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French Pages 211 [210] Year 1972
Le règlement des dettes successorales dans les coutumes rédigées
PUBLICATIONS DE L'UNIVERSITÉ DES SCIENCES SOCIALES DE GRENOBLE Collection du Centre de Recherche d'Histoire économique, sociale et institutionnelle
SÉRIE HISTOIRE
INSTITUTIONNELLE
VOLUME N° 4
Les volumes de la série « Histoire Institutionnelle » sont publiés par le Centre de Recherche d'Histoire économique, sociale et institutionnelle créé en 1962 au sein de la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de Grenoble. Ces volumes présentent des ouvrages de membres du corps professoral, des travaux de colloques et des thèses de doctorat préparés dans le cadre de la section « Histoire Institutionnelle » de ce Centre.
Paris . MOUTON . La Haye
PUCLICATIONS DE L'UNIVERSITÉ DES SCIENCES SOCIALES DE GRENOBLE
Le règlement des dettes successorales dans les coutumes rédigées par PIERRE A R S A C
Paris . M O U T O N . La Haye
Ouvrage honoré d'une subvention du Ministère de l'Education Nationale
Diffusion en France par la Librairie Maloine S.A. Éditeur; Librairie de la Nouvelle Faculté 30, rue des Saint-Pères 75 - Paris-7 e
Diffusion en dehors de la France : Mouton & Co Boîte Postale 1132 La Haye - Pays-Bas
Printed in the Netherlands © 1972, Mouton & Cie
Librairie Maloine S.A. 8, rue Dupuytren 75 - Paris-6e
PREFACE
Le droit successoral, parce qu'il se situe à l'un des points de rencontre entre le droit de la famille et le droit des biens et parce qu'il doit dès lors, à côté des impératifs de sa propre logique, tenir compte des conceptions qui prévalent et des intérêts qui s'imposent dans ces deux domaines, constitue un révélateur très précis de l'orientation d'un système juridique, de sa logique fondamentale, et de son esprit même. Ainsi en était-il dans le Droit romain; ainsi en est-il dans les droits actuels. Tel était également le cas, bien entendu, dans l'ancien Droit français. Une liaison de ce genre cependant ne s'établit pas seulement au niveau des grandes principes de la dévolution successorale, où il est en effet plus simple et plus direct de la rechercher. Sans doute se trouvait-elle clairement marquée, dans la France coutumière, par l'orientation de tous les aménagements essentiels de la transmission des biens : pluralité des régimes selon la nature et l'origine des biens héréditaires, règles "paterna paternis" et "propres ne remontent", systèmes de définition de l'habileté à succéder et de détermination des différentes catégories de successibles appelés, conception égalitaire ou inégalitaire du partage. Mais cette liaison se traduit aussi dans les règles ou institutions particulières, auxquelles on a peut-être tendance à accorder une signification moindre sur ce plan, telles que celles de la fente, du double lien, ou de la représentation, qui cependant font, elles aussi, et peut-être plus significativement encore, apparaître la logique profonde d'un système successoral du type de notre ancien droit coutumier. Elles étaient en effet fort révélatrices dans la mesure où, destinées en apparence à régler des problèmes limités et spécifiques, elles étaient en réalité porteuses d'une logique particulière, largement venue du droit romain et donc opposée à l'inspiration typique des coutumes, et où par le fait elles pouvaient se trouver en porte-à-faux ou en contradiction par rapport à la logique du droit coutumier. Dès lors, elles posaient à celui-ci des problèmes particuliers et nécessitaient, si l'on voulait les combiner avec celle-ci ou, à la limite, les y plier, ou inversement les utiliser comme instruments de transformation de la logique coutumière, un effort spécial, qui est aussi significatif lorsqu'il a réussi que lorsqu'il a abouti à introduire dans les coutumes des solutions laxistes ou même ouvertement contradictoires par rapport à leurs principes anciens. Tel était également le cas dans le problème de la transmission des dettes successorales, sur lesquelles M. Pierre Arsac a concentré son attention. Or, l'étude de ces règles et institutions a jusqu'ici beaucoup moins attiré les chercheurs que celles des grands problèmes de la dévolution héréditaire. Il en est résulté des lacunes, et un certain "manque" dans notre connaissance et notre compréhension profonde du système coutumier. Il faut donc accueillir avec intérêt et gratitude les travaux qui s'attachent à ces matières, sans doute fort techniques et d'un accès peu aisé, mais d'une importance certaine, celui de M. Arsac le prouve après d'autres. La première caractéristique de cet ouvrage est la combinaison de l'analyse historique et de l'analyse juridique, tant il est vrai qu'en matière d'histoire du droit, et spécialement dans le droit successoral, on ne peut faire œuvre utile qu'en se fondant sur les données et les concepts juridiques les plus techniques et les plus précis. De là l'importance attachée, à juste titre, à toute une série de notions, ésotériques pour le profane, mais fondamentales 5
pour le spécialiste : pluralité de systèmes de dévolution selon la nature et l'origine des biens, notion de succession considérée comme une universalité, saisine, titre universel, cumul des qualités d'héritier et de légataire, obligation au prorata de la part successorale, obligation ultra vires, etc. C'est précisément une telle analyse qui permet à M. Arsac de définir ce que l'on peut appeler la logique typiquement coutumière de la transmission des dettes successorales, logique cohérente avec celle qui domine la dévolution de l'actif puisqu'elle distinguait différents types de dettes, dont le paiement incombait aux héritiers des différentes catégories de biens : la pluralité du système de transmission était la règle dans les deux domaines. Inversement, le droit romain liait succession aux dettes et dévolution des biens selon le principe de l'unité du patrimoine et de la succession. Il y avait donc là deux conceptions cohérentes et logiques, mais opposées l'une à l'autre, et le problème de leur confrontation ne pouvait manquer de se poser d'une manière aiguë, dès l'instant où la pression du droit romain allait s'exercer fortement sur le droit coutumier. Se plaçant aux 16e et 17e siècle et étudiant la transmission des dettes dans les coutumes rédigées, M. Arsac s'est trouvé en présence des résultats que cette confrontation avait engendrés après plusieurs siècles de contact entre droit romain et coutumes. Il a ainsi fort heureusement opposé les coutumes "traditionnelles" où l'inspiration ancienne s'est maintenue et, avec elle, les règles typiques d'une conception pluraliste; les coutumes "nouvelles" que le droit romain avait détachées de celle-ci et fait passer au régime opposé; et celles qui, à des stades intermédiaires, n'ont cédé que partiellement à la pression et ont combiné à des doses variées leur système originaire et les règles d'inspiration romaine. L'évolution aboutit ainsi à une diversification croissante de la géographie coutumière, qui est une constante de notre Ancien Droit, et que M. Arsac met en relief fort utilement dans sa Conclusion et à l'aide de cartes annexes. La comparaison entre les diverses catégories de coutumes et l'analyse de l'évolution sont conduites ici avec beaucoup de sûreté et de précision; elles constituent l'apport principal de l'ouvrage, en ce sens que tous ceux qui recherchent des précisions sur la transmission des dettes successorales les y trouveront et pourront s'appuyer solidement sur la présentation qui en est faite. Il nous semble cependant, peut-être parce que ce problème nous paraît personnellement être au cœur de toute la question de l'évolution du droit coutumier, que l'apport le plus important scientifiquement de l'ouvrage de M. Arsac consiste à montrer non pas seulement la perturbation profonde créée par la pénétration de la logique successorale romaine dans un système obéissant à une inspiration toute différente, mais les contradictions qui en ont découlé dans les coutumes qui maintenaient les anciennes règles de dévolution de l'actif tout en admettant de nouveaux principes de transmission du passif. Sans doute une telle contradiction, qui écartelait le droit coutumier entre sa logique ancienne et la logique romaine, se rencontre-t-elle dans maints domaines : c'est là l'un des principaux résultats de la confrontation entre les deux systèmes juridiques; et l'on sait bien aujourd'hui que l'évolution n'a pas simplement consisté à passer globalement des règles coutumières anciennes aux règles romaines, là où le droit romain l'a emporté, et que les choses ont été certes plus complexes et les résultats de l'évolution souvent peu cohérents. Mais nulle part ailleurs que dans le droit successoral le fait n'apparaît avec une telle netteté, car nulle part la logique proprement juridique n'est aussi impérative : comment pouvait-on organiser la transmission des dettes à partir du principe d'unité de la succession, et celle de l'actif à partir du 6
