Vivre avec la terre - Méthode de la ferme du Bec Hellouin: Manuel des jardiniers-maraîchers. Permaculture - Écoculture - Microfermes. Tome 1 [1] 233011947X, 9782330119478

Le changement climatique s'accélère, la biodiversité s'effondre, notre modèle de civilisation vacille... N

253 115 100MB

French Pages [306] Year 2019

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Vivre avec la terre - Méthode de la ferme du Bec Hellouin: Manuel des jardiniers-maraîchers. Permaculture - Écoculture - Microfermes. Tome 1 [1]
 233011947X, 9782330119478

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+él@mitostréwi2le Perrine &Charles HERVÉ-GRUYER

VIVRE AVEC LA TERRE

MANUEL

DES JARDINIERS-MARAÎCHERS

TOME

|

PERMACULTURE, ÉCOCULTURE: LA NATURE NOUS INSPIRE

SUD

| FERMED

Uhortottteæs vai

Il a fallu pas moins de six années et dix mille heures de travail pour que ce manuel voie le jour, grâce à une merveilleuse équipe que les auteurs remercient chaleureusement, tout particulièrement : Anne-Sylvie Bameule, Aïté Bresson, Jean-Paul Gapitani, Camille Joyeux, Philippe Laborde,

Françoise Nyssen, Claudius Thiriet, Lauranne Valette.

DES MÊMES

AUTEURS

Perrine et Charles Hervé-Gruyer Permaculture. Guérir la Terre, nourrir les hommes, Actes Sud, 2014.

Perrine Hervé-Gruyer La Relaxation en famille, Presses de la Renaissance, 2008.

Charles Hervé-Gruyer Sagesse d’ailleurs pour vivre aujourd’hui (ouvrage collectif, Federika Van Ingen), Éditions des Arènes, 2016. L'avenir est en nous (ouvrage collectif), Dangles, 2014. La Femme feuille (roman), Albin Michel, 2007. Cunas, les Indiens du corail, Gallimard Jeunesse, 1994.

Wayanas, les Indiens du fleuve, Gallimard Jeunesse, 1994. Bijogos, les Grands Hommes de l’archipel, Gallimard Jeunesse, 1993. Imragen, les pêcheurs du désert, Gallimard Jeunesse, 1992.

Les Enfants dauphins, Gallimard Jeunesse, 1990 (Médaille de l’Académie de marine).

© Actes Sud / Ferme du Bec Hellouin, 2019 ISBN 978-2-330-11947-8

AVEC LA

Perrine & Charles HERVÉ-GRÜVYER

VIVRE AVEC LA TERRE TOME

|

PERMACULTURE, ÉCOCULTURE: LA NATURE NOUS INSPIRE

ACTES SUD | FERME DU BEC HELLOUIN

À PROPOS

DE CE LIVRE

EN PARTAGEANT DANS CES PAGES notre aventure paysanne, notre intention est de chercher avec vous une nouvelle manière d’habiter la Terre. Se rapprocher de la nature nous donne le pouvoir de transformer nos modes de vie, de gagner en cohérence tout en contribuant à restaurer l’intégrité de la biosphère. Vous trouverez dans ces pages : - DES

CONCEPTS

: ceux de l’écoculture, une forme d’agriculture qui s’inspire de la nature.

- DES

DONNÉES : cet ouvrage propose de très nombreuses informations sur les cultures vivrières.

- DES TECHNIQUES

: écologiques et très efficaces, elles permettent de concilier une régénération

- UNE

: celle de la ferme biologique du Bec Hellouin, où se déroulent divers pro-

du milieu naturel et une production de fruits et de légumes abondante et durable. EXPÉRIENCE

grammes de recherches scientifiques.

- DES CONSEILS : pour réussir à créer vous-même un jardin ou une ferme permaculturels, dans toutes sortes de contextes de sol et de climat.

6

À PROPOS DE CE LIVRE

UN PROJET LITTÉRAIRE

La Ferme du Bec Hellouin est une petite ferme familiale initiée par mon épouse Perrine et moimême. J’ai tenu seul la plume pour écrire ce livre, mais il reflète notre aventure commune. Ce manuel est aussi un projet littéraire, car un livre aussi volumineux composé uniquement d’informations pratiques serait terriblement sec ! Un brin de poésie aide à digérer la technique. Nous

avons émaillé le texte d’anecdotes et de réflexions reflétant notre quête de sens. En tant qu’auteur,

il m’a semblé important de partager avec vous un peu de notre aventure humaine, d’entrouvrir la porte de notre jardin secret. Au risque de surprendre le lecteur, pour nous l’intention et les concepts sont plus importants que les données techniques. - L'intention donne le cap : c’est parce que Perrine et moi avions pour projet de vivre dans une intimité aussi profonde que possible avec la nature que nous avons exploré les solutions proposées par la permaculture, ce qui nous a conduits vers l’écoculture. - Les concepts sont tirés de l’observation de la nature. Ils sont globalement différents de ceux qui régissent l’agriculture depuis son apparition au Néolithique. - Les techniques découlent de l'intention et des concepts, elles sont multiples et peuvent s’adapter aux différents contextes géographiques. Chacun peut opter pour celles qui lui parlent. UN MANUEL D’UN FORMAT EXCEPTIONNEL Nous avons voulu réaliser un livre différent de ceux qui existent déjà. I1 nous a semblé pertinent de prendre le temps de traiter en profondeur des sujets encore méconnus. Nombre d’informations sont

inédites car issues des recherches menées au Bec Hellouin. Nous avons également souhaité donner un aperçu rapide de sujets déjà bien traités dans la littérature existante, de manière que ceux qui découvrent les activités agricoles puissent se forger rapidement une vision globale.

En plein accord avec nos amis et partenaires d’Actes Sud, nous avons donc consacré cinq années à la

réalisation de ce manuel. Notre collaboratrice Camille Joyeux, agronome et docteur en pharmacie, a travaillé durant deux années pour collecter des informations dans la littérature technique et scientifique internationale. Ce manuel est donc le reflet de notre expérience de terrain et une synthèse des

plus récentes avancées dans les sciences de l’environnement en lien avec nos thématiques.

Le travail de maquette a été important et ce manuel n’aurait pu voir le jour sans l’infinie patience de notre talentueux maquettiste, Philippe Laborde.

S'ADRESSER AU PLUS GRAND NOMBRE Get ouvrage reflète l’aventure d’un couple de paysans qui vit et pratique au quotidien l’approche décrite dans ces pages. Toutefois, notre ferme n’est pas à copier, les références que nous faisons à notre expé-

rience ne sont là que pour illustrer et ancrer notre récit. Tout comme notre précédent livre, ce manuel

peut être utilisé par des paysans des deux hémisphères - nous avons donc constamment cherché à ne

pas nous laisser enfermer dans les particularités de notre vallée de Normandie. Le choix de donner la priorité aux grands principes tirés de l’observation de la nature, valables en tous lieux, permettra

à chacun d’adapter nos propositions à son contexte. Bien évidemment, lorsque nous parlons du nord ou de l’hiver, nous faisons référence à notre situation géographique et climatique.

Ayant eu une scolarité difficile, j’ai du mal avec les données théoriques lorsqu’elles ne sont pas connectées aux réalités du terrain. J’ai constamment cherché à présenter les choses de manière aussi simple que possible. J'espère y être parvenu !

COMMENT

UTILISER CE LIVRE ?

Notre rêve est que ce manuel vous accompagne des années durant et qu’il vous facilite vraiment la vie ! Le débutant y trouvera les grands repères qui lui permettront d’initier son projet, l'expert une synthèse probablement unique au monde de données sur les cultures vivrières. Ce livre peut être abordé de deux manières : vous pouvez le lire de la première à la dernière page. Les chapitres très techniques peuvent être juste survolés lors de la première lecture, vous saurez qu’ils existent et pourrez y revenir ultérieurement en fonction de vos besoins. N’ayez pas peur du nombre de pages : vivre avec la terre, c’est se lancer dans une aventure complexe qui ne s’apprend pas en quelques lignes ou vidéos. Ce livre n’est pas destiné aux gens pressés ni à ceux qui surfent à la surface des choses ! Prenez votre temps, avancez “au pas du paysan”, c’est un luxe rare de nos jours. Vous pouvez également vous reporter à tel ou tel chapitre pour y glaner les informations que vous recherchez, selon vos besoins du moment. Ceux qui sont avides de solutions techniques préféreront peut-être faire l’impasse sur les concepts en première lecture. Nous vous recommandons cependant d’y revenir lorsque vous en aurez le temps et l’envie car nous nous sommes aperçus, au fur et à mesure des années, que c’est leur compréhension qui nous a permis de progresser techniquement. Nous avons fait le choix de redonner certaines informations importantes à plusieurs endroits du manuel, afin que les lecteurs ne passent pas à côté, quel que soit leur mode de lecture. La bibliographie permettra à ceux qui le désirent d’approfondir leurs recherches en fonction de leurs besoins. Nous espérons que ces pages vous communiqueront notre passion pour la nature et la Vie ! Réalisez vos rêves !

TOME1]

CULTURES VIVRIÈRES ET FORÉTSJARDINS

TOMEI

V. MÉTHODES

PERMACULTURE, ÉCOCULTURE: LA NATURE NOUS INSPIRE INTRODUCTION : VIVRE AVEC LA TERRE

13

23

À L'ÉCOCULTURE

25

15. LES

CONCEPTS

16. L'ESPRIT

DE L'ÉCOCULTURE

PERMACULTUREL

:zsreemhmmnmmmenree 35

43 47 53 59

Il. À L'ÉCOLE

10. DE L'ÉCOSYSTÈME 103

19. LES

129

137 157

DU

BEC

DE

DESIGN

SAUVERA

DESIGNS

DE

163

LE MONDE

189

LA FERME

HELLOUIN

195

IV. UNE APPROCHE NATURELLE DU SOL ET DE LA FERTILITÉ LE

SOL

ET

LES

PAILLIS

…..

23. LES COMPOSTS 24. LES ENGRAIS

FT

mur

VERTS

BOKASHI

ET BIOCHAR

27. MICROFERME

241 257

UTILES, NN

ET FERTILITÉ

38. EN 39. 40. 41.

?

261 271

28. MICROFERMES,

377 383 389 401

VI. DENSIFIER ET ASSOCIER LES CULTURES mme an 42. DENSIFIER LES CULTURES 413 43. LES ASSOCIATIONS DE CULTURES : ET REPÈRES

44. ASSOCIATIONS 35 EXEMPLES

DE

.419 CULTURES

:

memes

VIH. CULTIVER

TOUTE 45. EN 46. LES 47.

L'ANNÉE



DES LÉGUMES TOUTES SAISONS CULTURES SOUS ABRI : ÉQUIPEMENTS SIMPLES CULTURES SOUS ABRI :

LES SERRES

NOTES

290

ANNEXES

293

48. LES COUCHES CHAUDES 49. ORGANISER LA PRODUCTION DU JARDIN sers

nsc

363 369

LES REPIQUAGES PLEINE TERRE LES ARROSAGES LE DÉSHERBAGE LES RÉCOLTES

279

CLIMAT

353 357

453

229 253

ET AMENDEMENTS

26. MICRO-ORGANISMES

223 . ….

14, INTRODUCTION À LA PERMACULTURE

315 329

PRINCIPES

PAYSANS

21. LA STRATÉGIE ORGANIQUE 22. LES

CARBONE,

11I. DESSINE-MOI UNE FERME

DESIGN

DESIGN

17. LE PROCESSUS

25. ENGRAIS

11. LES SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES 109 12. LA BIODIVERSITÉ 13 13. LES PLANTES sssssineercmerranrersrees 117

DU

D'UN

18. LA BEAUTÉ

20.

LA NATURE MURMURE DE LA VIE SOLEIL, LE VENT, LA PLUIE SOL...nririiericamesernrraronerrereense 81

À L'AGROÉCOSYSTÈME

PERMANENTES ie 30. LES BUTTES RONDES 31. LES PLANCHES PERMANENTES

SEMIS DIRECT OÙ REPIQUAGE 35. PRÉPARATION DU SOL 36. LES SEMIS EN PLACE (SEMIS DIRECTS) 37. FAIRE SES PLANTS

PERMACULTUREL

2. LES PRINCIPES FONDATEURS

DE 7. LE 8. LE 9. LE

313

PLATES smrnrrnntiiétetnde este 339 32. AUTRES TYPES DE BUTTES PERMANENTES 343 33. INTRODUCTION AUX CULTURES VIVRIÈRES ie …… 349 34. IMPLANTATION DES CULTURES :

I. NOURRIR LES HOMMES, GUÉRIR LA TERRE 1. DE L'AGRICULTURE

3. L'ÉCOCULTURE : UN NOUVEAU PARADIGME 4. CHASSEUR, CUEILLEUR, PAYSAN 5. LA FERME BIOLOGIQUE DU BEC HELLOUIN sis 6. LES PROGRAMMES DE RECHERCHE À LA FERME DU BEC HELLOUIN

DE CULTURE 29. LES BUTTES DE CULTURE

50. FRUITS ET LÉGUMES

aus

495 CL 505

sesssmreseneemenncntte

DE GARDE

209

519 mue 927

533

TOME

HI

CRÉER UNE MICROFERME VHI. LES LÉGUMES

XI. MULTIPLIER LES VÉGÉTAUX

51. LES

72.

PRINCIPALES

LÉGUMIÈRES

CULTURES

ie

DES 73.

IX. CULTURES LES LES DES LES

LÉGUMES VIVACES MINI-LÉGUMES SALADES TOUTE L'ANNÉE MESCLUNS

56. LES TRÈS

JEUNES

LÉGUMES

58. LES

FLEURS

suisses SES

60. LES PLANTES

MÉDICINALES

ie

XHI. LES ANIMAUX ET LA TRACTION ANIMALE 77. LES ANIMAUX

SAUVAGES

COMESTIBLES

763

SEMENCES

ET BIODIVERSITÉ 75. SANTÉ ET VITALITÉ DU JARDIN 76. ACCUEILLIR LA BIODIVERSITÉ

COMESTIBLES

PLANTES

PLANTES PRODUIRE

XII. SANTÉ DU JARDIN

ASIATIQUES AROMATIQUES

62. LES

…….

meme

59. LES PLANTES 61. LES

761

REPRODUCTION

74. LA REPRODUCTION VÉGÉTATIVE : BOUTURES, GREFFES, DIVISIONS, MARCOTTES eee

FEUILLES,

LES MICRO-POUSSES 57. LES

LA

POTAGÈRES

SPÉCIFIQUES

52. 53. 54. 55.

DE

767

779



787 789 799

X. ARBRES,

sn

XIV. LES FOINS

BUISSONS,

..su 813

FORÊTS-JARDINS

ET LES CÉRÉALES

837

79. LES

839

63, VERS

80. DU BLÉ SANS PÉTROLE

UNE

CIVILISATION

FOINS

845

DE L'ARBRE 64. L'AGROFORESTERIE 65. LES

HAIES

.

:#6069

66. LES PRÉS-VERGERS 67. LES VERGERS 68, LES

PETITS

MARAÎCHERS

FRUITS

sis.

70. CONCEVOIR UNE TI ÊTRE SYLVANIER

NOTES

XV. LES OUTILS ............... 859 81. LES OUTILS ie 861 82. L'ENTRETIEN ET L'AFFÜTAGE DES OUTILS ere 879

XVI. CRÉER UNE MICROFERME

69. LES FORÉTS-JARDINS

FORÉT-JARDIN

85. PAYSANS

DES

AGRICULTURES

ANNEXES

723

VILLES

:

URBAINES

ET PÉRIURBAINES

LES

87.

LA

FERME

MICROFERMES

ET

SON

88.

LE

“MOTEUR FERME

901

?

907

ENVIRONNEMENT

DE

LA

89.

LES

90.

VENDRE

971

HUMAIN” cure

PRODUITS SA

TRANSFORMÉS

D'UNE

929

MICROFERME

92. LE BÂTI 93.

943 DE

ORGANISER

DANS

SA

MICROFERMES,

AGRAIRES DES

SOLIDAIRES

PRODUIRE

96.

MODÉLISER

. 955

DES

CONNAISSANCES

UNE

MICROFERME

97. CONSEILS

AUX FUTURS

MARAÎCHERS

ice ee

98. DÉVELOPPER EN

TOUS

99.

PRENDRE

DU

LE

951

FORMATIONS

FERME

95.

100.

… 939

MICROFERMES,

SYSTÈMES 94.

915 923

PRODUCTION

91. L'ÉCONOMIE

PLUS

.. 963 . 967

.981

L'ÉCOCULTURE

LIEUX

985

SOIN

DU

BEAU

JARDIN

JARDINIER

iii

MONDE

CONCLUSION NOTES

se 743

720

ACTIVITÉS

POUR

ÉCOSYSTÈMES

nn renmnstinnennsette

CHAMPIGNONS

86. QUELLES

....

.

993 999

1001 1004

ANNEXES

1007

BIBLIOGRAPHIE

1026

INDEX

1035

INTRODUCTION

Le jardin c’est la simplicité, notre vraie patrie, le seul refuge idéal où l’humanité se retrouve dans les périodes troublées, loin du bruit

et des fureurs, et à partir duquel elle peut de nouveau se lancer à l’assaut de l'expérience de la modernité... Après la conquête de la Lune, partons à la conquête de la Terre et retrouvons la noblesse

des Paysans: ! Philippe Desbrosses

Ce manuel s’adresse à celles et ceux qui désirent vivre de leur jardin, au sens le plus large : se nourrir toute l’année de leur production, mais aussi, éventuellement, la commercialiser pour en faire leur métier. En d’autres termes, devenir

Dans ce manuel, nous

utilisons le mot “jardin” pour décrire un espace intensément soigné dédié à la production vivrière. Cela peut être le jardin d’une personne seule, d’une famille,

d’une communauté ou celui d’une ferme maraîchère.

jardinier-maraîcher.

Cet ouvrage a été écrit en pensant à toutes les

personnes qui sont en quête d’harmonie avec la Terre. Nos corps sont constitués des aliments

que nous mangeons et nous sommes de plus en

plus nombreux à refuser la pollution ambiante, à l’intérieur comme à l’extérieur de nous-mêmes. Pourquoi devrions-nous accepter un corps saturé de produits chimiques et traverser notre existence dans un monde enlaidi, dont le potentiel de vitalité

est sans cesse érodé ? Du plus profond de notre être, nous désirons respirer un air sain, boire une eau pure, nous nourrir d'aliments produits avec empathie et respect de toutes les formes de vie. Cultiver soi-même tout ou partie de sa nourriture est source de santé et d’épanouissement, pour soi

et son entourage.

L'approche de l’agriculture présentée dans ces pages est résolument novatrice : elle s’inspire de la vie - elle est bio-inspirée. C’est pour marquer

sa différence avec l’agriculture d’aujourd’hui, qui

ne cesse d’artificialiser la biosphère, que nous la nommons écoculture. En s'appuyant sur le génie du vivant et sur un travail réalisé à la main, elle autorise des récoltes étonnamment abondantes et durables, tout en créant de l’humus, en améliorant la biodiversité, en embellissant les paysages.

L'un des principaux intérêts de l’écoculture, c’est

qu’elle permet de s’affranchir progressivement du recours aux énergies fossiles, tout en stockant du carbone dans les arbres et les sols. Elle représente donc une voie élégante pour contenir les changements climatiques. En prenant un soin amoureux de notre lopin de terre, quelle que soit sa taille,

nous pouvons donc contribuer à restaurer l’intégrité de la planète : quelle merveilleuse nouvelle ! Apprendre à cultiver un jardin naturel est une connaissance essentielle qui devrait être enseignée dès le plus jeune âge. C’est poser la fondation d’un art de vivre qui nous met en cohérence avec nos aspirations les plus précieuses. C’est également construire une économie locale reposant sur des valeurs réelles et durables.

PASSER D'UN MONDE À L'AUTRE

La civilisation thermo-industrielle développée au cours du siècle écoulé n’est pas en phase avec les lois de la vie. Elle repose sur l’utilisation massive

des énergies fossiles et des autres ressources non

renouvelables de la planète. Fondée sur le gaspillage, notre société n’est pas légitime et ne peut que s’effondrer au cours des décennies à venir, pour une raison très simple : nous consommons

l'équivalent d’une planète et demie alors que nous

n’en avons qu’une’ ! Il nous appartient d’inventer une nouvelle manière d’habiter la Terre, en faisant preuve de sagesse et de modération. Une certaine vision, héritée du passé, nous pousse

à opposer respect de l’environnement et développement économique des activités humaines. L'observation de la nature nous invite toutefois à nous ouvrir à un nouveau paradigme. Nous

16 INTRODUCTION

“Jai compris très tôt

qu’il fallait résoudre le

pensons fermement qu’il est possible de subvenir à nos besoins légitimes tout en prenant soin de la planète et de nos compagnons de voyage que

sont les plantes et les animaux. Les écosystèmes

naturels sont une source d’inspiration puissante

problème alimentaire

pour bâtir une nouvelle civilisation qui aille dans

pousser votre propre

Nous pouvons cultiver l’optimisme — c’est bon pour la santé ! - sans être naïfs pour autant : la transition de la civilisation industrielle vers une

car, si vous faites

nourriture, vous devenez

plus « puissant »,

c’est-à-dire moins dépendant de ceux

le sens de la vie.

nouvelle civilisation fondée sur le respect de la vie ne se fera pas sans crises majeures. Il s’agit

d’un cycle de mort et de renaissance, à l'échelle de

qui faisaient leur profession de cultiver un

on . jardin, ou marais, pour reprendre l'expressi usage à l’époque, en THÉLNEE du temps Où les

cultures légumières se pratiquaient dans les Zones marécageuses, étaient tout naturellement baptisé “jardiniers-maraîchers”. Lenrs pratiques D'étaien

des pas fondamentalement différentes de celles

autres jardiniers ; leur espace cultivé était sim. plement plus grand et les occupait à temps Plein

Les jardiniers-maraîchers du temps passé avaient

Les en commun un très haut niveau d'expertise. connaissances se transmettalent et s’enrichis. saient de génération en génération. L'art du ma. raîchage avait atteint un sommet dans les jardins

qui essaient de vous contrôler. En fait,

la planète tout entière. Il est hautement probable que nous-mêmes, nos enfants et nos petits-enfants

traverserons des temps troublés, des décennies

parisiens durant la seconde moitié du xix° siècles Lorsque vint le temps de la mécanisation (syno.

ses propres aliments est l’une des choses les plus dangereuses à faire. Vous prenez un risque, celui de devenir libre.”

lesquelles nous devrons apprendre à subvenir à nos besoins essentiels à partir des ressources bio-

sor de l’agriculture industrielle et chimique, un divorce s’opéra : les professionnels adoptèrent

Jules Dervaes, fermier urbain à Pasadena, Californie

aujourd’hui, en aussi grand nombre que possible, revient à accélérer cette transition. Des jardins

je pense que cultiver

de grande précarité, voire de violence, durant

nyme, dans ces pages, de motorisation), puis l'es.

logiques et renouvelables locales, tout en déve-

progressivement

des jardins et des microfermes permaculturels dès

compétence des jardiniers amateurs s’abaissait, car vivre de son potager devenait moins néces-

loppant des solidarités nouvelles au sein de communautés fondées sur le partage équitable. Créer

et des fermes qui pourront constituer autant de

bouées de sauvetage en ces temps difficiles, et être des lieux où s’invente notre devenir.

Pour toutes celles et ceux qui cherchent une nouvelle manière d’habiter la Terre, revenir au jardin est l’un des actes les plus positifs que nous puissions accomplir.

DEVENIR JARDINIER-MARAÎCHER Ces microfermes peuvent être conduites par des

des techniques de plus en plus

éloignées du jardinage, tandis que le niveau de

saire, les supermarchés proposant en abondance et à bas prix les fruits et légumes nés de l’agriculture productiviste. À la Ferme biologique du Bec Hellouin, nous cherchons à réinventer le beau métier de jardinier-maraîcher.

LA PERMACULTURE : UNE NOUVELLE VOIE

La permaculture propose de prendre la nature pour

modèle. Appliqués à l’agriculture, les concepts de la permaculture permettent d'imaginer des jardins

tout droit du xrx siècle. À l’époque, chacun, ou Presque, avait l’âme jardinière. La majorité des habitants de nos pays européens cultivaient un

et des fermes qui soient des lieux où la vie s’épanouisse sous toutes ses formes. Les écosystèmes naturels produisent une biomasse plus abondante que nos espaces cultivés‘, et ce, sans travail méca-

Potager pour s’en nourrir, été comme hiver. Ceux

nique du sol, sans engrais et pesticides de synthèse

jardiniers-maraîchers, un joli terme qui nous vient

Permaculture, écoculture La permaculture à été formulée en Australie à la fin des années 1970 par Bill Mollison et David Holmgren. Elle a pour objectif de concevoir des installations humaines qui fonctionnent, autant que possible, comme les écosystèmes naturels. La permaculture est avant tout un système conceptuel fondé sur le design, un terme qui décrit tout le processus

d'étude du site et de ses occupants, afin de dessiner ensuite un projet parfaitement adapté. Elle n’est pas u? ensemble de techniques agricoles. Son objet est plus vaste et concerne potentiellement toutes les réalisations humaines,

L'écoculture, telle que nous la concevons, a pour objet de produire la nourriture des êtres humains en imitant les écosystèmes naturels. Les outils de design permaculturel sont pleinement en phase avec cet objectif L'écoculture utilise cette méthode de design pour concevoir des agroécosystèmes d’une haute productivité: fonctionnant avec un minimum d’intrants et d'énergie fossile. Même s’il est difficile de donner des définitions précises de la permaculture et de l’écoculture, qui sont encolt

des sciences émergentes, on peut décrire l’écoculture comme une application de la permaculture au secteu' agricole, sans la réduire à cela, comme nous le verrons dans la suite de ce manuel. .

ÿ

É

.

?

VIVRE AVEC LA TERRE

ni énergies fossiles, sans arrosage ni désherbage.

Au fil des chapitres, nous chercherons ensemble comment nos jardins et nos fermes pourraient devenir autant de petits agroécosystèmes autonomes, productifs et beaux.

L'AVENTURE DE LA FERME DU BEC HELLOUIN Perrine et moi nous sommes installés dans la

vallée du Bec, en Normandie, en 2003. Quelques

années plus tard, en 2006, nous avons décidé de faire du maraîchage biologique notre métier. Nous avons créé plusieurs jardins, y invitant les arbres

fruitiers, partout présents, et des animaux, l’en-

semble formant une petite ferme amoureusement soignée, qui est un lieu de vie tout autant qu’un espace de travail.

Chemin faisant, nous avons découvert qu’il est

tout à fait possible de nourrir notre famille en toutes saisons en travaillant à la main ces petits

jardins et de gagner notre vie en commercialisant

nos productions. Nous avons même créé plusieurs emplois permanents, alors que la surface cultivée en maraîchage ne dépasse pas quelques milliers de mètres carrés. La production est abondante, mais aussi savoureuse, recherchée par quelques-uns

des meilleurs chefs étoilés de France. Nous expé-

rimentons de nombreuses pratiques innovantes

et chaque année qui passe nous renforce dans la conviction que la nature est généreuse et que nous avons tout à gagner à nous mettre au service de la vie. Par sa luxuriance et sa fécondité, chaque jardin

permaculturel est un hommage à la Terre-Mère. qui nous le rend bien !

L'impact des recherches scientifiques menées au

Bec Hellouin est considérable - presque inimagi-

nable pour nous, à dire vrai. Lorsqu’en 2010, lors

de la première formation en maraîchage donnée à la ferme, nous avons formulé pour nos étudiants le concept de microferme permaculturelle, nous n’imaginions pas que, sept années plus tard, il ins-

pirerait environ 80 % des projets d’installation en maraîchage biologique dans notre pays ! La traduction de notre premier livre? dans de nombreux pays atteste également l'impact international de cette nouvelle approche : ce concept est aujourd’hui utilisé par des paysans de Chine, de Californie, de Patagonie, du Canada, de Hollande, de Grèce,

d’Espagne, de Belgique ou du Mozambique !

Contrairement aux idées reçues, faire le choix

À l’heure où la tendance lourde est à une industrialisation de l’agriculture biologique, l’écoculture représente une formidable opportunité de renouveler celle-ci dans le sens d’une activité plus naturelle, plus durable et productive, mieux adaptée au monde de demain.

travaillant entièrement à la main nous produisons, en valeur, autant de légumes sur 1 000 mètres car-

L’honnêteté nous pousse à souligner que les bons résultats obtenus au Bec Hellouin ne sont pas pour autant aisés à atteindre. Se nourrir de son jardin été comme hiver -— et bien davantage encore vivre de la vente de sa production - demande beau-

de travailler entièrement à la main sur une toute petite surface intensément soignée offre de nombreux avantages. Une étude technico-économique, menée dans notre ferme de 2011 à 2015 en partenariat avec AgroParisTech et l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), a démontré qu’en rés que nos confrères maraîchers bio sur 1 hectare avec un tracteur. Et nous créons autant de valeur par heure travaillée, sur un territoire bien plus

petit, avec un investissement initial réduit et des

frais de fonctionnement inférieurs.

D’autres programmes de recherche ont permis de constater que le sol de nos jardins s’améliore

très rapidement, en stockant des quantités excep-

tionnelles de carbone et de minéraux, que notre microferme est un puits de carbone, que la biodiversité s’accroît. L'approche décrite dans ce manuel permet donc de créer des microfermes atteignant une véritable viabilité écologique, économique et sociales.

coup de connaissances et de technicité, et tout

autant de travail. L'expérience s’acquiert au fil des ans, nous-mêmes ne sommes parvenus à vivre du

maraîchage qu’au terme d’années de recherches

et de labeur acharné.

S’IMMERGER DU VIVANT

DANS

LA LOGIQUE

C’est précisément parce que l’aventure est difficile, qu’elle demande du temps et des compétences, que nous souhaitons dans ces pages partager

le plus largement possible ce que nous avons

Travailler à la main des petits jardins nous permet de nourrir notre famille et de gagner notre vie en commercialisant nos productions.

17

18

INTRODUCTION

ours des glané en chemin, afin de jalonner le parc

la création jardiniers-maraîchers, facilitant ainsi que la Pour mes. ofer d’un grand nombre de micr de ter d’évi ette perm lecture de ce manuel vous inunts seme stis inve la fatigue, des soucis et des

Vivre du maraîchage est une aventure difficile,

qui demande beaucoup de connaissances et de travail. L’approche naturelle et créative décrite dans ce manuel vous propose des techniques d’une très haute efficacité.

nous tiles, nous dirons à nos lecteurs tout ce que

riculture avons appris en explorant cette micro-ag

bio-inspirée, y compris les tours de main et les les “secrets”, souvent jalousement gardés par plus maraîchers expérimentés. Sans occulter non nos erreurs et les pièges potentiels (nous sommes si souvent tombés dedans !). Une approche permaculturelle de Pagriculture est, par définition, holistique : elle cherche à appréhender le système dans son ensemble - ses dimensions environnementales et économiques, son impact sur la vie du jardinier-maraîcher, sur

sa communauté et sur la biosphère -, car tout est

lié. Ce manuel vous propose une immersion dans une approche qui a une cohérence profonde, mais qui diffère de ce que des générations d'agriculteurs nous ont transmis. Il s’ouvre donc logiquement par une première partie proposant une relecture des

fondamentaux de l’agriculture et une réflexion sur notre rapport à la nature. Suivront des chapitres présentant l'approche élaborée au Bec Hellouin, la permaculture et la manière de concevoir une micro-

ferme. La suite du manuel sera consacrée à de nombreuses thématiques, abordées sous un angle plus technique, décrivant d'innombrables gestes

et pratiques qui vous permettront de retr

ans

cette approche dans le contexte qui est le en fonction de vos aspirations.

Ce manuel est donc conçu un peu comme de

les premières images, tournées au grand

vous donneront une vision large du Paysage

nous ferons quelques plans moyens et ensu

nombreux zooms au Cœur de ce paysage.

Nous avons cherché à vous agréable et vivante, en évitant tions techniques accessibles Notre objectif est de donner

en rendre Ja |, de longues cons aux seuls spéci; au lecteur des

lecture et de compréhension du monde vivar

de développer en lui une intelligence de la: DU

JARDIN

VIVRIER

À LA MICROFERME

Dans certaines régions du monde, la micrc

culture a fait ses preuves depuis des temps:

moriaux. Pour concevoir la méthode de la]

du Bec Hellouin, nous nous sommes inspi

formes traditionnelles d’agriculture réputé

les plus productives qui soient, mais aussi d nières découvertes scientifiques, en y ajou dimension permaculturelle. Les techniqu crites dans ce manuel sont d’une très hau! cacité : la nature est tellement productive !

Ce manuel propose une approche mode

créative permettant de concevoir des micro

pouvant aller de quelques dizaines de mètr rés, en ville, à quelques hectares à la campa microferme permaculturelle représente ui fonde mutation par rapport aux conceptio anciennes du jardin potager et de la ferme sionnelle. La frontière devient plus poreus ces univers et chacun, s’il dispose ne serait d’une simple pelouse, peut renouer avec cines paysannes, découvrir la joie de trave

ses mains et se nourrir de sa production, m vit en milieu urbain et exerce une autre pre

La permaculture nous invite à sortir de le ciation et du découragement pour enti l'ère des solutions. Elle se fonde sur une

respecter la terre et les êtres humain

ger équitablement les ressources. Po! vous immerger dans la démarche ment Hellouin, nous vous invitons à lire not

dent livre : Permaculture. Guérir la Ter les hommes, car il complète utilement c Le premier livre traite davantage des ci

ce manuel de leurs applications, ils sor mentaires et s’enrichissent mutuellem

si chacun peut être lu de manière auto Nous

vous

souhaitons

votre jardin !

des jours he!

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DE L'AGRICULTURE À L'ECOCULTURE Alors que l’agriculture est, normalement, l’utilisation gratuite de l'énergie solaire par la plante,

celle-ci ne représente plus que 10 % de l'énergie nécessaire aux plantes cultivées. L'agriculture industrielle consomme 10 calories de pétrole pour produire 1 calorie alimentaire de plein champ et 36 calories de pétrole pour 1 calorie alimentaire hors sol. Or la France importe 100 % de son pétrole. C’est la première fois, dans l’histoire de l'humanité, que celle-ci fait dépendre son

alimentation du pétrole et non pas de cette énergie durable qu’est le soleil. Cette “pétroculture” a accompagné l'explosion démographique actuelle, ce qui nous amène à nous poser la question

Créer un jardin bio-inspiré est un engagement fort en faveur de la planète et des générations à venir. Chacun de nous peut contribuer à la naissance du monde de demain.

suivante : comment nourrira-t-on les générations futures si le pétrole vient à manquer, maintenant que nos sols sont fertilisés maïs ne sont plus fertiles' ? Lydia et Claude Bourguignon

CE LIVRE EST PORTEUR BONNE NOUVELLE !

D’UNE

L’humanité est aujourd’hui à la croisée des chemins : notre impact sur la planète est devenu tel qu’il menace notre survie même. Comme évoqué

dans l'introduction, un effondrement de notre ci-

< En Amazonie, les Wayanas vivent de la chasse, de la pêche et de la cueillette. Ils ouvrent également des clairières

dans la forêt pour cultiver du manioc et d’autres plantes.

En partageant à de nombreuses reprises la vie d’une communauté wayana, en immersion totale dans la nature, j'ai ressenti jusqu’au fond de moi la nostalgie de ce

mode de vie qui a été le nôtre pendant tant de générations.

Une expérience bouleversante. Les séjours effectués chez les peuples premiers ont

transformé à jamais ma

vision du monde et marqué

Profondément la Ferme du Bec Hellouin.

vilisation n’apparaît plus comme une possibilité lointaine, mais comme une échéance qui ne cesse de se rapprocher. Nous sommes en effet confrontés à un terrible dilemme : si nous perpétuons le système actuel, gourmand en énergies fossiles et

devraient

s’accentuer considérablement,

sous

l'effet conjugué d’une population croissante, de ressources se raréfiant et des changements climatiques. Ces sombres perspectives nous emplissent

d’une légitime anxiété, surtout lorsque nous pensons à nos enfants qui subiront les conséquences de notre

inconscience.

Pourtant,

ce livre se

incapables de contenir le changement climatique au-dessous de la barre fatidique des 2 degrés. Mais si nous décidons collectivement de nous passer dès à présent des énergies fossiles afin de limiter la dérive du climat, c’est tout notre modèle de so-

veut porteur d’une bonne nouvelle : les solutions bio-inspirées qu’il propose permettent, dans un même mouvement, de contribuer à la guérison de la planète tout en subvenant aux besoins de base des humains. Plus tôt nous mettrons en œuvre ces solutions, moins la transition sera douloureuse. Pour notre part, nous ressentons une vraie urgence : nous sommes engagés dans une course contre la montre en faveur du climat et de la planète, en faveur des générations à venir.

effondrement et beaucoup de souffrances... Donc

Bien involontairement, les agriculteurs sont en

Les tensions et conflits à travers le monde se jouent de plus en plus autour des questions d'accès

leur activité affecte directement la biosphère. Même si tout n’est pas négatif, force est de constater que, globalement, l’agriculture contemporaine se révèle avoir un impact puissamment destruc-

autres ressources non renouvelables, nous serons

ciété qui s'écroule. Dans les deux cas, il y aura un

la solution est de penser la transition !

aux ressources naturelles : eau, foncier, énergie,

nourriture. La sécheresse et les mauvaises récoltes

dans des régions vulnérables entraînent pauvreté

et désespoir, déstabilisant des sociétés qui peuvent sombrer dans la violence, engendrant des flots

de réfugiés qui peinent à trouver des terres d’ac-

cueil. Durant les décennies à venir, ces problèmes

première ligne de la guerre déclarée à la nature :

teur tant sur les milieux naturels que sur la santé humaine. Le beau métier de paysan a été profon-

dément perverti. Pourtant, aucun agriculteur n’a jamais souhaité appauvrir son sol ni produire une nourriture toxique. Comment en sommes-nous arrivés là ?

26

PARTIE

|! NOURRIR

GUÉRIR LA TERRE

LES HOMMES,

Dans ce cha

pitre, nous vous proposons d’embar-

la révolution agricoles.

re occidentale. Vous verrez à quel PRIRÉGE VOYESE

Pour assurer leur survie, les communautés de

gnements essentiels. Il bouscule nombre d idées reçues et indique clairement des voies novatrices à explorer pour inventer l'agriculture de demain.

les ressources biologiques disponibles sur 1,

survoler en quelques pages l'histoire de Pagricultudans le temps est passionnant et riche d'enseir

“La Terre n’appartient pas à l’homme, c’est

l’homme qui appartient

à la Terre. De même que

le sang unit une même

famille, il y a un lien entre toutes choses. Cela, nous le savons.” Chef Seattle

cognitive, ils n’étaient plus qu’une centaine lors de

quer dans une machine à remonter le temps pour

AUX

Avant

SOURCES

l'invention

DE L'HUMANITÉ de

lPagriculture,

durant

fut l'essentiel de son évolution, l’être humain

longchasseur-cueilleur. Les préhistoriens ont des ent nnem viro l'en sur act l’imp que pensé temps peu à clans de chasseurs-cueilleurs était minime, près équivalent à celui des animaux. Des décou-

vertes récentes ont cependant remis en question cette vision d’un âge d’or de l'humanité au sein duquel êtres humains et bêtes vivaient en harmonie.

Il y a environ 70 000 ans, Homo

sapiens, une €s-

pèce humaine apparue depuis peu sur la scène

du monde, entama une profonde révolution co-

gnitive en développant de nouvelles manières de penser et d'échanger. Sapiens devint progressivement capable de décrire des concepts immaté-

riels, donnant naissance aux mythes, à l’art, à la

culture. Cette capacité d'imaginer et de raconter ouvrit la possibilité de fédérer, autour de récits, de légendes et de croyances partagées, des individus nombreux et bien organisés - bien mieux en tout cas que les clans d’espèces humaines plus

archaïques. Dès lors, l’essor d’Homo sapiens à tra-

vers le monde, à partir de son berceau d’Afrique orientale, fut rapide. En colonisant de nouveaux territoires, les sapiens menèrent les autres espèces humaines qui les peuplaient vers une extinction

rapide (même si diverses formes de métissage ont

pu se produire : de 1 à 4 % de l’ADN des populations modernes d’Europe est hérité de l’ADN des hommes de Néandertal*).

chasseurs-cueilleurs durent toutefois recher. cher un équilibre entre leurs prélèvements et territoire, forcément restreint, qu’elles étaient

capables d'explorer. Homo sapiens dut apprendre à tempérer son impact destructeur sur son envi.

ronnement. Il utilisa pour cela sa capacité à mettre des mots sur l’immatériel ; cette Capacité qui lui avait conféré un pouvoir inédit sur le reste du monde vivant se révélait être aussi la

solution pour inventer les chemins d’une cohàa.

bitation harmonieuse. L’être humain est pétri de

culture et de symboles. Les mythes et croyances

des communautés de chasseurs-cueilleurs qui subsistent encore de nos jours contiennent de nombreux éléments visant à maintenir un équilibre entre l’être humain et la nature, sous forme

d’interdits et de tabous rituels par exemple. La spiritualité des Amérindiens est centrée sur Ja notion d’unité profonde de toutes les formes de

vie. En cultivant le respect de la nature, les tribus sapiens sont remarquablement parvenues à

restaurer l’équilibre, sinon nous ne serions pas là aujourd’hui ! Elles ont cependant transformé les paysages bien plus profondément que nous ne le pensons habituellement. Ce que nous prenons pour une nature sauvage est généralement un milieu façonné durant des millénaires par nos ancêtres chasseurs-cueilleurs.

DU BÂTON À FOUIR

À LA MOISSONNEUSE-BATTEUSE : BREVE HISTOIRE DE L'AGRICULTURE

Tout d’abord, précisons qu’il n’existe pas une, mais

des agricultures. Avec l’ethnocentrisme qui trop

espèces humaines : chaque arrivée sur de nouveaux territoires s’est également accompagnée de

souvent nous caractérise, nous apprenons à l’école que “l’agriculture est née dans le Croissant fertile au début du Néolithique”. C’est vrai pour l’agriculture moyen-orientale et occidentale, mais il y eut d’autres foyers d'apparition de l’agriculture dans le monde : en Chine, en Afrique, en Amérique’

animales, à commencer par les plus intéressantes

toutefois à la tradition occidentale, car elle exerc*

Les bandes

nombreuses

et organisées

d’'Homo

sapiens n’ont pas simplement éradiqué les autres

extinction rapide d’un grand nombre

pour

des chasseurs

: les grands

d’espèces

mammifères.

Durant les deux mille ans qui ont suivi l’arrivée de sapiens en Amérique du Nord, le continent perdit

34 de ses 47 espèces de gros mammifères : mam-

mouths et mastodontes, chevaux et chameaux, paresseux géants pouvant atteindre 6 mètres de haut et rongeurs de la taille d’un ours5... L'efficacité des techniques de chasse de nos ancêtres de la fin du Paléolithique a provoqué une chute importante du nombre de gros animaux : environ

200 genres de mammifères terrestres de plus de

50 kilos peuplaient la planète lors de la révolution

Dans les pages à venir, nous nous intéresserons

aujourd’hui une influence planétaire, sans oublie! que d’autres berceaux de l'agriculture ont privilégié les arbres et les forêts, ce qui leur a garanti unt grande stabilité. Les peuples premiers se rangent

habituellement dans cette catégorie.

En inventant l’agriculture, il y a 8 000 à 12 000 ans V'Homo sapiens a profondément transformé s0?

rapport à la nature, avec des conséquences parfo®

tragiques. Les grands foyers de développement |

l’agriculture ont été le plus souvent désertifiés :

tel point que certains s'interrogent, à l'instar ©

CHAPITRE1

DE L'AGRICULTURE À L'ÉCOCULTURE

27

< L'arrivée d’une agriculture de steppe en Afrique du Nord a engendré une désertification dramatique. Les oasis sont une tentative réussie de recréer des agrosystèmes équilibrés, grâce à la présence des arbres et à une gestion sobre et efficace des ressources en eau.

Joseph Pousset, lui-même paysan : l’agriculteur

principalement constituée de plantes annuelles, plus gourmandes en travail, en fertilité et en eau que les plantes vivaces. En cela, les agrosystèmes

Les premiers agriculteurs sélectionnent les plantes et les animaux qui leur sont les plus utiles et les fa-

s’écartent encore davantage des milieux naturels.

serait-il le “meilleur ennemi de la nature‘” ?

vorisent, au détriment des autres. Ils transforment

leur environnement pour servir les besoins de ces

plantes et de ces animaux. L’écosystème naturel est progressivement remplacé par un agrosystème - un écosystème anthropisé, aménagé par l’être humain. “Comme [agriculteur] doit bien substide tuer à l'équilibre naturel un équilibre artificiel,

désastre en découverte, c’est toute la dynamique

du système qu’il doit finalement penser, com”

Calame’. prendre et reconstituer”, écrit Matthieu

l’agriculture moyen-orientale est née autour de

la mer Noire, dans un paysage caractérisé par les

Notre agriculture moderne porte toujours les marques de l’héritage néolithique : elle a pris naissance dans un milieu ouvert. “C’est à partir de cette expérience primordiale que l’homme développe sa pratique, qu’il étendra aux nouveaux écosystèmes qu’il va coloniser. Au fur et à mesure qu’ils migreront vers des espaces souvent densément boisés,

les premiers agriculteurs auront le souci de recréer

les conditions de vie originelles de leurs plantes et de leurs animaux. Pour cela, ils vont défricher

pour créer une steppe ou une forêt peu dense.

espèces, et aucune n’est

fortement tributaires de leur héritage. L'homme

l’étaient à Vorigine, mais

Plusieurs millénaires après, nous sommes restés

steppes, des espaces largement ouverts, bien dif-

euro-méditerranéen a, globalement, essentielle-

dominé par la forêt. Les premiers agriculteurs ont

détriment des autres écosystèmes. Si donc, dans

férents du biotope originel de l’Europe tempérée,

choisi dans cet environnement des plantes (orge,

lentille, blé...) et des animaux (ovins, caprins,

bovins, équins) qui allaient constituer le socle

sur lequel se développerait l’agriculture moyenorientale : des plantes et des animaux des steppes.

Notons l'importance prise, dès l'invention de l’agriculture, par certaines graminées sauvages croissant dans les sols moyennement fertiles des steppes. Elles deviendront progressivement nos

céréales cultivées. Elles ont perdu, au cours de leur

long compagnonnage avec les humains, le caractère vivace qu’elles ont pu avoir sous leur forme sauvage, Il en va de même pour la plupart de nos

légumes. La nourriture cultivée au fil des âges est

“Aujourd’hui, la plus grande partie de la nourriture consommée dans le monde ne provient que de vingt

ment défriché. Il a étendu le système steppique au un premier temps, dans son berceau d’origine, l'agriculture a mimé l'écosystème spontané, elle

a, en migrant, modifié profondément les autres écosystèmes qu’elle rencontrait. Elle a essentiellement « steppisé » la forêt.”

Dès la préhistoire, l'essor de l’agriculture entraîne des désastres écologiques importants. Lorsque l’agriculture pénètre l'Afrique du Nord, s il y a 6 500 ans, le Sahara est vert. Les premier praet ux troupea leurs paître font y eurs agricult tiquent une céréaliculture d’abattis-brûlis, La

destruction des arbres par le feu et par les dents des ruminants contribue à la destruction du cou-

vert végétal. L'influence des humains se conjugue

pérenne ! Certaines

au cours des dix mille ans qu’a duré l’odyssée de amélioration des cultures nous avons

systématiquement fait disparaître leurs caractéristiques pérennes et

résistantes [...]".” Janine M. Benyus

28

PARTIE

I! NOURRIR

LES HOMMES,

GUÉRIR LA TERRE

probablement à une évolution climatique pour Nord. provoquer la désertification de l'Afrique du

toutes les autres [...]. Les montagnes de l’Attique

lonné par des bœufs, il y a 4 000 ans les chevaux

alors de beaux arbres, des cultures et de prodigien, pâturages pour les troupeaux. Chaque année, la contrée profitait au mieux de l’eau qui lui venait de Zeus car, au lieu de la laisser perdre en S’ÉCOUlant vers la mer comme aujourd’hui, elle possédait à.

“II y a 6 000 ans, le SaBarz occidental était sil-

de pouvaient encore le traverser, mais à partir

pour500 avant J.-C., seuls les dromadaires le oît ion s’accr ificat ront De nos jours, la désert

“C’est le changement brutal d’une végétation climax pérenne adaptée aux excédents de pluviométrie, la forêt, et son remplacement par une végétation rase de graminées annuelles qui explique les 2 milliards d’hectares de désert créés par l’homme en quatre mille ans d’agriculture”.” Claude et Lydia Bourguignon

de manière exponentielle.

PREMIERS DÉSASTRES

ÉCOLOGIQUES

EN

EUROPE

ée du Danube Les plaines plates et fertiles de la vall

voie de péoffrent aux premiers agriculteurs une de leurs ées . Arm nétration du continent européen abatie d’As es s venu haches de pierre, les peuplade ent, brûl les puis er séch sent tent les arbres, les lais res cend les es que rièr clai des t ouvrant dans la forê

fertilisent. Les agriculteurs du Néolithique les cultivent jusqu’à épuisement du sol, profitant de l'excédent de fertilité stocké dans la végétation de

la forêt. Autour des villages, les animaux venus des s steppes d’Anatolie broutent la végétation. Doté

qui maintenant ne peuvent plus nourrir d’abeilles

étaient couvertes de forêts profondes. Il y avai,

sez de bonnes terres pour la recueillir en son Sein, Cette eau [...] procurait un cours intarissable aux

sources et aux fleuves [...]. [Après la déforestation) tout ce que la terre avait de gras et de meuble ;

coulé tout autour et, du territoire de l’Attique, il ne reste plus aujourd’hui que son corps décharné»

Le géographe grec Strabon5 a écrit qu’un écureuil

pouvait traverser l'Espagne en allant d’arbre en

arbre des Pyrénées jusqu’au détroit de Gibraltar sans poser le pied à terre ! Ce pays est aujourd’hui

en proie à une désertification sévère. LA CIVILISATION

DE L’OLIVIER

du rumen, estomac peuplé de bactéries capables de digérer la cellulose, ils se nourrissent des jeunes pousses des arbres et bloquent la régénération de la forêt. Cette agriculture primitive épuise rapi-

Pour remédier à ces désastres, les agriculteurs du pourtour méditerranéen inventent les premiers

rester au même endroit plus d’une quinzaine

(lentilles, pois chiches, céréales, légumes) ou à de l'élevage. Cette révolution agronomique va per-

dement les ressources et ne peut nourrir qu’une population faible et mobile, contrainte de ne pas d'années.

Lorsque les populations se sédentarisent, le couvert

forestier s’amenuise et les désastres écologiques surviennent, longtemps, bien longtemps avant l'apparition de l'écriture en Europe ! En France, les plateaux calcaires du Languedoc accueillent une po-

pulation nombreuse vers le milieu du III° millénaire avant J.-C. Puis la destruction de la forêt a rendu ces causses stériles jusqu’à nos jours.

Un témoignage éloquent de Platon relate la dé-

sertification de la Grèce antique : “En ce tempslà, la terre de notre contrée dépassait en fertilité

systèmes agroforestiers : quatre mille ans après

avoir domestiqué les céréales, ils sélectionnent des oliviers sauvages qu’ils implantent dans leurs champs. Les oliviers sont associés à des cultures

mettre de retrouver un équilibre menacé : en de nombreux endroits du pourtour méditerranéen, la

civilisation de l'olivier va perdurer pendant cinq mille ans. Dans les régions plus montagneuses,

les châtaigneraies procurent des récoltes pour les

êtres humains et les bêtes. La civilisation de l’oli-

vier se maintient encore en de nombreux endroits du pourtour méditerranéen. Cette réussite peut

toujours nous inspirer : chaque fois que les agriculteurs créent des systèmes agro-sylvo-pastoraux, ils gagnent en productivité et en durabilité.

L'AGRICULTURE MÉDIÉVALE

Durant les siècles troublés qui suivent l’effondre-

ment de l’Empire romain, l’agriculture médiévale

en Europe tempérée, peine à nourrir correctement les populations. Les paysans ne comprennent Pé

bien les mécanismes de la fertilité, ils associent mal l’agriculture et l'élevage. Autour des villages

leurs agrosystèmes sont constitués d'espaces cloi sonnés, de trois types principaux :

- L'ager, champ cultivé consacré aux céréales ; — Le saltus, espace où l’on mène paître le bétail — La sylva, forêt utilisée notamment pour l’élevas® des porcs.

Les animaux se nourrissent dans la forêt et l*°

espaces naturels, puis reviennent le soir vers

parcelles cultivées où ils sont parqués pour : nuit. Ils effectuent un certain transfert de fertili!”

nee

CHAPITRE1

DE L'AGRICULTURE À L'ÉCOCULTURE

insuffisant toutefois pour maintenir la producti-

vité de l’ager, Ce qui oblige à laisser celui-ci en

jachère entre le tiers et la moitié du temps. Les

terres collectives, saltus et sylva, sont négligées et mal entretenues. En temps de famine, les plantes

sauvages sont largement mises à contribution.

L'AGRICULTURE DU XVIIIS SIÈCLE

Le Siècle des lumières voit l'essor de la culture

scientifique et un intérêt grandissant pour les questions agricoles. “À partir du xvirr: siècle se

développe une approche consistant à mieux utiliserles périodes de jachère interculture. Plutôt que

de laisser la terre à nu « se reposer » entre deux

cultures de céréales, pourquoi ne pas y cultiver des fourrages qui serviront à nourrir les animaux et accéléreront la reconstitution du sol! ?” écrit

lagronome Matthieu Calame. Il s’agit d’une forme d'intégration de l’ager et du saltus.

plus tard, les parcelles s’entourent de haies, les

vergers Se répandent, associés à des cultures ou à de l'élevage. C’est l'intégration de l’ager, du saltus et de la sylva au sein de la même parcelle, que

lon peut qualifier d’agro-sylvo-pastorale. Associer

étroitement les arbres fruitiers, les végétaux vés et les animaux était déjà la solution qui permis aux agriculteurs méditerranéens, mille ans avant notre ère, de pérenniser agrosystèmes.. une solution éprouvée qui toujours nous inspirer aujourd’hui !

cultiavait trois leurs peut

L'AGRICULTURE AU XIX° SIÈCLE En Europe du Nord, au siècle de la révolution industrielle, l’agriculture se perfectionne. De nouvelles plantes venues d'Amérique (courges, pommes de terre, tomates, haricots, maïs) se généralisent et le système de polyculture-élevage gagne en sophistication. Il permet des améliorations très sensibles. L'arbre, toutefois, reste marginal : l’agriculture donne la prédominance au blé et à la vache. Associés au cheval, ils sont synonymes de richesse dans l'imaginaire paysan, même s’ils restent le privilège des plus aisés. Le labour est de plus en plus pratiqué, rendu posSible par le cheval de trait, le collier d’épaule, la Charrue avec soc de fer et versoir qui permettent de retourner efficacement les prairies. Ces la-

bours peu profonds, pratiqués avec les animaux de trait, autorisent une alternance, sur une même

parcelle, de cultures et de prairies intégrant des légumineuses. Ce système fonctionne bien en Europe tempérée, là où prédominent les climats

OCéaniques à hivers doux et continentaux à hivers froids, La minéralisation (la mise à disposition des Nutriments pour les plantes) est faible à l’arrivée

de l’hiver, lors des labours, période où le lessivage

Intense risquerait d’emporter les précieux nutriMents, et cette alternance permet de concilier

17 VS nr en

conne

productivité élevée et maintien de la fertilité. Dans les pays du Sud, où la minéralisation est forte et la dégradation de la matière organique rapide, les labours donnent de mauvais résultats et provoquent un épuisement rapide des sols.

À partir du milieu du siècle, les chevaux de trait sont

sélectionnés pour gagner en puissance : ils tirent des machines de plus en plus lourdes, préparant Varrivée des premiers tracteurs au siècle suivant. L'AGRICULTURE

CONTEMPORAINE

Vers 1900, en France, les paysans représentent tou-

jours la moitié de la population active. Ils paient un lourd tribut aux deux guerres mondiales successives. Au sortir du second conflit, l'Europe meurtrie cherche à atteindre son autonomie alimentaire et l’agriculture se lance dans une course en avant sans précédent. La mécanisation, de plus en plus sophistiquée, se généralise, ainsi que l’utilisation massive de fertilisants de synthèse, d’herbicides et autres pesticides chimiques. Le remembrement met à mal le couvert arboré : les haies, les talus, les mares et les bosquets disparaissent sous les bulldozers. Un pas de plus vers la steppisation de nos campagnes : en percevant les arbres et la diversité du monde vivant comme

autant d’obstacles,

les agronomes de la révolution verte s’inscrivent sans le savoir dans la continuité de leurs ancêtres du Néolithique ! Pour le monde paysan et la société dans son ensemble, cette agriculture moderne apparaît comme

A En Europe, les bocages ont été progressivement mis en place au cours des siècles écoulés. Ils associent étroitement les

arbres, les plantes cultivées et les animaux. On y retrouve les

caractéristiques d’un système permaculturel : de nombreux éléments interagissent pour créer un milieu résilient et productif. L'influence bénéfique d’un bocage se fait sentir sur le climat, plus doux et moins venteux. Ces paysages traditionnels ont été mis à mal par l’essor de la motorisation agricole.

“Le fondement de Pagriculture est la

connaissance du naturel des terroirs que nous voulons cultiver [...]

et employans à propos et argent et peine,

recueillons le fruit du bon mesnage, que tant nous souhaitons : c’està-dire, contentement

un progrès considérable. Les rendements de blé

avec modéré profit et honneste plaisir'7.”

tivité par travailleur croît dans des proportions

Olivier de Serres, 1620

atteignent 100 quintaux par hectare. La produc-

inimaginables. Les exploitations grandissent sans

cesse, tandis que le nombre d’actifs dans le secteur

29

30

PARTIE I NOURRIR

LES HOMMES, GUÉRIR LA TERRE

- Les fertilisants chimiques, dont l'usage ; com mencé à se généraliser au sortir de la Premi

Guerre mondiale pour recycler les stocks qe trates utilisés par l’industrie de l’armement, st,

|

mulent la croissance des plantes. Dopées par de,

apports importants d’azote, les bactéries qu Sol s’en nourrissent, digérant en parallèle de grandes quantités de matière organique. La Minéralisa. tion de celle-ci est donc accélérée. Lutilisatio,

massive d'engrais azotés provoque de ce fait Une

chute du taux de matière organique des sols, une destruction de l’humus. De plus, leur Sÿnthèse est très coûteuse en énergie puisqu'il faut jusqu, 3,5 tonnes de pétrole pour fabriquer 1 tonne d'en. grais azoté. - Le travail mécanique, notamment les labours, de plus en plus profonds, engendre une déstruc. turation des sols. L’injection régulière de quantités

A Durant la première moitié du xx° siècle, l’arrivée des engins motorisés dans le monde agricole a été

universellement perçue comme un progrès. En

France, un choix géopolitique a été fait de privilégier l'industrie au détriment de l'agriculture. Les tracteurs

ont autorisé l'exode vers les villes de millions de paysans destinés à devenir ouvriers dans les usines. Avec près

d’un siècle de recul, on

peut mesurer l’ampleur des dégâts environnementaux et sociétaux provoqués par

la collusion des techniques et des politiques agricoles.

agricole, en France, chute, à la fin du xx° siècle,

au-dessous des 3 % de la population active. Dans le même temps, le prix des denrées alimentaires

baisse constamment, du fait notamment des subventions de la Politique agricole commune, qui

atteignent 40 % du budget de l’Europe. Ces mutations reflètent une volonté politique : libérer

de la main-d'œuvre rurale et du pouvoir d’achat

en faveur du secteur industriel. L'organisation du secteur agricole, de fait, est calquée sur l’industrie et vise une production de masse à bas coût. Dans

l’imaginaire collectif, travailler la terre est perçu comme une activité du passé, l’industrie et les services comme l'avenir d’une société marchandisée. Maïs, au tournant du millénaire, il apparaît clairement que l’agriculture industrielle, après des dé-

buts triomphants, s'enfonce dans une impasse :

importantes d'oxygène vient favoriser le métabo. lisme bactérien et l’oxydation de la matière Organique, constituée notamment de carbone : celui-ci est rejeté dans l'atmosphère sous forme de dioxyde

de carbone (CO), avec des conséquences néfastes tant pour les sols, qui s’appauvrissent, que pourle climat mondial, qui s’en retrouve profondément perturbé.

- L'irrigation des cultures se développe partout dans le monde, grâce aux puissants systèmes de pompage rendus possibles par l’utilisation des

énergies fossiles. L'épuisement progressif des lacs et des fleuves contraint à puiser dans des nappes

phréatiques de plus en plus profondes. Mais les

importantes quantités d’eau utilisées dans le secteur agricole provoquent trop souvent une remon-

tée des sels minéraux par capillarité et les terres

arables salinisées deviennent progressivement stériles.

pour maintenir la production à un niveau élevé,

Ces différents facteurs, le plus souvent conjugués

et à mesure que les agrosystèmes

tion massive de la production. À plus long termé

il faut augmenter sans cesse les intrants, au fur s’épuisent. Les

dégâts collatéraux pour la nature et la société sont de plus en plus visibles et la durabilité du système

D’UNE

MORT

ANNONCÉE : LA FIN DE L'AGRICULTURE

ils provoquent une baisse importante et générr

lisée du taux de matière organique des sols qui en perdant leur structure, deviennent beaucou?

apparaît compromise.

CHRONIQUE

engendrent dans un premier temps une augment

INDUSTRIELLE

Le sol est la fondation vivante et dynamique sur

laquelle se construit tout système de production

agricole, À quoi bon produire beaucoup si l’on

épuise la terre pour les générations à venir ? Les rendements élevés, soutenus par des quantités im-

portantes d’intrants, par un développement accé-

léré de l'irrigation et par un recours immodéré aux

énergies fossiles, ont longtemps masqué le fait que les terres arables étaient mises à mal, et ce, pour trois raisons essentielles :

plus vulnérables à l’érosion. Les vents et les plui®

emportent les particules les plus fines, qui son

aussi les plus fertiles. Actuellement, pour chaqu®

tonne de nourriture produite dans le monde, d°"

à 16 tonnes de terres arables sont définitiven®!" perdues". Selon Claude et Lydia Bourguign0" spécialistes des sols, 1 milliard d'hectares “

terres arables ont été détruits en quatre mille”

d'agriculture, et 1 milliard d'hectares supplé"*"

taires au cours des cent dernières années”: pe de personnes ont pris conscience de Pampleu" |

cette Catastrophe écologique rarement médiati

L'agriculture industrielle s’est donc enfermée”,

une stratégie de maximisation des rendemen®

CHAPITRE 1

court terme, au détriment de sa durabilité et du

bien-être des générations futures.

Et pourtant, nombre d’acteurs du secteur agricole

demeurent encore persuadés de l'efficacité de l'agriculture productiviste. Matthieu Calame entend casser le mythe : “À partir de 1950, l’agriculture va s’engager dans une régression agronomique d’une ampleur sans précédent historique connu, au point de revenir quasiment à son point d’origine : se généralisent des systèmes inférieurs, sur le plan agronomique, aux pratiques néolithiques mais compensant leur faiblesse agronomique par

Pimportance des moyens chimiques et énergétiques mis en œuvre, masquant l’impéritie des pratiques [...]. [Les] nitrates, en fournissant une

fertilité artificielle, vont mener à « simplifier » les

agrosystèmes dans un mouvement vertigineux de déconstruction de l’agronomie. Ils conduisent dans un premier temps à une dissociation entre élevage et culture, puis dans un deuxième temps à des systèmes en monocultures [...]. C’est vers ce modèle désastreux et primitif que tend l’agriculture depuis'un siècle [...]. Le niveau agronomique d’une exploitation moderne est désormais revenu à un stade néolithique, avec la puissance en plus*°.” Force est de reconnaître que la dissociation des

cultures et de l'élevage, liée notamment à la spé-

cialisation des régions, la suppression des arbres champêtres, les vastes monocultures de plantes annuelles, les labours profonds écartent encore davantage les agrosystèmes des écosystèmes spontanés. l’agriculture artificialise à outrance les milieux, se privant de fait des services rendus par les écosystèmes.

L'AGRICULTURE

DU

PÉTROLE

Une lecture permaculturelle du monde contemporain accorde une grande importance à la question

de l'énergie. Du champ à l'assiette, il faut actuellement de 10 à 12 calories d’énergie fossile pour

Produire 1 calorie alimentaire. Peut-on décemment qualifier un tel système de “productif” ?

Le bon-sens voudrait que tout système de pro-

duction agricole permette d’atteindre un double

objectif : = Produire une récolte ;

= Renouveler la fertilité de l’agrosystème, en vue des récoltes à venir et des générations futures. Orice survol de l’agriculture depuis son appari-

tion montre que cette double condition a rarement été atteinte. Nous en sommes aujourd’hui

Plus loin que jamais. Les premiers agriculteurs

du Néolithique brûlaient la forêt et profitaient de la fertilité accumulée dans les arbres durant les Quelques décennies qu’avait duré leur croissance. Les agriculteurs modernes brüûlent l'excédent

DE L'AGRICULTURE À L'ÉCOCULTURE

de fertilité du Carbonifère, des stocks d'énergie fossile que la nature à mis des dizaines de millions d’années à constituer. Dans les deux cas, les agrosystèmes sont infertiles par eux-mêmes. La seconde condition de notre équation n’est pas

remplie : l'humanité d’aujourd’hui se nourrit au détriment des générations à venir.

Fortement dépendante du pétrole et de ressources non

Au cours des quelques décennies écoulées, d’im-

l'agriculture

menses quantités d'énergies fossiles ont été utilisées par les agriculteurs, leur permettant de s’affranchir

pour un temps des lois du vivant. Le réveil est amer... La combustion extraordinairement rapide de ces énergies a déstabilisé la biosphère. La dépendance de notre agriculture aux énergies fossiles, qui vont, dans les années à venir, devenir inexorablement plus rares et plus chères, la condamne à sa perte. Privée de pétrole, l’agriculture industrielle s’effondre comme un château de cartes. Elle n’a aucune résilience. Une question vitale s'impose : que mangerons-nous lors de cet effondrement ? Ayons le courage de regarder la réalité en face : comment se nourriront demain les habitants des villes ? Nos enfants risquent-ils de mourir de faim ?

À l'aube du xxr° siècle, le bilan de l’agriculture productiviste s'avère tragique : 30 % des terres arables

renouvelables,

contemporaine est dans une impasse.

Elle ne pourra nourrir l'humanité de demain.

la déforestation est intense, notamment en zone tropicale où les forêts primaires cèdent la place aux cultures d'organismes génétiquement modi-

y L'agriculture industrielle semble d’une productivité jamais atteinte auparavant, mais peut-on qualifier de “productive” une agriculture qui détruit aussi vite les sols, les réserves en

sauvage et cultivée s’érode...

et le climat ?

de la planète ont été désertifiées ; les réserves

d’eau douce ont été mises à mal ; l’agriculture contribue largement au changement climatique ;

fiés (oem) et à l’élevage. Partout, la biodiversité

eau douce, la biodiversité

31

à

Les conséquences de ce type d’agriculture sont dramatiques pour la nature, maïs aussi pour l’humanité : la nourriture industrielle se révèle souvent néfaste d’un point de vue sanitaire, engendrant

APRÈS LA STEPPE : LE DÉSERT...

… QUI

agriculteurs du Sud. Tous les grands bidonvilles de

leurs terres par la désertification et la pauvreté.

catégories confondues”,

L'histoire se répète, avec une ampleur sans précédent. Les premiers agriculteurs ont engendré une steppisation des écosystèmes qu’ils colonisaient, et l’étude de leurs pratiques primitives démontre abondamment que l’étape d’après la steppe, c’est le désert. Aujourd’hui, c’est la planète entière qui

est en voie de désertification rapide”.

Les agriculteurs d’aujourd’hui laisseront aux générations futures des terres arables largement vidées de leurs stocks de matière organique. Nos enfants devront mener de front de gigantesques chantiers : produire de quoi nourrir une population chaque jour plus nombreuse, avec des ressources biologiques, énergétiques et minérales considérablement diminuées, le tout dans un climat mondial imprévisible, empreint de tensions sociales et politiques... Ces défis ne sont pas sans donner le vertige. La destruction de l’environnement déstabilise en profondeur les sociétés. Elles deviennent alors un terreau fertile pour des réseaux terroristes qui profitent du désespoir et de la misère des gens.

Nous avons aujourd’hui beaucoup de mal à gérer

» En artificialisant les agrosystèmes, l’agriculture

conventionnelle va à l’encontre du mouvement de la vie depuis son

apparition sur Terre.

Remplacer les fonctions et les services rendus

par le monde vivant par

des technologies et des intrants sortant des usines, payants, polluants et non renouvelables, est un

calcul à très court terme qui a conduit cette forme d'agriculture dans

une impasse.

sera-t-il à l'avenir s’ils Se COMptent par Cntaine,

la planète sont constitués de paysans chassés de

faim et 600 millions, d’obésité. Paradoxalement, les premières victimes de la malnutrition sont des

agricoles ont été perdus en France. En 2013, la France comptait 5,5 millions de chômeurs, toutes

climatiques, Que quelques millions de réfugiés

sité de Corne de millions ? Une étude de l'univer de 2 milliarg èse poth l'hy aux États-Unis, avance .. Le chan. de réfugiés climatiques à l'horizon 2100. affecter ns tio sta ife man 85 et gement climatique la pin, ent aiss conn en premier les pays du Sud qui que re guer La e. forte croissance démographiqu plane re natu la à e livr l'humanité d’aujourd’hui de demain. les germes toxiques des guerres

une progression des maladies dites “de civilisation”. 800 millions d’êtres humains souffrent de la

Depuis 1955, 5,45 millions d'emplois

Sn

GUÉRIR LA TERRE

DEMAIN

PEUT

REVERDIR':

C’est dire toute l'importance qu’il yaà restaurer

le capital vivant de la planète. Chaque jardinier peut y participer. Un jardin naturel et productif rte que nous contribue à la paix du monde. Il impo

soyons de plus en plus nombreux à nous atteler; cette noble tâche, au plus vite, pendant qu’il est

encore temps. Amis lecteurs, votre jardin peut devenir une oasis de vie en des temps difficiles!

Il convient de saluer les réalisations qui, à linté.

rieur du monde agricole contemporain, tentent

de corriger certains excès : l’agriculture de conservation (techniques culturales simplifiées, non-labour, semis sous couvert végétal...), l’agroforesterie, l’agroécologie... Ge sont autant de pas dans la bonne direction. L’écoculture, toutefois, propose d’aller beaucoup plus loin. Mais une démarche de transition s’opère graduellement.

L’écoculture doit donc d’abord gagner en crédi-

bilité en s’appuyant sur des résultats tangibles, scientifiquement démontrés. C’est ce que nous tentons de faire au Bec Hellouin, en collaborant

avec les institutions du monde agricole.

ne EURE

LES HOMMES,

SNS

PARTIE | NOURRIR

Lits

32

CHAPITRE1 DE L'AGRICULTURE À L'ÉCOCULTURE

L’humanité a suscité trois grandes extinctions

des espèces animales. Nous avons évoqué la pre-

mière, survenue lors de la révolution cognitive, il

ya 30 000 à 70 000 ans. La seconde eut lieu lors

de l'invention de l’agriculture, au Néolithique. La troisième accompagne l’essor de la civilisation industrielle. Chaque extinction se révèle être d’une

ampleur sans commune mesure avec la précédente.

Mais aujourd’hui, pour la première fois, notre connaissance du monde et de son évolution nous

rend conscients des enjeux. Face au danger qui monte, il appartient à chacun d’entre nous d’éla-

borer une réponse. Cette réponse passera par de

nouveaux mots et symboles, par des constructions mentales inédites et l'invention d’un imaginaire commun, autour de cette question de l’équilibre entre l’homme et son environnement.

d'agriculture naturelle - à dire vrai, bien des jardiniers limitent la permaculture à la culture sur buttes permanentes.

“Jai ma permaculture au fond du

jardin”, disent-ils en désignant quelques buttes. Or, la permaculture n’est pas un ensemble de techniques agricoles, mais un système conceptuel pouvant être appliqué à pratiquement toutes les activi-

tés humaines, ainsi qu’à tous types de structures :

jardins, fermes, Communautés, entreprises, col-

le Néolithique, et ouvre une nouvelle ère : celle

Usemblemque-le terme “écoculture” soit né menés par l’agronome Wess Jackson pour imaginer

L’agroécologie est une approche bien connue et de

Qutre-Atlantique, dans la mouvance des travaux

tune agriculture biomimétique”*.

Yadetrèsprofondes convergences entre le bio-

métisme et la permaculture. Pourquoi dès lors ser un nouveau mot et ne pas continuer à déOS pratiques en parlant d’agriculture perma-

elle, comme le font généralement les auteurs hones ? Tout simplement parce qu’il y a une on largement répandue entre permaculture

Quel

culture. Nombre de personnes pensent

permaculture n’est qu’une super-méthode

moyens d'existence.” Philippe Desbrosses

Nous reviendrons sur ces points en détail au chapitre 14 (p.131).

culturelle, ou agriculture bio-inspirée, ou agriculture biomimétique. Pour éviter toute confusion avec la permaculture, dont l’objet est plus vaste mais qui n’intègre pas à proprement parler de techniques de culture, il nous semble pertinent de parler d’écoculture, un vocable simple et facilement compréhensible par tous, et qui de plus suggère une vraie rupture avec VPagriculture. Pour décrire de nouvelles pratiques, il est souvent nécessaire de forger de nouveaux mots !

les premières pages de ce manuel, il est temps de mieux le définir.

et pacifiquement leurs

une vision globale et se fonde sur une éthique.

