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French Pages 460 [472] Year 1965
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE SOUS LA MONARCHIE AU XVIIIe SIÈCLE
ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES
-
SORBONNE
SIXIÈME SECTION : SCIENCES ÉCONOMIQUES ET
SOCIALES
LIVRE ET SOCIETES ÉTUDES ET MÉMOIRES POUR
SERVIR
A
DE LA CIVILISATION
L'HISTOIRE DU
LIVRE
II
PARIS
MOUTON & MCMLXV
CO
LA HAYE
ROBERT
E5TIVAL5
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE SOUS LA MONARCHIE AU XVIII e SIÈCLE
PARIS
MOUTON & CO MCMLXV
LA HAYE
CET PUBLIÉ
OUVRAGE AVEC
LE
A
ÉTÉ
CONCOURS
DU C E N T R E N A T I O N A L
DE
LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE
© i f i j , Mouton & Co, and École Pratique des Hautes Études Printed in France
A Monsieur le Professeur Ernest LABROUSSE en témoignage de gratitude
« S'il fallait à tout prix choisir dans cette large province d'Histoire où presque tout est encore à faire, entre le régulier et le fortuit, l'essentiel et l'accidentel, le répété et le singulier, disons-le sans mérite : c'est bien le répété qu'on choisirait. C'est le répété dans l'espace et dans le temps qu'on étudierait de préférence : d'abord parce que le répété a ici plus de valeur humaine que l'accidentel... » C.-E. L A B R O U S S E , La crise de l'économie française à la fin de l'Ancien Régime el au début de la Révolution, p. 171.
Cet ouvrage a été présenté comme thèse de doctorat de I I I E cycle en Histoire, à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Paris, et acceptée comme thèse complémentaire de doctorat ès lettres le 14 juin 1962. Le jury était composé de MM. les professeurs Labrousse, Leuilliot et Goubert.
INTRODUCTION
Comme toute œuvre ce travail a son origine, son histoire, sa situation parmi d'autres, dans une perspective personnelle de recherches. N'en pas parler serait laisser dans l'ombre ce qui, pour être anecdotique et non essentiel, n'en est pas moins utile. Tout problème possède en lui-même les germes de son examen, de son développement, qu'il faut vivre d'abord à tâtons et plus ou moins confusément, jusqu'au jour où, enfin, l'analyse terminée, on prend synthétiquement conscience de son ensemble et de ses parties. Comme le disait Pascal, c'est à la fin d'une œuvre qu'on sait par quoi on aurait dû commencer. Notre recherche sur le recensement de la production imprimée en France peut tenir en quatre parties : son origine ; les phases de la recherche ; l'élaboration des œuvres ; les perspectives de dépassement. Lorsque, voici plus de dix ans, M. Zoltowski nous avait initié à la statistique bibliographique, nous nous étions immédiatement posé la question des sources. Il nous semblait que les données accessibles dont M. Zoltowski se servait, celles de la Bibliographie de la France, devaient, comme il le pensait lui-même 1 , être critiquées. Ce fut l'origine de notre recherche. Le problème 1. « La Bibliographie de la France représente-t-elle, tout au long du xix" siècle et de la première moitié du x x e un recensement complet de la production française ? A la rigueur non. Et ce non n'est pas le même pour toutes les périodes. Encore une fois, il faudra toute une étude longue et minutieuse et presque irréalisable dans sa totalité, pour établir quels sont les livres qui manquent dans les différentes périodes et à quel pourcentage les évaluer. Il faudra aussi étudier très précisément les écarts entre les registres du Dépôt Légal et la publication de la Bibliographie de la France. » « Les Cycles de la Création Intellectuelle et Artistique » par M . Z O L T O W S K I , Année Sociologique 1952.
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LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
posé était celui de la statistique bibliographique de la France. La recherche comporta deux phases successives, inductivement dépendantes. Dans une première période nous en restâmes au problème posé dès l'origine : la critique des données de la Bibliographie de la France et par suite le recensement des imprimés des xix® et xx® siècles. Nous distinguâmes chronologiquement trois phases. Il y a d'abord la réalité concrète : les différents ouvrages publiés chaque année en France. C'est un en soi inconnu dans son ensemble. Il y a ensuite le Dépôt Légal. Cette institution qui remonte à François I e r oblige les producteurs, imprimeurs, libraires, auteurs, à déposer un ou plusieurs exemplaires de leurs publications. Ainsi par son principe même, les registres du Dépôt Légal constituent la Bibliographie Nationale Française courante la plus exacte. Enfin la troisième phase est faite, à partir de 1811-1812, de la Bibliographie de la France, Journal de la Librairie, qui offre la liste des ouvrages déposés, classés soit dans l'ordre chronologique du Dépôt, soit dans l'ordre alphabétique d'auteurs et de matières. Théoriquement donc, le recensement des ouvrages imprimés en France, aux x i x e et x x e siècles, présentés par la Bibliographie de la France, correspond à la totalité de la production imprimée. Toutefois, comme le disait Simiand, dans son ouvrage intitulé La Statistique et l'Expérience, il n'est aucune raison de considérer a priori une source comme valable parce qu'elle est officielle. La critique de la Bibliographie de la France et le recensement de la production imprimée de cette période devaient donc être tentés. Deux écarts étaient possibles : la différence entre la statistique du Dépôt Légal et celle de la Bibliographie de la France; celle qui pouvait exister entre la production réelle et la statistique du Dépôt. La première supposait l'étude comparée des registres du Dépôt Légal du x i x e et du x x e siècles et de la Bibliographie de la France. La seconde, plus approximative, comportait deux études particulières : celle des réclamations du Dépôt Légal et l'étude comparée des statistiques des autres bibliographies courantes et de celle du Dépôt. Les recherches nous permirent de constater que les deux écarts possibles étaient réels : d'une part, le Dépôt Légal est incomplet et particulier à certaines catégories d'ouvrages ; d'autre part, la production déposée est loin d'être annoncée en totalité, et l'écart est quantitativement important. La première phase de notre recherche s'achevait, la seconde allait commencer. En effet, dans le courant de notre travail, nous en vînmes à penser que le recensement de la production bibliographique ne devait pas s'en tenir simplement aux x i x e et x x e siècles. Le Dépôt Légal concernait aussi la période révolutionnaire et, bien avant, celle de l'Ancien Régime. Il y avait donc intérêt à remonter dans le temps et ceci d'autant plus que, comme le disait M. Zoltowski, «les xvi e ,
INTRODUCTION
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x v n e et x v n i e siècles demeurent toujours dans l'imprécision ». Nous en arrivâmes donc à imaginer une étude générale de la statistique bibliographique des livres imprimés en France du xvi e siècle à nos jours. L'examen de la période antérieure au x i x e siècle devait à son tour se subdiviser chronologiquement en deux parties. D'abord nous nous mîmes en quête des Registres du Dépôt Légal de la période révolutionnaire et de celle de l'Ancien Régime, lesquels, pour l'essentiel, sont conservés au Département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale. Leur étude, devait nous obliger à élargir notre recherche par la découverte de tous les registres bibliographiques officiels de l'Ancien Régime. Nous nous aperçûmes que les Registres du Dépôt ne constituent qu'une partie de ces bibliographies concernant les livres publiés. La production des livres, de la naissance de l'imprimerie à la Révolution, n'était pas libre comme elle le fut depuis. Une administration, celle de la Librairie, fut chargée de la censure notamment aux x v n e et x v m e siècles. Un grand nombre des registres bibliographiques qu'elle fut amenée à composer nous sont parvenus. Ils intéressent les permissions d'imprimer et la Police des livres après l'impression. Leur étude s'imposait donc également. Ainsi s'achevait la deuxième phase de notre recherche. Il ne restait plus qu'à déterminer les différents travaux qu'elle permettait et à passer ensuite à leur élaboration. La troisième période commençait. La détermination des sujets dépend de trois éléments : la nature des matières, la chronologie, et, principalement, le volume des sources. Ainsi fûmes-nous contraint de séparer la statistique bibliographique de l'Ancien Régime de celle des périodes révolutionnaire et moderne. De même, étant donné les développements auxquels la première partie nous obligeait, nous fûmes conduit à étudier séparément le Dépôt Légal de 1537 à 1791 et la Statistique Bibliographique de la France pour la même période. Ces trois sujets étant délimités, il restait à les ordonner dans un plan d'élaboration. Nous choisîmes l'inverse du plan expérimental de la recherche. De la démarche inductive nous en vînmes, pour la réalisation, à un plan déductif qui avait l'intérêt de respecter l'ordre chronologique de la matière et, par suite, de prendre le problème de la statistique des imprimés en France à sa source. Comme le Dépôt Légal était antérieur, c'est par lui que nous décidâmes de commencer. Ce travail a été publié en 1961. Après quoi il convenait d'examiner le problème général de la statistique bibliographique de la France sous l'Ancien Régime. C'est l'objet du présent travail. Enfin celui-ci sera poursuivi par l'étude du Dépôt Légal et de la Statistique bibliographique de la France de 1793 à nos jours. Ces trois ouvrages, dont deux sont aujourd'hui achevés et le
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
troisième entamé, nous p e r m e t t r o n t de répondre à la question fondamentale que nous nous étions posée il y a plus de dix ans et dont on comprend la portée : on saura dorénavant ce que sont, ce que valent, ce q u ' a p p o r t e n t sur le plan de la production générale, les Bibliographies courantes de la France, publiques et privées, manuscrites et imprimées. Nous pourrons désormais passer du problème technique des sources à celui, sociologique, de leur exploitation, et participer à l'étude de la dynamique de la culture, principalement dans la période moderne, en France. E n ce sens nous rejoindrons des préoccupations autres que nous avons commencé d'approfondir parallèlement. E n ce point du siècle où bien des vieilles choses finissent et où d'autres commencent, sur le plan esthétique, l'artiste éprouve le besoin de connaître l'évolution de la pensée artistique, littéraire, scientifique, afin d'abord de pouvoir la comprendre et d ' y trouver sa propre place et de prolonger ensuite le savoir par l'action. Mais il nous apparaît depuis longtemps impossible d'atteindre ce but, comme cela s'est si souvent produit depuis plus d'une décade, à partir d'une méthode a priori et d'une pensée philosophique, voire métaphysique. Il nous f a u t investir le problème d'une manière expérimentale et cela pourra désormais être réalisé, dans les cadres restreints mais possibles que nous nous sommes assignés, avec d ' a u t a n t plus de facilité que nous aurons précédemment assuré la valeur de nos sources statistiques. E t cette intention, nous sommes très profondément reconnaissant à M. le Professeur Labrousse de l'avoir devinée, qui voulut bien écrire dans sa Préface au Dépôt Légal sous l'Ancien Régime, en même temps qu'il nous fixait les cadres et les principes méthodologiques de notre étude, auxquels nous nous sommes efforcé de nous tenir, que nous rêvions d'apporter notre « contribution à une histoire sociologique de la pensée imprimée, qui retracerait, dans une perspective séculaire, la vogue et le déclin ondulants des genres et des thèmes ». Après avoir expliqué l'origine de ce travail et sa place dans la perspective de nos recherches passées et à venir, il convient d'en établir la composition et la situation. La constitution et l'examen de la statistique bibliographique de la France supposaient la recherche, la classification, l'analyse des diverses bibliographies nationales principalement courantes et dans certains cas rétrospectives. Ainsi, à l'étude sociologique, prélude, comme l'indiquait M. le Professeur Labrousse : «l'élaboration des grandes collections bibliographiques ». Celle-ci, à son tour, est une contribution à la bibliographie des bibliographies sous l'angle particulier de la bibliographie générale, nationale, française. Quant à la période, elle dépend et de l'intention primitive et, surtout, des sources rencontrées. Notre projet était d'établir la
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statistique de la p r o d u c t i o n imprimée en F r a n c e sous l ' A n c i e n R é g i m e . Cela e x i g e a i t une é t u d e r e c o u v r a n t trois siècles, de la fin du x v e , d a t e de la naissance de l'imprimerie e t de son i n t r o d u c t i o n en F r a n c e , j u s q u ' à la fin du x v m e e t la R é v o l u t i o n . C e p e n d a n t , il existe t o u j o u r s un é c a r t entre les données désirables et les données accessibles. L e s diverses bibliographies de la F r a n c e de l ' A n c i e n R é g i m e sur lesquelles nous entendions é t a b l i r notre recherche, ne r e c o u v r e n t pas, t a n t s'en f a u t , cette période de trois siècles. N o u s n ' a v o n s p r a t i q u e m e n t q u e peu de choses p o u r le x v i e e t le x v n e siècle. P o u r ce dernier, nous ne disposons que de quelques séries imprécises. C e t t e absence de données suffisantes i n t r o d u i t une conséquence m é t h o d o l o g i q u e . U n e é t u d e de la statistique bibliographique de la F r a n c e pour ces d e u x siècles, ne p o u v a n t se fonder s u f f i s a m m e n t sur les données des bibliographies e x i s t a n t e s , il c o n v i e n d r a d ' é t a b l i r r é t r o s p e c t i v e m e n t une bibliographie n a t i o nale c o u r a n t e à p a r t i r des données des c a t a l o g u e s des diverses bibliothèques e t de quelques bibliographies. C'est, c r o y o n s - n o u s savoir, la longue t â c h e q u ' a entreprise M. H . - J . Martin. De la sorte, e t bien que notre i n v e s t i g a t i o n statistique s'étende s o m m a i r e m e n t , soit a v a n t , sur quelques décades du x v n e siècle, soit après, sur le x i x e e t le x x e siècle, l'essentiel de nos sources et p a r suite de notre recherche, ne concerne que le x v m e siècle monarchique. L a recherche de ces bibliographies, condition de notre é t u d e , d e v a i t a b o u t i r à la d é t e r m i n a t i o n de q u a t r e grandes catégories q u i se s i t u e n t les unes p a r r a p p o r t a u x autres, selon u n p l a n chronologique de l'impression : a v a n t , p e n d a n t , après. Il a été possible de distinguer : a v a n t , les bibliographies des permissions d ' i m p r i m e r ; p e n d a n t e t après, celles de la Police des livres ; après é g a l e m e n t , celles du D é p ô t L é g a l et, enfin, celles de la v e n t e . L ' é t u d e c o m p a r é e de ces q u a t r e séries d e v a i t conduire à une classification selon l'intention ou l'organisme constitutif. L e s trois premières sont le résultat de l ' a c t i o n de l ' É t a t sous les doubles aspects de la Censure et du D é p ô t L é g a l ; la q u a t r i è m e é t a n t au contraire le p r o d u i t de l'initiative privée et commerciale des libraires. C e t t e première classification f o n d a m e n t a l e se superpose à une autre, formelle. E n effet, ces bibliographies n ' o n t pas été composées à p a r t i r du m ê m e procédé. L e s trois premières, officielles, sont manuscrites, la q u a t r i è m e est imprimée. Ainsi les séries de registres de permissions, de la Police des livres et du D é p ô t , constit u e n t la bibliographie m a n u s c r i t e et officielle de la F r a n c e , e t les périodiques, la bibliographie imprimée e t privée, si l'on e x c e p t e , c o m m e nous aurons l'occasion de le v o i r , le Journal de Paris q u i f u t le premier essai m o m e n t a n é à la fin de l ' A n c i e n R é g i m e , de Bibliographie de la France - Journal de la Librairie. C ' e s t donc selon ces distinctions que nous a v o n s dû composer la partie de c e t
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LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
ouvrage consacrée à l'analyse des Bibliographies générales et nationales courantes et rétrospectives de la France de cette période. A son tour cette élaboration des bibliographies françaises devait être complétée par une étude de l'organisation de la production des livres en France sous l'Ancien Régime. Sans doute, l'examen des bibliographies de la vente conduisaitil déjà à des considérations générales sur l'histoire de la bibliographie imprimée nationale. Toutefois celle-ci débordait à peine de l'analyse de ces périodiques. Il en fut tout autrement des bibliographies manuscrites et officielles : elles sont en effet le résultat de l'activité de plusieurs administrations, soit étatiques soit professionnelles, qui leur avaient donné naissance et qui, à leur tour, avaient été établies par des règlements. Les bibliographies manuscrites ne pouvaient donc pas être isolées de leur contexte historique. Ainsi à l'étude bibliographique devait préluder une étude de l'organisation administrative de la production des livres sous l'Ancien Régime. Une nouvelle situation s'impose donc. Puisque notre recherche nous a conduit à cette analyse, il convient d'en déterminer la place dans la matière dont elle dépend : c'est-à-dire, comme nous le précisait M. le Professeur Labrousse, par rapport à une « pleine étude du livre ». L'organisation administrative de la production des livres sous l'Ancien Régime ne constitue qu'un des chapitres réduits d'une histoire de l'Imprimerie et de la Librairie. Outre qu'elle est particulière à un pays et à une époque, elle ne se préoccupe directement, ni du problème de la composition du livre par l'auteur, ni de l'impression et de ses aspects techniques, humains, ni du commerce de Librairie, ni même de nombreux aspects de l'intervention de l ' É t a t dont elle fait partie sous les deux angles de la Censure avant, pendant, et après la production, et de la conservation par le Dépôt Légal. D'autre part, si l'étude de l'organisation administrative de la production des livres était indispensable à la connaissance des séries de registres, inversement, l'étude bibliographique devait apporter des éléments très nouveaux à la connaissance du fonctionnement de cette organisation. L'examen des registres, produits du fonctionnement, et qui n'avait pas encore été tenté, devait permettre d'établir l'existence des circuits administratifs des catégories de permissions, de la Police des livres et du Dépôt Légal, bien que, en ce qui concerne ces derniers, ils aient fait l'objet comme on l'a dit déjà d'une étude spéciale, que nous avons seulement complétée, éclaircie et surtout résumée. L a détermination des diverses catégories de bibliographies, précédée d'une connaissance de l'organisation administrative de la production, n'était pas un but en soi. Elles avaient toutes deux pour but d'élaborer la statistique bibliographique de la France,
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principalement pour le x v m e siècle. Celle-ci, évidemment, est dépendante des classifications effectuées et par suite de la chronologie de la production. Il a donc été possible, d'abord, d'établir la statistique des permissions données avant l'impression, et ceci, selon les diverses catégories d'autorisations, envisagées isolément ou globalement, et selon les diverses phases des circuits administratifs. Grâce à ces séries, on a pu réaliser une étude comparée qui devait éclaircir le fonctionnement de l'administration des permissions, et l'importance et l'évolution de la production interdite, soit en particulier selon les diverses autorisations, soit généralement en totalité. Ainsi, cette première partie de l'étude offre trois résultats : connaissance des permissions ; du fonctionnement de l'administration ; de l'évolution de la Censure royale avant l'impression. On a pu, ensuite, grâce aux registres de la police des livres imprimés, établir la statistique soit des livres nouveaux soit des livres arrêtés et ceci aux diverses étapes du circuit administratif, comme d'établir l'importance et l'évolution de la censure royale en ce qui concerne les livres imprimés et mis en vente. Les registres du Dépôt Légal avaient déjà été classés dans notre précédente étude. Ils ont été exploités cette fois-ci et ont fourni la statistique des livres imprimés et déposés, chez les différents destinataires, ce qui a permis par l'étude comparée, d'éclaircir le fonctionnement du Dépôt ; l'importance relative de la production non déposée en fonction des registres de réclamations ; la production des livres en France par addition des livres déposés et du nombre de livres qui ne l'avaient pas été. Enfin les bibliographies imprimées ont fourni la statistique de la production des livres publiés et mis en vente. Par la suite, l'étude comparée des diverses séries de statistiques, des permissions, de la Police des livres, du Dépôt Légal et des bibliographies imprimées a fixé, quand elle était réalisable, l'importance relative de chacune d'elles. Elle a éclairci le fonctionnement du Dépôt, l'importance générale de la censure avant et après l'impression. Elle a établi la statistique bibliographique générale de la France du x v m e siècle. Après avoir examiné la composition de ce travail, il convient d'en fixer la portée en le situant par rapport aux disciplines dont il dépend. Tout d'abord c'est une étude historique puisque pour une bonne part il décrit des faits particuliers. En ce sens il contribue à une meilleure connaissance de l'histoire de l'imprimerie et de la librairie, à une détermination précise des Bibliographies Nationales Françaises de la période. Même la statistique bibliographique est historique sous bien des angles. Mais ce travail est aussi sociologique. La statistique bibliogra-
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
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phique de la France, sous la Monarchie, au x v m e siècle, permet d'appréhender l'évolution générale de la pensée collective française, à travers la période classique, sous sa forme imprimée. En ce sens, c'est donc, par rapport aux diverses disciplines de la sociologie, une contribution à la sociologie de la connaissance, et dans celle-ci, plus particulièrement à l'étude de la dynamique sociale, puisque l'observation est historique, suivie, et qu'elle vise entre autres à déterminer les différents mouvements et cycles qui animèrent cette période. Par ailleurs, cette contribution à l'étude de la dynamique culturelle est menée d'une manière particulière grâce à l'indice statistique bibliographique, et cela lui donne, dans cette branche, une place qu'il faut préciser. Dans l'analyse de la structure de la réalité socio-culturelle, M. Sorokin avait distingué trois éléments : les individus ; les subjectivités ; les expressions de la subjectivité qu'il appelle véhicules. Le livre est l'un d'entre eux et c'est par rapport au langage qu'il faut situer notre étude. L'évolution générale et quantitative de la pensée française n'est pas atteinte à partir de l'expression fugitive de celle-ci, de ses diverses formes et spécialement du langage parlé dont relève la tradition orale. C'est grâce au langage écrit et seulement à l'une de ses subdivisions que nous avons pu l'appréhender. En effet, nous avons écarté les objets, produits de l'action des hommes, dans lesquels la pensée n'est pas directement inscrite mais seulement déductivement communicable, comme les réalisations des différents arts et métiers. C'est donc seulement à partir de la pensée inscrite, communicable directement, et donc du langage écrit, que nous avons mené notre étude. Là nous avons écarté l'antique manuscrit. Nous ne nous sommes servi que de l'imprimé à partir du moment où celui-ci commence. On a donc évidemment ignoré les moyens plus modernes de la communication inscrite, photo, film, disque. C'est-à-dire que nous avons utilisé le langage écrit typique d'une époque puisque l'imprimé, s'il n'est pas seul, est au moins nouveau. Enfin même dans ces limites elle a encore besoin d'être située. En effet, cette étude de l'évolution quantitative de la pensée française au x v m e siècle, n'est pas la seule recherche de sociologie de la connaissance, de dynamique historique effectuée à partir de l'indice statistique bibliographique, puisqu'elle vient après celles de M. Zoltowski qui nous y avait initié. Elle se distingue des travaux de cet auteur, dans la mesure où elle s'occupe d'une période pour laquelle aucun travail de ce genre n'avait été effectué, et par le seul examen de la production générale sans détermination de la statistique sérielle dont s'est abondamment servi M. Zoltowski. Ces diverses situations successives sont donc extrêmement utiles.
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Outre qu'elles sont nécessaires à la connaissance de notre sujet, elle nous montrent, une fois encore, que l'ampleur de son développement se produit dans les cadres qui, comme pour toute recherche qui se veut sérieuse, restent modestes.
LES SOURCES
L'analyse des sources doit être faite sur les trois plans de l'ouvrage, de la nature des documents, et des collections auxquelles ils appartiennent. Chacun d'eux est indispensable. Il faut, sans aucun doute, savoir où trouver les textes. Il est nécessaire de différencier les manuscrits des imprimés. Mais il est non moins utile, pour la compréhension de leur intervention et de leur rapport, de commencer par les énumérer suivant l'ordre même de l'ouvrage. Les sources dépendent directement de la recherche. C'est donc à celle-ci qu'il faut s'adresser pour les connaître. La statistique bibliographique de la France comprend deux parties essentielles : l'étude des bibliographies, sans quoi la statistique ne saurait être ; ensuite l'exploitation des données de ces dernières, dans un but historique et sociologique. Les sources d'un examen des bibliographies nationales de cette période dépendent de leur nature imprimée ou manuscrite. Les bibliographies imprimées devaient nous conduire à plusieurs problèmes et partant à plusieurs groupes d'ouvrages. La connaissance de la Bibliographie s'imposait pour plusieurs raisons. Une matière particulière, d'abord, ne saurait être vraiment connue si elle n'est auparavant rattachée à la discipline générale dont elle dépend. La recherche des bibliographies de la France supposait donc une étude préalable de la bibliographie. Celle-ci était d'autant plus nécessaire que le choix des bibliographies générales et nationales parmi toutes les autres supposait l'intervention de plusieurs des critères de classification bibliographique. Enfin cette connaissance devait déborder son cadre traditionnel de science du livre pour envisager celui de la bibliographie comme science annexe de la sociologie et de l'histoire.
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LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
Cette première recherche renvoyait, à son tour, à une étude des bibliographies de bibliographies d'abord, des bibliographies générales nationales de la France, courantes et rétrospectives, depuis la naissance de l'imprimerie jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, ensuite. Enfin ces sources encore générales conduisaient à chacune des bibliographies, et aux différents documents qui pouvaient renseigner sur elles. Les bibliographies de bibliographies nationales ont un inconvénient considérable en ce qui concerne notre période : elles ne mentionnent presque exclusivement que des bibliographies imprimées. Les sources manuscrites, notamment de la censure et du Dépôt Légal, ne sont pas mentionnées. On sait comment l'étude de cette dernière institution, dans sa première phase historique, nous avait conduit à redécouvrir ces documents essentiels. Leur examen introduisait plusieurs recherches, et partant plusieurs séries de sources. Il fallait connaître l'histoire des moyens de reproduction de la pensée humaine afin de situer l'imprimé qui nous occupait ; il était nécessaire d'étudier l'histoire de l'imprimerie pour mettre à sa juste place l'organisation administrative de la censure et du Dépôt Légal, laquelle était à l'origine des séries que nous devions classer, décrire, dépouiller ; il était indispensable d'analyser les règlements et le fonctionnement de cette administration pour comprendre la raison, le contenu de nos registres. Les documents qui servirent sont ou imprimés ou manuscrits. Cette recherche historique renvoyait à une étude des registres lesquels sont conservés, pour l'essentiel, au Département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale. L a deuxième partie de ce travail concernait l'exploitation des données statistiques fournies par la bibliographie. Un certain nombre de problèmes devaient donc être examinés concernant successivement, la sociologie et l'histoire, la sociologie de la connaissance, la statistique historique, économique, bibliographique et ses diverses méthodes, l'évolution de la pensée française enfin. Les ouvrages qui ont trait à ces matières sont imprimés. Ces diverses sources ne sont pas toutes nouvelles pour nous. E n effet notre recherche, nous l'avons dit, s'insère dans une perspective de travaux dont l'un est terminé et publié. L'étude du Dépôt Légal sous l'Ancien Régime nous avait obligé à l'analyse des diverses collections de manuscrits de la Censure et du Dépôt de cette période. Afin d'éviter des répétitions nous ne ferons que les résumer ici. P a r contre, tout ce qui concerne l'étude historique de l'imprimerie, comporte l'analyse de sources que nous n'avions pas encore analysées. Cet examen sommaire des sources, en fonction des nécessités
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SOURCES
de notre recherche, doit être complété par une classification selon la nature imprimée ou manuscrite des documents, puis selon les collections auxquelles ils appartiennent. I. LES SOURCES MANUSCRITES Elles concernent soit les registres bibliographiques soit le fonctionnement de la Librairie. Elles contiennent le nombre le plus important de Bibliographies de la France de la période : celles qui sont officielles et écrites. Par ailleurs on y trouve les matériaux d'une histoire de la Librairie qui ont déjà été plus ou moins exploités dans différentes études imprimées dont la lecture fut un complément indispensable. Enfin l'intérêt de ce travail dépend pour beaucoup du volume, du contenu, des points de vue de ces documents conservés dans plusieurs collections. A.
LE
DÉPARTEMENT
DES
MANUSCRITS
DE
LA
BIBLIOTHÈQUE
NATIONALE.
L'essentiel des sources manuscrites est conservé à la Bibliothèque Nationale. Plusieurs administrations et quelques personnes s'occupaient, sous l'Ancien Régime, des affaires de la Librairie. Les premières composèrent des registres. La direction de la Librairie pour toutes les questions réglementaires et notamment pour la Censure avant l'impression. Elle délivrait, en effet, les permissions. La Chambre Syndicale des Libraires de Paris fit de même. Elle devait intervenir en fin de circuit de délivrance des Privilèges et des Permissions Tacites pour les enregistrer. D'autre part c'était elle, seule, au début, aidée et surveillée, au x v m e siècle, par les Inspecteurs de la Librairie, qui assurait la Censure des livres pendant et après l'impression. Par ailleurs, elle recevait le Dépôt Légal, et elle dut aussi servir d'intermédiaire entre les imprimeurs et les autres dépositaires, à partir de 1704. Chaque fois elle fut conduite à constituer des Archives. Ce fut aussi le cas de la Bibliothèque et du Cabinet du Roi en tant que dépositaires. Le problème des Archives de ces administrations se posa le jour ou la Révolution les supprima. Le libéralisme économique anéantissait les corporations, donc la Chambre Syndicale des Libraires. Celle-ci perdit ses bureaux, et le 2 mars 1791, ses biens furent confisqués. Le libéralisme intellectuel introduisaitla liberté d'expression. La Censure des livres devait donc cesser et, par suite, le Bureau de la Librairie. Le Dépôt Légal était considéré comme une double contrainte économique et intellectuelle. La loi révolutionnaire
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BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
l'interdit. Nous avons analysé dans notre précédent travail consacré au Dépôt Légal sous VAncien Régime, au Chapitre VI, ayant trait à la fin du Bureau de la Librairie, l'évolution rapide des esprits et des décisions en cette matière, entre 1789 et 1791. Dès lors les Archives, seuls restes de l'ancienne organisation, devaient subir diverses tribulations jusqu'à nos jours. Tout d'abord il semble que l'homme chargé de cette affaire fut le citoyen Camus. Une partie principale des Archives de la Chambre, et probablement une bonne part de celles du Bureau de la Librairie échouèrent aux Archives Nationales où elles furent confondues. Les premières donnèrent leur nom à l'ensemble. Par ailleurs, une autre partie des Archives du Bureau, jointes à celles de l'Inspection de la Librairie, fut momentanément recueillie puis classée par le plus illustre des Inspecteurs, alors à la retraite, l'Inspecteur d'Hémery. Celui-ci, probablement vers 1792 et peut-être pour des raisons de sécurité personnelle, si l'on en croit Coyecque, s'en dessaisit en les vendant à l'ancien Directeur de l'Imprimerie Royale, Anisson Duperron, qui y ajouta quelques manuscrits, et qui donna son nom à l'ensemble. Cette collection Anisson Duperron rejoignit, à la Bibliothèque Nationale, les Archives de la Chambre qui y furent déposées par Camus le 21 mars 1801. La pérégrination d'une partie essentielle des Archives jusqu'à leur lieu définitif de conservation avait donc duré une dizaine d'années. Toutefois il est probable qu'une certaine confusion dut avoir lieu au Département des Manuscrits, au début du premier Empire. Il est possible qu'une partie des Archives de la Bibliothèque, et notamment celles du Dépôt Légal, ait été mélangée avec celles des Archives de la Chambre. Par la suite, lors des classifications, on sépara les Archives du Département des Manuscrits des Collections extérieures, de la Chambre et d'Anisson-Duperron. Ces dernières furent classées dans le Fond Français. Plus tard, on fit des inventaires de chacune d'elles. Nous possédons ainsi : celui d'Omont pour les Archives de la Chambre, celui de Coyecque pour la Collection Anisson-Duperron. Il faut ajouter, en ce qui concerne ce dernier, qu'on trouve à la fin un premier supplément qui renseigne sur les différents autres registres éparpillés dans le Fond Français et dans les Nouvelles Acquisitions. Plus près de nous enfin, M. Bondois, dans son Inventaire sommaire des Archives du Département des Manuscrits, dans la partie consacrée à l'Ancien Régime, réintroduisit les pièces diverses et les manuscrits qui provenaient du Département et qui avaient été introduits, autrefois, dans les Archives de la Chambre. C'est le cas notamment des deux registres aujourd'hui catalogués Archives 35 et Archives 36. Ainsi, dans l'état actuel des classifications, les Archives du Bureau se trouvent et dans les Archives de la Chambre et dans la Collection
SOURCES
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Anisson-Duperron ; une partie des Archives de la Chambre dans la collection qui porte son nom ; les Archives de l'Inspection dans la Collection Anisson-Duperron ; les Archives du Dépôt Légal de la Bibliothèque du Roi dans les Archives du Département des Manuscrits et, pour peu de choses, dans les Archives de la Chambre. Enfin il faut ajouter, puisqu'une partie de notre recherche concernera la statistique du Dépôt Légal révolutionnaire, que ses sources se trouvent également dans les Archives du Département des Manuscrits, mais dans le second chapitre, celui de la « Période Révolutionnaire et Impériale ». Toutes ces séries de registres ont été examinées pendant les années de préparation de ce travail. Il faut leur ajouter, outre divers registres isolés, l'examen de la Collection Delamare qui, concernant la Chancellerie, pouvait comporter des renseignements sur la Librairie. B. LA RÉGIE DU DÉPÔT LÉGAL.
Les sources manuscrites concernant la Librairie, conservées ailleurs qu'au Département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale et de la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris sont rares et généralement de peu d'importance. C'est entre autres le cas de deux petites plaquettes du Dépôt Légal de l'Ancien Régime égarées parmi les registres du Dépôt moderne dans les Archives de la Régie du Dépôt Légal à la Bibliothèque Nationale 1 . C. LA BIBLIOTHÈQUE HISTORIQUE DE LA VILLE DE PARIS.
Une partie importante, sinon essentielle, dont les registres bibliographiques, des Archives de la Chambre Syndicale était parvenue à la Bibliothèque Nationale. Toutefois, une fraction de celles-ci semble avoir échappé à la confiscation. Elle se trouve aujourd'hui conservée à la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris sous la cote 10414. On y trouve notamment dix cartons remplis de pièces diverses tant imprimées que manuscrites concernant les principaux chapitres des affaires de la Librairie de l'Ancien Régime. Dans le troisième carton figurent plusieurs documents sur la Police et le Dépôt Légal depuis le Règlement de 1785 jusqu'à la Révolution. Les septième et huitième se rapportent partiellement aux privilèges généraux, aux usages des diocèses, aux arrêts de suppression des livres imprimés. Cependant, on ne trouve aucun registre bibliographique et, de plus, les indications fournies tant 1. En dernière information elles auraient été reclassées dans les collections du département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
par les imprimés que par les manuscrits sont pour la plupart, les mêmes que celles des diverses collections de la Librairie de cette période. D. LES B I B L I O T H È Q U E S
DE LA SORBONNE
ET
DE
LA
FACULTÉ
DE
MÉDECINE.
Le fonctionnement de la Censure dans la période antérieure à l'intervention du Pouvoir Royal devait nous faire rechercher les Archives de la Faculté de Théologie lesquelles furent dispersées dans les collections de la Bibliothèque de la Sorbonne et dans celles de la Faculté de Médecine. Il existe en effet, principalement à la Sorbonne, quelques documents manuscrits sur la Librairie. Nous n'avons trouvé aucun registre de Permissions. E. L A B I B L I O T H È Q U E D U CERCLE D E L A L I B R A I R I E .
On trouve, à la Bibliothèque du Cercle de la Librairie, quelques pièces sur la Librairie de l'Ancien Régime, et notamment un fascicule de la Bibliographie Française el Latine de Paris qui nous a été obligeamment communiqué par Mademoiselle de Buzareingues. F. LES A R C H I V E S
NATIONALES.
Les Archives Nationales conservent des collections importantes de documents concernant la Librairie et le Dépôt Légal de la Révolution, de l'Empire et du x i x e siècle, principalement dans la Série F 18. Par contre, pour la période de l'Ancien Régime, on découvre peu de choses. La raison en est simple. L'essentiel, les Archives de la Chambre, qui se trouvaient àl'origine aux Archives Nationales, furent déposées par le citoyen Camus à la Bibliothèque Nationale. Ce ne pouvait donc être que quelques oublis, ou des pièces à l'origine des documents modernes qui devaient être conservés aux Archives Nationales. C'est le cas notamment des séries suivantes : F 18 Imprimerie et Librairie I Répertoire ancien V Grande Chancellerie, Prévoté et Requestes de l'Hôtel Conseils A D Bibliothèque administrative ; collection Rondonneau A D V I I I Instruction publique.
et
II faut cependant mentionner à nouveau que dans la série V sous la cote V I 549-553, on trouve une collection de documents sur la fin de la Direction de la Librairie qui nous a servi dans notre précédente étude.
17
SOURCES G. L E S A R C H I V E S D É P A R T E M E N T A L E S E T
COMMUNALES.
L a Librairie sous l'Ancien Régime en Province n'a qu'une importance secondaire. Dans la plupart des villes il n'y avait pas d'imprimeur ou il n'y en avait qu'un seul qui arrivait difficilement à vivre. Dans quelques cités plus étendues comme Lyon, Rouen, Strasbourg, Lille, Nantes, etc., le nombre des Libraires et des Imprimeurs fut toujours restreint par rapport à celui de la Capitale. Toutefois, dans le cours du x v m e siècle des Chambres Syndicales, à l'imitation de Paris, furent instituées. D'autre part, le Pouvoir Royal dans les Provinces recevait les instructions de la Direction de la Librairie. On pouvait donc espérer trouver, dans les Archives Départementales et Communales, en nombre moindre, bien sûr, qu'au Département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale, des pièces diverses concernant la Librairie pré-révolutionnaire. Le dépouillement des Inventaires et les indications gracieuses des archivistes de Province nous permirent d'obtenir la communication aux Archives Nationales de documents intéressants concernant toutes les affaires de Librairie. Mais, à l'exception des documents déjà exploités concernant le Dépôt Légal, nous n'avons trouvé que quelques renseignements utiles sur la Censure, la plupart des autres étant déjà connus par la lecture des collections de la Bibliothèque Nationale.
II. L E S S O U R C E S
IMPRIMÉES
Les sources manuscrites concernaient le fonctionnement de la Librairie sous l'Ancien Régime et comprenaient les Bibliographies officielles de la France. Les sources imprimées, moins originales dans l'ensemble, se rapportent aux diverses matières dont ce travail relève. Elles seront classées dans l'ordre déductif : sociologie, statistique, bibliographie, librairie, histoire de la Littérature en France aux x v n e et x v m e siècles. A. OUVRAGES DE
SOCIOLOGIE.
Notre étude n'était pas simplement historique. La recherche quantitative et cyclique de la pensée imprimée française aux x v n e et x v m e siècles, comme son élargissement aux x i x e et x x e siècles, concernait aussi la sociologie de la connaissance. Toute une littérature, depuis longtemps, s'était donc également imposée à nous. D'ordre général d'abord et historique, sur la formation de la sociologie comme science depuis la philosophie politique
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
des anciens jusqu'aux recherches spécialisées modernes, en passant par la phase de constitution du x i x e siècle. De même, parmi les différentes branches de la sociologie, avons-nous plus spécialement examiné les ouvrages relevant de la sociologie de la connaissance, de la culture, depuis les travaux de Durkheim et Mauss, jusqu'à ceux de A . Sorokin. B.
OUVRAGES SUR LA
STATISTIQUE.
L a recherche, la classification des diverses bibliographies générales de la France, la détermination et l'examen de la statistique bibliographique de notre pays sous l'Ancien Régime, exigeaient l'étude de la statistique, en tant que méthode d'investigation sociologique. Les publications sur cette matière sont nombreuses. Aussi bien avons-nous cherché à prendre connaissance de l'évolution historique de la méthode depuis la simple description de l'État jusqu'à sa constitution en méthode d'investigation sociologique, depuis Sansovino jusqu'à Bowley en passant par Achenwall, pour citer quelques noms. Après quoi nous avons examiné ses diverses applications modernes en biologie, en agronomie, en psychologie appliquée, dans les techniques industrielles, en histoire économique.. La compréhension claire de l'application de la méthode statistique sur le plan de la bibliographie ne nous paraissait pas pouvoir être obtenue sans ce double examen historique. Après quoi nous avons entrepris la lecture des ouvrages concernant la statistique comme méthode d'investigation sociologique, en la situant par rapport aux autres méthodes et en recherchant sa nature propre. Là encore, toute une littérature essentielle existe depuis Durkheim jusqu'à nos jours, en passant par les travaux de Simiand sur la Statistique et l'Expérience. La connaissance des principes généraux renvoyait à une étude des diverses techniques statistiques quand bien même la nature de notre travail n'exigeait pas leur total emploi ni une formulation mathématique. Les ouvrages en cette matière ne manquent pas non plus, depuis ceux de Bowley jusqu'aux récentes publications de M. Piatier. Enfin il ne nous restait plus qu'à envisager les problèmes particuliers de l'emploi de la statistique sur le plan bibliographique et cette fois c'est aux publications de M. Zoltowski que nous avons eu principalement recours. C.
LES O U V R A G E S SUR LA
BIBLIOGRAPHIE.
Les livres sur la bibliographie traitent de cette matière sous des angles différents, dont plusieurs correspondent à notre travail. L'étude générale de la Bibliographie, de son but, de son histoire,
19
SOURCES
de ses classifications, a été faite soit à partir de traités généraux, de précis universitaires, soit de certains chapitres de Bibliographie, depuis les travaux classiques de Brunet jusqu'à ceux plus récents de Mademoiselle Malclès, en passant par ceux de Delalain et de plusieurs autres auteurs. Les bibliographies de bibliographies nous ont encore été utiles pour déterminer les diverses bibliographies générales imprimées et privées, courantes et rétrospectives, de la France de notre période. D.
LES O U V R A G E S SUR LA
LIBRAIRIE.
En premier lieu il existe un certain nombre de documents imprimés sous l'Ancien Régime. Ce sont d'abord les règlements successifs sur l'Imprimerie et la Librairie, puis les mémoires qui furent imprimés à l'occasion des différents procès entre libraires et imprimeurs de la même ville, entre ceux de Paris et de Province, entre les imprimeurs libraires et d'autres corporations voisines comme celle des doreurs, etc. Il faut ajouter les sentences de la Justice, les feuilles volantes imprimées à propos du fonctionnement par la Direction de la Librairie, les Magistrats, la Chambre Syndicale elle-même. Enfin quelques petits livrets généraux sur la Librairie qui sont souvent des plaidoiries. La plupart de ces ouvrages concernent le fonctionnement de la Librairie. Ce ne sont pas des études rétrospectives et désintéressées. Ces textes fournissent la matière d'une recherche plutôt qu'ils ne l'exploitent. D'autre part, ils recouvrent une période assez courte, le x v n e et surtout le x v m e siècle. Enfin, le plus souvent, ils sont confondus avec les manuscrits dans les cartons et les registres des Archives de la Chambre ou du Bureau de la Librairie. Ils ont été conservés au fur et à mesure que le temps s'écoulait, par ces administrations. Us ne font bien souvent que reproduire un document manuscrit. Une seconde partie de la littérature imprimée sur la Librairie est faite d'études rétrospectives. Elles sont assez tardives. Il semble, bien qu'on trouve quelques ouvrages sur cette matière publiés dans la première moitié du x i x e siècle, qu'il faille attendre la fin du siècle et le début du x x e pour voir fleurir la littérature concernant l'histoire de la Librairie. Tout paraît se passer comme si plus d'un demi-siècle s'était écoulé entre les derniers imprimés précédents, produits à l'occasion du fonctionnement de la Librairie sous l'Ancien Régime, et les premières études importantes. Celles-ci sont moins nombreuses pour la période monarchique que pour les temps contemporains. Elles sont parfois générales, plus souvent particulières à l'Europe occidentale, et quelquefois à la France, et dans ce cas assez fréquemment à une région ou à une cité. Une classification systématique est possible : l'histoire de la Librairie fut l'occasion d'études spécialisées, d'ordre économique, sur la
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
condition des ouvriers, du patronat, des apprentis ; d'ordre politique, sur les contrefaçons et les pamphlets, d'ordre administratif, sur le Dépôt Légal, d'ordre technique, sur les moyens de reproduction et leur évolution ; d'ordre esthétique et bibliographique. C'est dire que les points de vue sont nombreux et qu'une bonne part des publications, bien qu'examinées attentivement, et malgré l'intérêt personnel que nous y trouvions, ne nous a pas été d'une grande utilité. Toutefois, il faut remarquer que plusieurs traités généraux et quelques ouvrages spécialisés nous renseignèrent sur les lois et les règlements. Cependant aucun n'est suffisant en ce qui concerne la Censure, parce qu'on n'a pas pratiqué systématiquement l'étude des registres bibliographiques composés par les administrations royales et professionnelles. Plusieurs mêmes ont commis des erreurs que cette même étude aurait permis d'éviter. E. OUVRAGES
SUR
L'HISTOIRE
DE
LA
LITTÉRATURE
EN
FRANCE
A U X X V I I E ET XVIII E SIÈCLES.
L'étude statistique de l'évolution de la pensée imprimée relève également de l'Histoire de la Littérature en France aux x v n e et XVIII® s i è c l e s .
Comme nous l'avait rappelé M. le Professeur Labrousse, il fallait sortir de la statistique pour assurer les résultats de celle-ci. Les chiffres, les fluctuations découvertes quantitativement ont besoin d'être confirmés par les événements que rapporte l'histoire et notamment ici, de l'histoire des idées, l'histoire littéraire. Il existe là aussi une bibliographie abondante. Plusieurs auteurs restent célèbres. Tels sont les noms de Daniel Mornet, Thibaudet, P. Hazard, Seignobos, Trénard, Adam, dont les ouvrages nous furent surtout utiles lors de l'étude de la Censure.
LIVRE
J
LES BIBLIOGRAPHIES DE LA FRANCE
PREMIÈRE
PARTIE
LES BIBLIOGRAPHIES MANUSCRITES
2
CHAPITRE
PREMIER
L'ADMINISTRATION DE LA CENSURE ET DU DÉPÔT LÉGAL
Connaître le sens de l'organisation de l'impression sous l'Ancien Régime et cette organisation détaillée elle-même, en vue de situer nos registres, suppose d'abord la détermination de ses cadres historiques. Puisqu'il s'agit de l'organisation de l'impression, c'est donc avec la découverte de l'imprimerie et plus exactement avec son introduction en France, c'est-à-dire vers la fin du x v e siècle, qu'elle commencera. Puisqu'il s'agit d'organisation autoritaire, c'est avec la Révolution Française, qu'elle s'achèvera. Ainsi se dessine une période de trois siècles, de la fin du xv® à 1791, dont il faut déterminer le sens. On peut dire que son trait essentiel aura été la prépondérance du pouvoir royal dans le domaine de la librairie, et particulièrement dans celui de l'organisation de l'impression. Par ailleurs cette période se situe dans l'histoire et se trouve limitée et encadrée par deux autres où triomphent, avant, le pouvoir religieux et, après, la conception libérale. Ces trois phases successives ont leur unité propre qui ne sont pas caractérisées seulement sur le plan de l'évolution des pouvoirs administratifs mais, peut-être, plus intrinsèquement, sur celui de l'évolution de la reproduction des livres. Avant la fin du x v e et le début du x v i e siècles, la prépondérance du pouvoir religieux s'effectue dans le même temps que la reproduction des ouvrages est manuscrite. La période qui nous occupe correspond assez bien non seulement à la prépondérance du
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
pouvoir royal et à l'extension de son administration, mais aussi à la naissance et aux premiers développements de l'Imprimerie. De même la période postérieure, du x i x e siècle, voit triompher la théorie libérale et aussi l'essor de l'imprimerie par la multiplication des imprimeurs et des livres dont la production passe de l'ordre des centaines d'unités annuelles à celui des milliers d'ouvrages. Quant à l'évolution de l'organisation de l'impression pendant notre période, elle est intéressante en ce qu'elle nous fait assister non seulement à l'ascension, à l'épanouissement, au déclin et à la fin du Pouvoir Royal en cette matière, mais aussi à l'imbrication des deux périodes précédente et suivante : la première correspondant au déclin et à la fin du pouvoir religieux quand le Pouvoir Royal est en ascension ; la seconde, à l'ascension de la théorie libérale et à son triomphe quand le Pouvoir Royal est dans sa phase d'affaiblissement. Trois phases sont donc clairement reconnaissables : I o Du début du x v i e siècle à 1653, le Pouvoir Royal se substitue progressivement à l'Université dans le droit de délivrer des autorisations d'imprimer. 2° De 1653 jusque vers 1715, c'est-à-dire pendant le règne de Louis XIY, le Pouvoir Royal et son administration triomphent. 3° De 1715 à 1790-1791, l'administration temporise, face à la montée des idées libérales qui l'emporteront avec la Révolution. La première période sera étudiée dans l'examen des droits d'autorisation de l'Université. La seconde et la troisième, dans les autorisations du Pouvoir Royal. Cependant, ces tendances générales ne doivent, d'aucune manière, nous faire oublier ce que fut l'organisation elle-même. Une situation s'impose : l'administration de l'impression ne fut qu'une partie de l'organisation de la Librairie. Celle-ci comprenait un certain nombre de matières différentes, comme, par exemple, l'organisation professionnelle ou l'organisation du travail qui n'intéressent pas directement le régime de l'impression. Les buts de ce dernier furent principalement la surveillance de la production des livres et, secondairement, l'enrichissement des collections nationales. L'organisation devait donc se modeler sur la chronologie de l'impression en trois phases : avant, pendant, après. Avant l'impression, il fallait obtenir l'autorisation d'imprimer. La police intervenait pendant et après. La surveillance ne consistait pas seulement à découvrir les livres interdits mais à vérifier les livres autorisés, d'où l'institution d'une des branches du Dépôt Légal dont l'autre, historiquement antérieure, consistait, la production achevée, à enrichir les collections nationales de quelques exemplaires. Cependant, ces trois parties, autorisation, police, dépôt, furent
ADMINISTRATION
DE LA
LIBRAIRIE
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réalisées par des personnes ou des institutions qui, par leur raison d'être, avaient intérêt à s'occuper de l'impression. Elles peuvent être regroupées en quatre catégories : pouvoir civil d'abord : Conseil du Roi, Chancellerie, Bureau de la Librairie, Bibliothèque et Cabinet du Roi, Censeurs. Pouvoir religieux ensuite : évêques, autorités ecclésiastiques, Université et Faculté de Théologie. Puis pouvoir judiciaire : Parlement, Lieutenant-Général de Police, Inspecteurs de la Librairie, Avocat, Procureurs. Organisme professionnel enfin, comme les Chambres Syndicales des Libraires et Imprimeurs. Chacune de ces institutions, n'ayant pas un but identique, s'occupait de l'organisation d'une manière différente, tantôt de la première, de la seconde ou de la troisième partie, tantôt de plusieurs simultanément. Le pouvoir civil agissait avant et après. Le Chancelier donnait, avant l'impression, le Privilège ou la Permission. Il reçut le Dépôt Légal ensuite, pour vérifier si l'impression était conforme au texte initial. C'est aussi ce que fit le Censeur puisqu'il était à l'origine de la décision du Chancelier et de l'octroi du privilège et qu'il recevait un exemplaire du livre imprimé, autant à titre de récompense que dans un but de vérification. Le Bureau de la Librairie intervenait principalement avant l'impression, et la Bibliothèque et le Cabinet du Roi après, pour obtenir le Dépôt. Le pouvoir religieux agissait, suivant, les périodes avant l'impression, pour donner des autorisations, et après pour interdire la vente et demander des sanctions. Les différentes formes du Pouvoir Judiciaire intervenaient aussi avant, pendant et après. Le Parlement donnait des permissions pour certaines catégories d'ouvrages, et pouvait censurer la production après. Le lieutenant Général de Police, et les Juges de Police autorisaient aussi la publication de certains livres, ils pouvaient agir pendant et après l'impression pour surveiller ou sanctionner. Les avocats et procureurs permettaient l'impression de textes concernant la Justice. Les Inspecteurs de la Librairie n'intervenaient que pendant ou après l'impression, pour la surveillance, et à partir d'une certaine période, pour assurer le Dépôt Légal. Enfin les Chambres Syndicales, avant l'impression, devaient enregistrer les privilèges et permissions ; pendant et après, elles devaient surveiller les imprimeurs, les arrivées de livres et assurer le Dépôt Légal à partir de 1704. Si la détermination succincte du rôle de chacune de ces institutions ou de ces personnes, dans l'organisation de l'impression, était nécessaire, il n'en reste pas moins que c'est sur les parties successives de cette organisation qu'il faut se fonder pour en connaître le mécanisme. Comme nous l'avons vu, l'autorisation fut donnée par les pouvoirs religieux, civils et judiciaires. Il faudra donc s'interroger sur les
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
diverses catégories de permissions qu'elles donnèrent et les différents genres d'ouvrages que celles-ci concernèrent. Après quoi on étudiera la Police de l'impression, qui varia selon la nature des livres et se réalisa soit par la vérification des livres autorisés, par le Chancelier, le Censeur, le Lieutenant de Police, grâce au Dépôt Légal, soit par la recherche des livres prohibés par les Syndics et Adjoints de la Chambre Syndicale et par les Inspecteurs de la Librairie. Enfin il restera à rappeler succinctement ce que fut le Dépôt Légal qui clôt cette organisation. Ainsi obtiendra-t-on une perspective précise de l'administration de l'impression. Il ne restera plus qu'à nous interroger sur ce qui nous est parvenu des archives, des diverses phases et des diverses périodes, et qu'à situer les groupes de registres dont l'analyse postérieure permettra d'obtenir la statistique officielle de la production des livres en France sous l'Ancien Régime.
I. L'AUTORISATION
D'IMPRIMER
Pendant toute notre période, de la fin du xv e siècle à 1791, plusieurs autorités eurent le droit de donner une permission d'imprimer. Celui-ci varia avec le temps soit qu'il se développât, disparût ou se maintînt dans certaines limites et qu'il concernât des catégories d'ouvrages qui elles aussi changèrent. A. LE POUVOIR
RELIGIEUX
On sait le rôle essentiel que joua, depuis la chute de Rome et la disparition du paganisme, pendant tout le Moyen Age, l'Église catholique dans la vie intellectuelle de l'Occident. Il était normal que, pour défendre l'orthodoxie, elle cherchât à surveiller et à autoriser la production des ouvrages anciens et nouveaux. C'est ce qu'elle fit pendant la période qui précède celle dont nous avons à nous occuper et qui correspond principalement à la reproduction manuscrite. La censure religieuse ne fut pas un vain mot. En effet : « nombreux avaient déjà été au Moyen Age les textes condamnés, dont la lecture, la copie et la vente avaient été interdites 1 . »
1. Lucien F E B V R E et Henri-Jean M A R T I N , L'apparition du Livre. Avant-Propos de Paul Chalus. Paris, A. Michel, 1957, in-16, xxxn-558 p. BN : 8» G 11125 (49), p. 371.
ADMINISTRATION
DE LA
LIBRAIRIE
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La naissance de l'imprimerie devait renforcer cette volonté ecclésiastique, soit à cause de la multiplication plus rapide des ouvrages et de l'accélération de la communication des idées, soit à cause de la réforme : « Assez vite et surtout lorsque la Réforme s'annonça les autorités ecclésiastiques s'inquiétèrent de voir les presses se mettre au service d'idées hétérodoxes et jugèrent nécessaire d'empêcher l'imprimerie de multiplier les mauvais livres1. »
Encore fallait-il en avoir le droit. Celui-ci, tant que n'intervint pas le pouvoir royal, c'est-à-dire jusqu'à la fin du x v e siècle, fut donné par le Pape aux autorités locales : « C'est déjà pour cela qu'en 1475 l'Université de Cologne reçut du Pape un privilège l'autorisant à censurer les imprimeurs, les éditeurs, les auteurs et même les lecteurs de livres pernicieux'... »
Enfin : « Au xvi® siècle les interventions de l'Église en matière de censure ne cessent de se multiplier». »
Ce rôle essentiel était exercé au début de notre période par l'évêque, l'Université et la Faculté de Théologie. Cependant, comme nous le verrons plus loin, la nature des livres visés par l'autorisation, et partant l'importance des deux autorités en cette matière, n'était pas identique. Le pouvoir de l'évêque était secondaire. C'est sans doute pourquoi il ne fut guère inquiété par l'ascension du Pouvoir Royal et pourquoi aussi la production soumise à son autorisation ne varia pratiquement pas. Au contraire, l'Université et la Faculté de Théologie dont le pouvoir était prépondérant puisqu'elles censuraient l'essentiel de la production, furent-elles l'adversaire que le Pouvoir Royal dût abattre en réduisant progressivement les droits d'autorisation jusqu'à les supprimer tous. Nous examinerons successivement les pouvoirs de ces deux autorités et leur évolution. 1. l ' é v ê q u e Avant même l'Université, peut-être, il semble que l'évêque ait eu, dans le ressort de son diocèse, le droit d'autorisation. Ainsi selon Mellottée : 1. Ibid., p. 371-372. 2. Ibid., p. 372. 3. Ibid., p. 372.
30
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
« La première autorité qui soit intervenue pour examiner les livres et les autoriser à paraître fut celle des évêques 1 . »
Cependant, les évêques ne conservèrent le droit d'autorisation que pour les ouvrages religieux concernant l'administration du diocèse ou la pratique de la foi. Ainsi : « Les évêques en effet n'avaient d'autorité que pour donner l'autorisation de publier les catéchismes ou des livres de piété en usage dans le diocèse". »
Encore ce principe a-t-il besoin d'être éclairci. L'étude statistique du contenu du privilège montrera que, dans la réalité, les évêques demandèrent, au x v n e et surtout au x v m e siècle, des privilèges généraux pour tous les ouvrages religieux de leur diocèse, sans spécifier les titres. Une formule type existait dans le début. Plus tard, pourvu du privilège, l'évêque donnait l'autorisation pour tel ou tel livre religieux particulier. Ainsi les deux droits du Roi et de l'évêque s'accordèrent-ils en se superposant l'un à l'autre. Cette pratique eut pendant longtemps de fâcheuses conséquences sur le plan du Dépôt Légal qui ne fut effectué que selon l'humeur de l'évêque, ainsi que le montra le sieur Joanne à l'Abbé Bignon 3 . Gela devait durer jusqu'au règlement de 1785 qui obligea les évêques au dépôt.
2.
L'UNIVERSITÉ
ET LA FACULTÉ
DE
THÉOLOGIE
C'est pour des raisons identiques que l'Université possédait le droit d'autorisation. Toutefois la catégorie d'ouvrages n'était pas la même. L'Université s'intéressait à toute la production intellectuelle essentielle. La lutte du Pouvoir Royal contre la Faculté de Théologie se produisit en plusieurs phases : prépondérance absolue de l'Université jusqu'en 1521 ; prépondérance reconnue par le Roi de 1521 à 1563 ; introduction de l'autorisation royale, parallèlement à celle de l'Université, de 1563 à 1653, avec la période de la lutte pour les censeurs royaux, de 1624 à 1649 ; enfin prépondérance absolue de l'autorisation royale, à partir de 1653, et élimination quasi complète de l'Université.
1. Paul MELLOTTÉE, Les transformations économiques de Vimprimerie sous l'Ancien Régime. Châteauroux, Irap. de Mellottée, 1905, in-8°, 531 p. flg., pl., plan et cartes. B N : 8° F 17645, p. 48. 2. Ibid., p. 48. 3. Voir Robert ESTIVALS, Le Dépôt Légal sous l'Ancien Régime de 1537 à 1191. Paris, M. Rivière et C". 1961, in-8°, iv-142 p. errata. B N : 8» Q 10518, p. 105.
ADMINISTRATION
DE LA
LIBRAIRIE
31
Lorsque le Pouvoir Royal commença à s'occuper de l'autorisation d'imprimer, il trouva l'Université en possession de ce droit. Il le lui confirma, manifestant par là même son autorité. Ainsi selon Falk : « Aussi quand l'autorité royale intervint dans la réglementation de l'industrie du livre elle trouva pour ainsi parler l'Université et la Faculté de Théologie installées dans leurs fonctions censoriales et ne fit que leur déléguer officiellement en 1521 les attributions que s'étaient décernées les Maîtres de la Science et de la Foi 1 . »
et encore : « à la date du 13 juin 1521, la lecture d'une défense du Roi aux libraires et imprimeurs de rien vendre au public sans autorisation de l'Université ou de la Faculté de Théologie et sans visite préalable'. »
Cette période, qui sur le plan de l'autorisation obligatoire de l'Université ne change rien, mais qui introduit l'autorité royale, se poursuivra jusqu'en 1563, date des Lettres Patentes introduisant l'obligation d'une autorisation royale. Ainsi selon Falk : « Cette délégation fut passagère. L'autorité royale suivit ici comme ailleurs fidèlement son principe : concentrer entre ses mains tous les pouvoirs... Elle prétendit bientôt procéder elle-même à la censure des livres. Elle commença par enlever à la Faculté de Théologie le droit d'autoriser l'impression des livres auxquels elle n'avait rien trouvé à reprendre même celle des livres religieux. Les Lettres Patentes du 10 septembre 1563 défendirent « d'imprimer aucun livre sans permission du Roi sous peine d'être pendu ou étranglé 3 . »
A partir de cette date de 1563 et jusqu'à 1791, l'impression fut donc toujours soumise à l'autorisation royale. Cependant, parallèlement, l'Université et la Faculté de Théologie semblent avoir conservé un certain droit de censure : « La Faculté de Théologie ne conserva que le droit d'exercer la censure... ; cette dernière prérogative lui fut enlevée en 1653*. »
Cette période de double autorisation devait donc se poursuivre de 1563 à 1653. Encore pendant ce temps le pouvoir royal devait-il progresser. L'exercice réel de l'autorisation exigeait des censeurs. 1 . Henri FALK, Les privilèges de la librairie sous l'Ancien Régime, étude historique du conflit des droits sur l'œuvre littéraire. Paris, A. Rousseau, 1906, ¡11-8", m-184 p. BN : 8» F 19429, p. 27. 2. Ibid., p. 16. 3. Ibid., p. 27. 4. Ibid., p. 29.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
La création de ces postes fut l'occasion de la lutte décisive avec la Faculté et l'Université, de 1624 à 1649 : « Plusieurs censeurs royaux furent créés Ils étaient choisis parmi les membres de la Deux exemplaires du manuscrit à examiner chargés de parapher page par page. Ils en l'autre à l'imprimeur1. »
en 1624 par Lettres Patentes. Faculté des Lettres de Paris. leur était remis qu'ils étaient conservaient un et rendaient
Cependant, malgré la précaution prise de prendre les censeurs parmi les membres de l'Université, celle-ci fut assez forte pour réagir et faire rapporter les Lettres Patentes qui ne furent appliquées que vingt-cinq ans plus tard en 1649. A partir de 1653 et jusqu'à la fin de l'Ancien Régime commence et se poursuivra une nouvelle période pendant laquelle le pouvoir royal est en principe seul à exercer son droit d'autorisation pour la production essentielle. L'université est pratiquement éliminée. Pourtant elle conserve encore le droit d'autoriser l'impression des livres de classe : « La Faculté ne put retenir que l'approbation des livres de classe et quelques distinctions honorifiques 1 . »
Encore n'est-on pas certain qu'il s'agisse d'un droit exclusif éliminant l'autorisation royale.
B. LE POUVOIR 1.
CIVIL HISTORIQUE
DE
SON
INTERVENTION
Le pouvoir royal prépondérant dans notre période, ne semble s'être préoccupé qu'assez tardivement de l'autorisation de la reproduction des livres. Son intervention paraît résulter de trois causes différentes. La première le concerne lui-même : « ...il était essentiel pour lui de pouvoir interdire les ouvrages hostiles au prince et au gouvernement». »
Une seconde raison concerne l'exécution de la censure religieuse décidée par l'Université ou l'évêque. En effet :
1. Ibid., p. 29. 2. Ibid., p. 29. 3 . Lucien F E B V R E et Henri-Jean
MARTIN,
L'apparition
du livre, p. 373.
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DE LA
LIBRAIRIE
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« Les autorités ecclésiastiques ne pouvaient rien en matière de police sans l'appui du bras séculier... 1 »
Enfin, à cette première sollicitation, s'en ajoute une seconde : la demande expresse, formulée par les imprimeurs, d'obtenir une autorisation pour se défendre contre les contrefaçons ruineuses : « Il y eut, en effet, de la part des premiers imprimeurs, des travaux admirables pour mettre au jour les manuscrits, en comparer, en discuter les textes. Il arrivait alors que les imitateurs des publications de leurs devanciers, reproduisaient dans des réimpressions, avec moins de science, de peine, de dépenses et de risques, les textes publiés sur les manuscrits. » «... des réclamations s'élevaient de toute part... on sollicitait des garanties privées, il s'établissait ainsi des privilèges individuels 1 . »
et encore : « Le privilège était un acte du pouvoir royal... il garantissait les imprimeurs contre la contrefaçon 8 . »
Ainsi le pouvoir civil fut-il amené pour se défendre soi-même ou pour les affaires religieuses et commerciales, à s'occuper de la librairie et particulièrement de l'autorisation d'imprimer. A partir de 1653 et jusque vers 1715, soit pendant le règne de Louis X I Y , le pouvoir royal triomphe. C'est l'époque du privilège du roi. A son tour cette seconde phase va faire place à une troisième d'affaiblissement de l'autorité royale qui, pour se survivre, sera obligée à partir de 1715 et jusqu'en 1791, de multiplier les permissions qui seront de moins en moins officielles et de plus en plus clandestines jusqu'à ce qu'elles soient supprimées, l'impression devenant libre et assurant en ce domaine le triomphe de la conception libérale. L'étude des diverses catégories de Permissions nous permettra d'examiner successivement ces deux phases. 2 . LES CATÉGORIES DE PERMISSIONS
Ce furent d'abord les Privilèges, puis, à partir de la fin du règne de Louis X I V , les Permissions Tacites. A celles-ci nous adjoindrons, pour mémoire, les permissions clandestines qui furent délivrées par le Lieutenant Général de Police et que nous analyserons lors de l'étude des autorisations données par cette dernière autorité. 1. Ibid., p. 373. Paul M E L L O T É E , Les transformations économiques de l'imprimerie sous l'Ancien Régime, p. 76-77. 3. Ibid., p. 77. 2.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Avant de commencer l'examen des permissions royales force est de constater que leur seule connaissance historique est insuffisante. Leur analyse comparée permet de dégager les deux dernières périodes de la prépondérance du pouvoir royal dans l'autorisation d'imprimer : son triomphe ; son affaiblissement, se terminant par sa suppression. La notion de permission s'établit sur un jugement de valeur de la part de l'autorité qui la délivre. Celui-ci n'est pas tant un jugement qualitatif de la valeur esthétique ou scientifique de l'œuvre autorisée, qu'une reconnaissance que l'ouvrage est conforme à sa philosophie politique, morale, ou religieuse, bref qu'il est orthodoxe. Ainsi la permission renvoie à une classification des ouvrages, selon le contenu philosophique, en trois catégories distinctes : les livres orthodoxes ; les livres hétérodoxes ; les livres modérés. Aux premiers seuls seront donnés les privilèges. Ils représenteront donc toujours la fraction de la production intellectuelle ou acceptable par le régime, ou participant des idées traditionnelles du pouvoir établi. Les seconds seront les livres condamnés, soit avant la publication, par le refus de délivrer le privilège, soit après publication, si l'imprimeur a passé outre aux règlements, par la confiscation à laquelle s'ajoutent les diverses sanctions prévues. Cette seconde fraction de la production intellectuelle peut en partie être considérée comme la manifestation extrémiste, avant-gardiste, anticonformiste, des idées nouvelles. La troisième catégorie sera faite des diverses autres permissions royales données pour des livres qui ne sont plus orthodoxes mais pas encore nettement hétérodoxes, qui sont prudents et modérés. Cette troisième fraction pourra être considérée comme la preuve de la pénétration des idées nouvelles dans une masse intellectuelle qui se révélera de plus en plus nombreuse et de plus en plus avancée. Historiquement, il existe deux périodes distinctes. Dans l'une, les deux premières catégories seules existent : privilèges et livres censurés ; dans l'autre, la troisième catégorie intervient et se développe. La première correspond à la phase de triomphe du pouvoir monarchique et elle s'étend de 1653 jusque vers 1715. Sans doute le privilège existait-il avant, depuis 1563. Mais il n'était pas seul. Il était en lutte avec les permissions données par d'autres pouvoirs et notamment par l'Université. Au contraire, à partir de 1653, le privilège pour l'essentiel de la production des livres est seul. Sa généralisation est réelle et quasi absolue. Ce monopole du privilège se poursuit, tant que triomphe le pouvoir royal. C'est vers la fin du règne de Louis XIV que commence la troisième phase de l'évolution de l'organisation de l'impression : l'affaiblissement du Pouvoir Royal. C'est alors qu'intervient la troisième catégorie d'ouvrages : les livres tolérables imprimés par diverses permissions.
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Une telle zone intermédiaire n'existe pratiquement pas en France sur le plan de l'organisation royale de l'impression sous le règne de Louis X I V . P a r contre elle se développe à travers le x v i n e siècle, c'est-à-dire en même temps que le siècle de la philosophie, en même temps que la mise en question de la société traditionnelle, c'est-à-dire de l'orthodoxie de la doctrine du pouvoir établi, en même temps enfin que se répand la théorie libérale dont elle est la manifestation modérée. Mais la phase d'affaiblissement du pouvoir royal dans l'organisation de l'impression se produit progressivement. Elle est comme soumise à l'augmentation en nombre et en conviction de plus en plus avancée de cette catégorie d'ouvrages intermédiaires. Elle oblige ainsi le pouvoir royal à relâcher son étreinte par degrés. L'histoire des permissions royales nous en apporte la preuve et nous en donne le mécanisme. Cette phase se développe entre celle du monopole du privilège correspondant à l'époque du pouvoir royal en cette matière, et la suppression de toute permission par la Révolution. Elle se caractérise par la multiplication des permissions dont le sens paraît être d'aller de l'officiel au clandestin, de l'autorisation a v a n t l'impression à l'autorisation a posteriori, déterminant ainsi deux phases : autorisation semi-officielle des permissions tacites, autorisation clandestine d'imprimer. Le privilège, dans cette dernière phase de l'organisation de l'impression, reste ce qu'il était dans la phase précédente de prépondérance du pouvoir royal : la reconnaissance par l'autorité civile de l'orthodoxie du livre qui lui est soumis. Mais cette fois il n'a plus le monopole de l'autorisation. Il doit le partager avec les autres permissions. La première, c'est la Permission Tacite qui remonte à la mort de Louis X I V . Avec elle commence la zone intermédiaire des ouvrages modérés comme aussi la troisième phase d'affaiblissement du pouvoir royal. Mais celui-ci ne peut reconnaître comme orthodoxe un ouvrage qui ne l'est pas. Il ne peut rendre totalement officielle l'autorisation, par un privilège, consacré par le sceau du chancelier. Cependant, comme le livre n'est pas assez hétérodoxe pour qu'on puisse l'interdire, on le permettra donc, mais officieusement. Il ne recevra pas le sceau, on n'indiquera pas le nom du censeur. La Permission Tacite est une autorisation encore semi-officielle. L'autorisation officielle ou semi-officielle, a v a n t l'impression, disparait avec les permissions clandestines. Le livre est hétérodoxe et dangereux puisque l'imprimeur craint une perquisition et que le pouvoir royal se décharge du droit de donner directement l'autorisation sur le Lieutenant de Police. La liberté est alors déjà presque entière puisque le pouvoir royal, non seulement ne p e u t empêcher l'impression, mais préfère la permettre. Le pouvoir
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
sent qu'il est déjà mis largement en question puisqu'il préfère contradictoirement et hypocritement soutenir l'imprimeur contre sa propre justice en assurant celui-ci qu'il le préviendra assez tôt pour qu'il puisse faire disparaître l'édition si par malheur une action en justice était entamée. Le pouvoir royal conscient de l'impossibilité de défendre pareil ouvrage décide de lui donner une autorisation avant l'impression, mais secrète, dont personne ne pourra l'accuser. Avec cette permission on achève de franchir la séparation du livre orthodoxe du livre censuré. La production est presque libre ; l'autorité royale plus un mythe qu'une force réelle. La révolution ne fera que balayer une organisation qui ne gêne plus beaucoup et qui n'est plus utile. C'est ce qui se produit avec la fermeture du Bureau de la Librairie en 1790-91 et la fin des permissions. Après avoir analysé cette évolution du pouvoir royal dans l'organisation de l'impression, il convient d'étudier particulièrement chaque groupe de permissions. 3.
a) La nature
LES
de la production
PRIVILÈGES
atteinte.
L'obtention d'un privilège était la condition fondamentale pour imprimer un livre sous l'Ancien Régime, au moins jusqu'à 1715. Comme le dit Falk : « L'histoire du Privilège se confond à son origine avec celle de la simple permission d'imprimer ou plutôt le privilège trouve son origine dans la permission d'imprimer 1 . »
Cependant, ce principe devait souffrir bien des dérogations qui sont autant de cadres délimitatifs des privilèges qu'il convient de fixer, autant pour leur connaissance exacte que pour la détermination de la valeur de nos séries statistiques. Une première distinction chronologique s'impose. L'obligation du privilège n'existe que pour un peu plus de deux siècles un quart. Elle commence, on l'a vu, en 1563. Elle s'achève en 1791. Les cadres des privilèges sont aussi limités par les autres permissions. Sur le plan du volume de l'ouvrage, le privilège ne concernera que les livres de plus de deux feuilles en caractère cicero, les autres étant permis soit par les Juges de Police des localités, soit par le Lieutenant de Police. Sur le plan du contenu, les petits opuscules judiciaires, religieux, 1. Henri
FALK,
Les privilèges de la librairie, p. 64.
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scolaires, administratifs n'auront pas non plus l'obligation du privilège mais celle du Parlement, des évêques, de l'Université, du Lieutenant de Police, des avocats, Procureurs... Au x v m e siècle, les livres qui relèvent du privilège mais auxquels l'État ne saurait l'accorder officiellement, sans pouvoir, ni vouloir l'interdire, n'en bénéficieront pas mais obtiendront les autres catégories de permissions, tacites, clandestines. A ce second type de délimitation qui provient des autres permissions, il faut encore ajouter celles qui découlent de la nature même du privilège et de son origine. Celui-ci provient, pour beaucoup, d'un motif commercial qui était d'éviter la contrefaçon, la concurrence facile et, par un droit de reproduction exclusive, pendant un temps donné, d'amortir les frais de la création et de la reproduction de l'ouvrage. Comme le dit Falk : « L'octroi du privilège fut à l'origine une simple mesure de protection de l'industrie dictée par la sollicitude royale... 1 »
Mais à son tour, ce but du privilège va déterminer d'abord la catégorie d'ouvrages dont il sera question et créer ainsi de nouveaux cadres complémentaires des précédents. Puisqu'il faut amortir les frais de la création, c'est des livres nouveaux dont il sera question. Ici une délimitation se fait jour, entre contenu et forme, production et reproduction ; production et consommation intellectuelle. Il s'agit du livre nouvellement créé, non du livre nouvellement imprimé. C'est pourquoi les auteurs qui se sont occupés, à l'époque, ou plus tardivement, des ouvrages de privilèges parlent en même temps de « livres nouveaux », et c'est dans le premier sens qu'ils l'entendent. Cette détermination est de première importance sur le plan qui nous occupe, de la statistique de la production intellectuelle aux x v n e et xvin e siècles. En effet les registres de privilèges dont nous aurons plus loin à nous occuper, concernent la statistique annuelle de la production manuscrite, non comme la plupart des bibliographies composées par les libraires, la statistique annuelle de la reproduction imprimée. Du même coup cette statistique des privilèges sera celle de la création année par année, non celle de la consommation intellectuelle plus particulièrement représentée par les secondes. Ainsi grâce à l'organisation de la librairie sous l'Ancien Régime, on pourra dissocier, dans une certaine mesure, création et consommation, ce que l'organisation moderne des xix e et x x e siècles ne permet plus. Cette détermination en introduit une autre. Le privilège qui est 1. Ibid.,
p. 66.
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LA STATISTIQUE
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DE LA FRANCE
donné pour la création nouvelle a pour but, par la reproduction imprimée, d'amortir les frais. Le privilège qui concerne la création, vise donc la consommation pendant une certaine durée, c'est-à-dire non seulement une impression, mais, si possible, plusieurs. Dans la réalité, suivant les périodes et les livres, les privilèges sont accordés pour plusieurs années au minimum, pour plusieurs décades au maximum. Cela suppose donc les réimpressions : on sait qu'elles furent souvent nombreuses. Ainsi se creuse un écart et se forme un cadre nouveau entre les privilèges pour les œuvres nouvellement écrites et la production nouvellement imprimée par privilège. Cette dernière est composée de la première édition qui correspond au privilège, à laquelle il faut ajouter les réimpressions. Les statistiques des privilèges et celles des livres nouveaux imprimés par privilège ne peuvent donc théoriquement se superposer. Il y manque les réimpressions dont la statistique devient plus particulièrement celle de la consommation des ouvrages nouveaux. Ceci pour aider à comprendre un des aspects du fonctionnement du Dépôt Légal de cette période qui concerne la réclamation fréquente des dépositaires pour obtenir les réimpressions. Selon les règlements, le privilège n'est délivré, au moins à certaines époques, que sous condition d'en fournir un ou plusieurs exemplaires à chacun des dépositaires. Quand ils ne précisent pas davantage, ceux-ci obtiennent un ou plusieurs exemplaires de la première édition et les libraires refusent, en arguant le règlement, de fournir des exemplaires pour les réimpressions postérieures, lesquelles ne sont pas toujours exactement identiques au texte initial. Un autre cadre va encore s'imposer. Puisque le privilège est fait pour amortir les frais de composition, puisque par là le privilège ne peut concerner qu'un livre nouvellement écrit, du même coup il ne pourra être donné en principe, au moins, pour un ouvrage ancien, qu'il s'agisse d'un auteur ayant vécu avant l'introduction du privilège, ou dont le privilège depuis n'aurait pas été renouvelé et serait tombé dans le domaine public, les dépenses étant supposées remboursées par la vente exclusive. E t c'est bien ce qui semble s'être passé longtemps, encore qu'on puisse discerner deux périodes, avant 1649 et après. Ainsi, selon Falk, rapportant le Compte Rendu de Séguier d'après les Arrêts de 1551 et 1586 : « Les privilèges ne peuvent avoir lieu que pour des livres nouveaux et qui n'ont pas encore été imprimés... tous les livres déjà imprimés et surtout les livres étrangers pouvaient être imprimés par tous les imprimeurs 1 . »
1. Ibid.,
p. 80.
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De même faisait l ' É d i t du 19 janvier 1626 qui : « . . . exemptait définitivement textes des auteurs anciens 1 . »
de
toute
permission
l'impression
des
Malgré tout, un changement semble survenir à partir de 1649 puisqu'un Édit de cette année permet : « d'obtenir des privilèges pour réimprimer les bons auteurs de l ' A n t i quité...' »
Cependant, plutôt que deux périodes bien nettes, il est possible que, d'une manière générale, les livres anciens n'aient pas eu la nécessité du privilège pour être imprimés mais que, de temps en temps, suivant la demande, on en ait accordé à cause du coût, non pas cette fois de la composition, mais de l'impression proprement dite. Ainsi le privilège se compose une fois encore un nouveau cadre : en concernant le livre nouvellement écrit, il élimine le livre anciennement créé. De plus, par rapport à la production des livres nouvellement imprimés, la statistique des privilèges est amputée non seulement des réimpressions des livres de privilège mais encore des livres anciens nouvellement imprimés ou réimprimés, c'est-àdire des réimpressions des livres de privilèges anciens tombés dans le public et les livres des anciens auteurs n'ayant pas encore été imprimés. Une dernière délimitation concernant la continuité des privilèges provient encore de l'origine commerciale de ceux-ci. L'amortissement du coût de l'œuvre ne pouvait se faire qu'avec la durée de l'exclusivité. L e jour où celle-ci s'achevait, le libraire perdait son privilège. Aussi bien tenta-t-il d'obtenir des lettres de continuation qui sont un privilège nouveau, un allongement de l'ancien. Encore fallut-il pour l'obtenir que l'ouvrage fut modifié, généralement d'un quart dans sa composition. L a logique même de cette démarche consistait à tendre vers la perpétuité du privilège, ce qui fut principalement recherché par les libraires de Paris. Ceux-ci, non contents de faire de la capitale le « magasin en livres de toutes les provinces » et le lieu d'impression des nouveaux livres, cherchèrent à conserver un privilège pour les anciens ouvrages contre les protestations des libraires de province réduits, à défaut d'imprimer les premiers, à rééditer ces derniers. L e principe de la continuité f u t donc discuté et selon les époques accepté ou refusé par l'autorité royale. Plusieurs phases successives paraissent se dessiner nettement. 1. Ibid., p. 81-82.
2. Ibid., p. 84.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
1° De 1563 à 1618, la continuité est accordée ; 2° De 1618 à 1649 elle ne l'est plus ; 3° De 1649 à 1777 elle est rétablie. Ainsi : « Des Lettres Patentes du 10 décembre de la même année 1649 portent licence de demander des Lettres de continuation, la durée du premier privilège une fois expirée. C'était le retour à l'état de choses existant avant 1618 1 . »
Enfin de 1777 à 1791 elle est à nouveau supprimée : « Les Arrêts de 1777 supprimèrent entre leurs mains (des libraires) la pérennité des privilèges*. »
Le problème de la continuation des privilèges et son évolution historique conduit à d'autres conséquences sur le plan des cadres des privilèges. Suivant les périodes, on obtient des cadres plus larges ou plus restreints. On a les privilèges seuls, ou ceux-ci plus leur continuité. Le premier cas se produit de 1618 à 1649 et de 1777 à 1791 ; le second de 1563 à 1618 et de 1649 à 1777. Mais ces variations n'ont pas des conséquences sur la seule statistique des privilèges, mais également sur celle de la production des livres nouvellement imprimés. La continuité a pour conséquence une augmentation des réimpressions d'ouvrages avec privilèges et corrélativement, une diminution des livres nouvellement imprimés sans privilège, c'est-à-dire des anciens livres. Cette première partie de l'étude des privilèges nous aura donc été grandement utile. Elle aura permis de déterminer les cadres de la statistique des privilèges qui, pour être complexes, sont néanmoins nets. Il convient de les synthétiser. 1° La statistique des privilèges correspond à celle de la production des livres nouvellement écrits et qui cherche à être imprimée. 2° La statistique des privilèges varie selon que la continuité de ceux-ci est acceptée ou non. Elle s'élargit de 1563 à 1618 et de 1649 à 1777. Elle se rétrécit de 1618 à 1649 et de 1777 à 1791. 3° Cette statistique ne comprend pas en principe : a) Les ouvrages de moins de deux feuilles cicero. b) Les petites productions administratives, judiciaires, scolaires, religieuses. c) Au x v m e siècle, les Permissions Tacites, clandestines.
1. Ibid., p. 84. 2. Ibid., p. 93.
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4° Cette statistique se distingue de celle de la production des livres nouvellement imprimés avec privilège, en ce que les réimpressions ne s'y trouvent pas inclues, celles-ci variant d'ailleurs d'importance suivant que la continuité est accordée ou non. 5° Cette statistique se distingue également de celle de la production des livres nouvellement imprimés avec ou sans privilège par le fait que, outre les réimpressions de privilège, les impressions d'ouvrages anciens n'y figurent pas ou peu, ceci variant également suivant que la continuité est accordée ou non. 6° Enfin elle ne peut exister que pour la période 1563-1791. b) Les catégories
de
privilèges
Les privilèges devaient naturellement être classés. Il y eut donc trois catégories : les privilèges généraux qui pouvaient eux-mêmes se subdiviser en deux conceptions différentes, c'est-à-dire en privilège pour plusieurs ouvrages, ou pour toute la France ; les privilèges particuliers concernaient un seul ouvrage ; les privilèges locaux valables pour une seule localité. Ainsi : « Les privilèges généraux, par opposition aux privilèges particuliers étaient ceux qu'on accordait pour une série d'ouvrages ; les privilèges généraux, par opposition aux privilèges locaux étaient ceux qui étaient accordés pour tout le royaume... les plus répandus étaient les privilèges particuliers et locaux valables pour un livre déterminé en un lieu déterminé : c'était la forme commune du privilège, dont la durée variait entre deux et dix ans. Puis venaient par ordre de fréquence décroissante : les privilèges généraux et particuliers c'est-à-dire portant droit exclusif de publier un ouvrage par tout le royaume... puis les privilèges généraux et locaux portant permission de publier une série d'ouvrages en un lieu déterminé... enfin les privilèges généraux dans les deux sens portant permission exclusive de publier une série d'ouvrages en tous lieux du royaume 1 . » 4.
LES PERMISSIONS
TACITES
Le second des trois stades logiques de la censure, occupé par les Permissions Tacites, débute au moment où l'autorité royale en matière de Librairie va commencer d'être contestée, c'est-à-dire dans la troisième phase de son évolution. Auparavant il n'y a que deux sortes d'ouvrages : ceux qui sont autorisés ; ceux qui sont interdits, et par suite il n'y a pas de Permissions Tacites. Ceci est d'ailleurs confirmé par Malesherbes qui écrit : « Dans l'origine il y avait peu de cas où les permissions ne pussent se donner publiquement parce qu'on imprimait sur moins de matières et 1. Ibid., p. 71-72.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
qu'il n'y avait guère que deux sortes d'ouvrages les uns qui n'intéressaient que les gens de Lettres, les autres directement contraires au gouvernement et à l'autorité et qui par là n'étaient pas plus susceptibles de Permissions Tacites que de Permissions Publiques 1 . »
La seconde phase logique de la censure n'intervient qu'au début de la dernière période, celle du déclin de l'autorité royale, et ceci dès la mort de Louis X I V . Malesherbes pense, en effet que les Permissions Tacites remontent à peu près à 1715. « . . . Je ne sais pas avec certitude dans quel temps l'usage s'en est établi, il l'était depuis longtemps quand je fus chargé de la Librairie. J'en parlai à M. D'Argenson qui avait eu la même fonction dont on venait de me charger... Il me dit qu'il en avait toujours vu donner... aussi je crois qu'elles ont commencé à peu près dans le temps de la mort de Louis X I V * . »
Cette hypothèse se confirmera plus loin par l'étude des Registres des Permissions Tacites dont le plus ancien, qui nous soit parvenu, le Manuscrit Français 21990, remonte à 1718. Une telle date n'est d'ailleurs pas étonnante puisqu'elle correspond aux premières années de la Régence dont nous savons que le climat social, au contraire de l'autoritarisme du règne de Louis X I V , fut libéral et devait naturellement inciter, sur le plan de la production intellectuelle, à un relâchement de la censure. Dès lors, les livres de privilèges représentent la pensée traditionnelle, orthodoxe, qui devient vite arriérée. Malesherbes lui-même le reconnaît. Il écrit : « Un homme qui n'aurait jamais lu que les livres qui dans leur origine ont paru avec l'attache expresse du gouvernement comme la loi le prescrit serait en arrière de ses contemporains presque d'un siècle3. »
Cette catégorie d'ouvrages qui recevra une permission tacite procède d'une psychologie collective qui ne fera que se développer au travers du x v m e siècle : la critique indirecte, dissimulée. Auparavant, dans la belle période du x v n e siècle, les esprits paraissaient ouvertement pour ou contre l'autorité et la frange des opinions nuancées et dissimulées paraissait réduite. De là, sur le plan de la production intellectuelle, l'existence de deux stades de censure. Au début du x v m e siècle par contre, l'opposition directe a gagné, semble-t-il, une partie assez importante de la population
1. C. G. DE MALESHERBES, Mémoires sur la librairie et sur la liberté de la presse (Publié par Antoine Alexandre Barbier). Paris, H. Agasse, 1809, in-8°, xv-435 p., fac-similé. BN : 8° F 39382, p. 248. 2. Ibid., p. 50. 3. Ibid., p. 39.
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qui n'ose se déclarer nettement et qui, dans ses écrits, comme dans son langage, procède par allusion. Ces ouvrages ne sont pas fondamentalement opposés mais partiellement critiques. Ils prouvent qu'une fraction croissante de la population se laisse pénétrer par les idées nouvelles, anticonformistes, avant-gardistes, des philosophes. Mais à l'inverse de ceux-ci qui luttent au grand jour, et très souvent à l'étranger, notamment par la publication d'ouvrages qui passent les frontières et sont vendus sous le manteau, cette partie de la société, plus modérée, moins consciente souvent, sous l'emprise directe de l'autorité royale, se manifeste par des sous-entendus. E t c'est bien ce que reconnaît aussi Malesherbes : « Puisque le goût d'imprimer sur toutes sortes de sujets est devenu plus général et que les particuliers, surtout les hommes puissants, sont aussi devenus plus délicats sur les allusions, il s'est trouvé des circonstances où on n'a pas osé autoriser publiquement un livre et où cependant on a senti qu'il ne serait pas possible de le défendre. C'est ce qui a donné lieu aux premières Permissions Tacites 1 . »
Le même auteur décrit l'état d'esprit qui est à l'origine des Permissions Tacites : quand on distingue qu'un livre n'est pas conforme en tout point à la doctrine de l'autorité, on préfère, puisqu'il faut lui donner une permission, ne pas la reconnaître officiellement et délivrer une Permission Tacite : « C'est qu'il n'y a point de loi qui soit exécutée lorsqu'une nation entière cherche à favoriser la fraude et que le gouvernement lui-même reconnaît qu'il faut fermer les yeux et c'est ce qui est arrivé en France dans le commerce de la Librairie 1 . »
Ainsi, pour éviter d'être totalement débordée et submergée, l'autorité, dès le début du x v m e siècle, temporise-t-elle en octroyant les Permissions Tacites et en créant ainsi une zone intermédiaire entre l'ouvrage autorisé et l'ouvrage prohibé. Cette zone intermédiaire, le pouvoir ne va pas la tolérer seulement à cause de son importance mais, par voie de conséquence, pour des raisons économiques. « Cependant il y avait beaucoup de ces ouvrages qu'il fallait absolument qui paraissent en France. Il n'était pas juste que le libraire de bonne foi fût privé du gain qu'un fraudeur ferait sur le même livre et l'intérêt du commerce ne permettait pas non plus qu'on laissât tous les jours les libraires étrangers s'enrichir... C'est ce qui a fait imaginer les Permissions Tacites... 3 »
1. Ibid., 2. Ibid., 3. Ibid.,
p. 345. p. 39. p. 50.
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BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Aussi bien l'origine, la nature des Permissions obligeaient-elles à les distinguer des autres autorisations. N'étant pas orthodoxes, elles ne pouvaient être officielles. Elles furent donc officieuses. Mieux même l'autorité évita longtemps de les reconnaître. C'est pourquoi elles furent déposées à la Chambre Syndicale sous le nom de « permissions pour le débit des ouvrages étrangers ». Là aussi le gouvernement procédait lui-même par dissimulation. Il ne s'agissait pas d'une autorisation d'imprimer ce qui eût été compromettant pour l'administration royale, mais de livres déjà imprimés. D'autre part ils l'étaient à l'étranger, là où on ne pouvait interdire leur publication. L'apparence était encore sauvée. Enfin on ne pouvait pas prohiber leur entrée complètement pour l'intérêt du commerce officiel. Ainsi sous tous les angles le choix des termes avait été judicieux : le pouvoir royal n'avait pas à reconnaître ces permissions qui, bien sûr, n'étaient pas scellées et pour lesquelles le nom de censeur, en principe, ne devait pas être connu. Quand le procédé fut assez éventé pour ne tromper personne, quand cela devint même ridicule de poursuivre, quand d'autre part le nombre des Permissions Tacites devint si grand qu'elles furent connues du plus large public, alors on renonça à ce titre et on prit officiellement le nom de permissions tacites. C'est ce qui se produisit à la Chambre Syndicale en 1750 et plus tardivement au Bureau de la Librairie puisque la dernière année du dernier registre de permissions étrangères est 1772. Aussi bien est-ce le lieu d'éclaircir une confusion qui s'est transmise jusqu'à nous entre les Permissions Tacites et les Permissions pour le débit des livres d'impression étrangère. Falk, écrivait à ce sujet : « Enfin il existait un moyen de transgresser les règlements... l'ouvrage était imprimé en France mais avec indication d'un lieu d'édition étranger. On le présentait comme tel au Garde des Sceaux et on lui demandait alors la permission de débiter. De ces permissions il était tenu registre comme des Permissions Tacites : Registre des livres d'impression étrangère présentés à Mgr. le Garde des Sceaux pour la permission de débiter 1 . »
Ainsi, en plus des Permissions Tacites, occupant la zone des livres non orthodoxes mais pas nettement hétérodoxes, il y aurait eu une catégorie supplémentaire de permissions pour des livres imprimés et à peine tolérables. Il trouvait, dans l'existence de certains registres de livres d'impression étrangère, une confirmation de son hypothèse. La lecture attentive des Mémoires de Malesherbes, l'étude comparée si nécessaire à la connaissance de la Librairie
1. Henri
FALK,
Les privilèges
de la librairie,
p. 61.
ADMINISTRATION
DE LA
LIBRAIRIE
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de cette époque, des registres de l'administration, devaient prouver que la théorie jusqu'ici répétée était erronée. Malesherbes, traitant de l'administration des Permissions Tacites d'une manière détaillée, écrivait encore sur le caractère exclusivement parisien des Permissions Tacites : « Les Permissions Tacites comme nous avons déjà dit sont consignées dans un registre qui reste chez M. le Chancelier et dont il y a deux copies, l'une entre les mains des Syndic et Adjoints de la Librairie, l'autre remise au Lieutenant de Police de Paris. De là il s'en suit qu'il n'y a aucune forme pour les Permissions Tacites qu'on accorde dans les provinces 1 . »
et plus loin : o C'est par la même raison que, dans l'usage actuel la liste des Permissions Tacites qui est déposée à la Chambre Syndicale est intitulée : liste des ouvrages imprimés en pays étrangers dont le débit est permis en France*. »
Ainsi selon le directeur de la Librairie lui-même, les permissions pour les livres étrangers ne sont qu'une dissimulation des Permissions Tacites pour le public qui avait à les connaître auprès des Syndics et Adjoints de la Librairie. L'étude des registres devait nous prouver l'exactitude du renseignement donné par Malesherbes. Les deux derniers registres de permissions pour les livres étrangers (Mss. Fr. 21991, 21993) correspondent dans le répertoire de Permissions Tacites (Mss. 21989) aux deux derniers registres de demandes de Permissions Tacites. Le second s'achève en 1772, l'année même où commence le troisième manuscrit (Mss. Fr. 21983) intitulé : Registre de Permissions Tacites. C'est donc la preuve que le renseignement donné en 1759 par M. de Malesherbes correspondait encore à une pratique courante plus de dix ans après. Ce stade intermédiaire entre le livre orthodoxe et le livre nettement hétérodoxe ne fit que se développer à travers le x v m e siècle. C'est l'opinion de Malesherbes au milieu du siècle : « Elles se sont multipliées au point d'être devenues aujourd'hui aussi communes que les Permissions Publiques'. »
La statistique des registres, une fois encore, sera beaucoup plus instructive que le texte. L'écart quantitatif entre le nombre annuel de privilèges et de Permissions Tacites ne fera que décroître à travers le siècle, et très rapidement à partir de 1760, au point 1. C. G. de
MALESHERBES,
p. 252. 2. Ibid., p. 255. 3. Ibid., p. 50.
Mémoires sur la librairie et sur la liberté de la presse,
46
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
qu'elles seront aussi nombreuses à la veille de la Révolution que les Permissions du Sceau et les Privilèges. Il semble même que ce développement progressif des Permissions Tacites ait un sens profond. On assiste, sur le plan de la production intellectuelle, à une lutte continue entre la fraction de la population favorable à la tradition royale et la fraction progressiste modérée. Le jour où les deux productions se rejoignent, où une masse égale de la population se trouve dans les deux camps, la révolution éclate, supprime les deux sortes d'autorisations en faisant triompher la seconde, en même temps que s'impose, sur le plan politique, les idées que cette dernière soutenait. Ainsi l'histoire de l'administration de la Librairie, l'histoire des diverses catégories de permissions d'imprimer nous permettent-elles de suivre l'évolution de l'autorité royale. Cependant l'augmentation du nombre des Permissions Tacites devait conduire naturellement à un enregistrement. L e même auteur le confirme : « Les Permissions Tacites étant devenues aussi communes qu'elles le sont aujourd'hui, on a senti la nécessité d'y mettre une forme et cette forme est qu'on les inscrit sur un registre déposé à la Chambre Syndicale et entre les mains du Lieutenant de Police 1 . »
Ce sont ces registres, sur lesquels nous reviendrons plus loin, qui devront être classés et nous permettront d'établir la statistique de cette catégorie de permission. Il nous reste, pour conclure, à déterminer les cadres théoriques des Permissions Tacites. 1° L a statistique des Permissions Tacites correspond à celle de la production des livres nouvellement écrits, qui cherchent à être imprimés, et dont la doctrine n'est ni orthodoxe ni franchement oppositionnelle. 2° Elle comprend les permissions dites de débit des livres d'origine étrangère. 3 ° Elle n'enregistre que les Permissions Tacites parisiennes, sans doute les plus nombreuses, mais en ne relevant pas les Permissions Tacites données dans les provinces. 4° Elle ne comprend pas : a) Les ouvrages de moins de deux feuilles cicero. b ) Les petites productions administratives, judiciaires, scolaires, religieuses. c) Les privilèges, les permissions clandestines.
1. Ibid., p. 246.
ADMINISTRATION
DE LA
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LIBRAIRIE
5° Cette statistique se distingue de celle de la production des livres nouvellement imprimés avec Permission Tacite en ce que les réimpressions ne s'y trouvent pas inclues. 6° Cette statistique ne peut exister, semble-t-il, que pour la période 1715-1791. 5.
L'ADMINISTRATION
DES
PERMISSIONS
Il faut ici distinguer deux parties différentes et complémentaires : l'autorité qui octroie la permission ; l'administration qui prépare sa délivrance. D'après les Lettres Patentes de 1563, c'était le roi qui décidait de donner ou non le privilège. Cependant le roi ne pouvait s'occuper personnellement de toutes les affaires du royaume. Il fut obligé, une première fois, de déléguer ses pouvoirs. Ce fut donc le Conseil d ' É t a t qui en fut chargé, et, dans celui-ci, la personne du ministère de qui dépendait ce problème : le Chancelier : « Le Conseil du Roi possède le droit de censure préalable (par délégation au Chancelier qui fait partie du Conseil)... 1 » « On voit, en conséquence, que le personnage auquel le roi avait donné délégation de veiller au fonctionnement du régime de la Librairie était le Chancelier de France 4 . »
Le Chancelier, plus tard, dans le courant du x v m e siècle, devait à son tour déléguer ses pouvoirs au Directeur de la Librairie : « Cependant, la multiplicité de ses attributions lui fit à son tour déléguer... le soin de diriger les affaires de la librairie à un fonctionnaire spécial, le directeur de la Librairie 3 . »
Ainsi peut-on discerner deux périodes : de 1653 à la fin du x v n e siècle et au début du x v m e ; de la fin du 1 e r quart du x v m e siècle à la Révolution Française. Dans la première c'est le Chancelier qui signe directement l'autorisation ; dans la seconde c'est par l'intermédiaire du Directeur de la Librairie que s'obtient le privilège. Ceux-ci se succédèrent à travers le x v m e siècle jusqu'à la Révolution Française. Selon J . P. Belin : « L'abbé Bignon qui était bibliothécaire et conseiller du roi fut nommé à cette charge au début du règne de Louis XV 4 . » 1. H e n r i FALK, Les privilèges de la librairie, p . 32. 2. Ibid., p. 49. 3. Ibid., p. 32. 4. J . P . BELIN, Le commerce des livres prohibés à Paris de 1750 à 1759. Paris, Belin frères, in-8°, 181 p. plans. B N : 8° Q 4019, p. 119.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Après quoi : « Elle fut confiée jusqu'en 1750 à des maîtres des requêtes : Fleuriau d'Armenonville (1722), Chauvelin (1727), qui furent tous deux Gardes des Sceaux, Rouillé, le Comte d'Argenson (1737), enfin Maboul (17401750). Les fonctions de Directeur de la Librairie étaient assez peu importantes et mal définies... 1 » D'autre part : « la place n'était nullement rétribuée». » Malesherbes succéda à Maboul : «Ce ne fut que quand Lamoignon fut nommé Chancelier en 1750 à la démission de d'Aguesseau que la Direction de la Librairie devint une charge réellement importante, tant à cause de la situation difficile où la publication des ouvrages philosophiques allaient mettre le gouvernement qu'à cause de la supériorité de l'homme qui fut chargé de ces délicates fonctions'. » Toutefois, Malesherbes avait des idées favorables aux philosophes, Il fut parfois doublé par le Lieutenant de Police : « Malesherbes conserva en effet sa place jusqu'à la disgrâce de son père. Il se retira en octobre 1763. Déjà en 1753, au dire de d'Argenson, le Lieutenant de Police Berryer aurait été chargé d'accorder les privilèges, la chose est douteuse 4 . » Mais en décembre 1759, de Sartine, qui venait d'être nommé Lieutenant de Police, fut commis pour tenir la main à l'exécution des règlements concernant la Librairie 8 . Après 1763, de Sartine fut chargé de la Librairie en remplacement de Malesherbes : « En 1763 ce fut lui qui fut complètement chargé par Maupeou de la Librairie dont la Direction se trouva réunie à la Police de 1763 à 1776'. » Cependant cette réunion, qui supprimait le poste réel de Directeur, devait obliger le Lieutenant de Police à renforcer les pouvoirs du secrétaire général de la Librairie.
1. 2. 3. 4. 5. 6.
Ibid., Ibid., Ibid., Ibid., Ibid., Ibid.,
p. 119. p. 119. p. 119. p. 119. p. 122. p. 122.
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Ainsi : « Comme le soin de sa charge ne lui permettait pas de s'occuper beaucoup de la Librairie on lui adjoignit un secrétaire général ou plutôt, on étendit les attributions de ce dernier dont la place existait déjà. On y nomma Marin, un censeur royal, journaliste assez ignoré 1 . »
En 1774, Sartine fut remplacé par Albert qui était aussi Lieutenant de Police. La Librairie fut à nouveau indépendante à partir de 1776 et du ministre Turgot, et fut confiée à Le Camus de Neville. « Le Ministère de Turgot et de Miromesnil... choisit comme directeur de la Librairie un conseiller du Grand Conseil, Le Camus de Neville...» »
enfin : « Le Camus quitta la Direction en janvier 1784. Il fut remplacé par un autre maître des requêtes Laurens de Villedeuil, auquel ne tarda pas à succéder Vidaud de la Tour, Conseiller d'État (1785) ; ce Vidaud resta en place jusqu'à la Révolution». »
L'examen attentif de l'origine de ces différents directeurs permet de déterminer cinq phases politiques successives. Au début, dans les premières années du règne de Louis XV, le développement de la production oblige le Chancelier à se décharger de cette occupation sur un Directeur de la Librairie. Comme il n'y a pas encore de question politique, on choisit un technicien : l'Abbé Bignon, bibliothécaire du Roi. Dans une deuxième période, c'est-à-dire pendant le deuxième quart de siècle, cette charge est donnée à des hommes d'administration, des maîtres des requêtes. A partir de 1750, elle est confiée dans une troisième phase au libéral M. de Malesherbes. Puis on cherche à renforcer la surveillance politique sous Maupeou et on réunit alors cette charge, momentanément, à celle du Lieutenant de Police. Mais cette réaction ne dure pas et l'on revient à l'ancien système à partir de Turgot : le libéralisme s'affirme progressivement sur le plan des fonctions. La fonction de directeur de la Librairie comportait les devoirs suivants sous Le Camus de Neville : « 1° 2° 3° 4° 5°
proposer la nomination d'un nouveau censeur ; nommer le censeur d'un ouvrage ; recevoir son jugement ; en rendre compte à M. le Garde des Sceaux ; lui adresser la feuille des jugements ou des Permissions Tacites;
1. Ibid., p. 121. 2. Ibid., p. 122. 3. Ibid., p. 125.
50
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
6° proposer la nomination des inspecteurs de la Librairie tant à Paris qu'en Province ; 7° signer les ordres pour rendre les livres à la Chambre Syndicale ; 8° permettre ou suspendre la distribution d'un ouvrage approuvé ou permis ; 9° punir un libraire qui aura mis en vente avant la permission ; 10° recevoir les plaintes des auteurs contre les libraires et en rendre compte à M. le Garde des Sceaux; 11° rendre compte à M. le Garde des Sceaux des demandes de privilèges, des refus d'enregistrement des dits privilèges à la Chambre Syndicale ; 12° des plaintes et contrefaçons 1 . »
Les directeurs, non plus, ne pouvaient s'occuper directement de choisir entre les livres. Ils étaient obligés de s'en référer aux censeurs qu'ils choisissaient, et à l'administration qu'ils dirigeaient. Il semble qu'on puisse distinguer trois périodes dans l'évolution de ceux-ci. Tout paraît en effet se passer comme si on assistait à la constitution progressive de l'administration royale de la Librairie et particulièrement des permissions, de 1563 à 1791. Dans une première période qui va de 1563 à 1624-1649, c'est bien le Chancelier qui délivre la permission. Mais il ne semble pas qu'il y ait alors une administration d ' É t a t chargée de cette affaire. Il est possible que le pouvoir civil s'en soit remis aux décisions des membres de l'Université, qu'il ratifiait ensuite. A partir de 1624-1649, et jusqu'au milieu du x v m e siècle, les choses vont changer. Le Pouvoir Royal ne se contente plus de délivrer la permission, il veut encore avoir des hommes à lui, chargés de donner leur avis. D'où la création, en 1624, des Censeurs Royaux au nombre de quatre, ce qui paraît montrer le peu d'importance de cette administration à son début. Encore furent-ils « choisis parmi les membres de la Faculté des Lettres de Paris 1 »
ce qui semble indiquer que le Pouvoir Royal voulait ménager l'Université, dont on peut ainsi penser qu'elle était bien, auparavant, l'autorité chargée de la censure pour le roi. On sait cependant que sur l'intervention de l'Université, les Censeurs durent renoncer à leur charge pendant un temps assez long, puisqu'ils ne furent rétablis définitivement qu'en 1649. Pendant cette période qui ne commence vraiment qu'en 1649, cette administration, faite essentiellement des Censeurs Royaux, va se développer par l'augmentation du nombre de ceux-ci, qui atteint 79 en 1741, puis 82 en 1751 et ne cessera de croître pendant la troisième période, puisqu'ils furent 121 en 17633. Aussi ceux-ci 1. Jbid., p. 124. 2. FALK, Les Privilèges 3. Ibid., p. 30-31.
de la Librairie,
p. 29.
ADMINISTRATION
DE LA
LIBRAIRIE
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furent-ils choisis parmi les spécialistes des diverses matières : théologie, jurisprudence, médecine, chirurgie, mathématique, géographie, belles-lettres. Enfin on sait comment on devait pratiquer : « Deux exemplaires du manuscrit à examiner leur étaient remis qu'ils étaient chargés de parapher page par page. Ils en conservaient un et rendaient l'autre à l'imprimeur 1 . »
Il est probable que cette seconde période se serait poursuivie si, vers le début du x v m e siècle, l'augmentation de la production des livres n'avait entraîné la constitution d'une administration sédentaire et méthodiquement organisée : la Direction de la Librairie, dans laquelle figurent comme une partie du personnel, les Censeurs Royaux. Ces derniers paraissent relativement indépendants par rapport aux autres employés. Enfin comme l'étude de la fin du Bureau de la Librairie l'a montré2, ce sont eux qui furent les premiers sacrifiés au début de la Révolution, avant que le Bureau ne soit lui-même fermé. Le Bureau semble avoir été précisément organisé, si l'on en juge par les registres qui nous en sont restés. Une série générale, les Registres de travaux, déterminent les diverses tâches à exécuter3. Quant à la méthode suivie pour l'obtention des autorisations, elle varia légèrement d'un genre de permission à l'autre. En ce qui concerne les privilèges, une note nous apprend la procédure : ... » L'usage est qu'on doit : 1° Présenter le manuscrit dont il s'agit ou seulement le titre à Mgr le Chancelier qui se donne la peine d'écrire en haut de la page le nom du censeur, à qui il lui plaît de l'envoyer pour le lire et y mettre une approbation : c'est ce qu'on appelle commettre ; 2° Le Manuscrit approuvé, il est présenté en entier au Sceau par un secrétaire du Roy, avec la patente de la permission d'imprimer que Mgr scelle ou refuse de sceller selon qu'il est content de la matière et de l'approbation qui se fait sans éloge ; 3° Le Privilège scellé, le manuscrit doit rester à Mgr le Chancelier qui le fait garder pour y avoir recours en cas qu'après l'impression on y trouve des choses qui n'auraient pas du estre approuvées et voir si l'auteur a changé quelque chose par malice, par intérest ou autrement ; 4° Le livre estant imprimé, celui qui en a obtenu le privilège, soit l'auteur, soit le libraire, est obligé d'en mettre un exemplaire en blanc à la Bibliothèque de M. le Chancelier et d'en tirer un reçu avant que de l'exposer en vente à peine d'être déchu de son privilège. Quant aux continuations, l'usage est qu'un an avant l'expiration d'un privilège dont on demande la prolongation, on fasse représenter au Sceau par un Secrétaire du Roy la patente en original du privilège, avec une 1. Ibid., p. 29. 2. Voir l'étude sur le Dépôt Légal sous VAncien Régime. 3. Mss. Fr. 2 1 9 6 2 à 2 1 9 6 6 ; 2 1 9 3 7 - 2 1 9 3 8 ; 22039-22010.
52
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
nouvelle patente prête à sceller, dans laquelle on expose les raisons sur lesquelles on fonde la demande et Monseigneur scelle ou refuse de sceller la dite patente, selon la justice des raisons. Aux privilèges et prolongations, Monseigneur écrit de sa main la grâce qu'il juge à propos de faire, et qui est de six, huit, dix, douze même vingt et cinquante années, suivant l'étendue et l'importance de l'ouvrage, et par rapport aux grandes avances que le libraire est ou a été obligé de faire... 1 »
Encore le document oublie-t-il de mentionner qu'après l'obtention du privilège, et bien avant l'impression, et à plus forte raison le dépôt, le bénéficiaire de la permission se devait de la faire enregistrer à la Chambre Syndicale des Libraires : « Une fois nanti de son privilège, le libraire est tenu de le faire enregistrer à la Chambre Syndicale de façon qu'un chacun en puisse prendre connaissance'. »
Les différentes phases se trouvent confirmées par l'étude des registres de privilèges tenus t a n t par le Bureau de la Librairie que par la Chambre Syndicale des Libraires. Ils en offrent même une connaissance plus complète. Nous aurons l'occasion d'y revenir plus loin lorsque nous examinerons ces registres. Le procédé d'obtention des Permissions Tacites devait être évidemment voisin. L à encore, le censeur intervenait, et la Chambre Syndicale également. Mais le Chancelier ne scellait pas : « Les Permissions Tacites ainsi que les Permissions Publiques ne sont données que sur le rapport d'un censeur qui signe son approbation et paraphe le manuscrit ou un exemplaire imprimé et la liste en est déposée à la Chambre Syndicale des Libraires de Paris'. »
et encore : « Il n'y a donc de différence entre ces permissions illégales et les autres qu'en ce qu'elles ne passent pas aux Sceaux et que le public ne voit pas le nom du censeur... 4 »
Nous aurons l'occasion, par l'étude des registres, de vérifier que les méthodes employées pour l'obtention des unes et des autres était en effet très voisin.
1. 2. 3. 4.
FALK, Les Privilèges Ibid., p. 76. Ibid., p. 59. Ibid., p. 59.
de la Librairie,
p. 75 76.
ADMINISTRATION
C. LE POUVOIR
DE LA
LIBRAIRIE
53
JUDICIAIRE
Les pouvoirs politiques et religieux n'étaient pas les seuls à délivrer des autorisations d'imprimer. Il y avait aussi le pouvoir judiciaire, c'est-à-dire le Parlement, le Lieutenant de Police, les Juges de Police, les Avocats et le Procureur du Roi. 1. LE
PARLEMENT
Dans la période antérieure à l'intervention définitive de l'autorisation royale, le Parlement possédait, comme l'Université, le droit de donner l'autorisation d'imprimer un livre. Cela devait durer jusqu'en 1563. « En même temps, l'autorité royale s'efforçait d'enlever au Parlement le droit d'autoriser l'impression et la publication des livres qu'il avait, à l'origine, exercé concurremment avec elle. A la page 4 du manuscrit qui porte copie des Lettres Patentes de 1563, le commentateur a ajouté de sa main : « Le Parlement, et quelquefois les Juges royaux inférieurs, étaient en possession d'accorder la permission d'imprimer ; cela a duré jusqu'en 1563 que Charles IX a défendu d'imprimer sans Lettres du Grand Sceau 1 . »
A partir de cette date, le Parlement ne délivra plus d'autorisation pour les livres. Il chercha et obtint la conservation du droit de censure non antérieur mais postérieur à la publication : « Le Parlement n'insista pas. Il ne chercha pas la censure des livres à paraître mais des livres parus 2 . »
Cependant les besoins propres du Parlement conduisirent celui-ci à donner son autorisation pour de petites publications, affiches, ordonnances, règlements, décisions de justice. Ainsi selon Falk : « certaines publications pouvaient avoir lieu sans la permission royale... le Parlement... conserva la faculté d'autoriser l'impression des règlements, affiches, ordonnances et autorisations de Justice'. »
Ce droit est aussi à l'origine des réclamations du Sieur Joanne adressées à l'Abbé Bignon et concernant le Dépôt Légal. Cet auteur mentionnait, au x v i u e siècle, que ces sortes d'ouvrages échappaient 1. Ibid., p. 28. 2. Jbid., p. 28. 3. Ibid., p. 56.