principe de la pluralité de masses successorales ? Même si l'on pouvait trouver une solution technique à ce problème grâce au système de la contribution de chacun selon la part qu'il prenait dans la succession, la contradiction logique n'en subsistait pas moins entre les deux aspects fondamentaux du système de transmission, et elle était plus ou moins prononcée selon que les coutumes avaient plus ou moins largement adopté l'inspiration romaine dans les deux domaines, ou au contraire créé un désajustement entre les deux en cédant davantage dans l'un au droit romain et en restant fidèle à la tradition coutumière dans l'autre. La contradiction ne devait disparaître qu'avec le rétablissement d'une cohérence complète par le Code Civil; jusque-là, elle demeura l'une des caractéristiques du droit coutumier, expression dans ce domaine particulier de la nature de phase transitionnelle qui marque la période des coutumes rédigées. Comme le problème est le même dans bien d'autres domaines du système juridique, il est souhaitable qu'un jour il puisse être abordé d'une manière synthétique, qui permettrait d'apprécier plus exactement ce que l'on pourrait appeler le degré de cohérence ou, inversement, le degré d'écartèlement du droit coutumier rédigé. Mais ceci ne sera évidemment possible que lorsque les différents domaines particuliers du Droit auront été explorés, comme M. Arsac l'a fait pour la transmission des dettes. Là se trouvent, nous semble-t-il, les principaux axes d'intérêt de son ouvrage. Mais ce ne sont pas là les seuls mérites de celui-ci : le lecteur appréciera notamment la solidité de la documentation et du raisonnement, la précision de l'analyse, la maîtrise de M. Arsac dans le maniement d'instruments techniques difficiles mais toujours présentés clairement, l'intérêt qui s'attache à l'évolution historique dans ce domaine, et à la pénétration du Droit romain. Ce sont précisément là les qualités qui ont amené le Centre de Recherche d'Histoire Economique, Sociale et Institutionnelle à accueillir ce travail dans la série "Histoire Institutionnelle" de sa collection, où il rejoint fort utilement les études déjà publiées par d'autres membres de ce Centre. J . MAILLET Directeur du Centre de Recherche d'Histoire Economique, Sociale et Institutionnelle
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INTRODUCTION
En droit f r a n ç a i s , l'héritier continue la personne du défunt et c'est d e r r i è r e cette formule que se profilent à la fois une théorie et une évolution. La théorie consiste en ce que la dévolution successorale obéit en droit français actuel à des règles particulières qui concernent à la fois la personne de l ' h é r i t i e r et les biens du défunt. La loi détermine en effet un ordre des successibles et ceux-ci recueillent le patrimoine actif et passif, avec l'obligation de r é g l e r les charges de la succession parmi lesquelles les articles 724, 870 et 873 du Code civil placent les dettes du défunt. Le patrimoine du défunt consiste par ailleurs en une universalité où actif et passif se compensent et où l'on ne distingue pas les biens selon leur nature ou leur qualité. (1) En d'autres t e r m e s le passif est la contrepartie de l'actif aussi bien dans la personne de l'héritier qu'auparavant dans celle du de cujus et les dettes en particulier sont une charge des biens considér é s dans leur ensemble. Ces solutions du droit français ne sont en réalité que l'expression d'un régime juridique particulier car on peut concevoir divers systèmes d'imputation de la charge des dettes successorales, sur les personnes ou sur les biens, selon l'esprit et les modalités du droit en vigueur à un moment donné. En fait le régime du Code civil est le résultat d'une lente élaboration qui s'est opérée à partir de systèmes différents: celui du droit coutumier et celui du droit romain. L'héritier n'a pas toujours "continué" la personne du défunt et sur le problème crucial du paiement des dettes laissées par le défunt les solutions les plus opposées ont eu cours. L'évolution s'est produite par étapes nettement définies. A l'époque médiévale où l'individu est absorbé par la famille, la personne des h é r i t i e r s s'efface devant les impératifs de la société car la famille, noble surtout, doit a s s u m e r des fonctions d'ordre public bien connues. Pour cela, d'un côté certains parmi les successeurs, l'aîné le plus souvent, remplissent les devoirs qui incombent à la famille, tandis que d'un autre côté certains parmi les biens sont affectés spécialement au service de la famille et par conséquent échappent à la fois à la libre disposition de ceux qui les détiennent et à la charge des dettes qu'ils peuvent c r é e r . Puis des causes générales viennent désagréger ou atteindre ces conceptions et ce droit qui protège ainsi le lignage se trouve a l o r s peu à peu confronté avec un nouveau système, celui du droit romain, pénétré et bientôt envahi par lui. Dans cette construction il n'y a plus de fonction sociale de la famille ni d'affectation particulière des personnes ou des biens. Tous les h é r i t i e r s situés sur un pied d'égalité accèdent également aux biens du défunt qui sont considérés comme un patrimoine unique, et tous participent au règlement des dettes successorales. L'examen des coutumes rédigées montre que ces deux systèmes coexistent au 16e siècle, et tant sur le plan juridique qu'à l'égard de l'organisation de la société, l'étude de cet état du droit révèle un triple intérêt. Tout d'abord elle permet de m e s u r e r le degré de cohésion de la famille à cette époque suivant les régions. C'est en déterminant la façon dont chaque héritier participe à la continuation de la famille qu'il apparaît. Si en effet un seul héritier recueille la plus grande partie des biens en même temps qu'il supporte la plus grande partie des dettes, c'est le signe que la famille r e s t e groupée autour de l'un de ses membres. Si par ailleurs 9
les dettes sont imputées sur certaines catégories de biens déterminés, c'est le signe qu'il existe une certaine autonomie des masses de biens par rapport à celui qui les détient qui apparaît dès lors comme un simple gérant des affaires du lignage. L'organisation, l'esprit de l'époque ancienne sont maintenus. S'il est admis au contraire que chacun des héritiers vient au même titre à la succession et se charge en particulier d'une part des dettes correspondant à ce qu'il recueille, il est permis d'affirmer que la famille s'est, dans ce cas, désagrégée, dispersée, et remembrée autour du foyer, du ménage. Or ces deux aspects se retrouvent dans les coutumes rédigées en France au 16e siècle, où coexistent donc deux conceptions, "lignagère" et "ménagère", de la famille. Cette constatation permet alors d'opérer des regroupements : la confrontation des diverses solutions montre l'existence de zones coutumières bien déterminées, plus ou moins fidèles aux critères traditionnels. Des groupes coutumiers peuvent en effet être repérés dans le domaine des dettes successorales, et le plus souvent les ressorts d'influence coïncident avec ceux que l'on a pu identifier sur d'autres points. (2) Mais cette coexistence de deux systèmes si opposés pose enfin un problème juridique très important lorsque l'on se réfère au Code civil. Dans celui-ci, comme dans le dernier état du droit commun coutumier et dans les coutumes qui ont adopté les règles du droit romain, l'ensemble des dettes successorales s'impute indistinctement sur la totalité du patrimoine du défunt. C'est le titre universel de l'héritier qui est, on le sait (3), le critère de son droit et de ses obligations. Or auparavant, dans le droit issu du système féodal, certains biens étaient affectés de façon rigide au règlement des dettes et c'est la saisine automatique de l'héritier qui était le fondement de son droit. Comment le passage a - t - i l pu s'opérer d'un critère à l'autre, comment le titre universel a-t-il pu remplacer la saisine, comment le rôle de l'héritier a-t-il pu se modifier aussi radicalement, devenant continuateur du défunt après avoir été gestionnaire des biens de famille ? Fournir une réponse revient à expliquer comment un système successoral organise le règlement de la masse successorale qui se compose d'un actif et d'un passif. Système successoral, masse successorale sont les deux paramètres permettant d'obtenir toutes les variétés de solutions pour le problème étudié qui est celui du rapport héritier-patrimoine du défunt, l'inconnue étant précisément la nature de ce rapport.
