Les constructions verbales en français parlé: Étude quantitative et descriptive de la syntaxe des 250 verbes les plus fréquents [Reprint 2014 ed.] 9783111356433, 9783484302433

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French Pages 273 [276] Year 1990

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Table of contents :
Ρréface
Table des matières
Introduction
Chapitre 1. Matériaux analysés
Chapitre 2.Le domaine du verbe
Chapitre 3. Principes d'analyse
Chapitre 4. Les constructions verbales dans la langue parlée
Chapitre 5. La construction im personnelle
Cοnclusion
Références bibliographiques
Appendice A
Appendice B
Appendice C. Questionnaires utilisés dans l'Etude sociolinguistique sur Orléans
Lexique
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Les constructions verbales en français parlé: Étude quantitative et descriptive de la syntaxe des 250 verbes les plus fréquents [Reprint 2014 ed.]
 9783111356433, 9783484302433

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Linguistische Arbeiten

243

Herausgegeben von Hans Altmann, Peter Blumenthal, Herbert E. Breide, Hans Jürgen Heringer, Heinz Vater und Otmar Werner

Tine Greidanus

Les constructions verbales en français parlé Etude quantitative et descriptive de la syntaxe des 250 verbes les plus fréquents

Max Niemeyer Verlag Tübingen 1990

CIP-Titelaufnahme der D e u t s c h e n Bibliothek Greidanus, Tine : Les constructions verbales en français parlé : E t u d e quantitative et descriptive de la syntaxe des 250 verbes les plus f r é q u e n t s / Tine G r e i d a n u s . Tübingen : Niemeyer, 1990. (Linguistische A r b e i t e n ; 243) NE: G T ISBN 3-484-30243-7

ISSN 0344-6727

© Max N i e m e y e r Verlag G m b H & Co. K G , Tübingen 1990 Das Werk einschließlich aller seiner Teile ist urheberrechtlich geschützt. J e d e Verw e r t u n g a u ß e r h a l b d e r engen G r e n z e n d e s U r h e b e r r e c h t g e s e t z e s ist o h n e Z u s t i m m u n g des Verlages unzulässig und strafbar. D a s gilt insbesondere f ü r Vervielfältig u n g e n , Ü b e r s e t z u n g e n , Mikroverfilmungen und die E i n s p e i c h e r u n g und Verarbeitung in elektronischen Systemen. Printed in Germany. Satz: Lichtsatz Walter, T ü b i n g e n - L u s t n a u . D r u c k : Allgäuer Zeitungs-Verlag, K e m p t e n . E i n b a n d : Heinrich Koch, Tübingen.

Ρ r é fa c e N o u s voudrions exprimer ici notre reconnaissance à toutes les personnes sans qui nous n'aurions pu réaliser les recherches rapportées dans cet ouvrage. Le professeur Bernard Al a bien voulu diriger notre recherche. C'est lui qui, connaissant notre goût pour un travail ayant une dimension appliquée, nous en a suggéré le sujet. Les discussions que nous avons eues avec lui nous ont souvent ouvert de nouvelles perspectives. Il a lu avec soin les chapitres que nous lui avons soumis et a contribué, par ses réflexions constructives, à en améliorer le contenu et la rédaction. Qu'il soit assuré de notre gratitude. Le professeur Claire Blanche-Benveniste a accepté dans un stade déjà plus avancé des recherches d'être co-directeur de thèse. Ses suggestions, ses remarques et ses encouragements nous ont été très précieux. Ce travail doit beaucoup à l'apport de plusieurs informaticiens. S a n s O n n o Huber cet ouvrage ne serait pas ce qu'il est devenu, tant sur le plan du contenu que sur celui de la forme. Il a créé les nombreux programmes nécessaires pour informatiser les données. C'est lui qui nous a initiée aux secrets, parfois impénétrables, du programme de traitement de texte Ö T f j X et a fait les adaptations nécessaires à nos besoins particuliers. Qu'il en soit remercié de tout coeur! N o s remerciements vont également à Arie Dirk Schenkeveld, qui nous a assistée au début de l'entreprise, et à Paul Janssen, qui a aidé à éditer le lexique. Deux chapitres de cet ouvrage ont une composante statistique. N o u s remercions Sophie de Schaepdrijver et Kees Mandemakers, qui nous ont conseillée dans le choix des tests statistiques utilisés dans le premier chapitre et qui ont exécuté les analyses. Harald Baayen a bien voulu appliquer à nos données un modèle statistique développé par lui. Nous lui devons la figure 4.2. Jacqueline van Baardewijk-Rességuier nous a beaucoup obligée en acceptant de relire le manuscrit complet. Elle a ainsi contribué à améliorer le texte. N o u s l'en remercions vivement. Q u e soit enfin remerciée la Faculté des Lettres de l'Université Libre d'Amsterdam, qui, en nous accordant un congé d'études, nous a permis de mener à bien cette recherche. N o u s dédions ce livre à la mémoire de nos parents.

ν

Table

des

matières

Introduction 1

Matériaux analysés 1.1

1.2

Verbes 1.1.1 1.1.2 1.1.3 1.1.4

étudiés Introduction Nombre de verbes à étudier Quels verbes? Listes de fréquence utilisées. Procédures de sélection appliquées . . 1.1.4.1 Le Dictionnaire des fréquences 1.1.4.2 Le Frequency Dictionary of French Words 1.1.4.3 Le Vocabulaire du roman français 1962-1968 1.1.4.4 L'Enquête statistique sur la langue parlée 1.1.4.5 L'Etude sociolinguistique sur Orléans 1.1.4.6 Principales caractéristiques des cinq corpus 1.1.5 Remarques sur les cinq listes de verbes. Sélection des verbes retenus pour notre recherche Le corpus d'Orléans

2 Le domaine du verbe 2.1 2.2

2.3

2.4

Introduction Les trois types de compléments 2.2.1 Les arguments du verbe 2.2.2 Les compléments du syntagme verbal 2.2.3 Les compléments de phrase Comment identifier les trois types de compléments? 2.3.1 Eléments régis par le verbe et éléments non régis 2.3.2 Arguments et compléments du syntagme verbal Compléments retenus dans notre recherche

3 Principes d'analyse 3.1 3.2

Principes généraux Les constituants arguments du verbe 3.2.1 Le syntagme nominal

1 7 7 7 7 10 11 11 12 12 12 13 13 13 20

23 23 24 24 24 25 26 26 27 29

31 31 33 33

vii

3.2.2

Le s y n t a g m e prépositionnel

35

3.2.3

Le p r o n o m

36

Le p r o n o m i n t e r r o g a t i f

3.2.3.3

Le p r o n o m clitique 'se'

36 •

36 37

La s u b o r d o n n é e

38

3.2.5

La phrase

39

3.2.6

L'infinitif

39

3.2.7

L'adjectif

40

3.2.8

L'adverbe

42

3.3

Les o p é r a t e u r s métadiscursifs

42

3.4

Les c o m p l é m e n t s du s y n t a g m e verbal

43

3.5

A u t r e s décisions c o n c e r n a n t le d é p o u i l l e m e n t du corpus

43

Les phrases à construction passive, à construction impersonnelle et à construction p r o n o m i n a l e à valeur passive

43

3.5.2

Place o c c u p é e par d e u x é l é m e n t s solidaires

44

3.5.3

Coordination et juxtaposition

45

3.5.4

La phrase n é g a t i v e et la phrase i n t e r r o g a t i v e

46

3.5.5

L ' o r d r e des c o n s t i t u a n t s

47

3.5.6

T e m p s et m o d e

47

3.5.7

C o n s t r u c t i o n s caractéristiques de la langue parlée

3.6

Q u e l q u e s r e m a r q u e s c o n c e r n a n t la réalisation p r a t i q u e du d é p o u i l l e m e n t

3.7

Le lexique

47 . .

49 50

Les c o n s t r u c t i o n s v e r b a l e s d a n s la l a n g u e parlée

53

4.1

Introduction

53

4.2

C o n s t r u c t i o n s verbales relevées dans le corpus d ' O r l é a n s

54

C o n s t r u c t i o n active et constructions dérivées

67

4.3.1

Introduction

67

4.3

4.3.2

viii

Le p r o n o m personnel

3.2.3.2 3.2.4

3.5.1

4

3.2.3.1

La construction active

67

4.3.2.1

R e m a r q u e s générales

67

4.3.2.2

La place à g a u c h e du v e r b e

69

4.3.2.3

La première place à droite du v e r b e

71

4.3.2.4

La seconde place à droite du v e r b e

73

4.3.3

La construction passive

75

4.3.4

La construction p r o n o m i n a l e à valeur passive

77

4.4

Constructions caractéristiques de la langue parlée

79

4.5

Les constructions f o n d a m e n t a l e s

80

4.6

Caractéristiques syntaxiques et s é m a n t i q u e s c o m m u n e s aux différents verbes

82

4.7

Conclusion

83

5

La construction impersonnelle

85

5.1

Introduction

85

5.2

il + V

86

5.3

il + V + séquence phrastique

86

5.4

5.3.1

Les verbes exclusivement impersonnels

86

5.3.2

Les verbes à construction impersonnelle

88

5.3.3

Les verbes auxiliaires

93

il + V + séquence nominale

95

5.4.1

Les verbes exclusivement impersonnels

95

5.4.2

Les verbes à construction impersonnelle

97

5.4.3

Caractéristiques sémantiques des verbes entrant dans la construction

5.4.4

Propriétés syntaxiques et sémantiques du constituant nominal

'il V séquence nominale'

97 ...

99

5.5

Raisons d'être de la construction impersonnelle

101

5.6

Conclusion

106

Conclusion

109

Références bibliographiques

113

Appendice A

119

Appendice Β

129

Appendice C

139

Lexique

149

IX

Introduction "Le verbe est l'âme d'une langue. C'est, comme on l'a fort bien dit, le mot par excellence" , 1 "le verbe est un P I V O T : c'est sur lui que s'appuient sujets et objets pour fixer leurs rapports réciproques; le verbe les met en rapport',2 "régissant de toute la phrase verbale", 3 "élément indispensable à la constitution d'un énoncé assertif fini", 4 "élément générateur de la phrase", 5 "porteur privilégié d'indices qui affectent le sens de la phrase entière",6 voilà quelques affirmations soulignant la place centrale du verbe à l'intérieur de la phrase. C'est un point sur lequel toutes les théories grammaticales s'accordent, explicitement ou implicitement. Des recherches en psycho-linguistique ont démontré l'importance du verbe pour la compréhension de la phrase.7 Qu'un mot ayant une fonction aussi importante ait donné lieu à une littérature abondante n'a rien de surprenant. Nombreuses sont les études consacrées au rôle du verbe en général ou à la description de catégories de verbes ou de constructions en particulier. Il y a d'autre part des dictionnaires de verbes. Il s'agit dans pratiquement tous les cas8 d'études qui décrivent les propriétés syntaxiques et lexicales théoriques de verbes. Nous sommes assez bien au courant des propriétés théoriques de (catégories de) verbes, mais assez mal des propriétés réalisées dans l'usage concret. Une meilleure connaissance des constructions syntaxiques observées aurait un intérêt certain, aussi bien en linguistique descriptive qu'en linguistique appliquée. En linguistique descriptive, la méthode généralement adoptée pour décrire un phénomène est celle de l'introspection. Quand il s'agit de savoir si un énoncé donné est acceptable ou non, le linguiste se basera sur sa propre intuition et éventuellement sur celle d'autres

1

Duhamel (1934:43).

2

Grammaire

3

Tesnière ( 1 9 5 9 ; 1 9 7 6 : 1 0 3 ) .

4

Benveniste (1950:22).

5

von Wartburg & Zumthor (1947;1958:181).

6

Fourquet (1950:78).

7

Voir par exemple Fodor, Garrett & Bever (1968), Fodor (1971), Schank (1972), Moore & Biederman (1979).

8

Nous ne connaissons, pour le français, que deux ouvrages basés entièrement ou en partie sur l'étude d'un corpus: Corbeil (1971) et R o y (1976).

Larousse

(1964;1969:75)

1

informateurs, le plus souvent d'autres linguistes.

Une telle procédure peut être critiquée

d ' u n point de vue méthodologique. 9 D ' a p r è s A l ( 1 9 7 5 : 1 1 - 1 9 ) , le linguiste qui veut obtenir des jugements d'acceptabilité fiables devrait: 1. se servir d ' u n g r a n d nombre d'informateurs, 2. contrôler les conditions dans lesquelles l'épreuve d'acceptabilité a lieu, et 3. choisir la méthode adéquate pour obtenir le jugement d'acceptabilité. O r , il est extrêmement rare que ces conditions soient remplies.

Ce qui a sans aucun

doute contribué à la popularité de la méthode de l'introspection est sa facilité d'emploi apparente.

L'utilisation d ' u n corpus par contre est laborieuse, surtout celle d ' u n corpus

non enrichi d'informations linguistiques. Gross ( 1 9 7 9 ) critique vivement la grammaire générative-transformationnelle pour "the anecdotal character of data in G G " . Il donne plusieurs exemples de règles transformationnelles qui reposent sur des données dont ses recherches personnelles ont montré qu'elles constituent une exception.

Gross est d'avis que, dans l'état actuel des connaissances,

l'ensemble des données linguistiques est trop réduit pour permettre la découverte des principes généraux abstraits qui sont à la base de toutes les langues humaines: It is virtually an absolute rule in all natural sciences that accumulation of consistent data precedes theoretical advances.

A c c u m u l a t i n g and classifying

facts, and constructing a global image of the language under study, is the major experimental process, all the more in that syntactic problems have never been approached in this way. (p. 5 6 8 ) L ' i m p o r t a n c e des questions théoriques s'efface devant "la nécessité d'accumuler des données empiriques aussi complètes et détaillées que possible" ( G r o s s 1975:45). Gross et ses collaborateurs du Laboratoire d ' A n a l y s e Documentaire et Linguistique visent à rassembler ces données en décrivant de façon systématique les propriétés syntaxiques de l'ensemble du lexique français. N o u s partageons le point de vue de Gross quant à l'importance des activités taxo n o m i q u e s pour la construction de modèles.

Et il ne fait aucun doute que les travaux

du L A D L constituent une contribution extrêmement importante à une meilleure connaissance de la langue française. M a i s les principes méthodologiques mis en oeuvre appellent aussi quelques remarques critiques: 1. Les jugements d'acceptabilité proviennent en général d ' u n e seule personne, le plus souvent le linguiste lui-même. Levelt ( 1 9 7 2 ) montre combien peu les linguistes sont d'accord entre eux quand il s ' a g i t de donner un jugement d'acceptabilité. O n devrait donc se méfier d ' u n jugement d'acceptabilité émis par une seule personne, qui plus est, un linguiste.

9

2

Voir par exemple Levelt (1972), Levelt (1973,111:13-19), Al (1975:11-19) et Gross (1979).

2. Les jugements portés sont binaires. Un énoncé est considéré comme grammatical ou comme agrammatical, les degrés intermédiaires n'existent pas. Le français étudié est un français standard.

Il est possible que des phrases inacceptables à ce niveau de

langue, mais acceptables à un autre niveau aient été considérées comme agrammaticales. 3. Les chercheurs donnent peu d'informations au sujet des tests utilisés.

Les tests

ne peuvent donc pas être reproduits. Cela va à l'encontre des "bonnes procédures scientifiques" exigées par Gross lui-même (1975:13). 4. L'acceptabilité a parfois été forcée pour des raisons théoriques. Ce procédé nous semble discutable d'un point de vue méthodologique: des données réunies dans le but de permettre la construction de modèles théoriques ne devraient pas être manipulées auparavant. L'utilisation d'un corpus pourra pallier en partie ces inconvénients: 1. Si le corpus a été composé avec soin, les énoncés proviennent d'un grand nombre d'informateurs, variant en âge, en sexe et en position sociale. 2. Les données concernant la fréquence d ' u n phénomène permettent de distinguer les cas nets et les cas douteux. O n pourrait se demander si une construction fréquemment réalisée ne devrait pas avoir un autre statut qu'une construction rarement ou même jamais attestée.

Il est vrai qu'un corpus ne contient pas d'énoncés impossibles,

argument souvent avancé contre l'utilisation d ' u n corpus. Un corpus par contre peut contenir des énoncés ne répondant pas à la norme, mais apparemment possibles, car réalisés. Or, nous savons depuis Frei ( 1 9 2 9 ) que les 'fautes' peuvent contribuer à expliquer les phénomènes qui sous-tendent le fonctionnement du langage. N o u s pensons que l'utilisation d'un corpus se justifie par le fait qu'il fournit des informations q u ' o n ne pourrait jamais ou difficilement obtenir par le biais d'autres procédés méthodologiques. Un corpus permet notamment de déterminer quels sont les phénomènes fréquents et quelles sont les exceptions. criptive d'une théorie grammaticale.

Il contribue ainsi à renforcer l'adéquation des-

Un corpus peut en plus permettre la découverte de

faits nouveaux. Pour ce qui est des constructions, Aarts et M e y s (1989:9) affirment que la variété des constructions réalisées dans un corpus se révèle toujours plus grande q u ' o n n'aurait tendance à penser sur la seule base d'ouvrages théoriques. Puis, un corpus constitue un ensemble de textes continus. Une linguistique qui se base sur un corpus de textes ne décrira pas uniquement la structure d'énoncés isolés, mais aussi celle d'énoncés dans leur contexte, ou celle de textes. Pour des exemples précis de ce dernier aspect nous renvoyons au chapitre 5. Une étude des constructions syntaxiques utilisées se justifie aussi en linguistique appliquée. O n pourrait penser à des applications en traduction automatique, ou à l'enseignement du français langue maternelle ou étrangère. De nombreuses publications allemandes ont souligné la pertinence de la valence du verbe pour l'enseignement. 1 0 Le verbe est pour

Voir par exemple pour l'enseignement du français Happ (1978) et Zöfgen (1982). 3

une large part responsable de la structure de base d'un énoncé. Son impact sur la phrase est donc plus grand que celui d'autres formes lexicales. Il mérite par conséquent une attention particulière dans l'enseignement. Un produit pratique de la recherche valencielle est le Französisches Verblexikon de Busse et Dubost (1983). Ce dictionnaire valenciel bilingue a pour objectif de décrire les constructions courantes d'environ 5 000 verbes français. Il s'agit plutôt d'un ouvrage de référence que d'un manuel. Sur le plan théorique il a certains défauts. 11 En France, les applications didactiques de recherches sur les constructions verbales sont plus rares. L'étude de Le Goffic et Combe McBride, qui se base sur les travaux du L A D L , est un exemple d'une application de recherches théoriques. Le livre présente un inventaire des constructions possibles à partir des mots (verbes, adjectifs et substantifs opérateurs) du Français Fondamental (1er degré). Les quelque 300 verbes du FF1 sont classés selon les constructions dans lesquelles ils peuvent entrer. Selon les calculs de Happ (1978:129), le nombre des constructions verbales s'élèverait à 35 environ. Il s'agit d'un inventaire de constructions potentielles. Dans leur 'Introduction', les auteurs exposent pourquoi ils n'ont pas compté les structures et ainsi tenu compte de leur fréquence. Les principales raisons concernent l'imprécision de la notion de structure et l'impossibilité de trouver un corpus représentatif du français en général. Nous sommes d'avis que ce sont là en effet des problèmes, mais que ces problèmes ne sont pas insurmontables. Le dépouillement d'un corpus pourrait d'autre part servir à éclaircir le problème de l'identité et des limites des éléments qui, combinés avec le verbe, forment une unité structurale. Nous avons choisi de travailler sur un corpus oral. 12 Et ce, pour plusieurs raisons. La première est que la langue parlée reflète peut-être mieux les principes fondamentaux du langage que la langue écrite, plus travaillée. Puis, la langue écrite a été mieux étudiée que la langue parlée. 13 Il est donc plus utile de prendre celle-ci pour objet d'analyse. La troisième raison est d'ordre plus pratique. Il n'existe pas, à notre connaissance, de corpus de textes français enrichis d'informations syntaxiques. Le dépouillement des constructions devra donc entièrement être fait à la main. Pour l'instant, il n'existe pas encore d'analyseur automatique pouvant faire ce travail de façon satisfaisante. Dans quelques années, les programmes

Les défauts les plus importants sont les suivants: 1. Les compléments verbaux sont classés tantôt d'après la catégorie grammaticale, tantôt d'après la fonction, tantôt d'après un critère d'ordre sémantique. 2. Certaines informations sont données de façon systématique, alors que d'autres ne le sont pas. 3. Les possibilités d'opération sur le verbe (passivation, extraposition, moyenne) ne sont pas indiquées du tout, ou pas de façon systématique.

construction

4. Le traitement des verbes dits essentiellement pronominaux est peu systématique. Pour une critique détaillée voir Zöfgen (1982). Q s'agit du corpus d'Orléans. Ce corpus, qui sera présenté en 1.2, répond aux conditions formulées plus haut: les informateurs ont été sélectionnés en fonction de leur âge, de leur sexe et de leur position sociale. Voir Blanche-Benveniste et Jeanjean (1987) pour une description de l'attitude des linguistes et des grammairiens à l'égard du français parlé.

4

seront probablement suffisamment sophistiqués pour permettre l'analyse automatique de la langue écrite. Pour la langue parlée ce sera beaucoup plus difficile à réaliser. C'est pourquoi nous préférons prendre un corpus de textes parlés. N o u s nous proposons d'étudier les constructions des verbes français les plus fréquents. Les verbes fréquents sont des verbes très riches en constructions. N o u s supposons qu'en décrivant leurs constructions, nous couvrons à peu de choses près les constructions possibles de tous les verbes français. L'approche par le biais d'un certain nombre de verbes permet de concilier deux points de vue complémentaires: le point de vue syntaxique (étant donné une construction, quels sont les verbes pour lesquels elle se réalise?), et le point de vue lexicographique (étant donné un verbe, quelles sont les constructions dans lesquelles il entre?). Les trois premiers chapitres de l'étude présentée ici sont consacrés à l'exposition de la démarche adoptée lors du dépouillement du corpus. Le choix des verbes à analyser constitue l'objet du premier chapitre. Nous comparons à cet effet les 250 verbes les plus fréquents de cinq listes de fréquence. Ce chapitre contient en outre une présentation du corpus d'Orléans. Le second et le troisième chapitre ont pour sujet la question de savoir quoi et comment compter. Les résultats globaux du dépouillement sont présentés dans le quatrième chapitre. Le cinquième et dernier chapitre donne une analyse détaillée d'une partie de nos matériaux. Il a pour objet la construction impersonnelle. Nous aimerions souligner ici que le dépouillement d'un corpus, tel que nous l'avons entrepris, procure un grand fonds de données. Une petite partie seulement de toutes ces données pourra être exploitée dans cet ouvrage. Le lexique, qui constitue la dernière partie de ce livre, présente les données de chaque verbe étudié à la manière d'un dictionnaire. Chaque entrée mentionne le nombre total des occurrences d ' u n verbe, les constructions dans lesquelles il entre et, pour chaque construction, le nombre des occurrences, un ou plusieurs exemples et, s'il y a lieu, des remarques.

5

Chapitre 1 Matériaux

1.1 1.1.1

analysés

Verbes étudiés Introduction

Notre objectif est d'étudier les constructions des verbes les plus fréquents en français. O n peut se demander de combien de verbes se compose ce groupe des verbes les plus fréquents et quels sont les verbes qui en font partie. Mais il est impossible de donner une réponse absolue à ces questions. En effet, le groupe des verbes les plus fréquents en tant que tel n'existe pas. Quand on range les verbes sur une échelle de fréquence, on ne constate aucune rupture entre verbes fréquents et verbes non fréquents. Il faudra déterminer quantitativement, en fonction de critères externes, l'étendue du groupe visé. Une fois le nombre de l'ensemble visé déterminé, il faut savoir quels sont ces verbes. Car cela ne va pas de soi: le groupe des 20, 50 ou 100 verbes les plus fréquents en français selon telle liste de fréquence n'est pas identique à celui d'une autre liste. Dans ce qui suit nous essaierons donc de nous doter de critères pour répondre à ces deux questions. Les recherches faites pour répondre à la seconde question (quels verbes?) nous ont fourni des matériaux qui nous permettent de faire des remarques de nature générale concernant les listes de fréquence. Nous en ferons état dans les différentes sections.

1.1.2

Nombre de verbes à étudier

Nous avons d'abord cherché à déterminer le nombre de verbes à étudier. Nous nous sommes posé la question suivante: si nous décidons de décrire les verbes faisant partie du groupe des 1 000 mots les plus fréquents du français, combien de verbes obtenons-nous, et est-il possible de déterminer le pourcentage que représentent ces verbes parmi tous les verbes utilisés dans un texte français moyen? Parmi les 1 000 mots les plus fréquents du français, combien y a-t-il de verbes? O u plutôt, les listes de fréquence intéressantes pour notre objectif combien de verbes contiennent-elles parmi les 1 000 mots les plus fréquents? Le tableau 1.1 rassemble les données concernant quatre listes de fréquence: la Table des fréquences décroissantes du

Dictionnaire

des fréquences

siècles) (désormais TLF),

dovitch, Frequency

du Trésor

de la Langue

Dictionary

of French

de Nancy (XIXe et XXe

Words (désormais FDFW),

des cinq mille lemmes majeurs' de Engwall, Vocabulaire (désormais VRF)

Française

la liste des fréquences décroissantes de Juilland, Brodin et Davidu roman

l'Index hiérarchique français

(1962-1968)

et 'La liste des mots par fréquences décroissantes' de 'L'Enquête statis-

tique sur la langue parlée', donnée par Gougenheim et al. ( 1 9 6 7 ) (désormais ESLP).

Nous

donnons, pour chaque liste, le nombre de verbes par tranche de 500 mots. 1 l e tranche

2e tranche

total sur

de 500 mots

de 500 mots

1 000 mots

TLF

84

108

192

FDFW

110

129

239

VRF

135

159

294

ESLP

101

114

215

Tableau 1.1: Nombre de verbes par tranche de 500 mots dans quatre listes de fréquence Ces chiffres doivent être considérés avec une certaine prudence.

