Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l'état solide: Rappels de cours et problèmes résolus 9782759825530

Cet ouvrage rassemble un ensemble de problèmes résolus portant sur la thermodynamique des transformations de phases, la

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French Pages 250 [254] Year 2021

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l'état solide: Rappels de cours et problèmes résolus
 9782759825530

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide Rappels de cours et problèmes résolus

Didier Blavette et Thomas Philippe

Didier Blavette est Professeur de physique à l’Université de Rouen-Normandie. Il mène ses recherches dans le Groupe de physique des matériaux (UMR CNRS 6634) dont il fut le directeur de 2003 à 2012. Il a enseigné pendant 30 ans la physique générale, la physique du solide, l’électronique et les sciences des matériaux, notamment la diffusion et les transformations de phase en master. Il fut le directeur du Groupement de recherches CNRS « transdiff » sur les transformations de phases diffusives (2004–2008) et de l’école CNRS sur ce sujet. Thomas Philippe est chargé de recherche CNRS au Laboratoire de physique de la matière condensée de l’École polytechnique à Palaiseau. Ancien élève de D. Blavette, il est un spécialiste de la germination, de la croissance et de la coalescence dans les systèmes multicomposants.

Illustration de couverture : Reconstruction 3D du volume analysé d’un alliage AlMgZn par sonde atomique tomographique. Chaque point élémentaire est un atome d’aluminium, de zinc ou de magnésium. L’image met en évidence la présence d’un nano-précipité enrichi en Zn et Mg. Celui-ci apparait sous la forme d’une plaquette parallèle aux plans (111) de la phase mère d’aluminium dont l’épaisseur est proche de 1 nm (W. Lefebvre, GPM).

Imprimé en France

ISBN (papier) : 978-2-7598-2421-2 – ISBN (ebook) : 978-2-7598-2553-0 Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage prive du copiste et non destinées à une utilisation collective », et d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal. © EDP Sciences, 2021

Table des matières

Préface 9 Préface de Yves Bréchet 11  Chapitre 1  • Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase 13 1.1 Rappels de cours 13 1.1.1 Précipitation et mise ordre 13 1.1.2 Fonctions et potentiels thermodynamiques 21 1.1.3 Équilibres binaires : solutions solides idéales et régulières 25 1.1.4 Théorie des transitions critiques et théorie de Landau 29 1.2 Problèmes 32 1.2.1 Concentration de lacunes à l’équilibre 32 1.2.2 La ségrégation intergranulaire 37 1.2.3 Diagrammes de phase et solution régulière 41 1.2.4 Transformations ordre-désordre CC-B2 dans CuPd 50 1.2.5 Mise en ordre dans les CFC et théorie de Landau 57 1.2.6 Mise en ordre dans les CC et théorie de Landau 63 Références 68

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

 Chapitre 2  • Diffusion et transport dans les solides 69 2.1 Rappels de cours 69 2.1.1 La diffusion à l’échelle atomique 70 2.1.2 Les deux lois de Fick 74 2.1.3 Hétérodiffusion, effet Kirkendall 77 2.1.4 Les courts-circuits de diffusion : influence des défauts 79 2.1.5 Diffusion dans un champ de force 80 2.2 Problèmes 83 2.2.1 Mécanismes fondamentaux de diffusion – Équation d’Einstein 83 2.2.2 Mécanismes élémentaires et autodiffusion 86 2.2.3 Diffusion dans les alliages CuAl 89 2.2.4 Le durcissement d’une surface par cémentation 94 2.2.5 Diffusion d’une couche mince en sandwich 98 2.2.6 Effet Kirkendall et diffusion dans CuZn 104 2.2.7 Les courts-circuits de diffusion : joints de grains et dislocations 108 2.2.8 Diffusion dans un champ de force et décomposition spinodale 112 2.2.9 Une nouvelle loi de Fick selon Howe 119 2.2.10 Diffusion dans un champ de forces : application au fluage de Nabarro-Herring 125 2.2.11 Diffusion d’impuretés dans un champ de force, la formation des « atmosphères de Cottrell » 129 2.2.12 Diffusion dans les semi-conducteurs : naissance d’un champ de Nernst interne 135 2.2.13 Diffusion dans un champ de force : l’oxydation du nickel 141 Références 147  Chapitre 3  • Cinétique de formation d’une nouvelle phase 149 3.1 Rappel de cours 149 3.1.1 Précipitation continue et discontinue 149 3.1.2 Instabilité et métastabilité 152 3.1.3 Germination homogène 156 3.1.4 Germination hétérogène 162 3.1.5 Germination de phases métastables 165 3.1.6 Croissance 168 3.1.7 La décomposition spinodale 169 3.1.8 Coalescence 173 3.1.9 Cinétique globale 175

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Table des matières

3.2 Problèmes 177 3.2.1 Les transformations eutectoïdes 177 3.2.2 Germination de précipités dans les alliages Ni-Al 184 3.2.3 Germination-croissance de précipités dans des alliages CuCo dilués 189 3.2.4 Germination hétérogène de précipités dans AlCu 195 3.2.5 Loi de croissance de Deal et Grove pour un précipité sphérique 200 3.2.6 Croissance d’un film d’oxyde en surface, loi de Deal et Grove 205 3.2.7 Croissance et coalescence de précipités sphériques 209 3.2.8 Coalescence dans les superalliages NiAl 218 3.2.9 Modèle de Zener pour la croissance d’un précipité avec interface plane incohérente 224 3.2.10 La décomposition spinodale 229 3.2.11 Théorie cinétique de la germination de Zeldovich et temps d’incubation 236 3.2.12 Coefficient de capture, flux de germination et temps d’incubation 242 Références 249

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Préface

Ce livre s’adresse aux enseignants et aux étudiants en fin de licence ou en master. Il pourra également être très utile aux ingénieurs et doctorants préparant une thèse en sciences des matériaux. La diffusion et les transformations de phase à l’état solide (précipitation d’une nouvelle phase, mise en ordre, croissance d’un film mince en surface d’un alliage, oxydation) constituent un socle fondamental en sciences des matériaux. Ce corpus de connaissances est absolument nécessaire pour la conception et l’optimisation des matériaux et des traitements thermiques aboutissant aux propriétés recherchées qu’il s’agisse de matériaux de structure (aciers, alliages à base Ni, Al, Cu, Ti…) ou fonctionnels (semi-conducteurs, puits quantiques pour l’optronique, multicouches magnétiques). Les transformations de phase diffusives sont incontournables en métallurgie physique. Il s’agit des fondements enseignés, notamment dans tous les cursus de formation en sciences des matériaux dans les écoles d’ingénieurs et universités [1,2]. C’est à l’issue de près de 30 ans d’enseignement en physique des matériaux et de conception d’exercices de travaux dirigés et de problèmes d’examens que l’idée m’est venue de rassembler ces sujets d’examens avec les corrigés détaillés. Les problèmes proposés sont souvent issus de problématiques de recherche avec des illustrations issues d’observations en microscopie électronique ou par sonde atomique tomographique, instrument phare conçu au Groupe de physique des matériaux dans les années 1990. Des liens sont fréquemment faits avec les « matériaux du quotidien ». Ce livre rassemble ainsi un ensemble de problèmes résolus portant sur la thermodynamique des transformations de phases, la diffusion et les phénomènes de diffusion et de transport à l’état solide dans les alliages et les cinétiques de transformation de phase. L’ouvrage est organisé en trois grands chapitres. Chacun commence par un rappel de cours qui donne de manière concise les éléments théoriques nécessaires à la

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

résolution des problèmes. Il y a bien sûr de nombreuses simplifications et omissions que le lecteur voudra bien nous pardonner. Il ne s’agit nullement d’un cours exhaustif. Nous nous sommes de plus limités aux alliages binaires. Enseigner c’est choisir et donc exclure. Ne sont introduites que les notions nécessaires pour résoudre les problèmes du livre. Les démonstrations de ces rappels de cours ne sont parfois pas détaillées. En revanche, les étapes de calculs sont le plus souvent données, ce qui permet au lecteur de redémontrer assez facilement les expressions finales données. La démonstration de certaines équations est de plus reprise dans les problèmes. Le livre contient quelques références bibliographiques de livres ou d’articles apportant un éclairage complémentaire. Le livre rassemble une trentaine de problèmes. Ceux-ci sont souvent précédés d’un préambule précisant le contexte en introduisant les nouveaux concepts utilisés. Les problèmes sont conçus de sorte à guider pas à pas le lecteur. Ils débouchent le plus souvent sur l’étude d’une problématique industrielle réelle (aéronautique, centrales nucléaires, microélectronique…). La solution détaillée est donnée à l’issue de chaque problème. Les problèmes de ce livre se sont inspirés de certains ouvrages, notamment ceux de Jean Philibert sur la diffusion, Yves Quéré sur la physique des matériaux, Porter et Easteling sur les transformations de phases que je souhaite remercier. Ce livre s’est également nourri d’échanges avec de nombreux collègues, notamment Georges Martin, Alphonse Finel, Yann Lebouar, Annick Loiseau, Michel Guttmann, et bien d’autres qui me pardonneront de ne pouvoir tous les citer. Mes remerciements vont aussi à mes anciens élèves et doctorants qui ont contribué de manière directe ou indirecte à ce livre. Merci à Manon Bonvalet, Emmanuel Cadel, Fréderic Danoix, Bernard Deconihout, Fréderic De Geuser, Williams Lefebvre, Cristelle Pareige, Philippe Pareige, Thomas Philippe, Bertrand Radiguet, Xavier Sauvage, François Vurpillot pour les discussions enrichissantes que nous avons pu avoir et les belles illustrations issues de la recherche figurant dans cet ouvrage. Un grand merci à Maryline, pour la relecture attentive des épreuves, travail ardu s’il en est. Ce livre doit beaucoup à Thomas Philippe, co-auteur de cet ouvrage, qui a accepté de se lancer dans l’aventure de ce livre en revisitant et enrichissant les problèmes et en en concevant de nouveaux. Didier Blavette

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Préface de Yves Bréchet Quelques réflexions sur les vertus des exercices et des problèmes…

Blaise Pascal, qui s’y connaissait en la matière de persuader aussi bien que pour ce qui est de construire la science, écrivait : « On se persuade mieux, pour l’ordinaire, par des raisons qu’on a soi-même trouvées, que par celles qui sont venues dans l’esprit des autres. » Tous ceux qui ont eu à cœur d’enseigner savent bien que le cours magistral a pour objectif de donner envie de comprendre, mais que c’est par la pratique des exercices, dans une relation moins théâtrale, qui fait que l’étudiant a vraiment compris. C’està-dire qu’il ne s’est pas limité à retenir, mais qu’il sait reconstruire le raisonnement qui lui permet de s’approprier les acquis de la discipline, seule façon de pouvoir luimême aller un pas plus loin, soit dans l’application, soit dans l’enrichissement du savoir. C’est dire l’importance des « exercices ». De même, les « problèmes » ont mauvaise presse parce qu’on les associe trop souvent à la nécessité d’évaluer les acquis d’un étudiant. C’est certes une de leur fonction, mais c’est à mon avis la moindre : un problème bien conçu doit permettre à l’étudiant de continuer à apprendre, et il doit en savoir plus en sortant de l’examen qu’il n’en savait en y entrant. Tout enseignant qui ne verrait dans un problème qu’un outil de contrôle se condamne à un psiccatisme stérile qui, dans sa forme la plus perverse, finit par façonner le cours lui-même non pas en fonction de ce qu’il est utile de savoir, mais en fonction de ce qui est facile à contrôler.

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Le volume d’exercices et de problèmes proposés par Didier Blavette et Thomas Philippe les positionne résolument dans la lignée de Pascal. Le thème du recueil, sur les transformations de phase et la diffusion, permet un traitement qui, sans avoir la prétention à être exhaustif, a le mérite de la cohérence. L’alternance des rappels de cours concis et éclairants, et des exercices et problèmes de difficulté variés, correspondant soit à des « classiques », soit à des résultats moins connus, offre une progression qui permet à l’étudiant de se « construire » ses propres raisons. Les illustrations, souvent issues du domaine de la sonde atomique tomographique où l’équipe de Rouen s’est taillée la part du lion, remplissent cette belle mission que D. Blavette appelait « rendre visible l’invisible » dans un lointain écho à Jean Perrin qui se donnait pour objectif pour la théorie atomique « d’expliquer du visible compliqué par de l’invisible simple ». Enfin, la structure de l’ouvrage, dans une belle facture classique, décline trois piliers des transformations de phases : quelle est la force motrice qui en est responsable, quels sont les mécanismes de mobilités qui la rendent opérationnelle, quelles sont les cinétiques qui résultent de la combinaison de ces deux aspects ? Faut-il le dire ? C’est une telle évidence pour tous ceux qui pratiquent l’industrie « matérielle » qu’il est fascinant qu’on puisse l’oublier si aisément dans les hautes sphères. Mais la pédagogie est l’art de la répétition, et on a trop souvent entendu des Trissotins dire avec un aplomb que n’égale que leur ignorance, que la métallurgie physique était une discipline sans avenir. Il est toujours nécessaire de leur rappeler l’évidence, au risque de froisser leurs certitudes, et particulièrement au moment où la « souveraineté industrielle » est devenue un slogan à la mode : la métallurgie est le socle indispensable dans de nombreuses industries de souveraineté. Cette souveraineté commence par la matière et les matériaux, par le savoir manufacturier. Les incidences pratiques des phénomènes illustrés ici couvrent des champs d’applications industriels immenses, depuis les alliages de fuselage d’avion aux superalliages des turbines, depuis le vieillissement des matériaux des centrales nucléaires aux aciers à haute résistance des automobiles. Mais c’est aussi dans les mémoires magnétiques, dans la réalisation des nanostructures semi-conductrices, dans le développement d’aimants durs, ou l’optimisation des injecteurs de moteurs thermiques en aciers inoxydables, que l’on retrouve l’importance des transformations de phases. Et dans le grand mouvement de la science des matériaux vers le « matériau sur mesure », la métallurgie physique, et en particulier celle des transformations de phase, montre une voie toujours novatrice. Et c’est par une pratique de l’exercice et du problème autant que par le cours magistral aussi brillant soit-il, que nous formerons les ingénieurs et les scientifiques qui ouvriront ce chemin… Yves Bréchet, membre de l’Académie des sciences

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1 Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

1.1 Rappels de cours 1.1.1

Précipitation et mise ordre

L’eau et l’alcool sont miscibles en toute proportion. Le système demeure monophasé. En revanche, l’eau et l’huile sont immiscibles. Le mélange eau-sel demeure monophasé si la solution est diluée. Au-dessus d’une certaine concentration en sel, appelée limite de solubilité, il y a deux phases, liquide et solide. On assiste à la précipitation de cristaux de sel. On a alors la solution H2O + NaCl saturée en sel et des cristaux de NaCl. Il en est de même dans les alliages, notamment en phase solide. Lorsque l’on mélange deux corps A et B, il y a bien souvent démixtion à basse température [3]. La solubilité de B dans A est en général limitée et croît avec la température T car l’entropie (i.e. le désordre) du système augmente. Au-dessus d’une certaine température dite critique (TC ), il peut y avoir miscibilité totale en phase solide. Elle est en revanche nulle à 0 K car l’entropie devient nulle conformément au troisième principe de la thermodynamique.

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Dans ce livre, nous nous cantonnerons le plus souvent aux alliages binaires qui très souvent donnent lieu à une séparation de phase. On assiste alors à la précipitation d’une nouvelle phase (β ) dans la phase mère α sursaturée (figure 1.1). Il est assez rare d’avoir miscibilité totale à l’état solide, c’est cependant le cas du système CuNi où les deux corps Cu et Ni ont la même structure CFC.

 Figure 1.1  Reconstruction 3D d’un volume de matière analysé par sonde atomique tomographique [4] d’un superalliage modèle à base de nickel sursaturé en Al. De petits précipités enrichis en Al de diamètre voisin de 7 nm sont mis en évidence en contraste sombre (F. Vurpillot, GPM).

Cette phase β peut être ordonnée chimiquement. C’est le cas de la phase   (type Ni3Al, ordre L12) précipitant dans les superalliages à base de nickel équipant les réacteurs d’avions. Ceci est illustré dans la figure 1.2. Un autre phénomène est mis en évidence, la ségrégation intergranulaire d’éléments d’addition comme le bore. La ségrégation du bore aux joints de grains (JG) renforce les JG et lutte donc contre la décohésion intergranulaire [5]. La ségrégation d’un élément d’addition sur les défauts cristallins peut se produire même lorsque l’alliage n’est pas sursaturé en cet élément. Elle sera étudiée dans l’un des problèmes de ce chapitre. Les phénomènes de démixtion, ou de précipitation d’une seconde phase dans un alliage AB sursaturé en atomes B, ont lieu lorsqu’il y a affinité des atomes de même nature. Dans une approche de champ moyen la plus simple et en se limitant aux interactions entre atomes premiers voisins, ceci se traduit par des énergies effectives d’interaction homo-atomiques AA et BB (ε AA, ε BB ) faibles comparées aux interactions hétéro-atomiques ε AB . On définit alors l’énergie d’ordre ε . Il s’agit d’un paramètre d’interaction essentiel dans les approches développées par la suite (solutions solides régulières). ε s’exprime facilement à partir d’un modèle de liaisons coupées. Il est facile de voir que l’énergie nécessaire pour couper les deux liaisons AA et BB afin de former deux liaisons AB vaut 2ε avec : 1    AB   AA   BB  2 Si   0, les paires AA et BB sont favorisées et il y a tendance à la ségrégation entre atomes A et B et l’on assiste à la formation de deux phases l’une riche en A (solution solide mère) et l’autre riche en B (précipités).

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1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

 Figure 1.2   Images de tomographie atomique révélant la distribution spatiale des atomes d’Al, Cr, Mo, B dans un superalliage N18 à base de nickel (élément non représenté). Un petit précipité ordonné Ni3Al riche en Al de taille voisine de 10 nm apparaît à gauche d’un joint de grains (JG) dans le grain 1. L’ordre chimique L12 dans le précipité est mis en évidence par l’alternance de plans riches en Al avec des plans pauvres en Al. La phase mère est appauvrie en Al et enrichie en Cr. Un gros précipité riche en Al de même nature de taille dépassant celle du volume analysé, jouxte le JG dans le grain 2. Cette analyse montre aussi la ségrégation du bore (et du Mo) au JG (E. Cadel, GPM) [6].

En revanche, si   0, les paires AB hétéro-atomiques sont moins coûteuses énergétiquement et il y a tendance à l’ordre. Les atomes A et B occupent alors des sites préférentiels dans la structure hôte. Notons que même en se limitant à cette approche simple où les interactions entre atomes en deuxième ou troisième voisins sont ignorées, on peut avoir à la fois démixtion et mise en ordre. Ainsi, si ε n’est pas trop positif, on peut avoir précipitation d’une phase ordonnée (Ducastelle, 1991 [7]). La structure ordonnée B2 (stœchiométrie AB) est la plus simple dans les structures cubiques centrées (CC). Les deux types d’atomes, A et B, s’ordonnent sur le réseau cubique centré en occupant respectivement les centres du cube et les sites des sommets (figure 1.3).

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

 Figure 1.3  Structure ordonnée B2 de stœchiométrie AB (atomes A en gris clair, B en gris foncé).

Ces phases ordonnées B2 sont par exemple observées dans les alliages FeAl (figure 1.4), NiAl ou ClCs. On parle alors de décoration du réseau et de brisure de symétrie. Le système initialement CC à l’état désordonné devient cubique simple (CS) en s’ordonnant avec un motif à deux atomes (B en (000) et A en (½, ½, ½)). Cette brisure de symétrie se traduit en diffraction (RX ou électrons), dans l’espace réciproque, par des taches de surstructure supplémentaires. Pour un CC, le réseau réciproque est CFC et les indices de Miller doivent respecter la condition h  k  l  2n . Cette condition est levée lors de la mise en ordre et des taches de surstructure en (100), (010), (001) apparaissent. Le réseau réciproque devient CS (figure 1.5).

 Figure 1.4  Image 3D de sonde atomique tomographique montrant l’alternance des plans riches en Fe et en Al selon la direction d’analyse dans un alliage Fe40%at.Al ordonné B2 (E. Cadel, GPM). Chaque point noir (Fe) ou gris (Al) représente un atome. La distance entre les plans riches en Al est égale au paramètre de maille (a = 0,29 nm).

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1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

 Figure 1.5  Réseau réciproque d’un CC et taches de surstructure relatives à l’ordre de type B2 (notée par ×).

Remarquons que la structure ordonnée B2 peut se décrire par une onde statique de concentration périodique (en atomes B) suivant traduisant l’alternance de plans riches en B avec des plans riches en A (BABAB…) selon cette direction. L’analyse plan atomique par plan atomique d’un alliage FeAl de structure B2 à l’aide d’une sonde atomique tomographique illustre cette séquence d’empilement (figure 1.6). Le concept d’onde statique de concentration a été introduit par Katchaturyan [8]. Compte tenu des symétries de la structure, la même onde de concentration est observée selon les deux autres directions cubiques équivalentes et .

 Figure 1.6  Profil de concentration (en Al) tiré de la figure 1.4 mettant en évidence l’onde de concentration selon la direction dans les alliages Fe40%at.Al de structure ordonnée B2 (E. Cadel, GPM). La longueur d’onde est égale au paramètre cristallin a = 0,29 nm (a = 2 d002 avec d002 la distance réticulaire).

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

La figure 1.7 montre, pour simplifier, une telle onde périodique C x  pour un cristal unidimensionnel de périodicité a. C désigne la fraction atomique d’atomes B. Cette fois, dans ce cristal 1D, les atomes A et B s’alternent selon x avec une période 1   2a. La position des atomes B est donnée par x = 2na avec n un entier et x  2n  1 a pour les atomes A. La figure 1.7b montre un second variant d’ordre déphasé de  / 2  a . Les deux ondes sont en opposition de phase. Les atomes B sont en x  2n  1 a et les A en x = 2na .

 Figure 1.7  (a) Cristal ordonné AB stœchiométrique en une dimension de périodicité a selon x (atomes B en x = 2na avec n entier). (b) Onde statique de concentration C  x  correspondante (trait plein). C  x  désigne la fraction atomique d’atome B en x et la fraction atomique moyenne de l’alliage est ici C 0 = 1 / 2. Dans un alliage stœchiométrique, la fraction atomique d’atomes B (ou A) est C 0 = 1 / 2 et les extrema sont C = 1 et 0 pour un ordre parfait (  1). En pointillé, l’onde relative au second variant d’ordre (atomes B en x  2n  1 a ) en antiphase avec le profil C  x  du premier variant.

Revenons au cas réel du cristal tridimensionnel. Les plans (001) se succèdent cette fois avec une périodicité égale à a/2, de sorte que la périodicité de l’onde concentration, double de cette valeur, est   a. Le vecteur d’onde associé est donc

1.  Attention, dans le cristal 3D, la période de l’onde de concentration selon est égale à   a car les plans (002) sont distants de la moitié du paramètre cristallin (a/2). En 1D, la période de l’onde est   2a car les atomes sont distants de a. Avec la même notation, il y a donc un facteur 2 entre cristal 1D et 3D si on conserve la même notation du paramètre cristallin (a).

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1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

q  2 / a100. Les symétries du réseau CC rendent indiscernables les directions , , . Ainsi, l’onde selon génère aussi les deux autres ondes selon , . Une seule onde suivant est donc nécessaire pour définir l’ordre B2 et elle s’écrit : C r  C0 1   e iq.r  r est le vecteur position des atomes dans la maille CC : (000) et ½(111). Pour une structure stœchiométrique parfaite, C0 = 1 / 2. Comme le montre la figure 1.5, le vecteur d’onde q  2 / a100 génère à lui seul toutes les taches de surstructure dans le réseau réciproque à partir des taches fondamentales du CC (e.g. (100) = (000) + (100), (210) = (110) + (100), etc. on omet ici le facteur 2π/a commun à tous les termes). Il existe deux variants d’ordre selon que l’atome B se place sur les sommets du cube ou les centres. On parle alors d’antiphase. Lorsque B est aux centres du cube et A aux sommets, C r est alors en opposition de phase et : C r  C0 1   e iq.r  Ces deux variants sont équivalents et ont la même énergie libre, ainsi F    F   . La fonctionnelle d’énergie libre est paire. Comme nous le verrons à la fin de ce chapitre, la transition peut être du second ordre selon la théorie de Landau (mais pas nécessairement). Dans une transition de second ordre, le paramètre d’ordre  T  décroît continûment avec la température T jusqu’à devenir nul à la température critique TC . De plus, il n’existe pas de domaine biphasé dans le diagramme de phase. La situation est toute différente dans les CFC. Les structures ordonnées les plus simples sur le réseau CFC sont les phases L12 de type A3B (Ni3Al, Cu3Al) où les atomes A occupent les centres de faces et B les sommets (figure 1.8). De nouveau, cet ordre à grande distance se traduit par une onde de concentration périodique (en A ou B) dans la direction . Pour un alliage stœchiométrique A3B, il y a alternance de plans mixtes (M) riches en B (50 % de B, 50 % de A) avec des plans purs (P) en A. L’analyse plan par plan d’un alliage Ni3Al par une sonde atomique illustre cette onde selon (figure 1.9).

 Figure 1.8  Structure ordonnée de type L12 de stœchiométrie A3B (les atomes B sont représentés en noir et les atomes A en gris).

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

 Figure 1.9  Profils de concentration issus de l’analyse à la sonde atomique d’une phase ordonnée Ni3Al selon . Pour chaque plan analysé, 30 atomes sont détectés en moyenne. L’ordre à grande distance dans cette phase L12 se traduit par une onde de concentration. Il y a alternance de plans « mixtes » (M) riches en Al et comportant aussi du Ni, avec des plans presque purs en Ni (P). Les éléments d’addition (Ti, W, Ta) sont observés sur les plans riches en Al, suggérant que ceux-ci se substituent à l’Al dans la structure ordonnée Ni3Al.

Trois ondes statiques de concentration selon x, y , z et de vecteurs d’onde q1  2 / a100 , q 2  2 / a010, et q 3  2 / a001 sont cette fois nécessaires pour décrire l’ordre et générer les taches de surstructure associées à cet ordre L12. La concentration C r d’atomes B en un site donné r s’écrit comme la somme de trois composantes d’amplitudes η1, η2 , η3  correspondant à ces ondes : C r  C0 1  1e iq1.r  2e iq2.r  3e iq3.r  Pour une structure stœchiométrique parfaite, C0 = 1 / 4. r est le vecteur position des atomes dans la maille CFC : r = (000), ½(110), ½(011), ½(101) avec a le paramètre cristallin, norme du vecteur de base du repère  x, y, z  . Il y a désormais trois paramètres d’ordre définissant ainsi un vecteur d’ordre   1,2 ,3 . Il existe 4 variants d’ordre suivant que l’atome B de la structure A3B

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1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

est placé en (000), ½(110), ½(011), ou en ½(101). L’écriture des 4 concentrations C ri  correspondant à ces 4 sites (i = 1, 2, 3, 4 ) montre que l’on passe d’un variant à l’autre par un changement de signe de certaines composantes des vecteurs d’ordre mais pas par un changement de signe du vecteur η (cf. problème). Ainsi, contrairement aux structures CC précédentes, dans les CFC, F  n’a plus de parité. Comme nous le verrons à la fin de ce chapitre, la théorie de Landau prévoit que la transition ne peut alors n’être que du 1er ordre. Il y a discontinuité de  T  à la température critique TC . De plus, les phases désordonnées et ordonnées peuvent cohabiter dans le diagramme de phase à la transition.

1.1.2

Fonctions et potentiels thermodynamiques

Considérons un système fermé. La variation d’énergie interne dU d’un système avec la température s’écrit : dU = CV dT CV est la chaleur molaire spécifique à volume constant (quantité de chaleur nécessaire pour élever de 1 degré une mole de substance). Dans les solides, contrairement aux gaz, CV est très proche de la chaleur spécifique à pression constante C p , on H . L’accroissement de C p avec la température T peut être rappelle que C p  T P décrit via le modèle de Debye. C p tend vers 3R (loi de Dulong et Petit) pour T   D (température de Debye du matériau, Kittel [9]). Examinons les fonctions thermodynamiques. L’enthalpie H s’écrit H  U  PV , l’enthalpie libre G  H  TS et l’énergie libre F  U  TS . Dans un système fermé (sans échange de matière), ces fonctions peuvent s’écrire comme des différentielles totales exactes en fonction des variables (T , V , P …). On peut se souvenir de l’écriture de ces différentielles exactes à partir du mémo « Si Une Vache Fait Ton Gain Prend Hen Soin » (figure 1.10). En face de chaque variable extensive (par exemple S ), la variable intensive conjuguée (T ). De même V et P sont conjuguées. Ainsi : dU  PdV  TdS dH  TdS  VdP dG  VdP  SdT dF  PdV  SdT Par principe H = 0 pour 25°C. Remarquons l’existence des deux signes − pour SdT et PdV . À pression constante, H et S croissent avec T car leur dérivée est positive : H / T  C p et donc S / T  C p / T .

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

 Figure 1.10  Schéma cyclique « Si Une Vache Fait Ton Gain Prend Hen Soin » donnant les variables dont dépendent les fonctions thermodynamiques U , H, F , G. Les variables opposées dans ce schéma sont conjuguées (S et T ainsi que P et V ).

G et F décroissent avec T avec une pente locale (dérivée première) égale à −S. Une phase désordonnée voit son enthalpie libre G décroître plus rapidement avec T qu’à l’état ordonné car l’entropie de la phase ordonnée So est plus faible que celle de la phase désordonnée Sd . Ainsi, les deux courbes G T  associées aux deux phases ordonnées et désordonnées se croisent en un point, la température de transition TC . Au-dessus de TC , c’est la phase désordonnée qui est la plus stable (figure 1.11).

 Figure 1.11  L’enthalpie libre G T  de la phase désordonnée décroît plus vite avec la température (T ) que celle de la phase ordonnée. L’intersection des deux courbes donne la température critique de transition ordre-désordre (TC ). Au-dessus de TC , la phase ordonnée se désordonne.

U est minimale si V et S sont constants alors que H l’est pour P et S  constants. Dans les deux cas, la condition requise d’une entropie constante est peu commode

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1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

car généralement non vérifiée dans les processus de transformations de phase. On préfère utiliser F ou G qui, libérées de l’entropie, ne dépendent plus de S et trouvent leur minimum dans des conditions réalistes. L’écriture des différentielles totales montre que dG = 0 si P et T sont fixées. Ainsi, l’équilibre thermodynamique se traduit par un minimum de G . Il en est de même pour F qui est minimum à l’équilibre à V , T constants (dF = 0). En sciences des matériaux, F et G sont utilisés presque indifféremment mais on choisit plus souvent G car il est plus facile d’imposer une pression externe constante au système qu’un volume constant (e.g. la solidification s’accompagne d’un changement de volume). Il est ainsi possible de prévoir théoriquement la concentration de lacunes dans un cristal (cf. problème). Considérons désormais un alliage binaire composé de n A moles de A et nB moles de B. On définit les fractions atomiques : XA 

nA nB et X B  n A  nB n A  nB

Nous avons bien sûr X A  X B  1. Dans les alliages binaires, il n’y a donc en fait qu’une seule variable de concentration indépendante, par exemple X B . On pourra omettre parfois l’indice B pour alléger la notation (X = X B ). Dans les phénomènes de précipitation d’une nouvelle phase (notée β ) dans une solution solide α sursaturée, les phases α et β sont des systèmes ouverts avec des échanges de matière. Le potentiel chimique μi des espèces chimiques i (i = A,B pour un alliage binaire AB) est alors à considérer. μi est l’énergie libre partielle ou l’enthalpie libre partielle ramenée à l’espèce i considérée. C’est une grandeur intensive et elle s’écrit comme une dérivée partielle de F et de G  :

i  i 

F ni T ,V ,n

j

G ni T ,P ,n

j

Lorsque μi est le potentiel chimique ramené à un atome, ni devient le nombre d’atomes i. Si μi est exprimé pour une mole d’atomes i, ni est alors le nombre de moles. À T , P imposées, on peut écrire pour un alliage binaire composé de n A moles de A et nB moles de B : G  n A  A  nB B Si l’on exprime maintenant G et les potentiels chimiques pour une mole, on a alors : G  X A  A  X B B Comme X A  X B  1 : G   A  X B  B   A 

23

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

La pente locale de G en un point (X B ) (tangente) est égale à B   A (figure 1.12). Ainsi, le potentiel chimique μ A (resp. μB ) est donné graphiquement par l’intersection de la tangente avec l’ordonnée en X B = 0 (resp. X B = 1). Il faut garder en mémoire que les potentiels chimiques dans un alliage binaire dépendent de la fraction atomique d’atomes B.

 Figure 1.12  Représentation de l’enthalpie libre G  X B  d’une solution solide AB en fonction de la fraction atomique d’atomes B à T et P imposées. L’intersection de la tangente en une valeur donnée de X B avec les verticales en X B = 0 et X B = 1 donnent respectivement les potentiels chimiques μ A et μ B . Pour une variation infinitésimale dμA, le point de tangence X B ne change pas et dμB se déduit de dμA très simplement par la règle des leviers inverses : X Bd  B   X Ad  A (équation de Gibbs-Duhem).

Les potentiels chimiques étant des enthalpies libres partielles, la variation dG associée à l’échange de dn A et dnB atomes s’écrit : dG   Adn A  B dnB Compte tenu de l’expression précédente de G , on aboutit à : n Ad  A  nB d B  0 (équation de Gibbs-Duhem) En divisant par le nombre de moles n A  nB  , on obtient : X Ad  A  X B d B  0 Cette « loi des leviers » peut se déduire du diagramme G  X B  en remarquant que le point de tangence en X B demeure immobile pour des variations infinitésimales de X B (figure 1.12). L’équilibre thermodynamique entre les deux phases (phase mère α et précipité β ) dans les phénomènes de précipitation se traduit par l’égalité des potentiels chimiques de chaque espèce (A,B) dans les phases en équilibre.