54
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
au D é p ô t j u s t e m e n t par le fait que seuls d e v a i e n t être déposés les livres avec permission royale.
2.
LE
LIEUTENANT
GÉNÉRAL
DE
POLICE
ET
LES
JUGES
DE
POLICE
Dans le cadre des règlements déterminés par le Conseil du Roi et par le Parlement, le L i e u t e n a n t Général de Police, plus particulièrement pour la capitale, et les J u g e s de Police, plus fréquemm e n t pour la province, a v a i e n t pour fonction de les faire appliquer. « ...Le Parlement... abandonne à la police, la besogne quotidienne et courante, la suppression des ouvrages obscènes, des feuilles volantes, la répression des contraventions ordinaires aux règlements de la Librairie... 1 » et encore : « Le Lieutenant de Police légiférait à l'intérieur, pour aussi parler, des Arrêts du Conseil et du Parlement 1 . » On a pu voir c e p e n d a n t que, de 1763 à 1776, les Lieutenants de Police, de Sartine et Albert, furent également chargés de la direction de la Librairie. Plus tard, sous Le Camus de Neville, les d e u x fonctions furent précisées en ce qui concerne la Librairie. Le L i e u t e n a n t de Police d e v a i t : « 1° Permettre l'entrée des livres aux barrières ; 2° les faire rendre à la douane ; 3° (s'occuper des) saisies ou suspensions des livres par le commis des fermes, tant aux barrières de Paris que de la province ; 4° Des saisies des livres prohibés faites dans les Chambres Syndicales par les Inspecteurs... 5° La visite qui se fait tous les ans à la Chambre Syndicale pour décider du sort des livres qui ont été confisqués ou suspendus ; 6° Recevoir les serments des nouveaux officiers de la Libraire et celui des nouveaux libraires ; 7° Tenir la main à l'exécution des règlements ; 8° Permettre l'impression d'un ouvrage jusqu'à concurrence de deux feuilles ; 9° Défendre ou arrêter la vente de toutes espèces d'ouvrages selon les circonstances ; 10° Toutes perquisitions ou saisies ; 11° La censure des pièces de t h é â t r e ; 12° On doit fournir au magistrat une copie des permissions tacites. Il faudrait aussi lui donner une copie de tous les règlements 3 . »
1. Ibid., p. 47. 2. Ibid. 3. J. B. BELIN, Le commerce des livres prohibes à Paris de 1750 à 1759, p . 124.
ADMINISTRATION
DE LA
55
LIBRAIRIE
D e par leur t r a v a i l ils f u r e n t donc chargés de deux sortes d ' a u t o risation : les permissions simples pour des ouvrages n ' e x c é d a n t pas deux feuilles en caractère cicero ; les permissions clandestines. a ) Les
permissions
simples.
« Le Lieutenant Général de Police autorisait l'impression des brochures de moins de deux feuilles et des affiches1. » et encore : « Ainsi fut-on d'accord pour excepter de cette formalité (le privilège) les brochures et livrets, les mémoires factums et autres actes de Justice. Les Lettres Patentes de 1701 décidèrent en effet que pour les imprimés de cette nature l'intervention du Chancelier n'était pas nécessaire, mais que l'autorisation du Juge de Police suffisait". » Son A r t i c l e I I stipulait en e f f e t : « Aucun libraire et imprimeur ne pourra faire imprimer ou réimprimer aucun livret sans en avoir obtenu permission des Juges de Police des lieux et sans une approbation de personnes capables et choisies par les dits Juges pour l'examen des dits livrets 3 . » A ces dernières, il f a u t encore a j o u t e r les j o u r n a u x et nouvelles à main : « Les journaux, nouvelles à main étaient assimilés aux brochures et livrets 4 . » Cette autorisation d e v a i t durer, semble-t-il, j u s q u ' à la fin de l'Ancien Régime. b ) Les
permissions
clandestines.
M e l l o t t é e écrit en se référant au M é m o i r e de Malesherbes : « On ne s'en tint même pas toujours à ces Permissions Tacites mais cependant contrôlées et consignées sur des registres spéciaux ; on laissa paraître, sans en inquiéter les imprimeurs, certains livres pour lesquels on n'avait même pas sollicité d'autorisation tacite. A côté des Permissions Tacites il y eut ainsi les Permissions Clandestines5. » 1. FALK, Les Privilèges de la Librairie, p. 57. 2. MELLOTTÉE, Les Transformations économiques Régime, p. 63. 3. Mss. Fr. 22071 f. 195. 4. FALK, ibid., p. 57. 5. MELLOTTÉE, ibid.,
p. 70.
de l'imprimerie
sous
l'Ancien
56
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Ainsi, avec les permissions clandestines, sommes-nous arrivés à l'extrême limite de cette zone intermédiaire des ouvrages tolérables placés entre celle des livres orthodoxes et celle des livres interdits. C'est même une frange pleine d'insécurité. Ainsi selon Malesherbes : « On prenait le parti de dire à un libraire qu'il pouvait entreprendre son édition, mais secrètement, que la police ferait semblant de l'ignorer et ne le ferait pas saisir ; et comme on ne pouvait pas prévoir jusqu'à quel point le clergé et la justice s'en fâcheraient, on lui recommandait de se tenir prêt à faire disparaître son édition dans le moment qu'on l'en avertirait, et on lui promettait de lui faire parvenir cet avis avant qu'il ne fût fait des recherches chez lui 1 . »
Ces ouvrages, le pouvoir royal ne pouvait en prendre la responsabilité. C'est pourquoi il s'en déchargea sur le Lieutenant Général de Police : « Ce n'est pas le magistrat de la librairie qui donne cette assurance au libraire, c'est le Lieutenant de Police 1 . »
3.
AVOCATS
ET
PROCUREURS
Les mêmes petits ouvrages, autorisés par les Juges de Police et par le Lieutenant Général de Police, quand ils concernaient la justice proprement dite, pouvaient être imprimés avec la seule autorisation d'un avocat ou d'un procureur : « Enfin les mémoires et les factums pouvaient être imprimés sans permission pourvu qu'ils fussent signés d'un avocat inscrit au tableau ou d'un procureur 3 . »
II. LA POLICE DES LIVRES L'autorisation d'imprimer visait la partie de l'organisation antérieure à l'impression. Cependant, l'autorité, qui avait déjà mis en place tout ce dispositif de surveillance préalable, ne pouvait pas se désintéresser de ce qui se passerait pendant et après la production du livre sans ruiner du même coup ce qu'elle venait d'instituer. Elle avait soumis l'impression à l'autorisation afin 1. Jbid. p. 71. 2. Ibid., p. 71. 3. FALK, Les Privilèges
de la librairie,
p. 57.
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DE LA
LIBRAIRIE
57
d'éliminer les livres dont elle ne voudrait pas, contrefaçons, livres dangereux pour le pouvoir royal, la religion ou la morale. Il lui était donc indispensable d'élaborer une seconde partie de l'organisation consacrée à la surveillance de l'impression, c'est-à-dire de créer une police des livres. Celle-ci à son tour devait comporter deux éléments : le contrôle afin de découvrir les infractions, d'abord ; des sanctions punitives, ensuite, qui rendraient plus craintifs les autres imprimeurs. Le contrôle dépendit de l'objet de la surveillance. La vérification des livres devait concerner d'une part les livres autorisés, d'autre part ceux qui ne l'étaient pas, qu'il s'agisse de la contrefaçon des premiers ou de livres interdits. Le contrôle des ouvrages permis fut effectué par les personnes ou les organismes qui avaient donné les permissions, c'est-à-dire le Chancelier, le Censeur, le Lieutenant de Police, et, dans une certaine mesure, l'Inspecteur de la Librairie, dans le courant du x v m e siècle, et grâce au Dépôt Légal. La découverte des ouvrages interdits fut réservée, pendant le x v n e siècle, à la Chambre Syndicale des Libraires et pendant une bonne partie du x v m e siècle, aux Inspecteurs de la Librairie qui doublèrent donc les Syndics et Adjoints. Ainsi le contrôle des autorisations se fit-il généralement après l'impression ; celui des ouvrages interdits, à la fois pendant et après. La vérification des livres autorisés était nécessaire. A quoi bon donner une permission si l'ouvrage pouvait être librement imprimé, si l'on pouvait en modifier le texte ? Cette surveillance semble avoir pris deux formes, suivant la nature des permissions : contrôle par le Chancelier et le Censeur, avec l'aide du Bureau et de l'Inspection de la Librairie pour les Privilèges, les Permissions Tacites, puis les Permissions Simples, et même les ouvrages de tolérance. Contrôle du Lieutenant de Police pour les Permissions Clandestines, avec l'aide toujours de l'Inspection de la Libraire. Le plus ancien des contrôles dont nous ayons connaissance était effectué par le Chancelier et le Censeur pour les livres de privilèges. Nous savons assez bien qu'il s'effectuait en deux temps : l'un préparatoire avant l'impression qui consistait, par la conservation d'un exemplaire paraphé du manuscrit, à s'assurer un moyen de comparaison. Le second temps, intervenait après l'impression. C'est alors que s'effectuait le contrôle, par la comparaison du manuscrit précédent et du livre nouvellement imprimé. Encore cela supposait-il la possession de ce dernier qui fut acquise par l'institution du Dépôt
1. Ibid.,
p. 29.
58
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
Légal, dans sa forme policière, au profit du Chancelier d'abord, et plus tard du Censeur 1 . Ce contrôle devait naturellement s'élargir, à travers le x v m e siècle, aux ouvrages publiés avec d'autres permissions, au fur et à mesure de leur institution ou des craintes gouvernementales. Cela commença par les permissions simples qui furent réclamées en 1707 par le Chancelier de Ponchartrain lequel du même coup développait le Dépôt à son profit 2 . Enfin les Permissions Tacites et les Permissions clandestines furent à leur tour déposées. Pourt a n t , les premières ne recevaient pas les scellés du grand sceau et les secondes étaient délivrées par le Lieutenant de Police. Cependant, elles furent réclamées et déposées comme le prouvent des textes signés du Chancelier 3 . Généralement, c'était l'Inspecteur de la Librairie qui, au moins dans la deuxième moitié du x v m e siècle, et pour ces permissions, servit d'intermédiaire et fut chargé de procurer les ouvrages déposés non seulement pour ces autorités mais aussi pour le Lieutenant Général de Police dont dépendait l'autorisation et donc le contrôle des permissions clandestines et des permissions simples pour la capitale. Quant aux cadres des livres recueillis, ils correspondent pour chaque genre de permission à ceux qui ont été déterminés plus haut. Le seul inconvénient majeur sur le plan statistique est que ce Dépôt fut fait à des personnes successives et non à une institution continue. De la sorte, ou les ouvrages ne furent pas enregistrés, ou les enregistrements, toujours fragmentaires à une période donnée, disparurent avec les archives familiales des destinataires. Le contrôle concernait aussi, et davantage peut-être, les livres qui pouvaient être imprimés sans autorisation. Il fallait donc surveiller les imprimeries et la vente afin de saisir les ouvrages interdits. Ici eut lieu une évolution. L'autorité royale s'en remit à la Chambre Syndicale des Libraires, notamment aux Syndics et Adjoints. Sans nous attarder à cette matière, rappelons, cependant, que cet organisme de défense des intérêts professionnels, qui existe encore aujourd'hui sous le nom de Cercle de la Librairie, provenait à l'origine des confréries des libraires imprimeurs du Moyen Age et qu'elle fut constituée en Communauté des Libraires par un É d i t du Roi de 1618. Dans notre précédente étude sur le Dépôt Légal sous l'Ancien Régime, nous avions déterminé les locaux successifs qu'elle occupa de 1618 à la Révolution qui devait la dissoudre comme toutes les corporations. E n fait les Syndics et Adjoints devaient intervenir
1. Voir Le Dépôt Légal sous l'Ancien Régime, 2. Ibid., p. 90. 3. Ibid., p. 56.
p. 51.
ADMINISTRATION
DE LA
LIBRAIRIE
59
sur plusieurs plans. En ce qui nous concerne ici, ils devaient d'abord, pendant l'impression, faire la visite des imprimeries : « Ils visitaient les ateliers et les livres chaque fois qu'ils le trouvaient nécessaire, ils dressaient un procès verbal des ouvrages imprimés... et le remettaient au Lieutenant Général de Police. Ils faisaient saisir et transporter immédiatement au bureau de la Communauté qui statuait sur tous les livres défendus ou contrefaits ou imprimés dans le royaume sans permissions ou privilèges 1 . »
En outre ils devaient vérifier, pour les mêmes raisons, les livres qui arrivaient à Paris de l'étranger ou des provinces, deux fois par semaine, les mardi et vendredi. Ils faisaient venir les ballots déposés à la douane, et qui avaient été scellés, ils les ouvraient, examinaient les livres, donc postérieurement à leur production et en dressaient également un procès-verbal. Enfin, il faut rappeler qu'ils durent enregistrer les nouveaux privilèges sur des registres susceptibles d'être compulsés par les libraires, afin d'éviter la contrefaçon involontaire et qu'à partir de 1704 ils étaient chargés de recevoir les livres du Dépôt Légal et de les répartir ensuite entre les différents destinataires. Cette surveillance aboutissait sur le plan statistique à la constitution de procès-verbaux particuliers à un imprimeur, et à une date donnée, en ce qui concerne les visites des imprimeries. L'enregistrement, au contraire, devait être continu pour les ouvrages introduits à Paris et ceux qui furent censurés. Cependant les Syndics et Adjoints qui avaient bénéficié, semble-t-il, de la protection royale pendant tout le x v n e siècle ne paraissent pas s'être acquittés de leur charge d'une manière aussi valable dans le courant du x v m e siècle. Ainsi d'Hémery, écrivait-il que, par crainte de réciprocité, lorsque les fonctions auraient changé de main, les Syndics et Adjoints : « s'acquittaient assez mal de leur mission'. »
et encore : « Aussi on sçait que les visites faites par les Syndics et Adjoints sont toujours infructueuses excepté quand il est question de l'infraction faite à un privilège ou quand ils reçoivent des ordres du Lieutenant de Police de se transporter sur le champ dans un lieu qui leur est indiqué en sorte qu'ils n'ayent pas le temps de prévenir le délinquant». »
1. FALK, Les Privilèges de la librairie, 2. Jbid., p. 52. 3. Mss. Fr. 22078. f 68.
p. 52.
60
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Aussi bien, le Lieutenant Général de Police, dont dépendait la police de la Librairie fut-il conduit à élargir progressivement les fonctions de l'Inspecteur de police chargé de la Librairie, jusqu'à constituer l'organisme de l'Inspection de la Librairie, dont la fonction consista à réaliser le même travail que les officiers de la Chambre, c'est-à-dire finalement à les doubler. Il faut remarquer, à ce propos, que cette évolution est parallèle à celle de l'administration de la Librairie. Les deux organismes se développent progressivement pendant le x v m e siècle, au fur et à mesure que les affaires de librairie prennent de l'importance. Nous avons eu l'occasion, dans notre étude sur le Dépôt Légal de 1537 à 1791, à la suite de Coyecque et en nous fondant sur les documents manuscrits de d'Hémery, de refaire l'historique de cette institution qui, confiée au début du x v m e siècle à François Le Roux, fut ensuite donnée à Tapin, enfin à d'Hémery et à Goupil. Nous ne nous occuperons ici que de leur fonction de contrôle de la production des livres. Après la surveillance générale, ils durent dresser un état des ouvrages suspendus et non retirés. Puis pendant l'impression, faire « la recherche des i m p r i m e u r s clandestins et d e t o u s les o u v r a g e s q u e l c o n ques i m p r i m é s sans p e r m i s s i o n 1 . »
Ils durent encore assister à la visite des livres imprimés qui arrivaient à Paris, de France et de l'étranger, en compagnie des Syndics et Adjoints et c'est à cette occasion que ceux-ci protestèrent sans obtenir raison. Enfin, ils furent progressivement chargés de regrouper et de distribuer les ouvrages imprimés par permission tacite ou clandestine, puis à partir de 1785, des livres du Dépôt Légal, notamment ceux imprimés avec privilège. Ainsi, faute de pouvoir avoir confiance dans les Syndics et Adjoints qui prirent la défense des intérêts des autres libraires, les Lieutenants de Police furent-ils conduits à les faire doubler par des gens qui dépendaient directement d'eux, qui leur rendaient compte, et dont ils étaient sûrs. Enfin, c'est à l'occasion de ce travail que l'un d'eux, le plus célèbre, Joseph d'Hémery, fut conduit à composer des registres pour renseigner l'autorité, en indiquant les livres nouveaux. Ce système de contrôle n'était évidemment pas suffisant. Il fallait non seulement découvrir les infractions aux règlements de l'impression, mais les sanctionner. Les organismes précédents
1.
Mellottée,
Régime, p. 108.
Les
transformations
économiques
de l'imprimerie
sous
l'Ancien
ADMINISTRATION
DE LA
LIBRAIRIE
61
n'avaient pas ce droit. Ils devaient seulement avertir l'autorité, rendre compte. Celle-ci prenait ensuite des sanctions. En fait, il semble que les décisions furent prises soit par le Lieutenant de Police, soit par le Parlement, soit par le Conseil du Roi ou le Chancelier. Le Lieutenant de Police : « légiférait à l'intérieur... des arrêts du Conseil et du Parlement, il rendait des ordonnances destinées à assurer le détail de l'exécution des règlements. Les ordonnances étaient portées à la connaissance des intéressés soit par placards... soit par l'intermédiaire des Syndics et Adjoints de la Librairie... 1 »
Le Lieutenant de Police : « avait le droit d'appMquer telle peine qu'il jugeait nécessaire... de fait le Lieutenant de Police prononça quelquefois la peine capitale...' »
Le Parlement aussi pouvait intervenir. Il conservait, depuis 1563, la « Censure postérieure à la publication du livre. Ce fut la « Publica Combustio » pour laquelle il eut un faible'. »
Celle-ci consistait à brûler un exemplaire de tous les livres, au pied du grand escalier du Palais. Enfin, un dernier recours, le Conseil du Roi, appliquait aussi les sanctions qu'il jugeait nécessaires. Au x v i e siècle ce fut, assez fréquemment, la peine de mort par le bûcher. Avec les années, les sanctions devinrent moins rigoureuses et le supplice du carcan remplaça souvent la peine précédente.
III. LE DÉPÔT LÉGAL Le Dépôt Légal constitue la dernière phase chronologique de cette organisation de l'impression sous l'Ancien Régime. Il ne peut être ici question d'entrer dans le détail de cette institution à laquelle nous avons consacré une étude déjà publiée. On ne saurait donc faire qu'un rappel très succinct des seules parties qui nous intéressent. On sait que le Dépôt Légal consiste en une obligation faite par la loi, aux imprimeurs, éditeurs, ou auteurs de délivrer un ou plusieurs exemplaires, suivant les époques, des 1. F A L K , Les privilèges de la librairie, p. 17-18. 2. Ibid., p. 49. 3. Ibid., p. 43.
62
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
ouvrages nouvellement imprimés, à un certain nombre de destinataires. Le Dépôt Légal fait donc partie de cette organisation de l'impression, puisqu'il s'agit d'une intervention réglementaire de l'autorité à propos de la production des livres nouveaux. Il en occupe bien la dernière partie puisque le Dépôt ne concerne que le livre achevé d'imprimer. S'il est incorporé il reste aussi distinct. Initialement il lui est étranger. Lorsque François I e r le fonde, en 1537, le Pouvoir Royal n'a pas encore ébauché fortement l'organisation de l'impression. Le Dépôt a seulement pour but d'enrichir les collections royales et nationales. Par la suite, toute une partie du Dépôt Légal restera étrangère à des préoccupations policières, qui n'interviennent qu'un siècle environ plus tard, vers 1638, quand le Dépôt commence à être fait aussi au profit du Chancelier, et qu'il s'introduit alors dans l'organisation de surveillance de l'impression qui est en pleine constitution. La branche fondamentale du Dépôt qui va, pour la période de l'Ancien Régime, de 1537 à 1791 intéressait, outre la Bibliothèque du Roi, le Cabinet du Roi à partir de 1658, et la Chambre Syndicale des Libraires depuis 1618, les deux premiers dans un but de collection, le dernier pour permettre de subvenir aux frais de la communauté. La branche policière, on l'a vu plus haut, ne concernait que le Chancelier à partir de 1638, le Garde des Sceaux quand les Sceaux avaient été retirés au Chancelier, le Censeur, et plus tard le Lieutenant de Police, principalement pour les permissions clandestines. Tous, à l'exception de ce dernier destinataire, recevaient les livres de privilèges et les Permissions Tacites, soit directement jusqu'en 1704, soit par l'intermédiaire de la Chambre Syndicale de 1704 à 1789, soit encore grâce à l'intervention des Inspecteurs de la Librairie à partir de 1785. On sait, enfin, que plusieurs des destinataires, par obligation des règlements, ou de leur propre initiative, avaient constitué des registres enregistrant le Dépôt année par année, pour des catégories de permissions dont les cadres statistiques ont été plus haut déterminés. Nous aurons l'occasion d'y revenir plus loin.
LES REGISTRES BIBLIOGRAPHIQUES DE L'ADMINISTRATION DE LA CENSURE ET DU DÉPÔT LÉGAL
CHAPITRE II
LES CIRCUITS DE L'ADMINISTRATION DE LA CENSURE ET DU DÉPÔT LÉGAL
GÉNÉRALITÉS La détermination de la statistique de la production générale des livres en France exigeait l'utilisation de toutes les sources bibliographiques valables et, particulièrement, de la plus importante de toutes, qui est faite des registres bibliographiques officiels et manuscrits. Toutefois, la classification de ceux-ci ne pouvait être réalisée exactement, sans obtenir préalablement la connaissance de l'organisation administrative qui leur a donné naissance. Cette dernière a été acquise dans le chapitre précédent. Il nous est maintenant possible de situer nos registres et de les examiner. Cependant, si l'organisation légale est utile aux registres, inversement ceux-ci sont non moins nécessaires. En effet, puisque les registres bibliographiques sont ce qui nous reste aujourd'hui du fonctionnement de cette administration, leur analyse nous permettra de dépasser la simple connaissance théorique de l'organisation et de préciser ce qu'elle fut en réalité. Ce ne sera pas le moindre apport de ce travail. Les sources des registres bibliographiques officiels et manuscrits sont les mêmes, à peu de chose près, que celles de l'étude générale de la Librairie pour la même période, dont elles ne constituent qu'une des parties. Aussi bien, ne reviendrons-nous pas sur les généralités concernant chaque grande collection. Cependant, nous devrons fixer ce que chacune d'elles comporte de registres bibliographiques.
66
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
LE DÉPARTEMENT DES MANUSCRITS A.
LA B I B L I O T H È Q U E
NATIONALE
Les plus importantes séries de registres bibliographiques sont conservées au Département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale. 1 . LES
ARCHIVES
LIBRAIRES D E
DE
LA
CHAMBRE
SYNDICALE
ET
ROYALE
DES
PARIS.
contiennent plusieurs catégories de registres : A. Les Registres de la Chambre Ce sont ceux qui furent composés à la Chambre, en application des règlements. On peut les classer selon les trois périodes chronologiques de la production des livres avant, pendant, après l'impression. Avant l'impression était effectué l'enregistrement des privilèges (Mss. Fr. 21944-47 et 21948-71) et des permissions tacites (Mss. Fr. 21982-21985). Pendant l'impression, à une certaine époque, était faite une déclaration des livres qu'on imprimait (Mss. Fr. 21982). Après l'impression, deux opérations avaient lieu. D'une part l'examen des livres arrivés à la douane, d'autre part le Dépôt Légal. A cela, il faut ajouter les visites dans les imprimeries, mais elles n'ont pas donné lieu à des registres distincts. On a ainsi les Registres des Balles transportées de la douane à la Chambre (Mss. Fr. 2189721926) et les Registres de livres arrêtés (Mss. Fr. 21930-21934). Quant au Dépôt Légal, outre les registres mentionnés dans l'étude précédente (Mss. Fr. 22029, 22030, 22034) il faut ajouter, pour le Dépôt Légal pour la Bibliothèque du Roi, le Mss. Fr. 21930, pour la Chambre Syndicale elle-même, les Mss. Fr. 21943, 21945, 21982 et pour le Chancelier, le Mss. Fr. 22007. B. Les registres du Bureau de la Librairie Là aussi, la classification doit être faite en trois périodes. Avant l'impression on trouve concernant l'autorisation d'imprimer : — Les registres de travaux. Registres de travaux en cours (Mss. Fr. 21862-66, 22039-40, 21969). Registres de Correspondance
CIRCUITS
ADMINISTRATIFS
67
(Mss. Fr. 21938, 2 e partie). Registres de travaux effectués (Mss. Fr. 21937 1™ partie — 21938, l r e partie 21867). Registre répertoire des travaux effectués (Mss. Fr. 21937, 2 e partie). — Les Registres de Privilèges et Permissions du Sceau. Registres de demandes et d'autorisations (Mss. Fr. 21939-42, 21995-22003, 21978 N. A. 2801). Registres des Censeurs (Mss. Fr. 22014, 22015, 22016). Répertoire des registres de demandes et d'autorisations (Mss. Fr. 21972, 21974-77, 21979, 22013). Répertoire particulier pour les Permissions Simples (Mss. Fr. 22018). Registres de feuilles (Mss. Fr. 22006-09). Feuilles de jugement (Mss. Fr. 22005, 22011), Feuilles du Sceau (Mss. 22012.) — Les Registres de Permissions Tacites. Registres de demandes et d'autorisations (Mss. Fr. 21990-94, 21983-21986). Répertoire des Registres de demandes et d'autorisations (Mss. Fr. 21989,21980). Registres de feuilles (Mss. Fr. 21981, 21984, 21987). Feuilles de Permissions Tacites (Mss. Fr. 21988). Les registres concernant les ouvrages après l'impression, c'est-àdire la Police des livres, forment plusieurs séries : — Les registres des livres entrés par la Chambre (Mss. Fr. 21935), — Le registre des livres visités dans certaines Chambres provinciales (Mss. Fr. 21927), enfin — Les répertoires des livres prohibés (Mss. Fr. 21928-29), des livres publiés (Mss. Fr. 22019), des privilèges devenant communs (Mss. Fr. 21832). C. Les registres de la Ribliothèque du Roi Les feuilles de relevé (Mss. Fr. 22034), Registres des entrées (MMs. Fr. 22023-22026), Registre de répartition des livres (Mss. Fr. 22033), Registres d'enregistrement dans les Départements (Mss. Fr. 22031-22027), Registre de réclamation (Mss. Fr. 22020). D. Registre du Cabinet du Roi (Mss. Fr. 22021) E. Registre de l'Inspection 2 . LA COLLECTION
de la Librairie
(Mss. Fr. 22038).
ANISSON-DUPERRON.
Cette collection comprend les registres bibliographiques constitués par les archives de l'Inspection de la Librairie notamment le Journal d'Hémery (Mss. Fr. 22156-65).
68 3.
LA STATISTIQUE
LES
ARCHIVES
BIRLIOTHÈQUE
DU
BIBLIOGRAPHIQUE
DÉPARTEMENT
DES
DE LA
MANUSCRITS
FRANCE
DE
LA
NATIONALE.
On y trouve divers registres bibliographiques concernant le Dépôt Légal à la Bibliothèque : feuilles de relevé (Arch. 36), Registre des entrées (Arch. 34-35), Registre de répartition (Arch. 14), Certificats de Dépôts (Arch. 36), Registres d'enregistrement dans les départements (Arch. 8-9), Registre des livres déposés par d'Hémery (Arch. 12). 4.
DIVERS.
Dans les Nouvelles Acquisitions du Fonds Français, on trouve le Registre des Privilèges imprimés (Mss. Fr. N. A 2490). B.
LA RÉGIE D U D É P Ô T
LÉGAL
On trouve, dans les Archives de la Régie, deux petits registres dont l'un concerne les feuilles de relevé et l'autre les certificats des Départements 1 . C . LES A U T R E S S É R I E S
D'ARCHIVES
Les recherches effectuées aux Archives Nationales, à la Bibliothèque de la Sorbonne, à celle de la Faculté de Droit, à la Bibliothèque de la Faculté de Médecine, à la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris, qui nous ont procuré quelques renseignements concernant le Parlement, le Chancelier et l'Université, ne nous ont pas permis de découvrir de registres bibliographiques. Une première observation est à faire : les collections une fois de plus ne sont pas homogènes ; les séries de registres bibliographiques appartiennent, pour une même collection, à plusieurs administrations différentes et les séries d'une même administration se trouvent séparées dans plusieurs collections. Ainsi les Archives de la Chambre comprennent-elles les registres bibliographiques de la Chambre, du Bureau de la Librairie, de la Bibliothèque du Roi, du Cabinet du Roi et de l'Inspection de la Librairie. De même les Archives de l'Inspection se trouvent-elles à la fois dans les Archives de la Chambre et dans la Collection Anisson-Duperron. Donc si la détermination des séries en fonction des collections était nécessaire pour fixer l'intérêt de chaque source, il devient indispensable 1. Voir plus haut note page 15.
CIRCUITS
ADMINISTRATIFS
69
de regrouper les séries de registres suivant les administrations ou les personnes qui étaient intéressées à l'organisation de la production des imprimés pendant cette période. C'est en partant des indications de l'organisation théorique et légale qu'il faudra effectuer ce travail. 1. LE P O U V O I R
RELIGIEUX.
On sait que les évêques, l'Université et la Faculté de Théologie étaient directement intéressés à la Librairie. Il ne nous reste pas de recueil bibliographique des premiers. Les archives de l'Université, on l'a vu, se trouvent aujourd'hui séparées entre les Bibliothèques de la Sorbonne, de la Faculté de Droit et de celle de Médecine. Les papiers sont assez nombreux. Ceux qui concernent la librairie sont rares et nous n'avons pas trouvé de registres bibliographiques. 2.
LE P O U V O I R
CIVIL.
a) Le Chancelier. Les Archives se trouvent soit au Département des Manuscrits, notamment dans la Collection Delamare, soit aux Archives Nationales. Là non plus, aucun registre, ce qui se conçoit mieux que pour l'Université puisque le Bureau de la Librairie, qui dépendait du Chancelier, devait en principe conserver toutes les archives concernant cette matière. b) L e Bureau de la Librairie. Les séries se trouvent essentiellement dans les Archives de la Chambre Syndicale. c) La dans les tement, soit à la
Bibliothèque du Roi. Les registres sont conservés soit archives de la Chambre, soit dans les Archives du Déparsoit dans les Nouvelles Acquisitions du Fonds Français, Régie du Dépôt Légal 1 .
d) Le Cabinet du roi. Le seul registre bibliographique du Dépôt Légal fait partie des Archives de la Chambre. 3.
LE
POUVOIR
JUDICIAIRE.
a) Le Parlement. Les archives se trouvent principalement aux Archives Nationales. Il n'y a pas trace de registres bibliographiques. b) Les Avocats, etc. Là encore, évidemment, aucun registre. c ) L'Inspection de la Librairie. La série des registres des livres nouveaux se trouve séparée en deux collections. Sa partie princi-
1. Voir plus haut, p. 15.
70
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
pale se trouve dans la Collection Anisson-Duperron. Un registre existe dans les Archives de la Chambre Syndicale. d) Le Lieutenant Général de Police et les Juges de Police. Nous n'avons rien trouvé, ce qui s'explique : les juges de province devaient donner des autorisations. Elles étaient peu nombreuses. Ils ne furent donc pas amenés à en conserver des états. Quant au Lieutenant de Police, à Paris il s'en référait à l'Inspection de la Librairie, administration particulière dépendant de lui, comme la Direction de la Librairie dépendait du Chancelier. e) L'organisation professionnelle. Les registres bibliographiques composés à la Chambre Syndicale font partie de la Collection des Archives de la Chambre. *
»
Ce regroupement n'est pas sans intérêt. Il conduit à plusieurs considérations : D'abord les séries de registres bibliographiques paraissent avoir été composées par les administrations, plus que par les personnes intéressées à la Librairie. Ainsi nous n'avons rien concernant les évêques, le Chancelier en t a n t que personne bénéficiaire du dépôt, les avocats. Par contre, les séries du Bureau de la Librairie ou de la Chambre Syndicale nous sont parvenues. En second lieu, les registres ne concernent pas toute la période pendant laquelle l'impression est soumise, sous l'Ancien Régime, à la censure. L'analyse de celle-ci, au chapitre précédent, nous l'avait fait commencer avec la naissance de l'imprimerie à la fin du x v e siècle et elle se poursuivait jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, en 1791. Or nous n'avons de registres bibliographiques que pour les x v n e et x v m e siècles. Si l'on revient à l'évolution de l'organisation pendant les trois siècles, on constate que les registres ont été créés pendant la période d'expansion du pouvoir royal et particulièrement pendant les deux dernières phases, celle de son apogée et celle de sa décadence. De la première période, qui va de la fin du x v e siècle à 1653, date de la généralisation de l'intervention du pouvoir royal, on ne conserve presque rien. Les autorités qui disparaissent progressivement en cette matière, celle du Parlement et celle de l'Université, ne semblent pas avoir composé de registres bibliographiques. L'autorité royale, qui combat pour s'étendre, paraît trop préoccupée par son but immédiat pour songer à organiser vraiment ce qu'elle a déjà acquis. Par contre, après l'institution définitive des Censeurs royaux (1649), après la généralisation absolue de l'intervention, au fur et à mesure naît et se développe l'administration
CIRCUITS
ADMINISTRATIFS
71
royale et par là même les séries de registres bibliographiques officiels et manuscrits. Enfin ceux-ci vont se multiplier pendant le x v m e siècle, dans le même temps que l'autorité royale, dans sa troisième phase de développement, se trouve discutée, et qu'elle est obligée de varier ses interventions. De là vient la série des registres de permissions tacites, ou la collection du Journal de l'inspecteur d'Hémery. Ainsi la naissance et l'extension des séries bibliographiques se trouvent-elles apparemment liées à l'évolution du pouvoir royal. Par ailleurs la considération attentive de ces divers registres montre qu'ils ont, fréquemment, des rapports entre eux. Ils composent différents circuits administratifs correspondant aux trois périodes chronologiques de la production, avant, pendant, après l'impression : 1. Avant l'impression on a le circuit des Permissions d'imprimer, lequel se divise en trois subdivisions : a) Le circuit des Privilèges et Permissions du Sceau b) Le circuit des Permissions Tacites, le premier concernant les x v n e et x v m e siècles, le deuxième le x v m e siècle seulement. c) Le circuit des travaux de la librairie, pour la dernière décade de l'Ancien Régime. 2. Après
l'impression
:
a) Le circuit de la Police des livres comporte : le circuit des livres visités et suspendus à la Chambre Syndicale, auquel s'ajoute le circuit de l'inspection de la Librairie, particulier au x v m e siècle, et des livres prohibés. b) Les circuits du Dépôt Légal qui sert à la fois de censure, d'enrichissement des collections, d'impôt des libraires pour la Chambre, comprennent : a. Le circuit de 1537 à 1704 b. Le circuit de 1704 à 1785 c. Le circuit de 1785 à 1791, auxquels il faut ajouter d. Le circuit des réclamations de livres déposés. Ces différents circuits sont ceux-là même qui sont imposés par les règlements, c'est-à-dire par l'organisation théorique administrative : autorisations avant, surveillance des livres arrivés à la douane, dépôt légal. Cependant, leur existence montre d'abord dans quelle mesure les différentes administrations concouraient à ce fonctionnement, comment elles y participaient et prouve surtout que toutes n'avaient pas, dans la réalité, la même importance. Ainsi le Parlement, le Pouvoir religieux, qui, théoriquement, devaient jouer un grand rôle, n'en ont en fait qu'un secondaire.
72
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Par contre, les circuits mettent en valeur l'importance du Bureau de la Librairie et de la Chambre ; la surveillance, avec l'inspection de la Librairie, le Lieutenant de Police et le Chancelier en personne ; enfin le Dépôt, avec la Bibliothèque et le Cabinet du Roi. Nous devrons donc, dans les lignes qui suivent, examiner chacun de ces circuits, déterminer leurs phases successives, décrire les séries de registres bibliographiques qui concernent chacune d'elles.
LES REGISTRES BIBLIOGRAPHIQUES DES CIRCUITS ADMINISTRATIFS DES PERMISSIONS D'IMPRIMER
Il convient de traiter ici des séries de registres concernant les Permissions. Nous avons pu en reconnaître essentiellement trois : les Registres de Privilèges et Permissions du Sceau qui recouvrent les xvn® et x v m e siècles ; les Registres de Permissions Tacites pour une période réduite du x v m e siècle, les Registres de travaux. Nous les examinerons successivement.
CHAPITRE
III
LES REGISTRES DE PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU
I.
INTRODUCTION
Une première classification sommaire des Registres des Privilèges et Permissions du Sceau avait été établie. L'analyse comparée nous a conduit à la compléter. Elle nous a permis de reconnaître que ces registres correspondent à des phases logiquement et temporellement successives de la délivrance des permissions, composant ainsi le circuit administratif des privilèges et permissions du Sceau. Celui-ci n'est pas rigoureusement identique pendant toute notre période. Ses variations sont à l'origine de certaines des séries de registres. On remarquera, enfin, que ce circuit n'est pas un fait hypothétique : outre qu'il est conforme aux règlements qu'il explique, il se trouve vérifié en ce qui concerne le circuit des Permissions Tacites qui, pour le principal, lui est identique. Pour en comprendre les phases, il faut revenir à l'opération à effectuer et aux étapes qu'elle suppose. La demande de permission concerne le livre manuscrit. Il faut remarquer en passant, que tout ce qui précède la demande, c'est-à-dire la composition, notamment l'intention de l'auteur, la rédaction, etc., ne nous occupe pas ici. La première étape est l'action de demande de permission, soit encore la remise du manuscrit à l'autorité compétente ; la seconde est la distribution aux censeurs ; la troisième, l'examen et la décision motivée de celui-ci ; la quatrième, le jugement définitif de l'auto-
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DE LA
FRANCE
rité ; la cinquième, l'apposition du Sceau ; la sixième, l'enregistrement à la Chambre Syndicale. Toutes ces étapes correspondent à des notions naturelles. L'idée d'en tenir registre suppose une nécessité d'agir ainsi. Elle peut être codifiée par un règlement ou composer des rouages administratifs. En outre on peut penser que le temps travaille au profit de la décomposition des opérations et, par suite, à la multiplication des notations. Cette hypothèse paraît vérifiée par les faits. Les séries de registres augmentent avec les années. Il est possible de distinguer quatre périodes. La première va des origines de l'imprimerie en France ou, si l'on veut, de l'origine de l'obligation d'une permission pour imprimer formulée par le Pouvoir Royal en 1563, jusqu'à 1635. Aucun registre ne nous est parvenu. La seconde, de 1635, et plus encore de 1653 à 1696, c'est-à-dire pendant la deuxième moitié du x v n e siècle, où l'enregistrement ne concerne que la dernière étape, la sixième, à la Chambre Syndicale. La troisième période, de 1696 à 1763, soit aussi pendant la première moitié du x v m e siècle, où des séries nouvelles de registres sont formées qui s'ajoutent à la précédente et correspondent aux demandes et autorisations, ou à leur répertoire alphabétique et au registre annexe des Permissions Simples, aux recueils des décisions des censeurs. Cette troisième période concerne les quatre premières étapes. C'est le produit de l'activité administrative pour des phases importantes à propos desquelles on peut être conduit à donner des renseignements. La quatrième période, enfin, recouvre les dernières décades de l'Ancien Régime, de 1763 à 1790. Elle vise à enregistrer les quatrième et cinquième étapes et les relations avec la sixième. Elle aboutit à la constitution de plusieurs séries : registres des feuilles envoyées au Sceau et des feuilles de jugements ; feuilles de jugements et feuilles du Sceau ; enfin le registre particulier des Privilèges derniers et définitifs. Constater une tendance à l'enregistrement, en préciser les principes, en déterminer les étapes et en indiquer les diverses séries de registres, pour être indispensable, n'est pas suffisant. Il faut encore en trouver les raisons. Une première question s'impose : est-on assuré que le premier registre que l'on possède de chaque série soit effectivement le premier ? N'y en aurait-il pas eu d'autres qui n'auraient pas été conservés ? Il y a plusieurs moyens de se faire une opinion sur l'origine d'une série de registres et sur la possibilité pour le premier dont on dispose d'avoir été précédé par d'autres. L'un concerne la conservation des archives dont la série fait partie. S'il y a tout lieu de penser que celles-ci nous ont entièrement été transmises, le doute qui peut planer sur l'origine tend à disparaître. Or ce n'est pas le cas des Archives de l'Administration de la Librairie qui étaient comprises
CIRCUIT
DES
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PRIVILEGES
pour une bonne part dans celles de la Chancellerie. On sait que ces dernières furent partiellement brûlées à la Révolution 1 . Toutefois il est d'autres moyens qui tiennent, soit à la réglementation, soit à la composition des registres. Il arrive, et c'est le cas le plus fréquent en cette matière de la Librairie, qu'un règlement oblige à l'enregistrement. C'est grâce à ce fait que nous avions pu, dans notre précédente étude, expliquer la constitution de certaines séries de registres du Dépôt Légal, notamment celles de la dernière période, à partir de 1785. C'est aussi la raison de la formation de la série des registres d'enregistrement à la Chambre Syndicale. D'autre part, quand on commence un registre on en donne la raison. C'est ce qui fut fait pour la série des registres d'entrées du Dépôt Légal à la Bibliothèque du Roi, catalogués Mss. Fr. 2202322026, et ceci grâce à un texte de l'Abbé Bignon. Par contre, quand l'énumération d'un registre est incomplète en sa première année, quand il renvoie à des références autres, il y a tout lieu de penser qu'il a été précédé par un ou plusieurs documents qui ne nous sont pas parvenus. L'examen de chacune des séries aboutit à des conclusions différentes. Il paraît assuré que l'enregistrement à la Chambre commença avec le règlement de 1653, instituant l'obligation absolue du privilège royal. On en est moins certain pour la série principale des demandes et autorisations et des répertoires alphabétiques. Par contre l'origine des diverses séries de registres de feuilles parait être due à la promotion de M. de Maupeou comme Vice-Chancelier Garde des Sceaux. Dans l'ensemble, il paraît vraisemblable que les premiers registres de chaque série principale que nous possédons furent bien les premiers à être composés. Quoiqu'il en soit, n'ayant pas de contre-indication, c'est à partir de ces séries, telles qu'elles se présentent, que nous devons tâcher de trouver une explication concernant leur institution. Quelle peut donc être alors la raison de cette multiplication progressive des séries bibliographiques à travers le x v n e et le x v m e siècles, concernant des étapes successives du circuit administratif de la délivrance du privilège ? A cette question il semble qu'il n'y ait qu'une réponse principale : c'est l'augmentation de la production des livres manuscrits. Celle-ci est assurée par les statistiques, non seulement par celles des privilèges mais aussi par celles des permissions tacites qui viennent s'ajouter aux premières dans le courant du x v m e siècle. Elle est démontrée par ses conséquences administratives. 1. Inventaire
méthodique des Archives Nationales,
p. 94.
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BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Le nombre des censeurs en est un témoignage. Lorsqu'ils sont institués définitivement, en 1649, au milieu donc du x v n e siècle, ils ne sont encore que quatre. Ils ne cesseront d'augmenter. D'autre part, la constitution de la Direction de la Librairie comme administration nouvelle prouve la multiplication des affaires de Librairie, donc des livres, par rapport à la période antérieure où le Chancelier pouvait encore avoir un regard direct sur ce problème. Il semble bien que ce soit cette augmentation de la production qui ait eu pour conséquence de multiplier les séries de registres. En effet, t a n t que la production est restreinte, comme c'est le cas au x v i e et au début du x v n e siècle, les Censeurs et les manuscrits doubles conservés suffisent. Mais à mesure que la production croît, le personnel augmente, et les mêmes affaires doivent être réglées par des personnes différentes. Il devient nécessaire de pouvoir se référer à des documents écrits, surtout quand la production ellemême n'est pas toujours autorisée. De là vient, sans doute, la constitution des séries de registres de demandes et d'autorisations et celle des répertoires. Puis quand, après le milieu du siècle, la production eut encore fait un bond en avant, quand le Chancelier se fut déchargé de l'administration de la Librairie sur un Directeur commis à cette charge, il devint indispensable de séparer l'opération du jugement effectué par la nouvelle autorité de celle du Sceau conservée évidemment par le Chancelier Garde des Sceaux. De là vient l'obligation, lors de la nomination de M. de Maupeou, d'établir des « feuilles envoyées au sceau » après jugement du directeur, et des Registres de ces feuilles, afin de connaître, à la Direction de la Librairie, les états qui avaient été expédiés. E t c'est bien ce qui fut fait à partir de 1763 d'abord, de 1777 ensuite, et permit la composition des Registres de feuilles et des feuilles volantes. Enfin cette multiplication des séries correspond à l'extension du Pouvoir Royal en trois périodes distinctes. Avant l'affirmation définitive de l'obligation du Privilège pour imprimer, malgré l'ordre donné de tenir un registre 1 , les censeurs, encore mal assis dans leur situation, agissaient peu. Après 1653, le Pouvoir Royal s'en remit au seul enregistrement à la Chambre. Il constitue enfin une administration vers la fin du x v n e siècle, laquelle multiplie son 1. « Aucun docteur des dits censeurs fera et tiendra registre de tous et chacun des livres qui auront esté lus et approuvés ou qui auront esté simplement... examinés non approuvés dont les dits censeurs informeront particulièrement le plus ancien d'Iceux... le plus ancien docteur... donnera tout estât ou indice de tous les dits livres tant approuvés qu'auttres à celui qui pour sera ordonné par sa majesté à son conseil comme au Mr des requestes qui tient le petit sceau et de quartiers en quartiers... Ces quatre censeurs et docteurs seront nommés par les docteurs de la maison et collège de Sorbonne... » Archives Nationales (Archives de l'Université) M. 71 pièce 15.
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DES
PRIVILEGES
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REGISTRES DE D E M A N D E S ET D ' A U T O R I S A T I O N S
Mss.21939 - 42 IIM
r TT r Ma 219951-22002
N. A. 2801 I
MS •J.219•72-74 RÉPERTOIRES ALPHABÉTIQUES I D E S D E M A N D E S ET Mss.21939-40 AUTORISATIONS
T
22005 I I
Ma.21978
M.JS. 22013
Mss.21974-77
M 55.21999
M SS.2I979
Mss.22018 RÉPERTOIRE ALPHABÉTIQUE DES PERMISSIONS SIMPLES ^
RAPPORTS DES CENSEURS
REGISTRES DES
MsIKTJ M J.2Z0I4-L
I Ms.22006 -2 22008FEUILLES DE J U G E M E N T S
Mss.22140 FEUILLES DE J U G E M E N T S I
FEUILLES DU S C E A U FEUILLES DE J U G E M E N T S ET D É F I N I T I F S
DES PRIVILÈGES DERNIERS
Mss.22011
r
Mm.22012
:
Mss.22005
Mil219441 - ZW I I I I Mss.21948 - 21971 mwrnmmrnm. !•••l l l l l f l f l l p l l p l l l l_l ^
E N R E G I S T R E M E N T S D E S P R I V I L È G E S A L A C H A M B R E SY^M D I C A L E i | I ' M ss. 16753 - 16754 REGISTRES DES PERMIS D'IMPRIMER
1630
1650
1700
1750
1790
Mss signifie Manuscrits Français. NA signifie nouvelles acquisitions conservées au département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale. CIRCUIT ADMINISTRATIF DES PRIVILÈGES ET PERMISSIONS D U SCEAU
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
action dans la deuxième moitié du x v m e siècle, pour disparaître en 1790-1791 Après avoir donné la raison d'être des diverses séries et expliqué leur naissance, il convient de les énumérer dans l'ordre même des étapes du circuit administratif, abstraction faite de leur institution chronologique et tel qu'il est constitué à la fin de l'Ancien Régime. On a, alors, les séries suivantes : 1° Les Registres de demandes et d'autorisations de privilèges et permissions du Sceau. Ils forment deux sous-séries : a) Les Manuscrits français 21939, 21940, 21941, 21942. b) Les Manuscrits français 21995 à 22002, 21978, 22003 et le Manuscrit français Nouvelles Acquisitions 2801. 2° Les Registres répertoires alphabétiques des demandes et autorisations de privilèges et permissions du Sceau (Mss. Fr. 21972, 21974 à 21977, 22013, 21979), auxquels il faut ajouter le registre particulier, répertoire alphabétique des Permissions Simples (Mss. Fr. 22018). 3° Les Registres rapports des censeurs (Mss Fr. 22137 à 22140, Mss. Fr. 22014 à 22016). 4° Les Registres des Feuilles de Jugements (Mss. Fr. 22006, 22008, 22009). 5° Les Feuilles de Jugement (Mss. Fr. 22140, Ms. Fr. 22011), les Feuilles du Sceau (Mss. Fr. 22012), et les Feuilles de Jugement des privilèges derniers et définitifs (Mss. Fr. 22005). 6° Les Registres d'enregistrement des Privilèges à la Chambre Syndicale (Mss. Fr. 21944 à 21971). 7° Les Registres de Permissions d'imprimer (Mss. Fr. 16753-16754).
II. LES REGISTRES DE DEMANDES ET D'OCTROIS DE P R I V I L È G E S ET PERMISSIONS DU SCEAU Ces registres correspondent, dans le premier des deux circuits des autorisations d'imprimer, à la notation de plusieurs de ses phases. La première est la demande des libraires ou des auteurs ; la seconde, la distribution aux censeurs ; la troisième, au moins pendant un certain temps, l'enregistrement du jugement de ces derniers ; la quatrième concerne l'enregistrement de la décision définitive prise par l'autorité administrative. Ces buts devaient imposer la composition des registres. Pour se souvenir de l'origine, il fallait donner un numéro d'ordre, au fur 1. Voir la fin du « Bureau de la Librairie » (Le Dépôt Légal sous l'Ancien p. 96.
Régime...),
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PRIVILEGES
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et à mesure des demandes. C'est l'objet de la première colonne, en allant de gauche à droite. Il fallait connaître aussi le titre du livre (2 e colonne), le nom de l'auteur et du présentateur (3 e et 4 e colonnes). Le jugement du censeur, approbation ou réprobation, fut transcrit dans la cinquième, la nature du privilège et sa durée, dans la sixième. C'est sur ce principe que furent composés ces registres, avec diverses modifications que nous analyserons en détail plus loin. Ceux-ci furent regroupés dans les Archives de la Chambre en deux séries principales. La Collection des Manuscrits Français 21939-21942 et 21995-22003 avec, en plus, les Manuscrits 21978 et le Manuscrit Français Nouvelles Acquisitions 2801. 1. Les Manuscrits Français 21939, 21940, 21942 nous donnent la statistique des demandes et autorisations de privilèges, et permissions du sceau, de 1696 à 1715. — Le Manuscrit Français 21939. Le catalogue des Manuscrits Français en donne le titre suivant, relevé du registre lui-même : « Registre de Monsieur l'Abbé Bignon contenant les ouvrages, présentés à Mgr. le Chancelier Phelypeaux par les auteurs ou les libraires, la distribution des dits ouvrages à Messieurs les Examinateurs avec les approbations ou motifs de réprobations, etc... 1696-1704.»
On retrouve, à peine modifiée, la composition des registres ci-dessus déterminée d'une manière générale. La 2 e colonne en partant de la gauche mentionne bien le titre, mais on y ajoute aussi le nombre de volumes et le format. Dans la 3 e , on mêle le nom de l'auteur avec celui du présentateur. Aussi la quatrième devient-elle celle de l'examinateur et la cinquième, celle de la décision « rejetté » ou « approuvé ». Une table alphabétique suit l'énumération chronologique. — Le Manuscrit Français 21940. Il a pour titre : « Registre des ouvrages manuscrits ou imprimés présentés à Monseigneur le Chancelier pour obtenir des privilèges. »
Le registre commence en 1705 et s'achève en 1707. C'est la suite du précédent. Il possède la même composition et une table alphabétique le termine. — Le Manuscrit Français 21941. Il a pour titre : « Registre des ouvrages présentés à Monseigneur le Chancelier et des privilèges accordés. »
Il commence en 1707 et s'achève en 1710. C'est la suite de 21940. — Le Manuscrit Français 21942. Il a le même titre que le précédent et se poursuit de 1711 à 1715. On prend l'habitude de
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
noter les dates de demandes. Il n'y a pas de table alphabétique à la fin du registre. Par contre on y trouve le billet suivant : « n° Monsieur prendra, s'il luy plaist, la peine d'examiner ce avec le plus d'attention et de diligence qu'il lui sera possible, pour en donner incessamment son jugement à M. le Garde des Sceaux à 17 »
Ce texte prouve que les censeurs ne se dérangeaient pas toujours pour prendre les livres à examiner, mais que, les manuscrits une fois enregistrés, on les leur faisait parvenir. Il correspond à la deuxième phase du circuit, celui de la distribution. 2. Les
Manuscrits
Français
21995-22003.
Cette collection des « Registres des Privilèges et Permissions Simples de la Librairie » nous donne la statistique des privilèges et permissions, de 1723 à 1784 sans interruption, et de 1788 à 1789. C'est la suite de la collection précédente, encore qu'elle laisse un écart entre 1715 et 1723, les registres de ces huit années paraissant manquer. — Le Manuscrit Français 21995. Il a pour titre : « Registre de la Librairie du 27 juin 1723 au 18 janvier 1728 ».
Il est composé de cinq colonnes qui mentionnent, outre les indications des trois premières phases regroupées dans les quatre premières colonnes, celles concernant la quatrième, c'est-à-dire la décision de l'autorité, mentionnée dans la cinquième colonne. On a ainsi le numéro d'ordre dans la l r e colonne, puis le titre dans la deuxième. Dans la troisième on regroupe les noms du présentateur et du censeur et on ajoute la nature de la permission demandée. On a ainsi successivement et verticalement : « Près, par... » puis la permission. Exemple : « PPG pour privilège général », enfin, au-dessous, « distribué à... » et on indique le nom du censeur de l'ouvrage. La quatrième colonne indique le jugement « approuvé le... » ou « réprouvé » ou « approuvé sans examen », ce qui montre une intervention qu'on retrouvera plus tard avec une désignation « accordé par ordre » dans d'autres registres. Enfin la cinquième colonne précise la décision (permission simple, privilège général, local), la personne bénéficiaire et la date de l'autorisation. Les quatrième et cinquième colonnes ne sont pas toujours remplies
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PRIVILEGES
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de sorte qu'il est d'assez nombreux cas où l'on ignore la décision prise. Enfin les demandes sont numérotées de 1 à 1559 et les dates d'enregistrement coupent irrégulièrement l'énumération des ouvrages. — Le Manuscrit Français 21996. Il a pour titre : « Registre de la Librairie du 1 e r février 1728 Monsieur Chauvelin Garde des Sceaux. »
Il s'achève le 16 octobre 1738 et la classification est la même que dans le registre précédent. — Le Manuscrit Français 21997. Il se poursuit du 6 novembre 1738 au 19 septembre 1750. — Le Manuscrit Français 21998. Il a pour titre : « Registre de la Librairie depuis le 24 décembre 1750 Monsieur de Lamoignon, chancelier. »
Il s'achève le 13 mars 1760. Une modification est introduite : le jugement du censeur semble disparaître. La troisième colonne, autrefois consacrée à la présentation et à la distribution, est de nouveau réservée à la présentation. La quatrième à la distribution au lieu du Jugement. La cinquième reste la même, elle mentionne la décision. Pourquoi ce changement ? Sans doute parce que le jugement faisait double emploi, dans la plupart des cas, avec la décision du Chancelier. — Le Manuscrit Français 21999. Il a pour titre : « Registre de la Librairie depuis le 20 mars 1760 Monsieur de Lamoignon chancelier de France. »
Il s'achève le 17 octobre 1763. La classification précédente se poursuit. A la fin du registre se trouve un répertoire alphabétique des titres d'ouvrages avec l'indication de la page de référence dans la première colonne, puis du titre (2°), enfin de la décision et de sa date (3 e colonne de droite). On remarquera que la réintroduction d'une table alphabétique semble se produire en 1760-1763, à l'époque où commence le répertoire de permissions tacites (Mss. Fr. 21989). — Le Manuscrit Français 22000. L'origine de ce registre nous est donnée en son commencement. « M. de Maupeou ayant été fait vice-chancelier et garde des Sceaux de France, M. de Sartine maître des requêtes et Lieutenant Général des requêtes fut chargé de la Librairie et succéda aux fonctions de M. de Malesherbes. Il tint le premier bureau de Librairie le 27 octobre 1763. Il confia les détails du secrétariat de la Librairie au Sr. Marin de plusieurs académies censeur royal et de la police qui a fait le présent registre. »
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Le manuscrit a pour titre « Registre de la Librairie depuis le 27 octobre 1763 Monseigneur de Maupeou vice-chancelier et garde des sceaux de France ». Il s'achève en février 1768. Des indications nouvelles apparaissent d'une grande importance, sur le plan du rapport des deux circuits de l'autorisation, celui des Privilèges et celui des Permissions Tacites, et sur le plan de la statistique bibliographique. En effet, alors que tout, auparavant, laissait supposer que les deux circuits étaient séparés et complètement distincts, on s'aperçoit, maintenant, qu'ils établissent des relations entre eux. Quand un Privilège ne pouvait être octroyé, il arrivait qu'on le transformât en Permission Tacite. De la sorte la demande était transférée d'un registre à l'autre. Ainsi, pour donner un exemple, a-t-on au n° 3 du registre de privilège l'indication : (Voyez le R des P.T. n° 21). Une autre indication est utile. On précise la nature de l'ouvrage pour lequel on demande un privilège. On précise « MS » (Manuscrit) ou « R » (Réimpression) dans la première colonne. Sous cette mention et à partir du n° 443, figure la nature de la permission demandée (PS, Permission Simple. PG, Privilège Général). — Le Manuscrit Français 22001. Commence le 25 février 1768 et s'achève le 3 septembre 1774. Les remarques précédentes valent également ici, notamment le rapport entre les deux circuits des privilèges et des permissions tacites. On a, par exemple, n° 58, « Voyez le registre des P. T. n° 565 ». Dans la troisième colonne on indique, parfois, outre le nom du libraire présentateur, le lieu. Dans la 5 e , la personne à qui le privilège est donné et la durée de ce dernier. On a, par exemple, pour le n° 65 : « P. S. à l'auteur pour trois ans, du 14.7.1768 ». — Le Manuscrit Français 22002. Il a pour titre : « Registre des Privilèges et permissions simples. »
Il commence le 10 septembre 1774 et s'achève le 18 juin 1784. L'indication de la nature du livre, manuscrit ou réimpression, disparaît. — Le Manuscrit Français 22003 1 . Du 15 juillet 1788 au 10 juillet 1789. 3. Le
Manuscrit
Nouvelles
Acquisitions
2801.
Ce registre a pour titre « É t a t des livres ou extrait des Registres du Bureau de la Librairie ». Comme son titre l'indique, il s'agit 1. Sur la remarque que nous a faite M. Furet, il n'est pas impossible que ce registre soit la suite du Mss. Fr. 21986 et par conséquent le dernier des registres de demandes de Permissions Tacites.
CIRCUIT
DES
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PRIVILEGES
très probablement d'un extrait, d'un double du Mss. Fr. 21995. Les feuilles qui le composent comprennent également cinq colonnes, réservées au numéro d'ordre, au titre, au présentateur et au nom du censeur, et à la notation de sa décision, la nature de la permission obtenue. Ce registre commence au n° 152 et s'achève au n° 575. Il va du 10 octobre 1723 à 1724. On trouve, à la fin du registre, un « Extrait des registres du bureau de la Librairie, addition du 10 décembre 1724. Il relève l'énoncé du précédent du n° 570 au n° 583, du 19 au 27 novembre 1724. 4. Le Manuscrit
Français
21978.
Porte sur le dos de la reliure le titre suivant : « 4 e Registre Privilège », qui est précisé à la première page, « Registre 4 e des Privilèges et Permissions du Sceau commencé le 1 e r juillet 1784 ». 11 s'achève le 9 juillet 1789. Il s'agit du registre de demandes et d'autorisations d'imprimer pour les années 1784-1789. L'ouvrage s'achève à la veille de la prise de la Bastille. Comme les autres, il est composé de cinq colonnes indiquant le numéro d'ordre avec, dessous, la nature de la permission demandée (P.S. — P-G.), le titre et l'auteur, le présentateur, l'examinateur, le jugement. C'est donc la suite du Mss. Fr. 22002 qui s'achevait le 18 juin 1784, puisqu'il débute le 1 e r juillet de la même année. III. LES R É P E R T O I R E S DES REGISTRES DE DEMANDES ET D'OCTROIS DE P R I V I L È G E S ET PERMISSIONS DU SCEAU Les registres de demandes et d'octrois de privilèges et permissions simples furent doublés, au x v n i e siècle, par une série de répertoires dont le but était de classer alphabétiquement les ouvrages qui y étaient inscrits. Ces registres étaient nécessaires. A tout moment, pour le service, pour répondre à des demandes extérieures, les employés du Bureau de la Librairie devaient pouvoir trouver rapidement tous les renseignements sur un ouvrage donné. Si la date de référence était fournie, on pouvait trouver immédiatement le registre correspondant. Dans le cas contraire, il devenait indispensable d'établir une classification alphabétique de titres et c'est pourquoi ces répertoires furent constitués. La composition de ceux-ci fut double suivant les périodes, soit qu'on cherchât à les incorporer aux registres de demandes, soit qu'on les en séparât pour constituer des registres distincts. Au commencement, on tenta d'établir une table alphabétique à la fin du registre de demandes. C'est ce qui fut fait dans les deux premiers classés, Mss. Fr. 21939 et 21940, pour les périodes respec-
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
tives de 1696-1705 et 1705-1707. Plus tard, on revint à cette idée, momentanément, au début du ministère du Vice-Chancelier de Maupeou, soit dans le Mss. Fr. 21999 pour les années 1760-63. Nous avons eu l'occasion de mentionner ces tables dans l'étude descriptive des registres de demandes et d'autorisations. Mais probablement pour des questions de place, de simplicité de manipulation, on abandonna cette conception. Alors f u t constituée la série des registres répertoires distincts des registres de demandes. La meilleure preuve en est qu'à l'exception de la période 17051707, c'est-à-dire, de la phase de transition, chaque fois que les répertoires existent, les tables disparaissent dans les registres, et vice-versa. Enfin, s'il fallait une preuve supplémentaire, on pourrait remarquer qu'ils se recoupent chronologiquement et que les deux registres de demandes et les répertoires alphabétiques manquent pour les années 1715-1723. Les tables, évidemment, se trouvent dans la série précédente. Les répertoires alphabétiques constituent, eux, une série de registres classés, dans les Archives de la Chambre Syndicale, sous les cotes Mss. Fr. 21972, 21974 à 77, 22013, 21979 et 22018. C'est de ces derniers qu'il sera maintenant question. 1. Le Manuscrit
Français
21972.
Commence en 1705 et se poursuit jusqu'en 1707 pendant une première partie correspondant à la table du Mss. Fr. 21940, puis de 1707 à 1710 à partir de la page 67. Il double les Mss. Fr. 21940, 41. 2. Le Manuscrit
Français
21974.
C'est la suite du précédent. Il commence en 1711 et s'achève dans sa première partie au début de 1716, l'année 1715 étant achevée. Suivant les lettres du répertoire, l'année 1716 est entamée et se poursuit jusqu'à la fin du mois de janvier. La deuxième partie va de 1723 à 1728 et commence page 91. On remarquera que la période 1716-1723 ne possède pas de données. Le Répertoire correspond au Mss. Fr. 21995. 3. Le Manuscrit
Français
21975.
C'est la suite du précédent pour les années 1728 à 1739. Il a pour titre : « Répertoire alphabétique de tous les ouvrages présentez et des privilèges obtenus ou refusez depuis l'année 1728 jusqu'à l'année 1739 inclusivement. »
Il recouvre le Mss. Fr. 21996.
CIRCUIT DES PRIVILEGES
4. Le Manuscrit
Français
87
21976.
Commence en 1738 et s'achève en 1750. Il double le Mss. Fr. 21997. 5. Le Manuscrit
Français
21977.
Continue le précédent de 1750 à 1760 et le Catalogue des Manuscrits leur donne à tous deux le même titre « Répertoire alphabétique des registres de la Librairie de 1738 à 1750 et de 1750 à 1760 », C'est l'équivalent du Mss. Fr. 21998. 6. Le Manuscrit
Français
22013.
Il a pour titre : « Répertoire des privilèges généraux ou permissions du sceau 1763-1786. »
C'est la suite de la collection Mss. Fr. 21972-21974-77, après l'interruption momentanée de la composition des répertoires et le retour à l'incorporation de la table dans les registres de demandes, de 1760 à 1763, dans le Mss. Fr. 21999. Il correspond pour cette longue période 1763-1786 aux registres de demandes catalogués, Mss. Fr. 22000, 22001, 22002. Ceux-ci, à l'époque, étaient numérotés 65, 66, 67 ainsi qu'il ressort du texte suivant inscrit sur le registre : « C'est le répertoire des registres 65, 66, 67 de 1763 à 1784. » L'examen du répertoire montre une composition identique pour chaque lettre. L'énoncé des titres est classé successivement sous les rubriques 1 e r , 2 e registre, petit registre des Almanachs, 3 e registre. Les registres 1, 2, 3, correspondent respectivement aux cotes précédentes, 65, 66, 67 et actuelles Mss. Fr. 22000, 22001, 22002. Le petit registre des Almanachs seul ne paraît pas nous être parvenu. 7. Le Manuscrit
Français
21979.
Il a pour titre, dans le Catalogue des Manuscrits Français : « Répertoire alphabétique du 4 e registre des privilèges. »
Il commence en 1784 et s'achève en 1789, avec la fin de l'Ancien Régime. C'est le répertoire alphabétique du registre Mss. Fr. 21978. A gauche, dans une colonne, est inscrit le numéro de référence au numéro d'enregistrement dans le Mss. Fr. 21978. Il ne fait pas double emploi avec le Mss. Fr. 22013 pour les années 1785 et 1786 malgré le titre de ce dernier, car, comme on l'a vu, ce manuscrit s'arrête avec la fin du 3 e registre, Mss. Fr. 22022, en 1784. 4
88
LA STATISTIQUE
8. Le Manuscrit
Français
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
22018.
Il a pour titre : « Registre des Permissions Simples pour les ouvrages classiques » 1778-1789.
L'ouvrage est composé de feuilles divisées en quatre parties, chacune correspondant à un livre, et en trois colonnes. La première, de gauche à droite, indique le nom de l'imprimeur, la seconde, le format et la date, la troisième, le modèle. Ce registre est étudié ici parce qu'il s'agit d'un répertoire alphabétique. Cependant il diffère des registres précédents. D'abord, il ne se rapporte pas à un registre de demande. Ensuite, il n'est pas question ici des livres nouveaux avec privilèges mais des seules Permissions Simples concernant l'édition, la réédition, plus exactement, des ouvrages classiques, et ceci de 1778 à 1787. Ce registre avait sa nécessité : les livres nouvellement écrits obtenaient un Privilège, une Permission Tacite, etc. Mais les livres anciens, le plus souvent classiques, qui n'étaient plus le monopole d'un auteur ou d'un libraire parce que le privilège ou sa prolongation en était épuisé, pouvaient s'imprimer avec une simple permission qu'il fallait cependant demander. C'est dans cette intention de les distinguer que f u t composé ce registre (d'après le règlement de 1777). Il paraît par ailleurs provenir d'une intention semblable à celle du registre Mss. Fr. 21832. Celui-ci, en effet, comporte à la page 26 un Tableau des ouvrages jugés communs ou qui le deviendront à l'expiration des privilèges dont ils sont revêtus en exécution de l'article X I de l'arrêt du Conseil du 30 avril 1777 portant règlement sur la durée des privilèges en librairie.
IV. L E S R E G I S T R E S DE R A P P O R T S DES CENSEURS Cette collection correspond à la troisième phase du circuit des permissions d'imprimer. Après la demande, la distribution, le censeur intervenait, et, après lecture, formulait un jugement qui, à son tour, était enregistré. Nous avons vu que ces trois opérations étaient enregistrées soit chronologiquement dans des séries de registres de demandes et d'autorisations, soit alphabétiquement dans les tables ou la série des répertoires. Ces registres encadrent donc les Rapports des censeurs, et c'est pourquoi nous avons dû les étudier avant ces derniers. On sait que le travail des censeurs, après qu'ils eussent été désignés par le Chancelier ou le Directeur de la Librairie suivant les périodes, leurs spécialisations et l'importance de la production, consistait à lire attentivement l'ouvrage et non pas à prendre une
CIRCUIT
DES
89
PRIVILEGES
décision administrative, mais à formuler un jugement. Après quoi, si l'ouvrage était approuvé, ils paraphaient, page par page, les deux exemplaires manuscrits qui leur étaient remis, l'un devant être conservé et l'autre rendu au demandeur. Comment s'effectuait ce jugement, et y eut-il des changements avec le temps dans la manière de procéder ? Ce qu'on peut, semble-t-il, affirmer, c'est que pendant une période du x v m e siècle, ces jugements furent détaillés. Il ne s'agissait pas, simplement, de répondre par oui ou non, en indiquant la nature de la permission et sa durée. Les censeurs consignaient leurs critiques positives ou négatives dans des Rapports remis ensuite à l'administration. Cette notion d'explication permettait d'éviter une trop grande part d'arbitraire ou de facilité chez le censeur qui se v o y a i t obligé de préciser les raisons de son point de vue, donc d'analyser attentivement l'ouvrage. L e rapport permettait de plus à l'autorité administrative de se faire elle-même une opinion, par suite de décider. Ce dernier but se trouve assuré par le texte plus haut cité concernant la méthode à suivre pour obtenir une permission 1 . Cependant, si le rapport paraît avoir été longtemps en usage, il n'est pas certain qu'il en ait été ainsi dès l'origine. Dans le texte du x v n e siècle, également cité plus haut, et concernant l'activité des censeurs royaux au temps même de leur institution, il n'est pas mentionné que l'approbation ait dû être faite par un rapport détaillé. En effet, les censeurs devaient « informer » le plus ancien parmi eux lequel constituerait un état des livres approuvés et refusés 2 . Ainsi il n'est pas assuré qu'il ait existé une continuité historique du rapport des censeurs royaux depuis le temps de leur institution définitive au milieu du x v n e siècle. Quoiqu'il en soit, ces rapports ont été groupés au registre. Cependant on peut en trouver d'autres, épars parmi les autres manuscrits des archives de la Chambre Syndicale. En ce qui concerne les registres des rapports il s'agit de plusieurs séries de manuscrits. 1. La série des Manuscrits
Français
22137-221403.
Les jugements des censeurs sont regroupés par ordre alphabétique. Ils recouvrent la période 1747 (Mss. Fr. 22138 f. 127) —1760 (Mss. Fr. 22140 f. 41) et ont été écrits pendant le ministère de
1. Voir page 51. 2. Voir page 78. 3. Cette série nous a été obligeamment signalée par M m e Cerf.
90
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Malesherbes. Le Catalogue des Manuscrits Français en donne l'analyse suivante : L X X V I I - L X X X Jugements des censeurs sur divers ouvrages sous l'administration de M. de Malesherbes. L X X X Y I I (22137) A-K. Jugements de Duhamel et de Jussieu, d'Astruc, Bezout, de Bougainville, de l'Académie des Inscriptions, de Boze, Fontenelle, de Guignes, d'Hozier, etc. — 151 pièces — 167 feuillets. L X X V I I I (22138) L-O. Jugements de Lagrange de Checieux, de La Haye, l'abbé de La Ville, Ladvocat, bibliothécaire et professeur de Sorbonne, de Marcilly, de Moncrif, etc. — 191 pièces — 207 feuillets. L X X I X (22139) Jugements de Rousselet, l'abbé Gallier, Secousse, etc... — 169 pièces — 197 feuillets. L X X X (22140) Jugements, rapports et décisions — Lettres de Silhouette (p. 26), du prince de Polignac (p. 44), d'Argenson (p. 66, 71) R. de Paulmy (p. 73-75), etc... 112 pièces — 165 feuillets. 2. Les Manuscrits Français 22014, 22015, 22016 dont le Catalogue des Manuscrits Français donne le titre suivant : « Rapports des censeurs sur les ouvrages soumis à leur examen pour l'obtention des privilèges et permissions 1769-1778 », 214, 310, 355 feuillets.
3. Enfin aux Archives Nationales, dans la Série VI (549-553) que nous avions déjà utilisée dans notre précédent travail sur Le Dépôt Légal sous l'Ancien Régime, de 1537 à 1791, se trouvent parmi différents dossiers concernant les affaires de Librairie, des jugements de censeurs incorporés à des feuilles de Permissions Tacites. Ils concernent l'année 1789.
V. LES REGISTRES DE F E U I L L E S DE JUGEMENTS Au point où nous en sommes arrivés, la première partie du circuit consacrée à la préparation de la décision est achevée. Après le dépôt des manuscrits, leur enregistrement, leur distribution, l'examen des censeurs et leurs rapports, les jugements de l'autorité et leur enregistrement sur les registres de demandes et d'autorisations, le premier travail est effectivement terminé. Il n'est plus que de faire enregistrer les nouveaux privilèges scellés sur les registres de la Chambre Syndicale. C'est du moins ce qui se produisit de 1696 à 1763.
CIRCUIT
DES
PRIVILEGES
91
A partir de cette date (et sans doute avant si l'on en juge par l'existence de feuilles de jugements datées de 1745-46 dans le Mss. Fr. 22140) et jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, les quatrième et cinquième phases du circuit vont donner lieu à un enregistrement particulier et ceci en deux périodes distinctes, de 1763 à 1777, de 1777 à 1790. Dans la première, on conserve l'enregistrement de la décision de l'autorité sur les registres de demandes et d'autorisations. Mais on envoie des feuilles sur lesquelles sont inscrits les Privilèges nouvellement jugés, pour qu'ils soient scellés. De ces feuilles, au Bureau de la Librairie, on tient un registre. C'est le Manuscrit Français 22006. Les feuilles volantes ne semblent pas nous être parvenues. Le registre s'intitulera Registre des Privilèges ou Copie de feuilles envoyées aux Sceaux. Deux dates y sont inscrites : celle du jugement, celle de l'apposition du sceau, qui est inscrite postérieurement. La première, la date du jugement, est indiquée à la fois dans le Registre de feuilles et dans le Registre de demande et d'autorisation. Ainsi pour donner un exemple : le « nouveau secrétaire », enregistré sous la demande n° 832 dans le registre de Privilèges Mss. Fr. 22001 est jugé dans la feuille de jugement du 15 mars 1770 dans le Mss. Fr. 22006 et scellé le 6 avril 1770. La date du 15 mars est indiquée dans le Mss. Fr. 22006 et dans le registre Mss. Fr. 22001. Dans la seconde période, à partir de 1777, on modifie légèrement la manière de pratiquer. On enregistre toujours les nouveaux jugements dans les registres. C'est la raison d'être des Mss. Fr. 22008 et 22009, qui sont donc la suite de 22006. Puis, les feuilles de jugement, jointes d'ailleurs à celles des Permissions Tacites, sont envoyées aux intéressés, à la Chambre Syndicale pour l'avertir des décisions, comme au Chancelier pour que les privilèges soient scellés. De ces feuilles, un registre, le Mss. Fr. 22011, nous est parvenu. A la suite de cela, quand l'opération du sceau est terminée, on renvoie au Bureau de la Librairie un état, ou feuilles du sceau, indiquant les nouveaux privilèges prêts à être envoyés à leurs bénéficiaires. Évidemment cette succession ne se produisait pas sans un certain décalage de temps. Celui-ci a déjà été constaté plus haut. Quelques nouveaux exemples le confirmeront. Le livre « Institutiones philosophica » figure sur la feuille de jugements du 6 juillet 1782. La permission sera scellée si l'on en juge par la feuille du sceau, le 24 juillet 1782. Ce même décalage se retrouve pour « L'état de la France de Waroquier » figurant sur la feuille de jugements du 28 août 1782, et qui est scellé le 30 octobre de la même année. Dès lors ces deux opérations s'ajoutent aux précédentes, de la demande, de la distribution, du jugement des censeurs. Le Manus-
92
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
crit Français 2 1 9 7 8 nous en donne la preuve. Citons un exemple : « Les Annales de la Charité ou de la Bienfaisance Chrétienne » présentées par le Sieur Richard furent «approuvées par M. Riballier », eurent une « P. G. (Permission générale) d'auteur », « par la feuille de jugement du 21 février 1785 » qui fut « scellée le 16 mars 1785 ». Le décalage n'était pas seulement une affaire de temps, mais aussi d'ordre. Ainsi, le « Trésor de la Littérature étrangère » et le « Code des Tailles » font partie de la feuille de jugement du 16 septembre 1783. Cependant le premier est inscrit dans la feuille du Sceau du 26 septembre 1783 et le second dans celle du 10 octobre 1783. L'existence de ces divers registres semble prouver qu'une complication est intervenue. Les quatrième et cinquième phases du circuit, jugement et sceau, sont réunies avant 1763 et séparées après cette date. Pourquoi ? L a raison paraît résider dans la promotion de M. de Maupeou. Au x v m e siècle, le Chancelier jugeait et scellait, en principe, en même temps. Au x v n e , ce dernier s'est déchargé des affaires de la Librairie en créant une Direction particulière confiée à un magistrat. C'est le cas entre 1750 et 1763, où le Chancelier est Guillaume 2 de Lamoignon, lequel confie la Librairie à son fils M. de Malesherbes. Ce dernier juge et décide. Le sceau s'effectue à la Chancellerie dont dépend directement la Direction de la Librairie. Quoique séparées administrativement, les deux opérations sont unies localement. Il n'existe donc pas de problème d'enregistrement. Les choses changent en 1763. M. de Maupeou est nommé Garde des Sceaux, Vice-Chancelier. Lamoignon, qui restera chancelier jusqu'en 1768, est en disgrâce, mais n'abandonne pas sa charge. Maupeou a les sceaux, non la chancellerie d'une manière normale. M. de Sartine remplace, à la tête de la Librairie, M. de Malesherbes. Sartines va juger et Maupeou scellera ou fera sceller. Ce dernier n ' a y a n t pas de plein droit la chancellerie, une désunion se produit entre les deux actions. Elle semble conduire à un nouvel enregistrement au Bureau de la Librairie, et à l'établissement d'une correspondance sous forme de feuilles envoyées au Sceau. On conserve l'habitude, par la suite, de cette manière de faire. On ajoute, à ces feuilles de sceau, après le règlement sur la Librairie de 1777, les feuilles de jugements envoyées à la Chambre Syndicale. L a dissociation de ces deux étapes oblige à les étudier séparément. Du jugement, nous aurons, d'une part, les registres d'enregistrement des feuilles, Mss. Fr. 22006, 22008, 22009, commençant en 1763 et s'achevant en 1790, et, d'autre part, le registre de feuilles dejugements allant de 1781 à 1787. De la deuxième étape, nous ne possédons que le registre des feuilles du sceau, Mss. F r . 22012,
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PRIVILEGES
pour la période 1778-1785, à quoi enfin il faut ajouter le registre des feuilles de jugements des privilèges derniers et définitifs. 1. Les registres
de feuilles
de
jugements.
Comme on vient de le voir, la série est faite des trois registres catalogués, Mss. Fr. 22006, 22008, et 22009. Tous les trois sont des registres d'enregistrements des feuilles de jugements, c'est-à-dire des décisions prises par le magistrat, correspondant à la quatrième phase du circuit des privilèges. La différence tient principalement en ceci que les dates du sceau sont mentionnées dans 22006, auprès de celles des jugements, quand elles ne sont précisées par la suite que par les feuilles du sceau. L'un s'achève le 5 avril 1777 et le Mss. Fr. 22008 reprend le 17 avril 1777. — Le Registre Manuscrit Français 22006 Le catalogue en donne le titre suivant : « Registre des privilèges ou Copie des feuilles envoyées aux Sceaux depuis le 9 novembre 1763 jusqu'au 5 avril 1777. » C'est la reproduction de celui qui figure sur le registre lui-même. Les pages sont divisées en quatre colonnes. A gauche le numéro du livre correspondant au numéro du registre de demandes de privilèges. Dans la deuxième colonne, le titre. Dans la 3 e , l'approbation. Dans la quatrième, la nature de la permission. De temps à autre un trait sépare l'énumération précisant qu'on passe d'une date à une autre, d'une feuille de jugement à une autre. On inscrit alors «Feuille du...» et à côté, en une écriture légèrement différente et postérieure « Scellée le ... ». — Les Manuscrits Français 22008 et 22009 Le catalogue en donne le titre suivant : « Feuilles des jugements du 16 avril 1777 au 21 octobre 1786 et du 17 novembre 1786 à mars 1790. Liste des ouvrages auxquels ont été accordés des privilèges ou permissions avec le nom des censeurs. » Le registre 22008 porte, au recto de la couverture, l'indication « Registre de feuilles. » Les pages sont composées de quatre colonnes. A gauche un numéro correspond au numéro d'enregistrement. Dans la deuxième colonne, le titre. Dans la troisième, le nom des censeurs. A droite, la décision (PG. PS. privilège général, permission simple) avec le nombre d'années et la personne bénéficiaire. Des dates coupent l'enregistrement avec l'indication : « Feuille du ... ». A partir du 15 janvier 1785, on intercale entre les titres les mots suivants : article 1, 2, 3... Ainsi on ajoute au numérotage de la demande, celui des feuilles de jugements. La composition du Manuscrit Français 22009 est identique. L'intercalation du numérotage des articles se poursuit jusqu'au 21 janvier 1789. A partir de cette date on revient à l'ancien procédé.
94
LA STATISTIQUE
2 . Les feuilles
de
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Jugements.
Le registre Manuscrit Français 22011 les conserve. On trouve aussi quelques feuilles de jugements concernant les années 1745 (28 juillet) et 1746 (8 juillet) égarées parmi les feuilles de censeurs à la fin du Manuscrit Français 22140. Le Catalogue des Manuscrits Français donne du Mss. Fr. 22011 le titre suivant : « Feuilles de Jugements, de may 1781 au 7 mars 1787. »
Ce registre est fait de feuilles volantes reliées. Elles portent chacune le titre : « Feuilles de jugements du... ». Sous le titre figure une énumération d'ouvrages avec l'indication de l'auteur, la nature du jugement, la personne qui l'a formulée. Les feuilles portent la marque de plis qui prouvent qu'elles avaient été faites pour être expédiées. Parmi ces feuilles de jugements ont été glissées quelques feuilles de Permissions Tacites à partir de la f. 119. On peut même remarquer qu'à une même date coexistent une feuille de Permissions Tacites et une feuille de jugements. (Il en est ainsi par exemple le 15 janvier 1785). Ce fait prouve que les circuits d'autorisations des Privilèges et des Permissions Tacites fusionnaient au moment de la cinquième phase, de communication, soit à la Chambre Syndicale, soit à l'Inspecteur de la Librairie, soit au Chancelier, en ce qui concerne spécialement les dernières permissions. En effet, les registres de feuilles de Permissions Tacites indiquent qu'il s'agit des copies des feuilles « envoyées à la Chambre Syndicale » (Mss. Fr. 21981) et à « Mgr le chancelier, aux inspecteurs de la Librairie et à la Chambre Syndicale » (Mss. Fr. 21984). Cette conjonction des deux groupes de permissions s'explique facilement puisqu'elles sont données par une même administration, le Bureau de la Librairie, et qu'elles concernent des personnes identiques. Cette confusion se trouve d'ailleurs confirmée par un pli qui figure à la page 140 de ce registre et qui précise : « J'ai l'honneur de vous envoyer sous ce pli les feuilles de Jugement et des Permissions Tacites du 6 de ce mois j'ay celui d'être avec bien de la considération, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur. » 3. Le registre
des feuilles
du
sceau.
Il nous reste un certain nombre de ces feuilles regroupées en un registre, le Manuscrit Français 22012. Le catalogue en donne le titre suivant :
CIRCUIT DES
95
PRIVILEGES
« Registre du sceau pour les privilèges, du 14 janvier 1778 au 31 décembre 1785. »
Sur la première feuille en plus de cette indication se trouve mentionné « Bureau de la Librairie 199 ». Il est composé de feuilles volantes. A gauche figure l'indication de la permission et sa durée. Dans la 2 e colonne, vers la droite, le titre : dans la troisième, les noms d'auteurs. Dans la quatrième, ceux des libraires. Les feuilles furent pliées en quatre dans la largeur et en trois dans la hauteur. Elles portent en titre : « Sceau du... » (exemple : « Sceau du 17 avril 1782 »). Elles ne sont pas placées dans l'ordre chronologique et il en existe de 1778 à 1785. à. Le registre
des Privilèges
derniers
et
définitifs.
Il est catalogué Manuscrit Français 22005 et a pour titre : « Bureau de la Librairie. Feuille des Jugements des Privilèges derniers et définitifs conformément à l'article X I de l'Arrêt du Conseil du 30 août 1777 sur la durée des privilèges. »
Il est composé de feuilles sur lesquelles sont mentionnées à gauche un numéro, au centre le titre, à droite une indication (néant, p. d'auteur, privilège dix ans...) Le numérotage s'arrête au n° 74, reprend au n° 1343, pour s'arrêter définitivement au n° 1351. Il ne nous est d'aucune utilité. Le règlement de 1777, auquel ce registre se réfère, concernait, entre autres, la prolongation des privilèges qui pouvait être obtenue pourvu que l'ouvrage soit modifié de plus d'un quart. On sait que le règlement de 1777 abrogeait ce principe de la pérennité qui avait été rétablie depuis 1649. Dès lors, il s'agissait des Privilèges derniers et définitifs, qu'on ne prolongerait pas. C'est probablement à leur énumération que ce registre est consacré.
VI. LES REGISTRES D'ENREGISTREMENT DES P R I V I L È G E S ET PERMISSIONS DU SCEAU A LA CHAMBRE SYNDICALE DES L I B R A I R E S Le circuit d'obtention des privilèges s'achève par une dernière étape qui concerne l'enregistrement du privilège obtenu à la Chambre Syndicale des Libraires de Paris. C'est la sixième phase, si l'on se place dans le circuit tel qu'il fut pratiqué à la fin de l'Ancien Régime. Après la demande, la distribution, l'avis du censeur, le jugement, l'envoi aux Sceaux, le Privilège devait être enregistré à la Chambre Syndicale de la Librairie, afin que le public puisse en prendre connaissance. C'était donc, dans une
96
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
certaine mesure, la publicité et l'officialisation du privilège. Cette étape est aussi l'une des plus anciennes. Elle date de l'intervention définitive et complète du pouvoir royal dans les affaires de Librairie, c'est-à-dire de 1653. On trouve, dans le premier de ces registres un texte qui rend compte de cette obligation et qui est extrait des Registres du Conseil d ' É t a t du Roi : « Par arrest du dit Parlement du huitième avril mil six cent cinquante trois il a esté ordonné que tous libraires et imprimeurs de Paris et autres villes du Royaume impétrans des Privilèges seront tenus de les faire enregistrer sans frais sur le dit livre de la Communauté des dits libraires 1 . »
Sans doute, cette dernière phase du circuit est-elle moins ancienne que la troisième, l'examen du censeur, par exemple, qui remonte dans son principe à 1629, bien qu'il ne fût appliqué qu'à partir de 1649. Cependant, à l'inverse, elle semble précéder celles qui ont trait au fonctionnement du Bureau de la Librairie proprement dit. Si elle n'est pas tout à fait la première, c'est elle qui, le plus tôt, a conduit à composer les plus anciens registres qui nous soient parvenus. Ceux du Bureau de la Librairie, qui concernent les première, deuxième, quatrième et cinquième phases du circuit, sont plus tardifs et ne remontent pas au-delà de la fin du x v n e siècle. Quant aux censeurs, bien que leur origine soit antérieure, ils ne nous ont laissé de trace que pour des périodes déjà avancées de l'Ancien Régime. Cette antériorité des registres de la Chambre s'explique, d'ailleurs, par le but poursuivi, d'officialisation et de publicité du privilège. Puisque le public devait être averti, il fallait tenir des registres. C'est cette même raison qui explique la magnifique continuité de la série. En effet, puisque les privilèges étaient donnés pour des périodes allant quelquefois jusqu'à cinquante ans, et qu'ils étaient même, suivant les époques, susceptibles de prolongation, il fallait conserver les registres. D'autre part, avec cette sixième étape, on change d'administration. L'obtention du privilège dépendait, à l'origine, de la Chancellerie, et plus tard, de la Direction de la Librairie. Au contraire, la publicité du Privilège obtenu était réalisée par un organisme professionnel : la Chambre Syndicale des Libraires de Paris. Les registres de la Chambre constituent une collection importante conservée au Département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale dans les Archives de la Chambre Syndicale des Libraires, sous les cotes Manuscrits Français 21944 à 21971. Ils couvrent la période 1653 à 1790, à l'exception des années 1700-1703 pour lesquelles le registre ne semble pas nous être parvenu. L'examen des registres permet de reconnaître plusieurs traits 1. Mss. Fr. 21944, p. 27.
CIRCUIT DES
PRIVILEGES
97
qui leur sont généralement communs. D'abord, ils ont tous une couverture verte pelucheuse à l'exception du Mss. Fr. 21946 relié en parchemin. Les feuilles, d'autre part, sont composées sur le principe suivant : enregistrement de privilège couvrant la hauteur de la page et la plus grande partie de sa largeur, laissant toutefois une marge à gauche, où furent, le plus souvent, indiquées des mentions supplémentaires indispensables, comme le numéro d'enregistrement, le numéro du privilège, la durée, le bénéficiaire, le lieu de son domicile et, tardivement, les dates du jugement et du sceau. Évidemment, ces indications ne furent pas constantes et varièrent suivant les années et les syndicats, soit qu'on en ajoutât, soit qu'on en supprimât. Le bas de la page était libre. Quelquefois pour éviter des additions ultérieures, on le rayait. En plus de l'enregistrement, au commencement du livre et à la fin, on écrivait des textes intéressant l'enregistrement, soit légaux, réglementaires, pratiques. C'est par l'un d'eux que nous pûmes apprendre où se faisait le Dépôt Légal pendant un certain temps. Enfin l'enregistrement varia qualitativement pendant cette longue période de 138 ans. On peut y discerner deux phases : la première, imprécise, de 1653 à 1700-1703 ; la seconde, rigoureuse, de 1703 à 1790. Dans la première, on mentionne, sur le registre, les éléments principaux du privilège obtenu. Aussi bien des imprécisions, des erreurs, volontaires ou involontaires, se produisirent-elles, créant divers abus. Des protestations s'élevèrent et les textes de réclamations concernant la mauvaise tenue des registres furent assez nombreux jusqu'au jour où, enfin, l'autorité royale intervint d'une manière ferme, comme l'atteste le texte suivant : « E x t r a i t des Registres du Conseil d ' É t a t . Le Roy a y a n t été informé que dans plusieurs des Lettres p o r t a n t permission ou privilège d'imprimer, graver ou vendre divers ouvrages dans le R o y a u m e quelques particuliers ont entrepris et entreprennent de faire glisser certaines clauses qui fournissent la matière de plusieurs contestations et s u r t o u t par r a p p o r t au nombre d'années porté par les dites lettres que plusieurs affectent de ne faire enregistrer les dites Lettres sur le Registre de la C o m m u n a u t é des Libraires de Paris que par extraits souvent tronqués et défectueux qui induisent en erreur ceux qui v o n t consultez les dits Registres : que d ' a u t r e s faisant secrett e m e n t diverses cessions des droits acquis par les dites lettres, ne cherchent qu'à j e t t e r de l'obscurité et du trouble dans une matière où il ne sçaurait régner t r o p de bonne foy et de droiture : E t que divers libraires et imprimeurs de Provinces inquiètent sans cesse tous les autres sous prétexte que les dites lettres n ' o n t pas été signifiées en certaines villes comme il était ordonné par arrêt du Conseil de sa Majesté du 27 février 1665. Quoique le dit arrest soit devenu présentement inutile au moyen de celui rendu le 2 octobre 1701, tous lesquels abus ont besoin d ' u n p r o m p t et efficace remède. A quoy était nécessaire de pourvoir vu les Règlements donnez en divers temps sur le fait de la Librairie n o t a m m e n t les dits arrrrets du 27 février 1665 et 20 octobre 1701. Ouy le r a p p o r t du sieur de Lamoignon de Courson conseiller du Roy en ses conseils, Maitre des Requestes ordinaire de son
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Hostel le tout étant considéré : le Roy estant en son Conseil, de l'avis de Monsieur le Chancelier a ordonné et ordonne : 1° Que dans toutes les Lettres portant permission d'imprimer ou réimprimer graver et vendre aucuns livres, livrets, ou feuillets, le nombre d'années porté par les dites lettres se comptera du jour de l'obtention d'icelles, quoyque la dite clause par négligence ou surprise s'y trouverait obmise, ou que même on eut affecté d'y en mettre de tout opposées, ce qui aurait lieu non seulement pour l'avenir mais encore pour toutes les lettres généralement quelconques obtenues jusqu'à ce jour, et à l'égard de celles qui pourraient s'obtenir ou qui ont été obtenues sans porter aucun nombre d'années fixé et précis elles demeureront nulles de plein droit et comme non obtenues sans qu'il soit besoin d'en prononcer autrement la nullité. 2° Que dans trois mois du jour de l'obtention des dites lettres elles seront enregistrées sur le registre de la Communauté des Libraires et Imprimeurs de Paris fidellement tout au long sans interlignes ny ratures à peine de nullité d'icelles. 3° Que toutes les cessions des dites lettres seront pareillement enregistrées ou plus tard trois mois après leur date sur le même registre tout au long à peine aussi de nullité des dites lettres. 4° Que le dit Registre sera communiqué à toutes personnes pour y faire telle recherche et tels extraits que chacun avisera au moyen de quoi les dites lettres seront censées avoir été suffisamment signifiées... Fait au Conseil d'Estat du Roy, sa Majesté y étant, tenu à Versailles, le treizième jour d'août mil sept cent trois 1 . » A partir de ce t e x t e , c'est-à-dire de l'année 1703, la décision royale f u t e f f e c t i v e m e n t respectée, et les privilèges furent relevés intégralement jusqu'à la R é v o l u t i o n , en 1790. Cet enregistrement ne p o u v a i t être réalisé sans qu'un lien se produisît entre l'autorité qui, dans les quatrième e t cinquième étapes du circuit, jugeait e t scellait, et les Syndic et A d j o i n t s qui en étaient chargés. N o u s a v o n s eu l'occasion de constater, dans l'étude des registres de feuilles, que, dans les dernières décades de l'Ancien R é g i m e , et plus spécialement après 1777, les feuilles de j u g e m e n t étaient adressées, parmi d'autres intéressés, à la Chambre Syndicale. On d e v a i t donc retrouver l'effet de cette communication, n o t a m m e n t sur les registres d'enregistrement. C'est, en effet, ce que l'on p e u t constater. Il semble que, pour les dernières décades de l'Ancien Régime, on puisse distinguer d e u x périodes, a v a n t et après 1785. A v a n t , on mentionne, dans la colonne de gauche, sous le n° du privilège et sous le n° d'enregistrement, après les indications des bénéficiaires et du titre, une date, qui est celle du sceau. Ainsi : « Le dictionnaire des Jardiniers fut scellé, par la feuille du sceau du 15.9.1784, comme il est indiqué dans le Mss. Fr. 22012 et c'est cette même date qui est relevée dans le Registre de la Chambre Syndicale. » 1. Mss. Fr. 21948.
CIRCUIT DES
PRIVILEGES
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Les choses changent légèrement après 1784. On mentionne, en marge, au-dessus de la date du sceau, l'indication suivante : « Feuille de jugement du... » Ce nouveau procédé apparaît le mardi 4 janvier 1785 pour la feuille de jugement du 2 août 1784. Ces deux périodes prouvent non seulement l'existence d'un lien entre l'administration et la Chambre Syndicale mais la précision de celui-ci, puisque a v a n t 1785, on ne relève dans les Registres tenus par les Syndic et Adjoints que la cinquième étape, celle du sceau, et qu'on y ajoute à partir de 1785, la quatrième, celle du jugement. Cet avertissement avait évidemment son utilité. Il permettait d'éviter les faux. Cependant cet enregistrement, s'il s'effectuait en liaison avec le jugement et le sceau, devait normalement se produire avec un certain décalage de temps et d'ordre. Ce fait n'est pas neuf. Nous l'avons constaté déjà pour la demande et l'autorisation ou jugement, puis pour le jugement et le sceau. L a plus ou moins grande rapidité du censeur, les protections ou les nécessaires compléments d'informations administratives, en étaient les causes. Ici, la raison tient à la date à laquelle le privilège est présenté, par le bénéficiaire, à l'enregistrement, comme aux dates généralement fixes du mardi et du vendredi des réunions des Syndic et Adjoints. Ce décalage permet d'établir la chronologie générale et définitive du circuit puisque l'enregistrement était la dernière étape. Donnons des exemples : « L a Lettre à M. l'Abbé Roufier » est présentée pour une demande de permission le 9 mars 1785. On lui donne le n° 273. Elle sera accordée par la feuille de jugement du 27 mars de la même année. Elle est scellée à Paris le 2 0 avril 1785 et enregistrée à la Chambre le « Vendredi 2 0 m a y 1785 » sous le n° 365. L'obtention de la permission aura duré deux mois et demi. Cependant, il arrive que les délais soient plus longs. « Les œuvres de Mengo », dont on demande la permission d'imprimer le 6 avril 1785 sous le n° 301, l'obtint par feuille de jugement du 4 octobre, laquelle est « scellée à Fontainebleau le 29 octobre 1785 » et enregistrée le 11 novembre 1785. L a durée aura été d'à peu près huit mois. Ainsi, dans tous les cas, un temps plus ou moins long s'est passé entre le sceau et l'enregistrement. Donnons encore un exemple. Les privilèges n o s 2872, 20, 77, 3315, 3249, 2924, 66, 3306, sont inscrits sur la feuille du Sceau du 15 septembre 1784. Cette date est bien inscrite dans le registre de la Chambre. Mais la date d'enregistrement varie. Le n° 2872 l'est le vendredi 17 septembre 1784, les n° s 2924, 20, 77, 3315, le mardi 21 ; les n°s 3249, 66, le vendredi 24 ; le 3306, le 5 octobre. D'autre part ce décalage de temps se double d'un décalage d'ordre. Ainsi, le 15 juin 1784, on enregistre sur le registre de la Chambre, principalement, les permissions scellées le 9 juin. Cependant on inscrit aussi des permissions octroyées précédemment,
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
par la feuille du Sceau du 7 mai. C'est le cas du Privilège Général n° 3305, intitulé Tableau de l'Histoire de France. Enfin, comme nous aurons l'occasion de le voir plus loin, toutes les permissions ne sont pas enregistrées. Après avoir étudié les traits généraux de ces registres et établi leur chronologie dans le circuit des permissions, il convient de faire l'analyse de ceux dont la composition appelle des remarques. — Manuscrit
Français
21944.
C'est le premier de la collection. Il porte le titre suivant : « Registre de privilèges de la Communauté ». Il commence le 30 octobre 1654 et la dernière date mentionnée est de 1660. Les formules d'enregistrement varient légèrement. On trouve notamm e n t : « Ce jourd'huy, Monseigneur le Procureur général nous a envoyé la lettre de privilège qu'à obtenue Monsieur., p o r t a n t permission d'imprimer., les dites lettres de Privilèges dattées du.. » On trouve souvent à la place de « nous a envoyé », « nous a présenté »... Dans la marge à gauche du relevé des privilèges, on indique quelquefois le titre et le nom de l'auteur, Les dates d'enregistrement sont placées en h a u t de page. Les dates d'autre p a r t ne sont pas suivies et se recoupent. Ainsi par exemple on passe de l'enregist r e m e n t du 20 mars 1653 à celui du 10 m a y 1657 puis au 20 juin 1657 pour revenir au 4 septembre 1653. Ces retours en arrière semblent s'expliquer par une économie de papier. On revient en arrière pour combler les vides entre deux enregistrements. — Manuscrit
Français
21945.
Du 10 avril 1660 au 29 septembre 1673. Les indications sont de même genre que dans le précédent registre. — Manuscrit
Français
21946.
Du 23 octobre 1673 au 31 décembre 1687. Les privilèges, dans une première partie, jusqu'à la page 254, sont numérotés de 1 à 2045. Après quoi, on fait simplement le total des privilèges enregistrés en bas de chaque page. On trouve au recto de la dernière page (p. 303) un avis ainsi conçu, concernant le dépôt et que nous avons déjà publié 1 : « Avis D e tous les livres qui s'impriment à Paris ou dans quelque ville de France avec privilège du Roi il en faut fournir cinq exemplaires. Sçavoir
1. Voir Le Dépôt Légal sous l'Ancien Régime, p. 36.
CIRCUIT DES
101
PRIVILEGES
Pour la Grande Bibliothèque du Roy deux exemplaires en feuilles. Il faut l'adresser chez Monsieur l'Abbé de Louvois demeurant rue Vivien derrière l'Hostel de Mgr Colbert Pour le Cabinet du Roy un exemplaire en feuille il faut s'adresser chez M. l'Abbé Delanaur demeurant au vieux Louvre Pour Monseigneur le Chancelier un exemplaire relié avec ses armes dessus il faut s'adresser à l'Hostel de Mgr l'Archevêque de Rheims et demander Mr Dufour bibliothécaire de Mgr le Chancelier, c'est dans la rue des Francs Bourgeois Pour la Communauté des Libraires un exemplaire en feuille. Il faut s'adresser chez le Syndic de la d. Communauté des Marchands Libraires et Imprimeurs de cette ville de Paris. Il faut tirer des receus de chacun de ceux à qui on délivrera les d. exemplaires 1688. »
— Manuscrit Français 21947. Du 4 janvier 1698 au 8 septembre 1700. Il a pour titre : « Suitte des enregistrements de privilèges faits pendant le Syndicat de J-B Loignard imprimeur du Roy ». Au début, le nom de l'auteur, dans la marge, disparaît. A partir du 24 septembre 1689, trois adjoints signent en bas après l'énoncé du privilège. On indique le lieu d'origine de l'imprimeur (Lyon, Dijon..). On numérote à nouveau les privilèges à partir du 13 mai 1698. — Manuscrit Français 21948. Du 4 septembre 1703 au 16 juin 1705. Le registre intermédiaire, on l'a vu, ne semble pas nous être parvenu. La première page est consacrée au relevé de l'ordonnance du roi sur l'enregistrement à la Chambre Syndicale des Libraires de Paris que nous avons reproduite plus haut. A partir de ce registre, on prend certaines habitudes qui se poursuivront jusqu'à la fin de l'Ancien Régime. Dans la marge, on trouve le numéro d'enregistrement du privilège. D'abord écrit en caractères romains, il le f u t plus tard en caractères arabes. Le but, à l'origine, devait être de le distinguer d'un second chiffre, placé dessous, correspondant au numéro du privilège et donc aux registres récemment constitués du Bureau. Les dates, évidemment, ne concordent pas, ainsi qu'on l'a déjà montré. Dans la marge sont encore indiqués l'acte de cession, et la nature du Privilège (général, local, Permission Simple). Le Privilège est relevé en entier. On souligne les données principales : nombre d'années ; date d'émission ; non de l'auteur ou du bénéficiaire ; titre.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
— Manuscrit Français 21949. Du 30 juin 1705 au 22 avril 1710. Au début du registre, les mois sont notés en haut de page, et le quantième avant le numéro d'enregistrement. A partir de la page 113, on revient à la manière de faire précédente. Les cessions commencent à être inscrites non plus en marge mais à la suite. — Manuscrit Français 21950. ou « Registre pour l'enregistrement des privilèges » fut « commencé en may 1710 » et « achevé le 16 mai 1716 ». — Manuscrit Français 21951. Du 20 mai 1716 au 27 octobre 1721. On trouve à la fin «La formule de l'enregistrement à mettre sur les privilèges », ce qui prouve l'existence d'une méthode définie remontant sans doute à 1703. — Manuscrit français 21952, du 29 octobre 1721 au 13 juin 1724. — — 21953, du 17 juin 1724 au 31 octobre 1727. — — 21954, du 12 novembre 1727 au 26 avril 1730. — — 21955, du 26 avril 1730 au 6 décembre 1734. — — 21956, du 7 décembre 1734 au 10 mars 1738. — — 21957, du 15 mars 1738 au 5 avril 1742. — — 21958, du 7 avril 1742 au 26 mai 1748. — — 21959, du 11 juin 1748 au 11 juillet 1752. — — 21960, du 11 juillet 1752 au 30 décembre 1755. — — 21961, du 9 janvier 1756 au 17 juillet 1759. — — 21962, du 18 juillet 1759 au 28 septembre 1763. — — 21963, du 8 octobre 1763 au 15 juillet 1766. — — 21964, du 15 juillet 1766 au 12 septembre 1769. — — 21965, du 12 septembre 1769 au 27 janvier 1773. — — 21966, du 16 janvier 1773 au 29 avril 1775. Ce dernier registre commence un peu avant la dernière date du précédent, comme le suivant d'ailleurs. — Manuscrit Français 21967, du 26 avril 1775 au 16 juillet 1778. — — 21968, du 18 septembre 1778 au 9 décembre 1783. — — 21969, du 9 décembre 1783 au 18 juillet 1786.
CIRCUIT DES
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PRIVILEGES
Quelques modifications sont apportées dans l'enregistrement. On mentionne, comme on l'a dit déjà plus haut, dans la marge à gauche, en plus des indications précédentes, l'expression suivante : «Feuille de jugement». Ceci à partir du 4 janvier 1785. — Manuscrit Français — —
21970, du 21 juillet 1786 au 18 juillet 1788. 21971, du 22 juillet 1788 au 27 juillet 1790.
La formule de la permission change. Elle est encore : « Louis, par la grâce de Dieu Roi de France et de Navarre » le 10 novembre 1789. Elle est « Louis par la grâce de Dieu et la loi constitutionnelle de l'État, Roi des Français » le 22 janvier 1790.
VII.
LES
REGISTRES
DE
PERMISSIONS
D'IMPRIMER
Il existe, au Département des Manuscrits de la Ribliothèque Nationale, en dehors des deux grandes collections de la Librairie de l'Ancien Régime, des Archives de la Chambre Syndicale et de la Collection Anisson-Duperron, deux registres catalogués Manuscrits Français 16753 et 16754. Tous deux sont des registres d'enregistrement des Permissions d'Imprimer. Ils se suivent chronologiquement. L'un commence en 1635 et s'achève en 1651. L'autre reprend en 1653 et s'achève en 1664. Tous deux ont la même composition : à gauche, dans une sorte de marge, les noms d'imprimeurs, de libraires, de bénéficiaires de la permission ; à droite, une formule, toujours la même, commençant par : « Une permission d'imprimer le livre intitulé. » Le titre du livre, l'auteur, la personne bénéficiaire, son origine, la date suivent. Les années sont séparées par des traits jusqu'en 1642. Quelle fut la raison de la composition de ces registres et dans quelle phase du circuit de l'autorisation d'imprimer faut-il les placer ? Il ne nous a pas été possible d'obtenir une certitude et c'est la raison pour laquelle l'analyse de ces registres n'intervient qu'ici, à la fin, hors du circuit. On peut, cependant, formuler une hypothèse. Tout d'abord ils correspondent à une période déterminée de l'organisation de l'impression : celle du début de l'intervention définitive du pouvoir royal. On a vu, plus haut, que de 1563 à 1653, pour imprimer, il était nécessaire d'avoir une autorisation et que celle-ci fut donnée autant par l'université que par le Pouvoir Royal, ce dernier évinçant progressivement la Faculté. On sait également que ce remplacement se produisait à l'occasion de la question des censeurs, de 1624 à 1649. Ces derniers étaient des docteurs de l'Université, nommés par le Roi, au moins à l'origine. Le premier des deux registres le Mss. Fr. 16753, recouvre donc, à peu près, la période
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
d'institution des Censeurs Royaux. Le second, au contraire, correspond au début de la prépondérance entière du pouvoir royal. Ces considérations conduisent à une étude comparée des différentes séries de registres, sur le plan chronologique. Il semblerait, alors, qu'on puisse discerner trois phases successives. La première, qui correspond aux registres Mss. Fr. 16753-16754, est la période archaïque de l'administration. La seconde, qui commence dans la 2 e moitié du x v n e siècle et se poursuit jusqu'à la révolution, se manifeste avec l'élaboration progressive des grandes séries, soit d'enregistrement à la Chambre Syndicale, soit de demandes et d'autorisations et des répertoires de la Chancellerie, et plus tard du Bureau de la Librairie. La troisième enfin, faite des registres de feuilles, concerne les dernières décades de l'Ancien Régime. Ces remarques ne nous renseignent pas sur l'origine de ces Registres. Trois solutions sont possibles. A cette époque, il n'existe que trois organisations qui puissent les avoir élaborés : les Censeurs, la Chancellerie, la Chambre Syndicale des Libraires. Les deux premières forment l'administration royale, bien que les censeurs soient encore liés de près à l'Université. La troisième est une organisation professionnelle. Il ne paraît pas interdit de penser, d'abord, que ces registres ont été composés par les censeurs. Chacun d'eux, en effet, devait tenir registre des permissions qu'il donnait. De plus, il lui fallait avertir le plus ancien d'entre eux qui rendait compte à la personne chargée par le roi de la question des privilèges. En ce cas, les manuscrits correspondraient à la troisième phase du circuit, celle de la décision des censeurs. Une seconde possibilité consiste à croire qu'il s'agit des registres constitués à la Chancellerie. En ce cas, ces registres auraient la même intention que la série des registres d'autorisations et des répertoires. Ils correspondraient à la quatrième phase du circuit, celle du regroupement des jugements des censeurs. La différence entre les deux groupes de registres s'expliquerait aisément. A partir de 1694, le nombre des demandes augmentant, on aurait été conduit à établir un registre enregistrant la demande, la distribution et regroupant les jugements. Avant, et jusqu'en 1664 au moins, le nombre étant plus restreint, on n'aurait eu besoin que de connaître les livres autorisés et l'on n'aurait noté ni la demande ni la distribution. Enfin dans une troisième hypothèse, ces deux registres concerneraient l'enregistrement fait à la Chambre Syndicale des ouvrages autorisés. De ces trois possibilités, il semble que les deux premières soient les plus vraisemblables. En ce qui concerne la troisième, on ne peut manquer de remarquer que le Mss. Fr. 16754 se superposerait aux registres Mss. Fr. 21744, 21945, de la Chambre Syndicale. D'autre
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PRIVILEGES
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part, l'étude quantitative comparée montre qu'il ne s'agit pas de doubles, puisque le nombre de permissions est plus grand dans le Mss. Fr. 16754 que dans le Mss. Fr. 21945. Cette différence milite d'ailleurs en faveur de la seconde hypothèse. En effet, comme nous aurons l'occasion de le voir plus loin, les autorisations enregistrées à la Chancellerie sont toujours plus nombreuses que celles de la Chambre Syndicale. Quoiqu'il en soit, faute de certitude suffisante, nous avons dû examiner ces registres séparément.