C'est que les listes

ne sont pas tout à fait comparables, étant donné que le regroupement des formes est différent pour chaque liste (phénomène qui rend épineuse toute comparaison de listes de fréquence), et que le FDFW loin sur ce problème.

contient des formes homographes.

nombre de verbes parmi les 1 000 mots les plus fréquents. verbes, et le VRF,

Nous reviendrons plus

On constate d'assez gros écarts entre les listes pour ce qui est du Le TLF,

qui a le moins de

qui en a le plus, forment les extrêmes, alors que les deux autres listes

ont un nombre de verbes qui tient le milieu entre ces deux extrêmes. Que le TLF

ait moins

de verbes que les trois autres listes s'explique par le fait qu'il regroupe relativement peu les mots grammaticaux et les formes verbales.

Il a donc, parmi les 1 000 mots les plus

fréquents, moins de lemmes différents que les trois autres listes, qui regroupent davantage. Le FDFW

a des verbes homographes, ce qui gonfle évidemment l'effectif total. Cette liste

contient en réalité 230 verbes différents parmi les 1 000 mots les plus fréquents. Le nombre élevé de verbes dans le VRF

est difficile à expliquer.

Il est vrai qu'il regroupe beaucoup,

mais il n'est pas sûr que cette donnée à elle seule puisse expliquer l'écart dans sa totalité. Il est possible qu'il faille chercher dans la nature du corpus du VRF phénomène.

l'explication de ce

L'ampleur du corpus est de toute façon un facteur qui ne peut pas jouer de

rôle. 2 Nous ne pouvons examiner ici cette question, qui dépasse le cadre de notre étude. La liste de Y ESLP

a ceci de commun avec celle du VRF

que les formes verbales ont toutes été

regroupées sous l'infinitif et qu'elle ne connaît pas d'homographes.

Pour les quatre listes

(1) Quant au TLF, il s'agit en réalité, non des verbes, mais des infinitifs de cette liste. (2) La seconde tranche du VRF contient 493 mots, et non 500. Ceci pour des raisons techniques. Pour être fiable, une liste de fréquence doit être basée sur un corpus suffisamment grand. Sciarone (1979:50) pose qu'un mot devrait avoir une fréquence absolue égale ou supérieure à 40 pour avoir une fiabilité satisfaisante. Les derniers verbes de la liste des 294 verbes du VRF ont une fréquence de 53, et satisfont donc largement au critère de Sciarone.

8

on constate que la premiere tranche contient moins de verbes que la seconde. Cela est dû au nombre relativement élevé des mots grammaticaux dans la première tranche de 500 mots. La moyenne des trois listes où toutes les formes verbales ont été lemmatisées sous l'infinitif (FDFW, VRF et ESLP) est de 246 verbes sur les 1 000 mots les plus fréquents. Ces 1 000 mots les plus fréquents, combien de mots d'un texte français moyen couvrentils? Le FDFW fournit les chiffres suivants pour sa liste de fréquence et le corpus utilisé: "the first ten words account for 30.52% of the total occurrences, the first hundred for 62.66%, the first thousand for 85.58%" (p.LXJ). Ces chiffres (qui se rapportent au corpus du FDFW, non à un texte quelconque) correspondent avec ceux donnés par Guiraud (cf. Sciarone 1979:51) d'après qui les 100 mots les plus fréquents couvrent 60% d'un texte quelconque, les 1 000 mots les plus fréquents 85% et les 4 000 mots les plus fréquents 97.5%, tandis que le reste du vocabulaire ne couvre que 2.5%. Sciarone est d'avis que ces estimations sont trop optimistes. 3 Lui-même (1977:91) arrive, pour l'italien, à un pourcentage de 80% pour 1 000 mots. Il attribue ces différences à l'étendue des corpus qui ont servi de base aux calculs: 500 000 occurrences pour le FDFW 11 un million et demi pour le sien. Nous pensons qu'il est prudent de nous en tenir à une estimation conservatrice et de poser que les 1 000 mots les plus fréquents ont un pourcentage de couverture de 80%.

On peut se demander s'il est permis d'extrapoler ce chiffre et de l'appliquer à la catégorie des verbes, et d'affirmer que les verbes de ces 1 000 mots les plus fréquents couvrent 80% des verbes utilisés dans un texte français moyen. Pareille généralisation serait fausse à notre avis. C'est que les premières tranches de fréquence contiennent plus de verbes que les tranches qui viennent après. Le FDFW a 239 verbes sur les 1 000 premiers mots ( = 24%) et 956 verbes sur les 5 000 mots les plus fréquents ( = 19%). Le VRF en a respectivement 294 ( = 29%) et 1 222 ( = 24%). Il est frappant de constater que l'écart entre les deux pourcentages est le même pour les deux listes de fréquence, c'est-à-dire 5%. FDFW ti VRF s'arrêtent aux 5 000 mots les plus fréquents. Nous ne pouvons donc pas nous prononcer sur le pourcentage des verbes dans les tranches au-delà de ce seuil, mais il est probable qu'il diminuera. Sciarone (communication personnelle) a calculé que les verbes du Dictionnaire du français contemporain (environ 25 000 entrées) représentent 16% environ de toutes les entrées. Les 1 000 mots les plus fréquents ont donc un pourcentage de verbes plus élevé que le vocabulaire total. Les verbes de ces 1 000 premiers mots doivent par conséquent couvrir plus de 80% de tous les verbes utilisés dans un texte moyen. Un autre calcul nous fournit un résultat similaire. Sciarone (communication personnelle) a calculé, pour les verbes des 10 tranches de 500 mots du FDFW, le pourcentage de couverture sur l'ensemble du corpus du FDFW. Le tableau 1.2 présente ces chiffres. On constate que le nombre de verbes diminue lentement après la deuxième tranche. Nous voyons d'autre part que le pourcentage de couverture diminue rapidement. Les verbes des deux premières tranches (239) couvrent 12.31% de tous les mots du corpus, les 117 verbes de la troisième tranche y ajoutent 0.9% seulement, et les tranches suivantes encore moins.

D'autres chiffres peuvent confirmer c e t t e opinion. Selon Engwall ( 1 9 8 4 : X L ) les cinq mille vocables les plus fréquents couvrent "environ 90 pour cent du texte courant."

9

nombre de verbes

% de couverture

Ire tranche de 500 mots

110

10.6802

2e

129

1.6284

3e

117

.8948

4e

86

.4554

5e

103

.4042

6e

93

.2732

7e

83

.1920

8e

82

.1544

9e

79

.1168

10e

74

.0860

956

14.8854

Total

Tableau 1.2: Pourcentages de couverture des verbes du FDFWsur

l'ensemble du corpus

Si nous divisons le pourcentage de couverture des verbes des deux premières tranches par celui de tous les verbes du FDFW,

nous obtenons un résultat de 8 2 . 7 % .

Ces chiffres nous confirment dans notre opinion que le groupe des verbes rencontrés parmi les 1 000 mots les plus fréquents représente un choix t o u t à fait raisonnable pour ce qui est du nombre des verbes à étudier. Nous avons trouvé plus haut une moyenne de 246 verbes sur les 1 000 mots les plus fréquents. Si nous décidons d'étudier les 250 verbes les plus fréquents, nous couvrons un pourcentage des formes verbales d'un texte quelconque qui se situe au-delà de 8 0 % . Cela nous semble satisfaisant. Les verbes les plus fréquents sont aussi les verbes les plus 'polyvalents': ils entrent dans beaucoup de constructions. En examinant leurs propriétés syntaxiques, nous saisissons une catégorie de verbes difficiles à étudier. En outre, les constructions de ces verbes représentent selon toute probabilité une très grande partie de toutes les constructions verbales possibles. L'intérêt de ce groupe de verbes est donc multiple.

1.1.3

Quels verbes?

Muller ( 1 9 7 4 ) cherche à savoir quels sont les vingt verbes les plus fréquents en français, et compare à cet effet plusieurs listes de fréquence. Il arrive à la conclusion que il n'y a pas de réponse absolue à une question comme:

"Quels sont les 20

verbes les plus fréquents en français?"; mais les données statistiques dont on dispose maintenant permettent de dresser des listes dont seules les dernières unités laisseraient place à l'hésitation. ( 1 9 7 4 : 1 7 ) Il est évident que cette hésitation s'accroîtra à mesure qu'on avancera dans la liste. autre conclusion de Muller est que les fréquences, dont l'intérêt n'est pas discutable, sont fortement dépendantes du type de corpus qui a servi à leur calcul.

10

Elles n'ont de valeur que par

Une

rapport à un certain type de textes, ou à un ensemble de textes divers dont elles reflètent une moyenne. [...] C'est pourquoi un corpus très vaste et très diversifié comme celui du T.L.F. nous propose des données plus solides que des relevés partiels; c'est pourquoi aussi la répartition des vocables à l'intérieur d'un corpus est un élément important. (1974:17) Il nous paraît absolument nécessaire d'asseoir le choix des verbes à étudier sur une base solide. C'est pourquoi nous partirons, non d'une seule liste de fréquence, mais de cinq (celles nommées sous 1.1.2 et la liste de fréquence du corpus d'Orléans), que nous comparerons. Ces listes sont toutes plus ou moins différentes par leur lemmatisation. Le FDFW, par exemple, a des verbes homographes, contrairement aux autres listes. Le VRF, pour donner un autre exemple, regroupe sous le lemme u n les formes masculine et féminine, le singulier et le pluriel, alors que le Dictionnaire des fréquences a quatre entrées. Si l'on veut savoir quels sont les verbes les plus fréquents parmi les 1 000 premiers mots, il faudra éliminer toutes ces différences. C'est un véritable travail de Sisyphe, possible, mais ingrat et tout à fait disproportionné à l'objectif de cette étude. C'est pourquoi nous avons décidé de sélectionner, pour chaque liste, les 250 verbes les plus fréquents. Les données concernant ces verbes, elles, ont été, autant que possible, rendues comparables.

1.1.4

Listes de fréquence utilisées. Procédures de sélection appliquées

Nous donnerons dans cette section un descriptif succinct des cinq listes de fréquence utilisées et des corpus sous-jacents et préciserons les opérations effectuées pour rendre les chiffres comparables. Les listes du VRF et de VESLP sont les listes les plus lemmatisées: toutes les formes verbales sont regroupées sous l'infinitif; aucun verbe n'apparaît plus d'une fois sur les listes. Nous avons donc aligné les trois autres listes sur ces deux-là.

1.1.4.1

Le Dictionnaire des fréquences

Le Dictionnaire des fréquences de Nancy repose sur un corpus de 7 1 millions d'occurrences environ. Le corpus dépouillé se compose de textes littéraires du X I X e et du X X e siècle (entre 1789 et 1964). Le Dictionnaire des fréquences donne, pour chaque vocable, des informations sur (1) sa fréquence absolue dans le corpus des textes du X I X e siècle et dans celui du X X e siècle, (2) le rang qu'occupe le vocable dans l'ensemble des vocables, et (3) des indications sur sa fréquence relative dans les deux corpus du X I X e et du X X e siècle et dans dix sous-ensembles. Les verbes apparaissent dans le Dictionnaire des fréquences sous trois formes: l'infinitif (qui regroupe toutes les formes conjuguées au mode personnel), le participe présent et le participe passé. Ce regroupement, particulier au TLF, constitue un grand problème quand on veut comparer différentes listes de fréquence. Il s'y en ajoute un autre. Par suite d'une lemmatisation très incomplète, les trois formes verbales peuvent regrouper des formes non verbales: des substantifs homographes avec un infinitif {dîner, devoir par exemple), et des adjectifs, des substantifs et des prépositions homographes avec des participes présents ou passés ( a m u s a n t , habitant, devant par exemple). Nous aurions pu totaliser pour chaque verbe les données concernant les trois formes sous lesquelles il 11

se manifeste dans le Dictionnaire

Seulement, ce chiffre aurait contenu

des fréquences.

beaucoup de bruit. C'est pourquoi il nous a paru préférable de nous baser uniquement sur les chiffres concernant les infinitifs, catégorie "relativement pure" d'après B r u n e t (1981, 1:297). N o u s sommes partie des données fournies par la Table du Dictionnaire

des fréquences

des fréquences

décroissantes

et les avons ensuite vérifiées dans B r u n e t (1981,11), qui a

corrigé les erreurs numériques qui s'étaient glissées dans les Tables. Les chiffres sélectionnés représentent la fréquence absolue des verbes dans l'ensemble du corpus.

1.1.4.2

L e Frequency Dictionary of French W o r d s

Le Frequency

Dictionary

of French

Words

est basé sur un corpus de textes en prose de

500 000 mots, réparti en cinq sous-corpus: pièces de théâtre, romans et nouvelles, essais, périodiques, textes scientifiques et techniques. Les textes dépouillés couvrent une période allant de 1920 à 1940. Nous avons utilisé les chiffres concernant la fréquence 4 de la Table décroissante du FDFW

pour sélectionner les 250 verbes les plus fréquents.

Le FDFW

a

c o m m e particularité que certains m o t s ont plusieurs entrées. En ce qui concerne les verbes, il s'agit d'une part des verbes avoir, et une autre c o m m e verbe auxiliaire.

être,

aller

et faire

qui ont une entrée c o m m e verbe

Les verbes homographes d'autre part o n t plusieurs

entrées, d'après leur régime syntaxique.

Nous avons totalisé les nombres d'occurrences

pour ces verbes.

1.1.4.3

L e Vocabulaire du r o m a n français 1 9 6 2 - 1 9 6 8

Le corpus sur lequel se base le VRF comprend un demi-million d'occurrences et est tiré de 25 romans best-sellers, publiés entre 1962 et 1968. P o u r faire la liste des 250 verbes les plus fréquents du corpus du VRF,

nous avons utilisé la liste 6 ( ' C l a s s e m e n t g r a m m a t i c a l des

cinq mille lemmes majeurs') qui donne une liste, par fréquences décroissantes, des verbes faisant partie de cet ensemble.

P o u r des raisons techniques (huit verbes ayant la même

fréquence occupent les places 246 à 253), notre sélection c o m p r e n d 253 verbes.

1.1.4.4

L ' E n q u ê t e statistique sur la langue parlée

Nous ne disposons actuellement que d'une seule liste de fréquence du français parlé, celle qui a servi à l'élaboration du Français

Fondamental

(1er

degré)

et qui est présentée dans

G o u g e n h e i m et al. (1967). Des interviews avec 275 témoins ont fourni les matériaux de la liste de fréquence. Les textes dépouillés proviennent pour une petite partie d'enregistrements phonographiques historiques. La plupart des textes ont été recueillis par enregistrement direct au début des années 50, en vue du projet d'élaboration du Français Le nombre total de mots dépouillés est de 312 135.

Fondamental.

Les mots d'une fréquence égale ou

supérieure à 20, 1 063 au total, ont été classés dans deux listes de fréquence, la première par

La Table décroissante contient en fait trois listes, établies d'après l'usage, la fréquence et la dispersion. Cf. FDFW, p. XLVIII - LXI.

12

fréquences décroissantes, la seconde par ordre alphabétique. N o u s avons utilisé la première liste. Elle comprend 228 verbes. 1.1.4.5

L'Etude sociolinguistique sur Orléans

N o u s avons cherché à compléter les données fournies par la liste de I ' E S L P par des données sur la fréquence de verbes en langue parlée provenant d ' u n e autre source, à savoir Γ E i u d e sociolinguistique

sur Orléans.

Ce corpus d'enregistrements du français parlé a été recueilli

à Orléans entre 1968 et 1971. Il y a au total 487 enregistrements qui se divisent en huit catégories: interviews sur questionnaires, reprises de contact informelles, enregistrements spontanés, communications téléphoniques, interviews 'sur mesure',

conférences/discus-

sions, enregistrements avec des témoins inconnus, interviews au Centre

Médico-Psycho-

pédagogique. Les témoins des quatre premières catégories ont été choisis selon des critères sociologiques explicites. Pour une description plus détaillée du corpus d ' O r l é a n s nous renv o y o n s à la section 1.2. D e s 1 5 7 5 interviews face-à-face sur des questionnaires standardisés, 60 ont été mises sur ordinateur à l'Université Libre d ' A m s t e r d a m . 4 9 4 028.

Le nombre total des occurrences est de

La liste de fréquence des 60 textes dont nous disposons actuellement est une

liste provisoire, car la lemmatisation n'est pas encore achevée. verbes, la situation est comparable à celle du Dictionnaire

En ce qui concerne les

des fréquences.

Les formes

verbales y apparaissent sous l'infinitif, le participe présent et le participe passé. Ces trois formes peuvent regrouper des formes non verbales, tout c o m m e pour le Dictionnaire fréquences.

des

N o u s nous s o m m e s basée sur les occurrences regroupées sous l'infinitif, pour

les raisons explicitées ci-dessus. N o u s avons suivi T ' E n q u ê t e statistique sur la langue parlée' pour ce qui est du seuil adopté: nous n ' a v o n s admis dans notre sélection que les infinitifs ayant une fréquence égale ou supérieure à 20. Ce critère nous a fourni une liste de 195 verbes. 1.1.4.6

Principales caractéristiques des cinq corpus

Le tableau 1.3 résume les caractéristiques des cinq corpus.

1.1.5

Remarques sur les cinq listes de verbes. verbes retenus pour notre recherche

Sélection des

Les verbes de chaque liste ont été classés par ordre de fréquence décroissante et pourvus d ' u n numéro de rang. 6 Ces données ont été regroupées par ordre alphabétique pour les cinq

5

Blanc et Biggs (1971) et Robach (1974) mentionnent un nombre de 147 interviews sur questionnaires standardisés, mais il y a, en réalité, 157.

6

Engwall (1984) contient déjà une telle liste (pp. 406^111). Les verbes qui ont la même fréquence partagent le même numéro de rang. Il est d'usage de prendre la moyenne des rangs occupés. Ce chiffre est entier si les verbes ayant la même fréquence sont en nombre impair et contient un demi si ces verbes sont en nombre pair. Or, Engwall a toujours des chiffres entiers. Nous avons modifié sa liste dans ce sens que nous avons toujours pris la moyenne exacte pour ces verbes.

13

é t e n d u e du

corpus

période

corpus TLF

7 1 mill.

1789 -

d'occ.

1964

500 000

1920 -

occ.

1940

500 000

1962 -

occ.

1968

langue écri-

t y p e de

n o m b r e de

te ou parlée

textes

verbes sél.

litt.

250

langue écrite

(prose et poésie)

FDFW

langue écrite

prose

250

( l i t t , et non-litt.)

VRF

ESLP

Orléans

312 135

1950

occ.

(princ.)

494 028

1969

langue écrite

25 r o m a n s

253

best-sellers

langue parlée

interviews

228

libres

langue parlée

interviews*

195

occ. * 6 0 interviews sur questionnaires standardises

Tableau 1.3: Principales caractéristiques des cinq corpus

listes. Elles f o r m e n t l ' A p p e n d i c e A . C e t t e liste c o n t i e n t 3 9 6 verbes au t o t a l . C e t ensemble a été soumis à un certain n o m b r e d'analyses, qui seront t r a i t é e s dans cette section, et sur lesquelles nous nous baserons pour sélectionner les verbes à étudier. U n e première question qu'on p e u t se poser est celle de savoir c o m b i e n de verbes sont c o m m u n s aux différentes listes.

Le t a b l e a u 1 . 4 présente les chiffres.

Le p o u r c e n t a g e des

n o m b r e t o t a l de verbes

3 9 6 verbes

sont présents sur 5 listes

1 1 8 verbes

(=

30%)

sont présents sur 4 listes

4 3 verbes

(=

11%)

sont présents sur 3 listes

55 verbes

(=

14%)

sont présents sur 2 listes

6 9 verbes

(=

17%)

1 1 1 verbes

(=

28%)

sont présents sur 1 liste

Tableau 1.4: Répartition des verbes sur les cinq listes verbes ne f i g u r a n t que sur une seule liste est presque aussi élevé que celui des verbes f i g u r a n t sur toutes les listes.

Ces chiffres i n v i t e n t à une analyse plus détaillée.

U n e telle

analyse n'est pas seulement intéressante pour notre objectif, elle pourra avoir aussi un i n t é r ê t intrinsèque. E x a m i n o n s d ' a b o r d les verbes qui n'apparaissent que sur une seule liste, les verbes 'solitaires'. Leur distribution sur les cinq listes n'est pas égale. Le TLF solitaires (soit 5 . 2 % sur 2 5 0 verbes), le VRF

c o n t i e n t 13 verbes

en a 27 (soit 1 0 . 8 % sur 2 5 0 verbes), le

27 (soit 1 0 . 7 % sur 2 5 3 verbes), l ' E S L P 2 5 (soit 1 1 % sur 2 2 8 verbes) et O r l é a n s 19

(soit 9 . 7 % sur 195 verbes).

11

FDFW

Nous présenterons b r i è v e m e n t ces verbes à l'aide de t a b l e a u x

commentés. Le TLF a relativement peu de verbes solitaires, comme le montre le tableau 1.5. achever eerier pardonner soutenir

admirer fuir rapporter

attacher mêler remplir

Tableau 1.5: Verbes figurant uniquement sur la liste du

Dîner

dîner nommer reposer

TLF

peut devoir sa place sur la liste au fait que le TLF ne distingue pas entre emploi verbal et emploi substantif d'une forme. Les autres verbes n'ont rien de bien étonnant. Leur numéro de rang est assez élevé, au-dessus de 180. Seul écrier a un numéro de rang assez peu élevé (r=104). Le TLF est le seul corpus dont les textes s'étalent sur deux siècles. A première vue, aucun des verbes solitaires ne paraît appartenir à un vocabulaire daté.7 Cependant, quand on consulte les données statistiques procurées par Brunet (1981), on constate que sept de ces verbes sont surreprésentés dans une ou plusieurs tranches chronologiques du 19e siècle. Il s'agit des verbes suivants: attacher, écrier, mêler, nommer, pardonner, remplir et soutenir. Le FDFW a beaucoup de verbes solitaires, comme le montre le tableau 1.6. Beaucoup accorder conclure déterminer fournir mériter réaliser signaler

appliquer constater développer imposer procéder réduire souhaiter

citer constituer examiner indiquer promettre résoudre subir

Tableau 1.6: Verbes figurant uniquement sur la liste du

comporter décrire figurer maintenir publier révéler

FDFW

de ces verbes appartiennent au vocabulaire abstrait et/ou scientifique. Quand on consulte les données numériques concernant les sous-corpus, on constate en effet que plus d'une vingtaine de ces verbes sont surreprésentés dans un ou plusieurs sous-corpus (le plus souvent dans le sous-corpus des textes techniques et scientifiques (14 verbes), ou celui des journaux et des magazines (7 verbes)). La liste du VRF compte également de nombreux verbes solitaires (voir le tableau 1.7). Certains mots surprennent (accrocher, allonger, allumer par exemple). La présence

Cf. Muller (1974:15) qui trouve, pour le corpus du TLF, que la nature et le classement des 20 verbes les plus fréquents sont chronologiquement stables, mais stylistiquement instables, et Brunet (1981,1:113-114, 807, 846) qui conclut, pour différents groupes de verbes du même corpus, parmi lesquels les 255 verbes les plus fréquents, que la marque 'genre' est cause de beaucoup plus de variance que la marque 'temps 1 .

15

d'autres verbes ( c a r e s s e r , chérir,

épouser,

mentir)

pourrait s'expliquer par le caractère

romanesque de ce corpus. accrocher

agiter

allonger

allumer

appuyer

briller

caressser

chérir

croiser

dresser

écarter

endormir

épouser

fixer

hésiter

inventer

mentir

pencher

peser

presser

rassurer

refermer

rejoindre

réveiller

secourir

surprendre

traîner

T a b l e a u 1.7: V e r b e s

figurant

La liste de YESLP que celles du FDFW

u n i q u e m e n t sur la liste du

VRF

(voir le tableau 1 . 8 ) contient à peu près a u t a n t de verbes solitaires t1 du VRF:

beaucoup de verbes concrets, reflétant la vie de tous les

attraper

chauffer

coller

danser

dépenser

engager

enlever

ennuyer

enregistrer

entretenir

loger

louer

nager

nettoyer

opérer

organiser

pleuvoir

prévoir

ramasser

remercier

réparer

repasser

risquer

soigner

surveiller

T a b l e a u 1.8: V e r b e s

figurant

u n i q u e m e n t sur la liste de

YESLP

jours; pas de termes a p p a r t e n a n t t y p i q u e m e n t à la langue parlée ( à l'exception p e u t - ê t r e de ramasser).

Rien de v r a i m e n t surprenant, sauf enregistrer,

qui doit sa présence sur la

liste aux conditions de prélèvement des textes, raison pour laquelle la Commission chargée de la composition du Français

Fondamental

a décidé de l'exclure de sa liste.

C o m m e le m o n t r e le tableau 1.9, la liste d'Orléans a un peu moins de verbes solitaires que le FDFW,

le VRF

et YESLP.

Il ne f a u t cependant pas perdre de vue que la liste est

moins longue que les trois autres ( 1 9 5 verbes). Les chances d'avoir des verbes solitaires sont é v i d e m m e n t moins grande que pour une liste plus longue. Dix des verbes solitaires de cette liste ( a u g m e n t e r , utiliser

et voter)

du corpus.

consister,

déplacer,

déplaire,

enseigner,

fréquenter,

regretter,

relire,

peuvent s'expliquer par les questionnaires 8 utilisés lors de la constitution

Un verbe utilisé dans une question a é v i d e m m e n t beaucoup de chances de

revenir dans la réponse. Q u a n t aux neuf verbes ne figurant pas dans une question, on peut cependant dire pour choquer,

contrôler,

corriger,

cuire

et participer

qu'ils peuvent avoir

été amenés par une question. 9

Ces questionnaires forment l'Appendice C. Choquer 16

par le terme 'agacer' utilisé dans les questions 32, 33 et 35 du Questionnaire socio-

améliorer

augmenter

choquer

consister

contrôler

corriger

cuire

déplacer

déplaire

diriger

enseigner

envisager

fréquenter

participer

regretter

relire

ressentir

utiliser

voter

T a b l e a u 1.9: V e r b e s

figurant

u n i q u e m e n t sur la liste d ' O r l é a n s

C e p h é n o m è n e q u ' u n v o c a b l e doit sa f r é q u e n c e au p r o c é d é de recueil des textes ne se limite é v i d e m m e n t p a s a u x v e r b e s solitaires.

