), confectionné sur les revenus d’Apollon 64. Le texte ne précise pas de quelle façon l’or se combine à la pourpre sur ce vêtement. Faut-il imaginer une broderie ou un tissage mêlant fils d’or et de laine pourpre, analogue à la pièce retrouvée à Vergina, ou bien la présence d’ornements métalliques parsemés sur l’étoffe, comme sur les statues chryséléphantines de la favissa de Delphes ? On l’ignore, mais l’emploi du terme epikhruson invite peut-être à privilégier la seconde hypothèse 65. Les inventaires de l’Artémision nous apprennent aussi qu’à cette occasion l’ancien chiton de la déesse est donné à Dionysos. Ce transfert de tissu d’une divinité à l’autre pose problème : faut-il y voir une signification rituelle et la preuve d’un lien privilégié entre Artémis et Dionysos ? Ph. Bruneau reste sceptique et préfère interpréter le geste comme une simple opération de « recyclage » des vêtements. Il n’en demeure pas moins que le costume d’Artémis sied à Dionysos 66. Il est possible que cet ancien vêtement soit, à l’instar du nouveau, teint de pourpre, auquel cas le dieu du vin et du théâtre possèderait lui aussi des affinités avec la teinture issue du murex. 60. 61.
62. 63.
64. 65. 66.
Euripide, Hécube 465-467. Voir E. Barber, « The Peplos of Athena », dans J. Neils (éd.), Goddess and Polis: the Panathenaic Festival in Ancient Athens (1992), p. 116. J. Mansfield estime que le peplos d’Athéna devait être pourpre (Mansfield 1985, p. 142). Il suggère la coexistence de deux types de peploi à partir de 470 av. J.-C. : l’un, réalisé par les ergastines, serait celui des Panathénées ordinaires ; l’autre, exécuté tous les quatre ans par deux tisserands professionnels, prendrait la forme d’une grande toile accrochée au mât du navire à roues des grandes Panathénées. Les astynomoi sont chargés de procurer la pourpre nécessaire : Mansfield 1985, p. 448. Bruneau 1970, p. 57 ; Fr. Prost, « La statue cultuelle d’Apollon à Délos », REG 112 (1999), p. 37-60. Ajoutons que les trois statues conservées dans le Pythion font l’objet d’une khrusôsis en 246 av. J.-C. (Bruneau 1970, p. 122). Il existe à Délos d’autres statues dorées. Outre l’agalma d’Hécate, dont la khrusôsis est confiée à Ophélion (ID 290, voir la contribution de V. Chankowski dans ce volume, p. 81-94), citons celle, en bronze doré, d’Artémis, dans l’Artémision Ȃư ưʨƶː, qui fait régulièrement l’objet d’une epikosmèsis nécessitant des petala d’or, et celle, en marbre doré, d’Aphrodite qui tient une phiale en bois doré et porte des boucles d’oreille en or (Bruneau 1970, p. 186-187, 336). ID 1442 B, l. 54-56. Si l’on se réfère au LSJ, qui traduit ȂƳƣƺƴƸƶƲƵ par « overlaid or plated with gold » et réserve le sens de « interwoven with gold » à ƨƣƥƺƴƸƶƲƵ. Bruneau 1970, p. 310-311, 325.
LES NOCES DE L’OR ET DE LA POURPRE DANS LE MONDE GREC
Une autre divinité délienne dispose d’une parure vestimentaire aussi somptueuse 67 : il s’agit de Létô, vénérée dans un sanctuaire situé au Nord du hieron d’Apollon. On sait par les comptes des hiéropes de 269 et 268 av. J.-C. que son temple abrite une statue de bois vêtue d’un chiton de lin, d’une paire de chaussures et d’un himation en laine teinte de pourpre 68. Au iie s. av. J.-C., la déesse possède en outre un chitoniskos finement ouvragé qui, curieusement, est conservé dans le temple d’Apollon. Les listes d’inventaires athéniens décrivent en détail sa belle facture : il est orné d’or et de pierreries, ajusté avec des agrafes d’or et une ceinture en or portant une inscription ; il possède en outre une bande circulaire de pourpre chamarrée d’or (ƮǀƮƯƲư ƳƩƴƭƳƿƴƹƸƴƲư ƳƩƳƲƭƮƭƯuơưƲư) 69. Enfin, les seules autres divinités déliennes pour lesquelles la pourpre s’ajoute à l’or ou à la dorure sont également des figures féminines. Il s’agit des deux agalmata acrolithes trônant dans le Thesmophorion (sans doute Déméter et Korè). Les effigies portent au iie s. av. J.-C. des couronnes et des boucles d’oreilles en bois doré, ainsi que des vêtements de pourpre et de lin 70. L’or entre donc fréquemment dans la composition de la panoplie divine 71 ; en revanche, la présence de tissus pourpres semble moins courante. Il semblerait que ces derniers soient plus volontiers réservés aux divinités féminines – contrairement à l’or, qui ne dessine aucune frontière sexuée au sein de la société divine 72. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le seul dieu susceptible d’endosser la pourpre, dans notre corpus d’inscriptions, est cette figure de la transgression qu’est Dionysos qui récupère le vêtement d’Artémis à Délos. Or on sait par Athénée que, lors de la procession grandiose orchestrée par Ptolémée II Philadelphe à Alexandrie, l’agalma de Dionysos était transporté en grande pompe, sur un char tiré par cent quatre-vingts hommes. Il portait une tunique pourpre
67. 68.
69. 70.
71.
72.
Et ce en dépit du fait que, d’après Ph. Bruneau, son culte semble connaître une certaine désaffection au cours du iiie s. av. J.-C. (Bruneau 1970, p. 208, 211-212). IG XI2 203 A, l. 73 et 204, l. 75-76. Ces inscriptions enregistrent la fourniture de pourpre nécessaire pour le manteau (200 drachmes de pourpre en 269 av. J.-C., en sus de l’achat de la laine ; seulement 20 drachmes en 268 av. J.-C., sans doute pour compléter le travail de l’année précédente). ID 1428 II, l. 53-58 et 1450 A, l. 200-201 (ces inscriptions datent du milieu du iie s. av. J.-C.). Voir Mansfield 1985, p. 479, et Bruneau 1970, p. 208-209. Inventaire athénien de 156-155 av. J.-C. : ID 1417 A, I, l. 50-52. À Syracuse, d’après Plutarque, lors de la cérémonie dite « du grand serment », la personne concernée se rendait dans le sanctuaire des Thesmophores et revêtait la porphyris de la déesse Korè pour prononcer le serment (Vie de Dion 51, 5). Les vêtements des divinités étaient parfois entièrement dorés, soit grâce à un revêtement de feuilles d’or, comme sur les statues chryséléphantines de Phidias, soit par une dorure appliquée sur du marbre ou du bronze, soit par l’utilisation de clinquants en or cousus sur un textile. Cela pourrait être mis en relation avec l’application de l’épithète khrusothronos aux divinités féminines comme Héra et Aurore (voir Homère, Iliade I 611 ; Odyssée XIV 502). J. Scheid, J. Svenbro (Le métier de Zeus. Mythe du tissage et du tissu dans le monde gréco-romain2 [2003], p. 51-56) ont remis à l’ordre du jour une piste d’interprétation déjà ancienne consistant à la comprendre dans le sens « au vêtement fleuri d’or ». Diodore de Sicile (Bibliothèque Historique X 28, 2) rapporte que le Zeus de Syracuse portait un manteau « qui avait été confectionné avec beaucoup d’or » (ȂƮƳƲƯƯƲ˅ƮƥƷƩƶƮƩƸƥƶuơưƲưƺƴƸƶƲ˅). Si l’utilisation de pigments violets sur les statues en marbre de Délos vise à suggérer la teinture issue du murex, l’Apollon étudié par Br. Bourgeois, Ph. Jockey et F. Fauquet, dont la chair est dorée et le manteau rose, doublé de bleu, pourrait fournir l’exemple d’un dieu paré d’or et de pourpre.
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sous une robe safranée transparente, recouverte d’un himation diapré d’or (ƳƲƴƹƸƴƲ˅ư ƺƴƸƶƲƳƲƣƮƭƯƲư) 73 : une parure vestimentaire très féminine, assurément. Mais le kosmos des dieux ne se limite pas aux atours des agalmata divins conservés dans les temples 74. L’or et la pourpre sont présents dans les sanctuaires d’une autre manière par le biais des offrandes consacrées aux divinités, n’en déplaise à Platon 75. Des inventaires gravés sur pierre consignent avec force détails les listes de vêtements et de pièces d’orfèvrerie déposés pieusement par les visiteurs. Ainsi, les stèles de l’Acropole d’Athènes répertorient année par année, entre 434 et 290 av. J.-C., l’ensemble des anathémata consacrés à Athéna et autres dieux et conservés dans les différents « trésors » du Parthénon et de l’Érechtheion. L’or y figure en première place 76. L’analyse des listes recensant les pièces de vêtements consacrées à Artémis Brauronia, pour les années 350-330 av. J.-C., livre des informations en ce qui concerne la nature des tissus offerts et leurs couleurs 77. Une part significative des pièces répertoriées est pourpre ou, le plus souvent, décorée de bordures et bandes pourpres. L’or apparaît sur trois pièces de tissu, dont la couleur propre n’est pas précisée 78. On ignore si ces offrandes étaient teintes de pourpre véritable ou s’il s’agissait d’imitations moins coûteuses. Il n’en demeure pas moins que leurs propriétaires trouvaient là un moyen d’affirmer avec éclat leur eusebeia auprès d’Artémis et de l’ensemble de la communauté – les inscriptions répertorient en effet le nom des propriétaires des vêtements, assurant ainsi une large publicité. La richesse du décor des pièces de Brauron ne constitue pas un cas unique. Un inventaire fragmentaire de l’Artémis Chitônè de Milet, sans doute daté de la fin du iie s. av. J.-C., dresse une liste de petits objets en or et en argent, peut-être destinés à orner l’agalma de la déesse, ainsi que des pièces de vêtement offertes par les fidèles. La kalarisis qui figure en tête du catalogue possède une bordure d’or (ƳƩƴƣƺƴƸƶƲƵ) et nombreux sont les cordons, pagnes et ceintures rehaussés d’or (ȂƳƣƺƴƸƶƲƭ) 79. De plus, comme dans les inventaires de Brauron, la moitié des vêtements est teinte ou ornée de pourpre. W. Günther, qui voit là la « marque d’une vénération toute particulière pour la divinité à laquelle [les pièces] étaient consacrées », explique une proportion si élevée par 73. 74.
75.
76. 77. 78. 79.
Athénée, Deipnosophistes V 198c. Il reprend la description minutieuse de Kallixeinos de Rhodes. Effectivement, le terme kosmos désigne, dans les listes d’inventaire, l’ensemble des objets et des étoffes qui correspondent aux biens sacrés : vêtements et bijoux réels portés par la statue, mais aussi ceux conservés dans le sanctuaire ; il inclut même parfois les tenues sacerdotales des officiants. Voir P. Linant de Bellefonds, Thescra II (2004), s.v. « Rites et activités relatifs aux images de culte », p. 428. En effet, Platon juge l’or (comme l’argent) inapproprié pour des anathèmata consacrés aux dieux, en raison des convoitises qu’il suscite, et lui préfère le bois ou la pierre. De la même manière, la seule couleur admise par le philosophe pour les textiles est le blanc, ce qui exclut de fait la teinture pourpre (Lois XII 956a). Selon lui, cette dernière ne doit même pas faire l’objet d’un commerce dans la cité idéale (847c). La publication de référence est S. Harris, The Treasures of the Parthenon and Erechtheion (1995). Voir T. Linders, Studies in the Treasure Records of Artemis Brauronia Found in Athens (1972). Certains de ces vêtements sont destinés à orner les trois effigies divines de Brauron. Voir le tableau synoptique des références et son commentaire dans L. Cleland (n. 30), p. 84-90, 96-100. W. Günther, « “Vieux et inutilisable” dans un inventaire inédit de Milet », dans D. Knoepfler (éd.), Comptes et inventaires dans la cité grecque (1988), p. 228-229.
LES NOCES DE L’OR ET DE LA POURPRE DANS LE MONDE GREC
le dynamisme de la production locale de pourpre, dont la renommée perdure à l’époque impériale 80. Effectivement, les questions d’approvisionnement et de coût ont dû jouer. Il n’en demeure pas moins que le choix de cette teinture avait peut-être pour but de distinguer les généreux donateurs des autres fidèles. On ne peut exclure non plus, comme le suggère W. Günther, que certains de ces vêtements aient appartenu à des officiants du culte. Effectivement, l’étude de Ch. Jones tend à indiquer que la tenue des prêtres, lors des fêtes ou des processions, est souvent pourpre ou ornée de pourpre, tandis que la masse des participants porte plutôt du blanc 81. On pourrait ajouter aux témoignages athénien et milésien une inscription concernant le sanctuaire d’Héra à Samos : l’inventaire de l’année 346/5 av. J.-C. mentionne également des vêtements à franges et bordures pourpres, ainsi qu’un chitoniskos diapré d’or 82. Enfin, les offrandes déliennes, inventoriées avec soin par les autorités du sanctuaire – magistrats athéniens ou hieropoioi – offrent de nombreux exemples de bijoux et ornements d’or, ou plus exactement dorés, plutôt qu’en métal massif. Effectivement, la récurrence des termes epikhrusos, perikhrusos, hypokhrusos, diakhrusos, aux côtés de khruseos et khrusos, apparaît comme significative 83. Br. Bourgeois, lors du colloque, a rappelé qu’à l’époque hellénistique, Délos semble bénéficier d’une relative facilité d’accès à ce métal – à la pourpre aussi, puisque deux ateliers de fabrication ont été découverts sur l’île. On peut même imaginer, comme le suggère Cl. Prêtre, que certaines des pièces en or offertes aux dieux ont été exposées et conservées sur des bandes d’étoffe pourpre, pour rehausser leur éclat et les mettre davantage en valeur 84. Ainsi, contrairement au vœu pieu de Platon, les offrandes ne font point l’objet d’une réglementation particulière, les parures les plus somptueuses convenant bien à la splendeur divine. Il en va différemment des personnes qui pénètrent dans certains sanctuaires, spécialement lorsqu’elles sont de sexe féminin. On dispose en effet d’une série de « lois sacrées » proscrivant, pour les femmes, les bijoux en or et les robes pourpres, fleuries ou chamarrées. C’est le cas dans le sanctuaire de Déméter, près de Patras, où « les femmes ne doivent pas porter d’objet en or pesant plus d’une obole, ni porter des robes bariolées ou pourpres, ni êtres fardées » ; comme dans celui de Déméter et de Despoina, à Lycosoura (en Arcadie), où le règlement stipule : « Il n’est pas permis d’entrer dans le sanctuaire de Despoina en ayant sur soi un objet en or, à moins qu’il ne s’agisse d’une offrande, ni de porter un vêtement pourpre ou fleuri ou noir, ni de porter des chaussures ou des bagues 85 ». Les raisons d’une telle réglementation sont sans doute multiples. Au-delà du respect des impératifs de pureté, de sobriété et des interdits rituels, il s’agit 80. 81.
82. 83.
84. 85.
Ibid., p. 223-224. Chr. Jones, « Processional Colors », Studies in the History of Art 56 (1999), p. 246-257. L’auteur cite notamment l’exemple d’un règlement relatif au culte de Nikè, à Cos, qui date du iiie s. av. J.-C. : les prêtres doivent porter des tuniques pourpres et des bagues en or. Ch. Michel, Recueil d’inscriptions grecques (1899), no 832. Voir R. Hamilton, Treasure Map. A Guide to the Delian Inventories (2000), p. 349. Voir l’étude lexicale de Cl. Prêtre, Recherches en épigraphie délienne. La parure : étude lexicale et typologique, Thèse de doctorat, École pratique des hautes études (1997), p. 12-19. Ibid., p. 191. Les deux inscriptions datent du iiie s. av. J.-C. : Fr. Sokolowski, Lois sacrées des cités grecques, Supplément (1962), nos 63 et 68.
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de ne pas offenser la divinité, en évitant d’arborer des ornements qui devraient lui être réservés. Ce sont les femmes qui sont touchées par ces « lois somptuaires » réglementant le port de l’or et de la pourpre : le fait souligne les affinités que le sexe féminin entretient avec l’association des deux couleurs dans l’imaginaire grec 86. Dans certaines cités, ce type d’accoutrement est même le propre des courtisanes. Phylarchos, auteur du iiie s. av. J.-C., rapporte en effet qu’à Syracuse une loi, sans doute ancienne, stipule que le port d’une robe « fleurie » (DzưƬƭưƠ), de vêtements bordés de pourpre et de bijoux en or permet de reconnaître les hétaïres 87. Or et pourpre, réunis, renvoient au domaine d’Aphrodite et convoquent un imaginaire érotique. L’analyse de quelques dossiers documentaires (le livre XII d’Athénée et les inventaires des sanctuaires) indique donc que le mariage de l’or et de la pourpre possède une histoire. Cette histoire est rythmée par des périodes où les élites dirigeantes s’approprient cette somptueuse bigarrure, une poikilia de l’excellence qui les rapproche des Bienheureux, d’autres où son usage se restreint et où elle reste l’apanage de la sphère divine. De telles fluctuations, dont la chronologie varie en fonction des cités et des régions du monde grec, ne sont pas uniquement liées à des questions d’approvisionnement 88, mais font intervenir d’autres paramètres. L’un d’entre eux est le rapport à l’étranger, notamment au Perse, dont l’une des spécificités est d’être un amateur d’or et de pourpre et d’en faire un mauvais usage. Le pouvoir de fascination détenu par chacune des deux couleurs est en effet tel que, lorsqu’elles se trouvent réunies, il est nécessaire de les utiliser à bon escient et dans le respect des traditions, sous peine de basculer dans l’hybris. Leurs valeurs intrinsèques se combinent et se renforcent mutuellement. L’or sacralise la pourpre et lui communique une valeur supérieure. La pourpre teinte l’or de significations déterminées, notamment dans le domaine funéraire, féminin ou érotique. Les deux couleurs sont sources de charis, un charme puissant, pour les hommes comme pour les dieux, qui capture et flatte le regard par le mouvement et le chatoiement de la lumière, leur alliance décuple le plaisir qu’elles génèrent et fait surgir l’image de la majesté royale ou divine. Dans les cités, la parure d’or et de pourpre participe ainsi à la construction d’une hiérarchie sociale et agit comme un instrument de légitimation politique. En outre, elle possède une efficacité reconnue dans le cadre des pratiques rituelles et constitue une offrande de choix pour combler les divinités. Maniés correctement, or et pourpre mettent en scène l’excellence, dévoilent l’invisible et donnent corps à la perfection. En revanche, utilisée pour elle-même, coupée de l’aristeia, la parure chamarrée s’apparente à un costume de parade, un artifice ridicule et trompeur, aussi superficiel et inutile que le ramage du paon de la fable.
86. 87. 88.
Dès lors, on comprend mieux la tradition sybarite faisant porter aux jeunes garçons une parure d’or et de pourpre (voir supra, n. 41) : il s’agit de souligner par là qu’ils n’ont pas encore atteint le stade de l’andreia. Athénée, Deipnosophistes XII 521b. A. Brugnone estime que cette loi remonte au vie s. av. J.-C. (« Le leggi suntuarie di Siracusa », La Parola del Passato XLVII [1992], p. 5-24). Il s’agit cependant d’un aspect important, qu’il faudrait examiner avec attention, dans une perspective d’histoire économique, en suivant les pistes suggérées par V. Chankowski lors du colloque.
Couleur, volume, illusion, de la Macédoine à Alexandrie. Structure, éléments constructifs et décor architectural à l’époque hellénistique Anne-Marie Guimier-Sorbets
RÉSUMÉ Les tombes de Macédoine offrent des exemples nombreux de l’utilisation de la couleur sur les façades comme sur les parois intérieures de bâtiments partiellement fictifs. Elles obéissent, pour une large part, aux règles de la grammaire de l’architecture grecque monumentale, qui lient les éléments architecturaux, leurs moulures, et leur décor sculpté, éventuellement rehaussés de couleur. Mais le caractère illusionniste des façades des tombes macédoniennes se retrouve dans le rendu du décor, la peinture donnant l’illusion du décor sculpté et, éventuellement, des moulures qui le portent. En Grèce, et plus encore à Alexandrie, la couleur enrichit l’architecture, sert à imiter des matériaux, à créer différents plans en trompe-l’œil, à donner une illusion de profondeur, parfois à remplacer moulures et décor sculpté. Créant un univers fictif d’architectures de grand luxe, la couleur participe de la truphè hellénistique. MOTS-CLEFS Macédoine, Alexandrie, tombes, façades, bâtiment fictif, architecture grecque monumentale, éléments architecturaux, moulures, décor sculpté, imitation des matériaux, trompel’œil, illusion de profondeur, truphè hellénistique.
Colors, volume, illusion, from ancient Macedonia to Alexandria in Egypt. Structure, building parts and architectural decoration in the Hellenistic period The tombs of Macedonia offer many examples of the use of color on facades as well as on interior walls of buildings that are partially fictitious. To a large extent, they obey the rules of grammar of Greek monumental architecture, which links architectural elements, their moldings, and their carved decorations, potentially enhanced using color. But the illusionist character of the facades of Macedonian tombs is visible on the decor itself, painting giving the illusion of carved decoration, and potentially too of the moldings on which they are painted. In Greece, and even more so in Alexandria, color enriches architecture and is used to imitate materials, to create different trompe l’oeil plans, to give an illusion of depth, and sometimes to replace moldings and carved decoration. Creating a fictional universe of luxurious architecture, color is part of the Hellenistic truphè. SUMMARY
KEYWORDS Macedonia, Alexandria, tombs, façades, Greek monumental architecture, architectural elements, moldings, carved decoration, trompe l’oeil, imitation of materials, illusion of depth, Hellenistic truphè.
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à propos de l’auteur A.-M. Guimier-Sorbets, professeur émérite d’archéologie et histoire de l’art du monde grec, université Paris Nanterre – ArScAn (Archéologie et Sciences de l'Antiquité), UMR 7041 – Maison de l’Archéologie et de l’Ethnologie René-Ginouvès, Nanterre, France.
COULEUR, VOLUME, ILLUSION, DE LA MACÉDOINE À ALEXANDRIE
La couleur fait partie de l’architecture des temples grecs depuis l’époque archaïque. Le style illusionniste, caractéristique des arts d’apparat, tire ses effets du dessin en perspective et d’une polychromie enrichie par la palette des peintres et par la rareté des revêtements de pierre qu’ils imitent, comme l’avait déjà souligné R. Martin 1. Cette volonté d’illusionnisme existe dès la seconde moitié du ve s. av. J.-C., en témoigne le style « structural » qui produit sur les parois, à l’aide de la peinture pour les couleurs et du stuc pour le volume, l’illusion d’un mode de construction à grand appareil et de décor totalement feints. Les tombes comme les maisons, particulièrement dans la Grèce du Nord, en offrent de beaux exemples ; ce style structural se répand dans tout le bassin méditerranéen et il n’est pas étonnant qu’on en trouve de nombreux emplois dans les hypogées d’Alexandrie. Nous envisagerons l’emploi de la couleur dans une visée illusionniste, mais nous n’évoquerons pas l’imitation des matériaux précieux, déjà bien étudiée ; nous prendrons en compte les procédés picturaux qui, au-delà de la polychromie traditionnelle de l’architecture grecque, contribuent à créer une illusion relative à la structure, aux éléments constructifs et au décor des bâtiments de prestige. Témoignant d’un grand savoir-faire, les artisans jouaient à la fois avec la couleur (peinture) et le volume (sculpté ou modelé en stuc), et ce jeu entre la couleur et le volume leur permettait de créer l’illusion de volume par la couleur. Les tombes de Macédoine des ive-iiie s. av. J.-C. en offrent des exemples remarquables, sur les façades comme sur les parois intérieures de bâtiments partiellement fictifs. Par leur caractère illusionniste très marqué et leur état de conservation exceptionnel, elles apportent des témoignages de tout premier plan de l’emploi de la couleur dans l’architecture monumentale. Pourtant, malgré la diversité de leurs façades comme de leur mobilier, réel ou feint, la richesse même de leur décor fait qu’on a, jusqu’ici, privilégié l’étude de leur iconographie aux dépens du décor architectural « classique » et des techniques mises en œuvre. Nous souhaitons donc évoquer le rôle de la couleur dans le rendu de la structure et du décor, eux-mêmes souvent illusionnistes, en Macédoine. En outre, nous étudierons leur utilisation dans les monuments grecs d’Alexandrie, puis leur transformation dans le style gréco-égyptien qui s’y développe au cours de la seconde moitié de l’époque hellénistique.
LE
DÉCOR ARCHITECTURAL PEINT EN MACÉDOINE ET À ALEXANDRIE Dans l’architecture monumentale grecque, la structure extérieure des monuments est mise en valeur par les ombres que les moulures et les cannelures produisent en plein soleil, d’une part, et, d’autre part, par la couleur ajoutée à certains éléments, selon des
1.
Voir R. Martin, « Sculpture et peinture dans les façades monumentales du ive s. avant J.-C. », Revue Archéologique 1968, p. 171-184 ; id., « Le marbre dans l’architecture grecque », Bulletin des Musées royaux d’art et d’histoire 53 (1982), p. 9-18. Ces deux articles sont repris dans R. Martin, Architecture et Urbanisme, CEFR 99 (1987). Pour une mise au point sur la naissance d’un décor illusionniste et les antécédents hellénistiques des fresques romaines, voir A. Rouveret, Histoire et imaginaire de la peinture ancienne, BEFAR 274 (1989), p. 165-219.
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Fig. 1 — Lefkadia, Tombe du Jugement (d’après A.-M. Guimier-Sorbets, Y. Morizot [n. 26], pl. 51.1).
règles canoniques. Ainsi, depuis l’époque archaïque, pendant laquelle la coloration des temples grecs a été élaborée de façon à mettre l’accent sur les points forts de l’élévation, les lignes correspondant à des articulations horizontales sont en rouge, tandis que les articulations verticales sont en bleu 2. Le jaune est utilisé, avec le blanc, pour rehausser certains éléments, tandis que le vert, pigment plus rare, est réservé aux motifs végétaux ; dans certains cas, il est remplacé par du bleu clair. À ce stade, l’utilisation de la couleur n’est pas illusionniste, elle souligne une structure et des éléments constructifs réels. Le caractère illusionniste des tombes macédoniennes se manifeste d’abord en relation avec leur structure : les dimensions et la composition des façades peuvent être sans rapport avec la structure et la taille de la chambre funéraire, comme dans la Tombe du Jugement à Lefkadia (fig. 1) ; ensuite il peut concerner les éléments constructifs : les colonnes engagées évoquent des colonnes libres ; leur matériau de construction – un poros tendre – demande à être enduit pour imiter le grain et la couleur du marbre ainsi que pour atteindre la précision du modelé de certaines moulures. Enfin, le caractère illusionniste des façades des tombes macédoniennes se retrouve dans le rendu du décor, la peinture donnant l’illusion du décor sculpté, et, éventuellement, des moulures qui le portent. 2.
M.-Chr. Hellmann, L’architecture grecque I. Les principes de la construction (2002), p. 234, et pl. XV.
COULEUR, VOLUME, ILLUSION, DE LA MACÉDOINE À ALEXANDRIE
En raison de leurs conditions de conservation, souvent sous un tumulus, et toujours enfouies après les dépositions des restes qu’elles ont pour fonction de conserver dans une chambre close, les tombes de Macédoine permettent d’observer l’emploi et le rôle des couleurs dans le décor architectural, sur les façades comme à l’intérieur des chambres funéraires peintes. Moins bien conservées, car destinées à accueillir les cérémonies de commémoration périodiquement dues aux morts – et donc ouvertes pendant toute la durée de leur utilisation –, les tombes d’Alexandrie fournissent pourtant des éléments du même type : ainsi, il est légitime de comparer l’emploi qui y est fait des couleurs. Dans les deux régions, on retrouve les principes canoniques de composition et d’utilisation des couleurs bleue et rouge au-dessus de l’architrave. Couleur du fond Dans tout le monde grec, les teintes sombres – noir ou bleu foncé – sont utilisées pour accentuer la profondeur et permettre au décor de mieux se détacher du fond. Ainsi, par exemple, celui des frises sculptées du Trésor de Siphnos à Delphes était bleu foncé 3. En Macédoine, le fond de la course de biges peinte dans l’antichambre de la Tombe III du tumulus royal de Vergina (Tombe du Prince) est lui aussi bleu foncé, situé au-dessus de la ligne de sol 4. Les figures, partiellement colorées, sont dessinées sur de l’enduit clair ; elles portent des ombres, rendues de manière graphique (hachures et croisillons) pour produire un effet de volume ; ce bandeau peint, comme celui des griffons et des fleurons à l’intérieur de la Tombe de Perséphone 5, imite un motif sculpté dans la pierre. À l’exception de ceux du Parthénon, à fond rouge 6, les tympans des frontons des temples ont un fond peint en bleu foncé, et on retrouve ce principe sur les tombes macédoniennes : sur la Tombe des Palmettes ou celle du Jugement à Lefkadia, ou encore sur celle du Banquet d’Aghios Athanasios (fig. 2). Au contraire, les figures peintes sur les parois se détachent sur le fond clair de la pierre juste enduite, qu’elles soient placées à l’intérieur (scène du rapt dans la Tombe de Perséphone à Vergina) 7 ou sur les façades (les soldats gardant la Tombe du Banquet d’Aghios Athanasios, les personnages du Jugement à Lefkadia [fig. 1], etc.). L’usage du fond monochrome sombre est donc bien lié à la grammaire du décor architectural. Si la frise de la chasse, sur la Tombe II du tumulus de Vergina (Tombe de Philippe) a un fond clair (qui n’est pas opaque, mais qui insère les personnages dans un paysage), c’est que cette frise s’apparente moins au décor architectural qu’à la grande peinture, tout comme le tableau peint sur le dossier du trône de la tombe d’Eurydice. Les personnages divins s’y détachent sur un fond clair, assez lumineux dans les zones qui ne sont pas altérées. Il en va de même pour l’ornement végétal : les rinceaux peints sur les façades se détachent sur un fond bleu foncé – par exemple sur la Tombe du Jugement 3. 4. 5. 6. 7.
M.-Chr. Hellmann (n. 2), p. 232 signale qu’à partir des années 530, le fond des sculptures architecturales devient bleu noir. R. Ginouvès et al., La Macédoine de Philippe II à la conquête romaine (1993), fig. 144. M. Andronikos, Vergina II, The “Tomb of Persephone” (1994), pl. III. M.-Chr. Hellmann (n. 2), p. 234. M. Andronikos (n. 5), pl. IV-XII.
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Fig. 2 – Aghios Athanasios, Tombe du Banquet (d’après M. Tsimbidou-Avloniti, ƑƥƮƩƨƲưƭƮƲƣƷƠƹƲƭ ƶƷƲưƚƲƣưƭƮƥƮƥƭƶƷƲưƆƧƭƲƆƬƥưƠƶƭƲƍƩƶƶƥƯƲưƣƮƫƵ, AD 91 [2005], pl. 27.2).
Fig. 3 – Vergina, Tombe d’Eurydice, intérieur de la tombe, la façade et le trône (d’après A. Kottaridou, « Couleur et sens : l’emploi de la couleur dans la tombe de la reine Eurydice », dans A.-M. Guimier-Sorbets, M. Hatzopoulos, Y. Morizot (éds) [n. 26], pl. 59.2).
COULEUR, VOLUME, ILLUSION, DE LA MACÉDOINE À ALEXANDRIE
(fig. 1), mais l’extraordinaire composition polychrome de palmettes et de fleurs peintes sur la voûte de l’antichambre de la Tombe des Palmettes à Lefkadia se détache sur un fond bleu clair qui évoque l’azur : nous ne sommes plus dans le domaine du décor architectural, mais dans celui, lumineux, de l’au-delà des bienheureux, derrière la façade fermée. À Alexandrie, il n’est pas facile de restituer précisément la couleur de fond de la scène figurée qui surmonte la porte centrale de la Tombe 1 de Mustapha Kamel : la peinture originelle n’en est plus conservée, mais les témoignages d’A. Adriani, dans les années 1950, indiquent que le fond était bleu clair, avec un cerne plus foncé autour des personnages, ce que montre la photographie en noir et blanc de la publication 8. Il s’agit vraisemblablement d’un artifice du peintre, visant à faire ressortir les figures sur un fond bleu clair, en donnant un effet de volume 9. La couleur noire est aussi utilisée pour suggérer le vide : on sait que le trône de marbre aux dimensions imposantes de la Tombe d’Eurydice à Vergina (fig. 3) est plein sous l’assise, mais la zone située entre les pieds, sur la face antérieure comme sur le côté libre, est peinte en noir, ce qui allège l’ensemble en créant un effet de vide 10. Le même procédé (plaque peinte en bleu foncé derrière les pieds du dieu) avait été décrit par Pausanias (V 11, 5) pour le trône de la statue chryséléphantine de Zeus dans le temple d’Olympie. De la même manière, sur les lits funéraires (de la Tombe de Potidée, sculptés dans la pierre), la peinture noire suggère les « vides » entre les traverses et les pieds des deux klinai et de leurs marchepieds 11. La même technique a été reprise, à Alexandrie, pour le lit de la Tombe B 26 du chantier du pont de Gabbari, dans la nécropole occidentale 12. On la retrouve aussi entre les montants de la (fausse) base de bois censée soutenir le naïskos dans la chambre 2 de la Tombe 2 d’Anfouchi. De plus, ce naïskos axial rendu en stuc se détache, non sur le décor des parois, mais sur une zone noire (dont la couleur est presque effacée mais certaine) qui interrompt le décor et produit une apparence de vide entre le naïskos et les murs qui le portent en réalité (fig. 4) : le naïskos semble ainsi placé à l’intérieur de la pièce, comme le sont les chapelles « saints des saints » des temples égyptiens 13. Cette
8.
9.
10.
11.
12. 13.
A. Adriani, La nécropole de Moustapha Pacha, Annuaire du Musée gréco-romain d’Alexandrie II (19331935), p. 47-128, fig. 2, 11 ; voir aussi M. Venit, Monumental Tombs of Ancient Alexandria, the Theater of the Dead (2002), fig. 42, p. 37. A.-M. Guimier-Sorbets, « Tracés préparatoires pour le décor peint : quelques exemples alexandrins », dans Mélanges Mostafa el-Abbadi, Bulletin de la Société archéologique d’Alexandrie 46 (2000), p. 127-136, particulièrement p. 133-134. R. Ginouvès (n. 4), fig. 135 pour la vue de côté, fig. 136 pour la vue de face. Le vide est réel sous les accoudoirs et le dossier, ce qui a permis d’y placer, sur deux niveaux, des colonnettes avec des sphinx et des figures féminines dans les entrecolonnements. K. Sismanidis, ƏƯƣưƩƵƮƥƭƮƯƭưƲƩƭƨƩƣƵƮƥƷƥƶƮƩƸơƵƷƼưuƥƮƩƨƲưƭƮǁưƷƠƹƼư (1997), p. 30-74, pl. 1-7 ; H. Brecoulaki, La peinture funéraire de Macédoine, emplois et fonctions de la couleur IVe-IIe s. avant J.-C., Mélétémata 48 (2006), pl. 118. A.-M. Guimier-Sorbets, M.-D. Nenna, « Le lit funéraire de la tombe B26 », dans J.-Y. Empereur, M.-D. Nenna (éds), Nécropolis 2, Études Alexandrines 7 (2003), p. 367-374. Pour un exemple de restitution du saint des saints du temple de Louxor, voir J.-Cl. Goyon et al., La Construction pharaonique du Moyen Empire à l’époque gréco-romaine, contextes, principes de construction (2004), pl. VI.
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Fig. 4 — Alexandrie, Anfouchi, Tombe 2, salle 2, vue générale (cl. A. Pelle, Archives CEAlex).
évocation de sanctuaire pharaonique est particulièrement forte depuis l’entrée de la cour puisque le naïskos, dans une pièce surélevée par rapport à la première salle, y était vu dans l’enfilade de deux portes, chacune gardée par une paire de sphinx (fig. 5). L’illusion n’est pas ici conçue verticalement, sur une façade comme en Macédoine, mais horizontalement, dans la profondeur des enfilades des pièces.
Si le noir fait « disparaître » la paroi, la couleur rouge la fait seulement « reculer », par rapport aux éléments plus clairs, créant un effet de renfoncement et donc un espace fictif. Ainsi, au second niveau de la façade de la Tombe du Jugement à Lefkadia, les colonnes engagées semblent détachées du mur grâce au bandeau rouge qui cerne les encadrements des fenêtres : le mur semble ainsi placé au fond d’un portique, fictif. Ce procédé crée un effet de profondeur sur la façade (fig. 1). Le même procédé a été utilisé sur la Fig. 5 — Anfouchi, Tombe 2, salle 1, vue générale (cl. A.-M. Guimier-Sorbets, ArScAn). façade (sur cour) de la Tombe I de la nécropole de Mustapha Kamel à Alexandrie, au iiie s. av. J.-C. : tout autour de la cour, des demi-colonnes imitent un péristyle (fig. 6), et, sur la façade principale, leur dissociation de la paroi est suggérée par la couleur rouge placée de part et d’autre des portes qui conduisent à l’espace funéraire majeur. De même, les chapiteaux des pilastres de ces portes sont plats, mais le renfoncement de leurs panneaux est suggéré par leur fond rouge, sur lequel étaient peintes des couronnes censées être sculptées en relief 14 (fig. 7). Dans la nécropole alexandrine d’Anfouchi (iie s. av. J.-C.), le loculus axial de la chambre funéraire 5.5 est cerné d’une zone rouge ; ce fond produit un effet de relief pour un encadrement qui est seulement peint ; le même procédé est utilisé au-dessus de la baie de la salle 5.4 donnant accès à la chambre funéraire 5.5. On comprend que le fond rouge qui surmonte la baie de 5.4 vers 5.5 a pour objectif de faire saillir le linteau du plafond,
14.
A. Adriani (n. 8), pl. C.
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Fig. 6 — Alexandrie, Mustapha Kamel I (d’après G. Grimm, Alexandria, Die Erste Königsstadt der Hellenistichen Welt [1998], fig..93c, p. 94).
Fig. 7 — Alexandrie, Mustapha Kamel I (d’après A. Adriani [n. 8], pl. C).
sans interrompre la continuité de la paroi dans laquelle s’ouvre la baie. Tandis que, dans la salle 5.5, la zone rouge placée sur trois côtés a pour effet de dégager de la paroi l’encadrement du loculus qui est conçu comme un naïskos-baldaquin, posé sur une base de bois tout à fait comparable à celle – réelle – qui est conservée au Musée gréco-romain d’Alexandrie et provient de Théadeldephia (Fayoum) 15. Une observation du même type peut être faite dans les deux tholoi balnéaires de Taposiris Magna, creusées dans les parois : encadrant les niches qui surmontent chaque baignoire, les parastades – creusées et non construites – sont en faible relief par rapport à l’espace qui les sépare. Dans le premier état des tholoi hellénistiques, cette zone correspond à un creux réel, dont la profondeur est renforcée par la couleur rouge. Dans un second état, après réfection et pose d’une nouvelle couche d’enduit, l’espace n’est plus en creux, mais la profondeur en est seulement simulée par l’emploi de peinture rouge 16.
15. 16.
MGR no 19680, voir I. Hairy (éd.), Du Nil à Alexandrie, histoires d’eaux (2009), p. 93, fig. 13. Ces bains, datables des iiie-iie s. av. J.-C., ont été découverts par E. Breccia en 1905-1906, et sont en cours d’étude par l’équipe de M.-Fr. Boussac, B. Redon et Th. Fournet ; je les remercie de m’y avoir accueillie. Pour une étude récente et des photographies des tholoi, voir Th. Fournet, B. Redon, « Les bains souterrains de Taposiris Magna et le bain de tradition hellénique en Égypte », dans M.-Fr. Boussac, B. Redon, Th. Fournet (éds), Le bain collectif en Égypte, Études urbaines 7 (2009), p. 113-137, particulièrement fig. 2, 11. Pour une photographie en couleurs, voir Dossiers de l’Archéologie 342 (novembre-décembre 2010), fig. p. 57.
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Fig. 8 — Lefkadia, Tombe du Jugement, métope (d’après F. M. Petsas [n. 21], pl. III).
Fig. 9 — Lefkadia, Tombe du Jugement, métope (d’après F. M. Petsas [n. 21], pl. IV).
Le rouge soutenu peut aussi être une couleur de fond, comme sur les frontons et les métopes du Parthénon à Athènes. Certains motifs décoratifs, avec un relief réel ou feint, sont à fond rouge : ainsi les oves et dards et les rais-de-cœur se détachent souvent sur un fond rouge visible entre les pointes. Dans les décors les plus soignés, les rais-de-cœur, les oves et les dards sont cernés latéralement d’une petite zone rouge foncé, ou grise, une “ombre portée” qui renforce l’illusion de la saillie du motif se détachant sur le fond, avec un éclairage tombant à l’oblique. C’est notamment le cas sur le rais-de-cœur de la façade intérieure de la Tombe d’Eurydice, et sur l’ovolo qui surmonte la course de biges, dans la Tombe du Prince (Tombe III) de Vergina 17. Ce rendu illusionniste qui « fonctionne » sur un décor de paroi (verticale) a été ensuite reproduit par les mosaïstes, qui l’ont projeté à l’identique sur le plan horizontal des pavements : on retrouve le même rendu des oves et dards avec ombres portées sur le fond, dans la bordure de l’embléma au masque de Rhodes 18. Sur deux pavements de Samos et de Rhodes, le motif des postes à protomés de griffons reproduit un motif de stuc doré : les postes animées se détachent sur un fond bichrome, rouge sous les enroulements, noir au-dessus des têtes. Sur le fond rouge, des lignes rouge foncé et noires marquent l’ombre portée placée d’un côté des enroulements, pour donner l’illusion de la saillie du motif 19. Au-dessus des enroulements et des protomés, le fond noir fait « disparaître » la paroi et le motif semble placé en couronnement, avec sa partie figurée en ronde bosse. Ces pavements témoignent d’un style doublement illusionniste puisque le mosaïste imite, à l’horizontale et avec des tesselles, un décor qui, lui-même, imite par la couleur et le stuc, un décor de couronnement de paroi, en trois dimensions. 17. 18. 19.
R. Ginouvès (n. 4), fig. 144. G. Konstantinopoulos, AD XXII (1967), Chron., p. 523-528, pl. 384. V. Giannouli, A.-M. Guimier-Sorbets, « Deux mosaïques hellénistiques à Samos », BCH 112 (1988), p. 545-568, pl. I-IV. Pour le pavement de Rhodes, au motif identique, voir A. Dreliossi, AD 45 (1990), Chron., p. 467-470, pl. 273d.
COULEUR, VOLUME, ILLUSION, DE LA MACÉDOINE À ALEXANDRIE
Si le fond des frises figurées est généralement de couleur sombre, comme on l’a vu, celui des métopes est laissé le plus souvent de couleur naturelle lorsque les figures sont sculptées 20. Sur la façade de la Tombe du Jugement, à Lefkadia, ce principe est respecté : la frise est à fond sombre, mais les métopes sont à fond clair. Toutefois, les figures de la frise ne sont pas sculptées, mais leur volume, réel, est rendu en stuc. Au contraire, les figures des métopes ne sont qu’à deux dimensions : elles sont simplement dessinées, donc laissées de la couleur de la pierre, avec un jeu de hachures et d’ombres portées grises et mauves qui produisent l’effet de volume de chaque figure et leur saillie par rapport au fond 21 (fig. 8-9). Les moulures et leur décor Au profil caractéristique de chaque moulure, sont associés des décors, rendus eux-mêmes en relief, c’est-à-dire sculptés dans la pierre, et éventuellement rehaussés de peinture. Ces associations, canoniques elles aussi, sont bien connues : à l’ovolo est associé le motif d’oves et de dards (pour former ce que nous nommons kymation ionique), au talon droit ou renversé sont associés les rais-de-cœur (kymation lesbique) et au bec de corbin sont associées les feuilles doriques (kymation dorique). En outre, les méandres sont sculptés sur des bandeaux plats, tandis que les perles et pirouettes sont placées sur de fines baguettes ou sur un angle droit saillant, à la jonction de parties horizontales et verticales 22. Si la moulure forme un relief, sculpté dans la pierre ou modelé dans le stuc, le motif qui lui est associé peut être seulement peint, le volume de ses éléments étant alors rendu de façon illusionniste par la couleur, avec un jeu d’ombre et de lumière. Dans d’autres cas, le motif, en réalité produit sur une zone plate, mais au volume rendu de façon illusionniste, se substitue à la moulure dont il suggère seulement la présence pour le spectateur qui a parfaitement intégré la grammaire de l’architecture grecque ; on atteint ainsi le degré supérieur de l’illusionnisme : volume de la moulure et volume du décor sont tous les deux fictifs. Parfois, un même élément architectural combine deux techniques. Ainsi, le soffite de l’architrave du naïskos du temple d’Apollon à Didymes présente, de chaque côté, une véritable moulure en talon sculptée de rais-de-cœur, tandis que la plate-bande centrale porte une guirlande en stipe de palmier, avec manchon textile, rendus seulement par la
20. 21. 22.
Toutefois, les métopes de l’Héphaistéion et du Parthénon semblent avoir été rouges : M.-Chr. Hellmann (n. 2), p. 234. F. M. Petsas,ȵƷƠƹƲƵƷ˒ưƐƩƸƮƥƨƣƼư (1966), pl. III-IV. Pour l’ensemble des moulures associées à leur décor, voir R. Ginouvès, R. Martin, Dictionnaire méthodique de l’architecture grecque et romaine I. Matériaux, techniques de construction, techniques et formes du décor (1985), p. 152-185 ; pour leur transcription en peinture, voir A.-M. Guimier-Sorbets, « Voir la peinture et la mosaïque en relief : représentations illusionnistes de quelques moulures et motifs architecturaux », dans C. Guiral Pelegrin (éd.), Circulacion de temas y sistemas decorativos en la pintura mural antigua, actas del IX Congreso Internacional de la Association Internationale pour la Peinture Murale Antique [AIPMA] (Zaragoza-Calatayud, 21-25 septiembre 2004) (2007), p. 115-122, pl. 10.
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Fig. 10 — Didymes, naïskos du temple d’Apollon, guirlande en stipe de palmier (d’après F. Rumscheid [n. 23], pl. 31.1).
Fig. 11 — Vergina, Tombe d’Eurydice, façade intérieure, kymation dorique (d’après A. Kottaridou, « Couleur et sens : l’emploi de la couleur dans la tombe de la reine Eurydice », dans A.-M. Guimier-Sorbets, M. Hatzopoulos, Y. Morizot (éds) [n. 26], pl. 59.3).
peinture 23 : les (rares) spectateurs de la façade monumentale restituaient le volume de la guirlande (fig. 10) – artificielle et donc durable – reproduite par la seule peinture sur le linteau du naïskos abritant la statue de la divinité. Dans le kymation dorique, le bec de corbin porte des feuilles d’eau à extrémité arrondie (feuilles doriques), le plus souvent bordées et avec nervure centrale, dont on voit normalement la face inférieure pour la partie basse de la feuille, et la face supérieure pour l’extrémité. Quand le motif est peint, sur une moulure réelle ou feinte, les feuilles sont alternativement bleues et rouges, avec les bordures et les nervures blanches pour marquer leur saillie. Parfois, pour renforcer visuellement l’extrémité des feuilles, le jeu d’alternance (fig. 11) porte aussi sur les faces : une feuille dont la face supérieure est bleue présente une face inférieure rouge, tandis que la suivante présente le même jeu de couleurs mais inversées (face supérieure rouge et face inférieure bleue). Lorsque, en deux dimensions seulement, le motif peint suggère la moulure, le peintre peut figurer soit le motif complet, en montrant les deux faces de chaque feuille, soit il n’en montre que la face supérieure. Dans ce dernier cas, il suggère des moulures fines, censées ne produire qu’une faible « saillie », vue de dessus. Les attestations de ces diverses variantes sont nombreuses dans les tombes de Macédoine.
COMPARAISON
DES RENDUS ILLUSIONNISTES DES TOMBES DE MACÉDOINE Afin de comparer les techniques illusionnistes mises en œuvre dans les tombes de Macédoine, nous choisirons trois exemples : la Tombe d’Eurydice à Vergina, datée des alentours de 340 av. J.-C., l’une des plus anciennes donc, la Tombe du Jugement à Lefkadia et celle au Banquet d’Aghios Athanasios, toutes deux datées du dernier quart du ive s. av. J.-C.
23.
Cet élément est daté des environs de 300 av. J.-C., voir F. Rumscheid, Untersuchungen zur kleinasiatischen Bauornamentik des Hellenismus (1994), p. 237-250, no 33.6, pl. 31.2.
COULEUR, VOLUME, ILLUSION, DE LA MACÉDOINE À ALEXANDRIE
La tombe d’Eurydice à Vergina (fig. ) Le caractère illusionniste de la Tombe d’Eurydice à Vergina est surtout marqué dans sa structure et le rendu de certains éléments constructifs : prototype des tombes macédoniennes (comme l’avait montré M. Andronikos), elle comporte une voûte qui permet d’assurer la stabilité de la couverture d’un vaste espace intérieur ; mais cet artifice de construction est dissimulé extérieurement par une rangée de pierres formant une couverture plate, et intérieurement par un plafond de bois coloré en bleu : ainsi le volume visible de la tombe, à l’intérieur avant sa fermeture et à l’extérieur avant d’être recouvert de terre, restait-il celui d’une tombe à ciste 24. Les parois intérieures de l’antichambre, enduites d’un fin mortier poli, portaient des incisions imitant les joints fins de blocs de construction en marbre. De plus, outre la porte qui ouvrait sur la façade (derrière la protection d’un empilement de blocs), la paroi du fond de la chambre funéraire était aménagée à l’intérieur comme une façade ionique précédée d’une colonnade avec une porte centrale à deux vantaux et deux fenêtres. Le caractère illusionniste de cet aménagement fictif était si fort que les pilleurs de la tombe s’y étaient trompés et avaient tenté de forcer la (fausse) porte. Pour le monumental trône de marbre, on a déjà indiqué le procédé qui allège visuellement l’assise pleine ; la teinte du marbre imite vraisemblablement l’ivoire des meubles les plus précieux ; sur le fond rouge qui approfondit visuellement le renfoncement des traverses, le stuc doré des figures animales imite des appliques de bronze 25. Sur le dossier du trône, les motifs encadrant le panneau central sont sculptés, peints et dorés à la feuille. Sur les parois de la chambre, les moulures sont réelles, comme la frise de denticules à fond rouge, mais les motifs sont seulement peints avec un effet d’ombre (frise d’anthémion, perles et pirouettes, oves et dards, rais-de-cœur). Sur la paroi du fond, au-dessus de la porte et des fenêtres, le motif complet des feuilles doriques est peint avec une double alternance de couleurs sur un bec de corbin réel (fig. 11). Sur les yeux des volutes des chapiteaux ioniques, des rosaces étaient peintes avec des rehauts dorés : de tels ornements de bronze ont été retrouvés sur les chapiteaux ioniques du temple de
24.
25.
Une série d’observations du décor des tombes et les particularités des murs m’avaient permis de formuler, au cours d’un colloque tenu en 2001, l’hypothèse de ce plafond de bois cachant complètement la voûte de l’intérieur de la chambre (A.-M. Guimier-Sorbets, « Architecture funéraire monumentale à l’époque hellénistique : des modèles macédoniens aux nécropoles alexandrines », dans L’architecture funéraire monumentale : La Gaule dans l’Empire Romain, Actes du colloque organisé par l’IRAA du CNRS et le musée archéologique Henri-Prades, Lattes, 11-13 octobre 2001 [2006], p. 191-203) ; par la suite, cette hypothèse a été confirmée par A. Kottaridou qui a noté la présence de restes de bois peint en bleu sur tout le sol de la chambre et des traces d’embout de poutres sur les murs latéraux (voir A. Kottaridi, « Discovering Aegae, the Old Macedonian Capital », dans M. Stamatopoulou, M. Yeroulanou [éds], Excavating Classical Culture. Recent Archaeological Discoveries in Greece, BAR International Series 1031 [2002], p. 158 et n. 18). Une figure (pl. 59.1) de ce même article montre la vue supérieure de la tombe et sa couverture plate de pierre qui surmonte et cache l’extrados de la voûte. Pour les références sur les appliques, voir A.-M. Guimier-Sorbets, « Quelques poissons dorés : un décor d’appliques du mobilier alexandrin », dans J.-Y. Empereur (éd.), Alexandrina 3, Études alexandrines 18 (2009), p. 343-372. Signalons que, sur le lit de pierre du tumulus Bella (Vergina), les appliques sont seulement peintes en jaune doré sur le fond rouge rose de la traverse : cette couleur jaune doré, ombrée, sert ici à suggérer le volume des appliques (R. Ginouvès [n. 4], fig. 131).
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Léto à Xanthos. Dans son ensemble, cette tombe témoigne d’une qualité exceptionnelle et d’innovations surprenantes. Son caractère illusionniste, très marqué, affecte davantage sa structure et les éléments constructifs que le décor dont le volume des moulures est réel. La Tombe du Jugement de Lefkadia (fig. ) La Tombe du Jugement de Lefkadia possède une façade particulièrement monumentale, qui dépasse en hauteur comme en largeur les dimensions de la chambre funéraire, à l’arrière du vestibule. La façade présente deux niveaux, qui ne correspondent pas à la structure intérieure du bâtiment. Le premier niveau, d’ordre dorique, avec quatre demicolonnes entre deux antes, imite un édifice tétrastyle in antis à colonnes libres. Dans les entrecolonnements, à environ deux mètres au-dessus du stylobate, sont figurés les quatre personnages du jugement : on suggère ainsi que la scène a lieu à l’intérieur du bâtiment, portes fermées. Ainsi, malgré la coupure matérialisée par la façade entre le monde des vivants et celui des morts, les vivants expriment leur croyance dans une survie agréable, après l’issue positive du jugement dernier 26. Le niveau supérieur de la façade est fictif, de même que les sept fenêtres fermées. Nous avons signalé précédemment l’emploi des demicolonnes et du renfoncement fictif créé au second niveau par l’adjonction de peinture rouge. À l’intérieur de la chambre funéraire, un décor de pilastres de stuc se détachant sur des parois rouge foncé imite une colonnade sur un socle. Ce dispositif reproduit l’aménagement d’un baldaquin recouvrant les restes du mort déposés sur une kliné réelle, dont des éléments décoratifs de verre ont été retrouvés. Ce baldaquin, qui rappelait la prothésis du mort, jouait un rôle important dans l’hommage qui lui était rendu en tant que héros ; un baldaquin de même type a été représenté dans la tombe familiale de Lyson et de Kalliklès, toujours à Lefkadia, mais il y était seulement rendu par la peinture 27. L’illusionnisme de la Tombe du Jugement est donc manifeste dans sa structure comme dans le rendu des éléments constructifs et de l’aménagement intérieur en baldaquin. Il n’est pas absent du décor et nous avons déjà signalé les techniques de trompe-l’œil qui ont permis de simuler une frise et des métopes sculptées. À l’exception du kymation ionique, totalement plat, qui sert de ligne de sol aux personnages, les motifs sont peints sur des moulures réelles, par exemple les feuilles doriques vues d’en dessous comme d’en dessus, avec une simple alternance de couleurs, d’une feuille à l’autre, sur un bec de corbin réel ; toutefois, les denticules sont seulement peints en trompe-l’œil. Le fronton devait porter un décor sculpté sur fond bleu foncé, mais il n’est quasiment plus conservé. Dans 26.
27.
A.-M. Guimier-Sorbets, Y. Morizot, « Construire l’identité du mort : l’architecture funéraire en Macédoine », dans A.-M. Guimier-Sorbets, M. Hatzopoulos, Y. Morizot (éds.), Rois, Cités, Nécropoles : institutions, rites et monuments en Macédoine, Actes des colloques de Nanterre 2002 et Athènes 2004, Mélétémata 45 (2006), p. 117-130, pl. 45-53. S. Miller, The Tomb of Lyson and Kallikles: A Painted Macedonian Tomb (1993) ; A.-M. Guimier-Sorbets, « Mobilier et décor des tombes macédoniennes », dans R. Frei-Stolba, K. Gex (éds), Recherches récentes sur le monde hellénistique, Actes du Colloque en l’honneur de Pierre Ducrey, Lausanne, 20-21 Novembre 1998 (2001), p. 217-229 ; A.-M. Guimier-Sorbets, « Architecture et décor funéraires, de la Grèce à l’Égypte : l’expression du statut héroïque du défunt », dans Chr. Muller, Fr. Prost (éds), Identités et cultures dans le monde méditerranéen antique, Mélanges F. Croissant (2002), p. 159-180.
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ce bâtiment emblématique de l’illusionnisme macédonien, l’emploi de la couleur est relativement limité et on voit que les efforts de trompe-l’œil concernent moins le décor architectural que la structure, les éléments constructifs et les représentations figurées. La Tombe au Banquet d’Aghios Athanasios (fig. ) La Tombe au Banquet (Tombe III) d’Aghios Athanasios, contemporaine de celle des Palmettes et de la Tombe du Jugement de Lefkadia, se caractérise, outre l’état de conservation de ses peintures, autant par son extraordinaire décor figuré, que par le caractère illusionniste de sa façade. Cet illusionnisme concerne aussi bien ses éléments constructifs que son décor. La structure du monument est assez simple : une chambre funéraire, derrière une façade dorique dans ses grandes lignes, malgré la présence d’une frise continue. La façade semble couronnée d’un fronton portant deux acrotères angulaires et un acrotère faîtier, constitués de palmettes à tiges fleuries. Mais fronton et acrotères ne sont pas réalisés par des blocs de forme appropriée, ils sont seulement peints sur une surface plane, rectangulaire. L’illusion du fronton est impressionnante, tout comme celle des acrotères végétaux dont les éléments sont peints sur fond noir. Tout oppose ce fronton en trompe-l’œil et celui de la Tombe aux Palmettes, par exemple, dont les acrotères sont sculptés. Au-dessus de la porte, la frise du banquet se développe, sur fond bleu sombre, entre les antes, ce qui suggère un second plan : on retrouve les effets de profondeur. H. Brecoulaki s’est interrogé sur la motivation d’un tel degré d’illusionnisme dans le rendu des éléments architecturaux de la façade : il est évident que la solution adoptée est plus rapide d’exécution que la construction traditionnelle avec des blocs taillés. Était-on pressé ? En raison du prix des pigments utilisés et de la qualité de l’enduit imitant le marbre, on ne peut retenir un critère économique 28. Il est difficile d’être affirmatif, mais on ne peut pas non plus écarter une esthétique particulière, une volonté de « chefd’œuvre de compagnon », si l’on peut dire, venant d’artisans particulièrement versés dans l’art de l’illusion, dont on a dit qu’il caractérisait les arts d’apparat. En effet, le même degré d’illusionnisme se retrouve dans le décor figuré : de larges boucliers semblent suspendus par un clou de part et d’autre de la porte et leur volume est figuré par l’ombre portée sur la paroi, marquée d’une bande grise, sur le côté inférieur droit. Rappelons que sur la Tombe du Prince (Tombe III) du tumulus de Vergina, le volume arrondi des boucliers avait été ajouté en stuc sur la façade, leur décor seul étant peint 29. Debout sous ces boucliers aux couleurs éclatantes, armés de leur longue sarisse et vêtus de teintes sourdes, les soldats affligés qui gardent la tombe pour l’éternité continuent de susciter l’étonnement, plus d’une décennie après leur découverte. La ligne de sol surélevée sur laquelle ils sont peints renforce l’illusion de recul de la paroi à l’arrière 28. 29.
H. Brecoulaki (n. 11), p. 265-266. Au moment de la découverte, M. Andronikos a signalé la présence d’un décor peint, alors assez effacé et aujourd’hui disparu, et il a proposé d’y reconnaître un gorgonéion, voir H. Brecoulaki (n. 11), p. 135, pl. 49.
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des antes. Leur taille légèrement inférieure à la normale concourt à monumentaliser la porte d’entrée et donc l’ensemble de la façade. Sur la frise du banquet, la disposition du groupe central rend le dispositif en pi des klinai, avec le lit central en arrière ; les lignes obliques du kylikéion, vu de trois quarts et éclairé latéralement, donnent sa profondeur à la scène, au-dessus de la porte de la chambre funéraire. L’ensemble se détache sur un fond bleu sombre, au-dessus de la ligne de sol : avec son cortège d’invités, le banquet se déroule à l’air libre, de nuit comme le signalent les torches allumées. La rencontre des banqueteurs et de ceux qui les rejoignent est montrée par la gestuelle des protagonistes. L’agrément du banquet est souligné par la présence des musiciennes. Mais ce banquet prend-il place dans le monde des vivants ou dans celui des morts ? Il fait le trait d’union entre les deux et il exprime à la fois l’hommage des vivants au mort qu’ils honorent, et le souhait qu’ils forment pour lui d’une survie heureuse dans l’au-delà grâce au statut héroïque qu’il a conquis par sa bravoure au combat 30. Les trois dimensions du décor architectural sont rendues par la seule peinture, sur un fond plat : on l’a noté pour les acrotères, il en va de même pour les divers motifs architecturaux. Autour du tympan fictif, les moulures, elles aussi, sont fictives et rendues seulement par la peinture comme leur décor. Dans le kymation dorique, seule la face supérieure des feuilles est représentée, en alternance de bleu et de rouge, tandis qu’une bande grise placée en dessous simule l’ombre qui serait produite par le bec de corbin. Sur l’abaque des pilastres d’antes, les deux faces des feuilles sont visibles, et leurs couleurs alternent doublement. Pour la réalisation de cette tombe de prestige, les peintres furent vraiment les maîtres et ils mirent tout leur art au service de l’illusion.
LA
TRANSITION ALEXANDRINE ET LA COMBINAISON DES SYSTÈMES DÉCORATIFS DE TRADITION GRECQUE ET ÉGYPTIENNE Alexandrie : illusionnisme dans le style grec
Si la conception générale des tombes monumentales d’Alexandrie diffère de celle des tombes macédoniennes car, organisées autour d’une cour, les chambres funéraires devaient rester ouvertes pour des commémorations régulières, on a déjà étudié comment les modèles de Grèce du Nord se retrouvent dans cette architecture creusée 31 ; nous rappellerons juste, à Chatby, la présence des façades fictives, sur la cour (fig. 12) et à l’intérieur des souterrains, ainsi que le mobilier de pierre (klinè-sarcophage). Nous avons mentionné aussi les procédés illusionnistes relatifs aux éléments constructifs et, notamment pour la Tombe I de Mustapha Kamel, les demi-colonnes imitant un péristyle et l’emploi de la couleur rouge pour créer des renfoncements fictifs (fig. 6-7). De même l’emploi du style structural est attesté dès les origines de la ville, que le volume des blocs 30. 31.
A.-M. Guimier-Sorbets (n. 27, 2002) ; A.-M. Guimier-Sorbets, Y. Morizot (n. 26). A.-M. Guimier-Sorbets (n. 24), p. 191-203.
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Fig. 12 — Alexandrie, Chatby, façade sur la cour (d’après E. Breccia, La necropoli di Schiatbi [1912], pl. II).
soit rendu par le stuc et la peinture comme dans les tombes de Mustapha Kamel, ou qu’il soit fictif et rendu seulement par la peinture, comme dans la Tombe B1 du chantier du pont de Gabbari 32. Dans les maisons construites pour les vivants comme dans les espaces creusés pour les morts, ces procédés de décor illusionniste ont été fréquemment utilisés pour embellir, anoblir, à relativement peu de frais, des espaces qu’on voulait d’apparat, dès les origines de la ville et à l’imitation des modes venues de Grèce, et notamment de Macédoine, en même temps que les premiers artisans. Cette imitation de la façade des tombes à fronton, elles-mêmes en forme d’herôon, s’étend aux fermetures de loculi : à Chatby, puis dans toutes les nécropoles collectives d’Alexandrie et de sa région, on retrouve des fermetures de loculi imitant des façades à fronton et porte fermée, de type grec. Parmi de nombreux autres exemples, le chantier du pont de Gabbari a livré une série de ces plaques de fermeture peintes ; qu’il s’agisse de portes à deux vantaux pleins, ou de portes à croisillons, leur rendu illusionniste est caractéristique 33. Les feuilles doriques sont très fréquemment peintes au-dessus de la porte : selon les principes de représentation déjà décrits dans les tombes macédoniennes, elles figurent le kymation dorique (sur bec de corbin) censé couronner l’entablement. Sur ces peintures de dimensions modestes, seule la partie supérieure des feuilles est visible, en alternance de bleu et de rouge, avec les nervures et les bordures blanches. Dans les hypogées creusés, la couverture de vastes espaces ne nécessite pas le recours à la voûte, pourtant elles y sont omniprésentes, car la référence est évidemment la construction de pierre, matériau noble par excellence. Moins connues mais tout aussi significatives de l’esprit illusionniste, il faut signaler dans ces tombes la présence des lignes rouges peintes sur les voûtes creusées en berceau surbaissé : elles marquent les limites des blocs clavés censés constituer les éléments de la voûte 34. La présence de ces 32.
33. 34.
Pour l’analyse du décor de la tombe B1 du chantier du pont de Gabbari, et la bibliographie antérieure du style structural, voir A.-M. Guimier-Sorbets, M.-D. Nenna, M. Seif el-Din, « Le décor des tombes B1, B2 et B3 », dans J.-Y. Empereur, M.-D. Nenna (éds), Nécropolis 1, Études Alexandrines 5 (2001), p. 161-207, particulièrement p. 190-192 pour les exemples anciens de style structural en Grèce et son développement à Alexandrie. Ibid., p. 172-201. Ibid., p. 198-201.
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Fig. 13 — Alexandrie, Tombe de Mafrousa, plafond voûté (cl. A.-M. Guimier-Sorbets, ArScAn).
lignes est systématique, dans les tombes d’Alexandrie, comme dans celles de Plinthine, et on les trouve jusque dans les chambres souterraines de la nécropole de Kom el-Chougafa, à la fin du ier s. apr. J.-C. Il s’agit bien évidemment d’un procédé illusionniste relatif aux éléments constructifs et ces lignes suggèrent la technique de la voûte clavée de pierre, de type grec, par opposition aux voûtes de type « nubien », à arcs obliques, bien connues en Égypte dans les architectures de terre, depuis l’Ancien Empire et encore en usage dans les villages égyptiens 35. Si le profil des voûtes, en berceau aplati, pouvait évoquer les voûtes habituelles de l’Égypte, les lignes peintes montrent que le modèle revendiqué pour ces hypogées est celui des voûtes clavées, de pierre, qui caractérisent les tombes macédoniennes. Sur les plafonds des tombes, les décors peints, avec de légers refends, sont de type divers, mais ils sont tous d’esprit illusionniste : nous avons déjà réalisé leur inventaire, qu’il s’agisse d’imitation de baldaquins ou de plafonds à caissons de bois 36. Signalons simplement que les « modèles » revendiqués dans ces décors peints de façon illusionniste pouvaient être quelque peu contradictoires : ainsi sur la voûte de la chambre funéraire de la tombe de Mafrousa, datée de la fin du iiie s. ou du iie s. av. J.-C. 37, les artisans qui ont creusé le volume intérieur et la voûte en berceau surbaissé n’ont pas omis de dessiner en rouge les limites des blocs clavés fictifs, comme ils le faisaient habituellement, puis les peintres chargés du décor intérieur de style structural – ou les commanditaires de la tombe – ont préféré recouvrir cette voûte d’une peinture très soignée imitant un plafond de bois à caissons : ils sont ainsi passés d’un modèle de voûte en berceau de pierre à un plafond de bois plat. Il est vrai que ce double modèle n’est visible aujourd’hui que parce que l’état de conservation de la peinture du plafond à caissons laisse voir la phase précédente (fig. 13). 35. 36. 37.
J.-Cl. Goyon et al. (n. 13), p. 124-127. A.-M. Guimier-Sorbets, « Les décors de plafond dans les tombes d’Alexandrie : un nouvel essai d’interprétation », dans J.-Y. Empereur, M.-D. Nenna (n. 12), p. 589-629. A.-M. Guimier-Sorbets, M.-D. Nenna, M. Seif el-Din (n. 32).
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La nécropole d’Anfouchi : transition vers le style gréco-égyptien Que devient l’utilisation illusionniste de la couleur lorsque à ce style grec vient se superposer un style architectural d’origine égyptienne ? La nécropole d’Anfouchi (iie-ier s. av. J.-C.) permet d’étudier cette phase de transition 38. Nous avons déjà fait quelques remarques relatives au décor illusionniste de type grec, et nous nous limiterons maintenant à quelques autres aspects et plus particulièrement au décor des feuilles doriques. Dans l’architecture traditionnelle de l’Égypte pharaonique, la corniche se compose d’une gorge associée à un tore 39, mouluration qui couronne souvent les parois extérieures comme intérieures d’édifices réels, et s’accompagne d’un décor de fines feuilles verticales, juxtaposées, à extrémité arrondie, dont on ne voit que la face inférieure, puisque, placées en hauteur, elles sont portées par une moulure à une seule courbe. Cette association systématique du décor et de la moulure fait qu’on le nomme « décor de la gorge égyptienne ». Les feuilles sont de couleurs alternées, souvent en rouge, bleu, parfois jaune. Le motif peut être sculpté, ainsi que le volume de chaque feuille, ou seulement peint, mais il est dans tous les cas porté par la moulure réelle. Les exemples de ce motif sont très nombreux, on ne citera, dans le sanctuaire d’Amon à Karnak, que la salle hypostyle et la chapelle de la barque offerte par Philippe Arrhidée (fig. 14). La Tombe 2 de la nécropole d’Anfouchi a connu deux états : l’un, de style grec, est visible dans les escaliers, la cour, la salle 2.1, le plafond et une partie de la paroi du fond de la salle 2.2 ; le second état, de style Fig. 14 — Karnak, sanctuaire d’Amon, égyptien (ou égyptisant), est visible sur les chapelle de Philippe Arrhidée, gorge égyptienne parois de la salle 2.1 et celles de la chambre (cl. A.-M. Guimier-Sorbets, ArScAn). funéraire 2.2 40. Du premier état – de style purement grec – de la salle 2.1, nous connaissons les plafonds, à décor d’octogones et carrés, peints avec de légers refends, qui imitent des plafonds de stuc. Le style structural du premier état des parois figure, sans relief autre que l’illusion produite par la peinture, une plinthe, une rangée d’orthostates d’albâtre, un bandeau puis des assises de 38. 39. 40.
A.-M. Guimier-Sorbets, « Vers un au-delà bienheureux. Les peintures des tombes d’Anfouchi et de Kôm el-Chougafa à Alexandrie », CRAI 2015, p. 399-413. J.-Cl. Goyon et al. (n. 13), p. 399 et fig. 511-512, et aussi R. Ginouvès, R. Martin (n. 22). A.-M. Guimier-Sorbets, « D’autres croyances, d’autres pratiques funéraires : les deux états de la tombe 2 dans la nécropole d’Anfouchi à Alexandrie », BCH 134 (2010), p. 153-175 ; A.-M. Guimier-Sorbets, « L’architecture et le décor peint des tombes d’Anfouchi à Alexandrie : nouvelles perspectives », dans P. Ballet (éd.), Grecs et Romains en Égypte. Territoires, espaces de la vie et de la mort, objets de prestige et du quotidien (2012), p. 171-186.
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blocs blancs à mouluration complexe, et un bandeau de couronnement imitant le granite. Dans l’escalier d’accès vers la cour comme dans le premier état de cette pièce, le relief est complètement fictif. Dans le second état, de style égyptien, les parois de la salle 2.1 ont été repeintes, toujours dans un style illusionniste puisqu’au-dessus des orthostates fictives, la peinture représente des alternances d’assises d’albâtre et de carreaux de faïence noirs et blancs en échiquier, avec, à intervalle régulier, des plaques plus grandes, peintes de couronnes de Fig. 15 — Anfouchi, Tombe 2, salle 1, couronnement de la dieux et de rois égyptiens (fig. 5). Sous paroi (cl. A.-M. Guimier-Sorbets, ArScAn). le plafond, dont le décor du premier état a été conservé, la paroi se termine par une moulure en gorge égyptienne au-dessus d’un tore, en relief véritable, réalisés en stuc (fig. 15). Le décor, caractéristique de ces moulures dans le style égyptien, est peint : le tore présente des sections noires et blanches, la gorge porte des feuilles dressées, en jaune, rouge, blanc et bleu. Il faut noter que si, dans le premier état de style grec tout le volume est fictif – rendu seulement par des bandes en dégradé coloré, dans le second état une mouluration en gorge égyptienne véritable est ajoutée en stuc, comme le système de portes à plusieurs linteaux, de style égyptien, qui encadrent le passage de la salle 2.1 à la chambre funéraire 2.2. (fig. 5). Les parois de cette chambre funéraire portent le même décor (sans la plinthe et les orthostates) de style égyptien que le second état de la salle 2.1, et il y est couronné par la même gorge égyptienne sur tore, en relief véritable, portant le décor de feuilles dressées peintes, en rouge, bleu et blanc. De part et d’autre de la porte, du côté intérieur, dans une zone peu éclairée et difficile à voir depuis la porte (que les visiteurs ne franchissaient pas), la paroi reste plane et la moulure n’existe pas. Elle est seulement suggérée par le motif des feuilles dressées peintes, en alternance de rouge et de bleu, comme sur la moulure des autres parois. On le voit, dans l’état de style égyptien, malgré son caractère illusionniste pour le décor des parois et les enfilades de portes devant le naïskos, on a préféré peindre le décor de feuilles sur des moulures réelles, au moins dans les endroits visibles par les visiteurs. Qu’en est-il de ce type de décor dans la Tombe 5 où l’on ne reconnaît qu’un seul état mais avec des éléments de décor de style grec et de style égyptien bien différenciés mais juxtaposés dans le même espace ? Les plafonds uniquement peints avec de légers refends reproduisent les mêmes types de décor imitant des plafonds de stuc à mouluration complexe dans le style grec. Les parois d’une même salle (5.4) portent des décors illusionnistes imitant sur certains côtés des assises de blocs à forte mouluration et, sur d’autres parois, des assises de plaques de faïence et bandes d’albâtre en alternance. Nous
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Fig. 16 — Anfouchi, Tombe 5, salle 2, paroi au-dessus de la banquette (cl. A. Pelle, Archives CEAlex).
Fig. 17 — Anfouchi, Tombe 5, salle 2, motif de couronnement (cl. A. Pelle, Archives CEAlex).
avons vu que l’encadrement de la porte permettant l’accès à la chambre funéraire 5.5 est seulement peint : il porte le rais-de-cœur qui suggère le kymation lesbique, et donc un couronnement en saillie. Au-dessus d’une banquette pleine à couverture peinte, le décor mural de la chambre funéraire 5.2, figure, dans un jardin, un baldaquin à pilastres portant un plafond à caissons de bois doré (peint sur une voûte en berceau très surbaissé). Au-dessus de l’architrave, une bande de feuilles doriques suggère la mouluration en bec de corbin, de style grec (fig. 16-17).
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Fig. 18 — Anfouchi, Tombe 5, salle 5, loculus (cl. A.-M. Guimier-Sorbets, ArScAn).
Fig. 19 — Anfouchi, Tombe 5, salle 4, loculus avec entablements (cl. A.-M. Guimier-Sorbets, ArScAn).