I. LE SYSTEME SUCCESSORAL
C'est la structure générale d'une société à une époque donnée qui détermine en grande partie son système juridique et en particulier son régime successoral. Or " plutôt que d'individus les sociétés anciennes étaient faites de groupes " (4), le plus naturel de ses groupes étant bien la communauté familiale. Et l'on sait que le mode de dévolution des biens reste lié à la conception de la famille, à sa structure et à la fonction qui lui est impartie : lorsqu'en effet celle-ci est directement associée par exemple au système de protection et de défense (comme à l'époque médiévale où l'Etat n'exerçait pas cette tâche) il devient primordial d'assurer d'abord la continuité du s e r vice qu'elle accomplit, donc de perpétuer la famille et par conséquent l'en10
semble de son patrimoine entre les mêmes mains. C'est là le rôle du régime successoral qui se trouve ainsi lié au contexte de son époque, et l'on en rencontre en particulier une application précise dans le texte des coutumes rédigées. 1. Les bases générales du régime successoral Le décès d'une personne crée une situation particulière à un double point de vue: les biens dont elle était titulaire deviennent vacants, et en principe les membres de sa famille sont, de ce fait, appelés à les recueillir. "La succession est en effet la transmission des droits actifs et passifs d'un défunt en la personne de son héritier". (5) Or les modalités de cette transmission varient suivant les options choisies en ce qui concerne le système familial d'une part, dont les règles définissent et délimitent les catégories de personnes aptes à venir à la succession, et le système patrimonial d'autre part qui correspond aux buts de la famille dans la société et à sa structure. A. Le système familial La conception du système familial, d'esprit communautaire c'est-à-dire lignager ou parentélaire, ou d'esprit plus individualiste c'est-à-dire organisé autour des époux, résulte en grande partie de la fonction attribuée à la famille dans la société: selon la nature même de cette fonction, la notion de famille est donc plus ou moins étendue et la dévolution successorale en conséquence organisée différemment. 1. Si la famille, en tant que telle, est intégrée dans une hiérarchie, comme elle l'était dans le système féodal, elle doit en général remplir des obligations bien définies, participer par exemple au service de défense ou jouer un rôle économique de production. Tous les membres de la famille sont alors solidairement tenus de fournir les prestations dues. Il faut donc des règles juridiques appropriées, en particulier pour désigner celui qui rendra les services dus lorsqu'ils sont personnels ou lorsqu'ils ne peuvent être accomplis que par un seul membre comme le service militaire. Le droit désigne alors d'autorité le successeur: la dévolution est légale; les tâches réparties par la coutume, la famille fixée dans son rôle et, dans ce but, on sait que "l'esprit de notre droit coutumier était que chacun conserve à sa famille les biens qui lui en étaient advenus". (6) C'est un système rigide qui exclut le testament et qui assigne à l'aîné, en général, la charge de représenter la famille et de rendre les services exigibles. Dans ce cadre les autres membres conservent leur droit individuel d'héritier, mais ce droit ne peut pas se traduire par une dévolution égale des biens de la succession car il faut compenser le poids des charges qui atteint l'aîné en lui accordant une plus large des biens. Ainsi la structure et la composition de la famille sont-elles réglées d'avance: c'est le lien du sang qui constitue le premier critère, et le plus objectif, de la dévolution successorale. Tous ceux qui sont issus d'un môme auteur forment une famille (7) à l'intérieur de laquelle les rôles sont distribués d'office. Ce rattachement à un auteur commun aboutit alors à séparer totalement les héritiers de deux familles issues d'auteurs différents mais qui ont des descendants communs. On reconnaît en l'espèce deux lignaIl
ges dont les membres respectifs n'ont aucune vocation réciproque à succéder les uns aux autres. Seuls les descendants communs peuvent prendre part successorale dans chaque ligne; tous les autres membres, ascendants et collatéraux, demeurent des étrangers d'une ligne à l'autre, chacun pouvant d'ailleurs avoir à remplir une fonction différente et même, à la limite, opposée dans la société. Ce système, fondé sur les trois notions de fonction assignée à la famille, de dévolution imposée par la loi, et de lignage, est celui qu'a connu le droit coutumier français: l'empreinte des conceptions germaniques sur la communauté familiale s'y révèle nettement, mais ce sont surtout cependant les nécessités de l'organisation féodale qui lui ont donné sa physionomie particulière. 2. Si au contraire, et c'était la conception du droit romain classique (mais non de l'ancien droit romain qui a connu un contexte voisin de celui de l'époque féodale), la famille constitue un groupe indépendant, plus ou moins restreint d'ailleurs, et si elle n'est pas assujettie à une fonction semblable à celle qu'on lui connaît pour l'époque féodale, une dévolution rigide des biens ne s'impose pas : il n'y a plus d'affectation des biens à une personne en contrepartie de ses services. Ce système connaît la dévolution testamentaire qui se caractérise par sa souplesse: la succession fondée sur les personnes plus que sur les biens, le critère de la dévolution est dans ce cas l'affection du défunt plus que la conservation des biens dans une famille puisque les lignages ne sont pas séparés. Or cette affection, nul mieux que le défunt lui-même n'est capable de la déterminer et de la sanctionner par un testament. Conception donc opposée puisque la dévolution dépend cette fois de la volonté du défunt et de son affection présumée, et non plus de la loi. (8) Absence de fonction assignée à la famille, liberté de dévolution expliquent que, dans ce système, la cohésion de la famille soit moins solide, que la solidarité entre générations diminue, et que la notion même de famille se restreigne. Alors que le lignage féodal ne connaissait pas d'exclusion, la famille, dans cette conception, se rapproche de la notion de ménage. (9) La structure familiale oriente donc la désignation des héritiers mais elle affecte aussi corrélativement la nature des biens successoraux. B. Le système patrimonial Le seul critère connu du droit romain pour régler la dévolution des biens était leur valeur vénale. Il ne se préoccupait ni de leur nature ni de leur origine pour en déterminer la répartition successorale. Du fait que la famille restait groupée autour de l'auteur commun, le pater familias, et que les membres d'un lignage n'excluaient pas ceux de l'autre, il n'était d'aucune utilité du point de vue successoral d'individualiser les meubles et les immeubles ni même les res mancipi et les res nec mancipi et de les considérer comme des masses de biens séparées, à fortiori autonomes, le patrimoine du défunt constituait une universalité indistincte et globale. Le droit coutumier français, lui, au contraire, connaît des principes opposés: plus de patrimoine unique dont seule compte la valeur vénale, mais des masses de biens distinctes que rien ne relie les unes aux autres. Les fonctions qui sont imparties à la famille contribuent en effet à introduire une double distinction. On doit en effet distinguer d'abord les biens improductifs, biens de consommation, qui sont de faible valeur à l'époque, c'està-dire les meubles, destinés à l'usage courant, des biens perpétuels et pro12
ductifs qui constituent la base de la continuité familiale. Et l'on doit ensuite, parmi ces immeubles, biens productifs et durables, distinguer d'une part la fortune transmise, les propres, qui doit rester dans la famille au moins dans une certaine proportion (réserve héréditaire) et qui lui est affectée à perpétuité, et d'autre part la fortune acquise par le ménage, les acquêts, qui deviennent propres à échéance. Ces biens forment dans l'ancien droit français de véritables patrimoines distincts, des masses distinctes, assujettis chacun à une loi spécifique. Ils ont une existence juridique propre, en tant que masse de meubles, ou masses d'acquêts ou masses de propres, et à ce titre ils sont en particulier affectés d'une façon différente au paiement des dettes de succession. Ce principe de la pluralité de successions, resté en vigueur jusqu'à la Révolution, en dépit de l'influence grandissante du droit romain, tirait son fondement d'une origine très ancienne qui était la nécessité de conserver les biens les plus importants dans les familles. Or ce sont les immeubles qui constituent, surtout à l'époque féodale, les biens les plus précieux, les biens de famille; tout doit être mis en oeuvre, en droit, pour les empêcher de sortir car la préoccupation majeure reste de les transmettre intacts de génération en génération. Le droit public féodal interdit d'ailleurs lui aussi, sous peine de sanctions, de diminuer la consistance ou la valeur des biens. Donc, en droit privé comme en droit public, les membres de la famille apparaissent plus comme des détenteurs, des précaristes que comme de véritables propriétaires de leurs biens. Dès lors, en fonction de ces principes, la règle fondamentale de la dévolution ab intestat destinée à conserver ces biens lorsqu'il n'y a pas de descendants s'exprime par le double adage connu : "paterna paternis" et "propres ne remontent". En vertu de ces principes les biens, lors du décès, retournent aux lignages respectifs d'où ils proviennent, les seuls parents, même très éloignés, d'une ligne recueillant les biens de cette ligne. Les autres catégories de biens, les acquêts et les meubles, ne bénéficient pas des mêmes mesures et c'est pourquoi elles supportent en général, à l'origine, le poids des dettes successorales. Suivant leur nature celles-ci sont en effet imputées sur telle ou telle masse de biens alors qu'en droit romain au contraire la totalité du patrimoine supporte indistinctement la totalité des dettes. La renaissance des études de droit romain, les mouvements économiques et sociaux propres à la période du 13e au 16e siècles, mais aussi le mouvement des faits et des idées compromettent les équilibres antérieurement réalisés, le renouveau actif du commerce après la guerre de Cent ans, l'apparition de pratiques, sinon de doctrines mercantilistes, le développement du rôle de l'individu dans tous les domaines, une multitude de causes donc contribuent à faire éclater ce qui subsistait encore des cadres de la féodalité, en particulier ses conceptions juridiques concernant le droit de la famille. Mais ces causes agissent avec des effets divers sur les points caractéristiques du système successoral et connaissent des succès plus ou moins complets suivants les régions: les coutumes rédigées reflètent ces mutations en figeant pour un temps les solutions adoptées. 2. Le cadre particulier des coutumes rédigées La législation officielle établie au 16e siècle a recueilli l'état du droit à ce 13
moment: elle n'est que le résultat d'une évolution pendant laquelle les conceptions traditionnelles en matière successorale ont connu des atteintes sensibles," modifiant en particulier la situation des héritiers. A. Les modifications intervenues dans les bases du système successoral Au premier rang des événements multiples qui ont désagrégé la société féodale figure la crise qui a atteint l'autorité dans la famille et son organisation au profit des droits de l'individu. Dès lors diminuait corrélativement la r i gidité des règles s'appliquant aux biens qui étaient jusque-là le support de la famille traditionnelle. 1) Modifications concernant le système familial Ce sont deux faits majeurs qui ont contribué à accélérer l'évolution des notions dans ce domaine. Les pays coutumiers connaissaient en effet depuis le 12e siècle et sous l'influence de l'Eglise une renaissance définitive du testament. (10) Si ce testament n'a jamais été l'analogue du testament romain instituant des héritiers, du moins a-t-il contribué à créer un domaine réservé au testateur, une quotité disponible. Or l'importance de ce phénomène consiste en ce que désormais se développe une idée nouvelle, non coutumière: c'est qu'une partie des biens peut faire l'objet d'actes juridiques de disposition, qu'ils peuvent être négociés, échapper au lignage, que leur dévolution dépend de la volonté de leur titulaire, ce qui est déjà une altération sensible de l'esprit coutumier qui refusait en réalité tout effet à la volonté du défunt. Mais aussi, à une époque plus tardive d'ailleurs, le déclin des obligations féodales et de la notion de service public accompli par les individus à la place de l'Etat inexistant accentuent encore ce mouvement. (11) L'individualisme corrélatif qui se développe alors est renforcé par l'influence de ce que l'on peut appeler l'esprit urbain. La vie urbaine qui connaît un renouveau à partir du 15e siècle(12) ne se prête en effet à une grande concentration familiale ni du point de vue matériel ni du point de vue intellectuel, à l'inverse du plat pays où tous vivent en communauté, où les contacts sont limités à l'extérieur du groupe. Ces deux éléments ont contribué à faire diminuer le sentiment du devoir familial, donc à relâcher la cohésion dans le lignage et à mettre en revanche l'accent sur l'aspect affectif à l'intérieur de la famille. Celle-ci tend à se resteindre et à glisser de la conception d'une famille-lignage à celle d'une famille-ménage, bien que le lignage reste encore et jusqu'à la fin de l'Ancien Régime la structure principale, ce dont l'existence des règles "paterna paternis" et "propres ne remontent" fournit une preuve suffisante. Il ne faut pas cependant exagérer l'importance des mouvements car la plus grande partie de la population se trouve dans les campagnes et échappe à ces mutations. Si cette évolution vers un resserrement de la famille est un fait acquis, elle n'est pas en réalité une caractéristique essentielle de l'époque (13), d'autant plus que, pour une fois, le droit romain ne donnait pas l'exemple d'un individualisme trop libre avec l'autorité du pater familias. Mais les principes de base sont définitivement atteints, et on le constate aussi en matière de système patrimonial puisqu'il est fonction du concept de famille.
