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French Pages 345 [344] Year 2005
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Créée en 1994 pour valoriser la recherche en sciences du langage, la collection « Sémantiques» accueille principalement des thèses nouveau régime et des synthèses d'habilitation. Elle publie dans les différents domaines de la linguistique:
phonologie, lexicologie, syntaxe, sémiologie et philosophie du langage, épistémologie, psycholinguistique
et sociolinguistique,
études littéraires à base de linguistique
générale et de sémiotique,
orthophonie, didactique des langues, traduction, terminologie mise en œuvre de l'outil sémio-linguistique au service de l'entreprise (analyse de contenu, marketing,
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publicité).
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Contact: Marc Arabyan
Centre de Recherches Sémiotiques Université de Limoges 39E, rue Camille-Guérin 87000 LIMOGES
(France)
[email protected]
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LES PROCESSUS DE LA RÉDACTION COLLABORATIVE
Derniers titres parus Jean ALEXANDRE Jonas ou l'oiseau du malheur: Variations bibliques sur un thème narratif
Astrid BERRIER Conversations francophones: A la recherche d'une communication interculturelle Annie BOONE et André JOLY Dictionnaire Terminologique de la Systématique du Langage Deuxième édition revue, corrigée et complétée Giulia CERIANI Marketing moving: L'approche Langue et monde:
sémiotique
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ÜUZOUNOV
A-MASPERO
Valéry et le langage dans les Cahiers (1894-1914) André-Jean PÉTROFF Saussure: La langue, l'ordre et le désordre Marielle RISP AIL Le Francique: De l'étude d'une langue minorée à la socio-didactique
@ L'Harmattan,
2005
ISBN: 2-7475-8163-2
des langues
EAN : 9782747581639
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Arabyan
Robert Bouchard et Lorenza Mondada (éds)
LES PROCESSUS DE LA RÉDACTION COLLABORATIVE
L'Harmattan 5-7~e de l'ÉcolePolytechnique 75005 Paris FRANCE
L 'Harmattan Hongrie Kossuth L. u. 14-16 1053 BQdapest
HONGRIE
L'Harmattan ltalia Via Degli Artisti, 15 10124 Torino ITALIE
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L'enregistrement audio original du corpus fait partie de la base de données CLAPI (Corpus de Langue Parlée en Interaction) d'ICAR (UMR 5191). Il peut être obtenu sur demande auprès de Lorenza Mondada ICAR CNRS - Université Lyon-2 - ENS LSH BP 7000 69342 LYON CEDEX 07 FRANCE ou de lorenza.mondada@
univ-lyon2.fr
A Marie-Madeleine de Gaulmyn, pionnière dans le domaine de la rédaction conversationnelle, et principale instigatrice du projet qui trouve ici son aboutissement.
Introduction Robert Bouchard et Lorenza Mondada
Dans cet ouvrage, un collectif d'auteurs se penche sur les processus de la rédaction conversationnelle (dite aussi rédaction collaborative) : il s'agit d'analyser les processus d'élaboration du texte tels qu'ils sont rendus observables dans le travail collectif de sa rédaction et plus précisément dans les interactions entre les scripteurs. Cette problématique permet de revisiter de manière originale le domaine de l'oralité en interaction aussi bien que celui de la textualité - en abordant le texte moins comme un produit fini que comme un processus et en approchant l'oral dans ses articulations avec d'autres activités gestuelles, scripturales, matérielles... D'autres notions peuvent être retravaillées dans ce cadre, comme celles de coordination de l'action, de reformulation, de métalangage, d'autonymie, de voix énonciative. Plus généralement, ce contexte d'observation invite à privilégier une conception du langage comme ensemble de ressources mobilisées dans des activités pratiques, plutôt que comme un système abstrait. La rédaction conversationnelle est ainsi une activité à la fois très particulière et très riche en potentialités analytiques; elle n'a été abordée en tant que telle que récemment en sciences du langage, notamment grâce aux travaux de Marie-Madeleine de Gaulmyn à qui est dédié ce volume. A travers son intérêt pour les questions de métalangage et pour les processus de reformulation, développé à travers des analyses prenant en compte différents niveaux de complexité, de la grammaire à l'interaction, Marie-Madeleine de Gaulmyn a montré à la communauté des linguistes et des didacticiens la richesse que recelaient ces corpus de rédaction conversationnelle. Mais elle ne s'est pas
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limitée à être l'initiatrice d'un nouveau domaine de recherches, elle a été aussi l'animatrice infatigable d'un groupe qui depuis 1997 a travaillé sur un des corpus qu'elle avait proposé et constitué en collaboration avec Robert Bouchard. C'est l'aboutissement de ce travail que le lecteur pourra lire dans ce volume. Le volume a ainsi pour objectif de souligner les intérêts à la fois théoriques et empiriques de la rédaction conversationnelle comme corpus pour l' analyse. Même si, dans l'expérience de beaucoup, la production du texte est généralement associée à la rédaction solitaire, la rédaction conversationnelle caractérise de nombreux contextes institutionnels et professionnels où la production de certains écrits est conçue et négociée en groupe, que ce soit en face à face ou grâce à des médiations technologiques, et n'engage ainsi pas simplement un rédacteur unique, mais une collectivité, équipe, entreprise, administration, association, syndicat... Dans tous ces cas, c'est une écriture à plusieurs qui devient la règle. La situation de rédaction conversationnelle analysée dans ce livre se déroule dans des conditions qui sont situées dans un contexte social ordinaire tout en relevant d'un protocole de recherche. En effet, le corpus a été recueilli en 1995 dans un contexte universitaire et didactique. Maïté et Paulo sont deux étudiants étrangers, de nationalité et de langue maternelle différentes, venus améliorer leur français par un séjour au Centre International d'Etudes Françaises de l'Université Lumière - Lyon 2. A la fin de leur séjour, un de leurs enseignants, Robert Bouchard en l'occurrence, leur a demandé de rédiger collectivement un texte, qui répond donc à une commande didactique. Cette consigne correspond aussi à un protocole expérimental emprunté à Annick Giroud (Université de Lausanne) qui a soutenu en 2001 à Genève une thèse sur un corpus analogue. Cette situation a le mérite de permettre d'étudier on line les processus interactionnels d'élaboration d'un texte dans de bonnes conditions écologiques et de fournir aux chercheurs deux types de données articulées. Il permet d'étudier d'une part les « objets intermédiaires », les brouillons écrits qui donnent à voir dans leurs versions successives comme dans les ratures, rajouts, abandons... figurant à la surface de chacune de ces versions, des traces et des étapes du processus de rédaction. D'autre part, il permet aussi d'étudier l'enregistrement et la transcription des activités verbales accompagnant et rendant possible le travail des participants. Ces activités assurent la coordination de l'action entre les co-scripteurs, ainsi que l'élaboration collective de ce qu'ils vont inscrire; ces activités, en outre, exhibent une dimension
INTRODUCTION
