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French Pages 176 Year 2015
Dans la même collection : La relativité en images, 2015, ISBN : 978-2-7598-1728-3 Le temps en images, 2014, ISBN : 978-2-7598-1228-8 La théorie quantique en images, 2014, ISBN : 978-2-7598-1229-5 La physique des particules en images, 2014, ISBN : 978-2-7598-1230-1 La psychologie en images, 2014, ISBN : 978-2-7598-1231-8
Édition originale : Logic, © Icon Books Lts, London, 2012. Traduction : Anne Confuron Imprimé en France par Présence Graphique, 37260 Monts Mise en page de l’édition française : studiowakeup.com
ISBN : 978-2-7598-1748-1 Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinés à une utilisation collective », et d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal. © EDP Sciences, 2015
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Qu'est-ce que la logique ? Rien de plus naturel dans une conversation que d'avancer des arguments. Nous essayons de convaincre la personne avec laquelle nous discutons que nous avons raison, que notre conclusion a sa place après tout ce que nous venons d'énoncer et qu'elle va l'accepter. Cela n'aurait rien de constructif si nous ne pouvions pas savoir à quel moment une chose découle d'une autre. Ce que l'on fait souvent passer dans une conversation comme argument ne fait pas l'affaire. La propriété,
c'est le vol. Donc le vol est synonyme de propriété.
Donc, ces perles sont à moi.
C'est clairement idiot parce qu'il y n'y a rien pour relier la vérité de la conclusion à celle des allégations. Ce dont nous avons besoin, c'est de nous assurer que la vérité des allégations est préservée par le raisonnement. La logique est tout simplement l'étude des arguments qui préservent la vérité. 3
L'étude des phrases Le philosophe grec Aristote (384-322 avant notre ère) a été le premier à nous donner l'idée d'un outil (organon) pour argumenter de façon convaincante. Cette étude incluait de la grammaire, de la rhétorique et une théorie de l'interprétation, ainsi que de la logique. La première chose que fait Aristote, c'est de discuter à propos des phrases.
Les phrases sont de trois types…
1. Singulier : 2. Universel :
Socrate est un homme.
chaque homme est mortel.
3. Particulier : certains hommes sont mortels.
Dans chacun de ces types de phrases, nous disons que quelque chose ou certaines choses sont d'un certain genre.
Les objets dont nous parlons (par exemple des noms comme Socrate et tables, des noms abstraits comme la marche et des pronoms comme quelqu'un et tout le monde) qu'Aristote désigne comme étant le sujet de la phrase. Ce que nous disons à propos du sujet de la phrase (par exemple des verbes comme est en train de manger et est tombé, des adjectifs comme c'est difficile et des noms comme homme dans des phrases comme « Socrate est un homme »), c'est qu'Aristote désigne comme étant le prédicat. 4
Le carré des oppositions Aristote a remarqué que la vérité de certaines phrases sujet-prédicat a un effet sur la vérité d'autres phrases sujet-prédicat.
Les phrases suivantes sont reliées entre elles par des relations définies. C'est ce que je désigne comme étant mon carré des oppositions.
Les phrases 1 et 2 ne peuvent pas être toutes les deux vraies. Les énoncés en diagonal 1 et 4 sont connus pour être contradictoires. Tant qu'il y a des êtres humains, l'un d'eux doit être vrai mais jamais les deux – la vérité de l'un garantit que l'autre est faux. C'est la même chose pour les énoncés 2 et 3 en diagonal. Les phrases 1 et 3 peuvent être vraies toutes les deux. Si 1 est vrai, alors 3 doit être vrai mais 3 étant vrai ne signifie pas que 1 doit être vrai. C'est la même chose avec 2 et 4. La même relation équivaut entre « Tous les hommes sont mortels » et « Socrate est mortel ». 5
Le syllogisme En utilisant le carré des oppositions, Aristote a remarqué un élément mystérieux. Prenez une phrase comme « Socrate est un homme ». Si un raisonnement de trois énoncés est construit de façon à ce que le sujet du premier énoncé soit le prédicat du second (désignons-les comme les principes) et que le troisième énoncé soit composé des éléments restant (c'est la conclusion), alors la vérité de la conclusion est garantie par la vérité des principes. Ce schéma est un
syllogisme. Nous pouvons
l'utiliser pour comprendre pour quelle raison un argument est vrai et un autre faux.
1. Tous les hommes sont mortels 2. Socrate est un homme 3. Socrate est mortel
E
LID A V
1. Chaque page de ce livre est imprimée à l'encre noire
2. Certaines pages ne sont pas imprimées à l'encre noire
3. Celles-là ne sont pas des pages de ce livre
E
LID VA
E
LID A NV
1. Je soutiens Arsenal 2. Arsenal est à Londres 3. Arsenal remportera la Coupe
NO
Aristote a oublié des énoncés conditionnels qui ont plus d'un prédicat, par exemple « Si Socrate est un homme, alors Socrate est mortel ». 6
Nous avons donc maintenant deux raisons pour lesquelles l'argument « Arsenal est à Londres donc le Club remportera la Coupe » est faux. La première vient de ce qui est dit. Il est impossible que le fait que je soutienne Arsenal et que ce Club soit à Londres soit suffisant pour garantir qu'Arsenal remportera la Coupe. Mais il y a aussi la raison officielle selon laquelle le prédicat du premier principe n'est pas le sujet du second.
Oui mais c'est valide…
1. Si je soutiens Arsenal alors le Club remportera la Coupe.
2. Je soutiens Arsenal donc… 3. Arsenal remportera la Coupe.
C'est toujours faux car la validité garantit uniquement la vérité de la conclusion si les principes sont vrais. Dans votre exemple, les principes sont faux donc la conclusion reste fausse. Alors quel est l'avantage de cette formalisation pour nous ?
Vous verrez. 7
La logique connective Une centaine d'années plus tard environ, Chrysippe de Soles (environ 280–207 avant notre ère) a changé l'objectif de la logique en passant des déclarations simples sujet-prédicat aux déclarations complexes comme : « Socrate est un homme et Zeno est un homme ». C'était une avancée majeure. On disait : « Si les dieux utilisaient la logique, ce serait celle de Chrysippe ». Comme nous le verrons, c'est la même chose pour nous humains mais il nous a fallu quelques millénaires pour le comprendre.
Avec des mots comme « et », « ou » et « si… alors… », différentes déclarations peuvent être associées et la vérité de l'ensemble dépendra exclusivement de la vérité de chaque partie.
Chacune de ces connectives a une manière unique d'associer la vérité des différentes parties dans celle de l'ensemble.
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Par exemple, le « ou » connectif et uniquement le « ou » connectif peut être utilisé de la façon suivante.
Soit Mahomet ira à la montagne ou la montagne ira à Mahomet. Mahomet n'est pas allé à la montagne donc la montagne est allée à Mahomet.
En utilisant mes définitions pour les connectives, je peux démontrer comment détourner différentes déclarations dont la vérité est toujours garantie par la vérité de la déclaration de départ. Chrysippe n'a eu aucun impact réel sur l'Histoire de la logique pendant au moins les 1 500 années qui ont suivi, notamment parce que ses écrits ont été perdus et ses idées connues uniquement par des rapports de seconde main mais aussi parce que Aristote est devenu la coqueluche de l'Église catholique.
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La loi de Leibniz Au cours des 2 000 années qui ont suivi, les logiciens ont présenté un nombre toujours croissant de syllogismes, certains incluant plus de deux principes. Le logicien était une sorte d'alchimiste qui jouait avec des concepts pour obtenir des arguments solides. Finalement, une méthode a émergé dans cette folie, proposée par Gottfried Leibniz (1646-1716). Leibniz a émis l'idée de traiter les déclarations comme s'il s'agissait d'équations en algèbre. Les équations utilisent le signe égal « = » pour dire que deux parties doivent avoir la même valeur numérique. Par exemple : X2
+ Y2 = Z2
Leibniz a introduit le signal égal en logique pour montrer que « a » est identique à « b ».
Deux éléments sont identiques si tout ce qui peut être dit d'un élément peut l'être aussi de l'autre.
C'est ce qui porte depuis le nom de loi de Leibniz. Il l'a analysée en deux allégations inséparables, « a est b » et « b est a » ce qu'il a pris pour signifier que « tous les a sont b » et « tous les b sont a ». 10
Si vous pouvez dire exactement la même chose à propos de deux éléments alors ils sont identiques.
Exemple : « Tous les célibataires sont des hommes non mariés et tous les hommes non mariés sont des célibataires ».
Clairement, si a est identique à b, alors nous pouvons remplacer le symbole « a » dans n'importe quelle déclaration par le symbole « b », tout en préservant la valeur de vérité de la déclaration. Par exemple : « Socrate est un homme non marié, un homme non marié c'est la même chose qu'un célibataire donc Socrate est un célibataire ». C'est important parce que cela nous permet d'évaluer la valeur de vérité d'un nombre potentiellement infini de phrases en utilisant un nombre raisonnable d'étapes. Leibniz en avait quatre. 1. « a = a » exemple : Socrate est Socrate. 2. Si « a est b » et « b est c », alors « a est c ». exemple : Tous les hommes sont mortels. Socrate est un homme donc Socrate est mortel.
Dire que « a est b », c'est la même chose qu'affirmer que « tous les a sont b ».
Donc cela revêt exactement la même forme que mon premier
syllogisme !
Ah… mais il y a les étapes
3 et 4…
3. a = n'est pas (n'est pas a) exemple : si Socrate est mortel, alors Socrate n'est pas immortel.
4. « a est b » = « ne pas être b est ne pas être a » exemple : Socrate est un homme signifie que si vous n'êtes pas un homme alors vous n'êtes pas Socrate. À partir de ces simples lois, Leibniz pouvait prouver n'importe quel syllogisme possible. À l'inverse du carré des oppositions d'Aristote, Leibniz a découvert la première vraie théorie de la vérité – tirant des conclusions de lois préétablies en substituant des symboles identiques (synonymes) les uns avec les autres. 11
Le reductio ad absurdum La méthode de preuve préférée de Leibniz est un outil immensément important très apprécié des logiciens et des philosophes depuis lors. Il lui a donné le nom de reductio ad absurdum. Le « reductio » est un outil très simple mais incroyablement efficace. Il a été largement utilisé depuis que Leibniz l'a inventé. Il est bien illustré par l'exemple suivant.
Donc où étais-tu dans la nuit du 25 ?
Je n'ai rien volé. Je jouais au basket-ball.
Bon, c'est peut-être vrai mais voyons si cela pourrait être vrai.
Bonjour Doc. Est-ce que le suspect aurait pu jouer au basket-ball le 25 ? Pas du tout. Il s'était cassé le bras la veille.
Donc, tu n'as pas pu jouer au basket-ball avec un bras cassé ! Tu te contredis mon vieux.
Il semble que tu aies eu le bras cassé ce soir-là.
Donc ?
12
Tu mens.
Dans la méthode du reductio, nous supposons qu'une déclaration est vraie et nous voyons quelles conclusions nous pouvons en tirer à partir de là. Si, en tirant ces conclusions, nous nous retrouvons face à une contradiction, nous savons que la déclaration initiale est fausse car les contradictions sont toujours fausses. Certaines personnes n'aiment pas ma merveilleuse nouvelle méthode car elle suppose que chaque phrase est vraie ou fausse et n'offre aucun support à cette hypothèse.
Le grand avantage de la méthode reductio, c'est qu'elle nous permet de dire si une déclaration est vraie même si nous ne savons pas comment construire une preuve dans ce sens-là. Nous pouvons dire qu'une déclaration est vraie en montrant que sa négation conduit à une contradiction. 13
Un « Nouvel organon » « Car mon invention utilisait la raison dans sa totalité et est, en outre, un juge de polémique, un interprète de notions, un équilibre de probabilités, une boussole qui nous guidera sur l'océan des expériences, un inventaire de choses, une table de pensées, un microscope pour scruter les choses, un télescope pour prévoir les choses éloignées, un calcul général, une magie innocente, une cabale non chimérique, un script que tout le monde lira dans sa propre langue et qui montrera la voie de la vraie religion partout où il va ». Lettre de Leibniz au duc de Hanovre, 1679
C'est une
révolution. Le vieil
organon d'Aristote est mort, je vous en propose un nouveau. C'est une nouvelle façon de penser à propos du monde et de la logique. La logique n'est plus un outil pour des arguments convaincants mais plutôt un système de règles de pensée de sorte que même la pensée de Dieu est nécessairement logique. Même s'il n'a pas pu créer un monde où la contradiction est vraie.
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Sans surprise, l'Église l'a désigné comme étant un hérétique. Mais l'idée de règles de pensée nécessaires s'est avérée avoir une influence durable sur les philosophes occidentaux comme Kant, Hegel, Marx et Russell. Nous avons tous essayé de rendre compte de ce que pourrait être cette logique essentielle de la pensée.
Cependant, il convient de noter que le système de Leibniz n'est pas un organon (outil) du tout. C'est un canon ou code de lois qui provient de la pensée mais qui s'applique nécessairement
au monde.
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Les quantificateurs de Frege L'Encyclopédie de la Philosophie explique que la logique moderne a débuté en 1879 avec la publication de Begriffsschrift de Gottlob Frege. Il introduit un calcul propositionnel qui associe la théorie de la preuve de Leibniz avec un compte de connecteurs logiques. Et nous sommes finalement arrivés à Chrysippe. Mais la plus significative des nouvelles inventions de Frege a été le quantificateur. Les quantificateurs sont des mots comme : « tous », « certains », « beaucoup » et « la plupart ». Ils nous permettent de dire des choses à propos de groupes d'objets, par exemple : « Certains hommes sont chauves ». Aristote les considérait comme des sujets apparaissant dans une déclaration mais cela peut conduire à des résultats ridicules comme celui-ci que l'on trouve dans Alice au Pays des Merveilles de Lewil Carroll…
Je ne vois personne sur la route, dit Alice. Si seulement j'avais ces yeux-là, fait remarquer le Roi de mauvaise humeur. Pouvoir ne voir personne ! Et à cette distance aussi ! Pourquoi, c'est tout ce que je peux faire pour voir de vraies personnes…
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Frege parvient à éviter ce problème en traitant les quantificateurs comme des entités séparées de manière logique. Il a utilisé deux quantificateurs : « tous » et « il y en a au moins un ». Cela lui permet de traduire
Je ne vois personne sur la route par
Car je ne peux pas voir tout le monde sur la route ou
Il n'y a pas au moins une personne que je puisse voir sur la route. Tout en étant pas une belle solution, elle nous permet d'éviter la bêtise style pays des merveilles dans la logique. Cela nous montre pourquoi « Je ne vois personne sur la route » est en réalité tout à fait différent de « Je vois un messager sur la route ».
Le mot « personne » n'a pas à se référer à un objet. 17
Le principe de contexte Frege a suggéré « le principe de contexte » qui explique que la plus petite unité que la logique peut gérer est une déclaration sujet-prédicat ou proposition. C'est uniquement dans le contexte d'une proposition dans son ensemble que nous savons les significations des mots qui la composent. Prenez la phrase « J'ai froid ». Cette phrase pourrait être prononcée par différentes personnes à différents moments. Les mêmes mots « J'ai froid » peuvent être utilisés pour exprimer des propositions très différentes selon les circonstances dans lesquelles elles sont utilisées.
Proposition 1
Proposition 2
J'ai froid
J'ai froid
Cela signifie quelque chose de très différent lorsque la proposition est dite par Socrate après avoir bu de la pruche toxique ou bien par un enfant.
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Calcul propositionnel Parce que l'unité fondamentale de la logique de Frege est la proposition, elle est connue sous le nom de calcul propositionnel. Avec lui, nous pouvons accéder à la vérité des propositions complexes en utilisant des connecteurs. Mais, plus que cela, Frege a montré que les connecteurs eux-mêmes sont reliés à la vérité. Une proposition utilisant un connecteur, par exemple « si… alors… », peut être transformée en une expression qui utilise les autres connecteurs « et » et « pas » sans changer la vérité de l'énoncé complexe.
Si vous êtes un oiseau, alors vous avez des ailes… pourrait être reformulé… Vous ne pouvez pas être un oiseau et ne pas avoir d'ailes.
La logique de Frege associe les qualités de Chrysippe (cela permet l'analyse de phrases en termes de phrases simples reliées par la logique) et Leibniz (la capacité de prouver une déclaration par rapport à une autre en remplaçant des synonymes) et ouvre la voie pour étendre ces idées afin d'inclure l'équivalence de différents connecteurs. Mais le premier amour de Frege a été sa tentative de déduire les mathématiques de la logique. 19
La théorie des ensembles de Cantor Gottlob Frege (1848-1925) vivait à une époque où l'on comptait de grandes inventions mathématiques et scientifiques. Parmi les nouvelles branches hétérogènes des mathématiques, on notait l'émergence de modèles. Cela a conduit à une tentative de fonder toutes les mathématiques sur un ensemble de règles à partir duquel chaque énoncé pourrait être établi. Frege pensait que son calcul propositionnel ferait parfaitement l'affaire mais il n'avait pas les outils pour la formulation des nombres – sans laquelle vous ne pouvez pas aller plus loin dans la formulation des mathématiques. Les quantificateurs de Frege « tous » et « il y en a au moins un » ne peuvent pas faire le travail. Une solution apparente est venue de l'une des nouvelles branches des mathématiques : La théorie des ensembles développée par Georg Cantor (1845-1918), un contemporain de Frege. En mathématiques, les ensembles sont les choses les plus élémentaires que l'on puisse imaginer. Il s'agit essentiellement de collections d'éléments qui n'ont pas besoin d'avoir un point commun. Chaque collection a un nombre spécifique d'éléments qui peut être comparé au nombre d'éléments dans les autres ensembles.
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D'abord, nous pouvons parler des éléments communs des ensembles a et b.
a
b
Cela ressemble à la façon dont nous utilisons le mot « et ». Ensuite, nous n'avons aucun élément qui appartienne à a ou à b.
a
b
Cela ressemble à la façon dont nous utilisons « ou ». Enfin, nous pouvons utiliser tout ce qui n'appartient pas à a.
a
b
Clairement, cela correspond à la façon dont nous utilisons « ne pas ».
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Utilité des connecteurs À partir de trois connecteurs seulement (et, ou, ne pas) nous pouvons exprimer toutes les propositions logiques possibles. Par exemple, nous disons la même chose avec « si a alors b » que nous disons avec « cela ne peut pas être le cas que a et non b ».
Si elle me donne un baiser, je vais me transformer en prince.
Cela n'est pas possible qu'elle vous embrasse et que vous ne vous transformiez pas en prince.
C'est ce que
j'ai dit.
Mes calculs peuvent fonctionner uniquement à partir de ces connecteurs et les ensembles me permettent de parler des nombres, donc en incorporant la théorie des ensembles dans mes calculs, je pense que je peux obtenir une base solide pour les mathématiques.
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Le paradoxe de Russell Tandis que Frege était sur le point de voir publier sa théorie, à laquelle il avait consacré une bonne partie de sa vie, un jeune parvenu anglais Bertrand Russell (1872-1970) faisait remarquer que l'utilisation par Frege des ensembles conduisait à une contradiction fatale. Est-il possible pour un ensemble d'appartenir à un autre ensemble ?
Oui, l'ensemble des nombres 1, 2 est compris dans l'ensemble des nombres 1, 2, 3. Tous les éléments du premier ensemble sont membres du second. Vous dites que les ensembles peuvent appartenir à
eux-mêmes ?
Oui, pour la même raison : les ensembles sont définis par leurs membres, donc dire qu'un ensemble contient lui-même revient à dire qu'il est lui-même – un peu comme la loi de Leibniz.
Jusqu'à maintenant, tout semble être correct mais Russell poursuit … 23
L'erreur fatale Mais dites-moi, est-ce que vous pouvez également avoir l'ensemble des ensembles – comme l'ensemble des ensembles avec plus de trois membres ?
Je suppose Alors que dites-vous de cet ensemble ? « L'ensemble de tous les ensembles qui ne sont pas membres de leurs ensembles ».
oui.
