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French Pages [246] Year 2008
Le Parthénon
DU MtME AUTEUR
Ténos,l Le Sanctuairede Poséidonet d'Amphitrite,en collaboration avec Roland Étienne et Jean-Pierre Braun, Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome 263, Paris, De Boccard, 1986. Lexiqued'histoireet de civilisationgrecques,en collaboration avec Anne Queyrel, Paris, Ellipses, 1996; 2c éd. 1998.
LesMoulagesdesculpturesantiqueset l'histoiredel'archéologie, Actes du colloque international (Paris, 24 octobre 1997), en collaboration avec Henri Lavagne, Centre de recherches d'histoire et de philologie II, Hautes études du monde gréco-romain 29, Genève, Droz, 2000. Le Laocoon, histoire et réception, en collaboration avec Élisabeth Décultot et Jacques Le Rider, Revue germanique internationale, 19, Paris, PUF, 2003. LesPortraits desAttalides:fonctionet représentation, Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome 308, Paris, De Boccard, 2003 (prix Gustave Mendel de l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres). L'AuteldePergame. Imagesetpouvoiren Grèced'Asie,Antiqua 9, Paris, Éditions Picard, 2005 (prix Salomon Reinach de l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres).
FrançoisQueyrel
Le Parthénon Un monumentdans /'Histoire Dessinsde FlorenceAndré
BARTILLAT 2, rue Crébillon, 75006 Paris
Tous droits réservés © 2008, &litions Banillat. www.cditions-bartillat.com
À mesamis d'Athènes
INTRODUCTION Le Parthénon est une histoire de passions, tout le contraire du froid modèle classique qui intimide ou inspire l'ennui. La longue histoire d'un monument devenu symbole d'un peuple et du miracle grec est impressionnante mais, dans la multiplicité des regards portés sur lui, se lit souvent la fascination pour l' œuvre d'art, l'émotion faite peut-être de malentendus, mais qui les transcende. Un Grec verra les chevaux de la frise captifs dans la grisaille londonienne; il les entendra hennir dans leur exil, loin de la terre d'Athènes: Melina Mercouri fit du retour des marbres le thème d'une épopée moderne, ta Marmara... Mais tel autre eut plaisir à voir, à toucher les sculptures arrachées par Elgin au monument sacré de l'Acropole : à leur arrivée à Londres, aucun sculpteur n'osa compléter les chefs-d' œuvre mutilés. Nouvelle rupture dans la routine artistique. Et remontons dans le temps : sous Louis XIV, un ambassadeur de France fit dessiner la plupart des sculptures encore en place et en sauva l'image avant qu'elles soient en grande partie détruites quelques années plus tard quand une bombe lancée par l'artillerie de Venise fit exploser le Parthénon où les Turcs avaient entreposé leurs munitions.
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Dès l'âge d'or de !'Athènes de Périclès, à partir du milieu du ye siècle av. J.-C., le Parthénon fut lieu d'affrontements : gouffre à finances, bâtiment ruineux, détournement d'argent public, alliés pressurés pour le construire, autant de griefs des adversaires du projet, mais on parla aussi de subversion de la religion traditionnelle, d'une entreprise impie au service de la tyrannie hypocrite d'un seul, de l'invention d'une idole monstrueuse qui éclipsait la bonne déesse protectrice d'Athènes ... Que répondre à ces critiques, à ces griefs, à ces règlements de comptes dont certains se terminèrent par des procès en règle devant la justice athénienne? La construction se poursuivait avec une organisation du chantier sans faille: au bout d'une quinzaine d'années seulement, le monument se dressait sur l'Acropole autrefois dévastée par l'envahisseur perse, manifestant la grandeur de la déesse Athéna et la puissance de sa ville. Des ruines qui jonchaient le sol, on passait à l'exaltation de la richesse et de l'impérialisme sur le plateau sacré de la cité. Il n'y avait donc pas plus un Parthénon unique pour les contemporains de Périclès qu'il n'existe aujourd'hui de vision unique du monument quand les visiteurs le découvrent en partie reconstruit sur le rocher sacré de l'Acropole, ou démembré dans des musées. Des visions, évidemment subjectives, composent la vérité d'une œuvre en fragments. Linvention du Parthénon est nécessaire pour donner au regard que l'on porte sur lui sa pertinence, à travers des lectures, à travers des souvenirs qui enrichissent la vision. Dans la nuit du 4 au 5 novembre 2006, j'eus, à Vilnius, la révélation du divin dans la frise continue du Parthénon. La chose peut paraître étrange : rien de plus
