Pour et contre Jean XXII en 1333. Deux traités avignonnais sur la vision béatifique 8821004945, 9788821004940


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French Pages 407 [412] Year 1975

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Pour et contre Jean XXII en 1333. Deux traités avignonnais sur la vision béatifique
 8821004945, 9788821004940

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STUDI E TESTI -----

274

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MARC D YK M AN S S.I.

POUR ET CONTRE JEAN XXII EN 1333 DEUX TRAITES AVIGN O N N AIS SUR LA VISION BÉATIFIQUE

CITTÀ DEL VATICANO B ib lio teca A postolica V aticana

1975

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STUDI 153. Prete, S. Il Codice Bembino di Terenzio. 1950. pp. 110, 5 tav. 154. Mercati, G. Il frammento Maffeiano di Nestorio e la catena dei Salmi d’onde fu tratto. 1950. pp. vili, 40. 155. Blum, R. La biblioteca della Badia Fioren­ tina e i codici di Antonio Corbinelli. 1951. ρρ . XII, 190.

156. Cian, V. Un illustre nunzio pontificio del Rinascimento: Baldassar Castiglione. 1951. pp. XI, 340.

157. Mercati, A. Dall’Archivio Vaticano ... 1951. pp. vi, 119. 158. Mercati, G. Alla ricerca dei nomi degli «al­ tri » traduttori nelle Omilie sui Salmi di s. Giovanni Crisostomo e variazioni su alcune catene del Salterio. 1952. pp. vili, 248, 10 tav. 159. Rossi, E. Il « Kitab-i Dede Qorqut » ; racconti epico-cavalières chi dei turchi Oguz tradotti e annotati con « facsimile » del ms. Vat. turco 102. 1952. pp. 2, [364]. 160. Pertusi, A. Costantino Porfirogenito : De thematibus. 1952. pp. xv, 210, 3 tav. 161. Rationes decimarum Italiae. Umbria, a cura di P. Sella. I. Testo. 1952. pp. [4], 916. 162. ----- II. Indice. Carta geogr. delle diocesi. 1952. pp. 204. 163. Monneret de Villard, U. Le leggende orien­ tali sui Magi evangelici. 1952. pp. 262. 164. Mercati, G., card. Note per la storia di al­ cune biblioteche romane nei secoli XVI-XIX. 1952. pp. [5], 190, 9 tav. 165. Miscellanea archivistica Angelo Mercati. 1952. pp. XXVII, 462, ant. (ritr.), 10 tav. 166-169. Rouët de Journel, M. J. Nonciatures de Russie d’après les documents authenti­ ques. 1922-52. vol. 4. 170. Maier, A. Codices Burghesiani Bibliothecae Vaticanae. 1952. pp. VII, 496. 171. Franchi de* Cavalieri, P. Constantiniana. 1953. pp. 207, [1]. 172. Graf, G. Geschichte der christlichen arabischen Literatur. V. Bd. Register. 1953. pp. 1, 196. 173. Honigmann, E. Patristic Studies. 1953. ρρ. vu, 255. 174. Rossi, E. Elenco dei manoscritti turchi della Biblioteca Vaticana. 1953. pp. xxn, 416. 175. Franchi de’ Cavalieri, P. Note agiografi­ che. Fascicolo 9. 1953. pp. [5], 253. 176. The Haran Gawaita and The Baptism of Hibil-Ziwa ... translation, notes and commen­ tary by E. S. Drower. 1953. pp. xi, 96. Facs. 177. Andreu, F. Le lettere di s. Gaetano da Thiene. 1954. ρρ . XXXIV, 144, 3 tav.

178. Mercati, A. I costituti di Niccolò Franco (1568-1570) dinanzi l’Inquisizione di Roma, esistenti nell’Archivio Segreto Vaticano. 1955. pp. [2], 242. 179. Patzes, Μ. Κριτού του Πατζη Τιπούκειτοσ. Librorum LX Basilicorum summarium. Libros XXXIX-XLVIII edid. St. Hoermann et E. Seidl. 1955. pp. xxiv, 287. 180. Baur, C. Initia Patrum graecorum. Vol. I. - Λ-Λ. 1955. pp. exui [2], 661. 1 8 1 . ----- Vol. II. M-Q. 1955. pp. xlvi , 720. 182. Gullotta, G. Gli antichi cataloghi e i codici della abbazia di Nonantola. 1955. pp. XXVIII, 539.

E

TESTI 182-bis. Ruysschaert, J. Les manuscrits de l’abbaye de Nonantola. 1955. pp. 76. 183. Devreesse, R. Les manuscrits grecs de l’Ita­ lie méridionale. 1955. pp. 67, 1 tav. 184. Biedl, A. Zur Textgeschichte des Laertios Diogenes. Das Grosse Exzerpt φ . 1955. pp. 132, m. 185. Tarchnisvili, M. Geschichte der kirchlichen georgischen Literatur. 1955. pp. 540. 186. Loenertz, R. J. Démétrius Cydonès, Cor­ respondance. Vol. I ... 1956. pp. XVI, 220. 187. Bidawid, R. J. Les lettres du patriarche nestorien Timothée 1er. Etude critique... 1956. pp. XIII, 132 [48]. 188. Aly, W. De Strabonis codice rescripto, cuius reliquiae in codicibus Vaticanis Vat. gr. 2306 et 2061 A servatae sunt. Corollarium adiecit Fr. Sbordone... 1956. pp. xiv, 285, 36 tav. 189. Pâsztor, L. - Pirri, P. L’Archivio dei Go­ verni provvisori di Bologna e delle Provincie Unite del 1831 ... 1956. pp. lxxx , 635. 190. Santifaller, L. Quellen und Forschungen zum Urkunden- und Kanzleiwesen Papst Gregors VII. I. Teil... 1957. pp. xxvi, 479, 25 tav. 191. Incisa della Rocchetta, G. - Vian, N. Il primo processo per s. Filippo Neri. Vol. I. Testimonianze dell’inchiesta romana: 1595... 1957. p p . XXVII, 419. 192. Van Lantschoot, A. Les « Questions de Théodore »... 1957. pp. vili, 303. 193. Patzes, M. Κριτού τού Πατζή Τιπούκειτοσ. Librorum LX Basilicorum Summarium. Libros XLIX-LX edid. St. Hoermann et E. Seidl... 1957. p p . XII, 351.

194. Rouët de Joumel, M. J. Nonciatures de Russie. Vol. V: Interim de Benvenuti, 17991803... 1957. p p . XL, 471. 195. Petrarca, F. Il « De otio religioso »... a cura di G. Rotondi... 1958. pp. xv, 113. 196. Incisa della Rocchetta, G. - Vian, N. Il primo processo per s. Filippo Neri. Vol. II. Testimonianze dell’inchiesta romana: 15961609. 1958. pp. XVI, 366.

197.

Pratesi, A. Carte latine di abbazie calabresi provenienti dall’Archivio Aldobrandini... 1958. pp. LV,

585.

198. Cerulli, E. Scritti teologici etiopici dei see. XVI-XVII. Vol. I. Tre opuscoli dei Mikaeliti... 1958. pp. XXII, 331.

199.

Ressuli, N. Il « Messale » di Giovanni Buzuku. Riproduzione e trascrizione... 1958. pp. XIX, 407.

200. Tavole e indici generali dei volumi 101200 di «Studi e Testi»... 1959. pp. 155. 201. Devreesse, R. Les anciens commenteurs grecs de l’Octateuque et des Rois... 1959. pp. XV, 208, ill. 202. Llorens, J. M. Capellae Sixtinae codices musicis notis instructi sive manuscripti sive praelo excussi... 1960. pp. xxn, 555, tav. 203. Manzini, L. Μ. II cardinale Luigi Lambruschini. 1960... pp. χχνιιι, 686. 204. Cerulli, E. Scritti teologici etiopici dei sec. XVI-XVII. Vol. II. La storia dei Quattro Con­ cili ed altri opuscoli monofisiti... 1960. pp. XX, 246. 205. Incisa della Rocchetta, G. - Vian, N. Il primo processo per s. Filippo Neri. Vol. III. Testimonianze dell’inchiesta romana: 1610. Testimonianze «extra Urbem»: 1595-1599... 1960. pp. XVI, 458.

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STUDI E TESTI -----

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MARC D YK M AN S S.I.

POUR ET CONTRE JEAN XXII EN 1333 DEUX TRAITÉS AVIGN O N N AIS SUR LA VISION BÉATIFIQUE

CITTÀ D EL VATICANO B iblio teca A postolica V aticana

1975

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I M P R I M A T U R :

E Vicariatu Civit. Vatic, die 3 Iunii 1975.

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etrus

C a n is iu s

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Vic. Gen.lis Civit. Vatic.

PROPRIETÀ LETTERARIA Esse-Gi-Esse - 00181 Roma - Tel. 727.819

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AVANT-PROPOS

L ’histoire des dogmes chrétiens compte peu d’épisodes aussi passionnés et bruyants que celui qui marqua la fin du règne de Jean X X I I (1316-1334), au sujet de la vision béatifique. On vit les adversaires s’affronter, en particulier en Avignon, autour du pontife même dont les uns espéraient et les autres crai­ gnaient qu’il tranche la question selon ses vues personelles. Parmi les traités alors composés, nous en offrirons ici deux de tendance opposée et qui sont complémentaires. Les ouvrages dont nous éditons les fragments sont conservés aux manuscrits Rome, Vat. lat. 4007, et Paris, Bibliothèque natio­ nale, lat. 3170. Le premier est dû, comme on va le montrer, au cardinal An­ nibai de Ceccano, l’autre à un curial anonyme et non cardinal. Le premier est une défense du pape, l’autre une attaque. Le premier est sec et rigoureux, le second est passionné et volubile. Nous devons les examiner l’un et l’autre à partir de leurs ma­ nuscrits, pour en déterminer autant que possible auteur et date, en apprécier la dootrine, en montrer l’incidence sur la question en jeu. Celle-ci a formé le programme doctrinal des dernières années de Jean X X I I , mort en Avignon le 4 décembre 1334. Ce pape l’a proposée dans ses sermons depuis la Toussaint 1331, il l’a traitée dans de nombreux écrits, il l’a fait discuter sous ses yeux. Il l’énonçait en ces termes dans une lettre au roi de France: « Ma question est de savoir si les âmes bienheureuses ont la vision de la divine essence avant la résurrection» (28 février 1333). On sait que la réponse négative, qu’avait suggérée Jean X X I I , fut exclue par la définition de son successeur, Benoît X II, le 29 janvier 1336.

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A v a n t-p r o p o s

En vain les partisans de Jean X X I I et le pape lui-même avaient-ils tenté de rapprocher la doctrine prônée de l’enseigne­ ment devenu commun des théologiens, en concédant aux âmes purifiées ime véritable béatitude, consistant en un séjour céleste avec le Christ, avec une saisie par l’esprit de son humanité rédemp­ trice. Le premier texte que nous avons à éditer s’arrête volontiers à ces aspects de la thèse. Le second au contraire s’attachera à les réfuter. L’introduction qui suit s’est voulue très sobre. Autour du vieil­ lard d’Avignon, et si sympathique qu’il puisse paraître, on n'a pas tenté une synthèse. Entre son défenseur, cet aristocrate romain, cardinal et si calme, et/son adversaire, professeur de théologie éru­ dit et orateur, on aimerait placer un portrait en pied du pape de Cahors. Mais on s’en abstiendra ici, car en eschatologie comme en politique, en spiritualité comme en sociologie, pour la pauvreté comme pour l’oecuménisme, ce bouillant Jean X X I I reste sous trop d’aspects une énigme. Il faut en tout cas d’abord publier les textes. Contentons-nous d’en offrir deux à l’étude des historiens, et de ceux de la théologie en particulier. Nous tenons à exprimer ici notre reconnaissance à tous ceux qui nous ont aidé et encouragé en ce travail. Nous remercions spé­ cialement le Révérendissime don A.M. Stickler. Nous lui avons porté ces textes au début de sa préfecture à la Bibliothèque vati­ cane. Il a bien voulu les accepter pour son admirable collection Studi e testi et les y faire paraître aussitôt qu’il fut possible.

