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French Pages 215 [212] Year 2020
Lagui MOYEN
ÉDUCATION ET GOUVERNANCE UNIVERSITAIRE AU CONGO-BRAZZAVILLE
Gouvernance et Société
(1960-2019)
ÉDUCATION ET GOUVERNANCE UNIVERSITAIRE AU CONGO-BRAZZAVILLE (1960-2020)
Gouvernance et société Dirigée par Emmanuel Okamba Cette collection s’intéresse à l’analyse des processus, des dynamiques de changement liée aux réflexions, aux idées, aux débats théoriques et aux actions pratiques sur l’organisation et le pilotage de la performance des systèmes de gouvernance de la cité et des organisations dans un contexte de diversité culturelle. Elle épouse une démarche transversale des sciences sociales et humaines. Déjà parus Michel Innocent PEYA, L’unité de commandement dans les organisations modernes au Congo-Brazzaville, 2015. Molka ERNEZ MRABET, Innovation dans la sous-traitance du textilehabillement en Tunisie, 2014. Richard DELAYE, Régulation et management des organisations, 2013. Emmanuel OKAMBA, La gouvernance, une affaire de société, 2010.
Lagui MOYEN
ÉDUCATION ET GOUVERNANCE UNIVERSITAIRE AU CONGO-BRAZZAVILLE (1960-2020)
Image de couverture Une vue générale de l’ancien Rectorat de l’université Marien Ngouabi. Au premier plan, se trouvent deux Congolais tenant un support composé d’un livre ouvert, surmonté de deux roues dentées qui représentent la science et la technique. Sur l’estrade (à leurs pieds), sont inscrits les noms de différents dirigeants et la date de son inauguration par le Recteur Makosso Makosso (le 16/10/1985). Ce monument symbolise les armoiries de l’université Marien Ngouabi, le seul grand établissement d’enseignement supérieur public du Congo depuis l’indépendance.
© L’Harmattan, 2020 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris www.harmattan.fr ISBN : 978-2-343-19651-0 EAN : 9782343196510
Principaux sigles A
A.E.F. = Afrique équatoriale française A.U.F. = Association des universités francophones A.P.N. = Armée populaire nationale C C.N.R. = Conseil national de la révolution C.E.S.B. = Centre d’enseignement supérieur de Brazzaville C.E.S. = Centre d’études supérieures C.E.A.T.S. = Centre d’études administratives et techniques supérieures C.A.M.E.S. = Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur C.N.S.S. = Caisse nationale de sécurité sociale C.M.E.S. = Conférence mondiale sur l’enseignement supérieur C.E.D.E.A.O. = Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest C.E.M.A.C. = Communauté économique et monétaire de l’Afrique Centrale D D.E. = Direction de l’équipement D.L.B.E. = Direction des logements et bâtiments chargé d’entretien D.E.S. = Diplôme d’études supérieures D.S.E. = Direction de la scolarité et des examens D.A.A.C. = Direction des affaires académiques D.A.F. = Direction des affaires financières D.B.U. = Direction de la bibliothèque universitaire D.R.M.T. = Direction des relations avec le monde du travail D.T.I.C.S. = Direction des technologies de l’information, de la communication et de la statistique D.R. = Direction de la recherche D.S.S.S. = Direction des services socio-sanitaires D.C.U. = Direction de la coopération universitaire D.C.R.I. = Direction de la coopération et des relations internationales D.P.A.A. = Direction du personnel et des affaires administratives D.R.H. = Direction des ressources humaines
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D.G.R.S.T.= Direction générale de la recherche scientifique et technologique D.E.A. = Diplôme d’études approfondies E E.N.S.A.C. = École normale supérieure d’Afrique centrale E.N.S. = École normale supérieure E.N.S.P. = École nationale supérieure polytechnique E.N.S.A.F. = École nationale supérieure d’agronomie et de foresterie E.N.A.M. = École nationale d’administration et de la magistrature E.N.S.E.T. = École normale supérieure de l’enseignement technique E.S.B. = École supérieure de Brazzaville E.S.S. = École supérieure des sciences F F.L.A.S.H. = Faculté des lettres, des arts et des sciences humaines F.L.S.H. = Faculté des lettres et des sciences humaines F.D. = Faculté de droit F.S.T. = Faculté des sciences et techniques F.S. = Faculté des sciences F.S.E. = Faculté des sciences économiques F.S.S.A. = Faculté des sciences de la santé F.E.S.A.C. = Fondation de l’enseignement supérieur en Afrique centrale F.A.C. = Forces armées congolaises F.E.D. = Fonds européen pour le développement I I.S.G. = Institut supérieur de gestion I.S.E.P.S. = Institut supérieur d’éducation physique et des sports I.N.S.S.E.D. = Institut supérieur des sciences de d’éducation I.D.R. = Institut de développement rural I.N.S.S.E.J.A.G. = Institut supérieur des sciences économiques, juridiques, administratives et de gestion I.N.S.S.S.A. = Institut supérieur des sciences de la santé I.S.P.L. = Institut supérieur pédagogique de Loubomo
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J J.M.N.R. = Jeunesse du mouvement national de la révolution J.O.C.F. = Jounal Officiel du Congo français L L.M.D. = Licence-master-doctorat M M.N.R. = Mouvement national de la révolution M.E.S. = Ministère de l’enseignement supérieur M.E.N. = Ministre de l’éducation nationale P P.C.T. = Parti congolais du travail U U.M.N.G. = Université Marien Ngouabi U.D.S.N.G. = Université Denis Sassou Nguesso U.J.S.C. = Union de la jeunesse socialiste congolaise U.N.E.S.C.O. = Organisation des nations unies pour l’éducation, la science et la culture O O.R.E. = Observation des réformes en éducation O.C.D.E. = Organisation de coopération et de développement économique S S.P.A.T.O.S. = Service du personnel administratif, technique, ouvrier et de service
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Dédicace Je dédie ce livre à : - mon fils Précieux Harry MALONDA MOYEN, dont ce travail servira un jour d’exemple ; - mon cher compagnon Brice Rodrigue MALONDA MBOUNGOU ; - mon père Gaston MOYEN, parti trop tôt de ce monde des vivants. Que ce livre soit une preuve de reconnaissance à sa mémoire ; - ma mère Marie Delphine OLOUONODZIA, ma bien aimée ; - au professeur Georges MOYEN, pour ses encouragements ; - ma tante Rachel MOYEN, pour ses nombreux services ; - mes frères et sœurs : Valérie Ursule, Olga Lydie, Josy Rita, Ockaya, Pytha, Ontsi MOYEN, qui m’ont soutenue moralement dans la réalisation de ce livre.
Remerciements
Ce travail étant le fruit d’une action parfois cordonnée, je ne pourrais ne pas remercier tous ceux qui ont contribué, de près ou de loin, à son aboutissement. Comment pourrais-je tout d’abord ne pas remercier le Pr A. ENGAMBÉ d’avoir accepté de m’encadrer dans ce travail, de m’avoir consacrée de son temps et de son écoute, et de m’avoir surtout encouragée sans cesse, à des moments où le doute prenait le pas sur la motivation. Je remercie également les Professeurs Anaclet TSOMAMBET et Sylvain MAKOSSO MAKOSSO, deux anciens recteurs, qui ont bien voulu m’accorder de leur temps en me procurant de précieuses informations. Mes remerciements s’adressent également à Madame Edwige MAVOUANGUI, responsable de la Direction des relations avec le monde du travail (DRMT), pour sa générosité. Je tiens aussi à remercier infiniment : - Rodrigue GOKOUBA - Christian DJAN ADJETEY - David Souffrance OTABO - Bienvenu MPAPOUGOU - Stalgard NGANTSIALA MBOUALA Enfin, ma reconnaissance à mes parents, amis et collègues de service, tant leur amitié m’a été très utile. Qu’ils trouvent ici l’expression de ma sincère gratitude.
Sommaire Table des illustrations ..................................................................................................... 17 Avant-propos ................................................................................................................... 19 Introduction générale ...................................................................................................... 23 Chapitre I - Les fondements de l’enseignement supérieur au Congo ............................. 29 A- Le Congo : présentation sommaire ........................................................................ 29 B- L’éducation, un support traditionnel de base.......................................................... 32 C- L’enseignement et l’action civilisatrice des missionnaires..................................... 35 D- L’école et le volet colonial ..................................................................................... 38 Chapitre II- Le pari d’une dynamique scientifique universitaire émergente ................... 45 A- Les accords de coopération : le monopole de la France ......................................... 45 B- L’université de Brazzaville : contexte de création ................................................. 47 C- La naissance de l’université Marien Ngouabi ........................................................ 50 D- Des engagements aux réformes structurelles ......................................................... 52 Chapitre III - La gestion des ressources humaines : source d’efficacité et de stabilité... 56 A- Les attributions comme source d’efficacité ............................................................ 56 B- Le corps enseignant ................................................................................................ 61 C - La législation en matière de recrutement .............................................................. 63 Chapitre IV - L’objectivité des réformes et les aspects pédagogiques ........................... 67 A- Définition et rôle des objectifs ............................................................................... 67 B- De la description pédagogique à l’université Marien Ngouabi .............................. 70 C- La mobilité professionnelle de la formation des cadres ......................................... 74 Chapitre V – Regard sur le Président Marien Ngouabi .................................................. 77 A- Marien Ngouabi : sa vie et son œuvre .................................................................... 77 B- Marien Ngouabi : la renommée internationale ....................................................... 80 C- Marien Ngouabi : la passion des sciences .............................................................. 81 Chapitre VI - L’université Marien Ngouabi et les défis du moment .............................. 88 A- L’adéquation formation-emploi ............................................................................. 88 B- La lente mutation et le déficit d’enseignants .......................................................... 90 C- L’autonomie financière .......................................................................................... 92 D- Les Nouvelles technologies de l’information (NTIC) : mythe ou réalité ? ............ 96 Chapitre VII - L’instabilité politique : source de déstabilisation collatérale de l’éducation ....................................................................................................................................... 102 A- L’ère des coalitions instables (1956 à 1990) ........................................................ 102 B- La Conférence nationale souveraine (26 février-10 juin 1991) ............................ 109
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C- La mémorable guerre du 5 juin 1997.................................................................... 112 D- Ntoumi et l’incessante guerre du Pool ................................................................. 118 Chapitre VIII- Éthique et déshérence morale à l’université Marien Ngouabi .............. 122 A- Le harcèlement sexuel .......................................................................................... 122 B- La grève comme vecteur de démotivation ............................................................ 124 C- Impacts et pistes de solutions ............................................................................... 126 Chapitre IX - Revitaliser l’enseignement supérieur au Congo : un enjeu majeur ........ 130 A- Rendre l’université plus compétitive .................................................................. 130 B- Redynamiser les cadres : la formation pour quoi faire ? ...................................... 135 C- Résoudre l’épineux problème des salaires : un casse-tête chinois ....................... 145 E- Réactiver la délocalisation : une nécessité incontournable ................................... 155 Chapitre X- L’université de Kintélé : une ambition d’avenir ....................................... 158 A- L’attractivité du site ............................................................................................. 158 B- Un nouveau cadre adéquat de formation en gestation .......................................... 160 C- Rendre Kintélé plus accessible ............................................................................. 165 Conclusion générale ...................................................................................................... 169 Bibliographie ................................................................................................................. 173 Annexes ......................................................................................................................... 179
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Table des illustrations Figure n°1 : La carte administrative du Congo ................................................... 30 Figure n°2 : Composition de l’Archidiocèse de Brazzaville (1890-1961) .......... 36 Figure n°3 : Évolution statistique des missions du Saint-Esprit au Congo (18891910) .................................................................................................................. 36 Figure n°4 : Les missions de l’Alima (1897-1978) ............................................. 37 Figure n°5 : Evolution bilancielle des subventions de l’enseignement privé en AEF (1928) ........................................................................................................ 40 Figure n°6 : Liste des principaux accords de coopération en matière d’enseignement passés entre la France et les États africains et malgache (19601964) .................................................................................................................. 44 Figure n°7 : État des besoins en personnel enseignant français dans les ........... 46 États de la Communauté (1959) ......................................................................... 46 Figure n°8 : Faculté des lettres, des arts et sciences humaines (FLASH) ........... 48 Figure n°9 : L’unique zone de grande concentration universitaire au Congo ..... 51 Figure n°10 : Les chefs d’établissement de l’Université Marien Ngouabi aujourd’hui ......................................................................................................... 52 Figure n° 11 : Le bâtiment du nouveau Rectorat de l’université Marien ............ 58 Ngouabi .............................................................................................................. 58 Figure n°12 : Une vue de la nouvelle Scolarité centrale ...................................... 59 Figure n°13 : Le volume horaire applicable à Marien Ngouabi .......................... 62 Figure n° 14 : Effectifs des enseignants par établissement et par grade de 20182019.................................................................................................................... 62 Figure n°15 : Tableau de la Commission de recrutement ................................... 63 Figure n°16 : Effectifs des enseignants par établissement et par année de 2003 à 2008.................................................................................................................... 66 Figure n°17 : Effectifs des boursiers de l’université (2016-2017) ...................... 69 Figure n°18 : Tableau des boursiers congolais à l’étranger ............................... 70 Figure n°19 : La portée diplomatique du Président M. Ngouabi......................... 82 (1969-1977)........................................................................................................ 82 Figure n°20 : L’immortel Marien Ngouabi en pleine séance de cours ................ 85 Figure n°21 : Effectifs des enseignants par établissement et par année .............. 91 Figure n°22 : Dépenses de fonctionnement et de personnel par centre d’activités ............................................................................................................................ 94 Figure n°23 : Récapitulatif des recettes 2017 et 2018 à l’université ................... 95 Marien Ngouabi ................................................................................................. 95 Figure n°24 : Le Président Youlou (robe blanche) et Martial Sinda ............... 105 (costume) lors d’un mariage ............................................................................ 105 Figure n°25 : Emile Biayenda (gauche) et le Président Marien Ngouabi.......... 108 (droite), le 18 mars 1977 ................................................................................... 108 Figure n°26 : Pascal Lissouba, Président de la République (1992-1997) ........ 114 Figure n°27 : Ntoumi, Délégué général aux valeurs de paix ............................. 119 17
Figure n°28 : Le contexte économique du Congo (2014-2017) ........................ 131 Figure n°29 : Les principaux indicateurs économiques (2016-2019) ............... 131 Figure n° 30 : L’amphithéâtre A. Bouya de l’université Marien....................... 139 Ngouabi ............................................................................................................ 139 Figure n°31 : La Grande Bibliothèque universitaire ......................................... 140 Figure n°32 : Un centre d’apprentissage de métiers ......................................... 144 Figure n°33 : Une déclaration de l’Intersyndicale de l’Université Marien ....... 147 Ngouabi ............................................................................................................ 147 Figure n° 34 : État des négociations Syndicats-Gouvernements (novembre .... 149 2018) ................................................................................................................ 149 Figure n°35 : Un compte-rendu de l’Intersyndicale du 20 mai 2019 .............. 151 Figure n°36 : Une vue de la nouvelle université de Kintélé (côté résidences achevées) .......................................................................................................... 160 Figure n°37 : Le Président Denis Sassou Nguesso dont l’université porte le nom .......................................................................................................................... 165 Figure n°38 : Le Pr T. Obenga, à l’origine du grand projet de Kintélé.............. 166
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Avant-propos Ce travail est l’aboutissement de mes recherches personnelles amorcées depuis belle lurette, sur l’enseignement supérieur public au CongoBrazzaville avec, en point de mire, la seule université que compte notre pays : l’université Marien Ngouabi. Autrefois “ Université de Brazzaville”, elle regroupe à ce jour plus d’une dizaine d’établissements, autour de 5 facultés pour 4 écoles et 2 instituts, lesquels mènent des activités d’enseignement et de recherche à l’échelle nationale et internationale depuis sa création en 1971. Ces travaux m’ont permis de comprendre que, nonobstant certaines imperfections inhérentes à tout organisme, notre pays compte l’une des « Écoles de science » la plus crédible d’Afrique Noire au sud du Sahara, aux côtés d’autres comme l’université Cheikh Anta Diop de Dakar (au Sénégal). En son sein, se relaient des hommes et des femmes bien formés, à l’intelligence subtile et au savoir-faire hors du commun, stimulant des prestations appréciées et reconnues des institutions internationales, à l’instar du Conseil Africain et Malgache pour l’Enseignement Supérieur (CAMES). Étudiante d’abord, puis Agent donc témoin (en partie) de ce processus, j’apporte ici une analyse objective de sa dynamique, le rôle des ressources humaines, tout en démontrant les failles et les réussites d’une entité vieillissante, dans un monde où la formation et la recherche prennent de l’ampleur et guident les pas du développement. Aussi, dois- je noter à quel point le Gouvernement de notre pays y attache du prix en ce qu’il s’attèle à sa rénovation en y construisant des infrastructures nouvelles, susceptibles d’accueillir chaque année un nombre important d’apprenants. Le terme « université » vient du latin Versitatemuni, qui signifie « Univers » ou encore Universitas magistrorum et scholarium, désignant à l’origine la « corporation des enseignants et des étudiants d’une même ville ». Tout au long de son histoire, il a connu diverses définitions pour devenir un établissement d’enseignement supérieur. D’après Wikipédia, elle est « une institution d’enseignements supérieurs, d’études et de recherches, constituée par la réunion de divers établissements nommés suivant les traditions » « collèges » ou « facultés », « institutions » « départements », « centres », « sections » « unités » ou écoles spécifiques, mais aussi bibliothèque ou atelier, médiathèque ou musée, formant un 19
ensemble administratif cohérent avec un statut de droit défini, public, privé ou éventuellement mixte. Sous cette égide légale et administrative sont aussi rassemblées ou monopolisées la production (recherche), la conservation (publication et bibliothèques) et la transmission (études supérieures de différents champs choisis d’études et de connaissance ». Depuis la fin du XXè siècle, les universités et globalement l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur, s’identifient comme un élément clef de la croissance des Etats donc des vecteurs de croissance économique. Le Congo, qui connait la première promotion d’universitaires avec la création de l’ESB (Ecole Supérieure de Brazzaville) en 1971, se trouve bien dans ce contexte ; avant la création de l’« Université Marien Ngouabi » en 1977. Cet ouvrage se veut un récit plus ou moins complet d’une histoire, celle de notre alma-mater dont les grands centres d’intérêt se concentrent à Brazzaville, les tentatives hâtives de délocalisation du Président Lissouba ayant simplement échoué. Ce principe, pourtant salutaire, aurait eu du répondant s’il avait réussi, évitant aux nouveaux bacheliers et aux enseignants de longs déplacements. Me référant au célèbre aphorisme bien connu chez nous selon lequel « le cabri ne broute l’herbe que là où il est attaché », j’ai pris la stricte résolution depuis de longs mois, de revisiter notre enseignement supérieur public commun, ses enjeux, ses avantages et ses faiblesses. Pour ce faire, j’ai eu recours à deux types de documents : les sources écrites notamment les archives et les sources orales. Les principales sources écrites de l’université Marien Ngouabi se réduisent essentiellement aux : -Réformes pédagogiques intervenues au cours des dernières années ; - Effectifs des étudiants par établissement ; - Répertoires des accords ; -Répartitions des dépenses et récapitulatifs des recettes, bources tant à Marien Ngouabi que dans les universités privées ; - Notes administratives triées par les autorités ; - Écrits et articles d’auteurs congolais, etc.
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Ces sources sont vérifiables dans les établissements et services universitaires publics, et ont inspiré ma curiosité quant à leur fiabilité. Mieux conservés que dans certaines structures, ils sont consultables, contrairement aux archives nationales où les sources se font rares, car vandalisées, pillées ou simplement brûlées suite aux événements malheureux ayant secoué notre pays ces vingt dernières années. Par contre, je n’ai eu aucune peine de m’abreuver aux sources photographiques lesquelles m’ont été à portée de main. Parallèlement à cette recherche documentaire, j’ai également eu recours aux sources orales constituées essentiellement de récits et témoignages. A cet effet, j’ai pu aborder les spécialistes de la question qui ont bien voulu me recevoir et répondre à mes questions. Il s’agit des Professeurs : Makosso Makosso et Tshomambet (tous deux anciens Recteurs), et de T. Obenga (ancien Ministre). La légitimité de ce travail tient au fait qu’il n’est ni une fiction ni un plagiat, encore moins une narration. Les faits rapportés ici sont vérifiables et peuvent éclairer le lecteur dans sa soif de connaître davantage. Un travail de recherche n’a de la valeur que dans la mesure où il est qualitativement fiable, du fait qu’on écrit pour être lu et apprécié, et non pas pour se contenter simplement d’être lu. Loin de moi l’idée que ce livre est un chefd’œuvre, dois-je dire. Il s’agit d’un essai scientifique élaboré par une femme avide de savoir, qu’elle souhaiterait bien transmettre au plus grand nombre. Cette tentative est donc la première et ne saurait être la dernière, car d’un espoir peut en naitre d’autres, dit-on. Aussi, n’aurais-je pas été en mesure de tout évoquer, car un seul livre ne suffira jamais à raconter la vie d’une institution si grande soit- elle. Le lecteur trouvera ici les éléments nécessaires à la parfaite connaissance de l’histoire de notre université et de sa gestion, un moyen pour les jeunes congolais nouvellement admis au baccalauréat de mieux cerner les contours de l’institution devant les accueillir pour poursuivre leur scolarité. Je ne douterai un instant de la fiabilité de leur jugement qui, d’ailleurs, sera d’une importance pour moi. A toutes celles et tous ceux qui me liront, je sollicite alors une forte indulgence.
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Je rends également un vibrant hommage à toutes les bonnes volontés qui, de près ou de loin, ont bien voulu m’aider dans cette aventure. Puisse leur constance se prévaloir et qu’ils trouvent eux aussi, l’expression de ma forte reconnaissance. MOYEN LAGUI
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Introduction générale Ce livre analyse la dynamique de gestion scientifique et humaine à l’université Marien Ngouabi, à travers son évolution historique impliquant ses aspects organisationnels et les différents mouvements socio-politiques qu’elle a traversés. Il met en œuvre l’apport des autorités nationales, ainsi que celle des dirigeants l’ayant gérée depuis sa création jusqu’à ce jour, une implication coordonnée mais souvent mise à mal par un contexte de récession économique marqué par la chute lancinante du prix du baril de pétrole. Toute gestion est à situer dans l’histoire et ne peut être possible que si les différents acteurs s’y mettent, une cohérence sans laquelle toute possibilité de développement optimal voulu et acceptable est vouée à l’échec. Elle fait appel aux hommes, à leur intelligence et à leur dévouement, afin de mieux optimiser les chances de réussite dans un domaine porteur d’opportunité et d’avenir. Du latin gestio qui signifie « action de gérer », la gestion correspond, à l’origine, à l’administration des organisations et s’est développée dans les années 1950 pour englober les questions de management et de direction. Elle renvoie à la conduite des organisations, dans l’action ou la manière de gérer, d’administrer et d’organiser. En cela, elle est l’ensemble des connaissances qui permettent de conduire une entreprise car elle est aussi le management de l’action collective. Aussi, fait-elle référence à un besoin de répartir les tâches, de coordonner les individus, de gérer la contrainte de temps, de gérer les ressources (humaines, matérielles, financières), l’organisation étant par nature plurielle et multiforme, composée d’un groupe d’individus qui structure, ordonne, pilote les ressources, afin d’atteindre un objectif commun. Au regard de cette définition et pour bien comprendre la gestion ou le fonctionnement de notre alma mater, un bref historique s’impose. Établissement public d’enseignement supérieur, mais dont la gouvernance était basée jusque-là sur le modèle hérité du bon vieux temps de la colonisation française, son organisation administrative est définie par le décret n° 2013- 395 du 29 juillet 2013 portant réorganisation de l’université Marien Ngouabi. Ce décret stipule qu’elle est administrée par un Comité de direction, et dirigée par un Recteur assisté d’un Conseil technique, de deux Vice-recteurs et d’un Secrétaire général ; des deux vice23
recteurs, l’un est chargé des Affaires académiques et l’autre de la Coopération et des relations internationales. Cette organisation comprend alors l’administration universitaire et les organes de délibération. De façon générale, l’université Marien Ngouabi compte onze (11) établissements et douze (12) directions reparties de la manière suivante : - Direction des affaires académiques ; - Direction de la scolarité et des examens ; - Direction de la bibliothèque universitaire ; - Direction de la recherche ; - Direction de la coopération et des relations internationales ; - Direction des relations avec le monde du travail ; - Direction des technologies de l’information, de la communication et de la statistique ; - Direction des ressources humaines ; - Direction des affaires financières ; - Direction de l’équipement ; - Direction des logements et bâtiments chargé d’entretien ; - Direction des services socio-sanitaires. A noter que les trois (3) premières directions, ainsi que les onze (11) établissements, appartiennent au Vice-rectorat chargé des affaires académiques. Les autres, au Vice-rectorat chargé de la coopération et des relations internationales. Enfin, les 4 dernières sont rattachées au Secrétariat général. La D.R.M.T. (liée au monde du travail) à laquelle j’appartiens, est une direction spécialisée placée sous l’autorité du Vicerecteur chargé de la coopération et des relations internationales. Créé par decision 249/umng.vr. du 05 octobre 2011 et dirigée actuellement par une femme, elle est chargée de : - orienter les étudiants dans l’optique du système LMD ; - prospecter le monde du travail ; - contrôler et appuyer les étudiants diplômés dans la recherche des stages ; - promouvoir et développer des partenaires D’autre part, elle est structurée en deux services à savoir : le service des stages et le service de prévision des emplois et des compétences. Entre 2010 et 2017, une évaluation des activités de recherche effectuées par les enseignants-chercheurs de l’université Marien Ngouabi, a permis de disposer d’une masse d’informations pertinentes qui ont servi à mesurer 24
le dynamisme des établissements dans le domaine de la recherche et de l’innovation. Ce classement se base sur quatre (4) critères ou indicateurs suivants : - la productivité, qui représente l’activité scientifique des enseignants par grade et par établissement ; - la participation, qui permet de catégoriser les établissements en fonction de leur participation à l’évaluation par le CAMES ; - la performance, qui est le rendement d’un établissement, obtenu en tenant compte du nombre de dossiers présentés au CAMES ; - l’efficacité, se rapportant au nombre d’enseignants inscrits (admis) chaque année sur les listes d’aptitude des CCI (Comités consultatifs interafricains) du CAMES par rapport au nombre de dossiers présentés par un établissement, tout en tenant compte du nombre total d’enseignantschercheurs permanents de l’établissement. Il apparaît que six (6) établissements sur onze (11) présente une activité satisfaisante dans le domaine de la recherche. En tête, la Faculté des sciences de la santé (FSSA), suivie dans l’ordre par la Faculté des sciences et techniques (FST), l’Institut supérieur de l’éducation physique et sportive (ISEPS), la Faculté des lettres, arts et sciences humaines (FLASH), l’Ecole normale supérieure (ENS) et l’Ecole nationale supérieure d’agronomie et de foresterie (ENSAF) avec plus de 25 points sur 50. Par contre, trois (3) établissements se trouvent dans une situation préoccupante en ce qui concerne l’activité de recherche. Il s’agit, par degré d’insuffisance, de la Faculté de droit (FD), l’Institut supérieure de gestion (ISG) et l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (ENAM), avec respectivement 09,11 et 15 points sur 50. Ces trois (3) établissements devraient être fortement accompagnés, tant sur le plan de l’organisation de la recherche que pour la participation au CAMES. D’autre part, l’organisation administrative des différents établissements est placée sous l’autorité d’un Conseil d’établissement dirigé par un chef d’établissement, assisté des secrétaires académiques, chefs de parcours, chefs de département, secrétaires principaux et gestionnaires comptables. Ces établissements sont gérés de façon démocratique avec le concours de l’ensemble du personnel. Ils ont vocation à regrouper différentes disciplines contrairement à l’ancien système en application de l’arrêté n° 1134 MES-CAB du 1er mars 2010 portant organisation des études dans le cadre du système « Licence-Master-Doctorat » (L.M.D.), qui relève du 25
décret n° 2009-177 du 18 juin portant application du système « LicenceMaster-Doctorat » à l’université Marien Ngouabi. D’autres organes interviennent dans la gestion de chaque département, à savoir : - le conseil d’établissement, institué auprès de chaque établissement de l’université Marien Ngouabi, présidé par le chef d’établissement. Il comprend outre le chef d’établissement, le vice-doyen ou le directeur adjoint, les chefs de département, les coordonnateurs des formations doctorales, les chefs de services, le gestionnaire, un (1) représentant par syndicats des travailleurs, parmi les syndicats les plus représentatifs de l’université, un (1) représentant par association estudiantine, parmi les associations les plus représentatives de l’université, trois (3) personnalités du milieu socioprofessionnel désignées par le chef d’établissement en raison de leurs compétences. Le Conseil d’Etablissement se réunit ordinairement deux (2) fois par semestre, sur convocation de son président. - le conseil de département (Licence, Master et Doctorat), administré par un conseil de département, dirigé par un chef de département élu parmi les enseignants permanents du département et nommé par le ministre de l’enseignement supérieur. Il se compose de tous les enseignants du département, des représentants de travailleurs non-enseignants du département, des représentants d’étudiants de différents niveaux. Il se réunit une (1) fois par trimestre sur convocation de son président, et peut être convoqué en session extraordinaire. La hiérarchie des rôles est telle que chacun, au niveau où il se trouve, a l’ambition de cerner les difficultés auxquelles il fait face et remonte l’information, afin de mieux faire avancer son département. L’université gagnerait alors en notoriété si chaque travailleur, imbu de la notion « gestion du bien public », s’en imprègne véritablement de façon à dégager les vieilles pesanteurs de la paresse et de la léthargie. Ce fut le vœu du Président Marien Ngouabi, l’homme dont le nom est à jamais collé à l’institution, et dont le courage et l’ambition ne cessent de remonter très haut dans la mémoire collective. Il a été un exemple, raison pour laquelle j’ai tenu à saluer sa mémoire en joignant à ce document, sa vie et son œuvre ainsi que sa renommée internationale, sa passion des sciences. Chacun sait qu’il est tombé un 18 mars 1977, le jour où il venait d’animer un cours à la faculté des sciences, avant d’aller à la rencontre du professeur Anaclet Tsomambet.
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Aussi, ai-je voulu faire un panorama historique de l’université Marien Ngouabi, depuis l’époque de sa création jusqu’à nos jours, en passant par différentes époques aussi brillantes que tumultueuses, pour montrer combien les Congolais ont su, malgré les bavures du temps, consolider cet instrument de la culture, de l’épanouissement et de la connaissance. Le clin d’œil fait à l’instabilité politique, véritable poison auquel le pays a toujours fait face, consiste à faire comprendre qu’il annihile les efforts des uns et des autres, décourage les ardeurs, crée la méfiance et installe le doute. Depuis 1960, en effet, le Congo n’a eu de cesse d’être secoué par des événements tribalo-régionalistes, qui ont émaillé et troublé notre système éducatif. D’autre part, mon souhait serait que l’université fasse avant tout sa toilette interne, en se débarrassant des vieilles mentalités pour privilégier l’essentiel, à savoir : la réussite, sans laquelle rien ne peut être possible. Certes notre institution avance et fait des prouesses, grâce à des femmes et des hommes courageux et fiers de l’être, ambitieux et prêts à servir leur pays, mais les défis demeurent. Des aspects d’importance majeure soulevés ici, à l’instar du « harcèlement sexuel », sont à bannir du fait de son caractère honteux et humiliant, l’enseignement supérieur (comme son nom l’indique) étant le creuset du savoir intellectuel. En définitive, cet ouvrage vise entre autres objectifs à : - restituer les fondements de l’éducation au Congo sans lesquels l’« enseignement supérieur » ne serait qu’un colosse aux pieds d’argile. Les déboires constatés à l’université sont souvent le fait d’une éducation de base mal maîtrisée ; - dégager le contexte historique de l’université au Congo de 1961 à nos Jours ; - montrer les ressources humaines disponibles, source d’efficacité ; - porter un regard sur l’action scientifique du Président Marien Ngouabi, en dépit des lourdes charges dues à son rang ; - mettre en exergue les défis qui sont ceux de notre alma mater public ; - faire un clin d’œil à l’instabilité politique dans notre pays depuis notre accession à l’indépendance, comme un des éléments à l’origine des troubles collatéraux sur l’éducation ; - inciter l’État à revitaliser l’enseignement supérieur en procédant à des changements à la fois quantitatifs et qualitatifs ; - faire des suggestions objectives tendant à l’amélioration de la gestion optimale à l’université Marien Ngouabi ; 27
- jeter un regard sur l’université Denis Sassou Nguesso en construction. Les chapitres à l’origine de ce livre s’inspirent largement de ces objectifs, gages d’un lendemain radieux pour les générations présentes et à venir, et pour que vive à jamais notre enseignement supérieur public.
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Chapitre I - Les fondements de l’enseignement supérieur au Congo L’enseignement supérieur se distingue par sa capacité à regrouper les enseignements généraux, techniques ou professionnels qui demandent à disposer d’un niveau de formation supérieur ou égal au baccalauréat ou à son équivalent. Les cours sont dispensés dans les établissements d’enseignement publics ou privés, sous tutelle d’un Ministère qui les habilite à délivrer les différents diplômes et à approuver leurs maquettes. De même qu’il accorde une reconnaissance à ceux provenant du privé, tout en coordonnant (avec son collègue de la recherche), la politique de recherche en matière scientifique et d’innovation. Au Congo, le champ universitaire couvre l’ensemble des établissements situés principalement à Brazzaville, ainsi que quelques rares écoles ou instituts se trouvant à l’intérieur. Après avoir présenté le pays (A), il nous reviendra d’expliciter les fondements de l’éducation au Congo à travers le support traditionnel, creuset de la sagesse (B), l’enseignement missionnaire (C), avant d’aborder le volet colonial à l’origine de l’enseignement universitaire tel que nous le connaissons aujourd’hui (D).
A- Le Congo : présentation sommaire A cheval sur l’équateur et comprenant 342.000 km2, le Congo a une population estimée à plus de 4 millions d’habitants, formant un tout composite de plusieurs ethnies regroupées en départements (Figure n°1). Les négrilles (ou pygmées) reconnus aujourd’hui sous l’appellation de « peuples autochtones », sont les premiers habitants du pays qui, moins nombreux et réfractaires à la vie en communauté, ne représentent plus que 1,4 % de la population totale. Ils tirent leur existence de la forêt qui leur procure viande de chasse, poisson, chenilles et autres produits divers. De petite taille et très méfiants des Bantous, ils habitent assez éloignés d’eux dans des habitations dont ils choisissent la forme, avec un mobilier souvent sommaire 29
Figure n°1 : La carte administrative du Congo1
Les Bantous forment l’essentiel du reste de la population avec plus de 98 % et se subdivisent en plusieurs tribus disséminées sur le territoire national. Ces tribus se composent des : - Kongo, plus nombreux (soit 52 %), qui occupent l’espace situé entre Brazzaville et la mer plus au sud. Dans ce groupe, on y trouve les Vili, Sundi, Kugni, Dondo, Kamba, Bembé et autres, que d’ailleurs l’histoire fait venir d’Angola, fuyant la traite négrière par petits groupes et, plus tard, la guerre d’Ambuila (1665) de triste mémoire. C’est aux Téké qu’ils doivent l’espace actuel conquis souvent au rythme du temps et par la force, se prévalant d’être les propriétaires millénaires de ces lieux ; - Téké, qui représentent environ 18% et occupent le centre-nord, entre Brazzaville (au sud) et la rivière Nkéni (au nord), proche de la ville de Gamboma. Ils dominent en majorité les quatre (4) plateaux Téké de Mbé, Nsa-Ngo, Djambala et Lékana, avec des variantes dans leur parler ordinaire. On y compte les Boma, les Nziku et les Kukuya. L’autre frange des Téké composée essentiellement des Téké-Alima et Mbéré, forme une 1
Tourisme-environnement.gouv.cg 30
ceinture le long de la frontière avec la République sœur du Gabon, autour des districts d’Okoyo, Ewo et de Kéllé. Elle comprend le département de la Cuvette-Ouest qui, jadis, faisait bloc avec l’actuelle Cuvette centrale. - Mbosi (ou Mbochi), qui se partagent le reste des Plateaux jusqu’à la Cuvette centrale et se composent des Mbosi proprement dits (50 %), des Koyo ou Kuyu (14 %), des Akwa ou Makoua (11 %) et autres Ngaré, Mboko et Likouba. Les Mbosi proprement dits occupent les deux rives de l’Alima autour des districts d’Abala, Allembè, Ollombo, Ongogni, Oyo, de Tchicapika, Boundji et Ngoko. A ces groupes, se rattache celui de l’interfleuve Sangha-Oubangui qui comprend environ 20 % de la population congolaise, autour des départements de la Sangha et de la Likouala. Il se compose des Bakouélé et Nzem (pour la Sangha), des Mbondjo, Bomitaba, Kaka, Mondjombo et autres (pour la Likouala). A l’origine, ces ethnies vivaient séparément selon qu’elles avaient un ordre ou non à recevoir des chefs d’autres contrées. Dans la réalité, les populations de la partie située entre la rivière Nkéni et l’Océan atlantique appartenaient aux royaumes Téké, Loango et Kongo, alors que celles n’y ayant pas appartenu logeaient dans les chefferies du nord Congo. Le terme « chefferie » prête à confusion du fait de son sens un peu trop léger en parlant de son champ d’action. En effet, dans la sphère précoloniale, le chef est celui qui commande ou dirige ses sujets, sur une étendue de terre donnée et avec des prérogatives bien définies. Pour sa renommée, il se pare des symboles ou attributs de pouvoirs traditionnels, signes de son omnipotence et de sa loyauté à sa tradition. Il est le descendant spirituel et psychologique des ancêtres, incarne la vie de la collectivité et règle les litiges entre familles et individus. Il est comme le dit si bien CORNEVIN (1961) 2 : « partie intégrante de la communauté et sert de baromètre en quelque sorte à sa vitalité. C’est bien lui l’intermédiaire entre les membres vivant de la communauté d’une part et les forces naturelles d’autre part. Ainsi, il est d’essence divine, représente les ancêtres, le passé de la tribu et sa gloire. Il concentre en sa personne l’ensemble des forces magiques du pays. De lui dépend la plus ou moins grande fertilité du sol, l’abondance et la bonne répartition des pluies ». CORNEVIN R. (1961) : L’évolution des chefferies dans l’Afrique noire d’expression française, Recueil Penant, 1961, n°686, p.23
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Mais le colonisateur est passé outre cette optique fondamentale, en créant une césure entre royaume et chefferie, comme si seule l’étendue suffisait à donner une primauté à l’un pas à l’autre. Ainsi, la chefferie dans les communautés villageoises d’Afrique englobe tout à la fois, en théorie et en pratique, raffermissant les relations entre populations. Des clans et des familles, auxquels se joint la primauté de l’influence spirituelle des chefs, est née une éducation de base longtemps méconnue du colonisateur français, mais dont les traits et aspects anthropologiques expliquent bien l’évolution normale de l’homme noir.
B- L’éducation, un support traditionnel de base L’éducation est d’origine lointaine et remonte aux temps immémoriaux. Elle s’enracine en l’homme dès qu’il commence à façonner son milieu, à le rendre plus aisé et exempt de toute manipulation contraire à son éthique. Elle procède alors d’une dimension philosophique qui n’est pas celle de l’animal mais d’un citoyen en devenir, tourné vers un lendemain qu’il se veut radieux. Elle est donc universelle, structurelle mais pérenne, nonobstant le caractère souvent erroné qu’on en donne. Elle évolue selon une tradition donnée, le milieu dans lequel vivent les hommes et les femmes chargés ou non de l’animer, en la transmettant de génération en génération. D’après PLATON, « l’éducation doit rendre l’homme meilleur et l’amener à penser par lui-même. Il part du principe que pour apprendre, il faut d’abord « désapprendre », s’affranchir de nos opinions et inclinaisons pour s’éveiller à la Réalité et au Vrai. Il faut apprendre à aller au-delà des apparences ». Et ARISTOTE d’ajouter que : « L’homme heureux est un homme éduqué : seul l’homme vertueux peut-être heureux et seule l’éducation permet d’acquérir la vertu. Ce n’est que par l’éducation que le bonheur devient accessible. Ainsi, le bonheur s’enseigne ». Mais de quelle éducation parlent-ils ? De l’analyse de ces deux réflexions, il apparaît clairement que l’élévation procède de l’éducation et qu’en conséquence celle-ci est enseignée, donnant au bonheur et à la vertu un sens bien particulier. C’est ainsi qu’elle est sujet à interprétation, du fait que l’œuvre d’un lecteur doit être à l’origine d’une transmission moyennant un support écrit. Un peu comme en Egypte où les scribes, grands nobles de l’écriture, transcrivaient sur du papyrus pour le compte du pharaon, des pages dont le contenu était lu et 32
interprété. Ce qui n’était pas le cas dans toute l’Afrique Noire où la transmission procédait d’une marque assez exceptionnelle, celle de la parole. Au Congo, l’éducation était considérée comme l’œuvre des initiés, ceux dont le subconscient moral et psychologique consistait au choix de leurs lieux d’habitation, afin de s’installer de façon définitive et nouer les unions de mariage par la procréation, sans que cela ne fasse, au préalable, l’objet d’un enseignement de type moderne. Au contraire, il ne s’agit là que d’un apprentissage traditionnel basé sur l’oralité, n’utilisant que les aspects d’une géométrie rudimentaire imaginée. Dans leur quotidien, ces anciens ne juraient que par la sagesse, s’imprégnaient des réalités locales pour expliquer aux jeunes générations le savoir-faire, la façon d’être et de vivre bref l’existence. Ils savaient diviser les saisons et contrôler leur évolution, lire le temps en le scindant en journées ouvrables et d’autres réservées aux activités de loisirs ou de culte. Ils interprétaient leur calendrier en fonction du jugement qu’ils avaient de la vie et du milieu ambiant, dont ils épousaient la pratique des activités comme la chasse, la pêche, la cueillette et l’élevage, soutirant de la forêt des éléments de subsistance. L’agriculture était considérée comme l’activité nourricière de base car d’elle dépendaient la vie de la communauté, son épanouissement et sa grandeur. La chasse, contrairement à la pêche, était réservée aux hommes qui utilisaient pièges, arbalètes, filets et autres fusils à tir pour capturer ou abattre le gibier. Enfin la cueillette, destinée au ramassage des chenilles en pleine ou en forêt, arrivait à un moment où la chaleur se faisant intense, permettant l’émergence de ces espèces très prisées par les populations. Leur exercice rudimentaire aiguisait le génie de l’homme noir, grâce à un apprentissage humain modeste et continu. Ainsi, découle l’idée selon laquelle l’école dans les sociétés africaines précoloniales, est une notion inconnue, vague et empirique. Elle n’existe alors ni dans la pensée collective, ni dans le subconscient des populations connectées à leurs us et coutumes. Elle est contraire à l’éthique coloniale et renvoie plutôt à une éducation domestique ancienne donc initiale dont la capacité suffisait à conseiller la progéniture par des moyens traditionnels ; la tradition locale n’étant pas encore au contact physique et spirituel avec l’Occident.