Il arrive q u ' u n verbe f i g u r a n t s u r notre liste

du c o r p u s d ' O r l é a n s ainsi q u e sur d ' a u t r e s listes ait u n n u m é r o de r a n g b e a u c o u p

plus

b a s (et d o n c u n e f r é q u e n c e plus élevée) d a n s la liste d ' O r l é a n s q u e d a n s les a u t r e s listes. Cela c o n c e r n e entre a u t r e s les v e r b e s apprendre, et travailler.

casser,

écrire,

plaire,

préférer,

réussir

C e t t e f r é q u e n c e élevée p e u t s ' e x p l i q u e r de la m ê m e f a ç o n q u e p o u r les v e r b e s

solitaires: le verbe figure d a n s une o u plusieurs q u e s t i o n s o u est a m e n é par u n e q u e s t i o n . Il est clair q u e la liste de f r é q u e n c e d ' u n c o r p u s recueilli à l'aide de q u e s t i o n n a i r e s s t a n d a r d i s é s est q u e l q u e peu f a u s s é e par ce procédé. O n devrait d o n c s ' e n servir avec c i r c o n s p e c t i o n . L ' a n a l y s e de ces v e r b e s solitaires fait n e t t e m e n t ressortir q u e les listes reflètent le c a r a c tère des textes d u c o r p u s o u les c o n d i t i o n s de recueil de ces textes. L e s trois listes b a s é e s sur des c o r p u s écrits se différencient n e t t e m e n t .

L a liste du TLF

est s a n s a u c u n d o u t e la

p l u s neutre. O n ne p e u t q u e s o u s c r i r e à la c o n c l u s i o n de M u l l e r ( 1 9 7 4 : 1 7 ) citée plus h a u t . E n s u i t e , n o u s a v o n s s o u m i s n o s d o n n é e s à des a n a l y s e s s t a t i s t i q u e s . L e c h o i x d u test à a p p l i q u e r à ce type de d o n n é e s ne va p a s de soi. N o u s a v o n s d ' a b o r d calculé la corrélation d e s r a n g s d e s v e r b e s de l ' A p p e n d i c e A . Le tableau 1.10 présente les résultats.

N o u s con-

s t a t o n s d e s c o r r é l a t i o n s élevées o u assez élevées entre les listes b a s é e s sur des c o r p u s écrits d ' u n e part et les d e u x listes b a s é e s sur des c o r p u s o r a u x d ' a u t r e part.

Les corrélations

entre les listes b a s é e s sur des c o r p u s écrits et celles b a s é e s s u r des c o r p u s o r a u x s o n t m o i n s élevées. C e t y p e de test, q u i s ' a p p l i q u e à des d o n n é e s de n i v e a u ordinal, fixe à 1 la d i s t a n c e entre u n verbe d ' u n e liste et celui qui le suit et ne tient p a s c o m p t e des f r é q u e n c e s réelles des verbes. P u i s , l ' a t t r i b u t i o n des r a n g s est relativement aléatoire d a n s le d o m a i n e des v e r b e s de f r é q u e n c e basse. C ' e s t p o u r q u o i n o u s a v o n s calculé é g a l e m e n t les coefficients de corrélation (coefficients de P e a r s o n ) entre les v e r b e s des cinq listes, c ' e s t - à - d i r e entre les o c c u r r e n c e s de tous les v e r b e s d a n s tous les c o r p u s , p o u r a u t a n t q u e ces d o n n é e s s o i e n t d i s p o n i b l e s . 1 0

linguistique; contrôler par le mot 'contrôle' utilisé deux fois dans la question 12 du même questionnaire; corriger par le synonyme 'reprendre' utilisé dans les questions 32, 33, 34, 35 et 36 de ce questionnaire; cuire par la question sur la préparation d'une omelette (Questionnaire ouvert, Branche Langue et culture); participer par le terme 'participation' de la question E12 du même questionnaire. L e FDFW a sélectionné les entrées d'après le coefficient d'usage (formule qui tient compte de la fréquence et de la dispersion): tous les mots ayant un coefficient de 3.00 ou plus apparaissent sur la liste. Ce critère a donné un nombre total de 5 082 entrées. L e nombre d'occurrences dans le corpus des verbes qui n'atteignent pas ce seuil n'est pas mentionné.

17

TLF

FDFW

VRF

ESLP

Orléans

TLF FDFW

.8296 (209)

VRF

ESLP

Orléans

.7999

.7314

(201)

(183)

.6685

.6854

.6544

(163)

(156)

(171)

.6040

.5966

.5892

(145)

(144)

(140)

Entre parenthèses le nombre de verbes impliqués pour chaque paire

(ρ < .000) T a b l e a u 1.10: C o r r é l a t i o n s des rangs des v e r b e s c o m m u n s à c h a q u e p a i r e de listes

L'Appendice Β présente les données concernant le nombre d'occurrences des 3 9 6 verbes de l'Appendice A dans les différents corpus.

Pour pouvoir effectuer un tel calcul, il f a u t

au préalable que les conditions techniques d'une analyse des corrélations soient satisfaites. Une de ces conditions est que la distribution des données soit normale. pas le cas.

O r , cela n'est

La distribution des données est f o r t e m e n t dissymétrique vers la droite.

avons donc procédé c o m m e suit: ( a ) élimination des verbes avoir

Nous

et être à cause de leurs

fréquences e x t r ê m e m e n t élevées, ( b ) transformation des données en valeur logarithmique (base =

10). Le tableau 1.11 regroupe les résultats obtenus de cette façon. Nous voyons

que les corrélations vont dans le m ê m e sens que les corrélations des rangs, à cette différence près que les premières sont plus élevées. Nous constatons que les corrélations entre FDFW,

VRF

avec ESLP,

et ESLPil

TLF,

sont élevées ou assez élevées. Orléans a une corrélation élevée

liste basée elle aussi sur un corpus oral, mais des corrélations n e t t e m e n t moins

élevées avec les autres listes. Ce résultat concorde avec les remarques faites plus t ô t dans cette section à propos du procédé de collecte du corpus d'Orléans. Si nous résumons les analyses traitées dans cette section, nous pouvons dire que: • •

La liste du TLF

a le moins de verbes solitaires.

Le test de corrélation des rangs révèle une scission entre les listes basées sur des corpus écrits et les listes basées sur des corpus oraux.



Le test des coefficients de Pearson à base de données transformées fait ressortir des corrélations élevées entre TLF,

FDFW,

VRF

et ESLP

d'une part et entre ESLP

et

Orléans d ' a u t r e part. La liste de fréquence de Y ESLP s'arrête à la fréquence 20. Gougenheim et al. (1967) ne fait pas mention des données concernant les vocables ayant un nombre d'occurrences inférieures à ce seuil. F. Debyser a donc raison quand il affirme que: " [ . . . ] français fondamental, dont la partie la plus sûre reste le lexique issu des relevés de fréquence et, en particulier, les verbes."

18

TLF

FDFW

VRF

ESLP

Orléans

TLF FDFW

.9075 (383)

VRF ESLP Orléans

.8446

.7446

(393)

(383)

.7884 (225) .6311

.8064 (220) .6851

.8049 (225) .5979

(359)

(350)

(359)

Entre parenthèses le nombre de verbes impliqués pour chaque paire (ρ < .000)

Tableau 1.11: Coefficients de Pearson à base de données transformées

Les analyses traitées dans ce qui précède avaient pour but de nous fournir des éléments justificatifs concernant les verbes à retenir pour notre recherche. Or, nous constatons qu'il n'y a pas de liste qui s'impose comme étant la meilleure ou la plus générale. La liste du TLF se distingue par le nombre peu élevé de verbes solitaires. C'est aussi la liste qui a le plus de verbes en commun avec les autres listes (voir le tableau 1.10). C'est par ailleurs une liste qui repose sur un corpus énorme, contrairement aux autres listes. T o u s ces facteurs nous ont amenée à considérer la liste du TLF comme la liste la plus appropriée à notre but, qui est l'analyse des constructions verbales dans un corpus oral. N o u s ne voyons aucune contradiction dans le fait que nous choisissons les verbes les plus fréquents du corpus de Nancy pour en étudier la construction dans un corpus oral: la liste du TLF est tout simplement la liste la plus neutre. Q u a n t au choix d'un corpus oral pour l'étude des constructions, nous en avons exposé les raisons dans l'Introduction.

19

1.2

Le corpus d'Orléans

Le corpus d'Orléans que nous utiliserons pour notre recherche est le fruit de l'Enquête Sociolinguistique sur Orléans, réalisée par une équipe d'universitaires britanniques. Le but de cette enquête était de rassembler des échantillons authentiques de français parlé spontané. Ces matériaux devaient servir deux buts: la description linguistique et l'enseignement du français langue étrangère. L'enquête a été réalisée à Orléans, parce que cette ville exempte de caractères dialectaux très marqués, cité historique mais en même temps ville en plein essor, démographique, économique, social et culturel (taux de croissance annuel de la population de 3 pour 100, nombreuses industries nouvelles, université récente, développement du secteur tertiaire), capitale régionale échappant suffisamment à l'attraction de Paris, a paru offrir l'homogénéité indispensable et la variété recherchée. (Blanc et Biggs 1971:17) Les enregistrements présentés dans le Catalogue des enregistrements entre 1968 et 1971. Ils se divisent en huit catégories générales:

ont été recueillis

• 157 interviews face-à-face sur des questionnaires standardisés; • 43 'reprises de contact' informelles, enregistrées à l'insu des témoins; • 36 enregistrements dans des situations sociales ou professionnelles, faits en l'absence des chercheurs; • 51 communications téléphoniques; • 46 interviews avec des personnalités publiques; • 29 conférences-débats ou discussions à plusieurs participants; • 84 enregistrements divers comportant des témoins inconnus; • 41 interviews au Centre Médico-Psychopédagogique. Le corpus total compte environ quatre millions et demi d'occurrences. Les témoins interviewés face-à-face sur des questionnaires standardisés sont des habitants d'Orléans des deux sexes, divisés en trois groupes d'âge (18 à 30 ans, 31 à 50 ans, 51 ans et au-delà), et répartis sur six catégories socio-professionnelles. Les interviews ont été recueillies en majeure partie à Pâques 1969. La durée moyenne des enregistrements est de 70 minutes environ par interview. Il y a au total 171 heures d'enregistrement. La méthode des questionnaires standardisés a été choisie pour rendre comparables les témoignages du comportement linguistique des membres des différentes catégories. Les questionnaires sont de trois types: 1. Le questionnaire ouvert avait pour but de permettre aux témoins de répondre aussi librement qu'il est possible dans les conditions de l'entretien face-à-face. 2. Le questionnaire socio-linguistique a un caractère semi-fermé. Ce questionnaire a pour but de cerner les attitudes des sujets vis-à-vis de la langue. 20

3. Le questionnaire f e r m é , posé en dernier lors de l'interview, d e m a n d e aux témoins des renseignements objectifs ( é t a t civil, études suivies, etc.). Ces trois questionnaires o n t été reproduits dans l'Appendice C. Soixante de ces interviews ont été transcrites et mises sur ordinateur à l'Université Libre d ' A m s t e r d a m . Ce mini-corpus contient 4 9 4 0 2 8 occurrences. Le tableau 1.12 donne des informations concernant la catégorie socio-professionnelle, 1 2 l'âge et le sexe des 60 témoins. Il p e r m e t de constater que les témoins se répartissent assez bien sur les différentes variables.

>50 A Β C D E total

H 2 1 1 1 2 7

31-50 F 2 2 1 2 2 9

H 2 1 2 1 2 8

18-30 F 3 1 2 4 2 12

H 2 3 2 2 2 10

F 3 3 3 3 2 13

total 14 11 10 13 12 60

Tableau 1.12: Distribution des 60 témoins, d'après la classe socio-économique, l'âge et le sexe Nous avons travaillé sur les transcriptions des interviews. Nous n'avons consulté les bandes sonores que si nous avions des doutes sur la fidélité de la transcription.

Selon la stratification sociale du corpus d'Orléans élaborée par Mullineaux et B l a n c (1982). C e t t e classification est basée sur l'occupation et l'éducation. L'échelle comporte cinq catégories, A représentant la valeur la plus élevée et E la plus basse.

21

Chapitre 2 Le

domaine

2.1

Introduction

du

verbe

N o u s nous proposons d'étudier les constructions des 2 5 0 verbes français les plus fréquents, telles qu'elles sont réalisées dans un corpus.

N o u s voudrions, dans ce chapitre, traiter

une question d ' i m p o r t a n c e primordiale pour celui ou celle qui veut analyser une matière pareille. Elle concerne le tri à faire parmi les données: quels sont les éléments qui nous intéressent et qu'il faut retenir, et quels sont les éléments qui ne nous intéressent pas et que nous pouvons, par conséquent, écarter.

E n d'autres termes, qu'est-ce qui relève du

domaine du verbe et qu'est-ce qui n'en relève p a s ?

C ' e s t une question sur laquelle les

opinions divergent. O n trouve, généralement parlant, deux conceptions en ce qui concerne le nombre des types de compléments.

D ' a u c u n s 1 en distinguent deux: les compléments

qui font partie du s y n t a g m e verbal (ou 'compléments nucléaires') et les compléments qui déterminent le s y n t a g m e verbal (appelés aussi 'compléments périphériques').

D'autres2

préconisent une tripartition: les compléments sous-catégorisés par le verbe (appelés aussi ' a r g u m e n t s ' ou 'actants'), les compléments qui, sans être sous-catégorisés par le verbe, déterminent le s y n t a g m e verbal (les 'circonstants') et les compléments qui modifient la phrase entière. C ' e s t ce dernier point de vue que nous adopterons pour notre recherche. D ' a b o r d , nous présenterons brièvement les trois catégories de compléments. Ensuite nous traiterons la question de savoir en quoi les trois catégories se distinguent. Finalement,

C'est le cas de la grammaire française traditionnelle et de la grammaire valencielle (voir par exemple Helbig 1971). M. Gross adhère également à ce point de vue. C'est le cas de la grammaire générative et de la grammaire fonctionnelle de S.C. Dik. Voir peuexemple Jackendoff (1977:57 ss) et Dik (1978). Blanche-Benveniste (1981) se range également dans cette catégorie. La terminologie utilisée varie. Jackendoff parle de compléments V I , V i l et V i l i . Blanche-Benveniste utilise les termes 'valence', 'rection' et 'associé'. Chez Dik, les 'arguments' et les 'satellites' se situent dans la prédication proprement dite. Les fonctions pragmatiques externes 'theme' et 'tail' correspondent aux compléments de phrase.

23

nous préciserons pourquoi nous voudrions, dans notre recherche, inclure, non seulement les arguments, mais encore les compléments faisant partie du syntagme verbal.

2.2

Les trois types de compléments

2.2.1

Les arguments du verbe

Les compléments arguments du verbe s'inscrivent dans la valence du verbe. Le verbe est sous-catégorisé pour cette catégorie de compléments. Le verbe offrir par exemple souscatégorise trois arguments fonctionnels, un sujet, un objet direct et un objet indirect: Marie

offre un cadeau à

Jean.

Le second argument ne peut pas être supprimé. l'être:

Le troisième argument par contre peut

*Marie offre à Jean Marie offre un cadeau. Le verbe habiter a deux places de construction, la première est occupée par le sujet, la seconde par un syntagme qui peut revêtir plusieurs formes (SIM, SP, adverbe): elle habite une belle maison / rue Buffardel elle habite à Toulouse / avec sa mère où habite-t-elle? Cette seconde place de construction est nécessairement occupée. Un complément qui ne peut pas être supprimé est toujours argument. Le contraire n'est pas vrai: l'argument de certains verbes peut être supprimé, comme nous avons vu plus haut pour offrir. Un verbe peut sous-catégoriser un SN, un SP, un adjectif, un adverbe, un infinitif et une complétive.

2.2.2

Les compléments du syntagme verbal

Les compléments du syntagme verbal (désormais CSV) modifient l'ensemble 'verbe + arg u m e n t ^ ) ' . Sémantiquement, ce sont ce que Jackendoff (1977:61) appelle des 'restrictive modifiers': ils restreignent l'extension de la phrase, parce qu'ils ajoutent des conditions de vérité supplémentaires à l'assertion de la phrase: elle sort souvent/rarement/avec rant, etc.

son ami/uniquement

pour aller au restau-

Ces compléments ne sont pas nécessaires à la construction du verbe. Ils doivent être sémantiquement compatibles avec le verbe. 3 Se comporter par exemple exige un complément de manière (qui est donc argument) et est compatible avec un complément de temps:

Somers (1984), qui distingue au total sept types de compléments, introduit ici une subdivision, certaines classes de compléments étant plus près du syntagme verbal que d'autres. Le constitu-

24

il s'est très bien comporté

pendant

la

cérémonie.

AUer exige un complément de lieu et est compatible avec un complément de manière: j'y suis allé à pied. La catégorie des CSV comprend des compléments de temps, de lieu, de cause, de but, de manière, d'instrument, etc., qui peuvent prendre différentes formes: SN, SP, adjectif, adverbe, infinitif, ainsi que des subordonnées adverbiales.

2.2.3

Les compléments de phrase

Les compléments de phrase (désormais CP) entretiennent un lien lâche avec le reste de la des 'associés'. Leur fonction sémantique est 1977:62): ils n'ajoutent pas de conditions à

ne f o n t pas partie de l'assertion principale. Ils phrase. Blanche-Benveniste (1981) les appelle celle de 'non-restrictive modifiers' (Jackendoff l'assertion de la phrase:

quant à moi, je n'irai pas il ne viendra probablement

pas

logiquement,

avoir une lettre ce

nous devrions

matin.

Les CP peuvent à leur tour être subdivisés. Ainsi, M a r t i n (1974) distingue trois grandes classes d'adverbes: les adverbes qui expriment un jugement sur la vérité ou la validité de l'énoncé, les adverbes qui servent à justifier le dire et les adverbes qui justifient les termes du dire. Il s'agit donc d'un classement qui est basé sur des critères sémantiques. Melis (1979) voudrait isoler du groupe des compléments de phrase au sens étroit les compléments transpositionnels. Il distingue deux grands groupes de compléments transpositionnels: • les compléments de type implicatif (subordonnées causales, concessives, hypothétiques; adverbes de liaison comme pourtant,

donc, par exemple);

• les compléments de point de vue et de domaine (légalement parlant, selon la loi par exemple et des termes comme pour une tortue dans pour une tortue, elle est bien rapide.) Les CP à proprement parler sont également divisés en deux grandes séries: • les compléments qui se rapportent aux circonstances du dire ( h o n n ê t e m e n t ,

franche-

ment, par exemple); • les compléments qui modalisent la phrase (probablement, peut-être,

heureusement,

par exemple).

ant with a hammer dans Nick smashed the vase with a hammer est d'une façon ou d'une autre plus rapproché du sens du verbe que yesterday dans Nick smashed the vase yesterday. Somers donne le nom de 'middles' à ce type de compléments, puisqu'ils se situent entre les arguments proprement dits et les compléments du syntagme verbal (qu'il appelle 'adjuncts').

25

Melis ( 1 9 8 3 ) propose une tripartition de la classe des compléments ne faisant pas partie du noeud actanciel et distingue compléments propositionnels, c o m p l é m e n t s transpositionnels et compléments de phrase. Schlyter (1977), qui traite la place des adverbes en -ment

dans un cadre génératif-

tranformationnel, distingue sept grandes classes d'adverbes sur la base de propriétés distributionnelles et syntaxiques. Quatre de ces grandes classes déterminent la phrase entière: les adverbes de cadre ( a c t u e l l e m e n t , techniquement

par exemple), les adverbes de phrase

par exemple), les adverbes de relation ( i n v e r s e m e n t par exemple) et les ad-

(probablement

verbes restrictifs ( s e u l e m e n t par exemple). La dernière classe peut déterminer également un S N ou un S P . La catégorie des C P n'étant pas prise en compte dans notre recherche, nous n'approfondirons pas cette question.

2.3

Comment identifier les trois types de compléments?

2.3.1

Eléments régis par le verbe et éléments non régis

Les compléments régis par le verbe, c'est-à-dire les a r g u m e n t s et les C S V , ont des propriétés que n ' o n t pas les c o m p l é m e n t s de phrase. Ces propriétés sont les suivantes: 1. Les éléments régis peuvent constituer le centre d ' u n e proposition clivée: 4 il m'a c'est

parlé

gentiment

gentiment

qu'il

m'a

parlé.

Cela vaut pour la très grande majorité des éléments régis. D a n s certains cas cependant, le test avec c'est...

que a pour résultat une phrase douteuse ou agrammaticale,

alors qu'il ne fait aucun doute que l'élément en question est un élément régi: il s'est *c'est

très très

bien bien

tu es toujours *c'est

4

26

toujours

comporté qu'il

d'un

s'est

avis

pendant comporté

la

cérémonie

pendant

la

cérémonie

différent

que tu es d'un

avis

différent.

Cf. Blanche-Benveniste (1981:71,72), Jackendoff (1977:62), Martin (1974:67,68), Melis (1979:13) et Schlyter (1977:29). Martin (1974:67,68) fait remarquer à juste titre que c'est... que h deux emplois: le premier implique une présupposition, l'autre ρ ω . Ainsi dans c'est le buffet que j'ai acheté on présuppose que le locuteur a acheté un buffet. Dans c'est que j'ai acheté un buffet les présupposés sont inexistants. Le complément de phrase n'est compatible qu'avec le second emploi. Une phrase comme c'est manifestement que Pierre est trop timide équivaut k c'est que Pierre est trop timide.

Les éléments non régis n'ont jamais cette possibilité: il viendra probablement *c'est probablement qu'il

viendra.

2. Les éléments régis peuvent être présentés dans une version positive en contraste avec une version négative:5 je ne viendrai pas aujourd'hui, mais demain *il viendra, non pas probablement, mais certainement. 3. Les éléments régis peuvent être l'objet d'une question, contrairement aux éléments non régis:6 tu sors quand/où/comment/avec

qui?

4. Les éléments non régis, à la différence des éléments régis, ne peuvent pas figurer dans une phrase interrogative et impérative:7 Pierre viendra probablement *Pierre viendra-t-il probablement? * Viens probablement. Grâce à ces propriétés, la reconnaissance des éléments non régis et des éléments régis par le verbe dans les corpus ne pose pas de problème. D'ailleurs, beaucoup de C P placés en tête de phrase sont séparés de l'énoncé qu'ils déterminent par une virgule (dans un texte écrit) ou une pause (dans un texte oral). Nous ne tiendrons jamais compte de compléments séparés du groupe verbal par ces deux procédés.

2.3.2

Arguments et compléments du syntagme verbal

Nous disposons de beaucoup moins de critères pour distinguer entre arguments et CSV. 8 Happ (1978:105) nomme le test avec le faire qui permet de séparer les deux catégories: les

5

Cf. Blanche-Benveniste (1981:66), Martin (1974:67) et Schlyter (1977:28).

6

Cf. Blanche-Benveniste (1981:67), Melis (1979:13) et Schlyter (1977:29).

7

Cf. Melis (1979:20) et Schlyter (1977:29). Cette propriété ne vaut pas pour tous les C P . Certains (peut-être peu· exemple) peuvent figurer dans une phrase interrogative: aurais-tu peut-être vu mes lunettes de soleil? D'autres sont possibles dans une phrase impérative: viens donc! 8

E n grammaire traditionnelle et structuraliste on a beaucoup discuté de la question de savoir comment distinguer le complément d'objet direct ou indirect du complément circonstanciel. Corbeil (1968;1971) résume les arguments dans une 'Annexe' de 18 pages. Π arrive à la conclusion que: Nous prenons conscience qu'entre les notions d'objet et de circonstant, il n'y a pas de cassure brutale, mais qu'au contraire, on passe d'une fonction à l'autre par teintes dégradées, (p. 168)

27

C S V peuvent figurer après le faire,

mais les arguments n ' o n t pas cette propriété. C o m p a r e z

les deux paires de phrases suivantes: Jean

met

*Jean

la voiture

met

au

la voiture

garage

et le fait

Jean

déjeune

au

Jean

déjeune

et le fait

au

garage

restaurant au

restaurant.

Un c o n s t i t u a n t considéré traditionnellement c o m m e non inclus dans la valence du verbe c o m m e avec mon

beaucoup aîné

dans:

d'étudiants

vit avec

beaucoup

d'étudiants

passe ainsi du côté des arguments, puisque la version avec le faire *mon

aîné

vit et le fait

avec

beaucoup

est agrammaticale:

d'étudiants.

Somers (1984) discute un test similaire avec do so.

Si la phrase résultant de ce test est

inacceptable, le constituant figurant après do so a le statut d'argument: *I live in Manchester *Harold Peter

drives

bought

so in

and

John

a Volkswagen Liz a present

does so in

and

Salford

Rod does so a

in Manchester

today

Lancia on an impulse,

and Rod

did

Bury.

Cependant, l'inconvénient de ces tests est qu'ils fonctionnent assez bien avec la plupart des verbes d ' a c t i o n à la voix active, mais moins bien avec d'autres catégories de verbes. phrases suivantes avec le faire

Les

devraient être g r a m m a t i c a l e s (les constituants mis en relief

de cette façon étant tous des C S V ) , mais elles nous semblent inacceptables: Jean

est nonchalamment

*Jean

*Thierry

est assis

entend

dans

assis

dans

son fauteuil

un bruit

P o u r que le test avec le faire

et Eric

son

fauteuil

et le fait

le fait

nonchalamment

tout

à

coup.

soit valable, il faut que le sujet du verbe fasse

quelque chose, ce qui n'est pas le cas avec être

assis

et entendre.

vraiment

Ce test a donc une

application restreinte. La difficulté qu'il y a à séparer les deux catégories de c o m p l é m e n t s provient aussi du fait que les valences ne sont pas délimitées de façon exacte et sont sujettes à des variations. Cela est très net si on examine les arguments des verbes d'un point de vue diachronique. 9

Le découpage de la phrase que nous pratiquons n'est pas une analyse en compléments fonctionnels. Puis, les compléments circonstanciels appartiennent tantôt à la catégorie des arguments tantôt à celle des CSV. Nous ne discuterons donc pas les tests proposés dans la littérature pour séparer les compléments circonstanciels des compléments d'objet (in)direct. 9

28

Cf. aussi Bréal (1897;1921:194-204) et Blankenberg (1960:26-34).

A u 20e siècle, le verbe précipiter (au sens de jeter de haut en bas) est un verbe à trois places de construction: sujet, objet direct et complément de direction. A u 17e siècle le verbe avait deux arguments et pouvait être intransitif et transitif: Le superbe Précipitent

Craffenet, le vain La Biscorne froissés entre les deux vaisseaux.

