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French Pages 219 Year 2024
Une Lisière de vie
Abib SÈNE
Une Lisière de vie Poésie
Préface de Sébastien Aimé Nyafouna
Du même auteur ¾ La Sémiotique de l’espace et la sémantique du discours littéraire dans les œuvres de Ngugi Wathiong’o, George Laming et William Boyd (Tomr I et Tome II). ¾
Sacrifice (Roman)
© L’Harmattan-Sénégal, 2023 10 VDN, Sicap Amitié 3, Lotissement Cité Police, DAKAR [email protected] [email protected] ISBN : 978-2-14-030666-2 EAN: 9782140306662
À mon fils, Mouhamed
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Préface Incandescence vibratoire d’une Poésie-Monde L’écriture peut en soi se concevoir comme un espace de dialogue intelligible entre une conscience écrivante et une conscience lisante. L’écrivain, le poète en l’occurrence, Abib Sène dans le cas espèce, a quelque chose à dire, à nous partager, à transmettre au monde. Comme il le rappelle très justement, la vie est un composé de temps et de patience. Dans le chemin manichéiste tiraillé, pour ainsi dire, entre les forces du bien et celles du mal, tout ne s’est pas fait d’un long repos. À l’évidence, il est d’usage pour les lamantins senghoriens, tout comme Ulysse d’ailleurs, après un très long détour entre les océans déchaînés, de toujours revenir boire à la source nourricière, à la genèse, au lieu principiel, sorte de matrice existentielle qui fonde et révèle en puissance l’Être de toute chose, nous retrouvons chez l’auteur ce paradigme de l’enracinement. À tout seigneur, tout honneur, le poète Abib Sène ne déroge pas un seul instant à cette règle commune de bienséance érigée en marque de civilité des premières lueurs du jour qui s’éveillent au chant liminaire du cocorico annonciateur. En loyal enfant sérère puissamment pétri de germes fertilisantes du breuvage de l’éducation traditionnelle reçue, il commence naturellement à remercier ceux qui sont ou ont été à juste titre pour lui, de précieuses lumières bienfaitrices qui s’agrègent à la longue route de l’apprenant, du quêteur de savoir et de sagesse au sens propre du terme. Une Lisière de vie s’ouvre sur un vibrant « Hommage », dignement rendu à ces personnes chères au poète éploré. Les manifestations d’une spiritualité ou les interrogations dépouillées de l’encombrant gauchissement, – peut-être 9
aussi, une façon de nous réconcilier ou de nous reconnecter sans obligation d’adhésion à cette part de sacré si vitale à nos âmes –, nous emportent sans doute dans une métaphysique du verbe. En même temps, c’est l’adulte aux yeux pétillants de nostalgie qui revisite avec bonheur les purs recoins de son enfance solaire qu’il réenchante par une écriture parfumée d’euphorie. Évidemment et sans fausse modestie, il lui fallait auparavant parcourir ces réminiscences pour que l’espace originel l’inspirât. Dès lors, Senghor – pour rappel, ici, c’est le lieu de naissance ; exacte ou heureuse coïncidence avec le nom du poète-Président Léopold Sédar – ne finit pas finalement de s’ériger en un ravissant locus amoenus, car c’est là où tout a commencé, dans la savane africaine, entre les veillées crépusculaires, entre le chemin de l’école du village, entre les sentiers poussiéreux des marches quotidiennes, entre les travaux champêtres, les fêtes sénégalaises, les célébrations d’événements (baptême, mariage, décès, etc.), sans nullement oublier le vert tamarinier royal qui tient par sa hauteur imposante, la rivière grouillante de poissons, et surtout les amis avec lesquels s’organisaient divers types de jeux, souvent autour des domiciles. Parmi les fidèles camarades, certains ont déjà engagé le grand voyage parfois à la fleur de l’âge. Hélas, le destin qui rapproche, c’est aussi le même qui sépare les proches d’hier et d’aujourd’hui. Sur ces entrefaites, « Larmes aux yeux », le poète n’a que des mots pour espérer amortir le terrible choc de l’éternelle absence, du non-sens que provoque la mort. Il écrit, il prie pour le repos des âmes. Comment, dans cette poétisation du vu et du vécu, perdre de vue ce furtif et dévoué clin d’œil adressé à l’âme sœur d’un cœur qui aime tendrement ? À côté de cette « Afrique des grands paradoxes » à déplorer, il existe également une Afrique des grands hommes, celle qui émerge et renaît des cendres étincelantes de la prise
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de conscience, de la foi dans le progrès, de la confiance dans un avenir prometteur. Abib Sène contribue à mettre au point une épistémè de la décomplexion observable à travers l’omniprésence des braves héros tombés en martyrs face à la colonisation déshumanisante. Il est question de courageuses femmes de Nder, de Lat Dior Ngone Latyr, de Alboury Ndiaye, de Bour Sine Coumba Ndofen, de Maba Diakhou Ba, de Béhanzin, de Samory Touré, de Aline Sitoé Diatta, de Coly Tingala… Chaque nom prononcé se fait la transcription sonore d’un aveu de sincérité : la présentation se décentre de l’arbitraire des discours édulcorés que le poète s’attache à déconstruire. La réécriture de l’histoire devient une préoccupation majeure dont il se fait le porte-parole téméraire, c’est-à-dire, ce conteur des temps modernes qui chante sans complaisance l’épopée glorieuse des figures de la résistance. Sène s’octroie justement ce droit de rêver, de voir enfin sortir de la chaleureuse terre de David Diop, le vieux et timide projet panafricain. Rien n’empêche de croire à cette perspective fédéraliste qui, au demeurant, sait avec exactitude ce que demain nous augure. En effet, le poète reste pleinement convaincu de l’énorme potentiel dont dispose une jeunesse désireuse de changement. Dans un autre registre, l’aède se donne carte blanche pour saluer l’illustre travail des ambassadeurs de la culture africaine. Parmi tant d’autres, ils ont pour prénoms Djoli Mamadou Kouyaté, les frères Tourékouda, Yandé Codou Sène, Sory Kandia Kouyaté, Aboubacar Demba Camara de Bembeya Jazz national de Guinée. Comprenons qu’il s’agit là d’un ton de revalorisation de l’africanité affichée qui, somme toute, ne se flatte aucunement de s’enfermer dans les terreaux de l’infécond esprit de clocher. À sa propre décharge, Sène n’envisage et ne saurait prôner un enfermement nombriliste sur le Même. Nous voulons simplement dire que son texte n’est point circonscrit dans une 11
stérile géographie figée sur une carte quelconque. Au contraire, et nous insistons là-dessus, il y a dans sa démarche poétique une volonté notoire d’ouverture. Nous sommes dans le cadre d’une poésie-évasement partant des rives du local pour atteindre les larges du global. Tour à tour, Tours, Niodior, Joal Fadiouth, Acra, Paris, Conakry, Caroline du Sud, Johannesburg, New York, Cocody, Ouidah, Nouakchott, sont convoqués. Voilà bien qui nous conduit à parler d’une incandescence vibratoire subséquente d’une Poésie-Monde. La teneur du propos se mesure plus dans le défilement des lieux qui tissent dans leur ensemble diversement hétérogène le chapelet de l’enrichissante disparité, celle-là même qui enjambe les frontières à la fois physiques et mentales. Telle est, à notre sens, la riche contribution du poète. Cette vision des choses constitue une véritable mathesis, un ultime cheval de bataille qui fait du texte littéraire le microcosme par essence, si nous osons l’expression, de la mixité intralinguistique. Dans Une Lisière de vie … le français, entre en dialogue avec les termes propres au terroir sérère sans souffrir d’un profond étouffement. Là encore, Abib Sène réussit à négocier ce pari esthétique. À ce propos, certains poèmes s’accompagnent d’un glossaire édifiant pour le lecteur. De la sève des mots, coule une langue poétiquement accessible à tous. Qu’on me permette d’ajouter que le poète Abib Sène compose essentiellement avec le cœur : un cœur généreux un cœur courageux un cœur reconnaissant un cœur tolérant un cœur plein d'humanité un cœur ouvert au monde, à la fraternité. Ultimo, un cœur imbibé de ses « Racines » ancestrales que tente de ressusciter une plume qui s'élance à la croisée des cultures, une plume aux saveurs du dialogue des 12
civilisations. Par ce biais, Sène revitalise la véritable rencontre dont nous avons tant besoin. Après les nombreuses pluies orageuses qui se sont abattues sur la terre, les humains – fussent-ils jaune, noir, blanc – gagneraient plus à admirer ensemble les couleurs de l’arc-en-ciel symbole naturel de la diversité des peuples. Le Coronavirus vient de nous démontrer que sans une coopération digne de ce nom à l’échelle planétaire, sans la mutualisation des efforts, nous peinerions à combattre efficacement cette maladie infectieuse qui fait tant de ravages. Cette épidémie n’épargne personne ; elle tue « sans distinction de race », nous dit le poète. Le message est clair. En plus d’être empreint du fil de l’actualité Une Lisière de vie porte un message d’espérance dans un monde déchiré davantage par l’indifférence, la méfiance, la violence terroriste, les guerres, le repliement nationaliste, etc. Dans ce sombre tableau de l’hypocrisie humaine, il faut compter ces vaillants jeunes, hommes, femmes et enfants tristement offerts en sacrifice aux enragées vagues de l'océan Atlantique. Nous n’en dirons pas plus. Laissons-nous patiemment embarquer à corps perdu dans ce voyage poétique que nous propose Abib Sène à travers ce recueil de poèmes hautement singulier. Sébastien Aimé Nyafouna Sorbonne nouvelle, France
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Partie I : Pri-ères
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Larmes aux yeux Toi avec qui je jouais au « qui trouve prend le trône », Toi avec qui je prenais la natte qui couvrait la cotonnade Des tisserands, artistes concepteurs des pagnes Des Kumax-Maaks, maître des esprits inconnus, Je portais devant l’éternel, L’esprit de ne jamais me séparer de toi. Mais voilà qu’un matin d’un Été chaud, Tu tiras le rideau de ta paume droite à l’odeur baume Pour fermer les lampes de ta lumière à jamais crayeuse. Comme souvenir, Tu me laissas une petite larme au coin de mes yeux, Lesquels ont lâché du lest dans la douleur de l’espacement fumeux. Toi avec qui je dansais au rythme des contes nocturnes, Toi avec qui je chantais au bord de la rivière de Yakowouk Les cantiques de la sainte coutume, Tu me trahis en me léguant l’absence de la tétée, La solitude dans la chambre des victuailles parfumées, Qu’embaume l’odeur piquante du couscous assaisonné. Toi avec qui je chassais les oiseaux Mange-mil des champs de Mamecore, Toi avec qui je marchais les matins Brumeux pour aller à l’école, Tu m’abandonneras à l’année de mon sacre étoilé. 16
Tu tournas le dos aux fruits de l’arbre ensoleillé Que tu as semé, arrosé et protégé. Ce n’est pas juste ! Et je t’en veux !!! Oh Tamarinier de Senghor, marigot de mes larmes, Emporte avec toi les prières d’une conscience sans âme. Et clouée au pied du mur de la tristesse, je dis : Adieu Mange-de-Djiguème !
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Regard au ciel Dans les couleurs du soir, Au cœur d’un été de loir, Je pose mon genou noir, Sur un destin d’une montagne fâme, Pour, d’un esprit dam, Prier le Dieu de Moïse, frame. Ya Rabi, Seigneur Dieu De mon âme de pécheur-récidiviste, De ma faiblesse d’homme-édénique, De ma nature d’Al Insane-humaniste, Je porte la blancheur du voile d’Emmanuel, Pour implorer une clémence sur un bilan divinement éternel. Un salut pour le peuple de Yémen. Une paix pour les frères Israélo-palestiniens. Une vie pour mes semblables Libyens. Sauvez la Libye !!! Dans ce désert du désespoir, Dans cette lagune de sang arroi, Je pleure l’ombre du berbère sauveur en aloi. Dans ce couloir sombre et alambiqué des algarades tueuses, On a fait de la peau noire une marchandise-voyeuse. Ils ont vendu à vil prix la couverture du bois d’ébène, Prétextant que je suis le descendant de l’enfant de la géhenne. 18
Seigneur Dieu ! Sauvez les Fourmis du désert. Brisez la vague bourreau de l’Atlantique amer. Détruisez ce marché du crime contre l’humanité. Otez ces barrières barbelées de l’autre rive sinistrée. Je ne suis pas un rebut. Je ne suis pas un malfrat perdu. Je ne suis pas un porteur de germes tordus. Je suis l’expression d’une alacrité, Qui s’étouffe dans le cercle des tropiques. Tendez-moi le berceau de l’obélisque, Je veux verser mes larmes de supplice, Pour supplier les acteurs de l’Agora d’Éthiopie, Afin que jaillisse la bonace d’un respect béni, Et d’une solidarité édénique. Seigneur Dieu ! De mes yeux remplis d’anchois, De mon regard hardi au désespoir, Recevez la larme d’un fidèle séquestré Dans le couloir funeste d’un Sahara pantois.
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Sarcophage d’Égypte Minette, reine de l’ombre, Lis-moi ces hiéroglyphes sombres, Dans la tombe du pharaon au collier d’ambre. Lis ! Lis ce sarcophage qui éclaire Les images d’un passé de gloire Collé sur le tronc cambré d’une nuit sélénienne. Passe-moi la lame par laquelle Les reliques sacrées se cassent En morceaux de sens authentique. Fais-moi entendre les cantiques par Lesquels sont lues et détaillées Les écritures démotiques cendrées. Offre-moi le pilon qui a moulu les papyrus Des rayons de la bile d’encre soulée. Et maintenant ! Écris ton destin. Écris ta volonté de festin Dans les eaux du Big Bang en entrain. Tu embrasses une vie d’un sarcophage. Et de ta main du mal en partage, Tu défies la prophétie des monstres de Carthage. Cède ! Tu seras le dieu sans couronne. Amanète, tu seras le dieu sans pyramide, Car le Mal sera vaincu par le Bien splendide.
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Sur la neige Seul sur les traces du chapardeur, Je glisse sur la lame de la mêmeté en ardeur. Ma natte, qui est celle des uns et des autres, Se déroule en meneur pour s’étaler sur les vallées Que bordent les champs en fureur. De la laine d’Afrique, Des vignes de Naples, et des Tanneurs, Des champs de blé d’Atlanta et de Kiev, Je lis le malheur des félins en chaleur. Sur ses arbres, raisonnent les sabots des loups en émois, Qui clanisent l’amour blanc, lequel larmoie Sur le pagne multicolore des moines idoines. Il est midi dans décembre mourant De la saison-printemps en sommeil. Sous un nuage en colère qui pointe sa lampe soleil, Sur le dos fragile de cette mousse phosphorescente en éveil Innocent, siffle la fin d’un état d’être sans pareil. Sous sa couverture argentée, Elle se fait pénétrer les entrailles qui sanguinolent Sur les pieds du prédateur envahisseur. C’est le temps du revers. Le protocole de Kyoto, les accords de Paris. Sauvons l’âme du pagne endiguant, La sœur de cette dame qui nous sert de repose-pied. 21
Chapelle ardente Nues devant la croix du sang en étale, Les larmes sucrées de piment s’affalent Sur la dalle cassée de l’espoir brisé. La fumée des canons fait vent dans la cheminée Pour souffler dans les narines du pachyderme de Duékoué. Les étincelles du feu ardent brûlent mes talons de progrès Avant de me couper mon fauteuil fissipède. Prions ! Genoux à terre. Prions ! Le mal a malléabilisé la haine, En ouvrant les portes de la fourmi-magma en haleine. Chandelle ! Oh chandelle grasse de peau au filet fragile, Ne te brûle point ! Elève ta blancheur sur le toit du Congo sans abscisse Pour briller sur la terre gabonaise mal-en-point. Que le noir du Pingouin ne l’emporte point Sur le blanc de son aile droite en embonpoint. Prions ! Prions ! Que la pince-monseigneur ne brise pas les cadenas de Genève ! Loin de mes doigts, ce contrat pignoratif Sur lequel tombent mes larmes cryptogamiques. Au bout de mes talons d’espoir, Piétin mange à coup de nécrose. Et Je refuse ! Je refuse ce tir à la fosse, dont la balle perdue 22
Va briser le bec de l’oiseau Columbia. Tendons nos bras. Tendons nos muscles. Pieuvre céphalopode de la roche houleuse, Que tombe sur toi le rideau de minuit. Prions ! Prions, Pour que le Biafra mange son pilaf, Pour que le Pin grandisse dans la savane du lion de Joal. Brisons ce pilori de la honte et de l’humiliation. Écrasons ce mauvais œil, Qui piète dans la maison des Grands-lacs. Sculptons ensemble l’autorité du ventre qui portera Les rayons du Pirée de Fadhiouth. Prions !
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Reine du Djoliba Dans la carrière de Makrana, Se tiennent les blocs de marbre, Qui couvrent le dôme de mon cœur, Qu’illumine le symbole de la sacralité divine. Oh ! Ton corps est un chemin, Qui mène vers le Paradis des huit portes. Je glisse entre tes entrailles Aux parois muqueuses et molles, Pour saisir le code 14 de la reine mystérieuse d’Éden, Où coulent les ruisseaux de ma gloire Yamuna. Des fontaines enchanteresses, Jaillit la symétrie d’une vie partagée. Au soir d’un baptême d’une éternité réunie, Bogantass de mes rêves unifiés, Je torpille les règles de la bienséance organisée, Pour ériger ma prière dans le sol béni De la Virginie perforée. Trait d’union Bogantass-Rébecca, Tu érigeas la paix des peuples malmenés Sur le drapeau multicolore de la diversité. Mon souffle s’essouffle. Ma poitrine se dilate. Je touche le fonds de la transcendance. Et la voilà, la Reine du Djoliba, Qui renaît des couleurs dialoguées D’une lune aux étoiles étincelantes. 24
Je pleure Je pleure. Je pleure les larmes de mon corps. Ce corps que caresse un destin débilitant. Je pleure ! Je pleure la fleur du rêve de mon âme, Que la Mousson a arrachée au milieu du printemps. Je marche, le soleil s’éclipse. Je titube, les étoiles s’effilochent. Je glisse, le ciel gronde d’une colère noire, Déverse ses larmes sur mes joues fanées Que mange le vent carnivore de Niodior. La poussière anthropophage De Djifère m’envoute les paupières. Et les caïmans du Zambèze me tutoient du regard. Je pleure ! Je pleure les larmes de mon corps. Je marche, Mais je vacille sous le poids écrasant de cette vie. Ce destin, ce destin d’une bête de somme Assaillie par les mange-mil, me tire vers une destination En déclin, un rendez-vous en perdition, une conjonction en décrépitude. Oh Mame-Mindisse ! Oh Mame Coumba Bang ! Oh Déesse Maïmouna ! 25
Je vous rends le creux de mon pied gauche, Où repose une vie offensée dans son essence Pour porter la tenue d’Ève. Ma main dans vos eaux, Mon pied sur vos bois, Je chanterai la lueur de demain, Grenue d’un futur farniente.
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Demain, il fera jour Ecartelé sous les tropiques, Qui tendent la main au soleil méridien, Le jour se fait jour sidéral avant de se jeter Dans le fossé de Ngor-batrain. Du Maroc à Tarfaya, Les rayons se lèvent Dans un bain de jouvence entrain Pour briller sur le pont Judéo-Arabe. Jordanie à l’est, Cisjordanie à l’ouest, Je fais face à l’Hermon libanais Pour chanter le vent pacifiant des eaux de la Tibériade. Kabbale, Talmud. Je dis dix pour commander le blanc du rire-bas, Et du sourire dans le royaume de Juda. Devant Bethulie, je tire mon voile. Et je prie sur mes doigts pour que jaillisse La lumière du Nous fraternel sur l’année jubilaire, Qui embrasse deux frères. Que Sarre et Sarrebruck se donnent la main Sous le regard satisfait de la Moselle. Que Yacer et Gédéon se serrent les âmes Pour liquéfier les gémonies, Et fêter la gemme Dans la sauce du jour qu’il fera demain. 27
Le Seigneur des anneaux Scruté par les glaciers de ses larmes, Qui isolent le fluor de la haute mer, Le regard du Seigneur des anneaux coule Dans les ruisseaux du Zambèze Pour arroser les merveilles du Green Garden. Sous la colère du vent volcanique, Se détachent les anneaux d’un python Rocheux qui s’étend au long de la falaise impolie, Laquelle gouverne les collines ondulantes d’un souffle satin. De ses forces géologiques, Échappe le secret de la fissure des plaques tectoniques, Qui se meuvent pour se croiser Dans le centre de l’étoile du grand bouclier canadien. Vie, vit dans le Gros-Mor du Baker’s Brook, Pour témoigner des teneurs têtues de la féminité créatrice.