Ce que dit Russell, c'est que si l'ensemble est un membre de lui-même, alors par définition il ne peut pas être un membre de lui-même. Mais s'il n'est pas un membre de lui-même, alors il est un membre de lui-même. Alors il est les deux à la fois. Et c'est une contradiction. Cette erreur flagrante, prétendument, a brisé Frege. 24
Euh…
Le problème de la grammaire de surface Pourtant, Russell a loué les travaux de Frege. Avec son ami A.N. Whitehead, il a tenté de faire reposer les mathématiques sur les ensembles et la logique. Cela a demandé beaucoup de temps pour éviter les contradictions comme celles de Frege. Il leur a fallu deux volumes pour tenter une solution ! Ils voulaient confirmer le fait que 1 + 1 = 2 sur quelque chose de plus évident…
Cela m'a donné une idée qui pourrait révolutionner la philosophie ! Le langage lui-même était le problème ! La grammaire de surface des phrases cache leur véritable forme logique.
La grammaire de surface (la grammaire scolaire des noms, verbes et adjectifs) dissimule la vraie forme d'une phrase. Russell pensait que si nous pouvions analyser le langage dans une parfaite structure logique, alors la plupart des grands problèmes philosophiques de notre époque disparaîtraient. 25
Le système de Russell Russell a ramené les prédicats dans le calcul et a développé la conception des quantificateurs de Frege. Cela lui a permis de distinguer « tous » par rapport à « quelques » et cela a supprimé le besoin d'analyser l'existence en tant que prédicat – ce qui pouvait provoquer une série de problèmes. Il a également officialisé le carré des oppositions d'Aristote en formulant les relations entre les quantificateurs. Si nous disons que « tous les oiseaux ont des ailes » et que « tout oiseau est doté d'ailes », alors nous disons la même chose. Les quantificateurs « tous » et « il y a au moins un » sont interchangeables – l'un peut se substituer à l'autre avec des symboles de négation aux endroits adéquats.
Mon système est le premier du genre dans lequel vous pouvez faire tout ce que vous pouviez dans n'importe quel système de logique qui ait existé auparavant.
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Prenez cette phrase : « L'actuel roi de France est chauve. » Est-ce vrai ou faux ? Cela pourrait sembler vrai, faux ou ni l'un ni l'autre. Mais si cela est faux, est-ce que cela veut dire que l'actuel roi de France n'est pas chauve ? Bien sûr, ce n'est ni vrai ni faux, cela signifie que la phrase ne revendique rien du tout. Elle ne dit simplement rien à propos du monde alentour. Russell pensait que cette phrase était en fait constituée de trois affirmations… 1. Il y a actuellement un roi de France. 2. Il y a exactement un roi de France en ce moment. 3. L'actuel roi de France est chauve. Cette association ne serait vraie que si les trois affirmations sont vraies. Nous savons que la première condition est fausse donc l'association est également fausse. Mais cela ne fait pas de l'affirmation opposée quelque chose de vrai car on peut l'analyser de la façon suivante… 1. Il y a un actuel roi de France. 2. Il y a exactement un actuel roi en France. 3. L'actuel roi de France n'est pas chauve. Et cet ensemble de phrases est clairement faux.
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Les images logiques de Wittgenstein Russell a occupé la scène de la philosophie en Angleterre pendant une dizaine d'années jusqu'à ce qu'un Juif autrichien, Ludwig Wittgenstein (1889-1951) renonce à une carrière potentiellement lucrative en ingénierie pour devenir un élève de Russell en 1912. Tout en étant en service actif pendant la première Guerre mondiale, il a composé le premier de ses deux principaux travaux : le Tractatus Logico-Philosophique. Il concevait la philosophie comme une analyse de structure logique cachée – avec des attaques définitives contre Frege et Russell. L'intérêt majeur de Wittgenstein a toujours été de comprendre la relation entre le langage, la logique et le monde. Cela peut être réalisé si nous voyons le langage comme une image du monde.
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Il a lu dans les journaux que dans les tribunaux de Paris, des modèles de voitures étaient utilisés pour représenter l'emplacement réel de véhicules dans les accidents de la circulation. Cela lui donna une idée de génie.
Ce que n'importe quelle image doit avoir en commun avec la réalité afin de pouvoir la décrire complètement, c'est une forme logique – la forme de la réalité. Pour Wittgenstein, la logique était quelque chose que le monde et le langage doivent avoir en commun. C'est seulement parce que le langage a quelque chose en commun avec le monde qu'il peut être utilisé pour représenter le monde, donc c'est seulement du fait de la logique que nos phrases ont un sens. C'est précisément la raison pour laquelle nos phrases sont dans un ordre logique parfait, cela est garanti par le fait que nos phrases ont un sens.
C'est vrai, ce n'est pas une pipe. Mais c'est une représentation logique de pipe.
Une image qui n'a pas de forme logique ne représente simplement rien du tout. Tout comme une peinture abstraite de Pollock ou de Rothko ne représente pas la réalité. « On avait l'habitude de dire que Dieu pouvait créer n'importe quoi sauf un monde illogique mais la vérité, c'est que nous ne pouvions pas dire à quoi ressemblait un monde illogique ». Tractatus 3.031 29
Carnap et le Cercle de Vienne Depuis Frege, la logique s'est développée conjointement avec le problème de fondation des mathématiques et de résolution des problèmes dans le langage. Avec Rudolf Carnap (1891-1970), l'accent était mis principalement sur les sciences. À l'origine élève de Frege, mais fortement influencé par le Tractatus de Wittgenstein, Carnap était l'une des vedettes du Cercle de Vienne (un groupe de philosophes et de scientifiques qui souhaitaient purger la philosophie de tout ce qui n'était pas scientifiquement vérifiable ou loi de logique). « La philosophie doit être remplacée par la logique de la science et la logique de la science est la syntaxe logique du langage de la science ». (Carnap, La syntaxe logique du langage, 1934). Carnap a déployé ses formidables compétences de logique pour essayer de développer un compte rigoureux de tout langage officiel possible.
Je l'ai vu comme un précurseur nécessaire à la seule forme légitime de recherche philosophique –
l'analyse logique.
Malheureusement, cette idée a restreint le langage dans une telle ampleur que le Cercle de Vienne a souvent trouvé difficile d'exprimer ses idées. « … Nous avons désigné l'un d'entre nous de crier « M » (pour métaphysique) chaque fois qu'une phrase illégitime était prononcée. Il criait tellement « M » que nous en avons eu assez et nous l'avons fait crier « M non » chaque fois que nous disions quelque chose de fondé ». 30
Le principe de tolérance La lecture de Tractatus m'a inspiré pour me donner à penser que je pouvais déduire toutes les phrases significatives de la logique et de l'expérience sensorielle uniquement.
Ce n'est pas exactement le message de mon livre. Ce que j'ai assemblé à propos des significations est venu du monde et non de l'expérience sensorielle.
La proposition de Carnap de réduire tous les langages a commencé à péricliter presque dès qu'il a commencé à travailler sur ses conséquences. En vieillissant, ayant déjà publié un très long ouvrage (le Aufbau) pour défendre son approche radicale, Carnap a assoupli son point de vue comme il l'a décrit dans un autre très long livre (La syntaxe logique). La contribution la plus importante de Carnap à propos de l'Histoire de la logique et des langages officiels est l'introduction du « Principe de Tolérance », selon lequel il n'y a pas une mais de nombreuses logiques. Dans le langage, toute expression est acceptable aussi longtemps qu'il y a suffisamment de règles qui régissent son application logique. 31
La théorie de la preuve d'Hilbert Les tentatives de Frege et de Russell pour réduire les maths à la logique et à la théorie des ensembles font partie des nombreux essais au début du xxe siècle pour ancrer les maths sur des bases logiques solides. Une autre tentative remarquable est venue de David Hilbert (1862-1943) qui a lancé une forme de logique qui portait le nom de « théorie de la preuve » ou métamathématiques. Hilbert s'intéressait au point commun qui unissait les différentes branches des mathématiques. Chaque branche mathématique commence avec un nombre d'axiomes ou de déclarations qui sont simplement supposés être Tant vrais et à partir desquels toutes qu'aucun des les autres déclarations de cette axiomes ne contredit branche peuvent être prouvées. l'autre, ils peuvent
être utilisés pour élaborer une branche possible de mathématiques. Je veux trouver un moyen de prouver la cohérence de n'importe quelle liste d'axiomes.
Toute branche de mathématiques qui réussissait le test d'Hilbert s'avérait reposer sur une base solide. 32
L'arrivée de Gödel D'une manière générale, la méthode d'Hilbert repose sur l'idée que nous pourrions sans aucun doute établir la cohérence de quelque chose comme la géométrie par exemple si nous pouvions montrer que nous ne pouvons pas déduire de ses axiomes quelque chose d'équivalent à disons 1 = 0, qui est une grande absurdité mathématique. Hilbert, comme Leibniz avant lui, a utilisé la réduction comme outil principal. Les efforts fournis par Hilbert pour trouver un mécanisme qui prouve la cohérence ont conduit à un peu plus de résultats. Mais ils ont attiré l'attention d'un autre jeune Autrichien, Kurt Gödel (1906-78) qui était destiné à devenir le plus grand logicien du xxe siècle.
À 23 ans, j'ai prouvé que toutes les propositions du calcul de prédicat de Russell sont vraies mais également que chaque affirmation vraie est démontrable dans cette logique. Pour utiliser un peu de jargon : c'est à la fois « cohérent et complet ».
Cette découverte a marqué le début de dix années intensives de publications qui ont exercé une influence profonde sur tous les développements ultérieurs dans la logique et les fondements des mathématiques.
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Le théorème d'incomplétude de Gödel Lorsque Gödel eut 24 ans et qu'il essaya d'élargir ses résultats pour couvrir l'arithmétique, il fit une découverte bien inattendue. Il découvrit que tout système suffisamment compliqué pour être utilisé comme base pour l'arithmétique sera incomplet. Cela signifie que le projet d'Hilbert de définir les mathématiques à partir d'un nombre fini d'axiomes ne pourrait jamais voir le jour pour l'arithmétique, sans parler de quelque chose de plus compliqué comme le calcul.
À cette époque-là, Gödel vivait au jour le jour, travaillant sans être rémunéré. Après l'arrivée des Nazis, ses amis et ses collègues sont peu à peu partis pour les États-Unis. Apolitique, Gödel hésitait à partir – jusqu'à ce qu'il soit jugé apte à servir dans l'armée, en dépit de son hypocondrie galopante. À ce Je suis finalement moment-là, il partit rapidement. arrivé à l'Université de Princeton Les preuves ingénieuses de où j'ai fait équipe avec Albert Einstein Gödel marquent le début et Oskar Morgenstern pour former de la logique mathématique ce qui était, si je peux me permettre, la section de mathématiques la moderne. Ses travaux ont plus brillante d'Amérique. dicté le cours de la logique jusqu'à aujourd'hui. 34
Les connexions vers la théorie de la preuve La logique moderne peut être divisée en trois projets associés les uns aux autres. Il s'agit de la logique mathématique, la logique symbolique et la logique philosophique.
La logique mathématique
continue le projet de réunir les mathématiques et la théorie des ensembles. Avec elle, les mathématiciens espèrent unifier différents champs mathématiques en découvrant leurs propriétés communes.
La logique symbolique est la
recherche pure dans la manipulation des symboles. Il n'est pas nécessaire que ces symboles correspondent à quelque chose, ce sont plutôt des entités abstraites dont les interactions sont exprimées par des définitions.
La logique philosophique essaie d'appliquer
la logique à des concepts réels. Au lieu de symboles pures, elle traite de l'interaction de concepts réels comme la probabilité et la conviction.
La fonction de liaison entre ces branches de la logique est leur dépendance vis-à-vis de la théorie de la preuve – ce qui nous permet de dire si une déclaration fait suite à une autre déclaration.
Logique mathématique
Théorie de la preuve Logique symbolique
Logique philosophique
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La théorie de la preuve est constituée d'une variété de méthodes pour montrer la suite logique d'une phrase logique ou « formule » – une chaîne de symboles reliés par des bits de syntaxe logique. La syntaxe logique affectera la véracité d'une déclaration. J'ai donc défini Par exemple, des morceaux de syntaxe le connecteur logique « et » dans logique en termes de « le ciel est gris et il pleut » vrai et faux. est vrai uniquement si les simples phrases « le ciel est gris » et « il pleut » sont toutes les deux vraies.
L'idée de définir les connecteurs logiques en termes de vrai et faux a vraiment eu du succès parmi les logiciens, tant et si bien que presque personne n'a jugé bon de le changer. La réalité, c'est que lorsque Frege parle de la vérité de « et », la signification de la phrase est sans importance. Ce qui est important, c'est que nous savons si la phrase est vraie ou fausse. Le comportement de la connective n'est pas affecté par ce que dit la phrase. Pour cette raison, Frege utilisait des symboles simples comme p et q, pour servir pour les phrases entières – une autre idée qui est rapidement devenue très en vogue parmi les logiciens. 36
Le tableau des connecteurs logiques de Wittgenstein Wittgenstein a inventé une méthode pour représenter les connecteurs logiques sous forme d'un simple tableau et a ainsi évité à chacun la peine de devoir utiliser le bavardage de Frege. Supposons que nous représentons « le ciel est gris » par « p » et « il pleut » par « q ». Chacune de ces deux phrases peut être vraie ou fausse, donc nous avons en tout quatre possibilités qui peuvent être représentées de la façon suivante.
Lorsque « p » est vrai et « q » est vrai, alors « p et q » sont vrais. Mais lorsque un ou les deux sont faux, la phrase complexe ne peut pas être vraie ce qui nous donne le tableau simple…
p
q
V
V
V
F
F
V
F
F
Nous pouvons prolonger ce tableau pour montrer la façon dont la connective « et » fonctionne dans la phrase « p et q ».
p
q
p&q
V
V
V
V
F
F
F
V
F
F
F
F
37
Les tableaux de vérité de Wittgensteinn Ces idées nous communiquent deux éléments : l'un est surtout pertinent pour les logiciens, tandis que l'autre nous concerne tous dans notre vie quotidienne. Les logiciens utilisent les tableaux de vérité simplement pour représenter la vérité de toute suite de phrases Cela peut liées entre elles par la logique. Mais ce qui aussi être représenté est peut-être plus important dans notre par la méthode du tableau vie de tous les jours, c'est le fait que des vérités. Les tableaux ces connecteurs constituent la base des vérités peuvent être de beaucoup d'appareils électroniques utilisés pour définir les moder nes. Pour commencer à saisir connecteurs qu’ils l'une ou l'autre de ces applications, nous représentent. devons comprendre deux connecteurs logiques supplémentaires. Le premier connecteur dont nous avons besoin est « v » (lire « ou ») qui peut être défini comme…
p
q
pvq
V
V
V
V
F
V
F
V
V
F
F
F
Ce connecteur est vrai si « p » ou « q » est vrai et il est faux uniquement lorsque les deux sont faux. Cela correspond à peu près à « et/ou » en langue anglaise. L'autre connecteur dont nous avons besoin est « ¬ » (lire « non ») qui s'applique seulement à une phrase. Son tableau de vérité ressemble à cela…
p
¬p
V
F
F
V
« ¬ » correspond à peu près à l'anglais « ce n'est pas le cas » comme dans « ce n'est pas le cas que Clinton soit Président des États-Unis ». 38
La découverte des tautologies Les symboles logiques peuvent être utilisés en association ce qui peut nous aider à évaluer le niveau de vérité de n'importe quelle phrase logiquement complexe. Par exemple, « p v ¬ p » ce qui donne le tableau de vérité suivant :
p
¬p
pv¬p
V
F
V
F
V
V
Lorsqu’une formule a uniquement des V dans un tableau de vérité, cela signifie que c'est vrai dans toutes les situations. La phrase « Soit il pleut ou il ne pleut pas » ne peut pas être fausse. Les logiciens la désignent comme étant une tautologie. Avec mes tableaux de vérité, vous pouvez facilement découvrir toutes les tautologies qui peuvent être exprimées en utilisant de simples symboles.
Dans une tautologie, une vérité découle nécessairement d'une autre vérité uniquement à cause de la syntaxe logique. Donc, nous savons que n'importe quelle phrase avec la même syntaxe logique sera toujours vraie. C'est important pour la théorie de la preuve car elle nous fournit une base solide pour prouver qu'un argument logique est nécessairement vrai. 39
Les portes logiques de l'électronique numérique La vie moderne serait méconnaissable sans l'électronique numérique et l'électronique numérique n'est pas beaucoup plus qu'une instanciation de logique. On peut trouver l'électronique numérique partout depuis les microondes jusqu'aux téléphones mobiles. L'électronique numérique s'appuie sur des « portes logiques » – essentiellement des commutateurs – qui font passer le courant, en fonction de leur entrée. Par exemple, un « And Gate » possède deux entrées et une sortie mais ne laissera passer le courant que s'il y a effectivement du courant aux deux entrées. Le comportement d'un And Gate peut être représenté de la façon suivante… Entrée 1
Entrée 2
Sortie
1
1
1
1
0
0
0
1
0
0
0
0
Un And Gate affiche exactement le même tableau de vérité que le connectif logique « And ». Tout comme la signification des phrases n'avait pas d'importance lorsqu'il était question du comportement de « And », de la même façon la quantité de courant n'a aucune importance pour les comportements de And Gate. À peu près tous les appareils électroniques numériques sont construits en dehors de « And Gate », « Or Gate » et « Not Gate » ce qui correspond aux connecteurs logiques « et », « v » et « ¬ ». Ce sont des outils extrêmement puissants basés sur la logique. 40
Encore une fois, mes tableaux de vérité s'avèrent utiles.
Un distributeur automatique Tout comme les formules logiques sont construites à partir des connecteurs logiques, les portails logiques peuvent être utilisés pour construire des appareils comme les distributeurs automatiques.
Le cœur d'un distributeur n'est pas plus compliqué qu'un nombre de And Gate attachés ensemble. Regardez plutôt ce simple diagramme…
Le compteur cash est un dispositif simple qui vérifie s'il y a suffisamment d'argent dans la machine. Lorsqu'il y en a suffisamment, elle renvoie le signal « 1 », le reste du temps elle envoie « 0 ». Si c'est « 0 », alors le Not Gate l'inversera et allumera la lumière « insérer pièce ». Si le compteur cash indique « 1 », alors le Not Gate éteindra le signal « insérer pièce » et chaque And Gate reçoit une entrée à « 1 ». Lorsqu’un produit est sélectionné, la seconde sortie du And Gate correspondant devient « 1 » et indique alors le signal « 1 », délivrant le produit choisi. 41
Turing et le « Code Enigma » L'activité du distributeur découle nécessairement des actions de l'acheteur. Nous pouvons également constater que celles de la machine sont la preuve d'une formule donnée. Cette idée précède les portes logiques. Elle vient d'Alan Turing (1912-1954) qui a tenté de craquer la machine à énigme, un ingénieux dispositif allemand de cryptage que l'on croyait à toute épreuve pendant la seconde Guerre mondiale.
L'astuce allemande consistait à modifier le code très régulièrement. La première ligne du message disait à la machine quel était le code mais ce message ne pouvait être décodé que par une machine qui était assemblée correctement.
Turing a essayé de craquer tous les codes d'énigme possibles, pas simplement le code de n'importe quel message. Il cherchait une machine programmable dont les paramètres pourraient être modifiés, c'est ce qui allait donner naissance à l'ordinateur. Mais il fallut environ 20 ans pour que son idée se réalise sous forme électronique. En substance, les ordinateurs ne sont rien de plus que des appareils géants faisant preuve de logique. 42
La méthode axiomatique d'Euclide Les tableaux de vérité sont une bonne façon de modéliser les dispositifs électroniques simples. Mais lorsqu'il s'agit de faire de la logique, la perspective de prouver une formule en utilisant un tableau de vérité de trente lignes n'a rien d'attrayant. Heureusement, il y a d'autres méthodes. La première, la méthode la plus officielle et la plus courante de la logique moderne sérieuse, est la méthode « axiomatique » de la preuve. Elle repose sur l'idée que nous pouvons tirer toutes les tautologies logiques à partir de deux ou trois déclarations simples qui sont considérées comme vraies. Elle doit son origine à Euclide (325-265 avant notre ère), l'ancien mathématicien grec.
Tous les énoncés dans mon célèbre livre sur la géométrie viennent de cinq déclarations simples que j'ai considérées à la fois comme fondamentales et vraies. J'ai appelé ces déclarations des axiomes.