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métarédactionnelle explicite, qui permet d'interpréter de manière beaucoup plus fiable les traces écrites souvent ambiguës lorsqu'elles sont détachées de l'activité qui les a produites (voir les difficultés rencontrées par 1'« analyse des erreurs» en didactique des langues). Elles donnent en effet à entendre-lire les justifications que les participants se fournissent l'un à l'autre sur leur manière d'agir, les explicitations de leurs représentations de l' activité rédactionnelle comme du texte: toutes justifications et explicitations que le travail en commun rend nécessaires. Elles donnent aussi à entendre-lire les conflits de conception qu'ils ont à résoudre et dont le document écrit ne montre que la solution définitive. Dans tous les cas, elles fournissent en amont de la formulation inscrite la chaîne des auto- ou des hétéroreformulations qui lui ont donné naissance. Un pas ultérieur vers la mise à disposition de ces traces par le dispositif d'enregistrement aurait pu être fait avec une reprise vidéo et non pas seulement audio de l'activité de co-scription. Cela n'a malheureusement pas été possible à l'époque du recueil des données - au milieu des années quatrevingt-dix; les analyses qui en sont fournies ici visent à tirer le plus grand parti possible de l'enregistrement audio, tout en n'ignorant pas ce que des données vidéo auraient permis de faire. C'est pourquoi, malgré ces limitations, il nous a semblé important de mettre à disposition les données sur lesquelles s'appuient les analyses de ce livre. Le lecteur trouvera ainsi à la fin du volume la transcription des échanges verbaux des deux co-scripteurs d'une part, et, d'autre part, les reproductions du texte rédigé avec ses ratures et sa mise en page originale, ainsi que celles des produits « intermédiaires» que sont le plan - tableau de stockage et de classement préalable des arguments - et une page de brouillon. L'article initial de M.-M. de Gaulmyn est précisément consacré à la présentation détaillée de la transcription ce long corpus. Elle a réalisé en particulier un ensemble de tableaux analytiques qui permettent d'en repérer plus facilement les agencements complexes sur plusieurs plans. Cet ouvrage est le résultat de plusieurs années de travail d'une équipe internationale issue d'universités françaises (Lyon 2 et Nancy 2), suisses (Bâle, Lausanne et Neuchâtel) et allemande (Bielefeld). Ce projet collectif a été mené à bien grâce à M.-M. de Gaulmyn qui a joué pendant toutes ces années un rôle central dans son avancement. Il trouve son aboutissement dans le présent volume sous la forme d'une série d'études croisées portant sur le phénomène de la production collective d'un texte. Une première moûture des travaux a été présentée à l'occasion d'un colloque organisé à Bielefeld en novembre 2001. La même année, paraissait un ouvrage édité par M.-M. de Gaulmyn,
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R. Bouchard et A. Rabatel, Le Processus rédactionnel, écrire à plusieurs voix (Paris, L'Harmattan, 2001), où l'on trouve les signatures de quelques-uns des auteurs présents dans ce volume, faisant un premier point sur la question, à partir de l'incipit du présent corpus et, pour certains, à partir d'autres corpus. Les études de ce volume portent sur la globalité du travail de production collective. Elles visent à approfondir différentes perspectives analytiques en linguistique, axées sur l'interaction, l'acquisition, la morpho-syntaxe, ou l'énonciation. Ainsi les auteurs adoptent différentes méthodologies explicitées et exemplifiées sur le même corpus dans un dialogue croisé qui se fonde sur des analyses détaillées, minutieuses et systématiques, en insistant sur les observables repérables dans l'enregistrement et sa transcription. Ces analyses concernent un corpus long (plus d'une heure) traité dans sa globalité - ce qui contraste avec de nombreuses analyses de l'oral et de l'interaction ne portant que sur des extraits très ponctuels. De même, les questions méthodologiques de transcription et d'exploitation des transcriptions pour la problématique visée sont explicitées au fil des différents chapitres. Après la présentation du corpus par Marie-Madeleine de Gaulmyn, Ulrich Krafft (Université de Bielefeld) aborde ainsi la question en prenant pleinement en compte la matérialité de la tâche de production écrite. Dans ce chapitre, celle-ci est conçue comme un travail progressif de construction d'un objet textuel. Ce travail nécessite en particulier la production préalable de divers objets, tableaux à double entrée, plans, schémas, brouillons... qui ne figureront pas dans la version définitive mais dont l'élaboration constitue autant d'étapes nécessaires dans la rédaction et dont la nature et la forme contraignent fortement le processus en cours, que celui-ci soit individuel ou collectif. Sa contribution insiste donc sur l'importance fondamentale de ces objets « intermédiaires» dans le travail rédactionnel. Robert Bouchard (Université Lyon 2), quant à lui, prend en compte, sous un angle légèrement différent, les mêmes données en étudiant l'écriture comme réécriture, comme réutilisation de ressources langagières. Celles-ci peuvent ne pas être matérialisées et rester abstraitement disponibles dans la mémoire des participants. Mais elles peuvent aussi être plus objectivement présentes. Il peut s'agir de données langagières « exogènes» proposées par/dans le sujet lui-même (ou éventuellement dans des documents d'accompagnement, pensons aux activités de synthèse de textes par exemple) et que le rédacteur doit savoir extraire et réutiliser. Enfin il peut s'agir de données « intermédiaires» - en reprenant le terme introduit par Jeantet et Vink
INTRODUCTION
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et réutilisé par Krafft plus haut et par Mondada plus loin - construites individuellement ou collectivement au cours même d'une des étapes préalables de la rédaction à deux. Si les deux premiers chapitres prennent plutôt appui sur les données écrites du corpus, la question qui intéresse Lorenza Mondada (Université Lyon 2) dans le chapitre suivant implique la mobilisation conjointe des ressources écrites et des ressources orales dans la coordination de l'action et de l'interaction des participants. A travers une attention particulière pour la temporalité des activités de parole et d'inscription, elle étudie les modalités et les formes par lesquelles les différents arguments sont introduits, discutés et notés progressivement par les deux co-scripteurs. Ceci lui permet d'articuler l'organisation interactionnelle, l'organisation thématique et l'organisation matérielle de l'activité. C'est sur les premières manifestations sous forme orale des énoncés ou fragments d'énoncés du texte à écrire que se penche Denis Apothéloz (Université Nancy 2) en étudiant la coordination des processus d'attention focalisés sur la référence métalangagière propres à ce type d'activité; ceci l'amène à suivre de manière détaillée la transformation de syntagmes au fil de l'élaboration du texte, prenant progressivement forme dans la référence autonymique et dans le travail d'auto- ou d'hétéro-reformulation des co-scripteurs. Les problèmes métadiscursifs intéressent aussi Anne-Claude Berthoud (Université de Lausanne) et Laurent Gajo (Université de Neuchâtel) dans une autre perspective, qui s'interroge sur la variété et la complexité des objets discursifs susceptibles d'être négociés et réfléchis dans l'interaction. Sur cette base, ils introduisent et questionnent la différence entre modes de construction des objets linguistiques et des objets discursifs, entre objets linguistiques (des formes de la langue) et objets non linguistiques (des objets du monde). Alain Rabatel (IUFM de Lyon) se propose quant à lui d'analyser les formes de narrati visation que l'on rencontre au cœur du processus de co-construction de ce texte argumentatif comme dans le texte luimême, en tentant d'expliquer leurs motivations ainsi que leurs fonctions. Il montre que cette narrativisation joue un rôle notable dans la résolution de la tâche compte tenu des conflits potentiels dûs aux désaccords existant entre les interactants. Mais il montre aussi que cette narrativisation ne répond pas simplement à la prévention d'une tension interactionnelle : elle renvoie aussi à l'expression de conceptions divergentes de l'argumentation. Le volume se clôt, comme il s'est ouvert, sur un hommage à Marie-Madeleine de Gaulmyn et à son œuvre, dans une postface
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d'Elisabeth Gülich (Université de Bielefeld) qui rappelle quelquesunes des riches facettes de son travail scientifique. Cette postface est suivie par la bibliographie complète de ses publications. Le volume tout entier salue ainsi le travail de pionnière d'une chercheuse qui a joué un rôle important dans la communauté.