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INTRODUCTION

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LE TRAITÉ D U CARDINAL DE CECCANO

I L e manuscrit

Le ms. Vat. lat. 4007 est un in-quarto sur papier de 31 x 23 cm. Il comprend 49 feuillets. Le filigrane % la cloche peut se comparer à Briquet 3917, dont il présente une variante. C’est un papier ita­ lien qui se rencontre en Avignon vers 1325. Il y a six quaternions de ce papier (au premier il manque à la fin un feuillet, sans perte de texte). Chacun a sa réclame, mais le manuscrit est mutilé au début et incomplet à la fin. La reliure en parchemin vert est aux armes de Paul V et du cardinal Scipion Borghése (1609-1618). Le manuscrit était venu sans doute d’Avignon et se reconnaît peut-être au n° 979 du ca­ talogue de 1369: «Quidam quaderni papirei super questiones vi­ sionis essencie divine » (x). Les pages sont occupées par une seule colonne, d’une largeur de 115 mm. sur une hauteur de 205, entre de larges espaces laissés libres. La colonne a été tracée au début à la pointe sèche, plus loin par pliage, et le papier n’a pas été réglé. Aussi les lignes du copiste varient-elles en nombre de 26 à 29. Ce copiste doit nous occuper un instant. Il a une très fine écri­ ture gothique cursive. Il a tracé son texte d’üne seule venue et commet peu de fautes, assez pour qu’on reconnaisse un profes­ sionnel qui aurait eu besoin d’un correcteur, lequel n’est intervenu que rarement. L ’apparat textuel de notre édition devra en faire l’office. D ’une écriture plus petite, des titres courants et des manchet­ tes ont été partout ajoutés. Dans le texte aussi et dans les marges,

(!) Catalogue d ’Urbain V publié par F. E h r l e , Historia Bibliothecae Ro­ manorum Pontificum tum bonifatianae tum Avenionensis, Rome, 1890, p. 362.

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I n t r o d u c t io n

il y a eu des additions remarquables. D ’une part il s’agit de repri­ ses et compléments parsemés, de l’autre de corrections d’un carac­ tère personnel. Quelques lacunes sont restées. On a l’impression d’un ouvrage matériellement inachevé. L’annotateur principal est peut-être le même qui également met parfois des manchettes moins soignées et des accolades négli­ gées, mais sa main habituelle le désigne nettement à l’attention. Il a une écriture hautaine et volontaire, abrupte et laide, peu li­ sible par autrui. Elle n’y vise manifestement pas mais cherche à préciser la pensée et à y mettre des nuances. Elle rappelle des sou­ venirs personnels: « Ceci était du maître répondant » (lors de notre dispute); «ceci est contre ce maître général du Carmel»; «ici finit, à propos des autorités d’ Écriture, ce qui regarde maître Durand »; « quant à la quatrième partie principale... » Il y a une quarantaine de ces corrections ou remarques dont certaines trahissent l’auteur même du traité.

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II L ’au teu r

et la date

Seule une heureuse trouvaille, due à la regrettée Maier, a permis de percer l’anonymat de cette écriture. en effet se reconnaît aux notes marginales d’au moins manuscrit dont un cardinal bien connu fut le possesseur. nibai de Ceccano, petit-neveu de Jacques Stefaneschi proviseur de Sorbonne (x).

Anneliese La même un autre C’est An­ et ancien

f1) On nous permettra de ne pas répéter ici ce qu’on peut trouver au sujet de ce cardinal soit dans Le cardinal Annibai de Ceccano et la vision beatifique, dans Gregorianum, 50, 1969, pp. 343-382, soit dans Le cardinal Annibai de Cec­ cano (vers 1282-1350), étude biographique suivie du testament du 17 juin 1348, dans Bulletin de l'Institut historique belge, 43, 1973, pp. 145-344. Nous donnerons ici la liste des autres contributions que nous avons con­ sacrées à la controverse et auxquelles il sera renvoyé plus loin sous une forme abrégée: R o b e r t d ’A n j o u , La vision bienheureuse, traité envoyé au pape Jean X X I I , Rome, 1970 (Miscellanea historiae pontificiae, 30). A propos de Jean X X I I et de Benoît X I I . La libération de Thomas Waleys, dans Archivum historiae pontificiae, 7, 1969, pp. 115-130. Jean X X I I et les Carmes. La controverse de la vision, dans Carmelus, 17, 1970, pp. 151-192. Le dernier sermon de Guillaume d’Alnwick, dans Archivum Franciscanum historicum, 63, 1970, pp. 259-279. Lettre de Jean d’Aragon, patriarche d’Alexandrie, au pape Jean X X I I sur la vision béatifique, dans Analecta sacra Tarraconensia, 42, 1969, pp. 143-168. Les Frères Mineurs d’Avignon au début de 1333 et le sermon de Gautier de Chatton sur la vision béatifique, dans Archives d’histoire doctrinale et littéraire du moyen âge, 38, 1971, pp. 105-148. Nouveaux textes de Jean X X I I sur la vision béatifique, dans Revue d’his­ toire ecclésiastique, 66, 1971, pp. 401-417. Fragments du Traité de Jean X X I I sur la vision béatifique, dans Recher­ ches de théologie ancienne et médiévale, 37, 1970, pp. 232-253. De Jean X X I I au concile de Florence ou les avatars d’une hérésie gréco-latine, dans Revue d’histoire ecclésiastique, 68, 1973, 29-66. Les sermons de Jean X X I I sur la vision béatifique, texte précédé d’une intro­ duction et suivi d’une Chronologie de la controverse, avec la liste des Écrits pour et contre le Pape, Rome, 1973 (Miscellanea historiae pontificiae, 34).

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I n tr o d u c tio n

Ce personnage devint en 1326 archevêque de Naples, et un manuscrit du X I I I e siècle de l’ Hexaméron d’Abélard porte un exlibris de cette année, ou du moins d’avant le cardinalat, lequel est de 1327, disant que le livre avait été acquis précédemment de l’église Notre-Dame de Paris par Annibal. Les notes marginales sont bien ici de la même main que dans notre manuscrit. L ’identification de cette écriture et donc de l’au­ teur paraît ainsi établie avec une très grande probabilité. Les cir­ constances qui s’y joignent et le contenu des annotations du ms. 4007 viennent la confirmer. Nous parlerons du cardinal comme responsable de notre ouvrage. La question suivante sera celle de la date. Il est ici nécessaire d’indiquer quelques points de repère. On admettra d’abord que le traité suppose la controverse bat­ tant son plein, entre les premiers sermons de Jean X X I I et la mort du pape, le 4 décembre 1334. Il est postérieur à l’intervention du patriarche Jean d’Aragon, qui semble dater encore de 1332, et y sera en partie cité, et aussi d’après l’arrivée en Avignon de l’écrit de Durand de Saint-Pourçain contre l’opinion papale. Sur cet écrit de l’évêque de Meaux, nous avons le témoignage du cardinal de Sainte-Prisque, Jacques Fournier, futur Benoît X II. Durand, nous dit-il, l’avait envoyé au pape (1). Nous savons aussi que Jean X X I I mit ou fit mettre l’opuscule aux mains de spécialistes dont était Annibal. Des maîtres en théologie y retinrent onze erreurs. Un examen doctrinal s’ensuivit, duquel Ceccano semble avoir eu la direction, et qui aboutit, le 6 septembre 1333, à une condamna­ tion dont les actes sont conservés. Le traité du cardinal de Cec­ cano porte la trace des discussions préalables et fut donc antérieur au 6 septembre 1333. D ’autre part il ne peut être que postérieur à l’arrivée de l’écrit de Durand. Sur cette arrivée, nous avons mieux que le rapport de Jacques Fournier, une information donnée par le pape lui-même. Dans une lettre au roi de France, du 15 septembre 1333, Jean X X I I relate que maître Durand a risqué un écrit contenant des erreurs

p) Ms. Vat. lat. 4006, f. 225v: ...Durandus episcopus Meldensis... super dicta materia scribens et illud quod scripserat mittens dicto domino pape... (éd. A. M a i e r , Zwei Prooemien Benedicts XII., dans Archivum historiae pontificiae, 7, 1969, p. 158).

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A n n ib a l d e

C eccan o

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et composé récemment, il dit même: « Hiis praeteritis diebus » (*). Si le pape, le 15 septembre 1333, s’exprime en ces termes, on ne voudra pas mettre l’arrivée de cet écrit en Avignon au cours de l’année 1332, ni au début de 1333, mais plutôt, en faisant sa part à quelque exagération dans la formule, dans les mois qui précè­ dent septembre. Nous n’avons pu trouver de repère plus précis. Il y a une autre information chronologique à tirer du traité du cardinal. Il cite un sermon que l’auteur lui-même, dit-il, a pro­ noncé pour la Saint-Étienne et au cours de cette armée (hoc anno ) (2). Ce ne peut être que le 26 décembre 1332. Il parle ailleurs et plus d’une fois d’une dispute récente qu’il va mettre au point et où eu­ rent part deux personnages connus: l’archevêque de Rouen, futur Clément V I, et le général des Carmes. Si Pierre Roger fut certai­ nement en Avignon en février, en juin, juillet et septembre 1333, on ne sait trop quel mois il faut choisir. Ni de même pour Pierre Desmaisons. Demeura-t-il en Avignon entre le Chapitre de Nîmes, auquel il fut en mai, et un voyage d’Allemagne suivi d’un séjour à Paris, ville où on le trouvera, avec Pierre Roger, en fin d’année? (3) Nous mettrons donc, tout compte fait, la composition de l’ouvrage entre les mois d’avril et d’août, et plus probablement dans l’été de 1333, avant ou après les courtes vacances qui se prenaient vers la mi-juillet.

(!) Chartularium Universitatis Parisiensis, éd. H. D enifle et É . Châte ­ t. 2, 1, Paris, 1891, p. 425, n° 976, note 3. Ce volume sera cité désormais Chartularium... ou Cartulaire. (2) Texte plus loin, n° 360. (3) Chartularium..., p. 429, n° 981.

lain ,

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m La

A.

d o c t r in e

V ue

d ’ en sem ble

Le fragment n’a conservé aucun exposé synthétique de la thèse. Elle est rappelée à l’occasion des objections et il n’est pas malaisé d’en rassembler les éléments. Nous le ferons, en laissant d’abord de côté les adversaires et la méthode d’exégèse, auxquels nous re­ viendrons ensuite.

I.

La

th èse

de

J ean X X II

d ’après

le

c a r d in a l

de

Ce c c a n o .

La vision face à face est promise à la résurrection pour la per­ sonne i1), et non pour l’âme séparée. Non seulement les mystères de l’incarnation et de la rédemption mais le mystère trinitaire luimême sera alors révélé aux bienheureux (372). En termes de temps — ainsi parlerons-nous avec nos auteurs, — il faut dire que cela se fait après la reprise des corps et après la sentence du jugement (1-2). L ’âme purifiée elle-même, avant la résurrection, sera dans la société du Dieu fait-homme, elle verra le Christ par intuition, d’un regard d’amour, bonheur reçu, repos possédé, anticipation et cer­ titude acquise de l’ultime béatitude (21, 40)·, la lumière du Thabor y sera dépassée (17, 165)·, le Christ-roi apparaîtra entouré des saints et des anges qui l’adorent (19); les anges portent les âmes à la ren­ contre du Christ qui vient les recevoir (379); elles sont en face de l’Agneau, dont la divinité leur apparaît sans voile (132, 162, 165). Cette intuition est encore spéculaire (137, 145) et abstraite, non immédiate, mais elle montre déjà avec évidence l’humanité

p) Nous noterons au besoin entre parenthèses les n°s d’ordre ajoutés par l’édition, chiffres italiques. Ici il s’agit d’un leit-motiv qu’on retrouvera aux nu­ méros 1, 9, 68 à 75, 106, 249, 290, 297, 303, 314-315, 318, 328, 335, 338, 370, 379.