VIII. CONCLUSIONS SUR L'ÉTUDE DES REGISTRES DES PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU Cette étude du premier des circuits administratifs de la production des livres sous l'Ancien Régime, particulièrement aux x v n e et x v m e siècles, s'est avérée utile. Elle a permis de dégager un certain nombre de résultats qu'il convient de regrouper ici. Un premier fait, très général, se confirme : sur le plan de l'histoire des institutions et, particulièrement, sur celui des organismes administratifs de la Librairie, la connaissance des règlements, des lois, pour être utile et nécessaire, n'est pas suffisante. Elle doit être complétée, le plus possible, par la connaissance de leur application et du fonctionnement des administrations chargées de les appliquer. S'il est vrai que le règlement fixe les cadres de l'administration, s'il les explique, déductivement, à son tour, la connaissance du fonctionnement de celle-ci en offre la réalité concrète, le détail, qui, inductivement, permet d'éclairer non seulement la composition des lois mais leur application et en indique souvent clairement les limites réelles ou leurs débordements. Ce point de vue n'est pas nouveau pour nous. Déjà, lors de notre précédente étude du Dépôt Légal, nous étions arrivé aux mêmes conclusions. Il ne fait cette fois que de se confirmer. Il convient maintenant d'en regrouper les apports. L'étude des règlements nous avait sommairement indiqué comment devait s'effectuer l'octroi des Privilèges et Permissions du Sceau à partir de 1653 et jusqu'en 1789-90 : intervention des censeurs royaux, choisis au début dans l'Université ; décision définitive du Chancelier ; délégation, au x v m e siècle, des pouvoirs du Chancelier à un Directeur de la Librairie. L'étude de l'administration, donc de ses archives, papiers divers et surtout registres, nous a montré qu'il existait un circuit d'obtention des Privilèges, lequel varia avec le temps et qui fut composé, chronologiquement et systématiquement, de plusieurs phases, au nombre de six : demande (1), distribution au censeur (2), critique, rapport et
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BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
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jugement du censeur (3), jugement du magistrat, Chancelier ou Directeur de la Librairie suivant les époques (4), Sceau (5), enregistrement officiel et publicitaire à la Chambre Syndicale des Libraires (6). L'étude nous a encore permis de regrouper les différentes séries de registres. Registres de demandes et d'autorisations (phases 1, 2, 3, 4), répertoires alphabétiques de ceux-ci ; rapports des censeurs (3), registres de feuilles de jugements (4) et du Sceau (5), registres d'enregistrements (6). A son tour cette classification a conduit à une refonte de celle que propose le catalogue des Manuscrits Français de la Bibliothèque Nationale. D'autre part, elle a mis en évidence plusieurs phases chronologiques successives : de 1653 à la fin du x v n e siècle, intervention du censeur et du Chancelier ; l r e moitié du x v m e siècle, institution de la direction de la Librairie ; enfin à partir de 1763 et surtout de 1777, multiplication des enregistrements.
CHAPITRE
IV
LES REGISTRES DE PERMISSIONS TACITES
I.
INTRODUCTION
Les Registres de Permissions Tacites composent les archives bibliographiques du deuxième circuit des permissions d'imprimer, soit encore des autorisations données, pour l'essentiel, avant l'impression. Ils correspondent par suite à la deuxième des trois phases logiques de la censure, au stade intermédiaire entre la production intellectuelle orthodoxe et traditionnaliste et celle qui s'affiche ouvertement hétérodoxe et anti-conformiste. Ils enregistrent donc la production intellectuellement modérée, celle, comme on l'a vu plus haut, qui procède par allusion. D'autre part, comme ce circuit correspond à la troisième phase de l'évolution du Pouvoir Royal dans le cadre de l'administration de la Librairie, celui de sa décadence, ils commencent avec elle après la mort de Louis XIV. L'octroi de ces permissions devait imposer la constitution d'un circuit administratif et, comme d'ordinaire, c'est sur le circuit ancien, dans la mesure où cela est possible, qu'on calque le nouveau. C'est bien ce qui se produisit. Ce circuit des Permissions Tacites est à peu de chose près la même que celui des privilèges, et les différences sont dues à la nature même de cette permission. On retrouvera cinq des six phases du circuit des privilèges. Il convient d'examiner l'ouvrage, et, dans un premier temps, d'enregistrer la demande. Il faudra, en second lieu, mentionner la distribution aux différents censeurs, qui, après lecture, donneront
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
leur avis. A la différence des privilèges, le rapport est rarement écrit. Par suite, il n'existe pas de registres les conservant. L a nature de la permission impose la dissimulation. Toutefois l'avis, positif ou négatif, est transcrit sur les registres des demandes. L'autorité, dans une quatrième phase, avait à décider et c'était chose délicate. L'un des Directeurs de la Librairie, M. de Malesherbes en a donné plusieurs exemples célèbres ; les décisions concernant l'Esprit des Lois de Montesquieu, La Pucelle de Voltaire, et L'Encyclopédie de Diderot. Après quoi, on les enregistrait, d'abord sur des registres de feuilles de Permissions Tacites, puis sur des feuilles qui étaient envoyées à la Chambre Syndicale. La cinquième phase, celle du Sceau, disparaîtra purement et simplement puisque, à la différence du Privilège, la Permission Tacite n'est pas scellée. Enfin, celle-ci doit être connue du public, d'une manière discrète, mais suffisante pour éviter les contrefaçons. L a sixième phase du circuit des Privilèges est donc conservée, qui concerne l'enregistrement à la Chambre Syndicale des Libraires. Cependant celui-ci devait être précis. Il ne devait pas faire l'objet de contestations. Aussi ce ne sera pas le bénéficiaire, auteur ou libraire qui fera enregistrer son Privilège scellé, mais l'administration qui transmettra directement les feuilles. Elles seront enregistrées entièrement. Ce circuit, très voisin de celui des Privilèges, n'était pas isolé. Il eut des rapports d'une part avec le circuit des Privilèges et d'autre part avec celui de la police des livres imprimés. En ce qui concerne le premier, il y eut des échanges continus, et dans les deux sens. Certaines demandes de Privilèges furent transformées, après un premier examen, en Permissions Tacites et inversement, certaines demandes de Permissions Tacites furent transcrites dans les registres de Permission du Sceau. L e circuit des Permissions Tacites fut aussi en relation étroite avec celui de la police des livres imprimés. Les ouvrages arrivés à la douane étaient « visités » et un certain nombre d'entre eux qui n'étaient pas réglementaires, étaient arrêtés par les Syndic et Adjoints en présence des Inspecteurs de la Librairie. Après lecture et jugement du censeur, ceux qui le méritaient étaient pourvus d'une Permission Tacite inscrite séparément sur les Registres de feuilles. Ainsi, le circuit de la police s'incorporait à celui des Permissions Tacites. L a structure de ce circuit paraît avoir évolué. Trois dates sont à retenir : 1750, 1763, 1772. Jusqu'en 1750, les Permissions Tacites ne semblent pas avoir été enregistrées à la Chambre, tandis qu'on en conservait la demande au Bureau de la Librairie. Ainsi, l'enregistrement à la Chambre est inverse, selon qu'il s'agit des Privilèges ou des Permissions Tacites : il devance l'enregistrement au Bureau pour les premiers, il les suit en ce qui concerne ces dernières. L'année 1763 est intéressante en ce qu'elle prouve une fois de plus
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CIRCUIT DES PERMISSIONS TACITES
Livres d'impression, Mss. 21990 21994 929193 REGISTRES étrangère" DE D E M A N D E S | | M ss.21983 21986 ET D ' A U T O R I S A T I O N S 'Permissions tacites M ss- 21989
RÉPERTOIRES A L P H A B E T I Q U E S
Mss.21980
Mss.21981 21984 21987
REGISTRES DE FEUILLES DE PERMISSIONS T A C I T E S
ITT
M ss. 21998 V. 549-555
FEUILLES DE P E R M I S S I O N S T A C I T E S REGISTRES DE LA C H A M B R E S Y N D I C A L E DES LIBRAIRES
,1710,
Mss. 21982
1750
••! 21985
1790
Mss signifie Manuscrits Français et concerne les Registres conservés au département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale. V signifie série V conservée aux Archives Nationales.
CIRCUIT ADMINISTRATIF DES PERMISSIONS TACITES que les deux circuits sont solidaires. Cette année, où M. de Maupeou devint Vice-Chancelier, fut institué le principe des feuilles et des Registres de feuilles, aussi bien pour les Privilèges que pour les Permissions Tacites. Enfin, l'année 1772 correspond à la fin de la série des Registres de Permissions Tacites dénommées Permissions Étrangères. Ainsi paraît avoir évolué ce second circuit des Permissions d'imprimer. On sait qu'il devait être complété par un troisième, celui des Permissions Clandestines, à la limite de l'hétérodoxie. Ce dernier ne dépendait pas de l'administration de la Librairie mais du Lieutenant de Police et, de par sa nature, il devait rester verbal, de sorte qu'aucune archive bibliographique ne semble nous en être parvenue. La composition du circuit des Permissions Tacites renvoie, à son tour, à une classification des registres.
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LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
1° La série des Registres de demandes et d'octrois de Permissions Tacites. Elle comprend deux sous-séries successives : a) Les registres «des livres d'impression étrangère». Les Manuscrits Français 21990, 21994, 21992, 21991, 21993. b) Les Registres de « Permissions Tacites ». Ce sont les Manuscrits Français 21983, 21986. Ils succèdent aux précédents. 2° Les Répertoires des Registres de Permissions Tacites. Manuscrits Français 21989 et 21980. 3° Les Registres de feuilles de Permissions Tacites. Manuscrits Français 21981, 21984, 21987. 4° Les Feuilles de Permissions Tacites. Manuscrit Français 21988 v. 549-533. 5° Les Registres d'enregistrement des Permissions Tacites à la Chambre Syndicale des Librairies. Manuscrits Français 21982, 21985.
II. L E S R E G I S T R E S DE DEMANDES E T DE PERMISSIONS TACITES
D'OCTROIS
Les Registres de demandes et d'octrois de Permissions Tacites correspondent à la notation des quatre premières phases du circuit administratif des Permissions Tacites. Ils ont donc une fonction identique à celle des mêmes Registres de Privilège. Il convenait en premier lieu d'inscrire la demande ( l r e phase), puis la distribution aux censeurs (2 e phase), leur jugement (3 e phase) et la décision de l'autorité (4 e phase). La plupart des demandes concernaient évidemment des manuscrits, puisqu'il s'agissait de demande de permissions d'imprimer. Elles provenaient parfois d'une transformation de la demande de Privilège en demande de Permission Tacite. Ces cas sont rares et ne représentent, dans la période du développement maximum des Permissions Tacites, que quelques unités par an. Inversement, des livres présentés pour l'obtention d'une permission étaient renvoyés au Registre de Privilège. Donnons deux exemples. Dans le Manuscrit Français 21991 (Permissions Tacites), on inscrit une demande sous le n° 527 pour un ouvrage ayant pour titre Histoire de VAgriculture Ancienne. Aucune décision définitive n'est donnée. On trouve seulement la mention « V.R.P n° 651 » ce qui veut dire : voir Registre de Privilège. De fait on trouve dans le Registre Mss. Fr. 22000 le même livre sous le n° 651. C'est encore le cas du livre La Stanislaïde qui passe
CIRCUIT
DES PERMISSIONS
TACITES
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du Mss. Fr. 21991 au n° 616 du Mss. Fr. 22000, avec renvoi du premier au second. De même, le circuit des Permissions Tacites était en relation avec celui des livres arrêtés dans les visites faites à la Chambre Syndicale. Il s'agit là de livres déjà imprimés, qui recevaient une Permission Tacite pour en faciliter le débit. Ces ouvrages furent groupés dans une rubrique particulière intitulée : « Livres entrés par la Chambre ». Enfin, ces Registres sont formés de deux séries successives : les Registres dits d'impression étrangère, les Registres de Permissions Tacites. Avant d'aller plus avant dans leur description, il convient de prouver que les premiers sont bien des registres de demandes de Permissions Tacites. On a vu déjà, plus haut, par le texte de M. de Malesherbes, que ces ouvrages, tenus par la Chancellerie et présentés aux Syndic et Adjoints de la Chambre Syndicale, étaient des registres de Permissions Tacites dissimulées. L'examen des ouvrages le prouve mieux encore. Tout d'abord, le dernier des Registres de Permissions Étrangères, le Mss. Fr. 21993, s'achève le 2 juillet 1772 et le Registre de Permissions Tacites Mss. Fr. 21983 reprend le 1 e r novembre de la même année. Cette preuve n'est pas suffisante. Elle ne fait qu'établir une succession chronologique, non un contenu identique. La preuve décisive sera fournie par une autre catégorie de registres sur laquelle nous reviendrons plus loin : Les Registres répertoires de Permissions Tacites et notamment le Mss. Fr. 21989. En effet, celui-ci commence en 1763, c'est-à-dire à une date où l'administration royale intitule encore et pour neuf ans ses Permissions Tacites, « permissions pour le débit des livres d'impression étrangère ». De la sorte il est possible, en vérifiant la présence des titres de livres, simultanément dans les Registres d'Impression Étrangère et dans le répertoire de Permissions Tacites, de s'assurer de la dissimulation effectuée dans le premier cas et de la nature réelle des Permissions d'Impression Étrangère. L e répertoire énumère à chacune des lettres du registre, les permissions dans l'ordre chronologique des registres : 1 e r , 2 e , 3 e , 4e registre de Permissions Tacites. Or le 3 e correspond au Manuscrit Français 21983, c'est-à-dire au premier des Registres de demandes de Permissions Tacites qui soient reconnus explicitement. Quant aux deux précédents, ils correspondent aux registres Mss. Fr. 21991 et 21990, c'est-à-dire aux deux derniers manuscrits de la collection des Registres de Permissions Étrangères. Citons quelques exemples : à la page 2 du répertoire Mss. Fr. 21989 est indiqué, contenu dans le 2 e registre de Permissions Tacites, la demande pour un livre intitulé Amour {V) trompé par le sentiment, cet ouvrage se trouvant à la page 4 du 2 e registre. De fait, à cette page, dans le Mss. Fr. 21993, Registre
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
pour le débit des livres d'impression étrangère, on trouve L'amour trompé par le sentiment ou les mémoires du Comte de Marinet. Ainsi, l'ouvrage se retrouve-t-il à la fois dans le registre répertoire de Permissions Tacites et dans celui des Permissions Étrangères, l'un renvoyant à l'autre, l'abréviation é t a n t évidemment due à la moindre nécessité de préciser dans un répertoire. C'est encore le cas pour les Amusements d'un solitaire indiqué dans le Mss. Fr. 21989 page 2, comme figurant dans le premier registre à la page 3. E t on le retrouve de fait dans le Mss. Fr. 21992 à cette page. Ainsi les Registres de Permissions pour le débit des livres d'impression étrangère sont bien des Registres de Permissions Tacites. Il reste m a i n t e n a n t à décrire chacune des séries successivement. A.
LA SÉRIE D E S REGISTRES D E D E M A N D E S D E PERMISSIONS TACITES INTITULÉS
« REGISTRES
DE
LIVRES D ' i M P R E S S I O N
É T R A N G È R E ».
Elle comprend les Manuscrits Français 21990, 21991, 21992, 21993, 21994. Cependant, la classification du Département des Manuscrits de la Ribliothèque Nationale ne correspond pas à l'ordre chronologique et donc réel des registres. Ce dernier oblige à la classification suivante : Manuscrit Français 21990, 21994, 21992, 21991, 21993. — Le manuscrit Il a pour titre :
Français
21990.
« Registre des livres d'impression étrangère présentez pour la permission de débiter. » 1718
Il est composé de deux parties : 1. « Registre des livres d'impression étrangère présentez à Monseigneur le Garde des Sceaux pour la permission de débiter. » May 1718. Ces feuilles sont composées de quatre colonnes. On a de gauche à droite : 1° le numéro d'ordre 2° le titre des livres 3° le nom des censeurs 4° les jugements ; on trouve dans cette colonne la mention « réprouvé » ou « approuvé ». Au début jusqu'à la f. 5 du 17 juin 1720, les jugements sont portés sous le nom du censeur. A partir de cette date, ils sont indiqués dans la colonne suivante, cependant qu'à la place on indique la matière de la demande : « (Permission Tacite) ». Dans la colonne des décisions, on ajoute encore des expressions comme celles-ci : «Ron pour permission tacite du 8 juillet 1720 »
CIRCUIT DES PERMISSIONS TACITES
113
ou encore « Permis pour des personnes très connues dont on donnera les noms ». Les dates d'autre part ne sont pas toujours données. Il se poursuit cependant jusqu'en 1745 avec certitude. 2. A la fin du registre se trouve un « Répertoire alphabétique des ouvrages étrangers présentés à Mgr. le Chancelier » et qui n'est autre que le répertoire de la première partie. Ainsi, la composition du registre, qu'il s'agisse des feuilles ou de l'énoncé chronologique suivi du répertoire, est-elle bien identique à celle des Registres de Privilèges. — Le manuscrit
Français
21994.
Il est intitulé : « Registre des livres d'impression étrangère présentés à Monseigneur le Chancelier pour la permission de débiter depuis le 24 décembre 1750 ».
Il est composé exactement comme le précédent et ne paraît commencer que cinq ans après. Les dates, d'autre part, sont rarement indiquées. Il est impossible de savoir, même approximativement, quand s'achève une année et quand l'autre commence. Cette absence de chronologie annuelle rendra difficile l'élaboration de la statistique. De plus il se pourrait qu'on soit en présence d'une dissimulation de la date de la décision. Il se poursuit jusqu'en 1760. On trouve en tête, à la date du « 5 janvier 1751 » le texte suivant : « Messieurs les Syndics et Adjoints de la Librairie ont été avertis de la part de Monseigneur le Chancelier que les permissions tacites ne sont accordées que sous la condition de remettre les exemplaires de chaque ouvrage ainsi permis soit à la Bibliothèque du Roi soit à chacune des Bibliothèques ou les personnes auxquelles ils sont tenus d'en fournir pour les privilèges du sceau qu'ainsy dans leurs visites ils doivent se faire représenter le reçu qui constate la remise des dits exemplaires. Qu'ils doivent aussi faire observer que les libraires qui obtiennent des Permissions Tacites ou qui traitent avec les auteurs qui les ont obtenues les déclarent ou les fassent enregistrer avant toute chose à la Chambre Syndicale duquel enregistrement ils rapporteront un relevé tous les mois au Bureau de la Librairie. »
— Le manuscrit
Français
21992.
Il a pour titre : « Registre des livres d'impression étrangère présentés à Mgr. le Chancelier pour la permission de débiter depuis 1760. »
Il est composé comme le premier et comprend un répertoire. — Le manuscrit
Français
21991.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Il a pour titre : « Registre des livres d'impression étrangère présentés à Monseigneur de Maupeou vice-chancelier et Garde des Sceaux de France pour la permission de débiter depuis août 1763 jusqu'au 20 novembre 1766. » Il comprend cinq colonnes consacrées a u x numéros d'ordre, titre, présentateur, au censeur (distribué à M. : jugement). Il n'y a pas de table et cela s'explique, puisque celle-ci se trouve séparée désormais du registre, pour constituer le répertoire, le Mss. Fr. 21989, dont on a déjà parlé. — Le manuscrit
Français
21993.
Il a pour titre : « Registre des livres d'impression étrangère présentés à Mr. de Maupeou vice chancelier et Garde des Sceaux de France pour la permission de débiter depuis le 20 novembre 1766. » On trouve, en tête du registre, le texte suivant : « M. de Maupeou ayant été fait vice-Chancelier et Garde des Sceaux de France, M. de Sartine maître des requêtes et Lieutenant général de Police fut chargé de la Librairie et succéda aux fonctions de M. de Malesherbes. Il tint le premier bureau de la Librairie le 25 octobre 1763 et confia les détails du secrétariat de la Librairie au S. Morin de plusieurs académies censeur royal et de la Police qui a fait le présent registre. » A la fin on trouve : « Les livres entrés par la Chambre Syndicale depuis le 20 novembre 1766. » Il n'y a pas non plus de table alphabétique puisque c'est l'objet du répertoire Mss. Fr. 21989.
B.
LA S É R I E D E S MANUSCRITS I N T I T U L É S « REGISTRES D E
PERMIS-
SIONS TACITES ».
Il s'agit des Manuscrits Français 21983 et 21986. C'est la suite de la série précédente. Elle commence en 1772 et s'achève en 1788. — Le manuscrit
Français
21983.
Il a pour titre : « 3 e Registre de la Librairie pour les Permissions Tacites... 1772. »
CIRCUIT DES PERMISSIONS
TACITES
115
Il commence à la date du 1 e r novembre 1772 et s'achève le 30 avril 1782. Les mêmes remarques sont à faire que pour les registres de la collection précédente, en ce qui concerne la composition des feuilles. — Le manuscrit
Français
21986.
Sur la couverture on trouve l'indication : « Permissions Tacites 4 e registre » et « Registre des Permissions Tacites commencé le 1 e r mai 1782-1788 ». C'est la suite du précédent. Il est semblablement composé.
III. LES R É P E R T O I R E S DES REGISTRES DE DEMANDES ET D'OCTROIS DE PERMISSIONS TACITES La même nécessité du travail administratif qui conduisit à la composition des répertoires de registres de privilèges aboutit à celle des répertoires de permissions tacites. E t l'on retrouve une évolution semblable, mais plus tardive, en ce qui concerne l'incorporation dans les registres de demandes ou la séparation des répertoires de ces derniers. En effet, comme on l'a vu précédemment, les tables alphabétiques sont conservées dans les registres de permissions d'impression étrangère depuis 1718 jusqu'en 1760-1763 (Mss. Fr. 21992). Elles composent à elles seules un répertoire à partir de 1763, c'est-à-dire presque soixante ans après qu'une séparation identique ait été instituée dans les registres de privilèges, les premiers répertoires de ceux-ci datant de 1705. Les répertoires incorporés se trouvent donc successivement dans les Manuscrits Français 21990-21994. Ils composent ensuite deux registres de 1763 à 1781, les Manuscrits Français 21989 et 21980, qui une fois encore ne sont pas classés dans l'ordre chronologique au Département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale. — Le Manuscrit
Français
21989.
Il a pour titre : « Répertoire de Permissions Tacites ou livres entrés par la Chambre depuis novembre 1763. »
Pour chacune des lettres de l'alphabet, on retrouve une composition identique dans l'ordre suivant : « 1° registre de Permissions Tacites » (Mss. Fr. 21993) puis « Petit registre des Almanachs », et
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
« Livres entrés par la Chambre » enfin « 3° » puis « 4° registre de permissions tacites » (Mss. Fr. 21983 et 21986).
Un seul des registres ne semble pas nous être parvenu : celui des Almanachs... Quant aux « Livres entrés par la Chambre » nous les avons déjà vu incorporés aux Registres de Permissions Tacites. Nous y reviendrons plus loin. En ce qui concerne le 4 e registre, il ne correspond pas à sa table alphabétique tout entière. En effet le Mss. Fr. 21989 se poursuit jusqu'en 1788 au folio 378, alors que la date la plus tardive d'enregistrement sur le répertoire est du 9 février 1784, correspondant au folio 64 de 21989. — Le Manuscrit
Français
21980.
Il a pour titre : « Répertoire alphabétique du 4 e registre des permissions tacites du 1 e r mai 1782. »
C'est la suite du précédent, bien qu'il fasse double emploi avec sa fin, puisqu'il commence en mai 1782, quand le Mss. Fr. 21989, parallèlement, se poursuit, pour l'enregistrement du même registre de demandes Mss. Fr. 21986, jusqu'en février 1784. A partir de cette date, le répertoire Mss. Fr. 21980 continue seul. IV. LES REGISTRES DE F E U I L L E S DE PERMISSIONS TACITES On retrouve, une fois encore, une procédure à peu près identique dans les circuits des Privilèges et des Permissions Tacites, en ce qui concerne le passage de la quatrième à la dernière phase du circuit : c'est-à-dire de la décision de l'autorité à sa communication et à son enregistrement à la Chambre Syndicale. Le jugement avait été enregistré, à l'intérieur du Bureau de la Librairie, sur les registres de demandes. La cinquième phase, celle du Sceau, propre aux Privilèges, disparaissait dès lors qu'il ne s'agissait plus de permission officielle, mais d'autorisations tacites, dissimulées. Comment s'effectuait donc ce passage de la quatrième à la dernière phase ? Il semble que, comme pour les Privilèges, on puisse distinguer deux périodes : avant et après 1763. Auparavant et depuis 1751, les libraires viennent eux-mêmes chercher la décision et ce sont eux qui doivent la faire enregistrer à la Chambre Syndicale. Celle-ci fournira tous les mois un relevé à l'autorité,
CIRCUIT DES PERMISSIONS
117
TACITES
pour qu'elle puisse savoir si l'enregistrement a bien été effectué. Le Pouvoir Royal ne se déplace pas et attend bénéficiaires et responsables. La fin du texte déjà relevé dans la description du Mss. Fr. 21994 en fait foi. Il déclare, rappelons-le, que Messieurs les Syndic et Adjoints : « doivent aussi faire observer que les libraires qui Tacites ou qui traitent avec les auteurs qui les ou les fassent enregistrer avant toute chose à la enregistrement ils rapporteront un relevé tous Librairie ».
obtiennent des Permissions ont obtenues les déclarent Chambre Syndicale duquel les mois au Bureau de la
La procédure va complètement changer à partir de 1763. L'autorité royale, considérant sans doute que l'enregistrement n'est pas exact, fait parvenir des feuilles de Permissions Tacites à la Chambre Syndicale. De ces feuilles, elle tiendra pour elle les registres qui nous occupent ici. E t comme les permissions sont une question plus délicate que les privilèges, l'autorité obligera les Syndic et Adjoints à un relevé intégral de sorte que les feuilles, les registres de feuilles et les registres d'enregistrement à la Chambre Syndicale auront très exactement la même composition. Il n'y aura donc plus d'écart statistique entre les deux séries de registres. Cette procédure est légèrement différente de celle des privilèges. En effet, l'autorité, en ce qui concerne ceux-ci, avertissait bien des nouvelles décisions, mais les Syndics prévenus attendaient, pour enregistrer, la venue des bénéficiaires, lesquels devaient présenter leurs privilèges scellés. C'est pourquoi les enregistrements n'étaient pas dans l'ordre et qu'un certain nombre même ne furent pas enregistrés. L'automatisme de la transcription des Permissions Tacites réduisait cette difficulté. Les registres relevant pour le Bureau de la Librairie le contenu des feuilles de Permissions Tacites envoyées à la Chambre constituent la série des Manuscrits Français 21981, 21984, 21987 qui, eux non plus, ne sont pas catalogués dans l'ordre chronologique de leur composition. A cela, il faut ajouter un manuscrit recueillant les feuilles qui furent envoyées d'abord aux Syndic et Adjoints, et plus tard aux Inspecteurs de la Librairie, ainsi qu'au Chancelier. Il convient de les analyser. A.
LES REGISTRES D E FEUILLES D E PERMISSIONS
— Le Manuscrit
Français
TACITES.
21981.
Il a pour titre : « Registre des Permissions Tacites, 1763, 1771, avec l'indication des livres entrés par la Chambre et des livres refusés, 1767, 1771. » On trouve aussi, au recto de la première page manuscrite, l'indication « Registre des
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Permissions Tacites ou Copie des feuilles de Permissions Tacites envoyées à la Chambre Syndicale. »
Il commence le 8 novembre 1763 et s'achève le 7 février 1771. Les feuilles sont composées de trois colonnes. Dans la première à partir de la gauche, est mentionné le numéro de la demande, et, dessous, Ms (manuscrit) ou R (réimpression). Les numéros ne se suivent pas dans l'ordre numérique puisqu'il s'agit de l'ordre de la décision qui n'est évidemment pas celui de la demande. Dans la colonne centrale, la plus large, est précisé le titre de l'ouvrage, après quoi est souvent mentionné le nom du censeur (approuvé par M...). De temps à autre, la colonne est coupée horizontalement par un trait qui marque le passage d'une date à une autre. Dans la colonne de droite, on note la nature de l'autorisation et la personne bénéficiaire. — Le Manuscrit
Français
21984.
Il a pour titre : « Registre des Permissions Tacites ou copie des feuilles de Permissions Tacites envoyées à Mgr le Chancelier aux inspecteurs de la Librairie et à la Chambre Syndicale. »
C'est la suite du précédent. Il commence le 21 février 1771 (et non 1774 comme l'indique le Catalogue des Manuscrits Français) et s'achève le 18 novembre 1784. La composition des feuilles est la même. On trouve une autre rubrique à la fin « entrés par la Chambre ». Enfin il semble que les feuilles soient envoyées non seulement au Syndic mais encore au Chancelier et aux Inspecteurs de la Librairie, ce qui élargit la communication de la quatrième phase du circuit. — Le Manuscrit Il a pour titre :
Français
21987.
« Feuilles de Permissions Tacites. »
C'est la suite du précédent. Il commence le 2 décembre 1784 et s'achève le 3 juillet 1789. La composition des feuilles est légèrement modifiée. Outre le numéro d'ordre et le titre, on trouve une troisième colonne réservée à l'indication de la personne bénéficiaire et une quatrième à la décision. La rubrique des ouvrages entrés par la Chambre existe toujours. L'année 1789 n'est pas terminée. L'enregistrement s'arrête quelques jours avant la prise de la Bastille.
CIRCUIT
DES PERMISSIONS
TACITES
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B. LES F E U I L L E S D E PERMISSIONS TACITES.
Elles sont conservées dans le Manuscrit Français 21988. Le titre suivant est inscrit sur la couverture : «Bureau de la Librairie. 175. Feuilles de Permissions Tacites ». Le Registre commence le 5 avril 1777 et s'achève le 7 mai 1787. Sous le titre « feuilles de Permissions Tacites » est inscrit la date. Ces feuilles volantes sont composées à gauche du numéro du registre de demande ; au centre se trouve le titre, à droite la décision. On indique les ouvrages « entrés par la Chambre ». A partir du 12 janvier 1778 et jusqu'au 1 e r mars 1786 non compris, les numéros à gauche disparaissent ainsi que la décision. Par contre sont incorporées de nouvelles feuilles plus petites où sont inscrits les ouvrages « rayés ». A partir du 1 e r mars 1786 on revient à l'ancienne manière de faire. On trouve aussi, conservées aux Archives Nationales dans la Série VI 549-553, particulièrement dans les boîtes 549 et 553, quelques feuilles de Permissions Tacites pour l'année 1789 (janvierseptembre).
V. LES REGISTRES D'ENREGISTREMENT DES PERMISSIONS TACITES A LA CHAMBRE SYNDICALE DES LIBRAIRES Avec l'enregistrement des Permissions Tacites à la Chambre Syndicale des Libraires de Paris, s'achève le circuit des Permissions Tacites. Cette formalité est donc, dans son principe, identique à celle concernant l'enregistrement des Privilèges. Quand fut-elle instituée ? L'enregistrement des Permissions du Sceau remontait à 1653, c'est-à-dire à l'année où fut consacrée la suprématie de l'autorité royale sur celle de l'Université. L'enregistrement à la Chambre Syndicale semble avoir été réalisé assez tardivement, en 1751. Or on en délivrait depuis 1718. Comment se fait-il qu'on n'avait pas cru bon de les faire enregistrer ? La raison en est simple, comme l'écrivait M. de Malesherbes, au début et jusqu'en 1751, c'est-à-dire jusqu'à son entrée en fonction, la Chancellerie ou le Bureau de la Librairie tenait un registre de Permissions Tacites dit d'impression étrangère dont copie était mise entre les mains des Syndic et Adjoints. Dès lors, l'enregistrement ne se posait pas. C'est seulement à partir de 1751 et jusqu'à la Révolution qu'il fut obligatoire. Encore peut-on discerner deux périodes. Sous Malesherbes, libéralement, ce sont les bénéficiaires qui doivent faire enregistrer. A partir de 1763, de Maupeou et Sartine, l'enregistrement ayant été jugé mal fait, on emploie le système des feuilles de Permissions Tacites. On revient à l'ancien 5
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
procédé d'avant 1751 en conservant le nouveau, de l'obligation de l'enregistrement, qui f u t effectué sur deux registres. — Le Manuscrit Français 21982. Le Catalogue des Manuscrits Français en donne l'énoncé suivant : « Registre des déclarations faites aux Syndic et Adjoints de la Librairie par les imprimeurs des ouvrages nouveaux mis sous presse 1732-1764 avec les Permissions Tacites de 1750 à 1783 et l'indication des livres entrés par la Chambre et des livres refusés depuis 1771 » —• Fol. 140.
Le registre n'a pas l'unité des précédents. Il comporte quelques documents complémentaires dont nous ne nous occuperons pas ici. L'énumération des permissions se fait du 24 décembre 1750 au 28 mars 1783. Il y a deux parties. D'abord du 5 décembre 1750 au 8 janvier 1761. Après quoi suivent quelques déclarations d'imprimeur. Puis la seconde partie des permissions se poursuit du 3 février 1757 jusqu'au 28 mars 1783. Au début, on reproduit donc les permissions déjà inscrites précédemment entre 1757 et 1761. Dans cette seconde partie intervient une nouvelle rubrique, celle des « livres entrés par la Chambre ». Au commencement, on trouve deux colonnes. Dans celle de gauche figure « le numéro du registre tenu chez M. de Malesherbes ». Dans la colonne de droite, le titre et la personne bénéficiaire de la permission. On mentionne assez tôt la reconnaissance du Dépôt Légal par les expressions « fourni », « reçu 8 exemplaires ». — Le Manuscrit Français Il a pour titre :
21985.
« Registre pour l'enregistrement des permissions tacites. »
Il commence le 24 avril 1783 et s'achève le 3 juillet 1789. C'est la suite du précédent. Ainsi la collection est complète, de la date de l'obligation (1751) à sa suppression révolutionnaire.
CHAPITRE;
v
LES REGISTRES DE TRAVAUX DE LA DIRECTION DE LA LIBRAIRIE
Cette série de Manuscrits n'est pas, à proprement parler, une série ni de registres bibliographiques, ni de permissions d'imprimer, parce qu'il y est souvent question de problèmes qui, pour concerner la Librairie, sont ou postérieurs à l'impression ou même hors de son circuit chronologique. E t cependant nous nous en occuperons ici, non seulement parce qu'il fallait établir leur classification non encore faite, mais parce que les deux circuits de Permissions d'imprimer, celui des Privilèges et celui des Permissions Tacites eurent des rapports avec celui des travaux de Librairie. C'est en effet dans la dernière décade de l'Ancien Régime, à partir de 1781, que l'Administration de la Librairie paraît avoir ressenti le besoin de noter par écrit d'une manière continue les différentes affaires dont elle s'occupait. Il faut toutefois mentionner qu'un premier essai de notation paraît avoir eu lieu plus tôt si l'on en juge par les feuilles de travail concernant les années 1745-46 conservées dans le Mss. Fr. 22140. Toutefois il ne semble pas qu'un enregistrement régulier ait alors eu lieu. On doit se demander comment il se fait qu'on ait attendu si tard pour pratiquer ainsi. Il semble que la même raison du développement des affaires, que nous avons vu être à l'origine de plusieurs séries de registres bibliographiques de permissions d'imprimer, vaille également ici. Quand les problèmes sont assez peu nombreux on les règle au fur et à mesure. Quand ils augmentent, il arrive que l'organisation et la notation deviennent indispensables.
122
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Or, p e n d a n t les dernières années de l'Ancien Régime une hausse considérable va se produire. L'augmentation rapide du nombre des Permissions Tacites s ' a j o u t a n t aux privilèges devait donc conduire à une organisation plus méthodique et à une notation manuscrite. De quoi s'est-il alors agi ? Comme pour toute administration, d'enregistrer les problèmes à leur arrivée, et au m o m e n t de leur règlement. C'est déjà ce qui s'était passé pour les privilèges et les Permissions Tacites qui avaient leurs Registres de demandes et leurs Registres de jugements ou de feuilles. Cette nécessité administrative devait conduire à deux séries de registres que nous appellerons série des Registres d'entrées et série des Registres de t r a v a u x exécutés. La première est composée de plusieurs groupes de Manuscrits (Mss. Fr. 21862 à 21866 ; 22039 et 22040) qui renseignent sur les t r a v a u x entre 1781 et 1788. La seconde comporte des Manuscrits 21937, 21938 et 21867 et indiquent les t r a v a u x exécutés de 1784 à 1788. L'étude comparée des deux séries de registres prouve leur succession systématique. Dans les premiers, on enregistre les demandes par matières. Un certain temps s'écoule, puis dans les seconds, on classe les t r a v a u x par nom d'intéressé, et par dates d'exécution, lesquelles sont ensuite reportées sur les registres d'entrées. Ainsi pour donner quelques exemples : Y Étal de la France est enregistré à la lettre E (État...) le 6 février dans le Mss. Fr. 21866. On prend une décision le 15 août à son sujet. Cette date, permet de retrouver au nom de Warroquier (Comte de), l'État de la France, dans le Mss. Fr. 21937. De même l'État de la Magistrature en France par le S. Robert de Hesseln est enregistré le 14 septembre dans le Mss. Fr. 21866. Le 17 septembre, on statue à son sujet, et l'on retrouvera ensuite dans le Mss. Fr. 21937, à Robert de Hesseln, la décision prise. Il est évident que, dans les deux exemples, il s'agit d'une permission d'imprimer. Il convient de rappeler qu'elle figure à côté de questions concernant d'autres matières de Librairie, colportage, livres étrangers, Chambre Syndicale, etc. Ce circuit des t r a v a u x de Librairie n'était pas, semble-t-il, sans r a p p o r t avec les deux précédents des Privilèges et des Permissions Tacites. Né plus tardivement, il ne pouvait avoir la prétention de les encadrer. Cependant, un grand nombre d'œuvres, soit par la matière, dont elles étaient faites, soit par le lieu d'où elles provenaient, soit par les renseignements complémentaires qui s'avéraient nécessaires, devaient nécessiter des t r a v a u x et par suite être enregistrées. Si les registres de t r a v a u x concernent diverses questions de Librairie, ils contiennent donc des permissions p r o u v a n t que les
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LIBRAIRIE
deux circuits précédents entretenaient des relations avec celui des travaux. Nous donnerons quelques exemples. On avait demandé une permission du Sceau, pour un ouvrage intitulé Avis aux Mères qui veulent allaiter par Rozé de l'Épinay, médecin. Le livre avait été lu et approuvé par un censeur, Desbois de Rochefort, et avait obtenu une Permission Simple, pour l'auteur et pour une durée de 5 ans, selon la feuille de jugements du 28 juillet 1785 (Article 3, n° 415 du Mss. Fr. 22008). Après quoi, un certain travail avait dû être effectué, peut-être pour avertir le bénéficiaire vivant en province. Il entre alors dans le circuit des travaux, et d'abord dans le registre d'entrée Mss. Fr. 21866. C'est encore ce qui se passe, pour L'Almanach des Jeux de Société approuvé par M. de Sauvigny et qui, lui, n'obtient qu'une Permission Tacite, par la feuille du 28 juillet 1785. Ces relations expliquent pourquoi les dates d'entrées ou d'exécution des travaux ne s'établissent pas, par rapport à celles des registres de permissions d'imprimer, selon une chronologie régulière. Tantôt elles sont antérieures et tantôt postérieures à celles des registres de demandes ou de feuilles. En effet, il suffît que les problèmes qui suscitent les travaux se posent avant ou après l'enregistrement de la demande, pendant l'examen, ou après la décision, pour que la chronologie diffère. Ainsi, pour donner des exemples Le Dictionnaire Universel de Police, qui ne sera enregistré sur le registre de demandes de privilèges (Mss. Fr. 21978) sous le n° 283 que le 25 mai, fait l'objet d'un travail le 16 mars 1785 (Mss. Fr. 21938). Inversement, les ouvrages de l'Académie Royale de Médecine qui ont été enregistrés le 8 avril sous le n° 304, avaient nécessité un travail le 2 avril (Registre d'entrée Mss. Fr. 21866) ; celui-ci fut achevé le 13 avril (Registre de sortie Mss. Fr. 21938). Ce manuscrit à son tour mentionne le carton (n° 55) auquel le dossier fut incorporé. Enfin, s'il était nécessaire de classer ces registres, il est évident que, de par leur composition, ils ne nous serviront à rien sur le plan de la statistique bibliographique de la France. A.
LA S É R I E D E S REGISTRES D E T R A V A U X
(ENTRÉES).
1. La collection des Mss. Fr. 21862 à 21866. Le Catalogue des Manuscrits Français en donne le titre suivant : « Registre de Librairie pour les années 1781-1785 I (21862) Registre de la Librairie pour l'année 1781, avec table. II (21863) 1782. III (21864) 1783. IV (21865) 1784-1785. V (21866) 1785. Répertoires alphabétiques donnant les titres des ouvrages pour lesquels l'autorisation est demandée au Directeur de la Librairie avec les décisions intervenues... »
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Ces registres sont composés de deux parties : a) Un répertoire alphabétique des travaux. b) Une table. La première partie est faite de feuilles comportant trois colonnes. A gauche, se trouve le premier mot du sujet traité, qui occupe la colonne centrale. Sous le sujet, sont indiquées les questions posées, les décisions, les réponses. Quand il s'agit d'une permission déjà examinée, on mentionne les différentes décisions successives prises. On précise, à la fin d'une énumération, la date du travail. Enfin, dans la colonne de droite, sont mentionnés les décisions et les travaux plus tardifs. 2. La collection des Mss. Fr. 22039-22040. Le catalogue en donne le titre suivant : « Registres des privilèges permissions simples de la Librairie »,
1786 et 1787, 218 et 263 feuillets. En réalité, ces registres ont été mal classés. Ils sont la suite des précédents. L e Mss. Fr. 22866 s'arrêtait à la fin de 1785. 22039 commence le 2 janvier 1786 et s'achève le 12 décembre. Tout comme eux, ces registres sont composés de deux parties, la première étant un registre alphabétique et chronologique des travaux de Librairie et non un registre de privilège. 3. Le Manuscrit
Français
21869.
Il a pour titre : « Répertoire alphabétique des personnes qui ont demandé des privilèges, permissions, dispenses, etc. concernant la Librairie imprimerie »,
1788, 189 feuillets. C'est la suite du précédent qui concernait l'année 1787. Son titre permet de mieux expliquer l'origine de l'erreur du titre du Mss. Fr. 22039-22040. Ce sont des registres de privilèges et permissions sous condition d'abréger, mais il y est évidemment question d'autres matières, dispenses, colportage, librairie, imprimerie, etc. Il comporte sept colonnes de gauche à droite : 1, la date de l'arrivée ; 2, le lieu du départ ; 3, le nom de l'intéressé ; 4, ses qualités ; 5, l'objet du travail ; 6, le carton ; 7, son numéro. B. L A SÉRIE DES REGISTRES DE T R A V A U X
1. Les Manuscrits
Français
(SORTIES).
21937-21938.
Le catalogue les définit ainsi :
CIRCUIT DES TRAVAUX
DE
LIBRAIRIE
125
« Registre de la Librairie sous la Direction de Mr. de Villedeuil directeur général de la Librairie » 1784-87. Le Mss. Fr. 21937 porte le titre suivant sur la couverture : « Librairie, Travail avec Mgr. le Garde des Sceaux, M. de Vidaud conseiller d'État directeur général de la Librairie 1785 ». Le Registre 21938 porte en première page l'indication suivante « Répertoire années 1784 et 1785 M. de Vidaud conseiller d'État directeur général de la Librairie ».
Le Registre Mss. Fr. 21937 est composé de deux parties principales. De la page 9 à la page 66 se trouve un état des travaux exécutés de 1785 à 1787. Ces feuilles sont divisées en quatre colonnes. A gauche, le titre de l'affaire, puis, successivement, vers la droite, le numéro des cartons, l'exposé du problème, la décision prise. A partir de la page 68, se trouve un répertoire alphabétique des travaux commencés en octobre 1787. Le Registre Mss. Fr. 21938 est également composé de deux parties. L'une correspond à la première partie du Mss. Fr. 21937. La deuxième est une énumération chronologique de la « Correspondance de 1784 et 1785 ». Les deux premières parties des deux manuscrits s'imbriquent chronologiquement l'une dans l'autre. En effet le début du Mss. Fr. 21937, jusqu'à la page 9, énumère les travaux de 1784. L'année 1785, de janvier à septembre, se trouve dans la première partie du Mss. Fr. 21938 et à partir de septembre 1785 jusqu'en 1787, les travaux sont à nouveau énumérés, après la page 9 dans le Mss. Fr. 21937. Quant aux deux parties du Mss. Fr. 21937, elles ne concordent que pour la courte période de la fin de 1787. Ainsi, pour donner un exemple, les Fermiers Généraux avaient adressé une lettre classée dans le carton G 75 (p. 66 l r e partie). Cette affaire est notée dans la table (f. 82). Cependant, comme cette dernière ne commence qu'en octobre 1787, les travaux antérieurs n'y figurent pas. 2. Le Manuscrit
Français
21867.
Il a pour titre : « Registre contenant les extraits des réponses faites tant aux différents particuliers qu'aux personnes de l'administration. »
1 e r octobre 1787 - 5 décembre 1788. C'est la suite, semble-t-il, du précédent. Les feuilles comportent six colonnes, consacrées, de gauche à droite, au nom des intéressés, lieu, qualité, la date des lettres qu'on leur a écrites, l'objet, le numéro du carton, le numéro de l'enregistrement.
CHAPITRE
VI
LES REGISTRES BIBLIOGRAPHIQUES DU CIRCUIT ADMINISTRATIF DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMÉS
On ne s'étonnera pas, que, dans une perspective chronologique, nous passions ici à la phase de la publication, sans nous arrêter à la période intermédiaire de l'impression proprement dite. C'est que, si la surveillance des imprimeries existait, si chacune d'elles pouvait à tout moment être visitée, cette inspection, quand elle eut lieu, fut l'origine d'arrêts qui furent transcrits avec les livres suspendus dans les visites de la Chambre. Quant à la première partie du Manuscrit Français 21982 enregistrant « les déclarations faites aux Syndic et Adjoints de la Librairie par les imprimeurs des ouvrages mis sous presse » de 1732 à 1764, elle aurait pu permettre un sondage intéressant pour la production parisienne. Mais ces reconnaissances, dont chacune s'étend sur plusieurs lignes, ne couvrent que quelques pages et rendent le dépouillement complètement inutile. Ce sont donc les registres bibliographiques du circuit de la police des livres imprimés qu'il convient d'examiner. Encore sont-ils loin, t a n t par le volume, que par la portée, d'être aussi utiles que ceux des circuits d'autorisations. On sait que la politique absolutiste de la royauté, qui la conduisait à surveiller la production intellectuelle, ne pouvait s'arrêter à l'octroi des permissions d'imprimer, et qu'elle devait, non seulement pendant mais après l'impression, censurer les livres. Un circuit d'inspection avait donc été constitué, qui, nous le verrons, se subdivisera en cinq parties. Les livres
128
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
provenaient ou de l'étranger, ou d'une autre ville de France. Dans le premier cas, ils ne devaient entrer que par certaines cités. Ainsi, selon l'article 92 du règlement de 1723, seules les villes de Paris, Rouen, Nantes, Bordeaux, Marseille, Lyon, Strasbourg, Metz, Amiens et Lille bénéficiaient de ce privilège. On doit s'interroger sur la manière dont s'effectuait l'entrée. Une fois encore M. de Malesherbes nous renseigne : « Il est aisé de voir que les villes dont on fait l'énumération dans cet article ne sont point celles par lesquelles les livres entrent réellement dans le Royaume, puisque la plupart de ces villes ne sont point frontières. Ainsi, permettre de faire entrer des livres dans le Royaume par Paris, c'est permettre de faire entrer par les frontières et les ports de France, les livres destinés à Paris... 1 »
Enfin, pour éviter la fraude, on devait prendre quelques précautions. « Elles consistaient à faire plomber les ballots et à donner acquit à caution 1 . »
Le principe de l'entrée n'était pas rigoureusement appliqué. Certaines villes frontières n'observaient pas toujours les règlements : « A Besançon au contraire, on ne connaissait aucun règlement il y a quelques années. Cette ville n'était pas comprise dans les villes d'entrées... cependant les livres y entraient librement'. »
Quoiqu'il en soit, à l'arrivée, les livres d'origine étrangère retrouvaient les livres d'impression française qui, eux-mêmes, étaient envoyés d'un point à un autre du royaume. Ils étaient arrêtés aux barrières et transportés à la douane, puis de celle-ci à la Chambre Syndicale pour y être visités : « Les commis aux barrières sont obligés d'envoyer tous les livres à la douane ; ceux de la douane doivent les faire passer à la Chambre Syndicale et c'est là que la visite se fait par les Syndic et Adjoints à des heures marquées par le règlement 4 . »
Ce procédé avait été étendu à Lyon en 1746 : « On a pris des précautions semblables pour Lyon dans l'arrêt de 17461. »
1. MALESHERBES, Mémoires 2. Ibid. 3. Ibid., p. 197. 4. Ibid. p. 210. 5. Ibid.
sur la liberté de la Presse, p. 182.
CIRCUIT DE LA POLICE DES LIVRES
IMPRIMES
129
De plus, pour toutes les autres villes le règlement stipulait que : « les ballots de livres qui y arrivaient seront déposés dans une chambre destinée à cet usage où ils seront visités par les officiers de la Chambre Syndicale s'il y en a une établie dans la ville, sinon par deux libraires nommés à cet effet 1 . »
La nature des registres bibliographiques qui nous sont parvenus oblige à faire la distinction entre la police des livres à Paris et dans les provinces. Le transfert de la Douane à la Chambre, dans la capitale, devait aboutir, sur le plan bibliographique, au premier des circuits secondaires de la police des livres imprimés. En effet, étant donné son importance, il exigeait, dans l'intérêt des deux parties, un enregistrement, et c'est ce qui a donné lieu à la série de Manuscrits Français 21897-21926 : « Registres des livres envoyés de la Douane à la Chambre Syndicale de la Librairie et Imprimerie de Paris. »
Les ballots étaient ouverts après qu'on ait vérifié le plomb, les mardi et vendredi de chaque semaine. Cet examen, à Paris, fut fait d'abord en présence des seuls Syndics et Adjoints. Plus tard, quand l'autorité s'aperçut qu'elle ne pouvait guère compter sur ceux-ci, elle chargea les inspecteurs de la Librairie d'une troisième fonction, celle d'assister à l'ouverture des ballots des « ouvrages d'impression qui se portent de la douane à la Chambre Syndicale des Libraires et Imprimeurs de la ville de Paris »2. Cette charge aurait été créée en 1737, après l'incident qui se produisit au sujet de l'Histoire du Concile de Trente, du Père le Courayer3. Ainsi, dans une lettre aux Syndic et Adjoints, le Lieutenant Général de Police Hérault écrivait : « Ne soyez ny surpris ny pennez de l'établissement de cet inspecteur ; si la librairie avait toujours été dans des mains aussi scures et aussi fidèles que les vôtres et si on pouvait espérer que tous vos successeurs vous ressemblassent, sa Majesté auroit juger elle-mesme la précaution qu'elle prend absolument inutile ; mais vous scavez ce qui s'est passé et vous ne pouvez ignorer les sujets de crainte qui peuvent y avoir pour l'avenir ; ces deux motifs doivent vous tranquiliser sur le changement qui se fait sous votre sindicat... 4 »
L'examen des ballots se fit à travers le x v m e siècle, en fonction de trois questions, qu'il convient de classer systématiquement : 1. Ibid., p. 182. 2. Mes. Fr. 2 2 0 8 0 , f° 82.
3. Ibid., t° 18. 4. Ibid., f° 7.
130
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
1° Quels sont les livres ? 2° Sont-ils autorisés ? 3° Le Dépôt Légal a-t-il été effectué ? Chacune des questions devait donner naissance à un autre circuit particulier, s ' a j o u t a n t au précédent, du transfert à la Chambre. L'un était à la charge de l'Inspecteur de la Librairie, en principe depuis 1737, c'est-à-dire à partir d'une date très postérieure à l'institution de l'examen des livres. L'Inspecteur devait rendre compte à ses chefs des livres nouvellement arrivés. Cela conduisit le plus célèbre d'entre eux à établir une bibliographie courante, le Journal d'Hémery (Mss. Fr. 22156-22165, 22038) et plus tardivement, sans doute, à la constitution du Mss. Fr. 22019. Cependant la surveillance n'avait pas été établie pour savoir seulement quels étaient les nouveaux livres, mais aussi, et surtout, pour effectuer une censure. Quand les livres étaient autorisés par une permission, les libraires, à qui ils étaient destinés, les recevaient et ils en délivraient un reçu. Un certain nombre de ceux-ci sont conservés dans le Mss. Fr. 21930. Cependant, les Privilèges et Permissions Simples n'avaient été octroyés que pour une certaine durée. Après quoi, les œuvres devenaient communes. Il convenait donc, au moment de l'examen, que l'on sache si les privilèges étaient ou non valables. De là, sans doute, la formation du Manuscrit Français 21832 sur l'expiration des privilèges. Dans le second cas, quand les livres n'étaient pas autorisés, ils étaient « suspendus » ou « arrêtés ». Alors commençait un autre circuit, le troisième, celui des « Livres entrés par la Chambre ». Une première remarque s'impose qui est importante sur le plan de la statistique. Une fois de plus, celle-ci dépend de la nature de l'opération administrative effectuée. Il s'agit ici de la censure de la production envoyée de la douane. L'unité ne sera donc pas le livre nouveau comme pour les permissions d'imprimer, mais l'arrêt, c'est-à-dire le ballot. Dans chaque arrêt, il peut se trouver un ou plusieurs livres, et un ou plusieurs exemplaires de chacun de ces ouvrages. De plus, d'un arrêt à l'autre, d'un paquet à l'autre, on peut retrouver les mêmes livres suspendus et c'est ce qui se produit très souvent. De la sorte, la statistique des livres arrêtés, si l'on met à part la question des exemplaires, ne sera pas la statistique des titres nouveaux. De plus, il s'agit de contrefaçons, d'ouvrages prohibés ou de livres nouveaux sans permission. Ces derniers n'étaient pas nécessairement d'origine étrangère. On a vu, dans les chapitres précédents, que les Permissions Tacites n'étaient données et enregistrées qu'à Paris et pour la Capitale. Dans les autres villes, les livres avaient bien reçu une autorisation du pouvoir local. Leur transfert et leur entrée à Paris exigeait une nouvelle autorisation. Dans les trois cas, la suspension introduisait une conséquence : l'enregistre-
CIRCUIT DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMES
131
ment des livres arrêtés dans les visites. C'est l'objet des Manuscrits Français 21930 à 21934, qui recouvrent la période 1698-1791 soit encore tout le x v m e siècle monarchique. Toutefois, l'arrêt était effectué pour deux raisons principales : il pouvait s'agir d'un livre connu, pour lequel une décision de prohibition avait déjà été prise et qui devait coûte que coûte être intercepté ; mais il pouvait aussi être question d'un livre nouveau imprimé sans permission. Dans les deux cas, l'Inspecteur et le Syndic avaient pour mission de l'arrêter. Dans le premier cas et le plus souvent, les autorités de police décidaient seules, en application des jugements préalablement effectués. Dans le second cas, ils devaient en référer à l'administration chargée de donner les autorisations. Les livres passaient alors de la Chambre Syndicale au Bureau de la Librairie, et ils s'incorporaient aux circuits des autorisations. Ici, il semble qu'il faille discerner deux périodes : avant et après 1778. Avant, les livres étaient analysés par les censeurs, et les entrées n'étaient pas enregistrées. A partir de 1778, l'arrivée au bureau donne lieu à la tenue d'un registre, le Mss. F r . 21935. L'ouvrage nouveau, une fois enregistré, était destiné à un censeur. L ' e x a m e n devait conduire à l'une des deux conclusions suivantes : ou le livre était un ouvrage déjà autorisé et simplement réimprimé sans permission, et il était rendu ; ou il n'était pas pourvu d'une permission. Deux problèmes se posaient alors. A quelle catégorie de permissions devait appartenir la nouvelle autorisation ? E t comment la communiquer à la Chambre ? Tous deux furent résolus, en incorporant les nouvelles décisions au circuit des Permissions Tacites. On ne pouvait donner de privilèges. On ne voulait pas constituer un nouveau type de permission. On pensa, sans doute, que ces sortes d'ouvrages, français ou étrangers, pouvaient être assimilés aux Permissions Tacites. E t cela paraît juste. Les nouveautés françaises avaient été imprimées par une simple autorisation dans les villes du royaume autres que Paris et par conséquent n'avaient pas paru mériter un privilège. Dans la capitale, elles auraient obtenu une Permission Tacite. Les ouvrages étrangers ne pouvaient recevoir de privilège sans léser la production nationale. On pouvait donc permettre le débit, le tolérer. L a décision prise, la permission donnée devait être enregistrée pour qu'on en conserve la trace au Bureau de la Librairie. Elle le fut tardivement, non seulement dans le registre d'entrées (Mss. F r . 21935) mais aussi dans le répertoire des Permissions Tacites (Mss. F r . 21989). Cet enregistrement concernait tous les livres suspendus, quelle que fût la décision, permission ou prohibition. Il était nécessaire qu'il fût complet pour pouvoir répondre aux questions qui auraient pu être posées à propos de la suspension. D'autre part, l'arrêt n'avait été institué que dans l'intention de
132
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
découvrir les livres prohibés ou à interdire. L'administration se devait donc de connaître, d'une manière particulière, les livres censurés. De là naquit un autre enregistrement particulier, celui des registres répertoires de livres prohibés (Mss. Fr. 21928-21929). Les décisions prises et enregistrées au bureau, soit en totalité, soit d'une manière particulière aux ouvrages intolérables, devaient ensuite rejoindre le circuit de la communication des Permissions Tacites à la Chambre tout en y restant séparées, afin de ne pas confondre les permissions d'imprimer avec les autorisations de débit. Dans tous les cas la rubrique est distincte. Elle a pour titre : « Livres entrés par la Chambre ». On la retrouvera successivement dans les registres de feuilles de Permissions Tacites (Mss. Fr. 21981, 21984, 21987), puis avec les feuilles envoyées à la Chambre (Mss. Fr. 21988). Leur retour, après décision, achevait ce circuit circulaire des livres suspendus. Là un double enregistrement avait lieu. D'abord, les décisions devaient être enregistrées. Elles devaient être communiquées au public si besoin était, et, aussi, faciliter l'examen des visites suivantes. Elles furent insérées à la suite des Permissions Tacites. Ensuite, il fallait conclure le circuit et enregistrer les décisions sur les registres de suspension. La permission avait pour conséquence de rendre les livres suspendus à leur bénéficiaire qui signait une reconnaissance sur les registres de suspension, en même temps que, au moins pendant une bonne partie du x v m e siècle, le Syndic ou ses adjoints rayaient l'énumération des livres arrêtés. Quant aux autres, les livres « rayés », prohibés, ou simples contrefaçons, ils pouvaient, selon les cas, être renvoyés à l'étranger et dans ce cas l'Inspecteur de la Librairie devait veiller à leur départ, ou être mis au pilon et c'était notamment le cas des livres interdits, ou être confisqués au profit des libraires intéressés, quand il s'agissait de contrefaçons. Ainsi s'achevait ce troisième circuit de l'examen des livres. Cependant la nature des opérations effectuées à ces diverses phases devait conduire à des registres dont les statistiques possèdent des cadres différents. Celle des registres d'arrêts à la Chambre Syndicale (Mss. Fr. 21930-21934) comporte plusieurs fois le même titre, lequel pouvait concerner un ouvrage anciennement ou nouvellement imprimé. Au contraire, avec les livres suspendus (Mss. Fr. 21935), il s'agit des seuls titres neufs imprimés sans permission. Enfin, avec les Registres de Permissions Tacites, et notamment avec la rubrique des « Livres entrés par la Chambre » il s'agit des titres nouveaux permis. Il convient de donner quelques exemples. Le livre intitulé Louisia fut arrêté le 23 novembre 1787 et enregistré dans le Mss. Fr. 21934 concernant les livres suspendus à la Chambre.
CIRCUIT DE LA POLICE DES LIVRES
Mss.21982
DÉCLARATIONS DES OUVRAGES MIS SOUS PRESSE REGISTRES DES LIVRES ENVOYÉS DE LA DOUANE A LA CHAMBRE SYNDICALE
133
IMPRIMES
M ». 21897-21926
JOURNAL P'HËMERY
mr
M a.22156-65 22035
Mu.22019
RÉPERTOIRE DES LIVRES PUBLIÉS
Msi.21832
T
PRIVILÈGES EXPIRÉS M ss. 21930 - 21932
LIVRES ARRÊTÉS DANS LES VISITÉS
I 21933-34
Mss.21935
LIVRES SUSPENDUS M ss. 21929 - 21929
RÉPERTOIRES DES LIVRES PROHIBÉS
M ss. 21989
LIVRES ENTRÉS PAR LA CHAMBRE Répertoires des permissions tacites
M».2I980
Mss2Í98l »I 87 LIVRES ENTRÉS PAR LA CHAMBRE Registres de feuilles de permissions tacites
FEUILLES DE PERMISSIONS TACITES
T
M ss. 21982 21985
LIVRES ENTRÉS PAR LA CHAMBRE Registres de la chambre
REGISTRE DES LIVRES VISITÉS EN PROVINCE
1700
r
" J. 21988
1750
H 532 .1927
1790
Mss signifie Manuscrits Français et concerne les Registres conservés au département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale.
CIRCUIT A D M I N I S T R A T I F
DE L A POLICE DES LIVRES
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Toutefois, il ne passe pas de la Chambre au Bureau, probablement parce qu'il n'est pas nouveau et qu'une décision a déjà été prise à son sujet. P a r contre, la Dissertation sur le charbon arrêtée à la Chambre le 20 mai 1780, enregistrée dans Mss. Fr. 21934 p. 24, est envoyée au Bureau de la Librairie et inscrite dans le Mss. Fr. 21935 sous le numéro d'entrée 200. Après examen, elle sera autorisée par la feuille du 16 juin 1780 et sera rendue le 5 juillet de la même année. Aussi figurera-t-elle dans le Mss. Fr. 21984, Registre des Feuilles de Permissions Tacites, dans la rubrique « Livres entrés par la Chambre », puis dans le Mss. Fr. 21982, Registre d'enregist r e m e n t à la Chambre Syndicale (p. 121). Après avoir pris connaissance des livres nouvellement arrivés, après avoir vérifié s'ils étaient autorisés ou non, les Syndics et Adjoints eurent encore à répondre à une troisième question, à partir de 1704 : les exemplaires des livres avaient-ils été déposés ? Les visites permettaient alors au Syndic de constituer le quatrième des circuits bibliographiques de la police des imprimés, qui est aussi l'un des circuits du Dépôt Légal sur lequel nous reviendrons plus loin. Cette procédure, à l'exception du Dépôt Légal, n ' é t a i t pas, en principe, particulière à Paris. Elle devait exister au moins dans toutes les villes d'entrées du royaume et dans celles où une Chambre Syndicale existait. Aucun document, semble-t-il, ne nous est parvenu, peut-être en partie à cause du peu d'importance de ces cités sur le plan de la librairie. Cependant l'administration parisienne, assez tardivement, chercha à connaître le mouvement des livres suspendus dans les provinces, et cela donna lieu à la cinquième subdivision bibliographique du circuit de la police des imprimés et à la constitution du Mss. Fr. 21927. Enfin il convient de mentionner l'existence du Manuscrit Français 22019, « Répertoire alphabétique des livres publiés de 1778 à 1788 avec l'indication du chiffre des tirages ». E n réalité ce registre au titre très prometteur f u t très mal tenu et reste incomplet. Sa composition le rend inutile à cette étude. Après avoir décrit l'application des règlements concernant la surveillance des livres postérieurement à l'impression, il convient d'examiner chacune des séries de registres. 1. La série des registres d'enregistrement douane.
des ballots provenant de la
Cette série, on l'a vu, correspond à la première phase du circuit d'inspection des livres imprimés arrivant à Paris, et, particulièrement, au transfert de la douane à la Chambre Syndicale. La nature de cette étape conditionne la composition des registres : il n ' y sera question que de paquets plus ou moins volumineux, c'est-à-dire de ballots ou de balles, de tonneaux, etc. E n effet, les
CIRCUIT DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMES
135
livres ont dû, pour parcourir le t r a j e t qui les sépare de la capitale, qu'ils viennent de l'étranger ou des provinces, être emballés, recouverts, protégés. Il ne peut donc être question à la douane, dans la majorité des cas, de livres en vrac. A cette raison pratique s'en ajoute une autre, d'ordre administratif, au moins pour une fraction de cette production : les ouvrages étrangers doivent circuler des frontières à la capitale dans des emballages ficelés et plombés, et l'une des premières préoccupations des Syndic et Adjoints sera de vérifier qu'ils n'ont pas été ouverts. Ainsi transport et règlement expliquent-ils l'énumération des ballots dans les registres et, par suite, leur inutilité sur le plan, qui est le nôtre, de la statistique bibliographique de la France. L'unité du paquet ne permet pas d'atteindre directement l'unité qui nous occupe, celle du livre. Ces registres sont catalogués Manuscrits Français 21897 à 21926 et recouvrent la période 1697-1791. Ils ont pour titre «Registre des livres envoyés de la douane à la Chambre Syndicale de la Librairie et Imprimerie de Paris ». Suivant les périodes, leur composition diffère et présente une évolution, comme pour toutes les autres séries, allant d'une énumération à la suite de chaque ballot à une rationalisation de plus en plus avancée de l'enregistrement. Ainsi, vers la fin, les feuilles sont-elles divisées en sept colonnes. L a première, en allant de gauche à droite, concerne le numéro d'enregistrement : la seconde, les marques des balles et ballots ; la troisième, le nom des personnes à qui les livres sont adressés ; la quatrième décrit les balles ; la cinquième, le lieu de leur départ ; la sixième précise les balles et ballots pourvus d'un acquit ; la septième porte la signature des personnes qui les retirent. Ainsi, en aucun cas, il n ' y a dans ces registres une énumération de livres. 2. Le Journal
d'Hémery.
Dans notre précédente étude sur Le Dépôt Légal sous l'Ancien Régime, nous avions eu l'occasion d'apporter notre contribution à l'histoire de l'Inspection de la Librairie avant 1 7 9 1 A p r è s E . Coyecque, qui avait principalement établi les fonctions de surveillance proprement dites, nous avions retracé l'évolution de l'intervention des inspecteurs dans le fonctionnement du Dépôt Légal. Nous réexaminerons cette question ici seulement sur le plan bibliographique de la surveillance des livres arrivant à Paris. Les inspecteurs assistaient à l'ouverture des balles, ballots, etc. provenant de la douane. Cette activité les conduisit à composer un registre des livres nouveaux. Ils y étaient obligés par le règlement, afin d'avertir le Lieutenant Général de Police et le Directeur de la Librairie à qui ils devaient rendre compte. Ils dressaient « un é t a t 1. Le Dépôt Légal sous VAncien Régime de 1537 à 1791, p. 52 et suivantes.
136
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
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certifié véritable dont ils rendent compte à la fin de chaque visite au Magistrat qui représente M. le Chancelier et à M. le Lieutenant Général de Police &1. C'est cette obligation qui amena sans doute d'Hémery, l'Inspecteur de la Librairie le plus célèbre, celui qui organisa ce service administratif, à composer son Journal des livres nouveaux. Ce dernier est conservé à la Bibliothèque Nationale et forme la collection des Manuscrits Français 22156-22165, à laquelle il faut ajouter le Manuscrit Français 22038. Ce journal recouvre la période 1750-1769. Il est composé de journaux hebdomadaires, où l'inspecteur énumère les livres nouveaux qu'il a pu découvrir lors des visites faites à la Chambre Syndicale. La classification chronologique n'est pas toujours respectée. Il est fréquent que les feuilles soient interverties. Le Journal d'Hémery est évidemment très utile. Il enregistre les titres nouveaux, au fur et à mesure qu'il les découvre, lors des visites. Il s'agit donc d'une bibliographie courante, manuscrite, administrative et officielle de la France, pour la production des livres publiés. Il se distingue des Registres de Permissions, Privilèges ou Permissions Tacites, car si, comme eux, il est manuscrit, officiel et courant, il énumère non pas des autorisations avant l'impression mais des livres effectivement imprimés. Il se rapproche ainsi des bibliographies imprimées, qu'elles soient, comme nous le verrons, pour la plupart, privées, ou, pour l'une d'elles, officielle. C'est en effet que le Journal d'Hémery n'est pas un enregistrement complet de tous les livres visités comme le prévoyait le règlement. On dut s'apercevoir assez tôt que les registres de suspension suffisaient, dès lors qu'ils étaient élaborés en présence des inspecteurs, et qu'il n'était pas nécessaire de les doubler. Les magistrats pensèrent, sans doute, que l'important pour eux était de connaître les livres nouvellement imprimés qui figuraient, avec les ouvrages anciennement publiés, parmi les ballots transportés à la Chambre pour y être examinés. Le seul inconvénient de ce Journal est son peu de durée, puisqu'il ne commence qu'en 1750, c'est-à-dire à l'époque de la réorganisation administrative de la Censure sous la direction de M. de Malesherbes, et qu'il s'arrête, sans qu'on sache d'ailleurs pourquoi, en 1769, puisque d'Hémery ne devait demander sa mise à la retraite qu'en 1773. 3. Le Manuscrit Français
22019.
Le catalogue du Département en donne le titre suivant : « Répertoire alphabétique des livres publiés de 1778 à 1788... ». Ce registre a probablement été composé de façon à connaître par ordre alphabétique les livres nouveaux, dans un but identique au 1. Mss. Fr. 22080 (f. 129-171).
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Journal d'Hémery. Chaque page est divisée en deux, dans le sens de la h a u t e u r et, suivant les cas, également en deux dans la largeur, de sorte qu'il existe deux, trois ou quatre titres par page. P o u r chaque titre, on trouve au moins trois colonnes énumérant, de gauche à droite, l'imprimeur et le lieu d'impression, des indications concernant la date, et le tirage, qui varie de quelques centaines à quelques milliers. Ce registre est très incomplet. Nous ne nous en servirons pas dans la présente étude consacrée à la production générale, en r e m e t t a n t son exploitation à une prochaine recherche consacrée à la consommation intellectuelle, soit globale soit régionale. 4. Le Manuscrit
Français
21832.
On trouve dans ce manuscrit, parmi d'autres pièces, un « Tableau des ouvrages jugés communs ou qui le deviendront à l'expiration des Privilèges dont ils sont revêtus, en exécution de l'article X I de l'Arrêt du Conseil du 30 août 1777 p o r t a n t règlement sur la durée des Privilèges en Librairie ». Les pages sont divisées en trois colonnes, comportant de gauche à droite : 1° le nom des libraires ; 2° le titre des ouvrages par ordre alphabétique ; 3° la date de l'expiration des Privilèges. Cette colonne est très peu remplie. Ce document a pu servir à l'examen des livres et à déterminer ceux qui étaient réimprimés après que le privilège f û t expiré. 5. La série des registres de livres arrêtés dans les visites. Elle correspond aux première, cinquième et sixième phases du troisième circuit secondaire de la police des imprimés. Comme pour les registres de demandes et d'octrois de permissions, les registres de cette série mentionnent le d é b u t et la fin du circuit. Ils enregistrent d'abord la première phase, c'est-à-dire l'acte de suspension. Les ouvrages sont ensuite examinés au Bureau de la Librairie. Une décision est prise, dont la Chambre est avertie. Dans une cinquième phase, il f a u t l'enregistrer et c'est ce qui est fait sur ces registres. Il en est de même de la sixième, l'exécution de la décision, n o t a m m e n t la signature du Libraire reconnaissant qu'il a bien reçu les livres, un instant suspendus, et désormais permis. Ces registres sont catalogués Manuscrits Français 21930 à 21934. Ils recouvrent la période 1698-1791, c'est-à-dire, à un an près, la même période que la Collection des balles. Comme pour cette série, on p e u t distinguer une évolution. Les registres 21930, 21931, 21932 qui concernent respectivement les périodes 1698-1702, 1703-1742, 1742-1771, f u r e n t composés de trois colonnes. A gauche le numéro de la visite, à droite la date
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et, dessous, à la suite, l'énumération des titres avec le nombre d'exemplaires. Le Manuscrit Français 21930 comprend de plus, d'une part, un « mémoire des livres nouveaux qui ont été retenus pour la bibliothèque et pour le Cabinet du roi », et sur lequel nous reviendrons plus loin à propos des registres du Dépôt Légal, et, d'autre part, « des reconnaissances de délivrance des ballots des livres arrivés à Paris après visite à la Chambre et données aux personnes à qui ils étaient envoyés ». La composition des registres change dans les Mss. Fr. 21933 et 21934 pour la période de 1771-1791. Le nombre des colonnes augmente. De gauche à droite, on indique, d'abord, le numéro et les marques ; le nom des personnes intéressées ; les balles et ballots, le nom des lieux d'où ils viennent avec ou sans acquit ; en quatrième lieu, le nombre et les titres des ouvrages suspendus ; puis la raison des suspensions et leurs dates. On trouve ainsi « nouveauté » « réimprimé le privilège étant expiré », « contrefaçon », « prohibé ». Dans la sixième sont indiqués les jugements sur les suspensions, et leurs dates. On a ainsi : « à rendre » « à mettre au pilon » « à renvoyer à l'étranger ». Dans la septième, les personnes qui les retirent. Ainsi les cinq premières colonnes concernent la première période du circuit d'inspection et les deux dernières ses cinquième et sixième phases. 6. Le Manuscrit
Français
21935.
Il a pour titre : « Registre des ouvrages entrés par la Chambre Syndicale de la Librairie 1778-1789». Il correspond aux deuxième et troisième phases du circuit des suspensions. Après l'arrêt, des exemplaires des ouvrages étaient transmis de la Chambre au Bureau de la Librairie pour y être analysés. Ce manuscrit enregistre donc les arrivées (2e phase) à partir de 1778 seulement, puisqu'il ne semble pas qu'on les ait auparavant inscrites. Après quoi on mentionne la distribution aux censeurs et la décision prise (3e phase). Ainsi est-on en présence, comme pour la précédente série, mais au niveau du Bureau de la Librairie, d'un registre comparable aux registres de demandes et d'octrois de permissions, avec cette différence qu'il s'agit ici du débit de livres imprimés. Les feuilles sont composées de six colonnes consacrées, de gauche à droite : au numéro d'enregistrement ; au titre de l'ouvrage ; à la date de suspension ; au nom de la personne destinataire ou propriétaire ; au censeur, encore que le nom de celui-ci, fréquemment, ne soit pas indiqué, et qu'on précise par la suite la cause de la suspension, « nouveauté », « sans permission », « contrefait ». Enfin la sixième est consacrée à la décision. L'évolution des premières séries de Registres de la police des livres à ce manuscrit est intéressante à suivre. Elle permet de passer, en ce qui concerne la production des
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livres, d'une conception matérialiste, économique et commerciale, à une conception plus idéaliste. La première, celle des registres de transfert, ne connaît que des paquets, des amas de livres. Il s'agit d'une marchandise, t o u t comme une autre. La série suivante, celle des registres d'arrêts, est intermédiaire. Sa nature est déjà spirituelle, puisqu'il s'agit d'arrêter les livres dangereux. Elle reste encore matérielle, puisqu'on dénombre la marchandise en énumér a n t le nombre des exemplaires suspendus. Le Manuscrit 21935, comme le Journal d'Hémery, mais pour une catégorie réduite de livres, n'enregistre que la seule production de l'esprit. Aussi cette fois indique-t-on le titre, non le nombre des exemplaires. Enfin ce registre d'entrée se prolonge par les registres d'enregist r e m e n t de la quatrième phase, la décision. Il n'est pas besoin ici de les décrire, puisqu'il s'agit des registres de Permissions Tacites. Les jugements sont enregistrés séparément sous la rubrique « Livres entrés par la Chambre » successivement dans les Répertoires de Permissions Tacites (Mss. Fr. 21989 et 21980) puis dans les registres de feuilles (Mss. Fr. 21981, 21984, 21987) avec les feuilles (Mss. Fr. 21988). A la Chambre Syndicale, dans la cinquième phase, l'enregistrement était effectué non seulement sur les registres de suspensions mais également sur ceux de Permissions Tacites mis à la disposition du public. (Mss. Fr. 21985). 7. La série des registres des livres
prohibés.
Elle correspond à la troisième phase du circuit des livres arrêtés. Après le jugement du censeur, quand la décision était prise et qu'on l'avait enregistrée sur les répertoires de Permissions Tacites, a v a n t de la communiquer à la Chambre pour la faire enregistrer et exécuter, l'administration relevait d'une manière particulière les « livres rayés ». Ce sont donc les livres interdits qui furent regroupés dans les Manuscrits Français 21928-21929. Les deux Registres sont identiques. L'un, le Mss. Fr. 21928, paraît être plus tardif et recopier le Mss. Fr. 21929. Ce sont des répertoires alphabétiques de titres. Le Mss. Fr. 21929 donne les années au début de l'énumération de chaque lettre. L'indication chronologique n'est p o u r t a n t pas continue. De plus, elle s'arrête généralement vers 1747-1750, laissant à la suite une longue liste de titres postérieurement prohibés. Les dates les plus extrêmes paraissent être 1696 et 1770 (dans le Mss. Fr. 21928 : Lettre sur les ouvrages condamnés par l'arrêt du Parlement du 18 avril 1770). 8. Le Manuscrit
Français
21927.
Les ouvrages précédents concernaient, presque exclusivement, le circuit de la police des livres postérieurement à leur impression,
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à Paris, en fonction des visites des balles provenant des provinces ou de l'étranger. On a vu que l'administration s'était efforcée de connaître les résultats des visites effectuées dans les autres villes principales, notamment dans les villes par lesquelles les livres étrangers avaient le droit d'entrer. C'est l'origine du Mss. Fr. 21927, qui a pour titre « Registre des livres visités aux Chambres Syndicales de Besançon, Lyon, Nancy, Orléans et Toulouse » de 1778 à 1789 (20 feuillets). Cette préoccupation semble assez tardive et correspond à l'extension de l'Inspection de la Librairie à plusieurs villes principales du royaume dans la dernière décade de l'Ancien Régime, à une période où la production, après une baisse spectaculaire, va prendre un élan considérable. Ce registre est un répertoire alphabétique des villes. Les renseignements sont indiqués sur une double page ouverte. Sur le verso de la feuille de gauche est indiqué le numéro d'enregistrement, sur le reste de la page, le titre. Sur le recto de la feuille à droite on mentionne une date, puis les noms. L'énumération est courte. Il est visible que le registre n'a pas été tenu régulièrement à jour.
CHAPITRE
VU
LES REGISTRES BIBLIOGRAPHIQUES DES CIRCUITS ADMINISTRATIFS DU DÉPÔT LÉGAL
Comme on l'a déjà dit, l'étude du Dépôt Légal et de ses registres est à la fois indispensable, indépendante et réduite. Elle est indispensable puisque le présent travail, sur la production intellectuelle de la France au x v m e siècle, doit analyser, outre les bibliographies imprimées, les registres manuscrits de l'organisation réglementaire dont fait partie le Dépôt Légal. Elle est indépendante aussi. Sans doute l'une des branches du Dépôt est policière ; elle pourrait, à juste titre, être rattachée aux études précédentes de l'autorisation d'imprimer, dont elle est la conclusion, et de la police des livres imprimés, qui comporte, à partir de 1704, le prélèvement des livres du Dépôt lors de l'examen des livres venus de la douane à la Chambre Syndicale. Cependant, cette branche policière est à la fois la moins importante et la plus tardive. Le Dépôt concerne primitivement l'enrichissement des collections nationales sans qu'intervienne le souci de Censure qui n'apparaît qu'un siècle environ après sa fondation. Il se fait au profit de la Bibliothèque du Roi, du Cabinet du Roi, de la Chambre Syndicale, qui n'ont rien à voir avec les autres organisations policières destinataires. De la sorte, il était indispensable d'en faire une étude distincte. Enfin, celle-ci ne saurait être que réduite puisque nous lui avons consacré un ouvrage déjà publié. Toutefois, elle n'en sera pas seulement un simple résumé : ce travail sur la production intellectuelle française nous a permis de reconnaître quelques registres
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du Dépôt qui ne figurent pas dans notre précédent livre et dont l'examen, par suite, en offrira un complément. Comme pour les registres de permissions ou de la police des livres imprimés, la fonction des registres du Dépôt Légal ne saurait être déterminée, s'ils ne sont pas situés dans le circuit administratif qui leur a donné naissance. Celui-ci a deux limites extrêmes : leur point de départ, l'imprimeur libraire obligé au dépôt ; leur point d'arrivée : les différents destinataires et mieux encore, dans certains cas, les classifications ou les départements dans lesquels ils sont introduits chez ces derniers. A son tour, ce circuit de l'imprimeur au destinataire peut être situé par rapport à la chronologie de l'impression et par rapport aux circuits administratifs précédents. D'abord, le circuit du Dépôt Légal ne commence qu'avec la troisième période celle de la publication. Nous avions déterminé trois phases : avant, pendant, après l'impression. Le circuit du Dépôt Légal commence avec la troisième phase, au moment où l'ouvrage est achevé d'imprimer et ceci à la limite même, puisque, d'après les règlements, le livre ne saurait être mis dans le public avant que le Dépôt ne soit déjà effectué. D'autre part, par rapport au circuit administratif, il rejoint et parachève celui des demandes de permissions. En effet, la permission n'est donnée que sous condition qu'on dépose les exemplaires dus. Sur ce plan on peut dire que c'est la seconde phase du circuit des permissions d'imprimer. La première, par la décision du pouvoir royal, allait de celui-ci à l'imprimeur libraire ou à l'auteur ; la seconde, celle du dépôt, reconduit au pouvoir royal, Bibliothèque, Chancelier, etc., en partant du bénéficiaire de la permission. Par rapport au circuit de la police des livres, le circuit du Dépôt Légal lui est initialement et temporellement parallèle. La police s'effectue, sans doute, pendant l'impression mais c'est surtout après, sur le plan de l'enregistrement, qu'elle se manifeste le plus. A partir de 1704 le circuit du Dépôt fut incorporé à celui de la police. Après avoir situé extérieurement le circuit administratif du Dépôt, il convient d'en déterminer la composition interne qui varia avec le temps et dont la cause essentielle tient au principe de l'intermédiaire. Il est, en effet, deux solutions fondamentales possibles entre l'imprimeur et les destinataires : ou le Dépôt se fait librement, directement, ou il s'effectue par un tiers. De plus celui-ci, s'il intervient, aura nécessairement deux faces et deux actions : vers l'imprimeur il aura pour but de recueillir les livres ; vers les destinataires, de les répartir. Ces deux fonctions peuvent, à leur tour, être réalisées par une seule et même personne, ou, au contraire, être dissociées et confiées à deux autorités différentes. Toute l'histoire du circuit administratif du Dépôt tient en ceci : liberté d'abord ; envoi direct du libraire au destinataire, pendant
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près de deux siècles, correspondant aux débuts et aux premiers développements de l'imprimerie de 1537 à 1704 ; intervention, ensuite, d'un intermédiaire qui conservera les deux fonctions de 1704 à 1785 : la Chambre Syndicale des Libraires de Paris, et, par la même occasion, unification des circuits de la police des livres et du Dépôt Légal. Enfin, de 1785 à la Révolution, dissociation des deux fonctions de l'intermédiaire : la Chambre Syndicale conservant le travail de regroupement des ouvrages du Dépôt en provenance des libraires et des auteurs ; l'Inspection de la Librairie intervenant seule dans la répartition des ouvrages. Historiquement, cette évolution a un sens plus profond dès lors qu'on déborde la période de l'Ancien Régime et qu'on situe celle-ci par rapport au Dépôt Légal moderne. L'institution de la Chambre Syndicale comme intermédiaire prépare, empiriquement, la constitution d'un organisme spécial qui n'est autre, aujourd'hui, que la Régie du Dépôt Légal. De même, l'évolution sous l'Ancien Régime de cet intermédiaire est également instructive : elle montre le passage de l'initiative privée à l'administration publique. En effet, la Chambre Syndicale chargée du Dépôt, en 1704, est un organisme privé, et lorsqu'on la décharge en 1785 de la répartition, c'est au profit des Inspecteurs, c'est-à-dire de la fonction publique et ceci pour la raison simple que l'état est finalement conduit, par l'expérience, à avoir davantage confiance en lui-même. Il ne restera plus qu'à enlever à l'initiative privée le soin de regrouper les exemplaires pour que le principe de la régie soit lui-même déterminé. Il faudra attendre le Dépôt Légal moderne. Ces trois périodes de l'histoire du circuit du Dépôt Légal devaient conduire à la constitution, par les différents destinataires et intermédiaires, de plusieurs séries de registres. Ce qui caractérise la première période, c'est le nombre réduit de bibliographies manuscrites. De 1537 à 1704 il y eut quatre destinataires qui furent d'ailleurs institués successivement : La Bibliothèque du Roi en 1537 ; la Chambre Syndicale des Libraires de 1615 à 1618 ; la Chancellerie vers 1638 ; et le Cabinet du Roi en 1658. Sur ces quatre destinataires, deux seulement devaient composer des registres, et assez tardivement. Le premier registre d'entrées à la Bibliothèque du Roi date de 1684 et est coté Archives 34. Il se poursuit après 1704, jusqu'en 1721. A la Chambre Syndicale, on avait aussi auparavant composé trois registres cotés Mss. Fr. 21943, 21845 et 21930. Ces manuscrits ne figurent pas dans notre précédent travail et il convient d'en faire la description ici. Le premier, le Mss. Fr. 21943, a pour titre « Registre de livres fournis par les imprimeurs aux Syndics et Adjoints de la Communauté, en exécution des règlements concernant la Librairie », 1626-1689.
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LA STATISTIQUE
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L'intérêt de ce registre, sur le plan théorique, est évident. Il devrait nous donner l'énumération des livres de privilèges déposés au profit de la Chambre Syndicale. En ce sens, il permettrait de remonter bien avant en ce qui concerne la statistique bibliographique du dépôt, puisque le premier document, le Registre Archives 34, ne commence qu'en 1684. On pourrait ainsi connaître le Dépôt des trois derniers quarts du x v n e siècle, au lieu d'en rester à la connaissance des 16 dernières années. Cependant, l'examen de ce registre devait décevoir notre espérance. En effet, le dépôt n'est pas continu. Cette irrégularité provient, sans doute, du but de ce dépôt, qui était fait au profit de la Chambre Syndicale, de façon à pouvoir régler les dépenses de celle-ci avec le produit de la vente des livres déposés. Aussi le dépôt paraît-il se faire suivant les besoins et les demandes des Syndics, plus que selon une régularité administrative. Aussi y eut-il des années sans que rien ne fût déposé. Dans certains cas, celui-ci est réduit à peu de choses. Au contraire, dans les années de besoin, il augmente pour atteindre des chiffres importants. Le second registre, le Mss. Fr. 21845, est la suite du précédent. Il a pour titre : « Registre des livres reçus pour la Communauté par le sieur Trabourlet, etc... le 15 novembre 1689. » Il énumère les livres déposés jusqu'en 1704. Les observations précédentes sur l'irrégularité des données annuelles sont également valables pour celui-ci. Le troisième des registres de dépôt composés à la Chambre est le Mss. Fr. 21930, qui comporte notamment un « Mémoire des livres nouveaux qui ont esté retenus pour la Bibliothèque et pour le Cabinet du Roy dans les visites faites dans la Chambre Syndicale des Libraires et Imprimeurs de Paris par les Syndics et Adjoints suivant les ordres ». La première livraison date du 9 juillet 1698. « Du 9 juillet 1698 envoyé à Monsr. Clément sous bibliothécaire du Roy. » Après l'énumération, on trouve le texte suivant signé de Clément : « Mrs les Syndic et Adjoints ont envoyé à la Bibliothèque du Roy les livres de privilèges mentionnés ci-dessus qu'ils avaient retenus en faisant les visites suivant les ordres de sa Majesté. Fait à Paris le 10 juillet 1698. »
Cette énumération est précieuse. Elle prouve que l'obligation pour les libraires de ne plus déposer les livres directement mais par l'intermédiaire de la Chambre Syndicale avait été appliquée dès 1698, soit encore six ans avant que la décision officielle du règlement ne soit prise. Ainsi, pendant cette première période, il n'y eut que deux destinataires qui composèrent des registres, la Chambre Syndicale et la Bibliothèque du Roi. Les Chanceliers et le Cabinet du Roi intro-
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duisirent directement leurs livres du dépôt dans leurs collections, sans établir, semble-t-il, le moindre catalogue. La seconde période, de 1704 à 1785, va voir se poursuivre la manière de faire qui avait commencé de s'établir dans la période précédente. A.
LA B I B L I O T H È Q U E D U
ROI.
L'enregistrement va se compliquer. D'une part, on relève les entrées du dépôt, d'autre part, on constitue des registres de répartition entre les différents départements. 1. La série des registres
d'entrées.
On a successivement : a) La fin du Registre Archives 34 qui commence en janvier 1684 et s'achève le 13 mai 1721. b) Archives 35, du 31 octobre 1721 au 4 novembre 1724. c) La série des Manuscrits Français 22023 à 22026 — Mss. Fr. 22023, de septembre 1724 à 1758 ; — Mss. Fr. 22024, du 31 janvier 1758 au 14 juillet 1775 ; — Mss. Fr. 22025, du 11 août 1775 au 23 mai 1783 ; — Mss. Fr. 22026, du 18 juillet 1783 au 29 décembre 1785. 2. Les Registres de répartition des ouvrages déposés. Cette série n'existait pas dans la période précédente. Le développement de la Bibliothèque Royale, la formation des différents départements devait conduire à un enregistrement interne des répartitions. On trouve deux groupes de registres : ceux qui concernent les différents cabinets ; ceux qui visent la vente des ouvrages doubles du dépôt. a) Les Registres généraux. On trouve successivement le Mss. Fr. 22033, de 1746 à 1779, et le registre Archives, 14 de 1779 à 1784. b) Les Registres de vente des ouvrages doubles. Ils sont cotés Archives 8 et 9 et enregistrent les livres doubles vendus à partir de 1753. B. LE C A B I N E T D U ROI.
Le cabinet du Roi, destinataire institué en 1658, ne commence à enregistrer, semble-t-il, qu'à partir de 1704, et ceci jusqu'en 1721, date de sa réunion à la Bibliothèque du Roi. Le registre sur lequel sont transcrites les entrées est catalogué Mss. Fr. 22021.
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C. LA CHAMBRE
SYNDICALE.
L e registre 2 1 8 4 5 s'achevait en 1704. Il ne semble pas qu'il ait été poursuivi. P a r contre, à partir de cette date, la Chambre, qui devient l'intermédiaire entre les imprimeurs, libraires, auteurs, et les destinataires, se devait de constituer des registres de dépôt, dont deux seulement nous ont été conservés, concernant l'un le dépôt pour le Chancelier et qui est coté Manuscrit Français 22007, et l'autre la Chambre elle-même. Il est coté Mss. Fr. 21982. Ces registres n'ont pas non plus été analysés dans notre étude précédente. Le premier, le Mss. F r . 22007, a pour titre : « E s t â t des ouvrages imprimez en vertu des privilèges ou permissions du sceau dont le manuscrit et l'exemplaire pour Monseigneur le Garde des Sceaux ont été remis en exécution de l'ordre du 22 décembre 1732 et des livres étrangers dont on permet le débit 1733-1737. » Les feuilles du registre sont composées de sept colonnes. On trouve, de gauche à droite : dans la première colonne, le « n° du manuscrit » ; dans la seconde, le « numéro d'ordre » ; dans la troisième, « le titre de l'ouvrage » ; dans la quatrième, « le nom du libraire ou autre qui remet » ; dans la cinquième, « la datte de la remise des Manuscrits à la Chambre Syndicale » ; dans la sixième, la « datte de la remise faite à Mr. Gallyot des Manuscrits » ; dans la septième enfin, la « datte de la remise faite à Mr. Gallyot des exemplaires appartenant à Mgr le Garde des Sceaux ». Il arrive que les dates des colonnes 5, 6 et 7, soient les mêmes. Parfois la date de la cinquième est antérieure à celle des deux suivantes. Un certain temps passe alors entre le dépôt à la Chambre et le dépôt par la Chambre chez le Chancelier. Enfin, ces colonnes ne sont pas remplies jusqu'à la fin du registre. L a composition de ce dernier est donc fort utile. Elle prouve que le dépôt effectué au profit du chancelier a bien une fonction policière, et, par là même, que les règlements sont bien appliqués. On se souvient que, pour obtenir une autorisation d'imprimer, il fallait déposer deux exemplaires manuscrits, dont l'un était conservé par le chancelier et l'autre rendu à l'imprimeur, tous deux devant en principe être paraphés page par page. Le dépôt avait alors pour fonction de vérifier si l'imprimé était conforme au manuscrit. D'où la nécessité de connaître, au moment où s'effectuait le dépôt, le numéro du manuscrit, et c'est bien la fonction de la première colonne. Ainsi pouvait-on retrouver le document initial et le censeur pouvait-il vérifier si l'imprimé ne comportait aucune altération. Ce registre a encore un intérêt. Il s'agit, en effet, du dépôt, non seulement des livres de privilèges, mais aussi des Permissions Tacites déguisées sous le titre de « livres étrangers dont on permet le débit ». Le second des deux manuscrits composés à la Chambre, le Mss.
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Fr. 21982, comporte, parmi d'autres énumérations de livres : « Un é t a t des livres imprimés en permissions tacites fournis à la Chambre ». Il commence le 10 décembre 1756 et se poursuit l'année suivante. L'énumération est courte et sans grand intérêt. P e n d a n t toute cette période, la Chambre Syndicale ne semble pas avoir tenu de registre général, ni non plus de registres particuliers de répartition, si l'on excepte les deux précédents, et dans une moindre mesure les Mss. Fr. 22023 à 22026 qui ont pu, peut-être, servir simultanément de registre d'entrées à la Bibliothèque du Roi et de répartition à la Chambre. Elle n'en t i n t pas effet, ni pour le Cabinet du Roi, ni pour les censeurs royaux destinataires à partir de 1704. De même, p e n d a n t cette période, aucun enregistrement ne semble nous être parvenu des censeurs, des Chanceliers et des Gardes des Sceaux. Ce qui va caractériser la troisième période, de 1785 à 1790, c'est la multiplication des notations concernant la Bibliothèque du Roi, t a n t par elle que par la Chambre et par les Inspecteurs de la Librairie, répartiteurs, et d'autre part, l'absence d'enregistrement pour et par les autres destinataires. Plusieurs des opérations successives effectuées entre la Chambre et la Bibliothèque ont été à l'origine de manuscrits. L'intermédiaire, la Chambre Syndicale des Libraires, ne conserve que le regroupement des ouvrages. La répartition, la livraison aux différents destinataires est effectuée par les Inspecteurs de la Librairie. 1. L'enregistrement
à la Chambre
Syndicale.
du dépôt délivré pour la Bibliothèque du Roi. A v a n t de répartir les ouvrages, on enregistrait, à la Chambre, les ouvrages dus à la Bibliothèque du Roi. Ces enregistrements nous ont été conservés, pour deux ans et demi, et figurent dans les Mss. Fr. 22034, 22029, 22030. a) Mss. Fr. 22034 : du folio 33 au folio 46 (2 septembre 178523 décembre 1785) ; b) Mss. Fr. 22029 : du folio 47 au folio 100 (11 janvier-29 décembre 1786); c) Mss. Fr. 22030 : du folio 101 au folio 119 (16 janvier-15 mai 1787) et du folio 1 au folio 30 (30 décembre 1787) ; d) Mss. Fr. 22034 : du folio 31 au folio 46 (4 janvier-28 mars 1788). 2. Les feuilles
de relevés des registres de la Chambre
Syndicale.
Les livraisons étaient effectuées par l'Inspection de la Librairie qui composait des relevés des registres de la Chambre, lesquels
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BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
accompagnaient les ouvrages. Ils figurent dans plusieurs registres cotés Mss. Fr. 22034, Archives 36, et dans l'un des registres conservés à la Régie du Dépôt Légal. La première date de juillet 1784, la dernière de la fin de l'année 1786. A. Le Manuscrit Français 22034. Il comprend les feuilles du 1° Folio 10 à 16 (juillet-décembre 1784) ; 2° — 20 à 33 (avril 1785 à août 1785) ; 3° — 57 et 58 (mars 1786) ; 4° — 17, 18, 19 (janvier-mars 1785). Elles permettent de connaître les répartitions du folio 10 au folio 33, de juillet 1784 à août 1785. Quant aux folios 57 et 58, ils complètent le 1 e r registre du Dépôt Légal. B. Le Premier Registre des Archives de la Régie du Dépôt Légal 1 . Les relevés des folios 47 à 59 (11 janvier-28 mars 1786) s'y trouvent à l'exception des folios 57 et 58 qui figurent dans le précédent. On remarquera donc que la suite des feuilles manque du folio 33 (août 1784), fin du Mss. Fr. 22034, au folio 47 (11 janvier 1786), début du 1 e r registre. C. Le Registre Archives 36. Les relevés se poursuivent du folio 60 au folio 100 (4 avril29 décembre 1786). 3. Le Registre
d'entrées
du Dépôt
Légal
à la Bibliothèque
du
Roi.
C'est la continuation de la série Archives 34-35 et de la série Mss. Fr. 22023-22026. Il s'agit du registre Mss. Fr. 22032. Il commence au folio 109 (9 juin 1789) et s'achève au folio 122 (15 janvier 1790), ainsi y a-t-il une interruption entre le Mss. Fr. 22066 et ce dernier. Celui-ci porte sur plusieurs années, du 29 décembre 1785 au 9 juin 1789. Que s'est-il passé entre temps ? Il est possible que l'interruption de l'enregistrement provienne du changement intervenu à la suite du Règlement de 1785. Les Inspecteurs de la Librairie transféraient les livres de dépôt, avec les feuilles de relevés, de la Chambre à la Bibliothèque. Dans celle-ci, ils les déposaient dans les différents départements. Il est donc possible que l'on se soit abstenu de faire un dépôt général et global pendant plusieurs années et qu'on ait préféré une répartition particulière dans les différents cabinets. On remarquera, à l'appui de cette hypothèse, que les registres d'entrées cessent quand com1. Voir note page 15.
CIRCUIT DU DEPOT LEGAL
149
CHAMBRE SYNDICALE Dépôt pour le chancelier
M u . 22007
Ma. 21962
2)845
Mss. 21945
I
Dépôt pour la chambre Mu.21930 I I I I I Dépôt pour la bibliothèque Doubl es
Mu.22029-3034
I II •TRig-M.
INSPECTEURS DE LA LIB RAI RI E
Mu. 22034 Ar.36 Ï E U Ï L L Ë S DÉ TRANSFERT I I
I
I Ar.362«Req.Dl
CERTI: 'ICATS DE DEPOT
BIBLIOTHÈQUE DU ROI
|
Ar. 54-35 Mss. 22025 - 22026
Enregistrement des entrées'
Mstmi Ar. 14
Mss.22033
Répartit ion dans les départements
Mss.22031 IMPRIMES MUSIQUE ||
Enregistrement dans les départements
lr8-9 £
Ma.22027 VENTE I
Mss. H.A. 2490
Récla mations
Mu.22020
Ar. 12
LIVRES D ' H E M E R Y |
CABINET DU ROI
1610
1650
Mss. 22021
1700
1750
1790.
Mss et Ar signifient Manuscrits Français et Archives et concernent les Registres conservés au département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale.
CIRCUIT A D M I N I S T R A T I F
DU DÉPÔT
LÉGAL
150
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
mencent des certificats de dépôt dans les départements et qu'ils reprennent quand ceux-ci disparaissent à leur tour. 4. Les Registres de
Certificats.
Les livres du dépôt étaient confiés par l'inspecteur a u x différents conservateurs des cabinets de la Bibliothèque, qui délivraient des certificats de dépôt. Ceux-ci figurent dans les Registres Archives 36 et dans le deuxième registre des archives de la Régie du Dépôt Légal. a) Archives 36. Les Certificats vont du folio 60 au folio 100 (4 avril 1786-29 décembre 1786). On trouve des certificats au Cabinet des Estampes, au Cabinet des Généalogies, au département des Imprimés et de la Musique, et pour le libraire Debure pour la vente des doubles. b) Le 2 e registre de la Régie du Dépôt Légal 1 . Les certificats correspondent aux folios 101 du 16 janvier 1787, et 14 au 28 avril 1787. 5. Les registres du département
enregistrant
le dépôt.
Les livres déposés par l'inspecteur dans les départements, les certificats délivrés, il restait à enregistrer les livres. C'est ce qui f u t fait, au moins par le département des imprimés de la musique, qui compose le Manuscrit Français 22031, et pour le libraire Debure, lequel est à l'origine du Mss. Fr. 22027. Le Mss. Fr. 22031 se poursuit du folio 47 au folio 99 (4 avril 1788-2 avril 1789) et le Mss. Fr. 22027, du folio 37 au folio 68 (2 décembre 1785-26 mai 1786). La classification de ces registres, selon les trois périodes de la réalisation du dépôt, direct à partir de 1537, indirect avec l'intermédiaire de la seule Chambre de 1704 à 1785, puis avec l'intervention des inspecteurs de la Librairie comme répartiteur de 1785 à 1790-91, était indispensable. Toutefois sur le plan de la statistique bibliographique, elle a besoin d'être complétée par une classification par séries qui nous permettra de connaître les groupes intéressants et les durées. Tout d'abord, il est des destinataires qui ne nous ont rien laissé. Tels sont les censeurs, les Chanceliers et Gardes des Sceaux. Le Cabinet du Roi nous offre, par le Mss. Fr. 22021, les données du dépôt de 1704 à 1721. La Chambre Syndicale, en t a n t que destinataire, les Mss. Fr. 21943 et 21845 de 1626 à 1704, puis le Mss. Fr. 21982 pour les années 1756 et 1757. Le principal est donc la Bibliothèque du Roi qui nous donne les séries plus ou moins longues, générales ou spécialisées. 1. Voir note page 15.
CIRCUIT
DU DEPOT
151
LEGAL
1° La Série des registres d'entrées, Archives 34 Archives 35 et Mss. Fr. 22023-22026 et 22032, de 1684 à 1785 et de 1789 à 1790. Elle est la plus longue et reste générale ; 2° La série des registres de répartition entre les différents départements, comprenant le Mss. Fr. 22033 et Archives 14, de 1746 à 1784; 3° La série des registres de départements enregistrant le dépôt. a. Les registres de vente, Archives 8, 9, Mss. Fr. 22027, à partir de 1733 pour les premières et de 1785 à 1786 pour le dernier. b. Les registres du département des imprimés et de la musique Mss. Fr. 22031 (1788-1789). En tant qu'intermédiaire, la Chambre Syndicale devait, par ailleurs, composer des registres. Il nous est resté : a ; Le dépôt pour le chancelier, Mss. Fr. 22007, de 1733 à 1737 ; b) L e Mss. Fr. 21930; c ) Les doubles pour la Bibliothèque du Roi (22034, 22029, 22030), de 1785 à 1788. Enfin, la répartition effectuée, à partir de 1785, par les inspecteurs de la Librairie est à l'origine de deux séries : a) Les séries de feuilles de relevés dans les Mss. Fr. 22034, Archives 36 et l'un des registres conservés à la Régie du Dépôt Légal, de la fin de 1784 à 1786. b) La série des registres de certificats dans Archives 36 et le 2 e registre des Archives de la Régie du Dépôt Légal, de 1786 à 1787. Cette énumération des registres du dépôt n'est pas complète parce qu'elle est effectuée à partir du principe même de l'opération. En réalité, le dépôt devait être vérifié, et ceci donna l'occasion d'une part du Mss. Fr. 22020, registre de réclamations des livres non déposés de 1752 et 1770 et, de plus, d'un autre manuscrit qui ne figure pas dans notre précédente étude, le Mss. Fr. N. A . 2490, auquel il faudra ajouter encore le manuscrit Archives 12 concernant des livres sans doute interdits remis à la Bibliothèque par M. d'Hémery en 1776. LE
MANUSCRIT
FRANÇAIS
NOUVELLES
ACQUISITIONS
2490.
Ce manuscrit est annoncé comme suit : « Extrait des Registres de la communauté des marchands libraires, contenant les livres imprimez avec privilège du R o y depuis le mois de novembre 1663 (jusqu'en aoust 1703 pour) la recherche de tous les livres qui estaient dus à la Bibliothèque du R o y » par Clément. Le registre porte au dos l'indication suivante « Chambre Syndicale ». Une note manuscrite figure en tête :
8
152
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
« Extrait des Registres de la Chambre Syndicale des libraires contenant les livres des Privilèges réimprimés depuis le mois de novembre 1663 jusqu'en 1703. »
La première page du document explique son but : « Par arrest du Conseil du 25 octobre 1663, le Roy a maintenu les libraires et imprimeurs en droits et possession de faire mettre au commencement ou à la fin des livres qu'ils imprimeront un extrait des lettres de Privilèges à eux accordez par sa Majesté moyennant quoy leurs di privilèges seront tenus pour deûment signifiez, en fournissant les exemplaires mentionnez es d. lettres et les faisant registrer sur le livre de la communauté. » « En suite de cet arrest, Mons. R. L'esvêque de Luçon fit faire la recherche de tous les livres qui estaient à la Bibliothèque du Roy jusques à ce temps, qui furent délivrez pour lors à Mond. Sr L'Evesque de Luçon et à Mons. Le Bailly du Palais, ainsy qu'ont asseuré les Libraires qui estoient en ce temps là. »
L'ouvrage est composé de feuilles divisées en plusieurs colonnes manuscrites. A gauche, est indiqué le nom des imprimeurs, libraires. Ils sont soulignés au commencement de l'ouvrage ; par la suite, le trait disparaît. A droite figure le titre de l'ouvrage. Les titres sont séparés les uns des autres par une petite barre placée sous les premières syllabes des titres. Ce procédé a d'ailleurs été fréquemment utilisé sous l'Ancien Régime dans les registres concernant la Librairie. Plusieurs titres sont souvent groupés par une accolade, pour indiquer que les livres ont obtenu un seul privilège pour la même personne. Ces titres sont le plus souvent individuels. Parfois, cependant, ils sont collectifs. Ainsi trouve-t-on : « Réimpressions de plusieurs livres » f. 58 — ou encore « Les livres d'arithmétique du Sieur Barrenne » f. 59 —
La continuité d'énumération est rompue pour deux motifs : indiquer un changement de syndicat, ainsi p. 9 « Sindicat de Simeon Piget, septembre 1665 ». Une autre raison est la distinction des années. Celles-ci, en général, sont indiquées en haut des pages. Mais il arrive que l'énoncé des ouvrages d'une année s'interrompe en cours de feuille. On laisse alors un espace, on indique la nouvelle année et l'on reprend l'énumération. Enfin, si au début on ne distingue pas les mois, ceux-ci par contre apparaissent à partir de 1686, coupant encore l'énumération. L'énoncé des ouvrages s'arrête en août 1703. Il se poursuit cependant, à la page suivante, sous un nouveau titre : « Liste des privilèges enregistrez tout au long depuis le mois d'avril 1703. » La présentation est alors différente de la première page. Les colonnes en allant de la gauche vers la droite de la feuille : d'abord un numéro d'ordre ; puis la nature de la permission (permission générale, simple, cession, etc.) représentée par leur première lettre. Puis le titre, enfin, le nom de l'imprimeur ou du libraire. Cette
CIRCUIT
DU DEPOT
LEGAL
153
énumération existe p. 247. De la page 248 à la page 255 on reprend le système antérieur. Quel était le b u t réel de ce registre ? Il semble que, pour en comprendre la situation exacte, a u t a n t sur le plan systématique que chronologique il suffise de revenir à l'analyse déjà effectuée dans notre précédent travail, sur l'organisation de la réclamation sous l'Ancien Régime. Nous avions vu (p. 101 et suivantes), q u ' a v a n t d'effectuer une réclamation auprès des libraires imprimeurs ou des auteurs, il convenait de faire une vérification. L'Arrêt de 1642 rappelait que les éditeurs étaient obligés de faire enregistrer leurs permissions sur les registres de la Chambre qui devait délivrer « de trois en trois mois un état » des nouveaux Privilèges au Bibliothécaire du Roi. Ainsi, c'est bien à partir des Registres de privilèges de la Chambre, à une période où il n'existe pas de Registre semblable tenu par l'administration royale, que s'effectue la vérification du dépôt. Ce principe établi au milieu du x v n e siècle est exactement le même que celui qui a donné naissance à ce Registre qui est un « extrait des registres de la Communauté des marchands libraires... ». Enfin, les dates ne sont pas quelconques, puisqu'elles concernent la vérification sur la période 1663-1703, soit encore jusqu'à la veille du règlement de 1704 si important pour le dépôt.
IIe
PARTIE
LES BIBLIOGRAPHIES IMPRIMÉES
GÉNÉRALITÉS
Nous savons que les bibliographies susceptibles de fournir la production générale annuelle des livres en France aux x v n e et x v m e siècle, dès qu'on les examine, se classent selon le critère du procédé d'inscription, en deux groupes : celui des bibliographies manuscrites et celui des bibliographies imprimées. Nous avons vu que les registres manuscrits sont aussi le plus souvent officiels et qu'ils fournissent des renseignements essentiels. Il reste, maintenant, à étudier les bibliographies imprimées de la France pour la même période. Encore convient-il, d'abord, de les découvrir. A quelles sources peut-on avoir recours ? Il semble qu'il y ait deux catégories bien déterminées. Ou l'on procède d'une manière systématique, et ce sont les bibliographies de bibliographies qui nous renseignent. Ou l'on travaille d'une manière empirique, et l'on recueille au fur et à mesure un certain nombre de bibliographies de la France. Les deux démarches sont indispensables et, peut-on dire, complémentaires. On sait que les bibliographies de bibliographies visent à composer un inventaire complet des bibliographies existantes et à les classer ensuite selon différents critères. Aussi bien une partie des bibliographies de bibliographies est-elle consacrée aux Bibliographies Nationales, une des subdivisions de celles-ci à la Bibliographie de la France et, en faisant intervenir le critère historique, aux Bibliographies de la France de l'Ancien Régime, plus spécialement des x v n e et x v m e siècles, en éliminant celles des périodes antérieures et postérieures qui n'intéressent pas directement cette étude. Il est remarquable que la plupart des auteurs qui se sont préoccupés de ces subdivisions ont mentionné presque exclusivement des bibliographies imprimées de la France
158
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
pour notre période, sans se préoccuper davantage des registres manuscrits. Aussi comprend-on pourquoi ils n'interviennent qu'ici. D'autre part, comme les auteurs successifs se reproduisent pour une bonne part, sinon pour la totalité, c'est donc aux plus récents et aux plus appréciés que nous avons dû finalement avoir recours, c'est-à-dire à Hatin et à M lle L. N. Malclès. Le premier, dans sa Bibliographie historique et critique de la Presse Périodique Française donne à la partie « Bibliographie » (p. 600) l'énumération suivante : 1° Les Annales Typographiques, ou Notice du progrès des connaissances humaines par Morin d'Hérouville, 1758, In-4°. Hatin indique, dans l'étude critique de ces Annales, plusieurs bibliographies de la France pour les x v n e et x v m e siècles, qu'il énumère chronologiquement. Les voici : 2° La Bibliographia Parisana et la Bibliotheca (sic) Gallica U niversalis ; 3° La Bibliothèque annuelle et universelle 1748-1750 par Burtin et l'Abbé Ladvocat, Paris 1750, 3 vol., in-12 ; 4° La Bibliographie Parisienne, 7 vol., in-8, dont un pour l'année 1769 et six pour l'année 1770 ; 5° Le Catalogue hebdomadaire 1763-1790, 27 vol., in-8 ; 6° Cours de Bibliographie ou Nouvelles productions des Sciences des Lettres et des Arts par Luneau de Boisgermain, 1788, in-8. Plus récemment, M Ue L. N. Malclès, dans son ouvrage intitulé Les Sources du Travail Bibliographique, énumère, dans le tome 1, au chapitre consacré aux Bibliographies générales de la France, plusieurs autres ouvrages. Nous ne relèverons pas ici les bibliographies concernant la période antérieure au x v n e siècle, comme celle de la Croix du Maine et de Du Verdier qui intéressent le x v n e siècle, ni celle de Thomas énumérant les ouvrages imprimés en France de 1470 à 1600. M lle L. N. Malclès indique pour notre période l'ouvrage de Theophilus Georgi intitulé : Allgemeines europaisches Bücher Lexicon, Leipzig 1742-1758, 8 volumes. Elle écrit notamment que : « la partie V de cette bibliographie est réservée aux livres français s 1 des x v n e et x v m e siècles jusqu'en 1753. Ce même auteur, dans son ouvrage intitulé : la Bibliographie2,
1. L. N. MALCLÈS, Les sources du travail bibliographique. Préface de Julien Cain. T. 1. Bibliographies générales. Genève, E. Droz, 1950, Gr. in-8°, xvi-365 p. p. 120. 2 . L . N . MALCLÈS, La Z 2 8 9 6 0 (708).