1 Le corpus comme un tout par Marie.. Madeleine de Gaulmyn
1. Situation spécifique et classes de situations La situation de recueil du corpus, dite rédaction conversationnelle, relève de quatre classes de situations d'interactions dialoguées ou plus simplement de conversations. Elle appartient en premier lieu à la classe très générale des situations de travail, finalisées par une tâche définie et accomplie pendant l'interaction, comme le sont des réunions de travail de caractère professionnel. C'est d'autre part un exemple de situation oralo-graphique, qui mêle échanges oraux et pratiques de littéracie. C'est ensuite une situation d'apprentissage de l'argumentation écrite en langue 2. Et c'est enfin une conversation à deux locuteurs, ou « di-Iogue ». La tâche des interactants consiste à construire un objet en collaboration (travailler ensemble) et en coopération (co-action ou action collective centrée sur un seul objet). L'objet visé est un texte écrit à réaliser en parlant, contrairement aux habitudes d'écrire seul et en silence. Chaque phrase est donc élaborée en commun ou co-élaborée, la formulation retenue étant négociée entre eux à partir des propositions faites par chacun. La situation, quasi expérimentale, mais au sens d'une expérimentation écologique, a été construite pour enregistrer le processus de rédaction d'un texte et observer les pratiques ordinaires d'écriture. Les corédacteurs, au nombre de deux, fille et garçon, sont étudiants en Français Langue Etrangère dans une université française. Bons francophones mais non-natifs, l'une, Maïté (M), est germanophone, et l'autre, Paulo (P), lusophone (Brésil). À l'initiative des corédacteurs, la tâche est répartie en sous-tâches successives qui donnent lieu à des changements d'activités explicites
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MARIE-MADELEINE
DE GAULMYN
et déterminent dans le corpus des parties justiciables d'analyses différentes. Dans la première partie de la conversation, M et P, après avoir écouté la consigne, dressent une liste des arguments destinés à leur futur texte: quatre arguments orientés pour les devoirs à la maison, six arguments contre, dont le deuxième et le sixième sont transformés en conclusions. Ce brouillon préalable qu'ils appellent le « plan» a la forme de notes abrégées et non rédigées et se présente comme une liste classée en deux colonnes. Dans la deuxième partie M et P entament une discussion sur le choix du titre à donner au texte et ils renoncent à trancher entre plusieurs solutions. Ils discutent de l'orientation et du genre de texte. Ils rédigent alors une introduction de quatre phrases, plus exactement une double introduction, celle de M, suivie de celle de P. Cette introduction, qui n'était pas prévue au moment du plan préalable, leur demande beaucoup de temps et de longues négociations. Les parties III à VI sont consacrées à la rédaction phrase par phrase des deux parties du texte et de la conclusion. Dans la partie III, ils composent un plan et attribuent selon ce plan un numéro d'ordre à chacun des arguments notés sur la première liste. Ils passent ensuite à la rédaction des phrases du corps du texte dans l'ordre du plan en développant les arguments numérotés. En partie IV, ils rédigent successivement cinq phrases pour cinq arguments pour, et en partie V six phrases pour quatre arguments contre. Dans la partie VI, ils rédigent alors les conclusions d'après les notes classées comme conclusions sur la liste préalable et finalement le titre, puis ils relisent tout le texte. La rédaction des deux parties du texte et de la conclusion est guidée par la liste préalable des arguments et diffère de l'élaboration des quatre phrases de l'introduction pour lesquelles rien n'est écrit d'avance. Mais cette introduction est elle-même faite de deux parties différentes. Alors que les deux dernières phrases de l'introduction, comme les deux parties du texte et la conclusion, relèvent du modèle scolaire canonique de la rédaction argumentative, les deux premières phrases échappent à ce modèle et constituent un essai d'invention original. 2. La consigne et le contrat La tâche est définie dans une consigne imposée par un tiers qui a, dans la réalité, autorité de professeur sur les corédacteurs qui sont étudiants. Elle renvoie donc à des habitudes et à des modèles scolaires et elle y renvoie doublement: les co-scripteurs font un devoir supplémentaire pour leur professeur en dehors du cours qu'ils suivent avec lui, et ils
LE CORPUS COMME UN TOUT
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ont à débattre du bien-fondé des devoirs scolaires supplémentaires donnés aux élèves à la maison. Le sujet à traiter se présente comme la simulation d'une situation fictive mais vraisemblable: une lettre ouverte publiable dans la presse pour alimenter un débat public, c'est-à-dire un texte argumentatif mono-orienté de genre journalistique (courrier des lecteurs, prise de position sur un problème de société). En fait les corédacteurs redéfinissent leur texte à écrire à la fois comme un article de presse bi-orienté (article d'opinion à propos d'un fait divers fictif) et comme une dissertation (selon un plan binaire typique d'un modèle scolaire). Ils font une réinterprétation originale de la consigne ambiguë qu'ils ont écoutée, de façon à concilier deux types de textes, l'article de presse et la dissertation académique, sans donner plus de valeur à leur texte que celle d'un exercice à des fins de recherche universitaire (voir leur allusion au DEA, 361-368 1, et le commentaire écrit en post-scriptum). Les corédacteurs transgressent doublement la