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Le même type de décor accompagnait le défunt dans le loculus de la chambre funéraire 5.5 : sur les parois intérieures peintes, on reconnaît le décor de jardin et l’imitation de la tenture sur le plafond (fig. 18). Les piliers du baldaquin n’ont pas été représentés, mais le couronnement des parois, uniquement peintes, se compose du tore noir et blanc surmonté d’une file de feuilles dressées : le principe du baldaquin est de tradition grecque, mais le décor de son cadre (gorge sur tore) est de style égyptien. En revanche, le stuc a été abondamment utilisé pour réaliser l’encadrement complexe du loculus central de la salle 5.4 (fig. 19). Selon le système de représentation déjà évoqué pour la Tombe 2, le caractère sacré du loculus est rendu par une imitation de naïskos précédé de trois encadrements dont les entablements et supports sont représentés emboîtés, avec des zones rouges soulignant leur espacement en profondeur. De l’intérieur vers l’extérieur, on reconnaît d’abord un entablement à gorge égyptienne (relief réel) à feuilles jaunes et rouges sur un tore (fictif ) noir et blanc, porté par des pilastres noirs et blancs à chapiteaux jaunes, puis un entablement à uraei (cobras dressés) sur une gorge égyptienne (relief réel) soutenu par de minces pilastres à chapiteaux jaunes. Enfin, au premier plan, porté par des colonnes blanches à chapiteaux jaunes, l’entablement se compose d’une gorge égyptienne (réelle) à feuilles dressées bleues et rouges, sur un tore noir et blanc ; au-dessus d’un listel, on reconnaît une frise de denticules rouges et bleus, puis un fronton courbe à disque central. Entre les denticules et le fronton, en relief réel, une bande double de feuilles doriques suggère le bec de corbin traditionnel dans un entablement de type grec. Les couleurs de ces feuilles, dont les deux faces sont visibles, sont en double alternance, selon le système analysé précédemment pour des exemples macédoniens. La structure de ces trois entablements emboîtés montre qu’ils appartiennent au style égyptien. Mais l’originalité de ce véritable style mixte réside dans la combinaison de décors de style égyptien et de style grec. Cette série de décors architecturaux de deux tombes d’Anfouchi montre que les principes du style illusionniste y sont parfaitement assimilés et mis en œuvre avec savoirfaire, même dans des souterrains peu éclairés. Style grec et style égyptien se succèdent dans les deux états de la Tombe 2 et cohabitent dans le même état de la Tombe 5, mais, dans tous les cas, les principes des grammaires décoratives sont respectés : même pour les feuilles arrondies à bordure et nervure, de couleurs alternées, qui appartiennent aux deux styles, il n’y a pas de confusion entre l’orientation des feuilles peintes et les moulures qui les portent. Et, même dans la Tombe 5, de style mixte, où la fantaisie semble dominer, les systèmes décoratifs sont parfaitement connus, même lorsqu’ils sont combinés. Cette connaissance devait être partagée entre les artisans et les spectateurs de ces architectures en grande partie fictives : elle constitue la condition indispensable pour que l’illusionnisme « fonctionne » pleinement.
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La couleur dans les tombeaux thraces : illusion et symbole Julia Valeva
RÉSUMÉ Un certain nombre de tombeaux thraces ne sont intérieurement peints qu’avec une ou deux couleurs de base seulement : le blanc et le rouge. Dans ces cas, il est évident que la valeur symbolique de la couleur est primordiale. Souvent, les quatre couleurs classiques de la peinture grecque sont posées à des endroits de passage, comme le cadre des entrées ou les portes. Parfois, au même endroit, on trouve des images en relief, telle la tête de la Méduse, qui font ressortir le symbolisme de l’élément peint et l’espace qu’il occupe dans la structure sémantique du tombeau. Pour démontrer ce phénomène, on analyse ici des tombeaux thraces moins connus, tels ceux de Sarafova moguila, Golyama Kosmatka, Borovo, Rouen, etc. Dans les tombeaux présentant un décor figuré, comme ceux de Kazanlak, Ostroucha et Alexandrovo, la présence d’un plus grand nombre de couleurs et de nuances souligne le rôle plus raffiné du coloris, qui hiérarchise la composition et transmet son message idéologique. MOTS-CLEFS Tombeaux thraces hellénistiques, blanc, rouge, peinture grecque, Méduse, valeur symbolique des couleurs, message idéologique. SUMMARY Color in Thracian tombs: illusionism and symbolic significance In a number of Hellenistic Thracian tombs the limited use of colour suggests its symbolic significance. The basic colours of Greek painting are sometimes applied at transitional places such as entrance frames and doors. In a few cases on the same places there are relief images, e.g. the Medusa head, which enhance the symbolic meaning of the painted element and the place it occupies within the whole semantic structure of the tomb. Several less known tombs, such as the Sarafova moguila, Golyama Kosmatka, Borovo and Rouen, have been chosen to illustrate this phenomenon. In tombs with complex decorative programmes, like Kazanlak, Ostrusha and Alexandrovo, the higher number of colours and hues bespeaks a more subtle meaning of the colouring, whose role is now to structure the composition and to transmit its ideological message. KEYWORDS Hellenistic Thracian tombs, white, red, Medusa, symbolic significance of colours, its ideological message. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƘƲƺƴǁuƥƶƷƲƸƵƬƴƥƮƭƮƲǀƵƷƠƹƲƸƵƻƩƸƨƥƣƶƬƫƶƫƮƥƭƶƸuƦƲƯƭƶuƿƵ ƏƠƳƲƭƲƭƬƴƥƮƭƮƲƣƷƠƹƲƭƩƣưƥƭƪƼƧƴƥƹƭƶuơưƲƭƶƷƲƩƶƼƷƩƴƭƮƿuƩuƿưƲơưƥƢƨǀƲƦƥƶƭƮƠƺƴǁuƥƷƥƷƲ ƯƩƸƮƿƮƥƭƷƲƩƴƸƬƴƿƗƷƭƵƳƩƴƭƳƷǁƶƩƭƵƥƸƷơƵ ƩƣưƥƭƹƥưƩƴƿƿƷƭƫƶƸuƦƲƯƭƮƢƥƱƣƥƷƲƸƺƴǁuƥƷƲƵƩƣưƥƭ uƩƧƠƯƫƵƶƫuƥƶƣƥƵƗƸƺưƠ ƷƥƷơƶƶƩƴƥƮƯƥƶƭƮƠƺƴǁuƥƷƥƷƫƵƩƯƯƫưƭƮƢƵƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵƦƴƣƶƮƲưƷƥƭƶƷƥ ƳƩƴƠƶuƥƷƥ ƿƳƼƵƶƷƥƳƯƥƣƶƭƥƷƼưƩƭƶƿƨƼưƢƶƷƭƵƳƿƴƷƩƵƑƩƴƭƮơƵƹƲƴơƵ ƶƷƲƣƨƭƲƶƫuƩƣƲ ƦƴƣƶƮƲƸuƩ ƥưƠƧƯƸƹƩƵ ƩƭƮƿưƩƵ ƿƳƼƵ Ʒƫư ƮƩƹƥƯƢ ƷƫƵ ƑơƨƲƸƶƥƵ ƳƲƸ ƷƲưƣƪƲƸư ƷƲ ƶƸuƦƲƯƭƶuƲƣ ƷƫƵ ƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵ
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à propos de l’auteur J. Valeva, professeur émérite, Institut d’histoire de l’art, Académie bulgare des sciences, Sophia, Bulgarie.
LA COULEUR DANS LES TOMBEAUX THRACES : ILLUSION ET SYMBOLE
Les tombes à chambre thraces de l’époque hellénistique montrent une grande diversité dans leurs plans, formes et décors. Quelques types fondamentaux se subdivisent en sous-types 1. Un des groupes distincts est celui des tombes de type macédonien, dont la caractéristique est la voûte en berceau clavé. Ces tombes sont répandues dans le Nord-Est de la Bulgarie, où la présence macédonienne (Lysimaque) était manifeste 2 : c’était le territoire de la tribu des Gètes et de la colonie grecque d’Odessos 3. Une autre région où ce type se rencontre est la Thrace égéenne, les Rhodopes du Sud et Strandja, avec le bassin du fleuve Maritsa entre ces deux montagnes, autrefois territoire des Odryses, et aujourd’hui partagé entre la Bulgarie, la Grèce et la Turquie. Beaucoup plus nombreuses sont les tombes à couverture en encorbellement, répandues partout en Thrace mais avec une concentration marquée sur les terres des Odryses. Deux types se distinguent d’après le plan rectangulaire ou circulaire de leurs chambres funéraires 4. Ces deux types se subdivisent en tombes avec ou sans dromos, ainsi qu’en sous-types qui dépendent du nombre des chambres. Le même sous-classement se rapporte aux tombes avec une chambre funéraire à plan circulaire. Un type de tombes à enfilade est aussi isolé ; la chambre funéraire peut être aussi bien circulaire que rectangulaire 5. Les types de couverture peuvent être à lanterne (appelé aussi à consoles) 6, en encorbellement (à différentes configurations) ou plat. Un classement des tombes thraces peut être fait à partir du matériau de construction
1. 2. 3.
4.
5.
6.
J. Valeva, Tipologia na trakiyskite monumentalni gradeni grobnitsi [Typologie des tombeaux thraces monumentaux (Ve-IIIe siècle av. J.-C.)] (2013). Sur Lysimaque voir S. Lund, Lysimachus. A Study of Early Hellenistic Kingship (1992) ; P. Delev, Lysimaque (2004) (en bulgare). Voir aussi M. Mirtchev, « Pametnitsi na grobnata architectura v Odessos i negovite okolnosti [Monuments d’architecture sépulcrale à Odessos et ses environs] », dans Recueil D. Detchev (1958), p. 569-582, en particulier p. 575 ; T. Stoyanov, « Grobnitchnata architektura v severoiztotchna Trakiya v svetlinata na kontaktite s Mala Asia (VI-III v.) [L’architecture sépulcrale en Thrace du Nord-Est à la lumière des contacts avec l’Asie Mineure (vie-iiie s. av. J.-C.)] », dans Terra Antiqua Balcanica IV (1990), p. 122-133 ; D. Stoyanova, « Barrel-Wedged Vault in the Tomb Architecture in Thrace: Models and Vogue », dans A. Iakovidou (éd.), Thrace in the Graeco-Roman World. Proceedings of the 10th International Congress of Thracology, Komotini-Alexandroupolis, 28-23 October 2005 (2007), p. 575-587. J. Valeva, « Hellenistic Tombs in Thrace and Macedonia: Their Form and Decoration », dans E. M. Moormann (éd.), Functional and Spatial Analysis of Wall Painting, Proceedings of the Fifth International Congress on Ancient Wall Painting, Amsterdam (8-12 September 1992), BABesch Suppl. 3 (1993), p. 119-126. J. Valeva, « Trakiyski anfiladni grobnitsi i tyahnata simvolika [Les tombeaux thraces à enfilade et leur symbolique] », dans I. Marazov, K. Zarev, K. Stefanova (éds), Problemi i izsledvaniya na trakiyskata kultura, IV, Kazanlak (2009) (sous presse). R. Ginouvès, A.-M. Guimier-Sorbets, « Voûte “galate” et charpente macédonienne », RA 1994, p. 311-321 ; et plus récemment N. Theodossiev, « The Lantern-Roofed Tombs in Thrace and Anatolia: Some Evidence about Cultural Relations and Interaction in the East Mediterranean », dans A. Iakovidou (n. 3), p. 602-613.
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Fig. 1 — La façade du tombeau Chouchmanets, près de la ville de Chipka (cl. Serpico CSI, Wikimedia.org).
employé : pierre ou brique. La même diversité de types et, par suite, la même difficulté de classement existe par rapport aux tombes macédoniennes 7. Cependant, tous ont une façade relativement simple, à l’ornementation pauvre, même dans le cas d’une tombe monumentale. Il s’agit habituellement d’une surface plate, sur laquelle se trouve l’ouverture de l’entrée 8, rectangulaire ou en ogive, trahissant la voûte en encorbellement qui suit (fig. 1). Cette simplicité impressionne quand on compare les façades des tombeaux thraces à celles des tombeaux macédoniens qui sont pour la plupart conçues selon les formes des ordres grecs. Cette différence pourrait s’expliquer par les nuances dans les croyances eschatologiques des deux peuples, de même que par les particularités de la culture de leurs élites aristocratiques. La mode aurait aussi joué un rôle, comme en témoigne la façade du tombeau de Svechtari (cat. no 16), plus élaborée et visiblement influencée par les tendances décoratives de la koiné hellénistique. En premier lieu, la tombe était une création idéologique qui exprimait tout un ensemble d’idées existentielles : chaque élément de sa structure avait un sens symbolique. La couleur non seulement donnait du lustre à ce système de symboles, mais le guidait, en l’accentuant. Ainsi, l’analyse des couleurs employées dans le décor des tombeaux thraces hellénistiques nous aiderait-elle à mieux comprendre les idées que les Thraces de cette époque se faisaient de l’existence après la mort. Bon nombre de tombes, découvertes dans différentes parties du monde hellénistique, sont peintes à l’intérieur en une seule couleur. Depuis 1869, on connaît à Kertch et sur 7.
8.
Fait déjà noté par B. Gossel, Makedonische Kammergräber (1980) et S. Miller, The Tomb of Lyson and Kallikles: A Painted Macedonian Tomb (1993). Pour des données générales sur les tombes mentionnées dans le présent article, voir infra, le catalogue à la fin de cet article, p. 336-343. En guise d’exemples, on peut donner les tombeaux Arsénalka, cat. no 2, et Golyama Kosmatka, cat. no 5.
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la presqu’île de Taman, des tombeaux peints entièrement en rouge qui dateraient du ive s. av. J.-C. 9. En Thrace, à Sozopol (l’ancienne Apollonia Pontica) et dans ses environs, des tombes peintes en rouge et en blanc furent aussi découvertes 10. G. Seure avait décrit deux tombes en forme de sarcophages, couvertes d’un même tumulus, autrefois aux environs de Sozopol. La première tombe, contenant la dépouille d’une femme, était blanche à l’intérieur et la seconde, destinée à recevoir les restes d’un homme, était peinte en rouge 11. G. Seure expliquait cette différence de couleurs par le sexe des personnes inhumées, mais les découvertes postérieures ne confirmèrent pas son hypothèse. Des tombes similaires avec peinture monochrome, furent fouillées à Odessos, une autre ville de la côte occidentale de la mer Noire (cat. nos 10a-d). Un exemple intéressant est la tombe en Fig. 2 — Tombe à ciste de Tchernozemen, partie forme de ciste, découverte récemment (2000Ouest de la tombe (d’après K. Kisyov, Thrace and 2003) intacte sous le tumulus no1 du village Greece in Ancient Times: Classical Age Tumuli in the Municipality of Kaloyanovo [2005]). de Tchernozemen (cat. no 17), dans la région de Plovdiv. Ses murs et le sol sont recouverts de stuc coloré en rouge sur le mur Ouest et les deux murs adjacents sur 1 m de long, tandis que les autres surfaces sont blanches (fig. 2) 12. Sur le côté Ouest de la tombe, se trouvaient les parties vitales du corps du jeune guerrier enterré ici – la tête (donc, 9.
10.
11.
12.
M. Rostovtzeff, La peinture décorative antique en Russie méridionale, Saint-Pétersbourg 1913-1914 (2004), p. 96-97 et d’autres exemples. Dans le tombeau découvert par I. Zabeline, on mentionnait des restes de dorure, mais M. Rostovtzeff en doutait. Tombe no 120 de la nécropole de la ville ancienne : L. Konova, « Izobrageniya na amazonki varhu tchervenofigurni sadove ot nekropola na Apollonia Pontica. Opit za interpretatsiya [Images d’Amazones sur céramique à figures rouges de la nécropole d’Apollonia Pontica] », Art Studies Quarterly/Problemi na izkustvoto 3-4 (1997), p. 42-45 ; autres tombes : K. Panayotova, « Kamenni grobove v necropola na Apollonia Pontica v mestnostta Kalfata [Tombes de pierre de la nécropole d’Apollonia Pontica dans la localité de Kalfata] », dans Patyat, Recueil G. Kitov (2003), p. 156-166, en particulier p. 161 ; id., « The Necropolis of Apollonia Pontica in the Kalfata/Budjaka Lokality », dans R. Docter et al., Apollonia Pontica 2007 (2008), p. 5-27. G. Seure, « Archéologie thrace : documents inédits ou peu connus », RA XIX (1924), p. 307-350, en particulier p. 327-338 : des fragments de l’enduit rouge sont conservés au Louvre (inv. 1774) ; voir cat. no 15. Le pigment rouge était appliqué a fresco : K. Kisyov, Thrace and Greece in Ancient Times: Classical Age Tumuli in the Municipality of Kaloyanovo (2005), p. 22-23.
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le cerveau) et la poitrine (le cœur). Ne s’agit-il pas d’une preuve évidente de la valeur symbolique de la couleur rouge dans les croyances eschatologiques des personnes qui commandèrent cette tombe ? En effet, l’archéologie témoigne constamment de ce rapport entre les couleurs de base – rouge, blanc et noir – et les croyances d’outre-tombe dans l’histoire spirituelle de l’humanité, et cela depuis les civilisations les plus anciennes : on considère par exemple que le peuplier blanc, dédié dans la religion grecque par Hadès à sa maîtresse Leuke, était le symbole de la résurrection dès l’époque sumérienne (IVe millénaire av. J.-C.) 13. D’autre part, les sources écrites grecques renvoient vers le Bronze récent et l’époque homérique. Le rouge est la couleur de la mort chez Homère 14 : dans l’Iliade XVI 334, l’épée avec laquelle Ajax, fils d’Oïlée, frappe Cléobule « devient toute chaude de sang, et dans les yeux de l’homme entrent en maîtres la mort rouge et l’impétueux destin » (ƿư ƨɘ ƮƥƷʠ ȲƶƶƩ ȆƯƯƥƦƩ ƳƲƴƹǀƴƩƲƵ ƬƠưƥƷƲƵ Ʈƥɜ uƲʶƴƥ ƮƴƥƷƥƭƢ) 15. Les sources qui parlent du rapport du noir et du blanc au monde souterrain dans la mythologie grecque sont bien connues. Dans l’Odyssée X 501-506 (« Au pays des morts »), Ulysse demande à Circé qui l’envoie dans le monde souterrain : « Mais qui nous guidera, Circé, en ce voyage ? Jamais un noir vaisseau ne put-il gagner l’Hadès ?... » Circé – « À quoi bon ce souci d’un pilote à ton bord ? Pars ! Et, dressant le mât, déploie les blanches voiles ! » Dans la « Seconde descente aux Enfers » (ƉƩǀƷƩƴƥ ƒơƮƸƭƥ), chant XXIV de l’Odyssée (1-14), Hermès mène les âmes des fiancés prétendants sur « les routes humides » vers l’Océan où se trouve le Rocher blanc qui marque les portes d’Hélios et le pays des Rêves. Ajoutons encore un autre témoignage. Sur la lamelle en or de Pharsale, découverte dans une tombe datée de 350-320 av. J.-C., on lit : « À droite de la maison d’Hadès, tu trouveras une source et près d’elle un cyprès blanc… » 16. Toutefois, le rouge, le blanc et le noir n’étaient pas uniquement réservés au monde funéraire. Le rouge et l’ocre jaune pouvaient être appliqués sur l’intégralité des murs des demeures comme dans les maisons d’Olynthe. L’utilisation du noir était particulière. Son rôle était beaucoup plus important depuis le style protogéométrique jusqu’à l’apparition du style polychrome dans la peinture des vases au viie s. av. J.-C. 17. Il pourrait s’agir simplement d’une phase initiale de développement de la technique picturale et 13.
14. 15. 16.
17.
R. Graves, The Greek Myths (1955), chap. 31, « The Gods of the Underworld » : 31.d.5, 134.f ; il m’a été malheureusement impossible de consulter une thèse de doctorat qui paraît être importante pour notre sujet, G. Radke, Die Bedeitung der weissen und der schwarzen Farbe im Kult und Brauch der Griechen und Römer, Thèse de doctorat, université de Berlin (1936). O. Freidenberg, Poetika syujeta i janra [La poétique du sujet et du genre] (1935), p. 224, n. 842. Le même texte se retrouve dans Homère, Iliade XX (trad. et éd. P. Mazon, CUF, 1938). M. Hatzopoulos, « De vie à trépas : rites de passage, lamelles dionysiaques et tombes macédoniennes », dans A.-M. Guimier-Sorbets, M. Hatzopoulos, Y. Morizot (éds), Rois, Cités, Nécropoles : institutions, rites et monuments en Macédoine, Actes des colloques de Nanterre 2002 et Athènes 2004, Mélétémata 45 (2006), p. 137. J. Papapostolou, « Color in Archaic Painting », dans M. A. Tiverios, D. S. Tsiaphake (éds), Color in Ancient Greece. The Role of Color in Ancient Greek Art and Architecture 700-31 B.C. (2002), p. 56-57.
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de l’emploi d’un nombre très restreint de pigments. Cette dernière nécessité dotait la couleur noire d’un symbolisme polyvalent et d’une expression graphique remarquable. Dans le décor pictural, le jeu optique de la répétition contrastée des motifs en noir et blanc n’était pas un simple ornement mais cachait un sens profond, que nous interprétons aujourd’hui, avec plus ou moins d’incertitude, comme des symboles de la fécondité, des éléments de la nature, d’un calendrier primitif ou de l’univers réel et imaginaire. À cette époque, la sémantique de la couleur noire contenait simultanément la vie et la mort. Les couleurs différentes des corps d’Ulysse et de Polyphème sur un vase d’Éleusis 18 du milieu du viie s. av. J.-C. expriment de toute évidence des oppositions : le bien et le mal (corps « blanc » d’Ulysse, corps « noir » de Polyphème), le dynamisme de l’intelligence contre la force passive de la brute, enfin l’opposition de la victoire à la défaite. Cette longue tradition de l’emploi du noir a aussi montré et développé sa valeur esthétique, son expression, sa netteté, son dynamisme. Pourtant, la Grèce classique et hellénistique n’a jamais recouru à de grandes surfaces noires monochromes en peinture murale. Ce sera la découverte de la peinture romaine, qui repose sur d’autres principes décoratifs et structuraux. Les murs noirs de la pièce Z de la Casa del Marinaio à Pompéi seraient un bon exemple de la conscience de la valeur esthétique du noir dans les styles décoratifs romains 19. Au contraire, dans le monde hellénistique grec, on ne couvrait jamais les murs de noir, mais on réservait cette couleur aux frises, contours et détails. Bien que les sources écrites citées jusqu’ici soient grecques, les tombes thraces suggèrent une parenté remarquable du symbolisme des couleurs dans le contexte funéraire. La façade et l’intérieur du tombeau de Vetren (cat. no 18), dans la région de Pazardjik, étaient entièrement couverts de stuc blanc (fig. 3). De même, la façade du tombeau Helvetia (cat. no 6) à Chipka est blanche, même si la structure classique du mur est imitée par le stuc en relief : on distingue la plinthe, les orthostates, le mur et la frise (fig. 4). Les murs de la tombe Chouchmanets (cat. no 4) à Chipka sont aussi enduits de blanc. L’intérieur de la tombe de Dolno Izvorovo, découverte en juin 2009, est entièrement blanc 20. On pourrait se demander si le recours à une seule couleur n’est pas une simple économie, mais cela paraît peu probable, si l’on considère les dépenses qu’une architecture aussi monumentale et un décor de stuc structuré demandaient. Dans certains cas, seule la façade est monochrome, tandis que l’intérieur porte un décor en style structural et des peintures figuratives. La façade du tombeau de Kazanlak (cat. no 8) est entièrement peinte en rouge-brun fig. 5), avec seulement une bande plus foncée suivant le contour de l’entrée, dont l’épaisseur est peinte de la même couleur. La façade du tombeau de Maglizh (cat. no 9), de la première phase, était aussi peinte en rouge d’après les petits fragments découverts enterrés à proximité. 18. 19. 20.
Vase athénien d’une tombe d’Éleusis, milieu du viie s. av. J.-C., musée d’Éleusis : R. Bianchi Bandinelli, E. Paribeni, Grecia, L’arte dell’antichità classica (1976), fig. 132. Sur la couleur noire dans la peinture antique : V. Bruno, « Color in Hellenistic Painting », dans Color in Ancient Greece (n. 17), p. 214-215. G. Nekhrizov, M. Parvin, « Nadgrobna mogila sas zidana grobnitsa pri s. Dolno Izvorovo, Obshtina Kazanlak [Tumulus avec tombeau maçonné près du village de Dolno Izvorovo, région de Kazanlak] », Bulgarian e-Journal of Archaeology 1 (2011), p. 41-69 (http://be-ja.org, consulté le 22 novembre 2016).
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Fig. 3 — La façade du tombeau de Vetren (cl. J. Valeva).
Fig. 4 — La façade du tombeau Helvetia à Chipka (cl. J. Valeva).
Fig. 5 — Le tombeau de Kazanlak, l’entrée et le système décoratif du dromos (cl. J. Valeva).
L’enfilade du tombeau de Maglizh (Maglij) (fig. 6) comprend entre autres une chambre voûtée, entièrement blanche, qui précède la chambre funéraire. Quelle est la signification de cet espace que nous pouvons identifier avec les salles glacées de l’Hadès d’Hésiode (658, 786) ? Le plan du tombeau de Maglizh est très suggestif aussi : à un long dromos succède un second couloir à pilastres, qui donne accès à une pièce blanche, antichambre de la chambre funéraire décorée d’une frise de vases panathénaïques et d’armes
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Fig. 6 — Schéma du système décoratif du tombeau de Maglizh (Maglij) (reconstitution générale J. Valeva à partir de la reconstitution de la frise par A. Barbet, F. Monier, B. Amadei, C. Bertrand et J. Valeva ; et du dromos par L. Ghetov, dessin I. Martinov).
typiquement thraces dans les lunettes. Ce monument funéraire pourrait symboliser le long chemin que l’âme devait parcourir en passant par les espaces glacés souterrains pour aboutir finalement à une existence héroïque qui évoquerait la gloire épichthonienne du défunt 21. L’utilisation des sources grecques pour essayer d’expliquer une réalité thrace est justifiée car dans beaucoup de tombes thraces le système décoratif et l’iconographie reflètent la familiarité des propriétaires avec la culture grecque et son système symbolique. Dans le tombeau de Maglizh notamment, les amphores panathénaïques, les palmettes, Nikè et les autres figures mythologiques sont clairement des symboles grecs de la victoire sur la mort, représentés aussi d’après l’iconographie grecque. Nous savons que le rouge et le blanc n’étaient pas réservés exclusivement à la peinture funéraire. C’étaient les couleurs utilisées pour l’ensemble de la peinture grecque. Ils formaient les décors monochromes plus modestes des maisons, les maisons d’Olynthe étant les exemples les mieux connus 22. S’il reste des interrogations sur cette situation 21.
22.
Sur la frise au-dessus des orthostates, étaient peintes des scènes de guerre ou des courses de chevaux : A. Barbet et al., Mission en Bulgarie, Rapport du Centre d’étude des peintures murales romaines (1995), p. 17. E. Walter-Karydi, The Greek House: The Rise of Noble Houses in Late Classical Times (1998), p. 33 ; pour D. Robinson et S. Miller ces peintures monochromes représentent un type décoratif : D. Robinson, Olynthus 12. Domestic and Public Architecture (1946), p. 291, fig. 30 ; S. Miller, Hellenistic Macedonian
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relativement claire, elles concernent l’application de l’ocre dans les maisons et dans les tombes. Rappelons d’abord que la chambre d’une tombe d’Égine des iiie-iie s. av. J.-C. est peinte en ocre jaune 23. Les murs d’une des chambres de la tombe de Pydna sont aussi jaunes 24. Il est possible que la tombe thrace découverte à Yankovo, dans le Nord-Est de la Bulgarie, ait été aussi peinte en ocre 25. La couleur avait-elle une valeur symbolique dans ces cas ? Est-ce que l’ocre suggérait l’or en tant que symbole d’outre-tombe et d’une existence quasi divine ? Les masques et les feuilles d’or posés sur les visages des défunts, tant en Grèce et en Macédoine qu’en Thrace, prouvent que l’or marquait le nouveau statut du défunt, son appartenance à un monde différent, inconnu et sacré, dont la valeur ne pouvait être exprimée matériellement que par le plus précieux des métaux. Le symbolisme de la peinture monochrome en rouge ou en blanc est facile à comprendre. Mais est-ce que les couleurs d’un système à zones ou architectonique étaient aussi le symbole de la vie et de la mort qui se croisaient dans la dernière demeure de l’homme ? Dans les tombes thraces décorées dans le style à zones 26, les couleurs symbolisant la vie et la mort dans la perspective d’une résurrection spirituelle et matérielle (d’après l’abondant mobilier déposé) sont les mêmes : rouge, blanc et noir. L’utilisation du bleu dans la tombe de Kaloyanovo (cat. no 7) a une vocation décorative, mais la bande ocre dans la tombe de Rouen (cat. no 13, fig. 7), parallèle aux bandes rouge et noire au-dessus de la plinthe rouge, souligne peut-être l’idée du cycle universel tout en gardant un aspect décoratif. Ainsi, les signes triangulaires au-dessus de la plinthe noire dans la tombe de Borovo (cat. no 3) 27 ne soulèvent aucun doute sur leur sens symbolique sinon magique. Fig. 7 — Le tombeau de Rouen, reconstitution de la décoration peinte (reconstitution J. Valeva, d’après les photographies et la description de M. Lazarov [cat. no 13]).
23. 24.
25.
26. 27.
Dans le tombeau de Kazanlak, le petit couloir derrière la façade monochrome est décoré à la manière grecque classique : au-dessus
Architecture: Its Style and Painted Ornamentation, PhD, Bryn Mawr College 1971 (1972), p. 169. En revanche, A. Andreou ne les inclut pas dans sa typologie : A. Andreou, Griechische Wanddekorationen, Dissertation, Mainz (1988). Fr. Alabe les appelle « enduits de propreté » dans son analyse des maisons déliennes : Fr. Alabe, La peinture des maisons à Délos : banalité décorative hellénistique (1993). A. Andreou (n. 22), p. 29, cat. 7, fig. 7,3. Voir infra, n. 28. Pour d’autres exemples de couleur jaune sur les murs et les voûtes des tombes macédoniennes, voir C. Huguenot, La Tombe aux Érotes et la Tombe d’Amarynthos, Eretria XIX (2008), p. 75, n. 380. Tombe I, cat. no 19 : la tombe est cependant endommagée, les parties hautes des murs sont perdues, donc, notre supposition reste une conjecture. Sur le sol on voyait des losanges rouges sur fond jaune. Pour des exemples de décoration identique des sols dans les tombes macédoniennes voir S. Miller (n. 7), p. 13-14. Sur le style à zones dans les tombes thraces : J. Valeva, « Les décors thraces et le style à zones (ive-iiie siècle av. J.-C.) », Art Studies Quarterly/Problemi na izkustvoto 4 (1999), p. 69-75. Pour l’illustration, ibid., p. 74.
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Fig. 8 — Le tombeau Sarafova moguila, dromos et façade (cl. K. Kitanov).
Fig. 9 — Le tombeau Sarafova moguila, seuil entre l’antichambre et la chambre funéraire (cl. J. Valeva).
de la plinthe blanche vient la zone des orthostates noirs, surmontée d’une frise blanche et du mur rouge, le sommet étant réservé à la frise des rinceaux, des kymatia et des compositions figurées. Dans la chambre funéraire, les orthostates au-dessus de la plinthe grisâtre sont blancs, surmontés d’une frise noire. Suivent la paroi rouge et les deux frises figurées. Une semblable séquence de couleurs des zones existe dans le tombeau Sarafova moguila mais sans frises figurées. La façade est scandée par une plinthe bleu-gris, des orthostates blancs, une frise ocre jaune, une bande rouge haute et une zone supérieure blanche. Le même schéma et les mêmes couleurs sont appliqués sur les murs du dromos qui précède la façade (fig. 8). Cette intéressante manière de peindre le dromos en avant de la façade avec les mêmes couleurs que celle-ci est vraiment rare. On la retrouve toutefois dans la tombe de Pydna, décrite par L. Heuzey et H. Daumet 28. Néanmoins dans les autres pièces du tombeau macédonien, le décor est différent, pratiquement monochrome : les murs de l’antichambre sont peints en jaune (comme nous l’avons déjà noté) et la voûte en blanc ; dans la chambre funéraire, les murs sont rouges au-dessus d’une plinthe noire et la voûte est blanche. Le luxe de l’entrée de la tombe pourrait être expliqué par le fait
28.
L. Heuzey, H. Daumet, Mission archéologique de Macédoine (1876), p. 243-244, pl. 17-18, 21 ; B. Gossel (n. 7), p. 217-225 ; A. Andreou (n. 22), p. 137, no 164, pl. 66, 7 ; H. Brecoulaki, La peinture funéraire de Macédoine, emplois et fonctions de la couleur IVe-IIIe siècle av. J.-C. (2006), p. 244 et bibliographie : les parois devant la façade ont une plinthe noire, des orthostates blancs, une frise bleue, le mur rouge et la partie supérieure blanche (la façade est complétée par un entablement dorique).
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que dans la tombe de Sarafova moguila le dromos précédant la façade contenait les restes d’un cheval – serait-ce un hommage à l’animal favori ou un simple effet esthétique ? La couleur rouge est aussi présente dans la coloration des sols. Dans le tombeau de Kazanlak, les sols du dromos et de la chambre funéraire sont enduits de mortier peint en rouge. Le mortier du sol dans l’espace B du tombeau de Maglizh était rose. Le sol du tombeau de Rouen est peint en blanc ; le sol de la chambre funéraire du tombeau de Philippopolis (cat. no 12) a une partie peinte en blanc près de l’entrée et en rouge à l’intérieur. Mentionnons de nouveau le tombeau de Pydna dont les sols de toutes les pièces étaient de cailloux pris dans un mortier rouge. Dans le tombeau Sarafova moguila, le seuil de l’entrée de l’antichambre est peint en ocre jaune tandis que ses murs sont rouges. Le seuil suivant qui mène à la chambre funéraire est peint en rouge (fig. 9). Les autres points de passage colorés en rouge sont les portes, symbolisant les « larges portes de la maison d’Hadès » (Odyssée XI 571 : … ƷƩ ƮƥƷʠ ƩȺƴƸƳƸƯɘƵ ʰƆƭƨƲƵ ƨ˒). Dans le tombeau Helvetia, la porte qui fermait l’entrée principale est brisée et ne présente pas de traces de peinture visibles. La porte entre l’antichambre et la chambre funéraire est conservée en place (fig. 4, 10) : les deux battants sont ornés de champs en creux, ceux du battant droit 29 sont peints en rouge et ceux du battant gauche étaient probablement noirs. Il semblerait qu’un incendie délibéré ait eu lieu à l’intérieur de la tombe. Ses traces, malheureusement, rendent l’identification d’une peinture noire très difficile. Mais le rouge du battant droit est si bien préservé que son absence sur l’autre battant implique l’application d’une autre couleur, vraisemblablement du noir. Doit-on alors voir ici l’opposition de la droite et de la gauche dans la pensée primitive 30 ? Le rouge signifiait sûrement la limite qui séparait le monde des vivants de celui des morts et particulièrement les couleurs vives de la vie terrestre. Une porte à deux battants fermait l’entrée de la chambre funéraire du tombeau de Chouchmanets. Sur le battant droit, quelques traces de son décor sont encore observables 31 (fig. 11). Il est remarquable que ce décor ait été posé en deux temps. En premier lieu, les deux rectangles dans le corps du battant furent évidés et les paires de cercles à croissants sur les trois (?) barres horizontales furent gravés. On peut comprendre ces formes circulaires comme des soleils, des rosettes ou des roues, de toute évidence des symboles de la lumière du jour et de la vie. Les sillons des motifs étaient colorés en rouge. Dans un second temps, la porte fut semble-t-il entièrement couverte de stuc posé sur les cercles gravés. Les rectangles creux furent alors peints en rouge. Ce nouvel exemple de peinture de porte en rouge confirme nos observations de la valeur symbolique de la couleur rouge dans le contexte funéraire thrace. Les rectangles rouges dans les deux cas sont du côté de l’entrée, suggérant ainsi la vie, le soleil et la lumière qui restent à l’extérieur.
29. 30. 31.
En direction de l’entrée vers l’intérieur. M. Hatzopoulos (n. 16), p. 136 : épigramme d’Hégésippe « on dit que par le chemin à la droite du bûcher Hermès conduit à Rhadamante ». Le second battant est très endommagé et il est impossible pour le moment de l’analyser en détail.
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Fig. 10 — Le tombeau Helvetia, la porte entre l’antichambre et la chambre funéraire (cl. J. Valeva).
Fig. 11 — Le tombeau Chouchmanets, le décor en deux couches de la porte (cl. J. Valeva).
Récemment une tombe monumentale nommée Golyama Kosmatka (cat. no 5), heureusement non pillée, a été découverte près de la ville de Chipka. Les deux battants de la porte qui ferme le passage entre l’antichambre et la chambre circulaire de ce tombeau sont en marbre, travaillés finement et décorés des têtes d’Hélios et de la Méduse en relief peint. Les cheveux d’Hélios sont blonds : « Titan brillant comme l’or » (ƘƭƷƠư ƺƴƸƶƥƸƧƢƵ) 32 ; le médaillon (bouclier) et sa bouche portent des traces de rouge (fig. 12). En revanche, la tête de la Méduse semble avoir été entièrement peinte en noir. De nouveau, on observe l’opposition du rouge et du noir ; cette fois, le rouge est de toute évidence la couleur de la vie (fig. 13). La présence d’Hélios 33 est liée à son rôle de porteur de lumière et de vie : il est représenté dans la tombe en tant que « lumière de vie » (ƪƼʨƵ ƹ˒Ƶ), « père du temps » (ƺƴƿưƲƸ ƳƥƷƢƴ) et « modèle de justice » (ƨƩƭƮƷɖ ƨƭƮƥƭƲƶǀưƫƵ) 34 – épithètes qu’il porte dans les 32.
33. 34.
A. Athanassakis, The Orphic Hymns, Text, Translation and Notes (1977), p. 12-13. On pourrait peutêtre faire ici le lien avec les cheveux blonds de Rhadamanthe : dans l’Odyssée IV 564 Rhadamanthe est « blond » (ƱƥưƬɞƵƖƥƨƠuƥưƬƸƵ), « Ménélas [...] aux Champs Élysées, tout au bout de la terre, les dieux t’emmèneront chez le blond Rhadamanthe, où la plus douce vie est offerte aux humains… ». Sur Hélios : K. Schauenburg, Helios, archäologisch mythologische Studien über den antiken Sonnengott (1955) ; N. Yalouris, T. Visser, LIMC V (1990), s.v. « Helios », p. 1005-1034. A. Athanassakis (n. 32), p. 12-13.
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Fig. 12 — Le tombeau Golyama Kosmatka, le médaillon avec la tête d’Hélios sur l’un des battants (cl. J. Valeva).
Fig. 13 — Le tombeau Kosmatka, le médaillon avec la tête de la Méduse sur l’autre battant (cl. J. Valeva).
Hymnes orphiques. Seul Hélios vit le rapt de Perséphone par Hadès (Hésiode, Hymne à Déméter 62-81) : un rare exemple qui montre Hélios et Déméter dans un quadrige à la recherche de Perséphone est un cratère à volutes, trouvé en Apulie (Pouilles) et aujourd’hui au Louvre 35. Il est fort probable que derrière l’image d’Hélios dans la tombe thrace, il faille reconnaître des mythes beaucoup plus anciens, liés à la mort rituelle du roi 36. La place de la Méduse est largement attestée dans le contexte funéraire du monde méditerranéen 37. Des sources écrites suggèrent que la demeure de la Méduse se trouve près de l’entrée de l’Hadès 38. La couleur noire du médaillon (bouclier) de la Méduse dans la tombe thrace symboliserait les Enfers, la mort en opposition à la figure d’Hélios, 35. 36. 37.
38.
A. D. Trendall, A. Cambitoglou, The Red-Figured Vases of Apulia II. Late Apulian (1982), p. 39, no 1023. R. Graves (n. 13), vol. 1, p. 157. Sur la Méduse, l’ouvrage classique d’E. Buschor, Medusa Rondanini (1958) et I. Krauskopf, S.-Ch. Dahlinger, LIMC IV (1988), s.v. « Gorgo, Gorgones », p. 285-330 ; M. Fuchs, « Méduse et la mort », dans A. Barbet (éd.), La peinture funéraire antique (IVe siècle av. J.-C.-IVe siècle apr. J.-C.), Actes du VIIe colloque de l’Association internationale pour la peinture murale antique, Saint-Romain-en-Gal, Vienne (1998) (2001), p. 79-84 ; dernièrement sur l’association d’Hélios et de la Méduse dans un contexte funéraire : C. Huguenot (n. 24), p. 161-172. Hésiode, Théogonie 274-275 ; Eschyle, Prométhée enchaîné 798-800 ; Odyssée XII 634-635 ; Apollodore, Bibliothèque II 5, 12, 4 ; E. Lippolis, « Le porte degli inferi », dans M. Mazzei, Arpi. L’ipogeo della Medusa e la necropoli (1995), p. 323.
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porteur de vie. Aristophane décrit les couleurs qui entourent celui qui se trouve aux Enfers 39 dans ce passage où Eaque s’adresse à Dionysos : « Mais aujourd’hui tu es tenu à bras le corps. Ainsi la roche au cœur noir du Styx 40, la falaise de l’Achéron dégoutante de sang te gardent, et les chiens qui rôdent autour du Cocyte, et Échidna aux cent têtes qui te déchirera les viscères [...] tes reins ensanglantés, avec tes entrailles, seront déchiquetés par des Gorgones [...] Tithrassiennes ». Parmi les nombreuses images de la Méduse dans les tombes du monde hellénistique, nous pouvons citer quelques exemples plus significatifs à titre de comparaison. Une tête de Méduse est peinte sur fond blanc au dos de la dalle qui fermait l’entrée d’un tombeau découvert à Kertch en 1902 41. La façade de la tombe d’Aghios Athanassios porte sur l’un de ses murs l’image de la Méduse sur un bouclier ; le bouclier sur l’autre mur est décoré du foudre de Zeus 42. Dans la tombe des Volumnii près de Pérouse, la Méduse sur le bouclier d’Athéna est sculptée au-dessus de l’entrée du caveau et fait face à la figure d’Hélios, qui occupe le fronton situé au-dessus de la porte d’entrée 43. Fort intéressant est le témoignage de Clément d’Alexandrie qui relate que le visage de la Méduse suggérait la Lune chez les Orphiques (Stromates V 49-50) 44 : elle serait ainsi associée au Soleil. Les chercheurs contemporains ont raison d’interpréter la Méduse en tant que maîtresse des passages et « reine des limites 45 ». Cette limite entre l’espace sacré et l’espace profane pouvait être la porte d’un temple comme c’était le cas au Parthénon 46. Toutefois, la longue liste des représentations de la Méduse dans les tombes du bassin méditerranéen prouve qu’elle était fortement liée à la mort. À propos des couleurs associées à la Méduse et au monde funéraire, il serait certainement intéressant de rappeler le mythe d’Asclépios : impressionnée par ses talents de médecin, Athéna lui donna deux phiales pleines du sang de la Gorgone Méduse ; celle remplie du sang des veines de son côté gauche avait le pouvoir de ressusciter, l’autre contenant celui des veines du côté droit pouvait détruire sur l’instant 47. Certes, la peinture funéraire n’était pas uniquement un système de symboles. Son analyse iconographique et stylistique révèle d’autres niveaux d’interprétation en relation avec son message idéologique, spirituel et esthétique. La structure du décor dans une tombe thrace était fortement influencée par le style grec mais portait l’empreinte de la culture locale. Cela se manifestait particulièrement dans l’adaptation de la peinture aux surfaces des coupoles, propres à l’architecture funéraire thrace.
39. 40. 41. 42. 43. 44. 45. 46. 47.
Aristophane, Les Grenouilles 469-477 (éd. V. Coulon, trad. H. Van Daele, CUF, 1928). Le Styx passait pour être formé par l’eau qui tombait d’un haut rocher noir et se perdait sous terre. Voir Iliade VIII 365-366. M. Rostovtzeff (n. 9), pl. LXV, LXXI. M. Tsibidou-Avloniti, ƑƥƮƩƨƲưƭƮƲƣƷƠƹƲƭƶƷƲưƚƲƣưƭƮƥƮƥƭƶƷƲưƆƧƣƲƆƬƥưƥƶƣƲƍƩƶƶƥƯƲưƣƮƫƵ (2005). M. Fuchs (n. 37), avec d’autres exemples. Ibid. ; avec renvoi au texte de K. Ziegler, dans RE VII (1912), s.v. « Gorgo », col. 1630-1655, en particulier col. 1644. Ibid., p. 83. A. Michaelis, Der Parthenon (1871), p. 316 ; B. Gossel (n. 7), p. 149. R. Graves (n. 13), p. 50, et les sources : Euripide, Ion 999-1 000, Apollodore, Bibliothèque III 10, 3.
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Fig. 14 — Le tombeau de Kazanlak, la peinture de la coupole (cl. N. Genov).
La peinture de la coupole de la chambre funéraire à Kazanlak (fig. 14) est inspirée de la structure de l’ordre ionique grec : une architrave, au-dessus de laquelle se trouve la frise principale avec la scène du banquet. Le couronnement comprend les denticules et la cimaise. Au-dessus, une frise représente trois biges en compétition. L’agencement du décor prouve qu’on identifiait la tombe à la dernière demeure du défunt, ce qui est suggéré aussi par le mobilier. Le choix des couleurs restait traditionnel : rouge, blanc, noir, jaune. Les frises figurées dans le tombeau de Kazanlak et leurs positions dans la partie haute des murs les éloignent cependant d’une fonction simplement imitative. Cette peinture exprimait les idées fondamentales de la société aristocratique thrace, surtout celles liées à la vertu héroïque et morale (DzƴƩƷƢ). Les couleurs font ressortir la priorité idéologique de ces images. Ainsi, l’impression générale de la palette de la frise principale est celle d’une peinture héroïque réalisée avec les quatre couleurs de la peinture classique, malgré les nombreux accents de bleu et les nuances discrètes de violet et de rose. Les touches bleues
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Fig. 15 — Le tombeau de Kazanlak, biges en compétition de la frise supérieure (cl. N. Genov).
Fig. 16 — Le tombeau Ostroucha, caisson avec tête de jeune femme (cl. N. Genov). Fig. 17 — Le tombeau Ostroucha, caisson avec fleuron (cl. N. Genov).
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marquent les objets appartenant au couple princier : ce sont la vaisselle d’argent, la chaise du défunt également d’argent, des étoffes bleues. Plus haut encore, le bleu est largement employé dans les vêtements des conducteurs des biges 48, dans lesquels nous devons voir peut-être l’image des participants aux jeux funéraires (fig. 15). Représentés au niveau le plus haut du décor, ces courses devaient symboliser aussi le passage du défunt dans le monde habité par les dieux et les héros. La valeur esthétique du bleu est la plus évidente dans les peintures du plafond à caissons de la tombe Ostroucha 49 : sur les fonds bleu foncé se dessinent avec majesté (malgré les petites dimensions) les figures des dieux chthoniens et des héros de différentes générations (Bellérophon, Achille), peints avec les couleurs classiques, l’ocre et le rouge, avec quelques touches de vert brillant dans les couronnes et les frises florales (fig. 16-17). L’arrangement des couleurs pour exprimer la sémantique du décor est utilisé dans la tombe d’Alexandrovo. La plinthe qui fait le tour de la chambre circulaire est surmontée d’une scène de banquet juste en face de l’entrée, ensuite par la haute bande rouge, la frise principale avec la chasse et une surface jaune ; la représentation de la roue sur la clé de la coupole termine la composition. Cette séquence montre qu’une importance particulière est donnée à la chasse, symbole de l’héroïsation. La surface jaune qui suit doit alors être vue comme dorée, marque d’un niveau cosmique divin 50. L’élan des chasseurs et la fuite des animaux créent l’illusion d’un tourbillon qui s’élève par la partie jaune vers la roue sur la clé de voûte (fig. 18). La roue est peinte avec les couleurs principales de la peinture funéraire : rouge, blanc et noir. Le symbole (la roue) et ses couleurs résument l’idée du cycle de la vie et du destin. Le rythme des nuances dans la frise de la chasse n’est pas particulièrement élaboré : les hommes et les animaux, peints avec des nuances de jaune, de rouge et de gris, se succèdent sur le fond blanc, mais les grandes taches noires des deux sangliers et des chiens intensifient le mouvement et la sensation de danger. La peinture dans la tombe d’Alexandrovo est loin d’être sophistiquée, mais elle est très expressive et riche en détails. Son effet provient de son aspect décoratif et des couleurs placées en opposition. La suggestion des volumes est faite par des hachures posées par une main sûre (fig. 19) ; toutefois, beaucoup de détails, surtout les vêtements de la plupart des chasseurs et des guerriers du dromos, sont des aplats assez naïfs. Nous avons porté notre attention sur la peinture figurative de deux tombes thraces qui se ressemblent par leurs systèmes décoratifs, nés de la forme de la coupole. À la différence des décors non figuratifs, les couleurs des compositions figurées ne corres-
48. 49. 50.
Sur la course des biges : H. Brecoulaki (n. 28), p. 137-141, pl. 50-53, dans le tombeau de Kazanlak : L. Zhivkova, The Kazanlak Tomb (1975), pl. 20, 37. J. Valeva, The Painted Coffers of the Ostrusha Tomb (2005). Dans le passage 59a8-b4 du Timée, Platon dit que ƱƥưƬƿư est la couleur de l’or : A. Levidis, « Why did Plato not Suffer of Color Blindness? », dans Color in Ancient Greece (n. 17), p. 12 ; le même mot exprime la lumière et la couleur du soleil, donc nous avons tout un système de relations métaphoriques qui cherchent à peindre l’image de l’existence bienheureuse et illuminée après que l’homme quitte cette terre.
LA COULEUR DANS LES TOMBEAUX THRACES : ILLUSION ET SYMBOLE
Fig. 18 — Le tombeau d’Alexandrovo, la peinture de la coupole (cl. K. Kitanov).
Fig. 19 — Le tombeau d’Alexandrovo, détail avec chasseur (cl. K. Kitanov).
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pondent plus seulement au symbolisme eschatologique. Entrelacées dans la composition de l’image, les quatre couleurs classiques renforcent son sens héroïque et aristocratique. Il est vrai que les bleus et les verts brillent comme des « pierres précieuses » au milieu de cette gamme qui reste cependant le royaume des quatre couleurs de base. Le blanc (ƯƩƸƮƿư), le noir (uơƯƥư), le rouge (ȂƴƸƬƴƿư) et le jaune (ƱƥưƬƿư) ressemblent par leur rôle fondamental aux éléments à la base de l’Univers : le feu, la terre, l’eau et l’air 51. Il suffit de regarder attentivement un seul détail des peintures dans ces tombes pour illustrer l’expérience et les raisonnements de Platon sur les mélanges des couleurs pour atteindre les nuances du jaune, du rouge et du gris 52. Avec un nombre aussi limité de couleurs – quatre – la peinture antique a su exprimer les idées existentielles et le système esthétique développé qui leur correspondait.
CATALOGUE ABRÉGÉ DES TOMBES THRACES MENTIONNÉES DANS LE TEXTE 53 1. Alexandrovo Village près de la ville de Haskovo, Bulgarie du Sud-Est. Année de la découverte : 2000. Tumulus : diam. 70 m, haut. 15 m. Dromos : 14,4 × 1,11 m (haut.), plafond plat. Antichambre : 1,85 × 1,20 × 2,20 m (haut.), couverture trapézoïdale à 1,22 m du sol, dalle de clé : 1,85 × 0,40 m. Chambre funéraire circulaire voûtée : diam. 3,3 m, haut. 3,40 m, lit funéraire. Datation : dernier quart du ive s. av. J.-C. G. Kitov, « A Newly Found Thracian Tomb with Frescoes », Archaeologia Bulgarica V/2 (2001), p. 15-29 ; G. Kitov, « New Discoveries in the Thracian Tomb with Frescoes by Alexandrovo », Archaeologia Bulgarica IX/1 (2005), p. 15-28 ; C. Webber, « Odrysian Cavalry Arms, Equipment and Tactics », dans Early Symbolic Systems for Communication in Southeast Europe 5, 2, BAR International Series 1139 (2003), p. 529-554 ; K. Kitanov, « Le dessin préparatoire et les corrections apportées à la peinture du tombeau thrace près d’Alexandrovo », dans N. Zimmermann (éd.), Antike Malerei zwischen Lokalstil und Zeitstil. Akten des XI. Internationalen Kolloquiums der AIPMA, 13.-17. September 2010 in Ephesos (2015), p. 675-678.
2. Arsénalka (Golyama Arsenalka) Tumulus au Sud-Ouest de Chipka, région de Kazanlak. Année de la découverte : 1995. Tumulus : haut. 10 m ; façade 5 × 2,50 m (haut.). 51. 52. 53.
A. Levidis (n. 50), p. 12, n. 12. L’analyse du Timée 67c4-68d7 dans ibid., passim. Le but de ce catalogue très abrégé est de donner une information de base et d’indiquer les publications pertinentes, car les tombes thraces sont encore peu connues et peu citées dans les études hors Bulgarie. Le catalogue (par ordre alphabétique) précise la localisation, la date de découverte, les dimensions, la forme architecturale, le matériel de construction, la datation et donne une bibliographie sélective.
LA COULEUR DANS LES TOMBEAUX THRACES : ILLUSION ET SYMBOLE
Antichambre : couverture à deux pentes. Chambre funéraire : diam. 3,30 m et haut. 3,30 m (d’après G. Kitov [1996]), ou diam. 3,053,20 m et haut. 3,25 m (d’après D. Dimitrova [2005]) ; voûte en encorbellement, lit funéraire, porte de pierre en deux battants. Construite en blocs de pierre. Pillée, mais restes du mobilier comme les os d’un cheval, éparpillés dans l’antichambre, quelques morceaux de la couronne funéraire en terre cuite dorée, des rosettes en or et les fragments d’un pectoral. Datation : ive s. av. J.-C. G. Kitov, «The Thracian Valley of the Kings in the Region of Kazanluk », Balkan Studies 37/1 (1996), p. 10-13 ; D. Dimitrova, « Koupolnite hramove v Dolinata na trakiyskite vladeteli [Les temples à coupole dans la Vallée des souverains thraces] », dans Zemite na Bulgaria lyulka na trakiyskata kultura II (2005), p. 111.
3. Borovo Village de Borovo, région de Roussé, Bulgarie du Nord-Est. Année de la découverte : 1977. Nécropole tumulaire, tombe creusée dans le sol et couverte du tumulus. Antichambre : 2,70 × 1,50 m, haut. inconnue. Chambre funéraire : 1,80 (N, O) × 2,10 (S) × 1,55 m (E) ; haut. 2,70 m. Datation : première moitié du iiie s. av. J.-C. D. Ivanov, « Trakiyska grobnitza krai s. Borovo [Tombe thrace près du village de Borovo] », Izvestiya na muzeite na severoiztotchna Bulgaria X (1984), p. 17-21 ; J. Valeva, « Les décors thraces et le style à zones (ive-iiie siècle av. J.-C.) », Art Studies Quarterly/Problemi na izkustvoto 4 (1999), p. 74.
4. Chouchmanets (Shushmanets) À l’Est de la ville de Chipka. Année de la découverte : 1996. Antichambre ouverte avec voûte en encorbellement. Chambre funéraire : diam. 3,90 m, haut. 3,85 m ; sept demi-colonnes doriques adjacentes qui se transforment au-dessus de l’architrave faisant le tour de la chambre en ogives, ces dernières s’amincissent vers le sommet de la coupole en encorbellement ; lit funéraire. Datation : ive s. av. J.-C. Le tombeau n’est pas publié en détail. Voir T. Stoyanov, D. Stoyanova, « Early Tombs of Thrace. Questions of the Chronology and the Cultural Context », dans O. Henry, U. Kelp (éds), Tumulus as Sema: Space, Politics, Culture and Religion in the First Millennium BC (2016), p. 313-327, spéc. p. 325-326.
5. Golyama Kosmatka Au Sud de la ville de Chipka. Année de la découverte : 2004. Tumulus : diam. ca 90 m, haut. 20 m. Façade : larg. 7 m, haut. 3 m. Dromos : 13 × 1,60 × 2,10-2,45 m (haut.) ; couverture plate en bois. Antichambre : 2,70 × 1,50 × 3,45 m (haut.) ; voûte en encorbellement à partir du sol.
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Chambre circulaire : diam. 3,35 m, haut. 4,5 m ; coupole en encorbellement à partir du sol. Chambre funéraire en forme de sarcophage : 3,30 × 1,92 × 2,21 m (haut.), en deux pièces : cuve et couvercle monolithes, lit funéraire creusé dans la pierre. Les autres chambres sont construites en blocs de pierre réguliers. Mobilier très riche (plus de 70 objets) : couronne de chêne en or, casque avec inscription « ƗƩǀƬƫƵ », vaisselle en or (kylix), en argent et en bronze (askos), boîte en forme de moule en argent doré, pectoral, cuirasse, armes, jambières en bronze décorées de représentations d’Athéna, restes de fils d’or de la couverture somptueuse du lit, pièces de harnais en or, amphores en terre cuite ; devant la façade a été trouvée une tête en bronze d’un homme barbu d’âge mur, dans l’antichambre le squelette d’un cheval. Aucun reste de squelette humain. Hypothèse : tombe du roi thrace Seuthès III. Datation : d’après l’archéologue du site G. Kitov (2005), la construction initiale est du ve s., d’après D. Stoyanova (2008), de la fin du ive-début du iiie s. av. J.-C. V. Saladino (2012-2013) considère la tête en bronze comme un portrait du roi thrace Seuthes III. G. Kitov, « The Newly Discovered Tomb of the Thracian Ruler Seuthes III », Archaeologia Bulgarica IX/2 (2005), p. 39-54 ; D. Stoyanova, « Za khronologiyata na grobnitsata v moguila Golyama Kosmatka [De la chronologie de la tombe sous le tumulus Golyama Kosmatka] », dans Problemi I izsledvaniya na trakiyskata kultura III (2008), p. 92-107 ; V. Saladino, « Il ritratto di Seuthes III. Con un appendice di E. Formigli », JdI 127-128 (2012-2013), p. 129-205 ; D. Dimitrova, Grobnitsata na Sevt III v moguilata Golyama Kosmatka (Le tombeau de Seuthès III sous le tumulus Golyama Kosmatka) (2004).
6. Helvetia À l’Est de la ville de Chipka. Année de la découverte : 1996. Antichambre ouverte et chambre funéraire de plan rectangulaire, toutes les deux couvertes d’une voûte en encorbellement ; un dromos hypèthre les précède. Datation : ive s. av. J.-C. Voir T. Stoyanov, D. Stoyanova, « Early Tombs of Thrace. Questions of the Chronology and the Cultural Context », dans O. Henry, U. Kelp (éds), Tumulus as Sema: Space, Politics, Culture and Religion in the First Millennium BC (2016), p. 313-327, spéc. p. 326-327.
7. Kaloyanovo Village de Kaloyanovo, à 10 km à l’Est de la ville de Sliven. Année de la découverte : 1963. Tumulus très aplati : diam. 50 m, haut. 3 m. Antichambre I, pour les inhumations des chevaux : 2,47 × 1,50 × 1,75 m (haut.) ; couverture plate. Antichambre II : 1,90 × 1,10 m ; couverture plate en dalles de pierre, rangées sur des poutres de bois. Chambre funéraire : long. 2,55 m, larg. 2,17 m (en bas) à 1,95 m (en haut), haut. 2,08 m ; couverture de dalles de pierre, posées sur des poutres en bois. L’antichambre I a été construite en dalles de pierre liées à l’argile, l’antichambre II et la chambre funéraire en appareil pseudo-isodome. Non pillée, inhumation d’un guerrier, mobilier comprenant des armes, une pélikè à figures rouges.
LA COULEUR DANS LES TOMBEAUX THRACES : ILLUSION ET SYMBOLE
Datation : deuxième quart du ive s. av. J.-C. M. Čičikova, « Trakiyska moguilna grobnitsa ot s. Kaloyanovo, Slivenski okrag (IV v. pr.n.e.) [Tombe tumulaire thrace du village de Kaloyanovo, région de Sliven (ive s. av. J.-C.)] », Bulletin de l’Institut archéologique (Sofia) XXXI (1969), p. 45-90.
8. Kazanlak Ville à 190 km à l’Est de Sofia. Année de la découverte : 1944. Tumulus : diam. 42 m, haut. 7,20 m. Façade : larg. 1,86 m, haut. 2,67 m. Espace devant la façade : 2,60 × 1,85 × 2,67 m (haut.). Dromos : 1,95-1,97 × 1,12 m ; haut. 2,24 m ; voûte en ogive en encorbellement. Chambre funéraire : diam. 2,65 m, haut. 3,20-3,25 m ; voûte en encorbellement en forme de ruche. Façade, couloir et chambre funéraire sont bâtis en briques ; espace devant la façade, en pierres cassées. Datation : fin du ive-début du iiie s. av. J.-C. C. Verdiani, « Original Hellenistic Painting in a Thracian Tomb », AJA 49 (1945), no 4, p. 402-415 ; A. Frova, « Arte ellenistica in Bulgaria. Le pitture di Kazanlak », Arti figurativi I (1945), p. 105-106 ; V. Mikov, Antichnata grobnitsa pri Kazanlak [Le tombeau antique près de Kazanlak] (1954) ; L. Zhivkova, The Kazanluk Tomb (1975) ; I. Venedikov, « Koi e pogreban v Kazanlachkata grobnitsa ? [Qui est enterré dans le tombeau de Kazanlak ?] », Izkustvo (1986), no 8, p. 2-8 ; J. Valeva, « Izobrawheniya na chlemove i causia v Kazanlachkata grobnitsa [Images de casques et de causia dans le tombeau de Kazanlak] », Art Studies Quarterly/Problemi na izkustvoto (1992), no 6, p. 19-30.
9. Maglizh Petite ville à 12 km à l’Est de Kazanlak, le tumulus se trouve à 3 km de la ville en direction de l’Ouest. Année de découverte : 1965. Tumulus : diam. 48 m, haut. 13 m. Tombe à enfilade : long. 21,79 m. Espace ouvert devant la tombe pour les inhumations de chevaux, constitué de trois pièces : centrale 4,15 × 2,52 m, orientale 4 × 1,82 m, occidentale 4,20 × 1,85 m. Dromos/couloir en deux parties reliées : long. totale 9,13 m ; larg. du dromos initial 1,80 m ; larg. de la partie ajoutée 2,20 m ; haut. 2,20 m. Couloir aux pilastres en bois : 3,04 × 1,80 × 2,20 m (haut.) ; couvrement plat en poutres, soutenu par des pilastres en bois, par trois sur les longs murs oriental et occidental. Antichambre « blanche » : 2,34 × 1,28 × 2 m (haut.), voûte en encorbellement. Chambre funéraire de plan trapézoïdal : 3,16 × 2,00-2,20 m, haut. 2,64 m ; voûte en ogive en encorbellement, deux lits funéraires, dont le plus grand est adossé au mur du fond Nord et le plus petit au mur Est. L’espace triple devant la tombe, le couloir et la pièce aux pilastres sont construits en pierres cassées, liées à l’argile ; l’antichambre « blanche » et la chambre funéraire sont en briques. Datation : iiie s. av. J.-C. L. Guetov, Maglizhkata grobnitsa [Le tombeau de Maglizh] (1988) ; D. Vassileva, « Metodat
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na proektirane na Kazanlachkata grobnitsa [Le tombeau thrace près de Maglizh. Méthode de projection] », Tehnitcheska misal (Sofia) XXVII (1990), no 2, p. 75-80 ; A. Barbet, F. Monier, B. Amadei, C. Bertrand, J. Valeva, Mission en Bulgarie 1995 (1995), p. 13-21, fig. 25-47 ; J. Valeva, « Le tombeau de Maglij », dans Au Royaume des ombres. La peinture funéraire antique (IVe siècle av. J.-C.-IVe siècle ap. J.-C.), Exposition Saint-Romain-en-Gal 1998-1999 (1998-1999), p. 32-34 ; J. Valeva, dans J.-L. Martinez (dir.), L’épopée des rois thraces des guerres médiques aux invasions celtes, 479-278 av. J.-C. Découvertes archéologiques en Bulgarie, Exposition musée du Louvre, Paris (2015), p. 152-155.
10. Odessos (Varna) a) Tombe à ciste sous tumulus (diam. 26 m, haut. 3 m), bâtie en blocs de pierre. Dimensions : 1,86 × 75,5 × 0,70 m (haut.). Intérieur peint en rouge. b) Tombe à ciste sous tumulus (diam. 22 m, haut. 2,80 m), bâtie en blocs de pierre. Dimensions : 2,10 × 69,5 × 0,86 m (haut.). Intérieur peint en rouge. H. Chkorpil, K. Chkorpil, « Razkopki na moguili do gr. Varna [Fouilles de tumuli près de Varna] », Bulletin du Musée archéologique de Varna II (1909), p. 8-14. c) Tombe dans l’ancien quartier Sez-sevmes à Varna. Tumulus : diam. 33 m, haut. ca 4 m. Tombe, bâtie en dalles de pierre. Dimensions : 0,85 × 0,85 × 0,91 m (haut.). Murs peints en rouge, sol enduit de « terre jaune » (K. Chkorpil [1930-1931]). Mobilier : hydrie en bronze, aryballe en terre cuite avec scène de chasse en relief, deux alabastres, un masque en plomb, un strigile et des fragments de céramique. K. Chkorpil, « Archeologitcheski belezhki ot Tchernomorskoto kraïbrezhie [Notes archéologiques de la côte de la mer Noire] », Bulletin de l’Institut archéologique bulgare VI (1930-1931), p. 57-88, en particulier p. 68-77. d) Tombe à ciste. Dimensions : 2,25 × ca 1,00 × 0,85 m (haut.). Enduit des murs de couleur rose-rouge. Inhumation de femme, riche mobilier, dont deux boucles d’oreilles avec figures de Nikè. Datation : fin du ive-début du iiie s. av. J.-C. O. Savova, « Dve grobni nahodki vav Varna ot elinistitcheskata epoha [Deux trouvailles sépulcrales à Varna de l’époque hellénistique] », Muzei i pametnitsi na kulturata (Sofia) (1971), no 3, p. 3-9.
11. Ostroucha Tumulus à 4 km de Chipka en direction du Sud-Est. Année de découverte : 1993. Tumulus : diam. 70 m, haut. 21 m. Complexe de cinq chambres, dimensions : 14,19 × 7,94 m. Chambre funéraire monolithe, posée sur un podium de trois marches, dimensions extérieures : 3,51 (N)-3,55 (S) × 2,47 × 3,37 m (haut.), lit funéraire, creusé dans la pierre. Chambre rectangulaire Nord-Est : 3,29 × 1,37 m. Chambre rectangulaire Nord-Ouest : 3,14 × 1,36 m.
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Chambre circulaire : diam. 3,24 m. Chambre Sud-Ouest : 3,15 × 3,15 m, inhumation de cheval. La chambre funéraire est constituée de deux monolithes, les autres pièces sont bâties en blocs de pierre. Leur hauteur originale est inconnue. Date de la décoration picturale : 330-310 av. J.-C. J. Valeva, The Painted Coffers of the Ostrusha Tomb (2005).
12. Philippopolis Tombe dans la région de Plovdiv, quartier Philippovo. Année de découverte : 1952. Façade décorée de deux acrotères. Antichambre : 1,55 × 1,50 × 1,83 m (haut.), couverture plate en deux grands blocs de pierre. Chambre funéraire : 2,45 × 2,20 × 2,80 (haut.), couverture à lanterne, lit funéraire. Construction en blocs de pierre, appareil pseudo-isodome. Datation : les deux dernières décennies du ive s. av. J.-C. L. Botucharova, V. Kolarova, « Koupolna grobnitsa pri Plovdiv (1961) [Un tombeau à coupole des environs de Plovdiv] », dans Recueil K. Chkorpil (Sofia) (1961), p. 279-297.
13. Rouen Village de Rouen, région de Bourgas. Année de la découverte : 1968, détruite. Pas de données sur la façade. Court dromos : 1,00 × 0,60 m. Chambre funéraire : 2,30 (O) × 2,40 (E) × 2,10 (N) × 2,05 m (S), couverture inconnue ; construction en blocs et moellons liés à l’argile ; épaisseur des murs : 0,30 m. Pillée, restes d’une couronne de bronze. Datation : un lécythe de la fin du ive-début du iiie s. av. J.-C. suggère la datation. M. Lazarov, « Trakiyska grobnitsa krai s. Rouen, Bourgaski okrag [Tombe thrace près de Rouen, région de Bourgas] », Arheologiya (Sofia) 4 (1971), p. 63-68.
14. Sarafova moguila Tumulus (moguila), près du village de Kran, à 5 km au Nord de Kazanlak en direction de Chipka. Année de découverte : 1995. Long. totale 7,04 m, entrée au Sud. Dromos : larg. 2,26 (E)-2,15 m (O). Antichambre : 1,53 × 1,38-1,32 m ; haut. 2,05 m. Chambre funéraire : 2,67 (E) × 2,685 (O) × 1,52 (N) × 1,565 m (S) ; haut. 1,94 m. Bâtie en briques. Datation : fin du ive-début du iiie s. av. J.-C. G. Kitov, « The Thracian Valley of the Kings in the Region of Kazanluk », Balkan Studies 37/1 (1996), p. 22-25 ; K. Kitanov, « Materiali i tehnika na izpalnenie na stenopisite na trakiyskata grobnitsa Kran II krai s. Kran [Matériaux et technique d’exécution des peintures murales dans la tombe Kran II près du village de Kran] », dans Konservatsiya i restavratsiya na muzeini i hudozhestveni tsennosti (2003), p. 63-79.
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15. Sozopol Ville sur la côte occidentale de la mer Noire, à 33 km au Sud de la ville de Bourgas. a) Tombe en forme de sarcophage sous le tumulus de la localité de Mapités, construite en six dalles « réunies par des tenons de cuivre rouge noyés dans le plomb » (G. Seure [1924]), couvercle constitué par deux pierres, taillées en arête. Dimensions : 1,68 × 0,55 × 0,73 m (haut.). Inhumation féminine. Intérieur peint en blanc. b) Tombe en forme de sarcophage sous le tumulus de la localité de Mapités, construite en six dalles, pierre de couvercle en arête. Dimensions : 1,80 × 0,50 × 0,70 m (haut.). Inhumation masculine. Datation des deux tombes : fin du ive-début du iiie s. av. J.-C. G. Seure, « Archéologie thrace : documents inédits ou peu connus », RA XIX (1924), p. 307-350, en particulier p. 335-336.
16. Svechtari, tombe avec caryatides Tumulus à 2,5 km à l’Ouest du village de Svechtari, situé à environ 40 km (Nord-Est) de la ville de Razgrad, Bulgarie du Nord-Est. Année de découverte : 1982. Façade : larg. 6,74 m Dromos : 4,01 × 1,88 × 2,88 m (haut.). Antichambre : 2,44 × 2,39 × 3,55 m (haut.). Chambre latérale : 2,14 × 2,11 × 3,05 m (haut.). Chambre funéraire : 3,32 × 3,32 × 4,45 m (haut.). Datation : début du iiie s. av. J.-C. A. Fol et al., The Thracian Tomb near the Village of Sveshtari (1986) ; J. Valeva, « Mythology and History. The Painted Frieze of the Sveshtari Tomb with Caryatids », dans D. Scagliarini Corlàita (éd.), I temi figurativi nella pittura parietale antica (IV sec.a.C.-IV sec. D.C.), Atti del VI Convegno Internazionale sulla Pittura Parietale Antica (1997), p. 295-298, ill. p. 421 ; M. Čičikova, « Colour in the Stone Decoration of the Tomb with Caryatids near Sveštari », Sbornik v pamet na Prof. Velizar Velkov, Sofia (2009), p. 229-235 ; M. Chichikova, D. Stoyanova, T. Stoyanov, The Caryatids Royal Tomb near the Village of Sveshtari (2012) ; M. Čičikova, « Guinina Moguila : le tombeau royal aux caryatides », dans J.-L. Martinez (dir.), L’épopée des rois thraces des guerres médiques aux invasions celtes, 479-278 av. J.-C. Découvertes archéologiques en Bulgarie, Exposition musée du Louvre, Paris (2015), p. 256.
17. Tchernozemen Village de Tchernozemen, situé à 20 km au Nord de Plovdiv. Années de la découverte : 2003-2004. Tumulus : diam. 48,50 m, haut. 8 m. Tombe en forme de sarcophage : 1,90 × 1,40 × 1,70 m (haut.). La tombe est bâtie en blocs de syénite et de marbre, sans liant. Riche mobilier accompagnant le squelette de l’homme inhumé : restes de tissus de fil doré, armes, lécythe à figures rouges, cuvette et hydrie de bronze, filtre d’argent, hydrie à figures rouges et un second lécythe à l’intérieur, deux petites cuillères d’argent, armure de bronze avec garde-nuque de
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fer, morceaux d’un carquois de cuir, kylix d’argent avec l’image de Bellérophon, patère-passoire d’argent, récipient de bois, bague et pectoral d’or massif. Datation : ca 430-425 av. J.-C. K. Kisyov, Thrace and Greece in Ancient Times: Classical Age Tumuli in the Municipality of Kaloyanovo (2005).
18. Vetren Village de Vetren, à 24 km à l’Ouest de Pazardjuk. Année de la découverte : 1944. Tumulus : haut. 5 m. Antichambre ouverte : 2,10 × 0,90 × 3,50 m (haut.). Chambre funéraire : 2,90 × 2,10 × 3,50 m (haut.) ; voûte en encorbellement. La tombe est construite en blocs de pierre locale sans liant ; épaisseur des murs 0,60 m. Restes minimes de l’inventaire, suggérant une couronne en terre cuite dorée. Datation : fin du ve-début du ive s. av. J.-C. I. Venedikov, « Trakiyska grobnitza pri Vetren, Pazardjichko [Une tombe thrace près de Vetren, région de Pazardjik] », Bulletin de l’Institut archéologique bulgare XV (1946), p. 194-196.
19. Yankovo Village à 32 km au Sud de Choumen, Bulgarie du Nord-Est. La tombe était connue et systématiquement pillée depuis 1924 ; fouilles archéologiques dans les années 1950. Tumulus : diam. 41 m, haut. 4,6 m. Façade détruite, mais fragment d’une inscription, suggérant des formes monumentales. Dimensions générales : 7,70 × 6,00-4,5 m ; haut. préservée 0,40 m. Espace devant la façade pour l’inhumation des chevaux : 3,55 × 1,84 m. Antichambre : 1,95 × 1,55 m. Chambre funéraire : diam. 1,98 m ; voûte en encorbellement. Construite en blocs de grès sans liant, épaisseur des murs 1,32 m. Mobilier : lampe de bronze, perles d’or, boutons d’os, vase d’argile, fragments de céramique, mors de fer. Datation : ive s. av. J.-C. C. Dremsizova, « Nadgrobni moguili pri selo Yankovo [Tumuli près du village de Yankovo] », Bulletin de l’Institut archéologique (Sofia) XIX (1955), p. 61-65.