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humain que ce défilé qui, sur un rythme vif puis apaisé, se dirige allègrement vers les dieux d'Athènes. Lhumanité de tous les personnages a déteint sur les divinités ellesmêmes qui accueillent la procession : les héros conversent familièrement, les dieux sont unis dans une complicité ironique. On retrouve là un trait marquant de la religion sont la Bible grecque : Homère, dont l'Iliadeet l'Odyssée des Grecs, s'est plu à dépeindre des héros animés de toutes les passions des hommes, de la colère d'Achille, vrai titre de l'Iliade,à la couardise et à la vantardise de Pâris; ses dieux aussi sont humains, trop humains peutêtre au goût de certains. Non, la révélation du Parthénon n'est pas là : elle est dans un ailleurs qui se glisse dans l'humanité que nous partageons avec les personnages de la frise. Où se dirige le défilé ? Vers les héros et les dieux, figurés au terme, mais aussi vers un « entre-dieux» qui reste énigmatique: ce n'est plus !'Olympe, mais, de nouveau, cette scène centrale est située à Athènes, sur !'Acropole, où cinq personnages participent à une action mystérieuse. Cependant, le lieu n'est plus à l'extérieur; c'est à l'intérieur que l'action se déroule. Et l'écho tout proche d'une conversation sur Plotin me revint, dans cette nuit lituanienne où des propos d'après-table prolongeaient les Nuits attiques. Plotin guide l'âme d'étape en étape vers la contemplation directe du divin. Et, par Plotin, on atteint la vérité de la frise, ce que j'appellerais la révélation du Parthénon : un divin ancré dans l'humanité, une contemplation annoncée, promise et offerte à tout le peuple d'Athènes. Les mystères ne sont plus réservés à une élite d'initiés, interdits au grand nombre, mais la foule est élite ; une mystique démocratique propose de nouveaux mystères communément partagés. Cette révélation n'est plus celle de Plotin, ni même celle
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de Platon dont elle se présentait comme la simple exégèse, mais elle joue sur les mêmes ressorts que celle des philosophes : une religion à mystères fournit le substrat sur lequel bâtir dans un cas la religion des idées, dans l'autre, la religion démocratique : toutes deux supposent en effet une adhésion intime à des valeurs, une communion que permettaient les cultes à mystères. La longue procession conduit à une initiation, mais elle n'est pas l'introduction à une nouvelle religion à mystères. Il faut éviter un tel malentendu. Les Athéniens sont ici amenés à adhérer au culte de la cité, dans un mouvement collectif qui joue sur les ressorts de la révélation personnelle. On saisit toute l'importance du regard dans cette révélation. Par regard, j'entends la vision et ses conditions. Il n'est pas indifférent que la frise continue ait été à peine visible, placée en hauteur, à l'ombre de la colonnade. Il fallait un regard aiguisé pour l'apercevoir, même si des rehauts de couleur et, pourquoi pas, de dorure, ou encore des pièces rapportées en métal signalaient certains détails et si les figures se détachaient sur un fond coloré. On a remarqué que c'était la fine fleur de la cité qui est ici exaltée, avec la domination de la jeunesse d'Athènes. J'ajoute que le Parthénon est conçu pour une vision jeune: l'acuité d'un œil de cavalier ou de marin permettait seule de donner toute sa force au message. Mais les autres âges de la vie ne sont pas exclus : cette prédominance de la jeunesse ne pouvait que charmer les Athéniens chenus qui voulaient partout de l'enfance. On dépasse cependant l'agrément du sujet quand on établit les relations spatiales sur lesquelles est fondée la révélation du Parthénon : on vient de le voir pour la scène mystérieuse au centre de la frise continue, mais on
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le constate aussi dans la mise en correspondance entre figures divines du fronton est et figures de l'assemblée des dieux placée dessous, en retrait, sur cette frise; le même lien unit les thèmes figurés sur le bouclier de la statue colossale de la Parthénos et sur les métopes* de la frise dorique* qui fait le tour du bâtiment. Ici le regard enrichit la contemplation de l'image de toutes les ressources de la mémoire visuelle et du mouvement qui entraîne vers les éléments visibles de la religion de la cité: les dieux figurés sont aussi présents dans des sanctuaires proches ; cette relation établie visuellement leur insuffle la vie, donne à l'image une respiration divine.