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Droit à la parole Kalas Kangaba, meurtrie dans ma chair de Canon, Je brûle du feu de la haine. Blessée dans ma fumée de balles, Ecorchée dans ma lumière de feu, Calomniée dans ma détente d’ordre, Je suis le malheur des hommes et des femmes à terre. Je suis la tombeuse d’ombres, le messager de la mort. Dame des fusils, Je suis mariée à la haine continentale. Mère des armelettes, Je suis collée sur le visage de la brutalité qui tue. Je m’exprime dans le langage funèbre, Qui couvre les nuits de la trahison. Je bavarde, mes mots annulent. J’ouvre la bouche, Et le monde sombre dans le joli chaos Du cimetière de Kangaba. Amen ! Le soleil est blanc. Dia ! Le vent souffle dans le monde des diatribes. Je cogne, la mère tombe, L’enfant s’effondre, l’orphelin gémit. Le monde des hiéroglyphes de Tchernobyl S’affiche sur le versant de l’île des serpents. Tu ne tueras point ! Paroles chuchotées dans mes oreilles De tirailleur enfouies dans cette zone 51. 29
La chambre 33 couve un secret, Qui surveille l’ombre de la mort. Dix, mille, deux-mille, des milliers de mille Dans les ruines de la Serbie. À la puissance infinie, Ils sont dans les débris-rebuts du Burundi et de la Gambie. Éthiopie, Érythrée, je vous aime dans le sang de l’histoire. Oh, vous, enfants de Seth, Vous m’avez fauchée dans la marre des larmes pupils. Vous m’avez pressée sur le pagne de la veuve. Vous m’avez trouée dans le vagin du 14 mars Au sommet de Conakry. Ombres funèbres du chaos, Ne me touchez pas. Ne me touchez plus. Laissez-moi dans les bras du Dalaïlama. Passez-moi les paroles de Gandhi. Laissez-moi dormir sous le soleil Orné du rêve de Luther, le King de l’action réussie. Couvrez-moi du manteau Mandela Dans les prairies de Soweto. À Lincoln, aussi, le prix Nobel ! Kalas-ni-mort, Kalas-ni-feux ! Enterrons la gâchette de la haine qui tue Et qui me tue dans la mort qui tue pour la vie ! Signé Kalachnikov Au nom d’un rêve d’une paix universelle !
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Dans la gueule de la fosse Dans le Bagan du golfe, J’aperçois la sardine, Qui fend la profondeur du Chakarwardi Entre mon destin et la baleine du golfe, S’est scellée une alliance Que nous célébrons sur le sommet De l’Euphrate en mode vaillance. Et me voilà qui pose un regard d’alpiniste Sur la traversée du pisteur anarchiste, Perdu dans une avalanche de peur moraliste. Mes larmes s’effondrent ! Nous pleurons sur le toit du monde, Dans la chaleur du Kamtchatka et du Lac Kourile. Rapace aigle royal. Rapace empereur de Pignard. Un combat de Titans, Qui broie ma dentelle de maïs offerte Par le Massaï du Kilimandjaro en alerte. Je souffre ! Ma route migratoire vers le croisement Des forces lumières est entourée de barbelés, D’éléphants aux trompes oh bien trompeurs. Je cherche la pierre angulaire du Grand Canyon Que survole l’oiseau de proie Candor Aux ailes empoisonnées dans la forêt du Salvador. 31
Mon vol ! Mon premier vol. Et j’ai besoin de courants ascendants Pour faire le grand saut au-dessus du Grand Canyon. Et j’en appelle à mes frères TingaTinga, À mes sœurs Baoulé et Akan, À mes cousins Tchétchènes, À mes fleurs du printemps du Nil au visage éogène, Que je veux bien planter au pays de la grande démocratie. Lion du Djolof, Éléphant de Mbissel, Soutenez-moi dans ma marche vers la différence qui libère.
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Sahara Fleuve tranquille dans le silence béant de la pensée berbère, Sahara fait figure de frontière entre le monde d’ébène Et l’univers Arabo-négroïde. Dans son cœur de vertiges enrobés, Se pose le pas du chameau carnivore. Sur la piste sombre des scorpions, S’ouvre le grimoire aux chapitres champions.
lugubrement
Dans ses pages, Se lit le destin arachnéen de ces corps en lampions Nourris aux victuailles de lézards et de termites. Yeux au ciel, genoux à terre, Je marmonne une prière de salut Pour que le paraclet les vienne en appui. Je prie pour que s’arrêtent les caravanes de hara kiri, Qui, de guerre lasse, ont tourné le dos à la vie, Afin d’aller essorer leur désespoir Dans les rues splendides de l’Élysée, Les ruelles majestueuses de Madrid, Et les pavées poétisées d’Italie.
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Enfant noir ! Réveille-toi. Réveille-toi de ce sommeil désespéré, De cette nuit sombrement diabolique, De ce présent arnaqué ! Lève-toi et prie. Lève-toi et porte ton rêve vers les prairies de la lune et De Midi où sonnent les cloches de l’espoir à l’heur minuit.
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G5 Sahel Zone de turbulence, Terre de larmes et de sang en battance, Le G5 porte le G de la guerre dans un Sahel sali Par les semeurs de troubles, les fauteurs de désastres accomplis Et les guetteurs de prébendes dans les guétalis De la Mauritanie et du Mali. Guéri soit le cinq de la savane endolorie. D’Inates à Arbinda, De Nouakchott au Lac Tchad, Tombent les âmes vaillantes Aux blessures profondes. Dans ce Sahel du G de la Gestapo, La haine a triomphé dans le cœur chapo De l’animal aux cornes écrasées. Dans cette terre du milieu déséquilibré, La guerre s’est sahélisée Pour porter les couleurs d’un noir déchiré, D’une tricolore plus théorisée qu’implémentée, D’un G qui a perdu son GPS Dans les débris de la désolidarisation. Serval, Licorne, Barkhane ! Oh ! L’Afrique mon Afrique ! L’Afrique des grands paradoxes depuis l’aube des temps, Je te chante ! Je te chante dans les marais sanguinolents que ravitaillent 35
Généreusement les kakis aux veines sacrificielles. G5, Sahel ! Hélas ! Le Sahel de ce liquide que Shell Totalise dans sa BP Pour liquéfier les tartes aigues de son Exon très Mobile[s] Dans sa collaboration avec le Big Group, Qui fait bondir l’or dans les Beaux lol ! Du seigneur Ré aux facettes multiples. Sourire, je me le permets, Car le tout fait sens dans un tout de signification.
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Ma Côte d’Ivoire Dans ce Paradis des hirondelles et des éléphants blancs, Se couche un soleil aux larmes de colère et de dépit. De cette prairie aux dents dorées par les éclats de la lagune Des poisonnets danseurs, se retire le sourire des étoiles de Bouaké. Ma Côte d’Ivoire, Je n’y vois plus l’ivoire des chants enjolivant les matins Calmes, des rosées parfumées aux odeurs douces Que tutoient les cocotiers de Grand Bassam. Dans ces montagnes verdoyantes, S’agrippe une forêt aux cimes heureusement ballantes. De ces ponts majestueux d’Abidjan, Se lit le progrès d’une science, Qui porte le nom de Mariama Docoh. Cocody, Odienné, Khorogo, Daloa, Abengourou, Livrez-moi la voix belliqueuse du canon De l’étranger qui fait figure de river between. Des profondeurs des terres des royaumes Bouna et d’Akan, J’implore le Dieu du roi rasta De concilier les deux pans de ma nation. Baoulé, Bété, Krou, Agni, Sénoufo, Dan, Gouro, Dida, Nous portons tous les obligations De l’Orange, du vert et du blanc. Que cette position de chien de faïence faillit Dans son projet manichéen. 37
Houphouëtistes, Bagboistes, Soroistes, Retrouvez le GPS du père de la nation Au nom du peuple, par le peuple et Pour le peuple ivoirien !
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Soweto Salon des pauvres et des marginalisés. Ombres des damnés d’un arc-en-ciel déconfiguré Par les écarts non lus, Je nomme le bled des trous de Wanglers qui ont engagé Un combat à mort contre un État, Qui se taille le côté léonin des terres. Aux pauvres non-ayant-droits, Un toit de misère en face D’un Johannesburg de bourgeois et d’abondance. Mandela, le boxeur, dit le droit de l’avocat Pour libérer le passé de sa cellule suffocante. F.W. de Klerk passe la main à cet homme, Qui veut faire un retour chaleureux au Pays natal ! De ce bidonville en show dans la déchéance, Sort le visage écrabouillé de la femme en gestation, De l’homme en pérégrination, De l’enfant en vadrouillage, De l’intellectuel en désespoir, Du lambda en cause de déshumanisation. De cette frontière qui les sépare, Se dessine la figure dizygote du Mal, Qui a réussi à déloger le Bien du centre de la concorde.
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Prière d’Accra Au pied du caïcédrat, Je lorgne, du regard, la lagune perdue Dans la colline d’Accra. De Ndjamena à Lomé, d’Abidjan à Conakry, Le Great Hall de 48 fait raisonner la voix Nkrumahiste, Qui délivre un message de fraternité et de partage. Père du symbolisme et de l’étoile noire, Le gardien du Dou fait Waga De son peuple et de son Afrique. Sous ce caïcédrat centenaire, Demeure enfouis mes rêves panafricains, Qui perturbent le sommeil Des marchands du Middle Passage. Du pied de la tombe du maître, Sonne un destin d’un devenir Certifié en terre ghanéenne. Oh Seigneur des mondes, Qu’il vous plaise de faire revenir le serpent du Ougadou Pour que ses sept têtes se dressent sur les collines d’Accra, Sur les mamelles de Dakar, Sur les vagues belliqueuses du Grand-Bassam, Sur les montagnes malheureuses des Grands Lacs, Afin que poussent et repoussent Les filons du pagne de la grand-mère, Afrique !
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Toi, arbre de vie De tes feuilles de divinité, Tu fixes un regard de vie sur les algues du ciel Pour défier la pesanteur de l’existence. Mystère de vie, Racine du pluriel qui perpétue le feuillage de l’être, Qui n’existe que dans l’existence de l’autre. Dans ton mouvement ascendant Vers la lumière de ce ciel créole, Tu fixes l’errance dans le cosmos du vivant Que tu arroses sans bémol. Avec tes idées sacrificatoires Dans la vallée des écailles scabreuses de l’avidité, Tu pousses l’éternité dans le génie de la générosité. Tu pousses dans la civilisation qui a combattu la famine, Tu élimines la peur de marcher pieds nus dans tes entrailles De tes intestins carnivores. Dans ton ombre gal, Je trouve un couvre-chef blafard, Qui me protège des bactéries d’une main sale. Cette main ! Oui cette main qui manie l’envie de tout posséder, Porte une couleur sanguinolente qui corrompt la visée De la parole de l’énergie vitale. Dans le pâle miroir de ton destin, Se range un couloir sans issue. 41
De Pékin à Los Angeles, Du Congo à Tokyo, Ton totem de vie s’épuise Dans l’arme de cette modernité totale, Qui momifie le perpétuel mouvement D’un cycle de vie totale. Arbre de vie, Racine de mes ancêtres, Reçois mes libations de reconnaissance !
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Genoux à terre Il est pris à pince-étau. Tombée du ciel bleu, ma salive Implore le dieu Ogun de libérer les vannes Du vent brumeux des salamalecs. Que les épines des cauchemars sanglants se brisent Sur les phares des constellations du sinus B. Demain À l’heure où le brouillage portera les marques étoilées D’un lendemain ensoleillé, Je lui tendrai une main inventive. Je lui porterai secours pour le tirer Du pince-étau Afin qu’il s’assoie sur la chaise du roi Salomon.
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Virus De ton nom racine, Qui expulse des germes pathologiques, Tu gangrènes la vie sur terre. De ton anatomie invisible, Tu infectes la santé et menaces le tissu social. De ta mobilité glissante, Tu stoppes l’existence et menaces De la mettre au silence panthéontique. De ta résistance, Tu défis la médecine et perturbes Les cerveaux de la pharmacopée. Coronavirus est ton nom, Ébola est ton terrain de jeux où Tu te défoules avec ton associé H1N1, Qui rend la vache folle. L’humanité se contemple Dans la douleur tragique des épidémies endémiques, Qui voient le destin de l’homme malade Se secouer et se plier dans sa case désespérée de souffrance. Au nom de la vie, Je t’ordonne de quitter ce corps. Sort de cette chair malade. Quitte cet esprit inquiet. Lâche cet homme sur qui repose l’humanité Pour que revienne la paix, Dans cette maison calme et tranquille. 44
Criminel à compétence internationale, Tu frappes sans distinction de race. Ta démocratie est judicieusement partagée Entre riches et pauvres, sauf que ta part léonine Est transférée aux géants champions de la pauvreté. Sort, sort de la cabane du grand-maître. Laisse la marmite de ma sœur, Ôte-toi du pagne de ma fille. Sur ta tête, Je verserai une solution hydraulique alcoolisée Pour que Coronavirus et compagnie disparaissent à jamais Dans les océans salés qu’arrose la mer morte.
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Le Silence des mosquées
Silence ! Ici commence la prière. En ce vendredi du troisième mois sans Moi, Se lit un silence d’une prière de résignation. Du Corona à la Covid, S’est réalisé un virage de 19 degrés, Qui a brisé la voix bénie du muezzin. De la Mecque à la Médine. D’Istanbul à Casablanca, De Rome à Jérusalem, Se vident les maisons de Dieu, Au nom de la vie qui file au vif Vers le néant cimetière sans dire au revoir. Riches et pauvres, la Covid a fait le vide Du nord au sud, de l’est à l’ouest sans invitation aucune. Des frontières se dressent les unes contre les autres, Des libertés égorgées sous les autels des confinements, Prouvent à suffisance la capacité virile du Corona à dévillager la planète terre. De la mondialisation de la pathologie covidienne, Surgit la dé-mondialisation des rapports humains. Ainsi émerge une autre victime universelle, Qui porte le nom de solidarité internationale. Covid convoite, et opère des cassures conchoïdales 46
Dans ces sociétés aux tubes digestifs cynocéphales. D’autorité, elle instaure la démocratie de la peur. Les minarets s’en retrouvent silencieux, La lune croise la croix et met en berne Le drapeau de la foi, Qui fait loi dans cette noix, Qui porte la soif de faire souffrir Le martyre de la mort à la corona-covidienne.
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Douleur Douleur d’une vie au collier angoissé, Tu te frottes au destin épineux d’un garçon sans sœur. D’ailleurs, Il vous supplie, Il vous supplie de défricher son visage mélancolique, De donner vie à son faciès perdu Dans la steppe de Ngodilème, De dépoussiérer ce sentier cahoteux, Qui dresse pierres et épines, Mauvaises herbes et peaux de banane, Vers une direction d’un hourra triomphant. Détruisez ce mur qui le cloisonne Et le sépare du bonheur au sourire licite. Venez, Venez trinquer avec lui dans les eaux qui rissolent Sous les pieds de Jean, le Baptiste. Douleur ! Soyez baptisée au nom du Bien, Du Bonheur et de la Félicité. Amen !
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Douleur-vie Serré entre les dents d’un destin douloureux, Je signe sur le chapitre des peines du livre des horreurs, Qui prennent pied à l’aurore du temps des malheurs. Dans les cendres brulantes D’une vie de chaume hagarde, Je plonge mes doigts affamés D’un homme possédé et dépossédé, Au fond d’une conscience bousculée. Je crie au désespoir d’une vie balayée Par l’Harmattan d’un Sahel sans pitié. Comme un orphelin qui cesse ses larmes Sur le banc de la solitude, Je hisse un regard idiot Vers un ciel incolore Et aphonement mélancolique.
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Amanosa Au milieu de ses barres d’aciers ensanglantées, Dans ces trous creusés sous les terres des crimes de sang, Tu déposes une vie pour en prendre une autre. Tu y déchires une identité pour une autre. Tu y découvres une Bible, une Bible que tu trouveras Raisonnable dans ses versets cataclysmiques. Amanosa, où on est libre Que dans ses idées silencieuses, Marque au fer rouge la conscience Lugubrement coupable. Tu y vis la vie de la mort, Qui trouve vie dans ces cellules d’agonie, Où se conjugue à perpétuité la présence d’une absence. Au milieu de cet espace de loques humaines Et de zéros sociaux, Tu as acheté une faute pour payer une vie. Drogue, meurtres, viols, et braquages, Voilà les termes qui ont détruit Et qui continuent à détruire ces visages, Qui, malgré leur nombre en case, n’épargnent en rien, La société des hommes de la violence aveugle en partage Entre les cœurs en mal, et en détresse de vie.
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Au Berghof Sur cette langue de terre aux salives secrètes, Se tenaient les murs d’une main tendue pour saluer le sang Versé dans la barbarie de l’homme à l’état zéro de la civilisation. De Munich à Moscou, La haine est fulminée pour dire la boucherie D’une bâtardise à hauteur d’homme. Alors que Sotchi brise ses rêves pour s’allonger Dans des purges de rang et de torture, La Tchécoslovaquie agonise dans la peur d’accueillir La première de la deuxième balle aux allures mondiales. Au nom de cette sécurité collective, la moustache Se heurte à la croix gravement renversée. Alors le monde s’effondre dans les sanglots de la mort. Et puis, une prière retentit dans le Bourget pour Faire taire les tonnerres qui foudroient la terre calcinée, Afin que l’animal ne puisse jamais ressortir de sa nature première. Prions !
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MONT Ararat Du haut de son dôme au bonnet blanc de neige, Ce toit sur la route de la soie Pointe ses yeux sur la Perse aux bras ouverts. Sur ce faîtage du Moyen-Orient, Atterrit ce bateau Mohican, Qui assura la renaissance de l’humanité. Arméniens, Syriens, Iraniens, Irakiens et Turcs Le contemplent d’un regard jaloux Pour le tenir à l’écart des uns et des autres. Et sur ma chamelle du 21ème siècle, Je parcours les environs du mont Ararat Afin de psalmodier des prières Pour toutes les victimes des enfants d’Abraham. Dans ces ceintures de routes Que le sang a peint d’une couleur indélébile, Je plante dans les racines de l’humanité, L’arbre de la paix pour conjuguer L’histoire dans le présent Du vivre ensemble dans la différence.
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Pour son salut Du faîte de ce minaret, j’appelle, J’appelle les gardiens des temples sacrés Pour leur demander de porter haut Le tambour de la parole du Bien. Sultans des sultanats, chevaliers de l’Eucharistie, Hougans de la case des pythons, Venez grenouiller sur le sol calcaire Des volcans endiablés Pour dire la prière de l’aube, Afin que l’homme soit sauvé. . Priez, priez pour que l’homme soit délié Des griffes démoniques de la haine. Priez pour que reprenne son souffle de contralto, Son rythme au cœur roi. Avec les madeleines du bonheur partagé, Priez pour que disparaisse cette tumeur, Qui sonne sur la cloche de l’espoir. Priez pour que tombe une pluie De fortunes ensoleillées Dans le pagne bleu du ciel paternel. Priez pour que jaillissent les graines du futur, Les semailles d’une étendue de fleurs Aux regards splendides. Renommez ce monstre, Rebaptisez l’homme dans les cendres De son ancêtre pécheur, Pour que périsse à jamais l’œuvre de Caïn. 53
Pain de vie Sous le poids écrasant de mes péchés véniels et mortels, J’ouvre mon cœur de pécheur pour quémander une grâce, Une miséricorde, un amour d’un Dieu aux eaux baptismales. Dans ma pénitence errante, Je crève d’envie de ce pain de vie, Qui génère espoir et réparation spirituels. Sur la croix de mes douleurs humaines, Je confesse la charge de ce cœur assoiffé De prières et de pardon gracieux. Sur ce corps blessé par le regret, J’y écris le désir de se pardonner Pour mieux goûter à la joie du festin Jubilatoire de la confession et du sacrement.