consigne, par le type de texte et par la position argumentative. Il leur a été demandé d'écrire une lettre pour le courrier des lecteurs d'un journal, mais ils écrivent un texte de journaliste qui constate qu'il existe deux positions et présente le débat. L'établissement de ce contrat se fait en trois temps. Les phases de négociation sont placées à des moments cruciaux pour le processus de production et pour l'interaction. Le contrat de collaboration et d'exécution du travail proposé par le professeur paraît être accepté (M répond d'accord à la fin de l'intervention du professeur vous avez le choix, tour 6), mais, le professeur sorti, ce premier contrat est immédiatement dénoncé et renégocié entre P et M au début de la partie I. Ils devaient en effet choisir entre deux positions et défendre la position choisie dans un débat possible entre école et parents d'élèves: pour ou contre les devoirs à la maison. Et, conformément à ce choix, ils devaient adopter l'un des deux titres proposés. D'emblée ils refusent de choisir une seule position et décident de traiter les deux et de remettre le choix à plus tard. Et ils dressent une double liste des arguments attribués aux tenants des deux positions, dont ils feront les deux parties antithétiques d'une dissertation. La négociation la plus complexe se place à la fin de la Partie I et au début de la Partie II. Ils évoquent en plaisantant leur participation à une recherche universitaire (361-368), ils décident de commencer la rédaction du texte et ils s'entendent sur le rôle de scripteur (371-381). C'est alors qu'ils rejettent explicitement le choix qui leur a été imposé 1.
Les renvois au corpus sont indiqués par les numéros des tours de parole.
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entre deux titres (402-406) et M, approuvée par P, décide d'utiliser leur double liste d'arguments pour faire un texte en deux parties suivies d'une conclusion (393-400). Après un essai manqué, ils remettent la rédaction de leur propre titre à plus tard et décident de composer une introduction. Ils vont en fait rédiger en guise d'introduction le titre imaginaire d'un texte fictif (d'où le bref malentendu sur le mot titre, 551). Mais si P et M s'entendent facilement pour rejeter les choix imposés par la consigne, ils ne sont pas d'accord sur le style à donner à l'introduction. Au moment de rédiger la première phrase, leurs propositions respectives sont incompatibles. M impose la sienne et rejette celle de P pour des raisons purement affectives (443 exagéré pour quelque chose de sobre mais je trouve ça plus drôle, 489-498 j'aime mieux) et, pleine de mauvaise foi, elle prétend même que c'est justement une idée de P (499). P récupère cependant sa proposition et la fait accepter (667) et ils passent un nouveau contrat sur le style à donner à l'introduction (rester neutre... impartial 747-752). À la fin de la partie II, P ouvre une nouvelle négociation sur le choix entre les positions pour et contre, mais M parvient encore une fois à différer la décision (804-816). La négociation se développe au début de la partie III, rendue nécessaire par l'ordre à donner aux deux séries d'arguments. Cette décision prise en deux temps manifeste un double retournement des positions. Au début de l'interaction, P s'était déclaré pour les devoirs (134) tandis que M s'étendait longuement sur les excès du travail scolaire en France. En fin de partie II, P convient d'orienter le texte contre les devoirs (818) et au début de la partie III, M se déclare pour à la surprise de P. Mais elle introduit aussitôt une réserve qui lui permet grâce à un raisonnement d'être contre (865, 867). Dans la suite de l'interaction, le contrat passé entre eux n'est plus remis en cause. Le rôle de scripteur fait seulement l'objet d'une brève négociation au début de la partie IV. À la fin de leur travail, ils reprennent le problème du titre laissé en suspens et le résolvent très vite en plaisantant (le choix crucial 1909) et en retournant envers les desti-
nataires du texte (
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2 La matérialité de la production écrite: Les objets intermédiaires dans la rédaction
coopérative de Paulo et Maïté
1
par Ulrich Krafft
1. Le côté matériel de la production écrite Écrire est une activité silencieuse et qu'il est donc difficile d'observer et d'analyser. Mais elle laisse des traces: texte écrit, corrections, brouillons, versions provisoires, et ces traces permettent de reconstruire certaines activités de production. On s'est servi de cette méthode, l'analyse des produits, dans la recherche didactique et pour analyser la genèse d' œuvres littéraires 2. Un autre type de données, les données processuelles, permet d'observer plus directement le processus de production. On peut par exemple demander à un écrivant de verbaliser tout haut tout ce qui lui passe par la tête pendant qu'il écrit, et l'on obtiendra un protocole verbal qu'on peut enrichir en filmant le travail de production 3. On obtiendra également des données proces-
1.
Le texte qu'on va lire a été un objet intermédiaire grâce auquel j'ai eu le plaisir de coopérer avec Christian Brassac, Ulrich Dausendschon-Gay, Ingrid Furchner et Karola Pitsch, que je remercie pour leurs remarques critiques et enrichissantes.
2.
Pour l'exploitation didactique, cf. la bibliographie chez Wolf (1999). Pour les recherches sur la genèse des œuvres littéraires, cf. Grésillon (1994).
3.
Cf. par exemple Hayes et Flower (1980) qui ont élaboré leur fameux modèle psycholinguistique de la production écrite à partir de l'analyse de protocoles verbaux. Keseling (1993) utilise un corpus vidéo.