24

1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

1.1.3

Équilibres binaires : solutions solides idéales et régulières

On considère une solution solide binaire mélangeant aléatoirement les atomes A et B. On considère tout d’abord que les corps A et B purs ont la même structure. Ainsi, le mélange des atomes A et B s’opère sur cette structure commune (par exemple CFC ou CC). L’enthalpie libre d’une solution solide aléatoire composée d’atomes A et B s’écrit : G  X AG A  X BGB  Gm Le troisième terme est l’enthalpie de mélange ΔGm  : Gm  H m  T Sm Si l’enthalpie de mélange ΔH m est nulle, on parle de solution idéale, l’énergie d’ordre devient nulle. Tout se passe comme si les atomes A et B étaient identiques. C’est le cas par exemple des alliages CuNi miscibles en phase solide en toute proportion. ΔSm est l’entropie de configuration du mélange d’atomes A et B. Dans le modèle le plus simple de solution régulière, on exprime ΔH m en champ moyen en ne prenant en compte que les interactions entre atomes premiers voisins. On écrit que chaque atome est en moyenne entouré de ZX A atomes A et ZX B atomes B (Z est la coordinence) avec un terme d’interaction moyen ε (énergie d’ordre). Pour N sites atomiques, on a : H m  NZX A X B L’entropie de mélange peut s’exprimer facilement en fonction de X A et X B en utilisant l’expression statistique de l’entropie : S  kN  pi ln pi i

N désigne le nombre de sites atomiques et i les configurations. k est la constante de Boltzmann. Dans une solution solide aléatoire, chaque site atomique est occupé par les atomes A ou B avec des fréquences d’occupation p A , pB (i = A,B) égales aux fractions atomiques X A et X B . La fraction atomique de lacunes, généralement très faible, est ici négligée. Pour une mole (N = 6,02 × 1023), on peut introduire la constante des gaz parfaits R = kN de sorte que : Sm  R  X A ln X A  X B ln X B  De ces expressions, on peut tirer l’expression de G  : G  X AG A  X BGB  NZX A X B  RT  X A ln X A  X B ln X B  En multipliant le terme enthalpique par X A  X B  1, on peut réécrire G sous la forme d’une somme de deux termes dépendant respectivement de A et B faisant apparaître les potentiels chimiques μ A et μB  : G  X A  A  X B B avec i  Gi  NZ  1  X i   RT ln X i , i = A,B. 2

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Cette expression est celle du potentiel chimique des espèces A,B dans l’approximation de la solution régulière. Pour une solution idéale (  0), on a : i  Gi  RT ln X i . Dans le cas général, le potentiel chimique peut s’écrire de manière analogue en fonction d’un paramètre appelé activité chimique ai :

i  Gi  RT ln ai Pour une solution quelconque, on écrit ai   i X i avec γ i le coefficient d’activité. Bien entendu, pour une solution idéale, ai = X i et  i  1. Remarquons que Sm  0, ainsi T Sm  0. En revanche, le signe de ΔH m est piloté par celui de ε . Si   0, les termes enthalpiques et entropiques sont tous deux négatifs et G  X  n’a qu’un seul minimum (X = X B ). On a la formation d’une phase ordonnée (figure 1.13). En revanche, pour   0, il y a compétition entre ces deux termes. Pour les basses températures T < TC (température critique), le terme entropique (de désordre), proportionnel à T , est de faible importance. Gm  X B  et donc G  X B  présentent alors deux minima (figure 1.14a). L’enthalpie libre du système peut être minimisée par la précipitation d’une nouvelle phase β enrichie en atomes B au sein de la phase mère α appauvrie en atomes B. Ceci s’accompagne d’un gain d’enthalpie libre ΔG p appelé force motrice de précipitation (figure 1.15a).

 Figure 1.13  Enthalpie libre de mélange ΔGm en fonction de X B pour   0. La tendance est à l’ordre chimique.

Pour T > TC (figure 1.14b), le terme entropique l’emporte et il n’y a plus qu’un seul minimum de G  X B  . Le système devient monophasé (solution solide). Les points d’inflexions de G  X B  disparaissent alors. En cherchant la température où les points d’inflexion disparaissent (un seul minimum de G ), on aboutit alors à l’expression suivante : TC 

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Z 2k

1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

 Figure 1.14  Enthalpie libre de mélange ΔGm pour   0. (a) Si T1 < TC , ΔGm présente deux minima. Il y a démixtion entre deux phases de la même structure, l’une riche en A, l’autre riche en B dont les compositions (X α et X β ) sont données par les deux minima. (b) Pour de plus hautes températures au-dessus de la température critique (T2 > TC ), un seul minimum demeure, le système devient monophasé.

TC est proportionnelle à l’énergie d’ordre. Pour T < TC , il y a formation de deux phases α et β de la même structure que seules les compositions chimiques distinguent. Les compositions d’équilibre de ces deux phases sont données par la tangente commune qui exprime l’égalité des potentiels chimiques des atomes A ou B dans les deux phases en équilibre α et β (figure 1.15a). Pour X B  1, la limite de solubilité d’atomes B en phase α s’écrit alors : X B  e 2TC /T X Bα croît avec T d’autant plus rapidement que TC est faible. Lorsque les deux corps A et B ont des structures différentes, deux phases α et β de structures différentes peuvent coexister en équilibre l’une avec l’autre (figure 1.15b). Il convient alors de considérer deux fonctions G  X B  pour chacune des phases α et β et la tangente commune à T , P imposées donne la composition des deux phases en équilibre. La solubilité est alors de la forme : X B  e G / RT e 2TC /T G  G   G est la différence d’enthalpie libre entre phases α et β pures en soluté B (cf. problème). Lorsque α et β ont la même structure, G  0 et l’on retrouve l’expression précédente.

27

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

 Figure 1.15  (a) Représentation de l’enthalpie libre G  X B  à T et P imposées, pour une solution régulière et pour une énergie d’ordre   0. À T < TC , la courbe présente deux minima. Il y a démixtion entre deux phases α et β de la même structure mais de composition différente. Les fractions atomiques d’atomes B dans les deux phases (X Bα , X Bβ ) sont données par la règle de la tangente commune. ΔGp (force motrice de précipitation) est le gain d’enthalpie libre réalisé pour une fraction nominale X B0 après précipitation lorsque l’équilibre thermodynamique est atteint. La fraction molaire de phase β d’équilibre est donnée par la règle des leviers, f   X B0  X B  /  X B  X B  . (b) Les courbes d’enthalpie libre des deux phases α et β de structure différente sont distinctes. De nouveau, la tangente commune donne la composition des deux phases en équilibre (X Bα , X Bβ ).

La loi des phases de Gibbs. Nous allons calculer le nombre de phases en équilibre possibles dans un alliage constitué de n espèces chimiques A, B, C… Soit ϕ le nombre de phases en équilibres. Le nombre de variables indépendantes incluant T et P est alors égal à : N  n  1   2 L’écriture de l’équilibre entre les ϕ phases entraîne  1 égalités de potentiels chimiques écrites pour les n constituants. Il y a donc n   1 relations traduisant

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1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

l’équilibre. La variance ou le nombre de degrés de liberté est la différence entre ces deux derniers termes, ainsi : v  n  2  Généralement, la pression P est fixée, de sorte que la nouvelle variance s’écrit v  n  1   . Pour un alliage binaire (n = 2), on a 3 phases au plus en équilibre (v  0). C’est un point (T et X B sont fixés) dans le diagramme de phase T  X B . Il s’agit par exemple du point eutectoïde dans les aciers. En ce point l’austénite est en équilibre avec la ferrite α et la cémentite Fe3C. Dans le domaine biphasé (  2), la variance v  1 et donc X B et T sont liés. Ceci définit la limite de solubilité T  X B  dans le diagramme de phase. À T fixée, dans le domaine biphasé, la composition des deux phases en équilibre est fixée (v  0) et ne dépend pas de la composition nominale X B0 , seule la fraction molaire des phases ( f ) change avec X B0 . f est donnée par la règle des leviers inverses : f   X B0  X B  /  X B  X B  X Bα et X Bβ sont les fractions atomiques d’équilibre en atomes B dans la phase mère α et les précipités de phase β . La situation est tout autre dans les alliages ternaires car il y a un degré de liberté en plus (v  1 à T , P imposées). Si l’on change la composition nominale de l’alliage, celle des phases change également. Les lignes de conjugaison (ou conodes) fixent la composition des phases α et β pour chaque concentration nominale imposée.

1.1.4

Théorie des transitions critiques et théorie de Landau

On peut définir un paramètre d’ordre η pour de nombreux processus (mise en ordre chimique dans les alliages, ferromagnétisme, supraconductivité, solidification). Dans les transitions ordre-désordre,   0 si la solution solide est aléatoire et   1 si un ordre à grande distance parfait s’installe. Prenons un exemple. Pour la mise en ordre B2 dans un alliage BCC,   1 si les atomes A et B occupent respectivement les sites de sommets de cube (sites 1) et centre de cube respectivement (sites 2). La probabilité de présence des atomes B sur les sites 2 est alors PB2 . On peut alors définir le paramètre d’ordre comme suit :



PB2  X B 1 XB

Dans cette définition de η , l’ordre ne peut plus être parfait si X B < 1 / 2 car les sites 2 ne sont que partiellement occupés par les atomes B. Les sites 2 sont partiellement occupés par les atomes A ou par des lacunes structurales. Selon Ehrenfest (1933), les transitions ordre-désordre sont de deux types, premier ou second ordre. La transition est du premier ordre si la dérivée partielle de G ou de F par rapport aux variables intensives (e.g. ∂G / ∂T ) est discontinue à la

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

température de transition TC . Elle est du second ordre si la dérivée première est continue et la dérivée seconde discontinue (e.g. ∂ 2G / ∂T 2 ). Dans les transitions du premier ordre, comme G / T  S , à TC il y a une variation brutale de l’entropie entre les états désordonnés et ordonnés (S  Sd  So ), ce qui se traduit par une variation brutale et discontinue de la pente de G T  (figure 1.11) et du paramètre d’ordre η (figure 1.16a). Comme H  T S à P constante, la transition ordre-désordre est accompagnée d’une chaleur latente de transformation L  H (figure 1.16b). À TC , G  0 et donc L  T S . Dans les transitions du premier ordre, il peut y avoir cohabitation de domaines ordonnés avec la phase ordonnée. Il existe donc un domaine biphasé dans le diagramme de phases (figure 1.16c).

 Figure 1.16  Transitions du 1er ordre. (a) Le paramètre d’ordre  T  présente une discontinuité à la température critique TC . (b) L’enthalpie H T  montre aussi une discontinuité à la température TC se traduisant par une augmentation brutale H  L (chaleur latente de transformation). (c) Le diagramme de phases T  X B  met en évidence deux domaines biphasés (α désordonnée + β ordonnée). Pour une fraction atomique X BC , il y a transformation congruente (directe) à TC de la phase désordonnée α en phase ordonnée β sans passage par le domaine biphasé    .

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1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

Dans les transitions du second ordre (figure 1.17), ∂G / ∂T est continue à TC , ainsi S  0 et donc L = 0. Il n’y a pas de saut d’enthalpie et donc pas de chaleur latente de transformation. En revanche, comme les C p sont différents dans les états ordonnés et désordonnés, ∂H / ∂T est discontinue à TC . Il y a continuité de η à TC contrairement aux transitions du premier ordre (figure 1.16a). Il n’y a pas de domaine biphasé associant phase ordonnée et désordonnée. Comme ∂ 2G / ∂T 2 est discontinue à TC , ∂S / ∂T et donc  / T sont discontinues à TC .

 Figure 1.17  Transitions du 2nd ordre. (a) Le paramètre d’ordre  T  décroît graduellement jusqu’à la température critique TC où il s’annule sans discontinuité. (b) L’enthalpie H T  est continue à la température TC . (c) Il n’y a pas de domaine biphasé    dans le diagramme de phases T  X B  .

Nous pouvons désormais énoncer les deux règles de Landau. Dans le cadre de cette théorie, il est d’usage de considérer la fonctionnelle d’énergie libre F   plutôt que G  . Ce choix n’a toutefois aucune incidence sur ce qui suit. Cette théorie de Landau repose sur les symétries du système sur lequel s’installe l’ordre et sur la parité

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

de F   . On définit alors une température T0 pour laquelle l’état désordonné (  0) devient instable lorsque T < T0 . La concavité de la fonctionnelle d’énergie F   est alors positive. Elle devient négative pour T > T0. L’état désordonné devient stable (F est minimum minimorum à   0) ou métastable (F connaît un minimum mais ce n’est pas un minimum minimorum). À T0 nous avons donc  2 F / T 2  0. C’est la température d’instabilité de l’état désordonné, à ne pas confondre avec la température critique de transition ordre-désordre TC . La première règle de Landau énonce que si F(η) est paire, la transition peut être du premier ou du second ordre. C’est le cas de la mise en ordre B2 sur le réseau CC. Il y a deux variants d’ordre équivalents selon que les atomes B sont placés aux centres ou aux sommets de la maille cubique centrée (CC). En reprenant l’expression de η ci-dessus pour X B = 1 / 2 , on constate que si PB2 = 1 (1er variant d’ordre),   1. En revanche, si PB2 = 0,   1. Ainsi, on passe d’un variant d’ordre à l’autre en changeant de signe le paramètre η . Ce résultat se généralise quelle que soit la valeur de η . Seule une translation ½(111) distingue les deux variants qui sont simplement en opposition de phase au sens des ondes de concentration. Ils ont donc la même énergie libre, ainsi F    F   . La fonctionnelle F   est donc paire. Notons que lorsque ces deux variants se rencontrent dans le solide, ils forment une paroi d’antiphase. En revanche, si F   n’a pas de parité, on peut démontrer que la transition est nécessairement du premier ordre (cf. problème sur la théorie de Landau). C’est le cas de la mise en ordre L12 sur le réseau CFC. Dans un alliage ordonné de stœchiométrie A3B, il y a 4 variants car les atomes B peuvent être placés sur les sommets du cube (position (000)) ou sur l’un des trois centres de faces du réseau CFC. Il est désormais nécessaire de considérer les 3 vecteurs de translation associés : ½(110), ½(011), ½(101). Le paramètre d’ordre n’est plus un scalaire mais un vecteur η dont les trois composantes sont associées aux trois ondes statiques selon x, y , z. F  alors n’a plus de parité car les variants ne se déduisent plus par un simple changement de signe du vecteur η comme dans les CC. Les transitions sont donc nécessairement du premier ordre dans les solides CFC et un domaine biphasé est attendu dans le diagramme de phases contrairement aux transitions du second ordre (e.g. phase ordonnée Ni3Al dans les alliages binaires NiAl).

1.2 Problèmes 1.2.1

Concentration de lacunes à l’équilibre

Tout comme les interstitiels, les lacunes (absence d’un atome sur un site du cristal) sont des défauts ponctuels. Les lacunes sont le siège d’une déformation élastique du réseau. La création d’une lacune nécessite une énergie de formation et est accompagnée d’une entropie de vibration. À cela s’ajoute une entropie de configuration car on peut placer la lacune sur chacun des N sites du cristal. Nous nous proposons de calculer la concentration de lacunes à l’équilibre thermodynamique.

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

de F   . On définit alors une température T0 pour laquelle l’état désordonné (  0) devient instable lorsque T < T0 . La concavité de la fonctionnelle d’énergie F   est alors positive. Elle devient négative pour T > T0. L’état désordonné devient stable (F est minimum minimorum à   0) ou métastable (F connaît un minimum mais ce n’est pas un minimum minimorum). À T0 nous avons donc  2 F / T 2  0. C’est la température d’instabilité de l’état désordonné, à ne pas confondre avec la température critique de transition ordre-désordre TC . La première règle de Landau énonce que si F(η) est paire, la transition peut être du premier ou du second ordre. C’est le cas de la mise en ordre B2 sur le réseau CC. Il y a deux variants d’ordre équivalents selon que les atomes B sont placés aux centres ou aux sommets de la maille cubique centrée (CC). En reprenant l’expression de η ci-dessus pour X B = 1 / 2 , on constate que si PB2 = 1 (1er variant d’ordre),   1. En revanche, si PB2 = 0,   1. Ainsi, on passe d’un variant d’ordre à l’autre en changeant de signe le paramètre η . Ce résultat se généralise quelle que soit la valeur de η . Seule une translation ½(111) distingue les deux variants qui sont simplement en opposition de phase au sens des ondes de concentration. Ils ont donc la même énergie libre, ainsi F    F   . La fonctionnelle F   est donc paire. Notons que lorsque ces deux variants se rencontrent dans le solide, ils forment une paroi d’antiphase. En revanche, si F   n’a pas de parité, on peut démontrer que la transition est nécessairement du premier ordre (cf. problème sur la théorie de Landau). C’est le cas de la mise en ordre L12 sur le réseau CFC. Dans un alliage ordonné de stœchiométrie A3B, il y a 4 variants car les atomes B peuvent être placés sur les sommets du cube (position (000)) ou sur l’un des trois centres de faces du réseau CFC. Il est désormais nécessaire de considérer les 3 vecteurs de translation associés : ½(110), ½(011), ½(101). Le paramètre d’ordre n’est plus un scalaire mais un vecteur η dont les trois composantes sont associées aux trois ondes statiques selon x, y , z. F  alors n’a plus de parité car les variants ne se déduisent plus par un simple changement de signe du vecteur η comme dans les CC. Les transitions sont donc nécessairement du premier ordre dans les solides CFC et un domaine biphasé est attendu dans le diagramme de phases contrairement aux transitions du second ordre (e.g. phase ordonnée Ni3Al dans les alliages binaires NiAl).

1.2 Problèmes 1.2.1

Concentration de lacunes à l’équilibre

Tout comme les interstitiels, les lacunes (absence d’un atome sur un site du cristal) sont des défauts ponctuels. Les lacunes sont le siège d’une déformation élastique du réseau. La création d’une lacune nécessite une énergie de formation et est accompagnée d’une entropie de vibration. À cela s’ajoute une entropie de configuration car on peut placer la lacune sur chacun des N sites du cristal. Nous nous proposons de calculer la concentration de lacunes à l’équilibre thermodynamique.

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1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

1. Enthalpie et entropie de formation d’une lacune 1.1. Enthalpie. On considère un cristal de coordinence Z . Calculer l’enthalpie de formation d’une lacune ΔH (fl ) en estimant le travail nécessaire pour amener un atome du volume vers la surface dans une situation de bord de terrasse. Dans cette situation, on fera l’approximation qu’en moyenne, les atomes ont Z / 2 premiers voisins en surface. On fera le calcul en champ moyen en se limitant aux interactions effectives entre premiers voisins ε AA. On rendra compte du terme élastique de relaxation en introduisant une énergie fantôme  A l d’interaction de la lacune (l ) crée avec ses Z atomes A premiers voisins. 1.2. Entropie. Lorsque l’on crée une lacune en déplaçant un atome du volume vers la surface, on crée un désordre de vibration que l’on traduit par un terme entropique ΔS (fl ). Donnez l’expression de cette entropie en fonction de l’échange de chaleur δ Q et de la température T . Calculez ΔS (fl ) en écrivant en toute première approximation que δ Q est de l’ordre du quantum thermique kT . k est la constante de Boltzmann. 2. Entropie de configuration ΔSc 2.1.

Calculez le terme d’entropie de configuration ΔSc pour n lacunes réparties parmi N sites cristallins en utilisant l’expression classique de l’entropie thermodynamique 2 S  k ln  avec Ω le nombre de configurations, ou nombre d’états équivalents du point de macroscopique. Exprimez ensuite ce terme en fonction de la fraction atomique de lacunes X l = n / N . On supposera que n et N sont grands, de sorte que la formule de Stirling peut être utilisée : ln u !  u ln u  u lorsque u  

2.2. On peut retrouver le résultat précèdent Sc  X l  en utilisant l’expression de l’entropie statistique donnée ci-dessous : Sc  kN  pi ln pi i

Quelle est la signification des probabililités pi  ? En déduire Sc  X l  . 2.  La formule de Boltzmann fait le lien entre les mondes macroscopique et microscopique. Un état macroscopique déterminé, d’entropie S , peut être réalisé par un très grand nombre d’états microscopiques. Boltzmann note ce nombre Ω et l’entropie thermodynamique est proportionnelle au logarithme de Ω, k la constante de Boltzmann étant le facteur de proportionnalité (k = 1,38 × 10–23). L’entropie statistique, Sc  kN  pi ln pi , vient de la théorie de Shannon i

qui propose de mesurer le manque d’information. Quand toutes les probabilités sont égales, on retrouve la formule de Boltzmann : aucun évènement n’est privilégié, l’information est minimale et donc l’entropie maximale. Aussi, l’entropie thermodynamique d’un système peut s’interpréter comme la mesure du manque d’information qui subsiste au niveau microscopique lorsque l’état macroscopique de ce système est donné.

33

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

2.3. Quelle est la valeur maximale de ΔSc et pour quelle valeur de X l est-elle obtenue ? 2.4. Représentez graphiquement ΔSc en fonction de X l . On cherchera tout d’abord les asymptotes de ΔSc lorsque X l → 0 et X l → 1. Commentez la variation de l’énergie libre à faible concentration de lacunes. Purifiez un cristal de ses lacunes, est-ce seulement un défi technologique ? 3. Enthalpie libre de formation des lacunes ΔG f 3.1. On rappelle que G f  nG (fl )  T Sc avec ΔG (fl ) l’enthalpie libre de formation pour une lacune isolée 3. Montrez graphiquement que ΔG f possède un minimum. À quoi correspond ce minimum ? Montrez graphiquement que ce minimum de ΔG f a lieu pour une valeur de X l qui dépend de T . 3.2. Montrez sans calcul comment varient qualitativement la concentration d’équilibre et le terme entropique en fonction de T ? 4. Concentration de lacunes à l’équilibre X l 4.1. Calculez l’expression de X l à l’équilibre en fonction de T pour X l 0, il est nécessaire que c > 0, sinon Δ serait toujours positif, ce qui impliquerait l’existence d’un extremum pour η non nul quelle que soit la température, ce qui n’est pas physique. 3b   . Les deux autres extrema non triviaux (  0) sont donc en   8c Afin qu’il subsiste uniquement l’état désordonné (pour T  T ), le discriminant Δ doit alors être négatif. La température T + est définie par   0 : T   T0  9b 2 / 32ac . Revenons au cas présentant 3 extrema de F (T  T  ), et plaçons-nous à un température supérieure à T0. Sachant qu’en   0, F est convexe ( 2 F /  2  0 ), on peut représenter schématiquement la fonctionnelle :

3b   , et F est concave 8c ( 2 F /  2  0, état instable, F   est maximum). F est à nouveau convexe et 3b   connaît un second extremum en   qui est un minimum. C’est la 8c seule construction possible. L’extremum le plus proche de   0 est en  

60

1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

5. On note par la suite m  , la valeur de η non nulle pour laquelle F est minimale. Ainsi, ηm augmente quand T diminue car Δ augmente quand T diminue, en accord avec la décroissance attendue de l’entropie (ordre croissant) quand T diminue. 3b En T  T ,   0. Le seul extremum non nul de F est alors donné par   . 8c Comme   0, on a b < 0 car c > 0. On se place maintenant à T = T0. La valeur de η non nulle parmi les 2 extrema pour laquelle F est minimale est donnée par 0  et 9b 2  3b  0. On voit que 0  2  .

3b  9b 2 3b  car b < 0 8c 4c

Au sens d’Ehrenfest, les 2 états (  0 et   c ) peuvent coexister à la température Tc car la transition est du 1er ordre. Ceci peut se démontrer de la manière suivante. On rappelle que ηc est un extremum de F et donc satisfait la condition 4cc 2  3bc  2a Tc  T0   0. De plus, pour que les 2 états coexistent, il faut que F c ,Tc   F   0,Tc   F0 , ce qui conduit à la seconde équation maître 4 cc 2  bc  a Tc  T0   0 car c  0. 6. On déduit par soustraction des deux équations maîtres que bc  2a Tc  T0  , et donc Tc  T0  bc / 2a . Comme b < 0 et a > 0, on a Tc > T0 . Finalement, on peut calculer la valeur ηc de l’état ordonné à partir de ηm en T = Tc , ainsi b 2 c    . On voit que c  0 et c    , et donc que ηc diminue quand la 2c 3 0 température augmente. On réinjecte ce résultat dans Tc , ainsi, Tc  T0  b 2 / 4ac . 1 Cette température est proportionnelle à l’énergie d’ordre    AB   AA   BB  2 dans la théorie de Bragg-Williams où les ε AA, ε BB et ε AB sont les énergies des paires AA, BB et AB. 7. On peut maintenant déduire l’allure de m T  :

61

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

et de la chaleur spécifique :

La mise en désordre est endothermique, C p  0 et H  0, il faut amener de l’énergie pour détruire l’ordre (règle de l’égoïste). 8. Synthèse. On peut maintenant représenter schématiquement la fonctionnelle F   à la lumière des résultats obtenus :

En raison de la présence d’états métastables, la courbe représentant m T  présente une hystérésis (le trajet diffère), selon que le système s’ordonne (quand la température diminue) ou se désordonne (quand la température augmente) :

62

1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

Lors d’une mise en ordre (partant des hautes températures), l’état initial désordonné   0 devient métastable pour T < Tc et T > T0. Il existe une barrière entre les états M et S . La transformation se fait alors par germination-croissance de petits domaines dans la phase désordonnée. En dessous de T0, l’état   0 devient instable et l’on parle alors de mise en ordre spinodale. Dans ce cas, l’amplitude des ondes de concentration augmente graduellement dans la phase mère. Il y a une mise en ordre globale et graduelle de l’ensemble de la phase désordonnée. 9. Lors de la mise en désordre, pour T qui augmente et T  T  , on est dans un régime de germination-croissance de domaines désordonnés dans une phase ordonnée car l’état ordonné initial (  m ) est métastable. La transformation devient continue au-dessus de T + . De plus, on comprend que si le système comporte des parois d’antiphases, la mise en désordre peut se produire plus facilement car ce sont des régions désordonnées.

1.2.6

Mise en ordre dans les CC et théorie de Landau

1. On considère un alliage CC formant une phase ordonnée AB de type B2 (exemple CuZn). La fonctionnelle d’énergie libre F  a-t-elle une parité et pourquoi ? 2. On considère la fonctionnelle d’énergie libre suivante : F    =  F0  a T  T0  2  b 4. T0 est la température en dessous de laquelle l’état désordonné devient instable et F   0  F0 . Selon les règles de Landau, la transition peut-elle être du 1er ordre, du 2nd ordre ? 3. Quelle doit être le signe de la dérivée seconde (concavité) de F   en   0 de part et d’autre de T0 ? En déduire le signe de a. 4. Étudiez les extrema ηe de la fonctionnelle F   . Calculez F e  et la courbure de F en   e . Quel doit être le signe de b selon le signe de T − T0 ? Quelle est votre interprétation de chacun des extrema ηe  ? 5. Quelle est la concavité de F   pour les extrema ηe  ? Qu’en déduisez-vous ? Correspondent-ils à des maxima ou des minima ? 6. Pour quelle température le paramètre d’ordre devient-il nul ? Exprimez la température critique de transition ordre-désordre TC en fonction de T0. Que vaut ηe pour T T0 jusqu’à T TC , T2 < TC avec T2 > T0 et T3 < T0.

Corrigé 1. Dans les cubiques centrés (CC), la fonctionnelle F   est paire car F    F   avec η et  les paramètres d’ordres associés aux deux variants de translation de la structure B2 (avec les atomes A au centre ou aux sommets du cube). 2. F   est paire donc la transition peut être du 1er ordre ou du 2nd ordre. 3.

64

F 2F  2a T  T0   4b 3 et  2a T  T0   12b 2 . En   0,   2 2F 2F  2a T  T0  doit être positif (minimum de F   ) pour T > T0 et 2  0 2   pour T < T0 , et donc nécessairement a > 0.

1. Thermodynamique des équilibres et diagrammes de phase

F  0, soit :  2a T T0   4b 2   0 .  a T  T0    0 est une solution évidente, les deux autres solutions sont e   2b avec b > 0 pour T < T0 car a > 0. ηe sont les deux variants possibles de la mise en ordre. De plus, on a :

4. On cherche les extrema de la fonctionnelle,

F e   F0  et

a 2 T  T0 2 4b

2F  4a T  T0   2 e Pour T < T0 , F e  est plus petit que F0 car b est positif. De plus, la courbure de F en   e est positive. Les deux variants possibles sont donc stables. Pour T > T0, il faut nécessairement que b < 0 soit négatif pour que les extrema existent. Ceci implique F e   F0 et la courbure de F en   e est négative. C’est donc un maximum et un état instable. Il n’existe pas d’état stable avec b < 0. 5. On cherche les concavités de la fonctionnelle pour les deux variants données par 2F 2F 2F  4a T  T0 , ainsi en   e . On trouve  0 quand 2 2    2 T < T0. Les ηe sont donc des minima. le signe de

6. e  0 pour T = T0, ce qui implique TC = T0 . Pour T 0), alors C x  diminue (resp. augmente). La diffusion tend donc à amortir avec le temps les fluctuations de concentration pouvant exister dans un alliage.

74

2. Diffusion et transport dans les solides

 Figure 2.5  (a) Diffusion d’atomes B en positions interstitielles en présence d’un gradient de concentration. (b) Profil de concentration C B  x  en atomes B correspon dant. La première loi de Fick indique que le flux d’atomes B ( JB ) descend le gradient de concentration. Le processus s’arrête lorsque la concentration  C B  x  devient constante pour tout x. Le flux devient nul ( JB = 0), le système est alors à l’équilibre thermodynamique.

Considérons un alliage binaire de concentration nominale C0 dans lequel existent des fluctuations périodiques de périodicité λ de la forme (figure 2.6) : C x, t   C0  A t  sin

2 x 

avec A t   A0 à t = 0.

 Figure 2.6  Profil de concentration sinusoïdal de longueur d’onde λ . A t  est l’amplitude à un instant t donné.

75

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

La résolution de la seconde équation de Fick aboutit à l’expression de l’amplitude des fluctuations A t  qui traduit un amortissement temporel exponentiel, analogue à la décharge d’un condensateur (figure 2.7) : A t   A0e



t t

La constante de temps caractéristique t λ est proportionnelle au carré de la période des fluctuations (λ ) : 2 t  2 4 D D est le coefficient de diffusion de l’espèce considérée. Pour t  3t  environ, l’amplitude des fluctuations tombe à 5 % de celle initiale.

 Figure 2.7  Décroissance exponentielle de l’amplitude A t  de fluctuations sinudoïdales en fonction du temps t.

Pour des fluctuations de forme plus complexe, on peut écrire C x  sous la forme d’une série de Fourier avec des composantes de fréquences spatiales qi  2 / i croissantes. Ce sont alors les composantes de Fourier de plus haut rang (grande fréquence spatiale, petite longueur d’onde λ ) qui s’amortissement en premier au cours du temps. Prenons un second exemple, celui de la diffusion d’atomes B depuis la surface d’un matériau (alliage AB) de concentration initiale en B égale à C0 . Ce problème est de première importance par exemple pour le traitement de pièces en vue de les durcir en surface (e.g. roulements à bille) par enrichissement en carbone près de la surface (cémentation) ou en azote (nitruration). La pièce est placée dans une atmosphère contrôlée riche en carbone ou azote de sorte que la concentration en surface demeure constante (C S ). La résolution de la seconde équation de Fick (cf. problème) aboutit à un profil de concentration décroissant avec x selon la fonction erreur (erf u , figure 2.8) : x C x, t   C S  C S  C0  erf 2 Dt



76



2. Diffusion et transport dans les solides

x * = Dt , la concentration vaut

On peut alors montrer que pour C x *   C S  C0  / 2.

Rappelons que la fonction erreur erf u est l’intégrale entre 0 et +u d’une distribution de Gauss d’écart type   1 / 2  : erf u 

2 

u

0

2

e v dv

Cette dernière étant non intégrable, erf u est tabulée en fonction de u (cf. problème 2.2.4 sur la cémentation).

 Figure 2.8  (a) Fonction erreur erf u encore appelée intégrale de Gauss. (b) Profil de concentration C  x  pour la diffusion d’atomes B depuis la surface où la concentration y est maintenue constante (C S ). C 0 est la concentration initiale avant diffusion.

2.1.3

Hétérodiffusion, effet Kirkendall

Considérons un alliage AB dans lequel les vitesses de diffusion sont différentes  (DA , DB ), les flux J A et JB ne sont alors pas égaux en norme 4. Un flux de lacunes Jl s’établit tel que :    JA  JB  Jl  0   Le flux de lacunes peut s’écrire sous la forme générale Jl = C0 v . C0 est la concen tration d’atomes par unité de volume et v désigne le vecteur vitesse des lacunes qui s’écrit donc :   v  DA  DB  X A

4.  Pour alléger l’écriture, on fera souvent l’abus de langage de parler de flux alors qu’il s’agit en réalité d’une densité surfacique de flux exprimée en at/m2s.

77

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

DA et DB étant les coefficients de diffusion partiels (encore appelés intrinsèques) :   JA  DAC A   JB  DB C B Ce « vent » de lacunes provoque un déplacement du réseau (figure 2.9) cristallin avec la vitesse v donnée ci-dessus. C’est l’effet Kirkendall. Les lacunes issues d’une boucle interstitielle migrent vers une boucle lacunaire entraînant l’annihilation des plans à gauche et la création d’un plan à droite (figure 2.9). Ceci conduit au déplacement des plans de droite à gauche, dans le sens des lacunes. Le flux de lacunes conduit également à la formation de porosités résultant de l’agglomération de lacunes.

 Figure 2.9  Déplacement des plans résultant du flux de lacunes. Les flèches verticales indiquent la montée des dislocations. On a création de plans au niveau des sources (et disparition sur les puits).