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Détritus Sous les ragots des forêts, pourrissent Les racines des herbes épineuses, Qui foncent et s’enfoncent Dans les ruines des âmes perdues. Oui, ces âmes qui ébruitent le silence flegmatique Du Chaos Premier. Horace, le magicien, caillot de sang en bandoulière, Tu laboures les champs herbivores des détritus humains Que le cyclone a jetés dans son œil gladiateur. Horace le pyromane ! Pour une victoire qui fait vie dans un feu de paille éclaire, Tu te jettes dans l’écurie des champions du machiavélisme, Où se trament complots et se tissent des lois Aux senteurs de la jungle. Horace le détritus ! Ne te fais pas poussière pour souffler dans les narines de la vie, Qui vit et vivifie la vitesse des vents, lesquels effleurent le visage Visqueux de la vigoureuse misère des misérables de Victor Hugo Que visitent et côtoient les villageois de ma colline natale.
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Consolation Suite au camouflet cinglant sans appel, Je pose un recueil de poèmes silencieux Sur tes larmes sèches et âcres Pour te bercer du haut de ma magnanimité. Toi qui as connu la douleur de l’échec, Viens te confesser au bois sacré du prêtre vaudou Pour que demain soit un temps porteur D’Étoiles de grâce et de bénédiction. Toi qui as foulé aux pieds Le drap de la dignité humaine, Viens t’accroupir devant la modestie De ce destin malencontreux. Dis, dis la prière de Jacob, le grabataire. Dis, dis le plaidoyer de Daniel, le juge. Récite la prière de Younous dans le ventre de la baleine, Pour que règne la paix de ton âme au soir De ta réconciliation avec ton destin.
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Trépas Dans l’abîme du non-être, Il franchit l’étape pour un voyage Vers le signe d’un silence-absence. Sur la fermeture d’un regard éteint, Je vois la silhouette d’un réel en fuite Vers une destination éternelle. D’une voix soumise, Je perçois le diktat de ce qui n’est plus. Mystère ! Ni âge ni sexe, Ce bourreau sans appel atemporel, Agit sur le premier temps pour conjuguer La vie dans les rayons lugubres D’un passé lointain. Si loin que les souvenirs se confondent Dans la douleur de la fin sans fin. Alors je prie. Je prie pour que les anges en mission funèbre Te portent sur leurs ailes, Afin de te préserver des supplices de la tombe.
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La Traversée Dans le tunnel des débris de la nuit sans astres, S’entend le cri de la souffrance Aux yeux scintillants de désarroi. Dans le canal des pirogues en divagation, Se creuse le désespoir de cause qui fait sa chienlit Dans le futur crépusculaire D’un peuple en déperdition absolue. Dans les tuyaux de la médiature traditionnelle, Se lisent et se relisent les dictons de la vie sans miroir. Sur les pages du livre de vie sans vie, Se résume la philosophie du poète sans plume ni ancre. Alors, d’une rive à une autre, S’effectue une traversée de la survie. Au nom d’une logique de survivance, Se conjugue une vision d’ensemble, Qui, au nom d’une pérennité collective, Fait de tous un tout de gloire immortelle.
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Ils sont toujours là ! Au bord des rives de Bel-air, Lorébol contrôle les eaux des poissons fumés Dans la pirogue bleue pour les vendre à prix d’or Dans les boutiques Auchan que la Société Générale finance Sans intérêts majeurs au nom de la République, Dont les limites sont bien tracées par Eiffage Groupe, Qui renforce les intérêts de Total Énergie, Le baron des conflits bien menés Par cette armée étrange et étrangère encore bien intruse. Alors que Bridel bride les mamelles de la vache laitière de Yoro Sow, Évian évite le marigot de Ndouff et étouffe les ruisseaux de Kirène. N’est-ce pas Orange Money qui a grugé le portefeuille De Wari et de Joni Joni qui ont enterré leur avenir Dans les grottes de la France-à-Fric ? Dans ma voiture Peugeot se trouve une assurance Axa, Qui ne m’assure pas le visa pour le sommet de la Baule. Ils sont encore là. Prions par nos muscles, Prions par nos neurones, Prions par notre voix contestataire, Afin qu’ils libèrent le tablier. Ils sont encore là ! Que tout le monde se le tienne pour dit ! 59
Sans limites Dans cette nuit envoutée par les démons de la déraison, J’aperçois ton ombre vadrouiller dans les méandres de la solitude. Dans cette soirée aux lampions ternis par la poussière du deuil, J’entends les battements de ton cœur aux rêves sinistrement bafoués. Dans ces océans houleux aux vagues maléfiques, Je sens ta prière d’enfant orphelin. Face à ces murs de malheurs armés, Je te souffle le message de l’espoir. Par le pouvoir de mes prières d’amour, Je te pousse au-delà des limites du possible Pour que demain soit différent. Dans les instances de doute et de faiblesse, Je te passe mes baguettes de gloire, Pour que ta réussite retentisse au-delà du ciel premier. Devant cette nudité de la mort inéluctable, Je te bénis au nom du souffle de nos ancêtres, Pour que le claveau céleste soit témoin de ton couronnement.
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« Rhodes Must Fall » De son siège de roi de la dépossession, Rhodes fait rôder son souffle dans les archives Et mémoires de l’asservissement. Maître dans la torture pour le gain illicite, Il passe chevalier des terres et lopins ensanglantés, Dans cette Afrique doublement violentée. Avec les paumes bien huilées de sang innocent, Rhodes résiste aux appels pathétiques du plus faible, Pour faire feu sur les braves gens de la résistance. « Rhodes must Fall » Dans cette Afrique du Sud encore En perfusion démocratique, Rhodes, qui se veut sempiternel, foule au pied L’Esprit du pardon et de la réconciliation. Maître d’esclaves, seigneur du racisme machiavélique, Rhodes arrondit les angles alpha et oméga Des existences de son cercle. « Rhodes Must Fall » Il est venu l’heure de tourner un chapitre saignant, Pour faire disparaître ce géant De la douleur et de la souffrance. Des yeux et de la mémoire collectivement martyrisée, « Rhodes Must Fall »
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Corbeille de lin Madona, vierge de la nature qui éclaire la nuit des temps. Tu fais corps et concept dans la figure de la sainteté, Pour illuminer la terre d’une trinité qui fait sens Dans la beauté d’une nature maternelle. De tes flancs surgit la communauté dominicaine, Qui sévit par l’épée pour restaurer l’ordre De l’inspiration divine. Sur ces tableaux de Mickael Ange, S’illustre le blanc de la source, Qui crée par le Verbe sans verve, Afin d’implanter la vérité du vert éternel. De cette pierre de St-Jérôme, Se déploient les germes de la renaissance À partir desquels Nicolo de Larga Modela les rebuts de Sodome et de Gomorrhe. Pour redéfinir la trajectoire de l’existence humaine. Pureté à la Savonarole, que soient allumés les bûchers De la vanité pour purifier l’innocence de la source virginale.
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Dans le puits
Tombé dans ce puits de l’horreur et de la haine, Le damné du temple de Sidjilmakha S’abreuve des eaux putréfiées de la méchanceté humaine. Dans une nuit de larmes et de misères, Au fond, au tréfonds du puits, il entend les rires moqueurs Des puisatiers jadis amis et complices. Menotté par les frissons du désespoir, Le damné babille des prières de foi et de supplication. Il cherche l’isoloir du pénitent pour confesser sa misère, Lui, la victime première de sa loyauté. Il se confie en la miséricorde, se compose, redresse son regard Et le pose sur la poulie qui indique la direction de la liberté. Dans l’ultime effort d’un revenant en spasmes, Il se projette dans le vide du dehors Pour croiser la médaille de la liberté et du salut.
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Contrition
Douleur, Douleur de mes écarts rémissibles, Ne me tue point. J’ouvre le livre sombre de mon cœur, Pour recevoir le sacrement du pardon. Pour avoir offensé le nom majuscule de sa Sainteté, Je fais pénitence. Accepte-moi dans Ta Grâce Et ne me laisse plus me bercer de l’illusion D’une félicité pécheresse. Devant Vous, me voilà, Qui Vous offre mon ballot d’omissions, De fautes, et de manquements, Pour me réconcilier avec votre Bonté. Amen !
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La Tristesse Toi sentiment d’amertume, sensation de démission, Tu tourmentes la conscience et immobilises le corps. Tu canalises l’atmosphère et fixes la pendule l’heure zéro de l’action. Tu rends statutaire la pensée et circoncis le vouloir Dans l’immobilisme du désarroi. Ta seule proposition aux perspectives de demain, C’est la nudité du désespoir. Toi tristesse, tu es l’image présente du corps perturbé. Tu es l’ambiguïté d’une conscience, Qui s’entiche d’une faible passante. Tu es la forme irrépressible D’un exil de soi vers soi. Tu es la voix gauchie de la joie. Tu es un désaccord brutal entre un regard joyeux Et une chanson d’un cœur lénifié. Toi tristesse, dans les profondeurs béantes Du noir de la colère, tu épingles l’esprit Et blesses l’âme dans la racine de son être. Toi tristesse. Au nom du commun vouloir de vie, Je te prie de te tirer une balle de tristesse dans la tête, Pour te tirer de la triste réalité de la vie.
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Le Couloir du diable
Ce labyrinthe où se conjuguent la mort et le deuil, S’expriment les fresques du diable, Qui gouvernent les esprits maléfiques. Ce tunnel dans lequel souffle le vent des utopies, Est le cercueil d’une aube étouffée Dans le disque des enfers en miniature. Dans cette avenue de maisons closes, Se trouve le diable, qui déambule Dans les cauchemars lugubres des escrocs de Chicago. Dans ce château de Holmes, Retentit le cri des innocents sacrifiés Sur l’autel des appétits indignes. Dans ce crématorium des meurtres, restent les restes De ceux qui sont restés en rêves innocents. Dans ce couloir du diable, se dresse la cabane de la mort Des pauvres enfouis dans la mauvaise foi des fous de l’accumulation. Dans ma foi de disciple du bien, je détruis ce couloir ahurissant du mal.
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Indécrottable
Toi crasse, toi écornifleuse, Ne t’approche point de l’orphelin. Toi algarade, toi avanie au pied du poult diffamatoire, Ne t’accole pas à la sainteté des fleurs en gemmation. Toi souillure immondice, Qui inonde le monde de ton impudicité, Ne te mêle pas des affaires des hommes en réclusion. Toi crapouillot au groin répulsif, Je t’ordonne de t’éloigner Des enfants aux sourires et rires angéliques. Toi au visage nauséeux, Ne parle pas avec les femmes-perles Aux senteurs féeriques. Toi gueuse de nuit et ombre du doute, Ne tente pas la virilité machiste, Au soir de la fête du nouvel an. Toi gredinerie massée et mâchée, Ne couvre pas la lune de tes canailleries indécrottables. Au beau milieu des étoiles polaires, Je pointe le phare des trayons sur ton existence, Pour te purifier de toute salissure et flétrissure.
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Lieutenance
Dans le livre sacré des versets divins, Ton Dieu te donne la lieutenance astrale, Pour que tu dises le langage divinatoire D’un présent collé aux tapis de la mosquée céleste. Toi qui portes la foi dans la poitrine, Le soleil se dilatera sur tes convictions bollines, Pour te couvrir de ses ombres salines. Dans ce bateau de Noé à la fonction prophétique, Tu verras le coq chanter au bord de la cale solide, Pour indiquer le lever d’un jour aux inconnues multiples. À l’heure du déluge et de la noyade, Tu t’accrocheras à l’ombre d’un arc-en-ciel Naissant au bord des eaux de l’hécatombe. Dans ces nouvelles terres, naîtra un nouvel homme D’une sainteté vierge aux allures d’un nouveau départ.
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Mon Dieu
Devant cette porte que frappe cinq fois Le faciès du bondieusard, Devant ce levant vers lequel se dirige le visage Silencieux de toute une Oumma, Sur ce djebel où s’est opéré un miracle de la croix, Vers cette pierre qui accueille les prières des dévots touriers, À ces minarets qui pointent leurs têtes vers le bleu de l’éternel, Pour ce livre qui délivre de la lire, Au nom de cet homme au nom prophétique, Je Te tends mes mains grelottantes de foi, Pour te faire don de ma prière : Que ce nécessiteux trouve pitance dans ton Jardin de rentes, Que ce malade soit libéré de ses souffrances indécentes, Que la paix soit l’ennemi vainqueur de tout malfaisant, Que règne Ta Grâce et Ton Royaume Omniprésent Pour nous et sur nous pour le temps d’une vie sans fin.
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Golgotha
Au sommet de cette chaîne de montagne, Je dépose une prière pour le repos de l’âme sacrifiée. Au flanc droit de ce mont, témoin de la crucifixion, Je plante une fleur de souvenir pour honorer l’absence du présent. Au pied de ce géant du Moyen Orient, Se trouve un salut, une vie de bohème. Barabbas, oh Barabbas, Libère-toi des chaînons de l’égarement et Accepte cette main tendue Aux brebis perdues de la maison d’Israël. Alors que la Judée jouxte la vallée de la mort, Je marche au bord de ses ailes pour implorer le pardon Du Dieu des hommes. Dieu des cieux et de la terre, Déverse ta Miséricorde Sur tes serviteurs en errance. Enlève cette couronne d’épines Sur la tête du fils de l’homme. Brise cette croix, qui porte le sang de l’agneau du sacrifice. Cette flèche tachetée du liquide rouge, Cette fiole remplie de cris et de sueur, Se verse sur l’infinitude destin de cet homme lumière. 70
Je me fâche
Dans le silence ombrageux de ce noir débilitant, Au milieu de cette muflerie foutrement éparpillée, À côté de ces arbres au fruits interdits, Je scie le fantôme de lignard-ignorant, Pour détruire le groin de l’inassouvie président. A l’intérieur de cette voix sans voie, Je détruis, à coups de marteau, ce mur démagogue D’une sale vision aux conséquences macaroniques. Oui je me fâche ! Je suis outré par ce mensonge en tenue présidentielle. Par cette bêtise au visage luciférien, Je défie les grades de ce Général aux ordres loufoques et malpropres. Les pieds trempés dans le sang refroidi de la victime martyre, J’enjambe le corps inerte de la démocratie martyrisée.
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Ma Joie
Pour cette mémoire des hommes Aux pouvoirs en danses nocturnes, Je salue l’ombre du baobab Aux bras colporteurs de mystères en élucubration. En cet homme aux habits baignés Dans la marre des Pangoles, Je place ma confiance de berger moulé Dans la sagesse du Salma Goudokh. Sur ces sabots du cheval du Jaraaf, Je dépose un gourdin vaillant pour dégager Le diable qui envoûte le « Mice de Senghor ». Sur cette lame du coupe-coupe de Sathiour, J’étale la gorge du vautour sorcier qui mange La dignité des hommes en errance diurne. Avec les libations des Kuus-Kuus en alerte, Je verse encore le sang du coq blanc Des ancêtres en déréliction. Et au soir d’une vie de Khaat, Je me dévêtis de la peau de l’ignorant innocent, Pour chanter avec les hirondelles du Ndout, La sagesse de la foi, ma joie d’homme forgée Dans les écorchures de cette case où brûle Le feu de l’orfèvre bâtisseur. 72
Narquois
Doigt accusateur sur ton front, Je te défie en te filant un fil tordu Dans ta fine bouche déridasse. Toi gourou dans ta vie de vipérin, Je te maudis dans la rigueur de la rusticité De tes livraisons ténébreuses. Que les paillettes des débris malades Te tombent dessus du haut de tes heures Hypocritement saltimbanques.
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Jacqueline
En ce vendredi Saint des Saints, Tu as tendu la main qui dit au revoir à jamais. Seule, sur ce lit de mort, tu as gardé le silence Des morts au fond de ta conscience leste. Ta vie fut un combat contre un mal inconnu, Seule avec les démons de la douleur, Tu t’es donnée à la stoïcité et à la persévérance. Sans jamais laisser entendre Le petit bruit de la complainte, Tu t’es laissée phagocytée par la joie de vivre. Aujourd’hui, tu as abdiqué Face à la force assourdissante du mal. Derrière toi, une vie orpheline rivée Sur un rayon d’espoir incertain. Dans une vie toute écourtée Par le tout mortel de la mort, Je tends la main et je prie : Que le coq blanc de nos ancêtres t’accueille Dans le jardin originel de la vie. Amen !
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Le Sermon de la montagne
Capharnaüm, La maison d’état d’un gymnase spirituelle, Galilée où la gale est guérie avec spontanéité, Je croise Christos qui dit le langage de la gloire libérée. D’une joue à une autre, il brise la haine du Caïphe, Pour assouplir le cœur de son ennemi. Et Lazard, Dans les profondeurs d’une tombe ténébreuse, Tombent les larmes de Marie et de Marthe. Et pourtant, en ce jour pascal, La croix se décroit dans les eaux du Jourdain, Pour déposer le message de la résurrection.
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Partie II : « Le Commun vouloir de vie commune »
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Diéri, terre de savane
Diéri, ma vallée, ma racine, Devant la calebasse de lait versée Sur le sol pastoral du Fouta, Je parle à la faune qui bégaie Le vert de la paille de juillet. Diéri, Dans le Wallo du berger aux doigts lestes De lait et de fromage. Diéri, Terres des mâles et des femelles, Étale ta peau de chèvre Et prie l’étoile du petit matin ivre, Qui scintille au premier chant De l’oiseau du minaret givre. Diéri, Dans la steppe, abreuve ton cheptel De veillées nocturnes, des rythmes du Yéla Et des saveurs du Lathiri blanc. Diéri, Ma terre de danse, qui tatoue Le langage de la girafe de Dagana. Je porte le canari de l’eau symbole, Pour répondre à l’appel de la grand-mère. 78
Buvons ensemble la coupe du passé. Déterrons le visage enfoui Dans les buissons du Ferlo. Tirons les rideaux sombres pour accueillir Les vestiges volés de Béhanzin. Terre d’hier, terre de demain, Diéri, nid de dires, étang de faires et creuset d’êtres-del’être, Karstiques des musées, de la raison intuitive et discursive, Tu m’apprendras, immanquablement, la leçon de demain.
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Noir et Blanc, je ne suis point !
Dans les bords de la source Zam-Zam, Siffle le vent du messager de l’aube. Je me lève. Je marche dans la brune rose des talons guerriers de Yasiga. Le blanc de mon œil se dilate sous la pression de ce ciel bramant, Lequel attache un garrot sous ses ailes chamarrées et glaçantes. Il saigne ! Il saigne de douleurs vermeilles, blafardes et basanées et blondines. Mes lèvres de prière s’allongent sous la pression du mot juste. Je dis PAIX ! Amores Mea Lex ! Et je m’écrie. J’interpelle ce chameau de Sidy, Qui galope sous le règne de l’intolérance sadique, Défiant le désert de la Libye qui monte sur ses dunes de haine, Pour ainsi souffler sa masse de sable sur la mer rouge. Il est noir de chenu et ecchymose de benzène. Ma patrie du monde broie le noir 80
De la réclusion et de l’exclusion. Il est midi. Je cherche mon arc dans le claveau aux gants de sang. Je cherche l’universel dans la mère des océans détritus. Je cherche ma bile de poète dans les tintamarres de Las Vegas. Thony, le frère, mon sang, le policier. Vous êtes tous des Domoubayes. Mon noir de peau : « c’est le soleil qui m’a brulé ». Mon blanc de couverture, « c’est la neige qui m’a recouvert ». Mon jaune de surface, « c’est l’or qui m’a passé son couvre-chef ». Mon rouge de sang, « c’est le Dieu des hommes qui m’a légué sa divinité ». Au bord de la source des 14 étoiles, Naquit l’Enfant moirage. Des mamelles d’Arabie, il grandira. Des satins de Bethléem, il paîtra son troupeau. Des montagnes de l’Indochine, Il boira son lait avant de courir vers ses semblables Dans l’univers du panorama racial. Éden des hommes, Éden de la flore, tu seras le remède, Qui cassera les ailes de ce ciel arc-en-haine. Tolérance, je veux bien nommer !