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A n n ib a l d e

C eccan o

15

du créateur et le mystère de la création et du salut: telle est la béa­ titude qui convient à l’âme, la présence faciale du Christ (87, 1 6 2 ) et une vision dont la clarté est à la connaissance d’ici-bas comme la lumière du soleil à celle d’une chandelle (151). C’est une véri­ table gloire bien qu’anticipative et provisoire (169).

II.

L es

a d v e r s a ir e s .

Les fondements scripturaires de cette théorie vont être exa­ minés à propos de ses adversaires. Le premier est saint Thomas, et si lui, dit Annibal avec une feinte déférence, n’a pas trouvé les autorités qui l’écartent, alors qu’il y a tant réfléchi, y est revenu en tant d’ouvrages et s’est cor­ rigé lui-même sur le sujet, on peut croire que personne ne trou­ vera mieux (11-13). Or les exégèses de saint Thomas ne s’imposent pas; bien au contraire, le sens véritable des textes qu’il cite favorise l’opinion du pape. Sur l’ Écriture et la tradition, la position du cardinal de Cec­ cano nous paraîtra assez forte. On peut admettre qu’une escha­ tologie unique s’y présente, sans exclure pour l’ âme une eschato­ logie intermédiaire. Quant à la distinction sur le Christ glorieux, homme-Dieu et Fils, on ne voit pas qu’elle fonde en rien une vision non Trinitaire. Sur le fond de la question, tous les maîtres s’accordent, ajou­ tera-t-il, à admettre une perfection plus grande de la béatitude après la résurrection, lui seul, Thomas, s’y oppose en certains de ses ouvrages (14, 311). Le cardinal semble ici se laisser entraîner par sa polémique. Saint Thomas n’a jamais nié que la vision béatifique ne soit plus parfaite après la résurrection. On sait qu’il a nié seulement un pro­ grès d’intensité qu’il avait d’abord admis. Tel des auteurs cités, c’est Durand de Saint-Pourçain lui-même, est ici entièrement d’ac­ cord avec la dernière version du grand docteur (1). Contre ce second adversaire, le cardinal veut donner libre cours à son indignation. Plus heureux que le cardinal Jacques Fournier,

p) D u r a n d i

a

S a n c t o P o r c ia n o ,

In Sententias, IV, dist. 49.

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I n tr o d u c tio n

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il a en mains son pamphlet contre le pape (on sait que Benoît X II se plaindra plus tard qu’on ne le lui ait pas montré en 1333). Il y a bien des erreurs à lui reprocher, en dehors même de son inter­ prétation scripturaire. Annibai veut y revenir: « tractatus pertrac­ tabitur », mais cette partie ne nous est point parvenue. Sur les reproches faits à Durand, il y a lieu de noter ici les deux listes d’erreurs initiales et le remaniement dont témoigne le ma­ nuscrit (*). Les quatre erreurs supprimées vont être pratiquement repri­ ses dans la suite de l’exposé (a). Elles sont remplacées au début par une liste de seize erreurs. Ceccano en attribue le relevé à des « quidam » sans prendre la série proprement à son compte. On peut se demander si elles ne venaient cependant pas de lui, ou du moins passèrent par ses mains avant d’être soumises aux maîtres con­ voqués. On remarquera en effet, après Denifle, que la commission théologique du 6 septembre 1333 a repris assez littéralement onze erreurs à cette liste (s). Elle en a laissé tomber cinq, dont la plus importante de toutes allait droit contre l’opinion papale (4). Il est à supposer dès lors que la liste de Ceccano est allée d’abord à une séance préparatoire et que tout s’est décidé là. On tournerait au­ tour de la question principale; on irait jusqu’à une réprobation plus ou moins formelle de beaucoup d’opinions de Durand, mais on n’approuverait en rien de définitif l’opinion nouvelle prônée par le pape. La porte ne serait donc ni ouverte ni fermée. Ceccano sut se contenter du compromis. Lui-même, nous le verrons en par­ lant de sa méthode d’exégèse, était moins sûr que passionné. Après saint Thomas et Durand, les autres adversaires étaient d'un moindre poids. Jean d’Aragon d’abord, ce jeune patriarche d’Alexandrie, recevra la leçon que mérite sa présomption et son air de n’y pas toucher. Les autres objections seront rencontrées à leur tour sur le terrain scripturaire. (l) Voir les pp. 97-99, qui conservent autant que possible les deux états du texte. (a) On retrouve les deux premières aux numéros 158 et 168, la troisième aux nos 172, 173, 175, la dernière aux nos 124 et suivants. (3) L ’édition a mis en italiques dans la seconde colonne les mots communs avec le texte du Cartulaire de Paris. (4) La proposition à condamner disait que les élus, à leur mort, sont admis tout de suite à la claire vision de Dieu, qui est la béatitude finale de l’homme

(122,

2°).

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A n n ib a i d e

III.

La

C eccan o

m éth ode

17

d’exégèse.

Ceccano mérite ici de grands éloges. Il sait lire un texte, tenir compte du contexte, distinguer le sens littéral des sens mystiques, analyser presque en philologue les divers termes, noter les diver­ gences d’interprétation, remarquer à l’occasion la différence entre un original d’Augustin et la citation de la Glose. Toute cette méthode prélude en quelque sorte à celle, bien connue et qui était encore nouvelle au X I V e siècle, de Nicolas de Lyre, dont bientôt la bible commentée toute entière prendra place dans la bibliothèque du cardinal^). On a remarqué plus haut combien déficiente fut chez lui l’in­ terprétation de la doctrine de saint Thomas. Ce n’est pas peu de chose par ailleurs d’avoir raison contre le grand docteur, ce qui lui arrive, semble-t-il, compte tenu des présupposés de l’exégèse médiévale, sur un texte essentiel de saint Paul, celui du corps im­ mortel (II Cor. 5, 1-8, nos 45-88) (2). On peut lui reprocher d’autre part, du point de vue exégétique, de vouloir fonder son argumentation sur un texte aussi obscur que celui de l’autel de l’Apocalypse (6, 9-11). Il attire l’attention toutefois sur certains aspects de la tra­ dition et sur un important courant patristique. L’eschatologie du dernier jour est remise en lumière, parousie lointaine et gloire an­ ticipée pour les âmes séparées. Il s’arrête pour celles-ci avec saint Bernard, à une vision de l’humanité du Sauveur, dont il croit mon­ trer qu’on ne peut y comprendre la vision trinitaire sans manquer de fidélité à l’ Écriture. Le texte sacré, dit-il, ne contient que la promesse faite aux personnes et pour l’heure du jugement: acceptons le certain et re­ fusons le reste. Principe discutable, puisque « abstrahentium non est mendacium », mais qui s’explique par l’espoir des partisans du pape: voir intervenir une détermination de l’ Église.(*)

(*) Il la laissera par testament, en 1348, aux futurs écoliers du collège qu'il veut fonder à Rome (Testament aux Archives de Vaucluse, H, Gentilly 6, éd. citée, p. 297). (a) Nicolas de Lyre, qu’on vient de citer, suivra ici la tradition de saint Thomas d ’Aquin, mais il mentionnera d’abord le sens de la Glose, que Ceccano avait préféré.

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18

I n tr o d u c tio n

C’est ce qui rend le débat palpitant. Les adversaires aux yeux de Ceccano apparaissent comme des trouble-fête. On peut au moins douter (367). Pourquoi ne pas accepter l’hypothèse (9-10)?

B.

S o m m a ir e

Le traité d’Annibai de Ceccano comprenait au moins quatre parties principales. Cela apparaît à la dernière ligne du manuscrit conservé. Il y a là une indication mise de la main de l’auteur, an­ nonçant que la page suivante commençait par les mots: « Quan­ tum ad quartum principale ». Il y avait donc là le début d’un qua­ trième membre principal. Le seul fragment qui ait survécu fait partie du troisième. Il s’occupe de l’ Écriture et on n’en a que le troisième et dernier pa­ ragraphe. C’est celui dont on va donner l’analyse. Avant ce jalonnement, on relèvera quelques indications sur le contenu des autres parties, que nous a transmises le texte con­ servé. L ’auteur en effet a coutume de renvoyer à son propre ou­ vrage, et il n’évite pas les reprises sinon les répétitions. C’est ainsi qu’il se réfère huit fois «supra», à des textes perdus. Ils s’occu­ paient, nous dit le début du fragment, de la vision face à face, de la vie éternelle, du denier de la récompense, de notre image de la divinité, du royaume éternel, de notre égalité avec les anges (1) et des fondements scripturaires. Il y avait d’autre part, dans un ordre qu’il n’y a plus moyen de restituer, des passages sur le paradis et l’exégèse des Pères (16); sur la béatitude dans l’ Écri­ ture et ses diverses significations (104); sur la première étole de l ’Apocalypse (188); sur le sens du « facie ad faciem » de la Genèse, où il était montré que Moïse ne vit pas Dieu face à face au sens des bienheureux (274); sur la vision divine étudiée et distinguée selon ses différentes possibilités (293 et 359); de même sur le texte de saint Paul au sujet de la vision céleste (308). On soupçonne donc que les autorités de l’ Écriture et de la tradition ont déjà été re­ tournées en tous sens et mêlées aux allusions scolastiques. La lec­ ture de la partie conservée nous en donnera la manière, et l’ana­ lyse suivante permettra de juger de la méthode.

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C eccan o

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Venons-en donc à l’opinion du pape, dite adverse, et au troi­ sième paragraphe de l ’exposé qui lui est consacré d’après l’ Écri­ ture. Nous laisserons parler Annibal. Dans le texte inspiré, la vision bienheureuse n’est pas pro­ mise à l’âme séparée mais à la personne (1), et après le jugement, comme le prouvent: Saint Paul, II Tim. 4, 7-8, avec la Glose (2) et II Tim. 1, 12 et la Glose (3). Saint Augustin, sur les Psaumes 100 (4), 125 (3), 43 (6) et sur Jean (7). Première instance: Il faudrait trouver la vision exclue positi­ vement pour l’âme séparée (8). Réponse: C’est là concéder que les textes sont positifs quant à la personne et au temps du jugement. Acceptons ce qui est sûr et cela seul (9); d’autant que saint Bernard nous en donne l’exem­ ple (10). Seconde instance: L ’ Écriture concède la vision aux âmes pu­

rifiées avant la résurrection des corps (11). Réponse: Voyons les textes

(12).

Division en quatre parties (13).

I.

Autorités employées par saint Thomas

Luc, 23, 43; II Cor. 5, 1; et 6-8; Philipp. 1, 23; Apoc. 14, 13 {14): etc. (95, 106). 1) L e t e x t e d u b o n l a r r o n : combien le propos de saint Tho­ mas en est peu appuyé (15).