Ce déplacement du réseau va modifier les lois de diffusion établies auparavant. Rappelons que les équations de Fick sont données dans le référentiel du réseau cristallin qui est désormais mobile. La nouvelle expression des flux pour chaque espèce (i = A, B ) dans un repère fixe Ji0 s’obtient alors en ajoutant un terme de  transport (Ci v) :  0  Ji  Di Ci  Ci v

78

2. Diffusion et transport dans les solides

 En substituant l’expression de la vitesse de transport v, on peut écrire de nouveau le flux de diffusion sous la forme d’une équation de Fick mais avec un coefficient  désormais de la concentration locale Ci x, y, z   : d’interdiffusion D dépendant  0 Ji  D Ci avec D  X A DB  X B DA . Pour un alliage dilué, X B 0, 2 u v 2 et C x, t   C0 pour x  . On rappelle que erf u  e dv .  0 1.4. Représentez schématiquement erf u et C x  pour différents temps. Commentez cette dernière courbe décrivant la cinétique de pénétration du carbone en volume. On rappelle que erf u est la primitive d’une gaussienne (non intégrable analytiquement) et dont la valeur est tabulée ci-dessous : u

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

1,4



erf u

0

0,22

0,43

0,6

0,74

0,84

0,91

0,95

1

2. Résolution par transformée de Laplace. 2.1. Écrivez la transformée de Laplace (TL) de l’équation différentielle régissant C x, t  (seconde loi de Fick). C  x, p est la TL de C x, t  avec p la variable de Laplace ( p  j ). Cette transformée est définie de la manière suivante : 

TL  f t    f t  e  pt dt 0

De plus, on rappelle que : TL K   K / p où K est une constante : TL C / t   pC  x, p  H avec H une constante : TL  2C / x 2    2C  x, p / x 2 TL 1  erf a / 2 t  

e a / p

p

2.2. Montrez que C  x, p  Ae  x  Be  x est solution de la nouvelle équation différentielle sans second membre. En déduire α . Les deux termes (en e α x et e  x ) ont-ils un sens physique ? 2.3. Trouvez une solution particulière, en déduire la solution générale dans l’espace des p et déterminez la valeur des constantes d’intégration. En déduire la solution générale dans l’espace des temps C x, t  par transformation inverse TL–1 et comparez à votre solution de la question 1.

95

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

3. Application à la cémentation d’un acier. Un morceau d’acier contenant 0,1 % de carbone est carburé à 930 °C jusqu’à ce que la teneur en carbone atteigne 0,45 % à une profondeur de 0,05 cm. Le gaz carburant maintient la surface à 1 % de carbone pour toute valeur de t positive. On pose D = 1.4 × 10–7 cm2 s–1 pour toutes les compositions. 3.1. Calculer le temps nécessaire pour cette opération. 3.2. Quel temps est nécessaire à la même température pour doubler cette profondeur de pénétration ? 3.3. Si D  0, 27e 17400/T cm2 s–1, quel accroissement de température est nécessaire pour avoir 0,45 % de C à une profondeur de 0,1 cm, dans le même temps qu’il a fallu pour atteindre 0,05 cm à 930 °C ?

Corrigé 1. Résolution par changement de variable 1.1. On va utiliser le changement de variable u = x / 2 Dt . Ainsi, C dC u 1 dC   , et donc : x du x 2 Dt du





 2C d 1 C u d 2C 1   2 du 2 Dt du x du 2 4Dt x On réinjecte ces expressions dans la seconde équation de Fick  C  2C  D 2 , de sorte que : t x dC Dt d 2C  du x du 2 C dC  , donc  d ln C   2udu , que l’on intègre  C u 2 ln C   u 2  K  : avec K une constante. On trouve C   Ae u et donc

1.2. On pose C   u

C u  A e v dv  B . 2

0

1.3. La fonction erreur : erf u 

2 

u

0 e v dv 2

peut servir à exprimer le

 erf u  B . 2 On a C x  0, t   C s pour tout t, donc C u  0  C s  B . De plus, C x, t   C0 pour t → 0 et lim C x, t   lim C u . Par conséquent, champ de concentration : C u  A

t 0

u 

  A  B  C0 , car erf u  1 quand u  . Ainsi, A  C0  C s 2 2 et finalement : C u  C s  C s  C 0  erf u

96

2. Diffusion et transport dans les solides

1.4. On peut désormais représenter schématiquement erf u et C x  pour différents temps :

On remarque d’après le tableau donnant erf u que la fonction erreur varie approximativement comme u, pour u petit. Pour une valeur de u = x / 2 Dt fixée, si t augmente alors x croît en Dt , pour maintenir u = cste . Ainsi, plus le temps passe, plus le carbone pénètre dans la pièce. 2. Résolution par transformée de Laplace.  2C C  D 2 , en prenant la transfort x  2C  x , p  , avec H une mation de Laplace, on trouve : pC  x, p  H  D x 2 constante d’intégration.

2.1. On repart de l’équation de Fick :

2.2. On s’intéresse à l’équation sans second membre (H = 0), elle est de la  2C  x , p  forme D  pC  x, p  0 et donc de manière tout à fait clasx 2 sique, elle admet pour solution : C  x, p  Ae  x  Be  x p . Par ailleurs, C  x, p ne peut diverger en x  , alors D nécessairement A = 0. avec ici  

2.3. C  x, p  H / p est une solution particulière de l’équation, la solution générale est la somme de la solution sans second membre et de la solu

p

x

tion particulière, C  x, p  H / p  Be D . On prend la transformée de Laplace inverse de C  x, p , de sorte que :



C x, t   H  B 1  erf

2 xDt 

97

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

En x  , C  C0  H , de plus C x  0, t   C s  H  B , on en déduit B  C s  C0 et donc :



C x, t   C0  C s  C0  1  erf

2 xDt 

on retrouve le résultat de la question 1.3. 3. Application à la cémentation d’un acier Cs  C . Ici, C s  = 1 % C s  C0 et C0  = 0,1 %. De plus, erf u  0,61 pour C  = 0,45 %, la valeur attendue. Ainsi u  0,61, en se plaçant dans l’approximation erf u ~ u . On en déduit le temps nécessaire pour atteindre 0,45 % de carbone à la profondeur souhaitée (0,05 cm), t = 1,2 × 104s, soit 3,33 h.

3.1. C u  C s  C0  C s  erf u. On a donc erf u 

3.2. Pour doubler cette profondeur de pénétration, sachant que t ~ x 2 , il faut attendre 4 fois plus longtemps (~13,3 heures). 3.3. t 

x 2 . Ainsi, si on veut que x ′ = 1 cm pour t constant, soit deux D 2  0,61

fois la valeur précédente, il faut que D  4D avec D  D0e



Q RT  .

Sachant

Q /R  ~ 1330 K, soit D ln 0 4D un accroissement de température de 127 °C, la température initiale étant de 930 °C.

que D  0, 27e 17400/T cm2 s–1, on a donc T  

2.2.5

 

Diffusion d’une couche mince en sandwich

On considère la diffusion d’une couche riche en B d’épaisseur très fine ε dans un corps pur en A. Soit x l’axe perpendiculaire au film placé en x = 0. Nous allons étudier la diffusion des atomes B selon cette direction x. 1. Représentez le film sandwich ainsi que le profil de concentration en atomes B C x,0 à t = 0 (fonction rectangle de largeur ε et de hauteur C x,0). Montrez schématiquement, sans aucun calcul, comment varie le profil de concentration C x, t  pour trois temps t1, t 2 , t3 successifs. 2. Rappelez l’expression générale de la distance quadratique moyenne de diffusion (x =

x 2 ) en fonction de D et du temps t pour une diffusion en une dimen-

sion. Quelle est la forme de C x, t  à t donné, et à quelle distribution statistique l’associez-vous ? Comment varie la largeur du profil L en fonction du temps.

98

2. Diffusion et transport dans les solides

3. Nous allons chercher une solution de la deuxième équation de Fick pour ce problème, de la forme : C x, t   P x, t  avec C la concentration d’atomes B par unité de volume. Λ est le nombre d’atomes déposés dans la couche par unité de surface. Quelles sont les unités de la distribution statistique P x, t   ? S’agit-il d’une probabilité ? Que vaut l’intégrale de P x, t  sur tout l’espace ? En déduire celle de C x, t  . Le profil de concentration initial à t = 0 présente une épaisseur ε très faible de sorte qu’il peut être représenté par une distribution de Dirac P x, t  0   x  qui peut se voir comme la limite de la fonction rectangle pour ε tendant vers 0. On rappelle que  x   0 pour tout x ≠ 0.  x  ne prend une valeur non nulle que pour x = 0. 4. On considère pour P x, t  , une distribution de Gauss G x, . On rappelle que : x2



et  G x  dx  1.

 1 G  x,    e 2 2 2 2



Vers quelle distribution particulière tend G x,  pour  t  tendant vers 0 ? Pour quel temps t,  t  tend-il vers zéro ? 5. Démontrez que C x, t   G x,  est solution de la seconde équation de Fick. En déduire l’expression de l’écart type σ en fonction du coefficient de diffusion D des atomes B (dans A) et du temps t. Comparez σ à la distance de diffusion x précédemment proposée. Conclusion ? 6. Retrouvez la solution de la seconde équation de Fick en utilisant les transformées de Fourier (TF). On rappelle que :  2C TF  2   4 2k 2TF C   x  TF C  C TF  t t

 

  x TF e a 2  

2

 2 2   ae  k a 

7. Représentez qualitativement le profil de concentration C x, t  pour des temps successifs (t0 très petit, t1, t 2 ...). Montrez comment varient C 0, t  et σ en fonction du temps. 8. Quelle est la propriété du produit  C 0, t  ? Quelle est votre interprétation ? 9. On considère désormais un film mince de bore (atomes B) dans du nickel (atomes A). Sachant que l’énergie d’activation de la diffusion du bore dans le nickel est Q = 1,15 eV et le facteur pré-exponentiel D0 = 2 × 10–7 m2/s, calculer le temps nécessaire pour que le film diffuse sur une largeur : L = 10 µm à une température T = 800 °C. On prendra ici L  4 .

99

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

10. Quelle est votre interprétation de L ? Quelle est la proportion d’atomes B dans cette région de largeur L ? 11. Il existe désormais un gradient de contraintes dans le film, perpendiculaire au film riche en bore. Les atomes de bore, en position interstitielle, vont migrer dans le sens des x croissants depuis les zones les plus compressées (x < 0) vers les régions les moins compressées du réseau (x > 0). Ce champ de force conduit à  un terme de transport supplémentaire (Cv) dans la première équation de Fick  régissant la concentration C de bore. On suppose que la vitesse de migration v sous l’action des contraintes demeure constante pour tout x. Donnez l’expres∂C sion de la densité de flux d’atomes de bore puis de . ∂t  x  x 2

0   12. Montrez que C ’ x, t   e 2 2 est solution de cette nouvelle équa2 2 tion. Donnez l’expression de x0 t . Quelle est votre interprétation de ce terme ? Représentez qualitativement la forme du profil de concentration C x, t  pour différents temps (t = 0, t1, t 2 , t3…).

Corrigé 1. On peut schématiquement représenter le film sandwich, le profil de concentration en atome B initial et son évolution temporelle comme suit :

100

2. Diffusion et transport dans les solides

2. La distance moyenne parcourue par un atome en une dimension et pendant un temps t s’écrit x = 2Dt . Le profil de concentration en B a la forme d’une gaussienne, qui va s’étaler dans le temps au fur et à mesure que les atomes B diffusent dans le volume. La largeur du profil L t  évolue donc comme x . Ainsi, L t  est proportionnelle à 2Dt . 3. On admet une solution de la forme : C x, t   P x, t . Comme la concentration d’atomes B s’exprime en atomes par unité de volume et que Λ est un nombre d’atomes par unité de surface, P x, t  est donc homogène à une densité de probabilité, en m–1. Ainsi, par définition : 

 P x, t  dx  1 

et donc,  C x, t  dx  . 

x2

 1 e 2 2 . 4. P x, t   G x,   2 2 Le profil de concentration initial peut être représenté par une distribution de Dirac P x, t  0   x   G x,  pour  t  tendant vers 0, pour t → 0.

5. On pose C x, t   G x,  . Lorsque le coefficient de diffusion est indépendant de la concentration, la seconde équation de Fick s’écrit : C x, t   2C x, t  D t x 2 Injectons la forme de C x, t  dans l’équation précédente, ainsi : C  x, t 

d  x 2 1  x2 1    DC x, t   4  2   3 dt      

d D  . dt  Ainsi, l’écart type s’écrit   2Dt . On trouve donc que   x , et donc L  4  4x . et donc on a

6. On peut retrouver la forme de C x, t  en considérant la transformée de Fourier de la seconde équation de Fick, qui s’écrit : TF C   4 2k 2 DTF C  t En intégrant par rapport au temps, on obtient une solution de la forme 2 2 TF C   Ae 4 k Dt avec A une constante d’intégration. On prend la transformée inverse et donc :  x2 A  a2 C  x, t   e a

101

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

  x  2 2 avec a  4 Dt et TF e a 2   ae  k a . Comme   2Dt , a  2 et     on trouve que C x, t   AG x, . Quand t → 0, A x    x , ainsi A  . Finalement, la concentration s’écrit : 2

C  x, t  

x2

  e 2 2 2 2

7. On peut maintenant représenter le profil de concentration C x, t  pour différents temps :

C 0, t  

 et σ ont l’allure suivante : 4 Dt

 , le produit est constant donc la matière se 2 conserve, bien entendu. De plus, la hauteur du profil de concentration baisse en proportion de sa largeur.

8. On remarque que  C 0, t  

102

2. Diffusion et transport dans les solides

9. Ici L  4  4 2Dt . On trouve que D = 8 × 10–13 m2/s, et donc t =

L2 = 3,9 s. 32D

10. L  4 , ainsi, comme le profil de concentration a la forme d’une gaussienne, par définition 95 % des atomes sont dans cette largeur. 11. La densité de flux d’atomes de bore va désormais s’écrire :    J  DC  c v  C  div J, on a : Comme t C C  2C  D 2 v x t x   12. Posons donc C  x, t   e 2 2

C  d C  t dt

 x  x 0 2 2 2

. On injecte cette forme dans 

C   : t

 1  x  x 0 2  dx0 x  x0       C  dt 3  2  

Calculons maintenant la somme du terme de Fick et du terme de transport,  2C C D 2 v  : x x D

 1  x  x 0 2  v  x  x0  C   2C     v C D  2    C 2 4  x x  2   

L’identification terme à terme des deux dernières équations implique que C ′ est dx solution si et seulement si : v = 0 , ainsi comme v = cste , x0 = vt . Par ailleurs, dt d D il faut nécessairement que  , et donc de nouveau   x  2Dt . Le dt  maximum du profil de concentration se déplace vers les x croissants tandis que l’amplitude du profil décroît et sa largeur augmente.

103

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

2.2.6

Effet Kirkendall et diffusion dans CuZn

Ce fut dans le laiton, en 1947, que Ernest Kirkendall découvrit l’effet portant son nom. Le point de fusion du cuivre est 1083 °C alors que celui du zinc est proche de 420 °C. Le zinc présente une grande solubilité dans le cuivre (CFC) dépassant 30 % sur une large gamme de température de sorte qu’il est facile de préparer une solution solide CuZn. On constitue un couple de diffusion en déposant du cuivre à la surface d’un échantillon de laiton CuZn dont la teneur en Zn est inférieure à la limite de solubilité (solution solide CFC de Zn dans le cuivre). L’épaisseur du couple de diffusion est de l’ordre du cm. Le problème de diffusion se traite en une dimension. 1. Faites un schéma de l’échantillon de laiton à la surface de laquelle est déposé du cuivre pur en représentant l’axe x perpendiculaire à l’interface qui sera l’origine du référentiel (x = 0). 2. À votre avis, quel est l’élément qui diffuse le plus vite et pourquoi ? 3. Si des porosités se formaient, où les observerait-on par rapport à l’interface Cu/CuZn et pourquoi ? 4. On place des fils inertes de molybdène constituant des marqueurs pour suivre le déplacement du réseau cristallin. Ces fils inertes suivent les plans atomiques sans réagir avec l’alliage. On observe alors l’effet Kirkendall. Indiquez sans calcul dans quelle direction les plans et les marqueurs de molybdène migrent. 5. On considère un échantillon de laiton à 25%at. de Zn traité à une température T  = 785 °C pendant un temps t donné. Représentez qualitativement l’un au-dessous de l’autre l’allure des profils Ci x  pour le cuivre et le zinc (i = Cu, Zn) et des flux d’atomes correspondants J i x  et de lacunes ( J l x ), ainsi que l’allure du taux de création/annihilation de lacunes  x   Cl t . Commentez. Définissez les différentes zones de  x  et indiquez sur le schéma le sens de déplacement du réseau et du vent de lacunes. À quel endroit la vitesse v du « vent de lacunes » est-elle maximum ? 6. Après 30 jours à 800 °C, les images de microscopie révèlent que la distance (d ) parcourue par les fils de molybdène est de 52 μm. Calculez la vitesse de déplacement du réseau v . 7. Le profil de concentration en Zn obtenu par microanalyse sur cet échantillon permet d’estimer les coefficients de diffusion partiels de Cu et Zn à 800 °C que l’on supposera indépendants de la composition locale. Ainsi, la fraction atomique de Zn mesurée en un point donné de l’échantillon x0 est X Zn = 20 % et le gradient de fraction atomique de Zn est estimé à ∂X Zn ∂x = 0,17/mm. Le coefficient d’interdiffusion déduit des profils de concentration observés est

104

2. Diffusion et transport dans les solides

estimé à D = 1,13 × 10–13 m2/s. À partir des expressions du coefficient d’interde déplacement du réseau v, exprimez DZn et de DCu diffusion D et de la vitesse  en fonction de D, v , ∇X Zn et X Zn . En déduire les valeurs de DZn et DCu. 8. Dans quel sens la température de fusion de l’alliage CuZn varie-t-elle avec la teneur en Zn ? Quelle est la conséquence sur les coefficients de diffusion partiels DCu et DZn  ? Représentez qualitativement sur un graphe comment les coefficients de diffusion DCu, DZn et le coefficient d’interdiffusion D évoluent avec X Zn . Dans cette expérience d’interdiffusion, la concentration en Zn croît avec x dans l’échantillon. Ainsi, contrairement à l’hypothèse faite précédemment, les valeurs de DCu et DZn varient avec x. Donnez le sens de variation de DCu et DZn avec x. Justifiez votre réponse.

Corrigé 1. On considère un couple de diffusion Cu/CuZn, que l’on peut représenter schématiquement comme suit :

2. Le point de fusion du cuivre est 1083 °C, celui du zinc est proche de 420 °C, sa cohésion est donc plus faible. Il est plus facile de « rompre » les liaisons Zn-Zn, que celles liant les atomes de cuivre. Les enthalpies de migration et de formation des lacunes sont donc plus faibles. Le Zn est par conséquent le diffuseur le plus rapide. 3. La plus grande mobilité du Zn fait que le flux de Zn diffusant vers le Cu est plus important que le flux inverse de Cu. Il apparaît donc un flux de lacunes du Cu

105

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

vers le laiton. Les lacunes vont ensuite s’agglomérer et entraîner la formation de porosités, sous l’interface Cu/CuZn (en x > 0). 4. Le flux de lacunes, vers les x > 0, déplace les plans atomiques dans la même direction. Par conséquent, les fils de Mo migrent vers les x croissants également (dans le laiton). 5. La situation est la suivante :

Ci x  , en valeur algébrique JCu est donc positif et x C J Zn est négatif. Le flux de lacunes est donné par J l   DCu  DZn  Zn . Or, x DCu  DZn  est négatif et donc un vent de lacunes se dirige vers les x croissants en remontant le gradient de concentration en Zn. On a utilisé J i x   Di

106

2. Diffusion et transport dans les solides

Le

taux

de

création/annihilation de lacunes est donné par :  2C Zn J  x   Cl t   l  DCu  DZn  et est donc de signe opposé à la x x 2  2C Zn courbure de C Zn x  . De plus, ce taux s’annule au point d’inflexion,  0. x 2   Enfin, le flux de lacunes s’écrit Jl   v avec ρ la densité atomique (soit l’inverse  C Zn   du volume atomique) et v la vitesse des lacunes. On a v  DZn  DCu  ,  le vent de lacunes est donc dirigé vers le laiton. Cette vitesse est maximum quand le gradient de concentration en Zn est maximum, à l’endroit du point d’inflexion. 6. On a d = vt , dans l’hypothèse d’un régime stationnaire, ce qui donne une vitesse de déplacement du réseau v de 0,02 nm/s, sachant que les fils ont parcouru une distance d de 52 µm, après 30 jours à 800 °C. 7. En x0 , X Zn = 0,2 et ∂X Zn ∂x = 0,17/mm, de plus, D = 1,13 × 10–13 m2/s. Le coefficient d’interdiffusion est donné par D  DZn X Cu  DCu X Zn . Or, v  v  DZn  DCu  X Zn . On en déduit que DZn  D  X Zn  ~ 1,36 × 10–13 m2/s X Zn v et DCu  DZn   ~ 0,18 × 10–13 m2/s. X Zn 8. Comme la température de fusion du Zn est plus petite que celle du cuivre, la température de fusion de l’alliage CuZn, T f , diminue quand la teneur en Zn augmente. Ainsi, à une température T donnée, la mobilité augmente, DCu et DZn vont croître avec la teneur en Zn (vers les x croissant). Les atomes sont plus « chauds » et migrent plus vite car la mobilité croît avec T / T f qui augmente. De plus, DCu < D < DZn . Le coefficient d’interdiffusion varie donc de la manière suivante :

107

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

2.2.7

Les courts-circuits de diffusion : joints de grains et dislocations

1. Diffusion le long des joints de grains 1.1. On modélise le matériau polycristallin par un réseau périodique de grains de forme cubique de côté d et séparés de e (largeur des joints de grains). Les cubes sont parallèles aux trois directions d’un repère orthogonal (xyz). On suppose que seuls interviennent  les joints de grains parallèles au flux de diffusion orienté selon z. Soit JV et J J les flux de diffusion en volume et le long des joints selon l’axe z et DV , D J les coefficients de diffusion correspondants. Faites  un schéma de la structure dans le plan xOy . Montrez  que  le flux total J s’exprime comme une somme pondérée des flux JV et J J dont les poids respectifs s’expriment en fonction de e et de d . Donnez une expression simplifiée pour e  1 μm. 1.2. On suppose qu’il existe un gradient de concentration selon z. Montrez que l’on peut mettre en évidence un coefficient de diffusion apparent D  DV*  D *J . Exprimez DV* et D *J en fonction de DV , D J , et du rapport e / d . On se placera dans la limite e T * et T < T * . 1.4. Calculez l’expression de T * en fonction de e , d , et QV . Quels sont les modes de diffusion pour un matériau comportant des grains très fins (nanomatériaux) ou au contraire très gros. 1.5. On considère la diffusion du cuivre dans le fer α (ferrite de structure CC, D0  = 0,57 cm2/s, QV = 238 kJ/mole, température de transition ferriteausténite Tt  = 910 °C). La taille de grains est d  = 100 μm. Calculez T * et comparez-la à Tt . Conclusion ? 2. Diffusion le long de dislocations 2.1. Nous allons reprendre les mêmes calculs que précédemment pour des dislocations que l’on modélise par un réseau périodique de tubes parallèles au flux de diffusion « pipe diffusion », de rayon r (~1 nm) et séparés par une distance L. Faites un schéma. Le facteur pré-exponentiel D0 du coefficient de diffusion est commun aux coefficients de diffusion DV et Dd en volume et le long des dislocations. On suppose de nouveau que les énergies d’activation sont respectivement QV et Qd = QV / 2.

108

2. Diffusion et transport dans les solides

Calculez l’expression du coefficient de diffusion apparent (D) pour un matériau comportant des dislocations dont la densité par unité de surface est   1 / L2. On mettra D sous la forme D  DV*  Dd* . Dans le fer non déformé bien recuit, la distance moyenne L entre dislocations est proche de 10 μm. Montrez que, dans ces conditions, DV* ~ DV . 2.2. Calculez l’expression de la température T * pour laquelle les 2 contributions en volume et le long des dislocations sont égales. Calculez T * pour la diffusion du cuivre dans la ferrite. 2.3. Comparez cette température à celle calculée pour des joints de grains. Pour quelle densité de dislocation les courts-circuits le long des dislocations auraient une influence comparable à la diffusion le long des joints de grains ? Comparez la distance entre dislocations à la précédente (L = 10 μm). S’agit-il d’un matériau très déformé (écroui) ?

Corrigé 1. Diffusion le long des joints de grains 1.1. On peut représenter la structure de la manière suivante :

 La diffusion des atomes admet 2 contributions, celle en volume JV et la diffusion aux joints de grains J J . Le flux de diffusion étant donné par le nombre  d’atomes migrant par unité de surface, on peut exprimer le flux total J comme la somme des 2 flux, pondérée par les fractions surfaciques respectives : d 2 / d  e 2 pour la diffusion dans les grains, et 2de  e 2  / d  e 2 pour les joints de grains. Ainsi,  J

d2  2de  e 2  JJ J  2 V d  e  d  e 2

109

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Dans la limite e  0) dans le sens inverse. Les fréquences de saut   et   dans les deux directions sont alors différentes. Montrez que la fréquence de saut effective        estde la forme   K 0 . Donnez une expression approchée de K en fonction de B et du paramètre cristallin a, pour B  kT . 4. Donnez l’expression de la vitesse de migration  vB′ des atomes B en fonction  de Γ et de a. Montrez ainsi que vB  M B B . Sachant que dans les cristaux cubiques, DB  a 2 , en déduire l’équation de Darken donnant M B en fonction de DB . 5. Cette migration des atomes B sous l’action du gradient de potentiel chimique, entraîne un flux d’atomes B ( J B ) que l’on peut écrire facilement en fonction de vB′ et de C B . Montrez que pour une solution idéale, l’expression de J B est identique à celle de la première loi de Fick.

112

2. Diffusion et transport dans les solides

6. Écrivez le potentiel chimique μB comme la somme d’une partie idéale μBi et d’une partie ϕB rendant compte de la non-idéalité. En déduire que J B est la somme d’un et d’un terme de transport sous l’action d’un champ  terme Fickien  de force F B x   B x  dérivant de l’énergie potentielle B x . Retrouvez ainsi l’équation de Nernst-Einstein donnant la vitesse de transport vB (différent de vB′ ) en fonction de la force FB x  . Réécrivez les équations précédentes établies en 1D, sous forme vectorielle pour un cristal réel en 3D. 7. L’alliage AB présente une lacune de miscibilité donnant lieu à la précipitation d’une phase β cohérente de même structure CC que la phase mère α (e.g. alliages FeCr). Ainsi, pour de fortes sursaturations en atomes B, un régime de décomposition spinodale peut être observé. En reprenant les expressions précédentes, montrez qu’en présence d’une force chimique, la densité de flux J B peut se mettre sous la forme de la première loi de Fick avec un coefficient de diffusion « apparent » DB* prenant en compte la thermodynamique du système. Donnez l’expression de DB*  X B  en fonction de DB , X B et de la dérivée seconde de l’enthalpie libre G  X B  du système. On pourra utiliser la relation de Gibbs-Duhem. 8. Donnez l’allure de l’enthalpie libre G  X B  dans le cas d’une démixtion à l’état solide entre deux phases α et β de même structure. Donnez le signe du coefficient de diffusion DB*  X B  de part et d’autre des points d’inflexion de G  X B  . Comparez les régimes de décomposition selon la courbure de G  X B  en utilisant les lois de Fick. 9. On suppose qu’à t = 0, il existe des fluctuations de concentrations d’origine thermique, que l’on modélise par une sinusoïde d’amplitude δ C B0 et de périodicité λ . Décrivez l’évolution temporelle des fluctuations  C B t . En faisant l’hypothèse que DB* varie peu avec C B et qu’il peut donc peut être considéré comme constant, trouvez l’expression de  C B t  satisfaisant à la seconde équation de Fick. Représentez  C B t . Comparez au problème de l’homogénéisation lorsque DB* > 0. 10. L’alliage AB peut être modélisé par une solution régulière. Calculez l’expression de la dérivée seconde de l’enthalpie libre G  X B  puis de la ligne spinodale TS  X B  correspondant aux points d’inflexion de G  X B  . Montrez que TS tend vers la température critique TC du système lorsque X B = 1 / 2 (TC est la température au-dessus de laquelle A et B sont miscibles en toutes proportions, cf. chapitre 1). En déduire l’expression de DB*  X B  en fonction du rapport TS / T . Quel est le signe de DB* pour T > TS et T < TS  ? 11. Lorsque l’alliage est concentré avec des mobilités Mi (i = A,B) sensiblement différentes pour les espèces A et B, il convient de tenir compte de l’effet Kirkendall. On ajoute aux équations de flux J i précédentes (i = A,B) un terme de trans  port Ci v tenant compte de la vitesse de déplacement du réseau v . En écrivant que la somme des flux de A et B est nulle dans le repère fixe de l’échantillon,

113

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

  déterminez l’expression de v . En remplaçant v par son expression, montrez que l’on retrouve la forme classique du flux d’atomes B dans un gradient de potentiel chimique μB  :   J B  MC B B avec cependant une inter-mobilité M que l’on explicitera en fonction des mobilités des deux espèces M A et M B . Montrez, à l’aide de la relation de Gibbs-Duhem, que cette dernière équation peut aussi s’écrire :   J B  M *C0 B   A  avec C0 la concentration d’atomes par unité de volume. Donnez l’expression de M * en fonction de M et des fractions atomiques X A et X B . Montrez que M s’exprime facilement en fonction de D le coefficient d’interdiffusion. Démontrez que, comme précédemment (question 7), cette équation peut se mettre sous la forme d’une équation de Fick mais avec un coefficient de diffusion apparent DB** que l’on exprimera en fonction du coefficient d’interdiffusion D, X B et de la dérivée seconde de l’enthalpie libre G  X B  du système.

Corrigé 1. On considère un cristal 1D de périodicité a en l’absence de tout gradient puis en présence d’un gradient de potentiel chimique constant :

Ici, le gradient de potentiel chimique est négatif, B  0.

114

2. Diffusion et transport dans les solides

2. Pour une solution idéale, B  GB  RT ln X B , ainsi d B 1 dX B RT dC B  RT  . dx X B dx C B dx H D  3. On considère tout d’abord B  0, et de plus 0  0e kT . υ0 est une constante. La hauteur de barrière de diffusion ΔH D est identique que ce soit pour un saut vers les x > 0 ou pour un saut vers les x < 0. Nécessairement, les atomes migrent dans les deux directions avec la même fréquence Γ0 . Ainsi,         0 et le flux de diffusion également.

En présence d’un gradient non nul et négatif (B  0), la barrière de diffusion effective ΔH diminue avec x croissant : H  H D  B pour les x > 0 et H  H D  B pour les x < 0. Ainsi :    0e avec B  0,    0, et :    0e

H D B  kT

H D B  kT

avec    0, ce qui entraîne une différence non nulle de fréquences de saut         :

 

B  B  B   0 e kT  e kT   20 sinh kT  

avec K  2 sinh

kT . B

kT  ~ kT . De plus, 

d B a , car les bardx 2 d a a a d B rières de diffusion sont en ± . Ainsi,   0 B , et donc K   2 dx kT kT dx (> 0).

Pour B  kT , on a sinh

B

B

B



4. Il est naturel d’écrire pour la vitesse de migration vB  a . On en déduit que : vB  0

 a2 d B a 2   0  B dx kT kT

en 1D. Comme DB  0a 2, alors :   vB  M B B avec M B =

DB , c’est l’équation de Darken. kT

115

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

5. La migration des atomes B sous l’action du gradient de potentiel chimique entraîne un flux J B  C B vB . Pour une solution idéale, on a B  GB  kT ln X B (en J/atome ici) et donc :  kT  C B  B  CB On en conclut que :    kT  J B  C B M B C B  M B kT C B  DB C B CB avec de nouveau DB = M B kT . 6. Soit B  Bi  B . On a :       J B  M BC B B  DB C B  M BC B B  DB C B  C B v B Ici, on a posé : v B   M B  B   M B

d B DB F x   dx kT B

  D  d B  . En 3D, FB  B et v B = B FB , qui n’est rien d’autre dx kT que l’équation de Nernst-Einstein. avec FB x   

  d B d B dC B  pour la composante 7. On repart de J B  M BC B B . De plus, dx dC B dx du gradient selon x. Nous avons la même forme pour les composantes selon y   et z. Ainsi J B  DB* C B avec : DB*  M BC B

d B d B  MB X B dC B dX B

Or G  X B   B X B   A X A . Ainsi,

dG  B   A et : dX B

XB  1 d B d 2G d B d  A d B     1  1  X   1  X dX 2 dX dX dX dX B B B B  B B B On a utilisé l’équation de Gibbs-Duhem, X Ad  A  X B d B  0. Par conséquent : DB*  M B X B 1  X B 

d 2G dX B 2

d 2G 1 , soit = DB* M = DB . On  kT B kT X B 1  X B  dX B 2 retrouve l’équation de Darken du cours.