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ULRICH KRAFFT
suelles en enregistrant deux ou plusieurs personnes qui rédigent ensemble un texte. Ce travail commun de «rédaction conversationnelle » n'aboutira que dans la mesure où les participants travailleront à voix haute. On pourra alors observer à travers leurs propositions, contre-propositions, corrections, etc., le travail de planification et de mise en mots, tandis que les arguments qu'ils énonceront à l'appui donneront des indications sur leurs stratégies de production et leurs critères d'évaluation 4. Ces approches très différentes concordent en ce qu'elles considèrent ce qu'on peut observer comme des traces, des traces de ce qui se passerait « en réalité », qui aurait lieu exclusivement dans la tête de l'auteur et qu'on ne pourrait donc étudier qu'indirectement à travers ces traces: activités communicatives, manipulations d'objets, produits. Nous défendrons ici un point de vue différent: nous considérons que les activités perceptibles de l'écrivant ne sont pas seulement les traces d'une activité de production cachée, non observable et qu'il s'agirait de reconstruire, mais qu'elles font elles-mêmes partie des activités de production, et que les objets que l'écrivant produit ou manipule au cours de son travail de production participent à ce travail. Nous nous proposons de concrétiser cette conception en analysant la rédaction coopérative de Paulo et Maïté à partir des objets qu'ils produisent et sur lesquels ils travaillent: le «plan préalable », les brouillons, le texte inscrit (cf. les documents en annexe). Nous suivrons en gros l'ordre chronologique des productions en examinant d'abord l'élaboration du plan préalable, ce qui inclut le travail sur les croquis (section 2), puis le travail de mise en discours (section 3). Pour reconstituer plus exactement le travail sur les brouillons dans sa matérialité, nous aurions eu besoin d'un enregistrement vidéo. Il est vrai que l'enregistrement audio conserve des traces - bruits d'écriture, autodictées, renvois implicites ou explicites dans les négociations qui permettent de reconstruire assez précisément l'élaboration de ces objets. Mais il manque les informations muettes sur les postures que prennent les interactants par rapport aux objets: Quand les regardentils ? Quand et comment les manipulent-ils? À quel moment qui désigne-t-il quoi du doigt ou du crayon? Comment celui qui ne tient pas la plume observe-t-ille travail d'inscription? etc. 5 Ces lacunes nous 4.
Cf. les indications bibliographiques in Bouchard et de Gaulmyn (1997) et Krafft et Dausendschon-Gay (1999).
5.
Au sujet des fonctions d'orientation de la gestualité dans l'interaction, cf. Krafft et Dausendschon-Gay (2002) et Krafft et Dausendschon-Gay (2003).
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DE LA PRODUCTION
ÉCRITE
57
feront certainement manquer tel détail des activités de production. Ce qui est plus grave, c'est qu'elles risquent de fausser globalement notre perception de ce travail. Nous avons certainement tendance à sousestimer l'importance de la présence physique des objets tout simplement parce que nous ne voyons pas comment la dyade les prend matériellement en compte et dans quelle mesure la réalité physique contribue à organiser le travail cognitif coopératif 6. Il faut se rappeler en permanence que le travail de production discursive, travail cognitif, est un travail et sur les représentations et sur le matériel, que la cognition distribuée est essentiellement une cognition située 7. 2. L'élaboration
du « plan préalable»
Le plan préalable (cf. annexe) se fait en quatre étapes: Maïté schéma (2.1) ; la dyade prend des notes (2.2) ; elle choisit provisoire (2.3) ; elle fixe l'ordre des arguments (2.5). Elle sur des « objets intermédiaires» (2.4) qui interviennent dans vités de production et qu'on peut donc considérer comme acteurs (2.6).
trace le un titre travaille les actides co-
2.1 Le schéma Le schéma pro
- contra
- conclusions
est le résultat d'un rapide travail
de planification: puisque Paulo et Maïté n'ont pas d'opinion au sujet des devoirs à la maison, ils décident de commencer par « ramasser les arguments soit pour pro soit pour contra» 8 (11M-13M). Des bruits d'écriture (14P, 15M) indiquent que Maïté trace le schéma: deux colonnes séparées par un trait vertical et intitulées pro et contra; au
6. Goffman (1981 et 1987b : 139) note que « la vue, parfois même le toucher sont très importants du point de vue de l'organisation» de la conversation. Il donne une série d'exemples et conclut: « Quant au fait qu'on puisse se téléphoner sans canal visuel et que la transcription de la parole, semble-t-il, fonctionne, il faut y voir un signe non pas de ce que seule compte la transmission des mots, mais de la puissance des processus de reconstruction et de transformation». Cette remarque implique une mise en garde de l'observateur: ces « processus de reconstruction» permettent de reconstituer l'interaction telle que nous la comprenons, et non telle qu'elle a eu lieu.
7. "The expression distributed and situated cognitions meant for us that the construction of shared knowledge is organization of the suggested activity through both the object and the actors" (Grosjean et alii 2000 : 9). 8.
Nous citons entre guillemets les « énoncés» de Paulo et Maïté, en italiques les inscriptions.
58
ULRICH KRAFFT
bas de la page, un trait horizontal réserve une plage horizontale dont on saura par la suite qu'elle est destinée à noter des conclusions 9. Le schéma fixe un premier résultat des activités de production, la définition de la première « tâche conversationnelle » (DausendschonGay et Krafft 1991), et marque ainsi la fin d'une première étape de travail. Prospectivement, la visualisation de la tâche implique un plan de travail qui comprend au moins trois phases: 1. collecter les arguments, 2. prendre position pour ou contre les devoirs, 3. rédiger le texte. La feuille avec son schéma matérialise l'horizon des activités de production de la première étape. En même temps, elle met à disposition pour les inscriptions une surface délimitée et organisée et qui n'acceptera que trois types de notes: arguments pour, arguments contre, conclusions. La présence physique de ce schéma d'inscription aide la dyade à orienter ses activités et à respecter une discipline de travail: ne seront évoqués, a fortiori inscrits, que des faits ou des appréciations pouvant servir d'argument ou d'élément de conclusion. 2.2 L'organisation
séquentielle de la prise de notes
La collecte des arguments consiste en une série de séquences dont chacune traite un seul argument et aboutit à la mise en mots et à l'inscription d'une note 10.Ces séquences sont closes, refermées sur elles-mêmes: pour évaluer la précision et la complétude de la formule inscrite, la dyade ne prend en compte que la discussion qui précède la mise en mots. Il n'y a donc aucune relation linguistique entre les différentes notes. La dyade note d'abord quatre arguments pro (24P67M), puis deux arguments contra et un élément de conclusion (70P131M). Après la discussion autour des mères surchargées, Paulo fait remarquer qu'il a du mal à trouver des arguments contre les devoirs parce qu'au fond il les approuve (132-134P) 11.Mais Maïté passe 9.
Maïté prévoit deux feuilles de prise de notes (19M-23M) et trace deux schémas (bruits d'inscription après 23M). Mais Paulo ne va rien inscrire, et cette deuxième feuille servira de feuille de brouillon (grâce à laquelle nous connaissons le premier état du schéma).