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Le système d'Euclide est toujours enseigné aujourd'hui dans les écoles. Sa méthode de construction d'un système a sa propre existence puisque les résultats qu'elle génère sont étonnamment convaincants. Cela vient du fait que la méthode axiomatique fonctionne comme une « pompe de la vérité » – elle fait circuler la vérité depuis les axiomes jusqu'aux affirmations prouvées. La vérité de chaque affirmation prouvée est garantie par celle des axiomes.
J'ai choisi les axiomes les plus évidents possibles, car plus nous sommes certains de la vérité des axiomes, plus nous pouvons l'être à propos des déclarations qui en découlent.
Aristote n'était pas très friand de mathématiques, alors pendant ses mille ans de règne à titre posthume sur la philosophie occidentale, la méthode d'Euclide fut peu utilisée en dehors des mathématiques. Galilée a d'abord pensé à l'appliquer à la physique avec les résultats révolutionnaires que l'on connaît. Il a bientôt été suivi par le philosophe français René Descartes (15961650) qui l'a appliquée à la philosophie, lançant ainsi le Siècle des Lumières. Il ne s'agissait alors que d'une question de temps avant que Leibniz ne l'utilise comme une méthode de preuve en logique. 44
J'ai développé ma logique à partir du système d'Euclide reposant sur quatre axiomes qui sont devenus partie prenante des règles pour toutes les évolutions ultérieures.
La méthode de preuve de Leibniz 1. Le premier axiome est le célèbre principe d'identité de Leibniz, « chaque chose est identique à elle-même », ou « a = a ». Le reste, ce sont des remaniements de certaines des règles d'Aristote.
2. La « loi de non contradiction » qui dit qu'aucune déclaration n'est à la fois vraie et fausse en même temps, ou « ¬ (p&¬p) ».
3. Le « principe du tiers exclu » qui dit que chaque déclaration est vraie ou fausse, ou « pv¬p ».
4. Une loi de substitution qui nous permet de substituer une expression par une autre, en conservant les mêmes conditions de vérité, ou « (a est b) et (b est c) = a est c ».
Pris ensemble, la loi de non contradiction et le principe du tiers exclu garantissent que toute déclaration qui peut être formulée en logique ne doit avoir qu'une valeur de vérité – cela doit être vrai ou faux.
Je peux donc déduire en toute sécurité qu'une déclaration est fausse lorsqu'elle n'est pas vraie, un résultat presque évident.
Fort de cela et en sachant qu'une contradiction n'est jamais vraie, nous avons la base de ma méthode de réduction. Nous pouvons rejeter toute déclaration qui mène à une contradiction
étant fausse.
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Abus de contradiction Les logiciens s'inquiètent à propos des contradictions non seulement parce qu'elles sont toujours fausses mais également parce que si elles étaient inévitables, elles détruiraient les liens entre la vérité d'une déclaration et celle d'une autre. C'est la raison pour laquelle la réduction leibnizienne nous permet de prouver tout ce que nous voulons à partir d'une contradiction. Supposons que nous ayons une contradiction comme p & ¬ p et nous voulons prouver q qui peut représenter n'importe quelle déclaration, comme par exemple : « les éléphants ne boivent que de l'eau en bouteille ». Il nous suffit d'appliquer la méthode de réduction à ¬ q. Donc, nous admettons ¬ q. Nous citons la contradiction p & ¬ p. p & ¬ p rompt le second axiome de Leibniz. La méthode de réduction nous dit de rejeter l'hypothèse qui dans ce cas était ¬ q. Nous réfutons donc l'hypothèse ce qui nous donne ¬¬ q. Il s'ensuit donc à partir du troisième axiome que si ¬¬ q est vrai, alors q est vrai. C'est un résultat étrange parce qu'il nous permet de prouver n'importe quoi, même quelque chose dont la vérité ne dépend pas de la vérité de la contradiction utilisée pour la prouver. 46
Règles des connecteurs L'application de la méthode axiomatique a atteint sa maturité dans les Principes mathématiques de Russell et Whitehead. Dans cet ouvrage, le système est un prétendant sérieux pour fonder les mathématiques sur la théorie des ensembles. Le problème, c'est que la plupart des axiomes qu'il utilise sont loin d'être simples, certains sont moins évidents que les choses qu'ils cherchent à prouver, par exemple 1 + 1 = 2. Néanmoins, une version améliorée de la méthode qu'il employait est toujours utilisée aujourd'hui, elle porte le nom de « déduction naturelle ».
Nous pouvons élaborer n'importe quelle formule logique bien construite si nous connaissons les circonstances dans lesquelles nous pouvons introduire ou supprimer un nouveau connecteur à partir de la formule…
Le comportement de chaque connecteur peut être tracé de façon exhaustive comme cela a été montré plus tard avec les tableaux de vérité de Wittgenstein. Il n'y a qu'un pas à franchir à partir de là vers un ensemble de règles qui déterminent exactement à quel moment nous pouvons légitimement introduire un connecteur. Chaque connecteur a une règle pour son introduction et une autre pour sa suppression. Par exemple, si nous avons une proposition q, et si nous pouvons montrer qu'en la considérant comme vraie cela mène à une contradiction (la méthode de la réduction) alors nous pouvons introduire « ¬ » pour obtenir « ¬ q ». Nous pouvons éliminer une négation en arrivant à une double négative puisque ¬¬ p (ce n'est pas le cas que ce n'est pas le cas que le ciel soit gris) est la même chose que p (le ciel est gris). 47
Sensibilité à la grammaire En dépit des nombreux atouts de la déduction naturelle du calcul propositionnel, il ne peut toujours pas montrer pourquoi le premier des syllogismes d'Aristote est valide. Il ne peut tout simplement pas faire face à la transition en partant de « Tous les hommes sont mortels » et
« Socrate est un homme » pour arriver à
« Socrate est mortel ». Le problème, c'est que le calcul propositionnel interprète toutes les déclarations sous forme de simples symboles, donc « Tous les hommes sont mortels » devient « p ». Du fait que la relation logique entre les déclarations comme celle qui précède semble dépendre de la formulation réelle des phrases, il n'y a donc aucun moyen de montrer la dépendance logique entre les trois symboles qui constituent le premier syllogisme d'Aristote. Par exemple, si nous faisions un tableau de la vérité, nous n'obtiendrions pas une tautologie.
Cela pourrait être considéré comme étant de la logique sensible dans la grammaire des phrases au sein d'une discussion. La structure des phrases se reflète dans les symboles logiques et non les mots réels. 48
C'est précisément pour cette raison que j'ai réintroduit la distinction d'Aristote entre le sujet et le prédicat – les objets et ce que nous en disons – dans ma logique.
Calcul des prédicats Dans le calcul des prédicats de Russell, les lettres minuscules représentent des objets : a, b, c… représentent des objets spécifiques et x, y, z figurent des objets qui ne sont pas encore précisés. Les lettres capitales représentent les prédicats. Russell aussi utilisait des symboles spéciaux pour représenter les quantificateurs : « x » représente « tous » et « x » équivalait à « il y en a au moins un ». Tous les autres connecteurs officiaient comme ils le faisaient dans le calcul propositionnel. Avec cet appareil en place, nous pouvons tenir compte de tout syllogisme possible. A
E
Là où Aristote avait… Aucun être humain n'est immortel. Socrate est un homme. Socrate est mortel.
Nous avons…
Nous pouvons prouver ce syllogisme en utilisant une version élargie de l'introduction et des règles d'élimination du calcul propositionnel. Malheureusement, nous ne pouvons pas construire les tableaux de vérité pour vérifier les formules de calcul des prédicats puisqu'ils ne sont simplement pas équipés pour saisir la relation entre la véracité des déclarations générales et celle des déclarations qui en découlent. 49
Modèle de sémantique théorique Les tableaux de vérité ne fonctionnent pas pour le calcul des prédicats mais il existe toutefois d'autres méthodes. La plus importante d'entre elles utilise des modèles très simples du monde entier. Le modèle nous fournit un moyen de vérifier la véracité des déclarations dans le calcul des prédicats par rapport à une liste donnée d'objets et de prédicats. Les modèles nous permettent de donner un sens aux formules logiques et donc d'examiner la véracité de déclarations particulières par rapport à une situation donnée. C'est ce que l'on appelle le modèle sémantique théorique. Sans lui, tout ce que nous pouvons faire, c'est montrer qu'un argument est valide, que si Px alors Qx.
C'est une idée formidable car une fois que le modèle devient suffisamment grand et compliqué, nous pouvons l'appliquer à la pensée elle-même. Ce serait une grande aide pour comprendre l'esprit humain et construire des machines qui peuvent l'imiter.
Mais avant que cette sémantique soit d'une grande utilité, nous avons besoin d'un système grammatical sur lequel nous appuyer. Ce système grammatical doit nous permettre de construire un nombre potentiellement infini de phrases à partir d'un nombre défini de règles. 50
Avec le modèle sémantique théorique, nous pouvons savoir dans quels modèles « Socrate est un homme » est vrai.
Le modèle de récursion d'Hilbert Un tel modèle a précisément été développé par Hilbert dans ses travaux sur les fondements des mathématiques. Peu impressionné par l'idée de réduire les mathématiques à de la logique, Hilbert voulait une version mathématique de la théorie de la preuve – une manière de prouver les énoncés mathématiques à partir des mathématiques. L'expression « théorie de la preuve » revient en fait à Hilbert. En arithmétique, n'importe quelle formule bien formée peut être la base de n'importe quelle autre formule bien construite, à condition de suivre les règles. En partant de 1 + 1, nous pouvons arriver à 1 + 1 + 1.
À cet égard, l'arithmétique c'est comme l'anglais dans laquelle nous pouvons continuer à appliquer des mots comme « et »… Je sors faire des courses, est-ce que je peux te rapporter quelque chose ?
Oh, tu peux me rapporter du raisin… et des éponges à récurer…
Cette application en continu porte le nom de récursion et elle est essentielle pour la construction de modèles. Elle nous permet de construire un nombre infini de phrases à partir de quelques règles simples et d'un vocabulaire limité.
et des corn-flakes… et de l'eau de Javel.
51
Hilbert avait un point de vue sur les mathématiques qu'il appelait formalisme. L'idée, c'est que les choses dont parlent les mathématiques ne sont rien d'autres que des symboles. Ces symboles sont, par eux-mêmes, dénués de sens – vous connaissez tout à leur propos lorsque vous savez comment les manipuler. Il donnait des règles récurrentes pour expliquer leurs interactions possibles.
L'entité mathématique la plus connue est le nombre. Tous les nombres entiers positifs peuvent être construits à partir de deux règles simples : 1 est un nombre et n'importe quel nombre plus 1 Puisque les mathématiciens est un nombre. savent déjà comment construire chaque nombre avec l'aide de nombres entiers positifs et de zéro, ces deux règles sont, plus ou moins, tout ce dont vous avez besoin pour construire n'importe quel nombre. Les règles d'Hilbert sont à la fois simples et efficaces. En effet, elles traitent les mathématiques comme s'il s'agissait d'un langage formel composé d'un vocabulaire et d'une syntaxe. La syntaxe vous permet de créer des phrases du langage sans avoir la moindre idée de leur signification. Le vocabulaire n'est rien de plus qu'une collection de blancs avec des propriétés grammaticales : des noms, des verbes etc. Tout comme nous savons mettre un nom et un verbe pour former une phrase complète en français, même si nous ne savons pas quel est son nom. 52
Imaginons un modèle de langage construit uniquement à partir des termes suivants… Prédicats
Noms
Évolués dans
Homo sapiens Homo sapiens sapiens Homo erectus Homo habilis
Et des simples règles grammaticales suivantes : 1. 2.
phrase = nom, prédicat, nom phrase = phrase, « qui », prédicat, nom
La première règle montre comment construire une formule bien élaborée en dehors de la séquence nom, prédicat, nom. Par exemple, « l'Homo erectus est devenu Homo sapiens ». La seconde règle montre comment construire une nouvelle formule bien élaborée en dehors de la phrase qui existe déjà et en plus la séquence « qui », prédicat, nom. Par exemple : « Homo erectus est devenu Homo sapiens qui a son tour est devenu Homo habilis ».
En utilisant ce modèle, nous pouvons construire un nombre infini de phrases par l'intermédiaire de l'application récurrente de la règle deux. Bien sûr, quelquesunes seulement de ces phrases seront vraies mais il devrait maintenant être clair que ce schéma familier est encore une autre application de la logique. 53
Des règles délimitées pour une production infinie Le philosophe américain Donald Davidson (1917-2003) a suggéré que nous puissions appliquer cette idée à la langue anglaise et à toute autre langue naturelle, en comblant les lacunes avec un modèle sémantique. « Nous devons expliquer comment les significations de phrases dépendent de la signification des mots. Sauf si une telle explication pouvait être fournie pour une langue particulière, rien ne pourrait expliquer le fait que nous pouvons apprendre cette langue : aucune explication pour le fait qu'en maîtrisant un vocabulaire défini et un ensemble déterminé de règles, nous sommes prêts à produire et à comprendre une infinité potentielle de phrases ». (Vérité et Signification, 1966). Les langues comme l'Anglais sont potentiellement illimitées si nous continuons d'appliquer des mots comme « et ». Il peut y avoir un nombre fini ou infini de règles qui réglementent chaque utilisation possible du mot « et ». Si les règles étaient infinies, alors nous ne pourrions pas les apprendre. Nous devons être capables d'appliquer les règles de manière récurrente afin de produire un nombre potentiellement infini de phrases. Davidson conclut que la langue anglaise, ou toute autre langue utilisée, pourrait être qualifiée d'énorme modèle. Donc, l'application de langues officielles aux langues naturelles revêt un agrément philosophique. 54
Mais s'il y a seulement un nombre fini de règles, alors elles peuvent être apprises.
Instructions simples Si Davidson a raison, alors le langage c'est un peu comme un Lego. Il est constitué de blocs (les mots) qui doivent être assemblés correctement. Les instructions données pour savoir comment lier un bloc à un autre expliqueront comment mettre en place n'importe quelle structure de Lego. Ce qui intéresse vraiment Davidson, c'est de savoir comment la signification de chaque mot contribue à celle de la phrase. Par exemple, la phrase…
peut être analysée comme « Il y a un événement pendant lequel j'ai marché et cet événement s'est produit lentement » ( x ) (Wx&Sx) E
Voici une analyse d'un communiqué en anglais – construit à partir de la conjonction de deux déclarations simples qui sont constituées d'un sujet et d'un prédicat. L'affirmation de Davidson présente deux qualités principales. D'abord, elle s'adapte parfaitement à ses conditions d'apprentissage. Ensuite, elle fournit un compte de la langue qui préserve une grande partie de notre compréhension intuitive sur le langage naturel. Par exemple, « J'ai marché » vient de « J'ai marché lentement » car dans la théorie de la preuve « Wx » vient de « Wx&Sx ». Davidson a consacré plus de dix ans à analyser différentes parties du langage dans cette sorte de forme logique. 55
Théorie de la preuve et langue officielle Davidson nous encourage à penser à tous les adjectifs, adverbes et prépositions comme étant des prédicats rattachés les uns aux autres. Cela diffère de l'analyse de Russell à propos de ces termes linguistiques.
Je dis que « Je suis allé skier avec un ami » est un prédicat seul qui explique quelque chose à propos de deux sujets. Un prédicat comme « allé skier avec » n'a de sens que s'il y a deux sujets qui y sont rattachés.
Mais Russell, comment pouvez-vous tenir compte du fait que « Je suis allé skier avec un ami » implique effectivement « Je suis allé skier » ?
Je ne peux pas car dans la théorie de la preuve, il n'y a aucun moyen de rendre compte de l'implication de deux prédicats vers un prédicat. La théorie de la preuve manque du mécanisme sémantique pertinent.
56
Non seulement cela mais en français, nous pourrions étendre indéfiniment notre explication. Par exemple : « Je suis allé skier avec un ami cet hiver dans les Alpes où il fait froid… ». Sur votre explication Russell, nous avons besoin d'un nouveau prédicat pour chaque ajout ultérieur. Cela signifie que nous aurions besoin d'une infinité potentielle de prédicats et c'est impossible à apprendre.
Si nous élaborons les phrases à ma façon, avec une série de différents prédicats reliés par des conjonctions, alors une règle simple récursive peut les expliquer tous.
À la base, Davidson essaie de comprendre l'anglais comme un langage formel. Pour ce faire, il a besoin d'un moyen de décider sous quelles conditions les phrases de l'anglais sont vraies. Davidson a adopté une explication de la vérité dans les langues officielles développée par un collègue de Berkeley, Alfred Tarski (1902-1983). Tarski a développé une distinction entre le langage officiel et celui qui est utilisé pour parler du langage officiel (le métalangage). 57
Les conditions de vérité de Tarski Tarski a fourni un ensemble de conditions qui nous permettent de dire à quel moment une phrase de langage officiel étudiée est vraie. Le résultat est étonnamment simple.
S est vrai si, et seulement si, p.
Dans le schéma de Tarski, « S » est une phrase d'une langue officielle et « p » est la traduction de S dans le métalangage. Si le métalangage est le français et la langue officielle comprend des phrases en français, nous pouvons dire « La neige est blanche » si et seulement si la neige est blanche.
Le schéma de Tarski semble moins insignifiant si nous l'utilisons pour préciser les conditions de vérité d'une Le prédicat langue étrangère. « Snow « est vrai » n'est jamais is white » est vrai si et correctement appliqué seulement si la neige est dans un langage formel, blanche. Il semble que il dit plutôt quelque chose nous puissions utiliser à propos des phrases du le schéma pour nous langage formel. donner la signification de la phrase anglaise.
58
Davidson pense que notre compréhension de l'anglais peut être expliquée par la compréhension d'une liste de phrases construites autour du schéma de Tarski.
Cette liste est tout ce dont nous avons besoin pour tenir compte de notre compréhension de notre langue naturelle car si nous connaissons les conditions dans lesquelles une phrase est vraie, alors nous savons comment utiliser cette phrase.
Donc même quelque chose en apparence aussi simple que « La neige est blanche » est vraie si, et uniquement si, la neige est blanche. est tout ce dont nous avons besoin pour commencer à utiliser une théorie de la signification selon Davidson. Lorsque cela est associé à la tentative de Davidson pour montrer comment les conditions de vérité des phrases dépendent des conditions de vérité de leurs parties, alors la base est là pour travailler sur les conditions de vérité de chaque phrase possible en français. 59
Sémantique formelle dans la pratique Le grand avantage pratique de la sémantique formelle réside dans notre capacité à construire des machines qui répondent à une langue formellement définie – tous les ordinateurs sont ces machines-là.
Mais cela ne s'applique pas seulement aux ordinateurs. La physique moderne des particules est faite dans le cadre des langages formels avec la théorie quantique qui propose le modèle. Souvent, nous ne savons même pas ce que les termes utilisés dans le modèle – comme les photons et les électrons – signifient en dehors du modèle. Les électrons n'ont jamais été directement observés : leurs propriétés définissent ce qu'ils sont et composent leur identité formelle dans les modèles des scientifiques. Les interactions entre les particules dans le modèle peuvent être vues comme des règles syntaxiques qui régissent leur comportement. Ce que veulent les physiciens, c'est montrer que leurs modèles correspondent à des résultats expérimentaux.
60
N'importe quel langage informatique est composé d'un vocabulaire et de règles qui décrivent comment construire des énoncés bien formés dans ce langage. Tous les programmes écrits dans le langage sont constitués de ces énoncés-là.
Construction d'un feuilleton télévisé Nous pouvons construire des langages formels pour modéliser presque n'importe quoi. En voici un utilisé pour élaborer l'intrigue d'un feuilleton télévisé typique : Prédicats
Personnages
Connecteurs
meurt a une liaison est en faillite
Jacques Renée Victor Hélène Sylvain Armand Caroline
et ou parce que
aime déteste a une liaison avec
Remarquez la différence entre les prédicats qui ont un caractère comme « a une liaison » et ceux qui en ont deux comme « a une liaison avec » Ils nécessitent des règles différentes d'association. Les connecteurs n'ont pas besoin d'être « logiques » de la même façon que les connecteurs du calcul des prédicats mais leur comportement dans le langage sera défini de façon exhaustive. Toute formule possible bien structurée peut être élaborée à partir des règles suivantes : 1. 2. 3.