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Croix et Croissant
Vous ! Vous qui contrôlez les portes du ciel, Vos enfants se tuent et s’entretuent, Dans les grottes de la Judée, Dans le désert des Esséniens, Sous l’ombre des palmiers de la Médine, Vos dévots heureux dans la folie croyante tuent le nom de Dieu, Au nom de Dieu, et pour le Dieu des hommes de Dieu. Oh Jésus, fils de Nazareth, Mohamed, fils d’Arabie, Chevalier du désert, ouvrez-nous vos demeures tombales, Pour que nous vous adressions un pot de fleurs d’inquiétudes. Ouvrez-nous vos livres sacrés, Nous avons une lecture à faire. Déroulez-nous vos linceuls, Nous avons une miséricorde à chercher. Montrez-nous le chemin, Nous avons un Dieu à rencontrer. Le sang d’Abraham Arrose le champ des épines de la terre promise. Il coule à l’est, Se déverse à l’ouest pour se coaguler 82
Au nord avant de former un abcès Au sud du plateau du Golan. Béni soit Isaac, qui trouva la paix dans la cabine du champ. Bénie soit la famille d’Abraham sur laquelle sont posées La couronne des Juifs et la clarté du sabre du désert. Oh Jésus, fils de Marie, Mohamed Ibn Abdallah, Saisissez cette main, ces deux mains qui s’opposent Et qui s’appuient sur la gazette pour chanter, Dans le déshonneur, la haine qui tue. Saisissez-les et baptisez-les Dans les eaux du pacifique Au nom de l’amour, de la fraternité et de la tolérance. Dieu Miséricorde Dieu, Ne nous abandonnez pas sur cette croix de sang. Ne nous livrez pas aux mercenaires de la mort. Ne nous soumettez pas à la charge du clandestin terroriste. Béni soit le monde des justes. En Dieu, nous croyons, De Lui, nous espérons secours, Vers Lui, nous formulons nos prières. Alléluia, le ciel est bleu, La terre est ronde, A nous d’arrondir ses angles, Nos angles de vie pour un monde meilleur. Oh Jésus, fils de Marie, Mohamed Ibn Abdallah, Que la paix soit avec vous et pour nous pour des siècles et des siècles. Amen !
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Le Juste-milieu
Quand l’aube chassera les lueurs poreuses et poisseuses De cette nuit mourante au milieu des grottes de Golgotha, Le coq chantera les galimatias de l’agneau du sacrifice de Calcutta. Quand le Nil arrosera les talons du chevalier noir, Quand les mamelles d’Arafat convoqueront le paraclet, Pour lui livrer secrets et boyaux de l’Orient, Le Persan portera la tunique du Turkanème, Pour saluer son frère Kurde en langue Assyrienne. Quand la silhouette d’Arabie remplira d’eau Les massifs du Zagros et du Taurus Baloutchistan et L’El bourg Pasdarans, Moudjahidines, Chiites et Sunnites, Juifs et Chrétiens et Musulmans se donneront la main, Pour chanter à l’unisson la gloire d’un Dieu qui universellement Parle la langue de Babel, enfile la soutane, le turban et le bonnet juif. Alhamdou-lilah Il est dans sa diversité, Unique dans son universalisme, Et puissant dans sa miséricorde. Son royaume est celui de l’Enfant-Amour, Qui traverse les frontières et les barrières raciales, 84
Pour détruire l’arbre de la haine, Qui pousse vilainement sur la terre hideuse De la haine et du rejet de l’autre. Le seul Dieu qui vaille est celui de l’écharpe de Vénus, C’est celui de la steppe, de la savane et de la forêt, C’est celui de la neige, du désert et des îles. Tu l’appelleras Roog et il te répondra Adona. Tu l’appelleras Jéhovah, et Il te répondra Allah Tu l’appelleras God, et Il te répondra Dio. Ne le cherche ni dans les cieux, ni dans les airs. Il est dans ton cœur et bat le rythme Du Tam-Tam de l’amour et de la paix. Écoute-le, et tu danseras avec ton prochain. Écoute-le, et tu partageras avec ton voisin. Écoute-le, et tu accueilleras ton semblable. Écoute-le, et tu aimeras l’être humain. Comme tu aimes ton propre corps.
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De Bagdad à Alep
Les larmes du Dieu soleil Coulent sur le sabot de la chamelle de Houde. Alep pleure, la Syrie marche sur le long chemin de l’existence. Et Bagdad, sous le poids d’un impérialisme en transe, Expose les couleurs du sapeur-pompier en instance. De Bagdad à Alep, s’étale la rosée brumeuse de la mort, Qui se compte et se chiffre dans l’indice quotidien du désarroi. Bagdad saigne, Alep ahane sous le choc de la fragmentation frénétique. Le monde hagard, se perd dans les ballets diplomatiques, Qui décorent les acrobaties des feuilles de route noires Perdues dans les labyrinthes du désespoir. Alep tremble, Bagdad gémit sous le poids du mensonge et de la tromperie. Sur le tombeau de Hassan, se flagelle un peuple maté, Qui trouve son Martyre dans la douleur d’exister. Sur le reste de Palmire, Alep fredonne. Et voit sa couronne de civilisation foulée au pied, Avant de tomber dans les fracas de l’indicible.
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Oh ! Dionysos ! Ici, nous implorons ta lampe lumière Pour trouver l’Homme égaré dans les vestiges de la haine. Au fond des détritus nombrilistes, La main sur le cœur, j’en appelle à Allah. Sauvez Bagdad, extirpez Alep, soignez Gaza. Bénissez le Sinaï, protégez Jérusalem, surveillez le Yémen, Posez votre gloire sur le diadème de la famille d’Abraham.
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Dans le Bronx
Au cœur du Concourse dans les rues noires D’une banlieue au rythme des sirènes endiablées, Je découvre la hauteur d’un ciel brun et ocre. D’un décor humain au tissu du Baye Fall, J’apprends à distinguer le sol des tannes à celui des Dior. Bigarré dans sa nature émaillée, Le chemin de fer dévide entre les entrailles Ensoleillées du temps qui ne s’arrête jamais. Du haut de mon sixième, Je touche du doigt quatre Les auteurs qui me connectent au fleuve Casamance Et aux verges de la délivrance du Sine. Je prends la place de Mame Ndiaré Pour devenir le berceau de la nostalgie, Qui soigne ses plaies par la magie du clic. Photos, et vidéos Me sapent le bonheur d’ubiquité pour me Faire des ailes qui défient l’Atlantique. Comme un oiseau volant, Je surplombe la voûte calme d’un Bronx qui Me salue d’une main flavescente, pourpre et hâlée. 88
La Croix du chemin lunaire
Au sommet du minaret, Retentit la cloche qui dit le son de la croix Dans le bruissement des ciboires, Qui font appel à la saveur des dattes du désert en proie. Judée et Yémen se croisent Dans le carrefour de la Croix Rouge Et du Croissant-Rouge. Des bras de la Seine aux ruisseaux de la mer morte, Coulent les eaux du Jourdain, Les eaux des oasis matins, Qui arrosent la terre des pyramides calcinées. De mes larmes mosaïques, De mes côtoiements Ismaélites, Fleurit l’arbre Touba, Qui refuse son fruit à une Eve adamite. Touba, De ses racines métisses, Jaillira le Zam-Zam qui engraissera Le cœur des braves soldats de la famille d’Abraham. Quand le soleil sortira de ses ailes lestes, Le Sinaï grondera de sa soif geste, Pour aller dire à l’étoile des six en messe, 89
De réveiller David, le juge en teste, D’aviser l’homme de la chamelle de Médine en piste, De combattre le Goliath de la force aveugle et iconoclaste. J’embrasse le bleu, Je pose ma poitrine sur le rouge, Et je m’embaume le noir, En buvant ma poudre au lait de papier de lynx. Bonjour la Judée. À vous Hong-Kong. Bien des choses à Séoul. Que du bonheur à Bagdad. Que la lumière soit ! Et tu seras diversement paix sur le lit du fleuve Salam.
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Cheval Olympique
Toi qui galopes dans la terre hybride de Rio, Sous le regard de ma statue, Soulève tes sabots au-dessus de la barrière, Saute, saute ! Plus haut ! Tu atteindras le triangle droit de l’univers des cinq cercles. Cheval des hymnes, Galope dans mes rêves de chevalier berger. Galope vers la tribune officielle ménagée, Pour y déposer la bride manichéenne de la différence achevée. Cheval olympique, prend la piste. La piste qui ferme le cinquième cercle Du stadium du donner-et-du-recevoir. D’Athènes à Rio en passant par Londres, Galope, galope dans le rythme des vibrations fraternelles. Sous tes pieds, chante le verbe Humanitas. Sur ton dos, Dandine le parapluie du messager de la paix Universalis. Olympique dans le pique de la fusion isme et cité : J’entends la tonalité d’un mondialisme, Qui se conjugue dans l’unité de l’unicité.
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Emmène-moi sur le ring du combat qui libère, Traverse les buts du jeu qui fait équipe. Prend le marteau qui lance la force épique, De la brutalité qui raisonne Hors du village des hommes stoïques. Plonge dans la piscine qui purifie Contre le poids des démons qui divisent. Olympe-bénissez ma course tendue, Et tracez la voie à cet athlète aux drapeaux perdus Dans la flamme éternelle, Qui jaillit aux croisements des pistes colorées.
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Ma Voix Sur cette tribune de Henry Catan, De George Bourguillon, je plaide non coupable, Pour le peuple de la pierre et du sable et de Haganah, Exodus. Ouvrez les mers et les océans, Les portes du désert et du fleuve de sable. Que ma signature noire ne soit pas effacée par le rouge du sang. Diery Yacine pleure ses morts sur le mont du Kurdistan. Jafifa s’exile vers le nord pour rencontrer le ciel des rêves volants. Pourquoi cette ligne de fissures ? Pourquoi cette fracture de morsures ? Seigneur Dieu ! Béni soi le sang des hommes, Le sang de l’Homme bipède. Gaza, Tel-Aviv, recevez, de mes mains tremblotantes, Le drapeau de la terre de l’unité et de l’entente. Fêtons le Grand-Pardon ! La Paix des braves. Que les frontières se cherchent pour trouver le chemin De la montagne de Moïse et ainsi ouvrir la marche de l’histoire, Le dialogue des cœurs dans la savane des damnés de la paix.
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Carnage en haute mer : je pleure les enfants d’Afrique
Dans ces flots d’où giclent les algues vertes, Qui dorment sur le lit des rayons invisibles, Les oiseaux du printemps laissent voler Les méduses blanches, qui chantent les larmes d’une vie volée. Tristes dans les profondeurs des vibrations halieutiques, Dans les courants froids qui transforment l’obscurité En maïeutique de peines, ils pleurent leur destin de proie bouleversé. Seuls devant le dauphin blanc, ils s’alignent aux signatures Des frégates pour se tirer du festin de la jungle bleue des aventures. Frénésie de chasse, écailles de requins, La lance tombe dans la profondeur Du récipient du sang déposé à l’intérieur de mer-douleur. Il ne reste plus qu’ossement et silence de deuil-majeur. Les requins et les baleines ont traversé Les frontières des océans d’horreurs. Disparaît alors la lampe soleil, Qui fortifiait la nageoire d’honneur De la boule des sardines qui peine dans le déluge Macabre au milieu de l’équateur.
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Dauphins et requins, Frères ennemis sur le banquet des eaux de Madagascar, Pour briser ces bouts de bois frêles Et fertiles dans les vagues du Za et du Ziz. Dans les filets du bateau pécheur, Se capturent les voyageurs pubères, Qui voguent dans une embarcation éphémère. Poissons côtiers dans l’aventure, L’immensité sans refuse vous perdra. Dans le comble du paradoxe des eaux tropicales Tributaires des courants marins, Vous goutez à la mort des eaux polaires. Vos destins sont soudés aux cales de l’enfer Infranchissable de l’hémisphère des enchères Que tutoie la mort dans l’univers des panthères.
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Réfugié
Je suis d’Afrique, d’Asie et d’Océanie. Je cherche un toit, le toit de l’humanité. Il m’a été dit que ce toit a été détruit Lors de la dernière guerre entre L’extrême gauche et l’extrême droite. Je cherche un point de chute, Mais, il m’a été dit que le point de ralliement Des rebuts sociaux a été assailli Par les acteurs du racisme coloré. Je cherche un toit Dans les prairies du rêve collé sur les ongles du pacifique, Mais, il m’a été dit que le vent des courants extrêmes a soufflé Dans la direction blanche de la Maison ovale. Je cherche un toit Dans les angles de la tricolore Que sous-tend la philosophie fraternelle, Mais, il m’a été dit que le 03 s’est émietté en un 01 exclusif. Je cherche un toit Dans la chancellerie de la Manche, Mais, il m’a été dit qu’ici on n’aime pas les parfums exogènes. 96
Je cherche un toit Dans le sourire helléniste, Mais, il m’a été dit que la lumière de Miss Liberty est braquée Sur les frontières hispaniques pour faire figure d’identifiant. Je cherche un toit Dans les rues de Moscou, Mais, il m’a été dit que la couleur de ma peau me rendait invisible. Je cherche un toit dans les montagnes du Nil, Dans les forêts des grandes eaux, Dans les sables du désert, Mais, il m’a été dit qu’il n’y avait pas assez à boire, Et à manger pour tout le monde. J’ai cherché un toit sous le ciel clément de L’Empire Perse et d’Ottoman, Mais, on m’a fait exploser le crâne Dans un supermarché Juif : Attentat à la bombe piégée. Où dois-je aller ? Sous quel ciel de l’humanité ? Une voix me répondit : Mon fils, tu vis dans le monde des humains Perdus dans les entrailles d’un individualisme, Qui se plait à mourir dans les bras D’un Père-égo pour mieux se maintenir. Réfugié, je cherche un toit. Peut-être devrais-je le trouver Dans mon propre corps de déshérité, 97
Dans mon âme, Ma propre âme damnée et maudite dans mon cœur, Mon propre cœur de citoyen de seconde zone. Je suis réfugié. Je cherche un point de chute, Mais, je ne sais où aller. Le monde m’a fermé ses portes, Voyant en moi un vulgaire passant qui est tombé du ciel, Et qui doit y retourner sans poser de questions. Réfugié je suis. Me voilà. Me revoilà qui pars, et qui repars comme j'étais venu. Seul, tout seul, avec, dans mes bagages, le dénuement abhumaniste, Le rejet rejetant de celui-là même qui me ressemble.
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Enola Gay Dans ta mission de End of Gaity Tu as franchi ces océans, Tu as volé au-dessus des montagnes de Nagasaki. Enola, tu as surplombé les sommets D’Hiroshima pour arroser le Nipponland D’une pluie de supplices sur ce pont en forme de T. Tu érigeas un peuple dans la raideur des atomes enrichies, Pour les faire taire dans ce brouillard de cette nuit d’horreur. De ton ventre ballonné, tu enfantas une fin et un début. Tu écrasas un monde pour, à jamais, en faire naître un autre. Du salut, tu tiras la mort et le désastre avant de rattraper Le soulagement dans un plan qui marcha Avec son maréchal tout à fait Marshall. Oh, Enola ! De cette case d’où tu es retournée depuis lors, N’y sors plus. Je t’intime l’ordre ! En ma qualité de citoyen du monde, Je te condamne à la peine capitale sans appel, Pour que tu ne sois plus jamais en mode opératoire. Que la commune volonté de vivre ensemble l’emporte Pour toujours sur la déchirure qui fait recours Aux services d’un gadget, qui signe sur le registre des horreurs, En consignant la vie dans toute son expression. 99
Le Malin
D’une main ferme, attachée à un regard dur, je frappe. Je frappe au cœur de ce visage, Qui dessine le mal et reflète la laideur de la haine. Je frappe sous la ceinture de cette ombre, Qui marche dans les ténèbres du malheur. Je frappe sur et je tranche la gorge de cet homme, Fils du malin, qui coupe la joie dans sa fleur de l’âge. Je frappe ce vent de paroles non humanisées, Qui s’écrasent sur les murs du printemps arabe. Je frappe sur la présence de ce tricheur indécent, Qui expose sa faiblesse-jalousie Dans le salon pacifié de la volonté du vivre ensemble. Toi, cœur malade, Viens pour que je t’arrache les épines de colère, Qui poussent à la con dans ta poitrine de misère. Viens pour que je te libère de tes fantômes, Qui volent la paix de l’âme afin que tu sois heureux En voyant l’autre dans ses habits de succès et de réussite.
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« I Can’t Breathe »
Vêtu de mon identité noire dans Une Amérique blanche aux étoiles en deuil, Je glisse ce billet de vingt que la sueur de mes bras A dignement gagné dans ces sentiers tordus d’un capitalisme Sans ordre capitolin. I Can’t Breathe ! En ce lundi sombre, Je prends la sentence d’un genou aveugle, Qui porte le fanion de la haine et du racisme. I Can’t breathe ! À terre, les mains liées, menottées comme L’ont été celles de Stephon Clark, de Michael Brown, d’Eric Garner, de Laquan Macdonald, de Travon Martin, de Souleyman Jalo, et j’en passe car, J’entends la voix de mon ancêtre Kunta Kinte, Qui murmure : « Mon fils, mon petit-fils, toi aussi… » L’histoire refuse de répondre aux appels inlassables du temps Dans cette Amérique au visage encore cannibale. I Can’t Breathe ! Ma gorge se dérobe sous les lettres de mon prénom George, Pour laisser cet homme-gorgé d’inimitié m’égorger Par un appui lâche de son fémur, 101
Qui me rappelle les terres de Gorée et de Cape Coast. I Can’t breath dans une Amérique où l’esprit Du Kukluxklan continue de régenter les faits et gestes De certains de mes compatriotes. Regard contre le sol, cœur asphyxié, Je rends mon souffle Entre les mains du Dieu de Saint-Georges en Lui priant de Pardonner à cet homme, qui m’a infligé un coup mortel de patella, Car il ignore que nous sommes tous à toi, et que ALL LIVES MATTER
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Auschwitz
Soixante-quinze ans après ! Un regard dans le rétroviseur Fixé sur cette montagne Gestapo, me permet De voir ce spectacle d’horreur Que Nuremberg n’a pas assez pleuré. Auschwitz ! Dans ces barbelés qui parlaient le langage barbare Des hommes au cœur antique, Vous tombait dessus, avec un ressentiment barbare, Un regard qui sculptait une statue éloquente D’un antisémitisme impitoyable. Shoa ! Transmettons l’histoire ! Parlons de cette étoile jaune, Qui faisait office d’immatriculation funèbre Dans ces fours crématoires d’où retentissait La vibration d’une vie barbarement bafouée. Dans ces camps polonais d’où flottait Un drapeau à la croix gammée, Se lisait l’exubérante image de la nudité Que la mort arrosait de sanglots endeuillés. Auschwitz ! Auschwitz aux âmes décapitées, Je signale l’angoisse d’une vie craquelée 103
Que l’encre de l’histoire a bien collée Sur le mur d’un Souleymane à la croisée des chemins. Gardons nos souvenirs vivaces et vivants, Pour que les démons d’Auschwitz N’aient plus la force de reprendre force. Géhenne des enfants de Canaan, Reprenons le bâton de Moïse, Pour retrouver cette terre promise, Où les rejetons de David balaient Les pierres tombales de Jérusalem. Que cette haine qui tue au nom de la couleur identitaire, Soit à jamais calcinée dans les cendres ardentes De la beauté du commun dessein de vivre ensemble, Sous les couleurs d’un hélianthe en extase.
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Je me bats
Contre les méfaits du déséquilibre social, je me bats. Contre le caporalisme monocrate, je me bats. Contre l’apartheid du gâteau national, je me bats. Contre le serrage et la sujétion sociale, je me bats. Contre la démonisation des rapports sociaux, je me bats. Contre la boucherie du talent et le carnage Des idées libératrices, je me bats. Contre la félonie et l’infidélité, je me dresse en officier De guerre aux échelons lieutenant. Contre la mollesse et la fainéantise, je me bats. Contre l’inimitié et la perfidie, je porte la tenue du combat. Contre la guidoune, et le criminel, je me bats. Contre la sédition et le bakchich, je me bats. Contre le tribadisme et le saphisme, je me dresse. Contre la clitoridectomie et les sévices sexuels, je lutte. Je combats pour le Bien de l’humanité, Pour le bonheur de l’être humain tout simplement.
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Sapience
Mère des connaissances, fruit des expériences, Conséquence des vies en bouillonnement, Sapience naquit avec sapienne pour saper le sas Des esprits en conflit. Sophia dans la méditation, Art dans son expression, un chemin dans son exemple, Un point dans son horizon, un état dans sa nature. Dans la lenteur de mes pas calculés, Je sens m’envahir les senteurs de l’émerveillement. Je m’interroge et j’interroge l’inconnu vivant dans le visible, Pour trouver la sapience qui éclaire et clarifie Le questionnent éternel du philosophe.