(Chapelain)

(Esope) fut ramené à Delphes chargé de fers, mis dans condamné à être précipité. (La Fontaine) (Les exemples proviennent de la rubrique Class, du Lexis.)

les cachots,

puis

Une telle évolution s'étend souvent sur plusieurs siècles. Il est évident qu'il faut un certain recul dans le temps pour détecter ce phénomène. Synchroniquement, le mouvement peut être imperceptible. Une autre source de variations est d'ordre sociolinguistique. Blanche-Benveniste (1981) cite quelques exemples de création de valences nouvelles qui semblent particuliers à des groupes de locuteurs. Ainsi, le verbe naître avait une rection ( = C S V dans la terminologie de Blanche-Benveniste), et non une valence, 'complément de temps' dans des énoncés d'enfants. Et le verbe travailler était presque toujours accompagné de compléments de temps ou de lieu dans des énoncés de travailleurs immigrés. Tout cela fait que, d'après Blanche-Benveniste (1981:96), la distinction entre 'complément essentiel' et 'complément accessoire' n'est pas toujours facile à cerner: Ce flou est sans doute fondamental dans les échanges de signification entre locuteurs et dans l'évolution des sens à travers les époques et à travers les milieux sociaux. La notion de "complément essentiel", opposée à celle de "complément accessoire" est une intuition qu'on ne peut pas vérifier par des procédés syntaxiques. Entre les différents locuteurs, essentiel et accessoire ne se laissent pas définir de la même façon; alors que les propriétés syntaxiques sont définissables pour tous les locuteurs de façon homogène.

2.4

Compléments retenus dans notre recherche

Nous adopterons la tripartition des compléments exposée ci-dessus pour le dépouillement du corpus. Comme ce sont le verbe et ses arguments qui nous intéressent et non la phrase, nous écarterons les CP. Pour ce faire, nous utiliserons les propriétés négatives de ce type de complément énumérées dans 2.3.1. Nous retiendrons les arguments. Nous prendrons également en compte les C S V . Pour deux raisons: 1. Il est intéressant de savoir si un verbe est souvent accompagné d'un complément ou non, et, dans le premier cas, de quel type de complément il s'agit. Cela ajoute à nos connaissances de la construction de ce verbe. 2. Un type de complément peut être en train de passer dans la valence d'un verbe, ou au contraire de s'en dégager. Blanche-Benveniste (1981:89) donne plusieurs exemples pour illustrer ce fait. Il nous semble attrayant de pouvoir rendre compte de ce phénomène, s'il se produit dans nos données. 29

Nous considérons comme argument tout ce qui est nettement sous-catégorisé par le verbe, ou ce qui constitue un élément obligatoire dans la phrase. Est CSV tout ce qui est ni argument ni CP. En règle générale, le contenu sémantique des arguments est prévisible. Cela n'est pas le cas pour les CSV, puisque leur sens ne peut pas être déduit du sens du verbe. Les CSV seront donc pourvus d'un indice précisant le sens. Cela nous permettra de distinguer entre CSV rapprochés du sens du verbe (les 'middles' de Somers (1984)) et CSV à sens plus neutre. Nous séparerons les deux catégories d'argument et de CSV. C'est que la dernière catégorie contiendra inévitablement beaucoup de 'bruit' et qu'il est préférable de ne pas surcharger la catégorie des arguments. La zone de flou entre arguments et CSV, signalée plus haut, a parfois constitué un problème. 10 En cas de doute, nous avons considéré un constituant à statut incertain comme un CSV. La catégorie des CSV ne sera pas étudiée dans le présent ouvrage. Dans le lexique cependant on trouvera des remarques occasionnelles à propos de ce type de complément. 11

Voici quelques exemples pour illustrer la difficulté. Les éléments en italique des phrases suivantes sont-ils arguments ou C S V ? ils se sont créé ime personnalité ç a marche tris bien quand on frappe chez vous ça finissait trop tari

P a r exemple si un verbe est souvent accompagné d'un complément de manière, ou si nous hésitons sur le s t a t u t à accorder à un complément (argument ou C S V ) .

30

Chapitre 3 Principes

3.1

d'analyse

Principes généraux

Le dépouillement d'énoncés présents dans un corpus soulève un grand nombre de problèmes concrets. Dans ce chapitre, nous montrerons en détail comment nous avons procédé en examinant notre matériel et sous quelle forme nous avons informatisé les données à analyser. Nous avons renoncé à travailler dans le cadre d'une théorie grammaticale particulière. La raison en est la suivante. Nous avons à analyser un grand nombre d'énoncés réalisés, des structures de surface. Les différentes théories grammaticales se distinguent par la composante de base adoptée et par la façon de relier cette composante de base à une structure de surface. Il y a moins de désaccords quand il s'agit de savoir comment il faut analyser cette structure de surface. A cet égard, les différentes théories grammaticales sont largement d'accord. Or, nous travaillons sur un corpus de phrases réalisées. Nous ne nous occupons pas ici de la question de savoir quelle est la nature profonde de ces phrases. C'est pourquoi il nous paraît préférable d'exposer ici les principes qui dirigent notre analyse, plutôt que de nous attacher à un seul modèle descriptif. Nous aimerions en outre que les résultats de cette étude puissent être utilisés dans n'importe quel cadre théorique. Chaque verbe dispose d'un certain nombre de places de construction qui, dans l'ordre canonique de la phrase, se répartissent des deux côtés du verbe. La place à gauche, celle du sujet, est obligatoirement occupée en français (seul le pronom impersonnel il peut manquer dans certains cas). Le sujet est défini comme le syntagme qui détermine en personne et en nombre le prédicat.1 Cette définition entraîne les conséquences suivantes: 1. Il impersonnel est considéré comme sujet, qu'il y ait un sujet dit logique dans la grammaire traditionnelle ou non:

L a seule exception étant un cas c o m m e ce sont nos amis où ce a été considéré c o m m e le sujet, malgré l'accord du verbe avec le SN2.

31

il pleut2 il me faut des livres. 2. Le pronom relatif ne peut jamais être sujet, car l'accord se fait avec l'antécédent: puisque c'est moi qui te le dis! Ce sera donc l'antécédent qui sera considéré comme le sujet. Le pronom relatif qui ne sera sujet que s'il n'a pas d'antécédent. Dans qui m'aime me suive, qui est le sujet de aime. Le nombre des places de construction à droite dépend du verbe individuel. Un verbe comme mourir n'en a pas. Manger dispose d'une place de construction à sa droite et donner de deux. Certaines de ces places sont toujours occupées, d'autres peuvent rester vides. Cela dépend de nouveau du verbe. Ainsi, la seconde place de manger peut rester vide. Le nombre des places de construction se limite à trois. Ces places de construction sont occupées par des constituants dont la nature lexicale peut varier. Une place peut être occupée par un syntagme nominal, un syntagme prépositionnel, un pronom, un adjectif, un adverbe, un infinitif (précédé éventuellement d'une préposition, et suivi de compléments qui dépendent de cet infinitif) et une subordonnée. Les possibilités pour chaque verbe individuel sont en général limitées. Elles sont liées au sens du verbe. Dans la section suivante, nous passerons en revue les types de constituants qui peuvent occuper ces places à gauche et à droite du verbe. Les compléments commutables entre eux occupent la même place. Ainsi, dans les phrases suivantes, le verbe penser est un verbe à un, deux et trois places. Ces places peuvent être occupées par des constituants de nature différente: verbe à une place on ne pense pas beaucoup et c'est malheureux vous ne croyez pas? [0] verbe à deux places toi Marylène qu'est-ce que tu penses? [0] j'ai jamais pensé à ça [0] je pense que tout le monde parle à peu près de la même façon [O] je pense pas être trop mal informé [0] verbe à trois places qu'est-ce que t'en penses toi Denis? [O] Beaucoup de verbes fréquents sont des verbes polysémiques. La question se pose de savoir si nous devons faire intervenir le sens du verbe dans la phase du dépouillement du corpus, et distinguer plusieurs verbes homonymes. Certains chercheurs,3 qui avaient,

32

2

Les exemples donnés dans ce chapitre ont été forgés par l'auteur ou proviennent du corpus d'Orléans. Ces derniers ont été marqués d'un Ό ' .

3

P a r exemple Gross (1975) et Salkoff ( 1 9 7 3 ) .

autant que possible, écarté le sens comme critère de base dans l'analyse des distributions des mots, ont constaté une certaine cohérence entre propriétés syntaxiques et distributionnelles d'une part, et propriétés sémantiques d'autre part. Nous avons trouvé plus prudent de tenir compte du sens du verbe, puisque nous ne sommes pas sûre qu'il y ait une corrélation parfaite entre les différents sens d'un verbe polysémique et leurs propriétés syntaxiques et distributionnelles. Nous nous sommes basée sur les dictionnaires de langue, de préférence sur le Lexis, s'il fallait décider si un verbe donné était polysémique ou non. La question de savoir si nous devons tenir compte de propriétés sémantiques se pose aussi sur le plan des arguments. Nous avons décidé de ne prendre en considération, dans cette partie,4 que le trait sémantique ' + / - h u m a i n ' . C'est que la propriété d'un verbe de prendre ou non un argument + h u m a i n ou - h u m a i n est un trait très caractéristique d'un verbe. Certains verbes, à sujet ou objet exclusivement +humain, se rencontrent avec des mots comme la municipalité, la ville, etc. Les phrases suivantes en donnent un exemple: la municipalité a décidé de construire ce livre a été donné par l'école [O].

un nouveau

théâtre

[O]

Ici, la municipalité équivaut à les personnes qui administrent la commune et l'école à les enseignants. Dans des contextes pareils ces mots ont été considérés comme +humains. Les animaux constituent une catégorie impossible à classer selon le trait ' + / - h u m a i n ' . Ils partagent avec les humains la qualité d'être des entités animées, qui respirent, mangent, se déplacent, etc. D'autre part, ils sont parfois traités comme des choses: ils peuvent par exemple être achetés ou vendus. Les animaux ont été classés tantôt comme +humains, tantôt comme -humains, d'après le verbe. Il est d'ailleurs rarement fait mention d'animaux dans notre corpus de phrases.

3.2

Les constituants arguments du verbe

3.2.1

Le syntagme nominal

Le syntagme nominal se compose d'un nom et d'un ou de plusieurs mots qui l'accompagnent à droite ou à gauche: un livre / un livre intéressant / aucun trois livres / plusieurs livres les livres de la bibliothèque / les livres mander

livre que j'ai

achetés

/ les livres

à

com-

Nous n'analyserons pas la structure interne des syntagmes nominaux. Seront considérés comme des syntagmes nominaux: • les noms non accompagnés d'un déterminant:

Dans le lexique nous tenons compte d'autres traits sémantiques.

33

expérience

passe

science

• les noms propres • les termes appartenant en principe à une autre catégorie grammaticale que le nom mais utilisés nominalement: beaucoup sont de notre

avis

• les pronoms possessifs: c'est votre opinion,

ce n'est pas la

mienne

• les pronoms démonstratifs (toujours suivis d'un ajout): celui (dont je t'ai parlé / de Pierre / -ci / -là) est

formidable

• les pronoms relatifs sans antécédent suivis d'une subordonnée: qui m'aime

me suive

• les pronom indéfinis (éventuellement accompagné d'un ajout à droite): aucun (0/ de ces livres) n'est intéressant tous / certains / plusieurs sont venus quelque chose ne va pas chacun (0/ d'entre vous) est libre de faire ce qu'il

veut.

Ces syntagmes nominaux seront codés soit comme 'Nqn' soit comme 'Nqc'. Le syntagme nominal peut occuper la première, la seconde et la troisième place de construction. Le S N 1 est le sujet. Le SIM2 peut remplir plusieurs fonctions dans la phrase. Il peut être le complément d'objet direct d'un verbe transitif: il lit un livre. Certains verbes intransitifs peuvent être accompagnés d'un objet dit interne, par exemple vivre dans: au fond je ne vis pas tellement

la vie d'Orléans

personnellement

[O],

Certains verbes sont suivis d'un complément de mesure, de prix ou de poids: le bifteck pèse 250 grammes ce tableau vaut 15 000 francs. Le S N 2 peut figurer dans une construction impersonnelle: il faut du courage pour faire cela on sent qu'il manque toujours quelque chose [O]. Il peut être l'attribut du sujet: 34

Pierre

est un bon

architecte.

Le SN3 est l'attribut du complément d'objet direct: ce sont de vénérables ecclésiastiques commission d'Art Sacré [ 0 ] .

3.2.2

[...]

qu'on a nommés

membres

de la

Le syntagme prépositionnel

Le syntagme prépositionnel se compose d'une préposition et d'un syntagme nominal, nom ou pronom. Ces syntagmes prépositionnels occupent la seconde ou la troisième place de construction: on ne parlera plus de cela je compte sur Paul Pierre se doutait de la vérité il va à Paris il passe pour un savant il donne un bonbon à son petit frère je mets le livre sur l'étagère ses parents la traitent en gamine.

Les syntagmes prépositionnels des énoncés précédents remplissent plusieurs fonctions dans la phrase: complément d'objet indirect, complément de lieu ou complément attributif. Certains verbes peuvent avoir deux syntagmes prépositionnels: il a parlé de vous à sa

mère.

Comme les SN2, les S P arguments du verbe peuvent être omis pour certains verbes. Pour d'autres verbes cependant, leur présence est obligatoire: *Pierre se *il va il donne un *je mets le *ses parents

doutait bonbon livre la traitent.

D'autres verbes encore peuvent être utilisés sans SP, mais alors leur sens est (légèrement) différent: on ne parlera je compte il passe.

plus

La préposition du S P est une préposition pour laquelle le verbe a été sous-catégorisé. Nous n'avons donc pas affaire à un SP, mais à un SN, dans les cas où de est une préposition partitive: ça devient

de l'intoxication

pure et simple

[0].

Lors de la mise sur ordinateur des données du corpus, nous avons spécifié la forme de la préposition. 35

3.2.3

Le pronom

Les pronoms personnels et interrogatifs n'ont pas été représentés par un symbole, comme les syntagmes nominaux et les pronoms considérés comme des syntagmes nominaux, mais ont été notés tels quels. 3.2.3.1

Le pronom personnel

Le pronom personnel non prépositionnel peut occuper la première, la seconde et la troisième place de construction. Le pronom personnel complément d'objet direct ou complément d'objet indirect est toujours un pronom clitique. Le pronom personnel ayant la fonction de sujet sera le plus souvent un pronom clitique. On peut cependant rencontrer des pronoms forts dans cette position: lui n'est pas

d'accord.

On trouve toujours des pronoms forts quand deux pronoms sujets sont coordonnés: lui et moi ne sommes pas

d'accord

ou quand le pronom sujet est l'antécédent: c'est moi qui vous le dis. Deux pronoms sujets coordonnés peuvent être repris par un pronom personnel clitique: lui et moi, nous ne sommes pas

d'accord.

Les verbes à l'impératif n'ont jamais de sujet explicite. Nous noterons cette absence de sujet comme '0impératif. Il va sans dire que nous ne tiendrons compte des clitiques que pour autant qu'ils soient liés au verbe et non de clitiques qui ont pour source un complément de nom: j'en vois le bout ou de clitiques qui forment un tout avec le verbe: en vouloir à qn., ne le céder à personne, il y va de ... 3.2.3.2

L e pronom interrogatif

Le pronom interrogatif non prépositionnel occupe la première ou la seconde place de construction. Il peut avoir un ajout à droite: qui a dit cela / qui est-ce qui a dit cela? qui as-tu vu / qui est-ce que tu as vu? qu'est ce qui se passe? qu'as-tu vu / qu'est-ce que tu as vu? lequel gagnera / lequel des coureurs cyclistes Nous ne prendrons pas en compte ces ajouts. 36

gagnera?

3.2.3.3

Le pronom clitique 'se'

Le clitique se se rencontre avec deux classes de verbes: des verbes transitifs directs ou indirects et les verbes pronominaux. D a n s le premier cas se est la pronominalisation d ' u n complément ' N ' ou 'à N ' humain: Paul

se

Pierre

lave se

nuit.

D a n s le second cas, se n ' a pas pour source un nom: Pierre

s'arroge

*Pierre

des

arroge

droits

des droits

à

Marie.

Le se des verbes transitifs directs et indirects sera traité c o m m e les autres clitiques. se des verbes p r o n o m i n a u x forme un tout inséparable avec le verbe. 5

L'ensemble 'se

V ' se comporte c o m m e un verbe simple et peut prendre des compléments ou non. verbe s'épanouir et s'abonner

n'en a pas, le verbe s'arroger

est suivi d ' u n S N , les verbes

Le + Le

s'apercevoir

d'un SP.

Certains verbes n'existent que s o u s la forme pronominale.

D ' a u t r e s connaissent une

forme simple et une forme pronominale, mais alors les deux formes ont des structures arguméntales si différentes qu'il faudrait parler de deux verbes. Ces différences sont de nature syntaxique et/ou sémantique. Les verbes pronominaux peuvent avoir des compléments que les verbes simples ne peuvent pas avoir et vice versa: Pierre

se trompe

*Marie

Pierre

se réveille

*Marie

Pierre *La

trompe

réveille

casse

d'adresse Pierre

en Pierre

la branche

branche

se casse

d'adresse

sursaut en

sursaut

d'une d'une

seule

seule

main main.

D ' u n point de vue sémantique on peut distinguer plusieurs cas: • Les verbes n ' o n t pas le m ê m e sens: se tromper douter

de

it tromper

qn., se douter

de qc. et

qc.

La question de savoir comment il faut classer une phrase pronominale ne va absolument pas de soi, comme l'affirment à plusieurs reprises Boons, Guillet et Leclère (1976:120-162). C'est également notre expérience. Si le pronom se (ou son équivalent) n'est pas nettement réfléchi ou réciproque, nous avons considéré le verbe en question comme un verbe pronominal (par exemple «e permettre) Le se d'une construction pronominale 'se partie du corps' (Pierre se lave les mains) n'a pas été considéré comme un argument, meus comme faisant partie du complément d'objet direct.

37



Le sujet du verbe pronominal ne participe pas activement à l'action exprimée par le verbe, alors que le sujet du verbe non pronominal est agent d'un point de vue sémantique: se réveiller



et réveiller

qn.

Le sujet du verbe pronominal est non animé, alors que le sujet du verbe non pronominal est animé: se c a s s e r e i

casser.

Certains verbes de la classe des verbes transitifs directs peuvent subir une transformation avec se: S N 1 + V + S N 2 — SIM2 + se + V : on vend bien cet cet article

article

se vend

bien.

Nous considérerons cette construction comme une construction dérivée.

3.2.4

La subordonnée

La position du premier argument du verbe peut être occupée par une subordonnée introduite par la conjonction que, éventuellement précédée de le fait: (le fait)

que Pierre

soit parti

m'étonne.

Pareilles subordonnées peuvent être le sujet de certaines sous-classes de verbes seulement. Certains verbes en outre n'acceptent pas le fait

que.

Plusieurs classes de verbes peuvent être suivies d'une subordonnée. Ce complément est introduit par une conjonction (qui peut être précédée d'une préposition) et par un pronom ou un adverbe interrogatifs: ( a ) je crois

que c'est

( b ) je tiens

à ce qu'on

bon soit

( c ) je ne sais pas si c'est

la

correct bonne

( d ) je ne sais pas qui a pu vous dire ( e ) je ne vois pas où il a bien pu

ça

aller.

Certaines combinaisons 'verbe + élément de liaison' imposent une contrainte sur le verbe de la complétive (cf. l'exemple ( b ) ) . Le subjonctif peut aussi être amené par une négation ou une interrogation portant sur le verbe: ( f ) je ne comprends

pas qu'il ait pu faire

( g ) comprenez-vous

qu'il ait pu faire

cela

cela?

Nous tiendrons compte de ces facteurs. Le pronom qui introduit la complétive peut être relié au verbe de cette complétive: ( h ) je me demande

à qui il

pense.

Nous analyserons comme suit les deux verbes tensés de (h): se demander penser: 38

: I r e place je, 2me place qui P;

I r e place il, 2me place à qui.

3.2.5

La phrase

Les verbes de communication peuvent être suivis (ou précédés) d'une phrase qui ne peut pas être considérée comme une complétive (le mot de liaison manque), mais qui néanmoins dépend du verbe qui l'introduit. Dans la langue écrite ces phrases sont facilement reconnaissables: ce sont des citations entourées de guillemets. Dans la langue parlée, ces guillemets manquent évidemment, mais il n'est pas difficile de reconnaître ces cas: je vous dis faut pas y aller nous sommes

[0]

en train je vous disais de construire

[O].

Gross (1975) dénomme cette propriété ' P ' . Nous adopterons le même symbole.

3.2.6

L'infinitif

Beaucoup de verbes peuvent être suivis d'un infinitif, éventuellement précédé d'une préposition: ils feront construire il vient de partir il commence à comprendre c 'est pour rire. Les infinitifs peuvent être accompagnés (à gauche et à droite) d'éléments qui en dépendent: il faut faire des sacrifices c'est trop demander. Nous ne ferons pas entrer en ligne de compte les arguments de l'infinitif. Certains verbes n'admettent qu'un groupe restreint d'infinitifs (avoir, être, pouvoir, devoir par exemple). Ainsi, l'infinitif qui suit le verbe se souvenir est toujours complexe et se compose d'un auxiliaire à l'infinitif suivi d'un participe passé: je me souviens d'avoir fait cela *je me souviens de faire cela. Nous tiendrons compte de ces cas spéciaux. Les verbes utilisés dans les exemples donnés ci-dessus sont suivis d'un infinitif dont le sujet est identique au sujet du verbe tensé. D'autres verbes sont suivis d'un infinitif qui n'a pas le même sujet que le verbe tensé: j'ai vu Pierre

partir.

Ici, la seconde et la troisième place de construction de voir sont occupées par un complément complexe ' S N 2 + Inf où le S N 2 est sujet de l'infinitif. La position du premier argument est parfois occupée par un infinitif, éventuellement précédé de le fait de ou de de, et suivi de compléments qui dépendent de cet infinitif: 39

voir cette formation de rochers vaut bien un détour le fait d'avoir tué l'homme n'avait pas changé son caractère d'étudier et de travailler ferme ne l'empêche pas de voyager temps.

de temps

en

L'infinitif sujet peut être rejeté en fin de phrase: trop facile

3.2.7

serait

d'y relever

des

fautes.

L'adjectif

Une place de construction de certains verbes peut être occupée par un adjectif qui est alors argument du verbe. Il faut distinguer ce cas d'avec celui de l'adjectif déterminant le syntagme verbal ou un autre argument, mais non argument du verbe lui-même. Ce n'est pas difficile: le premier est obligatoire et est toujours pronominalisable en le, quelle que soit sa forme. Cela n'est pas le cas pour l'adjectif non argument: elle paraît heureuse *elle paraît elle le paraît il partit content il partit *il le partit. Les verbes qui appartiennent à cette catégorie peuvent être divisés en deux grandes classes: 1. les verbes qui entrent dans la construction ' S N l + V + adj': il est

malade;

2. les verbes qui entrent dans la construction ' S N l + V + S N 2 + adj': je Pierre parti.

croyais

A l'intérieur de la deuxième classe on peut distinguer deux sous-classes:6 • les verbes (par exemple croire, juger, trouver) qui admettent également une complétive: je crois Pierre intelligent je crois que Pierre est intelligent • les verbes qui n'admettent pas de complétive: Paul rend sa femme heureuse *Paul rend que sa femme est

Cf. Willems (1981:139-141)

40

heureuse.

D'après Willems (1981:140) cette dernière sous-classe comprend trois verbes:

maintenir

conserver,

et rendre.

Les verbes qui entrent dans la structure ' S N l + V -f adj' ont deux places de construction. Il est vrai que l'ensemble ' V + adj' est souvent considéré comme une seule entité d'un point de vue sémantique, mais sur le plan syntaxique ' V ' et 'adj', tout en entretenant des liens étroits, doivent être considérés comme deux entités distinctes. Pour les verbes qui entrent dans la construction ' S N l + V + S N 2 + adj', les choses sont moins simples. Ces verbes ont-ils trois places de construction ou deux? O n trouve, dans la théorie linguistique, deux points de vue à l'égard de ces verbes. Gross ( 1 9 6 8 : 1 1 8 - 1 1 9 ) fait dériver cette construction ' S N l + V + S N 2 + adj' d'une structure sous-jacente ' S N l + V +

P', par

l'intermédiaire d'une construction infinitive:

je crois que Pierre est parti —• je crois Pierre être parti —* je crois Pierre parti. Ce point de vue pourrait constituer un argument pour considérer ces verbes comme des verbes à deux places: la seconde place serait occupée par deux éléments qui constituent en fait un constituant complexe, une phrase enchâssée à verbe non fini ou 'small clause'. Ruwet (1982) avance des arguments en faveur d'une autre hypothèse, l'hypothèse nulle, selon laquelle des verbes comme croire et juger seraient sous-catégorisés pour [ + / - N P Pred] et [ + / - P], et qui ne nécessiterait aucune transformation. Un de ses arguments est que le verbe rendre ne peut pas s'insérer dans le cadre ' S N l + V + S N 2 + P ' ou ' S N l + V + S N 2 + Inf'. Il trouve plus simple de rendre compte de ces différences dans le lexique. O n devrait alors parler de trois places de construction. Nous suivrons ici Ruwet. Ce choix n'implique nullement une prise de position théorique. Il nous paraît tout simplement plus commode, pour notre analyse, de ne pas faire occuper une même place de construction par deux éléments lexicaux. Si nous mettons le S N 2 sur la seconde place et l'adjectif sur la troisième, il n'y a aucune confusion possible avec d'autres constructions. Nous considérons les adjectifs dans les phrases suivantes comme des adverbes, étant donné que les formes sont invariables:

ta soupe sent bon *la soupe sent bonne ses paroles sonnent faux *ses paroles sonnent fausses. Certaines phrases sont ambiguës. D a n s il mange partie du S N la soupe

froide

la soupe froide,

le mot froide

fait-il

ou est-il complément du verbe à lui seul? Seul le contexte

permet de déterminer à quel cas nous avons affaire. Un autre cas d'ambiguïté est formé par une forme simple du verbe être suivi d'un participe passé. Dans:

la lampe est

allumée 41

être est-il auxiliaire ou verbe attributif? Dans des cas pareils, le contexte est crucial. La présence de certains compléments adverbiaux (ou la possibilité de les ajouter) peut indiquer s'il s'agit d'une action ou d'un état (par exemple ensuite, le plus tôt possible, aujourd'hui ou hier, qui indiquent qu'il s'agit d'une action, et depuis de longues années ou depuis pas mal de temps qui indiquent qu'il s'agit d'un état). Ce critère n'est pas parfait. La phrase A huit heures la lampe est allumée peut exprimer une action et un état. La Grammaire Larousse mentionne le critère de la forme du participe simple antéposé (§549). Dans: Le corps du concierge sur ces

fièvres

isolé, il avait téléphoné

à Richard

pour le

questionner

inguinales

(l'exemple provient de la Grammaire

Larousse)

le complément antéposé entretient une relation temporelle d'antériorité avec le reste de la phrase et indique donc une action. Le cas échéant, nous utiliserons ce critère comme test. S'il est possible, dans le contexte, d'antéposer la phrase ambiguë en complément à une autre phrase, nous avons affaire à une action, sinon, à un état.