Bibliographie,
Paris, P . U . F . 1956,
I n - 1 6 ° , 1 3 6 p . B N : 8»
BIBLIOGRAPHIES
159
IMPRIMEES
TABLEAU
DES BIBLIOGRAPHIES POUR
LE XVIIe
Bibliographies spécialisées — exhaustives
privées
La Clef du Cabinet des Princes
officielle
Le Journal des Savants Bibliographia Gallica. Universalis et Bibliographia Parisana. La Bibliographie française et latine de Paris. L'Almanach bibliographique.
a
3
S
de la France
Bibliographies rétrospectives
Parisienne
de la France
projet
Bibliographies générales
La Bibliothèque annuelle et Universelle. Les Annales typographiques. Le Journal de la librairie ou Catalogue des livres nouveaux. Le Cours de bibliographie.
s
o
FRANCE
exhaustives
C ce ©
< &6
D E LA
SIÈCLE
sélectives
Universelles
te fli C CO b 3
IMPRIMÉES
ET LE XVIIIe
privées
officielle
Le Journal de Paris.
privée
La Bibliographie parisienne.
privées
Allgemeines europaisches Bücher Lexicon. Tome 5 La France littéraire - Quérard La France littéraire - J . d'Hébrail et J . de La Porte -
La France littéraire - Ersch Les Siècles littéraires.
essai de bibliothèque universelle.
|
160
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
mentionne : la France Littéraire de 1769 à 1784 par J. d'Hébrail et Joseph de La Porte 1 , en plus des précédents. A cette liste, on peut encore ajouter La France Littéraire de J. S. Ersch et l'ouvrage de Quérard : La Bibliographie moderne de la France contenant la nomenclature... des ouvrages français imprimés... depuis le commencement du XVIIIe siècle... et celui de N. L. Desessarts intitulé : Les Siècles Littéraires de la France ou nouveau dictionnaire historique, critique et bibliographique de tous les écrivains français morts et vivons jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, 1800-1801. Les indications trouvées dans les bibliographies de bibliographies ne sont pas les seules. Nos recherches personnelles antérieures sur le Dépôt Légal nous avaient permis de découvrir, dans la Chronique de la Bibliographie de la France, 1911, un article de Paul Delalain consacré aux « Ancêtres de la Bibliographie de la France »2. Delalain, comme Hatin, mentionne La Bibliographia Parisana, La Bibliographia (sic) 1 Gallica Universalis, les Annales Typographiques et le Catalogue Hebdomadaire. Il ajoute cependant : 1° «La Bibliographie Française et Latine de Paris » ; 2° Le projet de publication de l'Almanach
Bibliographique
;
3° « Le Journal de Verdun ou suite de la Clef du Cabinet ou Journal Historique sur les matières du temps » ; 4° Un « Essai de Bibliothèque Universelle » qui, lui, demeura à l'état de projet ; 5° Le Journal
des
Savants.
Enfin, l'étude des règlements de la Librairie et du Dépôt Légal nous avait confirmé l'intérêt possible du Journal des Savants et nous avait révélé le Journal de Paris, qui, quoique pour une période très courte, fut la première bibliographie officielle courante et réelle de la France, antérieure par conséquent au Journal de la Librairie, Bibliographie de la France. Après avoir énuméré les différentes bibliographies de la France pour les x v n e et x v m e siècles, il convient d'en établir la classification. Il semble que celle-ci fasse appel à plusieurs des critères de classification bibliographique. Il y a, d'abord, celui de la forme. Toutes ces bibliographies sont imprimées, à la différence de celles qui ont été étudiées précédemment.
1. « Les ancêtres de la bibliographie de la France » par Paul DELALAIN. Bibliographie de la France, Journal général de l'imprimerie et de la librairie publié par le Cercle de la Librairie. 1911, In-8°, paginé 221-282, BN : 4° Q. Pièce 441. p. 223 et ss. 2. On remarquera que Hatin et Delalain donnent au même ouvrage un titre légèrement différent. En réalité c'est Delalain qui l'a relevé exactement (voir plus loin l'étude consacrée à cette bibliographie).
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
161
Il y a ensuite les matières traitées : les bibliographies sont générales ou spécialisées à une matière donnée. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, les diverses bibliographies énumérées cidessus ne sont pas toutes générales. Plusieurs d'entre elles sont spécialisées suivant un ou plusieurs critères. Ainsi l'ouvrage intitulé Allgemeines europaisches Bücher Lexicon dans son tome 5 qui nous intéresse, est une bibliographie générale des ouvrages écrits en langue française, soit encore, selon les classifications courantes, une bibliographie générale de la France fondée sur le critère linguistique. Cependant, dans notre perspective, qui est d'établir la statistique de la production des livres publiés en France, supposant donc le choix du critère géo-politique, cette bibliographie ne peut être considérée que comme une bibliographie particulière, spécialisée. Elle n'offre pas tous les livres publiés en France et écrits en langue étrangère. De même, la France Littéraire de J . d'Hébrail vise à ne relever que les ouvrages des auteurs vivants au cours d'une période donnée, ignorant du même coup les rééditions des auteurs anciens ou modernes morts. La France Littéraire de Quérard s'établit sur deux spécialisations : à partir des critères de matière et de langue. Elle relève plus particulièrement les ouvrages littéraires et historiques publiés en France, ou en français à l'étranger. Les bibliographies que nous avons énumérées peuvent être classées aussi selon le nombre des livres retenus. Ou elles choisissent d'être exhaustives, comme c'est le cas des précédentes, ou d'être sélectives. Dans le premier cas, les auteurs visèrent par goût, par intérêt commercial, ou par obligation légale, à constituer un inventaire complet et objectif de toute la production française, soit directement, soit par l'intermédiaire de la bibliographie parisienne, soit en l'élargissant à l'Europe. Dans le second cas, on fait un choix qualitatif entre les nouveaux ouvrages. On n'en conserve qu'un certain nombre et, le plus souvent, puisqu'on vise à la qualité, on ajoute à la description de l'ouvrage une partie critique. Ces bibliographies ne sauraient offrir de renseignements sur le plan exhaustif, leur b u t é t a n t autre. Aussi bien, malgré leur nombre plus important, les bibliographes précédents, et Delalain n o t a m m e n t , n'en ont-ils conservés que deux, Le Journal des Savants et le Journal de Trévoux, dans la mesure, semble-t-il, où leur composition, à une certaine période, pouvait laisser espérer trouver en elles des bibliographies exhaustives. Aux précédents critères il f a u t ajouter celui de la temporalité des bibliographies. Ou elles visent à donner la production des livres année par année et elles sont appelées courantes, ou elles sont réalisées après coup pour une période révolue et nommées rétrospectives. Il est remarquable que, des trois auteurs principaux
162
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
cités de bibliographie de bibliographies de la France pour les x v i i e et x v m e siècles, ce soient Hatin et Delalain qui nous offrent principalement des bibliographies courantes, quand M l l e L. N. Malclès ne nous apporte essentiellement que des bibliographies rétrospectives. Le contenu de ces deux groupes n'est pas indifférent : en effet, les classifications internes des bibliographies courantes et rétrospectives ne sont pas les mêmes. Sans doute existe-t-il souvent, sinon toujours, une classification alphabétique d'auteurs et de matières qui compose les tables dans les premières. Mais l'essentiel de l'ouvrage est fait d'une énumération chronologique au minimum par année, et quelquefois par mois et par semaine. Inversement, les secondes, les bibliographies rétrospectives, n'ont pratiquement pas de table annuelle. Les deux phénomènes s'expliquent facilement. Les auteurs de bibliographies courantes sont tenus de noter la production au fur et à mesure qu'elle sort des presses. La division chronologique s'impose. A u contraire, les auteurs de bibliographies rétrospectives sont principalement intéressés par le nom des auteurs et les matières dont les ouvrages relèvent. La classification chronologique, souvent possible, n'est pas faite, parce qu'elle complique le travail sans paraître une connaissance essentielle pour les bibliographes. Cependant, ces distinctions jouent un rôle primordial, dès qu'on cherche à déterminer la production intellectuelle, non pas globale, mais chronologique et suivie. Les premières sont alors indispensables. Les secondes, dans l'immédiat, pratiquement peu utiles. Elles ne peuvent le devenir que sous condition de travaux de dépouillement très longs et généralement peu rentables. Elles n'offrent que des statistiques générales et des moyennes annuelles de période, lesquelles ne sont utilisables que si la période que recouvre la bibliographie correspond à celle de l'étude et ne la dépasse pas. Après le critère temporel, on peut faire intervenir le critère spatial : toutes ces bibliographies concernent la production des livres en France, mais elles le font d'une manière variable, leur intention étant universelle, régionale ou nationale. Sans doute, théoriquement, ces trois graduations spatiales sont différentes. La bibliographie régionale ou communale ne saurait, en principe, intéresser directement la bibliographie nationale, si celle-ci, par contre, doit être nécessai rement représentée dans une bibliographie universelle. Toutefois, la réalité pratique des moyens des auteurs est très largement modératrice des divisions théoriques précédentes. En fait, le critère régional n'intéresse que la Bibliographie Parisienne. Ce n'est pas à proprement parler une bibliographie régionale. Mais, étant parisienne, elle relève, par le critère, de la notion de régional, et par le contenu, du national. En effet, on sait combien était importante la production parisienne à la fin de l'Ancien Régime.
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
163
Comme on disait alors, Paris était le magasin en livres des provinces et c'est pourquoi cette bibliographie a été retenue. En ce qui concerne les bibliographies universelles, il faut reconnaître, une fois encore, le décalage existant entre l'intention et les moyens. S'il est vrai qu'une partie de ces ouvrages est composée de livres imprimés à l'étranger, et connus, le plus souvent, par l'importation et l'inspection qu'on en faisait obligatoirement à la Chambre Syndicale des Libraires avant de les remettre à ces derniers, il n'en reste pas moins que c'est encore la Bibliographie Nationale, et plus spécialement parisienne, qui les alimente. C'est le cas notamment des Annales Typographiques, du Journal de la Librairie ou Catalogue des Livres Nouveaux, de la Bibliothèque Annuelle et Universelle, etc. Enfin, parmi l'énumération faite plus haut, il existe quelques bibliographies qui n'eurent d'autre intention que de recueillir la production nationale, comme YAlmanach Bibliographique ou, malgré le titre de plusieurs d'entre elles, la Bibliographie Française et Latine de Paris, La Bibliographia Gallica Universalis et la Bibliographia Parisana, le Journal de Paris. En définitive, la surprise que l'on peut éprouver de trouver, dans la rubrique des Bibliographies de la France, des bibliographies régionales et universelles, s'explique donc par la nature du contenu de celles-ci. D'autre part, il est remarquable que si l'on voulait s'en tenir à une interprétation formelle, le nombre déjà restreint des Bibliographies de la France imprimées pour les x v n e et x v m e siècles serait de beaucoup réduit. On peut encore faire intervenir un autre critère : celui de la personne ou de l'organisme créateur des bibliographies ; elles sont alors privées ou officielles. Nous avons vu que les registres manuscrits étaient essentiellement une production officielle de l'état. C'est l'inverse qui se produit pour les bibliographies imprimées précédentes. La plupart sont le fait d'une initiative privée, qu'il s'agisse d'amateurs, de lettrés, ou de commerçants ; chacune de ces catégories a des buts et des moyens différents. Les amateurs se fondent souvent sur les données du Dépôt Légal et les indications officielles, de la Chancellerie, de l'Inspection de la Librairie, de la Chambre Syndicale. Les commerçants établissent des catalogues des ouvrages en vente dans leur librairie et dans celles de leurs confrères. Les premiers avaient une intention plus souvent qualitative et leurs bibliographies furent sélectives. Dans les cas contraires, moins nombreux, leurs bibliographies exhaustives sont précieuses. Inversement, les seconds, dirigés par l'idée de profit, réalisèrent souvent des bibliographies hybrides. Ils furent conduits à répéter, d'un numéro à l'autre de leur revue, les livres qu'ils vendaient et qui parfois étaient publiés depuis plusieurs années aussi bien en France
164
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
qu'à l'étranger. Plus que des bibliographies courantes des nouveautés, elles forment des bibliographies courantes de la vente. Cependant, si l'extrême majorité des bibliographies imprimées sont d'origine privée pour les x v n e et x v m e siècles, par contre il est une exception, en ce qui concerne le Journal des Savants, et surtout le Journal de Paris qui fut, à la fin de l'Ancien Régime, par une de ses rubriques, la première bibliographie officielle de la France, bien a v a n t le Journal de la Librairie. Ainsi le Décret d'Amsterdam de Napoléon, loin d'innover en cette matière, ne fit que reprendre et systématiser une démarche qui avait été introduite, à la fin de l'Ancien Régime, par le Règlement de 1785. A tous ces critères, il f a u t ajouter celui de la réalisation. La plupart des titres énumérés correspondent à des bibliographies réelles qui parurent p e n d a n t un laps de temps plus ou moins long, de quelques mois, quelques années, ou quelques dizaines d'années. Toutefois, il en est une, « L'essai de Bibliothèque Universelle » citée par Delalain qui ne resta q u ' u n projet. Dans la réalité, ces divers critères se recoupent. Ces bibliographies imprimées peuvent être générales ou spécialisées, courantes ou rétrospectives, et encore universelles, françaises ou parisiennes, enfin privées ou officielles. Nous les avons classées dans la Planche V en fonction de ces différents critères. Si la recherche, puis la classification des bibliographies imprimées de la France pour les x v n e et x v m e siècles étaient indispensables, il reste à savoir celles qui sont utiles à notre recherche. Un premier point méthodologique devait être respecté : aucune d'entre elles ne serait, a priori, éliminée. Toutes devaient être examinées. Ce travail effectué a montré que les diverses bibliographies n'étaient pas toutes utiles et q u ' u n certain nombre devait être écartées. La raison tient à notre sujet : la statistique de la production générale des livres en France au x v m e siècle. La statistique vise à être complète. P a r suite, ce sont les bibliographies générales et exhaustives qui devaient être conservées. La statistique cherche de plus à être continue, ce sont donc les bibliographies générales exhaustives et courantes qui servirent. Enfin il s'agit de la production des livres en France. Ce seront donc les bibliographies générales exhaustives, courantes, françaises, parisiennes ou universelles, à condition que la partie française y soit présente et vise l'exhaustivité, qui offriront, d'une manière officielle ou privée, la statistique que nous recherchons. Il reste les autres catégories de bibliographies. Si elles ont été éliminées, après examen, il f a u t expliquer pourquoi. Il f a u t constater qu'elles appartiennent à trois critères différents : les bibliographies spécialisées, sélectives, rétrospectives. Les premières f u r e n t éliminées en premier lieu à cause de leur caractère partiel.
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Puisqu'il s'agit d'obtenir la production générale des livres en France, il n'est pas possible de se contenter d'une bibliographie spécialisée qui ne s'occupe que des ouvrages relevant d'un critère, d'une matière donnée. Pratiquer autrement, c'était élargir notre sujet de la production générale, à la production par matières. Nous avons voulu sérier les problèmes, remettant à plus tard la statistique-matières bien que nous ayons déjà réuni des données par les recherches menées pour la présente étude. Les bibliographies spécialisées furent éliminées pour d'autres raisons. Ainsi la bibliographie intitulée Allgemeines europaisches Bücher Lexicon f u t écartée parce qu'elle est aussi sélective, La France Littéraire de Quérard le f u t à cause de son caractère rétrospectif, propre : sa période dépassait celle de notre étude de la statistique générale et sa moyenne annuelle de la période était donc inutile. Seule La France Littéraire de J. d'Hébrail a fourni quelques renseignements statistiques. D'autre part, les bibliographies sélectives devaient a priori être écartées. C'est ce que firent les auteurs de bibliographie des bibliographies. Si l'on v e u t avoir la production générale des livres, il est évident qu'il est inutile de se rapporter à toutes les bibliographies qui font profession de choisir au nom de certains critères qualitatifs. E n principe donc on ne devrait pas trouver dans notre étude de bibliographies sélectives. E t pourtant il existe Le Journal des Savants et La Clef du Cabinet. L e u r présence s'explique par le fait que les bibliographes précédents les a y a n t mentionnés, ou nos recherches antérieures sur le Dépôt Légal a y a n t attiré notre attention sur ces publications, on p o u v a i t espérer trouver en elles, non des bibliographies sélectives, mais des ouvrages exhaustifs. L ' é t u d e montra que notre hypothèse était fausse. Il convenait, à cause même des possibilités qui leur a v a i t été données, de les mentionner. Les bibliographies rétrospectives furent, elles aussi, le plus souvent, éliminées. Elles ne possèdent pas de table chronologique. Elles ne p e u v e n t donc donner directement les données année par année. P o u r les atteindre, il faudrait un travail réalisé par une équipe de chercheurs. E n effet, il n ' y aurait pas lieu de s'en tenir a u x bibliographies rétrospectives de la France. Il faudrait élargir le dépouillement a u x bibliographies universelles rétrospectives et n o t a m m e n t a u x catalogues auteurs des bibliothèques. Cependant elles pourraient être utilisées pour obtenir la production générale de toute une période et la moyenne annuelle de celle-ci. Encore faudrait-il que la période de la bibliographie soit recouverte par la période de notre étude. Ce n'est pas le cas de La France Littéraire de Hersch, et des Siècles Littéraires de Désessarts. Ainsi, bien que toutes les biblio-
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BIBLIOGRAPHIQUE
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graphies énumérées par nos devanciers aient été examinées, les bibliographies spécialisées, sélectives et rétrospectives sont de peu d'utilité et se trouvent finalement éliminées au profit des bibliographies générales, exhaustives, courantes, universelles, françaises ou parisiennes, privées ou officielles, qui nous permettent d'atteindre directement la production générale des livres imprimés en France aux x v n e et x v m e siècles.
LA BIBLIOTHÈQUE ANNUELLE ET
UNIVERSELLE
La Bibliothèque Annuelle et Universelle fut éditée «à Paris rue Saint-Jacques chez P. C. le Mercier imprimeur libraire Au Livre d'Or, M. Lambert libraire ». Elle fut publiée en 1748, 1749 et 1750. La première page indique qu'il s'agit d'un « Catalogue de tous les livres qui ont été imprimés en Europe pendant l'année... rangés par ordre de Matières avec une table alphabétique des noms d'auteurs ». Ce but se trouve réaffirmé dans les pages d'introduction qui figurent en tête de l'ouvrage de 1748. L'auteur écrit : « Nous croyons faire une chose utile et agréable aux gens de lettres de leur donner tous les ans un Catalogue des livres imprimés en Europe l'année précédente &1. Pour savoir si cette bibliographie peut être véritablement utile à notre étude, il convient de répondre à plusieurs questions. Il faut d'abord savoir si elle est générale. L'auteur semble l'affirmer. La Bibliothèque comprendra « tout ce qui est paru nouvellement dans la République des Lettres de quelque genre de Sciences et d'Arts que ce puisse être »2. Cependant, en se fondant sur ses propres déclarations, il semble qu'elle ait été spécialisée dans une certaine mesure, puisqu'elle écarte, a priori, les ouvrages licencieux. « Que l'on ne s'imagine pas néanmoins que nous ayons ramassé scrupuleusement tout ce qui est sorti des presses. Toutes ces bagatelles soit en prose soit en vers productions ordinaires de l'oisiveté ou du vice n'ont pas arrêté nos regards un moment. »x
Une telle démarche n'a rien d'étonnant. On peut dire qu'elle est généralement pratiquée à cette époque, et le mérite de l'auteur est de l'avoir dit. En ce sens, on peut penser que la « Bibliothèque » comprend les ouvrages autorisés et évite ceux qui ne le sont pas et notamment ceux qui concernent les mœurs. Il semblerait donc que ses cadres soient ceux des ouvrages de privilèges et de permissions. 1. La Bibliothèque 2. Ibid., p. iv.
Annuelle
el Universelle,
T. 1, p. ii J (BN : Z 22545).
BIBLIOGRAPHIES
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D'autre part, la volonté de l'auteur a été de constituer une bibliographie exhaustive, aussi bien dans l'intention qu'en pratique. Après avoir affirmé, comme nous l'avons relevé plus haut, qu'il veut présenter « un Catalogue de tous les livres » il convient de s'interroger sur sa réussite et, loyalement, il constate qu'il n'y est pas parvenu. Il écrit : « ...ne le dissimulons pourtant pas. Nous avouons de bonne foi que le Catalogue des livres imprimés pendant l'année 1748.. ne renferme peut-être pas tous les livres de cette année 1 .»
Pourtant il ne s'avoue pas vaincu et il trouvera une solution, qui consiste à annoncer l'année suivante les ouvrages qu'il n'avait pas présentés. Ainsi : « ...nous nous proposons d'insérer dans les Catalogues des années suivantes en manière de supplément et au commencement de chaque article, les titres qui ne seront pas venus dans le temps à notre connaissance*. »
Cette intention fut réalisée. Dans chaque matière, dans chaque subdivision des tomes de 1749 et de 1750, la distinction est faite entre les livres de l'année précédente et ceux de l'année dont il est question. Ainsi il semble bien que cet ouvrage soit utilisable sur le plan exhaustif qui est le nôtre, tant à cause de son intention que par l'effort de l'auteur. D'autre part, la distinction annuelle est bien effectuée, si elle ne l'est que pour trois ans. Nous sommes donc en présence d'une bibliographie générale, au sens des publications permises, exhaustive et courante. Cependant, bien que générale dans les cadres des ouvrages autorisés et malgré son caractère exhaustif et courant, cette bibliographie universelle ne peut être utilisable que sous la condition de pouvoir atteindre la bibliographie nationale française. Là réside la difficulté. Il arrive, dans certains ouvrages, que les bibliographies françaises et européennes soient distinctes. Il n'en est pas, hélas, ainsi pour cette bibliographie. Si la chose n'est pas faite, il reste à savoir si elle est réalisable. Pour y parvenir, le moyen le plus simple est de se fonder sur l'indication du lieu d'impression, lequel est généralement donné. Toutefois, il est des exceptions assez fréquentes qui rendront difficile le dépouillement et relatifs les chiffres avancés. A défaut du lieu, force est de s'en rapporter à la langue. Cependant, il est difficile de compter pour un livre publié en France, 1. Ibid., p. iv. 2. Ibid., p. i J.
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un ouvrage en français, surtout aux x v n e et x v m e siècles, où le nombre des livres publiés dans notre langue à l'étranger est considérable. De plus la présentation des livres étrangers imprimés en langue étrangère accentue la difficulté. En effet, si, en 1748, les ouvrages ont leurs titres étrangers entièrement reproduits, par contre, en 1749, sur l'intervention d'un savant qui conserva l'incognito, seuls les premiers mots étrangers furent indiqués et tout le titre fut traduit en français. L'auteur s'en explique d'ailleurs : « ...la manière la plus instructive d'annoncer les titres des livres qui ne sont points écrits en latin ou en français est, après avoir mis le titre original ou les premiers mots de les traduire en français1. »
A ce premier inconvénient concernant la distinction de la production française de l'étrangère s'en ajoute un second, qui tient à la composition de la bibliographie, et, principalement, aux répétitions qui y sont faites : chaque titre ne correspond pas toujours à un ouvrage distinct mais quelquefois à un tome et parfois à un article. Ainsi, selon l'auteur : « Après avoir donné le titre général au lieu où il doit être, nous transcrivons tout de suite volume par volume les titres des différents traités qui composent la collection entière". »
De plus : « ...Quant aux livres qui servent de Recueils à différentes pièces de littérature comme les Mémoires de VAcadémie des Sciences, les Mémoires de VAcadémie des Inscriptions et Belles Lettres et tant d'autres de ce genre nous n'avons pas les mêmes raisons. Nous placerons d'abord le titre général de ces Recueils dans l'Article de l'Histoire Littéraire ensuite notre dessein est d'extraire tous les titres des pièces qui sont contenus dans ces Recueils et de placer tous ces divers titres dans la classe qui leur convient..." »
Ainsi le décompte est rendu passablement difficile, puisqu'il faut vérifier, pour chaque titre, s'il s'agit de livre, de volume ou d'article. A ces difficultés s'en ajoutent certaines autres dont il convient de prévenir l'utilisateur éventuel de cette Bibliothèque et qui tiennent à l'évolution des conceptions bibliographiques de l'auteur. C'est le cas, notamment, du Catalogue-matière. Bien que, dans l'essentiel, ce soit le même d'un tome à l'autre, cependant bien des variations ont été apportées, qui sont expliquées dans l'introduction de la Bibliothèque de 1749. Pour prendre un exemple, La Poésie Sacrée, qui était classée avec la théologie en 1748, se trouve reliée, à la poésie en 1749 4 . Ainsi, en définitive, La Bibliothèque Annuelle et Universelle est bien une 1. Ibid., T. 2,-1749, p. V I I I . 2. Ibid., T. 2, 1749, p. vni. 3. Ibid., T. 2, 1749 (BN : Z 22546), p. ix. 4. Ibid., T. 2, 1749, p. ix.
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bibliographie générale, exhaustive et courante. Toutefois, le fait que les livres étrangers et français soient mélangés et que les mêmes ouvrages soient répétés, rend le dépouillement délicat et les chiffres obtenus plus relatifs.
LES ANNALES
TYPOGRAPHIQUES
Les Annales Typographiques ou Notice des Progrès des Connaissances Humaines1 constituent une bibliographie générale, exhaustive, courante et universelle. Elles présentent la production des livres de 1757 à 1762. L'auteur, au moins à son début, f u t Morin d'Hérouville. C'est sous ce nom que le privilège d'impression avait été délivré le 20 août 1758 et enregistré le 15 novembre 1758. Il était accordé pour trois ans. Les rédacteurs changèrent avec les années. Progressivement, Morin d'Hérouville abandonna la direction des Annales. Il commença par s'adjoindre plusieurs hommes de Lettres, se content a n t de diriger la publication. L'« Avertissement » du Tome 1 de 1758, paru en janvier 1760, nous en donne les raisons : « L'auteur dont la santé a déjà souffert quelque altération s'est associé à un certain nombre de gens de Lettres ; chacun d'eux sera chargé de la partie dont il a fait une étude particulière. M. Morin s'est réservé principalement... de présider à l'édition de l'ouvrage et de continuer les correspondances établies avec les sociétés savantes de l'Europe. Il sera m ê m e secondé dans ces d e u x branches par M. R o u x 2 . »
Cette organisation ne d u t pas être appliquée longtemps, puisqu'en 1761, dans l'édition rétrospective de l'année 1759, l'Avertissement nous apprend que Morin avait abandonné : « Mais nous ne devons pas laisser ignorer à ce m ê m e public, que M. Morin, détourné par d'autres occupations, a été forcé de renoncer à un ouvrage dont on lui doit la première idée et à l'établissement duquel il a si fort contribué. Quoique nous perdions beaucoup en perdant un pareil associé, nous espérons cependant que le public ne s'apercevra pas de sa retraite. M. R o u x sera désormais seul chargé de la correspondance et de la direction de tout l'ouvrage et ce sera à lui qu'on devra donc adresser, franc de port, par la voie de Vincent imprimeur libraire, t o u t ce qu'on voudra faire annoncer dans les Annales... »
Déjà d'ailleurs Morin avait depuis quelque temps cédé son privilège : 1. Annales Typographiques, BN, Q 788 (1757), salle des Catalogues (1758-62). 2. Jbid., 1758, daté de janvier 1760, T. 1, p. ix. 3. Annales Typographiques « pour l'année mil sept cent cinquante neuf », daté de janvier 1761, T. 1, Avertissement, p. 8.
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« Je cède... à M. Vincent, imprimeur libraire à Paris, la Permission qui m'a été accordée pour les Annales Typographiques ou Progrès des Connaissances Humaines pour en jouir en mon lieu et place. A Paris le 26 décembre 1759, Morin d'Hérouville 1 . »
Les Annales sont composées de trois parties principales : l'énoncé des ouvrages et deux tables. L'énoncé est lui-même divisé en matières dans lesquelles les ouvrages sont classés avec indication du lieu de publication. Les titres sont donnés en petits caractères et les notions analytiques à la suite en caractères différents et de plus grand corps. A la suite figurent les deux tables. L'une est la « Première Table des Ouvrages dont il est fait mention dans les deux volumes des Annales Typographiques pour l'année 1758 distribués par ordre de matières'. »
L'autre est la « Seconde Table ou Table alphabétique des auteurs et des Matières traitées dans les ouvrages dont il est fait mention dans les deux volumes des Annales Typographiques, pour l'année 1758®. »
A partir de l'année 1758, la bibliographie est divisée en deux tomes. Le premier comprend les Notices de janvier à juin compris. Le second de juillet à décembre, avec les deux tables. Chacune d'elles est faite de l'énoncé des livres avec la référence du tome et de la page de la Notice. Le but de Morin était de composer une bibliographie générale exhaustive, courante, et universelle. Le n° 1 de 1758 nous renseigne : « Il serait donc très utile de présenter chaque année au Monde Sçavant, tous les livres imprimés en Europe pendant le cours de l'année précédente : et ce détail, que nous nous proposons de donner remplira la première partie de notre titre, Annales Typographiques. »
Bien qu'aucune indication précise ne permette de l'affirmer catégoriquement, il semble bien que son intention fût de composer une bibliographie générale. Encore est-il probable que les mêmes restrictions déjà déterminées dans l'étude consacrée à la Bibliothèque Annuelle et Universelle soient valables ici. En ce qui concerne la production française, c'est sans doute de la production autorisée qu'il s'agit. On est mieux renseigné sur le caractère exhaustif des Annales par l'indication des sources auxquelles les rédacteurs eurent recours : 1. Ibid., 1760, T. 1, p. IX. 2. Ibid., 1758, T. 2. 3. Ibid.
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« Pour être encore plus en état d'en remplir toute l'étendue outre les correspondants que nous avions déjà dans les principales villes de l'Europe où l'on cultive les Lettres nous nous sommes procurés tous les journaux et jusqu'aux catalogues des principaux libraires de chaque pays 1 . »
Ce texte est doublement utile, en ce qu'il montre l'effort tenté pour être le plus complet possible et les sources principales qui restent commerciales et privées. Il ne semble pas que les auteurs des Annales aient eu recours aux données essentielles du Dépôt Légal ou de l'organisation administrative de la production des livres en ce qui concerne les livres français. Chose singulière, le but poursuivi ne fut pas seulement exhaustif et quantitatif, mais aussi qualitatif. Les rédacteurs entendirent adjoindre des notions analytiques à l'énumération des livres constituant ainsi une bibliographie à la fois exhaustive et critique : « C'est d'après toutes ces réflexions judicieuses, que M. Morin d'Hérouville conçut l'an dernier et exécuta le plan de ses Annales Typographiques ou la Nolice du Progrès des Connaissances Humaines. Il est très loin de se faire honneur de cette idée qui n'est pas neuve quant au fond... mais la forme de ses Annales est toute différente et lui appartient, aucun de ces auteurs ne donne des notices détaillées de l'objet du livre, et c'est ce qui caractérise son travail*. »
Les Annales sont aussi une bibliographie courante, puisqu'elle offre périodiquement la liste des livres nouvellement imprimés. Cependant, la périodicité varia ; l'année 1757, outre qu'elle se distingue par le format plus grand, est hebdomadaire. Après quoi les Annales deviennent mensuelles, comme l'a très bien écrit Hatin : « Il change ensuite de formule et d'hebdomadaire devient mensuel*. »
Enfin les Annales Typographiques composent une bibliographie universelle et nous retrouvons les mêmes difficultés déjà rencontrées à propos de la Bibliothèque Annuelle el Universelle : le mélange des livres sans distinction de pays d'origine.
LE CATALOGUE H E B D O M A D A I R E , J O U R N A L D E LA L I B R A I R I E Cette bibliographie, qui parut de 1763 à 1789, porta deux titres successifs : de 1763 à 1781, Catalogue Hebdomadaire... et de 1782 1. Annales 2. Annales 3. HATIN, Paria, Firmin
Typographiques pour l'année 1759, T. 1, p. 4. Typographiques pour l'année 1760, T. 1, p. VII J. Bibliographie Historique et Critique de la Presse Périodique Française, Didot frères-fils et C l c — 1866, In-8°, LXVII-660 p. B N : Q 5254. p. 49.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
à 1789, Journal de la Librairie ou Catalogue des Livres Nouveaux. Elle f u t rédigée par : «Bellepierre de Neuveglise jusqu'en 1774 et ensuite par le Libraire Pierres 1 ». L'intention du catalogue est indiquée par son titre même qui précisait : « Catalogue Hebdomadaire ou liste des livres, Estampes, Cartes, Ordonnances, Êdits, Déclarations, Arrêts, qui sont mis en vente chaque semaine, tant en France qu'en pays étrangers ; l'indication des volumes du nombre et de la grandeur dont ils sont formés, les noms des auteurs, la nature du papier et du caractère, etc. que l'on a employés et les adresses des libraires ou autres qui les vendent. »
Ainsi, au moins en principe, Le Catalogue Hebdomadaire est-il une bibliographie générale, exhaustive, courante, nationale et universelle à la fois. Cette intention f u t suivie p e n d a n t vingt-sept ans, avec la variation de titre apportée en 1782. Le journal est hebdomadaire. Chaque page est divisée en deux groupes de deux colonnes. Dans la première colonne à gauche de chaque groupe, figurent le titre et toutes les indications descriptives de l'ouvrage. La colonne de droite, plus petite, est réservée au prix. Les ouvrages se suivent numérotés par « article ». L'énumération est elle-même divisée en plusieurs catégories : les ouvrages français ; les ouvrages parus à l'étranger, les publications musicales, les estampes, les cartes, les arrêts, les avis, etc. Il arrive que des suppléments soient ajoutés. A la suite des feuilles hebdomadaires existe une table des matières. Elle a pour titre en 1763 : « Table des livres nationaux contenus aux Catalogues hebdomadaires, imprimés depuis le premier janvier 1763, jusqu'au premier janvier 1764 exclusivement. »
Cette table est divisée par matières et l'énumération interne est alphabétique. Elle est faite de trois colonnes, celle du titre à gauche, puis la référence du « n° du catalogue », enfin le « n° des articles des dits catalogues ». Cette conception évoluera. A partir de 1765, t o u t en conservant la même présentation, le titre varie quelque peu. Il s'agit alors de la « Table des livres N a t i o n a u x et Étrangers publiés en Europe... » Quel est l'intérêt de cette bibliographie pour notre étude ? T o u t d'abord, il semble bien qu'elle soit générale. Cependant, l'énumération des matières n'est pas égale. Il f a u t remarquer qu'elle correspond à deux catégories bien différentes d'ouvrages : ce qu'on p e u t appeler les ouvrages autorisés, et les textes légaux nouveaux. Sur ce dernier plan, par rapport a u x deux bibliographies précédentes, il y a un élargissement des cadres de l'enregistrement, 1. Ibid., p. 602.
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puisque ces dernières ne se souciaient guère d'inventorier les nouveaux Arrêts, déclarations, édits et ordonnances. P a r contre, en ce qui concerne les livres autorisés, l'énumération des livres, estampes, cartes, montre seulement une précision des rubriques qui n'était pas faite dans les précédentes bibliographies. Aussi l'étude statistique devra-t-elle séparer distinctement les deux catégories différentes de publication pour conserver des cadres bibliographiques équivalents. Cette bibliographie, générale, si l'on s'en tient à la seule intention, est exhaustive. Cependant, il semble, si l'on s'en rapporte à Hatin, que cet ouvrage ne soit pas très sérieux. Cet auteur, en effet, écrivait du Catalogue Hebdomadaire qu'il : « ne contient l'indication que d'une faible partie des publications de l'époque » et qu'il était fait : « d'ailleurs avec beaucoup de négligence 1 . » Pourquoi ? Hatin ne précise pas. Toutefois, il semble que ce jugement sévère trouve sa justification dans la bibliographie elle-même. Le créateur du Journal ne paraît pas avoir eu à sa disposition des données très sûres, puisqu'il se fonde principalement sur les avis des libraires. Il écrivait dans le n° 12 de 1767 : « Messieurs les libraires qui désirent faire annoncer dans cette Feuille Hebdomadaire les ouvrages qu'ils mettent au jour sont priés instamment d'en envoyer la note à Despilly, Libraire rue St. Jacques près de la rue du Plâtre à la Croix d'Or avant le mardi de chaque semaine et franc de port. Outre le titre de l'ouvrage qu'il est bon de donner dans toute son étendue, il est convenable d'indiquer le format, le nombre des volumes et les prix particulier et marchand du livre relié ou broché ou en feuilles'. »
Ce texte vérifie une nouvelle fois la démarche des bibliographes privés qui sont aussi des commerçants. Ce sont les indications des libraires qui constituent l'essentiel de leurs sources, sans que les données légales interviennent. Mais à ce caractère partiel des données s'ajoute un autre inconvénient également commun à ce genre de démarche : la répétition publicitaire. E t le Directeur du Catalogue s'en plaint : « Nous espérons de l'équité de MM. les Libraires que lorsqu'ils donneront la notice d'un ouvrage auquel il se trouvera plusieurs débitants ils voudront bien avoir l'attention de les dénommer tous afin que nous ne soyons pas obligés (pour satisfaire aux plaintes fondées des débitans non mentionnés) de répéter les notices qu'il suffit de donner une fois. Nous espérons encore de Messieurs les Libraires qu'ils voudront bien 1° Ne donner la notice d'un ouvrage que lorsqu'on la débitera. 2° Ne la donner qu'une fois, bien entendu, dans la nouveauté'. » 1. Ibid., p. 601. 2. Catalogue Hebdomadaire 3. Ibid.
n° 12, 1767. B N : Q 4149/67.
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Il semble donc, si l'on s'en rapporte à ces indications, que cette bibliographie, derrière des chiffres assez importants, ne soit pas très exhaustive et qu'elle dissimule ce fait par des répétitions. Bibliographie générale, intentionnellement, sinon réellement exhaustive, le Catalogue Hebdomadaire est aussi une bibliographie courante, annuelle et hebdomadaire. Sa durée, une trentaine d'années, offre un intérêt tout particulier en cette matière ou les bibliographies imprimées et privées ont généralement une vie courte. Le Journal de la Librairie, par sa composition, est à la fois une bibliographie universelle et nationale. Grâce à celle-ci, nous nous trouvons à la limite de l'une et de l'autre. Les bibliographies précédentes n'étaient françaises que dans la mesure où elles étaient internationales, puisqu'elles mélangeaient tous les livres sans distinction d'origine. Il n'en est plus de même ici. Livres français et livres parus à l'étranger sont séparés, d'abord pendant les deux années, 1763 et 1764, dans la table et ensuite, dans les Feuilles Hebdomadaires proprement dites. Ainsi, bien qu'il faille tenir compte de son insuffisante exhaustivité et des cadres élargis de l'enregistrement, le Catalogue Hebdomadaire, par sa longue durée, et par la distinction de la bibliographie de la France, devait être conservé et étudié.
LE COURS DE BIBLIOGRAPHIE Le Cours de Bibliographie ou Nouvelle Production des Sciences de la Littérature et des Arts fut publié par Luneau de Boisgermain à Paris, en 1788. Il est conservé à la Bibliothèque Nationale sous la côte Q 5507. C'est l'œuvre d'un amateur animé d'une intention originale. On sait que les bibliographes amateurs des x v n e et x v m e siècles agissaient en vue de faciliter la connaissance des nouveautés aux hommes de Lettres et aux savants. C'est l'idée de Luneau de Boisgermain, mais appliquée au domaine scolaire : la production nouvelle des livres présente un intérêt pédagogique. Il s'explique : « Cet ouvrage est entrepris pour les personnes qui se destinent à l'instruction des jeunes gens et qui n'ayant ni le temps de lire tous les journaux, ni le moyen de se les procurer veulent prendre tous les mois une idée de tous les écrits qui arrivent au public 1 . »
1. Cours de Bibliographie,
Introduction.
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A l'origine la Bibliographie est donc bien générale, exhaustive, courante et universelle. Chaque numéro est composé de plusieurs rubriques : « Ouvrages périodiques pour lesquels on peut l'année 1788. » « Livres Français annoncés dans les Journaux « Ëdits, Lettres patentes, Arrêts du Conseil... langues étrangères ou écrits en Français chez les gravures » ; « Œuvre de musique ».
s'abonner à Paris pour pendant le mois de... » » ; « Livres latins et en étrangers » ; « Estampes,
Ainsi, la composition utilise les rubriques générales des bibliographies de l'époque. On peut faire la distinction, en ce qui concerne les cadres bibliographiques, entre les ouvrages imprimés avec privilège ou permission et les textes légaux. Si le Cours de Bibliographie est bien une bibliographie générale, elle est aussi courante, puisqu'elle était publié mensuellement. Enfin c'est une bibliographie universelle. Pourtant, à la différence du Catalogue Hebdomadaire, la séparation n'est pas faite entre la bibliographie nationale et la bibliographie européenne. En effet, on a mêlé le critère national avec le critère linguistique. Les « Livres Français » correspondent aux livres écrits en français et publiés en France. Mais il reste des livres publiés en France en langue latine et étrangère, or ces derniers sont mêlés avec ceux qui sont écrits en latin, en langue étrangère ou même en français et publiés à l'étranger. De la sorte, le dépouillement de cette dernière rubrique serait indispensable si la bibliographie n'était pas inutilisable, pratiquement. Il y a deux raisons à cela : d'abord le Cours de Bibliographie ne parut que quelques mois, de « janvier à juillet 1788 ». Nous n'avons donc pas même les données d'une année. D'autre part, même pour ce premier semestre, la bibliographie n'est pas complètement courante. Elle mélange en effet les livres nouveaux avec d'autres, publiés les années précédentes, et sans indiquer, le plus souvent, l'année de parution. L'auteur lui-même s'en explique : « Les livres qui sont annoncés tous les mois dans les journaux ne sont pas tous de fraîche date... Je n'ai point cru devoir retrancher ces articles de ce recueil 1 . »
Ainsi, bien qu'il s'agisse d'une bibliographie générale, exhaustive, courante et universelle, le Cours de Bibliographie ne peut nous rendre service puisqu'il n'est pas possible pour ces quelques mois où il parut, de séparer les publications proprement nouvelles.
1. Ibid., Avertissement.
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FRANCE
LA BIBLIOGRAPHIA PARISANA ET LA BIBLIOGRAPHIA GALLIGA UNIVERSALIS Paul Delalain, dans son article sur « Les Ancêtres de la Bibliographie de la France » publié dans la chronique de la Bibliographie de la France de 1911 1 mentionne : le « Père Jacob, religieux carme, né à Châlon-sur-Saône et mort à Paris en 1760 »2 comme ayant été le premier à tenter une bibliographie Générale exhaustive et courante de la France. Le père Jacob : « c o m m e n ç a en 1643 la p u b l i c a t i o n d e sa Bibliographie Parisana ou Catalogue de tous les livres imprimés à Paris qu'il t r a n s f o r m a p e u a p r è s e n Bibliographia Gallica Universalis, o u Catalogue de tous les livres imprimés par tout le royaume de France3. »
Cette tentative se continua pendant onze ans et fit connaître des livres sortis des presses parisiennes ou provinciales de 1643 à 16534. La Bibliothèque Nationale conserve ces bibliographies sous les numéros de cote Q 895 à Q 903 compris. Comme il fallait s'y attendre, préférant justement la classification formelle à la classification fondamentale, le catalogue sépare la Bibliographia Parisana de la Bibliographia Gallica Universalis, les classant l'une à la suite de l'autre, suivant l'ordre spatial, en plaçant la Bibliographia Gallica avant la Bibliographia Parisana. On a ainsi : 1. R. P. Ludovici Jacob, Cabilonensis, Garmelitae, Bibliographia Gallica Universalis hoc est catalogus omnium librorum per universum regnum galliae annis 1643, 1644 et 1645 excussorum (1646) (Q 895). 2. R. P. Ludovici Jacob... Bibliographia Gallica Universalis... anno 1646... (1647) (Q 896). 3. Bibliographia Gallica Universalis... anno 1651... (1652) (Q 897). 4. Bibliographia Gallica Universalis... annis 1652 et 1653 (1654) (Q 898). 5. R. P. Ludovici Jacob Cabilonensis, Carmelitae, Bibliographia Parisana, hoc est, catalogus omnium librorum Parisiis annis 1643 et 1644 inclusive excussorum — (1645) (Q 899). 1. Paul DELALAIN, « Les ancêtres de la Bibliographie de la France » in : la Bibliographie de la France, Chronique, 1911, p. 223 et ss. 2. Ibid., p. 223 : « Ce premier essai de Bibliographie parisienne et de Bibliographie de la France »... 3. Ibid., p. 223. 4. Ibid., p. 223.
BIBLIOGRAPHIES IMPRIMEES
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6. R. P. Ludovici Jacob, Cabilonensis, Carmelitae, Bibliographia Parisana anno 1645 (1646) (Q 900). 7. Bibliographia Parisana... annis 1647 et 1648... (1649) (Q 901). 8. Bibliographia Parisana... anno 1649... (1650) (Q 902). 9. Bibliographia Parisana... anno 1650... (1651) (Q 903). L'examen de ces ouvrages, qu'il s'agisse de l'une ou de l'autre des deux bibliographies composées par le Père Jacob, montre une composition assez identique. Après quelques explications en latin adressées au lecteur, la production annuelle est classée par matières à partir de 1647 et jusqu'à 1653. Pour la période antérieure, 16431647, les livres sont divisés par lieux d'édition d'abord, par matière ensuite. La Bibliographia Parisana et la Bibliographia Gallica Universalis forment une bibliographie générale puisqu'il s'agit de « tous les livres imprimés ». C'est aussi une bibliographie exhaustive pour la même raison. Toutefois on est mieux renseigné sur ce point. On sait, d'après Paul Delalain, que, comme tous les bibliographes du x v n e et du x v m e siècles, le Père Jacob recevait ou cherchait à obtenir certains renseignements des libraires du pays. Or ceux-ci répondirent mal à son appel, ainsi que le prouve le texte suivant : « Le R. P. Jacob, ayant invité dans sa préface de l'année passée, tous les libraires de ce Royaume de lui envoyer annuellement le Catalogue des livres qu'ils auraient imprimés afin de rendre son ouvrage universel... toutefois son dessein n'a pas réussy, selon qu'il s'estoit proposé, veu qu'aucun libraire ne s'est servy de son advis 1 . »
On peut donc conjecturer que l'exhaustivité ne fut pas complète et qu'une bonne part des livres nouvellement imprimés échappèrent au Père Jacob, faute d'une indication précise des imprimeurs libraires qui les publiaient. Cette bibliographie est aussi courante, puisqu'il s'agit des livres nouvellement imprimés dans l'année. Au moins ceux-ci forment-ils la majorité, car chaque numéro comprend aussi certains des livres publiés les deux autres années précédentes et qui avaient antérieurement été oubliés. Enfin, la Bibliographia Parisana et la Bibliographia Gallica Universalis ne composent qu'une seule et même bibliographie nationale française. En principe, l'une prend tous les livres de Paris et l'autre tous ceux de la France. L'examen de leurs dates de publication et de leur contenu aboutit à une autre hypothèse. I.
Bibliographia
Parisana,
annis
1647 et 1648,
« Le libraire au lecteur », BN : Q. 900.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
La Bibliographia Parisana, comme le montre le tableau suivant, fournit la production de 1643, 1644, 1645, 1647, 1648, 1649, 1650. La Bibliographia Gallica Universalis, celle de 1643, 1644, 1645, 1646, 1651, 1652, 1653. Années
Bibliographia Gallica Universalis
Bibliographia Parisana
1643 1644 1645 1646 1647 1648 1649 1650 1651 1652 1653
+ + + +
+ + +
+ + +
+ + + +
On est ainsi conduit à l'idée suivante : il se pourrait qu'au lieu d'être parallèles, les deux bibliographies correspondent, en réalité, au moins à partir de 1646 à une seule et même bibliographie de la France portant tantôt l'un tantôt l'autre titre. De 1643 à 1645 les deux bibliographies seraient réellement complémentaires, l'une prenant les livres de Paris, l'autre ceux de Province. Au contraire, la Bibliographia Gallica, en 1646, relèverait, selon son intention, tous les livres publiés en France, à Paris comme en province. Une nouvelle période de quatre ans ferait suite, de 1647 Parisana à 1650 compris, pendant laquelle la Bibliographia recueillerait tous les livres français et pas seulement ceux de Paris. Enfin dans une dernière période, de 1651 à 1653, on reviendrait à la conception de 1646. Une telle évolution aurait évidemment son explication. La publication de deux bibliographies sur un même sujet est plus coûteuse qu'une seule, surtout quand on sait le peu d'importance de la librairie provinciale par rapport à celle de Paris à cette époque. On en viendrait ainsi à mêler les deux dans l'idée de Bibliographie Nationale. Mais l'expérience prouvant que l'importance quantitative de la production parisienne est plus grande, on reviendrait au titre de Bibliographie Parisienne. E t c'est la raison précédente qui l'emporterait enfin définitivement. Pour qu'une telle hypothèse soit valable, il conviendrait que la production de l'une ou de l'autre, ou les deux, quand elles paraissent simultanément, soit en gros équivalente. Or c'est là
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
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justement ce qui se produit comme on peut s'en apercevoir dans l'analyse quantitative de ces bibliographies 1 . Une autre preuve est indispensable. Il faudrait que, dans le cas où les deux bibliographies paraissent simultanément, les livres de l'une n'aient été publiés qu'à Paris, et ceux de l'autre qu'en province. Or c'est ce qui se produit. Il faudrait aussi que, quand l'une ou l'autre paraît seule, elle regroupe toute la production nationale. C'est bien ce qui se réalise. Quand la Bibliographia Parisana est publiée seule, elle fournit les livres imprimés à Paris et en province, et il en est de même dans le cas contraire, quand seule est imprimée la Bibliographia Gallica Universalis. Enfin, il est une dernière preuve : l'évolution des classifications à l'intérieur de la production annuelle. En 1643, 1644, 1645, la priorité est donnée à la classification locale sur la table des matières, qu'il s'agisse de la Bibliographia Gallica ou de la Bibliographia Parisana. E n ce qui concerne la première, on trouve une séparation faite entre les livres de Lyon, Narbonne, Bordeaux, etc. Paris ne s'y trouve pas, à qui est réservée la seconde bibliographie. En 1646, par contre, la Bibliographia Parisana n'est pas publiée, mais la Bibliographia Gallica comporte une partie, la plus importante, réservée à la Bibliographie Parisienne, ainsi incorporée dans la Bibliographia Gallica aux autres bibliographies locales. Entre 1643, 1644 et 1645, d'une part, et 1648, d'autre part, il y a donc eu une évolution de l'auteur qui vise à ramasser en une seule bibliographie ce qui était séparé auparavant, suivant le critère spatial courant sous l'Ancien Régime, Paris-Province. Cette annéelà, il s'aperçut plus encore, combien était réduite la bibliographie provinciale. Aussi abandonne-t-il désormais la classification locale entièrement remplacée par la table des matières qui durera jusqu'à la fin, aussi bien à l'intérieur de la Bibliographia Parisana jusqu'en 1650, qu'à la suite dans la Bibliographia Gallica de 1651 à 1653, mêlant sans distinction de lieu ce qui était classé auparavant par ville. Aussi bien est-on quasiment assuré que ces deux bibliographies produites par un même auteur ne sont pas distinctes comme nous le ferait croire la classification formelle de la Bibliothèque Nationale, mais ne font qu'une seule et même bibliographie courante de la France, à partir de 1646, dont les seules variations s'expliquent par la conception également variable que s'en fait son auteur.
1. Voir l'étude statistique.
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LA STATISTIQUE
L'ALMANACH
BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
BIBLIOGRAPHIQUE
C'est encore à Paul Delalain que nous devons l'indication de YAlmanach Bibliographique. Cette bibliographie avait été annoncée par un prospectus dont on trouve un exemplaire à la Bibliothèque Nationale 1 . « Avis « Messieurs les imprimeurs et libraires, Le Père Louis Jacob religieux carme, ayant entrepris il y a quelques années, de donner tous les ans un Catalogue de tous les livres qui s'imprimoient dans le Royaume ; son dessein fut approuvé de tous ceux qui en eurent quelque connoissance, et il l'exécuta pendant plusieurs années. On s'étonne aujourd'hui que dans la France, qui est le séjour des beaux esprits et le centre des belles Lettres, personne n'ait pris la peine de continuer un Projet si utile aux Gens de Lettres. Je croy rendre service au public et à Messieurs mes confrères, en donnant tous les ans une liste de tous ces ouvrages qui s'imprimeront dans le Royaume. Mais comme j'ay besoin de leur secours pour l'exécution de ce Projet, je les prie d'avoir la bonté de m'envoyer le plutôt qu'ils pourront, les titres des livres et brochures qu'ils ont imprimez pendant l'année mil sept cens sept, tant ceux de privilège, que ceux qui sont avec la Permission des Juges des lieux ; et de continuer à m'envoyer les Titres de ceux qu'ils imprimeront d'année en année, avec le nom des auteurs quand cela se pourra, le prix de chaque ouvrage et même l'édition, afin que ceux qui voudront les acheter se déterminent plus aisément. Ce catalogue sera précédé d'un calendrier des Saints de France et des diverses phases de la lune, et aura pour titre , Almanach
Bibliographique
adresse à Paris, chez Charles Huguier Libraire, rue de la Huchette, à la Sagesse". » L'ouvrage fut publié, mais pour un an, en 1709, et comportait les publications de l'année 1707. Il avait pour titre : «Almanach Bibliographique pour l'an 1709 contenant le catalogue des livres imprimez dans ce royaume pendant l'année 1707 ; les Titres des Édits et déclarations du Roy de la même année ; les Archevéchez et Evéchez de France, avec le temps de leur érection et les Noms et Qualités de ceux qui les possèdent ; un Calendrier des Saints dont on célèbre les fêtes en France et le temps de leur mort... » Il fut imprimé à Paris, comme le prospectus, chez L. G. Huguier, en 1709. C'est un in-12 de 60 pages. La Bibliothèque Nationale en conserve un exemplaire. L'abbé de Morlière, qui en était l'auteur, expliquait son intention de 1. Bibliothèque Nationale, Mss. Fr. 21739, f. 35. 2. Almanach Bibliographique, B N : Q 5412. Paris-Huguier.
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
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composer une bibliographie exhaustive et non sélective, dans un avis qui ressemble quelque peu à celui annonçant la prochaine publication de l'Almanach : « Mon dessein dans ce petit ouvrage est de suivre le projet qu'avait formé R. J. Jacob carme de donner la liste de tout ce qui s'imprime chaque année dans le Royaume. Messieurs les Journalistes qui sont infatigables dans leur travail ne pouvant donner au public que l'analyse de quelques livres qui s'impriment dans l'Europe, sont obligés d'en passer plusieurs sous silence qui peuvent estre utiles aux Gens de Lettres et qui souvent demeurent ensevelis dans les magasins faute d'être indiquez. Je ne prétends point enchérir sur ces doctes plumes me restraignant dans les bornes que je me suis prescrit. Je ne fais qu'annoncer les livres qui sont sortis de dessous la presse l'an 1707... Si cet ouvrage peut plaire au public, je ferai en sorte de le perfectionner par la suite, les premiers fruits n'ont pas la même beauté ni la mesme bonté qu'ils acquièrent avec le temps ; et j'espère qu'avec le secours de Messieurs mes confrères, je n'obmettrais rien de tout ce qui sera imprimé dans ce Royaume. »
L'ouvrage est composé de plusieurs parties. commence à la page 44, après les « Archeveschez après les livraisons et le calendrier des Saints de l'indication des livres, on remarque des analyses ouvrages sont groupés par ville et par imprimeur.
Le catalogue et Evêchez », France. Outre critiques. Les
L'Almanach Bibliographique, par ses intentions, est une bibliographie générale. Il s'agit, bien entendu, comme dans les bibliographies précédentes, de la production autorisée par le pouvoir royal, c'est-à-dire comme le rédacteur le dit lui-même, des livres « de Privilège » ou imprimés « avec la Permission des Juges des lieux ». A cela il faut ajouter les textes légaux, « Les titres des Édits et déclarations du R o y de la même année ». C'est aussi une bibliographie exhaustive. Elle se distingue des bibliographies sélectives, et le rédacteur en marque lui-même les limites, lorsqu'il constate dans le texte, ci-dessus cité, que les journalistes composant des bibliographies critiques sont obligés de choisir et de laisser ignorer au public un certain nombre de livres. Aussi ne fait-il lui-même que d'annoncer les ouvrages nouveaux. Toutefois, si son intention est clairement délimitée, ses sources demeurent les mêmes que pour la plupart des autres bibliographies : les indications des libraires dont on a vu déjà qu'elles n'étaient pas toujours données et, quand elles l'étaient, qu'il arrivait qu'elles le fussent plusieurs fois. Aussi peut-on concevoir quelques doutes sur sa réelle exhaustivité. Enfin YAlmanach est une bibliographie courante, puisqu'elle vise à donner, année par année, la production des livres, et française, puisqu'il est question de la « Liste des 1. Almanach
Bibliographique,
p. 10.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
ouvrages qui s'impriment dans le Royaume ». Sur ce dernier plan, la démarche de l'auteur est intéressante en ce qu'elle se rattache à l'idée du R . J. Jacob et semble instituer une tradition interrompue fréquemment et qui pourtant se poursuivra jusqu'à la réalisation officielle de la Bibliographie de la France.
L A B I B L I O G R A P H I E FRANÇAISE ET L A T I N E DE
PARIS
C'est Paul Delalain qui mentionne particulièrement la Bibliographie Française et Latine de Paris, dans son article déjà cité des « Ancêtres de la Bibliographie de la France ». C'est en 1678, soit un quart de siècle.après la dernière publication du Père Jacob, que paraît : « La Bibliographie Française et Latine de Paris suite des nouveautés du temps ou l'art de dresser des Bibliothèques, contenant tous les livres, feuilles, cartes et affiches, tant géographiques que généalogiques qui s'impriment et se gravent dans Paris, et dans les autres villes du Royaume, les Académies et la liste de ceux qui enseignent les Beaux Arts. Avec le prix des volumes, le lieu où ils se vendent, le nom des auteurs et autres particularités historiques. Ouvrage composé, en faveur de ceux qui dressent des Bibliothèques et des Cabinets curieux, tant en France que dans les Pays Étrangers, des nouveautés de l'année. Troisième partie : dédiée à Messieurs les Syndic, Adjoints, Anciens et autres de la Communauté des Marchands Libraires de Paris. Par le sieur Colletet, de la maison de M. le Dauphin. A Paris, chez Emmanuel Langlois, rue Saint-Jacques à la Reine du Clergé... MDC LXXVIII1. »
Paul Delalain ajoute un renvoi : « Tel est le titre du fascicule... que possède la Bibliothèque technique du Cercle de la Librairie (n° 1551). »
Les mots : « Troisième partie » prouvent l'existence de fascicules antérieurs. A la fin, une note de l'auteur exprime son intention de publier la suite des fascicules, par un ou deux cahiers tous les mois : « pour reprendre le train ordinaire qui sera toujours la suite de ceux-ci, comme ceux-ci sont aussi la suite de ce qui a été imprimé les précédentes années. »
E t il prie Messieurs de la Communauté des Libraires de ne pas cesser de lui envoyer leurs mémoires, puisqu'il y va de leur intérêt et de l'honneur de la République des Belles-Lettres. Il ajoute : 1. Bibliographie
de la France, Chronique. 1911, p. 225.
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
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« Si ceux du dehors envoient aussi ce qu'ils impriment avec approbation, Permission ou Privilège, on n'oubliera pas de leur donner place aussi dans notre Bibliographie. »
Ainsi, dans son désir de rendre son œuvre aussi complète que possible, il faisait appel aux Libraires publiant des ouvrages en dehors de la Communauté et de la ville de Paris 1 . Les textes cités par Delalain sont extraits de l'avis imprimé à la fin du fascicule d'avril 1678, qui se trouve toujours à la Bibliothèque technique du Cercle de la Librairie sous le numéro de cote indiqué par Delalain. On peut aussi retrouver cet avis aux Archives Nationales. E n voici le contenu entier : « Avis Les affaires de l'auteur ne luy ayant pas laissé la liberté d'assembler sa bibliographie selon sa coutume, il a esté obligé de donner les quatre premiers mois ensemble de cette première année ; quant aux livres qui s'imprimeront doresnavant il en fera un ou deux cahiers tous les mois pour reprendre le train ordinaire qui sera toujours la suite de ceux-cy comme ceux-cy sont aussi la suite de tout ce qui a esté imprimé les précédentes années. Et il prie Messieurs de la Communauté des Libraires de ne pas cesser de luy envoyer leurs mémoires puisqu'il y va de leur intérêt et de l'honneur de la république des Belles-Lettres, si ceux du dehors envoyent aussi ce qu'ils impriment avec approbation, permission ou privilège, on n'oubliera pas de leur donner place aussi dans notre Bibliographie. Fin du mois d'avril de la Bibliographie Française et Latine de Paris qui fait partie des nouveautés du temps ou l'art de dresser les bibliothèques. Avril 1678». »
Cette bibliographie est bien générale. Toutefois, il faut remarquer l'intérêt particulier qu'elle porte aux ouvrages généalogiques. Elle est aussi exhaustive, puisque son intention fut de prendre « tous les livres ». Elle est encore courante, puisqu'elle fut publiée mensuellement et qu'elle offre les livres nouvellement imprimés pendant les quatre premiers mois de 1678. Enfin elle est, en principe, française, puisqu'elle vise à recueillir les livres « qui s'impriment et se gravent dans Paris et dans les autres villes du Royaume ». Cependant, ses sources, qui d'habitude sont utiles par leur renseignement à préciser le caractère exhaustif de la bibliographie, nous donneront des indications plus spatiales cette fois. L'originalité de la Bibliographie Française et Latine de Paris est de ne pas s'en être tenu aux libraires mais d'avoir sollicité et obtenu les données d'un organisme corporatif : la Communauté des Libraires
1. Ibid., p. 225.
2. Archives Nationales, Série AD VIII, 8. 7
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
de Paris. Quel intérêt pouvait-elle donc présenter pour la constitution d'une bibliographie ? On sait 1 que depuis 1618, et même avant, la Communauté recevait un exemplaire de tous les ouvrages imprimés à Paris. Elle était donc à même de renseigner efficacement sur toute la production parisienne et même probablement dans une moindre proportion sur celle de la province. En recueillant ces indications, l'auteur de la Bibliographie Française et Latine de Paris composait donc principalement et sûrement une bibliographie parisienne quelque peu élargie. C'est cette raison qui explique les remerciements aux Syndic et Adjoints sous la forme d'une dédicace. Cependant pour devenir vraiment une bibliographie nationale, il fallait qu'il fût renseigné, plus précisément qu'il ne l'était, sur les livres nouvellement imprimés dans la province. Et cela explique qu'il se soit adressé directement aux imprimeurs libraires des autres villes du Royaume, sans qu'on sache si son effort fut couronné de succès. On peut donc penser que, bien que nationale, cette bibliographie, en réalité, est peut-être davantage parisienne. Quant à l'attitude de la communauté, elle s'explique aisément. La publication d'une bibliographie dont la source était principalement les registres de la Chambre Syndicale, démontrait l'importance et l'utilité de celle-ci. Cela renforçait son action en vue de se faire reconnaître par le pouvoir royal comme la Chambre la plus importante, la plus officielle du Royaume, ce qu'elle obtint plus tard, lorsque, de Chambre Syndicale des Libraires de Paris, elle devint Chambre Syndicale et Royale de la Librairie, avec certains privilèges comme celui, à partir de 1704, de regrouper pour le Dépôt Légal tous les ouvrages publiés tant à Paris qu'en province.
LE JOURNAL DE PARIS Avec le Journal de Paris, nous nous trouvons en présence de la première bibliographie générale de la France, exhaustive, courante, officielle et imprimée, qui ait été publiée sous l'Ancien Régime. Il faudra donc modifier quelque peu notre conception de l'origine de la bibliographie officielle de la France. Les bibliographes, se répétant les uns les autres, la faisaient remonter au Journal de la Librairie, institué en 1811, avec le décret d'Amsterdam, par Napoléon 1er. En réalité, en ce domaine comme en beaucoup d'autres, l'Empire ne fit que reprendre, en les systématisant, après la tourmente 1. Voir note précédente Étude du Dépôt Légal en France de 1537 à 1791.
BIBLIOGRAPHIES
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IMPRIMEES
révolutionnaire, des réalisations fragmentaires, introduites pendant les dernières décades de la Monarchie absolue. Aussi bien l'idée d'adjoindre au Dépôt Légal une publication bibliographique composée et surveillée par l'Administration, qui présenterait au public toutes les productions nouvellement déposées, n'est-elle pas due au Décret d'Amsterdam mais au Règlement de 1785. Celui-ci chargeait deux journaux de cette annonce : Le Journal des Savants — Le Journal de Paris. Rappelons que l'article I X du Règlement de 1785 stipulait que les Syndic et Adjoints de la Chambre Syndicale et Royale de la Librairie devraient tenir un état des ouvrages déposés et en composer deux copies qu'ils adresseraient au Directeur de la Librairie, lequel en donnerait un à l'Inspecteur de la Librairie et « l'autre aux propriétaires du Journal des Savants et seront les dits propriétaires du Journal des Savants tenus de publier sur le champ le dit état à peine de déchéance de leur privilège, par la voie du dit Journal et subsidiairement par celle du Journal de Paris... »
Nous verrons que le Journal des Savants n'a pas exécuté l'ordre qu'il avait ainsi reçu. Il n'en fut pas de même du Journal de Paris, au moins pendant quelque temps. On sait que ce journal fut l'un des premiers quotidiens français. Comme le dit Hatin : a L'un s'appelle le Journal de Paris...
et paraît tous les jours 1 . »
Toujours d'après le même auteur : « Le prospectus... fut lancé dans Paris au commencement de Novembre 1776» »,
et le Journal parut de 1777 à septembre 1811. Il fut suspendu trois fois, du 23 au 28 janvier 1777 ; du 9 au 27 juin 1785 ; du 13 août au 30 septembre 1792. On le trouve à la Bibliothèque Nationale sous la cote 4° LC 2. 80. L'intention des journalistes était contenue dans le prospectus. Sur le plan bibliographique, il promettait : « L'annonce des livres le jour même où ils auraient paru ainsi que des cartes géographiques, des estampes, de la musique, avec les prix, l'adresse du libraire, l'interprétation du titre. Les journalistes se réservant en outre de donner des notices plus longues et plus détaillées lorsque les nouveautés le mériteraient...'» 1. HATIN, Bibliographie 2. Ibid. 3. Ibid., p. 16.
historique et critique de la presse périodique française, p. 76.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
En réalité, cette promesse, qui fut tenue, aboutit à constituer bibliographie sélective et critique. Comme toutes celles de l'époque, comme le Journal des Savants ou la Clef des Princes de l'Europe qu'il imite, le Journal de Paris, sur ce plan, se compose de notes critiques et d'annonces généralement publicitaires et commerciales des libraires. Les choses changèrent, au moins momentanément, à partir du Règlement de 1785 qui le désignait comme première bibliographie officielle exhaustive et courante de la France. L'annonce du Règlement fut faite dans la rubrique « administration du n° 133 du vendredi 13 mai 1785 ». Aucun commentaire ne l'accompagne. Le règlement fut appliqué par la constitution d'une rubrique du Journal et ceci à partir du «Supplément au n° 223 du jeudi 11 août 1785 ». On trouve dans le tome 2 de l'année 1785 à la page 925, le titre suivant : « Chambre Syndicale État des livres, estampes, etc. dont les exemplaires ont été fournis en vertu de l'Arrêt du Conseil d'État du Roi du 16 avril 1785 annoncés dans le journal subsidiairement à celui des Savants conformément à l'article X I du dit arrêt. Catalogue du 1 e r juillet 1785. »
Ce supplément comprenait, rétrospectivement, tous les catalogues du mois d'août. Cette annonce se poursuivit pendant le reste de l'année 1785 et le début de 1786. Elle disparaît après le n° 16 (Tome I, p. 65) de 1786, en date du 13 janvier 1786. Ainsi le premier essai de bibliographie officielle n'aura-t-il pas duré un an, mais à peine sept mois. La périodicité de l'annonce fut généralement assez régulière. L'article IX déjà cité du Règlement de 1785 stipulait que les états qui devaient être publiés seraient faits deux fois par semaine : « les mardi et vendredi de chaque semaine. »
Ces états prirent le nom de « Catalogue » et furent datés. Ils devaient être publiés « sur le champ » d'après le règlement. En fait, il y eut toujours un décalage de plusieurs jours. Ainsi, pour donner un exemple, le catalogue du 30 décembre 1785 parut dans le Journal de Paris le mardi 3 janvier 1786 ; celui du 5 janvier, le 8 ; celui du 10, le 13 ; celui du 13, le 16 janvier 1786. Le titre du Catalogue est toujours précédé de la mention : « Chambre Syndicale ». Toutefois, le texte précité : « État des livres » disparaît comme s'il n'avait été donné qu'une fois afin de prévenir et de servir d'introduction. De plus, l'annonce, qui n'est faite que deux fois par semaine, est insérée en première page, première colonne.
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BIBLIOGRAPHIES IMPRIMEES
Deux questions se posent : pourquoi le Journal de Paris observa-t-il le règlement et pourquoi le Journal des Savants ne le fit-il pas ? Pourquoi cessa-t-il au début de 1786 ? Il est assez facile de répondre à la première question. C'est sans doute la périodicité différente, quotidienne de l'un, mensuelle de l'autre, qui est la raison essentielle. Le Journal des Savants qui ne paraissait qu'une fois par mois ne pouvait pas annoncer « sur le champ » les deux états hebdomadaires prévus par le règlement. Il fallait, dans l'esprit de la décision royale, que le public fût averti, le plus tôt possible, des ouvrages nouvellement imprimés. Il convenait donc d'avoir recours à un journal quotidien. D'où les annonces du Journal de Paris et l'exclusion du Journal des Savants. Quant à la deuxième question, elle est plus embarrassante. Les annonces cessent après le 16 janvier 1786. Pourquoi ? Nous n'avons trouvé aucune explication dans le Journal lui-même. Le Règlement de 1785 stipulait que l'annonce pourrait ne pas être faite sous condition d'obtenir le « consentement des auteurs, éditeurs et autres ayant droit à la propriété de l'ouvrage non annoncé ». Est-ce là la raison ? L'accord des auteurs, éditeurs fut-il obtenu ? On peut en douter. D'autre part, le même règlement prévoyait une sanction, « la déchéance de leur privilège », pour les propriétaires du Journal au cas où les annonces ne seraient pas faites, l'accord précédent n'étant pas obtenu. Cette déchéance entraînait l'arrêt de la publication. Or cette sanction ne fut pas appliquée, puisque le Journal continua de paraître jusqu'en 1811. LA BIBLIOGRAPHIE
PARISIENNE
Cet ouvrage a pour titre : La Bibliographie Parisienne ou Catalogue d'ouvrages de Sciences, de Littérature et de tout ce qui concerne les Beaux Arts tels que la musique, les gravures, etc... imprimés ou vendus à Paris. Quel était le but exact du rédacteur ? Il le dit lui-même : « Quand le libraire nous a proposé de nous charger de l'ouvrage que nous offrons aujourd'hui au public, il était seulement question de donner les titres de ceux que se sont vendus successivement à Paris les années précédentes, en remontant même assez haut, avec les formats des livres en tout genre, des cartes et des gravures, le nombre des volumes, leurs prix différents, et les noms des personnes qui les ont vendus ou qui les vendent encore...1 »
A ce but commercial et quantitatif du libraire, le bibliographe devait ajouter des indications qualitatives : 1. La Bibliographie Parisienne, BN. Q. 3799-3804, T. 1, p. 7.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
« Nous avons cru devoir ajouter aux titres, aux formats, au nombre de volumes, aux prix et aux noms des marchands libraires ou autres, les différents jugements que MM. les Journalistes ont portés des ouvrages 1 . »
Ces livres énumérés et critiqués n'étaient pas tant des ouvrages publiés que vendus à Paris et en provenance de partout. De même, la date de 1770 correspond davantage aux livres en vente cette année-là et comprenant donc aussi des livres de 1769. L'auteur l'avoue : « Cela fait aussi que nous aurions peut-être attribué à l'année 1770, des ouvrages qui appartiennent à celle de 1769'. »
La Bibliographie Parisienne comporte 7 volumes in-8°, dont un pour 1769 et six pour 1770. L'auteur s'en expliquait : « C'est pour commencer que je leur offre aujourd'hui les deux premiers volumes de cet ouvrage faisant partie de ceux qui embrassent l'année 1770...« »
Outre ces deux premiers tomes, quatre autres devaient suivre. Le rédacteur l'avait d'ailleurs indiqué dans le premier volume : « Les autres, pour la même année, suivront de près successivement*. »
Son intention était de constituer une bibliographie sans doute courante mais rétrospective. Il précisait : « Partant toujours du même principe si nous rétrogradons, nous débuterons par l'année 1769 et nous passerons ensuite à 1768, puis à 1767, 1766, etc. "»
L'examen de l'ouvrage permet de faire plusieurs constatations. D'abord les tomes 1 et 2 sont groupés ensemble, les tomes 3, 4 et 5 de même. Le tome 6 forme à lui seul le troisième volume. Chaque feuille ensuite est divisée en quatre colonnes. Dans celle de gauche se trouvent le titre, la description de l'ouvrage et les jugements qui en ont été faits. Les colonnes suivantes, en allant vers la droite, concernent le prix, en livre et en sol, enfin la dernière a trait au libraire. A la fin du dernier tome existent plusieurs tables :
1. 2. 3. 4. 5.
Ibid., Ibid., Ibid., Ibid. Ibid.,
T, 1, p. 8. T. 1, p. 13. T. 1, p. iv. T. 1, p. 15.
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
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table des matières, tables des auteurs, table des musiciens, table des libraires et marchands. Cette bibliographie est à la fois intéressante en soi et dangereuse pour notre travail. C'est, beaucoup plus que les précédentes, une bibliographie commerciale et l'on a dit déjà que l'intention économique transforme la bibliographie de la production en bibliographie de la vente des livres, avec toutes les conséquences que cela entraîne de confusion des critères de classification bibliographique et, pour notre recherche, de difficultés pour atteindre la production réellement nouvelle. Le but, en effet, est d'indiquer les ouvrages qui, à une date précise, sont en vente en un lieu donné, soit par un, soit par tous les libraires. La bibliographie a donc bien des intentions générales et exhaustives comme celles dont nous avons besoin. Toutefois, la dépendance de la vente entraîne déjà une légère réduction en ce qui concerne l'exhaustivité. Le but à atteindre n'est pas de connaître tous les livres nouvellement produits en un lieu, mais tous ceux qui sont mis en vente. On se contentera donc de ce qu'on peut trouver et un écart théorique est possible. Mais c'est surtout sur le critère de périodicité et sur celui d'espace que les difficultés vont naître. La bibliographie ne sera pas courante d'une manière exacte. L'année de la vente des livres ne correspond pas nécessairement à celle de leur production, d'où la présentation de nombre de livres parus les années précédentes, ainsi que le rédacteur le dit lui-même. De plus, les livres vendus en un point du territoire ne correspondent pas seulement à la production du lieu mais également des provinces et de l'étranger. Ainsi, la bibliographie devient non pas régionale mais universelle. La Bibliographie Parisienne, en étant une bibliographie de la production des livres en vente, si elle est bien une bibliographie à peu près générale et exhaustive, n'est pas vraiment courante ni régionale ou nationale. Son utilisation exige beaucoup de précautions et principalement la possibilité de distinguer les années comme le lieu de parution des ouvrages qu'elle énumère.
LE JOURNAL DES SAVANTS L'idée que le Journal des Savants ait pu servir pendant l'Ancien Régime, et pour une période donnée, de bibliographie générale, quantitative et courante de la France, remonte à notre précédente étude, consacrée au Dépôt Légal de 1537 à 1791. Une note avait attiré notre attention. Nous la reproduisons ici :
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
« Vous êtes averti, de la part de vos Syndic et Adjoints suivant l'ordre qui vous a été ci-devant communiqué, d'apporter à la Chambre Syndicale tous les mardis et vendredis de chaque semaine, la liste des livres que vous mettez nouvellement dans le public afin qu'ils puissent en informer Monsieur le Comte d'Argenson, qui souhaite les faire mettre dans le Journal des Savants : comme aussi d'envoyer exactement à mon dit Sieur le Comte une affiche de chacun des livres que vous ferez afficher laquelle vous mettrez à la boite de la poste à l'adresse de mon dit sieur... le 17 avril 17191. »
Ainsi, dès le début du x v m e siècle, le Journal des Savants aurait pu servir de bibliographie officielle, générale, courante, et quantitative de la France, ce qu'il devait, en principe, devenir à partir du Règlement de 1785. Celui-ci stipulait en effet, comme on l'a vu à propos du Journal de Paris qu'il serait fait : « Par les officiers de la Chambre de Paris un état avec deux copies de tous les ouvrages imprimés ou gravés qui auraient été permis et pour lesquels il aura été satisfait à la dite obligation ; lequel état, dûment soigné et certifié sera par eux remis au magistrat chargé par M. le Chancelier ou Garde des Sceaux de la direction générale de la Librairie, et les dites deux copies également signées et certifiées seront envoyées, savoir l'une à l'inspecteur... l'autre aux propriétaires du Journal des Savants et seront les dits propriétaires du Journal des Savants tenus de publier sur le champ le dit état à peine de déchéance de leur privilège, par la voie du dit Journal...' »
Ainsi la note de 1719, comme le Règlement de 1785, faisaient-ils du Journal des Savants, pour le x v m e siècle, ce qu'à été la Bibliographie de la France depuis l'Empire jusqu'à nos jours. L'étude de cette publication s'avérait donc indispensable. Sa réalisation, après diverses espérances, devait nous faire constater son peu d'utilité pour notre recherche. Son histoire sous l'Ancien Régime nous offrit une continuité indispensable à l'analyse statistique ; son irrégulière production, pendant les premières décades fit naître des soupçons sur la valeur des chiffres qu'on pouvait en tirer pour la fin du x v n e siècle. L'examen de ses buts et de sa composition fit découvrir la partie du Journal consacrée à ce qui aurait pu être une bibliographie quantitative et que le dépouillement nous démontra n'être qu'une bibliographie sélective. Il convient d'en suivre l'évolution. On sait que l'honneur de la création du Journal des Savants revient : « à Denis de Sallo, Conseiller au Parlement de Paris, homme d'un rare mérite et d'un grand savoir. *» 1. Bibliothèque Nationale, Manuscrit Français 22076, f. 71. 2. Règlement de 1785 (16 avril). Bibliothèque Nationale A D V I I I 7. 3. HATIN, Bibliographie Historique et Critique de la Presse Périodique Française,
p. 28.
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
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« De Sallo crut devoir garder l'anonymat et fit paraître son journal sous le nom supposé du Sieur d'Hédouville 1 . » « C'est le lundi 5 janvier 1665 que parut le premier numéro... 2 » Une opposition se fit jour aussitôt contre cette publication qui s'arrogeait le droit de juger des œuvres littéraires : « Les jésuites... joignirent leurs plaintes aux cris de l'amour propre blessé ; ils firent agir le nonce du pape et celui-ci finit par obtenir qu'il serait défendu à Sallo de continuer sa publication. Le journal fut arrêté après trois mois seulement d'existence*. » Ainsi : «Le premier numéro parut le 5 janvier 1665 et le dernier le 30 may suivant ce qui fait seulement treize journaux de ce premier auteur qui mourut la même année de chagrin d'avoir perdu son argent au jeu... 4 » C'est Colbert qui : « chargea un de ses familiers l'abbé Gallois... de reprendre la publication du Journal des Savants ce qui eut lieu le 4 janvier 16668. » L'abbé Gallois continua « jusqu'en 1675* » puis : « l'abbé de la Roque jusqu'en 1686 et, durant les quinze années suivantes, par le président Cousin, que le Chancelier Boucherat avait chargé de ce travail'. » « A la fin de 1701 le chancelier de Pontchartrain en fit l'acquisition pour l'État et nomma pour sa rédaction une compagnie de savants... 8 » A partir de cette date, le Journal des Savants journal et une bibliographie officielle :
devient donc un
« Les premiers membres de cette Société se réunissaient chez l'abbé Bignon ; mais depuis 1715 jusqu'en 1792, les conférences des auteurs de ce journal se sont tenues, une ou deux fois par mois à la Chancellerie et l'on en rédigeait des procès-verbaux 1 . » 1. Ibid., p. 29. 2. Ibid., p. 29. 3. Ibid., p. 29. 4. Bibliothèque Nationale, Mss. Fr. N.A. 4762, Cahier d'observations diverses,
Article I, sur le Journal des Savants, t. 84. 5 . H A T I N , ibid., p. 3 0 6. Prospectus de la deuxième série. 7. H A T I N , ibid., p. 30.
8. Ibid., p. 30.
9. Prospectus de la deuxième série.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
On sait enfin que ce journal, ou plus exactement la première série, puisqu'il devait reprendre sa publication après la Révolution et l'Empire, fut obligé de : «s'arrêter au mois de novembre 17921. » Ainsi, le Journal des Savants présente depuis son origine jusqu'à la fin de l'Ancien Régime une continuité historique rare et utile. Cependant la périodicité du Journal des Savants sous l'Ancien Régime varia. On peut reconnaître deux grandes périodes : des origines à 1724 il fut hebdomadaire ; de 1724 à 1792, mensuel. Ainsi, d'après Hatin : « Le Journal, composé d'abord d'une feuille et demie in-4° continua à paraître avec plus ou moins de régularité le lundi de chaque semaine, donnant de temps en temps un supplément jusqu'en 1724...* » Toutefois, pendant une courte période, sous l'Abbé de la Roque, le journal fut imprimé toutes les quinzaines : « L'Abbé de la Roque ne publia d'abord le Journal que de quinzaine en quinzaine... dans la suite il reprit la méthode de ses prédécesseurs et fit paraître le Journal tous les lundis 3 . » Après 1724, il devint mensuel : « A cette époque les rédacteurs... se décidèrent à ne le plus faire paraître que tous les mois... non compris les suppléments dont il a été publié régulièrement depuis lors jusqu'en 1792, un cahier pour chacun des mois de juin et de décembre1. » Si la continuité historique n'est qu'assez peu gênée par cette variation de la périodicité, il n'en est pas de même en ce qui concerne l'irrégularité de la publication. Celle-ci en effet ne fut pas continue, surtout pendant le x v n e siècle : « Les bibliographes ne sont pas d'accord sur le nombre des volumes dont se doit composer la collection du Journal des Savants jusqu'en 1792. Gela tient à l'irrégularité de sa publication dans ses commencements, notamment durant la gestion de l'Abbé Gallois, qui, en neuf années, en publia 72 numéros savoir 42 en 1666, 16 en 1667, 1 en 1670, 3 en 1671, 8 en 1672 et 2 en 1674..."» 1. HATIN, ibid., 2. HATIN, ibid.,
p. 30. p. 2 9 .
3. Le Journal des Savants, 1765, a Avis sur le Journal des Savants à l'occasion de l'année séculaire de son institution », p. 61, ii J. 4. HATIN, ibid., p. 31, l'examen du journal montre effectivement 16 numéros pour 1667 mais seulement 13 en 1668, 4 en 1669 et 12 en 1675.
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
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A i n s i , le m a n i e m e n t des d o n n é e s s t a t i s t i q u e s se t r o u v e d é l i c a t en ce q u i c o n c e r n e les p r e m i è r e s d é c a d e s de sa p u b l i c a t i o n . L ' i n t e n t i o n des a u t e u r s e t la c o m p o s i t i o n d u Journal v o n t préciser la n a t u r e de c e t t e b i b l i o g r a p h i e . U n t e x t e de la p r e m i è r e é p o q u e i n d i q u a i t : « L'imprimeur au lecteur, Le dessein de ce journal estant de faire savoir ce qui se passe de nouveau dans la République des Lettres, il sera composé, premièrement d'un catalogue exact des principaux livres qui s'imprimeront dans l'Europe. Et on ne se contentera pas de donner les simples titres, comme on fait jusques à présent la plupart des bibliographes : mais de plus on dira de quoy ils traitent, et à quoy ils peuvent être utiles. Secondement, quand il viendra à mourir quelque personne célèbre par sa doctrine et par ses ouvrages on en fera l'éloge et on donnera un Catalogue de ce qu'il aura mis au jour, avec les principales circonstances de sa vie. En troisième lieu, on fera savoir les expériences de Physique et de Chimie... les nouvelles découvertes qui se font dans les Arts et dans les Sciences, comme les machines et les inventions utiles ou curieuses que peuvent fournir les Mathématiques : les observations du ciel... et ce que l'anatomie pourra trouver de nouveau dans les animaux. En quatrième lieu, les principales décisions des tribunaux séculiers et ecclésiastiques... 1 » P a r ailleurs, il se p r é t e n d a i t : « Le modèle et le père de ces Journaux Littéraires qui se sont multipliés dans l'Europe 1 . » L e Journal des Savants, p a r sa p r e m i è r e p a r t i e , s ' a n n o n ç a i t c o m m e u n e b i b l i o g r a p h i e u n i v e r s e l l e , p u i s q u ' i l s ' a g i s s a i t des o u v r a g e s de la F r a n c e e t de l ' E u r o p e entière ; s é l e c t i v e , p u i s q u ' i l ne d e v a i t être q u e s t i o n q u e des « p r i n c i p a u x livres » ; c r i t i q u e , p u i s q u ' e l l e ne c h e r c h a i t p a s à i n d i q u e r s e u l e m e n t les renseignem e n t s d e s c r i p t i f s , m a i s à en a n a l y s e r le c o n t e n u . C e t t e c o n c e p t i o n p r i m i t i v e d e v a i t c h a n g e r a v e c le t e m p s . L ' a v i s d é j à cité sur le Journal des Savants à l ' o c c a s i o n de l ' a n n é e séculaire de son instit u t i o n , le p r o s p e c t u s de la d e u x i è m e série, e n 1 8 1 6 , n o u s a p p r e n n e n t son é v o l u t i o n : « Les productions de la Littérature... ne sont pas toutes de la même importance pour l'objet, ni du même mérite pour l'exécution. Les unes ne doivent être annoncées que par un simple titre, il suffît qu'on sache leur existence ; les autres demandent de courtes notices ; d'autres enfin méritent d'être analysées et discutées dans les extraits raisonnés». »
1. Journal des Savants, 1665, p. 3. 2. Ibid., p. 60, i. 3. Ibid., 1765, p. 60, ü J.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Ces trois parties sont confirmées par le prospectus postérieur à la première série. Celui-ci énumère, d'une manière inverse de l'avis, la composition du Journal: « En général, les articles du Journal des Savants sont de trois espèces : I o Analyses d'ouvrages importants, 2° Dissertations ou mémoires sur des questions littéraires ou sur des découvertes dans les sciences, 3° Simples annonces de livres nouveaux : mais ce sont toujours les articles du premier genre qui occupent le plus d'espace. Ceux du second sont rares, et ceux du troisième fort courts 1 . »
Enfin, si l'on en juge par ces trois textes, l'un commençant le Journal, les deux autres, l'avis et le prospectus, correspondant à l'analyse de la composition, au milieu et à la fin de la réalisation de la série qui nous occupe, des variations auraient été apportées à l'intention primitive. Les analyses critiques des livres nouveaux forment toujours la première partie. Pourtant, les articles nécrologiques, les nouveautés scientifiques, et les décisions de justice qui figuraient respectivement dans les deuxième, troisième et quatrième parties des premiers journaux, se regroupent par la suite en une seule et même division, la seconde. Enfin, la troisième partie devient une bibliographie courante. Sur le plan statistique qui nous occupe ici, on doit reconnaître que deux seulement des parties du Journal des Savants sont susceptibles de nous être utiles : la première et la troisième. La première, comme dans l'intention primitive, n'est, ainsi qu'on en a été prévenu, qu'une bibliographie courante universelle, sélective et critique. Elle ne peut à elle seule nous arrêter. Reste la troisième. Il convient de savoir en quoi elle consiste exactement. Elle porte le titre de : « Nouvelles Littéraires ». Cette rubrique n'apparaît pas tout de suite : « C'est sous M. l'Abbé de la Roque et dans l'année 1678 qu'on trouve pour la première fois à la fin des feuilles un article séparé des Nouvelles Littéraires2. »
Quel en était le but ? « L'article des Nouvelles Littéraires les livres dans leurs nouveautés'. »
de toutes les Nations fait connaître
L'annonce des livres dans cette rubrique ne dispensait pas de
1. Prospectus de la 2 e série, septembre 1816. 2. Le Journal des Savants, 1765, p. 60, ii J. 3. Ibid., iv.
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son analyse postérieure, si l'ouvrage le méritait, dans la première partie : a L'article des Nouvelles Littéraires suffit pour la première sorte d'ouvrages et quelquefois pour la seconde ; il sert aussi pour annoncer les ouvrages qui doivent être analysés par la suite 1 . »
Ainsi, la conception de cette troisième partie, des Nouvelles Littéraires, est claire et distincte de la première partie. Outre qu'elle est un Journal Littéraire, c'est aussi en principe une bibliographie, générale, exhaustive, courante et universelle. L'étude de l'intention et de la composition du Journal des Savants est donc utile. Elle semble montrer que l'hypothèse d'une PréBibliographie de la France contenue dans le Journal des Savants n'est pas fausse mais elle indique encore la partie du Journal qui lui serait consacrée : les Nouvelles Littéraires de France. L'étude statistique montrera qu'il n'en est rien.
LA C L E F DU CABINET DES P R I N C E S DE L ' E U R O P E C'est l'article de Paul Delalain sur « les Ancêtres de la Bibliographie de la France » qui attira notre attention sur La Clef du Cabinet des Princes de l'Europe, plus connue sous le titre de Journal de Verdun. L'étude de cette publication devait nous conduire à des conclusions identiques à celles du Journal des Savants, plus accentuées même pour la raison que le Journal de Verdun aura été sur plusieurs plans, et notamment sous l'angle bibliographique, un démarquage de ce dernier périodique. La collection de cette revue est assez complexe et cela tient à deux raisons : les dissensions de l'auteur et de l'éditeur, qui, après avoir travaillé ensemble pendant un certain nombre d'années, se séparèrent, chacun continuant de son côté à publier une revue portant un titre presque identique. A cela, il faut encore ajouter des modifications dans le lieu d'impression, le titre et l'adjonction des parties complémentaires, que sont le Supplément et les Tables. On est ainsi amené à discerner : 1° Une période de publication commune de 1704 à 1717. Cependant, celle-ci doit être divisée en deux parties successives, correspondant à un changement de lieu d'impression et à une modification du titre.
l. ibid., ii J.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
On a dohc : A) De juillet 1704 à décembre 1706 : « La Clef du Cabinet des Princes de l'Europe ou Recueil historique et politique sur les matières du temps »
Tome 1 à 5, in-8°. L'ouvrage était « imprimé dans sa naissance à Luxembourg 1 ».
L'auteur en était « H. Philippe Jordan de Durand, Ecuyer, historiographe de France'. »
B) De 1707 à 1716 : « Journal historique sur les matières du temps... »
Tome 6 à 25, imprimé à Verdun (BN LC* 59-62). 2° Après ces 25 volumes Jordan se sépara de son éditeur, A. Chevalier de Luxembourg et vint continuer son Journal à Paris sous le le titre de 3 : « Suite de la Clef ou Journal Historique sur les Matières du Temps »
1717-1776 — 120 vol. (BN LC2 62). C'est le libraire Ganeau qui se chargea de l'impression jusqu'à sa fin. Cependant il y eut plusieurs rédacteurs successifs. Ce fut Louis Joseph de la Barre4 «...qui succéda en 1727»»
à Jordan. Plus tard ce fut : « Charles Philippe de Monchaut d'Égly' »
qui prit la suite de 1. Table générale Alphabétique et raisonnée du Journal Historique de Verdun sur « les Matières du Temps depuis 1677 jusques et y compris 1756 », par (J. François DREUX-DURADIER avocat) T. 1, Préface, p. x m . 2. Ibid. 3. HATIN, ibid.,
p. 55.
4. Table générale alphabétique. T. 1, Préface, p. x v m . 5. Ibid. 6. Ibid., p. x x i .
BIBLIOGRAPHIES
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IMPRIMEES
« M. de la Barre, en 17391 ». « Enfin M. (Pierre Nicolas) Bonamy... succéda à son confrère au mois de juin 1749' »,
et c'est : « enfin... Ameilhon 3 . »
Hatin signale encore que « Un avis inséré dans le dernier numéro apprend que la cessation regrettable de ce recueil a été déterminée par l'interdiction qui fut faite des nouvelles politiques4. »
A cette série il faut ajouter deux publications complémentaires. La première est due à Jordan : « En 1713 Jordan sur l'invitation de l'Abbé Bignon qui «lui fournit de bons mémoires...* »
publia un : 3° Supplément de La Clef... 2 volumes (BN LC 2 63). Enfin il y a : 4o « Une Table générale alphabétique et raisonnée du Journal historique de Verdun sur les matières du temps depuis 1697 jusques et y compris 1756 par Dreux-Duradier. 9 volumes In-8 0 «. »
Parallèlement à l'ouvrage de Jordan, le libraire de Luxembourg, A. Chevalier publia à partir de 1717 : 5 ° La Clef du Cabinet
des Princes
de
l'Europe
1717-1773 ( X X V I - G X X X V I I ) (BN LC 2 63A) qui changea de titre et devint en 1773 Le Journal Historique et Littéraire (17731788) et (1789-1794) (BN LC 2 63A). Cette variation du titre paraît être due au changement de direction : « Cependant Chevalier après sa rupture avec Jordan avait continué de son côté la Clef du Cabinet jusqu'au mois d'avril 1773 et au 138e volume. Elle passe alors sous la direction de Feller qui y rédigeait depuis 1769 les articles littéraires et théologiques et prit le titre de Journal Historique et Littéraire'1. » 1. Ibid., p. x x i . 2. Ibid.,
3. 4. 5. 6. 7.
p. XXIII.
HATIN, Bibliographie Ibid., p. 55. Ibid., p. 55. Ibid., p. 55. Ibid., p. 55.
historique et critique de la Presse périodique française, p. 55.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Qu'elle était l'intention de J o r d a n ? Dreux Duradier, d'une manière rétrospective, dans la Table Générale, répond à cette question. Parlant du Journal de Verdun il écrit que : « L'histoire moderne... en fit toujours le principal objet 1 . »
et définissant le but de Jordan : t II se proposa de donner autant qu'il le pourrait des pièces originales sur les Affaires Ecclésiastiques Civiles Politiques et Militaires du temps». »
La Clef du Cabinet, en t a n t que périodique historique et littéraire se devait donc de déterminer ses cadres en s'opposant aux genres voisins. C'est ce qui est tenté, d'abord vis-à-vis du périodique littéraire, particulièrement du Journal des Savanls qui l'avait précédé. Duradier reconnaît l'antériorité de cette dernière publication : « Les lettres eurent à peine en France, un éclat confirmé qu'on vit naître dans le Journal des Savants, le modèle des Journaux Littéraires". »
Ceci dit, La Clef du Cabinet s'en distingue : « Celui des Savants, si estimable et si justement estimé par l'impartialité, le goût, les lumières et les talents de ses auteurs n'a jamais eu que l'Histoire des lettres et celui des Savants pour objet 4 . »
Mais le genre du périodique littéraire n'est pas le seul dont La Clef du Cabinet doive se distinguer. Il y a aussi le Journal Politique et Historique, tel que les Gazettes, qui paraissaient une ou deux fois par semaine. E t c'est ce qui est fait par l'auteur dans l'Avertissement de 1704. Ainsi le Journal de Verdun créait un genre intermédiaire entre le périodique littéraire et le journal politique quotidien. Il avait la même nature que le second, avec la périodicité du premier. Le Journal avait une composition identique dans ses principales parties, qu'il s'agisse de l'édition française de Jordan, ou de celle, luxembourgeoise, de Chevalier. Chaque année est divisée en deux tomes semestriels, composés chacun des journaux mensuels, suivis de : « Une table générale et alphabétique des principales matières contenues dans les six premiers (ou derniers) mois de cet ouvrage. » 1. 2. 3. 4.
Table Ibid., Ibid., Ibid.,
générale..., ibid., p. xxxvn. p. xi. p. xi. p. LXV.
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Chaque numéro mensuel, à son tour, est fait de plusieurs articles correspondant à une délimitation spatiale de l'Europe : Espagne, France, etc... Toutefois, par la suite, une rubrique particulière apparaît : celle des Nouvelles Litléraires. Enfin, le premier numéro de l'année consacre une partie de ses pages à une récapitulation des faits politiques de l'année écoulée. A la fin de chaque numéro figure une « Table des articles ». B U C H H Ä N D L E R S IN L E I P Z I G A L L G E M E I N E S EUROPAISCHES BÜCHER LEXICON M l l e L. N. Malclès mentionne comme bibliographie de la France pour les x v n e et x v m e siècles, l'ouvrage de Theophili Georgi intitulé Buchhändlers in Leipzig Allgemeines Europaisches Bücher Lexicon in Welchem nach Ordnung des Dictionarii die Allermeisten Autores oder Gattungen von Büchern zu finden... Cet ouvrage est composé de quatre tomes et d'un supplément. Ce dernier surtout, qui énumère les ouvrages français, est intéressant. Chaque page est composée de sept colonnes comportant, de gauche à droite, la première, la date de l'ouvrage, la deuxième des indications de noms et de dates, la troisième le titre, la quatrième le lieu d'impression et les suivantes le prix. Cette bibliographie ne nous intéresse surtout que par son Supplément, le tome 5. Elle présente une facilité de dépouillement puisque les dates de parution sont indiquées dans une colonne à part, au début de la page. Toutefois, elle ne nous sera pas utile parce qu'elle n'est pas générale mais sélective doublement, en théorie et en pratique. Ce caractère sélectif des bibliographies rétrospectives de la France, nous le retrouverons chez Desessarts et chez Quérard, mais lié au critère des matières. Ici, il s'agit d'un choix en fonction du critère linguistique d'abord. La bibliographie enregistre les livres écrits en français. De la sorte les ouvrages publiés en France en d'autres langues échappent à la bibliographie. A cette sélection théorique s'ajoute une sélection pratique et géographique. Nous savons que le lieu de constitution de la bibliographie nationale joue un rôle essentiel sous l'Ancien Régime. C'est parce qu'elle était composée à Paris que la Bibliographie Universelle demeurait nationale. Ici, c'est parce que la Bibliographie est composée à l'étranger que son auteur donne plus fréquemment les ouvrages publiés en français à l'étranger, Hollande, Allemagne, Suisse, qu'imprimés en France. De la sorte, ces deux sélections, en réduisant à peu de choses le nombre des ouvrages publiés en France et en français, rendent du même coup la Bibliographie de Georgi pratiquement inutile à notre étude.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
LA FRANCE L I T T É R A I R E D E J. D ' H É B R A I L E T J. D E L A P O R T E 1752-1784 La France Littéraire ou Almanach des Beaux Arts est composée de plusieurs ouvrages successifs qui parurent de 1752 à 1784. Ils sont conservés à la Bibliothèque Nationale sous la cote Q 5121 à 5130. Les deux ouvrages sont les suivants : 1° L'Almanach des Beaux Arts contenant les noms et les ouvrages des gens de lettres, des Savants et des Artistes Célèbres qui vivent actuellement en France. A Paris chez Duchêne 1752 (BN. Q 5121). 2° L'Almanach des Beaux Arts... 1753 (BN. Q 5122). Deux intentions sont à retenir. L'auteur entend faire une bibliographie rétrospective de la France pour une période proche. « ...Mais je n'ai pas voulu m'établir le juge de mes confrères. Comme je leur suppose à tous beaucoup de mérite je leur ai donné une place dans mon Almanach... Si quelqu'un d'eux se plaint qu'on l'a oublié qu'il se fasse connaître, et dans la suite on lui rendra justice... 1 »
Toutefois, les ouvrages licencieux feront exception : « Qu'on ne s'attende pas à trouver les titres de certains ouvrages licencieux ou proscrits par le Gouvernement...»»
Ainsi l'auteur ne vise pas tant à donner la totalité de la production que l'énoncé des ouvrages permis, c'est-à-dire bénéficiant d'un privilège ou d'une permission d'imprimer. Mais surtout il nous indique encore son intention personnelle de faire un ouvrage de plus en plus complet et parfait avec les années : « Cet Almanach sera beaucoup plus complet qu'il ne l'était la première fois qu'il a paru. Tous les ans il se perfectionnera 3 . »
Ce but, l'auteur, nous le verrons, le réalisera. Quoi qu'il en soit, la partie purement bibliographique, négligeable l'année précédente, reste encore embryonnaire. Il s'agit d'une table alphabétique d'auteur, chaque nom étant suivi de l'énumération d'un ou plusieurs titres sans indications complémentaires. 1. Almanach des Beaux Arts 2. Ibid., p. 2. 3. Ibid.,
p. 1.
( B N . Q 5122) f. 2.
BIBLIOGRAPHIES
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3° La France Littéraire ou Almanach des Beaux Arts... Paris, chez Duchêne 1755 (BN. Q. 5123). L'ouvrage se modifie en se perfectionnant. Il change partiellement de titre et prend celui qui lui sera définitif : La France Littéraire. Il change aussi de format : il s'agrandit. Un « Avertissement » nous précise sa composition : « Cet Almanach est tel qu'il parut l'année dernière. On n'a réimprimé que les 48 premières pages. On trouvera dans le Supplément quelques articles nouveaux et des additions aux anciens ; tous ces articles et plusieurs autres seront placés l'année prochaine dans le corps de l'ouvrage 1 . »
La bibliographie est composée de deux parties. L'une est une énumération des auteurs et de leurs œuvres classées par matières. L'autre, une table alphabétique d'auteurs. Une plus grande précision est apportée dans la description. Quoique le format, la date et le lieu d'impression ne soient pas toujours donnés, cependant, leur indication est plus fréquente que dans l'édition précédente. A la suite figure le Supplément annoncé dans le texte ci-dessus. Il a pour titre : « Supplément à la France Littéraire... ». Il est divisé en plusieurs parties : Epitre dédicatoire, Académies, Auteurs. Enfin on indique le nom de l'auteur primitif. « Rien ne peut affaiblir le désir sincère que nous avons montré en nous chargeant de la continuation de cet ouvrage commencé en 1752 par H. Du Port du Tertre à qui ses occupations n'ont pas permis d'y travailler plus longtemps 2 ». 4° La France Littéraire ou Almanach des Beaux Arts contenant les noms et les ouvrages des gens de Lettres, des Savants et des artistes célèbres qui vivent actuellement en France; augmentée du Catalogue des Académies établies tant à Paris que dans les différentes villes du Royaume... Comme on peut le voir, le titre s'allonge avec l'adjonction du Catalogue. Le but reste le même : « C'est de rassembler les noms des Gens de Lettres, des Savants et des artistes actuellement vivants en France, avec la liste des ouvrages qu'ils ont donnés au public3. »
Le format reste le même que celui de l'ouvrage précédent. Ce dernier est plus volumineux sans être entièrement précis en ce qui concerne le lieu et la date d'impression des livres dont il donne les titres.
1. La France Littéraire (BN : Q. 5123) f. Ai J. 2. Jbid., t. p. Ai J. 3. Jbid., Q 5124. Avertissement, p. i.
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DE LA FRANCE
5° La France Littéraire... pour l'année 1758 (BN. Q 5125). Le rédacteur rappelle son but : « On s'est flatté, lorsqu'on a commencé cet ouvrage qu'il pourrait acquérir tous les ans un nouveau degré de perfection... »
Cette fois, en effet, il semble qu'il y ait un autre progrès. Les divisions sont clairement établies. Il est évident que le rédacteur a acquis une certaine connaissance de la Bibliographie, par son expérience propre, ou par les enseignements des autres : « L'ouvrage est divisé en trois parties : la première contient toutes les Académies du Royaume... La seconde est un dictionnaire des auteurs vivants avec la liste de leurs ouvrages connus... Une troisième partie qui contient le Catalogue alphabétique des titres de chaque ouvrage... »*
Cette troisième partie est plus détaillée en ce qui concerne la date de parution. 6° La France Littéraire... 1769 (BN. Q 5126). Le format est plus grand. C'est un in-8°. Il demeurera tel jusqu'à la fin. Il contient : « 1. Les Académies... 2. Les auteurs vivants avec la liste de leurs ouvrages... 3. Les auteurs morts depuis l'année 1751 inclusivement avec la liste de leurs ouvrages. 4. Le Catalogue alphabétique de tous ces auteurs. »
Ainsi le rédacteur s'efforce-t-il en avançant dans le temps de demeurer complet, en ajoutant les auteurs et les titres nouveaux ; en rappelant les auteurs morts depuis le début de l'ouvrage, en adjoignant le titre de leurs œuvres ; en les récapitulant tous. Encore le livre n'est-il que le « Tome I », ne comportant que les « première et deuxième parties ». L'ouvrage « avait été annoncé pour l'année 1767 »2. On peut donc voir qu'un certain laps de temps s'était écoulé depuis l'édition complète précédente de 1758. Entre temps, plusieurs suppléments avaient vu le jour qui ne nous sont pas parvenus. « ...Nous avons refondu l'édition de l'année 1758 avec les trois suppléments qui avaient été donnés en 1760, 1762 et 1764'. »
Ainsi, comme on voit, il est toujours question des mêmes auteurs et des mêmes livres. La liste seule est plus complète. 1. La France Littéraire, 1758 (BN : Q 5125). 2. Ibid, 1769 p. 2 (BN. Q 5126). 3. Ibid., p. 3.
BIBLIOGRAPHIES
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7 ° La France Littéraire... 1769 (BN. Q 5127). Tome second composé de la troisième et quatrième parties du titre, c'est-à-dire des « auteurs morts depuis l'année 1751... » et du «Catalogue alphabétique... » Ainsi les deux tomes constituent l'édition complète. 8° La France Littéraire... 1778 (BN. Q 5128). Tome troisième composé d'un « Supplément à la F r a n c e Littéraire » contenant : « 1. Les changements arrivés dans les Académies 2. Les auteurs morts 3. Le catalogue alphabétique de ces mêmes ouvrages. » L a deuxième partie comprend le supplément des : « Auteurs morts et ceux qui ont donné des ouvrages nouveaux depuis l'année 1758 1 . » C'est donc un complément a u x deux tomes de l'année 1769, une mise à jour des changements, morts et nouveautés bibliographiques, survenus dans l'espace de neuf ans. L a troisième partie est un : « Catalogue alphabétique des ouvrages de tous les auteurs morts et vivants dont les noms se trouvent dans la l r e partie du Supplément. » À ceci s'ajoutent : « Les ouvrages anonymes parmi lesquels il y en a dont on a appris le nom des auteurs pendant l'impression du précédent catalogue. » Ainsi, grâce à ce Supplément
ajouté a u x deux tomes de 1769 :
« Avec ces trois volumes on connaîtra tous les gens de Lettres qui ont vécu en France depuis le commencement du siècle jusqu'à présent et l'on aura le Catalogue de tous les ouvrages qu'ils ont donné au public...« » 9 ° Nouveau Supplément à la France quatrième. Première partie contenant :
Littéraire,
1784,
« 1. Les Académies et les Bibliothèques ; 2. Un calendrier généographique des auteurs ; 3. Un Catalogue des auteurs vivants, morts et anonymes ; 4. Une topographie littéraire. » 1. Ibid., 1778 BN : Q 5128, p. m.
2. Ibid., BN : Q 5128. Avertissement.
Tome
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
C'est donc le premier tome d'un nouveau et second supplément. On remarquera qu'il innove par les « deuxième et quatrième parties ». 10° Nouveau Supplément
à la France Littéraire,
Tome quatrième.
Deuxième partie contenant : « 1. Le catalogue alphabétique des ouvrages des auteurs vivants, morts et anonymes cités dans la première partie de cet ouvrage. 2. La nécrologie des auteurs morts. 3. Des additions... »
Ainsi le tome précédent correspond bien au Catalogue auteur et celui-ci principalement au Catalogue des titres avec une fois encore une adjonction, celle de la « Nécrologie »... Que peut-on penser de cette bibliographie ? Tout d'abord, il faut constater qu'elle n'est pas générale, qu'elle ne vise pas à prendre toutes les catégories de livres, mais qu'elle fait intervenir, au contraire, plusieurs critères de spécialisations. Il y a, en premier lieu, celui de la réputation de l'auteur. Ici, les rédacteurs ont été partagés et ont été conduits à prendre, successivement ou simultanément, des positions contradictoires. Ainsi, l'auteur de l'Almanach de 1752, dans son titre, précise qu'il s'agit des gens « célèbres ». Il s'en défend l'année suivante, lorsqu'il affirme ne pas vouloir s'établir « le juge de mes confrères ». Plus tard, par le titre, il revient à l'idée des gens célèbres tout en prétendant contradictoirement, dans l'ouvrage, à l'universalité. Ainsi cette première sélection n'est-elle pas assurée. Cependant, un doute demeure sur l'élimination de certains auteurs moins connus. Mais la véritable spécialisation qui vise toujours les auteurs concerne le critère de vie et de mort. La bibliographie enregistre les ouvrages des « auteurs actuellement vivants en France avec la liste des ouvrages qu'ils ont donné au public. »
Cette sélection est double. D'abord en ce qui concerne les ouvrages, il s'agit plus du titre que de la description matérielle des livres. De là vient qu'on ne donne pas de précision sur cette dernière pendant plusieurs éditions. Mais cette attitude conduit à écarter les rééditions et les réimpressions des mêmes ouvrages et par suite à éliminer une partie de la production nouvelle. Et surtout, on ne donne que les ouvrages des auteurs vivants. Or, la production générale comporte des livres aussi bien des vivants que des morts. Les rééditions, réimpressions des œuvres des auteurs morts, anciens et modernes sont donc écartées. Il ne faudrait pas croire
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IMPRIMEES
205
que le « Catalogue des auteurs morts » règle cette question. Celui-ci n'est qu'une production tardive, et l'édition de 1769, dix-huit ans après la première parution, a pour but de maintenir la bibliographie au courant en précisant le nom et les oeuvres des auteurs vivants en 1751, morts depuis. Aussi bien l'élimination de ces diverses catégories de rééditions ou de réimpressions transforme-t-elle cette bibliographie de générale en spécialisée, ce qui a pour conséquence d'en réduire l'intérêt pour notre étude. Malgré tout, il faut remarquer que dans les cadres ainsi fixés de sa spécialisation, cette bibliographie est exhaustive. C'est cette intention, plusieurs fois affirmée, qui conduisit les rédacteurs à des éditions successives de plus en plus complètes. Il semble qu'on puisse discerner une évolution en trois phases : A. La période de constitution, comprenant les éditions de 1752 à 1758 correspondant aux ouvrages cotés BN. Q 5121, 5122, 5123, 5124, 5125. Encore est-il possible de discerner trois subdivisions : a) (Q 5121, 5122) éditions de 1752, 1753 b) (Q 5123, 5124) édition de 1755, et celle précédant l'édition de 1758 c) (Q 5125) édition de 1758. On peut, à travers ces trois subdivisions, discerner une progression : a) Dans le titre, qui d'Almanach devient la France Littéraire ou Almanach. b) Dans la composition de la partie bibliographique, qui, dans l'intention d'exhaustivité, augmente progressivement ; dans l'adjonction des tables, puis la précision des titres, lieux et dates d'impression. c) Dans le format, très petit au commencement, croissant dans la deuxième subdivision, puis dans la troisième. On cherche une forme définitive qui ne sera trouvée que plus tardivement. B. La deuxième période, de création complète, définitive. Elle est faite des ouvrages publiés en 1769, Tome 1 et 2, cotes Q 5126, 5127. La bibliographie trouve son titre, sa forme, sa composition propres. C. La troisième période, des enrichissements successifs par les Suppléments, d'abord de 1779 (Q 5128), puis de 1784 (Q 51295130) (celui-ci étant développé par des parties annexes). Si cette bibliographie est spécialisée, ses rééditions successives et les progrès qu'elles présentent nous prouvent un magnifique effort d'exhaustivité. La France Littéraire, enfin, est bien une bibliographie rétrospective, puisqu'elle enregistre les ouvrages des
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DE LA FRANCE
auteurs vivants en 1751 et de cette date à 1784, c'est-à-dire, comme un des rédacteurs l'a affirmé : « pour une période qui va depuis le commencement du siècle jusqu'à présent ». Enfin, c'est bien aussi une bibliographie de la France, puisqu'il s'agit des auteurs « qui vivent actuellement en France ».