Pour une solution idéale,

116

2. Diffusion et transport dans les solides

8. Pour une démixtion à l’état solide entre deux phases α et β de même structure, on peut représenter G  X B  comme suit :

Dans la région concave où la courbure de l’enthalpie libre est négative : d 2G < 0 , on a également DB* < 0, et donc, d’après l’équation de Fick, le flux 2 dX B   J B  DB* C B remonte les gradients de concentration. Ainsi, les fluctuations de concentration s’amplifient, on parle d’instabilité, il s’agit du régime de décomd 2G > 0 et position spinodale. En revanche, en dehors de la zone d’instabilité dX B 2 DB* > 0, les fluctuations de concentration s’amortissent, le système est dans un état métastable. Il s’agit du régime de germination-croissance. 9.  C B t  augmente avec le temps (pour DB* < 0). En considérant 6 que t dC B d 2C B DB* = cste ,  C B t    C B0 x  e  est solution de = DB* avec dt dx 2 2    2 * . L’amplitude croît exponentiellement avec le temps. Dans le pro4 DB t blème de l’homogénéisation, DB* > 0 et  C B t    C B0 x  e  , l’amplitude décroît exponentiellement avec le temps. On peut représenter  C B t  de la façon suivante :

6.  En réalité le calcul de la théorie linéaire de Cahn est plus complexe car DB*  f C B .

117

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

10. La ligne spinodale TS  X B  est telle que

d 2G = 0 . Ici, l’enthalpie libre s’écrit : dX B 2

G  1  X B  G A  X BGB  NZ  X B 1  X B   RT 1  X B  ln 1  X B   X B ln X B  où N est la constante d’Avogadro, Z est la coordinance et ε l’énergie d’ordre (cf. chapitre I). Ainsi : d 2G 1 1   RT    2NZ  dX B 2 1  X B X B  On en déduit, à T = TS ,

d 2G = 0  : dX B 2

1 1  RTS    2NZ  1  X B X B  2Z  X B 1  X B . k Z  TC . TC est la température critique au-dessus de Pour X B = 1 / 2 , TS  2k laquelle A et B sont miscibles en toutes proportions. Au-dessus de cette température, il n’y a plus de point d’inflexion, et donc plus de démixtion possible. d 2G , on a : Sachant que DB*  M B X B 1  X B  dX B 2

soit TS 

 TT   D 1  TT 

DB*  M B RT 1 

S

B

S

qui est positif pour T > TS , et négatif pour T < TS . 11. En présence de l’effet Kirkendall, les flux de diffusion s’écrivent :    J B  M BC B B  C B v     et J A  M AC A A  C A v . v est la vitesse de déplacement du réseau par rapport au repère fixe du solide. Dans le repère fixe, on a :   J A  JB  0    Ainsi v  M A X AA  M B X B B . On injecte cette expression de la vitesse dans l’équation sur JB , de sorte que :   J B  MC B B avec M  X A M B  X B M A . On a utilisé ici la relation de Gibbs-Duhem, X Ad  A  X B d B  0.

118

2. Diffusion et transport dans les solides

  On utilise à nouveau Gibbs-Duhem pour démontrer que B  X A B   A . Le flux devient :   J B  M *C0 B   A  avec M * = MX A X B . Ici, C0 est la densité atomique (soit l’inverse du volume atomique). D D Mi = i , pour i = A,B. On réécrit M = avec D  X A DB  X B DA le coeffikT kT cient d’interdiffusion. C’est l’équation de Darken généralisée. dG  B   A. On injecte cette relation dans l’équation de flux dX B précédente :  d 2G  C B J B  M * dX B 2 Enfin,

Ainsi,

  J B  D **C B

avec D ** 

2.2.9

2 D 1  X B  X B d G2 . kT dX B

Une nouvelle loi de Fick selon Howe

Andrew Howe (Sheffield, Royaume-Uni) a publié en 2002 dans la revue Scripta Materialia un article [5] proposant une nouvelle loi qu’il pense être plus générale que celle de Fick. On se propose, dans ce problème, d’en reprendre la démonstration. La modification introduite par rapport à la diffusion classique de Fick est que la fréquence de saut dépend de la concentration locale dans le plan d’interstitiels considéré (0 C  , cf. figure). On considère la diffusion interstitielle d’atomes B dans un solide A. 1. Préambule : l’équation de Darken (1953) 1.1. Montrez qu’en présence d’un gradient de potentiel chimique, on peut écrire le flux de diffusion sous la forme de l’équation de Fick à condition de prendre pour coefficient de diffusion une expression de la forme :

D  D 1  K (1) avec D le coefficient de diffusion de B dans A. Donnez l’expression de la constante K en fonction du coefficient d’activité γ et de la fraction atomique X en atomes B et celle de D en fonction de la mobilité M .

119

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide



1.2. Dans quelle condition peut-on écrire la deuxième loi sous la forme suivante ? C  D C (2) t

2. Établissement de la nouvelle loi de diffusion (Howe, 2002) 2.1.



On traite le problème de la diffusion d’atomes B dans un alliage AB en une dimension selon Ox (figure ci-dessous). La distance entre plans est b . On considère deux plans successifs (plans notés 1 et 2) de concentration C et C   C en atomes B, respectivement. Les fréquences de saut dépendent de C donc de x et sont respectivement 1  0 et  2  0  0. En faisant apparaître les gradients (∂ / ∂x ) de C et de Γ0 , démontrez l’équation de Howe :  DC  J  (3) x

Dans le calcul de J , on négligera au premier ordre le produit  C 0 . Donnez l’expression de D en fonction de b , Γ0 et de Z * le nombre de sauts élémentaires dans une direction donnée et de distance projetée non nulle selon Ox . Comparez à l’expression classique. 2.2. Montrez que si l’on fait l’hypothèse que Γ0 ne dépend plus de la concentration locale C x , alors on retrouve la 1re équation de Fick classique. Donnez l’expression de D en fonction de Γ0 , Z * et b . Montrez que pour la diffusion en substitution d’atomes B dans les réseaux CS, CC et CFC, le coefficient de diffusion s’écrit toujours D  0a 2, a est le paramètre de maille. 3. Diffusion dans un champ de force chimique 3.1. La diffusion n’est plus brownienne. Il existe une force motrice « poussant » les atomes B à migrer vers les zones de plus faible activité chimique (i.e. faible potentiel chimique). On suppose dans un premier temps que

120

2. Diffusion et transport dans les solides

D est une constante (Γ0 n’est pas fonction de C et donc D ne dépend pas de x). On va montrer que la nouvelle équation de Howe est toujours valide à condition de prendre comme coefficient de diffusion D *   D (avec γ le coefficient d’activité). Montrez ainsi qu’on retrouve l’équation de Fick classique avec un coefficient de diffusion apparent qui a une forme identique à celle donnée en (1) : D  D * 1  K  (4)  Ainsi tout se passe comme si l’on pouvait écrire en général : J   D *C  , cf. équation (3). Ainsi, le postulat selon lequel la diffusivité est proportionnelle à l’activité (D *   D ) s’avère valide.



3.2. Donnez l’expression classique de D en fonction de la température T . Considérez maintenant que D *   D et montrez que ceci introduit une barrière de diffusion pour D * dépendant du potentiel chimique μ local (plans 1 et 2). Représentez schématiquement la barrière de diffusion entre deux configurations spatiales ou les potentiels à gauche et à droite de la barrière sont μ1 et μ2 . On notera ΔGD la hauteur de la barrière de migration dans le cas limite sans effet chimique (1  2). 3.3. Montrons que D *   D dans le cas général. Donnez l’expression classique (0  0 C ) du flux dans un champ de force chimique en le mettant sous la forme : J  D



C  f D,   (5) x

On considère que cette équation reste valide à condition de remplacer D par D *   D . Comparez terme à terme cette équation (5) à celle de D * donnée par Howe (3). En déduire que D * est nécessairement proportionnel au coefficient d’activité γ .

Corrigé 1. Préambule : l’équation de Darken (1953) 1.1. On rappelle que le flux de diffusion des atomes B peut s’écrire :  J  MC x C est la concentration en atomes B, reliée à la fraction atomique par C = X / Vat , avec Vat le volume atomique. M est la mobilité des atomes B. L’expression générale du potentiel chimique s’écrit   0  RT ln  X . γ est le coefficient d’activité. On injecte cette expression dans l’équation pour le flux de diffusion de sorte que :



J  MRT 1  avec D  D 1  K  



d ln  C C  D d ln X x x (1)

121

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

d ln  . d ln X Le coefficient de diffusion de B dans A est donné par : D = MRT .

et K 

1.2. De manière générale,



C     D C t x x



avec D qui dépend de l’activité, et qui est a priori fonction de x et donc ne peut pas être « sorti » de la divergence. De plus, D peut aussi être fonction de x. On peut écrire :

C  D C (2) t seulement si   cste (loi de Henry) et D = cste .

2. Établissement de la nouvelle loi de diffusion (Howe, 2002) 2.1. On se place dans la situation suivante :

Écrivons la différence des flux entre les plans d’interstitiels, du plan 1 vers le plan 2 ( J1→2) et du 2 vers le 1 ( J 2→1) : J  J12  J 21  Z *b 1C1   2C 2  avec Z * le nombre de sauts selon Ox et b la longueur des sauts. Or C1 = C et C 2  C   C . De même, 1  0 et  2  0  0. En négligeant le terme 0 C , on obtient : J  Z *b 0 C  C 0 

122

2. Diffusion et transport dans les solides

Comme les distances entre les plans sont très petites ( 0 (ou x < 0) et la distance de saut (projetée sur Ox ) est égale au paramètre de maille, donc D  0a 2. Le nombre de sauts de projection non nulle est Z * = 4 dans les CC et CFC et b = a / 2, on a donc toujours D  0a 2. 3. Diffusion dans un champ de force chimique 3.1. On part de l’équation de Howe (en 1D) : J 

 D *C  x

Or, D *   D . On obtient :

 dd lnlnX  Cx  D Cx d ln  avec cette fois D  D 1  . On a remarqué que d ln X = d ln C . d ln X  J   D 1  *

Nous retrouvons une forme identique à celle donnée en (1) :

D  D * 1  K  (4) D est remplacé par D *   D avec D * qui dépend de la concentration et de la position.

123

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

3.2. On sait que 0   e quence. Donc :

GD RT ,

ΔGD est la barrière de diffusion et υ une fré-

D   Z *b 2e

GD RT

Posons D *   D . On rappelle que   0  RT ln  X . Ainsi :

X e

  0 RT

On en déduit que : D *C 

 Z *b 2 RT0  RTD    e e Vat 

G

Vat est le volume atomique. Ainsi, la barrière de migration que voit les atomes en diffusant est abaissée par leur potentiel chimique μ (voir schéma) et J   D *C  / x .

3.3. On écrit : J  D *

avec v = et :

C  Cv (5) x

d ln    d ln  D*F , F   . On pose  RT . Ainsi v  D * x x dx dx RT



J  D * 1 

124



d ln  C d ln X x

2. Diffusion et transport dans les solides

L’équation de Howe s’écrit : J 

 D *C  C D *  D * C x x x

d ln  D *  D* , dx x soit D *   K  avec K ′ une constante. De plus, D *   1  K  donc K   D et D *   D . Ainsi, l’équation de Howe est équivalente à l’équation classique du flux dans un champ de force donnée dans le cours à condition de remplacer D par D *   D . Par identification des deux écritures du flux, il s’ensuit que

2.2.10 Diffusion dans un champ de forces : application au fluage de Nabarro-Herring Lorsqu’un matériau est soumis à une contrainte de traction σ à une température suffisante où la diffusion devient importante (T > 0.3T f dans les métaux, avec T f la température de fusion), on observe un allongement de l’échantillon dans le sens de la contrainte σ qui croît avec le temps. On parle alors de fluage. Rapidement, après une première phase dite de fluage primaire où les dislocations se multiplient, on atteint un régime stationnaire pendant lequel la densité de dislocations atteint un plateau et demeure sensiblement constante. Ce stade secondaire de fluage se traduit par un allongement δ l (l étant la dimension de l’éprouvette) croissant linéairement avec le temps (fluage secondaire). Pour de faibles contraintes, le fluage est essentiellement piloté par la diffusion et non par les dislocations et la vitesse de 1 dl déformation  0  est proportionnelle à la contrainte σ . On parle de fluage de l dt Nabarro-Herring ou de fluage Newtonien. On définit la viscosité comme le rapport    /  0 (exprimée en poises). Nous nous limiterons au fluage-diffusion dans ce problème. Nous allons ainsi établir l’expression de la viscosité η . C’est un problème de diffusion des lacunes dans un champ de forces pouvant être résolu par l’équation de Nernst-Einstein. La force à considérer ici est la contrainte de traction σ appliquée en surface de l’éprouvette. 1. On considère une éprouvette cylindrique de longueur l soumis à une contrainte de traction σ selon un axe (z) parallèle à sa longueur. L’action de la contrainte se traduit par un flux de lacunes allant des extrémités de l’éprouvette vers ses bords latéraux. Ceci aboutit à un allongement de l’éprouvette et une diminution consécutive de son diamètre (le volume se conserve). Faites un schéma en faisant figurer les flux de lacunes. Les surfaces (S ) étant des puits de lacunes parfaits, on admet que le gradient de concentration de lacunes près des surfaces en traction est pratiquement nul puisque ces défauts sont immédiatement éliminés. On peut donc faire l’hypothèse qu’en régime stationnaire le terme purement diffusif

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

est négligeable comparé au terme de transport. Nous allons calculer l’expression 1 dl de la vitesse d’écoulement  0  en fonction de Ω le volume atomique, du l dt flux de lacune J l . Dans cet objectif, on exprimera la variation de volume dV aux extrémités de l’éprouvette pour une déformation infinitésimale dl consécutivement à la migration des lacunes depuis les 2 extrémités vers les bords. Exprimez dV en fonction du volume atomique Ω, ceci pour une variation (dn) du nombre de lacunes diffusant vers la surface S . En déduire l’expression de ε 0 en fonction de Ω et de n0 = dn / dt . Exprimez ensuite n0 en fonction du flux de lacunes ( J l ). À partir de l’équation de Nernst-Einstein reliant vitesse v et force F , exprimez J l en fonction de σ . En utilisant l’expression du coefficient de diffusion des lacunes Dl , en fonction de celui d’autodiffusion D, donnez finalement l’expression de ε 0 en fonction de D, Ω, l , de la quantité kT et de σ . En déduire l’expression de la viscosité η . Comment varie-t-elle avec la température T  ? On parle de fluage newtonien lorsque la viscosité η est constante (fluage stationnaire). Est-ce le cas ici ? 2. Les superalliages à base de nickel sont des matériaux clés en aéronautique pour les turboréacteurs d’avion. Les aubes de turbines, notamment, sont soumises à des contraintes considérables (forces centrifuges dues à la rotation des aubes) et à des températures pouvant approcher 1000 °C. Dans les avions de chasse comme le Rafale (Dassault), les aubes sont de plus monocristallines. L’absence de joints de grains, points faibles sous contrainte, permet ainsi des performances supérieures aux aubes polycristallines. Nous allons appliquer les calculs précédents au nickel pur pour simplifier. Le paramètre cristallin du nickel (CFC) est a = 0,36 nm. Les données pour l’autodiffusion du nickel sont D0 = 1,9 cm2/s et Q = 68 kcal/mole. Calculez la viscosité η à 1000 °C pour une pièce de longueur l = 10 cm. En déduire la vitesse d’écoulement (en heure–1) sous une contrainte de 100 MPa. En déduire la valeur de l’allongement δ l de l’aube après 20 ans de service pour un appareil volant en moyenne 10 h par semaine. Qu’en concluez-vous ? 3. Nous allons maintenant appliquer ces calculs au nickel polycristallin (réacteurs des avions à réaction civils) dont les joints de grains constituent des puits de défauts tout comme les surfaces de l’éprouvette. On considère que le calcul reste valable pour un matériau polycristallin à condition de prendre pour l ′ la taille des grains. On prendra une taille moyenne des grains l ′ = 100 µm. Calculez la nouvelle viscosité. Toutes choses égales par ailleurs, comparez à la valeur précédente. Quel est le rapport des viscosités entre alliage monocristallin et polycristallin ? Qu’en déduisez-vous ?

126

2. Diffusion et transport dans les solides

Calculez la vitesse d’écoulement (en heure–1) pour σ = 100 MPa. Les grains d’un matériau ont bien souvent une dispersion en tailles. Quelle va être alors la « réponse » des grains au fluage suivant leurs tailles ?

Corrigé 1. On considère la situation de la figure ci-dessous.

dl . 2 S est la surface du cylindre aux extrémités. De plus, on a également dV  dn, pour dn lacunes migrant vers la surface S . Ω est le volume atomique. La variation de volume aux extrémités de l’éprouvette est donnée par dV = S

La vitesse d’écoulement  0 

1 dl s’écrit : l dt

0 

2 dV Sl dt

En injectant dV  dn, on trouve :

0 

2 0 n Sl

127

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

en posant n0 = dn / dt . Le nombre de lacunes migrant vers une extrémité s’écrit naturellement : n0 = J l S avec un flux de lacunes ( J l ) qui peut s’exprimer à l’aide de l’équation de NernstEinstein en négligeant le terme diffusif : J l = Cl v Cl est la concentration de lacunes et la vitesse v est telle que : v=

Dl F kT

S (exprimée par atome, et donc na divisé par le nombre d’atomes dans l’éprouvette na  Sl / ). Dl est le coefficient de diffusion des lacunes, Dl = D / X l , avec X l  C l  et D le coefficient d’autodiffusion. On obtient : les lacunes étant soumises à une force F 

Jl  et donc n0  forme :

D  kT l

D  S , qu’on injecte dans ε 0. Ainsi, ε 0 peut se mettre sous la kT l

0 

 

−Q l 2kT , la viscosité, qui varie en T / D ~ T / e RT . À une température 2D donnée, la viscosité est constante, c’est le fluage newtonien. Quand la température augmente, la viscosité diminue car le terme de diffusion (en exponentiel) l’emporte sur le terme linéaire en T .

avec  

−Q

2. À 1000 °C, on a D ~ D0e RT = 4,2 × 10–16 m2/s. Le nickel est CFC et la maille élémentaire (de volume a 3 ) contient 4 atomes, soit   a 3 / 4 = 1,16 × 10–29 m3. Pour une pièce de longueur l = 10 cm, on trouve η = 1,8 × 1022 poises. Pour une contrainte de 100 MPa, on a ε 0 = 2 × 10–11 h–1. Ainsi, après 20 ans de service (10 h par semaine), l’allongement δ l est faible ~20 nm, et n’a pas d’effet significatif sur la pièce. 3. Soit   la viscosité du matériau polycristallin. On a   /   l  / l 2 = 10–6. Donc ε 0 est 106 fois plus grand, de même pour l’allongement des grains. L’effet sera plus grand pour les petits grains, ce qui va avoir pour conséquence de modifier profondément la microstructure à l’échelle des grains.

128

2. Diffusion et transport dans les solides

2.2.11 Diffusion d’impuretés dans un champ de force, la formation des « atmosphères de Cottrell » Les nuages de Cottrell-Bilby sont des rassemblements de solutés (ou impuretés) se formant le long des lignes de dislocations dans les alliages. Ce phénomène de ségrégation, prédit théoriquement par Cottrell et Bilby [6], est rencontré dans de nombreux matériaux qu’ils soient métalliques (carbone dans les aciers, bore dans les alliages FeAl, cf. figure 2.12), ioniques (argent dans NaCl) ou encore semi-conducteurs (dopants (B,As,P) dans le silicium). Ces atmosphères de Cottrell jouent un rôle important en plasticité dans les métaux en gênant le déplacement des dislocations ou même en les épinglant en cours de déformation (effet de durcissement structural).

 Figure 2.12  Image tridimensionnelle de tomographie atomique montrant une atmosphère de Cottrell enrichie en bore (gros points noirs) dans un alliage ordonné (B2) FeAl [7]. On montre ici les plans atomiques (001) riches en Al (petits points noirs, le fer n’est pas représenté). Le circuit de Burgers montre la présence d’une dislocation coin le long de laquelle ségrége le bore (image E. Cadel, GPM). La ligne de dislocation est perpendiculaire à l’image.

Nous nous proposons dans ce problème d’étudier la distribution spatiale des impuretés autour d’une ligne de dislocation coin (surfaces iso-concentration). Il s’agit ici de traiter la diffusion des atomes de solutés dans le champ de force du à l’interaction élastique des impuretés avec la dislocation. On considère une solution solide diluée AB ou B est une impureté en interaction avec le champ de contraintes de la dislocation. On considère une dislocation coin rectiligne située le long d’un axe Oz perpendiculaire à la feuille. Son vecteur de Burgers est parallèle à x et sa norme est

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Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

notée b . L’énergie élastique d’interaction (φ ) d’un atome B avec la dislocation à la distance r s’exprime en coordonnées cylindriques (r,θ ) de la manière suivante :

K

sin  r

b V . µ est le module de cisaillement et δV est la variation de volume 3 introduite par l’impureté en solution solide.

avec K 

1. Une dislocation se comporte comme un dipôle mécanique ± avec une zone + en compression au-dessus de la ligne et une zone - en dilatation au-dessous. L’impureté B va donc interagir différemment selon l’effet de taille qu’elle produit en solution solide dans le réseau hôte. Ainsi, selon le signe de la variation de volume δV introduite par l’impureté (que l’on désigne par effet de taille par abus de langage), l’atome B ségrégera soit sous la dislocation soit au-dessus. Si l’atome B est en position substitutionnelle sur le réseau hôte de A, cet effet de taille est simplement la différence de volume entre atomes A et B : V  VB  V A . Les interstitiels dilatent le réseau de sorte que V  0. Montrez sur un schéma les 2 régions correspondant à   0  0 et   0 respectivement pour les interstitiels. Étudiez le signe de φ selon celui de δV et les valeurs de θ . Indiquez où ségrègent les atomes B pour V  0 et V  0. 2. Montrez que les 2 lignes équipotentielles (  0) forment des cercles dans le plan (r,θ ). On précisera les coordonnées du centre et le rayon en fonction de φ0 . Représentez ces équipotentielles dans le plan (r,θ ). Quelle est la forme des iso-surfaces d’interaction en 3D ?  v des atomes B (terme de transport) 3. Exprimez le vecteur vitesse d’entraînement  ainsi que le flux de transport JB correspondant en fonction de l’énergie potentielle d’interaction de B avec la dislocation φ et de DB (coefficient de diffusion de B dans A).   Par analogie avec les lignes de champ électrique (E  V ), et sans calcul, déduire  de la forme des équipotentielles la forme des lignes de flux de transport JB. Dans cet objectif, tracez qualitativement quelques équipotentielles pour des valeurs croissantes de φ0 , en particulier pour une valeur très faible et très importante. 4. Nous allons maintenant calculer la forme des lignes de flux de transport. Soit M le point représentant l’atome B. Dans cet objectif, écrivez que le vecteur déplacement d OM est colinéaire au gradient de φ . Déduisez du calcul du produit vectoriel d OM   l’équation donnant la forme des lignes de flux. On rappelle que les composantes du gradient en coordonnées cylindriques s’écrivent : r 

130

 1  et   r  r

2. Diffusion et transport dans les solides

 5. Écrivez sous forme vectorielle le flux JB des atomes B en tenant compte des termes diffusif (Fick) et de transport sous l’action du champ de force. En déduire les composantes J r et Jθ de ce flux en coordonnées cylindriques. Écrivez l’équilibre en termes de flux. En déduire l’équation des courbes iso-concentration C r,  sin  en atomes B. Dans cet objectif, faites le changement de variable u  . On r désignera par C0 la concentration de B loin de la dislocation. Montrez que C r,  se met sous la forme : C r ,   C0e

 r ,  kT .

Quelle est la forme des lignes iso-concentrations ? Considérons un élément B d’effet de taille positif (V  0). C’est le cas du carbone en position interstitielle dans les aciers. À partir de l’expression C r, , montrez dans quelle région (i.e. domaine de θ ), il y a enrichissement. 6. Nous allons estimer la « taille » de ce nuage en la prenant égale à la distance r0 à la dislocation en dessous de laquelle la concentration est significativement supérieure à la concentration nominale C0 . Si C0 = 100 ppm (fraction atomique exprimée en parties par million), on peut prendre par exemple C = 10C0 . Calculez r0 en nm pour le carbone dans le fer avec μ = 200 GPa, b = 0,2 nm. On prendra T = 1000 K,    / 2 et δV ~ 0, 9b 3 . 7. L’expression trouvée pour C r,  diverge dans le cas où K sin   0, lorsque r → 0. Cela n’a pas de sens physique. Imaginez comment varie l’énergie d’interaction réelle φ au fur et à mesure que les impuretés B migrent et ségrègent sur la ligne de dislocation Δ. Expliquez ainsi pourquoi on surestime beaucoup la concentration C près de Δ en utilisant l’expression classique de  r, .

Corrigé 1. On considère la situation suivante :

b sin  V donc φ avec K  r 3 a le signe de V sin  . Ainsi, pour   0,   , sin   0 et V  0 alors   0. En revanche,   0 quand V  0. Pour    ,2 , sin   0 et donc   0 quand V  0 et   0 quand V  0. L’énergie d’interaction élastique s’écrit   K

131

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

L’énergie élastique φ doit être négative pour que des atomes ségrègent le long de la ligne de dislocation. Par conséquent, quand V  0 les atomes B en substitution ségrègent dans la zone de compression (zone +) et dans la région de dilation (zone -), quand V  0. Pour un interstitiel, V  0 nécessairement, donc la ségrégation (0  0) se fait dans la zone de dilatation, cf. schéma ci-dessous.

sin  . On cherche les lignes équipotentielles, donc pour r sin  0  cste . Or r  x 2  y 2 , et y  r sin  . Ainsi, on peut mettre 0  K sous r K  K la forme d’une équation de cercle de centre  x  0, y  et de rayon  :  20  2φ0 

2. Soit 0  0, avec 0  K

2

K  K  x 2   y   20   20  

2

De la même façon, les lignes équipotentielles de valeur constante 0 sont des K  K cercles centrés en 0,   et de rayon 2φ (cf. schéma). On voit que plus φ0  2  0 0 est grand, plus les équipotentielles décrivent de petits cercles. Ceci est vrai quel que soit z. Les équipotentielles sont donc en 3 dimensions des cylindres, tous tangents à la ligne de dislocation.

132

2. Diffusion et transport dans les solides

   D DC    3. v  M B  avec M B = B , et JB = Cv . Ainsi, JB   B  . Les lignes de kT kT forces sont les lignes de flux, elles sont perpendiculaires aux équipotentielles. On peut conjecturer, par analogie avec les lignes de champ électrique, qu’il s’agit de cercles.

 4. Calculons   en coordonnées cylindriques :   K sin     2     r  K  2 cos   r r ,  Comme les lignes de flux sont perpendiculaires à  , les valeurs de r et de θ  dr  sont telles que d OM    0 avec d OM    , soit : rd   r , rd  sin   dr cos   0 r  A cos  est solution avec A une constante. Comme r 2  x 2  y 2 , et que r  x / cos  , avec cos   r / A, on aboutit à x 2  y 2  A 2 x 2. Cette dernière équation est celle d’un cercle de rayon r0 = A / 2 et de centre x = A / 2 :

x  A2   y   A2  2

2

2

Les lignes de flux de transport sont donc des cercles de rayon r0 , de centre x = r0 (voir schéma précédent).

133

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

 5. Le flux JB s’écrit :   DC  JB  DB C  B  kT Les composantes polaires du flux sont donc données par : J r  DB

C DBC K  sin  r kT r 2

et : J  DB

1 C DBC K  cos  r  kT r 2

À l’équilibre, J r et Jθ sont nulles. Posons u  sin  / r . Les 2 équations aboutissent à : dC CK  0 du kT Ainsi, C  Be

 Ku kT

avec B une constante. En r  , C = C0 donc B = C0. De 

plus, on reconnaît Ku   . On a donc C  C0e kT . On voit que   cste implique C = cste . Les iso-concentrations sont donc de la même forme que les équipotentielles. Si l’on considère un élément B d’effet de taille positif (V  0), d’après la question 1, il va ségréger sous la ligne de dislocation. En effet, cette région s’enrichit si C > C0 , et donc si   0. 6. Pour C = 10C0 , r0 = 1 nm. 7. Au fur et à mesure que les atomes ségrègent le long de la ligne de dislocation, il y a relaxation partielle du champ de déformation, ce qui va modifier l’énergie d’interaction φ . On comprend donc que le gain d’énergie associée à la ségrégation d’un atome B est plus faible quand la ligne de dislocation est déjà enrichie. Ainsi, pour ne pas surestimer la concentration des impuretés au niveau des atmosphères de Cottrell, il faudrait modifier l’expression de φ de telle sorte qu’elle décroisse avec la concentration.

134

2. Diffusion et transport dans les solides

2.2.12 Diffusion dans les semi-conducteurs : naissance d’un champ de Nernst interne 1. Dopage du silicium par diffusion 1.1.

On dope du silicium (valence 4) par de l’arsenic (valence 5) afin d’obtenir un dopage de type N. L’arsenic est un donneur d’électrons. À la température d’utilisation des dispositifs (300 K) les dopants s’ionisent. Chaque atome d’arsenic libère un électron : As → As+ + e–. Dans cette expérience, la concentration (C ) en dopant N est uniforme le long de x de sorte que la concentration d’électrons par unité de volume (n) est elle aussi uniforme. Sous l’action d’un champ électrique extérieur E ces électrons   acquirent une vitesse moyenne v  e E avec μe la mobilité électrique des électrons dans le semi-conducteur. Retrouvez l’expression de la diffusivité des électrons De en fonction de μe . La résistivité mesurée du barreau de silicium est ρ = 0,005 Ωm. À partir de l’expression du flux de charge J e , calculez la concentration de porteurs (e–). On donne μe = 0,13 m2 V–1 s–1. Tous les dopants sont ionisés et donc activés. Calculez la fraction atomique de dopants. Le silicium a une structure diamant avec 8 atomes/ maille et un paramètre cristallin a = 0,543 nm.

1.2. On souhaite maintenant réaliser une diode en élaborant une jonction PN (voir schéma ci-dessous). Ceci est fait par diffusion d’atomes de bore dans l’échantillon précédent (silicium dopé N) depuis sa surface. Le bore, de valence 3, est un accepteur d’électrons. Une fois ionisé, chaque atome de bore donne un trou chargé positivement h+ : B→B– + h+. Ainsi, la concentration de trous p est égale à celle de dopants P. Le dopage P est réalisé par diffusion en exposant la surface à une atmosphère gazeuse riche en bore qui se dépose en surface puis diffuse dans le silicium. L’apport continu du gaz, à pression partielle constante, maintient constante la concentration de bore à la surface (C 0, t   C s , ∀t ). C s est bien sûr supérieur à la concentration d’électrons (n) du silicium déjà dopé N afin que les trous soient majoritaires près de la surface (zone P). On obtient ainsi un dopage P du silicium en profondeur (x) avec une concentration en dopants qui décroît avec x. On supposera que le coefficient de diffusion D du bore dans le silicium ne dépend pas de x. Par analogie avec le problème sur la cémentation, donnez sans calcul l’expression de C x, t  en fonction de la fonction « erreur » erf u avec u  x / 2 Dt . On  donne : C x,0  0 , x  0, et C x, t  x  0. Représentez schématiquement C x, t  , pour t > 0 et croissant.

135

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

1.3. On fait un traitement thermique de diffusion à 1150 °C. Calculez le coefficient de diffusion du bore (D0  = 2,64 cm2/s et Q  = 3,6 eV/atome). 1.4. On désire qu’à une certaine profondeur x0 , la concentration de bore C devienne égale à n. On réalise ainsi une jonction PN à cette profondeur. Pour x < x0 , la zone est de type P et les trous sont majoritaires. Inversement pour x > x0 , les porteurs de charge N (électrons) deviennent majoritaires. Faites un schéma représentant les profils de concentration du bore C x   p x  pour t > 0 et du dopant N (arsenic) n x . La concentration de bore en surface est C s = 5 × 1024 atomes/m3. Calculer le temps nécessaire (en heures) pour que la jonction PN soit localisée à la profondeur x0 = 2,7 µm. 2. Dopage par implantation et champ de Nernst dans le silicium Dans ce problème, indépendant du précédent, le dopage N d’un échantillon de silicium est réalisé par implantation 7 ionique d’arsenic. Ceci donne lieu à un profil de concentration en dopant C x  présentant un maximum à la distance d de la surface selon x (on place l’axe Ox perpendiculairement à la surface). C x  a la forme d’une Gaussienne tronquée à gauche du maximum. On désignera par D le coefficient de diffusion du dopant P (bore) et De celui des électrons. 7.  L’implantation (jet atomique des dopants vers la surface du substrat) donne lieu à la création de défauts « d’irradiation » dans le cristal (auto-interstitiels de Si, lacunes), et conduit à un profil en cloche du dopant, qui se retrouve pour une grande part en position interstitielle dans le réseau après implantation. Un traitement thermique d’activation des dopants à une température suffisante (e.g. traitement « flash » à 1000 °C) est alors nécessaire après implantation afin de replacer les dopants en position de substitution sur les sites du silicium. À la température de fonctionnement des semi-conducteurs (300 K), on considère que les dopants s’ionisent tous. Les dopants sont des donneurs d’électrons s’il s’agit de dopants N comme l’arsenic de valence 5 ou des accepteurs d’électrons (création de trous h+) s’il s’agit de dopants P comme le bore de valence 3 (le silicium est de valence 4).

136

2. Diffusion et transport dans les solides

2.1. Les gradients de concentration en dopants lorsqu’ils sont tous ionisés donnent naissance à des gradients de concentration d’électrons ∂n / ∂x (en une dimension selon x). Ces charges d’espace vont donner lieu à un champ électrique E x  dit de Nernst dépendant aussi de x. Les dopants ionisés (As+) vont donc subir ce champ E . Donnez l’expression du flux J de dopants en une dimension selon x, en fonction de D, C x  (concentration de dopants), T et du champ de Nernst E . 2.2. Nous allons calculer l’expression de E x . De manière analogue à précédemment, écrivez le flux d’électrons ( J e ) en fonction de la concentration d’électrons n. En écrivant qu’en absence de champ électrique extérieur, le flux d’électrons ( J e ) est nécessairement nul, déduire l’expression de E x  en fonction de ∂n / ∂x . 2.3. On fait l’hypothèse que tous les dopants N sont ionisés. En remplaçant E x  par son expression dans l’équation du flux de dopants J , montrez alors que l’on retrouve une équation de Fick avec un coefficient de diffusion effectif D * = hD avec D le coefficient de diffusion des dopants. Donnez la valeur de h. Conclure sur l’influence du champ interne de Nernst E sur la diffusion. 2.4. Le profil de concentration en arsenic après implantation établi par analyse à la sonde atomique tomographique révèle une forme de dôme (figure 2.13). La concentration est de 1019 at/cm3 près de la surface (C s ) et le maximum C M culmine à 1021 at/cm3 observé à une profondeur x M = 10 nm. La concentration redescend ensuite. Faites un schéma du profil de concentration. Calculez la fraction atomique de dopants en surface en ppm. Calculez également celle au maximum du profil en x M en %.at. Comment varie E x  ? Faites un schéma de E x  en dessous de C x . Le champ de Nernst peut-il devenir nul ? Quel est son influence sur la diffusion des ions d’arsenic As+ ?