3.2.8

L'adverbe

Soit les exemples suivants: Alain

habite



il a bien agi envers cela va loin cela sent bon on le traite mal.

nous

Dans ces exemples, l'adverbe est lié au verbe par la valence. Cette place doit être occupée. Si on supprime l'adverbe, la phrase devient agrammaticale (les deux premières phrases), ou le sens du verbe change (les trois phrases qui suivent). Les adverbes peuvent avoir des ajouts à gauche ou à droite: il court (aussi) frappez (plus)

vite (que fort.

moi)

Ces syntagmes adverbiaux seront considérés comme des adverbes.

3.3

Les opérateurs métadiscursifs

Il existe des énoncés qui, sans contenir de verbe de communication, portent sur un autre énoncé. O n pourrait les considérer comme des opérateurs métadiscursifs. 7 Il s'agit d'énoncés comme si vous voulez, je crois, je pense, voyez-vous, il me semble, etc., qui sont utilisés

Judge & Healey (1983;1985:455-458) utilisent le terme "bridging elements".

42

par le locuteur, souvent de façon parenthétique, pour garder le contact avec son interlocuteur, nuancer son discours, etc. Leur fonctionnement dans le discours a été étudié par Gülich (1970). Nous considérerons ces énoncés comme des entités lexicales dont nous n'analyserons pas la structure arguméntale. Ils apparaissent tels quels dans notre lexique. Les opérateurs métadiscursifs ont en commun qu'ils sont presque toujours au présent et qu'ils ont un argument en moins en comparaison des emplois 'normaux' du verbe en question. Ce dernier trait fait qu'il n'est pas toujours facile de les délimiter par rapport aux emplois elliptiques et par rapport à la propriété " P " .

3.4

Les compléments du syntagme verbal

Les compléments du syntagme verbal ou C S V ne sont pas nécessaires à la construction du verbe. Leur place dans la phrase est beaucoup plus libre que celle des arguments du verbe. Ils peuvent prendre différentes formes:

SN: SP: Adj: Adv: SAdv: Inf: P:

je ne conduis pas souvent (la nuit) (sur le plan technique) on utilise le franglais [0] il partit (content) j'élève mes enfants (chrétiennement) [0] il me craint (beaucoup plus que ma femme) [0] elle part (chercher ses affaires) on a découvert ça (quand je suis arrivé).

Le nombre des C S V n'est pas limité, comme c'est le cas pour les arguments du verbe, mais dans la pratique on en trouve rarement plus de trois. Le contenu sémantique des C S V n'est pas prévisible à partir du verbe, contrairement à ce qui est le cas pour les arguments. Nous préciserons donc le contenu sémantique des CSV.

3.5

Autres décisions concernant le dépouillement du corpus

Dans cette section nous traiterons un certain nombre de problèmes concernant les propriétés verbales prises en compte ou écartées lors du dépouillement du matériel.

3.5.1

Les phrases à construction passive, à construction impersonnelle et à construction pronominale à valeur passive

Les constructions verbales traitées dans 3.2 peuvent être considérées comme des constructions de base des verbes en question. Un grand nombre de verbes admettent des constructions dérivées: la construction passive, la construction impersonnelle et la construction pronominale à valeur passive. Les propriétés syntaxiques d'un verbe déterminent 43

s'il peut être utilisé dans une construction dérivée. La construction passive et la construction pronominale à valeur passive sont réservées aux verbes qui entrent dans la construction ' S N 1 + V + SN2'. La construction impersonnelle est possible pour les verbes intransitifs, les verbes pronominaux et les verbes transitifs utilisés dans la construction passive et dans la construction pronominale à valeur passive. D'après Dubois (1967;1968:80-103), l'emploi de la construction passive est lié à des conditions sémantiques qui dépendent de l'ensemble de la proposition plutôt que du verbe. La construction impersonnelle, au contraire, semble liée plutôt à des conditions sémantiques émanant du verbe: elle ne se rencontre que pour un nombre assez restreint de verbes.8 La question se pose de savoir comment il faut traiter les verbes qui sont utilisés dans ces constructions dérivées. Celles-ci ont en commun que le constituant qui dans la phrase active correspondante occupe la première place est déplacé à gauche ou est éliminé et que la place du sujet est occupée par le S N 2 du verbe actif (pour la construction passive et la construction pronominale à valeur passive) et par le pronom impersonnel il (pour la construction impersonnelle). Deux questions se posent ici: (1) comment faut-il traiter ces constituants qui occupent, dans la construction dérivée, une autre place que dans la construction de base; (2) quel est le statut du complément d'agent, du pronom réfléchi se et du pronom personnel il. Le complément d'agent est-il argument ou C S V ? Il a pour source un argument (le sujet), mais il n'est jamais obligatoire. Le pronom se doit-il être considéré comme argument? Et le pronom impersonnel il est-ii sujet ou non? Ces questions ont été beaucoup discutées en théorie descriptive. Nous ne voulons pas en aborder la discussion ici, elle dépasserait le cadre de cette recherche. Notre description est une description de surface. La solution la plus sage nous paraît pour l'instant de grouper ensemble, pour chaque verbe à part, les phrases à construction dérivée. Les constituants occuperont la place qu'ils occupent dans la construction de surface. Le complément d'agent sera considéré comme un argument, qui occupera la seconde place. Le pronom réfléchi sera considéré comme faisant partie du verbe, tout comme l'auxiliaire être pour la construction passive.

3.5.2

Place occupée par deux éléments solidaires

Une place de construction du verbe peut être occupée par deux constituants coréférentiels. Il existe alors une relation anaphorique9 entre le pronom clitique et le syntagme nominal ou prépositionnel ou le pronom fort détaché: mon mari justement il a ses parents il parle cet homme [O] il parle lui [O] il lui parle à cet homme [O],

malades

[O]

Du moins en ce qui concerne les verbes intransitifs. Voir Willems ( 1 9 8 1 : 7 2 - 7 6 ) . Π arrive que cette relation anaphorique soit partielle. Dans Les eaux usées général à la dérive le pronom clitique ils est anaphorique avec les eaux usées pas pour le genre.

44

ils partaient en pour le nombre,

Ces formes couplées sont fréquentes dans la langue parlée, surtout pour le sujet. 1 0 Mais d'autres constituants aussi peuvent avoir une construction double. La construction est parfois triple: mon mari il est vraiment professionnel

lui [O].

La question se pose de savoir si les formes lexicales ou semi-lexicales couplées à un clitique se situent dans la prédication, ou au contraire s'en détachent et devraient être considérées c o m m e des éléments mis en relief. Jeanjean ( 1 9 8 1 : 1 0 2 - 1 0 3 ) rejette une analyse en termes de relation 'thème-propos' ou 'information ancienne-information nouvelle'. Elle s'appuie sur deux arguments: 1. Les formes lexicales couplées avec un clitique sujet sont beaucoup plus nombreuses que les formes lexicales couplées avec un clitique c o m p l é m e n t . O n voit difficilement c o m m e n t une analyse en termes de 'thème-propos' rendrait c o m p t e de ce fait. 2. Les clitiques ont un c o m p o r t e m e n t qui diffère selon la personne: - Les clitiques du type ii/elle sont plus souvent couplés en sujet que les clitiques du t y p e je. - Les clitiques du type me sont plus f r é q u e m m e n t couplés (avec une forme semilexicale du type moi) que leurs homologues sujets. Nous suivrons l'analyse de Jeanjean ( 1 9 8 1 ) et prendrons en c o m p t e les formes couplées illustrées par les exemples donnés ci-dessus. Si, par contre, la f o r m e lexicale ou semi-lexicale se détache n e t t e m e n t de la prédication proprement dite, nous ne tiendrons pas c o m p t e de l'élément détaché.

3.5.3

Coordination et juxtaposition

Des termes, des groupes de termes, des propositions et des phrases qui se situent sur le m ê m e plan sont coordonnés quand ils sont reliés au moyen d'un m o t approprié, et juxtaposés quand ils sont placés l'un à côté de l'autre sans qu'il y ait un m o t de liaison. Nous nous limiterons ici à la coordination et la juxtaposition pour a u t a n t qu'elles concernent les constituants arguments du verbe. Nous traiterons successivement la coordination et la juxtaposition de verbes tensés, et la coordination et la juxtaposition d'arguments du verbe. Lorsque deux ou plusieurs verbes tensés sont coordonnés ou juxtaposés le sujet peut manquer devant le second et le troisième verbe: ( a ) Jean va et vient ( b ) Pierre sourit, lui chuchota quelque chose et partit. Dans ces cas-là nous suppléerons le t e r m e sous-entendu, et analyserons ( a ) et ( b ) c o m m e suit:

Voir Jeanjean (1981) qui procure des données quantitatives.

45

(a') Jean va et Jean vient ( b ' ) Pierre sount, Pierre lui chuchota

quelque

chose et Pierre

partit.

La coordination ou juxtaposition de verbes à un temps composé peut entraîner la suppression d'un clitique et de l'auxiliaire: (c) je les ai vus et

entendus.

Cette phrase sera analysée avec les termes sous-entendus: (c') Je les ai vus et je les ai

entendus.

Deux ou plusieurs constituants qui se situent au même niveau par rapport au verbe peuvent être coordonnés ou juxtaposés: Pierre et Marie sont d'accord je n'ai pas vu votre frère et votre soeur je voudrais les voir et leur parler on est un peu fatigué un peu énervé [O] j'ai donné cet esprit à mes gars à mes commis

[O],

Comme les termes coordonnés et juxtaposés sont toujours de la même catégorie grammaticale, ces cas ne posent pas de problème et peuvent être analysés comme s'il n'y avait qu'un seul terme.

3.5.4

La phrase négative et la phrase interrogative

La phrase négative se caractérise par la présence de particules négatives. Nous considérerons les particules négatives portant sur le verbe comme des opérateurs et en tiendrons compte. Les phrases interrogatives peuvent être divisées en deux groupes: les questions oui-non et les questions à mot [K], Les phrases oui-non sont formées à l'aide de trois procédés: • l'intonation seule: tu • l'insertion de est-ce

viens?

que: est-ce

• le déplacement du sujet:

que tu

viens?

viens-tu?

Nous ne tiendrons pas compte du procédé interrogatif, uniquement de la présence d'un opérateur interrogatif. Les trois phrases interrogatives données en exemple seront toutes les trois codées de la même façon. Les phrases à mot [K] se caractérisent par un mot interrogatif, qui s'ajoute à chacun des trois procédés interrogatifs nommés ci-dessus. Les mots [K] appartiennent à différentes catégories lexicales (pronom, adjectif, adverbe) et peuvent occuper toutes les places autour du verbe:

46

qui a dit cela? qui as-tu vu? qu'est-ce qu'il a dit? quel train as-tu pris? où vas-tu? combien de victimes sont

mortes?

Ces phrases seront toutes codées comme ayant un opérateur interrogatif et par ailleurs traitées selon les principes exposés dans la section 3.2.

3.5.5

L'ordre des constituants

Comme l'ordre des constituants dans la phrase ne dépend pas du verbe constructeur, mais de facteurs discursifs, 11 nous en ferons abstraction.

3.5.6

Temps et mode

Nous tiendrons compte du temps et du mode du verbe tensé ou d'éléments tensés dépendant du verbe s'ils proviennent de contraintes émanant du verbe étudié. C'est le cas du temps et du mode de la complétive dans les deux phrases suivantes: je ne me souviens pas pourquoi j'ai dit ça je ne dis pas qu 'il ait tort. Mais dans. j'espère

qu'on pourra trouver pour lui une orientation

qui lui plaise [O]

le subjonctif plaise de la relative n'est pas amené par un verbe tensé. Nous n'en tiendrons donc pas compte.

3.5.7

Constructions caractéristiques de la langue parlée

Un corpus oral contient évidemment de nombreux énoncés qui, du point de vue de la construction, portent les caractéristiques de la langue parlée: anacoluthes, hésitations, reprises, phrases inachevées, phrases agrammaticales. C'est la raison pour laquelle beaucoup de grammairiens ont considéré le français parlé comme un secteur marginal et l'ont écarté. A tort, croyons-nous, il s'agit de phénomènes inhérents à la langue parlée et qui méritent d'être étudiés pour leur propre compte, et non d'être écartés comme des faits gênants. En général, il n'est pas difficile de voir ce que le locuteur a voulu dire, et de comprendre la raison qui explique son comportement langagier. Mais comme nous étudions ici les constructions verbales et non des phénomènes de performance, nous devons nous munir de critères pour traiter ces énoncés de façon cohérente. Nous donnerons maintenant

Voir Deulofeu (1979:84).

47

des exemples de phrases où ces phénomènes se manifestent et indiquerons comment nous traiterons ces énoncés. Les répétitions de mots, de syntagmes ou de parties de syntagmes sont nombreuses: ( a ) je je ça j'avoue

[0]

( b ) ils sont ils sont de la région [0], Nous négligerons ces répétitions, ( a ) et ( b ) seront traités comme s'ils s'énonçaient: ( a ' ) ça j'avoue ( b ' ) ils sont de la

région.

Il arrive aussi que le locuteur répète un même énoncé. Ces phrases ne seront pas comptées si elles sont contiguës. Les phrases identiques non contiguës seront prises en considération. Parfois, le locuteur interrompt la construction amorcée et la remplace par une autre: ( c ) un homme

[0]

il est il laisse traîner

( d ) on a été la France il a fallu qu'elle se relève [0]. Nous ne pouvons prendre en compte que la partie achevée de ces séquences: ( c ' ) un homme il laisse traîner ( d ' ) la France il a fallu qu'elle se

relève.

Dans ( c ) et (d), la phrase qui résulte du changement de construction est grammaticale. Il arrive aussi que le locuteur confonde deux constructions, et que le résultat soit agrammatical: (e) c'est ça que je voudrais

que vous fassiez

comprendre

[0].

Le locuteur a amalgamé deux constructions: (e') c'est ça que je voudrais vous faire ( e " ) c'est ça que je voudrais que vous

comprendre compreniez.

Si (e) est agrammatical, c'est au fond pour des raisons lexicales, non pour des raisons syntaxiques. Le verbe vouloir, utilisé ici avec une complétive au subjonctif, sera pris en considération. Seule la complétive sera traitée comme non interprétable. Il va sans dire que nous tiendrons compte des phrases agrammaticales non corrigées par le locuteur 'en cours de route'. Parfois, le locuteur hésite sur la construction syntaxique à choisir et se corrige: ( f ) j'ai pu relever ce fait qui dont je vous parle [0]. Nous ferons abstraction de cet élément remplacé, si le contexte indique qu'il s'agit d'une correction voulue, ( f ) sera ramené à: (f') j'ai pu relever ce fait dont je vous 48

parle.

Les corrections qui portent sur des éléments lexicaux et qui n'affectent pas la construction syntaxique ne nous intéressent évidemment pas. On peut distinguer deux types de construction non achevée: celle qui n'a pas été achevée parce que le locuteur a préféré tourner la phrase autrement, l'anacoluthe, et la construction grammaticalement inachevée, mais dont le contexte permet de conclure qu'elle est considérée comme achevée par le locuteur. Ce dernier type de phrase non achevée sera pris en considération. Parfois, le locuteur s'empêtre tellement dans ce qu'il veut dire que la séquence devient non interprétable et ne peut pas être analysée en 'verbe + arguments': ( g ) j'ai pas je suis enfin jamais

partie je suis toujours

[0],

Selon toute probabilité, le locuteur a voulu dire quelque chose comme: (g') je n'ai jamais

quitté la région

mais il n'est pas parvenu à l'exprimer. considération.

3.6

Ce type de séquence ne pourra pas être pris en

Quelques remarques concernant la réalisation pratique du dépouillement

Nous avons travaillé sur des listings présentant toutes les occurrences d'un verbe donné (à l'exception de l'infinitif et du participe présent). Chaque occurrence se trouvait au milieu d'une ligne de 124 positions avec le contexte pertinent à gauche et à droite. L'ordre dans lequel les énoncés étaient présentés était celui des témoins. Les données pertinentes pour notre étude ont été notées sur des formulaires et ensuite mises sur ordinateur. Il n'y a donc pas de lien direct avec le contexte. Cela est en soi un inconvénient. Nous avons essayé à un moment donné de coder dans le listing même des occurrences, afin de garder le lien avec le contexte et le locuteur. Cette méthode s'est trouvée excessivement laborieuse, raison qui nous a amenée à renoncer à mettre en mémoire les données de construction avec les énoncés mêmes. En général, le nombre d'occurrences par verbe n'est pas très élevé. Il est donc possible, sans trop de peine, de retrouver certaines données contextuelles à la main, si nécessaire. Certains des 250 premiers verbes de la liste du T L F n'avaient pas d'occurrences dans le corpus d'Orléans, ou y figuraient uniquement avec des formes qui n'entraient pas en ligne de compte. Il s'agit des verbes suivants: achever, couler, distinguer, écrier, embrasser, glisser, murmurer, pardonner et trembler. Dix verbes avaient un nombre grand ou très grand d'occurrences utilisables, plus de mille occurrences du verbe conjugué. Ceci concernait les verbes: aller, avoir, dire, être, faire, falloir, pouvoir, savoir, voir et vouloir. Il ne nous a pas paru nécessaire de prendre toutes les occurrences en considération: ce qui nous intéresse est la proportion entre les différentes constructions possibles d'un verbe et la proportion entre toutes les constructions, non les nombres absolus. Le nombre des occurrences effectivement dépouillées a été déterminé par les facteurs suivants: 49

• Le verbe en question est-il polysémique ou non? Un verbe polysémique connaît en général plus de possibilités de construction qu'un verbe non polysémique. • Combien de constructions possibles y a-t-il? Il faut analyser davantage d'occurrences d'un verbe ayant beaucoup de constructions possibles que d'un verbe n'en ayant pas. • Combien de constructions dérivées possibles y a-t-il? Si nous avions l'impression, après avoir analysé plusieurs centaines d'occurrences, que rien de nouveau ne se présenterait, nous nous sommes arrêtée. Sinon, nous avons continué jusqu'à ce que nous eussions dépouillé un millier d'occurrences à peu près. Pour les dix verbes en question nous avons utilisé un listing qui présentait les formes verbales dans un ordre randomisé, et non les 60 locuteurs l'un après l'autre. Toutes les occurrences des verbes qui restaient ont été analysées. Les données recueillies ont été traitées par deux programmes. Le premier programme fait des calculs concernant les constructions, le second totalise les unités figurant sur les différentes places de construction. Les données obtenues de cette façon ont été placées dans une base de données en vue de traitements ultérieurs. Dans les deux chapitres qui suivent nous exploiterons les données concernant les constructions. Nous n'analyserons pas dans cette étude les unités lexicales qui occupent les places de construction 12 ni les compléments du syntagme verbal.

3.7

Le lexique

Le lexique présente d'une autre façon les données recueillies selon la méthode décrite dans les sections qui précèdent. Il les présente, non par construction, mais par verbe. Il s'agit au fond d'un dictionnaire de verbes un peu spécial. Le principe qui organise la micro-structure de chaque entrée est la fréquence des différentes constructions. Les constructions sont rangées, en principe, de la plus fréquente à la moins fréquente. Les verbes homonymes sont également présentés dans un ordre fréquentiel. La première colonne est réservée à l'entrée. La seconde colonne donne le nombre total d'occurrences. La troisième colonne présente certaines caractéristiques syntaxiques et, s'il y a lieu, sémantiques du verbe en question. Le verbe est caractérisé d'après les places de construction qu'il possède et d'après son type grammatical. Nous distinguons cinq catégories de verbes: les verbes à une, deux ou trois places, les verbes essentiellement pronominaux (qui peuvent avoir une ou deux places), les verbes essentiellement impersonnels (qui ont deux ou trois places de construction), les verbes auxiliaires et les verbes factitifs (faire uniquement). Pour la définition du verbe auxiliaire nous renvoyons à la section 5.3.3. La quatrième colonne donne les constructions et, en italique, les constructions dérivées. L'analyse des données, telle qu'elle a été présentée dans la section 3.2, est une analyse catégorielle. Nous avons parfois indiqué pour certaines des catégories grammaticales

P a r exemple les différents pronoms clitiques, la proportion entre pronoms clitiques et noms, ou la fréquence des éléments solidaires occupant la m ê m e place de construction.

50

qu'elles peuvent remplir différentes fonctions à l'intérieur de la phrase. Une analyse en termes fonctionnels, telle qu'on la trouve dans les dictionnaires de langue, rend parfois mieux compte des propriétés syntaxiques et sémantiques d'un verbe qu'une analyse catégorielle. C'est la raison pour laquelle nous avons introduit dans le lexique certaines catégories fonctionnelles.

Il s'agit des catégories suivantes: complément attributif, complément de lieu,

complément de manière, complément de prix et complément de temps. La cinquième colonne donne le nombre d'occurrences de chaque construction. Les exemples et les remarques placées dans la sixième colonne servent à donner du corps aux données constructionnelles et quantitatives. Nous avons cherché à donner des exemples expressifs. Quant aux remarques, elles portent entre autres sur les formes catégorielles des compléments fonctionnels, sur certaines particularités des arguments, sur les compléments du syntagme verbal, sur les locutions, etc.

51

Chapitre 4 Les

constructions

dans

4.1

la

langue

verbales

parlée

Introduction

Les 241 verbes dépouillés ont fourni 21 370 occurrences d'une forme verbale conjuguée au mode personnel. 2 533 de ces occurrences sont des formes figées ou semi-figées. Il s'agit soit d'opérateurs métadiscursifs, soit d'autres formes verbales lexicalisées.1 Nous n'avons pas pris ces formes en considération dans cette partie de notre étude. Elles apparaissent uniquement dans le lexique. Restent 18 837 occurrences 'verbe + arguments'. Ce chapitre sera consacré à une première analyse, nécessairement schématique, des données présentées par ces occurrences. Nous donnerons d'abord la liste des constructions relevées, dont nous discuterons ensuite les grandes lignes. La section 4.3 sera consacrée aux grands types de construction: la construction active et les constructions dérivées. Nous passerons en revue les différents constituants qui occupent les places de construction du verbe. La langue parlée se manifeste-t-elle aussi dans le domaine des constructions verbales? C'est de cette question que traite la section 4.4. La question se pose de savoir s'il est possible de délimiter les constructions fondamentales du français, comme cela a été fait pour le vocabulaire fondamental. Cette question sera traitée dans la section 4.5. La sixième section de ce chapitre sera consacrée au problème de savoir si les verbes analysés partagent des caractéristiques syntaxiques et sémantiques.

Par exemple être dans la formule de mise en relief c 'est ... que, ou il y a comme préposition.

53

4.2

Constructions verbales relevées dans le corpus d'Orléans

Pour composer une liste comme notre liste de constructions, il est indispensable de généraliser. Les catégories ' N q n ' et ' N q c ' par exemple réunissent les noms et les pronoms humains et non humains, qu'ils soient doublés d'un (autre) pronom ou non. Soit les deux phrases suivantes: j'ai appris moi à parler français à quatre on me l'a déjà donnée votre adresse.

ans

Dans un premier temps elles ont été codées comme suit: [je_moi] V [à inf] || synt.prép. de temps [on] V [la.Nqc] [me] || adv. de temps. Pour la liste de constructions, ces données ont été réduites respectivement à ' N q n V à i n f et à ' N q n V Nqc à Nqn'. Nous avons cependant mentionné explicitement les complétives et les infinitifs en fonction de sujet doublés d'un démonstratif, puisque ces deux catégories n'apparaissent jamais en fonction de sujet sans être doublées d'un démonstratif. Les données valencielles des phrases ça m'arrive ça ne sert

souvent

que je fais

à rien de faire

ça

ça

sont rendues respectivement par les formules '[ça.que Pind] V [à Nqn]' et '[ça.de inf] V [à Nqc]'. De cette façon, nous laissons ouverte la possibilité de classer autrement une construction dont l'analyse logique n'est pas toujours évidente. Quant aux prépositions, si la préposition est toujours la même avec un scheme de valence donné, nous mentionnons cette préposition. Par exemple, à dans expliquer qc. à qn.. Si on trouve plusieurs prépositions pour un même verbe dans un même scheme de valence, nous avons mis 'prép'. Cela est par exemple le cas pour les verbes locatifs et les verbes de mouvement où la préposition n'est pas fixe ( a l l e r à Paris, chez le coiffeur, dans un musée, vers qn., par exemple). Mentionner toutes les prépositions effectivement utilisées aurait mené à une liste extrêmement longue et difficile à manipuler. Le lecteur qui voudra savoir quelles sont les prépositions utilisées avec un verbe donné pourra trouver ce renseignement dans le lexique. Nous donnons d'abord les constructions, sur quatre colonnes. La première colonne est réservée au sujet, la seconde au verbe. ' V ' veut dire que le verbe est à la forme active, 'être V é ' qu'il est à la forme passive, et 'se V ' à la forme pronominale à valeur passive. Les verbes intrinsèquement pronominaux et impersonnels se regroupent sous ' V ' . La troisième et la quatrième colonne sont réservées aux constituants qui occupent la seconde et la troisième place de construction. La cinquième colonne donne le nombre total des occurrences. Les sixième et septième colonnes mentionnent respectivement le nombre de verbes différents qui figurent dans une construction donnée et un verbe témoin. Ce verbe témoin est le verbe ayant le plus grand nombre d'occurrences pour cette construction. O n pourra trouver un exemple de la construction en se reportant à l'entrée du verbe en question dans le lexique.