A. Sens des mots.

1. «Paradis» a des sens multiples; donc le raisonnement est en faute (16). En effet acceptons vision: nous dirons vision du Christ comme à la Transfiguration et dans deux mots de saint Paul (17); acceptons sein d’Abraham (18); acceptons joie singulière, de voir, dirons-nous, le Christ-Roi en présence des saints de l’Ancien Testament et des anges (19); acceptons habitation de Dieu dans l’âme (20); accep-

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tons joie singulière avec la certitude d’une chose future: la vision face à face (21). On est donc dans l’équivoque, et même le sens le plus pro­ bable à vos yeux nous favorise (22). 2. « Aujourd’hui ». Au présent: le paradis a cinq sens possi­ bles... (23). Hors du temps, s’entend par comparaison comme sur la parousie (24), ou s’entend d’un présent éternel et il s’agit, alors aussi, du jugement (25). B. L ’exégèse des saints: elle est en désaccord (26). Athanase (27); Jean Chrysostome (28); Augustin, sur la Ge­ nèse (29); à Dardanus (30, 33); à Évodius (31-32); Sermon du larron [ce texte est de Chrysostome] (34); sur Jean (35); Léon le Grand (36); Pierre Comestor (37); Cassien (38). Ce désaccord plaide pour l’opinion contraire (39). « Mecum » s’interprète par suite en six sens, tous favorables au pape (40). Conclusion sur le sens des mots et l’exégèse des saints (41). C. De même, la portée générale du texte, quel que soit le sens par­ ticulier de ses éléments. Si le Christ a fait une grâce spéciale au bon larron, on n’en tirera rien pour les autres chrétiens (42). A quoi vous objecterez Athanase et Augustin (43). Réponse: Il faut les entendre en distinguant états et mérites avant la ré­ surrection, après la résurrection; récompense finale [en espé­ rance, certaine avant la résurrection], en réalité [pour quelque privilégié, tel le bon larron] (44). 2) L a d e m e u r e é t e r n e l l e d e s a in t P a u l , II Cor. 5, 1-5, dans saint Thomas (45). L ’autorité sera infirmée par une triple voie (46): A. Les mots d’après saint Thomas et en réalité. 1. Vision faciale n’y est pas. 2. Maison céleste ne dit pas vision. 3. La maison céleste est le corps ressuscité (47). 4. La jouissance de Dieu avec les anges semble réservée au jugement (48). L ’analyse des expressions conclut donc contre Tho­ mas (49).

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B. Le sens général indique le ciel mais non la vision antérieure au jugement (50). Les exégètes varient. Vue d’ensemble (51). C. Lisons maintenant le texte et ses exégètes (52). 1. 2. 3. 4.

Voyons la Glose (53). Saint Thomas lui-même a douté (54). Grégoire le Grand y voit le ciel (55). Cassien y voit la présence du Christ (56).

Objection 1. La béatitude de la maison céleste est d’après saint Tho­ mas inhérente à l’homme (57). Réponse: Saint Paul l’entend comme celle du corps spirituel et la Glose lui fait écho (58). Concluons, le texte étant clairement sur la résurrection et de même la Glose d’Augustin et de Jérôme, à une interprétation opposée à la vision antérieure (59). Objection 2. La Glose dit a. que l’ âme est déjà renouvelée (60); b. qu’on gémit en cette vie sur le retard de la gloire (61); c. que les saints avant la résurrection sont revêtus de la gloire promise (62). Réponse: a. Par la grâce, mais l’appel se fait au renouvellement du corps ressuscité, donc à la résurrection (63); b. On gémit dans l’au-delà sur le même retard (64); c. Non, ils attendent cette gloire et ce corps ressuscité. En forme: on admet que les âmes, déjà re­ vêtues de leur gloire convenable, seront revêtues à la résurrection de leur gloire principale (65). 3) L a p r é s e n c e a u p r è s d u S e i g n e u r , II Cor. 5, 7-8, d’après saint Thomas (66). Ici aussi on répondra de trois façons (67'): A. Le sens des expressions favorise l’opinion contraire (68) car le texte selon la Glose parle du corps immortel, il parle des per­ sonnes et non des âmes séparées (69); d’une présence ou ma­ nifestation au tribunal, vers laquelle on tend, ce qui s’entend à l’avance (70). Il s’agit des personnes (71), car c’est une per­ sonne qui parle (72), et d’actes personnels, avant cette phrase (73) et après elle (74). Si d’ailleurs l’acte de foi est un acte de la personne, donc la vision aussi (75). Ceci peut se confirmer ad hominem: si l’âme séparée n’a pas l’acte de foi, donc elle n’a pas non plus la vision (76). Tout le contexte du chapitre s’en­ tend de la personne (77). D ’où ce corollaire: Paul oppose foi et claire vision pour cette vie et pour après la résurrection; cette opposition est contraire à votre thèse (78). Concluons (79).

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I n tr o d u c tio n

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B. L ’interprétation d’Augustin confirme la nôtre (80). Nous cite­ rons quatre textes: Sur le Psaume 48 (81); sur Jean (82-83); « De vera paenitentia » (84). C. Triple argument (85). Concédons un triple désir, ou celui de la vision qui viendra après la résurrection (86), ou de la vision au sens de la présence du Christ, béatitude mais imparfaite (87), ou des deux ensemble, mais in via (88). D. Pierre Desmaisons et son mauvais argument (89). L’appui de Pierre Roger (90).

4) « D issolvi et esse Grecs .

cum

Ch r is t o », Philippiens 1, 23,

et

l ’ erreur des

A. L ’autorité telle que l’explique saint Thomas avec la conséquence qu’il en tire à bon droit sur l’erreur imputée aux Grecs (91). B. Le texte est favorable à l’opinion du pape (92); comme on voit dans Augustin [Gennade] (93). C. L ’opinion du pape n’a rien de commun avec celle des «Grecs» (94). D. Les textes du Lévitique allégués à ce propos par saint Thomas sont inopérants (95). 1. parce que, selon saint Grégoire, l’éternité s’exprime aussi bien par un instant que par une durée (96-97); et l’ Évangile parle de même (98); et selon le texte de Paul, le jour du jugement vient aussi bien aussitôt, ou vite, que dans un temps lointain (99). 2. parce que, au surplus, cette exégèse n’a rien de littéral (100). 5) « B eati qui in D omino m o riu n tu r », Apoc. 14, 13, d’après saint Thomas (101). A. Saint Bernard interprète ce texte pour le pape (102). Lisons son témoignage (103). B. Le sens de bienheureux dans l’ Écriture (104); de nouveau au témoignage de saint Bernard (105). 6)

«

V in c e n t i dabo », Apoc. 2, 7, selon saint Thomas.

A. La promesse est faite à la personne. B. La promesse est faite au futur: disons au jugement.

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A n n ib a i

de

C eccan o

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C. Pour trois raisons: 1. Agneau en présence duquel sont des personnes. 2. Jugement où est reçu le royaume définitif. 3. Le bois de la vie est le Christ glorieux, tandis que le bois rédempteur pour l’âme séparée est le Christ sauveur qui sera connu avant le Dieu vivant (106). De plus: le bois de vie ne sera perçu en tant que divinité du Christ, au sens le plus parfait, qu’après le jugement (107). D. Concluons que ce texte est plutôt pour le pape que pour ses adversaires (108). Conclusion sur les textes scripturaires de saint Thomas (109). Venons-en aux autres docteurs, maître Durand et quelques de ses pareils (110).

II.

Durand de Saint-Pourçain, évêque de Meaux (111). Ses neuf textes d ’ Écriture: Zach. 9, 11; Luc 16, 19-31; 23, 43; Phi­ lipp. 1, 21-23; II Cor. 5, 1; Apoc. 6, 9 et 11; 7, 9; et 22, 14; Luc 16, 22; Jac. 1, 12 (112-120).

A. Les erreurs de Durand à propos de ces textes. Rédaction sup­ primée: quatre erreurs (121). B. Les erreurs notées chez Durand. Seconde rédaction: seize er­ reurs (122). C. Réfutons ici seulement la prétention d’établir par ces textes la vision des âmes (123). 1) L a

descente

aux

enfers,

Zacharie 9, 11 (124).

A. Admettons que le texte s’applique, on aura seulement une dé­ livrance (125)·, tout comme dans I Petri 3, 19, la prédication, ni dans Actes, 2, 24, la libération des peines infernales, ne di­ sent rien sur la vision (126-127). Ces autorités sont muettes sur ce que vous voulez leur faire dire (128). B. Instance de Durand: délivrer du dam, c’est donner la vision; donc délivrer des limbes, c’est donner la vision (129). Réponse multiple selon la multiple ignorance de Durand (130).

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I n t r o d u c t io n

1. Augustin a cherché en vain (sur la Genèse et à Évodius) et conclut à l’ignorance sur la descente du Christ aux enfers (131). 2. Quoi qu’il en soit d’Augustin, les limbes des Pères et le sein d’Abraham étant placés en enfer, et admise la descente du Christ aux limbes, Durand n’a pas la vision, ce qu’il a, c’est tout ce que dit l’opinion adverse, dont voici la description essentielle... (132). 3. Concluons sur l’ Écriture et la descente aux enfers (133). Nouvelle instance: enlever la peine du dam, c’est enlever l’absence de la vision (134). Réponse: Où l’ Écriture lui dit-elle cela? Je ne trouve pas cette pro­ messe, et c’est pourquoi je dis que l’affirmation de l’évêque est té­ méraire, sinon suspecte, car il s’appuie sur un article de foi, et l’in­ terprète sans autorité d’ Écriture, du moins n’est-ce pas celle de Zacharie (135). C. Instance sur l’ouverture du paradis, etc. (136). Réponse. 1. Sur la peine du dam. Nous distinguerons dans le fruit de la rédemption, sans inventer une descente aux enfers indépendam­ ment des autres actes rédempteurs: a. privation de la vision du Christ, décrite comme atteinte de Dieu qui cependant n’excède pas la vision spéculaire (137), ce qui s’accorde avec la liturgie des défunts (138). b. privation de la vision face à face, écartée soit habituel­ lement par la rédemption, soit actuellement par la sen­ tence du jugement (139). 2. Sur la vision faciale provisoire du Christ, nous acceptons le mot et l’objet divinité, mais tenons une vision abstractive non intuitive (140), dont un « grand » a dit que le Christ s’y révèle comme Fils (141), et ainsi s’interprète le répons cité (142). On peut donc dire que le Christ emmène les âmes au ciel empyrée même, ou qu’el­ les sont déjà au séjour définitif des bienheureux (143). La descente aux enfers ne se fit donc pas en vain (144). 3. Sur la vision spéculaire, la plus parfaite en comparaison de celles d’ici-bas, mais encore ennuagée (Grégoire) et dans le secret (Écriture et Augustin), non faciale au sens définitif (145). D. Un autre inconvénient de l’interprétation de Durand est qu’il ne peut admettre nul retard non plus pour les âmes des saints,

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C eccan o

même de l’Ancien Testament, alors qué les Symboles et les décisions canoniques ne parlent pas de la descente aux enfers sans y joindre la mention de la vie éternelle avec la résurrec­ tion { 1 46 ). E. On aurait tort d’ailleurs de trop insister ici contre Durand, qui s’est fait reprocher par son ordre d’avoir dit que le Christ « in triduo nusquam fuit » et avoir dès lors nié la descente aux enfers { 147 ) . [Ceci n’est qu’une boutade, car Durand n’avait évidemment pas nié cet « article »].

2) L ’ âme de L azare , L uc 16, 19-31. Voir, nous dit-on, plus haut [texte perdu; cf., sur l’autre Lazare: 1 9 , 21 ] { 1 4 8 ). 3) L e

bon larron ,

L uc 23, 43.

A. Voir plus haut [15 à 44 ]

{ 1 4 9 ).

B. De plus, l’argument de Durand. 1. Qualification

{ 1 5 0 ).

2. Réfutation par la distinction des cinq sens du paradis: sein ou repos, grande joie, présence du Christ et des anges, présence du Christ-Dieu vu plus parfaitement qu’ici-bas, présence dans la vision face à face [concédée par privilège] { 151 ). 4) « C um Ch r ist o », Philipp. 1, 23

{ 1 5 2 ).

A. Ce texte est pour le pape: l’humanité du Christ B. L ’illogisme de la déduction

{ 153 ).

{ 1 5 4 ).