 Figure 2.13  Image de sonde atomique tomographique et profil de concentration en arsenic après implantation (S. Duguay, GPM).

137

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

2.5. Calculez un ordre de grandeur du champ de Nernst E (en V/μm) à la température de fonctionnement (300 K) du dispositif en approximant C x  à une droite entre x = 0 et x M . Le champ E est-il important d’après vous ? En déduire la différence de potentiel δV correspondante. 2.6. Le traitement d’activation des dopants est effectué à 1000 K. Expliquez pourquoi la diffusion peut être beaucoup plus rapide que prévu, surtout dans les premiers instants du traitement thermique. Quel est alors l’intérêt des traitements flash ?

Corrigé 1. Dopage du silicium par diffusion 1.1. On donne la vitesse moyenne des électrons sous l’action d’un champ  électrique extérieur E  : v  e E avec μe la mobilité électrique  des élec  trons dans le semi-conducteur. Par définition, v = M e F avec F  e E . D Ainsi e  eM e . Or, M e = e . e est la charge de l’électron (> 0 ici). Le kT coefficient de diffusion des électrons est donc donné par : De 

e kT e

Le flux de charge électrique J e s’écrit :    Je  ne v  ne e E Le terme diffusif ∂n / ∂x est nul car la concentration en électrons n est constante. De plus, Je   E . Nous en déduisons, pour la conductivité électrique,   ne e . Connaissant la résistivité du matériau,   1 /  = 0,005 Ωm, et μe = 0,13 m2 V–1 s–1, on a donc : n

1  = 9,61.1021 m–3  e e

Tous les dopants, dont la concentration est C , sont ionisés et donc activés, ainsi n = C . Le silicium comptant 8 atomes/maille, et sachant que son paramètre cristallin est a = 0,543 nm, le volume atomique est donné X par Vat = a 3 / 8 ~ 20 angströms3. Comme C = , avec X la fraction atoVat mique en dopants, on a X = nVat ~ 0,19 ppm (1,9 × 10–7). 1.2. Le profil de concentration en bore est de la forme : C x, t   C s  C s  C0  erf u avec u  x / 2 Dt , t > 0. Pour x = 0 (u = 0), erf u  0 et on vérifie bien que C 0, t   C s . C0 est la concentration initiale dans le matériau

138

2. Diffusion et transport dans les solides

 (nulle ici), d’après la condition C x, t  x  C 0  0. On obtient le profil suivant :

C  C s 1  erf u

1.3. À 1150 °C, sachant que D0  = 2,64 cm2/s et Q  = 3,6 eV/atome, on trouve : Q

D  D0e kT ~ 5.10–17 m2/s 1.4. Pour x < x0 , la zone est de type P et les trous sont majoritaires. Inversement, pour x > x0 , les électrons sont majoritaires et la zone est de type N. La jonction PN peut être représentée schématiquement comme suit :

La jonction PN est localisée en x = x0 , quand la concentration en bore C devient égale à la concentration en As (n). Écrivons cette condition : C  n  C s 1  erf u soit erf u  1  n / C s , ainsi u = 2,2 pour C s = 5 × 1024 atomes/m3. Or, u  x / 2 Dt , il faut 2 h pour que la jonction PN soit localisée à la profondeur x0 = 2,7 µm.

139

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

2. Dopage par implantation et champ de Nernst dans le silicium 2.1. Le flux J de dopants (ici As) s’écrit : J  D

C DC  eE x kT

2.2. En l’absence de champ électrique extérieur, le flux d’électrons ( J e ) est nul : n De  J e  De neE  0 x kT et donc : kT n E  ne x 2.3. Tous les dopants sont ionisés, ainsi C = n . En injectant l’expression du champ E dans l’équation de flux, on a : J  2D

C x

donc D * = hD avec ici h = 2. Le champ électrique interne double le coefficient de diffusion. 2.4. C s = 1019 at/cm3 et C M = 1021 at/cm3 en x = x M = 10 nm et donc X s = 200 ppm et X M = 2.104 ppm soit 0,02%at. La concentration redescend ensuite, de la manière suivante :

140

2. Diffusion et transport dans les solides

 kT C . Le champ E s’oppose au gradient de ne x concentration et va donc dans le même sens que le terme de Fick, d’où le schéma ci-dessus. E est négatif pour x < x M , nul en x = x M et positif en x > x M . Le champ interne a pour effet d’accélérer la diffusion de l’arsenic, et donc l’étalement du profil de concentration. Comme C = n , E  

2.5.

kT C C C M  C s C M ~ ~ 1035 m–4. avec  Ce x x xM xM La concentration moyenne dans cette région, pour une variation linéaire, C est proche de C ~ M . On obtient E ~ 5.106 V/m (en valeur absolue), 2 soit 5 V/µm. Ainsi, pour x M  = 10 nm, V  E / x M  ~ 0,05 V. Le champ de Nernst n’est pas négligeable. Nous allons calculer E  

2.6. La diffusion dans les premiers instants (à 1000 K) est plus rapide que prévu en raison de la sursaturation en auto-interstitiels après implantation, celle-ci produisant une quantité importante de défauts d’irradiations (dont des interstitiels) lesquels augmentent transitoirement la mobilité des dopants. Le traitement d’activation des dopants à 1000 K va diminuer la concentration de défauts et donc le coefficient de diffusion des dopants avec le temps. Un traitement flash, qui par définition s’effectue sur une courte période, va limiter la diffusion.

2.2.13 Diffusion dans un champ de force : l’oxydation du nickel On considère l’oxydation du nickel. L’oxyde formé est Ni1-δO. Il est non stœchiométrique et se décrit comme un cristal avec 2 sous-réseaux cubiques simples imbriqués, celui du nickel et celui de l’oxygène. Une fraction δ des sites du nickel est occupée par des lacunes structurales qui accommodent l’écart à la stœchiométrie. L’oxydation est contrôlée par l’autodiffusion du nickel sur son sous-réseau sous la forme de cations Ni²+ qui migrent depuis l’interface interne Ni/NiO vers la surface. Ceci est équivalent à la diffusion de lacunes v 2− depuis la surface exposée à l’oxygène. Ce processus est accompagné de l’émission d’électrons depuis l’interface Ni/NiO que l’on assimilera à la diffusion de trous h + provenant de la surface et se dirigeant vers l’interface Ni/NiO, tout comme les lacunes v 2− (schéma ci-dessous).

141

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Soit z la distance depuis l’interface Ni/NiO prise comme origine (z = 0). La grande mobilité des trous (ou des électrons) comparée à celle des lacunes va  créer une charge d’espace. Il en résulte un champ électrique interne E , dit de Nernst qui va affecter la migration des trous h + et accélérer les lacunes deux fois chargées v 2− . Dans la première partie du problème, on considère de manière générale un métal M donnant naissance à un oxyde MO. La valence du métal M sera notée α sans l’expliciter de façon à préserver la généralité des expressions établies. 1. Modélisation de la diffusion et du champ de Nernst 1.1. Soit α la valence du métal (M) et e la valeur absolue de la charge de l’électron. Donnez l’expression des charges des lacunes qv et des trous qh en fonction de e et de α . Donnez l’expression de la concentration de trous C h en fonction de la concentration de lacunes Cv . Donnez l’expression de la fraction atomique de lacunes X v dans l’oxyde en fonction de δ . Celle à l’interface MO/M, proche de la fraction d’équilibre dans le métal est plus basse. La concentration de lacunes croît donc avec z .   1.2. Écrivez les expressions en 1D des flux Jv et Jh en présence du champ de diffusion électrique E de Nernst. On note Dv et Dh les coefficients   des lacunes et trous. Écrivez la relation entre flux Jv et Jh pour  assurer la neutralité pendant l’oxydation. En déduire l’expression de E . Montrez qu’il est proportionnel à Dh − Dv et au gradient de concentration de  lacunes ∇Cv .  1.3. Donnez l’expression approchée pour Dh >> Dv . Montrez que E varie comme 1 / Cv .

142

2. Diffusion et transport dans les solides

1.4. Donnez le signe de E z . Quelle est son influence sur les espèces chargées h + et v  ? Faites un schéma montrant les flux de lacunes et de trous dans l’oxyde et en correspondance, Cv z  et de E z . 1.5. En déduire l’expression de J v en fonction de α , Dv et ∇Cv , dans l’hypothèse Dh >> Dv . Montrez que l’on peut faire apparaître un coefficient de diffusion apparent Dv* dont on donnera l’expression en fonction de Dv . 1.6. Montrez qu’en régime stationnaire, la concentration de lacunes Cv z  croît linéairement avec la distance z. Donnez les constantes d’intégration en fonction des concentrations de lacunes en surface (Cvs ) et à l’interface M/MO (Cvi ). Quelle est la loi de variation de E avec Cv et celle de E z  ? Donnez l’expression de E en fonction des fractions atomiques de lacunes X vs et X vi en surface et à l’interface métal-oxyde. 2. Oxydation du nickel 2.1. On oxyde du nickel à 1000 °C. L’oxyde NiO est de structure cubique (a = 0,418 nm). La maille contient 8 atomes (4Ni, 4O). La fraction atomique de lacunes sur le sous-réseau nickel mesurée près de la surface d’oxyde en équilibre avec la pression partielle d’oxygène imposée (P02 ) est δ s = 10–4 alors que celle à l’interface Ni/Ni0 est δ i = 4 × 10–6 (proche de la moitié de la concentration d’équilibre de lacunes dans le nickel). On prendra α  = 2 (Ni²+). Donnez l’expression approchée de E z  avec  s   i . Calculez le champ de Nernst E (en V/μm) en régime stationnaire en z = 0 et en z0 = 20 µm. 2.2. Le champ électrique E n’étant pas homogène dans l’épaisseur de l’oxyde, il y a création d’une charge d’espace dont la concentration  par unité de volume ρ est donnée par l’équation de Poisson : div E   /  avec    0 r et ε 0 = 1/(36π109) et ε r = 9 dans l’oxyde NiO. ρ est la densité volumique de charges. Montrez que ρ est proportionnelle à E / X v . Quel est son signe ? 2.3. On définit la concentration de charges d’espace par unité de volume C q par l’expression   C q e . Calculez son expression en fonction des valeurs de δ . Comparez C q en surface et celle à l’interface Ni/NiO. Calculez les fractions de charge d’espace par site correspondantes X q et comparez-les aux fractions de lacunes X v . Conclure. La neutralité est-elle parfaite ? 2.4. On s’intéresse désormais à la cinétique d’oxydation du nickel. On fait l’hypothèse que la vitesse de réaction en surface est très rapide et que c’est la diffusion en volume du nickel, phénomène bien plus lent, qui contrôle la cinétique. Démontrez que l’épaisseur oxydée z0 croît avec le temps selon la loi suivante : z02   t . Donnez l’expression de γ en fonction

143

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

de Dv et X vs lorsque  s   i . Montrez que γ est proportionnel à DNi le coefficient de diffusion de Ni dans NiO. 2.5. Calculez l’épaisseur d’oxyde (en microns) formé au bout de 8 heures. On donne DNi = 2,8 × 10–14 cm²/s à 1000 °C.

Corrigé 1. Modélisation de la diffusion et du champ de Nernst 1.1. α est la valence du métal, ainsi qv   e avec e la valeur absolue de la charge de l’électron. Pour la charge des trous, on a qh  e . La concentration de trous s’écrit donc C h   Cv car v  v    h  . Dans l’oxyde Ni1-δO, la fraction atomique de lacunes sur le sous-réseau du métal M est δ . Ramenée aux 2 sous-réseaux, elle est deux fois moindre, X v   / 2.   1.2. Les flux Jv et Jh en 1D sont donnés par : J v  Dv

Cv D  Cv v qv E z kT

J h  Dh

C h D  C h h qh E z kT

et :

La neutralité électrique est assurée par J h   J v . On injecte dans cette équation  les relations qv   e , qh  e et C h   Cv . Le champ électrique E s’exprime alors :  D  Dv kT  C v E h Dh   Dv eCv Le champ électrique est nul si la mobilité des trous est égale à celle des lacunes. 1.3. Pour Dh >> Dv , on a :

 kT  ∇C v E eCv

Le champ décroît lorsque la concentration de lacunes croît.  1.4. E z  est donc du signe de ∇Cv , ce dernier étant positif car la concentration de lacunes augmente avec la distance z depuis l’interface M/MO jusqu’à la surface. Comme E z   0 dans la région considérée, le champ a pour effet d’accélérer la diffusion des lacunes (F  qv E  0 avec qv   e ) mais s’oppose au mouvement des trous (F  eE  0, voir schéma cidessous). Le champ électrique E décroît avec z car la concentration de lacunes augmente de manière importante avec la distance z. Le gradient de concentration de lacunes, quant à lui, varie peu. Il est même constant en régime stationnaire. C’est le terme en 1 / Cv qui pilote le champ E .

144

2. Diffusion et transport dans les solides

kT ∂Cv dans l’équation de flux 1.5. On injecte l’expression du champ E  eCv ∂z des lacunes, ainsi : J v  Dv*

Cv z

avec Dv*  Dv 1   . Par conséquent, la diffusion est accélérée.  Cv J v  div Jv  0. Ainsi,  0 et donc 1.6. En régime stationnaire t z C Dv* v  cste . La concentration de lacune Cv z  est donnée par : z C v z    z    On sait que Cv z  0  Cvi , concentration à l’interface M/MO et que C s  Cvi Cv z0   Cvs  Cvi   z0 , soit   v . Finalement : z0 Cv z   Cvi 

Cvs  Cvi z z0

145

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Cvs  Cvi . Substituons cette équation dans l’expression z0 approchée du champ, on obtient : Donc Cv 

E

kT Cvs − Cvi 1 z0 C v e

Ainsi, en régime stationnaire, le champ est proportionnel à 1 1 / Cv  C vi   z  . E z  est une hyperbole. Comme Cv = X v / Vat , Vat est le volume atomique, E z  s’écrit : E

X vs  X vi kT i e X v z0   X vs  X vi  z

2. Oxydation du nickel 2.1. δ s = 10–4 à la surface et δ i = 4 × 10–6 à l’interface Ni/Ni0 donc  s   i . Or :  s  i kT E e  i z0   s   i  z que l’on peut approcher par : E

s kT e  i z0   s z

kT δ s , soit ~0,137 V/µm avec z0 = 20 µm et T = 1273K. ez0 δ i kT En z = z0 , E  , soit ~5,5 × 10–3 V/µm. ez0  E . Or : 2.2. div E   /  . En 1D,    z kT ∂X v E eX v ∂z En z = 0, E 

Pour rappel,

X v   i  cste    s . On obtient : z0 z

 

kT X v   1  1 X v   E e z z  X v  X v z

X v  0, ainsi   0. z 2.3.   C q e . On en déduit : E > 0 et

1 1 X v Cq   E e X v z

146

2. Diffusion et transport dans les solides

En z = 0,    i . On trouve C q ~ 8,5 × 1019 charges/m3. En z = z0 ,    s , soit C q ~ 3,4 × 1018 charges/m3. La concentration de charges à la surface est faible devant celle à l’interface Ni/NiO. Les électrons en excès à cette interface vont migrer vers la surface et « ioniser » les lacunes. Les trous, inversement, migrent de la surface vers l’interface Ni/NiO. La fraction atomique de charges électriques est donnée par : X q = C qVat avec Vat = a 3 / 8. Ainsi, X q ~ 7,8 × 10–10 en z = 0 ce qui est très faible devant X v (2 × 10–6). La neutralité est presque respectée. On a X q ~ 3,1 × 10–11 en z = z0 , ce qui garantit une meilleure neutralité, bien que n’étant pas parfaite. 2.4. L’augmentation de volume du matériau dV = Sdz0 (la surface S est arbitraire) consécutive à l’oxydation du matériau s’exprime en fonction du flux de lacunes : dV = J v SdtVat Or, J v 

Cs Dv* v z0

. On peut donc écrire : z0dz0 = Dv* X vs dt

soit z02   t avec   2Dv X vs 1    . On a posé z0 t  0  0 et DNi = Dv X v , ainsi   2DNi 1    . 2.5. z0 = 0,7 µm.

Références [1]

Philibert J. (2000) Diffusion et transport, Les Éditions de Physique.

[2]

Porter D.A., Easterling K. (2009) Phase transformation in metals and alloys, CRC Press, Taylor and Francis Group.

[3]

Renault J. (1994) Techniques mathématiques de la physique, Dunod.

[4]

Chossat M. (2011) Aide-mémoire mathématiques de l’ingénieur, L’Usine Nouvelle, Dunod.

[5]

Howe A. (2002) Scr. Mater. 47, 663.

[6]

Cottrell A.H., Bilby B.A.(1949) Proc. Phys. Soc. London, ser. A 62, 49.

[7]

Blavette D., Cadel E., Fraczkiewicz A., Menand A. (1999) Science, 2317–2319.

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2. Diffusion et transport dans les solides

En z = 0,    i . On trouve C q ~ 8,5 × 1019 charges/m3. En z = z0 ,    s , soit C q ~ 3,4 × 1018 charges/m3. La concentration de charges à la surface est faible devant celle à l’interface Ni/NiO. Les électrons en excès à cette interface vont migrer vers la surface et « ioniser » les lacunes. Les trous, inversement, migrent de la surface vers l’interface Ni/NiO. La fraction atomique de charges électriques est donnée par : X q = C qVat avec Vat = a 3 / 8. Ainsi, X q ~ 7,8 × 10–10 en z = 0 ce qui est très faible devant X v (2 × 10–6). La neutralité est presque respectée. On a X q ~ 3,1 × 10–11 en z = z0 , ce qui garantit une meilleure neutralité, bien que n’étant pas parfaite. 2.4. L’augmentation de volume du matériau dV = Sdz0 (la surface S est arbitraire) consécutive à l’oxydation du matériau s’exprime en fonction du flux de lacunes : dV = J v SdtVat Or, J v 

Cs Dv* v z0

. On peut donc écrire : z0dz0 = Dv* X vs dt

soit z02   t avec   2Dv X vs 1    . On a posé z0 t  0  0 et DNi = Dv X v , ainsi   2DNi 1    . 2.5. z0 = 0,7 µm.

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[7]

Blavette D., Cadel E., Fraczkiewicz A., Menand A. (1999) Science, 2317–2319.

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3 Cinétique de formation d’une nouvelle phase 3.1 Rappel de cours 3.1.1

Précipitation continue et discontinue

Considérons un alliage binaire AB sursaturé en atomes B, soumis à un traitement de revenu isotherme à T0 conduisant à la précipitation d’une phase β au sein de la phase mère α sursaturée en atomes B (cf. diagramme de phase, figure 3.1) [1].

 Figure 3.1  Diagramme de phase d’équilibre schématique montrant la présence d’un domaine biphasé dans lequel une phase β est en équilibre avec la solution solide mère α . X α , X β sont les fractions atomiques d’équilibre d’atomes B dans les phases α et β à T = T0 et X 0 la fraction nominale d’atomes B.

149

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

La précipitation d’une phase β cohérente peut être continue ou discontinue selon l’écart paramétrique entre les phases α et β . Le processus de précipitation continue est le plus fréquent. Il est notamment observé lorsque la nouvelle phase est cohérente et de paramètre proche de celui de la phase mère. La nouvelle phase β , enrichie en solutés B, se forme en appauvrissant de manière continue (avec le temps) la phase mère α en solutés. La sursaturation baisse alors graduellement au cours du temps. C’est ce qui est observé dans les alliages CuCo, FeCu, NiAl et bien d’autres systèmes notamment les alliages légers pour l’aéronautique à base d’aluminium (figures 3.2 et 3.3).

 Figure 3.2  Image de tomographie atomique (28 × 28 × 90 nm3) montrant la précipitation de petits précipités (enveloppes grisées) de type MgZn2 (5 à 25 nm) dans un alliage AlZnMgCu vieilli à 120 °C puis à 150 °C [2]. Chaque point représente un atome de soluté. L’image montre les surfaces iso-concentration à 10%at. de zinc (W. Lefebvre, GPM).

 Figure 3.3  Image de microscopie électronique en transmission (ARM 200F, 200 kV) en haute résolution (STEM-HAADF selon ) montrant la structure d’un précipité MgZn2 dans un alliage à base d’aluminium de la série 7000 (W. Lefebvre, GPM) [3].

Pour une phase cohérente donnant lieu à de forts écarts à la cohérence, la nouvelle phase β peut alors préférer germer aux joints de grains (JG) et croître selon un mécanisme de précipitation discontinue. On parle aussi de précipitation cellulaire en raison de la microstructure en cellules produite. Lors de sa croissance, la phase β emmène le joint dans son mouvement (figure 3.4). Il y a discontinuité de

150

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

composition à l’interface  /  ,   étant la phase mère sursaturée et α la phase en équilibre avec β . La composition de la phase α entre les lamelles β en arrière du front de transformation est, dès les premiers stades de croissance, celle de la phase α d’équilibre (X α ). En revanche, en avant du front, la composition de la phase mère n’est pas encore touchée et demeure celle de l’alliage (X 0). Le profil de concentration est donc discontinu au travers du joint  /   en mouvement. Le joint en migrant balaie la phase mère   sursaturée non encore transformée en drainant les atomes B en sursaturation nécessaires à la croissance de la phase β en arrière du front. Il y a diffusion des solutés le long des JG au cours de leur déplacement. Ce mode de transformation est davantage observé aux basses températures pour lesquelles la diffusion le long des JG l’emporte sur la mobilité en volume. Ce mécanisme de précipitation discontinu est observé notamment dans les alliages CuAg pour lesquels le désaccord paramétrique δ a / a entre la phase mère presque pure en cuivre et les précipités d’argent atteint 12 % (figure 3.5).

 Figure 3.4  Transformation discontinue. (a) La phase β germe aux joints de grains et entraîne le joint dans sa croissance (t = t1). (b) Étape de croissance pour un temps ultérieur t 2 > t1.

 Figure 3.5  Cliché de microscopie électronique montrant la précipitation discontinue de lamelles d’argent (en contraste clair) dans un alliage Cu5%at.Ag [4] – en clair les précipités d’Ag croissant d’un seul côté du JG (X. Sauvage, M. Bonvalet GPM).

151

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Dans le mécanisme de transformation discontinu, les lamelles β sont espacées quasi périodiquement avec une période minimale λm pilotée par la thermodynamique du système et la température T . Pour   m , le gain d’enthalpie libre en volume réalisé en précipitant β est juste compensé par l’énergie d’interface α/β, le bilan d’énergie est alors nul. Pour de faibles surfusions ΔT , un calcul simple aboutit à :

m 

K T

2VmTS . H TS est la température de solvus de la phase α au-delà de laquelle l’alliage est monophasé, T  T  TS (terme appelé parfois la surfusion par abus de langage), σ l’énergie interfaciale, Vm le volume molaire, et ΔH (> 0) le gain d’enthalpie à la transformation. La microstructure s’affine en baissant la température (λm diminue lorsque la surfusion ΔT augmente). avec K 

La transformation eutectoïde (un solide γ donne deux solides α et β ) se distingue de la transformation discontinue. Tout d’abord, parce qu’elle implique trois phases différentes avec une singularité dans le diagramme de phase, le point eutectoïde. De plus, dans la transformation eutectoïde, les lamelles de la nouvelle phase β germent aussi sur les joints de grains (JG) comme dans la transformation discontinue, mais les JG ne migrent pas. C’est l’exemple bien connu de la transformation perlitique dans les aciers où la phase γ CFC (austénite) se transforme en ferrite α (BCC) moins riche en carbone. Cette dernière en rejetant le carbone provoque la précipitation de la cémentite Fe3C, phase riche en carbone. L’expression de l’espacement minimal λm entre lamelles de cémentite est la même que précédemment (cf. problème 3.2.1 sur la transformation eutectoïde), à condition de remplacer TS par la température du palier eutectoïde TE au-dessous de laquelle l’austénite se transforme en ferrite et cémentite (mélange de phases appelé perlite). La microstructure est d’autant plus fine et la transformation d’autant plus rapide que la surfusion « ΔT  » est importante.

3.1.2

Instabilité et métastabilité

Considérons un alliage binaire sursaturé et la précipitation d’une phase β de même structure que la phase mère α . Des fluctuations de composition d’origine thermique existent toujours à température non nulle dans les matériaux. Examinons comment ces fluctuations évoluent avec le temps. Pour une fraction atomique d’atomes B (notée X ), voisine de la teneur nominale en solutés B (X 0), on peut faire un développement de Taylor de l’enthalpie libre G  X   : G  X   G  X 0   X

dG dX

X0

d 2G 1  X 2 2 dX 2

 ... X0

On note X  X  X 0 , les dérivées sont prises en X 0. En faisant une moyenne G  X  dans l’espace, les termes impaires s’annulent car il y a « autant » de

152

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

fluctuations ΔX positives que négatives de mêmes amplitudes. En se limitant au second ordre, on a alors en moyenne : G X   G X 0 

d 2G 1 X 2 2 dX 2

X0

Le gain d’enthalpie libre G  X   G  X 0  doit être favorable donc négatif. Ainsi, en écrivant que G  X   G  X 0  est voisin de −kT , on aboutit alors à [5] :

X 2 

2kT d 2G dX 2 X 0

 Figure 3.6  Diagramme d’enthalpie libre G  X  d’une solution solide régulière donnant lieu à une démixtion entre deux phases α et β de même structure et de compositions d’équilibre X α et X β données par la tangente commune. Dans la partie de courbure négative entre les deux points d’inflexion (forte sursaturation), le gain d’enthalpie libre ( G  0) est favorable à l’amplification de petites fluctuations de concentrations. On parle alors de régime spinodal. À droite, zoom d’une partie de G  X  de courbure positive près de la limite de solubilité X α (faible sursaturation). En dehors du domaine spinodal, le bilan ( G  0) est défavorable au développement de fluctuations de composition. L’enthalpie libre du système peut cependant baisser par germination de la phase β avec sa composition d’équilibre X β (figure 3.9).

Les fluctuations quadratiques de composition X 2 sont nécessairement positives. Ceci n’est réalisé que si d 2G / dX 2 < 0. Le système est alors dans un état instable (cf. chapitre I). C’est le régime spinodal. Le diagramme d’enthalpie G  X  relatif à la démixtion de la phase mère en deux phases de même structure (figure 3.6) montre cette région de courbure négative placée entre les deux points d’inflexion de G  X  .

153

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Dans cette zone au cœur de la lacune de miscibilité, le coefficient de diffusion apparent, proportionnel à la courbure de G  X  , devient négatif (cf. chapitre II sur la diffusion). Le flux de solutés remonte alors le gradient de concentration. Les petites fluctuations d’origine thermique croissent spontanément sans devoir franchir une barrière (figure 3.6). On assiste alors à la décomposition spinodale de l’alliage. Les interfaces  /  sont diffuses et la concentration en solutés dans la nouvelle phase β croît graduellement avec le temps avant d’atteindre sa valeur d’équilibre. Diverses études menées par nanoanalyse à la sonde atomique ont montré l’existence de ce régime spinodal dans bien des systèmes à partir de ces deux critères. La décomposition spinodale du système FeCr est un exemple typique (image de tomographie atomique représentée dans la figure 3.7).

 Figure 3.7  Image de tomographie atomique mettant en évidence la décomposition spinodale d’un acier ferritique FeCr (structure CC), échelle : 10 × 10 × 30 nm3. Les surfaces iso-concentration (20%at. de chrome) marquent l’interface entre les deux phases interconnectées α (riche en Fe) et   (riche en Cr) [6] (F. Danoix, GPM).

Ce régime d’instabilité n’a de sens que pour les transformations iso-structurales pour lesquelles seule la composition chimique distingue la nouvelle phase de la phase mère et pour lesquelles on a une fonction G  X  unique. Dans certains systèmes, comme FeCr, on observe une microstructure complexe interconnectée dans laquelle la phase β entoure α mais α entoure également β (figure 3.7).

154

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

En revanche, dans les régions de concavité positives (figure 3.6) de G  X  , les fluctuations s’amortissent nécessairement pour deux raisons : – le coefficient de diffusion devient positif (cf. chapitre II), les solutés descendent donc les gradients de concentration conformément à la première loi classique de Fick ; – les fluctuations aboutissent à une enthalpie libre supérieure à celle de l’alliage non décomposé (figure 3.6).

 Figure 3.8  (a) Germination puis croissance de la phase β à partir d’une solution solide mère α sursaturée. À l’interface, les concentrations sont celles des phases α et β à l’équilibre (X α et X β ). On parle d’équilibre local à l’interface. (b) Décomposition spinodale d’une solution solide fortement sursaturée. L’amplitude des fluctuations de concentrations initialement présentes croit avec le temps jusqu’à l’obtention des compositions d’équilibre (t = t 3 ).

Dans ces deux régions, en dehors de la spinodale, l’enthalpie du système ne peut décroître qu’en précipitant des germes β ayant la composition d’équilibre de la phase β (X β ). Le système est dans un état métastable et doit franchir une barrière pour la germination de la nouvelle phase β . Ainsi, pour de faibles sursaturations, le système est métastable. On parle alors d’un régime de germination-croissance (figure 3.8).

155

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Dans la théorie classique de la germination, les germes de la nouvelle phase β naissent avec leur composition d’équilibre et les interfaces  /  sont abruptes, contrairement à la décomposition spinodale où l’on assiste à un enrichissement graduel avec des interfaces diffuses. Il y a ensuite croissance des germes. Celle-ci est pilotée par la sursaturation X 0  X  qui peu à peu diminue.

3.1.3

Germination homogène

Divers auteurs ont contribué à ce que l’on désigne aujourd’hui la théorie classique de la germination. Mentionnons les précurseurs, Volmer [7] et Weber (1926) qui se sont intéressés à la germination de gouttes d’eau dans de la vapeur sursaturée, Becker et Döring [8], Turnbull [9] et Zeldovich [10]. John W. Cahn [11] a proposé enfin une théorie de germination dite non classique où les germes sont diffus et n’ont pas la composition d’équilibre de la nouvelle phase. Considérons un alliage binaire AB dilué sursaturé dans lequel germent des précipités sphériques d’une nouvelle phase β dont la structure est a priori différente de celle la phase mère α . Le diagramme G  X  correspondant est donné en figure 3.9. Nous ferons l’hypothèse que la densité de germes par unité de volume est faible de telle sorte que l’on puisse (i) ignorer les interactions entre eux, (ii) considérer que la quantité de solutés B puisée est si faible que la composition de la phase mère α demeure inchangée et égale à teneur nominale X 0. On peut exprimer simplement la variation d’enthalpie libre ΔG résultant de la formation d’un germe sphérique de rayon R  : 4 G    R 3 g n  g e   4 R 2 3 Δg n (> 0) est la force motrice de germination (figure 3.9) à laquelle s’oppose le terme d’énergie élastique de cohérence Δg e généralement plus faible. Ce dernier terme est dû à la déformation élastique du réseau liée aux contraintes de cohérence du germe dans la matrice (écart de paramètres de maille entre les deux phases α et β ). Le dernier terme d’énergie de surface proportionnel à R 2 s’oppose à la germination tout comme Δg e . L’énergie interfaciale par unité de surface σ est aussi appelée tension interfaciale (des J/m2 sont équivalents à des N/m). La concentration d’équilibre d’embryons de taille R à une température T est donnée par la loi de Boltzmann : Cn R   Cn0e

G R  kT

Cn0 est la concentration de sites possibles. Nous la prendrons égale à la concentration d’atomes B (X 0 / vat ), vat est le volume atomique. Ce terme est parfois pris égal à la concentration de sites (1 / vat ) qui est bien plus grande.

156

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

 Figure 3.9  Représentation de G  X  pour deux phases α et β . GP  GQ  / V  gn est la « force motrice » de germination. Il s’agit-là d’un abus de langage car il s’agit non pas d’une force (en Newton) mais d’une densité d’énergie par unité de volume (J/m3), grandeur équivalente à une pression. Vβ est le volume molaire de la phase β .

Dans le bilan d’énergie ΔG , nous voyons ici une compétition entre un terme de volume négatif (en général g n  g e ) croissant en R 3 et un terme positif de surface croissant en R 2 . G R  présente par conséquent un maximum ΔG * pour un rayon du germe R = R * appelé rayon critique de germination (figure 3.10). ΔG * constitue une barrière pour la germination de la nouvelle phase β . En écrivant dG / dR = 0 en R = R *, on aboutit à : R* 

2 g n  g e

La hauteur de la barrière de germination pour ΔG(R = R*) s’écrit : 4 G *   R *2 3 On a considéré ici que la composition du germe est celle d’équilibre (X β ). Le calcul de la force motrice développé ensuite est mené avec cette hypothèse. Un autre critère sur la composition du germe β est cependant souvent employé. Il s’agit de maximiser la force motrice, c’est la règle de la tangente parallèle. Lorsque la courbure de G   X  est importante (figure 3.9), la composition du germe est proche de celle d’équilibre. En toute rigueur, la composition du germe est une inconnue du problème, et est déterminée par un équilibre local à l’interface matrice/précipité, différent de l’équilibre du diagramme de phase car le germe est sous pression (par effet Gibbs-Thomson de capillarité, cf. section sur la coalescence). Pour des

157

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

courbures de G  X  et G   X  similaires, l’écart à la composition d’équilibre est du même ordre de grandeur que la sursaturation, donc faible. Quand le volume molaire est indépendant de la composition du germe, la condition d’équilibre locale (tangente commune) aboutit à la règle des tangentes parallèles.

 Figure 3.10  Gain d’enthalpie libre consécutif à la formation d’un germe sphérique de rayon R. Le bilan n’est réellement favorable au développement de la phase β que pour R > 3R * /2. La zone de Zeldovich de largeur δ * correspond au domaine où G R est proche du haut de la barrière ΔG * à kT près.