L'écoculture, telle que nous la définissons au Bec

(de lécoculture. Nous utilisons ce vocable depuis

“C’est une évidence que les agricultures paysannes, vivrières, biologiques sont les plus aptes et les plus efficaces à permettre aux populations pauvres de reconquérir leur souveraineté alimentaire et d’assurer durablement

lectivités territoriales. La permaculture propose une méthode de design permettant de concevoir ces installations pour que leur fonctionnement se rapproche de celui des écosystèmes, elle favorise

ÉCOCULTURE ET PERMACULTURE

Imaginer des milieux cultivés imitant, d’aussi près que possible, les espaces naturels représente un changement tellement important que l’on peut sugpérer qu'il mette fin à l’agriculture, telle qu’elle a été développée dans nos contrées depuis

33

Hellouin, est donc bien une agriculture perma-

plus en plus appliquée, qui vise également à réta-

blir un équilibre entre les paysans et les milieux

naturels. L’écoculture reprend tous les acquis de l’agroécologie, tout en allant plus loin dans l’imi-

tation des écosystèmes

naturels. Comme

nous

l’apl'avons vu, l’écoculture utilise également a peu qui lture, permacu la de uelle concept proche rencontré l’agroécologie, probablement parce que sa naissance est ultérieure. On peut donc percevoir l’écoculture comme étant issue de la rencontre de

l’agroécologie et de la permaculture,

L’écoculture est l’art de produire l’alimentation des êtres humains en aménageant des agroécosystèmes performants inspirés des écosystèmes spontanés. L’écoculture prend la nature pour modèle et va dans le sens de la vie. Elle peut être perçue comme étant issue de la rencontre de lagroécologie et de la permaculture.

77

DT

|

2 LES

PRINCIPES FONDATEURS DE L'ECOCULTURE

Le rapide survol de l’histoire de l’agriculture que nous venons d’effectuer donne de nombreuses indications sur les écueils à éviter et sur les solutions possibles. Imiter les écosystèmes spontanés semble être Ja solution par excellence. Voici

Ils fondent l’écoculture telle que nous la comprenons. Toutes les techniques décrites dans ce manuel s’en inspirent. Ce chapitre qui concentre notre expérience constitue l'essence de la méthode de la Ferme du Bec Hellouin.

quelques grands principes inspirés par la nature.

IMITER LES ÉCOSYSTÈMES

SPONTANÉS

La permaculture propose de prendre la nature comme modèle, en particulier les écosystèmes spécifiques à chaque terroir. Nous allons chercher à renaturer, complexifier nos milieux cultivés, pour qu’ils deviennent des agroécosystèmes fonctionnant, autant que faire se peut, de manière largement autonome et pérenne. Voir “De l'écosystème à l’agroécosystème”, p. 103.

À

#58

EH 2 UTILISER

L'ÉNERGIE

DU

SOLEIL

Le monde vivant fonctionne grâce à l’énergie de notre étoile. Vu les dégâts engendrés par les énergies fossiles, nous chercherons comment remplacer ces dernières, chaque fois que possible, par la puissance du soleil. Voir “Le soleil, le vent, la pluie”, p. 75.

36

PARTIE]

NOURRIR

LES

HOMMES,

GUÉRIR

LA TERRE

M 3 BOUCLER

LES

CYCLES

Nos agroécosystèmes fonctionneront en boucle, comme dans la nature. Dans c nous veillerons à ne rien gaspiller, à n’engendrer aucun déchet. Tout est ressour Voir “De l'écosystèmeà l’agroécosystème”, . et “Une approche naturelle du sol et de la fertilité» &

TIRER

PROFIT

DES

SERVICES

ÉCOSYSTÉMIQUES

L'application des principes précédents donnera des jardins et des fermes comple:

à l’instar des milieux naturels. La complexité de nos agroécosystèmes, la richesse

relations et des échanges entre leurs composants auront pour effet que de nombreu fonctions s’opéreront spontanément, naturellement et gratuitement. Ces foncti nous rendront des services qui permettront de diminuer la fréquence et l’inten

de nos interventions : création de fertilité, contrôle des ravageurs et des malad semis spontanés. Nous apprendrons à tirer profit des services rendus par la nat

Voir “De l'écosystème à l’agroécosystème”, p.

DONNER

AUX

ARBRES

UNE

PLACE

ESSENTIELLE

Les arbres sont d’importants pivots de la vie sur Terre. Ils rendent d'innombrables" vices à la biosphère. Nous chercherons à développer des pratiques agricoles repos?

largement sur les arbres. Ils seront les garants de la pérennité de nos agroécosysté" Voir les chapitres dédiés à l’agroforesterie, P

CHAPITRE 2

LES PRINCIPES FONDATEURS

DE L'ÉCOCULTURE

CRÉER UNE SYNERGIE ENTRE LES ARBRES, VÉGÉTAUX CULTIVÉS ET LES ANIMAUX Nous avons pu constater que chaque fois que les en élaborant des systèmes agro-sylvo-pastoraux, en autofertilité et en durabilité. La permaculture permettant de favoriser les interactions entre les

37

LES

paysans associaient ces éléments, ceux-ci gagnaient en productivité, propose divers outils conceptuels éléments d’un système, outils que

nous mettrons à profit pour élaborer des espaces cultivés bien plus performants que

ceux du passé.

Voir

“Le design

permaculturel”,

p.129,

et “En

quête

d’une

ferme”,

p. 895.

E 7 PRÉFÉRER LES PLANTES VIVACES AUX PLANTES ANNUELLES Dans la nature, les plantes annuelles sont une exception : les plantes vivaces, ou pérennes, représentent plus de 99 % des végétaux sauvages. Nous chercherons donc comment redonner progressivement davantage de place aux cultures pérennes dans nos jardins. Voir “Les légumes

vivaces”, p. 595.

.

j oe © eo ,° æ 0°

BH:

FAVORISER

& % es. LA

,."

BIODIVERSITÉ

d’eau, des En créant différents milieux au sein du jardin et en y intégrant un point

atbres.., nous favoriserons la diversité des espèces végétales et animales. Sauvage ou

srillivÉe, la biodiversité remplit de nombreuses fonctions et procure un meilleur état

sanitaire au jardin... Sans parler des joies qu ’elle procure!

Voir “De l'écosystème à l’agroécosystème”, p. 103, et “Accueillir la biodiversité”, p. 799.

38

PARTIE | NOURRIR

LES HOMMES,

GUÉRIR

LA TERRE

H° ÉVITER

LE TRAVAIL

DU

SOL

Dans la nature, le sol n’est jamais travaillé de manière mécanique, et jamais à ny sauf accident. Nous chercherons comment il est possible d’appliquer ce Principe à nos cultures, pour éviter de détruire le précieux humus. Voir “Une approche

ss

Ble

CRÉER

ESS REA

DU

LE En

naturelle du sol et de la fertilité”, p, 213

ERP RENE

SOL

Préserver soigneusement la terre arable est un premier pas, insuffisant au vu de l’éro sion actuelle des ressources biologiques. Nous nous efforcerons de devenir cocréa teurs d’humus, en comprenant, favorisant et amplifiant les processus naturels qui lu

donnent naissance.

Voir “Une approche naturelle du sol et de la fertilité”, p.21:

11 S'APPUYER SUR L'INFINIMENT PETIT Certaines traditions paysannes, au Japon notamment, ont su favoriser la vie pacte rienne des sols, sans même connaître l’existence des microbes. En agissant pers

veur des populations de bonnes bactéries, par des moyens légers et des prépa". autoproduites à la ferme, il nous sera possible d’avoir un effet levier et de favor® la santé et la fertilité des sols. Voir “Une approche naturelle du sol et de la fertilité ? P

21

CHAPITRE 2 LES PRINCIPES FONDATEURS DE L'ÉCOCULTURE

39

4.

M 12 ASSOCIER

LES

VÉGÉTAUX

Les monocultures n’existent pas dans la nature ! Associer les végétaux cultivés favorise la santé et la productivité de nos jardins.

”, p. 419. ions de cultures Voir “Les associat

ÉTAGER

LES

CULTURES

"4



Les plantes sauvages poussent rarement sur un seul plan : elles s’étagent, de manière à

capter la quintessence de la lumière du soleil. Nous utiliserons de même la verticalité dans nos jardins. Voir “Les associations de cultures”, p. 419.

‘0, r

# M

Cd

e

14

VALORISER

LES

PLANTES

SAUVAGES

Pourquoi ne pas tirer parti des plantes sauvages, qui croissent spontanément, pleinement adaptées au lieu, sans demander ni travail ni intrants ? Elles sont, le plus souvent,

d’une grande valeur nutritionnelle et bénéfiques pour notre santé.

Voir “Les plantes sauvages comestibles”, p. 641.

Le

40

PARTIE

| NOURRIR

LES HOMMES,

GUÉRIR

LA TERRE

UTILISER

LES

RESSOURCES

BIOLOGIQUES

Chaque fois que possible, nous choisirons d'utiliser des ressources biologiques simples et locales, plutôt que des solutions technologiques sophistiquées et énergivores, qui engendrent des dépendances. La meilleure technologie alternative est une alternati. aux technologies ! Nos bâtiments, nos outils, nos clôtures seront de préférence réalisés

avec des matériaux locaux et naturels.

Voir “Le bâti”, p. 943,

_

MISER

SUR

LE MOYEN

all

ET LE LONG

TERME

Contrairement à l’agriculture industrielle, productive à court terme mais s’appauvris-

sant dans la dur ée, nos agroécosystèmes mettront du temps à se déployer. Mais plus ils gagneront en maturité, plus ils seront autonomes, autofertiles, productifs et résilients. Voir “Les concepts du design permaculturel”, P. 137.

17 CULTIVER

NOTRE

JARDIN

INTÉRIEUR

avec le respect de la Terre. À l’insta' de Le respect des êtres humains va de pair

peuples premiers, nous percevrons l'unité et la communion de destin de la tou ité de natul* vivants. En d’autres termes, nous cesserons de séparer l'human êtres

de n0Ù En jardinant nos paysages intérieurs, nous embellirons le monde autour Il n°y a pas d'écologie véritable sans une écologie intérieure » Voir “Prendre soin du jardinier” P

99

CHAPITRE 2 LES PRINCIPES FONDATEURS DE L'ÉCOCULTURE

OLVÉNERGIE p,

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41

:

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PAIN

3

UN

L'ÉCOCULTURE :

NOUVEAU

PARADIGME

Le traité du bon usage du progrès reste à écriress. Jean-Marie Pelt

L’écoculture est une synthèse entre le

meilleur de diverses traditions, issues

pour la plupart de

formes d’agricultures non occidentales,

et le meilleur de la modernité, une

synthèse consciente qui intègre les enjeux

environnementaux et

sociétaux du monde contemporain. Son

objectif est de subvenir

à nos besoins tout en contribuant à

restaurer la biosphère.

> Vingt années d’expéditions sur les mers à bord de mes voiliers-écoles,

à la découverte de la nature et des peuples premiers, ont développé en moi un immense émerveillement devant le génie du monde vivant et le désir d’inventer un mode de vie qui soit fondé sur un respect absolu de la nature, sans se couper toutefois de notre époque. La Ferme du Bec Hellouin plonge ses racines dans ces aventures autour du monde.

Les grands points de repère énoncés au chapitre précédent sont autant d’aides à la décision pour créer un jardin ou une ferme bio-inspirés. Lecteurs, ces outils sont à votre disposition : Vous pouvez vous en emparer et constater leur efficacité. Aucun jardinier, aucun agriculteur des

millénaires passés n’a eu accès à de tels repères, formalisés et ancrés dans un cadre scientifique,

mie si toutes ces règles ont été appliquées, de maniere intuitive et le plus souvent partielle, en de nombreux points du globe, au sein des communautés paysannes traditionnelles. Ces dix-sept principes fondateurs de l’écocul-

ture sont simples à comprendre et relativement

simples également à mettre en œuvre. Ils posent les bases d’un cadre de réflexion mais demandent toutefois à être adaptés à chaque contexte. Ils font

donc appel à nos capacités d’observation et de ré-

flexion, ainsi qu’à notre créativité : il n’y a pas de recette toute faite ! Ils nous invitent à réaliser une profonde révolution en matière d’agronomie. Il s’agit d’un vrai chan-

gement de paradigme, un virage à 180 degrés par

rapport aux pratiques dominant l’agriculture productiviste. Ces grands repères peuvent également nous conduire à revisiter l’agriculture biologique telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui. PUISER

DANS

LES TRADITIONS

COMME DANS LA MODERNITÉ

L’écoculture est une pratique naissante. La frontière n’est pas tranchée entre agriculture et écoculture : la seconde emprunte à la première ses meilleures pratiques, tout en les insérant dans

une vision nouvelle, L’écoculture reste largement à inventer. Pourtant, tous les éléments favorables

sont réunis pour que ses progrès soient rapides :

- Nous sommes aujourd’hui à même de porter un regard global sur à peu près toutes les pratiques

agricoles développées par l'humanité au cours des âges, sur les différents continents. En les étu-

diant, nous pouvons y découvrir des techniques remarquablement ingénieuses, des végétaux comestibles aux propriétés intéressantes, des outils simples et efficaces...

- Cet héritage riche et diversifié gagne à être

croisé avec les dernières avancées des sciences

et techniques contemporaines. Nous vivons une

époque unique sur le plan cognitif: nos connaissances en biologie doublent tous les cinq ans !

Osons voir grand et loin : il ne s’agit plus de pra-

tiquer notre activité de jardinier ou de paysan en faisant le moins de mal possible à la Terre, il faut

44

PARTIE

NOURRIR

LES

HOMMES,

GUÉRIR

LA

TERRE

plus

savoureuse,

car naturelle

et fraîche. Ce

ne peut être que bénéfique pour notre Santé

nous nous rapprocherions dès lors du régime

ci

aété le nôtre durant notre longue évolution, deCa te de l’état de santé amélioration potentielle contemporains sera l’une des nombreuses tie, © nalités positives de cette approche.

IMAGINER

SOCIÉTÉ

UNE

DURABIE

, le passage de lag. Mais, de manière plus large e à repenser tou. invit nous ture ocul culture à l’éc

qui l’organisation de la société, en partant de ce

iture. constitue son socle : la production de nourr ouvre la possibili. ture icul oagr micr la de L’essor

on vivrière, jusqu’au té de relocaliser la producti

de biens et de percœur des villes. Les transports saires. sonnes deviennent dès lors moins néces

favorable à Gette relocalisation crée un terreau

traliune gestion décentralisée de la société, décen ions solut t des emen sation qui permet un développ ellestés unau comm les par es géré à petite échelle, de nombreux mêmes. L'expérience démontre en pays que ce contexte

est le plus favorable qui soit

uvelables, le à une transition vers les énergies reno

A Notre vie quotidienne s’entoure d'objets simples et beaux, comme

cette

maintenant réparer les dégâts que nous avons infligés à la planète. Ce manuel s’inscrit totalement dans cette perspective de restauration écologique.

charrette à bras et cette grange construite de nos mains. Ils dessinent un petit monde à taille humaine, au sein duquel nos enfants peuvent grandir proches des plantes

L'écoculture offre l'espoir de susciter une spirale

ascendante : elle pourra nourrir les générations à venir tout en guérissant la Terre — par petits

et des animaux, tout en

ayant accès aux richesses culturelles de notre époque.

La transition de Pagriculture constitue le premier levier pour faire bouger en profondeur d’autres secteurs

tels que l’énergie, les

transports, l’habitat, l'emploi... En partant de

notre nourriture et de

la manière dont nous

la produisons, c’est

notre art de vivre dans son ensemble que nous pouvons réinventer.

plois verts, recyclage, la création d'em

de la société civil

lience locale, la séL’écoculture favorise la rési énergétique des mie curité alimentaire, J’autono

points, jardin par jardin, lentement au début, puis de plus en plus rapidement, à mesure que l’'effondrement des ressources rendra plus pressante et nécessaire la mutation. Comme nous l’avons suggéré dans notre précédent livre, le très haut potentiel de productivité de l’écoculture permet de concentrer sur de petits espaces intensément soignés la production vivrière, libérant de vastes espaces qui peuvent être plantés de forêts comestibles ou rendus à la nature sauvage”. CHANGER D’ALIMENTATION À notre connaissance, il n’y a guère de verrou technique

majeur

s’opposant

à ce passage

de lagri-

culture à l’écoculture : sa mise en œuvre pourrait démarrer dès aujourd’hui, partout. Il faudra toutefois accepter de revisiter certains acquis et faire évoluer les structures économiques de notre société, notamment la filière agro-industrielle. Changer d'agriculture a pour corollaire de modifier nos habitudes alimentaires. Nous

ne nous

économie

, la créativité sociale et solidaire. À l’échelon local . e peut pleinement s’exprimer

nourrirons

plus exactement pareil, si nous voulons vivre de manière plus douce pour la planète : adieu les haricots du Kenya et l’agneau de Nouvelle-Zélande ! Demain, notre alimentation sera aussi locale que possible, elle comportera moins de plantes annuelles, de céréales et de produits animaux

et davantage de légumes, de fruits, de fruits à coque, de baies, de plantes sauvages... Elle sera

formidable opcommunautés. Elle constitue une de sociéune forme portunité de nous diriger vers

constitue l’objet té véritablement durable, ce qui ulture” étant, rmac (“pe ture acul perm la même de permanent culture). en anglais, la contraction de

culture repréLe passage de l’agriculture à l’éco sente

donc

bien

davantage

qu’une

révolution

révolution technique : il s’agit bel et bien d’une un acte itue const n jardi son sociétale. Cultiver ! politique fort, au sens le plus noble du terme

UNE APPROCHE EN RUPTURE Au Bec Hellouin, où nous pratiquons le maraîchage, l’arboriculture, le petit élevage, nous

sommes À

contre-courant des tendances lourdes de l’agr culture contemporaine

sur de nombreux points:

_ Nous constatons que plus la surface cultivée €$° petite et soignée, plus la ferme est productiv® alors que la tendance

est à l’agrandissement-

— Nous travaillons à la main et cherchons à nous affranchir de la motorisation, tandis que l'agricultur* cherche à se passer de main-d'œuvre humaine, re placée par les machines et des solutions high-tech

- Nous nous inspirons de pratiques ancienne‘ alors que le passé est le plus souvent considéré comme...

dépassé.

CHAPITRE

Le

3

L'ÉCOCULTURE

: UN NOUVEAU

PARADIGME

Ro" An

Dans notre ferme, nous cherchons à inventer un mode de vie selon notre cœur :

en phase avec notre temps, mais également connecté à ce qu’ily a de “sauvage” en nous.

- Nous sommes dans le même temps ultra-connectés aux dernières avancées scientifiques, tandis que le monde agricole contemporain se fonde souvent sur des connaissances vieilles de plusieurs décennies, devenues obsolètes (en matière de sols, de fertilité et de biodiversité notamment). - Nous nous inspirons de pratiques traditionnelles des paysans du Sud, que les agronomes occidentaux ont souvent méprisées. - La plus grande rupture est que nous prenons la nature pour modèle tandis que l’agriculture contemporaine s’en écarte. RENATURER NOTRE IMAGINAIRE La transition vers l’écoculture se heurte à un facteur limitant, et de taille, un obstacle difficile à appréhender car il se situe... à l’intérieur de nos têtes ! Il est fort difficile, en effet, de déconstruire

nos représentations mentales de ce que doit être

l’agriculture, pour nous ouvrir à une vision diamé-

tralement opposée. Depuis le Néolithique, l’environnement naturel est souvent perçu comme un Espace peu productif, peuplé de ravageurs. Les agriculteurs pensent que les récoltes abondantes s’obtiennent dans des systèmes fortement Contrôlés par eux-mêmes et par leurs technologies, au prix de beaucoup d’efforts ou de beau-

Coup d’énergie. L’écoculture propose une vision inverse : chaque milieu naturel est un modèle d'ingéniosité et de durabilité dont nous pouvons Nous inspirer.

Pour passer d’une représentation à l’autre, il est Utile de nous interroger sur le lien qui nous unit

à la nature. Qui sait, peut-être même nous fautil remonter dans notre mémoire profonde, avant

le Néolithique et l’invention de l’agriculture, et retrouver “ce malgré-moi de sauvage” que recherchait Gauguin en fuyant la civilisation, le souvenir du temps où nous marchions nus dans un monde inviolé, prélevant les ressources qu’offrait généreusement la Terre-Mère ?

45

4 CHASSEUR, CUEILLEUR, PAYSAN ? Ce qu’il a bien fallu appeler la révolution néolithique a coupé l’histoire humaine en deux car, avec la poterie (et donc la marmite), l'animal domestique et la céréale cultivée, un nouveau monde est

a z Notre rêve en créant la

Ferme du Bec Hellouin était de “vivre comme les Indiens”, dans

un respect absolu de la Terre Mère, tout

en produisant des fruits et légumes de haute qualité pour la communauté locale.

là, avec une vie sédentaire devenue possible, le village et, bientôt, la ville, et naturelle ment avec celle-ci l j nn. a 2R elle-ci le palais, le temple, la caserne, le lupanar

et la prison : enfin la civilisations.

Théodore Monod

L'histoire de l’agriculture nous enseigne qu’en s’écartant des lois de la nature, les humains ont

trop souvent subvenu à leurs besoins au détriment

du monde vivant qui les entoure, sciant par là

même la branche qui les porte. Nous pouvons dès

lors nous poser une question (tellement impertinente qu’elle n’est jamais formulée) : avions-nous

réellement besoin de franchir le pas menant de l’état de chasseur-cueilleur à celui d’agriculteur ?

LA PREMIÈRE VOIE : CELLE DU

CHASSEUR-CUEILLEUR

Si l’on positionne l’apparition des premiers homi-

nidés il y a 3 millions d'années environ, force est de reconnaître qué, durant ce très long temps,

nous avons été des cueilleurs, puis des chasseurscueilleurs. Un chiffre mérite d’être médité : du haut de ses 10 000 ans, l’agriculture ne couvre

que les derniers 0,003 % de notre évolution !

Sous nos habits de civilisés, nous gardons dans

nos gènes une mémoire de ce temps infini passé

en immersion complète au sein de la nature. Est-ce pour cela que nous fascinent tant les quelques ethnies qui perpétuent encore ce mode d’existence, fondé sur une très haute expertise de la nature ? Cette expertise leur permet de subvenir à leurs besoins de manière élégante et sobre, même dans des environnements aussi difficiles que le désert

du Kalahari ou les glaces de l'Arctique.

> J'ai passionnément aimé

la liberté et l'autonomie que procure le mode de vie des peuples premiers. Quelques objets simples, qu'ils fabriquent eux-mêmes, leur permettent de bien vivre au sein d’une nature généreuse. Les paysans

Les communautés de chasseurs-cueilleurs qui ont

traversé les âges parviennent à habiter durable-

ment leur environnement car elles ont su rechercher une voie d’équilibre et ne prélèvent que les “intérêts” du capital naturel environnant, Cette attitude est favorisée par des formes de spiritua-

lité fondées sur le respect de la vie. Des interdits

peuvent être posés sur certaines ressources, à certaines périodes de l’année. Le chasseur peut égale-

ment remercier l’animal qu’il abat, ou l'arbre qu'il

que nous sommes devenus

coupe, de donner sa vie pour qu’il puisse perpétuer la sienne. Ces peuples sont donc les meilleurs gar-

nous nourrit et nous protège.

évoqué au chapitre “De l’agriculture à l’écocul-

cherchent à s’entourer d’un cocon de nature féconde qui Pourrions-nous devenir des “chasseurscueilleurs-paysans” ?

diens de la nature, même s’ils exercent, comme

ture”, une influence sur leur environnement. Pour

avoir dédié quinze années de ma vie à la rencontre

avec quelques-unes de ces communautés, je peux

48

PARTIE

| NOURRIR

LES HOMMES,

GUÉRIR

LA TERRE

attester que la comparaison entre les modes de

vie des peuples premiers et celui des “civilisés” n’est pas forcément à l'avantage de ces derniers... LA SECONDE VOIE : R CELLE DE L’AGRICULTEU

s Nous avons succinctement décrit cette voie dan

Les peuples premiers fondent leur art de vivre sur une très

haute expertise de la nature. En ce début

de millénaire, ils

souhaitent partager avec nous des leçons de vie et une sagesse

dont nous avons grand

besoin pour assurer notre survie collective,

largement érodé ce capital lui-même.

L'invention de l’agriculture a autorisé de profondes mutations des sociétés humaines, notamment la sédentarisation et l’apparition des villes,

la division en classes sociales, un essor de l’art,

de la spiritualité, des cultures et des civilisations,

une croissance exponentielle de la population...

Mais les formes de capitalisation ayant accompagné l'émergence de l’agriculture ont engendré des

illeur à ce. le passage de l’état de chasseur-cue

eurs. satisfaisante, que celle des chasseurs-cueill

Ces derniers bénéficiaient de sources de nourridans la nature variées et abondantes, puisées nourriture leur de e . quêt La ante ture environn

s capacités phyles amenaïit à déployer toutes leur

aient siques et intellectuelles. Les paysans travaill

nes. davantage et étaient plus exposés aux fami é était sant de état leur que oser supp On peut

eurs, et moins bon que celui des chasseurs-cueill

que leur vie était soumise à des contraintes bien plus lourdes. La révolution agricole fut tout sauf

convoitises, des conflits. Au sein des communau-

une libération”.

ment pas, d'écart de richesse, et les structures de

Osons donc cette interrogation : avec le recul, était-il si pertinent d’inventer l’agriculture ? Pourquoi quitter une option qui avait fait ses preuves durant 99,997 % de notre évolution ? Cette

ronnante pourvoit à l’ensemble de leurs besoins. Après l’invention de l’agriculture, les fouilles archéologiques semblent démontrer une augmentation du nombre de squelettes portant les traces d’une mort violente. Durant les mauvaises années,

le paysan du Néolithique et ses enfants avaient

ainsi que des fleurs à profusion.

guerres... ont recensé quelque quarante mille

plus contenté de prélever les intérêts du capital biologique de la planète, mais a, en peu de temps,

ne stockent rien, mais savent que la nature envi-

et des herbes aromatiques,

classes sociales n’ont, dès lors, cessé de se creuser. Au cours des derniers millénaires, les historiens

immense avancée. lui de cultivateur comme une iers paysans était prem des Quelle illusion ! La vie ent bien moins lem bab pro et bien plus difficile,

jamais consciemment choisi, l’agriculteur est trop s’est souvent devenu un... “agricultueur” : il ne

nellement pu constater que la peur de manquer est le plus souvent absente parmi ces ethnies qui

transforme peu à peu en une forêt nourricière, Notre chaumière est immergée au cœur d’un jardin luxuriant qui nous procure des fruits et petits fruits, des légumes

différentes pillé. Les écarts de richesse entre les

f, nous percevons Dans notre imaginaire collecti

pouvoir y SOnt généralement légères. J’ai person-

des milliers d'arbres fruitiers et de buissons, et l’herbage initial se

surveillait son grenier Ja nuit de crainte de le voi,

les pages précédentes et constaté que, sans l’avoir

tés de chasseurs-cueilleurs, il n’y a pas, ou quasi-

> Nous avons planté

s fastes l le ventre creux, mais durant les année

question peut sembler vaine, puisque le pas a été

bel et bien franchi, et que tout retour en arrière

nous est interdit. Mais le fait de la poser bouscule notre imaginaire et nous invite à pousser plus loin

notre raisonnement : pourrions-nous imaginer une troisième voie, qui soit la synthèse des deux premières ?

CHAPITRE 4

CHASSEUR, CUEILLEUR, PAYSAN ?

49

LA PERMACULTURE,

UNE TROISIÈME VOIE ?

En d’autres termes, Sommes-nous en mesure

d'inventer une manière radicalement nouvelle

de subvenir à nos besoins alimentaires ; une

autre voie qui prendrait le meilleur des expé-

riences humaines : réinsuffler quelque chose du chasseur-cueilleur dans le paysan d’aujourd’hui et de demain ?

pisons-le tout net : notre réflexion n’est pas empreinte d’une nostalgie d’un passé idéalisé, elle se veut pleinement efficace et tournée vers l'avenir. Assumons tout ce que notre époque nous offre, ses dangers comme ses opportunités. Nous sommes devenus extrêmement brillants dans les domaines des sciences et des techniques. Nous sommes, par contre, extrèmement mauvais dans notre rapport à

Ja biosphère. Nous avons perdu la conscience des

loisélémentaires d'équilibre entre les prélèvements

quenous pouvons raisonnablement effectuer et ce

que la planète est en capacité d'offrir. En d’autres

termes, nous nous heurtons aujourd’hui, pour la

|

toute première fois, aux frontières planétaires.

Etc’est précisément là que l’héritage des peuples premiers est précieux. Les communautés an-

re est



bien

de technologies vertes :

conscience : la conscience planétaire.

c’est une nouvelle façon d’habiter la Terre.

Uneéquipe internationale de chercheurs a identifié dix limites planétaires, garantes du bien-être de l'humanité

son environnement et mettrait sur Terre. En dépassant ces limites, l'humanité modifierait trop brutalement seuils au-delà desquels limites, valeurs les estimé en danger sa propre survie. Les chercheurs ont également frontières. les perturbations engendrées sont trop importantes, pour certaines de ces

O Pollution chimique : pas encore quantifiée,

@ crise climatique. OAcidification des océans.

è

permacultu

mondiale d’aujourd’hui abuse de l’environnement

civilisation industrielle, Nous commençons tout

Les frontières de la planète:

|

P

juste à nous ouvrir à une nouvelle forme de

planétaire, mais peine à percevoir les signaux

|

La

la mesure de l’effondrement inéluctable de notre

ment immédiat, disparaissaient. La communauté {

d’alerte en retour. Bien peu d’entre nous prennent

ciennes, si elles surexploitaient leur environne-

[4] Épuisement de la couche d’ozone stratosphérique. . O Perturbation du cycle biochimique de l'azote : limite dépassée

O Perturbation du cycle biochimique du phosphore.

OlUtilisation de l'eau douce. O Déforestation et changement d'occupation des sols.

Érosion de la biodiversité : limite dépassée.

Pollution de l'atmosphère : pas encore quantifiée. d'ores et déjà profondément limites planétaires sont largement dépassées, tandis que les autres sont

davantage que le choix

SO

PARTIE

| NOURRIR

LES HOMMES,

GUÉRIR

LA TERRE

pourrions “cocréer” des agroécosystèmes imitan: d’aussi près que possible la nature sauvage ; Us tés aux besoins des humains. De cette symbiose

peut naître un potentiel de productivité insoup.

çonné. Nous atteindrions ce que nous appelons forme au Bec Hellouin la bio-abondance : une Partagée d’abondance durable et équitablement es fondée sur une utilisation sobre des ressourc notre biologiques renouvelables. En elle réside 4 espoir de subvenir aux besoins de l'humanité demain.

Voici un bel exemple de cocréation : les innom.

brables variétés de fruits, de fleurs, de légumes cultivés sont le résultat d’un très long compagnon: nage entre les êtres humains etleurs compagnons

végétaux. L'alliance de l'humanité et de la nature

a permis de conduire celle-ci vers des formes

qu’elle n’aurait probablement pas atteintes seule.

A Une microferme produit bien davantage que de la nourriture, elle est

également un lieu où se retrouvent ceux qui rêvent d’un monde plus doux et plus beau, fondé sur des valeurs de partage et de respect. Ces valeurs

animent les formations

données au Bec Hellouin. Autant de rencontres qui nourrissent des créateurs du monde de demain, de tous âges et de tous milieux.

UN CHEMIN D’ÉQUILIBRE, D'HUMILITÉ

ET DE RESPECT

Nous sommes riches des acquis de la modernité ; si, de surcroît, nous acceptions de féconder notre vision des notions d’équilibre et de respect de toute vie que portent les communautés tradition-

nelles, en les élargissant au respect de la biosphère prise dans sa totalité, alors nous serions vraiment bien équipés pour inventer le monde de demain.

Sommes-nous au-dessus de la nature, ou bien

sommes-nous au contraire partie intégrante de la

vaste communauté des vivants, solidaires et gar-

diens du devenir de chaque forme de vie ?

Cultivons une vision empreinte d’empathie, de

gratitude et d’émerveillement pour la biosphère.

Nous avons l’honneur d’habiter la seule planète

vivante connue dans l’immensité du cosmos, un

jardin perdu dans les étoiles !

COCRÉER AVEC LA NATURE

Et si nous décidions d’allier le génie humain et le génie de la nature, plutôt que de les opposer ? L’écoculture ne propose pas autre chose. Nous

Comment ne pas être admiratif du génie paysan qui a su, à partir d’une carotte sauvage à la racine

quelque peu filandreuse, créer des centaines de

variétés aux goûts, formes et couleurs étonnamment variés ?

L'écoculture est donc la voie d’une nouvelle alliance entre le paysan et le milieu naturel qu'il habite. Il tisse avec cet environnement des liens qui tiennent du partenariat : chacun œuvre dans le même sens, avec ses moyens propres. DES PAYSAGES COMESTIBLES La permaculture nous donne des outils précieux pour concevoir des paysages comestibles : des écosystèmes anthropisés procurant généreusement de la nourriture, de l’énergie, des fibres, des matériaux de construction, des plantes médicinales. Notre empreinte sur ces milieux devient de plus en plus douce à mesure qu’ils gagnent en

maturité et en productivité. Au fil des ans, nous

cultivons moins et récoltons davantage, quittant progressivement la posture du paysan pour adopter celle du cueilleur, voire du chasseur car il est possible d’y élever des animaux en semi-liberte. Ces îlots de nature intensément vivante nous nourrissent et nous protègent, un peu comme l®

La bio-abondance se 4 àÀ parti! parti dé En observant comment la nature parvient à engendrer des milieux d’une grande productivité ressources très limitées, nous avons formulé le concept de bio-abondance.

La bio-abondance est une forme d’abondance durable et équitablement partagée, fondée sur une utilisatio! sobre des ressources biologiques renouvelables.

Paysages comestibles La permaculture nous invite à créer des paysages comestibles : des a on né groécosystèmes inédits qui sont ü : synthèse du génie de la nature, de l’héritage des paysans d’autrefois et d es connaissances de la scie? contemporaine. j

LC

CHAPITRE4

CHASSEUR, CUEILLEUR, PAYSAN ?

placenta nourrit et protège l’enfant à naître. La

terre n’est plus un objet à asservir et exploiter, elle redevient la Terre-Mère. Dans ce sens, le perma-

culteur réalise une subtile alliance entre la voie du chasseur-cueilleur et celle du paysan.

Le paysage comestible serait-il l'équivalent stmoderne de la forêt nourricière du chasseur-

cueilleur du Paléolithique ?

L'agriculture moderne est masculine, les socs des charrues sont des armes de guerre qui éventrent la terre comme des scalpels luisants. Ils ont écrit

une histoire faite de conquêtes par le fer et le feu, une histoire de domination, de prédation.

L'écoculture est féminine et maternelle, faite de douceur, de rondeurs et de sensualité. Respect,

complicité et partage sont ses valeurs essentielles.

Elle donne à la beauté une place première, car la na-

ture est belle. Nos jardins et nos fermes peuvent

service de cette vision, qu’il nous a paru essentiel de décrire en ouverture de ce manuel.

Lorsque nous entrons dans une démarche de coévolution consciente avec la nature, sa capacité de réponse peut nous surprendre. Nous avons

Amis lecteurs, les chapitres à venir vous donneront de nombreuses pistes pour incarner ce rêve dans votre environnement. Mais n’oubliez pas : à l’école de l’écoculture, nous n’en sommes qu’en classe maternelle. Nous avons tant à apprendre! Ce manuel propose un partage de notre expérience à la

devenir autant d’hommages à la Terre-Mère.

l'intuition qu’en adoptant une attitude à la fois

humble et puissante, la capacité de régénération des milieux naturels peut être bien plus

rapide que nous ne le pensons généralement. La nature a depuis 3,8 milliards d’années suivi une direction : perpétuer la vie. Si humanité la détruit, deux forces s’opposent, il y a déperdition d'énergie. Mais lorsque nous mettons notre créativité au service du projet de la nature, alors les deux forces s’additionnent et l’on avance beau-

coup mieux !

Par exemple, sous nos latitudes européennes, la forêt est le milieu naturel spontané et les agriculteurs doivent lutter pour conserver des

espaces ouverts (nous en faisons l’expérience dans

notre jardin familial, où chaque année s’invitent spontanément hêtres, frênes, chênes et autres

noisetiers.). Si nous décidons au contraire de reboïser, en plantant une forêt comestible par

exemple, notre intention rejoint celle de la nature,

nous coopérons et tout est plus léger !

Sous les soins attentifs des jardiniers, les terres

désertifiées peuvent reverdir. L'expérience le dé-

montre en de multiples lieux.

Au Bec Hellouin, une forte conviction a grandi en nous au fil des ans : l’intention, la relation que nous établissons avec la nature est première - plus importante même que les techniques que nous choisissons d’utiliser. Notre intention est de contribuer à protéger la biosphère - êtres humains

Compris ! Les techniques ne sont que des outils au

Ferme du Bec Hellouin, expérience bien partielle.

Tant de questions restent en suspens. À vous d’apporter votre contribution : votre jardin peut de-

venir un petit centre de recherches ! Il produira des fruits et légumes

de la connaissance.

savoureux, mais également

L’écoculture reste largement

à inventer, plus

nous serons nombreux à y travailler, plus nous avancerons !

51

TN VERS, 4: CAN

(FEX. Arr

]

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4 Ni RE Ÿ À 4 Plusieurs forêts-jardins, de différents types, ont été plantées dans le cadre d’un programme de recherche. Un chantier collectif particulièrement arrosé (par la pluie) a laissé dans l’esprit de tous les participant(e)s bénévoles d’impérissables souvenirs !

miliale ait pu ainsi devenir une sorte de laboratoire à ciel ouvert. Des chercheurs éminents font partie du comité scientifique de l’Institut Sylva, nous avons énormément appris d’eux. Certains d’entre eux, comme Philippe Desbrosses, président de l’Institut Sylva, Dominique Soltner, Claude et Lydia Bourguignon, ont marqué l’histoire de l’agriculture biologique européenne. Le caution-

ÉVALUER

DE

LA VIABILITÉ

LA FORÊT-JARDIN“S

Un programme au long de la forêt-jardin. Dans formes de forêt-jardin ferme, en complément

cours porte sur la viabilité ce cadre, deux nouvelles ont été implantées à la de la première.

ÉTUDES DES DONNÉES

TECHNICO-ÉCONOMIQUES

CRÉER

DES SUPPORTS

POUR FAVORISER L’ESSAIMAGE LES OUTILS DE LA FERME DU BEC HELLOUIN‘S Une étude a été réalisée sur les outils utilisés à la Ferme du Bec Hellouin.

à pétrir le premier pain !

en résilience, en autonomie, en durabilité et en

Ces programmes ont permis de souligner qu’une toute petite ferme conduite selon la méthode du Bec Hellouin peut atteindre un niveau de productivité qui semblait inconcevable avec les méthodes

FRANCE‘

Camille Joyeux a réalisé une méta-étude sur un panel de différentes études déjà réalisées.

noué les gerbes, battu et

Plus la ferme est “renaturée”, plus elle gagne

Nous avons eu la surprise de constater qu'aucune étude nationale n’avait porté à ce jour sur les

données technico-économiques du maraîchage

vanné le blé, on s'apprête

réalisés de 2011 à 2017 tient dans ce

constat : la performance économique de la ferme découle de sa performance écologique. productivité.

biologique dans notre pays. Notre collaboratrice

entières. Quelle fierté lorsqu’après avoir fauché,

Le principal enseignement que j’ai tiré des programmes

DU MARAÎCHAGE BIOLOGIQUE

EN

>> La micro-agriculture nous permet de renouer avec les chantiers collectifs d'autrefois, qui réunissaient des familles

nement scientifique apporté par ces chercheurs et par les institutions partenaires a rapidement donné une crédibilité à l’approche développée au Bec Hellouin.

Les rapports finaux de toutes ces études sont dis-

classiques. Alors que les gains de productivité

réalisés par l’agriculture contemporaine ont le plus souvent engendré une dégradation des milieux naturels, l’approche bio-inspirée s’accompagne, entre autres externalités positives, d’une création rapide de sol et d’une amélioration de la biodiversité. Cela dépend bien évidemment du contexte,

des compétences des paysans et de leur ardeur au travail ! En France, fin 2017, selon les institutions du

ponibles sur notre site Internet. Les principaux résultats ont nourri certains chapitres de ce livre.

monde agricole, environ 80 % des projets de création d’une ferme maraîchère et 50 % des instal-

Ces études sont conduites avec différents parte-

microferme permaculturelles.

naires et organismes scientifiques. Le travail de terrain est souvent réalisé par des étudiants dans

le cadre de leur mémoire de fin d’études. Nous

avons eu jusqu’à cinq ingénieurs ou futurs ingé-

nieurs agronomes travaillant à temps plein sur la ferme !

lations effectives se revendiquent du concept de L'écoculture reposant sur des connaissances 4P-

profondies, ceci nous a motivés pour écrire ce ma

nuel, afin de sécuriser tous ces porteurs de projet et de leur donner toutes les chances de réussite .

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LE MURMURE

DE

LA VIE

Nous, les oiseaux, les aigles, les hiboux, nous sommes une nation et tu seras notre frère. Tu ne tueras pas et tu ne feras de mal à aucun d’entre nous. Tu apprendras les herbes

et les racines, et tu guériras les gens. Tu ne demanderas rien en contrepartie. La vie d’un homme est courte. Fais en sorte que la tienne soit remarquable!. Lame Deer

L’écoculture ne nécessite que peu d’outils et

d'énergies fossiles, son efficacité vient d’une bonne

connaissance des milieux naturels. Pour les imiter, il est nécessaire de comprendre leur fonctionnement. La seconde partie de ce manuel a pour objectif de donner des clés de lecture du monde vivant. Ce chapitre nous emmène dans un voyage à travers le temps. Nous allons remonter jusqu'aux origines du cosmos pour observer son évolution vers le monde que nous habitons aujourd’hui.

< Lors d’une escale à Bali,

j'ai pu partager la vie d’une

famille de paysans de la plus

basse caste. Elle vivait dans les rizières accrochées aux pentes du volcan Batur, dans un

paysage d’une beauté à couper le souffle. J'ai été profondément marqué par l'harmonie qui s’en dégageait. Elle semblait loin, la colère du volcan crachant la lave. Chaque espace était amoureusement cultivé,

couvert d’une végétation

luxuriante. Cette famille vivait

des seules ressources de sa terre, sobrement, pourtant Son quotidien était raffiné, laissant une large place à

LES JARDINIERS SONT LES GARDIENS DE LA VIE Jardiner est bien davantage que faire pousser des légumes. Chaque jardinier est responsable d’une parcelle de la seule planète vivante connue ! Le simple fait de disposer d’un jardin et d’en prendre soin représente un improbable miracle. Nos choux, nos carottes, nos tomates et nous-mêmes sommes vivants, héritiers d’une évolution qui a débuté dans le chaos des origines pour aboutir, quelques mil-

liards d’années plus tard, à ces légumes savoureux,

à ces fleurs parfumées, à notre conscience qui re-

garde et s’émerveille.

Écoutons le murmure de la vie. Si nous savons regarder et comprendre, tout nous parle et nous raconte la plus belle des aventures. Le soleil et les étoiles, l’oiseau qui chante et le pollen qui vole, l'herbe verte et les pâquerettes : les acteurs de

Pépopée de la vie sont là, autour de nous.

Devenir permaculteur, c’est s’immerger dans une

perception de plus en plus intime du mouvement de la vie pour y participer en conscience. LA TERRE

EST

UNE

ÎLE

De notre naissance à notre mort, nous évoluons au

sein d’une mince pellicule vivante à la surface de la Terre. On l'appelle la biosphère. Elle est ténue : l'immense majorité des êtres vivants se concentre dans quelques décimètres de sol et dans ce qui pousse au-dessus. Cette “couche de vie” est extrêmement réduite par rapport au volume de la planète. En prenant du recul, si l’on considère la situation de la Terre au sein du cosmos, il apparaît que la vie est infiniment rare. Notre statut est totalement singulier. La planète Terre est un jardin

Biosphère* Étymologie : “bio”, du grec añcien bios qui signifie “vie”, et “sphère”, du grec ancien sphaîra qui signifie “balle,

ballon, globe”.

Sur Terre, les êtres vivants évoluent dans différents milieux : l’eau, le sol, l'air... La biosphère correspond à

l’ensemble des écosystèmes de la planète.

la musique, à la danse et à

La biosphère est une couche superficielle et de faible épaisseur : moins de 0,15 % du diamètre de notre planète. Située tout autour de la Terre, elle comprend une fine zone de l’écorce terrestre, l’hydrosphère ainsi que la couche la plus basse de l'atmosphère.

Permanente, devenu plus tard permaculture.

qui habitent la Terre et l’espace qu’ils occupent. Elle compte plusieurs millions d'espèces qui interagissent

la spiritualité, Ce sont ces agroécosystèmes d’Asie qui ont inspiré le concept d'agriculture

La biosphère est un espace vivant. Certains auteurs la désignent comme l’ensemble des organismes vivants

entre elles et avec leur milieu en permanence,

70

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE dans les étoiles, une douce bulle de vie au sein

d’un univers minéral hostile, aux températures

affolantes.

COMPLEXITÉ

CROISSANTE

DE LA MATIÈRE

Lorsque le cosmos est apparu, il y a 15 milliards d’années environ, la désorganisation était totale, la chaleur, la densité et la luminosité, extrêmes. Les forces à l’œuvre auraient pu perpétuer ce chaos, ou au contraire engendrer un univers dur et concen-

tré. Pourtant, l'univers évolue constamment selon

une voie médiane, vers davantage de complexité.

façonné notre planète,

Préparant en quelque sorte notre apparition, on ne

Peut que se sentir rempli de gratitude. Notre existence était tellement improbable, et pourtant nous sommes

là, au cœur de ce miracle !

cules complexes, jusqu’à donner, il y a 3,8 milliar ds d’années environ, les premières formes de vie:.

LES PREMIÈRES BACTÉRIES

Lors de l'apparition de la vie, les conditions régnant sur notre planète étaient bien différentes d’au-

La planète Terre s’est formée il y a 4,56 milliards d'années environ par l’agrégation de “poussières

d'étoile”, des atomes issus de l’explosion d’une

Supernova, sous l’effet de la force de gravité.

L'APPARITION

DE LA VIE

Le fait que la vie ait pu se développer sur la Terre dépend d’un vaste ensemble de conditions : la vitesse de dilatation de l’univers, la taille de la Terre, sa position par rapport au soleil, sa capacité à conserver une atmosphère, la présence d’eau

ces conditions aurait rendu impossible l’éclosion de la vie.

quel point les formes de vie primitives ont lentement

ensemble et se sont transformées en macromojé.

a assemblé les particules élémentaires que sont

sous forme liquide et la disponibilité d’une source d'énergie stable... La plus infime variation d’une de

que la vie s’y épanouisse. Lorsque l’on constate à

surface - c’est la seule planète du système solair, à présenter cette particularité. L’océan primordia & l'énergie provenant du soleil ont offert un miliey propice à une évolution sans précédent : des moje cules organiques simples ont réagi chimiquemen:

MODIFIENT

les quarks en particules de plus en plus grandes : protons et neutrons, puis atomes et molécules.

> La Terre est située juste à la bonne distance de son étoile, le soleil, pour

permis de conserver de l’eau sous forme liquide n

Depuis le chaos initial qui a suivi le big bang, la

matière n’a cessé de s’organiser. La force nucléaire

Le cosmos a toujours évolué vers des formes plus complexes. Il en va de même pour les formes qu’adopte la vie depuis son apparition sur Terre.

cond Grâce à la composition de l’atmosphère, les es Terre la sur tions particulières qui régnaient

LES

L'ATMOSPHÈRE

OCEANS

ET

jourd’hui. Le soleil était plus froid de 20 à 30%.

lPatmosphère ne contenait pas d'oxygène, mais était de 10 à 100 fois plus riche en carbone que l’atmosphère actuelle ; océan était saturé en fer.

Les premières bactéries photosynthétiques ont

lentement transformé leur milieu, utilisant le rayonnement du soleil pour convertir l’eau et Je

CO, en sucres, rejetant de l’oxygène. L’oxygène

dégagé au cours de cette réaction chimique ré-

agissait avec le fer contenu dans les océans pri-

mitifs. Il a fallu 1 milliard d'années pour oxyder

la totalité du fer, qui s’est accumulé au fond des océans.

L’oxygène libéré par les bactéries a ensuite commencé à pénétrer dans l’atmosphère. Mais la

CHAPITRE 7

trouve toutes les formes de vie, depuis les bactéries primitives jusqu'aux mammifères

forme de carbonate de calcium qui tombait sur le fond de la mer, donnant naissance aux roches calcaires. Ce carbone, qui s’est progressivement accumulé en couches épaisses au fond des océans, était soustrait à l’atmosphère. Ces réactions chimiques

supérieurs que sont les dauphins

et les baleines. Une plongée

dans cet univers chatoyant est un cours d'histoire naturelle ! Hélas, en faisant le tour du monde de 1998 à 2001, nous avons pu constater que les récifs coralliens étaient presque partout moribonds, y compris les plus isolés... Je me sentais

ont profondément modifié la composition de l’atmosphère et des océans, préparant lapparition de formes de vie supérieures.

Les bactéries marines ont également contribué à la création et au maintien de la couche d’ozone qui, en absorbant une grande partie des rayons ultraviolets, protège les organismes vivants. La couche d'ozone leur a permis de migrer de l’océan vers les

empli de révolte et de dégoût en

constatant que nous détruisons si vite ce que la nature a mis tant de millions d’années à élaborer. Je saïs que je participe, comme tous mes contemporains, à cette destruction. Ce constat a motivé notre engagement.

terres émergées.

Les gaz qui composent l’atmosphère que nous respirons sont donc largement le fruit du métabolisme des micro-organismes.

ORGANISMES

La transformation progressive de l’atmosphère a favorisé l’apparition de nouveaux organismes. Il y a 600 millions d’années, la concentration d'oxygène devint telle qu’elle permit une explosion de la diversité marine. Ilya 500 millions d'années, des plantes semblables aux lichens et aux mousses commencèrent à s’installer sur les terres émergées. Ilya 400 millions d’années, la concentration d’oxy-

gène devint équivalente à celle de l’atmosphère

actuelle et les premiers arthropodes sont sortis du milieu aquatique pour coloniser les continents.

Il y a 380 millions d'années, à la fin du Dévonien,

des forêts avec des arbres atteignant 30 mètres de

haut couvraient déjà la surface des régions les plus humides.

Les premiers végétaux contribuèrent également à prélever du carbone dans l'atmosphère. Une partie

de ce carbone devint un constituant des sols qui recouvrirent la roche nue des origines. Une autre allait constituer les réserves souterraines de char-

bon et de pétrole.

LES BACTÉRIES MAINTIENNENT

LES CONDITIONS FAVORABLES LA VIE

Il est frappant de constater que les organismes

vivants ont progressivement exercé une influence croissante sur les conditions physiques de la pla-

nète, façonnant son atmosphère, Sa géologie,

7;

notre voilier Fleur de Lampaul vers les récifs coralliens. On y

également pour effet de précipiter le carbone sous

LES PREMIERS

DE LA VIE

< Nous avons souvent conduit

photosynthèse opérée par les organismes primitifs ne faisait pas que dégager de l'oxygène, elle avait

VIVANTS SORTENT DES OCÉANS

LE MURMURE

régulant sa température, créant son sol... Une “prise en charge” qui favorisa l’apparition de formes de vie de plus en plus sophistiquées.

Les organismes complexes ne peuvent éclore que

dans une étroite fenêtre de conditions de températures, de disponibilité d'énergie et de nutriments. Or, bien que les conditions régnant dans le système solaire évoluent, la biosphère se maintient depuis plusieurs dizaines de millions d’années dans cette étroite fenêtre. La température moyenne de la surface de la Terre est ainsi gardée constante autour de +15 °C, ce qui représente la température la plus favorable pour les organismes complexes. L'eau a pu se maintenir sous forme liquide à la surface de la Terre grâce à cette régulation de la température.

LE PLANCTON RÉGULE

LA TEMPÉRATURE DE LA TERRE

Cette régulation s’opère par des jeux d’interactions complexes entre les organismes et leur environnement. La couverture nuageuse est l’un des paramètres climatiques essentiels. Les régions sombres de la surface terrestre, comme les forêts

et les océans, absorbent davantage de chaleur que

les régions claires, comme

les déserts et les ca-

lottes polaires. Les nuages, lorsqu'ils sont abondants, réfléchissent la lumière solaire.

Des recherches récentes ont montré que le phytoplancton océanique émet dans l’atmosphère des composés biologiques contenant du soufre,

Ces particules permettent à la vapeur d’eau de se

La biosphère semble

réguler l’atmosphère et la température à

la surface de la Terre

afin de favoriser l'épanouissement de formes de vie complexes.

72

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE condenser sous forme de gouttelettes, donnant naissance aux nuages.

er], élaboré des stratégies pour capter l’énergie | : rmer transfo

Lorsque la lumière du soleil atteint la surface des océans, l’eau de surface se réchauffe et active la croissance du

maires, se nourrissent de minéral et transformer: le soleil en sucres par la photosynthèse. _ Les animaux herbivores absorbent l’énergie stoc. kée par les végétaux. - Les animaux carnivores mangent les herbivores. Plus la complexité d’un organisme augmente, plus

phytoplancton qui relâche ces aérosols en

abondance,

favorisant la formation d’une

couverture nuageuse. Ces nuages diminuent alors l’ensoleillement et la température de l’eau ne

tarde pas à se refroidir, ralentissant la croissance

du phytoplancton. La diminution du plancton en-

traîne une réduction de la couverture nuageuse,

l’ensoleillement augmente et la température croît à nouveau... Les minéraux présentés sur cette double page sont posés sur mon bureau, comme autant

d’hommages à la magie de la vie qui a su colorer jusqu'aux cailloux ! La nature dispose autour de nous un nombre infini de joyaux petits et grands, de toutes formes et couleurs : papillons, oiseaux, scarabées, coquillages, poissons. Sans oublier les fleurs, fruits et légumes qui nous accompagnent tous les jours ! Comment pourrions-nous purifier notre regard afin de ne jamais cesser de remercier pour les présents qui nous sont faits ? L'émerveillement et la gratitude sont au cœur d’un engagement écologique.

Ces boucles de rétroaction dynamiques et équilibrées permettent aux micro-organismes marins de contrôler la température de la planètes ! LES

BACTÉRIES

LA GÉOLOGIE

INFLUENCENT

La géologie a également été fortement influencée par les micro-organismes. Nous avons évoqué les prélèvements de carbone opérés dans l'atmosphère, précipité sous la forme de roches calcaires pouvant atteindre des centaines de mètres d’épaisseur sur le fond des océans. Le poids considérable de ces sédiments a peut-être influencé la tectonique des plaques, et donc la forme des continents.

- Les végétaux chlorophylliens, producteurs Pri-

il lui faut absorber une énergie concentrée, ce qui

explique le nombre de plus en plus restreint d’or. ganismes au fur et à mesure que l’on avance dans la chaîne trophique. Nous

autres,

humains,

représentons

le Stade

ultime de la complexité. Notre cerveau compte

une centaine de milliards de neurones, capables

d'exécuter plusieurs millions d'opérations par se.

conde. Au repos, ce cerveau consomme à lui seu]

20 à 30 % de l'énergie que nous absorbons’. I] faut beaucoup d’énergie pour maintenir un humain en vie ! La logique de l’évolution voudrait que nous mettions nos exceptionnelles capacités au service du vivant.

COMPLEXITÉ

DES SOCIÉTÉS

CROISSANTE

Il est tentant de faire le parallèle entre la complexité croissante de la matière, celle des organismes vivants et celle des sociétés humaines.

Les falaises blanches qui bordent certains littoraux et les pierres calcaires avec lesquelles est bâtie la

Nos structures immatérielles ne cessent d'évoluer vers des formes plus sophistiquées. Des tribus paléolithiques à la société mondialisée d’aujourd'hui,

disparus.

poléonien ou soviétique, on peut constater une tendance généralisée : les sociétés simples s’assemblent pour composer des sociétés de plus grande taille.

cathédrale Notre-Dame de Paris sont formées des coquilles d'organismes marins depuis longtemps

Les découvertes scientifiques récentes ont mis en évidence le fait que les deux tiers des 4 400 miné-

raux présents sur la Terre sont liés aux organismes vivantsé. Les couleurs fascinantes des turquoises, des azurites, des malachites et de nombreux autres

en passant par les empires romain, inca, chinois, na-

Les mégasociétés ont une durée de vie limitée,

elles se désagrègent, se décomposent avant de s’as-

minéraux parmi les plus beaux sont le fruit de la

sembler en ensembles plus grands encore. Dans ce sens, nos sociétés se comportent comme des macro-organismes, elles perpétuent le mouvement

La Terre habitée par la vie est devenue bien différente de ses planètes sœurs, Mars, Vénus et

LE MONDE DE DEMAIN Nous atteignons en ce début

chimie du vivant.

Mercure : malgré des compositions

proches, ces

dernières sont restées stériles.

LE PARADOXE DE LA VIE Un être vivant repose sur un paradoxe : il est ordonné, mais en déséquilibre énergétique. Il dépend donc d’un approvisionnement constant en énergie pour maintenir

la stabilité de sa structure.

Tout au long des chaînes alimentaires, les êtres vivants ont

de l’évolution en marche depuis les origines.

de xxr° siècle un seuil jamais

atteint auparavant : une fusion croissante de toutes les sociétés

existant à la surface de la Terre. La mondialisation gomme les diffé-

rences entre les cultures locales et favorise une uniformité planétaire dans les modes de consommation et de pensée.

Tout n’est pas forcément néfaste pour autant. Cette culture mondialisée

CHAPITRE

favorise l'émergence d’une prise de conscience Jobale : nous ne disposons que d’une seule pla-

nète et il appartient à chacun de prendre sa part de responsabilité pour maintenir saine et vivante cette “maison commune”.

7

LE MURMURE

DE LA VIE

météorites géantes ou les éruptions volcaniques massives. L’agriculteur

déconstruit ce que la nature a mis

des centaines de millions d'années à assembler. La biodiversité régresse

massivement. Les monocultures arroL'Internet est une technologie artificielle qui res-

semble aux structures neuronales ; il permet à chacun de se connecter à la globalité et d’avoir accès à pratiquement toutes les connaissances,

anciennes et contemporaines. Un usage positif de cet outil autorise une circulation rapide des “bonnes pratiques” et rend plus envisageable une réponse globale face aux problèmes émergents, comme le changement climatique.

internet accélère considérablement la naissance du monde de demain, fondé sur de nouveaux paradigmes. Il faut toutefois espérer que nous

parviendrons à limiter sa consommation énergé-

tique, équivalente à celle de l’ensemble des vols civils mondiaux. Les nouvelles technologies absorbent de 8 à 10 % de la consommation énergétique du continent européenf.

LES ÉNERGIES DU FUTUR

Les sociétés fonctionnent à l’instar des organismes

vivants : leurs besoins en énergie concentrée

croissent à mesure qu’elles grandissent en taille et

sées de poisons chimiques sont une aber ration

injustifiable au regard de la rareté de la vie dans le cosmos.

Toute agriculture qui s'inspire de la nature tend logiquement à engendrer des milieux complexes. L’écoculture favorise des agroécosystèmes diversifiés, comportant un grand nombre de niches

écologiques, et de ce fait une biodiversité élevée.

Ces milieux complexes permettent de transformer efficacement les minéraux et l'énergie du soleil en

ressources pour les êtres humains.

RÉCONCILIER SCIENCE

ET CONSCIENCE Passer d’une agriculture qui artificialise la planète

à une écoculture qui va dans le sens de la vie nécessite de modifier le regard que nous portons sur

la nature. Les pages qui précèdent nous ont permis

de comprendre à quel point la vie a façonné le

monde que nous habitons aujourd’hui. La nature a une expertise incroyable, riche de près de 4 mil-

liards d’années d’expérimentations successives.

en complexité. L'homme de Néandertal ramassait du bois mort. Les peuples de l’âge du fer coupaient la forêt sur de larges espaces pour alimenter leurs

Le bon sens voudrait que nous inscrivions nos modestes existences dans ce grand fleuve, au lieu de nager à contre-courant !

monde contemporain se nourrit de pétrole et de

Les peuples premiers considéraient la Terre comme une mère bienveillante nourrissant et protégeant ses enfants. Les découvertes de la science

forges. L’Angleterre creusait des mines de charbon pour effectuer sa révolution industrielle. Le la fission de l'atome.

Quelles seront les énergies de demain ? Chacun de nous sait qu’il convient d’abandonner au plus vite le recours aux énergies fossiles et nucléaires,

vu les risques qu’elles font encourir à la planète. Par quoi les remplacerons-nous ? Trouverons-nous une forme d'énergie plus concentrée encore, ce qui

irait dans le sens de la marche de l’évolution, ou

bien saurons-nous inventer de nouveaux usages de l'énergie solaire, en copiant la photosynthèse par exemple ? Cette question non résolue à ce jour

est au cœur de notre devenir.

L'ÉCOCULTURE, AGRICULTURE

DE LA COMPLEXITÉ

contemporaine ne sont pas en contradiction avec les intuitions de ces peuples racines. Un chercheur

britannique, James Lovelock, a décrit la biosphère comme un super-organisme, Gaïa, capable de

maintenir l’équilibre de ses conditions internes,

favorisant en cela l’évolution des organismes vers des formes de plus en plus complexes?. Cette hy-

pothèse Gaïa a le mérite d'ouvrir la voie vers une nouvelle perception de la Terre.

Si nous réalisions vraiment à quel point la vie est

rare dans l’univers, nous serions éperdus de grati-

tude pour cette planète. Les oiseaux, les papillons, les scarabées, les poissons et les coquillages, les

fleurs aux formes et aux couleurs chatoyantes re-

Les jardiniers et paysans que nous sommes Peuvent noter que, du point de vue de l’évolution,

présentent autant de joyaux, de miracles. Ne ces-

régression. Elle se traduit par une simplifica-

été, comme si nous le découvrions pour la première fois.

depuis son apparition. Dans ce sens, elle s’apParente aux grandes catastrophes qui ont mar-

En nous engageant sur la voie de l’écoculture, nous reprenons le chemin logique : celui de perpétuer

l’agriculture industrielle marque une immense

tion croissante des milieux naturels, ce qui va exactement à l’opposé du mouvement de la vie

qué l’histoire de la planète, comme la chute de

sons pas de nous étonner. Regardons le monde

avec les yeux de l’enfant émerveillé que nous avons

la grande aventure de la vie,

À l'instar des milieux naturels, nos jardins

et nos fermes gagnent

en efficacité et en durabilité en évoluant

vers davantage de complexité.

73

8

LE SOLEIL, LE VENT, LA PLUIE Être indien est important et spécial. Être indien signifie que l’on est capable de vivre en ayant avec ce monde une relation particulière. Cela signifie vivre avec la Terre, les animaux, les oiseaux et les poissons comme s’ils étaient vos frères et vos sœurs. Cela revient 4 dire que la Terre est une vieille amie que votre père connaissait et que votre peuple connaît depuis toujours...

L'écoculture nous invite à accorder nos actions à la danse des éléments naturels, à favoriser le mouvement de la vie.

Pour nous Indiens, la Terre est l'essence même de notre vie’°. Richard Nerysoo, Inuit. Nous autres, jardiniers, avons souvent les yeux tournés vers la terre, préoccupés par la préparation

s'élève et est remplacé par de l’air froid. Telle est Porigine des vents, qui font circuler les pollens et

du sol, le choix des bonnes semences, les associa-

les semences.

tions de cultures... Il est bon parfois de relever la tête et d'inscrire notre petit jardin dans des perspectives plus vastes.

LE SOLEIL, MOTEUR

DE LA VIE

Le soleil est un grand moteur de la vie sur notre planète. Par le biais de la photosynthèse, l'énergie du soleil permet aux plantes de produire de la matière organique et de stocker l’énergie nécessaire à leur croissance. Gette matière organique enrichit ensuite le sol, alimentant la litière et contribuant

à la pédogenèse. La matière organique du sol n’est rien d’autre que de l’énergie solaire stockée sous nos pieds. Une partie de la matière organique ancienne s’est transformée en charbon, en pétrole et en gaz. Les énergies fossiles que nous utilisons aujourd’hui libèrent la chaleur reçue par notre planète durant le Carbonifère, il y a 300 millions < Cette photo extraordinaire a été prise depuis un ULM par mon ami de vingt-cinq ans,

Claudius Thiriet, agriculteur et photographe, à qui l’on doit les plus belles photos

de ce manuel. Je l'aime Particulièrement car elle nous

fait pénétrer au cœur des

nuages. On ressent la force et l'élégance des mouvements qui

les animent. Les nuages sont

de grands voyageurs aériens,

Puissants et protecteurs, sans

Eux nous ne serions pas là. Mais je vous avoue queje

Préfère les regarder d’en bas !

d'années.

Les plantes nourrissent les animaux herbivores et ceux-ci sont mangés par les carnivores, voire par des humains. Tous les habitants de la surface de la Terre se nourrissent de soleil.

LE SOLEIL À L'ORIGINE DES VENTS

ET DES PLUIES

Le soleil réchauffe des masses d’air, sous les tro-

piques notamment. L'air chaud étant plus léger, il

Le soleil est aussi à l’origine des pluies : il réchauffe

l'eau des mers et des lacs, et l’amène à adopter une

forme gazeuse. La vapeur d’eau s’assemble sous forme de nuages que le vent fait voyager. La pluie vient arroser des terres qui, sans elle, resteraient

désespérément sèches.

La biosphère que nous habitons résulte de ces dynamiques. Le monde est plein de soleil ! Cultiver la terre, élever des animaux nous fait participer à l’organisation de ces flux d’énergie. Nous devenons des transformateurs de soleil en légumes et en fruits, en œufs, lait et produits animaux, en humus...

STOCKER L'ÉNERGIE DANS LES PAYSAGES L'énergie solaire est gratuite, renouvelable, non polluante. À l'échelle de la vie humaine, elle peut être considérée comme infinie. La permaculture nous invite à penser l’organisation de notre territoire en y concentrant l'énergie solaire sous différentes formes, de manière à créer des paysages “puissants”.

LE SOL, LES PLANTES ET LES ANIMAUX

Les plantes captent l'énergie solaire par la photo-

synthèse et la transfèrent vers l’humus sous forme

Soleil et lumière Rayonnement diffus : ce sont des rayons qui proviennent de l'atmosphère, qu'il fasse beau ou pas. Certains

rayons lumineux issus du soleil traversent les nuages et se diffusent sur la surface de la Terre.

Rayonnement direct : ce sont principalement les rayons uv du soleil, qui peuvent être mesurés par un e. instrument dédié : le pyrhéliomètr

PARTIE

Il À L'ÉCOLE

DE LA NATURE

Y Un matin, chez les Wayanas, je me baignaïs dans

le fleuve et j'ai été saisi d’un

sentiment extraordinaire : j'ai vraiment ressenti le mouvement de l’eau, dans

les nuages, le fleuve, la sève des arbres, dans mon sang et chacune de mes cellules, et

j'ai perçu que cette eau était une, c’est la même eau qui

circule dans l’ensemble de la biosphère... Je me suis senti complètement relié à toutes les formes qu’elle traverse.

Les gouttelettes de rosée qui

ourlent ces jeunes pousses de blé coulent peut-être aujourd’hui dans vos veines ?

de carbone organique, ce qui permet de stocker d'immenses quantités d'énergie dans les terres arables. Enrichir le sol en matière organique permet d’obtenir une terre plus profonde, plus

humifère, capable de retenir des quantités impor-

tantes d’eau de pluie et de nutriments. L'énergie ainsi stockée dans les sols peut y rester des années ou des siècles. Selon David Holmgren, augmenter le taux de matière organique de notre terre est une forme de partage avec les générations futures : nos

efforts pour créer de la fertilité leur permettront

de se nourrir. Aujourd’hui, nous faisons l'inverse.

Les industriels peinent à stocker l'énergie solaire dans des batteries efficaces, non polluantes et d’un

prix abordable, Les processus biologiques nous

permettent de recueillir cette énergie dans les sols Sans aucune technologie et quasiment sans autre coût que notre travail.

la croiss, Un sol riche en humus soutient r: | d’une végétation plus dense, qui favorise : ainsi s’amorce retour la croissance du sol

clé qe, spirale vertueuse toute simple qui est la bio-abondance.

Plus de sol > plus de végétaux > plus de sc

En plantant des arbres en grand nombre, en den

con fiant les cultures, nous pouvons augmenter

dérablement la biomasse de notre territoire. Cetr,

biomasse est un concentré de soleil.

Davantage de biomasse par hectare permet d'éless,

davantage d’animaux. Ceux-ci participent à la trans formation du soleil en nutriments via leur système digestif. Leurs déjections viennent nourrir le sol,

Plus de sol + plus de végétaux > plus d'animaux > plus de sol L'EAU DOUCE Aucun d’entre nous n’est capable de porter ne serait-ce que 100 litres d’eau. Imaginez l'énergie déployée pour transporter des millions de mètres cubes d’eau de pluie dans l’atmosphère, la faire circuler et la relâcher ensuite au-dessus des continents L'eau douce ne représente que 1 % de l’eau disponible à la surface de la Terre. Sécuriser les ressources en eau douce est un enjeu essentiel pour l'avenirde l'humanité. En de nombreuses régions du monde, Pirrigation excessive a asséché lacs et rivières et abaissé le niveau des nappes phréatiques. Pour les agriculteurs, savoir capter l’eau est d’une grande importance. Même les régions où la pluviométrie

nr:

est importante actuellement sont susceptibles de souffrir de sécheresse. Nous pouvons déjà constater que les changements climatiques augmentent les épisodes extrêmes. Notre région, la Normandie, est

2

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considérée comme pluvieuse, pourtant depuis notre installation nous avons subi à plusieurs reprises des

4

sécheresses pouvant durer plusieurs mois.

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Chaque design permaculturel devrait intégrer la

«

LA

PRET

76

captation de l’eau et ses flux, en vue de créer des “paysages d’eau”, pouvant prendre des formes différentes selon les contextes. Dans notre ferme.

chaque jardin dispose d’une ou de plusieurs mars ce qui nous permet de nous passer de moyens de pompage sophistiqués car il n’est pas nécessailt de transporter cette eau sur de grandes distances

CAPTER L'EAU DE PLUIE DANS

DES MARES

Lorsqu'il pleut sur les hauteurs de votre territoirt et que vous recueillez cette eau là où elle tombt: par des mares creusées aussi haut que possible sur les pentes, vous captez une part de l'énergit

solaire qui a été déployée pour faire évaporer le

CHAPITRE 8 LE SOLEIL, LE VENT, LA PLUIE masses d’eau lointaines et la transporter jusque-là. cette eau “haute” est plus puissante que de l’eau

L’Australien Percival A. Yeomans”* a formulé en

“basse”, Car VOUS pouvez la faire couler le long des

1940 une approche de l’utilisation du sol en agriculture basée sur l'observation et la géologie. Sa

d'énergie, offerte gratuitement par le soleil.

scarifier profondément le sol à l’aide d’une charrue spéciale, le long des courbes de niveau, de manière à favoriser la pénétration de l’eau de pluie.

pentes par gravité et irriguer des cultures situées en contrebas. Une mare de 20 mètres cubes située au sommet d’une pente représente beaucoup

EAU DE PLUIE

ET MATIÈRE ORGANIQUE

La capacité d’un sol à absorber l’eau de pluie augmente avec sa teneur en matière organique. Celle-

ci se comporte comme une vaste éponge et peut stocker 20 fois son poids d’eau.

méthode des contours (keyline design) consiste à

UN

PAYSAGE

PUISSANT

Si vous interagissez intelligemment avec tous Ces

processus, vous pouvez en quelques années rendre votre territoire beaucoup plus riche. Vous apprenez à “jongler” avec le soleil, la pluie, le vent. Au

Bec Hellouin, nous avons planté des kilomètres

de haïes et des milliers d’arbres, creusé vingt-cinq

Plus de sol + plus d’eau + plus de végétaux + plus d'animaux + plus de sol Des recherches récentes ont donné un résultat surprenant : il y a une corrélation entre la teneur

en matière organique des sols et la pluviométrie. L’évapotranspiration de la végétation peut engen-

drer jusqu’à 50 % des pluies tombant sur un continent. Des sols riches en matière organique sont capables de faire pousser une végétation dense, qui

favorise des pluies abondantes, qui favoriseront à leur tour la végétation.

Une augmentation de 1 % du taux de matière orga-

nique d’un sol permet d'augmenter sa capacité de

stockage en eau de 190 mètres cubes par hectare environ. À chaque pluie, le sol retiendra davantage d’eau. Le programme satellitaire de la Nasa Soil Moisture Active Passive a permis de constater

mares, enrichi la terre en matière organique, nous élevons des animaux dans tous les espaces disponibles.. La ferme devient chaque année plus luxuriante. Il est fascinant de voir s’amorcer la spirale vertueuse de la bio-abondance. Les énergies fossiles sont un concentré de soleil si

puissant qu’il est indispensable de les laisser là où

elles sont, sous terre, si nous voulons stabiliser le

changement climatique. Apprenons à nous passer de pétrole !

Le constat heureux que nous avons pu faire

dans notre petite ferme, c’est que remplacer les énergies fossiles par l’énergie solaire et les processus biologiques n’engendre pas de privation ni de pénurie, mais conduit au contraire vers la bio-abondance.

que, trois jours après une pluie, la couche de sol

TRANSFORMER

donc les pluies à venir.

Pour ceux qui aspirent à se nourrir de leur jardin ou à vivre de la vente de leur production, cette bio-abondance se traduit par des récoltes plus généreuses et plus régulières, obtenues à moindre coût.

supérieure conserve encore environ un septième de l’eau reçue. Plus le sol est riche en matière organique, plus la quantité d’eau stockée augmente, ce qui favorise l’évapotranspiration des plantes et

Plus de sol + plus d’eau + plus de végétaux ? plus de pluie > plus de végétaux + plus d’animaux > plus de sol

À l'inverse, des sols à nu, pauvres en matière organique, favorisent la sécheresse. Lorsque l’eau contenue dans un sol s’évapore, celui-ci se refroidit. Mais quand le sol devient sec, il ne se refroidit

plus et peut engendrer un temps plus chaud, voire

EN RÉCOLTE

DU SOLEIL

Au risque de choquer, car l’image manque de poésie, chaque paysan est un transformateur de soleil en euros. La vente de nos récoltes engendre un chiffre d’affaires qui est supposé nous permettre

de prélever une rémunération. Cet espoir est pourtant souvent déçu. Bien que le budget de la

Politique agricole commune (PAG) représente 40 % de celui de l’Europe, en 2015 le revenu annuel de 30 % des agriculteurs français était inférieur à

une vague de chaleur, qui vont encore accentuer

3 500 euros. Il devient de plus en plus criant que

CAPTER

gies fossiles, ne parvient pas à assurer la prospérité des agriculteurs.

la sécheresse”.