LA FRANCE LITTÉRAIRE DE ERSCH 1771-1805 La France Littéraire de J. d'Hébrail et J. de La Porte s'étendait, avec les suppléments, de 1752 à 1784. Elle eut un continuateur étranger en la personne de « Jean Samuel Ersch, professeur de géographie et de statistique à l'Université de Halle ». Cet auteur étranger en publia la suite sous le titre de : « La France Littéraire contenant les auteurs français de 1771 à 1796. »
La bibliographie est composée de cinq tomes. Les trois premiers concernent l'énumération des ouvrages par ordre alphabétique. A la fin du troisième volume, se trouvent adjoints les «Appendices contenant les auteurs anonymes », plus les « Additions et corrections ». A ces trois tomes, comme pour la France Littéraire de du Tertre, viennent s'ajouter deux tomes de suppléments successifs. Le quatrième a pour titre : «Supplément à la France Littéraire de 1771-1796 contenant outre les additions et corrections, les nouveaux articles jusqu'en 1800 » avec Table alphabétique des Matières.
Enfin, le cinquième a le même titre mais pour une période postérieure : « Second Supplément contenant outre les corrections et additions au corps de l'ouvrage et au premier supplément les nouveaux articles jusqu'en 1805... avec une Table générale des Matières. »
L'auteur nous indique son intention : « Mon amour pour votre littérature m'ayant invité à en étudier l'histoire nouvelle dans ses détails, j'ai trouvé que la France Littéraire continuée jusqu'en 1784 n'était ni assez complète, ni assez exacte... C'est ce qui m'a engagé malgré toutes les difficultés qui s'y opposaient à rédiger une nouvelle France Littéraire qui contient tous les auteurs vivants et morts pendant
BIBLIOGRAPHIES
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les années 1771-1796 avec le Catalogue de leurs ouvrages et des traductions qui en ont été faites en plusieurs langues*. »
Enfin, cette bibliographie rétrospective de la France avait bien des buts exhaustifs : « J'ai recueilli tous les auteurs sans aucune distinction". »
Cette bibliographie bien qu'elle soit la suite de la précédente, ne sera pas, comme cette dernière, utile à notre étude. La cause en est la période à laquelle elle s'intéresse. La France Littéraire de J. d'Hébrail donnait les ouvrages du début du X V I I I 6 siècle à 1784, c'est-à-dire pour une période recouverte par notre travail. Il n'en est pas de même de celle de Ersch qui énumère rétrospectivement, c'est-à-dire sans fournir les données annuelles, les ouvrages parus entre 1771 et 1796, débordant ainsi de cinq ans notre période. La moyenne annuelle comme la statistique générale n'auraient ici aucune utilité, surtout en une période où la production ne cesse d'augmenter d'année en année. Ce qui est valable, enfin, pour les trois premiers tomes, l'est à plus forte raison des deux suppléments, qui ne concernent pas du tout notre période. Aussi bien avons-nous dû éliminer cette bibliographie.
L E S SIÈCLES L I T T É R A I R E S D E L A
FRANCE
C'est à N. L . M. Desessarts que l'on doit l'ouvrage intitulé : « Les Siècles Littéraires de la France, ou N o u v e a u Dictionnaire Historique, critique et bibliographique de tous les écrivains français morts et vivants jusqu'à la fin du XVIII® siècle» (1800-1801).
Dans son introduction, l'auteur affirme : « J'ai osé, avec plusieurs Bibliographes, me charger de la tâche pénible et délicate d'apprécier les productions des écrivains français et de dégager les différents jugements qui ont été portés de tout esprit de parti, de faction et de coterie 3 . »
1. La France Littéraire, par J. S. ERSCH, « Aux Littérateurs Français », Hambourg, BG. Hoffmann, 1797-1806, 5 vol., In-8°, dont 2 suppléments. B N : Q 5072-5076, p. 4. 2. Ibid. 3. L . M. DESESSARTS, Les siècles littéraires de la France ou Nouveau dictionnaire historique critique et bibliographique de tous les écrivains français morts et vivants jusqu'à la fin du XVIII' siècle. Paris, l'auteur, an V I I I (1800) an X I (1803), 7 vol., In-8", B N : 8° L N 9 m . Introduction x x x v n .
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DE LA
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D'après son titre, l'ouvrage comprend : 1° Les principaux traits de la vie des auteurs morts avec des jugements sur leurs ouvrages ; 2° Des notices bibliographiques sur les auteurs vivants ; 3° L'indication des différentes éditions qui ont paru de tous les livres français, de l'année où ils ont été publiés et du lieu où ils ont été imprimés. Ainsi, d'après l'intention de l'auteur, on pourrait s'attendre à une bibliographie générale, exhaustive et rétrospective de la France. En réalité cette bibliographie est spécialisée. Ainsi, comme l'a écrit Quérard dans les Préliminaires à son ouvrage où il étudie l'œuvre de ses devanciers : « Dessesarts n'est point encyclopédique ; il se borne à peu près à la littérature. »
et encore : « Les Siècles Littéraires sont d'ailleurs reconnus aujourd'hui pour un ouvrage médiocre sous tous les rapports 1 . »
Aussi bien cette bibliographie, parce qu'elle est spécialisée, ne pouvait-elle être d'une grande utilité pour notre travail. Son caractère rétrospectif accentue encore ce fait. Toute bibliographie rétrospective ne peut directement fournir que la somme totale de ouvrages et la moyenne annuelle. Quand elle intéresse la période qui nous occupe elle peut encore être utile, même spécialisée, comme c'est le cas de la France Littéraire. Il n'en est pas de même ici. Le but de l'auteur est d'établir rétrospectivement les listes de tous les auteurs morts et vivants et celles de leurs œuvres. Aussi commence-t-il son ouvrage avec Abailard. Cette durée d'une dizaine de siècles introduit deux conséquences négatives pour notre recherche. L'auteur est obligé de choisir, donc de mentionner les œuvres connues et par suite, plus spécialement, les œuvres littéraires. De plus, comme il s'étend sur tant de siècles qui débordent extrêmement notre période, la statistique globale et la moyenne annuelle, outre qu'elles fournissent des chiffres très faibles, ne servent plus à rien pour une étude comparée, puisque nos données ne remontent pas au-delà du x v n e siècle. Ainsi, parce qu'elle est spécialisée et trop largement rétrospective, cette bibliographie ne saurait être directement utilisable dans notre travail. 1. Jos. Marie Q U E R A R D , La France Littéraire. Corrections, additions, auteurs, pseudonymes et anonymes dévoilés. — T. 11. Paris, II» édition, 1854-1857, In-8», 708 p. B N : 8° Q 6219 (11). — T. 12. L'éditeur 1859-1864, In-8°, 752 p. B N 8° Q 6219 (12). Préliminaires, p. x v .
BIBLIOGRAPHIES
IMPRIMEES
LA FRANGE L I T T É R A I R E OU DICTIONNAIRE BIBLIOGRAPHIQUE DE
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QUÉRARD
M U e L . N. Malclès mentionne comme bibliographie de la F r a n c e pour le x v m e et le x i x e siècle, l'ouvrage de José Marie Quérard intitulé : « La France Littéraire ou Dictionnaire bibliographique des savants historiens et gens de Lettres de la France ainsi que des littérateurs étrangers qui ont écrit en Français plus particulièrement pendant le xviii® et le x i x e siècle. » Ouvrage dans lequel on a inséré, afin d'en former une bibliographie nationale complète, l'indication : 1° Des réimpressions des ouvrages français de tous les âges ; 2° Des diverses traductions en notre langue de tous les auteurs étrangers anciens et modernes ; 3° Des réimpressions faites en France des ouvrages originaux de ces mêmes auteurs étrangers pendant cette époque. F. Didot, 1827-39, 10 vol. in-8°. T X I - X I I Corrections et additions, auteurs pseudonymes et anonymes... 1854-1864, 2 vol. 708 et 752 p.
Les mêmes reproches adressées par Quérard à Desessarts sont valables pour lui. La France Littéraire est un ouvrage doublement spécialisé. Comme celui de Georgi, il vise à prendre tous les livres en langue française indifféremment du lieu de la publication. Il s'agit, suivant son titre d'un « Dictionnaire bibliographique des Savants historiens et gens de Lettres de la France ainsi que des littérateurs étrangers qui ont écrit en Français. »
Aussi, faute de distinction par une classification particulière, cette bibliographie, se fondant sur un critère linguistique, est-elle plus une bibliographie de langue française qu'une bibliographie géo-politique de la France. Pour cette seule raison, elle devrait être éliminée. Mais La France Littéraire comporte une seconde spécialisation par le critère matière. L e reproche lui en fut adressé par M 1 ^ L . N. Malclès : « L'ouvrage de Quérard est classique ; il ne traite de bibliographie qu'au point de vue de la littérature, de l'histoire littéraire et non sous les rapports industriels et commerciaux 1 . »
1. L. N. Malclès, op. cit., T. 1, p. 120.
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Cette seconde spécialisation est donc une autre raison qui rend cette bibliographie peu utile à notre recherche. Elle fait de La France Littéraire non la bibliographie générale de la France dont on a besoin mais la Bibliographie spécialisée de la littérature de langue française. Enfin, il y a une raison plus décisive encore : son caractère rétrospectif et la période sur laquelle elle s'étend. Étant rétrospective, elle ne permet pas d'atteindre directement les données annuelles ; relevant les ouvrages du x v m e et du xix® siècles, c'est-à-dire pour une période débordant largement la nôtre, sa statistique générale et sa moyenne annuelle ne permettraient aucune comparaison valable.
LIVRE
II
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE SOUS LA MONARCHIE AU XVIIIe SIÈCLE
INTRODUCTION Les chapitres précédents concernaient ou l'histoire de l'organisation administrative de la Librairie sous l'Ancien Régime, ou les bibliographies manuscrites et imprimées. Comme nous avons eu l'occasion de l'écrire dans l'introduction à cet ouvrage, ils doivent permettre l'analyse statistique qui va suivre. Celle-ci dépend directement de ces sources officielles ou privées. Les séries qui seront examinées doivent être regroupées sous les quatre points de vue déjà connus : permissions ; police des livres ; Dépôt Légal ; vente. Chacun d'eux donnera la matière d'un chapitre où les séries seront envisagées séparément d'abord, pour être comparées ensuite. Après quoi, une étude comparée des quatre perspectives permettra d'envisager la production bibliographique française d'une manière générale. Nous pourrons prendre connaissance, en ce qui concerne les permissions, des permis d'imprimer, des privilèges, des permissions tacites. Dans ces deux derniers cas, chaque type de permission sera suivi à travers les différents stades du circuit, statistiquement accessibles, de la demande à l'enregistrement à la Chambre Syndicale. Après quoi, pour chaque permission, l'analyse comparée permettra d'étudier la censure, par la détermination des statistiques des demandes refusées ; puis le fonctionnement de l'administration, par l'examen des statistiques des autorisations non enregistrées, soit au Bureau de la Librairie, soit à la Chambre Syndicale ; enfin, en ce qui concerne particulièrement les permissions du sceau, le contenu en livres du privilège. L'étude comparée des séries des diverses permissions offrira plusieurs résultats. Dans une première partie, les séries des privilèges et des permissions tacites seront confrontées. Nous pourrons établir leur importance relative et la différence de leur évolution. De plus, nous découvrirons
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LA STATISTIQUE
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DE LA FRANCE
la politique différente de l'administration en ce qui concerne la censure, selon qu'il s'agit des privilèges ou des permissions tacites et nous confirmerons ces variations historiques précédemment mises à jour. Dans une seconde partie, les séries seront ajoutées l'une à l'autre dans tous les cas possibles et fourniront ainsi la statistique générale des permissions d'imprimer et des demandes refusées. Les séries de la police des livres, moins riches, renseigneront sur les livres nouveaux visités à Paris, les ouvrages arrêtés, suspendus, rendus, non rendus, prohibés, contrefaits, mis au pilon, les nouveautés de l'étranger et des provinces, les livres entrés par la Chambre. On pourra, de plus, établir la statistique des livres interdits après l'impression. Les séries du Dépôt Légal indiqueront le nombre des livres déposés chaque année soit à la Chambre Syndicale, soit à la Bibliothèque du Roi, au Cabinet du Roi, pour le Chancelier, ainsi que les statistiques des livres réclamés et non déposés. Elles permettront d'établir un premier pourcentage des ouvrages non déposés. Les quelques bibliographies imprimées fourniront la statistique des livres mis en vente. L'étude comparée, enfin, des quatre groupes de statistiques ne sera pas moins utile. Nous saurons, grâce à elle, quelle fut l'importance des permissions, des livres interdits, avant, après l'impression et en totalité. Nous apprendrons quelle fut l'efficacité du Dépôt Légal, et quel est l'intérêt des statistiques obtenues à partir des bibliographies imprimées et privées. Ces diverses recherches successives apporteront donc des précisions d'ordre historique et sociologique. Historique d'abord. L'étude descriptive des séries révélera quels furent le volume et l'évolution des diverses catégories d'ouvrages soumis à la censure avant ou après l'impression et au Dépôt Légal. E t ce ne sera pas un des moindres résultats, puisqu'elle éclaircira, d'une manière décisive, la connaissance de la production intellectuelle française des x v n e et x v m e siècles, qui était jusque-là restée dans l'ombre et dont les appréciations, fondées sur les textes, étaient confuses et fort approximatives. Cet apport sera historique encore par l'étude comparée des séries d'un même groupe, permissions, police des livres, etc., qui précisera le fonctionnement des différents circuits découverts lors de l'examen précédent des bibliographies. Ainsi l'organisation administrative de la censure et du Dépôt Légal sera-t-elle connue dans le détail. Toutes ces études ne seront pourtant pas uniquement historiques. Deux d'entre elles seront en effet sociologiques, dans la mesure où elles concerneront la recherche et la découverte de régularités dans l'évolution de la production des livres. E n premier lieu, l'examen comparé des statistiques des autorisations d'imprimer, demandées,
INTRODUCTION
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obtenues, refusées, puis des livres imprimés interdits, permettra d'établir l'évolution cyclique de la politique royale en matière de censure des livres, tantôt absolutiste et tantôt libérale, ceci pour le x v m e siècle. Ensuite, nous pourrons apporter une autre contribution à l'étude de la dynamique historique, par la détermination des cycles interdécennaux ou des mouvements de longue période, inspirant l'évolution de la pensée imprimée française. Avant de commencer cette étude, plusieurs problèmes méthodologiques doivent être examinés, qui concernent successivement l'élaboration des séries, l'étude descriptive, l'étude comparée. La composition des séries comportait, en tout premier lieu, le choix de l'unité. Celle-ci dépend de trois éléments : la nature de la production ; la nature des sources ; les autres statistiques déjà effectuées. S'il faut connaître la structure de la matière étudiée, celle-ci est insuffisante puisque le choix dépend des sources, et que, d'autre part, on a toujours intérêt à s'ajuster sur les statistiques déjà constituées de façon à maintenir un certain cadre et à faciliter les études comparées. L a nature de la production nous ramène au problème de l'imprimé, et celui-ci à la structure de la réalité socio-culturelle telle que l'avait envisagée M. Sorokin. L a pensée française n'est pas saisie par une description phénoménologique mais à travers son expression, dans le cadre particulier du langage inscrit, directement communicable et imprimé. On peut reconnaître plusieurs unités possibles qui se succèdent, de la réalité spirituelle à la réalité matérielle de l'ouvrage. On peut d'abord concevoir une unité intellectuelle : le titre de l'ouvrage, le sujet traité. Une telle unité présente un inconvénient : elle ne tient pas compte du développement intellectuel lequel correspond naturellement à une ou plusieurs unités matérielles. Ainsi, le souci de précision renvoie de la création intellectuelle à la production matérielle, le volume. L'analyse de celui-ci montre son imperfection. Il confond la feuille volante et le livre de plusieurs centaines de pages. Sa critique fait découvrir une nouvelle unité matérielle : la page, laquelle à son tour se trouve insuffisante puisqu'elle ne tient pas compte du nombre de mots et en définitive du nombre de caractères. L'unité du caractère est déjà une approximation plus sûre. Plus que les autres, elle tient compte du problème du développement. L a meilleure preuve en est qu'elle sert à déterminer le prix de revient de la composition par un imprimeur. Enfin, il reste le tirage, et l'unité de l'exemplaire qui déplace l'appréciation du plan de la production à celui de la consommation. Quelle unité devrait-on prendre ? C'est ici qu'il faut réintroduire la pensée de Simiand. Il y a d'abord les données désirables. Il était souhaitable d'atteindre non seulement les unités intellectuelles mais aussi les plus matérielles, celles du volume, de la page, du 8
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mot, du caractère, du tirage. Mais il y a aussi les seules données accessibles, c'est-à-dire la réalité de nos sources. C'est, hélas ! l'unité la moins précise, celle du titre, qu'il a fallu principalement employer. La plupart des autres, dans le plus grand nombre des cas, n'ont pu être atteintes. Les tirages sont accessibles une seule fois mais ils n'ont pu être exploités pratiquement. Les unités du caractère et de la page ont dû être écartées. Il aurait fallu faire un dépouillement extrêmement long et d'abord atteindre tous les livres présentés, ce qui ne pouvait se faire. L'unité du volume a quelquefois servi, quand elle était employée d'une manière régulière. C'est notamment le cas des livres déposés à la Bibliothèque du Roi. Ailleurs, et le plus souvent, c'est l'unité du titre qui seule était accessible, et c'est elle qui a servi à l'élaboration du plus grand nombre des séries, principalement pour la police des livres, le Dépôt Légal et les bibliographies privées. Toutefois, dans les dernières décades, la production des périodiques augmente et comme il n'existe pas, très fréquemment, de table des matières, et que dans la partie courante les indications sont souvent absentes, on a dû compter d'après l'unité d'annonce ou d'enregistrement, de sorte que les numéros d'un même périodique comptent soit pour une unité soit pour plusieurs, selon la manière dont l'annonce est faite. En ce qui concerne les permissions, le degré d'imprécision n'est pas moins grand. En effet, un privilège était donné pour un ou plusieurs livres, dont les titres étaient ou non précisés. De la sorte, on a dû compter les séries de la censure avant l'impression en se fondant sur l'unité de permission, quitte à tenter une approximation du rapport livres de privilèges-privilèges. D'une manière générale, nos unités ne sont pas absolument valables. L'unité de titre l'a emporté, mais elle recouvre une production imprécise. D'autre part, l'unité de permission et le mélange des périodiques ne sont pas moins confus. Cette insuffisance ne saurait surprendre le statisticien. Il existe toujours des différences entre ce qui est souhaitable et ce qu'on peut atteindre. Tout le problème consiste à savoir si, avec les unités choisies, on peut obtenir une approche valable de la réalité étudiée. La prépondérance de l'unité de titre donne à cette recherche un cadre pratiquement continu, qui permet de répondre par l'affirmative, en tenant compte, bien sûr, de ses imprécisions. De plus, le fait qu'il est possible d'apprécier la production à partir des permissions, des volumes, ou des titres pour plusieurs séries, permettra, dans une certaine mesure, d'apprécier les variations possibles introduites par l'unité du titre. Enfin cette prépondérance du titre ne saurait surprendre. C'est elle qui est à la base des statistiques officielles modernes, comme des
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travaux de M. Zoltowski. E n effet, ce qu'on cherche, en premier lieu, dans un livre, ce qui est le plus important, ce n'est pas tant le développement que le sujet traité. Le dépouillement, ensuite, n'a pas été sans présenter des difficultés qui tiennent à l'esprit dans lequel l'enregistrement et l'annonce ont été constitués. On peut distinguer, principalement pour les registres, une évolution en trois phases. A partir du début des premiers registres, c'est-à-dire du premier quart du x v n e siècle jusqu'au troisième quart, les inscriptions sont mal faites. Le souci d'un travail soigné n'existe pas, ou peu. La confusion règne. Ceci se manifeste entre autres par deux indices : les enregistrements sont imprécis ; ils ne se suivent pas toujours chronologiquement. On revient souvent en arrière et on incorpore alors des relevés appartenant à une époque plus tardive. Ces insuffisances ont eu pour conséquence de compliquer et, quelquefois, de rendre impossibles ou incomplets certains dépouillements annuels. Toutefois, malgré cet inconvénient, c'est là un avantage par rapport à la période antérieure du x v i e siècle et du début du x v n e pour laquelle nous n'avons pas d'indication. A partir du dernier quart du x v n e siècle et jusqu'au milieu du x v m e , le souci d'enregistrement précis s'établit progressivement. Enfin, dans les dernières décades de l'Ancien Régime on voit apparaître les premiers formulaires imprimés, qui se substituent aux anciennes classifications manuscrites en les systématisant et les multipliant. Le dépouillement dans ces deux dernières périodes devait s'en trouver facilité. Les séries obtenues ont été présentées sous forme de planches placées à l'intérieur des chapitres qu'elles concernent. L'étude statistique a été effectuée sur le plan quantitatif et sur celui des fluctuations. Il était utile de connaître la production globale de toute une période ou de toute une série et, également, de déterminer la moyenne arithmétique annuelle. L'étude du mouvement général des séries nous a conduit à plusieurs questions successives : qu'est-ce qu'un cycle ? Quelles en sont les catégories ? Leurs dénominations ? Les diverses méthodes pour les déterminer ? On considère une série chronologique, soit encore les variations historiques continues d'un même phénomène, par exemple le nombre de privilèges délivrés pendant un siècle ou davantage, chaque année, par les pouvoirs publics. Deux constatations opposées peuvent être faites : ou les données successives, quotidiennes, hebdomadaires, mensuelles, annuelles, décennales, etc., sont identiques constamment, ou elles varient. Le premier cas n'est pas absolument théorique. Il arrive par exemple, qu'une production ait des limites fixées réglementairement et que celles-ci soient toujours atteintes. Toutefois l'étude, ici, cesse très vite d'être intéressante, le mouvement, les fluctuations n'existent pas.
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Dans le deuxième cas, il est encore deux possibilités : les variations sont toujours différentes, et on dit alors qu'elles sont accidentelles, ou, au contraire, bien qu'elles puissent exister, l'analyse fait constater certaines ressemblances, certaines analogies dans l'évolution des chiffres : par exemple, des mouvements de hausse et de baisse tendent à se reproduire à intervalles de temps plus ou moins réguliers. C'est, généralement, sur ces apparentes régularités que porte l'étude du mouvement d'une série chronologique. Dans ce cas, les écueils que redoute l'observateur sont des variations soit absolument identiques, soit absolument différentes. Sa recherche consiste donc à mettre à jour l'identité dans la différence. Mais pour qu'il y ait identité, il faut qu'il y ait répétition. Le seul fait de constater une hausse suivie d'une baisse ne peut rendre certain de l'existence d'un cycle mais seulement permettre une présomption une hypothèse, très relative. C'est une des raisons pourquoi, en ce qui concerne la longue durée, la prudence scientifique fait souvent penser à des mouvements plutôt qu'à des cycles. En effet, comme les données statistiques ne portent, le plus souvent, que sur un siècle ou deux, l'étude des mouvements séculaires, dans une seule série, ne possède pas assez de recul pour constater historiquement la répétition du cycle conjecturé. D'autre part, l'assurance de l'existence du cycle peut et doit être obtenue par la découverte de sa répétition, non seulement dans une série, mais aussi dans plusieurs autres qui concernent le même phénomène. Ainsi, pour donner un exemple, notre conviction qu'il existe un cycle de vingt-deux ans dans l'évolution de la production des livres en France aux x v n e et x v m e siècles fut-elle établie par l'étude des productions des privilèges, des permissions tacites, du Dépôt Légal, des Bibliographies privées, lesquelles intéressent toutes la production intellectuelle de la France pour cette période. L'interrogation sur la constatation de la répétition renvoie à une autre, sur sa nature. La répétition suppose, comme on l'a vu déjà, que les données du phénomène varient, et ensuite qu'elles repassent, au fur et à mesure que le temps s'écoule, par des points relativement semblables. Le mouvement sera plus ou moins circulaire. Il s'agira d'un cycle, c'est-à-dire de la répétition à intervalles donnés de variations identiques d'un phénomène observé. Quant au degré d'identité, la manière courante de voir veut qu'il dépende de la nature du phénomène, de son degré de simplicité ou de complexité. Plus la simplicité est grande, quand le phénomène relève des sciences exactes, plus la répétition des variations devra être rigoureusement semblable. Au contraire, plus le phénomène est complexe, quand il relève des sciences humaines par exemple, plus on admet de relâchement dans la répétition.
INTRODUCTION
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Cette répétition par ailleurs est rarement perçue comme une superposition, dans la plupart des études d'histoire statistique. Cela tient à la représentation graphique, arithmétique ou logarithmique, peu importe ici, qui est généralement employée. L'utilisation des abscisses pour marquer le temps oblige à un décalage spatial qui interdit la superposition. Cela tient, en derniers recours, à la représentation sur deux dimensions de l'évolution du phénomène. La représentation sculptée, à trois dimensions, permet d'éviter en partie cet inconvénient. C'est ce que fit, pour citer un exemple, M. Sauvy dans son étude de prévision démographique pour la France dans le 3 e quart du siècle. Toutefois, la représentation sinusoïdale a un mérite : elle conduit à décomposer le cycle en deux mouvements successifs et de sens contraire : l'un de hausse ; l'autre de baisse. La détermination de ces deux mouvements obéit généralement à une règle courante : on le fait partir de la première graduation temporelle suivant une pointe jusqu'à celle, y comprise, de la pointe suivante. Pour la hausse, s'il s'agit d'années, on part de la première année suivant la baisse maximale précédente et on compte jusqu'au sommet de la hausse. Inversement, pour la baisse de la première année, suivant le sommet jusqu'à l'année de la baisse maximale. Ces deux mouvements qui composent théoriquement le cycle n'ont pas nécessairement une durée identique. Ainsi les phases A et B interdécennales de Simiand n'ont pas la même durée. E t cette différence n'est pas alors considérée comme une raison suffisante pour infirmer l'existence du cycle. D'autre part, la considération, non plus d'un cycle en lui-même, mais d'une ou de plusieurs courbes, permet, très souvent, de conjecturer l'existence simultanée de plusieurs sortes de cycles ou de mouvements. On constate d'abord la suite continue des lignes plus ou moins brisées qui marquent l'évolution de la série d'une graduation temporelle à une autre, d'une semaine ou d'une année à l'autre. Mais l'habitude de l'analyse graphique qui affine l'œil fait percevoir, comme sous le linéament, des flux et des reflux du phénomène, l'espace de temps écoulé entre deux sommets ou deux dépressions étant plus ou moins grand, intérieur ou égal à la décade, de plusieurs décades, d'un siècle, de plusieurs siècles... On est donc en présence de diverses catégories de cycles. Tous les ouvrages de statistique économique en parlent. Il s'agit ou du mouvement de longue durée dit de Kondratieff ou du cycle intradécennal dit de Juglar, ou du mouvement saisonnier. Ces dénominations, pour être communes, ne sont pas les seules. Simiand avait utilisé une autre terminologie plus systématique mais aussi, peut-être, plus claire. L'auteur du Salaire de l'Évolution Sociale et la Monnaie considérait que les mouvements, ou les cycles, pouvaient être intérieurs à l'année, interannuels ou intradécennaux,
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interdécennaux et semi-séculaires, séculaires. Il ne semble pas en effet qu'il faille réserver l'emploi du terme cycle pour appeler le mouvement intradécennal composé des phases de hausse et de baisse. En effet le cycle, sous condition évidemment, que sa répétition ait été dûment constatée, peut exister dans les variations annuelles comme dans les fluctuations de la longue période. Nous ne nous occuperons pas dans cette étude du mouvement du cycle saisonnier, puisque nous ne possédons pas les données journalières, hebdomadaires ni mensuelles de la production des livres, mais seulement les données annuelles. De même il nous a paru plus utile, dans une matière neuve, de considérer plutôt le mouvement général, ce qui nous a conduit à constater l'existence, outre les différents mouvements propres à chaque série, de cycles polydécennaux de 20 à 22 ans et à vérifier les cycles semi-circulaires et séculaires, composés des phases A et B de Simiand. Cette étude du mouvement de la production, cette recherche des cycles, nous l'avons conduite soit à partir de la considération des séries de chiffres, soit à partir de leur représentation graphique. Le second examen est le plus souvent courant. On ne saurait cependant trop insister sur l'intérêt, l'utilité de l'analyse des colonnes de chiffres. Sans doute, l'examen du diagramme donne-t-il une vue d'ensemble, une perspective plus difficilement accessible par les seuls chiffres. Toutefois, lorsqu'il s'agit du détail, et de variations d'une graduation temporelle à l'autre, d'une année à l'autre par exemple, notamment pour la recherche comparée des sommets, l'analyse des chiffres devient presque indispensable. Quant aux représentations graphiques, les deux échelles courantes sont arithmétiques et semi-logarithmiques. On sait que l'une considère les écarts des données successives, en soi et d'une manière absolue, quand la seconde les envisage d'une manière relative, par rapport à la masse des chiffres. Les deux échelles ont été employées en cours de recherches. Toutefois, pour la commodité de la représentation, nous n'avons retenu que l'échelle logarithmique. Celle-ci, en effet, a le mérite de permettre une représentation de variations considérables sur une surface réduite. C'est ce qu'indiquait Dugé de Bernonville, dans un exemple rapporté par M. Piatier, à propos de la statistique des chômeurs : «... quelques centaines en 1930 et 400.000 en France en 1936. Si on avait commencé en 1930 un graphique avec 1 mm d'échelle pour 100 chômeurs — ce qui était pertinent à l'époque — le graphique aurait eu en 1936 4 m de haut... 1 »
1. A. P I A T I E R , Statistique et Observation économique, P . U . F . Col. Thérais, T. I, Paris, 2 vol. In-16°, 972 p. BN : 16°R 6633 (23, I, II), p. 303.
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Nous avons, quant à nous, rencontré des difficultés du même genre, quoique moindres, pour les permissions tacites qui passent de quelques unités à plusieurs centaines ou, encore et beaucoup plus, de la production déposée du x v n e au x x e siècle, qui passe de quelques dizaines à beaucoup plus de dix mille. D'autre part, le choix même de l'échelle semi-logarithmique pose des problèmes. On sait, d'abord, que celle-ci utilise l'échelle logarithmique en ordonnées, tandis que les graduations temporelles indiquées en abscisses se font sur une échelle arithmétique. Or, le nombre de modules répétés dans un cas sur une même longueur d'ordonnée, et le choix de l'espacement entre deux graduations annuelles en abscisse jouent un rôle important. En effet, la représentation graphique est, en soi, déjà une conceptualisation du mouvement du phénomène étudié. La réalité s'est déroulée sur X mois, ou années. La seule spatialisation du mouvement est déjà une transformation. Sa réduction à une surface réduite de façon à ce que l'œil puisse, dans son champ de vision, l'embrasser de préférence en entier, lui fait subir un racourcissement extraordinaire. A son tour les proportions de cette réduction sur la feuille (qui dépendent pour beaucoup aussi de la durée de la série) jouent leur rôle. Si l'on veut connaître plus rapidement les mouvements, notamment ceux de la longue durée, si l'on veut convaincre plus sûrement, on a intérêt à raccourcir le plus possible l'espacement des temps en abscisse et à choisir des modules les plus larges qui soient, en tenant compte bien sûr de la hauteur des chiffres. Ainsi, on rend la courbe « nerveuse », en exagérant son amplitude et en accélérant ses variations. On aboutit là, sans faire intervenir aucun procédé de calcul, à un « lissage » de la courbe qui a le mérite de faire ressortir le mouvement interdécennal sans dissimuler les cycles intradécennaux. C'est ce que nous avons généralement tenté, par l'emploi des feuilles semi-logarithmiques à deux modules et demi. La considération des chiffres, l'examen des courbes, supposaient encore une méthode, une procédure mentale. Deux solutions nous apparurent : ou l'analyse viserait purement et simplement à vérifier l'existence des différents cycles et mouvements déjà mis à jour, ou au contraire, sans écarter cette démarche, mais en la faisant intervenir après coup, nous examinerions les variations de nos courbes, sans a priori, en essayant de dégager les mouvements qui pourraient s'y trouver. Nous avons finalement choisi la seconde et pour plusieurs raisons. Il nous était évident que, dans le cas où notre étude aurait porté sur une matière spécifiquement économique déjà examinée, comme les salaires, les prix, etc., nous aurions eu intérêt à choisir la première démarche. La nature même des constatations nous y aurait invité, et, de plus, il convient d'abord, en ces cas là, de vérifier les précédentes découvertes.
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Cela n'était pas ici. Sans doute les livres sont-ils une production, une marchandise, et la statistique de leur production intéresse-t-elle la sociologie et l'histoire économique. Mais elle relève aussi de la sociologie et de l'histoire de la culture. Surtout, cette statistique n'a, jusqu'ici, à notre connaissance, jamais fait l'objet d'une étude particulière en ce qui concerne les x v n e et x v n i e siècles. Même les travaux publiés de M. Zoltowski, ne concernent, pour les x i x e et x x e siècles, que la statistique sérielle de l'évolution comparée des livres publiés dans diverses disciplines, géographie, histoire, art, théâtre, etc., et non la production générale. Enfin, la matière, une fois encore, nous obligeait à la seconde démarche. L'étude de la censure, pour donner un exemple, nous conduisait à nous occuper des variations diverses que nous pouvions constater dans l'évolution de la production des livres interdits, sans nous soucier, d'abord, de vérifier des mouvements ailleurs connus. Une telle attitude nous a été en fin de compte bénéfique, puisqu'elle nous a permis de découvrir des mouvements et des cycles, comme ceux de vingt à vingt-deux ans, dont nous avons déjà parlé. Cependant nous n'en avons pas, pour autant, éliminé la vérification des mouvements déjà mis à jour. De la sorte, nous avons pu notamment confirmer, lors de l'étude sommaire de la statistique des livres déposés du x v n e au x x e siècle, l'existence des phases A et B autrefois déterminées par Simiand. Nous nous sommes ainsi confirmé dans notre conviction que la recherche scientifique ne saurait se faire sans indépendance d'esprit, mais qu'elle ne saurait avancer si elle ne s'établissait dans, et par rapport, à la tradition scientifique. Il reste à expliquer comment nous avons dégagé les mouvements ou les cycles. Ici deux méthodes coexistent. Certaines statistiques vantent les mérites de l'une, à l'exclusion de l'autre. D'autres les pensent complémentaires. L'une est appelée empirique ou synthétique ; l'autre mathématique et analytique. La première consiste pratiquement et essentiellement en une observation des séries chronologiques. La dissociation des différents cycles saisonniers, intradécennaux, semi-séculaires, etc. se fait par une sélection mentale et, le plus souvent, sans intervention de calculs. Les limites des mouvements ou leur amplitude sont déterminés soit sur le diagramme soit sur la série de chiffres. Cette méthode est généralement méprisée par les mathématiciens et par de nombreux statisticiens. Ils veulent bien lui reconnaître une fonction, celle de préparer une deuxième étape de la recherche, qui est aussi la deuxième méthode. Ils pensent de la première, comme l'a fait M. Piatier vis-à-vis des positions de Lescure, qu'elle : « condamne pratiquement toute démarche scientifique et au nom d'un
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positivisme de gros bon sens, nie toutes les schématisations et abstractions... qui sont la condition même de l'approche du réel s 1 .
La seconde vise, par l'analyse mathématique, à décomposer, à séparer ce qui est synthétiquement uni, à dissocier cycles saisonniers, intradécennaux, trend. Plusieurs modes de calculs le permettent. Il y a d'abord les ajustements graphiques sur la courbe elle-même. L'un d'eux, par exemple, pour déterminer le mouvement de longue durée, consiste à joindre les sommets des hausses et des baisses. On crée entre deux courbes « enveloppes », un couloir par où passe le trend. Un autre ajustement plus précis est celui dit des Points Moyens ou Mid Points. Il consiste à remplacer le boyau précédent par une ligne continue. On conserve les deux courbes « enveloppes » puis on joint les maxima et les minima à la courbe contraire par une verticale. On mesure ensuite l'écart que l'on divise ensuite par deux. Le milieu est le point moyen. La suite des points moyens détermine la courbe recherchée. A ces approximations, on peut ajouter des méthodes moins graphiques, comme les ajustements par les moyennes mobiles qui « lissent » les courbes, non sans inconvénients d'ailleurs, ou les ajustements analytiques par la méthode des moindres carrés, qui permet le calcul des paramètres. Ces deux méthodes n'ont pas toujours bénéficié de la même considération. La seconde fut longtemps en faveur et peu discutée. Les procédés de calcul, pensait-on, permettaient bien de dissocier les mouvements d'étendue historique différente. On sous-entendait alors que les diverses catégories de cycles, bien que composant, avec les variations accidentelles, la réalité du mouvement d'une série, étaient en elles-mêmes indépendantes et par suite qu'on pouvait les mettre à jour. Toutefois, cette théorie et cette méthode, depuis deux décades principalement, depuis Slotsky autrefois, jusqu'à M. Guitton aujourd'hui, ont été soumises à de très vives critiques. On a renversé les perspectives. Au lieu de penser que la réalité des variations était faite d'une addition des cycles différents, on a formulé une théorie selon laquelle ils étaient indispensables, inséparables les uns des autres. Par suite, on a mis en doute, plus amplement que la critique ne l'avait fait jusqu'alors, les procédés de calcul. Ceux-ci, a-t-on pensé, n'atteignent pas la réalité du cycle mais constituent au contraire un mouvement nouveau qui ne correspond pas à la réalité cherchée. Loin d'éclaircir, ils compliqueraient, égareraient la recherche. De la sorte, la méthode analytique, que l'on considérait supérieure par les différents calculs qu'elle utilisait, s'est vue minée dans ses fondements et à son tour être considérée comme inférieure sous le chef d'accusation d'imagination 1. Ibid.,
p. 313.
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et d'artificialité. Aussi bien, sans méconnaître l'intérêt, l'utilité de la seconde méthode, s'en est-on méfié. Du même coup, la première a retrouvé un regain de faveur dans la dernière décade. Comme l'a dit Lescure : « Le staticien nous doit des photographies, ne lui demandons pas des silhouettes ou des pastiches. L'être v i v a n t est préférable au mannequin. »
Quelle méthode devions-nous suivre ? Il nous a semblé d'abord, selon le bon sens, qu'il ne fallait se priver d'aucune. Il convenait de toute manière de procéder à une analyse empirique de nos courbes. Mais il ne fallait pas non plus refuser l'emploi des procédés de calcul quand cela s'avérait indispensable ou au moins utile. Mais alors il faudrait les poser en doute, chercher leurs possibilités et leurs imperfections, et surtout n'employer que ceux qui convenaient à l'étude des phénomènes étudiés. Enfin il ne fallait pas trop en espérer et fonder sur eux une foi naïve. L'étude quantitative, comme celle des mouvements, a d'abord concerné chaque série de données élémentaires. Celle-ci, à son tour, renvoyait à une étude comparée. L'idée de cette dernière devait naître soit progressivement et empiriquement au fur et à mesure que l'étude descriptive des séries avait lieu, soit systématiquement, après l'achèvement de cette dernière. En effet, l'examen de chaque statistique conduisait assez fréquemment à envisager la possibilité d'un rapport entre deux ou plusieurs séries, puis à poser un problème, qui se transformait presque aussitôt en une ou plusieurs hypothèses, appelant une vérification, une confrontation. A son tour, lorsque l'étude des séries d'un même groupe était achevée, l'idée de l'étude comparée, qui avait fait son chemin, conduisait à ne plus s'en tenir à quelques cas particuliers mais à poser systématiquement la question du rapport des séries et à rechercher les problèmes historiques et sociologiques qui pouvaient être envisagés. C'est au niveau de chaque catégorie de séries, et plus tard, au niveau général de toutes les séries, et donc de la production imprimée, que les problèmes furent déterminés. Il est évident que les séries qui n'avaient aucun rapport possible devaient être éliminées. A quoi bon comparer par exemple la statistique des ballots déposés à la douane pour être visités à la Chambre avec la statistique des permis d'imprimer ? Les comparaisons inutiles ou absurdes furent immédiatement écartées. L a relation qui existait entre les autres concernait notamment une ressemblance ou une différence, à découvrir ou à vérifier. Ainsi, pour donner un exemple, le problème des cycles et de la tendance de la longue période, conduisait à comparer les séries des permissions, du Dépôt Légal, des bibliographies privées, quand cela était possible, afin de dégager ces mouvements. Cela supposait donc que
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ces séries comportaient en elles-mêmes un fait identique, objet de l'étude. Inversement, la question des variations possibles du fonctionnement du Dépôt Légal chez les destinataires obligeait à comparer les séries du dépôt sur le plan de leur différence, de leur particularisme. Cette comparaison fondée sur l'analogie et la contradiction s'est faite sur les plans quantitatifs et des fluctuations périodiques, sur l'un, sur l'autre, ou sur les deux. Le même problème du fonctionnement du Dépôt suppose les deux comparaisons. La production totale déposée pour une même période montrera le dépôt le plus complet quand l'étude des fluctuations fera ressortir les irrégularités. Ainsi, pour connaître la production générale des permissions d'imprimer, ajoute-t-on les permissions tacites aux privilèges, puis compare-t-on la nouvelle série aux deux précédentes. Inversement, on soustrait les autorisations des demandes pour obtenir la statistique des livres censurés et prohibés. Enfin, pour déceler le mouvement propre d'une série, qui possède un mouvement en commun avec une autre série, divise-t-on les données annuelles de la première par la seconde pour éliminer le mouvement inutile dans tous les cas où cela s'avère nécessaire. L'étude de chaque série, et l'étude comparée sur les deux plans quantitatifs et des fluctuations, constituaient l'étude statistique. Toutefois les résultats obtenus, pour être importants, n'en avaient pas moins besoin d'une confirmation historique. Comme le M. Professeur Labrousse nous l'avait indiqué, nous avons toujours tenté « de sortir de la statistique pour assurer les résultats de la statistique ». L'étude statistique fait découvrir une tendance. Le fait historique assure que celle-ci n'est pas le produit technique de la statistique provenant d'une source ou d'une élaboration insuffisante. L'événement vérifie donc ce qui a été découvert statistiquement. On en donnera un exemple. Les données du Dépôt Légal pour la Bibliothèque du Roi haussent d'une manière brutale en 1685 en faisant plus que doubler. Le fait statistique est bien constaté, mais il ne se suffît pas à lui-même. Il reste une interrogation, Pourquoi cette hausse brutale ? E t c'est alors que les faits historiques, la connaissance des règlements et des décisions de l'autorité, interviennent pour nous montrer que la hausse provient du Dépôt supplémentaire des libraires qui sont obligés de fournir les ouvrages qu'ils avaient omis de déposer depuis plusieurs années. Toutefois pour sortir de la statistique, il faut en avoir les moyens. Quand l'étude porte sur une série historiquement connue, les sources ne manquent pas. C'est le cas, par exemple, pour l'étude de l'évolution de la politique de la censure du Pouvoir Royal. Alors l'histoire, les événements prouvent que cette politique ne fut qu'une application de la politique générale de la royauté. Mais ce
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n'est pas toujours le cas. Il arrive très fréquemment, hélas ! que les documents écrits concernant les diverses séries manquent, soit qu'ils aient disparu, soit simplement que la matière n'ait donné lieu à aucun commentaire écrit. Dans ces cas nous avons dû faire contre mauvaise fortune bon cœur et nous passer de la vérification historique. Enfin, ces diverses études, comme nous l'avons dit déjà, eurent comme but soit d'établir le fonctionnement des circuits, soit d'étudier l'évolution de la censure avant et après l'impression, soit encore et surtout de déterminer l'importance et l'évolution de la pensée imprimée française principalement à travers le x v m e siècle.
CHAPITRE
PREMIER
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU
I.
INTRODUCTION
L'étude consacrée aux registres du circuit administratif des privilèges et permissions du sceau nous a montré que toutes les séries de registres n'étaient pas utilisables. Deux principes avaient conduit à l'élimination de plusieurs d'entre elles : le premier concerne l'absence de classification chronologique, et la répétition. C'était le cas notamment des répertoires alphabétiques des registres de privilèges et permissions qui faisaient double emploi avec ceux de demandes et d'autorisations. Le second principe, c'est le caractère incomplet de certains registres par opposition à d'autres qui, ayant la même composition, sont plus exhaustifs. C'était le cas notamment des feuilles du sceau et de jugements par rapport aux registres de feuilles de jugements. Malgré cette élimination, plusieurs séries demeurent, dont les données statistiques vont nous être extrêmement utiles : ce sont les registres de demandes et d'autorisations ; les registres de jugements ; les registres d'enregistrements à la Chambre Syndicale ; les registres de permis d'imprimer. Cependant chacune de ces séries nous donnera des statistiques pour des périodes variables. Les registres de permis d'imprimer pour les années 1636-1663 (moins les années 16471653) ; ceux de la Chambre pour la période 1661-1789 ; ceux de demandes et d'autorisations pour le x v m e siècle, de 1697 à 1788 ; ceux des jugements pour les décades 1764-1789. Deux groupes de
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recherches pourront être tentés à partir de ces sources : d'une part, l'étude statistique descriptive nous fera connaître la production globale, la moyenne annuelle pour la période considérée, les fluctuations de chacune des séries des demandes, des autorisations, des jugements, des enregistrements et des permis d'imprimer. D'autre part, l'étude comparée des diverses statistiques permettra d'examiner plusieurs problèmes historiques et sociologiques. Nous devrons d'abord poser le problème essentiel de ces statistiques : l'évolution de la censure en France au x v m e siècle. Nous serons conduit à formuler l'hypothèse d'une régularité sociologique : celle d'une variation cyclique de l'autoritarisme et du libéralisme qui se manifesterait dans le cadre de l'administration de la Librairie, suivant les phases des cycles, par un renforcement de la censure et une augmentation du nombre de demandes refusées, ou l'inverse. L'étude comparée permettra encore d'examiner plusieurs problèmes historiques : celui du fonctionnement de l'enregistrement, t a n t au Bureau de la Librairie qu'à la Chambre Syndicale des Libraires ; celui du contenu du privilège. Cette dernière question ne pouvait être envisagée en premier lieu. En effet, elle aurait obligé à traiter en même temps le problème de la censure. D'autre part, cet ordre est sans conséquence pour les études précédentes, puisqu'elles se fondent toutes sur des statistiques utilisant la même unité : le privilège ou permission du sceau.
II. LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES REGISTRES DE DEMANDES ET D'OCTROIS DES PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU Les registres de privilèges et permissions du Sceau nous permettent d'atteindre directement la statistique bibliographique des demandes de privilèges et permissions et des autorisations, données par les censeurs d'abord et confirmées ensuite par le Chancelier ou le Directeur de la Librairie ; ce sont donc les statistiques des première et quatrième phases du circuit. A . LE
DÉPOUILLEMENT.
Il convient d'abord de préciser à partir de quels registres la statistique a été établie et pour quelles années. — Le Mss. Fr. 21939 a donné les chiffres annuels de 1696 à 1704. — Le Mss. Fr. 21940, de 1705 à 1706. L'année 1707 est obtenue à partie des Mss. Fr. 21940 et 21941. — Le Mss. Fr. 21941 de 1708 à 1710. — Le Mss. Fr. 21942 de 1711 à 1715. — Le Mss. Fr. 21995 de 1724 à 1727.
STATISTIQUE
DES
PRIVILEGES
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On remarquera qu'il y a une absence de données de 1716 à 1723. L'année 1716 est commencée dans 21942 mais non achevée et donc inutilisable. Il en est de même pour 1724 dans le Mss. Fr. 21995 qui commence le 27 juin 1723. L'année 1728 est obtenue par addition des données du Mss. Fr. 21995 (jusqu'au 18 janvier) et de celles du Mss. Fr. 21996. — Le Mss. Fr. 21996 de 1729 à 1737 L'année 1738 est obtenue par addition des données du Mss. Fr. 21996 (jusqu'au 16 octobre) et de celles du Mss. Fr. 21997 (du 6 novembre à la fin de l'année). — Le Mss. Fr. 21997 de 1739 à 1749 L'année 1750 est obtenue par addition des données de 21997 (jusqu'au 19 septembre 1750) et de celles du Mss. Fr. 21998 (du 24 décembre 1750). — Le Mss. Fr. 21998 de 1751 à 1759 1760 est obtenue par addition des données du Mss. Fr. 21998 (jusqu'au 13 mars) et de celles du Mss. Fr. 21999 (à partir du 20 mars). — Le Mss. Fr. 21999 de 1761 à 1762 1763 est obtenue par addition des données du Mss. Fr. 21999 (jusqu'au 17 octobre) et de celles du Mss. Fr. 22000 (du 27 octobre à la fin de l'année). — Le Mss. Fr. 22000 de 1764 à 1767 1768 est obtenue par addition des données du Mss. Fr. 22000 (jusqu'en février) et de celles du Mss. Fr. 22001 (à partir du 25 février). — Le Mss. Fr. 22001 de 1769 à 1773 L'année 1774 est obtenue à partir des données du Mss. Fr. 22001 (jusqu'au 3 septembre) additionnées à celles du Mss. Fr. 22002 (à partir du 10 septembre). — Le Mss. Fr. 22002 de 1775 à 1783. Les dernières années de l'Ancien Régime se trouvent dans le Mss. Fr. 21978. L'année 1784 est fournie par le Mss. Fr. 22002 (jusqu'au 18 juin) et 21978 (à partir du 1 e r juillet). Ce dernier registre donne en outre la statistique annuelle de 1785 à 1788 compris, puisqu'il s'arrête le 9 juillet 1789. On peut donc dire que la série statistique se poursuit de 1696 à 1788 avec l'interruption de 1715 à 1724. Ces registres, par ailleurs, peuvent offrir principalement et directement le nombre annuel de demandes et d'autorisations. On a décompté par privilège. E n ce qui concerne les demandes, il n'a pas été possible de procéder par soustraction du dernier numéro de l'année considérée au dernier numéro de l'année précédente. En effet des erreurs risquaient ainsi de s'introduire, causées
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DE LA
FRANCE
par les décalages erronés effectués autrefois par l'employé. Ainsi, pour donner des exemples, en 1734, on passe du numéro 2314 au n° 3315. En 1737, du n° 4022 au n° 5023, du n° 5099 au n 6000, du 6099 au 7000. Aussi, finalement, a-t-on décompté privilège par privilège. Le chiffre annuel des autorisations correspond au nombre de demandes qui, dans l'année, ont obtenu une réponse positive inscrite sur les registres dans la dernière colonne à droite, avec l'indication : privilège ou permission simple. Les permissions tacites qui apparaissent à partir de 1763 n'ont pas été comptées dans le chiffre annuel des privilèges octroyés, puisqu'il s'agit d'une autre permission sur laquelle nous reviendrons plus loin. Cependant, on en a fait un relevé qui est d'ailleurs infime, de l'ordre de quelques permissions par an.
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E N R E GISTRI • M E N T 5
I. P R I V I L È G E S E T P E R M I S S I O N S D U SCEAU
icn A i
1660
1670
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1660
16&0
V
1700
B. ANALYSE STATISTIQUE.
Le fait que ces registres nous offrent directement deux séries de statistiques nous obligera à les étudier séparément. 1. La statistique
des demandes
de privilèges
et
permissions.
Le nombre total de demandes pour la période 1700-1788 moins les années 1716-1723, pour lesquelles nous n'avons pas, par ces registres, de données, c'est-à-dire pour une période de 81 ans, est de 29.897 privilèges, principalement manuscrits, ce qui fait une moyenne de 369 privilèges par an. Il est, bien sûr, difficile de comparer ces chiffres avec ceux de la production déposée au x i x e siècle et annoncée dans la Bibliographie de la France. E n effet, on sait toutes les différences qui peuvent exister entre ces statistiques, puisque, pour l'essentiel, la première
STATISTIQUE
1700
1710
DES
1720
231
PRIVILEGES
1730
1740
1750
1760
1770
1780
I. PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU
1790
232
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
ne représente qu'une partie, plus ou moins importante suivant les périodes, des livres nouvellement écrits, et que la seconde concerne, pour le siècle suivant, outre les livres nouvellement écrits et imprimés, les rééditions et impressions. Cependant, malgré la difficulté de la comparaison, on ne peut manquer d'être frappé par le petit nombre de la première. Si l'on examine la série des données annuelles (voir planche I), on est conduit à plusieurs constatations : 1° Il existe, outre des mouvements intradécennaux, des cycles d'une vingtaine d'années. Les données sont trop incomplètes pour pouvoir juger pour la période 1700-1740. P a r contre, on peut en discerner deux après cette dernière date : le premier, qui s'étend de 1742 à 1762, et le second de 1763 à 1782, avec des hausses respectives de 1742 à 1751 et de 1763 à 1769-72 et des baisses de 1752 à 1762 et de 1770-73 à 1782. 2 ° Il semble que l'on puisse constater l'existence de mouvements de plus longue durée. Ainsi on assiste à une hausse à travers les quinze premières années du x v m e siècle des demandes de privilèges. On remarquera en effet que la baisse cyclique 1706-1710-15 ne retombe pas au niveau de 1700-1701, qu'elle reste supérieure, comme soulevée par le mouvement de hausse. Il est difficile de dire quand ce dernier s'achève, puisque nous n'avons pas de chiffres entre 1716 et 1723. Toutefois, la statistique des enregistrements montrera plus loin que la hausse se poursuit, au moins pour cette série, jusqu'en 1723. A ce mouvement de hausse 1700-1715, succède une baisse de 1724 à 1741, puis une hausse de 1742 à 1769-72, et une baisse dans les dernières décades de l'Ancien Régime. Les chiffres confirment cette observation graphique. Si l'on calcule le nombre de demandes effectuées par période de quinze années, on obtient les nombre suivants : de 1701 à 1715, 6003 ; de 1727 à 1741, 5 0 6 2 ; de 1742 à 1756, 5 1 8 2 ; de 1757 à 1771, 5884. Ces chiffres sont instructifs. Ils se regroupent deux à deux, et comme symétriquement, par rapport à la date de 1741. E n effet ceux des première et quatrième périodes, et des deuxième et troisième, sont voisins. Ainsi il semble, en tenant compte de l'absence des données entre 1715 et 1723, qu'on soit en présence d'une baisse au moins de 1724 jusqu'à 1741, suivie d'une hausse de 1742 à 1769-1772. 3 ° On peut également constater une hausse légère de 1726 à 1769-72, c'est-à-dire de 4 4 à 47 ans, qui se superpose à la baisse pour la période 1726-1761. Non seulement le nombre des demandes de la période 1742 à 1756 est supérieur à celui de la phase précédente, mais, à l'intérieur de celle-ci, le nombre de demandes du dernier cycle intradécennal est supérieur au premier. On compte 2 4 4 8 demandes de 1734 à 1740, contre 2354 de 1727 à 1723.
STATISTIQUE
DES
2. La statistique
PRIVILEGES
des
233
autorisations.
Le nombre total des privilèges et permissions simples dont les censeurs et le magistrat ont accepté la délivrance, et qui ont été inscrits sur les registres, pour la période 1700-1788, exception faite des années 1716-1723 comprises, est de 19.096 privilèges, soit une moyenne annuelle d'à peu près 236. Si l'on considère, non plus la production globale, mais la série des données annuelles (voir planche I), on est conduit à des remarques semblables à celles qui furent faites pour les demandes en ce qui concerne les mouvements intradécennaux et interdécennaux de vingt ans. E n effet, les cycles d'une vingtaine d'années (1743-1762 et 1763-1782) se confirment. P o u r les mouvements de plus longue durée, on peut constater certaines variations identiques et d'autres qui sont différentes. Ainsi la hausse 1700-1715 et la baisse 1724-1741-43 se retrouvent. Toutefois, cette dernière n'est pas soulevée par une hausse légère, mais au contraire accentuée. De plus, la baisse se poursuit jusqu'en 1751, et ce n'est qu'après cette date que l'identité des variations se produit, soit par la hausse jusqu'en 1768-72, soit par la baisse dans les dernières décades de la monarchie. La continuation de la baisse de 1726 à 1751 est confirmée par les chiffres. Ainsi la moyenne arithmétique annuelle de la baisse cyclique 1727-41 est de 225 permissions accordées, contre 183 dans la hausse cyclique 1742-51. Enfin, elle augmente légèrement, en passant à 190, dans la baisse cyclique 1752-1762.
I I I . LA S T A T I S T I Q U E B I B L I O G R A P H I Q U E DES R E G I S T R E S DE F E U I L L E S D E J U G E M E N T S Les registres de feuilles de jugements p e r m e t t e n t d'obtenir la statistique bibliographique des privilèges et permissions accordés, soit encore des autorisations correspondant donc à la quatrième phase du circuit, non plus dans l'ordre chronologique de la demande, comme c'était le cas avec la statistique précédente des autorisations mais dans l'ordre chronologique de la décision du magistrat. Les deux statistiques font donc, dans une certaine mesure, double emploi, mais pour une durée réduite. A. LE
DÉPOUILLEMENT.
On a relevé le nombre de privilèges et permissions. Le Mss. F r . 22006 donne la statistique bibliographique de 1764 à 1776, l'année
234
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
1763 étant incomplète. L e Mss. Fr. 22008, de 1778 à 1785. L'année 1777 a été obtenue par addition des données du registre Mss. Fr. 22006 jusqu'au 5 avril et de celles du Mss. Fr. 22008 à partir du 16 avril. L e Mss. Fr. 22009 a fourni les chiffres annuels de 1787 et 1788. L'année 1786 a été obtenue, comme précédemment, par addition des données des Mss. Fr. 22008 et 22009. L'année 1789 est à peine commencée.
B. ANALYSE
STATISTIQUE.
L e nombre total de jugements, pour les vingt-cinq ans, l'année 1789, anormale, n'étant pas comptée, est de 7.535 privilèges et permissions accordés, soit une moyenne annuelle de 301. En ce qui concerne les fluctuations (voir planche I) on peut constater que ce cycle de vingt ans, 1763-1782, se retrouve sur cette courbe. Toutefois, il semble composé de deux cycles décennaux, le premier commencerait en 1764 et s'achèverait avec la baisse de 1773. L e second allant de 1774 à 1782. Quant aux dernières années de l'Ancien Régime, il semble qu'elles correspondent à une hausse de 1783 jusqu'à 1787.
IV. L A S T A T I S T I Q U E B I B L I O G R A P H I Q U E DES R E G I S T R E S D ' E N R E G I S T R E M E N T DES P R I V I L È G E S E T P E R M I S S I O N S D U S C E A U A L A C H A M B R E S Y N D I C A L E DES L I B R A I R E S
Les registres d'enregistrement fournissent la statistique bibliographique des privilèges et, permissions du sceau qui, après avoir été accordés, ont été enregistrés à la Chambre Syndicale. C'est donc la statistique de la sixième phase du circuit des privilèges. A. LE
DÉPOUILLEMENT.
Il convient de préciser les apports de chaque registre. — Mss. Fr. 21944. Il n'a pas été utilisé à cause de manque d'ordre et de l'absence fréquentes de dates. — Mss. Fr. 21945. 1661 à 1672. 1673 est obtenu par addition des privilèges et permissions de l'année contenus dans les Mss. Fr. 21945 et 21946. Pour éviter les répétitions, nous ne donnerons ensuite que les cotes des registres qui ont fourni le chiffre annuel précisé.
STATISTIQUE
DES
PRIVILEGES
235
— Mss. Fr. 21946. 1664 à 1687 compris. — Mss. Fr. 21947. 1688 à 1699 1700 est incomplète. Pas de données pour 1701, 1702, 1703. — Mss. Fr. 21948. 1704 1705 (21948 et 21949) — Mss. Fr. 21949. 1706 à 1709 1710 (21949 +21950) — Mss. Fr. 21950. 1711 à 1715 1716 (21950+21951) _ Mss. Fr. 21951. 1717 à 1720 1721 (21951+21952) _ Mss. Fr. 21952. 1722 et 1723 1724 (21952 +21953) _ Mss. Fr. 21953. 1725-1726 1727 (21953+21954) _ Mss. Fr. 21954. 1728-1729 1730 (21954+21955) _ Mss. Fr. 21955. 1731 à 1733 1734 (21955+21956) _ Mss. Fr. 21956. 1735 à 1737 1738 (21956+21957) — Mss. Fr. 21957. 1739 à 1741 1742 (21957+21958) — Mss. Fr. 21958. 1743 à 1747 1748 (21958 +21959) _ Mss. Fr. 21959. 1749 à 1751 1752 (21959+21960) _ Mss. Fr. 21960. 1753 à 1755 _ Mss. Fr. 21961. 1756 à 1758 1759 (21961+21962) _ Mss. Fr. 21962. 1760 à 1762 1763 (21962+21963) — Mss. Fr. 21963. 1764 et 1765 1766 (21963+21964) — Mss. Fr. 21964. 1767 et 1768 1769 (21964+21965) _ Mss. Fr. 21965. 1770 à 1772 1773 (21965+21966) — Mss. Fr. 21966. 1774 1775 (21966+21967) — Mss. Fr. 21967. 1776 et 1777 1778 (21967+21968) — Mss. Fr. 21968. 1779 à 1782 1783 (21968+21969) — Mss. Fr. 21969. 1784 et 1785 1786 (21969+21970)
236
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
— Mss. Fr. 21970. 1787 1788 (21970+21971) — Mss. Fr. 21971. 1789. 1790 est incomplète. Les chiffres annuels obtenus correspondent au nombre de privilèges et permissions enregistrés dans l'année. Ils n'ont pu l'être par soustraction des derniers numéros d'enregistrement de l'année considérée de ceux de l'année précédente. A cela, il y a plusieurs raisons : d'abord il y a l'enregistrement des cessions des privilèges auxquelles à partir de 1703 on donne un numéro d'enregistrement à la suite de ceux des privilèges ; il faut ajouter ensuite les erreurs dans le numérotage. Ainsi pour donner quelques exemples dans le Mss. Fr. 21949 on passe, page 277, du n° 557 au n° 538, de même, page 293 et 294, du n° 565 au n° 366. Plus tard, on s'en aperçoit et, page 308, on revient du n° 385 au n° 585. Finalement, il a donc été nécessaire de compter privilège par privilège.
B. A N A L Y S E
STATISTIQUE.
Le nombre total de privilèges et permissions enregistrées à la Chambre Syndicale des Libraires de Paris, de 1661 à 1789, les années 1700-1703 exceptées, pour lesquelles on n'a pas de données, soit dans l'ensemble pour 125 années, est de 22.463 privilèges, ce qui correspond à une moyenne annuelle pour la période de 170. Si, après avoir considéré la production globale, on examine les fluctuations annuelles (voir planche I et I bis), on constate, outre des cycles intradécennaux, des cycles interdécennaux au nombre de cinq, si l'on excepte les périodes 1661-1673 et 1784-89, soit encore le début et la fin de la série. Le premier de ces mouvements paraît commencer en 1674 et se poursuivre jusqu'en 1694, avec une hausse de 1674 à 1684 suivie d'une baisse de 1685 à 1694. Le second, de 1695 à 1719. Il est difficile d'en déterminer le sommet puisque les années 1700-1703 nous manquent. Le troisième, de 1720 à 1740, avec une hausse de 1720 à 1723 et une baisse progressive ensuite. Le quatrième, de 1741 à 1761, avec une hausse de 1741 à 1752 et une baisse de 1753 à 1761. Le cinquième, de 1762 à 1783, avec une hausse de 1762-à 1768, suivie d'une baisse de 1769 à 1783. A leur tour, la succession de ces mouvements n'est pas sans intérêt. Elle permet de déceler un cycle intraséculaire, approximativement de 88 années, qui semble commencer après la baisse de 1673 (toujours si l'on ne tient pas compte des premières années de la série) et s'achèver vers 1761. Il serait composé de deux phases, l'une de hausse de 1674 à 1723, l'autre de baisse de 1724 à 1761. On remarquera, à ce propos, la coïncidence des chiffres annuels de 1673 et de 1761, l'un de 78 et l'autre de 75 privilèges
STATISTIQUE
DES
PRIVILEGES
237
ou permissions enregistrés et l'importance relative et comparée du sommet, de 324 privilèges, soit un rapport de 1 à un peu plus de 4 environ. D'autre part, la hausse paraît plus longue que la baisse, puisque celle-là dure presque un demi-siècle, exactement 50 années, quand la seconde ne dure que 38 années. Par ailleurs, la hausse occupe les deux premiers cycles de vingt ans et la hausse du troisième, tandis que la baisse de 38 années n'occupe que la baisse du 3 e cycle interdécennal et la totalité du quatrième. Quant au cinquième, il est possible qu'il concerne un nouveau mouvement semi-circulaire de hausse. D'autre part, outre ce cycle de 88 années, les cinq cycles interdécennaux manifestent un mouvement plus que séculaire de hausse générale, un moment ralentie par la baisse du mouvement semiséculaire. Leurs moyennes annuelles, qui sont respectivement de 146 pour le premier, 186 pour le deuxième, 203 pour le troisième, 158 pour le quatrième et 224 pour le cinquième, le prouvent.
V. LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES REGISTRES DE PERMIS D'IMPRIMER L'étude descriptive nous a permis de conjecturer que ces registres concernaient l'enregistrement à la Chancellerie des décisions prises par le magistrat. Faute de certitude, nous avions été conduit à les placer à la fin de notre analyse des registres de privilèges et permissions du sceau. Dans cette hypothèse, ils fourniraient la statistique bibliographique de la quatrième phase du circuit, pour une période assez courte du x v n e siècle. A. LE
DÉPOUILLEMENT.
Le dépouillement est assez aisé. En effet, les dates des permissions sont données et souvent même soulignées. D'autre part, les années sont séparées par un trait jusqu'en 1642. L'année 1647 n'est pas complète. Elle s'arrête à la page 138. Il n'y a pas de données pour 1648, 1649, 1650. L'année 1651 commence en novembre. Enfin le Mss. Fr. 16754 commence en juillet 1653. B . A N A L Y S E STATISTIQUE D E S PERMIS D ' i M P R I M E R .
Le nombre total de permissions enregistrées, pour la période 1636-1663, exception faite des années 1647-1653, est de 3141, soit une moyenne annuelle de 149 permis. L'examen des fluctuations annuelles est gêné par l'absence de
238
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
données pour la période 1647-1653. Il semble, cependant, qu'on puisse discerner plusieurs mouvements : une baisse de 1636 à 1639, suivie d'une hausse de 1640 à 1645, puis à nouveau, après l'interruption, une baisse de 1654 à 1658, suivie d'une hausse de 1659 à 1663. Il est possible qu'on soit en présence d'un cycle interdécennal d'une vingtaine d'années, de 1640 à 1658 (voir planche XIX). C.
ÉTUDE
COMPARÉE
DES
STATISTIQUES
DE
PERMIS
D'iMPRIMER
ET DES PRIVILÈGES E N R E G I S T R É S A LA CHAMBRE S Y N D I C A L E .
Cette étude ne peut être faite que pour les trois années où les deux séries possèdent simultanément des données, soit encore pour 1661, 62, 63. D'après ce que nous avons pu présumer de l'origine des registres de permis d'imprimer, cette analyse reviendrait à comparer les troisième ou quatrième et sixième phases du circuit, avec, toutefois, cette différence, qu'il ne semble pas y avoir ici de rapport entre les deux séries. La statistique globale, pour ces trois ans, est de 465 permis, pour 290 enregistrements. La différence est donc de 175 autorisations. Les privilèges enregistrés représentent 60 % des permis. La comparaison des fluctuations est plus instructive. Tout d'abord, les variations sont les mêmes et manifestent une hausse triannuelle. Mais c'est surtout dans la perspective séculaire que la comparaison devient utile. Elle permet de remonter plus avant dans la connaissance des cycles interdécennaux. L'analyse de la statistique des enregistrements, sans préjuger des années antérieures à 1661-1673, en avait décelé cinq. L'hypothèse d'une variation identique des fluctuations des permis et des enregistrements paraît possible, puisqu'elle existe déjà pendant plusieurs années. Aussi bien peut-on envisager l'existence d'un autre cycle interdécennal pour la période 1639-1658, précédant les cinq déjà connus.
VI. LA CENSURE DES DEMANDES DE PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU A.
INTRODUCTION.
Nous nous sommes contenté, jusqu'ici, de déterminer et d'étudier les statistiques bibliographiques que les registres de privilèges et permissions permettent d'obtenir directement. Les résultats en ont été instructifs. Cependant, ces séries, à leur tour, par comparaison, renseignent sur le problème le plus important, peut-être, puisque c'est la fonction de ce circuit administratif, celui de la censure des
STATISTIQUE
DES
239
PRIVILEGES
demandes de privilèges et permissions du Sceau. Cette étude doit d'abord déterminer la statistique annuelle et le nombre total des demandes qui n'ont pas été accordées. Elle réclame ensuite un examen comparé des séries des demandes, des autorisations et des non autorisations. Enfin, elle pourra être menée de deux manières : soit à partir des statistiques des registres de demandes et d'octrois de privilèges ; soit à partir des registres de feuilles de jugements en relation avec les précédents. Les deux études successives auront l'intérêt d'établir une vérification des résultats de l'une par l'autre qui s'avérera utile. D'autre part, il faut insister sur le fait qu'elles seront légèrement différentes, puisque l'une sera conduite à partir des autorisations classées dans l'ordre des demandes et l'autre, des autorisations classées dans l'ordre chronologique des décisions. Enfin, elles n'intéressent pas la même période, l'une recouvrant le x v m e siècle et l'autre les dernières décades de l'Ancien Régime seulement.
B.
LA C E N S U R E DU
SCEAU,
REGISTRES
DES
D'APRÈS DE
DEMANDES LES
DE
PRIVILÈGES
STATISTIQUES
DEMANDES
ET
ET
PERMISSIONS
BIBLIOGRAPHIQUES
D'OCTROIS
DE
PRIVILÈGES
DES ET
PERMISSIONS.
Cette étude est faite pour la période 1700-1788, moins les années 1716-1723. 1. La statistique
bibliographique
des demandes
non
accordées.
Cette statistique (voir planche I) correspond au nombre des demandes qui n'ont pas obtenu d'autorisations, c'est-à-dire aux demandes qui furent « rayées », « refusées », ou pour lesquelles aucune indication n'a été fournie pour la période 1700-1788, exception faite des années 1716-1723. Les quelques permissions tacites annuelles ont été défalquées, car, si elles prouvent que l'ouvrage n'a pas été jugé digne d'un privilège, elles montrent également qu'il n'a pas été interdit entièrement. Le nombre total de ces demandes non accordées est de 10.618, soit approximativement une moyenne annuelle de 131. En ce qui concerne les fluctuations (voir planche I), on peut constater un mouvement de longue durée très particulier, propre aux ouvrages censurés. Il semble qu'on ait d'abord un mouvement de baisse qui pourrait se poursuivre jusqu'en 1729. Celui-ci est suivi d'une hausse de 1730 à 1752, puis d'une baisse de 1753 à 1782, et enfin d'une hausse dans les dernières années de l'Ancien Régime.
240
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
2. Étude comparée des statistiques bibliographiques des autorisations, et des demandes non accordées.
des
demandes,
Cette étude doit être située par rapport au circuit d'obtention des privilèges. Elle équivaut à en comparer les première et quatrième phases. Une première remarque sur le plan de la production générale s'impose. Les autorisations constituent approximativement 64/100 des demandes. C'est dire qu'un peu plus d'un tiers de celles-ci auraient été censurées durant toute la période, ce qui représente une proportion importante. L ' e x a m e n des fluctuations est d'un enseignement non moins intéressant. On peut d'abord constater que les mouvements intradécennaux, les cycles de vingt ans, les mouvements de longue durée, d'une trentaine d'années, se retrouvent dans les deux courbes. C'est là leur ressemblance. L'allure générale permet cependant de distinguer des différences. Tout paraît se passer comme si, pendant un certain temps, la tendance des autorisations était celle, plus accentuée, des demandes et inversement, à une autre période, comme si la tendance était contraire. Ainsi, il est manifeste que l'écart entre les deux séries diminue de 1700 à 1715-1726, et de 1753 à la fin de l'Ancien Régime, à travers les fluctuations de la production. A l'inverse, il augmente de 1729-1730 à 1752. Le phénomène paraît net. Que peut-on en conjecturer ? Il semble que la politique de la censure s'inverse suivant les périodes. Ou elle tend à la sévérité, et cherche à restreindre la production et la liberté d'expression ; c'est ce qui se produit dans le 2 e quart du x v m e siècle : ou elle prend une attitude plus libérale ; c'est ce qui a cours dans les premier et troisième quarts du siècle. Cette hypothèse va se trouver confirmée par l'étude comparée des mouvements des deux séries précédentes avec celui des demandes non accordées. Ainsi de 1700 à 1724-29 et de 1753 à 1782, les prohibitions baissent quand les mouvements des demandes et des autorisations sont identiques en tendance et quand, dans la hausse, l'accélération est plus grande dans les autorisations, et inversement, quand dans la baisse, ce sont les demandes qui décélèrent plus rapidement. De même, de 1730 à 1752, les interdictions augmentent quand la tendance est contraire. A cela, il faut ajouter que le mouvement des interdictions est particulier, puisque la plupart des dates de baisse ou de hausse maximales ne concordent pas avec celles des deux autres séries. Ces variations, évidemment, s'expliquent logiquement. Quand le mouvement des autorisations est contraire à celui des demandes, le mouvement de la censure varie comme ce dernier. Si les demandes sont en hausse ou en pallier et qu'on diminue les autorisations, on augmente le nombre de livres censurés, et c'est ce qui se produit de 1730 à 1752.
STATISTIQUE
DES
PRIVILEGES
241
P a r contre, quand le mouvement des demandes et des autorisations est identique en tendance, le mouvement de la censure dépend de l'accélération du mouvement de chaque série. Quand celui-ci est plus accentué dans les demandes que dans les autorisations, le mouvement de la censure varie comme celui des demandes et c'est ce qui se passe n o t a m m e n t en 1772-82. P a r contre, quand l'accélération est plus grande dans le mouvement des autorisations que dans celui de la demande, le mouvement de la censure varie en sens inverse de ce dernier et c'est ce qui se passe également lors de la baisse de 1753-1768-71. Cependant cette explication logique renvoie à une explication sociologique. L'hypothèse précédente paraît se confirmer et se compléter. Que le mouvement de la censure soit inverse, pour l'essentiel, de celui des autorisations, p e n d a n t le le 2 e q u a r t du x v m e siècle jusqu'en 1752, rien là d ' é t o n n a n t , puisque la politique des autorisations consiste à contrarier le mouvement de la production. Les choses changent alors à partir de cette dernière date. La politique libérale s'introduit. Elle est évolutive. La tolérance s'étend progressivement jusqu'à la Révolution, et ceci malgré les deux réactions de 1766-72 et de 1780-86. Cette hypothèse dégagée directement de l'étude comparée, paraît se confirmer sur le plan de l'histoire de l'administration de la Librairie, et particulièrement de la Direction de celle-ci. Après le passage du technicien que f u t l'Abbé Bignon, bibliothécaire du roi, les maîtres des requêtes introduisent directement dans la Librairie la politique du Cardinal Fleury, et du Roi depuis Fleuriau d'Armenonville jusqu'à Maboul, en passant par Chauvelin, Rouillé et d'Argenson. Puis le renversement de la politique de la censure, si violente, si célèbre, est introduite par Malesherbes qui codifie le libéralisme en matière de Presse dans ses mémoires rédigées en 1759. Cet homme intègre et intelligent dirigeait la Librairie. Ainsi selon l'avertissement des Mémoires : « M. de Malesherbes reçu 1 e r Président de la Cour des aides le 14 décembre 1750 à la place de son père qui a v a i t été élevé, le 9 du même mois à la dignité de Chancelier f u t aussitôt chargé par celui-ci de la direction de la Librairie et de la Littérature. Ce f u t au commencement de 1759 que M. de Malesherbes composa ses cinq mémoires sur cette matière, à la sollicitation du Dauphin fils de Louis XV 1 . »
Ainsi, cette politique libérale, codifiée après son application pratique, remonte-t-elle bien au milieu du x v m e siècle. Elle est due à la personnalité de M. de Malesherbes, pénétré lui-même des idées libérales des philosophes, et qui ne cesse d'ailleurs de s'élever contre la politique antérieure rigide qui n ' é t a i t plus praticable en ce milieu du siècle. 1. Mémoires, Avertissement, p. iv.
242
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Mais à ce premier mouvement succéda la réaction de 1763 à 1772 et c'est alors, sous le Vice-chancelier de Maupeou, la réunion de la Direction de la Librairie à la Lieutenance de Police, assurée successivement par Sartine et Albert. Après quoi, sous les Ministères de Turgot et de Necker, avec la réintroduction de la politique libérale à partir de 1773-76 et jusqu'en 1782, la Direction est de nouveau séparée, et le restera jusqu'à la Révolution, malgré la réaction de 1782 à 1786. Toutefois, l'explication des variations cycliques de la censure par les changements dans l'organisation de la Direction de la Librairie et dans l'origine et l'orientation politique des directeurs successifs n'est pas suffisante, puisque celles-ci dépendent de la politique générale de l'État. Or, là aussi, les variations sont confirmées. La baisse jusqu'en 1726-29 correspond à la fin du règne de Louis XIV, et essentiellement à la Régence, dont on sait bien qu'elle fut intellectuellement libérale. Le renforcement de la censure s'effectue pendant le Ministère du Cardinal Fleury jusqu'en 1743. Puis, tout en continuant sa hausse, elle prend le tournant libéral, de 1744 à 1752, dans le temps que Machault d'Arnouville succède à Fleury. Après quoi, l'affaiblissement de la censure s'effectue sous les Ministères de Choiseul, Turgot, Necker, soit pendant les Règnes de Louis XV conseillé par Madame de Pompadour, favorable aux philosophes et au libéralisme intellectuel, et de Louis XVI, où s'effectuent les premières réformes économiques par la tentative d'application des théories physiocratiques. Quant aux deux réactions, elles s'effectuent sous le Chancelier de Maupeou et pendant le Ministère Calonne. Enfin, ces variations politiques elles-mêmes plongent leurs racines dans l'évolution sociale tout entière. Ainsi, dans la première période, jusqu'en 1726-29, le libéralisme, la détente sociale, se vérifient partout. Sur le plan économique, avec le système de Law ; sur le plan administratif, par le remplacement des ministres par des conseils ; sur le plan politique, par les mesures peu autoritaires du Régent qui n'a pas par ailleurs le pouvoir d'un monarque absolu tel que l'avait été Louis XIV ; sur le plan des mœurs, par la relative dissolution de la vie des milieux aristocratiques, du Régent et de ses « roués » ; sur le plan intellectuel enfin soit par l'ouverture du Club de l'Entresol et des réunions de la Place Vendôme, soit par la publication d'ouvrages critiques comme les Lettres Persanes de Montesquieu ou les livrets licencieux. Comme l'écrivait Daniel Mornet : « La brusque réaction qui suivit la mort de Louis XIV, les bouleversements de fortune qui furent la conséquence des opérations de Law installèrent dans la haute société de la cour et de Paris une sorte de gloriole du vice et une mode de cynisme... C'est enfin le temps où se multiplient les
STATISTIQUE
DES
243
PRIVILEGES
romans galants, les romans obscènes et les poésies qui ne le sont pas moins. Depuis la Pucelle de Voltaire... jusqu'aux romans de Crébillon fils1. »
De même le sentiment religieux baisse. Ainsi la Princesse Palatine écrivait : « Je ne crois pas qu'il y ait à Paris tant parmi les ecclésiastiques que parmi les gens du monde cent personnes qui aient la véritable foi et même qui croient en notre seigneur". »
Quant au second mouvement du libéralisme, après la réaction du ministère Fleury, il se joue dans les années essentielles de 17481750-52 et est dirigé par le parti des philosophes. Le pouvoir, d'abord, cherche à l'interdire. C'est la condamnation des Pensées Philosophiques de Diderot en 1746, des Mœurs de Toussaint en 1748. On commence à s'inquiéter : «C'est vers 1750 seulement que le gouvernement et l'Église s'avisent que les philosophes sont une « secte » et un « parti » et que leurs desseins sont redoutables". » « Jusqu'en 1748 on s'inquiète assez peu des beaux esprits... il y a quelques descentes de police chez les imprimeurs, quelques saisies... mais on tient en somme ces folliculaires pour méprisables 4 . »
Progressivement, pendant cette période et malgré les réactions comme celle de la condamnation de la thèse de l'Abbé de Prades en 1751, ou celle des Mémoires pour servir à Vhistoire des Cacouacs de Moreau, le parti des philosophes se répand dans l'opinion, les salons et même l'académie : « Contre la Sorbonne, le Parlement, les menaces de galères ou de mort, les philosophes ont en effet pour eux la plus puissante de toutes les forces, celle de l'opinion. Ils ont l'opinion des salons... Ils ont bientôt l'Académie elle-même...» »
et encore : « Très vite il est élégant de mépriser les « préjugés », la « superstition » et le « fanatisme ». Très vite même on est convaincu qu'il n'y a pas de dignité humaine sans liberté de penser". »
Aussi bien l'incrédulité, un moment arrêtée, se développe : 1.
Les Origines intellectuelles de la Révolution Française, Paris, A. Colin, In-4°, 552 p. BN : 4° Z 4241, p. 53. p. 53. p. 173. p. 172. p. 177. p. 178.
D . MORNET,
2 e édition, 2. Ibid., 3. Ibid., 4. Ibid., 5. Ibid., 6. Ibid.,
1715-1787,
244
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
« E n un an, de 1752 à 1753 à Saint-Sulpice, le n o m b r e des c o m m u n i a n t s t o m b e de 4200 à 3000». »
Aussi : « ...dès 1760 plus n e t t e m e n t vers 1770 et s u r t o u t vers 1780 presque plus rien ne s'oppose p r a t i q u e m e n t à la diffusion de l'esprit n o u v e a u . Il n ' y a plus de l u t t e véritable e n t r e la force b r u t a l e de l ' a u t o r i t é et les idées. La bataille se livre e n t r e des opinions t r a d i t i o n s d ' u n côté, des septicismes, négations et révoltes de l'autre*. »
Dans un semblable climat social, il est bien évident que la censure administrative ne peut que se relâcher progressivement, en tâchant de se reprendre par moments, comme en 1766 et 1772, ou entre 1782 et 1786. « C'est ainsi q u e des m a g i s t r a t s eux-mêmes se f o n t les complices des philosophes contre l ' a u t o r i t é qu'ils r e p r é s e n t e n t . C'est grâce au directeur de la Librairie Malesherbes q u e Rousseau p e u t faire i m p r i m e r la Nouvelle Héloïse et VÊmile. C'est chez Malesherbes q u e l'on cache les m a n u s c r i t s et lefs feuilles de l'Encyclopédie p e n d a n t q u ' o n perquisitionne chez les imprimeurs 3 . »
et encore : « Brissot nous a conté u n exemple p i t t o r e s q u e des simulacres de poursuite c o n t r e les auteurs. L'inspecteur de la Librairie v i n t le prévenir poliment qu'il eut à se sauver car il v i e n d r a i t l ' a r r ê t e r le lendemain... Les poursuites ne faisaient plus rien à personne ; elles ridiculisaient le g o u v e r n e m e n t et faisaient la gloire des victimes...* »
Ainsi, cette évolution cyclique de la censure, tantôt autoritaire et tantôt libérale, dégagée par l'analyse statistique, paraît bien se confirmer sur le plan événementiel, comme la manifestation sur le plan de la politique intellectuelle du pouvoir, et spécialement sur celui de la délivrance des privilèges, de la tendance de la société française entière, au x v m e siècle. C.
LA C E N S U R E D E S D E M A N D E S D E P R I V I L È G E S E T P E R M I S S I O N S SCEAU
D'APRÈS
REGISTRES
DE
PERMISSIONS JUGEMENT
LES
STATISTIQUES
DEMANDES
D'UNE
D'AUTRE
PART,
ET DES
BIBLIOGRAPHIQUES
D'OCTROIS REGISTRES
DE DE
DU DES
PRIVILÈGES
ET
FEUILLES
DE
PART.
Cette étude est faite pour une période plus courte que la précédente, soit pour les années 1764-1788, pour lesquelles nous possédons la statistique des jugements. Comme la précédente, elle suppose 1. 2. 3. 4.
Ibid., Ibid., Ibid., Ibid.,
p. p. p. p.
181. 198. 178. 181.
245
STATISTIQUE DES PRIVILEGES
deux parties : la détermination et l'examen des demandes non accordées par jugement ; l'étude comparée des statistiques de demandes, autorisations, jugements, demandes non accordées et demandes non acceptées par jugement. 1. La statistique
des demandes
non acceptées par
jugement.
Cette statistique (voir planche I) correspond au nombre annuel des demandes qui n'ont pas reçu un jugement favorable ou une permission tacite. Le nombre total des demandes non acceptées par jugement est de 2.299 pour 25 ans, soit une moyenne annuelle de 92. En ce qui concerne les fluctuations, on peut reconnaître un mouvement interdécennal de baisse de la production prohibée de 1766 à 1776-82, suivie d'une hausse dans les dernières années de l'Ancien Régime. 2. Étude comparée des statistiques bibliographiques des autorisations, jugements, demandes non accordées et non acceptées par jugements.
demandes, demandes
Elle est faite de deux parties indispensables. La première consiste en un renouvellement de l'étude de la censure obtenue à partir des statistiques des registres de demandes et d'octrois de privilèges et permissions du sceau, dans les cadres chronologiques plus limités de la période 1764-1788. Cette étude est nécessaire à la seconde. La comparaison des deux séries de la censure ne pouvait être effectuée que pour des périodes identiques. Mais cette première partie est intéressante en soi. Elle permettra d'établir le pourcentage de la censure à partir des registres de demandes, pour cette période restreinte et par suite d'en tirer des indications par comparaison avec le pourcentage de toute la période 1700-1788 (moins 1716-23). Si la première partie est utile, la seconde l'est d'avantage encore, puisqu'elle doit indiquer l'importance de la censure à partir de la statistique des registres de feuilles de jugements et par suite vérifier les résultats des analyses précédentes. La première partie n'a un intérêt particulier que sur le plan de la statistique totale, puisque les fluctuations ont déjà été étudiées. On dénombre, pour la période 1764-1788, 10.017 demandes, 6.741 autorisations et 3.093 demandes non accordées, soit une moyenne annuelle respective de 401, 270, et 124, le reste étant fourni par les permissions tacites. Ainsi les autorisations constituent 67 % des demandes et les demandes non accordées 31 %. Si l'on compare ces pourcentages avec les résultats identiques de la période 17001788 (moins 1716-1723) on constate une hausse appréciable des autorisations et une diminution de la production censurée, les chiffres étant respectivement de 67 % et 64 %, et de 31 % et 36 %.
246
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
Cette diminution vérifie ainsi la baisse déjà constatée de la censure à travers les dernières décades de l'Ancien Régime. La seconde partie aboutit à des résultats plus importants encore : le pourcentage de la censure, apprécié à partir des deux statistiques des autorisations et des jugements, est différent. En effet, si on relève 6.741 autorisations, on dénombre, pour la même période, 7.535 jugements, et, par suite, le nombre de demandes non accordées passe de 3.093 à 2.299 et les pourcentages de 31 % à 25%. Si, maintenant, on se place sur le plan des fluctuations, on peut constater que les mouvements intra-et interdécennaux sont les mêmes (voir planche I). Toutefois, la baisse de la production interdite est plus accentuée dans la statistique obtenue à partir des jugements que dans celle déduite à partir des autorisations, puisque la tendance à la baisse est plus accusée dans ces dernières que dans les premières (voir planche I). Cette divergence des résultats globaux ne peut pas être due au léger décalage de quelques mois entre la demande et le jugement. Celle-ci pourrait être appréciable dans la statistique annuelle. Elle s'annihile presque complètement, dès lors que l'on considère une période assez longue. Cette différence fait dégager un problème dont nous aurons à nous occuper dans l'étude suivante : l'enregistrement des permissions au Bureau de la Librairie. En attendant, elle ne nous empêche pas de conclure. Des deux séries, la plus sûre est celle des jugements parce qu'elle est le relevé chronologique des autorisations, tandis que l'autre n'est que leur rapport. C'est donc à partir d'elle qu'il faut plutôt conclure, bien que les indications qu'elle donne ne concernent que la période 1764-1788 et qu'il soit plus difficile de les généraliser au xviii® siècle en entier. On peut donc dire que le pourcentage des demandes censurées s'établit au maximum peu probable de 36 % et au minimum plus certain de 25 %, soit approximativement entre 1/3 et 1/4 des demandes, représentant entre 92 et 131 demandes en moyenne annuelle. Les résultats seront d'ailleurs confirmés notamment lors de l'étude du contenu des privilèges, le pourcentage des livres de privilèges censurés obtenus à partir des registres de demandes s'établit, lui aussi, à 36 %. Quant aux fluctuations, elles ont été vérifiées identiques en tendance par l'étude des deux séries et il y a tout lieu de penser qu'on assiste à une variation cyclique de la censure à travers la longue période, comprenant une baisse dans le premier quart du x v m e siècle, une hausse dans la deuxième, une baisse continue pendant le 3 e quart, avec une légère hausse dans les dernières années de l'Ancien Régime. Cette variation cyclique a d'autre part été vérifiée historiquement, aussi bien sur le plan de la politique générale de la France que sur celle de l'administration de la Librairie.
STATISTIQUE
DES
247
PRIVILEGES
STATISTIQUES DES REGISTRES DE PRIVILÈGES PERMISSIONS DU SCEAU Années
Demandes
Autorisations
Non Autorisées
1697 1698 1699 1700 1701 1702 1703 1704 1705 1706 1707 1708 1709 1710 1711 1712 1713 1714 1715 1716 1717 1718 1719 1720 1721 1722 1723 1724 1725 1726 1727 1728 1729 1730 1731 1732 1733 1734 1735 1736 1737
6 7 60 276 256 357 423 384 741 405 406 369 369 334 392 392 365 416 394
3 4 45 182 159 214 241 224 393 264 294 255 339 227 271 267 250 297 260
3 3 15 94 97 143 182 160 348 141 112 114 30 107 121 125 115 119 134
365 315 268 354 366 303 353 362 329 287 340 386 345 402
289 230 188 261 293 238 271 216 213 197 236 257 222 233
76 85 80 93 73 65 82 146 116 90 104 129 123 169
Années
Demandes
Autorisations
Non Autorisées
Permissions Tacites
1738 1739 1740 1741 1742 1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759 1760 1761 1762 1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778
392 316 267 260 325 339 282 278 380 296 370 325 385 453 436 342 333 331 307 338 378 343 308 353 317 372 357 337 355 456 539 558 451 422 609 369 382 450 359 388 369
239 142 220 131 159 130 149 198 231 158 176 200 206 227 196 200 199 200 174 195 181 197 185 186 176 219 238 237 252 303 373 357 296 270 377 211 272 309 224 266 261
153 174 47 129 166 209 133 80 149 138 194 125 179 226 240 142 134 131 133 143 197 146 123 167 141 153 113 92 96 197 156 191 149 142 222 153 107 138 133 112 97
6 8 7 6 10 10 6 10 10 5 3 3 2 10 11 9
248
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE STATISTIQUE DES REGISTRES DE PRIVILÈGES P E R M I S S I O N S DU SCEAU (suite)
Années
Demandes
Autorisations
Non Autorisées
1779 1780 1781 1782 1783
323 309 299 270 305
219 226 221 198 219
96 79 71 66 79
STATISTIQUE
DES
E T PERMISSIONS ACCORDÉES
PAR
Permissions Tacites
8 4 7 6 7
PRIVILÈGES DU
SCEAU
Années
Demandes
Autorisations
Non Autorisées
1784 1785 1786 1787 1788
388 367 479 467 409
278 260 304 307 263
105 100 170 149 130
DES
JUGEMENTS
1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788 1789
Privilèges et Permissions
235 257 244 348 384 367 369 297 452 237 299 346 318 337 279 249 262 245 230 240 280 270 290 352 348 152
5 7 5 11 16
STATISTIQUE PERMISSIONS D'IMPRIMER A A Années
Années
Permissions Tacites
1636 1637 1638 1639 1640 1641 1642 1643 1644 1645 1646 1647 1648 1649 1650 1651 1652 1653 1654 1655 1656 1657 1658 1659 1660 1661 1662 1663
jrermiòòivriò
123 111 123 106 112 151 149 200 194 206 191
163 178 142 136 106 117 168 112 173 180
STATISTIQUE
DES
249
PRIVILEGES
STATISTIQUE DES PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU ENREGISTRÉS A LA CHAMBRE SYNDICALE DES LIBRAIRES
Années
1661 1662 1663 1664 1665 1666 1667 1668 1669 1670 1671 1672 1673 1674 1675 1676 1677 1678 1679 1680 1681 1682 1683 1684 1685 1686 1687 1688 1689 1690 1691 1692 1693 1694 1695 1696 1697 1698 1699 1700
Privilèges et Permissions
84 90 110 137 125 138 97 134 173 130 167 117 78 93 102 122 143 122 136 142 128 170 175 190 183 176 174 142 162 152 150 130 147 131 133 180 158 189 134
Années
1701 1702 1703 1704 1705 1706 1707 1708 1709 1710 1711 1712 1713 1714 1715 1716 1717 1718 1719 1720 1721 1722 1723 1724 1725 1726 1727 1728 1729 1730 1731 1732 1733 1734 1735 1736 1737 1738 1739 1740
Privilèges et Permissions
223 227 217 239 177 187 111
168 220 181 236 221 175 174 162 125 150 166 269 324 279 217 201 216 250 200 233 191 185 172 180 223 159 177 198 170 98
Années
1741 1742 1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759 1760 1761 1762 1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780
Privilèges et Permissions
145 156 147 150 121 199 170 119 216 142 172 220 167 198 156 133 136 180 168 155 75 162 156 198 197 192 272 333 313 292 221 311 234 170 250 235 215 233 192 183
Années
1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788 1789
Privilèges et Permissions
200 192 184 217 244 248 278 278 121
250
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
VII. L ' E N R E G I S T R E M E N T DES JUGEMENTS SUR LES REGISTRES DE DEMANDES E T D'OCTROIS DE P R I V I L È G E S ET PERMISSIONS DU SCEAU L'étude précédente de la censure a révélé un problème nouveau : celui de l'enregistrement, dans la quatrième phase du circuit des privilèges, des jugements positifs des censeurs et du magistrat sur les registres de demandes. L'origine en est le nombre différent d'autorisations que fournissent les statistiques des deux catégories de registres. Le problème est d'ordre administratif, et son examen renseignera sur l'histoire du fonctionnement de l'administration. Reconnaissons d'abord que, pour la période 1764-1788, 794 jugements sur les 7.535 n'ont pas été enregistrés, puisque le nombre des autorisations sur les registres de demandes est de 6.741, les moyennes annuelles étant respectivement et approximativement de 32, 302, et 270. Si l'on transforme ces chiffres en pourcentage, on constate que 11 % des jugements n'ont pas été enregistrés, donc que les autorisations ne représentent que 89 % des jugements. D'autre part, l'examen des chiffres annuels n'est pas moins instructif. Comme on devait s'y attendre, ceux des jugements sont supérieurs à ceux des autorisations, et ceci 22 ans sur 25. Les trois années où ils sont inférieurs sont explicables par la nature des registres des deux séries. En effet, les données décomptées chaque année ne sont pas tout à fait les mêmes. Dans le cas des jugements, il s'agit naturellement du nombre de privilèges acceptés dans l'année dont il est question. Au contraire, pour les autorisations, il s'agit du nombre de demandes de l'année qui ont été jugées, sans préjuger de la date de leur acceptation toujours postérieure. Dans ce cas, le chiffre annuel dépend de la demande. Il n'est pas possible de faire autrement sans un dépouillement peu utile et extrêmement long. Or, entre la demande et le jugement, nous l'avons vu, un laps de temps, variable selon diverses causes, s'écoule, de l'ordre de plusieurs mois, et quelquefois même d'une année. Ainsi peut se produire un décalage qui, parfois, est assez sensible pour inverser les variations annuelles. Il reste à expliquer cette supériorité du nombre de jugements par rapport au nombre des autorisations. Il semble que la cause historique tienne à la relative négligence de la transcription. Les jugements n'ont pas toujours été reportés sur les registres de demandes de privilèges. A l'appui de cette hypothèse, outre la vérification par le titre, il faut noter que, en plus des formules « permission » ou « rayé » ou« retiré », il y a fréquemment, dans la colonne des décisions, des blancs, c'est-à-dire des privilèges pour lesquels le jugement n'a pas été relevé.
STATISTIQUE
DES
PRIVILEGES
II. PRIVILÈGES NON-ENREGISTRÉS A LA CHAMBRE SYNDICALE DES LIBRAIRES
251
252
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
L'examen des fluctuations annuelles des privilèges jugés et non enregistrés est aussi intéressant. On peut constater l'existence d'un cycle interdécennal d'une vingtaine d'années (voir planche II), composé d'un mouvement de hausse de 1764 à 1776, suivi d'une baisse de 1777 à 1784. Si l'on compare ce cycle avec les courbes des demandes, des autorisations et des jugements, on ne peut manquer de constater une différence. Dans les deux cas, les cycles de vingt ans existent, mais ils ne se superposent pas. La hausse de 1764 à 1768-1772 se poursuit en ce qui concerne les privilèges jugés et non enregistrés dans les registres de demandes jusqu'en 1776. De même la baisse, qui s'achève dans ce cas en 1782, dans l'autre en 1784. Il semble donc que l'on puisse conclure à un décalage du cycle à propos duquel nous nous garderons, pour l'instant, de toute interprétation. Ainsi, en résumé, cette étude n'aura pas été inutile. Elle a montré que : 1° 11 % des jugements n'étaient pas enregistrés sur les registres des demandes et d'autorisations de privilèges et permissions du sceau. 2° La cause probable en était la négligence des employés de bureau. 3° Les jugements non enregistrés variaient comme la production des demandes et des autorisations, en ce qui concerne le cycle interdécennal, mais avec un certain retard.
V I I I . L ' E N R E G I S T R E M E N T DES P R I V I L È G E S E T PERMISSIONS DU SCEAU A LA CHAMBRE SYNDICALE DES L I B R A I R E S A.
INTRODUCTION.
Cette étude équivaut à comparer la sixième phase du circuit des privilèges avec la quatrième, celle des autorisations, et la première, celle des demandes. De même que l'étude de la censure, elle devra être faite en deux parties, puisque la sixième phase, tout comme la première, est comparée à la quatrième qui comporte deux séries statistiques, celle des autorisations et celle des jugements. Aussi de même que pour la censure, l'une intéressera le x v m e siècle, 1704-1788 (moins 1716-1724) et l'autre les dernières décades de la monarchie, de 1764 à 1788.
STATISTIQUE
B.
ÉTUDE
DES
COMPARÉE
PRIVILÈGES
ET
DES
STATISTIQUES
PERMISSIONS
D'ENREGISTREMENTS A LA C H A M B R E
253
PRIVILEGES
ET
DU
SCEAU,
D'AUTORISATIONS
DE
DEMANDES
DE
D'AUTORISATIONS, NON
ENREGISTRÉES
SYNDICALE.
Comme les registres du Bureau ne sont exploitables statistiquement qu'à partir de 1700, et que ceux de la Chambre n'ont pas de données annuelles entre 1700 et 1703, c'est donc pour la période 1704-1788 que sera conduite l'analyse, l'année 1789 étant incomplète et incertaine. De plus, comme la statistique du Bureau est interrompue de 1716 à 1723, l'étude ne pourra être faite que de 1704 à 1715 et de 1724 à 1788. Sur le plan de la production totale, on dénombre, pour cette période de 77 années, 28.585 demandes de privilèges ou permissions du sceau, 18.300 autorisations, et 15.347 privilèges enregistrés, soit une moyenne arithmétique de 371 demandes, 238 autorisations, 200 privilèges enregistrés. Ainsi, pour l'ensemble de la période, le chiffre des privilèges enregistrés à la Chambre est-il inférieur au nombre des autorisations, puisqu'il n'en représente qu'approximativement 84 %. Le nombre des privilèges non enregistrés mais accordés est donc de 2.953, représentant 38 privilèges annuels, soit presque 16 % des autorisations. Enfin, entre la demande et l'enregistrement, on passe presque du double au simple, puisque les privilèges enregistrés ne représentent que 54 % des demandes. Comment expliquer ces faits, et notamment cette différence assez considérable entre la production autorisée et la production enregistrée ? Pour trouver une réponse, c'est encore au schéma du circuit qu'il convient d'avoir recours. Que peut-il s'être passé entre l'autorisation et l'enregistrement ? Tout d'abord, la production a pu varier ; d'autre part, plusieurs personnes sont intervenues : le Chancelier ou le Directeur de la Librairie, dans la cinquième phase, celle du sceau ; le bénéficiaire et le Syndic et ses Adjoints, dans la sixième. La première conjecture consiste à penser que toute la production qui avait reçu une permission ou un privilège n'était pas enregistrée. Il pourrait exister une raison à cela : l'écart serait dû à la nature de l'autorisation : on aurait distingué entre privilège et permission simple ; le premier étant seul enregistrable. Le privilège serait un monopole absolu pour une période donnée et devrait être connu du public, donc enregistré sur les registres de la Chambre. La permission du sceau, appelée encore Simple, serait relative, n'entraînant pas un monopole, et consisterait en une simple autorisation, un visa de censure. Une telle interprétation devait se vérifier erronée, t a n t dans sa conception réglementaire que par les faits. En réalité, il semble bien que la permission du
254
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
sceau ait entraîné un certain monopole, au moins sur un plan local, entraînant donc l'enregistrement. Les règlements les concernant parlent toujours des « Lettres portant permissions ou privilèges d'imprimer » et précisent qu'elles devront être « enregistrées sur le registre de la Communauté des Libraires »... De plus, les registres d'enregistrement de la Chambre, qui mentionnent la nature de la permission, indiquent aussi bien les privilèges que les permissions simples, ainsi qu'il est dit dans la description du registre Mss. Fr. 21948. Aussi cette hypothèse ne tient-elle pas. A défaut d'une explication concernant la nature de la production, il reste à examiner les conséquences de l'intervention des personnes, dans les deux dernières phases du circuit, celles du sceau et de l'enregistrement. Une première conjecture consiste à penser que, à l'occasion de l'apposition du sceau sur les privilèges, une nouvelle censure aurait pu être effectuée. Nous devons reconnaître que nous y avons longtemps pensé et qu'elle n'est pas totalement à écarter, bien qu'elle paraisse peu probable. En effet, on a vu déjà que les deux opérations du jugement et du sceau, qui étaient entre les mains du Chancelier, avaient été séparées par lui, dès lors qu'il en avait chargé un magistrat du Bureau de la Librairie. Le « jugement » resta donc l'opération essentielle de l'administration de la Librairie. C'est par elle que le magistrat chargé de la Direction tranchait en dernier ressort, après les approbations ou réprobations des censeurs. Malesherbes, dans son mémoire sur la liberté de la presse, en parle clairement. C'est aussi pourquoi l'autorisation enregistrée dans les registres de privilèges n'était rien d'autre que le jugement. C'est pour la même raison qu'on avertissait la Chambre, l'Inspecteur de la Librairie, le Lieutenant de Police et le Chancelier des décisions prises, afin qu'ils en exécutent les conséquences, ou qu'ils en soient simplement prévenus. Dès lors, l'opération du sceau n'est plus à la fin de l'Ancien Régime qu'une opération très secondaire, bureaucratique, matérielle, d'apposition du sceau sur le privilège. Il est donc peu probable que cette action ait donné lieu à une censure complémentaire. Il semble même qu'on en ait une preuve dans le Mss. Fr. 22006, registre des feuilles de jugement envoyées au sceau. En effet, les jugements, groupés par feuilles, sont scellés une quinzaine de jours après l'élaboration de la feuille, sans qu'aucune élimination ne paraisse avoir été faite. Évidemment, il est possible qu'entre temps quelques décisions complémentaires aient pu être prises mais il est très improbable qu'elles puissent rendre compte du pourcentage considérable des ouvrages éliminés entre le jugement et l'enregistrement de la permission. Cette hypothèse étant exclue, il ne reste plus que deux possibilités d'expliquer cette élimination, qui dépendent toutes deux de la dernière phase du circuit : l'insuffisance des Syndics et Adjoints ou la négligence des bénéficiaires. E t c'est, semble-t-il, finalement, cette dernière explication qui paraît assurée.
STATISTIQUE
DES
255
PRIVILEGES
Il faut cependant remarquer que les bénéficiaires avaient un double intérêt à faire enregistrer leurs privilèges. Ils se mettaient à l'abri de l'involontaire contrefaçon en rendant publique la décision administrative. D'autre part, ils s'assuraient sur le plan légal la valeur de leur permission, puisque celle-ci, comme on l'a vu plus haut, n'était définitive qu'après enregistrement à la Chambre Syndicale, dans les trois mois de son obtention, faute de quoi elle était nulle. Or les permissions ne furent pas toutes enregistrées, bien qu'elles aient été jugées et scellées, et quand elles le furent, ce fut souvent dans des délais dépassant très largement ceux qui étaient permis. Nous en donnerons ci-dessous un exemple obtenu par l'étude comparée des registres de privilèges (demandes et autorisations) (Mss. Fr. 22001) et d'enregistrement à la Chambre Syndicale (Mss. Fr. 21966). Ce sondage, parmi d'autres, porte sur les onze premières demandes de permissions enregistrées dans le Mss. Fr. 22001. Pour faciliter la lecture nous en donnons le résultat sous forme de tableau. Mss.
Fr. 22001
N° de la demande
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11
Mss.
Date de la demande
10 10 10 10 17 17 17 17 17 17 17
11 11 11 11 11 11 11 11 11 11 11
1774 1774 1774 1774 1774 1774 1774 1774 1774 1774 1774
Date du jugement
15 18 1 27 20 5 17 23 17 17 17
12 5 12 7 4 10 11 2 11 11 11
1774 1775 1774 1775 1775 1775 1774 1775 1774 1774 1774
Fr.
21966
Date de l'enregistrement à la Chambre Syndicale
7 7 1775 30 12 1774 4 9 1775 22 5 1775 23 1 1776 21 3. 3 8.
4 12 12 5
1775 1774 1774 1775
Ce sondage montre, en premier lieu, l'élimination de deux des onze demandes. Toutes deux, les numéros 1 et 7, ont bien été autorisées par les feuilles de jugement, l'une le 15 décembre 1774, l'autre le 17 novembre de la même année. Cependant, elle n'ont pas été enregistrées. L'examen des registres de la Chambre a été fait sur plusieurs années sans en retrouver l'enregistrement. D'autre part, l'hypothèse de l'élimination au cours du sceau est à écarter puisqu'on a vu déjà que le registre Mss. Fr. 22006, registre des feuilles de jugements, indiquait la date du sceau, plus tardif de quelques semaines pour la totalité des jugements. Ainsi les
256
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
bénéficiaires n'ont pas su ou cru devoir faire l'enregistrement. Aucune explication autre ne peut être retenue. Il est vrai, dans cet exemple, que les n 0 8 1 et 7 sont des permissions simples, mais il en est de même des n o s 3, 4, 9, 10. Sans doute ces permissions sont-elles données à un auteur et non à un libraire mais il en est aussi de même pour les n 0 8 3 , 8 , 9 , 1 0 qui furent enregistrés. D'autres remarques complètent cette analyse de la négligence de l'enregistrement : c'est son caractère tardif assez fréquent. Sans doute un espace de temps variable s'écoule-t-il entre la demande et l'autorisation allant du jour même (n 0B 9-10) à près d'un an (n° 6). Mais il en est de même entre le jugement et l'enregistrement allant d'une quinzaine de jours (n 08 9 et 10) à presque six mois (n° 11). Sans doute faut-il tenir compte du temps écoulé entre le jugement et le sceau. Mais le Mss. Fr. 22006, correspondant à ces données, nous montre qu'il s'agit de quelques dix à quinze jours, ce qui explique le minimum des numéros 9 et 10. Le reste doit donc être mis au compte du bénéficiaire, au moins pour cette période. Or celui-ci dépasse trois mois, c'est-à-dire le délai prescrit, entraînant la nullité dans deux autres cas, les n 0 8 6 et 11. Ainsi, au terme de cette analyse, il semble bien que, de toutes les explications possibles de l'élimination des privilèges entre le jugement et l'enregistrement, ce soit la négligence des bénéficiaires qu'il faille retenir comme cause essentielle. Si, maintenant, on examine les fluctuations annuelles soit des statistiques des demandes, des autorisations et des enregistrements (voir planche I), soit des privilèges autorisés et non enregistrés (voir planche II), on est conduit à plusieurs observations : 1° Les variations annuelles des autorisations et des enregistrements ne sont pas toujours identiques. Il arrive que le nombre d'enregistrements annuels soit parfois supérieur au nombre d'autorisations. C'est le cas par exemple en 1726, 1739, 41, 44, 47, 49, 52, 75, 76 et 88. Il arrive aussi que les mouvements d'un an à l'autre s'inversent. C'est le cas par exemple en 1739-41, l'année 1740 étant une hausse des autorisations et une baisse de l'enregistrement. Ces faits n'ont rien d'anormal. Ils proviennent du décalage de temps entre l'autorisation et l'enregistrement, qui légalement ne doit pas être supérieur à trois mois, mais que nous avons vu varier de quelques semaines à un semestre et même davantage. 2° Les cycles interdécennaux d'une vingtaine d'années sont plus accentués dans la série des enregistrements que dans les autres statistiques. Les cycles 1720-1740 ; 1741-1761 ; 1762-1782, quoique plus reconnaissables dans les séries des enregistrements, se retrouvent dans celles des demandes et des autorisations. 3° Non moins intéressant est le mouvement des privilèges non enregistrés. Celui-ci n'est pas très apparent dans la courbe des données naturelles (voir planche II). Cela provient du fait que,
STATISTIQUE
DES
257
PRIVILEGES
certaines années, le nombre des autorisations est inférieur à celui des enregistrements, de sorte que, par le diagramme positif, elles laissent des blancs qui rendent la lecture plus difficile. Pour éviter cet inconvénient, on a soustrait le nombre annuel des enregistrements supplémentaires, quand cela se produisait, du nombre des autorisations non enregistrées de l'année voisine et, pour obtenir des chiffres positifs, divisé ensuite le reste par deux. Ce procédé, ici, ne présente principalement que des avantages, dès lors qu'il s'agit de la lecture de la tendance générale de la courbe. Grâce à lui, on peut constater (voir planche II) une tendance à la hausse dans la première décade du x v m e siècle, suivie d'une baisse jusqu'au milieu du x v m e siècle, à laquelle fait suite une hausse à partir de 1752 qui se poursuit après 1770 jusqu'en 1772-74 et qui est plus accentuée dans les jugements non enregistrés que dans les autorisations des registres de demandes également non enregistrées. L'étude des courbes des autorisations, des enregistrements, et des permissions non enregistrées montre un certain parallélisme. Les trois courbes baissent dans le deuxième quart du siècle et haussent ensemble dans le troisième quart, ce qui semble montrer que la tendance de longue durée des non enregistrements est la même que celle de la production autorisée, dont elle dépend évidemment.
C.
ÉTUDE
COMPARÉE
PRIVILÈGES
ET
DES
STATISTIQUES
PERMISSIONS
D'ENREGISTREMENTS,
DU
D'AUTORISATIONS
SCEAU,
DE
DE
JUGEMENTS,
D'AUTORISATIONS ET D E J U G E M E N T S
NON
E N R E G I S T R É S A LA CHAMBRE.
Cette étude est la même que la précédente, mais, au lieu d'être menée à partir de la statistique des autorisations contenues dans les registres de demandes, elle est conduite à partir de celle des jugements. Comme on s'en doute, c'est sur le plan de la production globale et du pourcentage moyen de non enregistrement que les conclusions vont varier et, cette fois, en aggravant l'importance du non enregistrement à la Chambre Syndicale. En effet, les privilèges accordés vont passer de 6.741 à 7.535 pour 5.882 enregistrements, pendant la période 1764-1788. Par suite, l'écart entre l'enregistrement et les privilèges accordés va croître et passer de 859 à 1.653, c'est-à-dire presque doubler, avec une moyenne annuelle respective de 34 et 66. Dès lors, l'enregistrement à la Chambre Syndicale ne va plus constituer que 78 % des privilèges acceptés par jugement au lieu de 87 % des privilèges des registres d'autorisations et, inversement, le nombre des privilèges et permissions non enregistrés va passer de 13 % à 22 %, c'est-à-dire devenir presque égal à la censure. Enfin, il faut insister sur le fait que ces derniers résultats sont plus probables que les précédents, puisque la statis-
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
tique des jugements est plus sûre. Quant aux variations annuelles, elles ont la même tendance décennale, mais légèrement plus accusées. En conclusion, cette étude de l'enregistrement des privilèges et permissions du sceau à la Chambre Syndicale aura apporté un certain nombre de résultats dont il convient de regrouper les principaux : 1° Tous les privilèges et permissions du sceau accordés n'ont pas été enregistrés à la Chambre Syndicale des Libraires. 2° Les enregistrements représentent 78 % des jugements et 87 % des autorisations ; les privilèges non enregistrés étant selon le cas de 22 % ou de 13 %, le premier de ces chiffres étant le plus probable. 3° La cause historique du non enregistrement paraît être la négligence des bénéficiaires, auteurs et libraires. 4° Les cycles interdécennaux de vingt ans se vérifient et sont plus accentués dans la statistique des enregistrements que dans celle des demandes des autorisations et des jugements. 5° Le mouvement de longue durée des permissions non enregistrées est voisin de celui des autorisations.