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De cette conception du monde, est née une histoire que par ignorance, arrogance ou maladresse, le colonisateur refuse de reconnaître, préférant celle confectionnée à la va-vite par lui-même et selon son jugement. Une vision souvent condamnée par des historiens africains tels CHEIKH ANTA DIOP (1923-1986)3 et Théophile OBENGA, deux grands égyptologues dont la maîtrise de l’histoire africaine n’est plus à démontrer. Ils ont mis fin à l’imbroglio en repensant et soumettant une nouvelle périodisation de l’histoire africaine. Du latin Schola qui signifie « loisir studieux, leçon ou lieu d’étude », l’école est un lieu dédié à l’apprentissage, un établissement où l’on enseigne les savoirs fondamentaux comme la lecture et l’écriture. Par elle, on acquiert la formation en se donnant une expérience et on s’instruit. Dans son sens propre, l’école procède de l’éducation qui vient du latin ex-ducere (guider, conduire hors) et qui se révèle comme l’action de développer un ensemble de connaissances et de vertus morales, physiques, intellectuelles, scientifiques etc., considérées comme essentielles pour atteindre le niveau de culture souhaité. Ainsi différemment perçue, l’éducation de l’enfant et de l’adolescent a toujours été, dans les sociétés anciennes précoloniales, l’œuvre de la famille avant de s’élargir, grâce à l’instruction, à l’école et aux lectures personnelles conçus par les autres. Elle permet la transmission d’une génération à l’autre de la culture nécessaire au développement de la personnalité et à l’intégration sociale de l’individu. Censée être le support traditionnel en milieu villageois, l’éducation ancestrale va connaître une longue période d’hibernation, à cause des considérations et réalités colportées d’ailleurs et qui seront à l’origine de l’installation des missions au Congo.
Pionnier de la recherche historique africaine et de l’égyptologie moderne, C. ANTA DIOP s’est attaché toute sa vie d’homme de science à montrer l’apport de l’Afrique noire à la culture et à la civilisation mondiale. Il est l’auteur de trois célèbres ouvrages parus chez Présence Africaine en 1954, 1967 et 1981). OBENGA fut son fidèle compagnon. 3
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C- L’enseignement et l’action civilisatrice des missionnaires L’arrivée des missionnaires constitue, très vite, un tournant dans l’organisation de l’éducation et de l’enseignement modernes au Congo. Préoccupés moins par l’idéologie coloniale à ses débuts que par leur sacerdoce, leur rôle ne se limitera au départ qu’à « civiliser » en propageant la « parole » plutôt qu’à accompagner l’œuvre entreprise par l’administration dominante. Même si, la « trinité qui préside dès l’origine à l’entreprise coloniale comprend l’Officier, l’Administrateur, et enfin le missionnaire »4. L’évangélisation à outrance est donc l’une des raisons qui expliquent l’éclosion de l’enseignement au Congo. En effet, après le Gabon où ils officiaient depuis 1844, les missionnaires du Saint-Esprit sous la houlette de Mgr Augouard, débarquent au Congo et essaiment çà et là des missions à travers le pays. En 1886, la Préfecture Apostolique du Congo est fondée, de même que la mission du Saint- Esprit se scinde en deux (1890) donnant naissance au Vicariat du Bas- Congo français et à celui du Haut-Congo (Figure n°2). L’objectif est non seulement de propager le « Saint-Esprit », mais d’en assurer le suivi avec la création des écoles catholiques. Il en découle alors la création du « Catéchuménat », creuset indispensable réunissant des adeptes à qui on inculte la foi, seule arme susceptible de convertir les populations locales indécises. Au centre de cette activité, se trouve le Catéchiste-moniteur (l’équivalent du maître) qui se fait remarquer par l’opportunité de ses services. Il est le collaborateur fidèle, véritable militant dont l’action constitue une victoire du missionnaire sur le milieu traditionnel.
SURET-CANALE J. (1972) : Afrique occidentale et centrale, de la colonisation aux indépendances (1945-1960), crise du système colonial et capitalisme monopoliste d’État, Paris, Ed. Sociales, 1972, p.45.
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Figure n°2 : Composition de l’Archidiocèse de Brazzaville (1890-1961)5 Dirigeants
Années
Mgr Prosper Augouard
1890-1921
Mgr Firmin Guichard
1922-1935
Mgr Biechy
1936-1954
Mgr Michel Bernard
1954-1955
Mgr Théophile Mbemba
1961 …
Grâce à lui, l’évangélisation devient une réalité incontournable, s’enracinant dans une société dont les vertus se révèlent bien différentes de celles de l’homme blanc. La mobilisation des masses est telle qu’à partir de 1889 jusqu’à 1910, l’œuvre missionnaire devient retentissante, expliquant l’attachement des populations à la nouvelle donne, comme l’indique le tableau ci-dessous (Figure n°3). Figure n°3 : Évolution statistique des missions du Saint-Esprit au Congo (18891910)6 Années 1889 1895 1899 1902 1904 1906 1908 1910
Prêtres 3 12 24 23 23 23 22 15
Frères 2 8 14 14 16 16 15 10
Sœurs …. 6 7 6 7 7 8 7
Catholiques …. …. 2 000 2 800 2 900 3 000 3 500 2 010
Catéchistes …. …. …. …. …. …. …. 10
Résidences 1 4 8 8 7 15 15 17
Stations …. …. …. …. 1 2 1 1
Le missionnaire se veut réformateur donc artisan d’un savoir moderne, n’hésitant pas à combattre la mentalité religieuse traditionnelle. Au début, le manque d’engouement des indigènes réfractaires à la conversion est perceptible et s’accompagne d’une méfiance à l’égard des prêtres qui, pour Source : LEGRAIN M. : Le père JeanJean (1980) : missionnaire au Congo, Paris, Hatier, 1980. 6 LEGRAIN M. : idem 5
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des raisons qui leur sont propres, font usage de la contrainte. Ainsi, nait le rachat considéré comme une méthode civilisatrice, permettant de sauver les jeunes créatures de l’« esclavage », notamment les filles pour lesquelles on prévoit (dit-on) de les libérer de la polygamie et de son oppression. Deux phases expliquent son fonctionnement : - la première, plus douce, consiste à attirer le maximum d’enfants grâce à une procédure plus simple : le maître présente l’enfant au missionnaire qui l’examine sommairement, avant de demander le prix. Au bout de quelques minutes, le marché est conclu. Le payement se fait en perles ou en poudre, voire en miroir ou en brasse d’étoffe ; - la seconde, plus brutale, intervient lorsque les parents se révèlent réticents dans le but d’en faire obstacle. Dans ce cas, les missionnaires agissent en faisant usage de la menace, la force ou l’enlèvement et désormais, aucune tournée à l’intérieur ne se fait sans auxiliaires armés pour traquer les pères d’enfants indécis. Dans sa vision initiale, le rachat permet de réunir autant de fugitifs dans des villages dits « chrétiens » d’où partiront les catéchistes notamment de jeunes couples qui, de retour dans leur région d’origine, auront pour mission de faire progresser l’évangélisation. Des postes de catéchisme se multiplient au fil des ans, créant un maillage permettant de compenser la faiblesse des effectifs et des implantations missionnaires dans les zones les plus reculées, comme celles de l’Alima (Figure n°4). Figure n°4 : Les missions de l’Alima (1897-1978)7 Nom de la mission Notre Dame de Lekety Saint-François Xavier de Boundji Ste Radegonde de Tsambitso St Jean Marie Vianney d’Ewo St Georges d’Okoyo
Date de fondation 27 juin 1897 6 janvier 1900 15 janvier1899 Octobre 1956 1978
Fondateurs Mgr Augouard … … Père Raymond Grymonpré Père Jules Ernoult
Ce phénomène est particulièrement visible dans la région de l’Interfluve Sangha-Oubangui, (regroupant les départements actuels de la Sangha, la Likouala et une partie de la Cuvette centrale) où l’activité du caoutchouc et de l’ivoire était très intense, sollicitant une main- d’œuvre bon marché. 7
Source : Les Spiritains au Congo 37
Et contrairement à ce que pense le Père ANTUNÈS (1894)8 quand il dit que : « C’est à la libération de ces pauvres enfants malheureux, à leur éducation et à leur civilisation par le christianisme que nous devrons un jour la conversion et la régénération de l’Afrique », des voix s’élèvent partout pour signaler d’autres abus. Cas du Père DAIGRE qui rapporte pendant son séjour dans la colonie que : « Pour obtenir de nos pupilles un travail vraiment productif, une surveillance de tout instant s’imposait. La discipline était sévère car nos rachetés, enfants de la grande brousse, se pliaient difficilement à un règlement. Beaucoup étaient vicieux, et demandaient à être suivis de très près ». D’autre part, des faits montrent la violence des missionnaires eux- mêmes, par exemple lorsqu’ils collaborent au retour des indigènes recherchés, après une cabale due à la cueillette du caoutchouc très dure. Les Spiritains usent alors de leur influence pour les convaincre de revenir vaquer à la pire des besognes. Les missions, pourtant destinées à éduquer, servent aussi à la chasse aux indécis, partout dans les zones où sont implantées les concessions ou les factoreries. De même que pour les recrutements des volontaires ou appelés obligatoires devant être enrôlés et transférés pour aller combattre en métropole. Le contact entre missionnaires et administration deviendra plus exigeant lorsque, pour des raisons de travail, ils se trouvent obligés de s’associer mutuellement. Action apostolique et œuvre coloniale se fondent alors sur des valeurs et une idéologie partagée, et de celles-ci sortira un modèle éducatif colonial que beaucoup qualifieront de « modèle à demi-teinte » du fait de son caractère peu évolutif et hypocrite.
D- L’école et le volet colonial L’avènement du système colonial est de beaucoup dans l’évolution de l’éducation au Congo, notamment dans l’enseignement dit de base. En dehors du rachat, la formation joue dorénavant un rôle de qualité malgré la contrainte exercée sur les jeunes, la mobilisation leur servant d’exemple aux autres voire de relais au modèle colonial. Ainsi, l’entreprise missionnaire a servi de base à l’enseignement qui, selon la volonté du colonisateur, allait se perpétuer sans anicroche. Civiliser est un devoir, une Père ANTUNÈS (1894) : Rapport à la propagation sur la mission de Cutène, Annales Apostoliques, n°35, Octobre 1894
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nécessité nonobstant le fait que vue de la métropole, la culture est une valeur temporelle de ce que l’on propose à des individus considérés comme bruts, non éclairés et sujets à l’assimilation. Et que l’instruction devenant obligatoire, présente une double contradiction, à savoir que : d’un côté, en élevant la qualité de la main-d’œuvre, elle la rend plus coûteuse ; de l’autre, elle conduit les masses colonisées à prendre conscience de l’exploitation et de l’oppression auxquelles elles sont soumises ou exposées. Il convient alors de favoriser sa diffusion au minimum strictement indispensable et l’utiliser au mieux des intérêts de la colonisation. Car si l’instruction est assurément un devoir, il convient de la conformer aux intérêts économiques, administratifs, militaires et politiques, les plus évidents, de la métropole. Ainsi, le résultat serait d’améliorer la valeur de la production coloniale en multipliant dans la foule des travailleurs indigènes, la qualité des intelligences et le nombre des capacités99. En outre, elle doit dégager et dresser les élites de collaborateurs qui, comme agents techniques, contremaîtres, surveillants, employés ou commis de direction, doivent suppléer à l’insuffisance numérique des Européens… En clair, les effets de la diffusion de l’instruction doivent être, suivant la différence de pays, diversement nuancés et sagement mesurés. Les bases de l’éducation au Congo et en AEF sont alors taillées à la mesure des ambitions coloniales, qui y voient un atout indispensable ; tout en évitant que l’enseignement ne devienne, à terme, un instrument de perturbation sociale. La structure scolaire est la même pour chaque colonie, soit trois types d’écoles : école du village, école régionale, école urbaine et enseignement professionnel. On y injecte moins d’argent pour moins d’enseignants de qualité, et dans toute la fédération l’enseignement est abandonné aux missions. En 1910, le Moyen-Congo consacre à l’enseignement un peu moins de 20 000 francs et l’année suivante (1911), le budget passe à 25 000 francs sur un total de 2 200 000. Pour toute l’AEF, les subventions aux écoles privées sont reparties ainsi qu’il suit (Figure 5) :
SARRAUT A. (1923) : La mise en valeur des colonies françaises, Paris, Payot, 1923, p.95. 9
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Figure n°5 : Evolution bilancielle des subventions de l’enseignement privé en AEF (1928)10 Vicariat
Sommes (en Francs)
Vicariat apostolique de Brazzaville Vicariat apostolique du Gabon Vicariat apostolique de Loango Vicariat apostolique de Bangui
32 000 10 000 5 000 7 500
Au moment où les statistiques des missions demeurent encore élevées, naît un embryon d’enseignement primaire où les cours se tiennent dans des abris de fortune, la plupart du temps à l’air libre, sous des grands arbres. Cette année-là (1911), est déterminée la structure générale de l’enseignement qui va être complétée par une « Circulaire n°8 du 8 mai 1925 » et publiée par le gouverneur ANTONETTI qui juge encore faible le niveau de connaissances des indigènes, de même que L’inadéquation entre la formation offerte et les réalités locales africaines. Ainsi doit-il s’indigner en ces termes11 : « Trop d’élèves, chaque année, quittent nos écoles avec un mince bagage, sachant vaguement lire, ayant des notions d’écriture, ayant enregistré dans leur mémoire un certain nombre de mots français dont ils ignorent parfois de sens exact, juste assez savants en un mot pour s’écarter de la terre et mépriser leurs frères restés aux villages, mais incapables de se servir de ce semblant d’instruction dont ils sont puérilement fiers pour gagner leur vie. Aucun n’est capable de faire un écrivain, un dactylographe, un comptable. Ce sont trop souvent des déclassés, des mécontents, des parasites de la collectivité travailleuse ». En 1936, est créée, en France, une pédagogie conforme à l’enfant africain12 dont l’objectif est de préparer des cadres de bas niveau et tournés vers la métropole. Une idée qui rejoint l’assertion de l’Administrateur CAMILLE GUY (1922)12qui annonce : « Les bons programmes ne s’obtiennent qu’en élaguant, non en ajoutant. Enseignement du français, des sciences élémentaires, des travaux professionnels et enseignement technique approprié au milieu et c’est suffisant. Agir autrement on ne prépare pas des citoyens français, mais des déclassés, des vaniteux, des désaxés, qui ENGAMBÉ A. (2016) : Les méthodes coloniales au Congo-Brazzaville de 1886 à 1958. Analyse socio-économique et devoir de mémoire, Paris, L’Harmattan, 2016, p.89. 11 Cf. Journal Officiel de l’AEF, 1er décembre 1911. 12 Elle est l’œuvre d’André DAVESNE, inspecteur d’Académie français 10
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perdent leurs qualités natives et n’acquièrent que les vices des éducateurs. C’est par ce système qu’on crée de toutes pièces des Réné Maran et qu’un beau jour apparaît un roman comme Batouala, très médiocre au point de vue littéraire, enfantin comme conception, injuste et méchant comme tendances ». Cet enseignement à usage unique interdit les langues locales, l’objectif étant d’imposer le « français » (langue du colonisateur) et assurer le contrôle strict de l’enseignement dans son ensemble. Une recommandation d u Gouverneur F. EBOUÉ, à la Conférence de Brazzaville (1944)13, va dans ce sens lorsqu’elle affirme que : « l’enseignement doit être donné en langue française, l’emploi pédagogique des dialectes locaux parlés étant absolument interdit, aussi bien dans les écoles privées que dans les écoles publiques ». Et que la Conférence africaine de l’enseignement qui se tient plus tard à Dakar, pour appliquer les décisions de Brazzaville, entérine : « Nous devons nous rappeler que le but est moins de sauvegarder l’originalité des races colonisées que de les élever vers nous ». Et le rapport « métropole-colonie », poursuivi et raffermi par cette instance, sera déterminant dans la consolidation des acquis politiques, économiques et socioculturels. Les cadres indigènes formés se font de plus en plus entendre, poussant l’assistance française à devenir réalité, jusqu’à l’indépendance. Dès lors, les efforts pour rehausser l’éducation vont se poursuivre, toutes les politiques de développement ne pouvant se réaliser sans intégrer l’enseignement, véritable tremplin en vue d’une indépendance totale. Les langues dites véhiculaires (Lingala, Kituba) qui prennent corps, deviennent des relais incontournables entre populations parlant de dialectes différents, allant jusqu’à intégrer les médias officiels ce, malgré la persistance du français qui constitue encore un frein au développement global de notre pays. Et que dire des contenus de cet enseignement ? Ils se rapportent à la connaissance de la métropole et de ses atouts (touristiques, économiques, sociaux, etc.), d’autant plus que tout est enseigné dans la langue du colonisateur et non pas dans les langues locales elles-mêmes strictement prohibées. L’histoire et la géographie sont privilégiées en raison de leur importance à répercuter, dans le subconscient de l’indigène, les valeurs infinies de la « Mère-Patrie ». A cet effet, le gouverneur ROUME pense que : « Tout l’enseignement de l’histoire et de la géographie doit tendre à montrer que la France est une Nation 13
C.G. (1922), n°1, p.43.Gouverneur du Sénégal et de la Réunion. 41
riche, puissante et capable de se faire respecter, mais en même temps grande pour la noblesse de ses sentiments généreux et n’ayant jamais reculé devant les sacrifices d’hommes et d’argent pour délivrer les peuples asservis ou pour apporter aux peuples sauvages avec la paix, les bienfaits de la civilisation »14. Ce rôle est tenu par l’instituteur, considéré comme le détenteur du savoir, le seul fonctionnaire du village exerçant un métier valorisant, l’intermédiaire entre le monde dit sauvage et la civilisation. On l’écoute du fait de la vérité, le savoir et la compétence. Il est aux yeux de tous, un homme mystérieux qu’on affuble d’une aura particulière. Même le grand chef du village se plie devant ses exigences pour ramener en classe un enfant récalcitrant. Son autorité fait qu’il peut aller jusqu’à faire usage de la chicote, ensemble de bouts de liane soigneusement entrelacés qu’il martèle sans cesse sur le corps de l’apprenant sans défense. Nombreux sont ceux qui s’en sont sortis infirmes, perdant un œil, une oreille, une dent ou simplement avec un corps enflé de graves blessures ou de contusions. Il a le droit de renvoyer qui il voulait, à cause de l’impunité dont il bénéficie souvent de l’inspection ou des parents d’élèves incapables de dresser un rapport écrit. L’arrivée de M. l’inspecteur est saluée comme l’avènement d’un messie, à qui l’on adresse les compliments de tous genres accompagnés de présents divers que parfois l’enseignant se charge de remettre au nom des pauvres villageois. Toutefois, avec la colonisation l’enseignement missionnaire ne disparaît pas mais se consolide, subissant un bouleversement d’équilibre prôné par le dirigisme administratif colonial. L’école se généralise, brisant le monopole existant sans toutefois dissoudre les structures en place. En définitive, l’école en bouleversant les habitudes ancestrales, poussant les Congolais à un autre type d’apprentissage rendu possible grâce aux missionnaires, a permis de les pousser vers les cimes de la connaissance. Le pouvoir colonial qui écume l’Afrique vers 1880, l’élargit au reste de la société, faisant perdre une part de privilèges aux missions qui d’ailleurs, conserveront leur emprise. L’éducation se trouva alors gérée dans le cadre global de l’AEF, signe d’une volonté tangible de freiner l’élan des peuples vers l’émancipation véritable voire totale. D’où le retard quasi chronique dans la formation de l’élite intellectuelle locale, que l’on percevait déjà De La ROCHE J. (1957) : Le gouverneur général Eboué, Paris, Hachette, 1957, pp.167168. 14
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comme ruineuse et dangereuse pour l’avenir des rapports entre colonisateur et colonisés. Il faut attendre l’année 1961, pour voir éclore l’enseignement supérieur, à la suite d’un accord de coopération signé entre la France et les quatre (4) Etats indépendants de l’AEF. D’autre part, les accords de coopération culturelle (Figure n°6) vont permettre à la France d’intervenir très largement dans l’organisation et le fonctionnement de l’enseignement à divers niveaux : primaire, secondaire et technique. Ceux passés avec les Etats de l’A.E.F. (Congo, R.C.A., Tchad), le Togo et le Cameroun auront pour conséquence de ne pas coordonner l’enseignement national avec celui dispensé en France. L’objectif n’étant alors que de favoriser les ressortissants désireux de suivre un enseignement de type français. Dans ce cas, le principe d’équivalence des grades et diplômes délivrés dans les mêmes conditions qu’en France était reconnu. De même que les États d’Afrique centrale ne chercheront pas à créer un enseignement ou diplômes pouvant concurrencer ceux du système français. C’est ainsi qu’il n’existera dans ces Etats que des diplômes français et ces droits de décision permettront de maintenir des rapports très étroits avec la France. La réussite dans ce domaine est alors un véritable challenge que le Congo est appelé à gagner, tant l’accession à un enseignement supérieur de qualité est un pari pour le nouvel État indépendant.
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Figure n°6 : Liste des principaux accords de coopération en matière d’enseignement passés entre la France et les États africains et malgache (19601964)15 Pays
Date des accords
Ordre d’enseignement concerné
Publication au Journal Officiel, Lois et décrets.
Primaire, secondaire Supérieur et technique Cameroun
13 novembre 1960
Cameroun
8 août 1962
Conseil de l’entente (Côted’Ivoire, Dahomey, HauteVolta, Niger)
24 avril 1961
Fédération du Mali
˟
9 août 1961, p.7433.
˟
4 août 1963, p.7253
˟
6 février 1962, p.1261.
22 juin 1960
˟
20 juillet 1960, p.6638.
Gabon
17 août 1960
˟
24 novembre 1960, p.10487
Guinée
29 juillet 1961
Madagascar
2 avril 1960
Mali
2 février 1962
Mauritanie
19 juin 1961
˟
˟
6 février 1962, p.1335.
Tchad, Congo, RCA
15 août 1960
˟
˟
24 novembre 1960, p.10460.
Sénégal
15 mai 1964
˟
16 janvier 1966, p.468.
Togo
10 juillet 1963
˟
˟
19 avril 1962, p.4062. ˟
˟
˟
20 juillet 1960, p.6622. 10 juillet 1964, p.6126.
10 juin 1964, p.4997.
Cf. MANIÈRE L. (2010) : La politique française pour l’adaptation de l’enseignement en Afrique après les indépendances (1958-1964), histoire de l’éducation, 128/2010, 163190. 15
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Chapitre II- Le pari d’une dynamique scientifique universitaire émergente A sa création, l’université nationale du Congo n’est encore qu’un instrument au service de la cause coloniale, un secteur dont l’entrée dans l’ère du supérieur s’annonce d’ailleurs tardive en raison du laxisme constaté. L’émergence de cette nouvelle entité est un véritable pari du fait qu’il créé, tous azimuts, une dynamique pour que naisse une institution au service de la société et d’une région longtemps rongée par un siècle d’exploitation à la fois honteuse et désastreuse. C’est ainsi que contrairement à l’AEF, l’AOF a au moins l’avantage d’avoir la première université, celle de Dakar ouverte en 1957 et qui forme les premiers grands cadres de l’Afrique au sud de Sahara. Après avoir situé le contexte des accords de coopération signés avec la France (A), nous examinerons l’éclosion f u t u r e d e l’« université Marien Ngouabi » (B), avant de décrire les réformes engagées en vue d’une institution intellectuelle digne et de qualité (C).
A- Les accords de coopération : le monopole de la France Pour ce qui concerne le supérieur, la France s’engage à développer ou créer sur le territoire des États signataires un enseignement supérieur d’un niveau égal à celui de l’enseignement supérieur français. Celui-ci serait dispensé, sauf au Sénégal et à Madagascar, déjà dotés d’Universités nationales, dans des centres d’enseignement supérieur notamment ceux de Brazzaville (pour ce qui est de l’A.E.F.), pouvant être transformés plus tard avec l’aide de la France. Conformément à la règlementation française, les grades et diplômes délivrés seraient donc valables de plein droit en France. Par ailleurs, le monopole de la métropole est intact en ce sens que les Etats d’Afrique centrale y compris Madagascar ne sont pas autorisés à ouvrir d’autres centres d’enseignement supérieur sans l’aval du gouvernement français. Aussi, se réserve-t-elle certaines priorités comme l’ouverture sur le territoire de l’autre partie, des établissements relevant de sa seule autorité, en organisant des examens ou concours destinés aux seuls 45
ressortissants français. Alors clairement, les dispositions contenues dans les accords de coopération montrent à suffisance que l’indépendance (officielle) n’entraînait pas une situation de non-dépendance. C’est ainsi que la plupart des structures du système d’enseignement mis en place restèrent les mêmes qu’avant les indépendances en 1960. L’assistance technique, objet essentiel des accords culturels, consistait à fournir des prestations en matériel et en argent, tout en fournissant du personnel et de former les Africains. C’est dire que les besoins étaient particulièrement importants en ce qui concerne l’enseignement. Ainsi, les Etats africains étaient appelés à dresser un premier état de leurs besoins pour l’enseignement à divers niveaux. D’autant plus que le fonctionnement des services d’Etats était encore assuré par la France jusqu’au 30 juin 1959, date à laquelle l’envoi du personnel français outre-mer relèverait désormais de l’assistance technique. Le tableau ci- dessous fait apparaître l’état des besoins en personnel enseignant français (Figure n°7). Figure n°7 : État des besoins en personnel enseignant français dans les États de la Communauté (1959)16 Taux de scolarisation
Côte-d’Ivoire Dahomey Haute-Volta Mauritanie Niger Sénégal Soudan Congo Gabon Centrafrique Tchad Madagascar Total général
27,20%
66,80%
29% 8% 7% 4% 25% 8% 72%
28% 8.60% 46% 23,50%
Personnel français des cadres généraux et métropolitains en fonction au 1er mai 1959
350 106 76 31 41 348 76 83 57 86 58 565 1877
Personnel français Augmentation demandé par les États africains au titre de l’assistance technique à compter du 30 juin 1959 447 126 118 62 94 348 136 83 68 86 80 681 2 329
+ 27,71% + 18,87% + 55, 26% + 100,00% + 129, 27% + 0,00% + 78,95% + 0,00% + 19,30% + 0,00% + 37,93% + 20,53% + 24,08%
- Centre d’archives contemporaines de Fontainebleau…, Cité par MANIÈRE L., Op. cit. 16
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B- L’université de Brazzaville : contexte de création L’implantation d’un embryon d’enseignement supérieur en Afrique centrale date de 1958, année de naissance de la République du Congo. A cette époque, est créé à Brazzaville capitale du Moyen-Congo, un Centre d’enseignement supérieur (CES) qui se mue, l’année suivante (1959), en Centre d’études administratives et techniques supérieures (CEATS). Cette première université comporte deux propédeutiques : une scientifique et l’autre littéraire, le tout formant un moule bien constitué même s’il ne s’agit là que d’une première tentative d’un système d’enseignement supérieur cohérent. Le 15 août 1960, alors que le pays accède à l’indépendance, les gouvernements français et congolais auxquels se joignent ceux du Gabon, de la RCA et du Tchad, signent un accord transformant le CEATS en Centre d’enseignement supérieur de Brazzaville (CESB). Il s’agit d’un établissement public de droit français comprenant une Ecole de droit, une Ecole supérieure des sciences, une Ecole des lettres et une Section médicale. Le 11 décembre 1961, par « acte n°46/61-293 », les quatre (4) Etats adoptent à Fort-Lamy (Ndjamena), un accord créant la Fondation de l’enseignement supérieur en Afrique centrale (FESAC), une espèce de convention qui porte organisation de l’enseignement supérieur dans la région, chargée de former les cadres supérieurs des anciennes colonies françaises. En son article 2, l’accord dispose que : « L’enseignement supérieur est dispensé sur le territoire des Républiques d’Afrique centrale contractantes par la Fondation de l’enseignement supérieur en Afrique centrale. La République française fait apport à la Fondation du Centre d’enseignement supérieur de Brazzaville. Le développement des établissements existants et la création des établissements nouveaux interviendront à des dates et en des lieux que les parties contractantes détermineront d’un commun accord, lorsque les effectifs en personnel, en locaux et en matériel auront été réunis. La création de l’université interviendra dans les mêmes conditions ». Une université qui devrait être un bien commun aux quatre (4) Etats et gérée de façon collégiale. Elle regroupe, outre le CESB, les Instituts : agronomique en RCA, zootechnique au Tchad, polytechnique au Gabon, et l’Ecole normale 47
supérieure d’Afrique centrale (ENSAC) à Brazzaville (Congo). La création de ces structures est négociée avec l’UNESCO par le Congo, au nom des autres Etats de l’Afrique centrale. Sa construction se fait avec l’aide du Fonds européen pour le développement (FED). La FESAC est dirigée par un administrateur et évolue sous la houlette d’un conseil présidé, de façon tournante pour une année, par un ministre de l’éducation nationale de l’un des États contractants. En 1971, la FESAC est dissoute après dix ans d’exercice, donnant à chaque partenaire signataire de l’accord de création le droit de se doter d’une structure adaptée d’enseignement supérieur. L’université de Brazzaville (Figure n°8) est née, par « Ordonnance présidentielle n°29/71 du 4 décembre 1971), et par la mise en place de nouveaux organes de recherche et par l’instauration de la Direction générale de la recherche scientifique et technologique (DGRST). Figure n°8 : Faculté des lettres, des arts et sciences humaines (FLASH)
Cette ordonnance donne à l’université de Brazzaville, organisme groupant les établissements publics d’enseignement supérieur, les missions d’assurer : « l’élaboration et la transmission de la connaissance, la formation des hommes, l’organisation de l’éducation permanente, le perfectionnement des cadres au niveau du cycle supérieur des métiers dans tous les domaines, et de participer au développement économique, social et culturel du pays ». 48
En 1973 (le 8 novembre), le premier recteur est nommé. Les écoles supérieures de droit, lettres et sciences de l’ancien CESB deviennent respectivement : - faculté de droit et sciences économiques ; - faculté des lettres et sciences humaines ; - faculté des sciences. L’École normale supérieure d’Afrique centrale (ENSAC) devient Institut supérieur des sciences de l’éducation (INSSED), avant d’être appelé, plus tard en 1993, l’École normale supérieure (ENS) et ce, jusqu’à ce jour. En 1974 (le 10 janvier), Marien Ngouabi alors Président de la République procède à l’ouverture de la première rentrée solennelle de cette université. Dans la même dynamique, il réglemente son organisation et son fonctionnement par la promulgation des « décrets présidentiels n° 76/439 du 16 novembre 1976 » portant organisation de l’université de Brazzaville et « n° 91/846 du 30 octobre 1991 » portant Statut particulier du personnel de l’université de Brazzaville. En 1975 (le 11 décembre), l’Institut de développement rural (IDR) est créé par « arrêté ministériel n° 75/533 », et l’Institut supérieur d’éducation physique et sportive (ISEPS) par « arrêté ministériel n°7420 ». Ces établissements paraissaient autonomes au moment de la création. Sous l’impulsion du concept « École du peuple », l’université alors considérée comme le cycle supérieur des métiers, par l’entremise de ses établissements, entreprend de profondes réformes pour mieux satisfaire les nouvelles exigences académiques17. Elle jumelle à cet effet, le 8 mars 1977, par « décret n° 77/109 », les Facultés de droit et des sciences économiques pour former l’Institut supérieur des sciences économiques, juridiques, administratives et de gestion (INSSEJAG). Ce contexte de création donne lieu non seulement à certaines réformes conceptuelles et méritées, mais favorise un changement de cap avec la débaptisation de la structure. Le Congo rentre dans l’ère du changement relatif au grand Il s’agit de l’Union de la jeunesse socialiste congolaise, une organisation politique de jeunesse affiliée au Parti congolais du travail (PCT). Son rôle fut de mobiliser la jeunesse contre l’impérialisme en ayant pour fondement essentiel : la prise de conscience contre les antivaleurs représentées à l’époque par l’absentéisme, la corruption, la concussion et le vol. Un jeune devait se démarquer des autres par un esprit travailleur en vue de sauver la révolution partout où il se trouvait et en tout temps 17
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bouleversement politique que connaît le pays, avec la mort du Président Marien Ngouabi.
C- La naissance de l’université Marien Ngouabi En 1977, une autre ordonnance présidentielle « n° 034/71 du 28 juillet 1977 », portant changement de nom de l’université de Brazzaville, consacre la dénomination « université Marien Ngouabi ». Cette ordonnance entérine ainsi un vœu émis le 24 avril 1977, par la section UJSC18 de l’université de Brazzaville. Depuis lors, celle-ci est restée la seule université publique du pays. L’université de Brazzaville change alors de nom et est ainsi débaptisée en mémoire du vaillant Président assassiné, le 18 mars de la même année, en raison de son dévouement à la science et au développement de son pays. Pour la première fois de son histoire, le Congo venait d’attribuer à son alma-mater le nom d’un chef d’Etat dont le mérite à l’« Ecole des sciences » n’était plus à démontrer. Les manœuvres inédites d’André MILONGO, alors premier ministre de transition élu par la conférence nationale de 1991, qui dans tous ses discours inhérents à la structure parlait d’une « université nationale du Congo », sont vouées à l’échec. Dès lors, les changements s’opèrent à la fois dans la création de nouveaux établissements et leur regroupement, en vue de les rendre plus opérationnels et dynamiques. En 1978, est créé l’Institut supérieur des sciences de la santé (INSSSA) par « décret n° 78/279 du 13 avril ». La rentrée académique 1980-1981 consacre l’annexion de deux établissements à l’université Marien Ngouabi : l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (ENAM) et l’Ecole normale supérieure de l’enseignement technique (ENSET). En 1983, s’ouvre un établissement d’enseignement supérieur à l’intérieur du pays : l’Institut supérieur pédagogique de Loubomo (ISPL). A côté de l’INSSED, sa mission est de former les enseignants de collèges techniques, sauf qu’il cessera de fonctionner en 1992, de même que le CEGP d’application qui lui était adjoint pour préparer les élèves au Brevet d’études moyennes générales polytechniques (BEMGP). Désormais, l’université Marien Ngouabi compte neuf établissements.
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En 1988, la réforme de l’INSSEJAG donne naissance à trois (3) établissements : la Faculté de droit (FD), la Faculté des sciences économiques (FSE) et l’Institut supérieur de gestion (ISG). En 1993, l’INSSA devient la Faculté des sciences de la santé (FSSA). En 2012, deux établissements changent de dénomination : l’Institut de développement rural (IDR) devient Ecole nationale supérieure d’agronomie et de foresterie-ENSAF ; alors que l’Institut des sciences et techniques (IST) s’appelle Faculté des sciences et techniques (FST). En 2018, la Faculté des lettres et sciences humaines (FLSH) devient la Faculté des lettres, des arts et des sciences humaines (FLASH). De nos jours, l’université Marien Ngouabi est devenue une institution à part entière, composée de onze (11) établissements dont cinq (5) facultés, tous basés à Brazzaville (Figure n°9), dirigée par l’unique Recteur nommé en Conseil des ministres, ainsi que le sont les Directeurs d’écoles, Instituts et Doyens des Facultés (Figure n°10). Figure n°9 : L’unique zone de grande concentration universitaire au Congo18
D’après Musée du Bassin du Congo : Kiebe-Kiebe. Danse initiatique du CongoBrazzaville, Imprimé en Belgique pour ADIAC, Brazzaville, 2012, p.10.
18
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D- Des engagements aux réformes structurelles Désormais, tous les établissements (Instituts et Écoles) qui englobent les domaines nombreux et variés (agriculture, santé, justice, gestion, économie, enseignement technique, éducation physique et sports, enseignement général) ainsi que les Facultés, marquent la volonté de l’université Marien Ngouabi de se transformer en cycle supérieur des métiers remplissant les trois fonctions de formation, de recherche et de participation au développement. Figure n°10 : Les chefs d’établissement de l’Université Marien Ngouabi aujourd’hui
Établissements
Nom (s) et prénom(s)
FLASH
TSOKINI Dieudonné
FST
BOSSOTO Guy Richard
FSE
NDINGA Mathias Marie Adrien
FD
MEBIAMA Guy Jean Clément
FSSA
TSIBA Honoré
ENSAF
AKOUANGO Parisse
ENS
LOUMOUAMOU Aubin Nestor
ENSP
LILONGA-BOYENGA Désiré
ENAM
NSAKANI Joseph
ISG
MAKOSSO Béthuel
ISEPS
OKEMBA ITOUA Jean
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Ces mutations rejoignent le mouvement important de réformes des systèmes éducatifs congolais engagées depuis quelques années aux différents ordres d’enseignement ; dans la plupart des systèmes, les enjeux devenant culturels, économiques et sociaux. En ce sens, la Commission internationale sur l’éducation pour le XXIe siècle (1996) et cinquième Conférence internationale sur l’éducation des adultes (1997) entrevoient déjà la nécessité de réformer le système d’enseignement supérieur. En 1998, la Conférence mondiale sur l’enseignement supérieur (CMES) organisée par l’UNESCO à Paris, adopte une déclaration mondiale sur l’enseignement supérieur et un cadre d’action prioritaire pour le changement et le développement de l’enseignement supérieur. Ces documents mettent en exergue le rôle majeur de l’enseignement supérieur dans le processus de développement humain durable et définissent les missions et les fonctions des établissements d’enseignement supérieur et les actions à mettre en œuvre pour permettre à celui-ci de s’adapter au besoin actuel et futur de la société. Dans cette même perspective, le Processus de Bologne (1999), le Forum mondial sur l’éducation (2000), la Réunion des ministres de l’éducation des pays de l’OCDE (2001) ainsi que les séminaires des organismes régionaux comme la Communauté économique de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), l’Association des université francophone (AUF) et le Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur (CAMES) recommandent avec détermination le pleine harmonisation de l’architecture des systèmes d’enseignement supérieur. Dans les actions à entreprendre, on connaît l’importance du rehaussement des compétences, de la formation continue, du développement durable, de la reconnaissance des acquis et compétences. A ce propos, nous convenons avec le Professeur Philippe Jonnaert, directeur de l’Observation des Réformes en Education (ORE) lorsqu’il affirme que « le mouvement actuel des réformes au niveau mondial est unique dans l’histoire. Dans divers pays, les responsables politiques de l’éducation et les concepteurs des programmes subissent une forte pression de la part des grandes organisations, comme l’UNESCO et l’OCDE, pour que les systèmes éducatifs soient transformés afin de mieux répondre aux besoins de la société du savoir »19 . C’est dans cette optique de réforme de l’enseignement supérieur que le 19
Pr. Philippe Jonnaert, pilotage et réformes en éducation. 53
système Licence-Master-Doctorat (LMD) est perçu aujourd’hui comme le mieux approprié en vue de relever le défi de l’harmonisation de la qualité des apprentissages. Au lendemain de la Conférence nationale souveraine de 1 9 9 1, le secteur de l’enseignement est libéralisé en République du Congo. Et le ministre Bruno Jean-Richard ITOUA le confirme lorsqu’il dit que : « C’est la conférence nationale dite souveraine qui libéralise l’enseignement au Congo. Cependant de 1991 à 2009, il n’existe aucun texte juridique à ce sujet, notamment dans l’enseignement supérieur. Les premiers textes règlementant l’ouverture des écoles supérieures privées ont eu lieu de 2009-2011 ; comblant ainsi un vide juridique inexplicable »20. Ce processus engagé d’abord aux niveaux du préscolaire, du primaire et du secondaire, s’est élargi au supérieur au début des années 2000, avec la création de plusieurs Ecoles et Instituts supérieurs de formation à travers le pays. Aujourd’hui, on compte plus de cinquante établissements privés implantés dans quelques grandes villes du pays : 31 à Brazzaville, 16 à Pointe-Noire, 2 à Dolisie (Niari) et 1 à Owando (Cuvette), dont 15 sont actuellement agrées par l’Etat21. L’université Marien Ngouabi, qui jouit d’un monopole en matière d’enseignement supérieur, fait actuellement face à une concurrence. Au plan international, elle a intégré le Conseil africain et malgache pour l’enseignement supérieur (CAMES), tout en s’arrimant au système Licence-Master-Doctorat (LMD) ; ce qui revient à dire qu’elle doit mettre en place une bonne stratégie afin de se mettre au même niveau que les autres universités de référence22. Il sied de souligner que les défis qu’affronte l’université Marien Ngouabi sont multiples. Elle doit notamment faire face à une demande de plus en plus grande en matière de formation. La nécessité de répondre aux besoins des populations a amené les autorités congolaises à la création de nouveaux établissements supérieurs parmi lesquels l'université Denis Sassou Nguesso (UDSNG) en construction (sur laquelle nous reviendrons). Ce choix se justifie par le fait que malgré l’abolition de l’ancien système et la construction de nouvelles infrastructures à Marien Ngouabi, le système d’enseignement supérieur 20
Le ministre Bruno Jean-Richard ITOUA devant le Sénat ce vendredi, 22 mars 2019.
bid. Cité par Moyen L. (2018) in « La communication institutionnelle à l’université Marien Ngouabi : enjeux et perspectives », Mémoire de master professionnel, Université d’Oujda, Maroc, 2018, p.3 22 Ibid., p.3. 21
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rencontre actuellement de nombreux problèmes tels que : les effectifs pléthoriques, le chômage et l’incertitude du lendemain chez les étudiants, le manque d’espace approprié pour les apprenants… Au regard de ces mutations profondes observées dans le monde sur l’enseignement supérieur, je voudrais, à travers ce livre, examiner la situation évolutive de l’université Marien Ngouabi à travers ces réformes. Sa gestion des ressources humaines disponibles actuellement, fait d’elle un véritable poumon du développement intellectuel et économique, et constitue à n’en point douter une source de stabilité et d’efficacité sur l’échiquier national, nonobstant les situations de troubles liées aux grèves à répétition et à l’insécurité au Pool.