Addendum Une série de nouvelles publications sur les peintures des tombeaux thraces se détache ces dernières années. Le catalogue qui accompagne l’exposition L’épopée des rois thraces, qui a eu lieu au Louvre du 16 avril au 20 juillet 2015, présente les plus spectaculaires de ces tombeaux : J.-L. Martinez (dir.), L’épopée des rois thraces des guerres médiques aux invasions celtes, 479-278 av. J.-C. Découvertes archéologiques en Bulgarie, Exposition musée du Louvre, Paris (2015). Les contributions à la conférence qui s’est tenue à l’occasion de cette exposition les 12 et 13 juin 2015 seront aussi publiées, parmi lesquelles l’article de J. Valeva, « Les décors des tombeaux thraces ». Un autre article de J. Valeva sur « La peinture en Thrace pré-romaine » sera publié dans les Actes de la conférence de l’AIPMA, tenue à Lausanne du 12 au 16 septembre 2016. Le numéro de la revue des Dossiers archéologiques 368 (marsavril 2015), consacré à l’exposition L’épopée des rois thraces contient des articles importants concernant
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les tombeaux thraces. On retiendra encore l’ouvrage d’une importance majeure pour l’étude de l’histoire et de la culture thrace, A Companion to Ancient Thrace, sous la direction de J. Valeva, E. Nankov, D. Graninger, publié en 2015 (pour les peintures, voir l’article de J. Valeva, p. 180-196). Enfin, bien qu’il ne soit pas directement lié à la peinture des tombeaux thraces, on consultera L. Summerer, A. von Kienling (dir.), Tatarlı: renklerin dönüşü / The return of colours / Rückkehr der Farben (2010), qui donnent un aperçu de la peinture des tombeaux anatoliens.
Gestuelle et couleur au service du trompe-l’œil dans les peintures pariétales de la fin de la République romaine Maud Mulliez
RÉSUMÉ Si l’art du trompe-l’œil est souvent assimilé à la maîtrise de la perspective, il ne peut être réduit à cet aspect, si essentiel soit-il, et faire l’économie de la représentation de la matière : matière en tant que « volume » et en tant que « matériau ». Le volume est transcrit, en peinture, par un travail d’ombre et de lumière fondé sur la variation chromatique de l’objet représenté. De même, le rendu d’un matériau passe par un travail pictural lié aux choix des couleurs et à leur distribution : c’est la mise en image, grâce à différents moyens picturaux, de l’aspect visuel d’un matériau qui en permet l’identification. C’est donc avant tout un travail sur la couleur qui confère aux matières feintes leur matérialité ! Les artisans décorateurs de la fin de la République romaine, peignant des trompe-l’œil d’architecture, y ont exploré des jeux de couleurs, au gré d’expériences originales et isolées ou, au contraire, en se conformant à des codes ou à des habitudes gestuelles : jeux sur lesquels nous sommes invités ici à arrêter notre regard. MOTS-CLEFS Peinture romaine, deuxième style pompéien, trompe-l’œil, illusionnisme, espace fictif, moyens picturaux, technique picturale, procédés picturaux, dégradé, contraste, ombre portée, ombre et lumière, volume, imitation de matériaux, imitation de marbres, imitation de bois, polychromie.
Painting processes and uses of colors in trompe l’œil making on wall painting at the end of the Roman Republic Trompe l’œil art is often confused with perspective. However it cannot be confined to this aspect alone, essential as it is. Particular attention needs to be paid to how “substance” is represented: substance as “volume” and substance as “material”. In painting, volume is made with light and shade based on the chromatic variation of the item represented. Similarly, the material is produced through the choice of colours and the way they are distributed: depicting the visual aspect of the raw material –such as the shiny aspect of metal, or the polychrome aspect of marble– using various painting techniques makes it identifiable. This means that the appropriate use of colours is what gives reality to feigned substances! When they were painting these architectural trompe l’oeil, decorator craftsmen from the end of the Roman Republic, explored various uses of mixed colours, through original and isolated experiences, or on the contrary following customary strokes and painting techniques. I suggest we take a close look a these various forms of colour use. SUMMARY
KEYWORDS Roman painting, Pompeian Second Style, trompe l’oeil, pictorial techniques, pictorial processes, chromatic variations, contrast, drop shadow, light and shade, gradual fading out of colours, volume, imitation materials, imitation marble techniques, imitation wood techniques, polychromy.
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à propos de l’auteur M. Mulliez, université Paris Nanterre, UMR 7041 du CNRS, ArScAn (Archéologie et Sciences de l'Antiquité), Nanterre, France.
GESTUELLE ET COULEUR AU SERVICE DU TROMPE-L’ŒIL DANS LES PEINTURES PARIÉTALES
La fin de la République romaine a vu naître un art décoratif qui, pour la première fois, explorait des techniques poussées pour mettre en œuvre un espace tridimensionnel 1. Le mur à bossages que reproduisait, à l’aide de stucs peints, le style structural, d’abord repoussé au second plan, est peu à peu remplacé par des plans successifs, ouverts ou non, sur un extérieur de jardins ou de ciel. Ce système décoratif, appelé style architectural, mais qui conserve aussi par commodité l’appellation de deuxième style pompéien, modifie profondément la conception de l’espace habité. La paroi, en effet, n’est plus appréhendée comme une cloison mais comme un support où se développe un univers imaginaire. L’introduction de la perspective y est, naturellement, une des innovations les plus étonnantes et a déjà fait l’objet d’études aussi nombreuses que brillantes. En revanche, le choix des matériaux mis à contribution dans l’élaboration de ces riches architectures illusionnistes, d’une étonnante diversité et d’une vive polychromie, ainsi que les moyens techniques à la disposition des artisans décorateurs 2, n’ont pas fait jusque-là l’objet d’études systématiques. La couleur joue un rôle essentiel dans cette « fabrication d’espace » : la peinture en trompe-l’œil requiert la réunion de deux facteurs qui sont d’une part, la représentation de l’espace, et de l’autre, l’imitation, plus ou moins fidèle, des matériaux qui composent cet espace fictif, deux composantes qui sont le résultat d’un ensemble de moyens picturaux variés mis en œuvre par les peintres décorateurs.
COULEUR
ET MISE EN ESPACE : OMBRE PROPRE, OMBRE PORTÉE ET ASTUCES D’ATELIER Si l’introduction de la troisième dimension, caractéristique majeure des peintures de deuxième style, passe en premier lieu par la mise en place d’une composition en perspective, celle-ci, toute nécessaire soit-elle, ne suffit pas à créer l’illusion. Elle réclame notamment le concours de la représentation du volume. Or, la perception du volume est liée à l’impact de la lumière sur les surfaces, créant des zones d’ombre et des zones lumineuses, qui, en peinture, sont transcrites par une variation chromatique appliquée à la couleur initiale de l’objet représenté. Observons, en guise d’exemple préliminaire, le cas des colonnades qui occupent certaines compositions architecturales, en particulier celles, multiples, de la salle 15 de la Villa dite de Poppée, située à Oplontis dans la baie de Naples (fig. 1). L’illusion d’espace est créée à l’aide de plusieurs « outils » visuels dont l’efficacité ne peut qu’être soulignée.
1.
2.
D’autres expériences, moins accomplies, de la tridimensionnalité ont eu lieu avant. On pense, par exemple, aux décors de vases italiotes où la troisième dimension est déjà esquissée, notamment grâce à la présence des naiskoi. Ces « moyens techniques » à la disposition des artisans sont de deux ordres. Il s’agit aussi bien des procédés picturaux que de l’accès à la connaissance de certains matériaux : en effet, on ne connaît que mal la mesure de leur diffusion et s’ils étaient suffisamment accessibles pour être l’objet d’imitations. Ceci suppose soit un emploi déjà largement répandu, soit la circulation d’échantillons, soit la reproduction de motifs (copiés d’une maison à l’autre ou par le biais de « répertoires de motifs »).
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Fig. 1 — Villa dite de Poppée, Oplontis, salle 15 : colonnades (cl. M. Mulliez).
Fig. 2 — Villa dite de Poppée, Oplontis, salle 15 : détail du kymation, ombre propre complexe (cl. M. Mulliez).
Deux de ces outils relèvent bien de la perspective : – la situation de ces colonnades, au sein de la composition, contribue à créer l’impression d’espace : les éléments situés en arrière-plan (ciel, arbres) et ceux qui se trouvent en avant (la colonnade frontale du premier plan, le mur-écran ainsi que l’étrange entablement qui coupe en deux la vue sur la colonnade) renforcent l’impression de distance ; – la représentation des colonnes de manière « fuyante », c’est-à-dire de dimension de plus en plus réduite au fur et à mesure qu’elles doivent paraître plus lointaines, est aussi un procédé illusionniste mis au service de l’espace. Mais ces outils de perspective ne suffisent pas à « fabriquer la tridimensionnalité » : l’illusionnisme est aussi rendu par le volume de chacune de ces colonnes et par le rapport qu’elles entretiennent les unes avec les autres, grâce à une utilisation adéquate de la
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couleur. Leur volume, c’est-à-dire la forme cylindrique qui les caractérise, est rendu à l’aide d’un procédé pictural simple, le dégradé. Ce dernier, qui consiste soit en une transformation progressive de la valeur d’une couleur 3, soit en un glissement progressif d’une couleur vers une autre, restitue ici le volume individuel de chaque colonne. Par ailleurs, l’impression de colonnade, c’est-à-dire d’une succession de colonnes selon une séquence régulière, est produite par leur rapport coloré. Le passage radical d’une colonne à l’autre se distingue à l’aide du contraste de valeur : la partie la plus sombre de chaque colonne est juxtaposée à la partie claire de la suivante. Cet effet de contraste renforce la perspective fuyante et sert donc la représentation de l’espace. Dégradé et contraste sont les deux moyens picturaux, déclinés selon les cas par les artisans décorateurs pour rendre le volume, autrement dit pour représenter l’impact de la lumière sur un objet et sur son environnement. La lumière a en effet un impact sur l’objet lui-même mais aussi sur le milieu où il se trouve. Sur l’objet, elle définit des zones lumineuses et des zones d’ombre, qui sont transcrites par la variation chromatique de la couleur initiale de l’objet. La partie ombrée, opposée à la source lumineuse, est appelée « l’ombre propre » de l’objet. En fonction de la complexité de la forme de l’objet, le nombre et l’intensité de ces zones d’ombre et de lumière peuvent varier : pour la représentation d’un kymation lesbique (fig. 2), qui figure au nombre des formes les plus complexes des décors architecturaux, les zones les plus en creux sont représentées par des touches plus sombres, tandis que les parties les plus saillantes et les plus éclairées sont figurées à l’aide de touches de blanc. Enfin, la courbure progressive du profil, d’une profondeur moyenne, est figurée à l’aide d’une couleur intermédiaire, légèrement dégradée. On discerne aisément la trace de pinceau, horizontale, linéaire, qui marque la zone légèrement en creux du kymation. Quant à l’environnement de l’objet, il est également soumis à des variations liées à l’action qu’y exerce la lumière : lorsque l’objet constitue un obstacle à la trajectoire de la lumière, il projette une ombre sur l’arrière-plan, que l’on appelle « ombre portée ». Sa présence, dans les décors en trompe-l’œil, contribue de manière très significative à la représentation de la troisième dimension. Elle permet notamment d’appréhender la distance qui sépare l’objet du plan sur lequel il projette son ombre, comme l’illustre le détail du cubiculum 14 de la Maison d’Auguste au Palatin (fig. 3). Cette ombre portée est également retranscrite, en peinture, par des modifications infligées à la couleur, non plus de l’objet même, mais du plan sur lequel elle est projetée. Lorsque le plan de projection est agrémenté d’un relief, l’ombre portée doit suivre ce relief ; ce qui a pour effet de lui donner plus de corps, de la rendre plus visible. Lorsque le plan qui reçoit l’ombre portée est multicolore, le peintre doit, en principe, modifier le chromatisme de l’ensemble de ces zones : c’est bien ce qui apparaît dans l’exemple de la Maison d’Auguste où les trois zones concernées par l’ombre portée prennent toutes une teinte plus sombre. Cependant,
3.
On appelle « valeur » d’une couleur son intensité lumineuse, son niveau de clarté. Elle correspond à un niveau de gris que l’on obtiendrait en réalisant une photocopie en noir et blanc d’une image. Plus elle est proche du noir plus la valeur de la couleur est basse.
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Fig. 3 — Maison d’Auguste, Rome, cubiculum 14 : ombre propre, ombre portée (cl. M. Mulliez).
Fig. 4 — Maison des Noces d’Argent, Pompéi, cubiculum x : répercussion de l’ombre seulement sur les zones les plus visibles (cl. M. Mulliez).
Fig. 5 — Villa dite de Poppée, Oplontis, triclinium 14 : ombre portée tronquée, dégradé sur le plan horizontal (cl. M. Mulliez).
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par un souci d’efficacité, dans certains décors, les artisans s’en tiennent à ne modifier que les couleurs les plus visibles : on peut donc parler d’une « économie de moyens » 4 qui privilégie l’efficacité visuelle aux dépens du réalisme. Ainsi les artisans décorateurs qui ont orné le cubiculum x de la Maison des Noces d’Argent à Pompéi se sont-ils contentés de répercuter l’ombre portée des colonnes de premier plan sur la zone la plus claire et la plus en creux, à savoir l’entablement à modillons, où l’ombre est la plus visible (fig. 4). Selon ce même principe d’efficacité, il arrive que l’ombre portée soit seulement initiée, suggérée, sans que le geste du peintre ne soit achevé : c’est notamment le cas du fameux oiseau représenté dans le triclinium 14 de la Villa dite de Poppée, qui ne projette, sur le plan où il s’est posé, que l’ombre de ses pattes, figurée comme deux queues de comètes, alors que le reste du corps de l’oiseau est privé de toute ombre portée : il revient alors au spectateur de reconstruire mentalement l’ombre dans sa globalité (fig. 5). L’ombre portée, qu’elle soit représentée pleinement ou tronquée, demeure un outil d’une efficacité certaine pour la mise en image de l’espace. Parmi les sujets qui, comme les colonnes de premier plan, offrent la possibilité de figurer des ombres portées, certains semblent pouvoir être considérés comme des astuces d’atelier. Récurrentes, ces astuces sont inventées, puis copiées, certainement par un effet de mode, mais peut-être aussi parce qu’elles fonctionnent particulièrement bien dans le processus de « création d’espace ». En voici deux. La représentation des modillons métalliques, dont on n’a pourtant pas d’attestation de leur emploi dans la réalité 5, permet un jeu d’ombres portées, sur le bandeau situé en arrière-plan qui, tout en étant très décoratif, est particulièrement efficace pour créer une impression de relief. Le cubiculum x de la Maison des Noces d’Argent illustre bien cette pratique (fig. 4). Un autre exemple d’élément décoratif régulièrement utilisé dans les décors semble issu du même désir d’efficacité visuelle : les tenons de bardage figurés sur les colonnes peintes de certains décors architecturaux projettent une ombre en forme de flèche, très efficace dans la fabrication de l’espace fictif. On en trouve un exemple bien conservé dans la même Maison des Noces d’Argent, dans le cubiculum z (fig. 6). Dans la réalité, les cas où ces tenons ont effectivement été laissés sur les colonnes pour leur fonction décorative semblent extrêmement rares, voire inexistants. En revanche, dans les trompe-l’œil, il ne s’agit pas d’un phénomène isolé 6 ; ce décalage entre la réalité et sa représentation confirme qu’au-delà d’une mode, il devait y avoir un intérêt dans le processus créatif, au service de l’espace représenté.
4.
5.
6.
Pour reprendre, selon un goût assumé pour l’anachronisme, une expression chère aux artistes minimalistes dont le principe est hérité du fameux « less is more » de l’architecte allemand Ludwig Mies Van der Rohe (1886-1969). Si bien que l’exemple donné par R. Ginouvès, R. Martin, Dictionnaire méthodique de l’architecture grecque et romaine 2 (1992), pl. 65, fig. 7, est tiré d’une peinture : « Représentation peinte d’un entablement à modillons métalliques (Oplonte, Villa) ». On en trouve de très nombreux exemples dans les peintures de deuxième style, parmi lesquels on peut citer les décors de la Maison d’Auguste sur le Palatin et ceux de la Villa de P. Fannius Synistor à Boscoreale, ou encore dans le cubiculum q de la Maison du Laraire d’Achille à Pompéi, malheureusement
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Fig. 6 — Maison des Noces d’Argent, Pompéi, cubiculum z : détails des tenons de bardage (cl. M. Mulliez).
Fig. 7 — Maison d’Auguste, Rome, salle 5 dite des Masques : plans fuyants horizontaux et verticaux (cl. M. Mulliez).
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Les deux procédés picturaux évoqués précédemment et utilisés par les artisans décorateurs pour rendre le volume sont déclinés selon leur fonction au sein des trompe-l’œil : le contraste sert à représenter les objets aux arêtes saillantes, le dégradé est réservé aux objets dont la surface est courbe ainsi qu’aux surfaces planes fuyantes. Modification progressive d’une couleur, le dégradé est un procédé utilisé pour la représentation d’un espace plan, lorsque celui-ci est fuyant : dans ce cas, il est réalisé dans sa forme la plus simple, à savoir un dégradé théoriquement régulier et continu (sans compter les aléas du travail artisanal). La partie la plus sombre représente la plus éloignée et s’éclaircit au fur et à mesure, pour atteindre finalement sa teinte la plus claire au niveau le plus en avant du plan (fig. 5, 7). Étonnamment, ce procédé utilisé de manière permanente pour les surfaces planes horizontales ne l’est jamais pour les surfaces planes verticales : on remarque par exemple qu’au sein d’un même décor, la salle des Masques de la Maison d’Auguste à Rome (fig. 7), seuls les plans fuyants horizontaux bénéficient d’un traitement dégradé. Ce traitement différent des plans horizontaux et verticaux ne trouve pas d’écho dans une observation attentive de la réalité, où le dégradé concerne aussi bien les uns que les autres, dans la mesure où ils ne sont pas vus de manière frontale mais fuyante. Il témoigne d’un systématisme repris par tous les ateliers : le rendu visuel de l’espace fonctionne suffisamment bien grâce à cette méthode, mais cela montre que la réflexion sur l’impact de la lumière sur un espace plan fuyant n’a pas été menée jusqu’au bout. Le dégradé est un procédé qui sert aussi à figurer les éléments arrondis : pour la représentation d’une forme cylindrique, le dégradé diffère légèrement de son traitement pour les surfaces planes. En effet le dégradé n’est pas continu, allant de la nuance la plus claire vers la plus sombre ; la couleur la plus claire ne se trouve pas à une extrémité, mais légèrement décalée, provoquant un double dégradé. La zone la plus claire, parfois surlignée d’une ligne blanche, permet de « faire venir en avant » une partie de la colonne et de donner l’impression d’arrondi : la réalisation des colonnes du triclinium 14 de la Villa dite de Poppée correspond parfaitement à ce schéma (fig. 16). En revanche, les colonnes d’onyx représentées dans l’atrium de la même villa, qui témoignent d’une belle imitation d’albâtre égyptien, peuvent servir de contre-exemple. Ne présentant qu’un dégradé timide, elles « ne tournent pas », comme on dirait dans le jargon d’un cours de peinture : l’effet d’arrondi, pourtant nécessaire à l’imitation d’une colonne, y est pour ainsi dire absent 7 (fig. 8). S’il s’agit de représenter des sphères ou des oves, le procédé est plus ou moins le même, mais le dégradé, au lieu d’être droit, épouse la forme concave, ce qui donne à chaque étape colorée une forme approximative de croissant de lune (fig. 9). Puis une touche plus claire (souvent blanche) appliquée dans la zone la plus lumineuse parachève l’illusion.
7.
mal conservé. Sur ce sujet des tenons, voir M. Mulliez, Le luxe de l’imitation. Les trompe-l’œil de la fin de la République romaine, mémoire des artisans de la couleur (2015), p. 54-55. Les autres colonnes du même décor, en revanche, présentent un dégradé qui rend leur forme cylindrique parfaitement lisible, en particulier les colonnes cannelées. Sur les colonnes d’onyx, on remarque des tracés blancs qui suivent les courbures des veines, tentant de rendre plus lumineuse la partie la plus saillante de la colonne pour la faire venir en avant, mais la tentative, trop timide, ne produit pas l’effet escompté.
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Fig. 8 — Villa dite de Poppée, Oplontis, atrium 5 : colonnes « plates » (cl. M. Mulliez).
Fig. 9 — Détails de frises d’oves issues de divers décors tardo-républicains, provenances multiples (cl. M. Mulliez).
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Fig. 10 — Maison des Noces d’Argent, Pompéi, cubiculum x : blocs à haut-relief biseauté, contrastes de valeur entre les différents plans de chaque bloc (cl. M. Mulliez).
L’utilisation de l’autre procédé pictural essentiel, le contraste de valeur qui fait intervenir la notion de clair-obscur, est extrêmement courante : ce procédé sert à figurer tout élément anguleux. Chaque changement de plan d’un même élément, étant éclairé d’une manière différente, provoque un changement de couleur. On observe cette variation d’intensité colorée pour les nombreux éléments parallélépipédiques qui truffent les décors architecturaux : les constructions empilées dans le cubiculum m de la Villa de P. Fannius Synistor à Boscoreale, les podiums et autres entablements à décrochements, les socles comme celui représenté en onyx dans la salle 5, dite des Mystères, de la villa éponyme à Pompéi ou encore la représentation de panneaux à profil haut comme ceux du cubiculum x de la Maison des Noces d’Argent à Pompéi (fig. 10). La figuration des profils saillants des panneaux de toutes tailles (orthostates, carreaux, panneresses…) qui forment les murs fictifs des décors peints est également le résultat d’un contraste : deux lignes claires – indiquant le côté d’où provient la lumière – s’opposent à deux lignes sombres. Ce travail d’ombre et de lumière qui restitue le volume des éléments constitutifs des décors architecturaux définit la provenance de la lumière fictive choisie par les artisans peintres. Cette provenance peut être en adéquation avec la source lumineuse réelle qui éclaire la pièce décorée ou au contraire résulter d’un systématisme gestuel, sans avoir fait l’objet d’une attention particulière. Dans le cas d’un geste systématique, les côtés éclairés des profils, figurés par deux lignes claires, sont par exemple situés en haut et à droite quelle que soit la paroi de la pièce ; parfois, le côté éclairé des colonnes n’est pas le même que celui des panneaux. Lorsqu’en revanche, les artisans ont tenté de respecter la provenance réelle de la lumière, en général la porte d’entrée de la pièce, la représentation de la lumière sur les murs latéraux et sur le mur percé de la porte est aisée : elle est figurée à droite pour les parties situées à droite de la porte et à gauche pour les parties situées à gauche de la porte. La difficulté advient pour le mur qui fait face à la porte : représenter la lumière qui arrive de manière frontale n’est pas une mince affaire, si bien que les artisans ont trouvé une solution arbitraire qui consiste à diviser le mur en deux
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et à représenter la provenance de la lumière à droite pour la partie droite et à gauche pour la partie gauche. Ce système crée un changement de sens brusque au milieu de la paroi, comme cela est particulièrement visible au niveau des ombres portées (fig. 4) : les ombres des modillons et celles des colonnes de premier plan, dans le cubiculum x de la Maison des Noces d’Argent, passent de droite à gauche au beau milieu de la paroi. Cette étonnante pratique ressemble, pour nos yeux habitués à des représentations tridimensionnelles post-Renaissance que l’infographie a largement permis de perfectionner, à une maladresse ; elle est pourtant extrêmement courante dans les décors tardo-républicains. La mise en œuvre de ces procédés, plus ou moins naturalistes, destinés à figurer l’espace est un indicateur intéressant – qui nécessite certes d’être croisé avec d’autres données – permettant de distinguer des ateliers spécifiques ou des méthodes communes à différents ateliers qui ont pu travailler conjointement.
COULEUR
ET MATIÈRE IMITÉE
Si la représentation de la matière comme volume passe par un travail lié à la couleur, de même, imiter un matériau, avec ses caractéristiques visuelles propres, nécessite un travail pictural lié à la fois au choix des couleurs et à leur distribution. Parmi les différentes matières représentées dans les peintures tardo-républicaines, les marbres polychromes détiennent la palme ; mais bois, écaille de tortue, tissu, verre, pierres précieuses et métaux rivalisent aussi sur ces parois multicolores. Ces matériaux sont identifiables soit par leurs caractéristiques visuelles individuelles soit parce qu’ils renvoient à des objets connus que l’inconscient collectif associe d’emblée à telle ou telle matière. Ceci implique divers degrés de précision dans l’identification des matériaux : on reconnaît soit un matériau générique (par exemple du bois ou du tissu), alors qu’on peut définir précisément un marbre (par exemple le marbre de Phrygie). Le bois et l’écaille de tortue Assez peu représenté dans les peintures en trompe-l’œil, le bois y est parfois présent de manière indirecte, voire même de manière « invisible », toutes les fois que les décors reproduisent des éléments qui, dans la réalité, étaient conçus en bois puis recouverts ensuite de peinture. C’est le cas par exemple des représentations de plafonds à caissons, mais par-dessus tout, des imitations de pinakes, ces tableaux peints sur bois que l’on retrouve dans de nombreuses peintures de deuxième style (fig. 11). On ne peut pas à proprement parler d’imitation de bois, même si, de manière sous-jacente, ce matériau est présent dans la mise en scène. Lorsqu’en revanche il est « visible », il n’est généralement identifiable que par sa situation dans la composition, qui renvoie à un objet naturellement associé au bois : une porte, représentée par une masse uniforme marron, comme on en trouve un exemple dans l’œcus 23 de la Villa de Poppée à Oplontis, ou encore les volets des pinakes du même décor, renvoient au matériau générique « bois » (fig. 12). Il existe cependant un bois qui semble avoir fait l’objet d’une imitation spécifique. Le bois de thuya (ou citre),
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Fig. 11 — Villa des Mystères, Pompéi, cubiculum 4 : pinax à volets et plafond à caissons, imitation de bois peint (cl. M. Mulliez).
Fig. 12 — Villa dite de Poppée, Oplontis, œcus 23 : portes et volets de pinax, imitation de bois (cl. M. Mulliez).
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Fig. 13 — Villa de P. Fannius Synistor, Boscoreale, triclinium G : imitation probable de bois de thuya, comparaison avec un échantillon de thuya réel (cl. M.Mulliez).
seule essence évoquée par Pline l’Ancien, dans son Histoire naturelle 8, pour ses qualités visuelles, aurait été utilisé dès l’époque d’Alexandre le Grand : la racine, qui était la partie la plus madrée, était destinée aux objets les plus luxueux. Il mentionne également son utilisation dans le monde romain, notamment pour la réalisation de tables particulièrement estimées, mais aussi pour d’autres pièces dans l’ébénisterie de luxe. Originaire d’Afrique du Nord, du Sud de l’Espagne ou encore de l’île de Malte, il pouvait être utilisé soit massif soit en placage. On sait, grâce à Cicéron et à son plaidoyer contre Verrès, qu’il était déjà très en vogue à la fin de la République 9. Pline en décrit les veines qui donnent 8. 9.
Pline l’Ancien, Histoire naturelle XIII 91-102. Cicéron, Discours. Seconde action contre Verres IV 17.
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à ce matériau un aspect « tigré » ou une allure « panthérine » : il évoque « les madrures en petits chignons, qui ont quelque chose du pelage des panthères, la couleur de vin miellé », description qui pourrait bien correspondre aux incrustations imitées au sein de portes monumentales et de pilastres de quelques-uns de nos décors en perspective (fig. 13). Ces éléments peuvent aussi – et ce avec autant de probité – être assimilés à de l’écaille de tortue : les deux matériaux sont d’un aspect très proche si bien que l’écaille était parfois utilisée pour remplacer le thuya 10. D’autres exemples de représentation de bois, dans des peintures de deuxième style, cependant un peu plus tardives et dans une zone géographique plus étendue, ont été mentionnés par A. Barbet : à Glanum en Gaule ainsi qu’à Bilbilis, en Hispanie 11. Dans ces deux cas, il ne s’agit cependant pas du même bois puisque les veines brunes sur un fond ocre y sont linéaires et parallèles et ne ressemblent pas aux exemples trouvés en contexte campanien. Le textile Souvent identifiable par sa fluidité, caractéristique physique de ce matériau, qui provoque des plis en forme de V inversés ou de vagues, le textile représenté en peinture ne peut jamais être identifié précisément (est-ce du lin, de la laine ou de la soie ? Il est impossible de trancher…) 12. Sa disposition dans la composition et surtout son mode d’accrochage sont des indices importants pour l’identification d’un textile. On trouve deux types de tentures dans les décors de deuxième style. Les draperies fixées au soubassement présentent souvent les plis caractéristiques du tissu. Réalisées avec plus ou moins de finesse, on les trouve surtout dans des décors précoces tels que ceux de la Maison du Faune à Pompéi, du temple tardo-républicain de Brescia (fig. 14), ou encore de la Maison de Sutoria Primigenia à Pompéi (I, 13, 2), dans des compositions encore fermées. Généralement de couleur claire, elles peuvent être ornées d’un ou plusieurs liserés 13 et parfois d’un tapis d’éléments décoratifs 14. En fonction de la qualité d’exécution, ces motifs suivent ou non les plis du tissu : dans l’exemple de la salle 6 de la Maison de Sutoria Primigenia, les tracés figurant les liserés décoratifs n’épousent pas les vagues du tissu, alors que dans le décor plus prestigieux du temple de Brescia 15, les décorateurs se sont appliqués à faire suivre aux motifs colorés les mouvements du textile pourtant plus complexes. Le mode d’accrochage 10. 11.
12.
13. 14. 15.
Voir M. Mulliez (n. 6), p. 132-136. A. Barbet, « L’évidence d’un atelier de peintres itinérants ? », dans B. Perrier (éd.), Villas, maisons, sanctuaires et tombeaux tardo-républicains : découvertes et relectures, Actes du colloque international de SaintRomain-en-Gal (8-10 février 2007) (2007), p. 469-470. Parmi les textiles, les vêtements des personnages que l’on trouve notamment dans les mégalographies ne sont pas pris en compte dans cette étude centrée sur les matériaux constitutifs des décors architecturaux. On peut aussi mentionner le cas particulier du voile qui, dans l’œcus 23 de la Villa dite de Poppée à Oplontis, couvre le panier d’offrandes : cas isolé dans les décors de cette période, il offre la particularité d’être un voile transparent. Liserés qui peuvent prendre la forme de vagues corinthiennes, de dents de loup ou d’un simple bandeau. Généralement des rosettes. F. Rossi, Un luogo per gli dei. L’area del Capitolium a Brescia (2014).
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Fig. 14 — Brescia, temple tardo-républicain : tenture en soubassement (cl. M. Mulliez).
de ses tentures situées en partie basse n’est pas toujours visible. À Brescia, on distingue très nettement les anneaux et la ficelle qui maintiennent le tissu ; ailleurs, on peut parfois apercevoir les détails d’un ruban noué ou de clous tandis que dans le cas de la Maison de Sutoria Primigenia, on ne voit qu’un amas de plis au sommet de chaque vague. Le deuxième type d’étoffe que l’on peut trouver dans les décors architecturaux appartient généralement à des compositions un peu plus tardives où la perspective s’ouvre déjà sur une multiplication de plans successifs. Attachées en zone haute du décor, ces tentures, abaissées le plus souvent en forme d’arc de cercle, permettent au regard une échappée vers des jardins, un péristyle ou le bleu du ciel. Ces tissus sont toujours d’une couleur très sombre : généralement du noir ou du violet. Les artisans y omettent souvent les détails des plis caractéristiques du drapé 16. Le mode d’accrochage au contraire y est souvent bien visible : une corde à laquelle sont attachés des anneaux, ou bien une deuxième cordelette disposée en zigzag (fig. 15), qui maintiennent le corps de la tenture. Le métal Reconnaissable notamment par les touches de couleur claire – généralement du blanc pur – qui reproduisent la brillance de la matière, le métal dans les trompe-l’œil architecturaux se décline selon une gamme colorée qui, du gris au jaune en passant par le rouge 16.
Exception faite de la salle 15 de la Villa dite de Poppée, où de grands tracés courbes partant des angles d’attache figurent les plis de la tenture violette.
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Fig. 15 — Maison du Labyrinthe, Pompéi, cubiculum 46 : tenture en zone haute (cl. M. Mulliez).
cuivré, renvoie à différents matériaux (or, argent, cuivre, bronze). Il n’est cependant pas aisé de savoir de quel métal il s’agit précisément. Seules la couleur de fond et, une fois encore, la connaissance en amont des objets représentés 17 permettent d’incliner vers telle ou telle identification. Un vase gris, à reflet blanc, renvoie certainement à l’argent ; en revanche, s’il est jaune, on ne peut savoir s’il s’agit d’or ou de bronze doré. Les objets métalliques sont soit des éléments architecturaux, généralement décoratifs, soit des objets indépendants, posés ou accrochés à l’architecture. Parmi ceux qui appartiennent à l’architecture, on peut citer les nombreux clous, les modillons métalliques, les décors de toits et autres éléments qui renvoient peut-être à des systèmes anti-oiseaux 18, ainsi que les heurtoirs fixés aux portes, éléments représentés indifféremment dans un métal blanc ou jaune. Les chapiteaux aux reflets mordorés et les rinceaux métalliques dorés qui entourent certaines colonnes de leurs riches ramures 19 figurent certainement du bronze doré (fig. 16). On trouve par ailleurs de nombreux boucliers, suspendus à l’architecture et des vases de formes variées, posés çà et là sur des rebords ou en guise d’acrotère, indifféremment dorés ou argentés.
17. 18. 19.
En effet, mis à part les modillons métalliques, qui comme cela a été évoqué supra, ne sont pas attestés dans la réalité, les autres exemples de métaux renvoient à des objets connus. G. Sauron, Quis Deum ? (1994), p. 405. Au sujet des colonnes entourées de rinceaux métalliques ornés de pierres précieuses, voir G. Sauron (n. 18), p. 382, n. 280. On en trouve des modèles peints, pour ne prendre que ces exemples, dans le triclinium 14 de Villa dite de Poppée ou dans le fameux cubiculum m de celle de P. Fannius Synistor qui sont deux exemples d’une réalisation très comparable. Dans la Maison du Labyrinthe à Pompéi ainsi que dans celle du Ménandre, on trouve aussi ces rinceaux autour des colonnes, mais ils ne sont pas ornés de pierres précieuses ; tandis que l’exemplaire de l’exèdre 18 de la Maison VI, 17, 41 (dite de la Bibliothèque) à Pompéi, imite des feuillages verts et non leurs pastiches métalliques.
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Fig. 16 — Villa dite de Poppée, Oplontis, triclinium 14 : métaux et pierres précieuses (cl. M. Mulliez).
Les pierres précieuses ou cabochons de verre coloré Associés au métal dans le cas des rinceaux entourant les colonnes, les pierres précieuses multicolores ou cabochons de verre que l’on peut observer dans les décors architecturaux sont serties dans des tiges métalliques ou enserrés dans des pétales dorés dont ils représentent le cœur coloré (fig. 16). Ce type de décor particulièrement luxueux a été retrouvé dans des exemples réels, mais plus tardifs d’environ un siècle, aux Horti Lamiani à Rome 20. On trouve également des pierres précieuses incrustées dans des chapiteaux ioniques, au niveau de l’œil des volutes, ainsi que dans des éléments de frontons ou des acrotères. Le procédé de représentation consiste en l’application de la couleur de base de la pierre (principalement rouge et violette) dans une teinte soutenue, sur laquelle est appliquée une zone d’ombre, puis des touches de blancs purs pour figurer l’éclat : à la différence des éléments métalliques, ces touches lumineuses sont au moins au nombre de deux pour imiter la multiplicité des facettes et la transparence.
20.
La collection est visible au musée du Capitole à Rome : les éléments sont particulièrement proches des représentations peintes d’Oplontis et de Boscoreale.
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Le verre Très rarement représenté, le verre n’est présent dans les peintures de deuxième style qu’à travers des objets indépendants associés au décor architectural, mais jamais pour des éléments architecturaux à proprement parler 21. Il s’agit de coupes de tailles et de formes diverses, contenant généralement des fruits, dont la coloration peut aller du blanc au vert clair 22 (fig. 17). Techniquement, Fig. 17 — Maison d’Auguste, Rome, salle 5 dite des la représentation du verre, c’est-à-dire Masques : coupe de verre (cl. M. Mulliez). du matériau transparent par excellence, implique de laisser apparaître ce qui se trouve derrière : le peintre, pour cela, bénéficie de plusieurs techniques. Il peut soit utiliser une peinture diluée à appliquer sur une peinture sous-jacente déjà sèche 23, soit procéder par hachures qui permettent, à une certaine distance, de créer l’illusion de transparence. Dans les exemples bien connus d’Oplontis et de Boscoreale, on distingue très nettement les hachures, parallèles ou croisées. Les exemples de « vélature », l’application d’une peinture claire diluée au-dessus d’une couche d’une autre couleur 24, sont plus rares, mais dans les peintures romaines de la fin de la République, les deux techniques sont parfois associées. Le marbre et autres pierres assimilées Matériau de prédilection des peintres décorateurs ou plutôt de leurs commanditaires, le marbre 25, généralement polychrome, envahit les parois tardo-républicaines. Les veines des marbres et les formes extravagantes et abstraites qu’elles définissent à la surface des 21. 22.
23.
24. 25.
F. Naumann-Steckner, « Depictions of Glass in Roman Wall Paintings », dans M. Newby, K. Painter (éds), Roman Glass: Two Centuries of Art and Invention (1991), p. 86-98. L’exemple du cubiculum m de la Villa de P. Fannius Synistor et les six exemplaires de l’œcus 23 de la Villa dite de Poppée à Oplontis sont des coupes remplies de fruits sans doute issues du même atelier (voir M. Mulliez [n. 6], p. 76, fig. 48 et p. 165, fig. 100) ; dans la salle des Masques à la Maison d’Auguste sur le Palatin, se trouve un bol évasé monté sur trois petits pieds, de couleur verdâtre, contenant deux flacons et des tiges végétales. La question, extrêmement complexe, des techniques de peinture ne peut être abordée dans le cadre de ce dossier qui s’en tient à l’aspect gestuel de la technique des peintres. Il semble cependant évident que les peintres ont eu recours à des techniques mixtes dans la mesure où tous les ajouts de peintures nécessitent que la peinture sous-jacente soit sèche pour que les différentes couches ne se mêlent pas les unes aux autres ; ce qui n’est pas compatible avec une technique exclusivement a fresco. On peut parler de glacis, même si ce terme est aujourd’hui surtout employé dans le domaine de la peinture à l’huile. Dans l’Antiquité, les granites, les albâtres ou encore les porphyres, roches « susceptibles d’un beau poli » pour reprendre l’expression employée par R. Ginouvès R. Martin, Dictionnaire méthodique de l’architecture grecque et romaine 1 (1985), p. 37, étaient considérés comme des marbres. C’est pourquoi ces différentes pierres sont traitées comme un ensemble.
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Fig. 18 — Villa des Mystères, Pompéi, œcus 6 : imitation des marbres polychromes, utilisation classique du pinceau (cl. M. Mulliez). Fig. 19 — Maison du Bracelet d’or, Pompéi : imitation de marbre, inspirée du granite, utilisation du pinceau comme outil de projection (cl. M. Mulliez). Fig. 20 — Villa des Mystères, Pompéi, couloir F3 : imitation de marbre, utilisation du pinceau comme tampon (cl. M. Mulliez).
19
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GESTUELLE ET COULEUR AU SERVICE DU TROMPE-L’ŒIL DANS LES PEINTURES PARIÉTALES
morceaux taillés et polis offrent aux artisans qui les imitent un champ de création particulièrement alléchant qu’ils ne se sont pas privés d’investir. Les marbres les plus représentés sont le marbre jaune provenant des carrières numidiques de Chemtou (en actuelle Libye), l’onyx (ou albâtre égyptien) 26, l’albâtre oriental, le marbre de Phrygie (ou pavonazzetto) ainsi que les brèches variées. D’autres marbres identifiables sont plus ponctuellement imités, tandis que de nombreuses représentations semblent au contraire le fruit de l’imagination fertile des peintres. D’un point de vue technique, les tracés marmoréens ont souvent été travaillés exclusivement par l’application du pinceau, utilisé de manière classique (fig. 18). Connaissant le travail des décorateurs contemporains, qui multiplient les outils pour obtenir tous les rendus possibles de faux marbres ou de faux bois, on pourrait imaginer que les imitateurs de matériaux de l’Antiquité ont eux aussi mis en œuvre des moyens picturaux ingénieux pour obtenir les effets variés recherchés. La quête de traces d’utilisation d’outils diversifiés (comme des matériaux spongieux, par exemple) a cependant été vaine. En revanche, on a pu remarquer que le pinceau avait été employé de façons « détournées », par exemple comme outil de projection 27 : un fond uniforme est peint sur la surface définie puis aspergé de différentes couleurs. Ce procédé provient certainement d’une volonté d’imiter les mouchetis du granite (fig. 19). Étonnamment, lorsque l’on a pu constater ce type de technique ingénieuse, cela n’allait que rarement de pair avec des imitations de qualité 28. Au contraire, il s’agissait souvent d’une méthode permettant une rapidité d’exécution dont les résultats visuels n’étaient pas forcément très convaincants. Ailleurs, le pinceau a été appliqué comme un tampon : on y décèle parfois la taille et la dureté du pinceau utilisé, comme dans le couloir étroit de la Villa des Mystères qui mène de l’aile Ouest du portique à l’atrium (fig. 20). Sur les grands orthostates polychromes, se côtoient d’épaisses traces de pinceaux à poils durs de formes quasi rectangulaires et de fines taches cunéiformes – arrondies et affublées d’une queue effilée – déposées par un pinceau fin à poils souples, appliqué puis étiré sur la surface murale, d’un geste rapide et précis. Ainsi, l’utilisation adéquate de la couleur a permis aux décorateurs du ier s. av. J.-C. d’orner les murs des riches demeures de trompe-l’œil où la matérialité était rendue aussi bien par un travail sur le volume que sur l’aspect visuel des divers matériaux. Les méthodes picturales qu’ils ont mises en œuvre sont parfois extrêmement répandues ou au contraire le fruit d’expériences isolées. L’étude de ces procédés picturaux et des particularismes que
26.
27. 28.
M. Mulliez, « La représentation de marbres colorés dans la peinture pariétale de la fin de la République romaine. L’exemple de l’onyx », dans I. Bragantini, (éd.), Atti del X congresso internazionale AIPMA, Naples (17-21 septembre 2007) (2010), p. 810-813. La projection est une technique abondamment utilisée dans les peintures de quatrième style imitant des marbres, mais dans les décors de deuxième style, cela n’a encore été que rarement noté. Exception faite des panneaux imités dans le cubiculum 4 de la Villa des Mystères où des traces de projections ont pu être observées en association avec un emploi classique du pinceau. Dans ce cas, les techniques associées témoignent d’un réel travail d’observation et d’une mise en œuvre destinée à un résultat scrupuleusement étudié.
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l’on a pu noter grâce à une observation attentive de détails à la surface de la paroi peinte permet de dégager des habitudes gestuelles qui peuvent participer au repérage d’ateliers ou simplement de modes transmises d’un atelier à l’autre. Un travail de classement des différents procédés et de leur mise en œuvre et un comptage de ces catégories ont permis, depuis cette première approche présentée ici, de dégager des résultats significatifs 29.
29.
Depuis la présentation au colloque en 2009 et la rédaction de cet article, le travail de recherche s’est poursuivi dans le cadre d’une thèse intitulée Matière et couleur dans la peinture pariétale romaine de la fin de la République, préparée en cotutelle entre l’université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense et l’Orientale de Naples, et soutenue le 3 février 2011. Elle vient d’être publiée dans la collection Archéologie de l’artisanat antique au Centre Jean Bérard de Naples (M. Mulliez [n. 6]) : certains résultats diffèrent quelque peu de ceux présentés ici, ils y sont en tout état de cause abondamment approfondis et développés.
Reflections on Colour Coding in Roman Art Paolo Liverani
SUMMARY Increased interest in the topic of colour on stone has provided a new way of looking at Roman art, but at the moment more questions than answers have been raised. This is due to the scanty remains of colour on ancient sculpture, to the neoclassical taste very common amongst researchers and conservators in past generations, and to the small amount of available data obtained by different methods. The difficulties inherent in physically reconstructing ancient polychromy complicate further detailed interpretation of the evidence. It has been observed that, in Roman times, different choices in the use of colour were made that can only in part be explained by naturalistic reasons, chronology or patronage. On the basis of initial results, however, it is possible to explore a part of the basic functions of colour. Some of them appear more intuitive, in accordance with the need for clear information about the subject of the image or of the figurative narration in a specific context. Others are more subtle and appear to be related to the figurative genres and functions of the iconic language: in other words, they provide evidence for long lasting codes that show only slow evolutions. KEYWORDS Colour on stone, Roman art, pigments, ancient sculpture, neoclassical taste, Roman period, naturalistic reasons, patronage, iconic language, codes. RÉSUMÉ Réflexions sur la codification des couleurs dans l’art romain L’intérêt croissant pour l’usage de la couleur sur la pierre a offert une nouvelle vision de l’art romain ; mais pour l’heure on dispose plus de questions que de réponses. Cette situation est due à la rareté des restes de pigments sur les sculptures antiques, à la prédominance, dans les générations antérieures, d’un goût néoclassique et à une quantité encore insuffisante de données au demeurant obtenues par recours à des méthodes différentes. Une situation aussi difficile complique d’autant plus l’interprétation approfondie de tels témoignages. On constate, pour l’époque romaine, des choix différents dans l’usage de la couleur qui peuvent s’expliquer seulement en partie par des motivations naturalistes, par la chronologie ou par le niveau de la commande. Toutefois, en se fondant sur de premiers résultats, on peut explorer au moins quelques-unes des fonctions fondamentales de la couleur. Certaines sont purement intuitives et sont déterminées par l’exigence d’une information patente en relation avec le sujet ou avec la narration représentée dans un contexte spécifique. D’autres sont plus subtiles et semblent liées à des règles générales ainsi qu’aux fonctions du langage iconographique, en d’autres termes à des conventions en cours depuis longtemps et dont l’évolution est extrêmement lente. MOTS-CLEFS Couleur sur la pierre, art romain, pigments, sculpture antique, goût néo-classique, époque romaine, motivations naturalistes, commande, langage iconographique, conventions.
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about the author P. Liverani, Professor, Dipartimento di Storia, Archeologia, Geografia, Arti e Spettacolo, Faculty Member, University of Florence, Italy.
acknowledgements I am indebted to Bernard Frischer for translating this paper into English and to Michael Koorbotijan for discussions and further refinements.
bibliographical abbreviations The abbreviations used in this study to refer to ancient authors and their works are those used in the Neue Pauly. Brecoulaki 2006 = H. Brecoulaki, La peinture funéraire de Macédoine. Emplois et fonctions de la couleur IVe-IIe s. av. J.-C., Mélétémata 48. Goette 1990 = H. R. Goette, Studien zu römischen Togadarstellungen.
REFLECTIONS ON COLOUR CODING IN ROMAN ART
The theme chosen for this paper is rather ambitious. Indeed, it is not possible to make definite claims about colour coding in the Roman imperial period, a field of which study has just commenced. Therefore, I will have to limit myself to some preliminary notes, which may help us to give a wider context to the results of the first systematic observations about the monuments. Let us begin with the rainbow (table 1): the ancient Greek writers are not in agreement about its number of colours. According to Xenophanes, there were three, or four for Aristotle and Aetius. In contrast, the Latin authors seem to be more precise: Seneca was able to catalogue five and Ammianus Marcellinus lists six, a number that survived through the Middle Ages and down to the present day. 1 Only with Newton was the number of seven colours reached, but for reasons that were perhaps more numerological than scientific. To these, we must of course add black and white, which Newton did not count as colours. This table 2 is useful for some initial observations. Let us pass over the old theories of the 19th century, which claimed that the ancients suffered from colour blindness to blue. 3 More recently, even Pastoureau –a scholar whose work on later periods is of extraordinary interest– has tended to re-propose a sort of modern version of the old theory. For Pastoureau, blue was supposedly very clearly visible to the Greeks and Romans, but was of no importance and even had connotations of being a “barbaric” colour. 4 According to the French scholar, blue was only “discovered” in the 12th century, “launched” at first by the kings of France and subsequently popular for its association with the cult of the Virgin Mary. Finally, it was consecrated by the Protestant Reformation. Pastoureau derives this theory from his investigations of colours and of the techniques of the dyers of woven cloth, effectively limited to woad, 5 a vegetal dye that was inexpensive but not 1. 2. 3.
4.
5.
Xenophanes, frg. 32 (Diels-Kranz); Arist., Mete. 371b 32, 374b 30; Aet., III.5.6-9 (ed. Diels 1879); Sen., QNat. 1.3.12; Amm., 20.11.27-28. J. André, Étude sur les termes de couleur dans la langue latine, Études et commentaires VII (1949), p. 13. W. E. Gladstone, Studies on Homer and the Homeric Age III (1858), pp. 458-499; H. Magnus, Die Geschichtliche Entwicklung des Farbensinns (1877) (French edition: Histoire de l’évolution du sens des couleurs [1878], pp. 47-48); O. Weise, Die Farbenbezeichnungen bei der Griechen und Römern, Philologus 46 (1888), pp. 593-605. M. Pastoureau, Bleu. Histoire d’une couleur (2002). Similar ideas in other studies by the same author: Une histoire symbolique du Moyen Âge occidental (2004); Noir. Histoire d’une couleur (2008). This historian, the author of fundamental contributions on the issue, cannot profit from a solid body of literature on the Classical period, where he has at his disposal only a few essays that are limited in scope, and too general in their synthesis (M. Brusatin, Storia dei colori [1983]; J. Gage, Colour and Culture: Practice and Meaning from Antiquity to Abstraction [1993]) or works with evident methodological weaknesses (L. Luzzatto, R. Pompas, Il significato dei colori nelle civiltà antiche [1988]). For the best presentation of the sources in recent times see J. Lynn Sebesta, “Tunica ralla, tunica spissa: The Colors and Textiles of Roman Costume”, in J. Lynn Sebesta, L. Bonfante (eds), The World of Roman Costume (2001), pp. 65-76. A further proof –according to Pastoureau– of the low importance of blue in ancient times is its absence from Christian liturgy, but this is quite a weak argument. The choice of colour for mourning or penitence was from among grey, black, blue and violet. Only the last was preferred (in Latin also called subniger) with the obvious exclusion of the other “synonyms”. J. and Ch. Cotte, “La guéde dans l’Antiquité”, REA 21 (1919), pp. 43-57.
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violet Xenophanes Aristotle Aetius Seneca Ammianus Marcellinus
blue
green
yellow
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caeruleus caeruleus
luteus
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igneus puniceus
Table I — The colours of the rainbow according to the classical authors (from J. André [n. 2], p. 13).
Toga pulla
Toga candida Toga praetexta
Toga picta Trabea
Fig. 1 — Scheme with the various colours of the Roman toga (Illustration: P. Liverani).
REFLECTIONS ON COLOUR CODING IN ROMAN ART
bright, and to indigo, a pigment that was rather better but more expensive because it had to be imported from India. But Pastoureau forgets the great importance of blue in the circus games: here, the principal factions were precisely the Blues and the Greens (factiones Veneta et Prasina). 6 Moreover, Latin knows no fewer than seven terms for “blue”: the basic 7 caerul(e)us and six different tones, 8 which would seem rather excessive for a supposedly insignificant colour. It is true that blue did not have a primary role in Roman clothing because, aside from the sporting context, it was normally associated with the colours of mourning, grey and black. 9 Virgil 10 cites the caeruleae vittae, fillets of a blue that was probably very dark, which decorated the altars of the Manes, while Cato 11 attests that the gown of female mourning was caeruleus, contrasted with reddish purple, which had festive and elegant connotations 12 suitable for bridal gowns. 13 We can perhaps also imagine that the
6. 7. 8.
9.
10. 11.
12.
13.
A. Cameron, Circus Factions. Blues and Green at Rome and Byzantium (1976). In the meaning intended by B. Berlin, P. Kay, Basic Colour Terms. Their Universality and Evolution (1991) (first edition 1969). Livida, glaucus, caesius, cyaneus, venetus and aeri(n)us. See J. André (n. 2), pp. 162-183: caesius was used only for the colour of human eyes (and the eyes of lions); venetus occurs only in sporting contexts; aerinus appears only in Christian writers; ferreus is attested four times but with divergent meanings. For positive connotations of green see J. Trinquier, “Confusis oculis prosunt uirentia (Sénèque, De ira 3.9.2): les vertus magiques et hygiéniques du vert dans l’Antiquité”, in L. Villard (ed.), Couleurs et vision dans l’Antiquité classique (2002), pp. 97-128. Verg., Aen. 3.64, see also CIL XI 1420 (sacrifice to the Dii Manes of bosque et ovis atri infulis caerulis infulati); Val. Fl., 1.188. In Serv., Aen. 3.64: Cato ait, deposita veste purpurea feminas usas caerulea cum lugerent. See also L. Deschamps, “Rites funéraires de la Rome républicaine”, in F. Hinard (ed.), La mort au quotidien dans le monde romain. Actes du colloque organisé par l’Université Paris IV, Paris-Sorbonne, 7-9 octobre 1993 (1995), pp. 171-180, esp. 171-174; J. Engels, Funerum sepulcrorumque magnificentia: Begräbnis- und Grabluxusgesetze in der griechisch-römischen Welt: mit einigen Ausblicken auf Einschränkungen des funeralen und sepulkralen Luxus im Mittelalter und in der Neuzeit, Hermes Einzelschriften 78 (1998), p. 182. In a more generic manner Eus., ep. 22.27 considers the vestis pulla of a penitent as opposite to the sumptuous vestis aurata worn in her previous condition. An interesting portrait of a lady dressed for the most part in blue and with her face framed by a nimbus of the same colour is in the fresco in her tomb (G 2624) from Viminacium, now in the National Museum of Pozarevać (D. Sapsić-Jusić, in A. Donati, G. Gentili (eds), Costantino il grande. La civiltà antica al bivio tra Occidente e Oriente, Exhibition cat., Rimini 14.3-4.7.2005 (2005), p. 305, no. 159a. The entry “rica” in Festus (368 L), known to us only in a fragmentary state or through an imperfect compendium by Paul the Deacon, lets us suspect that some customs similar to the male ones also applied to female garments. Using a simplified definition, we can say that the rica was a sort of fringed female red mitra worn at sacrifices, but which likely existed also in white and in blue (the latter for mourning occasions). See also A. Hug, RE A.1 (1914), s.v. “Rica”, cc. 794-795. For the flammeum, also the official dress of the Flaminica Dialis, see Plin., nat. 21.46; Mart., 11.78.3; 12.42.2; Apul., met. 4.33; Fest., 79.23 L; Symm., or. 4.13; Mart. Cap., 5.538; Drac., Romul. 8.640; Ambr., de virginitate 5 (Patrologia Latina XVI.272): for the red reticulum, worn the night before the wedding, see Hier., ep. 120.2; 147.6 (Patrologia Latina 22 1109); Ambr., de virginitate 1.11 (Patrologia Latina 16.206); J. Lynn Sebesta, “Symbolism in the Costume of the Roman Woman”, in J. Lynn Sebesta, L. Bonfante (n. 4), pp. 46-53; L. La Follette, “The Costume of the Roman Bride”, ibid., pp. 54-64.
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chorus of boys which appears in a wall mosaic 14 that may be of the 1st century, from the area around the Temple of Diana Tifatina at Capua, was dressed in blue tunics because of the various chthonic and nocturnal connections of this goddess. Caeruleus also has underworld or, at any rate, negative connotations when it used to describe the hair of Alecto, 15 the dogs of Scylla, 16 and the boat of Charon. 17 But the principal problem with Pastoureau’s devaluation of blue is his decision to neglect completely the evidence of ancient architecture and the figurative arts, where blue was extensively used. But I will return to this topic in a moment. Not all the colours which dyers could create were bearers of clearly identifiable meanings. Women’s clothes –as happens in general in western societies– displayed a greater variety of colours than men’s, which were more strongly coded, especially in the case of official garments. For reasons of space, I will examine only the latter. The Romans knew a sort of “zero degree” of colour, which is that of the natural fabric or yarn, 18 of which the colour oscillated between the tones of more or less dark grey. While this colour was used for work clothes and was abandoned on holidays in favour of white, 19 it otherwise had connotations of mourning, 20 as in the case of the toga pulla (fig. 1). 21 By contrast, white was the colour of festivals and of solemnity, but in particular the toga, the official Roman garment, was always described as candida, a sort of semantic superlative which emphasises the luminosity of the colour, and never as alba, an adjective which implies a certain opacity. 22 The toga candida was also called pura 23 or virilis, insofar as it was assumed when a male reached adulthood. Finally, the toga candida signalled “candidacy” in the modern, English sense of the term, of running for political office. 24
14.
15. 16. 17. 18. 19.
20. 21. 22. 23.
24.
C. Robotti, “I mosaici del Museo Campano di Capua”, in H. Morlier (ed.), La mosaïque grécoromaine, IX, Actes du IXe colloque international pour l’étude de la mosaïque antique et médiévale, Rome, 5-10.11.2001 (2005), p. 1173-1174. The date proposed for the mosaic (2nd-3rd century AD) is probably too late. Verg., Aen. 7.346; see also 4.482 (serpents in the hair of the Eumenides). Verg., Aen. 3.432. Verg., Aen. 6.410. J. André (n. 2), pp. 298-296, collects the chromatic terminology concerning garments. Ov., fast. 4.619-620: alba decent Cererem: vestes Cerialibus albas / sumite; nunc pulli velleris usus abest; Artem., onirocr., 2.3: ƲȺƧɖƴƳƴɞƵȆƴƧƼȲưƷƩƵƲȟǶưƬƴƼƳƲƭ[…]ƯƩƸƮƲʶƵȟuƥƷɝƲƭƵƺƴ˒ưƷƥƭ. See Suet., Aug. 40.5 who counters the pullatorum turba with Roman citizens as rerum dominos, gentemque togatam. Liv., 45.7; Vell. Pat., 2.80.4; Ov., ars 3.189; Scriptores Historiae Augustae, Commodus 16.6. Cic., Vat. 30-32; CIL XI, 1420; AE 1989, 408; Artem., onirocr. 2.3: ƲȟƷƲɠƵDzƳƲƬưɛƶƮƲưƷƥƵƳƩưƬƲ˅ưƻƩƵ ƷƲƭƲɡƷƲƭƵƺƴ˒ưƷƥƭȟuƥƷɝƲƭƵ (sc. uƩƯɗưƲƭƵ). The same observation is valid for the black in the pair ater/niger. The readings of the sources proposed by S. Stone, “The Toga: From National to Ceremonial Costume”, in J. Lynn Sebesta, L. Bonfante (n. 4), pp. 13-45 (esp. 13-15) and to some extent also by L. Bonfante Warren, “Roman Triumphs and Etruscan Kings. The Changing Face of the Triumph”, JRS 60 (1970), pp. 49-66, at 60, are quite different. Goette 1990, pp. 5-6 with bibliography. In this case the fabric was artificially whitened: Isidorus, Etymologicum 19.24.3: Toga candida eadem cretata, in qua candidati […] addita creta, quo candidior insigniorque esset. See Pers., 5.177: cretata ambitio.
REFLECTIONS ON COLOUR CODING IN ROMAN ART
Black and white are present in all known languages, even in those with a poor chromatic lexicon, but ethno-linguistic research has shown that when a language possesses only three terms for colours the third is always red. 25 The linguistic emergence of red corresponds to the emergence of colour itself: 26 red is not simply another hue next to black and white. Rather, it is distinguished from the pair black/white in the way that chromatism is distinct from luminosity. Latin, too, uses red as a chromatically privileged marker. 27 Thus, beyond the toga pulla and the toga candida we have different types of togas indicated by the presence of red colouring. 28 First and foremost is the toga praetexta, which was white but bordered with a stripe of red. The toga praetexta signalled two opposing conditions: on the one hand that of being a boy, on the other, a magistrate. 29 In this sense, pure white is the medium grade between not yet being an adult and being a person shown to be “more than adult” from the point of view of civic responsibility. The stripe of the border functioned as a diacritical sign and was used in other cases as well. There was probably also a praetexta pulla for magistrates attending funerals. 30
25.
26.
27. 28. 29. 30.
B. Berlin, P. Kay, Basic Color Terms. Their Universality and Evolution (1991) (1st ed. 1969); P. Kay, L. Maffi, “Colour Appearance and the Emergence and Evolution of Basic Colour Lexicons”, American Anthropologist n.s. 101.4 (1999), pp. 743-760. This theory underwent various severe criticisms: see B. Saunders, “Revisiting Basic Colour Terms”, Journal of the Royal Anthropological Institute 6 [n.s.] (2000), pp. 81-99; N. P. Hickerson, review of B. Berlin, P. Kay, Basic Colour Terms, International Journal of American Linguistics 37.4 (1971), pp. 257-270; G. C. Conklin, “Colour Categorisation”, The American Anthropologist 75.4 (1973), pp. 931-942; L. D. Griffin, “Optimality of the Basic Colour Categories for Classification”, Journal of the Royal Society: Interface 3 [6] (2006), pp. 71-85, but the position of red as the third colour has never been challenged. Survey of the discussion in M. Grossmann, Colori e lessico: studi sulla struttura semantica degli aggettivi di colore in catalano, castigliano, italiano, romeno, latino e ungherese, Tübinger Beiträge zur Linguistik 310 (1988), pp. 12-21; A. Duranti, Linguistic Anthropology (1997), pp. 65-67; G. Deutscher, Through the Language Glass. How Words Colour Your World (2010); C. P. Biggam, The Semantics of Colour. A Historical Approach (2012). M. Sahlins, “Colours and Cultures”, Semiotica 16 (1976), pp. 1-22; R. Jakobson, L. R. Waugh, La forma fonica della lingua (1984), pp. 202-209 (English edition, The Sound Shape of Language [1979]); C. Lévi-Strauss, Le Regard éloigné (1983), p. 164; id., Regarder, Écouter, Lire, in Œuvres (Bibliothèque de la Pléiade) (2008), p. 1577 (first edition 1993). One further reason for this is obviously the great diffusion of red natural pigments as e.g. ochre. Goette 1990, pp. 5-6. J. Lynn Sebesta (n. 13), p. 47, explains this by reference to the apotropaic power of the red band. The entry of Festus (272.13) is unfortunately corrupted and fragmentary: ali licebat uti, qum --- ius magistratus hab--- loco publicos lud --- utitur, et scribam hab --- quos facit, ludos --- libus et praetoribus vota --- ---rantiam sacra novorum -----tum est uti, emit votum --- que item Valerius vica--- ---ra ex senatu inprobar---. Perhaps the passage of Varro, fr. 313 (quam istorum quorum vitreae togae ostentant tunicae clavos) has a connection with this type of dress.
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Moreover, there was the toga purpurea, which was later called the toga picta 31 or palmata. 32 It was an emblem of the triumphator, but it was also worn by the consuls on particular occasions. 33 Suetonius 34 gives us some more systematic details about the trabea, which in the imperial period was not easily distinguishable from the toga except for the coloured stripes on its border (that is, its trabes). There were three kinds of trabea: the first was consecrated to the gods and was only purple; the second for the kings was purple but with some white, which probably made it a kind of praetexta with inverted colours; the third was for the augurs, 35 marked by purple and scarlet, 36 and was probably a purple garment with a scarlet border. This third type of trabea was also used by the equites during the annual transvectio equitum held on July 15th. 37 It was also worn by the priests known
31.
32.
33. 34.
35. 36.
37.
Fest., 228 L: picta quae nunc toga dicitur, purpurea ante vocitata est, eaque erat sine pictura. eius rei argumentum est […] pictum in aede Vertumni, et Consi, quarum in altera M. Fulvius Flaccus, in altera T. Papirius Cursor triumphantes ita picti sunt. Toga purpurea: Cic., Phil. 2.85; Liv., 10.7.9; 27.4.3 (See Tac., ann. 4.26.2); Suet., Domit. 4.4: purpureaque amictus toga graecanica; Mart., 10.93.1 (metaphorical usage). Toga picta: Prop., 4.4.53; Liv., 30.15.11; Sall., Hist. fr. 2.70M, l. 12; Lucan., 9.177; Fronto, ep. 1.7.3; Flor., epit. 1, 12, l. 13 (1.5.6); Auson., protrept. 89 (toga picta as a symbol of the consulship); Macr., sat. 1.6.7 (institution of the toga picta, derived from the Etruscans, by Tullus Hostilius); 3.13.9; Scriptores Historiae Augustae, Alexander Severus 40.8 (praetextam et pictam togam numquam nisi consul accepit); Gordiani tres 4.4 (togam pictam primus Romanorum privatus suam propriam habuit); Gallieni duo 8.5 (to climb the Capitolium); Aurelianus 13.3; Symm., ep. I.1 (as a sign of the consulship). See Iuv., 10.36-40: tunica Iovis et pictae Sarrana ferentem / ex umeris aulaea togae. (Toga) palmata: Serv., Aen. 334 (palmata dicitur toga quam merebantur hi qui reportassent de hostibus palmam; See Isidorus, etymologicum 24.5); Liv., 31.11.11 (gift for a king); Mart., 7.2.7; Apul., apol. 1.22; Symm., ep. 6.40.1 (palmata amictus, et consulari insignis ornatu); Auson., Gratiarum actio 3.11.52 (signs of consulship: palmatae vestis meae ornamenta disponis […] Namque iste habitus ut in pace consulis est, sic in victoria triumphantis […] Palmatam […] in qua divus Constantinus intextus est); Auson., idyll. IV.94: Ut trabeam, pictamque togam, mea praemia, consul Induerer; Prud., c. symm. 1.553 (sign of the consulship); Sid. Apoll., ep. 5.13 palmata consularis; 8.1 palmata conferre; Ennod., ep. 5.2. Metaphorical usages: Sid. Apoll., ep. 6.221: palmatam plus picta oratione. Verg., Aen. 7.612. According to a scholium of the Codex Turonensis, this toga was also worn when delimiting the foundation of a city: H. Gabelmann, “Die ritterliche Trabea”, JDAI 92 (1977), p. 330. Serv., Aen. 7.612: IPSE QVIRINALI TRABEA Suetonius in libro de genere vestium dicit tria genera esse trabearum: unum dis sacratum, quod est tantum de purpura; aliud regum, quod est purpureum, habet tamen album aliquid; tertium augurale de purpura et cocco. Probably in the archaic and middle-republican ages; from the 3rd century BC these priests also chose the toga praetexta: T. Schäfer, JDAI 95 (1980), p. 351, n. 36. See also Isidorus, origines 19.24.8; Serv., Aen. 7.188. On this issue H. Gabelmann (n. 33), pp. 322-374, remains essential, but see also id., “Ein Eques Romanus auf einem afrikanischen Grabmosaik”, JDAI 94 (1979), pp. 594-599; id., “Römische ritterliche Offiziere im Triumphzug”, JDAI 96 (1981), pp. 436-465; Goette 1990, pp. 5-6; H. Wrede, “Zur Trabea”, JDAI 103 (1988), pp. 381-400. See Quint., inst. 11.1.31: Cicero, cum dicit, orationem suam coepisse canescere, sicut vestibus quoque non purpura coccoque fulgentibus illa aetas satis apta sit ; Fronto, ep. 2.2.3: (to the emperor Marcus Aurelius) vobis praeterea, quibus purpura et cocco uti necessarium est. Dion. Hal., 6.13.4.
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as the Salii. 38 The priestly connotations of the toga of this colour were attributed by Virgil to Aeneas himself, who sacrifices with his head covered with purple. 39 Very little figural documentation of the colours of these togas has so far been found. Aside from the togas sculpted in porphyry, 40 we have representations of men wearing the toga praetexta in frescoes, mosaics, and on gold glass. 41 To these examples I would like to add a headless togate statue in the Museum of Tarragona (figs. 2-6). 42 Its dimensions are bigger than normal, and they are also larger than those of all the other statues found in the town’s theatre. For this reason, its identification as a posthumous portrait of Augustus has been proposed. But what is most striking about this statue are the abundant traces over the entire surface of the toga of a vivid red, in some places rather thick, extending over a preparatory layer of white. 43 Apparently, we have here a toga picta: the hypothesis that this is a portrait of Augustus is certainly very attractive in this context and suggests that in future other togati should be examined with greater attention, in order to find other possible traces of red that may permit us to verify and perfect the typology which the sources present. In sum, we have a “zero degree” (the toga pulla) and a normal or festive degree (the toga candida) articulated with the praetexta on three increasing levels of civic responsibility. Finally, we have a superlative degree, the toga picta with sacred connotations, which probably evolved over time. This type, too, is scaled on three levels, from a white border to a scarlet border. Just as the toga is characteristic of the civic realm, so, too, is the paludamentum (fig. 7) of the military. In this case we also find the same chromatic tripartition, which is explained most clearly by Valerius Maximus, 44 when he narrates an unfavourable omen for Crassus while he prepared for the battle of Carrhae. Instead of the usual white (album) or purple mantle, he was brought one of a dark colour (pullum) –it was thus a sign of mourning, 38.
39.
40. 41.
42.
43.
44.
Dion. Hal., 2.70.2, with the discussion of the passage in H. Gabelmann (n. 33), pp. 327-328. Probably in the archaic and middle-republican ages this type of trabea was also worn by the Flamines Diales and Martiales: W. Helbig, “Toga und Trabea”, Hermes 39 (1904), pp. 161-181, at 161-163, 174; A. Alföldi, in Gestalt und Geschichte, Festschrift K. Schefold (1967), pp. 40-42. Verg., Aen. 3.403-409. See also Artem., onirocr. 2.3: ƳƲƭƮɝƯƫưƨɘȂƶƬʨƷƥȇƺƩƭưȐdzƯƲƸƴƧɝƨƥȟƩƴƩ˅ƶƭưuɘư ƮƥɜƬƸuƩƯƭƮƲʶƵƮƥɜƶƮƫưƭƮƲʶƵƮƥɜƷƲʶƵƳƩƴɜƷɞưƉƭɟưƸƶƲưƷƩƱưɝƷƥƭƵuɟưƲƭƵƶƸuƹəƴƩƭ. On the colours in this author see D. Kasprzyk, “Les couleurs du rêve : l’Onirocriticon d’Artémidore”, in L. Villard (n. 8), pp. 129-152. R. Delbrück, Antike Porphyrwerke (1932), pp. 49, 54-58, 96-100. Goette 1990, pp. 172-175, list K III-V; add also a togate statue from Formia: B. Conticello, Antiquarium di Formia (1978), n. 7; H. R. Goette, “Mulleus-Embas-Calceus”, JDAI 103 (1988), pp. 401-464, at 456; Goette 1990, p. 126, no. 269. MNAT 7584: E. M. Koppel, Die römischen Skulpturen von Tarraco, Madrider Forschungen 15 (1985), pp. 15-16, 28-29, no. 4, pll. 4.1-3. His height (2.46 m) is more than natural, although the statue is headless. Thanks to the kindness and helpfulness of the director of the Museum, Dr Francesc Tarrats, in January 2009 I obtained permission to take samples which were under analysis by Prof. Ulderico Santamaria, head of the Laboratory of Scientific Researches of the Vatican Museums. Val. Max., 1.6. 11: pullum ei traditum est paludamentum, cum in proelium exeuntibus album aut purpureum.
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Fig. 3 — Detail of fig. 2 (Photo: P. Liverani).
Fig. 4 — Detail of fig. 2 (Photo: P. Liverani).
Fig. 5 — Togate statue, Tarragona MNAT 7584, rear side (Photo: P. Liverani).
Fig. 6 — Detail of fig. 5 (Photo: P. Liverani).
Fig. 2 — Togate statue, Tarragona MNAT 7584 (Photo: P. Liverani).
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Fig. 7 — Paludamentum pullum, album, purpureum (Illustration: P. Liverani).
and unlucky. It is legitimate to suspect that the commune paludamentum, 45 in which Gallus had been dressed before he was killed by order of Constantius the Second, was also of a dark colour. Better attested in military contexts is the paludamentum coccineum 46 or purpureum, 47 a sign of imperium. The clear opposition recorded by Paulus Orosius between the paludamentum, a sign of command, and the generic vestis pulla, characteristic of the petitioner, 48 is also interesting: these were two forms of garment which delimited the semantic extremes of the political code in the field of clothing. Here we might recall the rather exceptional case, presented in implicitly negative terms, of a paludamentum aureum worn by Caligula 49 outside the ritual of the triumph. A similar accusation is made against Agrippina, who supposedly wore a paludamentum woven only from gilt threads when she and Claudius presided over a mock naval battle in 45. 46. 47.
48.
49.
Amm., 14.11.20. Iust., 20.3.8; Plin., nat. 22.3: coccum imperatoriis dicatum paludamentis; Lyd., mag. 2.4: ƳƥƯƲƸƨƥuəưƷƲƭƵž ƥȟƨəƩȞƶƭƨɝƳƯƥƮƩƵDzƳɞƮɟƮƮƲƸ. Val. Max., 1.8.8 mentions the paludamentum of the divus Caesar, who appeared to Cassius during the battle at Philippi; Amm., 23.3.2 (Julian’s paludamentum); Isidorus, origines 19.24.9: paludamentum erat insigne pallium imperatorium cocco purpuraque et auro distinctum. See Victric., 26: principum […] paludamenti flammas ac Tyrium myricem. Verg., Aen. 4.261-262 ascribes the garment to Aeneas when he appears to Dido dressed in a purple mantle which tyrio ardebat murice. Livy, on the contrary, considers it an Etruscan invention obtained via Tarquinius Priscus (Flor., epit. 1. p. 12, l. 13 [olim 1.5.6]). Oros., Hist. 6.18.32: Lepidus […] deposito paludamento assumptaque veste pulla supplex Caesaris factus; See Vell. Pat. 2.80.4: Lepidus et a militibus et a Fortuna desertus pulloque velatus amiculo […] ad Caesarem […] genibus eius advolutus est ; Liv., 45.7.4 (Perseus pullo amicto in front of Aemilius Paullus). Ps.-Aur. Vict., epit. de caes. 3.9.
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the Fucine Lake during the inauguration of the drainage channel. 50 Moreover, I was able to identify traces of red paint on the paludamentum of the statue of Augustus of Prima Porta (fig. 8), 51 and one might also recall the case of the Trajan of Samos, 52 but I will not take the time here to review examples that are well known. 53
Fig. 8 — Reconstruction of the polychromy of the Prima Porta Augustus, plaster cast, Vatican Museum (Photo: Vatican Museum, Rome).
50.
51.
52.
53.
54. 55.
In sum, the male dress code, both for civil and military occasions, seems principally to have been based on this tripartition: a dark colour, white, and red. Gold on a garment was seen as a sort of superlative, more appropriate for the gods than the living. 54 As the examples of Caligula and Agrippina show, gold was unacceptable unless employed on ritual occasions, and this is confirmed by the case of the inept figure of Procopius who, when Julian died, tried in vain to take over his position. Not finding the paludamentum purpureum, however, which the emperor had secretly delivered to him, he dressed himself in a tunica auro distincta and with other accessories, which simply made him appear to be a slave who frequented a paedagogium, or even an actor. 55
Plin., nat. 33.63, but Tac., ann. 12.56.3 refers more properly to a chlamys aurata. See also the negative opinion of Scriptores Historiae Augustae, Gallieni duo 8.2 of the species pomparum presented by the emperor Gallienus climbing up the Capitolium with mille ducenti gladiatores pompabiliter ornati cum auratis vestibus matronarum. P. Liverani, “Die Polychromie des Augustus von Prima Porta, vorläufiger Bericht”, in G. Zimmer (ed.), Neue Forschungen zur hellenistischen Plastik. Kolloquium zum 70. Geburtstag von Georg Daltrop. Eichstätt 27 April 2002 (2003), pp. 121-140; U. Santamaria, F. Morresi, “Le indagini scientifiche per lo studio della cromia dell’Augusto di Prima Porta”, in I colori del bianco (2004), pp. 243-248 ; P. Liverani, “L’Augusto di Prima Porta”, ibid., pp. 235-242. B. Freyer-Schauenburg, “Die Statue des Trajan auf Samos”, AM 117 (2002), pp. 257-298; ead., “Die Sternmantel des Kaisers Trajan”, in V. Brinkmann, R. Wünsche, Bunte Götter: die Farbigkeit antiker Skulptur (2003), pp. 212-215. I merely mention that something similar was the case for other military garments too: we know, for example, of tunicae russae ducales: Scriptores Historae Augustae, Aurelianus 13.3. Moreover, the lictor of the magistrate with imperium outside the pomerium or during the triumphal procession wore a red sagum (Varo., ling. 7.37; Liv., 31.41.1; 41.10.5; 45.39.11; Sil. It., 9.420; Cic., Pis. 55; App., Pun. 66: ˄ƥƦƨƲ˅ƺƲƭƹƲƭưƭƮƲ˅ƵƺƭƷ˒ưƥƵȂưƨƩƨƸƮɟƷƩƵ), as is also clearly confirmed by the traces of colour on the lictor before the figure of Mars in the profectio of the Cancelleria Relief. Plin., nat. 33.63 mentions the triumphal tunic of king Tarquinius Priscus, who had a bad reputation owing to his tyrannical associations. Amm., 23.3.2.