259
STATISTIQUE DES PRIVILEGES
STATISTIQUES DES DEMANDES NON ACCEPTÉES PAR JUGEMENT ; DU SUPPLÉMENT DE PRIVILÈGES JUGÉS PAR RAPPORT A U X AUTORISATIONS; DES JUGEMENTS NON ENREGISTRÉS A LA CHAMBRE SYNDICALE DES LIBRAIRES
Années
1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788 1789
Demandes non Supplément de Jugements non accordées par privilèges jugés enregistrés à la jugements par rapport chambre syndimoins les peraux cale 1 missions tacites autorisations
116 72 104 102 145 181 76 115 147 127 80 101 39 41 79 66 43 47 34 58 103 90 184 104 45 —
(3) 20 (8) 45 11 10 73 27 75 26 27 37 94 71 18 30 36 24 32 21 2 10 (14) 45 85 —
37 60 52 76 51 54 77 76 141 3 129 96 83 122 46 57 79 45 38 56 63 26 42 74 70 —
1. Les chiffres de cette colonne placés entre parenthèses correspondent au nombre annuel d'autorisations en supplément des jugements.
260
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
STATISTIQUE DES PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU DEMANDÉS, OCTROYÉS ET NON ENREGISTRÉS A LA CHAMBRE SYNDICALE DES LIBRAIRES
Années
1704 1705 1706 1707 1708 1709 1710 1711 1712 1713 1714 1715 1716 1717 1718 1719 1720 1721 1722 1723 1724 1725 1726 1727 1728 1729 1730 1731 1732 1733
Privilèges accordés non enregistrés
1 166 47 55 78 152 50 103 47 69 61 39
10 13 (13) 45 43 38 38 25 28 25
Années
1734 1735 1736 1737 1738 1739 1740 1741 1742 1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759 1760 1761 1762 1763
Privilèges accordés non enregistrés
56 34 63 56 41 (28) 122 (14) 3 (17) (1) 77 32 (12) 57 (16) 64 55 (24) 33 1 44 41 59 1 29 30 111 14 63
Années
1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788 1789
Privilèges accordés non enregistrés
40 40 60 31 40 44 4 49 66 (23) 102 59 (11) 51 28 27 43 21 6 35 61 16 56 29 (15)
Les chiffres annuels entre parenthèses représentent le nombre de privilèges enregistrés en supplément des autorisations à la Chambre Syndicale.
STATISTIQUE
DES
PRIVILEGES
261
IX. LE CONTENU DES PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU A.
INTRODUCTION.
Les trois études précédentes nous avaient permis d'obtenir des renseignements précieux sur le fonctionnement de l'administration de la Censure, de l'enregistrement des privilèges au Bureau de la Librairie et à la Chambre Syndicale. Il nous reste un dernier problème à envisager. Que représente un privilège ou une permission du sceau ? Sans doute l'étude de l'administration de la Librairie en avaitelle fixé les cadres théoriques. Encore convient-il d'en connaître les cadres réels. B. É T U D E D E S C R I P T I V E .
Une première question se pose. Les cadres théoriques définis lors de l'étude des règlements sont-ils valables ? A cela, il faut répondre par l'affirmative pour l'essentiel. L'étude des registres montre qu'un privilège, s'il est donné le plus souvent pour un livre nouvellement écrit, peut aussi, et cela se produit plusieurs fois chaque année, concerner les ouvrages des auteurs anciens. En second lieu, bien qu'il s'agisse le plus fréquemment de livres manuscrits à imprimer, il arrive que des privilèges soient octroyés pour des ouvrages déjà imprimés. En troisième lieu, s'il est vrai que la statistique des privilèges ne comprend pas les petites productions de moins de deux feuilles cicero, par contre, certaines des productions judiciaires ou administratives, scolaires et religieuses obtinrent des privilèges ou permissions du sceau. Chaque année, des permissions peu nombreuses furent données à des libraires pour imprimer les édits, arrêts etc., qui d'après l'étude théorique des règlements, devaient être autorisés directement par le parlement. Ceci ne veut pas dire que certains recueils de lois ne se soient pas passé de l'autorisation royale. Mais cela prouve que certaines personnes y tenaient. Ainsi trouve-t-on des titres comme celui-ci, « Recueil d'Édits du Roy, déclarations, arrests et règlements concernant les offices de trésorier de police et finances de Bretagne. » (1711). De même il existe des privilèges donnés pour les livres de classe et aussi pour les ouvrages du culte. Nous y reviendrons plus loin. D'autre part, nous l'avons vu déjà, à l'appui d'exemples, certaines demandes de privilèges jugées inacceptables officiellement
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
furent cependant pourvues d'une permission tacite, à partir de 1763, dont la mention est faite dans les registres. Toutefois, l'observation la plus importante concerne le contenu du privilège. Parfois la permission concerne un livre, parfois plusieurs. Ceci ne saurait surprendre, puisque nous avons vu que c'était la fonction de certains privilèges généraux d'être délivrés pour plusieurs ouvrages. Ce fait, cependant, pose le problème du rapport privilège-livre de privilège. L'examen des registres permet de constater qu'un privilège peut être donné : 1° pour un livre. C'est là le cas réglementaire le plus f r é q u e n t ; 2° pour deux ou trois livres différents et précis : par exemple, un privilège f u t donné en 1710 pour les livres intitulés « Perpétuité de la foy..., Dissertation..., Sinopsis historia Patria... ». Un autre, la même année, pour « Les Sermons des Missions par le Père Loris ; Prières Chrétiennes en forme de Méditations pour les trois consécrations, La Vie de Saint Louis », E n ce cas, le privilège mentionne que les ouvrages peuvent être imprimés « conjointement ou séparément ». Ces cas sont rares, de l'ordre de quelques privilèges par an ; 3° pour deux ou plusieurs livres dont certains sont précisés et d'autres pas. C'est le cas, non seulement des livres, mais aussi des ouvrages de musique, et d'estampes. Ainsi un privilège fut-il donné pour «Les quatre petits sujets de Psyché, le Cabinet des Machines, Le Passage de la Mer Rouge, La Descente de Jésus Christ aux enfers et autres estampes dessinées et gravées...»; 4° pour un nombre de livres indéterminé. C'est le cas, notamment, des privilèges donnés pour imprimer les œuvres d'un auteur, par exemple dans certains cas pour les œuvres de Molière ; 5° pour une ou plusieurs catégories d'ouvrages précisés ou imprécisés. C'est le cas des Usages des Diocèses, pour lesquels il y avait une formule générale presque toujours la même. On délivrait alors un privilège pour imprimer les «Bréviaires, Diurnaux, Missels, Antiphoniers, Graduels processionnaux, Epistoliers, Directoires, Heures, Catéchismes, Ordonnances, Mandements, Statuts Synodiaux, Lettres Pastorales et Instructions à l'usage du Diocèse » de tel évêque. Le même procédé est employé pour les livres de classe. On délivre, par exemple, en 1711, un privilège pour «Les auteurs classiques, de Grammaire et d'Éloquence d'Histoire et de Poésie soit grecs ou latins entiers ou par parties, que l'on nomme feuilles de classe à l'usage des collèges d'Amiens ». Même chose encore sur le plan musical ou des gravures.
263
STATISTIQUE DES PRIVILEGES
III. PRIVILÈGES
ET LIVRES
DE
PRIVILÈGES
264
C. É T U D E
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
STATISTIQUE.
L'analyse précédente prouve donc que la statistique des privilèges ne correspond pas à celle des livres officiellement autorisés, d'une part et, d'autre part, que cette dernière ne saurait être obtenue à partir de ces registres d'une manière précise, puisque les troisième, quatrième et cinquième catégories correspondent à un nombre de livres indéterminés, en tout ou en partie. En effet on ne sait jamais combien de catéchismes seront imprimés avec le même privilège, ni quelles sont les œuvres d'un auteur ou les livres des collèges. Aussi bien s'est-il avéré vain de chercher à établir cette statistique pour toute la période. Cependant, un sondage nous a paru intéressant pour avoir un aperçu non de la différence réelle mais de l'écart entre les privilèges et les livres de privilèges dont le titre est précisé. 1. Le
dépouillement.
De la sorte, nous avons dépouillé les mêmes registres, en comptant par titre, les privilèges des quatrième et cinquième catégories, imprécisés étant comptés pour une unité, et les indications indéterminées de la troisième pour rien. Nous avons procédé, dans des conditions identiques, au dépouillement des privilèges, pour obtenir les demandes, les autorisations et les non autorisations. Le sondage a été effectué pour la période 1741-1788. 2. Analyse
statistique.
Un certain nombre de conclusions intéressantes devaient être dégagées de l'analyse des séries de chiffres et de leurs diagrammes. 1° Sur le plan de la production globale (voir planche III), il s'avère que le nombre de livres de privilèges est différent du nombre de privilèges. Pour la période 1741-1788, c'est-à-dire pour quarante-huit ans, on relève 21.188 demandes de livres de privilèges pour 17.868 demandes de privilèges, soit une moyenne annuelle respective de 441 et 372. La différence est approximativement de 19 % des privilèges. Ainsi, le nombre des livres en supplément, au moment de la demande, qui est de 3.320, soit une moyenne annuelle de 69, correspond-il approximativement à 1/5 de la production des demandes de privilèges. Cet écart varie peu dans le cas des autorisations et des ouvrages censurés. On décompte 13.369 autorisations de livres pour 11.014 privilèges, soit une différence de 2.355 titres pour la production globale, avec des chiffres annuels respectifs de 278, 229 et 49.
STATISTIQUE
DES PRIVILEGES
IV. L I V R E S D E P R I V I L È G E S E N DES P R I V I L È G E S
265
SUPPLÉMENT
266
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
L'écart est alors de 21 %. Si les livres autorisés en supplément de privilèges sont en légère hausse de 2 % par rapport aux livres demandés, les livres censurés supplémentaires diminueront légèrement. On compte en effet 7.636 livres censurés et 6.671 privilèges non autorisés. Les moyennes sont respectivement de 159 et 139. Le nombre des livres interdits en supplément des privilèges non accordés est de 965 et le pourcentage est alors de 15 %. Ainsi l'écart entre privilèges et livres de privilèges varie-t-il de 15 à 21 %, c'est-à-dire approximativement entre 1/5 et presque 1 /7 de la production des privilèges. Il faut insister sur le fait qu'il s'agit du nombre de livres dont les titres sont précisés, et que, comme nous l'avons vu, ce chiffre est nécessairement supérieur, puisqu'une partie des privilèges comporte des autorisations officielles d'imprimer pour des séries de livres non déterminés. 2° Un deuxième résultat se dégage de l'étude comparée. S'il y a une différence entre la production des privilèges et celle des livres de privilèges, par contre les rapports précédemment déterminés entre le nombre des demandes, des autorisations et des demandes non accordées s'avèrent à peu près identiques, ce qui est une confirmation non négligeable de l'importance de la censure. En effet, le pourcentage des autorisations, pour la période 17001788, était de 64 % des demandes. Celui de la période qui nous occupe ici est de 62 % et celui des livres de privilèges pour cette même période est de 63 %. Ainsi la production censurée s'établitelle à 36, 37 ou 38 %, soit plus d'un tiers de la production des demandes, et elle ne varie pour ainsi dire pas, qu'il s'agisse de privilèges ou de livres de privilèges. 3° Si l'on se place non plus sur le plan de la production globale mais sur celui des variations annuelles (voir planche II), on constate une identité dans les mouvements de longue ou courte période et dans les différents cycles à quelques exceptions près. Si les livres de privilèges sont plus nombreux d'environ 1/5 que les privilèges, les fluctuations demeurent en général semblables, comme le sont les rapports entre demandes, autorisations et censure. 4° Une autre observation doit être faite. Si les mouvements des privilèges et des livres de privilèges sont identiques en tendance, ils sont différents en ampleur. Cette variation est à l'origine de cycles d'une dizaine d'années. L'examen de la courbe des livres en supplément des privilèges (voir planche 15) permet d'en reconnaître trois : le premier de 1741 à 1752 ; le second de 1753-1756 à 1769-1772 ; le troisième de 1770-73 à 1785. D'autre part, il semblerait que ces cycles se superposent dans une certaine mesure aux mouvements de hausse ou de baisse des cycles interdécennaux de la production. Le premier, de 1741 à 1752, correspond à la hausse de 1741 à
STATISTIQUE DES
PRIVILEGES
267
1751 ; le second, de 1753-56 à 1769, à la hausse de 1756 à 1768 ; le troisième, de 1770-73 à 1785, à la baisse de la production de 1769 à 1782. Ceci supposerait donc une évolution du contenu du privilège et parallèlement une variation de la démarche des auteurs libraires et de l'administration. Au début du mouvement, qu'il s'agisse d'une hausse ou d'une baisse, on aurait tendance à grossir le contenu du privilège, à donner une permission pour plusieurs livres. Inversement, on le diminuerait vers la fin, en réduisant le nombre de livres pour une permission. On assisterait alors à une sorte de censure formelle. Dans la première phase, on procéderait d'une manière libérale ; dans la seconde, on tendrait à redonner de la valeur au privilège, en diminuant le nombre des ouvrages. 5° Enfin la tendance générale à travers les dernières décades de l'Ancien Régime paraît être à la baisse, le nombre des livres pour un privilège diminuerait progressivement. Ainsi, cette étude du rapport privilège-livre de privilèges n'aura pas été inutile. Elle nous aura assuré plusieurs résultats qu'il est utile de regrouper : 1° L'étude ne peut être faite en absolu. Il n'est pas possible d'atteindre tous les livres de privilèges mais seulement une partie, ceux-là dont les titres sont définis. 2° Dans les cadres de ces possibilités, on a pu constater que le nombre de livres de privilèges est supérieur de 1/7 à 1/5 à celui des privilèges. 3° Les privilèges et les livres de privilèges ont une censure égale à 1/3 environ des demandes. 4° L'évolution des privilèges et des livres de privilèges est identique en ce qui concerne les mouvements et différente en amplitude. Celle-ci a deux conséquences qui concernent l'évolution ou la statistique des livres en supplément des privilèges. D'abord, elle est cause des cycles de plus d'une dizaine d'années qui semblent se superposer aux mouvements de hausse et de baisse des cycles interdécennaux de la production. Elle est ensuite à l'origine de la baisse à travers la longue période des données de cette série.
268
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
S T A T I S T I Q U E DES L I V R E S D E P R I V I L È G E S D O N T L E T I T R E EST P R É C I S É
Demandes
Autorisations
Non
autorisées
PermisAnnées
1741 1742 1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1706 1757 1758 1759 1760 1761 1762 1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777
Livres Livres Livres Livres de moins de moins privilèges privilèges privilèges privilèges
348 417 400 386 379 553 423 370 400 525 606 440 397 373 375 323 381 452 420 393 476 422 494 511 455 452 532 622 579 479 482 620 385 423 596 436 472
88 92 61 104 101 173 127 0 75 140 153 4 55 40 44 16 43 74 77 85 123 105 122 154 118 97 76 83 21 28 60 11 16 41 146 77 84
213 244 188 222 295 312 210 176 205 253 373 200 251 238 228 187 238 229 260 265 295 246 327 330 345 333 367 455 366 324 326 379 221 308 387 263 322
82 85 58 73 97 81 52 0 5 47 146 4 51 39 28 13 43 48 63 80 109 70 108 92 108 91 64 82 9 28 56 2 10 36 78 39 56
sions tacites
6 8 7 6 10 10 6 10 10 5 3 3 2 10
Livres Livres de moins privilèges privilèges
135 173 212 164 84 241 213 194 195 272 233 240 146 135 147 136 143 223 160 128 181 176 167 175 102 112 159 157 203 149 146 231 159 112 206 171 140
6 7 3 31 4 92 75 0 70 93 7 0 4 1 16 3 0 26 14 5 14 35 14 62 10 16 2 1 12 0 4 9 6 5 68 38 28
STATISTIQUE
DES PRIVILEGES
269
S T A T I S T I Q U E DES L I V R E S D E P R I V I L È G E S D O N T L E T I T R E EST PRÉCISÉ (suite)
Autorisations
Demandes Années
1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788
X.
Livres de
Livres Livres Livres moins de moins privilèges privilèges privilèges privilèges
418 384 372 338 285 355 400 378 521 511 429
49 61 63 39 15 50 12 11 42 44 20
267 266 255 253 198 256 280 267 338 327 281
6 47 29 32 0 37 2 7 34 20 18
Non Permissions tacites
11 8 4 7 6 7 5 7 5 11 16
autorisées
Livres de
Livres moins privilèges privilèges
140 110 113 78 81 92 115 104 178 173 132
43 14 34 7 15 13 10 4 8 24 2
CONCLUSIONS SUR L ' É T U D E S T A T I S T I Q U E DES R E G I S T R E S D E P R I V I L È G E S ET PERMISSIONS D U SCEAU
Comme on a pu s'en apercevoir dans les pages qui précèdent, cette étude a été non seulement longue mais importante. Les résultats ont été obtenus à partir de groupes de registres différents ; ils concernent des séries statistiques naturelles ou déduites, des périodes variables, et sont appréciés soit globalement, soit en moyenne arithmétique annuelle, soit en pourcentage lors des comparaisons. Rappelons d'abord que toutes les séries de registres n'ont pas fourni des séries statistiques. Les registres de privilèges ont donné les demandes, les autorisations, les demandes non accordées soit des privilèges soit des livres de privilèges. Les registres de feuilles, les jugements ; ceux de la Chambre Syndicale, les enregistrements. Certains autres enfin, les permissions d'imprimer. On a pu obtenir, grâce à eux, les résultats groupés dans plusieurs tableaux... Quoique tous ces résultats aient une importance, on peut encore les simplifier. Ainsi la demande pour le x v m e siècle jusqu'à la Révolution est-elle de l'ordre d'environ 30.000 privilèges, avec une
270
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
moyenne annuelle qui oscille entre 369 et 401. Les autorisations, pour la même période, sont au nombre d'une vingtaine de mille, avec une oscillation annuelle entre 229 et 301 privilèges, peut-être un peu plus, du fait de l'enregistrement incomplet sur les registres de privilèges. Le pourcentage des autorisations s'établit entre 62 et 75 % des demandes, en tenant compte des jugements pour une période assez réduite, le dernier chiffre étant d'ailleurs le plus probable. De ce fait, la censure, qui paraît comprendre toujours, pour la même période, une dizaine de milliers de demandes, qui varie annuellement entre 92 et 139 privilèges, correspond-elle à un pourcentage variable entre 37 et 25 %, ce dernier chiffre étant le plus probable. L'enregistrement à la Chambre Syndicale, qui comporte une quinzaine de milliers de privilèges, varie dans sa moyenne annuelle entre 179 et 235, et ne correspond qu'à 84-87 % des autorisations, 78 % de jugements, et ne comprend qu'un peu plus de la moitié des demandes (54-59 %). Aussi bien le non enregistrement dû à la négligence des bénéficiaires de privilèges varie-t-il entre 13 et 22 % des autorisations évaluables pour le x v m e siècle à plus de 3.000 privilèges, avec une moyenne annuelle oscillant entre 34 et 66 permissions. Une négligence comparable, mais au Bureau de la Librairie, conduit à un non enregistrement des jugements égal à 11 % de la totalité de ceux-ci. Enfin| l'écart entre les privilèges et les livres de privilèges, dont le titre est précisé sur les registres, varie suivant la demande, l'autorisation ou la censure, entre 15 et 21 %, soit approximativement 1/5 des privilèges. Ce chiffre est évidemment inférieur à la réalité, puisque les catégories de livres imprécisés n'ont pu être décomptés. Les fluctuations annuelles n'ont pas été moins instructives que les données globales. On a pu constater que les courbes n'étaient pas indifférentes. Il existe des cycles décennaux, interdécennaux. Ces derniers sont assez précis. Ils s'étendent chacun sur une vingtaine d'années. La statistique des enregistrements à la Chambre Syndicale et des permissions d'imprimer a permis d'en déceler sept : de 1639 à 1658 ; de 1659 à 1673 ; 1674-1694 ; 16951719 ; 1720-1740 ; 1741-1761 ; 1762-1783. Ces différents cycles se sont retrouvés, parfois avec un ou deux ans de décalage, dans chacune des séries. Il a été possible également de déceler des tendances inspirant la production dans la longue période et qui se retrouvent aussi bien dans les demandes que dans les autorisations : baisse du début du x v m e siècle à 1741, hausse de 1742 à 1769-72, baisse ensuite. De même, chaque série a montré sa personnalité propre. A une hausse légère de 1726 à 1772 des demandes correspond une baisse accentuée des autorisations de 1726 à 1752, ce qui permet de déter-
STATISTIQUE
DES
271
PRIVILEGES
miner le mouvement particulier de la censure, de baisse jusqu'en 1729, de hausse ensuite jusqu'en 1752, de baisse enfin dans le 3 e quart du x v m e siècle, ce qui a permis de conjecturer l'existence d'une variation de la censure, le libéralisme et l'absolutisme l'emportant tour à tour. Les enregistrements ont permis de discerner l'existence d'un cycle séculaire de 1660 à 1760. Il semble qu'il soit composé d'une hausse dont le sommet pourrait être l'année 1723. A ce mouvement succède une baisse durant la deuxième moitié du x v m e siècle. Enfin une nouvelle hausse a lieu dans le troisième quart du siècle. Le cycle paraît être conforme aux observations faites dans les autres séries à l'exception du sommet, qui est plus tardif dans la statistique des enregistrements que dans celle des demandes et des autorisations.
Phases du circuit
Périodes
Privilège
1700-1788 (—1716-23)
81 29897
369
1704-1788 (—1716-23)
77 28585
371
1741-1788
48
17868
372
1764-1788
25
10017
401
1741-1788
48 21188
441
119% des privilèges
Autorisa- Privilège 1700-1788 tions (—1716-23)
81
19096
236
64 % des demandes
1704-1788 (—1716-23)
77
18300
238
64 % des demandes
1741-1788
48
11014
229
62 % des demandes
Livre de Privilège
Total
Pourcentage pour la même période
Indice
Demandes
Années
Moyenne annuelle
PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE DES DONNÉES GLOBALES DES SÉRIES NATURELLES
272
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Périodes
Années
Total
Moyenne annuelle
P R I V I L È G E S ET PERMISSIONS D U SCEAU RÉSULTATS DE L ' A N A L Y S E STATISTIQUE DES D O N N É E S GLOBALES DES SÉRIES N A T U R E L L E S (suite)
Pourcentage pour la même période
Autorisa- Privilège tions
1764-1788
25
6741
270
67 % des demandes 89 % des jugements
Livre de Privilège
1741-1788
48
13369
278
63 % des demandes 121 % des privilèges
Privilège
1764-1788
25
7535
301
75 % des demandes
1661-1789 (— 1700-03)
125 22463
180
1704-1788 (-1716-23)
77
15347
200
54 % des demandes 84 % des autorisations
1764-1788
25
5882
235
59 % des demandes 87 % des autorisations 78 % des jugements
21
3141
149
Phases du circuit
Jugements
Circuit
Enregis- Privilège trements
Autorisa- Permis1636-1663 tions (?) sion d'im- (—1647-53) primer
STATISTIQUE
DES
273
PRIVILEGES
PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE DES DONNÉES GLOBALES DES SÉRIES DÉDUITES Nature de la Recherche
Périodes
Années
Total
Moyenne annuelle
Pourcentage pour la même période
1700-1788 ( _ 1716-23)
81
10618
131
36 % des demandes
1704-1788 (-1716-23)
77
10102
131
35 % des demandes
1741-1788
48
6671
139
37 % des demandes
1764-1788
25
3093
124
31 % des demandes
Privilège Jugement
1764-1788
25
2299
92
23 % des demandes
Livre de Privilège Autorisation
1741-1688
48
7636
159
36 % des demandes
1764-88
25
794
32
11 % des jugements
77
2953
38
16 % des autorisations
25
859
34
13 % des autorisations
25
1653
66
22 % des jugements
Indice
Censure Privilège Autorisation
Juge- Privilège ments non enregistrés sur les Registres de Privilèges
Non Privilège 1704-1788 enregis(—1716-23) trement Autorisation à la 1764-1788 Chambre Syndicale Privilège Jugement
1764-1788
274
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATITISQUE DES DONNÉES GLOBALES DES SÉRIES DÉDUITES (suite) Nature de la Recherche
Indice
Livres Demande des Privilèges en suppléAutoriment sations des Privilèges Non autorisations
Moyenne annuelle
Pourcentage pour la même période
Périodes
Années
Total
1741-1788
48
3320
69
19 % des privilèges
1741-1788
48
2355
49
21 % des privilèges
1741-1788
48
965
20
15 % des privilèges
CHAPITRE II
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES PERMISSIONS TACITES
I. INTRODUCTION De même que pour les privilèges et permissions du sceau, la statistique des permissions tacites n'a pas été obtenue à partir de toutes les séries de registres déjà étudiées. Les répertoires de demandes et autorisations ont été éliminés pour les mêmes raisons que ceux des registres de Privilèges : ils faisaient double emploi avec les registres de demandes sans avoir d'utilité nouvelle. Les feuilles de permissions tacites (Manuscrit Français 21.988), ont aussi été écartées parce que ce manuscrit était incomplet. Si les registres de permissions tacites ont des traits communs avec les privilèges, ils ont aussi des caractéristiques particulières qui intéressent la statistique. Ainsi, puisque les décisions transmises par feuilles furent enregistrées entièrement par les Syndic et Adjoints à la Chambre Syndicale, la statistique des registres de feuilles et celle des enregistrements se superposeront de 1764 à 1787. C'est-à-dire que la statistique des permissions tacites ne comprendra que les données des séries de registres de demandes et d'autorisations, des registres de feuilles et d'enregistrement, ces deux dernières séries se doublant. Ces manuscrits fourniront les données annuelles, la production globale, la moyenne annuelle, et permettront de discerner les fluctuations des demandes de permissions, des autorisations inscrites dans les registres de demandes, des autorisations transmises à la Chambre par feuille, des enregistrements. L'étude
276
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
comparée ensuite, dans les mêmes conditions que précédemment, renseignera sur la censure des permissions tacites à partir des deux séries de statistiques d'autorisations et la différence numérique de celles-ci précisera quelle fut l'efficacité de l'enregistrement au Bureau de la Librairie. Enfin, ces résultats confirmeront notre hypothèse sociologique d'une certaine régularité, en la précisant.
II. LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES REGISTRES DE DEMANDES ET D'OCTROIS DE PERMISSIONS TACITES A. LE
DÉPOUILLEMENT.
Les registres de permissions tacites permettent d'obtenir directement les statistiques de demandes et d'autorisations données et enregistrées dans l'ordre chronologique des demandes. Le dépouillement concerne successivement les deux séries des registres dits d'impressions étrangères et ceux intitulés registres de permissions tacites. 1. La série des étrangère.
registres
de permissions
tacites
dits
d'impression
Ils nous offrent la statistique bibliographique de 1718 à 17711772. Cependant, la composition des registres, notamment l'absence d'indication des dates de demandes et d'obtention d'une manière suffisante a obligé à un dénombrement fréquent par période et à la constitution de moyennes annuelles. La statistique est donc composée : a) De données annuelles réelles, dans tous les cas où le début ou la fin de l'année sont indiqués nettement. C'est le cas dans le Mss. Fr. 21990 pour les années 1719-1730 et 1733-1736, ainsi que pour 1746. Il en est de même pour le Mss. Fr. 21993, qui donne les chiffres annuels de 1766-67 à 1772. b) Des moyennes annuelles, dans tous les cas où les dates n'existent pas ou sont trop espacées pour permettre une détermination valable. C'est le cas : — dans le Mss. Fr. 21990, pour les années 1731-1732, dont le total, 76 demandes et 52 autorisations, a été divisé par deux. Également pour la période plus longue, 1737-1745, où les 279 demandes et les 162 autorisations ont été divisées par 9. — Dans le Mss. Fr. 21994. Pour toute sa durée. Les 1099 demandes et les 666 autorisations ont fourni les moyennes annuelles de 1751 à 1759. — dans le Mss. Fr. 21992 également, en entier. Les 530 demandes
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
277
TACITES
et les 280 autorisations ont fourni les moyennes annuelles de 1760 à 1763. — dans le Mss. Fr. 21991. La moyenne annuelle a été obtenue d'une manière un peu particulière. E n effet le Mss. Fr. 21992 s'achevait en août 1763 et celui-ci se termine en novembre 1766. Le nombre total de demandes (1147) et d'autorisations (740) a été divisé par la durée totale de l'enregistrement, soit 37 mois (4 pour 1763, 12 pour 1764, 12 pour 1765 et 11 pour 1766) et la moyenne mensuelle a permis d'obtenir les moyennes annuelles de 1764 et 1765. Les quatre mois de 1763 ont été ajoutés à la moyenne de 1763 obtenue par le Mss. Fr. 21992. L'année 1766 a été constituée par addition des onze moyennes mensuelles contenues dans le Mss. Fr. 21991 aux données de décembre se trouvant dans le Mss. Fr. 21993. c) Enfin, il faut mentionner l'absence de données pour les années 1747-1750. Le Manuscrit Français 21990 devrait se poursuivre jusqu'en 1750. En réalité il s'arrête en 1745-6 et le Mss. Fr. 21994 ne reprend qu'en 1750. 2. La série des registres
de permissions
tacites.
Ils fournissent la statistique pour les années 1773-1787. a) Le Mss. Fr. 21983. De 1773 à 1781. Comme on l'a vu ci-dessus, le mois de décembre 1772 a été ajouté aux onze moyennes mensuelles du Mss. Fr. 21993. L'année 1782 a été obtenue par addition des données contenues dans ce manuscrit jusqu'au 30 avril, avec celles du suivant, à partir du 1 e r mai. b) Le Mss. Fr. 21986. Outre les données des quelques mois de 1782, il donne la statistique de 1783 à 1787. L'année 1788 est incomplète, puisque la numération s'arrête en juillet. Les chiffres représentent les nombres réels ou les moyennes de permissions, non des titres. Les mêmes remarques qui ont été faites pour les privilèges à propos du contenu de la permission valent ici pour les permissions tacites. Enfin, à partir de 1774 sont indiqués les « livres entrés par la Chambre ». Ceux-ci, qui concernent un autre type d'autorisation, n'ont pas été comptés, afin de conserver les cadres de la statistique des permissions tacites. B. A N A L Y S E
STATISTIQUE.
Puisque ces registres nous donnent deux séries différentes de statistiques nous les étudierons successivement. 1. La statistique
des demandes
de permissions
tacites.
On dénombre pour toute la période 1719-1787 (moins 1747-50), 10056 demandes, soit une moyenne de 154. Si l'on examine les
278
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
V. PERMISSIONS TACITES
DE LA FRANCE
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
TACITES
279
fluctuations annuelles (voir planche V ) on est amené à plusieurs considérations. Tout d'abord, l'absence de données annuelles et les moyennes dissimulent les cycles pour la période 1737-1760-82. Malgré cela, dans la période antérieure 1719-1736, il semble que l'on puisse constater une tendance à la baisse, de 1719 à 1727, et une hausse de 1728 à 1736. D'autre part, le cycle interdécennal de 20 ans déjà connu, 1760-62 à 1782, se retrouve, composé de deux cycles décennaux, 1762-1772 et 1773-1782. Toutefois, le plus grand intérêt de la courbe des demandes de permissions tacites, c'est, évidemment, la hausse intraséculaire qui, à travers les cycles, ne cesse de se poursuivre. Cette hausse n'est pas quelconque. Elle semble se produire par périodes, que les moyennes rendent plus discernables et qui sont au nombre de quatre : 1719-1729 ; 17301746 (1750) ; 1751-1762-63 ; 1764-1787. L'accélération de l'une à l'autre n'est pas non plus sans intérêt. Ainsi, on a 148 demandes et une moyenne annuelle de 13 pour la première période ; puis respectivement, 496 et 29 pour la seconde ; 1.750 et 135 pour la troisième ; 7.662 et 319 pour la quatrième. L'appréciation de l'accélération ne peut évidemment être faite à partir des chiffres globaux des périodes, puisque les laps de temps sont variables. Par contre, elle peut l'être à partir des moyennes annuelles. Or si l'on apprécie le rapport des unes aux autres, on constate que la moyenne de la deuxième période équivaut approximativement à deux fois la première ; la troisième à 10 fois, la quatrième à plus de 24 fois. Ainsi, l'accélération est égale au carré de la première à la seconde période, et elle serait plus ou moins égale au cube dans les troisième et quatrième périodes où l'ascension se produit, proportionnellement, au nombre initial de la demande, d'une manière vertigineuse. Cette explication logique renvoie à une interprétation sociologique. Cette hausse de la demande est extrêmement importante. En effet, on sait que les permissions tacites correspondent à une production qui n'est pas orthodoxe, bien qu'elle ne s'affiche pas directement oppositionnelle. Les permissions tacites sont donc la production tolérée, et leur évolution, du même coup, est celle de la pensée libérale, et dans une certaine mesure, de l'esprit libéral de l'autorité royale. Celui-ci croît à travers le x v m e siècle. Cette constatation va se nuancer dans le cadre des périodes déjà déterminées. En effet, les études précédentes avaient permis de discerner un élargissement de la tolérance par la baisse de la censure à la fin du règne de Louis X I V et pendant la Régence ; une augmentation de l'autoritarisme et de la censure, entre 1729 et 1752, au début du règne de Louis X V , suivie d'un retour à la tolérance à partir de cette dernière date jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, réserve faite des toutes dernières années. Ces constatations vont se retrouver ici dans le mouvement même des permissions tacites. Leur institution, à la fin du règne de Louis X I V ou dans les premières années
10
280
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
de la Régence, n'est pas sans signification. [Elles sont instituées dans le temps que l'autorité royale devient plus tolérante sur le plan des privilèges. Leur naissance confirme bien l'existence d'une période libérale de 1715 à 1729. L'intérêt de la seconde période ne peut être apprécié que par la comparaison de la moyenne annuelle non seulement avec la moyenne de la période précédente mais aussi avec celle de la suivante. Elle double de la première à la seconde, et l'on pourrait justement penser à une hausse importante, si le passage à la troisième phase, qui comporte une multiplication approximative par cinq de la moyenne de la deuxième période, ne faisait percevoir qu'il s'agit en fait d'une hausse freinée d'une baisse sur la hausse. Puisqu'on a institué les permissions tacites, on les conserve, mais on n'enregistre que le moins possible de demandes qui, d'ailleurs, augmentent faiblement. On freine le mouvement en avant, qui n'est pas encore très volontaire. Toutefois, dès 1750-52, dès l'arrivée du libéral Malesherbes à la tête des affaires de la Librairie, on change de politique. Devant la pénétration des idées nouvelles, devant l'augmentation très importante de la production intellectuelle qui n'est plus orthodoxe, pour éviter d'être débordée, l'autorité royale relâche son emprise et la moyenne des demandes enregistrées passe d'abord à 135 contre 29, puis à 319 contre 135, quintuplant, puis décuplant, par rapport à la moyenne de la seconde période. Dans les dernières décades de l'Ancien Régime, la production des demandes de permissions tacites évolue dans l'esprit du libéralisme. Ainsi, en conclusion, cette statistique aura été extrêmement utile. Outre les données globales et la moyenne annuelle, elle nous aura apporté un renseignement de première importance : les Permissions Tacites, production tolérable, ont une accélération remarquable à travers le x v m e siècle. Elles haussent diversement suivant les périodes, et confirment l'évolution cyclique de l'autoritarisme et du libéralisme à travers le siècle. 2. La statistique
des permissions
tacites
accordées.
On dénombre, pour la période 1719-1787 (moins les années 174750) 5.652 autorisations enregistrées dans les registres de demandes, c'est-à-dire une moyenne annuelle de 87. Les observations concernant les fluctuations sont identiques (voir planche Y) à celles déjà faites pour les demandes, qu'il s'agisse des cycles décennaux ou interdécennaux de vingt ans ou du mouvement intraséculaire de hausse, ainsi que des périodes et de leur signification. Les chiffres seuls diffèrent. Ainsi on passe pour la période 1719-29 à 64 autorisations, soit une moyenne annuelle de 6 et, respectivement, à 293 et 17 pour la seconde (173046-50) ; à 1.026 et 79 pour la troisième (1751-63) ; à 4.269 et 178 pour la quatrième (1764-87).
STATISTIQUE
DES
PERMISSIONS
TACITES
281
III. LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES REGISTRES DE F E U I L L E S DE PERMISSIONS TACITES A.
DÉPOUILLEMENT.
Le nombre annuel de Permissions Tacites accordées, classées dans l'ordre chronologique de la décision prise, a été obtenu à partir des registres suivants : — Le Manuscrit Français 21981. — De 1764 à 1770. L'année 1763 est incomplète. L'année 1771 a été obtenue par addition des données de ce registre (jusqu'au 7 février) avec celles du Mss. Fr. 21984 (à partir du 21 février). — Le Manuscrit Français 21984. — De 1771 à 1783. L'année 1784 est faite des données de ce registre (jusqu'au 18 novembre) ajoutées à celles du Mss. Fr. 21987 (du 2 décembre à la fin de ce mois). — Le Manuscrit Français 21987. — D e 1785 à 1787. Les «livres entrés par la Chambre » n'ont évidemment pas été incorporés à cette statistique qui se poursuit donc de 1764 à 1788. B. A N A L Y S E
STATISTIQUE.
Le nombre total de permissions accordées par feuilles est de 4618 pour les 24 années de la période 1764-1787, soit une moyenne annuelle de 192. Les fluctuations annuelles (voir planche V) offrent une perspective plus limitée que les statistiques précédentes et permettent de déceler, à travers les cycles intradécennaux, une baisse de 1770-1774 à 1783, suivie d'une hausse dans les dernières années de l'Ancien Régime.
IV. LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES REGISTRES D'ENREGISTREMENT DES PERMISSIONS TACITES A LA CHAMBRE SYNDICALE DES LIBRAIRES A. LE
DÉPOUILLEMENT.
La statistique des permissions tacites enregistrées à la Chambre Syndicale pour les années 1751-1787 (moins les années 1753-55) a été obtenue à partir des deux registres suivants : — Le Manuscrit Français 21982. — De 1751 à 1782. L'année
282
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
1783 est obtenue par addition des données de ce registre (jusqu'au 23 mars) et de celles du Mss. Fr. 21985 (à partir du 24 avril). — Le Manuscrit Français 21985. — De 1784 à 1787. Là aussi, le nombre des livres entrés par la Chambre « n'a pas été incorporé ». De plus, cette statistique n'est originale que pour les années 1751-1763 moins les années 1753-55, pour lesquelles il n'y a pas d'enregistrement, puisque, à partir de 1764, le nombre annuel d'enregistrement est le même que celui des feuilles de permissions tacites dont l'enregistrement est une copie. B. ANALYSE
STATISTIQUE.
On décompte, pour cette période, 5.429 enregistrements, soit une moyenne annuelle de 160. Les fluctuations, et par suite les observations, sont les mêmes que pour la statistique des feuilles pour la période 1764-87. Le seul intérêt de cette série concerne les variations antérieures, de 1751 à 1763, malgré l'absence de données pour 175355. En effet, les statistiques précédentes ou ne nous renseignaient pas, faute de chiffre (statistique des feuilles), ou ne mentionnaient qu'un niveau moyen (statistiques des demandes et autorisations). Grâce aux enregistrements, l'accélération de la hausse de la troisième période (1751-63) à la quatrième (1764-87) se confirme (voir planche Y). En effet, dans l'une, on relève 811 autorisations enregistrées et une moyenne annuelle de 81, et dans la seconde, respectivement 4.618 et 192. Ainsi le rapport approximatif de 2 à 1 entre la quatrième et la troisième période, déjà constaté pour les demandes et pour les Autorisations enregistrées sur les registres de demandes, se vérifie. De plus, dans la troisième période, on peut discerner une baisse de 1751 à 1752 et un cycle intradécennal de 1756 à 1761.
Y. LA CENSURE DES DEMANDES DE PERMISSIONS TACITES A.
INTRODUCTION.
L'étude de la censure des permissions tacites équivaut à comparer les première et quatrième phases de ce circuit administratif. La première ne comporte qu'une statistique. Par contre, comme pour les privilèges, la quatrième en possède deux, qui permettront deux études différentes : la censure à partir des autorisations relevées sur les registres de demandes pour la période 1719-1787 ; la censure à partir des autorisations des registres de feuilles, pour la période réduite 1764-1787. Nous les examinerons successivement.
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
B . LA C E N S U R E TIQUES
DES
PERMISSIONS
BIBLIOGRAPHIQUES
DES
D'OCTROIS D E P E R M I S S I O N S
283
TACITES
TACITES, D ' A P R È S REGISTRES
DE
LES
STATIS-
DEMANDES
ET
TACITES.
Cette étude doit comporter deux parties : d'abord, la détermination de la statistique des demandes de permissions non accordées, l'étude comparée ensuite des demandes, autorisations et demandes non accordées. 1. La statistique bibliographique tacites non accordées.
des
demandes
de
permissions
Elle est obtenue par la différence annuelle entre les demandes et les autorisations. Cependant, à partir de 1764, et jusqu'en 1781, certaines demandes ont été pourvues d'un privilège et transférées dans les registres de permissions du Sceau. Elles ont été défalquées. Enfin, ces chiffres annuels correspondent sur les registres aux demandes « refusées », « retirées », « réprouvées ». Quand les données annuelles sont des moyennes, la soustraction a été faite dans les mêmes conditions. On dénombre, pour la période 17191787 (moins les années 1746-50), 4.186 demandes non accordées, soit une moyenne annuelle de 64. Des remarques identiques à celles des demandes et des autorisations peuvent être faites pour les demandes non accordées (voir planche V), qu'il s'agisse de la hausse intra-séculaire ou des cycles intra-décennaux ou décennaux. L'accélération se poursuit d'une période à l'autre. Ainsi passe-t-on de 84 non autorisations avec une moyenne de 8 pour la première période (1719-29), respectivement à 203 et 12 pour la seconde (1730-46), 724 et 56 pour la troisième (1751-63), et 3.175 et 132 pour la quatrième (1764-87). 2. Étude comparée des statistiques bibliographiques des demandes, autorisations, demandes de permissions tacites non accordées.
Une première remarque est à faire sur le plan de la production globale. Les autorisations ne constituent que 56 % des demandes, et les demandes non accordées, 41 % ; la différence correspond aux privilèges donnés à partir de demandes de permissions tacites. Ainsi, le pourcentage des demandes non accordées dépasse un tiers et ne constitue pas tout à fait la moitié des ouvrages présentés (voir planche V). L'examen des fluctuations annuelles (voir planche V) n'est pas moins intéressant. D'une manière générale, le mouvement intraséculaire de hausse se vérifie dans les trois courbes. Toutefois, il faut remarquer que si le pourcentage des demandes non accordées est identique dans les trois dernières phases, soit de 41 %, il est par
284
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
contre plus important dans la première, puisqu'il s'élève à 57 %. Encore faut-il tenir compte, ici, de la petitesse des chiffres des premières années, qui tend généralement à amplifier les appréciations. Malgré cela, il semble que, à l'origine, l'autorité royale, après avoir accepté le principe de la délivrance des permissions tacites, ait décidé de pratiquer une censure très sévère qui, plus tard, décroîtrait assez brusquement, pour se maintenir jusqu'à la fin de l'Ancien Régime à un niveau constant. Ainsi, le mouvement de la censure des permissions tacites est en général identique à celui de la demande. Il semble donc assuré que la politique de l'administration de la Librairie, dans la matière des permissions tacites, a été d'accepter d'être tolérante en enregistrant les fluctuations de la production semi-hétérodoxe, et notamment son accroissement constant, sans s'y opposer dans la tendance, mais en pratiquant une sévérité constante en ce qui concerne la délivrance des permissions. C.
LA C E N S U R E TIQUES
DES
PERMISSIONS
BIBLIOGRAPHIQUES
DES
TACITES,
D'APRÈS
REGISTRES
DE
LES
STATIS-
DEMANDES
ET
D E S REGISTRES D E F E U I L L E S DE PERMISSIONS TACITES.
Comme l'étude précédente, elle comporte la détermination de la statistique des demandes non autorisées par feuilles de jugement, et l'étude comparée des statistiques de demandes, d'autorisations et de non-autorisations, déterminées à partir des registres de demandes et de feuilles de permissions tacites. 1. La statistique feuilles.
bibliographique
des demandes
non accordées
par
Elle est obtenue par soustraction des données annuelles de demandes et d'autorisations par feuilles avec défalcations des privilèges obtenus à partir des demandes de permissions tacites. On dénombre, pour la période 1764-87, 2.826 demandes non accordées, soit une moyenne annuelle de 118. Les fluctuations annuelles (voir planche V) font ressortir les mêmes mouvements déjà connus, de baisse de 1769 à 1779-82, et de hausse dans les dernières années de l'Ancien Régime. Il faut cependant remarquer l'accélération singulière de la baisse de 1772. 2. Étude comparée des statistiques feuilles de permissions tacites.
des registres
de demandes
et de
Pour la période 1764-87, on dénombre 7.662 demandes, 4.269 autorisations enregistrées dans les registres de demandes, pour 4618 autorisations inscrites sur les Registres de feuilles, les demandes non accordées varient donc de 3.175 à 2.826 en tenant compte
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
TACITES
285
des privilèges obtenus à partir des demandes de Permissions Tacites. Ainsi les autorisations, suivant les cas, constituent 56 ou 60 % des demandes, et les demandes censurées 41 ou 37 %• Ces constatations sont intéressantes. Elles prouvent, comme pour les privilèges, que les registres de feuilles sont plus complets et que l'enregistrement au Bureau de la Librairie n'a pas été exact. Toutefois, l'écart est moins important. Il était en effet, pour les privilèges, de 8 % (respectivement 67 % et 75 % des demandes). Il n'est plus ici que de la moitié. Aussi la censure varie-t-elle moins. Elle passait suivant les cas de 1/4 à 1/3 de la production. Elle varie ici d'un peu plus d'un tiers à 2/5 des demandes. En ce qui concerne les fluctuations (voir planche V) on peut remarquer qu'elles sont très voisines. Les statistiques de la censure obtenues à partir des feuilles sont plus faibles, sauf pour quelques années. D'une manière générale, elles ont tendance à varier comme la courbe des demandes et elles suppriment les modifications apportées par les autorisations obtenues à partir des registres de demandes. Ainsi, la hausse de 1764-65 est rétablie et la hausse considérable de 1769 ramenée à de plus justes proportions. Toutefois elle amplifie la baisse de 1772.
VI. L'ENREGISTREMENT DES PERMISSIONS TACITES SUR LES REGISTRES DE DEMANDES ET D'AUTORISATIONS La statistique des autorisations non-enregistrées sur les registres de demandes a été obtenue par soustraction des deux séries d'autorisations. On dénombre, pour la période 1764-1787, 349 autorisations non enregistrées, ce qui constitue environ 7 % % des autorisations contenues dans les feuilles. Il est remarquable, cependant, que, comme pour les privilèges, il est des années où les relevés dans les registres de demandes sont supérieurs aux permissions inscrites sur les feuilles. Là aussi, la cause paraît identique et tient au décalage inévitable entre les autorisations classées par ordre chronologique de demandes et celles qui le sont par ordre de décision. L'examen des fluctuations (voir planche VIII) montre que cette statistique suit le mouvement même de la production : hausse jusqu'en 1769-72, baisse ensuite jusqu'en 1780-81.
286
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
V I I . L ' E N R E G I S T R E M E N T DES PERMISSIONS TACITES S U R L E S R E G I S T R E S DE LA CHAMBRE SYNDICALE Le problème de l'enregistrement des permissions tacites à la Chambre Syndicale se réduit, sur le plan statistique, à peu de choses. Après 1764, les enregistrements sont un relevé suivi, et par suite exact, des feuilles de permissions. Avant 1764, l'étude est extrêmement restreinte. Il n'est pas possible d'examiner les données annuelles, puisque celles des autorisations sont des moyennes annuelles, quand les autres sont des chiffres réels. Il n'est pas non plus possible, pour la période 1751-59, d'établir une comparaison globale, puisque les années 1753-55 manquent en ce qui concerne l'enregistrement. La seule possibilité intéresse les années 1760-1763. On relève 260 autorisations pour 241 enregistrements. Encore l'élaboration des chiffres des autorisations de 1703 permet-elle difficilement de conclure. Il semble que, pour cette très courte période, l'enregistrement soit très proche d'être exact. De toute façon il l'est davantage, avant l'institution des feuilles, pour les permissions tacites que pour les privilèges.
S T A T I S T I Q U E DES PERMISSIONS TACITES
Années
Demandes
1719 1720 1721 1722 1723 1724 1725 1726
10 20 12 10 21 11 15 10
Autorisations
5 10 4 7 9 9 6 3
Autorisations Privilèpar ges et Permis- Feuilles de sions du PermisSceau sions tacites
Demandes non autorisées
5 10 8 3 12 2 9 7
Demandes non accordées par Feuilles
Autorisations par Feuilles en supplément des autorisations
Permissions tacites enregistrées à la chambre syndicale
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
TACITES
287
S T A T I S T I Q U E DES P E R M I S S I O N S T A C I T E S
Années
1727 1728 1729 1730 1731 1732 1733 1734 1735 1736 1737 1738 1739 1740 1741 1742 1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759 1760
Demandes
4 16 19 21 38 38 23 7 33 20 31 31 31 31 31 31 31 31 31 37
Autorisations
Autorisations Privilèpar ges et Feuilles Permisde sions du PermisSceau sions tacites
Demandes non autorisées
2 7 2 7 26 26 13 3 17 12 18 18 18 18 18 18 18 18 18 27
9 17 14 12 12 10 4 16 8 13 13 13 13 13 13 13 13 13 10
—
—
—
—
—
—
—
—
—
—
—
—
74 74 74 74 74 74 74 74 74 70
48 48 48 48 48 48 48 48 48 62
122 122 122 122 122 122 122 122 122 132
(suite)
Autorisations Demanpar des Feuilles non en accordées supplément par des Feuilles autorisations
Permissions tacites enregistrées à la chambre syndicale
2
77 40 — — —
74 80 102 97 81
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
288
STATISTIQUE DES PERMISSIONS TACITES
Années
Demandes
Autorisations
1761 1762 1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787
132 132 256 372 372 338 330 393 457 445 292 243 314 421 394 347 239 280 202 218 190 169 214 277 321 342 492
70 70 150 240 240 211 169 205 187 198 143 107 141 244 199 202 153 180 130 110 118 98 113 154 191 217 319
Autorisations Privilèpar ges et Feuilles Permisde sions du PermisSceau sions tacites
14 14 15 10 11 10 32 15 7 6 30 23 1 5 5 5 8 7
241 182 201 189 211 246 251 175 205 170 265 240 166 150 206 147 123 130 118 111 187 196 197 311
(suite)
Autorisations Permispar sions Deman- Demandes Feuilles tacites des non en enregisnon trées auto- accordées supplépar ment à la risées Feuilles des chambre autori- syndicale sations1
62 62 106 118 118 112 151 177 260 215 134 129 167 147 172 144 81 95 67 100 65 71 101 123 130 125 173
117 176 122 131 171 201 162 102 31 138 126 131 180 84 69 50 87 53 51 103 90 125 145 181
1 (58) (10) 20 6 59 53 32 98 29 21 41 (36) (3) 26 17 13 12 20 (2) 33 5 (20) (8)
65 86 109 241 182 201 189 211 246 251 175 205 170 265 240 166 150 206 147 123 130 118 111 187 196 197 311
1. Les chiffres de cette colonne placés entre parenthèses correspondent au nombre annuel d'autorisations en supplément des permissions tacites accordées par fouilles.
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
TACITES
289
VIII. CONCLUSIONS SUR L ' É T U D E S T A T I S T I Q U E DES REGISTRES DE PERMISSIONS TACITES Les statistiques des registres de permissions tacites ont prêté à moins de développement que celles des privilèges. Les résultats pourtant n'en ont pas été moins intéressants. Sur le plan de la production globale et de la moyenne annuelle, on a pu déterminer 10.056 demandes pour toute la période où elles ont été délivrées, avec une moyenne de 154. Les autorisations ont été, de 1719 à 1787 (moins les années 174750), respectivement de 5.452 et 87, si l'on en juge d'après les registres de demandes, et de 4.618 et 192 pour la période 1764-1787, si l'on en juge d'après les feuilles. Les pourcentages des autorisations par rapport aux demandes s'établissent ainsi à 56 % et 60 %. Inversement, la censure a été soit de 4.186 et 64, soit de 2.826 et 118, selon la période considérée et la source statistique. Le pourcentage des demandes refusées est entre 37 % et 41 %, ce qui est un chiffre important. Le non enregistrement au Bureau de la Librairie des autorisations des feuilles de permissions tacites a été de 349, et la moyenne de 15, représentant 7 % % des autorisations. Quant à l'enregistrement à la Chambre Syndicale, il s'est avéré quasiment complet. Toutefois les résultats essentiels ont été obtenus à partir de l'examen des fluctuations. On a pu déceler un mouvement intraséculaire de hausse, extrêmement accéléré, et une censure égale à elle-même, sauf à l'origine. De ce fait, le dualisme cyclique autoritarisme-libéralisme semble s'inverser suivant la nature de la production intellectuelle, et au lieu d'inspirer la censure pour une production orthodoxe égale, elle paraît influencer la production hétérodoxe en hausse, pour une censure qui devient égale.
290
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE PERMISSIONS TACITES RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE DES DONNÉES GLOBALES DES SÉRIES NATURELLES
Phases du circuit
Pourcentage pour la même période
Périodes
Années
Total
Moyenne annuelle
1719-87 (—1747-50)
65
10.056
154
1719-29
11
148
13
1730-46
17
496
29
1751-63
13
1.750
135
1764-87
24
7.662
319
65
5.652
87
5 6 % des demandes
11
64
6
4 3 % des demandes
1730-46
17
293
17
5 9 % des demandes
1751-63
13
1.026
79
5 9 % des demandes
1764-87
24
4.269
178
5 6 % des demandes
Autorisations (feuilles)
1764-87
24
4.618
192
60 % des demandes
Enregistrements
1751-87
34
5.429
160
(—1753-55) 1751-63
10
811
81
( — 1753-55) 1764-87
24
4.618
192
Demandes
Autorisa1719-87 tions (Re- ( _ 1747-50) gistres de 1719-29 demandes)
6 0 % des demandes 100 % des autorisations
STATISTIQUE
DES
PERMISSIONS
TACITES
291
PERMISSIONS TACITES RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE D E S D O N N É E S GLOBALES D E S S É R I E S D É D U I T E S Nature de la recherche
Censure
Indice
Périodes
Autorisations non enregistrées sur les registres de demandes
Pourcentage pour la même période
Total
65
4.186
64
41 % des demandes
11
84
8
57 % des demandes
1730-46
17
203
12
41 % des demandes
1751-63
13
724
56
41 % des demandes
1764-87
24
3.175
132
41 % des demandes
1764-87
24
2.826
118
37 % des demandes
1764-87
24
349
15
Autori- 1719-1787 sation (- 1747-50) (registre 1719-29 de demandes
Autorisations (feuilles)
Moyenne annuelle
Années
% des autorisations (feuilles)
7%
CHAPITRE
III
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES PERMISSIONS D'IMPRIMER I. INTRODUCTION Les deux études précédentes, consacrées l'une à la statistique des Privilèges et Permissions du Sceau, l'autre à la statistique des Permissions Tacites, concernaient les deux circuits administratifs des permissions d'imprimer. Elles ont été utiles. A la connaissance réglementaire et théorique que donne la lecture des textes légaux, à celle, pratique du fonctionnement, obtenue par l'analyse comparée des registres et pièces diverses de l'administration, elles ont ajouté les résultats très nouveaux de l'observation quantitative et historique. Cependant, ces deux études restaient distinctes. Il convient maintenant, dans la mesure du possible, de regrouper les deux séries de statistiques dont la réunion constitue une entité précise et naturelle, celle de la statistique des permissions d'imprimer, correspondant, sur les plans administratifs, à la Censure antérieure à l'impression. S'il était nécessaire d'examiner successivement les permissions pour la production orthodoxe, puis celles concernant la production tolérable, il est non moins indispensable d'analyser désormais la statistique de la censure avant l'impression. Les deux groupes de séries donneront donc logiquement naissance à deux études : l'analyse comparée des statistiques des privilèges et permissions du sceau et de permissions tacites, où les séries seront confrontées ; l'étude de la statistique des permissions d'imprimer, où elles seront confondues.
294
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
II. ÉTUDE COMPARÉE DES STATISTIQUES BIBLIOGRAPHIQUES DES PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAJJ ET DES PERMISSIONS TACITES Cette étude est de première importance. Elle vise, en effet, sur le plan quantitatif et historique, à apprécier l'une en fonction de l'autre, les deux sortes de productions différentes, orthodoxe et semi-hétérodoxe ou tolérable, à travers les statistiques des privilèges et des permissions tacites. Elle consiste à comparer des séries de données de privilèges et de permissions tacites de même nature, obtenues à partir des collections de registres semblables. La comparaison, cependant, ne pourra pas être entière pour plusieurs raisons. D'abord, il est des séries de registres qui existent pour une permission et non pour l'autre. C'est le cas entre autres des permis d'imprimer classés parmi les privilèges et permissions du sceau. Il y a, ensuite, des raisons de temps. Lorsque des séries identiques existent, elles ne se superposent pas toujours entièrement. C'est le cas, pour citer un exemple, des registres de demandes, et cela tient, le plus souvent, à la naissance tardive des permissions tacites. De plus, à l'intérieur des périodes où les données sont comparables, il arrive que, sur plusieurs années, l'absence d'un registre, ou de chronologie précise, empêche également la confrontation. Enfin, il y a la composition même des registres qui, parfois, diffère. En tenant compte de toutes ces restrictions, l'étude comparée peut être faite à partir : I o Des registres de demandes, pour les statistiques de demandes, autorisations, demandes non accordées, de 1724 à 1787 (moins les années 1747-50). Avant 1718 il n'y a pas de permissions tacites, de même qu'entre 1747 et 1750, et qu'après 1787. De plus, entre 1719 et 1723 il n'y a pas de privilèges. 2° Des registres de feuilles, pour les statistiques d'autorisations par feuilles (jugements et feuilles de permissions tacites) ; de demandes non accordées par feuilles ; d'autorisations par feuille en supplément des autorisations des registres de demandes, de 1764 à 1787. Il n'y a toujours pas de données complètes pour 1788 dans la statistique des permissions tacites. 3° Des registres de la Chambre Syndicale des Libraires, pour les statistiques d'enregistrement et de non-enregistrement de 1751 à 1787 (moins 1753-55). Il n'y a pas, ces années-là, de permissions tacites. Cette étude comparée, dont nous venons de déterminer et les limites et les possibilités, permet d'obtenir les résultats suivants,
STATISTIQUE DES PERMISSIONS D'IMPRIMER
295
dont plusieurs sont essentiels, soit à partir des données globales et des moyennes, soit à partir de l'analyse des fluctuations : 1° Un premier problème concerne les productions générales et les moyennes des deux sortes de permissions. L'analyse des textes nous avait peu renseigné. Malesherbes avait seulement remarqué en 1759 que les permissions tacites étaient courantes. L'appréciations quantitative peut être effectuée sur presque toute la période pendant laquelle les permissions tacites ont été données, de 1724 à 1787 (moins 1747-50). Elle ne peut être faite qu'à partir des seuls registres de demandes, ceux des feuilles ne débutant qu'en 1764, et ceux de la Chambre qu'en 1751. Sur le plan des demandes, on dénombre 9.983 permissions tacites pour 21.833 demandes de privilèges pendant la même période. Les premières constituent donc approximativement 46 % des secondes. Ces chiffres varient quelque peu en ce qui concerne les autorisations et les demandes non accordées. On relève, en effet, 5.617 autorisations de permissions tacites pour 13.956 privilèges, soit 4 0 % de ces derniers. D'autre part, 4.148 demandes de permissions tacites n'ont pas été accordées, représentant 5 4 % des demandes de privilèges non accordées, lesquelles s'élèvent à 7.710. Ainsi, dans l'ensemble, les permissions tacites n'ont pas constitué plus de la moitié des privilèges, la production des livres tolérables est donc loin d'avoir atteint l'importance, si l'on considère toute la période, de la production des livres orthodoxes. Toutefois, ce n'est là qu'une appréciation générale qui renvoie à l'examen des fluctuations. 2° L a seconde question intéresse l'évolution respective des productions de privilèges et permissions tacites. L à encore, l'observation ne peut être conduite qu'à partir des registres et des séries précédentes pour toute la période, auxquels viendront se joindre les feuilles et les enregistrements pour des périodes plus tardives. Le principal résultat concerne l'évolution générale durant le x v m e siècle : la production des privilèges, à travers les cycles décennaux et interdécennaux est en hausse très légère, quand celle des permissions tacites est en hausse accélérée. Plus généralement, on peut dire, en caractérisant les deux statistiques, que l'une est égale, et l'autre en hausse continue. On doit, de plus, constater que l'évolution de l'écart des deux productions est remarquable puisque les permissions tacites, inexistantes avant 1718, finiront par presque égaliser et parfois dépasser le nombre des privilèges à la fin de l'Ancien Régime. L'étude comparée des proportions par période fera ressortir cette observation. Ainsi, dans la période 1724-29, en reprenant les phases déjà déterminées d'augmentation du nombre des permissions tacites, on dénombre 75 demandes de ces dernières permissions pour 1.971 demandes de privilèges. Le pourcentage des permissions tacites est alors de 4 % des privilèges.
296
LA STATISTIQUE
VI. PRIVILÈGES
BIBLIOGRAPHIQUE
ET PERMISSIONS
DE LA
TACITES
FRANCE
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
297
D'IMPRIMER
C E N S U R E D E S PRIVILÈGES
i
m
J
M
y j
¡3
CENSURE DES PERMISSIONS TACITES
1700
1710
V I bis.
1720
1730
1740
1750
1760
PRIVILÈGES ET PERMISSIONS
1770
1780
TACITES
1790
298
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Ces chiffres varient quelque peu selon qu'il s'agit des autorisations, 2 % (29 P. T. ; 1.499 P.), ou des demandes non accordées, 10 % (46 P. T. ; 472 P.). Cette différence tient pour beaucoup à l'importance de la censure des permissions tacites. Dans la deuxième période, de 1730 à 1746, les demandes de permissions tacites passent de 4 % à 9 % des demandes de privilèges (496 P. T. ; 5.643 P.), les autorisations à 9 % également (293 P . T. ; 3.213 P.) et les demandes non accordées demeurent à 10 % (203 P . T. ; 2.040 P.). Ainsi, mise à p a r t la censure, sur laquelle nous reviendrons plus loin, ce pourcentage passe du simple au double. Dans la troisième période, de 1751 à 1763, comme on devait s'y attendre, il augmente considérablement. Les demandes de permissions tacites passent à 38 % des demandes de privilèges (1.756 P. T. ; 4.611 P.), les autorisations constituent 40 % (1.026 P. T. ; 2.535 P.) et les demandes non accordées de permissions tacites, 35 % de la censure des privilèges (724 P. T. ; 2.076 P.). Pour la même période, les années 1753-55 exceptées, les enregistrements de permissions tacites haussent même jusqu'à 52 % (811 P. T. ; 1.557 P.). Enfin cette augmentation de la proportion des permissions tacites va, dans la dernière période, jusqu'à rejoindre presque, et même dépasser la production des privilèges. On a, de 1764 à 1787, 7.662 demandes de permissions tacites pour 9.608 demandes de privilèges (80 %). De même on dénombre 4.269 autorisations des premières pour 6.478 des seconds (66 %) ; le pourcentage varie peu s'il s'agit des jugements ou feuilles, 64 % (4.618 P. T. ; 7.187 P.). P a r contre, les permissions tacites interdites passent à 107 % des interdictions de privilèges (3.175 P. T. ; 2.963 P.) et à 127 % si l'on considère les demandes non accordées par feuilles (2.826 P . T. ; 2.254 P.). Enfin les enregistrements s'approchent de la demande. Les permissions tacites représentent 83 % des privilèges (4.618 P. T. ; 5.604 P.). Aussi, dans l'ensemble, l'accélération de la hausse des permissions tacites, compte tenu de la hausse lègère des privilèges, se retrouvet-elle à peine atténuée. Cette constatation, résultat des circuits, p e u t être très facilement observée dans l'examen des courbes (voir planches VI et VI bis). Cette différence de tendance dans la longue période a u n sens profond. Elle montre d'abord que la production traditionnaliste, orthodoxe, est plus ou moins statique à travers le x v m e siècle, mises à part, évidemment, les fluctuations cycliques décennales ou interdécennales. Elle prouve que le grand fait intellectuel nouveau du siècle est l'opposition au pouvoir, l'anticonformisme, la montée du libéralisme. Elle donne une idée de l'extrême rapidité avec laquelle la
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
299
D'IMPRIMER
doctrine libérale a pénétré les couches modérées et cultivées de la population, principalement à partir de 1750-52. A ce propos, il n'est pas sans intérêt de faire un rapprochement entre cette accélération continue et l'importance donnée, à l'époque, à la notion linéaire du progrès de l'humanité, qui put ainsi paraître assurée par le mouvement des idées. Elle montre encore le commencement de la reconnaissance officielle de ce courant à la mort de Louis XIV, et sa fin par son triomphe, à peine trois quarts de siècle plus tard, après égalisation et dépassement même de la production orthodoxe, c'est-à-dire de la couche traditionnelle de la population. Ces faits, tous les historiens de la littérature française du x v m e siècle, depuis Daniel Mornet jusqu'à P. Hazard, les ont montrés. Le courant traditionnaliste demeure et la seule considération de l'évolution des idées nouvelles tend à le dissimuler et à le méconnaître. La province est peu touchée, et tardivement. L'aristocratie, la bourgeoisie, le peuple des campagnes, croient toujours à la religion et à la royauté. E t l'on s'en apercevra bien au moment de la Révolution par la réaction des départements. Comme l'écrit D. Mornet : « Mais il y a jusqu'au bout des fidèles obstinés et nombreux 1 . »
L'instruction peut bien prendre de l'ampleur, elle reste dans les mains traditionnalistes du clergé. Dans la capitale même, les idées anciennes ont encore leurs bastions qui résisteront jusqu'à la Révolution, et dont certaines reparaîtront même sous l'Empire et la Restauration. Ainsi en est-il du Parlement, du Clergé, de l'Université. Il en est d'autres qui tombent, mais un à un et après de longues luttes, comme l'administration et l'Académie. A ce courant d'opinions d'origines si diverses, il faut une littérature conformiste, en accord avec la philosophie du pouvoir. C'est elle qui reçoit les privilèges. Ce sont les évêques, archevêques, etc., qui obtiennent des privilèges généraux tant pour la pratique de la religion que pour l'enseignement. Ce sont les Libraires classiques qui impriment les auteurs anciens acceptés depuis longtemps. E t cette production des privilèges montre, à travers les fluctuations diverses, décennales, interdécennales, à travers tout le siècle, qu'elle reste constante. Sans doute, elle ne possède pas l'élan qui permet le progrès d'une société, son changement, son renouvellement. Cependant, elle résiste, et peut-être mieux que l'analyse qualitative ne l'avait jusqu'alors révélé. Mais en face de ce courant du passé, en opposition, le courant de l'avenir, celui de l'avant-garde intellectuelle, naît, croît lentement, puis prend un immense élan, comme l'a très bien dit D. Mornet : 1. D. MORNET, Les origines intellectuelles de la Révolution
Française,
p. 204.
300
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
« La Révolution s'est faite dans les esprits ou dans un grand nombre d'esprits avant de se traduire dans les faits. Et l'on peut suivre très nettement cette évolution d'opinion 1 . »
Jusqu'au milieu du siècle, le courant est encore faible : « Jusque vers 1760 cet attachement de la nation à son roi est général et profond'. »
E t c'est après que le mouvement s'amplifie d'une manière visible. Ainsi, selon le texte déjà cité de D. Mornet : « Dès 1760 plus nettement vers 1770 et surtout vers 1780 plus rien ne s'oppose pratiquement à la diffusion de l'esprit nouveau 3 . »
Ainsi l'étude qualitative confirme l'observation statistique. Toutefois, celle-ci montre que le rythme de croissance n'est pas égal. Il s'accélère, il fait boule de neige, et il est normal que ni sa naissance vers la mort de Louis XIV, ni sa croissance réduite au deuxième quart du siècle ne soit encore perceptible, puisque la production des privilèges dissimule complètement les permissions tacites. Mais l'accélération se fait au carré, et, de décade en décade, le courant devient plus net, plus fort, jusqu'au moment où il égalise la production des privilèges, où il dépasse quantitativement enfin l'opinion traditionnaliste. Cette fois les idées nouvelles l'emportent, et c'est la Révolution de 1789. La tradition est submergée. 3° Le troisième résultat de cette étude comparée concerne la censure et, par-delà, le dualisme cyclique absolutisme-libéralisme. Il faut constater d'abord que la censure des permissions tacites est plus sévère que celle des privilèges, puisque, si l'on met à part les premières années (1719-1729), où elle est peut-être amplifiée par les variations sensibles des petits nombres, elle s'établit ensuite entre 37 % et 41 %, tandis que celle des privilèges varie entre 25 % et 37 % ; les chiffres de 37 % et de 25 % respectivement pour les permissions tacites et pour les privilèges étant les plus probables, puisque obtenus à partir des registres de feuilles. Si l'on accepte plus particulièrement ces deux pourcentages, on discerne que, selon la production, la censure passe du quart à plus du tiers. Cette augmentation, d'ailleurs, ne saurait surprendre, puisque les privilèges concernent une production qui, par nature, n'est pas opposée au pouvoir, quand celle des permissions tacites reste aux yeux de l'autorité la production tolérable. Toutefois, c'est l'examen comparé 1. Ibid., p. 204. 2. Ibid., p. 204. 3. Ibid., p. 181.
STATISTIQUE DES PERMISSIONS D'IMPRIMER
301
des fluctuations (voir planche V I bis) qui est révélateur. L a censure des privilèges a un mouvement très personnel, tandis que celle des permissions tacites est parallèle à la production des demandes et des autorisations. Cette constatation est au moins aussi importante que celle qui concernait la divergence des productions dans la longue période et, à la réflexion, elle ne peut paraître sans rapport. Le fait est le suivant. Pour une production orthodoxe presque égale, on a une censure variable en ce qui concerne les privilèges et, inversement, pour une production semi-hétérodoxe variable, on a une censure égale au mouvement de la demande, dans les Permissions Tacites. On est donc amené à l'hypothèse suivante : la censure suppose structurellement deux éléments : le demandeur ou producteur ; le censeur. Plus naturellement, la production et l'autorisation. Or il semblerait que le dualisme politique, cyclique, absolutismelibéralisme, s'insinue t a n t ô t dans l'un et t a n t ô t dans l'autre de ces éléments. Chaque fois, il neutraliserait le second, qui deviendrait égal. Ainsi, chaque élément aurait à son tour l'initiative qui, en dernier ressort, dépendrait de la nature de la production des livres. Quand celle-ci est orthodoxe, quand son mouvement est statique ou à peine en hausse, l'initiative est prise par la censure, c'est-à-dire par le pouvoir, dont les fluctuations font ressortir le cycle absolutisme-libéralisme. Inversement, quand la production est semihétérodoxe, quand elle est influencée elle-même par ce dualisme absolutisme-libéralisme, alors la censure perd l'initiative et elle devient égale. Ces faits s'expliquent très simplement sur le plan de la psychologie des administrations. Quand la production n'est pas dangereuse, elles retrouvent leur liberté d'agir et, selon leur tendance, qui est aussi celle de la société, elles tranchent t a n t ô t libéralement t a n t ô t sévèrement. Mais si la production est quelque peu dangereuse, toute leur liberté consiste dans leur acceptation ou leur refus de la considérer. Mais le choix positif étant fait, elles sont obligées d'en suivre les méandres tout en pratiquant une certaine sévérité égale. Quoi qu'il en soit et c'est bien, semble-t-il, une preuve de l'existence du dualisme, dans les deux cas, on retrouve les mêmes périodes, avec des manifestations évidemment différentes. De 1715 à 1729, la France traverse, avec la Régence, une période libérale. Sur le plan de l'administration de la Librairie et des Permissions d'imprimer, la censure des privilèges baisse. P a r ailleurs on institue les permissions tacites, production éminemment libérale. De 1729 à 1752, sous le ministère du Cardinal Fleury où le pouvoir tend à renforcer son absolutisme, les privilèges censurés augmentent et la production des permissions tacites a une hausse freinée et légère. A partir de 1752, et jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, les dernières années mises à part, la tolérance et le libé-
302
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
ralisme s'insinuent dans la vie politique, non sans d'ailleurs quelques retours offensifs et décennaux de l'autoritarisme. Dans le même temps, la censure des privilèges baisse, tandis que les permissions tacites font le bond prodigieux en avant que l'on sait. 4° Aux résultats essentiels précédents, l'étude comparée ajoute encore des enseignements concernant le fonctionnement administratif. La négligence de l'enregistrement au Bureau de la Librairie est assurée puisque, qu'il s'agisse des privilèges ou des permissons tacites, les autorisations des registres de feuilles sont en nombre supérieur aux autorisations relevées sur les registres de demandes, les pourcentages étant respectivement de 11 % et 17% %• P a r contre, l'enregistrement à la Chambre Syndicale est différent. Les permissions tacites sont toutes relevées, puisque l'enregistrement s'effectue directement à partir des feuilles envoyées par le Bureau dès 1764, quand, même après cette date et l'envoi des feuilles de jugement, la transcription est laissée à l'initiative des bénéficiaires, assez souvent négligents, en ce qui concerne les privilèges.
III. LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES PERMISSIONS D'IMPRIMER Les résultats de l'étude précédente ont montré la nécessité de celle-ci, où les statistiques des privilèges et permissions tacites, après avoir été comparées, vont être ajoutées l'une à l'autre. Si, en effet, les permissions d'imprimer, c'est-à-dire, la censure avant l'impression, étaient représentées avant 1718 par les seuls privilèges, elles sont, après cette date, désormais composées de la somme des deux séries d'autorisations. Par suite, l'étude de leur évolution, à travers le x v m e siècle, impose leur addition. Celle-ci, à son tour, n'est possible que dans les limites déjà fixées par l'étude comparée des deux séries. On peut donc obtenir : lo Pour la période 1724-87 (moins 1747-50), la statistique des demandes, des autorisations et des demandes non accordées de permissions d'imprimer. 2° Pour la période 1751-87 (moins 1753-55), les statistiques des permissions enregistrées et non enregistrées. 3° Pour la période de 1764-87, les statistiques des autorisations par feuilles ; des autorisations non transcrites ; des demandes non accordées par feuille. Ces statistiques permettront donc comme les précédentes, plusieurs études successives, consacrées à la demande, à l'autorisation
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
D'IMPRIMER
303
CENSURE Registres de demandes
1720
1730
1740
1750
1760
1770
1780
VII. PERMISSIONS D'IMPRIMER PRIVILÈGES PLUS PERMISSIONS TACITES
1790
304
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE
LA
FRANCE
des registres de demande, à l'autorisation par feuille, à l'enregistrement, à la censure (à partir des registres de demandes et des registres de feuille) et à l'enregistrement au Bureau de la Librairie. A.
LA
STATISTIQUE
GÉNÉRALE
DES
DEMANDES
DE
PERMISSIONS
D'IMPRIMER.
L'addition des statistiques des deux séries de privilèges et de permissions tacites permet de dénombrer pour la période 1724-87 (moins 1747-50) 31.816 demandes, soit une moyenne approximative annuelle de 530. L'examen des fluctuations annuelles (voir planche VII) confirme l'existence des cycles interdécennaux de 20 ans déjà observés et permet de discerner clairement la hausse intraséculaire de la production des demandes, conjonction du dynamisme des permissions tacites et du statisme relatif des privilèges, les unes soulevant les secondes et ces dernières assagissant les premières. B.
LA
STATISTIQUE
GÉNÉRALE
DES
AUTORISATIONS
D'iMPRIMER.
On dénombre, pour la même période, 19.573 autorisations reportées sur les registres de demandes, soit une moyenne annuelle de 326. L'analyse de la courbe (voir planche VII) montre que le mouvement typique des autorisations de privilèges s'est transmis à la production générale des permissions et s'est même accusé. En effet on assiste, à travers le premier cycle de 20 ans, à une baisse interdécennale, puis dans les deux suivants, et le début du troisième, à une hausse intraséculaire. Ce mouvement très personnel s'explique aisément. Dans la première période, les permissions tacites sont très peu nombreuses et la baisse des privilèges se transmet. Par contre, par la suite, les permissions tacites haussent plus rapidement que les privilèges, ce qui accentue la tendance générale des privilèges et, par comparaison, accuse le mouvement précédent de baisse.
C. LA S T A T I S T I Q U E G É N É R A L E D E S P E R M I S S I O N S D ' i M P R I M E R ACCORDÉES PAR
FEUILLES.
Cette série ne concerne évidemment que la période 1764-1789. Elle est faite de l'addition des jugements de privilèges et des permissions tacites inscrites sur les feuilles transmises à la Chambre Syndicale. On dénombre 11.805 autorisations, soit une moyenne de 492 permissions par an. L'étude des fluctuations confirme l'existence du cycle interdécennal de 1762 à 1782, et la phase de hausse des dernières années de l'Ancien Régime (voir planche VII).
STATISTIQUE
D.
DES
PERMISSIONS
305
D'IMPRIMER
LA STATISTIQUE GÉNÉRALE DES PERMISSONS D'iMPRIMER E N R E GISTRÉES A LA CHAMBRE SYNDICALE D E S LIBRAIRES.
Cette série ne peut exister que pour la période 1751-1787 (moins 1753-55). Elle ne permet donc pas une étude continue des permissions d'imprimer enregistrées à la Chambre, puisque, si les privilèges sont bien connus avant et après 1718 à quelques années près, il n'en est pas de même des permissions tacites qui, bien qu'accordées à partir de 1718, ne sont pas enregistrées avant 1751. On dénombre, pour cette période, 12.590 permissions, soit une moyenne annuelle de 370. Les fluctuations (voir planche VII) ne font, elles aussi, que confirmer la hausse intraséculaire et le cycle interdécennal 1762-1781-84.
E. LA CENSURE
DES
DEMANDES
DE
PERMISSIONS
D'iMPRIMER.
Comme les études de la censure des privilèges et des permissions tacites, elle comprend deux parties : la censure à partir des statistiques d'autorisations transcrites sur les registres de demandes pour la période 1724-87 (moins 1747-50), et d'après les statistiques d'autorisations des registres de feuilles pour la période 1764-87. Dans le premier cas, les 19.573 autorisations accordées représentent 61 % des demandes, et l'on dénombre 11.858 non accordées, soit une moyenne annuelle de 198, constituant 37 % des demandes. Dans la période plus courte (1764-87), 11.805 autorisations par feuilles forment 68 % des demandes, et l'on compte 5.080 demandes non acceptées, soit une moyenne de 212, c'est-à-dire 29 % des demandes. Ainsi la censure des permissions d'imprimer s'établit entre 29 % et 37 %, soit approximativement un tiers de la production. Ce pourcentage n'a rien de surprenant, quand on se souvient que la censure des privilèges s'établissait à un pourcentage un peu inférieur, et celle des permissions tacites, deux fois moins importante en volume, à un niveau supérieur. L'étude comparée des fluctuations des demandes, des autorisations des registres de demandes et des autorisations par feuilles (voir planche VII) permet plusieurs constatations : d'abord le mouvement de la demande est différent de celui de l'autorisation. Il hausse à travers le x v m e siècle, tandis que la seconde série baisse jusqu'en 1741-43 pour hausser après. Ainsi, le mouvement de l'autorisation est bien original, et identique à celui des privilèges. D'autre part, les autorisations par feuilles, qui représentent plus exactement la production autorisée, évoluent comme la statistique des demandes accordées transcrites sur les registres à un niveau plus haut, diminuant l'importance de la censure. L'examen comparé
306
VIII.
LA STATISTIQUE
JUGEMENTS
EN
BIBLIOGRAPHIQUE
SUPPLÉMENT
DES
DE LA FRANCE
AUTORISATIONS
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
D'IMPRIMER
307
des statistiques de demandes non accordées des registres de demandes et des feuilles est plus intéressant encore. On peut en effet constater (voir planche VII) une hausse générale de la censure jusqu'en 1769, qui s'effectue, à partir de 1752-53, sur un mouvement interdécennal de baisse de 1752 à 1782, lequel est plus sensible encore dans la série, plus exacte, des demandes non accordées par feuilles. Comme on devait s'y attendre, la censure des permissions d'imprimer reproduit et mêle les deux mouvements différents de la censure des privilèges et de celle des permissions tacites. F. L'ENREGISTREMET AU B U R E A U D E LA LIBRAIRIE.
L'enregistrement à la Chambre Syndicale ne peut donner lieu à une étude particulière, puisque les recherches précédentes ont montré qu'il était entier en ce qui concernait les permissions tacites et partiel pour les privilèges. Il n'en est pas de même de l'enregistrement au Bureau de la Librairie. On dénombre pour la période 1764-87, 1.058 autorisations par feuilles non enregistrées sur les registres de demandes, soit encore une moyenne de 44 par an et un pourcentage de 9 %. Quant aux fluctuations, elles confirment une fois de plus le dernier cycle interdécennal (voir planche VIII).
IV. CONCLUSIONS Cette étude aura été très utile. Elle nous aura fourni des renseignements de première importance sur les catégories d'ouvrages recevant des permissions d'imprimer au x v m e siècle. Elle aura précisé le rapport quantitatif d'abord, les permissions tacites ne constituant qu'à peine la moitié des privilèges. Elle aura montré encore que la tendance des deux productions est différente, l'une étant statique, et l'autre dynamique. Elle aura permis de dégager un mouvement différent de la censure, variable pour les privilèges, égale au mouvement de la production pour les permissions tacites, ce qui a conduit à la formulation d'une hypothèse concernant l'existence d'un dualisme cyclique de l'absolutisme et du libéralisme politique s'insinuant dans chaque catégorie de production intellectuelle, d'une manière différente, tenant à leur nature propre. Plusieurs traits caractéristiques des permissions d'imprimer ont pu être dégagés dans la seconde partie de cette étude : hausse intraséculaire des demandes ; mouvement particulier des autorisations semblable à celui des privilèges ; cycle de la censure s'insinuant dans la hausse intraséculaire. A cela, il faut encore ajouter quelques renseignements concernant le fonctionnement de l'administration, et notamment l'enregistrement au Bureau de la Librairie.
308
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE STATISTIQUE DES PERMISSIONS D'IMPRIMER ( P R I V I L È G E S PLUS PERMISSIONS TACITES)
Années
1724 1725 1726 1727 1728 1729 1730 1731 1732 1733 1734 1735 1736 1737 1738 1739 1740 1741 1742 1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759
Demandes Autorinon sations accordées (registres (registres de de demandes ) feuilles)
Demandes
Autorisations (registres de demandes)
376 330 278 358 382 322 374 400 367 310 347 419 365 433 423 347 298 291 356 370 313 309 417
298 236 191 263 300 240 278 242 239 210 239 274 234 251 257 160 238 149 177 148 167 216 258
78 94 87 95 82 82 96 158 128 100 108 145 131 182 166 187 60 142 179 222 146 93 159
575 558 464 455 453 429 460 500 465
301 270 274 273 274 248 269 255 271
274 288 190 182 179 181 191 245 194
Demandes non accordées par feuilles
Autorisations par feuilles en supplément des autorisations (registres de demandes )
STATISTIQUE DES PERMISSIONS STATISTIQUE (PRIVILÈGES
Années
Demandes
1760 1761 1762 1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787
440 485 449 628 729 709 693 786 932 1015 896 714 852 683 803 844 706 627 649 525 527 489 439 519 665 688 821 959
DES PERMISSIONS PLUS PERMISSIONS (suite)
D'IMPRIMER TACITES)
DemanDemandes AutoriAutorisades non sations tions non accordées (registres accordées (registres ( registres de de par de demandes ) feuilles ) feuilles demandes )
255 256 246 369 478 477 463 472 578 544 494 413 484 352 516 508 426 419 441 349 336 339 296 332 432 451 521 626
185 229 203 259 231 210 208 298 333 451 364 276 351 320 254 310 277 193 192 163 179 136 137 180 228 230 295 322
309
D'IMPRIMER
476 439 445 537 595 613 620 472 657 407 564 586 484 487 485 396 385 375 348 351 467 466 487 663
233 248 226 233 316 382 238 217 178 265 206 232 219 125 148 116 130 100 85 161 193 215 329 285
Autorisations par feuilles en suppléEnregisment des trements autorisations (registres de demandes )
(2) (38) (18) 65 17 69 126 59 173 55 48 78 58 68 44 47 49 36 52 19 35 15 (34) 37
236 140 248 265 439 379 393 461 544 559 543 396 516 404 435 490 401 365 439 339 306 330 310 295 404 440 445 589
1. Les chiffres de cette colonne placés entre parenthèses correspondent au nombre annuel d'autorisations des registres de demandes en supplément des autorisations par feuilles.
310
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
ÉTUDE COMPARÉE DES STATISTIQUES DE PRIVILÈGES ET PERMISSIONS DU SCEAU ET DE PERMISSIONS TACITES
Périodes
1724-87 ( _ 1747-50)
1724-29
Privilèges P. S.
Permissions Tacites
Demandes
21.833
9.983
PT = 46 % de P
Autorisations
13.956
5.617
PT = 40 % de P
Demandes non accordées
7.710
4.148
PT = 54 % de P
Demandes
1.971
75
PT = 4 % de P
1.499
29
PT = 2 % d e P
472
46
PT = 10 % de P
Nature de la statistique
Autorisations Demandes non accordées 1730-46
Pourcentages
Demandes
5.643
496 PT — 9 % de P
Autorisations
3.213
293 PT = 9 % de P
Demandes non accordées
2.040
203 PT = 10 % de P
Demandes
4.611
1.750
Autorisations
2.535
1.026 PT = 40 % de P
Demandes non accordées
2.076
724 PT = 35 % de P
(— 1753-55)
Enregistrements
1.557
811 PT = 52 % de P
1764-87
Demandes
9.608
7.662 PT = 80 % de P
Autorisations (D.)
6.478
4.269 PT = 66 % de P
1751-63
PT = 38 % de P
STATISTIQUE
DES PERMISSIONS
311
D'IMPRIMER
ÉTUDE COMPARÉE DES STATISTIQUES D E P R I V I L È G E S E T PERMISSIONS DU SCEAU ET DE PERMISSIONS TACITES (suite)
Périodes
1764-87
Nature de la statistique
Privilèges P. S.
Permissions Tacites
Autorisations (feuilles)
7.187
4.618
PT = 64 % de P
Demandes non accordées (D)
2.963
3.175
PT
Demandes non accordées (f.)
2.254
2.826
PT = 125 % de P
5.604
4.618
PT = 83 % de P
Enregistrements
RÉSULTATS
DE
Phases du circuit Nature de la Recherche
Demandes
= 107 % de P
PERMISSIONS D ' I M P R I M E R L'ANALYSE STATISTIQUE DES DONNÉES
GLOBALES
Pourcentage pour la même période
Périodes
Années
Total
Moyenne annuelle
1724-87 ( _ 47-50)
60
31.816
530
1751-87 ( _ 53-55)
34
22.259
655
1764-87
24
17.270
720
60
19.573
326
61 % des demandes
34
13.487
396
61 % des demandes
1764-87
24
10.747
448
62 % des demandes
1764-87
24
11.805
492
68 % des demandes
Autorisa1724-87 tions (— 47-50) (registres de 1751-87 demandes) (— 53-55)
Autorisations (registres de feuilles)
Pourcentages
11
312
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
PERMISSIONS D ' I M P R I M E R RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE DES DONNÉES GLOBALES (suite)
,— Phases du circuit Nature de la Recherche
Périodes
Années
Total
Moyenne annuelle
Pourcentage pour la mime période
Enregistrements
1751-87 (— 53-55)
34
12.590
370
93 % des autorisations 57 % des demandes
1764-87
24
10.222
426
95 % des autorisations 59 % des demandes
60
11.858
198
37 % des demandes
34
8.387
247
38 % des demandes
1764-87
24
6.138
256
36 % des demandes
Censure (registres de feuilles)
1764-87
24
5.080
212
29 % des demandes
Autorisapar feuilles en supplém1 des autorisations (registres des demandes
1764-87
24
1.058
44
9 % des autorisations par feuilles
Censure 1724-87 (registres de (— 47-50) demandes) 1751-87 (— 53-55)
CHAPITRE
IV
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMÉS
I. INTRODUCTION L'étude de la statistique de la police des livres imprimés concerne un autre aspect de la censure : celle qui s'effectue non plus avant, mais pendant, et surtout après l'impression. La censure, avant, permettait d'atteindre la production des demandes des autorisations et, plus tard, par soustraction, la production interdite. Elle obligeait à deux séries d'études distinctes. Il en fut ainsi des privilèges, des permissions tacites, de la totalité des permissions d'imprimer. Ce n'est plus le cas ici, à l'exception du Journal d'Hémery. En effet le but essentiel fut toujours d'arrêter la production douteuse ou interdite, sans noter tous les livres qui passaient entre les mains des Syndics et Adjoints pendant les visites de la Chambre Syndicale. Aussi l'étude de la statistique de la police des livres est-elle directement celle des livres arrêtés, puis interdits après l'impression. Tous les registres de ce circuit ne furent pas utilisés. Il en est qui ne peuvent donner de renseignements valables pour notre étude. C'est le cas, par exemple, de la série des registres de transfert des balles de la douane à la Chambre Syndicale, qui énumèrent des paquets (Mss. Fr. 21897 à 21926). C'est le cas également des répertoires de permissions tacites (Mss. Fr. 21989, 21980), et du Mss. 21927 concernant les livres visités dans les villes du Royaume autres que Paris et, dont l'énumération est extrêmement réduite. Enfin, il
314
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
faut insister sur le fait que les registres de feuilles, les feuilles, et les registres d'enregistrement des permissions tacites ont la même composition, les feuilles étant par ailleurs incomplètes. De la sorte, les décisions prises, les autorisations, peuvent être obtenues à partir de l'un ou de l'autre des trois groupes. C'est encore le cas, à cause de l'insuffisance de leurs données du Mss. Fr. 21832, et du Mss. Fr. 22019. Par contre, les autres séries permettent d'obtenir d'utiles renseigements. Tels sont le Journal d'Hémery, les registres d'arrêts (Mss. Fr. 21930-34), le registre de suspension (Mss. Fr. 21935) et les registres des livres prohibés (Mss Fr. 21.928-21.929).
II. L A
STATISTIQUE
DU
JOURNAL
D'HÉMERY
Comme on l'a vu, dans l'étude descriptive le Journal donne la statistique des livres nouvellement imprimés. A.
d'Hémery
LE DÉPOUILLEMENT.
Les manuscrits suivants annuelles de 1751 à 1767.
ont
— Le Mss. Fr. 22156 comprend
permis une
d'obtenir
partie
de
les
données
l'année
1750
et se poursuit jusqu'au 12 novembre 1751 ; — Le Mss. Fr. 22157 du 4.1.1752 au 28.12.1752 ; — L e Mss. Fr. 22158 du 11.1.1753 au 3.1.1754 ; — Le Mss. Fr. 22159 du 10.1.1754 au 25.12.1755 ; — Le Mss. Fr. 22160 du 1.1.1756 au 28.12.1758 ; — L e Mss. Fr. 22161 du 4.1.1759 au 25.12.1760 ; — Le Mss. Fr. 22162 du 1.1.1761 au 31.12.1761 ; — Le Mss. Fr. 22038, l'année 1762 ; — Le Mss. Fr. 22163 du 6.1.1763 au 19.12.1765 ; — Le Mss. Fr. 22164 du 9.1.1766 au 31.12.1767 ; — Le Mss. Fr. 22165 du 7.1.1768 au 28.12.1769. Les journaux hebdomadaires ne sont pas tous dans l'ordre chronologique. Plusieurs sont intercalés. Par ailleurs, il en est de nombreux qui manquent, et qui rendent par conséquent beaucoup moins complète et utile cette statistique des ouvrages nouveaux.
STATISTIQUE
B. ANALYSE
DE LA POLICE DES LIVRES
IMPRIMES
315
STATISTIQUE.
On dénombre, pour la période 1751-1767, soit pour 17 années, 4.349 titres nouvellement publiés, soit une moyenne annuelle de 256 ouvrages. Ces chiffres, du fait de l'absence d'un certain nombre de journaux hebdomadaires, sont inférieurs à la réalité. L'étude des fluctuations (voir planche XX) montre d'abord des variations fréquemment importantes dues sans doute en partie aux journaux manquants. Ainsi la production baisse-t-elle notamment en 1757, 1760 et 1765, tandis qu'elle présente une hausse insolite en 1766, qui est peut-être une compensation de la faiblesse des données de l'année précédente. Malgré ces incertitudes de la statistique, la considération de la courbe permet une remarque sur les tendances. Il semble qu'on assiste à une baisse de 1751 à 1760, suivie d'une hausse de 1761 à 1767. Cette remarque est intéressante dans la mesure où elle confirme, sur le plan de la production imprimée, l'existence des cycles de vingt ans. La baisse 1751-1760 correspond à la baisse du cycle interdécennal 1740-1760 et la hausse 1761 à 1767 au début de la hausse du cycle 1761-1762-83 déterminée dans la statistique des permissions d'imprimer.
III. LA
STATISTIQUE DES REGISTRES DE ARRÊTÉS DANS LES VISITES
LIVRES
L'étude descriptive des registres de cette série nous a donné les cadres de leur statistique. Il s'agit des livres venant de l'étranger et des provinces à Paris. A ceux-ci, il faut ajouter les ouvrages arrêtés par les Syndics et Adjoints dans les visites des imprimeries de la capitale, tous ces livres ayant en commun de n'être pas permis. Il est possible de s'en faire une idée plus précise encore, en les regroupant, d'une part selon les lieux d'origine et, d'autre part, selon les différentes catégories de livres, orthodoxes, semi-hétérodoxes et franchement oppositionnels, soit pour des raisons de morale, de religion ou de politique. Les ouvrages arrêtés provenant de l'étranger peuvent appartenir aux trois catégories ; ceux des provinces, aux deux dernières ; ceux de Paris, à la troisième. En effet, les livres étrangers sont arrêtés parce qu'ils sont inconnus. La lecture montrera s'ils sont autorisables franchement ou à demi, ou à renvoyer et parfois à mettre au pilon. Les livres des provinces arrêtés ne peuvent l'être que s'ils n'ont pas un privilège, c'est-àdire s'ils ont été publiés avec une permission tacite locale ou en fraude. Quant à ceux de la capitale, ils sont suspendus parce qu'ils
316
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
n'ont ni privilège ni permission tacite. D'autre part, et il faut insister sur ce fait, il s'agit, de tous les livres arrêtés, qu'ils soient nouveaux ou anciennement publiés, qu'ils soient différents les uns des autres, ce qui est fréquent, ou au contraire les mêmes d'un ballot à l'autre, ce qui n'est pas rare non plus. En ce sens, une pareille statistique a-t-elle moins d'intérêt que celle du registre Mss. Fr. 21935 pour notre étude de la statistique des imprimés en France. En effet ce dernier registre permet d'atteindre les seuls livres nouveaux tandis que la statistique dont nous nous occupons mêle les ouvrages anciens et nouveaux et dissocie peu titres et exemplaires. Tout au plus, et à la différence des autres, cette statistique a-t-elle le mérite de pouvoir nous informer, dans des limites réduites, sur le volume des échanges commerciaux entre l'étranger et les provinces, d'une part, et Paris de l'autre, non pas d'une manière générale, mais particulière aux livres non réglementaires et encore à ceux-là seuls qui sont appréhendés. De plus l'étude comparée de cette statistique et de celle des livres suspendus réduira une fois encore son intérêt en montrant qu'elle est incomplète par le fait que les registres furent mal tenus. Cependant, malgré ces insuffisances, son étude a été conservée, parce qu'elle permet des sondages importants. On a vu que cette série de registres renseigne sur la première, cinquième et sixième phases du troisième circuit de la police des imprimés. C'est dire qu'on peut connaître le nombre des ouvrages suspendus mais aussi, et approximativement, celui des ouvrages rendus et non rendus. Les cadres demeurant identiques, il est donc possible d'étudier les variations de la censure, non plus au niveau de la permission, comme cela fut fait précédemment, mais à celui des livres imprimés. Cette étude, on s'en doute, est d'une importance extrême en ce qui concerne la vérification des tendances interdécennales de la censure au x v m e siècle telles qu'elles ont déjà été déterminées. La composition des registres Mss. Fr. 21933 et 21934 doit permettre une troisième analyse non moins intéressante. Les feuilles imprimées sur lesquelles, désormais, on enregistre les livres arrêtés, comportent une colonne indiquant la cause, le motif de l'arrêt. Dès lors, on peut dissocier les livres prohibés, des livres contrefaits, des « nouveautés ». La composition antérieure ne faisait pas cette distinction d'une manière continue. A cette rubrique on pourra ajouter les livres mis au pilon. Quelles que soient les confusions des cadres de la statistique et l'insuffisance des relevés, on pourra donc opérer avec elle une première approche du volume et des fluctuations de la troisième catégorie des livres, ceux qui sont interdits et ceux qui sont contrefaits, et leur rapport tant avec les livres nouveaux qu'avec les livres détruits.
STATISTIQUE
A. LE
DE LA POLICE DES LIVRES
IMPRIMES
317
DÉPOUILLEMENT.
Le registre Mss. Fr. 21930 a donné la statistique de 1698 à 1702, le Mss. Fr. 21938 de 1704 à 1742. L'année 1703, étant incomplète, n'a pas été dépouillée ; le Mss. Fr. 21932, de 1742 à 1771 ; les Mss. Fr. 21.933 et 21.934, la période 1771-1789. Les chiffres annuels correspondent au nombre de titres arrêtés, ceux-ci étant parfois les mêmes d'un ballot à l'autre, sans qu'il soit possible, sans une refonte complète des registres, de pratiquer autrement. La statistique des livres autorisés correspond au nombre de livres pour lesquels on a la mention « rendus » ou « permis ». La statistique des livres non autorisés, par soustraction des livres rendus des livres arrêtés. B. ANALYSE
STATISTIQUE.
1. La statistique
des livres
arrêtés.
On dénombre pour la période 1699-1789 (moins 1703) 13.653 livres arrêtés, soit une moyenne approximative annuelle de 152. L'examen des fluctuations de la courbe (voir planche IX) permet de discerner plusieurs faits : 1° Si les cycles interdécennaux de 20 ans ne sont pas sensibles dans le premier tiers du siècle, il n'en est pas de même par la suite. On peut, en effet, reconnaître les deux cycles connus, de 1739-61 et de 1761 à 1780. 2° On peut constater l'existence d'une baisse interdécennale de 1700 à 1727, suivie d'une hausse jusqu'en 1744, qui paraît se stabiliser ensuite. La tendance de la deuxième moitié du x v m e siècle, en tenant compte des variations cycliques précédentes, paraît être stationnaire, ce qui peut être interprété comme une baisse sur la hausse, surtout quand on sait combien le volume de la production des livres a augmenté dans cette période. Ce mouvement reproduit donc à peu près celui de la censure des demandes de privilèges. 2. La statistique
des livres
rendus.
Pour la même période, on dénombre 6.134 livres arrêtés qui furent rendus, soit une moyenne annuelle de 68 ouvrages. Les livres rendus constituent 45 % des livres arrêtés, c'est-à-dire à peine la moitié. Quant aux fluctuations annuelles (voir planche IX bis) elles sont intéressantes. On peut remarquer que : 1° Les mêmes cycles interdécennaux précédemment trouvés se
318
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
IX. LIVRES ARRÊTÉS
DANS LES
DE LA FRANCE
VISITES
STATISTIQUE
DE LA POLICE
DES LIVRES
IX bis. LIVRES A R R Ê T É S
IMPRIMES
DANS LES
VISITES
319
320
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
vérifient, auxquels 011 peut ajouter les cycles 1699-1721 et 1723-39, ce dernier étant un peu moins net. 2° Il semble exister un mouvement séculaire de hausse à travers tout le x v m e siècle. Ceci paraît prouver l'existence d'un libéralisme continu du même genre que celui qui a déjà été décelé dans l'étude des permissions tacites. Ceci ne saurait surprendre. En effet, ces catégories d'ouvrages sont voisines, puisqu'il s'agit soit des permissions avant l'impression, soit d'autorisations après publication. Dans un cas, celui des permissions tacites, il est question des livres semi-hétérodoxes à imprimer à Paris, et dans l'autre, pour une très large part, de livres semi-hétérodoxes publiés dans la province, auxquels il faut ajouter les livres oppositionnels, et quelques livres autorisables venant de l'étranger. 3° La tendance interdécennale des livres rendus paraît inverse de celle des livres arrêtés : hausse de 1700 à 1724 quand ces derniers sont en baisse ; hausse légère quand les livres arrêtés sont en hausse rapide ; hausse accélérée avec le troisième cycle quand les livres arrêtés sont en baisse. 3. La statistique des livres non rendus. On décompte 7.519 ouvrages arrêtés qui ne furent pas rendus, soit une moyenne de 83 ouvrages, correspondant approximativement à 55 % des livres arrêtés, ce qui montre une certaine rigueur de la censure, laquelle est beaucoup plus voisine de celle des permissions tacites (37-41 %) que de celle des privilèges. Il n'est pas étonnant qu'elle soit plus forte puisqu'aux livres semi-hétérodoxes s'ajoutent les livres franchement oppositionnels. Les fluctuations annuelles (voir planche IX bis) sont non moins intéressantes. On peut constater que : 1° L'existence des cycles interdécennaux, notamment des deux derniers, se vérifie. 2° Les tendances interdécennales confirment le mouvement déjà dégagé dans la censure des permissions : baisse de l'autoritarisme, hausse du libéralisme, se traduisant par une diminution des livres non rendus de 1700 à 1726 ; renforcement de l'absolutisme, augmentation du nombre des livres non rendus de 1727 à 1743 ; extension du libéralisme et baisse du nombre de livres non rendus dans les dernières décades de l'Ancien Régime. Comme ces variations sont les mêmes que celles des livres arrêtés, pour éliminer le plus possible le mouvement de cette production, on a établi la statistique du pourcentage annuel des livres non rendus par rapport aux livres arrêtés (voir planche IX). Ainsi, les variations de longue durée du libéralisme et de l'absolutisme à travers le x v m e siècle se confirment-elles en ce qui concerne la police des livres imprimés, ce qui, évidemment, renforce la vraisemblance de notre hypothèse.
STATISTIQUE DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMES
321
3° On constate un mouvement général séculaire de baisse qui se superpose aux mouvements précédents. Ce fait est normal. Si la tendance séculaire des autorisations est à la hausse, celle des livres non rendus sera en baisse. On peut se rendre compte de ce fait non seulement par la lecture de la courbe mais aussi par l'établissement des pourcentages de la censure dans les trois mouvements interdécennaux. Ainsi, on a 2.850 livres non rendus pour 4.154 arrêtés dans la période 1699-1727 (moins 1723), soit un pourcentage de 69 %. Puis 2.089 non rendus pour 3.608 arrêtés de 1728 à 1749, soit un pourcentage de 58 %. Enfin 2.556 pour 5.896 de 1750 à 1789, soit un pourcentage de 44 %. 4. Les statistiques au pilon.
des livres prohibés,
contrefaits,
nouveaux
et mis
Elles ne concernent que la période 1771-1789. On décompte pour 3.076 livres arrêtés, 1.813 rendus, 1.263 non rendus, 550 prohibés, 290 contrefaits, 1.341 titres nouveaux, 222 mis au pilon, ce qui donne les moyennes annuelles respectives de 162, 95, 66, 29, 15, 71 et 12. L'intérêt de cette recherche consiste principalement dans l'étude des proportions. Ainsi les livres prohibés sont presque deux fois plus nombreux que les ouvrages contrefaits et que ceux qui furent mis au pilon, tandis qu'ils ne constituent que 41 % des nouveautés et 18 % des livres arrêtés. Les livres contrefaits ne constituent qu'à peine 53 % des livres prohibés, 22 % des nouveautés, 9 % des arrêtés. Les livres nouveaux sont 2 fois y2 plus nombreux que les livres prohibés, plus de 4 fois y2 que les contrefaits, et constituent près de la moitié des livres arrêtés (44 %). L'étude des fluctuations annuelles est également instructive. Elle montre que les livres prohibés et mis au pilon ne cessent de baisser très rapidement dans les dernières années de l'Ancien Régime. Ce qui prouve que la politique de l'administration en matière de livres imprimés à cette époque est celle d'une tolérance croissante, mais que malgré une hausse de la production connue généralement et discernable particulièrement dans le mouvement des « nouveautés », on arrête de moins en moins les livres prohibés et on les met de moins en moins au pilon. Encore, il faut le rappeler, tous ces résultats restent-ils très relatifs du fait de l'insuffisance de la tenue des registres.
322
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
IV. L E MANUSCRIT FRANÇAIS 21935 Son intérêt statistique est grand. Les registres des livres arrêtés Mss. Fr. 21930-21934 renseignaient sur les quantités de livres suspendus. Celui-ci, au contraire, permet d'atteindre la statistique annuelle des livres nouvellement imprimés sans permission, arrêtés à Paris. Il indiquera de plus l'importance réelle de la censure effectuée et, surtout, permettra d'établir, mieux que la statistique précédente, l'importance relative et comparée des livres nouveaux, contrefaits, prohibés ou imprimés à l'étranger, ou en France, avec une permission des autorités locales. Toutefois, comme la statistique précédente, celle-ci présente des inconvénients. D'abord elle ne concerne qu'une période très courte, d'une décade, la dernière de l'Ancien Régime. De plus, il n'est pas possible de dissocier la production imprimée en France de celle qui vient de l'étranger, ce qui, évidemment, est un inconvénient majeur, sur le plan qui nous occupe de la production des livres en France. Il ne s'agit encore que des seuls livres arrêtés à Paris, ce qui ne saurait présumer de la totalité des livres repréhensibles arrêtés dans le Royaume. Enfin, il n'est question que de livres arrêtés, et l'on ne saurait ainsi préjuger, surtout en ce qui concerne les livres contrefaits ou prohibés, de leur importance réelle, puisqu'une bonne part était vendue sous le manteau et que seuls l'imprudence et le hasard étaient à l'origine de la production arrêtée à la Chambre Syndicale. Pour toutes ces raisons, les conclusions auxquelles cette statistique nous permet d'aboutir ne peuvent être que relatives, surtout en ce qui concerne l'importance comparée des livres prohibés, ou contrefaits.
A. LE D É P O U I L L E M E N T .
Il permet d'obtenir la statistique des livres nouveaux arrêtés, rendus, rayés, contrefaits, prohibés ou imprimés sans permission, pour la période 1779-80, 1788. Les données de 1779 sont accessibles pour les trois premières catégories. Toutefois, la cause de l'arrêt, concernant les trois dernières, n'est précisée d'une manière suffisante qu'à partir de 1780. L'année 1789 s'achève le 7 juillet quelques jours avant la prise de la Bastille et reste donc incomplète. En ce qui concerne les livres contrefaits ou prohibés, il arrive quelquefois que figurent simultanément dans le registre, les inscriptions : « contrefaits » et « pro-
STATISTIQUE
DE LA POLICE DES LIVRES
IMPRIMES
323
hibés ». Pour conserver des cadres statistiques réguliers, nous avons compté les mêmes livres deux fois, un dans la statistique des livres prohibés, l'autre dans celle des livres contrefaits. B. ANALYSE
STATISTIQUE.
On dénombre, pour la période 1780-1788, 905 livres nouveaux suspendus, 514 rendus, 139 rayés, 744 « nouveautés », 139 « contrefaits » et 151 prohibés, soit une moyenne respective annuelle de 101, 57, 16, 83, 15, 17. Les livres rendus représentent 57 % des livres suspendus, et les rayés 15 %. De la sorte, la censure est au maximum de 43 % et au minimum de 15 %. D'autre part, la « nouveauté », c'est-à-dire le livre nouvellement imprimé, est de très loin le principal motif d'arrêt, puisqu'il constitue 82 % des livres suspendus, et qu'il est respectivement près de 5 fois y2 et 5 fois plus important que les contrefaçons et les livres prohibés. Ainsi les livres nouveaux arrêtés le sont en majeure partie du fait qu'ils ont été imprimés sans permission à l'étranger, ou avec une permission des autorités locales en France, inconnue encore à Paris. Toutefois, les livres contrefaits ou prohibés, imprimés à Paris, en France, à l'étranger, et arrêtés, sont à la fois peu importants et voisins en pourcentage. Les livres contrefaits représentant 15 % des livres suspendus et les prohibés 17 %. Les contrefaits constituent 92 % des prohibés et 19 % des nouveautés. ; les prohibés, 108 % des contrefaits et 20 % des nouveautés. Si l'on examine les fluctuations annuelles, on remarquera que les mêmes cycles intradécennaux se retrouvent dans les livres suspendus, permis et rendus, rayés, et dans les nouveautés (voir planche XI). Cependant les livres contrefaits et prohibés paraissent baisser quand la tendance décennale est en hausse dans les autres séries. Peut-être peut-on se risquer à une conjecture : il est possible que l'administration ait eu une politique de plus en plus tolérante. Elle aurait fermé les yeux pour éviter de renforcer la passion populaire.
V. LES MANUSCRITS FRANÇAIS 21928-21929 Ces répertoires doubles des livres prohibés, classés par ordre alphabétique de titres, faisaient naître de grands espoirs. En effet, on devait, par eux, pouvoir atteindre la censure des livres postérieurement à l'impression, ce qui aurait été un complément de la censure des permissions d'imprimer. Une première difficulté devait se présenter. L'indication de l'année de publication n'est pas donnée d'une manière continue, de sorte qu'il est impossible d'établir une statis-
324
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
X. LIVRES SUSPENDUS. PRODUCTION
DE LA
FRANCE
GÉNÉRALE
STATISTIQUE
DE LA POLICE DES LIVRES
IMPRIMES
325
tique annuelle. De plus, le nombre des livres est très peu important. D'autre part, il est difficile, toujours faute de date, de savoir exactement quelle période les registres recouvrent. On s'en est donc tenu aux deux dates extrêmes mentionnées, 1696 et 1770. Pour cette période incertaine, on relève 1.579 titres soit une moyenne annuelle approximative de 21 ouvrages prohibés, ce qui, on peut s'en rendre compte, est fort peu de chose. VI. LES MANUSCRITS FRANÇAIS 21982 ET 21985 A. L E
DÉPOUILLEMENT.
La statistique des livres entrés par la Chambre qui ont obtenu une permission peut être obtenue à partir des registres de feuilles ou des registres d'enregistrement à la Chambre Syndicale. On ne voit apparaître les livres entrés par la Chambre qu'à partir de 1766 et progressivement. Ceux-ci sont énumérés à la suite des permissions tacites et selon des numéros d'enregistrement différents. On a décompté par titres. L'année 1789 est incomplète. B. ANALYSE
STATISTIQUE.