L'EAU

DANS LES SOLS

DE

PLUIE

On peut favoriser l'infiltration des eaux de pluie

dans un sol de diverses manières. Les baissières (swales) et les terrasses sont des aménagements

efficaces qui permettent d’éviter les ruissellements (Voir le chapitre 15, p. 137).

l’agriculture conventionnelle, fondée sur les éner-

Le soleil brille pour tous. Devenons des experts

en soleil ! Apprenons à organiser avec élégance la

captation et la transformation de son énergie par le sol, par l’eau, par les plantes et les animaux, et nous pourrons vivre dignement de notre métier,

Ce n’est pas nous qui faisons pousser les plantes, nous sommes les humbles serviteurs d’une énergie vitale à l’œuvre depuis des milliards d’années.

77

78

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE

»> Cette ponette, Harmonie, a fait partie de notre famille durant douze années. Attelée à un petit tombereau que nous avons fabriqué, conduit ici par Fénoua, notre dernière fille, elle transportait sans effort 200 kilos de matériaux.

À petite ferme, petits outils,

petits animaux et... grandes joies ? L’écoculture, un jeu d’enfant ? ET TRANSFORMER

énergétique”. Juste de notre force, ou de celle

Passer du pétrole au soleil demande un apprentissage. Les énergies fossiles offrent de grands avantages : elles sont puissantes, faciles à transporter et immédiatement disponibles. Si vous avez recours à un tracteur, même si vous sortez mal réveillé de votre lit au petit matin, il vous suffit de vous asseoir dans l’habitacle et de tourner la clé de contact pour libérer instantanément une énergie enfermée depuis le Carbonifère. Un tracteur met à votre service l’équivalent de 200 “esclaves énergétiques”. Même mal réveillé, vous pouvez labourer des dizaines d’hectares dans la journée. Sans avoir la moindre conscience du nombre presque infini de micro-organismes que vous supprimez.

tâches nous deviennent interdites. Nous avançons

L'ÉNERGIE SOLAIRE

“L’environnement n’est

pas ici. l’environnement n’est pas là-bas. Vous êtes l’environnement.”

Chef Oren Lyons,

Amérindien onondaga

En faisant le choix de nous passer de pétrole, nous nous tournons vers l’énergie du soleil et vers des énergies biologiques. Les processus biologiques sont complexes, mais en simplifiant nous pouvons considérer que, lorsque vous sarclez à la main votre jardin, vous utilisez des calories solaires puisque vous vous nourrissez de végétaux et d’animaux qui

ont “mangé” du soleil. Il en va de même lorsque

vous travaillez avec un cheval de trait. Lorsque les grenouilles et les hérissons mangent des limaces, ils fonctionnent aussi à l’énergie solaire.

L'énergie solaire est diffuse et difficile à stocker.

Mais, à l'échelle du paysage, la quantité de rayonnements solaires reçue est telle que, bien que le

rendement de la photosynthèse ne soit que de 2%, elle est remarquablement puissante.

Le soleil ne s’utilise pas comme un tracteur ! Il

nous faut réapprendre une forme de lenteur, le respect des rythmes de la nature. En ayant recours au soleil, nous ne disposons d'aucun “esclave

de notre cheval et des grenouilles. Beaucoup de

humblement et causons moins de dégâts. UN

NOMBRE

PRESQUE

D’ALLIÉS DE CHOIX

INFINI

Mais nous ne sommes pas impuissants pour autant. Chaque ver de terre, chaque bactérie, chaque mycorhize œuvre avec nous : ils aèrent le sol, le fertilisent, organisent la circulation de l’eau, de Vair et des nutriments. Avec de tels alliés, le labour

n’est plus nécessaire. Ni le tracteur, du coup! Etsi

vous supprimez le tracteur, vous dites également adieu à l’assureur, au mécano, à la pompe à gasoil, aux commerciaux qui cherchent à vous vendre de nouveaux accessoires.

Et si nous apprenions à nous positionner différemment dans notre rapport à l'énergie ? Le pétrole

abondant et pas cher nous a rendus très paresseux. Les engins motorisés nous isolent dans

un habitacle, nous entourent de bruit et de gaz

d'échappement.

Devenir des transformateurs de soleil nous invite à vivre le nez tourné vers le ciel et les nuages, à sen-

tir le vent, à être attentif aux forces de la nature,

à l'instar des peuples premiers qui vivaient dans une profonde intimité avec leur environnement.

ORGANISER LES FLUX

EFFICACEMENT

Nous allons maintenant évoquer quelques points

qui facilitent le passage du pétrole au solaire. L'IMPORTANCE

DU

DESIGN

Pour tirer profit de chaque rayon sola ire, un excellent design est essentiel. Une bonne

FREE

CAPTER

CHAPITRE

8

LE SOLEIL, LE VENT, LA PLUIE

application des concepts de zones, de secteurs et

de réseaux fluidifie toute notre activité (voir le

chapitre 15, p. 137).

Chaque fois que vous pouvez vous épargner de parcourir quelques dizaines de mètres, en posi-

tionnant mieux votre réserve à outils ou en redessinant un chemin, par exemple, vous économisez

des calories et de la fatigue. Lorsque vous gagnez

30 mètres sur un petit trajet anodin réalisé des di-

zaines de fois dans la journée, vous vous épargnez plusieurs journées de travail sur l’année.

J'ai transformé une vieille brouette en bois que j'affectionne particulièrement en “brouette-

atelier”. J'y place mes outils à long manche et ma

caisse à outils qui contient à peu près tout ce dont j'ai besoin, jusqu'aux étiquettes, feutres, pierre à affûter... La brouette-atelier m’accompagne d’un jardin à l’autre. Elle m’économise au moins vingt minutes de trajets inutiles par jour entre le jardin et la serre-atelier, soit deux heures par semaine et quatre-vingt-dix heures par an. Plus de deux semaines de travail ! En multipliant de telles initiatives, vous pouvez imaginer la peine épargnée.

DES OUTILS ADAPTÉS

Disposer d’outils manuels de haute qualité permet d’épargner également de l'énergie. À travail égal, la différence entre un bon outil et un mauvais

est à peine croyable, surtout si l’on maîtrise par-

faitement son usage !

La légèreté est importante également. Si vous allégez le manche d’une binette de 500 grammes et que vous effectuez le geste des milliers de fois durant une séance de travail, ce sont des centaines de kilos à déplacer que vous aurez épargnés.

UNE ORGANISATION

MAÎTRISÉE

Chaque tâche doit être effectuée au moment op-

portun. Une bonne organisation permet d’éviter

de gros efforts. Par exemple, le désherbage est facile lorsque les adventices sont au stade plantules.

Un paillage déposé au bon moment évitera au sol

de se compacter..

des paysages énergétiques invisibles et pourtant si réels qui nous entourent. Ce niveau de conscience s’accompagne d’une vigilance accrue. Dans la nature, tout gaspillage est proscrit, car l’énergie est chère pour tout organisme vivant ! Les processus biologiques cherchent toujours à atteindre l'efficacité optimale avec une dépense énergétique minimale. Ceci nous invite à plus d'élégance : l'effort diminue à mesure que nos gestes gagnent en efficacité, à l'instar des maîtres en arts martiaux qui concentrent une énergie fantastique dans ce qui ressemble à une danse aérienne.

LES ÉNERGIES INVISIBLES

Toutes les formes d’énergie n’ont pas été décrites

par les sciences occidentales. En Extrême-Orient,

le prana, ou chi, ou qi, est l'énergie vitale qui baigne lunivers. Elle peut être visualisée sous forme d’aura. Les plantes et les animaux ont une aura, tout comme nous. Pour les hindous, les végétaux que nous mangeons sont plus ou moins chargés de prana selon qu’ils ont été cultivés avec amour et respect des

processus naturels. Les sentiments des jardiniers

influeraient sur les végétaux et les animaux qu’ils soignent. L'amour est une énergie puissante !

Une bonne organisation n’est possible que dans un jardin d’une taille bien adaptée à votre force de travail et au temps dont vous disposez. Un jardin trop grand vous enfermera dans une course permanente

tation. En nous reconnectant à ce qu’il y a de végétal

DEVENIR

matérielle et voir chatoyer les couleurs, les archi-

et vous n’aurez même plus le temps de réfléchir ! CONSCIENT

DE L'ÉNERGIE

de plus en plus conscients des flux, des échanges,

et d'animal en nous, nous devenons plus humains.

Nous pouvons regarder notre jardin sous sa forme

:

Être un transformateur de soleil nous conduit à Pénétrer une nouvelle dimension. Nous devenons

Travailler la terre peut devenir une forme de médi-

tectures végétales. Nous pouvons également le

regarder sur un plan subtil et percevoir quelque

chose de l'énergie du sol et des plantes. Vibrer à l'unisson du jardin...

A D’avoir vécu tant d'années parmi les

peuples racines, j'ai gardé une méfiance pour les équipements sophistiqués.

La solution la plus simple est souvent la meilleure ! Ma brouette-atelier me

permet de transporter

d’un jardin à l’autre tous les outils dont j'ai besoin. Elle me fait gagner du temps et de la sérénité.

79

4

« Rose, notre seconde

fille, repique des salades.

La culture sur buttes

9

permanentes nous a permis

de transformer le sol ingrat et peu profond de notre ferme en une terre

LE SOL

maraîchère fertile, en l'espace de quelques années.

Ne nous leurrons pas : il nous reste moins de 3 hectares de terre émergée par habitant et, sur cette petite étendue qui nous est encore octroyée, un dixième seulement est cultivé et nous nourrit; sur

le reste, il nous faut nous loger, nous habiller, nous véhiculer, enfin. vivre... Nous voici ramenés à l’exiguïté de cette planète Terre dont, pour la première fois dans l'Histoire, nous sommes

entièrement responsables. C’est dans cette notion de responsabilité et dans celle de respect que se situent les solutions au problème de l’environnement. D’enfants de la Terre, nous sommes devenus

ses gardiens. La clé de toute activité paysanne repose sur les soins au sol.

Claude et Lydia Bourguignon Sans sol nous n’existerions pas ! Ce milieu

complexe est indispensable à notre survie ainsi qu’à celle des animaux et des plantes qui nous

minéraux. Ils sont composés de molécules stabilisées par des liaisons atomiques extrêmement difficiles à casser. On ne peut donc pas les détruire

entourent. Les civilisations brillantes se sont construites sur les terres les plus fertiles, elles ont

sivement par nos activités.

QU’'EST-CE

Le sol, quant à lui, est caractérisé par une alliance complexe d’éléments minéraux et d'éléments or-

disparu lorsqu'elles les ont désertifiées. QUE

LE SOL ?

Le sol est la couche superficielle de l'écorce ter-

restre qui va de sa surface jusqu’à la roche-mère. L’épaisseur de cette mince “peau” de terre vi-

vante varie de quelques centimètres à quelques mètres : elle est dérisoirement ténue par rapport à l'épaisseur de l’écorce terrestre ou à celle de l’atmosphère. Pourtant, cet écosystème est celui qui abrite le plus grand nombre d’espèces vivantes.

Une cuillère à soupe de sol contient davantage d’êtres vivants qu’il n’y a d’humains sur Terre !

Le sol reste un milieu fort mal connu des scientifiques et, a fortiori, des agriculteurs et du grand public. Pire : notre culture nous enseigne un dégoût de la terre. Enfant, on nous gronde lorsque nos habits sont salis ou nos ongles noircis. Cette substance marron et poussiéreuse que nous foulons toute notre vie sans trop la regarder semble inerte,

- ce qui ne nous empêche pas de les polluer mas-

ganiques ; les liaisons qui les tiennent ensemble

sont électriques. De ce fait, elles sont fragiles et

peuvent facilement être cassées. Le sol peut être

rapidement détruit.

Lorsque Perrine et moi nous sommes installés dans notre ferme, nous ne connaissions absolument rien sur le sol. Pour être très francs, Perrine

mettait des gants en plastique pour travailler la terre qui l’avait toujours dégoûtée. Notre méconnaissance a été source de malentendus mais, peu

à peu, nous nous sommes intéressés à notre terre, nous avons cherché à la comprendre. Mieux : nous en sommes tombés véritablement amou-

reux. Lorsqu'elle rentre aujourd’hui du travail, Perrine en est maculée et... rayonnante ! Nous aimons travailler pieds nus dans nos jardins aux

allées si douces. Nous avons compris que notre

sans intérêt, le réceptacle de nos excréments, de nos pollutions. Est-ce faute de la comprendre et de l’aimer qu’un certain nombre d'agriculteurs dé-

sol est tout sauf inerte : il s’agit d’un milieu vivant, fluctuant, ouvert aux échanges, une frontière poreuse entre le ciel et la terre, entre le

UN MILIEU FRAGILE en va de Il est temps de sortir de ce malentendu, il vulnéme ystè notre devenir. Car le sol est un écos ent rable. L’air et l’eau sont deux milieux entièrem

néral dans le cycle de la vie.

truisent sans état d’âme d’invraisemblables quantités de terres arables ?

cosmique et le tellurique. Un espace empli d’une énergie extraordinairement puissante. Le lieu d’une alchimie mystérieuse qui incorpore le mi-

La clé de toute activité paysanne repose sur

les soins au sol. Nous savons que nos actions

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE

“Nous ne connaîtrons

jamais tout sur les

champs ; il nous paraît

donc souhaitable d’en avoir une double

approche scientifique

et intuitive4.”

Claude et Lydia Bourguignon

Peuvent vite le dégrader, mais nous avons aussi découvert avec émerveillement que nous détenons le pouvoir presque magique de l'améliorer. Au fil des ans, nous avons pu observer que nos Pratiques ont sensiblement augmenté la profondeur d’humus dans nos jardins ; notre terre est noire, pleine de vie, et la végétation a répondu à cette amélioration en s’épanouissant davantage

encore. Des plantes bien développées et saines

sont le meilleur indicateur d’un sol respecté et

soigné. Croyez-moi, enrichir sa terre est l’une des aventures les plus gratifiantes que l’on puisse vivre durant une vie humaine !

QUEL IMPACT ONT LES PRATIQUES BIO-INTENSIVES SUR LE SOL ? Mais comprendre le sol et son fonctionnement ma rien d’évident. Nous avons beaucoup lu, suivi des formations, fait réaliser de nombreuses ana-

lyses selon différents protocoles, dialogué avec des agronomes et des spécialistes. Nous nous sommes

progressivement rendu compte que notre manière

bio-intensive de cultiver la terre, sous la forme de

buttes permanentes recevant d'importantes quantités de matière organique fraîche, pose des ques-

tions spécifiques qui n’ont pas encore été étudiées

par la science contemporaine.

Y Lydia et Claude Bourguignon nous ont ouvert la voie d’une compréhension plus profonde

de notre sol. Nous avons été

impressionnés par ces chercheurs : chaque sondage qu’ils creusent

les passionne autant que si c'était le premier, alors qu’ils ont étudié la plupart des terres arables de la planète. Ils semblent y trouver autant de joie que s’ils allaient à l’opéra ! Les scientifiques qui poussent très loin leurs travaux

en sortent souvent grandis et touchent à l'essence du monde.

Nous avons fini par lancer nos propres programmes de recherche pour tenter de comprendre l’impact des pratiques bio-intensives sur les terres maraîchères. C’est dans le cadre de ces programmes que nous avons eu le bonheur

d'accueillir, à plusieurs reprises, Lydia et Claude Bourguignon, les meilleurs spécialistes français du sol, qui sont devenus membres de notre co-

mité scientifique. Nous sommes tombés sous le charme de ce couple de chercheurs passionnés

et généreux. Inséparables, Lydia et Claude ont

effectué des sondages dans à peu près toutes les

terres arables de la planète, mais ils ont pourtant

gardé une curiosité et un enthousiasme intacts,

comme si chaque profil de sol était le premier. Ils aiment la vie, la nature et leurs frères humains, ce qui motive leur combat pour la protection des terres arables. Nous les avons observés creuser des trous et réaliser des prélèvements dans nos différents jardins, sous serre et en plein air, dans

la prairie témoin, dans une ancienne couche chaude... Les premières analyses ont été faites en direct, sur le terrain, complétées par d’autres

réalisées ultérieurement dans leur laboratoire, le

LAMS", Ce chapitre doit beaucoup à nos échanges ainsi qu’à leur livre Le Sol, la terre et les champs,

qui est à notre sens le meilleur ouvrage sur la question.

belge a Par ailleurs, une récente étude scientifique elletionn excep mis en évidence une amélioration

s. ment rapide de nos sols, nous y reviendron

ion scientifique, je vous N’étant pas de format up de chose,

beauco avoue humblement que limites et C'est er mes s nai con Je m’échappent. je m'adresse, que cher tant que jardinier-maraî vous aide, vous. L'objectif de ces pages est de à comprendre

fonction. les grands principes de

vos pratiques s,, nement du sol et l’impact de ter ces ré celui-ci. J’ai cherché à vous présen s lités de manière simple. Rassurez-vou : vo,

pouvez être un excellent jardinier sans avoir er les de l'azote + tête toutes les subtilités des cyc du carbone !

LES TERRES ARABLES Le sol sert de support à toutes les activités agr.

coles. Les paysans sont, ou devraient être, Jes premiers gardiens du sol. Mais force est de re.

connaître que, depuis l’invention de l’agriculture ils ont rarement perçu sa nature sophistiquée, Par de mauvaises pratiques, un agriculteur peut, en l’espace de sa vie professionnelle, transformeren

un désert une bonne terre fertile que la nature avait probablement mis des dizaines de milliers d’années à élaborer. L'agriculture

contemporaine

repose

sur un

malentendu : elle a cru pouvoir se passer des organismes du sol et nourrir directement les plantes en leur fournissant des nutriments sous forme soluble, directement assimilable. Dansun

premier temps, cette démarche a été couronnée de succès, mais ses effets secondaires sont tels

qu’ils aboutissent à moyen terme à la destruction

des terres cultivées, à la pollution des cours d’eau,

à la déstabilisation du climat... Nous sommes sur pris de constater qu’en matière de pédologie (a

science qui étudie les sols), l’agriculture indus-

trielle repose largement sur des connaissances

scientifiques datant de plusieurs décennies, orl science du sol a énormément évolué ces dernières

années. Il y a de profondes contradictions entre

ce que l’on sait du sol aujourd’hui et les pratiques agricoles dominantes. Nos

pratiques permaculturelles

sont orientéts

vers la création de sol - il serait plus humble & plus exact de parler de cocréation, car nous if faisons qu’assister les processus de la pédogenèst (la création de sol).

SOL,

PLANTES,

ORGANISMES

Les terres arables de la planète sont le fruit Processus complexes qui associent des facteu climatiques,

géologiques

et biologiques. L®

plantes sont les gardiennes du sol : elles l'en” chissent en matières organiques, sources de nou

riture pour tout le petit peuple des organis"®

qui participe à son fonctionnement. Les arb'*ÿ

En particulier, jouent un rôle essentiel dan ? pédogenèse.

ee

82

CHAPITRES9

Le sol nourrit en retour les plantes, grâce à l’acti-

vité de la vie qu’il héberge. Il y a ainsi une communauté

de destin

entre

les végétaux

et les

organismes du sol. Ils ont coévolué pendant

plusieurs centaines de millions d’années et dé-

pendent les uns des autres. Supprimez l’un et bientôt les autres disparaissent.

LE SOL, UN

“SYSTÈME

DIGESTIF”

Le sol peut être comparé à un super-organisme qui mange et respire. Il y a de nombreuses ana-

logies entre le sol et un système digestif. Le sol

est construit à partir de “nourriture” : des roches et de la matière organique fraîche. Cette “nourriture” est transformée tout au long d’un processus

de digestion sophistiqué. Les organismes du sol

jouent un rôle de première importance dans ce processus : ils cassent les molécules complexes, les réduisant en éléments de plus en plus simples, s'en nourrissent, en tirent de l’énergie et des nutriments, les recomposent éventuellement et, au

final, les excrètent sous forme de déchets assimilables par les plantes ou par d’autres organismes du sol !

C’est là toute la magie du sol et de son fonctionnement : par leur activité, les organismes du sol rendent les éléments du sol biodisponibles pour les plantes. Notre système digestif ne fait pas

autre chose en transformant notre nourriture en

éléments assimilables par nos cellules.

NOURRIR LES PLANTES Connaître les plantes, leur composition et leurs

besoins peut nous aider à comprendre les processus à l’œuvre dans le sol.

mais ils leur sont indispensables. Ils contribuent, entre autres, à donner aux végétaux leur saveur et leurs caractéristiques “de terroir”.

Pour que les racines soient en capacité d’absorber ces minéraux, ils doivent être biodisponibles,

c’est-à-dire : - De petite taille, car des nutriments grossiers ne pourraient pénétrer dans les racines fines du chevelu ; - Solubles dans l’eau du sol - qui constitue ce qu’on appelle en pédologie la “solution du sol” -, afin de pouvoir arriver au contact des racines, franchir leur membrane et circuler dans le corps des plantes avec la sève. Le “système digestif sol” transforme donc les roches et la matière organique fraîche en minéraux solubles assimilables par les racines. DES

NUTRIMENTS

SOIGNEUSEMENT PROTÉGÉS

Ceci étant posé, une question doit encore être résolue : ces minéraux solubles, en solution dans

Veau du sol, risquent d’être rapidement emportés, lessivés - le terme exact pour décrire le lessivage des ions est lixiviation -, car cette eau est en mouvement. En effet, elle tombe du ciel sous forme

de pluie, traverse les différents horizons du sol et s’enfonce dans ses profondeurs pour rejoindre les nappes phréatiques. Du fait de leur petite taille, les nutriments des plantes sont les particules du sol les plus sujettes à la lixiviation.

vés dans l’atmosphère. Le gaz CO, qui constitue

corps des végétaux par les stomates des feuilles ; - D’eau, puisée dans le sol par les racines

Cet équilibre délicat entre disponibilité et stabilité est résolu grâce à deux dispositifs :

- De carbone et d’oxygène, exclusivement préle0,04 % de l'atmosphère, et l'oxygène pénètrent le

profondes ; - De minéraux, également puisés dans le sol par le chevelu racinaire. Ces minéraux comprennent

l'azote, le phosphore, la potasse et une quinzaine

d’autres éléments

en moindre

quantité,

dont

certains ne sont nécessaires qu’à l’état de traces (oligoéléments). Les minéraux ne représentent

83

que 3 à s % du poids de matière sèche des plantes

Une difficile équation doit donc être résolue : les minéraux doivent être à la fois solubles et disponibles, tout en disposant d’une certaine forme de stabilité pour ne pas être lixiviés et rester dans l'environnement proche des racines.

Les plantes se nourrissent :

LE SOL

- Des liens stabilisent les minéraux en les fixant sur des molécules plus importantes, non solubles dans l’eau (le complexe argilo-humique). Ces liens sont de nature électrique et ils peuvent céder pour libérer les nutriments dans la solution du sol, les rendant ainsi de nouveau biodisponibles pour les plantes.

Biodisponibilité La biodisponibilité décrit l’état d’un nutriment qui est assimilable par un organisme. Il est alors qualifié de

“biodisponible”.

Prenons un exemple simplifié, celui du pain au levain, pour expliquer ce phénomène. Les céréales complètes Sont riches en fer et en zinc. Cependant, ces deux nutriments ne sont pas biodisponibles en l’état, Ils sont

Piégés par une molécule qui empêche leur assi milation : l'acide phytique. Les micro-organismes présents dans

un levain sécrètent une enzyme particulière appe lée phytase. Elle dégrade l'acide phytique et libère ainsi le fer et le zinc, les rendant biodisponibles.

A Avant de créer ce que nous appelons le “paysage de résilience”, nous avons effectué

de multiples sondages afin de rechercher les emplacements les

plus favorables à l’implantation de champs en traction animale. Dans l’ensemble de la ferme, la profondeur de terre arable

dépasse rarement 20 centimètres.

Au-dessous, c’est un lit de caïlloux compact. Avec le recul, nous sommes très heureux d’avoir créé notre ferme sur une terre peu fertile, impropre aux cultures maraîchères, car

les résultats obtenus en peu

d'années démontrent d'autant mieux l'efficacité des techniques décrites dans ce manuel.

Il y a de nombreuses analogies entre le sol et

notre système digestif.

Si nous donnons au sol la meilleure nourriture possible, il fera croître

des plantes saines et vigoureuses.

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE

COMPOSITION D'UN SOL FERTILE

- Les minéraux sont stockés sous différentes formes :

+ Stockage minéral sur les argiles et l’humus

du sol. e Stockage organique dans les organismes vivants du sol. Les nutriments sont alors intégrés dans les tissus et les cellules de ces organismes. Chaque être vivant du sol est un stock de nutriments qui sera libéré dans la solution du sol à sa mort, ou simplement par les déchets qu’il excrète. Les humus et les argiles, mais aussi les bactéries,

les champignons et les vers, sont de véritables MATIÈRE ORGANIQUE

A Schéma inspiré de Patrick Whitefield, The Earth Care Manual.

concentrés de nutriments.

disponibles

sont occupés

pour moitié

Par l'air

ortions son et pour moitié par l’eau (ces prop

hiver les sols Sont variables selon les saisons : en

e représente de gorgés d’eau). La matière organiqu en COnstitue ral 1 à 10 % du sol, tandis que le miné environ 40 %.

Le sol est un milieu dynamique au sein duquel de

phases solides, liquides et gazeuses coexisten

et s’influencent mutuellement.

Les pratiques de

culture impactent directement cette dynamique.

LA RENCONTRE

ENTRE

LE MINÉRAL ET L’'ORGANIQUE

Le sol est le fruit de la rencontre du minéral «+ de l’organique. Le sol grandit par les deux extré.

mités, par la litière et par la roche-mère,

La coévolution du sol, des plantes et des nombreux organismes qui leur sont liés a ainsi élaboré des dispositifs sophistiqués qui permettent de sécuriser tant l’alimentation des organismes du sol en matière organique que l’approvisionnement en minéraux des végétaux. L’approvisionnement en eau est lui aussi sécurisé par la capacité des humus et des argiles à stocker dans le sol des quantités importantes d’eau de pluie.

loux pour en faire une nourriture savoureuse permettant à de nouvelles générations de plantes de s'épanouir !

CYCLE DES NUTRITION

LE MINÉRAL : LA DÉGRADATION DE LA ROCHE-MÈRE

SAISONS ET DES PLANTES

On peut comparer le sol à une immense cuisine au sein de laquelle s’activent d’innombrables

opérateurs talentueux, capables de transformer

et d’associer des déchets organiques et des cail.

Sous les latitudes tempérées et froides, durant la saison hivernale, lorsque les pluies sont abondantes, l’ensemble du système sol + végétaux fonctionne au ralenti. Les bactéries du solont besoin

Le minéral vient d’en bas, de la dégradation dela roche-mère. Celle-ci est attaquée par l’eau de pluie, le gel et d’autres facteurs climatiques, mais aussi par l’action des racines et des micro-organismes.

froid, elles ne sont plus actives et ne produisent

plantes. Ceci ne pénalise en rien les végétaux dont la croissance s’interrompt en hiver. La nature est bien faite : grâce à cette synchronicité entre activité bactérienne et croissance végétale, il ny a pas de perte de nutriments, ceux-ci ne sont

La roche-mère se délite en particules de plus en plus fines : pierres, sables, limons, argiles. Elle libère aussi des minéraux sous la forme d'ions positifs ou négatifs qui peuvent rester en solution dans l’eau du sol, précipiter sous forme de roche ou bien servir de nutriments à des plantes ou des micro-organismes et rejoindre ainsi le cycle du vivant.

UNE FRONTIÈRE OUVERTE

Un constat surprenant a longtemps interpellé les géologues : quelle que soit la constitution de la

de chaleur pour être actives. Lorsque le sol est donc plus de nutriments biodisponibles pour les

libérés que lorsque les plantes en ont besoin !

Le sol est une frontière ouverte qui reçoit par le haut la matière organique et les influences du soleil, de la pluie, du vent, de la lune et des astres, et par le bas les influences de la rochemère. L’oxygène, la chaleur et l’eau le pénètrent grâce à sa porosité. La surface d’un sol sain est constituée à 80 % de vide.

En volume, un sol fertile est généralement composé pour moitié de particules de matière rinérale ou organique, et pour moitié d’espaces laissés disponibles entre ces particules. Ces espaces

roche-mère, sa dégradation aboutit toujours à la formation d’argiles qui jouent un rôle important

dans la fertilité des sols. Les racines et les mi-

crobes sont à l’origine de cette transformation. Ils prélèvent les minéraux dont ils ont besoin pour leur nutrition et laissent dans le sol de grandes

quantités de silice, de fer et d'aluminium, qui cristallisent pour donner des argiles. Des expériences

de laboratoire ont montré qu’en présence de racines de blé, des cristaux de roches durs comme le mica commencent à se transformer en argiles au bout de sept heures seulement" !

Lixiviation “Entraînement des sels solubles par l’eau qui circule dans le sol de haut en bas'8”

mie

84

CHAPITRE9

jL'existe de nombreux types d’argiles. Leur strucrure en feuillets présente de minuscules cavités qui peuvent stocker de l’eau et des nutriments,

La dégradation de la roche-mère aboutit donc à la

libération de minérauxutiles pour la nutrition des

en plus ou moins grande quantité selon la qualité de l'argile considérée. Leur charge négative leur

plantes et des micro-organismes du sol. Des découvertes récentes laissent entrevoir que les plantes favorisent l'extraction des minéraux spécifiques dont

d'être emportés par l’eau.

rencé. Le monde vivant régule le monde minéral.

permet de fixer les ions positifs, ce qui leur évite

LESOL

elles ont besoin pour se nourrir, si le sol en est ca-

COUPE

DE SOL

ORGANIQUE

LITIÈRE HUMUS COMPLEXE ARGILO-HUMIQUE

NAPPE PHRÉATIQUE

ROCHE-MÈRE

Matière minérale, matière organique La matière minérale caractérise tout ce qui n’est pas organique, c’est-à-dire tout ce qui n’est pas composé de longues chaînes d’atomes de carbone. Dans les substances minérales, les atomes peuvent aussi s'organiser en structures de taille importante sous forme d’amas. Les gros amas minéraux peuvent prendre la forme de roches ou de particules (minéraux particulaires tels que les argiles, les limons et les sables). Les atomes peuvent également rester séparés et se dissoudre dans l'eau du sol.

La matière organique caractérise tous les matériaux et substances nu de carbone et qui présentent une structure organisée (organique one capable de se

de longues chaînes d’atomes cHEnne Ù nee Ds structurer en très longues chaînes. Celles-ci ne sont pas exclusivement composées de carbone,

elles incorporent également dans leur architect ure d’autres éléments : azote (N), phosphore (P), soufre (S)... IP B

(minéralisation) pour libérer les nutriments qui s’y trouvent I faut que les chaînes de carbone soient cassées

“équestrés afin qu’ils deviennent accessibles aux plantes.

qui se déposent à sa surface et La matiè i ’un sol est com posée des débris végétaux et animaux ! Re mrganique du de l'ensemble des organismes vivants qui la décomposent. On peut également parler de matière carbonée,

SMnonyme de matière organique.

MINÉRAL

85

86

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE ne minéral) de latro, transforment le CO2 (carbo (sucres) et en ox. que ani sphère en carbone org nsmet dans toute tra se que gène. Ce carbone organi la chaîne

alimentaire

: les animaux

herbivore

p,, mangent les plantes et sont eux-mêmes mangés ts s vivan sme ani org ces s Tou es. ivor les animaux carn ve. alimentent la litière sous forme de feuilles, de

gétaux en fin de cycle, de déjections animales ou de cadavres. À chaque étape de cette chaîne, il ya des

pertes de matière organique. Celle-ci est utilisée, par e les plantes et les animaux, COMME source d'énergi

MATIÈRE ORGANIQUE

de CO, Le carbone est alors rejeté sous forme

La macrofaune du sol (animaux visibles à l’œi] nu) et les micro-organismes (algues, animaux, cham. pignons et bactéries, invisibles à Pœil nu) parti. cipent à la décomposition, puis à la recomposition de la matière organique. Au terme du Processus,

les éléments grossiers sont transformés en miné.

raux solubles assimilables par les plantes.

La matière organique remplit de nombreuses

fonctions : L'ORGANIQUE

DE LA LITIÈRE

: LA DÉGRADATION

L’organique vient d’en haut, de la litière formée par tous les débris végétaux et animaux qui se déposent à la surface du sol. Les racines qui meurent dans le sol l’enrichissent également (rhizodéposition). La matière organique d’un sol

est composée de ces débris et de l’ensemble des organismes vivants qui la décomposent (à eux seuls, les vers peuvent représenter plusieurs tonnes à

lhectare). Elle est en perpétuel renouvellement. Son principal constituant est le carbone. Elle peut représenter jusqu’à 10 % de la composition du sol ; un taux d’au moins 3,5 % est considéré comme souhaitable pour une terre cultivable. Un sol fertile contient de la matière organique à tous les

stades de décomposition.

Le carbone entre dans les cycles du vivant par le biais de la photosynthèse que réalisent les végétaux chlorophylliens : grâce à l’énergie du soleil, ils

- Fonctions nutritionnelles pour les plantes (apport d’azote, de phosphore, de soufre...) et les

organismes du sol (apport de sucres et autres mo.

lécules organiques, de minéraux).

- Fonctions biologiques : support de l’activité

biologique du sol, biodiversité, source d'énergie

pour les organismes du sol. - Fertilité chimique (stockage des éléments minéraux, neutralisation du pH...

- Fonctions physiques : structure, porosité, aération, perméabilité, stabilité, stockage de l’eau, résistance à la battance..

- Qualité de l'atmosphère : stockage de carbone

dans les sols. - Disponibilité et qualité de l’eau : stockage, fil tration, rétention des polluants. - Qualité des cultures.

L'HUMUS

Lors de la décomposition de la litière, les micro-

organismes et les champignons transforment une

partie de la matière organique en humus. L’humus

L'eau du sol et les éléments en suspension” On nomme colloïdes les particules chargées électriquement sur leur pourtour, qui sont en capacité de rester en suspension dans un liquide tel que l’eau, dont les molécules (H20) présentent une polarité électrique :les électrons de la molécule H,0 sont plus attirés par le noyau d’oxygène que par les deux noyaux d'hydrogène. Il en résulte un pôle positif d’un côté de la molécule et un pôle négatif de l’autre. de la litière Les particules négatives provenant de la dégradation de la roche-mère (argiles) et de la dégradation Rappelons liées. faiblement restent elles auquel d’eau, (humus) sont attirées vers le pôle positif des molécules t. capacité La mutuellemen s’attirent négative ou positive électrique charge d’une dotées que les particules

des colloïdes à rester en suspension dans l’eau explique pourquoi le risque de lessivage de ces éléments 65!

important : si l’eau s’en va, ils partent avec !

L’altération de la roche-mère libère également des ions positifs (calcium, magnésium, fer, aluminium...), du

servent de liaison entre les particules négatives d’argiles et d’humus. Les particules ainsi formées (complext argilo-humique) sont électriquement neutres, elles ne sont pas attirées par l’eau et résistent à son action érosi®

Die

> ot —à

de —

ee

CHAPITRE9

est formé de molécules organiques stables composées d’atomes de carbone et de minéraux.

Le rythme d’humification (création d’hu mus) dépend de la qualité de la matière organique apportée au sol, du type de sol et des conditio ns de culture.

De manière générale, la matière Organique riche en

lignine (pailles, compost, BRF) a un rend ement humique élevé, tandis que les déjections animales et les engrais verts ont un rendement humique faible. Il existe différents types d’humus, plus ou moins

stables. La durée du cycle de l’humus varie en fonction du type de sol, de la température, de l’'humidité, de l’aération du sol et de son PH. Certains

Le complexe argilo-humique se forme principale

contient une glande spéciale sécrétant du carbo-

nate de calcium qui lie les argiles et les humus. C’est l’une des raisons pour lesquelles les vers de terre sont des agents majeurs de création de la

fertilité des sols.

LA CAPACITÉ D'ÉCHANGE

CATIONIQUE (CEC) Le complexe argilo-humique retient à sa surface des cations (calcium, magnésium, potassium, sodium). Ces cations, éléments minéraux essen-

tiels à la nutrition des plantes, peuvent s’échanger

humus peuvent rester dans le sol plusieurs milliers

L'humus est une réserve de nutriments. Il possède

La capacité d’échange cationique (cEc) est une mesure qui décrit cette capacité du complexe ar-

une grande capacité de rétention de l’eau et joue un rôle important dans la structuration du sol. LE COMPLEXE

ARGILO-HUMIQUE

Le complexe argilo-humique (cax) est une structure formée d’argiles et d’humus. Les molécules

d’argiles et d’humus étant toutes deux chargées

gilo-humique à stocker les minéraux. Plus elle est

élevée, plus les cations fixés sont nombreux.

Le complexe argilo-humique forme des agrégats

insolubles dans l’eau, sans pour autant perdre

sa capacité à échanger les cations fixés à sa surface. Il concilie stabilité et capacité d’échange.

formés d’ions positifs de calcium, de magnésium, d’hydroxyde de fer ou d’alumine.

négativement, elles sont reliées par des “ponts”

Son rôle est essentiel dans la fertilité des sols. Il contribue également à leur porosité et à leur résistance à la compaction.

Ces ponts électriques sont plus ou moins solides. Des “colles biologiques” viennent les renforcer. Certains champignons mycorhiziens sécrètent une colle que l’on appelle glomaline et qui vient enrober les éléments “argiles + humus + ions”. Les particules ainsi formées sont stables et contribuent à donner sa structure grumeleuse au sol.

On peut décrire le complexe argilo-humique comme le “garde-manger” des plantes. S'il est détœruit (par l’acidification du sol, par la sécheresse ou lorsque l’usage de produits chimiques anéantit la vie du sol), les minéraux qu’il retient sont mis en suspension dans l’eau du sol et susceptibles d’être lixiviés.

Humus?° Substance organique complexe issue de la transformation de la litière. L'humus est formé de molécules organiques stables composées d’atomes de carbone et de minéraux. Sa nature colloïdale en fait avec l'argile un réservoir des substances nutritives du sol et la source de sa stabilité.

Complexe argilo-humique Le complexe argilo-humique (ca) est une structure formée d’argiles et d’humus. Il retient à sa surface des

cations, nutriments minéraux des plantes. Le complexe argilo-humique se forme principalement dans le tube

digestif des vers de terre.

| La capacité d’échange cationique (CEC)” La capacité d’échange correspond à la mesure du nombre de sites porteurs d’une charge électrique dans un sol, Elle résulte de deux éléments : l'argile et la matière organique. Les limons et les sables n’ont pas de capacité d'échange, ils sont seulement intéressants pour la texture et la structure du sol.

|

87

ment dans le tube digestif des vers de terre, qui

avec la solution du sol et constituent son réservoir de fertilité chimique.

d'années.

LE SOL

La cec, , capacité d’échange cationique, exprime le nombre de sites porteurs d’une charge négative et donc } & où . ,

| Cépables de fixer des ions chargés positivement (cations), tandis que la CEA, capacité d’échange anionique,

| exprime le nombre de sites porteurs d’une charge positive et donc capables de fixer des ions chargés | Népativement (anions).

La cec correspond donc à la quantité de cations qu’un sol peut retenir, SUT un complexe argilo-humique notamment. Elle représente la capacité de rétention des éléments nutritifs et la capacité du sol à échanger

ces éléments avec la plante. Plus la EC est élevée, plus le sol peut retenir des cations.

“Comment le monde de la silice, celui des roches, fait-il pour fusionner avec le monde du carbone, celui de

la litière ? Sur le plan chimique ces deux

mondes paraissent incompatibles. Le monde

minéral de la silice est dur et cassant, alors que le monde organique est mou et souple?” Claude et Lydia Bourguignon

88

PARTIE

Il À L'ÉCOLE

DE LA NATURE

ière vivante, et à

LA MINÉRALISATION

La minéralisation est la transformation des molécules organiques de la litière ou de l’humus en molécules organiques simples, puis en minéraux solubles dans l’eau du sol et en CO.

“En bon état, un sol contient jusqu’à 1 milliard de micro-organismes par gramme

et de

1 à 4 tonnes de vers

par hectare.”

Claude et Lydia Bourguignon

Elle libère

les minéraux pour la nutrition des plantes et des micro-organismes. Une partie des minéraux libérés entre dans la composition du complexe argilo-humique. La minéralisation est réalisée par les organismes

du sol, bactéries et champignons en tête. Ils dé-

gradent la matière organique, l’oxydent pour en tirer l'énergie nécessaire à leur activité et rejettent du CO;. Ce processus est en fait leur respiration. En simplifiant quelque peu des processus complexes, on peut dire que le carbone entre dans le cycle du vivant par la photosynthèse, est stocké dans les sols par l’humification, puis est relâché

dans l’atmosphère par la minéralisation. La mi-

néralisation permet donc au carbone organique de redevenir du carbone minéral sous forme gazeuse (CO). Elle boucle ainsi le cycle du carbone,

de la mat principal constituant minéral de l’atmos sure l’équi libre entre carbone ue sol. du niq a phère et carbone org

on dépend du sol Le rythme de la minéralisati ce qui favorise et des pratiques culturales. Tout l’activité bactérienne accélère la minéralisation bac. et libère des nutriments pour les plantes. Les et d’eau eur, chal re, de ritu nour de in beso ont es téri

d’oxygène ; le travail du sol, irrigation et l'apport d’engrais intensifient donc la vie microbienne et la

nique. minéralisation de la matière orga LES

HORIZONS

DU

SOL

rents processus La pédogenèse résulte des diffé est un milieu sol Le r. oque d'év ns veno que nous

organisé qui évolue dans le temps et dans l’espace. La pédogenèse s’opère en trois étapes :

1. Décomposition de la roche-mère et de la litière. 2. Migration, sur le plan vertical, des colloïdes. 3. Accumulation des sables, argiles, humus, du

complexe argilo-humique.

»> Ces photos présentent trois sols différents. Celui de droite est un sol de notre ferme. Le cliché a été pris lorsque la pelleteuse creusait une mare dans un endroit où coulait autrefois le lit de la rivière. L’horizon supérieur est constitué d’une terre tourbeuse très noire et acide. On arrive vite dans le sous-sol minéral, une argile décomposée, friable, de couleur blanche. Il n’y a aucun endroit de

notre ferme où nous disposions

dun sol profond, comme ceux présentés sur les deux premiers profils.

La respiration Pour se maintenir en vie, tout être vivant a besoin d'énergie. Celle-ci est stockée dans la matière organique (ou matière carbonée), plus précisément dans chaque liaison qui relie deux atomes de carbone.

Toute cellule vivante, qu’elle soit végétale, animale, fongique ou bactérienne, s’applique donc à casser des liaisons carbone-carbone pour en tirer de l’énergie. Cette réaction nécessite la présence d'oxygène (O2). Les

atomes de carbone détachés des molécules organiques sont éliminés sous forme de dioxyde de carbone (CO:). Cette activité des cellules se nomme la respiration. La respiration consiste en fait à défaire ce que

photosynthèse a fait.

Le mot “respiration” est généralement utilisé avec un sens différent de celui qui est présenté ci-dessus. Ce que le langage courant appelle respiration : faire entrer de l'air dans des poumons puis l’en faire sortir, est en fait une activité nommée ventilation. CO, présent dans l’air que nous expirons Nous-mêmes, êtres humains, bouclons le cycle du carbone avec le on : : jai de respiration, de la réaction i e (par le biais organiqu Ï On peut dire que nous minéralisons de la matière

simple oxydation de la matière organique, en l’occurrence du glucose). Cette réaction nous donne l'énergie

corps à 37 °C, pour lire un manuel nécessaire au fonctionnement de notre organisme, pour maintenir notre

de permaculture..

CHAPITRE9 LE SOL 89 À l'issue de ce processus, un sol arrive à maturité, il est alors constitué de différents horizons. Les horizons sont les strates homogènes d’un sol. sol. L'ensemble des horizons forme le profil d’un

LES

HORIZONS

DU

SOL

Les horizons varient d’un sol à l’autre ; mais il est

possible de retenir, de manière générale, trois horizons principaux. Chaque strate assure une étape physiologique des plantes. _ L'horizon A est formé de matières organiques

plus ou moins dégradées (litière et horizon hu-

E LITIÈRE

LA GERMINATION

Fo

AUMUS

LA NUTRITION

mifère). Sa couleur est brun foncé à noire. C’est

Phorizon de la germination.

_ L'horizon B est constitué de matériaux Orga-

RIZON

DE

HORIZON DE

niques et de matériaux minéraux. C’est l’horizon dela nutrition. _L'horizon C est exclusivement minéral. Il est formé d’une zone d’altération qui surplombe la rochemère. C’est l’horizon de l'alimentation en eau.

Le système racinaire des végétaux est adapté à ces horizons. Les graines des plantes sont déposées à la surface du sol où elles germent. Puis leurs racines se développent sous la forme d’un chevelu racinaire capable d’extraire les nutriments de l’ho-

rizon B, où se trouve le complexe argilo-humique.

D'autres racines descendent explorer l'horizon C,

parfois très profondément, jusqu’à la nappe phréa-

tique, pour y puiser de l’eau.

LE SOL, UN

MILIEU

VIVANT

HORIZON DE L'ALIMENTATION EN EAU

LA MACROFLORE : LES RACINES DES PLANTES

Nous autres, jardiniers, avons toujours tendance à sous-estimer les racines des végétaux car elles nous sont invisibles. Pourtant, le développement des racines est bien supérieur à celui des parties aériennes. Dans lhorizon B, un pied de blé produit 5 000 kilomètres de poils absorbants. Les racines d’un chêne peuvent descendre à 140 mètres de pro-

Le sol est un biotope riche de nombreuses niches écologiques qui abritent un nombre considérable

fondeur et, si l’on mettait bout à bout les réseaux

sources alimentaires. Par leurs activités, ces orga-

de mycorhizes qui leur sont associés, ils feraient le tour de la planète”!

d'organismes. Il leur offre un habitat et des resnismes contribuent à la pédogenèse et façonnent

le milieu dans lequel ils vivent.

Les habitants du sol peuvent être divisés en deux catégories : les macro-organismes, visibles à l’œil

nu, et les micro-organismes, invisibles à l’œil nu. Les macro-organismes

assurent le brassage et

l'aération du sol, ainsi que le malaxage et la fragmentation des divers composants organiques (broyage de la matière organique, élimination des racines mortes...). Les micro-organismes inter-

viennent dans la dégradation de la matière organique et l’incorporation des éléments minéraux dans la dynamique du vivant.

La rhizosphère est le volume de sol soumis à l'influence des racines. C’est une zone d’intense activité microbienne. En effet, la plante, via les exsudats racinaires, met à disposition des nutriments qui favorisent le développement des microorganismes. Les interactions complexes entre ces populations microbiennes et le sol déterminent la

santé du sol.

Les racines de matière déposition des racines

apportent des quantités importantes organique dans le sol, par la rhizoet la litière souterraine - constituée mortes des plantes annuelles, mais

Sol et température La température exerce une influence considérable sur les processus de la pédogenèse. Lorsqu'il fait chaud

toute l’année, les bactéries sont actives en permanence. Les sols évoluent Desusoup pe vite sous les latitudes être détruits en Topicales que dans les régions froides. Ils peuvent 8€ former plus rpienenu THaIs . der

Peu de temps. Ceci est l’un des facteurs expliquant la rapidité avec laquelle P À à OR coupe les forêts tropicales.

survient la désertification lorsque

90

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE également des plantes pérennes qui renouvellent régulièrement leurs racines fines. Un arbre perd

en moyenne 30 % de ses racines chaque année.

Le chevelu racinaire et les micro-organismes se développent donc en coopération. Ils décompactent le sol et lui donnent cette structure grumeleuse, bien aérée, qui ressemble à du couscous’. Lorsque les racines meurent, elles nourrissent toute la vie du sol et laissent des galeries qui permettent la circulation de l’eau et des gaz.

LA MACROFAUNE

La macrofaune comprend des groupes d’animaux bien différents.

VERTÉBRÉS ET MAMMIFÈRES

Les rongeurs (campagnols et mulots) et les insectivores (taupes) creusent d'immenses galeries qui aèrent le sol, favorisent la circulation de l’air et de l’eau, et mélangent les horizons du sol. INVERTÉBRÉS Les invertébrés appartiennent groupes : — Les arthropodes :

à différents

e Crustacés : cloportes.

e Arachnides : araignées et acariens. e Insectes : fourmis, termites.

e Myriapodes : millepattes et iules. e Collemboles. - Les mollusques : limaces et escargots. — Les vers : e Nématodes. e Vers de terre. A La fourmi, le taupin et le perce-oreille font tous partie de la macrofaune du sol.

LES DIFFÉRENTS HABITATS DE LA MACROFAUNE

Les populations d’invertébrés se répartissent en trois grands groupes.

LA FAUNE

ÉPIGÉE

La faune épigée (du grec epi : “sur, par-dessus”, et gê : “la terre”) vit dans la litière du sol, à l’abri du

la faun e soleil, sous les feuilles. Les animaux de

de la litière épigée participent à la décomposition Ils creusenr fécales: et à la production de boulettes de aération cet & des galeries et contribuent à] Phorizon supérieur dy rizon. Grâce à leur activité,

s : IL sol possède une incroyable DEnesist d Eau par res d’absorber 150 millimèt en capacité heure pour les forêts tempérées et 300 millimètres

par heure pour les forêts tropicales, contre ] mil.

battant. limètre par heure sur un limon labouré

La faune épigée est composée de vers épigés

de collemboles, millepattes..

d’acariens,

de cloportes, de

LA FAUNE ENDOGÉE

La faune endogée (du grec endo : “dedans, vers l’intérieur”, et gé : “la terre”) occupe les horizons inférieurs du sol. Elle se compose globalement des mêmes espèces que la faune épigée mais les animaux rencontrés sont plus petits, plus allongés, de couleur blanchâtre. La faune endogée consomme

les racines mortes,

Elle libère l’espace occupé par ces racines et contribue ainsi à l’aération du sol en profondeur ainsi

qu’à l’infiltration de l’eau. La faune endopgée facilite

également l’apparition de nouvelles racines.

LA FAUNE ANÉCIQUE

La faune anécique (du grec anesis : “élasticité”) est composée d’animaux qui explorent les différents horizons en se déplaçant dans des galeries verticales. Sous les climats tempérés, la faune anécique est représentée par les grands vers de terre, les lombrics. Sous les tropiques, ce sont les termites qui occupent cette niche écologique. La faune anécique contribue à l’aération du sol et facilite la circulation de l’eau dans tous les horizons. Les lombrics assurent un brassage du sol en profondeur (consommation des argiles) et en surface (consommation des humus). Ils forment dans leur intestin le complexe

argilo-humique

et remontent en permanence vers les horizons

La rhizodéposition La plante sécrète, par le biais de ses racines vivantes, une quantité importante de composés organiques (sucrés simples, acides aminés, acides organiques...). Ces composés organiques permettent à la plante de modifie! l’environnement racinaire afin de pouvoir accéder aux nutriments dont elle a besoin. Ces exsudats racinaires vont attirer bactéries et champignons qui vont s’en nourrir. La présence d'importantes populations de bactéries

et de champignons va attirer à son tour les nématodes et les protozoaires, prédateurs des bactéries et des champignons. Les dynamiques alimentaires des bactéries et des champignons, et les dynamiques de prédation des protozoaires et des nématodes vont libérer de grandes quantités de nutriments minéraux solubles dans là solution du sol, immédiatement à proximité des racines. La plante se nourrit de ces déchets.

Au final, c’est près du tiers des produits de la photosynthèse que la plante injecte dans le sol par le biais de la rhizodéposition. Le volume de sol sous influence racinaire, c’est-à-dire qui reçoit les exsudats racinaires

est qualifié de rhizosphère.

Ces exsudats ont également un rôle dans la formation du sol (dissolution des minéraux de la roche-mère).

CHAPITRE9

supérieurs les nutriments ayant été emportés par l'eau en profondeur. Les turricules (déjections) des vers de terre sont extrêmement riches en mi-

néraux et autres éléments nutritifs. Ils contiennent

s fois plus d'azote, 2 fois plus de calcium, 7 fois plus de phosphore disponible et 11 fois plus de potasse disponible que le sol environnant. LES VERS

DE

TERRE?

L'importance des vers de terre pour la fertilité physique, chimique et biologique des sols est de plus

en plus reconnue. Véritables ingénieurs du sol, les vers de terre représentent la première biomasse des terres émergées (plus de 70 % de la masse animale terrestre des zones tempérées). 1 hectare de terre maraîchère contient de 4 à 6 millions de vers de terre. En France, la moyenne nationale est d'environ 1 tonne de vers de terre par hectare. Elle

peut atteindre de 4 à 5 tonnes par hectare dans les bonnes prairies. À travers le monde, environ 7 000 espèces de vers

de terre ont été identifiées. Il est possible d’en rencontrer une centaine dans les sols français,

réparties en trois catégories écologiques dont la morphologie, le cycle de vie, le comportement et les fonctions écologiques diffèrent : - Les vers épigés (moins de 1 % de la biomasse de

vers de terre dans le sol) vivent à la surface du sol, dans la matière organique fraîche, et se déplacent de manière horizontale. De petite taille et de cou-

leur rouge sombre, ils se nourrissent de la litière

et des résidus de culture, initiant ainsi le recyclage de la matière organique.

- Les vers endogés (20 % de la biomasse de vers de terre dans le sol) vivent dans le sol et se déplacent de manière horizontale. De taille intermédiaire,

ils sont faiblement à blanchâtre. Ils se aussi d’un substrat à buent à la structure

pigmentés, de couleur claire nourrissent des racines mais dominante minérale et contrigrumeleuse du sol.

- Les vers anéciques (80 % de la biomasse de vers de terre dans le sol) vivent dans tous les horizons

du sol dans lequel ils se déplacent de manière verticale. De grande taille, ils créent des galeries permanentes qui affleurent à la surface du sol.

Par leur activité fouisseuse, leurs habitudes ali-

mentaires et les déjections qu’ils produisent, les vers de terre assurent, directement et indirectement, de nombreuses fonctions :

ACTIVITÉ FOUISSEUSE

Dans un sol vivant, les galeries de plus de 2 millinétres de diamètre présentent une longueur cu-

mulée de 400 mètres par mètre carré. Une telle longueur de galeries offre une surface de l’ordre

LE SOL

de 5 mètres carrés. Les galeries représentent 5 #

du volume du sol. Elles sont essentielles à la fer-

tilité du sol :

- Augmentation de la porosité du sol :

e Aération du sol, amélioration des échanges

gazeux. + Diminution des phénomènes de ruissellement

et d’érosion, amélioration de l’infiltration et de

la diffusion de l’eau, meilleure capacité de réten-

tion, drainage et ressuyage plus rapides.

- Amélioration de la structure du sol, agrégation, structure grumeleuse.

- Amélioration du développement racinaire, contraintes mécaniques moindres, environnement favorable, riche en eau, en air et en substances

Inutile d’acheter des

engrais coûteux et polluants : en favorisant la vie du sol, le jardinier

lui permet de créer

le précieux humus.

nutritives (à la suite du passage des vers de terre,

les parois des galeries sont tapissées de mucus et de turricules). — Décompaction des sols durs.

HABITUDES ALIMENTAIRES

Les vers de terre consomment des matières organiques et minérales (argiles et limons), mais aussi des bactéries, des champignons, des nématodes et des protozoaires. Ils contribuent ainsi, d’une part, au broyage et à la décomposition de la matière

organique (le recyclage de celle-ci est plus rapide

en présence de vers de terre), et, d’autre part, à la

régulation des populations de micro-organismes

présents dans le sol et à la composition du réseau alimentaire du sol. De ce point de vue, les vers de

terre contribuent indirectement au bon état sani-

taire des cultures : les bio-agresseurs sont régulés par une vie du sol diversifiée et active.

DÉJECTIONS

1 tonne de vers de terre produit, en moyenne, 30 tonnes de déjections par hectare. Ces déjections, qualifiées de turricules (“petites tours” en latin), sont plus riches en matière organique que le sol qui n’est pas passé par les vers. La matière organique des turricules présente une cEc

Y En ouvrant un tas de compost, on peut souvent y observer la macrofaune du sol, ici des vers rouges, des cloportes et des larves.

9

92

PARTIE

II À L'ÉCOLE

DE LA NATURE

améliorée et s’avère extrêmement riche en minéraux

facilement assimilables par les plantes. Les turri-

cules sont également riches en complexe argilo-

Prenez grand soin des vers, ces précieux collaborateurs améliorent votre terre de jour comme de nuit, toute l’année !

Y Les vers de terre sont de grands créateurs de fertilité. La galerie de ce lombric contribue à aérer le sol, facilitant la circulation de l'air, de l’eau et la pénétration des racines, ainsi que le brassage des

éléments nutritifs. Les lombrics parviennent à enfouir des feuilles entières dans une telle galerie !

humique réalisé dans l’intestin des lombrics.

Ceux-ci consomment à la fois de la matière orga-

nique et des argiles, et sécrètent, lors de leur di-

gestion, du carbonate de calcium liquide qui vient lier particules carbonées et particules minérales. Le complexe argilo-humique ainsi créé améliore la stabilité structurale du sol. Enfin, les turricules sont également très riches en bactéries. Par le biais de leurs déjections, associées aux déplacements qu’ils effectuent dans le sol, les vers de terre disséminent la matière organique et ensemencent le sol en micro-organismes sur toute la hauteur du profil.

Les vers de terre sont particulièrement actifs à la sortie de l’hiver, au début du printemps

et en

automne. Ils vivent au ralenti en été et en hiver.

Ils sont favorisés par un sol limoneux, argilo-

limoneux, profond, riche en matière organique, bien humide, et par des températures aux environs de 12 °C. Ils sont négativement impactés par le travail mécanique du sol et les engrais chimiques. De bonnes pratiques agricoles en faveur des vers de terre reposent sur un travail du sol diminué, voire même supprimé, des apports de matière organique (fumier, paillage, engrais verts...) et le chaulage. Acteurs incontournables de la fertilité des sols, sensibles à la qualité de leur environnement et à la modification des milieux, les vers de terre sont de bons indicateurs de la qualité d’un sol et de la pertinence des pratiques agricoles mises en œuvre. Des populations nombreuses de vers de terre indiquent que le réseau alimentaire du sol est sain et fonctionnel.

anique effe Ctués apports constants €n matière org

cultivées et des sur la ferme (paillage des zones en place), ains; nes n raci tio des allées, décomposi par une irrigs. rés assu ues riq hyd rts que les appo ique marai. tion régulière, indispensable à 5 prat nus chère, pourraient expliquer les résultats obte LA

MICROFAUNE

senté, La microfaune est principalement repré

par les amibes. Elles se nourrissent des autres populations micro-organismes du sol et régulent les des niches ent microbiennes. De ce fait, elles libèr t, qu mmen nota ons pign écologiques, pour les cham

se reproduisent 20 fois moins vite que les bactéries Comme

évoqué, les organismes vivants du sç]

stockent dans leur corps des nutriments qui se-

ront progressivement

libérés à leur mort. I},

évitent ainsi la perte de ces nutriments par les. sivage et lixiviation, et contribuent à assurer leur

biodisponibilité. LA

MICROFLORE

La microflore du sol est composée de quatre caté-

gories : les algues, les champignons, les bactéries filamenteuses ou actinomycètes et les bactéries.

LES ALGUES Les algues sont des végétaux qui réalisent la photosynthèse. Elles vivent à la surface des sols, béné-

ficiant ainsi de la lumière. Certaines algues ont la propriété de fixer l’azote de l'air. LES CHAMPIGNONS Les champignons représentent les deux tiers de la masse microbienne d’un sol. Ils jouent un rôle majeur dans sa fertilité et son fonctionnement. En dégradant la lignine (un composant carboné du bois), ils assurent l’entrée du carbone dans les sols

LES

POPULATIONS

AU BEC HELLOUIN

DE

VERS

DE

TERRE

En 2015, Eskani Siruguet (AgroParisTech) a étudié les populations de vers de terre à la Ferme

du Bec Hellouin*, Il a pu mesurer que les populations de vers de terre rencontrées dans tous les jardins de la ferme sont plus abondantes que

et la production d’humus stable. Le bois constitue en effet la principale source d’humus.

Le mycélium des champignons exerce une action mécanique sur la structure du sol et contribueà sa stabilité.

celles des prairies adjacentes, y compris dans les allées, Habituellement, les vers de terre sont toujours plus abondants dans les prairies que dans les terres cultivées. Son travail montre par ailleurs que l'abondance et la diversité des vers de terre dans

Les champignons sont des organismes aérobies: ils ont besoin d’oxygène pour vivre. C’est la raison pour laquelle du bois enfoui au-delà de la profon-

plupart des agrosystèmes étudiés et documentés

Les champignons fonctions :

la ferme sont supérieures à celles trouvées dans la dans la littérature, et ce, même au sein de systèmes

conduits selon des logiques durables (semis direct, non-labour...).

En conclusion, cette étude a montré que les pra-

tiques agricoles mises en œuvre à la ferme du Bec Hellouin sont favorables aux vers de terre. Les

deur à laquelle peuvent vivre les champignons

n’est pas dégradé.

remplissent

de nombreuses

- Décomposition de la matière organique et rec\-

clage des éléments. - Cohésion des particules minérales entre elles et stabilisation des agrégats.

- Amélioration de la nutrition des plantes pa! la solubilisation et le transport actif d'éléments

CHAPITRE9 minéraux (surtout phosphore et microéléments), et d’eau via les mycorhizes. Régulation des popu-

Jations nuisibles pour les cultures (Trichoderma).

- Dégradation des certains pesticides et polluants. - Source d’alimentation pour d’autres membres de la chaîne alimentaire.

La culture sur buttes permanentes est probable-

ment la meilleure forme de culture pour favoriser

les mycorhizes car le sol est peu perturbé et les racines sont laissées en terre. LES MYCORHIZES La presque totalité des plantes vertes terrestres vit en symbiose avec des champignons : - La plante, par le biaïs de la photosynthèse, fourait des sucres au champignon.

- Le champignon filamenteux, par le biais de son réseau mycélien, fournit entre autres de l’eau et

des éléments minéraux à la plante.

Le mécanisme principal repose sur l'augmentation de la surface d’échange. Sous 1 mètre carré de prai-

améliore l’enracinement et la ramification du Système racinaire. Les plantes mycorhizées sont plus résistantes à la sécheresse. - Activité hormonale

: le champignon

régule la

croissance de la plante et favorise celle des parties aériennes (plus de feuilles > plus de photosynthèse > plus de sucres > plus de nourriture pour le champignon !).

gratuitement.

rhizien évite l'installation d’agents pathogènes

diversifiée, équilibrée et bénéfique. Le champi-

y Les mycorhizes augmentent le volume de sol que les plantes sont en capacité d'explorer car elles sont beaucoup plus fines

e Le champignon contribue à la bonne nutrition

d'espèces différentes, réalisant un transfert de nutriments et d'informations. Même si leurs fonctions sont encore mal connues, elles apparaissent essentielles. En tant que mardîchers, nous cherchons à créer des jardins et des communautés de plantes

(compétition pour l’espace, l’accès aux ressources, sécrétion de molécules antagonistes) et favorise l'installation d’une flore microbienne

Certaines plantes ont perdu leur capacité à mycorhizer. Ce sont les plantes de la famille

de la plante. Une plante bien nourrie est plus résistante aux agressions.

pignon multiplie donc par 10 la surface d’échange

des Chénopodiacées,

des

Brassicacées,

des

Polygonacées, des Caryophyllacées et ponctuelle-

ment d’autres familles comme les lupins (Fabacées).

L'intérêt agronomique des mycorhizes est d’autant

plus élevé que l'installation du mycélium mycorhi-

zien est précoce dans le cycle de développement de la plante. LES FONCTIONS

DES

MYCORHIZES

- Mise à disposition et absorption des éléments minéraux nutritifs, fonction d’autant plus

importante que l’élément est peu mobile (tel le

phosphore ou le zinc). Cette fonction est parfois réalisée en association avec des bactéries.

- Absorption de l’eau et économie d’eau. Le cham-

Pignon approvisionne la plante en eau, il est aussi

capable d'envoyer des signaux qui entraînent la fer-

Meture des stomates. Par ailleurs, le champignon

Mycorhize

L

qu’ils accomplissaient

- Protection contre les organismes pathogènes : e Dans la rhizosphère : le champignon myco-

des racines et augmente ainsi considérablement le volume de sol exploré par la plante. À la longueur duréseau mycélien s’ajoute sa finesse : un filament mycélien est capable de se développer dans des interstices minuscules, inaccessibles à la racine d'une plante.

90 mètres carrés de surface mycélienne. Le cham-

fardeau de devoir remplacer, par du travail et des intrants,

leviers : mycélium vivant, mycélium mort (mail-

gnon forme aussi un manchon protecteur autour de la racine (protection mécanique). e Dans les tissus racinaires : le champignon modifie l’activité de la racine et stimule les mécanismes de protection de la plante (bioprotection mycorhizienne). e Le champignon est capable d’induire des modifications biochimiques dans l’ensemble de la plante : diminution des attaques de phytophages.

rie, il y a 9 mètres carrés de surface racinaire et

s'impose le lourd

toutes les tâches

lage qui maintient les agrégats du sol), synthèse et sécrétion de glomaline (sorte de colle biologique).

93

Lorsqu'il détruit les vers de terre, l’agriculteur

- Agrégation, structure et stabilité des sols, apport

de matière organique dans les sols par différents

LE SOL

.

s

+t4

“Myco” vient du grec mukës, le champignon, et “rhize” de rhiza, la racine. Littéralement k mycorhize désigne l'organe mixte entre un champig non filamenteux et une racine.

«

:

»

“champignon-racine”,

que les racines. Elles relient

entre eux des végétaux, parfois

stables et diversifiées, favorisant

le développement des mycorhizes.

94

PARTIE

Il À L'ÉCOLE

DE LA NATURE

- Résistance aux stress environnementaux, proprié-

tés dépolluantes et mécanismes de détoxification du champignon, rôle de tampon entre le sol et la plante.

Les mycorhizes améliorent considérablement Palimentation des végétaux. Elles sont détruites par le travail du sol et les intrants chimiques.

la matière Orga notamment la minéralisation de

atmosphérique. nique et la fixation de l’azote

elles x; Ges bactéries sont dites thermophiles car la phase dans ent vienn inter Elles ment la chaleur.

- Autres fonctions : lutte contre la sénescence prématurée des végétaux (antioxydants), durée de floraison prolongée.

à chaud et1, de montée en chauffe du compostage pasteurisation des déchets.

LES MYCORHIZES, DES PLANTES”

Les bactéries sont à l'interface entre le monde mi.

“RÉSEAU

INTERNET

Le mycélium d’une espèce de champignon assure la mise en réseau de plantes d’espèces différentes. Dans ce réseau, de multiples échanges se font par : — Substances biochimiques et énergie (sucres) ; - Messages, signaux de communication : signaux d'apprentissage et d’alerte (attaque de ravageurs, sécheresse...) ; — Messages interspécifiques (entre des végétaux d'espèces différentes), “interstrates” (entre des végétaux appartenant à des strates différentes) et intergénérationnels (entre des végétaux âgés et des végétaux jeunes). De ce point de vue, la symbiose mycorhizienne devient la symbiose de toute une communauté végétale qui optimise le partage des ressources d’un vaste territoire.

Mettre en place de bonnes pratiques agricoles : l'intégralité de l'itinéraire technique doit être pensé pour protéger les champignons mycorhiziens : — Contrôle strict de la fertilisation phosphatée (éviter les apports si possible, à défaut éviter les surdosages). - Proscription des pesticides. - Diminution, voire arrêt du travail du sol.

- Vigilance lors du recours aux plantes non mycotrophes (Brassicacées, Chénopodiacées, Polygonacées, Caryophyllacées...). - Diversité végétale : associations, successions,

guildes (associations bénéfiques de plusieurs fa-

milles de végétaux)... DE

BONNES

BACTÉRIES

néral et le monde

organique. Elles transforment

diverses substances inertes du sol et de l’atmos. les cycles phère, et leur permettent d’entrer dans ue du vivant. Elles minéralisent la matière organiq

d’entre elles et dégradent les roches. Certaines fixent l'azote atmosphérique. En libérant des nutriments solubles et biodispo-

nibles, les bactéries jouent un rôle essentiel dans la nutrition des plantes. Elles sont elles-mêmes une source de nourriture pour d’autres membres

de la chaîne alimentaire. Elles dégradent certains pesticides et polluants. Elles stimulent la croissance des plantes*.

AÉROBIE Tous

ET ANAÉROBIE

les champignons

et de nombreux

micro-

organismes et bactéries du sol ont besoin d’oxygène pour respirer. Or l'oxygène circule moins vite

COMMENT FAVORISER LA MYCORHIZATION ?

RÉSULTATS

LES

PRATIQUES?

- Les plantes mycorhizées sont mieux nourries. Diminution des besoins en fertilisants et augmentation des rendements. - Les plantes mycorhizées sont plus résistantes à la sécheresse. Diminution des besoins en eau. - Amélioration de l’état sanitaire et diminution des interventions phytosanitaires. _ Amélioration des qualités nutritionnelles (te-

dans le sol que dans l’atmosphère. Dès lors, une

population abondante de micro-organismes peut consommer rapidement l’oxygène disponible et faire apparaître localement, dans un sol pourtant meuble et aéré, des poches d’anaérobiose. Lorsque

les micro-organismes manquent d'oxygène, leur activité diminue et c’est tout le métabolisme du sol qui en pâtit.

Si le sol se compacte, soit naturellement sous l'effet de la battance des gouttes d’eau de pluie, soit sous la pression d’une charge trop importante d'animaux, d’humains ou de machines agricoles, le volume d’air qu’il peut contenir diminue et se renouvelle moins vite.

Certains sols se compactent plus vite que d’autres (sols limoneux et argileux). Les pratiques culturales doivent chercher à éviter la compaction et favoriser l’aération.

Labours et bêchages enfouissent l’horizon orgt-

nique supérieur du sol, celui qui est habité par des micro-organismes vivant en aérobie, et remontent

neurs en sucres, en carotènes, en molécules an-

lhorizon minéral inférieur du sol, celui qui est ha bité par des micro-organismes vivant en anaérobie.

LES ACTINOMYCÈTES

de la densité des espèces et la perte de nombreu

tioxydantes) et organoleptiques.

Les actinomycètes, ou bactéries filamenteuses, assurent de nombreuses réactions biochimiques,

Ces pratiques vont à l’inverse du fonctionne ment naturel du sol. Elles engendrent une diminution

services écosystémiques.

+ - + ELS = —

CHAPITRE9 LES SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES ASSURÉS PAR LES ORGANISMES VIVANTS

DU

nitrogénase) et par les apports d’amendements.

SOL

Les organismes vivants rendent gratuitement au

jardinier de nombreux services® :

- Structure, porosité, aération et stabilité du sol.

_ Décomposition de la litière. - Recyclage des nutriments.

- Synthèse de l’humus. - Introduction des éléments minéraux dans les cycles du vivant. _Biodisponibilité et assimilabilité des nutriments par les plantes.

- Suppression des agents pathogènes.

- Régulation des populations de micro-organismes

et des processus biologiques.

- Interaction directe avec les communautés végétales. Pour les agriculteurs, protéger et favoriser la vie du

sol s'impose comme une évidente nécessité. La vie du sol est un facteur de production à part entière.

LES CYCLES DES MINÉRAUX

Nous avons évoqué le rôle essentiel joué par les micro-organismes en transformant des éléments inertes en nutriments biodisponibles, assimilables

par les plantes. Ils régulent les cycles des minéraux. En tant que jardinier et paysan, il est utile de connaître les cycles de trois minéraux essentiels aux plantes : le carbone, l’azote et le phosphore.

DU

CARBONE

Le cycle du carbone a déjà été évoqué (voir p. 86 et 88). Rappelons que le carbone entre dans le cycle

La sortie de l’azote se fait par l'exportation des

cultures, les pertes gazeuses et la lixiviation vers les cours d’eau et les nappes phréatiques.

FIXATION BIOLOGIQUE

du vivant par la photosynthèse, arrive au sol par la

une réalité toute simple : la transformation par les peuvent absorber en l’état, en éléments dérivés de ce gaz qui sont solubles dans le sol et en capacité d’être absorbés par les racines.

La fixation de l’azote atmosphérique repose sur la transformation du diazote (le gaz N,) en ammoniac (NH:), puis en nitrites (NO) (NO).

et en nitrates Cette transformation est réalisée princi-

palement par les bactéries.

La relation de symbiose qui s’établit entre des végétaux et des micro-organismes est la principale voie de fixation biologique : - Bactéries du genre Rhizobium et légumineuses (plantes de la famille des Fabacées).

l'azote compose 79 % de l’atmosphère, sous la

forme d’une molécule gazeuse extrêmement stable : N, (les deux atomes d’azote sont reliés

Par trois liaisons atomiques). SOURCES

D’AZOTE

l'atmosphère.

source

d’azote

minéral

est

Les sources d’azote organique sont : la litière et les résidus de cultures, les organismes vivants, lhumus. ENTRÉES

ET SORTIES

D’AZOTE

DANS LES AGROSYSTÈMES

L'entrée de l'azote dans les sols agricoles est

bioréalisée par la pluie, les éclairs, la fixation

biolologique (micro-organismes ; cette fixation

:la gique est permise par une enzyme bactérienne

changement climatique. Lorsqu'il est stocké dans les sols, il

améliore leur fertilité.

Éricacées, mais aussi filaos, argousiers, éléagnus... - Bactéries du genre Nostoc et cycas. - Bactéries diverses (dont actinomycètes) et autres plantes. - Algues bleues fixatrices d’azote associées avec

des algues vertes photosynthétiques.

LE CYCLE

le carbone sous forme de CO, par leur respiration.

DE L’AZOTE

Lorsque le carbone s’accumule dans Patmosphère, il contribue au

- Bactéries du genre Frankia et plantes de la famille des Bétulacées (aulne), des Rosacées et des

plexe argilo-humique. Les micro-organismes libèrent

La principale

DE L’AZOTE

ATMOSPHÉRIQUE Une fois n’est pas coutume dans les pages de ce manuel, nous ne pouvons faire l’économie d’un peu de chimie ! Derrière les formules se cache

litière, est stocké dans le sol dans l’humus et le com-

LE CYCLE

et

micro-organismes d’un gaz, N, que les plantes ne

_ Croissance et santé des plantes.