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The colour codes described thus far are linked to art only in a generic way, but it is clear that it will be necessary to take account of them when we interpret figural work. On the other hand, a work of art can also be analysed as an autonomous system, in which the significance of the colours acquires particular emphasis from internal oppositions. For the sake of brevity, I will give just one example: the colour of the wings of angels on some early Christian mosaic cycles of the 5th and 6th centuries, where we note a chromatic opposition between angels with red wings and those with blue. Long ago, E. Kirschbaum 56 recognised the positive connotations of the former and the negative of the latter both on the arch of Santa Maria Maggiore in Rome (434-440) (fig. 9) and in the cycle of the Basilica of San Vitale in Ravenna (540-548). It is, however, necessary at this point to emphasise that this approach is insufficient to explain in exhaustive detail the meaning of colour in a work of art. Here, too, I limit myself to just one example, which is particularly important and which I have recently begun to pursue in depth: the question of the colour on the background of reliefs and friezes, especially in architectonic contexts. If we applied mechanically the symbology described above, we would find ourselves in serious difficulty when trying to explain the omnipresence of the colour blue on the backgrounds. It is indeed not possible to attribute to these examples funerary or underworld associations, nor can the blue be interpreted naturalistically as a substitute for the sky. 57 Although I am concentrating on Roman examples, I can hardly neglect the Classical and Hellenistic precedents. As E. Walter-Karydi 58 showed some time ago, on Classical reliefs the canonical background was a blue that was dark and bright, a colour often obtained with Egyptian blue. Later, the situation became more complicated and articulated: in contrast to the friezes and pediments, for the background of the metopes white, or at any rate a bright colour, soon came to be preferred, while, in the Hellenistic age, backgrounds of various colours, all with a bright tone, are attested. Similar backgrounds seem particularly suitable for panels which have a narrative character and which do not possess an architectonic function canonised by tradition, as, for example, on the façade of the Tomb of the Hunt at Vergina. 59 Later, we find bright backgrounds on pastoral sarcophagi of the late third century (fig. 10), but they have not yet been studied in detail. If we follow these tendencies in their general development over a long period of time, we can propose a differentiation in the choice of backgrounds tied to the image’s genre and function. The vegetal friezes, for example, seem to be those more strongly tied to the tradition of the blue background, as innumerable examples show. One may mention
56. 57. 58.
59.
E. Kirschbaum, “L’angelo rosso e l’angelo turchino”, RAC 17 (1940), pp. 209-248. See E. La Rocca, Lo spazio negato (2008) about the background and treatment of the space in ancient figurative art. E. Walter-Karydi, “Prinzipien der archaischen Farbgebung”, in K. Braun, A. Furtwängler (eds), Studien zur klassischen Archäologie, Festschrift F. Hiller (1986), pp. 23-41; ead., “Das Kolorit des Reliefsgrundes in der archaischen und klassischen Plastik”, in V. Brinkmann, R. Wünsche (n. 52), pp. 207-211. Brecoulaki 2006, pp. 103-133, pll. 26-43.
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Fig. 9 — Angels in the mosaic of the arch Santa Maria Maggiore, Rome (Photo: Vatican Museum, Rome). Fig. 10 — Sarcophagus with pastoral scene, c. AD 300, Vatican Museums (Photo: Vatican Museum, Rome). Fig. 11 — Lateran Baptistery, Mosaic of the narthex (AD 432-450), Rome (Photo: Vatican Museum, Rome). Fig. 12 — Polychrome reconstruction of the back wall of the Aula of the Colossus (Photo: Museo dei Fori Imperiali, Rome).
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here the Macedonian tombs, 60 funerary lekythoi, 61 and the crowning of palmette steles. 62 The tradition survives in the middle and late imperial periods. Here one may cite the Hadrianic mosaics of the apses of the hypogeum of Monte dell’Incastro near Rome, 63 the vaults 64 of the mausoleum of Galla Placidia in Ravenna (425-430) (fig. 11), the apsidal vault of the narthex of the Baptistery of St John in the Lateran in Rome 65 (dating to the time of Sixtus III, AD 432-450) (fig. 12). But in Ravenna its use survives as late as in some vegetal mosaic friezes of the Baptistery of Bishop Neon 66 and even in some of San Vitale 67 (540-548). If we concentrate on the friezes and pediments, the impression given is more or less the same. Once again, we can take our point of departure from the Macedonian tombs in which friezes and pediments regularly have a blue or black background. 68 In the Roman period, I believe we can include among the blue backgrounds the back wall of the Aula of the Colossus 69 (fig. 13) in the Forum of Augustus in Rome, against which towered the colossal statue of the Genius of Augustus, as well as the terracotta revetment plaques 60.
61.
62. 63.
64. 65.
66. 67. 68.
69.
Moulding between frieze and metope in the Judgement Tomb at Lefkadia (Brecoulaki 2006, pp. 311-315, pll. 104-105); internal friezes of the II Tomb, Tumulus A, at Aineia (ibid., pp. 327-340, pll. 110-111) and of the Tomb B at Korynos (ibid., pp. 242-244, pll. 85.3-86); at Vergina, friezes on the back wall or the Tomb of Eurydice (ibid., pp. 49-76, pll. 1.2, 2.1) and of the façade of the Rhomaios Tomb (ibid., pp. 160-161, pll. 58.1 and 3). See the lekythos of the Kerameikos Archaeological Museum in Athens and of the Ny Carlsberg Glyptotek at Copenhagen, with the reconstruction of its polychromy: U. Koch-Brinkmann, R. Posamentir, “Ornament und Malerei einer attischen Grablekythos”, in V. Brinkmann, R. Wünsche (n. 52), pp. 175-183. Ibid., fig. 247, Piraeus Museum stele of Diogenes son of Apollonides, from Pyrrha on Lesbos (first half of the 4th century BC), inv. no. 8098. G. H. Hallam, “Notes on the Cult of Hercules Victor in Tibur and its Neighbourhood”, JRS 21 (1931), pp. 276-282; F. B. Sear, Roman Wall and Vault Mosaics, RM SupplB 23 (1977), p. 104, n. 89, figs. 30-32; Z. Mari, Tibur, pars tertia. Forma Italiae, Regio I, XVII (1983), pp. 57-68, n. 23. C. Rizzardi (ed.), Il mausoleo di Galla Placidia a Ravenna. The Mausoleum of Galla Placidia, Ravenna. Mirabilia Italiae 4 (1996), pll. 35, 39-44, 46, 60, 67-70, 72. F. R. Moretti, “Il mosaico con l’Agnus Dei, le colombe e i girali d’acanto nell’abside orientale”, in M. Andaloro (ed.), La pittura medievale a Roma. 312-1431. L’Orizzonte tardoantico e le nuove immagini, 312-468. Corpus I (2006), pp. 348-352, no. 42a. F. W. Deichmann, Ravenna. Hauptstadt des spätantiken Abendlandes II.1 (1974), pp. 30-31; III (1989), pll. 88-95. F. W. Deichmann (n. 66), II.2 (1976); III, p. 177, pll. 332-333. III Tomb at Haghios Athanasios (Brecoulaki 2006, pp. 263-303, pll. 90-95; M. Tisimbidou-Avloniti, Les peintures funéraires d’Aghios Athanassios, in S. Descamps-Lequime [ed.], Peinture et couleur dans le monde grec antique [2007], pp. 56-67, figs. 3-4); at Lefkadia in the Judgement Tomb (Brecoulaki 2006, pp. 204-217, pll. 74-75) and in the Palmette Tomb (Brecoulaki 2006, pp. 173-204, pll. 63.1, 64-67; K. Rhômiopoulou, in S. Descamps-Lequime, op. cit., pp. 18-20, fig. 3), in the Tomb at Phoinikas (Brecoulaki 2006, pp. 311-315, pll. 104-105), but also in the interior pediment of the upper chamber of Tomb C of the Via dei Cristallini at Naples (V. Valerio, Observations sur le décor peint de la tombe C du complexe monumental des Cristallini, Naples, in S. Descamps-Lequime, op. cit., pp. 148-161, figs. 8-9). L. Ungaro, “Il rivestimento dipinto dell’ ‘Aula del colosso’ nel Foro di Augusto”, in I Colori del bianco, pp. 275-280; ead., “L’Aula del Colosso nel Foro di Augusto: architettura e decorazione scultorea”, in J. M. Noguera Celdrán, E. Conde Guerri (eds), Escultura Romana en Hispania V, Actas de la reunión internacional, Murcia, 9-11 noviembre 2005 (2008), pp. 29-64.
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Fig. 13 — Ara dei Vicomagistri, detail with traces of malachite (Photo: P. Liverani). Fig. 14 — FT-IR analysis of the traces of pigment on the background of the Altar of the Vicomagistri (Diagram: Gabinetto di ricerche scientifiche, Vatican Museum, Rome). Fig. 15 — Hadrianic portrait on a clipeus, Vatican Museum (Photo: P. Liverani).
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Fig. 16 — Loculus’s slab of Procla, Via Anapo catacomb, Rome (Photos: Pontificia Commissione Archeologia Sacra).
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from the area of the Temple of Palatine Apollo. 70 A little later, in the age of Tiberius, the so-called “altar of the Vicomagistri” (fig. 14) shows clear traces of a malachite background, probably an alteration of the original one in azurite. 71 On a more reduced scale, in later periods traces of blue are found on the background of a Hadrianic clipeus in the Vatican Museums 72 (fig. 15) as well as on the sealing plaque of the loculus of Procla in the Via Anapo catacomb in Rome 73 (fig. 16). Among the mosaics should be mentioned, first and foremost, that of Silvanus from Ostia 74 (fig. 17). In the early Christian period one can also recall the mosaic with the Maiestas Domini 75 (366-384) (fig. 18) in the catacomb of Domitilla in Rome, as well as the fresco in the cubiculum of the Pistores 76 (fig. 19) with Christ and the Twelve Apostles. In the catacomb ad Decimum on the Via Latina in Rome, the fresco with the Traditio legis (fig. 20) on the arcosolium “of Biator” 77 can probably be dated to the beginning of the 5th century. The latest monumental Roman mosaic with a blue background is that in the apse of Sts Cosmas and Damian, which falls between the years 526 and 530. Here the blue does not primarily allude to the sky, which in this case is indicated more obviously by the presence of the clouds. At Ravenna, the lunettes of the aforementioned Mausoleum of Galla Placidia 78 present a blue background which once again derives from the Classical tradition, and the same is true for the background from which the apostles emerge at the top of the dome of the Baptistery of Bishop Neon. 79 We have now reached a “bilingual period”, as it were, because the central medallion with the baptism of Christ on the same dome has a golden background, and it was this colour that now became dominant for several centuries. 80 70.
71. 72.
73. 74. 75. 76. 77. 78. 79.
80.
M. J. Strazzulla, Il principato di Apollo. Mito e propaganda nelle “lastre Campana” del tempio di Apollo Palatino, Studia Archeologica 5 (1990); P. Pensabene, “Elementi architettonici dalla casa di Augusto sul Palatino”, MDAI(R) 104 (1997), pp. 189-192, pl. 28; M. A. Tomei, Museo Palatino (1997), pp. 50-53, nn. 29b-f, p. 59, no. 34b; A. Carandini, La Casa di Augusto dai “Lupercalia” al Natale (2008), p. 37, figs. 17-18; pp. 155-160, fig. 72. Also in this case the analyses were directed by U. Santamaria in the Laboratory for Scientific Researches of the Vatican Museums. Inv. 918; W. Amelung, Die Sculpturen des Vaticanischen Museums II (1908), p. 111, no. 41b, pl. 11; L. Budde, Antike Plastik IV (1965), p. 104, n. 9, fig. 1. The traces of pigment were noted during the restoration in 1992. U. Lange, R. Sörries, “Die Procla-Platte. Eine polychrome Loculusverschlussplatte aus der anonymen Katakombe an der Via Anapo in Rom”, AW 21 (1990), pp. 45-56. K. E. Werner, Die Sammlung antiker Mosaiken in den Vatikanischen Museen (1998), pp. 326-332 (late 2nd, early 3rd century AD). P. Pogliani, in M. Andaloro (n. 65), pp. 175-178, no. 20. M. R. Menna, in M. Andaloro (n. 65), pp. 179-180, no. 21. S. Pennesi, in M. Andaloro (n. 65), pp. 191-193, no. 26. C. Rizzardi (n. 64), pll. 15-22, 76-91. F. W. Deichmann (n. 66), II.1, pp. 31-43; III, pll. 39-53; C. Rizzardi, “La decorazione musiva del Battistero degli Ortodossi e degli Ariani a Ravenna: alcune considerazioni”, in L’edificio battesimale in Italia. Aspetti e problemi, Atti VIII Congr. Naz. Archeologia Cristiana 1998 II (2001), pp. 915-930. See L. Bréhier, “Les mosaïques murales à fond d’azur”, REByz 3 (1945), pp. 46-55. The first mosaic with a gold background is at St. Aquilino in Milan: C. Ihm, Die Programme der christlichen Apsismalerei vom vierten Jahrhundert bis zur Mitte des achten Jahrhunderts (1960), pp. 58-59, XX, pl. I.1; G. Bovini,
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PAOLO LIVERANI
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Fig. 17 — Silvanus Mosaic, Vatican Museum (Photo: Vatican Museum, Rome).
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Fig. 18 — Maiestas Domini, wall mosaic, Domitilla catacomb, Rome (Photo: Pontificia Commissione Archeologia Sacra). Fig. 19 — Christ and the Twelve Apostles, fresco, Cubiculum of the Pistores, Domitilla catacomb, Rome (Photo: Pontificia Commissione Archeologia Sacra). Fig. 20 — Traditio Legis, Arcosolium “of Biator”, Catacomb ad Decimum, Via Latina, Rome (Photo: Pontificia Commissione Archeologia Sacra).
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REFLECTIONS ON COLOUR CODING IN ROMAN ART
To conclude, it has been shown that in these cases blue constitutes a code which can be understood only when it is traced through a long period of development, and with a meaning completely different from that uncovered earlier with reference to dress codes. Rather than being tied to specific significations, the function of the blue background is rather metalinguistic, and its presence provides orientation to the spectator and confers on the images an authoritative and representative function, which we might define as “classic” and monumental.
“I mosaici del S. Aquilino di Milano”, in Corsi di cultura sull’arte ravennate e bizantina 17 (1970), pp. 61-82; C. Bertelli, “I mosaici di Sant’Aquilino”, in G. A. Dell’Acqua (ed.), La basilica di San Lorenzo in Milano (1985), pp. 145-169; P. J. Nordhagen, “The Mosaics of the Cappella di S. Aquilino in Milan. Evidence of Restoration”, ActaAArtHist 2 (1982), pp. 77-94.
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La restitution des couleurs. Des réalités antiques à l’imagerie numérique contemporaine Fabricia Fauquet, Philippe Jockey
RÉSUMÉ Nous présentons ici les résultats du programme de numérisation 3D et de restitution de cinq sculptures hellénistiques trouvées à Délos et retenues pour leur importance historique. Toutes présentaient des traces de dorure à la feuille et/ou de polychromie. On rappelle ici les étapes de travail conduisant à la constitution du modèle 3D ainsi que les apports d’un tel modèle à notre compréhension de la polychromie des œuvres antiques, sans omettre la question des éventuelles limites d’une telle opération. MOTS-CLEFS Délos, sculpture hellénistique, polychromie, dorure, numérisation 3D, restitution 3D polychrome, recontextualisation virtuelle.
The reconstitution of colours: from the realities of the ancient world to contemporary digital imaging We present here the results of a program of 3D scanning and restoration of five Hellenistic sculptures found at Delos and retained for their historical significance. All showed traces of gilding and/or polychrome. We outline the steps leading to the formation of the 3D model and the contributions of such a model to our understanding of ancient polychrome works, without omitting the question of possible limits of such an operation. SUMMARY
KEYWORDS Delos, Hellenistic sculpture, 3D digitalization, 3D reconstructiton, polychromy, virtual contextualization. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƌ ƻƩƸƨƥƣƶƬƫƶƫ ƷƼư ƺƴƼuƠƷƼư ƆƳƿ Ʒƫư ƥƴƺƥƣƥ ƳƴƥƧuƥƷƭƮƿƷƫƷƥ ƶƷƫ ƶǀƧƺƴƲưƫ ƻƫƹƭƥƮƢƩƭƮƲưƲƧƴƥƹƣƥ ƕƥƴƲƸƶƭƠƪƲƸuƩ Ʃƨǁ Ʒƥ ƥƳƲƷƩƯơƶuƥƷƥ ƷƲƸ ƳƴƲƧƴƠuuƥƷƲƵ ƷƴƭƶƨƭƠƶƷƥƷƫƵ ƻƫƹƭƲƳƲƣƫƶƫƵ ƳơưƷƩ ƩƯƯƫưƭƶƷƭƮǁưƧƯƸƳƷǁưƳƲƸƦƴơƬƫƮƥưƶƷƫƉƢƯƲƮƥƭƩƳƩƯơƧƫƶƥưƧƭƥƷƫưƭƶƷƲƴƭƮƢƶƳƲƸƨƥƭƿƷƫƷƠƷƲƸƵ ſƺƲƸưƿƯƥƣƺưƫƩƳƭƺƴǀƶƼƶƫƵuƩƹǀƯƯƥƺƴƸƶƲǀƮƥƭƢƳƲƯƸƺƴƼuƣƥƙƳƩưƬƸuƣƪƲƸuƩƩƨǁƷƥƶƷƠƨƭƥƷƫƵ ƩƴƧƥƶƣƥƵƳƲƸƲƨƫƧƲǀưƶƷƫƨƫuƭƲƸƴƧƣƥƷƲƸƷƴƭƶƨƭƠƶƷƥƷƲƸuƲưƷơƯƲƸ ƮƥƬǁƵƮƥƭƷƥƳƯƩƲưƩƮƷƢuƥƷƥƳƲƸ ƳƴƲƶƹơƴƩƭ ơưƥ ƷơƷƲƭƲ uƲưƷơƯƲ Ƨƭƥ ưƥ ƮƥƷƥưƲƢƶƲƸuƩ Ʒƫư ƳƲƯƸƺƴƼuƣƥ ƷƼư ƥƴƺƥƣƼư ơƴƧƼư ƺƼƴƣƵ ưƥ ƥƳƲƶƭƼƳƲǀuƩƷƲƪƢƷƫuƥƷƼưƳƭƬƥưǁưƲƴƣƼưƥƸƷƢƵƷƫƵƳƴƲƶơƧƧƭƶƫƵ ƐƊƓƊƎƗƏƐƊƎƉƎƆ ƉƢƯƲƵ ƩƯƯƫưƭƶƷƭƮƢƧƯƸƳƷƭƮƢ ƳƲƯƸƺƴƼuƣƥ ƩƳƭƺƴǀƶƼƶƫ ƷƴƭƶƨƭƠƶƷƥƷƫƻƫƹƭƲƳƲƣƫƶƫ ƳƲƯǀƺƴƼuƫƷƴƭƶƨƭƠƶƷƥƷƫƥưƥƳƥƴƠƶƷƥƶƫ ƩƭƮƲưƭƮƢƩƳƥươưƷƥƱƫƶƩơưƥƧƩưƭƮƿƳƯƥƣƶƭƲ
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FABRICIA FAUQUET, PHILIPPE JOCKEY
à propos des auteurs F. Fauquet, architecte et docteure en histoire, laboratoire INAMA, École nationale supérieure d’architecture de Marseille, France. Ph. Jockey, professeur d’histoire de l’art et d’archéologie du monde grec, université Paris Nanterre, UMR 7041 ArScAn (Archéologie et Sciences de l’Antiquité), Nanterre, France.
L’ILLUSION DES COULEURS. DES RÉALITÉS ANTIQUES À L’IMAGERIE NUMÉRIQUE CONTEMPORAINE
UN
CONTEXTE DES PLUS FAVORABLES
La collaboration entre l’École française d’Athènes et le Centre de recherche et de restauration des musées de France a permis de révéler au grand jour la très vive polychromie de plusieurs des plus fameuses sculptures hellénistiques de Délos 1. Restait, cependant, à redonner à toutes ces statues l’éclat de leurs couleurs et de leur or tel que les habitants de Délos les avaient connues jadis. Jusqu’à présent toutes les tentatives de restitutions proposées étaient demeurées d’ordre graphique, en deux dimensions, avec tout l’intérêt mais aussi toutes les limites inhérentes à un tel support. L’enjeu était donc de proposer une restitution numérique virtuelle 3D inédite. Ce projet a été réalisé dans le cadre du programme européen ArchéoMEd, porté par la région Toscane 2. Il s’inscrivait dans la dynamique générée par la modélisation 3D de navires antiques, qui constituait l’un des volets du programme européen 3.
LA
RESTITUTION DES COULEURS ET DE LA DORURE DES STATUES
Première étape : la synthèse des informations recueillies dans un cadre pluridisciplinaire Les cinq statues (fig. 1-2) retenues pour la qualité des vestiges d’or et de dorure conservés, pour la place qu’elles occupent dans les collections déliennes mais aussi pour la diversité de leurs types et fonctions, ont été celles du célèbre Diadumène, copie en marbre de l’œuvre de Polyclète (Athènes, MN 1826, fig. 1b), le Gaulois blessé de l’Agora des Italiens (Athènes, MN 247, fig. 1d), exposées au musée national d’Archéologie d’Athènes, ainsi que les statues d’Artémis (Délos, inv. A 449, fig. 1a), d’Apollon (Délos, inv. A 4135, fig. 1c) et d’Aphrodite (Délos, inv. A 4200, fig. 1e), exposées au musée de Délos. Afin de restituer les couleurs et la dorure des statues, on a opéré dans un premier temps la synthèse de toutes les connaissances relatives à ces sculptures et issues de disciplines et de compétences diverses. Trois types de données se sont avérées d’une utilité majeure : les images produites sous vidéomicroscopie ou sous fluorescence d’ultraviolets (fig. 3) ; les informations livrées par la caractérisation des composés minéraux et organiques 1. 2.
3.
Voir dans ce même ouvrage l’article de Br. Bourgeois et Ph. Jockey qui leur est consacré, supra, p. 143-167. Pour la région Campanie, l’ISTI (Roberto Scopigno, responsable scientifique) : Marco Callieri (chef d’équipe), Guido Ranzuglia, Matteo Dellepiane, Massimiliano Corsini ; le Centre de recherche et de restauration des musées de France, Brigitte Bourgeois (au titre de coresponsable scientifique du programme d’étude de la polychromie de la sculpture hellénistique de Délos développé en partenariat par l’École française d’Athènes et le C2RMF) ; l’École française d’Athènes (Philippe Jockey, coresponsable scientifique du programme. Son directeur d’alors, Dominique Mulliez, a permis l’accès aux collections de sculpture dont l’institution a la charge scientifique. L’EFA a par ailleurs facilité les déplacements de l’équipe entre Athènes et Délos ainsi que l’hébergement de ses membres, tant à Athènes qu’à Délos). F. Fauquet, A. Hesnard, « Du dessin aux techniques d’acquisition et de modélisation tridimensionnelle en archéologie maritime », dans Fr. Gravina (éd.), Comunicare la memoria del Mediterraneo: strumenti, esperienze e progetti di valorizzazione del patrimonio culturale marittimo, Atti del Convegno Internazionale di Pisa, ANSER (29-30 ottobre 2004), Collection du Centre Jean Bérard 24 (2007), p. 47-63.
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Fig. 1 — Les cinq sculptures hellénistiques polychromes et dorées de Délos (cl. EFA, Ph. Collet).
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Fig. 2 — La restitution de la polychromie et de la dorure des cinq sculptures hellénistiques de Délos (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
Fig. 3 — Statue d’Aphrodite (Délos, A 4200), vue sous fluorescence d’ultraviolets (cl. EFA, Ph. Collet).
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Fig. 4 — Numérisation 3D en cours du Diadumène (Athènes, MN 1826) (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 5 — Numérisation 3D en cours de la statue du Gaulois blessé de l’Agora des Italiens (Athènes, MN 247) (cl. EFA, Ph. Collet).
Fig. 6 — Le modèle géométrique du Diadumène visible dans MeshLab, logiciel développé par l’ISTI (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
L’ILLUSION DES COULEURS. DES RÉALITÉS ANTIQUES À L’IMAGERIE NUMÉRIQUE CONTEMPORAINE
rentrant dans la composition des couches picturales et autres traitements de surface ; les données textuelles et iconographiques, enfin, rassemblées par les chercheurs de l’équipe. Cette somme de connaissances a permis de constituer notre modèle théorique. Restait à réunir les éléments du puzzle en les replaçant – virtuellement – sur chacune des œuvres auxquelles ils appartenaient. Une option a été retenue : celle de la production d’une image virtuelle 3D de chacune des statues étudiées. La numérisation des statues Elle a constitué la seconde étape de ce projet. Nous avons bénéficié, pour cela, de l’expertise de l’Institut supérieur de technologie informatique de Pise, en Italie (ISTI). Ses responsables, R. Scopigno et Cl. Montani ont accepté de prêter leur concours à cette entreprise. Une première semaine de campagne (2-9 juin 2007) s’est déroulée au musée national d’Archéologie d’Athènes. Deux statues célèbres, intégralement dorées à la feuille à l’origine, ont été numérisées : le Diadumène (fig. 4) et le Gaulois blessé de l’Agora des Italiens (fig. 5). La saisie 3D s’est faite en présence de F. Fauquet, chargée, dans le cadre de ce projet pilote, de la restitution 3D des états de surface originels de ces deux œuvres. Cette première phase a bénéficié du soutien actif de N. Kaltsas, directeur du musée national d’Archéologie d’Athènes et de H. Kourinou, conservatrice en charge du département de sculptures au sein de ce même musée. Au terme de cette première semaine, l’équipe s’est déplacée à Délos où elle a procédé à la numérisation 3D des statues d’Artémis, d’Apollon et d’Aphrodite. Cette seconde phase a bénéficié du soutien actif de P. Chatzidakis, conservateur en charge des collections du musée de Délos. On a fait le choix ici d’une numérisation en trois dimensions par triangulation laser, sans contact avec l’objet. Cette méthode de relevé laser fonctionne par interaction d’un rayon lumineux de faible puissance avec les objets à relever. Le capteur est placé à faible distance de l’objet à scanner. Les coordonnées (en z, y, z) des points touchés par le laser sont récupérées à l’aide d’une caméra (fig. 5). Le capteur ne pouvant prendre que ce qu’il « voit », il est nécessaire d’effectuer des prises de vues tout autour de l’objet afin de relever l’ensemble de la scène. Les différents points de vue sont ensuite fusionnés, afin d’obtenir un fichier unique contenant des nuages de points tridimensionnels. Les nuages de points 3D sont très denses sur les surfaces composant les scènes. Quand ces surfaces ne peuvent être facilement reconstruites par des entités mathématiques (comme c’est le cas ici pour la sculpture) elles peuvent l’être par des ensembles de microtriangles pleins prenant ces points pour sommets. La triangulation des points permet de recouvrir le nuage de points d’une sorte de « peau ». L’équipe pisane de l’ISTI a développé sa propre technologie afin de modéliser ces formes complexes (fig. 6).
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Fig. 7 — Modèle géométrique du Gaulois blessé de l’Agora des Italiens : délimitation des zones en 3D, visibles en orange (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
Fig. 8 — Importation du modèle géométrique et zonage de l’Artémis A 449 (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
L’ILLUSION DES COULEURS. DES RÉALITÉS ANTIQUES À L’IMAGERIE NUMÉRIQUE CONTEMPORAINE
Le passage à la D À partir des modèles géométriques 3D fournis par l’ISTI (pour chaque statue des modèles allant de 500 000 à 8 millions de facettes), nous avons opté pour un modèle suffisamment précis (1 million de facettes) mais encore relativement léger (20 Mko). Chacun des fichiers a été exporté dans un nouveau format (.obj) vers le logiciel que nous avions choisi pour effectuer ces restitutions. Il s’agit du logiciel d’image de synthèse Cinéma 4D 4. Cet outil permet de créer des modélisations, des animations et des rendus de texture en 3D. La singularité de ce logiciel est aussi qu’il permet de peindre directement sur un modèle 3D 5. La souris ou plus souvent le stylet numérique de l’infographiste remplacent ici le pinceau du peintre. Cette étape est précédée de la délimitation des différentes zones. Délimitation des zones en D On procède pour cela à la sélection de facettes au moyen du stylet numérique, sur le modèle géométrique. Il s’agit d’un travail long et délicat (fig. 7). Nous avons procédé ainsi pour chaque statue, cheveu, ruban d’or dans les cheveux, manteau, roche et chiton, nous avons attribué à chaque zone, une couleur franche afin de bien les distinguer les unes des autres. Cette opération, lente et minutieuse, est rendue possible grâce à la visualisation dynamique de la statue en 3D (fig. 8). La colorisation du modèle Une fois le modèle 3D saisi et décomposé, est venu le temps de sa mise en couleur. Cette étape délicate exigeait au préalable une synthèse stricte des données matérielles, zone par zone, secteur par secteur. Pour ce faire, les données issues du vidéomicroscope ont été analysées et classées en fonction de leurs caractéristiques picturales (schéma chromatique, superposition, feuille d’or, modelé pictural). On a procédé également à la cartographie de ces clichés, ainsi qu’à la création d’une base de données mettant en relation cartographie et clichés. Grâce à la cartographie des données, aux tonalités des images saisies et à la palette de pigments antique connue, nous avons établi une charte graphique pour chaque statue étudiée. La synthèse de ces données aboutit à plusieurs propositions couleur 2D (croquis aux pastels à main levée) puis en 3D (fig. 9). La charte graphique permet d’attribuer à chaque zone délimitée sur le modèle 3D, un matériau. Celui-ci possède différents paramètres (couleur, texture, diffusion, luminosité…) que nous modifions afin de nous rapprocher d’une image satisfaisante. Il s’agit une fois encore d’une étape longue et empirique. L’un des avantages immédiats qu’offre la 3D est bien évidemment qu’il est possible pour l’observateur de tourner autour de la maquette numérique et d’offrir de nouveaux
4. 5.
Logiciel de modélisation et d’animation développé par la société MAXON. Le module MAXON BodyPaint 3D propose une solution de texturage évoluée. En effet, il permet de peindre par projection intuitive, ainsi que dans une image rendue.
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Fig. 9 — Cartographie des données (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
angles de vue. Mais il est également possible de produire, à partir du même modèle 3D, plusieurs maquettes numériques, c’est-à-dire, en l’occurrence, compte tenu du sujet qui nous occupait, plusieurs hypothèses de restitution en faisant varier différents paramètres, comme, ici, la couleur de la tunique, et ainsi, essai après essai, de valider ou non une ou plusieurs hypothèses. Dans le cas de l’Aphrodite A 4200, des restes de feuille d’or avaient été reconnus avec certitude sur le buste : on pouvait donc, sur cette base, supposer une tunique à l’origine totalement dorée. Mais un nombre conséquent d’indices positifs manquaient pour l’assurer avec certitude. Un tel travail de recherche, rendu possible grâce aux outils numériques, permet véritablement d’affiner le modèle théorique 3D. Il offre également la possibilité d’intégrer des connaissances et de questionner la base de données, de remonter aux sources utilisées.
ÉCLAIRAGES
ANTIQUES ET ÉCLATS DE LA COULEUR ET DE L’OR
Le programme informatique utilisé pour la représentation 3D a aussi été l’occasion de tester les différents éclairages possibles sur une statue. Un certain nombre d’observations nous ont invités à supposer que certaines statues antiques, sinon toutes, pouvaient avoir été peintes à la manière d’un tableau, c’est-à-dire en fonction d’un éclairage unidirectionnel, rééquilibré ou non par une lumière omnidirectionnelle (fig. 10). La prospection au vidéomicroscope a permis en effet de révéler les détails de cet art de peindre 6. En éclairant d’une touche de blanc l’arête de certains plis ou en recreusant de touches de bleu les fonds de plis, on approchait alors un modelé parfait. Dans le cas de l’Aphrodite 6.
Voir supra, p. 395.
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Fig. 10 — Différentes propositions d’éclairage de l’Aphrodite polychrome A 4200 (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
Fig. 11 — Couleurs, matières et modelé de l’Aphrodite polychrome A 4200 (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
A 4200, des touches de couleurs ont été posées afin d’accentuer le modelé, permettant ainsi de souligner une ombre ou une touche de lumière. Ces touches de couleurs sont appliquées dans le modèle numérique sur différentes couches qui se superposent, et dont on peut faire varier l’intensité (fig. 11). Pour la restitution de l’or, nous avons utilisé la même approche. Il s’agissait ici encore de croiser les tonalités des images saisies et de combiner les différentes caractéristiques : couleur, réflexion, lueur émise par ce matériau et les perturbations associées (effet de flou par exemple), avec pour finalité d’approcher une restitution possible, comme on le voit sur la représentation du Gaulois blessé de l’Agora des Italiens (fig. 12) : il s’effondre
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Fig. 12 — Restitution du Gaulois blessé de l’Agora des Italiens (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet). Fig. 13 — Restitution de l’Apollon A 4135 (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet). Fig. 14 — Bandes inférieures du manteau de l’Apollon A 4135 vues sous fluorescence d’ultraviolets (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet). 15
Fig. 15 — Restitution du groupe sculpté d’Artémis A 449 (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet). Fig. 16 — Les bandes colorées du vêtement d’Artémis A 449 (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
L’ILLUSION DES COULEURS. DES RÉALITÉS ANTIQUES À L’IMAGERIE NUMÉRIQUE CONTEMPORAINE
sur lui-même en tentant de se protéger de son bouclier – perdu – contre les coups de l’ennemi. L’œuvre est recomposée de plusieurs éléments. Son examen minutieux au vidéomicroscope a révélé une nouvelle fois qu’elle avait été entièrement dorée à la feuille ; seules deux zones n’ont pas présenté de traces d’or ou de son assiette : la toison pubienne et l’épaisse chevelure en partie conservée. L’une comme l’autre présentait, en revanche, des vestiges de couleur rouge. Pour prendre en compte ces différentes caractéristiques, nous avons placé et paramétré plusieurs sources lumineuses dans la scène. La restitution numérique permet de mieux apprécier le modelé de l’anatomie du Galate ; sa musculature puissante ne se révèle pleinement que grâce à l’éclat de l’or. La restitution de la polychromie et de la dorure de l’Apollon A 4135 a permis également de restituer ce travail sur la lumière. Le corps de cette statue chrysochrome était intégralement doré à la feuille. Seul le manteau, jeté sur l’épaule gauche, était peint, teint en rose et doublé de tissu bleu (fig. 13). Une couverture photographique préalable en fluorescence d’ultraviolets avait permis de préciser les détails des bandes inférieures du manteau ; chacune d’entre elles a fait l’objet d’un relevé précis de ses dimensions comme de sa tonalité (fig. 14). On a pris soin de rendre compte des modulations de couleur qui accentuaient les jeux d’ombre et de lumière du modelé, tel un bleu pâle sur un pli en lumière, proche d’un fond de pli recreusé de mauve. La restitution du groupe sculpté d’Artémis élaphébole a représenté un défi, à chacune des étapes de travail : qu’il s’agisse de sa numérisation, de la délimitation des zones du modèle géométrique en 3D ou de la restitution de sa polychromie originelle (fig. 15). On observe spécialement dans cette œuvre un souci de réalisme qui se traduit par exemple sur le corps du cervidé. Celui-ci présentait, en vue macroscopique, les vestiges colorés de son pelage, régulièrement distribués au pinceau sur toute la bête. Quant au vêtement, il présentait un traitement particulièrement sophistiqué des bandes et autres liserés qui ornaient et ourlaient le bas du vêtement : pas moins de onze unités chromatiques superposées ont pu être identifiées, dessinant un motif complexe, de taille et de couleurs variées (fig. 16).
UN
NOUVEAU DÉFI : LA RÉINTÉGRATION DU GROUPE D’ARTÉMIS ÉLAPHÉBOLE DANS SON CONTEXTE ARCHITECTURAL ORIGINEL
Enfin, nous avons tenté de replacer ce groupe sculpté dans son contexte architectural originel 7, pour une fois connu. Il se dressait en effet très probablement, compte tenu de son lieu de découverte, quand il fut sculpté et peint, sur le podium qui faisait face à l’entrée principale, au bout d’un long corridor. À l’aide du même logiciel, nous avons modélisé cette maison afin de replacer cette statue dans son contexte bâti. Mais de nombreuses 7.
Voir Br. Bourgeois et Ph. Jockey, supra, p. 166-167.
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Fig. 17 — Restitution de l’ensoleillement, à 8 h (a), à midi (b) et à 18 h (c) (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
inconnues demeurent, d’une part la hauteur des élévations des murs latéraux de la cour, et d’autre part l’existence d’une couverture de cet espace. Nous avons choisi de restituer un bâtiment de faible hauteur, sans étage, dont le fond de cour est partiellement couvert. Le logiciel que nous utilisons permet de placer des lumières paramétrables (couleur, intensité, mode d’éclairage…), celles-ci influent énormément sur le rendu final. Il est possible de paramétrer une source lumineuse qui simule la position du soleil (la longitude et la latitude) à différentes dates et heures. Nous avons donc simulé l’ensoleillement de ce vestibule à différents moments de la journée. Nous avons pu constater, au regard de ces trois vues, que la sculpture placée sur son podium se trouvait dans l’ombre projetée des murs latéraux le matin et l’après-midi. Et ceci nullement à cause de la hauteur des murs mais en raison de l’étroitesse de la cour (fig. 17a-c). En revanche, le groupe sculpté resplendissait de tout son éclat au zénith délien. La couverture partielle de la cour ne nuisait nullement à l’œuvre, au contraire, celle-ci était mise en valeur, mise en scène par cet arrière-plan sombre. Sur la base de ces premiers résultats, nous avons donc créé et paramétré une caméra virtuelle ainsi que son déplacement le long d’une trajectoire afin d’obtenir une séquence animée de la scène qui restitue le cheminement et la découverte par le visiteur d’une telle œuvre 8.
PRINCIPALES
DIFFICULTÉS RENCONTRÉES
Les principales difficultés que nous avons rencontrées au fil de cette campagne de numérisation et de restitution 3D ont été pour une part d’ordre technique. Le caractère complexe des objets scannés a généré des fichiers lourds à manipuler, sans qu’il soit cependant possible de les réduire sous peine de perdre en qualité de définition le modelé 8.
Séquence vidéo réalisée dans le cadre du programme ArchéoMEd, disponible sur demande auprès des auteurs de l’article.
L’ILLUSION DES COULEURS. DES RÉALITÉS ANTIQUES À L’IMAGERIE NUMÉRIQUE CONTEMPORAINE
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Fig. 18 — Le Diadumène : restitution de sa dorure à la feuille, vue de face (a) et de dos (b) (ArchéoMEd, C2RMF, EFA, F. Fauquet).
de la statue. Nous avons été par ailleurs confrontés au problème du mapping, c’est-à-dire à la difficulté de transposer les motifs complexes qui composent les bordures du vêtement sur un maillage géométrique tridimensionnel. Le défi était aussi d’ordre pictural. La transposition exacte des tonalités de la gamme de couleurs attestée par les clichés pris au vidéomicroscope sur le modèle 3D représentait une opération délicate. Nous ne disposons plus pour restituer cette polychromie que des seules images de vestiges infimes de couleur violemment éclairés et invisibles le plus souvent à l’œil nu. Enfin, une dernière difficulté consistait à s’affranchir du grain même du marbre tel qu’il apparaît sur les modèles géométriques scannés dans le rendu des effets de texture propres à la couche picturale originelle perdue. On sait en effet qu’à Délos, une sous-couche de blanc de plomb appliquée sur le marbre en effaçait généralement les irrégularités de surface et de ton.
LES
INTÉRÊTS DU MODÈLE NUMÉRIQUE
Le modèle numérique permet tout d’abord de proposer une restitution des savoir-faire mis en œuvre dans cet art et vérifiés par les examens et analyses évoqués plus haut. La statue du Diadumène en est une bonne illustration. La surface du marbre était justement recouverte, à l’origine, d’une sous-couche préparatoire de blanc de plomb, sur laquelle reposait une assiette d’ocre jaune étalée uniformément sur l’ensemble de la statue. Il restait à déposer les feuilles d’or elles-mêmes sur cette assiette. Une fois achevée, la copie en marbre doré à la feuille était à l’imitation parfaite du bronze à l’éclat doré créé par Polyclète (fig. 18a-b).
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FABRICIA FAUQUET, PHILIPPE JOCKEY
On retiendra de cette approche interdisciplinaire, associant dans un même projet l’archéologie, l’architecture, l’histoire, la conservation et l’informatique, sa pertinence et sa valeur heuristique. Les outils numériques, très utiles pour l’acquisition, la manipulation et la représentation des informations archéologiques et architecturales, représentent sans conteste un apport nouveau de tout premier plan à la démarche scientifique générale. Le modèle théorique permet la réalisation de simulations numériques, sans limitation de nombre ou d’options. De telles simulations permettent de tester des hypothèses, d’évaluer le degré de pertinence des restitutions fonctionnelles et architecturales proposées et explorées. Outre qu’elles offrent aux chercheurs la possibilité d’une valorisation souvent spectaculaire de leurs travaux. Ces démarches sont appelées à se développer toujours plus avant. On procède d’ores et déjà à des impressions 3D des objets préalablement numérisés. Les tirages rendus ainsi possibles permettront d’aller plus loin dans la compréhension de données souvent négligées dans la production du discours historique, faute de recontextualisation. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. De telles expériences inscrivent la recherche dans une dynamique inédite et prometteuse qui invite désormais à relever le défi de la réalité augmentée.
De Théophraste à Poliphile : les marbres, fondements d’une vision polychrome de l’architecture antique Pascal Julien
RÉSUMÉ De Théophraste aux Pères de l’Église, en passant par les Lapidaires grecs ou Pline l’Ancien, un important discours scientifique et littéraire a servi à composer une vision polychrome de l’architecture antique qui s’est concrétisée dans les romans médiévaux et a culminé, au xve s., dans Le Songe de Poliphile. Cette vision a engendré, au Moyen Âge puis à la Renaissance, des œuvres somptueuses dans lesquelles les marbres grecs – en particulier le porphyre vert de Lacédémone « plus riant qu’aucun autre » – tiennent une place de choix, aussi esthétique que symbolique. Esthétique par leur mariage avec d’autres variétés colorées, symbolique par la puissance dont elles furent investies : la puissance mémorielle de leurs bigarrures qui faisaient ressurgir de manière particulièrement voyante et suggestive les mystères, les rêves et les charmes d’un âge d’or. Ainsi le réemploi de roches grecques, qui furent des matériaux romains, a-t-il pu exprimer la quête de l’Antiquité et, au-delà encore, un sempiternel désir d’hellénisme. MOTS-CLEFS Théophraste, Pères de l’Église, les Lapidaires grecs, Pline l’Ancien, vision polychrome, architecture antique, romans médiévaux, Moyen Âge, Le Songe de Poliphile, Renaissance, marbres grecs, porphyre vert de Lacédémone, réemploi, désir d’hellénisme.
From Theophrastus to Polyphilus: about the role played by colored marbles in the perception of the polychromy of ancient architecture From Theophrastus to the Fathers of the Church, passing through the Greek Lapidaries or Pliny the Elder, an important literary and scientific discourse has served to compose a vision of polychromatic marble in ancient antique architecture, that was given concrete expression through medieval novels, and crystallized during the 15th century with Le Songe de Poliphile (Poliphilo’s Strife of Love in a Dream). This vision, from Medieval Times up until the Renaissance, generated luxurious masterpieces in which Greek marble, and in particular, green porphyry from Lacedemonia “plus riant qu’aucun autre” (more pleasant than any other), held a place of esthetical and symbolical choice. An Esthetical choice by its marriage with other colored varieties, and a Symbolic choice by the power that was invested in it: the renowned supremacy of its mottled appearance that re-emerged in a particularly gaudy and suggestive manner unveiling the mysteries, dreams and charms of a golden age. In this manner, the re-use of Greek rock, that was a roman material, could have expressed the quest for Antiquity, and above all, a neverceasing desire for Hellenism. SUMMARY
KEYWORDS Theophrastus, Fathers of the Church, Greek Lapidaries, Pliny the Elder, vision of polychromatic marble, ancient antique architecture, medieval novels, Medieval Times, Le Songe de Poliphile, the Renaissance, Greek marble, green porphyry from Lacedemonia, re-use, desire for Hellenism.
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PASCAL JULIEN
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à propos de l’auteur P. Julien, professeur d’histoire de l’art moderne, université Jean-Jaurès-Framespa, Toulouse, France.
abréviation bibliographique Marmi antichi = G. Borghini (éd.), Marmi antichi 4 (2001).
DE THÉOPHRASTE À POLIPHILE : LES MARBRES, FONDEMENTS D’UNE VISION POLYCHROME DE L’ARCHITECTURE ANTIQUE
De Théophraste aux Pères de l’Église, en passant par les Lapidaires grecs ou Pline l’Ancien, un important discours scientifique et littéraire a servi à composer une vision polychrome de l’architecture antique qui s’est concrétisée dans les romans médiévaux et a culminé, au xve s., dans Le Songe de Poliphile. Cette vision a engendré, au Moyen Âge puis à la Renaissance, des œuvres somptueuses dans lesquelles les marbres grecs – en particulier le porphyre vert de Lacédémone « plus riant qu’aucun autre » – tiennent une place de choix, aussi esthétique que symbolique. Esthétique par leur mariage avec d’autres variétés colorées, symbolique par la puissance dont elles furent investies : la puissance mémorielle de leurs bigarrures qui faisaient ressurgir de manière particulièrement voyante et suggestive les mystères, les rêves et les charmes d’un âge d’or. Ainsi le réemploi de roches grecques, qui furent des matériaux romains, a-t-il pu exprimer la quête de l’Antiquité et, au-delà encore, un sempiternel désir d’hellénisme.
ENTRE
NATURE, MAGIE ET CROYANCES
Si la haute renommée de l’architecture grecque a longtemps été essentiellement fondée sur les sources écrites, les marbres eurent une place singulière dans cette culture littéraire qui engloba peu à peu les variétés blanches et polychromes dans une même perception. Leur connaissance fut véhiculée par les naturalistes de même que par les ouvrages traitant de magie minérale ou de symbolique religieuse, la frontière entre les uns et les autres étant des plus fluctuantes. Dans son Traité sur les pierres, le philosophe Théophraste (ive s. av. J.-C.) classa les minéraux selon leurs propriétés physiques et recensa une dizaine de marbres, au rang desquels il compta aussi bien les granites et albâtres d’Égypte que les célèbres blancs de Paros et du Pentélique 1. Mais son approche méthodique fut sans lendemain, il fut « le commencement et le point final de la géologie scientifique chez les Grecs 2 ». Par la suite, les ouvrages consacrés aux pierres s’attachèrent surtout à leur valeur en tant que pierreries et à leurs propriétés magiques et médicinales pour les décrire et les cataloguer. Les Lapidaires grecs d’origine orientale, enrichis de siècle en siècle, firent la liste des magies minérales fondées sur un système de correspondances parmi lesquelles la couleur ou les veinures agissaient souvent tel un principe actif, ce qui fournissait aux marbres bien des attraits 3. À partir du ier s. apr. J.-C., l’emploi croissant d’éléments marmoréens dans de riches demeures frappa les esprits et engendra leur évocation par plusieurs auteurs et poètes romains 4. Parmi les variétés grecques, le vert de Lacédémone ou de Laconie fut si 1. 2. 3.
4.
Théophraste, De Lapidibus (trad. et com. D. E. Eichholz, Oxford University Press, 1965). R. Halleux, J. Schamp, Les Lapidaires grecs, CUF 300 (1985), p. XIV. F. de Mély, Les lapidaires de l’Antiquité et du Moyen Âge (1897-1902). Certains points de la présente étude sont repris et développés à partir de l’ouvrage de P. Julien, Marbres, de carrières en palais, du sang des dieux à la gloire des rois, XVIe-XVIIIe s. (2006). R. Bedon, « Stabunt et Parii lapides, spirantia signa, les roches décoratives chez les poètes latins », dans P. Chardron-Picault et al. (éds), Les roches décoratives dans l’architecture antique et du Haut Moyen Âge (2004), p. 369-386.
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apprécié qu’il fut employé partout dans l’Empire, en dépit de ses difficultés d’extraction (fig. 1-2). Aussi apparaît-il rapidement et fréquemment dans des descriptions – notamment à propos de dallages – où il s’offre à de belles métaphores. Martial le décrit ainsi comme « le marbre que l’Eurotas a lavé de ses flots verdis », alors que pour Stace il imite « les herbes ondoyantes » 5. Cette poésie touche bien d’autres variétés tel l’« onduleux Karystos […] qui rivalise avec la mer profonde ». Un même lyrisme anime Pline l’Ancien lorsqu’il évoque « les panneaux et les vastes surfaces qui font pénétrer les montagnes jusque dans une chambre » ou lorsqu’il feint de dénoncer le plaisir « de reposer au milieu de pierres aux taches colorées » car on ne peut en profiter que la moitié d’une vie, la nuit les dérobant au regard 6 ! L’opus sectile des pavements et les lambris et marqueteries murales s’ajoutaient alors aux colonnes, entablements et autres éléments structurants. Pline fut le premier à détailler les principales variétés originaires des régions les plus diverses, utilisées pour parer Rome des richesses de l’Empire : blanc de Luna pour l’Italie, jaune de Numidie, porphyres, granite et basalte d’Égypte, pavonazzetto de Phrygie, portasanta de Chios, cipollino de Karystos et vert de Laconie pour la Grèce ainsi que blanc de Paros, de Thasos et du Pentélique, sachant que toutes ces roches peuvent être polies (fig. 3) 7. Il perpétua le mythe de leur fabuleux pouvoir, fruit de l’hermétisme, mais comme les poètes il insista sur la célébration de la nature en faisant l’éloge des chefs-d’œuvre qu’en tirait la main de l’homme : les marbres, notamment grecs, faisaient partie des merveilles du monde déplacées par-delà les mers pour sublimer les merveilles de l’Urbs 8. Les auteurs chrétiens s’emparèrent des conceptions de Pline et de son compilateur, Solin, qu’ils transformèrent et propagèrent tel Isidore de Séville qui, à l’aube du viie s., consacra tout un chapitre aux marbres dans le livre XVII de ses Étymologies sur l’origine de certaines choses. Il en détailla plus d’une quinzaine venant essentiellement d’Égypte, d’Asie Mineure, d’Afrique et de Grèce, en se fondant également sur Dioscoride 9. Peu à peu, alors que les variétés colorées issues de Grèce tel le vert de Lacédémone avaient été mises en exploitation sous l’Empire romain, elles devinrent spécifiquement « grecques » dans la littérature par assimilation aux marbres blancs les plus célèbres qui structuraient véritablement les temples hellènes. À l’égal des herbiers ou des traités médicaux qui leur donnèrent une place importante, les lapidaires devinrent un élément à part entière des ouvrages patristiques, comme en témoigne leur développement chez Bède le Vénérable au viiie s. ou chez Raban Maur, au
5. 6. 7.
8. 9.
V. Maugan-Chemin, « Les couleurs des marbres chez Pline l’Ancien, Martial et Stace », dans Couleurs et matières dans l’Antiquité, textes, techniques et pratiques (2006), p. 103-127. Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 4 (trad. J.-M. Croisille, CUF, 1985). Pour Sidoine Apollinaire au sujet de cette variété, « les veines inscrivent le printemps dans le marbre ». Pline cite par ailleurs plusieurs autres marbres. Ce fut en fait près d’une quinzaine de variétés qui furent exploitées par les Romains en Égypte et près d’une vingtaine dans le monde grec : L. Lazzarini, « La determinazione della provenienza delle pietre decorative usate dai romani », dans M. De Nuccio, L. Ungaro (éds), I marmi colorati della Roma imperiale (2003), p. 223-265. V. Naas, Le projet encyclopédique de Pline l’Ancien (2002). Isidore de Séville, Etymologiarum, De lapidibus et metallis, P.L., vol. 81, 1830, XVI 5, 1, col. 568-570.
DE THÉOPHRASTE À POLIPHILE : LES MARBRES, FONDEMENTS D’UNE VISION POLYCHROME DE L’ARCHITECTURE ANTIQUE
Fig. 1 — Porphyre vert de Grèce, jaune de Numidie, portasanta orangé de Chios, porphyre rouge d’Égypte, pavonazzetto de Phrygie blanc et violet (villa Hadriana à Tivoli, vers la première moitié du iie s. apr. J.-C.) (cl. P. Julien).
Fig. 2 — Disques, feuilles et liserés de porphyre vert, jaune de Numidie et pavonazzetto de Phrygie, résidu d’un fin cœur étoilé en porphyre d’Égypte (fouilles de la villa de Garrissou à Béziers) (cl. P. Julien).
Fig. 3 — Pavement de la Domus d’Amour et Psyché à Ostie (ive s. apr. J.-C.) (cl. P. Julien).
ixe s., qui insista sur les vertus mystiques de certains marbres 10. De fait, loin d’être rejetés, des lapidaires fantastiques avaient été repris, interprétés et encore enrichis. La notion de vertus magiques et curatives fut même amplifiée, en particulier par l’étude des douze gemmes de la tradition hébraïque, symboliquement liés aux douze tribus d’Israël. De nombreux auteurs, tels que saint Épiphane, Clément d’Alexandrie ou Basile de Césarée se livrèrent à une exégèse allégorique inaugurant la tradition des lapidaires chrétiens ou apocalyptiques, faisant le lien entre les pierres de l’Exode et celles de la Jérusalem céleste, décrites dans l’Apocalypse. Les propriétés des pierres, parmi lesquelles plusieurs marbres, 10.
Raban Maur, De universo, P.L., vol. 111, 1852, col. 463-464.
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furent parfois mises en relation avec les signes du zodiaque et demeurèrent le plus souvent fabuleuses, mais elles devinrent aussi les symboles de notions théologiques et morales. Parallèlement, les fables minérales persistèrent et furent même amplifiées. En s’inspirant du traité latin de Damigéron-Évax et d’un pseudo Lapidaire d’Aristote, l’évêque de Rennes Marbode écrivit à la fin du xie s. un lapidaire en vers (Liber lapidum seu de gemmis) qui eut un succès considérable : il fut plusieurs fois copié et même traduit en Europe occidentale durant des siècles 11. La plupart des lapidaires mystiques qui suivirent, inspirés des préceptes des Pères de l’Église, cherchèrent dans les images et symboles assignés aux pierres des sujets d’édification mais ce fut toujours à Marbode qu’ils empruntèrent la description de leurs vertus naturelles et surnaturelles. Des vertus qui furent prêtées à bien des marbres. Dans la réécriture des croyances anciennes, de tels errements ne furent pas le fait de clercs incultes ou de schismatiques 12. Au xiiie s., Arnoldus Saxo (Liber floridus), Bartholomäus Anglicus (De proprietatibus rerum), Thomas de Cantimpré (Liber de natura rerum), Conrad de Megenberg (Buch des Natur) ou encore Vincent de Beauvais (Speculum naturale) rédigèrent des Livres des pierres au sein de leurs ouvrages encyclopédiques qui s’apparentent à des lapidaires astrologiques et détaillent des variétés investies d’un pouvoir surnaturel 13. Le dominicain Albert le Grand témoigna d’une approche plus scientifique avec son De mineralibus (vers 1260), inspiré tant par l’étude des apports grecs, latins et arabes que par l’expérimentation. Les marbres – « les plus nobles des pierres » – y sont avantageusement comparés aux pierres précieuses et y sont classés par texture, couleur, dureté, opacité, densité ou capacité à se fendre 14. Durant seize siècles, ces roches venues de l’Antiquité avaient parcouru la plus haute érudition en s’enrichissant d’une multiplicité de pouvoirs et de comparaisons toujours plus flatteuses avec les pierres fines. En dépit d’un certain progrès dans la lecture de la nature, avec l’avènement d’une volonté de classification en partie fondée sur l’expérience, la Terre restait essentiellement mystérieuse, et nombre de croyances perdurèrent longtemps encore. L’une de celles-ci, attachée à l’un des plus beaux marbres de Grèce, est particulièrement significative du jeu d’interaction ayant pu exister entre matières et pensée.
LA
SERPENTINE ET L’ENGEANCE AU DOS MARBRÉ
Dans les écrits qui jalonnent les siècles, il est particulièrement difficile d’identifier les pierres, soit parce qu’elles sont imaginaires, soit à cause des incessantes compilations qui ont déformé, adapté ou modernisé des appellations de toutes origines. Cette complexité 11. 12. 13. 14.
L. Pannier, Les lapidaires français du Moyen Âge des XIIe, XIIIe et XIVe siècles (1882) ; J. M. Riddle, Marbode of Rennes (1035-1123) “De lapidibus” (1977). Cl. Lecouteux, « Les pierres magiques et le merveilleux », dans Deutsch-französiches Mediävistik. Mélanges pour G. É. Zink (1984), p. 53-67. N. Weill-Parot, Les images astrologiques au Moyen Âge et à la Renaissance. Spéculations intellectuelles et pratiques magiques (2001). Albertus Magnus, Book of minerals (éd. D. Wyckoff, 1967).
DE THÉOPHRASTE À POLIPHILE : LES MARBRES, FONDEMENTS D’UNE VISION POLYCHROME DE L’ARCHITECTURE ANTIQUE
ne pouvait qu’empirer pour des raisons linguistiques, les dénominations passant de Mésopotamie et d’Égypte à la Grèce et à Rome, du Proche-Orient à Byzance, des auteurs arabes à la Sicile ou à l’Espagne. Propriétés ou couleurs n’aident guère à s’y reconnaître, car de mêmes critères sont souvent partagés par plusieurs roches et la distinction est rarement faite entre pierres précieuses, semi-précieuses, marbres ou autres. Nombre de ces roches furent pourtant des marbres utilisés à l’époque antique, dont les emplois ont été largement étudiés et les carrières localisées 15. L’un d’eux peut être particulièrement bien suivi à travers les siècles : celui de Laconie dit aussi de Lacédémone, connu sous le nom de porphyre vert de Grèce, qui fut communément nommé serpentine à partir de la Renaissance. Sur un fond vert sombre, uni, se détachent une multitude de cristallisations d’un vert plus clair, tirant sur le blanc ou le jaune, Fig. 4 — Porphyre vert de prismatiques ou rectangulaires, allant de quelques millimètres à Grèce (cl. P. Julien). 16 quelques centimètres . L’apparence de cette roche rappelle ainsi, de manière très suggestive, la couleur et le dessin de la peau des serpents (fig. 4). Or, pour nombre de marbres sombres tachetés de clair, l’une des vertus les plus régulièrement évoquées dans les Lapidaires fut justement la protection contre les serpents, que leur dangerosité avait transformés en monstres maléfiques ou en gardiens redoutables dans la plupart des civilisations méditerranéennes. Dans un monde fondé sur les analogies, les symboles et les ressemblances, les marbrures de certaines pierres furent perçues comme l’évocation de reptiles, elles furent donc utilisées pour s’en protéger ou guérir de leur morsure. Le Lapidaire orphique (vers le milieu du iie s.) permet de saisir les correspondances prodigieuses attachées à ce type de roche. Il recommande contre les reptiles l’action de « la sidérite infaillible » ou « orite animée », noire et compacte, portant « à l’entour et sur tous les côtés, gravées à la surface, des fibres et des rides pareilles » qui la couvrent en tous sens. En s’en munissant, on pourra « échapper à l’engeance au dos marbré ». Ainsi se trouve bouclé le cercle des analogies. La pierre porte la peau du serpent qui luimême porte des « marbrures » ; l’une, qui est inerte, est aussi froide que l’autre, qui est actif et vivant. La correspondance étant parfaite entre les règnes, l’homme qui maîtrise la pierre se trouve en conciliation avec l’animal. La nature est donc autant un piège qu’une promesse et les marbres y tiennent une place essentielle : « La noire terre elle-même pour les hommes en proie aux larmes est mère du malheur aussi bien que des remèdes guérissant toute douleur. Mère des serpents, elle l’est aussi des antidotes. De la terre provient toute la race des pierres : on trouve donc en elles une force infinie et diverse 17 ». 15. 16.
17.
Marmi antichi, p. 231-234, 276-281 ; M. De Nuccio, L. Ungaro (n. 7). Les carrières de ce marbre ont été localisées près du village de Krokea, non loin de Sparte. Cette origine était connue dès le xvie s. Ainsi G. Agricola (De la generatione de le cose, che sotto la terra sono e de la cause de’loro effetti e nature [1550], p. 315) écrivait-il : « e verde poi il marmo lacedemonnio, che si cava in un villagio chiamato Crocea, e nel monte Taygeto ». R. Halleux, J. Schamp (n. 2), p. 101.
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Pline l’Ancien recommanda lui aussi l’ophite « qui a des taches semblables à celle d’un serpent, d’où vient son nom » ou le vert de Lacédémone 18. Dioscoride conseillait de porter en amulette l’une des trois variétés d’ophite, compacte et noire, cendrée et tachetée ou rayée de blanc. Si Isidore de Séville reprit de Pline la définition de l’ophite, tachée à l’égal du serpent, il s’abstint d’en rapporter les pouvoirs 19. En revanche, le Lapidaire de Damégeron-Évax, original grec traduit vers le ve s., interpolé de passages du grand naturaliste, fit des prodiges. L’ophite et l’orite y ont en effet fini par fusionner, probablement à cause de leur dénomination proche et de leur pouvoir commun. Les trois ophites de Pline sont devenues des orites : l’une est toujours noire, utile contre les morsures, une autre est « verte avec des taches tirant sur le blanc », protégeant de tout danger, et la troisième est utile aux rois, qui l’attachent à leur maîtresse lorsqu’ils couchent avec elle, pour qu’elle n’enfante pas 20 ! Reprise par Marbode et ses suiveurs médiévaux, cette description fut encore transformée et l’orite verte devint celle utile en cas de morsure de vipère ou de chien enragé : « L’orite vert, et sus le mors/le met, s’en ist le venin fors 21 ». Assez logiquement le porphyre vert de Grèce, le plus répandu d’entre ces marbres, avait fini par remplacer dans les textes comme dans les usages des pierres devenues bien plus rares, voire inconnues. L’assimilation de l’ophite à l’orite et de l’orite au porphyre vert peut être suivie chez plusieurs auteurs du Moyen Âge comme Albert le Grand, qui répète que parmi trois types d’orite, il en est une « verte avec des taches blanches ». Le Lapidaire de Berne évoque de curieuse manière le pouvoir abortif qui lui fut également assigné, réduite en poudre et absorbée avec de l’huile : « Ceste pierre est bone aux nonainz / Et à maintes autres putains / Qui vuelent de lor rains oevrer / Non pas por enfant recovrer 22 ». Là encore jouait le symbolisme du serpent, mais dans sa dimension désormais chrétienne et diabolique du séparateur, de celui qui désunit. C’est d’ailleurs sous le nom commun de serpentine que s’imposa ce marbre, dont la dureté fut assimilée à celle du porphyre à la Renaissance, car on y voyait alors un gage de haute qualité. En 1550, dans un ouvrage extrêmement érudit, au prix de maintes lectures et de patientes observations des marbres sur les monuments – les premières du genre – le savant allemand Agricola chercha à rétablir la vérité des textes au sujet des trois ophites ; toutefois sa science ne put corriger ce qui était devenu d’un usage commun 23. Ce long cheminement est très bien explicité dans les annotations de la traduction de Dioscoride publiée par Martin Mathée en 1553 : « La pierre que vulgairement nous nommons Serpentine fort dure, quafi comme
18. 19. 20. 21. 22. 23.
Sur la localisation des ophites, voir Marmi antichi, p. 232-234. Isidore de Séville, Etymologiarum, De lapidibus et metallis, P.L., vol. 81, 1830, XVI 5, 1, col. 159. R. Halleux, J. Schamp (n. 2), p. 253-255. L. Pannier (n. 11), p. 141. Ibid., p. 141. G. Agricola, De la generatione de le cose, che sotto la terra sono e de la cause de’loro effetti e nature (1550), p. 317.
DE THÉOPHRASTE À POLIPHILE : LES MARBRES, FONDEMENTS D’UNE VISION POLYCHROME DE L’ARCHITECTURE ANTIQUE
le Porphire, n’eft ne noire ne blanche mais toute verde obfcure, & tachettee de verd clair. Ce qui fait entendre que la Serpentine des anciens est moult différente de la nostre 24 ». La nomenclature des marbres, esquissée par Théophastre, dressée par Pline, avait traversé les siècles par des voies fort diverses mais avait fini par imposer l’idée de variétés de couleur particulièrement prestigieuses issues de la Grèce ancienne, la plus voyante et la plus « puissante » d’entre elles demeurant le porphyre vert, qui avait même servi à synthétiser les qualités magiques de plusieurs pierres. Et cela se fit dans la perte de leur origine romaine en tant que matériau de construction. Aussi plusieurs de ces marbres servirent-ils logiquement à nombre d’auteurs, qui interprétèrent les récits homériques, pour en parer l’architecture de ce mythique âge d’or.
DES
ROMANZ AU SONGE : COULEURS DE PAPIER
Rehausser pour séduire : comme les enlumineurs, les écrivains médiévaux n’hésitèrent pas à orner d’or, de gemmes et de marbres leurs versions de certains textes classiques. Cette vision chatoyante, qui s’imposa dans la « mise en romanz », trouva son plein développement à la Renaissance, à la suite de l’observation des ruines, mais aussi, plus généralement, grâce à un ouvrage fondateur conçu comme un parcours initiatique vers la Grèce vénérable. Le renouveau de la culture antique, survenu au xiie s., suscita la traduction et la réécriture de textes anciens sous la forme de poèmes épiques, les romans de Thèbes, d’Éneas, ou de Troie principalement 25. Ces récits sont l’occasion de descriptions de villes et de palais qui font la part belle aux marbres de couleur alliés aux matières les plus précieuses 26. Les structures des monuments les plus puissants ou les plus prestigieux se doivent d’y être marmoréennes : ainsi la ville d’Argos, dans le roman de Thèbes, où « n’i avoit rien qui onc fust d’arbre / car estoit touz fez de marbre » (v. 686-687). Des marbres qui, de plus, sont multicolores, comme lorsque Benoît de Sainte-Maure décrit en détail le mur d’enceinte de Troie, « De marbre blanc, inde, safrin / Jaune, vermeil, pers e porprin », de manière assez similaire aux mêmes murailles dépeintes dans le roman d’Éneas : « Li carrel sont de marbre bis / de blans et d’inde et de vermoil ». Ces bigarrures minérales habillent également les salles des palais où l’on trouve même de la vaisselle de marbre mais c’est dans la chambre des beautés de Priam, que se concentre ce type d’apparat : « Une salle fist Priamus / De marbre fin e de benus [venus] 27 ». Dans le vaste corpus des manuscrits
24.
25. 26. 27.
Martin Mathée, Les six livres de Pedacion Dioscoride d’Anazarbe de la matière médicinale, translatez de latin en françois, à chacun Chapitre sont adjoustees certaines annotations fort doctes & recueillies des plus excellens Médecins anciens & modernes (1553), p. 364. Fr. Mora-Lebrun, « Metre en romanz ». Les romans d’Antiquité du XIIe siècle et leur postérité (XIIIe-XIVe siècle) (2008). V. Gonthero, Parures d’or et de gemmes, l’orfèvrerie dans les romans antiques du XIIe siècle (2002). C. Croizy-Naquet, Thèbes, Troie et Carthage. Poétique de la ville dans le roman antique au XIIe siècle (1994).
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enluminés de ces romans, il est relativement fréquent de trouver des illustrations de ces murailles de cités ou de ces salles de palais embellies de couleurs. Digne matériau de la venustas, les marbres servirent ainsi à traduire une vision classique fortement mâtinée des charmes de l’Orient. Au cours du xve s., le regard sur l’Antiquité prit une ampleur inégalée et devint bien plus précis, ce dont témoigne tout particulièrement le fameux Hypnerotomachia Poliphili, publié en 1499 à Venise par Francesco Colonna. Poliphile, amoureux de Polia, poursuit son aimée en rêve dans un voyage initiatique jusqu’à Cythère, l’île de l’amour. Le long de ce parcours, de minutieuses descriptions inspirées par une riche culture archéologique et littéraire recréent sur le mode onirique et allégorique tout un monde de fontaines, de fabriques, de nymphées, de temples et de palais où les marbres sont légion et les couleurs souveraines, des couleurs qui ne sont pas qu’invention poétique, mais aussi réalité littéraire. Les noms en sont, pour la plupart, empruntés à Pline : blanc de Paros, jaune de Numidie, marbre claudien ou granite du forum, Luccullien ou africano de Grèce, pierre pyropœcile ou marbre syénite de Thèbaïade, jaspes rouges et verts, lapis-lazuli oriental, Synadique ou pavonazzeto (Phrygie), Carystien ou cipollino (Karystos), porphyre d’Égypte, pierre lacédémonienne ou porphyre vert de Lacédémone : une multitude de marbres auxquels s’ajoute une multitude de gemmes. Le texte mêle des appellations attestées à la qualité inspirée des descriptions. Ainsi, parmi bien d’autres statues, dauphins ou aigles en « pierre dure et plus que noire », Poliphile s’émerveille de « larges cylindres à demi frustes, en serpentin et en porphyre », de « bassins, conques et vases en marbre de Numidie, en porphyre ou en différents marbres ornés », de « dalles en marbre séparées […] d’un travail en mosaïque représentant des entrelacs et des guirlandes diversement colorés », ou d’autres qui portent des « entrelacs de jaspes, prases, calcédoine, agates et autres manières de pierres fines éclatantes ». Il s’aventure parmi des dizaines de colonnes « en serpentin et en porphyre de couleur de corail » ou encore « en lapis-lazzuli oriental très fin, étalant sa gracieuse couleur relevée par un beau semis de menues parcelles d’or » et il franchit des seuils « en pierre verte très dure, semée de petits taches grises et jaunâtres, ainsi que de diverses maculatures inégales », description très précise du porphyre vert. En bien d’autres passages chamarrés, cet auteur reconnu comme « idolastre de l’Antiquité » « sème partout de belles pierres d’Architecture 28 » et « la polychromie des fleurs se transmet aux marbres 29 ». Le succès de ce Songe fut immense, notamment en France où l’on apprécia tant l’ambition hermétique que les séduisantes visions d’édifices colorés où les marbres les plus divers « s’alternaient, comme dans une harmonie musicale qui ravissait les yeux 30 ». Par ce lyrisme, l’Antiquité avait retrouvé la plénitude de sa 28.
29. 30.
Béroalde de Verville, Le Tableau des riches inventions Couvertes du voile des feintes Amoureuses, qui sont représentées dans le Songe de Poliphile desvoilées des ombres du Songe et subtilement exposées par Béroalde (1600). A. Tagliolini, « Poliphile et les jardins, entre nature et artifice », dans Hypnerotomachia poliphili ou Le Songe de Poliphile, le plus beau livre du monde, Venise 1499/Paris 1546 (2000), p. 59. Ibid., p. 63.
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Fig. 5 — Saturne/Chronos représenté devant un temple aux colonnes d’affricano, de porphyre et de portasanta, avec des chapiteaux de porphyre vert semblables à ceux que l’on pouvait admirer dans l’église de San Saba ; fresques du Studiolo de la Villa Médicis à Rome réalisées par Jacopo Zucchi (vers 1576-1577) (cl. P. Julien).
polychromie ou plutôt une polychromie rêvée, qui n’avait rien d’historique, car architecture ou statues ne sont jamais peintes dans Le Songe, seule la pierre, seul le marbre y fait couleur. De plus, si le lecteur est censé « parcourir » une île grecque, on sait que ses monuments sont le reflet des parures de Rome et la confusion devient totale. Alors qu’en ce domaine la polychromie avait été une affaire d’Empire, elle devient indûment une marque de l’art grec. Les marbres de couleurs issus de Grèce, connus par et pour leur riche poétique, ne pouvaient qu’avoir d’abord été employés par les Grecs. Nombre d’artistes avaient déjà eu l’occasion de traduire une vision colorée des édifices antiques, avant la parution de l’Hypnerotomachia Poliphili, mais cet ouvrage servit à en généraliser et à en populariser l’idée. Plusieurs peintures du xvie s., que l’on pourrait croire uniquement fondées sur l’observation des ruines, paraissent tout autant s’inspirer des architectures rêvées et bariolées du Songe. Il serait possible d’en citer maints exemples, à l’égal des fresques de Jacopo Zucchi (1576-1577) dans le Studiolo du jardin de la villa Médicis, à Rome. Dans le cadre d’un décor consacré aux Fables d’Ésope, sur le détail de petits temples qui abritent des allégories, l’observateur attentif peut distinguer les qualités des marbres « grecs » des soubassements, des colonnes ou des entablements. Alors même qu’ils sont très fidèlement rendus, leur diversité et leur éclat s’apparentent autant à une évocation onirique qu’à une notation archéologique (fig. 5). Toutefois, la prose, la poésie ou l’image ne furent pas les principaux domaines d’application de ces matériaux. Très logiquement, ils furent avant tout et très effectivement prisés dans les édifices pour leurs qualités architectoniques mais aussi et surtout en raison de leur valeur ornementale, une valeur qui ne fut pas que décorative.
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RAPPORTANT
DE L’ANTIQ LE PLUS PARFAIT EXEMPLE
À l’époque médiévale puis à la Renaissance, la disponibilité des marbres antiques qui gisaient en quantités souvent considérables dans les ruines romaines, favorisa leur remploi sous diverses formes dans de nombreux sanctuaires et palais. Parmi de multiples variétés, leur couleur, comme leur origine, valurent à certains d’entre eux de tenir le haut du pavé et de devenir tout autant des signes religieux que des signes du classicisme, des marques de l’Antiquité. Ce fut essentiellement pour des colonnes et des pavements que l’on utilisa les marbres polychromes au cours du Moyen Âge, dans la plupart des cas extraits des ruines d’édifices romains. Les colonnes ainsi réutilisées correspondaient à des nécessités constructives, car le marbre était seul à même de soutenir certaines structures, mais elles répondaient aussi à des attentes d’ordre symbolique, fondées sur l’exégèse biblique et sur la puissance évocatrice des couleurs et des veinures de plusieurs variétés 31. À ce titre, elles furent activement recherchées pour certains des sanctuaires les plus célèbres d’Europe. Ces remplois furent directs, sans véritables modifications, avec de simples adaptations aux édifices ou, pour les couleurs et les variétés les plus signifiantes, aux ciboriums des sanctuaires. Il en alla différemment pour certains parements et, surtout, pour les pavements, où les marbres devinrent les éléments d’une palette multicolore, source de créations diverses et de significations précises. Ces pavements, directement dérivés de la mosaïque pour la finesse des pièces assemblées et de l’opus sectile des ive-vie s. pour la complexité des figures, avaient connu diverses expressions jusqu’au ixe s., mais l’usage s’en était peu à peu perdu (fig. 6). Conservé durant l’époque byzantine, ce type de sols réapparut au xie s. et s’imposa à partir du xiie s. avec des œuvres de plus en plus sophistiquées portant un décor de figures géométriques régulièrement assemblées, composées de petits blocs formant des motifs en panneaux 32. Ces décors ont reçu la dénomination de « cosmatesques », en raison d’une famille de paveurs, les Cosmati, qui en développa l’emploi avec splendeur durant plusieurs générations, à Rome notamment 33. Cet art, qui gagna les décors de cloître, les ambons, les tribunes et les autels, fut particulièrement fastueux pour les décors de sols dont Rome et Venise conservent encore les plus beaux exemples 34. Roues, damiers, parquetages, enroulements, étoiles, dents-de-scie, les figures furent infinies, jouant du décalage autant que du mariage de leurs couleurs imbriquées (fig. 7). La plupart du temps le blanc sert de fond ou de contrepoint, allié à deux voire à trois 31. 32.