C. Confirmation dans la réflexion de Pierre à la Transfiguration (255). D. L ’objection de Durand être ses erreurs (257):

{ 156 ) ,

ses difficultés pour la foi et peut-

1. « Le séjour avec le Christ sans voir sa divinité ne serait pas un gain » {1 5 8 ); alors que l’ Évangile a parlé de la vue du Christ envoyé du Père { 159 ). 2. « L ’âme séparée ne verrait ni ne jouirait de l’humanité parce qu’elle n’a pas d’yeux de chair » { 160 ) ; comme si l’ Écriture ne par­ lait pas d’une jouissance, comme si Satan ne souffrit pas d’être chassé du paradis, comme si les anges ne jouissent pas en connais­ sant les corps, et l ’âme séparée en connaissant les corps sublimes;

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ce serait l’erreur d’Averroès, ou de plus celle de qui dirait que l’hu­ manité du Christ est objet de connaissance sensible, ou celle d’un hérétique niant l’existence de ce qui n’apparaît pas aux yeux de chair {161). 3. « L ’âme séparée ne gagnerait rien en gardant la foi »; alors qu’elle verrait l’humanité de l’Agneau de façon « faciale » {162). 4. « L’état présent n’aurait rien à gagner au changement »; alors que les âmes des saints n’ont pas, comme on imagine, la seule foi dans le Christ, avec la démonstration rationnelle de son iden­ tité avec le Dieu créateur, mais sa connaissance face à face comme cet être premier, que les anges désirent contempler {163). 5. « Il est pire de rester en chair que d’être avec le Christ en croyant en lui sans voir Dieu » {164); mais n’est-ce rien de prendre part à une vision supérieure à celle de la Transfiguration, vision plénière du Christ glorieux, vision de la dépendance des créatures à son égard, vision des anges qui l’assistent, avec la certitude sur l’état futur, au lieu du doute, la jouissance au lieu de la douleur, la société du Maître au lieu de celle du serviteur {166). Le Christ lui-même n’a-t-il pas distingué la société de l’envoyé de celle de Dieu même? Avoir la vie éternelle, ou du moins être avec le Christ qui est la vie éternelle, ne vaudrait pas cette vie misérable? Est-ce là une proposition conforme à l ’honneur du Christ? {166). Voir aussi bien notre rédempteur n’est-ce pas mieux que de croire sim­ plement en lui {167)1 6. « Mieux vaudrait rester en grâce en cette vie que de ne pou­ voir pécher dans l ’autre en étant avec le Christ ». Erreur évidente après ce qui a été dit {168). Et plus encore parce que dire qu’« on ne pèche que volontairement » devient une hérésie quand on iden­ tifie par là l’état de gloire à celui d’épreuve {169). Car notre opi­ nion met cette première récompense dans l’état de gloire bien que ce ne soit pas la dernière {170). De plus cette façon de raisonner ferait préférer l ’état de grâce permettant encore de mériter, à une vision due à un certain degré, hérésie évidente. Que Durand ne réponde pas ici qu’on pourrait encore pécher, puisqu’il a dit que ne pèche que qui veut {171). 7. « Saint Paul était sûr de ne pas déchoir de la grâce » (172). C’est là, semble-t-il, une hérésie {173). Le cas de saint Pierre le prouve {174), et Augustin a réprouvé expressément cette propo­ sition, et en réfutant un hérétique {175).

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8. « Saint Paul ne préférait la mort à la vie que pour obte­ nir la vision bienheureuse ». Ceci est faux { 1 76 ). En effet il ne se­ rait pas chrétien de préférer cette chair captive à la vision céleste de l’humanité du Christ { 177 ). 5) L a

demeure étern elle,

II Cor. 5, 1-5, d’après Durand { 1 7 8 ).

A. Le texte est pour la partie adverse, comme on l’a exposé plus haut, nos 45 à 6 5 { 179 ). B. Difficultés et erreurs propres à Durand: son texte sur l’âme séparée { 1 8 0 ). 1. Saint Paul d’après la Glose (sinon d’après saint Thomas) parle du corps immortel et ne fait nulle mention de la vision face à face { 181 ). 2. S’il pensait à la vision, il ne parlerait pas d’habitation au ciel, mais de l’habitation divine... { 182 ). 3. Il est périlleux de dire que l’âme séparée ne gagne rien à être au ciel { 1 8 3 ). 4. Et qu’étant esprit elle ne peut jouir des corps, alors qu’elle a une relation de nature avec son corps, et que les substances sé­ parées, selon la philosophie, meuvent les orbes, que les corps glo­ rieux sont une merveille de Dieu, et qu’Augustin [ou saint Patrice de Dublin] nous dit que ce n’est pas une fausse imagination de faire jouir des corps les âmes délivrées. 5. Cela est périlleux aussi pour deux raisons déjà dites (au n° 1 6 1 ) et à cause d’une parole du Christ que saint Augustin a en­ tendue du ciel { 184 ). 6) L ’ a u t e l

céleste,

Apoc. 6, 11

{ 185 ).

A. Ceci est l’autorité principale de la partie adverse... B. La béatitude de l’ Écriture a plusieurs sens

{ 186 ).

{ 1 8 7 ).

C. La résurrection de l’âme n’exige pas la vision

{ 188 ).

D. L ’étole va en sens contraire comme on le dira [voir nos 1 9 1 -1 9 0 ], { 1 8 9 ).

7) L ’ A g n e a u

de

l ’A poc alypse,

7, 9; et 22, 14

{ 1 9 0 ).

A. L ’Agneau est le Christ selon l’humanité; l’étole blanche a été lavée dans son sang, il conduit les âmes aux sources de la vie éternelle { 191 ).

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B. L ’étole d’ après Bède est la joie de l’âme, qui lui fait endurer le retard {192). C. Concluons: le texte est pour nous (193).

8) L azare

au

sein d ’ A braham ,

L uc 16, 22 (194).

A. Le parallélisme avec le mauvais riche en enfer est pour nous: pour l’âme séparée on a soit le sein d’Abraham soit l’enfer (195). B. Durand se trompe (196): 1. Son raisonnement est périlleux sur le châtiment infernal (197). 2. Le damné ne reçoit pas tout son châtiment tout de suite, mais Augustin le nous dit: il s’achève au jugement (198). C. Il y a double obstacle à ce que l’âme du pauvre Lazare reçoive la vision: la porte du paradis était encore close et la promesse n’était pas faite (199). D. Pierre Desmaisons opposait en vain le Psaume et voulait se baser à tort sur un parallélisme: si l’impie est tourmenté tout de suite, donc le juste est récompensé immédiatement (200). Réponse: 1. Une récompense tous l’admettent; la vision avant la mort du Christ: erreur (201). 2. Ni récompense totale ni châtiment total (202), comme il apparaît des deux textes eschatologiques de la Secunda Petri pour les démons (203), et de deux d’Augustin pour réprouvés et justes (204). 9) L a couronne de vie après l ’ épreuve , Jac. 1, 12 (205). A. Distinguons: celle de la promesse vient au jugement, selon l’Apô­ tre; celle de la victoire vient tout de suite (206). B. Instance: «Diligetur a Patre» (207).

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A n n ib a i d e

III.

C eccan o

29

Les autres adversaires, et d’abord Jean d’Aragon. Les huit textes du Patriarche: Matth. 20, 1-16; 25, 20; Luc 23, 43; Matth. 20, 8; Jean 17, 24; Apoc. 6, 11; Rois 10, 8; Ex. 33, 19 (209-216).

Rejet global de ces textes qui vont en sens contraire (217). 1) S u r

la

o n z iè m e

heure,

la parabole, Matth. 20, 1-16.

A. Elle a trait à la résurrection, et cela selon Augustin en six endroits (218). B. Bien que Grégoire le Grand, dans une interprétation sur quatre, la rapporte à la mort, en dépit du texte et des multiples expli­ cations d’Augustin. Elle doit alors s’entendre de la récompense provisoire et non de l’ultime béatitude (219). Ç, Lisons l’évangile (220) et notons les termes (221). Il s’agit de l’ Eglise à travers les temps (222) et l’histoire (223), jusqu’à la fin du monde (224), pour la récompense universelle (225). D. Les textes d’Augustin (226-230). E. Concluons à l’erreur du patriarche (231), qui a tort de plus de chercher un murmure chez les saints (231), au lieu de suivre Chrysostome (232); de dire que la vision face à face au juge­ ment n’explique pas « a novissimis usque ad primum » (233); et enfin d’objecter l ’homélie de saint Grégoire (234), qui lui aussi sait distinguer avant et après résurrection (235). 2) S u r

le

s e r v it e u r

f id è l e ,

Matth. 25, 20.

A. La parabole se rapporte au temps du jugement (236), comme on voit au contexte (237). B. Citons le texte qui fera apparaître le contresens (238), com­ bien contraire à Jérôme et Augustin (239), Raban Maur et Hi­ laire (240). C. Concluons que la parabole est pour le pape, comme aussi la liturgie (241). D. De plus, le présent s’adresse à celui qui est reçu pour la pre­ mière fois (242); la joie antécédente n’est pas niée; celle d’après la résurrection a son caractère propre (243).

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30

I n t r o d u c t io n

3) S ur le bon larron , L uc 23, 43

{ 2 4 4 ).

Voir plus haut, nos 15 à 44 et 1 4 9 -1 5 1 ; et notons de plus trois dé­ fauts du raisonnement ( 2 4 5 - 2 4 7 ). 4) S u r l e m u r m u r e d e l a o n z iè m e h e u r e , Matth. 20, 8. Voir n° 2 3 2 , et « À commencer par le dernier», voir n° 2 33 ( 2 4 8 ).

5) S u r « S i n t mecum », Jean 17, 24, parole qui suppose les personnes ( 2 4 9 ) , et S u r la divine clarté , ibid . D ’après Augus­ tin il s’agit de la vision finale ( 2 5 0 ). A. Le texte allégué d’Augustin n’est pas cité en entier ( 251 ) . Il parle de la gloire d’être avec le Christ, tout comme l’opinion ( 2 5 2 ).

B. Vous objecterez: donc il s’agit de la divinité du Christ. Je ré­ pondrai: oui, pour la fin du monde, comme le dit le reste du texte d’Augustin ( 2 5 3 ) , qui ajoute lui-même qu’il est question du jugement ( 2 5 4 ). C. Nous expliquerons fout son texte ( 2 5 5 ): Il précise d’abord ce qui regarde l’humanité du Christ ( 2 5 6 )] puis que la promesse se réalise à la résurrection ( 2 5 7 ). Il y a donc lieu de distinguer l’humanité du Christ avant et après la résurrection ( 2 58 ). D. Qu’on remarque l’omission faite: on ne cite que la Glose, alors que le texte complet promet aux personnes l’entrée du ciel ( 259 ) . Augustin ensuite parle du séjour avec la divinité du Christ, par allusion soit 1 . au grand bien du paradis du larron 2. au « mecum » du serviteur fidèle 3 . au temps d’après la résurrection 4 . ou même au temps d’ici-bas ( 2 6 0 ). E. Tout cela est diminué par le patriarche

( 2 6 1 ).

1. L ’âme du larron absoute et béatifiée par la présence du Christ-Dieu ( 2 6 2 ) . Les autres réflexions du patriarche ne viennent pas d’Augustin ( 2 6 3 ). 2. Le fidèle après avoir été avec le Christ par la foi y sera par vision ( 2 6 4 ). 3. Avec le Christ selon sa divinité après la résurrection

( 2 6 5 ).

Qu’on remarque encore les omissions du patriarche et les men­ tions d’Augustin ( 2 6 6 ). Encore une mention augustinienne du ju­ gement (2 6 7 ).

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A n n ib a i d e

4. (268).

C eccan o

31

Avec le Christ dès ici-bas par la foi, en attendant la gloire

F. La Glose ainsi complétée a une bien autre valeur (269). 6) S u r l ’ é t o l e , Apoc. 7, 9 et 22, 14, voir plus haut, 191-192, et plus loin [texte perdu]; et noter que saint Grégoire ne parle pas de la première étole quand il s’agit de la béatitude consommée (270).