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2) Les atteintes apportées au système patrimonial En effet, l'essor du commerce, des affaires en général, la dévalorisation progressive des revenus de la t e r r e pour les nobles (14), les principes du droit féodal qui admettent que les bourgeois, les non-nobles, peuvent a liéner leurs biens alors qu'ils l'interdisent aux nobles, tous ces faits contribuent à c r é e r un début de circulation des biens. Or la circulation des biens s'accomode mal de ce que les biens du défunt restent perpétuellement affect é s à certaines personnes. Elle exige que tout ce qui appartient à un moment donné à une personne soit susceptible d'actes de disposition de sa part, elle exige une unité de son actif, et simultanément elle confère une importance grandissante à des catégories de biens r e s t é s jusque-là sans intérêt. Le mouvement des affaires multiplie en effet l e s opérations d'une p e r sonne et surtout s e s dettes personnelles, et pour les couvrir, il est simple de décider que tout ce qui lui appartient y est affecté. Du même coup l'unification des patrimoines ainsi établie postule la disparition des affectations spéciales de certains biens à certaines dettes et rend nécessaire d'affecter indistinctement tous les biens à toutes les dettes. La circulation des biens contribue aussi à donner un rôle et une place de plus en plus grands aux meubles et acquêts puisqu'ils sont d'utilisation plus facile que les immeubles. Et pour les protéger, commence à se développer, au 16e siècle, l'institution, d'origine romaine, de la légitime qui a pour but de régler le sort des meubles et acquêts, les propres étant p r o tégés eux, par la r é s e r v e héréditaire au profit des lignages. Meubles et acquêts étant au ménage ce que les propres constituent pour le lignage, il est indéniable que le ménage bénéficie, à cette époque, d'une protection successorale (concernant principalement les descendants puisque la coutume de P a r i s institue la légitime uniquement pour eux en 1580). Ces innovations et ces préoccupations se retrouvent sur la carte des coutumes: les régions d'essor économique, de mouvement, c ' e s t - à - d i r e la région parisienne, l'axe Nord-Sud passant par les Champagnes et Bourgognes adoptent les principes nouveaux. Là les biens circulent plus librement, l e s fortunes deviennent mobilières et dans le droit successoral ont connaît l e s notions d'universalité du patrimoine et d'affectation indéterminée de tout le patrimoine aux dettes du défunt. A l'Ouest au contraire, zone de faible pénétration des courants commerciaux, zone aussi où le pourcentage des t e r r e s détenues par la noblesse est beaucoup plus fort que dans le r e s t e de la France(15), ce qui en immobilise une partie beaucoup plus grande, les r è gles restent les m ê m e s qu'auparavant. Mais cependant les principes traditionnels demeurent partout t r è s solides: les règles "paterna paternis" et "propres ne remontent", protection du lignage, sont loin de tomber en désuétude au 16e siècle. L'aménagement des t e r m e s féodaux par la noblesse, et à son profit, limitent par ailleurs l e s évolutions et c'est ce qui explique la subsistance des patrimoines sépar é s et des affectations spéciales de biens à des personnes et à des dettes. Tout ceci fait que, peu à peu, les principes traditionnels ont été de moins en moins compris dans certaines régions et qu'ainsi la pénétration de solutions nouvelles s'en est trouvée favorisée, mais que d'un autre côté ces m ê m e s principes anciens ont coexisté avec l e s nouveaux, diversifiant ainsi la notion même d'héritier.
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B. La situation des héritiers en face des modifications du système successoral C'est au double point de vue de la composition et de la répartition de la masse successorale que les coutumes rédigées révèlent des originalités. 1) Les héritiers et la constitution de la masse successorale Il n'y a pas d'uniformité en ce domaine entre les textes du 16e siècle et c'est ainsi que certains parmi les héritiers peuvent rester en marge de la succession. On le constate en premier lieu en ce qui concerne le rapport à succession. Certaines coutumes imposent à tous les successibles le rapport à la masse de tous les biens qu'ils ont recueillis, quel que soit le parti qu'ils prennent d'accepter la succession ou d'y renoncer. D'autres au contraire admettent le cumul des qualités d'héritier et de légataire, les successibles n'étant pas contraints au rapport. D'autres enfin permettent de choisir entre les biens déjà reçus et la part successorale moyennant rapport des biens reçus. (16) C'est ensuite sur la question de la réserve héréditaire et de la quotité disponible que les solutions se diversifient. La part des biens qui est réservée au lignagé et doit lui revenir est plus ou moins étendue suivant les cas et la composition de la masse de succession s'en trouve affectée d'autant, puisque la quotité disponible restante varie en fonction de l'étendue de la réserve, mais aussi en fonction des règles adoptées pour le rapport à succession. La partie de la quotité disponible qui ne fait pas l'objet de rapport n'entre pas dans la masse. (17) Donc lorsqu'il s'agira de répartir la masse successorale, non seulement des biens, mais des personnes aussi peuvent, selon les coutumes, faire partie ou être exclus de la succession. (18) 2) Les héritiers et la répartition de la masse successorale Trois particularités affectent le nombre des héritiers admis à prendre part au partage des biens: il s'agit de ce que l'on appelle l'égalité entre héritiers (19), de la représentation successorale et du testament, qui entrent en jeu à des degrés différents suivant les régions. Sur le problème de l'égalité entre héritiers, les coutumes se séparent en trois groupes. Certaines exigent des enfants dotés avant l'ouverture de la succession un rapport forcé des biens reçus, ce qui signifie que la quasitotalité des biens appartenant ou ayant appartenu au défunt fait partie de la masse successorale. Ces coutumes consacrent une égalité rigoureuse entre les héritiers, toutes les personnes et tous les biens devant participer au règlement définitif. A l'opposé d'autres coutumes admettent que les enfants dotés restent en dehors de la succession tout en conservant les biens qu'ils ont recueillis. L'esprit très différent de ces coutumes permet en d'autres termes d'avantager un héritier puisqu'il suffit pour lui de renoncer à la succession pour conserver sa donation ou son legs. Et puis, régime mixte, on rencontre un système où une option s'offre au successible: venir à la succession en rapportant, ou garder le disponible avec sa légitime en renonçant. On admettait traditionnellement que ce groupe de coutumes était le plus important, mais les travaux de M. Yver apportent en la matière de nouvelles conclusions, en prouvant qu'en réalité il ne s'agissait que d'un petit nombre de coutumes situées autour de Paris. Le nombre des personnes appelées à la succession se restreint ou 16
s'augmente par ailleurs selon que l'on rejette ou que l'on admet le principe de la représentation successorale. (20) Là encore se prolonge la conception de l'égalité entre héritiers, en profondeur si l'on peut dire. Car la vocation des souches, lorsque leur représentant a disparu, constitue bien un prolongement de l'égalité entre h é r i t i e r s puisque l'on ¡. enlace fictivement ce représentant prédécédé dans la dévolution successorale. Le testament enfin, dès lors qu'on l'utilise, perturbe les règles établies à une époque où il n'existait pas. Les réactions des coutumes se manifestent alors suivant leur esprit : elles acceptent ou refusent le cumul des qualités d'héritier et de légataire (21) et la solution retenue conditionne le jeu de deux institutions protectrices des droits des héritiers, la réserve et la légitime. (22) La constitution de la masse successorale et sa répartition entre les héritiers sont donc tributaires des options prises par les coutumes sur ce principe général de l'égalité entre h é r i t i e r s . Mais il ne s'agit là encore que d'une partie du problème. Car si des biens vont être dévolus à des successeurs, des dettes laissées par le défunt vont aussi être mises à leur charge. Il faudra déterminer quels biens et quelles personnes se voient imputer ces dettes et selon quel c r i t è r e s'opère la répartition entre les hérit i e r s . C'est, avec la détermination de l'actif la seconde face du règlement successoral. L'étude des coutumes rédigées permet de saisir les solutions retenues par le droit coutumier, et elle permet de constater, à mi-chemin de cette marche v e r s l'unification du droit bien connu (23) quelle a été l'influence des principes romains lors de leur affrontement avec le système juridique coutumier. Mais avant de procéder à cette étude, il faut déterminer précisément la masse successorale qu'il s'agit de répartir.