54

Il serait extrêmement fastidieux de donner ici des listes de tous les verbes qui s'utilisent dans les constructions. à nous2.

Le lecteur qui aimerait disposer de ces données pourra s'adresser

N o u s mettrons à sa disposition une disquette contenant cette partie de notre

banque de données.

A l'adresse suivante: Vrije Universiteit, Faculteit der Letteren, De Boelelaan 1105, 1081 HV Amsterdam

55

Liste des constructions verbales constructions Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqc Nqn Nqc Nqn Nqn Nqc Nqn Nqc Nqn il il Nqn Nqn Nqc Nqn Nqc Nqn Nqc Nqn Nqc Nqn Nqn Nqn Nqn Nqc Nqn Nqn Nqn -

Nqc Nqn Nqn Nqn il Nqc Nqc 56

occ. v.diff. V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V se V V V être Vé V être Vé V V V V V V

Nqc

-

-

-

inf que Pind Nqn -

prép Nqc Nqc de Nqc Nqc à Nqn à inf inf adv Nqc inf à Nqc Nqc adj de inf Nqn que Ρ adv à Nqn prép Nqc " P" "P" adj Pint ind

-

à Nqn -

prép Nqc -

à Nqn -

-

-

Nqc que Psubj

-

-

-

inf

-

-

-

prép Nqn Nqc de Nqn Nqn à Nqc Nqc

adj

-

adv -

à Nqn

3904 2686 1673 976 739 717 610 494 472 399 319 299 291 270 248 220 185 176 163 163 162 148 144 142 126 120 115 104 101 99 95 94 86 82 79 73 72 71 62 60 57

154 149 27 31 89 69 29 64 34 42 13 20 7 36 13 4 24 16 8 19 27 8 24 13 18 11 8 8 11 22 16 13 21 2 37 13 12 7 6 17 16

verbe témoin faire travailler pouvoir trouver connaître exister aller être s'occuper donner plaire arriver devoir aller y avoir falloir arriver mettre être essayer intéresser penser s'appeler écrire passer dire dire être savoir écrire trouver penser élever falloir écrire rester mettre s'occuper y avoir servir donner

Nqn Nqn Nqc Nqn il ¡1 Nqn Nqn Nqn Nqn Nqc Nqn Nqc ça/de inf ¡1

V V V V V V V V V V V V V V V V Nqn V Nqc V Nqc V Nqn V Nqc V ça/que Pind V il V Nqn V il V il V Nqn V Nqn V Nqn être Nqn V il V Nqc être V Nqn V V Nqn V Nqn V V Nqn Nqn V Nqn être V Nqc V être Nqc Nqn V V Nqn

Nqc Nqn de Nqc -

que Psubj que Ρ que Pind Nqn Nqc -









à inf Nqc de inf à Nqn que Pind Nqc Nqn de inf adj avec Nqn que Pind Nqc de inf de Nqc Nqc de inf Pint ind de inf prép Nqc sur Nqc que Pind par Nqn que Psubj dans Nqc par inf que Ρ Nqc à inf Nqn adv Nqn de Nqn prép Nqc Nqc Nqn

Nqc prép Nqc -

inf -

à Nqn inf à Nqc à Nqn -

de Nqc à Nqn -

à Nqn -

adv -

à Nqn -

à Nqn à Nqn à Nqn -

à Nqn à Nqn -

à inf à Nqn à inf -

inf adj

57 57 55 47 47 44 42 41 39 37 36 36 35 34 32 30 30 28 26 26 25 21 21 20 20 20 19 18 17 16 16 15 14 14 14 13 13 13 12 12 11 11 11 11 11

2 11 9 4 6 4 5 7 14 8 7 12 2 4 2 3 10 3 2 5 7 1 2 1 4 3 1 4 6 8 4 9 1 9 2 3 3 3 5 3 2 2 3 1 4

appeler mettre venir entendre falloir falloir assurer entendre comprendre demander commencer savoir permettre arriver sembler y avoir mettre permettre paraître parler faire faire arriver parler falloir s'agir demander demander payer compter paraître écrire falloir se trouver finir falloir passer apprendre mettre payer y avoir venir mettre laisser trouver

il il Nqc Nqn Nqn Nqn Nqn il Nqc Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn il Nqc Nqc Nqn Nqn il

V V V V V être Vé être Vé V être Vé V V V V V être Vé V V V V être Vé V V Nqc V Nqc V Nqn V Nqn V Nqn V Nqn V Nqn V Nqc V Nqn V Nqn V IMqn V Nqn V Nqn V Nqn V ça/de inf V ça/que Pind V V Nqc Nqc V Nqc être Vé Nqc être Vé Nqn V Nqn V Nqn V 58

-

-

adj " P" Npr Nqc à inf par Nqc que Pcond à Nqn -

Nqc Nqc Nqn avec Nqc Nqc de Nqc Nqn prép Nqn sur Nqn par Nqn Nqc -

-

prép Nqn -

à Nqn -

adv de inf de Nqn à Nqc -

de inf -

prép Nqc -

à Nqc à Nqn sur Nqc Nqn Nqc Nqc pour inf à ce que Psubj le que Ρ adj Nqn prép Nqc Nqc prép inf Nqc sur Nqc Nqn Nqn Nqn de Nqc Nqn de inf en Nqc Nqc -

Npr Nqn à Nqc adv Nqc Nqc Nqc

-

à Nqc -

conj en Nqc par Nqc

10 10 9 9 9 9 9 9 8 8 8 8 8 8 8 8 7 7 7 7 7 6 6 6 6 6 6 6 6 5 5 5 5 5 5 5 5 5 4 4 4 4 4 4 4

2 1 2 1 5 3 6 1 7 2 2 6 6 7 1 1 1 2 2 7 3 2 2 5 1 2 2 1 1 2 1 3 2 5 3 2 4 2 1 3 3 3 3 3 1

falloir faire vouloir s'appeler prendre amener prendre sembler offrir payer faire attendre accompagner coucher payer s'agir empêcher passer tomber amener se passer falloir servir agir appeler mettre tenir faire trouver mettre prendre payer appeler changer empêcher se trouver faire arriver s'appeler amener ajouter payer entendre tourner entendre

Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn ça/de inf ce/de inf il Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn ça/de inf de inf -

Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc

V V V V se V V V V V V V V V V V être Vé être Vé se V se V V V V V V V V V V être Vé être Vé V V V V V V V V V V V V V V être Vé

Nqn Nqn de Nqc de inf à Nqc adj que Ρ -

Nqc à inf dans Nqc inf que Ρ que Psubj de Nqc par Nqc à Nqn prép Nqc -

Nqc Nqn Nqn Nqn à Nqn de Nqc de Nqn que Psubj à Nqc comme Nqn adv à Nqn de inf que Pind -

Nqn Nqn adv avec Nqc comme Ρ par Nqc par Nqn pour Nqc pron pers adj

à Nqn pour Nqn à Nqc adj -

à à à à

Nqn Nqn Nqc Nqn

-

à Nqn -

prép Nqc que Ρ comme adj de Nqn prép Nqn inf avec Nqn à Nqn adj -

à Nqc à inf adj à Nqn -

4 4 4 4 4 4 4 4 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2

3 1 1 1 1 1 1 1 2 3 2 3 1 1 2 3 2 2 3 2 1 1 2 2 1 1 1 2 1 1 2 1 2 2 2 1 1 2 2 2 2 1 1 1 2

laisser prendre passer trouver reconnaître servir être sembler rapporter ajouter donner donner paraître empêcher faire tirer donner donner mettre payer aimer mieux considérer séparer envoyer laisser parler parler trouver recevoir considérer faire plaire s'occuper paraître préparer aider rendre paraître aller tomber commencer commencer servir être reconnaître

Nqc Mqn Mqn Mqn Mqn Mqn Mqn Mqn Mqn

être V é V V V V V V

sur Nqc

V

-

Nqc Nqc Nqc Nqc adj

Mqn Mqn

V V V

adv adv après Nqc par Nqc

Mqn Mqn Mqn ç a / d e inf ç a / d e inf ce/que Psubj

V V être V é V V V

prép que Pind prép Nqn Nqc adj adj

I 1

V V

Nqc

1 1 1

V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V ν ν ν

1 -

Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc

(50

-

Nqc Npr avec Nqn comme Nqc dans Nqc à Nqn avec Nqn de inf -

adj -

à Nqn -

à Nqc adv prép Nqc

2 2 2 2 2 2

1

compter appeler appeler faire considérer jeter

1 1 1 1

s'entendre faire attendre commencer

1 1

être trouver

2 1 1

paraître

2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2

1 1

poser faire faire être venir

2 2 2 2 2 2 1 1 1 1 1

1 1

Nqc Nqc Nqc Nqn Nqn Nqn à Nqn à ce que Ρ adv à inf autour de Nqc autour de Nqn -

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

se passer rester commencer rester paraître rester s'occuper aider apprendre mettre rendre retirer mettre rappeler pousser amener empêcher tenir mettre tourner tourner

avec Nqn

1 1 1 1 1 1

1 1 1 1 1 1

apparaître servir venir faire être

Nqc Nqn à inf à inf que Psubj à inf de Nqc -

Nqc Nqc

-

à Nqn à Nqn -

à inf Nqn à inf adj de Nqc pour inf à Nqn adv sur Nqc de inf

-

comme Nqc à Nqn de Nqc à Nqn du fait que Pind en sorte que Pind pour inf -

1 1 1 1 1 1 1

commencer

Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn

V V être Vé être Vé être Vé être Vé V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V V ν ν ν ν ν ν ν ν ν ν ν être Vé être Vé

prép Nqc sous Nqc comme Nqc en Nqc par Nqc par Nqn "P" -

Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqn Nqn Nqn Nqn à Nqn à ce que Ρ adv adv après Nqn avec chez Nqn comme Nqn comme Ρ de inf de inf de inf inf pour Nqn pour inf pour inf prép Nqc que Ρ que Ρ que Pind que Pind que Psubj que de inf adj de Nqc

à Nqn

à Nqn prép Nqc à Nqc à Nqc sur Nqc sur Nqn chez Nqn comme adj conj Ρ que Psubj sans inf sur Nqn Nqc chez Nqn comme Nqn en Nqn de inf à Nqn pour inf

comme Nqc inf prép Nqc adv

avec Nqn inf à Nqn adv de Nqc prép Nqc à Nqn

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

paraître tomber considérer passer donner prendre dire devoir payer tirer écrire considérer mettre faire passer prendre payer amener considérer former empêcher essayer acheter mettre courir jouer frapper devenir s'exprimer considérer appeler se mettre trouver passer s'occuper s'entendre aller répéter trouver penser se mettre dire penser porter frapper

Pint ind Ça ça/à inf ça/de inf ça/de inf ça/inf ça/inf ça/que Ρ ça/que Ρ ça/que Pind ça/Pint ind ça/que Psubj ça/que Psubj ça/que Psubj ça/que Psubj ce/que Pind ce/de inf ce/que Ρ de inf de inf/ça 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 nf/ça que Ρ que Pind que Psubj

62

V V V V être Vé V V V V V V V V V V être Vé V V V V V V V V V V V V V V V V se V V V V V

adv que Pind adj Nqn -

-

à Nqn -

-

-

a Nqn

-

-

-

à Nqn à Nqn à Nqn Nqc Nqn adj adj -

Nqc adv Nqn Nqc Nqc Nqc Nqc Nqc Nqn Nqn Nqn Nqn à Nqn adj adj par inf Nqc Nqc Nqn Nqn adv

-

à Nqn -

à Nqn -

dans Nqc de Nqc en face de prép Nqn à Nqc à Nqn de Nqc de inf conj de inf que Psubj -

importer paraître devenir intéresser permettre prendre plaire arriver plaire arriver échapper sembler étonner paraître sembler convenir être être intéresser jouer arriver sortir tomber rentrer arriver manquer sortir intéresser entendre être être finir créer faire sauver tuer importer

La liste compte 303 constructions différentes. 103 de ces constructions n'apparaissent qu'une seule fois. Un tiers des constructions rend donc compte d'une centaine d'occurrences seulement, soit de 0.5% du total. A l'autre extrémité de la liste nous observons le phénomène inverse, comme le montrent le tableau 4.1 et la figure 4.1. La première construction couvre plus de 20% des occurrences, les quatre premières constructions 49%, les dix premières 67%. Les pourcentages de couverture descendent plus lentement pour les fréquences moyennes. Les constructions 11 à 20 couvrent ensemble 12.39% des occurrences, les constructions 21 à 30 6.16%, les constructions 31 à 40 3.62% et les constructions 41 à 50 2.57%. Les 42 premières constructions rendent compte de 90% de toutes les occurrences. construction Nqn V Nqc Nqn V Nqn V inf Nqn V que Pind Nqn V Nqn Nqc V Nqn V prép Nqc Nqc V Nqc Nqn V de Nqc Nqn V Nqc à Nqn

nombre d'occ. 3 904 2 686 1 673 976 739 717 610 494 472 399

% de couverture 20.73 14.25 8.88 5.18 3.92 3.81 3.24 2.62 2.50 2.12

12 670

67.23

Total

Tableau 4.1: Pourcentages de couverture des dix premières constructions sur l'ensemble des occurrences Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqc Nqn Nqc Nqn Nqn

V V V V V V V V V V

Nqc inf que Pind Nqn prép Nqc Nqc de Nqc Nqc à Nqn

1 1 I I I 1 I I I 1

1 (14.25 1 1 (5.18 %) 1 (3.92 %) 1 (3.81 %) 1 (3.24 %)

(8.88

%)

1 (2.62 1 (2.5 %ï 1 (2.12 %)

Figure 4.1: Pourcentages de couverture des dix premières constructions sur l'ensemble des occurrences Si on consulte la 'Liste des constructions verbales', on s'aperçoit que le rapport entre nombre d'occurrences d'une construction donnée et nombre de verbes différents utilisés avec 63

cette construction est très variable. Pour les dix premières constructions nous trouvons les moyennes 'occurrences / verbes différents' suivantes: 25.4, 18, 62, 31.5, 8.3, 10.4, 21, 7.7, 13.8 et 9.5. Beaucoup de verbes connaissent une construction à un argument, ou une construction à second argument nominal. Il existe beaucoup plus de verbes qui se construisent de cette manière que de verbes qui se construisent avec un infinitif, une complétive ou un argument prépositionnel. Ces derniers cependant ont un nombre d'occurrences élevé avec ces constructions. La construction 'Nqn V i n f a une moyenne 'occurrences / verbes différents' très élevée (62). 3 II s'agit de verbes comme aimer, aller, devoir, pouvoir, vouloir. Pour ce qui est de la construction 'Nqn V que Pind', nous la rencontrons avec des verbes tels que aimer, apercevoir, croire, espérer et penser. Quant à la construction 'Nqn V prép Nqc', elle a un nombre d'occurrences élevé avec arriver, habiter, se mettre, partir, rentrer, rester et venir. La plupart de nos verbes fréquents entrent dans plus d'une construction, et de nombreux verbes s'utilisent dans beaucoup de constructions. Lexicalement parlant, la diversité est très grande, chaque verbe a un profil différent (voir aussi la section 4.6). Du point de vue syntaxique, la situation est également complexe. Il est vrai que les premières constructions portent la grande masse des occurrences. Mais cela ne veut pas dire que les constructions moins fréquentes soient utilisées avec un verbe seulement, loin de là. Des 200 constructions ayant un nombre d'occurrences supérieur à 1, un quart (53) s'utilise avec un verbe seulement. Pour les autres constructions, les occurrences se répartissent toujours sur plusieurs verbes. Les constructions à verbe actif à un seul argument sont évidemment peu nombreuses, les possibilités étant réduites, mais elles occupent des rangs élevés. Le contraire est vrai pour les constructions à trois arguments. La c o m b i n a t o l e riche explique le nombre élevé de ces constructions, mais celles-ci n'occupent pas les premiers rangs: la première construction à trois arguments vient au dixième rang seulement. Nous venons de voir que la 'Liste des constructions verbales' compte 303 unités. C'est un nombre considérable. Quand on étudie la liste, on voit que ce nombre élevé est dû en partie à trois facteurs: 1. les différentes prépositions (seize), 2. les différents modes de la subordonnée 'que P' (trois), 3. les constituants phrastiques en position de sujet doublés d'un démonstratif (onze cas différents). On peut se demander combien il reste de constructions si on élimine ces sources de variété. Nous avons donc réduit toutes les prépositions à 'prép', les différentes formes de subordonnée en 'que' à 'que P', et les constituants phrastiques doublés d'un démonstratif à la forme simple ( ' i n f , 'prép i n f , 'que P' et 'Pint ind'). Nous obtenons alors 177 constructions. Nous constatons que le nombre de constructions n'apparaissant qu'une seule fois a

Tout comme ses pendants à sujet non animé 'Nqc V inf' (41.6) et à sujet impersonnel 'il V inf (55).

64

beaucoup diminué: il n'en reste que 43, ce qui représente toujours un quart de toutes les constructions (au lieu d'un tiers pour la liste non réduite). Cette opération renforce encore le poids des dix premières constructions, comme le montre le tableau 4.2. construction Nqn V Nqc Nqn Nqn Nqn Nqn Nqn Nqc Nqc Nqn Nqn

V V V V V V V V V

Total

inf prép Nqc que Ρ Nqn Nqc prép inf Nqc prép Nqn

nombre d'occ.

% de couverture

904 686 673 314 218 739 717 494 478 418

20.73 14.25 8.88 6.98 6.47 3.92 3.81 2.62 2.54

13 641

72.42

3 2 1 1 1

2.22

Tableau 4.2: Pourcentages de couverture des dix premières constructions de la liste réduite La seconde liste de constructions obtenue après réduction de la première compte donc 177 constructions. C'est un nombre toujours considérable. Il nous semble difficile de pousser plus loin la réduction de la liste. Il est vrai qu'on pourrait réunir les catégories 'Nqn' et 'Nqc', mais cela ne nous semble pas très souhaitable: la liste perdrait beaucoup de sa valeur informative. L'opération de réduction montre aussi qu'il est impossible de dire combien de constructions le français compte en théorie ou en pratique. Le nombre de constructions observées dépend étroitement des critères qu'on se donne. La question se pose de savoir dans quelle mesure toutes les constructions verbales possibles sont représentées dans les deux listes. Pour en savoir plus, nous avons effectué un calcul qui mesure l'écart entre les constructions observées (celles de la première liste) et les constructions nouvelles qu'on rencontrerait dans un corpus plus étendu. Nous avons utilisé deux modèles statistiques pour voir lequel conviendrait le mieux à nos données, le modèle de Waring-Herdan-Muller et le modèle 'étendu' de Yule-Simon. 4 La figure 4.2 montre les résultats.

Voir Baayen 1989: 1 6 0 - 1 6 7 et 1 7 8 - 1 8 4 au sujet de ces modèles.

65

Figure 4.2: Courbes théoriques relatives aux données observées 1 = données, 2 = modèle étendu de Yule-Simon (t — 370, β = 0.747), 3 = modèle de Waring-Herdan Müller (α = 0.94, χ = 1.97). 66

D'après le modèle de Waring-Herdan-Muller, l'ensemble des constructions verbales possibles s'élève à 600. D'après le modèle 'étendu' de Yule-Simon, dont la courbe s'approche le mieux de celle de nos données, l'ensemble des constructions possibles est infini, car β < 1. Nous obtenons cette approximation avec un t de 370 et un β de 0.747.

En règle

générale, un ensemble est plus grand à mesure que t et β sont plus petits. Or, t est énorme, ce qui accentue le fait que V = o o vaut dans la limite de Ν —• oo, en d'autres termes que la limite V —> o o n'est atteinte que très lentement.

Ce fait est en corrélation avec une

seconde mesure de la richesse des types, à savoir ρ -

n l / N , en l'occurrence = 0.006. La

chance de trouver une construction nouvelle est donc très réduite, malgré le caractère infini de l'ensemble des constructions possibles: nous devons continuer à dépouiller des énoncés jusqu'au moment où nous aurons trouvé 166 constructions différentes. Nous avons alors une chance de trouver une construction nouvelle. Nous pouvons conclure de ces calculs que les 303 constructions observées ne sont pas les seules possibles, mais qu'elles en représentent certainement la grande majorité.

4.3 4.3.1

Construction active et constructions dérivées Introduction

Le tableau 4.3 regroupe l'effectif des énoncés selon les grands types de construction verbale: la construction active et les constructions dérivées, les constructions passive, pronominale en fonction de passif et impersonnelle. Nous voyons que les constructions dérivées occupent actif 18 240

impersonnel

passif 295

pronominal passif

= 96.8%

= 1.6%

= 0.6%

192

0

1

109

= 1%

Tableau 4.3: Distribution par type de construction une place marginale. 3.2% seulement des énoncés ont une construction qui n'est pas à la voix active. Si, dans certaines théories grammaticales, ces constructions dérivées sont beaucoup discutées, cela doit être pour d'autres raisons que pour leur poids numérique. Les trois sections suivantes seront consacrées à un examen sommaire des constructions active, passive et pronominale en fonction de passif. La construction impersonnelle sera étudiée plus en détail dans le chapitre 5.

4.3.2 4.3.2.1

La construction active Remarques générales

Nous distinguons trois places de construction de part et d'autre du verbe tensé. Ces places peuvent être occupées par un constituant ou non.

Il y a en principe huit schémas de

67

construction possibles, dont six se réalisent dans notre corpus. Le tableau 4.4 présente les différentes possibilités et en donne les occurrences. ' + ' signifie que la place est occupée et ' - ' qu'elle n'est pas occupée. Le sujet, en principe obligatoirement présent, manque construction V + V V + V V + V + V V -

-

-

-

-

+ + + -

+ -

-

+ + + +

nombre d'occ. 3 420 6 12 923 156 1 629 106 0 0

% de couverture 18.75 .03 70.85 .86 8.93 .58

18 240

100.00

Total

Tableau 4.4: Occupation des places de construction pour la construction active tout de même dans certains cas en langue parlée. Dans la plupart des cas il s'agit d'un il impersonnel qui manque pour un verbe essentiellement impersonnel. Dans les autres cas, l'argument manquant est également un pronom clitique, surtout je. La structure ' + / - V ' regroupe les verbes à un argument et les emplois absolus de verbes à deux et à trois arguments. La structure ' + / - V H—', la structure de loin la plus fréquente, regroupe les verbes à deux arguments et les verbes à trois arguments dont le troisième argument n'a pas été réalisé. Quant aux verbes ayant en principe trois arguments, il arrive que la seconde place reste vide, alors que la troisième place est occupée. Le second argument est alors suppléé par le contexte. L'argument manquant est toujours un nom de personne ou de chose, le troisième argument est le plus souvent ' i n f (47 x 5 ) ou 'à Nqn' (37 x 6 ) . Nous donnerons maintenant des exemples des six configurations réalisées et de différents types de constituants. + V - tu n'écoutes pas à la cuisine Roselle pour entendre si elle pleurait? un éventail de salaires qui ne montera pas beaucoup ils savent que c'est du verre du plomb mais en dehors de ça ils ignorent hein elle nous a entendues _

eh bien elle a

expliqué

V - Il s'agit des verbes entendre (36 occ.), envoyer (1 occ.), laisser (8 occ.) et voir (2 occ.). Certains de ces cas sont très lexicalisés: entendre parler (22 occ.), entendre dire (11 occ) et laisser tomber (3 o c c . ) . L a dispersion est plus grande que pour 'inf': huit verbes différents, dont deux ont plus de dix occurrences (demander ( 11 occ.) et expliquer (11 occ.)).

68

faudrait

oui

oui

+ V + dès que les enfants auront fini les études fini déménagement l'information maintenant gagne absolument la totalité de la population par l'intermédiaire de livres il aura découvert ce qui lui plaisait je connais pas mal de conseillers municipaux on s'est quittées avec beaucoup de regret il y avait visage

un donateur

ils vous méprisent

qui exigeait

il faut

que ce saint

qu'ils montrent

Gaston

par exemple

qu'ils sont supérieurs

ait

son

à vous

il y a les professeurs qui décident il va y avoir un examen quand la conversation porte sur des sujets ordinaires dès que je tombe dessus je le fais on était un vendredi ou le jeudi ça me plairait d'être bouquiniste nous passons - V +

pour

des ambassadeurs

paraît-il

auprès

d'eux

ils comptent

+ V +

faire

3 000 habitants

alors

vous savez faut

beaucoup

de

+

alors vous voulez que je vous explique la différence? j'enregistre et puis après je le porte au bureau c'était fini c'était zéro il obtenait rien de moi moi je vous répondrai que ça me plaît beaucoup lorsqu'on lui défendait d'avoir des livres alors il prenait le Larousse ai demandé où je pouvais trouver des perles je la pousse pas je la laisse tranquille une petite robe d'hiver qu'ils paieraient 6 000 francs tu ne veux tout de même pas me dire qu'une femme qu'ils la mettent de la soudure? vous mettez quinze jours à l'exécuter + V -

monde

je

à

lui

faire

+ c'est moi qui leur vous avez entendu alors on paie pas

4.3.2.2

montre parler des cher

fouilles?

La place à gauche du verbe

La place du sujet, à gauche du verbe tensé, est occupée par quatre types de constituants: un (pro)nom de personne, un (pro)nom de chose, un il impersonnel et un constituant phrastique (un infinitif, précédé ou non d'une préposition, ou une complétive). Il peut 69

aussi manquer, comme nous avons déjà vu plus haut. Le tableau 4.5 fournit les données numériques concernant l'occupation de cette place. La figure 4.3 en donne une illustration graphique. constituant

nombre d'occ.

% de couverture

Nqn

14 501

Nqc

2 861 609

79.5 15.7

162 108

3.3 .9 .6

18 240

100.0

il imp 0 constituant phrastique Total

Tableau 4.5: Occupation de la place du sujet dans la construction active

Nqn

_ | (79.5 %)

1 I

Nqc il imp 0 constituant phrastique

1

(15.7

• 3.3 % ) 1 (0.9 % ) 1 (0.6 % )

Figure 4.3: Occupation de la place du sujet dans la construction active Nous constatons que le syntagme nominal humain est de loin le sujet le plus fréquent. Cela n'est pas étonnant pour un corpus parlé, où les locuteurs parlent souvent d'eux-mêmes ou de leurs proches. Le constituant phrastique sujet apparaît rarement à la position du sujet, c'est-à-dire à gauche du verbe. Et il est, dans cette position, toujours doublé d'un démonstratif: quoique

d'être

célibataire

ça joue

un

rôle.