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Chapitre III - La gestion des ressources humaines : source d’efficacité et de stabilité L’université Marien Ngouabi fait partie intégrante du service public de l’éducation nationale et de la formation, service dont les caractéristiques, les principes, les objectifs et les missions spécifiques sont clairement définis et contribuent efficacement au développement du pays. Ainsi, lorsque celle-ci tend à l’objectivité du respect de la diversité des opinions, de garantir à l’enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, elle devient fiable voire commode pour tous. Dans ce cas, son organisation fortement hiérarchisée devient, sans ambiguïté, un canevas de distribution et de ventilation des rôles dont chacun est tenu de respecter autant qu’il peut et d’en faire siens (A, B, C)
A- Les attributions comme source d’efficacité Etablissement public d’enseignement supérieur à caractère scientifique, culturel, technique et professionnel, l’université Marien Ngouabi a des attributions complétées par celles des organes de délibération, qui contribuent efficacement à lui donner une image cohérente et fortifiée. En effet, régie par le « statut de 2012 » suivie du « décret portant réorganisation de l’université Marien Ngouabi de 2013 », l’organisation de cette institution comporte à ce jour quatre (4) niveaux administratifs suivants : - les Organes de délibérations ; - le Rectorat ; - les Etablissements ; - les Organes consultatifs. Tous répondent à une préséance bien particulière qui obéit à une hiérarchisation des rôles. J’ai résolu de donner à chaque niveau, la description qui s’impose sans toutefois me dérober de la règle en matière d’administration publique. C’est ainsi qu’on a : a) le Recteur : il fait partie d’un Rectorat qui est l’organe administratif et exécutif comprenant le Recteur lui-même, les deux Vice-recteurs et le 56
Secrétaire général, tous nommés par décret du Président de la République en conseil des ministres sur proposition du ministre chargé de l’enseignement supérieur. Le Recteur est choisi parmi les enseignants permanents du grade de professeur et dirige l’administration de l’université Marien Ngouabi. Il est chargé d’élaborer le plan de développement stratégique de l’université et met en œuvre la politique de formation et de recherche de l’université. Il exécute les délibérations du comité de direction, apprête les dossiers à soumettre au comité de direction et au conseil technique. Il recrute le personnel selon les procédures fixées par le conseil technique et met fin à l’activité du personnel détaché, tout en exerçant le pouvoir de notation et le pouvoir disciplinaire conformément aux textes en vigueur. D’autre part, il p r é s i d e le conseil technique et assure, après avis du conseil technique et communication au ministre de tutelle, l’exécution des délibérations afférentes à la gestion et à l’administration de l’université et de ses établissements. Il assiste, quand il le juge utile, aux délibérations des conseils d’établissements, sans toutefois les présider ni prendre part au vote. Par ailleurs, il nomme les jurys de doctorat, des concours d’entrée dans les écoles et instituts, ainsi que les jurys spéciaux. Il peut ester en justice et représenter l’université dans les actes de la vie civile, ordonne l’exécution du budget de l’université, dirige la publication des annales de l’université et assure la présidence des associations sportives et culturelles de l’université. Il est secondé par les Vice-recteurs. Enfin, il convoque tout conseil d’établissement en session extraordinaire en cas de crise grave paralysant le fonctionnement de celui-ci. Il est secondé par deux Vice-recteurs. A ce jour, le Recteur et ses deux adjoints occupent le bâtiment flambant neuf construit grâce à la coopération chinoise et inauguré en 2016 (Figure n°11), alors que le Secrétaire général et son équipe exercent encore à l’ancien Rectorat ; b) les Vice-Recteurs : ils sont nommés par décret en conseil de ministres parmi les enseignants de rang A, appliquent et exécutent, sous l’autorité du Recteur, les délibérations du Comité de direction dans les domaines intéressant particulièrement les affaires académiques, la recherche et la coopération. De tous ces adjoints, le Vice-recteur chargé des affaires académiques est l’ordonnateur délégué du budget de l’université, en cas d’absence du Recteur.
57
Figure n° 11 : Le bâtiment du nouveau Rectorat de l’université Marien Ngouabi23
En l’absence du Recteur et du Vice-recteur chargé des affaires académiques, le Vice-recteur chargé de la recherche et de la coopération est l’ordonnateur délégué du budget de l’Université. En dehors du fait qu’ils soutiennent le Recteur dans l’exécution de ses missions, les Vice-recteurs sont chargés de : - exercer le pouvoir hiérarchique sur tout le personnel de l’Université ; - Recruter le personnel non titulaire après consultation du Conseil technique de l’université à tous les emplois de l’Établissement ; - exercer le pouvoir de notation et le pouvoir disciplinaire à l’égard du personnel de l’université conformément aux textes en vigueur ; - contrôler le bon fonctionnement des services administratifs, des services communs et d’établissement d’enseignement supérieur qui constituent l’université ou qui en dépendent. D’autre part, ils appliquent et exécutent, sous l’autorité du Recteur, les décisions du Comité de direction de l’université dans les domaines intéressant particulièrement les affaires académiques, la recherche et la coopération ;
Ce joyau architectural a été inauguré en 2016 par Bruno Jean Richard ITOUA, alors ministre de l’enseignement supérieur. Photo M.L., Brazzaville (2017). 23
58
Figure n°12 : Une vue de la nouvelle Scolarité centrale 24
c) le Secrétaire général : il est nommé par décret pris en conseil des ministres, et assure, sous l’autorité et le contrôle du Recteur et des Vicerecteurs, la gestion administrative et financière de l’université, conformément au « décret n°2013-395 du 29 juillet 2013 » portant réorganisation de l’université Marien Ngouabi. Il assure le Secrétariat du Comité de direction et du Conseil technique de l’université ; d) le Comité de direction : c’est l’instance suprême de délibération des décisions prises par l’Université. Elle a pour missions essentielles de : - veiller à l’application des lois et règlements en vigueur en matière d’enseignement supérieur et de recherche ; - proposer la création et la dissolution des départements, des établissements, des programmes et des services spécialisés ; - décider de l’ouverture des postes budgétaires ; - décider des travaux de construction ainsi que de l’affectation des immeubles de l’université ; - déterminer les orientations des activités pédagogiques et de recherche ; - autoriser les actions en justice ; - accepter les dons et legs faits à l’université ; - délibérer sur les comptes de l’ordonnateur et de l’agent comptable et sur toutes les questions soumises par le ministère de l’enseignement supérieur.
24
D’après photo M.L., Brazzaville (2017). 59
Par ailleurs, il adopte ou réorganise le statut particulier du personnel de l’université, les plans de développement de l’université, les plans d’action de l’université et le règlement intérieur de l’université. De même que le projet de budget de l’université et les rapports d’évaluation sur l’université ; e) le Conseil technique : il est chargé de : - assurer les délibérations du Comité de direction en matière de formation et de recherche ; - approuver les plans de développement et d’action de l’Université et des établissements ; - adopter le règlement intérieur de l’Université et ceux des établissements ; - arrêter les programmes de formation, le projet de budget, les comptes de l’ordonnateur et du comptable de l’Université ; - évaluer et approuver les activités des établissements et les bilans des conseils des établissements ; - fixer le montant des droits d’inscriptions à l’Université et les procédures de recrutement du personnel. Son rôle est aussi de soumettre au Comité de direction pour adoption les propositions relatives à la formation et à la recherche, la publication des travaux de l’Université, les problèmes pédagogiques et les plans pluriannuels de recherche et les propositions relatives à la coopération en matière de recherché ; f) le Conseil d’établissement : c’est l’organe de délibération suprême au niveau d’un établissement de l’Université Marien Ngouabi. Il a pour mission de : - délibérer sur la création et la suppression des cycles d’études, des programmes de formation et de recherche, et du budget de l’établissement ; - Approuver le règlement intérieur de l’établissement ; - organiser en liaison avec les milieux socioprofessionnels, les stages d’imprégnation et de spécialisation ; - proposer les projets de formation continue et de formation à distance ; - organiser les activités physiques, sportives et culturelles ; - exprimer les besoins en personnel ; - donner un avis motivé sur le recrutement de personnel enseignant ; - répartir les crédits au sein de l’établissement et de décider de l’utilisation des menues recettes ; - siéger en session disciplinaire ; - approuver les bilans annuels de l’établissement ; - siéger en session disciplinaire ; 60
- pourvoir à l’organisation pédagogique et scientifique des unités pédagogique et de recherche. Il examine les délibérations des conseils scientifique et pédagogique de l’établissement, et fixe le calendrier académique de l’établissement. En définitive, la complexité des attributions oblige le Recteur à s’entourer d’une équipe dynamique et outillée, en raison du travail de qualité qui s’y fait même si souvent, les errements de parcours ne peuvent y manquer dans pareilles circonstances.
B- Le corps enseignant Le corps enseignant de l’université Marien Ngouabi est recruté sur la base des conditions fixées par le « décret n° 91/846 du 30 octobre 1991 » portant statut particulier du personnel de celle-ci. La formation pédagogique des étudiants est entièrement assurée par les enseignants détenteurs soit d’un Master, d’un DEA et d’un Doctorat. Toutefois, les enseignants recrutés de façon permanente sont soutenus par les enseignants vacataires, recrutés sur la base d’un contrat annuel renouvelable chaque année. Il sied d’ajouter, sans crainte d’être démenti, que ces enseignants vacataires sont également titulaires des mêmes diplômes suscités. Ces derniers sont pour la plupart des professionnels, exerçant dans des domaines techniques dont les enseignants permanents ne disposent pas toujours toutes les compétences. Le programme de formation à l’université Marien Ngouabi est, en majorité, inspirée de programmes des universités françaises, résultat de plusieurs années de colonisation dont la langue privilégiée était le français. Cependant, il est à relever qu’à son actif, les programmes de l’université Marien Ngouabi ont fait l’objet d’une homologation par le CAMES. Ils appliquent également les repères du CAMES, notamment en ce qui concerne le volume horaire imparti à la formation. D’une manière générale, ce volume horaire se situe entre 81 et 216 heures, quel que soit où va se trouver un enseignant. Le volume horaire des enseignants de l’université Marien Ngouabi est réparti selon ce tableau (Figure n°13)
61
Figure n°13 : Le volume horaire applicable à Marien Ngouabi Enseignants par grade
Volume horaire
Assistants Maître-assistant Maître de conférences Professeur titulaire
216 172 108 81
Toutefois, étant donné le déficit en personnel enseignant, ces derniers sont dans l’obligation d’aller au-delà et ces heures sont payées en heure complémentaire seulement s’ils font le double de leurs heures citées plus haut. Ainsi, faire plus d’heures supplémentaires dans ce cas, peut être à leur risque et péril. A noter aussi que, d’après l’« article 26 » du Statut particulier de l’université Marien Ngouabi, la rémunération se fait en fonction du grade, de l’échelon, de l’emploi et du poste de travail de l’enseignant conformément à l’annexe I du Statut de l’établissement (Figure n°14). Figure n° 14 : Effectifs des enseignants par établissement et par grade de 2018201925 Grade
CETP
Assistant
Maître assistant
ETS
Professeurs
Total
ENAM
04
20
05
00
00
29
ENS
20
34
27
14
04
99
ENSP
35
11
26
01
02
75
FD
10
37
03
03
00
53
FLASH
23
41
36
12
10
122
FS
44
30
41
19
08
142
FSE
21
48
25
04
01
99
FSSA
02
56
35
16
17
126
ENSAF
13
19
11
06
09
05
03
00
31
16 321
04 218
02 80
00 43
29 855
14
ISEPS ISG Total
25
Maître de conférences
07 193
Source : Direction rectorale/service du personnel enseignant 62
50
01
D’autre part, étant donné que le secteur de l’éducation est un secteur très sensible nécessitant l’homme qu’il faut à la place qu’il faut, l’inverse est intolérable car pouvant occasionner des conséquences mesurables et visibles. Ainsi, pour acquérir un personnel digne, le principe voudrait bien s’accommoder aux dispositions juridiques et réglementaires, plus au moins homogènes et diversifiées, en vigueur en République du Congo. La politique de recrutement obéit donc aux orientations et partant aux objectifs assignés par le gouvernement, de qui relève la matière de recrutement. Cette matière est bien réglementée, mais la grande réflexion réside dans la matière d’application sur le terrain de la pratique au niveau de la tutelle et de la disponibilité des postes budgétaires. Eu égard à cela, le recrutement à l’UMNG est réglementé notamment en ce qui concerne le personnel administratif, technique, ouvrier et de service. Pour ce qui est du personnel enseignant, la « décision n° 0078/ UMNG.SG.DPAAD.SPE du 29 avril 2008 » qui fixe la procédure de recrutement du personnel enseignant permanent à l’université Marien Ngouabi dispose, en son article 2, que le recrutement du personnel enseignant permanent relève de la compétence du Recteur. Ce dernier délègue ses pouvoirs à une commission instituée à cet effet (Figure n°15). Figure n°15 : Tableau de la Commission de recrutement Président Recteur de l’université Marien Ngouabi Vice-président Vice-recteurs Rapporteur Secrétaire Général de l’Université Rapporteur adjoint Directeur des Ressources Humaines Membres Chefs d’Établissement Directeur de la Recherche Directeur des Affaires Académiques Directeur des Affaires Financières Délégué Contrôle Financier Un représentant par syndicat des travailleurs de l’Université M.Ngouabi
C - La législation en matière de recrutement Le déclenchement du processus de recrutement n’est possible que lorsque ces trois conditions sont effectivement réunies, à savoir : 1- la Direction des ressources humaines fait le point sur le besoin en personnel enseignant avec définition des postes et profils ;
63
2- la Direction des Affaires financières, quant à elle, fait le point sur les postes budgétaires disponibles, car la procédure de recrutement ne peut être déclenchée que s’il existe des postes budgétaires disponibles et le recrutement ne peut s’opérer que par des remplacements numériques ou en cas de création de postes dûment autorisée par le gouvernement de la République. Deux possibilités sont susceptibles d’enclencher le processus de recrutement, à savoir : 1)- la détermination des besoins, en postes d’enseignants au niveau de chaque établissement, se fait d’abord en Conseil de département, ensuite en Conseil d’établissement. Et dans une spécialité donnée, elle est subordonnée à la vérification préalable du volume horaire dû (volume horaire obligatoire par enseignant et qui dépend du grade de celui-ci) de chaque enseignant permanent. Un enseignant qui ne peut atteindre tout son volume obligatoire dans son établissement d’attache, le complète autant que possible dans d’autres établissements dispensant les mêmes enseignements pour lequel il est spécialisé. Ces besoins sont dressés au Recteur par ordre de priorité. Ce dernier oriente le dossier, pour compétence, à la Direction des affaires académiques et, ensuite, à la Direction des ressources humaines pour entériner la procédure relative à la détermination des besoins des établissements en personnel enseignant. La Direction des ressources humaines, en collaboration avec la Direction des affaires académiques, fait le point définitif sur le besoin en personnel enseignant avec définition des postes et profils ; 2) le poste à pourvoir, entre les différents établissements relève de la compétence de la Commission de recrutement. Celle-ci procède à la répartition des postes à pourvoir en tenant compte non seulement de l’expression des besoins des établissements mais aussi des critères suivants : - devenir de la discipline par rapport au plan de développement de l’université Marien Ngouabi et de l’établissement ; - ratio enseignants permanents-étudiants dans la discipline ; - volume horaire moyen dans la discipline ; - distribution par grade des enseignants permanents intervenant dans la discipline ; - âge moyen des enseignants permanents intervenant dans la discipline.
64
Ainsi, pour tout recrutement le Recteur procède à un appel d’offres des postes à pourvoir ; 3) le traitement de la demande de recrutement : tous dossiers de demande de poste d’enseignant permanent à l’université Marien Ngouabi sont adressés directement par les candidats à M. le Recteur. Les établissements n’ont pas le droit de garder par devers eux les demandes de poste d’enseignants. Les dossiers qui leur parviennent directement, doivent être immédiatement transmis sans avis au Rectorat où ils sont centralisés au Cabinet du Vice-recteur chargé des affaires académiques et traités du point de vue de leur recevabilité puis transmis à la Direction des affaires académiques pour un prétraitement. Lorsque les conditions sont réunies, le Recteur déclenche la procédure de recrutement et transmet tous les dossiers de demande de poste d’enseignants permanents qui lui sont parvenus et qui correspondent aux spécialités retenues dans les établissements pour être examinés par les conseils de département concernés ; 4) l’acceptation des dossiers : nul ne peut être recruté comme enseignant permanent à l’université Marien Ngouabi si son dossier n’a pas reçu l’avis favorable au Conseil de département et Conseil d’établissement. A la suite d’une contestation écrite d’avis défavorable adressé au Recteur par le candidat concerné, la Commission peut décider de s’informer davantage auprès des membres du Conseil de département et/ou du Conseil d’établissement pour un nouvel examen du dossier. Les départements ne doivent examiner les dossiers qu’à la demande du Recteur. Dans ce sens, tous les avis et appréciations émis sur les dossiers à l’initiative des établissements et des départements en dehors des sessions de recrutement sont nuls et de nul effet ; 5) critères de discrimination : les Conseils de département et d’établissement examinent les dossiers qui leur sont soumis par le Recteur et attribuent des points à chacun et ce, conformément aux critères de discrimination prévus par l’ « article 13 » de la décision. Nonobstant ce processus du recrutement des enseignants, le Recteur qui est le garant de l’administration recrute parfois des enseignants que les dossiers ne sont pas passés par les établissements. Toutefois, les diplômés sont souvent vacataires avant d’être enseignants permanents au bout de 10 ou 12 ans. Il faut avoir au moins 41 ans pour être recruté avec son doctorat, son diplôme 65
d’étude approfondie (DEA) ou son master en commençant par l’Assistant avant d’être Maître assistant (Figure n°16). Actuellement, avec le doctorat on commence par le grade d’Assistant, avec le master et le DEA, on commence comme Chargé de cours d’où, les gens qui ont été recrutés à partir de 2014 avec le master et le DEA comme assistant ont été rétrogradés dans le but de leur pousser à avoir un doctorat. Pour les non-enseignants, depuis plusieurs années, le recrutement ne se fait plus selon les normes. Ce qui revient à dire que les modalités ne sont pas respectées, il y a plus de personnel ATOS que le personnel enseignant. Le rapport Enseignants-législation en matière de recrutement a pour base la pédagogie sans laquelle il ne peut être possible de réaliser les objectifs que l’université, dans son ensemble, s’est fixée. Figure n°16 : Effectifs des enseignants par établissement et par année de 2003 à 200826 Ets Année
2004-2005
2005-2006
2006-2007
2007-2008
584
503
487
443
479
ENS
778
949
1105
967
1039
ENSP
378
399
405
470
551
FLSH
2588
2970
3637
4245
4297
FD
1713
2125
2134
2450
2209
FS
1134
1211
1303
2125
1181
FSE
2086
3083
3287
3328
3278
FSSA
331
341
395
411
399
IDR
407
426
417
424
402
ISEPS
307
292
313
393
445
ENAM
26
2003-2004
ISG
334
345
383
398
473
Total
10.640
12.644
13.866
15.654
14.753
Source : Direction de la scolarité, et des Examens. 66
Chapitre IV - L’objectivité des réformes et les aspects pédagogiques Tout passe par la définition claire des objectifs (A), la description pédagogique au sein de l’institution (B) et la mobilité professionnelle (C).
A- Définition et rôle des objectifs L’université Marien Ngouabi a des objectifs bien définis dans son statut particulier à savoir : former une élite intellectuelle et professionnelle compétente dans les domaines divers ; offrir à des jeunes congolais la possibilité de faire chez eux de bonnes études ouvrant à des emplois ; limiter la fuite des cerveaux, car ceux des étudiants congolais qui réussissent leur formation à l’étranger sont peu enclins à revenir au pays, etc. Ces objectifs constituent déjà une perspective immense et qui, à n’en point douter, contribuera au développement de l’enseignement supérieur au Congo. D’ailleurs, l’université Marien Ngouabi, dans l’étude de faisabilité de ces objectifs, bénéficie de l’expertise de beaucoup d’enseignants des universités étrangères. Sur le plan international, elle a intégré le CAMES), tout en s’arrimant au système Licence-Master-Doctorat (LMD). A noter que le Congo présente, régulièrement au concours, des candidats pour l’acquisition des grades universitaires. Depuis cette intégration, l’enseignement supérieur laïc au Congo est en pleine et rapide expansion. La Conférence nationale souveraine de 1991 avait pris les actes : “050/91, 080/91, 085/91 et 088/91 datés du 21 juin 91,” allant dans le sens du développement de l’université Marien Ngouabi représentant, à l’époque, l’enseignement supérieur. A ce jour, sur la base de la loi scolaire n°25/95 du 17 novembre 1995 et en plus des textes spécifiques des établissements publics, des décrets relatifs à la Direction générale de l’enseignement supérieur (D.G.E.SUP) et aux Commissions d’agrément, cités tantôt, l’enseignement supérieur laïc est régi au Congo par les décrets n°96-174 du 15 avril 1996, fixant les normes applicables à l’école ; et le décret n°96-221 du 13 mai 1996 portant réglementation de l’exercice privé de l’enseignement rectifié par le décret n°99-281 du 31 décembre 1999 ensuite modifié par le décret n°2004-327 du 16 juillet 2004. 67
Cependant, avant l'indépendance le système éducatif congolais comprenait l'enseignement public et l'enseignement privé. Mais, avec l'adoption de la loi 32-65 du 12 décembre 1965 sur la nationalisation de l'enseignement, l'école avait été placée sous le contrôle du Parti et de l'État, réduisant ainsi la participation du secteur privé à la formation des cadres. C’est la loi n°008/90 du 6 septembre 1990 modifiant la loi n°20/80 du 11 septembre 1980 portant réorganisation du système éducatif en République Populaire du Congo qui a donné naissance au secteur privé de l’enseignement supérieur. Cette loi dispose, en son article 3, que « l’enseignement est dispensé par les établissements publics et privés », mettant ainsi fin au monopole de l’Etat sur l’éducation et la formation. Pour se positionner dans un système fiable en éducation, l’Etat avait pris l'engagement de réformer l’éducation en tenant compte aussi bien de son adaptation au contexte socioculturel local, des recommandations de la Conférence Nationale Souveraine (C.N.S) de 1991 que des différentes lois d'orientation scolaire, dont la loi n°25-95 du 17 novembre 1995 modifiant celle n°008/90 du 6 septembre 1990. En effet, de l’Institut d’études supérieures à l’université Marien Ngouabi, cet ordre d’enseignement ne regroupait que des établissements publics. A l’issue de ces réformes de dénomination, l’université Marien Ngouabi compte actuellement cinq Facultés, trois Instituts et trois Ecoles, soit onze établissements au total. Jusqu’au début des années 1980, une bourse d’étude était automatiquement attribuée à tout étudiant inscrit en première année d’université. L’unique condition posée au maintien de la bourse était le non triplement d’une classe dans le cursus universitaire. La rupture des grands équilibres macroéconomiques et la crise des finances publiques ont contraint l’État congolais à réformer le mode d’attribution des bourses. La volonté des pouvoirs publics d’instituer un concours de bourses a entraîné une manifestation générale des élèves et étudiants, manifestation dite « du 11-11 » ou (11 novembre 1986) qui s’est finalement traduite par l’introduction d’un critère d’âge. Dans un premier temps, la limite d’âge était fixée à 23 ans à compter de la première année à l’université. Cette disposition a été modifiée par la loi 25-95 du 17 novembre 1995. Selon l’article 31 de cette dernière loi, une bourse de l’enseignement supérieur est attribuée aux étudiants congolais titulaires du baccalauréat et âgés de 22 ans au plus, la limite supérieure de l’âge des boursiers est fixée à 30 ans, et des quotas de bourses sont réservés à différentes filières d’étude en fonction des besoins de l’économie du pays (Figure n°17). Et nul ne peut 68
bénéficier d’une bourse de l’enseignement supérieur pour une période de plus de six ans, sauf à justifier d’une inscription dans un cycle spécialisé. Figure n°17 : Effectifs des boursiers de l’université (2016-2017)27 Établissements
Attribution
Renouvellement
Faculté des Sciences et Techniques
887
932
Faculté des Sciences Économiques
1158
1108
Faculté des Sciences de la Santé
344
442
Faculté des Lettres, des Arts et des Sciences Humaines
1271
1441
Faculté de Droit
1258
1912
École Nationale d’Administration et de la Magistrature
26
34
École Normale et Supérieure
457
632
École Nationale Supérieure Polytechnique
460
641
École Nationale Supérieure d’Agronomie et de Foresterie
149
303
Institut Supérieur de Gestion
314
347
Institut Supérieur d’Éducation Physique et des Sports
94
213
6418
8005
Effectif total
Des bourses pour l’étranger ne sont octroyées qu’aux étudiants inscrits dans des filières n’existant pas au Congo (Figure n°18). 27
Source : Ministère de l’Enseignement supérieur 69
Figure n°18 : Tableau des boursiers congolais à l’étranger 28 Établissements
Attribution
Renouvellement
Afrique Centrale et du Sud
153
115
Afrique de l’ouest
714
458
Madrid
241
376
Asie et Amérique du Sud
324
316
Europe de l’Est
414
387
Europe occidental
532
340
/
2012
2378
4004
Cuba Effectif total
Le système de promotion des enseignants, qui prévalait jusqu’au début des années 1990, était celui de la promotion interne. Ce système, qui ne reposait sur aucun critère objectif pouvant faire l’objet d’un consensus, a été remplacé par les règles.
B- De la description pédagogique à l’université Marien Ngouabi Examinons l’aspect pédagogique sous deux angles : - le Diplôme d’études universitaires générales (DEUG) préparé en deux ans qui relevait du premier cycle ; - le deuxième cycle dit d’approfondissement conduisait à la Licence puis la Maîtrise, et le troisième cycle qui menait au Diplôme d’études approfondies (DEA) ou au diplôme supérieur spécialisé (DESS), et éventuellement le Doctorat. BAKINGU BAKIBANGU Yvette (2007) : Problématique des diplômes de l’enseignement privé au Congo. Mémoire de l’ENAM, cycle supérieur, AEN, 2007, p.33
28
70
1- l’organisation pédagogique sous l’ancien système : L’organisation pédagogique à l’UMNG, sous l’ancien système, était calculée sur le modèle français donc de l’ancienne métropole. Elle recevait toute personne titulaire d’un baccalauréat ou d’un diplôme admis en équivalence du baccalauréat. Et l’accès dans les Facultés était libre en dehors de la Faculté des sciences de la santé (FSSA). De ce fait, les Facultés offraient une large palette de formation. Elles dispensaient des enseignements fondamentaux, généraux de sciences, lettres, droit, économie, gestion et étaient axées sur la recherche et leur cursus universitaire s’organisait autour de trois cycles. Contrairement aux facultés, les institutions et les écoles accueillaient au terme d’une sélection par voie de concours. La plupart des Instituts et Ecoles proposaient des formations techniques et professionnelles de courte durée. Ils préparaient en deux ans, selon les établissements, au Brevet technique supérieur (BTS) ; en trois ans au Brevet de l’ENAM, à la Licence, au Diplôme universitaire technique (DUT), et au CAPCEG. Cependant, certaines institutions et écoles en l’occurrence de l’IDR actuellement appelé ENSAF, l’ENS et l’ISEPS dérogeaient à la règle, car ces établissements avaient un cycle de cinq ans qui préparaient au diplôme d’ingénieur pour l’IDR et CAPES pour l’ENS et l’ISEPS. 2- Le système Licence-master-doctorat29: Le LMD est caractérisé par l’harmonisation progressive des offres de formation, des diplômes et des cycles. En effet, « Le système LMD a vocation à devenir le référentiel international commun de la totalité de l’offre de formation supérieure. L’harmonisation des systèmes d’enseignement supérieur constitue le seul moyen qui puisse garantir l’internationalisation des diplômes et assurer la mobilité prônée par la réforme ». 30 31 Entré en vigueur en octobre 2007 , le LMD se caractérise sur trois grades universitaires à savoir : la licence, le master et le doctorat avec un découpage des périodes de formation en semestre ; une organisation des formations en parcours types et en unités d’enseignement ainsi que la KINGOUARI KINGUEGUI Jérôme : Place et rôle de la direction des affaires académiques dans la gestion du système « LMD » à l’Université Marien Ngouabi. Mémoire pour l’obtention du diplôme de l’ENAM, p.60-61-64. 30 KINGOUARI KINGUEGUI Jérôme : Place et rôle de la direction des affaires académiques dans la gestion du système « LMD » à l’Université Marien Ngouabi. Mémoire pour l’obtention du diplôme de l’ENAM, p.60-61-64. 31 Bulletin de liaison de l’UMNG : univ info n°00-mai 2006, p.4. 29
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mise en œuvre d’un système de crédits capitalisables et transférables. Chaque diplôme se décline en mentions et en spécialités contrairement à l’ancien système. Les études universitaires dans le LMD peuvent être accomplies en formation initiale ou continue. Aussi, chaque diplôme est accompagné d’une annexe descriptive et d’un supplément de diplôme. Dans ce système, les études sont structurées en semestres et déclinées en : six (6) semestres (pour l’obtention de la License) ; quatre (4) semestres après la Licence pour l’obtention du Master ; et six (6) semestres après le Master pour l’obtention du Doctorat. Aussi, les formations sont organisées en termes de parcours types de formation et d’unité d’enseignement. Les inscriptions à l’UMNG sont annuelles et individuelles, et sont conditionnées par une inscription administrative qui confère la qualité d’étudiant. Elles sont confirmées par le versement des droits universitaires tels que fixés par les textes en vigueur. Cependant, avec les nouveaux systèmes, il y a eu des changements dans les modalités d’inscription, les examens, les horaires, etc. Dans le LMD, les inscriptions administratives sont accompagnées des inscriptions pédagogiques qui permettent à l’étudiant de choisir son parcours de formation dès son inscription. Quant à l’évaluation des connaissances et compétences, elle est effectuée soit par un contrôle continu et régulier, soit par un examen terminal, ou encore par ces deux modes de contrôles combinés. A noter que dans les années 70, l’université comptait moins de 200 enseignants, aujourd’hui, avec son intégration au CAMES, elle compte 32 plus de 855 enseignants33 dont 43 professeurs, 80 maitres de conférences, 218 maitres assistants, 321 assistants, 193 CEPT et dans tous les domaines d’où le nombre des enseignants missionnaires a diminué. Ce qui explique, que l’UMNG a beaucoup évolué en cadres. Aussi, avant les années 2000, la recherche à l'université constituait le parent pauvre des politiques éducatives comme le souligne, ici, l’ancien Secrétaire du Comité Central du P.C.T, Jean François OBEMBÉ : « La recherche scientifique à l'université Marien Ngouabi se présente aujourd'hui comme la cinquième roue de la charrette. Elle est en effet diluée dans les affaires académiques au lieu d'être un département indépendant »33. Ainsi, Service du personnel enseignant (direction des ressources humaines de l’UMNG) Cf. Mweti, n°1499 (9è année), du mardi 24 mars 1987, P.1. Tiré du mémoire en ligne de Claude-Ernest KIAMBA (2009 32 33
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conscients de ce qu'aucun pays au monde ne peut se développer sans une base solide dans le secteur de la recherche, les politiques avaient décidé de faire de la science et de la technologie un moteur du développement au Congo. A ce jour, il existe une Direction de la recherche et grâce à celleci, les enseignants sont accompagnés au concours du CAMES, d’où l’augmentation d’effectifs d’enseignants chercheurs à l’université. En effet, la recherche est menée dans un grand nombre de laboratoires et groupes de recherche, et dans plusieurs disciplines pour lesquelles elle offre des formations. Les chercheurs de l’université participent à des réseaux scientifiques avec des chercheurs d’organismes étrangers. La structuration des diplômes délivrés par l’UMNG est, depuis 2012 et dans l’ensemble des établissements qui la composent, conforme au système Licence-master-doctorat (LMD). La mise en place de passerelles entre domaines de formation, mais aussi entre établissements d’enseignement supérieur des états de la CEMAC, est ainsi facilitée. En ce qui concerne le personnel administratif, chaque année il y a au moins 10 qui repartent à l’ENAM et 7 qui vont dans les Facultés ainsi que des cours à distance. Cette volonté des dirigeants de l’université à l’égard de son personnel prouve qu’elle créée des cadres tant en administration qu’à l’enseignement. L’université Marien Ngouabi a inscrit son développement dans une démarche partenariale diversifiée et ouverte aux institutions nationales et internationales. Cette démarche répond au souci de renforcer ses offres de formation et de recherche afin de l’arrimer à la modernité et lui permettre de participer à l’essor national, à l’intégration régionale et sous régionale. La politique de coopération de l’université Marien Ngouabi s’articule autour de quatre (4) axes principaux suivants : la coopération interuniversitaire, la coopération avec les organismes de recherche, le partenariat avec le monde du travail et le partenariat institutionnel. Cette innovation est l’introduction d’un nouveau procédé, d’une nouvelle technique ou d’un nouveau produit dans la société. Le processus de l’innovation est la meilleure critique qui va de la recherche au développement d’activités et qui peut engendrer des produits ou des services nouveaux34. André OUELLET, processus de recherche : une approche systémique, presse de l’université du Québec, 1981, p.54 34
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C- La mobilité professionnelle de la formation des cadres Concernant l’insertion professionnelle, la fonction publique a depuis toujours été le principal pourvoyeur de l’emploi aux diplômés de l’université Marien Ngouabi. La preuve est que la plupart des cadres moyens et supérieurs au service de l’administration congolaise sont formés dans cette institution. Aussi, il faut souligner que la quasi-totalité des enseignants du secondaire, par exemple, est le fruit de l’université, pour ne citer que ce secteur. A l’heure actuelle où la fonction publique ne dispose plus assez de postes budgétaires, certains des diplômés s’orientent de plus en plus vers les entreprises privées ; d’autres cependant, sont en chômage. L’université Marien Ngouabi offre une grande diversité de formations : formations générales classiques, professionnalisantes, professionnelles, formations à la recherche ainsi que des formations ouvertes à tous dans le cadre de ses partenariats institutionnels. Le large choix de formations et diplômes offerts, permet à chaque étudiant de poursuivre les études correspondant à ses aspirations personnelles. En 1972, il n’y avait qu’une douzaine de docteurs et dans toutes disciplines confondues. Aujourd’hui, il y en a plus de 600. C’est pour dire que l’université a fait un travail considérable en ce qui concerne la formation des cadres. Elle peut former des très haut cadres et dans la plupart des disciplines, on soutient même les thèses de doctorat. C’est pour montrer qu’un travail de formation a été effectué et c’est l’une des grandes réussites de l’université. Aujourd’hui on ne peut plus assister à ce qu’il manque de professeurs afin de faire venir les enseignants missionnaires car la plupart des professeurs sont sur place. a) L’hébergement, la capacité d’accueil et l’admission des étudiants : à l’université Marien Ngouabi, il y a deux voies d’admission qui sont possibles à un nouveau bachelier d’être reconnu comme étudiant au sein de celle-ci à savoir : - une admission sur titre pour les titulaires des diplômes requis pour chaque programme de formation. Ce mode d’admission concerne les facultés (à l’exception de la Faculté des sciences de la santé où l’admission est soumise à un concours) ;
Legrand, 1973, cité par André OUELLET, processus de recherche : une approche systémique, presse de l’université du Québec, 1981, p.54 74
- une admission sur concours. On distingue des concours dits externes pour les nouveaux bacheliers et des concours dits internes pour les fonctionnaires de l’Etat. Ce mode d’admission est propre aux Ecoles et Instituts, des quotas étant réservés aux étrangers dans les différents concours organisés. Il sied de noter qu’au cas où un étudiant n’a pu satisfaire à un concours, ce dernier a la possibilité de s’inscrire dans une faculté qu’il lui convient sauf la FSSA. En ce qui concerne les bourses et l’hébergement des étudiants, ceux-ci ne sont plus gérés directement par l’université, mais par une Direction générale des affaires sociales et des œuvres universitaires (DGASOU), rattachée au cabinet du ministre de l’enseignement supérieur qui manage ces problèmes. Cette direction disposait de (5) résidences qui logent les étudiants à savoir : le campus I (1 étudiant par chambre soit un total de 184 étudiants), le campus II (2 étudiants par chambre soit 320 étudiants), le campus impérial (6 étudiants par chambre soit 127 étudiants), Enam (4 à 6 étudiants par chambre soit 290 étudiants), Tcheulima (6 étudiants par chambre soit 185 étudiants) et campus Bayardelle (1 étudiant par chambre soit 14 étudiants). Sur un effectif total de 14.753 étudiants au titre de l’année académique 2007-2008, seuls 1.134 étudiants étaient officiellement logés par l’université. Cependant, depuis quelques années, elle ne dispose que de 4 campus car le campus impérial avait été détruit afin d’en construire un autre à l’avenir. D’où, on constate un grand nombre d’étudiants par chambre dans pratiquement tous les campus. Il faut préciser que ces effectifs concernent les étudiants qui sont officiellement pris en compte par les services des affaires sociales et des œuvres universitaires, en tenant compte de sa capacité d’accueil. Cependant, à côté de ces effectifs, il faut ajouter ceux des étudiants qui sont « sous logés » par les résidents titulaires des chambres. Aussi, il faut noter qu’il n’existe aucun service spécifique pour l’hébergement des étrangers. b) Les bourses : elles sont octroyées par l’État congolais à certaines catégories d’étudiants inscrits à l’université Marien Ngouabi. Les candidats à ces bourses doivent remplir certaines conditions fixées par la Direction générale des affaires sociales et des œuvres universitaires (DGASOU) près le ministère de l’enseignement supérieur. Les étudiants inscrits dans les écoles et instituts de l’université Marien Ngouabi, ainsi que ceux de la Faculté des sciences de la santé, bénéficient automatiquement de la bourse dès la première année, car cette inscription est subordonnée à la réussite à un concours. Et ceux des Facultés en 75
bénéficient après leur passage en classe supérieure donc à partir de la deuxième année. Toutefois, pour bénéficier d’une bourse il faut : être titulaire du baccalauréat, être inscrit(e) dans l’un des établissements de l’université Marien Ngouabi et être âgé(e) de 22 ans au plus au cours de l’année de l’obtention du baccalauréat. L’étudiant doit avoir réalisé un succès au premier et au deuxième semestre pour ceux (celles) qui passent en deuxième année, être âgé(e) de 23 ans au plus pour les personnes vivant avec handicap et moins de 30 ans au moment de la demande de la bourse, et être de nationalité congolaise. Pour ce qui concerne le renouvellement, il faut : être admis(e) en année supérieure, n’avoir redoublé qu’une seule fois dans un cycle et ne pas avoir dépassé 6 années de bénéfice de la bourse aux deux premiers cycles universitaires. Enfin, ne pas avoir un baccalauréat vieux de 10 ans ou plus. Le rétablissement de la bourse reste conditionné par deux succès consécutifs après la suspension de la bourse, un non-dépassement de 30 ans d’âge et de 6 ans de bénéfice de la bourse aux deux premiers cycles universitaires. Enfin, ne pas avoir un baccalauréat vieux de 10 ans ou plus et bénéficier d’une annulation d’année académique ou obtenir un certificat médical délivré ou contresigné par le médecin de la direction générale des affaires sociales et des œuvres universitaires (cas de maladie). Enfin, pour prétendre au bénéfice de la bourse, les candidats doivent fournir un dossier comprenant principalement les pièces exigées dont nous faisons fi ici. Ainsi, de la définition des objectifs à la mobilité professionnelle en passant par la description pédagogique, il n ’ y a q u ’ un pas : le respect des normes universitaires établies. Le nom de Marien Ngouabi nous rappelle ses règles d’importance, du fait que lui-même a été un exemple à tout point de vue.
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Chapitre V – Regard sur le Président Marien Ngouabi Le nom de Marien Ngouabi est indissociable de celui de l’université qui porte aujourd’hui son nom. Fils de paysan Koyo (Kouyou-Mbosi) du nord- Congo, officier de carrière, sorti des grandes écoles puis Président de la République, Marien a été un « champion » de l’unité nationale pour laquelle il a sacrifié sa vie. Orateur hors-pair et grand patriote, pour avoir fermement combattu le tribalisme et le régionalisme de son vivant, il a été le symbole d’amour pour son cher pays que ceux qui l’ont combattu utilisent aujourd’hui à des fins politiciennes. Mais Ngouabi, c’est aussi une aventure à l’« Ecole des sciences » devenue son lieu de prédilection qu’il visitait pour apprendre ou donner un cours, troquant sa blouse blanche contre sa tenue militaire, lorsque l’occasion le lui permettait. Nous allons examiner, en dehors de son activité scientifique brillante, les autres points saillants de son parcours, depuis sa formation de soldat jusqu’à son passage à la présidence de la République (A,B,C.).