Dans la théorie classique, on considère dans une première approche que le germe peut croître si R > R * car G R  décroît chaque fois qu’un nouvel atome B vient s’agréger au germe. Toutefois, G R  demeure positif près de R *. Le bilan n’est réellement favorable au développement de la nouvelle phase β que si G  0. Ceci est réalisé pour R > 3R * /2 . Les fluctuations thermiques permettent aux embryons sous-critiques (R < R *) de franchir la barrière ΔG *. Le flux stationnaire de germes surcritiques se formant est de la forme : I n  I 0e

Q D G * kT e kT

I 0  ACn0 avec υ la fréquence de vibration des atomes. A est une constante proportionnelle à la surface des germes critiques que nous n’expliciterons pas ici. Q D est l’énergie d’activation pour la diffusion des solutés vers les germes. I n est stationnaire si ΔG * demeure constant, condition réalisée si la composition de la phase mère demeure sensiblement inchangée et proche de la composition nominale de l’alliage (faible fraction précipitée), la force motrice Δg n est alors constante. Ceci n’est réellement vérifié qu’en début de germination. Cette dernière équation du flux de germination traduit la compétition entre barrière de germination (G * T ) et mobilité des atomes (Q D / kT ) qui varie de manière opposée avec la température. À haute température, la faible sursaturation

158

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

en atomes B produit une plus faible densité de précipités. En revanche, ils grossissent vite car la mobilité atomique est grande (figure 3.1). À basse température, c’est l’inverse. Les précipités sont nombreux car la sursaturation est grande et ils sont généralement plus petits. Toutefois, la fraction volumique d’équilibre est plus importante qu’à haute température. Les calculs du flux de germination I n et de R * nécessitent la connaissance des trois termes Δg n , Δg e et σ . La force motrice de germination g n  G P  GQ  / V est le gain d’enthalpie libre par unité de volume (Vβ est le volume molaire de la phase β ) consécutif à la formation dans la phase mère α , d’un germe β (figure 3.9) de composition égale à celle d’équilibre donnée par le diagramme de phases. Pour une solution régulière diluée, et des germes presque purs en B (X β ~1), on aboutit à l’expression simplifiée suivante (cf. problèmes 3.2.2 et 3.2.3) : g n 

RT  X 0  ln V  X  

Les fractions atomiques (X ) se réfèrent toutes aux solutés B. X 0 est la fraction nominale de solutés B dans l’alliage et X α celle dans la phase mère à l’équilibre. Δg n croît avec X 0 donc avec la sursaturation (X 0  X  T ) laquelle décroît si T augmente car X  T  croît avec T (figure 3.1). Le flux de germination et la densité de germes décroissent donc avec T et R * croît lorsque l’on s’approche du solvus (limite de solubilité) où la sursaturation devient nulle. Le terme élastique peut s’écrire simplement selon la théorie des inclusions cohérentes incompressibles d’Eshelby [12] comme proportionnel au carré de l’écart paramétrique relatif (δ) entre les deux phases α et β  : g e  E

2 1 v

E est le module de rigidité de Young, v le coefficient de poisson (~0,3). Selon la loi de Vegard, le paramètre cristallin est proportionnel à la fraction atomique, de sorte que l’on peut écrire :

 2

aB  a A X  X  aB  a A 

Pour un germe cohérent, la tension interfaciale σ a pour origine l’existence de nombreuses paires hétéro-atomiques AB à l’interface qui donnent lieu à un excès d’énergie proportionnel à l’énergie d’ordre ε . Dans cette approche simplifiée, la tension σ (J/m2) est proportionnelle à ε et à la quantité de paires AB, terme qui croît avec le carré du gradient de concentration existant à l’interface  /  . Ainsi :  2    X  L’énergie interfaciale varie généralement de 10 à 200 mJ/m2 pour les interfaces cohérentes pour lesquelles il y a continuité du réseau au travers de l’interface  /  (figure 3.11). σ peut atteindre 500 mJ/m2 pour des interfaces semi-cohérentes (figure 3.12). Pour ces interfaces, il y a relaxation des contraintes de cohérence par

159

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

un réseau de dislocations d’accommodation (figure 3.13) espacées d’une distance d  b /  (b est la norme du vecteur de Burgers des dislocations, b = a / 2 pour des dislocations coin (001) dans un cristal CC de paramètre cristallin a). La tension interfaciale σ peut atteindre 1 J/m2 pour des interfaces incohérentes (figure 3.13), valeur proche de celle de joints de grains généraux (σ  ~ 0,78 J/m2 dans le fer). Ceci rend très difficile la germination homogène des phases incohérentes. Celles-ci germent le plus souvent de manière hétérogène sur les défauts cristallins (joints de grains, dislocations…).

 Figure 3.11  Interface  /  cohérente pour un précipité β constitué d’atomes B plus gros que les atomes A présents majoritairement dans la phase α . Le paramètre cristallin de β , supérieur à celui de la phase mère α , introduit une distorsion du réseau qui est le siège d’une énergie élastique proportionnelle au volume de la phase β.

 Figure 3.12  Interface semi-cohérente entre deux phases α et β . Un réseau de dislocations accommode l’écart paramétrique δ a / a entre les deux phases tel que :  a / a  b / d avec b le module du vecteur de Burgers des dislocations et d la distance entre celles-ci. L’énergie élastique est partiellement relaxée par ce réseau de dislocations mais l’énergie interfaciale augmente en devenant plus importante que celle des interfaces cohérentes.

160

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

Alors que l’énergie d’interface est faible lorsque les phases α et β sont cohérentes, les contraintes de cohérence entraînent une déformation élastique se traduisant par une densité d’énergie élastique Δg e . La figure 3.11 montre schématiquement la situation pour un germe de paramètre cristallin plus grand que la phase mère α (taille des atomes de solutés B plus importante). Cette contribution élastique diminue drastiquement lorsque les précipités sont semi-cohérents (figure 3.12) ou incohérents (figure 3.13), au profit de l’énergie interfaciale qui croît.

 Figure 3.13  Interface incohérente entre deux phases α et β . Les réseaux des deux phases sont découplés. L’énergie élastique est quasi nulle mais l’énergie interfaciale est grande.

Une théorie plus raffinée prenant en compte de manière plus réaliste les fluctuations thermiques (kT ) et effets de régression des germes près de R * a été proposée par Turnbull et Zeldovich. On prend en compte ici les fluctuations d’hétérophase autour de R *. Ainsi, si G R  pour R > R * est trop proche du haut de la barrière ΔG * (figure 3.10), on conçoit qu’il peut y avoir régression des germes. R peut alors décroître même en dessous de R *. Selon cette théorie, les germes ne peuvent croître de manière irréversible que lorsque le germe sort de la zone de Zeldovich de largeur δ *, telle que G * G R   kT (figure 3.10). Dans cette zone de Zeldovich autour de R *, pour G * G R   kT , les germes voient leur taille « osciller » pendant un certain temps (τ ) de manière stochastique autour de R*. Ceci introduit un temps d’incubation τ nécessaire pour que les germes sortent de cette zone de largeur δ *. Le système ne rentre ainsi dans le régime de croissance que pour t   . La largeur de Zeldovich peut facilement se calculer en faisant un développement de Taylor au second ordre de G R  près de la taille critique (cf. problème 3.2.11) : 2 *  Z  Z est le facteur de Zeldovich : Z

1 d 2 G 2 kT dn 2 n n*

161

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

4 n est le nombre d’atomes dans le germe de rayon R  : n   R 3 . n * est donc le 3vat nombre d’atomes dans le germe critique. Le flux de germination, dépendant du temps, s’écrit : I t   Z  * Cn0e

G *  kT e t

β * est la fréquence à laquelle les atomes s’incorporent au germe, dans un régime de marche aléatoire des atomes, β * s’écrit : * 

4 R *2 DC0 a4

C0 est la concentration nominale en atomes B et a est une distance atomique. Q D ) et force motrice de On retrouve la compétition entre mobilité (D  D0 exp kT germination à la fois dans la fréquence d’adsorption β * et dans le courant de germination I t . Notons qu’il existe d’autres expressions de β * (cf. problème 3.2.12). Le temps d’incubation τ s’obtient en écrivant β * à l’instar du coefficient de diffusion donné par l’équation d’Einstein (marche aléatoire des germes dans « l’espace des phases » de leur taille) :

 

* 

 *2 2

2 .  Z 2 * La largeur de Zeldovich δ * et par conséquent le temps d’incubation τ décroissent lorsque la courbure de ΔG (en valeur absolue) augmente. Ainsi,  

3.1.4

Germination hétérogène

Lorsque la phase β n’a pas la même structure que la phase mère α (phases incohérentes), la germination homogène dans le grain est très difficile, voire impossible. On assiste alors à la germination préférentielle de la phase β sur les défauts cristallins, notamment les joints de grains (JG) ou les dislocations (cf. figures 3.14 et 3.15). Ce mode de précipitation est renforcé à haute température car la sursaturation et la force motrice de germination baissent. On assiste alors à une zone appauvrie en solutés et en lacunes donnant lieu à une zone désertée où il n’y a plus précipitation (precipitation free zone [PFZ]). On a alors une décoration des joints de grains par des précipités β dont la croissance est favorisée également pas les JG qui sont des courts-circuits de diffusion. Lorsque germinations homogène et hétérogène cohabitent, les précipités naissant sur les JG sont plus gros que ceux naissant dans le grain.

162

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

 Figure 3.14  Image de microscopie électronique (STEM HAADF) montrant en contraste sombre la précipitation hétérogène de précipités incohérents aux JG (phase β riche en Mg) dans des alliages AlMgZr contenant 5%at. de Mg et une faible teneur en Zr. En contraste clair apparaissent également quelques précipités de « dispersoides » riches en Zr, élément de faible teneur (X. Sauvage, GPM).

 Figure 3.15  Cliché de microscopie électronique mettant en évidence la précipitation homogène et hétérogène de particules d’Ag (en contraste sombre) dans un alliage Cu5%at.Ag ayant subi un traitement de précipitation à 440 °C pendant 30 minutes. Cu et Ag ont la même structure (CFC) mais avec un fort écart paramétrique (12 %) donnant lieu à la fois à une germination homogène et hétérogène sur les dislocations (lignes en contraste sombre) de précipités d’argent (X. Sauvage et M. Bonvalet, GPM).

163

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Les JG étant eux-mêmes siège d’un excès d’énergie interfaciale (  ), le bilan énergétique est alors souvent favorable à une germination de la phase β sur les JG. Considérons la formation d’une particule constituée de deux calottes sphériques de phase β de chaque côté du JG (figure 3.16). L’équilibre des tensions interfaciales au point triple entraîne l’égalité :

   2  cos  θ (  / 2) est l’angle de mouillage et   l’énergie interfaciale entre la solution solide α et le germe β . Un bilan d’énergie montre que la nouvelle barrière ΔG *JG est plus basse d’un facteur S(θ) dépendant de l’angle de mouillage θ (cf. problème 3.2.4) : G *JG  G * S   1 avec S    2  cos   1  cos  2 . 2

 Figure 3.16  Germination hétérogène d’un précipité β sur un joint de grains occupés par la phase mère α . L’équilibre des tensions interfaciales aux deux points triples fixe l’angle de mouillage θ .

 Figure 3.17  Représentation de la fonction S   à laquelle est proportionnelle la barrière de germination hétérogène ΔG*JG . La germination de la phase β est d’autant plus facile que l’angle de mouillage θ est petit.

La figure 3.17 montre l’allure du facteur S  . Si l’énergie interfaciale du JG,   , est très faible comparée à   , θ tend vers π / 2 et S   tend vers 1. Le germe

164

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

devient sphérique et la germination hétérogène sur le JG n’est pas favorable comparée à la germination homogène car l’énergie du JG est très faible. Pour des valeurs croissantes de l’énergie de JG (  ), les grandeurs θ et S   décroissent, aboutissant à une hauteur de barrière ΔG *JG plus faible. Celle-ci devient nulle si    2  (pour   0). On aboutit alors au mouillage parfait du joint par la phase β . La phase β s’étale sur toute la surface du JG sans qu’aucune barrière ne s’y oppose. C’est bien sûr une situation extrême qui fait penser à la ségrégation intergranulaire. Les deux phénomènes sont toutefois distincts car contrairement à la précipitation, la ségrégation intergranulaire de solutés B est observée même lorsque le système n’est pas sursaturé (cf. chapitre I).

3.1.5

Germination de phases métastables

Lorsque la nouvelle phase devant précipiter possède une structure différente de la phase mère, le temps d’incubation pour sa germination devient très grand. On peut alors assister à la germination d’une phase métastable cohérente de structure différente de la phase d’équilibre, plus facile à germer mais d’enthalpie libre plus grande que la phase d’équilibre. Ceci est très souvent observé dans les alliages à base aluminium. Prenons le cas d’école des alliages AlCu pour lesquelles la phase d’équilibre θ est Al2Cu (phase ordonnée tétragonale incohérente). Il y a alors la germination de zones de pré-précipitation se présentant sous la forme de plaquettes de cuivre d’épaisseur égale à un plan atomique (001), appelées zones GP de Guinier-Preston (figures 3.18, 3.19 et 3.20), du nom des chercheurs les ayant identifiées pour la première fois pas diffraction des RX. Cette phase métastable a bien sûr une énergie libre plus importante que la phase d’équilibre (figure 3.21), ce qui entraîne une limite de solubilité métastable X α /GP plus haute (figures 3.21 et 3.22). Ainsi, ces zones GP ne sont observées que si la teneur en cuivre est suffisante et supérieure à cette limite X α /GP .

 Figure 3.18  Image de tomographie atomique (16 × 16 × 50 nm3) révélant la présence de zones GP riches en cuivre, parallèles aux plans (001) dans des alliages Al4%at.Cu (A. Bigot, GPM) [13].

165

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

 Figure 3.19  Zone de Guinier-Preston (GP) sous la forme d’une plaquette monocouche pure en cuivre dans les alliages AlCu. Les atomes de cuivre plus petits que ceux d’aluminium conduisent à une distorsion du réseau cristallin.

Dans les alliages AlCu, d’autres phases intermédiaires métastables appelées   (phase Al2Cu cohérente, figures 3.21 et 3.22), et   (tétragonale, partiellement cohérente), d’énergie plus basse que les GP pour lesquelles les limites de solubilité métastables décroissent en s’approchant de la limite de solubilité stable X  / (figure 3.20). On a alors une cascade de métastabilité aboutissant à la germination successive de zones GP, puis dans l’ordre des phases  ,  , θ d’énergies libres décroissantes.

 Figure 3.20  Image de microscopie ionique [14] (50 × 50 nm) mettant en évidence des précipités θ’’ riches en Cu dans un alliage Al comportant 1,7%at. de Cu vieilli à 150 °C pendant 24 h. Les précipités apparaissent sous forme de plaquettes de quelques nm d’épaisseur et sont orientés selon les 3 directions équivalentes du réseau CFC de l’aluminium (W. Lefebvre, GPM).

166

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

 Figure 3.21  Enthalpie libre G  X  pour (i) la solution solide mère α , (ii) les phases métastables GP,  ,   et (iii) la phase stable θ .

 Figure 3.22  Diagramme de phases métastables correspondant montrant en pointillé les limites de solubilité métastables relatives aux phases métastables GP,  ,   lesquelles sont plus grandes que la limite d’équilibre X  /  , θ étant la phase d’équilibre.

167

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Les chemins cinétiques de formation successive de ces phases sont complexes. Les zones GP peuvent ainsi croître pour finalement former la phase  . Une partie des GP se transforme alors en   alors que les autres zones GP se dissolvent. La phase   germe sur les dislocations alors que l’on assiste à la germination hétérogène de θ aux interfaces  /  . Ces cascades de métastabilité sont rencontrées dans bien d’autres alliages (AlZnMg, AlMgSi, aciers au niobium [15]). Dans les alliages à base aluminium, de nombreuses lacunes sont piégées en cours de trempe depuis la température de traitement. Cette sursaturation de lacunes accélère d’autant la vitesse de diffusion et peut aboutir à la germination de phases et leur croissance à la température ambiante. Les alliages AlCu vieillissent à l’ambiante (20 °C) et durcissent par précipitation de zones GP (expériences historiques de Alfred Wilm à Düren en 1906, donnant naissance aux premiers alliages Dualumin du nom de la ville de Düren).

3.1.6

Croissance

Une fois dépassée la taille critique, les germes β peuvent croître. La vitesse de croissance dépend de la nature des interfaces  /  . Les interfaces incohérentes sont en général plus mobiles que les interfaces semi-cohérentes. Les interfaces semi-cohérentes, dont l’écart à la cohérence est accommodé par des dislocations périodiquement espacées, migrent par un mécanisme de croissance en coin (bords de terrasses sur l’interface  /  ) plus lent. On peut alors assister à une croissance de la nouvelle phase sous la forme de plaquettes dont les grandes faces, semicohérentes migrent lentement et les faces latérales, incohérentes sont très mobiles (figure 3.23). L’anisotropie de forme est ici pilotée par la cinétique de migration des interfaces. Le rapport épaisseur sur largeur des plaquettes tend alors à décroître au cours de leur croissance. Cet effet est à l’origine de la morphologie dite de Widmanstätten.

 Figure 3.23   Évolution temporelle de la morphologie d’un précipité comportant des interfaces latérales incohérentes très mobiles et des interfaces planes semicohérentes peu mobiles dont l’aire est plus grande.

La diffusion en volume des solutés dans la phase mère α vers les interfaces  /  est un processus bien souvent plus lent que le mécanisme de réaction à l’interface. C’est alors la diffusion, processus le plus lent, qui contrôle la vitesse de migration d’une

168

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

interface plane. On montre alors facilement à partir d’un bilan matière à l’interface et de la première équation de Fick que les interfaces planes se déplacent dans une direction x perpendiculaire selon une loi parabolique, caractéristique d’un processus contrôlé par la diffusion (cf. problème 3.2.6) : x = f m Dt La fraction molaire d’équilibre de phase β ( f m ) et le coefficient de diffusion (D) viennent en compétition car f m décroît avec la température T alors que D croît « exponentiellement » avec T . Dès lors, on comprend aisément pourquoi la vitesse de croissance v = dx / dt croît avec T puis connaît un maximum avant de décroître et s’annule pour T = TS (solvus). Pour des précipités sphériques (rayon R ) dont la vitesse de croissance est contrôlée par la diffusion, les lois de Fick résolues en coordonnées sphériques aboutissent à une loi parabolique un peu différente (cf. problème 3.2.7 sur la croissance) : R = 2 f m Dt Cette loi n’est valide que pour de faibles densités de précipités, sans interactions, croissant indépendamment dans une solution solide de composition quasi constante (figure 3.8), condition satisfaite pour une faible fraction molaire précipitée f m .

3.1.7

La décomposition spinodale

Ce régime de décomposition est observé dans bien des systèmes (figures 3.24 et 3.25). Mentionnons les alliages concentrés FeCr, AlNiCo, CuNiFe, mais aussi les polymères (polystyrène-polyvinylméthylène). La décomposition spinodale est de très grande importance notamment pour les aciers inoxydables des circuits de refroidissement primaire des centrales nucléaires car pouvant donner lieu à une baisse de résilience. C’est donc un problème de sûreté du parc de centrales en France, en Europe et ailleurs qui est ici en jeu. Ceci sera étudié dans l’un des problèmes de ce chapitre (cf. problème 3.2.10). Tout comme le régime de germination pour lequel les germes doivent dépasser une taille critique pour croître, dans la décomposition spinodale, et pour les mêmes raisons, les fluctuations de concentration ne peuvent croître que si la force motrice de décomposition l’emporte sur les termes s’y opposant (énergies interfaciale et élastique). Ceci introduit une longueur d’onde critique λc au-dessus de laquelle les fluctuations de concentration peuvent se développer.

λc peut se calculer en établissant le bilan d’énergie. Le gain d’enthalpie libre associé au développement de fluctuations de composition  X  X  X 0 dans un alliage de fraction atomique X 0 s’écrit :  2 G  X   G  X   G  X 0     g  X   g  X 0   K i X  K e  X 2 dV V





169

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

 Figure 3.24  Décomposition spinodale d’alliages Fe20%at.Cr vieillis à 450 °C à l’intérieur de la ligne spinodale du diagramme FeCr. Cette image de tomographie atomique (section de 30 × 30 nm2) révèle la structure interconnectée et percolée  /   des zones   enrichies en chrome. Les isosurfaces de concentration à 30at%Cr sont en contraste clair, le contraste plus sombre est relatif aux isosurfaces à 31 %, marquant ainsi, respectivement l’extérieur et l’intérieur des domaines riches en Cr (F. Danoix, GPM).

Tous les termes dans l’intégrale sont des densités d’énergie par unité de volume. Le premier terme g  X   g  X 0  est le gain d’énergie chimique. Il est négatif et  2 s’oppose aux termes interfacial (K i ∇X ) et élastique (K e  X 2 ) tous deux positifs, lesquels s’opposent à la décomposition. Un développement limité au second ordre donne pour le terme moteur : d 2g 1 g  X   g  X 0    X 2 2 dX 2

X  X0

Le terme du premier ordre du développement de Taylor n’intervient pas et s’annule dans l’intégrale car δ X peut être négatif ou positif avec la même occurrence. Pour des fluctuations de concentrations sinusoïdales de longueur d’onde λ , le gradient de concentration est maximum en x = 0 et s’écrit 2 X /  . En prenant cette dernière valeur, la condition G  X   0 impose : 1 d 2g 2 dX 2

X  X0

 Ki

  K 2 

2

e

et donc nécessairement   c avec :

c  2

170

2K i d 2g 2K e  dX 2

X  X0

0

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

 Figure 3.25   Évolution temporelle des profils de concentration en Cr dans la ferrite d’un acier duplex ausétono-ferritique (α + γ) de centrale nucléaire vieilli à 350 °C (jusqu’à 30 000 h). Les profils mettent en évidence dans la ferrite α l’accroissement des amplitudes et l’amortissement des longueurs d’onde les plus petites. Les distributions d’amplitudes de concentration (à gauche) déduites des profils traduisent cette augmentation de l’amplitude des fluctuations avec le temps (F. Danoix, GPM) [16].

Dans une approche de champ moyen avec des interactions limitées aux premiers voisins, le terme d’interface peut s’écrire : K i  A / vat avec ε l’énergie d’ordre et A une constante proportionnelle au carré des distances d’interaction. Les énergies sont des densités par unité de volume, on ramène donc le terme Ki au volume atomique vat . E a 2 . Ainsi, Rappelons (cf. section sur la germination) que : g e  1 v a 2 E d ln a g e  K e X 2 avec K e  . 1  v dX L’expression de λc n’a de sens physique que si elle est réelle et donc si l’intérieur de la racine est positif, ceci impose que :







 

d 2g dX 2

X  X0

 2K e

171

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Lorsque les contraintes de cohérence sont nulles (K e = 0) ou négligeables, on retrouve la condition nécessaire pour développer une décomposition spinodale (cf. instabilités, chapitre I) : d 2 g / dX 2 < 0 . Ceci définit la spinodale dite incohérente. Il s’agit ici d’un abus de langage car en réalité les deux phases demeurent cohérentes dans une décomposition spinodale (le concept n’a de sens que lorsque les deux phases ont même structure pour aboutir à une seule et même fonction G(X)). Le terme de « spinodale incohérente » traduit simplement le fait que l’on ne tient pas compte de l’énergie élastique de cohérence liée à l’écart paramétrique entre phases. Dans le cas plus général, en présence de contraintes de cohérence, le terme moteur d 2 g / dX 2 doit être encore plus négatif, ce qui nécessite d’être encore plus au cœur de la lacune de miscibilité (plus grandes sursaturations). La condition ci-dessus définit alors la spinodale cohérente qui est incluse dans la lacune de miscibilité cohérente, elle-même incluse dans la lacune incohérente (figure 3.26).

 Figure 3.26  Diagramme de phase T  X  montrant (i) la lacune de miscibilité cohérente plus étroite à cause de l’énergie élastique que la lacune incohérente et (ii) les lignes spinodales correspondantes.

L’évolution temporelle de la concentration C r , t  est pilotée par la divergence du flux de diffusion. Ce dernier est proportionnel au gradient de potentiel chimique donc à la dérivée seconde de g  X  dont l’expression est donnée dans le chapitre sur la diffusion. Dans les premiers stades de décomposition spinodale, l’amplitude des fluctuations est faible. Cahn [17] et Hilliard ont ainsi proposé une théorie dans le cadre de cette hypothèse. Cette théorie, dite linéaire, prévoit une amplitude des fluctuations de concentration A k  croissant exponentiellement avec le temps si k < kc (k  2 /  et kc  2 / c ) : A k   A0e R kt avec R k   2M 0Vm K i kc 2  k 2  k 2 . M 0 est un terme d’inter-mobilité (cf. chapitre 2 sur la diffusion), qui est fonction du coefficient d’inter-diffusion D des solutés, mais également de la fraction atomique nominale de solutés X 0 contribution parfois négligée dans la littérature : M 0  DX 0 1  X 0  / RT (cf. problème 3.2.10 sur la spinodale). Lors de la cinétique de décomposition spinodale, il y a peu à peu amortissement des fluctuations de compositions de petites longueurs d’ondes   c et amplification des autres composantes

172

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

de Fourier du signal de concentration. On montre que R k  présente un maximum pour M  c / 2 . Ceci est mis en évidence notamment par diffusion des neutrons ou des RX aux petits angles. Cette théorie est limitée aux premiers stades de décomposition pour lesquels l’amplitude des fluctuations est faible et les hypothèses acceptables. Une autre théorie (LBM), développée par Langer, Bar-On, Miller [18], permet de prévoir l’évolution des longueurs d’onde de la structure décomposée. Ainsi, cette théorie LBM prévoit une évolution en loi de puissance de type   0t n avec n ~ 0,2, exposant qui n’est pas toujours celui observé expérimentalement.

3.1.8

Coalescence

Au cours de la cinétique de précipitation, les particules n’ont pas toutes la même histoire depuis le stade de germination jusqu’à celui de croissance. Certaines particules de la nouvelle phase sont en croissance alors que d’autres viennent de naître (i.e. germer). Les précipités nés au début du traitement thermique sont à un instant t donné, plus gros que ceux nés plus tard. Pendant la croissance, la sursaturation baisse puis devient presque nulle et la fraction molaire précipitée tend vers celle d’équilibre. La force motrice de croissance, pilotée par la sursaturation, disparaît peu à peu. Toutefois, les interfaces    sont le siège d’un excès d’énergie libre qui favorise les grosses particules dont le rapport entre le terme moteur (en R 3 pour des précipités sphériques) et l’énergie de surface (terme frein en R 2 ) est plus favorable. On va alors assister à une croissance compétitive, aboutissant à une dissolution des plus petites particules coûteuses en énergie interfaciale au profit des grosses (figures 3.27 et 3.28). La densité de précipités va alors décroître alors que la taille moyenne des précipités va continuer à augmenter. C’est ce que traduit la théorie de la coalescence (cf. problème 3.2.7).

 Figure 3.27  Micrographie de microscopie électronique à balayage (électrons rétrodiffusés) illustrant la microstructure très ordonnée observée dans un stade avancé de coalescence dans un superalliage modèle à base de cobalt. L’alliage (Co9%at.Al7%at.W) a été vieilli à 900 °C pendant 200 h. La micrographie révèle une fraction volumique très importante de précipités   enrichis en Al et W cuboïdaux orientés selon les directions . La taille moyenne des particules   est de 160 nm (A. Azzam, GPM) [19].

173

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

L’excès d’enthalpie libre dû aux effets capillaires pour une interface de rayon R est de la forme : G  Vm p Vm est le volume molaire. La différence de pression entre les phases p  p  p à l’interface  /  est donnée par l’équation de Laplace-Young p  2 / R avec σ l’énergie d’interface par unité de surface, de sorte que : 2Vm R Cet excès, qui décroît avec R , donne lieu, dans certaines approximations (faibles sursaturation, solution idéale, précipités pures en atomes B) à une augmentation de la limite de solubilité en solutés B à l’interface qui peut aisément se calculer : G 

X R  X e

2Vm 1 R R gT

X R  X  pour R tendant vers l’infini, c’est donc la limite de solubilité d’équilibre donnée par le diagramme de phase. R g est la constante des gaz parfaits. Pour un exposant faible, on aboutit à l’expression simple :

 R 

X R  X  1  avec  

2Vm , la longueur capillaire. R gT

Cette équation est connue sous le nom d’équation de Gibbs-Thomson. Le calcul de la loi de croissance intégrant cet effet aboutit à une évolution du rayon moyen R des particules en t 1/3 qui est plus lente donc que celle de croissance pure (en t 1/2 ) : R 3  R0 3  K R t  t0  t0 désigne le temps de début de coalescence et R0 le rayon correspondant. La théorie classique LSW de la coalescence donne pour des précipités purs en B (cf. problème 3.2.8) : 8 Vm 2 DC KR  9 NR gT avec N le nombre d’Avogadro. Pendant le régime de coalescence, les précipités plus petits qu’une certaine taille critique Rc se dissolvent au profit des gros. Le rayon critique Rc a la même origine physique que dans la théorie de la germination et son expression est identique (cf. problème). On montre que Rc est la taille moyenne de la population de précipités, R (figure 3.28), laquelle croît avec le temps. Cette croissance compétitive se traduit par une décroissance de la densité de précipités NV . L’évolution temporelle de la densité de précipité NV t  peut se déduire de celle de la taille des précipités. En toute première approximation, on peut écrire la fraction volumique sous la forme : 4 f v   R 3 NV 3

174

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

 Figure 3.28  Coalescence de précipités. Il y a croissance compétitive : les précipités plus petits que la taille moyenne R se dissolvent alors que ceux plus grands croissent. Il y a concomitamment inversion des gradients de concentration près des interfaces  /  .

La fraction volumique ( f v ) demeurant sensiblement constante en coalescence, comme R 3 est proportionnel à t, la densité de précipités décroît en t −1. Le calcul (cf. problèmes 3.2.7 et 3.2.8) montre cependant qu’il demeure une sursaturation résiduelle dans la phase mère et que celle-ci décroît en t −1/3. La fraction volumique, très proche de celle d’équilibre, continue donc à croître un tout petit peu durant la coalescence.

3.1.9

Cinétique globale

Les profils I t , C t , NV t  et R t  représentés dans la figure 3.29 résument l’évolution cinétique d’un alliage sursaturé depuis les premiers stades de germination jusqu’à la coalescence. Après un temps d’incubation τ (théorie de ZeldovichTurnbull), le flux de germination I t  croît rapidement puis décroît au début du stade de la croissance. La densité de germes NV croît tout d’abord puis atteint un maximum en début de croissance et décroît en t −1 pendant le régime de coalescence. Au tout début, la composition de la phase mère est peu touchée, ainsi la force motrice de germination demeure sensiblement constante, le flux de germination est alors stationnaire et donc NV croît linéairement avec le temps. Dans les tous premiers stades de la précipitation de la phase β , la concentration en solutés B dans la phase mère C t  demeure sensiblement constante (germination stationnaire) pour ensuite décroître rapidement pendant le régime de croissance et tendre asymptotiquement vers la limite de solubilité d’équilibre en fin de coalescence (en t −1/3), stade pendant lequel la force motrice n’est plus la sursaturation mais la

175

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

minimisation de l’énergie d’interface. La taille moyenne R des précipités, quant à elle, demeure sensiblement constante et proche du rayon critique pendant le stade de germination puis croît en t 1/2 en croissance et enfin en t 1/3 pendant le dernier stade de coalescence. Ce scénario est cependant schématique car, en réalité, il y a bien souvent recouvrement des régimes de germination et de croissance. De nouveaux germes continuent à naître alors que les précipités nés plus tôt sont en régime de croissance. De même, il n’est pas rare d’observer une diminution de la densité de précipités en fin de croissance, tendance caractéristique de la coalescence, alors que la teneur en solutés B de la phase mère est encore au-dessus de la limite de solubilité (régime de croissance pilotée par la sursaturation).

 Figure 3.29  Cinétique globale de germination-croissance-coalescence montrant l’évolution temporelle (a) du flux de germination de la phase β, I t , (b) de la concentration en atomes B dans la solution solide mère C t , (c) de la densité volumique de précipités NV t  , (d) du rayon des précipités R t .

176

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

3.2 Problèmes 3.2.1

Les transformations eutectoïdes

Les transformations eutectoïdes sont de grande importance dans les aciers dans lesquels l’austénite γ se transforme en perlite qui est un mélange de ferrite α et de cémentite Fe3C. Nous dénommons par la suite la cémentite, la phase β . Des colonies de carbures β germent aux joints de grains et s’alternent avec la ferrite α pour former une microstructure quasi périodique. Ces colonies  /  croissent et envahissent in fine tout le grain en faisant disparaître la phase mère γ . Nous allons modéliser cette transformation en considérant une transformation eutectoïde      . On modélise le système par des lamelles β de largeur constante croissant à partir d’un joint de grains s’alternant avec α périodiquement (longueur de corrélation λ ). On considère que les trois phases ont sensiblement le même volume molaire Vm . 1. Soit X E la fraction atomique de solutés B dans la phase mère γ correspondant au point eutectoïde. ΔG est le gain d’enthalpie libre réalisé lors de la transformation de γ en    . Soit TE la température eutectoïde. Représentez G  X  pour les trois phases α , β et γ à T = TE et T < TE en faisant apparaître ΔG et les compositions d’équilibre X α et X β dans les phases α et β (fractions atomiques de carbone). 2. La distance (λ ) entre lamelles β dépend de la thermodynamique du système en particulier de l’énergie interfaciale  /  par unité de surface, σ . Nous allons étudier ce problème en fonction de la « surfusion » ΔT (abus de langage faisant référence au problème de la germination d’un solide dans un liquide) pour T < TE . Calculez la force motrice effective de transformation Δg (c’est-àdire diminuée du terme « frein » d’interface) en fonction de ΔG (exprimée en J/mole), σ et le rapport surface sur volume A / V (A est l’aire d’interface  /  ) de la microstructure    se formant. Exprimez A / V en fonction de λ en considérant la microstructure  /  périodique de périodicité λ . En déduire l’expression de Δg en fonction de λ , ΔG et Vm . 3. Quelle est la condition sur le signe de Δg pour que la transformation ait lieu ? En déduire l’expression de la valeur minimale λm de λ . 4. Nous allons calculer G T . Quelle est la valeur de ΔG à TE  ? En déduire l’expression de la variation d’entropie correspondante ΔS en fonction du gain d’enthalpie correspondant ΔH . ΔS et ΔH varient peu pour une faible surfusion ΔT . En déduire l’expression approchée de G T  puis celle de λm en fonction de ΔHV (enthalpie par unité de volume), ΔT , σ et TE . Représentez λm en fonction de ΔT . Comment varie la microstructure avec la surfusion ?