* [astérisque indique un terme défini dans le glossaire.
I LA ROCHE SACRÉE
L'ACROPOLE
Le Parthénon se dresse sur l'Acropole d'Athènes, le haut lieu le plus sacré de la cité, et sa décoration sculptée exalte sur le lieu même où on les situait d'antiques légendes qui rattachent les Athéniens au sol sacré de la patrie. La colline sainte abrite le sanctuaire d'Athéna, la déesse maîtresse de la ville, et les plus anciens cultes athéniens: s'y côtoient dieux et héros. C'est là que résidaient les rois mythiques d'Athènes. Lélévation du plateau aux pentes abruptes en fait une forteresse idéale pour protéger les demeures des dieux et des rois. Le lieu est hanté par le souvenir de légendes, que l'on verra représentées sur le Parthénon. Et ces légendes familières à tous les Athéniens sont empreintes de violence, de sexe et de mort.
Athéna et Poséidon LAcropole est le domaine de la déesse Athéna, qui l'avait conquise en remportant la victoire sur son oncle Poséidon, le dieu de la Mer. C'est sur l'Acropole qu'était située cette lutte pour la possession de la cité d'Athènes. Poséidon avait revendiqué le pays en y faisant jaillir, d'un
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coup de trident, une « mer salée», merveille de stérilité. Athéna, prenant le roi Cécrops à témoin, fit alors pousser l'olivier sur ce sol rocailleux et le roi, institué arbitre par Zeus, donna la victoire à Athéna. Poséidon eut beau provoquer une inondation qui recouvrit l'Attique, Athéna en resta dès lors la maîtresse incontestée.
Cécropset sesfilles Avant même la victoire d'Athéna régnait ici l'homme aux jambes de serpent, sorti de la terre d'Athènes, le roi Cécrops. Ce premier roi eut quatre enfants: trois filles, les Aglaurides, et un fils, Érysichthon, qui mourut avant de lui succéder. LesAglaurides trempèrent dans la sombre histoire d'Érichthonios, autre monstre intermédiaire entre l'homme et le serpent. Le mythe raconte comment Érichthonios, né de la Terre fécondée par le sperme d'Héphaïstos qui poursuivait la Vierge Athéna, fut confié par Athéna à Pandrose, une fille de Cécrops, caché dans une corbeille avec défense de l'ouvrir. Ses deux sœurs, Hersé et Aglaure, dévorées de curiosité, et Pandrose aussi dans certaines versions de la légende, ouvrirent malgré l'interdiction divine la corbeille d'Érichthonios; trouvant un énorme serpent à côté du nouveau-né, elles se jetèrent du haut de l'Acropole, frappées de folie par Athéna. Aglaure vint expirer dans la plus vaste caverne de l'Acropole, sous la pointe orientale du plateau sacré.
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Érechthéeet sessœurs De cette lignée royale issue de la Terre sainte d'Athènes naquit le roi Érechthée, que l'on confond parfois avec Érichthonios. Ce roi aurait institué la première fête en l'honneur d'Athéna, la patronne du rocher, et son frère Boutès eut en partage le sacerdoce de la déesse et de son ancien rival, Poséidon. Dans cette famille maudite, les deux sœurs d'Érechthée eurent un destin tragique : Procné fut donnée en mariage au Thrace Térée, qui avait volé au secours d'Athènes en guerre contre Thèbes, et ils eurent un fils, ltys ; mais Térée fit violence à sa bellesœur Philomèle et lui coupa la langue pour l'empêcher de parler; pour dénoncer le crime de son beau-frère, l'infortunée broda sur une étoffe le récit de ses malheurs ; Procné, tuant son fils ltys, le donna à manger à son mari et prit la fuite avec sa sœur. Au moment où Térée allait les rattraper, les dieux, les prenant enfin en pitié, changèrent Procné en rossignol, Philomèle en hirondelle et Térée en huppe.