A- Marien Ngouabi : sa vie et son œuvre D’après les éléments de sa biographie, le Président Ngouabi a connu une enfance assez paisible aux côtés de sa mère Mboualé, son père OsséréEndebe ayant quitté tôt ce monde. On peut alors dire qu’il n’a pas connu son géniteur, celui-là même qui manquait cruellement à sa vie. C’est dans son village natal d’Ombélé, sur les bords du fleuve Kouyou où il est né en 1938, qu’il grandit avant d’aller comme tout jeune de l’époque embrasser le banc de l’école. Jusqu’en 1953, en effet, il fait ses études primaires à Fort-Rousset (actuelle Owando) avant d’entrer la même année, à l'École militaire préparatoire général Leclerc de Brazzaville. Il en sort en 1957 et est affecté à Bouar (Oubangui- Chari), dans l’actuelle République centrafricaine. A partir de 1958, son passage au deuxième bataillon des tirailleurs du Cameroun lui vaut le grade de sergent. En 1960, le Congo devient indépendant et le jeune Marien est admis à suivre une formation d'Officier en France, tour à tour à l’École militaire préparatoire de Strasbourg et à l’Ecole militaire interarmes de Coëtquidam. En 1962, il rentre au Congo avec le grade de sous-lieutenant et est affecté à la garnison de Pointe-Noire, en qualité d’adjoint au 77
commandant du bataillon d’infanterie, Kimbouala-Kaya. L’année suivante (1963), il est promu lieutenant. En 1965, soit deux ans après, il devient capitaine et rentre à Brazzaville pour diriger le tout nouveau bataillon parachutiste des Forces armées congolaises (FAC). En 1968 (le 1er octobre), il devient commandant après le « Mouvement insurrectionnel de juillet » qui consacre ses efforts d’homme politique au sein de l’armée. Mais les mois à venir seront déterminants dans la vie de ce militant averti qui, très tôt, roula sa bosse au sein du parti marxisteléniniste de l’après-Youlou, le Mouvement national de la révolution (MNR). Ngouabi en est membre du Comité central en 1966 où il représente l’armée qui, après l’évasion de l’ancien président F. Youlou, avait été pourvue d’une branche armée dénommée Défense civile (bras armé de la Jeunesse du Mouvement national de la révolution-JMNR). Une nouvelle ère s’ouvre pour le pays, celle de l’unité, la concorde et la cohésion nationales, notions chères à Marien Ngouabi qui, à l’époque, vivait déjà mal les changements opérés dans l’armée par le pouvoir politique. Un présage pour les 30 années à venir sans que personne ne puisse s’en apercevoir, hélas ! Déjà, en 1966, des changements s’étaient opérés quand l’Assemblée nationale vote une loi qui transforme les Forces armées congolaises (FAC) en Armée populaire nationale (APN). Il s’ensuit la création de deux corps d’importance : une Direction politique à l’armée (DPA) et un Hautcommandement collégial dirigés par une Commission civile coiffée par un Officier membre du Parti congolais du travail, qui a rang de Commandant en chef de l’APN. Le capitaine Ngouabi s’insurge contre cette inféodation de l’armée au politique et émet de vives critiques à l’endroit du Président Massamba-Débat. En guise de punition, il est muté à Pointe-Noire, affectation qu’il refuse avant d’être arrêté et rétrogradé au rang de simple soldat de première classe. Le climat délétère qui se crée, pousse les militaires du Groupement aéroporté basé à Maya-Maya, à une espèce de rébellion que le Commandant David Mountsaka alors chef d’Etat-major (et neveu de Massamba-Débat) n’arrive à y mettre un terme. Il est fait prisonnier avant que l’intervention de la Défense civile ne rétablisse l’ordre. Ngouabi est finalement libéré et rétabli dans son grade. Au sein des forces armées, son influence ne cesse de grandir, l’imposant comme le chef incontesté des forces progressistes. Il publie son mémorable ouvrage 78
intitulé : Soldat du peuple dans lequel il donne sa vision de la politique nationale et traite de l’éthique du révolutionnaire dans la sauvegarde des intérêts de la Nation. Désormais, Marien Ngouabi qui cristallise la situation politique du pays apparait comme l’ennemi juré du président, l’homme à abattre si ce n’est à court ou moyen terme. En 1968 (le 3 août), alors que Massamba-Débat quitte le palais pour son village natal (Boko), laissant le pouvoir vacant, l’armée publie un communiqué invitant le Président de la République à reprendre ses fonctions. Le communiqué précise que le lieutenant Poignet, Secrétaire d’État à la Défense Nationale, assure l’intérim. D’autorité, les responsables militaires annoncent aussi la nomination de Ngouabi comme Commandant en chef de l’APN, en remplacement du capitaine Ebadep, et celle du capitaine Louis-Sylvain Goma comme Chef d’État-major, en remplacement du capitaine Kimbouala-Nkaya. La négociation entre les nouveaux hommes forts de l’armée et Massamba-Débat revenu à Brazzaville, s'ouvre le 4 août. Elle aboutit le 5 août, à la formation d’un nouveau gouvernement et à la constitution d’un Conseil National de la Révolution (CNR), de 39 membres. Douze officiers font partie du CNR dont Ngouabi, Alfred Raoul, Kimbouala- Nkaya et Sassou Nguesso. Massamba-Débat a aussi accepté de former un nouveau gouvernement. La nouvelle équipe reflète l’improbable équilibre établi après l’épreuve de force (Lissouba au Plan, Mouzabakani à l’Intérieur, Matoumpa-Mpolo à l’Information, etc). Le 16 août, un Acte fondamental abroge la constitution de 1963 et institue légalement le CNR, organe législatif provisoire. Il est présidé par Marien Ngouabi, alors que Massamba-Débat n’en est que simple membre. Le fonctionnement du CNR dépouille de fait le Président de la République du pouvoir réel. Le 20 août, le commandant Alfred Raoul est nommé Premier ministre, par décision du CNR. Le 4 septembre, devant l’érosion de son pouvoir, Alphonse Massamba-Débat démissionne de sa fonction de Président de la République. Il est aussitôt emprisonné. Le 7 septembre, le CNR aménage l’Acte fondamental et supprime la fonction de Président de la République. Le Premier ministre Raoul est chargé d’assurer l’intérim à la tête de l’État jusqu’à la mise en place d’institutions définitives. Le 31 décembre, l’Acte fondamental est de nouveau modifié. Le CNR, remanié et réduit à 28 membres avec la mise à l’écart des proches de Massamba-Débat, devient l’organe suprême de l’État. Le chef du Conseil est de droit Président de la République. Marien Ngouabi devient ainsi le troisième Président, à l’âge de 30 ans. Marien Ngouabi prend la tête d’un pays d'un million d’habitants, dont l’économie repose sur 79
l’agriculture (vivrière et d’exportation, notamment café et cacao), l’exportation du bois l’exploitation minière et le transport. Les services publics, quoique modestes, fonctionnent assez correctement. La corruption a été presque totalement éradiquée, la situation financière de l’État saine. Avec un taux de scolarisation de 95 % au primaire, tous les espoirs semblent permis. Mais il se pose le problème du réseau terrestre, du fait qu’aucune voie bitumée n’a été construite à l’intérieur du pays sauf quelques avenues à Brazzaville, Pointe-Noire et banlieues. La zone nord du Congo est la plus marginalisée, en dehors des 45 kilomètres asphaltés entre la capitale et l’actuel district d’Ignié, et les 16 autres entre Inonifalaises et Etsouali, œuvre du Président Youlou. Très tôt, il s’affirme au plan international comme messager de la paix et de l’unité, en faisant constamment le tour de l’Afrique et du monde pour faire entendre la voix du Congo.
B- Marien Ngouabi : la renommée internationale Au pouvoir, Marien symbolise pour la jeunesse l’union des nations opprimées dans l’action et l’esprit de libération face à l’impérialisme occidental. Passionné de sciences et très proche du peuple, il avait une vision diplomatique claire pour le Congo et l’Afrique. En 1958, en mission au Cameroun pour le compte de l’Armée française au Cameroun qui luttait contre les résistants et indépendantistes camerounais, Ngouabi est hanté par des massacres : villages entiers brûlés avec tous les habitants, femmes enceintes froidement éventrées, fuites éperdues à travers les forêts et les montagnes, etc. Ainsi, commença-t-il par dissuader les soldats camerounais qui travaillaient au compte des impérialistes, par des langages qui étaient inconcevables pour un homme venu en renfort pour le colon, du genre : « Vos compatriotes sont au maquis pour lutter contre la puissance coloniale et obtenir l’indépendance, plutôt que de vous associer au français pour combattre, faites au contraire tout ce que vous pouvez pour soutenir leur lutte…». En 1972 (le 28 juin), au sommet de l’OUA à Rabat (Maroc), il évoque sans sourciller : « la révision de tous les accords qui couvraient l’incompréhensible présence en Afrique des bases militaires étrangères, plates forme permanente d’agression contre notre indépendance et notre liberté ». Et exige : « La création de brigades internationales de libération qui devraient combattre sans délais partout où le colonialisme et le racisme continuent de régner avec arrogance, de 80
telles unités seraient placées sous commandement unique des dirigeants de mouvement de libération nationale ». Il s’agit de la Force armée africaine (FAA), une idée géniale du soldat Ngouabi ! Enfin, il termine en sollicitant : « L’intégration économique des pays Africains sous un nouvel aspect plus dynamique et qui répond aux intérêts véritables des peuples Africains. Ainsi dit-il : « Créons-nous aussi un véritable marché commun africain, un marché commun qui ne soit pas une simple filiale d’un autre combien plus célèbre, mais qui soit au contraire l’expression de nos véritables capacités d’intervention dans l’économie mondiale ». Des propos qui sonnent mal aux oreilles de tous ceux qui, encore sous le joug colonial, acceptent de se faire plier surtout lorsqu’il s’agit là d’un dirigeant socialiste. Plus tard, il écrira un ouvrage bien apprécié intitulé Vers la construction d’une société socialiste en Afrique (1976), dans lequel il étale son amour sans faille pour son continent, l’Afrique. De tout temps, il a voyagé ou reçu au Congo, diverses personnalités démontrant ainsi son rayonnement diplomatique. Jugeons-en par ce tableau (Figure n°19). Diplomatie et politique ont certes eu d’incidence directe dans la vie du Président (la fonction oblige), mais sa passion des sciences allait au- delà. Ainsi, intelligent et féru de la connaissance, il partageait ses journées entre son bureau et la Faculté lorsqu’il en avait le temps. Son souci du savoir pointu le poussait à aller partager des heures aux côtés des étudiants, passant outre les règles de sécurité chères à une chef d’Etat. De ce fait, il persévérait et arborait l’allure incontestée d’un grand universitaire, un homme de sciences.
C- Marien Ngouabi : la passion des sciences a) Ngouabi, l’impétrant : en sa qualité d’étudiant chevronné plein de curiosité et de persévérance, Marien Ngouabi avec l’aide d’Anaclet Tsomambet alors Professeur, amorce en 1977 la rédaction d’un mémoire de DEA sur l’énergie solaire. Selon lui, un tel travail visait, à terme, le développement du pays en se saisissant des opportunités qu’offre l’univers physique. Selon certaines indiscrétions, la veille de son assassinat fut un moment fort où il aurait dû être abattu, alors qu’il rentrait très tard, de l’université. Sa passion des sciences, principalement de la physique, était intacte voire exceptionnelle d’autant plus que l’un de ses encadreurs ne le quittait jamais. Ce dernier trouva la mort en 1976 dans un accident 81
d’hélicoptère près d’Owando (Cuvette), pendant que l’équipage accompagnait le Président à une partie de chasse. Figure n°19 : La portée diplomatique du Président M. Ngouabi (1969-1977) Années 1969 1969 1972 1972 1972 1972 1973 1973 1973 1974 1974 1974 1974 1974 1974 1974 1974 1975
Visites Caire ……… ............ Paris ……… Addis-Abeba Pékin Pyongyang Tripoli Mogadiscio ……… ……… ……… ………. ……… ……… … Abidjan
1975 1975 1975 1975 1975 1975 1975 1975 1975 1976 1976 1976 1976 1976 1976 1976 1976 1977 1977
Caire Alger Moscou ……… Havane Conakry Ndjamena ……… ……… ……… ……… ……… ……… ……… Luanda Lagos Libreville ……… ………
Réceptions … Brazzaville Brazzaville ………. Brazzaville ………. ………. ………. ……… ……… Brazzaville Brazzaville Brazzaville Brazzaville Brazzaville Brazzaville Brazzaville … ……… ……… ……… Brazzaville ……… ……… ……… Brazzaville Brazzaville Brazzaville Brazzaville Brazzaville Brazzaville Brazzaville ………. ………. ………. Brazzaville Brazzaville
Personnalités Marien Ngouabi Yakubu Gowon Ceausescu Marien Ngouabi Amilcar Cabral Hailé Selassié Marie Ngouabi Marien Ngouabi Marien Ngouabi Marien Ngouabi Gafar El Nimery J. Habyarimana J. Nyerere K. Kaunda M. Nguéma JB Bokassa LS Senghor Houphouët.Boigny
Pays Egypte Nigéria Roumanie France Guinée Bissau Ethiopie Chine Corée du Nord Lybie Somalie Soudan Rwanda Tanzanie Zambie Guinée Équatoriale RCA Sénégal Côte-d’Ivoire
Marien Ngouabi Marien Ngouabi Marien Ngouabi M.Ould Dadah Marien Ngouabi Marie Ngouabi Marien Ngouabi A.Ahidjo I.Amin Dada A.Neto K.Waldeim R.Castro Ruz S.M.Machel Do’oh Marien Ngouabi Marien Ngouabi Marien Ngouabi Ry-In-Kyou A.A.Neto
Égypte Algérie URSS Mauritanie Cuba Guinée Tchad Cameroun Ouganda Angola ONU Cuba Mozambique PNUD Angola Nigeria Gabon Corée du Nord Angola
En 1968, alors qu’il n’est pas encore Président, Marien se présente à un examen spécial pour entrer à l’Ecole supérieure des sciences (ESS) sans baccalauréat. La règle étant que pour faire les études supérieures, il fallait présenter un bac, une possibilité était donnée à ceux qui n’en avaient pas d’accéder aux études supérieures pour combler les effectifs à l’université 82
plus précisément à l’ESS. Après proclamation, Marien est admis. Mais hasard de l’histoire, arrive le 31 juillet avec une insurrection populaire qui chasse Massamba du pouvoir. Et une fois au perchoir, il revoit ses ambitions scientifiques afin de régler d’abord ses problèmes politiques. Deux ans après (1970), il décide de reprendre ses cours à l’Ecole supérieure des sciences. La même année, alors qu’il hérite de la CESB après l’éclatement de la FESAC, le Congo est appelé à trouver des moyens conséquents susceptibles de mettre en place une Université digne de ce nom. C’est avec le concours du président Marien Ngouabi, par ailleurs signataire des « ordonnances n° 29/71 du 4/12/71 » portant création de l’université de Brazzaville et « n° 9/74 du 14/5/74 » portant modification de l’ « ordonnance n°29/71 » du 4 décembre 1971, que l’on pense à sa construction à Brazzaville même,. Cette aventure devant être suivie d’un nombre important d’enseignants, eux aussi habilités à conduire des travaux intellectuels d’envergure pour le compte des étudiants, la tâche s’annonce ardue. En 1972, alors qu’il rentre au pays avec un Doctorat de physique, M. Tsomambet, seul à l’époque à avoir un tel diplôme du fait que l’enseignement supérieur était encore contrôlé par la France, il se voit donné la charge de diriger le département jusque-là sous le contrôle d’un certain Brunel, chimiste de nationalité française. Marien s’inscrit en première année de DEUG puis en deuxième (1973) et fait la connaissance de M. Tsomambet, quand il se pose le problème de son orientation après son admission. Deux possibilités s’offrent à lui : soit il fait la chimie, soit il opte pour la physique. Mais Marien choisit la deuxième option en s’inscrivant en Licence de physique comme tous les étudiants. Il faut donc aux Professeurs d’organiser les enseignements en tenant compte de l’emploi du temps du Président. b) L’apport des enseignants missionnaires : En 1974, il obtient sa licence de physique et décide de faire la maîtrise. Ironie du sort, il n’existe pas à cette époque d’enseignants compétents pour dispenser les cours de ce niveau. On lui fait savoir qu’il y avait possibilité de faire appel aux enseignants missionnaires, ce qu’il accepte. Grâce à son aide, la Faculté des sciences va bénéficier de la présence au Congo des Professeurs Karrara et Quintard venus de France afin d’organiser les cours de niveau maîtrise. Au sujet des travaux pratiques, il y avait sur place le Professeur Guiama qui officiait à l’Ecole normale supérieure (ENS) mais qui devait se déplacer à 83
la Faculté pour s’en occuper. C’est de cette manière que le département de physique a pu fonctionner, essentiellement avec l’aide des missionnaires. De même, le Professeur Karrara a été désigné pour dispenser le cours sur la mécanique optique qui était une nouvelle discipline ne figurant pas dans le programme de l’époque. Tsomambet en a profité lui aussi, pour apprendre la mécanique quantique de façon à la dispenser. C’est grâce à la ténacité du Président que la Faculté des sciences a pu introduire l’enseignement de cette mécanique à l’université. A cette période, les enseignants missionnaires mettent au point un programme de visite de certains départements du pays. Ce qui fut fait : Quintard pour Pointe-Noire, Daguenet pour la Likouala et Karrara pour la Cuvette, la région natale du Président. Cette tâche fut confiée au Professeur Tsomambet (lui aussi de la Cuvette) qui, étant empêché, donna à Marien (sobre qu’il était), de conduire lui-même cette mission. Mais elle tourna mal suite au crash d’hélicoptère qui coûta deux morts. Le Président qui en sortit indemne, finit quand même par obtenir sa Maîtrise de physique avant de s’inscrire en DEA., sur les conseils de ses Professeurs qui lui en ont sollicité le domaine. Il leur répondit qu’« il souhaitait celui qui puisse permettre de régler un peu les problèmes des populations » et ces derniers lui en proposèrent l’énergie solaire. Mais le problème est qu’il fallait là aussi, trouver un directeur de mémoire puisqu’à cette époque, il n’y avait pas un spécialiste en énergie solaire au Congo. Et le Professeur Kekou Traoré, qui donnait des cours de mathématiques à Brazzaville, dira qu’il connaissait au Niger le professeur Abdou Moumoni qui dirigeait l’Office d’énergie solaire à Niamey. Après un contact fructueux, il est finalement arrivé au Congo pour rencontrer le Président afin de bâtir un programme de travail. Mais ce dernier ne pouvait pas être sur le terrain pour faire les manipulations, car la première chose à faire était d’établir l’existence solaire au Congo. Ainsi, il fallait prendre les relevés au niveau de certaines régions (Sangha, Likouala, Cuvette, Sibiti, Pointe-Noire), avant de monter les données concernant le gisement solaire du Congo à partir duquel on tirait des conclusions sur la capacité du pays en matière d’énergie solaire. Ce travail sera finalement mis au point avec le Président qui soutiendra, en 1976 à la Faculté des sciences, son mémoire de DEA devant un jury au complet et très attentif. L’impétrant étant alors déclaré apte, il ne lui restait plus qu’à préparer une thèse.
84
Dévoué qu’il était, il avait besoin d’entretenir ces connaissances. C’est ainsi que pour lui permettre d’entretenir ses connaissances, le Professeur Tsomambet en profita pour lui proposer un cours en deuxième année de thermodynamique. Et comme la meilleure façon d’apprendre étant d’enseigner en vue de consolider ces connaissances, le Président donna son accord. Il dispensait alors ses cours chaque vendredi de 9h00 à 11h00 en deuxième année, comme le prouve cette photo (Figure n°20). Figure n°20 : L’immortel Marien Ngouabi en pleine séance de cours35
c) Le jour où tout arriva (ou la fin du mythe Ngouabi) : Le vendredi 18 mars 1977 à 11 heures, quand il a fini son cours comme d’habitude, il passa au bureau du Professeur A.Tsomambet dans sa blouse blanche et lui dit : « Qu’il avait constaté que dans le livre intitulé le « Brouillard », en page 356, on confondait les vitesses et les volumes. Est-ce que vous ne pouvez pas passer à l’Etat-Major pour m’expliquer ». Surpris, ce dernier lui demanda du temps pour le consulter afin de lui en apporter de l’éclairage possible. C’est ce même jour que Marien trouva la mort et Tsomambet aurait péri en même temps que lui, c’est sûr. Deux fois de suite, il aura ainsi échappé à la mort tragique aux côtés du Président : - la première, en 1976 dans les forêts de la Cuvette où empêché, il ne put prendre part à la partie de chasse qui coûta la vie à deux des compagnons du chef ce jour-là ; 35
https://www.bing.com/images/search?view=detailV2ccid 85
- la seconde, au Quartier général de l’armée où la fougue des assaillants était telle que le Professeur n’aurait pas survécu. Les hommes en armes bien outillés et attentifs à ses déplacements depuis belle lurette, ne l’auraient pas épargné dans ces circonstances. Hasard du destin ou simple chance, nul ne sait. Dans nos traditions, on parlerait de pouvoirs intrinsèques des ancêtres Koyo-Mbosi qui, comme toujours, veilleraient sur sa personne, des forces millénaires que tout Bantu doit porter en lui. Ainsi, ce proche de Marien de surcroît enseignant de qualité et premier de sa génération dans son domaine au Congo, doit nos éloges. Qu’il lui soit transmis, à travers ces lignes, toutes nos pensées des plus dignes ! A ses côtés, le Congo aura connu un Président exceptionnel en la personne de Marien Ngouabi, dont le parcours intellectuel peut être interprété comme un cas unique dans le monde de l’époque ; celui de voir un Président repartir à l’école, faisant fi des règles de sécurité les plus élémentaires et des lourdes charges inhérentes à sa responsabilité de chef d’Etat, qui exigent du temps, de doigté et de concentration. Ce caractère studieux, il le devait non seulement à son intégrité intellectuelle repérée très tôt à Fort-Rousset par ses encadreurs, alors qu’il était encore gamin, mais à une certaine volonté de principe frisant un peu d’orgueil personnel. Marien reconnaissait, d’ailleurs, qu’« il était gênant de commander quelqu’un qui est plus instruit que toi ». Ainsi, à Pointe-Noire où il était affecté, il avait sous lui le capitaine kimbouala Kaya qui avait le bac et lui non. Alors, il prit la résolution de repartir à l’école pour effacer ce qu’il croyait être une insulte, et non pas une distraction quand il passait son temps précieux en tant que Président de la République à étudier avec tout le monde comme étudiant. A cela, s’ajoute le fait qu’il voulait aussi s’affirmer devant la communauté nationale, en rejoignant le philosophe PLATON qui disait que : « pour commander aux autres, il faut détenir le savoir et la sagesse ». Et lui voulait aussi avoir la sagesse et le savoir. En définitive, Marien Ngouabi a beaucoup contribué à la réforme de l'université au Congo, dont il a été lui-même témoin dans son évolution, apprenant à ses heures. Même si, celle-ci a longtemps été différée à cause de la prééminence de l' « École du Parti » qui avait pour mission de former les cadres dont le Parti congolais du travail (P.C.T) avait besoin. La réforme de l'enseignement était d'autant plus urgente que la coexistence de ces deux structures de formation avait contribué à une véritable confusion 86
dans la manière de gérer l'enseignement au niveau du supérieur. La réforme était nécessaire car, selon lui, « L'université de Brazzaville devra nécessairement refléter notre option : voilà pourquoi dans les meilleurs délais, le marxisme- léninisme sera enseigné dans toutes les facultés sans exception ».36 Ainsi, l’hommage mérité à lui rendu par la nation d’avoir une université à son nom l’était en tenant compte de l’intérêt qu’il accordait à l’éducation, notamment à cette « Ecole des sciences ». Sa disparition brutale a donc contribué à créer dans le cœur des universitaires, un sentiment d’émoi au sein de notre alma-Mater qui d’ailleurs n’a cessé d’être secoué par d’autres situations non moins douloureuses.
NGOUABI M. (1975) : A société nouvelle, université nouvelle, in Vers la construction d'une société socialiste en Afrique, Présence Africaine, Paris, 1975, p.170. 36
87
Chapitre VI - L’université Marien Ngouabiet les défis du moment Notre université (nous l’avons souligné ci-haut) compte 11 établissements dont nombreux posent encore problème, notamment celui lié à une gestion globale nécessitant l’intervention du gouvernement de la République et des partenaires. L’objectif étant, à terme, d’apporter une contribution adéquate voire efficace à son développement en mettant sur le marché du travail des compétences attendues. La crise actuelle visible par le ralentissement de l’économie est un des éléments qui entament sérieusement les capacités et l’ardeur des enseignants, de l’administration et des apprenants dans leur qualité à rendre. Ainsi donc, si la tendance n’est pas tant de dissimuler les réalités de notre université, force est de constater qu’il subsiste d’énormes faiblesses tant structurelles que financières qu’il convient d’examiner (A,B,C,D.).
A- L’adéquation formation-emploi En effet, devant l’absence décriée d’enseignants dans certains domaines et d’infrastructures de formation, l’adéquation formation-emploi pose encore problème. Au fil des ans, les Facultés et Ecoles de l’université Marien Ngouabi gardent l’essentiel des missions et les mêmes filières de formation, laissant de côté les nouvelles problématiques induites par la dynamique sociétale. Plusieurs établissements manquent de matériels adéquats, notamment les Facultés alors que les Instituts et Ecoles doivent former davantage pour combler le vide que veulent remplir les secteurs comme celui des zones économiques spéciales en création. Ainsi, l’adéquation formation-emploi est l’un des problèmes qui minent l’évolution de notre enseignement supérieur, du fait que nombre de diplômés qui sortent ne trouvent pas d’emploi dans leur domaine. Ce n’est pas tant la faute de l’institution qui forme, mais de l’Etat principal employeur dont la politique à ce niveau vit au rythme d’une conjoncture souvent morose. La tendance est donc à une restriction des inscrits dans le but de limiter au maximum l’entrée à l’université, en vue de former moins dans les domaines où l’on attend le plus : l’éducation et la santé par exemple. Les établissements d’enseignement secondaire et technique affichent une pénurie de ressources humaines, notamment en mathématique, biologie, anglais, etc. Les hôpitaux manquent cruellement 88
de médecins notamment ceux de l’intérieur, les diplômés préférant Brazzaville que d’aller prester dans les localités éloignées dont nombreuses bénéficient pourtant, de nos jours, des infrastructures de qualité. Une situation extrêmement préoccupante qui pousse à une sélection rigoureuse aux concours d’entrée à l’Ecole normale supérieure (ENS) et à la Faculté des sciences de la santé (FSSA), deux établissements pourvoyeurs de cadres dont l’État a besoin et où le pourcentage d’admission par année est faible. Le modèle de compétences au Congo ne correspond donc pas aux besoins du marché du travail et du développement. Pour espérer rattraper ce retard, le pays se bat à former tous azimuts, nouant des partenariats avec des pays tiers ou amis. C’est ainsi qu’en vertu d’un accord de coopération conclu en 2013 par le Congo, trois vagues de plus de 2 000 jeunes sont actuellement à Cuba. La majorité d’entre eux étudient la médecine et l’électromédecine (discipline relative à l’application de l’électricité en médecine), l’objectif étant qu’à leur retour ils soient déployés dans les établissements sanitaires notamment les hôpitaux généraux en construction. Il s’agit aussi comme le dit François IBOVI37, alors ministre de la santé de la population de l’époque, d’ « améliorer la santé des populations et de mettre le pays à l’abri des évacuations sanitaires » et de « réunir toutes les conditions nécessaires pour que le pays dispose d’un système de santé performant et que la population jouisse d’une meilleure santé ». Aussi le Congo doit avoir « dans chaque hôpital général au moins 80 spécialistes en raison de deux par spécialité. Nous n’avions pas encore atteint les critères fixés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il faut un médecin pour dix mille habitants, il faut une sage-femme, un assistant ou un infirmier d’Etat pour quatre mille habitants et pour le reste des agents, il faut 2,3 agents pour mille habitants », a-t-il expliqué. Selon toute vraisemblance, ce nombre s’avère largement insuffisant et l’Etat devrait, pour pallier la carence en personnel, solliciter actuellement au Congo, le doubler voire le tripler. Mais depuis peu, de nombreux étudiants sont rentrés de la Havane pour des motifs liés à leur niveau très faible et à une indiscipline caractérisée, frisant un gangstérisme inacceptable. Ils ont alors été remis à leur famille respective en attendant d’être réinsérés dans des Facultés et Instituts 37
Le ministre face aux 600 étudiants en partance pour La Havane, Palais des congrès, Brazzaville 2013. Pour rappel, l’accord inclus la formation dans d’autres cursus comme l’agronomie, la communication. 89
supérieurs locaux en vue de la poursuite de leur formation. Après eux, plusieurs médecins viennent de rentrer, en pleine COVID-19, et devraient être affectés rapidement à leurs postes de travail. En clair, il subsiste en matière d’employabilité l’inéquation des formations dispensées avec les demandes exprimées par les employeurs notamment l’Etat. Il y a lieu de revoir les méthodes d’enseignement et les modalités d’évaluation qui ne favorisent pas la réussite des étudiants. Aussi, doit-on favoriser l’emploi des apprenants sortis de l’université, dont le critère premier demeure la mise à disposition des formés à ceux qui en ont besoin.
B- La lente mutation et le déficit d’enseignants L’université Marien Ngouabi est un établissement public à caractère scientifique, culturel, technique et professionnel dotée de la personnalité morale, de l’autonomie administrative et financière. Placée sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur (MES), elle est la seule institution publique dispensant l’enseignement supérieur en République du Congo qui n’a pas pris le train de la modernité emprunté habilement par les autres depuis près de deux décennies. En effet, les universités même les plus classiques, ont vu se modifier leur corpus pédagogique et structurel pour innover afin de conserver une place dans le bouillonnement d’intelligence où les meilleures écoles attirent les étudiants de tous horizons. A Marien Ngouabi, tout porte à croire que la mutation attendue ne s’est pas opérée, nonobstant les efforts fournis dans la rénovation et la construction des infrastructures par le gouvernement de la République des amphithéâtres et autres bâtiments administratifs. L’université devrait donc, outre les autres infrastructures à réhabiliter et à améliorer, équilibrer le ratio enseignantétudiant qui, se situant à environ un enseignant pour dix étudiants dans les Ecoles et Instituts, est d’un enseignant pour 80 ou 100 étudiants ; ce qui parait énorme. L’université Marien Ngouabi connait une insuffisance chronique d’enseignants (Figure n°21). La présence d’étrangers venus en renfort et des vacataires ne suffit pas, puisqu’ils ne remplissent pas toujours les critères établis. La durée des missionnaires sollicités dans le but de maintenir la 90
qualité des enseignements dans des domaines pointus reste très précaire, en raison des jours très limités qu’ils passent à dispenser des cours. Figure n°21 : Effectifs des enseignants par établissement et par année38 Ets Année
2003-2004
ENAM
29
ENS
2004-2005
2005-2006
2006-2007
2007-2008
28
27
26
26
71
70
63
58
55
ENSP
38
37
37
33
32
FLSH
127
124
122
114
110
FD
38
38
37
36
35
FS
107
108
103
96
91
FSE
56
56
54
52
52
FSSA
63
64
59
54
54
IDR
38
34
36
33
33
ISEPS
23
19
15
13
12
ISG
22
21
21
20
20
Total
612
599
574
535
520
Dans la plupart des Masters 1 et 2 options confondues, la quantité et la qualité représente un revers majeur qui empiète indubitablement sur la formation. De tous les enseignants permanents (642 en 2013) officiant dans les 11 établissements éparpillés à Brazzaville, un peu plus de la moitié exercerait réellement à ce jour. Nombreux présentent une double casquette. La plupart du temps, les fonctions politiques l’emportent sur l’enseignement et la formation en prend un coup sérieux. Ils sont conseillers à la Présidence, à la Primature, dans les différents ministères et au Parlement ou simplement dans des institutions comme la Cour des comptes, le Conseil économique, social et environnemental où leur expertise est vivement attendue. Pourtant, le poste pour lequel ils ont été engagés pour être régulièrement rémunérés est là, pendant, attendant d’eux un savoir-faire permettant non seulement à 38
Source : DRH/Service du personnel enseignant. 91
l’université d’avancer en qualité, mais aux apprenants de se faire une véritable virginité intellectuelle. Il est certes vrai que l’armature administrative de l’Etat a besoin d’universitaires outillés, bien au parfum de l’évolution politique et économique du monde, mais il est de leur devoir d’œuvrer à ce que l’éducation soit à la hauteur de l’espérance et c’est de leur chef. Ce tableau explique alors que les difficultés auxquelles se heurte le système LMD sont donc dues essentiellement à l’insuffisance des ressources humaines. En définitive, l’université Marien Ngouabi a besoin d’une mutation profonde de ses structures laquelle passe non seulement par l’insuffisance d’enseignants, mais aussi et surtout par l’amélioration des conditions d’accueil peu satisfaisantes à ce jour. A cela, s’ajoutent les offres de formation aux débouchés parfois difficiles et l’autonomie financière encore chancelante.
C- L’autonomie financière Elle inclut avant tout l’État en tant que garant de la gestion de l’institution dont elle dépend et qu’il revient ici d’examiner. 1- Le rôle de l’État : c’est la particularité qu’a l’université, en sa qualité d’entreprise publique, de fonctionner sur la base de la subvention du gouvernement. Certes elle est dotée d’une autonomie financière et d’une personnalité juridique, mais l’Etat doit lui confier les moyens et veiller au respect de leur utilisation. Ce qui suppose que celui-ci est toujours présent à 100% dans les actions de l’institution, c’est-à-dire qu’elle est ancrée dans l’Etat car, tout ce qu’elle fait est sous son contrôle. Il nomme le Recteur et toute l’équipe dirigeante qui l’accompagne dans l’exécution de ses prérogatives. Et dès lors que les obligations à lui assignées ne sont plus respectées, il appartient à l’Etat de rappeler sans cesse quelles sont les idées, les sentiments qu'il faut imprimer afin d’harmoniser les choses au sein de celle-ci. Tout dysfonctionnement de tâche appelle du ministre garant du secteur, de ramener à l’ordre la structure dont il a la tutelle et savoir de quelle manière il doit discipliner afin de soigner l’image de l’université. Ainsi, la présence de l’État est effective et ne peut, un seul instant, s’éloigner de l’université considérée comme le miroir de l’enseignement supérieur laïc au Congo. Hormis le Statut spécial particulier que celle-ci a 92
contrairement aux autres structures de la fonction publique, les agents de l’université sont aussi des fonctionnaires de l’Etat congolais car, le trésor qui paye les fonctionnaires est le même qui s’occupe des agents de l’université, bien que le Recteur soit l’ordonnateur principal des crédits. L’Etat a une autorité sur l’université et il ne peut que la consacrer, la maintenir, la rendre plus consciente aux particuliers. L’emprise de l'État sur l’université Marien Ngouabi est donc inaliénable car elle permet à celui-ci de dégager ses principes essentiels, de mettre en place les conditions adéquates pour que les enseignants puissent bien faire leur travail de transmission du savoir aux enseignés, de veiller à ce que nulle part il ne soit mis un terme sans justification à l’évolution ou au déroulement des cours. Toutefois, contrairement à certaines structures sous contrôle l’université bénéficie d’une autonomie financière, ce qui signifie l’autonomie non seulement dans la détermination des ressources budgétaires nécessaires, mais aussi dans l’exécution et la gestion de ce budget. 2- L’autonomie financière : elle constitue une certaine indépendance permettant à l’université Marien Ngouabi de préparer un plan d’engagement annuel, puis l’Etat alloue des crédits c’est-à-dire des lignes budgétaires en fonction de son budget annuel lui permettant de réaliser toutes ses projections administratives et financières et ce, sans aucune injonction de sa tutelle. Elle dispose d’une libre gestion de son budget malgré que celui-ci soit alloué par tranches, le pouvoir de décision revenant à l’ordonnateur principal qu’est le Recteur. Il ordonne le décaissement des fonds et le paiement des mandats. L’autonomie financière est assurée d’un côté par un budget propre qui est constitué de subventions de l’État, de l’autre par ses recettes propres constituées en grande partie par des frais d’inscription, des locations des amphithéâtres, etc. En 2017, le budget de fonctionnement de l’université Marien Ngouabi était arrêté en recettes et en dépenses à la somme de trente-six milliards cent vingt-quatre millions sept cent dix-sept mille huit cent six (36.124.717.806) francs CFA ; comprenant la subvention de l’Etat et les ressources propres soit un milliard cent cinq millions cent quatre- vingt mille (1.105.180.000) francs CFA. Les dépenses quant à elles 93
comprenaient les charges de personnel ((32.084.557.806) francs CFA) et de fonctionnement ((4.040.160.000) francs CFA.) soit un total de 36.124.717.806 comme noté ci-dessus (Figure n°22). Figure n°22 : Dépenses de fonctionnement et de personnel par centre d’activités 2017
Nature de la dépense Dépenses de personnel
32.084.557.806 4.040.160.000
Dépenses de fonctionnement Total
36.124.717.806
Il prenait en compte les éléments suivants : - le recrutement du personnel enseignant et administratif, technique, ouvrier et de service (ATOS) ; - le renforcement des fonds documentaires de la Grande bibliothèque universitaire ; - la consolidation de la mise en œuvre du système LMD ; - l’organisation des missions de terrain et des stages ; - la redynamisation des formations doctorales ; - l’amélioration de la gestion de la scolarité et des examens par la mise en réseau des établissements de l’université Marien Ngouabi. Un travail que souvent les gestionnaires ont réussi non sans difficultés, surtout qu’aujourd’hui le pays est en butes à une crise due à la baisse du baril de pétrole. Et que l’État, dans tous les secteurs de la vie nationale notamment celui de l’éducation, a été dans l’obligation de tout revoir à la baisse. Le tableau (ci-dessous) montre que l’État subventionnait jusqu’à une certaine époque l’institution, à hauteur de 97 % et les ressources propres s’élevaient à 3% de son budget de fonctionnement. Le constat est que le budget de l ’ u n i v e r s i t é provient essentiellement de la subvention de l’État, et celle- ci a diminué en 2018 suite au problème de trésorerie que connaît le Congo (Figure n°23).
94
Figure n°23 : Récapitulatif des recettes 2017 et 2018 à l’université Marien Ngouabi
Libellé des comptes
2017
Production, vente de 1.043.500.000 biens et services
2018
+
-
881.900.706
161.599.294
Subventions de l’État 35.019.537.806
29.184.000.000
5.835.537.806
Autres produits et produits divers
61.680.000
44.938.433
16.741.567
36.124.717.806
30.110.839.139
6.013.878.667
Total
A ce jour, des postes de dépenses comme les heures supplémentaires, les primes d’encadrement de thèses de mémoires… sont en berne, et Marien Ngouabi qui attend presque tout de l’État devrait avoir de la peine à définir les mécanismes d’affectation de la subvention à lui allouée. Il lui faut faire des choix stratégiques, mener une véritable politique de recrutement, gérer avec minutie son maigre budget actuel, assurer une nouvelle mission d’insertion professionnelle des étudiants, bref savoir gérer pour le bien de la formation des jeunes dont le pays a besoin. Pour tout dire, l’autonomie représente un tournant véritable car indispensable à la gestion optimale de l’université comme la nôtre qui a encore d’énormes problèmes de gestion. Mais rien n’est acquis tant que l’État a encore une place prépondérante dans la gestion financière de son enseignement supérieur. Celui-ci aura les coudées franches quand le moment venu, il sera capable de s’autogérer ou d’avoir des moyens pouvant lui procurer de ressources suffisantes, que d’attendre que l’État subventionne à hauteur de plus de 90%.
95
D- Les Nouvelles technologies de l’information (NTIC) : mythe ou réalité ? Les NTIC sont devenus un enjeu important dans la vie des humains tant leur utilisation dans tous les domaines bouleverse les vieilles habitudes acquises depuis des lustres. S’il y a encore quelques décennies l’homme balbutiait à atteindre le bout du monde par des moyens moins performants, de nos jours la technologie a tout révolutionné, rendant plus aisée la communication. Pour l’UNESCO (2003), ces technologies contribuent à l’accès à l’éducation, à tous les niveaux, de surmonter les distances géographiques et de donner aux enseignants et aux apprenants des possibilités fiables par l’accès à l’information et à des méthodes d’apprentissage novatrices - tant en situation de scolarité que par le téléenseignement ou l’enseignement non formel. Ainsi, les NTIC ou Nouvelles technologies de l’information et de la communication représentent tous les outils à notre disposition en termes de télécommunication, d’informatique, d’audiovisuel, d’internet, de multimédias, etc. ; ce qui permet l’émergence de nouvelles pratiques dans notre quotidien, aux plans professionnels que privé. Ces nouveaux outils apportent de la performance et de la productivité à ses utilisateurs nonobstant ses inconvénients. L’information a donc amélioré les niveaux de productivité, faisant bénéficier aux travailleurs une réduction du temps de travail tout en conservant le même niveau de vie. Les entreprises utilisant les NTIC sont, par exemple, en mesure de faire face à la concurrence, contribuant ainsi à la création de nouveaux emplois et dont nombreux sont réalisables à partir d’un domicile ou d’un bureau ; rendant plus courtes les longues distances jadis incontournables. Voici donc plusieurs décennies que la production, la diffusion et le renouvellement des connaissances contribuent au développement d’un pays. L’ampleur technologique fait de l’accès au savoir une condition essentielle de la participation à l’économie mondiale telle qu’on la connaît jusque-là. Les NTIC ont considérablement modifié le rythme de production, d’utilisation et de distribution du savoir, comme l’attestent l’augmentation de la publication des documents scientifiques et le nombre des demandes de brevets. C’est dans ce contexte que l’université Marien Ngouabi a créé en 2012, une Direction des technologies de l’information, de la communication et des statistiques (DTICS), allant dans le sens de l’idée impulsée par la 96
Conférence sur l’enseignement supérieur organisée à Paris en 1998 qui stipule que : « Le XXIème siècle sera celui du savoir: en raison de
l’importance et de la rapidité des changements auxquels nous assistons, la Société est de plus en plus fondée sur le savoir, de sorte que l’enseignement supérieur et la recherche sont désormais des composantes essentielles du développement culturel, socio- économique et écologiquement viable, des individus, des communautés et des sociétés ». Le savoir véhiculé par les TIC étant devenu le facteur le plus important du développement économique, démontre la capacité d’un pays à tirer profit de l’économie fondée sur le savoir. Les NTIC sont devenues des vecteurs d’échange universel et brisent les frontières entre États. Elles gratifient le secteur de l’enseignement supérieur d’outils de croissance et des moyens d’acquérir une plus grande autonomie, celui- ci et la recherche scientifique constituant des mallons fort pour le progrès des peuples par l’innovation, l’inventivité et la créativité.