Pour une phrase à un prédicat : phrase = nom, prédicat
Pour une phrase à deux prédicats : phrase = nom, prédicat, nom
Pour les connecteurs : phrase = phrase simple, connecteur, phrase simple
À partir de là, nous pouvons parvenir à un nombre potentiellement infini de phrases : « Hélène est en faillite », « Jacques aime Renée », « Sylvain meurt car Renée a une liaison avec Victor ». 61
Prologue à un feuilleton télévisé en intelligence artificielle Même si tous les langages informatiques sont des langages officiels, certains affichent leur vraie nature de façon plus flagrante que d'autres. Dans la plupart des langages informatiques, le vocabulaire et la grammaire sont prédéterminés mais les langages comme prologue permettent à l'ordinateur de développer sa propre programmation.
La motivation vient de mon idée que les machines pourraient avoir des compétences en apprentissage, auto-correction et communication.
Avec le prologue, l'idée est simple. On donne à l'ordinateur un modèle similaire à celui du langage du feuilleton télévisé mais en plus complexe. Le vocabulaire est constitué de mots à utiliser par l'ordinateur et d'instructions à accomplir. L'ordinateur peut alors se voir défini des tâches spécifiques basées sur ce vocabulaire. Il peut aussi identifier des bits de vocabulaire qu'il ne possède pas et les demander.
62
Cela constitue la base de la plupart des tentatives pour créer l'intelligence artificielle (AI).
Le vocabulaire du prologue est constitué de « faits » qui sont des énoncés composés de prédicats et des noms de variables comme : « Allé sur la lune (Neil Armstrong) » et « Allé sur la lune (Buzz Aldrin) ».
Les langages comme le prologue contiennent tout ce que je pensais être nécessaire pour créer une machine aussi intelligente que nous le sommes.
Un ensemble de règles est ajouté pour structurer et relier un fait à un autre, donc… « Le premier homme sur la lune était Neil Armstrong ». devient « Le premier homme sur la lune (x) : - x = Neil Armstrong ». L'élément final prend la forme de questions dans lequel la machine est programmée pour certaines tâches, donc « ? premier homme sur la lune » recevrait la réponse…
63
La recette de Turing pour l'intelligence artificielle Pour préparer une machine intelligente, nous avons besoin de… 1. Un modèle avec un vocabulaire suffisamment riche pour représenter le monde réel.
2. Ce modèle sera alors utilisé pour construire une image du monde. Vous pourriez trouver ici un tableau de l'auto-apprentissage utile.
3. Maintenant, nous devons assembler les dispositifs d'entrée et de sortie. L'entrée devrait être composée de dispositifs similaires à nos propres sens. La sortie est composée de réactions comportementales appropriées à l'image du monde que nous avons créé plus tôt.
Présenté de la bonne façon, ce serait impossible à distinguer depuis le voisin d'à coté.
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Tout en montrant que les machines peuvent être programmables en utilisant quelque chose comme un langage formel, Turing a également ouvert la voie à la construction des premiers ordinateurs numériques. C'est Turing qui a découvert que les tubes sous vide pouvaient être utilisés pour stocker des informations par voie électronique. Jusque-là, toutes ses machines avaient été mécaniques. L'introduction du tube sous vide a vu les engrenages remplacés par l'électronique. Aujourd'hui, les transistors ont remplacé les tubes sous vide mais le principe demeure inchangé. Turing s'est suicidé en 1954, peut-être mené à cette extrémité par le traitement brutal infligé par le système juridique britannique. En dépit de son énorme contribution à l'effort de guerre et à ses travaux ultérieurs sur les ordinateurs et l'intelligence artificielle, en 1952 Turing était jugé pour « outrage à la pudeur » – en un mot parce qu'il était gay.
J'ai évité une peine de prison en plaidant coupable mais comme condition à ma libération conditionnelle, j'ai dû me soumettre à des injections d'œstrogène – une forme de castration chimique. 65
Le problème des paradoxes Comme avec la plupart des choses en logique, la théorie de la preuve à première vue semble sèche et obscure. Souvent, le côté pratique de ses applications comme méthode de preuve logique semble limité. Mais il forme la structure d'une grande partie de notre science, des mathématiques et de la technologie informatique. Une des qualités de la théorie de la preuve est sa capacité à garantir un seul résultat répétable chaque fois qu'elle est appliquée à une chaîne particulière de symboles, ce qui est plus que ce qui peut être dit pour la majorité des expériences scientifiques. En revanche, si la chaîne de symboles en question affiche une contradiction, l'efficacité du procédé disparaît, car tout découle d'une contradiction.
Lorsque Russell a découvert un paradoxe dans mon système de logique, tout le monde, même moi, a rejeté le système. Le paradoxe qu'il a découvert était une contradiction inévitable construite dans le système.
Frege est devenu une leçon de choses pour les logiciens qui ont essayé d'éviter les paradoxes depuis lors. 66
Un paradoxe, c'est une déclaration qui entraîne sa négation. C'est le cauchemar d'un logicien car cela n'a pas d'importance que nous supposions que la phrase soit vraie ou fausse, nous arrivons toujours à une contradiction. Ce qui fait qu'il est très difficile de conserver la loi de la noncontradiction (aucune phrase ne peut à la fois être vraie et fausse). Le mot « paradoxe » est d'origine grecque et à juste titre. Les sceptiques dans la Grèce antique voulaient montrer que la raison ne pouvait pas conduire à la connaissance absolue – le paradoxe était leur arme principale. Le plus célèbre de ces réprouvés philosophiques était Zeno d'Elea (environ 495-430 avant notre ère). Peut-être que le plus célèbre paradoxe grec est le soi-disant « paradoxe du menteur » qui dans sa forme la plus simple semble indiquer que…
Le problème ici, c'est que si la phrase est vraie, alors elle est fausse ; mais si elle est fausse, alors elle doit être vraie. Si nous supposons qu'elle est vraie ou fausse, cela mène toujours à une contradiction. C'est le plus célèbre de la famille des paradoxes autoréférentiels. On les appelle « autoréférentiels » car la phrase parle d'elle-même. 67
Les paradoxes peuvent-ils être évités ? Les paradoxes posent de sérieux problèmes pour les systèmes logiques de Leibniz, Frege et Russell. Ils permettent la formulation de contradictions au sein de systèmes très simples. Les logiciens ont essayé d'éviter le paradoxe du menteur de différentes façons mais aucune n'est très convaincante.
Pour tenter d'éviter le paradoxe du menteur, on peut interdire toutes les phrases auto-référentielles des systèmes logiques mais cela présente deux problèmes :
1. Certaines phrases auto-référentielles sont totalement inoffensives, par exemple : « Cette phrase possède cinq mots ».
2. Nous pouvons construire un paradoxe qui fonctionne comme le paradoxe du menteur et qui n'est pas auto-référentiel…
Cela fonctionne de la même façon que le traditionnel paradoxe du menteur. Si son signe à lui est vrai alors son signe à elle est faux – et vice versa.
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La théorie des types Le paradoxe de Russell utilisé contre Frege est sensiblement une reformulation du menteur dans le langage de la théorie des ensembles. Russell nous demandait de considérer l'ensemble de tous les ensembles qui ne sont pas membres d'eux-mêmes. Une bonne La question qu'il a soulevée était de savoir si partie de mes travaux cet ensemble est un membre de lui-même. en logique a été consacrée Cela conduit à la configuration familière : c'est à l'élaboration de ce un membre de lui-même alors il n'est pas mécanisme. Je l'ai appelé un membre de lui-même ; ce n'est pas un « la théorie des membre de lui-même alors c'est un types ». membre de lui-même. Russell en est arrivé à un mécanisme Nous devrions logique compliqué pour opposer différents types de séries… aborder ce problème.
des ensembles dont les membres sont des objets, des ensembles dont les membres sont des ensembles, etc. Nous pouvons continuer indéfiniment pour avoir des ensembles dont les membres sont des ensembles d'ensembles, etc.
De la même façon, nous pouvons utiliser des prédicats qui parlent d'objets et des prédicats qui parlent de prédicats, comme par exemple « être beau est dangereux ». 69
La théorie de Russell soutient que si nous interdisons le croisement entre les types, alors son paradoxe est résolu – l'ensemble des problèmes est un ensemble d'ensembles et en tant que tel, d'un type différent que les ensembles qui le composent. Le paradoxe ne voit pas le jour car il implique un croisement entre les types. Malheureusement, lorsque cette solution est appliquée au paradoxe du menteur, il s'avère que cette solution potentiellement infinie n'est pas suffisante. Lorsque Russell a essayé d'analyser « Cette phrase est fausse », il a trouvé qu'elle était constituée de deux phrases…
La première dit d'un objet qu'il est une phrase…
… et la seconde dit de la phrase qu'elle est fausse.
Russell pensait que « C'est vrai » est un prédicat qui dit quelque chose à propos d'une phrase – c'est-à-dire à propos d'un prédicat et de son objet. Le problème pour la simple théorie des types, c'est que le menteur a deux prédicats de différents types – une situation à laquelle il ne peut pas faire face.
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J'ai trouvé un moyen de me débrouiller avec ce problème mais uniquement au détriment de mon système encore plus difficile à manier.
Le nouveau système de Russell empêchait tant de croisements entre les types qu'il est devenu impossible de prouver même les propositions élémentaires de la théorie des ensembles utilisant ce système.
La solution de Tarski pour le menteur Tarski pensait que la distinction qu'il faisait entre la « langue étudiée » et le « métalangage » pouvait très bien gérer le menteur car « est vrai » et « est faux » sont les prédicats du métalangage. Lorsque le menteur dit « cette phrase est fausse », il se trompe en appliquant le prédicat « est faux ». Il le traite comme s'il faisait partie du langage objet. Mais il ne peut vraiment être appliqué qu'au métalangage.
Une phrase ne peut pas contenir son propre prédicat de vérité. « Cette phrase est fausse » n'est pas plus une partie de langage objet que « cette neige est white » fait partie du français. Cette solution est semblable à celle de Russell puisqu'elle ne permet pas aux phrases du même type de parler de leur propre valeur de vérité. Tout comme il y a des types infinis, de la même manière avec la proposition de Tarski, il y a des langages à étudier, des langages pour étudier le métalangage et ainsi de suite à l'infini. 71
Le paradoxe non levé Tout comme le menteur semblait être un problème pour Russell, un paradoxe comme « La phrase suivante est fausse. La dernière phrase est juste » est problématique pour Tarski. Une phrase semble appartenir à la fois au métalangage et au métalangage pour le métalangage.
« La dernière phrase est vraie » devrait être le sujet de discussion mais elle dit quelque chose à propos de la phrase du métalangage. En bref, elle semble appartenir à deux langages en même temps.
« La phrase suivante est fausse » parle d'une phrase donc à tout le moins, elle appartient au métalangage.
Le menteur reste l'un des grands paradoxes non résolus. Il continue de tourmenter les philosophes et les logiciens, inspirant de temps en temps de nouvelles solutions. Il a la curieuse habitude d'apparaître dans des contextes différents à des moments différents. 72
Savez-vous ce que sont les « hétérologies » ?
Ce sont des mots qui ne sont pas ce qu'ils disent. Par exemple, « long » n'est pas long, « grand » n'est pas grand, etc.
Et puis il y a le mot « hétérologique », hétérologique ou non ? Si ce n'est pas hétérologique, alors il est ce qu'il dit être, mais alors, il dit qu'il est hétérologique.
Et s’il l'est ?
Alors il est et n'est pas hétérologique – un paradoxe, pourriez-vous dire.
Alors il est et n'est pas hétérologique – un paradoxe, pourriez-vous dire.
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Le théorème d'incomplétude de Gödel Le plus influent des paradoxes autoréférentiels modernes est le second théorème d'incomplétude de Gödel. Lorsqu'il a été publié pour la première fois en 1931, peu de gens pouvaient le comprendre. Cela ne veut pas dire que les idées qu'il énonce sont particulièrement difficiles. Ses résultats ont eu un grand impact sur la science, les mathématiques et la philosophie. Gödel a eu l'idée ingénieuse de coder les énoncés de logique et de métamathématiques comme des nombres. Il a attribué un nombre à chaque symbole dans la logique de Russell puis il a inséré les nombres dans une formule mathématique qui générait un nombre unique pour chaque chaîne de symboles possibles dans cette logique.
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Lorsque j'étudiais avec Hilbert, je l'ai aidé sur son projet afin de trouver des preuves de cohérence en arithmétique en utilisant sa méthode récursive. À ma grande surprise, au début de la recherche, j'ai découvert qu'aucune de ces preuves ne pouvait être fournie.
Dans le système de Gödel, nous pouvons traduire de la façon suivante…
Cela permet à Gödel de produire un nombre unique pour cette formule.
En utilisant cette méthode, j'ai montré qu'un nombre particulier correspondrait à une formule dans le système complet de Russell qui dit : « Cette formule est impossible à prouver ».
Lorsque nous sommes parvenus à cette formule, nous pouvons procéder de deux façons. D'abord, supposons que cette phrase est vraie – nous avons un énoncé vrai dans la logique de Russell qui ne peut pas être prouvé. Cela signifie que la logique de Russell est incomplète. Sinon, si la phrase est fausse, cela signifie qu'elle est démontrable – mais alors une déclaration fausse est démontrable dans la logique de Russell, c'est donc incohérent.
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Les conséquences du théorème de Gödel Aucune de ces suggestions n'est très séduisante aux yeux de Russell ou de Hilbert qui voulaient élaborer un système qui produirait toutes et uniquement les phrases vraies en mathématiques. Ils se retrouvaient donc face au fait que cet objectif n'était pas réalisable en principe.
J'ai montré que les branches de base des mathématiques peuvent être formalisées par un ensemble d'axiomes conformément au programme d'Hilbert. Mais les conclusions de mon théorème s'appliquent également à eux. Donc, soit l'arithmétique de base est incomplète soit elle est incohérente – ou bien, soit un vrai calcul ne peut pas être prouvé soit un faux calcul peut l'être.
Le théorème de Gödel peut être généralisé pour couvrir n'importe quelle langue officielle suffisamment complexe dans laquelle il y a un certain « ordre » entre les différentes phrases. Gödel a ensuite prouvé que les mathématiques sont essentiellement incomplètes – qu'aucune liste d'axiomes ne peut jamais rendre compte de toutes les vérités de l'arithmétique. La conclusion selon laquelle il y a des phrases vraies en mathématiques qui ne peuvent pas être prouvées est très inquiétant pour quiconque essayant de définir les mathématiques sur une base sûre. 76
Gödel a enfoncé le dernier clou dans le rêve du xixe siècle qui était de faire découler toutes les mathématiques d'un ensemble simple et rigoureux d'axiomes. La logique n'est plus pratiquée dans l'espoir de fonder les bases des mathématiques.
Ce ne sont pas que des mauvaises nouvelles pour la pratique quotidienne des mathématiciens. Tant qu'ils montrent que leurs systèmes sont cohérents, au prix d'être incomplets, ils peuvent continuer à produire de loin la grande majorité des phrases mathématiques.
Alors que mon programme était dévasté, ma méthode continuait à être utilisée pour formaliser et axiomatiser de nouvelles branches de mathématiques. J'ai moi-même imaginé un système mathématique pour gérer le royaume bizarre des particules quantiques qui portent maintenant le nom d'espaces d'Hilbert. 77
Le « problème de l'arrêt » Le théorème de Gödel nous montre quelque chose de très similaire lorsqu'il est appliqué au calcul. En utilisant le système de numérotation de Gödel, chaque Les preuve mathématique formelle peut être ordinateurs sont des machines transformée en un calcul numérique qui simulent les relativement simple. Ainsi, pour chaque calculs numériques. formule correspond un nombre C'est fondamentalement particulier. Cela veut dire que s'il y a une ma technique de formule qui ne peut pas être prouvée, numérotation qui leur permet d'exécuter des il y a donc un nombre qui ne peut pas programmes dans être calculé. la logique formelle.
En utilisant une astuce mathématique bien définie, j'ai montré que mon ordinateur idéal ne pouvait pas calculer la plupart des numéros parce qu'il y a plus de numéros irrationnels comme ii qu'il n'y a de numéros rationnels Cela veut dire que le théorème d'incomplétude de comme 7.
Gödel s'applique aux ordinateurs. Les nombres incalculables correspondent d'une certaine façon aux programmes qui ne donneront jamais de résultat. Le théorème d'incomplétude de Gödel signifie qu'il ne peut pas y avoir un programme qui utilise un nombre fini d'étapes pour vérifier n'importe quel programme et voir s'il arrivera à une conclusion ou à un arrêt. Il est devenu connu sous le nom de « problème de l'arrêt ». Un tel programme serait équivalent à un système dans lequel vous pourriez systématiquement calculer tous les chiffres et c'est une impossibilité.
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La limite de la preuve de Gödel En dépit de ses vastes ramifications, il y a certaines choses que la preuve de Gödel ne peut pas faire. Elle ne garantit absolument pas que nous ne pourrions pas utiliser la méthode d'Hilbert pour prouver la cohérence et l'exhaustivité de l'arithmétique, seulement qu'une telle preuve n'est pas susceptible d'être représentée en arithmétique. C'est vrai mais personne jusqu'à ce jour ne sait à quoi ressemblerait ce genre de preuve, sans parler de la manière d'en élaborer une. On ne peut pas s'en servir pour dire, comme certains ont essayé, que la mystérieuse intuition doit remplacer la preuve convaincante. Ce n'est pas non plus une preuve qu'il y ait des limites intrinsèques au raisonnement humain puisque personne ne sait si le raisonnement de l'Homme relève des règles d'Hilbert. Cela ne veut pas dire que nous n'avons aucun espoir d'expliquer la pensée
en termes physiques.
Mais cela remet en cause la possibilité de systèmes de règles qui formalisent n'importe quelle phrase.
Le théorème de l'incomplétude de Gödel a même fait partie des conférences d'éthique en première année de premier cycle. 79
Le paradoxe du mouvement de Zeno Le plus célèbre des paradoxes non auto-référentiels a également été inventé par Zeno de Elea. Zeno voulait montrer que le mouvement était impossible. Chaque fois que nous voyons quelque chose bouger, ce sont nos sens qui nous trompent. L'argument principal de Zeno quant à cette affirmation curieuse était de montrer que si le mouvement devait exister, cela conduirait à une contradiction.
Notre héros légendaire Achille ne courra jamais assez vite pour attraper cette tortue. Car afin d'y parvenir, il doit d'abord parcourir la moitié de la distance qui le sépare de la tortue. Puis il . devrait parcourir la moitié de la distance restant puis encore et encore… jusqu'à l'infini.
Il lui faudrait un temps infini pour atteindre la tortue. 80
Zeno se targuait d'être parvenu à sa conclusion à partir de vraies hypothèses. Qui nierait que pour aller d'un point A à un point B, vous devez d'abord parcourir la moitié de la distance ? Mais nos sens nous disent que nous atteignons et passons tout le temps par des endroits. Donc, Zeno en conclut que nos sens nous trompent. Le paradoxe de Zeno peut s'appliquer à tous les types de mouvement. Puisque une flèche tirée vers une cible doit d'abord parcourir la moitié de la distance et puis la moitié de la distance qui reste et puis la moitié de ce qui reste après et ainsi de suite jusqu'à l'infini…
Le résultat, c'est que même si une flèche s'approche toujours de sa cible, elle n'y parvient jamais totalement.
Alors Saint Sébastien a du mourir de peur !
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Une somme infinie Le paradoxe de Zeno s'appuie sur une hypothèse faite par tous les mathématiciens avant Newton et Leibniz. Ils supposaient que toute somme d'un nombre infini de nombres positifs serait infinie. C'est une hypothèse facile à émettre.
Si nous prenons la distance de A à B comme 1…
Je prétends que vous devez d'abord parcourir la moitié du chemin.
Ajoutez à cela la distance qui reste.