On dénombre, pour la période 1766-1788, 685 permissions, soit une moyenne annuelle approximative de 30 ouvrages autorisés. Les variations annuelles sont très intéressantes. Elles confirment la baisse de 1760. Elles font apparaître deux cycles décennaux : 1772-1780 et 1781-1788 (voir planche X). Mais surtout il semble qu'il existe un mouvement de hausse continue des autorisations dans les dernières décades de l'Ancien Régime, dont l'accélération n'est pas apparemment sans analogie avec le mouvement des permissions tacites, et rejoint l'observation faite précédemment en ce qui concerne les livres arrêtés et rendus. Or les permissions pour les livres entrés par la Chambre concernent la censure effectuée sur le plan des livres déjà publiés sans permission. L'extension du libéralisme, déjà constatée par ailleurs, se confirmerait dans cette production. VII. ÉTUDE COMPARÉE DES STATISTIQUES DES REGISTRES DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMÉS Toutes les statistiques de la police des livres imprimés ne sont pas comparables, parce qu'elles ne se recoupent pas historiquement ou parce que la comparaison ne présente pas d'intérêt. Il en est
326
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
A. NOUVEAUTÉS I» J* Livres arrêtés clans les visites
C. LIVRES PROHIBÉS
D. LIVRES MIS AU PIILON Livres suspei>ndu»
Livras arrê :és| dans les. visites
B. CONTREFAÇONS Livr 11 arrêtés dans'lek visites
•10
Livres arrêtésl dans les visites
10-
Lfvres suspendus 10-
Uvres suspendus
1770
1780
1790
1770
1780
1790
1770
1780
X I . LIVRES ARRÊTÉS DANS LES VISITES ET LIVRES SUSPENDUS
1790
STATISTIQUE
DE LA POLICE DES LIVRES
IMPRIMES
327
ainsi, outre les registres de la Douane qui n'ont pas donné lieu à une statistique dans le cadre de cette étude, du registre des livres prohibés qui n'offre pas de données annuelles, et du Journal d'Hémery. Il reste les statistiques des livres arrêtés (Mss. Fr. 21930-34), des livres suspendus (Mss. Fr. 21935) et des livres entrés par la Chambre (registres de feuilles de permissions tacites et registres d'enregistrement des permissions tacites à la Chambre Syndicale). Leur comparaison est utile. Elle consiste dans l'examen des diverses phases du circuit des livres arrêtés, soit encore l'arrêt proprement dit à la Chambre, la censure des livres suspendus au Bureau de la Librairie, l'octroi de permissions. Elle équivaut à mesurer l'écart entre les cadres de ces statistiques. Ainsi l'étude comparée des statistiques des livres arrêtés (Mss. Fr. 21930-34) et des livres suspendus (Mss. Fr. 21935) devrait en principe permettre d'apprécier quantitativement la production des livres anciennement examinés pour lesquels une décision d'arrêt avait déjà été prise, ainsi que des exemplaires des livres anciens et nouveaux répartis dans les différents paquets. L'étude comparée des statistiques des livres suspendus et des livres « entrés par la Chambre » doit permettre d'établir la production nouvelle qui n'a pas obtenu de permission et qui a simplement été rendue. Encore ces diverses études ne sont-elles réalisables que dans des cadres chronologiques réduits soit, principalement, pour les trois séries examinées simultanément pour les années 1780-1788.
A.
ÉTUDE
COMPARÉE
DES
STATISTIQUES
DES
LIVRES
ARRÊTÉS
ET DES LIVRES SUSPENDUS.
Un seul résultat paraît devoir être considéré comme valable, celui de l'enregistrement des livres « arrêtés » et des livres « suspendus ». Pour les neuf années, on dénombre 1.106 livres arrêtés à la Chambre et 905 livres nouveaux suspendus et examinés au bureau. L'écart est donc de 201, soit une moyenne annuelle de 22 titres. Ainsi les livres suspendus représentent 82 % des livres arrêtés. Quant aux autres données, la comparaison montre que les chiffres des registres d'arrêts à la Chambre sont généralement inférieurs. Si l'on a 562 ouvrages rendus dans ces derniers pour 514 dans le Mss. Fr. 21935, par contre on relève 106 prohibés contre 151 ; 113 contrefaits contre 139 ; 618 nouveautés contre 744. Or, puisque les cadres des registres de la Chambre sont plus larges que ceux des registres du Bureau, et, puisque ce fait est assuré pour les enregistrements des arrêts, on est amené à conclure, après vérification, que les registres du Bureau sont mieux tenus que ceux de la Chambre. Ceci n'est pas sans conséquence. Les résultats obtenus par l'ana-
328
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
lyse des statistiques des livres arrêtés à la Chambre, principalement en ce qui concerne la cause de la décision prise, sont sujets à caution et beaucoup moins exacts que ceux du Bureau. B.
ÉTUDE
COMPARÉE
DES
STATISTIQUES
DES
LIVRES
SUSPENDUS
E T DES LIVRES E N T R É S PAR LA CHAMBRE.
Les livres nouveaux soumis à l'examen étaient rendus sans ou avec permission, suivant qu'il s'agissait de livres réimprimés ou réédités ou de titres nouveaux. Dans ce dernier cas, ils passaient par les registres de feuilles de permissions tacites. Ils étaient ensuite enregistrés à la Chambre. L'écart entre les deux statistiques permet d'établir le nombre et le pourcentage des livres rendus sans permission, c'est-à-dire de réimpression ou réédition. On dénombre 514 livres suspendus et rendus pour 366 livres permis entrés par la Chambre. Les livres rendus sans permission sont donc au nombre de 148 pour les neuf années, et ils représentent 29 % des livres suspendus et 40 % des livres suspendus, permis, appelés livres entrés par la Chambre. Ainsi, un peu moins d'un livre nouveau sur trois qui avaient été arrêtés, était rendu sans qu'on jugeât bon de le pourvoir d'une permission particulière, puisqu'il s'agissait d'un livre déjà connu et autorisé.
V I I I . CONCLUSIONS Cette étude des statistiques des registres de la police des livres imprimés aura permis d'obtenir quelques résultats appréciables. Sur le plan des données globales, on a pu évaluer la censure des livres arrêtés entre 15 % et 43 %. Mais c'est surtout l'évaluation de certaines catégories d'ouvrages imprimés qui est intéressante. Par le Journal d'Hémery, pour la période 1751-67, on a pu atteindre la production des livres nouvellement imprimés, titres nouveaux ou anciens réimprimés. E t la moyenne s'est élevée à 256 ouvrages. L'étude comparée des statistiques des livres suspendus et des livres entrés par la Chambre a fourni le nombre des livres réimprimés sans permission, arrivant à Paris de 1780 à 1788. Celui-ci, évidemment, ne représente qu'une partie de la production française des réimpressions, puisque n'y figurent pas, d'une part, les livres réimprimés avec permission et, d'autre part, la production des livres réimprimés sans permission qui ne fut pas dirigée sur Paris, bien qu'elle contienne une partie de la production étrangère. De même, l'étude de la statistique des ouvrages suspendus a donné l'importance de la production des livres imprimés sans
STATISTIQUE DE LA POLICE DES LIVRES
329
IMPRIMES
permission avec le même inconvénient que précédemment : les ouvrages étrangers sont mêlés aux français. On a pu enfin se faire une idée de l'importance comparée des productions de livres prohibés, contrefaits, nouveaux, mis au pilon et arrêtés, les chiffres du registre Mss. Fr. 21935 étant plus exacts. Cependant, tous ces résultats ont une portée restreinte du fait que les registres sont souvent incomplets. Sur le plan des fluctuations, ces études ont confirmé l'existence des cycles interdécennaux, des tendances de la censure dégagées dans l'examen des statistiques de permissions d'imprimer. Elles ont, en outre, permis de discerner l'existence d'une tendance séculaire au libéralisme dans la censure des livres imprimés, qui se renforce dans les dernières années de l'Ancien Régime pour les livres prohibés ou mis au pilon.
STATISTIQUE DES LIVRES SUSPENDUS (MSS. FR. 21935)
Années
1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788
Livres suspendus
Livres permis et rendus
Livres rayés
41 33 46 54 36 57 73 70 88 57
8 8 19 12 6 21 24 25 12 12
114 57 90 99 71 101 123 126 139 99
Nouveautés
Contrefaits
40 71 79 56 93 102 111 105 87
STATISTIQUE DU JOURNAL
15 22 13 32 23 3 16 9 6
D'HËMERY
Années
Livres nouveaux
Années
Livres nouveaux
Années
Livres nouveaux
1751 1752 1753 1754 1755 1756
128 186 259 286 175 167
1757 1758 1759 1760 1761 1762
68 195 108 34 383 165
1763 1764 1765 1766 1767
198 201 77 1471 248
Prohibés
13 22 2 22 43 11 34 3 1
LA STATISTIQUE
330
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
STATISTIQUE DES LIVRES A R R Ê T É S DANS LES VISITES
Années
1699 1700 1701 1702 1703 1704 1705 1706 1707 1708 1709 1710 1711 1712 1713 1714 1715 1716 1717 1718 1719 1720 1721 1722 1723 1724 1725 1726 1727 1728 1729 1730 1731 1732 1733 1734 1735 1736 1737 1738
Livres arrêtés
Livres rendus
Livres non rendus
474 50 316 265
13 12 15 20
461 38 301 245
146 87 129 289 108 118 109 49 89 156 264 266 74 179 44 212 41 26 80 223 235 58 44 23 105 150 136 73 106 30 194 79 104 145 85
26 20 38 96 36 56 30 32 41 95 40 115 32 44 33 16 22 10 61 138 163 41 42 17 60 99 92 29 62 17 59 7 58 76 50
120 67 91 193 72 62 79 17 48 61 224 151 42 135 11 196 19 16 19 85 72 17 2 6 45 51 44 44 44 13 135 72 46 69 35
Années
1739 1740 1741 1742 1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759 1760 1761 1762 1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778
Livres arrêtés
Livres rendus
Livres non rendus
117 170 224 384 460 234 154 168 121 195 174 101 12 37 18 15 26 36 185 78 158 78 60 61 110 124 95 268 261 270 467 355 401 179 138 266 260 169 161 145
43 71 65 135 206 55 50 55 57 118 55 38 8 14 7 11 25 24 68 40 86 56 27 25 54 82 65 99 164 178 237 190 309 132 80 143 184 105 102 66
74 99 159 249 254 179 104 113 64 77 119 63 4 23 11 4 1 12 117 38 72 5 33 36 56 42 30 169 97 92 230 165 92 47 58 123 76 64 59 79
STATISTIQUE DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMES
331
STATISTIQUE DES LIVRES ARRÊTÉS DANS LES VISITES (suite)
Années
Livres arrêtés
Livres rendus
Livres non rendus
1779 1780 1781 1782 1783 1784
121 96 118 121 117 155
67 60 49 63 54 65
54 36 69 58 63 90
Années
Livres arrêtés
1785 1786 1787 1788 1789
128 133 144 94 130
Liyres rendus
Livres non rendus
70 64 82 55 63
58 69 62 39 67
Livres nouveaux
Livres mis au pilon
STATISTIQUE DES LIVRES ARRÊTÉS DANS LES VISITES
Années
1699 1700 1701 1702 1703 1704 1705 1706 1707 1708 1709 1710 1711 1712 1713 1714 1715 1716 1717 1718 1719 1720
Livres non rendus par rapport aux livres arrêtés
97 76 95 90 82 77 66 67 67 52 72 35 54 39 85 57 57 75 23 92 46
Années
1721 1722 1723 1724 1725 1726 1727 1728 1729 1730 1731 1732 1733 1734 1735 1736 1737 1738 1739 1740 1741 1742
Livres non rendus par rapport aux livres arrêtés
62 21 38 31 29 5 26 43 34 32 60 41 43 70 91 44 48 41 63 58 71 65
Livres prohibés
Livres contrefaits
332
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE STATISTIQUE DES L I V R E S A R R Ê T É S DANS L E S VISITES
Années
Livres non rendus par rapport aux livres arrêtés
1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759 1760 1761 1762 1763 1764 1765 1766
55 76 68 67 53 39 68 62 33 62 61 27 4 33 63 49 46 28 55 59 51 34 32 63
Années
Livres non rendus par rapport aux livres arrêtés
1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788 1789
37 34 41 46 23 26 42 41 29 32 37 54 45 38 58 48 54 56 45 52 43 41 52
Livres prohibés
Livres contrefaits
111 49 40 122 43 33 13 18 15 4 6 8 11 38 23 13 12 1 0
65 5 6 2 53 26 3 10 3 7 22 6 37 10 2 21 6 2 4
Livres nouveaux
132 84 43 35 81 58 87 75 56 46 63 86 58 89 79 79 64 54 72
STATISTIQUE DES L I V R E S E N T R É S PAR LA CHAMBRE A Y A N T REÇU UNE PERMISSION
Années
Livres entrés par la Chambre
Années
Livres entrés par la Chambre
1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773
1 1 12 11 14 7 41 20
1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781
34 34 41 38 30 35 16 32
Années
Livres entrés par la Chambre
1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788
36 33 44 55 46 65 39
(suite)
Livres mis au pilon
39 19 10 55 22 27 8 16 11 0 0 1 1 11 2 0 0 0 0
STATISTIQUE
DE LA POLICE DES LIVRES
IMPRIMES
333
POLICE DES LIVRES IMPRIMÉS RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE DES DONNÉES GLOBALES
Registres
Nature de la série
Dates
Nombre d'années
Total
Moyenne annuelle
Pourcentages
Journal Livres d'Héme- nouveaux ry
1751-67
17
4.349
256
Livres Arrêts arrêtés dans les Rendus visites (Mss Fr. 21930 à Non 34) Rendus
1699
90
13.653
152
6.134
68
45 % des livres arrêtés
7.519
83
55 % des livres arrêtés
3.076
162
—
1.813
95
—
1.263
66
Prohibés
550
29
2 fois y2 plus que les livres contrefaits et pilonnés, 41 % des nouveautés, 18 % des livres arrêtés
Contrefaits
290
15
13 % des prohibés 22 % des nouveautés 9 % des ararrêtés
Arrêts Rendus Non Rendus
1789 (moins 1703) ' "
1771-89
19
334
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE POLICE DES L I V R E S IMPRIMÉS R É S U L T A T S D E L'ANALYSE STATISTIQUE D E S DONNÉES GLOBALES (suite)
Registres
Nature de la série
Dates
Livres nouveaux
1771-89
Pilon
Livres suspendus (Mss F r . 21935)
Nombre d'années
—
Arrêts Rendus Prohibés Contrefaits Nouveautés
1780-88
Arrêtés
1780-88
9
Total
1.341
71
222
12
1.106
123 62
562 106 113 618 9
Moyenne annuelle
Pourcentages
2 fois y2 plus que les prohibés ; 4 % plus que les contrefaits, 4 4 % des arrêtés
12 13 69
905
101
Rendus
514
57
57 % des suspendus
Rayés
139
16
15 % des suspendus
Prohibés
151
17
17 % des suspendus 108 % des contrefaits 2 0 % des nouveautés
Contrefaits
139
15
15 % des suspendus 92 % des prohibés 19 % des nouveautés
STATISTIQUE DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMES
335
POLICE DES LIVRES IMPRIMÉS RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE DES DONNÉES GLOBALES (suite) Registres
Nature de la série
Dates
Nombre d'années
Nouveautés
Livres Prohibés (Mss F r . 2192821929)
16961770
Total
Moyenne annuelle
744
83
74
1.579
21
Pourcentages
82 % des suspendus, 5 fois plus que les prohibés
(?)
Livres entrés par la Chambre
Permis
17661788
23
685
30
Étude Comparée livres suspendus et arrêtés
Arrêts suspendus
178088
9
201
22
les suspendus = 82 % des livres arrêtés
9
148
16
les livres rendus non permis = 2 9 % des livres suspendus et 4 0 % des livres entrés par la Chambre.
Étude comparée livres suspendus et livres entrés par la Chambre
Suspen- 1780-88 dus moins entrés par la Chambre (permis)
CHAPITRE
V
LA STATISTIQUE DU DÉPÔT LÉGAL I.
INTRODUCTION
Les registres du Dépôt Légal de l'Ancien Régime permettent de réaliser trois études statistiques. Grâce à eux, d'abord, on peut atteindre la production générale des livres imprimés en France par permissions et déposés soit à la Bibliothèque Royale pour la période de 1684-1789, soit pour la Chambre Syndicale des Libraires de Paris de 1626 à 1704, soit au Cabinet du Roi de 1704 à 1721, ou pour le Chancelier de 1734 à 1737. On peut ensuite étudier le fonctionnement du Dépôt par l'étude comparée des registres des destinataires, quand ils recouvrent une même période. Ce sera le cas du fonctionnement du dépôt à la Chambre et à la Bibliothèque pour les années 1684-1704, à la Bibliothèque et au Cabinet du Roi de 1704 à 1721, à la Bibliothèque et chez le Chancelier de 1734 à 1737. La dernière recherche, enfin, visera à apprécier l'efficacité du Dépôt Légal à la Bibliothèque du Roi. Ces trois études se complètent. La première est extrêmement utile, puisque, avec et mieux que la statistique de la police des imprimés et des bibliographies imprimées et privées, elle nous renseignera sur la production française réglementaire. La seconde, par des sondages courts, vérifiera l'intérêt comparé des statistiques des différents destinataires et la troisième, face à la totalité de la production déposable, déterminera quantitativement ses limites.
338
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
II. LA PRODUCTION GÉNÉRALE DES LIVRES DÉPOSÉS Cette première étude comporte, comme nous l'avons vu, quatre parties en fonction de l'origine des données. A.
LA
PRODUCTION
GÉNÉRALE
DES
LIVRES
DÉPOSÉS
POUR
CHAMBRE S Y N D I C A L E DES LIBRAIRES DE PARIS D E 1 6 2 6 A
1.
LA
1704.
Dépouillement.
Cette statistique a été obtenue à partir du registre Mss. Fr. 21943, « Registre des livres fournis par les imprimeurs aux Syndics et Adjoints de la Communauté en exécution des règlements concernant la Librairie », 1626-1689, et du registre 21845 qui lui fait suite. Le dépouillement a été réalisé en comptant par titres sans tenir compte du nombre d'exemplaires, lequel varie avec le temps et la nature de la production. La séparation des années n'est pas toujours précise. Il arrive même que la liste partielle des livres d'une année soit intercalée dans celle d'une autre. Il a fallu la séparer, et l'ajouter à l'énumération principale de l'année qu'elle concerne. 2. Analyse
statistique.
Sur le plan de la production globale, on dénombre 7.655 titres déposés pendant la période 1626-1704, soit une moyenne de 57 ouvrages. Si l'on examine les fluctuations, on est d'abord conduit à une première et très importante constatation : le dépôt n'est pas régulier. Il est des années où aucun livre n'est fourni, comme en 1634, 1647, 1648, etc. Quelquefois, le dépôt est très réduit, comme en 1653 (1), 1659 (5), etc. Par contre, certaines années sont des records : ainsi on dénombre 503 titres en 1646, 1200 en 1676. De même, parfois, les chiffres, pour être moins spectaculaires, sont néanmoins anormalement élevés par rapport aux années voisines. C'est le cas en 1652 où l'on trouve 246 titres, les années précédentes et suivantes étant très faibles. Cette irrégularité du dépôt à ses causes. Elle provient, d'abord, du fait que la fourniture des ouvrages se produit, très souvent, à l'occasion du changement de syndicat. De la sorte, les libraires déposent mal jusqu'au jour de la passation des pouvoirs. Il y a, de plus, une autre raison. La tendance générale paraît être à la négli-
STATISTIQUE
DU DEPOT LEGAL
339
gence, surtout pendant les deuxième et troisième quarts du x v n e siècle. De temps à autre, une réclamation générale est effectuée par les Syndics auprès des libraires qui déposent alors les livres très anciennement imprimés dont ils n'avaient pas, en leur temps, effectué le dépôt. Le moyen pour l'autorité de la Communauté de déterminer les livres non fournis est sans doute le même que celui qui servit à la Bibliothèque du Roi : les registres d'enregistrement des privilèges, au moins à partir de l'époque où ils furent constitués. Ceux-ci, comparés avec les livres fournis, permettaient de reconnaître ceux qui ne l'avaient pas été, et par suite, de les réclamer. Cette vérification périodique n'a rien de surprenant. Elle était également employée par la Bibliothèque, comme nous l'avons montré dans notre précédente étude et elle se manifeste par les mêmes faits : la hausse brutale et momentanée des données annuelles. Ce fut le cas notamment en 1685 dans le dépôt pour la Bibliothèque. Une telle irrégularité, généralisée a deux conséquences : d'abord elle laisse planer un doute sur l'efficacité du dépôt. En effet, on peut présumer, dans une certaine mesure, que les réclamations tardives risquaient de ne pas obtenir toute la production manquante. Ensuite, et ceci est non moins grave, l'irrégularité du dépôt masque en partie les fluctuations réelles de la production des livres. Elle ne semble pas pourtant les effacer complètement. C'est que la baisse ou la hausse technologique se produit toujours sur les fluctuations de la production. Malgré cet inconvénient, il semble que l'existence des cycles interdécennaux, déjà constatés dans les statistiques des permis d'imprimer et des privilèges à la Chambre Syndicale, se vérifie. Ainsi on peut constater (voir planche XII) : 1° Une baisse décennale de 1627 à 1639 ; 2° Les cycles interdécennaux 1639-1658 ; 1659-1673 et 1674-1694 ; 3° Il semble qu'il existe un mouvement de baisse de 1626 à 1658 qui se superpose à la baisse décennale et au premier mouvement interdécennal. Il serait suivi d'une hausse. Ces constatations sont confirmées par la moyenne des périodes d'irrégularité comprises entre deux années records, la première de ces années étant éliminée et la dernière incorporée. Ainsi la moyenne annuelle est de 115 ouvrages pour la période 1626-1630. Puis elle baisse à 68 pour les années 1631-1635 ; 60 pour la période 1636-42 ; elle remonte à 157 de 1643 à 1646 pendant la hausse cyclique ; baisse encore de 1647 à 1652, pour atteindre le chiffre de 59 et même de 48 entre 1653-57. Après quoi elle commence à remonter : 67 pour les années 16581668 ; 167 de 1669 à 1676.
340
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
CHAI
1620
1800
X I I . PRODUCTION DÉPOSÉE AUX ET XVIII® SIÈCLES
XVIIe
STATISTIQUE
B.
DU DEPOT
LEGAL
341
LA PRODUCTION DES LIVRES DÉPOSÉS POUR LA BIBLIOTHÈQUE DU ROI.
1. Le
dépouillement.
La production générale des livres déposés par la Bibliothèque du Roi concerne une période plus étendue que le Dépôt pour la Chambre Syndicale des Libraires puisqu'elle commence en 1684 et s'achève en 1789. Tous les registres n'ont pas été utiles. C'est principalement à partir des registres d'entrées, Archives 34 et 35, Mss. Fr. 22023 à 22026 et 22032, que la statistique a été établie. Toutefois, pour plusieurs des dernières années de l'Ancien Régime, il a fallu avoir recours soit aux doubles de la Chambre (Mss. Fr. 22029, 22030 et 22034), soit à un registre de répartition, le Mss. Fr. 22031. De plus, le dépouillement a été différent avant et après 1785. Pour la période principale, l'énumération des entrées est aussi celle des titres. La certitude est donc absolue. Au contraire, dans les trois dernières années de 1787 à 1789, comme les doubles ne sont pas complets, il a fallu se fonder sur la numérotation des folios. On sait que chaque feuille comportait trente ouvrages. Il suffisait donc de connaître le n° du folio de la première semaine de l'année et celui de la dernière pour, en multiplicant par trente, obtenir le chiffre annuel. C'est ce qui fut fait, faute d'indications plus précises. Ces nombres, il y a tout lieu de le penser, sont exacts. Le registre Archives 34 fournit les données de 1684 à 1720 compris. L'année 1721 est obtenue par l'addition des données de ce registre (jusqu'au 13 mars 1721) et de celles qui figurent dans Archives 35. Le registre Archives 35 donne la statistique de 1722 et de 1723. L'année 1724 est obtenue par addition des livres enregistrés dans ce manuscrit (jusqu'au 4 novembre) et de ceux qui sont énumérés dans le Mss. Fr. 22023. Le Manuscrit Français 22023, de 1724 à 1757 compris. Le Manuscrit Français 22024, de 1758 (31 janvier) à 1774. L'année 1775 est obtenue à partir des données de ce registre (jusqu'au 14 juillet) et de celles de suivant (à partir du 11 août). Le Manuscrit Français 22025, du 1775 à 1782. L'année 1783 est obtenue par addition des livres déposés jusqu'au 23 mai et figurant dans ce registre et de ceux du Mss. Fr. 22026 à partir du 18 juillet. Le Manuscrit Français 22026 donne les chiffres de 1784 et 1785 (jusqu'au 29 décembre). L'année 1786 est obtenue à partir du Manuscrit Français 22029, registre double de la Chambre Syndicale. L'année 1787 est obtenue à partir du Manuscrit Français 22030,
342
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
de même origine que le précédent. Toutefois les folios 109, 112, 114, 115,116, 117, 118 manquent et on les a comptés chacun pour trente unités comme les autres. Les chiffres de l'année 1788 sont obtenus à partir des trois registres suivants : — Le Manuscrit Français 22030 indique le numéro du dernier folio de 1787 (folio 30, 30 décembre 1787). — Le Manuscrit Français 22034 précise le numéro du premier folio de 1788 (folio 31) et énumère les livres jusqu'au folio 46 (28 mai 1788). — Le Manuscrit Français 22031 (qui ne donne en principe que les livres et la musique) commence au folio 47 (4 avril) et indique le dernier numéro de l'année (folio 86, 30 décembre 1788). Les chiffres de l'année 1789 sont obtenus à partir des indications des Manuscrits Français 22031 et 22032. Le Mss. Fr. 22031 indique le premier folio de 1789 (folio 87) et le dernier (folio 127). Un certain nombre de considérations complémentaires sont à faire en ce qui concerne la statistique obtenue. 1° Les chiffres sont ceux du dépôt effectué dans l'année dont il est question, sans tenir compte de la date de parution. Le dépôt n'est jamais, et même aujourd'hui encore, celui des seuls livres parus dans l'année. Il s'y ajoute ceux qui ont été publiés les années précédentes. Un sondage effectué nous a montré, cependant que, dans la plupart des cas, les livres de l'année constituent la partie la plus importante, approximativement les 3/4 ou les 4/5. Comme on devait s'y attendre, le nombre des livres des années antérieures diminue au fur et à mesure qu'on s'éloigne de l'année considérée, et ceci sur deux ou trois ans, dans les années normales. Ce fait est courant. Il est cependant une exception due à la réclamation des livres non déposés depuis une période assez longue. C'est le cas notamment en 1685. On retrouve alors un phénomène identique à celui qui a été constaté régulièrement en ce qui concerne le dépôt pour la Chambre Syndicale des Libraires. 2° Les chiffres concernent les livres publiés aussi bien à Paris qu'en Province. 3° Ils comportent les livres imprimés par privilèges d'abord, et, plus tard, à partir de 1733, semble-t-il, par permissions tacites. Ainsi trouve-t-on dans le Mss. Fr. 22023, f. 157 : « Imprimé à Paris par Permission Tacite et fourni aussi à la Bibliothèque par ordre de Mgr le Garde des Sceaux ». 4° Les chiffres annuels comprennent également les réimpressions, les livres de musique, les cartes, les estampes et les périodiques. Cette dernière catégorie d'ouvrages, dont le nombre annuel était peu élevé avant 1775, augmente rapidement, en| même temps d'ailleurs que les livres proprement dits, jusqu'à la fin de l'Ancien
343
STATISTIQUE DU DEPOT LEGAL
Régime. Ainsi, ils passent de 6 en 1772, à 5 en 1773, 8 en 1774, 30 en 1775, 36 en 1776, 72 en 1777, 87 en 1778, 118 en 1779, 97 en 1780, 103 en 1781, 59 en 1782, 71 en 1783, 56 en 1784, 103 en 1785, 284 en 1786. Chacune de ces catégories d'imprimés n'a pas été séparée, puisqu'il s'agissait dans ce travail de la seule production générale bibliographique. 5° Enfin, comme le nombre de volumes était clairement indiqué, on a établi la statistique des titres et celle des volumes. Toutefois, en 1787, 1788, et 1789, à cause du procédé hypothétique de calcul, il a été impossible de fixer le nombre de volumes. 2. Analyse
statislique.
On dénombre, pour toute la période 1684-1789, soit pour 106 ans, 28.585 ouvrages déposés, ce qui donne une moyenne annuelle approximative de 270 titres. Pour la période légèrement plus courte 1684-1786, on relève 31.962 volumes, soit une moyenne annuelle de 310 volumes. Le nombre de volumes annuel en supplément des titres, en tenant compte de l'absence de données pour les trois dernières années de l'Ancien Régime, est supérieur à dix pour cent et compose approximativement 1/7 du nombre des titres déposés. L'examen des fluctuations annuelles conduit à deux constatations (voir planche X I I ) : 1° Les cycles interdécennaux déjà décelés dans d'autres séries se vérifient. Si l'on ne doit pas tenir compte de la hausse technologique de 1685 due aux réclamations, il semble qu'on ait les cycles suivants : 1695-1701 à 1719-20 ; 1721 à 1738-1744 ; 1739-1745 à 1761 ; 1762 à 1774-82. 2° Ces cycles se succèdent et constituent un mouvement séculaire de hausse assez rapide jusqu'en 1735, qui se calme un peu ensuite, jusqu'en 1753-61, pour s'accélérer de plus en plus rapidement, dans les trois dernières décades de l'Ancien Régime. 3° Les fluctuations des deux séries des volumes et des titres sont, dans leur ensemble, identiques. C.
LA
PRODUCTION
GÉNÉRALE
DES
LIVRES
DÉPOSÉS
POUR
LE
C A B I N E T D U ROI.
1.
Dépouillement.
La statistique a été obtenue à partir du Mss. Fr. 22021 « Registre des livres et des estampes que les Syndics et Adjoints des Libraires et Imprimeurs de Paris ont fournis au Cabinet du Roy... » 12
344
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
On a décompté par titres. Il y a généralement plusieurs livraisons dans l'année qui ont été additionnées. La statistique a été plus difficilement élaborée pour les dernières années, de 1716 à 1721. En effet, au lieu de plusieurs livraisons annuelles, on ne rencontre qu'une énumération de livres tous les deux ans. Ainsi, on trouve 326 livres le 13 octobre 1717, la livraison précédente étant celle du 8 octobre 1715. Après quoi, on passe au 18 août 1719 et au 12 avril 1721. Il est donc remarquable que, dans les années qui précèdent la réunion du Cabinet à la Bibliothèque, le dépôt se soit relâché. Comme celui-ci est fait tous les deux ans, on a été obligé d'établir une moyenne annuelle, en divisant les derniers relevés par deux. 2. Analyse
statistique.
On dénombre pour la période 1705-1721, soit pour 17 ans, 2.723 ouvrages. La moyenne annuelle s'établit donc approximativement à 160 titres déposés chaque année. L'examen des fluctuations annuelles confirme, sur le plan du dépôt pour le Cabinet du Roi, l'existence du cycle interdécennal 1700-1720-21 (voir planche XII). D.
LA PRODUCTION GÉNÉRALE D E S LIVRES D É P O S É S A LA CHAMBRE SYNDICALE
DES
LIBRAIRES
POUR
LE
CHANCELIER
GARDE
DES
SCEAUX.
1. Le
dépouillement.
La statistique a été établie à partir du Manuscrit Français 22007 comportant un « Estât des ouvrages imprimez en vertu des Privilèges ou Permissions du Sceau dont le Manuscrit et l'exemplaire pour Monseigneur le Garde des Sceaux ont été remis en exécution de l'ordre du 22 décembre 1732 ». On a compté par titres. L'année 1737 est inachevée et s'arrête le 8 août. 2. Analyse
statistique.
On décompte 914 ouvrages pour les cinq années de 1732-1737, soit une moyenne annuelle de 183 titres. Les fluctuations annuelles sont trop peu nombreuses pour donner des renseignements très utiles. On remarquera, néanmoins, la hausse continue de 1733 à 1736, la baisse de 1737 provenant du fait que l'année est incomplète (voir planche XII).
STATISTIQUE
DU DEPOT LEGAL
345
III. ÉTUDE COMPARÉE DES STATISTIQUES DU DÉPÔT LÉGAL DES DIFFÉRENTS DESTINATAIRES Notre travail ne serait pas complet si l'analyse précédente n'était suivie d'une étude comparée des statistiques, lorsqu'elles existent simultanément, pendant une période déterminée. Celle-ci aura un double intérêt. La constatation de ressemblances quantitatives ou des fluctuations renseignera sur l'efficacité du dépôt et la variation de la production des livres imprimés réglementaires ; les dissemblances préciseront le fonctionnement du dépôt des différents destinataires. Cependant, à cause des données dont nous disposons, cette étude n'aura que la portée réduite d'un sondage. En effet, tous les destinataires ne nous ont pas laissé de statistique pour les mêmes périodes. Ainsi la comparaison ne pourra être effectuée qu'entre les données de la Chambre Syndicale, du Cabinet du Roi, du Chancelier, d'une part, et celles de la Bibliothèque du Roi, d'autre part. De plus, et ceci est plus important encore, elle ne pourra être réalisée en ce qui concerne la Bibliothèque et le Chancelier, que pour quelques années. Seule la comparaison entre les statistiques de la Bibliothèque, de la Chambre, et du Cabinet dépassera une décade. A.
É T U D E COMPARÉE DES STATISTIQUES D U DÉPÔT LÉGAL POUR LA CHAMBRE S Y N D I C A L E ET POUR LA BIBLIOTHÈQUE D U ROI.
La période pour laquelle les deux séries ont des données est courte puisqu'elle ne concerne que les 21 années de 1684 à 1704. On dénombre 1.946 ouvrages déposés pour la Chambre et 3.070 pour la Bibliothèque, soit une moyenne respective de 93 et 146. Toutefois, la comparaison quantitative est quelque peu faussée, puisque l'année 1685 comporte, outre les livres de l'année, ceux d'une réclamation importante en ce qui concerne la Bibliothèque. C'est pourquoi il a paru préférable d'éliminer l'année 1685 dans les deux séries. On trouve alors 1.847 ouvrages à la Chambre et 2.604 à la Bibliothèque. Les moyennes sont de 92 et 130. La différence est alors de 757 titres, qui représentent approximatvement 29 % du dépôt de la Bibliothèque. Ainsi se confirme ce que nous avions déjà envisagé dans l'étude des données de la Chambre Syndicale. Le dépôt est non seulement irrégulier, mais très incomplet. Les imprimeurs observent le dépôt pour la Bibliothèque parce qu'ils dépendent d'une autorité qui leur est étrangère. Ils négligent le dépôt pour la Communauté à laquelle ils appartiennent et avec laquelle ils peuvent prendre plus de liberté.
346
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
10000 "9000 8000 7000 6000
X I I I . PRODUCTION
D É P O S É E DU X V I I e AU XX«
SIÈCLE
STATISTIQUE
DU DEPOT
347
LEGAL
1 4
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1800
XIII
1850
bis. PRODUCTION
1900
1950
DÉPOSÉE DU X V I I « AU
XXe
SIÈCLE
348
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
L'étude des fluctuations (voir planche XII) est par contre intéressante. Elle prouve une première fois que les variations sont dans l'ensemble identiques si les niveaux diffèrent, à condition bien entendu de ne pas tenir compte de la hausse brutale du dépôt à la Bibliothèque en 1685. B.
É T U D E COMPARÉE D E S STATISTIQUES D U DÉPÔT LÉGAL POUR LE CABINET ET POUR LA BIBLIOTHÈQUE D U ROI.
Cette étude concerne une période plus tardive que la précédente et s'étend de 1705 à 1721. On décompte 2.723 ouvrages déposés au Cabinet pour 2.671 à la Bibliothèque, ce qui représente une moyenne annuelle respective de 160 et 157. Ainsi, dans l'ensemble, le dépôt pour le Cabinet du Roi est-il légèrement supérieur d'un peu plus de 2 % au dépôt à la Bibliothèque. A peu de choses près le dépôt est donc identique, et de toute façon, très différent de celui qui fut effectué pour la Chambre Syndicale. L'examen des fluctuations est non moins important. La partie accessible du cycle interdécennal 1700-1720 se retrouve dans les deux séries. De plus, si l'on excepte les six dernières années du dépôt au Cabinet du Roi pour lesquels existent seules des moyennes, il semblerait que les fluctuations soient légèrement retardées d'un an dans la série du Cabinet, par rapport à celle de la Bibliothèque (voir planche XII). Il se pourrait, en ce cas, que le dépôt au Cabinet soit plus tardif, manifestant ainsi un certain relâchement dans la livraison, déjà constaté en ce qui concerne les années précédant la réunion des deux collections. C. É T U D E COMPARÉE D E S STATISTIQUES D U DÉPÔT LÉGAL POUR LE CHANCELIER ET POUR LA BIBLIOTHÈQUE D U ROI.
L'étude est réalisable pour la courte période 1733-1737. On dénombre pour cinq années, 1.177 ouvrages déposés à la Bibliothèque et 914 à la Chambre pour le Chancelier Garde des Sceaux, ce qui fait une moyenne respective de 235 et 183. Une nouvelle fois se vérifie donc le fait que le dépôt pour la Bibliothèque est le plus souvent supérieur à celui qui concerne les autres destinataires. Le dépôt du Chancelier ne représente que 78 % de celui de la Bibliothèque et la proportion des livres manquants s'établit entre 1/5 et 1/4. Les fluctuations sont identiques mais avec un léger retard du dépôt pour le Chancelier (voir planche XII). Ainsi, en conclusion, cette étude comparée des statistiques, bien que réduite, aura été utile. Elle montre que les fluctuations sont généralement identiques, le dépôt pour les destinataires autres que la Bibliothèque
STATISTIQUE
DU DEPOT LEGAL
349
étant peut-être, parfois, en retard d'un an. Ensuite, le meilleur dépôt est celui qui est effectué pour les collections royales, les dépôts pour le Chancelier et pour la Chambre étant inférieurs de 22 % et 15 %.
IV. L'EFFICACITÉ DU DÉPÔT LÉGAL Les deux études précédentes nous ont fait connaître les fluctuations et le fonctionnement du Dépôt Légal chez les différents destinataires. Cependant, une question subsistait, que nous aurons maintenant à examiner : quelle est l'importance de la production déposée, par rapport à la production déposable ? Autrement dit, quelle fut l'efficacité du Dépôt Légal sous l'Ancien Régime. Ce problème suppose plusieurs faits : d'abord, il convient de le rappeler, il existe un écart théorique, que nous devons estimer dans les études qui suivront, entre la production réelle, et la production déposable : c'est l'écart entre la production réelle et la production réglementaire. Après quoi, et c'est là la question qui nous occupe ici, il est possible qu'il existe un écart entre la production déposable et la production déposée. Deux études complémentaires permettront de l'apprécier. L'une, pour la période 1664-1703, concerne les privilèges seuls et sera réalisée grâce aux données du Mss. Fr. 2490, indiquant la production déposable. L'écart sera donc obtenu indirectement, par soustraction des deux séries du dépôt et des livres réglementaires à déposer. L'autre, de 1752 à 1770, pour les privilèges et les permissions tacites, par le Mss. Fr. 22020, atteindra directement l'écart, et la production déposable sera déduite par addition des réclamations et des livres déposés.
A. LES LIVRES I M P R I M É S PAR
PRIVILÈGE.
Le Manuscrit Français Nouvelles Acquisitions 2490 permet d'atteindre la production des livres de privilèges, par nombre de titres, qui a été imprimée et qui aurait dû être déposée. Cette statistique représente la totalité de la production réglementaire, puisqu'à cette époque on ne délivre pas encore de permissions tacites. Trois études successives doivent être faites : l'examen de la statistique des livres imprimés par privilège, soit encore la production déposable ; l'étude comparée avec les données du Dépôt Légal; la détermination de la production non déposée, qui fournira une première indication sur l'efficacité du dépôt.
350
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
1. La statistique des livres imprimés par
DE LA
FRANCE
privilège.
Le dépouillement du Mss. Fr. N. A. 2490 a été fait en c o m p t a n t p a r nombre de titres. On dénombre, pour la période 1664-1702, 6.572 ouvrages publiés avec privilège, soit une moyenne annuelle approximative de 168. Les fluctuations annuelles (voir planche X I I ) sont les mêmes que celles de la statistique des privilèges enregistrés à la Chambre Syndicale (voir planche I bis) et confirme l'existence du cycle interdécennal de 1674 à 1695. Les variations antérieures à 1674 font partie de la baisse du cycle précédent et celles postérieures à 1695 amorcent la hausse du cycle de 1695 à 1719. 2. Étude comparée des statistiques lèges et du Dépôt Légal.
de livres imprimés
par
privi-
Cette étude doit se fractionner en deux parties puisque, p e n d a n t toute la période 1664-1702, les données du Dépôt Légal proviennent des deux sources différentes, de la Chambre Syndicale et de la Bibliothèque du Roi. a ) É t u d e comparée à partir du Dépôt Légal à la Chambre Syndicale. Elle recouvre la période 1664-1683. Elle pourrait, sans doute, se poursuivre jusqu'en 1704, puisque les données du dépôt à la Chambre existent jusqu'à cette date. Cependant, à partir de 1684, commence le registre plus exact de la Bibliothèque, et c'est donc à partir de cette dernière statistique qu'il sera préférable de mener ensuite l'étude. Notre recherche ici ne saurait donner des indications très précises, é t a n t donnée l'irrégularité déjà constatée du dépôt à la Chambre ainsi que son insuffisance par r a p p o r t au dépôt de la Bibliothèque. On dénombre, pour la période 1664-1683, 3.056 ouvrages déposés pour la communauté, soit une moyenne annuelle approximative de 153, pour 3.323 livres déposables, représentant une moyenne annuelle de 166 ouvrages. L'écart pour les vingt ans de la période est donc de 267 ouvrages, soit approximativement 9 % de la production déposée et 8 % de la production déposable. L'étude des fluctuations annuelles,' malgré les difficultés de lectures provenant de l'irrégularité du Dépôt Légal à la Chambre, montre des variations identiques ; hausses de 1665 à 1670 et de 1676 à 1683 ; baisse de 1671 à 1675 (voir planche X I I ) . b) É t u d e comparée à partir du Dépôt Légal de la Bibliothèque du Roi. Elle est réalisable pour la période réduite 1684-1702, puisqu'il n'existe pas de dépôt antérieur à cette date à la Bibliothèque du Roi. On dénombre, pour les 19 années, 3.249 livres de privilèges
STATISTIQUE
DU DEPOT
351
LEGAL
XIV. PRODUCTION
NON-DÉPOSËE
imprimés pour 2.797 déposés, soit une moyenne annuelle respective de 171 et 147. Le nombre des livres non déposés est donc de 452, soit une moyenne annuelle de 24 ouvrages et le pourcentage des réclamations s'élève à 16 % des livres déposés et à 14 % des ouvrages déposables. L'examen des fluctuations montre des variations intra et interdécennales semblables, notamment baisse de 1685 à 1692-1695 suivie d'une hausse en 1696 et 1698, le mouvement de dépôt étant généralement inférieur à celui des privilèges imprimés. 3. La statistique
des livres
non
déposés.
Cette étude peut aussi être conduite à partir des deux sources du Dépôt Légal de la Chambre Syndicale et de la Bibliothèque du Roi. Dans les deux cas, les données annuelles sont obtenues par soustraction des livres déposés des livres déposables. Toutefois l'irré-
352
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
gularité du dépôt dans le premier cas rend l'appréciation plus délicate que dans le second (voir planche XIV). Cependant, il semblerait qu'on puisse formuler l'hypothèse d'une variation inverse du dépôt et des livres non déposés, ce qui, d'ailleurs, n'a rien de surprenant. Ainsi les livres déposés à la Chambre diminuent de 1664 à 1674 tandis que les livres non déposés augmentent, et, inversement, ils augmentent de 1676 à 1683, quand les réclamations baissent. De même, en ce qui concerne les données plus exactes du dépôt à la Bibliothèque, quand les ouvrages déposés diminuent, de 1685 à 1695, ceux qui ne l'ont pas été augmentent, et le phénomène inverse paraît se reproduire de 1695 à 1702. Cette première étude de l'efficacité du Dépôt Légal à partir de la comparaison de la production déposable et de la production déposée aura été utile. Elle aura permis d'évaluer le nombre de livres non Déposés à 14-16 %, à partir du dépôt à la Bibliothèque, et à 9 % en ce qui concerne le dépôt à la Chambre, le premier des deux chiffres étant probablement le moins erroné. De même elle a conduit à l'hypothèse d'une variation inverse du dépôt et du non dépôt.
V. LES RÉCLAMATIONS Cette statistique nous est fournie pour une période courte par le Mss. Fr. 22020, de 1752 à 1770. Après quoi, il nous faudra établir l'importance comparée des productions déposées et réclamées et, enfin, en ajoutant l'une à l'autre, déterminer la production déposable. A . LA S T A T I S T I Q U E D E S L I V R E S R É C L A M É S .
Le Mss. Fr. 22020 permet de dénombrer, pour les 19 années de la période de 1752-1770, 599 titres qui auraient dû être déposés, soit une moyenne annuelle approximative de 32 ouvrages. L'examen des fluctuations (voir planche XV), fait ressortir l'existence d'un cycle décennal composé d'une hausse de 1752 à 1760 et d'une baisse de 1761 à 1765. Ce cycle paraît suivi d'une nouvelle hausse de 1766 à 1768-70.
STATISTIQUE
DU DEPOT
353
LEGAL
XV. PRODUCTIONS
DÉPOSÉES
ET
NON-DÉPOSÉES
354 B.
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
É T U D E COMPARÉE D E S STATISTIQUES DE LIVRES D É P O S É S ET D E LIVRES
RÉCLAMÉS.
Si la seconde est obtenue à partir des données du Mss. Fr. 22020, la première est fournie par la Bibliothèque du Roi seulement, les autres destinataires ne nous ayant pas laissé de renseignements pour cette période. On décompte 4.697 titres déposés pour 599 qui auraient dû l'être, soit une moyenne respective annuelle de 247 et 32. Les livres non déposés constituent donc approximativement 13 % des ouvrages déposés. Évidemment, il est difficile de généraliser ce résultat important à tout le Dépôt Légal de l'Ancien Régime. Cependant, même pour une période réduite, il semblerait montrer que le dépôt fut assez bien effectué. L'examen des fluctuations est non moins intéressant. Si l'on met à part la hausse singulière des cinq dernières années, il semblerait que le mouvement des livres non déposés soit l'inverse de celui des livres déposés, ce qui n'a rien d'étonnant. Ainsi de 1752 à 1760-61, quand les livres déposés sont en baisse, les livres non déposés sont en hausse, et le phénomène inverse se produit de 1761-62 à 1765-66. Évidemment, l'exception des dernières années et la très courte période du sondage ne permettent pas de généraliser. Cette inversion se trouve encore renforcée par l'étude de la statistique des réclamations par rapport aux livres déposés (voir planche XV).
C. LA STATISTIQUE D E S LIVRES D É P O S A B L E S .
Elle a été obtenue par addition des livres déposés et de ceux qui auraient dû l'être et qui ne l'ont pas été. On compte ainsi 5.296 titres pour la période, soit une moyenne annuelle de 279. Quant aux fluctuations, elles sont dans l'ensemble les mêmes que celles des livres déposés et l'on peut donc constater (voir planche XV) que les variations inverses des livres réclamés ne l'affectent que très peu, à l'exception de l'année 1768 dont la hausse brutale due aux réclamations pourrait peut-être avoir une cause technique non identifiée. Cette seconde étude de l'efficacité du Dépôt Légal, réalisée à partir des données d'origine différente, et pour une période plus tardive, semble confirmer que la production non déposée et qui aurait dû l'être s'établit plus ou moins autour de 15 % de la production déposée, si l'on fait exception du pourcentage assez incertain des réclamations obtenues à partir du Dépôt Légal de la Chambre. Elle semble de plus confirmer l'existence d'une variation inverse du dépôt et du non dépôt.
STATISTIQUE
DU DEPOT
355
LEGAL
STATISTIQUE DU DÉPÔT LÉGAL POUR L A CHAMBRE SYNDICALE DES L I B R A I R E S Années
Titres
1626 1627 1628 1629 1630 1631 1632 1633 1634 1635 1636 1637 1638 1639 1640 1641
50 154 89 146 135 83 42 105 —
112 35 35 20 19 31 —
Années
Titres
1642 1643 1644 1645 1646 1647 1648 1649 1650 1651 1652 1653 1654 1655 1656 1657
277 74 30 19 503 — —
59 13 38 246 1 16 69 4 149
Années
1658 1659 1660 1661 1662 1663 1664 1665 1666 1667 1668 1669 1670 1671 1672 1673
STATISTIQUE DU DÉPÔT LÉGAL POUR L E CABINET DU ROI Années
1705 1706 1707 1708 1709 1710 1711 1712 1713
Titres
100 174 169 104 184 163 147 182 225
Années
1714 1715 1716 1717 1718 1719 1720 1721
Titres
Années
5 —
73 4 17 148 147 19 45 283 20 113 — •—• —
Titres
1674 1675 5 1676 1200 1677 133 1678 46 1679 221 1680 194 1681 133 1682 193 1683 156 1684 107 1685 99 1686 89 1687 128 1688 241 1689 115
Années
Titres
1690 1691 1692 1693 1694 1695 1696 1697 1698 1699 1700 1701 1702 1703 1704
33 17 17 172 55 58 —
230 84 55 2 75 88 106 175
STATISTIQUE DU DÉPÔT LÉGAL POUR LE CHANCELIER
Titres
Années
Titres
166 191 163 163 150 150 146 146
1733 1734 1735 1736 1737
141 163 173 273 164
356
LA STATISTIQUE
STATISTIQUE Années
1684 1685 1686 1687 1688 1689 1690 1691 1692 1693 1694 1695 1696 1697 1698 1699 1700 1701 1702 1703 1704 1705 1706 1707 1708 1709 1710 1711 1712 1713 1714 1715 1716 1717 1718 1719 1720 1721
DU
DÉPÔT
Titres
Volumes
175 466 149 104 213 128 138 119 113 105 116 71 141 137 132 150 110 104 126 126 147 148 147 129 166 167 155 148 199 201 160 225 174 149 159 113 111 120
238 709 197 116 280 178 169 127 152 141 149 85 193 182 183 221 144 139 158 178 186 186 185 146 191 214 200 182 252 266 202 276 213 185 200 152 144 174
BIBLIOGRAPHIQUE
LÉGAL
Années
1722 1723 1724 1725 1726 1727 1728 1729 1730 1731 1732 1733 1734 1735 1736 1737 1738 1739 1740 1741 1742 1743 1744 1745 1746 1747 1748 1749 1750 1751 1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759
POUR
DE LA
LA BIBLIOTHÈQUE
Titres
Volumes
170 210 220 169 168 224 271 207 243 208 231 228 231 283 258 177 122 145 155 152 242 149 112 177 189 208 284 271 297 243 276 302 267 189 187 243 238 160
225 301 304 235 246 289 333 252 301 285 320 292 314 348 331 209 146 184 186 189 311 206 132 265 243 292 340 347 397 348 347 393 379 273 250 298 342 211
Années
1760 1761 1762 1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788 1789
Titres
FRANCE
DU
ROI
Volumes
196 265 138 177 212 313 179 217 296 209 265 363 313 249 422 317 455 347 326 461 602 397 376 519 303 425 278 405 240 327 360 485 313 449 424 550 492 360 750 600 390 530 479 617 329 453 373 461 392 488 895 1.097 1.615 1.873 1.470 1.680 1.020
STATISTIQUE
DU DEPOT
LEGAL
STATISTIQUE DU DÉPÔT LÉGAL (OUVRAGES NON DÉPOSÉS) (ire Partie)
Années
1752 1753 1754 1755 1756 1757 1758 1759 1760 1761 1762 1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770
Réclamations
3 5 5 10 9 17 25 26 40 38 14 17 18 3 7 29 153 45 135
Réclamations plus Dépôt Légal (Titres)
% des Réclamations par rapport au Dépôt Légal
279 307 272 199 196 260 263 186 236 176 226 196 227 268 256 346 500 371 532
1 2 2 5 5 7 11 16 21 28 7 10 9 1 3 9 44 14 34
358
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
STATISTIQUE DU DÉPÔT LÉGAL (OUVRAGES NON DÉPOSÉS) (2^e
Années
1664 1665 1666 1667 1668 1669 1670 1671 1672 1673 1674 1675 1676 1677 1678 1679 1680 1681 1682 1683
Livres Livres imprimés non déposés par privilège à la Chambre NA 2490 syndicale
167 191 179 146 158 229 169 218 162 86 98 111 149 203 142 180 169 131 197 238
19 44 160 101 + 125 209 56 218 162 86 98 106 + 1.051 70 96 +41 +25 +2 4 82
partie)
Années
1684 1685 1686 1687 1688 1689 1690 1691 1692 1693 1694 1695 1696 1697 1698 1699 1700 1701 1702 1703
Livres imprimés par privilège NA 2490
236 279 194 171 157 179 151 151 139 176 138 140 183 165 203 141 132 140 174 107 (jusqu'en août)
Livres non déposés à la Bibliothèque du Roi
61 + 187 45 67 +56 51 13 32 26 71 22 69 42 28 71 +9 22 36 48 —
Les chiffres précédés du signe + correspondent aux nombres de livres déposés en supplément des livres de privilèges imprimés.
STATISTIQUE
DU DEPOT
359
LEGAL DÉPÔT
LÉGAL
RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE D E S D O N N É E S GLOBALES Nature de l'étude
Destinataires
Période
Chambre S. 16261704 Bib. Roy. 1684Produc1789 tion Cabinet déposée du Roy 17051721 Chancelier 17331737
Nombre d'années
Total
Moyenne annuelle
79
7.655
97
106
28.585
270
17
2.723
160
5
914
183
21
3.070
146
1.946
93
20
2.604 1.847
130 92
1684Bib. du Roi moins 1704 Fonctionne- Chambre S. (-1685) ment du Biblioth. 1705Dépôt 1721 Légal Cabinet Étude du Roy compa- Biblioth. rée moins Cabinet
20
757
17
2.671
157
2.723
160
Biblioth.
5
Bib. du Roi-Chambre Synd.
16841704
Bib. du 1684Roi-Cham- 1704 bre Synd. (-1685)
Chancelier Biblioth. moins Chancelier
173337
Pourcentages
29 % du dépôt à la Bibl. du Roi
62
1.117
235
914 263
183
2 % du dépôt à la Bibl. du Roi
1/5 = 1/4 du dépôt Bibl. du Roi
360
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
DÉPÔT LÉGAL RÉSULTATS DE L'ANALYSE STATISTIQUE DES DONNÉES GLOBALES (suite)
Nature de l'élude
Efficacité du Dépôt Légal
Destinataires
Réclamations Dépôt
Période
175270
Nombre d'années
Efficacité du Dépôt Légal (suite)
32
4.697
247
5.296
279
39
6.572
168
20
3.056
153
_
_
3.323
166
—
—
267
13
2.797
147
3.249
171
452
24
B. R. Livres imprimés parprivilège
16641702
Dépôt Chambre syndicale
16641683
Non déposés
Dépôt Bib. Roy.
16841702
19
Livres imprimés parprivilège Non déposés
Moyenne annuelle
599
19
Production déposable
Livres imprimés parprivilège
Total
—
—
Pourcentages
13 % du dépôt à la Bibl. du Roi
9 % du dépôt 8 % de la product. déposable
16 % du dépôt 14% de la product. déposable
CHAPITRE
VI
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES BIBLIOGRAPHIES IMPRIMÉES
I.
INTRODUCTION
L'étude descriptive des Bibliographies de la France des x v n e et x v m e siècles nous a montré que les bibliographies imprimées correspondaient chronologiquement à la dernière période de la production des livres, celle de la vente. Aussi bien ces bibliographies ne sont-elles pas officielles, à la différence des bibliographies manuscrites, puisque le commerce est entre les mains de l'initiative privée. Leur étude statistique est à la fois intéressante, difficile et restreinte. Intéressante, puisque, par elle, on peut atteindre la statistique bibliographique de la France, non plus avant la production ou après, selon les points de vue de la police des livres et du Dépôt Légal, mais dans la perspective commerciale. Elle sera difficile aussi. En effet, comme l'a montré l'étude descriptive, l'intérêt pousse les auteurs à composer, non pas tant une bibliographie nationale courante de la production nouvelle, ce que nous cherchons à atteindre, qu'une bibliographie courante de la vente. Celle-ci peut être intéressante en soi mais comporte, de notre point de vue, de nombreux inconvénients, parmi lesquels il faut mentionner la répétition des annonces, l'indication d'ouvrages publiés depuis longtemps et hors de France, la statistique réelle grossie artificiellement. Enfin cette étude sera réduite doublement. D'abord ces bibliographies courantes de la France sont peu nombreuses pour les x v n e et x v m e siècles. Ensuite, un certain nombre
362
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
ne furent que des projets ou n'eurent qu'une ébauche de réalisation. L'étude descriptive a montré qu'elles étaient inutiles. Elles ont été éliminées. C'est le cas du Cours de Bibliographie, de VAllgemeines Bûcher Lexicon, de la France Littéraire de Ersch et de Quérard, des Siècles Littéraires. De même, parmi les bibliographies qui ont été conservées et qui font l'objet de cette étude, il faut distinguer celles qui, à l'examen, se sont vérifiées sélectives, comme le Journal des Savants et La Clef du Cabinet des Princes de VEurope, et qui, à leur tour, ont été écartées, de celles qui fournirent la statistique pour une période plus ou moins courte, soit d'une manière rétrospective, comme c'est le cas de La France Littéraire de J . d'Hébrail, soit d'une manière courante, ce qui est le plus souvent, et concerne toutes les autres. Enfin cette étude statistique comporte deux parties : l'analyse des données de chaque bibliographie ; l'examen comparé de toutes celles qui se recouvrent chronologiquement en tout ou en partie.
II. LA BIBLIOGRAPHIE ANNUELLE ET
UNIVERSELLE
Le dépouillement a été effectué en décomptant séparément les ouvrages de l'année et ceux de l'année précédente. C'est le cas notamment en 1749 et 1750. Cela a été d'autant plus facile que, comme nous l'avons dit, la classification matière se double, pour chaque discipline, d'une classification chronologique. Toutefois, ceci évidemment ne fut fait que pour les deux dernières années, et pas pour la première, puisqu'il s'agit d'un rappel des ouvrages oubliés. Après quoi, il a fallu séparer les ouvrages imprimés en France de ceux qui le furent en Europe. C'est donc sur l'indication du lieu de parution que nous nous sommes appuyés. Quand celui-ci n'était pas donné et que l'ouvrage était indiqué entièrement en français, nous l'avons ajouté à la somme des livres français. Enfin, il est probable que, dans un assez grand nombre de cas, la distinction des articles n'a pu être faite. Aussi les chiffres obtenus, après addition des chiffres annuels ajoutés à ceux oubliés et parus l'année suivante, sont-ils certainement au-dessus de la production réelle. On a pu dénombrer en 1748 = 486 titres 1749 = 591 titres 1750 = 427 titres Cette dernière année ne bénéficie évidemment pas des rappels postérieurs, puisque la bibliographie cessa de paraître en 1751. La totalité pour les trois ans est donc de 1.504 titres. Les chiffres, ainsi considérés, indiquent peu de choses. C'est surtout à l'étude
STATISTIQUE
363
DE LA VENTE
comparée qu'ils seront utiles. Remarquons toutefois que le mouvement de hausse de 1748 à 1749 cesse en 1750, peut-être à cause de l'absence des livres oubliés qui auraient dû être annoncés l'année suivante.
III. LES ANNALES
TYPOGRAPHIQUES
Le dépouillement devait nécessiter la séparation des livres étrangers de ceux parus en France. Ceci n'est réalisable qu'à la condition de se baser sur l'indication du lieu d'édition, qui est donné dans la première partie de l'ouvrage. Il a fallu faire un décompte précis, page par page, des livres (titres) publiés en France pendant les années 1757-1762. On a ainsi obtenu la statistique suivante : Titres 228 230 235 432 297 270
Années 1757 1758 1759 1760 1761 1762 TOTAL
1.692
Celle-ci, comme précédemment pour la Bibliothèque Annuelle et Universelle, ne fournit pas de données suivies suffisantes pour être en elle-même d'une grande utilité. Il est possible, cependant, de conjecturer la présence d'un mouvement cyclique croissant de 1757 à 1760 et faisant place les années suivantes à un mouvement de baisse (voir planche XX).
III. LE CATALOGUE A. LE
HEBDOMADAIRE
DÉPOUILLEMENT.
Le dépouillement pouvait s'effectuer soit à partir des feuilles hebdomadaires soit à partir de la table des livres nationaux. Cette seconde solution aurait eu l'avantage d'être plus rapide. Cette possibilité n'a pas pu être réalisée. Il y a, en effet, un premier inconvénient. La table des ouvrages nationaux ne dure que les deux premières années, 1763 et 1764. Elle est remplacée ensuite
364
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
par une « table des livres tant nationaux qu'étrangers » qui mêle évidemment les livres publiés en France à ceux qui le furent à l'étranger. Sans doute, les titres en langue étrangère sont-ils souvent donnés en italique. Mais il existe de très nombreux livres, à cette époque, publiés hors de France en langue française. Pour les deux premières années, on aurait pu espérer trouver les tables. L'examen du nombre des livres contenus dans celles-ci et dans le Journal Hebdomadaire fit ressortir une différence considérable de l'ordre du quart ou du tiers. Une analyse minutieuse permit de constater que certains des livres qui étaient annoncés dans le Journal ne l'étaient pas dans la table. Ainsi, pour donner un exemple, les articles 11 (Chansons...), 12 (Menuet...), 13 (Sei Sinfonia...), 14 (Six sonates...), du n° 7 de 1764 ne figurent pas dans la table. On pourrait évidemment fournir une longue liste. Pourquoi ? Il ne semble pas qu'il existe une raison technique. Ainsi le jugement de Hatin sur la négligence avec laquelle fut rédigé ce journal se trouve justifié. Les oublis de la table ne sont pas les seuls. La fantaisie paraît avoir été grande, qu'il s'agisse d'un trait de caractère, ou du peu de souci qu'à l'époque on avait pour la rigueur bibliographique... On en trouve un autre exemple dans la manière d'indiquer les titres dans la table. Parfois, on se réfère à la première lettre de l'article, parfois à celle du premier mot, parfois à un mot qui paraît important. Aussi sont-ce les feuilles hebdomadaires qui nous ont servi. Ici, un nouvel écueil nous attendait. S'il y avait des livres en moins dans la table, il en avait en double dans le Journal. Cette question de la répétition se trouve mentionnée dans le texte précédemment cité, où l'auteur invitait les libraires à n'envoyer leur notice qu'une fois et dans la nouveauté. Malgré cet avertissement, les tables prouvent que des répétitions ont été faites chaque année. Il convenait de les relever dans les tables, afin de les défalquer, en sachant que, malgré tout, un certain nombre d'entre elles pouvait échapper, qu'il était pratiquement impossible de pouvoir découvrir. Restaient les divisions du Journal composées des livres français, gravures, estampes, musique, cartes et arrêts. Nous avons, pour ces deux années 1763 et 1764, relevé à partir du Journal toutes les données séparées. A partir de 1765, la composition de la table change. Un « Avis » la précise : « On a cru devoir suivre cette année pour cette table, la même distribution que l'on a observée dans les cinquante-deux numéros. Ainsi, au lieu d'une seule table qui réunissait et peut-être confondait tous les articles indistinctement, on en a dressé une particulière pour chacun des cinq objets ; c'est-à-dire qu'il y aura cinq tables : la première pour les livres tant nationaux qu'étrangers, la seconde pour les Arrêts du Conseil, la troisième pour
STATISTIQUE
DE LA VENTE
365
les cartes géographiques, la quatrième pour les livres de musique gravés, la cinquième pour les Estampes en taille douce1. »
Cette nouvelle conception eut des conséquences sur le dépouillement. Tout d'abord, les sondages effectués prouvèrent que la table cette fois était exacte et contenait les ouvrages indiqués dans le Journal, en ce qui concerne les arrêts, les cartes, les estampes et la musique publiés en France. Aussi, à partir de cette année, c'est le relevé de ces tables qui a fourni les chiffres de ces rubriques. Par contre, c'est toujours le Journal qui a donné le nombre des livres, puisque la table mêle les livres étrangers à ceux d'origine française. Enfin, ces livres correspondent à la production des livres en France par privilège, puisque le titre de la rubrique « Livres nationaux » devient, à partir du n° 10 de 1766, « Les livres nationaux avec privilèges. » Quelle est la valeur des chiffres annoncés ? Ils sont à peu près certains pour les arrêts, les ouvrages de musique, les cartes, les estampes. Par contre, il est possible que le nombre annuel des livres soit grossi par la publicité renouvelée et intéressée des libraires. B. LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE.
Cette statistique bibliographique de la France contenue dans le Catalogue Hebdomadaire, Journal de la Librairie, est présentée dans le tableau suivant (v. p. 366). Il est composé de huit colonnes. Si l'on excepte la première qui donne les années, les cinq suivantes correspondent à des données élémentaires : livres avec privilèges ou permissions, arrêts, cartes, musique, estampes. Les deux dernières présentent la production générale, sans ou avec les arrêts. Cette distinction a sa raison d'être. D'une part, il convenait de connaître la production générale française énumérée dans la bibliographie, d'autre part, comme il est fréquent à cette époque que les cadres de la production générale ne comprennent pas les arrêts, mais les seuls livres, cartes, estampes, musique, il fallait aussi, pour conserver des cadres statistiques identiques, établir la production sans les arrêts. Il faut enfin constater que l'élévation du nombre des publications dans les dernières décades peut s'expliquer en partie par les publications périodiques, dont chaque numéro est souvent compté pour une unité. Analyse
Statistique.
Les données numériques des livres et de la production générale offrent une continuité normale. Il n'en est pas de même des données 1. Catalogue Hebdomadaire,
1765, Table, p. 1.
366
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
STATISTIQUE B I B L I O G R A P H I Q U E DE LA FRANGE DU CATALOGUE HEBDOMADAIRE - JOURNAL D E LA L I B R A I R I E
Années
Livres de privilèges
1763 1764 1765 1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775 1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788 1789
415 417 475 393 333 398 321 380 378 349 347 462 463 459 377 383 333 326 299 495 658 588 668 953 930 833 595
TOTAL
13.028
Arrêts
Caries
Musique
Estampes
Production générale sans les arrêts
101 135 167 117 45 35 21 14 2 13 13 55 110 148 107 81 103 103 139 159 114 156 155 102 98 43
8 23 18 16 17 14 23 30 9 20 5 5 6 8 21 14 12 12 8 28 29 25 19 10 28 33 9
27 90 56 67 41 29 21 2 8 20 54 54 69 82 58 24 34 46 37 118 122 137 75 123 140 120 62
21 38 68 70 42 53 79 74 59 39 39 39 66 80 77 71 63 54 37 98 142 121 105 88 128 173 94
471 568 617 546 433 494 444 486 454 428 445 560 604 629 533 492 442 438 381 739 951 871 867 1.174 1.226 1.159 760
572 703 784 663 478 529 465 500 456 428 458 573 659 739 681 599 523 541 484 878 1.110 985 1.023 1.329 1.328 1.257 803
2.336
450
1.716
2.018
17.212
19.548
—
Production générale avec les arrêts
STATISTIQUE
DE LA VENTE
367
des séries complémentaires, principalement pour celles des arrêts et des cartes et, d'une manière moindre, pour les ouvrages de musique et les estampes. On ne peut manquer, surtout pour les premières, de constater des variations brutales, continues ou momentanées. Ainsi, pour les arrêts, tout se passe comme si on était en présence de deux niveaux : l'un au-dessus de la centaine en 1763 et 1766, puis de 1776 à 1787, exception faite de 1779 ; l'autre, très inférieur de l'ordre de la cinquantaine et même moins pour la période 1767-1775. Un phénomène identique d'affaissement entre 1771 et 1776, exception faite de 1772, existe pour les cartes. A ces variations continues de niveaux s'ajoutent les chutes brutales momentanées : ainsi la musique passe de 37 à 118 ouvrages, de 1781 à 1782. Comment expliquer ce fait ? L'hypothèse de variations intrinsèques aux disciplines ne doit pas être écartée. Toutefois, on peut risquer une conjecture technique : la négligence, déjà signalée, des auteurs, qui tantôt se contentent de peu, et tantôt cherchent l'exhaustivité. Cette hypothèse est certainement à retenir. L'exemple des arrêts le prouve qui, de 101 en 1763, passent à 2 en 1771, et disparaissent en 1772. Il est évident que, pendant ces deux dernières années, les textes officiels existent et que les rédacteurs du journal les ont omis. Une certaine fantaisie semble donc avoir présidé à la composition de la bibliographie. Le jugement sévère de Hatin se vérifie quantitativement. L'examen de la courbe de la production des livres, en soi ou comparée avec celle de la production générale, avec ou sans les arrêts, est instructif. On peut remarquer qu'à peu de chose près, elles évoluent semblablement. Ensuite, on peut reconnaître, à travers les variations annuelles, trois mouvements cycliques (voir planche XX) : lo De 1763 à 1769-1772-1773 : le sommet apparent en est 1765. 2° De 1769-1772-73 à 1781 : le sommet se trouvant entre 1774 et 1776. 3° De 1781 à 1788 : le cycle se divisant en deux mouvements ; le premier de 1781 à 1785 et ayant comme sommet l'année 1783 ; le second de 1784-85 à 1789, avec sommet en 1786-87. Les trois cycles, comparés les uns aux autres, font ressortir, semble-t-il, un mouvement interdécennal de hausse. L'analyse des courbes des arrêts, des cartes, de la musique et des estampes permet de constater plusieurs faits : 1° Une légère atténuation des mouvements cycliques dégagés par l'analyse des productions générales. 2° Une profonde accentuation des phases de baisse et de hausse, due sans doute à la petitesse des chiffres.
368
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
3° Un léger décalage des sommets des mouvements cycliques suivant les matières. Ainsi, dans le mouvement de 1763-72, le sommet est atteint en 1764 pour la musique et les cartes, et en 1765 pour les estampes et les arrêts. De même, pour le mouvement de 1784 à 1789, le sommet varie de 1785 pour les arrêts, à 1787 pour la musique, et 1788 pour les cartes et les estampes. 4° Les données des cartes, estampes, musique, arrêts, n'ont pas des mouvements identiques. Il semble que les arrêts et la musique aient une évolution relativement semblable et qu'il en soit aussi de même des cartes et des estampes. Il faut encore ajouter quelques mots sur la production globale de la période 1763-1789, comprenant 13.028 titres de livres de privilèges ou permissions, 2.336 arrêts, 450 cartes, 1.716 ouvrages de musique et 2.018 estampes, soit une moyenne approximative annuelle respective de 482, 86, 16, 63, 74 titres. On remarquera le nombre restreint des cartes par rapport aux trois autres groupes. La proportion s'établit approximativement pour les cartes entre un quart (musique) et un cinquième (arrêts). Si, d'autre part, ces trois dernières séries se maintiennent à un niveau assez voisin, leur pourcentage est très petit par rapport à la production des livres et s'établit entre 1/6 et 1/8 de cette production.
IV. LA BIBLIOGRAPHIA PARISANA ET LA BIBLIOGRAPHIA GALLICA UNIVERSALIS A. LE
DÉPOUILLEMENT.
Le dépouillement a dû tenir compte de la date de parution, puisque, comme on l'a vu plus haut, les ouvrages énumérés dans le volume annuel de l'une, de l'autre, ou des deux bibliographies, appartiennent non seulement à l'année indiquée mais aussi rétrospectivement aux deux ou trois années précédentes. Ainsi, la Bibliographia Gallica Universalis, pour l'année 1646, comprendelle des livres publiés en 1643, 1644, 1645, 1646, et même en 1647. Le dépouillement a donc été rendu plus délicat. Sans doute a-t-on déterminé le nombre d'ouvrages mentionnés chaque année par les deux bibliographies. Mais ces chiffres ne sauraient être directement utiles à notre étude. Ils peuvent fournir surtout des renseignements sur le fonctionnement de la publication des bibliographies. Aussi bien, pour déterminer la production bibliographique française annuelle, avons-nous dû compter les ouvrages par année de publication. Ainsi, dans l'exemple ci-dessus, nous avons relevé le nombre des ouvrages publiés en 1643, en 1644, 1645, 1646, 1647, et annoncés dans la Bibliographia Gallica de 1646.
STATISTIQUE
DE LA
369
VENTE
BIBLIOGRAPHIA GALLICA U N I V E R S A L I S ET | fc BIBLIOGRAPHIA PARISANA
CATALOGUE H E B D O M A 3 Production générale avec les arrêts
-10
-9 -8
-7 -6 -5
2 Production générale sans les arrêts
-4 -3
1 Livres de privilèges
1640
1650
1760
-2
1770
XVI. LIVRES MIS EN V E N T E - PRODUCTION
1780
•
1790
Ll
GÉNÉRALE
Nous avons pratiqué ainsi pour toutes les années des deux bibliographies complémentaires. Enfin, nous avons additionné les chiffres des livres publiés la même année et annoncés soit dans des années successives de la même bibliographie, soit dans les deux bibliographies. Ainsi, pour avoir la production française de 1645, nous avons ajouté les chiffres des livres parus cette année-là et annoncés dans les numéros de 1643, 1644, et 1646 de la Bibliographia Gallica Universalis, et de 1643-1644, 1645, 1647-1648, de la Bibliographia Parisana, après avoir vérifié qu'ils n'étaient pas annoncés deux fois. Les chiffres ainsi obtenus correspondent au nombre de titres parus de l'année, non au nombre de tomes.
370
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
XVII. S É R I E DES LIVRES IMPRIMÉS MIS EN V E N T E ANNONCÉS DANS LE CATALOGUE HEBDOMADAIRE
STATISTIQUE
B.
371
DE LA VENTE
STATISTIQUE
DES
G R A P H I E S GALLICA
LIVRES
CONTENUS
UN1VERSALIS
ET
DANS
LES
DEUX
BIBLIO-
PARISANA.
1643 = 265 1644 = 520 1645 = 454 1646 = 367 1647 = 219 1648 = 192 1649 = 193 1650 = 240 1651 = 384 1652 = 200 1653 = 411 On remarquera que la statistique de 1642 (2 titres) et 1654 (53), n'ayant pas fait l'objet d'une énumération complète, nous ne l'avons pas retenue. Enfin, le chiffre total, pour la période de 1643-1653, est de 3445 titres, soit une moyenne annuelle, pour la période, de 313. C. A N A L Y S E D E L A S T A T I S T I Q U E
BIBLIOGRAPHIQUE.
En ce qui concerne l'évolution de cette production, il faut remarquer que, si l'on excepte la première année 1643, dont le chiffre peut être insuffisant, et si l'on met à part la baisse de 1652, on est en présence d'un mouvement cyclique intradécennal composé d'une baisse de 1644 à 1648-49, suivi d'une hausse de 1649 à 1653, sans qu'on puisse préjuger, par ces seuls chiffres, si les années 1644 et 1653 sont des sommets, puisqu'on ne connaît pas les chiffres antérieurs ou postérieurs par ces deux seules bibliographies (voir planche XVI).
V. LA BIBLIOGRAPHIE FRANÇAISE ET LATINE DE PARIS Tout ce qui est accessible, de cette bibliographie, se trouve conservé à la Bibliothèque Technique du Cercle de la Librairie, sous la cote indiquée par Delalain. On y découvre quatre fascicules consacrés successivement aux mois de janvier, février, mars et avril 1678. C'est donc en définitive peu de choses. Le dépouillement permet de dénombrer 46 titres en janvier, 18 en février, 8 en mars, 15 en avril, soit au total 87 titres pour les quatre premiers mois de 1678.
372
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Ainsi, la moyenne mensuelle s'établirait à un peu plus de vingt titres et, en généralisant, la moyenne annuelle serait de 261 ouvrages nouvellement parus. Il est évident que ce chiffre est très incertain. L'évolution des données mensuelles montre une variation très importante de 46 en janvier à 8 en mars, qui pourrait tenir, plus qu'à une variation saisonnière réelle, à une notation incomplète de l'auteur. Aussi ce sondage annuel, quoiqu'intéressant, doit-il être manié avec beaucoup de prudence.
VI. L'ALMANAGH
BIBLIOGRAPHIQUE
Malgré son intérêt général évident, cette bibliographie ne saurait être d'une grande utilité pour nos recherches, puisqu'elle ne nous permet qu'un sondage pour une seule année, l'année 1707. Le dépouillement permet de dénombrer 180 titres annoncés. C'est donc un sondage de même ordre que celui permis pour l'année 1678 par la Bibliographie Française et Latine de Paris. Elle a, sur celle-ci, l'avantage d'offrir au moins des données annuelles complètes. Enfin, on peut dénombrer, en plus des livres, 47 édits.
VII. LE JOURNAL DE PARIS Tout l'intérêt de cette étude consiste à savoir quels furent les rapports réels entre les données du Dépôt Légal et l'annonce du Journal de Paris, pendant les sept mois de l'existence de cette bibliographie générale et officielle de la France. En principe, puisque l'annonce n'est rien d'autre que l'état des livres nouvellement déposés du vendredi précédent au mardi, et du mardi au vendredi, on devrait trouver un relevé des registres du Dépôt Légal de la Chambre Syndicale des Libraires. L'étude comparée des registres du Dépôt Légal et des catalogues était donc indispensable. Encore fallait-il déterminer avec quels registres. Le choix fut restreint par la période qui, rappelons-le, va de juillet 1785 à janvier 1786. Il n'existe pour ce laps de temps que les registres Manuscrits français 22026, 22027, 22029, 22034 et le 1 e r registre de la Régie du Dépôt Légal 1 . Toutefois, ces documents ne nous sont pas tous utiles. On peut les grouper en trois catégories. La première est faite d'un registre incomplet, le Mss. Fr. 22027, qui contient les ouvrages doubles conservés pour être mis en vente, c'est-à-dire d'une fraction seule1. Voir notre précédente étude consacrée au Dépôt Légal de 1537 à 1791.
STATISTIQUE
DE LA VENTE
373
ment des livres nouveaux. La seconde est composée des registres de l'un des dépositaires : la Bibliothèque du Roi. Il s'agit du 1 e r registre de la Régie du Dépôt Légal, c'est-à-dire des feuillets de transfert à la Bibliothèque Royale et du Manuscrit 22026, concernant les entrées à cette même bibliothèque. Les catalogues du Journal de Paris, ne pouvaient être composés à partir de ces états, qui concernent la livraison ou l'enregistrement à la Bibliothèque Royale. Ils ne peuvent donc être que d'une utilité indirecte. Ce n'est pas le cas de la troisième catégorie où figurent les Mss. Fr. 22034 et 22029, qui sont justement les doubles des registres de la Chambre Syndicale, à partir desquels étaient composés les précédents. C'est donc à eux qu'il fallait avoir recours de préférence, et cela est possible, puisqu'ils offrent une continuité de septembre 1785 jusqu'à la fin de la parution de l'annonce dans Le Journal de Paris. Pour la période précédente, c'est-à-dire pour les mois de juillet et d'août, faute de documents directs, on peut avoir recours au registre des entrées Mss. Fr. 22026. Celui-ci ne peut avoir été à l'origine des catalogues du Journal de Paris. De plus, il existe un certain décalage de temps, entre les Mss. Fr. 22034 et 22029 et le Mss. Fr. 22026, qui correspond à la durée du transfert de la Chambre à la Bibliothèque. Cette étude comparée aboutit à plusieurs résultats. D'abord elle montre que les annonces faites par Le Journal de Paris sont la transcription imprimée complète de la liste des ouvrages déposés. Aucun ouvrage n'est éliminé. Ainsi sommes-nous bien en présence d'une bibliographie exhaustive du Dépôt Légal, ce qui n'est pas le cas de la Bibliographie de la France actuelle. Les ouvrages, ensuite, se suivent dans l'ordre même des registres. Rappelons que les Syndics et Adjoints énuméraient les titres les uns à la suite des autres par feuilles ou folios de trente unités, chaque titre ayant donc une référence, un numéro d'ordre dans un folio donné. L'énoncé du Journal de Paris reproduit cette énumération. Il faut remarquer seulement que le titre n'est pas absolument transcrit. Il est souvent simplifié dans Le Journal de Paris. Enfin, il existe un fait non moins important : la longueur des catalogues est généralement plus courte que celle d'un folio. Un catalogue comprend, suivant les cas, huit, dix, quinze ouvrages. Les catalogues coupent les folios. Ainsi, pour donner un exemple : le catalogue du 10 janvier, publié dans le n° 13 du vendredi 13 janvier 1786 du Journal de Paris, commence par le titre suivant : Dissertation sur le thé. Le même ouvrage porte le n° 4 du folio 49 du Manuscrit français 22029. Il s'arrête avec L'Almanach nécessaire, numéro 10 du folio 49 de ce même registre. Le catalogue suivant, du 13 janvier 1786, publié dans le n° 16
374
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
du lundi 16 janvier 1786 du même Journal de Paris, commence avec l'ouvrage suivant intitulé La Raison dans l'homme, lui-même portant le numéro 11 du folio 49 du Manuscrit français 22029. Ainsi, la succession des catalogues, s'effectue dans le cadre de l'énumération des folios. Ceci tient évidemment à l'obligation faite au Syndic de composer à date fixe, le mardi et le vendredi, un catalogue des nouveautés. Sur le plan statistique, il est évident que les données qui n'offrent pas même la production annuelle de 1785 ou de 1786 sont très exactement celles qui ont été relevées à partir des registres manuscrits dont la durée est plus longue, et à la statistique desquels il est préférable de se reporter.
VIII. LA BIBLIOGRAPHIE
PARISIENNE
Le dépouillement devait nous montrer l'extrême difficulté qu'il y a à classer les ouvrages selon l'année et le lieu de parution. Les dates, très fréquemment, ne sont pas indiquées et il en est de même des lieux. Aussi, faute de certitude, avons-nous préféré relever la totalité des ouvrages qui sont en vente cette année-là. Le dépouillement a été fait par une analyse de chaque tome, puis par une vérification en dénombrant les ouvrages de la table des matières. Ainsi a-t-on trouvé pour cette année 1770,1362 titres, comprenant 169 gravures, 153 ouvrages musicaux et 52 cartes. A cela il faut ajouter quelques déclarations ou édits du Roi, quelques livres en langue étrangère, quelques livres datés de 1771 et beaucoup d'autres non datés. Il faut insister sur le fait que ces chiffres ne représentent pas la production nouvelle des livres en 1770 en France mais celle des ouvrages vendus à Paris à cette date et provenant soit de l'étranger ou des provinces, de cette année-là ou des précédentes.
IX. LE JOURNAL DES SAVANTS Il n'était pas possible de se contenter des textes qui assurent que cette bibliographie n'est pas exhaustive. La vérification devait nous apporter, hélas, la preuve que Le Journal des Savants n'est qu'une bibliographie réduite, dans sa première partie, à une bibliographie critique, qui fut élargie mais jamais exhaustive dans sa troisième partie, de sorte qu'il s'avère en définitive inutile à notre recherche. E n ce qui concerne le Journal, le dépouillement devait intéresser la première et la troisième parties. La première, qui est une analyse
STATISTIQUE
DE LA VENTE
375
critique, concerne aussi bien les livres français qu'étrangers, la proportion est d'ailleurs variable suivant les époques. Les ouvrages étrangers sont plus nombreux au x v n e et au début du x v m e siècle que pendant les 2 e et 3 e quarts de ce dernier siècle. On s'est fondé sur le lieu et l'année de parution. Les « Nouvelles Littéraires » qui composent la troisième partie du Journal sont divisées en sous-rubriques nationales. Ainsi, il est déjà facile ici d'éliminer la bibliographie universelle pour ne conserver que les livres nationaux. Toutefois les « Nouvelles Littéraires de France » ne comprennent pas que les livres ; d'autre part, ceux qui sont annoncés ne sont pas des livres nécessairement publiés, mais des ouvrages en cours d'impression, ou pour lesquels on ouvre une souscription. Il arrive souvent aussi qu'un libraire fasse insérer un catalogue de livres en cours de vente, qui sont parfois d'origine étrangère et parfois d'origine française, de l'année ou de l'année précédente. Enfin les titres sont généralement, mais pas toujours, indiqués en italique. Aussi bien peut-on s'imaginer les difficultés rencontrées dans le dépouillement. Il faut lire attentivement les « Nouvelles », vérifier l'année et le lieu, se méfier d'une annonce commerciale. La deuxième partie du Journal est faite de la « table ». Elle a pour titre : «Bibliographie ou Catalogue des livres dont il est parlé dans les journaux de l'année... »
Cette bibliographie avait l'attrait de pouvoir simplifier le dépouillement. Cependant, sa composition le rendit impossible. En effet les lieux de production ne sont pas souvent donnés. On est en présence d'une bibliographie universelle sans possibilité de distinction nationale, puisque ni l'année ni le lieu d'édition ne sont indiqués. Toutefois elle ne fut pas inutile. Elle montre en effet que les titres sont fréquemment répétés dans le courant d'une année. Sous condition de vérifier qu'il s'agit bien de livres publiés en France, elle permet d'éviter de compter deux fois des ouvrages, ce que le dépouillement des numéros rendait inévitable. Ainsi, en conclusion, le dépouillement devait-il s'effectuer en décomptant dans la première partie du Journal les livres publiés en France dans l'année, et, en réalité, dans l'année et l'année précédente. On y adjoindrait les livres indiqués dans les « Nouvelles Littéraires de France » comme étant aussi des livres publiés en France dans l'année ou l'année précédente. Enfin, de la somme des deux, on retirerait le nombre des ouvrages français qui auraient été répétés deux ou plusieurs fois dans l'année, obtenus par le dépouillement de la table. On devait obtenir ainsi la statistique 13
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
376
de la production française nouvellement imprimée annoncée dans Le Journal des Savants. Cependant, a v a n t d'effectuer un dépouillement général, il convenait de faire u n sondage : celui-ci f u t réalisé pour vingt-quatre années, en prenant principalement les deux premières années de chaque décade à partir de 1680, puisqu'on pouvait espérer que Le Journal des Savants était devenu, grâce aux « Nouvelles Littéraires », une bibliographie exhaustive à partir de 1678. Cependant les chiffres obtenus ne devaient pas être considérés en soi, mais par r a p p o r t aux données des autres séries. C'est que ce nous ferons, en donnant pour quelques années, quand ils existent, les chiffres du Journal des Savants, (JS) des Privilèges accordés (P), des ouvrages déposés à la Bibliothèque royale (BR), ou des journaux bibliographiques, Catalogue hebdomadaire n o t a m m e n t (CH). Or dans tous les cas, les chiffres du Journal furent inférieurs. Encore peut-on distinguer deux périodes : a v a n t et après 1724, c'est-à-dire p e n d a n t la périodicité hebdomadaire ou p e n d a n t la périodicité mensuelle. Dans l'une, ils sont très faibles, dans l'autre ils augmentent, sans cesser d'être inférieurs de beaucoup. Ainsi pour donner quelques chiffres, on a : en en en en en en en en en
1711 1712 1730 1731 1741 1751 1765 1771 1786
= = = = = = = = =
59 77 189 131 118 124 248 258 210
(JS) (JS) (JS) (JS) (JS) (JS) (JS) (JS) (JS)
pour pour pour pour pour pour pour pour pour
271 267 271 216 213 313 333 326 338
(P) (P) (P) (P) (P) (P) (P) (P) (P)
et et et et et et et et et
148 199 243 208 152 297 249 376 1615
(BR) (BR) (BR) (BR) (BR) (BR) (BR), 617 (CH) (BR), 454 (CH) (BR), 867 (CH)
Ainsi, malgré les hypothèses, Le Journal des Savants, dans sa première et troisième parties, ne reste-t-il p e n d a n t toute la première série qu'une bibliographie universelle, courante et sélective, qui, par là même, ne peut être directement utile à notre étude.
X . LA C L E F DU C A B I N E T D E S P R I N C E S D E L ' E U R O P E Deux parties pouvaient permettre d'atteindre la production des livres de la France : la table semestrielle ; l'article des « Nouvelles Littéraires ». La première est en réalité inutile. Toutes les matières, livres, simples sujets, s'y trouvent mêlés, sans qu'il soit possible de les dissocier directement. Reste l'article des « Nouvelles Littéraires ». Ici il f a u t faire une distinction, suivant qu'il s'agit de l'édition luxembourgeoise ou parisienne. La première est inutile : les nouvelles sont peu nombreuses, événementielles, surtout.
STATISTIQUE
DE LA
VENTE
377
L'annonce des livres nouveaux est réduite, la quantité de ceux-ci infime. Il n'en est pas de même de l'article du journal de Jordan. Les « Nouvelles » sont groupées en trois parties successives : 1° des analyses critiques de livres 2° les livres nouveaux ou réimprimés 3° les énigmes et extraits. Comme on le voit, la composition de l'article consacré aux « Nouvelles Littéraires » était très proche et probablement empruntée au Journal des Savants. Cependant, dans l'ensemble, ce dernier périodique était plus clair que la Suite de la Clef. Comme dans Le Journal des Savants, il existe un rapport entre les livres annoncés dans la rubrique des livres et ceux qui sont analysés dans la première partie. Il arrive souvent qu'ils soient répétés. Ainsi, dans la première partie du Journal de janvier 1751, trouve-t-on le texte suivant : « Je ne peux mieux commencer cet article de littérature qu'en rappelant au lecteur le souvenir d'un livre que je n'ai fait qu'annoncer dans le Journal d'août 1 . »
Si la première partie est, comme celle du Journal des Savants, une bibliographie critique, on aurait pu espérer trouver, dans la seconde, une bibliographie exhaustive. Son examen montre, d'abord, que la plupart des livres annoncés sont parisiens. Tout se passe une fois encore comme si cet article servait de publicité aux libraires de la capitale. Outre les livres nouveaux, on y découvre des livres de l'étranger vendus à Paris, et même des listes de livres français publiés les années précédentes mais en vente à l'époque chez les libraires de Paris. Les ouvrages de la province, enfin, sont rares. Un premier sondage devait être effectué, le dépouillement fut conduit comme pour Le Journal des Savants, c'est-à-dire en se servant des données des deux premières parties, avec cette différence toutefois que la table ne renseigne pas sur les répétitions d'annonces. Les chiffres obtenus permirent de distinguer trois périodes. Jusque vers 1710, la partie littéraire est très peu développée, quand elle existe. C'est toujours une bibliographie critique. A partir principalement de la rupture entre Jordan et Chevalier, dans l'édition française, on voit apparaître, jusque vers 1740, des énumérations, généralement peu nombreuses, d'ouvrages. Enfin c'est surtout vers 1760-1770 que la bibliographie prend une certaine importance quantitative. On retrouve donc un phénomène assez semblable à celui du Journal des Savants : la constitution progressive d'une bibliographie quantitative, avec, toutefois, un certain décalage, un certain retard de la Suite de la Clef. 1. Suite de la Clef, 1750, T. I, p. 45.
378
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
Quant à l'importance de ces chiffres, ils sont toujours inférieurs à ceux fournis par Le Journal des Savants. On décompte, par exemple, 201 titres nouveaux dans la Suite de la Clef en 1772 contre 219 dans Le Journal des Savants. Aussi bien l'infériorité par rapport aux bibliographies courantes et exhaustives est-elle encore plus manifeste et les conclusions qui valaient pour Le Journal des Savants sont-elles encore plus justifiées ici : le Journal de Verdun, dans ses meilleures années, demeure une bibliographie sélective. Ce fait semble avoir deux causes : l'intention d'abord de copier d'une manière réduite Le Journal des Savants; l'idée ensuite de faire une bibliographie commerciale. La première se trouve clairement exprimée dans le texte suivant de Duradier : « Jordan crut aussi que l'exemple du Journal des Savants lui faisait une loi qu'il ne devait pas négliger de suivre. Il embrassa la partie littéraire avec les égards qu'il devait aux auteurs des Journaux dont elle faisait l'objet principal : il n'en fit que son accessoire 1 . »
E t c'est bien ce qui se passe. La composition de l'article des « Nouvelles Littéraires » est un démarquage du Journal des Savants t o u t entier. Après quoi on y ajoute les nouvelles politiques. Celles-ci peuvent bien diminuer de volume, au fur et à mesure que le premier s'étend, elles interdisent cependant à la Suite de la Clef de comporter a u t a n t d'ouvrages que Le Journal des Savants. Celui-ci, en t a n t que publication d ' É t a t , pouvait connaître plus directement la production permise et déposée. Le Journal de Verdun, œuvre privée, devait se tourner davantage vers les libraires et faire de sa bibliographie une œuvre commerciale, subissant la bonne volonté des imprimeurs ou des éditeurs, ainsi qu'il ressort du texte suivant : « On a été informé que quelques libraires ont trouvé mauvais qu'on ne parlât point dans le Journal des livres nouveaux qu'ils font mettre sous presse, pendant qu'ils y voyaient plusieurs articles qui concernaient leurs confrères. On les avertit ici que l'auteur s'étant déterminé de n'annoncer au public que les ouvrages qu'on lui communique, ceux qui voudront qu'on parle des leurs peuvent lui en faire parvenir un exemplaire franc de port ou le faire remettre chez le sieur Ganeau, libraire rue Saint-Jacques, à Paris qui aura soin de le lui faire envoyer ; en ce cas là personne n'aura lieu de se plaindre et cet exemplaire sera souvent le mieux vendu'. »
Ainsi, faute d'avoir eu des intentions purement littéraires et d'avoir possédé les données officielles, le Journal de Verdun est 1. Ibid., Table générale, p. XII. 2. Suite de la Clef... (2 e semestre 1717), T. II, p. 37.
STATISTIQUE
DE LA
VENTE
379
resté une bibliographie plus sélective que celle du Journal des Savants et pourtant encore moins utile que ce dernier à notre étude. Enfin, en plus du Journal proprement dit, existent deux publications complémentaires. Le Supplément, dont la composition est identique à celle du Journal, est aussi peu utile. La «Table Générale Alphabétique et raisonnée du Journal Historique de Verdun sur les matières du temps » pouvait laisser espérer une bibliographie pour la période allant des origines à 1756. L'examen nous montra qu'elle était composée, comme les tables annuelles de noms d'auteur, de personnages officiels, militaires, administratifs, de batailles et de titres de livres, dont le nombre était non moins insignifiant.
XI. LA FRANCE LITTÉRAIRE DE J. D'HÉBRAIL ET J. DE LA PORTE Il semble que cette bibliographie soit peu utile pour notre étude. Elle n'est pas, d'abord, une bibliographie générale de la France. Elle ne peut donc pas nous renseigner sur la production générale. D'autre part, à cet inconvénient fondamental s'ajoute celui qui est propre, le plus souvent, aux bibliographies rétrospectives : la difficulté d'obtenir la statistique annuelle ; la nécessité de recourir à des dépouillements extrêmement longs, rendus d'autant plus aléatoires dans plusieurs éditions puisque les dates ne sont pas fournies. Cependant si la statistique annuelle ne pouvait être qu'incomplète, il a semblé d'un certain intérêt d'effectuer un sondage pour déterminer la moyenne annuelle des livres contenus dans cette bibliographie. En se basant sur la quatrième partie, tome 2 de l'édition de 1769, faite du catalogue alphabétique de tous les ouvrages, on peut recenser approximativement 9.000 titres pour 68 années, soit un peu plus de 132 titres par an. Le même calcul, établi à partir de la troisième partie du Supplément de 1778 ou « Catalogue alphabétique des ouvrages », aboutit à dénombrer près de 5.500 titres pour la période 1768-1777 c'est-à-dire pour dix ans à peu près 550 titres par an. Comme parmi les ouvrages énumérés il en est qui furent publiés dans la période antérieure à 1768 on est aussi en droit de faire une moyenne annuelle et une statistique générale pour la période de 1700-1778. On a alors 9.000 titres (1700-1767) plus 5.500 titres (1768-1777), soit 14.500 titres. La moyenne annuelle hausse alors à près de 186 titres. Un calcul du même genre peut encore être effectué à partir du 2 e supplément de 1784 et particulièrement du « Catalogue alpha-
380
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
bétique des ouvrages... ». On obtient approximativement 5.200 titres pour six années de la période 1779-1784, soit une moyenne annuelle encore en hausse par rapport à la précédente, d'un peu plus de 866 titres. Enfin on peut également faire une moyenne générale pour le xviii 6 siècle de 1700 à 1783, en a j o u t a n t les données des éditions de 1768, 1778, 1784, ce qui correspond au nombre de 19.700 titres pour 84 années et à une moyenne d'un peu plus de 234 titres par an. Périodes 1700-1767 1768-1777 1700-1777 1778-1783 1700-1784
Statistiques 9.000 5.500 14.500 5.200 19.700
générales titres titres titres titres titres
Moyennes
annuelles
132 550 186 866 234
Ces chiffres successifs montrent une évolution croissante du nombre d'ouvrages enregistrés. A cela, semble-t-il, il y a deux raisons : le but d'exhaustivité des rédacteurs en particulier. Toutefois cette cause ne doit pas être exagérée. La présence d'un nombre réduit d'ouvrages oubliés dans la période 1700-1769 et annoncés dans l'un ou l'autre des deux Suppléments prouve que l'exhaustivité était déjà grande. La seconde raison, de très loin la plus importante, c'est l'augmentation de la production des livres dans la 2 e moitié du x v m e siècle en France et spécialement après 1770, qui a pour conséquence d'augmenter la moyenne du siècle.
É T U D E COMPARÉE DES STATISTIQUES DES B I B L I O G R A P H I E S I M P R I M É E S DE LA FRANCE DES X V I I e E T X V I I I e SIÈCLES L'étude comparée des séries statistiques des Bibliographies imprimées de la France aux x v n e et x v m e siècles est très limitée. Plusieurs d'entre elles étant sélectives, comme nous l'avons vu, ont dû être éliminées. D'autre part, plusieurs des bibliographies exhaustives ne possèdent des données que pour quelques semaines ou quelques mois. C'est le cas du Journal de Paris ou du Cours de Bibliographie. Enfin dans le cas où les bibliographies sont exhaustives, où elles fournissent des statistiques périodiques, elles ne se superposent pas ou exceptionnellement. S'il fallait les situer chronologiquement, on aurait :
STATISTIQUE
381
DE LA VENTE
1° La Bibliographia Gallica Universalis et la Bibliographia Parisana de 1643 à 1653. 2° La Bibliographie Française et Latine de Paris, 1678. 3° L'Almanach Bibliographique, 1707. 4° La Bibliothèque Annuelle et Universelle, 1748-1750. 5° Les Annales Typographiques, 1757-1762. 6° Le Catalogue Hebdomadaire, 1763-1789. 7° La Bibliographie Parisienne, 1770. 8° La France Littéraire d'Hébrail, 1700-1783. Ces faits sont intéressants. Ils montrent d'abord que la Bibliographie Nationale Française ne s'est constituée que lentement. Après quelques timides essais au milieu du x v n e siècle, il a fallu attendre presqu'un siècle pour que l'effort soit repris et poursuivi sans discontinuité, si l'on met à part les deux exceptions de La Bibliographie Française et Latine de Paris pour 1678 et YAlmanach Bibliographique de 1707. Une seconde remarque est à faire. Au contraire des bibliographies imprimées de la France qui sont simultanément plusieurs aujourd'hui, il semble que les bibliographies aient évité la concurrence et ait plutôt cherché à se relayer, comme le prouvent la succession chronologique de La Bibliothèque Annuelle et Universelle, des Annales Typographiques et du Catalogue Hebdomadaire. Quant à la superposition, elle ne se produit que dans le troisième quart du x v m e siècle et exceptionnellement, telle La Bibliographie Parisienne éditée en même temps que le Catalogue Hebdomadaire en 1770. Quant à La France Littéraire, il faut se souvenir qu'elle est rétrospective et non constante. Cependant sur le plan de la moyenne arithmétique annuelle, elle nous sera utile et nous fournira même le meilleur renseignement. Ainsi, d'après les données bibliographiques de l'époque, deux études comparées peuvent être tentées. 1° Pour l'année 1770, entre les données de La Bibliographie Parisienne et celles du Catalogue Hebdomadaire. 2° Pour la moyenne de la période 1768-1783, entre La France Littéraire d'Hébrail et le Catalogue Hebdomadaire, les autres renseignements de la première de ces deux bibliographies débordant la période couverte par la seconde. A.
ÉTUDE DE
LA
COMPARÉE BIBLIOGRAPHIE
POUR
L'ANNÉE
PARISIENNE
1770 ET
ENTRE
CELLES
LES DU
DONNÉES CATALOGUE
HEBDOMADAIRE.
On sait que la production annoncée par la première fut de 1362 titres, dont 169 gravures, 153 ouvrages de musique et 52 cartes. Le Catalogue Hebdomadaire ne comporte, sans les arrêts, c'est-à-dire
382
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
pour les cadres statistiques semblables à la première, que 486 titres, soit une production presque trois fois moindre. Cette différence trouve son explication dans le contenu même des deux bibliographies. La seconde concerne les livres publiés en France, la première les livres vendus à Paris, provenant du pays ou de l'étranger et imprimés cette année-là ou les années précédentes. B. ÉTUDE
COMPARÉE
MOYENNE
D O N N É E S DE LA CATALOGUE
DE
ANNUELLE, FRANCE
LA
PRODUCTION
POUR
LA
LITTÉRAIRE
GLOBALE
PÉRIODE
ET
DE
1768-1783,
LA DES
D ' H É B R A I L ET DE CELLES D U
HEBDOMADAIRE.
Beaucoup plus intéressante est cette étude. Elle semblerait montrer en effet un décalage, La France Littéraire étant plus complète que le Catalogue Hebdomadaire. En effet, pour les seize années de la période, on décompte 10.700 titres dans l'une, et 8.520 dans l'autre, soit des moyennes respectives de 668 et 532.
CHAPITRE
VII
ÉTUDE COMPARÉE DES STATISTIQUES DE LA PRODUCTION INTELLECTUELLE DE LA FRANCE DES XVIIe ET XVIIIe SIÈCLES Les études précédentes concernaient toutes la production des livres en France sous l'Ancien Régime, mais chacune sous un angle particulier. Il s'agit cette fois de comparer ces statistiques entre elles, afin d'apprécier, les unes par rapport aux autres et non plus en soi, les différents moments de la publication. A cela il y a plusieurs conditions essentielles. Il convient, d'abord, que les séries se recouvrent historiquement. Il faut ensuite que leurs cadres statistiques soient identiques ou, sinon, que les différences soient appréciables. Il est nécessaire encore que la comparaison apporte un enseignement utile. A partir de toutes ces conditions, deux études importantes devront être tentées dans les pages qui suivent : l'étude comparée des diverses séries de la production réglementaire, des permissions accordées, des livres visités par la police, des ouvrages déposés et mis en vente. Cet examen devra concerner si possible les quatre séries simultanément. Il indiquera l'importance des permissions, des livres inspectés, des livres déposés et vendus et, d'une manière plus générale, les variations de la production intellectuelle française pour les périodes considérées. La seconde étude intéressera la censure générale avant et après l'impression. Elle sera réalisée à partir de la censure des permissions et des livres suspendus lors des visites des livres à la Chambre Syndicale. Ces statistiques
384
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
devront être comparées à la production autorisée pour en établir l'importance, et ajoutées à celle-ci pour obtenir une idée approchée de la totalité de la production française.
2000^
^
Dépôt légal plus contrefaçons et l i v r e s prohibés 1000
900
Catalogue hebdomadaire' 70 QI" contrefaçons et l i v r e s prohibés.
500 400 300 1770 XVIII.
1780
PRODUCTION
1790 GÉNÉRALE
I. ÉTUDE COMPARÉE DES STATISTIQUES DE LA PRODUCTION RÉGLEMENTAIRE Les conditions déjà énumérées de cette étude n'ont permis le plus souvent que des examens comparés, simultanés, de deux ou trois et rarement des quatre séries de statistiques. Leur classification a été effectuée dans l'ordre chronologique théorique de la production des livres d'abord (permission, police, dépôt, vente), des périodes considérées ensuite. On effectuera donc les études comparées suivantes : 1° Les permissions et la police des livres (1766-1787). 2° Les permissions et le Dépôt Légal (1647-53 ; 1661-83 ; 16841699; 1700-1715; 1724-87). 3° Le Dépôt Légal et les données de la Bibliographie annuelle et universelle (1748-50). 4° Les permissions, le Journal d'Hémery, et le Dépôt Légal (1751-67). 5° Les permissions, le Dépôt Légal et les journaux bibliographiques tels que la Bibliographia Parisana et Gallica Universalis (1643-1653) ; la France Littéraire (1700-1784) ; le Catalogue Hebdomadaire (1766-87). 6° Les permissions, le Journal d'Hémery, le Dépôt Légal, et les Annales Typographiques (1757-62).
STATISTIQUE
A.
ÉTUDE
DES
XVII'
COMPARÉE
ET XVIII'
DES
385
SIECLES
STATISTIQUES
DES
PERMISSIONS
D'IMPRIMER E T D E S LIVRES E N T R É S PAR LA CHAMBRE.
Cette étude peut être effectuée pour les années 1766 à 1787. Pour la même période, les autres séries, Dépôt Légal et Bibliographies privées sont représentées, l'une par les données de la Bibliothèque du Roi, les autres par le Catalogue Hebdomadaire. L'examen comparé simultané des quatre statistiques aurait pu être fait s'il avait eu une utilité réelle, ce qui n'est pas le cas puisque les livres entrés par la Chambre ne représentent qu'une fraction de la production totale, qui, en principe, est enregistrée par les trois autres séries. P a r contre, les permissions de la police des livres imprimés devait être comparées avec les permissions d'imprimer puisqu'il s'agit de statistiques de même nature. C'est l'objet de cette étude dont on voit l'intérêt : il consiste dans la comparaison des permissions données a v a n t et après l'impression d'une part, dans l'établissement de la statistique générale des permissions données par les pouvoirs publics ensuite, obtenue par addition des deux séries. L'étude doit être faite à partir des statistiques globales les plus exactes. Pour les autorisations a v a n t l'impression, c'est donc à la statistique des permissions d'imprimer, obtenue par addition des privilèges, permissions du sceau et permissions tacites, qu'il faudra avoir recours et, de préférence, à celle, plus complète, des registres de feuilles plutôt q u ' a u x autorisations des registres de demandes. Pour les permissions après l'impression, c'est seulement la statistique des « Livres entrés par la Chambre » qui pouvait servir, puisque celle des livres arrêtés comprend non seulement des titres mais des exemplaires et, d'autre part, que les « livres rendus » de la statistique des livres suspendus énumérent des livres déjà autorisés par permission a v a n t l'impression. On dénombre 10.890 permissions d'imprimer et 646 ouvrages entrés par la Chambre pour les vingt-deux années de la période. Aussi bien le pourcentage des permissions de débit par r a p p o r t aux permissions d'imprimer est-il assez faible, de l'ordre, approximativement, de 6 %. Il est, de plus, confirmé par la comparaison des livres entrés par la Chambre et des statistiques du Dépôt Légal et du Catalogue Hebdomadaire. L'analyse des fluctuations est non moins instructive. On p e u t constater d'abord (voir planche X X ) que les mouvements intradécennaux sont les mêmes. On retrouve aussi les variations interdécennales déjà déterminées : fin de la hausse, de 1766 à 1770-75, du cycle de vingt ans, de 1762 à 1782 ; baisse de 1771-76 à 1780-83. Nouvelle hausse enfin dans les dernières années de l'Ancien Régime. Toutefois la nouveauté consiste dans la tendance générale qui est
386
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
X I X . CONCORDANCE TENDANCIELLE.
1636-1715
STATISTIQUE
DES XVII'
ET XVIII'
387
SIECLES
X I X bis. CONCORDANCE T E N D A N C I E L L E .
1636-1715
388
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
très nettement à la hausse en ce qui concerne les livres « entrés par la Chambre » et à la baisse pour les permissions d'imprimer, dans la décade 1770-1780. Cette divergence ne saurait surprendre. Elle tient à la nature de la statistique des livres entrés par la Chambre. Elle est à la fois semblable et différente de celle des permissions d'imprimer et des livres mis en vente. Ceux-ci concernent, à l'inverse des permissions d'imprimer, non des manuscrits mais des livres publiés. A la différence de la production générale des livres imprimés, les ouvrages entrés par la Chambre sont ceux qui ont été autorisés par la censure. Leurs fluctuations doivent donc comporter les deux tendances, celle des livres imprimés et celle de la censure. Or les deux concordent en cette matière. On sait en effet que dans les dernières décades de l'Ancien Régime, on assiste à une hausse interdécennale rapide. Par ailleurs, la statistique des livres entrés par la Chambre est assimilée à celle des permissions tacites et enregistre donc une production de livres mi-orthodoxes, mi-hétérodoxes, pour laquelle nous avons constaté déjà que le pouvoir royal pratiquait une politique libérale et suivait le mouvement de la demande. Aussi les livres entrés par la Chambre devaient-ils conserver la hausse de la production, atténuée dans la statistique des permissions par l'évolution de la production des privilèges, qui tempère celle des permissions tacites. La totalité des permissions données par les pouvoirs publics, obtenue par addition, pour la période, des autorisations d'imprimer et des « livres entrés par la Chambre », est de 11.536, correspondant à une moyenne annuelle approximative de 524. D'autre part, leurs fluctuations (voir planche XX) sont dans l'ensemble les mêmes que celles des permissions d'imprimer. Gela n'a d'ailleurs rien d'étonnant. En effet le nombre des « livres entrés par la Chambre » est trop petit par rapport à celui des autorisations avant l'impression pour pouvoir modifier la tendance générale de celles-ci.
B.
ÉTUDES
COMPARÉES
DES
STATISTIQUES
DES
PERMISSIONS
ET
D U DÉPÔT LÉGAL.
Les statistiques des Permissions et du Dépôt Légal n'ont pas toutes, à travers le x v n e et le x v m e siècles, ni la même origine, ni la même valeur. On a donc été conduit à plusieurs études successives. Lorsqu'il existait diverses statistiques pour une même série, on a choisi celle qui s'était montrée la plus exacte. C'est ce qui s'est passé, pour les permissions d'imprimer, par la préférence donnée à la statistique des feuilles plutôt qu'à celle des autorisations et de celle-ci plutôt qu'à la statistique des enregistrements à la Chambre Syndicale. Il en a été de même pour le Dépôt Légal, ou
STATISTIQUE
DES XVII' ET XVIII'
389
SIECLES
la préférence a été donnée à la statistique de la Bibliothèque du Roi, plutôt qu'à celles de la Chambre Syndicale, ou du Chancelier, chaque fois qu'elles existaient simultanément. Ces études recouvrent une période assez longue, d ' u n siècle et demi approximativement, de 1637 a u x dernières années de l'Ancien Régime. On examinera donc successivement : a) Le? permis d'imprimer et le dépôt à la Chambre Syndicale, pour les années 1636 à 1663 ; b) Les privilèges (enregistrements) et le dépôt à la Chambre Syndicale, de 1661 à 1683. c) Les privilèges (enregistrements) et le dépôt à la Bibliothèque du Roi de 1684 à 1699. d ) Les privilèges (autorisations) et le dépôt à la Bibliothèque du Roi, de 1760 à 1715. e) Les permissions d'imprimer (privilèges plus permissions tacites, autorisations) et le Dépôt à la Bibliothèque du Roi, de 1724 à 1787. E n ce qui concerne l'étude comparée des statistiques du dépôt et des permissions obtenues à partir des feuilles, elle sera faite, plus loin, avec celle du Catalogue Hebdomadaire. 1. Étude comparée Dépôt Légal.
des statistiques
des permis
d'imprimer
et du
Cette étude est, sans doute, l'une des plus utiles de ce travail, bien qu'elle ne concerne que la période courte 1636-1663, moins les années 1641-1647-53, 1658 et 1660, pour lesquelles il n'existe pas de données dans l'une ou l'autre statistique. Ce sondage permet en effet de se faire, même timide, une opinion sur le fonctionnement du Dépôt Légal de la première moitié du x v n e siècle. La comparaison est effectuée à partir des permis d'imprimer enregistrés à la Chambre Syndicale et du dépôt pour la Communauté des Libraires, dont nous avons ailleurs montré les irrégularités et les insuffisances. On dénombre, pour les 18 années, 2.716 permis et 1.380 ouvrages déposés, soit une moyenne annuelle respective de 151 et 71. Ainsi, le dépôt ne constitue que 51 % approximativement de la production globale des autorisations. La production réglementaire non déposée s'élève à 49 %. C'est là u n pourcentage élevé qui confirme, en même temps que les fluctuations annuelles brutales (voir planche X I X ) , l'irrégularité du dépôt pour la Communauté des Libraires vers le milieu du x v n e siècle. 2. Élude comparée des statistiques Dépôt Légal (1661-1683).
des privilèges
enregistrés
et du
Cette étude est réalisable pour la période 1661-1683, moins les années 1671-74, pour lesquelles il n ' y a pas de données dans la
390
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
statistique du dépôt. Elle est possible uniquement à partir des privilèges enregistrés à la Chambre Syndicale et des livres déposés pour la Communauté. Elle doit permettre une estimation de l'efficacité du dépôt par comparaison avec la totalité des permissions puisqu'il n'existe à l'époque que des privilèges. On dénombre 3.150 titres déposés et 2.464 privilèges enregistrés. Ainsi le dépôt est-il, cette fois, supérieur aux permissions. Il y a à cela deux explications. D'abord le dépôt est très irrégulier et la hausse brutale de 1676 comprenant des livres anciennement imprimés est sans doute pour beaucoup dans cette supériorité. Il y a ensuite l'insuffisance connue de l'enregistrement à la Chambre, dont la statistique est inférieure à celle des permissions accordées. Enfin, il f a u t tenir compte aussi du fait q u ' u n privilège correspond souvent à plusieurs ouvrages. L'examen des fluctuations (voir planche X I X ) vérifie une nouvelle fois le fonctionnement irrégulier du dépôt à la Chambre et confirme, sur le plan des mouvements, les hausses de 1664 à 66 de 1668-69, de 1676 à 1680-83, ainsi que la baisse de 1672-73. 3. Étude comparée des statistiques Dépôt Légal (1684-1699).
des privilèges
enregistrés
et du
Cette étude intéresse la période 1684-1699. Elle peut être faite à partir des privilèges enregistrés à la Chambre Syndicale et du dépôt à la Bibliothèque du Roi, plus efficace que celui de la Chambre. On dénombre 2.457 livres déposés et 2.531 privilèges enregistrés. Cette fois le dépôt représente 97 % des privilèges. On peut toutefois penser que le nombre des livres autorisés non déposés est supérieur à 3 %, é t a n t donné l'insuffisance de l'enregistrement des privilèges et la supériorité du nombre de livres de privilèges par rapport au nombre de privilèges. E n ce qui concerne les fluctuations (voir planche X I X bis), elles confirment la baisse de la production de 1684 à 1692-1695 et le début, ensuite, d'une hausse. 4. Étude comparée des statistiques Dépôt Légal (1700-1715).
des privilèges
autorisés
et du
Cette étude couvre la période 1700-1715. Elle est réalisable pour les privilèges à partir des autorisations des registres de demandes, dont nous savons le nombre plus exact que celui des enregistrements et cependant moindre que celui des jugements dont la statistique n'existe pas pour la période. E n ce qui concerne le Dépôt Légal, il s'agit de la statistique de la Bibliothèque du Roi. On dénombre 2458 ouvrages déposés pour 4.137 demandes de privilèges accordées. Le pourcentage du dépôt diminue cette fois à 59 %, laissant 41 % de la production non déposée. Ce chiffre est là encore minimum, puisque les livres
STATISTIQUE
DES XVII'
ET XVIII'
391
SIECLES
•4
Bibliographie annuelle universelle Dépôt légal. Bibliothèque du Roi Permissions d'imprimer (Autorisations) (Privilèges plus permissions tacites) Journal d'Hémery Annales typographiques Catalogue hebdomadaire Permission d'imprimer . ( Privilèges plus permissions tacites, feuilles) Permissions (P + P T , feuilles) -»-livres entras par la chambre 9 Permissions d'imprimer (demandes non accordées) 10 Livres suspendus (Production générale) 11 Nouveautés (Livres suspendus) 12 Livres entrés par la Chambre !t contrefaitsi " v r e s suspendus 15 Livres rayés J (détail)
1750 XX.
CONCORDANCE
TENDANCIELLE.