Au Congo (de façon générale), ce tableau est encore moins reluisant en raison du retard pris dans la mise en place des structures adéquates dont souffre d’ailleurs encore toute l’Afrique centrale. Pourtant, le non-usage des TIC apparaît comme un handicap à la formation des élites de demain surtout avec le fonctionnement du système LMD. On constate alors que dix ans plus tard, la mise en place de cette stratégie n’a pas un effet spectaculaire sur l’intégration des NTIC en contexte éducatif, plus précisément en milieu universitaire. Alors que l’intégration des TIC dans l’enseignement supérieur implique une réforme des pratiques universitaires en termes d’administration, d’organisation et de pédagogie. Ce que font remarquer les auteurs d'Africampus (2008-2009) lorsqu’ils pensent que « C’est donc pour innover dans ses propres pratiques pédagogiques, administratives et techniques, que l’université doit s’approprier les technologies de l’information et de la communication pour en exploiter toutes les propriétés informationnelles et communicationnelles certes, mais aussi relationnelles ». Il sied de noter que depuis lors, le gouvernement a affirmé sa volonté de faire de l’usage des NTIC une priorité en publiant, en 2004, un document portant sur « les stratégies à mettre en place pour développer les TIC au Congo ». Dans ce document, le Congo affirme sa volonté de faire de la population congolaise des « cyber-citoyens », et de transformer son retard relatif en avantage décisif en s’engageant dans la voie de la maîtrise des TIC comme outil privilégié au service d’une stratégie ambitieuse de 97
développement économique, de lutte contre la pauvreté et de promotion de la bonne gouvernance. Selon le ministre BJR ITOUA (mai 2019), « l’impact des TIC sur la production, l’utilisation et la diffusion du savoir scientifique est considérable. Ces technologies offrent de nombreuses possibilités de combler la fracture scientifique en facilitant l’intégration des scientifiques nationaux et internationaux dans des réseaux et en fournissant aux décideurs de l’information et des connaissances scientifiques qui les aident à mieux gouverner ». Mais, le temps que l’on n’y prend à connecter différents secteurs de l’État dont l’enseignement supérieur laisse à désirer. Tout se fait en termes d’ambition comme si numériser ne constituait pas en soi, une urgence, notamment à l’université qui souffre encore de gros maux tant décriés. Comme si, dans le cadre d’une gestion efficiente du système universitaire, la numérisation n’apparaissait ne pas être une réponse aux attentes des enseignants, du personnel administratif et des étudiants en quête de meilleures conditions de travail. Aujourd’hui, l’introduction du numérique dans les universités, à travers l’enseignement à distance ou le télé-enseignement, permet de rendre les cours accessibles via internet. Les universités publiques Marien Ngouabi et Denis Sassou Nguesso (en construction), qui devraient accueillir chaque année des milliers de nouveaux bacheliers, ne feront pas exception à la règle. Dans ces deux cadres, le numérique permettra au corps professoral estimé à plus de 5 000 enseignants (si l’on n’exagère !) de dispenser des cours aux nombreux étudiants que compte le Congo. Les discours tenus doivent donc être suivis d’effets pour ne pas que l’on reparte toujours aux calendes grecques. L’évolution n’attend pas et le ministre lui-même le constate dans cet extrait de son discours3943 prononcés récemment face aux universitaires, nous citons : « Le numérique que nous allons très bientôt introduire va sans nul doute améliorer considérablement les conditions de travail tant pour les enseignants que les enseignés ». Et s’il annonce les classes intelligentes, le e-Learning, le tableau digital et autre, il présente en outre le TIC SUP (ou Technologies de l’Information et de la Communication de l’Enseignement Supérieur), projet qui se résume en plusieurs modules clefs comme le suivi des étudiants de l’inscription jusqu’à l’obtention d’un emploi, la confection Discours prononcé en Juillet 2017, dans l’auditorium du nouveau bâtiment du rectorat de l’université Marien Ngouabi 39
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des cartes à puce qui vont servir d’accès à tous les services universitaires. Aussi, a-t-il parlé du Datacenter, pour stocker et sécuriser les données, de même qu’une connexion internet au Rectorat permettant aux étudiants de naviguer à un coût très réduit. Ce qui, à terme, aboutirait à l’équipement des étudiants en tablettes numériques et des enseignants en ordinateurs portables. La mise en œuvre du projet TIC SUP se fera suivant quatre (4) axes prioritaires à savoir : - les infrastructures ; - les services ; - la production de contenus éducationnels ; - la gouvernance. Des formations devraient être organisées (selon lui) en fonction des besoins spécifiques pour outiller les enseignants en vue d’une utilisation optimale des NTIC. Car l'on observe encore quelques réticences de la part du corps enseignant à les utiliser, peut-être parce qu'il nourrit encore des doutes sur ses valeurs pédagogiques. Ce qui suppose qu’à l’heure actuelle, bon nombre d’enseignants n’ont fait recours aux NTIC. Une formation serait alors donnée à un échantillon d’étudiants qui se chargera ensuite d’assurer le relais avec leurs camarades. Dans le cadre de cette réforme, le numérique sera également utilisé pour mieux orienter les nouveaux bacheliers. Ainsi, trois systèmes seront mis en place : l’orientation scolaire, l’offre des formations en ligne et l’accès à la bourse. Mais ceci ne doit pas se résumer en ambition politique (comme nous l’avons dit) pour simplement être jeté aux oubliettes comme tant d’autres projets par le passé, mais devrait se concrétiser en véritable chantier d’où jaillira l’espoir de tous les Congolais en quête de formation. Les paroles, notamment celle d’un responsable de cette envergure, n’ont de l’intérêt et de la résonnance que dans la mesure où elles savent satisfaire ceux ou celles qui les écoutent et les lisent dans les lignes. Autrement, elles n’auraient servi qu’à biaiser l’opinion mieux ceux auxquels elles sont destinées à court, moyen ou long terme. Le constat fait dans les 11 établissements de l’université Marien Ngouabi montre aussi une inadéquation avec les nouvelles normes de l’enseignement supérieur et des carences en termes d’équipements, de connectivité et de technocompétences. Les observations faites depuis plus de 10 ans n’ont révélé, dans ce sens, aucune forme d’usage des NTIC durant les cours. Au cours 99
des séances d’observations, on a recensé aucun équipement numérique dans les salles de cours affectées aux étudiants. Ainsi, le grand défi aujourd'hui du gouvernement congolais, est d'amener les NTIC à intégrer complètement autant la pédagogie que l'administration des services universitaires40. A contrario, le non-usage des NTIC apparaît comme un handicap à la formation des élites de demain surtout avec le fonctionnement du système LMD. Les avantages de l'enseignement magistral étant multiples et bien connus. Par exemple, cette approche convient particulièrement bien à l'enseignement devant de grands groupes, et elle permet en plus de communiquer beaucoup d'informations en peu de temps. Il s'agit donc d'une formule d'enseignement économique, un avantage certain dans les conditions actuelles, compte tenu des maigres ressources financières et matérielles de l’Université Marien Ngouabi. C'est aussi une approche rassurante pour le professeur qui est en complète maîtrise des événements, et pour les étudiants parfaitement familiers avec le fonctionnement de ce type d'enseignement. Pour toutes ces raisons les NTIC, si elles sont bien utilisées devraient devenir de plus en plus incontournables en formation au sein de notre alma mater. Encore faut-il en connaître les principales forces et faiblesses pour pouvoir les utiliser à bon escient. C’est ainsi qu’en cette période où la technologie prend de l’ampleur, l'université Marien Ngouabi doit faire preuve d'imagination et de créativité pour réussir à remplir les missions qui lui sont confiées. L'intégration des NTIC aux activités quotidiennes d'enseignement à l’université est, depuis un certain temps déjà, perçue par plusieurs comme la solution aux problèmes pédagogiques qui assaillent l'université. Cette solution « miracle » risque, si on l'applique sans discernement, d'entraîner rapidement désillusion et frustration même chez les plus enthousiastes. Il est donc essentiel, si l'on veut réussir l'intégration harmonieuse des NTIC aux outils pédagogiques déjà en place, de bien en cerner les forces et les faiblesses, et surtout, de bien identifier les situations où ces nouveaux outils sont les plus prometteurs en pédagogie universitaire. Il sied alors de faire comme à la Grande bibliothèque universitaire (GBU) où un accès internet haut débit venait d’être réalisé dans le cadre de la coopération sino-congolaise, avec l’appui technique de l’opérateur télécoms AIRTEL qui s’est chargé d’installer la fibre optique. 40
Cf. le ministre Itoua, 11 mai 2019. 100
En définitive, les NTIC ne sont plus un mythe au Congo mais une réalité depuis l’atterrage à Matombi au sud (proche de Pointe-Noire dans le département du Kouilou) du câble sous-marin en 2012. Cette connexion aux autoroutes de l’information s’est faite dans le cadre du projet du câble sousmarin de la côte ouest d’Afrique (en anglais West Africa Cable System (WACS). Mais elles ont encore du mal à s’imposer dans les structures d’enseignement supérieur, malgré la volonté du gouvernement de la République qui veut bien émailler l’ensemble du territoire en infrastructures de connexion. A cette insuffisance, se greffent aussi les turpitudes de l’histoire de notre pays, faite de soubresauts dont on ne peut s’en dérober et qui ont été préjudiciables à l’évolution de l’éducation dans notre pays.
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Chapitre VII - L’instabilité politique : source de déstabilisation collatérale de l’éducation Les soubresauts militaro-politiques, à l’origine de plusieurs malheurs, ont fortement contribué à ébranler l’image de l’enseignement supérieur dans notre pays. En effet, de 1956 à nos jours, on ne compte pas moins d’une vingtaine de crises ayant émaillé le Congo non sans conséquences sur l’éducation, auxquelles s’ajoutent années blanches et grèves à répétition dues à la situation économique précaire souvent décriée. On pourrait me reprocher (à tort) de m’attarder sur cet aspect essentiel, mais l’on oublie que les faits collatéraux produits à l’occasion de ces soulèvements sont énormes : cessation des cours, attaques par des bandits armés, occupation et détérioration des structures scolaires et universitaires, etc. En dehors des facteurs endogènes connus et propres à notre enseignement supérieur laïc, je vais analyser ici l’impact de l’instabilité politique sur l’université Marien Ngouabi de 1956 à nos jours. L’objectif étant, entre autres, de faire l’état des lieux d’un pays dont le dialogue a souvent été sabordé au profit des intérêts mesquins et puérils, toujours au nom de la région ou de la tribu, reléguant au second plan l’intérêt supérieur de la Nation. Quatre (4) grands moments expliquent cette turbulence politique à savoir :
A- L’ère des coalitions instables (1956 à 1990) A partir de 1956, le pays est en perpétuelle effervescence due à la fois aux coalitions de circonstance mal bâties et aux ambitions des premiers leaders politiques en manque d’électorat. D’où la sempiternelle idée de revanche impliquant assassinats, coups de force, maquis et débordements idéologiques, et dont l’issue sera un affrontement inévitable. 1- L’échec de la coalition Youlou-Opangault et la guerre de 1959 : peu avant la proclamation de la République en 1958, le Congo apparaît comme un terrain propice aux affrontements entre factions en quête de revendications identitaires, mettant en déroute les bases de la vie en société et la construction d’une véritable Nation. Ces conflits dont le point d’ancrage demeure les 102
tensions politiques croissantes liées aux alliances, opposent deux mouvances de l’époque à savoir :
- l’Union pour la défense des intérêts africains (UDDIA) de Fulbert
Youlou ;
- le Mouvement socialiste africain (MSA) de Jacques Opangault ; - etle Parti progressiste congolais (PPC) de Félix Tchicaya.
Ces deux camps qui s’affrontent par tribus interposées, créent parmi les populations des frictions fort-évidentes grâce au nouveau visage politique qui s’affiche à l’horizon. Tout part de 1956, lorsque la Loi-cadre proposée par Gaston Deffere et votée au Parlement français provoque une évolution rapide voire spectaculaire. Elle prévoit un ensemble de réformes qui accentuent la « personnalité des territoires » et accroît « la participation des Africains à la gestion des affaires de l’Etat ». Ainsi, les assemblées territoriales élues au suffrage universel et au collège unique reçoivent des attributions étendues, le but poursuivi étant l’épanouissement de la personnalité des territoires et la remise aux organes issus du suffrage des populations dans la conduite des affaires locales. Elles votent le budget des territoires, reçoivent le droit d’édicter des règlements administratifs et un véritable pouvoir administratif dans certains domaines. Elle contribue puissamment à développer chez les Africains le sentiment qu’une évolution rapide est possible, et que par la pratique des élections, éveille les territoires d’Afrique noire à la vie politique. Au Congo, Youlou devient maire de Brazzaville grâce aux élections municipales face à Opangault avec 23 sièges contre 11 à la SFIO (Section française de l’internationale ouvrière) et 3 au Parti progressiste congolais (PPC) de Tchicaya. De son côté, Tchitchellé est élu maire de Pointe-Noire, écartant du coup le leader Tchicaya. En 1957, ont lieu les élections territoriales qui donnent une victoire étriquée de 23 sièges à Opangault contre 22 à Youlou, poussant le premier à former le gouvernement dit de coalition. Les mouvances UDDIA et MSA se répartissent équitablement les postes ministériels dont les plus importants (Agriculture, Affaires sociales et travail) reviennent à Youlou tout comme la présidence de l’assemblée. Cette coalition résiste jusqu’en 1958 avant qu’un député, le nommé Yambot (conseiller du Niari), corrompu par l’UDDIA, rejoigne le camp Youlou plongeant le pays dans une instabilité politique. Ainsi, ce dernier arrive au pouvoir par un coup d’État parlementaire, en 103
renversant le premier ministre Jacques Opangault, après avoir corrompu les députés de la majorité sur des bases tribales. Cette crise qui couvait sous les manteaux atteint son paroxysme une année après, lorsque les deux camps s’affrontent par tribus interposées (Kongo- Mbosi), faisant resurgir un des aspects de la guerre que Matsoua avait menée au Blanc en 1926. Du 15 au 18 février 1959, éclate à Brazzaville une guerre civile qui opposa les nordistes et les sudistes, à la suite de ce truquage organisé par l’Abbé (Figure n°24). Après des journées d’affrontement, le bilan est lourd : plus de 99 morts, 160 blessés graves, plus de 350 maisons détruites, conduisant les Laris à chasser par les armes les Mbosi du quartier « Les palmerais Mbemba» de Ouenzé, situé dans la banlieue nord-ouest de Brazzaville. Elle ne trouvera d’issue honorable que grâce à l’intervention de la France, pays colonisateur, où la droite au pouvoir ne supportait pas le choix des congolais d’apporter un socialiste à la tête de la République du Congo naissante. De nos jours, on se remémore encore cette phase de notre histoire en parlant de « Guerre de Youlou contre Opangault » ou « Etumba ya Youlou na Opangault » (en lingala) ; ou simplement « Guerre des Mbosi contre les Lari » considérés comme des ennemis jurés, se regardant parfois en chiens de faïence lorsqu’éclate une crise politique majeure. 2- De l’éviction de Youlou à la Conférence nationale (1963-1990) : en 1963, alors que Youlou est vomi par des syndicalistes remontés contre ses truquages, l e s dérives financières de son gouvernement auxquelles s’ajoutent son instinct tribalo-régionaliste, la situation est de nouveau tendue. Les populations Lari dont il a fait subir le calvaire de la déportation sous le pseudonyme de « Corbeaux », vers les régions du centre et nord- Congo, en profitent pour lui régler des comptes.
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Figure n°24 : Le Président Youlou (robe blanche) et Martial Sinda (costume) lors d’un mariage41
L’Abbé Président aux abois, tente de persuader les siens dans un discours en langue Lari, en vain. Car personne n’y prête vraiment attention et les syndicalistes en profitent, chantant « Youlou a tout volé » en direction de la Maison d’arrêt où ils libèrent tous leurs camarades emprisonnés. Ils perdent trois de leurs camarades à savoir : Pierre Ntsiété, Paul Nsondé et Gaston Lenda, devenant du coup « Les trois Martyrs » du Congo, par opposition aux « Martyrs du Congo » tombés au Gabon lors d’un match de foot-ball. De Gaulle auprès de qui il sollicite la protection militaire répond par la négation. Youlou signa sa démission et s’exile en Espagne où il meurt en 1972. En février 1969, le capitaine F. Mouzabakani (Kongo) ministre de l’intérieur dans le gouvernement provisoire du 5 septembre 1968, fomente un coup d’État. Conseillé par les sages Kongo pour rétablir le pouvoir du Pool (sa région natale), il prévoyait de briser l’élan pris par le mouvement du 31 juillet en abattant le Président. Retranché dans une auberge en plein centre-ville de Brazzaville, il est lui-même cueilli à froid au petit matin. Ses complices Augustin Poignet et Kinganga prennent la fuite et sont jugés par contumace. Ce 41
Cf. Archives du Moyen-Congo, In Publi-Congo, Brazzaville, 1986 105
coup de force est le premier des plus importants auxquels le pays fait face après le départ de Massamba-Débat du pouvoir. En novembre de la même année (dans la nuit du 7 au 8 novembre), un autre complot est déjoué organisé par Koléla, un fanatique politico- messianique de la même région. En fuite, il sera jugé par contumace et condamné à la peine capitale. En 1970, le lieutenant Pierre Kinganga alias Siroco (Commandant de la 2è compagnie parachutistes) attaque par surprise le siège de la radio et télévision, dans le bâtiment qui abrite l’actuel ministère de l’Enseignement primaire et secondaire (en face du stade Marchand). Cerné alors qu’il se trouvait au premier étage, il est abattu par l’Armée qu’il croyait avoir vaincue, dans son appel à la révolte. Les habitants de Bacongo (quartier sud-est de Brazzaville) qu’il appelait à le rejoindre avant son forfait, niché sur sa vespa, n’ont rien pu y faire. Son corps fut exposé, les billets de banque à la bouche. En 1972 (le 22 février), le Lieutenant Ange Diawara Bédié (Lari-Kongo) qui ne pardonne pas à Ngouabi (en séjour à Pointe-Noire) d’avoir neutralisé ses visées politiques, en intégrant (le 20 août 1968) les éléments de la Défense Civile dans l’Armée Populaire Nationale (APN), prend le maquis. Il se réfugie à Ngoma Tsé-Tsé (Pool) avec ses acolytes : Jean- Baptiste Ikoko et JeanPierre Olouka tous Makoua (tribu Mbosi du nord), Jean Claude Bakékolo (Lari) et autres du Mouvement guévariste et castriste dit du « M22 » (référence faite au numéro matricule que portait l’uniforme d’A. Matsoua). Les populations terrorisées fuient en masse les zones de conflit, jusqu’à ce que l’armée congolaise neutralise ce maquis dans un bain de sang, le 23 avril 1973. Les corps de ces « énergumènes »42 putschistes seront traînés en spectacle dans les rues et stades de Brazzaville, avant d’être enterrés. En 1975, le pays vit une accalmie précaire en raison de la grève des syndicalistes. Mais la situation politique et économique est telle que Marien Ngouabi remplace (le 12 décembre 1975), le Bureau politique par un corps nouveau : l’Etat-major spécial révolutionnaire qui, à son tour, lance un vaste mouvement d’épuration contre les cadres incompétents ou
C’est ainsi que Marien Ngouabi qualifie ces maquisards dans son discours prononcé au stade de la Révolution 42
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non révolutionnaires. M. Henri Lopès alors Premier ministre voit son gouvernement limogé et remplacé par une équipe de 14 membres tous révolutionnaires. En 1977 (le 13mars), devant les femmes de l’Union révolutionnaire des femmes du Congo (URFC) massées sur le parvis de l’Hôtel de ville de Brazzaville, Marien Ngouabi (en uniforme) tient ces mots présageant ainsi une mort certaine : « « Lorsque ton pays est sale et manque de paix durable, tu ne peux lui rendre sa propreté et son unité qu'en le lavant avec ton propre sang ». Il dénonce les complots ourdis par l’impérialisme occidental et fait allusion aux attaques de la zone de Kimongo (sud du pays) par le Front de libération du Cabinda (FLEC) faisant de nombreux morts. Il fait le tour de la situation économique difficile du pays et fait des propositions concrètes. Ce discours signe son arrêt de mort et le 18 mars il est abattu dans sa résidence de l’Etat- major par un commando dirigé par Barthélémy Kikadidi (ancien chef du renseignement militaire) et ayant servi auprès du ministre de la défense Denis Sassou Nguesso. Dans la foulée, plusieurs personnalités suspectées d’avoir participé au complot sont exécutées à savoir : Emile Biayenda (Figure n°25) dont la visite chez le Président le même jour de l’assassinat paraissait injustifiable, est exécuté le 22 mars ; Luc Kimboula-Nkaya, qui avait travaillé avec Marien à Pointe-Noire, est lui aussi exécuté le même jour (22 mars) par un commando venu l’interpeller ; Alphonse Massamba-Débat, cerveau du complot, est cueilli à Boko où il s’était désormais retiré et jugé avant d’être exécuté le 25 mars. Sa visite chez le Président aux côtés de Emile Biayenda était jugée elle aussi suspecte. Enfin, Barthélemy Kikadidi qui conduisait les assaillants est repéré une année après et abattu à Massissia (sud de la capitale) dans la nuit du 3 au 4 février 1977.
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Figure n°25 : Emile Biayenda (gauche) et le Président Marien Ngouabi (droite), le 18 mars 197743
Les obsèques organisées par le Comité militaire du Parti (CMP) sont suivies de 600 jours de gestion par le colonel Yhombi, avant que n’arrive le Mouvement dit du « 5 février 1979 ». En effet, ce dernier qui n’entendait pas léguer le pouvoir à lui confié par le Comité central du PCT seul à pouvoir reprendre les choses en main, voit ses ambitions stoppées net par une session du même Parti. Il s’ensuit l’organisation d’un Congrès extraordinaire à la suite duquel Denis Sassou Nguesso est élu Président du Comité central, chef de l’État. Alors commence une longue période de paix au cours de laquelle de grandes réalisations à caractère socioéconomiques sont opérées dans le pays, grâce au Plan quinquennal 1982-1986. Fixé à hauteur de 1.180 milliards de franc CFA d’investissements, il promouvait une économie socialiste autodynamique et autocentrée, financée à 70% par la rente pétrolière et à 30% par les bénéfices des entreprises publiques. En ellemême, l’infrastructure de base représentait 50%, 35% pour le secteur productif, 2,3% pour le social, 2% pour l’éducation et 9,8% pour les autres secteurs. Sous le double effet du choc pétrolier de 1984 et des déficits cumulés de plus de 75 milliards de francs CFA entre 1982 et 1986 des entreprises publiques, ce plan ne sera réalisé qu’à 67% des prévisions. 43
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A la suite de la crise pétrolière qui s’annonçait, il sera remplacé par plusieurs plans d’ajustement structurel (PAS), imposés par les institutions de Bretton Woods. Dans l’ensemble, le pays bénéficiera des routes bitumées qui manquaient cruellement au pays en dehors de Brazzaville, Pointe-Noire et Dolisie, dont quelques artères avaient été balisées dans les quartiers où vivaient les Européens. La partie nord du pays verra sa voie prolongée jusqu’à Obouya (dans la Cuvette centrale), où elle atteindra, plus tard Ouesso dans la Sangha (extrême nord) aujourd’hui, avec des déviations sur le Gabon à Obouya, le Cameroun à Ketta et Etoumbi à Makoua. Au total, près de 40 ans auront suffi à un petit Etat comme le Congo de voir ses fils se canarder entre eux pour le pouvoir, mais souvent dans des scènes où la tribu s’est révélée être la locomotive d’assouvissement des intérêts politiques. Le pays a donc vécu de moult péripéties faites de trahisons, coups de force, chutes, décès, etc., le congolais étant passé maître dans l’art de la domination, du doute et du combat. Le dialogue hérité de nos ancêtres relégué au second plan, le recours désiré à la force a finalement été choisi comme moyen de résolution des conflits. L’année 1990 sera marquée par la Conférence nationale souveraine, née des tumultes liés à la « Perestroïka Gorbatchévienne » soufflant sur le monde dès 1989, et favorisée par la perte du rôle dirigeant du Parti communiste soviétique.
B- La Conférence nationale souveraine (26 février-10 juin 1991) Tout part de la Baule où, la France qui comme toujours veillait au grain, souhaitant asséner des coups sérieux aux partis uniques, ouvre la boîte de pandore. Dans le viseur, 37 chefs d’État africains invités pour la circonstance à qui François Mitterrand (alors Président de la République française) adresse, le 20 juin 1990, un discours de fermeté : « La démocratie est la seule façon de parvenir à un État d’équilibre au moment où apparaît la nécessité d’une plus grande liberté avec un schéma naturel : système représentatif, élections libres, multipartisme, liberté de la presse, indépendance de la magistrature, refus de la censure… ». Et d’ajouter que : « L’aide de la France sera conditionnée aux efforts démocratiques… ». 109
Véritable mise en garde de la France qui, dès lors, pousse ses anciennes colonies à des changements radicaux pouvant être émaillés non seulement d’incidents et de morts, mais de dialogue. De retour chez eux, les présidents tentent d’expliquer la « leçon » à leur peuple non sans ambiguïté du fait que l’évidence pouvait être sujette à un soulèvement en cas de tergiversations. Au Congo, Denis Sassou Nguesso qui croit aux vertus du processus démocratique, propose au cours d’une session du Comité central du PCT, une démocratie par étape, seule possibilité (selon lui) d’arriver en douceur à la stabilité du pays sans effusion de sang. Ce que refuse Jean- Michel Bokamba-Yangouma, alors Secrétaire général de la Confédération syndicale congolaise (CSC)44, qualifiant de ruse politique la démarche du Président qui ne vise qu’à retarder le processus démocratique déjà enclenché. Il ira jusqu’à défier ce dernier en brandissant le spectre d’une action violente des travailleurs dont nombreux sont acquis à sa cause. Le pays est aux bords de l’éclatement. A cette instabilité politique s’ajoute l’ampleur de la crise économique et sociale des années 1980, marquée par la baisse vertigineuse du prix du baril de pétrole. Le 4è congrès du PCT tenu du 29 juin au 4 juillet 1990 proclame la fin de l’idéologie marxisteléniniste et supprime le rôle dirigeant du Parti unique. De fait, le multipartisme est rétabli (la loi est votée plus tard, le 24 décembre) de même que la liberté syndicale et de conscience. Deux mois après, le 8 septembre 1990, le 8è congrès de la CSC dirigé par Bokamba-Yangouma proclame à son tour la liberté du syndicat à l’égard du Parti. Peu après, la session extraordinaire du PCT balise le chemin de la transition démocratique, l’Armée est dépolitisée. Le 23 février 1991, par « décret n°91/029 » du Président de la République, il est autorisé la tenue d’une Conférence nationale à Brazzaville, après celles tenues à travers l’Afrique noire notamment au Bénin. Du 26 février au 10 juin 1991, s’ouvre au Palais des Congrès la grande palabre inclusive, regroupant près de 1.250 délégués venus de l’intérieur et de la diaspora, censés représenter le peuple.
La CSC a été créée le 8 novembre 1965 et dirigée successivement par Diallo Idriss, Paul Banthoud puis Jean Boniface Ngalouo Bocquet.
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Mais très tôt, elle se transforme en parodie de dialogue en raison de la violence des débats et des intrigues qui s’en suivent, poussant les uns et les autres à des dénonciations calomnieuses visant les dignitaires du pouvoir. Ainsi, au lieu « de redéfinir les valeurs fondamentales de la Nation et de créer les conditions d’un consensus national en vue de l’instauration d’un État de droit », la Conférence dérape sur plusieurs points : - La notion de souveraineté considérée comme une défiance faite aux autorités, au regard des commissions (assassinats, biens mal acquis, etc) qui n’offrent aucune garantie d’indépendance ; - La haine tribale caractérisée par un discours sulfureux, point de départ d’une confrontation qui s’annonçait des années plus tard. On comprend alors dans quelle imposture s’est déroulée la messe, au mépris des règles de politesse les plus élémentaires, frisant une guerre psycho-tribale entre conférenciers ; - La transformation de la CNS en tribunal présidé par Mgr Nkombo, ne disposant d’aucune qualité juridique mais jouissant simplement de la confiance des conférenciers dont certains doutent de la neutralité de ses fonctions.; - Le caractère inégalitaire des recommandations sortis de la CNS, sentences qui dépouillent un Président en fonction de ses droits régaliens pour ne disposer que de la diplomatie, etc. D’autre part, la CNS apporte des changements notoires dans le but de souiller le Parti unique qui, depuis 1963, tient les rênes du pays et rythme la vie politique. Il s’agit notamment de 45: - la suspension de la Constitution de 1979 remplacée par un Acte fondamental qui fait de la démocratie pluraliste le moteur de toutes démarches politiques ; - l’abandon des emblèmes de la République : le Drapeau rouge (dont la couleur symbolise le sang donc les assassinats), l’hymne national (Les Trois glorieuses), la Devise (Travail-Démocratie-Paix) qui sont remplacées par : le Drapeau tricolore (vert-jaune-rouge), l’hymne (La Congolaise) et la Devise (Unité-Travail-Progrès) ; - la libération des prisonniers politiques ; 45
Actes n°281 à 285 de la CNS 111
- la remise aux églises (catholiques notamment) des biens nationalisés par le Parti unique ; - la débaptisation de certaines villes qui jadis portaient des noms à connotation nationale comme Loubomo (Dolisie). Brazzaville, PointeNoire et les autres gardent leur appellation. De même que plusieurs établissements publics (écoles, lycées, hôpitaux, stades, etc..) changent de noms. La Conférence ouvre alors la porte à un sentiment d’injustice au regard des sentences prononcées, comme si c’était le cas devant un tribunal ordinaire. N’ayant aucune force de loi nécessaire pour s’imposer à tous, l’« acte n°018 » de la CNS fixait l’amnistie des infractions à la loi pénale, à compter du 21 février 1991, alors que l’ « acte n°227 » ordonnait au gouvernement de transition d’engager des poursuites contre les auteurs des crimes économiques identifiés par la commission «Biens mal acquis», mais amnistiés. Le discours du Président Sassou intitulé « J’assume », dans lequel il reconnaît toutes les fautes commises par ses prédécesseurs y compris par lui-même et la cérémonie du lavement de mains (Place du Palais des Congrès), suivis de la mise en terre des plants relatifs à la forêt de l’unité nationale, calment les ardeurs. Partout les esprits sont soulagés. Mais la période transitoire n’ira pas sans provoquer des inimitiés entre la Primature et le CSR d’un côté, la Présidence de la République de l’autre. Cette méfiance honteuse conduit, néanmoins, à la présidentielle de 1992 et à l’élection de M. Lissouba comme Président de la République du Congo.
C- La mémorable guerre du 5 juin 1997 Elle a lieu du 15 juin au 19 octobre 1997 et oppose l’Armée nationale soutenue par les milices « Aubevillois » et « Cocoyes » fidèles à Lissouba, aux forces Cobras de Denis Sassou Nguesso. Tous les scénarios tournent autour de l’avènement au pouvoir du nouveau Président et les velléités tribalo-régionalistes qui ont suivi la Conférence nationales souveraine de 1991. 1- Lissouba, Président de la République : en 1992 (les 2 et 16 août), Lissouba est élu Président de la République (Figure n°26) grâce aux voix de Denis Sassou Nguesso qui lui apporta son soutien au terme d’un accord conclu entre le PCT (son parti) et l’UPADS, quelques mois auparavant. 112
Il obtient alors 61,30% de suffrages contre 38,70% pour son concurrent au deuxième tour, Bernard Koléla. Mais très tôt, la victoire de ce biologiste qui n’est pas novice en politique se transforme en véritable complexe de supériorité, jetant aux oubliettes l’accord avec l’ancien Parti unique dont il a été membre influent. Alors que l’on croyait oublier les turpitudes du passé à jamais bannies par la CNS, les vieux démons de la politique refont surface. Le premier gouvernement censé être celui de l’Alliance PCTUPADS, dans lequel 7 ministres préalablement choisis devaient être remis à son allié, se fait sans l’aval de celui-ci. Les tractations de circonstance aboutissent à l’entrée de Grégoire Léfouoba, Isidore Mvouba ayant décliné l’offre pour ne pas trahir l’âme de son cher Parti. L’alliance qui se fait au profit d’un seul camp, le même qui martèle sans cesse sur le manque de volonté de Sassou, est dénoncée par Ambroise Edouard Noumazalaye (alors Secrétaire général du PCT), pour qui elle était devenue caduque. Ce désaccord donne des ailes à Lissouba qui peut désormais compter sur l’appui des cadres de sa région, auxquels s’ajoutent ceux du nord comme Yhombi et Bokamba, deux poids lourds de la politique congolaise. En 1993 (le 30 novembre), une marche des militants du Mouvement congolais pour la démocratie et le développement intégral (MCDDI) se termine par un bain de sang, faisant plusieurs morts. Denis Sassou Nguesso qui devient allié de circonstance de Koléla depuis les législatives de 1992 (39 sièges à l’UPADS), vole à son secours. Les quartiers Bacongo et Makéléké (fiefs de Koléla) sont bombardés, sans discernement, à l’arme lourde. Il est créé au camp d’Aubeville, dans la Bouenza (sud du pays) une réserve ministérielle (nom donné à cette armée supplétive) composée des jeunes du grand Niari et portant des noms de guerre : Zoulous, Mambas, Aubevillois et Cocoyes. Dans la réalité, il s’agissait d’une milice conforme à l’esprit de la JMNR de 1965 mise en place par lui au moment où il était Premier ministre. De l’avis des observateurs, la création de cette armée consistait à conserver les acquis d’un pouvoir longtemps recherché, contre les velléités de retour au perchoir de l’ancien Président le Général Denis Sassou Nguesso. Le même jour, ils s’opposent aux Ninja de B. Koléla alliés de circonstance des Cobras, milice d’auto-défense mise en place pour contrecarrer celle de P. Lissouba, dans le cadre d’une union politique appelée Forces démocratiques unies (FDU).
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En 1994, un bataillon de réservistes est expédié à Gamboma (centre- nord du pays) pour dit-on s’opposer aux Cobras de l’ancien Président en formation dans le grand nord, et les empêcher de descendre sur la capitale. En réalité, il n’en avait rien l’objectif principal étant de surveiller les mouvements de l’ancien Président, ennemi juré de M. Lissouba. Ils furent chassés à la suite d’une altercation avec les habitants (dont une femme), laquelle occasionna un soulèvement à l’origine d’une formule désormais célèbre : « Aubeville yo mè » (en langue Ngangulu) qui signifie : « Aubeville laisse-moi tranquille » (en Français). On apprendra, plus tard, que nombreux sortaient de l’université Marien Ngouabi où ils venaient de passer une brillante scolarité. Figure n°26 : Pascal Lissouba, Président de la République (1992-1997) 46
En 1997 (le 4 juin au soir), se tient un conseil des ministres (de guerre) faisant suite à la fulgurante tournée dans la partie septentrionale du pays de Denis Sassou Nguesso, où il faillit être abattu par un commando dressé à Owando par Yhombi et Lissouba. Ce jeune Makoye, envoyé comme appât, fut à son tour neutralisé par l’intrépide Aboya, membre de la garde de l’ancien Président. Ce mouvement de foule provoqua quelques décès dans la ville, dont les obsèques furent prises en charge par la délégation. Dès lors, l’atmosphère politique devint insoutenable. André Milongo (Président de l’assemblée nationale) visité dans la nuit par l’ancien Président, qui lui demandait de ramener Lissouba à la raison pour éviter un bain de sang, ne fut pas entendu. Le lendemain (5 juin), très tôt le matin, des engins blindés appuyés par des fantassins encerclent la résidence privée de Sassou Nguesso située à Mpila (nord de Brazzaville). Dans la phraséologie officielle, il s’agissait d’une action de police visant des 46
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individus suspectés de meurtre par la justice, allusion faite à la situation d’Owando décrite ci-haut. L’un des engins blindés fut immobilisé, créant la panique et la fuite des assaillants qui furent pris en chasse par les fidèles de Denis Sassou Nguesso, suivi de l’attaque des camps militaires de Mpila. C’est le début de la guerre dite du 5 juin qui fit des milliers de morts. En 1997 (le 10 septembre), alors qu’il se trouve à Libreville (au Gabon) où il représente son Président, le Premier ministre Ganao (Téké) est remplacé par Koléla (Téké-Lari) devenu allié de Lissouba contre Sassou. D’aucuns ont vu là une nomination sur une base régionaliste, les deux étant du sud contre le nord que Lissouba n’a pu visiter qu’une fois de façon officielle. Trahi par un Téké comme lui, Ganao finira par soutenir Sassou à l’élection présidentielle de 2002. Le 16 octobre, l’offensive des forces Cobras se solda par la victoire du Général Denis Sassou Nguesso qui avait su gérer le conflit à son compte. Confus, Lissouba prend le chemin de l’exil par le Gabon. Imprudent et en difficulté politique, il a préféré sacrifier des âmes sur une base tribalo-régionaliste, dans le but de régler des comptes à son ennemi juré Sassou Nguesso, de surcroît Mbosi. Au lieu de sortir par la grande porte en se présentant à l’élection présidentielle prévue le 27 juillet 1997. Le 25 octobre, Sassou s’autoproclame Président de la République et appelle le peuple à l’unité tout en se plaçant au-dessus de la mêlée. Il forme un gouvernement d’union nationale incluant les ministres provenant des grands partis politiques, géopolitique oblige. Pour l’éducation nationale, cette guerre-là, plus meurtrière que toutes les premières fut une catastrophe par son ampleur du fait que plusieurs étudiants et enseignants perdirent la vie. D’autres gagnèrent leurs villages d’origine avec leur famille pour se protéger des obus et de la famine, le « Professeur » Lissouba s’étant obstiné à prôner le dialogue, préférant la guerre alors qu’il n’avait aucune connaissance de l’art militaire. En cinq (5) mois de combats atroces, il n’y aura ni cours, ni apprentissage, ni conférence, obligeant les établissements à rester portes closes. L’université est l’une des plus grandes perdantes sous le régime de Lissouba. 2- Le Président Lissouba et l’université : le pouvoir de Lissouba n’a eu qu’un impact négatif sur l’enseignement supérieur, depuis sa brillante élection jusqu’à son départ brutal en 1997. Jamais un chef d’Etat (de surcroît enseignant) n’a été aussi indifférent aux problèmes du secteur dans lequel il a consacré une grande partie de sa vie. 115
Et lorsqu’il débarque en France après sa défaite militaire, il tient ces mots chargés d’orgueil comme si son passage à la tête de son pays ne suffisait à réaliser ses rêves : « Avec mon retour dans ce pays de liberté et de démocratie (la France), j’entends reprendre mes recherches dans mon domaine comme un citoyen normal… »47. En 1992, alors qu’il n’était encore que simple candidat à l’élection présidentielle, il lança aux étudiants réunis à l’amphithéâtre Bouya (en face de l’ancien Rectorat) : « Combien touchez-vous en termes de bourse chaque fin de mois, les jeunes ?... 35.000 francs répondent les étudiants », Emu, il répondit sans hésiter : « C’est l’argent de poche çà ! Comment est-ce possible ? Comment vous en sortez-vous alors avec cette si petite somme d’argent ? ». Une fois élu, l’espoir d’une bourse plus importante que l’argent de poche s’envole. M. le Président est vite laminé par le vertige du pouvoir qui le pousse plutôt à une instabilité politique croissante, traînant l’université dans un chaos indescriptible, qu’à une recherche de solutions véritables à ses problèmes. En 1993-1994, le Congo connaît sa première année blanche à l’université sous l’ère Lissouba. Le non-paiement de la bourse et des salaires d’enseignants, situation jamais observée dans l’histoire de notre enseignement supérieur en est l’origine. La Faculté des sciences située à Bacongo est la plus touchée, alignant de façon séquentielle une série d’années blanches qui vont de 1995 à 1998 pour les 2è années, de 1996 à 1997 pour les 1ères années, couplées à la guerre du 5 juin 1997. De son exil à Paris, Denis Sassou Nguesso vole au secours des étudiants qui le sollicitent en y apportant une aide substantielle. A Brazzaville, le pouvoir saisi parle de « bienfaiteur » en quête de notoriété et une semaine plus tard, intente une action en justice contre l’ancien chef de l’Etat pour gestion illégale des moyens de campagne en 1992. Les médias qui relaient l’information (dont RFI) n’en donnent un montant exact, ce que le PCT qualifie de machination politique. L’affaire est classée sans suite par manque de preuves. En cause, l’influence croissante de Denis Sassou Nguesso dans le peuple et qui, écarté démocratiquement du pouvoir a quitté sa résidence de Mpila (nord de Brazzaville) pour s’installer à Oyo (son fief natal dans la Cuvette) avant 47
P. Lissouba, invité à LCI, 1998 116
de s’exiler en France afin de mieux préparer son retour à la tête de l’Etat. Au pays, la situation va de mal en pis. Alors que les étudiants et les fonctionnaires croupissent sous le poids de la misère, Lissouba renforce son pouvoir en créant un « méta-tribu » appelée « NIBOLEK » qui n’est que le continuum tant rêvé de sa « Tribu-classe ». En 1995, alors qu’il est hissé au rang de « Messie ou Génie » par ses congénères, chantre de la technologie naissante, le Président demande à Ikounga (ministre de l’enseignement supérieur et technique), d’entreprendre la délocalisation de l’université Marien Ngouabi qu’il croit trop concentrée à Brazzaville. Il a raison et Dolisie, chef-lieu de sa région natale du Niari (sud du pays), reçoit sa Faculté des sciences (faite en contreplaqués) qui ne sera jamais ouverte en raison de l’instabilité sociopolitique dans le pays et de l’incompétence du pouvoir qui confondait vitesse avec précipitation. Elle sera purement et simplement retirée après la guerre. Pour leur part, les établissements d’enseignement supérieur : INSSED, ENSET, INSSA, Faculltés des sciences et de droit, Amphithéâtres et autres Bâtiments administratifs (Rectorat notamment), en raison de leur proximité avec les zones sensibles, sont constamment pris pour cibles ; abandonnant l’université au centre d’un conflit militaro-politique dirigé par un « Professeur » qui jadis, avait fait ses preuves comme « généticien ». L’absence de grandeur d’esprit de Lissouba ne lui permettra pas de garantir l’avenir de ses concitoyens avec circonspection et loyauté. Il se préoccupa plutôt de refonder un Etat basé sur la haine tribale, objet de toutes les rancunes comme si les déchirements à la Conférence nationale souveraine de 1991 n’avaient pas suffi. L’enseignement supérieur n’aura donc bénéficié de rien qui soit sorti du projet initial du Président Lissouba, légendaire « génie agronomique » qui a tant fait rêver pour sa science et sa technologie. L’opinion se souviendra beaucoup plus des obus ayant fait vider les salles de classe pendant des mois, que de la pertinence de vue d’un « grand universitaire » au pouvoir En clair, l’Ecole dans son ensemble paya le lourd tribut du passage du Président Lissouba au pouvoir, alors qu’elle aurait eu à gagner avec lui. Et comme politique rime souvent avec tribalisme, le moment de l’inextricable Ntoumi arriva.