LE CYCLE

d'engrais

LESOL 95

CARBONE MINÉRAL

DU CARBONE

96

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE LE CYCLE NATUREL DE L’'AZOTE

ORTS PROBLÈMES LIÉS AUX APP

D’'AZOTE DE SYNTHESE par l’agriculture Les engrais de synthèse apportés

ote minérà] conventionnelle contiennent de l’az

nitrates. Les sous forme de sels ammoniacaux et de

ièrement problé. sels ammoniacaux sont particul cation des sols, matiques car ils favorisent lacidifi

BACTÉRIES ALGUES BLEUES ALGUES VERTES

En apportant de l’azote sous forme minérale, on

court-circuite toute la vie du sol et les dynamiques biologiques. On défavorise donc les symbioses bactériennes car le coût de la symbiose devient

défavorable pour la plante : dans un sol riche en

azote, elle dépense moins d’énergie à aller cher. cher l’azote elle-même dans le sol. Par ailleurs,

les bactéries fixatrices d’azote sont pénalisées .

elles se retrouvent dans un environnement riche

en azote minéral (ammoniacal ou nitrique), prin-

cipal déchet de leur activité.

En court-circuitant ainsi la vie du sol, on s’affran-

Ces relations symbiotiques permettent de fixer de 100 à 400 kilos d’azote par hectare et par an#. Les conditions favorables sont : un pH neutre, une

richesse en calcium et peu de nitrates. Plusieurs

familles

Azotobacter, mosphérique, une vingtaine présence est recouvrant le

L’azote est très abondant dans l’atmosphère sous

forme gazeuse. Dans

le sol, les processus naturels permettent de le transformer en azote

minéral biodisponible

pour les plantes.

de

bactéries,

comme

les

peuvent également fixer l’azote aten quantité moindre (au minimum de kilos par hectare et par an). Leur favorisée par un paillis, ou mulch, sol.

En régions tropicales, les algues peuvent fixer entre 80 et 200 kilos d’azote par hectare et par an%, Les conditions favorables sont : une température élevée, un pH neutre, une disponibilité importante de carbone et d’oxygène.

MINÉRALISATION

La minéralisation est la transformation de l’azote organique, qui a été intégré aux organismes du sol, en azote minéral. Elle se déroule en deux étapes : - Première étape : l’'ammonification. Les microorganismes transforment l’azote organique en ammonium (NH4'). - Seconde étape : la nitrification. Transformation de l’'ammonium en nitrites (NO,') puis en ni-

trates (NO,). Nitrites et nitrates sont facilement

lessivés.

ASSIMILATION

PAR LES PLANTES

Les plantes sont capables d’absorber l’azote lorsqu’il est disponible sous forme d’ammonium (NH4'), de nitrites (NO) et de nitrates (NO). Les nitrates sont la forme d’azote minéral qui est la plus facilement assimilée par les cultures ma-

raîchères (légumes annuels notamment) et céréalières (graminées annuelles)#.

chit de tous les services qu’elle rend au cultivateur, services qui vont bien plus loin que la seule nutrition azotée : structure du sol, mise à disposition des autres éléments nutritifs, santé des plantes... Les nitrates étant des molécules facilement lessivables, les engrais azotés engendrent souvent des

pollutions des cours d’eau et des nappes phréatiques, particulièrement

en hiver, lorsque les

pluies sont intenses et qu’il n’y a pas de couvert végétal pour les absorber. En automne, le recours aux engrais verts est alors une solution pour fixer les nitrates résiduels qui n’auraient pas été assimilés par la culture précédente. Utilisés pour cette finalité, les engrais verts sont qualifiés de “culture intermédiaire piège à nitrates” ou cIPAN. Il faut enfin noter que dans les sols très com-

pactés par le machinisme agricole, en situation d’anaérobiose, certaines bactéries transforment

les nitrates en protoxyde d'azote, un gaz à effet de

serre particulièrement puissant - près de 300 fois

l'effet réchauffant du CO, -, qui détruit la couche

d'ozone et qui est à l’origine du phénomène des pluies acides (acide nitrique).

LE RAPPORT OÙ C/N

Le rapport

C/N

CARBONE/AZOTE décrit la teneur relative en

carbone et en azote d’un élément. On parle de

rapport C/N pour les amendements et le sol, mais aussi pour les légumes, les bactéries, les champignons...

Lorsque le C/N est bas : la matière organique

est riche en azote, elle est plutôt verte et hu-

mide (matière organique jeune, engrais verts, lisiers, paillis d’orties ou de consoude, tontes de pelouse...). La matière organique est rapidement dégradée et minéralisée. I] ÿaune libération nette

CHAPITRE

d'azote minéral dans le sol, disponible pour la nution des micro-organismes et des plantes.

trouveront pas d’azote : c’est le phénomène décrit sous le nom de faim d’azote.

Lorsque le C/N est élevé : la matière organique

Lorsque l’on effectue un apport impo rtant de matière organique sèche, riche en carbone, Dilyaun Y4

est riche en carbone, elle est plutôt brune et sèche (matière organique âgée, paille, BRF, copeaux

risque d’épuisement temporaire de l'azote minéral

er sciure de bois...). La matière organique est dégradée lentement. Elle apporte peu d’azote mais est source d’humus.

du sol, surtout si cette matière est enfouie. Les plantes manquent alors de nutriments.

La faim d’azote peut durer de quelques semaines

le rapà quelques mois, elle disparaît lorsque

FAIM D’AZOTE

port C/N du sol diminue. Ce phénomène peut également survenir pour d’autres nutriments.

Chaque organisme a un C/N donné et adapte

son régime alimentaire afin que celui-ci ait un

CIN qui lui permette de répondre à ses besoins.

Pour éviter la faim d’azote, plusieurs possibilités s’offrent aux jardiniers :

Les micro-organismes ont un C/N d’environ 8 à

0. Le tiers du carbone qu’ils ingèrent est utilisé

- Éviter des apports trop importants de matière

pour leur constitution, le reste étant minérali-

sé (respiration) pour leur apporter de l'énergie. Au contraire, 100 % de l’azote ingéré est utilisé comme élément constitutifs.

organique possédant un C/N élevé.

- Ne pas enfouir la matière organique riche en carbone : elle est alors dégradée plus lentement. — Réserver les apports de matière organique riche en carbone aux allées. - Accompagner les apports de matière organique riche en carbone par des apports de matière azotée

En conséquence, si les micro-organismes évoluent dans un environnement très carboné, avec un C/N très élevé, ils vont laisser une partie du carbone et consommer tout l’azote présent. Les racines des plantes, moins compétitives que les bactéries

(orties, consoude, engrais biologique azoté..), en

positionnant les apports azotés au-dessous et les

pour prélever les éléments présents dans le sol, ne

RAPPORT

C/N

C/N

EN

apports carbonés au-dessus.

TRÈS

ÉLEVÉ

ÉLEVÉ

BAS

s

TRÈS

BAS

TENEUR| AZOTE

PROPRIÉTÉ DE LA MATIÈRE

DÉCOMPOSITION LENTE DE LA MATIÈRE ORGANIQUE Mobilisation de l’azote minéral du sol

DÉCOMPOSITION RAPIDE DE LA MATIÈRE ORGANIQUE Enrichissement du sol en azote minéral

ERERESERENSRENSENERENNENENENRNENENE Fumier frais

BRF

Sciure

de bois : > 200

de forêt : 30

Déchets de cuisine : 10-25

Ë Aiguilles de

conifères : 30-100 Foin de

Paille :

50-100 Carton : > 200 Cendres de

bois : 200-500

graminées : 30 Feuilles mortes : 20-80 Ë Orties âgées :

25-30

I Coquilles

d'œuf : 25-30

Le rapport C/N%

6-16

Luzerne et engrais vert : 10-20

Litière

EXEMPLES

Bactéries

peu pailleux : 20

30-70

ÿ Matières végétales vertes, sans tige : 7 Consoude : 10

Fientes de volaille : 10

I Fanes de légumineuses (haricots, pois, fèves) : 15 Marc de

café : 10-20 Tontes de

pelouse : 10-15

Jus de fumier: 19-3,1

Urine :

0,8

ë Algues : 15

Tailles d’arbustes au printemps : 25-30

Lerapport C/N d’un engrais ou d’un amendement décrit la teneur relative en carbone et en azote d’un élément.

Faim d'azote

L faim d'azote est un déficit temporaire d’azote min! éral dans le sol, causé par un apport important de matière

TBanique fortement carbonée.

9

LE SOL

97

98

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE LE CYCLE

DU

PHOSPHORE

Le cycle du phosphore (P) est exclusivement terrestre. Les deux sources de phosphore dans le sol sont la roche-mère (60 %) et l’humus (40 %).

Des apports équilibrés

de matière organique

assurent une libération lente et progressive

de nutriments pour

les plantes, durant les saisons où la vie du sol est active.

Les champignons jouent un rôle essentiel dans ce cycle. Ils sont en effet capables de produire et de sécréter dans leur environnement des acides organiques et des enzymes qui attaquent la roche-

mère et l’humus, et libèrent ainsi du phosphore sous forme de phosphates POf (minéralisation).

Ils interviennent également, d’une part, dans l’humification de la matière organique et le stockage de nutriments (dont les phosphates), et, d’autre part, dans la mise à disposition pour les plantes du phosphore stocké sous forme de phosphates dans le complexe argilo-humique (rôle des mycorhizes). PROBLÈMES

D’ENGRAIS

LIÉS AUX

APPORTS

Les engrais phosphatés (superphosphates) em-

pêchent la formation des mycorhizes et entravent

de ce fait la production naturelle de phosphates.

L'ion phosphate portant trois charges négatives, il est très réactif et précipite facilement sous forme de roche en fonction du pH de la solution du sol : - Un excès de chaulage favorise la précipitation du phosphate en apatite et peut générer des carences en phosphore.

- De la même manière, l’acidification d’un sol, qui

peut résulter d’un recours inadapté aux engrais de synthèse, favorise la précipitation du phosphate

en phosphate de fer et peut aussi engendrer des carences en phosphore.

n sol est riche en Ainsi, ce n’est pas parce qu’u

s pour s’en phosphore que les plantes y ont accè place in en re mett nourrir. Tout l’enjeu est de nibilits dispo nt sa pratiques agricoles qui permette

dans la solution du sol.

hen. Les pages qui précèdent permettent d’appré

der la complexité des processus mis En œuvre par la nature pour créer des terres fertiles. Lorsque

l’agriculteur adopte une démarche trop simpliste

en labourant ou en déversant des engrais de Synthèse, il met à mal ces processus et se prive de la fertilité naturelle. L'approche de l’écoculturs proposée dans ce manuel vise à favoriser les ph£. nomènes naturels, voire à les amplifier.

DÉCRIRE

UN SOL

Lorsque l’on met une terre en culture, on prend la responsabilité de son devenir. Nos pratiques

culturales vont l’influencer, la transformer, parfois profondément. Il est donc essentiel de comprendre cette terre afin d’adapter nos pratiquesà ses spécificités, et non l'inverse. Les pédologues ont recours à diverses notions pour décrire un sol,

Il est utile de connaître les termes utilisés.

LE PH

Le pH (ou potentiel hydrogène) indique le degré d’acidité d’un sol sur une échelle de 1 à 14. Un sol neutre et bien équilibré présentera un pH de 7. Un PH inférieur à 7 caractérisera un sol à tendance acide, et un pH supérieur à 7, une terre basique contenant du calcaire. La majorité des sols ont un pH situé entre 5 et 9.

LE CYCLE NATUREL DU PHOSPHORE

Au fil de l’évolution, des végétaux spécifiques se sont adaptés aux sols acides ou basiques.

ASSIMILATION

PAR LES PLANTES

Le pH influence les réactions biochimiques du sol et joue sur la disponibilité des nutriments ainsi que sur leur éventuelle toxicité.

On trouve en jardinerie des tests qui permettent de réaliser soi-même l’analyse du pH. Si votre sol est déséquilibré, il existe différents leviers pour le ramener vers un pH neutre. Dans

le cas d’un déséquilibre peu marqué, une stratégie à moyen terme vise à utiliser le pouvoir tampon du sol. Une bonne activité microbienne, soutenue

par des apports adaptés de matière organique et de bonnes pratiques culturales, tend spontanément à ramener le pH vers la neutralité.

À court terme, si le déséquilibre est marqué, le recours à des amendements peut être envisagé. L®

compost a la capacité d’équilibrer le pH des sols. Remonter le PH d’un sol trop acide est relative”

ment aisé : - Assainir les sols trop humides.

|

CHAPITRE9

- Apporter de la matière organique (compost et paillis).

- Utiliser des engrais verts (à titre d'exemples : Jupin jaune, mélilot blanc, serradelle, Sarrasin...).

- Apporter des amendements basiques calciques

et magnésiens (éviter les ressources faiblement

renouvelables comme le lithothamne) :

e Cendre, 50 à 100 g/m? au printemps ; - Dolomie ou calcaire broyé, 30 à 200 g/m? par

an; e Marne ou craie, 150 à 300 g/m? tous les trois

à cinq ans.

Abaisser le pH d’un sol trop basique est très difficile à réaliser :

- Apporter de la matière organique (paillis et compost). Privilégier des pailles acides (aiguilles de pin, copeaux de bois de résineux). - Utiliser des engrais verts (à titre d'exemples : luzerne, phacélie, ray-grass, consoude, bardane, bouillon-blanc….).

- Apporter des amendements et engrais acidifiants

(soufre). Éviter les ressources faiblement renou-

velables telles que la tourbe.

Quelle que soit la stratégie retenue, les interventions doivent être mesurées afin de favoriser un

retour progressif vers la neutralité. Il ne faut pas

oublier que c’est la vie du sol qui permet une telle évolution : tout apport exagéré, qui dépasserait les capacités de digestion de la vie du sol, serait contre-productif. STRUCTURE ET POROSITÉ DU SOL La structure correspond à l’organisation des constituants solides

d’un sol (argiles, humus,

complexe argilo-humique...). La porosité décrit l'organisation des vides, c’est le négatif de la struc-

ture, Toutes deux peuvent être appréciées à l’œil et au toucher.

Une structure grumeleuse est idéale : elle indique une excellente activité biologique, une richesse en matière organique, une bonne capacité à

TEXTURE DU SOL . Les particules minérales qui résultent de la dé-

gradation de la roche-mère influencent la texture des sols. En fonction de la taille des particules minérales qui composent un sol, ses PrOPRIÈTES

physiques ne seront pas les mêmes : la taille des particules influence la porosité, le drainage et la rétention d’eau, l’absorption et les échanges des éléments minéraux, la nutrition de la plante, la résistance au tassement et à la compaction...

La notion de texture renvoie donc à la dimension

des particules,

non

à leur

composition

chimique. Les pédologues décrivent trois fractions granulométriques : — Les sables (de 50 à 2 000 microns). - Les limons (de 2 à 50 microns). - Les argiles (de o à 2 microns). Sables, limons et argiles coexistent dans les sols dans des proportions variées. Ces proportions définissent la texture du sol, comme l’indique le triangle de texture. Ghaque fraction minérale confère au sol certaines caractéristiques qui doivent être connues et prises en compte afin d'adapter au mieux les pratiques culturales.

- Couleur bleu grisâtre : sol gorgé d’eau, hydromorphe. - Couleur pâle : sol pauvre en matière organique, en fer, en argile, sol lessivé.

- Couleur blanche : sol pauvre en matière organique, salinité élevée.

UN “BON SOL MARAÎCHER"

Un “bon sol maraîcher” présente un équilibre

lessivage.

TASSEMENT ET COMPACTION Le tassement est un phénomène naturel : sous

Une terre maraîchère est la plus anthropisée qui soit. Elle a besoin d’amendements réguliers, adap-

tés et importants, car la culture des légumes engendre davantage d’exportations de nutriments que les autres cultures. Les légumes, en effet, sont récoltés en pleine végétation, avant la montée en

La compaction résulte d’une pression extérieure exercée sur le sol (tracteur, piétinement animal

graines. Les éléments minéraux prélevés par la plante, ceux qu’elle restitue habituellement au sol,

augmente sa densité. Elle est à l’origine de divers

de ce fait systématiquement exportés. Dans notre approche bio-intensive, la densité des cultures et

Où humain...). Elle diminue le volume de sol et

Problèmes : semelle de labour, asphyxie, mauvaise

Pénétration de l’eau et érosion, mauvais dévelopPément des plantes et de leurs racines...

de l’art du jardinage.

- Couleur vive à dominante rouge : présence de fer.

granulométrique et se compose d’environ 30 % de sable, 30 % de limon, 20 % d’argile et 10 % de matière organique®.

rangent. Les sols limoneux à particules très fines SOnt sujets au tassement.

Bien connaître son sol est à la base

LA COULEUR D'UN SOL La couleur d’un sol peut donner quelques indications sur sa composition. - Couleur brun-noir : riche en matière organique.

retenir l’eau et à résister au tassement et au

l'effet de leur propre poids, les particules se réar-

LE SOL

pour partie, à la fin de son cycle végétatif, sont

le rythme des successions nous invitent à être par-

ticulièrement vigilants sur ce point.

Y Ilexiste différents tests que l’on peut réaliser soi-même pour mieux comprendre son sol.

99

100

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE

ANALYSER

En développant ses capacités d’écoute,

UN

Baptisée «géosmine”, cette odeur a un pouvoir

SOL

SE LAISSER GUIDER PAR SES SENS Une observation attentive et une écoute profonde

permettent de recueillir beaucoup d'informations

chacun de nous a la capacité de ressentir si son sol est en souffrance, ou au contraire en bonne santé.

sur un sol. - Marchez sur la parcelle, les yeux fermés : le sol

est-il souple sous vos pas ?

— Posez vos mains sur le sol et restez quelques minutes à l'écoute. Que ressentez-vous ?

- Recueillez de la terre de l’horizon superficiel et sentez-la : dégage-t-elle cette bonne odeur d’hu-

mus, de sous-bois, caractéristique d’un sol vivant ?

apaisant.

_ observez la terre de surface : quelle est sa struc.

ture ? Est-elle aérée, grumeleuse ? Une structure ronde et grumeleuse

est le signe d’un

_ Creusez un trou pour réaliser un profil de so]. Idéalement, descendez jusqu’à 1 mètre ou davan. tage. Veillez à garder une paroi du profil bien nette

pour voir les différents horizons. Identifiez les ho. rizons À, B et C et évaluez leur épaisseur. _ Observez la couleur des différents horizons,

_ Prélevez une poignée de sol et malaxez3 Sentez-vous la présence

TRIANGLE

DES

TEXTURES“

La texture du sol est définie par la grosseur des particules qui le composent. 100

O

sol vivant

(présence de galeries, de boulettes fécales...).

de grains de sable ? I:

terre est-elle très fine, à dominante limoneuse? La proportion d’argile peut être estimée en réalisant un boudin de terre, que l’on malaxe comme on le ferait avec de la pâte à modeler : si vous pouvez pétrir la terre sans qu’elle perde sa cohérence, sa teneur en argile est importante. Réalisez ce test à différentes profondeurs. Il existe d’autres tests que l’on peut réaliser faci-

ARGILE

40

%

LIMON

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%

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NO.

SABLOÉIMONEUX

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SABLEUX 0

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100

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60 50 SABLE

40 %

30

20

10

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Lmoneux TRES FINS 100

FAIRE RÉALISER UNE ANALYSE DE SOL Pour aller plus loin, il est souhaitable de faire réaliser en laboratoire une analyse de sol, ou plusieurs si nécessaire. Il existe différents protocoles. Toutes les analyses donnent des indications de base comme la composition minérale du sol, sa teneur en matière organique, son pH. Des analyses fines proposent également une lecture des teneurs en nutriments, de la capacité d’échange cationique, et indiquent les déséquilibres ou manques éventuels. Les commentaires qui accompagnent l’analyse sont importants pour permettre à des non-spécialistes de comprendre les informations et de les interpréter. Il est préférable de pouvoir dialoguer avec la personne qui a réalisé l’étude. Bien souvent, les analyses s’accompagnent de recommandations sur

TEXTURE“

SABLE

LIMON

TAILLE DES

De 50 à 2 000 microns

ARGILE

De 2 à 50 microns

De o à 2 microns

STRUCTURE

Souple, les particules ne peuvent s’agréger. | Particules très fines ne pouvant s’agréger. Sujet à Peu sujet à compaction compaction (croûte de battance)

Les particules peuvent s’agréger. Sujet à compaction

Très bonne Très perméable

Médiocre Moyennement perméable

Médiocre Peu perméable

Bonne. Sujet à l’engorgement

Très bonne. Sujet à l’engorgement

PARTICULES

AÉRATION PERMÉABILITÉ

RÉTENTION D'EAU | Médiocre, sujet à la sécheresse RÉSERVE

DE

pu

Faible capacité de stockage des nutriments | Faible capacité de stockage des nutriments

Excellente capacité de stockage des nutriments

Faible

SENSIBILITÉ

Très importante

Importante

SENSIBILITÉ

Très importante

Importante

TEMPÉRATURE

Réchauffement rapide au printemps

Réchauffement moyennement rapide au printemps | Lent à se réchauffer au printemps

PH

Tendance acide

Variable

AU

LESSIVAGE

À L'ÉROSION

Faible

Tendance basique

a

lement soi-même, bien décrits dans la littérature.

CHAPITRE9

les amendements et les engrais à apporter. Ces recommandations sont des indicateurs intéressants. Toutefois, elles sont formulées pour des pratiques

agricoles conventionnelles et il faut les adapter à notre approche permaculturelle.

LA VISITE DE SPÉCIALISTES SUR LE SITE

Au Bec Hellouin, pour comprendre notre sol nous avons travaillé en lien avec des agronomes réputés

pendant des années et fait réaliser de nombreuses

analyses. Il nous a fallu plus de dix ans pour nous dé-

cider à commander à Claude et Lydia Bourguignon

une série d’analyses complètes de nos différentes parcelles. Nous avons tellement progressé en leur compagnie que nous avons vraiment regretté de ne

pas les avoir fait intervenir plus tôt ! Le fait de réaliser, avec eux, des profils dans chaque jardin, d’assister à leurs analyses, de pouvoir leur poser toutes nos questions nous a menés à une compréhension de notre sol qu'aucune analyse en laboratoire ne

nous avait permis d’approcher jusqu’alors. LES PLANTES

BIO-INDICATRICES

Chaque végétal est particulièrement adapté à un certain type de sol. On appelle “plantes bio-indicatrices” les végétaux dont la présence caractérise un sol particulier. Sous certaines conditions, l’obser-

vation de la végétation naturellement présente sur la parcelle à étudier peut donner des indications

sur le sol, éventuellement sur son évolution et ses problèmes, à condition de disposer de connaïissances botaniques solides ou d’un bon guide. En France, Gérard Ducerf étudie les plantes bioindicatrices. Il a rédigé une encyclopédie en trois volumes, véritable guide de diagnostic des sols reposant sur l’identification de ces plantes#. Son travail remarquable est souvent cité et recommandé lors des étapes préliminaires au design perma-

culturel : étude du terrain et analyse du sol.

UN

NOUVEAU

RAPPORT

AU

SOL

LE SOL

jo]

|

Une lecture purement agricole des sols pourrait

nous amener à dire que chaque sol possède une

vocation : ses propriétés chimiques, physiques et

biologiques le rendent plus à même de supporter certaines productions et de leur permettre de s'épanouir. La logique permaculturelle nous invite à nous accorder à la terre dont nous disposons, en prenant en considération trois domaines : 1. Les potentialités du sol. 2. Les besoins des végétaux cultivés. 3. Les pratiques culturales. Le but du jardinier ou du paysan est d’atteindre un équilibre optimal entre ces trois paramètres. Lorsque la terre, les végétaux cultivés et les paySans qui les soignent sont en phase, on entre dans

une nouvelle dimension. Je dois toutefois nuancer ce qui précède, au vu de notre expérience. Le sol de notre ferme était vraiment peu adapté aux cultures maraîchères — il avait du reste jamais été cultivé depuis le Néolithique ! Nous avons pu constater que la culture sur buttes permanentes permet de transformer en profondeur un sol, en construisant un sol “anthropique” au-dessus du sol existant. Notre terre n’est pas adaptée non plus aux cultures céréalières. Comme nous n’en avons pas d’autre, nous tentons néanmoins ces cultures avec comme objectif d'obtenir une variété de “blé du Bec Hellouin”, bien adaptée à notre contexte. Ce point sera développé au chapitre 80, p. 845.

Il est rassurant pour notre avenir commun de

A En dialoguant avec Lydia et Claude Bourguignon ainsi qu’avec les autres scientifiques

qui interviennent sur notre

ferme, nous avons été surpris de constater que les découvertes scientifiques récentes confirment la pertinence des pratiques que nous utilisons, comme la culture sur buttes permanentes, le non-travail

du sol, les paillis, les associations de cultures, l’agroforesterie... Elles sont toutes fort anciennes. Ces mêmes avancées scientifiques condamnent les pratiques

qui dominent l’agriculture

conventionnelle : artificialisation des agrosystèmes, labours, monocultures, engrais chimiques,

pesticides. Nous avons réalisé

que l’agriculture contemporaine

repose largement sur un socle

de connaissances agronomiques vieux d’une cinquantaine d'années, et que les agriculteurs sont trop souvent coupés des connaissances issues des récentes avancées des sciences du vivant.

constater que des sols relativement impropres aux cultures peuvent devenir fertiles - à condition de s'appuyer sur la dynamique de la vie.

Par de bonnes pratiques

fondées sur le respect

du sol et de la vie qu’il

Plantes bio-indicatrices La notion de plante bio-indicatrice part du principe que si une plante est présente en abondance sur un sol

donné, c’est qu’elle y a trouvé les conditions nécessaires à sa germination, sa croissance et son développement. Le sol est rempli de milliers de graines et toutes ne germent pas. Tout en restant viables, elles sont en dormance ét attendent de rencontrer les bonnes conditions de sol et de climat Pour en sortir. Partant de ce postulat, connaître les conditions de levée de dormance des plantes identifiées sur un terrain donné permet d’en déduire des informations sur les conditions pédoclimatiques de ce terrain. Ces plantes sont qualifiées de “bio-indicatrices”. . » 1 Plus précisément, les informations qu’il est possible cebteir eo ncernent surtout les propriétés du sol : excès Ou carences, ainsi qu'état de la vie qu'il héberge, pH, structure, risque hote d’érosion et de lixiviation, pollution,

engorgement et hydromorphisme, compaction et tassement, asphyxle, état de la matière organique, € Certains minéraux...

blocage

abrite, nous pouvons transformer une terre Pauvre en une terre

capable de fournir des récoltes abondantes.

ER

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2

Le

10

DE L'ÉCOSYSTÈME À L'AGROÉCOSYSTEME L'homme qui s’est assis sur Le sol de son tipi, pour méditer sur la vie et sur son sens, à su accepter une filiation commune à toutes les créatures et a reconnu l’unité de l’univers®,

Chef Luther Standing Bear Dans ce chapitre, nous allons chercher à mieux comprendre le fonctionnement des écosystèmes naturels. Imiter la nature est notre objectif, n’estce pas ? Intéressons-nous aux écosystèmes naturels, avant d’en venir aux imitations anthropisées

que sont nos agroécosystèmes.

PIEDS

< Lorsque j'étais marin, j'étais complètement fasciné par les flots

des mers coralliennes. La lumière vibrante, les eaux transparentes,

le sable chauffé par le soleil, les roches de grès, la végétation d’un

vert intense et toutes les formes de vie forment un écosystème d'une telle beauté qu’on s’y sent

Le corps pur et le cœur aérien. La splendeur de ce milieu

renforce ma gratitude devant la

Puissance de la vie. Mais on ne

peuf poser le pied sur cette plage

vierge sans être en même temps bouleversé par sa vulnérabilité : le corail qui l'entoure est en voie de destruction rapide et l’îlot Sera probablement submergé

Par la montée des océans durant

le siècle à venir. Car lorsque les barrières de corail qui protègent ces îles basses sont mises à mal,

les vagues des fortes tempêtes les ent entièrement, ruinant $ ge la vie a mis tant de génie 4 Créer, Jamais mes enfants ne Pourront contempler la beauté

1e j'ai connue lorsque j'ai tOmmencé à naviguer, ilya quarante ans.

NUS

SUR SANDY

CAY

Sandy Cay est une île tropicale minuscule, juste un banc de sable posé sur les eaux translucides des

Bahamas. Elle est située dans le parc naturel des

Exumas où j'ai étudié les récifs coralliens lorsque j'étais marin. J'y ai passé quelques jours qui ont compté parmi les plus heureux de ma vie. Dans son

extrême simplicité, Sandy Cay racontait la magie de la vie et son extraordinaire capacité à coloniser

les milieux les plus improbables.

Get îlot ne mesurait que quelques dizaines de pas de diamètre, mais il était protégé des fortes tempêtes par une barrière de corail. Malgré le vent marin et l’ardeur du soleil, la vie s’y déployait sous

la forme d’anneaux concentriques de végétation luxuriante. Sur la plage, Sandy Gay était ceinturée par des herbes coriaces et des plantes grasses sup-

portant le sel. Pour pénétrer dans l’île, il fallait se frayer un passage parmi des arbrisseaux au tronc torturé dont le bois était d’une extrême dureté,

des buissons au feuillage d’un vert intense et des palmiers nains. En quelques pas seulement on arrivait au cœur de l’îlot, une forêt miniature comportant moins de dix arbres : des filaos dont les fines aiguilles chantaient en permanence dans le vent et quelques cocotiers. Juste de quoi accrocher un hamac et installer mon camp afin d’étudier ce petit

coin de paradis. Je me suis fait aussi discret que

possible pour partager Sandy Cay avec ses hôtes habituels : des crabes, des insectes et quelques oiseaux.

Par quel miracle la vie avait-elle réussi à s’établir sur ce banc de sable, probablement sorti de l’océan

quelques siècles plus tôt à l’issue d’un ouragan puissant ? Comment cet univers minéral, grillé par le soleil, saturé de sel, avait-il pu se transformer

en un petit joyau tropical ?

Les premiers êtres vivants à se poser sur Sandy Cay furent des oiseaux marins, qui enrichirent progres-

sivement le sable de leurs déjections. Des algues et des coquillages y moururent, apportant également un peu de matière organique. Les pluies lavèrent le centre de l’îlot de son sel et une fine lame d’eau douce se forma sous le sable, flottant à la surface

de l’eau de mer qui baigne le sous-sol de l’île, car Veau douce est plus légère que l’eau salée.

Agrosystème Où agroécosystème ? Pour des raisons de clarté, nous adoptons dans ce manuel une distinction sémantique simple, qui nous est pre. Nous vous proposons les définitions suivantes :

pro

Agrosystème : milieu cultivé selon les principes de l’agriculture. Les agrosystèmes contemporains s'écartent els. de plus en plus des écosystèmes natur

Agroécosystème . milieu cultivé selon les principes de l’écoculture. Les permaculteurs cherchent à créer des

agroécosys tèmes qui se rapprochent des écosystèmes naturels.

Les agroécosystèmes comprennent les plantes cultivées et les animaux élevés, mais aussi les plantes et les animaux sauvages présents SUT le territoire. Ils intègr Er les milieux physiques mobilisés pour les activités de production ainsi que les interactions entre tous ces éléments vivants et non vivants

104 PARTIE I! À L'ÉCOLE DE LA NATURE pour une végét ation apparurent, formant un abri

> Un lambi sur la plage

i que les plus haute au centre de l’île. Et c’est ains iques, entr conc les cerc nt en ère nis rga plantes s’o cates déli plus les eur, les plus rustiques à l'extéri

de Sandy Cay. Les lambis sont de gros coquillages abondants aux Bahamas. Les Amérindiens arawak, qui habitaient ces îles avant que les hommes blancs ne les

ogiques, au centre, occupant toutes les niches écol

s’épa. chacune selon ses besoins. La mini-forêt qui cette de ogée l'ap e ent rés rep t r de l’îlo

nouit au cœu

évolution.

exterminent, en consommaient

de grandes quantités et tiraient de leur coquille des outils.

Il fallut probablement quelques centaines d’années

Lorsque les coquillages, les

pour qu’une communauté de plantes et d'animaux

crustacés, les oiseaux et les

insectes meurent sur le banc de sable, ils y laissent un peu de matière organique qui sera mise à profit par

les plantes pionnières.

diversifiée se forme, qu’un équilibre s’établisse

Le vent déposa des graines et des plantes pionnières purent commencer à coloniser le sable. Les plantes pionnières sont des végétaux adaptés aux conditions extrêmes. Elles réparent les sols agressés et préparent la venue de végétaux plus délicats. Ces “courageuses” pionnières, capables de sup-

porter un sol pauvre, le manque d’eau et l’ardeur

du soleil, croissent et se reproduisent très vite. Génération après génération, elles enrichissent

la détruise. L’île heureuse est aujourd’hui mena. cée par le réchauffement climatique et la montée

La mer apporta des graines capables de flotter, comme les noix de coco, tandis que les oiseaux se faisaient jardiniers en semant dans leurs déjections

SUR

CLIMAX

DES

PETITE LEÇON LA

D’'ÉCOLOGIE

PLAGE

L’exemple de Sandy Cay nous permet d’aborder quelques notions essentielles d'écologie, que tout

permaculteur devrait connaître.

Sandy Cay forme un biotope bien circonscrit. Le biotope est l’ensemble des éléments non vivants

VÉGÉTATIONS45

“À chaque

climat, la sélection naturelle a créé une végétation particulière est fortement liée à la pluviométrie.

adaptée

que l'on appelle

la végétation

climax4”

PRATIQUES

Cette végétation

AGRICOLES

LOCALISATION

DRE ENIENNS CLIMAX

TRADITIONNELLES

9 mm

à Pôles

Toundra - végétation rase, lichens, mousses

Élevage de Be de rennes

599 mm

De la Norvège au Canada dans l'hémisphère nord

Taïga - grandes forêts de , à résineux

. Sylviculture Y

Le à s grandes prairies à teppe P raminées

Céréaliculture

Forêts de feuillus

Systèmes de cultures permanentes du sol, rotations, associations de cultures. Jardin arboré d’Indonésie, milpa

ANNUELLES

400-

pher des obstacles, à coloniser des milieux Stériles,

à créer de la diversité et de la beauté... jusqu’à ce qu’un nouvel ouragan ou la folie des hommes ne

des océans, le blanchiment du corail et l'essor du tourisme.

sont le seul stade où les plantes sont capables de se déplacer, et leur imagination pour disséminer leur descendance est prodigieuse ! Des buissons bas supportant le vent marin et les embruns salés

< 40

quoise, portant fièrement sa couronne de végétaux

bercés par les vents alizés, Sandy Cay raconte, en miniature, l’histoire de la vie, sa capacité à triom-

le sol et procurent un ombrage à des plantes plus exigeantes.

les graines ingérées sur d’autres îles. Les semences

PRÉCIPITATIONS

Le stade ultime atteint par l’écosystème arrivé;

maturité s’appelle le climax. Posée sur l’océan tur.

Plaines du Middle West

500-550 mm

américain et canadien, pampas ; d'Argentine, steppes d’Australie,

Vu

> 550 mm

Zone tempérée, zone méditerranéenne, zones

tropicales et équatoriales

d'Amérique centrale, mil, haricot niébé, igname en Afrique équatoriale

FN

chernozems de Russie et d'Ukraine

Climax Le climax est le stade ultime d'évolution d’un écosystème, Il représente un équilibre qui résulte des dynamiques de la sélection naturelle. Cet équilibre est un gage de stabilité et de pérennité pour l'écosystème”.

«

«

CHAP

ui donnent à l’île ses caractéristiques : le banc de sable, le soleil qui la grille, les vents alizés qui la palaient, la pluie... Les plantes et les animaux,

sans oublier les

micro-organismes, qui ont colonisé Sandy Cay forment ensemble la biocénose. sandy Cay forme un écosystème bien défini

constitué d'êtres vivants et du milieu qui les porte, mais aussi de l’ensemble des interactions qu’entretiennent ces êtres vivants, entre eux et avec leur milieu. Il existe des écosystèmes de toutes tailles,

depuis la mare du jardin jusqu’aux forêts tropicales. Les êtres humains font partie intégrante des écosystèmes.

L’écologie étudie les relations entre les êtres vi-

ITRE 10

DE L'ÉCOSYSTÈME À L'AGROÉCOSYSTÈME

qui circule, s’échange, se transforme et S€ partage au sein du milieu où nous interférons.

À CHACUN SA NICHE

|

Les plantes et les animaux qui ont colonisé Sandy

Cay se sont réparti le banc de sable selon des critères précis, liés à leur physiologie et à leur mode

de vie. Par exemple, certaines plantes, dites “halophiles”, ont développé des aptitudes particulières qui leur permettent de supporter un milieu salé ;

elles occupent naturellement le pourtour de l’île et sont périodiquement arrosées par les embruns

lors des tempêtes. Certains oiseaux marins s€ nourrissent de poissons en mer et ne se posent

sur Sandy Cay que pour se reposer et éventuelle-

ment s’y reproduire. Mais d’autres oiseaux vivent sur l’île et se nourrissent d'insectes ou de graines.

vants et leur environnement. L'approche permaculturelle est fondée sur l’écologie : puisque nous

Au sein d’un écosystème donné, chaque espèce végétale ou animale occupe une niche écologique.

porter une attention toute particulière à tout ce

ter contre des espèces dont les besoins seraient

cherchons à imiter les écosystèmes, nous devons

Ceci lui évite de dépenser trop d’énergie à lut-

Lebiotope (littéralement “lieu de vie”) est l’ensemble des facteurs abiotiques (non vivants) d’un écosystème : il rassemble des conditions climatiques (température, rayonnement solaire et luminosité, humidité et pluviométrie...), des conditions géologiques (caractéristiques du sol et du sous-sol...) et des conditions hydrologiques (eaux artificielles, eaux souterraines...).

Écosystème …

Un écosystème® est un ensemble organisé et dynamique, composé de l'association d’espèces végétales et animales (la biocénose) et de leur biotope, ainsi que des relations qui les unissent. Cet ensemble forme un système. Il évolue à court terme et se maintient dans la durée. Il ne se retrouve pas sous la même forme dans un autre milieu. Écosystème = biotope + biocénose + les relations qui les unissent. .

/

Biocénose La biocénose (littéralement “communauté de vie”) est l’ensemble des êtres vivants au sein d’un écosystème, ceux que l’on voit et ceux que l’on ne voit pas (microscopiques ou cachés dans le sol) : animaux, végétaux, bactéries, champignons... Ces espèces partagent des exigences physiques similaires.

Ecologie f

L'écologie® (littéralement “étude de la maison”) est la science qui étudie les relations dans le monde naturel : relations entre les organismes et leur environnement physique (écophysiologie), entre les organismes d’une

même espèce et leur habitat (écologie des populations), entre les organismes de différentes espèces (écologie

des communautés) et entre les organismes et les flux de matière et d'énergie (écologie des écosystèmes).

Niche écologiques 1

parvient à rester luxuriante

malgré la rareté des pluies.

En milieu insulaire, les

plantes et les animaux sont souvent de plus petite taille que sur les continents. Les arbres ont une croissance

lente et un bois dur.

Biotope

1

Y Parfaitement adaptée, la végétation de Sandy Cay

1

.

1

La niche écologique est l’espace occupé par une espèce dans un écosystème (niche spatiale). Cet espace est | Caractérisé par une végétation, un climat, une altitude, une géologie, une pédologie, une hydrologie, une faune... | Ilrassemble des conditions physicochimiques et des ressources nécessaires pour la survie et la reproduction

de cette espèce.

La niche écologique peut également être décrite comme le rôle joué par une espèce dans un écosystème (niche | trophique), c’est-à-dire sa place dans le réseau trophique, les relations prédateur-proie qu’elle entretient mais

aussi les modifications qu’elle effectue sur son habitat.

| La notion de niche est étroitement liée à celle de compétition.

Dans un écosystème naturel, toutes les niches écologiques disponibles sont occupées par différentes espèces.

105

106 PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE similaires. Le concept de niche écologique définit

l'espace occupé par une espèce, qui comprend l’espace physique mais également le rôle fonctionnel joué par cette espèce dans la chaîne trophique. En d’autres termes, on peut dire que la niche d’une espèce est tout autant sa fonction écologique que son habitat. Une espèce donnée peut occuper plusieurs niches successives à des stades différents de son développement.

MANGE

QUI

?

Les écosystèmes sont traversés par des flux d’énergie. Les seuls intrants sont généralement le soleil et des éléments comme le vent et l’eau, qui

peuvent apporter des nutriments, des semences...

Les flux d’énergie se transmettent de maillon en

maillon tout au long des différentes chaînes alimentaires, ou chaînes trophiques. Les végétaux

et les animaux déjà morts sont consommés par les micro-organismes et recyclés : les nutriments qui les composent viennent enrichir l’humus

dans lequel puiseront de nouvelles générations de plantes. Le recyclage des nutriments, auquel

D» Les bio-agresseurs des

cultures sont pour la plupart

des espèces à cycle court, adaptées à des écosystèmes régulièrement perturbés.

De haut en bas : chenille d’hyménoptère (tentrède du rosier), sauterelle verte, accouplements de cantharides, de punaises

noires et de piérides du chou, doryphore avec ses œufs.

stockée dans un niveau trophique se transmet au niveau supérieur“.

La productivité d’un milieu naturel augmente avec

tropicales humides. Ceci explique en partie pour.

QUI

d'inspiration infinie.

Une partie de l'énergie est dissipée tout au long des chaînes alimentaires. Seulement 10 % de l'énerpie

végétales : leur biodiversité s’accroît. Chaque écosystème tend vers l'établissement d’une structure

La biodiversité contribue efficacement à la stabilité et à la résilience des écosystèmes.

la nature, une source

de fonctionner avec peu ou pas de pertess,

la température (jusqu’à 30 °C) et avec l'humidité,

biologique de plus en plus complexe, dans la limite des ressources disponibles®?.

progressent rapidement et nous permettent de mieux comprendre

aux écosystèmes, l'azote et du phosphore, permet

Plus les écosystèmes évoluent, plus ils com-

prennent un grand nombre d’espèces animales et

Les sciences du vivant

carbone, & il faut intégrer les cycles de l’eau, du

la productivité est la plus forte dans les régions quoi les serres sont des espaces particulièrement

intéressants pour les jardiniers.

LES ÉCOSYSTÈMES, DES MODÈLES DE DURABILITÉ

Les écosystèmes fonctionnent donc durablement

avec peu ou pas d’intrants, sans produire de dé.

chets qui ne puissent pas être recyclés. Chaque écosystème apporte une contribution à l’ensemble de la biosphère.

Grâce aux progrès rapides de l’écologie, les jardiniers d’aujourd’hui sont à même de mieux com-

prendre ce qui se passe dans leur jardin. Les lignes qui suivent, décrivant la dynamique des populations au sein de deux grands types d’écosystèmes, ouvrent des perspectives passionnantes.

Voici cinq caractéristiques essentielles des écosystèmes terrestres :

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à + 2222

me

DO

CHAPITRE1

LES ÉCOSYSTÈMES STABLES

ET LES ESPÈCES À CYCLE LONG:

Un écosystème stable prospère au sein de condi-

tions prévisibles : les perturbations sont faibles et les approvisionnements réguliers. Une forêt

mature est un écosystème stable. Dans ce type d'environnement, les organismes sont adaptés à cette stabilité ; les espèces sont nombreuses, les niches écologiques toutes occupées. Ces organismes ont développé une série de carac-

téristiques, un modèle

évolutif baptisé par les

écologues stratégie K. Les caractéristiques propres aux organismes qui mettent en œuvre

LECTURE

O

DE L'ÉCOSYSTÈME À L'AGROÉCOSYSTÈME

PERMACULTURELLE

DES DIFFÉRENTS MODÈLES

DÉMOGRAPHIQUES Entre les deux extrêmes que sont les organismes de stratégie K et R, il existe de nombreuses espèces qui ont adopté des stratégies intermédiaires.

Les paysans et les jardiniers ne manqueront pas de noter qu’une grande majorité des bio-agresseurs des cultures sont des espèces de stratégie R, particulièrement adaptées aux écosystèmes instables. Gette constatation est majeure et mérite que nous

une stratégie K sont :

comparions deux approches : celle de l’agriculteur mécanisé et celle du permaculteur.

- Une longue durée de vie ; - Des organismes souvent de grande taille ;

Les agriculteurs mécanisés, qu’ils soient conventionnels ou biologiques, engendrent des agrosys-

- Une maturité sexuelle tardive ;

- Une descendance peu nombreuse ; - Des soins parentaux aux jeunes ; - Une croissance lente ; - Des populations présentant peu de jeunes mais beaucoup d’adultes. Les espèces qui suivent une stratégie K, comme les oiseaux et les grands mammifères maïs aussi les plantes à cycle long, sont plus vulnérables et susceptibles d’extinction que les espèces à cycle rapide. Les éléphants en sont une parfaite illustration.

LES ÉCOSYSTÈMES INSTABLES

ET LES ESPÈCES

À CYCLE

COURT‘

Un écosystème instable est un milieu perturbé par des aléas divers, comme une plaine inondable

située à côté d’une rivière, par exemple. Dans cet

environnement à risques, un organisme vivant à une probabilité importante d’être tué de ma-

nière précoce. Pour se perpétuer, ces organismes adoptent un modèle évolutif baptisé stratégie R. Leurs caractéristiques communes sont : - Une taille réduite ;

- Une croissance rapide ; - Une durée de vie courte ; - Une maturité sexuelle précoce ; - Une forte descendance ;

- Peu ou pas de soins parentaux ; “Des populations présentant beaucoup de jeunes Mais peu d'adultes ;

-D'importantes fluctuations des populations (épi-

tèmes qui sont régulièrement perturbés par les labours et autres interventions musclées. Un ma-

raîcher qui laboure son champ recrée sans le savoir un écosystème instable : en quelques passages de tracteur, la totalité de l’espace est bouleversée. Ce

faisant, il ouvre la porte aux ravageurs qui sont susceptibles de pulluler rapidement. L'effet de cette perturbation est augmenté par la très faible biodiversité des milieux cultivés.

L'usage de pesticides n’améliore pas la situation sanitaire des cultures car ces poisons détruisent

également les auxiliaires utiles. Aux États-Unis,

l'utilisation de pesticides a augmenté de 3 300 % depuis 1945, 1 million de tonnes de pesticides sont

déversées chaque année sur les champs, soit pas moins de 72 kilos par personne, pourtant les pertes de récoltes ont augmenté de 20 #5.

À l'inverse, un permaculteur adoptant les pratiques

décrites dans ce manuel recrée un agroécosystème stable. Ses interventions journalières concernent au mieux quelques buttes et sont faiblement perturbatrices. Un maraîcher sur une microferme de 1 hectare qui décompacte dans sa journée 30 mètres

carrés de buttes avant de les remettre en culture ne perturbe que 0,003 % de son territoire. La stabilité

de la microferme tend à favoriser les espèces à stra-

tégie K, et ce, d’autant plus que l’on y multiplie les

plantes pérennes et que l’on y favorise la biodiversité. Les dégâts occasionnés par les bio-agresseurs sont alors très circonscrits et ne nécessitent que

rarement des interventions particulières, du fait de la capacité de l’agroécosystème à s’autoréguler.

sodes de pullulation...).

Nous le constatons chaque année.

Les espèces ayant adopté une stratégie R sont ca-

Tout l’art d’une approche permaculturelle de

lépide lorsque les conditions environnementales leur sont favorables (phénomène explosif). Les

nature. Le permaculteur intervient au minimum. Il laisse patiemment les équilibres naturels s’installer, la biodiversité augmenter et les interactions se

Pables d’avoir un taux de croissance extrêmement

bactéries, les plantes annuelles, les insectes, les

Srenouilles, les campagnols et les rats sont consi-

$ comme ayant une stratégie R.

Vagriculture repose donc sur l’observation de la

multiplier. Cette attitude permet de tirer la quintessence des services écosystémiques,

uw

107

. TRAITEMENT DES DÉCHETS

PROTECTION CONTRE LES TEMPÊTES

: RÉGULATION

__lDES MALADIES

HUMAINES

SERVICES ÉCOSYTÉMIQUES:° SENTIMENT

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11

LES SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES Enfant, le moindre joli caillou avait de la valeur à mes yeux ; chaque arbre était un objet de respect®.

Chiyesa

Le concept de services écosystémiques a été décrit très récemment, à tel point qu’il commence à

peine à pénétrer les milieux agricoles et qu’il est rarement enseigné.

En 2001, le secrétaire général des Nations unies,

Kofi Annan, a initié le Millenium Ecosystem Assessment (MEA), un programme mondial d’évaluation des liens entre environnement, économie et société. Les travaux menés par le MEA visaient à identifier les services écosystémiques, à les quantifier et à évaluer leur impact sur le bien-être

humainf.

Les services écosystémiques sont les bénéfices que les humains tirent des écosystèmes. Ils sont nombreux et très divers. La classification qu’en donne

le MEA% est la suivante :

- Les services d’approvisionnement sont les pro-

duits obtenus à partir des écosystèmes.

- Les services de régulation sont les bénéfices

+ Lorsque nous avons créé la

ferme, en 2003, on commençait

à peine à parler de services écospstémiques dans les milieux écologistes : la première étude d'envergure sur ce sujet s’achevait. Nous avons vraiment pris conscience du

rôle décisif des services que nous rend gratuitement la nature

lorsque nous avons commencé à collaborer avec des scientifiques. Multiplier les mares a favorisé

la présence des grenouilles, des crapauds, des couleuvres qui régulent les populations

de limaces. Des espaces fleuris

favorisent les pollinisateurs,

Comme ce bourdon butinant une fleur de cosmos.

obtenus à partir de la régulation effectuée par les

processus écosystémiques.

- Les services production de - Les services tériels obtenus

de soutien sont nécessaires à la tous les autres services. culturels sont les bénéfices immaà partir des écosystèmes.

La notion de services écosystémiques est à l’évi-

dence anthropocentrée, elle peut favoriser une

vision utilitariste de la nature. Certaines institutions vont jusqu’à chiffrer en milliards de dollars les services que nous rendent les

écosystèmes.

Faut-il en arriver là pour nous décider à protéger la biosphère ? Toutefois, le concept de services écosystémiques décrit une réalité que nous avons tendance à oublier : l'humanité dépend de la nature pour subvenir à la majeure partie de ses besoins. Pour un paysan, comprendre ce concept permet de revisiter son rapport à la terre.

LES SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES

AU

JARDIN

Après avoir évoqué les services écosystémiques dans leur ensemble, voyons maintenant de manière plus concrète comment ils se manifestent

dans nos jardins. Favoriser le déploiement de ces services constitue la fondation sur laquelle se construit un jardin permaculturel.

1o

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE REMPLACER LES SERVICES ÉCOSYSTÉMIQUES PAR DES TECHNOLOGIES Certains services écosystémiques peuvent être partiellement remplacés par du travail, des tech-

En artificialisant les espaces cultivés, l’agriculteur se prive des services rendus par la nature et s’enferme

dans “l’engrenage

de la vigilance”.

niques, des équipements, des énergies... Du reste,

c’est ce que font l’agriculture contemporaine et notre société en général : nous n’avons de cesse de remplacer ce qui est vivant, organique, doux et beau à regarder, par des produits industriels inertes, froids, payants et polluants... Des produits et des techniques qui nous asservissent alors que nous les croyons libérateurs. En copiant l’industrie, l’agriculture met à mal nombre de processus naturels, ce qui engendre

des coûts importants tant pour les agricul-

teurs que pour la société dans son ensemble. L’artificialisation des terres agricoles fait plonger les cultivateurs dans une spirale descendante qui

compromet la durabilité du système.

Intensification agricole > Perte de biodiversité, diminution des stocks de nutriments, perte des fonctions de contrôle et de régulation > Interventions humaines constantes > Détérioration de la qualité du sol, de l’air, de l’eau et de la nourriture

> Répercussions sur la santé humaine et la santé animale

> Dégradation de l’environnement. Les services écosystémiques qui sont remplis par des animaux (contrôle des ravageurs, pollinisation...) sont les plus impactés par la simplification

>> Durant deux années, une équipe de chercheurs belges a étudié les abeilles

sauvages sur notre ferme, où près d’une quarantaine d’espèces sont présentes. Ces abeilles sauvages,

des paysages. Plus un milieu naturel est artificialisé, plus les bio-agresseurs sont abondants et nocifs.

En voulant se substituer aux processus l’agriculteur s’enferme dans ce que Wess appelle “l’engrenage de la vigilance” : il est ment tenu d'intervenir pour maintenir un d'équilibre.

naturels, Jackson constamsemblant

les services L’essor des activités humaines dégrade 60 % de MEA, du aux trav les n écosystémiques. Selo ces services seraient en déclin#.

INTENSIFIER

LES

ÉCOSYSTÉMIQUES

SERVICES

Pour illustrer ce qui précède,

prenons un

exemple : y a-t-il du sens à supprimer les vers de terre par les pesticides et le travail du sol, pour devoir ensuite acheter des engrais coûteux?

Les vers de terre sont des agents majeurs de la

fertilité. Un hectare de sol sain en contient de

2 à 4 tonnes, l’équivalent en poids de plusieurs

tracteurs. Ces alliés fidèles et discrets travaillent

sans relâche à décompacter et fertiliser le so], sept jours sur sept, sans jamais nous présenter une fiche de paie, sans demander de congés payés ni de RTT... Amis paysans, si le sol de votre ferme est vivant, soyez certains que les vers œuvrent

pour vous, même à l’heure de l’apéritif ou lors de la grasse matinée dominicale !

Lors de la création d’un jardin bio-inspiré, nous observons et réfléchissons beaucoup. Une fois le jardin mis en place, nos interventions se font de plus

en plus ténues.

Pourtant,

notre agro-

écosystème devient chaque année plus puissant. Gratuitement, silencieusement, efficacement, les mécanismes du vivant dégradent la roche-mère, aèrent la terre et la fertilisent, apportent l’eau et les nutriments

aux cultures, contrôlent les ra-

vageurs. Au lieu de travailler dur pour gagner largent nécessaire aux intrants ou à des équipements sophistiqués, nous pouvons investir notre temps dans des observations et des réglages de plus en plus fins. Quoi de plus gratifiant que le spectacle de la vie qui se déploie ? En d’autres termes, dans une vision permaculturelle nous choisissons d'adopter une approche généralement low-tech, mais intensive en connaissances ; nous nous fions aux services éco-

systémiques plutôt qu'aux technologies.

comme ce spécimen butinant une rose, sont de meilleures pollinisatrices que les abeilles domestiques élevées dans les ruches.

Services écosystémiques et conception permaculturelle Un service écosystémique peut être assuré par différentes fonctions écologiques et différents processus biologiques. Par exemple : la gestion des limaces dans le jardin est assurée par les hérissons mais aussi par les canards, les grenouilles, les crapauds, les escargots ou encore les carabes..

La démarche de conception permaculturelle repose donc sur un raisonnement essentiel : pour profiter des services écosystémiques, il faut, en amont, identifier et privilégier les processus biologiques et les fonctions

écologiques qui seront bénéfiques à notre jardin.

PS

ei

BIODIVERSITÉ

12

LA BIODIVERSITÉ ,

£

« L Tout biologiste de plein air, tout écologiste vous le dira : la diversité, © est la vie, et la santé d’un 4

n)

écospstème se mesure à la multiplicité de ses composants comme à la richesse des liaisons internes unissant ces derniersSi. Théodore Monod

La biodiversité sous-tend une multitude de fonc-

tions écologiques essentielles : elle est fondamentale pour de nombreux services écosystémiques$.

Améliorer la biodiversité de notre jardin revient donc Y Dans ce jardin permaculturel de l’île de la Réunion, le choix a été fait de privilégier la diversité des végétaux, notamment les arbres fruitiers.

à souscrire une sorte d’assurance biologique qui aide à sécuriser ses performances et sa durabilitéS.

LA BIODIVERSITÉ

CULTIVÉE

Les paysans traditionnels cultivent généralement

un grand nombre d’espèces végétales différentes. Certains systèmes agroforestiers comptent plusieurs centaines de plantes annuelles et pérennes.

Dans une agriculture de subsistance, les paysans ne cherchent pas tant la performance maximale

que la sécurité qu’offre une importante biodiver-

sité : quels que soient les aléas climatiques de la saison, toutes les cultures ne seront pas affectées simultanément, certaines familles de végétaux prospéreront. La biodiversité cultivée est donc

une garantie contre l'insécurité alimentaire.

Selon la Fao, 75 % des variétés cultivées depuis

linvention de l’agriculture ont disparu au cours

du xx° siècle. L'agriculture mondialisée contemporaine repose essentiellement sur 12 espèces de cultures à grains, 23 espèces de légumes et 35 espèces de fruits et de noix.

Contrairement aux idées reçues, notre régime alimentaire s’est considérablement appauvri au

cours du siècle écoulé - non pas en quantité, la ration calorique par personne a augmenté, mais en diversité. Aujourd’hui, 60 % de l’alimentation de

l'humanité est constituée de 3 espèces de céréales :

le riz, le blé et le maïs - des plantes annuelles sus-

ceptibles d'atteindre de hauts niveaux de production, mais dont la culture nécessite beaucoup de

travail et d'énergie”.

En uniformisant ses agrosystèmes, en réduisant

fortement le nombre d’espèces cultivées, l’agriculture contemporaine se condamne sans le sa-

voir à une extrême vulnérabilité. C’est le recours

à des énergies pétrochimiques abondantes et bon marché qui a permis de substituer technologies et

intrants aux fonctions naturelles des écosystèmes.

Biodiversité La biodiversité est la diversité du vivant. Cette diversité s'exprime à différentes échelles : celle des espèces (biodiversité spécifique), la plus facile à observer et la plus connue, celle des gènes d’une espèce (biodiversité

génétique) et celle des écosystèmes (biodiversité écosystémique). La biodiversité n’est pas figée, elle évolue dans le temps (extinction d’espèces, apparition de nouvelles espèces, mutations génétiques...)

n4

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE

LA BIODIVERSITÉ AU JARDIN

“On peut comparer la diversité de la

vie sauvage à une bibliothèque. Plus elle

comporte de livres et d’expériences, plus

on a des chances de trouver la solution’. Hervé Coves

Mais lorsque le pétrole se raréfie, lorsque son prix

petit nombre de variétés modernes nécessitant

portance de chercher dès aujourd’hui des voies alternatives.

des millions de petits paysans. Tous les bidonvilles

augmente, les famines se généralisent. D’où l’im-

Les estimations du nombre de végétaux comestibles existant sur la planète varient de 35 000 à

70 000. 7 000 espèces ont déjà été cultivées par

>> À Cuba, Perrine a

constaté la créativité des jardiniers urbains qui se

sont emparés des concepts de la permaculture comme

un moyen de survivre à l'effondrement brutal de l’économie de l’île, à la suite

l'humanité”. C’est dire l'importance du potentiel de végétaux à explorer pour sécuriser notre alimentation ! Les possibilités de diversifier nos cultures sont chaque jour plus grandes car les graines circulent de plus en plus facilement. Il est

aujourd’hui possible de réaliser dans son jardin des polycultures plus riches que celles de nos ancêtres, ceci constitue une différence entre l’agriculture pré-industrielle et l’agriculture post-industrielle.

de la disparition de l’urss.

Toutefois, les tentatives des grandes firmes pour privatiser et contrôler ces biens communs que

périodes d’effondrement,

tique participe à la domination de l'agriculture

Comme souvent dans les

lesprit de solidarité domine

et le souci de partage est manifeste.

des intrants coûteux, la révolution verte a ruiné

de la planète sont remplis de fermiers chassés de leurs terres par la mondialisation. Le combat pour les semences est emblématique d’une nouvelle vi-

sion du monde reposant sur le partage et l'intérêt général. En préservant des variétés locales et rus-

tiques, nos jardins bio-inspirés sont aussi des ilots de résistance citoyenne !

CONCEVOIR

UN

AGROÉCOSYSTÈME

DIVERSIFIÉ

Puisque la nature est complexe, nos agroécosys-

tèmes le sont également. Nous cherchons à créer

une multitude d’habitats pour le logement, l'alimentation et la reproduction d’un grand nombi

d'espèces, sauvages et cultivées. Dans toute la me-

sure du possible, notre jardin ou notre ferme sont

composés d’une mosaïque de milieux : parcelles

sont les semences s’intensifient. Le génie géné-

boisées, zones humides, haies, prés, jardins.

par l’industrie. Les oGm rendent plus difficile la pratique d’une agriculture naturelle et durable. En remplaçant les variétés traditionnelles par un

vers les grands principes du design permaculturel

Ces indications nous amènent tout naturellement

qu Seront exposés dans la partie III de ce manuel

NET

ri

7 Li

LU

PES

eh

4 Les fleurs et les crosses de

ces pois grimpants dessinent

d'élégantes volutes dans

13

ja lumière du matin. Les jardiniers-maraîchers ont le

‘privilège de vivre au sein d’un monde végétal d’une infinie richesse. Nous n’aurons pas

LES PLANTES

trop dune vie pour apprendre à

le connaître et à le comprendre. pardonnez-moi ce constat

bien matériel après ce qui précède, maïs je voudrais

De Palliance de l’homme et de la terre, le jardin est le symbole vivant et suggestif, car il est

commercialisons les extrémités

il y a un Indien qui sommeille !

- les dernières feuilles, la crosse

Jean-Marie Pelt

souligner que nous récoltons et

desjeunes pousses de petits pois

la synthèse achevée de l’action de l’homme sur la nature sauvage... Dans chaque jardinier,

et parfois la fleur: délicieuses à manger, elles décorent les assiettes que composent les

chefs avec qui nous collaborons.

La grande beauté du métier de jardinier est quil nous amène à vivre dans l’intimité des plantes. Nous assistons chaque jour au miracle de la vie qui déploie, à partir d’humbles graines, une profusion de végétaux aux couleurs et aux formes infiniment variées. Certes, on peut atteindre des

sommets dans l’art du jardin sans comprendre les

mystères du peuple végétal, toutefois cette passion nous conduit vite à nous intéresser à la botanique.

Une bonne connaissance du fonctionnement des

plantes est un facteur de progrès certain, notamment pour les maraîchers. Mais la botanique est une science complexe, rarement enseignée de nos

jours, et l’on peut être dérouté par la richesse de son vocabulaire. La langue des plantes n’est pas

celle que nous utilisons au quotidien !

Dans ce chapitre, j'ai tenté de présenter les connaissances essentielles en cherchant à les rendre aus-

si abordables que possible, quitte à simplifier la description de phénomènes complexes. Le lecteur qui n’a pas d’attrait particulier pour la botanique peut sans problème sauter ce chapitre, mais celui qui aspire à mieux comprendre ses compagnons végétaux s’intéressera à cette brève introduction, qui lui donnera peut-être l’envie de poursuivre ses

investigations dans la littérature spécialisée.

ANATOMIE

D’UNE

PLANTE

Les plantes sont des organismes composés de

cellules différenciées formant des tissus. Chaque tissu possède une fonction : croissance, squelette

de la plante, circulation de la sève, réserve d’énergie, revêtement et protection... Les cellules d’un

végétal sont donc spécialisées, toutefois elles ont

la capacité de se dédifférencier pour devenir du

tissu de croissance. Cette propriété autorise la multiplication végétative (bouturage).

Une branche importante de la botanique s’attache à décrire les végétaux, ce qui permet de les iden-

tifier. L’extraordinaire diversité du monde végétal a rendu nécessaire un vocabulaire étendu. Nous n’aborderons dans les pages qui suivent que les termes les plus couramment utilisés.

Certaines parties de la plante participent à sa

croissance, d’autres à sa reproduction. - Morphologie végétative : feuille, tige, bourgeon,

racine.

> Quand les légumes

touchent au sublime... Nos

Jardins potagers deviennent

des galeries d’art à ciel Ouvert lorsqu'ils accueillent

ces merveilles végétales, à l'instar de ce chou d’un rouge violacé intense.

- Morphologie reproductive : fleur et inflores-

cence, fruit, graine.

LA

FEUILLE

La feuille participe à la nutrition de la plante, elle

est le lieu où se déroule la photosynthèse. Elle peut Également remplir des fonctions de défense, de Soutien et de protection.

n8

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE

LES FEUILLES

ienees SECONDAIRES

NERVURE PRINCIPALE

FOLIOLE

TIGE GAINE FOLIAIRE

PÉTIOLE

FEUILLE SIMPLE

FEUILLES COMPOSÉES

DRRGEEn AXILLA

STIPULE

RECONNAÎTRE

LINÉAIRE

LES FEUILLES PAR LEURS FORMES FEUILLES SIMPLES

FALCIFORME

OBLONGUE

ELLIPTIQUE

. FEUILLES COMPOSÉES

OVALE

OBOVALE

LANCÉOLÉE

COMPOSÉE PALMÉE

SPATULÉE

ORBICULAIRE

RECONNAÎTRE

LES

LOSANGIQUE FEUILLES

TRIANGULAIRE PAR

LEURS

RÉNIFORME

SAGITTÉE

ARRONDIE

BORDS

COMPOSÉE

PARIPENNÉE

POSITION

LISSE

DENTÉ

RECONNAÎTRE

nr

UNINERVÉE

LES

DOUBLE DENTÉ FEUILLES

PALMATINERVÉE

PAR

CRÉNELÉ LEURS

LOBÉ

COMPOSÉE

IMPARIPENNÉE

DES FEUILLES SUR LA TIGE

CILLÉ

NERVURES

PENNINERVÉE

PARALCÉÉLINERVÉE

FEUILLES ALTERNÉ ERNÉES

FEUILLES OPPOSÉES

CHAPITRE 13

CLASSIFICATION DES FEUILLES La forme des feuilles est variée, de même que leur architecture (feuille simple, folioles..), leur positionnement le long de la tige, leur consistance, leur istance (feuilles caduques, persistantes...). De nombreux critères permettent de les classifier. Une

bonne connaissance des différents feuillages permet au jardinier de mieux identifier les adventices qu'il désherbe, de mieux associer ses cultures... LA TIGE La tige est le support des différents organes de la

plante. Elle est aussi le lieu de circulation de la

sève et un réservoir d’eau et de nutriments. Elle peut participer à la protection de la plante en portant des épines ou des poils urticants.

La tige porte un bourgeon terminal et des bourgeons latéraux donnant naissance aux tiges se-

condaires. Elle est divisée en nœuds sur lesquels s'insèrent les feuilles. La jonction entre la tige et

la racine s’appelle le collet. Le morceau de tige compris entre deux nœuds s’appelle l’entrenœud.

La classification des tiges se fait selon différents

critères : port (dressée, rampante, grimpante...),

LA RACINE

.

La racine fixe la plante dans le sol. Elle participe

à sa nutrition en absorbant l’eau et les éléments

LES PLANTES

LA TIGE BOURGEON TERMINAL

nutritifs, et permet la circulation de la sève. Elle

peut également servir de support à des organes de réserve (tubercules racinaires).

Lors de la germination d’une graine, la radicule

de la plantule donne la racine principale, qui se

divise ensuite en racines secondaires. Certaines plantes peuvent également donner naissance à de nouvelles racines le long de leur tige ou de leurs

FEUILLE

feuilles, on parle alors de racines adventives.

Certaines plantes sont dotées d’un système racinaire pivotant : la racine principale domine et s’enfonce profondément dans le sol. D’autres ont un système racinaire fasciculé, en faisceau. Les racines sont dans ce cas toutes de même taille. Il

existe d’autres types de systèmes racinaires : tubé-

reux, traçants, en échasses, contreforts (figuier),

pneumatophores (palétuvier), racines lianes,

crampons ou suçoirs... LES RACINES

BOURGEON AXILLAIRE

RACINE PIVOTANTE

composition (ligneuse ou herbacée), section (tige creuse ou pleine, forme, contour...), surface (glabre, poilue, épineuse...), ramification. Certaines tiges sont souterraines, leur forme

peut être alors bien différente de celle des tiges aériennes : ce sont les rhizomes, tubercules.

bulbes

et

LE BOURGEON Le bourgeon peut être décrit comme une tige mi-

niature comportant des entrenœuds très courts et l'ébauche de feuilles, voire de fleurs. Le bourgeon terminal est situé au sommet de la

tige qui l’a produit, tandis que le bourgeon latéral

ou bourgeon axillaire est situé à l’aisselle d’une

feuille. Les bourgeons latéraux donnent des rameaux, mais tous ne peuvent pas se développer, faute de place et de lumière, ils deviennent alors

RACINES ADVENTIVES

des bourgeons dormants. Un bourgeon peut donc être en activité, en cours

de développement, ou dormant, sans activité bio-

logique, mais ayant le potentiel de se développer

si la tige située au-dessus de lui est sectionnée.

On peut distinguer le bourgeon à feuilles, conte-

ant à l’état embryonnaire une tige et des fleurs,

& le bourgeon floral ou bourgeon à fruits, contemnt à l'état embryonnaire une fleur ou une inflorescence. Savoir les identifier est précieux pour les arboriculteurs lors des opérations de taille, d'égourmandage, de bouturage...

719

RACINE PIVOTANTE TUBÉREUSE

120

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE

LA FLEUR

STIGMATE STYLE

PISTIL

OVAIRE

COROLLE

PÉTALE

OVULES

En MINE

FLEUR À PÉTALES SOUDÉS

ANTHÈRE FILET CALICE SÉPALE

RÉCEPTACLE FLEUR À PÉTALES

PÉDONCULE

INFLORESCENCES DISPOSITION

(FLEURS SIMPLE

GROUPÉES

LIBRES

SUR UN RAMEAU) DISPOSITION COMPOSÉE

CYME

GRAPPE

}

À

/

ÉPI

CORYMBE

OMBELLE

JEUNE

LA GRAINE

PANICULE

POUSSE

TÉGUMENT EXTERNE

JEUNES

COTYLÉDONS

COTYLÉDON

TÉGUMENT INTERNE GEMMULE

RADICULE

FEUILLES

GRAINE

TIGELLE

RACINE PRIMAIRE

JEUNE TIGE

ALBUMEN TÉGUMENT

RADICELLE

COIFFE

POILS ABSORBANTS

CHAPITRE

LA FLEUR

La fleur est l’organe permettant la reproduction sexuée des plantes à fleurs (Phanérogames). Les fleurs solitaires sont rares. Elles sont souvent

regroupées eninflorescences (ensemble des fleurs

sur un rameau). Ces inflorescences peuvent être simples ou divisées.

On rencontre une grande diversité de fleurs. La

plupart sont dotées de caractéristiques leur per-

mettant d’attirer leurs pollinisateurs : couleurs vives, parfum, nectar...

Cette diversité a une influence directe sur les modalités de la fécondation et sur la formation des graines. Les fleurs sont classifiées selon leur morphologie, leur organisation (insertion des pétales, des sépales et des éléments reproducteurs mâles et femelles, symétrie), le nombre et la forme des pièces florales...

Certaines fleurs sont unisexuées, elles ne portent les organes reproducteurs que d’un seul sexe, mâle

ou femelle. D’autres sont bisexuées (hermaphro-

les Monocotylédones n’en ont qu’un.

LE FRUIT Le fruit n’est présent que chez les Ang iospermes. Il protège la (ou les) graine(s). Il a pour vocation

d’être mangé par les animaux qui assurent ainsi

la dispersion des semences. Pour les attirer, il est

souvent doté de caractéristiques destinées à le rendre visible et appétant : couleur, odeur, chair

épaisse et savoureuse...

Le fruit est composé d’une enveloppe externe

(épicarpe), d’un tissu charnu (mésocarpe), d’une

membrane interne protégeant la (ou les) graine(s) (noyau, pépins).

Les fruits sont de différents types : - Fruits simples : ils résultent d’une seule fleur. Ils comprennent les fruits secs indéhiscents, qui ne s’ouvrent pas spontanément à maturité (châtaigne, gland, noisette, samare du frêne ou de l’orme...), les fruits secs déhiscents - capsules (pavot), gousses (légumineuses), siliques (Brassicacées) -, les baies (raisin, Solanacées, Cucurbitacées), les

p.767.

amande), les fruits multiples (framboise, mûre).

LA GRAINE

Après la fécondation, les différentes pièces de la feur évoluent. Un fruit est issu de l’évolution de l'ovaire, les graines de l’évolution des ovules.

La graine est l’organe caractéristique des plantes fleurs (Angiospermes et Gymnospermes). Elle tt composée d’un embryon, de réserves et d’en“eloppes protectrices. Elle est caractérisée par un äat de dessiccation (sa teneur en eau va de 5 à

8%) et une aptitude à la vie ralentie.

Une plante ne peut voyager, sauf au stade de la gaine ou du fruit. Les végétaux ont donc élaboré

des stratégies pour disséminer leurs semences, ce qui évite aux jeunes sujets de croître à proximité mmédiate de leurs parents. La dissémination peut

fre réalisée par éclatement de la graine ou par le “ent, la pluie, les animaux qui peuvent manger les

“mences et les rejeter plus loin, tandis que d’autres

Jänes s’accrochent à leur toison. Les graines sont Brfois porteuses d’appendices tégumentaires favo-

fsant leur dissémination : poils, ailes, crochets...

La graine est protégée par le tégument, ou en-

loppe, constitué de deux membranes. Elle

‘mporte l’amande, réserve nutritive formée de Fandes cellules riches en amidon ou en huile.

“mbryon est la première ébauche du végétal :

Fmmule, tigelle et radicule. La tigelle porte les “lédons, premières feuilles de réserves. Ils sont

LES PLANTES

au nombre de deux chez les plantes dicotylédones,

dites). La reproduction des plantes sera développée au chapitre sur la production de semences,

13

fruits charnus à noyau ou drupes (cerise, noix,

- Faux-fruits, fruits complexes ou pseudo-fruits:

ils sont issus de la combinaison de l’ovaire d’une seule feus ou de plusieurs fleurs à d’autres OTganes (réceptacle floral, pédoncule...) : fraise, figue, pomme...

- Fruits composés : ils résultent de plusieurs fleurs

issues d’une même inflorescence (ananas, figue).

- Les fruits parthénocarpiques sont des fruits sans graine, qui se développent sans qu’il y ait eu

fécondation (banane).