En français, la place à gauche du verbe est, en principe, réservée au thème, à l'information connue. L'information nouvelle apparaît plutôt à la fin de la phrase. Or, un élément phrastique contient par définition (parce qu'il a une certaine longueur) une quantité d'information nouvelle. C'est pourquoi il est préférable de le rejeter en fin de phrase. Si, dans l'exemple donné ci-dessus, le locuteur a gardé l'élément phrastique en position de sujet, il a introduit un élément thématique, ça, entre l'élément phrastique et le verbe. Ainsi, il en fait au fond deux prédications: je suis célibataire et ça joue un rôle. Dans la grande majorité des cas cependant, le constituant phrastique sujet figure à droite du verbe, dans une construction de mise en relief, dislocation à droite ou pseudo-clivée: ça τη 'étonnerait qu 'il le fasse ce qui m'intéressait c'était de partir 70

à la campagne

tous les

dimanches.

Nqc

I

0

I

I (31.4 %)

inf

I

prép Nqc

I

que Ρ

i

Nqn

I

prép Nqn

I

1 (4 %) I (3.5 %)

I (19.4 %) I (12.4 %) I (8.9 %)

Ί (7.7 %) I (6.6 %)

prép ¡nf

I

adv

( ! • (2.4 %)

adj



"P"

(1.7%)

•(1.3Ä)

Pint ind

D(o.7%)

prép que Ρ

| (0.05 %)

reste

| (0.03 %)

Figure 4.4: Occupation de la première place à droite du verbe

4.3.2.3

La première place & droite du verbe

Le tableau 4.6 reproduit les données concernant les constituants occupant la première place à droite du verbe. La figure 4.4 montre nettement l'importance proportionnelle des différentes possibilités. constituant

nombre d'occ.

% de couverture

Nqc

5 724

31.4

0

3 532

19.4

inf

2 270

12.4

prép Nqc

1 622

8.9

que Ρ

1 410

7.7

Nqn

1 208

6.6

prép Nqn

714

4.0

prép inf

634

3.5

adv

429

2.4

adj

316

1.7

"P"

245

1.3

Pint ind

120

0.7

prép que Ρ

10

reste

6

Total

18 240

100.0

Tableau 4.6: Occupation de la première place à droite du verbe Si le sujet type est un constituant (pro)nominal humain, le second argument type est un

71

constituant (pro)nominal non humain. Le constituant phrastique, infinitif et complétive, et le syntagme prépositionnel non humain précèdent le constituant (pro)nominal direct humain. Quant au constituant 'prép inf, celui-ci regroupe 'à i n f (353 occ.), 'de i n f (263 occ.), 'par i n f (15 occ.), et 'pour i n f (3 occ.). Si nous réunissons les grandes catégories, nous constatons que le syntagme nominal vient en tête, avec 3 8 % , suivi du constituant phrastique ( 2 5 . 5 % ) . Dans 1 9 . 4 % des cas, la seconde place n'est pas occupée, soit parce que le verbe est un verbe à un seul argument, soit parce que le second argument n'a pas été réalisé. Le syntagme prépositionnel occupe une place relativement modeste avec 12.9%. Voici, pour chacun des constituants concernés, un ou plusieurs exemples: Nqc quand je vois ça je ferme ma porte ça reste deux classes vous comprenez ça fera dix ans inf je savais

lire les noies

[de musique] avant

de savoir

lire autre

chose

prép Nqc les gens se sont jetés

sur les denrées

alimentaires

puis on a été chez mes parents

qui habitent

ils avaient

utile

à 25 kilomètres

d'ici

que Ρ jugé

que c'était

pas

Nqn moi j'entends mal alors la télévision m'intéresse je suis une bourgeoise je resterai une bourgeoise

moins

prép Nqn voyez

ce qui nous

reste

prép inf je crois j'ai

qu'on

essayé

arrivera

de chercher

à pousser

ces

une situation

techniques-là à Paris

dans

différentes

branches

adv je resterai il est évident ici que ça fait adj 72

toujours

très bien vis-à-vis des gens du

quartier

les plaines de la Beauce je crois qu'elles resteront longtemps

cultivables

"P" vous leur demandez

comment allez-vous

voter?

Pint ind je demande

quel jour il serait libre

prép que Ρ je crois que ça tient à ce que les professeurs 4.3.2.4

poussent pas assez les

enfants

L a seconde place à droite du verbe

L'examen du tableau 4.7 et de la figure 4.5, qui présentent les données concernant les constituants qui occupent la troisième position d'argument, révèle que la majorité des énoncés n'a pas d'argument en troisième position. constituant 0 prép Nqn prép Nqc adj adv inf prép inf Nqc Nqn conj ( P ) que P prép adj Total

nombre d'occ. 16 506 867 367 124 115 104 69 60 14 6 4 4

% de couverture 90.5 4.8 2.0 .8 .6 .6 .4 .3

18 240

100.0

Tableau 4.7: Occupation de la seconde place à droite du verbe 'Prép Nqn' est le constituant numériquement le plus important à cet endroit et, pour être plus précis, 'à Nqn', qui a 826 occurrences. Pour 'prép Nqc' la distribution sur les différentes prépositions est plus égale. Pour le second argument, 'à i n f était numériquement plus important que 'de i n f . Pour le troisième argument, cela est toujours le cas, mais à une échelle beaucoup plus réduite: 30 contre 25. Voici un exemple pour chaque constituant en question: prép Nqn vous allez vous demander

pourquoi je vous raconte

ça 73

0

ι • (4.8 %) 0 (2.0 %) | (0.8 %) 1 (0.6 %) 1 (0.6%) 1 (0.4 %) 1 (0.3 %) 1 (0.08 %) 1 (0.03 %) 1 (0.02 %) 1 (0.02 %)

prép N q n prép N q c adj adv inf prép inf Nqc Nqn conj ( P ) que

P

prép adj

ι

Figure 4.5: Occupation de la seconde place à droite du verbe prép N q c

je casse des oeufs je les mets dans un

récipient

adj moi je trouve ça très important

que les speakers les speakerines parlent bien

adv

les parents les mettent

là pour en être

débarrassés

inf

est-ce qu'on vous entend poser les

questions?

prép inf

ce qui m'empêche

pas du tout d'apprécier

certaines chansons

actuelles

Nqc

c'est devenu ce qu'on appelle un panier de crabes Nqn

on voyait des gens qu'on appelle des chronométreurs

se

promener

conj ( P )

une femme qui est manée [...] peut parfaitement travailler trois quatre cinq demi-journées par semaine comme elle l'entend elle met ses rendez-vous quand elle veut que Ρ

j'aime

beaucoup mieux le français

que les maths

prép adj

ils ne se considéraient 74

pas comme

malheureux

4.3.3

La construction passive

Commençons par présenter les données. Il y a en tout 295 phrases à construction passive. 158 phrases ont un sujet (pro)nominal humain, 137 un sujet (pro)nominal non humain et 2 phrases un sujet phrastique doublé d'un démonstratif. Nous trouvons, pour 295 occurrences de phrases passives, 78 verbes différents. La dispersion est donc très grande. La construction Nqn être Vé X s'utilise avec 36 verbes différents. Certains verbes ont un nombre d'occurrences élevé: élever en a 32 et payer 27. Pour Nqc être Vé X nous trouvons 56 verbes différents. Ici, il n'y a qu'un seul verbe ayant plus de dix occurrences: écrire (11 occ.). La distribution est donc plus égale que pour la construction avec un sujet humain. Quatorze verbes seulement s'emploient aussi bien avec un sujet animé qu'avec un sujet non animé. Voici quelques exemples de la phrase passive: les vieillards ne sont pas assez aidés ce sac n'a pas été acheté ici ils [ = les journalistes et les speakers] sont tellement écoutés par de gens que s'ils disent une bêtise ça se répercute à quarante d'exemplaires [...] plutôt que ça leur soit donné directement par des livres.

beaucoup millions

Nous nous sommes posé la question de savoir si la construction passive est utilisée de préférence avec un sujet animé. 7 Le test de Pearson fait sur les résultats mentionnés plus haut donne un χ 2 de 1.815, associé à une probabilité entre 0.10 et 0.20. La différence n'est donc pas significative. La liste complète des verbes utilisés dans une construction passive contient des verbes qui peuvent être utilisés avec un sujet animé, mais non avec un sujet non animé, et vice versa. Nous avons donc composé une seconde liste dans laquelle nous n'avons gardé que les verbes qui peuvent s'utiliser aussi bien avec un sujet animé qu'avec un sujet non animé. On obtient alors 117 phrases avec un sujet animé et 97 phrases avec un sujet non animé. Le test de Pearson sur ces résultats donne un χ2 de 1.869, qui a également une probabilité entre 0.10 et 0.20. L'hypothèse nulle ne peut donc pas être rejetée. Il reste cependant que notre corpus contient beaucoup plus de verbes qui, à la voix active, se construisent avec un second argument non humain (175 verbes) que de verbes se construisant avec un second argument humain (109 verbes). Si on tient compte de cette donnée, on devrait trouver, logiquement, 61.6% d'énoncés passifs à sujet non animé, contre 38.4% d'énoncés passifs à sujet animé. Or, cela n'est pas le cas. Vue de cette façon, la

C'est ce qu'affirme Verluyten (1985:87): Ainsi on a observé que le passif préfère un sujet animé et qu'il est plus difficile avec un sujet non-animé; [ensuite, Verluyten cite des exemples de Dubois (1967;1968:92), qui d'ailleurs ne dit pas en ces termes que le passif préfère un sujet animé, et qui est beaucoup plus nuancé. Puis, Verluyten conclut:] Si l'observation est erronée, elle n'en est pas moins, sans aucun doute, statistiquement valable.

75

construction passive s'utilise en effet de préférence avec un sujet animé. 36 phrases seulement, 12 %, ont un complément d'agent, 8 dont 17 phrases à sujet humain et 19 phrases à sujet non humain. Ce complément d'agent est dans la plupart des cas un complément en par. Il n'y a qu'une seule occurrence d'un complément d'agent en de. On pourrait se demander si ce facteur 'animé-non animé', dont nous avons vu plus haut qu'il joue un certain rôle pour la construction passive dans son ensemble, joue aussi pour la combinaison 'sujet Vpassif complément d'agent'. Dubois (1967;1968:91-95) formule des hypothèses à propos de la nature des syntagmes nominaux impliqués dans une transformation passive. Selon Dubois, la caractéristique essentielle de la phrase passive est que l'ordre des syntagmes y est l'inverse de celui que présente la phrase active. S'il existe un ordre préférentiel des syntagmes sujet et objet qui dépende de la nature des substantifs, la transformation passive, plus coûteuse que la production d'une phrase active, sera réalisée pour rétablir l'ordre canonique des syntagmes. (P-91) Dubois formule plusieurs hypothèses: 1. Dans la langue parlée, la transformation ne jouera pas si les syntagmes sont tous deux de la classe des animés. La phrase passive n'est pas impossible, mais lorsqu'elle se présente, c'est à cause de facteurs contextuels. 2. La transformation ne jouera pas lorsque la phrase active sera formée de deux syntagmes non animés. Si le passif se réalise, c'est de nouveau par suite de facteurs contextuels. 3. Là où ces facteurs contextuels ne jouent pas, la transformation passive permet de rétablir l'ordre 'sujet animé —+ complément d'agent non animé'. Voyons ce qu'il en est pour notre corpus. Le tableau 4.8 reproduit les données pour les compléments d'agent en par. Nous pouvons en conclure que: • 20% des phrases ont un sujet et un complément d'agent animés. L'écart entre ces 20% et les 25% auxquels on s'attendrait si la distribution sur les quatre constructions était aléatoire n'est pas très grand. L'hypothèse de Dubois semble donc incorrecte. • Il y a en effet très peu de phrases passives formées de deux syntagmes non animés. • Nous avons 46% de phrases passives 'Nqc Vpassif par Nqn', où "l'ordre canonique" n'a pas été rétabli. L'hypothèse de Dubois est donc manifestement fausse.

Cf. Weiner et Labov (1983:34) qui constatent, pour l'anglais, que les phrases passives sont tout à fait usuelles dans la conversation et le langage spontané, mais que la grande m a j o r i t é de ces phrases n ' a pas de complément d'agent. Corbeil (1968;1971:72) a 3 . 1 9 % de phrases avec complément d'agent sur l'ensemble de son corpus de textes écrits, nous en avons 0.2% seulement.

76

construction

nombre d'occ.

pourcentage

7

Nqn Vpassif par Nqc

9

20% 26%

Nqc Vpassif par Nqn

16

46%

Nqc Vpassif par Nqc

3

8%

Nqn Vpassif par Nqn

Tableau 4.8: Distribution des sujets et des compléments d'agent sur la classe des animés et celle des non animés



Si on groupe les constructions par sujets 'Nqn' et 'Nqc', et qu'on y applique le test de Pearson, on obtient un χ 2 de 0.26, qui n'est pas significatif.

Si on groupe les

constructions par compléments d'agent 'par Nqn' et 'par Nqc', le test de Pearson donne un χ 2 de 3.46, associé à une probabilité entre 0.10 et 0.05.

Ces résultats

sont tout à fait à l'opposé des hypothèses de Dubois: il n'y a pas de préférence pour un sujet animé ou non animé, mais par contre une préférence très nette pour un complément d'agent animé. Ces calculs faits pour établir s'il y a effectivement une préférence de la construction passive pour un sujet animé, et d'un ordre préférentiel pour le sujet et le complément d'agent montrent nettement qu'il n'est pas inutile pour un linguiste d'asseoir ses affirmations sur une base empirique solide, et qu'il a tort de s'appuyer sur sa seule intuition.

4.3.4

La construction pronominale à valeur passive

Il y a 110 phrases dont le verbe tensé entre dans une construction de forme ' X se V ( X ) ' . D'après Ruwet ( 1 9 7 2 : 9 5 ) , la construction pronominale à valeur passive (ou construction moyenne): [ . . . ] ne peut pas être utilisée pour signifier un événement particulier localisé en un point du temps; elle peut en revanche prendre des valeurs habituelles, normatives, ou génériques. Voici des exemples de chacune de ces trois valeurs:

ça se dit partout hein alors c'est pas français ça se dit pas oh ben tu sais ça s'apprend. Notre corpus ne contient en effet aucun exemple qui signifie un événement particulier

localisé en un point du temps, c'est-à-dire des phrases du type: * cette cravate ça s'est porté hier pendant toute la

soirée.

(Ruwet 1972:96) Cela va à l'encontre de la remarque de G. et R. Le Bidois ( 1 9 6 7 ; 1 9 6 8 : 4 0 9 ) , qui posent que

77

L'éminent romaniste [Κ. Sneyders de Vogel] déclare que cette construction n'est possible que si le verbe exprime "une action habituelle"; aucun des exemples que nous avons cités, sauf celui de La Rochefoucauld, ne marque une action habituelle; chacun d'eux, au contraire, exprime une action unique, voire exceptionnelle, (cf. l'ex, de Bossuet). La remarque de Sneyders de Vogel ne s'applique donc, selon nous, qu'à un petit nombre de phrases du type: "Cela se fait", "cela ne se dit pas", dont nous dirons un mot plus loin. G. et R. Le Bidois ne donnent que des exemples historiques. Ce qui était possible au 17me et au 18me siècle ne l'est apparemment plus aujourd'hui, ou, de toute façon, ne se pratique plus. Ruwet (1972:95) remarque que les grammairiens traditionnels ont noté que la construction moyenne se rencontre fréquemment avec des adverbes comme facilement ou fréquemment, ou encore avec le sujet cela ou ça. C'est en effet le cas dans notre corpus. Sur 109 phrases à construction moyenne non impersonnelle, nous en avons 59 avec ça et 3 avec un nom dédoublé de ça. Des 47 autres phrases, 31 ont pour sujet un nom en position d'antécédent: il y a un nivellement

qui se fait

13 ont pour sujet un nom: le problème se pose avec toute son acuité avec ma seconde fille 3 ont pour sujet un pronom: moi je ne savais plus tellement

comment

il s'écrivait

alors je l'ai regardé.

39 phrases ont un complément de manière et 6 phrases un complément de degré: vous avez des tas de mots qui s'écrivent pareil ça s'abandonne de plus en plus en raison de la

télévision.

Les grammairiens sont d'accord pour dire qu'en français moderne la construction moyenne avec un complément d'agent est impossible. D'après Ruwet (1972:110-111), le contreexemple: l'éducation

du coeur se fait par les mères

n'en est pas un, puisque le syntagme en par SN est, en réalité, non un agent, mais un complément d'instrument. C'est en effet de cette façon qu'il faut interpréter le complément en par de la phrase suivante de notre corpus: ce sont des catégories qui se sont créées par

connaissances.

Sur 109 phrases pronominales actives à valeur passive la grande majorité, 105, ont un sujet non animé. Quatre phrases ont un sujet animé, toutes avec le verbe reconnaître et toutes les quatre dans une construction avec dislocation à droite avec le pronom démonstratif ça à gauche du verbe: 78

ça se reconnaît

aussi à ça vous savez un ouvrier.

Une phrase pronominale à valeur passive à sujet animé n'est nullement impossible, mais est apparemment rare. C'est une différence importante avec la construction passive. D'après Grevisse (1936;1980:697) et G. et R. Le Bidois (1967;1968:409), le pronominal passif s'emploie fréquemment comme impersonnel. Notre corpus ne comprend qu'un seul exemple de cette construction: il s'est créé une espèce de couche comme ça de gens ayant certains

moyens.

Notre corpus contient 27 verbes différents entrant dans cette construction. Tous sont transitifs directs.9 Certains verbes ont une fréquence relativement élevée avec cette construction: écrire (18 x), faire (16 x), poser ( 10 x), sentir ( 11 x) et υοι>(11 χ). Les verbes qui peuvent entrer dans une construction passive se prêtent également à une construction pronominale à valeur passive. Les deux ensembles de verbes qui s'utilisent dans l'une ou l'autre construction ont en effet 15 verbes en commun.

4.4

Constructions caractéristiques de la langue parlée

Beaucoup des exemples donnés dans la section précédente ont un 'parfum' de langue parlée. Cet effet provient entre autres du vocabulaire (fréquence de ça par exemple), du caractère segmenté de la phrase, de l'utilisation de procédés de mise en relief, de la négation en pas. La question se pose de savoir s'il existe des constructions caractéristiques de la langue parlée. Pour répondre à cette question, on devrait faire une comparaison avec une étude quantitative sur les constructions verbales en français écrit. La seule étude qui existe, Corbeil (1971), fait une analyse en catégories fonctionnelles (sujet, complément d'objet direct, indirect, etc.) et délimite différemment entre arguments et circonstants. Il est donc impossible de comparer les fréquences des différentes constructions en français écrit et en français parlé. Notre réponse à la question posée dans le premier paragraphe de cette section ne peut donc être que subjective. Or, le phénomène le plus important par lequel le français parlé se distingue du français écrit en matière de constructions verbales nous semble être l'ellipse.10 En langue parlée, le premier, le second et le troisième argument manquent assez souvent

Le verbe canter, qui est normalement transitif indirect (causer de qc.), est utilisé de façon transitive directe dans notre corpus, probablement par analogie avec parler ou dire. Π est présent aussi avec une construction pronominale à valeur passive: mon mari a des mots qui se causent

que moi je lui demande

ce que ça veut

dire.

L'ellipse est par ailleurs un phénomène qui caractérise le français parlé en général. Cf. Judge & Healey (1983;1985:463-465).

79

(surtout le second et le troisième). Le locuteur peut omettre un constituant si le contexte contient suffisamment d'indications concernant l'argument manquant. C'est probablement un principe d'économie que nous voyons à l'oeuvre ici. Il paraît souvent fastidieux ou pédant de répéter un élément énoncé immédiatement avant. Il est possible aussi que le locuteur ne dispose pas de suffisamment de temps pour varier son discours et éviter ainsi l'ellipse. Voici deux exemples de constructions elliptiques: puis on la on la on laisse préparation d'une omelette]

automatiquement pour

un mot

avant ou quelque

un petti

d'ouvrir

peu pour

le dictionnaire

chose je lui demande

qui précède le témoin a dit: elle me demande

colle [on parle de la

qu'elle

euh je avant

demanderais

euh

quoi [dans le passage

des conseils

je lui demande

des

conseils] Il est possible de quantifier l'omission pour l'argument à gauche du verbe tensé. Il manque 162 fois. Il s'agit presque toujours d'un il impersonnel. Une quantification pour le second et le troisième argument est difficile, sinon impossible. Pour ce qui est du second argument, il est souvent impossible de dire à propos d'un verbe si nous avons affaire à un emploi à un seul argument ou à un emploi à deux arguments dont le second manque. Dans s'il y a un mot anglais

qui explique

mieux que le français

ben autant

l'employer

expliquer est-il verbe à deux arguments dont le second argument manque, ou est-il aussi verbe à un seul argument? Nous avons hésité nous-même, à propos des phrases exemples de la construction ' + V - + ' données plus haut, si le second argument manque réellement. Pour c'est moi qui leur montre cela paraît assez plausible. Mais pour les deux autres phrases? Manque-t-il un argument comme les gens ou cette marchandise respectivement dans vous avez entendu parler des fouilles? et alors on paie pas cher? C'est difficile à dire. Seulement, il est clair que l'infinitif parler ti l'adverbe cher ne se rapportent pas au sujet. C'est pourquoi nous n'avons pas voulu classer ces énoncés respectivement sous 'Nqn V i n f et 'Nqn V adv'.

4.5

Les constructions fondamentales

Nous venons de voir dans 4.2 qu'un nombre assez réduit de constructions rend compte d'un nombre d'occurrences élevé. Les 42 premières constructions rendent compte de 90% de toutes les occurrences. Nous croyons qu'on devrait tenir compte de cette donnée dans l'enseignement du français langue étrangère. Le Goffic et Combe McBride (1975), livre "essentiellement destiné à ceux qui enseignent ou qui apprennent le français", présente un inventaire des constructions à partir des verbes, adjectifs et substantifs opérateurs du Français Fondamental (1er degré). Les auteurs distinguent à peu près 35 constructions verbales différentes (voir les pages 39, 89 et 111). Cela paraît peu. Pour le nom sujet, ils ne font pas la distinction entre nom humain et nom non-humain, 1 1 contrairement à

80

ce que nous avons fait. On devrait donc peut-être multiplier ces 35 constructions par deux pour rendre plus correcte une comparaison avec nos données. En décrivant toutes les constructions des verbes du F F l , on risque d'inclure des constructions qui ne sont pas fréquentes. Nous avons comparé les 35 constructions de Le Goffic et Combe McBride avec nos 42 premières constructions. On constate que 16 ( ! ) de leurs constructions ne figurent pas parmi nos constructions fréquentes. Il s'agit dans tous les cas de constructions à trois places. 12 Il se peut que l'absence de certaines de ces constructions parmi nos 42 premières constructions soit due au caractère parlé de notre corpus. Il n'est pas improbable qu'en français parlé les constructions verbales soient plus courtes, moins étoffées qu'en français écrit. En français parlé on rencontre de toute façon plus de constructions elliptiques qu'en français écrit. Inversement, notre liste des 42 premières constructions contient des constructions qui ne figurent pas en tant que telles dans les trois listes données par Le Goffic et Combe McBride. Il s'agit notamment des constructions où la seconde place est occupée par un syntagme prépositionnel ou un adverbe des fois on va à Blois c'est par la suite que mes parents sont venus

ici

et des constructions où cette place est occupée par une phrase en discours direct vous savez quand il fait beau on dit on s'en campagne alors nos amis nous disaient vous êtes fous.

va faire

un petit tour à la

Mais dans les exemples le sujet est toujours humain, ce qui ne correspond pas à la réalité. Voici les constructions en question, suivies de la phrase exemple donnée par les auteurs. Constructions nominales: Ν V à Ν de Ν : Pierre parle de Paul à Marie Ν V Nqc à Nqc : Pierre passe son temps au jeu Ν V Nqn k Nqn : Pierre présente Paul à Marie Ν V Nqn de Nqc : Pierre charge Marie d'une affaire Ν V Nqc de Nqc : Pierre enveloppe un livre de papier Ν V Nqc de Nqn : Pierre attend de Marie un conseil Ν V Nqn de Nqn : vos parents m'ont chargé de vous (Le Goffic et Combe McBride disent de cette construction qu'elle est peu courante) Ν V Nqn attr. de l'objet : Pierre rend Marie heureuse Constructions infinitives: Ν V Nqn à inf : Pierre oblige Marie à travailler Ν V Nqc à inf : Pierre a perdu son temps à travailler Ν V Ν de inf : Pierre excuse Marie d'être en retard Ν V à Ν à inf : Pierre apprend à conduire à Marie Ν V à Ν de inf : Pierre parle à Marie de venir Constructions complétives: Ν V Ν que Ind : Pierre prévient Marie qu'il doit partir Ν V à Ν que Ind : Pierre dit à Marie qu'il est d'accord Ν V à Ν que Subj : Pierre demande à Marie qu'elle vienne

81

Parmi les 35 constructions de base de Le Goffic et Combe McBride il ne figure pas de constructions dérivées. A juste titre. Trois seulement de nos 42 constructions les plus fréquentes concernent des constructions dérivées, deux constructions passives et une construction pronominale à valeur passive. Cette petite excursion dans le domaine de l'enseignement du français langue étrangère montre nettement, croyons-nous, que les ouvrages destinés à l'enseignement auraient avantage à tenir compte (1) de données fréquentielles concernant les constructions verbales et (2) des constructions caractéristiques du français parlé. L'apprenant devrait par exemple savoir s'il est possible d'omettre un argument ou non. Cela lui permettra de mieux se débrouiller en français parlé, d'une part, de comprendre ses interlocuteurs et d'autre part, de ne pas parler 'comme un livre'.