Créüsefille d'Érechthée Érechthée lui-même immola ses filles pour remporter la victoire sur le fils de Poséidon, avant d'être englouti dans le sol sous les coups de trident du dieu qui vengea ainsi la mort de son fils Eumolpos. La seule qui survécut fut Créüse. Un antre situé au pied de l'Acropole fut le théâtre de ses amours avec Apollon ; elle y exposa son fils Ion, futur roi d'Athènes, le créateur des quatre tribus*
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primitives. Euripide, dans sa tragédie consacrée à Ion, rappelle cette légende : « Or une cité grecque qui n'est pas sans importance, tenant son nom de Pallas-Lance-d'Or,a vu Phoibos s'unir par contrainte à Créüse, la fille d'Érechthée, là où sont des roches tournées vers le septentrion, au pied de la colline de Pallas,sur le sol d'Athènes, appelées les HautesRoches par les seigneurs de la terre d'Attique. À l'insu de son père - c'était le désir du dieu - elle porta le fruit dans ses entrailles. Quand vint le terme, elle accoucha dans le palais et alla déposer l'enfant nouveau-né dans le même antre où elle, Créüse, avait été prise par le dieu et elle l'exposa promis à la mort dans le cercle parfait d'une corbeille creuse, respectant la coutume des aïeux et d'Érichthonios né de la terre 1• » Ainsi Créüse cache son fils nouveau-né comme l'avait fait Athéna pour Érichthonios. Le dieu Apollon recueillit dans cette grotte Ion, ancêtre des Ioniens, qui devint plus tard roi d'Athènes.
Thésée L'Acropole est aussi hantée par le souvenir du roi Thésée, le fils d'Égée, qui réunit les bourgades de !'Attique en un seul État, devenant le fondateur légendaire de la cité. Thésée, sous les murailles de l'Acropole assiégée, mit en déroute une armée d' Amazones qui avait envahi Athènes. C'est lui aussi qui, invité aux noces de son ami Pirithoos, prit fait et cause pour ses
1. Euripide, Ion, vers8-13.
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hôtes, les Lapithes, dont les femmes étaient poursuivies par les Centaures avinés, monstres mi-hommes michevaux.
Cultesde /'Acropole Après la période des rois, l'Acropole conserve le souvenir de ces légendes qui mêlent dieux et rois de la cité dans une geste compliquée qui a la logique des rêves. LesAthéniens adorent sur l'Acropole la déesse de la cité, Athéna Polias, qui y a son sanctuaire avec différents monuments. Mais Athéna est aussi l'Athéna de la victoire, Athéna Niké, et la déesse vierge, Athéna Parthénos*. Elle n'est pas isolée sur le plateau sacré : elle y est aussi vénérée avec celui qui l'avait poursuivie, Héphaïstos, et celui qu'elle a vaincu, Poséidon, ainsi qu'avec Boutès, le premier prêtre, frère du roi Érechthée, et Pandrose, l'une des Aglaurides. Le père de la déesse, Zeus, occupe le point culminant du plateau : il est le dieu de la cité, Polieus, comme sa fille Athéna est la Polias. Artémis s'est aussi installée sur !'Acropole dans un sanctuaire qui est comme une succursale de son sanctuaire principal de Brauron en Attique. Au pied de l'Acropole, dans un creux de rocher tourné vers le nord, Aphrodite est adorée avec son fils Éros et, sur le plateau, sa mère Dioné, la première épouse de Zeus, possède un autel. Dionysos, le dieu du Théâtre, tard venu, s'est installé près d'une grande dépression au sud, en contrebas, où son théâtre a été aménagé. À l'entrée du plateau, à l'ouest, on rencontre Hécate, la déesse sorcière des carrefours, en compagnie d'Hermès, le messager des dieux. Tout près, sous les Hautes-Roches, Apollon a sa grotte consacrée. Quant
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à Arès, le dieu de la Guerre, il est banni au-dehors, sur sa colline, l'Aréopage, dominant le lieu de la victoire de Thésée sur les Amazones.