7) S ur

les mots de la reine de

Sa b a , Rois, 10, 8, d’après

la Glose (271). A. Ces mots s’appliquent aux saints d’après la résurrection et c’est ainsi que Remy d’Auxerre les entend, lui qui dit ailleurs que c’est le Christ qui rend au jugement aux ouvriers leur salaire (272). B. Au surplus le texte peut s’entendre des âmes qui ont la vision du Christ (273). 8) S u r l a d é f in it io n d e B o è c e , qui est le meilleur fonde­ ment de l’opinion adverse, et sur la mauvaise interprétation du texte de l’Exode, 33, 19 (274).

IV.

Quinze autres textes objectés.

Matth. 5, 8; 5, 3; 4, 17; Jean 16, 16; Matth. 19, 29; Luc 12, 20; I Cor. 13, 12; II Tim. 4, 7-8; II Cor. 3, 18; 5, 10; 12, 2-4; Act. 7, 56; I Petri 1, 9; II Cor. 4, 17; I Petri 3, 18 (275-289).

Réponse générale: il s’agit presque toujours des personnes (290). 1) Ainsi de l a p r e m iè r e b é a t i t u d e , Matth. 5, 8 (291). De plus le « statim » ne s’y trouve pas ni la vision béatifique (292). 2) Ainsi de l a s e c o n d e , Matth. 5, 3 (293). De plus: «après la mort » ne dit pas vision; il y a plus d’un royaume des cieux, celui du Christ précède celui du Père, selon saint Augustin, et la béati­ tude d’avant la résurrection n’est pas celle d’après elle, selon saint Ambroise (294). 3) L ’ a p p r o c h e d u r o y a u m e , Matth. 4, 17, s’entend soit après la mort, soit au jugement, l’histoire du monde n’étant qu’un instant au regard de l’éternité (295).

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32

I n t r o d u c t io n

4) L e «

m o d ic u m »

de

s a in t

J e a n , 16,

16.

A. Les deux espaces sont d’après Augustin et la Glose, la vie pré­ sente et l’histoire du inonde, ce qui favorise l’opinion du pape (2 9 6 ). B. Le Christ parle aux personnes

( 2 9 7 ).

C. Augustin ne donne une autre interprétation que pour lui pré­ férer celle-ci (2 9 8 ). D. Le Christ lui-même, selon Augustin et la Glose, donne l’expli­ cation eschatologique ( 2 9 9 ). E. Lisons le texte de saint Jean ( 3 0 0 ) et celui d’Augustin ( 3 0 1 ). Concluons: la joie brève est celle d’avant la fin du monde; alors suit la joie parfaite ( 302 ) . 5) L e

c e n tu ple d a n s l a v ie é t e r n e l l e ,

Matth. 19, 20. Réponse:

A. Non avant la résurrection. B. Et promis aux personnes 6) L a

n u it

du

m a u v a is

( 3 0 3 ).

r ic h e

de

s a in t

L u c , 12, 20

( 3 0 4 ).

A. D ’après Athanase et les saints, il n’y a ni total châtiment ni totale récompense avant le jugement ( 3 0 5 ). B. Le sens littéral est autre. Lisons le texte

( 3 0 6 ).

7) L a v is io n m a in t e n a n t a u m ir o ir e t p a r é n ig m e , opposée par saint Paul à la vision face à face d’alors, I Cor. 13, 12 (3 0 7 ). A. Réponse sur le « tune ». Saint Paul parle de la vision qui éva­ cue toute autre vision. Jusqu’alors la vision reste spéculaire. Cela a été vu plus haut et sera repris plus bas, et le texte déjà allégué d’Augustin le dit assez ( 3 0 8 ). B. Lisons donc l’Apôtre une vision

(309):

Sa vision face à face s’oppose à

1. qui sera en partie évacuée. 2. d’enfant avant celle de l’homme. 3. spéculaire et énigmatique ( 3 1 0 ). C. On ne l’aura face à face qu’au jugement, disent tous les doc­ teurs, puisque tous admettent qu’elle ne sera parfaite qu’à la résurrection.

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A n n ib a l d e

33

C eccan o

Ainsi nos maîtres déterminant ou prêchant, ainsi le patriar­ che, l’auteur de Paris et celui d’Angleterre, et maître Durand lui-même, contre le seul saint Thomas, en trois ouvrages, et le général des Carmes, qui hésita ( 3 1 1 ). D. Non moins que saint Paul, saint Jean est formel, d’après l’ex­ plication d’Augustin ( 3 12 ). E. Ajoutez saint Paul, aux Colossiens 3, 4

( 3 1 3 ).

F. Ajoutez qu’il s’agit des personnes, comme le montrent divers arguments ( 3 1 4 - 316 ). 8) L e 7-8

bon

com bat

et

la

couronne

de

j u s t ic e ,

II Tim. 4,

( 3 1 7 ).

A. Regarde la personne

( 3 1 8 ).

B. Les expressions: chacune montre qu’il s’agit de la résurrec­ tion ( 3 1 9 ). C. La Glose, à propos du stade de la Ière aux Corinthiens, sup­ pose de même l’ultime couronnement ( 3 2 0 ). 9) L a

t r a n s f o r m a t io n

de

clarté

en

clarté,

II Cor. 3, 18

( 3 2 1 ).

A. Les mots vont dans l’autre sens

( 3 2 2 ).

B. Les trois interprétations de la Glose de même

( 3 2 3 ):

1. La première s’applique soit aux âmes dans l’autre vie avant le jugement, soit aux personnes dans la vie présente ( 3 2 4 ). 2 . La seconde s’applique aux personnes et à la vision des fils ( 3 2 5 ). 3. La troisième mène à la résurrection ( 3 2 6 ). C. Augustin applique le texte à la vision d’après la résurrection ( 3 2 7 ). D. La Glose dit l’image de Dieu renouvelée parfaitement. Cela suppose l’homme entier ( 3 2 8 ). Instance: Tendre vers le Christ image du Père n’est pas tendre à le voir selon son humanité ( 3 2 9 ). Réponse: Distinguons tendre principalement, et secondairement, quoi­ que en premier lieu pour l’exécution ( 3 3 0 ). E. Augustin sur les textes 7) et 9) dit expressément qu’il s’agit de la promesse qui s’accomplit à la résurrection (3 3 1 ).

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34

I n tr o d u c tio n

10) L a

c o m p a r u t io n a u t r ib u n a l d u

C h r is t , II Cor. 5, 10 { 332 ) .

A. Il s’agit des personnes d’après la Glose, confirmée par la Dé­ crétale ( 3 3 3 ). B. « Devant le tribunal » ne dit pas à quel moment, et peut se rap­ porter au dernier jour ( 3 3 4 ). C. Le sens des mots. 1. «T ou s» les hommes, donc jugement der­ nier. 2. « Nous », et non: nos âmes. 3. « Au tribunal »: jugement de tous. 4. « Chacun »: à la fin du mende. 5. « Les oeuvres du corps »: donc à la résurrection. 6. « Ce qu’il a oeuvré »: donc en âme et corps ( 3 3 5 ). D. Le contexte précédent, et la Glose de ce qui suit, imposent le jugement dernier ( 3 3 6 ).

11) L e

rapt

de

s a in t

P a u l , II Cor. 12, 2-4

( 3 37 ).

A. Le témoin est saint Paul et non l’âme de saint Paul, bien qu’il ne sache pas si c’était en corps ou âme ( 3 3 8 ). B. Supposez qu’il ait eu vision de Dieu. 1. Cela ne dit rien d’autrui

( 3 39 ).

2. Elle serait, selon beaucoup de docteurs, transitoire et im­ parfaite, et ne donnerait pas la dernière béatitude. Nos âmes, en cette hypothèse, ne l’auraient pas davantage ( 3 40 ). C. L ’hypothèse, d’après nombre d’auteurs, est à rejeter, parce que ne l’impose aucune des cinq expressions du récit ( 341 ). 1. «Troisième ciel»: variations des astronomes et des théolo­ giens, d’Augustin et de la Glose ( 342 ). 2. « Paradis » a trois sens: le lieu, la jouissance, les deux en­ semble. Saint Paul identifie troisième ciel et paradis, il parle donc du lieu ou du rapt lui-même. Nous nions en tout cas qu’il fut là vraiment « bienheureux » ( 3 4 3 ) . On peut confirmer soit par les di­ verses acceptions de paradis, soit parce que Lucifer aussi fut au paradis ( 344 ). 3. « Je ne sais si en chair... » exclut la vision divine, qui aug­ mente la connaissance de soi, et à quoi ne convient pas cette igno­ rance ( 345 ).

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A n n ib a i d e

C eccan o

35

4. L ’ouïe n’est pas vue. Objection·. L ’ouïe est la vue de l’esprit. Réponse: On concède, mais non la vue de l’essence du révélateur, car saint Jean aussi eut révélation de profondeurs; personne ne dit qu’il ait vu l’essence de Dieu (346-350). 5. On peut « se glorifier » sans avoir eu la vision face à face (351). D. Il ne faut pas se faire « une trop grande fête » de cette vision de Paul (352). 1. Lisez saint Thomas: il a trois correctifs (353). Ceux-ci man­ quent à la prétendue vision face à face, mais s’appliquent à la vi­ sion de l’ âme séparée: elle est transitoire et relative (354); au pa­ radis (355); non éternelle (356). 2. Concédez même à saint Augustin sa vision au « paradis des paradis », elle reste imparfaite et ne favorise pas votre théorie (357). 3. Saint Grégoire la rejette (358). Concluons donc du rapt de saint Paul qu’on peut être au para­ dis sans vision béatifique (359).

12) L a v is io n d e s a in t É t ie n n e , Act. 7, 56. On peut faire sur elle quatre hypothèses, qui toutes écartent votre opinion (360). 13) L e s a l u t m e t f in à l a f o i , I Petri 1, 9 (361). Distinguons: à la résurrection, et déjà en quelque façon à la mort (362). A. La Glose met l’accent sur l’heure du jugement (363). B. La foi ne finit pas entièrement à la mort, car, s’il est vraisem­ blable, selon Pierre Lombard et de nombreux auteurs anciens ou récents, qu’elle reste même après le jugement, sans être une vertu (364), il est plus vraisemblable encore qu’elle reste après la mort, non pas sur tous les mystères, comme celui du Christ homme-Dieu, qui est vu, mais sur celui de la Trinité, qui n’ap­ paraît pas encore (365), ou au moins comme habitus, ainsi que saint Thomas l’admet du rapt paulinien, ce qui suffit à défendre l’opinion du pape (366). 14) L e

p o id s

de la

g l o ir e ,

II Cor. 4, 17 (367).

A. D ’après le contexte, l’Apôtre a en vue la gloire d’après le ju­ gement (368).

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I n t r o d u c t io n

36

B. Il y a un illogisme à raisonner de ce poids de gloire après la mort au poids du moment même de la mort (369). C. A concéder ce moment, on concède pour l’âme, non pour la personne. 15) M o r ts q u a n t a u c o r p s , v iv if ié s p o u r l ’ e s p r it , ainsi la rédemption nous présente à Dieu, I Pétri 3, 18 [selon le texte de l’ Occident médiéval] (371). Réponse: L ’âme « ressuscitée » une première fois est portée à Dieu par les anges et le Christ vient la recevoir, sans qu’il suive qu’il y ait vision tout de suite (372). Instance: La Glose parle ici de la gloire éternelle opposée à la damna­ tion éternelle (373). Réponse: 1. Avec saint Ambroise, distinguons le degré de partici­ pation différent, avant et après la résurrection (374).