10. Pour les procédés de mise en mots, cf. Krafft et Dausendschon-Gay (2000). Il. À partir de ce moment, les arguments ne sont plus présentés comme des
prises de position personnelles ( « apprendront» > « apprendrions» > « apprendraient». 30. Par exemple « il » > « l'élève» > « les élèves ». 31. Par exemple quand le sens d'une activité n'est pas évident et demande à être expliqué (Paulo cherche un conditionnel, 1086P-1091M); qu'on veut évaluer explicitement les produits (évaluations positives 1102P, 1104P; négatives: 1111M, 1112P, 1114P) ; qu'on propose un procédé, par exemple de noter l'exemple entre parenthèses pour pouvoir abréger (1122P-1135M).
LA MATÉRIALITÉ
DE LA PRODUCTION
ÉCRITE
73
marquées par des formes prosodiques particulières: proposition de mise en mots (y compris les corrections et les expansions), dictée, autodictée 32, lecture-pour-soi 33,lecture-pour-Ia-dyade 34. En utilisant des formes prosodiques de « manipulation de l'écrit» ("Schreibsprechstile", Krafft 1997), la dyade distingue nettement la manipulation de l'objet de ses autres activités. Le travail sur l'objet est ponctué par l'inscription progressive de la formulation. En inscrivant un segment, la dyade le déclare provisoirement achevé, ce qui lui permet de se tourner vers le segment suivant 35. Linguistiquement, le travail de mise en mots consiste en une série de révisions - corrections, expansions, réductions - d'une première version. Dans notre exemple, cette forme première fournit un cadre syntaxique et sémantique qu'on retrouve jusque dans la forme finale 36. La dyade rencontre des problèmes particuliers lorsqu'elle dépasse le cadre de la phrase préfigurée par la note pour ajouter un exem-
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Tableau 3 : La triple organisation successive des arguments
1.
Si on considère que la locution « le pour et le contre» amène toujours à traiter les arguments successivement dans le même ordre a priori dicté sinon par la langue (cependant « oui ou non» où se conserve la même polarité) du moins par l'intertexte, nous pouvons relinéariser ces éléments. Les éléments « pour» précèdent les éléments « contre» qui précèdent eux-mêmes les éléments de conclusion, chacun conservant son ordre de production orale au sein de sa catégorie.
112
ROBERT BOUCHARD
4.1 La première étape (orale) Elle concerne l' inventio à proprement parler c'est-à-dire le processus de formulation et de négociation des « idées» considérées comme susceptibles de nourrir le discours commun. Elle aboutit à l'esquisse plus ou moins achevée d'un énoncé oral organisé autour d'un ou de plusieurs verbes mais encore instable. Par rapport aux quatorze notes qui en résulteront, les deux partenaires ont un apport sensiblement équivalent: huit ont pour origine Paulo, et six Maïté. Ajoutons que cet apport d'arguments se fait a priori en respectant implicitement un principe d'alternance entre les deux partenaires qui chacun à leur tour apportent une pierre à l'édifice commun.
n° note Formule de prise en charge orale initiale 1. à mon avis
Source 25M
2. moi je crois
34P
3. peut-être 0 (enfin) toutes les choses que 00 qui: euhm, par exemple
49M
4. ... j' crois que 5. moi je dirai contra c'est que ben 6. je crois ce qui...
54P 77M 98P
7. on peut dire
119M
8. peut-être ça
140P
9. on peut dire
169M
10. (j'aurais) un argument pour
186 P
Il.0
226P
12.0
286P
13. on peut dire peut-être en plus que 14. il peut y avoir un côté positive aussi
311M 332P
Tableau 4 : Formulation orale et prise en charge énonciative
Au début de cet épisode de travail, l'argument proposé est pris en charge par son énonciateur. On peut en voir ci-dessous un exemple clair avec le premier argument énoncé par Maïté dont elle encadre la formulation par deux « à mon avis» :
SOURCES
ET RESSOURCES
DU DISCOURS
(ACADÉMIQUE)
113
(8) Production de la 1renote 25 M ça à mon avis' si: tu travailles à la maison' 0 ça: te:, 1'aça t'aide à à apprendre de [travailler,O euh: indépend indépendamment 00 sans tu tu apprends de ne pas: seul=ment travailler sous: sous quelqu'un quit qui te dirige qui: qui te dit euhlc=qui faut faire,! 26P
/qui te donne des ordres/ ouais
27M
tu es: 0 tu deviens plus responsable /voilà à mon!
28 P /hmhm/
29 M avis si tu travailles (à la) Cette prise en charge énonciative de la première formulation est un phénomène fréquent dans le corpus mais uniquement au début de la séance de « remue-méninges ». Cinq des six premiers arguments sont présentés comme caractéristiques d'une position personnelle de Paulo ou de Maïté à propos de la question posée. Il n'en va pas de même pour la suite, où on passe progressivement du «je» au « on » (Maïté 3 occurrences) voire, chez Paulo, à un questionnement totalement neutralisé sur les arguments possibles (2 occurrences). Plus le travail avance, plus ce sont les contraintes propres à la tâche qui l'animent et non la volonté d'expression personnelle des participants. En particulier pour les arguments «pro» finaux 12, 13 et 14, Krafft a pu montrer qu'ils correspondent à la nécessité pour les deux coscripteurs de remplir également les deux colonnes d'arguments pour et contre qu'ils se sont données a priori en construisant leur tableau. 4.2 La deuxième étape orale: de la formulation de l'argument à la formulation de la note La deuxième étape orale porte plus précisément sur la mise au point de la note en tant que telle. Il ne suffit pas de partager une idée, encore faut-il pouvoir la reformuler en une note efficace, c'est-à-dire dotée d'une forme à la fois économique et fiable, homogène avec celle des
114
ROBERT BOUCHARD
autres notes et donc conforme à un genre informel, spécifique de l'écrit, la liste (cf. Goody 1979). On verra qu'en langue étrangère ce n'est pas toujours linguistiquement facile pour nos deux étudiants: (9) 1re note
30 P
donc ça serait le:,O l'apprentissagede: 0 de l'indépendance'
Pour chaque note, cette deuxième étape se démarque régulièrement de la première par l'utilisation par Maïté comme par Paulo de ponctuants conversationnels, le plus souvent un « donc» (9 occurrences) comme dans l'exemple ci-dessus. Ce MSC indique au partenaire la modification de la phase du travail collectif entrepris. La régularité de l'organisation de ce travail collaboratif dans ces deux épisodes de constitution des ressources est d'ailleurs remarquable. Implicitement se crée une méthode de travail fondée sur une double alternance. D'une part, au moment de la première étape de cette production, nous avions constaté que sur les quatorze arguments du document intermédiaire systématiquement à une proposition de Maïté succédait une proposition de Paulo, et ce à une seule exception près, les arguments successifs 10 et Il, tous deux produits par Paulo. D'autre part on peut voir que tout aussi systématiquement chaque fois que l'un des partenaires propose une idée d'argument c'est l'autre qui prend en charge sa reformulation avant inscription, (là encore à une exception près, l'argument 12 dont Paulo, toujours lui, est à la fois l'inventeur et le reformulateur). Notes et énonciation Un des premiers effets de ce stockage économique de l'information est l'effacement énonciatif dont les arguments sont l'objet. Nous avions constaté qu'au moins les six premières propositions de notes étaient marquées par une prise en charge énonciative explicite. Leur proposition de notation, par contre, fait disparaître ces indications subjectives. Interactionnellement, elle signifie d'une part qu'elles deviennent de simples matériaux, des « objets intermédiaires» non insérés dans un discours (l'un de ces éléments, le numéro 4, disparaîtra en cours de travail, d'autres se scinderont en deux informations ou au contraire se regrouperont avec des informations proches à une autre étape de la rédaction). Elle signifie d'autre part que les partenaires avancent vers une progressive prise en compte collective des matériaux intermédiaires communs.