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D- Ntoumi et l’incessante guerre du Pool L’autre cause de l’instabilité politique au Congo a pour nom Frédéric Bitsamou alias Ntoumi, Pasteur de son état et symbole de la révolte Kongo-Lari longtemps portée par André Grenard Matsoua, qui a défié l’Etat colonial sur sa terre natale. Sorti du néant, il fonde sa lutte sur un messianisme hasardeux qui prend ses racines dans le Pool qu’il considère comme le fief des envoyés de dieu, s’inspirant d’un Ngouzisme des vainqueurs. Il se proclame chef d’une milice Nsilulu (les sauveurs) née dans le maquis, calquée sur le modèle des Ninjas fondés par B. Koléla en son temps et dirigeant d’un Parti politique, le Conseil National de la Résistance (CNR). Il se fait remarquer par des attaques inopinées contre les forces de l’ordre, profitant d’une notoriété accordée par l’Etat qui lui concède des séances de dialogue. Munis d’armes de guerre, ses partisans (chômeurs, travailleurs, élèves et étudiants, tous du Pool) rackettent sans cesse les populations en semant çà et là la terreur qui va au-delà du Pool pour atteindre les départements de la Bouenza et du Niari. Dans leurs prières, ils diabolisent le Président Sassou leur pire ennemi et font croire qu’ils l’ont dompté avec leur mysticisme spirituel et ne pensent qu’à sa chute inévitable voire certaine. Ils invoquent les héros mythiques des Kongo-Laris que sont : Kimpa Vita, Mabiala Mâ Nganga, Mabiala Mâ Nkenké, Tozi, André Matsoua, Simon Kimbangu et les autres), ayant combattu le Blanc et source de leur force contre l’occupant Mbosi (ou Mbochi) de leur territoire. La défaite de Lissouba (en 1997) laisse aux hommes de Ntoumi l’occasion de lancer des assauts sur la capitale, pour se retirer de façon ostentatoire, défiant à cette occasion la force publique dont le rôle régalien est de sécuriser la population. Ils occupent alors le grand espace allant de la rivière Djoué jusqu’à la Bouenza, la frontière avec la RDC, le Niari, la Lékoumou et les Plateaux. En 2005 (le 13 octobre), au terme d’un ultimatum donné aux Ninjas de libérer les locaux de la Faculté des sciences (basés à Bacongo-sud de Brazzaville) et la résidence construite par le gouvernement dans les environs du Marché Total pour loger leur leader, des affrontements ont lieu faisant une dizaine de morts et plusieurs blessés. Durant l’occupation, des bâtiments furent souillés, les laboratoires et d’autres structures pillées occasionnant aux étudiants et enseignants de longs mois d’absence de cours. Les années blanches frappant cet établissement (évoquées ci-haut) 118
sont le fait de ces jeunes venus des forêts du Pool, pour y régner en maîtres sous l’emprise d’un homme : Ntoumi. En 2007 (le 20 mai), un accord de cessez-le-feu conclu avec le pouvoir fait de lui le « Délégué général chargé de la promotion des valeurs de paix et de la réparation des séquelles de guerre », près de la Présidence de la République avec rang de Ministre (Figure n°27), poste qu’il n’occupera que le 28 mai 2009. Mais son refus de remplir convenablement sa mission en se dérobant des mesures protocolaires les plus élémentaires, prétextant une maigre dotation dans l’exercice de ses fonctions, le pousse à reprendre le maquis. Les observateurs pensent que sa volte-face est liée beaucoup plus à un manque de respect pour les institutions et leur chef le Général Denis Sassou Nguesso, qu’aux moyens conséquents dont il avait besoin. L’échec de Ntoumi tant redouté par ceux qui en critiquaient l’issue à une fonction ministérielle est visible, et doit être récompensé par une reprise des hostilités au Pool où il avait réinvesti dans des activités agropastorales en trompe-l’œil dans les zones de Mayama, Kindamba et Vindza, mais jamais ailleurs que dans le Pool. Figure n°27 : Ntoumi, Délégué général aux valeurs de paix48
Le 04 avril 2016, après la proclamation des résultats de l’élection présidentielle remportée par Denis Sassou-Nguesso, le Révérend Pasteur réapparaît dans la capitale et tue des innocents (17 morts), mets le feu aux édifices publics dont celui abritant le siège de la Mairie de Makélékélé. Les populations de Brazzaville-sud (enfants, jeunes, femmes et vieux), https://www.jeuneafrique.com/392174/societe/congo-brazzaville-arrestation-dunjournaliste-soupconne-de-complicite-pasteur-ntumi/ 48
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baluchons sur la tête et bébés à califourchon fuient en masse les quartiers de Bacongo et Makélékélé pour se réfugier dans la partie nord. Les mauvaises langues prêtent cette action au Président réélu qui utiliserait (selon eux), ce va-t-en-guerre véreux et illuminé, pour brouiller les cartes et légitimer sa victoire. De toute évidence, ce coup de force est en contradiction avec le « Code électoral » qui veut qu’un non-candidat à une élection, n’a pas le droit de revendiquer les résultats ; et que celui qui l’a été dispose d’une « obligation légitime » de déposer devant la « Cour constitutionnelle », dans un délai requis par la loi, son recours en bonne et due forme. Ce qui n’est pas le cas de Ntoumi qui n’a pas été candidat mais s’est arrogé le droit de profiter de cette période pour lancer son ultime assaut. En 2017 (le 3 octobre), recevant les sages du Pool venus lui présenter les recommandations de Kinkala du 23 septembre, le Président de la République revient sur cette contradiction et déclare : « A ma connaissance, je sais que Ntoumi a soutenu le candidat Guy Brice Parfait Kolélas sorti deuxième à l’élection présidentielle. Ce dernier vaque tranquillement à ses occupations. Il siège à l’Assemblée nationale. Je me demande donc la motivation profonde qui justifie le retranchement de Ntoumi et son basculement dans la violence aveugle. Vous qui êtes avec lui dans le Pool, vous devrez assurément connaître les principales raisons de sa rébellion ». Et prend le ferme engagement de : « … tous nous mettre à l’œuvre pour créer des couloirs humanitaires sécurisés. Je vous invite, vous qui connaissez les refuges des ninjas de Ntoumi, à aller les sensibiliser que le chef de l’Etat leur a dit de sortir des forêts. Personne ne sera tué. C’est la parole du père de la nation. D’ailleurs notre Constitution interdit la peine de mort. Je vous parle avec mon cœur ; parce que je suis sans papier devant moi ». En décembre 2017, un « Accord de paix » mettant en place une « Commission mixte Gouvernement-Ninjas » est signé, travaillant depuis lors à ramener la paix définitive dans le Pool avec une sortie massive des Ninjas-Nsilulu cantonnés dans centre de transit à Kinkala. Ntoumi dont les poursuites ont été levées est désormais libre de ses mouvements. Dès lors, les populations en fuite ont regagné leurs habitations, les activités ont repris et le gouvernement par membres interposés veille au déroulement de la vie dans ce département source à conflits. 120
En définitive, l’instabilité politique des 60 dernières années a fortement contribué à entraîner des troubles à Brazzaville, avec d’énormes effets collatéraux à l’université Marien Ngouabi. De l’instauration d’une paix durable dans les zones où se trouve implantée cette dernière dépend la volonté des acteurs politiques à surmonter leurs querelles intestines et tribales, gage d’une unité véritablement nationale et sans tâches. Les guerres à répétition, en ce qu’elles génèrent des souffrances et des malheurs, nuisent profondément à la bonne marche de l’école donc de la formation de l’élite intellectuelle dont le pays a besoin. Malgré que d’autres facteurs beaucoup nuisibles s’ajoutent, à savoir ceux liés à l’éthique et à la morale.
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Chapitre VIII- Éthique et déshérence morale à l’université Marien Ngouabi Évoquer les pratiques contraires à l’éthique et à la morale au sein de notre enseignement supérieur laïc, suppose un regard critique sur une observation de terrain faite à l’université Marien Ngouabi, ces dernières années. J’ai été tentée de recourir à cette méthode, pour mieux cerner les raisons et conséquences de ces attitudes néfastes, qui gangrènent de nos jours notre alma mater à partir de leurs signes distinctifs depuis des années. L’éthique renvoie, en général, à toutes les considérations portant sur la manière dont on doit agir et relève aussi bien de la morale individuelle que de la morale collective, autour des points (A,B,C.).
A- Le harcèlement sexuel Défini comme une violence répétée, continue, sur une longue période, par une personne ou un groupe de personnes à l’égard d’une autre, le « harcèlement sexuel » se manifeste par des attaques verbales, physiques ou psychologiques. En ce sens, il s’impose par un rapport de domination ou un abus de pouvoir et une intention de nuire de celui qui prétend atteindre son but, poussant la victime à s’isoler, à se taire, se repliant sur elle-même ; car ne parlant à personne de ce qu’elle subit par honte ou par sentiment de culpabilité. La dynamique du harcèlement évolue alors discrètement en tenant compte de l’attitude de la victime et de l’harceleur. En milieu universitaire, il est le fait pour un enseignant d’utiliser son autorité en vue d’obtenir des rapports sexuels avec son ou ses étudiants, parfois même avec ses collègues du genre féminin. Tout en exerçant surtout un contrôle important sur les filles à travers les notes de classe et des résultats des examens. Il arrive que les enseignants et les étudiants entretiennent des relations de nature conflictuelle, et de ces conflits, naissent des perturbations au sein de la structure scolaire49. En effet, le « harcèlement sexuel » se manifeste par des messages, des ordres, des attaques verbales, des gestes obscènes, ou encore par des Thibaut Doth DOUMA, ancien président de l’Union Libre des Elèves et Etudiants du Congo (ULEECO) : lors entretien du 5 mai 2019. 49
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tentatives d’attouchement, des compliments déplacés, des séductions agaçantes, et tout ceci de façon répétée. Lorsqu’elles manifestent leur refus, les victimes récoltent souvent des mauvaises notes et sont régulièrement sanctionnées. A l’université Marien Ngouabi comme dans les écoles privées d’enseignement supérieur, le « harcèlement sexuel » n’est plus un sujet tabou car il existe, évolue et défraie partout la chronique en raison de son importance accrue dans la sphère pédagogique et académique, sur la gent féminine que l’on assimile souvent à un « objet de sentiment ». Partout, la femme est en proie à plusieurs violences entre autres : le harcèlement sexuel, les achats de notes moyennant une somme d’argent.... Ces phénomènes qui se vivent depuis longtemps sont connus même s’ils restent dans l’ombre du silence, malgré le contrecoup qui en découle et qui influe négativement sur les résultats des apprenants. Par exemple, certains enseignants, à cause du manque de déontologie, vendent chaque année les notes aux étudiants moyennant une somme importante (dont le montant reste inconnu). Or, tous les étudiants n'ont pas les moyens pour s'en procurer, voilà l'un des facteurs principaux de la régression du niveau intellectuel des étudiants congolais en général et en particulier les étudiantes. Le plus souvent, les filles pour éviter d’être harcelées en permanence acceptent d’acheter la note dans le but rêvé de se débarrasser des pressions de l’harceleur. D’autres par contre, négligentes et paresseuses, acceptent l’offre parce que fortunées en raison de la position des parents ou de leurs maris. Ou encore, cèdent simplement parce que fatiguées des attaques incessantes d’enseignants qui promettent de tout faire à la place de l’étudiante. Le rôle de l’étudiant est primordial, pour que cela ne soit toujours pas la faute du Professeur considéré comme à l’origine des méfaits tant décriés. De façon officielle et à contrario, le « harcèlement sexuel » et la « vente des notes » en milieu universitaire restent secret, totalement absents car il n’y a presque jamais eu de conseil de discipline jusqu’à ce jour afin de ramener à l’ordre ces enseignants et ces enseignés. Généralement, les contentieux entre enseignants et enseignés s’arrêtent au niveau des Ecoles et les auteurs ne sont pas sanctionnés, faute de preuves. Faute aussi, parfois, de volonté d'en finir avec ces pratiques. Il revient donc à la Direction rectorale d’agir
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de façon prompte et ferme, afin d’éradiquer ces phénomènes qui désorientent, démoralisent et salissent l’image de notre université. Par contre, la grève est moins intentionnelle donc officielle, même si certains syndicats l’utilisent souvent comme moyen pour se faire une place au soleil, se dérobant volontiers du rôle qui leur est imparti dans le cadre normal de leurs prérogatives.
B- La grève comme vecteur de démotivation La grève est un droit et tous les travailleurs syndiqués en jouissent, dans le but justement de défendre leurs intérêts matériels ou moraux. Sa pratique, dans une institution d’enseignement, nous amène à constater qu’elle provoque plutôt des problèmes au sein de celui-ci et, malheureusement, des problèmes qui se résolvent difficilement (conjoncture oblige !). Depuis quelques années, l’université est secouée par des grèves à répétition. Les mouvements syndicaux des travailleurs (Synalu, Sypenes, Synesup) appellent les travailleurs à observer des grèves et cette situation est observée chez les étudiants. En clair, il règne une certaine instabilité récurrente au niveau de notre alma mater. Les années universitaires ainsi que le calendrier académique subissent un bouleversement sans précédent. Je ne saurais parler des remèdes sans pourtant déceler les maux qui sont à l’origine de ces grèves. Aussi, le problème des grèves à l’université Marien Ngouabi doit normalement être abordé dans sa globalité, c’est-à-dire que l’on prend en compte les deux composantes qui sont d’une part les travailleurs et de l’autre les étudiants. Plusieurs mobiles expliquent le déclenchement de ces grèves et sans toutefois les décrire de façon résolue, on peut citer entre autres : - le retard dans le paiement des salaires ; - les mauvaises conditions de travail ; - le non-paiement des heures supplémentaires, complémentaires et de surveillance ; - l’insuffisance du budget de fonctionnement alloué à cette institution ; - le non-paiement des bourses des étudiants depuis un certain temps ; - les mauvaises conditions de vie dans les campus universitaires etc. Il sied de souligner que cette liste n’est pas exhaustive. Cette situation va sans doute poser de sérieux problèmes au bon fonctionnement de 124
l’université, ce que d’ailleurs souligne Catherine Guillaume (2010) lors d’un Colloque sur Les Risques Majeurs organisé par l'université de Nouvelle-Calédonie et la province Sud, lorsqu’elle pense qu’« Une crise est un processus qui, sous l’effet d’un événement déclencheur (interne ou externe), met en évidence une série de dysfonctionnements affectant temporairement ou durablement un ou plusieurs des aspects suivants d’une organisation (entreprise ou collectivité) : la sûreté, la santé humaine, l’environnement, le produit, la réputation, la pérennité »50 Cette situation peut provoquer l’absentéisme des travailleurs à leur poste, l’incivisme, la corruption lors de l’organisation de différents examens, le refus d’obéir aux autorités, etc. A l’école, les étudiants sont obligés d’abandonner les études afin d’exercer des petits métiers pour la survie (Marketing Airtel, MTN, chauffeur de bus…). Il s’agit là d’une démotivation causée non pas par eux dont l’objectif est d’apprendre pour servir au nom du statut qui est le leur, mais par l’incompétence du gestionnaire qu’est l’État d’honorer ses engagements. L’État doit tous azimuts rechercher des voies et moyens pour résoudre les problèmes qui se posent aux corporations, afin de soulager tant soit peu les revendications. De même qu’il peut frapper dès lors que certaines règles de gestion des grèves ne sont pas respectées : absence de préavis, nonrespect des prescriptions de la Préfecture, débordements, etc. En tout état de cause, les autorités peuvent être amenées à prendre des dispositions qui s’imposent en interdisant ou en mettant en branle, sur les lieux, les forces de sécurité chargées du maintien de l’ordre pour défaut d’obtempérer. Au regard de ce tableau, quels remèdes peut-on envisager pour mettre fin à ces grèves ? Quelles pistes de solutions durables peut-on mettre en place pour éradiquer de façon efficiente ces grèves à répétition ? Ces interrogations me poussent à dire d’emblée qu’il faut attaquer le mal à la racine. Pour mieux étayer mon argumentation, il faut de suite dire que l’État providence n’existe plus, celui qui donnait tout à ses citoyens et se trouve aujourd’hui dans l’incapacité de le faire. De ce point de vue, la première action que l’on devra mettre en exergue, c’est de créer les conditions d’un auto- financement propre à l’université qui doit être pérennisé dans le temps. Mais comment devra donc se concrétiser cet autofinancement afin de créer l’autonomie financière de l’université ? Il faut préconiser certaines mesures telles que : le conseil technique devra 50
http://cathysolutions.canalblog.co m/archives/2010/11/15/19607436.html 125
siéger pour revoir par exemple les frais d’inscription que l’étudiant doit payer à l’université, ce montant ne répondant plus avec le système LMD. Il sied alors de le revoir à la hausse, car l’université ne doit plus se confondre avec un « lycée » qui reçoit tous les brevetés. En outre, elle doit être au cœur du développement économique, notamment à travers l’École nationale supérieure d’agronomie et de foresterie. Il est donc question de reformer et surtout d’orienter vers la production agropastorale : créations des fermes avicoles, élevage porcin, bovin …, plantation de manioc, maïs, banane. La commercialisation des denrées alimentaires sur le marché de la consommation permettra à l’université de recouvrer des sommes colossales pour assurer son fonctionnement sans attendre la subvention de l’État qui arrive très en retard. De ce fait, la partie gouvernementale ne s’occupera rien que de la charge salariale. Aussi, l’on devra éviter la frustration des travailleurs par des nominations qui ne tiennent pas compte de la compétence et de l’expérience professionnelle. Cette manière de faire crée le mécontentement dans l’administration. Ainsi, l’on devrait favoriser un climat de confiance entre d’une part la Direction rectorale et d’autre part entre les travailleurs et pourquoi pas avec le ministère de tutelle.
C- Impacts et pistes de solutions 1- Pour le harcèlement sexuel : Si la vision du gouvernement congolais est de favoriser l’instruction des filles, ces dernières perdent très tôt parfois le goût d’aller à l’école, en raison des violences sexuelles dont elles sont victimes de la part de certains de leurs enseignants qui tirent du plaisir à user de leur position pour solliciter une faveur aux filles en situation de vulnérabilité. A cet effet, les étudiantes victimes ne sauraient avoir raison devant les enseignants et surtout aux yeux de l’administration, d’autant plus que le conseil de discipline est quasi- inexistant dans les différents établissements de l’université Marien Ngouabi. D’où une forte présence de l’impunité à l’égard des enseignants, favorisant du coup la baisse du niveau des apprenants. Ce fléau a des conséquences sur la victime et sur ses résultats. La jeune fille perd peu à peu le goût d’aller à l’école. D’après les statistiques, beaucoup de filles, pour se libérer de ses enseignants à la libido insatiable, abandonnent très tôt les études. Celles qui résistent pendant longtemps sont parfois obligés de changer d’établissement à la 126
recherche des cadres d’études pouvant leur permettre d’être à l’abri de ces prédateurs. D’autre part, les victimes au lieu de s’alarmer ou abandonner les études doivent prendre leur courage en dénonçant toute tentative d’harcèlement, passant outre le respect qu’elles ont pour ces enseignants. On vient à l’école pour apprendre et non pour se laisser avoir en cédant si facilement son corps à qui en a besoin. L’université qui a d’autres chats à fouetter n’a que faire de ces situations nuisibles qui, la plupart du temps, prônent un jeu de passe-passe entre des personnes assez matures, donc susceptibles de comprendre leurs engagements. Est-il que, en tant qu’institution chargée de l’éducation, de trouver des solutions idoines à ce qui est en passe de devenir une catastrophe morale et intellectuelle. Dans le cas où la fille est consentante, cela doit se faire en dehors du cadre universitaire pour ne pas que ça apparaisse comme un acte de plaisir pour la note. Nul n’ignore que le corps de la femme est sacré et ne devrait faire l’objet d’un quelconque marchandage. 2- Pour la grève : La grève au niveau d’une institution d’enseignement entraine des conséquences énormes sur les résultats en termes de performance. C’est l’incapacité de gérer une grève qui entraine les impacts négatifs à la fois directs et indirects. Par exemple, le cas de l’Etat qui consacre un budget assez considérable à l’éducation. Il y a des impacts sur les différentes institutions universitaires et les Facultés et Grandes écoles ; sur les travailleurs, qui perdent leur vécu quotidien tout au long de la période que va durer une grève. Et sur les étudiants qui malheureusement n’apprennent rien pendant les périodes de grève. Cela peut provoquer des impacts psychologiques importants. L’impact de la grève sur une année scolaire ne peut être que négatif dans notre société. Car les grèves sont très généralement prolongées par manque de communication. Que ce soit les syndicats ou que ce soit les administrateurs, ils n’ont pas cette capacité de communiquer afin de s’entendre. Alors qu’il faut toujours communiquer, même si c’est pour dire NON. C’est d’ailleurs pourquoi des petites grèves qui, en principe, ne devraient pas dépasser les 24 heures, durent souvent et finissent même par se transformer en grève illimitée. Les impacts indirects touchent la population qui exercent de petites activités commerciales devant les établissements, et qui se retrouvent au chômage, 127
les étudiants n’ayant que 3 à 4 mois de cours au lieu de 9. A la fin de leurs cycles universitaires, on leur délivre des diplômes dont ils n’ont pas le niveau et cela va se sentir même dans l’exercice de leur fonction. Ce qui équivaut à un vrai danger parce que dans tous les pays du monde, on parle d’une bonne gestion des ressources humaines car c’est cela qui permettra à un pays de se développer. N’oublions pas que le travailleur est au centre de la production ; pour cela il est donc de bon aloi que la direction rectorale créé des conditions de motivation notamment par le paiement des heures supplémentaires. L’on notera aussi que la subvention allouée par l’État doit être bien gérée de telle sorte que les établissements ne manquent pas de craie, papier, encre… Il faut ajouter que l’environnement dans lequel les travailleurs de l’université Marien Ngouabi exercent n’est toujours pas propice pour bien accomplir leurs tâches. Les mauvaises conditions de travail militent au déclenchement des grèves : manque d’outil informatique dans plusieurs services, absence de climatisation, la nonélectrification des bureaux et salle de classe. Du côté des étudiants, les mêmes conditions de travail posent problème. Le paiement des bourses est à notre avis une solution pour mettre fin aux grèves des étudiants car depuis l’année universitaire 2016-2017, les bourses tombent assez rarement. Le moins que l’on puisse dire au regard de la situation de l’université, est que le gouvernement devra organiser les états généraux pour attaquer le mal à la racine. L’unique institution d’enseignement supérieur publique au Congo court les risques d’une année blanche, à cause de ces grèves à répétition chose qu’elle a connue au cours de l’année universitaire 1993-1994. Au point ou le niveau des étudiants congolais laissent à désirer. Confusion totale dans l’application du système LicenceMaster-Doctorat. En dehors du Coronavirus (dit Covid-19) qui fait des victimes dans le monde, depuis 2019, les facteurs bloquant l’amélioration des rendements académiques au sein de l’université peuvent être envisagés selon trois (3) axes : les facteurs liés aux infrastructures, ceux liés à la mauvaise organisation académique et les facteurs relatifs aux ressources humaines. Au regard de ce qui précède, il convient de retenir que pour qu’il y ait un bon rendement à l’université Marien Ngouabi, il nous faut développer aussi une culture de qualité. Bon nombre de nos concitoyens considèrent que l’échec fait partie intrinsèque du processus d’apprentissage. Cependant, pour fonder une véritable culture de la qualité intellectuelle, il 128
faudra mobiliser des convictions et des valeurs différentes susceptibles d’accompagner cette humble démarche. C’est pourquoi, il s’agit d’admettre avant tout que la plupart des étudiants soient capables de maitriser les connaissances théoriques et pratiques inscrites dans les programmes académiques si les moyens leur sont donnés au préalable. Enfin, cette amélioration passe par une véritable mobilisation de tous les acteurs de l’éducation. De toute évidence, il revient à l’État de donner un nouveau souffle à l’université Marien Ngouabi de façon à galvaniser les énergies, seule et unique voie de réussite et de sortie.
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Chapitre IX - Revitaliser l’enseignement supérieur au Congo : un enjeu majeur L’université est une institution comme les autres, mais sa vitalité dépend du soin que l’on doit y apporter, en raison de la place qu’elle occupe dans la société et des résultats que l’on attend d’elle. C’est le summum intellectuel d’un pays qui, par la qualité de ses enseignants et de la formation qu’elle procure aux apprenants, forme l’« intelligentsia » susceptible de servir à divers niveaux de la Nation. Ainsi, que doit être sa mission dans la société congolaise ? Le genre d’enseignement qu’elle procure pour l’avenir et le cadre de travail qu’on espère avoir pour optimiser le travail que l’on a à faire ? Des questions qui suscitent autant de réponses que d’observations, mais il sied déjà de dire que pour véritablement revitaliser notre enseignement supérieur, il faut un certain nombre d’impératifs (A, B, C, D, E.).
A- Rendre l’université plus compétitive Du latin « competitio ou competere », la compétitivité se rapporte à la rivalité et à la concurrence donc à la compétition en tant que telle. Elle tient compte de plusieurs facteurs parmi lesquels la capacité à produire les sensibilités, les coûts, les infrastructures et les partenaires. C’est donc l’aptitude couramment connue à affronter des situations de concurrence et à rivaliser avec autrui en vue d’obtenir des résultats probants. En qualité d’« entreprise du savoir », l’université a pour rôle de développer des actions, des compétences, des réseaux qui illustrent son lien avec la culture scientifique et technique, à savoir qu’elle s’investit dans de nouvelles formes de recherches participatives au service de la société. Quelle société avons-nous au Congo et quel rôle l’université joue-t-elle à son égard ? Au Congo, nous avons une société en voie de développement dans un Pays à Revenu Intermédiaire (PRI), donc en route vers l’émergence que l’on pourra atteindre en 2025. Toutefois, la crise économique consécutive à l’effondrement des cours du pétrole depuis 2014 s’est accentuée en 2017 (Figure n°28), faisant baisser le PIB à -3%. Les embellies dues à la mise en service du gisement de Moho Nord en 2017, de même que la remontée du cours du brut n’a pas compensé le déclin des activités non pétrolières. Mais 130
la croissance devrait reprendre sur la période 2018-2020 à 1,9% en moyenne, à cause de la hausse de la production pétrolière, des activités des NIC et du secteur manufacturier (cimenterie). La production hors pétrole se consolidant pour atteindre son pic en 2019, l’inflation devant être maîtrisée à 3% (taux de la CEMAC) et permettre de contenir les déficits budgétaires (2018-2020). Le Plan National de Développement 2018-2022 (PND) table sur une reprise économique rapide doublée d’une croissance durable et inclusive. Figure n°28 : Le contexte économique du Congo (2014-2017)51
Croissance PIB (%) Inflation (moyenne annuelle) Solde budgétaire / PIB % Solde ex. courant / PIB % Dette publique / PIB % Exportations de biens et services / PIB % Importations de biens et services / PIB % Taux de change effectif réel (ind.2000=100)
2014 3,3 0,9 -7,9 -3,3 33,8 75,1
-18,3 -21,0
64,2 129,2
2015 2,5 2,0 50,9 66,9
2016 (p) 1,7 4,0 -7,5 -8,2 51,2 66,2
2017 (p) 5 3,7 -1,6 -2,1 43,5 70,8
78,2
64,7
60,7
125,6
Ce contexte a nettement évolué mais avec des estimations (e) aussi fortes que des prévisions (p) sensibles de 2016 à 2019 (Figure n°29). Figure n°29 : Les principaux indicateurs économiques (2016-2019)52
Croissance PIB (%) Inflation (moyenne annuelle, %) Solde public / PIB (%) Solde courant / PIB (%) Dette publique / PIB (%)
2016 -2,8, 3,6 -19,4 -54,1 98,7
2017 -3,1 0,5 -7,6 -13,1 117,9
2018(e) 1,9 1,6 7,1 4,2 102,1
2019(p) 3,5 1,8 7,9 5,4 98,3
Source : Economies africaines. site économique de « toutes Afriques », 2017. Pour rappel, le PIB est à 8,87 Md$ l’année ayant marqué une rupture dans la mesure où l’augmentation du PIB réel, selon le FMI, est restée décevante de +2,3%, et par habitant +0,1%, à cause de la chute des cours du pétrole. 51
52
Source : Coface, fév. 2019 131
Et si l’on considère les trois (3) dimensions du développement (économique, social et culturel), il apparaît que l’université Marien Ngouabi accompagne l’État dans sa marche vers le développement nonobstant ses faiblesses évoquées ci-haut. Mais cela ne suffit pas. Elle doit s’évertuer à fournir davantage d’efforts dans la formation des cadres compétitifs donc de qualité, pouvant être utilisés dans les secteurs qui s’annoncent et où on les attend, comme les Zones économiques spéciales (ZES) en construction. Elles ont été mises en place à Brazzaville, PointeNoire, Oyo-Ollombo et Ouesso et devraient contribuer au développement des activités de service et de transformation, offrant des avantages fiscaux et douaniers. Car même faible (comme c’est le cas aujourd’hui), le taux la croissance économique reste une condition nécessaire au développement. Les cadres bien formés étant là pour aider les pouvoirs publics à le booster, dans le processus de satisfaction des besoins humains essentiels, besoins primaires, santé, éducation. Il faut avouer que dans toute sa dimension, notre université a son rôle à jouer comme catalyseur dans la recherche de l’équité sociale. Et comme le dit si bien l’économiste sociologue IGNACY SACHS, « Tout développement digne de ce nom doit poursuivre comme objectif, la justice sociale, en respectant la nature et en tendant à l’efficacité économique, mais sans que ces deux préoccupations deviennent une fin en soi ». Et de poursuivre : « L’économique doit être subordonnée à un projet social démocratiquement élaborée ». L’université en tant que système (administratif) dans un système (social), fournira à l’État (nous l’espérons) des moyens humains et techniques de réussir ses politiques publiques en matière de développement économique, social et culturel voire politique. Ainsi, les principaux objectifs de l’université Marien Ngouabi, laquelle devra évoluer davantage, doivent se traduire par la formation efficace de tous les cadres supérieurs dont le pays en besoin pour son émergence. Ces cadres doivent avoir (et nous le réitérons) une qualification de très haut niveau au regard des normes internationales imposées par le CAMES qui est un outil efficace de suivi de nos universités d’Afrique. Elle doit préparer les hommes et les femmes compétents dans leurs domaines, socialement intégrés, mais aussi aptes à s’épanouir dans un monde en perpétuel devenir grâce à la révolution scientifique et technologique. Et dans ces conditions, la formation ne doit plus être ramenée à l’accumulation d’une masse de connaissance vite périmées, mais devrait plutôt s’orienter vers la capacité d’adaptation afin de rendre possible une nécessaire reconversion grâce à un niveau général solide et un recyclage rapide en temps opportun. 132
Malgré la disparition du Parti unique et le retour de la démocratie pluraliste au Congo, l’université Marien Ngouabi doit réhabiliter non seulement la culture générale, mais aussi la formation politique axée sur nos réalités, afin d’éviter l’aliénation par la poursuite d’objectifs trop éloignés de nos traditions économiques. Ce faisceau de connaissances justifie une base de recrutement reposant sur l’acquisition de sérieuses connaissances générales avant d’accéder aux spécialisations prévues dans le cycle supérieur de métiers. L’enseignement supérieur dans un pays comme le nôtre, résolument engagé et décidé à maîtriser son développement doit, à travers ses orientations essentielles (finalité, organisation et méthodes d’enseignement), avoir pour but de : - rénover la culture nationale sans pourtant méconnaître les acquisitions de l’humanité. La recherche et la coopération interuniversitaire devant traduire cette exigence ; - rehausser le niveau culturel de notre pays par son rayonnement et son intégration dans le milieu universitaire ; - s’imposer comme un foyer de progrès permanent en assurant la formation (permanente) et le recyclage ; - former des cadres experts et particulièrement intégrés en assurant de façon concomitante et non successive la formation théorique et professionnelle (formation intégrée). Ainsi, la mission traditionnelle de l’université est donc de produire et transmettre des connaissances utiles liées aux attentes de la société, le corps professoral étant tenu de ne pas faillir à cette mission, quelles que soient les conditions de financement. Pierre angulaire de l’économie du savoir, Marien Ngouabi doit, de ce fait, produire des connaissances non seulement aux marchés, mais surtout aux besoins de la main-d’œuvre qualifiée et à ceux d’épanouissement personnel de la femme et de l’homme congolais. En définitive, l’importance de la formation professionnelle au sein de l’université est plus qu’indéniable, elle doit valoriser avec force et pertinence la recherche et maintenir ses engagements en : - augmentant le nombre de diplômés ; - accroissant les effectifs féminins notamment les enseignantes. Pour rappel, à l’université Marien Ngouabi, non seulement il y a peu de femmes qui sont aux postes de prise de décision, aucune femme n’est à la tête de la Direction rectorale sur 4 postes : 02 directrices sur 14 directions, zéro chef d’établissement sur 11, zéro chef d’établissement adjoint sur 11 ; 133
mais dans le corps enseignant, on constate aussi un nombre limité de femmes qui exercent le métier d’enseignant. Cet effectif minable des femmes aux postes de prise de décision au sein de notre alma mater donne accès aux hommes de tout se permettre. Aussi, la prédominance des hommes dans le corps enseignant renforce le pouvoir masculin et leur donne une certaine aura sur la gent féminine ; - créant davantage des laboratoires et des centres de recherches. Au Congo, la recherche demeure le parent pauvre de la chaîne car trop théorique, ses acteurs ne visitant les médias que pour attester de son existence lors des conférences (ou interviews) que parfois le public a du mal à saisir le contenu. Non pas à cause des moyens, mais parce que souvent mal organisée et bureaucratisée. Une université de formation théorique est une pure perte pour notre pays et doit pouvoir s’appuyer sur une recherche, la vraie ; - ajustant continuellement ses enseignements à la réalité mouvante de la société, au lieu de toujours servir de tremplin à la culture occidentale que l’on rabâche sans cesse aux apprenants, comme pour ressasser le bon vieux temps de la colonisation. En effet, la colonisation française qui l’a implantée ici a continué à lui donner cette orientation, la formation y est théorique jusqu’aujourd’hui dans certains établissements et vise plus la promotion de la carrière des enseignants. On fait des recherches pour avancer dans sa carrière non pas pour résoudre les problèmes des communautés. Il peut arriver incidemment qu’un travail universitaire résolve un problème de la société, mais fondamentalement cette mission n’est pas l’orientation de nos universités telle que héritées de l’ancien colonisateur. Notre université forme des agents qui ont tendance à se détacher de la société et qui n’y reviennent qu’à travers l’administration, le salariat. Ils réapprennent même à intervenir dans la société. La formation, telle qu’elle est donnée à l’université, devrait offrir beaucoup plus d’alternatives à l’étudiant. La seule chose qu’il est capable de faire aujourd’hui après sa formation, c’est d’y revenir enseigner, donc s’auto-reproduire. On est donc dans un système où les meilleurs sont formés pour s’auto-reproduire. Les autres, après leurs diplômes universitaires ont une bonne formation, mais n’ont aucun métier à part les médecins et les journalistes quelque fois. Il leur faut donc aller dans une école de formation ou sur le terrain pour acquérir un métier. Il est temps de rompre avec ce système qui est d’ailleurs très révolu. 134
J’ajouterai que, l’université de formation théorique est une pure perte pour notre pays et plus grave même. On ne peut passer 5 ans dans un système et en sortir comme un « main vide ». Pour moi, c’est un scandale, dépenser pendant 5 ans sur un étudiant et lui dire un jour, c’est terminé, tu peux partir et il n’a rien entre les mains. C’est un véritable scandale et on doit y remédier en : - répondant à la demande de ceux ou celles qui ont besoin d’un diplôme attestant de leurs compétences professionnelles. Cette invite est d’autant plus importante que l’université doit revoir sa politique de recrutement de « 41 à 50 ans », et l’âge de la retraire à « 67 ans », l’objectif étant d’avoir des enseignants non seulement intelligents mais imbus de sagesse et de maturité. La plupart des recrues viennent reproduire, sans pédagogie, des connaissances académiques que parfois ils ne maîtrisent pas, mais que les étudiants prennent pour argent comptant surtout qu’ils ont en face d’eux des hommes férus de diplômes, en l’occurrence des “Doc” donc des omniscients. Ainsi, pour que l’université Marien Ngouabi devienne réellement compétitive, elle doit accomplir ses missions fondamentales en contribuant efficacement au devenir de la société congolaise, pour se débarrasser des vieux schémas légués par nos « parents Français avares ».
B- Redynamiser les cadres : la formation pour quoi faire ? 1- Réinventer la recherche pour rehausser le niveau : Pour l’histoire, il est vrai qu’au lendemain des indépendances, c’était la construction de l’État qui primait. On pouvait donc se permettre de former des universitaires férus de droit pour rédiger les Constitutions, les Lois, donner des Agents au nouvel État... Mais à partir des années 1984, la rupture est survenue et on avait désormais des diplômés de l’université qui n’étaient plus acceptés sur titre à l’Ecole normale supérieure. Sinon auparavant, si vous avez une licence, quelle que soit la Faculté, vous allez travailler, devenir enseignant ou autre. Et quand vous avez la maîtrise en droit, vous allez vous inscrire au barreau. Il vous fallait juste faire un stage dans un cabinet d’avocats et vous devenez avocat, pas besoin de passer un concours. C’est dans ces années d’ajustement structurel que tout a été bloqué et la licence ou la maîtrise ne vous donnait plus directement accès à l’Ecole normale supérieure. 135
Ce qui constituait un calvaire pour les chercheurs. Conscients de ce qu'aucun pays au monde ne peut se développer sans une base solide dans le secteur de la recherche, les politiques avaient décidé de faire de la science et de la technologie un moteur du développement au Congo. Et aujourd’hui, avec les réformes, il existe une Direction de la recherche au sein de l’université Marien Ngouabi. Et grâce à celle-ci, on constate un progrès en matière de la recherche d’où le nombre élevé de Professeurs dans pratiquement tous les établissements de l’institution. Malgré le nombre élevé de Professeurs, il se trouve par ailleurs que dans le système d’enseignement supérieur au Congo, la recherche est déconnectée des problèmes du pays au point où l’État a senti le besoin de créer une autre institution d’enseignement supérieur publique en construction : l’université Denis Sassou-Nguesso de Kintélé. Le constat fait souvent, est que les étudiants formés dans différents établissements de notre université arrivent en masse au terme de leurs études, avec un niveau beaucoup plus faible en matière de recherche. Ce niveau baisse au fur et à mesure car, dans certains établissements, on garde toujours un modèle pédagogique figé. 2- Repenser la professionnalisation à l’université : A Marien Ngouabi on devrait, à mon avis, introduire la professionnalisation dès la 1ère année. Par p r o f e s s i o n n a l i s a t i o n , on entend « un processus d’engagement volontaire permettant de développer ou renforcer une identité de métier ». En parlant d’université de métier (Cf pages précédentes), je veux dire qu’il s’agit bien d’une identité qui s’accompagne de pratiques, comportements et valeurs du professionnel. La professionnalisation gagne donc à être accompagnée par les ressources humaines. Or si pour G. Le BORTEF (1996) 53 « professionnaliser » désigne « le processus qui permet de construire et développer ses compétences », C. GUITTON (2000) 54 lui pense que le choix de la personnalisation traduit la volonté de la recherche par les pouvoirs « d’un nouveau mode d’articulation de la relation formation-emploi », privilégiant l’expérience professionnelle par rapport à la formation, et les compétences acquises en Cf. Le BORTEF (1996) : De la compétence à la navigation professionnelle, Ed. Organisation, 1996 54 GUITTON C. (2000) : La professionnalisation, nouvelle catégorie de l’intervention publique. Formation Emploi n°70, Avril-Juin 2000. 53
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situation de travail plutôt qu’en situation de formation initiale notamment ». Il s’agit selon R. WITTORSKI (2008)55): « d’intégrer dans un même mouvement l’action au travail, l’analyse de la pratique professionnelle et l’expérimentation de nouvelles façons de travailler ». Dans ce processus, ceux qui n’arrivent pas à passer en 2ème année peuvent sortir vers une bretelle professionnelle avec la possibilité de revenir à l’université après avoir travaillé un ou deux ans, ainsi de suite pour les autres années. Plus vous sélectionnerez plus vous aurez donc des conditions d’excellence pour ceux qui sont sélectionnés, et pour ceux qui ne le sont pas, ils ne sont pas éliminés, mais plutôt réorientés vu qu’on les aurait préparés à un métier ; ce qui ne leur enlève pas la possibilité de revenir à l’université quelques années après. Ainsi, au bout de 3 (trois) ans, il faut que l’étudiant puisse sortir de l’université avec un métier et vous verrez que tout de suite on pourra baisser le niveau démographique. On peut construire beaucoup d’universités, mais il nous faut modifier notre approche pédagogique où les gens font 5 (cinq) ans à l’université et sont en 2ème année. Il faut que nous puissions harmoniser le flux d’entrée avec le flux de sortie. Professionnalisation à courte durée vers les métiers des sciences, de la technologie et des mathématiques. Voilà les types de réformes qui aideront l’université Marien Ngouabi à se démarquer et essayer de suivre l’exemple d’autres universités à travers le monde, à l’instar de celles des pays du nord où cette pratique a donné des résultats escomptés. Pour cela, il faut le faire en tenant compte de nos réalités, pour ne pas tomber dans le sempiternel piège du mimétisme (ou du suivisme) aveugle caractérisant depuis longtemps nos Etats ; le pays n’ayant pas encore assez de débouchés pour être capables d’attirer des compétences et pratiquer le système pur de l’alternance, cela s’entend. Mais en tant qu'institution publique majeure dans la formation des compétences qualifiées, l'université Marien Ngouabi doit pouvoir oser à faire certaines réformes pouvant changer l’image de notre alma mater. 3- Prôner la qualité et veiller à l’essentiel : Dans le tableau peint cihaut, j’ai cru devoir montrer le rôle que joue l’État dans l’enseignement supérieur, sa dynamique scientifique et sa gestion des hommes et des femmes qui, avec zèle et doigté s’attèlent à apporter une formation à la 55
WITTORSKI R. (2008) : La professionnalisation, Savoirs, 2008. 137
hauteur de leur espérance. Chaque année, sortent de l’université des jeunes instruits et cultivés, après de grands moments passés à suivre les enseignements dispensés par leurs guides intellectuels commis à cela et fiers de l’être. Ils sont nombreux à être envoyés dans des écoles (collèges et lycées) de Brazzaville et de l’intérieur, pour enseigner à leur tour et donner le mieux qu’ils savent faire en tenant compte des programmes de l’année. Ils ont appris la pédagogie, la vraie, dans les grandes écoles (ENS, ENST, ISEPS…) où ils ont été admis par concours et où l’occasion leur a été offerte d’aiguiser leur savoir, eux qui arrivent frais émoulus de la Faculté des lettres ou des sciences. A une époque bien récente, celle du Parti unique (PCT) que l’on peut encore regretter aujourd’hui, l’entrée était automatique pour ne pas que les acquis s’émoussent et que les établissements n’aient pas à évoluer dans un déficit perpétuel. Les années de formation étaient écourtées, une (1) à l’INSSED (ENS aujourd’hui pour les lycées) et deux (2) pour les collèges. Ailleurs (à l’ENAM et à l’ENMA), où l’on formait des magistrats et autres administrateurs de qualité, le tableau était sensiblement le même sauf que la soutenance était obligatoire. C’est aussi l’État qui pourvoie l’université en budget conséquent (Cf. le tableau statistique en pages précédentes), les recettes internes étant largement insuffisantes et ne répondant nullement aux besoins de l’institution. L’autonomie financière s’avère nécessaire et même urgente pour que l’université n’est plus à attendre tout de son pourvoyeur, quand bien même ce dernier éprouve d’énormes difficultés. Les grèves à répétition pour non-paiement de bourses d’étudiants, retards de salaires du personnel et d’heures complémentaires et supplémentaires, des primes d’encadrement et de surveillance des devoirs, des examens, de surveillance et d’encadrement des thèses de mémoires et le non-décaissement régulier du budget de fonctionnement de l’université, expliquent cette faiblesse. Enfin, c’est le gouvernement qui, dans sa politique de maillage du pays en infrastructures de qualité, a réfectionné des bâtiments (comme ceux de la Faculté des sciences détruits lors des guerres civiles), des salles de classe et construit certains locaux de l’université, les derniers en date étant : le nouveau Rectorat, les deux grands amphithéâtres de plus de 1 600 (Figure n°30) places chacun, la grande bibliothèque (Figure n°31) et autres… Jamais notre alma mater n’a eu autant de structures neuves et modernes en dehors de celles bâties à l’époque du défunt Président Marien Ngouabi grâce à la coopération soviétique (ENS, ENST, Amphi 600, FSSA, etc.). Des infrastructures qui, dans l’ensemble, permettent à nos étudiants de ne 138
plus ravaler les rues de la capitale de nuit pour espérer gagner de la place et suivre assez décemment les cours : cas de l’Amphi 600 pour le droit et les sciences économiques. Figure n° 30 : L’amphithéâtre A. Bouya de l’université Marien Ngouabi
Mais cette politique du gouvernement souffre encore de plusieurs lacunes qu’il devient urgent d’en corriger les failles pour une prise en main réelle et avantageuse de l’université. Ainsi donc, autant l’Etat fait autant les difficultés s’accumulent dues le plus souvent au manque de suivi, de maladresses et d’impunité.