Et la moitié du chemin encore…
Il en résulte que nous avons une somme infinie de quantités positives ½ + ¼ + 1/8… et cela, d'après l'hypothèse de Zeno, serait infini. Nous n'irions jamais de A à B ! 82
Une convergence sur les limites Ce que Newton et Leibniz ont découvert presque simultanément, c'était que souvent la somme d'un nombre positif de nombres entiers n'est pas infinie. Certains calculs infinis ont la propriété de converger vers les limites. Ce qui revient à dire qu'avec chaque addition ultérieure, nous nous rapprochons toujours plus d'un nombre particulier. Étant donné un nombre infini de calculs, on pourrait éventuellement arriver au nombre.
Malheureusement pour Zeno, la somme ½ + ¼ + 1/8 … est ce calcul-là.
1
C'est fortuit car cela veut dire qu'il faut exactement le même temps pour aller de A à B que pour aller de A vers B… et nos sens sont sauvés.
Il peut facilement être démontré, en utilisant notre méthode, que la somme finale de ce calcul est 1.
Il a fallu 2 000 ans mais finalement j'ai battu cette tortue !
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Combien vaut un « tas » ? L'autre paradoxe bien connu qui ne soit pas auto-référentiel est celui du tas. Il était très apprécié par les Stoïciens qui l'utilisaient pour montrer la faiblesse de la raison. Il s'appuie sur le fait que certains mots dans notre langage, comme « tas », sont imprécis. Dans certains exemples, il n'y a pas de règles précises pour dire qu'ils sont correctement appliqués.
Voici un tas de sable.
Si je devais enlever un grain de sable, est-ce que cela serait toujours un tas ?
Oui – quelle différence peut faire un simple grain de sable ?
Il nous reste maintenant un grain de sable. Est-ce un tas ? Difficilement et pourtant à chaque étape, je n'ai enlevé qu'un seul grain pour lequel vous avez accepté qu'il ne revêtait aucune importance.
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Que se passerait-il si je devais enlever un autre gain de sable, est-ce que cela serait toujours un tas ?
Bien sûr et un autre…
Le paradoxe du tas met l'accent sur le fait qu'il n'y a pas de règles pour déterminer le nombre de grains de sable dans un tas. C'est un vrai paradoxe car en suivant les étapes logiques que nous acceptons comme étant vraies, nous sommes conduits à la contradiction qu'un simple grain de sable est à la fois un tas et n'en est pas un.
Le défi des séries Le paradoxe sorite peut être appliqué à d'autres choses que des grains de sable. Il peut concerner presque tout ce que vous pouvez changer dans la minute. Récemment, le philosophe Peter Unger a publié un article sous le titre « Je n'existe pas ». Il y réalise un paradoxe sorite sur lui-même, en enlevant une cellule à la fois. Le sorite n'a aucune incidence sur la logique formelle dans laquelle ce qui compte est la pure manipulation de symboles. Mais une fois que nous essayons d'appliquer un sens à ces symboles, ce paradoxe devient très important car beaucoup de mots de Les philosophes se tous les jours comme sont beaucoup enthousiasmés peu, beaucoup, grand, à propos de la combinaison des petit et autres, ainsi ensembles et de la logique afin que les couleurs et d'analyser le langage. Une idée commune veut que les prédicats de notre langage les sons, peuvent être correspondent à des ensembles. utilisés pour générer un Donc, le prédicat « est un tas » paradoxe sorite. correspond à l'ensemble de tous les tas. Ce que nous dit le sorite, c'est qu'il y aura toujours un cas douteux au moment de savoir si quelque chose est un tas.
Si nous n'avons pas de solution, alors l'ensemble de la tentative devient très contestable.
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Compromettre la logique En plus de la menace qu'il représente au niveau de la tentative d'utilisation d'ensembles pour analyser les prédicats de notre langue, le paradoxe sorite met en question la capacité du calcul propositionnel et de prédicat pour décrire la façon d'être du monde.
La loi d'identité (a = a) et la loi de noncontradiction (p& p) sont deux axiomes fondamentaux de nos systèmes de logique. Le paradoxe sorite les met toutes les deux en question.
Cela remet en question la loi d'identité car il semble parvenir au résultat selon lequel une chose qui est un tas ne l'est pas non plus. Pour la même raison, il remet en question également la loi de non-contradiction. Sans surprise, beaucoup de philosophes contemporains ainsi que des logiciens ont été plutôt contrariés par ce résultat. 86
La fiction des mots vagues Beaucoup de solutions possibles ont été proposées. Elles se répartissent en trois catégories. Certains suggèrent que le problème repose sur l'application de concepts vagues au monde. D'autres pensent que l'imprécision n'est qu'apparente. Quelques-uns pensent que la meilleure chose à faire est de rompre avec les contraintes de la logique propositionnelle et le prédicat. Frege pensait qu'il ne devrait pas y avoir de termes vagues dans l'argumentation logique. Pour Frege, la question de la logique était de la précision scientifique et les mots vagues ne servent que comme une fiction utile dans le langage courant.
Nous comprenons « Ulysse est sage » et « Patrick Stewart est chauve » mais tout comme il n'y a pas d'Ulysse, il n'y a donc pas de propriété de calvitie.
Dans ma langue précise, nous devons mettre de côté les noms sans support de même que les prédicats qui ne parviennent pas à attribuer des propriétés explicites.
La suggestion de Peter Unger se résume au fait que les mots comme « gens » sont aussi des fictions utiles. 87
Que « signifient » les mots ? D'autres penseurs contemporains choisissent de nier l'imprécision ou bien revendiquent le fait que l'imprécision est uniquement due à un manque de connaissances. Ils prétendraient par exemple qu'un nombre particulier de grains de sable constitue un tas mais il se peut que nous ne le sachions pas. Ils pensent que la vraie question est de savoir si quelque chose constitue ou non un tas.
Donc, les bonnes vieilles lois de la logique sont en fait des vérités du monde. Le problème repose uniquement sur les mots et les concepts que nous utilisons pour parler du monde. Cette solution au paradoxe sorite suggère que nous ne connaissons pas réellement ce que signifie nos mots puisqu'il est accepté que connaissant la signification d'un mot signifie savoir comment l'appliquer correctement. Mais la solution rejette explicitement que nous ayons ce genre de connaissances. 88
La logique floue Parce qu'aucune de ces conclusions n'est concluante ou non problématique, il y a des penseurs qui ont serré les dents et accepté le résultat de ce paradoxe. Ils renoncent à la demande très ancienne selon laquelle les déclarations ont une des deux valeurs possibles de vérité : vrai ou faux. Maintenant, nous pouvons penser à des phrases étant « très vraies », « assez vraies », « raisonnablement fausses », « complètement fausses », etc. Toute une famille de logiques est ainsi crée, appelée collectivement « logique floue ». Cela présente l'avantage supplémentaire de nous permettre de traiter des valeurs comparatives de vérité. Considérons ces formes…
Il est plus juste de dire de l'ovale qu'il est rond que de le dire du rectangle, en dépit du fait que ni l'un ni l'autre n'est vraiment rond.
Avec une logique floue, la vérité peut être considérée comme une échelle continue :
100 % complètement vrai
50 % très vrai
assez vrai
assez faux
0 % très faux
complètement faux
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Des tas flous Recourir à la logique floue n'est pas une solution mais une soumission au paradoxe. Mais même si nous l'acceptons, nous ne pouvons pas nous débarrasser complètement des sorites. La continuité de la vérité de la logique floue se prête à une version du paradoxe des sorites. Si quelque chose est très vrai, que se passe-t-il si 0,000001 % est moins vrai ?
Est-ce que c'est toujours très vrai ?… Nous pourrions dire que quelque chose est valide si elle préserve la vérité complète ou bien si elle préserve le même degré de vérité.
L'autre question urgente, c'est de savoir comment comptabiliser la validité de la logique floue. Comment pouvons-nous dire si une déclaration fait suite à une autre ?
La première suggestion nous ramène au point de départ. Nous pouvons valablement conclure que quelque chose est vrai si cela découle d'une déclaration complètement vraie. Alors que la seconde option signifie qu'il est difficile de savoir si nous pourrions jamais connaître la vérité de nos énoncés et ainsi de ne jamais faire une conclusion valable. En bref, le paradoxe sorite continue d'empêcher de dormir ceux qui sont enclins à se quereller sur de tels problèmes. 90
Est-ce que la logique peut échapper au paradoxe ? L'Histoire de la logique est parsemée de paradoxes. Elle peut être considérée comme une lutte entre deux camps – les constructeurs du système et les auteurs du paradoxe. Pour la plupart, les constructeurs du système recherchent des manières précises pour analyser nos concepts. Pour ce faire, ils tentent d'utiliser la logique pour obtenir tous les vrais énoncés de façon claire et précise. En revanche, un bon paradoxe défiera la capacité de la logique à faire cela en jetant le doute sur notre aptitude à distinguer ou à déduire des énoncés vrais et faux ou bien à fournir des définitions claires pour nos concepts.
Les systèmes d'aujourd'hui, en dépit de leur ingéniosité technique, sont presque autant assaillis par les paradoxes que la logique de la Grèce antique. Car, tandis que le calcul des prédicats est lui-même exempt de paradoxes, au moment où nous essayons de l'utiliser pour répondre aux questions au sujet du monde, nous courons rapidement au-devant des ennuis.
Compte-tenu de ces limites de calcul de prédicats, ce n'était qu'une question de temps avant que quelques logiciens essaient de s'en éloigner et développent de nouveaux systèmes de logique. La logique floue n'est qu'une de ces logiques « non classiques ».
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Des logiques non classiques : l'intuitionnisme L'une des premières alternatives à ce qui porte le nom maintenant de « logique classique » est venue de L.E.J Brouwer (1881-1966). Il s'opposait au projet de Frege et de Russell de réduire les mathématiques à la logique. Il pensait que les mathématiques reposaient sur des « intuitions » de base que nous avons à propos de ce que sont certains objets de J'ai essayé mathématiques de base de montrer que les preuves (comme le nombre et mathématiques fonctionnent simplement différemment des preuves la ligne). Son point de logiques. J'ai montré en particulier que vue est connu comme dans certains cas en mathématiques, étant « l'intuitionnisme ». la loi du tiers exclu ne fonctionne pas. C'est-à-dire, p n'est pas toujours en mathématiques la même chose que p.
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L'argument du diable Brouwer s'est principalement concentré sur les cas d'ensembles infinis et de séquences. Par exemple, l'ensemble de tous les nombres positifs et la – séquence de chiffres comprenant des nombres irrationnels comme π et √2. L'argument de Brouwer pourrait être expliqué comme cela… Je peux logiquement vous prouver que la séquence 666 doit apparaître quelque part dans le prolongement de tout nombre irrationnel comme π. Car, dire qu'il n'est pas là, c'est la même chose que de dire que pour tous les chiffres de π, ce n'est pas le cas que la séquence 666 y apparaisse. Mais cela ne peut jamais être prouvé mathématiquement. Même si vous remplissez chaque morceau de papier dans le monde avec des chiffres de π, il y aurait toujours infiniment plus de chiffres que vous n'avez pu le vérifier.
Mais même si ce n'est pas vrai que tous les chiffres de n'ont pas la séquence 666 en eux, alors par la loi du tiers exclu, il est vrai que quelque part dans , L'argument du la séquence apparaît. diable ne peut pas être accepté. Je concluais en disant que la loi du tiers exclu ne s'applique pas aux ensembles infinis ou aux séquences en mathématiques.
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La logique intuitionniste Même si Brouwer voulait montrer que certaines preuves mathématiques fonctionnent différemment par rapport à la logique, on constatait que l'argument de Brouwer pouvait également indiquer que certaines branches du travail sur les mathématiques opèrent avec une logique différente. Certaines ont même développé cette logique-là et tenté de montrer que c'est en fait la logique de toutes les mathématiques. Elle porte le nom de « logique intuitionniste ».
L'essentiel à propos de la logique intuitionniste, c'est qu'elle ne comporte pas la règle p = p à moins qu'il n'y ait une méthode claire pour vérifier si p est vrai.
Cela nous permet d'utiliser cette règle dans les cas d'ensembles finis, par exemple, mais écarte le cas des ensembles et des séquences infinis.
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L'intuitionnisme face à la méthode de réduction Notons une caractéristique importante de la logique intuitionniste qui veut que la méthode de réduction de Leibniz ne peut pas fonctionner dans ce cas-là. Dans la méthode de réduction, nous prouvons un énoncé mathématique en assumant son contraire et en obtenant une contradiction. Mais le passage de « sa négation est fausse » à « est exacte » repose sur la loi du tiers exclu. La méthode de réduction ne nous fournit pas une construction de la phrase mathématique à partir des axiomes d'une branche des mathématiques comme elles sont supposées le faire.
Sans nous donner la preuve appropriée de la phrase, vous voulez montrer qu'elle doit être vraie car sa négation est fausse. Cela s'appuie sur la loi selon laquelle p = p qui n'existe pas dans ma logique.
Le problème, c'est que de nombreux énoncés mathématiques fondamentaux – que tout le monde veut accepter – n'ont jamais été prouvés en utilisant ma méthode de réduction.
95
La mode intuitionniste Ce problème a mené à une nouvelle mode mathématique pendant les années 1930 pour essayer de trouver des preuves à quelques phrases mathématiques de base et fréquemment utilisées en se servant de la logique intuitionniste. Beaucoup de ces preuves ont été trouvées. Des départements de mathématiques et de philosophie ont vu le jour et des nouvelles divisions universitaires ont été créées. Même les méthodes officielles d'Hilbert, tout en étant concurrentes de la logique intuitionniste, ont été conçues pour utiliser uniquement des procédures intuitionnistes agréées. Jusqu'à ce que finalement, Gödel s'y intéresse.
En utilisant les méthodes d'Hilbert, j'ai montré que l'arithmétique formelle officielle est cohérente si une intuitionniste l'est.
Donc, dans la mesure où la cohérence est la mesure des systèmes mathématiques, les intuitionnistes ne sont pas significativement différents des classiques.
L'intérêt pour ce débat a diminué un peu depuis, mais la notion de base – selon laquelle nous avons besoin d'une preuve constructive pour être certain qu'une affirmation est vraie – a toujours ses partisans modernes parmi les logiciens, mathématiciens, scientifiques et philosophes.
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Aborder quelques vieux problèmes Environ à la même époque, l'intérêt avait été suscité par une idée qu'un mathématicien polonais Jan Lukasiewicz (1897-1956) avait publiée en 1920. Cela n'a pas engendré beaucoup de réaction en dehors de la Pologne pendant plus de dix ans. Lukasiewicz abordait quelques vieux problèmes qui étaient connus pour exister dans la logique depuis Aristote jusqu'à Russell.
J'ai remarqué que la logique est mal équipée pour gérer des mots comme « possible » et « nécessaire » et avec des déclarations à propos de l'avenir.
Comment pouvons-nous décider, après tout, de la valeur de vérité de « il neigera
sur Big Ben dans mille ans » ?
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La valeur du possible Lukasiewicz voulait un système logique qui pouvait intégrer et traiter ces éléments de langage. Pour ce faire, il a conçu une logique qui avait trois valeurs de vérité : faux, vrai et une qu'il mettait dans la rubrique de « possible ». N'importe quelle déclaration dans la logique de Lukasiewicz peut afficher la troisième valeur de vérité, mais elle peut aussi être fausse ou vraie.
À cause de cela, j'ai dû décider de nouvelles règles pour tous les connecteurs logiques. Par exemple, quelle est la valeur de vérité de p& q lorsque p est vrai et q possible ?
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Valeurs de vérité en nombres Pour résoudre ce problème, il est plus facile de penser aux valeurs de vérité sous la forme de nombres. Vrai et faux ont été aussi fréquemment représentés par 1 et 0.
J'ai décidé de gérer la troisième valeur de vérité comme si elle était ½.
En utilisant des nombres, la valeur de vérité de p&q serait la plus petite entre les valeurs de vérité de p et de q. Donc, si p est 1 et q est ½, alors p&q est aussi ½ La valeur de pvq est, de façon similaire, la plus grande parmi les valeurs de vérité de p et de q, donc si p est 0 et q est ½, alors la valeur de pvq serait aussi ½. La valeur de ¬p serait 1 moins (la valeur de p) donc si p est possible (1 : 2), sa négation l'est également.
99
Le possible et la non-contradiction Par conséquent, dans la logique de Lukasiewicz, ni la loi du tiers exclu ni la loi de non-contradiction ne fonctionne. Il est faux de dire que soit p est vrai ou non-p est vrai car p peut aussi être « possible ». Pour la même raison, il est également faux de dire que p et ¬p ne peuvent pas avoir la même valeur de vérité. Pourtant, la loi de non-contradiction fonctionne dans ma logique d'une façon différente.
Cela peut être présenté comme cela.
Donc, curieusement, il peut être prouvé dans ma logique que…
100
… Qui fonctionne bien pour toutes les valeurs de vérité de p. Dans ce sens, c'est très différent de la logique de Brouwer.
En dépit du fait que deux règles fondamentales de la logique classique ne s'appliquent pas à la logique de Lukasiewicz, elle est parfaitement cohérente et elle peut être utilisée tout aussi bien que la logique de Russell. Lorsque les suspects habituels ont pris conscience de l'invention de Lukasiewicz, il a été rapidement montré que ses définitions de connecteurs logiques pouvaient s'appliquer pour créer des logiques avec n'importe quel nombre de valeurs de vérité de trois jusqu'à l'infini. Tout ce que vous devez faire si vous voulez, par exemple, avoir une logique avec 7 valeurs de vérité, c'est de donner à chaque valeur de vérité la valeur numérique de 1/6. Vous aurez les valeurs de vérité…
c'est-à-dire sept valeurs de vérité au total. C'est entièrement à vous de décider ce que signifient ces valeurs.
En ce qui concerne la logique, les règles de Lukasiewicz pour les connecteurs logiques fonctionneront parfaitement. 101
De la logique classique à la logique floue Brouwer et Lukasiewicz ont initié la période moderne dans la logique. Depuis lors, la logique a évolué rapidement. Nous avons maintenant des douzaines de systèmes de logique qui représentent un intérêt pour quelqu'un, quelque part. La logique a été analysée dans ses parties les plus simples en utilisant des outils venus de l'algèbre puis rassemblés à nouveau pour Avec Lukasiewicz, tous les goûts et toutes les la « logique à valeurs modes. Tout ce qui est multiples » était née, arrivé en logique depuis qui a également récemment Aristote jusqu'aux années acquis le nom plus amusant de « logique floue ». 1930 a été rassemblé dans une seule dénomination – la logique classique.
L'idée originale de Lukasiewicz d'utiliser sa logique pour gérer le mot « possible » n'a pas fait son chemin mais beaucoup d'autres applications ont été trouvées plus tard pour la logique floue.
102
Les états électroniques « possibles » Une application importante de la logique floue se retrouve dans le domaine des machines électroniques. Souvenez-vous la façon dont fonctionnent beaucoup d'appareils électroniques. Ce sont généralement des appareils qui utilisent des interrupteurs oui/non ou on/off, sur le modèle de calcul propositionnel avec les deux valeurs traditionnelles de vérité, vrai et faux. Mais il y a des appareils qui peuvent utiliser des commutateurs avec plus de deux positions possibles.
Les touches de ce clavier sont simplement des interrupteurs on/off. Si j'appuie sur une touche, un son retentit.
Cet autre est beaucoup mieux avec des touches qui ont plus de deux états possibles. Le son qu'elles émettent change et devient plus sonore à mesure que j'appuie plus fort, comme un vrai piano.
Lorsque des machines utilisent des interrupteurs avec plus de deux états possibles, elles peuvent être modélisées en utilisant une logique floue, aussi facilement que les plus simples peuvent être modélisées avec le calcul propositionnel. 103
Le moteur de recherche de la logique floue Une autre implication importante de la logique floue se retrouve dans le domaine de l'intelligence artificielle. Supposons que nous voulions un système intelligent de recherche d'informations, comme un moteur de recherche Web amélioré. Plus un moteur peut reconnaître ce que vous cherchez à partir d'une liste de mots que vous lui donnez, meilleur il sera. Si nous utilisons le calcul propositionnel classique dans notre moteur de recherche, soit les sites correspondent aux mots que vous donnez au moteur, soit ils ne correspondent pas. Chaque petite variation de l'orthographe est considérée comme une noncorrespondance.
104
Toutefois, si nous utilisons la logique floue, le moteur peut trouver des sites correspondant aux mots que vous donnez à des degrés divers et vous apporter plus d'informations que ce dont vous avez besoin.