CYCLE BIOLOGIQUE DE LA PLANTE Le cycle biologique décrit l’ensemble des étapes de croissance et de développement de la plante, de limplantation à la maturité :

- Germination et émergence de la plantule. - Période de croissance végétative. - Phase de transition.

- Période de croissance reproductive.

- Sénescence progressive des organes et maturité

des graines ou des fruits.

Plantes annuelles : plantes à cycle court, elles

germent, grandissent, fleurissent et fructifient

dans la même année (généralement du printemps

à l'automne). Le cycle complet dure moins d’un an.

Le semis de la plante et la récolte de ses graines

auront lieu la même année.

Le monde végétal a élaboré d’innombrables

stratégies pour se perpétuer et faire

voyager les semences. La moindre plante est un chef-d'œuvre de évolution

12

122

PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE Plantes bisannuelles : plantes à cycle court mais ayant développé des capacités d'adaptation pour

résister au froid hivernal. La plante réalise son cycle sur deux années (deux périodes de développement),

avec un hiver au milieu (repos hivernal) : elle crée des réserves la première année (racine de la carotte ou du panais), puis fleurit et monte en graine la seconde. Le semis de la plante et la récolte de ses graines auront lieu sur deux années consécutives. Plantes vivaces : plantes pérennes à cycle long. Les vivaces adoptent différentes stratégies face aux variations saisonnières : présence d’organes souterrains (racines, bulbes, rhizomes, tubercules)

qui garantissent le retour à végétation l’année suivante, ou présence d'organes durs (bois) résistants au froid (arbres et arbustes). La récolte de graines est possible tous les ans mais la reproduction végétative est parfois plus efficace, voire même la seule possible (cas des crosnes du Japon, par exemple). COMPOSITION D’UNE PLANTE Il existe bien sûr des variations d’une espèce à autre mais, de manière générale, une plante est

composée à 90 % d’eau !

La matière sèche d’une plante, obtenue après des-

Les minéraux spécifiques à chaque sol donnent aux fruits et aux légumes leurs qualités gustatives,

leur “goût de terroir”.

siccation, est formée de 40 à 50 % de carbone, de

42 à 45 % d’oxygène, de 6 à 7 % d’hydrogène et de o,5 à 4 % d’azote. Carbone, oxygène, hydrogène et azote constituent donc de 92 à 98 % du poids

sec. Ces éléments proviennent de l’atmosphère : - Le dioxyde de carbone (CO) et le dioxygène (O2) que consomme la plante lors de la photosynthèse et de la respiration apportent le carbone et l'oxygène. - Lazote est prélevé dans le sol par l'absorption racinaire, il est fixé depuis l’atmosphère par certaines bactéries ou par les éclairs. - L’hydrogène est prélevé dans l’eau du sol par l’absorption racinaire, cette eau vient de la pluie. Les principaux constituants d’une plante sont donc normalement disponibles en abondance. Ce constat est intéressant pour les jardiniers qui ont parfois le sentiment que les nutriments sont rares et qu’ils exportent énormément de matière provenant du sol lors de leurs récoltes. En réalité, ce dernier n’apporte que de 2 à 5 % de la matière sèche de la plante, 1 % seulement de la matière fraîche, sous forme d’une trentaine d'éléments” :

_- Des éléments vitaux : potassium, phosphore, bore, calcium, magnésium, soufre, fer, manganèse, molybdène, cuivre, zinc.

- Des oligoéléments accessoires ou de rôle mal

connu : lithium, sodium, rubidium, césium, fluor, silicium, sélénium, cobalt, iode, strontium, baryum, aluminium, vanadium, étain, nickel, chrome, béryllium, brome.

Ces minéraux proviennent de la roche-mère, ils

sont abondants si le sol est respecté et s’il abrite une vie intense. Les minéraux doivent être présents sous forme absorbable (molécules de petite taille et solubles dans l’eau) pour être biodisponibles pour la plante. Sur ce point, l’eau joue un rôle essentiel comme vecteur des nutriments de la plante. En se nourrissant, les végétaux réalisent une syn-

thèse entre le terrestre et l’aérien. L’atmosphère apporte l’alimentation quantitative, quelques élé-

ments simples et disponibles partout, qui forment

la biomasse. Le sol apporte une alimentation qua-

litative, des minéraux dont la disponibilité varie selon les types de sols, qui donnent aux cultures

une saveur spécifique, le “goût de terroir”. Ceci explique pourquoi l’on peut produire en quantité

des cultures médiocres en apportant beaucoup d’eau et d’engrais, ce qui donne de gros végétaux manquant de saveur, et pourquoi des modes de culture naturels, fondés sur un sol vivant et sur le

respect du milieu et des cycles de la nature, per-

mettent d’atteindre une production beaucoup plus goûteuse et chargée en nutriments.

Il est intéressant de noter que les techniques de fertilisation de la révolution verte mettent l’accent sur les éléments du squelette aux dépens de ceux qui sont indispensables au fonctionnement métabolique de la plante. Il en résulte des plantes grandes et bien vertes mais carencées, donc fragiles et sensibles aux agressions extérieures, ce qui conduit les agriculteurs à l’usage des pesticides. Au cours des cinquante dernières années, du fait de l’évolution des pratiques culturales, les fruits et légumes ont perdu une grande part de leurs qualités nutritionnelles.

NUTRITION DES VÉGÉTAUX

Nous avons déjà abordé au chapitre sur le sol cer-

tains aspects de la nutrition des plantes. Celle-ci peut être décrite en six étapes. 1. ABSORPTION Dans le sol, les racines puisent de l’eau chargée

de minéraux à l’état soluble. Ceci donne la sève brute ou minérale. 2. CIRCULATION

OÙ MINÉRALE

DE

LA

SÈVE

BRUTE

La sève brute est une solution de sels minéraux. Comment cette sève va-t-elle monter des racines

jusqu'aux feuilles ? Dans le règne animal, la circulation sanguine est réalisée grâce au cœur. Dans les végétaux, la sève circule sous l'effet de plusieurs phénomènes : dynamiques osmotiques, capillari-

té... La sève monte au centre de la plante dans les

vaisseaux ligneux (vaisseaux du bois ou xylème). Dans les feuilles, la sève brute se transforme en sève élaborée.

ei=

CHAPITRE 13 3, TRANSPIRATION L'eau sort de la plante au niveau des stomates. Ceci favorise sa thermorégulation et l'ascension

de la sève brute. La transpiration augmente avec

la température et la lumière, elle diminue avec

l'humidité.

PHOTOSYNTHÈSE

laquelle les plantes chlorophylliennes (celles qui

possèdent de la chlorophylle, de couleur verte : les

4. PHOTOSYNTHÈSE OÙ ASSIMILATION La photosynthèse (voir plus bas) permet la production de matière organique sous forme de sucres simples, puis complexes. Associées à la sève brute,

taux verts sont capables d’assembler de petites particules chimiques minérales pour en fabriquer

ces molécules forment la sève élaborée. Cette

réaction a lieu le jour, dans les feuilles (en présence de chlorophylle et de chloroplastes).

Les organismes dits autotrophes obtiennent leur

énergie et leur carbone de façon autonome. À cette fin, ils utilisent l’énergie lumineuse ou encore

l'énergie chimique. Les plantes chlorophylliennes sont des organismes autotrophes.

5. CIRCULATION DE LA SÈVE ÉLABORÉE OÙ NUTRITIVE

La sève élaborée est une solution de organiques solubles (acides aminés Produite dans les feuilles, elle circule ganes de réserve (tubercules, fruits,

substances et sucres). vers les orgraines) ou

les organes en croissance (tige, bourgeons), selon

et le transforment en une structure organique

simple, le glucose. En d’autres termes, les végé-

de plus grosses en utilisant l'énergie de la lumière. Cette opération se réalise dans les feuilles grâce au rayonnement du soleil. La plante transforme

ainsi de l'énergie solaire en énergie chimique. En

effet, la molécule de glucose est composée d’un ensemble d’atomes de carbone. Ces atomes sont reliés entre eux par des liaisons. C’est au niveau de ces liaisons que l'énergie est stockée : la liaison carbone-carbone est riche en énergie. La photosynthèse se fait dans les cellules chlorophylliennes (celles qui sont vertes). La réaction de la photosynthèse est illustrée par le schéma ci-dessous.

l'énergie nécessaire au maintien de ses fonctions

La plante se sert du glucose ainsi synthétisé pour réaliser son développement. Le glucose est le point de départ de nombreuses réactions biochimiques. À partir du glucose, la plante peut produire des acides gras ou des acides aminés qui sont à l’origine des protéines. Cependant, le glucose à lui seul ne suffit pas pour réaliser ces synthèses. En

toutes les cellules de la plante.

qui possèdent un atome de phosphore, les acides

les besoins. Cette circulation s’opère en périphérie de la tige dans les vaisseaux du liber (phloème). 6. RESPIRATION

Cette réaction indispensable fournit à la plante

vitales. Elle a lieu de jour comme de nuit dans

LA PHOTOSYNTHÈSE (JOUR)

123

La photosynthèse est l’un des phénomènes les plus fascinants du monde végétal. C’est la réaction par plantes chlorophylliennes sont donc les plantes vertes) captent le CO, (le dioxyde de carbone), une molécule gazeuse minérale de Patmosphère,

CHLOROPHYLLIENNE

LES PLANTES

effet, certains acides gras sont des phospholipides,

Si nous savions, comme les plantes, produire

Pénergie dont nous

avons besoin grâce à la lumière du soleil, par

un procédé inspiré de la

photosynthèse, nombre

des problèmes posés

par notre civilisation seraient résolus !

124 PARTIE Il À L'ÉCOLE DE LA NATURE aminés sont composés d’un atome d’azote.. Ainsi,

retrouve aussi dans le règne animal : la respi,,

simples : des minéraux tels que l’azote (N), le phosphore (P), le potassium (K), le cuivre (Cu), le soufre (S), le magnésium (Mg), le fer (Fe)... Ces minéraux sont apportés jusqu'aux feuilles par la sève brute, comme évoqué plus haut.

appelons “respiration” dans le langage couran

la plante a également besoin d’autres éléments

Grâce au glucose produit par la photosynthèse et aux éléments simples prélevés dans le sol, la

plante dispose de toutes les matières premières

nécessaires à son développement. Il faut imaginer les sucres simples, les acides aminés et les acides gras comme de petites unités mobiles que nous pouvons comparer à des perles. Par le biais des cycles biochimiques, ces petites perles vont être remaniées puis associées dans des ensembles plus grands (des colliers de perles), qui vont former des sucres complexes (amidon, cellulose, hémicellulose, lignine...), des lipides et des protéines.

Une plante se nourrit essentiellement d’atomes abondants dans l’atmosphère, ainsi que d’une toute petite quantité de minéraux prélevés dans le sol.

Sucres complexes, lipides et protéines constituent Parchitecture de la plante et de ses organes de ré-

serve. Ces structures complexes peuvent aussi

être utilisées par la plante pour gérer un stress,

une carence... La plante peut en effet casser ces

structures pour récupérer des éléments simples, s’en servir comme source d’énergie ou bien pour synthétiser d’autres éléments de structure. La sève

élaborée distribue ces nutriments dans l’ensemble de la plante, jusqu'aux cellules racinaires. LA RESPIRATION

:

SOURCE D’ÉNERGIE

La plante a besoin d’énergie pour réaliser au quotidien son métabolisme basal et sa croissance. Elle tire son énergie d’une réaction que l’on

LA RESPIRATION (JOUR ET NUIT)

tion. Une

précision s'impose

ici : ce que nous

est en fait la ventilation (faire entrer l'air dan,

les poumons). La respiration est une réaction chimique produisant de l’énergie. Elle utilise

VO; (dioxygène) de l'air pour casser les liaisos, carbone-carbone de la molécule de glucose «+ libérer, sous forme d’adénosine triphosphar. (arr), l'énergie qui s’y trouve.

Les molécules

d’arP sont les piles énergétiques qui vont per

mettre le fonctionnement de la plante.

Par la respiration, la plante relâche du CO, et de l’eau. La respiration consiste à défaire ce que Ja photosynthèse a construit, comme nous l'avons

évoqué au chapitre sur le sol.

La respiration est une forme d’oxydation, de com. bustion de la matière organique. On dit Souvent,

pour schématiser, que la matière organique est “brûlée”. La respiration se fait dans toutes les

cellules de la plante, y compris les cellules raci-

naires. On comprend donc l’importance d’avoir

un sol souple, meuble, dont la porosité permet Ja circulation et le renouvellement de l'air, y Compris en profondeur, au niveau des racines. Nous-mêmes, et l’ensemble des animaux, réalisons

cette réaction de respiration. La grande différence avec le règne végétal est la provenance du glucose: - Pour les végétaux, le glucose provient de la photosynthèse. Les végétaux chlorophylliens

sont autonomes pour leur approvisionnement

en matière organique. À partir du CO, de l’atmosphère, ils sont capables de produire leur

CHAPITRE 13 propre matière organique

: ils sont qualifiés,

nous l'avons vu, d’autotrophes. Le carbone qui compose les végétaux est exclusivement d’origine armosphérique. - À l'inverse, dans le règne animal, le glucose a l'ensemble de la matière organique sont apportés par l'alimentation. Les animaux sont incapables de synthétiser la matière organique à

partir d’une source minérale. Ils sont qualifiés

d'hétérotrophes.

La photosynthèse est réalisée durant le jour uniquement, la respiration durant le jour et la

nuit. Ceci explique pourquoi une plante dégage de l’oxygène pendant la journée et en absorbe

pendant la nuit (lorsque la photosynthèse s’in-

terrompt). Tant que la plante croît, grandit, se

développe, l'équilibre photosynthèse/respiration est en faveur de la photosynthèse. La plante stocke plus de carbone sous forme de matière organique

(glucose, lipides, protéines) qu’elle n’en dégage

sous forme de CO, pour produire de l’énergie. À la mort de la plante, le carbone qu’elle contient est progressivement libéré dans le sol et dans l'atmosphère.

TRANSPIRATION ET CYCLE DE L'EAU En respirant, la plante relâche donc du CO, mais

aussi de l’eau. La plante perd également de l’eau par la dynamique de la transpiration qui se fait essentiellement au niveau des stomates, les pores présents à la surface des feuilles. La plante transpire quand elle ouvre ses stomates pour ab-

sorber le CO, nécessaire à la photosynthèse.

En cas de stress hydrique, de forte chaleur, la

plante ferme ses stomates pour préserver son

capital hydrique. Elle ne peut alors plus réaliser d'échanges gazeux, la photosynthèse n’a pas lieu, sa croissance est interrompue. C’est pour cette raison que des plantes en plein soleil peuvent souffrir et ralentir leur développement. L'intérêt de l’agroforesterie et de la création de microclimats

frais et partiellement ombragés est donc évident de ce point de vue.

CLASSIFICATION

BOTANIQUE

Pour décrire la nature, les botanistes et zoologistes

des siècles passés ont élaboré des systèmes de clas-

sement à la fois simples et universels. La classification botanique est indispensable pour reconnaître et identifier les nombreux végétaux. La taxonomie est la science qui décrit les êtres

vivants et les regroupe en entités (taxons) afin de les identifier, de les nommer, de les classer et de les reconnaître à l’aide de clés de détermination.

LES PLANTES

science qui vise à l’idenLa systématique est la ent rem et à la classificatlo" tification, au dénomb aux autres selon ort des taxons les uns par rapp

un ordre logique (caractères physiques, gènes.…). L'architecture ou arborescence taxonomique ese

sés construite à partir de rangs taxonomiques utili

ique en systématique pour la classification hiérarch

du monde vivant. Les principaux rangs présentés par ordre décroissant sont les suivants :

Règne > Embranchement > Sous-embranchement > Classe > Sous-classe > Ordre > Famille > Genre? Espèce > Variété > Sous-variété > Race où cultivar

Pour les végétaux, le botaniste Carl von Linné

tion binominale a proposé en 1735 une classifica

basée sur l'anatomie des fleurs : chaque plante est identifiée par un nom de genre et un nom

par un d'espèce. Un végétal est, depuis, désigné rsels : unive s usage nom composé répondant à des - Genre + espèce + une majuscule (le botaniste

lleayant découvert et désigné la plante) + éventue

ment l’année durant laquelle l’espèce a été décrite. - Les noms latins sont écrits en italique (ou soulignés dans le cas d’une écriture manuscrite). - Le nom de genre commence par une majuscule tandis que le nom d’espèce commence par une

minuscule. Par exemple : la Mauve sylvestre, Malva

sylvestris L. 1753.

Cette nomenclature permet de s’affranchir du caractère aléatoire des noms vernaculaires. Elle est utilisée par les botanistes et par tous ceux qui s'intéressent aux plantes dans le monde

entier,

même si certaines dénominations peuvent varier. Chaque jardinier-maraîcher est directement concerné par ces classifications. Il nous est in-

dispensable de savoir reconnaître et nommer les

plantes avec lesquelles nous travaillons. Les ca-

talogues des semenciers donnent les noms latins des espèces et variétés qu’ils commercialisent. Nous pouvons apprendre à identifier les plantes sauvages grâce aux nombreuses et excellentes flores aujourd’hui disponibles. Il est judicieux

d’en posséder plusieurs, bien illustrées, quelques

flores simples permettant la reconnaissance des

plantes courantes et une flore complète de sa région. Les amateurs de botanique gagneront à emporter sur le terrain une loupe, une pince à épiler et un carnet de croquis. La réalisation d’un herbier de son jardin ou de sa ferme permet de progresser rapidement dans la connaissance de

la flore locale.

On peut voyager toute sa vie au pays des plantes sans jamais en faire le tour, c’est une source

d’émerveillements constants !

Lorsqu'une plante est stressée par un soleil trop ardent ou un vent desséchant, elle ferme ses stomates

afin de ne pas perdre

son eau et interrompt

sa croissance.

125

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ESSINE-MOI UNE FERME LE DESIGN RMACULTUREL

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14

INTRODUCTION À LA PERMACULTURE Nous changeons d’univers. Il ne s’agit plus de réparer. Il faut réinventer.

La permaculture est un

système conceptuel, une méthode pour dessiner

des installations fonctionnant en boucles, au sein

desquelles les éléments sont judicieusement

positionnés afin de pouvoir interagir.

Samuel Pisar*

Les chapitres qui suivent ont pour objectif de vous

donner les clés pour que vous soyez en mesure de concevoir vous-même une ferme ou un jardin permaculturel, même s’il est aussi petit qu’un balcon. Pour cela, penchons-nous d’abord sur ce qu'est la permaculture, afin d’en comprendre l’essence, avant d’aborder la mise en pratique de ses concepts. UNE BRÈVE HISTOIRE PERMACULTURE

DE

LA

En 1909, un agronome américain, Franklin H. King,

voyagea en Asie afin d’y étudier les agricultures traditionnelles. Fasciné par ces paysans qui ont réussi à produire, quarante siècles durant, des ré-

coltes abondantes tout en maintenant la fertilité de leurs parcelles, il publia un livre qui devint une référence : Farmers of Forty Centuries, Or Permanent

Agriculture in China, Korea, and Japan’. King fut le premier à parler d’agriculture permanente. Plus tard, la contraction de permanent agriculture a donné permaculture.

La serre-atelier constitue une zone o au cœur des jardins. Elle remplit de nombreuses fonctions et permet notamment aux maraîchers de se réunir pour préparer leur journée de travail.

ler, il s’enherbe et devient improductif... Et l’on a

encore moins envie d’y travailler ! Tous les jardins maraîchers que nous avons implantés en zone 3 se sont révélés décevants et ont fini par être abandonnés. Croyez-le ou non, quelques dizaines de mètres d’écart peuvent faire une réelle différence !

Permaculture humaine

et zone 00

Les pères fondateurs ne l'avaient pas imaginé ainsi mais, au fil des ans, certains permaculteurs ont pensé

qu'il serait bon d’intégrer l’être humain dans son design en le décrivant comme la “zone 00”. Cette zone n’est évidemment pas de même nature que les autres, mais elle nous rappelle que l'attention portée à notre

environnement ne doit pas nous faire négliger notre espace intérieur. La permaculture humaine intègre différentes approches de développement personnel et s'intéresse également aux interactions entre les

personnes. En cela, elle est pleinement en phase avec l'éthique de la permaculture : prendre soin des hommes et de la Terre, partager équitablement. Penser l'humain et son écosystème de manière holistique fait toute la force de l'approche permaculturelle.

CHAPITRE 15 LES CONCEPTS DU DESIGN PERMACULTUREL

141

SECTEURS Le concept de secteur prend en compte les influences extérieures qui affectent votre instal-

lation : ensoleillement, vents, vues, voisinage,

sources éventuelles de nuisance ou de pollution... En portant Votre attention sur ces influences, vous

serez en Capacité de tirer un meilleur parti de celles qui ont un effet bénéfique et de vous proté-

ger des indésirables.

L'ENSOLEILLEMENT Il convient de tirer la quintessence de l’énergie du

soleil. Toutefois, dans les régions du Sud, l’enso-

leillement peut être si intense en été qu’il faudra aussi prévoir de tempérer son ardeur par des amé-

nagements spécifiques. Tout le monde

sait que la course du soleil varie

selon les heures du jour et les saisons’. Le design permaculturel nous propose de porter une attention fine à l’ensoleillement de chaque parcelle

de notre installation (si le territoire est vaste, au

moins sur les zones 1 et 2). Cela nous permettra de tirer un meilleur parti de la ressource solaire, en devenant capables de déterminer efficacement les endroits où implanter les plantes, selon leurs besoins en lumière et en chaleur.

Dans l'hémisphère nord, le soleil passe au nord de l’axe est-ouest du 21 mars au 21 septembre. Ceci permet à des plantes tolérant l’ombre de pousser au nord d’un mur. Elles bénéficient alors d’un ensoleillement direct le matin et le soir. Les végétaux mettent également à profit la lumière indirecte.

Vous pouvez trouver des informations précieuses sur des sites Internet comme celui de MétéoFrance. Les architectes et les paysagistes utilisent des logiciels capables de tracer les zones d’ombre

En hiver, le soleil est bas sur l’horizon, les ombres

pour appréhender la course du soleil, rien ne vaut

cient d’aucune lumière directe à cette saison. Le

faudra prévoir une mise en culture tardive.

observer votre jardin durant une année complète avant d’envisager d’y intervenir. Photographiez ou dessinez sur un plan les zones éclairées selon les heures et les saisons. Ces informations seront utilisées dans la réalisation de votre design.

En été, le jardin est largement baigné de soleil. Sa chaleur devra peut-être être tempérée par la

LES VENTS Les vents sont précieux car ils assainissent la vé-

portées sont longues. Certaines zones ne bénéfisol s’y réchauffera plus lentement au printemps.

Ce n’est probablement pas le meilleur endroit

pour implanter un potager de zone 1, ou alors il

plantation d’arbres judicieusement positionnés ou par implantation d’une tonnelle ou d’une om-

brière. Les arbres à feuilles caduques présentent l'avantage de laisser passer la lumière du soleil

en hiver, lorsque les branches sont à nu, et de la filtrer en été.

et de lumière selon les heures et les saisons. Mais,

l'observation directe. Idéalement, il vous faudrait

gétation, transportent les pollens et procurent une agréable sensation les jours de grande chaleur.

Mais des vents trop forts nuisent aux cultures.

Ils augmentent également le froid ressenti et

Retrouvez votre chat intérieur N'oubliez pas que vous-même, tout comme les plantes et les animaux, avez besoin de la lumière du soleil sur Votre peau. Nos modes de vie contemporai ns nous coupent trop souvent de notre corps. Pourtant, comme il est bon de se reconnecter à son côté animal ! Votre chat peut devenir votre maître en la matière : il sait très bien identifier les jeux du soleil au sein de votre jardin ! Soyez attentif aux messages de vos sens. Il existe un exercice intéressant pour développer cette écoute du corps. Bandez-vous les yeux avec un foulard et demandez à un ami de vous promener lentement dans votre jardin. Vous percevrez très vite les différences subtiles de Microclimats, bien mieux que vous ne 1

vez jamais fait. Si vous marchez au nord d’une mare, vous pourrez avez

noter à quel point les rayons du soleil réfléchi s à la surface de l’eau augmentent la température ambiante.

Les secteurs décrivent les influences

extérieures qui affectent

une installation.

142

PARTIE Ill

DESSINE-MOI

UNE FERME,

LE DESIGN

PERMACULTUREL

l’évapotranspiration. Les tempêtes peuvent provoquer des dégâts importants. En zone cyclonique, le

paramètre “vent” doit être tout particulièrement pris en considération.

“Peut-être sommes-nous en quête du jardin d’Eden ? Et pourquoi pas ?” Bill Mollison,

David Holmgren

Y À l’origine, la Ferme du Bec Hellouin était ce simple pré que nous avons mis en culture à l’aide de notre brave cheval Winik. Il nous auraît été impossible alors d'imaginer ce que cet espace deviendrait quelques années plus tard !

plus loin en mettant à profit ces flux, pour remplir une mare temporaire ou une citerne, par exemple,

Le long d’une pente, les chemins peuvent être utilisés pour capter les eaux de ruissellement lors des

Chaque région connaît généralement un secteur de vents dominants, qui peut d’ailleurs varier avec les saisons. Les tempêtes soufflent le plus souvent d’une direction définie. Sur la façade ouest de l’Europe, par exemple, les vents dominants viennent de l'Océan. Les dépressions engendrent des vents qui soufflent fort du secteur sud-est au secteur nord-ouest. Ils apportent un air doux et humide.

fortes pluies et remplir des réservoirs.

et sec, parfois fort désagréable.

Vous chercherez bien évidemment à mettre en

Connaître la météo de votre région vous permettra de gérer l'influence des vents sur votre jardin en positionnant des brise-vent adaptés aux endroits opportuns (nous reviendrons sur ce sujet en traitant des microclimats®). Sous nos latitudes, il est généralement pertinent de planter les plus grands arbres au nord du terrain : ils abriteront des vents froids du nord et leur ombrage ne sera pas trop important. Implantées à l’ouest, une haie fruitière ou une forêt-jardin abritent des vents dominants. Maïs positionner des arbres élevés au sud serait une erreur dans bien des cas, d’autant plus si le terrain est petit.

teurs disgracieux. Une usine ou une autoroute à

Maïs lorsqu'un fort anticyclone s’installe, il souffle un air continental du secteur nord à nord-est, froid

LA CIRCULATION DE L'EAU Votre terrain peut être soumis à des mouvements d’eau réguliers ou occasionnels : crues, inondations, ruissellements... Votre design peut vous per-

mettre de vous en protéger par des aménagements qui vont contenir ou diriger les flux d’eau. Vous éviterez bien évidemment de donner aux espaces concernés un usage susceptible d’être affecté par la présence de l’eau. Mieux vaut laisser une zone inondable en herbage, par exemple, que d’y construire votre atelier ! Votre design peut aller

Vous pouvez renforcer délibérément le Caractère humide d’une dépression pour en faire une zone

marécageuse au fort potentiel écologique. Elle peut également devenir une source de biomasse par une plantation de consoudes ou de saules, ou même éventuellement une rizière.

LES VUES

|

valeur les vues intéressantes et à occulter les sec-

proximité pourront être gommées du paysage par un dense rideau d’arbres ou une construction qui

fera également obstacle au bruit.

Pour mettre en valeur une belle vue, il n’est pas forcément nécessaire de dégager tout un pan de

votre territoire. Quelques beaux arbres peuvent la souligner davantage, à la manière d’un cadre qui

renforce l’impact visuel d’un tableau.

Il est parfois intéressant de ménager un effet de

surprise. La traversée d’un sous-bois dense et obs-

cur, suivie de la découverte d’un panorama dégagé, est un vrai bonheur. Pour que votre jardin soit source d'émotions, mieux vaut renforcer le caractère propre à chaque espace - le concept de zones s’y prête à merveille.

Il faut parfois jongler avec des impératifs contradictoires. Ainsi, dans l'aménagement d’une microferme sur le toit d’un grand magasin situé au cœur

d’une ville ancienne, nous avons dû ceinturer la

terrasse d’une haie brise-vent. Mais quelques belvédères permettent aux visiteurs de profiter d’une vue exceptionnelle sur les flèches de la cathédrale toute proche.

Au Bec Hellouin, le terrain de notre parcelle ini-

tiale était en longueur. Côté nord, la ferme est longée par une route et le passage des voitures représentait une nuisance. Au sud, la rivière du

Bec offrait un intérêt évident. Toutefois, elle était

encaissée au fond d’un fossé et il fallait être au

bord pour la découvrir. Nous avons pu corriger ces défauts et transformer complètement l’ambiance du terrain. Les berges de la rivière ont été

décaissées en dessinant des courbes et des cri-

ques dont certaines ont été aménagées en plages,

nous permettant de profiter au maximum de cette Eau pure. La terre des remblais a été utilisée pour créer un talus le long de la route, planté d’une dense haie champêtre. Un talus d’une hauteur

CHAPITRE 15 LES CONCEPTS DU DESIGN PERMACULTUREL 143 suffisante atténue considérablement le bruit des moteurs. Les années suivantes, tous les bAtiments qu’il a été nécessaire de construire ont été implantés le long de cette haie, tournés vers le sud. La présence de la route est aujourd’hui

presque oubliée, tandis que la vue sur la rivière

et la vallée est pleinement valorisée, On se sent Join du monde.

Nos jardins situés au-dessus du village du Bec

Hellouin bénéficient d’une vue exceptionnelle : l'abbaye en contrebas, les maisons du village, classé parmi les Plus Beaux Villages de France, les trois

vallées ceinturées de forêt offrent un merveilleux panorama. Nous voulions toutefois y planter un verger conservatoire. Il a fallu faire un arbitrage : les arbres fruitiers ont été implantés sur la moitié

inférieure de la pente. La vue reste dégagée de-

puis les jardins en terrasses situés en haut de la pente. Pour déterminer jusqu’où il était possible de planter les arbres, nous avons utilisé une perche de 8 mètres représentant la hauteur d’un fruitier

adulte. Lorsque le haut de la perche atteignait la zone de vue intéressante, nous avons cessé de planter. Par définition, les arbres sont de petite

taille lors de la plantation et l’on a généralement tendance à sous-estimer leur croissance !

LE VOISINAGE

Il vous faudra penser à la cohabitation avec un éventuel voisinage. En Normandie, un dicton dit : “Aime ton voisin et plante ta haie” (en relisant ce texte, Perrine note : “On peut aussi planter une haie et inviter son voisin à picorer dedans !”). À l'inverse, dans certains écoquartiers, les clôtures séparant les habitations sont supprimées et les enfants peuvent circuler assez librement chez les

uns ou les autres. Que vous litaire ou adepte de l’apéro de voir quel type de relation tenir avec votre entourage l'intégrer dans votre design.

soyez plutôt ours sotous les soirs, à vous vous souhaitez entrepensez simplement à

LES NUISANCES ET SOURCES DE POLLUTION

Les fondateurs australiens de la permaculture conseillaient d'intégrer au design le secteur par où proviennent les feux de brousse, pour s’en

protéger. Ce risque est moins réel en Europe, quoique dans les régions méditerranéennes, avec

les épisodes climatiques extrêmes qui risquent de se multiplier, il puisse être judicieux d'envisager

une barrière coupe-feu.

Chez nous, les feux de brousse ou les invasions

dekangourous sont rares, les nuisances viendront Plus probablement d’un voisin qui épand des pes-

ficides dans le champ limitrophe, d’une voie ferrée

bruyante... Toutes ces influences extérieures, ré-

8ulières ou épisodiques, méritent d’être prises en

considération. Trouvez la réponse adaptée : haie,

mur, fossé...

RÉSEAUX

Sous le vocable de réseaux, nous intégrons les voies de circulation, mais également les réseaux d’eau, d'électricité, de téléphone, le tout-à-l’égout... Ces derniers éléments méritent d’être connus et intégrés au design. Toutefois, ils ne nécessitent que rarement un dessin spécifique dont vous seriez en charge. AXES

DE

CIRCULATION

Dans une microferme, nous passons une bonne

partie de notre temps à marcher d’un endroit à un autre, un tracé optimal des chemins est un gage d'efficacité.

À l’intérieur de tout jardin important, et tiori pour une ferme, nous recommandons ment la création d’une allée suffisamment pour qu’un tracteur de taille raisonnable

remorque puissent l’emprunter. Ceci contradiction avec notre souhait de de ce type d'équipement. Un jour ou très probable que vous souhaiterez

a forvivelarge et sa

n’est pas en nous passer l’autre, il est faire inter-

venir un engin pour creuser une mare, un fossé,

planter des piquets de clôture ou pour vous faire livrer une remorque de fumier ou de BRr. Vous vous féliciterez alors d’avoir intégré dans votre

design une voie suffisamment large qui desserve l’ensemble de votre territoire. N'oubliez pas non

plus de prévoir un espace où l’engin pourra faire demi-tour et manœuvrer... Un chemin de desserte

qui fasse le tour du terrain est généralement bien adapté.

Dans notre ferme, nous avions calculé le tracé

des chemins en fonction de notre cheval de trait, mais sa carriole braque beaucoup mieux qu’un engin mécanisé, ce qui interdisait aux tracteurs d’une certaine taille de pénétrer dans nos jardins.

A Voici notre chaumière lors de son rachat: une humble maison paysanne

faite de boïs, de terre,

de pierres, de roseaux. Elle abrite les joies et les peines de notre famille. Les concepts de la permaculture nous ont permis d’y rassembler à peu près tous les éléments et fonctions dont nous avons besoin pour vivre et nous épanouir.

SANS 144

PARTIE II! DESSINE-MOI UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL

A Nous avons implanté une miniforêt-jardin dans une parcelle tout en longueur. Pour casser cet effet de couloir, le chemin serpente. Les courbes sont nombreuses mais, vu la petite taille de cette forêt, les quelques mètres supplémentaires à parcourir sont largement compensés par le plaisir d’une balade sur cette allée sinueuse. Cette forêt-jardin étant ouverte aux visiteurs,

un compromis a été recherché entre l'efficacité et l'agrément.

De bonnes clôtures sont d’une grande importance pour les paysans. Les animaux sont doués d’une personnalité, même les poules. Il y en a toujours qui, comme nous,

donneraient tout pour courir le vaste monde !

Lorsque nous faisions des couches chaudes, le tracteur du club hippique local bennaït son fumier à l'entrée de la ferme et nous devions tout reprendre à la brouette, ce qui représentait des centaines d’heures de travail inutile. Le principal chemin de desserte mérite d’être em-

pierré, si vous pouvez vous l’offrir. Certes, c’est

une dépense importante et pas amusante du tout. Maïs patauger dans la boue hiver après hiver n’a rien de plaisant non plus et cela occasionne des fatigues inutiles et un risque de blessures accru. Dans notre ferme, nous avons attendu près de dix ans avant de faire empierrer le chemin qui mène aux serres, celui que nous empruntons un nombre de fois incalculable chaque jour. En hiver, il nous arrivait de pousser nos brouettes plusieurs mois durant dans 10 centimètres de boue. Ce chemin en dur nous a changé la vie en améliorant considérablement le confort au travail, et j’ai bien regretté de ne pas avoir engagé cet investissement plus tôt.

Je vous suggère en passant d’entretenir d’excellentes relations avec votre entrepreneur de travaux publics ! Le nôtre est un artiste de la pelleteuse. Nous avons planté ensemble des milliers d’arbres et de piquets de clôture, et creusé plus de vingt mares ! J’ajouterai que l'expérience nous a montré que louer une petite pelleteuse pour réaliser soi-

même ses travaux de terrassement est rarement

une économie. Ce n’est pas notre métier, nous y passons un temps fou pour un résultat probablement décevant. Mieux vaut faire appel à un entrepreneur équipé d’une grosse pelleteuse, car un engin puissant coûte peut-être 2 fois plus cher à la journée mais travaille 10 fois plus vite. Mais revenons à nos réseaux. Prévoyez autant de chemins secondaires que nécessaire. Dessinez des tracés logiques. Intégrez bien le fait que, pour qu’une allée ou un sentier soient agréables à emprunter, il convient d’éviter la ligne droite. Dans la nature il n’y a pas, ou quasiment pas, de ligne droite et une portion de chemin rectiligne est très ennuyeuse à emprunter. Mais ne multipliez pas les courbes inutiles pour autant. Si votre réseau de

chemins ressemble à un plat de spaghettis, vous perdrez un temps fou pour vous rendre d’un bout à l’autre du jardin. Cherchezà concilier l’agrément

et l'efficacité !

Les humains, comme les autres animaux, cherchent inconsciemment à obtenir un résultat maximal avec une dépense d’énergie minimale.

Tout ce qui ralentit inutilement la circulation est

malvenu. Nous avons constaté que dès qu’un obstacle, même léger, freinait d’une manière ou d’une autre la circulation, inconsciemment nous cessions d'emprunter cet itinéraire. Il en résultait une portion de jardin mal entretenue.

La logique qui sous-tend le tracé des réseaux rejoint celle des zones : chaque fois que vous pouvez éviter de parcourir inutilement quelques mètres, vous économisez de précieuses calories et gagnez des minutes. Mis bout à bout, à la fin de la semaine, ce temps économisé et cette fatigue épargnée peuvent vous permettre d’offrir une soirée au cinéma à votre famille, tandis qu’un maraîcher qui n’aurait pas bien pensé son design travaillera peut-être encore à la lampe frontale. On peut toujours rêver d’un monde où les consommateurs accepteront de payer plus cher les légumes bio -— et nous espérons de tout cœur qu’un jour prochain notre travail sera mieux rémunéré. Mais en attendant, un design soigné vous permettra de gagner considérablement en efficacité, ce qui aura un impact positif sur votre qualité de vie. Gela ne dépend que de vous ! CLÔTURES Les clôtures peuvent être envisagées dans les ré-

seaux car elles affectent la circulation et les flux. Le

tracé des clôtures requiert une attention toute particulière. Si vous intégrez des animaux dans votre design, pensez à limiter le temps nécessaire à leurs soins grâce à de bonnes clôtures. Nous vous suggérons d’éviter de laisser trop d’espaces ouverts en dehors des zones pâturées car il vous faudra les tondre ou les faucher. Les animaux peuvent permettre d’alléger l’entretien général du site en broutant l’herbe,

RELIEFS

Les reliefs qui peuvent animer votre territoire présentent des contraintes comme des opportunités.

votre design doit permettre de limiter les premières et de tirer le meilleur parti des secondes.

Inutile de rappeler que les fortes pentes entravent la circulation. Elles excluent aussi les cultures à cause

des risques d’érosion, mais également du danger

vY

que représente le passage d’un tracteur sur des

déclivités importantes. Chaque année, des agriculteurs paient de leur vie le fait de vouloir mettre en

des châteaux d’eau pour les régions environnantes. Lorsqu'ils sont déboisés, comme c’est actuellement

le cas pour l'Himalaya, la terre des pentes est lessivée et emportée par les fleuves. Ces derniers voient leur niveau baisser et risquent de se tarir. Couper les arbres sur les hauteurs revient à ruiner de vastes territoires en contrebas.

AMÉNAGER UNE PENTE

Dans les climats humides d'Europe ou d’ailleurs, les reliefs érodés présentent souvent une forme de $ incliné. Chaque partie de la pente est pro-

valeur de tels espaces, traditionnellement dévolus à des vergers ou des pâturages. Toutefois, la meilleure affectation reste la forêt qui, à l’état naturel, recouvre généralement les fortes pentes.

pice à certains types d'aménagements et en exclut

Une pente, même douce, est beaucoup plus difficile à cultiver qu’un terrain plat lorsque l’on ne dis-

judicieux, comme évoqué, d’y creuser un bassin

d’autres. Le sommet de la pente est exposé aux vents. C’est un bon endroit pour installer une éolienne. Il sera pour capter l’eau de pluie en hauteur.

pose pas de la puissance d’un tracteur. En traction animale, l'effort à fournir est important. C’est ce qui nous a conduits, au Bec Hellouin, à aménager des terrasses sur nos pentes.

une forêt.

GESTION

La pente, à un endroit donné, change de courbure :

DE

L'EAU

SUR

UNE

PENTE

Une pente peut permettre de capter l’eau de pluie en hauteur. Comme évoqué, creuser une mare en

haut d’une colline est d’un grand intérêt car cette eau pourra irriguer par gravité des jardins situés

en contrebas.

La course de l’eau le long d’une pente est toujours à éviter car elle risque fort d’entraîner un phénomène

d'érosion. Le meilleur moyen de prévenir l'érosion

est un couvert arboré. Les arbres tiennent le sol et permettent à l’eau de pluie de s’infiltrer. La déforestation qui sévit dans de nombreuses régions du monde se révèle, de ce point de vue, catastrophique. Les reliefs importants constituent généralement

Le haut de la pente est souvent raide. Si c’est le

Cas, au risque de nous répéter, mieux vaut y planter

de convexe elle devient concave. Au-dessous de ce “point-clé”, ou point d’inflexion, l’érosion a généralement accumulé davantage de terre arable et les usages possibles sont plus variés. Le point-clé est un bon endroit pour construire une maison (si la pente est orientée vers le sud), à l’abri des poches de gel que constituent les fonds de vallée, également susceptibles d’être inondés. L'endroit est propice à la construction d’une retenue d’eau. C’est également souvent là que passent les routes.

A La permaculture nous suggère de transformer les problèmes en solutions. La forte pente de nos jardins situés au-dessus de l’abbaye du Bec Hellouin a permis de créer des mares qui peuvent irriguer par gravité les terrasses inférieures.

Au-dessous du point-clé, la pente plus douce peut accueillir un verger qui bénéficiera du climat abrité du vent et du gel. D’UNE PENTE

EN S

RE

mé OR

éme

COUPE



RÉSERVOIR D'EAU EN HAUT DE LA PENTE BOIS SUR LA PARTIE LA PLUS ABRUPTE

VERGER

HERBAGE

CULTURES RIVIÈRE

MAISON CONSTRUITE AU POINT D'INFLEXION DE LA PENTE

est préféSi une rivière coule au fond de la vallée, il

sur les berges rable de conserver une bande boisée

(ripisylve). Les saules, les aulnes et les peupliers apprécieront ce biotope. Pour favoriser l’infiltration de Veau dans une

pente, un aménagement simple consiste à creuser

un fossé en travers de celle-ci. La terre retirée du fossé sert à créer un talus le long de ce dernier.

Ce type d'aménagement, cher aux permaculteurs, s’appelle une baissière (swale en anglais). L'eau est retenue par le fossé qui peut se remplir temporairement. Elle pénètre dans le sous-sol et reviendra humidifier la pente en contrebas. Le talus gagnera à être planté d’une haie fruitière. Les végétaux maintiendront la terre et bénéficieront de l’humidité. A Il a fallu plusieurs années defforts pour transformer la friche impénétrable achetée aux moniales du Bec Hellouin en une succession de terrasses plantées, sur leur talus, d'arbres fruitiers. Lorsque nous y travaillons, bercés par le son des cloches de l’abbaye, nous avons Pimpression de toucher le ciel !

Plus bas, là où la pente diminue à l’approche du fond de la vallée, le sol est généralement fertile car il a bénéficié des alluvions venant des parties supérieures. C’est un bon endroit pour cultiver des céréales. Le fond de la vallée est le plus souvent humide, fertile et plus froid que la pente. Traditionnellement, ces espaces font de bons pâturages et d’excellentes prairies de fauche. À la belle saison, lorsque le sol

est réchauffé et a perdu son excédent d’eau, il est possible d’y cultiver des légumes qui apprécient l'humidité et les sols profonds.

Enlever une haie peut avoir des conséquences, comme en témoigne un ancien agriculteur : “Je

l'ai vécu. Une haie qui était disposée à l’oblique

dans le haut d’une pente fut arrachée. une parcelle plus bas dans la pente, laisser en herbe car une fois la haie chaque pluie, c'était une catastrophe

J’exploitais que j'ai dû arrachée, à dans mon

champ, et puis, deuxième constatation, une source

qui sortait dans un petit bosquet en bas de pente s’est tarie. Conclusion, la haie avait été placée pour couper l’eau, la faire couler moins droit dans la pente, qui plus est sur une terre bien filtrante qui donnait naissance à une source et ne causait aucune érosion.”

Créer des terrasses Si la terre arable fait vraiment défaut, la création de terrasses peut être envisageable. Toutefois, il s’agit là d’un gros chantier coûteux qui ne doit pas être considéré à la légère. Le travail de terrassement est également soumis à autorisation dans bien des cas. Les terrasses doivent suivre les courbes de niveau, ainsi l’eau s’infiltrera dans le sol. Les talus entre les terrasses

peuvent être constitués de murets de pierres, comme

c’est traditionnellement le cas dans de nombreuses

régions du monde. Toutefois, construire de tels murets est un travail énorme, quasiment impossible à réaliser à notre époque vu le coût de la main-d'œuvre. Si les talus sont simplement formés de la terre et des matériaux

en place, leur pente doit être de 45 degrés au maximum pour qu’ils ne s’effondrent pas.

Il est fort probable que le travail de terrassement fera remonter d'innombrables pierres et mettra à mal la

couche de terre arable, généralement mince sur une pente. Il faudra alors prévoir d'apporter une importante

quantité de terre arable et de compost pour créer la fertilité.

Au Bec Hellouin, nous avons été assez fous pour nous lancer dans cette aventure, inspirés par les travaux de Sepp Holzer. Sur nos terrains situés au-dessus de l’abbaye du Bec Hellouin, il a fallu une bonne semaine de travail à la pelleteuse pour créer nos neuf terrasses, puis deux Jours avec trois engins pour apporter une couche épaisse de compost provenant du club hippique situé Juste en contrebas. Nous avons réalisé un réseau de quatorze mares pour recueillir l’eau de pluie à chaque niveau, En creusant des rigoles en travers des chemins

pour capter les eaux de ruissellement. Le bord des terrasses a été planté d’arbres fruitiers et parfois de fruits rouges. Ces terrasses bénéficient d’un microclimat sensiblement plus chaud que le fond de la vallée où est située la ferme. Nous avons pu observer que les terrasses sont très efficaces pour Capter l’eau. Cette configuration est favorable à des cultures précoces où tardives, aux plantes aromatiques et médicinales, aux petits fruits, plus

sucrés que ceux de la vallée.

Quelle beauté dans ces terrasses ! En partageant la vie de paysans dans les rizières de Bali, j'avais pu observer la très haute efficacité de ce système qui permet de nourrir durablement une population nombreuse.

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CHAPITRE 15 LES CONCEPTS DU DESIGN PERMACULTUREL C L IM AT'°

Le climat est un thème particulièrement étudié

en permaculture. Si nous parvenons à jouer intelligemment avec le climat et les microclimats qui caractérisent notre territoire, nous gagnons en productivité et pouvons épargner beaucoup

d'énergie fossile. L’ère des énergies fossiles nous

a rendus très paresseux et insensibles aux signaux que nous envoie la nature, il est si facile de pousser le thermostat d’une maison. Mais si cette der-

nière est positionnée de manière optimale, ses besoins en chauffage seront bien moindres, voire

inexistants grâce à une conception bioclimatique.

L'objectif de ces lignes est de développer votre connaissance des facteurs climatiques.

LE CLIMAT DE VOTRE RÉGION

Chaque bio-région bénéficie d’un climat qui dé-

pend de plusieurs facteurs.

Latitude : la distance par rapport à l’équateur est

un facteur décisif. Plus on monte vers le nord, plus

la saison de culture, déterminée par le nombre de

jours durant lesquels la température est égale ou supérieure à 5 °C, est courte. Ceci limite le nombre

de plantes cultivables. De manière générale, la biodiversité animale et végétale diminue à mesure que

l'on s'élève en latitude (gradient de biodiversité). Les paysans du Sud peuvent cultiver un plus grand

nombre de végétaux, tout au long de l’année.

Longitude : les régions situées sur un même axe est-ouest ne bénéficient pas du même climat. Celuici peut varier en fonction du régime des vents, de

la présence ou non d’un océan ou d’une chaîne de montagnes. Dans le Sud de la France, la température augmente à mesure que l’on progresse vers l’est.

quasi inexistant en Europe tempérée. Toutefois, les vents marins forts peuvent nuire aux cultures. En France, le Finistère nord est réputé pour ses légumes de plein champ, tandis que les célèbres pommes de terre Bonotte de l’île de Noirmoutier,

en Vendée, sont les plus précoces de notre pays.

Le climat continental connaît des hivers rigoureux. Toutefois, au printemps, la température

croît rapidement et régulièrement. Les étés sont

plus chauds. Les végétaux adaptés à ce climat ne

Influence maritime/continentale : l’inertie ther-

souffrent pas des grands froids hivernaux.

sec. Les vastes étendues d’eau demandent davantage d'énergie pour se réchauffer. Les mers et les océans jouent donc un rôle de régulateurs thermiques, limitant les extrêmes de température. Sur

Altitude : chaque fois que l’on s’élève de 200 mètres, la température chute de 1 °C. La né-

mique de l’eau est plus grande que celle d’un sol

la côte ouest de l’Irlande, l'amplitude thermique n’est que de 5 °C entre les températures moyennes

d’hiver et celles d’été. En Russie continentale, elle

atteint 30 °C.

Le climat océanique est doux et humide. Par rap-

Port au climat continental, le ciel est généralement

bulosité s’accroît avec l'altitude, diminuant encore

la chaleur et la température. Les pluies augmen-

tent également. Ces différents facteurs, conjugués avec les pentes, rendent plus difficile l’exercice de

l’agriculture en altitude. Les régions montagneuses

sont plutôt dévolues à l'élevage, avec parfois des

systèmes de transhumance.

Contexte environnant ville/campagne :

: les villes

sont plus nuageux, les vents plus forts, les pluies e. l’anné sur ère réparties de manière plus réguli fortes de et L'absence de grands froids en hiver

engendrent un climat spécifique, caractérisé par une température moyenne plus élevée (de 0,5 à 1,5 °C de plus que dans les campagnes environnantes en

monter taux qui ont besoin de ces extrêmes pour est ique à fleur et fructifier. Mais le climat océan La ères. 8lobalement favorable aux cultures légumi

les ruelles étroites), des pluies plus abondantes (de 5 à 10 %), une luminosité moindre, due à la pollution (de 15 à 20 %). Les vents y sont de 10 à 20 % moins forts qu’à la campagne mais, dans certaines configurations, ils peuvent être renforcés.

certains végéchaleurs en été exclut la culture de

Saison de culture est longue dans les zones sou-

être Mises à un tel climat. Sur les côtes, le gel peut

moyenne, parfois bien davantage dans les cours et

147

148

PARTIE Ill DESSINE-MOI

UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL

RELIEFS

:

Une pente dirigée vers le nord est froide car les

rayons du soleil y pénètrent avec une faible incidence. À l'inverse, une pente orientée vers le sud capte mieux les rayons du soleil. Ce phéno-

mène joue à l’échelle d’une montagne commeà celle d’une butte de culture. Cette dernière se ré.

chauffe plus vite au printemps qu’un sol plat et la différence entre sa face exposée au sud et sa face exposée au nord est assez facilement observable au niveau des cultures.

À l'échelle du paysage, une pente orientée vers le

sud peut connaître, en climat tempéré, jusqu’à

trois semaines de gel en moins au printemps et autant à l’automne. Cette différence est considérable pour des maraîchers qui cherchent toujours à produire plus tôt et plus tard en saison. Une pente bien orientée peut représenter, en termes de climat, un bond de plusieurs cen-

taines de kilomètres vers le sud. Dans un jardin, il peut être envisageable de créer une légère pente artificielle vers le sud, vu le gain de productivité potentiel qu’un tel aménagement permet.

Dans l’hémisphère nord, l’orientation la plus chaude est une pente orientée sud-sud-ouest car le soleil de l’après-midi est plus chaud que

Demandez à vos animaux de vous

enseigner les

microclimats de vos

jardins. Ne disposant pas de chauffages ni de climatiseurs,

ils savent parfaitement

les identifier !

MICROCLIMATS Le climat dominant au sein d’une bio-région se décline en une infinité de microclimats sous l'influence de multiples facteurs : reliefs, ensoleillement, vents, gel, infrastructures... Les

microclimats peuvent être de taille très variable, allant de quelques centimètres au pied d’un arbre à plusieurs kilomètres dans le cas d’une vallée. Dans un design permaculturel, il est essentiel d’identifier les microclimats existants pour en tirer le meilleur profit. Ces observations se font au fil des saisons. Les matins froids d’hiver, avant le

lever du soleil, lorsque le sol est gelé ou couvert d’une fine couche de neige, sont particulièrement propices. Les poches de gel peuvent être bien dessinées. Au fil des heures, le soleil fait fondre

le gel ou la neige sur les parties les mieux exposées, tandis que les zones froides restent blanches. Il se dessine alors une sorte de cartographie des micro-zones climatiques de votre jardin, en hiver du moins. Tirer parti des microclimats existants pour y implanter les végétaux les mieux adaptés est un premier pas. Vous pourrez ensuite créer à dessein d’autres microclimats favorables. Tout ceci vous permettra d'augmenter vos récoltes. Votre jardin sera plus agréable à vivre, pour vous comme pour vos compagnons animaux et Végétaux.

celui du matin. Cette configuration, tournée vers

les vents dominants en climat océanique, sera également la plus sèche car le soleil, les vents et la pente conjuguent leurs effets pour assécher le sol.

Nous vous recommandons vraiment de ne pas installer un jardin sur une pente orientée vers le nord. Quels que soient vos efforts, vous serez toujours

pénalisé par cette configuration.

L’air froid a tendance à couler le long des pentes car il est plus lourd que l'air chaud. Les dépressions, grandes ou petites, constituent souvent des poches de gel. Mieux vaut éviter d’y implanter des végétaux sensibles au froid.

Dans les pays chauds et secs, à l'inverse, on plante parfois les végétaux cultivés au fond d’un trou ou d’une cavité, pour les rapprocher de la nappe phréatique et les abriter partiellement du soleil et du vent.

Pour protéger un verger des gels tardifs, une haie peut être implantée en travers de la pente afin

de dévier le flux d’air froid. Cette haie doit bien évidemment être plantée au-dessus de la zoneà protéger. Une haie étanche placée au-dessous d'un verger où d’un jardin risque de jouer le rôle inverse en empêchant l’écoulement de l'air froid, formant

ainsi une poche de gel.

2268 ©

ee.

CHAPITRE 15

LES CONCEPTS

DU DESIGN

PERMACULTUREL

ENSOLEILLEMENT

La quantité de rayons lumineux que reçoit un es-

pace où un objet peut être évaluée en termes de jumière et en termes de chaleur. Chaque objet, selon sa nature, Son poids, sa couleur, sa surface,

réféchit une partie de l’énergie lumineuse reçue sous forme de lumière et en absorbe une autre

sous forme de chaleur. Plus un objet est lourd, sombre et rugueux, plus il absorbera de chaleur.

La lumière est essentielle à la photosynthèse des végétaux.

Lorsque

la lumière

est rare, la

croissance des végétaux ralentit ou s’arrête. L'accès à la lumière peut être un facteur limitant

des cultures. Si l’ensoleillement est de moins de

dix heures par jour, il devient beaucoup plus dif-

ficile de cultiver. Toutefois, les végétaux peuvent tirer profit d’une lumière indirecte. En milieu urbain, où de nombreux édifices font obstacle à la lumière, le fait de peindre en blanc les murs d’une courette augmente sensiblement la quantité de lumière réfléchie. La chaleur est un facteur favorisant la croissance des végétaux. Nous pouvons créer des pièges à

chaleur en mettant à profit la capacité des ma-

tériaux lourds et sombres à stocker cette dernière. Les pierres, le béton, la maçonnerie, l’eau sont de bons accumulateurs de chaleur, surtout si

leur contenant est sombre. Maïs les arbres et les buissons jouent également un rôle de régulateurs thermiques. PIÈGES À CHALEUR

qui présente le plus grand nombre d’arbres fruitiers palissés, avec des espèces et des conduites variées. Les maraîchers parisiens du x1x° siècle, qui ne bénéficiaient pas de serres ou de tunnels, conjuguaient les effets d’une pente et d’un mur en créant des ados. Ces buttes inclinées vers le sud prenaient appui contre les murs les mieux exposés. Elles étaient mises en culture en premier, dès le mois de février.

Cour : dans le cas d’une cour ou d’un patio, plu-

sieurs murs contribuent à abriter du vent et à piéger la chaleur. Le revêtement du sol, souvent

Murs : traditionnellement, les murs bien orientés

servaient à palisser des fruitiers délicats, comme les abricotiers ou les pêchers. Les célèbres murs à pêches de Montreuil, en banlieue parisienne, fournissaient, au x1x*siècle, une production abondante qui s’exportait jusqu’en Russie. Le Potager du Roi, à Versailles, est probablement

le jardin

minéral dans ce cas, contribue également à accu-

muler de la chaleur. Toutefois, cet effet bénéfique est limité par l'ombre portée des murs. Mais une cour bien exposée pourra accueillir des végétaux ou des fruitiers délicats, comme des figuiers au nord de la Loire.

Les murs à pêches de Montreuil” En Europe, entre le xvr: et le xx‘ siècle, une multitude de petites fermes urbaines se sont spécialisées dans la production de fruits et de légumes de climat méditerranéen. Installées jusqu'en Angleterre et aux Pays-Bas, ces

fermes assuraient une telle production grâce à des designs astucieux et àla création de microclimats favorables au développement de ces cultures particulièrement exigeantes en lumière et en chaleur.

Dans cet esprit, la culture de pêches s’est considérablement développée en France, à Montreuil, à partir du ,

»

.

5

|

;

zvir siècle. Chaque parcelle étroite et allongée était orientée selon un axe nord-sud et bordée d’un mur de 2,70 mètres de haut, épais de 55 centimètres à sa base et de 25 centimètres à son sommet, recouvert de plâtre

s. et protégé par un jeu de toitures amovible ?

Les pêchers étaient installés au plus près des murs, profitant clos du micradlimet favorable que ces derniers

Engendraient. En journée, les murs reflétaient ne partie de 1 énergie solaire qu ils recevaient sous forme de

lumière qui bénéficiait alors aux arbres, tandis qu une autre partie de cette énergie était stockée sous forme dans la parcelle. Le design ainsi créé permettait d'atteindre des de chaleur, progressivement diffusée la °Cnuitsupérieures à la température ambiante. Des paillassons déroulants températures intraparcellaires de 8 à 12 s, toitures amovibles les préservaient des pluies. des et froide trop nuits des arbres venaient protéger les

Conduit en espalier à partir de deux branches charpentières guidées en oblique, chaque pêcher pouvait couvrir jusqu’à 12 mètres linéaires de mur et produire, chaque année, 400 kilos de fruits.

A Ce pêcher profite de la chaleur accumulée par un mur du Potager du Roi, à Versailles, qui présente une collection unique au monde d'arbres fruitiers conduits selon des formes complexes, destinées à donner une

production maximale

dans lespace contraint d’un jardin urbain.

149

150

PARTIE Ill DESSINE-MOI

UNE

FERME, LE DESIGN

PERMACULTUREL

> Cette petite plage créée devant notre chaumière est bordée d’une palissade de rondins de châtaignier, formant un fer à cheval orienté vers le sud. Elle constitue un excellent piège à chaleur, tout en abritant

ce petit havre de paix du vent et des regards.

> Ces gravures datant de 1835 montrent que

les paysans d'autrefois savaient parfaitement créer

des microclimats. À gauche,

une haïe en fer à cheval abrite des moutons ; à droite, des rideaux

d’arbres protègent du vent des vergers.

RER ES À RQ > F Si 2 mn LIRTR

=

ANNE

L’accumulation de chaleur dans un matériau n’exerce son influence que sur une zone réduite, quelques centimètres à quelques décimètres le plus souvent. Le fait d’abriter du vent permet

d'augmenter cette influence bénéfique sur une distance plus grande. Toutefois, en hiver, le vent

limite la formation du gel en brassant l’air et une courette peut alors devenir une poche de gel.

Arbres, formes et reliefs : tout aménagement adoptant peu ou prou la forme d’un fer à cheval ouvert vers le sud pourra concentrer la chaleur et abriter du vent. Il peut s’agir d’une butte, d’une portion de jardin entourée d’un talus ou d’une rangée d’arbres, comme le montrent les illustrations ci-dessus. VENT Le vent augmente la fraîcheur apparente de l'air. Lorsqu'un fluide tel que le vent est contraint par un relief qui rend sa zone de circulation plus étroite, son déplacement est accéléré. Ce phénomène est baptisé “effet Venturi”. Cela peut être le cas entre deux collines, mais également entre des immeubles.

Le vent favorise l’évaporation de l’eau. Cette propriété, fort utile pour sécher le linge, assèche également la végétation et le sol. Le vent contribue à assainir les feuillages car trop d’humidité ou de confinement favorise l'apparition de maladies cryptogamiques. Mais les végétaux Soumis au vent, surtout s’il est sec et chaud, ferment leurs stomates, les petits pores présents à la surface des feuilles, pour conserver leur eau. Ce faisant, ils arrêtent les échanges

gazeux avec l'atmosphère et donc la photosynthèse et leur croissance. Trop de vent nuit donc aux cultures. Des vents réguliers freinent également la croissance des arbres.

Les applications de ces principes sont diverses.

Une serre gagnera à être implantée dans l’axe des

vents dominants, sa ventilation n’en sera que meil-

leure. Une maison perdra moins de chaleur si elle présente son pignon aux vents dominants plutôt

que sa façade.

CHAPITRE 15

pans votre design, cherchez à bien gérer les vents. si possible, positionnez les éléments du bâti de manière à protéger le jardin. Une maison, une grange, un poulailler, une serre : chaque construction peut y contribuer. Veillez à ne pas créer un

effet Venturi : évitez de disposer vos constructions en entonnoir.

Une fois positionnés les éléments les plus importants, voyez si votre dispositif a besoin d’être renforcé. Des murs, des palissades peuvent faire obstacle au vent. Dans de nombreuses régions du

monde, le potager domestique, qui constituait la

seule source de légumes et jouait un rôle essentiel

dans l’économie familiale, bénéficiait de soins tout particuliers. Il était généralement clos de murs des

quatre côtés, ces murs étant parfois ceux de la mai-

son ou des petits bâtiments ruraux : réserve à ou-

tils, cellier, soue à cochon... Les plantes cultivées,

les animaux et les humaïns bénéficiaient tous du microclimat de cette zone 1.

Les arbres et les haies peuvent jouer un rôle de

brise-vent efficace. Vu leur importance, nous

traiterons de cette thématique au chapitre 65,

p. 669.

GEL Nous avons parfois une perception négative du geL Les gels hivernaux ne posent pas de problème,

au contraire (sauf pour les canalisations qu’il faut penser à protéger ou à purger !). Le gel assainit la

végétation et détruit certains parasites. Les végétaux autochtones y sont adaptés. Certains en ont besoin pour leur mise à fruit ou pour déclencher la germination de leurs semences.

Ce sont les gelées tardives qui posent problème.

En Normandie, elles peuvent survenir jusqu’en

mai (les fameux “saints de glace”), alors que les

NGEPTS DU DESIGN PERMACULTUREL

LES CO

15]

fruitiers sont en pleine floraison et que les cultures estivales sont déjà implantées. Les dégâts peuvent

être importants. Une seule gelée tardive impor

tante peut ruiner une année de récolte de fruits aux gels hiveret de petits fruits. Contrairement au-dessous peine à d descen mètre thermo le naux, certains mais s, tardive gelées ces de lors de zéro végétaux y sont très vulnérables. Vous serez alors récompensé de toute Patten-

tion que vous aurez portée aux microclimats. Le

fait que le gel soit faible donne à chaque mesure

adoptée une efficacité certaine. Votre serre Sera positionnée dans le meilleur emplacement. Vous

n’aurez pas implanté les plantes fragiles dans les

poches de gel. Vous les aurez abritées.

Le gel intervient en premier au niveau du sol. Si

le froid est intense, il monte progressivement dans la couche d’air au-dessus du sol. Lors des gelées tardives de faible amplitude, du fait de leur

hauteur, des arbres demi-tige ou haute-tige seront moins susceptibles d’être affectés que des arbres basse-tige. Si votre terrain est régulièrement soumis à des gelées tardives, pensez à cet élément dans le choix de vos fruitiers. De jeunes plants posés sur des tables seront également moins exposés que s’ils sont posés au sol.

Les plantes souffrent davantage du dégel que du gel, lorsque les cristaux de gel qui se sont formés dans leurs tissus fondent. Un dégel lent est donc préférable. De ce point de vue, une orientation sud-ouest est préférable à une orientation sud-est car elle ne bénéficie pas du soleil du matin. Pour des cultures sous serre, lorsqu’il a gelé pendant la nuit, mieux vaut ouvrir les portes assez tôt le matin

afin de ralentir le réchauffement de la serre, qui

peut être très rapide lors des matinées claires et ensoleillées qui accompagnent l’air froid. a,

LCI

a

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SE

< Jean-Pierre et Jean-Claude,

en charge depuis de nombreuses années de l'entretien de la ferme,

construisent au printemps 2018

une série de bacs surélevés dans

la serre, destinés à accueillir le “jardin créole”. Ils sont faits de fortes planches de châtaignier, un bois relativement imputrescible, enfoncées d’une vingtaine de centimètres dans le sol et reliées entre elles, à l’intérieur, par un fer

plat cintré, vissé dans chaque latte. Outre leur intérêt esthétique et le confort de travail qu’ils procurent, ces bacs soustraient les végétaux

à l'emprise des premiers gels qui

surviennent au niveau du sol.

152

PARTIE

Il

DESSINE-MOI

UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL

Rappelons que le vent, en brassant lair, limite le gel qui intervient plutôt durant les nuits calmes, au ciel clair.

Dans les régions de plaine, si votre terrain est tout plat, vous n’aurez probablement pas de poche de gel mais celui-ci peut s’étendre sur la totalité de votre espace. En conclusion de cette partie sur les microclimats, vous avez pu constater que de multiples facteurs se

combinent. Nous sommes dans une approche fine, complexe - ce qui ne signifie pas compliquée -, reposant sur l’observation et l’expérimentation.

Par petites touches, vous saurez affiner au fil des ans votre design, en vous adaptant intelligemment à la nature. A Le soleil est le grand moteur de notre ferme. Cette

photo montre un poirier basse-tige planté au sommet d’une butte permanente

portant une association de laïtues et de choux,

dans le jardin mandala.

ÉTAGEMENT

Au sein des milieux naturels, la végétation est

presque toujours étagée. Dans une forêt, on peut facilement observer trois étages : les arbres, les buissons et la strate herbacée. Les arbres poussent

partout où l’eau est présente, tandis que l’herbe s’adapte à des conditions plus sèches.

Sous nos climats d'Europe, la végétation spontanée est la forêt, un système étagé hautement productif. Pourtant, notre agriculture se pratique presque exclusivement “à plat”, en deux dimensions, et privilégie les plantes herbacées originaires d'Asie Mineure, au climat plus sec (voir le chapitre 1, p. 25). En s’écartant de l’organisation étagée qui prévaut dans les milieux naturels, l’agri-

culture contemporaine se prive d’un fort potentiel de productivité.

v Les zones humides produisent une biomasse importante.

La productivité de différents milieux met en évidence l’avantage des systèmes étagés.

tropicales uniquement par certaines cultures é. irrigu riz le ou comme la canne à sucre On peut noter que la biomasse produite par une forêt tempérée est en moyenne 2 fois plus importante que celle d’un champ cultivé. Les systèmes étagés naturels partagent efficacement Ja ressource lumineuse. Dans les forêts caduques des latitudes tempérées, au printemps, la strate herba. cée voit ses feuilles pousser en premier, puis vient le tour des buissons et enfin des arbres. L’agroforesterie est une élégante imitation des milieux naturels ; la forêt-jardin permet d’aller

plus loin encore. Dans un jardin vivrier, l’étagement des diverses familles de légumes est une mise

en œuvre du même principe, il permet de gagner

en productivité (voir le chapitre 43, p. 419).

Lorsque plusieurs espèces végétales sont associées, la récolte totale ne sera pas égale à la somme des récoltes qu’aurait données chaque espèce cultivée séparément sur la même surface. Mais la récolte totale sera généralement plus importante qu'une monoculture. Par exemple, “l’expérimentation de INRA sur un système blé-noyers à Restinclières (Hérault) a montré qu’une parcelle agroforestière de 100 hectares pouvait produire autant de biomasse (bois et produits agricoles) qu’une parcelle de 136 hectares où arbres et cultures auraient été

séparés, soit un gain de 36 %. Cette intensification de la production résulte d’une meilleure utilisation des ressources naturelles du milieu : la lumière,

Peau et les engrais sont prélevés plus efficacement grâce à un étagement des cultures, des systèmes racinaires de profondeurs variées, une occupation du sol permanente...”

Il convient de noter que la fourchette haute de la productivité des champs cultivés est atteinte

Les systèmes étagés comportent davantage de niches écologiques que les monocultures et les services écosystémiques rendus par ces milieux complexes sont plus diversifiés et plus intenses. Un système étagé peut inclure des animaux

PRODUCTIVITÉ

ÉCOSYSTÈMES

DE

QUELQUES

ÉCOSYSTÈME

FORÊT TROPICALE FORÊT CADUQUE TEMPÉRÉE

(EN

PRODUCTIVITÉ

GRAMMES

DE MATIÈRE

TYPES":

PRIMAIRE ORGANIQUE

NETTE SÈCHE/M2/AN)

MOYENNE

MINIMU / MAXIM UM M

2 200

1000 / 3 500

1200

600 / 2 500

ARBRES OÙ BUISSONS ÉPARS

700

250 / 1200

PRAIRIE TEMPÉRÉE

600

200 / 1500

CHAMPS CULT IVÉS

650

100 / 3 500

(TOUS

(TOUS

CLIMATS)

CLIMATS)

CHAPITRE 15

d'élevage. Les prés-vergers associent des arbres

fruitiers et des animaux. Sous certaines conditions,

des poules, des cochons, des moutons peuvent pâturer ponctuellement dans une forêt-jardin. ll est intéressant de constater que les systèmes agroforestiers traditionnels, de type pré-verger,

LES CONCEPTS

DU DESIGN PERMACULTUREL

Dans nos jardins et nos fermes, contrairement aux fermes classiques qui restent le plus souvent au stade “terre nue”, nous allons mettre en une un processus similaire qui peut prendre de multi-

ples formes. L'association “arbres + animaux” peut représenter un stade final satisfaisant. D’autres

ont été mis à mal par l’industrialisation de l'agriculture, mais également par les mesures de la pac (Politique agricole commune) qui ne reconnaissait

portions de territoire peuvent suivre des cycles

et subventionnait l’arrachage des arbres fruitiers.

Au potager, nos associations de cultures déclinent aussi ce principe, lorsque nous associons un légume à cycle long et un ou plusieurs légumes à

qu'une seule fonction possible à une terre agricole

Ceci souligne la dépendance de l’agriculture aux

systèmes économiques et politiques.

Dans une démarche permaculturelle, le facteur

temps est pleinement intégré. Nous travaillons

dans le long terme et prenons en compte l’évolution de notre système. Bien évidemment, en premier lieu ce sont les vé-

gétaux qui évoluent. Nous avons vu que nous cher-

chons à favoriser un système fondé sur les arbres et les autres plantes pérennes plutôt que sur les plantes annuelles, comme

décalés pour maintenir une production de légumes annuels.

cycle court (choux, salades et radis, par exemple).

SUCCESSIONS

dans la nature où ces

dernières ne représentent qu’une faible proportion des végétaux. Mais les arbres demandent du temps pour pousser et devenir productifs.

L'évolution de notre jardin se fera probablement en phase avec celle de notre vie humaine. Jeunes,

nous déploierons une grande énergie pour mettre en place notre installation et cultiver majoritairement des légumes annuels. Avec les années, nous travaillerons moins dur et récolterons davantage de fruits, de légumes vivaces et de plantes sauvages. Notre expérience du monde naturel s’enrichira à mesure que notre petit bout de terre gagnera en complexité. Cette évolution de nos pratiques favorisera la contemplation et la gratitude qui sont souvent la marque d’une fin de vie accomplie... Je l'espère, du moins !

Notre désir d'accompagner le mouvement de la vie

s’exprime de multiples

façons. Ainsi, nous

suivons la tendance naturelle des espaces ouverts à retrouver la

grande forêt des origines en plantant de nombreux arbres fruitiers.

Sous les latitudes tempérées, les grandes catégo-

ries de végétaux se succèdent naturellement selon

le schéma général :

Terre nue + plantes herbacées annuelles

? plantes herbacées vivaces > buissons et arbres pionniers > forêt jeune > forêt mature.

L4

"hi

TERRE À NU

“SRICULTURE ANNÉES

PRAIRIE PLANTES ANNUELLES PIONNIÈRES

153

C7 RE

ARRUELLES ANNVACES,

PRÉ-FORÊT PETITS ARBRES, ARBUSTES

JEUNE FORÊT

5

10

50

FRICHE

7 VESONS

SUCCESSION VÉGÉTALE EN CLIMAT TEMPÉRÉ

FORÊT MATURE

100

154 PARTIE II! DESSINE-MOI UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL LISIÈRES

Dans la nature, on peut observer que les lisières

entre deux écosystèmes sont généralement plus productives que le cœur de ces écosystèmes. La

rencontre entre une forêt et une prairie offre les

bénéfices du système étagé et l’accès à la lumière. La végétation y est dense et les espèces animales et végétales nombreuses.

L’'INTERFACE TERRE-EAU La zone d’interface entre un milieu aquatique aux eaux peu profondes et la terre est souvent hautement productive. Sous toutes les latitudes, les eaux peu profondes représentent les zones les plus fécondes car les végétaux y bénéficient d’un accès direct aux trois éléments essentiels : la lumière, la terre et l’eau. Un estuaire d'Europe peut atteindre la productivité d’une forêt tropi-

cale. Partout dans le monde, les estuaires, mangroves, marais, récifs et herbiers côtiers forment

des espaces majeurs en matière de biodiversité et de productivité.

Traditionnellement, les paysans ont su recréer à leur profit des systèmes comprenant de nombreuses lisières. Ils ont parfois joué sur l’interface terre-eau pour créer des jardins maraîchers bénéficiant, comme les plantes aquatiques, de la présence d’un sol riche en matières organiques, de la lumière et de l’eau. Les hortillonnages d'Amiens sont des jardins lacustres qui ont vu le jour dès l’époque gallo-romaine. Ils abritent toujours quelques maraîchers et il y a fort à parier que l'essor de l’agriculture urbaine leur offre un nouvel avenir.