1748-1788
392
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
autorisés sont supérieurs de 20 % au moins au nombre de privilèges. Les fluctuations (voir planche X I X bis) confirment la hausse de la production de 1700 à 1715. Toutefois elle est continue en ce qui concerne le dépôt, tandis qu'elle faiblit un peu entre 1706 et 1715 pour les privilèges. 5. Étude comparée Dépôt Légal.
des statistiques
des permissions
d'imprimer
et du
Cette étude concerne la période 1724-1787, moins les années 1747-1750. Elle est réalisable à partir de la statistique des permissions, soit encore de la somme des privilèges et permissions tacites et seulement des demandes accordées transcrites dans les registres de demandes. Les données du Dépôt sont celles de la Bibliothèque du Roi. On dénombre 19.573 permissions pour 18.698 livres déposés. Le pourcentage du dépôt est donc, cette fois-ci, de 96 %. Là encore il est possible que les livres non déposés soient en réalité plus nombreux, puisque les permissions sont moindres que les livres ayant obtenu une permission et que, d'autre part, le dépôt comprend les exemplaires des publications périodiques dans la dernière décade. Ce dernier fait est d'ailleurs bien mis en évidence par l'étude des fluctuations (voir planche XXI). En effet, la courbe du dépôt, généralement inférieure à celle des permissions, la dépasse largement à partir de 1779. Par ailleurs les variations annuelles confirment l'existence des cycles de vingt ans, 1721-1743,44, 174445-1761-63, et 1762-63-1782.
C. É T U D E ANNUELLE
COMPARÉE ET
DES
UNIVERSELLE
STATISTIQUES
DE
LA
BIBLIOGRAPHIE
ET D U DÉPÔT LÉGAL.
Cette étude est réalisable pour les trois années de 1748 à 1750. Les données du Dépôt Légal sont celles de la Bibliothèque du Roi. L'intérêt de cette comparaison tient également en un sondage de l'efficacité du dépôt. On dénombre 1.504 titres annoncés dans la Bibliographie pour 852 ouvrages déposés, qui représentent donc approximativement 57 % de la première statistique. Ainsi 43 % des livres publiés n'auraient pas été déposés. Toutefois ce pourcentage paraît exagéré. Cela tient, en grande partie, à la répétition assez fréquente des annonces de la Bibliographie. Quant aux variations annuelles (voir planche XX), bien qu'elles soient inverses, il est impossible d'en tirer des conclusions, étant donnée la trop courte période sur laquelle s'effectue le sondage.
DES XVIIe ET XVIII'
STATISTIQUE
SIECLES
393
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1750
1760
1770
X X I . É T U D E COMPARÉE DES PERMISSIONS ET DU DÉPÔT LÉGAL
D.
ÉTUDE
COMPARÉE
D'IMPRIMER,
DU
JOURNAL
DES
STATISTIQUES
D'HÉMERY
ET D U
1780
1790
D'IMPRIMER
DES DEPOT
PERMISSIONS LÉGAL.
La connaissance de la production bibliographique française peut être obtenue, pour la période 1751-1767, par l'examen comparé des statistiques des permissions d'imprimer, du Journal d'Hémery et du Dépôt Légal. Cette étude doit n o t a m m e n t permettre d'apprécier l'importance respective de chaque série, des autorisations d'imprimer par rapport à la production réglementaire publiée, de l'intérêt du Journal d'Hémery et, enfin, d'apporter des renseignements nouveaux sur l'efficacité du dépôt. Puisque les statistiques du Journal d'Hémery et du dépôt concernent, en principe, la totalité de la production nouvellement imprimée, il a été nécessaire, pour conserver des cadres statistiques voisins, de se servir de la statistique des permissions d'imprimer obtenue par addition des privilèges et permissions tacites, et, n o t a m m e n t , de celle des autorisations des registres de demandes, les enregistrements de la Chambre Syndicale é t a n t incomplets et les statistiques des feuilles n'existant qu'à partir de 1764. Il f a u t rappeler que cette statistique des autorisations est doublement inférieure, par rapport aux livres permis et par r a p p o r t aux permissions des registres de feuilles.
394
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
Elle est donc très inférieure à la production réelle des manuscrits autorisés à être imprimés. Sur le plan de la police des livres, seule la statistique du Journal d'Hémery est utilisable et il en a été de même pour le Dépôt Légal des données de la Bibliothèque du Roi. Il f a u t enfin mentionner l'absence regrettable de bibliographies privées pour cette période. Sur le plan de la production globale, on dénombre, pour les 17 années, 3.565 privilèges, 1.886 permissions tacites, c'est-à-dire 5.451 permissions d'imprimer. La moyenne annuelle est approximativement de 321 permis. P o u r la même période, on dénombre, dans le Journal d'Hémery, 4.349 livres imprimés nouveaux, et 3.870 livres déposés, ce qui donne les moyennes respectives de 256 et 228. Ainsi, contrairement à ce qu'on pourrait attendre, la production des permissions qui, comme on l'a dit, ne représente pas la totalité des manuscrits autorisés, est-elle supérieure aux deux statistiques de livres imprimés, la production du Journal d'Hémery n'en const i t u a n t que 80 % et celle du dépôt que 71 %. De plus, cette dernière est inférieure à celle du Journal d'Hémery. Ces constatations renforcent donc l'hypothèse déjà formulée de l'insuffisance du Journal d'Hémery et du Dépôt Légal. E n ce qui concerne ce dernier, on remarquera que la production déposable, obtenue par addition des données du dépôt et des réclamations, pour la même période (moins les réclamations de 1.752 qui n'existent pas), est de 4.136 ouvrages, et qu'elle reste inférieure à la statistique des permissions. Cette différence p e u t être due au fait que l'estimation des réclamations se fait à partir des enregistrements à la Chambre, qui sont très inférieurs aux autorisations. Ainsi l'évaluation de la production non déposée évolue-t-elle entre 11 % et 29 % selon que l'on considère le Journal d'Hémery incomplet, ou la production des permissions d'imprimer. L'examen des fluctuations (voir planche X X ) est également intéressant. L'existence d'une baisse décennale de 1751 à 1762 suivie d'une hausse se trouve confirmée. Cependant les mouvements intra décennaux sont beaucoup plus sensibles dans la statistique du Dépôt et du Journal d'Hémery que dans celle des permissions.
E.
ÉTUDE
COMPARÉE
D'IMPRIMER
DU
DES
STATISTIQUES
DES
PERMISSIONS
DÉPÔT LÉGAL ET D E S BIBLIOGRAPHIES P R I V É E S .
Toutes les séries ne se recoupent pas chronologiquement. Trois études sont possibles : a) Les Parisana b) Les Littéraire
permis d'imprimer, le Dépôt Légal, la Bibliographia et Gallica Universalis (1643-1653). permissions d'imprimer, le Dépôt Légal, La France (1700-1780).
STATISTIQUE
DES XVII' ET XVIII'
SIECLES
395
c) Les permissions d'imprimer, le Dépôt Légal et le Catalogue Hebdomadaire (1766-87). Ces études ont l'intérêt de comparer la production générale des livres non seulement sur le plan administratif (permission, Dépôt Légal), mais de confronter celle-ci avec les productions mises en vente. 1. Étude comparée des statistiques des permis d'imprimer, du Dépôt Légal et de la Bibliographia Parisana et Gallica universalis. Cette étude est réalisable pour les quatre années 1643-1646, à partir des trois séries, et seulement des deux dernières pour la totalité de la courte période 1643-1653. On dénombre, de 1643 à 1646, 791 permis ; 626 livres déposés et 1.606 annonces dans la Bibliographia Gallica Universalis et Parisana. La production déposée ne constitue que 79 % des permis et 39 % des annonces. Ainsi les ouvrages non déposés représenteraient 21 % des permis et 61 % des livres imprimés. D'autre part, le nombre des autorisations est assez réduit, puisqu'il ne constitue lui-même que 49 % des annonces de la bibliographie. L'inefficacité du dépôt pour la Chambre au milieu du x v m e siècle se trouve confirmée par l'étude comparée effectuée sur toute la période 1643-53. On relève alors 983 livres déposés pour 3.034 annonces. La production non déposée s'élève alors à 68 % des livres de la bibliographie. Quant aux fluctuations, leur examen vérifie l'existence d'une hausse de la production se poursuivant de 1640 à 1645, laquelle est suivie d'une baisse pour les années qui suivent jusqu'en 1658. 2. Étude comparée des statistiques des permissions d'imprimer, Dépôt Légal et de la France Littéraire.
du
La comparaison cette fois est plus longue et intéresse la période 1700-1783. Toutefois, comme La France Littéraire est une bibliographie rétrospective et non courante, l'étude ne peut être faite que sur le plan des données globales, les variations annuelles n'étant pas accessibles. La statistique des permissions comprend les privilèges (autorisations) de 1700 à 1715, les enregistrements à la Chambre de 1716 à 1723, puisque la statistique des autorisations ne fournit pas de données pour ces quelques années, et les permissions tacites de 1719 à 1723. De 1724 à 1783, elle comprend toutes les permissions d'imprimer, privilèges et permissions tacites. Cette statistique, ainsi obtenue, est inférieure à la totalité des permissions, puisqu'il n'y a pas de données pour les années 1747 à 1750 et qu'elle est réalisée à partir des autorisations ou des enregistrements à la Chambre Syndicale.
396
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
On dénombre, pour cette période, 19.700 ouvrages annoncés dans La France Littéraire pour 23.260 permissions d'imprimer et 19.056 livres déposés à la Bibliothèque du Roi. Ainsi le Dépôt Légal représente 96 % des annonces et 82 % des permissions. La production non déposée s'élève, cette fois, à 18 % des permissions. La moindre différence entre les données du dépôt et celles de la bibliographie (4 %) montre que cette dernière est incomplète, ce qui ne saurait surprendre puisque nous avons vu déjà qu'elle était spécialisée à l'enregistrement des ouvrages des auteurs vivants. Cette hypothèse est confirmée d'ailleurs par la comparaison des statistiques de La France Littéraire et des permissions, la première ne constituant que 85 % de la seconde. 3. Élude comparée des statistiques des permissions Dépôt Légat et du Catalogue Hebdomadaire.
d'imprimer,
du
Elle est réalisable pour la période 1766-1787. Les permissions comprennent les statistiques des privilèges et permissions tacites accordées par feuilles. E n ce qui concerne le Dépôt Légal, il s'agit des données de la Bibliothèque du Roi. On dénombre 10.890 permissions, 10.833 ouvrages déposés et 13.637 titres annoncés dans le Catalogue Hebdomadaire. Les permissions constituent 80 % des livres de la bibliographie, le dépôt 99 % des permissions et 79 % des annonces. On pourrait en déduire que le Catalogue est exact et relève bien la production française autorisée, puisqu'on sait que le nombre des livres autorisés par permissions est au moins supérieur de 20 % au nombre de permissions données, une autorisation correspondant parfois à plusieurs ouvrages. Toutefois il pourrait ne s'agir ici que d'une pure coïncidence. L'étude du Catalogue a montré en effet d'une p a r t la négligence des libraires et d'autre p a r t que les annonces étaient souvent répétées. Dans la même perspective, il semble qu'on puisse conjecturer que la production non déposée s'élève, à peu près, à 20 % des annonces du Catalogue. L'étude des fluctuations est non moins importante. Elle confirme (voir planche X X ) ce que nous avions constaté déjà à propos de la statistique des « livres entrés par la Chambre ». Si l'on excepte les divergences annuelles et que l'on considère la tendance générale, on peut distinguer u n mouvement de hausse, aussi bien dans les données du dépôt que dans celles du Catalogue quand les permissions sont en baisse légère. Ce fait s'explique entre autres par l'augmentation de la production périodique.
STATISTIQUE
DES XVII' ET XVIII'
SIECLES
397
4. Élude comparée des statistiques des permissions d'imprimer, du Journal d'Hémery, du Dépôt Légal et des Annales typographiques. Cette étude est intéressante en ce qu'elle réunit des statistiques des diverses périodes de l'impression. Elle est réalisable pour la courte période de 1757 à 1762. On dénombre 1.552 permissions (registres de demandes), 953 ouvrages relevés dans le Journal d'Hémery, 1.187 déposés à la Bibliothèque du Roi et 1.692 annoncés dans les Annales Typographiques. Ainsi le dépôt apparaît inférieur aux Annales de 30 % et aux permissions de 29 %, ces dernières étant à peine inférieures aux livres annoncés dans le Journal Bibliographique (8 %). Gela montre que les Annales ne sont pas complètes puisqu'on sait par ailleurs que le nombre total des livres de permissions est inférieur au nombre de permissions, au minimum de 20 %. De toute façon, dans cette comparaison, le fonctionnement du Dépôt Légal, dans cette courte période, paraît très insuffisant. Enfin, la statistique du Journal d'Hémery s'avère une nouvelle fois incomplète. Quant aux fluctuations, la période est trop courte pour faire autre chose que de relever la baisse de 1760 et la hausse de 1762 en même temps que les variations voisines du Journal d'Hémery, et de Dépôt Légal (voir planche XX). F.
CONCLUSIONS.
L'étude comparée de deux, trois ou des quatre séries de statistiques nous a montré, d'une manière générale, que les permissions représentent une partie essentielle de la production des livres imprimés. Si leur ^nombre n'égale pas celui des journaux bibliographiques le plus souvent, c'est d'une part que le nombre de livres autorisés est supérieur au nombre de privilèges (au minimum 20 %), et d'autre part que les périodiques commerciaux répètent la même annonce. Toutefois les permissions sont généralement égales ou supérieures aux statistiques officielles des livres imprimés, qu'il s'agisse de celles du dépôt ou de la police. On a pu constater que les permis d'imprimer, pour être assez nombreux, sont fortement inférieurs aux livres annoncés (49 %). Les privilèges enregistrés à la Chambre ont vu leur insuffisance confirmée par rapport aux privilèges autorisés ou relevés sur les feuilles de Jugement L'importance des données de la police des livres a été réduite, qu'il s'agisse du Journal d'Hémery ou du petit nombre de permissions accordées aux ouvrages déjà publiés entrés par la Chambre (6 % du total des permissions avant l'impression). Mais les résultats les plus nombreux et les plus variés sont ceux qui concernent le Dépôt Légal. La production non déposée avait été évaluée entre 10 % e t 15 % lors de l'étude comparée des statis-
398
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
tiques du dépôt. Elle a été cette fois élargie et nuancée. On peut regrouper les pourcentages en trois catégories : une minimale, une maximale et une moyenne. La catégorie minimale comprend : 1 % des permissions de 1766 à 1787 ; 3 % de 1684 à 1699 ; 4 % de 1724 à 1787 ; 4 % des annonces de La France Littéraire de 1700 à 1783 ; 11 % du Journal d'Hémery de 1751 à 1767. La catégorie maximale : 68 % des données de la Bibliographia Gallica Universalis de 1643 à 1646 ; 49 % des permissions de 1636 à 1663 ; 41 % de 1700 à 1715 ; 43 % de la Bibliographie Annuelle et Universelle de 1748 à 1750. Enfin la production non déposée comprend un pourcentage moyen : 29 % des permissions de 1751 à 1767 ; 18 % de 1700 à 1783 ; 30 % des Annales Typographiques de 1757 à 1762 et 20 % du Catalogue Hebdomadaire de 1766 à 1787. Ces pourcentages, d'autre part paraissent varier selon les époques. Il semble que le dépôt du x v n e siècle et de la Chambre Syndicale soit moins bien effectué que celui du x v m e et de la Bibliothèque du Roi. Ainsi les maxima principaux concernent soit la période 16431646 (68 %), soit celle de 1643 à 1663 (49 %). De même les minima sont ceux des années 1724-87 (4 %), 1766-87 (1 %). Enfin les résultats concernant les bibliographies imprimées et privées sont non moins utiles. Ils montrent que le nombre des annonces est généralement supérieur aux renseignements officiels, ce qui, comme on l'a déjà dit, est dû en partie aux répétitions des annonces. La qualité relative de la Bibliographia Parisana et de la Bibliographia Gallica Universalis s'est vue confirmée, de même que l'importance des données de la Bibliographie Annuelle et Universelle, des Annales Typographiques. Par contre, la faiblesse de la statistique de La France Littéraire de J . d'Hébrail est due à la spécialisation de la bibliographie. En ce qui concerne les fluctuations, le fait le plus intéressant peut-être, et le plus commun à toutes les séries, c'est l'existence de cycles d'une vingtaine d'années : 1639-1658 ; 1659-73 ; 1674-9294 ; 1693-95 à 1720 ; 1721-1740 ; 1741-61 ; 1762-83. Diverses études, plus ou moins partielles à une période et à deux ou plusieurs groupes de séries, l'ont prouvé. On pourra s'en rendre compte par l'examen de la planche X X I I , où sont reproduites les courbes des moyennes mobiles par 11, du Dépôt Légal de la Chambre, de la Bibliothèque et des Privilèges enregistrés à la Chambre Syndicale. La moyenne mobile l i a été choisie pour éliminer le plus possible les variations intradécennales des mouvements de hausse et baisse des cycles. On ne sera pas surpris, à la lecture, par la hausse brutale de 1671 dans les données de la Chambre qui proviennent d'un dépôt rétrospectif important, lequel déforme et amplifie le mouvement
STATISTIQUE
DES XVII' ET XVIII'
399
SIECLES
X X I I . CONCORDANCE CYCLIQUE - P R O D U C T I O N
GÉNÉRALE
de hausse, en même temps qu'il dissimule la fin de la baisse du mouvement précédent. Quant aux différences du mouvement de longue période, il s'explique par la nature des productions considérées. Avec le Dépôt Légal, il s'agit de toute la production autorisée, privilèges plus permissions tacites ; avec l'autre courbe, il n'est question que d'une fraction de celle-ci, avant l'impression, les privilèges enregistrés. La hausse de la première série est due, comme on sait, aux permissions tacites. II. ÉTUDE COMPARÉE DES STATISTIQUES DES LIVRES INTERDITS Les études précédentes concernaient l'examen comparé des diverses séries de la production autorisée. C'était l'aspect positif de ce travail. Il reste, maintenant, à examiner les statistiques des
400
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
BE LA
FRANCE
livres interdits ou sur le point de l'être. L'étude peut être menée principalement à partir de deux des quatre séries précédentes : les permissions avant l'impression ; la police des livres imprimés. Elle peut concerner deux problèmes : l'importance comparée de la censure ; la vérification de l'évolution cyclique de la censure, tantôt dirigée par la politique absolutiste et tantôt conduite par des vues libérales. Les séries statistiques employées ne sont pas les mêmes pour les deux questions. Dans le premier cas, pour les permissions, c'est à la totalité des demandes non acceptées qu'il faut avoir recours, qu'il s'agisse de privilèges ou de permissions tacites, puisque la police des livres recouvre toute la production sans distinction. D'autre part, c'est la statistique des refus obtenue à partir des feuilles qui sera employée, parce qu'elle est plus exacte. Pour la police des livres, ni les statistiques des balles, ni celle des livres arrêtés à la Chambre ne peuvent être utilisables. Les premières n'énumèrent que des paquets ; les secondes, beaucoup d'exemplaires. C'est donc seulement la statistique des livres suspendus qui peut servir et cela réduira notre recherche à un sondage pour la courte période 1780-1787. Trois études sont possibles : 1° L'étude comparée des livres interdits avant et après l'impression. 2° L'importance de la production interdite avant et après l'impression par rapport à la production autorisée, manuscrite ou publiée. 3° La production générale des livres par addition des statistiques de livres publiés et autorisés et des livres publiés et interdits. Pour l'examen du deuxième problème, au contraire, il sera utile d'analyser les séries des livres arrêtés à la Chambre. Il n'y a aucune contre-indication puisqu'il s'agit de l'analyse des fluctuations. Ces séries, d'autre part, ont un avantage considérable sur celles des livres suspendus : elles recouvrent une période plus longue de beaucoup, identique, dans l'ensemble, à celle des autres séries des permissions. En ce qui concerne ces dernières, c'est aux privilèges refusés, ou aux permissions d'imprimer refusées, que nous aurons recours. Les permissions tacites déjà étudiées ont un mouvement particulier qui nous a obligé de les écarter de cette recherche. A. IMPORTANCE COMPARÉE D E LA C E N S U R E .
1. Étude comparée des statistiques de demandes de permissions accordées par feuilles et des livres suspendus.
non
Elle est réalisable pour la période 1780-87. Comme la statistique des livres suspendus est décomposée, il sera possible d'apprécier
STATISTIQUE
DES XVII' ET XVIII'
SIECLES
401
l'importance des livres rayés, des livres nouveaux, des contrefaçons et des livres prohibés. On dénombre, pour cette période, 1.498 demandes de permissions d'imprimer non accordées par feuilles, pour 806 suspendus, 127 rayés, 657 nouveautés, 133 contrefaits, 150 prohibés. Ainsi le pourcentage des livres suspendus par rapport aux demandes refusées est de 54 %, celui des rayés de 8 %, des nouveautés de 44 %, des contrefaits de 9 % et des prohibés 10 % . On remarquera l'importance assez grande des ouvrages suspendus, ce qui ne veut pas dire qu'ils f u r e n t prohibés, et ceci à cause du nombre élevé de nouveautés imprimées principalement dans les provinces et non encore pourvues de permissions tacites par la Chancellerie parisienne. Inversement, parmi les exemplaires arrêtés, le nombre des livres contrefaits ou prohibés est assez réduit. L ' é t u d e des fluctuations (voir planche X X ) montre que l'évolution des livres suspendus est la même que celle des demandes non autorisées, avec u n décalage d'un an, explicable par le temps d'impression écoulé entre l'autorisation et la mise en vente. 2. Étude comparée des statistiques des demandes non accordées, des livres suspendus, des permissions d'imprimer, du Dépôt Légal, du Catalogue Hebdomadaire. Cette étude a pour b u t d'apprécier l'importance et l'évolution des ouvrages interdits a v a n t et après l'impression, par rapport aux livres réglementaires envisagés a v a n t l'impression ou au moment de la publication et de la vente. On dénombre, pour la période 1780-87, 3.542 permissions d'imprimer, 5.943 ouvrages déposés, 6.647 annoncés dans le Catalogue Hebdomadaire, 1.491 demandes non autorisées, 806 suspendus, 127 rayés, 657 nouveautés sans permission, 133 contrefaçons et 150 prohibés. Les demandes de permissions qui f u r e n t refusées constituent 42 % des permissions, 25 % du dépôt et 20 % des livres annoncés. Les livres suspendus, 23 % des permissions, 14 % du dépôt et 12 % du Catalogue Hebdomadaire. Les livres rayés, respectivement 4 %, 2 % et 2 % ; les livres nouveaux sans autorisations, 18 %, 11 % et 10 % ; les contrefaçons, 4 %, 2 % et 2 % ; les livres prohibés, 4 %, 3 %, et 2 %. Ainsi la censure intervient plus durement a v a n t qu'après l'impression. Les contrefaçons et les livres prohibés sont par ailleurs nombreux par r a p p o r t aux nouveautés parues sans autorisation. L'étude des fluctuations (voir planche X X ) montre qu'à l'exception partielle d'ailleurs du Catalogue Hebdomadaire, les données des demandes non accordées et des livres suspendus évoluent parallèlement à celle des séries du Dépôt Légal et des permissions.
402
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
3. La statistique générale des livres publiés en France de 1780 à 1788. Elle consiste évidemment dans la somme des livres autorisés et interdits. Les premiers sont connus, soit par le Dépôt Légal soit p a r le Catalogue Hebdomadaire. Les seconds sont composés des contrefaçons et des livres prohibés. Il suffît donc d ' a j o u t e r les statistiques de ces deux séries a u x deux premières pour obtenir une idée approchée de la production générale des livres imprimés en France. On dénombre, pour cette période, 7.913 ouvrages avec la statistique du Dépôt Légal et 8.046 avec le Catalogue Hebdomadaire, soit une moyenne annuelle respective de 879 et 894 ouvrages. On remarquera que la différence est assez légère. E n ce qui concerne les fluctuations (voir planche X V I I I ) , le m o u v e m e n t de hausse de 1780 à 1787 se retrouve, plus accentué dans la statistique obtenue à partir du Dépôt Légal, mise à p a r t la divergence de tendance de 1782. 4.
Conclusions.
Cette étude comparée des statistiques des livres interdits nous a apporté plusieurs résultats : 1° Les demandes non accordées représentent à peu près 1/4 de la production réelle. 2° Les ouvrages prohibés, contrefaits, découverts et jugés, de 2 à 4 % de cette même production. 3° Les nouveautés sont assez importantes et varient entre 10 % et 20 % de la production. 4° Les livres suspendus, environ 15 %. 5° Les fluctuations paraissent être identiques. B.
L'ÉVOLUTION
CYCLIQUE
DE
LA
CENSURE
L'IMPRESSION E N FRANCE, AU X V I I I E
AVANT
ET
APRÈS
SIÈCLE.
Plusieurs études de la censure ont déjà été faites. Nous avons examiné les variations de la politique du pouvoir a v a n t l'impression, d'abord pour les privilèges, puis pour les permissions tacites. Un examen comparé de la censure des privilèges et des Permissions tacites a été effectué, qui f u t suivi d'une analyse de la censure générale des permissions d'imprimer. L'étude des séries de la police des livres avait permis de déterminer l'évolution de la censure postérieurement à l'impression, lors de la visite des livres à la Chambre Syndicale par les Syndics et Adjoints et les Inspecteurs de la Librairie, puis au Bureau de la Librairie par les censeurs examinateurs des livres précédemment suspendus. Il s'agit, cette fois, non plus sur le plan quantitatif, mais sur celui des fluctuations, de vérifier l'existence d'une évolution cyclique, t a n t ô t libérale et
STATISTIQUE
DES XVII' ET XVIII'
SIECLES
403
tantôt absolutiste, de la politique du pouvoir, qui se manifesterait simultanément dans les séries des permissions et dans celles de la police. Il est donc question d'une confirmation des phases précédemment déterminées. Des permissions, nous n'avons, après recherche, conservé que les séries des privilèges et des permissions d'imprimer, en écartant celles des Permissions Tacites refusées, dont le mouvement est identique à celui de la demande. Pour la police des livres imprimés, nous avons utilisé les séries des livres arrêtés dans les visites. Cellesci sans doute ne sont pas pures, puisqu'on y trouve des exemplaires. Mais notre but ici n'est plus d'établir une proportion. L'étude des fluctuations n'est en rien gênée, puisque les exemplaires se retrouvent dans toutes les séries, qu'il s'agisse des livres arrêtés ou des livres rendus. Par contre, ces statistiques recouvrent une période beaucoup plus étendue que celle des livres suspendus, approximativement la même que celle des permissions d'imprimer. Notre recherche s'est effectuée, d'abord, sur les séries de données naturelles. Toutefois, dans certains cas, nous avons dû établir les pourcentages annuels d'une série par rapport à une autre concernant la même production. Ce fut le cas des séries des permissions d'imprimer refusées par rapport à celles demandées, ou des livres non rendus par rapport aux livres arrêtés. Le but poursuivi était alors d'éliminer le mouvement général de la production de la série considérée, lequel dissimulait partiellement le mouvement de la censure. Enfin, dans tous les cas, séries de données naturelles ou de pourcentages, nous avons employé la moyenne mobile 7 pour éliminer les fluctuations interannuelles et certaines variations intradécennales discernables dans la courbe des données naturelles. Quelles conclusions pouvons-nous tirer de cette recherche, soit encore de l'analyse de la planche X X I I I ? Il semble que, dans tous les cas, on retrouve : 1° Une baisse des refus de permissions ou une diminution du nombre des livres non rendus, équivalente à une baisse de l'absolutisme et à une hausse du libéralisme : a) Du début du x v m e siècle à 1725-30, en tenant compte d'une hausse intradécennale légère vers 1716. b) De 1745-1750 à la fin de l'Ancien Régime, coupée d'une hausse vers 1770. 2° Une hausse des refus de permissions et une augmentation du nombre des livres non rendus, correspondant à une hausse de l'absolutisme et à une baisse du libéralisme : a ; De 1725-30 à 1745-50. b) Lors des pointes de 1715-20 et de 1765-75. Ainsi la régularité précédemment conjecturée se confirme.
404
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
300 Moyennes mobiles 7 200
D E M A N D E S DE PRIVILÈGE! î REFUSÉES
100
V*
90 80
70
60
LIVRES A R R Ê T Ë S . D A N S LE S V I S I T E S ET N O N - R E N D U S par rapport aux livres arrêtés ;
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P E R M I S S I O N S D ' I M P R I M E ! t RI :FU SÊE. s ' par rapport aux permissions d'ir ripri mai de maridée s
10 1700
XXIII.
CONCORDANCE TENDANCIELLE DE LA CENSURE AVANT ET APRÈS L'IMPRESSION
STATISTIQUE DE LA TOTALITÉ DES PERMISSIONS PAR LE POUVOIR ROYAL Permissions d'imprimer Années
1766 1767 1768 1769 1770 1771 1772 1773 1774 1775
1790
1750
Permissions d'imprimer
+
Années
446 538 607 624 634 479 698 427 598 620
1776 1777 1778 1779 1780 1781 1782 1783 1784 1785
Livres entrés par la Chambre
Permissions d'imprimer
+
Années
525 525 515 431 401 407 384 384 511 521
1786 1787
Livres entrés par la Chambre
DÉLIVRÉES
+
Livres entrés par la Chambre
533 728
405
STATISTIQUE DES XVII' ET XVIII« SIECLES
S T A T I S T I Q U E D E LA PRODUCTION G É N É R A L E D E S L I V R E S I M P R I M É S TANT R É G L E M E N T A I R E S Q U ' I N T E R D I T S
Années
Dépôt Légal + livres contrefaits et prohibés
Catalogue hebdomadaire +livres contrefaits et prohibés
1780 1781 1782 1783 1784 1785 1786 1787 1788
418 523 344 427 458 909 1665 1482 1687
466 425 754 1005 937 831 1224 1238 1166
CHAPITRE
Vili
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE DU XVIIe AU XX e SIÈCLE (ÉTUDE
SOMMAIRE)
Au terme de cette recherche consacrée à la statistique bibliographique de la France du x v n e et du x v m e siècles, on est tenté par un dernier problème. Après les études cloisonnées qui s'achèvent, l'esprit éprouve le besoin de s'élever, de gagner de plus vastes perspectives et s'interroge sur ce qu'aura été jusqu'à nos jours l'évolution de la production générale des livres imprimés en France, depuis la naissance de l'imprimerie et, à défaut de sources bibliographiques suffisantes, depuis le x v n e siècle. On en comprend, derrière la sécheresse des chiffres, toute la portée : il s'agit de l'évolution de la pensée imprimée et dans une large mesure de l'esprit collectif français considéré dans son ampleur et ses fluctuations. Cette ambition, à la réflexion, s'avère indispensable. Tout travail exige d'être placé dans son contexte pour y prendre son vrai sens. Ainsi la production imprimée de l'Ancien Régime devait être, en dernier lieu, confrontée avec la production révolutionnaire et moderne. Cependant, une pareille étude, faute d'une analyse de la totalité de la production générale des x i x e et x x e siècles, ne saurait être qu'une ébauche. Nous pensons sur ce point, avec M. Eric de Grolier, que les résultats de cette recherche ne sauraient être que relatifs. Les sources en effet seront partielles. Toutefois, elles permettent de se faire une première idée qui, même approximative, n'en sera pas moins utile. Toute la difficulté consiste à trouver une ou plusieurs séries statistiques qui offrent des données continues depuis la période la plus reculée jusqu'à l'époque actuelle. Une seule semble répondre à ce souci méthodologique : la statis14
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LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
tique du Dépôt Légal. Les séries de la censure, des permissions avant l'impression et de la police des livres après, vont en effet cesser d'exister à partir des premières années de la Révolution qui introduisait la liberté d'expression. D'autre part, les bibliographies imprimées et privées ne fournissent pas de séries continues pour toute la période des x v n e et x v m e siècles. De même, pour ce qui est du x i x e et du x x e siècles, elles n'ont ni la magnifique durée ni le caractère officiel du Journal de la Librairie, Bibliographie de la France. Celle-ci, en effet, depuis le Décret de Napoléon signé à Amsterdam en 1811, présente au moins en principe les listes des ouvrages déposés. Si la statistique du Dépôt Légal semble être la seule à nous offrir des données depuis le x v n e siècle, il n'en reste pas moins nécessaire d'en connaître les limites. Une période de plus de trois siècles ne peut s'écouler sans apporter des modifications. Une fois encore il serait vain de se retrancher derrière l'unité institutionnelle, l'unité du principe du dépôt, ou son caractère officiel. Notre étude sera conduite à partir de quatre séries. La première concerne le dépôt pour la Chambre Syndicale des Libraires. La période à utiliser se poursuit de 1626 à 1683. Le présent travail a montré à la fois son irrégularité et son insuffisance. La seconde est faite du dépôt pour la Bibliothèque du Roi. Elle commence en 1684 et s'achève en 1789. Les livraisons sont régulières, cependant on sait qu'elle ne recouvre ni toute la production autorisée, ni, à plus forte raison, la totalité de la production imprimée. De 1790 à 1793, aucun dépôt suivi n'a lieu puisqu'il a été supprimé. La troisième série est faite du Dépôt Révolutionnaire. Il fut institué en 17931 et dura jusqu'en 1811. Il ne se fondait plus ni sur le principe de l'enrichissement des Collections Nationales ni sur celui de la censure, toutes idées contraires à la doctrine nouvelle. Il devait servir seulement de garantie contre les contrefacteurs. En ce sens, il s'agissait de protéger la propriété littéraire donc le droit des citoyens. Toutefois, pour respecter l'idéal de liberté, les législateurs ne le rendirent pas rigoureusement obligatoire. En effet le dépôt n'était nécessaire que pour pouvoir « être admis en Justice pour la poursuite des contrefacteurs ». De la sorte, le dépôt de cette période fut beaucoup plus insuffisant que celui de l'Ancien Régime. Enfin la quatrième série est composée de la statistique annuelle
1. Décret du 19 juillet 1793 article 6.
« Tout citoyen qui mettra au jour un ouvrage soit de littérature ou de gravure dans quelque genre que ce soit sera obligé d'en déposer deux exemplaires à la Bibliothèque Nationale ou au Cabinet des Estampes de la République, dont il recevra un reçu signé par le Bibliothécaire faute de quoi il ne pourra être admis en Justice pour la poursuite des contrefaiteurs. »
STATISTIQUE
DU XVII° AU XX'
SIECLE
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des seuls livres annoncés dans le Journal de la Librairie, Bibliographie de la France. Elle commence en 1811, date à laquelle le Dépôt Révolutionnaire facultatif fut remplacé par un dépôt obligatoire 1 , qui est l'origine du Dépôt Légal moderne. Cependant ce n'est pas la statistique des registres du Dépôt du x i x e et du x x e siècle qui nous a servi ici. Celle-ci a besoin d'une étude minutieuse qui ne saurait être faite dans le cadre de ce travail. Les classifications notamment ont évolué et elles ont besoin d'être réajustées. Cependant il faut savoir qu'un écart considérable existe entre la statistique du Dépôt Légal et celle de la Bibliographie de la France. Cette dernière élimine les imprimés de moindre importance. De même, étant donné l'évolution irrégulière des rubriques, dont l'analyse nécessite à elle seule toute une étude, nous ne nous sommes servi que de la statistique des livres. Aussi, d'une manière générale, les statistiques des périodes révolutionnaire et moderne sont-elles, comme celle de la Chambre Syndicale, inférieures à celle de la deuxième série du dépôt à la Bibliothèque du Roi. Ces considérations nous seront utiles plus loin, lors de l'analyse statistique. La statistique du Dépôt Légal de l'Ancien Régime est connue. Celle de la période révolutionnaire a été obtenue par le dépouillement des registres du Dépôt Révolutionnaire qui se trouvent au Département des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale. C'est la Chronique de la Bibliographie de la France de l'année 1911 qui a fourni la statistique du dépôt moderne des livres jusqu'à cette date. Les données annuelles ont ensuite été directement relevées dans la bibliographie. L'analyse de la courbe de l'évolution de la production des livres imprimés et déposés (voir planches X I I I et XIII bis) est d'un enseignement extrêmement important. La tendance à travers la longue période, du x v n e siècle à nos jours, est celle d'une courbe en S, ou « courbe logistique ». M. Piatier rappelle que : « L'exemple typique de courbe logistique est celui obtenu par l'évolution d'une population microbienne sur un milieu nutritif fini : cette population se développe lentement à partir des premières unités, puis la croissance s'accélère, passe par un maximum, se ralentit et la population tend vers une limite supérieure'. » 1. D'après le Moniteur, la loi fut signée par Napoléon le 21 janvier et promulguée le mercredi 7 février 1810. Elle comportait, section II, Titre VIII, art. 48 : «chaque imprimeur sera tenu de déposer à la Préfecture de son département et à Paris à la Préfecture de Police, cinq exemplaires de chaque ouvrage... » Enfin le décret signé par Napoléon à Amsterdam le 14 octobre 1811 stipulait dans son article 1° que : >La direction de la Librairie est autorisée à publier... un journal dans lequel seront annoncées toutes les éditions d'ouvrages imprimés ou gravés. » 2. A. PIATIER, Statistique et observation économique, p. 335.
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BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
C'est bien en effet ce qui se passe en ce qui concerne la production déposée en France du x v n e au x x e siècle. Mais cette vue générale, à son tour, conduit à une dissociation. On p e u t en premier lieu décomposer le mouvement en trois parties : 1° A travers la fin du x v n e et le x v m e siècle jusqu'en 1760-70, l'accélération est lente. 2° De 1770 à 1898, la croissance est rapide. 3° Depuis la fin du x i x e siècle la tendance est à la baisse légère. Les chiffres donneront une idée précise de ces variations. Sous l'Ancien Régime, la production annuelle déposée est de l'ordre de la centaine dans le deuxième q u a r t du x v n e siècle. Elle double au m a x i m u m au début du x v m e siècle, passe à 300 vers 1750, pour atteindre 400 vers 1770, 600 en 1779. Elle dépasse pour la première fois le millier à la veille de la Révolution, a t t e i n t 3 à 4.000 unités vers la fin de l'Empire, 7 et 8.000 sous la Restauration, 12.000 sous le Second Empire, 13 et 14.000 au début de la Troisième République, et baisse légèrement depuis. Ces constatations, cette décomposition en trois phases, sont extrêmement utiles. Elles rejoignent et confirment les observations faites autrefois par Simiand en ce qui concerne les phases séculaires de 130 ans, A et B. Dans son ouvrage intitulé Les Fluctuations économiques à longue période et la crise mondiale, Simiand indiquait d'abord : « Il « saute aux yeux » que, dans leur variation, au total fortement croissante, se distinguent des phases bien différenciées Phases A d'accroissement accéléré, Phases B d'accroissement atténué parfois de régression 1 . »
E t ailleurs il indiquait les phases séculaires. La première irait... « du commencement du x v i e siècle au milieu du
XVII«'. »
Elle serait suivie d'une Phase B du milieu du x v n e siècle à 1770. Celle-ci d'une nouvelle phase A, de 1770 à la fin du x i x e siècle. La période actuelle, en t a n t que mouvement séculaire, serait celle d'une Phase B. On sait que les phases A se caractérisent par une hausse des prix et une augmentation de la production, les Phases B au contraire correspondant à une stagnation voire à une baisse. Nous ne saurions présumer ici des variations du prix des livres à travers les trois siècles et demi, mais la production des livres, dans la mesure où elle est une marchandise, devait retrouver les observations de Simiand et c'est bien ce qui s'est produit. Il nous 1. S I M I A N D , Les Fluctuations économiques à longue période et la crise mondiale, Paris, F. Alcan, 1912, In-16", 208 p. BN : F» R 25531, p. 24. 2. Ibid., p. 17.
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DU XVII' AU XX'
SIECLE
411
manque des données pour déterminer l'évolution de la production au x v i e siècle et dans la première partie du x v n e siècle. P a r contre, les phases A et B se vérifient après. La production hausse très légèrement en doublant ou triplant t o u t au plus, à travers la deuxième moitié du x v n e siècle et le x v m e siècle jusqu'en 1770. Nous sommes bien en présence d'une phase B. Cette hypothèse se confirme par l'évolution postérieure, de 1770 à 1900, qui passe de l'ordre de 400 à près de 15.000, si l'on considère les seuls chiffres de la Bibliographie de la France pour le dépôt moderne, lesquels sont très inférieurs à la production des registres du dépôt. Cette fois la production est multipliée approximativement par quarante. Enfin, depuis la fin du siècle précédent, la tendance est généralement à la baisse, ce qui confirme encore l'existence d'une nouvelle phase B, différente de celle du x v m e siècle en ce qu'elle est une baisse, tandis que l'autre était d'une hausse légère. Les phases A et B paraissent composer des cycles polyséculaires de 260 ans. Le premier partirait de la Renaissance pour s'achever vers 1770 ; le second commencerait à cette date et serait en cours de développement. Cette hypothèse f u t formulée implicitement par Simiand. Elle f u t reprise plus récemment par M. Zoltowski dans son étude sur Les cycles de la création intellectuelle et artistique. Il est évident qu'il ne s'agit là que d'une hypothèse. Pour être confirmée, il conviendrait d'une p a r t de vérifier ces phases séculaires A et B pour la même période dans diverses activités et, d'autre part, de remonter dans le temps. Ce n'est pas l'objet de cette étude. Si, maintenant, on considère, non plus les mouvements séculaires et les cycles polyséculaires, mais les mouvements interdécennaux ou semiséculaires, force est de vérifier une nouvelle fois la théorie Simiandienne. Celle-ci notait le début et la fin de chaque phase. Déterminant les phases A, en r e m o n t a n t dans le temps, Simiand indiquait : « 1° de la fin du x i x e siècle jusqu'après la grande guerre ; 2° du milieu du x i x e siècle aux années 1875-80 ; 3" d'avant 1789 aux années 1815-1820 1 . »
Inversement, les phases B interdécennales se succédaient de 1815-20 à 1850, de 1875-77 à 1900. La considération de la courbe confirme, sur le plan de la production des livres, les observations faites en d'autres domaines. De 1770 à 1815-20, on passe de 400 livres à près de 5.000. La production augmente de plus de douze fois. On est en présence d'une hausse et d'une phase A. De 1820 à 1850, la production varie 1. Ibid., p. 17.
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DE LA
FRANCE
de près de 5.000 à 7 et 8.000. Elle augmente à peine d'une demie fois. C'est une phase B de hausse ralentie. De 1850 à 1875-80, elle passe de 7-8.000 à plus de 14.000, l'accélération reprend, la production double presque, et nous retrouvons une phase A. Enfin, de 1875 à 1900, la production reste stationnaire. La dernière phase B se confirme. Quant au x x e siècle, la baisse de la première moitié du siècle doit être envisagée aussi par rapport au mouvement séculaire. Au x i x e siècle, phases A et B interdécennales se produisaient sur un mouvement séculaire de hausse, de phase A. Cette fois les mêmes s'effectuent sur la baisse séculaire. Par ailleurs, il semble que l'on puisse remonter plus avant dans l'étude des phases A et B interdécennales. Simiand s'était arrêté à la fin du x v m e siècle. La production des livres déposés au xviii® siècle permet de constater une phase B de baisse, de 1730-1740 à 1760-1770, antérieure à la phase A, 1770-1815-20. De même, cette nouvelle phase B paraît être précédée d'une phase A de hausse, de la fin du x v n e siècle jusque vers 1730. L'étude des cycles interdécennaux n'est pas moins intéressante. L'examen des séries de la production des livres de l'Ancien Régime avait permis de déceler l'existence de cycles d'une vingtaine d'années : 1639-58 ; 1659-73 ; 1674-92-94 ; 1693-95 à 1720, 17211740 ; 1741-1761 ; 1762-1783 (v. pl. XXII). Or ces cycles semblent disparaître pendant la deuxième période de la hausse accélérée. L'insuffisance des données pour le Dépôt Légal révolutionnaire rend plus malaisé un diagnostic précis. Enfin pendant la troisième période, s'il existe des cycles interdécennaux, ils ne paraissent pas avoir la même durée. On peut en effet distinguer le cycle de 31 ans de 1817 à 1847 correspondant à la Restauration et à la Monarchie de Juillet, suivi d'un autre de 1848 à 1871 de 24 ans, correspondant au Second Empire. Après quoi vient celui très long de 44 ans de la Troisième République et de la Belle Époque, de 1872 à 1914-18, puis celui de l'entre-deux-guerres de 1919 à 1941 plus court, de 22 ans, et enfin le cycle actuel de la quatrième puis de la cinquième République. Ainsi il semblerait qu'on assiste, dans l'évolution de la production au x i x e et au x x e siècle, à la succession de cycles longs et courts. Encore n'est-ce là qu'une approximation dont nous avons d'autant plus à nous méfier que la source est partielle. Ces constatations conduisent à plusieurs considérations. D'abord, la phase de hausse de la production des imprimés déposés correspond à l'essor du livre imprimé en tant que principal moyen de reproduction de la pensée écrite. En effet, ni au début, ni à la fin, le livre n'est seul. Au x v e et au début du xvi e siècle, c'est-à-dire pour des périodes où nous n'avons pas de données statistiques, le livre imprimé n'est pas l'unique document. Le manuscrit, la copie, continue de coexister avec l'imprimerie,
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DU XVII• AU XX'
SIECLE
413
bien que celle-ci élimine le procédé antique d'une manière assez rapide. Lorsque notre série commence, au début du x v n e siècle, l'imprimerie a déjà acquis le quasi-monopole de le reproduction de la pensée. Elle le conserve jusqu'à la fin du xix e et du début du x x e siècle. Pendant cette période de près de trois siècles, sa progression est continue. Cependant le début de sa baisse va plus ou moins coïncider avec l'apparition de nouveaux moyens de reproduction de la pensée (disque, film, etc...), qui vont prendre leur place parmi les moyens sociaux d'expression. De là aussi, un élargissement progressif des cadres du Dépôt Légal, qui ne voudra plus se contenter du livre comme dans la période précédente, mais cherchera à obtenir des exemplaires produits avec les moyens nouveaux. Dès lors, l'imprimé perd son rôle essentiel, unique, et doit partager. C'est là sans doute l'une des causes essentielles de la baisse légère de la production imprimée au x x e siècle en France. On pourrait ajouter à cela des causes politiques plus ou moins momentanées, comme l'amputation de l'Alsace-Lorraine ou les guerres mondiales. Par voie de conséquence, l'évolution de la production des livres cesse de représenter l'évolution de la pensée nationale reproduite tout entière, ce qu'elle avait été depuis la Renaissance. Son étude devra dorénavant comporter, outre la statistique des livres, celle des disques, des films, etc. Cette évolution du livre, par induction, conduit à poser le problème de la succession des moyens de reproduction de la pensée. Une hypothèse est alors formulée. D'abord, l'histoire montre qu'il n'est pas un seul mais plusieurs moyens. D'autre part, ceux-ci paraissent se succéder sans s'anéantir. Ils naissent, se développent, semblent passer par une période d'extension maximale pour être limités par de nouveaux procédés, qui, sans les évincer entièrement, les fixent dans certains cadres et dans une certaine spécialisation. Il est trop tôt pour juger du film ou du disque. Mais l'évolution du manuscrit paraît dans une certaine mesure aller dans le sens de cette hypothèse. Comme le livre au xix e siècle, il se développe au Moyen Age. Comme celui-ci, qui voit son importance limitée par le disque, le film, etc., le manuscrit fut réduit par l'invention de l'imprimerie. Il est évident qu'il ne s'agit là que d'une simple conjecture supposant des études approfondies pour être confirmée. Si l'on examine l'accélération continue de la production des imprimés du x v n e à la fin du xix e siècle, on ne peut pas ne pas remarquer que la hausse violente qui fait passer la production des centaines à celle des milliers, du x v n e et du x v m e siècle au xix e siècle, correspond à la fois à la Révolution Française sur le plan politique et à la Révolution Industrielle sur le plan économique. L'augmentation rapide de la production des livres ne pouvait se faire que parallèlement, le nombre des imprimeries, des éditeurs, du matériel, de sa valeur technique, augmentant. Or celle-ci ne
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DE LA
FRANCE
pouvait avoir lieu dans les cadres corporatifs étroits de l'Ancien Régime où le nombre des imprimeries était fixé par le Pouvoir Royal. Il fallait pour cela que le moule ancien et traditionnel de la production fut brisé, que la liberté de produire, d'imprimer, soit instituée. On le demandait depuis plusieurs décades vers la fin de l'Ancien Régime. Les rapports des intendants, ou des inspecteurs de la Librairie dans les provinces, montrent comment, dès 1789, les premières initiatives furent prises spontanément sur place par des gens qui n'avaient encore aucun droit. La Révolution Française se vérifie donc bien, sur le plan qui nous occupe, celui de la Librairie, comme ayant été l'essentiel moyen politique pour la production de passer de la croissance lente à la croissance accélérée que la hausse progressive des dernières décades imposait. De même, il est possible que les changements survenus dans les cycles interdécennaux puissent être le résultat du changement d'organisation de la production des imprimés, qui du corporatisme antérieur à la Révolution passe au libéralisme moderne. Enfin on ne saurait s'en tenir au seul aspect économique de l'évolution de la production des livres déposés. En effet, les livres ne sont que l'expression de la pensée collective française. E t il faut bien reconnaître qu'on assiste tant dans la création intellectuelle que dans la consommation, puisqu'un livre suppose un auteur et des lecteurs, en même temps qu'à l'essor de la production, et du libéralisme, à celui d'un élargissement du savoir par une augmentation du nombre des citoyens touchés par le livre. En effet, la production augmente approximativement de 70 fois entre le x v m e et la fin du x i x e siècle, tandis que la population française ne double même pas. Toutefois on ne saurait en conclure à une démocratisation réelle du savoir. Le rapport nombre de livre - masse de la population montre bien que cette augmentation ne concerne qu'une couche de la nation, sans doute plus large que celle de l'Ancien Régime, mais qui est loin encore d'être populaire. Aussi la phase séculaire A de hausse de 1770 à 1900 confirme-t-elle le rapport entre infrastructure économique et superstructure intellectuelle. La hausse de la reproduction matérielle du document est liée directement à l'essor industriel, à la législation libérale, introduite par la Révolution et la prise du pouvoir par la bourgeoisie. Elle correspond à une hausse du nombre des documents nouvellement écrits, partant du nombre des auteurs et des lecteurs. La hausse semble être produite par et pour la bourgeoisie française. Ce premier sondage de l'évolution de la pensée imprimée nationale dans la période moderne est donc très instructif. Il introduit et renvoie à une étude approfondie. Ce sera l'objet de notre prochain et essentiel travail.
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DU XVII'
AU XX' SIECLE
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DÉPÔT LÉGAL DE LA PÉRIODE RÉVOLUTIONNAIRE Années
Titres
Années
Titres
Années
Titres
Années
Titres
1794 1795 1796 1797 1798
371 308 240 345 475
1799 1800 1801 1802 1803
815 709 972 1329 1374
1804 1805 1806 1807 1808
1378 1377 1536 1219 1274
1809 1810 1811
981 2872 2373
DÉPÔT LÉGAL MODERNE BIBLIOGRAPHIE DE LA FRANCE STATISTIQUE DES LIVRES Années
1812 1813 1814 1815 1816 1817 1818 1819 1820 1821 1822 1823 1824 1825 1826 1827 1828 1829 1830 1831 1832 1833 1834 1835 1836 1837 1838 1839 1840 1841
Livres
5442 3749 2547 3357 3763 4287 4827 4568 4881 5499 5824 5893 6974 7805 8273 8198 7616 7823 6739 6180 6478 7011 7125 6700 6632 6543 6603 6186 6369 6300
Années
1842 1843 1844 1845 1846 1847 1848 1849 1850 1851 1852 1853 1854 1855 1856 1857 1858 1859 1860 1861 1862 1863 1864 1865 1866 1867 1868 1869 1870 1871
Livres
6445 6176 6577 6521 5916 5530 7234 7378 7608 7350 7787 8060 8011 8253 12027 12019 13331 11905 11882 12236 11753 12108 12065 11723 13883 11355 11267 12269 8831 7245
Années
1872 1873 1874 1875 1876 1877 1878 1879 1880 1881 1882 1883 1884 1885 1886 1887 1888 1889 1890 1891 1892 1893 1896 1895 1896 1897 1898 1899 1900 1901
Livres
10559 11530 11917 14195 13642 12764 12823 14122 12414 12766 13184 13701 13938 12342 12831 12901 12973 14849 13643 14192 13123 13595 13550 12927 12738 13799 14781 14595 13362 13053
Années
1902 1903 1904 1905 1906 1907 1908 1909 1910 1911 1912 1913 1914 1915 1916 1917 1918 1919 1920 1921 1922 1923 1924 1925 1926 1927 1928 1929 1930 1931
Livres
12199 12264 12139 12416 10896 10785 11073 13185 12615 11652 11560 14460 8698 4274 5062 5054 4484 5361 6315 7726 8515 8784 8864 15054 11095 11922 11548 10941 9176 9822
Années
1932 1933 1934 1935 1936 1937 1938 1939 1946 1941 1942 1943 1944 1945 1946 1947 1948 1949 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960
Livres
10603 8204 8389 7964 9319 8080 8124 7505 5549 4007 7281 7918 8680 7291 9522 14746 16020 12526 11849 11850 11954 11351 11934 11793 11377 11917 11725 12032 11872
CONCLUSION
GÉNÉRALE
LA SCHÉMATISATION HISTORIQUE Au moment d'achever ce travail nous sommes tenté par une dernière interrogation : quelle est la nature de la compréhension des phénomènes historiques que nous avons étudiés jusqu'ici ? Il faut insister d'abord sur le fait que cette question est justifiée. S'il est vrai que l'Histoire est une science expérimentale et inductive, encore convient-il que toutes les étapes de cette induction soient franchies. Il y fallait, selon nous, une méthode précise. C'est pourquoi nous avons commencé par l'histoire de l'administration, puis continué par la classification des registres et la découverte des circuits, enfin terminé par l'analyse statistique systématique des sources dont nous disposions et qui pouvaient servir. Tout l'effort à ce niveau devait porter sur la rigueur. Qu'il en ressorte une certaine lassitude par trop de minutie, c'est ce que nous n'ignorons pas et que, sans le désirer, nous acceptons. L'histoire doit être une science, et non une forme de littérature. Encore ne faut-il pas s'y tromper. La sécheresse d'apparence dissimule, comme dans les autres sciences, la passion du chercheur qu'il est aisé de retrouver et qui préside au déroulement minutieux de la recherche. Mais enfin, quand celle-ci s'est achevée dans les cadres étroits où se meut toute étude scientifique qui se veut valable, la pensée inductive ne peut pas en rester là. Elle désire prendre son essor de façon à situer plus complètement son travail, trouvant du même coup, et un dépassement conjectural, et une source de relancement de la recherche. C'est pourquoi nous avions tenté dans le chapitre précédent un premier examen sommaire de l'évolution de la
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pensée imprimée française du x v n e au x x e siècle. Celle-ci nous a ouvert la porte de notre prochain travail : la production française des x i x e et x x e siècles. Pourtant, jusqu'à ce point, nous demeurions dans la perspective fondamentale de notre sujet quand même nous l'élargissions un peu. C'est alors qu'avant de l'achever complètement une dernière question nous vient à l'esprit : nous avons, à travers dix années d'efforts, cherché à connaître l'évolution de la pensée collective reproduite de la France. Nous avons découvert certains phénomènes, notamment des cycles et des mouvements divers. Quelle est donc la nature de cette compréhension que nous avons acquise, grâce à l'expérience ? Il nous semble que c'est la schématisation historique. La schématisation c'est la nature de la connaissance de l'histoire sociologisante. On peut considérer, dans une perspective collective, que toutes les interprétations du savoir historique sont valables et, dans une certaine mesure, c'est aussi notre point de vue. Selon que l'on considère le temps présent, proche passé, ou lointain, qu'on l'examine largement ou sur un point réduit, à la loupe exclusivement événementielle de l'histoire, ou presque mathématique de la philosophie, on prend une idée plus particulière de la connaissance historique. Pour nous, dans le cadre de l'histoire sociologisante, le savoir historique ne peut être autre que schématique. Cela suppose une certaine mentalité initiale. L'histoire, en tant que science de l'accident, bien qu'elle nous paraisse utile, ne nous semble pas devoir être une fin. Sans doute nous nous refusons vivement à la position déductive des métaphysiciens qui font des théories romanesques et qui s'ébattent dans les abstractions bien souvent simplistes, dont parfois le brillant jette de la poudre aux yeux et cache la réalité historique jamais ou rarement atteinte. Nous l'avons montré ailleurs 1 . Mais à l'inverse, la recherche du détail historique, considérée comme une fin en soi, nous paraît déboucher sur une perspective limitée. On peut vouloir s'y tenir et nous le concevons. Elle ne nous satisfait pas. C'est que la psychologie de l'histoire sociologisante suppose un besoin de connaissance de l'évolution humaine. Nous désirons savoir s'il existe un mécanisme naturel. Nous ne voulons pas l'inventer, et, dès lors, nous reprenons la grande ligne des historiens sociologisants qui se refusaient aux théories faciles. Notre besoin n'est pas d'imaginer le mécanisme. Il est seulement de le mettre à jour. Sans doute y a-t-il, en cela, comme une sorte
1. Voir L'avant-garde
culturelle
parisienne
depuis
1945,
Paris, éd. Le Prat, 1962.
SCHEMATISATION
HISTORIQUE
419
de foi que l'histoire n'est pas gratuite comme le pensent les historiens libéraux. Mais notre exigence rigoureuse est de fouiller la terre du temps pour en mettre à jour le trésor. C'est pourquoi l'accident, l'événement, nous paraît devoir être connu et c'est en ce sens que nous sommes historien. Mais la comparaison doit servir, ensuite, à démêler les liens qui dissimulent les régularités, et si celles-ci existent à les montrer, bref à dépasser l'histoire vers la sociologie. Pour ce faire, nous utilisons toutes les méthodes, aussi bien qualitatives que quantitatives. Mais, et qu'on veuille bien ici nous le pardonner, sans négliger jamais la première, nous croyons beaucoup dans la seconde. C'est là encore notre besoin d'histoire sociologisante qui nous conduit. L'historien qui n'est qu'historien se satisfait de la première. La contradiction des faits particuliers, individuels, lui permet de confirmer son opinion qu'il n'y a que l'accident dont on puisse en certains cas être sur. Puisque les faits se contredisent, point de régularité, et le doute est ainsi autorisé en même temps que la poésie de la description sensible. Aussi bien cette méthode, qui ne saurait être rejetée par l'historien sociologisant est-elle plutôt comme une sorte d'introduction ou de vérification des résultats de la seconde. C'est en ce sens qu'il faut sortir de la statistique. Avec celle-ci, enfin, nous atteignons les faits d'ensemble. Quand, au travers de la production des livres au x v m e siècle, nous avons, à partir de séries établies par des mains différentes, composé nos statistiques et que leurs comparaisons nous ont fait déceler une régularité, un cycle ayant en moyenne une vingtaine d'années, nous avons acquis une certitude expérimentale. Nous ne l'aurions pas obtenue avec autant de force avec la méthode qualitative. A chaque fait prouvant que nous avions bien un cycle, même s'il est dominant, on n'aurait pas manqué d'objecter le fait contraire. Aurait-on dit que tel et tel imprimeur d'après les textes paraissait augmenter sa production ? On aurait répondu tout aussitôt que le voisin la diminuait et que cette régularité n'était qu'une vue de l'esprit. Mais voilà que la statistique, que les séries de chiffres que nous ignorions, que nous avons laborieusement établis, et bien sûr sans grand amusement, comme un comptable, prouvent, par de nombreux exemples, le cycle avancé. La population globale des livres évolue pendant une certaine durée d'une manière cyclique. C'est un fait, et notre conviction, c'est la statistique qui, plus que la méthode qualitative, nous l'a donnée. Mais alors cette compréhension de l'histoire sociologisante, qu'est-elle donc sinon justement schématique ? Notre connaissance historique s'est en effet spacialisée. E t notre compréhension n'est devenue définitive qu'au moment où nous
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BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
sommes parvenu mentalement à une image géométrique. Le cycle, comme d'ailleurs l'absence de cycle, supposent une représentation intellectuelle géométrique : un schéma, c'est-à-dire une abstraction de la réalité, une figure simplifiée du réel, mais qui colle à lui. Ainsi la structure de la connaissance de l'histoire sociologisante s'établitelle entre la perspective sensible de l'historien, et celle mathématique soit des sciences de la nature qui peuvent déboucher sur l'équation, soit des philosophes de l'histoire, qui, n'étant en contact avec la réalité que du haut d'un belvédère, peuvent bien soumettre celle-ci à toutes les équations nées de leur imagination. L'histoire sociologisante ne relève ni de la littérature, ni de l'algèbre mais de la géométrie et peut-être même, jusqu'ici, de la géométrie plane. Une telle conception schématique, se justifie en soi, avant même de se justifier historiquement. Les psychologues de la forme, de la Gestalt-theorie, l'équipe de G. Dumas autrefois, de MM. Souriau et Matoré aujourd'hui, ont développé cette théorie. Goblot n'écrivaitil pas que « comprendre c'est schématiser » ? L'histoire de cette théorie n'avait-elle pas montré tout ce qu'elle devait à Kant et à Bergson ? Revault d'Allones n'avait-il pas dégagé les « lois de la schématisation » ? N'avait-il pas analysé la procédure mentale du phénomène de compréhension ? Sensation ; intervention de l'attention ; sélection produisant des phénomènes dits « d'effets » ; schèmes mentaux traduits dans le langage par des schémas, dont on sait l'importance qu'ils ont prise dans la pédagogie moderne ? Aussi bien, avant d'être une répétition asséchante de la connaissance acquise, aboutissant à une mutilation de la réalité comme c'est le cas en pédagogie, la schématisation est-elle la structure du phénomène de comprendre. Connaître c'est schématiser ; c'est, partant du foisonnement des faits concrets, abstraire, pour s'en faire une idée. Celle-ci n'est rien d'autre, comme tout schéma, qu'une image simplifiée du réel. E t cette simplification il ne faudrait pas croire que l'historien historisant y échappe. Que fait-il donc ? C'est encore de la réalité passée, à jamais disparue qu'il faut partir pour répondre. Cette vie d'hier, il est donc hors de question de jamais la reproduire. De celle-ci sont restés des documents que l'historien considère. Quel est alors celui d'entre ces savants qui, par intégrité, n'a pas voulu tout examiner dans les limites pourtant d'un étroit sujet, sorte de première schématisation ? Quel est celui d'entre eux qui n'a souvent été confondu par la masse, presque le tonnage, des textes à analyser ? Quel est celui enfin qui ne s'est pas dit, au terme de son étude, qu'un décalage existerait toujours entre les restes foisonnants et partiels de cette énorme réalité à jamais éteinte et la mince production qu'il avait rédigée ? E t ce décalage n'était-il autre chose que le produit de sa compréhension,
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HISTORIQUE
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et de sa schématisation ? Aussi bien la schématisation de l'histoire sociologisante ne s'établit-elle pas en opposition de principe à l'histoire historisante mais à un degré différent. L e schéma historique existe dans tous les cas, comme pour toute connaissance. Il est seulement ou plus sensible ou plus géométrique. Telle est, ou plutôt telle nous semble être cette compréhension de l'histoire que nous avons acquise au travers des recherches qui ont été présentées dans cet ouvrage. Avons-nous besoin d'ajouter pour conclure que si l'évolution de la pensée imprimée française du x i x e et du x x e siècle nous occupera en tant qu'historien sociologisant, nos travaux à venir auront comme obligation d'approfondir aussi ce qui n'a été ici présenté que sous la forme d'un court essai : la Schématisation Historique ?
BIBLIOGRAPHIE Cette bibliographie énumère les ouvrages qui ont principalement retenu notre attention et dont plusieurs nous ont été directement utiles. Elle a été établie, en ce qui concerne les ouvrages imprimés, d'après la description bibliographique des fiches de la Bibliothèque Nationale.
I. SOURCES
MANUSCRITES
A. D É P A R T E M E N T D E S M A N U S C R I T S D E I.A B I B L I O T H È Q U E
1. Du
Fonds
NATIONALE
Français
L'essentiel de nos sources manuscrites est conservé dans le Fonds Français. Les manuscrits ont été examinés un à un. Un grand nombre d'entre eux intervient dans notre travail où ils sont décrits. Aussi pour éviter les répétitions inutiles, quand il s'agit des grandes collections principales nous ne mentionnerons que leur titre. A. Archives de la Chambre Syndicale de la Librairie et Imprimerie de Paris aux XVII® et x v m e siècles. Mss. Fr. 21813-22060. B. Collection Anisson-Duperron sur la Librairie et l'Imprimerie. Mss. Fr. 22061-22193. C. Autres Manuscrits. — Du Fonds Français: Mss. Fr. 8131. Librairie de Paris. « Recueil chronologique des Lettres patentes, édits, déclarations, arrêts du Conseil et Cours supérieures, sentences et jugements souverains sur la Librairie et l'Imprimerie de Paris depuis 1275 jusqu'à présent, par Guillaume Saugrain libraire •— 1777 ». Mss. Fr. 13529... quelques règlements et édits sur la librairie fol. 557. Mss. Fr. 15648 fol. 125. Librairie. Mss. Fr. 16746 « ce que les presses d'imprimerie qui travaillent à présent dans Paris consomment de papier (1670) » Mss. Fr. 16753-54 Registres de permis d'imprimer (1635-1664) 1. Mss. Fr. 16753 (1635-51) 2. — 16754 (1653-64) Mss. Fr. 17343 Permissions d'imprimer... Ce registre est principalement consacré à la correspondance. Les permissions (f. 347-352) concernent janvier 1661 et avril 1660. Mss. Fr. 18780 ... Mémoire « pour remédier aux abus qui se commettent à l'imprimerie », f. 118.
424
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
La Collection formée par Nicolas Delamare sur l'Administration de la Police de Paris et de la France. Mss. Fr. 21545-21808. On trouve dans cette Collection douze registres sur la Librairie qui ont trait aux matières suivantes : CXCV (21739) livres en général CXCVI (21740) imprimeries CXCVII (21741) syndics et adjoints de la Librairie... CXCVIII (21742) libellés, pamphlets... CXCIX (21743) livres défendus. CC (21744) affaire de Fluteau... CCI (21745) ... CCII (21746) ... CCIII (21747) livre et imprimerie en général CCIV (21748) imprimerie librairie à Paris CCV (21749) colporteurs et afficheurs CCVI (21750) libellés, pamphlets... Mss. Fr. 22226-22236. Papiers de l'Abbé J . P. Bignon bibliothécaire du Roi, membre des Académies des Inscriptions et Belles Lettres et des Sciences (1718-1741). Mss. Fr. 24521. On trouve notamment : Fol 196... Minutes copies ou notes de Fanière pour ... son mémoire au sujet des livres imprimez par souscription, et son mémoire au sujet de l'imprimerie, librairie et gravure. Mss. Fr. 32585 ... Catalogue des « Livres imprimés à Paris chez Florentin Delaulne. » 18°, p. 102. — Nouvelles acquisitions du fonds français: Mss. Fr. 399-400 « Estât de la Librairie de France sous M. le Chancelier de Pontchartrain, composé des déclarations originales de tous les imprimeurs, libraires et relieurs des différentes villes du Royaume ; ... le tout recueilly et rédigé par messire Jean Paul Bignon, conseiller d'État ordinaire, chef du Bureau de la Librairie et Bibliothécaire du Roy». 1700. Mss. Fr. N. A. 1263. Catalogue de Libraire 15-16° Fol. 18-19. Mss. Fr. N. A 2490. « Extraits des registres de la Communauté des marchands Libraires, contenant les livres imprimés avec privilèges du Roy depuis le mois de nov. 1663 » jusqu'en août 1703, pour « La recherche de tous les livres qui estaient deus à la Bib. du Roy » par Clement. Mss. Fr. 2801. « Etats de livres, ou extraits des registres du Bureau de la Librairie ». (1723-1724). Mss. Fr. 3546. Recueil de documents sur l'histoire de la Librairie.... «Arrêts et mémoires concernant les exemplaires des livres imprimés ou gravés que l'on est tenu de fournir à la Bibliothèque du Roi ». Mss. Fr. N. A 5533 ... Chambre Syndicale de la Librairie. Mss. Fr. N. A 5761. Catalogue des volumes Registres et cartons remis aux conservateurs des Manuscrits de la Bibliothèque Nationale, par le citoyen Camus Garde des Archives Nationales le 12 Germinal an neuf de la République. 2. Des
Archives
du Déparlement
des
Manuscrits
a. Archives pour la période de l'Ancien Régime Les registres suivants nous ont été directement utiles : Archives 8, 9, 12, 14, 34, 35, 36. b. Archives de la période révolutionnaire
425
BIBLIOGRAPHIE
Outre les Archives du Département pour cette période, on relève plusieurs registres contenant des pièces diverses sur la Librairie et surtout les 16 registres du Dépôt Légal révolutionnaire qui ont servi au sondage effectué sur l'évolution générale de la production des livres du xvn® au xx e siècle. B.
ARCHIVES
DE
LA R É G I E D U
DÉPÔT
LÉGAL
Il existait dans les Archives de la Régie, deux registres concernant la fin du Dépôt Légal de l'Ancien Régime (v. page 15). C. B I B L I O T H È Q U E
HISTORIQUE
DE
LA V I L L E
DE
PARIS
On trouve à la Bibliothèque de la Ville de Paris dix cartons cotés 10414 qui concernent la Librairie de l'Ancien Régime. Ils constituent une partie des Archives de l'ancienne Chambre Syndicale des Libraires. On distingue notamment diverses pièces intéressantes : 1 e r Carton — Compte-rendu des Syndic et Adjoints sortants. 2 e Carton — Parmi des règlements imprimés divers projets manuscrits. 3 e Carton — Police des livres vers 1785, interdictions d'imprimer certains ouvrages... 4° Carton — Papetiers, encyclopédie... 5 e Carton — Apprentis, inventaires des dossiers de la Communauté des Libraires conservés dans cette collection, merciers, compagnons. 6 e Carton — Opposition entre la Librairie de province et de Paris. Réception des libraires. 7 e Carton — Continuation des privilèges. 8 e Carton — Privilèges, pièces diverses. 9 e Carton — Contrefaçons. 10e Carton — Vente de fonds. D. BIBLIOTHÈQUE
DE
LA
SORBONNE
Le Catalogue général des Manuscrits des Bibliothèques publiques en France, Université de Paris et des Départements renseigne sur une partie des Archives de l'ancienne Université de Paris concernant la Librairie. On trouve notamment aux Archives de l'Université de Paris, p. 106 : « État des cartons et registres composant les Archives de l'Ancienne Université de Paris, retirés du Ministère de l'Instruction publique le 1 e r février 1865 et déposés le même jour à la Bibliothèque de l'Université impériale de France... Conformément à l'Arrêté de M. le Ministre de l'Instruction publique en date du 15 décembre de l'année 1864. » On distingue : Carton 7, p. 354 du Catalogue « Défences... d'imprimer ou vendre des livres contraires à la dicte religion... » Carton 11. (13) 4 dossiers, 104 pièces relatives aux Libraires imprimeurs soumis à la juridiction de l'Université classés par ordre chronologique. A. x n e siècle. 10 pièces papier et parchemin imprimés et manuscrit. B. xvi e -xvn e siècles. Règlements de 1649-57. C. xvn 0 siècle, après 1649, 12 pièces parchemin. D. X V I I I « siècle. 25 pièces, la plupart imprimées. Le n° 8 manuscrit sur parchemin avec grand sceau de cire jaune. Carton 15. Affaires diverses de l'Université en général. Le douzième dossier comprend des approbations, censures d'ouvrages, nouveaux discours.
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LA STATISTIQUE E.
BIBLIOTHÈQUE
DU
BIBLIOGRAPHIQUE CERCLE
DE
LA
DE LA FRANCE
LIBRAIRIE
On trouve dans cette bibliothèque parmi diverses pièces concernant la Librairie un fascicule de la Bibliographie Française et Latine de Paris. F. ARCHIVES
NATIONAi.ES
Série AD (Section administrative) Bibliothèque administrative-Collection Rondonneau. AD VIII Instruction Publique, Partie antérieure à 1789. AD VIII 4, 5, 6, 7 — 1535-1629 , 1630-1699 ; 1700-1750 ; 1751-1789. Imprimerie Librairie Règlements généraux. AD VIII 8, 9, XVII, x v m e siècle. Série E (Section administrative) Conseil du Roi. I Minutes du Conseil — Collection formée par les secrétaires du Conseil. E l - 1683 — Minutes d'arrêts rangées dans l'ordre chronologique 1593-1791. E 168 n ° 3 — Arrêt du Conseil d'État (1642). E 287c n° 422 — Arrêt du Conseil d'État révoquant les privilèges des livres qui n'ont pas été déposés (1656). E 294 fol. 208 — Arrêt du Conseil d'État révoquant les privilèges des livres qui n'auront pas été déposés avant quinzaine (1646). — Collection formée par les secrétaires d'État. E 1684-2661 •— Minutes d'arrêt en commandement, réparties en plusieurs séries qui correspondent aux divers départements des secrétaires d'État... 1611-1791. E 708 n° 128 — Arrêt du Conseil d'État (1658). Série M M. 69, 71, 73 Censures de la Faculté de Théologie xvi e -xvm e siècles. M. 70. Privilèges des Libraires, imprimeurs et relieurs de l'Université 1513-1650. Série V (Section judiciaire) Grande Chancellerie, Prévoté et Requêtes de l'Hôtel et Conseil. VI Lettres en secondes minutes de provision d'office, contrôle des Gardes-Minutes, Lettres Patentes diverses. VI 459-553 Affaires de Librairie. 1789-1790. Série X (Section judiciaire) Parlement de Paris, Requêtes du Palais, Chancellerie du Palais ou Petite Chancellerie, Communauté des Procureurs au Parlement. X 1/a : Parlement Civil, Registres X 1/a 5034-8282 : Plaidoiries 1571-1774 X 1/a 5349 : Arrêt du Parlement de Paris. G. A R C H I V E S
COMMUNALES
Archives communales d'Albi Série H H (Agriculture : industrie ; commerce).
427
BIBLIOGRAPHIE
II. SOURCES A.
IMPRIMÉES
SOCIOLOGIE
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LA STATISTIQUE
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BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
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STATISTIQUE
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BIBLIOGRAPHIE
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C. A P P L I C A T I O N S
DIVERSES DE
LA
STATISTIQUE
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D.
SOCIOLOGIE
ÉCONOMIQUE
ET
STATISTIQUE
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430
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
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SOCIOLOGIE
ET STATISTIQUE
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POTTINGER
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432
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
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B I B L I O G R A P H I E S I M P R I M É E S D E LA F R A N C E D E S X V I I E E T X V I I I E
Bibliographies I. Bibliographies française).
générales exhaustives
générales, exhaustives,
SIÈCLES
courantes et privées
universelles
(contenant
une partie
— Annales Typographiques ou notice du progrès des connaissances humaines... - Paris, Vincent, 1757-1763 - In-4°, puis In-8°. — La Bibliothèque annuelle et universelle - Paris, Lambert, 1748-1750. — Catalogue hebdomadaire ou liste des livres, estampes, cartes, ordonnances... Êdits, déclarations, arrêtés, qui sont mis en vente chaque semaine, tant en France qu'en pays étrangers; l'indication des volumes, du nombre et de la grandeur dont ils sont formés; les noms des auteurs, la nature du papier et du caractère, etc. que l'on a employés, et les adresses des libraires ou auteurs qui les vendent. - 1763-1781 (I-XIX) devenu : Journal de la Librairie ou Catalogue Hebdomadaire contenant par ordre alphabétique les livres tant nationaux qu'étrangers... 1782-1789 ( X X - X X V I I ) Paris, imp. de Ph. D. Pierres (1763) - In-8°. — Le cours de bibliographie ou nouvelle production des sciences des arts et des métiers - Paris, 1788 - In-8° II. Bibliographies
générales, exhaustives,
courantes et privées de la France.
— Almanach Bibliographique pour l'année 1709 contenant le catalogue des livres imprimés dans ce royaume pendant l'année 1707; les titres des Êdits et Déclarations du Roy de la mesme année ; les archevêchez et evêchez de France avec le temps de leur création, et les noms et qualilez de ceux qui les possèdent. Un calendrier des saints dont on célèbre les festes en France, et le temps de leur mort; les Phases de la Lune, etc. - A Paris, chez Charles Huguier, rue de la Huchette, à la Sagesse, 1709 - In-12°. — La Bibliographie Française et Latine de Paris... - Paris, Langlois, 1678 In-8° - Bibliothèque du Cercle de la Librairie n° 1551. — Bibliographia Gallica Universalis hoc est Catalogus omnium librorum per universum regnum galliae... exusorum (per) R. P. Ludovicum Jacob Cabilonensis Carmelitae 1643-1653 - Parisiis - In-4°. — Bibliographia Parisana (sic) hoc est Catalogus omnium librorum Parisiis. inclusive excusorum (per) R. P. Ludovicum Jacob Cabilonensi Carmelitae - 1643-1650 - Parisiis - In-4°. III. Bibliographie
générale, exhaustive,
courante et officielle de la
France.
— Journal de Paris - Paris, 1777-sept 1811 - In 4° (suspendu du 23 au 28 janvier 1777, du 4 au 27 juin 1785, du 23 août au 30 sept. 1792).
BIBLIOGRAPHIE IV. Bibliographie
433
générale, exhaustive, courante et privée
parisienne.
— La Bibliographie Parisienne ou Catalogue d'ouvrages de sciences de littérature... imprimés ou vendus à Paris, 1770, (I-VI), Paris - In-8°. V. Bibliographies
générales, exhaustives rétrospectives et privées de la France.
— La France Littéraire contenant : I. Les Académies établies à Paris et dans les différentes villes du royaume. II. Les auteurs vivants avec la liste de leurs ouvrages. III. Les auteurs morts depuis Vannée 1751 inclusivement avec la liste de leurs ouvrages. IV. Le catalogue alphabétique des ouvrages de tous les auteurs - Paris, Vve Duchesne, 1769 - 20 vol. In-8°. (Nouvelle édition entièrement refondue de : La France Littéraire ou almanach des beaux arts...; complétée par 2 suppléments : Supplément à la France Littéraire... et Nouveau supplément à la France Littéraire. — Les Siècles Littéraires de la France (Desessarts. L.M) ou Nouveau Dictionnaire Historique critique et bibliographique de tous les écrivains français morts et vivons jusqu'à la fin du XVIIIe siècle - Paris, l'auteur, an V I I I (1800) - an X I (1803) - 7 vol., In-8°). VI. Bibliographie universelle.
générale,
exhaustive,
sélective,
courante,
privée
et
Parmi d'autres on notera : — La Clef du Cabinet des princes de l'Europe, éd. André Chevalier 17171773 (XXVI-CXXXVIII), Luxembourg, In-8° (rédigé par A. CHEVALIER après sa rupture avec Cl. JORDAN qui fait paraître à Paris : Suite de la Clef ou Journal historique sur les matières du tems. La Clef du Cabinet des princes de l'Europe... juillet 1709 - déc. 1706 (I-V). — La Clef du Cabinet des Princes de l'Europe ou recueil historique sur les matières du tems... 1707-1716 (VI-XXV) devenu : 1° Suite de la Clef ou Journal historique sur les matières du tems 17171776 (I-CXX) ; 2" La Clef du Cabinet des princes de l'Europe, 1717-1773 (XXVICXXXVII) qui devient : Journal Historique et littéraire... 1773-1788 (CXXXIX-CLXXIX) 1789-1794. Tables : 1697-1756 (I-IX). — La Clef du Cabinet des Princes de l'Europe ou Recueil historique alphabétique sur les matières du tems (par Claude JORDAN), juil. 1704-1706, I-V) - Luxembourg, In-8° (Tables : 1697-1756). En 1713 Jordan fait paraître un ouvrage intitulé : Supplément de la Clef ou Journal historique sur les matières du tems... depuis la Paix de Riswick (1697-1703). VII. Bibliographie générale sélective courante officielle et universelle. — Journal des Savants par... de HEDOUVILLE... 1665-juil. 1792 (6 niv.30 prai. an V (5 janv. 1797) (n°» 1-12) - Paris 4° et 8 (Tables : 1665-1750...) (n'a pas paru en 1673) (Pour le supplément voir : Supplément aux Journaux des scavans et de Trévoux on Lettres critiques... (de 1724 à 1790 en même temps que l'ed. In-4° a paru une ed. In-12) (d'autres éd. ei contrefaçons ont paru à Cologne, Bruxelles, Amsterdam, de 1665 à 1789), l'éd. d'Amsterdam étant de 1754 à 1763 (I-LXXIX), combiné avec les Mémoires de Trévoux (une éd. en latin a paru à Leipzig et à Francfort sous le titre de : Journal des Sçavans et Ephemerides eruditorum).
434
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
Bibliographies
DE LA
FRANCE
spécialisées
V I I I . Bibliographies spécialisées, exhaustives, rétrospectives et privées de la France (en fonction du critère géo-politique). europaisches Bücher Lexicon in welchem nach Ordnung — Allgemeines des Dictionarii die allermeinslens autores oder Gattungen von Büchern zu finden, welche sowohl von denen palribus theologis... als auch von denen Juris-Consullis, medicis, physicis... noch vor dem anfange des XVI seculi bis 1739 inclusive... und also in mehr als zwey hundert jähren in dem europäischen Theile der weit, sonderlich aber in Teutschland sind geschrieben und gedrucket worden... Georgi (Theophilus) T H - I - V sup. I - I I I Leipzig, Georgi, 1742-1758 - 8 vol. F°. — La France Littéraire de HÉBRAIL (J. d') et LA PORTE (J. de) - Paris, V v e Duchesne, 1769, 2 vol., In-8°. — La France Littéraire de QUÉRARD (Jos.-Marie) ou Dictionnaire bibliographique des savants historiens et gens de Lettres en France ainsi que des littérateurs étrangers qui ont écrit en français plus particulièrement pendant les XVIIIe et XIXe siècles. Ouvrage dans lequel on a inséré afin d'en former une bibliographie nationale complète, l'indication : 1° des réimpressions des ouvrages français de tous les âges; 2° des diverses traductions en notre langue de tous les auteurs étrangers anciens et modernes; 3° des réimpressions faites en France des ouvrages originaux de ces mêmes auteurs étrangers pendant celle époque. - F. Didot, 1827-39 - 10 vol., In-8°, t. X I - X I I : corrections additions auteurs pseudonymes et anonymes dévoilés - 1854-1864, 2 vol., 708 et 752 p. ; s'arrêtent à Rog.
H.
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436
LA STATISTIQUE
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242. 14.
P
.
p.
20,
152,
180. 242
164,
et 178,
INDEX
443
P A S C A L , p . 1. PAULMY, p. 90. P H E L Y P E A U X (Chancelier), p. 81. PIATIER, p. 18, 2 2 0 , 2 2 2 , 4 0 9 . PIERRES, p. 172. P I G E T (Siméon), p. 152. POLIGNAC, p. 90. POMPADOUR, p. 2 4 2 . PONTCHARTRAIN (de), p. 5 8 , 191. P R A D E S (Abbé), p. 243. PRINCESSE PALATINE, p. 242.
Pucelle (La), p. 106, 242. QUÉRARD, p. 159,
199, 2 0 8
160 et sq.,
et sq., 3 6 2 .
165,
Réforme, p. 25. RÉGENT, p. 242. REVAULT D'ALLONES, p. 420. RIBALLIER, p. 92. RICHARD, p. 92. ROQUE, p. 191 e t sq. R O U F I E R (Abbé), p. 9 9 . ROUILLÉ, p. 48, 241. ROUSSEAU, p. 244. ROUSSELET, p. 90.
Roux, p. 169. RozÉ D E L ' É P I N A Y , p. 1 2 3 .
S A L L O (Denis de), p. 1 9 0 , 1 9 1 . SANSOVINO, p. 18. SARTINE (de), p. 4 8 , 4 9 , 5 4 , 8 3 , 9 2 ,
119, 242.
SAUVIGNY (de), p. SAUVY, p. 219.
123.
SECOUSSE, p. 90. SÉGUIER, p. 38. SEIGNOBOS, p. 8 0 . SILHOUETTE, p. 90. SIMIAND, p. 2, 18, 2 1 5 ,
220, 410
et sq.
218,
219,
SLOTSKY, p. 2 2 3 . SOROKIN, p. 8, 18, 2 1 5 . SOURIAU, p. 420. TAPIN, p. 60. THIBAUDET, p. 20. THOMAS, p. 158. TOUSSAINT, p. 2 4 3 . TRÉNARD, p. 20. TURCOT, p. 4 9 e t sq.,
242.
Université de Cologne, p. 25. V I D A U D D E LA T O U R , p . 4 9 , 1 2 5 . V I L L E D E U I L (Laurens de), p. 4 9 ,
125. VINCENT, p.
169.
VOLTAIRE, p. 108,
243.
WARROQUIER, p. 91,
122.
ZOLTOWSKI, p. 1, 2 , 8 , 1 8 , 2 1 7 , 2 2 2 ,
411.
15—1
TABLE DES TABLEAUX ET DES PLANCHES
I. TABLEAUX
DES BIBLIOGRAPHIES
ET
REGISTRES
BIBLIOGRAPHIQUES
Pages — Circuit administratif des Privilèges et Permissions du Sceau....
79
— Circuit administratif des Permissions Tacites
109
— Circuit administratif de la Police des livres
133
— Circuit administratif du Dépôt Légal.
149
— Tableau des Bibliographies imprimées de la France pour les x v i i e et x v m e siècles
159
II.
PLANCHES
I. Diagramme des Privilèges el Permissions du Sceau (demandes ; autorisations ; jugements ; enregistrements à la Chambre Syndicale ; censure — demandes moins autorisations ; censure — demandes moins jugements) 230-231 — Statistiques des Registres de Privilèges et Permissions du Sceau (demandes ; autorisations ; demandes non autorisées) 247-248 — Statistique des Privilèges et Permissions du Sceau accordés par jugements
248
— Statistique des Permissions d'imprimer
248
— Statistique des Privilèges et Permissions du Sceau enregistrés à la Chambre Syndicale des Libraires
249
I I . Diagramme des Privilèges non enregistrés à la Chambre Syndicale des Libraires (autorisations non enregistrées ; jugements non enregistrés)
251
446
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
— Statistiques des demandes non acceptées par jugements ; du supplément de Privilèges jugés par rapport aux autorisations ; des jugements non enregistrés à la Chambre des Libraires
259
•—• Statistique des Privilèges et Permissions du Sceau demandés, octroyés et non enregistrés à la Chambre Syndicale
260
III. Diagramme des Privilèges et livres de Privilèges autorisations ; censure)
(demandes ; 263
IV. Diagramme des livres de Privilèges en supplément des Privilèges (demandes ; autorisations ; censure)
265
— Statistique des livres de Privilèges dont le titre est précisé 268-269 — Privilèges et Permissions du Sceau. Résultats de l'analyse statistique des données globales des séries naturelles. l r e Partie
271
— Privilèges et Permissions du Sceau. Résultats de l'analyse statistique des données globales des séries naturelles. 2 e Partie
272
— Privilèges et Permissions du Sceau. Résultats de l'analyse statistique des données globales des séries déduites 273-274 V. Diagramme des Permissions Tacites (demandes ; autorisations ; autorisations par feuilles ; enregistrements ; censure — demandes moins autorisations — demandes moins jugements) 278 — Statistique des Permissions Tacites. l r e Partie
287
e
— Statistique des Permissions Tacites. 2 Partie
288
— Permissions Tacites. Résultats de l'analyse statistique des données globales des séries naturelles. l r e Partie
290
— Permissions Tacites. Résultats de l'analyse statistique des données globales des séries déduites
291
VI. Diagramme des Privilèges et Permissions Taciles (demandes de Privilèges ; demandes de Permissions Tacites)
2%
VI bis. Diagramme des Privilèges et Permissions Tacites (censure des Privilèges ; censure des Permissions Tacites)
297
VII. Diagramme des Permissions Permissions Tacites)
303
d'imprimer
(Privilèges
plus
VIII. Diagramme des jugements en supplément des autorisations (Privilèges ; Permissions Tacites ; Permissions d'imprimer)
306
447
TABLES DES TABLEAUX ET DES PLANCHES — Statistique des Permissions d'imprimer (Privilèges plus Permissions Tacites). l r e Partie
308
— Statistique des Permissions d'imprimer (Privilèges plus Permissions Tacites). 2 e Partie
309
— Étude comparée des statistiques de Privilèges et Permissions du Sceau et de Permissions Tacites 310-311 — Permissions d'imprimer. Résultats de l'analyse statistique des données globales 311-312 I X . Diagramme des livres arrêtés dans les visites. Livres arrêtés ; livres non rendus par rapport aux livres arrêtés
318
I X bis. Diagramme des livres arrêtés dans les visites (livres arrêtés et rendus ; livres arrêtés et non rendus)
319
X . Diagramme des statistiques des livres suspendus (Livres suspendus ; permis et rendus ; rayés ; entrés par la Chambre et ayant reçu une permission)
324
X I . Diagramme des livres arrêtés dans les visites et livres (nouveautés ; contrefaçons ; prohibés ; mis au pilon)
326
suspendus
— Statistiques des livres suspendus
329
— Statistique du Journal d'Hémery
329
— Statistiques des livres arrêtés dans les visites (arrêtés, rendus, non rendus) 330-331 — Statistiques des livres arrêtés dans les visites (non rendus par rapport aux livres arrêtés ; prohibés, contrefaits, nouveautés, mis au pilon) 331-332 — Statistique des livres entrés par la Chambre ayant reçu une permission
332
— Police des livres imprimés. Résultats de l'analyse des données globales. 1™ Partie 333-334-335 X I I . Diagramme de la production déposée aux XVIIe et XVIIIe siècles (Chambre Syndicale des Libraires ; Cabinet du Roi ; Garde des Sceaux ; Bibliothèque du Roi — titres ; Bibliothèque du Roi — volumes ; livres imprimés par Privilèges)
340
X I I I . Diagramme de la production déposée du X VIe au XXe siècle. 346-347 X I V . Diagramme de la production non déposée (ouvrages non déposés — livres imprimés par Privilèges moins Dépôt Légal Chambre Syndicale ; ouvrages non déposés — livres imprimés par Privilèges moins Dépôt Légal à la Bibliothèque du Roi)
351
448
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
X V . Diagramme des productions déposées el non déposées (Dépôt Légal — Bibliothèque du Roi ; réclamations ; livres déposés plus réclamations ; réclamations par rapport aux livres déposés)....
353
— Statistiques du Dépôt Légal, pour la Chambre Syndicale des Libraires, pour le Cabinet du Roi, pour le Chancelier...
355
— Statistique du Dépôt Légal pour la Bibliothèque du Roi
356
— Statistique du Dépôt Légal (ouvrages non déposés). Partie
lre 357
— Statistique du Dépôt Légal. 2 e Partie
358
— Dépôt Légal. Résultats de l'analyse statistique des données globales. l r e Partie
359
— Dépôt Légal. Résultats de l'analyse statistique des données globales. 2 e Partie
360
— Statistique bibliographique de la Hebdomadaire Journal de la Librairie
366
France
du Catalogue
X V I . Diagramme des livres mis en vente (production générale) (Bibliographia Galtica Universalis et Bibliographia Parisana; Bibliographie annuelle et universelle; Annales Typographiques ; Catalogue Hebdomadaire — Livres de Privilèges ; production générale sans les arrêts ; avec les arrêts)
369
X V I I . Diagramme de la série des livres imprimés mis en vente annoncés dans le Catalogue Hebdomadaire (cartes ; arrêts ; musique ; estampes)
370
X V I I I . Diagramme de la production générale (Dépôt Légal ; contrefaçons et livres prohibés ; Catalogue Hebdomadaire, contrefaçons et livres prohibés)
384
X I X et X I X bis. Diagrammes de Concordance tendancielle (16361715). — Dépôt Légal -— Chambre Syndicale des Libraires ; Permis d'imprimer ; Bibliographia Gallica Universalis et Bibliographia Parisana; Privilèges — enregistrement à la Chambre Syndicale ; Dépôt Légal — Bibliothèque du Roi ; Privilèges — autorisations 386-387 X X . Diagramme
de Concordance tendancielle
(1748-1788).
1. Bibliographie annuelle et universelle. 2. Dépôt Légal, Bibliothèque du Roi. 3. Permissions d'imprimer Permissions Tacites).
(autorisations ;
Privilèges
plus
TABLES DES TABLEAUX ET DES PLANCHES
449
Journal d'Hémery. Annales Typographiques. Catalogue Hebdomadaire. Permissions d'imprimer (Privilèges plus Permissions Tacites, feuilles). 8. Permissions ( P . + P . T . , feuilles) + livres entrés par la Chambre. 9. Permissions d'imprimer (demandes non accordées) . 10. Livres suspendus (production générale). 11. Nouveautés (livres suspendus). 12. Livres entrés par la Chambre. 13. Livres prohibés. 14. Livres contrefaits. 4. 5. 6. 7.
15. Livres rayés (livres suspendus — détail)
373
X X I . Diagramme de l'élude comparée des Permissions d'imprimer et du Dépôt Légal. Concordance tendancielle (1724-1787). (Permissions d'imprimer — autorisations — ; Dépôt Légal — Bibliothèque du Roi)
393
X X I I . Diagramme de la concordance cyclique (production générale) (Dépôt Légal — Bibl. du Roi, M. M. II ; Dépôt Légal —Chambre Syndicale — M. M. II)
399
X X I I I . Diagramme de la concordance tendancielle de la Censure avant et après l'impression (Demandes de Privilèges refusées—M. M. 7 ; livres arrêtés dans la visite et non rendus par rapport aux livres arrêtés — M. M. 7 ; Permissions d'imprimer refusées — par rapport aux Permissions d'imprimer demandées — M. M. 7 ) . . .
404
— Statistique de la totalité des Permissions délivrées par le Pouvoir Royal
404
— Statistique de la production générale des livres imprimés t a n t réglementaires qu'interdits
405
— Statistiques du Dépôt Légal de la Période Révolutionnaire et de la Bibliographie de la France (livres)
415
TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION
1
L E S SOURCES
11
I. Les sources manuscrites A. Le Département des manuscrits de la Bibliothèque Nationale B. La Régie du Dépôt Légal C. La Bibliothèque Historique de la Ville de Paris D. Les Bibliothèques de la Sorbonne et de la Faculté de Médecine E. La Bibliothèque du Cercle de la Librairie F. Les Archives Nationales G. Les Archives départementales et communales II. Les sources imprimées A. Ouvrages de sociologie B. Ouvrages sur la statistique C. Les ouvrages sur la Bibliographie D. Les ouvrages sur la librairie E. Ouvrages sur l'histoire de la littérature en France aux xvn« et x v m e siècles Livre
LES
13 15 15 16 16 16 17 17 17 18 18 19 20
I
BIBLIOGRAPHIES lre
13
DE
LA
FRANGE
Partie
LES BIBLIOGRAPHIES MANUSCRITES Chapitre
I.
L'ADMINISTRATION LÉGAL
DE
LA
CENSURE
ET
DU
DÉPÔT 25
452
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE I. L'autorisation d'imprimer
28
A. Le pouvoir religieux
28
B . Le pouvoir civil
32
C. Le pouvoir judiciaire
53
II. La Police des livres
56
I I I . Le Dépôt Légal
61
L E S REGISTRES BIBLIOGRAPHIQUES DE L'ADMINISTRATION DE LA C E N S U R E E T DU D É P Ô T
Chapitre II.
LÉGAL.
LES
CIRCUITS DE L'ADMINISTRATION DE LA
CENSURE
E T DU D É P Ô T L É G A L
65
Généralités
65
Le département des manuscrits
66
A. La Bibliothèque Nationale
66
1. Les Archives de la Chambre Syndicale et royale des libraires de Paris 2. La Collection Anisson-Duperron
66 67
3. Les Archives du département des manuscrits de la Bibliothèque Nationale
68
4. Divers
68
B. La Régie du Dépôt Légal
68
C. Les autres séries d'Archives
68
1. Le pouvoir religieux
LES
69
2. Le pouvoir civil
69
3. Le pouvoir judiciaire
69
REGISTRES
PERMISSIONS
Chapitre III.
BIBLIOGRAPHIQUES
DES
CIRCUITS
ADMINISTRATIFS
DES
D'IMPRIMER. L E S REGISTRES DE P R I V I L È G E S E T PERMISSIONS
DU
SCEAU
I. Introduction II. Les registres de demandes et d'octrois de Privilèges et Permissions du Sceau
75
75 80
I I I . Les répertoires des registres de demandes et d'octrois de Privilèges et Permissions du Sceau IV. Les registres de rapports des censeurs V. Les registres de feuilles de jugements 1. Les registres de feuilles de jugements 2. Les feuilles de jugements
85 88 90 93 94
453
TABLE DES MATIÈRES 3. Le registre de feuilles du Sceau
94
4. Le registre des Privilèges derniers et définitifs
94
V I . Les registres d'enregistrement des Privilèges et Permissions du Sceau à la Chambre Syndicale des Libraires V I I . Les registres de Permissions d'imprimer
95 103
V I I I . Conclusions sur l'étude des registres de Privilèges et Permissions du Sceau
105
L E S REGISTRES DE PERMISSIONS T A C I T E S
107
Chapitre
IV.
I. Introduction II. Les registres de demandes et d'octrois de Tacites
107 Permissions 110
A. La série des registres de demandes de Permissions Tacites intitulés « registres de livres d'impression étrangère »
112
B. La série des manuscrits intitulés « registres de Permissions Tacites »
114
I I I . Les répertoires des registres de demandes et d'octrois de Permissions Tacites
115
IV. Les registres de feuilles de Permissions Tacites
117
A. Les registres de feuilles de Permissions Tacites
117
B. Les feuilles de Permissions Tacites
119
V. Les registres d'enregistrement des Permissions Tacites à la Chambre Syndicale des Libraires Chapitre
V.
L E S REGISTRES DE T R A V A U X DE L A DIRECTION DE
119
LA
LIBRAIRIE
121
A . La série des registres de travaux (entrées)
123
B. La série des registres de travaux (sorties)
124
Chapitre
VI.
L E S REGISTRES BIBLIOGRAPHIQUES DU CIRCUIT A D M I N I S T R A T I F DE L A POLICE DES LIVRES IMPRIMÉS
127
1. La série des registres d'enregistrement des ballots provenant de la douane
134
2. Le Journal d'Hémery
135
3. Le Ms. Fr. 22019
136
4. Le Ms. Fr. 21832
137
5. La série des registres de livres arrêtés dans les visites
137
6. Le Ms. Fr. 21935
138
7. La série des registres des livres prohibés
139
8. Le Ms. Fr. 21927
139
454
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE
Chapitre VII.
L E S REGISTRES BIBLIOGRAPHIQUES ADMINISTRATIFS DU DÉPÔT LÉGAL
DES
CIRCUITS 141
A. La Bibliothèque du Roi 1. La série des registres d'entrées 2. Les registres de répartition des ouvrages déposés
145 145 145
B. Le Cabinet du Roi
145
C. La Chambre Syndicale 1. L'enregistrement à la Chambre Syndicale du Dépôt délivré pour la Bibliothèque du Roi 2. Les feuilles de relevés des registres de la Chambre Syndicale 3. Le registre d'entrées du Dépôt Légal à la Bibliothèque du Roi 4. Les registres de certificats 5. Les registres du département enregistrant le D é p ô t . . . . D. Le Ms. Fr. 2490
146 147 147 148 150 150 151
2e Partie LES BIBLIOGRAPHIES IMPRIMÉES Généralités
157
La Bibliothèque annuelle et universelle Les Annales Typographiques Le Catalogue Hebdomadaire. Journal de la Librairie Le Cours de bibliographie La Bibliographia Parisana et la Bibliographia Gallica Universalis.. L'Almanach bibliographique La Bibliographie française et latine de Paris Le Journal de Paris La Bibliographie parisienne Le Journal des Savants La Clef du Cabinet des Princes de l'Europe Buchhändlers La France Littéraire de J. d'Hébrail et J. de La Porte La France Littéraire de Ersch Les Siècles Littéraires de la France
166 169 171 174 176 180 182 184 187 189 195 199 200 206 207
La France Littéraire de Quérard
209
TABLE DES
455
MATIÈRES
Livre
LA
STATISTIQUE DE LA
11
BIBLIOGRAPHIQUE FRANCE
Introduction
213
Chapitre I. L A
STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE D E S P R I V I L È G E S
ET
PERMISSIONS DU SCEAU
I. Introduction
227
227
II. La statistique bibliographique des registres de demandes et d'octrois de Privilèges et Permissions du Sceau 228 A. Le dépouillement 228 B. Analyse statistique 230 III. La statistique bibliographique des registres de feuilles de jugements 233 A. Le dépouillement 233 B. L'analyse statistique 234 IV. La statistique bibliographique des registres d'enregistrement des Privilèges et Permissions du Sceau à la Chambre Syndicale des Libraires 234 A. Le dépouillement 234 B. Analyse statistique 236 V. La statistique bibliographique des registres de Permis d'imprimer A. Le dépouillement B. Analyse statistique des Permis d'imprimer C. Étude comparée des statistiques de Permis d'imprimer et des Privilèges enregistrés à la Chambre Syndicale
237 237 237 238
VI. La censure des demandes de Privilèges et Permissions du Sceau 238 A. Introduction 238 B. La censure des demandes de Privilèges et Permissions du Sceau, d'après les statistiques bibliographiques des registres de demandes et d'octrois de Privilèges et Permissions 239 C. La censure des demandes de privilèges et permissions du Sceau d'après les statistiques bibliographiques des registres de demandes et d'octrois de Privilèges et Permissions d'une part, des registres de feuilles de jugement d'autre part 244
456
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA
FRANCE
VII. L'enregistrement des jugements sur les registres de demandes et d'octrois de Privilèges et Permissions du Sceau VIII. L'enregistrement des Privilèges et Permissions du Sceau à la Chambre Syndicale des Libraires A. Introduction B. Étude comparée des statistiques de demandes de Privilèges et Permissions du Sceau, d'autorisations d'enregistrements et d'autorisations non enregistrées à la Chambre Syndicale C. Étude comparée des statistiques d'autorisations de Privilèges et Permissions du Sceau, de jugements, d'enregistrements, d'autorisations et de jugements non enregistrés à la Chambre Syndicale IX. Le contenu des Privilèges et Permissions du Sceau A. Introduction B. Étude descriptive C. Étude statistique X. Conclusions sur l'étude statistique des Registres de Privilèges et Permissions du Sceau Chapitre
I I . LA
STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DES
250 252 252
253
257 261 261 261 264 269
PERMISSIONS
TACITES
I. Introduction II. La statistique bibliographique des registres de demandes et d'octrois de Permissions Tacites A. Le dépouillement B. Analyse statistique III. La statistique bibliographique des registres de feuilles de Permissions Tacites A. Dépouillement B. Analyse statistique IV. La statistique bibliographique des registres d'enregistrement des Permissions Tacites à la Chambre Syndicale des Libraires A. Le dépouillement B. Analyse statistique
273
275 276 276 277 281 281 281 281 281 282
V. La censure des demandes de Permissions Tacites 282 A. Introduction 283 B. La censure des Permissions Tacites, d'après les statistiques bibliographiques des registres de demandes et d'octrois de Permissions Tacites 283
TABLE DES MATIÈRES
457
G. La censure des Permissions Tacites d'après les statistiques bibliographiques des registres de demandes et des registres de feuilles de Permissions Tacites
284
V I . L'enregistrement des Permissions Tacites sur les registres de demandes et d'autorisations
285
VII. L'enregistrement des Permissions Tacites sur les registres de la Chambre Syndicale
286
V I I Ï . Conclusions sur l'étude statistique des registres des Permissions Tacites
289
Chapitre III.
L A STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DES PERMISSIONS D'IMPRIMER
I. Introduction
293
293
II. Étude comparée des statistiques bibliographiques des Privilèges et Permissions du Sceau et des Permissions Tacites.
294
I I I . La statistique bibliographique des Permissions d'imprimer..
302
A. La statistique générale des demandes de Permissions d'imprimer
304
B. La statistique générale des autorisations d'imprimer...
304
C. La statistique générale des Permissions d'imprimer accordées par feuilles D. La statistique générale des Permissions d'imprimer enregistrées à la Chambre Syndicale des Libraires E. La censure des demandes de Permissions d'imprimer.. F. L'enregistrement au Bureau de la Librairie IV. Conclusions Chapitre IV.
304 305 305 307 307
L A STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA POLICE DES LIVRES IMPRIMÉS
I. Introduction II. La statistique du Journal d'Hémery A. Dépouillement B . Analyse statistique I I I . La statistique des registres de livres arrêtés dans les visites.
313
313 314 314 315 315
A. Dépouillement
317
B. Analyse statistique
317
IV. Le manuscrit français 21935
322
A. Dépouillement
323
B. Analyse statistique
323
V. Les manuscrits français 21928-21929
323
458
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
VI. Les manuscrits français 21982 et 21985 A. Dépouillement B. Analyse statistique
325 325 325
VII. Étude comparée des statistiques des registres de la police des livres imprimés A. Étude comparée des statistiques de livres arrêtés et des livres suspendus B. Étude comparée des statistiques des livres suspendus et des livres entrés par la Chambre VIII. Conclusions Chapitre V.
L A STATISTIQUE DU D É P Ô T L É G A L
337
III. Étude comparée des statistiques du Dépôt Légal des différents destinataires A. Étude comparée des statistiques du Dépôt Légal pour la Chambre Syndicale et pour la Bibliothèque du Roi.. B. Étude comparée des statistiques du Dépôt Légal pour le Cabinet et pour la Bibliothèque du Roi G. Étude comparée des statistiques du Dépôt Légal pour le Chancelier et pour la Bibliothèque du Roi IV. L'efficacité du Dépôt Légal Les livres imprimés par Privilèges
STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
338
338 341 343
344 345 345 348 348 349 349
V. Les réclamations A. La statistique des livres réclamés B. Étude comparée des statistiques de livres déposés et des livres réclamés C. La statistique des livres déposables LA
328
337
II. La production générale des livres déposés A. La production générale des livres déposés pour la Chambre Syndicale des Libraires de Paris de 1626 à 1704 B. La production des livres déposés pour la Bibliothèque du Roi C. La production générale des livres déposés pour le Cabinet du roi D. La production générale des livres déposés à la Chambre Syndicale des Libraires pour le Chancelier Garde des Sceaux
PHIES IMPRIMÉES
327
328
I. Introduction
Chapitre VI.
325
DES
352 352 354 354
BIBLIOGRA361
TABLE DES MATIÈRES
459
I. Introduction
361
II. La Bibliographie annuelle et universelle
362
I I I . Les Annales Typographiques
363
I I I . Le Catalogue Hebdomadaire
363
A. Dépouillement
363
B. La statistique bibliographique. Analyse statistique....
365
IV. La Bibliographia Parisana et de la Bibliographia Universalis
Gallica
A. Dépouillement
368 368
B. Statistique des livres contenus dans les deux bibliographies Gallica Universalis et Parisana
371
C. Analyse de la statistique bibliographique
371
V. La Bibliographie française et latine de Paris V I . L'Almanach bibliographique V I I . Le Journal de Paris V I I I . La Bibliographie Parisienne I X . Le Journal des savants X . La Clef du Cabinet des Princes de l'Europe X I . La France Littéraire de J. d'Hébrail et J. de la Porte
371 372 372 374 374 376 379
X I I . Étude comparée des statistiques des bibliographies imprimées
380
A. Étude comparée pour l'année 1770 entre les données de la Bibliographie parisienne et celles du Catalogue Hebdomadaire
381
B. Étude comparée de la production globale de la moyenne annuelle, pour la période 1768-1783, des données de la France Littéraire d'Hébrail et de celles du Catalogue Hebdomadaire
382
Chapitre
V I I . É T U D E COMPARÉE DES STATISTIQUES DE LA PRODUCTION INTELLECTUELLE DE LA F R A N C E DES XVII E ET XVIII E SIÈCLES
383
I. Étude comparée des statistiques de la production réglementaire
384
A. Étude comparée des statistiques des Permissions d'imprimer et des livres entrés par la Chambre
385
B. Études comparées des statistiques des Permissions et du Dépôt Légal
388
C. Étude comparée des statistiques de la Bibliographie annuelle et universelle et du Dépôt Légal
392
460
LA STATISTIQUE
BIBLIOGRAPHIQUE
DE LA FRANCE
D. Étude comparée des statistiques des Permissions d'imprimer du Journal d'Hémery et du Dépôt Légal 393 E. Étude comparée des statistiques des Permissions d'imprimer du Dépôt Légal et des bibliographies privées 394 F. Conclusions 397 II. Étude comparée des statistiques des livres interdits 399 A. L'importance comparée de la censure 400 B. L'évolution cyclique de la censure avant et après l'impression en France, au xvn e siècle 402 Chapitre
VIII.
LA STATISTIQUE BIBLIOGRAPHIQUE DE LA FRANCE DU
xvn e
AU
xx e
SIÈCLE
(étude sommaire)
407
CONCLUSION GÉNÉRALE : L A SCHÉMATISATION HISTORIQUE
417
BIBLIOGRAPHIE
423
I. Sources manuscrites A. Département des manuscrits de la Bibliothèque Nationale B. Archives de la régie du Dépôt Légal C. Bibliothèque historique de la Ville de Paris D. Bibliothèque de la Sorbonne E. Bibliothèque du Cercle de la Librairie F. Archives Nationales G. Archives Communales
423
II. Sources imprimées A. Sociologie B. Méthode statistique C. Applications diverses de la statistique D. Sociologie économique et statistique E. Sociologie et statistique bibliographique F. Bibliographie générale G. Bibliographie imprimée de la France des xvn® et XVIII® siècles H. L'imprimerie et la Librairie I. La censure J. Le Dépôt Légal K. Histoire de la littérature en France aux xvn e et XVIII 8 siècles L. Divers
427 427 428 429 429 430 431
423 425 425 425 426 426 426
432 434 437 438 438 439
INDEX
441
TABLE DES TABLEAUX ET DES PLANCHES
445
IMPRIMERIE NATIONALE 64 0645 0 67 007 2