Guerresmédiqueset suprématied'Athènes Au début du VCsiècle av. J.-C., l'Acropole était dans toute sa splendeur, couverte de temples et de statues offertes en ex-voto: le temple principal d'Athéna, le « Vieux Temple», ainsi appelé dans les inscriptions, avait été construit par les tyrans d'Athènes à partir du milieu du VIe siècle pour abriter la statue de culte d'Athéna Polias, et, à l'emplacement qu'allait occuper le Parthénon, un « pré-Parthénon », comme l'appellent les archéologues, avait été mis en chantier pour remplacer un édifice plus ancien ; sa construction avait été décidée par la nouvelle démocratie instaurée à la fin du VIe siècle av. J.-C. après la chute des tyrans. On avait alors nivelé l'espace pour accueillir un bâtiment de six colonnes en façade. Deux Grands Rois de l'Empire perse, qui avait soumis les Grecs installés sur la côte de l'Asie Mineure, menèrent au début du ye siècle deux expéditions contre la Grèce : la première guerre médique se termina en 490 av. J.-C. sur la défaite du corps expéditionnaire perse en Attique, à Marathon, devant les Athéniens, qui n'eurent que 192 morts ; la seconde guerre médique, dix ans après, qui engagea des effectifs beaucoup plus importants, vit la victoire des Grecs coalisés, à la bataille navale de Salamine en 480 av. J.-C. LesAthéniens avaient décidé, après la victoire de Marathon en 490, de construire en marbre le pré-Parthénon dont les fondations étaient déjà mises en place, mais les travaux furent suspendus à cause
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de l'effort de guerre fourni par Athènes qui, en prévision d'une nouvelle invasion perse, consacra toutes ses ressources à la constitution d'une flotte. En 480, avant Salamine, voyant l'avancée des Perses, les Athéniens évacuèrent leur ville pour combattre avec leur flotte l'armée du Grand Roi, sur le conseil de l'oracle de Delphes qui leur dit de se réfugier « derrière des remparts de bois», c'est-à-dire sur des navires. Seule une poignée d'Athéniens, interprétant l'oracle à la lettre, refusa de quitter la ville et se retrancha sur l'Acropole à l'abri de palissades en bois; les Perses, escaladant la pente rocheuse, prirent l'Acropole et les massacrèrent : « Par devant l'Acropole, mais par derrière la porte et la montée, à un endroit que personne ne gardait et où l'on ne s'attendait pas à ce que jamais quiconque monte, c'est par là que quelques hommes montèrent à côté du sanctuaire d'Aglaure fille de Cécrops, en dépit de l'escarpement du lieu 2 • » Les envahisseurs ravagèrent le lieu sacré d'Athènes en y mettant le feu ; les pierres du préParthénon en construction portent la marque de cet incendie. Après la victoire de Salamine, les Athéniens revenus dans leur ville trouvèrent une Acropole dévastée; seul l'olivier sacré d'Athéna, qui avait aussi brûlé, repoussa miraculeusement, marquant que la déesse d'Athènes restait fidèle à la cité dont elle s'était rendue maîtresse. Par respect pour le caractère sacré du lieu, les Athéniens victorieux firent place nette en déblayant
2. Hérodote, HistoireVIII 53, « Coll. des universités de France»,
Les Belles-Lettres,Paris.
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les ruines ; ilsprirent soin d'enterrer dansle sol consacré les statues renversées par les Perses et réutilisèrent dans les murs de soutènement de !'Acropole des blocs architecturaux des temples saccagés. Même dévastée,l'Acropole restait le centre religieux d'Athènes. Lidole fruste d'Athéna, mise à l'abri pendant l'invasion perse, fut réinstallée dans son temple, qu'il fallut réaménager. Selon une interprétation qui n'est pas unanimement acceptée, la partie arrière de ce « Vieux Temple» fut conservée pour abriter l'effigie d'Athéna Polias. Le Vieux Temple, réduit à cet « Opisthodome*», ainsi désigné dans les inscriptions, resta debout jusqu'à un incendie qui le ravagea à la fin du v