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Figure n°31 : La Grande Bibliothèque universitaire
Par exemple, certaines infrastructures ne sont pas souvent bien entretenues : cas de la bibliothèque (où l’ascenseur pose problème) et des amphithéâtres où d’autres toilettes ne sont quasiment plus praticables. Du côté de Bayardelle, quelques réfections faites ne soulagent pas encore totalement les occupants en raison de l’insalubrité des bâtiments qui laissent filtrer l’eau de pluie, situation d’extrême dangerosité. Le dernier sinistre (incendie) qui a ravagé un restaurant dans l’enceinte de la Faculté des lettres et des arts, au mois de mai 2019, doit être la conséquence de ce manque d’entretien. Certains fonctionnaires de l’université brillent par des comportements frisant l’amateurisme si ce n’est le manque d’amour pour leur pays, surtout quand ils sont élevés à des postes de gestion importants. Les dernières malversations financières tant décriées à la Direction doctorale en sont une illustration, comme si l’on se souciait mieux de soimême que de l’outil de travail pour lequel on a été nommé. Ce serait une erreur de croire qu’une grande institution comme la nôtre devrait être gérée à la manière d’une « boutique », pour en donner une image totalement erronée et déconnectée de la réalité.
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Il revient donc à l’université, au plan strictement interne, de se revitaliser en tant qu’institution d’enseignement supérieur (public) qui a des obligations, des visées et des objectifs à atteindre, sans toutefois attendre que l’Etat fasse à sa place. Pour sa part, l’État doit y jouer un rôle plus décisif (que celui souligné ci-haut) et remettre l’enseignement supérieur au centre de ses préoccupations, en considérant la formation et la recherche comme l’une des clés pour l’avenir. Pour qu’une institution marche il faut des cadres de renom, l’université n’en manque pas. Ils sont partout, disséminés dans les Facultés, Ecoles et Instituts où ils servent avec loyauté et sérieux leur pays, le Congo. La maîtrise par eux de la science, leur dévouement et leur sagacité ne sont plus à démontrer. Le pays a des talents, des génies, des hommes et des femmes qui comptent parmi les meilleurs en Afrique et au monde, le CAMES ayant fait la démonstration qu’ils ont de la valeur. Ils ont tous appris à divers niveaux pour devenir ce qu’ils sont : Docteurs, Maîtres assistants ou de conférences…, devenant d’éminents chercheurs aux qualités pointues. Mais force est de constater que souvent nos compétences manquent de civisme, d’amour de la patrie, de collaboration et d’intégrité morale. Nombreux arrivent à l’université imbus d’idées ethniques, d’esprit de grandeur, d’orgueil démesuré et de chauvinisme intellectuel, des notions aveuglantes indignes du formateur. D’aucuns sont particulièrement hostiles à la pédagogie, se vantent d’avoir beaucoup appris et obtenu de gros diplômes en France, ancien pays colonisateur. Ils se particularisent des autres parce que meilleurs, férus de connaissances oubliant qu’ils ne sont pas les seuls et que l’enseignant ne vaut rien sans déontologie. L’impression qu’ils en donnent, en bravant l’auditoire des étudiants qui arrivent frais émoulus, est de n’appartenir à rien, même pas à l’institution pour laquelle ils sont là, au pays tout simplement ! Ils se disent étrangers venus servir le Congo, à la place de ses fils, oubliant qu’ils le sont euxmêmes, donc les vrais. Oubliant aussi que le diplôme ne se vante pas et que sa valeur dépend de ce qu’on est et de ce que l’on fait pour les autres. De leur côté, les anciens (vacataires en l’occurrence) déçus de la position qu’ils occupent de façon éperdue, boudent les novices, utilisant le langage fait de boutades du genre : « Ils viennent jouir là où les autres ont souffert à attendre ! ». Ces comportements sont simplement à bannir, à effacer de la conscience collective, du subconscient de chacun car indignes et d’aucune portée. L’université demeure une institution d’État et ne saurait 141
être l’apanage d’individus d’exception, de névrosés intellectuels sans foi ni loi, rabaissant au centuple sa réputation. Le Congo est un et indivisible, ses fils de véritables compatriotes qui n’attendent pas mais l’aiment et se respectent entre eux, autour d’un idéal commun : le développement. L’enseignant est un homme intègre, en ce sens qu’il doit évoluer loin des pesanteurs tribalo-régionalistes et faire preuve d’humanisme, de patriotisme. Ainsi, comme dit T. OBENGA56 : « Bien amusantes sont les dissertations de quelques intellectuels congolais sur le tribalisme, l’ethnisme, le messianisme, l’intégrisme, le séparatisme, la scission nationale, la politique politicienne : il y a tant à penser, à imaginer, à concevoir, à créer, à faire, à produire. L’idéal est la beauté ». Il est un modèle pour l’apprenant qui le cite en exemple, veut faire comme lui une fois cadre en le mimant même maladroitement. Il est au-dessus de la mêlée, applique sa pédagogie avec fierté, cultive l’humanisme et veille à l’application de ses enseignements par des exposés et devoirs soutenus, des notes distribuées en tenant compte du travail abattu. Exceptée la pédagogie, il doit à la déontologie ses façons de concevoir, d’agir et de faire car elle est imperturbable et guide celui ou celle qui la porte en lui et l’applique. Un formateur sans déontologie est comme un arbitre sans accessoires pour son métier, arrivant sur un terrain les bras ballants en se confondant au reste des joueurs à qui il n’a strictement rien à dire. D’autre part, on relève un goût cru pour l’argent facile et le sexe. Les enseignants se livrent sans motif à une vente éhontée des notes, à une pédagogie de bas étage, loin du respect et du mérite qu’on leur doit. Il est un secret de polichinelle que l’enseignement supérieur se mue parfois en un lieu de commerce où règne le « droit de cuissage », une mentalité naguère pratiquée au collège et au lycée quand des enseignants, en quête de finances pouvaient espérer arrondir les fins de mois, en gonflant simplement les copies ou les bulletins. Le harcèlement sexuel dénoncé cihaut venant en appui de ce système honteux dont la pratique n’honore ni leurs auteurs ni l’institution, encore moins le pays. Des séminaires ont été organisés à cet effet, des dénonciations faites sur les médias, jamais ces actes n’ont pris fin. Nous invitons donc nos dirigeants à sévir contre ces actes ignominieux, de façon à punir leurs auteurs pour que plus jamais nos apprenants n’aient à les vivre. La vie à l’université pour nos filles, OBENGA T. (2001) : Pour le Congo-Brazzaville. Réflexions et propositions, Paris, L’Harmattan, 2001, pp.70-71 56
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notamment, en dépend alors qu’elles sont considérées comme les plus sensibles parce que vulnérables à tout point de vue. En définitive, le dynamisme de nos cadres est interpelé pour qu’ils deviennent de vrais patriotes, des hommes intègres et au faîte de l’intérêt que représente l’éducation pour leur pays. Celle-ci, au même titre que la culture, est inaliénable voire inaltérable pour le bien de tous. Ainsi, « A la lumière de ce qui précède, on constate qu’il faut, enfin, au Congo, une grande structure culturelle, intellectuelle, pédagogique, scientifique et économique : l’Université du Congo, jalon de l’Université Africaine, dans le cadre de la Renaissance Africaine et de la Globalisation. Voilà le problème à résoudre… »57. A côté du dynamisme, on devrait penser à former de vrais étudiants pour faire d’eux des cadres de demain, férus non seulement de diplômes mais de maturité dans tel ou tel autre domaine de compétences. Et non des cadres au rabais dont le niveau pourrait, à l’avenir, poser problème et empiéter négativement sur la société. En effet, le système scolaire et universitaire au Congo le mérite d’accueillir presque tous les enfants et les jeunes titulaires d’un baccalauréat. On peut se satisfaire de l’effort quantitatif colossal fait jusqu’à présent. Mais à regarder le niveau d’employabilité des jeunes sortis du système éducatif (nous l’avons souligné), on ne peut pas avoir le même sentiment de satisfaction. Soixante pour cent (60%) des diplômés sans emploi sortent des différents établissements de l’université Marien Ngouabi (Facultés des lettres, de droit et d’économie…). Le système éducatif congolais est à faire évoluer, de sorte qu’il y ait toujours une adéquation entre formation et emploi. Ainsi, l’État doit continuer de s’occuper prioritairement de l’éducation en favorisant désormais l’initiation aux métiers (Figure n°32), l’acquisition des connaissances et des compétences en adéquation avec les impératifs et les besoins du développement. Le mode d’éducation à privilégier est celui qui rend ses bénéficiaires aptes à l’emploi.
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Ibid. 143
Figure n°32 : Un centre d’apprentissage de métiers58
A l’université, au lycée et même au collège (technique), l’enseignement dispensé devra mettre l’accent sur la transmission des compétences utiles à l’exercice des emplois disponibles dans la société ou à créer. Des centres publics et privés, dédiés à l’initiation aux métiers et à la formation professionnelle, des jeunes en difficulté scolaire, ou à la formation continue, mériteront de l’État la même attention que celle accordée aux structures classiques de l’Éducation. Tout jeune congolais a droit à la formation qualifiante. Telle doit être l’ambition à assigner au nouveau système éducatif national et universitaire. L’objectif visé par l’État étant de consacrer chaque année le quart (25%) du budget général à l’éducation nationale. Et ce pour59 : • former le cas échéant à l’étranger, des milliers de formateurs spécialisés dans l’initiation aux métiers et dans la transmission des compétences dans divers domaines ; • initier aux métiers et donner une formation professionnelle à des centaines de milliers de jeunes Congolais ; • créer et encourager la création des universités ou des centres (publics et privés) des métiers ; Cf. Projet de société du Président D.S.N (2016) : La marche pour le développement. Allons plus loin ensemble, Rubrique 4. 59 Projet de société du chef de l’État D.S.Nguesso pour le Congo de 2016 à 2021, intitulé « La marche vers le développement. Allons plus loin ensemble » (Rubrique 4 : Préparer les jeunes à l’emploi par la formation qualifiante). 58
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• construire des infrastructures adaptées au nouveau modèle de formation ; • réhabiliter et équiper, en tenant compte des nouvelles exigences de formation, les structures scolaires et universitaires existantes ; • prendre en charge, dans les internats et résidences universitaires, des élèves et étudiants des écoles et des instituts spécialisés d’enseignement supérieur ; • créer des conditions d’attirer et de retenir les meilleurs enseignants dans le système éducatif national. Ce travail ne peut être possible qu’en créant des conditions favorables à une rémunération mensuelle continue des travailleurs, notamment ceux exerçant dans l’enseignement supérieur public. Il mettrait fin aux incessants mouvements de grève qui frappent l’université Marien Ngouabi et redorerait son image, surtout lorsque ceux-ci perçoivent leur dû au même moment que ceux de la fonction publique. Le salaire, et encore lui, demeure un épineux problème que l’État devrait pouvoir résoudre en temps opportun, le temps de vaches maigres passé. C- Résoudre l’épineux problème des salaires : un casse-tête chinois Au dynamisme des enseignants et du personnel administratif, se greffe celui du traitement des salaires. Nul ne peut faire mieux s’il est affamé, courbant l’échine à faire des recherches souvent dans des conditions inacceptables, sous un soleil accablant. Le problème de l’université n’est pas qu’infrastructurel, sécuritaire mais financier. Il se pose encore un sérieux problème de salaire et de bourses à l’origine d’incessants remous (grèves) que connait actuellement l’enseignement supérieur. Après la lune de miel des années 2014 à 2017 (voir tableau ci-dessus), l’université est tombée dans les travers d’une situation financière extrêmement difficile due à la crise que traverse le pays. Personnel et étudiants battent le pavé des fins de mois sans dû auxquelles s’ajoutent les tracasseries dont nous avons déjà fait état (infrastructures de recherche et centres d’archives insuffisants, guerres à répétition, etc.). Le refrain bonimenteur connu « Le Congo est dans l’impasse, il faut comprendre » ne peut calmer l’ardeur des syndicats qui répliquent par un slogan connu : « Ventre affamé n’a point d’oreille ! ». Le discours d’apaisement du gouvernement à leur égard ne suffit donc plus, il est temps d’agir.
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Dès novembre 2018, en effet, le Collège intersyndical de l’université Marien Ngouabi constate dans une déclaration (Figure n°33), l’indifférence du ministre de tutelle de ne pas les associer aux démarches tendant à éclairer les revendications des travailleurs ; informant l’opinion sur la seule réunion tenue avec ce dernier, depuis la grève de septembre 2018. Il dénonce « son incompétence et ses limites quant à proposer aux travailleurs de l’Université Marien Ngouabi des solutions dignes d’un homme d’État », sa solution étant de « nous demander d’attendre indéfiniment la signature de l’accord entre le Congo et le FMI, tout en continuant à travailler religieusement, quelle que soit la croissance du nombre de mois de salaires impayés… ». Selon lui, le ministre n’a jamais eu le courage d’informer l’opinion sur la réalité des revendications des travailleurs de l’université Marien Ngouabi, notamment les « 6 mois de salaires impayés au 30 octobre 2018, deux ans et demi d’heures diverses dues et la subvention de fonctionnement non versée ». Aussi, pense-t-il que les grèves à répétition sont le fait du mode de financement de l’université qui a montré ses limites, son budget étant devenu déficitaire depuis plus d’une dizaine d’années ! Elles n’ont pas toujours les mêmes causes, exception faite pour celles des années 2017 et 2018 qui portent sur « le paiement des salaires ». Et peu après (le 28 novembre), à la suite d’une réception chez M. le Premier Ministre, le Collège intersyndical de l’université Marien Ngouabi (Figure n°34) décline (de commun accord) ce qui suit : 1- Mise à disposition immédiate d’une enveloppe spéciale destinée à couvrir les charges suivantes : - Paiement immédiat du salaire du mois de juin 2018 ; - Paiement des heures diverses dues au titre de l’année académique 2016-2017 ; - Versement de la subvention de fonctionnement ; - Versement d’une subvention spéciale pour l’organisation des examens ; 2- Poursuite des négociations avec le ministre de tutelle en vue du règlement des mois de salaires impayés et des heures diverses dues ;
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3- Paiement régulier des salaires au même rythme que les agents de la fonction publique. Ce relevé de conclusions aboutit à la levée de la grève avec reprise immédiate du travail dans tous les établissements de l’université. Figure n°33 : Une déclaration de l’Intersyndicale de l’Université Marien Ngouabi
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En 2019 (le 23 mars), dans une déclaration rendue publique au sujet de la disparition de quarante millions cinq cent mille francs CFA (40.500.000), au niveau de l’Agence comptable de l’université Marien Ngouabi, le Collège Intersyndical rend le Recteur responsable de ce vol et demande son départ. Il dénonce la mauvaise gestion et le laxisme dans la tenue des fonds, tout en lui rappelant les missions réglementaires des syndicats à savoir : « défendre les intérêts matériels et moraux des travailleurs et contribuer à la gestion administrative, pédagogique et financière de l’Université Marien Ngouabi ». Il met en garde Monsieur le Recteur contre la gestion chaotique et ethnocentrique, et le prévient que la persistance de cet état de fait qui l’amènerait à prendre d’autres types de décisions.
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Figure n° 34 : État des négociations Syndicats-Gouvernements (novembre 2018)
La même année (le 20 mai), un point sur l’exécution du relevé de conclusions (du 28 novembre 2018) aboutit à un satisfecit du corps syndical qui « félicite et encourage le Gouvernement de la République dans le sens de maintenir le respect du principe de concomitance dans le paiement des salaires tout en veillant à ce que cet acquis ne soit pas brisé » (Figure n°35).
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Il note, par ailleurs, que le projet de Protocole d’accord (qui devait être signé peu avant avec le Ministre de tutelle), indiquait les modalités pratiques d’apurement des salaires impayés et des heures diverses dues, selon le tableau suivant : - premier mois de salaire impayé : courant juin 2019 ; - deuxième mois de salaire impayé : courant 3è trimestre 2019 ; - troisième mois de salaire impayé : courant 4è trimestre 2019 ; - quatrième mois de salaire impayé : courant 1er trimestre 2020. D’autre part, les heures diverses dues, concernant les années académiques 2017-2018 et 2018-2019, ainsi que les 50% restés au titre de l’année 2015-2016, devraient être apurés ainsi qu’il suit : - les 50% de l’année 2015-2016 : courant juin 2019 ; - les heures de 2017-2018 : courant 4è trimestre 2019 ; - les heures de 2018-2019 : courant 1er trimestre 2020. Dès lors, les négociations qui se suivent n’ont jamais été rompues malgré le retard croissant de salaires et de bourses au niveau de l’institution. A ce jour, les travailleurs accusent sept mois (7) d’impayés, une possibilité donnée aux syndicats de charger quand la situation l’impose. Par contre, s’il est une chose que les syndicalistes abordent assez rarement ou presque jamais, et qui paraît être d’un intérêt aussi vital que le salaire, c’est la « délocalisation universitaire ». A cette idée géniale, vient s’adjoindre celle des pôles universitaires tant évoqués et qui, à ce jour, ont du mal à démarrer.
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Figure n°35 : Un compte-rendu de l’Intersyndicale du 20 mai 2019
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D- Le rôle du transport urbain Le transport urbain est l’âme d’une ville, son évolution et son existence en dépendent. Le lot de déplacements quotidiens de la banlieue vers le centre et vice versa, détermine sa vitalité et celle de ses habitants peu importe son étendue. Brazzaville, capitale politico-administrative du Congo, ne manque pas d’atouts : avenues spacieuses à perte de vue, villas cossues, écoles et centres de santé, aéroports, stades, etc. Deux voies ultramodernes venaient d’être érigées le long du fleuve (les corniches) : l’une menant à Kintélé (nord de la ville), l’autre au Djoué (sud) rendant plus fluide la circulation devenue trop intense.
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Mais le système de transport reste défaillant, au grand dam des usagers qui ne savent quoi faire, ravalant leur colère devant le jeu honteux des « demiterrains ». Les établissements d’enseignement supérieur public restent très mal desservis, non seulement à cause de leur position stratégique (Bayardelle, Faculté des sciences et Rectorat…) mais par manque cruel des bus de qualité opérant en temps et heures échus. L’État qui dispose d’une Société de Transport Urbain (STPU) doit construire, devant les Instituts et autres Ecoles, des abris- bus confortables et durables, capables de recevoir des moyens roulants aussi confortables. De là partiraient (ou arriveraient), en temps déterminé, des enseignants et étudiants qui ont cours, soucieux de parer au plus pressé car ayant pour d’autres, terminé. L’université est un haut lieu de la connaissance, et où les enseignements ne sont plus assurés comme au collège, avec des emplois du temps parfois lourds, harassants et sollicitant des heures tardives. Il faut donc une attention bien particulière des autorités, et surtout ne pas gérer le transport avec indifférence et négligence, dans le but de nuire au temps des uns et des autres. Des lignes bien ciblées doivent retenir l’attention des gestionnaires d’établissements qui, par inadvertance de la Société de transport, peuvent interpeler ses dirigeants. Leur rôle dans ce cas est déterminant pour ramener à l’ordre, ne fut-ce que par une simple note, ceux-ci à ne pas oublier que l’université a besoin d’être en permanence desservie. Cela ne coûte rien que de solliciter d’une Société de transport aide et assurance, pour le bien de l’éducation. Le Rectorat peut le faire de façon officielle, sans tabous ni imposition encore moins sans contrainte. Tout le monde n’a pas droit à une voiture, ça coûte très cher, le bus est le bienvenu lorsqu’il est permanent, à la portée de tous. Je ne parle pas des minibus privés qui font tout et n’importe quoi, mais des grands moyens de la trempe des « Mal à l’aise », gérés par des hommes responsables, prêts à se mouvoir. On ne fait de leçon à personne, on veut l’équité, la promptitude, le savoirfaire, la créativité. Une société sans invention est condamnée à disparaître, puisqu’elle ne produit pas et attend tout de l’extérieur, du ciel comme de nos jours. Les autres n’ont pas attendu pour devenir ce qu’ils sont, parmi les plus développés de la planète. La Chine a construit la zone économique spéciale (ZES) la plus puissante au monde grâce à l’invention des techniques, à son savoir pointu. Les moyens de transport circulent de nuit comme de jour, les métros sous des anciens marécages, à Shenzhen ville industrielle ! L’Afrique du sud a ses bus à étage, très performants, qui circulent aux quatre coins des grandes villes, souvent de nuit. Le congolais 153
n’a pas encore besoin de train urbain très coûteux à mettre au point, le bus suffit. Au Congo, on ne crée pas on mime. Sans risques, les « bus de nuit » peuvent circuler à Brazzaville, il suffit de tester avec l’appui des services de sécurité dont la proximité avec la population est légendaire. Les étudiants peuvent en profiter en allant très tôt de Talangaï à Bacongo, de Mfilou à Mpila, préparer des exposés avec des collègues ou visiter une médiathèque, assister au premier cours. Les jours fériés peuvent être bénéfiques à ces jeunes gens, car ils sont libres de mouvement, de curiosité. D’autre part, on peut initier des « cartes de bus à puce » perfectionnées grâce auxquelles des abonnements peuvent être souscrits, selon les possibilités des uns et des autres ; cela profiterait aux étudiants qui n’auront plus à se dépenser au quotidien. Autre avantage : finies les palabres intempestives à chaque station, qui ralentissent les trajets et dégradent la monnaie. Cette innovation devra être accompagnée de mesures très strictes, tendant à pénaliser d’éventuels fraudeurs comme ce fut le cas, les années passés, avec les abonnements en carnets de la Société de Transport Urbain de Brazzaville (STUB). Cette compagnie apparaissait, aux yeux de tous, comme la meilleure que le Congo ait connue avec les célèbres bus à longue distance, les « Pegazzo ». Le manque de rigueur et la gestion scabreuse des dirigeants l’avaient conduit à cesser toutes ses activités. De ce qui précède, le transport demeure un véritable mystère pour nos villes et l’université en souffre. Il revient aux autorités d’y mettre un accent bien particulier, en considérant les établissements d’enseignement supérieur comme des points de jonction et de chute accessibles pour d’éventuels mouvements. Cela est important voir urgent, comme le dit si bien un éminent penseur, nous citons : « Sur la grande horloge du temps, on ne lit qu’un mot : maintenant » Cet effort pourra être poursuivi avec la future délocalisation de l’université, une nécessité tant redoutée par les congolais qui rêvent d’un tel exploit.
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E- Réactiver la délocalisation : une nécessité incontournable Délocaliser (au sens économique du terme) signifie « déplacer une unité de production afin de bénéficier d’avantages industriels, de politiques de redynamisation améliorant leur attractivité économique pour inciter à la création de nouvelles activités pour remplacer le vide économique ». Il existe plusieurs définitions de la délocalisation à l’image de celle de Philippe VILLEMUS6070 qui pense à la « séparation entre les lieux de production et de consommation. Autrement dit, les produits sont fabriqués dans un lieu différent de celui où ils sont consommés ». De son côté, Francis GRIGNON6171 croit à « changer de lieu une unité de production … avec l’ouverture d’une unité productive à l’étranger, concomitante à la fermeture d’une unité locale, sans que soit affectée la destination des biens produits : marché domestique, ce qui implique alors un flux nouveau d’importations, ou marchés étrangers, ce qui diminue le flux d’exportation… ». La délocalisation est une pratique ancienne qui ne concerne pas que le secteur économique, mais bien d’autres comme celui de l’éducation dont les établissements, au gré de l’évolution et des contingences, peuvent subir une implantation nouvelle. C’est le cas de l’université Marien Ngouabi dont la concentration dans la seule ville de Brazzaville pose problème. Il faut donc la dégager de certaines zones sensibles, exposées aux conflits tribalo-régionalistes qui ont contribué à l’avènement des années blanches et des souffrances de toutes sortes. Ces quartiers sont connus, l’objectif est de débarrasser les enseignants et les étudiants des destructions à venir, la guerre servant de tremplin au règlement de comptes tribalo-politiques. Après les tentatives infructueuses de Lissouba (rappelées ci-dessus), il revient au gouvernement de construire d’autres universités à travers le pays pour contenir le flot d’étudiants qui arrivent chaque année. Les admis au baccalauréat du Nord et du Sud viennent en ville, désorientés, et ont toutes les peines du monde à poursuivre leurs études. Les campus (ou résidences universitaires) sont insuffisants en nombre et en espace, et ne peuvent accueillir tout le monde. Cette situation bloque les génies à poursuivre les études faute de parents à Brazzaville. Hormis Cf VILLEMUS P. (2005) : Délocalisations, aurons-nous encore des emplois demain ?, Ed. du Seuil, 2005. 61 http://www.senat.fr/rap/r03-374.html 60
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l’enseignement privé qui prend de l’ampleur, le public joue encore un rôle extrêmement important en raison de la souplesse des frais d’inscription et de son caractère moins contraignant. Mais beaucoup reste encore à faire. L’idée des pôles universitaires semble avoir été abandonnée au profit de Kintélé qui, elle aussi, n’est qu’aux portes de la capitale, à quelques encablures du centre-ville. Elle devrait permettre d’élargir l’enseignement supérieur au reste des départements, et raccourcir les distances en vue d’un apprentissage beaucoup plus aisé. Le coût serait certes exorbitant, mais cette décentralisation permettrait d’alléger les établissements existants en effectifs pléthoriques et supplanterait les coûts de gestion à l’Etat et à ses usagers. Sur une dizaine d’universités prévues selon les spécificités locales, aucune n’a été construite à ce jour laissant planer un flou artistique. Mais le projet couve dans les tiroirs, en attendant d’être mis au point un jour, à la satisfaction des congolais pour qui la formation qualifiante est l’un des leviers pouvant conduire le pays à l’émergence. Pour rappel, le Congo est le seul pays d’Afrique centrale à abriter l’unique université public, derrière les Etats comme le Gabon, le Cameroun, le Rwanda et la RDC qui en compte plusieurs. Je sollicite alors du gouvernement que ce projet devienne réalité et que se réduise le système épuisant de vacation, qui retarde outre mesure de nombreux enseignants dans leur promotion. Nonobstant la crise qui nous cisaille, des financements pourraient être trouvés auprès de nos partenaires : asiatiques, européens, américains, brésiliens, etc. En dirigeant charismatique, le Président pourrait bien jouer sur la diplomatie pour réveiller ses amitiés de par le monde, auprès des grands groupes économiques qui lui apporteraient leur aide. De même qu’il a fait pour Kintélé autant il le fera pour les autres universités à naître, mettant en exergue son génie de grand leader africain pour capter l’attention de ses interlocuteurs. La coopération entre Etats tient autant à la politique, à l’économie qu’à la culture, et cela peut nous être profitable. Les grands projets au monde ont abouti grâce à des accords dûment signés, conséquence d’une entente préalable entre Etats d’une part, les Etats et les groupes de gestion de l’autre. Les retombées peuvent et doivent profiter à tous, dans le cadre bien précis des relations « gagnant- gagnant » qui caractérisent le monde d’aujourd’hui, particulièrement avec la Chine communiste. Les bienfaiteurs du monde entier peuvent attribuer des dons pouvant leur profiter en reconnaissance de leur geste, de leur amour pour le Congo, son éducation, sa culture. Mais aussi de leurs dirigeants à qui ils 156
font confiance, traitent des problèmes bénéfiques aux institutions et aux hommes, bref que le contact demeure permanent pour le bien de tous. Le débat au sujet de ces pôles universitaires devrait reprendre car il est d’un grand intérêt pour notre pays. Le monde universitaire attend le démarrage des travaux aux lieux choisis comme étant valorisables, dans le but de soulager les peines des apprenants du Nord, du Sud, de l’Est et de l’Ouest, sortis en masse des lycées après leur admission au baccalauréat. Les structures d'accueil sont insuffisantes et concentrées à Brazzaville où elles ont subi d'importants dégâts suite aux différentes guerres et ont été vidées de leur contenu. Ainsi donc, à défaut de délocaliser Marien Ngouabi, le devoir du gouvernement de la République est d’ériger partout dans le pays, des infrastructures d’enseignement supérieur dignes pour compenser le retard. Car, créer d’autres universités revient à mettre la main à la pâte, continuer la formation théorique de haut niveau, tout en veillant à créer des bretelles de sortie et d’entrée. Afin de permettre un va-et-vient entre le terrain et l’espace académique de haut niveau. Et c’est justement dans ce sens-là que l’université Marien Ngouabi devrait mettre en place un programme qui consistera à former des étudiants utiles qui peuvent contribuer à l’émergence du Congo et non ceux qui viennent apprendre à l’Etat. Ce programme peut par exemple être basé sur une visite du pays chaque année par 10 ou 20 étudiants en leur donnant des cours sur l’histoire du Congo et de l’université tout en mettant à leur disposition des moyens pédagogiques conséquents. En 60 ans d’indépendance, le Congo n’a connu qu’une seule et unique université, ce qui constitue un frein à la formation pouvant combiner des chercheurs venus d’horizons divers. Personne ne saurait, en effet, pardonner à tous les pouvoirs ayant dirigé ce pays, sous aucun prétexte fallacieux, de s’être trompés dans la gestion de différents projets ou simplement de n’y avoir pas pensé Kintélé (nous l’avons dit) est une autre histoire, celle-là aussi bénéfique. Mais le peuple profond attend que soit réalisés, dans nos départements, des centres d’enseignement supérieur viables, susceptibles de réduire les distances de façon à permettre aux apprenants d’être plus proches de chez eux.
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Chapitre X- L’université de Kintélé : une ambition d’avenir Mon désir, ici, est de présenter aux lecteurs une œuvre qui se veut l’une des plus grandes d’Afrique et même du monde, le temple scientifique de demain par son gigantisme et l’enjeu qu’elle représente pour le pays. J’insisterai particulièrement sur l’importance du site, qui se veut un cadre de formation approprié et son accessibilité par rapport au reste de la ville (A, B, C.)
A- L’attractivité du site Comparée (par exagération) à la Silicon Valley62, Kintélé est de nos jours l’endroit idéal où s’exerce une intense activité politique, touristique et sportive. Hier plaine quasi vide où habitaient quelques pêcheurs, cet ancien village téké donne l’impression d’être devenu un arrondissement de Brazzaville. Ici l’eau abonde, l’île Mbamou et Kinshasa sont en face, la route nationale 2 y passe sans oublier la Zone économique spéciale de Maloukou (en construction), autant d’atouts profitables à souhait et qui font la beauté du site. T. OBENGA (2001)63 le décrit comme « … extensible à l’infini, jusqu’au-delà du 45 km… » avant d’ajouter : « … les possibilités de construction sont considérables, sur des hauteurs dominant le fleuve Congo. Bâtiments d’enseignement longeant toutes les facultés et tous les instituts de recherche, bâtiments administratifs, dortoirs, restaurants, services postaux, aérodrome, piscines, terrains de jeux (football, tennis, basket-ball, volley-ball, saut, javelot, etc.), services de transport à travers le campus universitaire, jardins, bosquets, ski nautique sur le fleuve, développement de l’île Mbamou (tourisme jusqu’à Manguénguéngué-falaises), développement du port fluvial de Yoro si proche, structures de pêcheries, d’agriculture et d’élevage pour l’Université elle-même ; équipements modernes, machines électroniques, Silicon valley (vallée du silicium) désigne le pôle des industries de pointe situé dans la partie sud de la région de la baie de San Francisco en Californie, sur la côte ouest des Etats-Unis, dont San José est la plus grande ville. Pour rappel, son importance a inspiré bon nombre de technopoles dans le monde. 63 Op.Cit., p.71. 62
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groupes électrogènes, laboratoires, bibliothèques, clubs et night-club universitaires, salles de conférences internationales, télécommunication. Les sections industrielles du campus universitaire peuvent fabriquer de petits avions achetables par Lina-Congo pour la couverture aérienne du pays. Le centre hospitalier universitaire prendrait en charge tous les grands problèmes sanitaires du pays. Des laboratoires liés aux sciences agronomiques seraient à développer avec des stations à travers le pays. Une partie du bois du haut-Congo serait traité à l’Université de Brazzaville, site Kintélé, la capitale Brazzaville est éloignée seulement de 6 km ; les personnels administratifs et enseignants, ainsi que les étudiants qui voudraient toujours habiter Brazzaville n’auraient pas beaucoup de distance à parcourir (bus, véhicules personnels, navettes sur le fleuve de Kintélé à Yoro). De toute façon, Brazzaville s’étendra, dans l’avenir jusqu’à Kintélé ». Située à quelques encablures de la banlieue nord de la capitale, Kintélé est un vaste espace collinaire qui abrite, à ce jour, non seulement un Collège et un Marché mais un Complexe sportif dit « La Concorde », des Hôtels haut-standing et le Centre de conférences international. En contrebas, sur une vallée arborée, se trouve le Centre touristique Elonda où viennent se prélasser des congolais (accompagnés ou non), avides de plaisir et de curiosité. Une corniche ultramoderne à deux voies partie de Talangaï (6è arrondissement) y aboutit, après avoir longé le fleuve sur près d’une dizaine de kilomètres. C’est ici et nulle part ailleurs que se construit, par une Société de droit congolais (Unicon), l’université Denis Sassou Nguesso (UDSN), la seconde depuis notre accession à l’indépendance (Figure n°36). Créée par “loi n°37-2013 du 30 décembre 201”, c’est un complexe pouvant accueillir jusqu’à 30 000 étudiants composé de huit (8) Instituts de formation regroupés en 37 bâtiments, dont un Rectorat, une Bibliothèque centrale, un centre audiovisuel, un restaurant et un amphithéâtre. Certains ayant qualifié le projet de fiasco et même de canular économique, ont fini par se résoudre à comprendre le bien- fondé de celui-ci au vu des travaux qui se réalisent sur le terrain. Bâti sur 36,5 hectares répartis sur 4 zones par 5 kilomètres de voiries et réseaux divers de parkings et d’espaces verts, il couvre au total 187 hectares pour 36 mois de travaux. Ce délai est à ce jour rallongé en raison des difficultés de financement dues à la crise économique qui cisaille le pays et du Coronavirus. 159
En dehors de l’aspect touristique du site, l’université est avant tout une ambition intellectuelle que tente de donner au Congo son géniteur, au regard de la pertinence et du sérieux qu’on y impose pour les générations présentes et à venir. Figure n°36 : Une vue de la nouvelle université de Kintélé (côté résidences achevées)64
B- Un nouveau cadre adéquat de formation en gestation Insistant sur la qualité des femmes et des hommes capables d’animer la structure, et son importance intellectuelle pour le Congo et l’Afrique au regard de son gigantisme un peu particulier, T. OBENGA (2001)75 tient ces mots d’une extrême qualité : « L’Université n’est pas une école spécialisée, une école d’ingénieurs, de sciences, de technologies, non plus une académie mais un lieu où se rassemblent tous les savoirs universels du moment. On y fait aussi de la restauration, de l’hôtellerie que de la physique nucléaire, de la sociologie, de la génétique le plus fine. Donc c’est ça qu’on veut créer ici à Sassou Nguesso de Kintélé, c’est-à-dire faire de cette Université un foyer culturel, scientifique, technologique du continent africain. C’est ça l’ambition…C’est ça l’Université et si le 64
Cf. Projet de société, op. cité. 160
Congo le fait, tous les étudiants, toute la jeunesse africaine viendra se former au Congo. Et vous aurez le rôle que vous allez jouer dans la formation de l’Afrique de demain, vous aurez formé tous les cadres, tous les intellectuels, tous les savants de l’Afrique contemporaine. C’est ça que les gens ne comprennent pas du tout, c’est le lieu où l’on exploite le gisement le plus important de l’humanité, le gisement cérébral qu’il faut exploiter, et quand vous ne l’exploitez pas vous baissez. Je crois qu’il suffit de former, les Congolais je crois qu’ils ont du génie, chaque fois ils l’ont montré, moi je crois à ça… ». Et de poursuivre : «…On ne fait rien pour faire épanouir le génie congolais et les gens commencent à s’endormir. Le niveau est bas et on dégringole. C’est inadmissible parce que déjà on n’était rien mais Brazzaville était déjà la capitale de l’AEF, la capitale non seulement politique et administrative mais intellectuelle. Le Congo brillait, une bonne étoile, les gens n’avaient pas vos diplômes, aujourd’hui vous avez le brevet, le bac… »65. Kintélé sera donc un cadre adéquat de formation qui recevra aussi bien le personnel enseignant que les étudiants dans des conditions optimales de travail. Un complexe intégré qui fera de l’espace collinaire un centre névralgique d’impulsion des dynamiques économiques. Un endroit véritablement de la croissance future afin de façonner des femmes et des hommes performants, qui va s’inscrire sur la liste restreinte des atouts dont peut disposer le pays. Ainsi, les bâtiments de cette infrastructure présentent toutes les commodités du fait de sa vocation panafricaine, car pouvant accueillir un grand nombre d’étudiants (soit 30 000 au total). A côté des résidences pour étudiants et Professeurs complètement achevés, l’Institut supérieur des sports et des sciences physiques en voie de l’être, les bâtiments abritant l’administration et la restauration sont encore loin de connaître leur achèvement. A cela se greffent les actes d’incivisme perpétrés par des personnes mal intentionnées et non identifiées. Devant cette situation et malgré la crise morose que connaît le pays, le gouvernement devrait revoir ses stratégies pour optimiser un financement adéquat de ce grand projet et aussi assurer sa sécurisation. D’autre part, son ouverture promise pour 2019 ou 2020, permettra d’enrayer la pléthore des effectifs à l’université Marien Ngouabi et restera une heureuse solution au déficit de cette 65
Cf. OBENGA T. : Interview avec la Presse présidentielle. 161
institution, laquelle présage un avenir radieux pour notre pays. Ainsi donc, en sa qualité de contenu à maîtriser par l’enseignement et les recherches, l’université Denis Sassou Nguesso se distingue par sa spécificité en raison de ses nombreuses filières techniques et instituts supérieurs, à savoir : - (1) École supérieure des télécommunications, qui doit se reconnaître par son excellence pédagogique et sa dimension internationale, pour se situer ainsi à la pointe de l’innovation technologique. S’appuyant sur une recherche de haut niveau, les enseignements devraient se caractériser par la richesse, la qualité, l’innovation pédagogique. Ainsi, outre une formation approfondie sur les dernières technologies, nos étudiants pourront par exemple suivre des cours d’économie, de gestion ou même d’entrepreneuriat. Pour le Congo, de telles formations répondent parfaitement à la diversification tant souhaitée et attendue de notre économie dans le domaine des NTIC, un accent particulier devant être mis sur les qualités humaines, la maîtrise du management, la capacité à œuvrer dans un contexte pluriculturel face à la puissance des technologies dont les diplômés de Kintélé seront experts. Ils répondront alors aux besoins des entreprises, la formation d’ingénieur pouvant être complétée par un Master, un Doctorat ou un Master spécialisé. Bref, au cœur de la dynamique des Technologies de l’information et de la communication, l’université Denis Sassou Nguesso devra être un acteur majeur de la recherche dans ce domaine ; - (1) Institut supérieur d’éducation, dont la vocation devra être de former des enseignants donc des éducateurs ou cadres éducatifs que le pays attend. Cet institut viendrait en appui de l’ENS sa consœur qui, elle aussi, fait déjà un travail de formation considérable ; - des Facultés des sciences et techniques, qui s’appuieraient sur le Numérique et l’industrie du futur où seraient regroupées des formations en mathématiques, informatique et science pour l’ingénieur, sciences et développement durable ; de même que les formations en chimie, physique et environnement. Dans la pratique, ces facultés auront besoin d’être associées à des laboratoires de recherche ou à tisser d’étroites collaborations avec les entreprises, pour la recherche ou pour la formation des étudiants, futurs acteurs du monde socio-économique. De façon générale, pour ces facultés qui regroupent deux grands domaines de formation, l’offre de formation permet à la fois de répondre aux exigences 162
scientifiques de demain et de correspondre aux attentes du monde de l’emploi dans notre pays ; - (1) École des mines, de l’hydraulique et de l’énergie, qui formera des cadres de renom en matière d’ingénierie minière, hydraulique et énergétique ; - (1) École supérieure des bâtiments et des travaux publics ; - (3) autres Instituts supérieurs : des sciences et techniques de la communication, des sciences et techniques appliquées ainsi que des sports et de l’éducation physique. Ce spacieux complexe, aux qualités techniques et pédagogiques irréprochables auxquelles s’ajouteront d’éminents chercheurs venus d’horizons divers (Afrique, Europe et ailleurs…), coûterait à l’Etat congolais la bagatelle somme de 241 647 529 724 FCFA pour servir d’exemple par sa technicité. Pour cela, il se poserait avec acuité le sempiternel problème d’enseignants au niveau national pour un pays d’à peine 4 millions et demi d’habitants et dont les formateurs ne sont pas assez nombreux. Il faudrait alors de la matière grise susceptible de distiller ou rendre le savoir attendu, proportionnel aux moyens mis en jeu pour mettre au point ce gigantesque projet. Le Congo se doit alors de former davantage des enseignants ou alors procéder au recrutement de nombreux complexés qui traînent à travers le monde, devenus commerçants de circonstance pour n’avoir pas été pris en compte par leur propre pays. Mieux vaut tard que jamais, ils peuvent être reçus, recyclés puis utilisés comme supplétifs à l’enseignement supérieur malgré leur âge. Nombreux, pour n’avoir pas retenu l’attention des autorités, ont été contraints de repartir en Occident où ils exercent souvent des petits boulots alors qu’ils seraient utiles à leur nation qu’ils aiment tant et qui les a formés. En clair, pour mieux pourvoir Kintélé en nombre suffisant de compétences, plusieurs options sont possibles : 1- Répertorier partout où il est possible de les rencontrer, tous les diplômés du pays ayant terminé leur cursus universitaire et qui y résident encore ; 2- Convaincre les indécis de ce qu’ils pourraient être mieux utilisés à leur retour au bercail. Au besoin, brandir les photos de la nouvelle université tout en leur expliquant le bien-fondé de leur mission si ce n’est juste pour 163
enseigner et participer au développer du pays. Nul n’a le droit de nier d’où il vient, son appartenance à une patrie, son ethnie, sa langue, bref son existence. Honte à ceux ou celles qui pensent ne plus être de chez euxmêmes lorsqu’ils font pâte blanche ailleurs, en Europe surtout, où ils croient avoir tout gagné ne fut-ce que par la sueur de leur front. On ignore souvent de porter en soi son pays, feignant d’en être un représentant même au plus profond de son âme. Il revient donc à l’Etat de jouer son rôle régalien, en les approchant pour leur dire ce qu’ils ne savent plus ou simplement leur insuffler son amour, sa capacité à fournir à ses fils ce dont ils ont besoin ; 3- Réunir toutes les commodités administratives et financières, pour compenser le retard accumulé, car nombreux ont peu ou prou formé des foyers tout comme ils ont pour certains changé ou multiplié des formations ; 4- Imaginer des plans en vue de mieux les insérer et les adapter au nouvel environnement qui n’est plus celui qu’ils ont laissé il y a tant d’années ; 5- Revoir ou requalifier le système de retraite en vigueur à l’enseignement supérieur, pour permettre aux nouvelles recrues de rattraper les années perdues à l’extérieur. Aussi, serait-il mieux d’imaginer pour eux, une nouvelle grille avec des salaires et indemnités fixes, qu’ils percevront chaque fin de mois. On ne perçoit pas la vie ailleurs que chez soi de la même façon, certains n’auraient pas été mieux que d’autres dans leur aventure hors du Congo. Ces conditions, préalablement remplies, permettront aux diplômés congolais encore en errance dans le monde de revenir au pays. Le chef de l’Etat (Figure n°37), en sa qualité de garant de la nation, se servirait personnellement de diligenter les procédures en mettant en place une commission interministérielle susceptible de traiter tous les dossiers y afférant et sans discrimination. Une aide financière forfaitaire de mise en route serait alors dégagée et versée aux nouveaux venus, pour mieux leur permettre de s’installer et gérer une nouvelle vie.