177

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

5. Les phases α et β croissent par diffusion des solutés (le carbone dans les aciers) dans la phase γ depuis la phase mère α vers la nouvelle phase β . On fait l’hypothèse que la migration des solutés a lieu en volume, dans la phase γ , près des interfaces  /  et  /  . Faites un schéma montrant les flux de diffusion. D est le coefficient de diffusion correspondant. On néglige la diffusion interfaciale. Écrivez sous forme scalaire en une dimension que le flux de diffusion des solutés J (équation de Fick) est égal à Cγ v avec v la vitesse de migration du front de transformation et Cγ la concentration nominale de solutés dans la phase mère γ . Justifiez cette relation. Soit δ C la différence de concentration dans γ existant près des interfaces  /  et  /  . Le gradient de concentration est alors approximativement égal à  C /  . En déduire l’expression de v en fonction de D, δ C et λ . 6. Nous allons faire une estimation de δ C à partir du diagramme de phase. On peut faire l’hypothèse d’un équilibre local près des interfaces  /  et  /  au cours de la transformation. Soient X  / et X  / les fractions atomiques de solutés dans la phase mère existant près des interfaces  /  et  /  respectivement. Montrez ces grandeurs sur un diagramme G  X  représentant les enthalpies libres des trois phases α , β et γ . Montrez sur un diagramme de phase générique T  X  que ces grandeurs s’obtiennent par extrapolation, dans le domaine biphasé    , des lignes séparant le domaine γ des domaines biphasés    et    . Montrez dans quelles conditions on peut écrire la relation linéaire suivante :  X   X  /  X  /  kX T avec kX une constante déduite du diagramme de phase. 7. Les interfaces  /  et  /  sont en fait courbes dans leur migration. Ceci modifie les concentrations près des interfaces (effet Gibbs-Thomson, cf. section sur la coalescence), donc δ X , avec une dépendance en 1 / R (avec R le rayon de courbure). Il est raisonnable de penser que R est proportionnel à la distance (λ ) entre lamelles de β . δ X s’échelonne donc comme 1 / λ . Or, pour   m (distance critique minimale), la force motrice de transformation Δg devient nulle tout comme la vitesse de transformation v et donc nécessairement  X  0 ( X   C / Vm ). Il est alors naturel d’écrire :  X   X  1  m /  . δ X s’annule pour   m . Donnez l’expression de v en remplaçant δ X par sa valeur. En déduire la valeur λM de λ pour laquelle la vitesse v est maximale (vM ). Représentez v en fonction de λ . Montrez que la vitesse maximale vM est proportionnelle à T 2 . 8. Nous allons appliquer ce modèle à la transformation perlitique d’un acier eutectoïde (0,77 % en poids de carbone, TE  = 727 °C) subissant un revenu isotherme à T  = 707 °C. L’énergie interfaciale est σ  = 700 mJ/m2 et l’enthalpie de transformation par unité de volume est ΔHV  = 8 × 108 J/m3. Calculez la valeur

178

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

critique λm . Les observations en microscopie électronique montrent une assez grande dispersion des distances entre lamelles de cémentite avec une moyenne voisine de 0,18 μm. Comparez cette valeur à la distance λM pour laquelle la vitesse de migration est la plus grande. Conclure. 9. L’examen du diagramme de phase FeC indique que  X   = 1 % à 707 °C. En déduire la vitesse maximale vM . On prendra pour D, les données de diffusion du carbone dans l’austénite : D0 = 0,15 × 10–4 m2/s et Q = 143 kJ/mole. Comparez le résultat de ce calcul aux mesures qui donnent une vitesse voisine de 1μm/s. Conclusion ? Les interfaces  /  et  /  jouent en fait le rôle de courts-circuits de diffusion. Le carbone dans l’austénite est balayé par les interfaces en mouvement et diffuse rapidement le long de celles-ci. Refaites le calcul pour une énergie d’activation Q   0,7Q rendant compte des courts-circuits. 10. Refaites les calculs précédents pour T  = 687 °C en tenant compte des courtscircuits de diffusion. Quel est le rôle de la température ? La taille moyenne des grains est ϕ = 100 μm. Quel est l’ordre de grandeur du temps au bout duquel la perlite envahit tout le grain ?

Corrigé 1. Le point eutectoïde, de fraction atomique X E dans γ , est l’endroit où les 3 phases coexistent, que l’on peut placer schématiquement dans un diagramme T  X  de la manière suivante :

179

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Au point eutectoïde (X E ,TE ), les 3 phases sont à l’équilibre thermodynamique, la tangente est donc commune aux phases α , β et γ  :

Ainsi, pour T < TE , la phase mère γ va se transformer en    . Le gain d’énergie ΔG associé à cette transformation est schématisé comme suit :

X α et X β sont les compositions dans les phases α et β à cette température ( C0). Ceci donne lieu à une réaction d’interface avec un flux d’échange proportionnel à Ci − C0 s’écrivant : J R  K Ci  C0  . Par soucis de simplicité, on fait l’hypothèse que les volumes atomiques des deux phases (Ni et NiO) sont identiques.

205

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

1. Faites un schéma de l’oxyde en surface du nickel d’épaisseur z0 en représentant les flux de diffusion des lacunes JV et de nickel J Ni . Montrez qu’en régime stationnaire avec Ci constant, la concentration en lacunes C z  croît linéairement avec la distance z . On prendra l’origine (z = 0) à l’interface Ni/NiO. Donnez l’expression du gradient de concentration. Représentez le profil de concentration de lacunes C z . 2. Les équations qui suivent seront exprimées en fonction de la concentration en lacunes exclusivement. Écrivez que le flux de diffusion de lacunes est égal au flux de réaction. On notera D le coefficient de diffusion des lacunes dans l’oxyde que l’on supposera être une constante indépendante de la concentration locale. En déduire l’expression de Ci en fonction de C0 , K , D et z0. Conclure. 3. Écrivez la conservation de la matière associée à la croissance de dz0 de l’épaisseur du film pendant dt . Montrez que ceci peut s’écrire sous la forme J = cv . Précisez la signification de c et v dans ce contexte. En remplaçant Ci par son expression, montrez que l’équation maître régissant la cinétique de croissance de z0 est de la forme d’une équation du second degré en z0 s’écrivant f z0, D, K   K ’ t . Donnez l’expression de K ’ en fonction de X S la fraction atomique de lacunes en surface et de X 0 celle d’équilibre dans le nickel. 4. Montrez que dans les premiers stades, la loi de croissance est linéaire en temps alors qu’ensuite elle est parabolique. Montrez qu’il existe une épaisseur de transition zt entre les deux régimes dont on donnera l’expression en fonction de D et de K . Faites un graphe de z0 t . 5. On oxyde du nickel à 1000 °C. Le coefficient de diffusion du nickel mesuré dans l’oxyde Ni1-δO (avec δ = 10–4) est DNi = 8,4 × 10–14 cm²/s à 1000 °C. En déduire celui des lacunes (D). L’enthalpie de formation des lacunes dans le nickel est ΔH f  = 1,8 eV. On prendra une entropie de formation S f  R . La concentration de lacunes mesurée à l’interface Ni/Ni0 est X i = 2 × 10–6 pour une épaisseur de 100 nm. Calculez la fraction atomique de lacunes à l’équilibre X 0 et comparez-la à X i . En déduire une estimation de la vitesse de réaction K . Les volumes molaires de Ni et NiO sont supposés égaux. En déduire l’épaisseur critique zt de transition entre régimes. Calculez l’épaisseur d’oxyde (en microns) formé au bout de 8 heures. Dans quel régime de croissance est-on ?

206

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

Corrigé 1. On se place dans la situation décrite par le schéma ci-après.

C  cste de sorte que C z  varie linéaiz rement avec z. Sachant que C z  0  Ci et C z  z0   C S , on peut écrire : En régime stationnaire, C  0. Ainsi,

C z   C i  z et pour le gradient :

C S  Ci z0

C C S  Ci .  z0 z

207

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

2. JV = J Ni . On peut calculer le flux de lacunes, connaissant ∂C / ∂z à l’interC  Ci face métal/oxyde, JV  D S . De plus, le flux de nickel qui résulte de la z0 réaction de l’interface est donné par J R  K Ci  C0  car pour une lacune qui traverse l’interface métal/oxyde, un atome de Ni fait le chemin inverse. Ainsi : K Ci  C0   D Et donc : Ci 

C S  Ci z0

DC S  Kz0C0 Kz0  D

Pour Kz0 >> D , Ci tend vers C0 . On tend vers l’équilibre local. Dans le cas contraire, quand Kz0 > Kz0, dans les premiers stades de l’oxydation, le terme en z02 est négligeable devant celui en z0, et donc z0 ~ K  X S  X 0  t . Puis z0 augmente et le terme en z02 l’emporte, le régime devient alors parabolique, z02  K t . On remarque que pour X 0 > R *. 1.4. Nous allons étudier l’évolution de la vitesse de croissance v en fonction de la température T . Montrez qu’il y a compétition entre deux termes variant de manière opposée avec la température. Représentez schématiquement v T  sans calcul en indiquant la température Tm pour laquelle v est maximale. 1.5. Soit TS la température de solvus pour laquelle Ce  C0 . Donnez l’expression de C T  en introduisant TS . On rappelle que la limite de solubilité Q

de B dans la solution solide α à l’équilibre est de la forme : Ce  A e R gT .

210

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

Montrez ainsi qu’il existe un maximum de v T  à T = Tm que l’on calculera explicitement pour Ce  C  . On supposera que C β ne dépendant pas de T . 2. Coalescence Lorsque la fraction molaire précipitée devient proche de celle d’équilibre, le terme moteur de la croissance piloté par la sursaturation de la phase mère devient faible. C’est la fin de la croissance. Le système entre alors dans un nouveau régime, celui de la coalescence, piloté cette fois par l’énergie d’interface entre phases. L’énergie libre du système peut ainsi décroître encore en minimisant l’aire d’interface  /  . Tous les germes n’étant pas nés au même moment, il y a une dispersion de tailles. Les gros précipités, de rapport surface sur volume plus faible, vont alors croître au détriment des petits. Les calculs ci-dessous ont pour ambition de prévoir la dynamique temporelle d’un système polydispersé composé de précipités sphériques (de rayon R ) avec une dispersion de tailles. 2.1. On tient compte désormais des effets capillaires et donc de l’effet GibbsThomson dû à la courbure (terme en 1 / R ) des interfaces  /  . Cette courbure donne lieu à un excès d’enthalpie libre que nous allons exprimer. Dans cet objectif, calculez la variation d’énergie libre du système (dF ) associée à une variation dR infinitésimale du rayon des précipités R que l’on supposera de taille unique pour ce calcul. En déduire, qu’à l’équilibre, ce calcul conduit à l’expression de la différence de pression Δp entre phases donnée par Thomson. Montrez que ceci conduit à un excès d’enthalpie libre (exprimée en J/atome) s’écrivant : G  2 / R avec Ω le volume atomique et σ l’énergie interfaciale par unité de surface. 2.2. Montrez sur un diagramme G C  que cet excès ΔG donne lieu à une augmentation des concentrations d’équilibre des phase α et β . Dans quelles conditions, la concentration dans β est-elle peu affectée ? On fera cette hypothèse par la suite. On pose   2 / kT . Montrez que pour ρ petit devant R , la concentration d’équilibre dans la matrice α près d’un précipité de rayon R est donnée par l’équation linéarisée de Gibbs-Thomson : C R   Ce 1   / R  avec et Cαe la concentration à l’équilibre dans α pour R infini (i.e. sans effet Gibbs-Thomson). 2.3.

On considère des précipités β cohérents d’énergie interfaciale σ de l’ordre de 100 mJ/m2. Le paramètre du réseau CFC est a = 0,35 nm. Quelle est la valeur de ρ à 600 °C ? L’approximation faite précédemment est-elle valide ?

2.4. La concentration près de l’interface dans la phase mère α n’étant plus constante (C R  ), la loi de croissance établie précédemment n’est plus valable. Soit Rc la taille critique de coalescence pour laquelle la concentration près de l’interface d’un précipité C R  est égale à la concentration

211

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

de la phase mère α loin de l’interface C . Notons que C est inférieure à la concentration nominale C0 . Toutefois, C demeure un peu supérieure à la concentration d’équilibre Cαe . Il subsiste donc une petite sursaturation qui diminue avec le temps. En reprenant l’expression de dR / dt établie pour la croissance, montrez que la vitesse de croissance pour C  C  est donnée par : Ce  1 1 dR  DB     dt C  R  Rc R  Donnez l’expression de Rc que l’on mettra sous la forme Rc  2 /  g . Donnez l’expression de δ g en fonction de la sursaturation relative. Quel lien voyez-vous avec la germination ? Quel est le signe de la vitesse de croissance selon la taille R des précipités ? Quelle interprétation donnez-vous à Rc  ? 2.5. Nous allons démontrer que Rc est égal au rayon moyen des particules Rm . Exprimez la conservation du volume total précipité au cours du temps (i.e. fraction volumique presque constante) pour un système composé de n particules sphériques de rayon notés Ri , puis utilisez l’expression de dR / dt . Quelle est la vitesse de croissance des précipités de taille égale à la taille moyenne ? Faites un schéma des profils de concentration pour R < Rm, R = Rm et R > Rm . 2.6. Montrez que la vitesse de croissance dR / dt est maximale pour R = 2Rm . En déduire l’évolution de la taille moyenne des rayons de la population des précipités que l’on mettra sous la forme : Rm3  R03  K R t Exprimez la constante K R . Quelle est votre interprétation de R0 ? Comparez cette expression à celle de la théorie LSW donnée dans le rappel de cours. Donnez l’expression de Rm t  pour R >> R0 . 2.7. En coalescence, la fraction volumique varie peu. En déduire la loi de variation de la densité de particules par unité de volume au cours du temps NV t . On fera l’hypothèse que R >> R0 et que la moyenne de R 3 est égale au cube de la moyenne de R .

Corrigé 1. Croissance 1.1. L’équilibre local impose à l’interface  /  (en r = R ), dans la phase mère α , une concentration constante ne dépendant pas de la taille du précipité (effet Gibbs-Thomson non pris en compte) notée Cαe . La concentration

212

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

loin de l’interface  /  est la concentration nominale C0 (concentration à l’infini), dont la valeur est supérieure à Cαe . Il s’établit donc un gradient de concentration (cf. figure ci-dessous).

dC  D C  0. Le profil de concentration dans dt α près de l’interface est donc tel que : En régime stationnaire,





d 2 dC r 0 dr dr dC A = et donc C r    A / r  B avec A et B deux constantes. dr r 2 Comme C r   C0 en r  , B = C0. De plus, C r  R   Ce et donc A  R C0  Ce . On en déduit : Ainsi,

C r    C0  Ce 

R  C0 r

et le gradient de concentration à l’interface s’écrit : C  Ce dC  0 R dr r  R 1.2. Le coefficient d’absorption sur un germe critique β * est donné par  *  4 R *2 J B . On connaît le gradient de concentration à l’interface, à partir duquel on peut calculer le flux et donc :

 *  4 R * DB C0  Ce  1.3. Le nombre d’atomes B nécessaires pour accroître de dR la taille d’un précipité, sur un temps dt , provient de la diffusion des solutés de α vers β , due au gradient de concentration à l’interface. Ainsi, la conservation de la matière s’écrit : 4 R 2 J B dt  4 R 2dR C   Ce 

213

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Cette équation donne une première expression du flux de diffusion qui est égal au flux donné par la première équation de Fick et qui est proportionnel au gradient de concentration. En injectant l’expression précédente du gradient de concentration, on aboutit à : J B  C   C  Et donc : = v

dR DB  C  Ce  dt R 0

dR DB = f dt R m

C0  Ce , la fraction molaire d’équilibre, donnée par la règle C   Ce des leviers. Comme v évolue en 1 / R , la vitesse de croissance diminue avec le temps (car R augmente). avec f m 

On intègre la loi de croissance de sorte que : R 2  R *2  2DB f mt avec R t  t0   R * (rayon critique de germination). En négligeant R * devant R , on aboutit à la loi classique de croissance parabolique R = 2DB f mt . Par conséquent, v évolue en 1 / t . 1.4. La vitesse de croissance v peut se mettre sous la forme suivante : v

DB T  f m T  2t

Le coefficient de diffusion, ainsi que la fraction molaire, dépendent de la température. DB augmente avec la température alors que f m diminue, car la limite de solubilité Cαe se rapproche de C0 à mesure que T augmente. On note Tm la température pour laquelle v est maximale. Il y a donc compétition entre les deux termes aboutissant à une variation non monotone de la vitesse de croissance avec la température avec un maximum en Tm (cf. schéma ci-dessous). Lorsque T atteint la température de solvus TS , par définition, la concentration d’équilibre de la phase mère Cαe devient égale à C0 et f m = 0, entraînant une vitesse de croissance nulle.

214

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

Q

1.5. Soit TS la température de solvus. Par définition Ce TS   C0  A e R gTS , Q

ainsi A = C0 e R gTS . On a donc : Q  1 1   T  S

Ce T   C0 e R g T

C0  Ce . Le maximum de v est donné par le C maximum de DB T  f m T . Et donc : Pour Ce  C  , on a f m 

Q  1 1 Rg    ln 1  Tm TS Q  Q D  Q  Indépendamment des valeurs de Q et Q D , ln 1    0 et donc on a  QD  bien Tm < TS . 2. Coalescence 2.1. Considérons un germe sphérique de rayon R (de volume Vβ ). Soit Vα le volume de matrice. La variation d’énergie libre dF associée à une variation infinitésimale du rayon des précipités dR est donnée par : dF   p dV  p dV   dA avec dA  8 RdR la variation d’aire associée à la croissance du précipité. Le volume total est fixé et constant donc, dV  dV  4 R 2dR . À l’équilibre dF = 0, ainsi :

 p  p  dV   dA 2 . C’est l’équation de Laplace. La R variation d’enthalpie libre associée à la croissance du précipité et expri2 mée en J/atome est donc G  avec Ω le volume atomique. R 2.2. Comme le montre la figure ci-après (G est exprimé ici en J/atome), la solubilité dans la phase α augmente. En revanche, la concentration dans la phase β est peu affectée si la courbure de l’enthalpie libre associée à cette phase est grande. Ceci est généralement vérifié pour les phases ordonnées et composés définis, mais moins vrai pour la solution solide terminale riche en B. L’effet de Gibbs-Thomson augmente l’énergie molaire de la 2σVm et la concentration d’équilibre dans la phase α , donnée phase β de R Q  G Q Par conséquent, p  p  p 

désormais par C R   A e

R gT

. Comme Ce  C R    A e R gT ,

215

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

2

il suit C R   Ce e RkT . On pose ensuite   2 / kT . Pour   R , un développement de Taylor au 1er ordre donne :

 R 

C R   Ce 1 

2.3. Le volume atomique pour un CFC est donné par   a 3 / 4 ~ 1,07 × 10–29 m3. Ainsi ρ  = 0,18 nm, ce qui valide l’approximation   R , surtout pendant le régime de coalescence. 2.4. On repart de la loi de croissance : dR DB C  C R   dt R C   C R  Nous avons remplacé Cαe par C R  , la concentration à l’interface qui tient compte de l’effet de courbure. Supposons ici que C   C R   C  , car C  C  . On introduit l’expression de Gibbs-Thomson linéarisée pour C R  de sorte que : Ce  1 1 dR  DB     dt C  R  Rc R  kT C  Ce . On reconnaît la force motrice  Ce de germination pour de faibles sursaturations et pour une solution idéale. Rc a donc le même sens physique que le rayon de germination, qui est un état stationnaire (vitesse de croissance nulle : v = 0 pour R = Rc ). Pour R > Rc , vont croître. avec Rc  2 /  g et  g 

216

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

n

4 2.5. Écrivons le volume total occupé par les précipités, V    Ri 3 . La 3 i 1 fraction volumique en coalescence étant presque constante et proche de sa valeur d’équilibre (sursaturation presque nulle), le volume total de seconde phase β est pratiquement constant. Même si la taille de chaque particule évolue, dV / dt = 0. À partir de la loi de croissance, on obtient l’égalité suivante : n

 Ri  nRc i 1

n

Or, par définition du rayon moyen, nRm   Ri . Ainsi, Rm = Rc , la taille i 1

critique est égale au rayon moyen de la population de précipités. Les précipités de rayon égal à la taille moyenne ont par conséquent une vitesse nulle. Au sens de la germination, ce sont les précipités de taille critique.

2.6. Un calcul simple montre que la vitesse de croissance est maximale (dv / dR = 0) pour R = 2Rm . En substituant R par cette valeur, on peut exprimer la vitesse de croissance maximale : v R  2Rm  

d 2Rm  Ce   DB  C  4Rm 2 dt

Ainsi : Rm3  R03  K R t 3DBCe  . R0 est la taille des précipités en début de coales4C  kT cence. On suppose ici que les temps de germination et de croissance sont négligeables devant t. Ainsi, la taille moyenne des précipités croît avec le temps alors que les précipités de taille moyenne ne grossissent pas. avec K R 

217

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Toutefois, un instant δ t plus tard, ils deviendront sous-critiques et vont se dissoudre. Pour R >> R0 , on retrouve une forme proche de la loi LSW. La taille des précipités évolue en t 1/3 . Seul le pré-facteur numérique K R est différent, il est de 8/9 dans la théorie LSW alors qu’il est ici égale à 3/4. Ceci est dû au fait qu’on n’a pas tenu compte de la distribution réelle en taille des précipités dans ce calcul simplifié. 2.7. En faisant l’hypothèse que la fraction volumique pendant la coalescence est proche de la fraction molaire d’équilibre, on peut écrire : f m  NV

4 πR 3 3 m

D’où : NV  K N t 1 C0  Ce kT . Pendant la coalescence, la densité de précipiCe DB tés par unité de volume évolue en t −1.

avec K N 

3.2.8

Coalescence dans les superalliages NiAl

Les superalliages à base de nickel sont des matériaux mis en œuvre dans les turboréacteurs d’avion en raison de leur très bonne tenue en fluage et résistance à la corrosion. Ils constituent les pièces chaudes en mouvement dans les turbines (disques ou aubes de turbomachines). Les températures peuvent dépasser 800 °C et les contraintes sont équivalentes à 50 000 fois le poids des pièces en mouvement (force centrifuge des aubes de turbine en rotation). Ces alliages sont durcis par une fraction volumique importante de précipités   ordonnés de type Ni3Al (figures 3.30 et 3.31) pouvant atteindre 50 %, voire 70 %. Bien d’autres éléments d’addition sont adjoints aux superalliages (Cr, Ti, Mo, W…) pour améliorer les propriétés (e.g. oxydation/corrosion) et performances en fluage. Dans ce problème, pour simplifier, on considère un alliage binaire NiAl sans autres éléments d’addition que l’aluminium.

 Figure 3.30  Micrographie de microscopie électronique montrant la présence de précipités γ’ de 100 nm dans un superalliage (A. Azzam, GPM).

218

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

 Figure 3.31  Structure ordonnée de la phase γ’ Ni3Al. Les atomes de nickel sont en blanc et les atomes d’aluminium en noir.

On considère ainsi un alliage binaire NiAl vieilli à 550 °C contenant 14at.% d’Al. L’étude en microscopie électronique en transmission montre des précipités   Ni3Al ordonnés que l’on considérera pour simplifier comme sensiblement sphériques (figure 3.30). Les compositions de la phase mère γ NiAl et des précipités germant dans celle-ci ont été mesurés par microanalyse à la sonde atomique [22]. 1. La figure 3.32. montre une partie du diagramme de phase NiAl. Quelle est la limite de solubilité de Al (X e ) dans Ni à 550 °C ? En déduire la fraction molaire d’équilibre de   se formant à 550 °C.

 Figure 3.32  Diagramme de phase NiAl.

2. L’écart paramétrique à la cohérence δ a / a entre les deux phases γ et   mesuré par diffraction des RX est de 0,4 %. Le volume molaire des deux phases γ et   est-il très différent ? En déduire la fraction volumique d’équilibre à 550 °C.

219

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

3. Rappelez comment varient en fonction du temps le rayon des précipités R t  et de la densité volumique de précipités NV t  en coalescence. 4. La figure 3.34a montre l’évolution temporelle du rayon des précipités en cours de revenu isotherme à 550 °C. À quel régime correspond la zone de taille constante ? Pour t > 50 min, R croît en t 1/3 . Quelle est votre interprétation ? Voit-on sur l’évolution de R t  un régime de croissance pure ?

 Figure 3.34  Évolution temporelle à 550 °C (selon Wendt et Hassen [12]) : (a) du rayon moyen des précipités R t  , (b) de la densité par unité de volume NV t  de précipités par unité de volume (précipités/m3), (c) de la sursaturation (dans cette figure, attention ΔC est exprimée en % atomique et non par m3) en fonction de t −1/ 3 .

5. Le nickel est CFC de paramètre de maille a = 0,36 nm. Calculez le volume atomique vat et en déduire le nombre d’atomes contenus dans les germes critiques avant croissance. Calculez le diamètre atomique. Représentez schématiquement un germe sphérique et les atomes le composant. Commentez le résultat. 6. La figure 3.34b donne l’évolution temporelle de la densité de précipités par unité de volume. Commentez cette évolution en termes de germination, croissance et

220

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

coalescence. La densité décroît en t −1 pour t > 50 min. Interprétation ? Quelle est la densité maximale ? En déduire la distance moyenne entre précipités pour ces temps de vieillissement. 7. La figure 3.34c représente la variation temporelle de la sursaturation en Al dans la phase mère γ donnant naissance à la nouvelle phase γ ’ en fonction de t −1/3. Une échelle de temps est donnée au-dessus également. Quelle est l’évolution de la composition de la matrice jusqu’à 1400 min. Commentez. Faut-il qu’il existe une sursaturation de la phase mère pour avoir coalescence ? Quelle est l’origine physique de la coalescence ? Quelle est l’influence de l’énergie interfaciale ? 8. Donnez une expression simple et approchée de la fraction volumique précipitée f en fonction de R et NV . Donnez sa valeur avant croissance. 9. La figure 3.34c donne également f e − f . f est la fraction volumique précipitée au temps t et f e celle d’équilibre. Comparez avec le calcul précèdent de f . 10. L’évolution temporelle du rayon des précipités en coalescence de la théorie clas8D CeVm 2 . sique LSW est donnée par : R 3  R03  bt avec b  9R gT Quelle est votre interprétation de R0 et de t dans cette équation ? La concentration d’équilibre dans la phase mère γ , Ce , est exprimée dans cette équation en moles/m3 et non en atomes/m3. Vérifiez l’équation aux dimensions de b . 11. Dans la théorie LSW, la sursaturation quant à elle suit la loi : 2 D R gT  C  C  Ce   t 1/3 avec   2 2 . Cγ est la concentration en Al 9 C e Vm dans la matrice γ . À nouveau, toutes les concentrations sont ici en moles/m3. Vérifier l’homogénéité de l’équation. Quelles sont les unités de α  ? 12. Montrez qu’en combinant de manière judicieuse les équations de b et de α , on peut déduire les valeurs des deux paramètres inconnus σ et D à partir des cinétiques de R t  et de C t . Exprimez σ et D en fonction de b et α . Simplifiez en remarquant que le produit CeVm s’exprime facilement en fonction de X e . 13. À partir des cinétiques d’évolution présentées en figure 3.34, on en déduit que b  = 2 × 10–3 nm3/min et α  = 2 × 10–13 m9 s–1 mole–3. En déduire les valeurs de σ en mJ/m2 et de D en m2 s–1. Compte tenu de la valeur de σ , les interfaces sont-elles, à votre avis cohérentes, semi-cohérentes ou incohérentes ? Est-ce un résultat attendu au regard de la valeur de l’écart paramétrique de 0,4 % donné en question 2 ? 14. En déduire la distance parcourue x par les atomes d’aluminium (en nm) pour des temps de 10, 50, 150, 1400 min à 550 °C (temps des expériences, figure 3.34). Calculez la distance (d ) entre précipités pour 1400 min et comparez-la au rayon des précipités. Comparez x à d . Commentez le résultat.

221

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Corrigé 1. Le diagramme de phase donne les limites de solubilité en Al à 550 °C dans les phases γ et γ ’ suivantes : X γ = 9 % at. et X γ ’ = 25 % at. La fraction molaire f m X  X . Ce qui précipitée, donnée par la règle des leviers inverses, s’écrit f m  0 X ’  X donne f m  = 31,25 %. 2. L’écart paramétrique à la cohérence δ a / a = 0,4 % est très faible de sorte que les volumes molaires (Vm = Na 3 / 4 avec N le nombre d’Avogadro) des deux phases γ et γ ’ sont très proches. Par conséquent, la fraction volumique f peut être confondue avec f m et donc f = 31,25 %. 3. La force motrice de coalescence est la réduction de l’énergie interfaciale de l’ensemble du système. Les interfaces donnent lieu à un excès interfacial de Gibbs G  2Vm / R (équation de Gibbs-Thomson) avec σ l’énergie interfaciale et R le rayon du précipité. Ceci entraîne une augmentation de la concentration d’équilibre dans la matrice. Les petits précipités vont se dissoudre au profit des plus gros. Le rayon moyen des particules augmente avec le temps en t 1/3 , on notera ce rayon R par la suite. Comme la fraction volumique f est presque 4 constante en coalescence et que f  NV π R 3, NV décroît en t −1. 3 4. Le stade d’évolution observé pour lequel le rayon des précipités est constant (~ 1 nm) correspond à la germination. Pour t > 50 minutes, on assiste à de la coalescence car R croît comme t 1/3 . On ne voit pas de régime pur de croissance car dans ce régime on devrait en théorie observer une croissance de R en t 1/2 et une densité de précipités constante (NV = cste ). 5. Le volume atomique est donné par vat = a 3 / 4 = 11,66 × 10–3 nm3. On peut en 4 déduire le nombre d’atomes dans le germe critique, π R 3 pour R  ~ 1 nm, 3vat soit environ 359 atomes. Le diamètre d’un atome est a 2 / 2 = 0,254 nm (modèle de sphères dures dans un CFC). On a donc environ 8 atomes sur une distance égale au diamètre du précipité (cf. schéma ci-dessous).

222

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

6. NV = cste pour t  50 min. on a coalescence car NV décroît en t −1. On peut voir que le maximum de densité de précipités est d’environ 4 × 1025 précipités/m3. La distance moyenne entre précipités est égale en première approximation à : NV −1/3, soit environ 3 nm. 7. Notons X la fraction atomique en Al (et non C comme dans la figure 3.34c de l’article de Wendt et al.) afin d’éviter toute ambiguïté ou erreur. On réservera le symbole C pour les concentrations par unité de volume discutées dans les questions suivantes. La sursaturation est donnée par X  X   X e , X γ est la fraction atomique de la matrice au temps considéré et X e est la valeur d’équilibre observée (9%at.) à t = 1400 min, temps pour lequel la sursaturation est presque nulle (ΔX ~ 0, cf. figure 3.34c). Le tableau ci-dessous donne les valeurs expérimentales de la fraction atomique d’Al dans la phase mère γ données par la figure pour chaque temps de vieillissement t: t (min)

10

20

50

600

1400

X γ (% at.)

10,8

10,8

10,4

9,5

9

La sursaturation n’est pas la force motrice et n’est donc pas nécessaire pour la coalescence (sursaturation très faible et fraction volumique très proche de celle d’équilibre). Si σ augmente, la cinétique s’accélère. 4 3  R dans la question 3. Elle demeure 3 valide en 1ère approximation, NV  ~ 4 × 1025 précipités/m3 et R  ~ 1 nm, ainsi la

8. On a déjà utilisé l’équation f  NV

fraction volumique est d’environ 16,8 %. 9. f e − f   = 14 % sur le diagramme (figure 3.34c). Pour f e = 31,25 %, on a f = 17,25 % qui est une valeur proche de celle calculée en question 8. 8D CeVm 2 . 9R gT Le début de coalescence est pris comme origine des temps (t = 0). R0 est le rayon initial à t = 0 (fin du régime de germination-croissance). Ce est la concentration d’équilibre dans la matrice (en mole/m3). D est le coefficient de diffusion, R g la constante des gaz parfait et T la température. On peut donc vérifier que les unités de b sont des m3/s.

10. D’après la théorie LSW : R 3  R03  bt avec b 

D R gT  avec   2 2 . 11. Dans la théorie LSW : C  C  Ce   t  9 C e Vm 9 –3 –1 On peut vérifier que les unités de α sont des m  mole  s , l’équation est homogène, car les concentrations sont en moles/m3. 2

1/3

223

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide



R gT b 12. En calculant b / α on élimine D et ainsi :   2X e  CeVm = X e .

1/3

. On a utilisé

On vérifie l’équation aux dimensions   = J/m2.

Le calcul de α b 2 élimine σ de sorte que : D

9  b 2 1/3 82/3Vm

On vérifie au passage que les dimensions de D sont bien des m2/s. 13. σ = 21 mJ/m2, ce qui est une faible valeur correspondant à des interfaces cohérentes, c’est un résultat attendu compte tenu du très faible écart paramétrique (0,4 %). De plus, D = 1,93 × 10–20 m2/s. 14. La distance quadratique moyenne parcourue est donnée par x = 6Dt . Le calcul de x pour chacun des temps de vieillissement est donné ci-dessous. Pour 1400 min, NV  ~ 2 × 1024/m3. On peut en déduire une estimation de la distance entre précipités : d  NV 1/3. Ainsi, d est proche de 8 nm alors que R est voisin de 2,7 nm. d est environ 3 fois plus grand que le rayon R . On constate que la distance de diffusion reste même ordre de grandeur que la distance entre particules. Le rayon des précipités et la distance entre particules croissent moins vite que x. Ce n’est pas surprenant car la vitesse de coalescence dépend de l’énergie interfaciale.