II. LA MASSE SUCCESSORALE
La masse de la succession se compose d'éléments d'actif et d'éléments de passif complémentaires les uns des autres. Les opérations visant au règlement des dettes successorales doivent être précédées d'une détermination exacte des biens existant et des dettes de la succession. 1. Détermination des biens actifs existant, du point de vue particulier de la suc c es sion La masse des biens composant l'hérédité est t r è s diverse. Elle comprend tous les biens et les droits dont se trouvait titulaire le défunt à un certain moment, celui de son décès. Or il s'agit de réaliser cet ensemble, de liquider des droits, de centraliser le tout, d'interrompre des opérations juridiques. En un mot, il faut pour reconstituer l'hérédité regrouper d'une part le patrimoine actuel du de cujus, c ' e s t - à - d i r e tous les biens dont il jouissait au jour du décès, et d'autre part les biens qui étaient déjà sortis de son patrimoine mais qui doivent revenir dans la succession pour respect e r principalement l'égalité entre les héritiers. L'hérédité se compose donc du patrimoine et de biens rapportés à la succession. 17
A. Le patrimoine actif du défunt Deux catégories de biens le composent : 1) Les biens corporels Aucun problème ne se pose vis-à-vis des biens corporels. En effet y sont compris tous les objets mobiliers du défunt en particulier ceux de sa part de la communauté s'il était marié, tous les acquêts réalisés durant le mariage, tous les immeubles propres lui appartenant. Cet ensemble compose un seul patrimoine sinon une seule succession, et il y a confusion en cas d'addition d'hérédité et d'acceptation de communauté (24) pour le règlement successoral sauf si les biens conservent ou prennent un statut propre dans le patrimoine de l'héritier : propres de succession par exemple. Il faut y ajouter les biens de subrogation c'est-à-dire les biens acquis directement par le de cujus en échange de biens réels aliénés : ces nouveaux biens sont immédiatement subrogés aux anciens dont ils prennent les caractéristiques juridiques. (25) De même l'immeuble qui a été reçu moyennant une soulte devient bien de succession subrogé, propre en général mais il donnera lieu à récompense au profit des héritiers aux meubles et aux acquêts à concurrence de la soulte (26) puisque les deniers ne sont propres qu'au cas, rare, de stipulation de propre. Mais en revanche, les deniers provenant de la vente d'un propre ou du rachat d'une rente propre ne deviennent pas propres de succession car les deniers sont des meubles, ni même, ce qui est plus discutable, les biens acquis postérieurement en remploi de ces deniers(27), sauf toutefois si le titulaire des biens est un mineur. 2) Les biens corporels Il s'agit d'abord de créances dont le défunt était titulaire, des sommes d'argent qui lui sont dues, donc en principe des créances mobilières. Toutefois le rapport des billets et des obligations s'exécute en nature s'ils ne sont pas détériorés, sinon il se fait en valeur. (28) Mais certaines, les plus importantes en valeur, sont immobilières: ce sont les rentes. Les rentes constituées, dans le plus grand nombre de coutumes, sont qualifiées immeubles; mais, dans d'autres elles sont meubles (29) et c'est là un signe qui traduit l'évolution amorcée vers une certaine circulation des biens rendue nécessaire par l'évolution générale déjà rencontrée. (30) Les rentes foncières sont à fortiori immeubles, puisqu'elles suivent le bien. Et les sommes qui constituent le revenu de cette rente prennent le caractère d'immeubles comme la rente. Parmi les biens incorporels de la succession doivent encore figurer les droits en usufruit. Certes l'usufruit est un droit viager qui s'éteint au décès mais dans l'actif de la succession il constitue une valeur estimée en général au tiers de la valeur de la propriété pleine. (31) Les offices constituent encore une valeur d'actif et parfois la seule d'une succession. Les offices domaniaux héréditaires sont en effet dans le patrimoine une sorte de rente constituée sur le public. Pour savoir s'il s'agit d'un bien meuble ou immeuble, il faut suivre le même principe que pour la qualification d'une rente constituée (32) : une rente constituée sur le domaine public, sur les recettes du sel par exemple ou sur les aides suit la coutume du lieu de son assiette. Mais à Paris, selon l'article 93 de la coutume, tous les offices attachés à la personne sont meubles. (33) Il en 18
est de même en Normandie, article 94 de la coutume. Tous les offices qui circulent dans le commerce sont biens de succession (34), le plus souvent en qualité d'immeubles à cause de leur grande valeur. (35) Mais il n'est pas possible de comprendre l'office en nature dans la succession : il s'en opère alors un rapport en valeur égale à la finance de cette office, cette valeur étant celle du jour du contrat et non celle du jour où s'ouvre la successioa (36) Il peut a r r i v e r aussi que personne parmi les successeurs ne puisse ou ne veuille continuer d'assumer la charge de l'office. Dans ce cas on le vend et le prix r e t i r é entre dans l'actif successoral; et au cas où l'un des h é r i t i e r s au contraire le reprend, sa valeur est mise en compte, mais il donne lieu à rapport en moins prenant à la succession car les qualités de créancier et de débiteur de l'héritier se confondent. Ce rapport pour compte seulement se retrouve pour d'autres biens. B. Les biens rapportés à la succession Certains biens, pendant la vie du de cujus, sont sortis de son patrimoine. On doit les prendre en compte pour l'établissement de la masse active de la succession, mais ils ne seront effectivement rapportés en nature ou en équivalent qu'après les opérations de liquidation au cas où l'on a r r i v e r a i t à une insuffisance d'actif en face du passif. Pour ces biens, on procède à une reconstitution en vue de l'établissement du patrimoine successoral, l'instrument de cette reconstitution étant le rapport à succession tant pour les biens aliénés que pour les biens non aliénés, mais sortis cependant du patrimoine sous une qualification quelconque. - Tout ce que les enfants ont reçu en avancement d'hoirie est sujet à rapport, le problème consistant à différencier ces biens de ceux qui constituent un préciput. Pour cela il existe une présomption en vertu de laquelle toutes les donations des père et m è r e sont qualifiées avancement d'hoir i e . (37) La majorité des coutumes interdit en effet le cumul des qualités d'héritier et de donataire. Pour l'évaluation du rapport, on prend comme référence la valeur du bien au jour de la donation. (38) La dot est souvent un élément t r è s important de rapport, l'établissement matériel de la fille constituant pour elle son "partage". Là aussi tout ce que reçoit le gendre est présumé donné à la fille en avancement d'hoirie: point important car si on le considérait comme une donation au gendre la donation serait rapportée mais elle serait répartie sur tous les héritiers, alors qu'en la présumant faite à la fille, c'est sur sa part seule dans la succession qu'elle s'impute en totalité. Et au cas où le mari, dont la femme doit rapporter la dot, serait insolvable, il ne suffit pas de rapporter l'action (39) qui existe contre le m a r i pour obtenir le paiement. Si la femme est héritière et prend part au partage elle impute son rapport en moins prenant sur sa part. Mais si le rapport dépasse la valeur de sa part ou si elle ne figure pas au partage, le poids de l'insolvabilité se répartit différemment. (40) L'égalité entre les héritiers se conçoit d'ailleurs différemment selon les coutumes : il y en a qui ne connaissent pas le rapport et Dumoulin s ' é tait élevé contre cette pratique injuste. (41) Il y a en revanche des coutumes d'égalité parfaite dont le groupe des coutumes de l'Ouest par exemple fait partie où même les renonçants peuvent être obligés au rapport. (42)
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- Les biens non aliénés, mais seulement prêtés font aussi l'objet de rapport à succession. (43) L'héritier qui est débiteur du de cujus rapporte en moins prenant, sinon l'égalité dans le partage serait rompue. Le rapport des dettes a lieu essentiellement dans deux hypothèses. Lorsque le père a payé les dettes du fils le rapport doit avoir lieu sinon il y aurait une large possiblité de fraude. (44) Lorsqu'aussi le père a consenti un prêt au gendre, il doit y avoir rapport et la femme comme commune en biens, si elle accepte la communauté lors du décès de son père, participe au rapport mais seulement dans la mesure de l'émolument qu'elle retire. (45) Si elle renonce à la communauté, toujours dans le cas où le prêt a été fait à son mari seul, la femme ne doit pas le rapport. Mais lorsque le prêt a été fait aux deux époux conjointement la fille doit rapporter même si elle renonce à la communauté et si le mari est insolvable. (46) Il s'agit là en effet d'un contrat où la femme était partie et dont elle ne peut se libérer de sa seule autorité : elle est personnellement liée. Il faut ajouter qu'en cas de prêt aux époux sans spécification du destinataire, il est présumé fait aux deux conjointement. Le rapport de dettes emporte une conséquence assez importante : alors que le défunt a prêté ou payé les dettes et prend ainsi place parmi les créanciers du fils, le rapport lui confère un privilège de fait sur ceux-ci au cas où le fils est insolvable et où il faut opérer un remboursement partiel et proportionnel des créanciers : en effet s'il rapporte le total de sa dette en moins prenant par confusion avec sa part héréditaire, il se trouve avoir remboursé toute la dette à l'un de ses créanciers alors que les autres n'en n'ont qu'une partie. Les créanciers de la femme doivent d'ailleurs participer au rapport. (47) Tous ces rapports sont valables pour la ligne directe. En ligne collatérale en revanche, il n'y a pas de rapport (48) sauf si celui-ci est expressément stipulé. 2. Détermination des dettes successorales Lors du décès d'une personne plusieurs faisceaux de droits et d'obligations, de créances et de dettes, continuent à s'interpénétrer comme ils le faisaient de son vivant. Un état doit donc être dressé pour déterminer d'une part l'existence des dettes et en opérer d'autre part la ventilation entre les héritiers. De plus des charges naissent au moment et par le fait même du décès : tels un douaire, un fidéicommis, un legs. Il convient donc d'indiquer la composition de ce qui sera la masse des dettes de succession c'est-à-dire de ce dont les héritiers seront redevables envers d'éventuels créanciers, en vertu de leur qualité d'héritier ou du fait qu'ils recueillent certains biens. Le droit coutumier affectait certains biens ou désignait certaines personnes au règlement de certaines dettes. Aussi est-il primordial de qualifier une dette, et la première de ces qualifications sera celle de personnelle ou réelle. La plupart des auteurs (49) distinguent en effet les dettes dont sont tenus les héritiers personnellement de celles dont sont redevables les choses elles-mêmes en quelques mains qu'elles se trouvent. La nature de l'action qui est personnelle réelle ou mixte fixera la qualification de la dette. (50) Tout n'est pas si clair d'ailleurs dans les textes des coutumes ou de leurs commentateurs : le plus souvent aucune classification n'est opérée, les termes de dettes personnelles, mobilières, immobilières, réelles sont confondus et employés sous divers sens. Il convient de préciser ces termes. 20