» Hors contexte, il serait

bien difficile de situer

nos îles-jardins : s'agit-il des jardins tropicaux

d’une ethnie reculée ? d’une forme de land art ? L'ensemble formé par les îles et par la forêt-jardin est tout à la fois une oasis de biodiversité, un

puits de carbone et un

agroécosystème hautement productif et durable.

DES FRONTIÈRES COURBES

s”, il est Pour optimiser l'effet “lisière

|

souhaitable

à surface égale d'utiliser des formes courbes qui, augmentent la longueur du périmètre et donc les rondes zones d’interface, plutôt que des formes

ou carrées.

Pour augmenter la pénétration entre deux milieux,

une transition douce est préférable. Elle facilite l'accès à la lumière d’un plus grand nombre de végétaux et offre davantage de niches écologiques,

Sur le plan esthétique, nos jardins et nos fermes

gagneront également à adopter ce principe formes courbes et imbriquées. Dans certains toutefois, il n’est pas souhaitable d'augmenter zones d'interface. Nous avons Souvent noté

des

cas les que

les bordures de nos jardins, lorsqu'elles sont au contact d'espaces enherbés, sont plus envahies par la flore spontanée et visitées par les limaces. Un jardin potager gagnera donc à avoir un périmètre bien circonscrit.

Nous pouvons noter que cet “effet métissage” est

vrai également sur le plan culturel. Les sociétés hu-

maines gagnent à se frotter les unes aux autres et les rencontres favorisent une créativité pétillante.

En conclusion de ce chapitre, vous avez pu constater que les éléments à prendre en compte dans un design sont nombreux, mais rien n’est compliqué pour autant. Pour ne pas se noyer toutefois dans la complexité de la démarche, les chapitres suivants vous proposent une méthode de design pas à pas, qui peut s’appliquer à des installations de toutes tailles.

Ait ab.

CHAPITRE

15

LES CO

NGEPTS DU DESIGN PERMACULTUREL

4 La tombe de l’artisan égyptien Sennedjem, qui vivait sous le règne de

Ramsès II, abrite depuis 3 200 ans cette fresque étonnante et pleine de vie. Elle représente une sorte d’île-jardin

en bordure du Nil. On y voit Sennedjem et son épouse Iy-Neferti moissonnant le blé à l’aide d'une

faucille de boïs, en prenant soin de laisser les tiges pour nourrir leur bétail, avant de se restaurer. Plus

bas, le couple récolte du lin pour confectionner ses vêtements.

Puis Sennedjem laboure avec un araire tiré par deux vaches tandis que

Iy-Neferti sème les graïns. Le bas de la fresque montre un verger fleuri bordé

À

Ne S) 2

LS

de canaux. Quand on vous dit que

la permaculture n’a rien inventé !

Les chinampas Au Mexique, les Améridiens, à l’époque précolombienne, ont aménagé des systèmes maraîchers hautement productifs au sein des lacs et des cours d’eau peu profonds. Ils pouvaient prendre la forme de radeaux formés

d'empilement de matières végétales et d’alluvions fertiles, entourés de branchages tressés, Ils ont créé un sol artificiel portant des jardins et des étables flottantes. Ces chinampas étaient souvent plantées sur leur périphérie

d'arbres et de végétaux adaptés au milieu aquatique, à croissance rapide, fréquemment coupés pour fournir de la biomasse. Les chinampas étaient constamment fertilisées et portaient une grande diversité de végétaux cultivés, Elles ont permis de nourrir durablement des populations très nombreuses. Les hortillonnages et les inc : ñ : 14 : hinampas nous ont inspiré le design de nos îÎles-jardins.

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155

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« Consacrer tant d'efforts

à créer la ferme de ses

rêves aurait-il du sens si

16

nous ne savions qu’elle pourra servir de refuge

aux générations à venir ?

Fénoua, notre quatrième

L'ESPRIT D'UN DESIGN PERMACULTUREL

fille, cueille des fleurs de

glycine sous la tonnelle qui mène à la petite serre du jardin familial.

Ton activité quotidienne doit avoir un rapport direct avec la manière dont tu te nourris,

tu Phabilles, tu P’abrites. II ne faut pas que des personnes que tu ne connais pas, et qui n’ont

avec toi qu’une relation économique, te fournissent ces biens-là, parce qu’alors cela devient

anonyme et complètement dévitalisé. S’il n’y a pas de rapport entre la vie que les gens mènent

et ce qu’ils mangent le soir, s’il n’y a pas de relation entre ce qu’ils font dans la journée et la maison dans laquelle ils dorment, ils sont comme aliénés de leur propre environnement, il leur manque des liens.

Si on vit dans la nature, on n’a pas besoin de toute cette technologie, on n’a pas besoin non plus de travailler aussi fort". Aigle Bleu Après avoir évoqué les concepts du design permaculturel, intéressons-nous maintenant à la dé-

marche de conception en elle-même. Ce chapitre porte sur l’esprit d’une telle démarche, tel que

nous le vivons au Bec Hellouin, il est donc assez

personnel. Le chapitre suivant traite de la mise en pratique.

FAIRE ALLIANCE

AVEC

LA TERRE

L'intention que nous mettons dans notre projet est déterminante. Notre objectif premier est, comme l’écrivait Patrick Whitefeld, de “faire par-

tie des solutions plutôt que des problèmes”. On conçoit son jardin et sa ferme avant tout pour soi, mais la prise en compte du bien-être des générations futures est pleinement intégrée.

De ce fait, le permaculteur ne se positionne pas comme le font la majorité des citoyens du monde moderne, inspirés par la culture occidentale. Dans

leur rapport au monde, ces derniers donnent géné-

ralement la priorité à la dimension économique, à la maximisation du profit individuel.

Ceci se traduit trop souvent par des réalisations un usage à purement utilitaristes, conçues pour et la dutique court terme, qui sacrifient l'esthé

rabilité pour des questions de coûts. Lorsqu'ils

Homo saprennent possession d’une terre, les à la vioce piens occidentalis ont souvent tendan

lenter, plaquant sur elle des projets qui ne sont

pas forcément en phase avec l’esprit des lieux. En témoignent ces marées de zones pavillonnaires standardisées et ces zones commerciales

hideuses qui stérilisent les terres agricoles autour des villes.

Ce choix d’équipements à bas coût, énergivores et peu durables, est en partie lié au fait que nous avons perdu les compétences qui permettent de comprendre et de valoriser la terre et les ressources

biologiques locales. L’Occidental est aujourd’hui le plus souvent bien incapable de construire lui-

même ses outils, sa maison et de cultiver sa terre. Il consacre ses jours à l’exercice d’une profession définie et achète à d’autres tous les biens et services nécessaires à sa survie, La permaculture propose justement de se réapproprier ces savoirs et d’en développer de nouveaux.

Le permaculteur se positionne comme un gardie n des lieux. Il n’est pas inutile de rappeler que la permaculture s’est nourrie de la pensée des peuple s premiers, en particulier des Aborigènes d'Aust ralie. En nous installant sur un lopin de terre, nous

sommes conscients que ce lieu est riche d’une histoire qui se compte en millions d'années. La terre

était là avant nous et elle sera encore là après notre

départ. Les quelques années où décennies de notre

Occupation sont l’occasion de veiller sur elle avec bienveillance, en l’embellissant, en enrichissant son potentiel,

158

PARTIE

Ill DESSINE-MOI

UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL

Notre époque est caractérisée par des changements ultrarapides. La plupart d’entre nous sont déstabilisés par la perte de leurs racines. Nous ne vivons plus sur la terre de nos ancêtres, mais occupons un

lieu dont, le plus souvent, nous ignorons le passé proche et lointain. Nous ne connaissons pas son

sol, ni les végétaux et les animaux qu'il abrite, pas plus que l’histoire des familles qui vivent autour de nous. Nous ignorons ses ressources naturelles et, si tant est que nous les connaissions, nous se-

rions bien incapables d’en tirer profit. Les peuples premiers disent que nous flottons à la surface de la terre comme des bateaux à la dérive. Ce manque d’ancrage induit une insécurité intérieure, une instabilité des individus comme des sociétés.

Mais on peut également voir quelques aspects positifs dans cette rupture du lien avec la terre : ce

vide béant est une invitation pressante à inven-

“Il y a un lien entre le simple fait de cultiver et consommer notre nourriture et la question plus vaste de cultiver un monde plus pacifiques.” Dena Merriam

> Une ferme permaculturelle est une sorte de laboratoire où s’invente le monde de demain. Elle produit des connaissances utiles à l'humanité. Les explorateurs

de l’avenir s’y retrouvent et partagent leurs visions, leurs savoirs, leurs petits trucs pour habiter la Terre d’une manière plus douce...

ter une nouvelle forme d’alliance. La perte d’un ancrage local s’accompagne d’une ouverture au global. L'humanité est en train de développer une conscience chaque jour plus aiguë de lPimportance de protéger la Terre, ce qui nous mène à imaginer de nouveaux styles de vie. Notre époque offre également, dans de nombreux pays, davantage de

possibilités de choix que par le passé et donc davantage de liberté et de tolérance. Chacun de nous

peut, s’il le souhaite ardemment, choisir le lieu où

activités qu’il il va vivre, la nature de sa maison, les e phase avec en mond rt va pratiquer et un rappo au s. ation aspir ses et ue son éthiq Nous sommes donc dans une posture certes incon fortable, mais hautement passionnante : il nous appartient d'inventer notre vie. Et pour cela, force

est de reconnaître que disposer d’un petit lopin de

terre est un atout indéniable.

Une personne qui se met en quête d’une terre en attend beaucoup. Chercher un lieu et s’y installer, ou bien reconsidérer l’usage que nous faisons du lieu que nous habitons déjà, est un processus complexe qui nous engage fortement. Puisque l’on

investit dans l’aménagement d’une terre des an-

nées de sa vie et beaucoup d’argent, même si l’on démarre modestement, autant mettre toutes les chances de son côté pour que cette aventure soit

upe pleine réussite !

L'objectif d’un design permaculturel est d’aboutir à une réalisation qui soit en phase avec le site, mais aussi avec nos aspirations, nos com-

pétences et nos moyens. C’est un processus éminemment

personnel, qui se déroule en grande

partie à l’intérieur de nous-mêmes. Dans les paragraphes suivants, nous allons nous intéresser aux conditions qui vont nous permettre de mener cette maturation dans les meilleures conditions.

£

CHAPITRE 16

L'ESPRIT DES LIEUX, LES RÊVES DES ÊTRES HUMAINS

Tout au long du processus de design, notre atten-

tion est dirigée vers la terre qui nous accueille. Nous allons chercher à l’écouter, à comprendre ses potentialités comme ses faiblesses.

Mais dans le même temps nous nous plongeons

dans une écoute profonde des personnes qui vont habiter cette terre : nous-mêmes et ceux qui éven-

tuellement partagent notre vie, ou bien les occu-

pants des lieux si nous réalisons un design pour autrui.

Le processus de design prend donc en compte tant le lieu que ceux qui l’habitent, en vue d’aboutir à un projet commun. Il s’agit d’une cocréation mettant en musique les potentialités de l’humanité et de la nature. Il s’agit de recréer la profonde harmonie qui devrait unir les humains et la terre. Ce qui est bon pour la terre l’est également pour nous et réciproquement. En soignant la terre, nous nous soignons aussi : chaque personne qui veille avec bienveillance sur une parcelle du monde vivant exerce une influence bénéfique sur la totalité de ce monde vivant. Le jardin vivrier et fleuri d’un modeste pavillon de banlieue embellit la Terre entière ! Il peut suffire à donner sens à une vie.

PENSER

COMME

LA NATURE

Mais pourquoi tant de réalisations mal accordées et dissonantes ? Probablement parce que cette

écoute profonde de l'esprit des lieux et des rêves des humains n’a pas été réalisée. Mais aussi parce

que le processus de création fait appel à des apti-

tudes diverses que nous n’avons pas été habitués à déployer. Créer un design heureux est comme

faire du pain ou de l'informatique : cela s’apprend. Comprendre le monde et s’y situer est pour un être

humain une question difficile. Comme la nature est bien faite, elle nous a dotés pour cela de deux qualités différentes et complémentaires : lintuition et la raison.

Notre cerveau est divisé en deux hémisphères. Les

découvertes en neurosciences donnent à penser que le cerveau droit serait plutôt le siège de l’intuition, de la pensée holistique, capable d’appréhender la globalité, tandis que le cerveau gauche serait celui de la raison analytique, capable de d’invenConceptualiser, de penser l’abstraction,

Nos dons ter un langage et de faire des maths.

et nos artistiques seraient plutôt hébergés à droite reprendre Pour gauche. à aptitudes scientifiques

dans la pensée les concepts orientaux, on peut voir

yang analytique l'expression du principe masculin €t dans l'intuition celle du principe féminin yin.

mm

A 2 si Ces divisions sont forcément réductrices, l’im :

Portant est de savoir que chacun de nous dispose

L'

ESPRIT D'UN DESIGN PERMACULTUREL

159

de ces deux qualités et qu’il convient de ne pas les opposer, mais plutôt de mettre à profit Feu complémentarité. Dans le processus de design permaculturel, nous avons tout autant besoin de l'intuition que de la raison. Il n’est pas inutile de

consacrer quelques minutes à mieux comprendre ces capacités.

Face à la complexité du monde, la pensée analy-

de tique, que le physicien Fritjof Capra qualifie

“mécaniste’”, propose de le simplifier en le découis0pant en segments et d'étudier chaque segment un à sser s'intére de aisé plus effet en est Il lément.

petit bout du monde qu’à sa totalité. Les sciences ont précisément pour objet de comprendre et d’expliquer de manière rationnelle chaque aspect du cosmos. L’essor des sciences a rendu nécessaire la création de disciplines de plus en plus nombreuses. Comprendre un jardin peut nécessiter de faire appel aux compétences d’un géologue, d’un pédologue, d’un paysagiste, d’un écologue, d’un agro-

A Les études scientifiques

nome, d’un microbiologiste, d’un climatologue,

d’un ornithologue, d’un entomologiste, et pour-

menées dans notre ferme, auxquelles a participé Morgane, ici plongée dans

urbaniste. Mais rien ne garantit qu’ils sauront faire pousser des légumes !

quoi pas d’un sociologue, d’un économiste et d'un

une intense concentration,

ont pour but de donner un socle objectifà nos

Connaissez-vous consultant?

l’histoire du berger

et du

Un berger fait paître son troupeau au bord d’une route lorsqu'une grosse voiture s’arrête. Un homme en descend, sûr de lui, bien habillé. Il toise le berger et lui déclare :

- Si je vous dis combien de moutons il y a dans

votre troupeau, vous m’en donnez un ? Le berger marmonne dans sa barbe : - Je voudrais bien voir cela ! — Vous avez 528 moutons.

Le berger ouvre des yeux ronds.

- Comment avez-vous fait ? - Facile ! J'ai calculé la superficie du terrain occupé par votre cheptel et multiplié par la densité moyenne de moutons au mètre carré dans votre région. C’est mon métier, je suis consultant. L'homme s’empare du premier animal venu et entreprend de le charger dans son coffre. - Ben... Ÿ a juste un problème, dit le berger. - Quoi ?

- C’est mon chien que vous embarquez ! Le développement des connaissances est une op-

portunité extraordinaire pour mieux comprendre le monde, mais cet essor de disciplines chaque année plus nombreuses s’est souvent accompagné d’une perte de la vision globale. La masse de

connaissances que doit acquérir chaque scientifique spécialiste d’une discipline risque de l’enfer-

mer dans son domaine d’expertise, Le monde est

découpé en rondelles comme un saucisson.

intuitions, tirées de

l'observation de la nature.

“Chaque être humain a

le devoir sacré de veiller sur la santé de notre

Mère la Terre, parce que c’est d’elle que provient toute vie. Afin

d'accomplir cette tâche,

nous devons reconnaître

l'ennemi - celui qui se

trouve à l’intérieur de chacun d’entre nous. [...] Nous ne pouvons plus sacrifier le bienêtre des générations

à venir à la recherche du profit immédiat.” Leon Shenandoah,

Iroquois

160

PARTIE 11 DESSINE-MOI UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL L'intuition favorise la compréhension des réseaux et des échanges. Utiliser notre intuition nous conduit donc à penser le monde dans toute sa ri. chesse et à créer des systèmes fonctionnant en

boucle, en réseau, à l'instar d’Internet.

La culture française, depuis Descartes et le Siècle et des lumières, a encensé la pensée analytique considéré bien souvent qu’elle représentait Ja seule approche valable. La société occidentale af. fiche sa croyance dans la supériorité des sciences

sur les arts, de l’action sur la rêverie, de l'efficacité sur le gratuit, de l’avoir sur l’être.. Peut-être est-ce le signe d’une domination séculaire des hommes sur les femmes ? Notre monde serait-il si âpre et désenchanté si nous laissions le principe féminin s'exprimer ?

A Nous avons proposé plusieurs années durant une formation intitulée “Créer avec la nature”, durant laquelle notre ami Marc Grollimund invitait les stagiaires à créer ensemble un mandala éphémère. En glanant des végétaux dans les jardins, les participants donnaient vie à des œuvres naturelles d’une émouvante beauté.

“Lorsque nous renouons avec la nature une relation que nos ancêtres ont vécue durant longtemps, nous Pabordons sous un éclairage nouveau [...].

Les connaissances scientifiques que nous avons acquises doivent être équilibrées par notre conscience plus artistique, intuitive et créative. Ilyaun équilibre à trouver entre science et art dans notre manière de cultiver la nourriture.” Dena Merriam

La pensée analytique, mécaniste, envisage les processus naturels comme des suites de relations de cause à effet. Elle peine à percevoir la toile de relations extrêmement dense qui relie les composants d’un système. Au contraire, elle tend à engendrer des systèmes linéaires. La simplification outrancière des agrosystèmes est le résultat d’une prise de pouvoir de la pensée scientifique et de l’agronomie sur les paysans. L’intuition est capable d'appréhender des systèmes hautement complexes dans leur globalité. Elle est au-delà des mots et de la pensée. Les perceptions intuitives peuvent être rapides comme des flashs. Elles nous permettent d'accéder, en une fulgurance parfois, à une compréhension profonde des personnes et des lieux. L’intuition peut être perçue comme une reliance à des champs d’énergie et d’informations qui unissent les êtres, un niveau subtil non encore expliqué par les sciences rationnelles.

MARCHER SUR SES DEUX PIEDS La plupart d’entre nous utilisent principalement l’un ou l’autre mode d’appréhension du monde.

Ceci peut être fondé sur des croyances héritées

de notre éducation car nos écoles privilégient les “sciences

dures”

et laissent trop souvent

sur le

bord de la route les personnes plus sensibles.

Nous prônons l’intégration en nous-mêmes de ces deux pôles, le masculin et le féminin, l'alliance

de l’analyse et de l'intuition. Un bon design permaculturel devrait faire appel tant à nos talents créateurs et artistiques qu’à nos capacités d’analyse. Toutefois, que ceux qui peinent à équilibrer en eux ces deux polarités se rassurent : ils peuvent faire appel à des personnes aux talents complémentaires des leurs. Une pluralité de regards est toujours un enrichissement. Le processus de design doit se fonder sur différents registres : des temps yin d'écoute profonde et silencieuse, nos antennes déployées. Mais aussi

CHAPITRE

16

L L'ESPRIT D'UN DESIGN PERMACULTURE

161

des temps Jang d'analyse de données, suivis de »

£

.

propositions.

pour avoir formé et accompagné au design permaculturel des centaines de permaculteurs en herbe,

nous constatons que les résultats des premiers travaux SONT parfois “tièdes” car les apprentis designers ne vont pas assez loin dans chacune des deux directions : leurs analyses restent superfi-

cielles et ils n’osent pas déployer leur créativité.

pevenir conscient de l'importance des deux pôles,

e libérer” dans chaque registre peut nous mener

à la réalisation de designs audacieux et extrêmement pertinents. Il conviendra ensuite de “faire

ses gammes” pour acquérir une expérience.

Rassurez-vous : un design n’est jamais acquis, figé. jisera toujours évolutif, comme la vie. Design and

redesign, disent nos confrères anglo-saxons !

“Il ne s’agit plus de fournir à nos enfants une vie toute faite. mais de leur apprendre, plus modestement et plus durement, à inventer

eux-mêmes leur propre

avenir... [Les jeunes s’adaptent] au grand métier d’explorateurs de avenir, de créateurs de nouveaux continents

d’intelligence’”.” Samuel Pisar

A.

ÉTAPES

PRÉPARATOIRES

17

LE PROCESSUS DU DESIGN La permaculture n’est pas une discipline en elle-même, mais plutôt une approche de conception z Nr est une aventure humaine qui

basée sur l'association de différentes disciplines, stratégies et techniques. Comme la nature, elle utilise et combine les meilleures caractéristiques de tout ce à quoi elle a accès*®

y Créer un design à plusieurs

demande de grandes qualités d'écoute et de respect. On est toujours un peu vulnérable lorsque l’on expose sa vision au regard des autres. Mais quelle joie lorsque les intuitions se renforcent !

Toby Hemenway

Le processus de design peut être envisagé sous la forme de phases successives. Ces phases varient selon les auteurs. sit

À

ie

FN

N

a

Nous avons formulé un protocole qui nous semble simple et complet, présenté sur la page précédente.

164

PARTIE

Ill DESSINE-MOI

UNE FERME, LE DESIGN

PERMACULTUREL

Permettez-nous d’entrer dans les détails tant cette partie nous semble importante, au vu des dizaines

“Je ne connais pas Péchec. Si je ne remporte pas la victoire, j'apprends.” Nelson Mandela

de projets que nous accompagnons de près ou de

vite sur une idée bien arrêtée qui risque de limiter

Le processus de design s’intéresse en premier aux personnes qui portent le projet. Il peut s’agir de

vous vous mettez dans un état de disponibilité inté-

loin.

vous-même

ou d’un collectif : votre famille, un

groupe d’amis, une association... Vous pouvez également être sollicité pour réaliser un design pour autrui. Nous vous suggérons fortement d’avoir acquis une solide expérience avant de vous lancer dans la réalisation de designs rémunérés.

Créer un jardin ou une ferme permaculturelle est avant tout un choix de vie. Votre projet peut comporter une dimension économique, et cet objectif demande à être étudié avec tout le sérieux nécessaire. Mais, le plus souvent, nous attendons davantage de notre jardin : il doit favoriser notre épanouissement et celui de nos proches.

Y Les mains dans la terre,

la tête dans les étoiles : lors d’un atelier pratique, Perrine partage avec les stagiaires en formation à la ferme quelques aspects de son expérience, en vue de

faciliter leur installation.

sus Une séance ne suffit pas, il s’agit d’un proces t dans la durée. L'importan est de ne pas partir trop

Que vous travailliez pour vous-même ou pour autrui, faire émerger le rêve qui motive le projet est d’une grande importance. Or, ce rêve est en partie enfoui dans notre inconscient. La motivation initialement affichée n’est le plus souvent que la partie émergée de l’iceberg. Le temps passé à comprendre vos motivations profondes ne sera certainement pas du temps perdu, bien au contraire : il peut vous éviter de vous engager dans une voie qui

ne vous correspond pas vraiment.

Mettre dans la lumière de la pleine conscience votre rêve nécessite une profonde écoute. Nous vous conseillons de faire le calme en vous, de res-

ter silencieux et ouvert, sans attente, sans jugement. Vous ouvrez alors un espace d’accueil, une “clairière” où peuvent se manifester les aspirations profondes.

le champ des possibles.

Mieux vaut garder les choses ouvertes. Lorsque

rieure, votre subconscient perçoit votre intention et peut laisser remonter à votre conscience des infor-

mations importantes. “Je souhaite ardemment trou-

ver du sens à ma vie et entreprendre une réalisation

qui m’épanouisse et fasse du bien à ceux que j'aime”

est un message fort, qui aura des répercussions en vous-même et dans le monde qui vous entoure. Ce

type de message a le pouvoir de libérer des énergies insoupçonnées.

Lorsque nous nous mettons

dans une intention

juste, cela modifie les champs énergétiques en nous et autour de nous, et suscite généralement

des réponses positives. Il peut s’agir d’un songe qui vous éclaire de façon limpide, d’une rencontre, voire d’une offre de terrain qui arrive juste à point nommé. J’ai personnellement fait l’expérience à de très nombreuses reprises du pouvoir de la pensée positive ! S’accorder à son être profond, tionner un bateau dans la bonne il avance plus vite et avec moins lon est situé à sa juste place, les fluides.

c’est comme posiveine de courant: d’efforts. Lorsque choses deviennent

Mais il se peut aussi que la gestation soit longue, voire difficile. Une gestation n’est pas du temps perdu, même si l’on préférerait “accoucher” rapidement de son projet. Les obstacles s’accumulent

parfois. Il faut rester à l’écoute des messages que

la vie nous envoie, être prêt à reconsidérer les choses, cultiver le lâcher-prise tout en faisant preuve de persévérance. Rien de grand ne s’accomplit sans efforts ni courage. Se faire aider par des amis ou une personne extérieure en qui nous

Si vous êtes à l’écoute d’une autre personne pour l'aider à faire émerger son rêve, durant le premier entretien restez silencieux autant que possible et soyez certain que cette personne percevra votre qualité d’écoute. Abstenez-vous de poser des questions, au moins dans un premier temps, car elles peuvent être limitantes. Contentez-vous

votre chemin de vie.

Ne soulignez pas les faiblesses potentielles de la démarche de votre interlocuteur : laissez-le déployer ses aspirations, le temps de la maturation viendra.

S’il s’agit d’un projet collectif, l'affaire est plus complexe, La plupart des projets collectifs capotent car le rêve de chacun n’a pas été suffisamment formulé.

d’acquiescer, de reformuler de temps en temps.

avons confiance peut se révéler fort utile. Réaliser

un bilan de compétences ou faire appel à un théra-

peute ou à un coach a du sens : ces personnes sont formées à vous accompagner dans la réalisation de

RÊVER À PLUSIEURS

CHAPITRE 17 LE PROCESSUS DU DESIGN 165 La majorité des projets de création d’un écovillage

se soldent par un échec, voire par un procès.

Lorsque l’on aspire à un engagement collectif, il ne s’agit pas que tous partagent le même rêve - ce serait suspect ! Mais il faut permettre à chacun de conscientiser et d'exprimer ses motivations profondes, qui doivent être accueillies sans jugement par les autres - des motivations qui peuvent évo-

luer dans le temps, du reste ! Le fait de partager

ce qui nous motive, ce qui a du sens pour nous, et le fait d’être écouté permettent d'éviter de se décevoir ultérieurement. Les autres prennent acte de nos motivations et nous accueillons les leurs. Ces motivations gagneront à être fixées par écrit

pour réduire la distorsion entre ce que l’on pense, ce que l’on exprime et ce que l’autre entend. Si les décalages sont trop grands à ce stade, chacun est libre de se retirer de l’aventure.

Si les aspirations des uns et des autres semblent

pouvoir s’accorder, passez à la seconde étape :

formuler un projet commun, par écrit pour les mêmes raisons, projet que nous conseillons vive-

ment d'accompagner d’une charte éthique et d’un règlement intérieur. Ces documents formeront la “constitution” du groupe. Ceci peut paraître trop formel et contraignant, toutefois l’expérience montre que seuls les groupes qui se dotent de solides fondations tiennent ensemble dans la durée. Le fait de passer du temps à se mettre d’accord sur un projet commun et à le consigner par écrit peut à

nouveau faire apparaître des divergences, susciter

des tensions : mieux vaut qu’elles apparaissent à ce stade !

Certains refuseront catégoriquement tout cadre ou règlement, c’est probablement le signe d’un manque de structure intérieure et ceci peut faire douter de leur capacité à s’engager dans la durée. L'objet d’un bon contrat est de mettre des mots sur des intentions et des envies, de leur faire prendre

du “corps”, ce qui permet de déminer le terrain en

amont. S’il est bien fait, on a rarement besoin de s’y reporter par la suite. Mais en son absence, l'aven-

ture risque d’être émaillée de malentendus. Si vous n'arrivez pas à vous accorder, ne vous engagez pas ensemble, vous vous épargnerez bien des déboires.

L'EXIGENCE DE CLARTÉ

ferme nécessite énormément de travail, engendre

beaucoup de fatigue et de stress, et il ne fait pas toujours beau à la campagne ! Devenir maraîcher,

c’est adopter l’un des métiers les plus difficiles qui soient. de le D'où l'importance de creuser votre désir et

confronter à la réalité. Est-ce vraiment votre TEve,

celui qui va comme un gant à la personne que vous

êtes, ou bien enfilez-vous le projet d’un autre ? Soyez lucide et exigeant envers vous-même ! Dans

le cas d’un couple, le désir d’un retour à la terre

est-il également partagé par les deux conjoints?

Qu’en pensent les enfants ? Chacun ose-t-il exprimer franchement son opinion, quitte à décevoir

et faire de la peine ? Êtes-vous certain de n’user

d’aucune forme de chantage affectif pour empor-

ter l'adhésion de votre famille ? Si votre projet se construit sur des bases partiellement biaisées, ces

L'AUDACE D’ENTREPRENDRE

grandissent nos enfants,

cuse pour ne pas entreprendre. Soyez audacieux et confiant : lorsque vous vous engagerez dans la voie qui vous correspond vraiment, vous serez capable de déplacer des montagnes.

Un soir de printemps, Rose danse dans le pré-verger...

Mais que cette exigence de clarté ne serve pas d’ex-

Soyez des rêveurs pragmatiques ! Trop de personnes sont déçues par la vie parce qu’elles n’osent pas s’autoriser à rêver, ou bien parce qu’ellesnese

donnent pas les moyens d’incarner leur rêve dans le monde réel. Nous souhaiterions témoigner de l’importance

de cette première étape du design. Au risque de

surprendre ceux qui connaissent la ferme de l’extérieur, au Bec Hellouin nous n’avons pas pris le temps d’accorder nos rêves respectifs. Il s’est ensuivi des décalages entre nous et une réelle souffrance qui ne s’est pas complètement résorbée avec les années. Nous partagions tous deux des aspirations communes : vivre simplement dans

fois de ne pas l’idéaliser. Les jolies photos de ce manuel ne doivent pas faire illusion : créer une

où ils déploient leurs ailes.

,

‘Vos pensées sont aussi concrètes et solides que des pierres.” SWami Sivananda

l'intimité de la terre et apporter notre contri-

et secrète, en autosuffisance, centrée autour de

la famille, tandis que je souhaitais faire du ma-

raîchage mon métier, ouvrir la ferme et partager

née, nous “revoyons notre design”, cherchons la

apparaître comme /a solution. Il convient toute-

où vit notre famille, où

bution à la construction du monde de demain. Mais les formes que pouvait prendre ce rêve divergeaient : Perrine aspirait à une ferme calme

trouver leur compte dans une existence stressée

et superficielle. Le retour à la terre peut alors

décriée, maïs pour nous

elle est avant tout le lieu

aspirations profondes sisur nos fantasmes et nos de citadins sont confronIls peuvent avoir brillam-

ment réussi une première carrière mais ne plus

exposée, admirée ou

faiblesses resurgiront un jour ou l’autre.

l'aventure. J'ai largement imposé ma vision. Le

Mettre en lumière nos gnifie aussi être lucide Projections. Beaucoup tés à une perte de sens.

À Notre ferme est devenue

succès du Bec Hellouin a rapidement été tel que

nous nous sentons écartelés entre le désir de partager et d'accueillir, et la nécessité de protéger le lieu de vie de notre famille, Année après an-

manière juste de concilier nos engagements de

parents, de fermiers, de personnes soucieuses du bien de tous. Honnêtement, nous avons encore du chemin à parcourir !

ME

Ds.

PR. k

À »

|

166

PARTIE Ill DESSINE-MOI

UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL

Une fois votre rêve bien défini, il vous appartient

de le matérialiser. La seconde étape consiste à se poser les bonnes questions. À ce stade du processus, nous n’entrons pas encore dans la phase active du design. Nous cherchons à collecter un maximum d’informations pour que le design à venir se fonde sur des bases solides.

après un questionnaire reNous vous proposons CI-

Jativement exhaustif. Il s’adresse à des personnes

Les jarsouhaitant reprendre ou créer une ferme. points les diniers pourront simplifier et supprimer qui ne les concernent pas.

Pour des raisons de clarté, ce questionnaire

s'adresse à un projet porté par une seule personne, Il convient de l’adapter en cas de projet collectif.

AIDE À LA CRÉATION D'UN DESIGN PERMACULTUREL 1. LE

PORTEUR

VOICI MON

DE

PROJET

RÊVE (À PRÉSENTER

DE MANIÈRE

APPROFONDIE)

:

CHAPITRE 17 LE PROCESSUS DU DESIGN D Mes besoins essentiels : O Besoins relationnels, affectifs, insertion dans la communauté.

[1 Besoins matériels : D Biens : maison, voiture... O Revenu net annuel :

D Temps libre: [ Besoins professionnels : a Impératifs géographiques, équipements...

O Combien de temps puis-je investir dans mon projet ?

© Durant la phase de création :

O À moyen terme : CO À long terme : O Ai-je besoin d’aide ? Si oui, qui peut m'aider ? O Famille, amis, bénévoles, association locale, groupe d’entraide..

O Personnes rémunérées..

O Contraintes et facteurs limitants :

O Personnes à charge, études des enfants.

167

168

PARTIE

Ill

DESSINE-MOI

UNE

FERME,

LE DESIGN

PERMACULTUREL

2. JE NE DISPOSE PAS ENCORE D’UN LIEU, VOICI

MES CRITÈRES

SITUATION

DE RECHERCHE

GÉOGRAPHIQUE

O Type d’environnement : O Pays, région...

ne s g ÿ 5 d’une gare ferroviaire, jai rces, d’un Û Proximité d’une crèche, d’une école, d’un collège/lycée, de commerces, hôpital...

NATURE

DU

LIEU

O Maison de ville avec jardin, jardin à la campagne, ferme...

O Superficie : 0 Du terrain ?

CHAPITRE

BUDGET

17

LE PROCESSUS

DU DESIGN

D’INVESTISSEMENT

D De manière réaliste et en tenant compte des imprévu s, combien puis-je

dans l’acquisition d’un lieu ?

Esirormablement investie

O Budget d’investissement pour le lieu que j’envisage d'acquérir : Ü Achat, y compris les frais d’acte notarié. O Travaux de construction ou de réhabilitation.

D Travaux dans le jardin/la ferme. O Mes moyens : Ü Mon capital est-il suffisant pour l'acquisition envisagée ? [ Vais-je devoir emprunter ? Si oui, à qui ? Comment vais-je rembourser ?

3. JE DISPOSE

D'UN

LIEU

: DESCRIPTION

DU

SITE

SITUATION O Références cadastrales des parcelles.

O Catégorisation des parcelles sur le PLU (ZC, ZNC, ZA), présence de périmètres de protection...

SURFACE O Totale : O Cultivable :

[ Composition du territoire : DO Herbages O Champs [ Bois D Haies O Plan d’eau... D Marnière...

169

TOPOGRAPHIE, RELIEF

O Crêtes, vallées, pentes...

CLIMAT

Q Vents dominants (force, direction, froid/chaud, sec/humide). avec les voisins, les anciens,

les élus et par observation

directe.

LE DESIGN

aussi en dialoguant

FERME,

mais

UNE

cartes d’état-major détaillées,

DESSINE-MOI

BRGM,

1Il

du

PARTIE

Les éléments ci-contre peuvent être obtenus à partir de sources diverses : Géoportail, Google Earth, Météo France, cartes géologiques

170 PERMACULTUREL

BÂTI À Habitat.

CHAPITRE 17 LE PROCESSUS DU DESIGN SOL O Type de sol (profondeur, structure, texture, fertilité, pH, matière organique...)

D Des analyses de sol ont-elles été effectuées ? Si non, faut-il en réaliser ?

HISTORIQUE

DE

L'UTILISATION

DES

TERRAINS

D Cultures agricoles réalisées par le passé. Tradition agricole de la région.

À Agriculture pratiquée : conventionnelle, biologique...

O Problèmes phytosanitaires rencontrés : bio-agresseurs, pathologies, problèmes récurrents, problèmes ponctuels, stratégies préventives et curatives mises en œuvre, efficacité de ces stratégies...

[ Pollutions éventuelles.

HYDROLOGIE O Cours d’eau, points d’eau, sources (permanentes, temporaires).

O Zones humides, marécages, zones d’accumulation.

O Nappe phréatique : profondeur ? Hydromorphisme ?

O Qualité de l’eau. [ Importance du ruissellement | de l’infiltration dans le sol. O Traitement des eaux grises, des eaux-vannes.

O Zones de drainage.

17]

172

PARTIE

Ill

DESSINE-MOI

UNE

FERME,

LE DESIGN

PERMACULTUREL

VÉGÉTATION O Types de végétation sur le site : végétation spontanée / cultivée ?

D Quelles sont les espèces de végétaux typiques dans la région ?

O Vie animale sauvage (dont insectes, animaux aquatiques, oiseaux nocturnes, auxiliaires, prédateurs

et ravageurs potentiels...).

RÉSEAUX

SUR

LE SITE

O Circulation :

O Chemins pour piétons.

O Lignes EDF, téléphone, internet, gaz, eau, réseaux souterrains... []l Les réseaux existent-ils ?

CHAPITRE 17

RÉSEAUX

AUTOUR

DU

SITE

D Accessibilité du site.

D Gares ferroviaire et routière les plus proch es.

À Autres transports en commun.

RESSOURCES

SUR

LE SITE

O Bois d’œuvre, bois de chauffage ?

À Matériaux pour l’artisanat ?

D Sable, argile à poterie, graviers ?

BÂTI O Habitation.

O Dépendances, atelier, bâtiments d’élevage, serre, murs.

O État d’entretien.

O Besoins en nouveaux bâtiments.

BEAUTÉ O Vues intéressantes.

O Potentialités.

LE PROCESSUS

DU DESIGN

173

174

PARTIE Ill DESSINE-MOI

VOISINAGE,

UNE

FERME,

LE DESIGN

PERMACULTUREL

ENVIRONNEMENT

D Frontières du site avec les milieux naturels et humains qui l’entourent. D Caractéristiques, impact sur le site.

: ï : Ü Dangers et nuisances potentiels (y compris àà venir,. tels qu’un projet de constru ction ou d’aménagement aux environs).

4. LE PROJET DESCRIPTION DU PROJET

PRODUCTIONS

AGRICOLES

DESTINÉES

À LA COMMERCIALISATION

O Quels ateliers de production (atelier animal, atelier végétal) ?

CHAPITRE

AUTRES

ACTIVITÉS

RESSOURCES

17

LE PROCESSUS

ENVISAGÉES

HUMAINES

D Temps de travail nécessaire :

D Types de collaborations envisagées : D Main-d’œuvre familiale.

[ Stagiaires, woofers : - Défraiement.

O Personnel extérieur :

- Artisans, entreprises, prestataires.

Personnes en charge de l'implantation / de la maintenance / de la production agricole ? s... Noms, fonctions, formations, expérience

DU DESIGN

175

176

PARTIE Ill DESSINE-MOI

DOMAINES

UNE

FERME,

LE DESIGN

D’EXPERTISE

DE

PERMACULTUREL

L'ÉQUIPE

O Compétences en interne.

INSERTION

TERRITORIALE

DE LA FERME

D Perception du projet par le voisinage immédiat et large.

O Ressources locales (savoir-faire, artisanat, tissu économique, ressources en matériaux et matières premières, tissu associatif, vie locale..).

CHAPITRE

BUDGETS

PRÉVISIONNELS

D Objectif en termes de revenus ?

D Montant des investissements envis agés sur le site :

ve -

[ Aménagements.

RÉCAPITULATIF O Temps.

DES BESOINS

17

LE PROCESSUS

DU DESIGN

177

178

PARTIE Ill

DESSINE-MOI

UNE

FERME,

LE DESIGN

PERMACULTUREL

L'étude du site va de pair avec les réponses au

questionnaire. Il en va de même pour la réalisation

Toute la force

d’une réalisation permaculturelle réside dans cette attention,

poussée à l’extrême, portée au lieu et à ceux qui l’habitent.

de la carte, qui représente l'étape suivante. Dans la réalité, ces trois phases peuvent être menées simultanément. De nombreuses informations se recoupent, le questionnaire, l’étude du site et

la carte constituent des manières différentes et

complémentaires de les traiter.

L'étude du site est une étape essentielle en permaculture. Une observation attentive et systématique est fondamentale et permet d'économiser beaucoup de travail et d’investissements. Nous nallons pas plaquer sur le site une construction mentale issue de nos cogitations “hors-sol”, mais nous imprégner de ce qui existe et ensuite seule-

ment réfléchir à la manière dont nous pourrions

faire évoluer le site, tout comme notre projet, pour

qu’ils s’accordent de manière fluide.

Cette étape demande du temps. Une règle permaculturelle suggère qu’idéalement nous observions le site pendant douze mois avant d’implanter des éléments inamovibles comme des arbres, des haies ou des constructions. L’arpenter

à toute heure du jour et même parfois de la nuit, ay

fil des saisons, vous permettra de vous imprégner

de ses particularités. L'ÉCOUTE

SUBTILE

Même si vous n’en avez jamais pris Conscience

vous êtes une antenne : VOUS POUVEZ percevoir

les informations transmises par vos cinq Sens,

mais également des informations plus subtiles liées à l’énergie du lieu. Les toutes premières impressions sont déterminantes. Une fois que

vous serez habitué au site, ces perceptions Sub-

tiles s’'émousseront.

Lors de vos premières visites, prenez le temps de vous promener lentement, de manière méditative, et soyez attentif à votre ressenti. Réfléchissez Je moins possible, n’analysez pas, sinon vous fer.

merez ce canal de perception intuitive. Selon les espaces traversés, vous pourrez constater une sensation de dilatation, de bien-être ou, au contraire,

de rétraction, de malaise. Ces ressentis agréables

ou déplaisants sont vraiment à prendre en compte. Les sensations de dilatation ou de rétraction peuvent être engendrés par certains éléments plus ou moins heureux du paysage, mais aussi par les

caractéristiques géobiologiques du lieu. Certains

endroits sont chargés d’une énergie positive, on s’y sent bien. D’autres, à l’inverse, dégagent quelque chose d’inconfortable. Les Orientaux ont

développé la science du feng shui, qui permet de corriger et d’améliorer les énergies d’un bâtiment. Nous pouvons nous en inspirer. Il y a des lieux

où ni les personnes ni les plantes ne se sentent bien. En devenir conscient permet de corriger les

choses - ou de renoncer à une acquisition si l’on ressent le lieu comme “irrécupérable”. À l'inverse, un site magnifique peut être “pollué” par une accumulation d'éléments disgracieux placés là par les anciens propriétaires mais, en visualisant son potentiel, on peut estimer que l'aventure vaut la peine d’être tentée. C’est ce que nous avons vécu au Bec Hellouin. LES OBSERVATIONS

TANGIBLES

Vos observations sur le terrain vont vous permettre de remplir les diverses rubriques correspondantes du questionnaire.

Vos observations peuvent être utilement com-

plétées par des informations glanées auprès des

voisins ou dans divers lieux et sites ressources. QUICK

DESIGN

Au fil des ans, avec l’habitude d’une lectu re permaculturelle, il devient possible de réaliser des

analyses rapides d’un site, ce que les Anglo-Saxon$

CHAPITRE

17

LE PROCESSUS

DU DESIGN

appellent des quick designs. La pensée permaculturelle nous rend familiers avec des notions simples auxquelles les personnes ne sont pas toujours attentives. Ainsi, un jour, un couple s’installant en maraîchage nous invite à visiter sa nouvelle ferme. Ils nous montrent l'emplacement envisagé pour leur future serre : une pente orientée vers le nord, à la terre argileuse, proche d’une mare

située dans un bas-fond. À l'évidence cet emplace-

ment cumulait les inconvénients : la terre argileuse

est lourde et froide ; la pente dirigée vers le nord limite la pénétration des rayons du soleil et fait perdre quelques degrés ; la mare qui draine les eaux de ruissellement accentue l’humidité. Nous

leur avons suggéré un site distant d’une trentaine

de mètres seulement, sur le plateau, bien orienté, en leur conseillant d’implanter des haies fruitières

pour l’abriter des vents dominants.

Une observation attentive vous permettra de positionner votre habitat ou votre serre au meilleur emplacement possible. À quelques dizaines de mètres près, vous pouvez gagner 2 °C en moyenne grâce à un microclimat favorable. Vous pouvez renforcer ce microclimat en implantant une haie brise-vent, une mare côté sud, un talus, ou par

une construction partiellement intégrée dans une pente. Vous bénéficierez de ces degrés gratuitement gagnés durant des dizaines d’années peutêtre. Imaginez-vous le gain en efficacité à terme ? Cet exemple illustre tout l'intérêt d’une conception permaculturelle. LES PHOTOS

Photographier l'existant est un excellent moyen de l'étudier. Prenez des photos à différentes heures du jour et aux différentes saisons. Les photos aériennes sont particulièrement utiles pour appréhender un site. Vous pouvez utiliser des photos satellites trouvées sur Internet. Mais il y a mieux : depuis peu, les drones se répandent rapi-

dement dans de nombreux pays. Un drone est un

Vous avez maintenant recueilli de très nombreuses informations sur le lieu. Dessinez une carte du site existant (avant votre design, donc). Selon l’im-

portance et l’ambition de votre projet, mais aussi selon vos aptitudes, vous pouvez réaliser un simple

dessin ou un document plus approfondi. Prenez

outil extrêmement amusant. Vous découvrez votre site avec le regard des oiseaux ! Une bonne photo aérienne d'ensemble peut constituer le meilleur fond de carte imaginable. Il faudra reporter les mesures du terrain sur la photo et éventuellement faire ressortir certains éléments s’ils ne sont pas bien lisibles (bâti, chemins, rivière, clôtures...), ce qui peut être fait assez simplement, même avec un logiciel grand public. Si vous aimez dessiner, ne vous en privez pas :

réaliser des dessins du site vous permettra une appréhension plus profonde encore.

climat et microclimats, etc. Comme évoqué, le fond de carte peut être une photo aérienne prise par un drone.

Les étapes 1 à 4 vous ont permis de définir votre

rêve et de bien connaître l’existant. À ce stade

Commencez par les éléments les plus importants

du processus, vous pouvez aborder le design permaculturel en lui-même dans les meilleures conditions. Nous vous proposons un cheminement

et volumineux. Si nécessaire, réalisez une carte de base et superposez-y des calques. Chaque calque Sera dédié à un type d’information : réseaux, eau,

simplifier si vous le souhaitez.

Soin de ne pas vous noyer dans les détails.

découpé en plusieurs étapes. Ce cheminement cor-

respond à un projet d'envergure, vous pouvez le

A Les drones nous permettent de partager quelques instants le regard des oiseaux, nous révélant le design de notre ferme bien mieux que ne le fait la vision du sol.

179

180

PARTIE Ill DESSINE-MOI

UNE FERME,

LE DESIGN

PERMACULTUREL

Vous allez maintenant vous lancer dans la création de votre design, une aventure qui consiste à réduire l'écart entre le monde réel et celui auquel vous aspirez ! Dans un premier temps, faites la liste des élé-

“Ce qui est préservé

dans une région sauvage,

ce ne sont pas les arbres ou les organismes

ments et des dispositifs que vous désirez inté-

grer au site. Réalisez ensuite une analyse ayant

Pour objectif de mettre en lumière : LA

individuels, mais la toile

de relations complexes

istant entre eux”.

SxSte

Fritjof Capra

SERRE

1. Les fonctions, les forces, les opportunités

qu’apporte chaque élément.

2. Les besoins, les faiblesses, les contraintes qu’il impose. Prenez le temps de réaliser pour chaque élément un tableau très simple, dont voici quelques exemples, en commençant par la serre permaculturelle déjà évoquée et les éléments qui lui sont associés.

MARAÎCHÈRE

FONCTIONS

BESOINS

FORCES

FAIBLESSES

OPPORTUNITÉS

CONTRAINTES

Allonge la saison de cultures Permet de fidéliser les clients en hiver Permet de travailler à l’abri

Coût de l'investissement

Cultures de légumes estivaux

Les cultures sont protégées des intempéries Désherbage facilité Peut constituer un abri pour les poules Peut constituer une réserve à outils Peut servir de pépinière Brise-vent

Coût de l’installation Coût de la maintenance/entretien

Système d'irrigation Nécessité d’irriguer Nécessité de ventiler Présence quasi quotidienne en saison Pollution visuelle Altération de la qualité du sol

Récupération d’eau Diversification de la gamme

LES

FONCTIONS

POULES

BESOINS

FORCES . OPPORTUNITES

FAIBLESSES CONTRAINTES

Pondent des œufs

Nourriture

Grattent le sol, désherbent Mangent les œufs de limaces

Mangent les fruits véreux Donnent une chaleur corporelle

Fertilisent par leurs excréments Possibilité de manger les poulets Possibilité de vendre les œufs Compagnie Diversification des revenus, résilience

Eau Abri

Perchoir pour la nuit Surveillance

Clôture Protection contre les renards Coût d’achat (poules, nourriture, équipements)

CHAPITRE 17

LA

OPPORTUNITÉS

Réserve d’eau douce pour irriguer Eau potable pour les animaux Agrément et loisirs (baignade...) Beauté Plantes aquatiques : biomasse et valorisation commerciale Biodiversité Microclimat Vase : fertilisant Aquaculture Élevage de canards Les grenouilles, crapauds, certains canards mangent les limaces Avancez ainsi pour chaque élément et chaque installation. Vous découvrirez certainement des fonctions, mais aussi des contraintes

qui vous

avaient échappé. N'oubliez pas que la conception permaculturelle vise à porter un regard global sur

À ce stade, réfrénez votre envie de passer tout de suite à un dessin du site ! Restez encore un peu dans le virtuel, de manière à garder le champ des

possibles largement ouvert. La matérialisation de votre vision n’en sera ensuite que plus puissante. En vous appuyant sur les tableaux des fonctions et

des besoins réalisés à l’étape précédente, réalisez un schéma des interactions possibles entre les éléments de votre design. L’objectif est de tisser un réseau dense d'interactions entre ces éléments, de

manière que votre système fonctionne en boucle, comme un écosystème naturel.

Mare

(biomasse, vase)

Compostage

des déchets de culture

et des adventices

Poules

(chaleur

corporelle

+inertie du poulailler)

Mare

Serre

(réflexion

(abri dans

soleil, tampon thermique)

brise-vent au-dehors)

des rayons du

Ja]

BESOINS FAIBLESSES CONTRAINTES

FORCES

Poules

DU DESIGN

MARE

FONCTIONS

(excréments)

LE PROCESSUS

la serre,

Goût de l'installation Nécessité d’une étanchéité Approvisionnement en eau Entretien

Nourriture des poissons Soins et nourriture des canards

Biodiversité négative : poules d’eau, ragondins

Le temps dédié à

la conception est

votre projet, c’est ce qui fait sa force. Avancez donc

avec courage et détermination dans ce processus de conception, même s’il est long : c’est autant

de temps et d'énergie de gagnés pendant toute la durée de vie de votre implantation.

L'objectif est d'augmenter le nombre de fonctions

remplies par chaque élément et de multiplier les mises en relation, de manière à renforcer l’effi-

cience du système.

Rappelons ce grand principe tiré de l'observation de la nature : Chaque élément remplit plusieurs fonctions. Chaque fonction importante est remplie par plu-

sieurs éléments.

En reprenant les trois tableaux proposés ci-dessus, nous pouvons constater que plusieurs fonctions sont remplies par différents éléments.

Poules (œufs, chair)

Serre (légumes)

Mare (certains végétaux comme les roseaux, poissons, canards)

Poules (dans leur parcours extérieur)

Mare (grenouilles et crapauds ;

canards, la race

coureur indien)

Serre (protection physique)

un investissement immatériel considérable

qui facilitera le

fonctionnement de la future installation bien des années durant.

PARTIE

ll

DESSINE-MOI

UNE FERME, LE DESIGN

PERMACULTUREL

» Shanti, notre troisième

fille, arrose des cultures de jeunes pousses dans les bacs situés au-dessus du poulailler.

En croisant les fonctions et les besoins qui caractérisent les différents éléments, des mises en relation intéressantes apparaissent : POULES

“Lagriculture traditionnelle était à forte intensité de maind'œuvre, l’agriculture industrielle est à forte intensité énergétique et les systèmes permaculturels sont à forte intensité d'informations et de conception’?.”

La zone de compostage présente dans le poulail ler apporte de la chaleur et joue un rôle dans fertilisation. MARE

Le poulailler peut être positionné dans la serre. La chaleur corporelle des poules et le CO: qu’elles rejettent seront bénéfiques aux cultures sous serre. Les poules pourront être nourries en partie par les restes de cultures et le désherbage de la serre.

Elle peut être remplie par les eaux de pluie récupérées sur la serre.

Les poules pourront être nourries en partie par la

des poules. Les cultures ont besoin de fertilité : compost produit par les poules et compostage de la biomasse

végétation aquatique de la mare. Les excréments des poules et leur activité permettront de fabriquer du compost au cœur de la serre. L'eau de boisson des poules peut être récupérée par la serre.

CULTURES

Les cultures ont besoin de chaleur : abri de la serre, microclimat de la mare, chaleur corporelle

de la mare, paillage avec les résidus de cultures et

les végétaux fauchés autour de la mare.

Voici à quoi peut ressembler le schéma des interactions entre les poules, la mare et la serre :

atEs

SNIOS

DE CULr

OS

Es

David Holmgren

ES

182

CHAPITRE 17

arrivés au cœur

de la démarche

conceptuelle. La logique permaculturelle nous

propose

de passer beaucoup de temps en amont,

à observer et à concevoir notre système. Riche de tous les éléments recueillis, il est temps de passer au dessin ! À ce stade, nous vous invitons à réaliser des es-

quisses de votre design. Ces esquisses sont des croquis à main levée, sans prétention, sans y passer trop de temps, de manière à ne pas figer le dessin.

Restons sur l’exemple précédent. Les premières

étapes de la réflexion font apparaître qu’à l’évidence, plus nous positionnerons les éléments poules, serre et mare proches les uns des autres, plus ils vont interagir. Pourquoi donc ne pas positionner le poulailler dans la serre et une petite mare au sud de cette dernière, de manière à réfléchir les rayons du soleil et à inviter les grenouilles

à pénétrer dans la serre ? L’esquisse de ces trois éléments peut ressembler au schéma ci-contre.

voit, on s’y promène ! On consacre un temps infini à dessiner chaque élément, jusqu'aux plumes des poules et aux pommes

dans l'arbre ! I1en résul-

tera une œuvre que l’on peut encadrer dans son design salon, mais à peu près certainement pas un desun re reprend de même L'idée permaculturel. , sin sur lequel vous avez tant travaillé “l’œuvre de votre vie”, vous sera insupportable. D'où l'intérêt de procéder par étapes, selon le protocole proposé.

, Les esquisses ne prennent que quelques minutes voulez vous que autant dessiner en vous pouvez et explorer mille combinaisons possibles avant d’opter pour la meilleure. Ba 4%

Nous sommes

LE PROCESSUS DU DESIGN

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PARCOURS

DES POULES eve

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EXTÉRIEUR

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RÉCUPÉRATION EAU DE PLUIE

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Réalisez différentes esquisses pour chercher le meilleur positionnement possible des éléments.

Le processus devient très créatif et amusant !

L'erreur à éviter - ne souriez pas, tant de personnes tombent dedans - consiste à se lancer d’emblée

MARE

dans un dessin très soigné, très léché. On peut

s’immerger jusqu’au cou dans un tel dessin, on s’y

Vous avez réalisé toutes les esquisses nécessaires. Le moment est venu de mettre les choses au propre en réalisant un grand et beau dessin de votre projet.

Repartez du plan de l'existant, dupliquez-le (ilfaut

le conserver) et utilisez-le pour dessiner votre pro-

jet, en supprimant les éléments que vous ne sou-

haitez pas conserver et en ajoutant les nouveaux

éléments.

Utilisez le support que vous voulez. Comme pour le plan de l'existant, la meilleure solution, pour ne pas surcharger inutilement un seul document, est de dessiner sur une grande feuille de papier épais

Une astuce de design

et d’y superposer des calques dédiés aux différents

éléments (zones, secteurs, réseaux, eau, arbres,

cultures..).

Vous pouvez également utiliser un support infor-

matique, ce qui demande toutefois un savoir-faire particulier.

Progressez en allant des éléments les plus im-

portants vers les éléments les plus fins. Ne vous perdez pas dans les détails. Lorsque vous passez un bon moment à travailler de manière précise un

point de détail, prenez ensuite du recul pour voir comment il s'intègre dans l’ensemble.

à

,

ns ortance Pour les esquisses, utilisez de s crayons ou des feutres épais. ls vous empécheront d'accorder tropsansd'imp l'enfermer

s, elles matérialisent votre vision aux détails, Les esquisses ne sont que des croq uis préparatoire si nécessaire, ment ieure ultér Conservez-les toutefois pour vous y reporter

183

184

PARTIE Il DESSINE-MOI UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL

Les étapes de création d’un design

De l’esquisse jusqu’au design final, on prend en compte des éléments de plus en plus précis. 1

ÉTAPE

CONSTRUCTIONS

ÉTAPE

Les

co pres ’

: i Dimensions

a

ÉTAPE

3

ÉTAPE

2

4

détails constructif. ructifs

les modèles

|

BRAS

mn,

L'eau

LES

:

Le potager

Le préverger

La forêt jardin

Etc.

Déclinaison des strates

herbacée, arbustive et

arborée

_

me

de

desrvivaces,

sbuereset

Le conditionnement : : (semis, racine nue,

motte), les tailles, les porte-greffes,

les fournisseurs, etc.

arbres, etc.

nn

DRE

LES ACCÈS ET CIRCULATIONS

'

,

ÉCOSYSTÈMES

cultures de cu Le « variétés

Les circulations

ee

es circulations secondaires

s

Les revêtements

de de so sol

Etc.

s LES LISIÈRES ET JONCTIONS

Lesh Le Etc °

Ânes LES

——

Dimensions, usages

ANIMAUX

Poules

Ruches

:

ER

memes

.

FA

lité

=:

Lieu de vie et parcours

Les variétés des vivaces, arbustes et arbres, les tailles. Le type de clôture

Les races

Etc.

Avez-vous déjà vu travailler un peintre ? Il commence généralement par dessiner à grands traits l’ébauche de son tableau. Puis il pose des aplats de couleur sur sa toile pour définir les teintes dominantes, les zones d’ombre et de lumière. Ensuite, il précise les traits, corrige, équilibre. Ce n’est

qu’après qu’il commence à travailler de manière plus fine chaque partie du tableau, tout en prenant soin de faire régulièrement quelques pas en arrière pour juger du rendu.

Soyez comme un peintre, faites quelques pas en

arrière et prenez du recul. Évaluez votre travail. Lorsque vous estimez que le design correspond à

vos attentes, allez sur le terrain, confrontez-le à la

N'hésitez pas à ranger votre design dans un placard et oubliez-le quelques jours. Laissez décanter. Puis considérez-le à nouveau. Et n’hésitez jamais à corriger tel ou tel aspect, voire à reprendre tout

l'ensemble si vous n’êtes pas satisfait, même si

vous y avez déjà consacré des semaines de travail. Vous donner la possibilité d'étudier différentes options avant de choisir celle qui vous paraît la meilleure n’est en aucun cas du temps perdu, bien

au contraire. Dites-vous qu’il est bien plus facile de reprendre un dessin que d’essayer de corriger un design une fois qu’il a été implanté sur le terrain. Quelques coups de gomme reviennent moins cher que quelques coups de pelleteuse !

réalité. Intégrez ensuite vos ajustements éventuels.

Faire du design un jeu Peut-être vous estimez-vous très mauvais en dessin ? Une alternative amusante et créative consiste à dessine! et découper dans des papiers épais de couleurs différentes les éléments de votre design : arbres, maisons,

à votre guise. Vous animaux, mares, légumes... Ensuite, sur un grand fond de carte, disposez-les et déplacez-les

pouvez aussi utiliser de petites figurines pour enfants.

Ce jeu du design est un formidable moyen de créer un design collectif en donnant à chacun, quels que soient son âge et ses aptitudes, l’occasion de participer. Lorsque l’on réalise un design en groupe, ilyaunrisquequ “celui qui est doué en dessin” prenne trop de pouvoir. Ce jeu libère la créativité et la fantaisie. Il a également le mérite de ne pas figer les choses : il est si facile de déplacer les éléments... alors qu’on hésite toujours à reprendre un dessin sur lequel on a travaillé pendant des heures !

CHAPITRE 17 LE PROCESSUS DU DESIGN 195 DESSINER

AVEC

L’EXISTANT

L'approche permaculturelle cherche à atteindre

une efficacité maximale avec un minimum d’éner-

gie et de coûts. Plutôt que de faire table rase de l'existant, voyez Comment le transformer, le valo-

riser. La démarche peut être décrite ainsi :

1. Valorisez (éventuellement, transformez) les éléments existants pour qu’ils s’intègrent au design. 2. En dernier lieu seulement, importez de nouveaux éléments. Voici un exemple. Lorsque nous avons acheté notre

chaumière, un vilain garage en parpaings défigu-

rait les abords. Il était construit sur les bords de la rivière du Bec qu’il masquait en partie, ombrageant le futur potager. Nous avons sérieusement envisagé de le démolir et de construire un bâti-

ment mieux positionné. Finalement, nous avons opté pour transformer le garage. Nous avons pu

- ouvrir entièrement le mur du fond et les deux box

sont devenus un magnifique bureau, ouvert sur la nature et chauffé par le soleil. Son seul inconvénient est que nous sommes souvent distraits par les truites qui nagent presque à nos pieds et par le martin-pêcheur qui vient se poser sur le noisetier de la rive ! L'IMPACT

ÉCOLOGIQUE

DU

DESIGN

Lorsque l’on cherche à créer un paysage comestible - et ceci peut sembler paradoxal par rapport à ce qui précède -, on est souvent amené à intervenir

beaucoup lors de l'implantation du design, probablement plus que lors d’une création de jardin classique. En effet, il est souvent pertinent d’inté-

grer des arbres, des haies, une mare, de soigner les chemins. Ceci peut nécessiter des interventions lourdes, par exemple l’utilisation d’une pelleteuse pour creuser une mare dont les remblais serviront à former des talus, d’un tracteur et d’une remorque

pour apporter du compost...

Ceci pose la question de l'impact écologique de votre design. Nombre de permaculteurs répugnent à “sortir l'artillerie lourde”, pelleteuse et tracteur,

L'impact carbone d’une réalisation doit être consi-

déré en tant que tel, mais également comparé avec l’impact carbone engendré par la solution alternative à la réalisation. Par exemple, on peut comparer le coût énergétique de la nourriture que produira votre ferme pendant des décennies, qua-

siment sans recours aux énergies fossiles une fois implantée, avec l'énergie nécessaire pour produire la même quantité de nourriture par les procédés classiques.

UN

EFFORT

DÉCROISSANT

L'objectif du gros chantier initial est de créer

plusieurs mois de travail manuel est un choix lé-

Pour piloter un jardin ou une ferme selon les prin-

pétrole pour une journée d'utilisation, mais que des travailleurs venant creuser à la main pendant des semaines en consommeraient probablement

bien davantage pour leurs trajets.

notamment mon bureau, où a été écrit ce manuel.

Lorsque nous avons acheté cette propriété, c'était un disgracieux garage en parpaings.

demain a du sens. Pour autant, veillez à diminuer

limpact écologique de votre chantier par tous les moyens, en utilisant des ressources aussi locales que possible, par exemple. La plantation de vos arbres fruitiers et de vos haies peut être calibrée pour compenser les rejets de carbone liés à l’implantation de votre projet et à son fonctionnement.

avec la nature un agroécosystème complexe qui demandera chaque année moins d’interventions humaines pour fonctionner. Vos interventions deviendront de plus en plus ciblées. Vous observerez la vie qui s’emparera de votre petit royaume et remplira nombre de fonctions à votre place.

gitime. Un rapide calcul peut montrer que la pelleteuse consommera quelques dizaines de litres de

est mon antre, elle abrite

Utiliser judicieusement et avec parcimonie les derniers barils de pétrole restants pour créer des paysages comestibles qui nourriront l'humanité de

gourmands en pétrole. Sur ce point, chacun se positionne selon sa conscience. Il faut toutefois considérer la question sous différents angles. Le pétrole est une source de pollution, mais utiliser un peu de cette fabuleuse énergie pour créer un

paysage comestible peut se révéler pertinent. À notre époque et vu le coût de la main-d'œuvre, louer une pelleteuse une journée et éviter ainsi

A Cette chaumière située au bord du ruisseau du Bec

PILOTER

UN SYSTÈME

COMPLEXE

cipes de l’écoculture, je vous suggère vivement de vous intéresser à l’art des compromis. Toute action dans un sens entraînera forcément une rétroaction ailleurs, quelque part au sein de l’agroécosystème, Ceci nous invite à une approche subtile, tout en finesse,

Une installation permaculturelle

bien conçue

pourra fonctionner efficacement dans un

monde post-pétrole. Elle pourra éventuellement constituer un

lieu-ressource capable de nourrir la communauté locale en cas d’effondrement

brutal de notre société.

186

PARTIE

Ill DESSINE-MOI

UNE

FERME, LE DESIGN

PERMACULTUREL

> À l’origine, je cherchais à créer une petite ferme pour retrouver un équilibre de vie avec mes deux

premières filles, Lila et Rose, à l'issue d’un douloureux divorce. La rencontre avec Perrine en

a fait le terreau d’une nouvelle

aventure familiale. Nos filles ont grandi, tout comme la ferme. Sur cette photo de 2007, Rose et Lila,

A Quelques années plus tard,

Rose présente fièrement sa récolte

de fruits rouges aux clients

de la boutique de la ferme.

> Est-ce sa participation ponctuelle aux travaux de la ferme qui a éveillé chez Lila sa vocation actuelle d’éditrice de livres sur la nature ?

Dans la gestion de notre ferme, il en est ainsi. Aucune action n’est isolée. Vous ne gagnerez jamais sur tous les plans. Si vous densifiez les arbres fruitiers, vous produirez davantage de fruits mais perdrez en luminosité au niveau de la strate herbacée. Si vous introduisez des poules, vous aurez des œufs mais devrez acheter des clôtures et du grain. Nous rêvons tous d’un monde idéal, d’une épouse ou d’un conjoint parfait, d’une voiture qui soit tout à la fois spacieuse et économe, d’une maison simple et pourtant confortable... Soyez conscient du fait que la ferme idéale n’existe pas, la vôtre sera simplement la résultante de vos compromis

et de votre créativité : ne poussez pas à fond tel

ou tel curseur au détriment des autres, la musique risque d’être dissonante ! Cherchez plutôt à obtenir un ensemble harmonieux. Comme l’ingénieur du son, vous serez en permanence en train d’effectuer des réglages subtils, ce qui nécessite une attention aux boucles de rétroaction qui vous indiquent l'effet de chacune de vos actions sur le système

et vous invitent éventuellement à effectuer des corrections,

Il s’agit le plus souvent, comme

le soulignait

Masanobu Fukuoka, de s'interroger sur ce que l'on

pourrait éviter de faire plutôt que sur ce que Von pourrait faire. ENTRE

CONTRÔLE

ET LÂCHER-PRISE

Ne rêvez pas : vous ne pourrez contrôler qu'une partie des paramètres seulement. Tant d’autres vous échappent : la météo, l’évolution des populations de ravageurs, le cours des fruits et légumes, les politiques gouvernementales d’aide à l’agriculture. Ne vous crispez donc pas dans une volonté de contrôle démesurée. Faites de votre mieux pour régler les paramètres qui dépendent de vous et lâchez prise pour les autres ! Plutôt que de vouloir tout diriger - et de ce fait de vivre dans la crainte de limprévu -, soyez attentif à la qualité de votre intention. Après tout, vous n’êtes qu’un paramètre parmi d’autres au sein d’un système complexe qui sera toujours en perpétuelle évolution, tout comme vous. Vous

participez à un mouvement

sans bien savoir d’où

il vient, ni où il va. Mais votre intention est déterminante. Chacune de nos pensées est une énergie L'intention que nous mettons dans notre jardin

a un effet catalyseur sur les autres forces en presence. Si votre intention est généreuse, si votre

but est noble, l'effet de votre positionnement

intérieur est puissant au-delà de ce que vous

pouvez imaginer. Donnez donc le meilleur de vous-même et faites confiance pour le reste, €" accueillant chaque événement comme une octasion de progresser.

BB AG

Je perçois le permaculteur comme ces ingénieurs du son que j’ai pu observer avec admiration par le passé, dans les cabines de mixage de films, lorsque j'étais réalisateur. “L’ingé son”, comme on dit, travaille assis devant un pupitre où sont alignés des centaines de petits leviers, un véritable poste de pilotage ! Pour obtenir le son désiré, il avance ou recule tel ou tel levier, règle les basses et les aigus. Mais fatalement chaque action sur un levier en active un autre par un effet de rétroaction. Si l’on pousse les basses, on réduit les aigus, et inversement.

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à gauche, animent un atelier de traction animale avec leur ponette Harmonie, à destination de leurs amis.

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« La biosphère est une très mince pellicule de vie entourant la planète Terre...

18

Si nous étions réellement conscients de son époustouflante beauté, pourrions-nous la sacrifier aussi brutalement sur l'autel du profit ?

LA BEAUTÉ

SAUVERA

LE MONDE

Moi qui suis née dans les nations [amérindiennes], je sais avec certitude que la vie infinie est la beauté. C’est l'appel que j'entends, psalmodié par l'univers tout entier. Les oiseaux le chantent et les animaux le reconnaissent. Tout ce que l'œil perçoit s'inscrit en harmonie”. Anna Lee Walters

“La sagesse demande une nouvelle orientation vers ce qui est organique, noble, non violent,

élégant et beau”*.” Ernst Friedrich Schumacher

Comment créer un jardin ou une ferme qui soient beaux ? Nous partageons tous cette aspiration, mais la beauté est subjective, chacun l’apprécie à sa façon. La définir est hasardeux. Est-ce seulement possible ?

artisanale, en s’inspirant des traditions paysannes du lieu, permettra de créer un jardin ou une ferme en harmonie avec son environnement.

On peut toutefois avancer que les formes, les couleurs et les matières que l’on trouve dans la nature sont belles et efficaces car elles sont le fruit d’une très longue évolution. Ce couple beauté/efficacité est une constante dans la nature.

gique de rentabilité. Comme la beauté ne rapporte

En poussant ce raisonnement plus loin, chacun peut constater que les formes, les couleurs et les matières traditionnellement utilisées par les cultures populaires des différentes régions du monde sonnent juste. L'architecture des fermes préindustrielles, par exemple, concilie une élé-

gante sobriété et une parfaite adaptation à leur

usage, même si ces fermes prennent des apparences extrêmement variées selon les territoires. Ces fermes sont harmonieuses car réalisées par des mains humaines à partir des matériaux naturels locaux. Elles semblent être une émanation du territoire dans lequel elles se fondent. Mais elles sont également efficaces, parce que les travailleurs d’autrefois étaient trop pauvres pour se permettre des fioritures inutiles et que les gadgets n’avaient

pas leur place au sein d’une société vernaculaire.

Nos aïeux paysans possédaient peu d’objets mais

ils les gardaient bien souvent toute leur vie et avaient le goût de les mettre à leur main et de les

adapter parfaitement à leur usage.

Pour avancer dans notre quête de beauté, nous

pouvons donc affirmer, sans trop de crainte de nous tromper, que l’utilisation des ressources biologiques locales, mises en œuvre de manière

DISSONANCES L'architecture industrielle s’inscrit dans une lo-

rien, elle est habituellement considérée comme accessoire. Les fermes industrielles ressemblent trop souvent aux usines dont elles s’inspirent. On y sent le froid du métal et la souffrance des êtres vivants qui les habitent. Elles ne sont plus à échelle humaine car dimensionnées selon les standards des machines. Mais il arrive aussi - que l’on me pardonne cette remarque exprimée avec toute la bienveillance possible - que les réalisations alternatives négligent la beauté. L'architecture écologique, par exemple, tend à se concentrer sur certains aspects (matériaux, isolation, énergies..), mais ne prend pas toujours le temps de penser à l’harmonie des réalisations. Des questions de coût peuvent également phagocyter le processus de création. Les proportions sont parfois hasar-

deuses, alors qu’il est simple de dessiner en te-

nant compte du nombre d’or ou de s’inspirer des formes traditionnelles.

Dans le monde alternatif, le souci de réaliser à bas coût et de limiter l'impact écologique a en-

gendré une mode de la récupération, cohérente

et légitime en soi. Mais le risque est réel, pour des jardins structurés à partir de palettes ou de pneus, pour des isolations faites de bouteilles de

plastique, d'évoquer une décharge... Les déchets de l’ère industrielle ne parviennent que difficile-

ment à devenir des ressources de qualité pour un jardin naturel,

190 PARTIE Ill DESSINE-MOI UNE FERME, LE DESIGN PERMACULTUREL Y En prenant pour source d'inspiration les formes

vernaculaires auxquelles avaient recours les paysans du passé, nous pouvons donner à notre jardin

une authenticité profonde. Ces barrières, présentées dans un

quérir des compétences artisanales et de réaliser soi-même ses clôtures et ses bâtiments à partir

des ressources naturelles locales (ressource s souvent gratuites ou presque). Une clôture en châtaignier fendu constituera un élément tout à la fois utilitaire et décoratif. I1 faudra quelques compétences et du temps pour la réaliser de ses mains, mais l'impact visuel et le service rendu Seront supérieurs à une palissade en palettes de récupération. ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ Jai, j’en conviens, une forte attirance pour l’artisanat et les formes préindustrielles. Les objets, les matériaux, les couleurs qu’utilisaient les sociétés traditionnelles étaient directement issus

==

SE

manuel d'agriculture du début du xix° siècle, ont une autre allure que les quelques modèles standardisés proposés dans les jardineries ! Chacun peut les réaliser soi-même en faisant appel aux ressources biologiques locales.