SOURCES
ET RESSOURCES
DU DISCOURS
(ACADÉMIQUE)
NOTE MODALITÉ DE REFORMULATION
115 ACTEUR
1. à mon avis 2. 3. 4. 5.
6. 7.
8.
9.
10. Il. 12.
13
14
25M2 3 30P donc ça serait + NOM moi je crois 34P 43M ouais donc peut-être 0 (enfin) toutes les choses que 00 qui: euhm, par exemple 49M 50P ouais + NOM 54P ... j' crois que 61M o 77M moi je dirai contra c'est que ben 94P oui je pense alors + NOM 98P je crois ce qui... 109M donconpeut ici onpeut dire 119M on peut dire 128P) (donc + NOM peut-être 131M 137M qu'est-ce qu'on a comme problème quand on est enfant 140P peut-être ça ouais, ça va un peu avec s- ça' 143M on peut le- on peut le prendre comme 0 par exemple' 169M on peut dire 178P donc + NOM 179M donc c'est + NOM 186P G'aurais) un argument pour 211M donc 226P 0 241M donc il faut dire 269M est-c= qu'on a encore quèq= chose pour' 280P qu'est-ce qu'il y a d'autre comme argument pour 286P o 300P donc ça serait + NOM 311M on peut dire peut-être en plus que 312P ouais ça serait + NOM 320P donc + NOM qu'est ce qu'il y a d'autre pour 332P il peut y avoir un côté positive aussi 355M on peut dire Tableau 5 : Modalités de reformulation « écrite»
2.
Caractères gras pour la proposition orale, maigres pour la reformulation « écrite », italiques pour la prise en charge par « on »
3.
+ NOM: reformulation « écrite» utilisant une nominalisation.
116
ROBERT BOUCHARD
Ceux-ci dont nous avons remarqué qu'ils sont systématiquement pris en compte au moment de la reformulation par celui des deux coscripteurs qui ne les avait pas proposés sont promis dans le discours commun à une prise en charge par un unique archiénonciateur représentant les deux partenaires (cf. Maingueneau et pour une discussion Rabatel ici même). La forme de la proposition de note Au-delà de la neutralisation énonciative, remarquons aussi l'écart qui peut se creuser entre la formulation de départ et la proposition orale de note à laquelle elle donne naissance (telles qu'on peut les reconstituer un peu artificiellement il est vrai en supprimant ce que certains appellent leurs « scories») : (10) 1re note
25 M à mon avis' si: tu travailles à la maison ça t'aide à apprendre vailler indépendamment 30 P
l'apprentissage
de tra-
de l'indépendance
Seuls deux mots, transformés, de l'énoncé liminaire subsistent. Le marquage énonciatif mais aussi le rappel thématique valable pour
l'ensemble du discours
( apprentissage) (travailler indépendamment> indépendance) cristallisée sous la forme d'un syntagme de type N de N. Dans le tableau ci-dessus, on constate neuf épisodes de reformulation par nominalisation de l'énoncé phrastique antérieurement proposé. Sur ce nombre huit sont le fait de Paulo. C'est lui qui propose le plus spontanément une nominalisation en ricochant immédiatement sur l'énoncé précédent mais en utilisant (trois fois) une locution de marquage de reformulation qui est en même temps un modalisateur « donc ça serait» qui permet d'atténuer l'importance de cette reformulation: (12) note 13 311 M... on peut dire peut-être en plus 0 que ça entraîne aussi un peu pour les examens... 312 P louais ça serait! un entraînement 0 pour étudier pour un vrai examen
Pour la note numéro 7 cependant, on assiste à un conflit de reformulation entre les deux partenaires. Ce conflit met typiquement en opposition deux traitements de la même information, l'un par nominalisation (130P / la fatigue (de la part) des mères) qui est le fait de Paulo et l'autre phrastique (131M: les parents sont surchargés en aidant toujours aux devoirs) proposé par Maïté. On pourrait dire donc que Paulo est à la fois plus sensible aux contraintes du genre « prise de notes» que sa camarade et que d'autre part il maîtrise mieux qu'elle, linguistiquement, la production de telles formes (cf. cidessous). Ces deux traits cumulés dénotent une sensibilité particulière à l'intertexte écrit, caractérisé par l'importance de ces groupes nominaux lourds (cf. l'hypothèse classique de Halliday). En effet les nominalisations et leurs suffixations normées en -age, -tion, -ement... fai-
118
ROBERT BOUCHARD
blement sémantisées exigent pour être mises en œuvre efficacement autant un stockage en mémoire, dû à une pratique intensive de l'écrit, qu'une véritable capacité à produire la bonne forme, en d'autres termes plus une reproduction qu'une production. (13) note 3 50 P 51 M
52P
louais le l' organisation du'l oui oui l'organisation de de Id'un travail! Ide l'emploi du tempsl oui
Dans l'exemple (13) on voit l'accélération de la production d'un énoncé quand le locuteur retrouve en mémoire un syntagme préconstruit et en l'occurrence un syntagme nominalisé de la forme N de N. Ordre de production
Tour de parole et auteur
Forme grammaticale
1 2 3 4 5
30P 43M 50P 61M 94P
6 7
115M (130P) 131M 143M 178P 179M 211M 247M 300P 310P 323M 355M
NdeN GN (avec 1 Nom) NdeN GN NdeN N pour N Phr. (N de N) Phrase N pour N NdeN NdeN 2 Phr. Phr. (avec 2 Noms) GVinf + NdeN N pour N Phr.