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Figure n°37 : Le Président Denis Sassou Nguesso dont l’université porte le nom66
Toutefois, ce cadre est isolé tant il demeure éloigné de la capitale et sans issue directe à ce jour, nonobstant sa liaison routière mais étriquée à la capitale.
C- Rendre Kintélé plus accessible Pour n’avoir pas été soulignées par le professeur OBENGA (Figure n°38), son accessibilité et sa viabilité ne peuvent être possibles que si trois mesures (et pas des moindres) sont rendues nécessaires : 1- La construction d’une voie complémentaire : D’aucuns se plaignent encore du manque récurrent de transport dans cette zone, une réalité tangible que nul ne peut y apporter le moindre doute. Au bout de la ville, à environ 27 km du centre, Kintélé a besoin d’être totalement enclavée, la nationale 2 (à l’ouest) et le viaduc (à l’est) ne suffisent plus. La première, très engorgée en heure de pointe, traverse Brazzaville nord via Massengo et Itatolo pour se prolonger au-delà du 45 km jusqu’à Ouesso ; la seconde, très longue elle aussi, complète la première par Ngamakosso pour chuter à quelques mètres du marché après sa jonction avec le viaduc au niveau du stade.
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https://www.bing.com/images/search?view=detailV2ccid 165
Figure n°38 : Le Pr T. Obenga, à l’origine du grand projet de Kintélé67
Deux axes assez mal éclairés qui, de toute évidence, sont loin d’atteindre l’université qui elle, se trouve plus à droite au bord du fleuve. Ainsi, s’impose la construction d’une nouvelle route à deux voies, qui partirait de l’actuel grand centre sportif à l’université via Elonda. Il s’agit en fait du prolongement de la voie existante mais dont l’accès à la cité universitaire serait plus direct, et dont la jonction pourrait être faite avec la nationale 2 au niveau du péage. Elle est d’une telle importance que sa réalisation permettra d’atteindre si facilement l’alma mater, sans suivre la bifurcation actuelle et aller plus à gauche en direction de Kintélé-centre. De sa fluidité, dépendra celle des moyens de transport, la régularité des activités pédagogiques et administratives, de même qu’elle facilitera l’accès à la zone économique spéciale et au port de Maloukou en création ; 2- La mise à disposition des moyens de transport plus aisés : Les moyens de transport font partie du patrimoine de l’entreprise, ils sont inaliénables. Le patrimoine représente un ensemble cohérent de biens qui lui appartiennent de droit ou légués en héritage : immobiliers, financiers, professionnels… L’université aura à faire valoir ces biens durables (cars notamment) pour assurer le ramassage et le transport de son Actuel Conseiller à l’éducation du chef de l’État, le Professeur T. OBENGA a exposé ce grand projet dans son livre intitulé : Pour le Congo-Brazzaville. Réflexions et Propositions (Op. cit.) publié chez L’Harmattan en 2001. Il est rentré au pays après avoir enseigné l’Histoire des Civilisations et la Linguistique africaines à l’Université d’Etat de San Francisco en Californie (USA). D’après https://www.bing.com/images/search?view=detailV2&ccid 67
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personnel administratif, des navettes priées de passer en temps et en heures échus à des endroits fixes décidés de commun accord avec l’autorité doctorale. Un tour révisable le matin permettra aux travailleurs de gagner leur poste à temps et sans encombre, le soir pour rentrer chez eux avec l’avantage de repartir le lendemain. L’administration gagnera donc en évitant des retards injustifiés, mais aussi et surtout, en ayant disponibles des ressources humaines attendues ; 3- Le rôle de la Société publique des transports urbains : elle devrait allouer des lignes spéciales directes pour la desserte ininterrompue de la nouvelle structure et y ériger une gare à passager aux abords. Celle-ci doit bénéficier des abris-bus bien bâtis et aux normes requises, pour protéger les usagers (étudiants, personnel administratif, personnes lambda…) des intempéries (pluie par exemple) aux arrêts des lignes de bus ou de cars. A ceux-ci, doivent être associés des panneaux publicitaires tenus par des grandes sociétés de la place, qui vantent leur mérite et font la promotion de leur création récente. Les contrats passés avec celles-ci peuvent assurer à la mairie d’énormes fortunes, à travers sa société de transport dont les moyens roulants seraient toujours de bonne qualité. Aussi, devrait-elle être bien suivie car une entreprise mal gérée est vouée à l’échec, des exemples dans ce sens sont légion. Dans leur forme habituelle, ces abris-bus seront aussi conçus pour recevoir les bus de nuit du fait de leur caractère sécuritaire renforcé par leur éclairage. La circulation nocturne ne poserait aucun problème (on l’a dit), les agents de l’ordre (policiers ou simples agents formés) étant là pour monter la garde ou accompagner les moyens roulants dans leur déplacement. Une telle opportunité est un gage sûr pour les populations à se mouvoir en toute tranquillité, depuis Nganga-Lingolo jusqu’à Kintélé qui, d’ailleurs, va abriter sous peu ce joyau architectural moderne. Et Kintélé aurait le mérite ou l’avantage de voir expérimenter cette nouveauté pour effacer du « subconscient brazzavillois », non seulement la peur de vivre mais aussi et surtout la joie de voyager de jour comme de nuit. Le transport n’est pas l’apanage de la journée, il doit aussi être nocturne, car il implique la bonne gestion des flux de voyageurs et de marchandises dans l’espace urbain, des activités économiques importantes ; la ville étant à la fois le lieu de départ et d’arrivée de ces flux. L’université en création devra être ce point de chute important pour de nombreux étudiants en partance ou en provenance de la ville, même en week-end pour ceux qui adorent s’exhiber. 167
Pour ce faire, il nous faut des bus à niveau de service (bus de grande capacité) répondant aux normes afin d’apporter un service de meilleure qualité sans avoir recours au métro ou tramway qui exigent de lourds investissements. Des bus qui répondent à une vitesse commerciale normale, marquée par des fréquences élevées, une amplitude horaire importante voire chiffrée sur des tableaux électroniques basés à chaque arrêt. Les terminus doivent disposer des services plus importants : distributeurs de tickets, cabines téléphoniques, kiosques à journaux, abribus, etc. Ces propositions, si elles sont réalisées, ont de quoi soulagé confortablement les usagers qui, de nos jours, subissent encore les tracasseries humiliantes de certains tenanciers de minibus qui brillent par un comportement pas trop conciliant. La mairie doit donc agrandir son parc automobile, le rendre fluide et bien le gérer, tant la vie des citadins doit être sa préoccupation majeure ainsi que le prescrit la plupart des recommandations prises au sein du Conseil municipal de Brazzaville. De même, le projet de création de la Société chargée de gérer le fleuve avec des bateaux péniches devrait voir le jour, et faire de la petite ville de Kintélé un point de chute touristique indéniable.
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Conclusion générale La dynamique scientifique à l’université Marien Ngouabi est une réalité et ne saurait faire, à ce jour, l’objet d’un quelconque reniement. Elle est ancienne, inaliénable et tient aux facteurs endogènes qui fondent notre alma mater, institution pour laquelle le Congo s’est tant battu à former et reformer, au lendemain de sa création par le colonisateur français, moins concerné par la formation d’une élite vraiment intellectuelle puissante, que par une école de cadres moyens. Chancelante et éloignée des réalités sociologiques du pays, tenue en respect par ceux pour lesquels l’intelligence était l’affaire des seuls nantis issus des grandes écoles métropolitaines, cet élan ira croissant pour donner au pays des cadres de renom dont on ne peut qu’en être fiers. En 60 ans, grâce à l’effort colossal du gouvernement, ce qui était l’Ecole supérieur de Brazzaville (ESB) est devenue peu à peu l’université de Brazzaville, tenant lieu de grand temple du savoir où la science cohabite désormais avec éducation et formation. La démonstration ainsi faite de son organisation pédagogique, la prise en compte de la maîtrise de ses effectifs et leur quantification, la qualité de la formation et son emprise sur la société congolaise, ont permis de saisir le niveau élevé de notre enseignement supérieur. Il s’appuie sur une politique de rigueur insufflée à divers niveaux, à laquelle s’ajoute l’apport infaillible de ses animateurs en tant qu’acteurs principaux. L’objet de ce travail a donc été d’analyser la gestion scientifique et humaine de notre université à partir de ses leviers historiques et gestationnels, y compris les moments les plus sombres liés à la fois aux grèves à répétition et à l’instabilité croissante des années 1970 à 2000. La cohérence de ces éléments montre que l’enseignement supérieur au Congo n’a pas été que commode, au regard des actions mouvementées couplées aux différents contextes politiques que socio-économiques que notre pays a connus, depuis son accession à l’indépendance. C’est dire que l’éducation, au sens général du terme, n’a pas suivi un parcours bien plus précis, sans tâches et anicroches, mais beaucoup plus sinueux qu’on ne l’ait pensé dès les premières années de notre accession à la souveraineté nationale. Mais elle a sous-tendu toute évolution dès lors qu’elle est apparue comme le sous-bassement de la société, la création de l’école 169
ayant été noble pour les plus jeunes à apprendre et mettre en pratique les rudiments de leur apprentissage. Tout le cursus scolaire en dépend, l’université n’étant que l’étape finale d’un parcours parfois long et lent, où l’on s’habitue aux règles de la vie en société, au niveau supérieur de la science comme creuset des sociétés modernes. Ce travail d’éducation est avant tout un fait de civilisation et non l’apanage de quelque société supranantie, contrairement à certaines thèses assez lugubres qui situent l’évolution sociétale et naturelle des peuples par rapport aux autres. L’éducation dans les sociétés noires d’Afrique a toujours été, au départ, domestique du fait de sa valeur humanisante, avant d’être plus ou moins anéantie pour être dominée par celle colportée d’ailleurs. Ces premières écoles modernes, au Congo, prennent naissance du terreau missionnaire qui écume le pays vers 1880, aliénant la culture locale pour privilégier l’évangélisation d’où sortiront les premiers enseignants. Ils sont noirs, mais enseignent les rudiments du catholicisme blanc considéré comme le salut de l’homme aliéné, vivant éloigné de l’évolution du monde moderne donc « sauvage ». La volonté n’est pas simplement d’enseigner afin d’évaluer les connaissances de nouvelles pupilles, mais de contribuer à créer un homme nouveau susceptible de propager l’évangile, en créant des villages d’« êtres civilisés » qui serviront de modèles aux autres. Cela n’ira sans frustrations, les jeunes étant dans l’obligation de se soumettre à la nouveauté qui, d’ailleurs, servira de tremplin à la domination coloniale que l’on dit souvent éloignée des missionnaires. Dans l’ensemble, la collaboration sera étroite nonobstant les écarts de départ, que les historiens décrivent comme étant une indifférence, cachant les véritables ambitions de Mgr Augouard et ses hommes. Ainsi, la mise en place de l’administration coloniale ne viendra que confirmer et parfaire le travail amorcé par les « Pères du Saint-Esprit », rendant l’école un peu plus lisible avec des enseignements beaucoup plus encadrés. On distingue alors trois types d’écoles disséminées à travers la colonie, avec quelques spécificités : l’école du village, l’école régionale, l’école urbaine et l’enseignement professionnel. Pour cause, « les effets de la diffusion de l’instruction doivent être, suivant la différence de pays diversement nuancés et sagement mesurés, le bon même l’indique 78».L’aide à ces écoles est disproportionnée selon la taille des colonies, le Moyen-Congo arrivant largement en tête avec un taux très élevé mais les méthodes de gestion restent les mêmes. 170
La gestion à Marien Ngouabi demeure celle héritée des anciens colonisateurs, avec un Ministère dit de l’ « Education nationale », de l’ « Enseignement supérieur » couplé parfois à l’ « Enseignement professionnel » ou à celui de la « Recherche scientifique », qui chapeaute l’ensemble de l’administration. Il est suivi du Recteur qui gère l‘ensemble de l’université et qui a, sous sa férule, tout le complet des Directeurs, chefs centraux et autres chefs de service et leurs adjoints. Ici, le travail est fait de façon collégiale et chacun, en ce qui le concerne, s’évertue du mieux qu’il peut, à accomplir les tâches qui sont les siennes et à divers niveaux. C’est dire que les rôles à l’université sont surmontables, en dépit des difficultés qui ne manquent pas : retard de salaires à l’origine des grèves, renouvellements, détournements... Des efforts ont été fournis dans la construction des infrastructures (Cf nos illustrations en diverses pages de ce livre), de même que la couverture des 11 établissements en NTIC, ce que certains pays ont beaucoup de mal à réaliser (il faut le reconnaître). L’Université Marien Ngouabi est au CAMES, l’une des plus performantes en matière de compétences, d’encadrement et de développement, n’empêche le regard parfois insoluble des critiques qui fusent des compatriotes qui confondent vitesse avec précipitation, politique avec gestion. Il est certes vrai que les maux qui minent notre alma mater sont loin d’être dissipés et que la forte crise économique qui cisaille le pays reste un élément important à l’origine de ceux-ci. Par contre, des efforts sont à faire en ce qui concerne la formation, objet de critiques quant à la qualité des diplômés et de leur utilisation. « Et Pourtant, ces mêmes étudiants font des miracles à (l’étranger)…. Beaucoup de Congolais et de Congolaises enseignent dans les universités étrangères, avec compétence et admiration. Ils font courageusement preuve de compétitivité internationale dans plusieurs domaines des savoirs modernes… Le Congo a des talents, des génies, des hommes et des femmes des lettres, de science, de théâtre, de danse et de musique parmi les meilleurs du monde »68. Ainsi donc, l’État congolais demeure trop laxiste quant à leur recrutement notamment dans l’enseignement où les établissements secondaires manquent cruellement d’enseignants titulaires dans la quasi-totalité des séries. A la place, les bénévoles deviennent de véritables tenanciers des écoles alors qu’ils n’ont subi aucune adéquate pouvant leur permettre de 68
SARRAUT A., in ENGAMBÉ, op. cit, p.86. 171
jouer ce rôle. Les langues se délient quant au comportement de notre gouvernement dont les membres sillonnent constamment le pays et ne semblent pas réagir afin de trouver des solutions qui s’imposent. L’Etat, en même temps qu’il forme, doit pouvoir jouer le rôle qui est le sien en attribuant un poste budgétaire à qui de droit, aidé par le privé qui apparaît être la cinquième roue de carrosse aujourd’hui. On reproche également à l’État son inertie quant à la création des pôles universitaires qui demeure encore en projet, de même que le refus des règles de délocalisation de l’université Marien Ngouabi hors de Brazzaville. Cette ville qui concentre tout est souvent victime d’une instabilité politique qui pousse les belligérants à prendre en otage les établissements universitaires, jusqu’à les saccager, ce que nous avons qualifié d’effets collatéraux des guerres à répétition notamment dans le Pool, sempiternelle région rebelle. C’est pourquoi nous avons sollicité que soit mis au point tous ces projets, de façon à permettre à notre pays d’honorer ses engagements à l’égard du peuple qui attend mais aussi des futurs étudiants qui souhaiteraient avoir une Université à côté de chez eux. Le seul projet à réussir dans ce sens est celui de Kintélé où va naître d’ici à 5 mois, une « Université dit Denis Sassou Nguesso », véritable joyau architectural des temps modernes. Son mérite sera de former dans certains domaines que jamais le pays n’a eu l’occasion de faire émerger. En définitive, gageons à ce que la bonne gestion sans tabou de notre université devienne l’affaire de tous, pour que gagne le Congo et ses habitants !
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I- Généraliste
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Annexes Annexe I : Quelques dates de l’histoire récente de notre pays de 1944 à 2018 Photo 1 : Chronologie 1944 (28 janvier-8 février) : la « Conférence des colonies » convoquée par De Gaulle et présidée par le Gouverneur général de l’AEF, Félix Eboué, se tient à Brazzaville. Elle prend des décisions importantes en ce qui concerne l’éducation mais l’Université n’est pas encore née. 1958 (8 décembre) : proclamation, à Pointe-Noire, de la République du Congo. 1958 : création à Brazzaville, capitale du Moyen-Congo, d’un Centre d’enseignement supérieur dénommé CES. 1959 : le CES devient Centre d’études administratives et techniques supérieures (CEATS). 1960 (15 août) : le Congo accède à l’indépendance, après un siècle de colonisation française mouvementé. Un accord est signé entre les gouvernements français et congolais auxquels se joignent le Gabon, la RCA et le Tchad, accord qui transforme le CEATS en Centre d’enseignement supérieur de Brazzaville (CESB). Il ne s’agit encore que d’un établissement de droit français donc entièrement géré par l’ancienne puissance coloniale. 1961 (28 septembre) : Les établissements d’enseignement sont regroupés en trois catégories : les assimilés, les subventionnés et les libres. Les assimilés sont tenus aux mêmes obligations que les établissements publics ; les subventionnés ont des contrats avec l’Etat et les établissements dits libres ne perçoivent aucune subvention. 1961 (11 décembre) : un acte n°46/61-293 permet aux quatre (4) Etats d’Afrique centrale d’adopter à Fort-Lamy (Tchad), la création d’une Fondation de l’enseignement supérieur dans la région d’Afrique
179
centrale (FESAC). Son objectif : former des cadres supérieurs qui manquent cruellement aux anciennes colonies françaises. 1965 (12 août) : nationalisation de l’enseignement au Congo. 1968 : le Mouvement du 31 juillet a lieu, au cours duquel Marien Ngouabi devenu commandant est dégradé dans ses galons avant d’être Président de la République populaire du Congo. En 1969, il fonde le Parti congolais du travail, premier parti marxiste-léniniste au pouvoir en Afrique noire. Progressivement, les emblèmes du pays (drapeau, hymne, devise, etc.) changent. 1970 (23 mars) : Pierre Kinganga Alias Siroco, capitaine et parachutiste de son état, tente un putsch à Bacongo (dans l’enceinte de l’actuel bâtiment abritant les ministères des enseignements technique et secondaire). Il est abattu, avec lui tous ses complices. 1971 : dissolution de la FESAC qui donne naissance à l’ESB. 1972 (22 février) : coup d’État fomenté par Ange Diawara Bédié, auteur du « Mouvement du 22 ou M 22 » qui écume le maquis de Goma Tsé-Tsé (Pool). L’Université Marien Ngouabi a pour recteur M. Tati- Loutard JeanBaptiste qui cède le témoin à M. Levy Makany en 1973. 1973 (24 avril) : tué dans le maquis du Pool (d’aucuns parlent de la frontière avec la RDC où il se serait refugié), les corps de Diawara et quelques-uns de ses acolytes sont exposés au Stade de la Révolution (actuel Stade Massamba-Débat). Fini alors le suspens des populations traumatisées depuis des mois par ceux que Marien appellera « des énergumènes ». 1973 (8 novembre) : les écoles supérieures de droit, lettres et sciences qui appartenaient à l’ancien CESB deviennent respectivement : Faculté de droit, Faculté des lettres et Faculté des sciences. L’Ecole normale supérieure d’Afrique centrale (ENSAC) devient l’Institut supérieur des sciences de l’éducation (INSSED). 1974 (10 janvier) : le Président Marien Ngouabi en personne procède à l’ouverture solennelle de la rentrée universitaire. 1975 (11 décembre) : l’Institut de développement rural (IDR) et l’Institut supérieur d’éducation physique et sportive voient le jour.
180
1977 (18 mars) : le Président Marien Ngouabi est assassiné dans l’enceinte de l’Etat-major des Forces armées où il résidait. 1977 (2 avril) : obsèques nationales du Président Marien Ngouabi, l’oraison funèbre est lue par le commandant Denis Sassou Nguesso alors adjoint au colonel Yhombi-Opango, Président du CMP. 1977 (28 juillet) : l’Université de Brazzaville devient « Université Marien Ngouabi ». L’ordonnance qui consacre la dénomination entérine un vœu émis le 24 avril 1977 par la section UJSC de l’Université de Brazzaville. 1978 (13 avril) : création de l’Institut supérieur des sciences de la santé (INSSA). 1980 : institution de l’ « École du peuple » qui dégage une orientation nouvelle de l’école congolaise. 1983 : ouverture à Loubomo (actuelle Dolisie) de l’Institut supérieur pédagogique de Loubomo (ISPL), chargé de former les enseignants. 1988 : l’Institut supérieur des sciences économiques, juridiques, administratives et de gestion. 1990 (6 septembre) : libéralisation de l’école au Congo. 1992 (15 mars) : libéralisation des activités économiques et sociales. 1992-1993-1994 : guerre civile, des milliers de morts ; destruction du patrimoine scientifique national dont quelques établissements de l’Université Marien Ngouabi. Les milices agissent en toute impunité et publiquement. 1993 : l’INSSA devient la Faculté des sciences de la santé (FSSA). 1993-1994 : première année blanche à l’Université Marien Ngouabi. 1997 (5 juin-17 octobre) : guerre civile, des dizaines de milliers de morts suivis d’incalculables destructions matérielles, psychologiques et économiques. 1997 (18 octobre) : le Général Denis Sassou Nguesso est au pouvoir. 1997 (20 octobre) : message du Président Sassou Nguesso à la nation de puis Oyo (Cuvette). La paix se réinstalle peu à peu, les cours reprennent à l’Université. 181
2005 (13 octobre) : un ultimatum est donné aux Ninjas de libérer la Faculté des sciences occupée depuis lors. 2007 : mise en vigueur, à l’Université Marien Ngouabi, du système LMD (Licence-Master-Doctorat). 2012 : l’IDR devient l’École nationale supérieure d’agronomie et de foresterie (ENSAF) et la FS, la FST (Faculté des sciences et techniques). 2016 (4 avril) : dernière guerre du Pool, les Ninjas incendient les bâtiments. Ntumi gagne les forêts de Mayama où il s’était déjà refugié après avoir abandonné son poste de ministre. 2017 (3 octobre) : le Président Sassou Nguesso reçoit les sages du Pool venus lui faire état de la situation dans le Pool. Ntoumi est reconnu seul responsable de ce chaos mais reçoit, pour la circonstance, le pardon du père de la nation. Dès lors le calme est revenu, les filles et fils de ce département regagnent leurs habitations grâce à l’appui de l’État et des organisations internationales. L’école a repris au grand bonheur de tous. 2017 : signature de l’accord de paix entre le Gouvernement et les Ninjas. Une Commission de pacification du Pool est mise en place et dirigée par le Directeur de cabinet du ministre de l’Intérieur, Séraphin Ondèlè. 2018 : la Faculté des lettres et des sciences humaines (FLSH) devient la Faculté des lettres, des arts et des sciences humaines (FLASH).
182
Annexe II : Les Ministres de l’éducation nationale du Congo depuis 1969 Photo 2 : LOPÈS Henri., ministre de l’éducation nationale (1969-1971)
Photo 3 : THYSTÈRE TCHICAYA Jean-Pierre, ministre de l’enseignement supérieur, technique et professionnel (1971-1975)
183
Photo 4 : TATI LOUTARD Jean-Baptiste, ministre de l’enseignement supérieur (1975-1977)
Photo 5 : NDINGA OBA Antoine, ministre de l’éducation nationale (1977-1984)
184
Photo 6 : TATI LOUTARD Jean-Baptiste, ministre de l’enseignement supérieur (1986-1988)
Photo 7 : ADADA Rodolphe, ministre de l’enseignement secondaire et supérieur, chargé de la recherche scientifique (1989-1991)
185
Photo 8 : LOUTÉTÉ DANGUI N., ministre de l’enseignement supérieur et technique (1992-1995)
Photo 9 : IKOUNGA Vincent de Paul, ministre de l’enseignement supérieur et technique (1995-1997)
186
Photo 10 : NZILA Pierre, ministre de l’enseignement primaire, secondaire et supérieur, chargé de la recherche scientifique (1998-2002)
Photo 11 : OSSÉBI Henri, ministre de l’enseignement supérieur (2002-2009)
187
Photo 12 : ABÉNA Ange Antoine, ministre de l’enseignement supérieur (2009-2012)
Photo 13 : MOYEN Georges, ministre de l’enseignement supérieur (20122016)
188
Photo 14 : ITOUA Bruno Jean-Richard, ministre de l’enseignement supérieur (2016 à ce jour)
189
Annexe III Les recteurs de l’université Marien NGOUABI depuis 1972 Photo 15 : TATI LOUTARD Jean-Baptiste (1972-1973)
Photo 16: MAKANY LEVY (1973-1976)
191
Photo 17: NDINGA OBA Antoine (1976-1977)
Photo 18 : TSOMAMBET Anaclet (1977-1979)
192
Photo 19 : ABIBI Daniel (1979-1983)
Photo 20 : MAKOSSO MAKOSSO Sylvain (1983-1986)
193
Photo 21 : BOUHOYI Hilaire (1986-1991)
Photo 22 : LUMWAMU François (1991-1992)
194
Photo 23 : BOURAMOUÉ Christophe (1992-1995)
Photo 24 : MATONDO Hubert (1995-1997)
195
Photo 25 : GOMBÉ MBALAWA Charles (1997-2003)
Photo 26 : MOYEN Georges (2003-2009)
196
Figure n°27 : MOYIKOUA Armand (2009-2015)
Figure n°28 : LOUZOLO-KIMBEMBÉ Paul (2015-2016)
197
Figure n°29 : IBARA Jean Rosaire (depuis 2016)
198
Annexe IV : Les bâtiments et locaux administratifs Photo 27 : L’ancien rectorat de l’université Marien NGOUABI80 69
Ce bâtiment de type colonial devenait un casse-tête pour les autorités rectorales qui ne savaient quoi faire de l’exiguïté des bureaux. Dans certains services, il n’était pas rare de trouver, au grand dam des usagers, des dossiers entassés à même le sol, ce qui rendait la moindre recherche difficile à celui qui souhaitait connaître de l’agent, la trajectoire de ses papiers. D’après Photo M.L., Brazzaville (2014). 69
199
Photo 28 : Une vue de l’Institut supérieur d’Éducation physique et sportive (ISEP)70
Cet institut est chargé de la formation des professionnels de l’éducation physique et sportive, de la jeunesse-loisirs et sports ainsi que de l’administration sportive. A l’instar de la majorité des établissements d’enseignement supérieur, il est situé à Bacongo (sud de Brazzaville). Photo D.S.Otabo, Brazzaville (2017) 70
200
Photo 29 : L’École nationale supérieure polytechnique (ENSP)71
D’après Photo S.N. MBOUALA (2015). Cette école se charge de former des techniciens supérieurs et des ingénieurs dans les domaines du génie civil, du génie électrique, du génie mécanique et des sciences et technologies alimentaires. L’admission à celle-ci, en première année, se fait par concours. Elle abrite aussi une chaire Unesco en sciences sociales de l’ingénieur et offre des formations doctorales dans ce domaine 71
201
Photo 30 : L’entrée de l’École nationale d’administration et de magistrature (ENAM) 72
Ce complexe de l’ENAM, construit grâce à la coopération russe (une partie), abritait au départ le Ministère des mines de l’AEF, avant de devenir l’« ancienne Ecole supérieure du Parti congolais du travail (PCT) » qui a formé de haut-cadres dont un grand nombre exerce encore à divers niveaux de la vie institutionnelle du Congo. Leur proximité, dans divers services, étaient à l’origine de certains frottements avec les diplômés venus des universités occidentales qui se croyaient tout connaître donc « plus intelligents », erreur ! De nos jours, y sortent : magistrats, administrateurs, inspecteurs et autres fonctionnaires admis au concours d’entrée, après quelques années d’études. Photo S.N.MBOUALA, Brazzaville (2012). 72
202
Photo 31 : Bâtiment de l’Ecole normale supérieure d’agronomie et forestière (ENSAF) 73
L’ENSAF est une école qui forme des techniciens supérieurs et des ingénieurs dans les domaines de l’agriculture, de l’élevage, la forêt et l’environnement au Congo. L’admission se fait par concours. Photo D.S. OTABO, Brazzaville (2015).
73
203
Photo 32 : Le bâtiment des facultés de sciences et techniques, et de droit (FSTFD)
204
Photo 33 : L’Institut supérieure de gestion (ISG)74
Cet établissement vit aujourd’hui une poussée de croissance en exerçant une forte attractivité auprès des nouveaux bacheliers qu’auprès des entreprises et autres organisations qui sollicitent son expertise. On y accède par concours. Photo MOYEN L., Brazzaville (2018). 74
205
Photo 34 : L’École normale supérieure (ENS)75
De cette école, sortent chaque année de dizaines d’étudiants formés au métier d’enseignant de collège et de lycée. Avec l’ENSP, elle constitue le domaine des sciences dites de l’éducation qui concernent l’étude de différents aspects de l’éducation, et font appel à diverses disciplines comme l’histoire de l’éducation, la sociologie de l’éducation, la didactique des disciplines et la psychologie des apprentissages. Les sciences de l’éducation ont donc pour objets d’études, l’ensemble des faits éducatifs interrogés selon plusieurs éclairages. Elles s’intéressent à toutes les étapes de la vie, du jeune enfant à l’adulte et envisagent l’éducation formelle et informelle. Les terrains d’investigation sont divers : l’école primaire, le collège, le lycée, l’enseignement supérieur, la formation postscolaire des adultes, le travail social, la santé, etc. Son entrée est soumise à un concours. Photo MOYEN L., Brazzaville (2018). 75
206
Photo 35 : La Faculté des sciences de la santé (FSSA)76
Ce complexe appelé Tcheulima (nom coréen) et situé de l’autre côté du grand hôpital « Mère et enfant » Blanche Gomez, derrière l’ambassade des États-Unis d’Amérique, est une extension du lycée technique du 1er mai situé juste à côté. En dehors des classiques études en médecine, la Faculté offre des formations en licence de sciences biomédicales, santé publique et sciences infirmières. L’entrée est conditionnée par l’admission à un concours. Photo MOYEN L., Brazzaville (2019). 76
207
Photo 36 : Un bâtiment de la Faculté des sciences économiques (FSE)77
La Faculté des sciences économiques est située à côté de la FLASH (Bayardelle). D’après Photo MOYEN L., Brazzaville (2018).
77
208
Photo 37 : Le nouvel amphithéâtre Ndinga Oba Antoine de l’université Marien Ngouabi
Photo 38 : Vue d’intérieur du nouvel amphithéâtre
209
Photo 39 : Une vue d’ensemble d’un autre amphithéâtre
210
Annexe V : De la gestion des ressources humaines Photo 40 : L’effectif des boursiers de l’enseignement supérieur (2016-2017) Établissements
Attribution
Renouvellement
574
/
Université Catholique d’Afrique Centrale
69
/
Institut (INTS)
57
/
École Supérieure de Gestion et d’Administration des Entreprises
Effectif total
/ 700
Photo 41 : Effectifs des enseignants par établissement et par année Ets Année
20032004
20042005
20052006
20062007
20072008
ENAM
29
28
27
26
26
ENS
71
70
63
58
55
ENSP
38
37
37
33
32
124
122
38
37
36
35
108
103
96
91
FLSH FD FS
127 38 107
114
110
FSE
56
56
54
52
52
FSSA
63
64
59
54
54
38 23
34 19
36 15
33 13
33 12
22
21
21
20
20
599
574
IDR ISEPS ISG Total
612
211
535
520
Photo 42 : Tableau comparatif des effectifs des étudiants et des enseignants78 Année
Etudiants
Enseignants
2003-2004
10.640
612
2004-2005
2.644
599
2005-2006
13.866
574
2006-2007
15.654
535
2007-2008
14.753
520
Photo 43 : Effectifs des enseignants par établissement et par grade au titre de l’année académique 2007-2008 Grade ETS
Assistant
Maître assistant
Maître de conférences
Professeu rs Total
ENAM
00
13
12
1
00
26
ENS
00
09
42
4
00
55
ENSP
00
13
17
02
00
32
00
12
23
00
00
35
00
22
76
04
08
110
FS
01
13
63
08
06
91
FSE
00
26
25
01
00
52
01
11
26
07
09
54
00
08
22
03
00
33
00
03
01
01
12
FD FLSH
FSSA IDR ISEPS ISG Total
78
CETP
07
02
07
11
00
00
20
04
137
324
31
24
520
Source : Direction rectorale/ Service du personnel enseignant 212
Annexe VI :
La signature des accords de coopération le 15 août 1960, à l’Assemblée nationale79 M. le Président de l’Assemblée nationale. _ M. Foyer, secrétaire d’État aux relations avec les États de la Communauté et M. le Président de la République du Congo signent les accords de coopération passés entre la République française et la République du Congo, que l’Assemblée nationale sera appelée à ratifier tout à l’heure. Affaire n°113 PROJET DE LOI PORTANT APPROBATION DES ACCORDS PARAPHÉS LE 12 JUILLET 1960 ET SIGNÉS LE 15 AOÛT 1960 ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ET LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE DU CONGO AINSI QUE DE L’ADHÉSION DE LA RÉPUBLIQUE DU CONGO Ă LA CONVENTION MULTILATÉRALE SUR LA CONCILIATION ET LA COUR D’ARBITRAGE ET Ă L’ACCORD MULTILATÉRAL SUR LES DROITS FONDAMENTAUX DES NATIONAUX DES ÉTATS DE LA COMMUNAUTÉ. M. le Président de l’Assemblée nationale. _ Je donne la parole à M. le rapporteur de la commission élargie. M. L’heyet-Gaboka, rapporteur de la commission élargie. _ « Votre commission élargie, réunie le 14 août 1960, a entendu les explications fournies mutuellement par Monsieur le vice-président du conseil de Gouvernement, MM. les députés Mambéké-Boucher et Vial, sur les données organiques de l’affaire n°113. Les commissions ont aussi demandé que l’application des modalités concernant l’annexe des armées sur la République du Congo, ne lèsent pas cette République. Partant votre commission élargie a adopté à l’unanimité l’affaire n°113. » M. le Président. _ Je mets aux voix le rapport de la commission élargie. M. le Président. _ Je vous donne lecture du texte de loi. « Article 1er. _ Sont approuvés les accords qui ont été paraphés le 12 juillet 1960 et signés le 15 août 1960 entre le Gouvernement de la République française d’une part et le Gouvernement de la République du Congo d’autre part et dont le texte est annexé à la présente loi :
Ces accords paraphés par MM. Foyer et Youlou concernaient aussi l’enseignement supérieur notamment le Centre d’enseignement supérieur de Brazzaville, c’est-à-dire l’actuelle Université Marien Ngouabi. Il est à noter que dans le cadre de la Communauté instituée par la Constitution du 4 octobre 1958, chaque Etat devient responsable de son propre système d’éducation devenue nationale 79
213
« 1° Accord particulier sur les conditions de participation de la République du Congo à la Communauté ; « 2° Accord de coopération en matière de politique étrangère ; « 3° Accord d’assistance militaire technique ; « 4° Accord en matière d’aide ; « 5° Accord en matière domaniale ; « 6° Accord de coopération culturelle ; « 7° Convention d’établissement ; « 8° Accord relatif au centre d’enseignement supérieur de Brazzaville ; « 9° Accord de défense ; « 10° Accord de coopération en matière monétaire, économique et financière ; « 11° Accord relatif à l’enseignement ». « Article 2. _ Est approuvée l’adhésion de la République du Congo à : « 1° La convention multilatérale sur la conciliation et la cour d’arbitrage ; « 2° L’accord multilatéral sur les droits fondamentaux des nationaux des États de la Communauté, « dont le texte est annexé à la présente loi ». « Article 3. _ La présente loi sera exécutée comme loi de l’Etat » « M. le Président. _ Je mets aux voix l’ensemble de cette loi qui prendra le n°44/60. Adopté à l’unanimité. (Applaudissements.) Le Gouvernement était représenté par : M. l’Abbé Fulbert Youlou, Président de la République, Chef du Gouvernement. M. Stéphane Tchichelle, vice-président du conseil, ministre de l’intérieur, chargé des affaires étrangères. M. Jacques Opangault, ministre d’État. M. Gandzion, ministre de l’éducation nationale. M. Bazinga, ministre de l’information. M. Goura, ministre des finances. M. Okomba, ministre du travail. M. Samba, ministre de l’agriculture, de l’élevage, des eaux et forêts. M. Mahouata, ministre de la santé publique. 214
M. Sathoud, secrétaire d’État à la présidence, délégué à la fonction publique. M. Ibouanga, secrétaire d’État à la production industriel
215
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ÉDUCATION ET GOUVERNANCE UNIVERSITAIRE AU CONGO-BRAZZAVILLE (1960-2019) Ce livre présente et analyse le processus de gestion scientifique et humaine à l’Université Marien Ngouabi, « l’université » du CongoBrazzaville depuis son indépendance, en 1960. La combinaison des éléments de ce processus pousse à revisiter l’institution dans son évolution historique, à travers ses aspects organisationnels et l’instabilité politique ayant émaillé notre pays. Témoin (en partie) de ce processus, car y exerçant depuis plus d’une dizaine d’années, l’auteure apporte ici une analyse objective de cette dynamique, le rôle des ressources humaines tout en démontrant les failles et les réussites d’une entité vieillissante, dans un monde où la formation et la recherche prennent de l’ampleur et guident les pas du développement. L’inventaire de cette démarche permet de corriger les erreurs, tout en appelant au sursaut de tous, au réalisme et au changement de mentalités, une synergie d’ensemble qui permettra de surmonter les défis auxquels notre enseignement supérieur reste confronté. En interrogeant la qualité de la formation, son adéquation à l’emploi et la sempiternelle question des salaires et des bourses à l’origine de grèves à répétition, l’auteure fait des propositions pour l’avenir de l’enseignement supérieur au Congo Brazzaville.
Née à Okoyo, dans le département de la Cuvette-Ouest (NordCongo), Lagui MOYEN est détentrice d’un master professionnel en communication et marketing obtenu à l’Université Mohamed Premier d’Oujda (Maroc). De 2014 à 2017, elle est chef de service des missions et relations publiques de l’Université Marien Ngouabi, avant d’être affectée, en complément d’effectif, à la Direction des relations avec le monde du travail (D.R.M.T.) où elle exerce actuellement. Ses travaux portent sur l’analyse de la gouvernance à l’Université Marien Ngouabi et la recherche de solutions. Collection «Gouvernance et société», dirigée par Emmanuel Okamba
ISBN : 978-2-343-19651-0 25,50 €