La machine logique floue En général, la logique floue est un meilleur outil que la logique classique lorsqu'il s'agit de la reconnaissance des formes, plutôt que de trouver des correspondances à 100 % entre les choses. En utilisant la logique floue, nous pouvons avoir des machines qui spécifient lorsqu’une chose est similaire à une autre. C'est une compétence importante avec de nombreuses applications en intelligence artificielle, telle que la reconnaissance du mot, la reconnaissance d'objet, etc.
Le réseau neuronal est un dispositif qui fait mieux qu'un ordinateur normal dans le domaine de la reconnaissance des formes. Tandis qu'un ordinateur normal est effectivement une machine logique classique, un réseau de neurones est en fait une machine logique floue.
La notion de réseau neuronal se retrouve pages 161-165.
105
La logique dans le monde quantique Le mariage au xxe siècle de la logique et de l'algèbre a conduit à d'autres logiques étranges avec d'importantes applications scientifiques et technologiques.
Dans les années 1920, j'ai dû inventer un outil mathématique spécial pour exprimer le comportement physique des particules comme les électrons en mécanique quantique. Le monde quantique est un univers très étrange qui a besoin également de modèles mathématiques . étranges pour le décrire. . Plusieurs années plus tard, les mathématiciens ont trouvé une formulation À ce moment-là, l'algèbre et la algébrique des « espaces logique étaient si proches que d'Hilbert » conçus si nous avions une formulation spécialement. algébrique de la mécanique quantique, nous pouvions également en avoir une pour la logique. 106
La loi distributive de la logique quantique La logique quantique a fait son apparition dans les années 60. L'idée, c'est que l'univers quantique – que les scientifiques trouveront difficile à comprendre et à décrire – fonctionne selon sa propre logique. Comme la philosophe Hilary Putnam (avant 1926) le disait, cette logique est très différente de la logique classique qui vient du langage humain et du raisonnement.
Dans la logique quantique, il y a deux valeurs de vérité possibles pour n'importe quelle phrase, comme dans la logique classique. La principale différence entre les logiques classique et quantique porte sur la loi distributive plutôt que sur n'importe quelles lois fondamentales de la logique comme celles du tiers exclu ou de la noncontradiction.
La loi distributive de la logique stipule que
p & (qvr) = (p& q) v (p& r) 107
Comment fonctionne la logique quantique La loi distributive de la logique classique fonctionne ainsi…
Je voudrais un morceau de gâteau au chocolat, s'il vous plaît. Nous avons du gâteau au chocolat avec cerises ou amandes. Vous voulez dire que vous avec du gâteau au chocolat avec des cerises ou du gâteau au chocolat avec des amandes.
Dans la logique quantique, cette règle simple ne fonctionne pas. Le boulanger devrait avoir du gâteau au chocolat soit avec des cerises soit avec des amandes mais lorsque vous vérifiez, vous pouvez ne pas trouver de gâteau au chocolat avec des cerises pas plus que de gâteau au chocolat avec des amandes.
Vous êtes perdu ? Maintenant, vous savez pourquoi les physiciens continuent autant d'étudier la question. 108
La logique par l'expérimentation L'invention de la logique quantique a conduit Putnam à affirmer que la question dont la logique s'applique au monde est empirique et ne peut être tranchée que par l'expérimentation. Putnam affirmait que la mécanique quantique permet vraiment de découvrir que le monde subatomique fonctionne selon une logique différente de celle à J'ai réalisé laquelle nous sommes que pour pouvoir lire les habitués dans le monde résultats d'une expérience et quotidien. Depuis, savoir quelle logique elle privilégie, Putnam a dû revoir nous devons déjà commencer avec une ses notes. sorte de raisonnement. Donc, toute la logique ne s'acquiert pas par l'observation.
Logique classique
Logique floue
Je continue de croire qu'il y a des faits dans le monde qui déterminent quelle logique il est approprié d'utiliser pour chaque cas et qu'aucune logique n'est meilleure qu'une autre. Logique quantique
109
La logique quantique peut ne pas supprimer le fondement même qui se trouve derrière notre foi dans le raisonnement humain mais elle a des applications qui nous emmènent presque dans le royaume de la science-fiction.
Les scientifiques remportent aujourd'hui un certain succès en utilisant les atomes simples comme des bits numériques. Ils peuvent exister dans l'un des deux états et il n'y a pas de mal à prendre ces états pour représenter 1 et 0 ou vrai et faux. C'est bien sûr la vision ultime en termes de réduction, de vitesse et d'efficacité.
110
La façon dont nous comprenons le monde d'aujourd'hui, si nous calculons en utilisant des atomes simples, nous fait utiliser des ordinateurs quantiques minuscules. Le meilleur modèle de logique pour les actions de ces ordinateurs serait également la logique quantique. Même si la technologie n'en est qu'à ses débuts, le jour viendra bientôt où beaucoup de nos calculs les plus complexes se feront par les lois étranges de la logique quantique.
Logique et sciences Si les seules applications de la logique étaient les arguments et la fondation des mathématiques, alors ce serait un outil plutôt limité. Néanmoins, l'ensemble de la science moderne implique l'application d'outils logiques et mathématiques. La logique de Frege était en fait conçue pour aider à créer un langage scientifique rigoureux. Mais les liens entre la logique et la science remontent beaucoup plus loin que cela.
Je ne pensais pas beaucoup aux mathématiques, ma science ne s'appuyait donc pas sur la mesure ou l'expérimentation précise. J'en ai conclu que les corps célestes se déplacent en cercles en dehors de leur amour de Dieu.
Malheureusement, essayer de prévoir le mouvement des planètes avec cette idée s'est avéré très difficile. Finalement, au deuxième siècle de notre ère, Ptolémée a commencé à ajouter des cercles au système d'Aristote pour tenir compte du mouvement de la masse. 111
La révolution copernicienne Les ajouts de Ptolémée ont été utiles pendant un temps mais Mars a poursuivi sa marche en dehors de l'orbite prévue. Cela a été géré en ajoutant un nombre toujours croissant de cercles jusqu'à la révolution copernicienne au milieu du xve siècle. Copernic a suggéré que les prédictions seraient simplifiées si la Terre tournait en rond autour du Soleil.
L'Église avait déjà donné son approbation au système aristotélicien. Ma suggestion choqua face à l'infaillibilité du pape.
L'hérésie de Copernic a inspiré des gens comme Galilée et Kepler. Galilée pensait que la controverse devrait être résolue par l'expérience. En faisant preuve d'un esprit brillant de déduction, il en conclu que si la Terre tournait autour du Soleil, cela affecterait le mouvement d'un pendule. Et c'est le cas. 112
La révolution de Galilée Galilée soutenait que les phénomènes de la Nature devaient faire l'objet d'une observation attentive et de mesure rigoureuse. Nous ne devrions pas nous fier à l'autorité du passé mais à l'observation quantifiée. Pour lui, « les mathématiques sont le langage de la Nature ». Galilée a relancé l'idée de Platon selon laquelle la Nature est régie par des lois mathématiques.
J'ai découvert mes lois du mouvement en observant les régularités mathématiques dans les expériences.
Ses résultats constituent le tout début de la mécanique de Newton.
Galilée a été contraint de se rétracter par l'Église et il passa le reste de sa vie isolé de tous. Mais la révolution scientifique était en marche. Bientôt, le monde d'Aristote allait s’écrouler sur lui-même. 113
Méthodes de déduction et d'induction Les méthodes de Galilée sont devenues la méthodologie de la science développée par les philosophes Francis Bacon (1561-1626) et René Descartes.
En science, nous effectuons d'abord des expériences puis nous généralisons à partir des résultats expérimentaux pour parvenir aux lois naturelles.
114
Une fois que nous avons ces lois, nous pouvons en tirer des déductions pour voir ce qui devrait se produire. Nous pouvons alors réaliser l'expérience pour voir si la prédiction est bonne.
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Descartes et Bacon représentent deux formes de raisonnement – la déduction et l'induction. La déduction est la méthode utilisée pour montrer qu'une théorie découle d'une autre théorie. L'induction est la méthode qui consiste à déduire une règle générale à partir de quelques cas.
Ce corbeau est noir, ce corbeau-là est noir… tous les corbeaux sont noirs.
Tous les corbeaux sont noirs. C'est un corbeau. Donc, il est noir.
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115
Problèmes avec l'induction En déduction, la vérité de la conclusion découle de la vérité de l'hypothèse. Dans une induction, nous ne pouvons pas en dire autant. Le fait que les deux corbeaux soient noirs ne contredit pas le fait qu'il y ait un corbeau blanc au Japon. Mais la règle générale selon laquelle « tous les corbeaux sont noirs » est incompatible avec l'existence d'un corbeau blanc.
Donc, la vérité des revendications justificatives ne garantit pas logiquement la vérité de la conclusion. Cela pose un problème pour l'utilisation de l'induction en sciences pour générer un résultat garanti.
116
La fourche de Hume Même si nous sommes en mesure d'utiliser l'induction avec beaucoup de succès, son application reste néanmoins discutable. Le philosophe écossais David Hume (17111776) s'est vu attribuer l'idée que notre utilisation de l'induction est injustifiée.
Justifier l'induction C'est connu depuis sous le nom de fourche de Hume
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Utiliser la déduction
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Pour justifier l'induction, nous devons choisir entre deux options. La première est d'utiliser la déduction mais la vérité de l'induction ne peut pas être déduite des axiomes de logique.
Utiliser l'induction
Nous ne pouvons pas utiliser l'induction non plus car cela signifie que notre propre justification serait fausse et la justification ne garantirait pas notre utilisation de l'induction.
117
Déduction nomologique Hume pensait que l'inférence inductive est un fait psychologique à propos des êtres humains. Une fois que nous avons été brûlés, nous éviterons de mettre la main dans le feu à partir de là. Nous déduisons par expérience. C'est exactement le problème. Utiliser l'induction semble terriblement sensé.
Mais notre utilisation ne peut pas être justifiée.
Les tentatives menées pour établir notre utilisation de l'induction n'ont pas été entièrement concluantes. Avec la montée du Cercle de Vienne, un doute sérieux a été émis à propos de l'idée selon laquelle la science est véritablement inductive.
Au lieu de cela, l'idée de la « déduction nomologique » a pris de l'importance.
L'idée, c'est que la science propose des lois générales à partir desquelles des résultats particuliers peuvent être déduits.
Plutôt que de croire que prédiction et explication nécessitent des méthodologies distinctes – une inductive et une déductive – nous laissons la déduction faire tout le travail. Nous voyons un phénomène puis nous proposons une loi qui peut expliquer le lien de causalité. Nous en déduisons alors ce qui peut aussi découler de cette loi et nous cherchons la confirmation empirique ou la falsification. 118
Le modèle nomologique a commencé avec le philosophe John Stuart Mill (1806-1863). Il pensait que la science était une division de la logique et que les inférences inductives n'étaient rien que des généralisations empiriques. La confiance dans ces généralisations augmente plus elles sont confirmées de façon empirique par opposition à des alternatives. Mais nous ne sommes jamais complètement certains de leurs conclusions. Le point commun à toutes les inférences inductives, c'est de croire que tout dans la Nature doit avoir une cause ou une condition qui est à la fois nécessaire et suffisante pour entraîner son existence. Nous pouvons découvrir ces deux types par la généralisation à partir de l'observation. Une condition nécessaire doit être trouvée avec ce que cela entraîne… Par exemple, les nuages sont nécessaires pour la pluie. Nous pouvons le découvrir en essayant de trouver des cas de pluie sans nuages. Si nous ne pouvons pas, cela soutient l'allégation.
Une condition suffisante est celle qui ne peut exister sans son effet – comme le feu avec la chaleur. Pouvons-nous avoir un cas de feu sans chaleur ?
119
L'induction par la généralisation Le travail du scientifique est donc similaire à celui d'un chimiste qui distille une substance quelconque. Par l'utilisation judicieuse de l'induction, de la déduction et l'élimination des candidats, le scientifique retient finalement quelques conditions nécessaires et suffisantes pour n'importe quel phénomène. Plus il y a d'expériences réalisées, plus le scientifique peut être certain de trouver les causes correctes pour un certain effet.
120
Hume affirmait que nous ne pouvons pas utiliser la déduction pour justifier l'induction. Mais Mill soutient que la déduction elle-même est seulement supposée agir du fait de l'induction de généralisations tirées de notre expérience. Hume ne peut pas utiliser le raisonnement par déduction pour saper l'induction car cette forme Tout ce que nous savons se fait par de raisonnement elle-même induction donc, la fourche repose sur l'induction. de Hume ne se présente pas puisque la répartition entre l'induction et la déduction est érodée.
Je pensais que les mathématiques et la logique ne sont que des généralisations empiriques, atteintes en utilisant une méthode dont nous sommes très sûrs.
121
Pour Galilée, les mathématiques sont le langage de la Nature qui peut éventuellement découvrir les lois mathématiques de la Nature. Mill quant à lui considère les mathématiques comme une autre forme de généralisation. Son idée, c'est que la science se déplace vers des règles encore plus générales qui prévoient toujours plus précisément.
La mécanique de Newton était une grande réussite parce qu'elle prévoyait tous les mouvements et les forces avec quatre règles simples.
122
Je pouvais déduire à partir d'elles toutes les grandes lois qui m'ont précédé – la loi du mouvement de Galilée et le compte de Kepler sur le mouvement des planètes, par exemple.
Le point de vue de Mill sur les mathématiques et la logique est tout à fait original et unique. Mill pensait que la certitude avec laquelle nous organisons les énoncés mathématiques et logiques comme 1 + 1 = 2 et ¬ (p&¬p) est due au très grand nombre de confirmations empiriques que nous avons d'eux. Les philosophes avaient depuis longtemps essayé d'expliquer la vérité prétendument nécessaire des mathématiques et de la logique. Mill faisait Ce coup a valoir qu'il n'y a rien à toujours expliquer. Ce ne sont fonctionné avant. pas des déclarations spéciales mais juste des affirmations plus largement confirmées. 123
Lois ou prédictions empiriques Les philosophes n'ont jamais été totalement convaincus par la justification empirique pour les mathématiques et la logique. Le problème, c'est que les énoncés de mathématiques – par exemple (2 + 2 = 4) semblent se comporter comme des lois, non pas simplement comme des prédictions qui, par exemple, si je mets ensemble deux et deux pommes, j'aurai quatre pommes.
Bizarre, j'avais deux pommes dans le saladier, puis j'en ai ajouté deux mais maintenant, il y en a trois ! C'est peut-être un cas où vos généralisations vous font défaut ?
124
Il semble beaucoup plus probable qu'il ait volé une des pommes !
Les règles de mathématiques ne prédisent pas les événements futurs mais réglementent plutôt ce que nous considérons comme rationnel. Chaque fois que nous trouvons un cas qui semble fausser les règles des mathématiques, nous cherchons toujours une autre explication rationnelle. Il n'y a aucun cas pour lequel nous voudrions céder et accepter que les règles de mathématiques soient fausses dans certains cas.
Il est également difficile de voir comment ces idées modernes-là telles que les nombres imaginaires et la géométrie avec plus de trois dimensions peuvent être des généralisations tirées de l'expérience puisque nous ne trouvons jamais ces choses-là dans le monde réel.
125
Le paradoxe du corbeau La méthode déductive nomologique a été mise à jour par Karl Hempel (1902-1997) issu du Cercle de Vienne. Il décrivait la science comme étant la recherche de règles générales reposant sur le lien de causalité qui pourrait expliquer tout le phénomène et uniquement celui-là observé au moment de l'expérience. Mais il découvrit bientôt des problèmes à propos de ce modèle.
Si nous avons une règle générale qui suit la formule suivante « Tous les F sont des G » (tous les hommes sont mortels) et un énoncé de la forme Fa (Socrate est un homme), Une loi de alors nous pouvons en cette forme est conclure Ga (Socrate logiquement équivalente est mortel). à la loi qui stipule que tout ce qui n'est pas G n'est pas F (tout ce qui est immortel n'est pas un homme). Si trouver un homme qui est mortel confirme la loi, alors trouver quelque chose qui n'est pas un homme et est immortel confirme également la loi. Muni de ces éléments, Hempel a découvert un problème connu sous le nom de « paradoxe du corbeau »… 126
Croyez-moi, tous les corbeaux sont noirs, et en voici la preuve…
1 : tous les corbeaux sont noirs signifie que tout ce qui n'est pas noir n'est pas un corbeau. 2 : maintenant, regardez mes chaussures, elles ne sont pas noires et ce ne sont pas des corbeaux.
3 : donc, elles confirment la règle qui veut que tous les corbeaux sont noirs.
Ce n'est pas un problème de logique mais un problème posé par la logique. Nous pourrions en théorie prouver que tous les corbeaux sont noirs en vérifiant que tout ce qui n'est pas noir dans l'univers n'est également pas un corbeau. Mais en tant que méthodologie de la science, cela ne sera clairement pas le cas car il faut une paire de chaussures blanches pour confirmer la loi selon laquelle tous les corbeaux sont noirs, autant que le fait un corbeau noir. Le problème est un manque de pertinence même si nous savons que toutes les chaussures de tennis sont blanches, nous ne voyons en aucun cas que cela affecte la couleur des corbeaux. 127
Un problème de cause à effet Un autre problème qui se présente avec le compte nomologique de Hempel, c'est qu'il ne fait pas la distinction entre la cause et l'effet. Par exemple, l'observation selon laquelle une certaine lecture d'un baromètre est liée à la pluie pourrait tout aussi bien confirmer l'opinion selon laquelle la présence de pluie « entraîne » la lecture du baromètre – ou bien que la lecture du baromètre « entraîne » la pluie.
Une bonne méthode scientifique doit tenir compte de la direction de cause à effet car personne ne croit sérieusement que les baromètres provoquent la pluie.
1.Chaque fois que le il baromètre indique qu' ut. ple il pleut, e 2.Le baromètre indiqu qu'il pleut. 3.Donc il pleut.
128
Nous avons ici une conjonction de deux observations : la lecture sur le baromètre et le fait qu'il pleut également confirme bien les arguments suivants… Selon la méthode proposée par Hempel, les deux explications sont également possibles en tant que lois naturelles.
1.Chaque fois qu'il pleut, le baromètre indiqu e qu'il pleut. 2.Il pleut. 3.Donc le baromètr e indique qu'il pleut.
La réponse de Popper à Hempel Une idée de cause à effet ne suffit pas pour sauver le modèle nomologique. Aujourd'hui, presque personne ne croit en la déduction nomologique. L'idée de la confirmation d'une loi particulière par une observation spécifique est tombée dans l'oubli. Une autre suggestion est arrivée par l'intermédiaire de Karl Popper.
En toute logique, dire que si F est une loi naturelle, alors G se produira équivaut à dire que si G ne se produisait pas alors F n'est pas une loi naturelle mais selon notre habilité à les confirmer, il y a une différence de taille. La première formulation demande que nous vérifiions tous les G. C'est pratiquement impossible car cela nous demande de vérifier tout ce qui s'est produit et ne se reproduira jamais. Mais un seul cas où G ne s'est pas produit dans des conditions appropriées est suffisant pour nous convaincre que F n'est pas une loi.
Popper a continué à faire de cela la base de sa méthodologie scientifique. D'après Popper, la meilleure façon de faire de la science n'est pas de chercher la confirmation de nos théories mais plutôt d'essayer de les infirmer. En se débarrassant du problème de la confirmation, Popper pensait que le problème de l'induction était résolu et que la science reposait sur un terrain logique solide. 129
La théorie de l'infirmation de Popper Si une théorie est infirmée dans un cas particulier, alors nous la refusons par une déduction très similaire à la méthode de réduction. La suggestion de Popper correspond à la façon dont les scientifiques travaillent en fait. Considérons cet exemple qui a marqué le début de la physique de Newton…
Supposons que la physique de Newton soit vraie. Nous devrions donc pouvoir détecter la lumière en mouvement à des vitesses différentes.
130
À partir d'expériences, nous n'avons pas trouvé que la lumière se déplace à des vitesses différentes. Donc, la physique de Newton n'est pas exacte.