Gomment concilier le souci de diminuer son empreinte écologique tout en vivant au cœur d’un espace harmonieux ? La solution peut être d’ac-

de la nature environnante. Les artisans du village

parvenaient à réaliser tous les objets nécessaires à la vie quotidienne à partir des ressources locales. Ces réalisations artisanales étaient forcément à taille humaine car ceux qui les fabriquaient ne disposaient pas de la puissance des énergies fossiles. Les dimensions étaient dictées par le corps du travailleur ou celui de l'animal domestique. Matériaux naturels, travail artisanal, échelle juste :

tout ceci induisait une adéquation profonde entre les communautés paysannes et leur environnement, ce qu’on appelle au Japon l’esprit Mingei.

Mais nombre de réalisations contemporaines sont superbes également, reflétant un vrai travail de création. Si vos goûts vous portent vers l’architecture moderne, vous y trouverez de nombreuses sources d’inspiration. Parfois, même, des architectes ou des artistes revisitent avec bonheur des formes issues de la nature ou des traditions. Pour dessiner le Centre culturel kanak de Nouméa,

locales pour Renzo Piano s’est inspiré des cases et la Charge l visue act l'imp dont une réalisation

Dans un autre émotionnelle sont extraordinaires. sworthy, ar domaine, les œuvres d’Andy Gold ar

land art, mett tiste britannique pionnier du de la nature en œuvre des éléments tout simples

invitent à Portez sont bouleversantes. Elles nous

t pour en un autre regard sur notre environnemen déceler les beautés cachées.

Perrine et moi sommes sensibles à l'architecture contemporaine,

notamment au FORÉANE asiatique

qui s'inscrit dans une recherche d’habitats “zen et naturels”. La maison japonaise est traditionnel. lement très ouverte sur Son environnement. Les

matériaux d’aujourd’hui, le verre en particulier

permettent de recréer cette transparence sans perdre en isolation, y compris sous nos latitudes, ce qui n’était pas possible il y a peu. La frontière

devient poreuse entre l’habitat et le jardin.

Nous nous sommes beaucoup amusés à créer des structures contemporaines et naturelles tout à la fois. Nous avons choisi de grands arbres à la scierie locale et les avons fait débiter en prenant soin de préserver les départs des racines et des branches, Avec ces énormes plateaux de bois aux courbes féminines, nous avons réalisé des cloisons et des meubles. Une grosse souche de cèdre du Liban abandonnée dans un roncier, qui ressemblait à un

dragon tant la surface du bois était ridée, est devenue un fauteuil-sculpture confortable et odorant.

LA BEAUTÉ DU MONDE

Notre âme a besoin de beauté tout comme nos corps de nourriture. Les peuples premiers la recherchaient dans toutes leurs réalisations (notamment les soins aux corps), comme un hommageà la splendeur du monde. Notre planète est somptueuse et, si nos fermes la défigurent, c’est que

quelque chose n’est pas ajusté.

La beauté coûte-t-elle cher ? Ce n’est pas certain. Il ne faut pas la confondre avec la “décoration”. Nous lavons vu, elle est plutôt affaire de matériaux, de proportions,

de créativité. Il est vrai

que les matériaux naturels - le bois, la pierre, la terre — reviennent plus cher que les parpaings ou

les tôles. Mais c’est leur mise en œuvre qui coûte

cher. Achetés à l’état brut, ces matériaux sont très

peu onéreux, voire disponibles chez vous. Si l'on

fait les choses soi-même et que l’on y consacre le temps nécessaire, alors il devient possible de réaliser un jardin unique, avec, en prime, la fierté et le bonheur inhérents à chaque création ! Je suis persuadé que l'exigence et les soins appor

tés à la gestation d’une ferme peuvent contribuer également à son succès économique. Nous avons créé la Ferme du Bec Hellouin en premier lieu pour notre famille. L’attention portée à la beauté n'a

CHAP

ITRE 18

LA BEAUTÉ SAUVERA LE MONDE

pas été motivée par des préoccupations écono-

miques, elle répondait à une exigence intérieure. Notre équipe sait bien que les questions touchant

à l'esthétique ne sont pas négociables ! Mais force est de reconnaître que nos visiteurs sont souvent

CT] 7] LT. [] HT] HU)

profondément touchés. Certains éprouvent un

véritable choc en pénétrant dans les jardins. Des

milliers de personnes nous ont déclaré avec des

étoiles dans les yeux que la ferme ressemble au paradis (un mot d’origine persane qui signifiait “jardin”). Indéniablement, sa beauté a contribué à lui donner une visibilité et à construire sa répu-

tation. Nous pouvons également constater que la

qualité de vie qu’elle offre est l’un des éléments qui attirent des collaborateurs motivés et compétents. Si votre ferme est belle et harmonieuse, vous aurez

davantage de plaisir à y passer de longues journées de travail. L'ambiance y sera probablement meilleure au quotidien. FAIRE SIMPLE ET EFFICACE Un jardin permaculturel atteint vite une forme de luxuriance, de joyeuse exubérance qui produit un impact visuel bien supérieur à celui d’un jardin classique, “en rangs” et “à plat”. Les buttes de culture permanente rondes se prêtent bien à des lignes courbes et évoquent tout naturellement le corps de la Terre-Mère, avec ses rondeurs sensuelles. Dans la nature, la ligne droite est rare-

ment présente et cette agriculture féminine peut

prendre très vite l’apparence d’une forme de land art. C’est l’un de ses nombreux attraits.

Mais la facilité avec laquelle on peut dessiner des formes complexes avec les buttes rondes ne doit pas vous faire tomber dans le piège d’un dessin compliqué ! Faites simple et efficace. Ce conseil est encore plus vrai pour les maraîchers. Les planches perma-

nentes plates, lorsqu’elles sont conduites avec la

gamme d’outils que nous présentons au chapitre 81, p. 861, sont plus productives et demandent moins d’entretien que les buttes rondes. Certes, elles dessinent des lignes droites dans le paysage, mais

la beauté d’un alignement de planches bien soi-

gnées, couvertes de légumes aux feuillages divers, est indéniable.

COCRÉER AVEC LA NATURE

Jardin à la française ultrastructuré, jardin à l’an-

glaise jouant avec les couleurs et le flou, jardin

japonais habité de spiritualité : chaque tradition

paysagère a engendré ses codes qui reflètent le positionnement de l’être humain par rapport à la nature, spécifique à chaque culture. Le parc imposant du château de Versailles avait pour vocation

de magnifier la puissance du roi. On peut y lire le désir de contrôler à l'extrême le monde vivant,

une volonté de toute-puissance qui était peut-être sous-tendue par la peur de la nature. Car, dans l’esprit des Occidentaux, le monde sauvage a souvent

été perçu comme une menace.

Nous autres permaculteurs nous rapprochons de la perception des peuples racines qui considéraient la nature comme une mère féconde. Mais au vu de l'ampleur des dégâts causés par l'humanité à la Terre, les personnes sensibles ne peuvent qu’être saisies de culpabilité. Comment en sommes-nous arrivés là ? Ce sentiment de culpabilité peut être tel que certains auteurs ou courants de pensée

perçoivent l’être humain comme une espèce parasite, un accident de parcours dans l’évolution, et vont jusqu’à affirmer que son éradication serait salutaire pour le reste des vivants. Entre l’être humain tout-puissant et l’être humain pétri de culpabilité, il existe une autre voie. Nous sommes des enfants de la nature. Elle nous a offert ce cerveau incroyable qui nous caractérise. Nous pouvons mettre cette intelligence au service de la Terre-Mère pour la porter vers des formes qu’elle n’aurait probablement pas atteintes seule.

Un jardin peut être l'expression d’une cocréation féconde entre la nature et les êtres humains.

Et si notre vocation sur cette Terre était de mettre notre conscience au service de l’épanouissement de toutes les formes de vie ? Lorsque l’être humain et la nature vibrent à l'unisson, on touche au sublime.

Nous vous invitons donc à créer joyeusement, le cœur ouvert, plein de gratitude devant l'honneur qui vous est fait de prendre en charge une petite parcelle du monde vivant. Si vous vous positionnez ainsi, soyez certain que la nature saura vous gui-

der vers les formes qu’elle aspire à prendre, Et la

vie pourra se déployer dans votre jardin avec une

A Les maisons traditionnelles japonaises sont largement ouvertes sur la nature, la frontière entre l’habitat et le jardin est transparente. Ceci reflète le profond respect des cultures d'Orient pour la nature.

19

192

PARTIE

Il

DESSINE-MOI

UNE

FERME,

LE DESIGN

PERMACULTUREL

rapidité et une puissance qui vous émerveilleront. Je suis intimement persuadé que, si nous sommes nombreux à adopter cette attitude, il deviendra possible de réparer les blessures que nous avons infligées à la Terre bien plus rapidement que nous ne le pensons généralement. LES FORMES

DE LA NATURE

Au détour d’un chemin, il nous arrive d’être boule-

versé jusqu’au fond de l’âme par une herbe ourlée de gel, la caresse du soleil couchant

sur un pic

enneigé, l'apparition furtive d’une biche, une toile d’araignée sous un voile de rosée... Quelle que soit sa culture, l’être humain vibre devant la splendeur

“Vivre sans la beauté m’est impossible. Car

elle circule dans le cosmos tout entier et elle est la vie. Mon

univers est composé de symboles par lesquels j'accède à la beautés”

Anna Lee Walters

du cosmos. Il aurait pu n’être que chaos, pourtant lPunivers s’est organisé selon une géométrie dictée par des lois physicochimiques universelles.

A Construction, à la règle et au comp z

05, d’un

segment de longueur égale au nombre y, d'or:

—————

Durant sa longue évolution, l'humanité s’est imprégnée des quelques figures de base qui struc-

turent la matière. On les retrouve de l’infiniment petit jusqu’à l’infiniment grand. Elles sont communes aux règnes minéral, végétal et animal, qui Sont soumis aux mêmes contraintes physiques. Les anciens ont eu l'intuition que la nature s’organisait parfois selon des suites mathématiques. Ils en

A Rectangles d’or et divine Proportion.

ont déduit une géométrie sacrée qui a inspiré des œuvres d'art et l'architecture de certains temples.

Dessiner un jardin ou sa maison est une manière de prolonger la création du monde. La connais-

sance de sa géométrie secrète peut nous aider à

trouver des proportions qui paraissent justes à l’œil et dégagent une impression d’harmonie. Si la plupart des créateurs y parviennent intuitivement, une connaissance des formes archétypales de la nature peut toutefois nous aider à mettre

plus de conscience dans nos créations et renforcer l'émotion qui s’en dégage. Ces formes (baptisées patterns en anglais) viennent nourrir une démarche bio-inspirée. Le nombre d’or, parfois appelé divine proportion, est une proportion que l’on retrouve dans nombre de formes naturelles. Le mathématicien antique Euclide est le premier à y faire référence. Des créateurs, peintres, architectes, musiciens l’ont

A Deux petits rectangles d’or inscri ts

dans un grand rectangle d’or°.

En 1202, le mathématicien Leonardo Fibonx décrit dans son ouvrage Liber abaci la croiss

théorique d’une population de lapins. Ilen dei: une suite de nombres, baptisée depuis suite Fibonacci,

dont

la progression

correspond.

nombre d’or. Chaque nombre est la somme deux précédents :

0/1/2/3/518/13/21/34/55/89/14.

utilisé. Sa valeur est de 1,61803... Il est désigné par

la lettre phi, Ÿ.

> La proportion définie par a et b est dite

d’“extrême et moyenne raison” lorsque a est à b ce quea + bestà a, soit:

lorsque (a + b)/a = ab.

Le rapport aJb est alors égal au nombre d’or“.

A On retrouve la suite de Fibonacci

dans de nombreuses formes de la nature. Une succession de carrés dessinés selon ce rapport donne une spirale*.

Re.

0 ÉENS

18 CHAPITRE

DE LA BEAUTÉ SAUVERA LE MON

Dans le règne végétal, on observe de nombreuses spirales répondant à ce modèle, comme la pomme

du chou romanesco et la crosse d’une jeune fou-

gère. Les écailles d’une pomme de pin s’organisent sous la forme de 8 spirales dans un sens et 13 dans

V'autre. Une fleur de tournesol est constituée de

deux groupes de spirales, comptant généralement

a spirales dans un sens et 34 dans l’autre. La fleur de marguerite comporte 34 spires dans un sens et ss dans l’autre... Dans le règne animal, le coquillage nautile adopte une forme de spirale logarithmique qui peut être

Ces photos satellite de la région du lac Titicaca montre des jardins dont l'origine remonte à une civilisation pré-inca vieille de 3 200 ans. Nous nous

sommes inspirés des deux formes circulaires que l’on aperçoit sur la photo du haut pour les designs successifs de notre jardin mandala.

Nous allons maintenant nous intéresser au design

des différents jardins. Notre ferme en compo rte plusieurs, fort différents.

récemment permis de dé Les photos satellites ont Pérou, environ couvrir, autour du lac Titicaca, au de tailles 20 000 jardins mandalas de formes et ins, un dess ces de d Pun diverses. Le nôtre repren ilya que esi rin pré ion sat ili civ plan conçu par une Normandie en el onn cti fon ère s'av qui 3 200 ans et de nos jours !

Le mandala est toutefois le jardin auquel nous avons été amenés à apporter le plus de modifica-

tions. Lors de sa création, en 2008, le cœur du jar din mandala était organisé sous forme de cercles

concentriques. Pour renforcer Veffet visuel, une seule entrée les pénétrait. Très rapidement, nous avons constaté que ce n’était vraiment pas pra-

tique : si vous étiez dans le cercle 2 et que vous aviez laissé un outil sur le cercle 4, il fallait faire tout le tour pour vous y rendre ! Dès l’année suivante, nous avons ouvert des allées en croix, di-

visant le mandala en quatre segments. Toutefois,

la circulation manquait encore de fluidité et nous

visitions trop peu les cercles intérieurs. Toute entrave à la circulation est pénalisante dans le cadre d’un jardin maraîcher. L'étude menée à partir de 2o11 l’a confirmé : le cercle intérieur ne produisait qu’une valeur de 2,50 euros par mètre carré et par an, le pire résultat de la ferme ! Nous avons alors entrepris de redessiner complètement le cœur du mandala, optant pour un autre dessin pré-inca en forme de soleil. Les pétales rayonnent à partir d’une place centrale, bien pratique pour accueillir les groupes. La forme est belle, l'énergie puissante. Ce dessin est très fonctionnel car, lorsque l’on est au centre, d’un regard circulaire on voit toutes les cultures. Ce plan s’est révélé infiniment plus pratique et agréable que le précédent. En année 3 de l’étude, la production moyenne du mandala était de 28 euros le mètre carré, une va-

leur sensiblement plus faible que la moyenne des secteurs étudiés, ce qui s’explique par le fait qu’il

est situé en zone 2, les soins qu’il reçoit ne sont donc pas très intensifs.

Ce jardin mandala illustre la créativité qu’autorisent les buttes de culture rondes. Il est réjouissant de constater qu’un jardin maraîcher professionnel, dont la vocation première est la production, peut aussi être beau. Ce mandala frappe l’imagination des visiteurs et il est souvent copié - nous-mêmes en avons dessiné un, avec le paysagiste Rémi Algis, pour le ministère des Affaires étrangères, à l’occasion de la cop 21.

CHAPITRE

NS

NUE

HS

1

!

8

4 À

L..

LES DESIGNS

19

ne osent

DE LA FERME

DU BEC HELLOUIN

&)MS

A En 2000, nous avons

dessiné le mandala sous la forme de cercles concentriques. Bien que nous y ayons progressivement ouvert

des allées, la circulation

était peu fluide.

< Quelques années plus tard, nous avons entièrement redessiné le mandala en optant pour une forme de soleil, qui se révèle belle et beaucoup plus pratique.

199

200

PARTIE Ill DESSINE-MOI

UNE

FERME, LE DESIGN

PERMACULTUREL

Allons maintenant nous promener du côté de Îles-jardins, mon endroit préféré. À l’origine, & lieu magique était l’extrémité ouest d’un Simple

pré, au sol particulièrement peu profond. Ancie, marin, je cherchais comment intégrer plus d’ex, dans notre ferme et, puisque la rivière passait juste à côté, Perrine et moi avons tenté de créer des Îles

- bien modestes mais qui coup de joie. Nous avons laissant en réserve ce qui et la petite île-jardin. Le dédié à la forêt-jardin.

nous procurent beau. fait creuser des mares allait devenir la grande fond de la parcelle fx

Sur ce bout d’herbage de 3 000 mètres carrés coexistent dorénavant quatre milieux différents .

- Les mares, d’une superficie de 400 mètres carrés environ.

- Les deux îles. La surface cultivée sur la plus grande est de 200 mètres carrés. - La forêt-jardin, 1 200 mètres carrés environ. Chaque espace remplit plusieurs fonctions. Forêt-jardin : — Production de fruits, petits fruits, plantes aromatiques, quelques légumes, champignons. - Sert ponctuellement de pâturage pour les animaux au printemps. - Brise-vent : implantée du côté des vents dominants, elle abrite les îles.

- Fertilité: biomasse (taille des végétaux, orties, consoude). - Source de biodiversité : abrite des auxiliaires utiles. Mares :

shift

— Présence de l’eau (capillarité, arrosages). — Microclimat. — Fertilité (roseaux, consoude, vase). - Abrite des auxiliaires utiles (grenouilles, crapauds). — Élevage de poissons (carpes communes). -— Beauté, sentiment d’“aventure” lorsque l’on franchit les petits ponts pour se rendre sur les îles. Pré-verger : - Pâturage des animaux. - Bois fourrage (grands frênes le long de la rivière). - Fruits. - Fertilité (déjections animales). — Force de travail des animaux de trait (cheval, âne, poney). - Produits animaux (moutons).

VENT DOMINANT

* sUD

Îles-jardins : - Production intensive de légumes.

-— Fertilité (consoude, bardane, restes de cultures).

CHAPITRE 19

- Un petit pré-verger planté de pruniers. On pourrait y ajouter la rivière qui offre encore un milieu différent. Ce design donne beaucoup de

place à l’eau, rappelant que “maraîchage” vient de “marais”.

Comme vous pouvez le constater sur les photographies, les différents espaces sont fortement imbriqués. Malgré la petite superficie des mares,

LES DESI

GNS DE LA FERME DU BEC HELLOUIN

occasionnée par la réflexion des rayons solaires à la surface des mares, la régulation des écarts thermiques qu’engendre la masse d’eau bénéficient aux cultures légumières.

Auxiliaires : la gestion des limaces est l’un des problèmes posés par la culture sur buttes pErmanentes, surtout dans un fond de vallée humide

et enherbé. La barrière physique des mares et la

Depuis huit années, nous travaillons dans cet espace

présence de différents auxiliaires (grenouilles, crapauds, canards coureurs indiens ponctuellement) ont permis de soulager considérablement la pression sur les îles.

bien. L'entretien nécessaire est faible et la produc-

Biodiversité : des observations naturalistes ont

l'interface terre-eau, particulièrement féconde, est maximisée.

et constatons qu’il fonctionne particulièrement

tivité des îles élevée. De plus, l'agrément pour notre équipe et pour les visiteurs est réel : quel plaisir de jardiner dans un tel environnement, bercé par les chants d’oiseaux et le murmure de l’eau ! Voici quelques remarques thématiques. Fertilité : la gestion de la fertilité est l’objet d’une attention particulière. À la création, vu la très faible profondeur de sol (10 à 15 centimètres seulement), nous avons apporté une couche de terreau, de près de 10 centimètres d'épaisseur, à l'emplacement des îles et de la future forêt-jardin. Un travail du sol mécanique a permis d’incorporer ce terreau. Après le passage du rotovator, du fait du sol ameubli, la création des buttes sur la

grande île a été facile (cinq jours de travail à la pelle et au râteau pour une personne). La plantation des végétaux de la forêt-jardin fut également rapide et sans trop d’efforts (une semaine environ à deux). Nous avons été surpris par l'effet immédiat de cet apport important de terreau, un vieux compost récupéré sur la zone de dépose du club hippique local : deux mois seulement après la création des buttes de culture, la productivité était déjà impressionnante. Les îles-jardins bénéficient de flux de matière organique importants afin de maintenir et d'augmenter leur productivité. Outre les sources de biomasse

déjà évoquées, nous utilisons différents types de

matières pour pailler généreusement les allées et les buttes (roseaux et vase de la mare, BRF, fumier, fougères, feuilles mortes...). Nous avons pu consta-

ter qu’au fil des ans, la profondeur de terre arable à augmenté d’une bonne dizaine de centimètres.

L'illustration ci-contre présente les flux liés à la fertilité. Microclimat : le microclimat dont bénéficient les îles, grâce à la présence des mares et de la

forêt-jardin, est bien réel. C’est l’un des facteurs

qui expliquent leur productivité. L’abri du vent

procuré par les arbres, la chaleur supplémentaire

201

mis en évidence la présence d’une faune très

riche. Les oiseaux sont nombreux, y compris des

espèces rares. Les visites presque quotidiennes du

martin-pêcheur nous enchantent. Une population d’écrevisses à pattes blanches s’est installée dans les mares, signe d’une eau pure. Dix espèces de libellules ont été identifiées. Cette richesse est un facteur d’équilibre pour l’agroécosystème. Aquaculture : le mot est un peu fort dans notre cas, nous nous sommes contentés d'importer des carpes et des tanches pêchées dans un étang voisin. Ces poissons ne constituent pas des mets délicats mais ils ne nécessitent aucun apport de nourriture.

A L’herbage initial est devenu un petit monde riche et diversifié,

202

PARTIE

II! DESSINE-MOI

UNE

FERME, LE DESIGN

PERMACULTUREL

1 FY

A Les îles, vues de la forêt-jardin.

Dans le cas des carpes communes, la production est estimée à 1 kilo de poisson par mètre carré et par an, ce qui constituerait une source de protéines animales non négligeable en cas de pénurie alimentaire. Outre le plaisir d'observer les poissons, nous bénéficions de leurs déjections qui en-

richissent la vase fertile du fond de la mare, elle est

de temps en temps récupérée au profit des buttes.

y4

0e 4

nE %

L

D: TA

Cet ensemble constitue le design permaculture] le plus abouti au sein de notre ferme. Regardez les photos aériennes. Elles n’évoquent aucune forme d’agriculture connue, ou alors peut-être des jardins cultivés par des ethnies reculées en milieu tropical... Difficile d’imaginer une agriculture plus low-tech, pourtant la productivité est au rendez-vous. On y sent l’épanouissement de la vie tandis que les besoins des humains sont comblés. L’abondante production de fruits et de légumes s’accompagne d’une création d’humus. La terre s’enrichit et devient de plus en plus profonde et vivante. Le système est maintenant autofertile et pourrait, si nécessaire, se passer d’apports extérieurs, d'autant plus que nous y développons des cultures de plantes à biomasse, comme les roseaux et la consoude. Cet ensemble de jardins donnant une place primordiale aux arbres illustre parfaitement ce que nous appelons l’écoculture : l’art de subvenir aux besoins des humains tout en enrichissant le milieu naturel, en s'inspirant simplement de la nature.

> La grande île-jardin est mon endroit préféré de la ferme, je paierais pour y travailler !

La réalisation de ces qué en soi, elle a été avons été infiniment d’audace nécessaire

jardins n’avait rien de compli rapide et peu coûteuse. Nous récompensés de la petite dose à ce design original. Il nous à

donné confiance en l'avenir, en démontrant qu'il

est possible de passer, en quelques années, d’un milieu peu fertile à un agroécosystème naturel et productif,

CHAPITRE 1

9 LES DESIGNS DE LA FERME DU BEC HELLOUIN

< Le petit pont de bois est

un passage symbolique

d’un monde à l’autre.

Quelques pas au-dessus de l'eau suffisent à engendrer une impression de

dépaysement et de détente.

RÉCOLTE

Première possibilité : produire de la biomasse sur l’espace cultivé.

Se TRAVAIL DU SOL

de fertilité sous forme de rejets de gaz carbonique et de lessivage. De cycle en cycle, la fertilité se dégrade. Comment la maintenir ?

TRAVAIL DU SOL...

Les cultures d’engrais vert permettent de compenser les pertes de fertilité, mais elles monopolisent le terrain plusieurs mois...

> ENGRAIS VERT

TRAVAIL DU SOL...

cees

de travail dans les jardins. Moyenne nationale pour le maraîchage mécanisé : 10 000 m° produisent 30 000 €.

MICROFERME ET FERTILITÉ

CHAPITRE 27

peuxième possibilité : importer la fertilité de rexérieur de la parcelle, sous forme d'engrais er d'amendements. pans l'approche mécanisée, le sol de la parcelle œltivée tend donc inexorablement à perdre sa

matière organique et ses nutriments. Des apports

rieur constants de fertilité provenant de l’exté

sont indispensables pour maintenir le potentiel acent productif du sol. Mais les engrais ne rempl

infertile pas la matière organique et la parcelle est

par elle-même : elle sera toujours dépendante de

carbone est transferts de fertilité dont l'empreinte élevée et la durabilité incertaine.

AMENDEMENTS

AMENDEMENTS

GAZ

CULTURES

EXPORTÉES

5

ENGRAIS

ENGRAIS

L'hectare considéré comprend deux parcelles bien distinctes : L. Un “cœur intensif ” de 1 000 m° dédié au maraîchage diversifié.

LESSIVAGE

exemple, II. L'espace libéré, 9 000 m° dans notre

des mis à profit pour planter des arbres, accueillir

animaux ou pour d’autres usages.

L'ensemble forme un système complexe, riche de

potentialités multiples.

@ +

en sus

MICRO

FERME

1- LE “CŒUR INTENSIF” CULTIVÉ

buttes de cultures permanentes, sur lesquelles la

PREMIER OBJECTIF : LIMITER LES PERTES DE FERTILITÉ Le bon sens suggère de tout faire pour éviter les

d'éviter le lessivage des nutriments. Le non-travail du sol diminue les rejets de gaz carbonique.

qui limite les risques de pertes. Le système de

les pertes de fertilité.

EN MARAÎCHAGE MANUEL (1 000 M2)

pertes des précieux nutriments. La toute petite taille de la parcelle cultivée est en soit un facteur

MP



matière organique est apportée par le haut, permet

Le fait de travailler à la main permet de mettre en œuvre diverses “bonnes pratiques” qui limitent

273

274

PARTIE IV

UNE APPROCHE

NATURELLE

DU SOL ET DE LA FERTILITÉ

Un maraîchage entièrement manuel est bénéfique pour la fertilité des sols

; : la mise : en œuvr e de s “bonnes pratiques” suivantes : Une gestion manuelle des cultures autorise

NL

Sixième “bonne pratique” : restituer les résidus de culture

Première “bonne pratique” : non-travail du sol.

N’exporter que les parties Consom

Les buttes permanentes permettent de limiter les interventions

décompactage, si nécessaire.

mables des cultures permet 4.

au

conserver une biomasse impor tante dans le jardin.

Septième “bonne pratique” .

Seconde “bonne pratique” : sol couvert.

cultiver des légumineuses

Les buttes permanentes sont le plus souvent protégées par un mulch.

Elles sont intégrées dans les associations de cultures.

(fabacées).

Huitième “bonne pratique”: cultiver des plantes à biomasse,

Troisième “bonne pratique” : plantations denses. Le couvert végétal protège du

Maïs, topinambour, fèves, tourne. sols. fournissent un volume important de matière organique

lessivage.

pour les paillages et le compost.

Neuvième “bonne pratique”: Agroforesterie. La conduite en verger maraîcher permet au jardin de bénéficier des

Quatrième “bonne pratique” :

associations de cultures. Le

tissu

racinaire

est

dense

et

réparti sur différents étages du

services rendus par les arbres.

sous-sol.

Dixième “bonne pratique” : : complexifier.

e

Cinquième “bonne pratique” :

laisser les racines en terre.

Les racines constituent une masse

généralement supérieure à celle de la partie aérienne des végétaux.

SECOND

OBJECTIF

: COMPENSER

PERTES DE FERTILITÉ

LES

L'exportation des cultures nécessite d’être compensée d’une manière ou d’une autre. Dans le

jardin maraîcher, il est possible de cultiver des

engrais verts, comme en culture mécanisée.

“e

9

e”.®

da e e° es ee.

®® ©

Lintensité des soins permet de

fareévoluer la microferme vers des formes plus complexes, comportant de nombreuses niches écologiques, à l'instar des milieux naturels.

aux besoins importants en paillages. Elle est donc

privilégiée. Cette matière organique peut prove-

nir de l’espace libéré : les 9/10 du terrain dédiés aux arbres, aux animaux, à des cultures de plantes

à biomasse... Dans cette approche, il est envisageable d'atteindre l’autofertilité puisque 9 000 m°

On peut également importer de la matière Orga-

sont disponibles pour nourrir le “cœur intensif de 1 000 m° (buttes de cultures et allées). Il est

ser les cultures toute l’année ; de plus, elle répond

nique de l’extérieur de la ferme.

nique. Cette seconde option a l'avantage d’autori-

MATIÈRE ORGANIQUE PROVENANT DE L'EXTÉRIEUR DE LA MICROFERME

également possible d’importer de la matière orga-

MATIÈRE ORGANIQUE PROVENANT DE L'INTÉRIEUR DE LA MICROFERME

CHAPITRE 27

OBJECTIF

: CRÉER

DU SOL

entière : augmentation de la fertilité, stockage de carbone, impact sur le réchauffement climatique...

De la gestion des flux dépend la détérioration ou

l’aggradation de la fertilité. Si les flux d’intrants

sont inférieurs aux exportations et aux pertes, la parcelle se dégrade. Cette configuration domine l’agriculture contemporaine. Si les flux d’intrants sont équivalents aux exportations et aux pertes, la parcelle est à l'équilibre.

Si les flux d’intrants sont supérieurs aux

La conception permaculturelle de la Ferme du Bec

taires en matière organique. Il devient alors possible de créer de l’humus en quantité, relativement rapidement. Il convient d’ajouter que, comme ÉvO-

qué dans les chapitres précédents, la fertilité du sol ne dépend que partiellement des intrants, elle

est également favorisée par les bonnes pratiques

culturales et par l'intensité de la vie du sol.

aa .

INTRANTS b

à

LESSIVAGE

Lorsque les intrants sont inférieurs aux pertes et aux exportations, le sol se dégrade.

2 - L'ESPACE LIBÉRÉ (9 000 M?)

L'espace libéré ouvre tout un champ d’opportunités nouvelles, que n’autorise pas une gestion motorisée des cultures. Dans l’optique permaculturelle, les arbres sont privilégiés. Les 9 000 m° sont donc

plantés d’arbres fruitiers, sous diverses formes, en grand nombre si possible. Même la parcelle maraîchère peut être plantée en verger maraîcher. Le terrain est donc transformé en un vaste verger. Même si la parcelle est arborée, le champ des possibles reste vaste : diverses formes de petit élevage peuvent être pratiquées sous les arbres, des mares peuvent être créées, un habitat peut être construit. Il y a de l’espace pour des cultures en agroforesterie de plantes à biomasse, de céréales,

de légumineuses... FRUITS, PETITS FRUITS, CÉRÉALES, MIEL, PRODUITS ANIMAUX...

BIOMASSE, COMPOST...

da

Hellouin autorise des flux très largement excéden-

f CULTURES EXPORTÉES

ET FERTILITÉ

tions et aux pertes, la fertilité de la parcelle s’aggrace.

INTRANTS

DES 9 000 Me LIBÉRÉ ET

S DE L'EXTÉRIEUR DE LA FERME

CULTURES EXPORTÉES

pr “ESSIVASE

Lorsque les intrants sont supérieurs aux pertes et aux exportations, le sol s’aggrade.

Un système agro-sylvo-pastoral s’implante. De nombreuses

sources

de biomasse

sont poten-

tiellement disponibles. Les 9 000 m° libérés sont également un lieu de production, en complément

de la parcelle maraîchère (schéma n° 1). Une production agricole diversifiée se développe.

Lors de la création de la microferme, si nécessaire,

les 9 000 m° peuvent bénéficier d’apports de fertilité venant de l'extérieur (schéma n° 2). Les années suivantes, lorsque l’agroécosystème s’établit, ces apports extérieurs ne devraient plus être nécessaires, une fois le sol à l’équilibre.

Des circulations de nutriments s’établissent à l’in-

térieur de l’agroécosystème. Elles se développent au fil des ans (schéma n° 3).

VERGER

Ior'us@

TROISIÈME

Nous l’avons souvent évoqué dans ces pages, dans notre approche, créer du sol est un objectif à part

MICROFERME

MARAICHER PRÉ-VERGER FORÊT-JARDIN

HAIE FRUITIÈRE

CÉRÉALES MARES

HABITAT

275

276

PARTIE

IV

UNE APPROCHE

NATURELLE

DU SOL ET DE LA FERTILITÉ

m ur intensif ” de 1 000 9 000 M° libérés. Le “cœ qe. rs jou tou ra ite ess néc de cultures maraîchères que pour al. a ne 2), n° a hém (sc s apport or, s il béné cie des app menter les paillis, mai

3 - GESTION DE LA FERTILITÉ DE

L'ENSEMBLE DE LA MICROFERME : PHASES SUCCESSIVES ET DURABILITÉ Dans l'approche du Bec Hellouin, nous distinguons deux phases successives:

provenant des 9 000 m° libérés. si la biomasse uffisante, il provenant de l’espace libéré est ins uer Importer de à tin e peut être nécessair de con

l'extérieur de la micro. la biomasse provenant de hère, ferme au bénéfice de la parcelle maraîc

PREMIÈRE PHASE : CRÉER DU SOL

Cette première phase n’est indispensable que si le Sol initial est médiocre. Lors de l'implantation de la microferme, des apports extérieurs permettent de créer de l’humus (schéma n° 1). Une création rapide et importante d’humus n’est réellement possible que sur de petites surfaces, vu Pimportance des volumes de biomasse nécessaires.

SECONDE PHASE :

ENTRETENIR LA FERTILITÉ

qué que Dans notre contexte, nous avons remar de la rieur les flux de matières organiques à l'inté ceux que et , azotée e microferme sont à dominant principalement destinées à pailler les buttes de culture, et les matières carbonées à pailler Jes

Lorsque le sol est suffisamment riche, les apports extérieurs ne sont plus nécessaires sur les

| LA

MICROFERME

ÉVOLUE

À K VERS

L'AUTOFERTILITÉ Plus l’agroécosystème s’implante et gagne en maturité et en diversité, plus les ressources sont abondantes.

ANNÉE1 : PLANTATION

DES ARBRES

APPORTS DE FERTILITÉ PROVENANT DE L’ EXTÉRIEUR

DE LA MICROFERME

s

FLUX À L'INTÉRIEUR DE LA MICROFERME

NP. CPR

ORNE,

BERNIE

Sont à provenant de l'extérieur de lamicroferme sont s azotée res matiè dominante carbonée. Les

allées.

2 TAILLES DE HAIES, TONTE D'HERBES, ORTIES, ROSEAUX, CONSOUDE, k DÉJECTIONS ANIMALES, TOILETTES SÈCHES... FUMIER,

FEUILLES

MORTES,

BRF, FOUGÈRES...

L'augmentation des sources de biomasse à l'in-

térieur de la ferme diminue progressivement la dépendance aux ressources extérieures. Il devient

possible de concilier une production abondante et une amélioration constante de la fertilité.

ANNÉE 10 : LE VERGER ARRIVE À MATURITÉ FLUX À L'INTÉRIEUR DE LA MICROFERME

MARAÎCHAGE

ANNÉE 5 : LES ARBRES ENTRENT EN PRODUCTION

FLUX À L'INTÉRIEUR

DE LA MICROFERME

APPORTS DE FERTILITÉ

MARAÎCHAGE

PROVENANT DE L'EXTÉRIEUR PP DE LA MICROFERME MARAÎCHAGE

LES APPORTS DE FERTILITÉ PROVENANT DE L'EXTÉRI EUR DE LA MICROFERME NE SONT PLUS NÉCESSAIR ES

CHAPITRE

CONCLUSION En s'inspirant des écosystèmes naturels, la micro-

ferme permaculturelle, selon l'approche du Bec Hellouin, représente un milieu agricole riche de possibilités multiples. Elle évolue “naturellement” vers davantage de fertilité, et concilie productivité

et durabilité.

27

MICROFERME

: fournir Elle rend des services essentiels, en plus de L impact son qualité. de s des produits agricole

le climat, par la séquestration de carbone dans

sols et les arbres, est un aspect particulièremen

intéressant, qui demande à être étudié. C’est 1 un

des objectifs des études menées au Bec Hellouin.

Ces deux photos ont été prises au même endroit dans le “cœur intensif” de la ferme, à 9 ans d'écart.

LES FLUX

INVISIBLES

Pour clore ce chapitre, Perrine et moi voudrions

partager une conviction personnelle issue de notre expérience : Pune de nos missions essentielles au sein de la ferme est d’être des “organisateurs de flux”. Nous cherchons à favoriser et fluidifier les

échanges entre tous les composants du système. Ceci suppose une attention donnée à de très nombreux facteurs : l'optimisation du design (ouvrir un chemin, rapprocher deux activités, redessiner une clôture...), la prise en compte des besoins de chaque élément (créer une culture de plantes à biomasse à côté d’un jardin qui n’est pas suffisamment approvisionné, entourer un herbage d’une haie fourragère..).

La qualité des relations que nous pouvons établir

avec notre voisinage mérite tout autant notre attention. Ce dernier point mérite d’être souligné. On ne construit pas un système agraire résilient sans l’accompagner d’une “construction humaine”, invisible mais bien réelle. Une ferme n’est pas composée

uniquement de terres, de bâtiments, de plantes et d'animaux. Elle existe aussi sur le plan immatériel.

Les nombreux liens d’estime et de convivialité qui se tissent entre les paysans et leur environnement

humain, la réputation de sérieux et d’honnêteté, le

souci du travail bien fait conditionnent la qualité de l'insertion de la ferme dans son territoire, insertion qui est assurément un facteur déterminant de réusSite du projet, sur tous les plans.

Certains permaculteurs aspirent à une ferme qui

Soit un isolat. Pour eux, une autonomie totale est le “must”. Nous respectons ce point de vue mais

ne le partageons pas. Le postulat qu’une ferme ne doit pas dépendre du monde extérieur reflète plus une peur des autres qu’une réalité objective. Dans la nature, plus on échange, plus on est vivant. Lorsqu'une cellule va mourir, ses parois se rigidifient, ses échanges avec le milieu ambiant ralentissent jusqu’à cesser définitivement.

Dans un petit pays de campagne, les nouveaux arrivants ne sont pas toujours bien perçus. sur-

tout s’ils viennent de la ville et qu’ils font diffé-

remment ! Il faut le temps d’un apprivoisement. Des années peut-être. On oublie trop vite que les gens des campagnes ont subi pendant des siècles le mépris des gens des villes... Mais si l’on cherche humblement et courageusement à réaliser son rêve, plutôt que vouloir “aider à la transition” de son entourage (une attitude qui peut supposer que nous percevons inconsciemment nos voisins comme étant “dans l’erreur” et nous “dans le vrai”), alors il n’y a aucune raison pour que des relations conviviales ne se tissent pas. Ce sera la

meilleure façon de contribuer au bien-être de la communauté locale.

Dans les campagnes, il y a une “économie du don”

bien réelle, une tradition d’entraide et de solidarité qui permettait de tenir lors des années difficiles.

Bien des agriculteurs conventionnels nous ont aidés en réalisant ponctuellement des travaux chez

nous avec leurs engins, en nous vendant ou en nous offrant de la paille ou du foin. Si notre ferme

a survécu à d'innombrables difficultés, c’est grâce à tous les coups de main grands et petits qui nous

ont été généreusement offerts.

ET FERTILITÉ

277

28 MICROFERMES, CARBONE, CLIMAT En Afrique et en Amazonie, les bois proches des villages sont souvent tabous. Personne n’a le

droit d’y aller, sauf pour enterrer les morts. Cela permet la résilience des écosystèmes et sécurise lalimentation : quand le village manque de nourriture, le bois regorge de vie... Évidemment, tous

les enfants vont en cachette jouer dans ces forêts mystérieuses. Hervé Coves

Les objectifs de toute agriculture sont :

caractérisent le monde vivant, nous devrions être

d’assurer la sécurité alimentaire des populations ; 2. Permettre aux agriculteurs de vivre dignement de leur métier.

nombreuse tout en réparant la planète.

1. Produire des récoltes abondantes, permettant

Mais le monde change vite et il convient d’ajouter un nouvel objectif : 3. Exercer les activités agricoles dans le respect des frontières de la planète, en intégrant les enjeux sociaux et environnementaux spécifiques à ce début de millénaire :

- Érosion rapide des ressources.

- Augmentation de la population. - Changements climatiques. - Extinction de nombreuses espèces animales et végétales, etc. Notre rapport au temps ne peut rester circonscrit à une approche à très court terme. Les stratégies agricoles se doivent de tenir compte du long terme et des besoins de l’humanité de demain.

capables de nourrir durablement une population

Plantez une humble graine, elle a le potentiel incroyable de donner un arbre qui vivra des décennies, fournissant année après année de la biomasse et des fruits tout en créant du sol et en abritant des oiseaux. La rencontre invisible d’un ovule et d’un spermatozoïde peut donner naissance à un cheval de trait, une baleine bleue, un être humain... Telle est la magie du vivant : en organisant les ressources minérales et le carbone disponibles, il a la

capacité de croître au sein d’un monde fini.

Nous envisageons donc la fertilité en nous appuyant sur la stratégie organique évoquée au fil des précédents chapitres. Elle valorise les ressources vivantes et locales. Cette approche repose sur une vision holistique et considère la fertilité des espaces cultivés en lien avec tous les autres éléments

de la biosphère.

L'approche du sol et de la fertilité proposée dans ces pages cherche à prendre en considération tous ces paramètres. Il est moralement inacceptable que nos modes de vie et notre prospérité s’ac-

< Chaque microferme peut

compagnent de famines et de conflits hautement prévisibles pour les générations à venir.

En s’inspirant de la nature, la stratégie organique nous invite à intégrer la notion essentielle de complexité. Si la nature atteint un tel niveau d’efficacité, c’est parce qu’elle tend vers des systèmes toujours plus complexes.

éficace à sa petite échelle. Si

LA

SANS ÉQUIVALENT Notre approche, au Bec Hellouin, est en filiation

devenir un puits de carbone des millions de microfermes

MAGIE

DU

VIVANT

Mais il y a une bonne nouvelle, sur laquelle repose

les grandes exploitations

tout le contenu de ce manuel : à l’intérieur des frontières de plus en plus étroites de notre planète,

émettrice de gaz à effet de serre, nous augmenterions nos chances

ressources vivantes. Ce constat très simple nous a menés à formuler le concept de bio-abondance.

remplaçaient progressivement

industrielles, fortement

de stabiliser le climat mondial.

UNE EXPÉRIENCE AGRONOMIQUE

directe avec celle des jardiniers-maraîchers pari-

un certain type de ressources peut croître : les

siens du xix° siècle, La fertilité extraordinairement élevée des jardins parisiens était issue de ce qui

En nous appuyant sur les phénomènes qui

jardins des quantités considérables de fumier de

n'était pas encore baptisé “stratégie organique”.

Les jardiniers-maraîchers importaient dans leurs

280

PARTIE

IV

UNE APPROCHE

NATURELLE

DU SOL ET DE LA FERTILITÉ

cheval. Les témoignages écrits datant de cette

époque décrivent une pratique qui a totalement disparu : enrichir les parcelles maraîchères de

centaines de tonnes de fumier par hectare chaque année, et ce durant des décennies.

Les anciens

jardiniers-maraîchers parisiens ont nourri la capitale en utilisant des méthodes de culture d’une grande efficacité, qui n’ont pas été étudiées par l’agronomie contemporaine.

Les jardiniers-maraîchers parisiens ont donc pratiqué une “expérience agronomique” sans précédent, exceptionnelle à plusieurs titres : — Par les doses apportées.

— Par sa durée (plus d’un siècle !).

— Par son étendue (Paris et ses banlieues, soit des milliers de fermes).

Les apports étaient exclusivement constitués de

fumier de cheval (on peut penser que la cendre

des cuisinières à bois était également répandue). Cette “nourriture unique” était cependant capable de créer du sol et de soutenir une produc-

tion hors normes. Elle fournissait même la cha-

leur des couches chaudes qui permettaient aux jardiniers-maraîchers de proposer des fraises et des melons en avril ! Bien que de nombreux agronomes d’aujourd’hui soulignent les risques potentiels liés à des ap-

ports de matières organiques élevés dans la durée,

a contrario, tous les témoignages liés aux anciens jardins maraîchers parisiens attestent la très

grande efficacité de cette pratique et l'excellent état sanitaire des cultures.

Les sols créés grâce au fumier de cheval ont parfois traversé le xx° siècle. Il nous est arrivé

à plusieurs reprises d’accueillir à la ferme des

personnes s’étant installées dans un lotissement construit sur les anciennes terres maraîchères,

en périphérie des centres urbains. Ces personnes décrivaient avec émotion la terre noire et fertile de leur jardin. Dans le monde

anglo-saxon perdure une pro-

fonde admiration pour le modèle des anciens

. Rappelons du jardiniers-maraîchers français

es réalisé, c'est la mémoire des voyages d étud par les maraîchers

londoniens

auprès de leurs

confrères parisiens, au début du xx° siècle, Qui 4

suscité outre-Atlantique l'émergence de la micy, agriculture bio-intensive.

DU TEMPS DES CHEVAUX ET DES VOILIERS... révolue Ces pratiques viennent d’une époque omie l’agron par es étudié été pas et n’ont donc décalées ent fortem sont e. Elles porain contem par rapport aux approches de la fertilité qui pré. dominent aujourd’hui. Est-ce pour cela qu’elles

semblent si éloignées de ce qui est enseigné dans les écoles d’agriculture ? Les anciens maraîchers travaillaient en Sabots,

avec leurs bras et leur cheval, ils n’avaient pas

les moyens d’acheter des fertilisants issus de res.

sources extraites à l’autre bout du monde. Ces fertilisants, du reste, n’existaient pas à époque,

même si à la toute fin du xix° siècle des marins

héroïques franchissaient le cap Horn à bord de

leurs trois-mâts pour rapporter du guano des côtes chiliennes !

La stratégie organique que nous pratiquons au Bec Hellouin n’est pas une copie conforme de cette ancienne approche : les doses que nous ap-

portons sont bien inférieures et nous cherchons

à diversifier les apports. Notre proposition in-

tègre les connaissances contemporaines sur les

sols, que nous évitons de retourner. Toutefois, le

témoignage des jardiniers-maraîchers parisiens nous conforte dans le fait que la stratégie organique peut donner d’excellents résultats, à court, à moyen et à long terme.

DEUX STRATÉGIES AUX EFFETS CONTRASTÉS

L'ancien modèle fondé sur le recyclage des déchets organiques de la ville a été remplacé, au sortir de

la Première Guerre mondiale, par Pagriculture in-

dustrielle qui a élaboré un modèle de fertilisation radicalement différent, fondé sur la chimie et l’exploitation des ressources minières et du pétrole. Une approche que nous avons décrite comme la “stratégie minérale et fossile”.

Lorsque l’on considère ces deux modèles, leurs différences sautent aux yeux.

La stratégie minérale et fossile épuise les terres

et les ressources non renouvelables de la planète.

Elle ne peut fonctionner sans un système capitalis-

tique et mondialisé reposant sur une longue chaine d'opérateurs : les puits de pétrole et les raffine-

ries, les mines de phosphates, les usines de l'agro-

industrie, les distributeurs, les commerciaux... Elle

CHAPITRE 28

MICROFERMES, CARBONE, CLIMAT

engendre de multiples dépendances des agriculteurs vis-à-vis des banques, des agronomes et des techniciens, des cours du pétrole et d’un système

globalisé qui leur échappe

totalement. Elle est

condamnée à court où à moyen terme, ne serait-ce que par l'épuisement des ressources.

La stratégie organique repose sur la biomasse locale, une ressource renouvelable et durable si elle

est bien gérée, et sur la valorisation des déchets

organiques. Elle permet de créer des sols fertiles

et de produire en abondance et durablement. Cette

approche de la fertilité n’est pas limitée par des

ressources minières, elle ne dépend pas de réseaux

mondialisés et ne nécessite pas forcément des

achats monétarisés. Elle repose sur des réseaux

d'échanges à l’échelle des communautés locales

et peut aussi être mise en œuvre de manière individuelle, partout dans le monde. Elle est low-tech par essence et adaptée à de nombreux contextes. Elle ne nécessite pas de capitaux ni d’investisse-

ments élevés et facilite la viabilité écologique et

économique d’une petite agriculture paysanne et familiale. Gette stratégie organique semble la mieux adaptée pour nourrir les quelque 11 milliards d’êtres humains qui peupleront la Terre à l'horizon 2100.

DES QUESTIONS

NOUVELLES

- L'étude Maraîchage biologique permaculturel et performance économique a montré que la méthode du Bec Hellouin permettait d'atteindre un niveau

de production qui est, en valeur, environ 10 fois supérieur, par unité de surface, à celui des cultures

maraîchères mécanisées. Des études menées dans d’autres fermes ont confirmé ces premiers

Au Bec Hellouin, lorsque nous avons commencé

résultatss$.

tantes de fumier et d’autres ressources naturelles dans nos jardins, nous avons été surpris de subir nombre d’attaques virulentes et de mises en garde. Nous avons tenu bon parce qu’il nous semblait que nos détracteurs n’intégraient pas dans leur réflexion ces questions déterminantes pour notre avenir commun : comment créer des

-— Les premières études portant sur la biodiversité

à importer des quantités relativement impor-

sols fertiles susceptibles de nourrir durablement

les générations à venir ? Comment

stabiliser le

au sein de la ferme soulignent l'intérêt d’un milieu

renaturé. La ferme accueille plus de vers de terre, d’abeilles sauvages et d’oiseaux que les parcelles environnantes (voir p. 92 et 799). Le fait que la ferme devienne un agroécosystème complexe permet aux services écosystémiques de s’exprimer de manière plus intense et plus diversifiée.

climat en stockant du carbone organique dans les terres agricoles ?

- Une étude sur les sols a mis en évidence le fait

Toutefois, nous sommes plutôt du genre à douter et nous nous sommes sincèrement remis en

sur la capacité des sols à séquestrer du carbone

question : notre stratégie est-elle efficace à court

terme ? durable à long terme ? Y a-t-il un risque d’engendrer des maladies pour les plantes ? de

polluer les nappes phréatiques ? Bien vite, nous avons réalisé qu’il était indispensable de lancer

des programmes de recherche pour étudier nos

Sols et analyser les flux de matières organiques.

Les études déjà réalisées nous ont conduits à des constats vraiment encourageants, qui confirment scientifiquement l'efficacité d’une approche bio-inspirée. En reprenant le fil de ces recherches, Voici les principales découvertes qui ont jalonné Cet itinéraire :

que la stratégie organique avait un impact positif

majeur sur la biodisponibilité des nutriments et

organique*. Nous allons présenter cette étude dans les pages à venir. Au fil des ans et des travaux avec les chercheurs,

Perrine et moi avons commencé à percevoir qu’il se passait, dans la ferme, quelque chose qui dé-

passait chacun des programmes pris individuellement. C'était comme si chaque étude apportait un

morceau d’un vaste puzzle et qu’à force de poser des morceaux sur la table, nous découvrions une image d’ensemble qui prenait forme sous nos yeux, bien plus belle que tout ce que nous aurions pu imaginer. S’inspirer humblement de la vie nous fait pénétrer dans une spirale vertueuse où il nous semble gagner sur tous les plans.

A Prendre le meilleur

de différentes traditions

passées et le meilleur

de notre époque pour inventer des solutions qui permettront d’habiter durablement notre planète : telle est notre philosophie, notre obsession !

2g7

282

PARTIE

IV

UNE APPROCHE

NATURELLE

DU SOL ET DE LA FERTILITÉ

Demain, malgré les subventions dont il bénéficie. ré. enter il sera définitivement La matière organique est renouvelable Par nature. Bien souvent, elle ne coûte que la peine de la réco]. évoqué, ter. Il faut toutefois veiller, nous l'avons ements en isionn à ne pas surexploiter les approv durée biomasse. Sécuriser ces ressources dans la

dé. est une invitation à les diversifier, pour ne pas source. seule d’une pendre

La conception permaculturelle de la ferme s’accorde à merveille avec cet objectif. Une petite surface bien conçue permet d’accueillir des arbres, des buissons, des plantes cultivées, des animaux, des mares.. qui constituent autant de sources de biomasse.

UN

MILIEU

COMPLEXE

EST PLUS RÉSILIENT

Outre son impact sur la fertilité, cette conception

de la ferme offre d’autres avantages de taille :

A Nous avons une vénération pour les arbres, ce sont eux

qui sauveront la planète ! Mais ils ont bien souvent besoin que nous leur libérions de l’espace et que nous les plantions, surtout s’il s’agit d'arbres donnant une récolte

comestible pour les humains.

J'ai de la gratitude pour les

anciens qui ont planté et

formé ces trognes de tilleul.

DES RESSOURCES RENOUVELABLES ET DURABLES Fertiliser sa terre sans devoir acheter chaque année des sacs d’engrais ni utiliser des barils de pétrole : c’est le rêve de tout paysan sensible à lavenir de la planète ! Pouvoir se passer de produits à base de pétrole est également bénéfique pour l’économie de la ferme. Aux États-Unis, les agriculteurs achètent en moyenne 2,7 dollars de produits à base de pétrole pour 4 dollars de production®. Le coût des énergies fossiles augmentera inexorablement au cours des décennies à venir. Ce type d’agriculture est d’ores et déjà exsangue,

- La complexité du milieu et la biodiversité accrue qui en découle sont des facteurs de résilience face au changement climatique. Les arbres et les mares créent un microclimat, les sols stockent davantage d’eau, les plantes, les animaux et Les humains sont moins affectés par les épisodes ex-

trêmes de chaleur ou de froid, par les sécheresses ou les tempêtes.

- Les services écosystémiques peuvent se déployer, ils assurent de nombreuses fonctions. Au Bec, les limaces, par exemple, sont passées du rang de “souci numéro 1” à une question relativement accessoire. Lorsqu'une aube pluvieuse se lève, je ne vois plus Perrine en chemise de nuit dans le

Système agro-alimentaire et gaz à effet de serres Jean-Marc Jancovici propose une analyse détaillée des émissions de gaz à effet de serre liées à l'alimentation française. Premier constat, l’agriculture est le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre autres que le CO,. Ces gaz sont le méthane (CH), pour lequel l’agriculture est responsable des deux tiers des émissions nationales, et le protoxyde d’azote (N:O), pour lequel l’agriculture est responsable des trois quarts des émissions nationales.

Méthane et protoxyde d'azote sont dotés d’un pouvoir réchauffant respectivement 25 et 298 fois supérieurà

celui du CO,. Toutes activités confondues, le CH, et le N,0 représentent le tiers des émissions de gaz à effet

de serre en France. é

#

:

),

1

Au niveau national comme international, 1agriculture (au sens large du terme, déforestation incluse) est le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre (environ un quart des émissions mondiales). 2

:

.

1

Mais, si on poursuit la démonstration en ouvrant la réflexion à l'alimentation et non plus à la seule production agricole, il faut alors également prendre en compte le coût énergétique et les émissions de gaz à effet de serre

liés à la production des engrais et des pesticides, à! activité des industries agro-alimentaires, à la production

des emballages des aliments, au transport routier qui intervient à chaque étape de la filière agro-alimentaire,

au fonctionnement des grandes surfaces de distribution, au déplacement des consommateurs vers les lieux

d'achat, à la conservation, à la préparation et à la transformation à domicile des denrées alimentaires, et enfin au traitement des déchets produits par toute la filière. Au final, l'alimentation est responsable de plus de 30 % (près du tiers) des émissions françaises de gaz à effet de serre.

CH

jardin, un manteau jeté sur les épaules, occupée à

chasser les indésirables : les carabes, les hérissons,

les grenouilles et les poules se chargent dorénavant de maintenir l’équilibre !

LA SÉQUESTRATION

DE

CARBONE

La question de la séquestration de carbone est

plus difficile à aborder. La différence entre les limaces et le carbone, c’est qu’au quotidien on ne “voit” pas ce dernier. Pour que nous en prenions conscience, il a fallu que l’un des meilleurs spécia-

listes français de la question, Jean-Marc Jancovici, vienne à la ferme et nous fasse part de son enthousiasme au vu des perspectives offertes par ce modèle. Indéniablement, un petit territoire couvert d'arbres et dont le sol s’enrichit est un puits de carbone. Les arbres, les végétaux pérennes et la

APITRE 28 MICROFERMES, CARBONE, CLIMAT. 283

. . , : e - Diminuer les émanations de méthane issues d

l'élevage.

- Remplacer le pétrole par des biocarburants. Cette agriculture du carbone pourrait constituer

une source d’inspiration pour les agriculteurs francophones.

UN ENGAGEMENT

ÉCOLOGIQUE

ET POLITIQUE Une partie des responsables du monde agricole

ont maintenant compris que l’enrichissement des

sols en matière organique est une solution pour soustraire du carbone de l’atmosphère. La France,

dans le cadre de la cop 21, a même fixé un objectif:

augmenter chaque année la teneur en carbone des

terres agricoles d’un facteur de 4 pour 1000, ce

annuels aussi, mais leur carbone est libéré à très

qui permettrait d’absorber une part importante de nos émissions. Mais, comme toutes les bonnes intentions, celle-ci tarde à être mise en application.

À l'inverse, les terres agricoles dénudées sont émet-

La capacité des microfermes à agir efficacement contre les changements climatiques pourrait de-

matière organique des sols sont majoritairement constitués de carbone organique (les végétaux court terme).

trices de gaz à effet de serre. Le labour de 1 hectare de terre dégage 1 tonne de CO, ! L'alimentation contemporaine est responsable d’environ un tiers des émissions de gaz à effet de serre®. Selon certains spécialistes, la moitié du carbone contenu

dans les terres arables de la planète serait déjà passé des sols à l’atmosphères.

Depuis, nous nous passionnons pour cette thématique et collaborons avec Carbone 4, un bureau

d'études spécialisé, pour étudier les effets de nos

pratiques sur l’émission et la séquestration de carbone.

LES MICROFERMES, DES PUITS DE CARBONE

Planter des arbres et enrichir les terres agricoles

en matière organique sont deux leviers majeurs

pour stocker du carbone. Nous avons la possibilité de réaliser l’un comme l’autre dans nos jardins. Ces actions sont simples et peu coûteuses, voire

totalement gratuites. Elles nous permettent de nous engager concrètement en faveur du climat,

ans attendre que les instances politiques et économiques se décident enfin à prendre les mesures qui s'imposent.

LE “CARBON FARMING” Un mouvement en faveur d’une agriculture séquestrant du carbone, baptisé “carbon farming”, se développe dans le monde anglo-saxon. Il s’appuie

Sur les six piliers suivants :

-Stocker du carbone dans les arbres et les forêts. - Stocker du carbone dans les terres agricoles. -Stocker du carbone en produisant et en utilisant

du biochar.

- Abandonner la gestion des savanes par le feu.

venir un argument majeur en faveur de leur mul-

tiplication. Mais il faudrait au préalable pouvoir démontrer scientifiquement cette efficacité. Pour les végétaux, c’est facile : le fait que les arbres et la végétation pérenne constituent des puits de car-

bone est une évidence. Mais qu’en est-il du sol ?

Notre approche fondée sur des apports importants de matières organiques est-elle pertinente ?

Gette question est complexe. Si les matières organiques n’arrivaient pas dans nos jardins, le carbone qu’elles contiennent ne resterait-il pas tout simplement en place, sur le lieu de leur production ?

Y Nous plantons des arbres tous les ans, autant

que possible, en explorant parfois des formes

d’agroforesterie inédites,

comme la mini-forêt-jardin.

284

PARTIE IV

UNE APPROCHE

NATURELLE

DU SOL ET DE LA FERTILITÉ

Le cycle de vie de chaque matière demande à être

Examiné au cas par cas. Toutefois, valoriser la matière organique dans les terres agricoles permet d'atteindre au moins cinq objectifs principaux : — Protéger ces terres de la désertification.

— Augmenter les rendements. - Sécuriser l’alimentation des communautés locales. - Améliorer la vie du sol. — Stocker durablement du carbone.

Il y a donc beaucoup de sens à rediriger vers les terres cultivées les déchets de nos sociétés et à concevoir des sources d’approvisionnement durables au sein de nos fermes. Rappelons que nos sols étaient, lorsque nous avons pris le statut d’agriculteurs fin 2006, considérés

comme relativement impropres aux cultures ma-

raîchères. Selon une responsable de la Chambre d'agriculture qui les avait analysés, nous avions probablement les plus mauvais sols maraîchers de la région. Les résultats qui suivent sont d’autant plus encourageants.

TONNES DE CARBONE ORGANIQUE/HECTARE CULTIVÉ

| Stocks de carbone organiques 90

UNE ÉTUDE APPROFONDIEME

SUR

LES

SOLS

DE

LA

FER

essentielle à nos yeux Gette question est tellement

euse que nous avons accueilli comme une merveill u Lièg de sité iver l'un de ion osit nouvelle la prop réaliser de e) giqu (Bel Tech io o-B Agr Gemblouxation de car. une étude approfondie sur la séquestr ferme du Bec la bone organique au sein des sols de . Hellouin, en s’appuyant sur les dernières technolo ques prati des e uenc Infl e, gies disponibles. Cette étud

de la Ferme du Bec Hellouin sur la fertilité et la matière

organique du sol, a été conduite en 2016 et 2017 par

Valentin Sohy, Félix de Tombeur et Jean-Thomas

CornélisS. Elle a permis de comparer plusieurs sols

provenant de parcelles géographiquement toutes

proches : la prairie jouxtant les jardins, une terre

agricole cultivée de manière conventionnelle, située à la sortie de la vallée, et quatre jardins de la ferme.

CARBONE ORGANIQUE La capacité de ces différents sols à séquestrer du carbone organique est la suivante : sans surprise, la parcelle cultivée de manière conventionnelle s'inscrit en bas du classement. Viennent ensuite la prairie (les herbages sont réputés pour leur taux de matière organique élevé), puis les différents espaces de la ferme.

Les concentrations en carbone organique des

80

terres de nos jardins sont, en moyenne, 6 fois plus

importantes que celles du sol cultivé en agriculture

70

conventionnelle.

60 50

En comparant la prairie témoin et nos espaces cultivés, qui étaient à l’état de prairie il y a quelques années, l'étude a souligné que la vitesse d’enrichissement des sols de la ferme en carbone organique

40 30

est de 7 à 26 fois supérieure à lobjectif des 4 pour

CONVENTIONNEL

PÂTURE

1 000 fixé par l'INRA ! Le taux de carbone organique augmente jusqu’à 10 % par an.

FORÊT-JARDIN FERME

PLANCHE DU BEC HELLOUIN

Ceci constitue une information de grande importance : la stratégie organique, associée aux

L'objectif des 4 pour 1 000% L'initiative 4 pour 1 000 est une initiative internationale lancée par la France en décembre 2015 à l’occasion de la cop 21. Toujours actuelle, elle s’inscrit dans le Plan mondial d’action pour le climat, rédigé et adoptéà

l'issue de la cop 22. L'initiative vise à concilier la réponse aux objectifs de sécurité alimentaire et la lutte contre le changement climatique par le biais d’une agriculture durable. L'initiative 4 pour 1 000 vise à obtenir un taux annuel de croissance du stock de carbone dans les sols de 0,4? %, » soit 4 %o, à Cet objectif n’a pas été fixé arbitrairement. Il correspond à la quantité de carbone à stocker g « 14 Su % _ ns de manière à stopper l'augmentation atmosphérique du taux de CO; lié aux activités humaines. Cette initiative

n'est pas une fin en soi. Elle s’inscrit en complément d'efforts indispensables de réduction en amont des

émissions de gaz à effet de serre.

Répondre à l’objectif des 4 pour 1 000 suppose lamise en Œuvre de Pratiques agricoles adaptées : arrêt de la

déforestation, reforestation et agroforesterie (plantation d’arbres, de haïies...), gestion durable des pâturages,

couverture des sols, diminution du travail des sols, amendements des sols à base de fumier et de compost,

restauration des terres dégradées... Les sols ainsi améliorés s'enrichiront en matière organique, séquestreront

du carbone tout en redevenant fertiles et aptes à soutenir une production agricole quantitative et qualitative.

CHAPITRE 28 MICROFERMES, CARBONE, CLIMAT 285 ES

léments biodisponibles Os

techniques de micro-agriculture décrites dans ce

manuel, permet de concilier une production très

élevée et une amélioration exceptionnellement

rapide des sols. La performance ne s’atteint pas

MINÉRAUX

BIODISPONIBLES

La même étude s’est également intéressée aux nutriments contenus dans les différents échantillons

mg/100 g

au détriment de la durabilité, bien au contraire.

de sols. Là encore, les résultats sont très nettement en faveur de nos pratiques. La biodisponibilité des

minéraux est beaucoup plus importante dans nos

0

différents jardins que dans les terres cultivées de manière conventionnelle et dans la prairie. La stra-

Tadremientes

tégie organique se révèle donc plus efficace que

PÂTURE

M PHOSPHORE BIODISPONIBLE

l'apport d’amendements et d’engrais énergivores et non renouvelables.

FORÊT-JARDIN

FERME DU BEC HELLOUIN

D POTASSIUM BIODISPONIBLE

PLANCHE

M MAGNÉSIUM BIODISPONIBLE

Moyenne des quantités de calcium biodisponible mesurées

Il est intéressant de noter que le sol de la forêtjardin, qui n’a reçu qu’un seul apport de compost en 2009 et aucun intrant par la suite, révèle des taux élevés en nutriments biodisponibles. Ceci

1600

prêche en faveur de l’efficacité écologique de la

1400

forêt jardinée.

STRATÉGIE ORGANIQUE ET MINÉRAUX

Ces données semblent confirmer le fait que les

apports de matière organique ont un effet levier puissant sur la biodisponibilité des minéraux. Ceci

mg/100 g

1200 1000 800 600 400

peut s’expliquer de la manière suivante : - La matière organique apportée comporte des

200

minéraux ;

PÂTURE

- La couverture du sol et l’enrichissement en matière organique favorisent la vie du sol, qui dégrade la roche-mère et libère des minéraux;

cec en fonction des teneurs en carbone organique

sur une année engendrent une plus grande densité de racines dans le sol, qui dégradent elles aussi la

Le carré rouge représente les valeurs moyennes de la parcelle en conventionnel, le triangle

vert représente les valeurs moyennes de la pâture et les ronds bleus représentent les

valeurs moyennes des parcelles de la Ferme du Bec Hellouin. La ligne rouge est une régression polynomiale de degré 2 réalisée sur l’ensemble de ces points.

megq/100 g

roche-mère et libèrent des minéraux.

LA CAPACITÉ D'ÉCHANGE

PLANCHE

-

de plantes, le nombre élevé de rotations réalisées

CATIONIQUE (CEC) L'étude a aussi mis en évidence le fait que l’aug-

BUTTE

FERME DU BEC HELLOUIN

- L'intensification des cultures, les associations

Ces constatations nous amènent à nous interroger : est-il forcément nécessaire d’apporter des amendements et engrais minéraux aux sols cultivés ? Des apports importants de matière organique, surtout en phase de démarrage, pourraient-ils suffire à leur équilibre ?

FORÊT-JARDIN

y = - 0,0073x2 + 0,9493x + 1,8208 R?=

mentation du stock de carbone organique dans les

Sols de nos espaces cultivés entraîne une augmen-

lation de la capacité d'échange cationique (GEC).

Citons l'étude : “La capacité d'échange cationique (ec) représente le potentiel d’un sol à stocker des éléments nutritifs chargés positivement Cl.

Plus la cec sera grande, plus le sol pourra contenir

0

10

20

30

40

50

60

Concentration en gaz carbonique (g/kg) M CONVENTIONNEL

À PÂTURE

©

FERME DU BEC HELLOUIN

70



286

PARTIE IV

UNE APPROCHE

NATURELLE

DU SOL ET DE LA FERTILITÉ

cc et taux de saturation en bases

biodisponibles y sont beaucoup plus importantes

La hauteur totale des barres représente la valeur de la cec, La quantité de nutriments

présente dans le complexe d'échange est égale à la hauteur totale des barres moins le bleu clair (ions acides). Le taux de saturation en bases est le ratio entre la quantité de nutriments divisée par la CEc. K = potassium (bleu) ; Mg = magnési um (rouge) ; Na = sodium (vert) ; Ca = calcium (mauve).

agricoup plus importante que dans la parcelle en pas culture conventionnelle. Elle n’est toutefois

de saturation en bases est plus important dans les parcelles de la Ferme du Bec Hellouin que dans la parcelle « pâture ». Dans tous les cas, cela semble

35

permis par la gestion des résidus de cultures et par

30 meq/100 g

nt beau pacité d'échange cationique) y est égaleme

différente de celle de la pâture. Par contre, le taux

40

les apports de matière organique fraîche sur les

25

sols de la ferme. Ces pratiques proposent donc

un moyen d'amener les sols à un excellent état

20

de fertilité tout en prônant l’utilisation exclusive de fertilisants organiques.

15 10 5 oO

que dans la parcelle en agriculture conventionnelle (caet dans la parcelle « pâture ». De plus, la cEc

PÂTURE

FORÊT-JARDIN

BUTTE

PLANCHE

FERME DU BEC HELLOUIN ŒKCEC

D’après une étude belge,

les pratiques culturales

M

MgCEC

I

NaCEC

M

Ca CEC

[M

IONS ACIDES

de nutriments. Les études réalisées sur la cec ont montré qu’elle est proportionnelle aux teneurs en argile des sols ainsi qu’aux teneurs en matière organique. Dans le cadre de cette étude, aucune corrélation entre la teneur en argile et la cEc n’a pu être mise en évidence. Par contre, le graphique ci-dessus montre bien l’influence des quantités de carbone organique (et donc de la matière organique) sur les valeurs de la cec. Le matière organique semble jouer un rôle plus important que les argiles dans le fonctionnement du sol[...]. Le taux de saturation en bases

de la Ferme du Bec Hellouin permettent

des trois parcelles de la Ferme du Bec Hellouin est de 100 #5.”

un excellent état de oc \

Ces résultats sous ont surpris car la CEC de nos sols était basse à l’origine et nos sols manquent

d’“amener les sols à

fertilité tout en prônant l’utilisation exclusive de

fertilisants organiques”,

|

|

d'argile. Faut-il en déduire que des apports de matière organique permettent à eux seuls, indé-

pendamment de la teneur en argile des sols, d’augmenter la cec ? Cette information est importante

car recourir à des apports d’argile, même s’il s’agit d’une ressource naturelle, s’inscrit dans une lo-

D’autre part, les pratiques de la ferme montrent un fort potentiel d'augmentation des stocks de carbone organique dans les sols avec des taux de stockage allant de 7 à 26 fois l’objectif des « 4 pour 1 000 » dans les 10 premiers centimètres de sol, et ce malgré des concentrations en carbone organique dans les sols déjà importantes avant la mise en place des cultures. À contrario, le sol de la parcelle en agriculture conventionnelle présente des concentrations en carbone organique particulièrement basses, ce qui est en accord avec la

tendance générale observée dans les sols gérés suivant ces pratiques.

Loin d’avoir la prétention d’évaluer la pertinence de lentièreté du système proposé par la Ferme du Bec Hellouin, cette étude montre toutefois que les pratiques qui y sont implémentées ont un fort potentiel bénéfique sur Pétat des sols et sur Vaugmentation des services écosystémiques rendus par

ceux-cis5.”

Les résultats de cette première étude sont donc particulièrement encourageants. Ce programme a toutefois soulevé des questions : le carbone organique est-il séquestré durablement ? Si cette approche se généralisait, disposerait-on de suffisamment de matière organique pour fertiliser toutes les fermes ?

gique extractive au coût environnemental élevé.

DISPONIBILITÉ

CONDUIRE LES UN EXCELLENT

Les éléments dont nous disposons ne nous font pas craindre une pénurie de matière organique, dans le contexte des zones tempérées et tropic ales,

SOLS ÉTAT

VERS DE FERTILITÉ

Dans les conclusions de l’étude, les chercheurs ont

fait le constat suivant :

“L'étude des sols de la Ferme du Bec Hellouin et la comparaison avec une pâture et une parcelle en agriculture conventionnelle ont donné des résultats clairs et marqués. Tout d’abord, les pratiques de la Ferme du Bec Hellouin ont un effet positif sur la fertilité du sol. Les quantités d’éléments

DE LA MATIÈRE ORGANIQUE

pour les raisons suivantes (en milie u désertique,

la question se pose différemment) : — Des quantités élevées de matière organique ne sont nécessaires que durant la phase 1 de création

de sol. Ensuite, ces apports peuvent diminuer. - Les terres maraîchères sont les plus gour mandes

en matière organique, les autres cultures en sont moins demandeuses.

=

eee eee

CHAPITRE 2 8

MICROFERMES,

CARBONE,

CLIMAT

287

- Notre approche, en concentrant les cultur es, diminue les surfaces à fertiliser.

- Conçue selon les Principes de la permaculture, une ferme devrait être en mesure de couvrir ses besoins en matière organique, à moyen terme. -Ilexiste d'importants gisements potent iels dans

le compostage de nos déchets organiques, qui n’est encore que très partiellement réalisé, Les déchets

verts d’une ville d’une certaine importance, comme

Rouen et Caen, produisent à eux seuls plusieurs dizaines de milliers de tonnes de compost.

- Le compostage du “fumier humain” n’est pas réalisé actuellement. Il pourrait l’être en cas de besoin. UN TRIPLE IMPACT POSITIF SUR LE CLIMAT En matière de climat, la pertinence de la stratégie organique semble évidente, pour trois raisons essentielles : - Les sols qui reçoivent des paillages et des apports en compost généreux constituent des puits

de carbone. - La stratégie organique permet d'éviter de recourir à des intrants fortement consommateurs d'énergies fossiles, nécessitant des transports sur de longues distances. En d’autres termes, on économise du pétrole.

< Concentrer ses soins sur le sol permet de prévenir toute une chaîne de difficultés et de produire des légumes sains et en bonne santé.

- Elle permet de diminuer le recours à la mécani-

territoire s’enrichit également grâce au couvert arboré et aux animaux. C’est donc la totalité de la ferme qui constitue un puits de carbone.

Ces bénéfices sont d’autant plus forts que les approvisionnements en matière organique sont aussi locaux que possible.

LA STRATÉGIE ORGANIQUE ENTRAÎNE-T-ELLE UN RISQUE

sation agricole, voire de s’en affranchir, ce qui est encore une source d'économie de pétrole.