33. 34.
P. Julien (n. 3), p. 51-57. F. Guidobaldi, A. Guiglia Guidobaldi, Pavimenti marmorei di roma dal IV al IX secolo (1983) ; C. Fiori, R. Barboni, L. Saragoni, Marmi e altre pietre nel mosaico antico e moderno, note storiche, classificazione e proprietà dei materiali (1998) ; F. Guidobaldi, « Sectila pavimenta e incrustationes: i rivestimenti policromi pavimenti e parietali in marmo o materiali litici e litoidi dell’antichità romana », dans Eternità e nobilità di materia. Itinerario artistico fra le pietre policrome (2003), p. 15-75. P. C. Claussen, « Marmi antichi nel medioevo romano. L’arte dei Cosmati », dans Marmi Antichi, p. 65-79 ; D. Del Buffalo, Marmi colorati. Le pietre e l’architettura dall’Antico al Barocco (2003). X. Barral i Altet, Les mosaïques des pavements médiévaux : Venise, Murano, Torcello (1985) ; A. Crovato, I pavementi alla Veneziana (1989) ; P. Hills, La couleur à Venise (1999), p. 44-51.
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Fig. 6 — Disque de porphyre d’Égypte bordé de triangles de porphyre vert et de blanc de Carrare ; ce type de motif a été très largement repris à l’époque médiévale (pavement de la Domus d’Amour et Psyché à Ostie, ive s. apr. J.-C.) (cl. P. Julien).
Fig. 8 — Pavement de l’église Santa Prassede, chapelle San Zenone à Rome (xiie s.) (cl. P. Julien).
Fig. 7 — Disques de porphyre vert et rouge, bordés d’enroulements et de dentsde-scie du même marbre (pavement restauré de l’église San Clemente à Rome, xiie s.) (cl. P. Julien). Fig. 9 — Plaques de porphyre vert et de porphyre d’Égypte sur un fond de blanc de Carrare sculpté, enrichi de mosaïques dorées (clôture de la schola cantorum de l’église San Saba à Rome, xiiie s.) (cl. P. Julien).
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couleurs alternées : le porphyre rouge d’Égypte, le porphyre vert de Grèce et, parfois, le jaune de Numidie. Carrés, rectangles, triangles, cercles, losanges ou hexagones de toutes tailles servent à composer des motifs des plus simples aux plus complexes dans un aspect mosaïqué très recherché (fig. 8). Leur assemblage en cadres crantés, en rubans élégants ou en cercles étoilés ou concentriques, vient souvent s’aligner ou se lover autour de plaques unies vertes ou rouges de grandes dimensions qui mettent très explicitement en valeur et la couleur et la surface de ces marbres. Mais, alors que le blanc et le jaune – ou d’autres variétés et couleurs parfois – servent de champs ou d’éléments d’appoint, les deux « porphyres » – rouge et vert – sont essentiels à la majorité des compositions, que ce soit en petites découpes agencées ou en larges plaques enserrées. L’essence et la belle apparence de ces deux matériaux en est la cause, car ils n’étaient pas les plus disponibles, loin de là, alors même qu’ils étaient les plus difficiles à mettre en œuvre : c’est d’ailleurs la dureté extrême du vert de Lacédémone qui lui valut son appellation de porphyre, à l’égal de la roche égyptienne. Dès lors, pourquoi avoir choisi de privilégier ces pierres sinon pour leur passé et leurs couleurs ? Des couleurs qui ne sont pas sans significations : ainsi, éclairé par le blanc de pureté, le protecteur porphyre grec, vert de la fertilité, de l’état de grâce et de la vie nouvelle, est associé au porphyre de la Passion et des supplices, rouge du feu de la foi et de la plénitude du sacerdoce, de même que, parfois, au jaune de l’amour divin et de la sagesse éternelle, voire à l’or en incrustation, éclat de Dieu lui-même, lorsqu’il enrichit des colonnes ou des décors muraux (fig. 9). Il y a, dans ces compositions, un évident souci d’accord entre les couleurs et les formes, une recherche d’harmonie qui semble assimiler le sol des sanctuaires à un parcours vers le sacré, à une préfiguration des beautés du Paradis. Comme si avait été mise en application cette parole divine tirée d’Ézéchiel (28.14) : « Je t’avais placé et tu étais sur la sainte montagne de Dieu ; Tu marchais au milieu des pierres étincelantes ». Mais il y a aussi, dans l’attrait toujours plus affirmé pour ces deux pierres, un rapport mythique à la Grèce et à l’Égypte, ces pays qui ont tant fasciné les penseurs chrétiens. La « christianisation » de l’impérial porphyre rouge, illustrée par l’histoire des quatre saints couronnés, a fait l’objet de multiples études 35. Cependant, même si le porphyre de Lacédémone a connu un destin moins remarqué et n’a pu servir à des œuvres aussi exceptionnelles que la pierre d’Égypte – par sa couleur verte, il se prêtait moins à la figuration humaine – il n’en a pas moins suivi un parcours similaire, qui mériterait d’être plus amplement étudié, des délices des palais romains à l’écriture de l’espérance dans les sanc35.
Le porphyre fut auréolé de la gloire des premiers temps de l’Église. Sa renommée, déjà exceptionnelle sous l’Empire romain, fut adaptée aux exigences cultuelles par la Passio des Quatre Saints couronnés, des sculpteurs chrétiens censés exceller dans sa taille extrêmement difficile grâce aux prières qu’ils récitaient sur leurs outils. Lorsque Dioclétien exigea qu’ils fassent une statue d’Esculape, ils refusèrent et furent martyrisés ; Ph. Malgouyres, Porphyre. La pierre pourpre des Ptolémées à Bonaparte (2003), p. 30-31. Ce récit marque symboliquement la fin de l’asservissement de cette pierre aux idoles et la vocation de sa couleur de feu à signifier la Passion, le martyre sanglant. Le porphyre devint ainsi l’une des pierres de fondation de l’Église, signe honorifique de l’héritage antique transmis par Constantin et revendiqué par les papes.
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tuaires chrétiens. Un exemple très significatif peut ainsi être donné de l’aura étonnante et très changeante dont bénéficia ce marbre suivant les époques : à Bethléem, dans la grotte de la Nativité, les pèlerins se recueillaient devant une étoile de marbres de couleurs, de type cosmatesque, au centre de laquelle était enchâssé un disque de porphyre vert qui marquait l’endroit précis de l’enfantement. Les fidèles étaient invités à embrasser cette « pierre serpentine, qui est aussi un marbre brun vert, portant des taches de vert gay » qui distinguait le lieu du renouveau, de la régénérescence des hommes par la venue du nouvel Adam 36. Il est fascinant, dans la description de ce marbre hautement symbolique, faite au début du xviie s., de voir persister pour évoquer les taches de vert clair le « vert gay » qui reprend la définition de Pline l’Ancien, celle d’un marbre « plus riant qu’aucun autre ». Cet usage lexical qui a traversé les siècles, confirme le fait que l’utilisation et la description du porphyre vert se firent dans la connaissance valorisante de ses origines grecques, transmises par les textes. À la Renaissance, les marbres de couleur connurent des emplois très divers. Leur connaissance et leur identification, désormais recherchées, furent renouvelées par la lecture attentive des écrits antiques, comme en témoigne leur citation dans les traités d’Alberti (vers 1445) ou de Filarète (1464). Dans le domaine des applications architecturales, se développa au xve s. en Italie la pratique des incrustations en façade, que ce soit sur de multiples édifices vénitiens ou en des lieux devenus aussi emblématiques de la modernité que le Tempio Malatestiano de Rimini ou la Chartreuse de Pavie. Le principe n’est pas celui d’un décor couvrant, sauf cas exceptionnel comme parfois à Venise, selon le modèle byzantin 37. Hormis pour des corniches ou des moulures servant de cadre, l’essentiel des emplois polychromes porte sur des disques ou des panneaux quadrangulaires incrustés dans la pierre ou le marbre blanc (fig. 10). Il s’agit en fait d’une notation colorée, une mise en valeur des marbres antiques sertis comme des bijoux dans des encadrements souvent sophistiqués. Cette présentation spectaculaire assimile ces pierres à des joyaux, pour leurs couleurs et leur brillance mais aussi en tant que faire-valoir de
36.
37.
Jean Zuallazart, Le tres devot voyage de Ierusalem : avecq les figures des lieux saincts et plusieurs autres tirées au naturel (1608), p. 204-205 : « Un autel long d’environ six pieds et large de trois, fur lequel est une table peinte, contenan l’histoire de la nativité dudit Sauveur : le dessoubz duquel autel est creux, et se termine sa concavité par derrière à demy cercle en forme d’hémisphère. Quant au bas et sur terre, le pavement est faict de marbre blanc, portant une estoille à quatorze rayons ou pointes, faite aussi de marbre de diverses couleurs : au milieu de laquelle estoille est un petit rond enfoncé d’environ deux doigts ayant demy pied en diamètre, lequel est faict d’une pierre serpentine, qui est aussi un marbre brun vert, portant des taches de vert gay : icelle pierre ronde, toutes les nations Chrestiennes, mesme les Turcs, Perfiens, Sarazins & Mahometistes, révérent, baifent et souvent arrousent d’abondance de larmes, & y est mise pour enseigncment du propre lieu, ou Iesus Christ […] a esté enfanté de l’immaculée vierge Marie ». À Venise, dès l’époque médiévale, s’était imposé l’usage de décors couvrant à l’aide de plaques disposées « à livre ouvert », des plaques sciées de manière à créer des effets de surface par symétrie de leur dessin. Cet usage, qui répondait à de très précises préoccupations symboliques, perdura à la Renaissance, avec des chefs-d’œuvre comme l’église Santa Maria dei Miracoli ou la Scuola Grande di San Marco. Toutefois il s’agit essentiellement de marbres clairs qui servent de fond pour des découpes polychromes plus soutenues ; pour le symbolisme des panneaux « à livre ouvert », P. Julien (n. 3), p. 31-37.
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Fig. 10 — Venise, Mauro Codussi et Pietro Lombardo, Scuola grande di San Marco, fin du xve s. (cl. P. Julien).
Fig. 11 — Ovale de pavonazzeto antique et un panneau rectangulaire de sarrancolin des Pyrénées rappelant le portasanta, renforcent le « classicisme » de la composition (façade du Louvre à Paris réalisée par Pierre Lescot en 1552) (cl. P. Julien).
l’Antiquité. Les teintes ainsi magnifiées sont systématiquement le vert et le rouge, sous la forme des porphyres grec et égyptiens, encore et toujours associés 38. Cette continuité, qui perpétuait le goût médiéval, fut renforcée par la fascination de plus en plus revendiquée pour tout ce qui pouvait symboliser les civilisations grecques et égyptiennes, aussi attirantes que mystérieuses pour les humanistes, ce que résuma l’architecte et théoricien Sebastiano Serlio, en 1550, lorsqu’il rédigea à la fin de son livre III : « Ung traicté d’aulcunes choses merveilleuses d’egipte ». Pour lui, s’il était possible de contempler « ce que les Grecz au temps passé ont faictz », ces œuvres malheureusement « toutes consumées » surmonteraient les merveilles des anciens romains, tout comme le feraient les merveilles d’Égypte 39. 38.
39.
Une même association se retrouve également dans la peinture, où les miracles de la perspective permirent la représentation de pavements sophistiqués de type cosmatesque, où le vert du renouveau et le rouge de la Passion composent des sols symboliques, notamment pour des Annonciations telle celle de Marco Palmezzano (1460-1539), à la pinacothèque du Vatican ou celle du Maître de Moulins (vers 1500), au Louvre. Sebastiano Serlio, Des Antiquités, Le troisiesme livre translaté d’italien en franchois (1550), fol. 74 : « Ainsi que maintenant nous avons veu et apperceu que les choses des anciens Romains estoient fort merveilleuses devant nos yeulx : Mais si possible estoit donques d’estre desparty par la veue, ce que les Grecz au temps passé ont faictz (lesquelles sont toutes consumées) paradventure porroient surmonter toutes les choses
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Si l’usage des incrustations fut peu à peu délaissé en Italie, il connut en France d’intéressants développements dans la seconde moitié du xvie s. où murailles et portails furent souvent « de pierres enrichis », notamment dans l’art royal. L’illustration la plus spectaculaire de ce phénomène demeure la façade du palais du Louvre d’Henri II, élevée par Pierre Lescot à partir de 1550, là demeurent encore de larges plaques et de grands ovales de marbre antiques et modernes qui, même après avoir subi maintes restaurations, témoignent du goût pour le rappel coloré d’une idée impériale de l’Antiquité (fig. 11). Il est possible de retrouver, vers la même époque, une pratique identique sur le portail triomphal du château d’Écouen ou sur d’autres châteaux, comme celui de Vallery (Yonne) ou du Fraisse (Haute-Vienne). Il subsiste même un exemple, commenté dès sa création, de ces rehauts traités en manière de joyaux : le portail du château d’Anet, que son auteur, Philibert De L’Orme, érigea vers 1550 pour la maîtresse d’Henri II, Diane de Poitiers, et qu’il décrivit ainsi. Tout le portail fait de pierre de Vernon enrichie de marbres, porphyres, serpentins, et de bronze signamment sur les portes, et aux tables d’attente. Les métopes qui sont entre les triglyphes, et tous les triglyphes, mesme ceux qui sont sur l’arceau de la porte, sont de marbre noir : tous les bouillons de fueilles et fruicts se voyent de bronzes entre les triglyphes […] Aux costez et par le dessus des petites portes, sont terrasses enrichies à l’entour de tables d’attente, estans de marbre noir avec leurs entrelacs […] au plus haut, un ornement fait de belle pierre blanche de Vernon, et de marbre noir aux tables d’attente 40.
Sur ce portail les restaurations, mais aussi l’oxydation des marbres, ne permettent plus de repérer formellement la subsistance de porphyre vert, attestée par les textes (fig. 12). Toutefois la citation conjointe du porphyre et de la serpentine par De L’Orme souligne leur utilisation dans la continuité des usages italiens. De plus, les découpes décoratives colorées encore en place, telles que les plaquettes, billettes, triangles, denticules, cabochons ou pointes de diamant, rappellent l’importance de l’aura classique conférée à ce type de composition, ce que rapporta Ronsard en chantant les palais d’Henri II « Qui volontiers ont l’entrée / De grands
40.
Fig. 12 — Portail du château d’Anet réalisé par Philibert De L’Orme (1550) (cl. P. Julien).
Romaines, veue que Rome et Venise sont fort aornées et enrichies des pillages et usurpations, qui furent dudict pays admenées. Mais que declairerons nous des plus merveilleuses œuvres d’Egipte ? ». Philibert De L’Orme, Le Premier tome de l’architecture (1567), p. 246.
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Fig. 13 — Pavement de la chapelle du château d’Anet réalisé par Philibert De L’Orme, 1552 (cl. P. Julien).
Fig. 14 — Grand disque d’affricano, ovales de portasanta et découpes de porphyres (pavement de la chapelle du château d’Anet réalisé par Philibert De L’Orme, 1552) (cl. P. Julien).
Fig. 15 – Découpes de porphyres autour d’un carreau de portasanta (pavement de la chapelle du château d’Anet réalisé par Philibert De L’Orme, 1552) (cl. P. Julien).
Fig. 16 — Juxtaposition d’un motif d’opus sectile de la Domus Tiberiana (ier s. apr. J.-C., Rome, Antiquarium du Palatin) avec un motif du pavement de la chapelle du château d’Anet (1552) (cl. P. Julien).
marbres accoustrée 41 ». La chapelle de ce même château conserve un témoignage plus exceptionnel encore de cet engouement pour les polychromies marmoréennes. Le pavement de la chapelle d’Anet fut réalisé vers 1550-1552 sous la direction de Philibert De L’Orme 42. La précocité de cette date est tout à fait essentielle, car il s’agitlà de la première application de la technique du commesso, cet art de l’agencement des 41. 42.
Pierre de Ronsard, Au Roy Henry (1552) (éd. Œuvres complètes, 1857, p. 130). J.-M. Pérouse de Montclos, Philibert De l’Orme, Architecte du roi (1514-1570) (2000).
DE THÉOPHRASTE À POLIPHILE : LES MARBRES, FONDEMENTS D’UNE VISION POLYCHROME DE L’ARCHITECTURE ANTIQUE
marbres hérité de l’opus sectile romain qui ne se développa véritablement en Italie qu’à partir des années 1560 43. Le sol de cette chapelle n’a en effet plus rien à voir avec l’art cosmatesque. Dans sa plus grande partie, il joue avec les marbres noir et blanc, couleurs du roi et de sa maîtresse, disposés en une immense grille formée d’ellipses et de losanges décroissants qui épousent une forme hélicoïdale complexe (fig. 13). Au centre, un vaste disque formé de cercles concentriques accueille de multiples assemblages de motifs géométriques composés de plusieurs marbres antiques, affricano, portasanta, porphyre rouge et porphyre grec (fig. 14). Ces pierres étaient achetées à Rome où elles étaient tirées des ruines dont on sciait les blocs et les colonnes en « tables » ou panneaux très recherchés. Ils faisaient alors l’objet d’un tel commerce qu’ils nécessitaient des licences d’exportation 44. Dans la chapelle du château d’Anet, se trouvent ainsi de nouveau rassemblés les deux porphyres, en carrés, en disques ou en hexagones méticuleusement découpés (fig. 15). Mais ils le sont avec d’autres variétés grecques, l’affricano et le portasanta auxquelles De L’Orme accorde tout autant d’importance. Les dessins sont pour certains directement issus de motifs antiques. Ainsi les roses quadrilobées munies d’un cœur étoilé en porphyre grec ont-elles été copiées sur un modèle très proche d’un fastueux décor de la Domus Tiberiana, demeure impériale du Palatin, que l’architecte du roi avait dû admirer lors de son séjour à Rome (fig. 16). S’il ne s’agit pas ici d’un système de représentation, tel qu’avaient pu le mettre au point et le développer les Cosmati, l’intention est pour partie la même : écrire avec ces pierres une ode à l’Antiquité. Ce qu’exprima parfaitement Du Bellay, lorsqu’il loua la « belle architecture », les diverses merveilles et « la luisante chappelle » d’Anet en dédiant ainsi son poème à Diane de Poitiers : « Ces ouvrages (Madame) à qui bien les comtemple / Rapportant de l’antiq’ le plus parfait exemple ». Sous la direction du plus génial architecte de « l’invention du classicisme » à la française, l’hommage esthétique et symbolique à ce passé vénéré était alors triple, tant par le principe de l’emploi des marbres que par l’origine de ceux-ci et la source de leur agencement. L’utilisation explicite de variétés antiques finit par disparaître en France dans la seconde moitié du xvie s., probablement parce que cette notation savante n’était plus de mise dans une architecture désormais théorisée, où un certain nombre de normes classiques avaient été instituées quant aux règles, dont la couleur était exclue. Toutefois le goût pour les rehauts de marbres colorés sur les édifices subsista largement, des Tuileries de Catherine de Médicis au Versailles de Louis XIV, avec la mise en application de variétés « modernes » issues de Toscane, des Flandres ou des Pyrénées. La référence fut 43.
44.
F. M. Tuena, « I marmi commessi nel tardo rinascimento romano », dans Marmi antichi (1997), p. 80-97 ; A. Gonzàlez-Palacios, « Le origini della tarsia in marmi colorati: quel che si sa e qualcosa che non si sa », dans Le parole e i marmi, studi in onore di Raniero Gnoli (2001), p. 963-981 ; A. Giusti, « Da Roma a Firenze: gli esordi del commesso rinascimentale », dans Eternità e nobilità di materia (n. 32). En 1550, le cardinal Charles de Guise puis le cardinal Jean du Bellay avaient obtenu pour le roi de France des licences d’exportation pour des statues, tables de marbre et figures diverses. B. Jestaz, « L’exportation des marbres de Rome de 1535 à 1571 », Mélanges d’archéologie et d’Histoire de l’École française de Rome 2 (1963), p. 454.
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alors plus romaine que grecque, dans une comparaison désormais voulue à l’avantage des modernes. Le souverain conviait les richesses du royaume à célébrer sa gloire, comme les empereurs en avaient usé à Rome avec les ressources de l’Empire. Charles Perrault allait ainsi pouvoir comparer « Le siècle de Louis au beau siècle d’Auguste 45 ». Étrange destin que celui de ce matériau, soumis au long regard des hommes. Les marbres grecs ont traversé les siècles, dans la littérature comme dans les monuments, pour devenir des emblèmes du classicisme. Curieusement, si la véritable nature polychrome de l’architecture antique n’a jamais été soupçonnée, elle fut sublimée dans une brillante vision marmoréenne. Paradoxalement, seuls les marbres blancs continuèrent à endosser cette « beauté idéale » de l’art grec, dans le domaine de la sculpture, dans une vision tout aussi mythifiée de leur emploi d’origine 46.
45. 46.
Charles Perrault, Le siècle de Louis le Grand (1687), p. 3. I. Manfrini, « Entre refus et nécessité de la couleur, la sculpture grecque antique », dans L’Antiquité en couleurs, catégories, pratiques, représentations (2009), p. 21-41 ; Ph. Jockey, Le mythe de la Grèce blanche. Histoire d’un rêve occidental (2013).
Iconicité du corps : l’efficacité de la couleur. Le laboratoire de l’histoire Ivonne Manfrini
RÉSUMÉ L’état des traces et la force de nos a priori culturels font obstacle à l’appréciation de l’efficacité de la sculpture polychrome antique. À partir de quelques exemples bien conservés, la mise en perspective historique, de la Renaissance à l’époque contemporaine, permet de constater la subtilité et la diversité de la pratique coloriste. Une subtilité qui implique l’inscription dans le contexte culturel dans lequel la couleur interagit pour contribuer à créer une proximité avec le divin ou l’invisible. On peut ainsi tenter de proposer comment, malgré la fragilité des traces, la polychromie des statues antiques culturellement construite permet à son tour de donner à voir une interaction paradoxale, entre proximité et distance, avec le monde des dieux. MOTS-CLEFS Antiquité, polychromie de la sculpture antique, corps, couleur, Grèce antique, Renaissance, époque contemporaine, monde des dieux.
SUMMARY About the role played by colors in body iconocity The lack of sources and the weight of our cultural patterns constitute obstacles to the access of the understanding of the Ancient sculpture’s polychromy. From some well preserved examples, between Renaissance and contemporary period, it’s possible to point out some aspects of the “color of time” in its subtlety and variety. A subtlety rooted in the cultural context in which color interacts in order to produce proximity with divinity and invisibility. Despite the poorness of sources, one may propose how ancient Greek sculpture’s polychromy, culturally informed, allow to make visible the paradoxe of interaction, between proximity and distance, with Gods World. KEYWORDS Antiquity, Ancient sculpture’s polychromy, body, colours, Ancient Greece, Renaissance, contemporary period, Gods World. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƆƳƩƭƮƿưƭƶƫƷƲƸƶǁuƥƷƲƵƫƥƳƲƷƩƯƩƶuƥƷƭƮƿƷƫƷƥƷƲƸƺƴǁuƥƷƲƵ ƌƮƥƷƠƶƷƥƶƫƷƼưƸƳƲƯƩƭuuƠƷƼưƮƥƭƫƨǀưƥuƫƷƼưƳƲƯƭƷƭƶƷƭƮǁưuƥƵƳƴƲƮƥƷƥƯƢƻƩƼưƩuƳƲƨƣƪƲƸưƷƫ ƶƼƶƷƢƩƮƷƣuƫƶƫƷƫƵƥƳƲƷƩƯƩƶuƥƷƭƮƿƷƫƷƥƵƷƫƵƳƲƯǀƺƴƼuƫƵƥƴƺƥƣƥƵƧƯƸƳƷƭƮƢƵƑƩƥƹƩƷƫƴƣƥƲƴƭƶuơưƥ ƮƥƯƠƨƭƥƷƫƴƫuơưƥƳƥƴƥƨƩƣƧuƥƷƥ ƥƳƿƷƫưƆưƥƧơưưƫƶƫơƼƵƷƫƶǀƧƺƴƲưƫƩƳƲƺƢ uƳƲƴƲǀuƩưƥƨƭƥƳƭƶƷǁ ƶƲƸuƩƷƫƯƩƳƷƿƷƫƷƥƮƥƭƷƫƳƲƭƮƭƯƣƥƷƫƵƪƼƧƴƥƹƭƮƢƵƳƴƥƮƷƭƮƢƵƑƭƥƯƩƳƷƿƷƫƷƥƳƲƸƳƴƲƾƳƲƬơƷƩƭƷƫư ƩƧƧƴƥƹƢƶƷƲƳƲƯƭƷƭƶƷƭƮƿƳƯƥƣƶƭƲuơƶƥƶƷƲƲƳƲƣƲƷƲƺƴǁuƥƨƴƥƧƭƥưƥƶƸưƩƭƶƹơƴƩƭƶƷƫƨƫuƭƲƸƴƧƣƥ uƭƥƵƩƧƧǀƷƫƷƥƵuƩƷƲƬƩƣƲƢƷƲƥƿƴƥƷƲƑƳƲƴƲǀuƩƩƳƣƶƫƵưƥƳƴƲƶƳƥƬƢƶƲƸuƩưƥƳƴƲƷƩƣưƲƸuƩuƩƳƲƭƿư
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à propos de l’auteur I. Manfrini, Haute école d’art et de design, Genève/Geneva University of Art and Design, Genève, Suisse.
abréviation bibliographique The Color of Life = R. Panzanelli (éd.), The Color of Life. Polychromy in Sculpture from Antiquity to the Present (2008).
ICONICITÉ DU CORPS : L’EFFICACITÉ DE LA COULEUR
Façonné par le contexte social et culturel qui baigne l’acteur, le corps est ce vecteur sémantique par l’intermédiaire duquel se construit l’évidence de la relation au monde : activités perceptives, mais aussi expression des sentiments, étiquettes des rites d’interaction, gestuelles et mimiques, mise en scène de l’apparence, jeux subtils de la séduction, techniques du corps. […] Appliquée au corps, elle (la sociologie) s’attache à l’inventaire et à la compréhension des logiques sociales et culturelles qui se côtoient dans l’épaisseur et les mouvements de l’homme 1. Le corps humain n’est que le point de départ d’une métamorphose destinée à faire paraître le corps du dieu comme une vision impressionnante et éblouissante 2. L’impuissance des mots à dire la couleur et les émotions qu’elle suscite, ce lieu commun de tous les discours sur la peinture, traduit un désarroi plus fondamental devant une réalité sensible qui déroute les procédures habituelles du langage 3.
S’intéresser à la polychromie de la sculpture grecque antique c’est affronter un spectre de problématiques qui vont de l’examen d’un corps culturellement construit à sa « reconstruction » en image pour exprimer la communication, la médiation, entre les hommes et les dieux, entre les hommes et l’au-delà, entre les hommes et les autres quel(le)s qu’ils (ou elles) soient. Écrire cette histoire, c’est donc interroger l’efficacité de la couleur dans cette dynamique interactive, c’est également faire converger les enquêtes ancrées dans des champs disciplinaires variés, de l’histoire de l’art à l’histoire des religions et des pratiques culturelles en général. Le corps a une histoire et l’histoire du corps grec et de son iconicité en constitue un chapitre 4. Mais les traces de la « condition corporelle » des Grecs, ainsi que celles des images et des couleurs sont lacunaires, difficiles à repérer et à interpréter d’autant plus que les a priori pluriséculaires, cristallisés, entre autres, par la critique philosophique, hantent notre imaginaire. Non seulement il faut se défaire d’une Antiquité peuplée de statues blanches, une blancheur qui a été un repère identitaire fondamental, donc excellent, et accepter que la couleur ne se limite ni au naturalisme ni à l’illusionnisme mimétique comme on le verra ; mais il faut également se confronter à la difficulté de formuler les réalités de la couleur. C’est un lieu commun, les concepts et les mots semblent inadéquats pour dire son efficacité, l’effet qu’elle exerce sur le spectateur, et cela qu’il s’agisse de peinture ou de sculpture 5. Les lignes qui suivent se proposent de pointer quelques questions, de formuler des amorces de problématiques en suivant des images à travers le temps. On débordera donc de l’espace antique grec, pour offrir aux archéologues et aux scientifiques, qui procèdent aux analyses de laboratoire et aux tentatives d’explorations virtuelles, un aperçu de la gamme des usages subtiles de la couleur dont témoigne le savoir-faire des imagiers inscrits
1. 2. 3. 4.
5.
D. Le Breton, La Sociologie du corps (2004), p. 3. Fr. Frontisi-Ducroux, « Les limites de l’anthropomorphisme. Hermès et Dionysos », dans Ch. Malamoud, J.-P. Vernant, Corps des dieux, Le temps de la réflexion VII (1986), p. 196. J. Lichtenstein, La Couleur éloquente (1999), p. 12. Pour une histoire générale du corps, qui ne mentionne cependant pas la Grèce antique, voir G. Vigarello, A. Corbin, J.-J. Courtine (éds), Histoire du corps (2005) ; J. Le Goff, N. Truong, Une histoire du corps au Moyen Âge (2003), en particulier p. 11, 17-38. J. Lichtenstein (n. 3) ; D. Batchelor, Chromofobia (2008), voir chap. « Chromophilia ».
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dans des espaces culturels et temporels variés. En pointant quelques exemples de sculptures, se situant entre le xve s. et le xxie s., dont la polychromie est bien conservée − mieux conservée que la polychromie des sculptures grecques antiques −, il s’agit d’ouvrir un autre laboratoire, un autre champ d’observation, celui des usages efficaces de la couleur à travers les temps longs de l’histoire des images, afin de repérer à la fois les continuités et les ruptures ainsi que ce qui fait obstacle à la réception de la polychromie antique.
DÉTOUR
PAR L’HISTOIRE : COULEUR ET DISPOSITIF
Au cours de l’histoire occidentale des images tridimensionnelles, des objets anthropomorphes polychromes s’inscrivent délibérément dans une visée réaliste, la couleur y joue par conséquent un rôle majeur. Par exemple, dans la Florence bourgeoise du xve et du xvie s., ce souci de réalisme passe par l’utilisation de moulages pris sur le vif, qui sont ensuite transformés, modifiés en sculpture ou qui servent d’ébauche pour une réalisation, monochrome ou polychrome, dans un autre matériau. De cette pratique, dont témoignent les sources écrites, sont ainsi issus des objets votifs en cire, grandeur nature, habillés de vêtements et exposés dans certaines églises à Florence, à Sienne et à Prato. À propos du déplacement de ces objets devenus trop encombrants, un texte de 1665 cité par A. Warburg, exprime le regret de voir disparaître ces ex-voto dont la grande efficacité dévotionnelle, l’« efficacissimo mezzo », est soulignée y compris dans ce qu’elle a de rationnellement incompréhensible : « non potendo l’intelletto nostro arrivare cosi facilmente a conoscere le cause alla produzione degli effetti ». Des effets qui produisent une émotion spirituelle : « un’aumento di spirito, di speranza e di fede più viva alla intercessione dei santi ». L’apport de ce témoignage à l’histoire de l’efficacité des images colorées reste tout entier à explorer. Mais dans le cadre présent, on retiendra cet informulable pouvoir d’images dont la proximité avec la réalité est soulignée : « simili esteriori sufficienti » 6. Aujourd’hui les cires ont disparu mais il reste des portraits en buste également issus de la technique du moulage sur le vif 7 : celui du cardinal Giovanni dei Medici (fig. 1), une terre cuite polychrome attribuée à Antonio d’Orsino Benintendi, datant de 1512 environ et actuellement conservée au Victoria and Albert Museum, en est un bon exemple 8. Le buste, de grandeur nature (38,5 cm), est clairement issu de moulages partiels, « pris » sur la personne, puis retravaillés par le sculpteur. L’effigie de Giovanni dei Medici était placée dans une niche à l’intérieur d’une maison privée. Travaillée en ronde bosse avec le souci évident d’exprimer un réalisme marqué quel que soit le point de vue adopté, elle devait donner au spectateur le sentiment d’être suivi du regard tout comme elle lui permettait de percevoir l’effet d’une présence variant selon sa « déambulation » dans l’espace partagé avec l’effigie. Même si le temps a modifié la polychromie originale, l’effet de résonance 6. 7.
8.
A. Warburg, La rinascita del paganesimo antico (1980), p. 137-141, 141. J. Schuyler, Florentine Busts: Sculpted Portraiture in the Fifteenth Century (1972). Pour la technique de l’empreinte à partir d’un mort, voir J. Schuyler, « Death Masks in Quattrocento Florence », Source V.4 (1986), p. 1-6. Voir en dernier lieu The Color of Life, p. 100, fig. 1.
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avec les familiarités sensorielles du quotidien induisait un déploiement d’une sensorialité en partage, favorisant l’« aumento di spirito » produit par les « simili esteriori sufficienti » dont il a été question ci-dessus. Les couleurs activaient donc la proximité avec l’expérience du spectateur et du coup la proximité avec un absent, mort ou vivant, cependant présent par l’image. Cet effet devait être plus saisissant encore dans l’espace des églises puisque les effigies en cire, mais portant de véritables vêtements, étaient représentées en mouvement 9. Dans ce cas, ce qui est inscrit c’est la présence continue, dans l’espace du religieux, face au divin et à la communauté, d’une Fig. 1 — Buste de Giovanni dei Medici (1512), assemblée d’absents représentant l’excellence Antonio d’Orsino Benintendi, Victoria and civique et sociale. La sensation d’illusion, Albert Museum (A 29.1982), Londres (d’après suscitée par les formes et les couleurs dans The Color of Life, p. 100). l’espace partagé avec les fidèles, créait une proximité plus marquée que dans le cadre du dispositif « niche » propre au buste du cardinal Giovanni dei Medici. Dans un cas comme dans l’autre, cependant, un lien visuel, un autre type de proximité, avec des pratiques antiques pourrait avoir été donné à voir. Les spécialistes de ce dossier font en effet remonter ces pratiques florentines à celles des Romains qui plaçaient les portraits des ancêtres, moulés et peints, dans des niches disposées dans l’espace de l’atrium, des moulages exhibés lors de procession funéraires familiales. Cet usage du Ius imaginum est mentionné à la fois dans un passage de Pline l’Ancien, lu et commenté à Florence depuis le début du xve s. 10. À Florence, au xve s., l’efficacité de ces images polychromes était donc inscrite dans un système qui inclut le sujet, la forme, la matière, la mise en espace, la fonction et la relation aux pratiques romaines. Le Ius imaginum revisité des Romains devenait ainsi un Ius imaginum florentin qui inscrivait des pérennités visuelles, celle de la terre cuite n’est pas celle de la cire, de proximité, inscrites dans des espaces favorisant chacun de manière différente un commerce entre les corporéités physiques et iconiques à l’enseigne d’une filiation excellente avec Rome.
9. 10.
A. Warburg (n. 6). Pline l’Ancien, Histoire naturelle XXXV 6-11 (éd. et trad. J.-M. Croisille, CUF, 1985). Pour le dossier sur ce sujet voir H. Meyer, RE VII.2 (1914), s.v. « Imagines maiorum », col. 1098-1104 ; pour la discussion sur la disposition des bustes dans les maisons romaines voir le commentaire de J.-M. Croisille à la traduction de Pline, p. 135, n. 1-3 du paragraphe 6. Les Florentins ont également pu avoir connaissance des pratiques romaines en lisant Polybe, Histoires VI 53, dont le texte était lu à Florence depuis 1417, voir R. Hanslik, RE XXI.2 (1952), col. 1575.
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Fig. 2 — Buste de Benoît XIII (1725), Bartolommeo Mazzuoli, Museo Nazionale di Palazzo Venezia, Rome (d’après The Color of Life, p. 104).
Fig. 3 — Buste de Benoît XIII (1724-1730), artiste inconnu, collection privée, Milan (d’après The Color of Life, p. 106-107).
Deux autres bustes plus tardifs permettent d’élargir le champ des observations et de comparer l’efficacité de la blancheur avec celle de la polychromie. Il s’agit d’effigies, datant de 1725-1730, identifiées comme celles du pape Benoît XIII 11. L’une est une terre cuite polychrome attribuée à Bartolommeo Mazzuoli, grandeur nature (41 cm), représentant le pape portant le vêtement et le bonnet rouges qui caractérisent sa fonction (fig. 2). Le modelé illusionniste traduit l’âge et la psychologie du personnage. Malgré la blancheur du matériau, le buste en marbre, peut-être dû à Pietro Bracci, est plus vivant (fig. 3). Le modelé favorise les jeux d’ombre et de lumière qui mettent le marbre en mouvement et provoque une interaction visuelle avec le spectateur plus grande encore que dans le cas du buste de Giovanni dei Medici cité plus haut. En termes de réalisme, l’efficacité de la monochromie blanche de l’un n’est pas moindre que celui de la polychromie de l’autre parce que l’illusion dépend bien évidemment du modelé, de la forme. Mais la blancheur rétablit l’écart et la distance, en gommant l’effet de sensorialité partagée, un écart inscrit également par des dimensions supérieures à la nature (76,4 cm de haut mais 93,1 cm avec le socle ajouté plus tardivement). L’efficacité du blanc est de l’ordre de la tension entre réalité et idéalité. En dépit du sujet, les deux bustes ne sauraient être plus différents ; l’écart se marque également dans le modelé, plus statique dans la terre cuite ; ou bien s’agit-il une fois encore d’inscrire une sorte de tension par rapport à la réalité ? La comparaison entre ces effigies représentant le même sujet, à la même époque, illustre bien la subtilité des effets du marbre blanc et de la terre cuite 11.
The Color of Life, p. 104-106.
ICONICITÉ DU CORPS : L’EFFICACITÉ DE LA COULEUR
polychrome, même en l’absence d’information sur la fonction, la disposition choisie dans l’espace est déterminante, on l’a vu, pour activer l’efficacité visuelle du dispositif. La polychromie introduit la contingence de l’histoire à l’enseigne de la sensorialité quotidienne, celle de la blancheur inscrit la contingence de l’histoire dans les temps longs de la « filiation excellente », une filiation donnée à voir dans des espaces probablement davantage marqués par la dimension publique. L’inscription de la polychromie dans un dispositif est rarement documentée dans son intégralité. Du coup, les sanctuaires préalpins du Sud des Alpes, qui se sont développés à partir du xve s., avec un accent particulier associé au mouvement de la Contre-Réforme, au xvie s., constituent un laboratoire d’observations particulièrement riche 12. Par exemple, à partir de 1517, suite à l’annexion de la Palestine par l’Empire ottoman, la colline de Varallo située au Nord du Piémont actuel (alors partie du duché de Milan), devint un lieu de pèlerinage très fréquenté, un substitut des lieux saints du Proche-Orient. On peut aujourd’hui encore visiter les quarante-trois chapelles disposées en pleine nature, véritables théâtres de fresques (environ quatre mille figures) et de statues (environ quatre cents) en bois ou en terre cuite polychromes qui racontent la vie et la Passion du Christ. Après l’ascension de la colline scandée par les chants et les prières, les pèlerins se retrouvaient, et se retrouvent encore aujourd’hui, devant l’expérience de visions du divin proposées par les imagiers et les architectes. Il s’agit donc d’une expérience visuelle qui engage le corps et l’esprit dans un espace topographique efficace, à l’enseigne d’un voyage mental qui tresse les réalités locales du quotidien à celle d’un ailleurs géographique habité par la résonance du divin. Dans le cadre du dispositif − qui inclut la présence d’humbles objets de la vie de tous les jours −, la polychromie des statues contribue à une efficacité précisément inscrite et orientée. La photographie de F. Ferranti de la Marie-Madeleine de la chapelle de la Crucifixion (chapelle 37, datée entre 1630 et 1635) montre bien le fonctionnement de la mise en scène (fig. 4). Vêtue de bleu et de rouge, dressée seule − comme dans un colloque privilégié avec le supplicié − au milieu des autres personnages éplorés qui assistent à la crucifixion, la pénitente repentie est pourvue de « vrais » cheveux blond-roux qui, à certains moments de la journée, sont à la fois frappés de lumière et source de lumière. La sainte des imagiers emprunte à la matérialité et à la banalité du quotidien ; mais ses gestes, comme ceux des autres personnages, sont ceux du répertoire théâtral. Ce montage, souligné par le jeu de la lumière, qui tresse réalisme et stylisation dans un espace où se mêlent et interfèrent figures peintes et figures sculptées, donne un aperçu des modalités de l’activation de l’empathie religieuse, de l’« aumento di spirito, di speranza e di fede più viva alla intercessione dei santi », que seul un œil sensible, ou celui d’un croyant perçoit aujourd’hui encore. Dans cette recherche de proximité empathique, la couleur stimule une sensorialité qui concourt à la qualité de l’expérience de la transcendance marquée par la nécessité de l’identification que les pèlerins venaient, et viennent toujours, rechercher à Varallo et ailleurs 13. 12. 13.
L. Zanzi et al., Atlante dei Sacri Monti prealpini (2002) ; http://www.villemagne.net/site_fr/rome-sacromonte-varallo.php, consulté le 24 novembre 2016. Le site illustre toutes les chapelles. G. Careri, F. Ferranti, Baroques (2002), fig. 41.
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Fig. 4 — Marie-Madeleine (vers 1630-1635), artiste inconnu, Sacro Monte de Varallo (chapelle 37) (cl. F. Ferranti).
Fig. 5 — Tête de Tanagra (1890), Jean-Léon Gérôme, Santa Barbara Museum of Art (d’après The Color of Life, p. 167).
Cette recherche de visibilité de l’effet de seuil, entre le monde des apparences et celui du divin ou d’un ailleurs quel qu’il soit, n’est pas limité à la religiosité chrétienne. De ce point de vue, au xixe s., les expériences de Jean-Léon Gérôme, l’artiste peintre devenu sculpteur, offrent à notre observation un laboratoire d’autant plus intéressant que cet artiste s’est directement intéressé à la polychromie de l’Antiquité grecque 14. Sa Tête de Tanagra en marbre polychrome (fig. 5), mesurant 43,2 cm de hauteur et 54,6 cm avec la base, illustre efficacement la rencontre de l’art du moment avec l’Antiquité et celle de la visibilité de la tension « épiphanique » qui nous intéresse ici 15. La « polychromie » (ou choix des teintes) de Gérôme, du moins ce qu’il en reste aujourd’hui, est délicate. Le visage de sa Tanagra, teinté de cire suivant le procédé de la ganôsis antique 16, était de couleur chair, une couleur dont il reste des traces dans les narines et les oreilles. Les lèvres sont roses, le bleu des iris et le noir des pupilles sont insérés dans le marbre pour créer un 14. 15. 16.
G. M. Ackermann, The Life and Work of Jean-Louis Gérôme (1986) ; K. Türr, Farbe und Naturalismus in des Skulptur des 19. und 20. Jahrhunderts (1994), p. 42-45, 83-85, 88-92, 243-245. The Color of Life, p. 166-168, pl. 35. E. Héran, « L’évolution du regard sur la sculpture polychrome », dans La Polychromie, Quarante-huitQuatorze. La revue du musée d’Orsay 18 (2004), p. 62-71.
ICONICITÉ DU CORPS : L’EFFICACITÉ DE LA COULEUR
effet de scintillement, rien ne saurait être plus éloigné du coloriage. Quant aux cheveux qui étaient bruns, ils sont devenus blonds avec le temps. Les couleurs et les stries réalisées à l’aide des ciseaux du sculpteur produisent « un effet de vie ». La justesse du chromatisme et du modelé créent l’illusion mais la forme corrige aussitôt cette impression. En effet, le visage de la Tanagra n’est pas un moulage pris sur le vif, le modèle vivant a été revu par l’« idéal » antique : les traits sont réguliers, plus réguliers que nature, une subtile symétrie construit en fait le visage. Entre la couleur et le modelé il y a ainsi une tension, entre un idéal ancré dans l’« ailleurs excellent » de l’Histoire et l’effet d’animation produit par la coloration qui introduit une proximité avec le spectateur. Cette tension suscitée, qualifiée ici d’épiphanique, est remarquablement mise en évidence par la photographie du catalogue d’exposition du Paul Getty Museum. Le Sculpturae vitam insufflat pictura (« la peinFig. 6 — Händler (2001), Katharina Fritsch, ture insuffle la vie à la sculpture »), est le titre Matthew Marks Gallery, New York (d’après d’un tableau de Gérôme, peint en 1893, qui The Color of Life, p. 82-83). représente un jeune peintre colorant une série de statuettes de danseuses 17. Mais la vitalité « épiphanique » de la Tête de Tanagra n’est pas celle de la Marie-Madeleine de Varallo ; la vie que la peinture peut insuffler à la sculpture est culturellement et symboliquement inscrite. Mais la couleur peut également produire un effet de dématérialisation comme en témoignent au xxie s., les recherches de l’artiste allemande Katharina Fritsch 18. Ses sculptures interrogent et donnent à voir les seuils entre les matérialités évidentes et les réalités subtiles qui hantent notre imaginaire. Ses réalisations perturbent l’œil des spectateurs en associant familiarité et étrangeté à l’enseigne d’une stricte monochromie. Pour exemple, en 2001, elle propose une statue en polyester entièrement peinte d’un rouge vif représentant un homme de grande taille (1,92 m) et qui se tient debout, vêtu d’un costumecravate, soit un Händler, un Commerçant (fig. 6) 19. Rien de plus commun en somme : 17. 18.
19.
The Color of Life, p. 168. I. Blazwick (éd.), Katharina Fritsch, Exposition Tate Modern 2002 (2002) ; http://www.tate.org.uk/ whats-on/tate-modern/exhibition/katharina-fritsch ; http://whitecube.com/artists/katharina_fritsch/, consultés le 24 novembre 2016. La statue est conservée à la Matthew Marks Gallery à New York, voir A. Potts, « Colors of Sculpture », dans The Color of Life, p. 83, fig. 64.
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le complet veston le plus convenu, le plus socio-culturellement codé ; mais rien de plus déconcertant. En effet, le Commerçant, « en rouge », voit son irréelle symétrie perturbée par un pied de bovidé ou de caprin, par une jambe plus longue que l’autre, un visage sans expression aux yeux clos. Serait-ce une représentation d’un masque mortuaire ? De plus, son oreille gauche est décollée, l’épaule droite est plus courte que l’autre, et la main droite plus longue que la gauche. La couleur souligne la matérialité fixe, non vivante de cet hybride, entre diable et autre créature fantastique, qui conjugue proximité et éloignement, comme dans les rêves et les apparitions : la frontière entre réel et irréel, entre banalité et fantastique, est brouillée. À l’instar du blanc la monochromie rouge instaure également une idéalité insolite. Les gestes de Katharina Fritsch interviennent via la forme, la surface, l’échelle, l’espace et la couleur pour donner corps, substance et poids : « to the fleetings products of our imaginations 20 », selon l’artiste. Il s’agit des productions flottantes de notre imagination qui appartiennent à l’invisible du monde des contes, des rêves, des religions et de l’histoire, l’histoire des images incluse. L’évocation de l’invisible ou d’une réalité flottante est également la tâche des imagiers grecs, y compris dans une dimension d’altérité insolite et monochrome. Pausanias (VII 26, 4) évoque en effet le Dionysos de Phelloé, dont la statue était peinte avec du cinabre et celui de Phigalie (VIII 39, 6) dont la partie inférieure se distinguait à peine : elle était dissimulée sous une frondaison de laurier et de lierre alors que la partie visible resplendissait de la brillance du cinabre. La couleur rouge et les feuillages pour Dionysos évoquent son étrangeté par rapport aux autres dieux 21 ; le dieu est rouge comme le Commerçant de Fritsch sans pourtant qu’il faille rabattre les deux matérialisations iconiques l’une sur l’autre puisqu’elles s’inscrivent dans des systèmes socio-culturels différents. Au terme de ce bref et superficiel parcours à travers le laboratoire de l’histoire des imagiers coloristes, on aurait tort de déduire que la polychromie inscrit systématiquement la proximité sensorielle. Il sera question plus bas, à propos de l’Aphrodite de Cnide, de polychromies réalistes qui induisent un effet d’écart et de tension entre réel et imaginaire. Suivant la forme, la tonalité des coloris et le dispositif, les effets obtenus par la couleur sont inattendus, voire paradoxaux, loin de se limiter à un simple effet illusionniste de reproduction du réel. Le corps comme la couleur sont des matériaux permettant la production de réalités iconiques qui inscrivent proximités et effets de brouillages bons à voir, à imaginer, à penser dans le cadre d’espaces socio-culturels et symboliques délimités. Quel que soit le contexte, la couleur semble inscrite par une altérité qui permet à la fois la transgression des codes et la contribution à les inscrire 22. La subtilité du savoir-faire des coloristes semble illimitée, comme en témoignent les expériences des artistes du xve au xxie s. convoquées ici parce que plus accessibles pour nous que celles des peintres grecs 20. 21. 22.
Voir n. 18. Fr. Frontisi-Ducroux, Le dieu-masque. Une figure du Dionysos d’Athènes (1991), voir en particulier chap. IX. D. Batchelor (n. 5).
ICONICITÉ DU CORPS : L’EFFICACITÉ DE LA COULEUR
dont la science était cependant tout aussi sophistiquée 23. L’observation de cet éventail des possibilités de l’iconicité tridimensionnelle colorée, culturellement inscrite, n’a évidemment pas pour but de fournir des exemples autorisant la reconstitution de la polychromie antique ; il s’agit plutôt, rappelons-le, d’en déployer la variété et la richesse afin d’éviter de construire des continuités réductrices, voire artificielles, qui feraient obstacle, à l’instar de l’autorité de la blancheur, à la compréhension des réalités antiques.
AUTORITÉS
DE LA BLANCHEUR
Les lacunes des traces, la difficulté de percevoir la multiplicité des efficacités de la couleur ainsi qu’une valorisation pluriséculaire de la blancheur, des blancheurs, ont constitué autant d’écueils à l’appréciation de la sculpture antique polychrome ou monochrome. Identifier ces écueils, c’est donc se donner la possibilité de libérer le regard d’un conditionnement pesant. Au cours des siècles, la culture occidentale a additionné les valeurs positives de la blancheur. Couleur de la pureté spirituelle, de la propreté, de la discrétion et de la paix, elle est aussi celle de la sagesse des anciens, des fantômes et du divin 24. Dans le domaine de la sculpture, on fait remonter l’autorité du blanc à la culture néo-classique. Dès le xviiie s., en effet, philosophes, théoriciens et artistes formulent son efficacité et lui donnent forme. Le blanc est associé à la perfection de la ligne, du dessin donc, qui circonscrit le volume 25. Il donne à la stature une amplification optique que la lumière accentue encore. Le blanc est du côté d’une vitalité intemporelle à l’abri des accidents de la vie et de l’histoire. Il permet un subtil montage de vitalité et d’idéalité, comme nous l’avons dit plus haut pour le buste de Benoît XIII (fig. 3), qui éloigne de la corruption – celle des matières et celle des hommes – en inscrivant une forme inaltérable. Pour Goethe et pour Winckelmann, la blancheur est du côté de la vie 26 ; au xixe s., 23.
24. 25.
26.
Ph. Jockey, « Praxitèle et Nicias, le débat sur la polychromie de la statuaire antique. La sculpture antique et le débat sur la couleur ; de sa réception à l’époque moderne aux recherches contemporaines », dans A. Pasquier, J.-L. Martinez (éds), Praxitèle, Exposition Louvre 2007 (2007), p. 62-81, 79 ; Br. Bourgeois, Ph. Jockey, « Le marbre, l’or et la couleur. Nouveaux regards sur la sculpture hellénistique de Délos », dans S. Descamp-Lequime (éd.), Peinture et couleur dans le monde grec antique (2007), p. 165-191. M. Pastoureau, Dictionnaire des couleurs de notre temps (1992), p. 29-30 ; G. Vigarello, Le Propre et le Sale. L’hygiène du corps depuis le Moyen Âge (1985), p. 68-89 ; D. Batchelor (n. 5). Les expérimentations de Fritsch montrent bien cette efficacité optique (culturellement inscrite). Une série de quatre sculptures, quatre parapluies rigoureusement identiques (blanc, vert, rouge, noir), identifient la force visuelle, et symbolique, de chacune des couleurs. Le blanc est un dessin en volume, le noir est une masse colorée qui troue l’espace, voir http://www.artic.edu/aic/collections/exhibitions/ Modern/selectedworks#, consulté le 24 novembre 2016. Voir aussi sa réalisation en noir, en blanc et en rouge, intitulée Company at Table, où l’artiste réussit à conjuguer sculpture et contraste noir/blanc pour produire un étrange dessin tridimensionnel, à la limite de l’onirique, et cela à partir d’une réalité quotidienne banale, http://artknowledgenews.com/201009257838/katharina-fritsch-retrospective. html, consulté le 24 novembre 2016. N. Himmelmann, Utopische Vergangenheit. Archäologie und Moderne Kultur (1976), en particulier p. 187-195 ; M. Praz, Gusto neoclassico (1974), p. 66-67. Plus récemment, voir la contribution de R. Wünsche, « Il colore ritorna... », dans A. Gramiccia (éd.), I colori del bianco. Policromia nella
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le romantisme ajoutera une dimension démoniaque, païenne, teintée d’un onirisme étrange que l’on retrouve dans les peintures de Giorgio De Chirico et de Paul Delvaux. Cependant, avant le xviiie s., les vertus de la blancheur sont également associées à une certaine vision du corps, fondement de l’excellence de l’art du sculpteur qui rivalise avec la nature. Débarrassée de la contingence colorée, l’anatomie inscrite dans la pierre sublime l’ordre caché du corps. Une vision qu’à tort l’historiographie a souvent accordée aux pratiques grecques, renforçant ainsi abusivement, en lui octroyant une légitimité fondatrice excellente, l’autorité de la blancheur et de l’anatomie 27. Pour cerner l’origine de la valorisation du blanc il faut remonter plus haut dans le temps, à la Renaissance florentine dont le xviiie s. serait l’héritier 28. En effet, au xive s. déjà, alors que la polychromie de l’architecture antique est connue, voire appréciée, le théoricien et architecte Leon Battista Alberti affirme la supériorité du blanc. Dans ses écrits, il se fait le promoteur de la blancheur des édifices antiques, et romains, et de la nécessité de préférer le marbre et le crépi immaculés dans les édifices contemporains. Pour lui, le « marbre est pur », translucide, source et émanation de vix, de force ; il fonde cette excellence de la blancheur sur le témoignage de Cicéron qui à son tour s’appuierait sur Platon. La vertu du blanc, comme vertu antique qui affirme par l’architecture la parenté de Florence avec Rome, peut être considérée comme un geste politique soulignant la grandeur de la ville qui revendique sa suprématie sur toute la Toscane 29. C’est également dans ce contexte historique que se développent à Florence et à Rome les collections de statues antiques, ou dites « à l’antique » et des copies en plâtre blanc. Collections de prélats et de princes qui affirment ainsi leur pouvoir et leur grandeur par leur connaissance de l’Antiquité 30. Le lien du pouvoir avec l’excellence fondatrice s’inscrivait donc visuellement par la blancheur. Mais Alberti et les Florentins pourraient bien à leur tour être les héritiers d’une tradition antérieure. Au chant X du Purgatoire (dès le v. 28), Dante évoque une rampe de marbre blanc, ornée de reliefs, si belle qu’elle pourrait susciter l’envie de la nature et la jalousie de Polyclète. La main divine sculpte la blancheur et son excellence dépasse celle du sculpteur antique, aujourd’hui connu pour sa science du bronze, devenu à Florence un parangon de l’art du marbre. L’origine de l’excellence blanche est sans doute encore à découvrir. Du xiiie s. à nos jours, la force de la blancheur semble mettre en forme et fonder diverses origines : le divin, l’excellence du politique et l’ordre caché du corps, sans oublier
27. 28. 29. 30.
scultura antica (2004), p. 13-28, ainsi que celle de A. Prater, « Il dibattito sul colore. La riscoperta della policromia nell’architettura greca e nella plastica del XVIII e nel XIX secolo », dans A. Gramiccia, op. cit., p. 341-356 ; A. Potts, Flesh and the Ideal. Winckelmann and the Origins of Art History (1994). I. Manfrini, « Entre refus et nécessité de la couleur. La sculpture grecque antique », dans M. Carastro (éd.), L’Antiquité en couleurs. Catégories, pratiques, représentations (2008), p. 21-41, 26. M. Cagiano de Azevedo, « Il colore nella Antichità », Aevum 28.2 (1954), p. 151-167. Alberti écrit que la coupole de Sainte-Marie-de-la-Fleur couvre de son ombre, et donc englobe, tous les habitants de la Toscane. Fr. Haskell, N. Penny, Taste and the Antique. The Lure of Classical Sculpture 1500-1900 (1981) ; L. Beschi, « La scoperta dell’arte greca », dans S. Settis (éd.), Memoria dell’antico nell’arte italiana III. Dalla tradizione all’archeologia (1986), p. 295-372, en particulier p. 319-325.
ICONICITÉ DU CORPS : L’EFFICACITÉ DE LA COULEUR
l’inaccessible de l’étrange. Du coup, la polychromie a été réduite à la contingence, à l’accident, aux proximités sensorielles sans subtilités. Les autorités de la blancheur, qui remontent bien au-delà du xviiie s., s’additionnent et se renforcent jusqu’à dévaloriser la polychromie réduite à une expression secondaire et populaire. Un jugement 31 qui semble remonter aux philosophes, aux théoriciens et aux artistes du xviiie s. : « il est intéressant de noter que les peuples primitifs, les hommes incultes et les enfants éprouvent une grande prédilection pour les couleurs vives, que certains animaux réagissent avec férocité à certaines couleurs, que les hommes cultivés évitent les couleurs vives pour leurs vêtements et pour leurs habitations et qu’ils cherchent, en général, à s’en passer 32 ».
RÉALITÉS
GRECQUES
La force de nos a priori culturels et les lacunes des traces constituent autant d’obstacles à la compréhension de l’efficacité de la couleur dans le domaine de la sculpture grecque, et cela quel que soit le matériau. Il faut donc impérativement avoir à l’esprit que : « la couleur ne fonctionne pas hors contexte, et les problèmes qu’elle soulève ne peuvent être envisagés hors du temps et de l’espace ; ils sont toujours étroitement culturels, il n’y a rien d’universel dans la couleur 33 ». Il paraît parfois possible de relever des similitudes ; ainsi, la monochromie rouge de Dionysos contribue à produire un écart dans le système polychromique grec comme celle du Commerçant hybride de Fritsch qui casse les habitudes de blancheur pluriséculaires informant l’œil du spectateur du xxe s. Dans un cas comme dans l’autre, le rouge, le monochrome, semble inscrire l’altérité, la dimension de l’écart, mais bien évidemment le sens de cette rupture n’est pas le même. La dimension autoréflexive, l’art pour l’art, propre à l’époque contemporaine est sans écho dans les pratiques visuelles grecques toutes entières tournées dans l’inscription de la relation au divin et aux morts, publiquement donnée à voir. Que la polychromie puisse convoquer une dimension de proximité sensorielle peut également être de l’ordre de la similitude mais le pourquoi et le comment de cette proximité sont à définir dans leur spécificité contextuelle. Ce qui en revanche semble constant, quelle que soit l’époque, c’est la subtilité extrême du savoir-faire des coloristes qui ne laisse aucune place à l’approximation, une subtilité que la pauvreté des traces ne permettra jamais de restituer. Cependant, la conscience de cette complexité et la prise en compte des paramètres du système grec, dans lequel fonctionne la sculpture colorée, devraient permettre d’imaginer les conditions de son efficacité, ou plutôt de ses efficacités puisque les pratiques de la couleur en Grèce antique ont varié au cours du temps comme le soulignent plusieurs contributions de cet ouvrage. Chez les Grecs, les manières de rendre présent le divin dans le monde des hommes sont multiples, l’aniconisme n’est pas moins important que la figuration. Un arbre, une 31. 32. 33.
I. Manfrini (n. 27). J. W. Goethe, Matériaux pour l’histoire de la théorie des couleurs (trad. E. Maurie, 2003), cité par D. Batchelor (n. 5), p. 142. Ph. Junod, M. Pastoureau (éds), La couleur. Regards croisés sur la couleur du Moyen Âge au XXe s., Actes du colloque de l’Université de Lausanne (25-27 juin 1992) (1994), p. 5 ; M. Pastoureau (n. 24), p. 12.
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colonne, une pierre, un masque constituent autant de manières de visualiser le divin 34. L’anthropomorphisme coloré est donc une forme parmi d’autres mais une forme qui inscrit d’emblée une proximité avec les hommes alors même que les dieux sont perçus comme autres. Lorsque la présentification du divin a un aspect anthropomorphe, elle exprime par conséquent − dans la proximité ou/et dans l’écart − quelque chose de la corporéité comme construction sociale. Le corps en tant que tel n’est en effet pas un simple fait de nature ni une réalité universelle immuable, il s’agit bien d’une catégorie socio-culturelle et historique qui exprime un système de valeurs 35. Il est un laboratoire qui naturalise les codes, un lieu où se manifeste et donc se construit la nécessaire relation à l’autre, aux autres. La culture grecque antique n’échappe pas à ce fait 36. L’appréciation de la beauté, féminine et masculine faisait ainsi l’objet de concours, inscrits dans le cadre de rituels 37 où s’exprimait et s’alimentait cette corporéité exemplaire. Mais la connaissance précise des critères fondant cette appréciation sont difficiles à saisir ; ce sont cependant ces critères qui pourraient fonder la pratique des sculpteurs grecs, y compris dans l’usage de la polychromie, et non le donner à voir d’une réalité formelle, anatomique, plus ou moins idéalisée 38. Le citoyen athénien qui, dans le cadre d’un procès, justifie son allure rapide comme un défaut congénital à ne pas confondre avec l’indice d’un mauvais caractère, pointe efficacement le nécessaire contrôle de soi dont certains trouvent un écho dans l’attitude du Doryphore de Polyclète par exemple 39. Le corps masculin exprimerait ainsi des valeurs civiques, militaires et morales, incarnées par le façonnage des corps vivants et par leur mise en image sans pour autant que les unes soient les illustrations, les copies conformes, des autres. À l’époque archaïque, les kouroi et les korai donneraient à voir la dimension aristocratique de ces valeurs avec, 34. 35.
36.
37.
38.
39.
Fr. Frontisi-Ducroux (n. 2) ; D. Tarn Steiner, Images in Mind. Statues in Archaic and Classical Greek Literature and Thought (2001), p. 80-95. À l’origine, il y a l’étude de M. Mauss, « Les techniques du corps », dans Sociologie et Anthropologie (1983), p. 365-386 ; voir les nombreux ouvrages de D. Le Breton (dont D. Le Breton [n. 1]) ; Ch. Detrez, La construction sociale du corps (2002). Dans le champ de l’histoire, voir supra, n. 4. Pour une mise en perspective comparatiste voir. S. Breton (éd.), Qu’est-ce qu’un corps ?, Exposition musée Branly 2007 (2007). Pour un état des lieux sur le corps antique dans une perspective historique plus ample, voir Fr. Prost, « Introduction », dans Fr. Prost, J. Wilgaux (éds), Penser et représenter le corps dans l’Antiquité. Actes du colloque international de Rennes (1-4 septembre 2004), Cahiers d’histoire du monde antique 1 (2006), p. 1-11. N. B. Crowther, « Male “Beauty” Contests in Greece: The Euandria and Euexia », L’Antiquité classique LIV (1985), p. 285-297 ; P. Brulé, « Le corps sportif », dans Fr. Prost, J. Wilgaux (n. 36), p. 263-289 ; N. Fisher, « The Pleasure of Reciprocity: Charis and the Athletic Body in Pindar », dans ibid., p. 227-245. Pour une lecture de la sculpture grecque fondée sur des critères anatomiques, voir G. Métraux, Sculptors and Physicians in Fifth-Century: A Preliminary Study (1995) ; contra : N. Demand, « The Cultural Construction of the Body and Representational Art: Greek Physicians and Sculptors », dans G. Hoffmann (éd.), Les pierres de l’offrande. Autour de l’œuvre de Christophe W. Clairmont (2001), p. 66-71. Démosthène, Plaidoyers civils XXXVII 55-56, cité par J. Tanner, « Social Structure, Cultural Rationalisation and Aesthetic Judgement in Classical Greece », dans K. Rutter, B. A. Sparkes, Word and Image in Ancient Greece (2000), p. 183-203, 201.
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par conséquent, l’inscription visuelle d’une nécessaire distanciation d’avec les expériences sensorielles du commun des mortels et celle d’une proximité privilégiée avec les dieux, les morts et les héros. À partir du ve s. av. J.-C., le naturalisme soulignerait à la fois la diffusion sociale de ces valeurs et un commerce avec le divin et l’au-delà socialement plus partagé 40. Les historiens des religions et des images qui proposent ce type de lecture ne convoquent pas le rôle de la couleur redécouverte par les archéologues. Mais les observations des uns pourraient bien converger avec celles des autres. Dans les grandes lignes, parce que les coloristes devaient être maîtres dans l’exploration de la gamme des nuances aujourd’hui difficile à saisir, on peut avancer que la palette contrastée et saturée des couleurs archaïques creusait probablement l’écart avec la sensorialité quotidienne, soulignant ainsi visuellement le profil aristocratique des commanditaires, alors que celle du ve s. et du ive s. av. J.-C. pourrait avoir activé, jusqu’à un certain point, une interaction avec l’altérité moins sélective. Le corps comme expression d’un imaginaire culturel inscrivant une proximité ne suppose pas ipso facto que l’expression figurée et colorée s’identifie avec un illusionnisme qualifié de mimétique ; dieux, héros, athlètes vainqueurs ou défunts n’appartiennent que plus ou moins lointainement à l’espace de la condition humaine : « Poser le problème du corps des dieux ce n’est donc pas se demander comment les Grecs ont pu affubler leurs divinités d’un corps humain mais rechercher comment fonctionne ce système symbolique, comment le code corporel permet de penser la relation du proche et du lointain, du contact et de la séparation, en marquant, entre les pôles de l’humain et du divin, ce qui les associe par un jeu de similitudes, de rapprochements, de chevauchements et ce qui les dissocie par effets de contraste, d’opposition, d’incompatibilités, d’exclusion réciproque 41 ». À la suite de J.-P. Vernant, il faut donc considérer le corps comme un médium qui articule, dans le paradoxe, la relation entre ce qui est marqué du sceau de la mortalité, de l’imperfection, et ce qui s’inscrit dans l’immortalité ou la mémoire. Les rituels dans lesquels sont prises les images, des rituels qui engagent tous les sens, contribuent à part entière à construire et à activer cette tension entre la proximité et la distance 42. C’est dans le cadre de ce dispositif, de ce système, qu’il faut introduire et considérer le jeu des formes et des couleurs.
40.
41.
42.
B. Fehr, Bewegungswesen und Verhaltensideale. Physiognomische Deutungsmöglichkeiten der Bewegungsdarstellung an griechischen Statuen ders 5. und 4. Jhs vor Chr. (1979) ; id., Les Tyrannoctones, peut-on élever un monument à la Démocratie ? (1989) ; id., « Kouroi e Korai. Formule e tipi dell’arte arcaica come espressione di valori », dans S. Settis, I Greci, Storia, cultura, società 2.1 (1996), p. 785-843 ; J. Tanner, (n. 39) ; id., « Nature, Culture and the Body in Classical Greek Religious Art », World Archaeology 33.2 (2001), p. 257-276. J.-P. Vernant, « Corps obscur, corps éclatant », dans Ch. Malamoud, J.-P. Vernant (n. 2), p. 19-45 (repris dans id., L’Individu, la Mort, l’Amour. Soi-même et l’autre en Grèce ancienne [1989], p. 7-39) ; Fr. Frontisi-Ducroux (n. 2), p. 193-196. B. Gladikow, « Präsenz der Bilder-Präsenz der Götter. Kultbilder und Bilder der Götter in der griechischen Religion », Visible Religion IV-V (1985-1986), p. 114-133 ; id., « Epiphanie, Statuette, Kultbild, griechische Gottesvorstellungen im Wechsel von Kontext und Medium », Visible Religion VII (1990), p. 98-121 ; D. Tarn Steiner (n. 34).
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Prenons un exemple, tiré d’Euripide (Ion, v. 184-218) : lorsqu’elles arrivent à Delphes, un lieu rituellement inscrit, les servantes de Créüse s’étonnent devant la beauté des frontons sculptés du temple d’Apollon. Les images suscitent leurs commentaires, les actions des dieux sont décrites comme s’ils étaient présents. Les mots animent la pierre sculptée parce que la qualité du travail du sculpteur et du coloriste suscite cet effet : « admirez sur ce mur de marbre le combat des géants » (v. 206-207). Il s’agit bien d’une pierre travaillée mais les servantes s’extasient, elles voient la vitalité des actions divines, elles y voient le feu de la torche de Iolaos, un héros dont elles ont les exploits dans l’oreille puisqu’elles les chantent en tissant la toile, disent-elles (v. 194-200). L’action de voir est plusieurs fois nommée, comme pour en souligner l’importance. Les servantes de Créüse se stimulent l’une l’autre à aiguiser leur regard pour verbaliser le voir : « mes yeux ne savent où se poser » ; le grec souligne davantage que ne le fait la traduction le mouvement du regard filtré par les paupières qui tourne afin de tout voir. Le geste animé du voir est une manière réflexive de souligner la grande animation de la scène alors même qu’il s’agit d’une minéralité colorée immobile. Le « jeu des paupières » apparaît déjà au début de la parodos (v. 189) pour qualifier le regard de ces visages que sont, pour le poète, les deux frontons du temple : les belles paupières des visages des frontons laissent filtrer un regard plein de lumière, une lumière qui n’est pas décrite mais qui est « regardable ». La métaphore est pour nous obscure mais il semble incontestable que les images du temple d’Apollon se situent à l’enseigne d’un commerce des regards entre les humains, les dieux et les héros. Comme il paraît évident que le kalliblépharon phôs, à savoir la lumière issue des belles paupières, une manière de qualifier la beauté du regard qui filtre entre les cils, est de l’ordre du « bon à voir » : sculptures et lumière des « visages » coexistent dans l’espace des frontons sans se confondre tout à fait et cette vision est sans danger. Or, la contemplation du divin ne va pas de soi comme le dit Euripide dans la même tragédie. En effet, plus loin dans le texte (v. 15491552), Ion et Créüse sont confrontés à une théophanie ; Athéna leur apparaît à la cimaise du temple d’Apollon dans un effet de luminosité qui incite Ion à fuir parce que, dit-il, il faut éviter de voir les dieux hors du moment prévu à cet effet. Athéna doit alors les rassurer, les autoriser donc à contempler son éclat, et leur permettre ainsi d’entendre ses paroles. Le contraste entre la crainte de voir et le bon à voir, pratiqué par les servantes de Créüse, est évident. Il indique que la contemplation des images sculptées et colorées, dans l’espace du « visage » dont le regard laisse filtrer le phôs divin, s’inscrit dans le lieu ritualisé du sanctuaire, réglé par des temporalités précises cernant le « moment prévu à cet effet ». Un rituel parmi d’autres, mais qui tous avaient pour objet de favoriser la proximité et la distance. Les images commentées par les servantes de Créüse donnent aux dieux une visibilité anthropomorphe et l’illusion à la fois d’une grande proximité avec le monde des hommes, résultant du tressage de l’efficacité de la forme avec celle de la couleur, et en même temps, produite par le même tressage, d’une visibilité excessive qui inscrit l’écart : les dieux et les héros sont véritablement présents et animés comme s’il fallait « montrer
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les dieux plus éclatants, plus visibles en somme que les hommes 43 », comme on l’a écrit à propos de la description homérique du bouclier d’Achille. L’image anthropomorphe, issue des savoir-faire conjugués du sculpteur et du coloriste, semble avoir eu pour objet d’exciter le regard et l’imagination en donnant au divin une forme aisément et étonnamment reconnaissable comme le prouve la rencontre émerveillée des servantes de Créüse avec les sculptures du fronton d’Apollon. Il y a chez Euripide trois manières d’évoquer la visibilité du divin : la théophanie qui suscite l’effroi et les images associées au regard lumineux filtré par les paupières qui offrent une accessibilité plaisante mais paradoxale à l’invisible. Il y a ainsi différentes manières d’inscrire, via le proche et le ressemblant, quelque chose qui est de l’ordre de l’inaccessible. Ce que le poète dit de l’efficacité du visible est dans la réalité matérialisé grâce à la technè des imagiers. Celle du sculpteur et celle du coloriste sont également sollicitées. La statue de l’Athéna Parthénos, sculptée par Phidias entre 448 et 437 av. J.-C., a disparu, mais ce que les sources nous disent de sa forme, des matériaux et du dispositif dans lequel elle s’inscrivait nous permettent d’imaginer la subtilité des savoir-faire engagés 44. Haute de 11,54 m, en or et en ivoire, avec sans doute des rehauts de couleur pour les différentes parties du visage, dont les yeux avec leurs cils, et pour colorer les reliefs de la base, elle se dressait devant un plan d’eau et dans l’axe d’une double source de lumière provenant de deux fenêtres latérales. La forme anthropomorphe, illusionniste, était ainsi défaite par le jeu de la lumière et des reflets comme étaient défaites par le chatoiement les images de la base racontant la naissance de Pandore et celles du bouclier évoquant l’assaut de l’Acropole par les Amazones. Gigantesque, incontestablement immobile, la statue porteuse de mythe de Phidias devait ainsi produire un effet de luminosité et de mouvement caractéristique des apparitions divines, du phôs divin et mythique. Grâce au dispositif, les formes anthropomorphes colorées vibraient entre proximité et distance, l’ensemble actualisait et activait ainsi la présence divine plus qu’il ne la représentait 45. Les parfums, les chants et les gestes concourraient à l’efficacité du dispositif en provoquant chez le fidèle une émotion marquée par la stupeur, une émotion très éloignée du détachement qui accompagne la contemplation esthétique, très éloignée également de l’empathie chrétienne sous-tendue par l’identification à la Passion du Christ 46. L’Aphrodite de Cnide sculptée par Praxitèle vers 340 av. J.-C., dont il reste de nombreuses copies aujourd’hui décolorées, était elle aussi inscrite dans un dispositif qui nous échappe 47. Célèbre durant des siècles dans toute la Méditerranée, elle a suscité 43. 44. 45.
46. 47.