A. Les dettes personnelles Ce terme est ambigu. Il est employé par l'article 334 de la nouvelle coutume de Paris, mais son contenu n'est pas fixé. On doit donc y comprendre , par à contrario, toutes les dettes qui ne sont pas réelles, toutes les dettes qui sont plus personnelles que réelles (51) et par conséquent les dettes mixtes. En fait, ce contenu diffère suivant les coutumes. Ainsi en Maine et Anjou les dettes personnelles sont limitées aux dettes mobilières, telles cédules et obligations, arrérages de rentes. (52) En effet dans cette catégorie de dettes personnelles, c'est-à-dire de dettes dont les héritiers vont être tenus eux-mêmes en tant que représentants du défunt et non du fait de la détention d'un bien, il faut encore distinguer deux séries : celle des dettes mobilières et celles des dettes immobilières. On en constatera toute l'importance lors de l'étude des coutumes qui rattachent le paiement de ces différentes dettes à des héritiers différents. 1) Les dettes mobilières Pour savoir si une dette est mobilière ou immobilière on regarde si l'objet de la dette, le contenu de l'obligation est mobilier ou non. (53) Il faut donc mettre au nombre des dettes mobilières les dettes de somme de deniers qui peuvent résulter d'une obligation quelconque : achat de meubles ou d'immeubles (54) même s'il y a subrogation (55), emprunt d'une somme. Mais la dette d'argent peut se trouver disqualifiée et devenir immeuble : c'est le cas des rentes où des sommes exigibles peuvent être immobilières et même réelles. Les dettes d'une chose indéterminée sont aussi dettes mobilières, par exemple, celle d'un objet de telle valeur. Il en est de même pour la dette d'un corps certain meuble (s'il est immeuble il s'agit d'une dette immobilière) : la différence réside dans l'imputation de cette dette qui pèse sur le seul héritier de ce corps certain. (56) Les arrérages de pension viagère et de rentes, foncière ou constituée, dus et échus avant le décès constituent une dette mobilière de toute la succession et non la charge de celui qui hérite de l'immeuble sur lequel est assise la rente (57) : il s'agit d'une dette d'une somme d'argent. Il en est ainsi de toute somme exigible antérieurement au décès quelle qu'en soit la cause juridique. (58) Il faut envisager aussi le cas des obligations adfaciendum à la charge du défunt. Lorsque les héritiers d'un maçon par exemple ont été contraints de construire un bâtiment que devait élever leur auteur, un seul de ces héritiers reste tenu de l'exécution sauf son recours ultérieur en paiement contre les autres. (59) Parfois il incombe aux frères de pourvoir à la situation de leurs soeurs. Ainsi en Normandie doivent-ils leur procurer "mariage avenant": c'est une créance de la fille sur tous les biens de la succession des frère, mère, ou autres ascendants qui constitue sa part dans le partage auquel elle ne participe d'ailleurs pas au cas où elle a été dotée par le père de son vivant. Cette pratique n'est pas une libéralité de la part des frères à leurs sœurs, mais le paiement d'une légitime dont ils doivent garantie, tenus qu'ils sont d'assurer les promesses du père. C'est une dette de succession. (60) Mais cette espèce est à la limite d'une catégorie de dettes personnelles mobilières différente : celles qui naissent du fait du décès et du chef de la femme faut-il ajouter pour certaines dettes. On sait que l'on employait les deniers apportés en dot par la femme en acquisition d'immeubles, plus encore que de nos jours. Il faut envisager le cas où des immeubles achetés avec les deniers 21
dotaux de la femme ont été aliénés et où les deniers obtenus ainsi n'ont pas encore fait l'objet d'un remploi en immeubles au moment où s'ouvre la succession. Ce remploi de deniers réalisé au profit de la femme en vertu du contrat de mariage est une dette mobilière (61) : Lebrun en particulier rapporte cette interprétation des articles 232 et 334 de la coutume de Paris et décide qu'il n'est pas une dette réelle de la communauté, mais une dette personnelle de la succession. En effet, les deniers de la dot, s'ils figurent en deniers dans la succession, même après un emploi en immeuble et une aliénation de cet immeuble font partie de la succession mobilière; c'est donc aux héritiers mobiliers qu'il incombe d'opérer le remploi de ces deniers. Les héritiers immobiliers n'en profitent pas. (62) D'autres dettes font partie de la succession mais elles ne sont devenues dettes qu'au décès. Il s'agit du remploi des propres de la femme qui a accepté la communauté après le décès de son mari. Il a été jugé dette personnelle de la succession et non charge réelle de la communauté. (63) Le problème se trouve ainsi résolu entre autres, de savoir si l'héritier des propres du mari contribue à la moitié du remploi des propres de la veuve aliénés pendant la communauté ou si l'héritier des meubles et acquêts, qui partage les biens de la commauté avec la veuve par moitié en est seul tenu : il a été décidé que l'héritier aux propres du mari y contribuerait selon son émolument avec l'autre héritier (64) au motif que c'est une dette de succession. Ce problème ne se résoud ainsi que dans les coutumes qui, comme celle de Paris, répartissent les dettes au prorata de ce que chacun prend dans la succession sans en distinguer la nature; dans celles où les meubles sont sièges de dettes, c'est l'héritier mobilier qui acquitte le remploi. Lorsqu'au contraire la femme a renoncé à la communauté, elle a le droit d'exercer des reprises qui constituent des dettes de la succession auxquelles tous les héritiers participent personnellement. (65) Mais tout en étant personnelle cette dette devient mobilière ou immoblière selon ce que la femme reprend. Il s'agit d'ailleurs dans ces hypothèses d'un règlement interne de la succession considérée comme une masse globale, préalable même au r è glement de la succession, plus que de dettes purement successorales. Il y a encore d'autres dettes de la succession dont le défunt n'a jamais été débiteur avant son décès, puisque c'est le décès qui les fait naitre: il ne s'agit pas néanmoins de dettes immobilières ni réelles, aussi ont-elles leur place ici. Il s'agit en premier lieu du douaire, du douaire préfix. C'est en effet une dette personnelle du mari prenant naissance à son décès : tous les biens du mari (66) y sont affectés ou hypothéqués, propres, meubles et acquêts, et même ceux du fils qui succède au père (67), c'est une obligation personnelle. (68) Mais certaines coutumes considèrent cependant qu'un douaire préfix est une dette réelle : ainsi celles de Tours et de Loudun. (69) On peut se demander d'ailleurs s'il s'agit encore là de dettes successorales ou de règlements internes de la succession à opérer avant le partage. L'objection majeure qui empêche de se prononcer est qu'on peut en dire autant de toutes les dettes, et que l'on pourrait concevoir un apurement de la succession durant son indivision avant tout partage. Le décès crée en second lieu des dettes, frais funéraires qui deviennent dettes personnelles de tous les héritiers. (70) On considère traditionnellement les legs et fidéicommis comme des charges de la succession et non comme des dettes. On peut mettre aussi les dettes de communauté au rang des dettes successorales. D'une part lorsque liquidations de succession et de communauté 22