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La Pa-tience
Un pas, une trace, la vie n’est que souvenir. Patience : un composé de temps et d’inactions. Un intervalle de vie dans une position figée. Un pan de l’existence arraché à la réalité du quotidien. Un morceau de l’être crucifié Sur le tableau sadique du non-être. Une illusion qui fait collusion avec le rêve égorgé Sur le pagne têtu du cauchemar. Une tolérance de trop de cet état apathique, Qui finit par réveiller la maladie du Wu-wei et du Tao. Pa-tience, un pas de plus Dans la nescience des exigences du présent.
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Fleuve tranquille
À travers ses vagues molles et dociles, Ce fleuve au nom inconnu, vogue en direction de la Sicile. Dans les tréfonds de la forêt vierge, Le vent tranquille souffle dans les oreilles Chevelues de ce grand silence fluvial. À l’intérieur de ses boyaux jaunis par un lit en or enfoui Dans la plaque tectonique de Koumbi Saleh, Se trouvent les gravas d’un futur souriant. Au bord de son delta décalotté, grossit une mousse À la blancheur cérémonielle d’une messe de minuit. Il se lance, force, fonce et s’enfonce dans Le bois vert du mystère de cette nature difficile. Il se déambule, serpente et se jette dans cette eau du boudin, Qui offre un spectacle vaudeville plus que réjouissant.
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Je refuse À la croisée des chemins qui mènent vers la victoire, Je m’agrippe sur la veste rougeâtre de la résistance. Je refuse ce tribalisme, qui scinde ma nation en portions maléfiques. Je refuse ce manichéisme, Qui neutralise le bon vouloir collectif Des descendants de Bourba Djolof. Je refuse cet égoïsme exprimé Dans la démagogie du petit nombre. Je refuse cette faiblesse coupable, Qui assombrit l’étoile de la fraternité. Je refuse de marchander avec les démons de la division Et « du tout pour ma tribu ». Je refuse cette ethnicisation Hyperbolique de la chose publique. Je refuse la tarikhisation voilée du pouvoir politique. Je refuse, Je refuse cette bureaucratisation à outrance De l’urgence dans tous ses états. Je refuse cette philosophie dogmatique Du système maraboutique. Je refuse cette politisation Du deuil permanent de la périphérie. 109
Je décentre ce centre, Qui centralise le gâteau national Entre les mains des centristes néolibéraux. Je décentre la centralité De cet esprit citadin de la citoyenneté. Dans une nation aux couleurs vivement républicaines, Se pose une nova qui tend la main à ses enfants, Pour un commun destin de paix et de concorde.
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Le Bafing et le Bakoy
Source de vie, lisières du salut, Le Bafing et le Bakoy se croisent et s’entrecroisent, Pour donner naissance à la vie, Une vie qui coule d’est en ouest, Du nord au sud de la Falémé pour arroser Les terres sèches de la fracture sociale. Aux arbustes désolés dans la soif de la vie, Ils injectent des bulles de rosée, Pour les ressusciter de leur sommeil létal. Au désespoir d’un peuple affamé, Ils apportent confort et aisance. Alors que le Baffing balaie les sédiments Funèbres des marais endeuillés, Le Bakoy coagule la saignée du corridor de l’union sacrée De la source du métissage aquatique, qui fait germer La vie dans les terres berbères de la Mauritanie, Les tannes en pleurs de Richard Toll et du Gandiolé. Et les calcaires latérites de la montagne Dogon du Mali.
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Ce palais
Bercé au sommet de la colline du diable, Ce palais se pavane dans les ombres De la forêt du capitaine Martyre. Enfoui dans les ondes belliqueuses de la trahison, Ce palais pali sous les ordres criminels de son Excellence. Sur la route qui mène vers son dieu, Je rencontre ce berger aux rêves souffre-douleurs, Qui soulève l’épée de la révolution. Au bout de sa lame, Une âme d’un sacrifice égorgé Dans la forêt du peuple Beti. Paul, le billard en pyjamas mortuaire, Refuse de lâcher le gésier de sa bananeraie en pleurs. Sous sa casquette père de la nation, Se cache le Rubicon du sang, Qui limite son interface avec le peuple. Pour une éternité d’un pouvoir bunkérisé, Les ailes des faucons aux regards patibulaires, Sont déployées, oui redéployées aux quatre saisons De cette cour couronnée, courtisée et diablement Court-circuitée dans la profondeur de ses équilibres.
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Pluriversalisme
Je suis de cette beauté. Cette beauté de la terre du Soudan Que seuls les poètes initiés peuvent chanter. Je suis mirifique. Magnifique de cette beauté Que nomme Martin Luther King. Je suis de la Teranga, La générosité d’accueillir la différence Dans l’indifférence. Nègre des plantations, Nègre des montagnes du Kenya, Je dessine le cercle de la beauté qui souffre. Dans un univers de ceci et de cela, Je pose le pied sur les guidons du pluriversalisme Pour faire halte sur la terre de mes ancêtres.
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Concert de casseroles
Alors que le soleil fait ses adieux au crépuscule du jour, Un vent venu de loin tournoie les casseroles endiablées. Des klaxons et clairons des taxis et mototaxis, Ébruite le bruit aigu, qui tombe dans la marre noire D’un dégout audible et sonore. Du gobelet à la casserole, la rue se casse Dans les cassures du cachot social Que surpeuple le grand nombre de la belle misère sociale. Du haut d’un balcon balafré, Je dégonfle le cœur qui libère la fracture D’un corps en frémissement. Et dans le rythme de ces pleurs en colère, Je chante le désespoir de ces regards, Qui s’affalent sur ces bords et abords de ces casseroles que Raille la misère noire de ce peuple piteusement asservi.
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Les Sept collines
Yaoundé, la ville des sept collines. Enterrée dans la pente cahoteuse du bassin de EMIA, Yaoundé est incarcérée dans les bras vigoureux De cette diversité silencieuse. Tombeau du silence fataliste, Yaoundé est soumise au quotidien sabré Par la mélancolie de l’impuissante innocence. Dans ses yeux éclatants, brille la clarté de la beauté splendide, Qui couve, dans les lisseurs des feuilles de bananes, L’agneau de ce paysage tombal. Alors que le soleil sanctifie la lueur de ses rayons, Je ressens la vie dans cette vie enterrée Dans les pieds des sommets de cette rosée matinale Que les singes s’arrachent avec ardeur Pour remplir leurs paniers de grimaceries.
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La Cité U
Dans cette ville aux tresses renversées, Je trouve, je retrouve les traces du capitaine Sankara. Dans ces monticules aux yeux vert-foret, ricanent Les dentelles d’une vie aux abois. Dans ce versant des nudités féminines tropicales, Se casse le thermomètre au liquide ithyphallique. Dans cette cité U au volant dévasté, Se signalent les odeurs d’une sexualité libérée. Sous ce regard liquéfié, sortent les ongles Des bouteilles d’alcool en chaleur. Dans ces rues rustiques aux veines arrosoirs de liqueurs, Se fume le poisson de maman-Chantal. Et après ! Oui, au-delà de cette brise nocturne, Chuchotent les aigreurs d’une vie balafrée Au cœur de son essence.
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Partie III : Amour
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Un matin d’octobre Dans ce quartier désinvolte Où bat le cœur sacré du dieu Éros, Tu poussas les rideaux des deux portes Pour glisser sous les draps inox, De cette demeure Rahma au siège de Minos. D’un cri aigu qui dilata la bobine de ta mère, Tu saluas l’assemblée au corps blanc de couleur. J’étais là ! Au bord d’une rivière de larmes-mouilloirs Que bordaient les délices d’un bonheur sincère. Je perdis les mots pour retrouver la prière. Gloire à la nature mère ! Gloire au Seigneur Donateur ! Gloire au pouvoir du Verbe, Qui s’est fait chair dans ce matin d’octobre. De ton regard curieux, Qui suivait le rythme de tes mouvements spontanés, Je décelais un signe de mêmeté qui faisait office d’identité : Miroir de la trinité. Me voilà, Nous voilà qui faisons Un dans cette diversité qui s’écartèle, Dans la forêt du sud et la savane du centre. Kor Marie, homonyme du Roi Khoureich, Soit béni dans ta mission prophétique.
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Au cœur du cœur Volé des méandres du ciel affamé, Ton cœur survole les racines de la Falémé, Pour se poser sur les ailes frêles De cet oiseau métis qui gazouille dans l’île des serpents. Posé sur les cimes de cet arbre caché Dans les eaux sacrées du cinquième ciel, Ton cœur éclaire la vie qui éclot sur terre. Cœur de mon cœur, Je te cache dans les racines solides de la vérité De l’amour chanté à l’aurore du printemps. Dans les talons hennés de fleurs de lys, Je dépose le pot de sentiments qu’embaume Le parfum rythmé du Riti des princes de Diakhao-Sine. Cœur de mon cœur, par devers moi les fleurs, Je te parle dans ma nuit honteusement belle De discrétions dévoilées. Entre les yeux de ces étoiles aux pieds nus, Je peins un mouvement qui prend la forme D’un cœur qui fait cœur au cœur du cœur, Qui me tient à cœur. Du cœur de ton cœur, Je voyage avec mes rêves dessinés Dans le manuscrit des anges bleus, Qui volent au-dessus de la mer Rouge. 119
Au printemps de l’âge
Tombeau de cet arbre où vit le nombril, Qui lie la force de l’eau et celle du feu, Et dans cette rizière grenue De délices et d’épices aux prix leus, Je fais sombrer mon épave de corps Assoiffé dans la yeule du champ de beu. Prunelles de l’existence, cordialité des mœurs, Tu détiens les secrets de la connaissance, De l’interdit dans ce mat de heu. Et de ta source, coulent les ruisseaux De la mignardise qui me fait salir les couleurs Du printemps enceinte de neuble. Oh ! Lune de minuit, soleil de midi, Vos rayons foudroient le mercure qui tombe du nid De la pyramide du maître Mani. Du temple de Ted, s’échappent les Fourmis à piqures Galbées du blanc caillé de ce lait vie. Libère-moi, libère-moi de cette masse qui massifie Ma douleur de Selbé kor qui veut bien Se purifier dans les eaux du Jourdain, Avant l’âge du prochain printemps doris.
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Rose-Marie
Samba Linguère ! Girafe de la Falémé, Kangourou de la Mésopotamie, Nectar de Gibraltar, Rose Marie, Samba Linguère, Je te tends la main. J’appelle ton visage aux traits angéliques De poser son angoisse sur mes épaules de géant. Que ta splendeur gratte-ciel se couve Dans le vent mousson de ma poitrine galbée. Que tes collines de chairs s’apaisent sur mon cœur soleil, Qui bat pour une diastole de vie. Seul dans mes rêves gondolés de désirs, Je pose les paumes sur le mur d’une lamentation nocturne. Seul devant ce noir de brouillard incertain, Je mange le désespoir de te voir soulever Le trophée de la fertilité. Seul au bas des bas-fonds de Cocody, Au sommet de l’Himalaya, Au fond du lac Tchad, Je chante le corps de cette lune aux ailes messianiques.
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Trouve-moi ! Amène-moi ! Dans ce désert aux eaux tièdes, Où ne vit que la graine de la progéniture. Rose Marie, Samba Linguère ! Lignée des Berbères Almoravides, Descendante de l’ancêtre du maître des hiéroglyphes, Reçois de cette main tendre, la fleur de l’arbre du milieu.
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Amitié
L’âme aimable du révérend S’échappe de la 13ème rue amande, Pour entrer dans les rêves errants du révérend. De ses colliers à valeurs altruistes, Je lis la hauteur du palier centriste, Qui soutient l’âme litière, Laquelle arrose notre amitié. Dans mon ignorance d’homme faible, Je regardais ma force du Bien m’abandonnait Sans pour autant que je pusse lever le doigt de la question. Mais quand mon destin croisa le bonheur collé Sur l’action de droiture, Je réalisais, Qu’il ne me restait plus qu’une seule erreur à commettre : Secouer l’arbre qui a porté les preuves de notre fraternité.
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Elle !
Native de Siou, Papillon de lama-bou, Ton menton en forme de pyramide renversée, Donne une longueur à tes joues glissement affinées. A la sensation de la laine des glaciers de montage du Québec, S’ajoute ta silhouette de fée qui me soulève le scrotum, Et me heurte les corps caverneux qui se dilatent Au vue de ton grand fessier au mouvement décalottant. Du bassin au fémur, je contemple la danse mouillante De tes cuisses aux contenus gracieusement excitants. Oh mon nerf sciatique ne me laissera pas faire ! De mon sacrum d’un homme à l’annulaire déjà pendu, Retentit un cri de peur que la fidélité commande au gré de sa volonté.
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Pilon tendu
Pierre jetée au bord d’un déluge épouvantable, La vague du pacifique vient délivrer la bouteille Des profondeurs inconnues de ce jour 14 février. Sur la croute de l’oiseau marin, scintille la blancheur D’un cœur aux prises des vagues d’un océan chanteur Dans les rives que noircit ce profane amour brut. Dans les fibres d’une litote ivre, Je plonge mon regard indiscret dans cette pyramide Au centre joyeusement gonflé. Au travers de cette vague qui s’envole Vers les limites de mes rêves délicieux, Je tiens le piquet qui tremble devant Le magma de cette montagne en ébullition. Tendu comme les cordes d’une Kora en vibration, Le pilon de ce mortier fermé piaffe de force sauvage Que seules les vagues moussantes de cet océan Aux eaux chaudes peuvent calmer.
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Toi qui me parles Juillet dans les cordes vocales du muezzin de 17h, Je dis 16 et tu fus dans les bras du fleuve Ndiagamar. Ton regard de vert forêt brille au-dessus du soleil Des espoirs pour foudroyer la lampe des mamelles. Ton souffle de girafe se mêle aux tremblements De mes lèvres de débutant. Et me voilà qui entre dans la case de l’oiseau fétiche. Ma sueur se vide de son corps pour traverser ses ongles D’amour qui me caressent la montagne de l’obélisque. J’emprunte l’escalier du bas pour poser pied Dans la mer caspienne où règne La puissance du Dieu créateur. Il est 19 heures. Le soleil va mourir de sa belle Mort dans les ailes d’une voussure clémente, Où repose l’âme de la graine éternelle. Juillet dans les cordes vibrantes du muezzin, Aprème m’a livré une vie pour en prendre une autre. J’étais. Je suis. Je serai. Oui, je serai, à l’aube de la renaissance, Dans la hutte du berger, Pour murmurer une prière de bénédiction.
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Tam-Tam Tam-Tam, je vous salue. Je vous salue vous qui êtes pleine de grâce. Tam-Tam, messager d’Afrique, je vous écoute, Vous qui portez sur la peau les larmes du deuil Et celles du rire. Je vous entends. Vous qui rythmez le talon d’Achille des femmes, Qui creusent, des doigts du pied, la terre de Médina Sabakh ; Terre des rythmes de voix et de couleurs, Je vous chante la gloire de l’émotion nègre. Quand la voix du Ngoyane vous caresse Les fibres de la peau de chèvre, Qui se gondole sous les doigts de Dondé Mbaye, Siga, la belle danseuse, Pose ses ongles sur son petit pagne, Pour sauter sur la pointe de ses pieds, Qui prolongent la peau douce de ses cuisses Grenues de joie et d’énergie. Oui, ce petit pagne que couronnent de séduction Les précieuses perles dial-diali qui se croisent Et s’entrecroisent sur la taille arrondie qui bouge Du mouvement de déhanché, Me donne l’ivresse d’un homme en désaccord Avec la logique empirique. 127
La terre tremble sous ses pieds, Elle pleure les larmes de ses entrailles. Le Magma charnel de ses éperons fend le désir de l’homme Et fond le plaisir du regard dans les profondeurs De la marre de Mbélakadiaw. Le soleil frémit, il gémit. Et l’air suspend le mouvement des arbres Vers le coucher d’une nuit, Qui se dilate dans le péché de la chair. Cette chair du Tam-Tam que Dondé-Mbaye turlupine, Tapote, caresse et pénètre du doigt de tambour majeur Pour dire à l’humanité le message De l’Afrique qui renaît de ses cendres.
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Mon nom est Diouma
Diouma, la Linguère ! Tapis sur un balcon gris accroché Sur les dents de l’Atlantique, La vague de l’ouest souffle dans les narines De ma guitare qui chante la paix. Oui, la paix des braves, Qui donne racine à la Coraille bleue Sur laquelle coulent, avec douceur, Les senteurs de la miséricorde. Sur ce rocher aux oreilles mauves, Sonne la cloche de l’union, Qui dicte la direction de la concorde. Saly, Diouma, la Linguère ! Je vous invite Venez ! Venez ! Soulevez avec moi le refrain de la paix, Qui peint l’univers des océans calmes et doux. Je défie l’éternité dans la vague du pacifique. Le monde bouge. Il bouge. Il a bougé dans les eaux lumières D’un espace de brotherhood.
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Mes ailes poussent Dans le flanc gauche du lac de guerre. Sur son lit, fleurit l’arbre rose Aux branches argentées Et son feuillage danse sous les caresses D’une vie aux éclats dorés. Diouma, la Linguère ! Ouvre-moi la porte de tes lèvres, Afin que je balaie les devants de tes Petites et grandes maisonnettes. J’en appelle à la blancheur du Pélican, À la rose de ce lac qui traverse le camp De mes rêves avant d’aller mourir dans Le triangle sacré de ma déesse. Et de cette mort qui n’est point morte, N’acquit le Phénix aux ailes multicolores, Qui, sur le toit de Babel, Entame le Vol de Saint-Exupéry, Pour ainsi tisser la toile de la maison d’Abraham. Ely ! J’en appelle à Zeinab, à Kon Zang, à Rosa et à Kloskov, Pour bâtir le nid de l’oiseau mère avant la tombée de la nuit.
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Soleil À minuit
Elle est belle ! Il est beau de le dire en ce temps du coucher d’un soleil écarlate. Son visage latérite qui décore le ciel des oiseaux fontaines, Qui gazouillent sur les nuages sertis de diamants noirs, Je dis le beau dans sa joliesse splendide. Je dis beauté dans son élégance de girafe aux zébrures dorées. Je dis le soleil de minuit qui éclaire les nuits du Dieu Nyx Et sème la graine de vie qui laisse pousser l’arbre de demain. Sa douceur de peau fait vibrer ma montagne acné, Qui se fissure sous le poids du vent ivre. Je souffle, Je frémis avant de dégringoler sur le gazon rude Et épais qu’annonce les épieux de cette palissade, Qui fait corps dans mon rêve de chair. Je me reprends ! Il est minuit. Le soleil a sonné, j’ouvre la bouche. Je passe la langue sur le flanc, Pour ainsi gravir les mamelles de Ngor Afin d’y poser ma tête perdue.
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Les aires qui s’entremêlent, Les eaux de mer se coagulent dans un pleure-rire Pour générer une peine de joie, Qui sort de mon corps afin d’écrire Dans les couleurs de l’amour, ces lettres De noblesse, qui sonnent comme le groupe de lettres : Je T’aime !
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En villégiature
Dans ce paradis créé des mains des dieux, L’infiniment plus petit se déploie À côté de l’infiniment plus grand. Dans une robe digne d’une princesse d’Égypte, Tu étales ton corps dans les couloirs De ce palais rural que bordent les trésors D’un cœur aplati dans le regard Infiniment amoureux de cet homme. Au cœur d’une forêt de fleurs roses Au parfum de bois ivre de vigne, Je marche à tes côtés. En villégiature, sur tes cheveux D’Orés aux allures angéliques, Se pose la couronne lunaire d’une vie royalement définie. Cette main nue que je saisie par le puce, Me met la puce à l’oreille, Pour me pousser à pourchasser ta chasteté à travers Le chas d’une aiguille que ne peut échapper À la chapelle de mon amour chaud et chichement acquis. Sous l’ombre du paillasson existentiel, Je marchais avec ton âme jusqu’aux limites Naturelles des esprits en villégiature.
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Incognito
Qu’est-ce à dire ? Avec un pieu en larmes de foutre, Je pénètre incognito dans ton corps d’émotions Pour faire abnégation d’une volonté de rut. Incognito dans cet olympe des dieux grecs, Je glisse dans ton ombre sombre, Pour détacher tes embryons de membres féminins. Avec un feu porté aux plaisirs débauchés, Je marche avec la volonté branlante de tes jointures de cuisses, Qui brandouillent un fessier de curiosité. Avec une licence audacieuse sur ma poitrine enhardie, Je passe en revue mille et une lubricités Pour conclure en verve des caresses qualifiées Sous cette jupe convulsionnée d’écorchures.