3.2.9

t (min)

10

50

150

1400

x (nm)

1,1

2,4

4,2

12,7

Modèle de Zener pour la croissance d’un précipité avec interface plane incohérente

On considère un alliage AlCu de structure CFC contenant 1%at. de cuivre (paramètre cristallin a = 0,4 nm) dans lequel précipite la phase incohérente Al2Cu. Nous allons étudier la croissance des précipités en utilisant le modèle de Zener. Dans ce modèle, la concentration en solutés dans la phase mère α croît linéairement avec la distance x (gradient de concentration constant). On considère un alliage AB de fraction atomique X 0 en atomes B. Nous allons étudier la croissance, dans une solution solide α sursaturée, de précipités β incohérents présentant des interfaces planes. X α et X β sont les fractions atomiques d’atomes B à l’équilibre dans les phases α et β (pour alléger l’écriture on omet l’indice B dans les notations, toutes les grandeurs font référence aux atomes B). Ces précipités β ont la forme de plaquettes d’épaisseur xi . On s’intéresse à la migration des interfaces planes  /  .

224

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

1. On recherche une solution stationnaire au problème de diffusion. On postule qu’il existe un équilibre local à l’interface  /  et que la concentration C x  devient égale à la composition nominale C0 à une certaine distance L de l’interface que nous allons calculer par la suite. En déduire l’expression du profil de concentration C x  dans la phase α près de l’interface  /  et du gradient de concentration. Faites un schéma représentant le profil de concentration C x  en atomes B. 2. Dans le modèle de Zener, le profil C x  dans la phase mère α près de l’interface est précisément considéré comme linéaire sur une distance L. À partir d’un bilan matière, donnez la relation entre l’épaisseur de la plaquette xi et L. 3. Montrez qu’en exprimant le bilan de matière relatif à l’accroissement d’épaisseur dxi pendant dt et en écrivant la première loi de Fick, on peut exprimer la vitesse de migration v de l’interface en fonction du coefficient de diffusion D, de Cα , C0 et de C β . 4. Montrez que l’épaisseur de la plaquette xi varie en Dt . Pour simplifier les calculs, on fera l’approximation justifiée que C   C ~ C   C0 et que xi = 0 à t = 0. Montrez que xi est proportionnel à la fraction molaire f m de phase β à l’équilibre. En déduire l’expression de v en fonction de f m , D et t. Représentez schématiquement v t  . Commentez. 5. Représentez la vitesse de croissance v en fonction de la température T . Faites le schéma donnant v T  en mettant T en ordonnée et en correspondance un diagramme de phase binaire typique pour lequel se produit la précipitation d’une phase β . Indiquez la température de solvus sur ce schéma. Expliquez pourquoi v ne varie pas de manière monotone avec T . Indiquez sur ce schéma la vitesse de croissance v T  pour deux teneurs nominales différentes X 01 et X 02 > X 01. Comparez les maxima de v T  pour ces deux compositions nominales ainsi que les températures TM pour lesquelles v T  est maximum. 6. La limite de solubilité X α de Cu dans Al est donnée par l’équation classique : B

X   Ae RT . Le diagramme de phase d’équilibre AlCu donne des limites de solubilité de 1 % et 2 % (en atomique) respectivement pour 430 °C et 500 °C. Estimez les constantes A et B . 7. Déterminez l’expression de la température (TM ) à laquelle vitesse de croissance v T  est maximale (vM ). On mènera le calcul en faisant l’hypothèse que X   X  . 8. Calculez TM pour un alliage comportant 2%at. de cuivre. Calculez la fraction molaire de précipités Al2Cu se formant dans cet alliage à cette température. On donne les paramètres de diffusion du cuivre dans l’aluminium : D0  = 0,647 cm2/s et Q  = 32,27 kcal/mole. Calculez le coefficient de diffusion et la distance de diffusion x D après 1 h de revenu. Calculez la vitesse maximale vM ainsi que l’épaisseur xi du précipité. Comparez xi à x D .

225

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Corrigé 1. L’interface  /  est en équilibre local, ainsi les concentrations de part et d’autre de l’interface sont les concentrations d’équilibre Cα et C β . En régime stationnaire (C  0), la divergence du flux de diffusion est nulle. Le flux est donc constant et le gradient de concentration aussi, par conséquent : C x  

C0  C x  xi   C L

sachant que C x  xi  L  C0 et C x  xi   C .

2. Pour former un précipité de largeur xi , dans une matrice à la concentration C0 , il faut apporter C   C0  xi atomes B (par unité de surface). Cet apport est égal à la quantité d’atomes B amenés par la diffusion, et donc :

C   C0  xi  Ainsi, on a xi 

C0  C L . C   C0 2

C0  C L 2

3. Un simple bilan de matière sur le nombre d’atomes traversant la surface du précipité permet d’écrire :

J dt  C   C  dxi   C  C Le flux d’atomes B, J  DC , est donné par J  D 0 . On en déduit la L vitesse de migration des interfaces : v

dxi D C0  C  J  dt L C   C

L n’est pas constant mais croît avec le temps, c’est une fonction de xi , ainsi : v

C0  C 2 D 2xi C   C0  C   C 

v varie en 1 / xi , autrement dit la vitesse de migration diminue à mesure que le précipité croît.

226

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

4. Sachant que C   C ~ C   C0 , on peut écrire= v C  C . Et donc : fraction molaire, f m  0 C   C xi 2 = Df m 2t

dxi D f 2 avec f m la = dt 2 xi m

en posant xi = 0 à t = 0. Par conséquent, on a xi = f m Dt  ; la vitesse de croissance est : f D v= m 2 t On trouve que v   pour t → 0, car dans les premiers instants de croissance C  C L → 0, et la vitesse est proportionnelle au gradient de concentration, en 0 . L A contrario, aux temps longs, le gradient de concentration doit s’étendre sur une très grande distance pour respecter la conservation de la matière et devient donc très faible. Ainsi, v → 0 pour t  .

5. Il y a compétition entre fraction molaire (sursaturation) et diffusion lorsque la température T varie. Alors que la fraction molaire augmente quand T diminue en s’éloignant de la température de solvus (TS ), la vitesse de diffusion diminue. Ceci se traduit par une vitesse de migration présentant un maximum en fonction de T, noté TM .

227

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

Pour X 02 > X 01 (plus grande sursaturation), la fraction molaire est plus grande. À une température donnée, la vitesse de migration est donc supérieure pour X 02 (cf. figure précédente) alors que le terme de diffusion est inchangé. Ainsi, la température TM est plus haute pour X 02 > X 01. 6. La limite de solubilité est donné par : B

X   Ae RT

B

On note X α1 la limite de solubilité à T1, et X α2 à T2 . Ainsi, X 1  Ae RT1 et B

X 2  Ae RT2 . Il vient : B

X1 R ln 2 1 / T2  1 / T1 X  B

B  ~ 4,47 × 104 J/mole de sorte que A  X 1 e RT1  ~ 21. 7. On a démontré que v =

fm 2

C  C D . Pour X   X  , v  0 t 2C 

D . Le t

maximum de v T  est donné par le maximum de C0  C T  D T  . Or Q

D  D0e RT . Un calcul simple de la dérivée donne la température TM pour laquelle la vitesse est maximale : TM 

B 1 R ln 2 AB  AQ   ln  X 0Q 

On remarque que TM augmente lorsque X 0 augmente, en accord avec l’interprétation qualitative précédente. 8. Pour un alliage comportant 2%at. de cuivre (X 0), TM ~ 447 °C. Al2Cu est la phase qui précipite, ainsi X   1 / 3. À cette température, X α  ~ 0,012. On en déduit f m  ~ 0,025. De plus, D ~ 1,23 × 10–14 m2/s. La distance de diffusion x D après 1 h de revenu est 6Dt  ~ 16,3 µm. On trouve finalement vM  ~ 2,3 × 10–11 m/s, soit environ 80 nm/h. Ainsi, xi ~ 0,17 µm, ce qui est très faible devant la distance quadratique moyenne de diffusion x D .

228

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

3.2.10 La décomposition spinodale Nous allons tout d’abord calculer la loi d’évolution temporelle des fluctuations de concentration établie par Cahn et Hilliard en 1961 pour les systèmes inhomogènes (cf. rappels de cours). Cette théorie s’applique en particulier à la décomposition spinodale se produisant dans les solides. Dans la seconde partie du problème, nous appliquerons cette théorie aux alliages binaires FeCr, système modèle des aciers mis en œuvre dans les circuits de refroidissement primaire des centrales nucléaires dans lesquels une décomposition spinodale est observée. On considère un alliage binaire AB sursaturé. X 0 est la fraction atomique nominale d’atomes B. Les éléments A et B sont de même structure mais sont peu miscibles donnant lieu à la démixtion entre deux phases α et α ’ cohérentes de même structure (CC), l’une riche en A (α ), l’autre en B (α ’). La décomposition spinodale du système est donc possible. Nous allons résoudre la seconde équation de Fick en une dimension selon x, direction selon laquelle la fraction atomique X x  fluctue avec une amplitude notée  X  X  X 0 . Le chapitre sur la diffusion nous enseigne que dans un gradient de potentiel chimique, le flux d’atomes B s’écrit en 1D : J 

M X 1  X   B   A  vat

avec M l’inter-mobilité, μ A et μB les potentiels chimiques des atomes A et B et vat le volume atomique. 1. Vérifiez l’homogénéité de l’équation ci-dessus. Quels sont les unités de M  ? Exprimez B   A en fonction de l’enthalpie libre molaire G  X  . En déduire le signe de d B   A  / dX en régime spinodal. 2. Calculez B   A sachant que l’enthalpie libre molaire d’un système inhomogène G  X  s’écrit : G  X    g ’  X , X dV V

avec g ’  X ,X   g  X   K e  X 2  K i X 2 . Rappelez la signification de chacun des termes. Comme G  X  est une enthalpie libre molaire, l’intégrale est calculée sur le volume d’une mole, on note Vm est le volume molaire, g et g ’ sont des densités volumiques d’énergie. K i et K e sont des constantes. On utilisera la relation d’Euler-Lagrange selon laquelle la différentielle de cette intégrale de volume s’écrit :



g ’ d g ’ G   Vm X dx X  X x 



229

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

3. Dans la théorie de Cahn et Hilliard, le terme de mobilité MX 1  X  tout comme la dérivée seconde ∂ 2 g / ∂X 2 sont considérés comme constants. Leurs valeurs sont prises en X = X 0 (fraction atomique nominale) et l’on pose M 0  MX 0 1  X 0 . Établissez l’équation de diffusion régissant l’équation pour la concentration C x, t  / t . Discutez de la validité de ces hypothèses. Établissez l’équation maître donnant l’évolution temporelle de la concentration. Exprimez ∂C / ∂t en fonction de C , X 0 et Vm . 4. Nous allons résoudre l’équation de diffusion aux dérivées partielles par transformée de Fourier (TF). On peut alors décomposer C x, t  en série de Fourier : C x, t   C0   A k, t  e ikx k

L’amplitude des composantes de Fourier du signal de concentration est donnée par : A k, t   TF C x, t   C0  On rappelle que :  2C TF  2   k 2TF C   x  TF

Ct   TFtC 

Montrez que l’amplitude des fluctuations de concentration s’écrit : A k, t   A0e R kt . Retrouvez l’expression de R k  avec k  2 /  , le nombre d’ondes. 5. Représentez schématiquement R k . Quel doit être le signe de R k  pour que l’amplitude des fluctuations augmente avec le temps ? En déduire l’expression du vecteur d’onde critique kc au-dessous duquel l’amplitude croît. Donnez la longueur d’onde critique correspondante λc . Quelle est la condition nécessaire sur le terme moteur ∂ 2 g / ∂X 2 , lorsqu’il y a cohérence parfaite entre phases (K e = 0) et lorsqu’il existe au contraire un écart à la cohérence ? Quelles sont les conséquences sur la position de la ligne spinodale dans le diagramme de phases ? Retrouvez l’expression de R k  donnée dans le rappel de cours en fonction de kc . 6. Quelle est la valeur kM de k pour laquelle l’amplitude croît la plus vite ? Quelle est la valeur de R kM  correspondante ?

Qu’en déduisez-vous pour l’évolution de fluctuations complexes de composition C x, t  composées de différentes composantes de Fourier ? Quelles sont les longueurs d’ondes disparaissant peu à peu avec le temps ?

230

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

7. La décomposition spinodale des alliages FeCr. On s’intéresse à la stabilité thermodynamique à long terme de la ferrite α (CC) des aciers austéno-ferritiques des circuits de refroidissement primaire des centrales nucléaires à eau pressurisée (fluide caloporteur des centrales PWR [presurised water reactor] dont la durée de vie est de l’ordre de 40 ans). Ces matériaux sont des alliages FeCr comportant des impuretés que l’on négligera. On observe une baisse de résilience et une augmentation de la dureté consécutives à la décomposition de la ferrite en deux phases, l’une appauvrie en chrome (α ) et l’autre enrichie en chrome (α ’). Le diagramme de phase du système FeCr (structure cubique centrée) révèle une lacune de miscibilité    ’ dont le sommet extrapolé est estimé à TC = 600 °C. On modélise le système par une solution régulière en ne considérant que les interactions entre atomes premiers voisins. Les énergies d’interaction  i  j (i = Fe ou Cr, j  = Fe ou Cr) sont prises négatives : un puits de potentiel profond signifie une plus grande stabilité. On donne les énergies de cohésion EC du Fer (413 kJ/mole) et du chrome (395 kJ/mole). Calculez la valeur de l’énergie d’ordre ε en eV. En déduire la valeur du potentiel d’interaction effectif  Fe Cr . 8. À partir du modèle de solution régulière (chapitre I), calculez l’expression de ∂ 2 g / ∂X 2 en fonction de TC , T , vat (volume atomique de l’alliage) et de X . Calculez sa valeur à une température de fonctionnement de 280 °C du circuit de refroidissement, pour un alliage contenant 25%at. de chrome. Le paramètre cristallin est a = 0,29 nm. En déduire l’expression de la fraction atomique X S T  correspondant à la ligne spinodale. Quelle est sa valeur pour 280 °C ? Quelle est la valeur théorique de X S pour la température critique TC  ? Quel est le régime de décomposition pour 25%at. de chrome ? 9. Le coefficient K i de la théorie de John Cahn est proportionnel à l’énergie d’ordre ε et au carré des distances d’interactions ramenées au volume atomique. On approxime ce coefficient par l’expression K i   / rat qui permet d’accéder à un ordre de grandeur. rat est le rayon atomique 8. Calculez K i . En déduire la valeur de la longueur d’onde critique λC . On négligera le terme élastique (K e ) car les atomes de fer et de chrome ont des rayons atomiques très proches. 10. Des nanoanalyses à la sonde atomique d’un alliage vieilli pendant 10 000 h (un peu plus qu’une année) révèlent des fluctuations de concentration avec des longueurs de corrélation λ allant de 1 nm à 5 nm. Comment évolueront ces longueurs d’onde avec le temps ? 8.  Les distances d’interaction entre premiers voisins sont de l’ordre de rat et le volume atomique est proportionnel à rat 3 , ainsi le carré des distances d’interactions ramenées au volume atomique s’échelonne comme 1 / rat à une constante près.

231

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

11. On donne les données de diffusion du chrome DCr dans le fer α  : D0  = 2,53 cm2/s et Q D  = 57,5 kcal/mole. Calculez la distance de diffusion x D pour un vieillissement à long terme de 10 000 h à 280 °C. Comparez aux longueurs d’ondes observées à la sonde atomique. 12. On pose  M  1 / R kM  temps de relaxation correspondant au maximum de R k . Pour simplifier, on approximera l’inter-mobilité M à la seule mobilité du chrome : M = DCr / RT . Calculez τ M . Commentez le résultat au regard de la durée de vie d’une centrale nucléaire (~40 ans).

Corrigé 1. On choisit les unités des potentiels chimiques, des J/mole, dans l’équation du flux : J 

M X 1  X   B   A . vat

Puisqu’un flux s’exprime en at.m–2s–1, il faut nécessairement que l’inter-mobilité soit donnée en m2.mole.J–1s–1. On sait que la différence de potentiel chimique entre espèces A et B s’écrit comme :

B   A 

dG dX

avec l’enthalpie libre G en J/mole. On en déduit : d B   A  d 2G  dX dX 2 Ce terme est négatif en régime spinodal. 2. En écrivant l’enthalpie libre G  X  comme : G  X    g ’  X , X dV Vm

Dans le modèle de Cahn et Hilliard, on ajoute donc à g  X , l’énergie de la phase homogène, un terme d’énergie interfaciale (K i X 2 ) et un terme élastique (K e  X 2 ). Ainsi, g ’  X ,X   g  X   K e  X 2  K i X 2 . On tient compte alors des fluctuations spatiales de concentration  X x  . Comme X varie avec x, la différence de potentiels chimiques devient égale à la différentielle de G  X  , donnée par l’équation d’Euler-Lagrange :

B   A 

232



g ’ d g ’ G   Vm X dx X X



3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

On aboutit à : g 2 X  2K e X  2K i 2  B   A  Vm  x   X et donc :   B   A    2 g X X 3 X   Vm  2  2K e  2K i 3  x x x   X x  3. L’équation de diffusion, C / t  div J , s’écrit donc sous la forme suivante, en une dimension :   2 g C C  3C    C  2K e  2K i 3   MX 1  X Vm  2 x t x  x   X x C’est l’équation de Cahn-Hilliard. Les valeurs de l’inter-mobilité et de la dérivée seconde de g sont prises en X 0 : MX 1  X   MX 0 1  X 0   M 0 Et :

2 g 2 g  X 2 X 2

X0

Ces approximations supposent que l’on étudie l’équation de Cahn-Hilliard dans un régime de petites fluctuations de concentration autour de X 0. On aboutit à la forme suivante de l’équation de diffusion :   2C   2 g C  M 0Vm  2  2  x  X t  

X0

  4C   2K e   2K i 4   x  

4. On injecte dans l’équation de diffusion l’expression de C x, t  écrite comme une série de Fourier. La transformée de Fourier conduit à :  2 g  A k   M 0Vm  k 2 A k   2   t   X

X0

   2K e   2K i k 4 A k     

A  R k  dt et donc A k   A0e R kt avec A A0 l’amplitude des fluctuations à t = 0, et R k  est donné par :

que l’on peut mettre sous la forme

 2 g R k   M 0Vmk 2  2  X 

X0

  2K e  2K i k 2   

Dans cette expression, le premier terme moteur (dérivée seconde de g ) est négatif alors que les deux autres sont positifs.

233

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

5. Les amplitudes des fluctuations vont augmenter avec le temps quand R k  est positif, et s’atténuer dans le cas contraire. La valeur critique kc est donnée par R kc   0, soit :  2 g    2  2K e   X  X0   kc  2K i La longueur d’onde critique est c  2 / kc , qui n’existe que si l’intérieur de la racine est positif. 2 g  2K e , pour que cette longueur d’onde Il faut donc nécessairement que X 2 X 0 ∂2 g doit être existe, ce qui définit la ligne spinodale cohérente. Le fait que ∂X 2 X 0 plus négatif, quand on tient compte du terme élastique, implique nécessairement que la lacune cohérente soit incluse dans la lacune incohérente. Finalement, R k   2M 0Vm K i k 2 kc 2  k 2  C’est l’expression donnée dans le rappel de cours. R k  présente un maximum en kM et s’annule en kc .

6. kM est donné par la condition

dR = 0. On trouve kM = kc / 2. Les fluctuadk kM

tions de grande longueur d’onde (  c ) vont toutes être amplifiés (k < kc ), mais pour   M  2 / kM l’amplification est maximale, on parle de longueur d’onde dangereuse. Les fluctuations de petite longueur d’onde (  c ) vont en revanche s’atténuer (k > kc ). C’est l’énergie interfaciale qui est à l’origine de l’échelle de coupure de l’instabilité. Une fluctuation de concentration s’étalant

234

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

sur une petite distance ne se développe pas car elle crée beaucoup d’énergie interfaciale, qui n’est pas compensée par la force motrice. Z . Z est la coordinance (8 pour 2kB un CC). Ainsi,   2kBTC / Z = 1,88 × 10–2 eV. L’énergie d’ordre est donnée par :

7. Dans le modèle de la solution régulière, TC 

1    Fe Cr   Fe  Fe  Cr Cr  2 On connaît les énergies de cohésions du Fe et du Cr, EC ,i  NZ  i i / 2 pour i = Fe et Cr. N est le nombre d’Avogadro. Par conséquent  Fe  Fe = –1,07 eV et Cr Cr = –1,025 eV. On peut désormais calculer  Fe Cr     Fe  Fe  Cr Cr  / 2 = –1,029 eV. 8. Dans ce modèle, l’enthalpie libre de mélange (en J/mole) est donné par : gVm  2RTC X 1  X   RT  X ln X  1  X  ln 1  X  La dérivée seconde est donnée par :  2 g / X 2 

kB  T  4TC  X 1  X   vat 

À 280 °C, et pour X = 0,25, on a ∂ 2 g / ∂X 2 ~ -6,14 × 108 J/m3, qui est négatif, on est donc dans le régime spinodal. Calculons la ligne spinodale en posant  2 g / X 2  0 en X = X S , on obtient la condition suivante sur X S  : XS2  XS 

T 0 4TC

1 1 T  1 . Comme attendu, X S = 1 / 2 à T = TC . À la tempéra2 2 TC ture de refroidissement du fluide colporteur (280 °C), X S = 0,2 et X S = 0,8. Ainsi, pour X 0 = 0,25, on est bien dans le régime spinodale. soit X S 

9. K i   / rat ~ 2,4 × 10–11 J/m car a 2 = 4rat , et donc rat ~ 0,126 nm. Pour K e = 0, la longueur d’onde critique vaut c  2 2K i /

2 g  ~ 1,76 nm. X 2

10. D’après la théorie, on s’attend à ce que les petites longueurs d’onde (λ   0. a

237

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

6. En raison des fluctuations thermiques, seuls les germes dont la taille est supérieure à n *  / 2 rentrent dans le régime de croissance. δ est la largeur de Zeldovich, définie par la condition suivante : Gn n *  / 2  Gn n *  kT Déterminez l’expression de la largeur de Zeldovich δ en fonction de Z , à partir du développement de Taylor au second ordre de l’énergie de formation, et représentez la zone de Zeldovich sur un graphe de ΔGn . 7. On peut assimiler le déplacement des germes dans l’espace des tailles (n) à un mouvement Brownien. Autrement dit, les germes « diffusent » dans l’espace des n. Montrez que le temps caractéristique τ pour qu’un germe sorte de la zone de Zeldovich, et ne soit plus sujet aux effets de régression, est donnée par :



2

 Z 2 * Le coefficient de capture β *, dont l’expression dépend de la cinétique de croissance (cf. problème 3.2.12), peut être vu ici comme le coefficient de « diffusion » des germes dans l’espace des tailles (cf. équation du flux de la question 3). 8. τ étant le temps nécessaire pour sortir de la zone de Zeldovich, il est souvent associé au temps d’incubation du processus de germination de sorte que le flux dépendant du temps s’écrit : J t   J * e

 t

Représentez τ sur un graphe de J t .

Corrigé 1. Le flux net de germes dont le nombre d’atomes s’accroît d’une unité (n  n  1) est donné par : J n n 1  nCn   n 1C n 1 2.  n 1  nCn0 / C n01 est vérifiée pour J n n 1  0. Cette relation est donc valable à l’équilibre (flux nul), quand le nombre de germes de taille n capturant un atome est exactement compensé par le nombre de germes de taille n + 1 perdant un atome. Les concentrations de germes sont alors à l’équilibre (Cn0 ). Autrement dit, à l’équilibre les processus directs et inverses (de capture et de régression) se compensent. 3. On injecte dans l’expression du flux J n n 1 la relation précédente,  n 1  nCn / Cn 1. Supposons qu’elle reste valable, bien qu’on soit ici dans une situation hors-équilibre. Ainsi : C  C J n n 1  nC n0  n01  n0   C n 1 C n 

238

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

que l’on peut mettre sous la forme : J n n 1  nC n0

 Cn / Cn0  n

avec n  1. Ainsi, le passage vers un modèle continu permet d’écrire le flux sous la forme d’une équation de Fick dans l’espace des tailles (n) : J n n 1  nC n0

  Cn  n  Cn0 

4. Intégrons l’expression du flux de germination : 





J*

1

C  dn    n  n0  Cn0  Cn  1

Le flux est constant, car indépendant de n, et on va supposer que βn varie très C peu en comparaison du rapport n0 . Ainsi, βn  β *, sa valeur pour le germe Cn critique. On obtient :



n 

C  dn   *  n0  0 C Cn  n 1 1 n

J*

En réalité les germes de grande taille sont entrés dans le régime de croissance, leur nombre est négligeable devant Cn0 , ainsi, Cn / Cn0 → 0 pour n  . Pour n petit, les deux populations sont confondues, les concentrations en germes sont maintenues à l’équilibre, le système disposant d’un réservoir infini d’atomes. Ceci justifie la deuxième limite, Cn / Cn0 = 1 pour n = 1. On a donc : J* 

*



dn

 Cn0 1

239

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

5. On développe ΔGn autour de n = n * :  2 Gn 1  ... Gn  G *  n  n *2 2 n 2 n n* en se limitant au second ordre. G *  Gn n  n * est la hauteur de la barrière de germination. Le terme à l’ordre 1 est nul car par définition du germe critique Gn  0. n n n* On injecte ce résultat dans l’expression de Cn0 puis dans celle du flux : J* 

 * Ne 

e

G * kT

 2Gn 1 n n *2 2kT n 2 n *

dn

1

Posons a  

1  2 Gn  0, car la courbure de ΔGn est négative autour 2kT n 2 n n*

de n = n *. On fait ensuite un changement de variable u  n  n *. Ainsi du = dn et la borne inférieure de l’intégrale devient 1 − n *. Pour n* >> 1 cette borne inférieure peut être remplacée par  car l’intégrale est quasi nulle pour u  1  n *. On comprend, en effet, sur le graphe de Cn0 (cf. question 4) que 1 / Cn0 tend vers 0 quand n → 1. La région des petites tailles contribue donc très peu au calcul du flux. C’est l’allure de 1 / Cn0 autour de n * qui est prépondérante dans le calcul de l’intégrale. Le dénominateur de l’expression du flux fait apparaître l’intégrale de Gauss de sorte que : J *  Z  * Cn0* avec Z  

G * 1  2 Gn 0  C 0 n  n *  Ne kT . On n’a pas préet C   n * n 2 kT n 2 n n*

cisé la valeur de la constante de normalisation N dans ce problème. Bien souvent en science des matériaux on l’assimile au nombre de sites possibles pour la germination par unité de volume, par exemple 1 / vat . 6. Pour s’affranchir des fluctuations thermiques et entrer en croissance, un germe doit dépasser une certaine taille, n *  / 2, définie par : Gn n *  / 2  Gn n *  kT Or, on peut développer l’énergie de formation autour de la taille critique en nous limitant au second ordre : 1  2  2 Gn  ... Gn n *  / 2  G *  2 2 n 2 n n*



240

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

Ainsi :



1  2 2

2

 2 Gn  kT n 2 n n*

et donc :



2 Z

On peut représenter la zone de Zeldovich sur un graphe de ΔGn , que l’on peut considérer comme étant symétrique autour de n * (c’est systématique si on s’arrête à l’ordre 2 dans le développement de Taylor). Pour n  n *  / 2, le germe n’est plus sujet aux effets de régression et entre en phase de croissance.

7. Dans le cadre d’un mouvement brownien, τ est donnée par l’équation d’Einstein :

 soit :



2 2 *

2  Z 2 *

8. Le flux est nul en t = 0, il tend vers J *, quand le régime stationnaire est atteint, pour t   .

241

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

3.2.12 Coefficient de capture, flux de germination et temps d’incubation Nous allons tout d’abord déterminer l’expression du coefficient de capture des atomes sur un germe (appelé parfois coefficient d’absorption) à partir de la loi de croissance des précipités. On appliquera ensuite la théorie à la précipitation de la phase Ni3Al dans NiAl. L’équation de continuité régissant l’évolution temporelle des populations de taille (notées C ) est donnée par : J C  t R

avec :

J   R

dR C C dt R

Cette équation de flux est analogue à celle de la diffusion avec un terme de transdR ). L’équation est écrite dans l’espace des rayons R . Le flux J contient port (C dt donc un terme de diffusion et un terme de dérive, qui est comparable au terme de transport pour la diffusion atomique dans un champ de force. L’équation de continuité est l’équation de Fokker-Planck, qui contient les effets de régression (théorie de Zeldovich). La variable C  C R  est analogue à la densité de germe ayant un rayon compris entre R et R + dR . Ses dimensions sont en m −4 car il faut nécessairement que  C R  dR  N v , avec N v la concentration totale de germes par unité de

volume (en m −3). β R est la diffusivité dans l’espace des rayons R . Dans le terme de dR dérive, est la vitesse de croissance, elle est macroscopique car elle décrit la croisdt sance d’un germe quand on néglige les fluctuations. C0 correspond à la population d’embryons à l’équilibre. 1. Montrez qu’à l’équilibre ( J = 0) :

 G dR  R dt kT R G  G R  est l’énergie de formation d’un germe de rayon R . On rappelle que C0 R   const .e

G R  kT .

Que dire de la vitesse de croissance du germe critique ?

2. Faisons l’hypothèse que l’équation précédente de R demeure valide même hors équilibre. Montrez alors que, hors-équilibre, on peut écrire le flux sous la forme suivante :  C  J    RC 0 R  C0 

242

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

3. Écrivez ΔG sous la forme d’un développement limité au second ordre autour de R *, le rayon critique. En déduire l’expression suivante :

 dR   R H R R  R * dt kT avec H R 

d 2 G , une constante. dR 2 R  R *

4. La loi de croissance des précipités (cf. problème croissance-coalescence) est donnée par : dR D X   X  R   dt R X   X  R  avec X  R  la fraction atomique dans la matrice à l’interface d’un précipité (en équilibre local). On note β la phase qui précipite (à ne pas confondre avec β R ). X β est la composition des précipités. X  est la composition loin du précipité (égale à la composition nominale dans les premiers stades de précipitation). D est le coefficient de diffusion des atomes B. L’équation de Gibbs-Thomson s’écrit aux faibles sursaturations : X  R   X e 1   / R  Montrez que la loi de croissance s’écrit, pour les faibles sursaturations :



X e dR D 1 1    dt R  X e  X e  R * R



 X e . On supposera que X   X  R   X e  X e . Comment   X e  varie la vitesse de croissance en fonction de R  ? Quelle est votre interprétation de R * ?

avec R * 

X 

5. On peut montrer par ailleurs que pour une solution solide non nécessairement régulière, ρ prend la forme générale suivante :



2Vm e  Xe H Xe X     

d 2G est la dX  2 X e  dérivée seconde de l’énergie libre de Gibbs de la matrice (Gα ) évaluée à la composition d’équilibre. Gα est en J/mole.

Vm est le volume molaire, σ est l’énergie interfaciale et H 

Montrez que pour une solution régulière et dans certaines approximations que l’on précisera, on retrouve l’expression classique donnée dans le cours :



2Vm R gT

243

Diffusion, ségrégation et transformations de phase à l’état solide

R g est la constante des gaz (on utilise l’indice g afin de différencier R g de R , le rayon des germes). On rappelle que la limite de solubilité dans la solution régulière est donnée par : X e  e régulière.

2TC T

. TC est la température critique de la solution

d 2 G . À partir des lois de croissance obtenues aux quesdR 2 R  R * tions 3 et 4, déterminez le coefficient de capture β R pour R proche de R *, ce dernier variant peu avec R .

6. Calculez H R 

7. Une des formes les plus courantes de la littérature pour le coefficient de capture est la suivante :

’

4 R *2 DX  a4

avec a la distance atomique. Pourquoi ne peut-on pas directement comparer β R et β ’ ? 8. On note βn le coefficient de capture dans l’espace des n, n étant le nombre d’atomes qu’un germe contient. Démontrer que : 2

4 R *2  n    R  vat  vat est le volume atomique. Pour cette démonstration, on pourra écrire que les flux J dans les deux espaces n et R sont identiques. Donnez l’expression littérale de βn . Comparez ensuite βn et β ’. Quelle physique se cache derrière β ’ ? 9. Application. On considère la germination de précipités de phase L12 dans une matrice NiAl (cfc). Le volume atomique est 1,09 × 10–29 m3. Pendant un recuit à 550 °C d’un alliage sursaturé en aluminium de composition nominale X 0, on observe la formation de précipités Ni3Al (X βe = 0,25) dont le rayon est d’environ 1 nm dans les premiers stades de la transformation (cf. problème 3.2.8 sur la coalescence dans NiAl, pour lequel on avait R*  1 nm). De plus, la fraction atomique d’équilibre en Al dans la matrice est d’environ 9 %. On a pu extraire des expériences de sonde atomique l’énergie interfaciale (σ = 0,021 J/m2) et le coefficient de diffusion de l’Al (D = 2 × 10–20 m2/s). On rappelle que le flux stationnaire de germination dans la théorie de Zeldovich (calculé à partir de l’expression du flux de la question 2) est donné par : J *  Z n n Ne

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G * kT

3. Cinétique de formation d’une nouvelle phase

X0 est le nombre de sites de germination. On rappelle que la hauteur de la vat 4 barrière de germination est donnée par G *   R *2 . Enfin, Z n est le coeffi3 cient de Zeldovich (exprimé dans l’espace des n) : N =

Zn  

1 H 2 kT n

d 2 G . Donnez l’expression de H n en fonction de vat , σ et R *. dn 2 n n* On considère le modèle de la solution régulière, calculer la température critique TC . L’approximation T