R. Piettre, « Les dieux crèvent les yeux : l’enargeia dans la présentation du divin », dans D. Mulliez (éd.), La transmission de l’image dans l’Antiquité, Ateliers 21 (1999), p. 11-21, 13. A. Stewart, Greek Sculpture (1990), p. 157-163 ; G. Nick, « Die Athena Parthenos: Studien zum griechischen Kultbild und seiner Rezeption », MDAI(A) Beih. 19 (2002). Sur l’idée de présentification plutôt que de représentation, voir en dernier lieu D. Jaillard, « Les champs de la mimèsis à l’époque classique. Un concept à redéfinir entre pratiques rituelles et poétiques, spéculations philosophiques et “réflexions sur l’art” », La part de l’œil 23 (2003), p. 65-73. J. Tanner (n. 39), p. 261-263, qui mentionne d’autres dispositifs de ce genre. Pour l’Aphrodite de Cnide, voir en dernier lieu A. Pasquier, « Les Aphrodites de Praxitèle », dans A. Pasquier, J.-L. Martinez (n. 23), p. 130-201, 139-142. Pour l’analyse des épigrammes, voir
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des épigrammes amoureux, plus tardifs que la statue, qui ont contribué à informer, de manière diamétralement opposée les interprétations des historiens des images. Dans le cadre d’approches pointant sur l’efficacité interactive entre image et spectateur, la statue de Praxitèle a été vue comme une manière d’exciter le regard masculin mais en inscrivant une distance, puisque la nudité divine est de l’ordre de l’irreprésentable, une distance qui aurait été formellement mise en place par le cadrage du regard résultant du dispositif 48. Toujours dans la même perspective interactive, l’Aphrodite de Praxitèle a été interprétée comme une incitation au voyeurisme masculin, voire à l’acte sexuel, dans le cadre d’un espace rituellement inscrit, conformément à son statut de protectrice des hétaïres. Une lecture qui suppose une grande proximité sensorielle entre l’image et le spectateur ; une proximité que suggère la référence à un modèle humain, à Phryné, la maîtresse de Praxitèle 49. Cette contrainte de rendre visuellement proximité et distance, une distance propre à la fois au statut de la déesse et à la pudeur qui qualifie l’honorabilité du féminin, a défié à parts égales le savoir-faire de Praxitèle et de Nicias. La lecture de la rencontre entre Aphrodite et Anchise, dans l’Hymne homérique dédié à la déesse, donne un aperçu de la subtilité du défi proposé aux imagiers ; vêtements, parures, incarnat, tout signifie l’éclat, associé à la pudeur, qui suscite le désir, alors même que la déesse apparaît au mortel sous l’apparence d’une vierge. Au réveil, lorsque Aphrodite se montre à Anchise dans l’effet de sa divine présence, c’est la peur qui saisit l’amant ; la déesse rassure, accepte le regard du mortel − comme Athéna autorise celui d’Ion − pour autant qu’il garde le secret 50. Il faut accepter l’aporie : il est impossible de restituer la polychromie tridimensionnelle de la Cnidienne car la visibilité de l’efficacité religieuse était déterminée par le dispositif dans ses moindres détails. Provocation, et/ou chasteté ainsi que visibilité et éclat divin étaient suggérés autant par la pose, par le savoir-faire du sculpteur, que par la qualité du regard et par la couleur de l’incarnat, qui dépendent de l’art, de la virtuosité et/ou du don du peintre. Un nouveau détour par le laboratoire de l’histoire fait toucher des yeux l’efficacité de la couleur associée au nu féminin. Du côté de la peinture d’abord, le dessin ferme et les couleurs maigres de la Naissance de Vénus de Botticelli (1485), inscrite dans un schéma iconographique qui évoque la scène du baptême du Christ sous celle de la naissance, le tout dans un espace sans perspective, donnent à ce corps de femme exposé au regard un aspect éthéré qui exclut toute dimension érotique 51. À l’opposé, Manet, dans le Déjeuner sur l’herbe (1863) comme dans l’Olympia (1863), dévoile par la tonalité des corps féminins inscrits dans des dispositifs picturaux efficaces, l’usage que l’Occident
48.
49. 50. 51.
R. Robert, « Ars Regenda Amore. Séduction érotique et plaisir esthétique : de Praxitèle à Ovide », MEFRA 104.1 (1992), p. 373-438, 379-384. R. Osborne, « Looking on Greek Style. Does the Sculpted Girl Speak to Women Too? », dans I. Morris (éd.), Classical Greece. Ancient Histories and Modern Archaeologies (1994), p. 81-85 ; A. Stewart, Art, Desire and the Body in Ancient Greece (1997), p. 97-106. N. Spivey, Understanding Greek Sculpture. Ancient Meanings, Modern Readings (1996), p. 173-183. Homère, Hymne homérique à Aphrodite 155-167, 890. G. C. Argan, Botticelli (1989), p. 92-97 ; pour la comparaison avec le baptême du Christ, voir par exemple http://www.lombardiabeniculturali.it/opere-arte/schede/4y090-00014/, consulté le 24 novembre 2016. Pour les images en ligne, il est important d’être attentif à la qualité de la couleur, mais par la même occasion, le web devient à son tour un laboratoire qui permet d’en constater les effets.
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a fait du corps féminin dénudé. Sans le travestissement du mythe, la nudité des femmes peintes par Manet, indifférentes mais offertes au regard, devient incongrue, d’autant plus incongrue que le peintre est accusé de faire l’économie du dessin 52. Entre les deux, entre le xve s. et le xixe s., la Vénus d’Urbin (1538) du Titien active, et par la couleur de la chair et par la construction de l’espace pictural, l’érotisation du regard dans l’espace d’une chambre à coucher florentine 53. Il ne suffit pas qu’un corps de femme soit nu pour qu’il soit érotique. Du côté de la sculpture, l’histoire du nu féminin coloré est moins riche d’exemples. La Tinted Venus (1851-1856) de John Gibson (fig. 7) est une tentative de s’inspirer des découvertes archéologiques sur la polychromie antique et des informations des sources sur la technique de la ganôsis. Grandeur nature, la Vénus de Gibson est teintée à la cire, les yeux, les lèvres et les cheveux sont légèrement colorés dans la tentative, déclarée, de ne pas copier la nature mais de rehausser la tonalité du marbre pour évoquer la manière grecque. La statue fut mal reçue par la critique qui y voyait une perte de la dimension divine alors que certains sculpteurs, sensibles au défi technique, ont apprécié l’effort de rompre avec la tyrannie de la blancheur 54. La comparaison avec la Tête de Tanagra de Gérôme (fig. 6), montre bien l’écart entre les deux propositions Fig. 7 — The Tinted Venus (1851), des deux sculpteurs du xixe s. L’effet épiphanique de la John Gibson, Walter Art Gallery, Tanagréenne, tel qu’il est donné à voir par la photogra(WAG7808), Liverpool (d’après The phie, est absent de la Tinted Venus. Or cet effet résulte Color of Life, fig. 92). de la tension entre une forme naturaliste traversée par la symétrie et la vibration de la couleur associée à la cire. Une tension donc entre proximité et distance qui mettait à l’épreuve le savoir-faire des coloristes et des sculpteurs grecs. La proposition de Gérôme reste donc bonne à imaginer, à entrevoir, concernant l’aspect et l’efficacité de certaines réalisations grecques. À défaut de pouvoir constater, sur les statues antiques en pierre, ce jeu subtil de contrastes et de paradoxes qui construisent l’iconicité du corps, à la fois en écho et dans 52.
53. 54.
H. Damisch, Le Jugement de Pâris, Iconologie analytique 1 (1997), p. 209-217. Pour l’Olympia, voir aussi L. Corrain, « Les sens de Vénus », dans O. Calabrese, Vénus dévoilée. La Vénus d’Urbino du Titien, Exposition palais des Beaux-Arts de Bruxelles 2003 (2003), p. 165-181, 177 ; http://www.musee-orsay. fr/fr/collections/catalogue-des-œuvres/notice.html?no_cache=1&nnumid=904, consulté le 24 novembre 2016. O. Calabrese, « La Vénus d’Urbino du Titien », dans O. Calabrese (n. 52), p. 31-47. K. Türr (n. 14), p. 17-20 ; Ph. Jockey (n. 23), p. 70 ; The Color of Life, p. 164, fig. 92.
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Fig. 8 — Statue du guerrier A de Riace (détail) (env. 460 av. J.-C.), musée de Reggio Calabria (© Surintendance de Reggio Calabria). Fig. 9 — Aurige de Delphes (détail) (474 av. J.-C.), musée de Delphes (d’après The Color of Life, fig..78). Fig. 10 — Statue du guerrier A de Riace (460 av. J.-C.), musée de Reggio Calabria (© Surintendance de Reggio Calabria). Fig. 11 — Apollon citharède (copie romaine, détail), glyptothèque de Munich (d'après A. Gramiccia [éd.] [n. 26], p. 170).
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l’écart d’une corporéité socio-culturellement inscrite, l’apport de la sculpture en bronze peut être éclairant. Car l’effet de polychromie résulte autant des pigments que des matériaux, comme on l’a vu avec la statue chryséléphantine d’Athéna de l’Acropole d’Athènes. Les archéologues et les scientifiques ont depuis longtemps constaté certains aspects de la polychromie des statues en bronze et des effets d’animation qu’elle produit : l’Aurige de Delphes (env. 470 av. J.-C.) et les Guerriers de Riace (env. 460 av. J.-C.) en sont les exemples les plus connus (fig. 8). Sur ces trois statues, légèrement plus grandes que nature, comme sur d’autres, les yeux ont fait l’objet d’un travail d’orfèvre particulièrement minutieux : le cuivre, le marbre, l’os, l’ivoire, l’ambre, l’onyx, la pâte de verre translucide donnent au regard brillance et intensité (fig. 9). Pour les lèvres, parfois entrouvertes et laissant voir des dents, sont utilisés le cuivre, l’étain, l’argent alors que sur une stèle d’époque hellénistique trouvée à Délos, l’application d’un oxyde de fer souligne les narines et les lèvres 55. Matériaux précieux et techniques raffinées sont convoqués pour animer l’organe de la vision ainsi que celui de la voix et du souffle, sur ce qui exprime par excellence l’animation de la vie. L’attention portée au rendu des yeux est peut-être à mettre en relation avec le kalliblépharon du phôs divin du fronton de Delphes. En effet, la minutie du rendu des cils qui ourlent les paupières contribue à qualifier le regard, par la brillance du cuivre découpé, et à souligner son importance. L’effet est d’autant plus saisissant que les visages sont construits par une symétrie rigoureuse qui contribue à accentuer l’imbrication de l’effet de proximité et de distance, de contraste entre l’illusion de l’animation et la réalité de l’immobilité. Les corps, rayonnant de l’éclat du bronze poli, sont construits par cette même bipolarisation ; l’excellence de l’image du corps bonne à voir est fondée sur des codes socio-culturels, appréciés en particulier lors des concours 56, mais dans l’écart. On a ainsi constaté que la prolongation du bourrelet iliaque dans le dos des Guerriers de Riace (fig. 10), un exemple parmi d’autres, ne correspond à aucune réalité anatomique 57. L’Aurige de Delphes, consacré par Polyzalos de Géla, comme les athlètes ou même les Guerriers de Riace, sont des mortels qui ont, l’espace d’un instant, exprimé des qualités de brillance physiques et psychiques réservées aux dieux 58 ; la statue pérennise donc la fugacité de l’instant. Dans l’Hymne homérique qui lui est consacré, face à Anchise tremblant, Aphrodite se plaît à souligner la misère des hommes condamnés à vieillir en opposition à l’immuable splendeur des dieux. Mais elle souligne que parmi les mortels, ceux qui par la taille et l’allure ressemblent aux dieux sont toujours Troyens (v. 200-204). Lorsqu’il y a proximité, elle est le résultat d’une élection ou d’un mérite. C’est ce mérite et cette élection que la statue immobilise dans une matière rendue partiellement animée par le savoir-faire subtile des imagiers. Le jeu formel et symbolique qui articule dans le contraste la visibilité du divin et de l’humain n’est pas limité aux bronzes, mais, les couleurs ayant disparu, il est souvent 55. 56. 57. 58.
R. Wünsche, « La policromia della testa bronzea con la benda da vincitore », dans A. Gramiccia (n. 26), p. 163-186 ; The Color of Life, p. 108-109 ; Br. Bourgeois, Ph. Jockey (n. 23), p. 175. Voir supra, n. 39-41. N. Spivey (n. 49), p. 40-41. Pour les bronzes de Riace en général voir P. Moreno, Les bronzes de Riace (2000). J.-P. Vernant (n. 41).
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difficile, voire impossible, de le repérer dans les réalisations en pierre ou en terre cuite. De ce point de vue, une tête d’Apollon en marbre, copie romaine d’une œuvre grecque de la fin du ve s. av. J.-C., constitue un témoignage précieux (fig. 11). Seuls les yeux ont conservé des traces de la polychromie d’origine : les cils de bronze ourlent le regard en produisant un effet de khôl, alors que l’iris est matérialisé par un marbre particulièrement fin et lumineux. En dépit de la disparition de la pupille et de la polychromie, l’effet de tension constaté sur les bronzes est évident 59. L’efficacité de la matérialisation de cette interaction paradoxale entre les hommes et les dieux, entre les vivants et les morts, résulte des savoirfaire conjugués du plasticien et du coloriste. Inscrite dans le dispositif rituel, l’immobilité de la statue colorée est une manière parmi d’autres d’actualiser dans le présent des hommes l’insaisissable mobilité des dieux et des morts, engageant ainsi l’esprit des fidèles à voyager entre proximité familière et altérité plus ou moins marquée 60 : c’est dire que la disparition de la couleur constitue bien davantage qu’une perte pour l’histoire des formes. Au terme de ce rapide, et donc superficiel, parcours à travers les temps longs de l’histoire de la sculpture anthropomorphe, la complexité et la subtilité des usages et des effets de la couleur apparaissent de manière évidente. Inscrire la couleur dans la perspective de l’Histoire, c’est se donner la possibilité de constater son efficacité à partir de traces encore clairement lisibles afin d’en déployer l’efficacité en contexte, sans la réduire à un effet de vitalité dont l’universalité serait acquise. Lorsque la couleur est entendue comme expression de vie, il faut examiner de quelle vie, culturellement inscrite, il est question. La couleur tridimensionnelle convoque certes la sensorialité du quotidien mais elle le fait d’une manière différente suivant les contextes culturels. Dans le cadre des pratiques grecques, s’il y a recherche d’illusionnisme c’est celui de la présentification du divin, des héros et des morts dans ce qu’il y a de plus paradoxal et de pluriel. La proximité sélective, aristocratique, de l’époque archaïque n’est pas celle des époques classiques. L’histoire des temps longs marque donc les ruptures mais également les continuités. En Grèce, comme à Florence et à Varallo, tous les éléments du dispositif étaient nécessaires : l’architecture, la lumière, l’eau, comme la forme, la couleur et la qualité des matériaux, sans omettre la temporalité des rituels. Actuellement, les reconstitutions du chromatisme de la sculpture grecque ont le mérite d’arracher notre regard à l’autorité du blanc mais elles ne donnent par encore accès à la subtilité du savoir-faire des coloristes dans ce qui l’oriente. Les outils informatiques semblent en revanche offrir un laboratoire permettant d’intégrer et de jouer avec l’ensemble des données connues apportant ainsi un aperçu des procédés visuels qui transforment les corps en acteurs d’utopie, autorisant la communication avec les forces de l’invisible 61. 59. 60.
61.
R. Wünsche (n. 55), p. 170-171, fig. 224 ; I. Manfrini (n. 27), pl. I.2. D. Tarn Steiner, Images in Mind. Statues in Archaic and Classical Greek Literature and Thought2 (2003), voir en particulier les chap. 2 et 3, p. 79-156 ; Fr. Prost, « Gestes des hommes, gestes des dieux. La représentation des gestes dans la plastique grecque archaïque et classique », dans L. Bodiou, D. Frère, V. Mehl (éds), L’Expression des corps. Gestes, attitudes, regards dans l’iconographie antique (2006), p. 25-38. M. Foucault, Il corpo luogo di utopia (2008) et l’édition française : Le Corps utopique (2009).
S’habiller aux couleurs des saints : démarches votives et culte des saints au Liban Nour Farra-Haddad
RÉSUMÉ Le culte des saints véhicule encore aujourd’hui, au Liban, l’essentiel des dévotions chrétiennes et musulmanes. La renommée des lieux de pèlerinages se fonde le plus souvent sur leurs vertus thérapeutiques, attirant des fidèles pour guérir leur âme et leur corps. Chaque sanctuaire propose aux fidèles une série de rites. Plusieurs actions peuvent s’enchaîner et s’agencer pour former une seule démarche votive comme allumer un cierge, brûler de l’encens, embrasser la statue du saint, etc. On s’intéresse ici au rituel du port de l’habit d’un saint et de ses couleurs durant un ou plusieurs mois, voire toute une vie. On évoquera tous les choix qu’il implique (le saint concerné et ses habits, la durée du port, l’origine des vêtements, la démarche rituelle). Les couleurs des habits de saints seront évoquées en insistant sur ce qu’elles représentent aux yeux des « vouants ». MOTS-CLEFS Liban, culte des saints, chrétiens, musulmans, vertus thérapeutiques, pèlerinage, couleur de l’habit, « vouant ». SUMMARY Wearing the colors of saints: votive practices and cult of saints in today’s Lebanon In Lebanon, today, the cult of saints still conveys much of Christian and Muslim devotions. Most of the time, the success of some pilgrimages comes from the therapeutic virtues of the saints. Every sanctuary offers visitors different rituals that can be followed separately or integrated into one unique votive procedure as lighting a candle, burning incense, “kissing” a statue, etc. The article will look at the ritual of dressing up with the clothes and colors of a particular saint, for a period of one or many months, or sometimes even a lifetime. It considers details concerning believers’ choices: the saint and his clothes, the duration of the ritual, the origin of the dress, the ritual’s procedure. The colors of the saints’ clothes will be mentioned mainly according to what they represent for the pilgrims. KEYWORDS Lebanon, cult of Saints, Christians, Muslims, therapeutic virtues, pilgrimages, colors of the saints’ clothes, pilgrims. ƕƊƖƎƐƌƜƌ ƚƲƴǁưƷƥƵƷƥƺƴǁuƥƷƥƷƼưƥƧƣƼưƥưƥƬƫuƥƷƭƮơƵƳƴƥƮƷƭƮơƵƮƥƭƯƥƷƴƩƣƥƷƼưƥƧƣƼư ƶƷƲƐƣƦƥưƲ ƗƷƭƵuơƴƩƵuƥƵƫƯƥƷƴƩƣƥƷƼưƥƧƣƼưƩuƳƩƴƭơƺƩƭƳƠưƷƲƷƩƷƥƦƥƶƭƮƠƺƥƴƥƮƷƫƴƭƶƷƭƮƠƷƫƵƺƴƭƶƷƭƥưƭƮƢƵ ƮƥƭuƲƸƶƲƸƯuƥưƭƮƢƵƩƸƶơƦƩƭƥƵƌƹƢuƫƷƼưƳƲƯƸƠƴƭƬuƼưƷƿƳƼưƳƴƲƶƮƸưƢuƥƷƲƵƦƥƶƣƪƩƷƥƭƷƭƵƳƩƴƭƶ ƶƿƷƩƴƩƵƹƲƴơƵƶƷƭƵƬƩƴƥƳƩƸƷƭƮơƵƥƴƩƷơƵƷƲƸƵ ƳƲƸƳƴƲƶƩƯƮǀƲƸưƷƲƸƵƳƭƶƷƲǀƵ ƲƭƲƳƲƣƲƭƩƳƭƨƭǁƮƲƸưƷƫ ƬƩƴƥƳƩƣƥƷƫƵƻƸƺƢƵƮƥƭƷƲƸƶǁuƥƷƿƵƷƲƸƵƏƠƬƩƭƩƴƿơƺƩƭƷƲƨƭƮƿƷƲƸƷƩƯƩƷƲƸƴƧƭƮƿƕƲƯƯơƵƳƴƠƱƩƭƵ uƳƲƴƲǀưưƥƨƭƥƨƩƺƬƲǀưƫuƭƥƷƫưƠƯƯƫƮƥƭưƥƶƸưƨƸƥƶƷƲǀưǁƶƷƩưƥƶƺƫuƥƷƣƶƲƸưuƭƥƥưƥƬƫuƥƷƭƮƢ ƳƴƠƱƫ ƠưƥuuƥƩưƿƵƮƩƴƭƲǀ ƬƸuƣƥuƥ ƹƣƯƫuƥƷƲƸƥƧƠƯuƥƷƲƵƷƲƸƥƧƣƲƸ ƷƴƣƻƭuƲuƩuƭƥƭƩƴƢƳơƷƴƥƢ
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à propos de l’auteur N. Farra-Haddad, anthropologue, USJ, IFPO, CNRS (Liban), chercheure affiliée à l’Institut français du Proche-Orient (IFPO), chargée de cours à l’université Saint-Joseph de Beyrouth, Liban.
S’HABILLER AUX COULEURS DES SAINTS : DÉMARCHES VOTIVES ET CULTE DES SAINTS AU LIBAN
Au Liban, de nos jours, le culte des saints véhicule toujours comme depuis des siècles l’essentiel des dévotions chrétiennes et musulmanes. Oratoires, chapelles, monastères, mosquées, maqâms et mazars traduisent l’importance du culte des saints dans la culture libanaise. La renommée des lieux de pèlerinages, très nombreux, se fonde le plus souvent sur leurs vertus thérapeutiques qui attirent des fidèles pour guérir leur âme et leur corps. Chaque sanctuaire propose aux fidèles une série de rites qui, selon leur efficacité potentielle, vont être classés par les pèlerins par ordre d’importance. Plusieurs démarches peuvent s’imbriquer, s’enchaîner et s’agencer pour former une seule démarche votive (allumer un cierge, brûler de l’encens, embrasser la statue ou l’icône du saint, se masser avec une pierre sacrée, boire de l’eau du lieu de culte, etc.). Au moment même de la formulation du vœu, les pèlerins adoptent un ou des rituels, selon le lieu, qui exigent souvent la mise en jeu du corps et qui vont, comme l’esprit, se mobiliser pour le saint ou la sainte. Un rite peut occuper la place principale, mais souvent une série d’autres rites viennent se cristalliser autour de lui pour créer toute une ambiance propice à la réalisation du vœu. Les démarches votives sont avant tout des démarches personnelles entreprises par les pèlerins exprimant leurs vœux, mais il arrive aussi que d’autres personnes interviennent significativement dans le processus (mères, parents, voisins, amis, etc.) en leur suggérant d’avoir recours aux vœux, en les orientant vers tel ou tel rite, en les initiant à tel ou tel rite, en les accompagnant ou en priant avec eux. Dans une première partie, seront présentés les choix des « vouants » concernant le saint et ses habits, le moment choisi pour le porter ainsi que sa durée dans le temps. Les différentes origines des vêtements, leur présentation dans les lieux de culte, la démarche qui accompagne ce port ou le moment d’ôter l’habit ainsi que l’intérêt de cette pratique et son impact sur son environnement social seront aussi développés. Enfin, les couleurs de ces habits et leur symbolisme seront évoqués en insistant sur ce qu’ils représentent aux yeux des « vouants ».
LE
PORT DE L’HABIT DU SAINT OU DE LA SAINTE
La promesse de porter l’habit est verbalisé soit en formulant un vœu, soit en remerciant le saint de l’avoir accompli. Ainsi le rite est réalisé à la suite d’une demande ou en signe de remerciement, selon le vœu formulé. La verbalisation peut se faire devant l’icône ou la statue du saint dans une ambiance pieuse, en allumant un cierge par exemple ou en brûlant de l’encens dans un sanctuaire ou chez soi. Dans la plupart des cas, ce vœu est associé à un pèlerinage national mais il arrive que certains « vouants » libanais l’associent à un pèlerinage à l’étranger comme c’est le cas de femmes libanaises qui ont fait le vœu de porter les habits de sainte Rita en visitant son sanctuaire à Cassia en Italie, ou d’autres qui ont fait le vœu de porter les habits de sainte Thérèse en visitant son sanctuaire à Lisieux en France. Ce pèlerinage est courant au Liban, surtout dans les milieux chrétiens. Les musulmans s’y prêtent rarement, craignant le regard « critique de l’autre », étant donné que
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ce rite impose au pèlerin d’afficher ouvertement ses intentions votives. Ce rite implique une régularité et des efforts quotidiens puisque les « vouants » portent l’habit pour une période déterminée, toute la journée, et ne l’enlèvent que le soir pour dormir. Quelle que soit l’activité du « vouant », l’habit se porte. Dans les écoles, les universités, dans des bureaux, dans les rues… il est possible de croiser des « vouants » habillés aux couleurs des saints. L’habit peut être porté à même la peau ou bien par-dessus des vêtements. Toutes les composantes de ce rite sont porteuses de symboles (le saint choisi, les couleurs de l’habit, le moment choisi pour ce port et sa durée) et peuvent témoigner de la détermination, de la foi et des motivations des « vouants ».
CHOIX
DE L’HABIT, CHOIX DU SAINT
Le choix de l’habit du saint est étroitement lié aux motivations des « vouants ». Les saints auxquels sont attribués des pouvoirs et des vertus spécifiques sont très nombreux dans toutes les communautés. Une tradition orale véhicule les différentes « spécialisations des saints guérisseurs » et dans certains cas la tradition écrite livre aussi des témoignages et des « guides de saints ou de lieux saints ». Un même saint peut accumuler plusieurs spécialisations et caractéristiques. Certains sont réputés pour leurs vertus thérapeutiques, d’autres sont patrons de métiers, des protecteurs. Les saints à vertus thérapeutiques, qu’on appelle saints guérisseurs ou thaumaturges, sont les plus sollicités pour des grâces et des miracles. À titre d’exemple, Mar Nohra (saint Lumière) est spécialisé dans les problèmes oculaires, il est « ophtalmologiste », Mar Doumit est « orthopédiste », Cheikh Zaber est un saint musulman dédié à la guérison des verrues. Il existe aussi des sous-spécialisations : dans le cas des saints « gynécologues », il y a ainsi ceux qui sont spécialisés dans les accouchements et qui protègent les femmes déjà enceintes, comme Al-Chahidé Margharita (sainte Marguerite la martyre) et Mar Lionardo (saint Léonard), et ceux qui favorisent les montées de lait chez les jeunes mères qui n’arrivent pas à nourrir leur enfant, comme Al-Qaddisé Marina (sainte Marina) et Saydet Al Bzaz (Notre-Dame des Mamelles), ceux qui favorisent plus la naissance de filles ou de garçons comme saint Élie pour les garçons 1… Les motifs qui animent les croyants pour entreprendre une démarche votive sont multiples et sont communs à tous, chrétiens et musulmans, voire universels : ils peuvent aller de l’obtention ou de l’accroissement de biens matériels à une intimité avec Dieu en passant par la guérison, la protection, le succès, la fidélité de leur conjoint ou la redécouverte d’un objet perdu. Toute demande ou besoin peut engendrer la formulation d’un vœu, des plus banals aux plus compliqués. Les dévotions à motivation thérapeutique, qui se retrouvent dans presque toutes les religions, sont les motivations les plus fréquentes. Les recherches dans le cadre des pèlerinages aboutissent à cette conclusion : on se rend le plus souvent dans les lieux saints pour obtenir une faveur matérielle. Les recueils des 1.
V. Sauma, Sur les pas des saints au Liban (1994).
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miracles et les livres d’intentions que certains sanctuaires conservent en sont la preuve. Les fidèles se tournent directement vers la religion lorsqu’un problème de santé survient dans leur vie, après avoir fait appel en vain à la médecine, ou encore en parallèle à cette science pour « doubler » les chances de guérison. Au Liban, tout un réseau de traditions thérapeutiques accompagne hommes et femmes de la naissance à la mort, leur permettant de vaincre maladie et infortune. En 1989, dans leur étude statistique sur les valeurs religieuses au Liban, A. El-Kahi, J. Khoury et A. Boudjikanian abordent le problème des vœux sous différents angles. Les Libanais ont recours aux vœux surtout dans le cas de problèmes physiques ou de santé : « Quand confronté à des problèmes physiques ou à des maladies, le Libanais fait le plus souvent appel à l’intercession des forces divines par l’intermédiaire des vœux 2 ».
SAINTS
FAVORIS DES VOUANTS LIBANAIS OPTANT POUR LE PORT DE L’HABIT La Vierge, Saydeh Maryam
La Sainte Vierge occupe indiscutablement une place unique, aussi bien dans la religion chrétienne que dans la religion musulmane. Reconnue comme fille de Sion par les Juifs, comme mère de Jésus, fils de Dieu, par les chrétiens, comme mère du prophète Issa par les musulmans et comme une figure admirable devant laquelle viennent se recueillir les fidèles de diverses religions, on lui réserve une forte dévotion en Orient et tout particulièrement au Liban. Chaque village chrétien libanais lui a dédié des autels, des églises et des chapelles. Dans les maisons, une place d’honneur est consacrée à l’image ou à la statue de la Vierge. Le nombre de lieux de culte qui lui sont dédiés (églises, oratoires, chapelles) est impressionnant et leur fréquentation intense. Au Liban, plus de 900 lieux de culte chrétiens lui sont consacrés sur un territoire de 10 452 km2. La densité de ces lieux de culte révèle l’importance de la dévotion mariale au Liban qui dépasse à elle seule la dévotion à tous les autres saints. Beaucoup de filles portent le nom de Marie ou de Maryam. Dans les légendes populaires, la Vierge apparaît dans les sources ou les grottes. Dans les contes pour enfants, elle est omniprésente, préservant du « méchant » ou réalisant un miracle. Dans le langage courant, l’expression « ya ’adra », (« Oh, Vierge Marie ! » en français) est une des plus courantes que l’on retrouve sur les lèvres des chrétiens comme celles des musulmans. Son habit est composé d’une tunique bleue avec un voile blanc ou le contraire, une tunique blanche avec un voile bleu. Sur la hanche, se noue un cordon de couleur bleue ou blanche selon la tunique. Le voile peut soit se mettre sur la tête soit plus couramment sur les épaules. Les femmes encore sans enfant ou en manque de lait s’habillent essentiellement aux couleurs de la Vierge, symbole de fécondité et de maternité par excellence. Mais la Vierge 2.
A. El-Kahi, J. Khoury, A. Boudjikanian, Valeurs religieuses au Liban (1991).
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répond aussi à toute sorte de demande, on fait appel à elle pour des problèmes de santé, des problèmes d’ordre matériel ou professionnels, etc. Son habit est de loin celui qui est le plus porté par des « vouantes ». C’est aussi probablement le premier qui fut porté et les « vouantes » ne s’en sont pas lassées, jamais il n’est passé de mode. Il est porté aussi bien par des petites filles que par des femmes adultes de tout âge. Les saints libanais nationaux : saint Charbel, saint Hardini ou sainte Rafqa La dévotion réservée aux saints chrétiens par l’Ordre libanais maronite a pris une réelle ampleur. Ces derniers semblent être devenus les patrons de tout le pays. La dévotion qu’on leur porte, traduite par la ferveur de foules innombrables, n’a pas attendu les canonisations officielles, voire même les béatifications. Saint Charbel (Mar Charbel), saint Hardini (Mar Hardini) et sainte Rafqa (El-Qeddisseh Rafqa) ont été canonisés respectivement en 1977, 2004 et 2001. Ils sont devenus depuis les intercesseurs et les défenseurs de toutes les communautés libanaises, et donc des symboles nationaux. Ils ont tous les trois mené une vie monastique exemplaire et modeste, on comptait déjà à leur actif de nombreux miracles alors même qu’ils étaient en vie. Saint Charbel n’a laissé aucun enseignement écrit ou oral et l’histoire ne retient que bien peu de paroles de cet homme qui avait choisi le silence et l’ascétisme. Il n’y a rien de vraiment romanesque dans le récit de la vie de saint Charbel. Son hagiographie s’attarde sur ses miracles, la reconstitution de l’enfance et du quotidien de sa vie de moine. Le processus de canonisation de ce saint date de 1977. Sainte Rafqa a aussi vécu une vie monastique exemplaire et modeste tout comme saint Charbel et saint Hardini ; elle s’en distingue par un parcours plus mouvementé : elle a vécu les massacres de la montagne. Elle vécut quatre-vingt-deux années, dont vingt-neuf passées dans la souffrance qu’elle supportait avec joie, patience et prière pour l’amour du Christ. Elle mourut en 1914 dans la sérénité. Elle fut canonisée en 2001 par le pape Jean-Paul II. Symbole de discrétion et d’humilité, la vie de Nimatullah Al-Hardini est pleine de sérénité et de patience. Il a accepté les épreuves et les joies quotidiennes en vivant une vie monastique modeste et en se vouant à l’enseignement scolastique. Il mourut à l’âge de cinquante ans d’une maladie incurable. Le 16 mai 2004, sa canonisation fut célébrée par le pape Jean-Paul II à Rome. De son vivant déjà, on comptait au père Nimatullah de nombreux miracles comme celui du petit garçon qui servait sa messe quotidienne, frappé d’une fièvre que le saint guérit ou comme le miracle de la caisse des provisions au couvent El-Kattara miraculeusement fournie. Après sa mort les miracles se multiplièrent. L’habit monastique de ces saints est sobre : une tunique noire avec, sur les hanches, un cordon noir ou blanc. On les considère comme des saints guérisseurs « généralistes », accomplissant tous les genres de miracles et remédiant à toutes sortes de situations. Depuis la canonisation de saint Charbel en 1977, la mode de porter les habits des moines de l’Ordre libanais
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maronite s’est de plus en plus répandue et a pris de plus en plus d’ampleur. À chaque béatification et à chaque canonisation un regain d’intérêt pour le port de ces habits est manifeste. Les enfants comme les adultes portent l’habit de ces saints. Il est intéressant de remarquer que même si, en général, les filles portent les habits d’une femme sainte et les garçons ceux d’un homme saint, dans de nombreux cas au Liban, fillettes et femmes n’hésitent pas à porter l’habit de saint Charbel et de saint Hardini. Il est vrai que c’est le même habit que celui de sainte Rafqa, mais les « vouantes » le précisent quand il s’agit d’une référence aux hommes saints. Cet habit peut donc être considéré, dans le jargon vestimentaire, comme unisexe. Étant donné que cet habit est encore porté de nos jours par les moines de l’Ordre libanais maronite, ces derniers tentent d’en interdire ou d’en limiter le port par des adultes en encourageant les fidèles à le faire porter aux enfants uniquement. Saint Antoine de Padoue Ferdinand de Bulhoes dit Antoine de Padoue (Mar Matanios, et Antoine de Lisbonne au Portugal), surnommé aussi « le Thaumaturge », voit le jour vers 1195 à Lisbonne, dans une famille de nobles et de militaires. Il meurt d’épuisement le 13 juin 1231 à Padoue et est canonisé le 30 mai 1232 par le pape Grégoire IX. Docteur de l’Église, saint de l’Église catholique romaine d’origine portugaise, ayant vécu en Italie, il est fêté le 13 juin. Le culte de saint Antoine de Padoue se répandit surtout au xve et au xvie s. Il devint le saint national du Portugal, que les explorateurs firent connaître dans le monde entier. Il est le patron des marins, des naufragés, des prisonniers, des pauvres, des animaux, des oppressés, des femmes enceintes ou stériles, des affamés, des cavaliers et des natifs américains (amérindiens). À partir du xviie s., il est essentiellement invoqué pour retrouver les objets perdus ; cette idée vient du fait qu’un voleur qui lui avait dérobé ses commentaires sur les Psaumes se sentit obligé de les lui rendre. De nombreux épisodes surnaturels lui sont attribués, comme la bilocation, le fait de se faire entendre et comprendre des poissons, ou d’avoir tenu une nuit l’enfant Jésus dans ses bras. Son habit consiste en une tunique marron avec un capuchon et, sur les hanches, un cordon blanc. Son culte a été introduit au Liban par les franciscains au xve s. Dans les traditions libanaises, il est invoqué pour les objets perdus mais aussi pour les demandes familiales particulières. D’après le père capucin Théophane : « Au Liban, S. Antoine est à la place d’honneur […] Dans les dangers et dans les maladies c’est à lui qu’on a recours […] Un grand nombre promettent de faire porter à leurs enfants l’habit de S. Antoine. Et c’est vraiment touchant de voir tant de bambins pleins de vie circuler comme de nouveaux S. Antoine, en habit capucin 3 ». Au Liban, la tradition de faire des vœux en portant les habits de ce saint et de saint Élie est très ancienne. Les fidèles ont recours à ce saint 3.
Deir El Kamar Père Théophane, L’Apôtre de la Croix (1961), p. 47.
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essentiellement pour des problèmes qui touchent les enfants : maladies infantiles, retard scolaire, etc. Ainsi les habits de saint Antoine sont, dans la plupart des cas, portés par des petits garçons. C’est un habit purement masculin. Sainte Rita Elle est née au mois de mai 1381, près de Cascia (Italie). À sa naissance, on raconte que des abeilles mystérieuses, voltigeant autour de son berceau, pénétraient dans sa bouche entrouverte et en ressortaient sans lui faire aucun mal. Elle fut mariée par ses parents à un jeune homme du pays, sa vie conjugale fut un vrai martyr à cause du caractère violent et brutal de son conjoint. Mais avec sa douceur et sa patience, Rita parvint à le convertir. En 1416, son mari fut tué. Rita pardonna et s’efforça encore d’éloigner de ses deux enfants tout sentiment de vengeance. Restée seule, elle entra dans le couvent des Augustines de Cascia, où elle passa quarante années. Religieuse, Rita essaya de vivre jusqu’au bout les exigences de son état : vie de prière, d’obéissance et de pauvreté, et, dans un moment de grande ferveur, de participer dans sa chair aux souffrances du Christ. Elle fut exaucée le Jeudi Saint de l’année 1441. Pendant une extase, Rita fut miraculeusement blessée au front par une épine d’une statue du Christ devant laquelle elle priait. C’est pour cette raison qu’on la représente avec une plaie incurable à cet endroit, qui la fit terriblement souffrir durant toute sa vie. Elle se dévoua pour aider les habitants les plus pauvres de Cascia et mourut le 22 mai 1457, à l’âge de soixante-seize ans. Elle fut béatifiée en 1627 par le pape Urbain VIII et le pape Léon XIII la canonisa le 24 mai 1900. Depuis, elle est fêtée le 22 mai. Aujourd’hui, la dévotion à sainte Rita est universelle et ses grâces sont innombrables. Elle est invoquée surtout pour les cas désespérés. Son corps, miraculeusement conservé, repose dans son sanctuaire de Cascia, en Italie. L’habit de sainte Rita est composé d’une tunique noire avec un voile blanc et un cordon blanc lié sur les hanches. Au Liban, sa renommée date du milieu du xxe s. et de nombreuses filles portent son prénom 4. On lui compte une dizaine d’églises et des dizaines de petits oratoires. Sainte Rita étant la patronne des causes désespérées, des fidèles font souvent appel à elle après avoir en vain fait des vœux à d’autres saints. Elle est l’ultime recours des Libanais qui l’ont spécialement adoptée. Ils vouent en effet une dévotion particulière à cette sainte étrangère à leur culture. Sa réputation a traversé l’espace et le temps, ses statues sont vendues en grande quantité et on les retrouve sur de nombreux autels auprès d’autres saints. Des images d’elle ainsi que des prières qui lui sont consacrées sont abondamment distribuées à titre d’ex-voto. Son habit est surtout porté par des femmes adultes.
4.
V. Sauma (n. 1), t. 2, p. 207.
S’HABILLER AUX COULEURS DES SAINTS : DÉMARCHES VOTIVES ET CULTE DES SAINTS AU LIBAN
Saint Élie Élie (Mar Elias), Elijah, Ilyas ou Ayla, est un prophète dans les religions juive, chrétienne et musulmane. Il est le prophète le plus fréquemment cité dans le Nouveau Testament. Dans le Coran, il est le « bienfaiteur auprès des faibles, qui défendait des valeurs de respect ». C’est une figure qui domine le prophétisme de l’Ancien Testament. C’est sa passion pour Dieu qui l’engage dans une lutte sans relâche contre Baal et ses serviteurs. Appelé « Nouveau Moïse », Élie échappe au désert pour sauver sa vie, un ange lui apparaît, le réconforte et le pousse à continuer sa marche : la fuite devient une sorte de pèlerinage volontaire durant quarante jours, correspondant aux quarante années d’errance de son peuple 5. Les commentaires du Coran et les savants musulmans s’accordèrent à dire que le prophète Élie avait été envoyé par Dieu aux Hébreux qui vivaient dans la région du Cham (regroupant la Syrie actuelle ainsi qu’une petite partie du Liban et tout le territoire actuel de la Jordanie et de la Palestine). Élie habitait dans la célèbre cité de Baalbek (« Ba’lbakka » dans le Coran) située au Liban. Il aurait vécu au ixe s. av. J.-C. Les gens de la région étaient des païens qui adoraient Baal, la fameuse divinité phénicienne. L’effort d’Élie visait justement à essayer de faire prendre conscience à son peuple de son égarement afin de le ramener dans le droit chemin. On lui attribue aussi comme à « Khodr » le don d’immortalité. Élie est le gardien des déserts et il apparaît à l’homme qui s’y perd pour lui indiquer sa route 6. Son habit consiste en une tunique dont la couleur est le plus couramment verte ; mais elle peut aussi être grise, mauve ou rouge. Sur cette tunique, les « vouants » disposent en général en bandoulière de l’épaule droite à la hanche, sur le côté gauche, une bande de tissu le plus souvent rouge mais qui peut aussi être jaune ou verte. Ce sont les habits de saint où l’on retrouve le plus de variantes et qui sont les plus colorés. Saint Élie est l’un des grands prophètes de l’Ancien Testament, thaumaturge du ixe s. av. J.-C. qui a foulé le sol « libanais ». Saint Élie et saint Georges semblent être les saints les plus populaires du Liban. Ce nom est très communément utilisé : de nombreux villages, rues et quartiers le portent aussi. Les statues et autres images qui le représentent brandissant une épée sont exposées un peu partout dans des oratoires, des grottes, des niches, etc. Outre les deux cent soixante-deux lieux de culte chrétiens au Liban qui lui sont dédiés, une quinzaine de lieux musulmans peuvent aussi être répertoriés, à Nabi Elias, Nabi Ayla ou Nabi Yassine (ce nom étant celui de saint Élie dans le Coran), dont la petite mosquée d’Ablah, le maqâm de Nabi Elias à Qab Elias… À Baalbek, Kheir Eldeen évoque un monastère grec-catholique dédié à saint Élie qu’il mentionne comme étant un maqâm dédié au Nabi Elias, en insistant sur le caractère pluriconfessionnel des visites 7. Saint Élie est connu chez les femmes en « manque d’enfant et spécialement chez celles en manque de garçon ».
5. 6. 7.
Fr. Chiovaro (éd.), Histoire des saints et de la sainteté chrétienne (1986), p. 155-157. E. Weber, Petit dictionnaire de mythologie arabe et des croyances musulmanes (1996). H. Kheir Eldeen, Al Mazarat oual makamat al islamiah fi al Bikaa (Les mazars et les maqâms islamiques dans la Békaa), Thèse de doctorat, université Saint-Esprit de Kaslik (2004).
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L’habit de ce saint est porté au Liban aussi bien par des femmes adultes que par des enfants, plus fréquemment des garçons. C’est donc aussi un habit que l’on pourrait qualifier d’unisexe. Très rares sont les hommes et les petites filles qui le portent. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face, plus connue sous le nom de sainte Thérèse de Lisieux, née le 2 janvier 1873, est une sœur carmélite morte de la tuberculose le 30 septembre 1897 à l’âge de vingt-quatre ans (à Lisieux). À sa mort, elle laisse une autobiographie, L’Histoire d’une âme, que sa supérieure, mère Agnès, lui avait demandé de rédiger, relatant ses expériences mystiques. Elle y explique ce qu’elle appelle la « petite voie », une petite voie, selon elle, « toute droite » pour aller à Dieu, faite d’humilité et d’absolue confiance dans sa miséricorde, un chemin praticable par tous : « Je ne meurs pas, j’entre dans la vie », écrit-elle. Sainte Thérèse est béatifiée le 29 avril 1923 et canonisée le 17 mai 1925 par le pape Pie XI qui l’appelle « l’étoile de son pontificat ». Elle est déclarée patronne des Missions en 1927. À sa mort, c’est une quasi-inconnue. Ses obsèques sont célébrées en présence d’une trentaine de personnes. Très vite, pourtant, sa tombe devient un lieu de pèlerinage. Son rayonnement s’accroît si rapidement qu’il faut trouver une solution à l’accueil des pèlerins : on édifie à cet effet l’immense basilique de Sainte-Thérése de Lisieux à partir de 1929. On la fête le 1er octobre. Les Libanais sont nombreux à faire ce pèlerinage chaque année. La sainte est vêtue d’une tunique de couleur marron foncé, d’un voile blanc qui se porte sur les épaules ainsi que d’un cordon blanc sur les hanches. En 1927, le père Gebrael el-Chemali al-Achkouti (supérieur général des moines mariamites maronites) visita Rome, où Thérèse avait été proclamée sainte en 1925 par le pape Pie XI. C’est à la suite de cette visite qu’on lui bâtit un petit sanctuaire dans la cour extérieure du couvent Louaizeh à Jeita, où il exigea qu’une lanterne demeure allumée durant toute la nuit en son hommage ; son culte se répandit alors rapidement au Liban. Puis le père Gebrael fit ériger un couvent à Shaylé, dès 1927 : il fut le premier couvent au monde dédié à la sainte et sa construction ne s’acheva qu’en 2002 lors de la visite des reliques de sainte Thérèse au Liban. Par la suite, de nombreux autres couvents, églises et écoles lui furent dédiés à travers tout le pays. Sa statue est également placée sur nombre d’autels auprès d’autres saints. En 1935, une congrégation maronite lui fut consacrée, dévouée à l’éducation de la jeunesse, à l’assistance dans les hôpitaux et dans les maisons de retraite, etc. Elle compte plus de cent religieuses, une dizaine de maisons de religieuses, un hôpital et cinq écoles. Les Libanais vouent un culte particulier à sainte Thérèse, connue pour sa douceur, sa compréhension, sa compassion. Les « vouants » ont recours à elle comme à une sainte « généraliste » qui remédie à tout genre de maux. Son habit est surtout porté par des femmes adultes.
S’HABILLER AUX COULEURS DES SAINTS : DÉMARCHES VOTIVES ET CULTE DES SAINTS AU LIBAN
LES
TEMPORALITÉS DE LA PRATIQUE DÉVOTIONNELLE
Le moment choisi pour le port Le fidèle, qui formule un vœu, promet de porter l’habit du saint ou de le faire porter à quelqu’un pour une période définie, et cela en guise de demande ou de remerciement avant ou après la réalisation du vœu. Ce port ne suit pas nécessairement immédiatement la formulation du vœu. Le moment choisi dépend de différentes variables. Dans la plupart des cas, le port est programmé suite à un événement attendu, à un vœu réalisé, comme un mariage souhaité, une réussite à un examen ou une guérison. Ce moment peut aussi correspondre à un événement religieux comme le début du mois de mai, le mois marial, ou le début de la période de carême. La fête de Sainte-Thérèse est célébrée le 1er octobre de chaque année, ainsi de nombreux « vouants » choisissent cette date pour porter l’habit. D’autres variables jouent un rôle comme le facteur climatique : la chaleur de l’été peut dissuader bien des « vouants » de porter ces habits qui en général donnent chaud et sont à manches longues. Le moment choisi pour le port peut être décalé de manière significative par rapport à la réalisation du vœu. Une femme ayant fait un vœu pour avoir un enfant peut avoir promis de faire porter l’habit du saint à son enfant quand il commencera à marcher ; une autre peut promettre que si son enfant guérit à deux ans, il portera l’habit à ses dix-huit ans. La durée du port de l’habit La durée du port de cet habit est très variable. Courte ou longue, elle peut être et elle est le plus souvent symbolique. Une femme désirant avoir un enfant peut choisir par exemple de porter neuf mois durant les habits de la Sainte Vierge. La durée peut aussi dépendre d’un temps liturgique, comme le choix de porter l’habit de la Vierge durant tout le mois de mai, le mois marial, ou le choix de porter l’habit d’un saint toute la période du carême. Il arrive qu’à la suite d’un événement exceptionnel, tragique ou miraculeux, des « vouants » choisissent de porter l’habit du saint à vie, fait toutefois très rare. J’ai pu interroger l’une de ces femmes habillées aux couleurs de sainte Thérèse : elle avait fait le vœu de porter ses habits à vie suite à une guérison miraculeuse. Une autre femme s’est habillée à vie aux couleurs de saint Charbel, à la suite d’une apparition du saint chez elle. La durée la plus courante est d’un mois ou, un peu moins fréquemment, de trois mois, mais il arrive aussi que ce soit un an, voire plus.
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QUI
PORTE L’HABIT ?
La personne qui formule le vœu n’est pas nécessairement celle qui exécute le ou les rites associés. Le pèlerinage votif par délégation volontaire ou involontaire est une pratique bien antérieure aux monothéismes comme en témoignent de nombreuses recherches et récits de pèlerins. Au Liban, chez les chrétiens et les musulmans, le pèlerinage par délégation est une pratique courante mais très rarement entreprise dans une perspective de rémunération. La délégation peut être volontaire ou non : la personne concernée peut être avisée ou non du déroulement du pèlerinage. Le plus souvent, la personne « intermédiaire », celle qui formule le vœu, est une personne proche, souvent un(e) parent(e), un(e) voisin(e) ou un(e) ami(e). Il arrive qu’elle effectue le vœu sans en avertir la personne concernée et ce n’est que si le vœu se réalise que le secret de celui-ci est dévoilé pour pousser aux remerciements. Les enfants en bas âge peuvent être voués à différents saints par leurs parents ou leurs proches. Un problème de santé ou l’éloignement peuvent être des causes de délégation. Celle-ci peut également intervenir lorsqu’une personne ne croit pas en l’efficacité des rites, parce qu’elle a désespéré de venir à bout de ses problèmes, qu’elle est en voyage ou enfin parce qu’elle ne peut pas se déplacer, pour des raisons matérielles ou par peur de son entourage. La personne en difficulté peut demander à quelqu’un d’autre de faire le pèlerinage à sa place. Quoique restant chez elle, elle peut choisir de participer au pèlerinage en priant. Il arrive que les premières démarches votives soient entreprises par une personne intermédiaire puis complétées par les personnes concernées par le vœu. Il arrive que certains se sentent le devoir de faire un pèlerinage pour une personne en difficulté sans le lui faire savoir au préalable. Il arrive donc parfois que le vœu soit formulé au nom de la personne en difficulté qui ne s’est pas déplacée. Dans ce cas de figure, la personne en difficulté ne participe nullement au pèlerinage. Les adultes comme les enfants se prêtent à ce rite. Les adultes portant l’habit sont presque toujours des femmes, par contre chez les enfants, petites filles comme petits garçons se font habiller aux couleurs des saints. Bien entendu ce ne sont pas les enfants eux-mêmes qui ont formulé leurs vœux, mais dans la majorité des cas il s’agit de leurs parents, des membres de leur famille, de proches amis ou de voisins. Il est beaucoup plus courant de faire porter l’habit à des enfants qu’à des adultes. Le clergé tente dans de nombreux cas de réserver cette pratique aux seuls enfants. Au sanctuaire de Saint-Charbel à ’Annaya, les prêtres tentent de l’interdire strictement aux adultes et refusent de bénir les habits de ceux-ci. Souvent les femmes en manque d’enfants ou qui ont des enfants malades portent elles-mêmes l’habit d’un saint. Une fois l’enfant né ou guéri, il arrive que les mères le fassent porter aussi à l’enfant. Pour un même vœu, la mère peut porter l’habit d’un saint et l’enfant celui d’un autre saint (ou sainte) : à l’exemple de Micheline qui a porté l’habit de la Vierge et a fait porter à son enfant l’habit de saint Charbel. Elle était convaincue qu’elle avait vu son fils naître par la force de ces deux saints.
S’HABILLER AUX COULEURS DES SAINTS : DÉMARCHES VOTIVES ET CULTE DES SAINTS AU LIBAN
On observera que certaines femmes émigrées se livrent aussi à ce rite ainsi que de nombreux Libanais vivant à l’étranger. Ce rituel peut concerner aussi bien les adultes que les enfants, les femmes comme les hommes et des personnes de classes sociales très variées, originaires de différentes régions libanaises, rurales ou urbaines. Toutefois les hommes adultes qui portent l’habit sont minoritaires tout comme les « vouants » issus de la haute bourgeoisie.
L’ORIGINE
ET LA PRÉSENTATION DES VÊTEMENTS
Pour se procurer des habits de saints, les fidèles ont le choix entre plusieurs formules. Des boutiques spécialisées proposent des habits de saints flambants neufs. Pour les acheter, il faut en avoir les moyens et avoir la volonté de se les offrir alors qu’ils sont disponibles gratuitement dans les sanctuaires. Certains « vouants » procèdent à des commandes spéciales de ces habits auprès de couturiers ou couturières, à moins qu’ils ne les confectionnent eux-mêmes. Le croyant qui se procure, achète ou confectionne des habits neufs les fait bénir par un prêtre, le plus souvent sur le lieu de culte relatif au saint choisi. Une fois la période du vœu achevée, le fidèle rend, dans la plupart des cas, ces habits au sanctuaire concerné. De nombreux pèlerins, indépendamment du prix de ces habits neufs, considèrent que les vêtements usagés sont emprunts d’une bénédiction spéciale parce qu’ils ont été bénis par les prêtres à plusieurs reprises (« Fiyon el-Baraka ») et qu’ils ont peut-être été témoins de vœux réalisés. Des sanctuaires chrétiens offrent aux pèlerins la possibilité de se procurer, sur place, les habits du saint vénéré, disponibles le plus souvent en plusieurs tailles et offrant même, parfois, un choix de coloris ou de combinaison d’éléments de vêtements. Certains lieux de culte ne proposent que des habits pour enfants (jusqu’à 10 ans) comme c’est le cas depuis quelques années au sanctuaire de Saint-Charbel à ’Annaya. Au sanctuaire de Sainte-Rafqa à Jrabta, en revanche, on met à la disposition des pèlerins soit des habits pour enfants de moins de deux ans, soit des vêtements de femmes adultes. Pas de tenues, cependant, pour les enfants de plus de deux ans. Ces vêtements ont souvent déjà été utilisés. Une fois le vœu accompli, le fidèle les restitue au lieu de culte pour d’autres usages futurs. Dans la plupart des cas, les sanctuaires s’assurent de la propreté des vêtements avant de les prêter à un nouveau « vouant ». En général, les fidèles veillent à rendre les vêtements très propres : parfois, même, ils les portent chez un teinturier qui les recouvre d’un emballage spécial. Ces habits sont soit directement accessibles aux visiteurs dans un espace « public » du sanctuaire, sans aucun intermédiaire, soit disponibles uniquement sur demande auprès d’un employé du sanctuaire ou d’un membre de la communauté. C’est le cas à ’Annaya, où les tenues pour enfants dédiées à saint Charbel sont disposées très proprement sur des cintres devant le comptoir d’huile et d’encens ; dans l’oratoire de Saint-Élie, à Ain Sa’adé, elles sont jetées en désordre sur la table de la cuisine située en face des toilettes du
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sanctuaire. Dans le cas contraire, ces habits ne sont disponibles que sur demande : ils sont en général rangés dans des armoires (à Sainte-Rita Sheylé), derrière des comptoirs (au sanctuaire de Notre-Dame du Liban à Harissa, au sanctuaire de Saint-Hardini à Kfifane, au sanctuaire de Sainte-Rafqa à Jrabta, etc.). Le fidèle doit alors informer la personne en charge de la distribution des habits de la taille qu’il désire porter. Ce prêt est normalement gratuit. Cependant, tous les « vouants », sans exception, se sentent dans l’obligation de faire une donation au « denier du culte » après l’emprunt, acte qui reste dans la majorité des cas secret, puisque l’argent est versé en toute discrétion dans la caisse à offrandes du sanctuaire. En général, on procède à deux donations : la première au moment de l’emprunt ; la seconde lors de la restitution de l’habit. Bien entendu, une troisième donation s’impose si le vœu est exaucé. Les habits mis à disposition dans ces sanctuaires sont préalablement bénis par des prêtres et sont donc prêts à être portés directement.
LA
CÉRÉMONIE DU PORT DE L’HABIT DU SAINT ET LA CÉRÉMONIE POUR ÔTER CET HABIT La provenance de l’habit est bien entendu déterminante pour le déroulement du rituel. Si le vêtement est neuf, acheté ou confectionné par les « vouants », il doit en général impérativement être béni par un prêtre. Très rares sont les fidèles qui portent l’habit sans aucune bénédiction. Les « vouants » qui optent pour des habits usagés disponibles dans les sanctuaires peuvent choisir de les porter directement puisqu’ils ont été préalablement bénis ou bien de les refaire bénir lors de la visite.
Les prêtres dans les sanctuaires de pèlerinage sont pour la plupart préparés à ce genre de rituel et disposent d’un manuel qui dicte les prières relatives à chacun des rites de bénédiction (Al Tabrikât), dont celles de la bénédiction de l’habit avant son port et au moment de l’ôter. Ainsi, à la demande des fidèles une petite cérémonie est organisée. Plutôt « informelle », elle se déroule en général dans l’enceinte du sanctuaire, le plus souvent dans l’église ou la chapelle principale, et peut prendre différentes formes. Dans la majorité des cas les prêtres se limitent à bénir l’habit que leur présente un fidèle, avant d’être porté, à l’aide d’une croix en récitant une courte prière. Dans certains sanctuaires, comme dans celui de Sainte-Rafqa à Jrabta, la femme du comptoir affirme aux pèlerins que les habits qu’elle leur remet ont déjà été préalablement bénis par un prêtre et peuvent donc être portés directement, les décourageant d’insister pour obtenir l’intervention d’un prêtre. Les « vouants » qui optent pour un habit usagé, emprunté à une voisine, une amie ou autre considèrent parfois qu’étant donné qu’il a déjà été béni et porté, il est possible de faire l’économie d’une nouvelle bénédiction. La plupart des « vouants » se prêtent à la cérémonie pour la bénédiction de l’habit mais l’ôtent sans aucun rituel spécifique. Pourtant il existe une petite cérémonie pour le retrait de l’habit décrite dans le manuel des bénédictions à laquelle de rares pèlerins se prêtent.
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Comme dans le cas de la cérémonie de bénédiction de l’habit, le prêtre brandit une croix cette fois-ci sur le « vouant » et récite des prières avant qu’il n’enlève l’habit solennellement et ne le rende au sanctuaire.
ACTE
DE FOI ET DE PROMOTION DES SAINTS
Le rituel que l’on vient de relater témoigne de motivations personnelles intimes ; mais c’est par le port quotidien de l’habit que la foi et la dévotion à un saint spécifique s’extériorisent socialement. Le « vouant » cherche à ce que l’« autre » remarque ce vêtement, il va et veut promouvoir l’image du saint à travers ce port. Il arrive même que certains « vouants » adultes portant l’habit se consacrent aussi à distribuer dans certaines occasions les images du saint, à l’instar de cette femme portant les habits de la Vierge et rencontrée le 22 novembre 2008 à ’Annaya : elle distribuait aux pèlerins de l’ermitage de Saint-Pierreet-Saint-Paul des images de la Vierge de Medjugorje. Les « vouants » eux-mêmes parlent de cette reconnaissance. Ainsi, Soumaya, une « vouante » de cinquante ans, rencontrée au sanctuaire de Notre-Dame de l’Attente à Maghdouché en octobre 2004, me disait : « Il suffit de voir au Liban au mois de mai combien de femmes portent l’habit de la Vierge pour se rendre compte de sa popularité ». Ce désir des « vouants » de promouvoir le saint concerne essentiellement le port de l’habit par des adultes. Les femmes qui choisissent cependant de le faire porter à leurs enfants ont essentiellement le désir de bénir leur enfant et de lui attribuer des grâces spéciales, sans une quelconque perspective de promotion du saint.
UNE
PRATIQUE EN ÉVOLUTION
Modes de saints On observe tout à la fois des modes et des constantes dans ces pratiques. Il y a quelques années de cela, de nombreux fidèles portaient les habits de saint Antoine de Padoue et de sainte Rita. Le port de ces habits se fait de plus en plus rare aujourd’hui, cédant la place aux habits de saint Charbel, sainte Rafka ou saint Hardini, parmi d’autres. Ce sont à présent ceux de la Vierge qui remportent le plus vif succès. Ils sont incontestablement les plus communs et les plus utilisés depuis bien longtemps. On peut les qualifier d’« indémodables ». Durant toute l’année, des femmes se vouent à la Vierge. Cependant, le mois de mai représente un moment privilégié. Nul déplacement dans un quartier ou dans un village chrétien libanais sans que vous croisiez une femme ou une petite fille portant l’habit de Marie. Certains événements peuvent remettre à la mode l’habit d’un saint ou d’une sainte ou bien en encourager le port. Chaque nouvelle canonisation de saints libanais tels Charbel, Rafqa ou Hardini, a renforcé le succès des habits noirs des moines de l’Ordre libanais maronite.
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Les habits de sainte Thérèse connurent un regain d’intérêt auprès des Libanais lorsque ses reliques furent déposées dans le sanctuaire de Shaylé (Keserouan) en 2002. De même, la béatification de ses parents, Louis et Zélie Martin, en octobre 2008 et le dépôt de leurs reliques en janvier 2009 au couvent de Shaylé entraînèrent en retour le succès du port de l’habit de la sainte. Une mode peut en éclipser une autre. Certains saints perdront ainsi peu à peu de leur popularité. Les modalités du port de l’habit La manière dont sont portés ces habits, bien que relativement constante, peut évoluer. Dérogeant à la manière « classique » de porter les habits, certains « vouants » y ajoutent une touche personnelle selon leur goût, leur âge, ou encore leur rang social. Quelques-uns de ces habits permettent aux « vouants » de faire des choix. Pour celui de la Vierge, la « vouante » peut choisir de porter ou non le voile, ou encore de porter une robe bleue avec une cape banche ou bien, à l’inverse, une robe blanche avec une cape bleue. L’habit de saint Élie offre le choix entre plusieurs tons de couleurs allant du vert au gris ou au mauve avec une ceinture jaune ou rouge. Certains « vouants », essentiellement des jeunes, tentent de trouver des moyens « à la mode » de porter ces habits que beaucoup trouvent « ringards ». Ils cherchent ainsi à les adapter à leurs âges et à leurs goûts vestimentaires. La manière originale et très moderne dont Bernadette a porté l’habit de saint Charbel est éloquente : les manches retroussées, l’habit très court laissant entrevoir un collant fuseau noir et de hautes bottes noires, un énorme chapelet autour du cou, donnent l’impression d’une tenue à la mode très recherchée, dite « trendy ». L’habit du saint pourrait même être celui d’un enfant utilisé volontairement par un adulte pour des raisons esthétiques. À l’université Saint-Esprit à Kaslik, au mois de mai 2007, une jeune étudiante portait l’habit de la Vierge à la manière d’une « mini-jupe », utilisant volontairement un habit de petite taille (d’enfant) pour cela.
COULEURS
ET SYMBOLISMES : CROYANCES POPULAIRES DES PÈLERINS VOUANTS Chaque couleur véhicule des images et des symboles qui varient selon les cultures, les périodes historiques et les circonstances. Le symbolisme des couleurs est issu de différentes sources, aussi bien de l’histoire, des traditions de différents pays et des religions. Cette valeur, utilisée consciemment ou inconsciemment, est plus ou moins prégnante selon le contexte dans lequel est employée la couleur. Chacune des couleurs a toujours pris des significations qui se sont affirmées avec le temps ou qui ont pris au contraire une connotation nouvelle en fonction de l’évolution des mœurs ou de la technologie et des faits historiques. Au fil du temps, au Liban comme ailleurs, les couleurs ont acquis
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une multitude de connotations symboliques qui se sont parfois modifiées et parfois cristallisées. Sans s’attarder sur le symbolisme des couleurs en général, on s’intéressera plus particulièrement au seul cas des croyants libanais qui attribuent souvent aux couleurs des significations diverses. Si les pèlerins semblent prêter une importance plus grande au choix de la figure de sainteté qu’aux couleurs de son habit, ces dernières leur inspirent cependant souvent des vertus et ne les laissent pas indifférents. Le noir pour les habits de saint Charbel, de saint Hardini, de sainte Rafqa et de sainte Rita, couleur des moines de l’Ordre libanais maronite Au Liban, le noir est incontestablement associé au deuil et à la mort, mais porté en habit de moine, il inspire le sacrifice, l’humilité, la sainteté et la dévotion totale à Dieu. Tina, femme de quarante-cinq ans, originaire de Tyr, une grande ville côtière du Liban, porte les habits de saint Charbel et m’avoue qu’il est « vrai que le noir inspire la mort et la tristesse mais c’est aussi la couleur du désintéressement, du sacrifice et de l’humilité. Les moines qui renoncent à tous les vices de la vie matérielle ici-bas choisissent cette couleur ». Rihab, une jeune femme de vingt-trois ans, originaire de Batroun, ville côtière au Nord, et qui portait les habits de sainte Rafqa pour réussir ses examens de fin d’année me dit alors « moi je n’aime pas du tout la couleur noire, mais quand je vois un prêtre ou un moine en noir, il m’inspire de la sérénité et la sainteté ». Originaire de Khenchara, dans la montagne libanaise, Soha, cinquante et un ans, en visite au sanctuaire de Saint-Hardini au couvent Saint-Cyprien-et-Sainte-Justine à Kfifane, répond à ma question en ces termes : « Le noir est la couleur de la décence, de la dévotion totale à Dieu, c’est pour ça que les hommes de religion l’ont adopté ». Je questionne un homme prénomé Tony, âgé de quarante-sept ans, et originaire de Jal el-Dib, ville côtière au Nord de Beyrouth, venu récupérer des habits de saint Charbel au couvent de Saint-Maron à ’Annaya pour son fils souffrant d’une grave maladie. Il m’avoue que « porter du noir indique que vraiment on a renoncé à toute matérialité et que seul Dieu compte. Ce n’est pas la mort, le noir, mais bien au contraire le chemin vers la lumière de Dieu. » Le marron pour les habits de saint Antoine et de sainte Thérèse Le marron fait partie des couleurs chaudes. Il n’appartient pas aux couleurs de l’arcen-ciel. C’est une couleur stabilisante, solide, associée à une certaine rudesse, et même vulgarité, symbolisant souvent la vie domestique. C’est une couleur « confortable », pour l’intérieur d’une maison ou portée sur soi. Elle symbolise non pas le jaillissement de vie comme le vert mais sa maturation. Le brun porte en lui toutes les promesses fécondes de la terre et du bois. Couleur réceptive et sensorielle, les diverses nuances de marron correspondent bien au corps, au foyer et à son intimité, à la sécurité idéale de la cellule familiale.
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Fig. 1 — Georges (3 ans) habillé par sa mère aux couleurs de saint Antoine de Padoue (cl. N. Farra-Haddad).
Fig. 4 — Nicolas (4 ans) habillé par sa mère aux couleurs de saint Élie, la tunique verte avec la bande rouge (cl. N. Farra-Haddad).
Fig. 2 — Georges (3 ans) habillé aux couleurs de saint Antoine de Padoue et sa mère (cl. N. Farra-Haddad).
Fig. 5 — Tigist (jeune Éthiopienne, employée de maison) habillée aux couleurs de saint Élie, la tunique verte avec la bande rouge (cl. N. Farra-Haddad).
Fig. 3 — Tuniques de saint Élie présentées sur une table de cuisine à l’oratoire de Saint-Élie, Ain Saadé, à l’usage des « vouants » (cl. N. Farra-Haddad).
Fig. 6 — Alain (4 ans) habillé par sa mère aux couleurs de saint Élie, la tunique grise avec la bande jaune (cl. N. Farra-Haddad).
Pour les Libanais la couleur marron est associée directement à la terre à laquelle ils tiennent particulièrement. En habit de saints, cette couleur leur inspire l’humilité, la simplicité et la dévotion totale à Dieu. Maha, une femme âgée de cinquante-trois ans, originaire de Joura dans la montagne libanaise, a fait le vœu de faire porter à son fils les habits de saint Antoine à condition qu’il guérisse de sa maladie. Pour cette croyante, « le marron, c’est la couleur de la terre, ça nous rappelle que de la terre nous sommes venus et à la terre nous reviendrons ». Roula, trente-sept ans, originaire de Deir el-Qamar dans la montagne libanaise, a fait porter à son fils les habits de saint Antoine pour éloigner de lui le mauvais œil car pour elle « le marron, c’est la couleur de l’humilité ». Hiba, quarante et un ans, originaire de Beyrouth, a vêtu son fils des habits de saint Antoine pour remercier le saint de lui avoir « envoyé » cet enfant ; pour elle, le marron,
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« c’est la couleur de saint Antoine de Padoue, il était si simple, si humble, si dévoué à Dieu. Si Dieu le veut [Inshallah] il nous indiquera le chemin pour être aussi proches de Dieu que lui » (fig. 1-2). Le vert et le rouge ou le jaune pour les habits de saint Élie (fig. -) Van Gogh écrivit : « J’ai tenté d’exprimer les terribles passions humaines par le rouge et le vert 8 ». Le vert est la couleur de la nature au printemps. Elle correspond à la renaissance de la nature, à la croissance, à la jeunesse, à l’expérience. C’est à la fois l’éveil de la vie et sa pérennité. Pour l’islam, le vert représente le Salut (d’où le drapeau vert, car le manteau du Prophète Mohammad était vert). L’homme vert ou « Khidr » ou « Khodr », patron des voyageurs, incarne la providence divine. Au paradis musulman, les saints sont vêtus de vert comme le Prophète. Pour le christianisme, le vert représente la régénération de l’âme, la charité, la sagesse, c’est la couleur de la Vierge, de l’enfant Jésus et du Christ après sa crucifixion. La croix et les instruments de la passion étaient, de même, représentés en vert au Moyen Âge. Les vêtements liturgiques de la messe sont verts pour certaines fêtes. Le jaune est la couleur du soleil, de la lumière et du métal le plus précieux, l’or. C’est le symbole de la spiritualité, de l’intelligence et de la force infuse. Le jaune, comme l’or, évoque la richesse matérielle et spirituelle, l’abondance. La grande majorité des peuples ont associé l’or à la richesse, donc à la noblesse, au pouvoir. Couleur de l’immortalité, elle est couleur divine. Pour les chrétiens, le jaune est couleur d’éternité et l’or est son métal. Le jaune existe aussi dans le drapeau du Vatican comme l’illustrent le ciboire et la croix de la chasuble. Confondu avec la couleur des grains mûrs (blé, maïs, millet, etc.), le jaune annonce l’automne. Il dessèche comme l’or qui entraîne envie et jouissance. Couleur du feu et du sang, le rouge symbolise la vie avec sa force, son éclat et sa puissance. L’ambivalence est permanente avec cette couleur. L’habit de saint Élie au Liban associe le plus souvent tunique verte et ceinture rouge (fig. 4-5). Il arrive cependant que l’on observe le contraire, à savoir tunique rouge et ceinture verte. Ainsi, les « vouants » qui voient d’avantage en saint Élie un saint justicier et vengeur porteront la tunique rouge. En revanche, ceux qui reconnaissent d’abord en lui sa bonté porteront la tunique verte. Pour les Libanais, le vert est incontestablement associé à la nature et sa sérénité. Chez les musulmans, il est la couleur divine de la sainteté. Mais le vert associé au rouge ou au jaune rappelle à tous les habits de saint Élie, saint qui n’est pas sans inspirer une certaine peur chez les croyants. Le rouge inspire le sang et la vengeance, même si le vert le tempère. L’image la plus fameuse de ce saint au Liban est celle qui le présente avec un grand sabre ensanglanté. Il est connu pour être justicier, vengeur et rancunier, mais aussi pour être très efficace auprès des « vouants ». 8.
É. Alliez, J.-Cl. Bonne, La pensée-Matisse : Portrait de l’artiste en hyperfauve (2005), p. 24.
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Fig. 7 — L’armoire où sont rangées les tuniques de la Vierge à la disposition des « vouantes » au sanctuaire de Notre-Dame du Liban, à Harissa (cl. N. Farra-Haddad). Fig. 8 — Inaam (37 ans) habillée aux couleurs de la Vierge suite à un vœu pour des problèmes de santé (cl. N. Farra-Haddad). Fig. 9 — Sylvie (10 ans) habillée par sa mère aux couleurs de la Vierge Marie, la tunique bleue et le voile blanc (cl. N. Farra-Haddad).
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Fig. 10 — Yasmine (2 ans) habillée par sa mère aux couleurs de la Vierge, la tunique bleue et l’étole blanche (cl. N. Farra-Haddad). Fig. 11 — Devant le comptoir de l’oratoire de Saint-Élie, Ain Saadé une « vouante » participe à la distribution de ceinture en coton, pain de communion et huile bénite (cl. N. Farra-Haddad). Fig. 12 — Devant le comptoir pour l’encens, l’huile et les ceintures du couvent de Saint-Maron, ’Annaya (sanctuaire de Saint-Charbel), les habits du saint de toutes tailles sont présentés aux « vouants » (cl. N. Farra-Haddad).
Pour Rana, « le vert est la couleur de la sainteté et le rouge la couleur de la vengeance qui nous rappelle que l’on doit être fidèle à Dieu et surtout respecter le saint et les promesses qu’on lui aurait faites ». Abed, un homme de quarante-huit ans, originaire de Ballouneh, dans la montagne libanaise, a porté les habits de saint Élie pour le remercier d’une faveur. Selon lui, « le vert, c’est la couleur de la nature, des arbres, des plantes et le rouge c’est la couleur du sang ». Marwan, trente-six ans, originaire de Mezyara dans la montagne libanaise au Nord, a fait porter à son fils les habits de saint Élie pour demander sa guérison : « le vert, c’est
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une couleur si apaisante, si douce, sécurisante et le rouge, au contraire, c’est une couleur qui impressionne, qui fait peur. Ainsi les habits de saint Élie nous rappellent combien le saint est gentil, compréhensif et doux, mais qu’il peut aussi être vengeur et méchant si l’intention des fidèles est mauvaise » (fig. 4). In’am, quarante-sept ans, originaire de Sidon, ville côtière Sud, a revêtu son fils des habits de saint Élie pour remercier le saint de sa naissance, pour elle : « saint Élie aime le sang, mais il n’y a pas plus bon que lui. Il ne faut absolument pas le fâcher et toujours tenir ses promesses, sinon il peut se venger. Il répond à la demande de tous les fidèles c’est pourquoi ses habits sont verts, couleur divine, et rouges, couleur du sang ». Le bleu et le blanc, pour les habits de la Vierge, Saydeh Maryam (fig. -) Le bleu est l’une des trois couleurs primaires. C’est la couleur du ciel et de la mer et elle appelle à l’évasion spirituelle. C’est la couleur de l’azur, du paradis par conséquent. Elle symbolise la paix, le calme et la volupté ainsi que la vérité et la sagesse divine. En Orient, le bleu conjure le mauvais sort, le mauvais œil. Cette croyance se traduit par l’accumulation de pierres bleues, œil de verre méditerranéen ou œil peint sur les bateaux, suspendus dans les camions et les voitures. Il porte chance, comme en Occident. Le blanc est constitué de l’ensemble des longueurs d’ondes et des couleurs visibles dans l’arc-en-ciel. Il est par excellence la couleur de la pureté, de la virginité (la mariée est vêtue de blanc), et par conséquent de l’innocence (l’enfant que l’on baptise est vêtu de blanc). Le blanc représente aussi la sagesse. Dans nombre de religions, on l’identifie à la lumière intérieure. Cette couleur est également associée, on le sait, à la Vierge de l’Immaculée Conception vêtue de blanc, ainsi qu’à Jésus lui-même. N’apparaît-il pas à ses disciples vêtu de blanc ? Les fidèles au Liban voient dans ces couleurs l’expression divine et céleste. Elles leur inspirent la paix, la sérénité, la sainteté, la tendresse et l’amour. Micheline, âgée de trente-deux ans, née à Kartaba dans la montagne libanaise, porte les habits de la Vierge pour guérir d’une maladie car : « le bleu est une couleur céleste, bénite, et le blanc est la couleur de la paix. Ces couleurs inspirent la sainteté, la paix, la prière ». Rania, cinquante-sept ans, originaire de Beyrouth, la capitale libanaise, accompagne sa fille qui désirait alors porter les habits de la Vierge pour avoir un enfant et qui déclare que : « le bleu et le blanc sont les couleurs de la Vierge. Ils inspirent le ciel, les anges et la sainteté ». Noha, vingt-neuf ans, native de Meyrouba dans la montagne libanaise, a fait porter les habits de la Vierge à sa fille pour la guérir d’un problème de santé. Elle me confie : « moi, les couleurs des habits de la Vierge me sécurisent, elles m’inspirent la tendresse et l’amour ».