2. Ou acceptons le règne éternel, au sens où il est cer­ tain qu’il sera obtenu, en nous appuyant sur Augus­ tin: le présent étemel est mis pour le futur (375). 16) Une autorité supplémentaire: I l com pen ser

e s t a is é

à

D ie u

de

ré­

dès le jour de la mort, Sir. 11, 27-28 (376).

Quatre réponses: A. Distinguons en droit et en fait (377). B. Une récompense immense est concédée: sans la vision promise pour le jour du jugement (378). C. La récompense définitive est proportionnée, dit l’ Écriture, aux actions non pas de l’âme séparée, mais de la personne (379). D. Selon Augustin, le jour de la mort détermine la récompense qui se donne au dernier jour (380). Au bout de ces discussions, n’aura-t-on pas l’impression d’un fourré trop touffu? Le cardinal était-il si peu ordonnateur, ou de­ vait-il seulement accepter les termes choisis pour la dispute? Cer­ tainement celle-ci le guide soit par de premiers documents écrits, soit par des instances orales, qui ont pu s’y ajouter. La combinai-

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A n n ib a i d e

C eccan o

37

son de ces éléments explique son cheminement. Les sinuosités et les maladresses auraient dû disparaître lors d’une nouvelle rédac­ tion, mais on n’a qu’un premier exposé. Il faut s’en contenter. Un exemple pour finir fera saisir avec quelle prestesse le car­ dinal savait se débarrasser d’un objecteur. C’est le résumé qu’il fait de son sermon de la Saint-Étienne. Le martyr, disait l’adversaire, a vu le Christ et les cieux enti’ouverts (x). Bien, répond froide­ ment le prédicateur. Je puis vous expliquer cela de quatre façons différentes. Aucune n’est favorable à votre opinion. La première est la vision d’imagination d’un nuage lumineux où apparaisse le corps glorieux du Christ, la seconde la vision augustinienne de l’es­ prit ravi en Dieu, avec espèce sensible, la troisième la vision scotiste évidente, où une espèce intelligible fait office de moyen, sans intuition ni parfaite béatitude, la quatrième enfin serait l’intui­ tion immédiate, véritable anticipation de la vision, mais concédée par grâce privilégiée. Cela non plus n’est pas contre notre thèse, pas plus que pour le bon larron. L ’exemple montre qu’Annibai se prend au jeu et sait pousser hardiment sa pointe. Qu’on lise au surplus la quatrième partie en­ tière, nos 275 à 375, on admettra que tout y est bien raisonné. Ce noble romain mué à Paris en maître en théologie ne manque pas de métier. Il sait parfaitement aussi le latin scolastique de son temps. C’est pourquoi nous avons tenu à respecter presque toujours même l’orthographe de son scribe qui, Italien comme lui, mais moins sa­ vant, était manifestement aussi un intellectuel.

f1) « Cum autem esset plenus Spiritu Sancto, intendens in caelum, vidit gloriam Dei, et Iesum stantem a dextris Dei. Et ait: Ecce video caelos apertos et filium hominis stantem a dextris D ei» (Act. 7, 55-56). Le texte a « virtutis Dei » selon la recension médiévale. Voir la réponse plus loin, n° 360.

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IV A n n ib a l

de

Ce c c a n o

et

Jean X X I I

Le cardinal, se demandera-t-on maintenant, a-t-il été l’inspi­ rateur du pape? Deux considérations paraissent s’y opposer. L’an­ cien membre de la Sorbonne devait avoir connu une autre doc­ trine. Il devait l’avoir lui-même enseignée. Sa théologie parisienne ne lui aurait guère permis de souffler quelque chose au pontife. Jean X X I I , d’autre part, était-il homme à puiser ses opinions chez un conseiller? Il ne semble pas. Annibal au contraire reprend toute la thèse et tous les argu­ ments des sermons du pape. Il complète l’opinion par sa connais­ sance personnelle de l’ Écriture et par sa lecture des anciens au­ teurs ecclésiastiques. Il essaie de lui donner une teinte orthodoxe et scolastique en puisant chez des Franciscains. On a encore le ser­ mon de Gautier de Chatton qui permet de l’affirmer (x). S’il a pris parti avec quelque assurance, au fond Ceccano est hésitant. Il est provisoirement pour le pape. Sa dernière conclu­ sion était: Pourquoi pas cette hypothèse? L’ Écriture la permet. Un revirement dut se produire au cours de l’année 1334. Les étapes nous en échappent, bien qu’on sache l’importance de l’in­ tervention de ses anciens confrères, les théologiens de Paris. On lira aussi le traité suivant que nous croyons dirigé contre lui. Il est essentiel de noter que ce revirement s’acheva avant la mort du pape. Annibal préside alors, dans son palais d’Avignon (2), une commission qui fixe les termes d’une prise de position bien nou­ velle. Elle fournit à la rétractation du pape mourant ses expres­ sions essentielles. Elle prélude ainsi à la définition que Benoît X II finira par imposer. Le cardinal, même avant ce dernier événement,

(!) Voir le texte édité dans Les Frères Mineurs..., pp. 134-148. (2) On peut voir une étude sur Les palais cardinalices d’Avignon, dans M é­ langes de l’École française de Rome. Moyen âge. Temps modernes, 83, 1971, pp. 389-438; on y trouve une vue du palais de Ceccano se dressant à peu de distance de celui des papes.

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A n n ib a i d e

C eccan o

39

avait fait se rétracter un de ses chapelains, devenu l’abbé de Casamari (x). Les rares auteurs qui se sont penchés sur le ms. 4007 n’ont pas caché leur enthousiasme. Rinaldi, qui n’était pas prodigue de tels éloges envers un adversaire de l’orthodoxie, a noté que le docte auteur intervenait avec intelligence (2). Denifle voulait y revenir dans le travail qu’il préparait (3). Le Père H.-M. Laurent annonça dans la Revue thomiste de 1930 (4) la publication qu’il allait en pro­ curer. La regrettée Anneliese Maier le trouvait assez intéressant pour le vouloir comprendre dans le Corpus, auquel elle voulait at­ tacher son nom, sur la Vision béatifique au temps de Jean X X I I . C’est à sa demande que nous en avons préparé l’édition. Si le cardinal, malgré ses bénéfices, se révèle ainsi théologien travailleur et digne d’attention, on trouvait en cette même année à la curie d’Avignon d’autres personnages non moins compétents que lui. Les fragments conservés d'Annibal de Ceccanò nous ont fait un peu l’impression d’être travaillés au microscope, mais le texte que nous avons maintenant à étudier remet le problème de Jean X X I I au centre d’un vaste panorama: il nous présentera une fresque théologique.

(J) Qu’on nous permette de renvoyer, sur Barthélemy, à notre article du Gregorianum, 50, 1969, pp. 375-378 (on y corrigera une faute d’impression, p. 377, lire: en matière de foi, et non: en matière de la foi). Nous avons pu montrer de­ puis lors, grâce au ms. 50 de Pelplin, — indiqué au Repertorium de S c h n e y e r , — que dans son abbaye, sous Benoît X II, le cistercien avait prêché en bon père spirituel, et très orthodoxe (Les sermons de Jean X X I I , p. 65, note 6). (2) « Constat certe Durandi scripta acerrime discussa fuisse a theologis qui in pontificia curia versabantur, ex quibus unus praestans scientia»... (An­ nales ecclesiastici B a r o n i i continuatio O d e r i c i R a y n a l d i , ad a. 1333, n° 58). (3) Chartularium..., p. 415 (la cote 4006 doit se lire 4007; les tomes 6 et 7 — et dernier — de l’Archiv parurent en 1892 et 1893, sans contenir l’étude annoncée). (4) H.M. L a u r e n t , Armand de Belvézer..., d a n s Revue thomiste, 35, 1930, p. 430, n . 5.

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Le ‘ De visione beata ’ anonyme

I Le

manuscrit

Un autre manuscrit mutilé est venu d’Avignon à la Biblio­ thèque nationale de Paris. Il porte la cote lat. 3170 et le catalo­ gue l’attribue, avec un point d’interrogation plein de sagesse, au cardinal Pierre de Chappes l1). Celui-ci, évêque de Chartres et an­ cien chancelier de Philippe V, eut la pourpre en 1327 en même temps qu’Annibai de Ceccano. Il fut cardinal-prêtre de Saint-Martin-auxMonts jusqu’à sa mort le 24 mars 1336. Il habitait Avignon, non loin de Ceccano et près des Franciscains (a). Il est connu pour sa compétence en droit et pour sa richesse en bénéfices. Son nom a été inscrit, probablement par lui-même, au coin supérieur droit de la première page du manuscrit. Le nom est « Petri de Capis » (3). Il a été effacé, assez mal, sans doute par Baluze qui acquit le codex au X V I I e siècle et qui avait la malheureuse coutume d’enlever, dans ses manuscrits, les traces laissées par d’autres possesseurs. Il s’agit bien ici d’un possesseur, car le nom était mis d’une écri­ ture personnelle, et à une place où ne se mettait guère un nom d’au­ teur. Il suit le titre qui est à quelque distance et d’une autre main: « Tractatus de visione beata ». Nous verrons plus loin que, selon toute probabilité, l’auteur de cet ouvrage n’est pas cardinal. Le manuscrit est sur papier. Il mesure 290 sur 220 mm. et compte aujourd’hui 164 feuillets. Us forment en majorité des qua­ ternions avec réclames. Font exception un ternion ajouté en tête

(!) Catalogue général des manuscrits latins (de la Bibliothèque nationale), t. 4, Paris, 1958, pp. 277-278. (a) Les palais... (article cité p. 38), p. 410. (s) Il y eut deux frères et deux neveux, nommés tous quatre Pierre de Chap­ pes. Le frère du cardinal était évêque de Soissons et mourut en 1349. Rien n’in­ dique qu’il résidât en Avignon, tandis que le « cardinal de Chartres » y instrui­ sit des procès d’inquisition et fut sans doute aux sermons du pape. Il assista au moins, le 3 décembre 1334, à la rétractation de Jean X X II.

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et un quinion aux ff. 127-136. Un binion, ff. 137-140, devait rem­ placer un passage omis après le f. 77. Ces cahiers laissent quatre lacunes dont nous allons reparler. Elles viennent après les ff. 6, 136, 140 et 164. Les filigranes à l’arbalète et aux deux cercles traversés d’une croix (celui-ci se remarque seulement aux trois premières feuil­ les), se retrouvent à peu près identiques, mais non exactement, ni avec même vergeure et mêmes pontuseaux, dans Mosin et Traljic, aux nos 2021 à 2034, pour 1326 à 1350. L ’arbalète se retrouve exacte­ ment au ms. Paris, Bibliothèque nationale, lat. 3291, ff. 69-78, avec un texte bien avignonnais et écrit en 1333. L ’écriture est cursive et d’une seule main qui use d’un mo­ dule tantôt plus grand et tantôt plus petit. Il n’y a aucune anno­ tation notable d’une autre main, ni aucun travail de correcteur. On a laissé la copie pleine de fautes (1). Cette copie, pour des raisons générales: on cessa de s’intéres­ ser à la question une fois faite la définition de Benoît X II, et de par son état d’inachèvement, ne saurait être placée longtemps après les disputes tenues en Avignon sous Jean X X I I . Des manchettes reprennent régulièrement les titres. Ainsi la première annonce la division d’ensemble: « Ordo et recitatio in generali... » Le traité débute en effet par une table des matières qui remplit les six premiers feuillets. Elle est pour nous précieuse, car elle nous donne une idée des parties manquantes. Ce sont la première, dont il n’y a plus que les deux dernières pages; la cinquième, divisée en « Fondements », dont il manque la fin du fondement 3, les fondements 4 à 12, et une partie d’un appendice au fondement 11; la sixième et dernière enfin, qui reste inachevée après 25 pages. On notera donc ces lacunes matérielles de la façon suivante: Ff. 1-6V : Aperçu général des six parties. Lacune F. 7V : Ff. 7-77; 137-140 (2); 77-114: Ff. 114-118:(*)

Ie Partie, fin. I I e Partie. IIIe Partie.