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Femme fatale
Dans cette caverne en ébullition quotidienne, Émerge une clarté de fée qui émeut le regard. Tombeuse des âmes sensiblement fanatiques, Elle dégage une chaleur d’enfer aux fragrances érotiques. Dans un rythme de marée basse et de marée haute, Son fessier foudroie le regard du curieux voyeur. Feutré dans une poitrine en colère et en mode vombrisseur, Ses mamelons pointent avec insistance vers l’horizon D’une lune de miel au coucher du printemps. Et d’une flamboyance angélique, ses yeux éconduisent Le courage insérieux d’un aventurier innocent. Son corps, comme une arme fatalement puissante, Attire, immobilise, et écrase formellement Les cœurs en déréliction primaire.
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Claire de lune Des décombres de la beauté féminine, Je découvre ce joyau de Balli. Épinglé au premier regard, Mon cœur se lance dans une course athlétique, Pour échapper à l’emprise suffocante D’une présence enivrante. Dérèglé au plus haut niveau de ma psychologie, Mon sang froid se refroidit Sous le soleil lointain de la Casamance. Reine protégée dans sa ruche de miel, Elle transperce du regard la partie vitale De mon égo aux dimensions aplaties. Ces genoux qui tremblent, je les pose par terre. Ces mains qui flottent, Je les range derrière Le coup pour m’offrir en offrande, Oui, en deniers privés bien acquis. Et puis cette voix, cette mesure dans sa tonalité, Cette maîtrise dans le rythme, se joignent à la splendeur Toute entière pour me dire qu’entre le Bafing et le Bakoy, Il y a qu’une seule source. Et la source ne saurait être source sans son delta. Alors, j’en déduis que l’amour partagé Avec équité est un miracle du Dieu Cupidon.
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En Batifolage
Entre le gouffre du rien et l’abysse du dedans, Se trouve la vie. Batifolage du vin en vain, Qui ne vainc que dans la crainte du cancre. Batifolage, dans les digues du destin en folie enragée, Sonne la marque de la pudeur déchiquetée. Le vent siffle, le feuillage s’évade Dans les inconnues directions du libertinage. La vie batifole dans le bas ventre De ces eaux latines du carnaval de Rio. Et les poils pubiens s’accrochent à leur seul espoir Que porte un sexe en délire juvénile. Alors que les reins libèrent ce coup de butoir De la victoire érotique savamment consommée, Il batifole dans le couloir odalisque Du sérail hautement voluptueux.
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Solstice d’été
Au beau milieu de ces terres en urgence médicalisée, Tu te lances dans les aires calcinées de Hannibal. A tort ou à retors, Tu gambades dans le sable salé des fleurs du destin. Dans des pas faussement calculés, Tu livres le livre secret de tes délires de corps, Qui me laissent pantois dans la gueule-tapée du delirium. Sans déhanché ni déhanchement, Tu poses et imposes le rythme des hanches hanchement hanchées Pour dire le beau dans le Hanchinmani Collège de Dharwal.
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Une pluie
Sous cette pluie matinale au bonjour éventré, Dans cette boue joviale que renforce la latérite Des tannes du Tigré, Tu gambades dans la douleur et la crainte. Sous cette pluie matinale au parfum forestier, Tu te fends eu deux pour poser une étoile au sommet Du volcan endormi de Karisimbi. Sous cette pluie matinale que saluent les corbeaux de Salemata, Tu salues les papillons qui entrent en transe sur les cocotiers D’Oussouye et de Kandiabore. Et te voilà qui peint le ciel d’un sourire Aux ailes matinalement brillantes.
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Maman Chantal
Assise sur les extrémités d’un destin De douleurs et de sanglots, Maman Chantal chante le réveil des fleurs Du mal en mode coupable. Sous un lampadaire complice, Maman noie sa tragédie Dans la grillade de ses sourires enfumés. D’une voix anoblie par la sagesse d’un destin foudroyant, La maman de Yaoundé s’agrippe sur la queue du poisson Pour se frayer un chemin dans les eaux de la ville de l’autorité.
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Gladis
Au fond de ton cœur, J’ai trouvé une princesse aux allures angéliques. Dans l’émail de tes molaires en flamme, Raisonne le bruit présentoir de tes salives au goût pillard. De tes bouquets de fleurs médians, Grandit la force de conquête que cerne ta beauté édénique. Sur tes pieds mal chaussés, se cale une poussière, Qui danse dans les fleurs des discothèques De Yaoundé et de Douala. Et au sommet de tes sens sans essence, Je te bénis par le bâton Des tambours de Wasila et de Diogomaak. Oui ! Oui ! Au beau milieu de cette nuit des étoiles en folie, Je sursaute d’un rêve qui se dissipe dans les nuages mouillés D’une eau de semence que portent les anges de la forêt baoulé.
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Partie IV : Hommage
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Senghor : terre natale
Dans le cœur de la savane Du Royaume Ndoffène Fa Maak, Sur les rives du fleuve béotien de Salmone, Sur le dos de l’arbre Khodjil qui pousse ses racines Dans les cendres des champs de guerres féodales, Tu émerges pour émarger sur la marge des marigots De Mbassis et de Mboudaye. Sable des traditions, capitale Des Pangoles de Sobème et de Niawoule, Tu trônes sur le legs des ancêtres. Puits de la sagesse, ruisseau des déesses, Creuset des mânes de Mame Médisse, Tu jaillis des cimes de l’arbre fétiche Pour chanter les péans du Samel et du Khoy. Et sur la balançoire aux cheveux blancs, Se bercent les enfants de Mbine Senghor, Racines d’hier et fleuve de demain. Ta case de chaume encerclée par le serpent de Fape Maak, Pointe ses yeux sur le soleil perturbé du petit matin. De tes entrailles de mère fertile, Dégouline la sueur du pain libérateur.
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Tes héros du Ngole qui ont mangé sur la table servie, Sont descendus avec les secrets des dieux des étoiles. Oh terre natale ! J’implore tes esprits. Qu’ils m’enseignent les arcanes du temps. Qu’ils me transmettent le pouvoir de l’espace des initiés. Sur toi, tombe la pluie du cercle fermé Que chante le griot Ngouyane Dans ses transes de Chaman en mode esprit. Dans ton sous-sol repose le cimetière Baobab au fond Duquel chantonne la voix Samèle. Kor Gninale ! Ecartelé entre le coucher et le lever de Greenwich, Tu fais cap sur le point du rendez-vous du donner et du recevoir.
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Grand-mère
Que la lumière soit ; Et la lumière fut sur le gazon De tes paumes chaudes et humides. Que la vie soit ; Et la vie fut dans les marécages De tes poumons qui encerclent les battements De ton cœur fleurdelisé. Parfum de ma vie, source de mon imagination, Je te dois la racine de ma Diastole. Sur tes doigts gelés par la rigueur du pilon, La robustesse du Kadiadou, Je pose mon crane d’enfant gâté au crépuscule d’un âge d’or. Des flics flacs de ta voix sage et pleine d’amour, Je me réveille pour accueillir le premier rayon D’un soleil qui murmure dans mes oreilles les délices De la sauce d’arachide et du poisson fumée. De tes mamelons craquelés par l’âge du troisième temps, Jaillit ce lait entier qui arrosa la tige De mes talons d’orphelin. Grand-mère ! Sous ta couverture de bénédiction, J’ai trouvé salut et protection. 146
Dans la case de chaume où tu enfouis L’ombre jumelle de mon nombril, Sortit un destin d’un homme sur Qui se posa l’étoile du milieu de la tricolore. Flétrissures, il effacera ! Maladie, il soignera ! Malheur, il gommera ! Justice, il rendra ! Sur l’honneur de la vie, il t’honorera ! Pour se consoler, il déposera tous les soirs Sur la pierre de ta case de vie, Une vie, une fleur de prière pour Que, sur ton âme de vie, se déversent à jamais Les sources de l’éternité. Grand-mère ! Ton Fils !
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Maman
Maman, astre des quatre coins cardinaux, Tu brilles dans l’éternel de l’orbite soleil, Qui ne se couche jamais. Tu m’as passé la vie dans le jardin d’Éden Pour me faire manger le fruit de l’amour du cordon Et du sang béni de Youssouf. Toi qui a semé dans les pleurs Pour me faire récolter la joie de la danse, Je te chante les fleurs de ton sacrifice, Qui porte le signe de la croix de Pâque. Oh maman ! Maman oh Maman, Reine de mes veines dans le trésor de ma vie, Chante avec la Ste-vierge, Bavarde avec la Ste-Aicha, Et trinque avec les anges du septième. Avec mes sœurs Monique et Véronique, Soyez bénies parmi les saints de la droite. Amen !
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Bayedallaye
Je vous salue, père, Vous qui êtes plein d’humanité, Que votre nom soit vivement célébré. Lion blanc, messager du Bien, Vous êtes la pierre à chaux dans ce temple béni Des écritures du ciel égyptien. Lion esprit, vous nourrissez le feu éclair de la lune, Pour sauver les brebis de la maison d’Israël. De la cabane du Hougan, Vous réconciliez le corps et l’esprit. Lion blanc, Etoile de Sanar, enfant du Fouta, Trophée de la Sorbonne, Fierté dans la nationale République, Soyez honoré, cher maître ! Sous mes jambes frêles qui titubaient, Vous plaçâtes un repose-pied Pour raffermir mes pieds d’apprenti. De vos mains de délivrance, Je goûtais à la sagesse de l’esprit Dans la calebasse de l’Afrique.
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Père des orphelins aux pieds nus Dans le couloir de la mort, Vous conjurez le mal par votre sens du sacrifice. De votre voix de stentor, J’appris la vérité première qui guida mes pas Vers des prairies de nos ancêtres noirs. Lion blanc, Etoile binaire du Ougadou, De votre bâton de Moïse, De votre Kane empruntée au vénéré Foutiyou, Vous vous dressâtes en berger peulh Dans les Bandiagara de Sanar. De votre guidance par itération, Surgit la volonté de ces enfants du pays. De votre générosité de maître, Vous avez donné plus que vous ne deviez Pour ainsi définir l’avenir de vos semences. Écoutez, écoutez, cher maître Écoutez ce vent du Dalemayo, Écoutez cette vibration du luth, Qui secoue les talons du roi des arènes. Écoutez la voix citharède, Qui secoue les lions de la savane de Timbarati. Que la fleur de Jacob vous célèbre Dans ce midi du printemps de Sanar. Hilaire dans la forêt épineuse du SAES en essaim, Vous défrichâtes le chemin qui mena vers la dignité d’un métier. Dans votre vision prospective, vous signâtes le livre d’or D’un temple du futur. 150
Depuis toujours et pour toujours, Vous faites face pour tout donner. Cette adversité des pyromanes de Carthage, Vous l’avez convertie en engrais énergétique, Afin de mieux assoir les semailles de l’espoir. Baye le père ! Baye le maître ! Baye le missionnaire d’Allah ! Recevez de mes doigts de disciple, Ces lignes de reconnaissance, Qui ne sauraient suffire pour Dire à quel point le tableau est redevable à son peintre.
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Philip
Des montagnes anciennes de l’Ecosse, Tombe une pluie qui faisait pousser la graine Du Bien dans le cœur de l’Hexagone ! Philip, sonna son nom qui trouve blancheur Dans le nom Whyte lequel nettoie poisse et malheur. Actant du symbole de la balance, Il fait de la justice un verbe actif dans la présence, Qui indique, éduque et poli, oriente et méduse. D’une main de maître, il tira efficacement Un petit agneau des rives boueuses, Et des marécages de l’establishment, Pour lui souffler l’énergie de l’affranchissement. Maître dans la lettre, Encadrant dans l’esprit, Philip modela un bout de bois De l’arbre affaiblit de Yaye Malick et de Mame Diarra. De ce marmot venu d’une brousse d’un Sanar lointain, Il essuya le visage et effaça les larmes Lamartines Sur son visage ridé par la peur d’une incertitude à brûlepoint. D’une humanité salutaire, Il couva du blanc de la renaissance Le destin grelottant de cet enfant de Mbine Maak. 152
Avec une paume posée sur un cœur soulagé, Une voix reconnaissante vous reconnait comme un maître penseur, Un guide qu’on ne saurait assez dire, MERCI !
153
Grand-Maître
Kyus, je suis devant le Dan-maître, Achille de la cheville-ouvrière De la calebasse magique de Sancoré Nanti de ses œuvres d’arts aux armes créoles, Qui fécondent le champ fertile du néant. De l’Arctique à l’Antarctique, J’ai suivi du regard le ciel des Sourcils, Qui s’écroulent sous le poids de votre pinceau. Ici commence la fin de l’ignorance. Professeur des lettres aux esprits mouvants, Vous avez aiguisé les larmes et les lamelles, Qui ont coupé les restes de la racine Nocturne du siècle des ténèbres. Je veux nommer le Guam qui dit maître. Je veux citer le onzième mois du calendrier juif, Qui me signale le code barre de la reconnaissance. Oui, les disciples, la famille ont fait l’école Pour terrasser les murs de la limite et du cloisonnement. Yale MBine de la natte de Ouagadougou, Salmakor dans les nuages qui couvrent le temple De l’amoureux du carbone 14, vous êtes le fil Qui conduit intuitivement et instinctivement Au delta et à la source-racine du Lex mea Lex. 154
Pierre noire
Toi pierre angulaire qui fait tourner le chiffre sept, Toi qui se pointe au centre de l’existence, Parle-moi de ton langage. Parle-moi de ta robe étalon. Dis-moi ton nom, Le nom de ton Dieu, Un Dieu pour qui tu fermes Le cinquième échelon de l’escalier d’Abraham. Parle-moi de ta noirceur autour de laquelle Tourne l’humanité de l’universel. Ce tout qui fait tout autour de la racine vie, Taille ma compréhension d’un univers où jaillissent Les lumières du berceau. Inspire, Fascine, Purifie et unifie les contraires De Francfort jusqu’au delà du mur bifacial. Majestueuse est ton nom. Éternelle, ta position. Éclatante, ta couleur radieuse. Et ta lumière répond à l’identité quatre-vingt-dix-neuf.
155
Pierre noire, Vêtue de ton drap qui est vie, Tu fais doublement triangle. Entre les deux ailes de mon nombril de cœur, Je chante ta puissance, Psalmodie ta force. Je récite ta beauté. Miracle du sacrifice, Djaloré de la justice, Histoire d’un chemin de croix, Qui fait croix sur la haine qui divise. Passe-moi ta main pour que vers toi se dirigent Les volontés perdues dans l’orgueil du voleur des fleursjardins. Passe-moi ta main, Vers toi se dirigent les papillons aux couleurs diaprées. Pierres à la main, Je conjure le mauvais sort sept fois avant de libérer Le contenu de mon index droit : sur l’honneur de la vie, Point d’existence si ce n’est le P Qui fait majuscule dans la sphère du S.
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Bamba Khadim Rassoul
Maître du chant et de la prière divine, Lion de Mbacké Kadior, Recteur de la plume en or, Détenteur de la signature universelle, Bamba Rassoul. Lumière éclatante, Blancheur et guidance, Éléphant de Mayombé, Capitaine de l’Atlantique déchainé, Cantateur du prophète, Tu portas l’arbre de vie, Tu plantas la graine du pardon-chéri, Et récoltas la concorde entre le monde des humains Et celui des Djinns. Rassoul de l’envoyé, Tu portas la couronne de la victoire éclairée, Tu brisas l’épée, écrasas la haine, Tu brûlas le livre démagogue, Qui déchire les nations soudées. De Libreville, tu libéras l’humanité du Joug colonial. De la fosse ardente, tu imploras le pardon pour tes ennemis. De l’encre de ta plume, Tu écris demain dans la lumière du Koune Fa Yakoune. Béni soit ton héritage ! 157
Chiffre divin du changement, Tu portas le sept des années. Le sept des jours pour faire neuf Dans le Safar de l’humanité. Magaal, Illa Touba ! Répondons à l’appel universel de l’amour. Magaal, Illa Khadim Rassoul ! Répondons à la voix de la concorde entre les hommes. Magaal Illa Diouma ; Cheikh, Baye Fallou ! Répondons aux Berndeles pour que onze soit deux Dans les fondements de l’année 1902. Touba, ville sainte, ville Mouridoulah. Tu nourris l’affamé, Tu vêtis le dénudé. Tu protèges le faible. Tu éduques l’ignorant. Tu combats le mal. Tu Effaces le racisme, enraies la différence Et chantes la grâce pour tous. Du sonore de ton ombre Diarawlak, Tu égraines le chapelet du bonheur pour tous. Touba, Toute-bénie ! Djaradieuf Sérigne Touba !
158
Yako
Rossignol de la renaissance, Panthère de Ouaga dans la terre des hommes intègres. Toi qui portas l’étoile sur le flanc droit du béret De l’honneur et de la révolution acerbe, Tu renversas la soupe de l’hyène au clair d’un matin aubère. Toi qui indiquas la vague noire de la tornade des hérissons Au soir d’une vie de désespoir, Toi qui ramassas les graines du capital, Pour les faire moudre Dans le sable d’une aube naissante sur un taquoir, Toi que je nomme capitaine, Tu refusas de faire chemin dans la haine de l’autre. Un chapeau bas pour la patrie avant le parti. Héros du Faso, étalon de Vittel, Tu inscris ta vision dans la poussière de la démolition. Foulard rouge à la main, Torero de Yako, Tu narguas le taureau au milieu de la corrida. Ta lame de matador toucha les tendons De la bête Cassegrain Qui s’agenouilla devant la beauté du jugement. Capitaine, je vous salue. Je vous salue dans la douleur d’un souvenir avorté.
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Paris la France, je te bénis
Toi qui couves et se convulses Dans le noir du Bataclan, Je te lave le visage de ces cendres De deuil qui tirent le blanc Le rouge et le bleu du bas de l’estrade. Paris, la France ! Je te pleure tes morts qui gisent Sur le sol funèbre qui se dérobe Sous le poids de la honte et du désarroi. Je te lave les yeux rouges de sang, Le sang innocent de tes fils trahis en ce jour 13 Du décembre de l’hiver. Je nettoie tes mains tremblotantes en te passant Le savon du pardon et de l’apaisement. Paris dans le parricide du Bataclan qui claudique Sous le joug du clandestin tireur de minuit, Je te lave les pieds qui, dit-on, ont dansé la faute De l’amour et de la jouissance. Abattre le bataclan, C’est claniser la joie de vivre dans une civilisation, Qui fait lumière dans la légalité, la solidarité et la fraternité.
160
Paris, la France ! Je te couvre le manteau de l’étoile de David. Je te fais porter la robe de Daniel. Et je te passe les souliers de Youssoupha, le sage ! Lève-toi. Debout sur tes ergots de Titan et marche. Marche dans la solennité du souvenir, Et de la beauté du pardon. Garde ton cœur pur et curé de la haine de l’autre, Qui s’égare dans les méandres de l’ignorance. Marche et chante les vibrations de la joue de Jésus Pour que demain naisse un autre jour, Un autre soleil, Une autre lueur sous un ciel multicolore et inodore.
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Un Tour à Tours
Accrochée sur les ailes de la Loire, Tours tourne autour de la Tour Eiffel, En tendant ses bras Tanneurs au Seigneur des traditions. Sur le dos de tes serpents noirs, Tu glisses vers les six coins de Paris Pour remplir ton contrat génétique. De tes entrailles, naîtra la langue Française. Dans ton sol repose la tombe du roi. Ta gloire fixée sur l’arc de la victoire, Tu dis l’histoire de tes héros champions. Sur ta paume de témoin, s’écrit l’histoire. Et de ta langue, se raconte l’accompli. Dans ton ventre dictionnaire des vestiges, Jaillit le nom Rabelais qui me rappelle Celui de Napoléon, de Louis I, de Jean Jaurès, et de Pompidou. En ce mois de novembre terre d’été et d’hiver moites, Foula ton sol, un pied perdu dans la nature du loin. Entre tes doigts jets d’eau, se faufila un regard pantois. N’est-ce pas un puceau qui s’étonne de l’inconnue ? Déposé par l’aigle blanc sur le tapis noir des oiseaux du ciel, ll nomma de Gaulle pour trouver la spirale des mille étoiles. 162
Sous le perron de tes rues-vières Dansent les pas de l’entreprise qui répond à l’appel de l’universel Majestueusement collé sur la lettre du ciel de la BNF. Rabelais, case du marabout d’où scintille la logique de l’esprit, M’accueillit dans le blanc de l’œuf qui décore la consécration. Au soir de la saison des circoncis heureux, Je m’élève, on m’élève au grade de l’honneur Pour me porter sur le front de la Tour Défense. Je surplombe les champs de l’Élysée, En bandoulière, l’arc de la victoire. Je marche vers l’église des 14 étoiles. Je marche vers la savane de Thieytou, Pour m’abreuver de la mamelle des pyramides du Baol.