Il faut souligner que, si l’étude Influence des pratiques de la Ferme du Bec Hellouin sur la fertilité et la matière organique du sol n’a porté que sur

les espaces cultivés de la ferme, le reste de son

DE POLLUTION ? Dans nombre de régions agricoles, le recours aux engrais azotés de synthèse et l’essor des élevages industriels ont engendré des pollutions importantes des nappes phréatiques, des cours d’eau et

du littoral (le tristement célèbre phénomène des

Une expérience étonnante au Costa Rica® Loin du contexte normand, l'expérience suivante atteste le potentiel d’un apport important de matière

organique.

Au milieu des années 1990, deux écologistes de l’université de Pennsylvanie ont souhaité tester le potentiel de déchets issus de l’industrie alimentaire pour restaurer des écosystèmes dégradés. Ils ont fait déverser

12 000 tonnes de pelures d’oranges (plus de 1 000 camions !), fournies Par une entreprise costaricienne de production de jus d’orange, sur 3 hectares d’une parcelle fortement dégradée. Initialement recouverte

d'une forêt tropicale humide, cette parcelle, située au Nord du Costa Rica, avait été déforestée par le feu puis surpâturée. Son sol était extrêmement compact et pauvre.

Séize années plus tard, sans à utre apport, la zone qui avait reçu les déchets d’oranges est métamorphosée. . Elle porte une végétation luxuriant e qui abrite une importante biodiversité En COMparaison avec la parcelle té ères y est 3 fois plus importante. s a diversi des espèce de plantes foresti témoin qui n’a reçu aucun apport, l

La biomasse en bois a augmenté de 176 % tandis que la fertilité du sol s’est considérablement améliorée icronutriments, augmentation potentielle de la séquestration du (augmentation des taux de macro- et de m Carbone dans le sol...). | éri

de ‘ déchets issus de : l’industrie alimentaire ‘ : erspectives in téressantes. La valorisation de restaurer les forêts tropicales tout en séquestrant d'importantes

Se expérience ouvre des PEISP Pourrait, dans certaines conditions, permettre Quantités de carbone.

Notre planète est un monde fini, entouré de

frontières cosmiques infranchissables.

Mais à l’intérieur de

cet isolat, un certain type de ressources a le pouvoir de croître et de se renouveler : les

ressources biologiques.

288

PARTIE IV

UNE APPROCHE

NATURELLE

DU SOL ET DE LA FERTILITÉ

algues vertes). Nous nous sommes donc posé la question suivante : la stratégie organique pour-

la rivière l'eau de la mare, qui est alimentée par

pollutions aux nitrates et aux phosphates ?

quand elles sortent de la ferme que quand elles y

rait-elle avoir un effet similaire et engendrer des

Nous rêvons d’une ferme zéro carbone. Mais, à

l'échelle de notre petit

territoire, il est difficile de calculer le carbone

séquestré dans les sols

et les arbres ! Dans le doute, nous cherchons

tous les moyens de réduire nos émissions et plantons des arbres en grand nombre.

Cette question nous a longuement taraudés : il serait intolérable, en effet, que nos pratiques puissent avoir des effets négatifs marqués sur l’environnement. Nous avons discuté de cet aspect avec Claude et Lydia Bourguignon durant leurs séjours à la ferme. Selon eux, nos sols sont vulnérables aux phénomènes de lessivage et de lixivia-

tion, par leur structure limoneuse fine. Toutefois,

la stratégie organique ne devrait pas entraîner de risques de pollution pour deux raisons : — La matière organique est déposée à la surface des buttes de culture, de préférence fraîche par les paillis ou sous forme de compost. Dans les deux cas, les nutriments ne sont pas immédiatement disponibles : ils doivent au préalable passer par les cycles de transformation du sol avant de devenir biodisponibles pour les plantes (sous forme soluble). La libération des nutriments, et notamment de l’azote, est lente et progressive. Elle s’interrompt en hiver, durant la saison où les pluies sont les plus fortes, car les organismes du sol sont alors largement inactifs. — Les nutriments progressivement libérés sont absorbés au fur et à mesure par les cultures qui occupent les buttes, et ce d’autant mieux que ces cultures sont denses et leurs systèmes racinaires étagés. Lydia et Claude ont souligné avec insistance qu'il n’y a guère de comparaison possible entre les engrais de synthèse, qui apportent des nutriments

Nous avons été rassurés de constater que les eaux

de la rivière ne sont pas plus chargées en nitrates entrent et que, paradoxalement, l’eau de la mare

présente une teneur en nitrates inférieure à celle de la rivière, alors même qu’elle est située à proximité immédiate des buttes couvertes de compost ! Ce taux inférieur est peut-être dû aux roseaux qui poussent dans la mare, qui constituent eux-mêmes une source de biomasse.

Cette expérience nous a largement rassurés sur l’absence de risques de notre stratégie organique,

à condition bien évidemment qu’elle soit mise en

œuvre avec bon sens.

UNE FERME ZÉRO CARBONE Plus nous avançons vers un début de compréhension de ces sujets complexes, plus nous réalisons que, si nos pratiques dans les jardins se révèlent efficaces en matière de carbone, nos autres activités sont émettrices de gaz à effet de serre et

contribuent à dégrader la planète. À peu près tout

ce que nous réalisons sur le plan professionnel ou personnel participe au changement climatique : les trajets quotidiens de notre équipe pour venir au travail, la livraison de nos légumes, nos recherches sur Internet, les trajets pour conduire les enfants à Pécole, l'écriture de ce manuel... Nous avons cherché comment remplacer l’utilisation d’énergies fossiles par des solutions moins polluantes : un véhicule hybride, l'installation de poêles à bois, le remplacement des moteurs thermiques par des outils manuels, la suppression d’une chaudière au fuel...

solubles immédiatement disponibles, et la matière

Nous avons changé de fournisseur d’électricité et opté pour Énercoop, une coopérative qui vend exclusivement de l'électricité d’origine renouvelable. Toute la ferme et la maison familiale sont maintenant alimentées en énergie verte.

lant ; les lisiers, concentrés en nitrates rapidement

Le bureau d’études Carbone 4 a réalisé un bilan

organique, dont les effets sont progressifs. Bien évidemment, chaque matière organique a ses caractéristiques propres et il convient de rester vigidisponibles, sont connus pour les pollutions qu’ils engendrent. Nous n’y avons pas recours. Pour être à peu près certains que nous ne faisons pas courir de risques à notre environnement, nous

avons fait procéder à des analyses d’eau. Nous avons décidé de pousser expérience aussi loin que possible : sur toutes les buttes de culture de la grande île-jardin, nous avons déposé 5 centimètres d'épaisseur de compost riche en azote, soit la dose considérable de 25 kilos par mètre carré. Nous avons ensuite laissé pendant quatre mois ces buttes à nu, durant tout le printemps, saison pluvieuse en Normandie. Si lessivage des nitrates il y avait, nous aurions dû les retrouver dans les eaux

de la mare qui entoure l’île. Puis nous avons fait analyser l’eau de la rivière qui traverse la ferme et

carbone de toutes nos activités : production agricole, formations, programmes de recherche... Ilen est ressorti que la principale source d'émissions de carbone liée à la ferme est représentée par les trajets des milliers de visiteurs qui viennent au Bec Hellouin chaque année, Ces émissions sont difficilement compressibles, à moins de referm er

nos portes...

En 2015, nous avons pris une décision : produire des fruits et légumes zéro carbone - et même étendre cette démarche à l’ensemble de nos activités. La diminution de notre empreinte carbone passe, d’une part, par les économies d’énergie que

nous pouvons réaliser, poste par poste, et, d’autre

Part, par la compensation de la part incompressible grâce à la plantation d’arbres.

ge

CHAPITRE

Nous avons alors cherché à calculer combien d'arbres il faudrait planter chaque année pour effacer notre empreinte carbone. Là, nous nous

sommes heurtés à une difficulté sérieuse : s’il est re-

coco abbéliés. ares

xIx" siècle, se révèle pertinente et efficace, ne fois

adaptée à notre époque. Les anciens maraichers se disaient capables “de nourrir 1 000 personnes

les arbres est plus complexe, principalement parce

que ce type de calcul est encore rare et peu docu-

héritage dans les jardins du Bec Hellouin, avec en prime la joie de constater les nombreuses exter-

organisations expertes en carbone et en agrofores-

pour la biodiversité et le climat.

terie, mais aucune n’a été en capacité de réaliser ces

calculs qui doivent être effectués arbre par arbre, ou presque : le carbone stocké dans un pommier diffère de celui d’un chêne ou d’une haie... À ce jour, nous

n'avons pas encore franchi cet obstacle.

Nous n'avons donc pas encore acquis la certitude que notre empreinte carbone est neutralisée mais

nous plantons chaque année de nouveaux arbres

(plus de 3 000 arbres fruitiers, fourragers et buissons en 2017 et 2018), en espérant pouvoir bientôt

avancer sur Ce sujet qui nous tient vraiment à cœur. és

inspirée des jardiniers-maraîchers parisiens du

Sur un terrain qui n’en nourrirait pas 50 par les

menté. Nous avons pour partenaires sur ce sujet des

ct nb he

MICROFERMES, CARBONE, CLIMAT

lativement facile à un cabinet Spécialisé de calculer

les émissions, quantifier le carbone séquestré par

D

28

UNE VOIE PROMETTEUSE

À EXPLORER

Dans les pages qui précèdent, nous avons relaté comment la stratégie organique, une solution

procédés ordinaires”, On retrouve une part de cet

nalités positives de cette approche, notamment

Notre modeste expérience ne bénéficie que de quelques années de recul. Nous avons été honorës par la confiance des chercheurs qui ont conduit les études évoquées plus haut. Ils apportent un début de validation scientifique de la stratégie organique. Il ne faudrait pas en déduire toutefois que nous

avons fait le tour du sujet, nous en sommes aux premiers pas : de nombreuses

questions

restent

sans réponse et il serait souhaitable de multiplier les études dans des contextes variés. Nous invitons les agronomes à considérer les informations données dans ces pages comme de simples indications, montrant qu’une voie prometteuse semble s'offrir à nous et qu’il convient de l’explorer. Chercheurs et paysans, nous avons besoin les uns des autres pour avancer.

A Nous sommes fortement demandeurs de collaboration avec des organismes de recherche scientifique, afin de poser des repères objectifs sur les nouvelles pratiques de l’écoculture.

289

7

me

NOTES INTRODUCTION. VIVRE 1, Mail du 1° février 2017,

AVEC

LA TERRE

2. Lire à ce sujet le passionnant livre de Pablo Servigne

ct Raphaël Stevens, Comment tout peut s'effondrer, Petit manuel de collapsologie à l'usage des générations présentes, Seuil, Paris, 2015.

3.1.-G. Moreau et Jean-Jacques Daverne, Manuel pratique

de la culture maraîchère de Paris, éd. originale, Vve Bouchard-Huzard, Paris, 1845 (rééd, 2016). 4. Patrick Whitefield, The Earth Care Manual, À Permaculture Handbook for Britain and Other Temperate Climates, Permanent Publications, Petersfield, 2005,

p.23. 5. Dans ce manuel, le terme “viabilité” doit être compris dans son sens premier tel que défini dans le dictionnaire : “état de ce qui peut se développer”, de ce “qui présente les conditions nécessaires pour durer”. Le Robert Micro, Dictionnaire d'apprentissage de la langue française, Le Robert, Paris, 1998, p. 1404. 6. FNAB et ITAB, Communications personnelles, 2017. 7. Perrine et Charles Hervé-Gruyer, Permaculture. Guérir la Terre, nourrir les hommes, Actes Sud, Arles, 2014.

1. NOURRIR LES HOMMES, GUÉRIR LA TERRE 1. Lydia et Claude Bourguignon, Manifeste pour une

22, En 2016, après dix années de relative régression, les chiffres de la faim sont de nouveau en hausse : 816 millions de personnes, soit 11 % de la population mondiale, souffrent actucllement de la faim. Plus de 150 millions d'enfants de moins de cinq ans sont porteurs d’un retard de croissance, Les deux causes principales identifiées comme étant à l’origine de cette augmentation sont la recrudescence des conflits et les changements climatiques. Les chiffres de la faim sont systématiquement plus importants dans les zones soumises à des conflits. En parallèle, les proportions d’enfants en surpoids et d'adultes obèses ne cessent d’augmenter à travers le monde, Pauvreté et changement profond des habitudes alimentaires expliquent ces évolutions préoccupantes. D'après ArRD, “La faim progresse de nouveau dans le monde”, Goodplanet Info, 2017, www.goodplanet.info/ actualite/2017/09/15/faim-progresse-de-nouveau-monde/. 23. Malgré l’effondrement progressif des agrosystèmes, l'agriculture industrielle continue de produire car elle bénéficie encore de quantités importantes de pétrole bon marché. Mais qu’en sera-t-il demain, lorsqu’elle sera progressivement privée de cette énergie ? Quelles alternatives s’offrent à nous ? Cette question a été développée dans notre livre : Perrine et Charles

locales et peu connues, signalons l'ouvrage d’Éric Mollard et Annie Walter, Agricultures singulières, RD Éditions, Bondy, 2008. I] décrit plusieurs dizaines de pratiques traditionnelles originales, sur tous les continents. 8. Joseph Pousset, Traité d’agroécologie. Pour une agriculture naturelle, France agricole, Paris, 2012, p. 5.

9. Matthieu Calame, La Tourmente alimentaire. Pour une

politique agricole mondiale, Éditions Charles Léopold Mayer, Paris, 2008, p. 26. Matthieu Calame dirige la Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de

l'Homme, qui dispose, à Villarceaux, d’un vaste domaine

agricole où sont testées des pratiques agroécologiques comme l’agroforesterie. Son livre est du plus grand intérêt, notamment pour le regard critique et très documenté qu’il porte sur l’agriculture occidentale. 10. Ibid., p. 28, 11. Janine M, Benyus, Biomimétisme. Quand la nature

inspire des innovations durables, Rue de l'Échiquier, Paris, 2011, p. 48,

12, Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les

champs. Pour retrouver une agriculture saine, Sang de la

Terre, Paris, 2015, p. 99.

13, Matthieu Calame, op. cit., p. 33. 14. Platon, Critias, cité in fbid., p. 35.

15, Source : Wistenbildung-Ükozid, 1992, extrait cité in Zepp Holzer, Desert or Paradise, Permanent Publications, East Meon, 2011, p. 29.

16. Matthieu Calame, op. cit., p. 43. 17. Olivier de Serres, Le Théâtre d'agriculture et message des champs, Actes Sud, Arles, 2001, P. 71.

18, John Jeavons cité par Dominique Guillet, Planète Terre : planète Désert ?, Kokopelli Semences, 2007, kokopelli-semences.fr/articles/ Planete_terre_planete_desert#o. 19, Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les

champs, op. cit, p. 38 et 99.

20. Marthieu Calame, op. cit. p. 44-46. 21. Perrine et Charles Hervé-Gruyer, op. cit, p. 288.

fin d’études présenté en vue de l’obtention du diplôme

de master bio-ingénieur en sciences et technologies de l’environnement, travail encadré par Jean-Thomas

Cornélis, Université de Liège, 2017.

25. Mail du 1°" février 2017. 26. Jean-Marie Pelt, Au fond de mon jardin, Fayard, Paris,

1992, p. 31. 27. Perrine et Charles Hervé-Gruyer, op. cit.

30. Johan Rockstrôm, Will Steffen, Kevin Noone, Âsa

7. Pour ceux qui s'intéressent à des formes d’agricultures

les-rapports-scientifiques/. Valentin Sohy, Étude des aspects quantitatifs et qualitatifs sur de l'influence des pratiques de maraîchage bio-intensif la dynamique de la matière organique du sol, travail de

45. Eskani Siruguet, Définition d’une problématique de

28. Théodore Monod, L’Émeraude des Gamarantes, Actes

6. À ce sujet, voir ibid., p. 95.

de Liège, 2017, www.fermedubec.com/la-recherche/

24. Janine M. Benyus, op. cit.

2. Cité in Anna Lee Walters, L'Esprit des Indiens, trad. Danièle et Pierre Bondil, Casterman, Tournai, 1990, P. 114. 3. L'apparition des Homo sapiens remonte à 150 000 ans environ. l'humanité, Albin Michel, Paris, 2015, p. 27. 5: Ibid., p. 93.

et Luc Devaux, Étude des flux de matières organiques

de la Ferme du Bec Hellouin en 2016, Institut Sylva, 2017, www.fermedubec.com/la-recherche/ les-rapports-scientifiques/, 43. Camille Joyeux et Louise Géhin, Sol et fertilité Analyses des sols de la Ferme biologique du Bec Hellouin par Claude et Lydia Bourguignon, Institut Sylva, 2017, www.fermedubec.com/la-recherche/ les-rapports-scientifiques/. 44. Valentin Sohy, Félix de Tombeur, Jean-Thomas Cornélis, Influence des pratiques de la Ferme du Bec Hellouin sur la fertilité et la matière organique du sol, Institut Sylva, Gembloux Agro-Bio Tech-Université

Hervé-Gruyer, op. cit.

agriculture durable, Actes Sud, Arles, 2017, p. 19-20.

4. Yuval Noah Harari, Sapiens. Une brève histoire de

qualitatives ét modélisation, thèse de doctorat en sciencen agronomiquen, sous la direction de François Léger, Université Paris-Saclay, 2016, 42. Louise Géhin, François Léger, Margaux Villebrun

Sud, Arles, 1992, p. 191. 29. À ce sujet, voir Yuval Noah Harari, op. cit., p. 103-104. Persson, F. Stuart Chapin Ill, Éric F. Lambin, Timothy

M. Lenton, Marten Scheffer, Carl Folke, Hans Joachim

Schellnhuber, Bjôm Nykvist, Cynthia A. de Wit, Terry

Hughes, Sander Van der Leeuw, Henning Rodhe,

Sverker Sürlin, Peter K, Snyder, Robert Costanza, Uno Svedin, Malin Falkenmark, Louise Karlberg, Robert

W. Corell, Victoria J. Fabry, James Hansen, Brian Walker, Diana Liverman, Katherine Richardson, Paul Crutzen

et Jonathan A. Foley, “A Safe Operating Space for Humanity”, Nature, 461, 2009, p. 472-475.

31. Extrait de la préface du livre de Perrine et Charles Hervé-Gruyer, Miraculous Abundance, Chelsea Green Publishing, White River Junction, 2016.

32. Perrine et Charles Hervé-Gruyer, op. cit. 33. John Jeavons, How to Grow More Vegetable (and Fruits, Nuts, Berries, Grains and Other Crop) than You Ever Thought Possible on Less Land with Less Water than You Can Imagine, Ten Speed Press, Emeryville, 2006. 34. Eliot Coleman, Des légumes en hiver. Produire en abondance, même sous la neige, trad. Elsa Petit, Actes Sud,

Arles, 2013.

35. Association française d’agroforesterie, “Agroforesterie maraîchère smaRT”, www.agroforesterie. fr/smart-systemes-maraichers-agroforestiers.php. 36. La Campagnole sera présentée au chapitre 81, p. 861. Elle peut être commandée auprès de Vincent Legris, de la Fabriculture : www.lafabriculture.fr. 37. Étude Maraîchage biologique permaculturel et performance économique, rapport n° 2, www.fermedubec.com. 38. Sacha Guégan, François Léger, Charles Hervé-Gruyer

et Gauthier Chapelle, étude “Maraîchage biologique permaculturel et performance économique”, Institut Sylva, rapport final, 2015, www.fermedubec.com/la-recherche/ les-rapports-scientifiques/,

Camille Joyeux, Charles Hervé-Gruyer et Louise Géhin,

étude Maraîchage biologique permaculturel et performance économique. Données technico-économiques en maraîchage biologique en France. État des lieux de la littérature actuelle et réflexion pour une méthodologie collégiale, Institut Sylva, rapport n° 6, 2017, www.fermedubec.com/la-recherche/

les-rapports-scientifiques/, p. 55-63,

39. Camille Joyeux, Charles Hervé-Gruyer et Louise

Géhin, op, cit., p. 57. 40. Sacha Guégan, François Léger, Charles Hervé-Gruyer

et Gauthier Chapelle, op, cit,

41. Kevin Morel, Viabilité des microfermes maraîchères biologiques. Une étude inductive combinant méthodes

recherche et conception d’un protocole pour l’étude des carabes et des vers de terre à la Ferme du Bec Hellouin,

travail de fin d’études présenté en vue de l’obtention du diplôme de master en sciences et technologies du vivant et de l’environnement, travail encadré par François

Léger, AgroParisTech, 2015.

Luc Devaux, Étude de la performance écologique de la

microferme du Bec Hellouin par l’analyse de la structure des communautés d’abeilles sauvages à l’échelle du paysage et de leur importance économique, travail de fin d’études présenté en vue de l’obtention du diplôme d’ingénieur agronome, travail encadré par Gwenaëlle Hellou et Nicolas Vereecken, EsaA-Université libre de Bruxelles,

2016.

Margaux Villebrun, Étude de la diversité des communautés

d’abeilles sauvages dans le but d’évaluer les performances écologiques d’un système permaculturel comparé à d’autres types d’habitat, travail de fin d’études présenté en vue de l'obtention du diplôme de master bio-ingénieur en sciences agronomiques, travail encadré par Nicolas Vereecken et Marc Dufrêne, Gembloux Agro-Bio Tech-Université de Liège, 2016.

46. Louise Géhin, François Warlop et Cécile Thibaut,

Peut-on vivre d’une forêt-jardin ?, Institut Sylva, rapport technico-économique n° 1, 2017, www.fermedubec.com la-recherche/les-rapports-scientifiques/.

47. Camille Joyeux, Charles Hervé-Gruyer et Louise

Géhin, op. cit. 48. Camille Joyeux et Teddy Perez, Les Outils de la Ferme du Bec Hellouin, S'installer sur une microferme en maraîchage biologique permaculturel et bio-intensif: outils nécessaires pour démarrer une activité sur un cœur intensif de 1 000 m°, Institut Sylva, 2017, www.fermedubec.com la-recherche/les-rapports-scientifiques/. 49. Ferme du Bec Hellouin, La Recherche, Les rapports scientifiques, Www.fermedubec.com/la-recherche/

les-rapports-scientifiques/. 50. FNAB et ITAB, Communications personnelles, 2017.

il. À L'ÉCOLE DE LA NATURE 1. Henri Gougaud, Paroles de chamans, Albin Michel, Paris, 1997, p. 19.

2. “Biosphère”, in “Dictionnaire environnement”,

Actu-Environnement.com, WNww.actu-environnement.com/ ae/dictionnaire_environnement/definition/biosphere.

php4.

“Biosphère”, in “Toupictionnaire : le dictionnaire de

politique”, La Toupie, www.toupie.org/Dictionnaire/ Biosphere.htm. Université virtuelle Environnement et Développement durable, www.uved.fr/?L=o. 3. Pour les lecteurs désirant approfondir ces sujets fascinants, nous recommandons vivement la lecture

de Patrick de Wever, Le Beau Livre de la Terre. De la

formation du système solaire à nos jours, Dunod, Paris, 2015. 4. lbid., p. 28 sq.

NOTES s. Ibid. P« 376.

6. Ibid, P. 36.

7. N. Troubat, M. A. épépense énergét iqueFargeas-Gluck et B. Dugue, d’une tâche Cognitiv e : exemple du jeu d'échecs”, Scie nce & sports, 25, 2010 , p. 1-16, «activité intellectuelle intense us de calories ?”, Body Science, Consomme-t-elle Toute la recherche Scientifique sur le sport et le COTPS, 2012, www.bodyscience fil -activite-intellectu . elle-intense. &. Nolwenn Weiler, “Nu mérique : cette emprei nte écologique que les consom mateurs ont bien du malà voir”, Basta !, 2014, Www .bastamag.net/ Numeri que-cette-empreint

e.

clément Fournier, “Quel est l'impact environnemental

d'internet ?” [infographie], e-rse.net, la plateforme de rengagement RSE et développement durable, 2015, e-rse.net/ empreinte-carbone-internet-greenit-infogra phie-12352/, 9. James Lovelock, Gaïa : comment Soigner une terre malade, Robert Laffont, Paris, 1992.

10. Richard Nerysoo, témoignage à la Commission d'enquête sur le pipe-line de la vallée du Mackenzie, 1975-

n. Alan Newport, “More Soil Organic Matter Makes More Rain”, BeefProducer, 2017, beefproducer.com/management/ more-soil-organic-matter-makes-more-rain, 12. The late P. A. Yeomans et Ken B. Yeomans, Water Every Farm : Yeomans Keyline Plan, CreateSpace Independent Publishing Platform, North Charleston,

2008.

.

13. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les

champs, 0p. cit., p. 11.

14 Ibid., p. 16. 15. 1aMs : Laboratoire d'analyses microbiologiques des sols, 5, rue de Charmont, 21120 Marey-sur-Tille, www.lams-21.com/artc/1/fr/. Un rapport complet a

éé rédigé sur les analyses réalisées par Claude et

Lydia Bourguignon à la Ferme du Bec Hellouin, il est consultable sur notre site www.fermedubec.com/ à la rubrique “La recherche”.

16. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les

champs, op. cit.

17. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les

champs, op. cit., p. 31.

18. “Lixiviation”, Larousse. Dictionnaire français,

wwlarousse.fr/dictionnaires/francais/lixiviation/ 47544. 19. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les champs, op. cit, p. 29.

20. Ibid. p. 236.

2. Anne Jaffrezic, Didier Michot et Christian Walter, Cou de sciences rs du sol, cours dispensés dans le cadre de

l'enseignement de première année, Agrocampus Rennes,

2008

Claude et Lydia Bourguignon, Profil de la vie du 50, Brin de paille Alsace, www.youtube.com/ Walch®V=3ZRZXQIYITM.

2 Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les champs, op. cit., p. 27. 3 Ibid, p. 57.

4 Ibid, p. 59. 5 Ibid, p. 60. 2.John Jeavons, op. cit., p. 32.

3. Note rédigée à partir des données trouvées dans :

Baise Leclerc et Gilles Leblais, Des auxiliaires dans mon Rrdin! Les attirer, les loger, les nourrir, Terre vivante,

»P. 42-45.

Marcel Bouché, Cycle de la fertilité naturelle appliqué au Mrdchage sans travail du sol, formation msv, Altenach, 54116 mars 2016, parties 1 à 6, www.youtube.com/

“chv-nfoT43DqocM (partie 1). | #fLowenfels et Wayne Lewis, Un sol vivant, un allié Pr dtiver, Rouergue, Arles, 2016. |

Vigot et Daniel Cluzeau, Les Vers de terre. Guide "que auxiliaires de cultures, Chambre d’agriculture de

À Vienne, 2014.

À Elan Siruguet, Définition d’une problématique de

érebe[., op. cit.

Daniel Wipf, Les Mycorhizes : une alliance plante:

ignon découverte en 1885 et mal connue ?,

wrkontres Bourgogne nature, 15-16 novembre 2013, Youtube.com/watch?v=novoMqbPloc.

30. Claude et Lydia Bou rguignon, Le Sol, la terr champs, op. ci, e et les p.73, 77-86,

de Miguel A, Altieri, “The Ecolog ical Role of Blodiversity

n Agroccosy

stems”, Agriculture, Eco systems and Environment, 74, 1999 , p. 19-31,

32. Claude et Lydia Bou rguignon, Le Sol, la terr Champs, Op. cit., e et les p. 150,

33. Ibid. p. 161.

34. Jeff Lowenfels et Wayne Lewis, op. cit. p. 106.

35: Gilles Domenech, Jardiner sur sol vivant. Quand les LE terre remplacent

la bêche !, Larousse, Paris, 2016,

36. Sources : Eddy Mercier, “Le rapport C/N” (tableau), Le Compostage,

c’est facile !, 2016, www.compostage.info/

index.php?option-com_content&view-article&id7&Itemid=6,

Aurélien Gourmelen, “Le rapport carbone/azote pour

Composter”, Tous au potager, www.tous-au-potager.fr/ le-rapport-carbone-azote-pour-composter/.

Anne Weill et Jear À 1 biologi diversifié : guide à n Duval al, Le Maraîchage biologique

€ gestion globale, Équiterre et Bio-Action,

Montréal, 2010, module 7, Chapitre 12.

43.

Paul R

Moorcroft,

291

Robert H, Crahtree

et Seuart J, Davies, 0p. cit 54. Ibid.

ss. Pred Magdoff, “£cological Agriculture Principles, Practices, and C constraints", Renewable Agriculture end Food Systems, 22, 2007, p. 109-117. 56. Paul R. Moorcroft, Robert H. Crabtree et Stuart J. Davies, op. cit.

57. Ibid.

58. Janine M. Benyus, op. cit, p. 38. 59. MEA (Millenium

Ecosystem Assessment), op. cit, et

Nicolas Dedoncker et Ann Van Herzele, op. cit.

60. Teresa Carolyn McLuhan, Pieds nus sur la terre sacrée,

op. cit., p. 112.

61. Bruno Maresca, Xavier Mordert, Anne Lise Ughetto

et Philippe Blancher, “Évaluation des services rendus

par les écosystèmes en France : les enseignements d’une

application du Millenium Ecosystem Assessment au

territoire français”, Développement durable et territoires, 2, 2011. 62. MEA (Millenium Ecosystem Assessment), op. cit.

37. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les

63. Bruno Maresca, Xavier Mordert, Anne Lise Ughetto et Philippe Blancher, op. cit.

38. Recommandations issues de : Blaise Leclerc, Les Clés

64. Théodore Monod, L'Émeraude des Gamarantes, op. cit. P- 195. 65. MEA (Millenium Ecosystem Assessment), op. cit., et

Champs, op. cit. p. 84.

d’un sol vivant, Terre vivante, Mens, 2017.

Olivier Gruié, “Le PH du sol”, Mon jardin en Permaculture, Www.monjardinenpermaculture.fr/pages/

le-ph-du-sol.

?

39. Claude €t Lydia Bourguignon, Profil de la vie du sol, 0p. cit, et Patrick Whiteñield, op. cit.

40. Version utilisée par le Lams pour les analyses de sol. 41. Source du tableau : Patrick Whitefield, op. cit.

42. Gérard Ducerf, L'Encyclopédie des plantes

bio-indicatrices alimentaires et médicinales. Guide de

diagnostic des sols, Promonature, Briant, vol. 1, 2017, vol. 2, 2008, vol. 3, 2017.

Gérard Ducerf, Fascicule des conditions de levée de

dormance des plantes bio-indicatrices, Promonature, Briant, 2017.

43- Teresa Carolyn McLuhan, Pieds nus sur la terre sacrée, trad. Michel Barthélémy, Denoël, Paris, p.103.

44. D’après Chaléard et Charvet, 2004, cités par Nicolas Dedoncker et Ann Van Herzele in “La contribution des services écosystémiques à l’agroécologie”, Agroécologie : entre pratiques et sciences sociales, Éducagri éditions, Dijon, 2012. Et K. Garbach, J. C. Milder, M. Montenegro, D. S. Karp et F. A. J. De Clerck, “Biodiversity and Ecosystem Services in Agroecosystems”, Encyclopedia of. Agriculture and Food

Systems, 2, 2014, p. 21-40.

45. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les champs. Pour retrouver une agriculture saine, Sang de la

Terre, Paris, 2009, p. 97-101.

46. Ibid., p. 97.

47. Ibid., p. 97-101. 48. MEA (Millenium Ecosystem Assessment), Ecosystems

K. Garbach, J. C. Milder, M. Montenegro, D. S. Karp

et F. A. J. De Clerck, op. cit. 66. Ibid. 67. Miguel Altieri, op. cit.

68. Patrick Whitefield, op. cit. p. 20. 69. Fowler et Mooney, 1990, cités par Miguel Altieri, op. cit. 70. Patrick Whitefield, op. cit., p. 18.

71. Hervé Coves et Christel Jacson, Vivre ensemble dans un monde truffé d’amour, Les Monédières,

Brive-la-Gaillarde, 2016, p. 129. 72. Patrick Whitefield, op. cit., p. 19.

73- Jean-Marie Pelt, Au fond de mon jardin, op. cit. P. 97. 74. D’après Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les champs, op. cit., p. 113. 75. Ibid.

II. DESSINE-MOI

UNE FERME

1. Edmond Valère et Samuel Pisar, Entretiens avec Samuel Pisar. Le chantier de l'avenir, Favre, Lausanne, 1985, p. 78.

2. Franklin Hiram King, Farmers of Forty Centuries.

Organic Agriculture in China, Korea, and Japan, Dover Publications, New York, 2004.

3. Bill Mollison et David Holmgren, Permaculture 1. Une agriculture pérenne pour l’autosuffisance et lesexploitations de toutes les tailles, Debard, Paris, 1986. Rééd. Charles Corlet, Paris, zou. 4. Ibid., p.15. 5. Perrine et Charles Hervé-Gruyer, op. cit, p. 91.

and Human Well-Being, a Framework Fortification Assessment, Island Press, Washington, 2003. 49. Sandrine Gombert, Structure et fonctionnement des

6. Bill Mollison et David Holmgren, op. cit., p. 70. 7. Il existe plusieurs applications utiles pour suivre et prévoir la course du soleil : Sun Locator, sun-locator-lite.fr ; Sun Seeker, play.google.com/store/

dispensé dans le cadre du Certificat international d'écologie humaine, 2007, docplayer.fr/69669710Structure-et-fonctionnement-des-ecosystemesterrestres-menaces-et-enjeux.html. Patrice Francour, Écosystème. Tout “ensemble” vivant est une collection de sous-unités et constitue un “système”, ftp://ftp.unice.fr/users/francour/Cours_1_Ecosysteme_ Introduction.pdf.

Surveyor, www.sunsurveyor.com/, Un site Internet pour le même type d'informations : SunCalc, suncalc.net/. 8. Bill Mollison et David Holmgren, op. cit., p. 15. 9. Un excellent site Internet pour suivre la météo en direct de façon précise : Windy.com, www.windy.com.

écosystèmes terrestres : menaces et enjeux, enseignement

50. Définition inspirée de Paul R. Moorcroft, Robert H. Crabtree et Stuart J. Davies, “Ecosystems”, The

Habitable Planet, À Systems Approach to Environmental

Science, cours multimédia, unité n° 4, www.learner,org/ courses/envsci/unit/text.php?unit-4&secNum=0,

$1. Jean-Michel Gobat, Michel Aragno et Wily Hate, Le Sol vivant. Bases de pédologie -biologie de Es î resses

polytechniques et universitaires romandes, 2013.

Lausanne,

| . Gliessman, “Agroecology and 52: Stephen 3 » Agroecosystems Analysis, American Agroecosystems”, Agn dd act 11936.

Society of Agronomy, Macison,

204,

apps/details?id=com.ajnaware.sunseeker&hl=fr ; Sun

10. Voir l'excellent chapitre sur le climat dans The Earth Care Manual, Patrick Whitefield, op. cit, p. 67-89.

Ces pages lui doivent beaucoup. 11. D'après Kris De Decker, “Fruit Walls : Urban Farming in the 1600”, Resilience, 2016, www.resilience.org/ Stories/2016-01-06/fruit-walls urban-farming-in-the16005}, et “Mur à pêches”, Wikipédia, fr.wikipedia.org/

wiki/Mur_à_ pêches.

Pour aller plus loin, voir l'article “Pêches de Paris

Sur toutes les grandes tables d'Europe à partir du xvH' siècle, tout un savoir des siècles passés”, Pierre1911.fr, www.pierre1g11.fr/2017/04/

peches-de-montreuil-le-savoir-faire-des.htmil.

292

NOTES

12. Association française d’agroforesterie, L'Agroforesterie, qu'est-ce que c’est ?, www.agroforesterie.

fr/definition-agroforesterie.php.

13. D'après Patrick Whitefield, op. cit. p. 23. 14. Extrait d’une interview dans la revue Terre du ciel. 15. Dena Merriam, The Message in a Seed, Shumei

22. John Seymour, Revivre à la campagne, De Borée, Clermont-Ferrand, 2007. 23. Dena Merriam, op. cit., P. 29. 24. John Jeavons, op. cit., p. 56.

25. Le lecteur désirant approfondir les questions liées au sol et à l’agriculture pourra consulter l’excellente

International Press, Koka, 2007, p. 8.

collection d’ouvrages publiés par l’agronome Dominique

avec bonheur les travaux de Fritjof Capra : Le Tao de

Soltner (www.soltner.fr), notamment Les Bases de la production végétale, t. I : Le Sol et son amélioration,

Dominique Radanyi et Anneliese de Saint-Maur, Éditions du Rocher, Monaco, 1988.

les amendements : p. 269 sq. ; pour les engrais : p. 385 sq. 26. Claude et Lydia Bourguignon, La Fertilisation des sols,

16. Ceux qui désirent approfondir cette question liront

la physique, Sand, Paris, 1994, et Sagesse des sages, trad.

17. Cité par Harvey Arden et Steve Wall, Les Gardiens de la sagesse, Éditions du Rocher, Monaco, 1994, P. 107.

18. Dena Merriam, op. cit., p. 32. 19. Edmond Valère et Samuel Pisar, op. cit., p. 127-137. 20. Toby Hemenway, Le Jardin de Gaïa, trad. Lysianne Rondeau, Imagine un colibri, Marsac, 2016, p.15.

21. Fritjof Capra, Le Temps du changement, trad. Paul Couturiau, Éditions du Rocher, Monaco, 1983, P. 248. 22. David Holmgren, Permaculture, principes et pistes

d’action pour un mode de vie soutenable, Rue de l’Échiquier, Paris, 2014.

23. Anna Lee Walters, op. cit., p. 66. 24. Cité par Fritjof Capra in Le Temps du changement, op. cit, p. 385.

25. Anna Lee Walters, L'Esprit des Indiens, trad. Danièle et Pierre Bondil, Casterman, Tournai, 1990, p. 27.

26. Source : wikipedia.org/wiki/Nombre_d’or. 27. Ibid.

Sciences et techniques agricoles, Bressuire, 2014. Pour

Viticultures alternatives, 29 et 30 octobre 2015,

Www.youtube.com/watch?v=UnZSoxE4KYk&feature= share. 27. Dominique Soltner, op. cit., p. 269. 28. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les champs, op. cit., p. 147. 29. Hervé Coves et Christel Jacson, op. cit., p. 97. 30. Ministère de la Transition écologique et solidaire, La Biodiversité des sols, 2014, www.statistiques. developpement-durable.gouv.fr/lessentiel/ar/272/1122/ biodiversite-sols.html. 31. Voir aussi à ce sujet Perrine et Charles Hervé-Gruyer, op. cit, p. 163. 32. Philippe Besnard, Natural Farming, natural-farming. weebly.com/agriculture-naturelle.html. 33. Vous trouverez le mode de culture des mor en

français sur le site Internet de Philippe Besnard, Natural Farming, ibid. 34. Rohiny Reddy, “Cho’s Global Natural Farming,

28. Ibid.

South Asia Rural Reconstruction Association”,

29. Ibid. 30. Ibid. 31. Cité par Pierre Fluchaire, Renaître au sommeil naturel : de nouvelles solutions pratiques, simples et efficaces, Dangles,

35. “Le nigari est, en fait, du chlorure de magnésium

Saint-Jean-de-Braye, 1989.

IV. UNE APPROCHE NATURELLE ET DE LA FERTILITÉ

DU

SOL

1. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les

champs, op. cit, p. 17.

2. Valentin Sohy, Félix de Tombeur et Jean-Thomas

Cornélis, op. cit., et Valentin Sohy, op. cit. 3. Albert Bartlett, cité par Patrick Whitefield, op. cit.

4. Étude citée par Salim Berkoun, “Il y aura 2 milliards de réfugiés climatiques à la fin du siècle”, Daily Geek Show,

2017, dailygeekshow.com/refugie-climatique-monde/. 5. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les Champs, op. cit., p. 31. 6. Ibid., p. 38. 7. Ibid., p. 34-42. 8. Voir le dossier réalisé par le magazine Réussir fruits et légumes, n° 374, juillet 2017, p. 63. 9. Essai réalisé par le crirc de Balandran, cité in ibid., p.62.

10. Ibid., p. 63. 11. Claude et Lydia Bourguignon, Le Sol, la terre et les champs, op. cit., p. 14. 12. Toby Hemenway, Le Jardin de Gaïa, op. cit., p.75. 13. J.-G. Moreau et Jean-Jacques Daverne, op. cit., p. 16. 14. Camille Joyeux, Charles Hervé-Gruyer et Louise

Géhin, op. cit. 15. Sacha Guégan, François Léger, Charles Hervé-Gruyer

ilcasia.files.wordpress.com/2012/02/ chos-global-natural-farming-sarra.pdf.

naturel, c’est-à-dire qui n’est pas complètement raffiné (il contient jusqu’à 5 % de sulfate de magnésium et de minéraux divers). Le nigari étant d’origine japonaise, il arrive que l’on croie qu’il est extrait d’une algue du même nom.” (Source : Wikipédia.) Le nigari est obtenu en faisant traverser une masse de sel marin par une petite quantité d’eau. L’eau prélève en passant les composés minéraux les plus solubles. 36. Le sucre n’étant pas un produit issu de la ferme, nous avons fait quelques tests avec des pommes fort mûres (mais pas pourries) et de la betterave, pas tout à fait concluants pour l'instant. Mais nous allons continuer à chercher à apporter avec une ressource locale ce sucre dont les Mot raffolent... 37. Depuis 2010, le projet Microbiome Terre (en anglais : Earth Microbiome Project) propose d’analyser de façon pluridisciplinaire les communautés microbiennes dans le monde entier. À terme, on espère séquencer 500 000 génomes microbiens et produire un atlas génétique cartographiant le contenu métabolique de l’ensemble des biomes étudiés. Ces données devraient pouvoir être accessibles aux chercheurs par le biais d’un portail : www.earthmicrobiome.org/. 38. Un article de la revue Scientific American fait état de tests d’enrobage de graines avec des ajouts de micro-organismes depuis quelques années aux

États-Unis. Marla Broadfoot, “Microbes Added to

Seeds Could Boost Crop Production”, Scientific

American, 2016, www.scientificamerican.com/article/

microbes-added-to-seeds-could-boost-crop-production/.

39. Voir à ce sujet Perrine et Charles Hervé-Gruyer,

est notamment inspirée de John Jeavons, dont la

op. cit., p. 159. 40. La mise en lumière scientifique de ces conséquences a été réalisée par Steven J. Scheuerell et Walter F. Mahaffee en 2006. Pour autant, les explications sont complexes et dépendent de plusieurs facteurs, incluant les espèces de plantes, la qualité du compost, la méthode d’extraction et les conditions de croissance. Voir Steven J. Scheuerell et Walter F. Mahaffee, “Variability Associated with Suppression of Gray Mold (Botrytis cinerea) on Geranium by Foliar Applications of Nonaerated and Aerated Compost Teas”, Plant Disease, 90, 2006, p. 1201-1208.

particulièrement intéressante, même si elle se restreint aux plantes cultivées.

Internet : Elaine Ingham, Soil Foodweb Inc., www.soilfoodweb.com/Home._Page.html.

et Gauthier Chapelle, op. cit.

16, Joseph Pousset, Engrais verts et fertilité des sols, France agricole, Paris, 2017, p. 33. 17. Toby Hemenway, Le Jardin de Gaïa, op. cit., p. 87. 18. Annexe 1 du Règlement (ce) n° 889/2008 de la

Commission, paru en 2008 et révisé en 2016, p. 78. 19. Cité par John Jeavons, op. cit., p. 35.

20, Notre approche du compost au Bec Hellouin

réflexion sur l'autonomie d’un jardin en nutriments est 21. Cité par Jean-Paul Collaert, Compostons ! Pour redonner sa fertilité à la Terre, Éditions de l'erran, Escalquens, 2008, p. 6.

41. Beaucoup d'informations figurent sur son site

42. On trouve ici une bonne traduction en français

des protocoles du Dr Ingham (s’ils ont un peu évolué depuis la rédaction de ce document, les bases sont les

mêmes) : Elaine Ingham, “Thé de compost oxygéné”, Ecofarm and Garden, 2002, traduction et adaptation par

Andrée Deschênes, jardineralodeve.blog.free.fr/public Thecompost_-_Copie.PDF.

43. Elaine Ingham, traduction et adaptation par Andrée Deschênes, op. cit. 44. Ce site vous permet de suivre toutes les initiatives autour du biochar : www.biochar-journal.org/en. 45. Hervé Coves et Christel Jacson, op. cit., p. 112.

46. Louis Géhin, Luc Devaux, op. 47. Hervé Coves 48. Kevin Morel,

François Léger, Margaux Villebrun et cit. et Christel Jacson, op. cit., p. 130. op. cit.

49. Valentin Sohy, Félix de Tombeur et Jean-Thomas Cornélis, op. cit., et Valentin Sohy, op. cit.

50. Janine M. Benyus, op. cit, P. 39.

51. Jean-Marc Jancovici, “Combien de gaz à effet de serre dans notre assiette ?”, 2017, jancovici.

com/changement-climatique/les-ges-et-nous/

combien-de-gaz-a-effet-de-serre-dans-notre-assiette/.

52. Ibid.

53. Alain Canet, Association française d’agroforesterie, communication personnelle. 54. Les tableaux présentés dans ce chapitre sont extraits de l’étude Influence des pratiques de la Ferme du Bec Hellouin sur la fertilité et la matière organique du sol, Valentin Sohy, Félix de Tombeur et Jean-Thomas Cornélis, op. cit. 55. Valentin Sohy, op. cit., et Valentin Sohy, Félix de Tombeur et Jean-Thomas Cornélis, op. cit. 56. Pour en savoir plus : “Qu'est-ce que l'initiative « 4 pour 1 000 » ?”, www.4p1000.0rg/fr. 57. Ibid., p. 12-13. 58. Ibid., p. 18-19.

59. Victoria Ouicher, “Des pelures d’oranges pour redonner vie aux terres désertiques ?”, +POSITIVR, 2017, pOsitivr.fr/

pelures-oranges-redonner-vie-terres-desertiques/. Jérémy Anso, “Une forêt renaît avec des pelures et de la pulpe d’orange : non, ce n’est pas un fake !”, Dur à avaler, 2017, www.dur-a-avaler.com/une-foret-renaitavec-des-pelures-et-de-la-pulpe-dorange-non-ce-nestpas-un-fake/.

ANNEXES

TABLEAUX ENGRAIS VERTS CRÉDITS

294

294

ANNEXES

LES

DIFFÉRENTES FAMILLES D'ENGRAIS VERTS

FABACÉES / LÉGUMINEUSES PROPRIÉTÉS

GÉNÉRALES

Fixation de l’azote atmosphérique, enrichissement du sol Enracinement développé et profond, amélioration de la structure du sol Floraisons mellifères, favorables aux pollinisateurs Production de biomasse, vitesse d'installation et rusticité variables d’une espèce à l’autre Développement généralement lent, à associer pour une couverture du sol optimale

Certaines espèces possèdent des propriétés spécifiques à l’égard de certains ravageurs Attention : dans le cas d’une utilisation en maraîchage, raisonner les rotations et le recours aux légumineuses comme engrais verts

PLANTE

UTILISABLE

FÈVEROLE, VICIA FABA L.

PROPRIÉTÉS

GESTION

Très rustique

Destruction mécanique ou par le gel (- 5 °C pour la féverole de printemps, - 10 °C pour la féverole d’hiver)

Rustique Bonne occupation du sol

Destruction mécanique

Forte production de biomasse Faible couverture du sol, à associer Système racinaire pivotant et puissant Bon développement en sol argilo-calcaire Plante sensible aux pucerons

LUZERNE, MEDICAGO SP.

DU

COUVERT

Système racinaire pivotant et puissant Privilégier les espèces annuelles dans un système maraîcher, les espèces vivaces

ont toute leur place dans des cultures céréalières en semis direct sous couvert

Utilisation possible comme fourrage POIS FOURRAGER, PISUM ARVENSE L.

Implantation rapide

Forte production de biomasse

Bonne couverture du sol

Système racinaire pivotant

Utilisation possible comme fourrage Plante sensible à la sécheresse et à l’excès d’eau Implantation longue Forte production de biomasse Floraison esthétique

TRÈFLE, TRIFOLIUM SP.

Système racinaire parfois mixte (trèfle d’Alexandrie et trèfle de Perse), pivotant

(trèfle incarnat) où fasciculé (trèfle violet) Utilisation possible comme fourrage (trèfle incarnat) Attention aux espèces vivaces, privilégier les espèces annuelles SAINFOIN, ONOBRYCHIS

VICIIFOLIA SCOP.

Supporte bien les terres calcaires

de printemps, - 10 °C pour le pois

fourrager d’hiver)

Destruction mécanique ou par le gel (- 5 °C pour le trèfle d'Alexandrie, - 10 °C pour le trèfle de Perse et le trèfle incarnat)

Risque de repousses Destruction mécanique ou par le

Bonne valorisation des terrains pauvres et secs

gel (- 10 °C)

Implantation longue Croissance rapide

Destruction mécanique ou par le gel (o °C pour la vesce de

Croissance rapide Floraison esthétique, plante mellifère Système racinaire pivotant et profond Utilisation possible comme fourrage (propriétés anthelminthiques) VESCE, VICIA SP.

Destruction mécanique ou par le

gel (- 2 °C pour le pois fourrager

Forte production de biomasse

Bonne couverture du sol Floraison esthétique Système racinaire fasciculé Utilisation possible comme fourrage Attention : peut parfois devenir envahissante

printemps, - 7 °C pour la vesce

d'hiver)

Autres légumineuses utilisables : lupin (intérêt en sol acide mais ne pas utiliser seul), fénugrec (résiste à la séchersse), mélilot (très intéressant comme réservoir d’auxiliaires), lentilles...

LES DIFFÉRENTES FAMILLES D'ENGRAIS VERTS r

POACÉES / GRAMINÉES PROPRIÉTÉS

GÉNÉRALES



Système racinaire fasciculé, très déco structure upé et parfois profond, amélioration de la structu Forte production de

du sol

biomasse, enrichissement du sol

PLANTE

UTILISABLE

GRAMINÉES AVOINE,

AVENA

Tiges ligneuses POuvant servir de support à des lianes Croissance générale ment lente Les graminées tropicales gèlent au-dessous de o °C, gestion et desernecionfacti iées

PROPRIÉTÉS

SÉSTION

DES CLIMATS TEMPÉRÉS Forte production de biomasse

SP.

Bonne résistance au froid

Culture possible en région montagneuse

Système racinaire fasciculé et très développé Effet

RAY-GRASS ITALIEN, LOLIUM ITALICUM À. BRAUN

Forte production de biom asse Bonne résistance au froid

SEIGLE,

Utilisation possible comm e fourrage Forte production de biomasse

ets allélopathiques marq ués Système racinaire fasciculé et

DA

tone

re

"c

a

COUVERT

te

ir

“s

FE?

e e e diffi cile, nomb reuses repo“ai usses

bonne Couverture du sol

Re

L.

end

le F ee

s allélopathiques marq ués Utilisation possible Comm e fourrage Risque de maladie (rouille)

ANGE LAI RAYIUM LOL -GRASS PERENN L.S,

SECALE CEREALE

295

très puissant, très fort effet sur la structure du sol

Bonne résistance au froid

Culture possible en région mont agneuse Système racinaire fasciculé, très fort effet sur la structure du sol À associer pour une bonne Couv erture du so] Utilisation possible comme fourrage

Destruction mécanique

> Autres graminées de climat temp éré utilisables : orge, blé, triticale ! GRAMINÉES | SORGHO,

DES

CLIMATS

TROPICAUX Très forte production de biomasse

SORGHUM SP.

Résistance à la sécheresse une fois installé

Très bon couvert, plante très concurrent e Système racinaire mixte, à la fois pivotant et fasciculé

Destruction mécanique ou par le

gel (- 10 °C)

Utilisation possible comme fourrage (foin, enrub ané ou ensilage)

MOHA,

Forte production de biomasse

PANICUM GERMANICUM BAUCH. … Croissance rapide

Résitance à la sécheresse et à la chaleur une fois installé

Bon couvert, étouffe les adventices

Système racinaire fasciculé Cycle court (30-40 jours)

Destruction mécanique où par le gel (0 °C pour la vesce de

printemps, - 7 °C pour la vesce

d'hiver)

Autres graminées de climat tropical utilisables : mil, millet des oiseaux, millet commun...

BRASSICACÉES / CRUCIFÈRES PROPRIÉTÉS

GÉNÉRALES

Système racinaire pivotant et très puissant, amélioration de la structure du sol (décompaction)

Floraisons mellifères, favorables aux pollinisateurs et aux autres auxiliaires Plantes très gourmandes en nitrates, elles mobilisent rapidement les ressour: ces minérales du sol évitant ainsi la lixiviation et la pollution de l’eau (excellentes cultures intermédiaires pièges à nitrat es) Production de biomasse intéressante, enrichissement du sol

Développement rapide Plantes riches en composés soufrés, effet désinfectant et assainissant sur le sol lors de la décomposition des couverts Attention dans le cas d’une utilisation en maraîchage, raisonner les rotations et le recours aux brassicacées comme

engrais verts

Certaines espèces possèdent des propriétés spécifiques à l'égard de certains ravageurs Généralement sensibles au gel Cycle court et montée en graine rapide au printemps et en été Plantes très étouffantes, difficiles à associer dans un mélange d'engrais verts a

Une ne utilisation excessive pourrait diminuer la teneur du sol en Champignons mycorhizie ns

296 ANNEXES PLANTE

UTILISABLE

MOUTARDE, SINAPIS SP.

GESTION DU COUVERT

PROPRIÉTÉS

Destruction mécanique et par ]

Très rustique

Facile à implanter en toutes saisons

gel(de-sà-100C)

Croissance rapide Système racinaire pivotant qui travaille le sol en profondeur Facilement détruite par le gel Utilisation possible comme fourrage NAVETTE, BRASSICA RAPA VAR. OLEIFERA DC.

RADIS, RAPHANUS

Très résistante au froid

Plante extrêmement efficace pour capter les nitrates Port peu élevé mais très couvrant Utilisation possible comme fourrage Très forte production de biomasse Croissance rapide Système racinaire extrêmement puissant, décompaction du sol en profondeur Utilisation possible comme fourrage (en association avec une légumineuse)

SP.

Destruction mécanique et ar |

gel (- 13 °C)

pe

Destruction mécanique et par le

gel (- 13 °C)

Autres brassicacées utilisables : cameline, colza, chou fourrager...

AUTRES PROPRIÉTÉS

FAMILLES GÉNÉRALES

D’ENGRAIS

VERTS

L'intérêt majeur de ces plantes repose sur le fait qu’elles n’appartiennent généralement pas à des familles de légumes

habituellement cultivées en maraîchage. Leur utilisation comme engrais vert permet donc de rompre le cycle des maladies et des adventices spécifiques des cultures maraîchères. Ces plantes ne s’utilisent pas souvent seules mais viennent généralement compléter un mélange d’engrais verts

PLANTE

UTILISABLE

BOURRACHE, BORAGO OFFICINALIS L., FAMILLE DES BORAGINACÉES

PROPRIÉTÉS

GESTION

Implantation facile et croissance rapide Couverture intéressante Système racinaire puissant et pivotant Plante riche en minéraux (potassium) Plante mellifère

Destruction mécanique et par le gel

DU

COUVERT

À utiliser en mélange avec d’autres engrais verts

Se ressème facilement, peut devenir envahissante

LIN, LINUM USITATISSIMUM L., FAMILLE DES LINACÉES

Système racinaire mixte, à la fois fasciculé et pivotant Floraison esthétique

Faible production de biomasse

Intéressant en mélange avec d’autres engrais verts, notamment avec des

légumineuses à qui le lin sert alors de support Culture possible toute l’année PHACÉLIE,

Croissance rapide Plante mellifère Forte production de biomasse

HYDROPHYLLACÉES

Système racinaire mixte, fasciculé et pivotant, important et ramifié, permettant d’affiner le sol en surface

PHACELIA TANACETIFOLIA BENTH., FAMILLE DES

Destruction mécanique et par le gel (-6°C)

Effets allélopathiques

Effets répulsifs sur certains bio-agresseurs (nématodes) mais en héberge aussi

d’autres (thrips, pucerons, aleurodes) Se ressème facilement, peut devenir envahissante SARRASIN, FAGOPYRUM ESCULENTUM MOENCH, FAMILLE DES POLYGONACÉES

Implantation et croissance rapides Faible production de biomasse Système racinaire mixte, fasciculé et pivotant Extraction du phosphore du sol et amélioration de sa disponibilité pour les

Destruction mécanique et par le gel (o °C)

cultures suivantes Plante mellifère

Plante nettoyante, effets allélopathiques Très concurrentielle par rapport à l’herbe Cycle court Accepte les sols pauvres TOURNESOL, HELIANTHUS ANNUUS L., FAMILLE DES COMPOSÉES OÙ ASTÉRACÉES

Très forte production de biomasse Plante mellifère Système racinaire pivotant et puissant Bonne résistance à la sécheresse Implantation parfois délicate (très sensible aux attaques de limaces) Utilisation possible comme fourrage

Autres plantes utilisables : amarante, capucine, chanvre textile, consoude, épinard, nyger, tagète.

Destruction mécanique et par le

gel (- 3 °C)

CRÉDITS Toutes les illustrations © Charles Hervé-Gruyer.

Toutes les photographies © Charles Hervé-Gruyer, sauf: p.2,36 b., 323 b., 327 h., 301, 392 m.-b., 460 d., 473 h., 511, 601 h. © Christian Hochet ; p. 7 h., 14, 17 b

26 à 33, 35 b., 36 h. et m., 37,38 m. et

b., 46, 68, 70, 74, 76, 77, 79, 80, 84, 87, 88 g. et m., 89 à 94, 97 h., 99 h., 106, 107, 109, 111, 121 b., 122 h., 123, 124, 125, 140,151 h.,152 b., 158, 159, 180, 187, 188, 189, 191, 193 m.-b., 199 h.-d. et m.-d. 202 h., 203 h. et m., 206 b., 214 à 222, 237, 239, 240, 245, 246, 248 h., 249 h., 252, 253, 256 à 262, 265 b., 267, 268 b., 287, 288, 316 b.-d., 320, 324, 325, 328, 336, 345 h., 348, 351 à 355, 357, 366 b., 375 M. et b., 385, 388, 392 h. et b., 394, 395, 404 m. et b., 405 h.-g. et h.-d., 412, 418, 422, 425, 431 sauf h., 445, 449, 455, 464 d., 468 h.-8., 470, 472 h., 475 h.-8. et b.-g., 479 8, 480, 481

sauf b.-d., 485, 496, 506 h., 507 b., 520, 521, 524 b., 530, 532, 535, 538 b., 539 h., 540, 598 h., 606, 607, 609 d., 612 h., 618 b., 619 m., m.-b. et b. 627 h., 630, 632 h., 637, 656, 657, 658 b., 659 b., 660 h., 666, 672 b., 676 h., 677 b., 680 h., 681, 683, 697, 718, 758, 781 b., 784, 788, 790 m.

etb., 791, 793 b., 795 M. 796, 797 h., 798, 800, 817 h., 818 b., 822, 825 b., 826, 860, 861, 862 b., 863 h., 871 h., 875 h., 876 h., 877 h, 880, 880,

894, 897 h., 898 h., 899, 908, 910, ou1, 912 h., 916, 921, 929 h., 935 m.-b., 939, 950 à 952, 955, 959 m., 961 b., 970 b., 971 h., 981, 984 à 990, 998 © Claudius Thiriet ; p. 10, 487, 828 b., 829 h. © Emmanuel de Bettignies ; p. 19, 20, 136, 139, 154, 199 b., 200, 698, 719, 789, 806-807

© Nicolas Vereecken ; p. 43 © Nedjma Berder ; p. 44 © Fénoua Hervé-Gruyer ; p. 48, 598 b., 602 h., 609 g., 612 b., 616 b., 640, 641,

642 h. et b., 654, 658 h., 873 h., 892, 897 m. et b., 944 b., 960 m., 982 b. © Pauline de Voghel ; p. 54, 115, 142, 277 8, 345 m., 833, 841, 842 b., 852 h., 868 h., 869, 873 b.-d. © Perrine Hervé-Gruyer ; p. 56 © Van Gogh Museum, Amsterdam, Pays-Bas / Bridgeman

Images ; p. 141 © Shanti Hervé-Gruyer ; p. 143 b., 528 © Lauren Fleishman ; p. 179 © Armand Laskowski ; p. 184, 967 © Rémi Algis ; p.193 sauf m.-b. © Getty Images/iStockphoto ; p. 198, 346, 864 b., 913 b., 959 h. et b. © D. R. ; p. 209, 400, 644, 646, 648 h., 649 h.

667, 691 b., 708 b.-d., 781 h., 783 b. © Thierry Mesnard ; p. 278, 907 b. © Martin Egbert ; p. 289 h., 953 h., 962, 963, 964 b. © Gauthier Chapelle ; p. 363, 851 © Rose Hervé-Gruyer ; p. 427 d., 763 © Nicolas Guiraud ; p. 492, 499 h., 982 h., 983 b. © Antoine Agoudjian ;

p.529, 877 b., 918 b., 953 b., 956 b., 992, 993 h., 996 h.-d., 999, 1000 © Max Riché ; p. 590 © Carlo Bettinelli et Fruzsina Gyertyan ; p. 602 sauf h., 603 h. et m., 613 m. et b., 616 h., 622, 624, 634, 635 m., m.-b. et b., 648 m. et b., 649 m. et b., 661, 676 sauf h, 677 sauf b. © Getty Images/Stockdisc ; p. 696 h. © Franck Boucourt ; p. 710 © Christine Kristof ; p. 754 © Pascal Hanrion ; p. 870 h. et b.

© Laure Chavanne ; p. 896 © Xavier Dubois ; p. 900 © Philippe Lemarchand ; p. 902, 903 h., 904 © Gilles Degroote ; p. 903 b.

© Andrea Sham ; p. 905 h., 997 b. © Lila Hervé-Gruyer ; p. 925, 926 h., 927, 946 h. © Frédéric Sauvadet ; p. 957 b. © Julien Vanlerberghe ; p.969 © Olivier Marchant ; p. 993 b., 994 h., 997 m. © Christophe Jammet ; p. 995 h. © Babeth Aloy.

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REMERCIEMENTS L'écriture de ce manuel a été un voyage au long cours, une belle aventure partagée ! Nous n’y serions pas

|

enus sans l’engagement de nombreuses personne s

à nos côtés. Nous ne pouvons citer ici tous ceux qui ont

contribué, d’une manière ou d’une autre, À porter ce

projet, mais sachez que vous êtes tous dans notre cœur

et que notre gratitude est infinie !

Nos remerciements vont en premier lieu à nos familles, à nos parents et tout particulièrement à nos merveilleuses filles : Lila, Rose, Shanti et Fénoua. Merci pour votre compréhension et votre patience les jours d’épuisement, et pour votre soutien ! Votre amour

nous porte sans cesse. Nous espérons que ce manuel

contribuera, ne serait-ce qu’un peu, à vous laisser une

Jammet, Christine Kristof, Armand Laskowski, Thierry Mesnard, Max Riché, Andrea Sham, Julien Vanlerberghe,

Nicolas Vereecken, Pauline de Voghel.

Ce manuel a bénéficié du soutien généreux de citoyens du monde au grand cœur et nous voulons remercier nos amis et compagnons de route Charlotte de Mévius, François et Françoise Lemarchand et Michaël Lunt pour leur engagement à nos côtés et leur confiance. L'équipe de la ferme constitue un valeureux équipage,

qui tient bon le cap contre vents et marées ! Nous

exprimons toute notre reconnaissance à celles et ceux qui ont apporté leurs talents, leur humour et leur joie de vivre à cette aventure, hier ou aujourd’hui : Jean-Claude

belle planète ainsi qu’à tous les enfants du monde !

Bellencontre, Jean-Pierre Bellencontre, Hugo-Martial

11 fallait beaucoup d’audace pour accepter de publier un manuel “sans limite” comme celui-ci, dont l’achèvement a été reporté d’année en année, au fur et à mesure que croissait le nombre de pages. Merci à nos chers éditeurs d'y avoir cru et de nous avoir toujours soutenus avec tant d'enthousiasme. Nous avons rencontré en Anne-Sylvie Bameule, Jean-Paul Capitani et Françoise Nyssen des éditeurs engagés et visionnaires, avec un talent et un cœur immenses, et des amis précieux.

Henriot, Christine Joly, Yohann Jourdan, Anne-Noëlle

Merci à Camille Joyeux, responsable du contenu

scientifique et technique du manuel, pour son engagement exceptionnel à nos côtés deux années durant. Camille, ta force de travail, le sérieux que tu

as apporté à la rédaction des notes de synthèse, à la

réalisation des tableaux, à la relecture, et tes conseils Si pertinents ont énormément contribué à faire de ce manuel ce qu’il est. Merci à Philippe Laborde, le maquettiste qui accompagne toutes nos réalisations depuis plus de quinze ans. Philippe, je ne saurais te dire à quel Point ces années passées ensemble à concevoir la

maquette ont été rendues agréables par ton écoute,

Bonnet, Justin Bourel, Laure Chavanne, Thomas

Jubelin, Édith Legay, Fanny Marquer, Luigi Morin, Teddy Perez, Isabelle Perron, Fabien Prudhomme, Baptiste

Saulnier, Frédéric Sauvadet et Cécile Thibault.

Le contenu de ce manuel doit beaucoup aux membres du comité scientifique de la ferme et aux chercheurs ayant mené des études sur notre site - précisons toutefois que les opinions exprimées dans ces pages n’engagent que nous ! Nous remercions chaleureusement Stéphane Bellon, agronome, INRA ; Lydia et Claude Bourguignon, agronomes, cofondateurs du LAMS (Laboratoire d'analyse

microbiologique des sols) ; Alain Canet, Association française d’agroforesterie ; Clara Carrayrou, agronome ; Gauthier Chapelle, biomiméticien, Greenloop ;

Jean-Thomas Cornélis, pédologue, Université Gembloux Agro-Bio Tech (Belgique) ; Nathalie Corroyer, agronome, Chambre régionale d'agriculture de Normandie ; Martin Crawford, Agroforestry Research Trust (Angleterre) ; Philippe Desbrosses, agroécologue, Ferme de

Sainte-Marthe ; Jean-Marie Deshoux, Pur Projet ;

Luc Devaux, agronome ; Marc Dufumier, agronome, AgroParisTech ; Paul Emptaz, agronome ; Louise

qui Notre gratitude est grande pour nos amis par son administrent l’Institut Sylva, à commencer président d’honneur, Philippe Desbrosses, sa présidente

Lucile de Cossé Brissac, ainsi que Louis-Albert de

Broglie, Laurent de Chérisay, Jean-Baptiste Dumont, Sébastien Henry, François Lemarchand, Alexandre Poussin et Frédéric Proniewski. stages Les bénévoles et étudiants qui ont effectué des chacun de à la ferme sont nombreux, et nous assurons notre reconnaissance. Merci pour le travail en commun et les bons moments partagés. Parmi les nombreuses personnes et amis qui nous ont

soutenus et encouragés durant cette aventure, nous remercions tout particulièrement Rémi Algis, Bernard

Alonso, Marie-Marie Andrasch, Steve Arcelin, Claude Aubert, Laurent Auguste, Huguette Autin, Florence

Ballay, Thibault Basquin, Christophe Beckaert, Armand Bongrain, Antonin Bonnet, Cybèle de Brem, Françoise Brenckman, Arnaud Brulaire, Chloé Bulgheroni, Eliot Coleman, Loïc Coutelle, Arnaud Daguin, Stéphanie

Deflandre, Pascal Depienne, Sylvie Dévigne, Cyril Dion, Jérôme Doncieux, Philippe Dubarry, Gérard Dufils, Bertrand et Béatrice Finet, frère Raphaël Flaujac, Jean-Martin Fortier, Jean-Yves Fromonot, Formations Sainte-Marthe ; Ideline Genette, Thierry Gissinger, Thierry et Pascale Glaizot, Marc Grollimund, Jérôme

Henry, Bruno et Martine Hermenault, Jean-Olivier

Héron (t), Bertrand Hervieu, Jean-Pierre et Blanche Hopsore, Jean-Marie Hullot, Aymeric Jung, Patricia Jung-Singh, Annie Kerangueven, Julie Laffond, Minnie et Romain Lassus, Mélanie Laurent, Tristan Lecomte,

Jean-Jacques Legarrec, Vincent Legris, Antoine et Agnès Lemarchand, Philippe Lemarchand, Julien Leray, permaculturepourtous.com, Hélène Le Teno, Martine, Joseph et Syméon Losfeld, Dorothée Machils, Blanche Magarinos-Rey, Ludivine Mesnard, Antoine Minkowski, Alexandra Mitsotsaki, Lionel Mourlin et son équipe,

Éric Mulliez, Emmanuel Oblin, Serge et Carina Orru,

tes encouragements, ta créativité et ton goût

Gehin, agroécologue ; Morgane Goirand, agronome ; Alain Grandjean, Carbone 4 ; Sacha Guégan, Nature

Jean-Marie Pelt (+), Roger Pillot, lan Pinault, Jérôme

Nous souhaitons rendre hommage à Aïté Bresson, la meilleure des correctrices ! Aïté, tu as pris en charge

Permaculture ; François Léger, UMR SAD-APT, AgroParisTech/INRA ; Alexis de Lidekercke, agronome, Ferme de Froidefontaine ; Kevin Morel, agronome, AgroParisTech ; Isabelle Poirette, mouvement Graines

Scotto, Stéphane de Swaef, Claude Taleb, Alessandro

du travail bien fait !

le manuel lorsqu'il n’était qu’un immense puzzle

disparate et tu as, avec une infinie patience, assemblé

les morceaux et corrigé tout ce qui pouvait l'être, très

efficacement épaulée par Lauranne Valette pour l'ultime

relecture. Nous ne saurions te dire à quel point ton expérience et tes petits mots bienveillants nous Ont Portés !

Nos remerciements vont également à toute l’équipe

d’Actes Sud, notamment Isabelle Alliel, Karima Chabaud, Émeline Lacombe, Mencia Morere.

Ce livre est merveilleusement illustré par les photos

graphe, ami de Claudius Thiriet, agriculteur et photo Claudius, après avoir depuis près de vingt-cinq ans. à bord de Fleur de Lampaul, sillonné les océans ensemble l’occasion

JE Suis heureux que la terre nous ait donné de ! Un grand merci d'une nouvelle collaboration fécon à je ement aux autres photographes ayant contribué

Aloy, Emmanuel de Manuel : Antoine Agoudjian, Babeth Bettinelli, Franck Boucourt, Gauthier Carlo , ignies Chapelle, Laure Chavanne, Gilles nent NICO"® hman, Fleis n Laure t, Egber n is, Marti Christophe on, Hanri l Pasca yan, Suiraud, Fhusine Gyert

de vie ; Arthur Rouanet, Pur Projet ; Pierre Scheercousse,

Arbre & paysage 32 ; Pablo Servigne, chercheur, écrivain ;

Eskani Siruguet, agroécologue ; Stefan Sobkowiack, arboriculteur, fondateur de Miracle Farms (Québec) ;

Valentin Sohy, agronome ; Dominique Soltner, agronome et auteur ; Pierre Stassart, agronome ; Serge Valet, agronome ; Nicolas Vereecken, agronome, écologue ; Margaux Villebrun, bio-ingénieur ; François Warlop,

Groupe de recherche en agriculture biologique (GRAB). Un immense merci aux partenaires de l’Institut Sylva,

dont la confiance et l'engagement fidèle permettent de conduire des programmes innovants : Fondation Akuo,

Fondation Ardian, Fondation Daniel et Nina Carasso, Fondation de France, Fondation Iris, Fondation

Lemarchand pour l'équilibre entre les Hommes et la Terre, Fondation Lunt, Fondation Picard, Fondation Terra Symbiosis, Mairie de Paris, sans oublier nos amis et mécènes Gilles Ghesquières, Agnès Martin, Thierry Plojoux, Nicolas et Marina Plowiecki (#aLr-NEwco). Chacune de ces fondations est animée par une belle équipe avec qui nous avons beaucoup de plaisir à travailler.

Pousset, Mona Puill-Stephan, Pierre Rabhi, Katinka Rambert, Jean-François Renard, Hélène Rollin, Éric Thellung, Françoise Vernet et Mona Zeutschel. Charles remercie tout particulièrement Laure

Lemarchand et Isabelle Minne, avec qui il anime la

formation Écologie intérieure, efficacement épaulés par

Vanessa Correa, Élodie Loquet, Laura Mentasti et Elise Ninnin.

Nous remercions vivement l’équipe municipale du Bec Hellouin, qui a toujours soutenu nos projets, tout particulièrement Jean-Paul Vittecoq et Pascal Finet. Notre gratitude s'adresse également à nos frères et sœurs des communautés monastiques du Bec Hellouin. La Ferme du Bec Hellouin a bénéficié du soutien de la région Haute-Normandie, du conseil général de l'Eure, de la Chambre d'agriculture de l'Eure, de la 8P1, du GRAB de Haute-Normandie, Nous vous remercions pour votre confiance,

Notre amitié va également à celles et ceux qui œuvrent pour développer la permaculture en France et ailleurs, chaque année plus nombreux, tout particulièrement aux

équipes de l’Université populaire de permaculture et de Brin de paille.

DOCUMENTATION SCIENTIFIQUE ET TECHNIQUE, TABLEAUX ET ANNEXES, RELECTURE : Camille Joyeux ÉDITION : Aïté Bresson CORRECTION CONCEPTION

GRAPHIQUE

SUIVI

: Lauranne Valette

ET MISE

DE FABRICATION

PHOTOGRAVURE

EN PAGE :

Philippe Laborde

: Karima Chabaud

: Caroline Lano, Terre Neuve

à

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VIVRE AVEC LA TERRE TOME

PERMACULTURE, ÉCOCULTURE: LA NATURE NOUS INSPIRE LA PERMACULTURE L'ÉCOCULTURE À L'ÉCOLE DE LA NATURE

SOLEIL, PLUIE, VENT, SOL LES PLANTES DE L'ÉCOSYSTÈME À L'AGROÉCOSYSTÈME LE DESIGN PERMACULTUREL CONCEVOIR UN JARDIN OÙ UNE FERME UNE APPROCHE NATURELLE DE LA FERTILITÉ MICROFERMES, CARBONE, CLIMAT