4.6

Caractéristiques syntaxiques et sémantiques communes aux différents verbes

M. Gross et les chercheurs qui travaillent dans le même cadre méthodologique affirment qu'il n'existe pas deux verbes ayant les mêmes propriétés syntaxiques. 13 Cette affirmation, faite à propos des propriétés théoriques des verbes, est-elle vraie aussi quand il s'agit de propriétés réalisées? Nous avons tenté de vérifier cela pour notre corpus en analysant les verbes à dix occurrences ou plus ( = 165 verbes). Nous avons éliminé les verbes qui ont moins de dix occurrences, car il est évident que les verbes ayant très peu d'occurrences, et donc le plus souvent peu de constructions, ont beaucoup de chances d'avoir un profil identique. Nous constatons qu'il n'existe aucun verbe qui a exactement les mêmes propriétés qu'un autre verbe. Nous avons également essayé de voir s'il existe des groupes de verbes ayant une ou plusieurs constructions en commun. Nous avons effectué ces calculs sur les dix constructions les plus fréquentes et l'ensemble des 165 verbes dont il a été question ci-dessus. Nous trouvons, sur 165 verbes, 90 noyaux différents. Il y a donc, même si on se limite aux constructions les plus fréquentes et laisse de côté toutes les autres constructions, peu de conformité entre les verbes. Il y a un groupe de sept verbes, 4 de cinq verbes, 6 de quatre verbes, 9 de trois verbes, 17 de deux verbes et 53 verbes faisant cavaliers seuls. Les groupes sont donc en général très petits, et un tiers des verbes présente un ensemble de propriétés idiosyncrasiques. Ils ont en outre relativement peu de constructions en commun: • 3 groupes ont 6 constructions en commun • 5 groupes ont 5 constructions en commun • 10 groupes ont 4 constructions en commun • 16 groupes ont 3 constructions en commun.

Cf. peu- exemple Gross (1975:214).

82

Les autres groupes n'ont qu'une ou deux constructions en commun. Des 37 groupes contenant deux verbes ou plus, cinq seulement ont des propriétés sémantiques en commun: •

espérer,

penser



croire et

• remonter • partir, •

savoir

juger ti

retrouver

revenir

causer et

et

et

venir

parler.

Il s'agit de verbes de mouvement, d'opinion et de communication, catégories dont d'autres chercheurs ont déjà constaté la cohérence syntaxique et sémantique. Nous pouvons donc conclure que les données de notre corpus, loin d'infirmer la thèse de Gross et al., la consolident: parmi les verbes les plus fréquents, chacun a sa propre configuration de propriétés et, qui plus est, même si on se limite aux dix constructions les plus fréquentes, les verbes présentent peu de conformité.

4.7

Conclusion

Ce chapitre présente les résultats globaux du dépouillement des constructions verbales dans lesquelles apparaissent les 250 verbes les plus fréquents du français. Les conclusions qui se dégagent d'une première analyse de ces données sont les suivantes: •

Une dixième partie environ des occurrences est constituée par des opérateurs métadiscursifs.

• Nous avons trouvé 303 constructions différentes. Ces constructions représentent la majorité des constructions possibles. Les dix premières constructions couvrent près des deux tiers de toutes les occurrences. Les 42 premières constructions couvrent 90% des occurrences. • Presque toutes les constructions sont à la voix active. Les constructions dérivées (constructions passive, impersonnelle et pronominale en fonction de passif) occupent une place marginale. • Le sujet 'type' d'une phrase à la voix active est un (pro)nom de personne, le second argument 'type' un (pro)nom de chose. 10% des énoncés seulement ont un troisième argument. L'argument 'type' est alors un syntagme prépositionnel avec un (pro)nom de personne. • La construction passive a une légère préférence pour le sujet animé. Cette préférence n'est pas statistiquement significative quand on se base sur les constructions passives réalisées. 83

La phrase pronominale à valeur passive a une préférence nette pour le sujet non animé. L'ellipse est le trait de la langue parlée le plus pertinent q u a n d il s ' a g i t de c o n s t r u c t i o n s verbales. O n devrait, d a n s l'enseignement d u français langue étrangère, tenir d a v a n t a g e c o m p t e de d o n n é e s fréquentielles c o n c e r n a n t les c o n s t r u c t i o n s verbales et des c o n s t r u c t i o n s caractéristiques du français parlé. Il n'existe pas deux verbes se construisant de la m ê m e manière.

Chapitre 5 La

construction

im p e r s o n n e lie

5.1

Introduction

Dans le chapitre qui précède nous avons traité l'ensemble des constructions présentes dans notre corpus. Nous voudrions consacrer ce chapitre à une étude détaillée d'un type de construction, la construction impersonnelle. Nous examinerons les données concernant les modalités d'emploi de la construction impersonnelle dans le corpus d'Orléans à la lumière d'un certain nombre de publications plus ou moins récentes, articles et monographies, traitant cette construction. Certaines d'entre elles sont d'orientation plus ou moins théorique et se basent sur des jugements de grammaticalité obtenus par introspection. D'autres se fondent sur des données provenant de corpus. Il s'agit ici de corpus d'exemples de phrases impersonnelles empruntées à des sources littéraires. Nous pensons que les données de notre corpus pourront fournir une contribution à l'étude de la construction impersonnelle. Pour deux raisons: • L'analyse des modalités d'emploi de la construction impersonnelle a été basée jusqu'ici sur des exemples construits ou empruntés à la langue littéraire. L'étude d'exemples empruntés à la langue parlée pourra fournir des renseignements supplémentaires utiles sur le fonctionnement de la construction impersonnelle dans le langage de locuteurs qui ne cherchent pas à trouver les limites d'une construction syntaxique, comme le font les linguistes, ou à atteindre des effets de style, comme le font les auteurs littéraires. • Notre corpus ne se compose pas uniquement de phrases impersonnelles, comme ceux de Gaatone (1970), Hériau (1980) et H. Martinet (1975), mais de phrases centrées autour des 250 verbes français les plus fréquents. Cela nous permettra d'examiner la place de la construction impersonnelle dans l'ensemble des constructions verbales du français. 85

Ainsi, nous pourrons voir non seulement quand et comment la construction impersonnelle est utilisée en français parlé, mais aussi dans quelles circonstances elle n'est pas utilisée et quels sont les rapports qu'elle entretient avec d'autres constructions. On distingue en général trois types de constructions impersonnelles, une construction sans séquence, une construction avec une séquence verbale (infinitif ou complétive) et une construction avec une séquence nominale. Nous nous conformerons à ce classement et consacrerons une section à chacune de ces trois constructions. La quatrième partie de ce chapitre traitera la question de savoir si la construction impersonnelle a une valeur sémantique particulière par rapport à la construction personnelle ou non. Nous n'aborderons pas le problème du statut à accorder au morphème il (sujet apparent, sujet, complément d'agent, élément postiche?) et à la séquence nominale (sujet réel, complément d'objet direct, complément du sujet?), ni celui de la relation entre le personnel et l'impersonnel (transformation ou non?).

5.2

il + V

Aucun des verbes étudiés n'appartient à la classe des verbes exclusivement impersonnels se réalisant sous la forme il + V, celle des verbes désignant des phénomènes météorologiques. D'habitude on associe à cette classe les locutions verbales avec faire + adj, SN ou N. Notre corpus compte dix occurrences de la construction faire + adj t1 une occurrence de faire + SN: quand il fait beau alors on s'en va en s'il fait mauvais

temps

voiture

on va au bal.

Il s'agit d'unités fortement lexicalisées qui n'appellent pas de remarques particulières.

5.3

il + V + séquence phrastique

Le tableau 5.1 présente les verbes impersonnels du corpus d'Orléans suivis d'un infinitif ou d'une complétive que P, et donne le nombre d'occurrences de la construction en question. Nous distinguons deux catégories de verbes impersonnels, les verbes qui n'existent que sous la forme impersonnelle et les verbes qui connaissent aussi une construction personnelle. 1

5.3.1

Les verbes exclusivement impersonnels

S'agir et falloir ne sont utilisés qu'à la forme impersonnelle. Valoir mieux peut être utilisé dans une construction personnelle, mais est alors sujet à beaucoup de restrictions. Dans notre corpus il n'est présent que sous la forme impersonnelle. C'est pourquoi nous

Nous n'avons p a s pris en considération trois occurrences de (il) n'empêche que P. Ces formes doivent être considérées comme entièrement lexicalisées. L a preuve en est que le verbe est toujours au présent.

86

verbe

+ (prép) inf verbes

exclusivement

s'agir falloir valoir mieux Total

11 266

106

15

4 110

292 verbes

arriver être + attr intéresser paraître paraître + attr. se pouvoir rester sembler suffire se trouver Total

+ complétive impersonnels

à construction

impersonnelle 9 1

20 1 1

15 1 1

2 3 9

47 4 4

36

82

T a b l e a u 5.1: Les v e r b e s u t i l i s é s d a n s l a c o n s t r u c t i o n il + V + séquence

phrastique

l'associons aux deux autres verbes de cette catégorie. Ces trois verbes se réalisent assez souvent sous la forme 0 + V + séquence phrastique. Le pronom impersonnel manque une fois pour s'agir de + inf, 82 fois pour falloir + inf, 5 fois pour valoir mieux + inf, 25 fois pour falloir + que Ρ et une fois pour valoir mieux + que P. Il manque 114 fois sur 402, donc dans 28 % des phrases. Hériau (1980:114,115) note à propos de l'opposition il imp / 0 :

Quant à l'opposition il imp / zéro, elle est aussi en français moderne une des manifestations de la division du verbe en Vimp / Vpers. Exceptionnellement, la langue peut utiliser le préfixe 0 comme une variante rhétorique du morphème impersonnel. Mais cela ne concerne que des cas particuliers, notamment des verbes qui ne connaissent pas l'opposition Vpers/Vimp et qui à cause de cela sont des verbes de type archaïque. Leur fréquence et leur vitalité ( f a l l o i r , y avoir) ne doivent pas nous tromper. Ils n'appartiennent pas au système du verbe impersonnel vivant, tel que nous le définirons dans la suite.

Les données du corpus d'Orléans confirment cette thèse. En dehors des cas nommés, il y a quatre occurrences de verbes non essentiellement impersonnels avec un sujet 0 : reste à inf(lx), n'empêche que Ρ (2x) et paraît que Ρ ( l x ) . A l'exception du dernier cas il s'agit de locutions entièrement ou partiellement lexicalisées. 87

5.3.2

Les verbes à construction impersonnelle

Les autres verbes du tableau 5.1 figurent dans notre corpus dans une construction personnelle et dans une construction impersonnelle. Il s'agit de verbes intransitifs, transitifs indirects, attributifs et pronominaux (non réfléchis et non réciproques) et d'un verbe transitif direct. 2 Voici des exemples de chaque catégorie verbale et de chaque type de séquence phrastique: il arrive certaines fois qu'on change de poste il nous est arrivé de faire des vitraux pour une église à Rodez il me semble que ça sert à quelque chose il me paraît épouvantable de ne pas pouvoir entendre quelqu'un il nous paraît très naturel qu'une femme ait une activité autre que faire le ménage il se trouve qu 'on est trois ou quatre à se connaître c'est peut-être un livre qu'il vous intéresserait d'avoir Hériau (1980:250 et 281) donne des listes de verbes impersonnels attestés avec leur indice de fréquence, que nous pouvons comparer à la nôtre. Les quatre verbes qui viennent en tête de liste des verbes neutres 3 suivis d'une séquence que Ρ sont: 1 sembler, 2 paraître, 3 arriver, 4 suffire. L'ordre est le même pour notre corpus parlé. Pour les verbes neutres suivis d'une séquence de inf le verbe le plus fréquent est suffire, le second en rang arriver. Pour le corpus d'Orléans l'ordre est inverse, d'abord arriver, ensuite suffire. Quant aux verbes pronominaux, les deux verbes pronominaux du tableau 5.1 sont les plus fréquents des verbes pronominaux d' Hériau, se pouvoir vient en première position, se trouver en deuxième. Il y a donc ici une grande concordance entre langue écrite et langue orale. Une question traitée dans toutes les recherches sur la construction impersonnelle + séquence phrastique est la question de savoir si cette construction est facultative ou obligatoire. Pour Martin (1970) elle est obligatoire dans le cas d'une séquence phrastique. Pour Gaatone (1970) elle est facultative, même si elle est "quasi générale". C'est uniquement si le verbe principal se trouve lui aussi dans une subordonnée que la transformation est obligatoire. Le corpus d'Hériau comprend environ 800 exemples d'un verbe personnel avec une subordonnée que Ρ ou un infinitif en fonction de sujet. La construction personnelle à élément verbal antéposé est donc confortablement attestée en langue écrite. Quant à la langue orale, notre corpus ne contient pas un seul exemple d'infinitif ou de subordonnée sujets antéposés 4 non doublés d'un démonstratif. Cela ne veut pas dire qu'il n'y ait pas

Les verbes transitifs directs qui acceptent la construction impersonnelle appartiennent h la catégorie des verbes de sentiment. Ces verbes peuvent se mettre à la forme impersonnelle s'ils acceptent un sujet inanimé et si le complément d'objet direct est un pronom clitique. Intéresser en est un exemple connu. D'autres verbes qui ont la même propriété sont: étonner, frapper, irriter, toucher par exemple. D'après Olsson (1986: 71-73) ces verbes se construisent toujours avec ça. Cela est manifestement faux. Olsson cite d'ailleurs lui-même cinq phrases avec il. D est possible que la construction avec ça soit plus fréquente pour ce type de verbes. Nos matériaux ne nous permettent pas de nous prononcer là-dessus. Hériau entend par verbe neutre un verbe à la voix active.

88

d'arguments phrastiques en fonction de sujet, loin de là. Mais là où le français écrit peut placer l'élément phrastique à gauche du verbe ou bien utiliser une construction impersonnelle si le verbe le permet, le français parlé, du moins dans notre corpus, a une option différente: celle qui oppose la construction impersonnelle à une construction de mise en relief. Ces constructions de mise en relief sont de deux types: la dislocation (à gauche ou à droite) et le pseudo-clivage. La dislocation à droite et le pseudo-clivage rejettent l'argument phrastique en fin de phrase, tout comme la construction impersonnelle. La dislocation à gauche ne fait pas changer de place l'argument phrastique, l'infinitif. L'élément phrastique est doublé par un démonstratif, qui peut être ce, c', ça et cela. Comme ça est la forme la plus fréquente, nous utiliserons ce morphème comme représentant de cette classe de démonstratifs. Voici quelques exemples: dislocation à droite: si ça leur arrive de faire une faute de ça m'arrive souvent que je fais ça

français

pseudo-clivage: ce qui m'intéresserait c'était de partir à la campagne tous les dimanches ils disent bien que ce qui les tue en Amérique c'est bien qu'il n'y a pas d'artisans dislocation à gauche: beaucoup lire et puis pouvoir ferait plaisir

regarder

un peu la télé de temps

en temps

ça

Le tableau 5.2 résume les données concernant les verbes utilisés dans ces types de construction. Nous voyons que la dislocation à droite est le procédé le plus fréquemment utilisé. La dislocation se caractérise en principe par une virgule (à l'écrit) ou une pause (à l'oral) devant ou après l'élément déplacé. Or, dans certaines de nos phrases disloquées à droite cette pause n'est pas présente. Cela rapproche ces phrases des phrases impersonnelles à séquence phrastique. On a parfois l'impression qu'en français parlé le pronom impersonnel il entrant dans la construction 'il V séquence phrastique' a trop peu de consistance pour porter une construction lourde et qu'il est remplacé par le démonstratif ça, plus 'robuste' 5 et non ambigu. Cela expliquerait pourquoi les verbes exclusivement impersonnels suivis d'une séquence phrastique n'ont jamais ça: le pronom iltst non ambigu. Aussi peut-il être omis. Les tableaux 5.1 et 5.2 se recoupent en partie: cinq verbes ( a r r i v e r , être + attr, intéresser, paraître + attr et suffire) figurent dans les deux tableaux. Est-ce un hasard

Π y a deux exemples de subordonnées sujets en position d'inversion: peu importe que mes enfant» soient forts il faut que le travail se fasse peu importe

en français ou en anglais à quel moment il se fait.

Π s'agit de cas très lexicalisés. Cf. G et R . Le Bidois (1967;1968:116): "ce ayant une valeur épidictique et phonétique plus accusée, plus n e t t e que il, on le préfère de nos jours, s'il y a lieu d'insister, de bien préciser".

89

disi. à dr.

disi, à g.

verbe

(prép) inf

que Ρ

arriver

23

5

convenir

pseudo-clivage ( p r é p ) inf

devenir +

attr

1 2

étonner

1 attr

5

faire ( s u p p o r t )

4

faire (manière)

3

faire ( t e m p s ) intéresser

3 1 21

1

1

jouer

1

manquer

1

paraître +

attr

permettre ( p a s s i f ) plaire

1 1 10

prendre

3

1

1

représenter

1

revenir +

1

adv

sauver sembler + servir

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suffire

2

tuer

1

valoir

1

Total

59

37

2

4

Tableau 5.2: Constituants phrastiques dans une construction personnelle

90

que Ρ

1

convenir ( p a s s i f )

être +

(prép) inf

2

si certains verbes sont présents dans une liste et absents dans l'autre, et les deux listes peuvent-elles s'emboîter l'une dans l'autre?

La phrase disloquée à droite notamment

ressemble beaucoup à la phrase impersonnelle. On pourrait se demander si un verbe admettant la construction impersonnelle admet également cette construction avec ça et vice versa. Ou, en d'autres termes, quel est le statut de ça? Est-ce une variante de il, ou y a-t-il des différences fondamentales entre les deux constructions?

De nombreux grammairiens

considèrent les démonstratifs comme appartenant à la catégorie du pronom impersonnel. Brunot (1922:288) par exemple affirme que "les impersonnels tendent à prendre un autre sujet que il".

Et il donne entre autres les exemples suivants:

ça me fâche

de penser

ça vous fatigue

que vous

peut-être

de

êtes parti

sans

m'avertir

marcher.

Dans les exemples donnés au début de cette section il pourrait en effet être remplacé par ça sans que la grammaticalité des phrases soit vraiment compromise. O n peut se demander si l'inverse est également vrai. tableau 5.2 ça peut être remplacé par il: ça m'étonnerait

qu 'il le

il m'étonnerait ça ne sert il ne sert

qu 'il le

à rien

Pour la plupart des verbes du

fasse fasse

de les

apprendre

à rien de les

apprendre.

Une construction avec infinitif demande quelquefois qu'on ajoute de ou change une autre préposition en de: ça me plairait

faire

de la

couture

*il me plairait

faire

de la

couture

il me plairait

de faire

de la

couture.

Les verbes en question sont des verbes intransitifs, transitifs indirects et directs, attributifs et transitifs passifs. Seuls faire,

prendre

et représenter

résistent à la commutation de ça

en il: ça fait

pas bien

*il fait pas bien

de dire qu 'on est

ouvrier

de dire

ouvrier

qu'on

est

ça fait deux ans que je suis là *il fait deux ans que je suis là je ne sais pas si ça prendrait *je ne sais

qu'est-ce que ça représente *qu 'est-ce qu'il représente Pour faire

quand

pas s'il prendrait

et représenter

seconde place. Mais prendre

quand

même même

écrire (d')

comme

écrire

de se laisser pousser les de se laisser pousser les

on

comme

parle on

parle

cheveux? cheveux?

cela n'est pas étonnant. Les deux verbes ont un argument en est ici verbe intransitif, catégorie qui accepte normalement la

construction impersonnelle. Cela montre nettement que les verbes intransitifs n'admettent pas tous la tournure impersonnelle. 91

Hériau (1980) consacre une trentaine de pages (p.64-90) au problème du statut de ça et de il. Il arrive à la conclusion que les verbes en ça sont des formes personnelles. Ses arguments sont les suivants: ( 1 ) Les verbes impersonnels sans séquence constituent une classe restreinte. La classe des verbes en ça par contre a la même extension que celle des verbes personnels qui rentrent dans une construction absolue. ( 2 ) Quant aux verbes impersonnels avec séquence, la syntaxe n'est pas la même que celle des verbes en ça. Dans II est sage d'y aller "la séquence est insuppressible, et même indéplaçable: Il est sage sans d'y aller est un verbe personnel, et y aller il est sage est agrammatical. A u contraire le verbe en ça ne subit aucune modification morphologique, si on déplace la suite ou même si on la supprime: D'y aller, c'est sage./

C'est sage."

(p. 12)

Hériau traite surtout les impersonnels à séquence nominale. Cependant, ses conclusions sont également valables pour l'impersonnel à séquence phrastique. Les constructions en il et en ça ne se recoupent pas, comme le montrent les exemples qui précèdent. L'extension de ça est plus grande. Certains verbes transitifs directs admettant un sujet non animé (représenter par exemple) et certains verbes admettant un sujet non animé et suivis d'un argument non passivable ( f a i r e + complément (nominal) par exemple) se prêtent à la construction en ça, alors qu'ils sont rebelles à la construction en il. Pour citer encore Hériau: "Toutes sortes de facteurs rentrent en jeu: les classes de verbes, la forme des suites, les compléments du verbe, et jusqu'à la négation ne . . . que" (p.73). Olsson (1986), qui ne mentionne pas l'étude d'Hériau, a un point de vue entièrement opposé. Il entend par 'verbe impersonnel' "un verbe que précède un pronom sujet neutre (il, ce ou cela/ça) qui n'a aucun rapport avec ce qui précède dans le contexte, ni avec un mot particulier, ni avec le contenu total" (p.159). Son étude montre que il, ce et cela/ça ont en effet le plus souvent une distribution différente. C'est pour certains verbes seulement qu'on trouve il et cela/ça. Pour être + attribut on trouve tantôt il, tantôt ce, d'après le caractère de l'attribut. Alors qu'en français écrit la tournure impersonnelle est beaucoup plus naturelle pour un verbe admettant cette construction qu'une tournure avec un élément phrastique à gauche du verbe, le français parlé offre donc un choix réel, celui entre construction impersonnelle et construction personnelle en ça. Et le français parlé ne manque pas d'exploiter cette possibilité. Quand on compare le nombre d'occurrences des constructions en il et en ça + dislocation à droite pour les cinq verbes communs aux deux tableaux (arriver, être + attr, intéresser, paraître + attr et suffire ) on constate qu'il y a presque autant de phrases en ça qu'en il: 40 pour la première construction contre 48 pour la seconde. Olsson (1986), qui a travaillé sur un corpus principalement écrit, donne des chiffres, entre autres pour arriver. Pour arriver + infinitif il a rencontré 309 fois il, et 22 fois ça, pour arriver + complétive 128 fois il et 3 fois ça. La langue parlée a une prédilection nette pour ça, puisque nous avons, pour la construction avec infinitif, 23 fois ça et 20 fois il, et pour la construction avec complétive 5 fois ça et 9 fois il. Il est possible de faire une comparaison entre corpus écrit et corpus oral pour ce qui est des verbes entrant dans une construction personnelle et une construction impersonnelle. 92

Corpus d'Hériau Vimp (-|- Séq verb)

Vpers ( + Suj verb)

Neutres

46

17

Passifs

131

12

Pronominaux

42

13

Neutres

40

36

Passifs

61

14

3

16

Avec

Avec

Vque

Vinf

(de)

Pronominaux

Corpus d'Orléans Avec

Vque

Neutres

6

Passifs

0

1

2

0

Neutres

6

13

Passifs

0

1

Pronominaux

0

0

Pronominaux Avec

Vinf

9

(de)

Tableau 5.3:

V e r b e s e n t r a n t d a n s une c o n s t r u c t i o n personnelle et une c o n s t r u c t i o n

impersonnelle

Hériau (1980:998) présente une table qui compare les verbes personnels et les verbes impersonnels de ses deux corpus. Le tableau 5 . 3 reproduit ses données auxquelles nous avons ajouté celles du corpus d'Orléans. Les chiffres indiquent le nombre d'entrées verbales, non le nombre d'occurrences. On constate que les verbes à construction impersonnelle l'emportent dans la langue écrite et ceux à construction personnelle avec ça dans la langue parlée. Dans le corpus écrit les verbes passifs et pronominaux sont beaucoup mieux représentés que les verbes actifs. L'inverse est vrai pour le corpus d'Orléans. Les deux corpus ont en commun que les verbes personnels sont plus compétitifs avec Vinf (de)

que ces mêmes verbes avec

Vque.

5.3.3

Les verbes auxiliaires

Nous voudrions maintenant consacrer une brève discussion à des verbes qui peuvent être précédés du pronom impersonnel ¿/sans pour autant être des verbes impersonnels. Voyons les exemples suivants: il commence il doit

à y avoir

y avoir

il finit par

une

y avoir

beaucoup

irop

de

monde

erreur une

différence

assez

énorme

entre

la droite

et la

gauche 93

il peut y avoir un manque

d'intérêt.

D a n s ces phrases il est en fait le sujet de l'infinitif enchâssé, non celui du verbe conjugué. Il s'agit de verbes auxiliaires. 6 Notre corpus comprend 2 9 de ces phrases, réparties sur quatre verbes, commencer,

devoir,

verbe impersonnel: y avoir. il doit peut-être

arriver

il a dû se passer un

et pouvoir.

finir

quelques

être fait quelque

il peut arriver

ratures

court-circuit

il doit être quand même d'autres il devrait

D a n s la majorité des cas l'infinitif est un

Il y a cinq phrases où l'infinitif enchâssé est un autre verbe:

locataires

compromis

chose

qu'il y ait des pauvres.

O n constate que toutes sortes de verbes à construction impersonnelle peuvent être précédés d ' u n auxiliaire: des verbes intransitifs, pronominaux et transitifs passifs. Si la g r a m m a t i calité de certaines phrases est un peu douteuse, cela tient à la nature du complément (quelques

ratures, un court-circuit,

d'autres

locataires

compromis),

non au verbe.

Sembler et paraître suivis d ' u n infinitif 7 appartiennent aussi à cette catégorie des verbes auxiliaires. S ' i l s sont suivis d ' u n infinitif, le sujet superficiel est en réalité le sujet de l'infinitif enchâssé, puisqu'on a aussi bien elle semble avoir commis

une

erreur

que il semble y avoir un

malentendu.

A notre avis, il ne faut pas voir un verbe sembler impersonnel dans la dernière phrase. Il y a beaucoup plus de ressemblances entre les deux dernières phrases qu'entre les paires discutées en théorie grammaticale: 8

Nous définissons un verbe auxiliaire comme un verbe suivi d'un infinitif (précédé ou non d'une préposition) et dépourvu de restrictions de sélection. L'auxiliaire assume les marques de flexion, le verbe auxilié garde toutes ses propriétés morpho-syntaxiques: il arrive —*• il vient d'arriver il neige —

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