ont lieu simultanément et que la communauté est acceptée, il a toujours été décidé ainsi que les dettes de communauté deviennent par l'acceptation dettes de succession (71); d'autre part lorsque le conjoint survivant ou les héritiers du défunt renoncent à leur part de communauté, et c'est ce qui se produit lorsque la communauté est surchargée de dettes, elles deviennent aussi dettes de la succession dans ce cas de renonciation. Mais la communauté qui forme une entité distincte peut comporter, et en conséquence la succession aussi, des dettes de différentes natures, en particulier des dettes immobilières. 2) Les dettes immobilières L'objet de la dette conditionne sa nature et celle-ci devient immobilière lorsqu'il est immobilier ou qualifié tel. La dette peut alors être soit réelle et suivre le fonds qui la supporte, soit personnelle et rester attachée à la personne du débiteur ou de ses héritiers. Dans cette dernière espèce on traite les arrérages de rentes échus depuis le décès et ceux qui restent à échoir. La finance d'un office vénal, qui est considéré comme un immeuble (art.95 de la coutume de Paris) ne semble pas en revanche faire partie des dettes immobilières puisque le prix d'achat d'un immeuble encore dû est une dette mobilière. (72) Il importe donc peu de savoir si les offices domaniaux et héréditaires qui sont une sorte de rente constituée sur le public, perceptible en un endroit déterminé (par exemple une rente à percevoir sur les aides de telle circonscription) suivent la coutume du lieu pour leur qualification. (73) Mais le problème le plus important ici est celui de la nature des rentes, car le 16e siècle a connu une évolution dans ce domaine, en particulier sous l'impulsion de Dumoulin. La rente au début du 16e siècle est un droit à percevoir des revenus sur l'immeuble; elle est foncière. Mais la rente constituée qui résulte de la cession d'un capital et non plus de la cession d'un immeuble ne devait pas être réelle. Seulement cette constitution se faisait le plus souvent moyennant assignation d'un immeuble au débi-rentier, si bien que cette rente se rapprochait beaucoup de la rente foncière. Elle ne s'en éloignera que lorsque tous les biens du débi-rentier seront affectés à la rente, ce qui sera analogue à une hypothèque générale : de là, l'assignation sur un immeuble particulier ne sera bientôt considérée elle aussi que comme une hypothèque particulière. Mais les définitions sont toujours restées obscures sur ce sujet. Longtemps après le 16e siècle, d'ailleurs, certains auteurs (74) admettent encore le caractère réel de la rente constituée qui figurait dans l'ancienne coutume de Paris, article 172 (l'art. 94 de la nouvelle coutume qualifie d'immeubles les rentes constituées mais non pas réelles). La raison qui avait fait juger les rentes constituées réelles était que l'assignation sur un bien en constituait une composante essentielle. Or Dumoulin a contesté ce caractère fondamental de l'assignation. (75) Il suffit pour lui que le capital soit aliéné à perpétuité et que le débiteur ait le droit de racheter sa dette quand il le désire (76) pour qu'il y ait une rente valablement constituée. Des raisons d'ordre économique et en particulier le souci de libérer les immeubles déjà surchargés de droits, ont conduit Dumoulin à précipiter l'évolution qui devait aboutir à faire des rentes constituées des droits personnels. (77) A partir du milieu du 16e siècle l'assignation d'un bien à la rente n'est plus qu'une clause accessoire qui a pour but de donner une garantie supplémentaire au crédi-rentier. (78) Elle dégénère donc en simple hypothèque (79) et celui qui recevra l'héritage hypothéqué dans sa part successorale ne de23
vra la rente que pour sa portion héréditaire (80) bien qu'il soit soumis aux poursuites pour le tout. C'est alors une dette personnelle affectant toute la succession mais immobilières (81), solution inspirée des pays de droit écrit, où les rentes sont immeubles. (82) Les réformateurs avaient d'ailleurs décidé qu'il n'était pas nécessaire qu'une rente soit assise sur un immeuble pour être immobilière. (83) Mais ceci ne constitue que le droit de la coutume de Paris. En effet, depuis sa réformation il est jugé à Paris que les rentes sont meubles ou immeubles suivant les termes de la coutume du lieu où le créancier a son domicile (84) et de la coutume du lieu où la rente a été constituée. (85) Cette solution est valable lorsqu'il s'agit de rentes sur des particuliers. Mais celles qui sont assises sur l'hôtel de ville de Paris ou sur le Domaine comportent une décentralisation, elles constituent un revenu local : il a été jugé qu'une rente à prendre sur les aides de la ville de Beaumont dans le Maine, serait partagée suivant la coutume du Maine, bien que défunt et créancier demeurent à Paris. (86) Certaines coutumes en effet réputent meubles les rentes constituées ; ce sont d'ailleurs les moins nombreuses : la coutume de Reims les qualifie meubles (87) celle de Troyes (art. 66) pendant le temps où le rachat n'est pas utilisé, car une fois rachetées elles deviennent immeubles; celles de Chaulny (art. 6) et d'Amiens (art. 137) de même les qualifient meubles (sauf si elles sont réalisées nanties et hypothéquées), de même que celle de Lille (art. 73). En Lorraine et à Vitry elles sont meubles. En Bourgogne les rentes sont immeubles seulement entre époux. La plupart des autres coutumes qualifient d'immeubles les rentes constituées. (88) La question s'est posée pour des rentes dont l'assise se situait dans plusieurs coutumes : il a été décidé que l'on suivait la coutume du domicile du créancier. (89) Enfin lorsqu'une coutume reste muette sur ce sujet, les rentes constituées y sont présumées immeubles. (90) Lors du rachat de la rente celle-ci se trouve transformée en une somme de deniers, donc elle devient meuble. Toutes ces solutions sont acquises à la fin du 16e siècle où les divers types de rentes connaissent une définition juridique précise. Les rentes constituées sont immeubles, sauf exception dans certaines coutumes, et c'est l'aspect intéressant du point de vue des dettes successorales, perpétuelles mais rachetables, alors que les rentes purement foncières, nécessitant toujours l'aliénation d'un immeuble moyennant la retenue d'une rente, c'est-à-dire de partie de cet immeuble, restent un démembrement de la propriété : la dette successorale de rente foncière est une dette réelle. B. Les dettes réelles Ce qui différencie les dettes réelles des dettes personnelles, c'est le fait que le fonds lui-même en quelques mains qu' il se trouve, réponde de la dette, point capital donc pour les rapports entre héritiers dans la succession. Au nombre de ces dettes doivent donc figurer les rentes foncières. (91) On l'a cependant contesté, au motif que ces dettes, ces rentes, n'étaient plus des dettes de la succession, mais des charges grevant le bien, entité autonome. (92) L'objection ne peut être retenue : en effet, tout ce dont le défunt était débiteur, même par l'intermédiaire nécessaire d'un de ses biens, constitue lors du décès une dette de la succession considérée dans son ensemble: il ne faut pas en éliminer certaines sous le prétexte qu'elles suivent tel bien et seront entièrement à charge d'un seul héritier. Les rentes sei24
gneuriales figurent aussi au nombre des dettes réelles liées aux biens. (93) Elles s'analysent, en effet, en une retenue d'une partie d'un bien qui est concédé. Le douaire coutumier qui a pour base la moitié des immeubles du mari au jour du mariage et la moitié des héritages depuis la consommation du mariage (94) est une charge réelle de ces biens (95) ; les héritiers aux propres paternels en seront donc seuls chargés. De plus il peut y avoir des dettes mobilières qui sont décrétées réelles, et suivent le fonds comme les frais exposés pour la culture d'une terre par exemple. (96)
HL L'IMPUTATION DES DETTES. EVOLUTION HISTORIQUE
L'imputation des dettes successorales à des personnes ou sur des biens, telle que la prévoient les coutumes à la fin du 16e siècle, qui constitue une étape dans l'histoire du droit privé puisque rédactions et réformations sont alors achevées, est le résultat d'une évolution qui a utilisé les principes coutumiers traditionnels antérieurs, et qui a innové en partie par l'adoption de nouveaux principes issus du droit romain. (97) Au Moyen Age les fonctions des lignages exigeaient que les biens restent concentrés dans la famille : il fallait soutenir les guerres privées, rendre les services féodaux, assurer la défense commune. C'est pourquoi la dévolution des biens n'avait pas pour but l'intérêt particulier des héritiers mais l'intérêt familial et féodal car il fallait assurer la continuité des services, donc de la famille, mais non pas la continuation de la personne du défunt lui-même. Il eut d'ailleurs été impossible de constituer un droit individuel à un héritier car les terres étaient grevées de droits perpétuels et enchevêtrés, elles étaient intégrées dans l'organisation féodale. Les biens sont indisponibles (98), ils sont affectés et les héritiers qui les recueillent en deviennent "gérants", ils les "tiennent", selon la terminologie féodale, mais ces biens ont une fonction juridique indépendante des personnes. Seuls les meubles considérés comme une prolongement de la personne du défunt (99) qui en était propriétaire, sont régis par la coutume de son domicile alors que les immeubles suivent celle du lieu de leur situation. On comprend dès lors que rien n'ait été commun entre meubles et immeubles, qu'ils n'aient même pas fait partie juridiquement de la même succession. Et l'on retrouve sur le plan des dettes successorales la même séparation : tout ce qui est dette personnelle mobilière et qui concerne uniquement la personne du défunt doit s'imputer sur cette masse de biens personnelle au défunt, les meubles. (100) Ces dettes, comme ces biens sont peu nombreuses et leur compensation toujours facile. D'un autre côté les dettes importantes, qui concernent les immeubles doivent s'imputer sur eux et les suivre en quelques mains qu'ils se trouvent. Mais, avec la multiplication des dettes, il a fallu bientôt que tous les biens du débiteur en répondent. Car s'il n'était pas de règle au départ de les faire supporter par les propres réservés au lignage, il était plus injuste encore de les imputer aux héritiers sur leurs biens personnels alors que la succession restait solvable. (101) C'est alors que les solutions apportées à la prise en charge du passif se sont diversifiées, solutions que l'on retrouve dans les coutumes rédigées. 25