163
L’Épée du chevalier
Yacine Mbacké Baol! Dans cette terre aride aux sentiers poussiéreux, Tu galopas avec soin vers les minarets majestueux De Keur Pathé, le souverain dispendieux. Sous le manguier des palabres enceintes, Jaillirent des mains maintes, Qui sortirent pour offrir l’étreinte D’un amour fraternellement aimant. Ngoné Latyr ! Ndiaye Alboury ! Sine, Bour Coumba, le Martyr ! De la bouche galbée de Yandé Codou, La voix glorieuse des héros de la terre Sinegandoum, Recevez les honneurs qui font hommage, À Mamba qui crie Dia dans les prairies de Diakhao-Som Entendez la chanson qui scie l’histoire de la boucle du Niger Pour ainsi sortir des ténèbres d’une vérité déplacée, Des ragots qui disent le passé de Béhanzin, Du technicien de la terre brûlée, Des femmes de Grand-Bassam et de Nder. Ndaté, adresse-toi à YAllah, Pour que la pluie tombe à Yang-Yang. 164
Parle au Seigneur des étoiles manges, Pour que le vent du Ying et du Yang Souffle la miséricorde de Adona. Dans le sol, le sous-sol de Dinguiraye, Du Walo, de Mayombé et de Bandiagara, Que s’y reposent les esprits, oh ! Combien résistants Des âmes à la teneur sacrificielle.
165
Jackson village
Loin dans la Caroline du Sud, Perdu dans le Myrtle Beach, Jackson village se retire de la dichotomie, Pour faire chiche dans les rizières Bordées d’arbres aux trônes de lotus. Dans ses entrailles déchirées par un passé De larmes et de sang, Jackson garde, dans La jalousie du souvenir, les reliques d’une plantation Au visage muet et égaré. En ce vendredi saint de ce mois carême 03/19, Je marche sur les pas de mes ancêtres. Je les entends me saluer par une voix brisée, Mais libre dans la dignité de l’homme noir sacrifié. Je les vois soulever le fardeau de la chicote, Qui siffle dans mes oreilles non initiées. Je les sens marcher, gambader dans le sol tétanisé Et corrompu par les morsures d’une souffrance anesthésiée. De Washington à Atlanta, Je poursuis les traces de sueur et de sang Versés par des êtres en quête du Saint Graal de liberté sans gang.
166
Entre le nord et le sud, s’étend l’écho de leur corps qui s’étale, Pour hisser le drapeau de Miss Liberty en étale. Dans mon rêve d’enfant d’Afrique natale, Je vois Jackson dans le village du septième ciel en parlance, Où grouille une foule noire au visage du Selbé Kore en transe.
167
Oubli
Quatre siècles avec l’acier mouillé au long de l’Atlantique. Douze siècles avec les sabots ferrés du chameau arabique. L’Afrique déchirée et chosifiée, met le turban du silence pour Marcher sur les dalles bavardes de Nantes et de Bordeaux. La Rochelle, le Havre ont reconnu, avec minuscule, le passé Indicible qui appelle au secours de ses sanglots Dans l’océan bourreau d’une mémoire perdue. Afrique, Pourquoi t’empresses-tu à fouler à la mémoire Les images cataclysmiques de ces navires-cargaisons, Qui ont fait naufrage à Madagascar ? Dans cette île sans nom, providence racialise la survie Dans ce gros sable perdu dans les méandres d’une eau en cercle. Ce 11 novembre qui fait naufrage, pointe la date du drame, Qui dit l’année du sacrifice oublié. Que valent ces nègres qui ramènent leur Souffle au totem des ancêtres à genoux. Il fallait donner sa vie à la Fayette-Diane, Au lieu de la soumettre à une progéniture sauvage Et perdue dans la saison d’une ombre nocturne. 168
Pourquoi l’Afrique a oublié Ses Moïses qui ont sauvé Tromelin, Dont les occupants ont porté Le drapeau hariettien pour lire dans le livre douglacien ? Pourquoi l’Afrique a oublié Ces héros dans l’ombre qui n’entendent pas la voix Des cordes de Djeli Mamadou Kouyaté ? Leur héroïsme n’est pas griotisé pour parler au présent, En ressuscitant le passé douloureux de ces eaux nègres Fâchées contre ce bois lugubre qui vogue sous le vent funèbre Que maudissent ces oiseaux-marabouts. Dé-chaînez ce passé éhonté. Dé-ténèbrez cette histoire pleurant que caressent Les rêves douloureux des revenants. Dé-capsulez cette bouteille pandorisée de plaies Saignantes portées par des esprits mouillés de colère. Dé-capitez cette tête de victoire triste que veulent célébrer Ces hommes aux pieds de poule.
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Dos à la mer
Cette mer qui n’est pas mère a englouti ma mère Qui n’était pas une merdre. Dans les cales-tombeaux de ces navires qui virent à la nonvie, S’étendent des corps vêtus de douleur et de peines-à-vie. De leurs regards fixés au lointain des eaux horizon, Ils ne voient que le monstre de la mort par pendaison. Dans ce bleu-ciel avec lequel ils se sont couverts de sanglots, Ces hommes sans noms se dilatent dans la douleur ergot Du trauma pour dire le silence de l’indicible cagot. Tu tends la main d’Elmina devenue ragote Pour saluer les yeux hagards de ce vent marchand, Qui circule dans les veines de ce corps fade et tristement entamé. Dos à la mère, les ancêtres ont pris la route du retour pour Retrouver leurs tours autour des atours et atouts des courses sans détours.
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Ouidah
Mémoires, mémoires d’un passé morbide. Mémoires d’une douleur enchainée sur le chevet de l’Atlantique. Mémoires d’une animalisation de vie jetée dans les dents carnivores D’une vague lugubrement migratoire. Mémoires d’une porte sans retour qui perd le sens du verbe Devant ce spectacle de désolation. Mémoires, mémoires enfermées dans ce sac plongé Dans ces profondeurs perdues du Middle Passage. Mémoires, mémoires de corps mouillés d’esprits Écartelés, âmes brutalisées et harassées des pans De gaieté aux couleurs ancestrales. Mémoires, mémoires de figures à l’horizon qui fixent Le regard sur un passé craquelé, un présent inexistant, Un futur labyrintheisé dans le sud noirci de plumes et de sang. Ouidah, Gorée, Cape Coast, Elmina, De cette rencontre entre le fleuve-rivière et l’Atlantiqueocéan, Éclate une boule de feu qui détruit les fruits de l’espoir et les germes D’une vie éternelle.
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Lisons cette lettre du Vatican, Ce mot esclave-Âge pour qui le taureau de Calavi, Le lion de Dahomey, La girafe du Mali, L’agneau de Gorée, Ont été dépêchés de leur peau d’ébène au sang gémissant Sur le pied de cette dalle voguant dans les ténèbres de la négation. Mémoires, mémoires de cette si longue litanie Que chante un Évangile aux ordres. Je pointe un doigt vers Rufisque, Je soulève un poing fermé vers le dôme Papal pour remettre en selle la beauté du crime organisé. Ouidah, tu as survécu à l’oubli, Et ton cœur continue à battre dans les arts, la littérature, Et dans les vitres bé-vitrés des musées. Malheureusement muselés depuis l’antiquité. Descendant que je suis, Je porte sur mes épaules frêles Le devoir de parler aux vestiges du legs Et de la mémoire des mémoires confinées Dans cette maison ChaCha du grand marché.
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Massada
Toi Rebel, résistant contre l’envahisseur, Toi digne fils d’un peuple de guerriers qui refuse de perdre Pied et poule devant la main étouffante de l’envahisseur, Toi défenseur de la dignité humaine et de la liberté, Tu fais 5 et 2 pour lire le chiffre 7 sur la montagne du sacrifice. Ton sens de l’honneur des femmes de Nder, fait de ton courage Une histoire qui traverse les effets corrosifs du temps et de l’espace. Et du bout de ma plume, recevez mon hommage cordialement fraternel.
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Décembre 44
Dans ce faubourg aux arbustes ensanglantés, J’entends les bruits de canons en colère, J’entends des poules en haleine. Thiaroye ! On dirait Troie en guerre en ce mois béni de nativité. Thiaroye, tu fais foi dans les pages d’une histoire trahie. Ngor, Samba Elékine, Ndiaye Diop, Tourékouda, Mantouk, joseph Corréa, Tous, je vous appelle par vos noms maison et non de guerre. Vous qui avez tiré ailleurs pour sauver la France, Je vous nomme de vive voix pour ressusciter la vérité Dans sa tombe de silence complice. Je vous appelle Pour que raisonne dans le blanc de l’Hexagone La voix endeuillée du tirailleur, Qui a sauvé le gaulois des griffes nazis. Je vous appelle nommément pour que vos mémoires Soient restituées dans la gloire qu’est la leur Afin que demain soit diffèrent d’hier. Repos, chers Jambars-Tirailleurs. Respect !
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Femme brave Au milieu de ces fleurs malades, Qui se prosternent devant les rayons solaires, Je vous salue dans un petit matin au regard éblouissant. Dans ce champ de maïs éclairé Par les larmes d’une lune en sueur, Je salue le courage d’Isabelle Van Lew. Sur le sommet de la colline au sang sacrifice, Je salue son caractère sous l’ombre de l’histoire. Avec l’encre invisible, s’écrit le message Que relate la flamme de la vérité pudique. Et Marie Wawsers, une présence-absence, Tu te replies dans la couleur de ta peau, Pour nourrir ta mémoire de données, Qui chantent le mot liberté Dans le palais de la Fédération. De ton silence lourd d’efficacité, Tu marchas sur le sentier des unionistes, Pour libérer la banane coincée Dans les entrailles de l’assertivement. Femme ! On dira ! Négresse ! On soulignera ! Domestique noire ! On t’identifiera ! Erreur ! Tes oreilles sont bien tendues, Et Bête-la-folle a survécu dans un SUD aveugle. 175
À Richmond, elle a hissé une barrière étoilée Pour défier l’ennemi dans son propre territoire. Entourée de tes papillons aux ailes d’ébène, Tu coupas la racine du mal de l’intérieur sans broncher. Au nom de la dignité humaine, nous rejetons L’histoire méconnue et saluons ta mémoire de femme. Brave, brave pour avoir mis ta vie au service de l’homme martyrisé.
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Poème Addition de lettres et de mots, De lignes et de para-graphes, Poème, Tu poses tes griffes sur la page, Qui porte le pagne de la virginité pour perforer Sa blancheur du silence grenu de sens. Dans la langue de ta parole de saint, Tu bénis ceux qui portent ta plume pour chanter La beauté de l’être et du non-être. Toi poème, Encre de mes larmes versées Sur la rigueur de l’hilaire, Bile de ma joie accrochée Sur les feuilles d’un présent joyeux, Je t’écris ces mots pour dire le mot, Qui chante la puissance Dans le verbe du commencement. Corps dans la chair du dire, Tu conjugues le réel dans l’orthographe Du sensible et du sublime Au rythme des djembés gutturaux sur lesquels Tombent les chuintantes et les sifflantes De la déesse lyrique. Au nom des chantres sans mot, Je te fredonne le chant des esprits du champ du texte. Que de tes reins surgisse un monde meilleur, Un monde tout simplement poème.
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Courage d’homme,
Dans ce hangar aux rayons X, Dans ce trou au fond pétri de radiations atomiques, Dans ces eaux aux vagues mortellement diffamatoires, Des hommes armés des couleurs de la déesse Shinto, Défient la mort dans sa nudité absolue. Fukushima ! Le drame d’une science aux esprits mercantiles, Le cauchemar d’une vie aux yeux fixés Sur le grand disque rouge. Dans les décombres maritimes d’une catastrophe 2.0, Se faufile un état d’esprit, un courage greffé Hors des limites de l’exception, Un sacrifice d’hommes qui se lit sur le livre Des apôtres de la civilisation Amaterasu.
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Afrique
Mère des lumières incandescentes, Reine des glorioles éternellement retentissantes, Gardienne des mémoires impérissables, Doyenne des existences mouvantes, Tu es la terre des pharaons. Tu es la légende des pythons d’Abomey. Tu es la vierge mariée aux anges de la félicité. Ta terre nourrit la race de l’humanité. Tes eaux arrosent les trésors Des jardins d’Élise de l’Outre-mer. Tes racines mettent en jonction les ruisseaux Qu’alimentent les groupes bancaires Aux politiques monétaires bancales. Ton soleil brille sur les éclats d’énergie, Qui font fonctionner Fukushima. Ton vent souffle et s’essouffle avant de s’engouffrer Dans le soufre de leurs tours. Tes fils Olympio Sylvanus, Dia Mamadou, Mandela Nelson, Tes filles Taytu Betul, Anne Zingha, Kimpa Vita, Te font entendre la voix du dedans remplie De graines de vie auréolées de nostalgie et de fierté.
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Féminitude
Héroïnes des montagnes et collines de Berbera, Cigognes des baobabs d’Assiout, Baleines des mères-acres et des fleuves salés, J’entends vos toux se mêler Aux sanglots des vagues de Mbodiène. Héritières de Yacine Boubou et de Julia Brown, Je vous côtoie avec l’ordre et la vertu de la dignité noire. Négresses aux foulards durement noués, Vous dites la messe des ombres qui cassent la coupe, Pour vous libérer des pieds du mâle-dominant. Prêtresses des marais de la Louisiane, Vous conversez avec les esprits Vodou du temple de Cotonou. Lionnes de la savane où coulent Sang et larmes des plus faibles, Vous rugissez dans la prairie libérée du confinement. Émancipation ! Dans les surbrillances que reflètent vos-noires-de peaux, Se lit votre féminitude que chantent les cigognes Perchées sur la corne de l’Afrique.
180
« The Almighty »
De son identité de « All in One, and One in All» Le Bon Dieu se fait invisible Dans le visible et lisible de l'inaudible. Oh, mon Dieu, par ton Nom, Qui sonne quatre-vingt-dix-neuf, Tu laisses ta marque de fabrique sur toute créature. Maître des océans, Patron de l’univers, Tu fais et défais par le Koune Fa Yakoune. Unique dans sa Nature, Seul dans son pouvoir, Le Dieu des dieux se voit confirmer dans Sa Totalité Sur Sa Chaise Royale Kursi. Maître exclusif du destin, Envoyeur de la prophétie, Tu es Le Commencement et La Fin, Le Connu et l’Inconnu. À toi gloire et soumission ! De l’infiniment plus petit à l’infiniment plus grand, Tu gouvernes le positif et le négatif. Dans ce monde de péchés où le fils d’Adam Trouve son dada dans le Dadaïsme, Il importe d’implorer ton Pardon et ta Miséricorde, Pour que la créature soit sauvée Des griffes ardentes de la Géhenne.
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Ma route
Pointé sur l’horizon du ciel en constellation, Je regarde le plafond de mes ambitions en file indienne Sur les montagnes silencieuses de ma solitude. Courage à la main, je prends la route du destin, Qui se fraie un passage dans le labyrinthe Barbelé de l’inimitié humaine. Je marche, je chancèle, je tombe et je me relève. Au nombril de mon chemin, un ligasigne-hisseur, Un propulseur de rêve qui me met en orbite. Alors, je tourne, je me retourne pour me mirer Dans le reflet de l’autre que je vois en moi En ce mois béni des actions de grâce !
182
Rivière de larmes
Feu ! Au bout du fusil que chante À pince-étau la voix de la cantatrice, Je vois le feu qui brûle les semelles des juments noires Dans la savane des bergers aux bonnets rouges. Sur ton corps aux souffrances épiques, Je lis le regard cassé et fuyant de Diéri Dior Ndella. Sur ton armure de guerre au fond noir, Je relis les traces de sang Que les vents de l’ouest refusent d’effacer. À ma droite, le peuple Guélewar qui noie sa douleur Dans une rivière de larmes au goût revanchard. À ma gauche, la peur de demain, le désespoir incrusté Dans une aube à l’étoile naissante. De ce feu sans maux, je fais peu attention à la peau de chagrin Que font ressortir les mots d’un défi sans égal. Dans les méandres de ces eaux qui coulent dans mes yeux, Je dépose une calebasse de graines d’or pour sécher Les larmes de ce fleuve, qui zigzague Vers les sols salés de la trahison.
183
Le Zéro du collier
Dans le cœur de celui qui se tient debout sur ses ergots, Je chuchote une prière. À l’heure où les rayons de Hêlios s’inclinent vers l’ouest, J’étale ma natte de méditation pour faire entendre nettement La prière née de mes poignets enchainés. À l’heure où le ciel gronde les parois Craquelées des rives de la mer Rouge, Je psalmodie un murmure d’invocations. À l’heure où EOS se jette Dans les rêves mouillés de Seléné, Je balbutie des mots de pitié à ton endroit. À l’heure où Amon-Ré enrichit la terre de sa salive fertile, Je pose un genou meurtri sur un ciboire de douleur. À l’heure où les cigales s’envolent Vers les eaux douces de Djoudj, Je redresse un écho dans les profondeurs du ciel en larmes. À l’heure où les vagues d’espoirs s’infiltrent Dans les interstices des pierres de l’île des Pélicans, J’entends les alléluias de mes frères africains.
184
Libres ! Libres des affres de la nuit et Des chaînons de l’asservissement. Libres du colonialisme et de la colonisation. Libres de ces dirigeants vendeurs d’illusions et de médiocrité. Libres de ces colosses de Breton Woods Aux intentions nuitamment fossilisées. Libres ! Libres. Tout simplement libres du « zéro, collier du néant ».
185
Shark Island
Nama-héros, les fleurs écrasées dans les rives de la Namibie, Vos cimetières effacés de la carte mémorielle des victimes, Abouchent les cris de douleurs étouffés Dans le sable calleux de vos ancêtres. Vos larmes aspirées par les brises des eaux coupables, Voguent sur la bâtardise des idées de Mein Kampf. Vos cranes envoyés à Berlin, S’écrasent sur la dure terrasse du racisme nazi. Ce génocide du deuxième Reich Sciemment enterré dans le sous-sol de la mémoire, Célèbre une messe de déni dans l’église de Cornelius, le Capitaine. Nama, le héros méconnu de la libération namibienne. Tu fais corps avec un passé saumâtre chichement confiné Dans le mensonge grossier qui crétinise le laboratoire nazi. Affamés et chicotés Dans ce camp de concentration de Shark Island, Nos ancêtres Nama nagent dans les eaux de l’oubli, Pour mieux écouter les vibrations De la torture racialement rationalisée.
186
« This is Lagos »
Lagos, un legs des divinités du Golfe de Guinée. Lagos, une légende dans l’encyclopédie du continent. Lagos, lisière d’une lagune aux eaux saumâtres et ternes, Où brûle le liquide franc de l’or noir en putréfaction abyssale. Lagos aux empreintes Niasses qui chantent Les louages de Baye au béret encavé. Je sens la Fayda Léona raisonner dans le ciel d’Abuja. Et Babalola étale ses lettres pour laisser danser Le souffle de la sagesse féconde. Nnamdi Azikiwe, retourne ton flanc pour parler À ce géant de l’Afrique malade de ses richesses, Pour que l’espoir écrase ce péché mortel de la désunion entre Le nord et le sud, Igbo et Fulani, Musulmans et Chrétiens. Nigeria pour nier la guérilla Haram Afin que repentance et résipiscence Puissent se nicher dans la fortune du fleuve Niger.
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Ma Guinée
Dans le record Guinness, Ma Guinée fait un gain de violence d’état sans grimaces. Ma Guinée, Ce pays Sékoutouréya refuse Le démo-banditisme et fait entendre, En ce dimanche cinq, le grondement martial Contre une chienlit démocratique. Ma Guinée sans guide, s’installe dans la logique De la force sans loi et de la loi sans force. Parce que Conakry compte ses morts, Ma Guinée se refuse de guincher Du côté du néocolonialisme. Est-ce que la première lettre de l’alphabet grec A fini de se faire variant dans l’équation Omega Du pouvoir de trop ou de la résistance patriotique ? Une voix sage nous demande de ne pas se faire dé Sur une surface glissante laquelle peut éconduire Le rêve bizarre d’une conscience en décadence.