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ELBARAKEH TYAB ELQEDISSIN ILS SONT EMPRUNTS DE BÉNÉDICTIONS, LES HABITS DES SAINTS Wardeh, âgé de quarante-sept ans, originaire de Broummana dans la montagne libanaise, a porté les habits de la Vierge pour guérir de ses varices. Deux ans auparavant, elle avait aussi fait porter à sa fille de douze ans les habits de sainte Rafqa pour réussir un examen. Elle me confie que : « les habits de saints sont pleins de bénédictions, de grâces ». À la recherche de grâces pour la plupart thérapeutiques, des « vouants » s’habillent ou habillent leurs enfants « aux couleurs des saints ». Aucune étude quantitative ne peut démontrer l’ampleur du recours à ce rituel. Il suffit cependant d’arpenter les rues des villes et des villages chrétiens tout au long du mois de mai pour se rendre compte de son succès. Celles et ceux qui sont en charge de la distribution de ces vêtements dans les hauts lieux de pèlerinage des saints concernés par ce port, notamment ceux de la Vierge, des saints libanais nationaux (saint Charbel, saint Hardini ou sainte Rafqa), de saint Antoine de Padoue (Mar Mtanios), de sainte Rita, de saint Élie (Mar Elias) et de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, attestent eux aussi le recours important de « vouants » à ce rite (fig. 11-12). Voir circuler dans les rues des personnes habillées en saints peut être touchant, déstabilisant, choquant, mais ne laisse en aucun cas indifférents les passants. Jinane, quarantetrois ans, originaire de Jezzine et vivant à Beyrouth, dit : « Voir des personnes habillées en saints m’a toujours ému… J’admire la foi de ses “vouants” et leur capacité à supporter le regard des autres, très curieux et inquisiteur ». Doris, trente-trois ans, originaire de Zahlé et en pèlerinage à Beshouat, me confie : « Les “vouants” habillés en saints semblent répandre des grâces sur leur passage, marquant les regards de la couleur du saint qu’ils ne seront pas près d’oublier ».
Index général (noms propres et communs) Les entrées en anglais, à l’exception des couleurs, ont été regroupées avec celles françaises. Les auteurs antiques ne sont indexés que lorsqu’ils sont cités dans le corps du texte.
a fresco, 45, 321, 363 Abydos, 16, 215 accoutrement, 285, 287, 292 Achéron, 207, 331 Achille, 199, 207-209, 334, 351, 439 acide(s), 56, 253 (acétique), 257 Acropole, Acropolis (GB), 91, 97, 120, 131, 181, 216, 246, 287, 290, 439, 443 Acropolis kore 682, 131-142 acrotère(s), 307, 308, 341, 361, 362 acteur(s), 10, 11, 244, 444 Adimante, 200 adjudication, 88, 89, 92, 94 Adulte(s), 54, 67, 246, 248, 284, 450-452, 454, 456, 457, 459, 460 Aegina, 103-105, 109, 112, 123, 129, 133, 136, 171. Voir Égine Aegisthus, 104, 105 Aetius, 369, 370 Afghanistan, 224 africano, 412 Afrique, 406 du Nord, 358 agalma, 86, 102, 275, 287, 288 agalmata, 280, 289, 290 Agamemnon, 203-205, 207 Agatharchos, 189 Agathôn, 88 âge(s), 251, 456, 450, 460
âgé(e)(s), 461, 466 âge d’or, 403, 405, 411 agora, 25, 111, 245, 246, 248, 254, 284, 286-288 des Italiens (Délos), 389, 392-394, 397, 398 Agrippina, 377, 378 aigle(s), 198, 412 Ajax, 188, 194, 195, 199, 204, 205, 207, 322 alabastre(s), 218, 249, 340 albâtre(s), 311, 312, 353, 363, 365, 405 Albert le Grand, 408, 410 De mineralibus, 408 Alberti (Leon Battista), 417, 434 alcalin(s), 15, 25, 63, 214, 220 alcalinité(s), 251 Alcmène, 195-199, 202 Alésia, 255 Alexandre, 187, 190, 194, 195, 284, 285, 286, 358 Alexandre III de Macédoine, 284 Alexandre le Grand, 358 Alexandrie, 15 (bleu de), 16, 19, 22, 27, 289, 293-315 alexandrin(e)(s), 19, 187, 225, 227, 299, 300, 305, 308 alexandrinum, 226 Alexandrovo, 317, 318, 336 tombeau (d’), 334, 335 alizarine, 55, 56, 251 alourgis, 284
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LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
alumine, 226 Amathonte, 20, 216 Amazone(s), 321, 439 Amazonomachie, 204, 205 ambon(s), 414 ambre, 219, 220-224, 443 Amiens, 255 Ammianus Marcellinus, 369, 370 amphore(s), amphora (GB), 28, 78, 107, 197, 201, 203, 219, 246, 247, 325, 338 Attic, 98-100 krater-, 102, 103, 105, 108 panathénaïque(s), 202, 325 Amphitryon, 195-198 Amsterdam, 200, 201 Anacréon, 280 analyse(s), analysé(e)(s), analysables, analysed (GB), (physico-chimiques), 9-11, 16-21, 25, 29, 34, 35, 42-44, 49-55, 60-62, 65, 66, 74, 79, 81, 83, 85, 91, 94, 137, 143, 145-147, 150, 151, 153-155, 157, 159, 165, 166, 167, 175, 187, 189, 191, 192, 194, 197, 204, 208, 213-215, 217-219, 226, 235, 241, 244, 248-251, 252-257, 275, 320, 383, 401, 425 architecturale(s), 326 iconographique(s) et stylistique(s), 309, 315, 317, 320, 328, 331, 379, 395 textuelle(s), 278, 290, 292, 336, 439 analytique procédure(s), 249 technique(s), 249 anathémata, 290 Anatolie, 280 anatolien(ne)(s), 344 anatomique (d), 436, 443 Anchise, Anchises (GB), 140, 440, 443 Andromaque, 280, 285 Anfouchi, 299, 300, 311-315 Angélion, 288 animal(e)(s), animaux, animal(s) (GB), 37, 91, 98, 101-103, 109, 111, 120, 124, 179199, 217, 278, 305, 328, 334, 409 Anténor, Antenor (GB), 136, 197 anthémion, 305
anthraquinones, 251 anthropomorphe(s), 426, 436, 438, 439, 444 antichambre(s), 280, 297, 299, 305, 324, 327-329, 336-339, 341-343 Antigone de Carystos, 187 Antigone le Borgne, 285 antimoine, 211, 213-215, 217-219, 225, 226 Antinoupolis, 67 antique(s), 9 Antiquité, 13, 15, 18, 33 (tardive), 55, 72, 79, 83, 94, 149, 189, 190, 197, 211, 214, 218, 227, 241, 243, 265, 277, 363, 365, 369, 371, 403, 405, 406, 408, 411, 412, 414, 418, 419, 421-423, 425, 430, 434, 436, 439 grecque, 90, 243, 430 gréco-romaine, 94, 197, 277 Apelle, 187, 189, 190, 195 Aphrodite, 88, 107, 140, 154, 155, 159-162, 165, 171, 199, 216, 279, 286, 288, 292, 389, 391, 393, 396, 397, 432, 439, 440, 443 de Cnide, 439 de Stésiléôs, 88 Pandemos, 288 Apocalypse, 407 Apollodore d’Athénée, 188, 194, 330, 331 Apollon, Apollo (GB), 20, 30, 84, 85, 88, 90, 103-105, 107-110, 112, 146, 147, 159, 160, 171, 200, 281, 285, 288, 289, 303, 304, 383, 389, 393, 398, 399, 401, 438, 439, 442, 444 Apollonia Pontica (Sozopol), 321 Apollonios de Rhodes, 285 apoptygma, 117, 118, 123 apparat(s), 11, 217, 282-285, 295, 307, 309, 411 appearance, 102, 111, 119, 120, 140, 185, 186, 241, 403 application(s) traitement(s) de surface (couleur, dorure, patine, peinture, pinceau, etc.), 9, 10, 18, 88, 91, 148, 150, 151-154, 159, 173, 243, 249, 250, 256, 273, 326, 328, 362, 363, 365, 420, 421, 443 méthode(s) (examen, analyse, etc.), 39, 40, 42, 43, 124, 148, 151
469
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
applique(s), 215, 305 appliqué(e)(s), 359 tarif(s), 93 décor(s), 181, 211, 226, 281 couleur(s), 35, 322, 327 apprêt(s), 154, 155, 156 approche(s), 10, 73, 440 apulien(ne), 181, 182, 193, 199, 202, 203, 205, 369, 370 arc-en-ciel, rainbow (GB), 185, 190, 197, 208, 210, 465 Arcadie, 291 archaïque(s), Archaic (GB), archaïsme, 21, 95-114, 115-130, 131-142, 151, 169, 171, 172, 188, 208, 216, 245, 261, 277, 279, 282, 283, 295, 296, 322, 436, 437, 444 archéologie (champ disciplinaire, période, hors revues), 4, 20, 21, 22, 33, 51, 90, 94, 102, 117, 187, 243, 301, 321, 322, 342, 366, 402 expérimentale(s), 63, 71 maritime(s), 389 revue(s), 219, 295, 299, 421 (Bulletin de la Société…) archéologique(s), 9, 10, 15, 21, 28-30, 33, 35, 49-56, 73, 79, 153, 187, 252, 256, 413 Annales, 21 corpus, 192 culture(s), 412 découverte(s), 225, 256, 340, 342, 441 donnée(s), 22, 243, 261 échantillon(s), 256, 259 ensemble(s), 244 étude(s), 274 évidence(s), 273 exploration(s), 265 fard(s), 252, 259 fouille(s), 21, 343 information(s), 402 matériel(s), 225, 278 micro-, 148 note(s), 340 objet(s), 35 recherche(s), 193 source(s), 25 site(s), 265 archéométrique(s), archaeometric (GB), 20, 25, 43-47, 79 architecte(s), 10, 351, 418, 420, 421, 429, 434
architectonique(s), 326, 413 architectural(e)(s) application(s), 417 complexe(s), 265 composition(s), 347 contexte(s), 399 corniche(s), 209 décor(s) 293, 295, 297-304, 307, 308, 363 décoration(s), 177, 293 forme(s), 336 effet(s), 202 élément(s), 293, 303 member(s), 95 métaphore(s), 200 moulure(s), 10, 20, 81, 402, 84 motif(s), 179 painting(s), 178 restitution(s), 402 sculpture(s), 297 structure(s), 208 style(s), 311, 347 surface(s), 273 trompe l’œil, 345 verre(s), 211 architecture(s), 53, 87, 111-114, 133, 177, 179, 181, 189, 199, 200, 202, 209, 293, 295, 296, 303, 305, 306, 308, 310, 311, 315, 319, 322, 323, 325, 326, 331, 345, 347, 351, 361, 363, 372, 402, 403-422, 434, 444 de terre, 310 house, 181 palatial, 181 stone, 111, 113 tomb, 177, 179, 181 architrave(s), 93, 297, 303, 313, 332, 337 arête(s), 160, 342, 353, 396 arétè, 185, 199-202, 283 Argaman, 35, 37, 38, 46, 47 argent(s), 78, 88, 217, 227, 256-258, 280, 281, 285, 290, 334, 338, 342, 343, 350-352, 355, 356, 361, 443, 458 argenté(e)(s), 361 argentifère, 257 argile(s), 23, 24, 30, 251, 255, 338, 339, 341, 343 argileux, argileuse(s), 20, 246 Argos, 106, 411
470
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
Ariane, 210 aristeia, 282, 283, 292 Aristide, 93, 188 aristocratie, 185 aristocratique, aristocratic (GB), 117, 177, 179, 283, 286, 320, 332, 336, 436, 437, 444 Aristophane, 244, 260, 286, 331 Aristote, Aristotle (GB), 37, 92, 153, 188, 189, 190, 197, 199, 208, 369, 370, 408 aristotélicien(ne)(s), 189, 191, 197, 210, 408 arme(s), weapon(s) (GB), 97, 179, 181, 197, 217, 324, 338, 342 armée(s), 50 armé(s), 307 armure, armour (GB), 110, 342 Arnoldus Saxo, 408 Liber floridus, 408 Arpi, 169, 170, 177, 178, 179, 181, 182, 183, 198, 238, 330 arrondi(e)(s), 304, 307, 311, 315, 353, 365, art(s), 9, 10, 16, 18, 37, 46, 67, 70, 83, 95, 9799, 101, 102, 105, 111-114, 127, 133, 140, 151, 156, 166, 171, 181, 187, 188 (Nouveau), 188-190, 192, 195, 204, 216, 227, 265, 278, 291, 295, 308, 321, 322, 326, 337, 339, 347, 363, 367, 372, 379, 396, 401, 414, 420, 434, 436, 437, 440 Artémis, Artemis (GB), 88, 103, 104, 105, 117, 119, 120, 127-129, 152, 157, 158, 159, 163, 164, 166, 281, 282, 287-290, 389, 393, 394, 398, 399 Brauronia, 282, 287, 290 Chitônè (Milet), 290 élaphébole, 159, 163, 164, 166, 399 Artémise, 217 Artémision, 288 artisan(s), 78, 82-85, 86, 88-94, 146, 150, 157, 188, 201, 229, 251, 263, 279, 295, 307, 309, 310, 315, 345, 347, 349, 351, 353, 355, 360, 365 artisan(s)-décorateur(s), 81, 347, 349, 351, 353 artisanal(e)(s) activité(s), 27, 83, 90, 289 travail, 353 artisanat(s), 33, 34, 76, 83, 89, 213, 223, 229, 366
artiste(s), artist(s) (GB), 18, 83, 85, 93, 101, 113, 114, 124, 130, 133, 151, 152, 171, 173, 187, 188, 190, 263, 287, 351, 413, 414, 428, 430, 431, 432, 433, 435, 463 artistique(s), artistic (GB), 83, 97, 99, 113, 124, 125, 151, 169, 171, 177, 187, 243, 263 Asie Mineure, 283, 319, 406 Asklepieion, 85 Asklépios, Asclépios, 85, 245, 331 aspergé, 365 Asperula tinctoria L., 251 assiette(s) sous-couche(s), 146, 149, 150, 155, 156, 399, 401 vaisselle(s), 218, 219, 221, 229, 247 Assyrie, Assyria (GB), 216, 236 assyrien, assyrian (GB), 214, 236, 281 (néo-) Astrapè, Astrapen, 195, 196, 199 astrologique(s), 224, 408 astynomoi, 288 atelier(s), workshop(s) (GB), 13, 21-23, 25, 27-29, 33, 34, 63, 87, 88, 91, 102, 107, 110, 113, 127, 137, 145, 151, 154, 169, 175, 179, 213-215, 217-220, 223-227, 260, 273, 287, 291, 347, 351, 353, 356, 359, 363, 366, 439 de production, 25, 28, 34, 223, 260 primaire(s), 21, 214, 226 secondaire(s), 20, 21, 213, 214 Athéna, 83, 88, 107, 195, 202, 216, 245, 276, 285, 287, 288, 290, 331, 338, 438, 439, 440, 443 Parthénos, 439 Polias, 287 Promachos, 83, 88 Athénée de Naucratis, 189, 190, 244, 261, 263, 274, 275, 281-286, 289, 290, 292 Athènes, Athens (GB), 18, 38, 88, 91, 92, 94, 97-100, 103, 106-108, 116, 120, 123, 130, 131, 134, 170, 192, 230, 251, 252, 254, 255, 257-260, 281-283, 286, 288, 290, 302, 381, 389, 392, 443 Athénien(s), athénien(ne)(s), Athenian (GB), 91, 92, 94, 113, 131, 133, 151, 244, 248, 254, 277, 282, 283, 286-289, 291, 323, 436 athlète(s), 437, 443 atrium, 353, 354, 365, 427
471
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
attique(s), attica (GB), 83, 84, 86-88, 90, 92, 94, 98, 105, 107, 111, 113, 117131, 175, 192, 200, 251, 254, 255, 277 Auguste, Augustus (GB), augustéen(ne)(s), Augustean (GB), 33, 187, 218, 220, 221, 222, 225, 349, 350, 351-353, 363, 372, 374, 375, 378, 381, 383, 422 Aurige (de Delphes), 442, 443 autorité(s), 291, 433-435 Auxerre (Lady of ), 115, 119-122, 125, 127-129 Avenches, 223, 224 azure, 136, 137 azurite, 16, 383 Baalbek, 453 background, 130, 181, 233, 236, 379, 381, 382, 383, 385 bain(s) établissement(s), 301 milieu(x) liquide(s), 63, 64, 74, 243, 251 bande(s), band(s) (GB), 54, 55, 57, 60, 64, 66, 70, 71, 73, 115, 117, 120, 122-130, 148, 157, 165, 198, 207, 210, 233, 235, 238, 265, 267, 269, 272, 284, 289-291, 312, 313, 315, 323, 326, 327, 334, 373, 398, 399, 453, 462 bandeau(x), 283, 297, 300, 303, 307, 308, 311, 312, 351, 359 bandelette(s), 152, 157 banquet(s), 172, 206, 254, 297, 298, 304, 307, 308, 332, 334 banqueteur(s), 282 banquette(s), 313 bardage(s) (tenons de), 351, 352 Bartholomäus Anglicus, 408 De proprietatibus rerum, 408 basalte(s), 406 base(s), 29, 33, 45, 49, 51, 65, 66, 72, 87, 94, 122, 141, 154, 157, 159, 161, 165, 166, 229, 231, 233, 244, 252, 269, 271, 285, 299, 301, 317, 322, 336, 362, 396, 400, 430, 439 base(s) de données, 145, 257, 258, 395, 396 Basile de Césarée, 407
bassin(s) de Maritsa, 319 de Numidie, 412 méditerranéen, 21, 192, 295, 331 battant(s), 200, 328-330, 337 bec de corbin, 303-305, 306, 308, 309, 313, 315 Bède le Vénérable, 406 Begram (trésor de), 224 Bellérophon, 106, 107, 334, 343 Benoît de Sainte-Maure, 411 Béotie, 87, 90 Berlin, 101, 104, 105, 107, 108 Antikensammlung, 129, 130, 254, 322 bigarrure(s), 275, 277, 280, 292, 403, 405, 411 bijouterie(s), 15 bijou(x), jewellery (GB), 140, 177246, 248, 273 (Îlot des), 280, 282, 284, 290, 291, 292, 417 Bilbilis, 359 biochimique(s), 50, 63, 65 biologie, biologique(s), biology (GB), biologic (GB), 49, 51, 55, 61, 246 black, 101, 105, 107, 110, 111, 113, 129, 140, 172, 173, 175, 236, 369, 371, 372, 381 black and white, 369, 373 Black Sea (region), 233 blanc(s), blanche(s), 9, 54, 92, 154, 162, 188, 190, 191, 194, 195, 198, 200, 201, 202, 207, 209, 210, 227, 241, 246, 249, 267-269, 280, 284, 285, 290, 291, 296, 299, 304, 309, 312, 315, 317, 321-328, 332, 336, 339, 342, 349, 353, 360-363, 393, 396, 405-407, 409, 410-412, 414, 416, 417, 419, 421, 422, 425, 428, 432, 433, 434, 444, 449, 450, 451, 452, 454, 460, 464, 465 apprêt(s), préparation(s), sous-couche(s), 148, 150, 154, 155, 156, 401 argile(s) blanche(s), 255 bloc(s) blanc(s), 249, 312 fard(s) blanc(s), 241, 243, 244, 246, 247, 249, 252, 257, 258, 261 fond(s) blanc(s), 195, 265, 269, 331, 414 Grèce, 9 ligne(s) blanche(s), 353 matière(s) blanche(s), 255
472
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
pierre(s) blanche(s), 267 pigment(s) blanc(s), 248, 251, 252, 254, 256 poudre(s) blanche(s), 246-249, 253 produit(s) blanc(s), 254 tesselle(s) blanche(s), 265-268, 271 substance(s), 252 blanc de Carrare, 415 blanc de céruse, 87, 89 blanc de Luna, 406 blanc de Mélos, 90 blanc de Paros, 406, 412 blanc de plomb, 150, 154-157, 159, 160, 252-255, 258, 260, 401 blanc de Thasos, 406 blanc opaque, 214, 224 blanchâtre(s) (testées), 247, 272 blancheur(s), 191, 199, 425, 428, 429, 433, 434, 435, 441 blanchi(e)(s), 85, 89 blanchir, 254 blanchissage(s), 87 blatta, 74 bleu(e)(s), 9, 13-34, 54, 55, 64, 90, 91, 143, 148, 157, 159, 162, 195, 207, 208, 216, 223, 268, 271, 280, 289, 296, 297, 304, 305, 308, 309, 311, 312, 315, 326, 327, 332, 334, 336, 369, 396, 399, 429, 430, 449, 460, 464, 465 bleu (de /du) ciel, 157, 202, 221, 222, 360 céruléen, 16 clair, 219, 220, 223, 296, 299 égyptien, 13-34, 90, 148, 149, 157, 159, 160, 268, 271, 280, 308 foncé, 218, 220, 221, 222, 224, 271, 297, 299, 306, 334 indigo, 55 noir, 297 opaque, 216, 219, 220, 224 pâle, 399 paon, 221, 222 pétrole, 221, 222 sombre, 207, 307, 308 turquoise, 215, 221, 222, 224 vert paon, 221 violacé, 148, 149, 279 bleu-gris, 327
bleu-vert, 54, 55, 215, 218, 223, 224, 225 bleuté(e)(s), 150, 159, 208, 211, 213, 216, 221-224, 227 blue, 13, 15, 37, 42, 43, 101, 111, 112, 129, 130, 134, 136, 140, 141, 144, 171, 173, 175, 177, 181, 215, 233, 235, 236, 238, 369, 370-372, 379, 381, 383, 385 blue-dyed, 43 blue-ground, 181 blue-purple, 39, 47 blue-red, 141 Egyptian blue, 13, 16-18, 21, 25, 32, 136, 171, 175, 238, 379 navy-blue, 42 bluish, 39, 42, 47, 211, 212, 239 bois, 17, 20, 85, 86, 281, 287-290, 299, 301, 305, 310, 313, 337-339, 343, 345, 356-359, 365, 429, 461 d’olivier, 287 de thuya, 356, 358, 359 faux, 365 boiserie(s), 84, 87 boisson(s), 286 bol(s) technique(s), 154, 155 vaisselle(s), 215, 217, 218, 219, 220, 221, 222, 224, 225, 247, 249, 363 Bolinus brandaris, 37-39, 42, 43, 62, 63 bordeau(x), 267, 268, 271 bordure(s), 157, 158, 210, 290, 291, 302, 304, 309, 315, 401 Borovo, 317, 318, 326, 337 bouclier(s), 198, 286, 307, 329, 330, 331, 361, 399, 439 Boularchos de Lydie, 277 boule(s) de bleu égyptien, 18, 20-23, 29 boulette(s) de bleu égyptien, 16, 23, 25, 30, 34 bracelet(s), 120, 208, 280, 287, 364 (maison du) bras, arm(s) (GB), 68, 105, 107, 118, 123, 131, 141, 150, 197, 199, 207, 451 brèche(s), 365 Brescia, 359, 360 brightness, 99, 140, 185
473
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
brillance(s), 151, 360, 417, 432, 443 brillant(e)(s), bright (GB), brilliant (GB), shining (GB), 23, 99, 101, 103, 131, 133, 175, 191, 202, 280, 329, 334, 347, 379, 422 briller, 336 brique(s), 320, 339, 341 briquette(s), 252 broderie(s), 280, 281, 288 bromoindirubine, 56, 60 bromoisatine, 60 bronze, 21, 22, 89, 97-99, 104, 107, 111, 127, 128, 215, 249, 257, 281, 288, 289, 305, 338, 340-343, 361, 401, 419, 434, 443, 444 Age, 97, 278 âge du, 19, 257 Late Bronze Age, 21 moyen, 245 récent, 20, 21, 322 broyage(s), 10, 159, 250, 252 brun(e)(s), 146, 148, 197, 271, 278, 359, 431, 461 foncé, 148, 149 rouge, 166 vert, 417 brun-jaune, 271 brut(e)(s), 18, 20, 21, 156, 157, 211, 213, 214, 217, 218, 223-225, 323 brutal, 452 bulgare(s), 318, 319, 340, 343 Bulgarie, 319, 325, 326, 336, 337, 340, 342, 343 Byzance, 409 byzantine (époque), 274, 414 cabochon(s), 362, 419 cadre(s), 268, 269, 315, 413, 416, 417 caducée(s), 195, 197, 198 caerulae, caeruleum, caeruleus, 15, 17, 29, 175, 370-372 caillou(x), 30, 328 calcium, 15, 25, 214, 226, 255 carbonate de, 255 sulfate de, 255 carbonate, 173, 175 calice(s), 196, 215, 217-219
Caligula, 377, 378 Camiros, 216 campanien(ne)(s), 27, 197, 359 Canosa, 169, 177, 181, 182, 204, 218, 233, 235-238 canthare(s), 247, 249 Capoue, Capua (GB), 169, 177, 197, 372 carbonate, 253 copper, 175 de calcium, calcium, 173, 175, 255 de sodium, 171 (neutre) de plomb, 252, 254. Voir aussi cérusite caréné(e), 221 carène(s), 256 cargaison(s), 21, 220, 225 carnation(s), 165, 190, 193 carquois, 343 carré(e)(s), square(s) (GB), 122, 141, 218, 235, 265, 267, 311, 416, 421 carrière(s), 226, 365, 405, 409 carved, carving, 45, 119, 133, 137, 141, 293 Carystos, 187. Voir aussi Karystos Carystien, 412 Casa del Marinaio (Pompéi), 323. Voir aussi maison(s) casein, 136, 137 cast(s), 129, 131, 133, 134, 136, 217, 231378 Castor et Pollux, 199 caverne(s), 204 cendre(s), 63, 202, 213, 215 céramique(s), 20, 22, 23, 27, 29, 30, 101, 102, 113, 185, 186, 192-200, 203, 204, 221, 222, 249, 260, 277, 321, 340, 343 Céramique cimetière /quartier d’Athènes, 251, 252, 254, 258, 260. Voir aussi Kerameikos Musée du céramique, 260 cercle(s), 152, 194, 198, 199, 328, 360 (arc de), 409, 416, 417, 421 céruse, 87, 89, 156, 244, 251-255, 260 cérusite, 252-254 Cerveteri, 169, 170, 175, 177, 183 chaîne(s)
474
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
textile, 56, 65, 68 opératoire(s), 73 Chalcidique, 258 chamarré(e)(s), 284, 285, 287, 289, 291, 292, 412 chambre(s), 33, 204, 206, 207, 210, 248, 285, 296, 297, 299, 300, 305-308, 310-313, 315, 319, 324, 326-329, 332, 334, 336-343, 406, 441 champ(s), 197, 199, 328, 416, 439 Élysées, 329 Phlégréens, 13, 26, 34 sémantique, 277 chapiteau(x), 20, 300, 305, 315, 361, 413 ionique, 305, 362 charis, 279, 282, 286, 287, 292, 436 charisme, 286 Chartreuse de Pavie, 417 chasseur(s), 334, 335 chasteté, 440 chatoiement, 209, 210, 277, 292, 439 chatoyant(e)(s), 411 chef-d’œuvre(s), masterpiece(s) (GB), 110, 185, 194, 195, 238, 403 cheirides, 118 Chemtou, 365 chêne(s), 338 chéneaux, 85 chevelure, 157, 193, 283, 399 Chia terra candicans, 255 chiaroscuro, 181, 183, 185, 186 chimie, 9, 37, 61, 250 chimique(s), chemist (GB), chemistry (GB), 15, 29, 34, 35, 51, 55, 61, 65, 213, 217, 218, 226, 241, 250 attaque(s), 253 classe(s), 35 composition(s), 35, 61, 55, 213, 250 élément(s), 257 fonction(s), 250 processus, 61 synthèse(s), 252, 253, 255-257 transformation(s), 256 chimiquement, 226, 241, 244 Chios, 119, 128, 255, 406, 407
Chipka, 320, 323, 324, 329, 336-338, 340, 341 chiton(s), 78, 118-120, 123-125, 128-130, 141, 157-159, 166, 288, 289, 395 Chitônè, 290 chitoniskos, 289, 291 chlamyde(s), 146, 147, 157, 285 Chouchmanets (tombe), 320, 323, 328, 329, 337 chouette(s), 287 chrétien(ne)(s), 406, 407, 410, 416, 417, 430, 439, 445, 447-450, 453, 456, 457, 459, 463, 466 Christ, 383, 384, 417, 429, 439, 440, 450, 452, 463 Christian, 67, 369, 371, 379, 383, 445 christianisation, 416 christianisme, 463 chromatique(s), chromatic (GB) accord(s), 275, 277 chord, 275 échelle(s), 200 effet(s), 148, 157, 347 fingerprinting, 42 gamme(s), 159, 208 hiérarchie(s), 279 indices(s), 161 lexicon, 373 name(s), 38 opposition(s), 379 palette(s), 277 propriété(s), 278 retouche(s), 166 schéma(s), 395 terminology, 372 tripartition(s), 375 unité(s), 165, 399 variation(s), 345, 347, 349 vestige(s), 143 chromatisme(s), chromatism(s) (GB), 190, 349, 373, 431, 444 chromatographie(s) en phase gazeuse, 146 en phase liquide, 35, 146 technique, 250 Chronos, 413 chryséléphantine(s), 202, 217, 279, 281, 288, 289, 299, 443
475
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
Chrysôsis, voir à khrusôsis Cicéron, 27, 358, 374, 434 cil(s), 438, 439, 443, 444 ciment(s), 263, 271, 273 -support, 271 cimetière(s), 245, 246, 251, 252, 254, 258, 260 Cimolia creta, 255 cinabre(s), cinnabar(s) (GB), 136, 137, 175, 202, 251, 432 cipollino, 406, 412 Circé, 322 circuit(s), 90, 92, 94 cire(s), 86, 94, 426, 427, 430, 441 ciseau(x), taille de la pierre, sculpture, 77, 153, 160, 431 cité(s), 20, 25, 27, 30, 33, 51, 77, 91, 151, 202, 261, 277, 282-285, 287, 288, 290-292, 306, 322, 412, 453 clair-obscur, 95, 185, 188, 191, 192, 208, 355 Cléobule, 322 Classical art, 113 authors, 37, 370 late, 171, 217, 325 lidded phiale, 233 literature, 436, 444 painting, 185 period, time, age, 117, 119, 169, 179, 231, 281, 321, 343, 369 precedents, 379 reliefs, 379 sculpture, 434 shape, 238 tradition, 278, 383 world, 81, 187, 213 classique(s), 81, 192, 206, 244, 323, 326, 330, 364, 365, 371, 412, 419, 439, 444, 460 couleur(s), 317, 334, 336 décor(s) (architectural), 295 époque(s), période(s), 88, 91, 190, 211, 227, 244-246, 256, 260, 261, 277, 278, 281, 436, 439, 444, 460 norme(s), 421 peintre(s), 188, 194 peinture(s), 167, 185, 187, 192, 332, 334 plastique(s), 444 sculpture(s), 167
structure(s), 323 tableau(x), 188 texte(s), 411 Claudius, 377 clavus, clavi, 54-57, 66, 69, 71, 73, 78 Clément d’Alexandrie, 331, 407 clipeus, 382, 383 cloison(s), 347 cloître(s), 414 coccinea, coccineum, 74, 377 cochenille(s), 278 code(s), 287, 367, 385, 436, 437, 443 colour, 379 corporel(s), 437 de représentation, 200 gestuel(s), 345 political, 377 socio-culturel(s), 443 transgression des, 432 vestimentaire(s), dress, 287, 378, 385 codé(e)(s), 432 coffret(s), 202, 245 coiffure, 152, 207, 210, 285 collection(s), 20, 171, 189, 216, 218, 221-233, 362, 366, 389, 393, 428, 434 colle(s), 9, 89, 91, 94 collé(s), 29 collier(s), 21, 287 Cologne, 251, 255 colonnade(s), 274, 305, 306, 347-349 colonne(s), 22 (maison des), 73, 87, 203, 296, 300, 306, 315, 348, 349, 351, 353-355, 356, 361, 362, 406, 412-414, 416, 421, 436 Colonna (Francesco), 412 Hypnerotomachia Poliphili, 412, 413 colorant(e)(s), colorants (GB), 9, 20, 27, 35, 37, 39, 40, 42, 43, 49, 53-55, 57, 63, 64, 71, 79, 146, 153, 154, 156, 159, 160, 219, 249, 250, 251, 431 coquillage(s), 16, 22, 51, 63, 279 coloration, 20, 151, 189, 211, 213, 219, 220, 268, 271, 279, 296, 328, 363, 431 coloré(e)(s), colored (GB), 9, 20, 131, 154, 189, 193, 200, 209, 214, 215, 251, 271, 273, 275, 278, 281, 284, 287, 288, 297,
476
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
305, 312, 321, 328, 349, 353, 355, 359, 360, 362, 365, 398, 399, 403, 405, 406, 412, 413, 417, 419, 421, 426, 433, 434, 435, 436, 437, 438, 439, 441, 444, 453 light-, 130 colorer, 161, 221, 243, 439 colorisation, 9, 395, 396 coloriste(s), 423, 432, 435, 437-439, 441, 444 colour triad (GB), 101, 102, 105, 107, 111, 114 colourless, 39, 211-213, 217, 220, 229, 231, 236, 238, 239 commanditaire(s), 10, 11, 88, 94, 166, 213, 217, 310, 363, 437 commerce(s), 25, 27, 90-93, 213, 214, 220, 223, 245, 258, 290, 421, 427, 437, 438 commercialisation, 71, 258, 260 comparaison(s), comparison(s) (GB), 10, 49, 56, 77, 92, 93, 153, 185, 186, 220, 239, 304, 331, 358, 408, 422, 428, 440, 441 comparable(s), 44, 85, 93, 120, 128, 256, 301, 361 comparative, 136 compare, 182, 241 comparé(e)(s), 77, 83, 259, 408 compared, 233 comparer, 49, 51, 72, 165, 190, 241, 297, 304, 320, 422, 428 comparing, 42, 44, 46 comparatiste, 436 compass-drawn, 98, 110 composition(s), 9, 19, 20, 25, 35, 46, 55, 56, 61, 62, 65, 74, 137, 140, 141, 153, 159, 163, 199, 200, 213, 215, 221, 226, 243, 250-253, 257, 259, 271, 279, 289, 296, 297, 299, 317, 327, 334, 336, 347, 348, 356, 359, 360, 393, 416, 418, 419 compte(s), 81-90, 93, 94, 289 en trame, 65, 66, 69, 70-73 concave(s), 217, 233, 239, 249, 353 concentrique(s), 194, 198, 416, 421 conique(s), 217-219 conception(s), 127, 140, 185, 188, 206, 208, 275. 308, 347, 406, 465 concours, 151, 188, 437, 436, 443
confin(s), 10 confrontation(s), 10, 188 conservation(s), 145, 148, 206, 246, 297, 402 état de, 53, 54, 145, 149, 154, 246, 248, 252, 295, 307, 310 conservé(e)(s), 9, 16, 17, 19, 21, 23, 65-67, 71, 74, 78, 84, 87, 88, 93, 115, 131, 145, 157, 159, 164, 165, 185-189, 192, 194, 197, 198, 200, 201, 204, 206, 207, 215, 216, 244, 249, 251, 254, 265, 267-269, 273, 280, 284, 285, 287-291, 297, 299, 301, 306, 312, 321, 328, 351, 353, 389, 399, 414, 423, 426, 431, 444, 452 conserver, 71, 250, 260, 297, 347, 449 Constantius the Second, 377 contemporain(e)(s) de, 55, 61, 67, 131, 188, 190, 192, 206, 207, 220, 225, 285-287, 307 d’aujourd’hui, 10, 11, 17, 166, 244, 331, 365, 387, 423, 433, 434, 435 continent(s), 10 contraste(s), 160, 194, 199, 200, 207-210, 260, 345, 349, 353, 355, 433, 438, 441, 443 contrasté(e)(s), contrasted (GB), 275, 277, 323, 371, 437 contraster, 203, 207, 269 contrepoint, 414 convexe(s), 218, 219 copie(s), copy (GB), 21, 134, 191, 389, 401, 434, 436, 439, 442, 444 copié(e)(s), 347, 351, 408, 421 copier, 441 Copte, 67 cordelière(s), 68, 265 Corinthe, Corinth (GB), 112, 113, 254, 260 Corinthien(ne)(s), Corinthian (GB), 359 Proto, 101, 103, 109, 110, 113 corniche(s), 209, 274, 311, 417 corps, 188-195, 199-201, 203, 207, 208, 210, 241, 243, 246, 277, 279, 284, 285, 292, 321, 323, 328, 331, 349, 351, 360, 399, 423, 425, 429, 432, 434, 436, 437, 440, 441, 443-445, 447, 452, 461 corpse, 105 Cos, 25, 91, 219, 220, 291
477
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
cosmatesque(s), 414, 417, 418, 421 Cosmati, 414 Cosmésis, voir kosmèsis cosmétique(s), cosmetic(s) (GB), 156, 157, 199, 216, 241, 243, 246-248, 250-252, 254, 256-258, 260, 282 cost, 49 costume(s), 124, 278, 282-285, 288, 292, 369, 371, 370, 431 cou(s), 460 couche(s), 49, 51, 60, 77, 146, 156, 159, 236, 329, 393 strate(s), 146, 148-150, 153, 154, 194, 246, 301, 363, 397, 401 sous-couche(s), 143, 150, 154, 401 couleur(s), voir chacune d’entre elles coupe(s), 209, 210, 215, 218, 222, 223, 225, 280, 363 coupellation, 256, 257 coupelle(s), 217-219, 221 coupole(s), 331, 332, 334, 335, 337, 338, 341, 434 couronne(s), crown(s) (GB), 141, 195, 210, 246, 267, 286-289, 300, 312, 334, 337, 338, 341, 343 couronné(e)(s), crowned (GB), 182, 284, 307, 312, 416 couronnement(s), crowning (GB), 302, 312, 313, 315, 332, 381 couronner, 309, 311 cousu(e)(s), 68, 280, 281, 289 coût(s), 49, 51, 65, 74, 77, 78, 83-86, 88, 90, 92-94, 291 coûter, 78, 89, 92, 93 coûteux, coûteuse(s), 225, 226, 281, 290 surcoût(s), 77 couture(s), 68 couturier(s), couturière(s), 457 couvercle(s), 217, 229, 247-249, 260, 338, 342 couverture(s), 246, 305, 309, 313, 319, 336-338, 341, 399, 400 couvrant, 198, 245, 273, 417 pouvoir, 154, 253 craie(s), creta, 191, 251, 255
cratère(s), 105, 193, 195-198, 200, 201, 203, 204, 218, 219, 330. Voir aussi Krater création(s) creation(s) (GB), 83, 85, 93, 119, 120, 124, 140, 154, 183, 187, 194, 200, 229, 239, 320, 351, 365, 395, 414, 419 Crète, Crete (GB), 121, 126-128, 215 Créüse, 438, 439 creusé(e)(s), 206, 246, 301, 308-310, 338, 340 creuset(s), 13, 23, 24, 25, 28, 29, 30, 32, 33, 34 creux, 162, 191, 211, 301, 328, 417 en, 83, 224, 227, 328, 349, 351 cristal, 151, 217, 225, 252 de roche, 211, 215, 226, 227 croisé(e)(s), 363 croisillon(s), 297, 309 croissant(s) de lune, 353 Crotone, 284 croyance(s), 192, 206, 306, 311, 320, 322, 405, 408, 453, 465 croyant(e)(s), 429, 448, 457, 461-463 cruche(s), 247 cubiculum, 349, 350-352, 355-357, 361, 363, 365, 383, 384 cuir(s), 343 cuirasse(s), 338 cuivre(s), 15, 16, 25, 157, 247, 256, 342, 361, 443 cultuel(le)(s), 88, 200, 288, 416 culture(s), 10, 169, 181, 184, 208, 213, 278, 305, 306, 320, 325, 331, 337, 344, 369, 373, 385, 405, 411, 412, 425, 433, 435, 436, 444, 447, 452, 460 culturel(le)(s), cultural(s) (GB), 40, 42, 53, 169, 171, 179, 181, 225, 278, 281, 319, 338, 423, 425, 426, 435-437 socio-, 432, 436, 443 culturellement, 423, 425, 431, 433, 444 socio-, 432, 443 Cumes, 13, 14, 21, 26, 29-34, 284 cuve(s), 50, 61, 63-65, 338 cuvette(s), 342 Cyclades, cycladique, Cycladic (GB), 91, 94, 102, 106, 107, 111, 127, 128 Cyclope, Cyclops (GB), 105, 207
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LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
cylindrique, cylindrical (GB), 120, 349, 353 cyprès, 322 Cyrus le Grand, 284 Cythère, 255, 412 Daedalic, 115, 117-120, 123, 128, 130 Damigéron-Évax, 408 damier(s), 277, 414 dard(s), 302, 303, 305 Darius I, 35, 44, 45, 47, 61 Darius III, 284 Darius (Peintre de, Painter), 181, 196, 198, 201 dark, 43, 95, 97, 99, 101, 104, 105, 107, 110, 111, 112, 113, 114, 173, 181, 371, 372. 375, 377, 378, 379 darkening, 124 darker, 128 data base, 39 dauphin(s), 412 De Chirico (Giorgio), 434 De Criscio (Giuseppe), 26-28 décelable(s), 9, 256 décolorant(s), 214, 219 décoloration(s), 211, 214, 219, 225 décoloré(e)(s), 213-215, 217-219, 223439 décor(s), 54, 56, 60, 65, 71, 73, 115, 148, 189, 190, 202, 206, 208, 209, 211, 215, 217-219, 221, 224-227, 229, 236, 265, 267-269, 271, 272, 274, 285, 288, 290, 293, 295-297, 299, 302, 303, 305-313, 315, 317, 319, 320, 323, 326-329, 331, 332, 334, 343, 347, 349, 351, 353-356, 359, 360, 362, 363, 365, 381, 413-417, 421 décorateur(s), decorator(s) (GB), 81, 88, 90, 227, 345, 347, 349, 351, 353, 359, 363, 365 décoratif(s), décorative(s), decorative (GB), 51, 55, 66, 67, 70, 71, 110, 115, 117, 122-125, 127, 128, 199, 201, 229, 281, 285, 302, 306, 308, 315, 317, 320, 321, 323, 324, 325, 326, 334, 347, 351, 359, 361, 405, 413, 419, 421 décoration, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 22, 65, 66, 81, 84, 88, 89, 91, 92, 111, 112, 115-117, 120, 122-125, 127-131, 133, 134, 136, 137, 140, 141, 148, 171, 177, 179, 182,
211, 212, 215, 229, 231-233, 235-238, 263, 268, 293, 317, 319, 326, 341, 342 décoré(e)(s), décorated (GB), 22, 69, 79, 88, 92, 99, 110, 115, 122, 123, 128, 129, 133, 136, 181, 194, 218, 224, 225, 229, 233, 235, 236, 238, 239, 267, 277, 281, 284, 290, 324, 326, 329, 331, 338, 341, 355, 371 décorer, decorate (GB), 22, 49, 51, 54, 67, 69, 70, 71, 77, 127, 128, 207, 280 découpe, 271, 416, 417, 419, 420 découpé(e)(s), 218, 421, 443 découper, 198 découverte(s), 16, 22, 25, 27-29, 35, 49, 50, 53, 67, 79, 91, 145, 149, 187, 192, 193, 202, 206, 213, 214, 216, 219, 220, 223, 225, 226, 243, 248, 249, 255, 256, 260, 272, 274, 280, 307, 320-323, 326, 329, 336-343, 399, 400, 441 décret(s), 91, 92, 261 dédalique(s), 115 défunt(e)(s), 67, 185, 200-202, 208, 246, 260, 306, 315, 325, 326, 332, 334, 437 dégradé(e)(s) (effet, motif ), 55, 160, 312, 345, 349, 350, 353 délien(ne)(s), 85, 86, 88-90, 93, 143, 145, 150, 154, 157, 160, 165, 219, 289, 291, 326, 389, 400 Déliens, 167 Délos, Delos (GB), 25, 84, 85-90, 92, 93, 94, 115, 117, 122, 123, 143-149, 151, 153, 154-161, 163, 165, 201, 219, 220, 263, 265-267, 269, 271-274, 288, 289, 291, 326, 387, 389-391, 393, 401, 433, 443 Delphes, 84, 192, 200, 203, 206, 208, 281, 288, 297, 438, 442, 443 delphien(ne)(s), 84 Delvaux (Paul), 434 dématérialisation(s), 431 Déméter, Demeter (GB), 84, 171, 207, 261, 289, 291, 330 demi-colonne(s), 300, 308, 337 Démétria, 261 Démétrias, 244-250, 253, 255, 258, 260, 261 Démétrios Poliorcète, 244, 285, 286
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INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
Démokédès, 284 dents-de-scie, 414, 415 denticule(s), 305, 306, 315, 332, 419 dent(s) de loup, 207, 359 dibromoindigo(tine), 35, 37, 40, 41, 56, 62, 64, 239 dibromoindirubine, 56, 60 distribution, 27, 61, 90, 94, 137, 141, 345, 356, 458, 464, 466 dépense(s), 78, 85, 86, 88, 92, 323 Derveni, 251, 254, 255, 257, 258, 260 Despoina, 291 dessin(s), drawing(s) (GB), 50, 404, 116, 123, 125, 127, 133, 172, 185, 193, 208, 267, 268, 271, 288, 295, 336, 389, 409, 417, 421, 433, 440, 441 dessiné(e)(s), 267, 297, 303 dessiner, 23, 209, 265, 267, 268, 281, 289, 310, 334, 399 détail(s), detail(s) (GB), 47, 51, 65, 108, 111, 117, 125, 134-136, 151, 152, 164, 165, 173-184, 197, 202, 206, 209, 210, 235, 236, 247, 248, 253, 263, 271, 289, 290, 323, 334-337, 349, 352, 354, 360, 366, 374, 376, 379, 382, 396, 399, 411, 413, 440, 442, 445 détaillant(s), 92 détaillé(e)(s), detailed (GB), 16, 45, 56, 62, 67, 89, 118, 145, 287, 367 détailler, 87, 406, 408 (vendre au détail), 87 diadème(s), 285 Diadumène (copie détienne), 389, 392, 393, 401 diakhrusos, 291 diaphane, 190 diapré, 285, 290, 291 Didymes, 84, 303, 304 Didymoi, 49-51, 53-55, 57, 60-67, 69, 70, 72, 74, 78 déesse(s), 115, 163, 165, 194, 279-290, 440 dieu(x), 146, 161, 197-200, 202, 207, 274, 275, 278-282, 287-292, 299, 312, 329, 334, 405, 423, 425, 432, 436-439, 443, 444
Dieu, 416, 448, 449, 453, 454, 461, 462, 463, 464 diffraction des rayons X, 150, 250, 252, 253 diffusion, 49, 51, 79, 213, 221, 226, 347, 373, 395, 437 diffusé(e)(s), 83, 220 dilué(e)(s), 159, 194, 197, 363 dilution(s), 10, 91, 154, 157, 159 dinos, 108 Diodore de Sicile, 27, 261, 285, 289 Diogène Laërce, 199, 283, 287 Vies des philosophes illustres, 199, 283, 287 Dionysies, 86 Dionysos, 86, 155, 159, 195, 196, 199, 200, 210, 273, 288, 289, 331, 425, 432, 435 Dioscoride, 252, 256, 406, 410, 411 discours, 187, 227, 282, 358, 402, 403, 405, 425 discovery, 17, 18, 46, 47, 112, 124, 263 disque(s), 224, 315, 407, 415, 417, 420, 421 dissolution(s), 39, 40, 44 divin(e)(s), 165, 194, 195, 198, 199, 208, 279, 280, 287, 289-292, 297, 326, 334, 416, 423, 427, 429, 430, 433-441, 443, 444, 449, 463, 465 divinité(s), 279, 286-290, 292, 304, 423, 437, 453 divinisantes, 279 Dodone, 281 doigt(s), 194, 203, 417 domaine(s), 9, 55, 83, 88, 90, 91, 149, 163, 170, 208, 213, 278, 279, 282, 292, 299, 363, 413, 417, 422, 433, 435 Domus d’Amour et Psyché (Ostie), 407, 415 Tiberiana (Rome), 420, 421 donnée(s), 9, 10, 13, 15, 19, 22, 23, 28, 51, 6, 69-71, 81, 83, 89, 93, 145, 146, 148, 157, 16, 167, 188, 206, 211, 221, 243, 257, 258, 261, 320, 341, 356, 367, 389, 393, 395, 396, 402, 444
480
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
doré(e)(s), 85, 88, 89, 143, 146, 149, 150, 154, 156, 160, 161, 198, 200, 274, 278, 279, 280, 285-289, 291, 302, 305, 313, 334, 337, 338, 342, 343, 361, 362, 390, 393, 396, 399, 401, 415 dorer, 89, 154, 287 doreur(s), 90, 143 dorure(s), 84, 86, 88, 89, 92, 143, 144, 146, 149, 150, 154, 155, 279, 289, 321, 387, 389, 391, 399, 401 Doryphore, 436 Dossiers archéologiques, 343 Douris de Samos, 187 drachme(s), 72, 74, 75, 77, 78, 84-89, 92, 93, 289 draperie(s), drapery(ies) (GB), 72, 134, 136, 140, 179, 359 dromos, 182, 319, 324, 325, 327, 328, 334, 336-339, 341, 342 dyes, 35, 37-47, 49 Dymè, 261 écaille(s), 268, 359 de tortue, 356, 359 échantillon(s), sample(s) (GB), 18, 19, 23, 30, 34, 35, 39, 40, 42-45, 60, 61, 62, 137, 148, 159, 239, 248, 250-254, 256-259, 347, 358, 375 échantillonnage(s), 54, 55, 62, 221, 222 éclairage(s), 54, 61, 64, 83, 161, 163, 166, 278, 302, 396, 397, 400 éclairé(e)(s), 308, 312, 315, 349, 355, 401, 416 éclairer, 355 éclat(s), 15, 159, 160, 161, 185, 188, 190, 191, 194, 195, 197, 198, 200, 206, 208, 209, 227, 243, 279, 280, 283, 286, 287, 290, 291, 362, 389, 396, 399-401, 413, 416, 438, 440, 443, 463 éclatant(e)(s), 166, 210, 253, 278, 285, 307, 412, 437, 439 économie(s), 9, 60, 81-83, 94, 152, 185, 244, 251, 323, 345, 351, 441, 459 édit(s), 211, 225 du Maximum de Dioclétien, 17, 64, 74, 211, 225, 226, effigie(s), 146, 151, 152, 154, 156, 159, 201, 279, 287, 288, 289, 290, 426, 427, 428
égide(s), 210, 287 Égine, 326 église(s), 426, 427, 449, 452, 454, 458 San Clemente (Rome), 17, 18, 415 San Saba (Rome), 17, 413, 415 San Vincenzo al Volturno (Naples), 17 Santa Maria dei Miracoli (Rome), 417 Santa Prassede (Rome), 415 Église, 403, 405, 408, 416, 451 Egnazia, 169, 170, 177 Égypte, Egypt (GB), 13, 16, 21, 22, 34, 49-57, 59, 60, 64, 67, 69, 71, 73, 74, 75, 77, 79, 90, 91, 113, 214, 216, 223, 224, 233, 257, 263, 274, 293, 301, 306, 310, 311, 405-407, 409, 412, 415, 416, 418 égyptien(ne)(s), egyptian(s) (GB), 13-34, 49, 61, 63, 64, 95, 96, 113, 114, 148, 157, 159, 160, 171, 175, 214, 226, 227, 238, 252, 295, 299, 308, 311, 312, 315, 353, 365, 379, 416, 418 E. blue, voir bleu égyptien E. frit, 175 égyptisant(e)(s), 215, 311 eidôlon, 206 Eita, 204, 207 élaphébole, 159, 163, 164, 166, 399 Éleusis, Eleusis (GB), 83, 84, 87, 90, 100, 242, 254, 255, 257, 258, 323 Eleutherna, 127, 128 élite(s), elite(s) (GB), 79, 181, 217, 282, 283, 285-287, 292, 320 Elmali / Karaburun, 172 Embie, 287 embiez (épave des), 214, 225 embléma(ta), 263, 265, 267, 274, 302 Empire, 13, 45, 60, 61, 79, 213, 214, 226, 310, 406, 413, 416, 422, 429 emploi(s), 18, 49, 51, 54, 55, 57, 65, 77, 91, 144, 154, 155, 157, 159, 192, 198, 211, 215, 218, 225-227, 243, 250, 251, 254, 282, 288, 295, 297-299, 301, 304, 306-308, 323, 327, 347, 351, 365, 405, 409, 414, 417, 421, 422 emporion, 169, 171 encadré(e)(s), 200 encadrement(s), 300, 301, 313, 315, 417
481
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
encens, 445, 447, 457, 464 enduit(e)(s), 84, 87, 296, 297, 301, 305, 307, 321, 323, 326, 328, 340 enfant(s), 29, 261, 410, 417, 435, 448-466 enfantement(s), 417 Éniautos, 199 enlumineur(s), 411 enroulement(s), 152, 302, 414, 415 ensoleillement(s), 150, 400 entablement(s), 309, 314, 315, 327, 348, 351, 355, 406, 413 enterré(e)(s), 321, 323, 339 enterrement(s), 29 entolè, 78 entrecroisement(s), 73 entrée(s), 202, 204, 206, 210, 267, 300, 308, 317, 320, 323, 324, 327, 328, 330, 331, 334, 341, 355, 359, 419 entretien(s), 10, 78, 83, 84, 86, 89, 91, 94, 273 Éos, 194, 197, 198 épave(s), 21, 213, 214, 220, 225 epiblema, 118, 120 épichthonienne(s), 325 Épidaure, 84, 85, 87-89 épigramme(s), 187, 188, 225, 328, 439, 440 épigraphique(s), 81, 83, 91, 148, 275, 278, 281 epikhrusos, 282, 291 épiphanie(s), 198, 202, 210 épisème(s), 198, 286 épistate(s), 87 épistémologique(s), 9, 10 épistyle(s), 274 epitektos, 282 Érétrie, 91, 251, 254, 255, 257, 258 Éros, 197, 199, 279, 286 esclave(s), 75, 78, 92 espace(s), 83, 153, 185, 194, 195, 203, 208, 265, 300, 301, 305, 309, 312, 317, 324, 325, 328, 331, 339, 343, 345, 347-349, 351, 353, 356, 400, 425, 426, 427, 429, 432, 433, 435, 437, 438, 440, 441, 443, 452, 457 espacement(s), 73, 315
Espagne(s), 226, 358, 409 esprit(s), spirit(s) (GB), 130, 207, 274, 286, 309, 310, 405, 435, 429, 444, 447 esthétique(s), 10, 165, 188, 272, 307, 323, 328, 331, 334, 336, 403, 405, 421, 439, 440, 460 état(s) (de surface, succession), 149, 150, 311, 312, 315, 393 éthique(s), 188, 192 étoffe(s), 148, 159, 163, 202, 251, 278, 280, 281, 284, 285, 288, 290, 291, 334, 360 étrusque(s), Etruscan(s) (GB), 169-172, 176, 181, 183-187, 203-208, 374, 377 Étrurie, Etruria (GB), 10, 169-177, 179, 181, 183, 204-206, 208 Eubée, 258 Euboulos, 244 Euripide, 197, 287, 288, 331, 438, 439 eusebeia, 275, 278, 287, 290 examen(s), 145, 146, 149, 154, 249, 399, 401, 425, 455, 461, 466 excellence(s), 199, 275, 277, 280, 283, 286, 287, 292, 427, 434, 443 exécution(s), 307, 341, 359, 365 extraction(s), 39, 63, 239, 250, 251, 256, 406 fabrication(s), 10, 16, 20, 21, 23, 25, 27, 29, 34, 53, 83, 86, 87, 90, 91, 114, 166, 221, 256, 265, 271, 279, 282, 291, 347, 351 façade(s), 148, 178, 179, 182, 183, 198, 202, 293, 295-309, 320, 323, 324, 326-328, 331, 336-339, 341-343, 379, 381, 417-419 faïence(s), 20, 23, 216, 280, 312 faire-valoir, 417 fantastique(s), 407, 432 fard(s), 16, 165, 241-261 blanc, 241, 243, 244, 246, 247, 252-261 rose, 243, 244, 250-251, 254 rouge, 244 fardé(e)(s), 156, 291 faux bois, 365 marbre, 365 plafond, 202 porche, 202
482
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
féminin(e)(s), 49, 51, 115, 149, 155, 156, 165, 201, 204, 254, 289, 290, 291, 292, 299, 342, 436, 440, 441 femme(s), female(s) (GB), 49, 60, 67, 69, 78, 97, 103-105, 107, 108, 111, 113, 115, 117-120, 123, 124, 127, 128, 140, 145, 156, 179, 207, 243, 244, 248, 249, 254, 260, 261, 280, 291, 292, 321, 333, 340, 371, 440, 441, 447-462 fenêtre(s), 300, 305, 306, 439 fer, irons (GB), 27, 214, 256, 343 oxyde de, oxides, 130, 159, 174, 213, 251, 254, 443 ferrugineuse, ferruginous (GB), 146, 155-157, 174 fertilité(s), 416 fête(s), 261, 28, 291, 455, 463 feuillage(s), 361, 432 feuille(s), 210, 253, 315, 407 d’eau, 304 d’or, 88-90, 92-94, 143, 146, 147, 150, 154-156, 209, 218, 229, 263, 273, 274, 289, 305, 326, 387, 393, 395, 396, 399, 401 doriques, 303-306, 308, 309, 311-313, 315 fibre(s), 173, 278, 279, 409 fictif(ve)(s), fictional (GB), 189, 293, 295, 300, 303, 305, 306, 308-310, 312, 315, 345, 347, 351, 355 figuratif(ive)(s), figural (GB), 124, 172, 179, 182, 207, 208, 323, 334, 367, 372, 375, 379 figured scenes, 97-99 fil(s), 50, 55, 60, 65, 66, 69, 70-73, 78, 280, 281, 285, 288, 338, 342 Filarète, 417 fingerprint, 45 (chromatographic) fingerprinting, 35, 42 flacon(s), 241, 243, 247, 255, 363 flaconnage, 223 flavienne (époque), 30, 224, 227 flavokermésique (acide), 56 fleuri(e)(s), 279, 288, 289, 291, 292, 307 Florence, 426, 427, 434, 444
Florentin(e)(s), 427, 434 fluorescence des rayons X (XRF), X-ray fluorescence (spectrometry), 143, 144, 146, 175, 256 d’ultraviolet, ultraviolet reflection, 124, 150, 152, 154, 155, 164, 249, 389, 391, 398, 399 « jaune », 154 « rouge », 150 « rouge orangée », 154 fond(s), 23, 24, 28, 29, 33, 54-57, 60, 65, 76, 154, 160, 166, 193, 195, 198, 201-208, 210, 218, 219, 244, 265, 267-269, 280, 288, 297, 299, 300, 302, 303, 305, 307, 308, 311, 326, 331, 334, 339, 359, 361, 365, 396, 399, 400, 409, 414, 415, 417 fondant(s), 213 fondu enchaîné, 165 foreground, 105 Fortetsa, 215 forum(s), 26, 381, 412 foudre(s), 188, 194, 195, 197-199, 286 (portefoudre), 331 fournisseur(s), 87, 89, 90, 92 frange(s), 291 frise(s), frieze(s) (GB), 10, 101, 103, 109, 112, 178, 179-182, 201, 235, 277, 297, 303, 305-308, 315, 323-325, 327, 332-334, 342, 354, 379, 381 frontière(s), 188, 287, 289, 405, 432 fronton(s), 297, 302, 306, 307, 309, 315, 331, 362, 438, 439, 443 fruit(s), 363 fruitier(s), 91 funéraire(s), funerary (GB), 16, 19, 30, 33, 67, 91, 153, 169, 170, 185, 186, 192, 194, 198, 200, 206, 208, 216, 217, 224, 227, 231, 236, 246, 248, 254, 280, 281, 285, 292, 296, 297, 299, 300, 305-308, 310-313, 315, 319, 322-325, 327-334, 336-339, 341-343, 379, 381, 427 galène(s), 252, 255, 257 Galien, 254 Galium verum L., 251 Gallus, 377
483
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
ganôsis, 287, 430, 441 garance, 54, 55, 148, 150, 154, 159, 250, 251, 278 garment(s), 37, 49, 115, 115-120, 122-124, 125, 127-129, 134, 136, 140, 141, 275, 371, 372, 374, 377, 378 Gaule(s), 18, 19, 34, 226, 305, 359 Gaulois blessé de l’Agora des Italiens, 389, 392-394, 397, 398 Géla, Gela (GB), 179, 443 gemme(s), 407, 411, 412 géométrique(s), Geometric (GB), 60, 95, 96, 98, 99, 102, 104, 105, 111-114, 124, 128, 189, 207, 218, 267, 269, 414, 421 modèle 3D, 392, 394, 395, 399, 401 Proto, 102, 322 géomorphologique(s), 30 Gérôme (Jean-Léon), 430, 431, 441 Géryon, 204 geste(s), 9, 11, 143, 195, 197, 243, 287, 288, 351, 355, 365, 429, 432, 434, 438, 439, 444 gestuelle(s), 308, 345, 355, 357, 363, 366, 425 Gètes, 319 glacis, 10, 363 glande(s), gland(s) (GB), 71 hypobranchiale, hypobranchial, 37, 39, 61, 71 Glanum, 359 gobelet(s), 217, 224, 225 gobeleterie(s), 223 gold, 97, 143, 233, 235, 236, 238, 263, 275, 288, 378, 383 glass, 235, 236-238, 375 foil, 229, 235-238 leaf(ves), 144, 233, 235, 263 golden, 140, 383, 403 gomme(s), gum (GB), 86, 91, 94 arabique, arabic, 90, 91, 136, 154 Gordion, 172, 215 Gorga, 218, 221, 222 Gorgone(s), 209, 210, 331 gorgoneion(a), 178, 179, 287, 307 Gortyne, Gortyna (GB), 115, 126, 127, 128
goût(s), 165, 167, 188, 197, 211, 213, 215, 218, 221, 223-227, 283, 351, 367, 418, 419, 421, 460 gradation colour, 137 tonale, 279 grain(s), 76, 137, 146, 154, 157, 159, 165, 252, 253, 256, 296, 401, 463 Grande Grèce, 193, 194, 284, 287. Voir aussi Magna Graecia granite(s), 312, 363-365, 405, 406, 412 graphique(s), 165, 185, 208, 258, 297, 323, 389, 395 green, 39, 99, 111, 136, 140, 144, 173, 175, 220, 231, 370, 371, 403 greenish, 211, 212 gravure(s), 83, 84, 90, 211 gréco-égyptien (style), 295, 311 grey, 175, 369, 371, 372 gris(e)(s), 54, 221, 222, 302, 303, 307, 308, 334, 336, 349, 360, 361, 412, 453, 460, 462 gris mauve, 54 grisâtre, 194, 249, 327 ground, 99, 181, 182 white-ground, 107 marble-ground, 140 guerrier(s), 208, 321, 334, 338, 442, 443 guidelines, 124 Gupsum, 255 Gypse, 255 hachure(s), 297, 303, 334, 363 Hadrianic, 381-383 Hadès, Hades (GB), 202, 204, 205, 207, 208, 322, 324, 328, 330 haplia, 74 harmonie, 277, 287, 412, 416 harmonieuse(s), harmonieux, 271 Haut-Empire, 226 Hécate, 88, 288 Hector, 110, 280, 285 Hélios, 322, 329-331 hellénistique(s), Hellenistic(s) (GB), 13-34, 81, 84, 93, 143-167, 169, 171, 179, 188, 189,
484
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
194, 195, 201, 211, 216, 218-221, 225, 229, 231, 233, 238, 239, 241-261, 263-274, 278, 279, 285, 291, 293-315, 317, 319, 320, 323, 325, 326, 331, 339, 340, 378, 379, 387, 389, 390, 391, 433, 443 hématite(s), hematite(s) (GB), 137, 174, 251 hémisphérique(s), 218, 219 Herakleion, 116, 121, 126 Héraclès, Herakles (GB), 107-109, 148, 165, 197, 199, 202 Héraclide de Cumes, 284 herbier(s), 406 Hermès, Hermes (GB), 108, 148, 149, 152-154, 157-159, 165, 195, 197, 198, 202, 322, 328, 425 Hérode, Herod (GB), 35, 46, 47 Herodian(s), 46 Hérodote, Herodotus (GB), 92, 120, 171, 283 herôon, 309 héros, 207, 287, 306, 334, 437, 438, 444 Hésiode, 324, 330 hetairai, 261 Hexaplex trunculus, 35-39, 42, 43, 45-47, 61-64, 71, 239 hiéropes, 84, 85, 86, 87, 88, 89, 93, 289 hieropoioi, 291 high-performance liquid chromatography (HPLC), 35-37, 39-47, 146 highlight(s), 183 photographs, 173 white, 181 himation, 69, 71, 76, 77, 123, 124, 130, 136, 148, 149, 180, 287, 289, 290 Hispanie, 359 Homère, Homer (GB), 194, 207, 277, 279, 280, 289, 322, 369, 440 homérique(s), Homeric (GB), 95, 96, 99, 101, 102, 111, 114, 140, 185, 192, 206, 207, 277, 279, 322, 411, 439, 440, 443 homme(s), male(s) (GB), 15, 27, 49, 60, 67, 69, 76, 89, 105, 107, 110, 113, 119, 141, 191, 199-201, 204, 244, 280, 283, 287, 289, 292, 321, 322, 326, 334, 338, 342, 371, 372, 378, 406, 409, 417, 422, 425,
431, 433, 435, 436, 438, 439, 443, 444, 449-454, 457, 461, 463, 464 Hsbd iryt, 15 hue, 42, 46, 101, 239, 317, 373 huile(s), 75, 78, 218, 363, 410, 457, 464 hyacinthe(s), hyacinth (GB), 288 hyacinth colour, 38 Hydra, 109 hydrie(s), 20, 197, 201, 340, 342 hydrocérusite, 252, 253 hymne(s), 199, 330, 440, 443 Hypnos, 199 hypoblatta, 74 hypogée(s), 19, 170, 198, 204, 209, 210, 295, 309, 310 hypokhrusos, 291 hypostyle(s), 311 hysgina, hysginum, 74, 251 Histiée, 91 iconique(s), iconic (GB), 367, 427, 432 iconicité(s), 423, 425, 433, 441 iconographie(s), iconography (GB), 169, 176, 182, 281, 295, 325 iconographique(s), iconographic (GB), 169, 170, 172, 177, 181, 281, 331, 367, 393, 440, idéologie(s), ideology (GB), 170, 176 idéologique(s), ideological, 169, 170, 177, 181, 317, 320, 331, 332 île(s), 91, 145, 291, 413 illusion(s), 203, 293, 295, 296, 300, 302, 307, 308, 311, 317, 334, 347, 353, 363, 427, 428, 431, 438, 443 illusionnisme(s), illusionism (GB), 151, 166, 295, 303, 306-308, 315, 317, 345, 348, 425, 437, 444 illusionniste(s), illusionist(s) (GB), 293, 295, 296, 302-312, 315, 347, 348, 428, 432, 439 image(s), 97, 98, 101, 104, 105, 113, 142, 145, 150, 160, 185, 186, 188, 193-195, 197, 199-204, 206, 208, 209, 277, 280, 287, 290, 292, 317, 321, 330-332, 334, 336, 339, 343, 345, 349, 351, 367, 379, 385, 389, 393, 395, 397, 401, 408, 413,
485
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
425-427, 432, 436-440, 443, 444, 449, 452, 453, 459, 460, 463 imagerie(s), imagery (GB), 98, 166, 387 imagier(s), 425, 429, 432, 439, 440, 443 imaginaire(s), imaginary (GB), 185, 186, 191, 275, 277, 278, 292, 323, 347, 408, 425, 431, 432, 437 imagination, 209, 365, 432, 439 imbriqué(e)(s), 210, 414 imbriquer (s’), 447 imitation(s), 54, 55, 77, 79, 163, 206, 211, 215, 217, 290, 293, 295, 309, 310, 315, 345, 347, 353, 356-358, 364, 365, 401 immaculé(e)(s), 417, 434 Immaculée Conception, 465 immatériell(e)(s), 11 immortalité(s), 199, 437, 453, 463 Immortels, 279, 287 impression(s) 3D, 402 impureté(s), 21, 211, 213, 219 incised, 99, 104, 110, 111, 117, 120, 122-124, 127, 128, 134, 235 incision(s), 101, 102, 107, 110, 115, 119, 122, 123, 125, 173, 174, 305 incolore(s), 211-227, 229 incrustation(s), 214, 216, 217, 359, 416, 417, 419 incrusté(e)(s), 286, 362, 417 indécelable(s), 146 indigo, 40-45, 54-57, 239, 371 indigoïde(s), indigoid(s) (GB), 35-37, 39, 40-45, 55-57, 60, 61, 63 indigotine, 56, 60-64 indirubine, 56, 60 indirubinoïde(s), 35 infrared (spectroscopy), 239, 240 ingénieur(s), 227 inorganique(s), inorganic (GB), 91, 136, 137, 250 inscription(s), 15, 27, 87, 88, 90, 91, 171, 176, 204-206, 246, 247, 275, 287-291, 338, 343 intaille(s), 217
interaction, 10, 190, 250, 319, 393, 408, 423, 425, 428, 437, 444 interdisciplinaire(s), 51, 143, 187, 402 interdisciplinarité(s), 9-10 interdit(s), 197, 261, 291 inventaire(s), 86, 259, 260, 284, 287-292, 310, 343, 425 invisible(s), 185-187, 190-192, 197, 206-210, 292, 356, 401, 423, 432, 439, 444 ionien(ne)(s), ionian (GB), 102, 128, 169, 171, 172, 283 ionique(s), ionic (GB), 120, 124, 303, 305, 306, 332, 362 Ionicism, 172 Ionie, 282, 283, 285 Ioniens, 281 ionisation, 257 isatine, 56, 60 isatinoïde(s), 35 Isatis tinctoria, 43, 55 Isidore de Séville, 406, 410 Étymologies sur l’origine de certaines choses, 406 isotopique(s) (mesures, rapports), 257-259 Israël, Israel (GB), 43, 45, 46, 67, 69, 216, 407 Italie, Italy (GB), 13, 15, 19, 21-34, 101, 169, 170, 171, 174, 177, 179, 181, 184, 193, 215, 216, 393, 406, 417, 419, 421, 447, 451, 452 préromaine, 169, 170 Southern Italy, 169-184 italien(ne)(s), italian (GB), 169, 185, 186, 216, 226, 223, 419 italiote(s), 185, 192, 194, 195, 198, 199, 204, 208, 347 Ithaque, 280 itinérant(s), 359 ivoire, 54, 165, 279, 280, 305, 439, 443 jambe(s), 284, 432 jaspe(s), 214, 412 jaune(s), 9, 143, 148-150, 154, 155, 157, 165, 166, 194, 195, 197, 200, 210, 214, 216, 220-222, 224, 227, 251, 265, 267-269, 271, 296, 305, 311, 312, 315, 322, 326-328, 332, 334, 336, 340, 360, 361, 365, 401,
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LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
406, 407, 409, 411, 412, 416, 453, 460, 462, 463 jeu(x), 20, 254, 304, 408, 437, 438, 443, 447 d’échos, 279 d’ombre (et de lumière), 10, 143, 151, 159-163, 206, 267, 303, 399, 351, 428 de contraste(s), 441 de couleur(s), 199, 200, 295, 304, 345, 437 de hachure(s), 303 funéraire(s), 334 de la lumière, 429, 439 de séduction, 425 des superpositions, 194 optique, 323 jeune(s), 75, 115, 131, 193, 198, 201, 254, 277, 284, 286, 292, 321, 333, 431, 448, 452, 460-463 jeunesse(s), 454, 463 joyau(x), 417, 419 kalliblépharon, 438, 443 Kallixeinos de Rhodes, 263, 290 Karnak, 311 Karystos, 406, 412. Voir aussi Carystos Kéos, 90, 91, 92, 94 Kerameikos, 98, 100, 103, 107, 381. Voir aussi Céramique kermès, 54, 55, 63, 64, 74 kermésique (acide), 56 Kertch, 320, 331 khrôs, 277 khruseos, 279, 291 khrusos, 279, 291 khrusôsis, 287, 288, 291 Kimolos, 255 Klytaimnestra, 105 Kôm el-Chougafa, 310, 311 Koropi, 280, 281 kosmèsis, 149, 156, 275, 287, 288 kosmos, 277, 287, 290 krater, 100 -amphora, 102, 103, 104, 105, 106, 107, 108 kyanos, 15, 16 kylix, 238 (kylix-kantharos), 338, 343
kylikéion, 176, 308 kymation, 84, 85, 93, 148, 178, 303, 304, 306, 308, 309, 313, 341, 348, 349 Lacédémone, 403, 405, 406, 409, 410, 412, 416 Laconie, 405, 406, 409 lacrymatoire(s), 249 lagynos, 219 laine(s), 49, 51, 53, 63-66, 71, 72, 73, 76, 77, 78, 279, 285, 288, 289, 359 lame(s) mince, 159 de plomb, 252, 271 lampe(s), 247, 249, 343 Lapidaires, 403, 405-410, d’Aristote, 408 de Berne, 410 de Damégeron-Évax, 410. orphique, 409 lapis-lazuli, lapis lazuli (GB), 15, 17, 18, 175, 214, 412 larnakès, 245 Laurion, 255-258 laurionite, 252 laque(s), 148, 150, 285 laqué(e)(s), 250, 251 Lébadée, 87, 90 Léda, 196, 198, 199 Lefkadia (tombe de), 148, 202, 296, 297, 299, 300, 302, 303, 304, 306-307, 381 légende(s), 449 lékanè(s), 246, 247, 249, 260 Lemnos, 90, 91, 197 Lesché (de Delphes), 192, 208 Lescot (Pierre), 418, 419 Léto, Létô, 88, 281, 289, 306 lettre(s), 27, 69, 78, 90, 287 Lettres (grotte des), 67, 69 Leuke, 322 lèvre(s) anatomique, 160, 161, 430, 441, 443, 449 vase, 29, 33, 229 liant(s)
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INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
en peinture, 9, 20, 86, 87, 93, 146, 154, 249, 250, 252 construction, 342, 343 light colour, light-coloured, 111, 128, 130 lighting, 127 conditions, 39, 40 lightcolored, 130 ligne(s), 189, 203, 250, 256, 268, 296, 307, 309, 310, 349, 355 blanche(s), 353 des épaules, 67 en dessin, 193, 433 de sol, 197, 297, 306, 307, 308 lin, 280 (blanc), 281, 289, 359 linéaire(s), 349, 359 lion(s), 85, 108, 111, 112, 267 (griffon-lion), 281, 371 liseré(s), 146, 163, 166, 359, 399, 407 litharge, 25, 27, 256 local(e)(s), 20, 64, 91, 92, 206, 215, 235, 261, 291, 331, 343, 429 localement, 65 localisé(e)(s), 17, 27, 245, 246, 409 localiser, 22, 25, 27, 258 localisation, 26, 27, 87, 258, 336, 410, loculus(i), 300, 301, 309, 314, 315, 382, 383 loi(s), 291, 292 sacrées, 291 somptuaires, 292 losange(s), lozenge(s) (GB), 233, 265, 267, 268, 277, 281, 326, 416, 421 lumen, 160, 181, 188 lumière(s), light(s) (GB), 10, 39, 99, 101, 105, 111-115, 143, 151, 159-163, 166, 173, 175, 188-190, 192, 194, 200, 202, 209, 211, 212, 226, 238, 239, 253, 267, 274, 275, 280, 292, 303, 328, 329, 334, 345, 347, 349, 353, 355, 356, 396, 397, 399, 400, 428, 429, 433, 438, 439, 444, 448, 461, 463, 465. Voir aussi jeux d’ombre et de lumière absorption, 44 and dark, 95, 97, 99, 101 and shade, 345 incident, 235 ground, 99 value, 99, 110, 114