Lorsqu'une théorie est rejetée, la course commence pour une nouvelle théorie qui puisse tenir compte de tous les résultats de l'ancienne théorie et expliquer les nouvelles données empiriques. Si nous nous retrouvons avec deux théories qui peuvent rendre compte des mêmes données, alors nous devrions choisir la plus simple.
La science ne cesse de découvrir l'inconnu puisque chaque théorie est remplacée par une théorie qui explique
davantage de faits.
Une fois que nous avons établi une nouvelle théorie, alors l'effort pour infirmer recommence.
131
La probabilité de la théorie viable L'infirmation de Popper ou théorie de « réfutabilité » déplace l'induction de son rôle centrale dans la méthodologie de la science. Cela signifie que toutes les inquiétudes à propos de la justification de l'induction et celles de Hempel à propos de la confirmation peuvent être évitées. Puisque c'est le travail d'une théorie de tenir compte de toutes les observations précédentes et de faire des prédictions précises là où les théories précédentes ont échoué, une nouvelle théorie doit aussi expliquer davantage. Du fait que la science évolue, ses théories s'éloignent du sens commun et deviennent de plus en plus improbables.
Théorie 1
Théorie 2
Une théorie qui explique cinq faits a une plus grande chance d'être correcte qu'une théorie qui explique dix faits, simplement parce qu'elle traite de moins d'événements qui peuvent être falsifiés. Tandis que la science progresse et que les théories représentent toujours plus de faits, la probabilité de ses théories étant exactes
diminuera.
132
Pendant un temps, l'idée de Popper a converti un certain nombre d'adeptes, jusqu'à ce que Williard Van Orman Quine (1908-2000) publie l'article « Les deux dogmes de l'empirisme » en 1951. Du point de vue de Popper, un résultat expérimental peut fausser une théorie scientifique particulière. Par exemple, l'orbite observée de la planète Mercure falsifie la loi de Newton sur l'attraction universelle.
Assurément, l'orbite observée de Mercure peut uniquement fausser la théorie de Newton si l'observation est correcte…
… si les
lois optiques sont correctes…
… s'il n'y a pas
d'interférence inconnue entre ici et Mercure, et ainsi de suite.
Oui ?
Donc, au lieu d'une théorie suspecte, vous avez une multitude d'hypothèses contestables. Chacune d'elles pourrait en principe être falsifiée par infirmation expérimentale. Alors, comment savez-vous quelle est celle qui est fausse ?
Euh… 133
« L'ensemble des convictions » de Quine Au niveau de la logique, il n'y a rien qui puisse étayer le point de vue de Quine selon lequel nous devrions rejeter la mécanique de Newton et non les lois optiques. Lorsqu’un ensemble de déclarations conduit à une contradiction, au moins une d'entre elles doit être fausse mais la logique ne nous dit pas comment trouver la déclaration en question. Dire que les lois optiques ont été observées à maintes reprises n'aide pas du tout, car il est logiquement possible que notre foi dans les mesures soit déplacée.
Prenez cette idée à son extrême qui dit que tout cas de « falsification » menace potentiellement non seulement la théorie en question mais également notre ensemble de croyances.
Au niveau logique, il n'y a aucun moyen de déduire quelles croyances conduisent à la conclusion fausse. 134
La critique formulée par Quine pose la question suivante : comment notre conviction que « la campagne est jolie » peut avoir une influence ou porter sur la question de la mécanique newtonienne ?
Toutes nos croyances sont reliées entre elles et constituent un tout. C'est ce que j'appelle « la chaîne des convictions ».
Quine pense que la chaîne ne concerne que l'expérience extérieure mais c'est la chaîne qui est mesurée par rapport à l'expérience. 135
Modifications sur le « réseau » Les changements apportés à un certain nombre de nos croyances au cœur du réseau auront des répercussions à travers la chaîne, tandis que les modifications apportées aux zones externes plus souples auront moins d'impact sur le reste du réseau. Un changement majeur se produira si nos croyances fondamentales sont contestées – par exemple la conversion de Saint Paul au christianisme.
Une bonne partie de mon réseau a dû être réajustée.
Mais seul un changement mineur s'est produit lorsque les cygnes noirs ont été découverts en Australie.
Quine a déclaré : « La totalité de nos soi-disant connaissances ou croyances, depuis les questions les plus anodines de géographie et de droit jusqu'aux lois les plus profondes en physique atomique ou même en mathématiques pures et logique, est un tissu synthétique qui empiète sur l'expérience uniquement le long du bord… Un conflit avec une expérience à la périphérie provoque des réajustements dans la partie la plus intérieure du réseau ». 136
Lorsqu’une quelconque de nos propres croyances se trouve confrontée à une falsification par l'expérience, c'est la chaîne dans son ensemble qui est contestée. D'après Quine, nous essayons de faire aussi peu de modifications que possible pour recevoir une nouvelle expérience. Alors, nous essayons de changer les parties molles du réseau plutôt que celles qui sont dures.
Nous choisissons de rejeter la mécanique de Newton plutôt que toute autre chose car nous avons trouvé moins d'altérations impliquées sur le réseau dans son ensemble.
Néanmoins, les lois de la logique sont potentiellement révisables.
137
Preuves insuffisantes Le résultat de ce réseau de croyance, c'est que la science est « indéterminée » ce qui veut dire que les preuves sont insuffisantes pour garantir en toute logique la vérité de nos croyances scientifiques. Car pour obtenir la vérité ou la fausseté de tout énoncé, nous avons besoin d'une multitude d'endroits dissimulés décrivant efficacement l'ensemble de notre réseau de croyances. Comme Quine tient à le souligner, le réseau touche seulement les expériences à l'extérieur. L'expérience nous apprend très peu de choses, c'est nous qui en constituons la plus grande partie.
Une déclaration scientifique est considérée comme vraie si elle peut rendre compte de notre expérience tout en opérant des changements minimes à notre réseau dans son ensemble.
Si nous avions un réseau de croyances radicalement différentes, comme Aristote, alors il se pourrait que des déclarations complètement différentes fassent le travail de comptabilité pour une expérience avec des répercussions minimes.
138
Même la question fondamentale de savoir ce que l'on trouve dans le monde ne peut trouver réponse qu'à la lumière de l'ensemble de nos autres croyances.
Les objets physiques eux-mêmes ne sont rien de plus que des mythes pratiques qui font le travail d'expliquer et de prédire l'expérience.
« Les objets physiques sont conceptuellement importés dans la situation comme des intermédiaires pratiques – pas, par définition, en termes d'expérience mais simplement comme des dépôts irréductibles comparables, sur le plan épistémologique, aux divinités d'Homère. Permettez-moi de préciser que pour ma part, en tant que physicien, je crois aux objets physiques et non aux divinités d'Homère et je considère que c'est une erreur scientifique de croire le contraire. Mais au niveau des bases épistémologiques, les objets physiques et les divinités diffèrent uniquement par le degré et non par la nature ». 139
Le relativisme de Quine L'idée de Quine a inspiré un certain nombre de personnes pour renoncer à tout espoir d'arriver à des vérités objectives sur le monde grâce à la science. C'est ainsi qu'était né le relativisme de la science.
La caractéristique commune du relativisme, c'est qu'il perçoit le succès des théories scientifiques comme ayant un rapport avec un élément autre que la vérité objective.
L'idée de Quine remet en question la méthode du choix entre les théories « en simplicité ». Qu'est-ce qui fait qu'une théorie est plus simple qu'une autre ? Au lieu de la simplicité, les philosophes ont suggéré que nous choisissions entre des théories concurrentes pour des raisons aussi diverses que la politique et les gains financiers – ou avantages pragmatiques et préférence esthétique. 140
Le déni de la méthode scientifique de Feyerabend La forme la plus extrême de ce point de vue a été exprimée par le philosophe « anarchiste » de la science Paul Feyerabend (1924-1994) qui nie l'existence de toute méthode scientifique.
Chaque culture crée une théorie qui convient à son caractère esthétique et moral.
141
La réponse de Davidson à Quine Donald Davidson avait de sérieux doutes quant au rejet de la méthode scientifique. Son opposition commence avec la conviction de Quine selon laquelle la logique est en principe révisable.
Afin de savoir comment modifier notre réseau, nous devrions être en mesure de dire ce qu'allait entraîner un changement possible dans Comment le réseau.
savons-nous que notre changement ne sera pas en contradiction avec l'expérience ? En bref, nous devons avoir une sorte de théorie de la preuve.
Cela veut dire que non seulement nous ne pouvons pas éviter une sorte de logique mais aussi que cette théorie de la preuve ne peut pas être elle-même révisable. Car si nous pouvions changer la méthode de la preuve, alors nous n'aurions aucun moyen de savoir ce que pourraient être les conséquences. Donc au moins, le réseau doit posséder un noyau inaltérable. 142
L'exposé de la vérité Davidson va plus loin face au relativisme. Si notre réseau est véritablement un « réseau de croyance », alors nous devons supposer qu'il vise la vérité. Croire quelque chose et croire que ce quelque chose est vrai revient au même. Tous les réseaux doivent partager une base commune de vérité.
La vérité ne fait pas partie du réseau variable mais de ses « arêtes vives » en quelque sorte.
L'élévation de la vérité de Davidson avec la logique vers des bases solides n'est pas étonnant puisque la logique, c'est l'étude de la présentation de la vérité.
À cause de cela, tous les réseaux peuvent être comparés les uns aux autres en termes de vérité.
143
La vérité tranchante face au relativisme Davidson partage le point de vue de Quine que la science est sousdéterminée mais il rejette le réseau totalement révisable de Quine. À sa place, il y a un réseau partiellement révisable, suspendu entre un noyau dur de logique et les Piégé entre arêtes vives de la vérité. La vérité constitue les deux, il n'y a pas une base rigide sur laquelle est construite une de place pour que structure en constante amélioration.
nous déterminions nos croyances en faisant abstraction des faits.
Davidson nous dit que la science est une façon de s'approcher de la vérité. Pourtant, il offre peu au niveau des méthodes d'approche de la vérité, pas plus qu'il n'offre une justification pour la méthode scientifique. Par conséquent, il n'a pas réussi à convaincre les relativistes endurcis.
144
Sciences cognitives et logique Mis à part l'importance de la logique de la méthodologie scientifique, il y a des sciences qui font un usage évident de logique et même aspirent à être ouvertement logiques. Une telle motivation vient des ordinateurs. Tout comme vous pourriez parler des programmes d'ordinateur ne sachant absolument rien à propos des composants électroniques sous-jacents, les sciences cognitives espèrent comprendre la conscience humaine sans tenir compte du comportement d'un système de cellules du cerveau sur lequel nous connaissons très peu de choses.
Dans un ordinateur, nous pouvons y arriver sans tenir compte du système électronique parce que nous l'avons construit pour qu'il agisse comme un système logique.
L'hypothèse commune des sciences cognitives est que l'esprit est un système logique similaire.
Turing était un fervent partisan de cette hypothèse. Cela a motivé ses tentatives répétées pour créer les premiers ordinateurs numériques. Le boom des sciences cognitives est en grande partie dû au succès des appareils de Turing et à la montée de la linguistique de Chomsky.
145
La grammaire universelle de Chomsky L'intérêt de Noam Chomsky (1928) pour la linguistique visait la problématique de l'apprentissage des langues. À l'époque, on pensait que les enfants apprenaient la langue en imitant les adultes. Des expériences ont montré que les enfants peuvent créer des phrases grammaticalement correctes qu'ils n'ont jamais entendues. Un enfant de trois ans va corriger la grammaire d'un adulte mais il ne discutera jamais avec lui à propos de faits.
Déterminateur adjectif substantif verbe groupe nominal Pour expliquer ceci, j'ai suggéré qu'il doit y avoir une « grammaire universelle » innée. Chaque enfant est né avec certaines règles grammaticales programmées dans son cerveau.
146
Dans le processus d'apprentissage d'une langue, un enfant apprend non seulement les mots mais aussi la place qu'ils occupent en relation avec les règles grammaticales déjà existantes.
D'après Chomsky, cette grammaire universelle innée de l'Homme est suffisamment riche pour créer toutes les langues humaines. Donc, toutes les langues humaines sont fondées sur la même structure universelle. La grammaire universelle comporte plusieurs configurations possibles qui déterminent la grammaire de toute langue humaine. Cela inclut l'ordre des mots, si oui ou non la langue a des noms et des verbes avec un genre défini et comment elle construit les propositions. 147
Les catégories des substantifs et des verbes
Une phrase dans n'importe quelle langue peut être divisée en groupes nominaux et syntagmes verbaux. Voyez cet exemple simple : « Les cochons volent ». Il peut être divisé comme cela…
Notre grammaire innée divise les mots en différentes catégories systématiques. Un enfant naît avec ses catégories. Tandis qu'il apprend le vocabulaire d'une langue, il apprend aussi dans quelle catégorie placer un mot. Ces catégories, avec quelques règles simples de syntaxe, définissent comment les mots peuvent être associés pour former des phrases. Les deux catégories les plus importantes sont les substantifs et les verbes.
Les cochons volent
Phrase
148
Syntagme nominal
Syntagme verbal
Nom
Verbe
Cochons
Volent
Bien sûr, les choses sont rarement aussi simples, le plus souvent, les phrases sont beaucoup plus compliquées. Les phrases peuvent être formées de plus d'un nom et d'un verbe – par exemple, « Les cochons volent pour rentrer chez eux » qui peut s'analyser de la façon suivante…
Les cochons volent pour rentrer chez eux
Phrase
Syntagme nominal
Nom
Syntagme verbal
Verbe
Syntagme nominal
Nom
Cochons
Volent
Chez eux
149
Chomsky a dû tenir compte de phrases complexes qui pouvaient être constituées de phrases nominales, phrases verbales et d'une autre phrase. Par exemple… John pense que les cochons volent Voici ce que cela donne…
John pense que les cochons volent
Phrase
Phrase nominale
Nom
John 150
Phrase verbale
Phrase
Verbe
pense
Syntagme nominal
Syntagme verbal
Nom
Verbe
que les cochons
volent
Règles de grammaire récursives
GL E
RE AI
RÈ
M
Les règles de construction de la grammaire universelle sont récursives. « Récursives » signifie l'application répétée d'une règle, définition ou procédure vers des résultats successifs. Chomsky pensait que c'était la seule manière de tenir compte des phrases de longueur potentiellement infinie. Mais ce n'était pas suffisant. La langue permet une grande variété LLES DE L de constructions linguistiques, RSE AG VE I RA dont beaucoup nécessitent UN M S de nouvelles règles de combinaison. Finalement, il y a eu tant de règles ajoutées que Chomsky a eu besoin d'une structure de base pour soutenir sa théorie.
PH ) Tandis que de plus RA ES SE TÉ en plus de règles sont I S RÉ IM ELLES (ILL nécessaires pour tenir compte de la diversité de la langue, toutes ces nouvelles règles semblent suivre le même schéma récursif de base.
En identifiant ce modèle, nous pouvons toutes les relier à nouveau sur une seule grammaire, encore plus abstraite.
151
La théorie x-barre Chomsky affirmait qu'un simple ensemble de règles récursives peut expliquer la formation de n'importe quelle phrase grammaticale. Il lui a donné le nom accrocheur de théorie x-barre. Dans la théorie x-barre, x et y représentent les catégories grammaticales. x-barre et y-barre représentent la phrase grammaticale correspondante. Leur simple règle de formation est la suivante : x-barre = x + y-barre. C'est une formule simple d'application récursive. Prenons par exemple la phrase suivante : l'horloge dans le coin.
n-barre
n + p-barre
p + n-barre
n
l'horloge dans le coin
D'après la théorie X-barre, elle est construite de la façon suivante…
clé :
152
n-barre
syntagme nominal
p-barre
phrase de préposition
n
nom
p
préposition
Une théorie logique Chomsky pensait que la théorie x-barre peut expliquer à la fois le processus de l'apprentissage des langues et la compréhension intuitive des gens de leur langue maternelle. Complété par un mécanisme approprié pour l'ordre des mots et les règles de transformation, Chomsky pensait que la théorie x-barre est suffisante pour expliquer toutes les constructions grammaticales dans n'importe quelle langue. La théorie x-barre est une théorie logique car elle est concernée par la forme plutôt que par le contenu et par la construction de suites de symboles par l'application successive de quelques règles simples. Je pense que nous sommes nés avec un mécanisme de langage dans le cerveau qui peut être décrit comme un programme logique.
Si Chomsky a raison, alors notre compréhension de la langue naturelle se ramène à un calcul fondé sur notre grammaire innée.
Influencés par cette idée, certains philosophes éminents ont affirmé que le cerveau était en partie un peu plus qu'un langage informatique de négociation complexe selon les thèmes de Chomsky. 153
Problèmes de syntaxe et de sémantique La linguistique de Chomsky va dans le sens de la pensée du langage naturel dans des termes de « modèle théorique ». Chomsky lui-même est plus concerné par la syntaxe que par la sémantique mais il s'aperçoit que pour les langues comme le français, la syntaxe et la sémantique ne peuvent pas être complètement dissociées. Chomsky a constaté qu'il devait regarder la sémantique de chaque mot afin d'expliquer la raison pour laquelle certaines phrases qui semblent bien formées au niveau de la syntaxe sont en fait dénuées de sens. Par exemple :
« J'ai pleuré Cela ressemble à une phrase innocente sujet-verbe-objet mais c'est évidemment stupide. Nous ne pouvons pas dire que cette forme de phrase est agrammaticale car la plupart des phrases de cette forme sont parfaitement correctes… … par exemple,
« Je l'ai virée ».
154
elle. » La différence entre les phrases grammaticalement correctes et incorrectes doit reposer sur la signification du verbe.
Pour cette raison, j'ai introduit un certain nombre de critères pour décrire le comportement des mots. Ces critères déterminent quels mots peuvent être associés pour former des phrases de façon plus détaillée que la simple distinction entre les syntagmes nominaux et les phrases verbales.
Chomsky suggère des catégories qui décrivent si le mot est actif ou passif, s'il implique une intention et ainsi de suite. Les règles qui régissent le comportement de ces catégories font partie d'un modèle sémantique très complexe qui peut être encore amélioré. 155
Structures grammaticales complexes La linguistique de Chomsky a connu beaucoup de succès au départ dans le traitement des langues structurées comme l'anglais et le français. Mais elles possèdent un certain nombre de dialectes – par exemple, le Cockney et le verlan parisien – et de plus un grand nombre d'accents régionaux. La linguistique de Chomsky aspire à leur trouver une explication. Pour ce faire, elle a été obligée d'ajouter progressivement plusieurs couches de structure grammaticale.
Grammaire profonde (théorie x-barre)
Une hiérarchie simple pourrait ressembler un peu à cela…
156
Forme phonologique (questions de prononciation)
Grammaire superficielle (ordre des mots, etc.)
Forme logique (questions sémantiques qui se reflètent dans la grammaire, par exemple : « Je l'ai virée » est grammaticalement correcte mais « J'ai pleuré elle » ne l'est pas).
Chaque étape de la hiérarchie de Chomsky contient une énorme quantité d'information et son propre ensemble de règles récursives. Cette structure fonctionne en même temps que d'autres structures complexes, comme le vocabulaire de la langue et la morphologie du mot – la structure des mots eux-mêmes.
Vocabulaire Morphologie
La quantité d'informations impliquées est si grande qu'il semble improbable que l'évolution humaine puisse avoir généré une structure aussi complexe. Cela conduit à se poser la question de savoir s'il y a suffisamment d'espace ou de structure dans le cerveau du nouveau-né pour contenir toutes ces informations. 157
Problèmes avec la grammaire « universelle » L'hypothèse de la grammaire universelle est également ébranlée lorsque nous examinons des langues autres que celles de l'Europe occidentale, comme par exemple les langues slaves, sémitiques et aborigènes. Dans ces langues-là, l'ordre des mots a très peu d'importance. Tandis que certaines structures significatives sont plus communes que d'autres, très peu sont réellement non grammaticales. Certains d'entre nous comprennent que le temps est cyclique ce qui explique le manque relatif de tension dans notre langue.
158
D'autres n'ont pas de termes abstraits. Notre langue manque simplement d'une catégorie de mots que vous considérez comme étant innés.