(*) L ’apparat textuel devra en rendre compte. (2) Ce binion a été inséré en reliure, sans doute dès le X IV e siècle, à la place de la lacune qui se remarquait au bas du f. 136v (Hic deficit, en écriture gothi­ que). L’édition remettra le texte à sa place véritable.

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IV e Partie. V e Partie, début.

Ff. 118v-125: Ff. 125-135v: Lacune

Ve

F. 141v :

Partie, appendice.

Lacune V Ie Partie, début.

Ff. 142-164: Lacune

Π A nalyse

sommaire

Nous allons reprendre le contenu du Traité autant que le per­ met ce tableau. L ’aperçu général a été ajouté à l’ouvrage achevé ou plutôt en cours d’achèvement. Le reste est la mise au net d’un premier jet, ou peut-être d’une première dictée. On le voit notamment par les références laissées en blanc. Les textes scripturaires invoqués partout sont énumérés de 1 à 107 aux ff. 26-102. Dans les feuillets précédents et même suivants, sauf dans la cinquième partie, ils sont cités le plus souvent sans leurs numéros d’ordre. Celui-ci est laissé en blanc. C’est que l’auteur compose et cite de mémoire et que les textes n’ont pas encore reçu leur numéro de référence. De même les douze « Fondements » de la cinquième partie sont en blanc, sans être numérotés, dans toute la seconde. On a donc là une première rédaction. Cette constatation est confirmée par le défaut d’élaboration de l ’ensemble. Les répétitions continuelles sont maintenues. Sans doute l’auteur sacrifiait-il à l’adage pédagogique: « repetitio mater studiorum ». Sans doute aime-t-il à regrouper sur chaque argu­ ment toutes les raisons et tous les textes déjà énumérés, mais son art de composer est à mettre en question. Il ne se soucie pas assez des grandes lignes. Sa construction ploie sous les détails sans cesse rappelés. Ces reproches doivent précéder la tentative d’analyse à laquelle nous allons nous livrer et justifier le parti que nous avons pris dans l’édition de ne pas répéter deux fois le même texte, quitte à remplacer beaucoup de longueurs par des points de suspension. Le traité se divisait en deux: trois parties avant et deux après le Libellus fartis negativae. La quatrième partie en effet ne faisait guère que citer le Libellus. Ce « livre du parti négateur » est, comme

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nous avons pu l’établir ailleurs, le traité opposé par le pape luimême à ses adversaires. Nous en avons édité les fragments au com­ plet et le texte ne devra pas être repris ici (1). Ce Traité était ici en somme seulement analysé et cité. Nous devons reprendre au contraire la marche générale suivie autour du Libellus ainsi résumé. Elle va du plus universel au plus particulier. Les trois premières parties posent les principes géné­ raux et les appliquent à la controverse de Jean X X I I . Elles sont consacrées à la question soit en elle-même, soit en rencontrant ses té­ moins privilégiés, saint Augustin et saint Bernard. Les deux der­ nières réfutent l’argumentation du pape. Essayant ici de résumer l’ensemble, nous suivrons les six par­ ties, sans nous interdire quelques appréciations au passage.

I La première partie exposait la position du croyant. Où trouve-t-il sa foi garantie par l’ Église infaillible? Cette foi lui est apportée par sept voies principales:

1. Les articles du Symbole. Du rôle qu’ont eu les Apôtres. 2. La détermination de l’ Église universelle, en son enseigne­ ment ou en sa pratique, en particulier par les sacrements. 3. L ’ Écriture. Son autorité infaillible attestée par les con­ ciles généraux. Le canon scripturaire. 4. L’interprétation des Pères; qu’elle fait foi et qu’on ne peut admettre de nouvelles gloses. 5. L ’exégèse littérale, et que contre le sens des Pères elle a mené beaucoup d’hérétiques à leurs erreurs. On donnera treize exemples, dont sept concernent déjà la béatitude des âmes avant le jour du jugement (2).

6. La liturgie de l’ Église universelle. Quatre conciles géné­ raux enseignent qu’elle fait preuve.

(!) Le texte est édité, Fragments..., pp. 238-250; l’attribution à Jean X X II est proposée avec les nuances voulues, pp. 232-238. (2) On peut se faire une idée de ces sept exemples par un passage conservé qui les reprend en partie et qu’on pourra lire plus loin, pp. 355-357.

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7. Le sentiment commun des docteurs de l’ Église ou de l’un d’entre eux, là où l’ Église l’approuve. Ce traité du magistère est malheureusement perdu (*). On no­ tera la place faite à la liturgie, et d’autre part la défiance à l’égard de l’exégèse littérale, rendue responsable des erreurs en général et de celles sur la béatitude en particulier. C’est sans doute que dans le présent cas on jugeait que cette exégèse allait aboutir à une opi­ nion apparentée à plusieurs hérésies.

II La seconde partie est la condamnation de l’opinion. Elle ap­ plique les règles données, mais ce réquisitoire n’est qu’en voie de composition. Nous nous interdirons d’y mettre un ordre nouveau. Aucun catholique ne peut dire que les âmes saintes ne voient pas là-haut dès maintenant Dieu par essence... On le montrera en neuf chapitres ou par neuf raisons. Première raison. On va traiter de l’enseignement canonique et liturgique de l’ Église, mais on fait précéder l’objection qu’il faut attendre du parti opposé. Remarquons ici l’importance capitale de cette objection. Logiquement elle devait venir en tête du traité. En effet le parti adverse voudrait faire entendre une distinction entre la vision divine ou face à face et la présence du Christ vu dans son humanité. La première ne vient qu’à la résurrection, l’autre est la béatitude des âmes séparées. La position nouvelle se dis­ tingue ainsi de toute erreur déjà condamnée (2). L ’auteur avertit qu’il tiendra grand compte de cette objection. Il ne s’est pas décidé pour autant à ne pas parler du reste. Son ouvrage entier porte contre Jean X X I I comme un dernier repré­ sentant d’une vieille hérésie sur la béatitude. Il brouille les plans.

(!) Le seul fragment subsistant sera édité à la suite du septième point. C’est un digne exemple de l’érudition de l’auteur. Il cite les conciles d’ Éphèse et de Nicée, le décret gélasien, et un concile oecuménique de Constantinople. Les textes se retrouvent en partie dans les Fausses décrétales, ce dont on aurait tort de s’étonner. Ils sont cités assez librement et pour autant qu’ils viennent à point. Les auteurs relevés dans ces vieux textes sont surtout ceux que le traité citera. (2) Voir ci-dessus, l’opinioh du cardinal de Ceccano, p. 14.

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Sa préoccupation essentielle est de ne pas trop séparer les divers adversaires. Nous dirons que c’est son faible mais l’auteur pense que c’est son habileté. Il veut avoir raison d’une erreur protéiforme. Il montre par là tout le venin de l’opinion adverse. Il ne traite ce­ pendant pas le pape d’hérétique, il dit seulement que son opinion, qui voisine avec d’autres déjà réprouvées, est sur la voie de l’hé­ résie. Il la fait baigner dans un passé suspect (Préliminaires). On devine que ce procédé devait échauffer les esprits et non faciliter leur retour à une pensée plus orthodoxe. Celle-ci apparaît d’autre part comme en possession d’une tradition séculaire. Ce de­ vait être sa force aux yeux de ses partisans qui, pas plus que l’apo­ logiste que nous résumons, ne s’embarrassaient de chronologie. Il est fait recours d’abord au droit canonique sous la forme de trois conciles, celui d’ Éphèse, celui de Nicée «tel qu’on le con­ naît par saint Jérôme », et le « premier concile de Carthage ». Le concile d’ Ëphèse doit faire réfléchir au danger du nestoria­ nisme. L ’opinion divise le Christ. On attendrait ici un développement théologique. La christolo­ gie, semble penser l’auteur, interdit la conception dualiste d’une vision divine où le Christ n’apparaît qu’en tant qu’homme. mais sur cet argument, peut-être essentiel, son texte conservé n’insiste nulle part (Première conclusion). Le concile de Nicée évoque le spectre d’Arius. La Trinité ne peut être touchée dans son règne inaliénable. On écoutera ici saint Jérôme. L ’auteur commence par ce texte apocryphe: l’héritage du royaume des cieux sera possédé sans nulle ambiguïté. Qu’on ne dise pas que Jérôme a distingué la vision finale de la béatitude actuelle, le contexte s’y oppose, et d’autres textes de Jérôme — on en cite cinq, authentiques cette fois, mais dont les preuves ne por­ tent pas aussi loin qu’on voudrait: les richesses de sainte Paule, la conversation avec Jésus promise au diacre Praesidius, la parité du jour de la mort avec celui du jugement, les martyrs illuminés par l’Agneau, l’erreur dite de Victorin de Pettau, que Jérôme est dit rejeter comme il rejette celle des millénaristes. Et si l’on vou­ lait une confirmation, on la trouverait dans la lettre de saint Augus­ tin sur la mort de Jérôme, faux hagiographique daté de vers 1300, qui apparaît ici pour la première fois, paraît-il, dans la littérature ecclésiastique, et qui complète en effet grandement les textes pré­ cédents (Deuxième conclusion).

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Tout cela étant cité, comme nous le supposons, de bonne foi, il y a lieu de porter sur le compilateur polémiste un jugement bien modéré. Notre auteur a beaucoup et bien lu Jérôme, et beaucoup d’autres que nous le verrons citer. Il n’a pas notion des questions d’authenticité. Il ne commence pas par rassembler les textes selon leur objet exact ni ne leur applique une méthode précise. Ses auto­ rités sont mélangées et non classées. Chacune reçoit l’appui des autres. Ainsi passe-t-on de l’implicite à l’explicite, non plus, comme cela se fit au cours des siècles, en vertu de la plénitude du donné révélé, mais dans des rapprochements faciles. Jérôme est un exemple. Nous ne répéterons pas ces remarques pour chaque auteur. Le concile de Carthage en 349 a défendu toute profanation autour des martyrs. N ’est-ce pas rabaisser le martyr que de l’ex­ clure de la vision véritable? (Troisième conclusion). Mais ceci nous amène à l’argument liturgique. Les textes tirés des « confessions de foi publiques » de l’ Église sont copieux. L ’auteur ouvre son bréviaire et déverse les synonymes de la vision céleste. Il y en a 28 pris au hasard. Que l’adversaire ne l’ar­ rête pas en disant les textes imprécis et pouvant s’expliquer de la seule humanité du Christ. Ce serait là renoncer au sens des mots, premier principe d’une bonne discussion selon Aristote, renier le propre vocabulaire de votre opuscule de défense, vous exposer à des objections scripturaires, et ne pas accepter, au surplus, d’au­ tres textes que nous ajouterons maintenant. Nous les prenons dans le Pontifical de la Curie, dans la prose de Toussaint, dans les offi­ ces des saints franciscains — peut-être ces choix n’allaient-ils pas sans allusion, visant par exemple des Frères Mineurs partisans du pape. Les derniers textes parlent, explicitement cette fois, de la vi­ sion face à face. Ils s’étendent, il est vrai, sur les derniers siècles de la tradition, des environs de l’an mille au X I I I e siècle, mais cette question chronologique, si importante pour nous, n’est pas consi­ dérée par notre auteur. Le témoignage liturgique est à ses yeux d’une pièce (Quatrième conclusion). De même l’enseignement des papes, car l’ Écriture sainte, briè­ vement rappelée d’abord (cinquième conclusion), fera l’objet d’une partie spéciale (voir p. 213, septième raison). Comme lettres des pontifes romains, on peut citer des décrétales traditionnelles. On en rappelle, sans hésiter, une du second siècle, puis on passe à cel­ les d’innocent III au X I I I e. Celles-ci sont analysées pour prouver

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