visible, 42 ultraviolette, 154, 249 lumineux(se)(s), 154, 159, 160, 188, 191, 194, 198, 200, 210, 297, 299, 347, 349, 353, 355, 362, 393, 399, 400, 439, 444 lunette(s), 210, 325, 383 lustrer, 287, 320 luxe, 21, 78, 83, 94, 213, 215, 218, 223, 224, 275, 278, 282, 286, 293, 327, 353, 358 Lycosoura, 291 Lydie, 277 Lydiens, 282, 283, 284 Lyon, 223, 224, 257 lys, 85, 89 Lysippe, 127, 187, 188, 190, 195 Maglizh,Maglij (tombeau de), 323, 325, 328, 329, 339, 340 maison(s), 295, 309, 325, 326, 347, 399, 426, 427, 449, 454, 461, 462 Maison de l’Ancre, (Pompéi), 22 Maison d’Auguste (Rome), 349-353, 363 Maison du Bracelet d’or, (Pompéi), 364 Maison du Centenaire (Pompéi), 22 Maison des Cinq Statues (Délos), 148, 157, 159 Maison des Colonnes de mosaïque (Pompéi), 22 Maison du Faune (Pompéi), 359 Maison de Fourni (Délos), 263-274 Maison du grand-duc de Toscane (Pompéi), 22 Maison de la Grande Fontaine, (Pompéi), 22 Maison d’Hadès, 322, 328 Maison de l’Hermès (Délos), 152, 154, 157, 159, 165 Maison de Julia Felix, (Pompéi), 22 Maison du Labyrinthe, (Pompéi), 361 Maison du Lac (Délos), 165 Maison du Laraire d’Achille (Pompéi), 351 Maison des Masques, (Délos), 146, 149, 155 Maison du Ménandre (Pompéi), 361 Maison des Noces d’Argent (Pompéi), 350, 351, 352, 355, 356 Maison de Neptune et Amphitrite (Pompéi), 22
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LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
Maison des Noces d’Argent (Pompéi), 350-352, 355, 356 Maison d’Olynthe, 322, 325 Maison de P. Fannius Synistor (Boscoreale), 351, 363 Maison des Scientifiques (Pompéi), 22 Maison du Squelette (Pompéi), 22 Maison de Sutoria Primigenia, (Pompéi), 359, 360 Maison du Taureau de bronze (Pompéi), 22 Maison III S (Délos), 166 Maison VI (Pompei), 361 Macédoine, Macedonia (GB), 19, 91, 154, 169, 170, 174, 177, 181, 184, 202, 217, 229, 236, 238, 239, 245, 248, 280, 284, 285, 293, 295, 297, 299, 300, 304, 309, 326 macédonien(ne)(s), Macedonian(s) (GB), 153, 154, 169, 177, 179, 181, 217, 229, 231, 238, 239, 244, 285, 293, 296, 297, 305, 307-310, 315, 319, 320, 322, 325-327, 381 magie, 405 magistrat(e)(s), magistrate(s) (GB), 284, 291, 373 magistratus, 373 Magna Graecia, 174, 175, 181, 238. Voir aussi Grande Grèce main(s), hand(s) (GB), 16, 98, 109, 118, 131, 134, 136, 140, 141, 151, 156, 197-200, 203, 251, 334, 395, 432, 434 main-d’œuvre, 84 malachite(s), 136, 157, 175, 382, 383 manganèse, 211, 214, 219, 223, 225 manière (de peindre), 327 mapping, 401 maquillage(s), 87, 156, 241, 243, 252, 253, 255, 261, 282 Marbode, 408, 410 Liber lapidum seu de gemmis, 408 marbre(s), 35, 145, 146, 148, 149-151, 154-157, 159, 161, 165, 202, 227, 246, 288, 289, 296, 299, 305, 307, 329, 342, 345, 356, 363-365, 389, 401, 403-422, 428, 430, 434, 438, 441, 443, 444 blanc(s), 411, 417, 428, 434 noir(s), 419 marbrure(s), 409
Marcadé (Jean), 152, 154, 157, 165 marché(s), 74, 81, 86, 89, 90, 92, 93, 94, 216 marchepied(s), 299 Maréotide, 213, 214, 226 Marie, 417, 449, 459, 464 Marie-Madeleine, 429, 430, 431 marié(e)(s), 261, 452, 465 marier (se), 261, 278 marmoréen(ne)(s), 365, 405, 411, 420, 422 marquèteries, 406 Martial, 225, 406 martyrisé(e)(s), 416 martyre, 416 martyr(s), 452 Masada, 35, 46, 47, 55, 223, masculin(e)(s), 49, 51, 87, 141, 157, 158, 165, 201, 342, 436, 440, 452 massif(s), 16, 20, 154, 284, 291, 343, 358 matérialité(s), materiality (GB), 185, 191, 192, 345, 365, 429, 431, 432, 461 matérialisé(e)(s), 197, 285, 306, 439, 439, 444 matérialiser (se), 207 matérialisation, 207, 432, 444 matériau(x), material(s) (GB), 9-11, 15, 20, 22, 81, 83-86, 88-90, 92, 112, 133, 136, 137, 146, 151, 154, 156, 157, 175, 187, 201, 211, 213, 227, 239, 241, 243, 254, 258, 271, 273, 275, 293, 295, 296, 309, 319, 345, 347, 356, 359, 361, 363, 365, 395, 397, 403, 405, 411-413, 416, 422, 426, 428, 432, 435, 439, 443, 444 matériel(le)(s), 10, 23, 28, 30, 33, 148, 167, 217, 219, 225, 254, 274, 278, 326, 336, 395, 448, 450, 456, 461, 463 matière(s), 9, 20, 21, 61, 77, 81, 146, 159, 213, 217, 218, 241, 243, 244, 249, 250, 251-256, 258, 275, 277, 278, 279, 283, 287, 345, 356, 360, 397, 408, 411, 427, 433, 443 manteau(x), 131, 148, 150, 154, 157, 159, 166, 207, 208, 277, 280, 283-287, 289, 395, 398, 399, 463 mantle, 46, 47, 131, 134, 141, 375, 377 matrix, 136, 137
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INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
Mausole, 217 mausolée(s), mausoleum(s) (GB), 33, 381, 383 mauve, 57, 159, 271, 303, 399, 453, 460 mauve-violette, 148 méandre(s), meander(s) (GB), 115, 123-125, 127, 128, 134, 136, 179, 265, 267, 277, 303 médaillon(s), 329, 330 Médicis (Catherine de), 421 méditerranéen(ne)(s), mediterranean (GB), 21, 35, 37, 38, 45, 50, 61-64, 90, 172, 177, 179, 184, 192, 257, 295, 330, 331, 409, 465 Méduse, Medusa (GB), 169, 170, 178, 179, 210, 317, 329, 330, 331 mégalographie(s), megalographie(s) (GB), 172, 182, 359 Megenberg (Conrad de), 408 Buch des Natur, 408 Melinum candidum, 255 Mélitè, 84, 90 Mélos, Melos (GB), 90, 108, 255 Memphis, 13, 23, 24, 33, 34 mer Méditerranée, 10, 25, 27, 35, 50, 62, 65, 213, 221, 245, 257, 439 mer Noire, 312, 321, 340, 342, mer Rouge, 51, 52, 63, 65, 257 Mésopotamie, 281, 409 mésopotamien(ne)(s), 16, 214 metalinguistic, 385 métal, metal (GB), 27, 85, 146, 173, 175, 200, 208, 210, 225, 238, 256, 257, 273, 274, 278-280, 291, 345, 360, 361, 362, 463 métallique, 217, 220-222, 253, 256, 257, 281, 282, 288, 351, 361, 362 métallurgie, 85 metalware, 231 métaphore(s), 191, 200, 406, 438 métier(s), 10, 448 à tisser, 68, 76 microscopie(s) MEB, 250 microscopie électronique à balayage, 250, 252
microscopie optique, 249 vidéomicroscopie, 143, 145, 146, 147, 150, 159, 389 microspectrométrie infrarouge, 146. Raman, 146, 250 Middle Ages, 369 milésien, 291 Milet, 290 Miletus, 119 miltos, 87, 89-94 mimésis, 163 mine(s), 255, 257, 258 mina monétaire, mine(s), 75, 77, 86-89 minerai(s), 252, 255, 256, 257, 258, 259 minéral(e)(s), minéraux, mineral (GB), 15, 136, 137, 150, 159, 249, 250, 252, 389, 405, 408, 411 minéralité(s), 438 minéralogique(s), 150 Minet el-Beida, 20 miracle(s), 418, 448-450 miraculeux(se), 455 miraculeusement, 452 miroir(s), 197, 204, 243, 246, 247, 249 miroitement, 210, 211 Mission archéologique de Macédoine, 327 mobilier(s), 11, 33, 215, 217, 219, 220, 224, 246, 248, 251, 295, 305, 308, 326, 332, 337, 338, 340, 342, 343 mode(s), 92, 153, 195, 199, 277, 309, 320, 351, 359, 360, 366, 400, 412, 450, 459, 460 d’acquisition, 83 de construction, fabrication, préparation, production, 9, 10, 202, 251, 252, 295 de vie, 282, 286 modelage, 160, 161, 162 modèle(s), model(s) (GB), 62, 85, 112, 153, 163, 167, 181, 198, 199, 204, 277, 305, 308, 310, 329, 361, 387, 392-396, 401, 402, 417, 421, 431, 440 modèle(s) 3D, 387, 392-397, 399, 401 modèle(s) (géométrique) numérique(s), 394, 395, 397, 399, 401, 402
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LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
modelé(s), 10, 160, 161, 166, 167, 295, 296, 303, 395-397, 399, 400, 428, 431 modeler, to model (GB), 133, 160, 161 modélisation, modelling, (GB), 10, 389, 395 modéliser, 393, 399 modernité(s), 417 modillon(s), 351, 356, 361 molécule(s), molecule(s) (GB), 41, 250, 251 mollusque(s), mollusc(s) (GB), 35, 37-39, 43, 44, 49, 51, 54-57, 61, 63, 71, 74 monobapha, 74 monobromoisatine, 56 monochrome(s), 148, 221, 297, 321, 323, 325-327, 426, 432, 433, 435 monochromie, 428, 431, 432, 435 monumental(e)(s), monumental(s) (GB), 95, 96, 110, 111, 128, 177, 179, 181, 188, 200, 202, 209, 293, 295, 299, 304, 305, 306, 308, 319, 320, 323, 329, 343, 359, 381, 383, 385 moralisateur, 227 mordoré(s), 361 morphologie(s), 146, 250, 252, 253 mort(s), 191, 200, 202, 204, 206-208, 217, 244, 247, 248, 279, 284, 287, 297, 306, 308, 309, 320, 322, 323, 325, 326, 328, 330, 331, 426, 427, 435, 437, 444, 449, 450, 454, 461 mortalité(s), 437 mortel(le)(s), 198, 199, 437, 440, 443 mortier, mortar (GB), 21, 45, 112, 251, 254, 305, 328 mortar, 45, 112, 254 mortuaire(s), 432 mosaïque(s), mosaic(s) (GB), 11, 21, 22, 165, 177, 179, 181, 263-274, 372, 375, 379, 380, 381, 383, 384, 412, 414, 415 mosaïqué(e)(s), 218, 274, 416 mosaïste(s), 263, 271, 273, 302 motif(s), pattern(s) (GB), 54, 56, 58, 60, 66, 67, 69, 73, 98, 102, 111, 112, 115, 117, 125, 127-129, 134, 136, 137, 140, 141, 166, 177-179, 181, 194-196, 198 207, 209, 215, 218, 229, 236, 239, 267-269, 277, 280, 285-288, 296, 297, 302-306, 308,
311, 312, 313, 323, 328, 347, 359, 399, 401, 414-416, 420, 421, 423, 448 motivation(s), 307, 367, 448, 459 mouchetis, 365 moule(s), mould(s) (GB), 20, 134, 338 moulé(e)(s), 216, 220-222, 231, 427 moulage(s), 131, 215, 219, 281, 426, 427, 431 moulure(s), moulding(s) (GB), 10, 84, 85, 92-96, 112, 293, 295, 296, 303-306, 308, 311, 312, 315, 381, 417 mouluration, 311, 312, 313 Moyen Âge, 17, 403, 405, 410, 414, 463 Haut, 405 multicolore(s), 157, 349, 356, 362, 411, 414 Munich, 204, 442 mur(s), 28, 265, 267, 299, 300, 305, 321-323, 326-328, 331, 332, 338-341, 343, 347, 348, 355, 365, 400, 411, 438 mûr(e)(s), 10, 463 mural(e)(s), muraux, mural painting(s) (GB), 313, 406, 416 mosaïque(s), 22 peinture(s), 11, 13, 18, 19, 95, 96, 113, 192, 323, 341 surface(s), 365 murex, 35-37, 88, 279, 288, 289 Muricidae, Muricidés, 35-39, 42, 43, 45, 55, 61, 63 Mustapha Kamel, 299-301, 308, 309 Mycènes, mycénien(ne)(s), Mycenaean(s), 95, 97-99, 114, 281 mythe(s), 9, 191, 192, 208, 280, 330, 331, 406, 439, 441 mythifié(e)(s), 422 mythique(s), 411, 416, 439 mythologie(s), 322 mythologique(s), 325 naïskos, naïskoi (GB), 185, 186, 199-202, 208, 299-301, 303, 304, 312, 315, 347 naïskos-baldaquin, 301 Naples, 17, 26, 28, 29, 169, 170, 177, 179, 200, 203, 209, 210, 347 narine(s), 165, 430, 443 natron, 25, 171, 213, 217, 218
491
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
nécropole(s), necropolis (GB), 14, 19, 20, 67, 169, 170, 182, 183, 223, 244, 245, 246, 249, 254, 255, 299, 300, 309, 310, 311, 321, 337 Nekuia, 192, 207, 208 néoclassique (goût), neoclassical (taste) (GB), 211, 367 Nuées, Nephelai, 197 nervure(s), 210, 304, 309, 315 Nicaea, 74 niello, 97 Nikandrè, Nikandre (GB), 111, 115-130 Nikè, Nike (GB), 179, 182, 183, 291, 325, 340 Nil, 21, 51, 52, 78 nilotique, 268 Nimrud, 215, 236, 237 noir(e)(s), 9, 54, 87, 89, 90, 92, 188, 190, 193, 194, 197-201, 203, 204, 207, 246, 249, 265, 267-269, 271, 291, 297, 299, 300, 302, 307, 312, 315, 322, 323, 326-332, 334, 336, 360, 409, 410-412, 419, 421, 430, 433, 450, 452, 459, 460, 461 noir et blanc, 9, 267, 299, 315, 322, 323, 326-332, 334, 336, 349, 421 Nola, 169, 170, 177 nu(e)(s), 440, 441 nuage(s), 204, 207, 208, 393 nuance(s), 10, 54, 55, 64, 79, 164, 165, 278, 279, 288, 317, 320, 332, 334, 336, 353, 437, 461 nuancé(e)(s), nuanced (GB), 54, 74 nuancer, 21, 55 nucleus, 271 nudité(s), 440, 441 numérique, digital (GB), 167, 387-402 numérisé(e)(s), 393, 402 numérisation, digitalization (GB), 387, 392, 393, 399, 400 Numidie, 406 (jaune de), 407, 412, 416 numidiques, 365 obscurum, 188
ocre(s), ochre (GB), 90, 91, 165, 251, 326, 334, 359, 373 de Lemnos, 90 jaune, yellow, 150, 154, 157, 165, 174, 251, 322, 326-328, 401 rouge, 154, 159, 165, 208 Odessos, 319, 321 Odryses, 319 Odysseus, 100, 101, 105, 106 offrande(s), 89, 169, 202, 244, 246, 247, 275, 281, 287, 290, 291, 292, 359, 458 œil, 165, 190, 214, 362, 429, 431, 435, 462, 465 oinochoè, oinochoe (GB),103, 105, 109, 110 Lévy, 102 oiseau(x), bird(s), 86, 98, 102, 104, 107, 111, 208, 255, 286, 351, 361, œuf(s), egg(s) (GB), 75, 136 white, 174 olivier(s), 267, 287 Olympie, Olympia (GB), 111, 127, 217, 287, 299 Olynthe, 322, 325 ombre(s), 10, 60, 160, 166, 197, 200, 201, 204, 205, 207-209, 295, 297, 302, 303, 305, 307, 308, 345, 347, 348, 349, 350, 351, 356, 397, 400, 434. Voir aussi jeu d’ombre et de lumière omnidirectionnel(le)(s), 396 omphalos, 215 onyx, 353, 355, 365, 443 opaque(s), 150, 214, 216, 219, 220, 221, 222, 224, 297 Ophélion, 88, 89, 288 ophite(s), 410 Oplontis, 227, 347, 348, 350, 354, 356, 357, 359, 362, 363 optique(s), 9, 249, 323, 433 opus, 22 musivum, 22 sectile, 406, 414, 420, 421 segmentatum, 267, 273 signinum, 267, 268, 273 tessellatum, 263, 264, 265, 267, 271 vermiculatum, 263, 264, 265, 267, 268
492
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
or, 10, 87, 88-90, 92, 147, 150, 154-156, 160, 166, 191, 194, 202, 209, 217, 218, 229, 263, 265, 269, 271-292, 322, 326, 329, 334, 337, 338, 343, 361, 389, 395-397, 399, 401, 412, 416, 439, 463 orange(s), orangé(e)(s), 55, 57, 165, 370, 394, 407 oreille(s), 247, 430, 432, 438 boucles (d’), 287, 288, 289, 340 Oreste, Orestes (GB), 104, 105, 200, 203 orfèvre(s), 287, 443 orfèvrerie, 278, 280, 290 organique(s), organic(s) (GB), 37, 39, 136, 137, 146, 154, 156, 159, 175, 235, 249, 250, 252, 255, 389 originaire(s), 16, 90, 358, 406, 457, 460, 461, 462, 464, 465, 466 original(e)(s), original(s) (GB), 9, 11, 70, 131, 134, 136, 137, 171, 197, 229, 341, 345, 383, 410, 426, 460 originalité, 189, 194, 315 originator, 113 orite(s), 409, 410 orné(e)(s), 51, 57, 66, 67, 74, 78, 79, 198, 216, 280, 285, 289-291, 328, 351, 359, 361, 412, 419, 434 ornement(s), ornament(s) (GB), 65, 67, 85, 88, 89, 92, 98, 99, 111, 122, 123, 127, 128, 130, 133, 134, 137, 140, 177, 202, 275, 281, 282, 284, 286, 288, 291, 292, 297, 305, 323, 419 ornemental(e)(s), ornamental (GB), 179, 413 ornementation, ornamentation (GB), 179, 281, 282, 320 orner, 69, 157, 159, 210, 225, 290, 365, 411 Orphiques (Hymnes), 330, 331 orseille(s), 250 orthostate(s), 311, 312, 323, 325, 327, 355, 365 Orvieto, 169, 170, 177, 206 os, 337, 343, 443 ostracon(s), 72, 78 Ostroucha, 317, 318, 333, 334 (tombe) outil(s), 167, 250, 347, 348, 351, 364, 365, 395, 396, 402, 416, 444
outligned, 235 outligne(s), 117, 173, 236, 238, 387 outre-tombe, 322, 326 oves, 302, 304, 305, 353, 354 oxydation(s), 256, 419 oxyde(s) de fer, ferreux, 159, 213, 251, 254, 443 de plomb, 256 oxytyria, 64, 74 Paestum, 169, 170, 174, 177, 182, 184, 196, 197, 203, 255 pain(s), 20, 21, 34, 78, 464 palais, 20, 199, 202, 205, 246, 405, 411, 412, 414, 416, 419 palette(s), 9, 91, 94, 143, 148, 157, 159, 173, 174, 183, 194, 200, 216, 277, 295, 332, 395, 414, 437 palla, 60, 69, 71 pallium, 54, 56-60, 66, 69, 71, 73, 377 palmette(s), 148, 235, 297, 299, 307, 325, 381 paludamentum, 375, 377, 378 panathénaïque, 202, 324, 325 Panathénées, 10, 288 Pandore, 439 panier(s), 78, 359 panneau(x), 85, 201, 265, 267, 300, 305, 355, 365, 406, 414, 417, 418, 421 paraskèniai, 85, 92 panse(s), 28, 29, 221 panthère(s), 359 panthérine, 359 papyrus, papyry (GB), 61, 63, 64, 65, 72, 73, 74, 77, 78 papyrologue(s), 51, 53 papyrologique, 77 paradis, 416, 463, 465 parallèle(s), 28, 326, 359, 363 parastade(s), 301 parfum(s), 27, 243, 282, 439 parfumé(e)(s), 218, 280, 284 pariétal(e)(s), pariétaux, 15, 19 peinture, 345-366
493
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
paroi(s), 22, 23, 28-30, 32, 33, 195, 202, 204, 206, 207, 210, 215, 218, 249, 293, 295, 297, 299, 302, 305-307, 311, 312, 315, 327, 347, 355, 356, 363, 366 Parien(ne)(s), Parian(s) (GB), Paros, 102, 103, 107, 108, 110, 123, 127, 405, 406, 412 parquetage(s), 414 Parthénon, Parthenon (GB), 83, 133, 290, 297, 302, 303, 331 pastiche(s), 361 pastille(s), 249, 253, 260 parure(s), 89, 157, 215, 217, 243, 275, 279, 280, 282, 284, 287, 289-291, 292, 411, 413, 440 Passion du Christ, 416, 418, 429, 439 pâte de verre, 263, 267, 268, 271, 274, 281, 443 Patras, 291 Patrocle, 204, 207-209 patte(s), 267, 351, 423 patterned, 112 paupières, 438, 439, 443 pavement(s), 22, 302, 406, 407, 414, 415, 417, 418, 420 mosaïque de, 22, 263-274, 302 paveur(s), 414 Pavie (Chartreuse de), 417 pavonazzetto, 365, 406, 407 peau(x), 95, 96, 153, 243, 250, 253, 254, 277, 393, 409, 448 peindre, to paint (GB), 10, 37, 47, 85, 86, 93, 133, 154, 161, 195, 235, 312, 327, 334, 378, 395, 396 peint(e)(s), painted (GB), 17, 18, 35, 45, 96, 102, 107, 112, 115, 117, 119, 120, 122-131, 133, 134, 136, 137, 140, 141, 143, 148, 150, 151, 152, 153, 155, 157, 160, 161, 166, 169-171, 173, 175, 179, 180, 182-185, 186, 188, 191, 192, 194, 197, 199, 202, 204, 207, 209, 215, 217, 224, 229, 235-238, 267, 293, 295, 297, 299, 300, 303, 304, 305-307, 309-313, 315, 317, 320, 321, 323, 325-329, 331, 334, 340, 342, 347, 351, 355-357, 361,
362, 365, 366, 396, 399, 413, 417, 427, 429, 431, 432, 441, 465 reverse, 229-240 matt-painted, 107 peintre(s), 81, 83, 84, 85, 88, 92-94, 101, 104, 105, 107, 110, 113, 124, 125, 143, 148, 151, 153, 157, 161, 169, 169-175, 181, 187-189, 191, 192, 194, 195, 197, 199-201, 207, 208, 227, 277, 286, 29, 299, 304, 308, 310, 347, 349, 351, 363, 365, 395, 430-432, 440, 441 artisan-peintre, 90, 355 Chigi, 110 of Berlin, 101 Phyrnos Painter, 107, 110 the Sacrifice Painter, 101, 110 Tomb, 169-184 Parrhasios, 188, 189, 191, 286 peintre-sculpteur, 161 peintre encaustiqueur, 84, 90 Peintre de Cassandre, 197 Peintre de Darius, 196, 198, 201 Peintre des Enfers, 204 Peintre de la Furie Noire, 194, 198, 199, 200, 203 Peintre de l’Ilioupersis, 199, 201 Peintre de Konnakis, 199, 200 Peintre du Louvre K 491, 197 Peintre du Louvre MNB 1148, 196, 198, 201 Peintre de la Naissance de Dionysos, 195, 196, 199, 200 Peintre de l’Oreste de Genève, 203 Peintre de Talos, 200, 202 Peintre Varrese, 201 Phyrnos Painter, 107, 110 the Sacrifice Painter, 101, 110 Timomachos, 93 Tomb, 169-184 peinture(s), painting(s) (GB), 11, 13, 17-19, 61, 83-88, 91-97, 99, 101, 102, 104, 105, 107, 110--115, 136, 143, 146, 148-154, 157, 159-161, 165, 166, 167, 169-177, 181, 183, 185185-210, 218, 227, 229, 243, 251, 253, 255, 263, 285, 293, 295, 296, 297, 299, 301, 303, 304, 306-312, 317, 321-325, 328, 331, 332, 334-336, 341, 343-345, 347, 349, 351, 353, 263, 293, 317, 345, 347, 349, 351, 353, 356, 359, 363, 365, 413, 418, 425, 431, 434, 440 à l’encaustique, 84, 86, 88 figurative(s), 323, 334
494
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
mural(e)(s), 11, 13, 18, 19, 95, 192 polychrome(s), 97, 110, 114 technique(s), 169 reverse (GB), 229-240 sur marbre, 151 tomb(s), 169-184 wall paintings, 95, 97, 110, 112, 172, 176, 177, 179 Peithô, 288 pelage(s), 163, 164, 359, 399 pèlerinage(s), 10, 429, 445, 447, 448, 453, 456, 458, 466 Pella, 187 Pentélique, 405, 406 péplos, peplos (GB), 117-120, 123, 157, 159, 287, 288 Pères de l’Église, 403, 405, 408 perikhrusos, 291 péristyle(s), peristyle(s) (GB), 177, 300, 308, 360 perle(s), 16, 20, 21, 216, 219, 280, 281, 343 et pirouettes, 303, 305 perse(s), 35, 281-285, 292 Perséphone, Persephone (GB), 176, 195, 198, 202, 205, 207, 297, 330 personnage(s), 27, 93, 199, 204, 206, 207, 282, 284, 286, 297, 299, 306, 359, 428, 429 perspective(s), 152, 179, 183, 193, 265, 267, 295, 345, 347, 348, 349, 359, 360, 418 pétale(s), 215, 362 petalon, 88, 89, 92 peuplier(s), 322 Pharsale, 322 Phéacien(s), 207 Phersipnai, 204 phiale(s), 229-240, 287, 288, 331 Phidias, 202, 289, 439, Philibert De L’Orme, 419, 420 Philippe Arrhidée, 311 Philippopolis (tombeau de), 328 philosophe(s), philosopher(s) (GB), 37, 187, 189, 190, 191, 244, 282, 287, 290, 405, 433, 435 philosophique(s), 191, 425, 439
phôs, 438, 439, 443 phosgénite, 252 phosphorescent(e)(s), 190 phosphoric (acid), 40 photochimique, 64 Phrasikleia, 129 Phrygie, 356, 365, 406, 407, 412 phrygien(ne)(s), 215 Phryné, 254, 440 physique, 9, 185, 192, 207, 261, 278, 359, 405, 427, 443, 449 physico-chimique(s), 9, 10, 187 pictural(e)(s), 16, 19, 143, 146, 148, 151-154, 156, 157, 159-163, 165-167, 169, 170, 322, 323, 341, 345, 349, 355, 356, 365, 393, 395, 401, 441 pièce(s), pieces (GB), 20, 43, 46, 81, 133, 145, 193, 214, 216-218, 220, 224, 225, 227, 280, 236 architecture, 28, 265-267, 299, 300, 302, 323, 324, 327, 328, 338, 339, 341, 355 d’étoffe, tissu, vêtement, garment, clothin, 67, 68, 70, 117, 119, 123, 124, 280, 281, 288, 290 d’orfèvrerie, 290 de harnais, 338 ébénisterie, 358 élément(s) de mosaïque, 414 élément(s) de mosaïque, 414 en or, 291 monnaie, 194 parure, rapportées, 281 théâtre, 197, 244 pied(s), 198, 246 mobilier (table, vaisselle, etc.), 23, 33, 267, 299, 363 mesure, 84, 85, 93, 417 membre, 152, 285, 432 pierre(s), 16, 77, 83, 91, 95, 96, 191, 216, 225, 245, 263, 267, 268, 271, 273, 274, 290, 291, 295, 297, 299, 303, 305, 308-310, 320, 321, 337-343, 363, 367, 405-413, 416-419, 421, 434, 436, 438, 441, 444, 447, 459, 465 (semi-) précieuse(s), 191, 214, 281, 284, 336, 356, 361, 362, 408, 409 pierrerie(s), 191, 289, 405L
495
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
pétrin(s), 77 phénicien(ne)(s), Phoenician(s) (GB), 37, 43, 45, 453 photocopie(s), 349, 351 pieusement, 290 pieu(x), pieuse(s), 291, 447 pigment(s), 9, 13-47, 62, 64, 71, 81, 86, 91, 137, 150, 153, 154, 156, 157, 169, 171, 173, 174, 235, 236, 239, 243, 244, 248-252, 254-257, 260, 285, 290, 295, 296, 307, 321, 323, 363, 367, 371, 373, 382, 383, 395, 443 pilastre(s), 300, 306, 308, 313, 315, 324, 339, 359. pilleur(s), 202, 305 pinax(kes), 85, 92, 356, 357 Pinacothèque du Vatican, 17, 418 pinacoteca, 183 pink, 137, 229, 241 pinkish, 181, 182 Paulus Orosius, 377, pinceau(x), 349, 364, 365, 395, 399 Pindare, 200, 280 plafond(s), 85, 86, 87, 93, 202, 300, 305, 310, 311, 312, 313, 315, 334, 336, 356, 357 plan(s), 26, 30, 31, 152, 183, 266, 293, 302, 319, 324, 338, 339, 347, 349-353, 355, 360, 402, 439 arrière-plan, 194, 208, 348, 349, 351, 352, 400 premier plan, foreground, 105, 187, 208, 295, 315, 348, 351, 356 second plan, 307, 347, plane(s), 307, 312, 353 planer, 198 plante, plant(s) (GB), 43, 97, 99, 215, 250, 251, 464 tinctoriale, 79 plaquette(s), 253, 419 plate-bande, 303 Platon, 191, 200, 202, 244, 261, 290, 291, 334, 336, 434 platonicien(s), 191, 277 pli(s), 131, 150, 160, 162, 359, 360, 396, 399
Pline l’Ancien, Pliny the Elder (GB), 17, 27, 37, 63, 79, 81, 90, 93, 95, 96, 113, 114, 148, 151, 160, 163, 175, 181, 188, 189, 225-227, 252, 254, 256, 287, 358, 403, 405, 406, 410-412, 417, 427 plinthe(s), 311, 312, 323, 326, 327, 334 plomb, 25, 146, 154, 157, 244, 246, 247, 252, 253, 254, 255, 256, 257, 258, 259, 271, 340, 342. Voir aussi blanc de plomb carbonate de, 252, 254 lames de, 252271 vanadate de, 157 plombifère(s), 258 (minerai) Plutarque, 160, 195, 244, 286, 289 poikilia, 275, 277, 281, 292 poikilos(on), 277 poil(s), 365 pointe(s) de diamant, 419 poison(s), 254, poix, 84, 86, 87, 90, 92, 94 polarité(s), polarity (GB), 96-97, 99, 101, 105, 107, 113, 114 poli(e)(s), polished (GB), 231, 305, 363, 365, 406, 443 Polia, 412 Poliphile, 403-422 politique(s), political (GB), 9, 92, 181, 275, 278, 282, 284, 286, 292, 372, 377, 434 polis (cité-État), 284 Polyclète d’Argos, 389, 401, 434, 436 polychrome(s), polychromatic (GB), 10, 11, 17, 95-97, 107, 110-112, 114, 143-167, 181, 182, 199, 218, 221-223, 265, 267-271, 277, 299, 322, 345, 356, 363-365, 380, 387, 390, 397, 403, 405, 414, 417, 422, 423, 426-430, 433 polychromie(s), polychromy (GB), 9, 10, 81-114, 131, 133, 134, 142-167, 171, 218, 225, 239, 268, 272, 275, 277, 278, 282, 295, 299, 345, 347, 367, 378, 387, 389, 391, 399, 401, 403, 412, 413, 420, 422, 423, 425, 426, 428-430, 432-436, 440, 441, 443, 444 polychromique(s), 435 Polyphème, Polyphemus (GB), 100, 101, 105, 106, 176, 323
496
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
Polyzalos (de Géla), 443 Pompéi, 15, 18, 19, 22, 26, 186, 201, 203, 210, 227, 243, 251, 255, 323, 350, 351, 352, 355, 357, 359, 361, 364 pompéien(ne)(s), Pompeian(s) (GB), 22, 345, 347 porche(s), 200, 202 porphyran, 38 porphyre(s), 363, 403, 405-407, 409-413, 415-421 porphura, 285 porphureos, 278, 279, 288 portasanta, 406, 407, 413, 418, 420, 421 porte(s) (mobilier), 15, 17, 27, 84, 200, 202, 204, 208, 255, 284, 299, 300, 305-309, 312, 313, 317, 322, 328, 329, 331, 355-357, 361, 419 Portonaccio Temple of Apollo in Veii, 171 portrait(s), 67, 195, 227, 338, 371, 375, 382, 426, 427 Posidippe de Pella, 187, 188 poudre(s), 20, 71, 243, 244, 250, 252, 253, 256, 258, 260, 410 blanche(s), 246, 247, 248, 249, 253 pourpre, 10, 27, 35, 49-79, 88, 148, 159, 166, 191, 197, 202, 229, 251, 275-292 Pouzzoles, 15, 16, 25-28 Praxitèle, 151, 439, 440 prélèvement(s), 18, 53, 54, 146, 248, 249 préparation(s), preparation(s) (GB), 89, 109, 148, 150, 154, 155, 250-253, 255, 256, 258, 260 préparatoire(s), 146, 154, 401 pre-Roman, 169, 171, 179, 231 présentification, 436, 439, 444 prestige(s), 10, 21, 64, 79, 281, 295, 308 prestigieuse(s), prestigieux, prestigious (GB), 49, 51, 74, 99, 285, 287, 359, 411 Priam, Priamus (GB), 411 Prima Porta, 378 primitif(s), primitive(s), 323, 328, 435 Prinias, 119, 121, 123, 127 privé(e)(s), private (GB), 11, 426, 428
prix, 17, 49, 51, 64, 65, 71-78, 81, 83, 86-90, 92, 93, 201, 211, 225, 251, 307, 457 procédé(s), 35, 49, 54, 55, 65, 95, 152, 160, 185, 198, 203, 204, 220, 221, 225, 226, 255, 256, 300, 305, 308, 309, 310, 345, 349, 353, 355, 356, 362, 365, 444 pictural(e)(s), picturaux, 148, 347, 349, 353, 355, 365
148, 207, 295, 347, 366,
151, 208, 299, 348, 430,
295, 345,
procession(s), 10, 107, 112, 172, 287, 289, 291, 378, 427 processionnel(le)(s), 86 processus, 23, 50, 54, 55, 61, 166, 191, 197, 260, 271, 279, 351, 447, 450 Proche-Orient, 20, 35, 223, 224, 409, 429 proche-oriental, 223 production(s), 9, 10, 13-34, 38, 44, 49, 51, 53, 60, 64, 79, 83, 87, 91, 94, 193, 199, 203, 211-227, 229, 238, 239, 255, 256, 260, 265, 291, 393, 402, 432, centre(s), lieu(x), center(s), 20, 25, 64, 193, 215-217, 226, 229, 239 programme(s) de construction, 84 decorative, 317 iconographique, iconographic, 169, 170, 177, 181 informatique, 396 projection(s), 349, 364, 365, 395 propriétaire(s), 27, 208, 273, 290, 325 propriété(s) (d’un matériau, etc.), 151, 156, 253, 254, 278, 405, 407, 409 proskénion, 85 Protogène, 189 protogéométrique, 322 psimythion, 156, 243, 252, 255, 260, 261 pur(e)(s), pure (GB), 87, 89, 93, 154, 191, 202, 211, 225, 279, 286, 360, 362, 434 pureté(s), 227, 256, 258, 291, 416, 433, 465 purification, 200, 203 purpurarius, 27 purpurine, 55, 56, 251 pseudo-purpurine, 55, 251
497
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
purple, 35-47, 49, 229, 235, 239, 275, 283, 371, 374, 375, 377 blue-, 39, 47 red-, 39, 42, 44 purple-dyed, 49 purple-dyeing, 35, 47 purpura oxytyria, 64 Puteoli, 25, 27 Pydna, 217, 229, 231, 232, 233, 234, 235, 236, 238, 239, 326, 327, 328, tombeau de Pydna, 328 pyropœcile, 412 Pythion, 85-89, 92, 93, 288 Python, 196-198 pyxide(s), 18, 219, 244, 246-249, 252, 253, 256, 258, 260 Raban Maur, 406 racine(s), 55, 251, 278, 358 rais-de-coeur, 302, 303, 305, 313 Raman spectroscopy, 175, 239, 240 (micro) ramure(s), 361 rayons X, 145, 150, 155, 250, 252, 253, 256 rayure(s), 277 réalité augmentée, 402 récipient(s), 243, 248, 249, 343 recolorisation(s), 9 recontextualisation(s), 166, 387, 402 rectangle(s), 60, 69, 122, 328, 416 red, 40, 95, 101, 105, 107, 109-114, 128-130, 136, 137, 140, 141, 172-175, 181, 233, 235, 236, 238, 317, 370, 371, 373, 375, 378, 379 redécouverte(s), 10, 161, 437, 448 refend(s), 310-312 reflet(s), 210, 288, 361, 439, 413 refléter, 74, 189, 257, 325 Regio vici Vestoriani et Calpurniani, 26-28 réglementation(s), 285, 291 rehaussé(e)(s), 153, 194, 207, 280, 281, 288, 290, 293, 303 rehausser, 90, 281, 291, 296, 411, 441 rehaut(s), 165, 305, 419, 421, 439
relief(s), 10, 112, 152, 153, 160, 171, 172, 194, 203, 210, 211, 246, 265, 300-303, 311, 312, 315, 317, 323, 329, 340, 349, 351, 355, 379, 434, 439 bas, 10 haut, 224, 227, 355 low, 134 religieuse(s), religieux, religious (GB), 177, 192, 238, 241, 243, 282, 405, 414, 427, 429, 449, 452, 454, 455 religion(s), 241, 322, 425, 432, 437, 440, 448, 449, 453, 460, 461, 465 religiosité, 430 remploi(s), 166, 414 renaissance, 217, 463 Renaissance, 403, 405, 409-411, 414, 417, 423, 434 post-Renaissance, 356 rendu(s), 150, 163, 164, 188, 197, 293, 295, 296, 302, 305-307, 309, 345, 353, 400, 401, 443 représentation(s), representation(s) (GB), 105, 120, 123, 124, 129, 133, 140, 153, 181, 182, 185, 189, 191, 192, 194, 195, 197-202, 204, 205, 206, 208, 244, 246, 247, 265, 267, 268, 271, 274, 307, 309, 315, 331, 334, 338, 345, 347-349, 351, 353, 355, 356, 359, 362, 363, 365, 375, 396, 397, 402, 418, 421, 432, 439 representational, 102, 105, 111 reproduction(s), 11, 91, 347, 432 reptile(s), 409 République (romaine), 22, 345, 347, 358, 363 resplendir, 202, 400, 432 ressemblance, 192, 207, 225, 409 ressemblant, 146, 207, 439 restitution(s), 11, 146, 163, 167, 387, 389, 391, 393, 395, 396-402, 458 retravaillé(e)(s), 208, 215, 426 reverse-painted, 229, 235, 238 reverse painting, 229, 236, 239 revêtement(s), 25, 289, 295 Rhadamanthe, 202, 329 Rhodes, 20, 110, 216, 217, 219, 260, 302 rhodien(s), 217, 218
498
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
Rhodopes, 319 Riace (Guerriers de), 442, 443 riche(s), 10, 25, 64, 83, 95, 143, 159, 217, 245, 247, 248, 249, 263, 268, 271, 287, 338, 340, 342, 347, 361, 365, 405 richesse(s), 20, 143, 263, 272, 274, 278, 280, 286, 287, 290, 295, 406, 422, 433, 463 rim, 229, 231, 233, 235, 236, 238, 239 rinceau(x), 297, 327, 361, 362 rite(s), 10, 181, 206, 425, 445, 447, 448, 456, 457, 458, 466 rituel(le)(s), 287, 288, 291, 292, 330, 436, 437, 438, 444, 445, 447, 457, 458, 459, 466 rituellement, 438, 440 roche(s), 257, 331, 363, 395, 403, 405, 406, 408, 409, 416 romain(e), 29, 201, 243, 255, 323, 358, 367, 403, 405, 406, 414, 416, 418, 421, 427, 434 roman(s) de Thèbes, 411 d’Éneas, 411 de Troie, 411 Rome, 17, 18, 25, 27, 171, 177, 181, 195, 201, 205, 218, 221, 350, 352, 353, 362, 363, 378-384, 406, 409, 413-415, 419-422, 427, 428, 434, 450, 454 ronde-bosse, 10, 302, 426 Ronsard (Pierre de), 419 rosace(s), 305 rose(s), rosé(e)(s), 54, 149, 150, 154, 159, 165, 210, 229, 241, 243, 244, 247, 249, 250, 251, 254, 267, 268, 279, 289, 305, 328, 332, 340, 399, 430 pourpre, 55, 57 violacé, 54 de garance, 148, 154, 159, 165 rouge, 340 rose(s)(fleurs), 421 rosette(s), 85, 89, 110, 127, 128, 130, 179, 277, 328, 337, 359 roue(s), 288, 328, 334, 414 rouge(s), 9, 54, 55, 57, 61, 63, 64, 90-92, 95, 96, 150, 154-156, 160, 165, 166, 193, 194, 197-200, 202, 207, 210, 219, 220, 244, 249, 251, 260, 265, 268, 271, 278, 279,
296, 297, 300-306, 308-312, 315, 317, 321-323, 325-329, 332, 334, 336, 338, 340, 342, 360, 362, 399, 407, 412, 415, 416, 418, 421, 428, 429, 431-433, 435, 453, 460, 462-465 brun, 323 cinabre, 202, 251, 432 ocre, 154, 159, 165, 208 violacé, 54 rougeoyant(e)(s), 279 royaume, 204, 207, 336, 422 royauté, 280, 284 Rubia cordifolia L., 251 Rubia perigrina L., 251 Rubia tinctorum L., 55, 251 sable(s), 15, 16, 25, 30, 211, 213, 214, 226 sacré(e)(s), sacred (GB), 9, 10, 92, 281, 290, 291, 315, 326, 331, 416, 447 sacrifice(s), 109, 201, 204, 206, 207, 208, 209, 371, 375, 461 sacrifié(s), 206 safrin, 411 saint(s), 299, 416, 429, 445-466 Antoine, 451, 452, 459, 461, 462, 466 Charbel, 450, 451, 455, 456, 457, 459461, 464, 466 Cheikh Zaber, 448 Élie, 448, 451, 453, 457, 460-466 Épiphane, 407 Georges, 453 Hardini, 450, 451, 458, 459, 461, 466 Mar Doumit, 448 Mar Lionardo, 448 Mar Noher, 448 sainte(s), 416, 429, 445-466 Marguerite la martyre, 448 Marina, 448 Montagne de Dieu, 416 Rafqa, 450, 451, 456-459, 461, 466 Rita, 447, 452, 458, 459, 461, 466 Thérèse, 447, 454, 455, 460, 461, 466 Vierge, 449, 455 Saint-Augustin (abbaye), 17 Saint-Esprit, 453, 460 Sainte-Marie-de-la-Fleur, 434 sainteté(s), 461, 463-465 Samos, 119, 172, 187, 255, 291, 302, 378
499
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
Samothrace, 281 sanctuaire(s), sanctuary(ies) (GB), 81-86, 88-94, 99, 128, 171, 203, 245, 275, 281, 287, 288-292, 300, 311, 359, 414, 416, 429, 438, 445, 447, 449, 452, 454, 456-461, 464 of Apollo at Aegina, 103, 105, 109 of Apollo, Paros, Despotiko, 108 of Artemis on Delos, 117 of Ortheia in Sparta, 123 Sappho, 280, 285 Saqqara, 16, 67 Sarafova moguila (tombeau), 317, 327, 328, 341 sarcophage(s), 203, 204, 205, 206, 254, 308, 321, 338, 342 sarrancolin des Pyrénées, 418 Saturne, 413 satyre(s), satyr(s) (GB), 109, 193 savoir-faire, 88, 151, 153, 154, 251, 280, 295, 401, 425, 432, 435, 439, 440, 441, 443, 444 schéma(s), 165, 195, 325, 327, 353, 395, 440 schematic, 123 sculpté(e)(s), sculpted (figures) (GB),120, 146, 151, 154, 157, 161, 163, 166, 188, 191, 195, 202-204, 209, 210, 293, 295-297, 299, 300, 303, 305-307, 311, 331, 375, 398-400, 415, 429, 438, 439 sculpter, 10, 434 sculpteur(s), 93, 151, 153, 156, 187, 195, 416, 426, 430, 431, 434, 436, 438-441 sculpture(s), 11, 17, 93, 95-97, 111-114, 117, 124, 129, 131, 133, 141, 143, 144, 171, 272, 273, 367, 387, 389-391, 393, 400, 422, 423, 425, 426, 431, 433-436, 438, 439, 441, 443, 444 Archaic (Greek), 111, 131, 142 architecturales, 297 hellénistique, 143-167 limestone, 111 monumental, 95, 111 Mycenaean, 97 coloured, painted, polychrome, 131, 133, 143-167 stone, 95, 113 terracotta sculptures, 171 Scuola Grande di San Marco, 417, 418
sea snails, 35, 37-39, 47 Sélinonte, 255 selle(s), 76, 77 Seneca, 369, 370, Serlio Sebastiano, 418 Des Antiquités, Le troisiesme livre translaté d’italien en franchois (1550), 418 serpent(s), 210, 372, 409, 410 serpentine(s), 408, 409, 410, 411, 417, 419 serpentin(s), 412, 419 serti(e)(s), 284, 362, 417 sexe(s), 61, 248, 321 féminin, 291, 292 masculin, 87 Sicile, Sicily (GB), 21, 106, 107, 179.193, 287, 409 Sidon, 225, 465 sillon(s), 328 silver, 97, 238, 239 simulations, 402 Sindos, 255 Sinope, 90, 91 Siphnos, 126, 127, 297 skènai, 85, 92 skiagraphie, 200 skin, 95, 104, 105, 107, 110, 114, 118, 133 skyphos, 217-219 social(e)(s), sociaux, 49, 54, 73, 275, 278, 282, 283, 287, 292, 425, 427, 436, 437, 447, 457, 460 socialement, 437, 459 société(s), 9, 11, 49, 51, 61, 77, 83, 93, 278, 289, 332 soie(s), 359 soleil(s), 197, 295, 328, 331, 334, 400, 463 somptueuse(s), somptueux, 275, 280, 285, 286, 289, 291, 292, 338, 403, 405 sourcils, 165 souterrain(ne)(s), 22, 204, 301, 308, 310, 315, 322, 325 spectrométrie(s)
500
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
de fluorescence des rayons X, XRF, X-ray fluorence spectromy (GB),143-147, 150, 154, 155, 157, 256 de masse, 257 infrarouge, 146, 250 micro-, 146 statère(s), 6672, 73-78, 84, 87 stereomicroscope(s), 124 sphère(s), 9, 277, 292, 353 sphinx, sphinx(es) (GB), 100, 101, 199, 236, 299, 300 spirale(s), 265 splendeur(s), splendor (GB), 287, 291, 414, 443 splendide(s), splendid (GB), 166, 218, 244, 284 splendor, 160, 161, 181, 188 spongieuse(s), spongieux, 365 Stabies, 255 statue(s), statuette(s), 18, 20, 83, 86-89, 92, 102, 104, 111, 115-131, 133, 134, 136, 140, 141, 143, 146, 148-150, 155, 157, 159-161, 166, 171, 187, 198, 200, 202, 217, 263, 273, 279, 281, 288-290, 299, 304, 375, 376, 378, 381, 389, 391-393, 395, 396, 399, 401, 412, 413, 416, 421, 423, 425, 429, 431, 432, 434, 436, 437, 439-447, 449, 452, 453, 454 stèle(s), stele(s) (GB),15, 16, 19, 91, 111, 123, 200, 201, 246, 247, 290, 381, 443 stephanè, 287 stibine, 214 Strasbourg, 255 Stramonita haemastoma, 37-39, 42, 43, 62, 63 stuc(s), stucco (GB), 97, 179, 295, 299, 302, 303, 305-307, 309, 311, 312, 315, 321, 323, 328, 347 stucage, 271 style(s), 107, 113, 117, 154, 172, 177, 183, 238, 281, 308, 315, 322, 323, 326, 331, 337, 345, 347, 351 architectural, 311, 347 à zones, 326, 337 deuxième (pompéien), 345, 347, 351, 356, 359, 363, 365 gréco-égyptien, 295, 311-315 illusionniste, 295, 302, 315
polychrome, 322 protogéométrique, 322 quatrième, 365 structural, 179, 295, 308, 309, 310, 311, 323, 347 stylet(s) (numérique), 395, Styx, 331 sulfure de mercure, 251 sunlight, 39 superposition(s), 10, 148, 150, 153, 154, 163, 194, 395 surface, 10, 23, 65, 66, 69, 102, 104, 105, 111, 114, 118, 124, 128, 133, 134, 136, 137, 145, 148, 150, 152, 154, 160, 161, 175, 189, 203, 233, 235, 236, 246, 253, 263, 267-269, 271-274, 277, 307, 320, 321, 323, 331, 334, 347, 353, 363, 365, 366, 375, 393, 401, 406, 409, 416, 417, 432 surnaturel(le)(s), 194, 408, 451 surpeint(e)(s), 200 surteinture, 64 Sybaris, 284 syénite, 342, 412 symbole(s), symbol(s) (GB), 79, 275, 317, 320, 322, 323, 325, 326, 328, 331, 334, 408, 409, 448-450, 460, 463 symbolical, 403 symbolique(s), symbolic (GB), 10, 51, 129, 202, 243, 252, 278, 282, 317, 320, 322, 325, 326, 328, 403, 405, 414, 417, 418, 421, 432, 433, 437, 443, 455, 461 symboliquement, 407, 416, 431 symboliser, 285, 286, 325, 326, 328, 330, 334, 418, 461, 463, 465 symbolisme(s), 194, 317, 323, 326, 336, 410, 417, 447, 460, 461 symbology, 379 sympolitie, 91 Synadique, 412 synthèse(s) (chimique), 13, 15, 250, 252, 253, 255, 256, 257 synthétisé(e)(s) (chimie), 241, 244, 251, 252 synthétiser, 411 syro-palestinien(ne)(s), 227 systématisme(s), 353, 355
501
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
table(s), 206, 215, 267, 358, 417, 419, 421, 457, 462 service de, vaisselle de, vases de, 211, 213, 215, 218, 224, 226, 227 tableau(x), 93, 153, 163, 188, 189, 192, 194, 195, 200, 208, 297, 356, 396, 431 tache(s), 254, 277, 334, 365, 406, 410, 412, 417 tacheté(e)(s), 409, 410 taillé(e)s, 156, 219, 224, 307, 342, 365 taille(s), 89, 416 tailler, 76, 77 Talmud (Babylonian), 38 tambourin(s), 155, 156 tampon(s), 364, 365 tapis, 267, 359 tapisserie(s), 67, 69 Taposiris Magna, 301 tardo-républicain(s), 354, 356, 359, 360, 363 tarif(s), 87, 88, 92, 93 Tarquinia, 19, 169, 170, 171-178, 180-184, 204, 205 technè, 148, 161, 241, 243, 439 teint(e)(s), 15, 19, 28, 35, 49, 51, 54-57, 62-66, 71, 72-74, 76-78, 91, 157, 161, 194, 220, 254, 278, 279, 284, 287-290, 292, 297, 305, 307, 349, 353, 362, 399, 418, 430 teinté(e)(s), 214, 221, 222, 434, 441 teinture(s), 35, 49, 51-57, 61-64, 74, 88, 278, 279, 280, 285, 287-291 teinturerie(s), 53 teinturier(s), teinturière(s), 54, 61, 64, 251, 457 Tekhelet, 35, 38, 47 Tektaios, 288 Tel Dor, 35, 43, 44, Tel Kabri, 35, 44, 45 Tempio Malatestiano (Rimini), 417 temple(s), 95, 111, 112, 185, 199, 200, 216, 289, 290, 295-297, 299, 331, 359, 406, 412, 413, 438 « Ara della Regina » temple (Tarquinia), 171 temple at Aegina, 133
temple at Kalapodi, 110, 112 Second Temple in Jerusalem, 46, temple d’Apollon (Délos), 289 temple d’Apollon (Delphes), 84, 438 temple d’Apollon (Didymes), 303, 304 temple d’Asklépios (Épidaure), 85 temple d’Athéna (Camiros), 216 temple de Déméter (Pyles), 84 temple de Diane (Éphèse), 194 temple de Lébadée (Béotie), 90 temple de Létô (Délos), 289 temple de Létô (Xanthos), 304, 305 temple de Louxor (saint des saints du), 299 temple de Zeus (Olympie), 299 Temple in Veii, 171 Temple of Apollo (Corinth), 112 Temple of Diana Tifatina (Capua), 372 Temple of Palatine Apollo, 383 temple of Poseidon (Isthmia), 110, 112 temple tardo-républicain de Brescia, 359, 360 tenon(s), 342, 351-353 tenture(s), 57, 59, 315, 359-361 terracotta, 97, 102, 103, 111, 120, 140, 171, 172, 177, 181, 381 terre(s), 10, 165, 191, 305, 310, 319, 329, 331, 334, 336, 408, 409, 417, 461, 462 de Chios, 255 d’Érétrie, 255 jaune, 340 de Kimolos, 255 de Mélos, 255 terre de Samos, 255 de Sélinonte, 255 verte, 157, 159 terre(s) cuite(s), 16, 18, 20, 148, 165, 245-247, 249, 337, 338, 340, 343, 426-429, 444 terrestre(s), 328 tesselle(s), 22, 263, 265, 267-269, 271, 272, 273, 274, 302 tête(s), head(s) (GB), 85, 97, 105, 109, 110, 112, 120, 137, 140, 141, 155-158, 172, 176, 179, 198, 199, 207, 210, 249, 286, 302, 317, 321, 329-331, 333, 338, 375, 444, 449 headless, 375 Tête de Tanagra, 430, 431, 441 tétrastyle(s), 306
502
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
texte(s), 15, 16, 50, 65, 71-73, 78, 79, 81, 88, 190, 191, 202, 207, 226, 241, 243, 250, 252, 255, 260, 261, 263, 273, 279, 288, 410-412, 417, 419, 426, 427, 438 textile(s), 37, 38, 43, 44, 47, 49-51, 53-57, 60, 61, 63-66, 73, 74, 76-79, 136, 278-280, 289, 290, 303, 359 texture(s), 105, 275, 277, 395, 401, 408 Thasos, Thasien, Thasian(s) (GB), 106, 109, 110, 258, 406 Théadeldephia, 301 théâtre(s), 85, 92, 166, 189, 190, 206, 244, 245, 246, 288, 375, 429 Thèbaïade, 412 Thèbes, 411 de Phtiotide, 244, 245, 247, 249, 253, 255, 258, 260 théophanie, 438, 439 Théophraste, 16, 90, 187, 188, 189, 252, 403, 405 thermes de Sosandra, 22 Thespis, 244 Thessalie, Thessaly, 241-261 Thessalonique, 198 (Musée archéologique de), 242 tholoi, 301 Thomas de Cantimpré, 408 Thrace, 10, 177, 184, 317-344 Thracian, 181, 317 tigré(e)(s), 359 tinctorial(e), 61, 71, 79 tirage (numérique 3D), 402 Tirésias, 204-207 tissage(s), 65-67, 71, 76, 78, 280, 288 tissé(e)(s), 60, 67, 68, 70, 74, 280, 285, 287, tisser, 65, 73, 76, 199, 438, tisserand(e)(s), 65, 73, 78, 288, tissu(s), 60, 65, 69, 71, 254, 279-282, 285, 288-290, 342, 356, 359, 360, 399, 453 Tomba degli Ori (Canosa), 233 Tomba dei Festoni (Tarquinia), 169, 170, 179, 180, 181 Tomba Giglioli (Tarquinia), 180, 181
tombe(s), 19, 29, 69, 170, 202, 204, 207, 217, 229, 243-249, 251, 252, 254, 260, 280, 281, 293, 295, 296, 297, 304-310, 317-344, 454 tombe 1 de Mustapha Kamel (Alexandrie, Égypte), 299, 300, 308, 309, tombe 2 d’Anfouchi (Alexandrie, Égypte), 299, 300, 311, 312, 315, tombe 5 d’Anfouchi (Alexandrie, Égypte), 312, 313, 314, 315, tombe 3 du terrain Tokalis, (Thèbes de Phthiotide, Grèce), 246, 249 tombe III du tumulus royal de Vergina (Tombe du Prince) (Grèce), 297, 302, 307 tombe 21 de la nécropole Ouest d’Oropos (Grèce), 255, tombe 24, zone 64 du cimetière du Céramique (Athènes, Grèce), 254, 260, tombe 396 de la nécropole Nord (Démétrias, Grèce), 249, 253 tombe 417 de la nécropole Nord (Démétrias, Grèce), 249, 253 tombe 439 de la nécropole Nord (Démétrias, Grèce), 249, 253 tombe 771 de la nécropole Nord (Démétrias, Grèce), 249, 253 tombe 3121 (Saqqara, Égypte), 16, tombe B de la porte de Stabies (Pompéi, Italie), 255 tombe B 26 du chantier du pont de Gabbari (Alexandrie, Égypte), 299, 309 tombe B188, (Ballana, Nubie ancienne), 69, 70 tombe Chouchmanets (Bulgarie), 320, 323, 328, 329, 337 tombe E de la nécropole (Derveni, Grèce), 251, 254, 260 tombe Golini I de Volsinies (Orvieto, Italie), 206 tombe Ostroucha (Bulgarie), 317, 318, 333, 334 tombe d’Aghios Athanasios (Thessalonique, Grèce), 198, 297, 298, 304, 307, 308, 331 tombe d’El-Deir (Israël), 67 tombe d’Eurydice (Vergina, Grèce), 154, 202, 209, 297-299, 302, 304, 305-306 tombe d’Odessos (Bulgarie), 340 tombe d’Alexandrovo (Bulgarie), 334
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INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
tombe de la Balançoire (Cyrène, Libye), 207 tombe de Borovo (Bulgarie), 317, 318, 326, 337 tombe de Dolno Izvorovo (Bulgarie), 323 tombe François (Vulci, Italie), 204, 208, 209 tombe du Jugement Dernier (Lefkadia), Grèce, 202, 296, 297, 300, 302-307 tombe de Kaloyanovo, Bulgarie, 321, 326, 338, 339 tombe de l’enlèvement de Perséphone (Vergina, Grèce), 195, 198 tombe de Mafrousa (Alexandrie, Égypte), 310 tombe de l’Ogre I (Tarquinia, Italie), 204, 205, 206 tombe de l’Ogre II (Tarquinia, Italie), 205-208 tombe des Palmettes (Lefkadia, Grèce), 148, 297, 299, 307 tombe de Perséphone (Vergina, Grèce), 207, 297 tombe de Philippe II (Vergina, Grèce), 154, 297 tombe de Philippopolis (Bulgarie), 328, 341 tombe de Pydna (Grèce), 326-328 tombe de Sarafova moguila (Bulgarie), 317, 318, 327, 328, 341 tombe de Sozopol (Bulgarie), 321, 342 tombe de Svechtari (Bulgarie), 342 tombe de Tchernozemen (Bulgarie), 321, 342 tombe de Yankovo (Bulgarie), 326, 343 tombe degli Auguri (Tarquinia, Italie), 172 tombe dei Giocolieri (Tarquinia, Italie), 172 tombe del Barone (Tarquinia, Italie), 172 tombe della Caccia e Pesca (Tarquinia, Italie), 172 tombe delle Iscrizioni / des Inscriptions (Vulci, Italie), 172, 204, 205 tombe delle Leonesse (Tarquinia Italie), 172 tombe des Partunu (Tarquinia, Italie), 204 tombe des Volumnii (Pérouse, Italie), 331
tombeau(x), 185, 201, 208, 317-344 tombeau Arsénalka (Bulgarie), 320, 336 tombeau de Kazanlak (Bulgarie), 317, 323, 324, 326, 328, 332-334, 336, 339, 341 tombeau de Maglizh (Bulgarie), 323-325, 328, 339 tombeau de Rouen (Bulgarie), 317, 318, 326, 328, 341 tombeau de Vetren (Bulgarie), 323, 324, 343 tombeau Golyama Kosmatka (Bulgarie), 317, 318, 320, 323, 329, 330, 336, 338, 337 tombeau Helvetia (Bulgarie), 323, 324, 328, 339 ton(s), tone(s) (GB), 55, 136, 137, 148, 153, 154, 156, 159, 161, 165, 221, 222, 263, 265, 371, 372, 379. 401, 460 tonalité(s), 10, 149, 157, 395, 397, 399, 401, 432, 440, 441 tongue(s), 110 tore, 311, 312, 315 touche(s) (de couleur, picturale[s]), 157, 160-163, 165, 193, 195, 207, 332, 334, 349, 353, 360, 362, 396, 397 trace(s), 10, 29, 32, 57, 64, 117, 118, 124, 125, 127-129, 131, 136, 145, 146, 155, 156, 157, 159, 165, 206, 229, 233, 235, 248, 249, 253, 256, 263, 299, 305, 328, 329, 349, 365, 375, 378, 382, 383, 387, 399, 423, 425, 430, 433, 435, 444 tracé(s), 189, 229, 353, 359, 360, 365 traitement(s), 145, 148, 152-154, 165, 166, 263, 353, 393, 399 traité(s), 189, 191, 208, 406, 408, 417 d’actinographie (Démocrite), 189 De Anima (Aristote), 189 De Architectura (Vitruve), 16, 189 De Lapidibus / Sur les pierres, (Théophraste), 16, 405 De Sensu et Sensibilibus (Aristote), 189 Sur la disparition des oracles (Plutarque), 208 sur les couleurs (Démocrite), 189 Sur les Sensations (Théophraste), 189 trame(s) (tissage), 54-57, 60, 65-73, 78 translucide(s), 221, 223, 434, 443 translucidité(s), 214
504
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
transparence(s), transparency (GB),10, 211, 212, 214, 215, 225, 227, 239, 362, 363 transparence(s), 10 transparent, 190, 210, 225, 229, 231, 235, 238, 290, 359, 363 travail, 20, 27, 53, 75, 76, 78, 84-86, 88, 90-92, 152, 160, 166, 185, 194, 200, 208, 209, 220, 227, 271, 280, 289, 345, 353, 355, 356, 365, 399, 412, 438, 443 travaillé(e)(s), 152, 220, 280, 329, 365, 426, 438 travailleurs (antiques), 87 travaux, 83-86, 89, 90, 92-94 travestissement, 441 trésor(s), 224 de Begram, 224 du Parthénon, 290 de Siphnos, 297 Trèves, 251 triad (colour, etc.), 101, 102, 105, 107, 111, 114, 120 tribu(s), 319, 407 tribune(s), 414 triclinium, 350, 351, 353, 358, 361, 362 Troie, 207, 411 tridimensionnel(le)(s), trois dimensions, 3D (numérique), 10, 11, 150, 163, 166, 167, 192, 199, 202, 302, 308, 347, 356, 387, 402, 426, 433, 440, 444 trompe-l’œil, trompe l’oeil (GB), 185, 186, 189, 193, 199, 200, 202, 204, 210, 267, 268, 293, 306, 307, 345-366 trône(s), 154, 202, 209, 281, 284, 297, 298, 299, 305 truphè, 275, 278, 282, 283, 284, 285, 293 tuileau(x), 267 tumulus, 215, 297, 321, 336, 337, 338, 339, 340, 341, 342, 343 Tumulus A(t Aineia), 381 tumulus I, tombe III (Démétrias), 248 tumulus no 1 du village de Tchernozemen (Bulgarie), 321 tumulus Bella (Vergina), 305 d’Alexandrovo (Bulgarie), 336 d’Arsénalka (Bulgarie), 320, 336 de Golyama Kosmatka (Bulgarie), 337
de Svechtari (Bulgarie), 342 de Vergina, 280, 297, 307 P, Gordion, 215 tunique(s), 54-60, 65-69, 71, 73, 76-78, 194, 207, 208, 280, 283, 284, 285, 289, 291, 396, 449, 450, 451, 452-454, 462, 463-464 Turmuca, 204 turquoise (bleu), 214, 215, 221, 222, 224 Tyr, 64, 461 Tyrian, 37 Tyrianthine, 64 tyran, 199, 286 tyrannie(s), 284, 286, 441 tyrannique(s), tyrannical (GB), 284, 378 ultraviolett(e)(s), 249, Ulysse, 206, 207, 280, 322, 323. Voir aussi Odysseus undecorated, 229, 231, 233 underground, 184 unguentaria, 247, 249 unidirectionnel, 396 uniforme(s), 227, 356, 365 uniformément, 154, 401 unisexe(s), 451, 454 Urbs, 406 Usak, 172 UV / VIS, 41, 42, 240 vague(s) (motif ), 359, 360 vaisselle(s), vessel(s), 99, 171, 206, 213-215, 217, 218-222, 224-227, 229, 231, 233, 236, 238, 239, 334, 338, 411 valeur(s), value(s) (GB),10, 44, 81, 83, 85, 86, 92, 93, 95, 101, 102, 105, 110, 111, 133, 151, 160, 185, 192, 227, 278-281, 284, 292, 317, 322, 323, 326, 328, 334, 349, 355, 402, 405, 413, 416, 433 mesure, 67, 69, 72 civique, morale religieuse, 185, 199, 200, 282, 436, 437, 449, 453, 460 mise en, 65, 156, 200, 202, 273, 291, 295, 400, 417 valeureux, 283, variation(s), 10, 61, 133, 189, 195, 201, 257, 345, 347, 349, 355
505
INDEX GÉNÉRAL (NOMS PROPRES ET COMMUNS)
variété(s), 9, 11, 17, 35, 53, 64, 91, 265, 277, 403, 405, 406, 408, 410, 411, 414, 416, 421, 433 végétal(e)s), vegetal (GB), 55, 91, 213, 217-219, 236, 251, 278, 297, 363, 369, 379, 381 veine(s), 219, 331, 353, 358, 359, 363, 406 vélature(s), 363 Venise, 412, 414, 417, 418, 419 verdâtre, 216, 225, 363 Vergina, 195, 202, 207, 209, 217, 237, 238, 280, 288, 297-299, 302, 304, 305, 307, 379, 381 vermeil(le)(s), 411 verre(s), glass(es) (GB), 20-23, 27, 40, 49, 184, 211-240, 254, 263, 267, 268, 271, 274, 281, 306, 356, 362, 363, 375, 443, 465 Verrès, 358 verrier(s), verrière(s), 211, 214, 220, 223, 226 vert(e)(s), 9, 57, 143, 152, 157, 159, 197, 210, 211, 213, 214, 218-222, 224, 227, 267, 268, 296, 334, 336, 361, 363, 403, 405-407, 409, 410-419, 433, 453, 460-465 bleu-vert, 54, 55, 215, 218, 221, 223-225 émeraude, 220-224 jaune-vert, 221, 222 olive, 220 vert-bleu, 221-223, 271 vert-jaune, 216, 220, 227 vert paon, 221, 222 vestige(s), 9, 23, 28, 131, 143, 145, 146, 148, 149, 152, 154, 157, 161, 162, 165, 245, 246, 274, 281, 389, 399, 401 vestimentaire(s), 282-284, 287, 289, 290, 451, 460 Vestorius, Vestoria (gens), 15, 16, 25, 27 vêtement(s), 49, 51, 53, 54, 56, 60, 65, 66, 67, 68, 69, 71, 72, 73, 74, 77, 88, 159, 163, 279-292, 334, 359, 398, 399, 401, 426, 427, 428, 435, 440, 445, 447, 448, 457-459, 463, 466 vidéomicroscope(s), vidéomicroscopie(s), videomicroscopy (GB),143-147, 149, 150, 154, 155, 160, 161, 164, 389, 395, 396, 399, 401 villa(s), 243 Getty Villa (Malibu), 181 Villa de Garrissou (Béziers), 407
Villa Hadriana (Tivoli), 407 Villa Médicis (Rome), 413 Villa des Mystères, (Pompéi), 355, 357, 364, 365 Villa de P. Fannius Synistor (Boscoreale), 351, 355, 358, 363 Villa de Poppée (Oplontis), 347, 348, 350, 351, 353, 354, 356, 360-363 village(s), 310, 321, 323, 336, 337, 338, 341, 342, 343, 409, 449, 453, 459, 466 vin(s), 27, 75, 78, 193, 288, 359 vinaigre(s), 253 Vincent de Beauvais, 408 violacé(s), 54, 55, 148, 149, 279, violet(te)(s), 37, 39, 42, 47, 54, 55, 57, 148, 159, 166, 197, 214, 215, 219, 220-222, 224, 227, 239, 250, 278, 288, 289, 332, 360, 362, 369, 370, 407 violette(s) (fleur), 251 Virgile, Virgil (GB), 195, 197, 371, 375 virtuosité(s), 9, 143, 163, 271, 440 visage(s), 165, 191, 207, 210, 243, 244, 249, 254, 326, 331, 430-432, 438, 439, 443 visible(s), 185-210 visibilité(s), 189, 430, 438, 439, 440, 443 vitre(s), 213, 225 Vitruve, 16, 25, 27, 189, 251, 252 vivant(e)(s), 200, 206, 208, 306, 308, 309, 328, 409, 427, 428, 431, 432, 436, 444 vœu(x), 291, 447-449, 451, 452, 455-458, 462, 464 voile(s), 198, 322, 359, 449, 452, 454, 460, 464 voilé(e)(s), 207 Volos, 244, 246 Volumnii (tombe des), 331 volute(s) (œil de), 305, 362 voûte(s), 22, 202, 299, 305, 309, 310, 313, 319, 320, 326, 327, 334, 337-339, 343 voûté(e)(s), 28, 310, 324, 336 Vulci, 169, 170, 172, 177, 178, 204, 205, 209 Wadi Natrun, 213, 214, 226 white, 39, 99, 101, 104, 105, 107, 110-112, 133, 134, 140, 174, 175, 181, 235, 236, 241, 317, 369, 371-375, 378, 379
506
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
woad plant(s), 43 workshop(s), 13, 102, 107, 110, 113, 137, 169, 175, 179 Xénocrate d’Athènes, 187, 188 Xénophane de Colophon, Xenophanes (GB), 283, 284, 286, 369, 370 Xénophon, 92, 244, 284, 286 Yakinthon, 38 Yankovo, 326, 343
yellow, 39, 101, 110-112, 128, 130, 144, 172, 174, 175, 220, 370 yellowish, 42 yeux, 165, 191, 210, 279, 305, 322, 432, 438, 439, 441, 443, 444. Voir aussi œil Zeus, 107, 195-199, 289, 299, 331 Zeuxis, 188, 189, 191, 287, Zigzag, 136, 141, 150, 194, 360 zodiaque(s), 408
TABLE DES MATIÈRES
Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
8
Introduction (Ph. Jockey) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
9-11
ENTRER EN MATIÈRES : TECHNIQUES DE FABRICATION, PRODUCTION, ÉCONOMIE DE LA COULEUR Laëtitia Cavassa, La production du bleu égyptien durant l’époque hellénistique et l’Empire romain (IIIe s. av. J.-C.-Ier s. apr. J.-C.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
13-34
Zvi C. Koren, Scientific Research on Purple Mollusc Pigments on Archaeological Artifacts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
35-47
Dominique Cardon, Witold Nowik, Adam Bülow-Jacobsen, Renata Marcinowska, Katarzyna Kusyk, Marek Trojanowicz, La pourpre en Égypte romaine. Récentes découvertes, implications techniques, économiques et sociales . . . . . .
49-79
Véronique Chankowski, Un marché de la couleur ? Quelques considérations sur les enjeux économiques de la polychromie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
81-94
ARTS POLYCHROMES ET DORÉS, SYNTHÈSES ET ÉTUDES DE CAS Elena Walter-Karydi, The Emergence of Polychromy in Ancient Greek Art in the 7th Century BC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
95-114
Georgia Kokkorou-Alevras, The Painted Decoration on the Dress of the Nikandre Statue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115-130 Bernhard Schmaltz, The Acropolis Kore 682 from Athens. An Approach to the Reconstruction of a Greek Late Archaic Sculpture of a Girl . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131-142 Brigitte Bourgeois, Philippe Jockey, Ombres et Lumières. La sculpture hellénistique polychrome et dorée de Délos : bilan méthodologique et historique . . . . . . . . . . . . . . . . . 143-167 Stephan Steingräber, Greek Contributions in Tomb Paintings in Etruria and Southern Italy: Colours, Painting Techniques, Workshops and Iconography . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169-184 Agnès Rouveret, Les couleurs du visible et de l’invisible dans la peinture grecque et étrusque (V e-IV e s. av. J.-C.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185-210 Marie-Dominique Nenna, Le verre incolore dans l’Antiquité : de l’histoire de la production à l’histoire du goût . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211-227 Despina Ignatiadou, A Lidded Glass Phiale with Reverse-Painted Decoration . . . . . . . . 229-240
508
LES ARTS DE LA COULEUR EN GRÈCE ANCIENNE… ET AILLEURS
Vassiliki Adrymi, Elissavet Nikolaou, Stamatia Alexandrou, Sofia Kravaritou, Philippe Walter, Elisabetta Welcomme, Elsa Van Elslande, Georges Tsoucaris, Les flacons à fard à l’époque hellénistique. Exemples de la région de Thessalie . . . . . . . . 241-261 Nikolaos Tolis, L’utilisation d’or dans les mosaïques de pavement hellénistiques de la Maison de Fourni à Délos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263-274
RÔLES, VALEURS ET SYMBOLES DES COULEURS ET DE L’OR Adeline Grand-Clément, Les noces de l’or et de la pourpre dans le monde grec. À la recherche du juste accord chromatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 275-292 Anne-Marie Guimier-Sorbets, Couleur, volume, illusion, de la Macédoine à Alexandrie. Structure, éléments constructifs et décor architectural à l’époque hellénistique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293-315 Julia Valeva, La couleur dans les tombeaux thraces : illusion et symbole . . . . . . . . . . . . . . . 317-344 Maud Mulliez, Gestuelle et couleur au service du trompe-l’œil dans les peintures pariétales de la fin de la République romaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 345-366 Paolo Liverani, Reflections on the Colour Coding in Roman Art . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 367-385 Fabricia Fauquet, Philippe Jockey, La restitution des couleurs. Des réalités antiques à l’imagerie numérique contemporaine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 387-402
Pascal Julien, De Théophraste à Poliphile : les marbres, fondements d’une vision polychrome de l’architecture antique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 403-422 Ivonne Manfrini, Iconicité du corps : l’efficacité de la couleur. Le laboratoire de l’histoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 423-444 Nour Farra-Haddad, S’habiller aux couleurs des saints : démarches votives et culte des saints au Liban . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 445-466
Index . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 467-506 Table des matières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 507-508
Cet ouvrage a été imprimé et relié en avril 2018 par Corlet Imprimeur 14110 Condé-sur-Noireau Dépôt légal : mai 2018 N° d’imprimeur : 196254 Imprimé en France