188
Un Cimetière en acier Dans les hauteurs profondes de Marioupol, S’enfonce dans les aires de ces ères ce monument de l’acier, Un cimetière ouvert dans le sol fermé de Marioupol Comme un bouquet de feu en flammes diestiennes. Azovstal pleure au milieu d’une bêtise humaine En péché mortel théâtralisé. Seul avec ses morts, Ce cimetière durcit son ventre en acier, Pour couver ses intestins vivants. Dans les cendres et débris de la haine, Souffle la sueur du cœur vaillant aux battements De sirènes en larmes de morts. Sur son dos envoûté et ensorcelé, Tombe une pluie de cris sorciers Assoiffés de sang et de chaire. Mais ce nid d’oiseaux au fond souterrain A porté avec dignité la calebasse funèbre de l’empire. Une mouche voltige, Des rafales de morts pénétrant le sol Endeuillé de Marioupol en cendre. Un cri, un borborygme, une larme, Une goutte, une goutte de sang Ruisselant sur le discours barbarement prétentieux De ce clone pauvrement président.
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Partie V : Racines
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Dans le brouillard des origines
Dans la discrétion du voyage dans les cendres du phénix, Te voilà qui glisses vers la lame du bois kylix, Qui rend discret ton sacre d’empereur. Sous les étoiles bavardes du ciel en murmure, Tu te dépouilles de tes habits d’enfant Pour porter le manteau de la renaissance. Sous les draps blancs de Ndiouga et de Mame, Tu pointes tes baguettes d’initié vers l’horizon bimane D’un monde d’hommes au visage masculin. Dans ta case de Ndoute mescaline, Tu te forces une identité humaniste Á la mesure de la tempête des troubles de la vie perfectionniste. Tu chantes, tu danses dans la douleur de l’existence. Pour la première fois, tu découvres la face cachée du bois, Des murmures des arbres muettement calomniés. Tu entends l’appel des dieux, Qui te sifflent les secrets du Jardin Premier, À l’heure où le soleil reprend vie et vigueur.
192
Te voilà qui manges Avec les barbes blanches Des Occidentaux de la falaise des origines. Une délivrance originelle, La corde coupée à la mamelle, Fait de toi un étalon charnel Dans un Canaan d’une Jérusalem nouvelle. Enterrée dans les tréfonds de la forêt des épites, Ta couverture souillée, nourrit désormais les épitres De la mémoire féminine de celles qui t’ont bercé. Du brouillard de ton innocence perçée, Te voilà qui entres, pour toujours, Dans la case des origines sacrées.
193
Je suis seul, devant moi Le bruit ténébreux de la cheminée qui brûle Le feu de la chimère qui m’enveloppe du noir de la peur, Je gémis de frayeur, Je geins d’effroi de voir ma silhouette tomber Dans le vestibule des larmes du dieu Érèbe. Un souffle dans la trayeuse de minuit, Et j’entends une voix qui chantonne le délire Du Kumax Damane, Parrain du Ndout, Maître du silence. Je suis Mansa, le Roi de l’or qui couronne le temple Des Pyramides d’un tissu jaune À l’aube du troisième temps. Je suis Kaya, le Manga des empires éternels. Je suis Coly qui chante le Tingala maternel. Je suis Soundiata qui parle le Kei dans le tas des mystères. Dans le fleuve de Ndioum au sol marécageux, Je suis le Bour qui fait boulonner son esprit fabuleux Dans le boulodrome de l’espoir de demain. Je suis Yacine qui porte le boubou de la dignité. Je suis Sitoé qui agit sur le diaphragme citoyen De l’appareil populaire. Linguère, la Signare De St-Louis au foulard diapré d’étoiles de mer ; Buvez de cette eau, source de Guet Ndar et de Gazobile.
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Je suis le Sultan de la pierre noire qui tend la main De l’arc en ciel venu d’ailleurs. Je suis cette pierre sur laquelle tu bâtiras ton église Au milieu de la terre promise. Je suis ce mur des bénédictions où nous viendrons Offrir à Moïse le repas du Pharaon repenti. De la bande de Gaza au tombeau de Joseph, S’établit un Fil blanc où marchent les pigeons De l’amour et de la fraternité. Debout, je suis seul devant moi. Demain, je partirai. Honni qui manque à l’appel !
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L’Âge du printemps
Fleure d’Ibis, jardin du Roi Salomon. Diane de la forêt d’Eden autour de cette pierre Simon, Tu dors sur le toit moiré d’étoiles de minuit à l’heur saumon. Ton souffle en or qui peint ta poitrine dans ce soleil au couché, Perpétue la vie de la rose qui pousse sous tes talons au parfum Diane-Dioné. Reine de Kabrousse, princesse de Baligore, étoile des Baoulés, Laisse-moi me rafraichir sous le feuillage de tes cils épointés.
196
Al Caza
Dans la Séville arabophone du siècle VIII, Se dressa ce joyeux qui envoyait une vague Scélérate de la voix d’Arabie. Symbole de la deuxième foi, Elle se dressa dans un royaume aux reliques pentecôtes Pour annoncer un message aux écritures pétroglyphes. Al Caza, monument du drapeau vert. Elle fait flotter son héritage dans un esprit De symbiose et de cordialité verve. Hier, signe du Moyen-Orient arabique, Aujourd’hui, Romain-bethléhemique, Parcourant le chemin de la cloche Hébraïque. Sa croix épouse le Croissant-Rouge pour former la baie Du point zéro de l’Ouest et de l’Orient.
197
Guélewar
Roi des savanes. Seigneur des guerres-paravents, Maîtres des terres du Nioro du Rip, De Mbassis et de Godaguène, Tu défies l’Océan bleu du ciel allène. En s’emparant des étoiles filantes qui portent Le message d’Asrahfil et de Djibrilou. Kor Siga, lion de Mbine Maak, aigle de Koudougou, Tu terrassas la panthère Odin. Tu chassas le tigre du Ngol pour, D’autorité, imposer ton bâton de pèlerin. Au monde hostile des djinns et des esprits maléfiques. Kor Siga, Tu coupas le bois et offris un toit à de multiples déshérités. Tu bravas les bras du Nil, du Sine et du Saloum déchirés, Pour réserver à Bour le sort d’un Pharaon désespéré. Sur ton cheval Djégdiam, Tu parcourus les contrées De Djilas, de Toutegui et de Diarékh, Pour semer et protéger la graine de la Paix. Kor Siga, Guélewar du Sine, Jambar du Cayor, terre passine Torodo du Walo, au paysage cytisine 198
Venez boire à la source de la Renaissance Que parfument les fleurs du Zambèze Et du lac Tchad en adhérence. Rejeton de Tening et de Birame, enfant du bourg, Fils du Baol et de Mostaganem, de Soweto et de Johannesburg, Aîné de Shaba et de Salomon : acteurs du livre divinatoire, Tu resteras un dérivé de la lignée de ceux qui font et défont l’histoire. Vainqueur des ténèbres du mal ostentatoire, Tu dresseras la fierté de ton nom polymathe, Dans les veines de ta descendance Que portera le trône de Mbine Maak en cadence Et de Mboudaye, Royaume du Niawoul, Berceau du Yak en abondance.
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Et la vie ?
Dans ces vestibules aux profondeurs incalculables, Dans ces hauteurs aux racines insondables, Sur ces sommets gravement enfouis dans les vallées du Rip, Danse et se danse la sonorité du tambour major, De la Kora de Lala Dramé, et de la flute du chasseur endeuillé. Vers ce horion où pointe ton doigt de chef, Apparaît un essaim de nuages qui, à vive allure, s’enfonce Dans un zénith aux larmes d’une joie douloureuse. Alors que la trompe souffle le langage de l’existence, L’homme se retire avec son maître pour en décider ainsi. Et moi dans tout cela ? De ta sueur, tu mangeras à ta faim. De ton sang, Tu passeras la main à qui il sera décidé un destin autre et outre.
200
La Nuit
Temps des ombres et des silences en mouvement, Temps des libertés et des peurs en éveil, La nuit fait main basse sur le grouillement Des êtres pour laisser couler Le message des eaux diurnes. Nuit des sirènes nues de leur beauté lunaire, Je chante dans le ventre des dieux en palabre Sous labre du village des initiés. Nuit du langage de l’inconnu, Nuit de l’oubli et des rêves en chaleur, Je te vois filer dans l’angle droit Des mystères des chiffres et des lettres. À l’heure mi-nuit où sonnera la cloche de la frontière, Tu lèveras ton voile de ténèbres, Pour laisser entendre la voix célèbre Des connaissances libératrices.
201
Stonehenge
Cercle de pierres à la masse fleuve, Tu fais racine dans le mystère bleu de L’architecture de l’antiquité. Au milieu de ces monolithes massifs, S’érige le symbole du secret de la pierre. Des profondeurs de la terre, S’érigent des vestiges dont le but reste dans la page Non explorée de l’histoire muettement silencieuse. Tes racines se connectent au temple d’Abou Simbel, Qui s’ouvre sur la montagne des quatre princes. Du dôme du panthéon, pénètre la lumière Soleil qui illumine la case 21 de Ramsès. Des Romains aux Pharaons, se dit l’histoire des bâtisseurs De l’impossible qui font cercle dans le cercle fermé de Stonehenge.
202
La Grande Pyramide
Dans ce désert aride à la peau fracturée, Dans cette terre muette à la respiration étouffée, Dans ce joli paysage à la vie harassée, Tu te tiens debout avec un sommet immaculé À la forme rectangulairement calculée. Tu dialogues avec les nuages d’un ciel sidéré. Seule, devant tous, tu défies L’Incrédule avec ta senteur irrationnelle. Dans ta structure mathématique, Tu parles le langage pie pour toiser du regard l’Autre, Qui croit être la source du chiffre et de la cérébralité. Dans tes entrailles en communion Avec les racines des origines, Se lit un chapitre des hiéroglyphes liminaires.
203
Foutoir
Au crépuscule sanglant d’un espoir abîmé, Un vent de peur se fracasse sur le mur de la fierté Pour s’engouffrer dans le foutoir de Sa Majesté. Au milieu de la saison des indignés, Tu fais vœux de richesses indues sur le dos balafré Du peuple. Ce peuple tenu à distance, laisse promener Un besoin de recouvrement de sa dignité des mains De ce foutoir où viennent manger tous les roturiers Ivres de bêtises et de péchés mortels.
204
Nègre
Au milieu du feu d’artifice de la colonisation, S’est élaboré un dire d’une hilarité éthylique : Ventre plein, petit nègre content. Si ce n’est de la démagogie, On n’est pas loin d’une vulgarité à caractère racial. Nègre sans neige au-dessus de la tête, Nègre sans négoce dans le marché de la dignité humaine, Nègre sans négation de joie au commencement de l’initiation. La quête du savoir est un sacerdoce pour toi. Le partage de la connaissance une obligation. Ta tête bien faite condense ta fierté dans ton identité Première. Tête pleine, nègre libre !
205
Le Gros corps Malade
Crocodile dans les marrées de Sangalkam, Gros comme le dos de l’éléphant de Bouaké, Gros comme le regard du lion Simbel Dans la savane Rumba de Dialokoto, Gros comme les cornes du taureau de Wakodou, Ce corps, ce corps malade de son porteur, A perdu la sémantique de son âme bien de chez nous.
206
Rien
Dans cette vie qui se vide Dans le vide du vivant en vadrouille, Dans cette langue vipère qui vilipende La victoire luisante de ces Vikings du Sahel, Dans ce lien vil aux virages vacillants, Dans ce village vitré de fissures Sociales aux lignes visqueuses, Dans ce véhicule en vitesse versatile Vers le vélodrome du Vanuatu, Dans cette vision vomissures ou s’entrelacent Vignettes de mensonges et virgules d’énumération, Dans cette ville ou vit un rien de vie, Se trouve la rivière des guignols, Qui ne trouvent rien à dédire Dans ce rivage ridicule des riens-à-dires.
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Combi Saleh
Dans le passé glorieux des Cissé Toukara, Dans les vestiges du temps des maîtres de l’or, Dans ces débris de l’empire des Kaya Manga, Dans les reliques de cette dynastie des Ghana, Je lis le livre sacré sur El Ghaba. Coumbi Saleh, le territoire de la bravoure, La capitale de l’or du Galam et de Bouré, Témoin des siècles de lumière, Tu donnas voix à douze muézins Sur les minarets de la foi du juste milieu. Dans ce paysage du Ouagadougou Bida, Coula le sang-sacrifice du python totem. Sur les traces du destin de KanKan Moussa, S’élève la poussière de la générosité Du prince en errance spirituelle. Coumbi Saleh, étoile noire sur tes pieds de titan, Ta gloire nous éclaire le présent, Pour que demains soit bâti à l’image de ton passé.
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Glossaire :
Ngodileme : un village situé dans la commune de Diouroup. Une commune appartenant à la région de Fatick (centre du Sénégal), qui se trouve être la région d’origine de l’auteur. Mame Diaré : nom attribué à la déesse maritime des villages des pécheurs de Yoff et de Ouakam (Dakar). Sine : ancien nom de l’actuelle région de Fatick située au centre du Sénégal dans le bassin arachidier. Kor : un mot de la langue Sereer qui veut dire Homme ou Mari. Selbé kor : un jeune homme qui accompagne les nouveaux circoncis en pays Sereer. Salmone : Roi du Sine dans le pays seerer. Il fut célèbre par sa droiture dans la gestion des affaires du royaume, sa rigueur envers ses sujets, et son courage légendaire. Mbine : un mot Seerer qui veut dire maison. Kadiadou : instrument rudimentaire qu’utilisent les Diola (une ethnie dans le sud du Sénégal) dans la culture du riz. Mbine Maak : un mot Seerer qui veut dire « grande concession ». Yale MBine : chef de concession. Djeuradieuf : un mot de la langue Wolof qui veut dire merci. Diakhao : capitale du royaume du Sine. Yandé Codou : une cantatrice Seerer. Sinegandoum : habitant non casté du royaume du Sine. Jambar : le courageux. Bour : un mot de la langue Wolof qui veut dire Roi
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Ndout : littéralement veut dire en Sereer nid d’oiseau. Il s’agit du lieu où les nouveaux circoncis élisent domicile en compagnie des Selbés-kors et des Kumax. Ils y sont formés et préparés à la vie adulte. Kumax : un mot de la langue Seerer qui veut dire chef du Ndout dont la présence fait autorité. Torodo : Un terme dans la langue peulh qui renvoie à un Halpular de classe noble. Domoubaye : un terme de la langue wolof qui renvoie à « demi-frère ». Le Koune Fa Yakoune : il s’agit du pouvoir de création par Le Verbe Divin.
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Tables des matières Préface ........................................................................ 9 Partie I : Pri-ères ........................................................ 15 Larmes aux yeux ...................................................... 16 Regard au ciel ........................................................... 18 Seigneur Dieu ! ......................................................... 19 Sarcophage d’Égypte ................................................ 20 Sur la neige ............................................................... 21 Chapelle ardente ....................................................... 22 Reine du Djoliba ....................................................... 24 Je pleure .................................................................... 25 Demain, il fera jour .................................................. 27 Le Seigneur des anneaux .......................................... 28 Droit à la parole ........................................................ 29 Dans la gueule de la fosse ........................................ 31 Sahara ....................................................................... 33 Enfant noir !.............................................................. 34 G5 Sahel ................................................................... 35 Ma Côte d’Ivoire ...................................................... 37 Soweto ...................................................................... 39 Prière d’Accra........................................................... 40 Toi, arbre de vie........................................................ 41 Genoux à terre .......................................................... 43 Virus ......................................................................... 44 Le Silence des mosquées .......................................... 46 Douleur ..................................................................... 48 Douleur-vie ............................................................... 49 Amanosa ................................................................... 50 Au Berghof ............................................................... 51 211
MONT Ararat ........................................................... 52 Pour son salut ........................................................... 53 Pain de vie ................................................................ 54 Détritus ..................................................................... 55 Consolation ............................................................... 56 Trépas ....................................................................... 57 La Traversée ............................................................. 58 Ils sont toujours là ! .................................................. 59 Sans limites............................................................... 60 « Rhodes Must Fall » ............................................... 61 Corbeille de lin ......................................................... 62 Dans le puits ............................................................. 63 Contrition.................................................................. 64 La Tristesse............................................................... 65 Le Couloir du diable ................................................. 66 Indécrottable ............................................................. 67 Lieutenance .............................................................. 68 Mon Dieu .................................................................. 69 Golgotha ................................................................... 70 Je me fâche ............................................................... 71 Ma joie ...................................................................... 72 Narquois ................................................................... 73 Jacqueline ................................................................. 74 Le Sermon de la montagne ....................................... 75 Partie II : « Le Commun vouloir de vie commune » ...................................................................................... 77 Diéri, terre de savane ................................................ 78 Noir et Blanc, je ne suis point ! ................................ 80 Croix et Croissant ..................................................... 82 Le Juste-milieu ......................................................... 84 De Bagdad à Alep..................................................... 86 Dans le Bronx ........................................................... 88 La Croix du chemin lunaire ...................................... 89 Cheval Olympique .................................................... 91 212
Ma Voix .................................................................... 93 Carnage en haute mer : je pleure les enfants d’Afrique .................................................................................. 94 Réfugié ..................................................................... 96 Enola Gay ................................................................. 99 Le Malin ................................................................. 100 I Can’t Breathe ....................................................... 101 Auschwitz ............................................................... 103 Je me bats ............................................................... 105 Sapience.................................................................. 106 La Pa-tience ............................................................ 107 Fleuve tranquille ..................................................... 108 Je refuse .................................................................. 109 Le Bafing et le Bakoy ............................................. 111 Ce palais ................................................................. 112 Pluriversalisme ....................................................... 113 Concert de casseroles ............................................. 114 Les Sept collines ..................................................... 115 La Cité U ................................................................ 116 Partie III : Amour .................................................... 117 Un matin d’octobre ................................................. 118 Au cœur du cœur .................................................... 119 Au printemps de l’âge ............................................ 120 Rose-Marie ............................................................. 121 Amitié ..................................................................... 123 Elle ! ....................................................................... 124 Pilon tendu .............................................................. 125 Toi qui me parles .................................................... 126 Tam-Tam ................................................................ 127 Mon nom est Diouma ............................................. 129 Soleil À minuit ....................................................... 131 En villégiature ........................................................ 133 Incognito ................................................................. 134 Femme fatale .......................................................... 135 213
Claire de lune.......................................................... 136 En Batifolage .......................................................... 137 Solstice d’été .......................................................... 138 Une pluie ................................................................ 139 Maman Chantal ...................................................... 140 Gladis...................................................................... 141 Partie IV : Hommage ............................................... 143 Senghor : terre natale .............................................. 144 Grand-mère ............................................................. 146 Maman .................................................................... 148 Bayedallaye ............................................................ 149 Philip ...................................................................... 152 Grand-Maître .......................................................... 154 Pierre noire ............................................................. 155 Bamba Khadim Rassoul ......................................... 157 Yako ....................................................................... 159 Paris la France, je te bénis ...................................... 160 Un Tour à Tours ..................................................... 162 L’Épée du chevalier................................................ 164 Jackson village ....................................................... 166 Oubli ....................................................................... 168 Dos à la mer ............................................................ 170 Ouidah .................................................................... 171 Massada .................................................................. 173 Décembre 44........................................................... 174 Femme brave .......................................................... 175 Poème ..................................................................... 177 Courage d’homme, ................................................. 178 Afrique.................................................................... 179 Féminitude .............................................................. 180 « The Almighty » ................................................... 181 Ma route ................................................................. 182 Rivière de larmes .................................................... 183 Le Zéro du collier ................................................... 184 214
Shark Island............................................................ 186 « This is Lagos » .................................................... 187 Ma Guinée .............................................................. 188 Un Cimetière en acier............................................. 189 Partie V : Racines .................................................... 191 Dans le brouillard des origines............................... 192 Je suis seul, devant moi .......................................... 194 L’Âge du printemps................................................ 196 Al Caza ................................................................... 197 Guélewar ................................................................ 198 Et la vie ?................................................................ 200 La Nuit.................................................................... 201 Stonehenge ............................................................. 202 La Grande Pyramide............................................... 203 Foutoir .................................................................... 204 Nègre ...................................................................... 205 Le Gros corps Malade ............................................ 206 Rien ........................................................................ 207 Combi Saleh ........................................................... 208 Glossaire :............................................................... 209 Tables des matières ................................................ 211
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