D'un côté certaines coutumes ont continué à admettre la répartition ancienne imputant certaines dettes aux meubles et certaines aux immeubles. Ce système de la "spécialisation du gage" (102) était simple mais il comportait un inconvénient qui était le risque de voir une masse de dettes insuffisamment compensée par sa masse de biens correspondante, alors qu'il pouvait r e s t e r dans l a succession une autre masse de biens excédentaire par r a p port aux dettes qui lui étaient affectées. Mais ce problème a été néammoins résolu. Ce système durera t r è s .longtemps puisqu'on le retrouve dans des coutumes rédigées et même réformées, et dans des décisions judiciaires même t r è s tardives. (103) D'un autre côté certaines coutumes suivent une voie quelque peu différente. Pour éteindre les dettes qui se multipliaient, elles ont d'abord augmenté la masse des biens qui y seraient affectés. C'est ainsi qu'à côté des meubles, l e s acquêts, qui ont ceci de commun avec les meubles qu'ils sont le résultat de l'activité personnelle d'un individu, sont affectés aux dettes. L e s immeubles eux, se voient toujours imputer les mêmes dettes particul i è r e s . Aux meubles et aux acquêts, on joint bientôt la quotité disponible des propres, le quint ou le tiers suivant les coutumes. Certaines conservent encore lors de l e u r s rédactions c e s affectations particulières dont le modèle est la coutume de P a r i s de 1510. Mais il faut compléter ces vues schématiques et c'est ce qui obscurcit la question car l e s coutumes adoptent des solutions qui se rapprochent pour r é g l e r les dettes successorales. En effet, à l'intérieur de ces deux systèmes, il faut replacer cette notion que les meubles sont des biens d'utilisation courante, affectés aux besoins immédiats. Et pour le règlement des dettes en particulier, on aura tendance à procéder, comme l'eût fait le défunt lui-même, à une affectation successive des biens aux dettes :d'abord ceux auxquels on est le moins r a t taché, les meubles jusqu'à épuisement, puis les acquêts puis le quint des p r o p r e s etc. et à l'extrême rigueur les propres (104), car tous les biens du défunt doivent répondre de son passif. Mais même dans les coutumes où il y a une spécialisation du gage, on est arrivé à cette poursuite initiale des meubles pour ne passer qu'ensuite à une poursuite sur les véritables biens, les immeubles, acquêts ou autres, qui ont une plus grande valeur familiale. Les meubles auraient donc servi à régler toutes l e s dettes, jusqu'à leur épuisement. Mais là encore un aménagement s'est opéré qui a consisté à n'affecter aux meubles que les dettes personnelles et mobilières. (105) Ces solutions diverses se cumulent et •c'est ce qui explique leurs imbrications : ce dernier système prévaudra dans l e s groupes de coutumes de l'Ouest et du Nord, a p r è s avoir été adopté en Anjou en 1453, d'où il s'étendra. (106) Et au 16e siècle deux éléments vont venir modifier c e s conceptions : il s'agit de l'ordonnance de 1539 de V i l l e r s Coterêts qui va modifier la procédure des poursuites, et de l'influence des principes du droit romain. 1. L'ordonnance de 1539 Une preuve de ce que les meubles ont été longtemps affectés par priorité à toutes les dettes est fournie à contrario par l'ordonnance de 1539 qui, dans son article 74 stipule que "pour la validité des saisies, exécution et c r i é e s , il n'est besoin de perquisition de meubles". Avant cette ordonnance on procédait d'abord à l'exécution sur les meubles, puis subsidiairement 26
sur les immeubles (107) pour toutes les dettes, y compris donc les dettes successorales. Après l'ordonnance les créanciers peuvent s'adresser à tels biens de leur débiteur qu'il leur plait pour être payés (108), il leur est "permis de s'adresser de plein vol aux immeubles". (109) Cette solution a été adoptée par certaines coutumes (110), mais elle est aussi appliquée in toto regno, même aux coutumes qui, conformément à la pratique ancienne, disposent du contraire comme celle de la Marche (art. 370-371) (111), nonobstant qu'elles ne soient pas spécialement abrogées ; c'est ce que soutenait déjà Dumoulin dans son commentaire sur cet article 74. (112) Cette ordonnance a donc eu, en principe, une application générale dans toutes les coutumes, la seule restriction concernant les mineurs qui n'y étaient pas assujettis : pour eux, l'ordre restait, traditionnellement, comme auparavant, les meubles devant d'abord être affectés aux dettes, les autres biens y contribuant seulement ensuite (113), et le tuteur devant rendre compte en justice de ces opérations. Ces aménagements successifs et parfois cumulés, mais nécessaires, ne contribuaient pas à préciser une classifications rigoureuse des coutumes. Mais l'on peut cependant les regrouper et dire que deux groupes de coutumes sont issues directement, quant à leurs options sur le problème de l'imputation des dettes successorales, de la pratique du Moyen Age : le groupe où l'on constate que "meubles sont sièges de dettes" et celui, dérivé, où "meubles et acquêts sont sièges de dettes". C'est pour cela qu'il conviendra de les classer sous le concept de "succession avec spécialisation du gage", car elles ont le même fondement historique et attribuent certains biens au règlement de certaines dettes. (114) L'habitude de ces affectations les a transformées en des règles coutumières t r è s solides puisqu'elles resteront en vigueur jusqu'en 1804. Mais parallèlement à ce double système issu d'une même origine, un mouvement de réforme se précise, lié au renouveau des études de droit romain. 2. L'influence du droit romain Déjà la coutume de Vermandois, rédigée au 15e siècle, adoptait une répartition nouvelle des dettes entre les héritiers, chacun au prorata de son émolument. (115) Il ne s'agit pas là d'une invention ex nihilo. Déjà certes entre les masses de biens, une répartition des dettes avait lieu dans les coutumes. Mais l'on n'avait jamais encore envisagé une succession comme une universalité indistincte où l'on aurait réparti les dettes à proportion de la part de chacun dans l'actif. C'est la connaissance d'un système étranger qui a importé ce concept. Toute la première moitié du 16e siècle a connu un large engouement pour le droit romain, et particulièrement en notre matière. Certains rédacteurs des coutumes en étaient des adeptes déclarés et proposaient d'en faire le droit commun de la France (116), tel le premier président Lizet qui participa à nombre de rédactions et réformations jusqu'en 1555 où De Thou le remplaça, DeThou qui lui, tenait plutôt le droit français et coutumier pour droit commun, ce qui contribua à ralentir la réception des principes romains. (117) Il ne manque pas de textes romains à l'appui de cette offensive et Dumoulin en cite plusieurs. (118) Certes, dans son commentaire de la nouvelle coutume de Paris, il se félicite que certains articles soient conformes au droit romain, mais il les avait déjà indiqués auparavant comme modèles. 27
Tous les textes invoqués mettent les dettes à la charge des héritiers selon leur part dans l'actif : "hereditaria onera ad heredes pro portionibus hereditariis, non pro modo emolumenti pertinere" . (119) La plus invoquée des lois romaines et celle qui fut appelée "loi des ainés" en France : "si certum petatur". (120) L'article 132 de la nouvelle coutume de Paris a été composé, tels sont les termes d'un commentateur (121), avec cette loi. D'autres textes vont dans le même sens : la loi ea quae au titre familiae erciscundae (122), la loi debitores au titre de exceptionibus seu praescriptionibus. (123) Et encore au Code les deux premières lois du titre de hereditariis actionibus. (124) Des passages du Digeste sont aussi f r é quemment cités. (125) Le commentateur de la coutume de Nivernais, donc en contact assez facile avec les pays de droit écrit, dit que l'inclination de sa coutume vers le système romain date de 1550 : à partir de ce moment (126) on verra des jugements de cour aller à l'encontre du texte de la coutume prescrivant d'imputer les dettes sur les meubles. Le commentateur parle de titre universel : les concepts romains sont donc connus et exploités. (127) Et, en fait, plusieurs coutumes les admettront pour régler le passif successoral. Nous voici donc au 16e siècle en présence de trois sytèmes de règlement de ce passif : il y a l'ancien qui a subsisté partiellement sous deux aspects, celui d'une spécialisation du gage rigoureuse, et celui d'une affectation principale d'une masse plus large (meubles et acquêts), suivie d'une affectation des autres biens du défunt aux dettes successorales. On peut dire que ces deux systèmes dérivés des conceptions médiévales traduisent encore un principe de "succession avec spécialisation du gage". (128) Il y a aussi le système, à l'origine duquel les principes romains figurent pour une bonne part, selon lequel les biens sont répartis suivant les parts héréditaires, c'est-à-dire suivant la place qu'occupent les héritiers vis-àvis du défunt : il s'agit là d'une autre conception, celle d'une succession considérée dans son universalité indistincte. Il serait inexact d'affirmer qu'il y a eu un passage brusque d'une conception à l'autre. Elles ont d'abord coexisté. Mais il peut être intéressant de rechercher le cheminement de l'une à l'autre, car c'est celui qui a conduit à l'unification du droit. Or le 16e siècle où se sont figées les coutumes, a connu un intense travail doctrinal et pratique en cette matière, et par suite une évolution. Mais d'autre part, cette rédaction des coutumes a eu pour effet d'arrêter, au moins pour un temps et en théorie, cette évolution. Il est donc possible, au moment où s'achèvent les dernières réformations, de fair e le point sur cette question de l'envahissement du droit romain souvent dénoncé, ou, plus techniquement, du passage d'une conception à l'autre en matière de liquidation du passif successoral. Obligation à la dette et contribution à la dette sont les deux termes du règlement du passif successoral, même encore en droit actuel. C'est au regard de ces deux concepts qu'il faut l'étudier. NOTES
1. Code civil, art. 732. 2. J.Yver, "Les caractères communs dans les coutumes de l'Ouest", R. H.D.. 1950, p. 155; "Les caractères originaux du groupe de coutumes de l'Ouest de la France", R.H.D., 1952, p. 18-64; "Les deux groupes de coutumes du Nord", Revue du Nord. 1953, p. 197-220 et 1954, p. 5-30 et 73 sq. ; "Le règlement du passif successoral dans les coutumes de l'Ouest", R.H.D.. 1956, p. 300-311; L'Egalité entre héritiers et l'exclusion des enfants dotés. Essai de géographie coutumière. Paris. r
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