L'absence de noms abstraits dans les langues réelles prouve que les langues peuvent exister sans eux, ce qui, à son tour, met en doute la question de savoir si nous sommes tous nés avec une compréhension innée de ces noms-là. Malgré cela, nous devons prendre en compte la vitesse et la précision avec lesquelles nous apprenons les langues. Un ensemble défini d'axiomes est une bonne façon d'en tenir compte.
Il faut se rappeler que la linguistique générative est une science relativement nouvelle, il n'est donc guère surprenant que les théories doivent évoluer pour tenir compte des cas difficiles. À l'heure actuelle, nous n'avons simplement pas de meilleure explication. 159
Le modèle symbolique du cerveau Inspirés par le succès de la linguistique de Chomsky, de nombreux philosophes et psychologues aspirent à expliquer la vie mentale de l'Homme comme Chomsky a essayé d'expliquer le langage. Ils conçoivent le mental comme étant le résultat d'un nombre immense de manipulations logiques dans le cerveau. Ce programme se divise grosso modo en deux camps, chacun employant deux systèmes logiques différents. Nous pouvons l'imaginer avec deux modèles : le I-Robot et le Y-Robot. La première ou approche « symbolique » considère le cerveau comme étant une machine qui manipule des symboles. Se trouver dans différents états mentaux équivaut à arriver dans une formule bien structurée dans un langage formel. Ressentir une douleur atroce, par exemple, équivaut à une association particulière de symboles dans les centres de la douleur dans le cerveau.
AAIIIEEEOUCH ! ! ! 160
On pense plus récemment que le cerveau est un mécanisme qui utilise la logique floue. Il conçoit le cerveau comme un « réseau neuronal » qui peut être dans une certaine variété d'états.
Un réseau neuronal est composé d'unités qui se comportent comme les cellules du cerveau (neurones). Comme un neurone, elles sont reliées à plusieurs entrées et sorties. La réaction est régie par l'effet global de l'entrée reçue. Le processus de calcul qui se produit à l'intérieur du réseau n'est pas semblable à une déduction formelle. La seule façon que nous avons de modéliser ce comportement est statistique, et à ce titre, nous savons très peu de choses à propos d'un réseau en particulier. Un réseau neuronal simple ressemble à cela… 161
Formation d'un réseau neuronal Supposons que nous entraînions un réseau neuronal pour produire des mots anglais « parlés » correctement à partir d'un texte. L'entrée serait des lettres et la sortie des sons. Les « neurones » doivent apprendre à relier correctement les deux. Le système apprend en reliant différents niveaux d'importance à différentes entrées et sorties. Cela s'effectue en multipliant chacune des connections par un nombre différent (représentées par des lignes sur le diagramme).
S
A
L
U
T
Initialement, les connections reçoivent des petits nombres aléatoires. Puis les résultats qui sont donnés par le réseau sont corrigés et une pondération différente est essayée. La machine va continuer à modifier la pondération tout en produisant des résultats statistiquement améliorés. 162
Les réseaux de neurones sont une application de base des idées de la logique floue.
Salut
D'abord, les réseaux sont reliés à diverses sorties et il y a diverses situations qui les déclencheront. Cela contraste avec le fonctionnement d'un distributeur qui est fondé sur le calcul propositionnel et qui ne dispose que d'une sortie pour chaque niveau. Ensuite, les différentes pondérations attribuées aux différentes connections sont un équivalent numérique aux multiples valeurs de vérité de la logique floue. 163
La reconnaissance de formes Comparativement aux ordinateurs numériques, les réseaux de neurones sont particulièrement bons au niveau de la reconnaissance de formes. Cela les conduit à exceller dans la production de sons de mots à partir de texte là où un ordinateur classique pataugerait. Cela ne pose pas de problème pour un réseau de neurones de reconnaître un morceau de musique…
C'est Mozart
… mais il ne pourrait probablement pas vous dire quelles sont les notes.
164
Un ordinateur numérique pourrait facilement reconnaître les notes mais il est très difficile de lui faire reconnaître le style.
Le cerveau humain semble se comporter de façon similaire. Les êtres humains trouvent très facile de classer les choses en catégories mais ils passent de nombreuses années à apprendre comment faire des mathématiques.
Ces considérations ont conduit certains à penser que l'esprit est simplement une conséquence du réseau compliqué de neurones qu'est le cerveau humain.
Les réseaux de neurones trouvent très difficile la manipulation systématique de symboles.
Cela signifie que les réseaux de neurones sont très mauvais dans les choses comme les mathématiques, le raisonnement logique et apprendre à respecter la syntaxe linguistique. 165
Le modèle de comportement rationnel L'hypothèse dominante à propos de l'esprit, c'est que nous devrions penser qu'il s'agit d'un modèle impliqué dans la production du comportement rationnel. Selon cette théorie, l'une des principales caractéristiques de l'esprit conscient c'est d'agir pour une raison. Certains psychologues cognitifs croient que cela est rendu possible par un modèle d'action rationnelle intégré dans le cerveau humain. On prétend que nous trouvons du sens à notre propre comportement psychologique et à celui des autres au moyen de ce modèle. Il est basé sur la méthode d'Aristote du syllogisme pratique…
Mes syllogismes logiques étaient concernés par des formes valides d'arguments qui arrivent à des conclusions valables.
Les syllogismes pratiques arrivent à des raisons valables pour l'action. 166
Raison pratique Dans un syllogisme pratique, la première prémisse est une déclaration d'intention. Par exemple : je veux manger. La seconde prémisse est une affirmation. Par exemple : il y a de la nourriture dans mon réfrigérateur. Elles conduisent à une conclusion qui recommande un plan d'action : je devrais aller voir mon réfrigérateur.
De nombreux psychologues cognitifs pensent que notre esprit est équipé d'une image du monde contenant beaucoup de choses que nous considérons comme étant vraies.
On affirme également que nous possédons une sorte de « mécanisme de délibération » qui extrait les objectifs par rapport aux besoins. Ils sont ensuite associés à l'image du monde pour justifier l'action. C'est ce que l'on appelle le modèle « certitude/envie ».
167
Qu'est-ce que la conscience ? Bien que la plupart des psychologues cognitifs et des philosophes de l'esprit partagent cet avis, il y a encore beaucoup de désaccords en suspens.
Est-ce que ces modèles sont effectivement dans le cerveau ?
Ou bien sont-ils
une simplification
d'un mécanisme beaucoup plus compliqué ?
Ou bien est-ce simplement une bonne méthode pour modéliser le comportement humain quelle que soit la façon dont fonctionne le cerveau ?
Quelles que soient les différences, le fait est que tous voient le cerveau comme une machine qui suit les règles de la pensée rationnelle. Notre vie consciente est le résultat de réactions électro-chimiques dans le cerveau qui instancie une machine de manipulation logique extrêmement complexe. Que ce soit convaincant ou non, beaucoup d'efforts sont fournis pour décrypter le programme informatique qu'est la conscience humaine. 168
La place de la logique La logique pénètre dans toutes les formes de la recherche humaine. Tous les bons arguments devraient être logiques, ils doivent donc suivre les règles logiques pour montrer que les conclusions découlent des prémisses. La logique elle-même fait très peu d'allégations sur quoi que ce soit. C'est un outil, une méthode d'analyse.
Donc la logique n'impose pas que le bien des nombreuses personnes Non, la logique ne l'emporte sur le bien de peut pas faire de telles quelques-uns ? revendications mais elle vous fournit un moyen de parvenir à cette conclusion à partir de certaines prémisses. La logique peut être utilisée pour davantage que cela. L'accent que la logique moderne met sur les règles syntaxiques nous permet de l'utiliser pour tout, depuis l'électronique numérique jusqu'à l'analyse du langage.
169
Changement de vision de Wittgenstein La logique semble être une partie inséparable de notre vie. Mais tout le monde n'est pas convaincu que la logique soit si essentielle. Dans sa période plus tardive, Wittgenstein s'est éloigné de la foi qu'il avait dans la logique en étant plus jeune. Dans un échange célèbre qu'il a eu avec Turing, il tenait à mettre l'accent sur les conséquences pratiques par rapport aux inquiétudes théoriques. Avec le scepticisme à propos du rôle tenu par la logique est arrivée une nouvelle vision de la philosophie. Wittgenstein en est venu à penser que ce qui était important en philosophie, ce n'était pas l'argument mais amener les gens à voir les choses sous un angle nouveau.
Le travail sur la philosophie – comme l'est fréquemment aussi le travail sur l'architecture – est en fait plus une sorte de travail sur soi, sur sa propre conception, sur la façon dont on voit les choses. 170
Si quelqu'un croit qu'il a trouvé la solution au « problème de la vie »… alors afin de se réfuter, il devrait simplement se souvenir qu'il y avait un temps où cette « solution » n'avait pas été trouvée, mais à cette époque-là aussi, on devait pouvoir vivre aussi…
Et c'est ce qui nous arrive dans la logique.
S'il y avait une « solution » aux problèmes logiques, alors nous devrions simplement garder à l'esprit qu'à une époque, ils n'avaient pas été résolus (et aussi qu'on devait pouvoir vivre et penser).
171
Sans surprise, en arrivant à la fin d'un siècle dans lequel la logique a connu de tels succès concrets, très peu sont préparés à suivre Wittgenstein dans sa ligne de pensée. Au lieu de cela, la logique continue de jouer un rôle dans la formation des bases de la science occidentale, des mathématiques et de la technologie.
Alors, qu'en pensez-vous Spock ? Jolie petite farce, non ?
172
L'ensemble de la civilisation occidentale a fait beaucoup de choses en dehors de votre « jolie petite farce ».
Que cela appartienne à l'essence de la pensée et du langage ou non, la capacité de penser de manière systématique et de prouver que vous pensez par étapes qui se suivent les unes les autres, s'avère être un avantage évident lorsqu'il est appliqué à une grande variété de contenus.
173
Pour en savoir plus Logique grecque Aristote, « Prior Analytics », in J. Barnes (ed), The Complete Works of Aristotle, Princeton University Press (1984). Les notes les plus précises d'Aristote à propos de sa logique. Barnes, J. (ed), The Cambridge Companion to Aristotle, Cambridge University Press (1995). Il contient des articles sur tous les aspects de la philosophie d'Aristote, y compris un excellent article sur sa logique réédité par R. Smith. Gerson, L.P. And Inwood, B. (trans.), Hellenistic Philosophy : Introductory Reading, Hackett (1998). Il contient des traductions de différents textes de la philosophie post-Aristote, y compris une quantité raisonnable de logique stoïcienne.
Logique et mathématiques Frege, G. Begriffsschrift (1879). On peut trouver une traduction complète dans J. van Heijenoort (ed). Le récit de Frege à propos de son dispositif officiel qui a ouvert la voie à des recherches ultérieures mais qui a été dépassé. The Foundations of Arithmetic, trad. J.L. Austin, Blackwell (1953). Un compte-rendu informel très apprécié sur la vision de Frege à propos de la nature des nombres ainsi que sur certaines de ses revendications clés dans la philosophie du langage. The Basic Laws of Arithmetic, trad. M. Furth, University of California Press (1964). Une combinaison du Begriffsschrift et de The Foundations of Arithmetic. Gödel, K. « Sur des propositions officiellement indécidables des principes mathématiques et des systèmes connexes », dans Kurt Gödel : Collected Works, vol. 1, ed. S. Feferman, Oxford University Press (1990). Là où demeure la preuve de l'incomplétude. Presque impossible à comprendre sans une quantité significative de logique symbolique.
174
Van Heijenoort, J. (ed.). From Frege to Gödel : A Source Book in Mathematical Logic, 1879-1931, Havard University Press (1967). Ce recueil très utile présente des travaux clés de Frege, Hilbert, Brouwer et Gödel. Ne s'adresse pas aux débutants. Hilbert, D. « On the Infinite », in J. van Heijencort (ed). Un compte-rendu complet de Hilbert sur les fondements des mathématiques. Kenny, A. Frege, Penguin (1995). Introduit les principales idées de Frege de façon accessible qui ne requiert pas de lectures préalables. Nagel, E. and Newman, J.R. Gödel's Proof, Routledge (1959). Une introduction courte, claire et facile à la preuve du même nom. Russell, B. and Whitehead, A.N. Principia Mathematica (1910-13), seconde édition, Cambridge University Press (1994). Un opus en deux volumes qui propose un compte-rendu officiel des fondements de l'arithmétique. Russell, B., Introduction to Mathematical Philosophy, Allen and Unwin (1919), réimprimé par Routledge (1993) avec une nouvelle introduction. Un récit plus court, moins officiel des fondements de l'arithmétique.
Logique et langage Carnap, R. « Intellectual Autobiography », in Paul A. Schlipp (ed). The Philosophy of Rudolf Carnap, Open Court Publishing (1963). Carnap esquisse son propre raisonnement intellectuel d'une façon relativement accessible. The Logical Syntax of Language, trans. Amethe Smeaton, Kegan Paul, Trench, Trubner & Co (1937). Un ouvrage de poids qui développe les propositions de Carnap. Chomsky, N. Generative Grammar : Its Basis, Development and Prospects, Kyoto University of Foreign Studies (1988). Donne une explication de départ
et donc moins compliquée du système de la grammaire générative. Davidson, D. Inquiries into Truth and Interpretation, Oxford University Press (1984). Une collection d'articles de Davidson concernant ses idées sur le langage, y compris « Truth and Meaning » (1967) et « Radical Interpretation » (1973). Heaton, J. and Groves, J., Introducing Wittgenstein, Icon Books (1999). L'un des meilleurs textes qui regroupe ses points de vue du début et de la fin, tout en constituant un « simple » aperçu. Maher, J. and Groves, J. Introducing Chomsky, Icon Books (1999). Un aperçu facile à lire sur les pensées de Chomsky. Neale, S., Descriptions, MIT Press (1990). Exposition claire et défense de la théorie des descriptions de Russell. Russell, B. « On Denoting » (1905), reproduit dans Logic and Knowledge : Essays 1901-1950, Allen and Unwin (1956). Article classique exposant la théorie des descriptions. Il couvre une grande partie du même domaine que l'Introduction to Mathematical Philosophy, ch. XVI de Russell. Wittgenstein, L. Tractatus LogicoPhilosophicus, Routledge. Deux traductions sont disponibles : la première par C.K. Ogden (1922), approuvée par Wittgenstein lui-même, tandis que la seconde de D.F. Pears et B.F. McGuiness (1961) est généralement préférée à l'autre. L'un des ouvrages les plus difficiles et enrichissants de la philosophie du 20e siècle. Berceau de la théorie de l'image et des tables de vérité. Philosophical Investigations, trans. G.E.M. Anscombe, Blackwell (1953). Rejet de réflexion brillant sur ce qui est arrivé avant et a suivi, y compris son précédent Tractatus.
Logique et sciences Davidson, D. « On the Very Idea of a Conceptual Scheme » (1974), réimprimé
dans ses Inquiries into Truth and Interpretation. Une attaque articulée sur le relativisme. Hume, D. A Treatise of Human Nature (1739), ed. D.F. Norton and M.J. Norton, Oxford University Press (2000). Une autre étape dans la philosophie et l'origine supposée du scepticisme inductif. Kuhn, T.S., The Structure of Scientific Revolutions (1962), seconde édition, University of Chicago Press (1970). Un cas clair, bien argumenté et bien écrit à propos du relativisme. Popper, K., Objective Knowledge : An Evolutionary Approach, Clarendon Press (1972). Popper plaide pour rejeter l'idée selon laquelle la science a besoin d'induction. Quine, W.V.O., « Two Dogmas of Empiricism » (1951), réimprimé dans son From a Logical Point of View, Harvard University Press (1953). Un texte classique, la dernière partie proposant une courte introduction au réseau de croyance.
Paradoxes Sainsbury, M. Paradoxes, seconde édition, Cambridge University Press (1995). Williamson, T., Vagueness, Routledge (1994à. Un ouvrage entier consacré au raisonnement sorite.
Livres Larson, R. and Segal, G. Knowledge of Meaning : An Introduction to Semantic Theory, MIT Press (1995). Le plus proche que l'on puisse trouver d'un livre sur la théorie sémantique formelle aussi accessible que ce genre de choses arrive. Machover, M. Set Theory, Logic and Their Limitations, Cambridge University Press (1996). Un livre de pointe, très respecté. Tomassi, P. Logic, Routledge (1999). On compte des centaines de livres sur la logique élémentaire , c'est l'un des meilleurs.
175
Index analyse logique 30 Aristote 4-7, 45, 48, 166 axiomes 32, 43-7 Bacon, Francis 114 Brouwer, LE. J. 92-4 calcul des prédicats 49-50, 86, 91 calcul propositionnel 19, 48-50, 86 Cantor, Georg 20 Carnap, Rudolf 30 carré des oppositions 5, 6 cercle de Vienne 30, 118 cerveau comme réseau neuronal 161-5 Chomsky, Noam 146-57 Chrysippe de Soles 8-9, 19 code de l'énigme 42 connecteurs 8-9, 22, 36-8, 47 connecteurs logiques 37-8 conscience 168 contradiction 5, 14, 24, 46, voir aussi paradoxe croyance, voir réseau de croyance Davidson, D. 54, 59, 142-4 déduction 115-21, 118, 126 déduction nomologique 118, 126-9 Descartes, René 44-5, 114 espaces de Hilbert 77, 106 Feyerabend, Paul 141 formalisme 52 Frege G. 16, 36, 66, 68, 87 Galilée 44, 112-4, 122 Gödel, Kurt 33 grammaire 25, 50, 154, voir aussi langage grammaire de Chomsky 146-60 grammaire de structures 156-7 grammaire et les mathématiques 50-3 grammaire universelle 146-60 Hempel, Karl 126-8 Hétérologies 73 Hilbert, David 32-3, 51, 74
176
Hume, David 117-8, 121 Incomplétude de mathématiques, 76-7 induction 115-21 intelligence artificielle 62, 104-5 intuitionnisme 92-6 Langage 28-9, 54 Langage de Chomsky 146-57 Leibniz 10-6, 44-5, 68 Logique « possible » 98 logique classique 92, 102 logique des portes 40 logique et science cognitive 145 logique et sciences 111 logique floue 89-90, 102 logique intuitionniste 94 logique mathématique 35 logique quantique 107-10 logique symbolique 35 loi distributive 107 Lukasiewicz, Jan 97-102 mathématiques 20, 111, 122-5 mathématiques de Hilbert 32-3 mathématiques de langage 52 mécanique quantique 106 mensonge, voir paradoxe Métalangage 71-2 Mill, John Stuart 119-24 modèle de comportement rationnel 166 Newton 113, 122, 130 ordinateurs 60, 62-5, 78 organon 14 paradoxe 66-92 paradoxe auto-référentiel 67 paradoxe de Gödel 74 paradoxe de logique floue 90 paradoxe d'hétérologies 73 paradoxe du menteur 67-92 paradoxe du mouvement 80-3 paradoxe du tas, voir paradoxe sorites paradoxes de Russell 68-70 paradoxe sorites 84-8, 90 Philosophie 28, 35 phrases 4-7, voir aussi grammaire de la théorie des ensembles 4-7
Popper, Karl 129-63 Prédicat 4-5, 69 principe de contexte 18 Principe de noncontradiction 100 principe de tolérance 31 principe d'identité 45 principe du tiers exclu 93, 100 problème de l'arrêt 78 Putnam, Hilary 109 quantificateur 16, 20 Quine, Willard 133-44 récursivité 51 reductio ad absurdum 12-13, 33, 36, 95, 130 relativisme 140-4 réseau de croyance 134-43 réseaux neuronaux 105, 161-5 Russell, B. 23-7, 27-50 sciences 129-40 sciences et Carnap 30 sciences et la logique 111 sciences et le relativisme 140-4 sémantique 50, 60, 154-5 syllogismes 6-11, 48, 166-7 système de Russell 26, 27 tables de vérité 38-40, 43 Tarski, Alfred 57-8, 71-2 tautologie 39 théorème de Gödel 75 Théorie de la preuve 32, 36, 39, 51, 55, 66 Théorie de la preuve et du langage 56 théorie de l'infirmation 130-3 théorie des types 69 théorie viable 132 Turing, Alan 42, 64-6, 145 Unger, Peter 85 valeurs vrais sous forme de nombres 99 vérité sous conditions 58-9 Wittgenstein, L. 28, 37-8, 170-2 Zénon d'Elée 67, 80-3