8 9 10 Il 12 13 14
Tableau 6 : Note et mise en forme grammaticale
4.3 La troisième étape: l'inscription La troisième étape est immédiatement contiguë à la seconde et consiste en l' (auto)dictée partielle et l'inscription par le/la « secrétaire de séance» du moment de la note ainsi formulée collectivement. Dans
SOURCES
ET RESSOURCES
DU DISCOURS
(ACADÉMIQUE)
119
notre corpus, c'est Maïté qui prend la responsabilité de cette étape et de toutes les possibilités de... prise de décision qu'elle exige et permet: (14) note 1 apprentissage de l'indépendance 33 M ÉCRIT -tissage' 0+ note 2 possible question après une certaine réflexion indépendante 47 M ÉCRIT après une certaine réflexion' in- indépendante,
Sur les quatorze notes, en fait, comme le tableau 6 le montre, six seulement sont organisées autour d'un verbe alors que les huit autres sont de nature nominale, et parmi ces dernières on en compte cinq de la forme N de N et deux autres de la forme N pour N. On peut observer que ce travail de dérivation d'un nom abstrait à partir d'un verbe ou d'un adjectif est mieux maîtrisé par Paulo que par Maïté. Quantitativement, c'est lui qui en produit le plus grand nombre alors que c'est Maïté qui produit le plus de notes sous la forme de phrases plus ou moins superficiellement simplifiées. L'inscription est l'occasion éventuellement d'un ajustement formel supplémentaire, comme dans le premier cas ici où il y a suppression par Maïté de l'article initial en accord avec les règles tacites de la prise de note. Au cours de ce travail d'ajustement simultané à l'inscription, Maïté, à deux reprises, ressent aussi le besoin d'une nominalisation mais d'une nominalisation s'insérant à l'intérieur d'une note organisée autour d'un verbe. Les deux fois, elle a recours à l'aide de Paulo: (15)note Il 249 M à la ca (SE RACLELA GORGE) à la capacité non' 250 P capacité' 251 M à la : 252 P capacité' 253 M si si on peut faire quelquechosec'est capacité 254 P ah si oui 0 ouai' note 14 355 M on peut dire d- des fois, euh: 0 ÉCRIT les devoirs 000 aident 000 de créer + 356 P une aune: (premier) approximation' 357 M ÉCRIT une appr une apapproximation +
120
ROBERT BOUCHARD
entre les parents let/ 358 P 359M louaisl 360 P les enfants, 000 approximation 361 M ÉCRIT + ouais
000 enfants et parents 000
Dans le dernier cas l'origine intertextuelle de la proposition non
satisfaisante de Paulo (
Phr. 5 capacité de la réflexion individuelle
note 2 Travail
Phr.6
>
temps et travail par exemple le suiviment de l'emploi du temps
Il est intéressant de constater que pour procéder à cette expansion les participants peuvent retrouver en mémoire des informations qui n'ont pas été prises en note. L'exemple de « l'emploi du temps» de la phrase deux (re)proposé par Paulo au tour de parole 1132 (avec en prime une nominalisation sui generis « suiviment ») l'avait déjà été au tour de parole 52, au tout début de la séance de rédaction conversationnelle. Il peut donc exister un écart important entre les deux formulations : si les deux mots pleins de la note 2 se retrouvent dans la phrase-cible (n° 6), il n'en est rien dans le premier cas (note 1, Phr. 5). C'est plus de re que de dicto que fonctionne la réécriture. La note est plus un support pour la mémoire qu'une première formulation. Cela se vérifie pour l'ensemble du texte à l'exception des deux phrases de conclusion dont nous avons déjà souligné l'élaboration à la fois spécifique et problématique. I NO (le 1)]113se
6
Nb (le JIlOts 4Note-sOtIl ce Nb (le JIlOts 0 C'OJlselvés Nb (le JIlOts ~41)]II35e
6
7
8
9
10
Il
12
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3
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13
9
13
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0
0
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3
0
4-
40
48
36
13
17
~4-tB ~1
3~
11
""
16 ~1
16
17
16
~5
5
14+1
~1
51
40
31
Tableau 9 : Economie lexicale des reformulations
Une dénominalisation relative Tous les groupes N de N ne donnent pas lieu à une dénominalisation. La question ne se pose que quand la nominalisation antérieure a été opérée sur la base d'un verbe! Ainsi, «conditions de travail », « inégalité des chances », restent tels quels des notes au texte final. Pour le premier, c'est la relation adjectif - groupe nominal complexe qui va donner lieu à une prédication: (20) mauvaises conditions de travail ... où les conditions de travail sont inadéquates
Pour l'autre de manière plus spécifique c'est l'élément iconique qui le précède, la flèche, qui va donner naissance au ligateur et au
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noyau verbal de la phrase qui l'englobe: (21) => inégalité des chances « Ainsi existe-t-il une inégalité des chances... » Ce traitement « conservateur» n'est cependant pas réservé aux nominalisations à base non verbale. On en observe deux autres cas dans le texte final: (22) 8.- p.e. meilleur entraînement pour les examens Cela enffflfne de surcroît, un entraînement profond et régulier J*ffif engendre face aux examens. 15.- exagération du travail : Ce qui apparaît comme l'argument le plus fort. peur les dé nscups de kt pour ee-e ceux qui sont contre le travail à la maison. c'est l'exagération du travail ce qui empêche les écoliers à.!.e(f) de suivre d'autres activités...
Textualisation, mise en discours et actualisation De plus la phrase ainsi créée doit simultanément être dotée de tous les éléments - essentiellement antéposés - qui permettent de l'intégrer, textuellement et discursivement, dans le dispositif pragmatique du document en cours de réalisation. C'est surtout le début de la phrase qui va être modelé spécialement dans ce but. On y retrouve comme composants les éléments dont Morel et Danon- Boileau (1998) ont montré l'importance dans les préambules des « paragraphes oraux» : ligateur, source énonciative, modus, cadrage, thème antéposé. W(le I)]. ~
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Tableau 10 :Trois exemples de textualisation
Si la note sert de noyau au dictum avec les transformations décrites plus haut, par contre le « préambule» sera lui même plus ou moins développé suivant le point d'insertion de la phrase dans le corps du développement. Une seule phrase (n° 12) n'utilise pas de préambule. Sous sa forme minimale sinon, celui-ci prend la forme d'un unique ligateur, un « marqueur d'intégration linéaire» le plus souvent, de nature grammaticale variée. Sous sa forme la plus développée, aux articulations stratégiques du texte (attaques de chaque partie du déve-
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loppement et de la conclusion) il a pour but d'expliciter et la source énonciative et l'orientation argumentative de la phrase qu'il ouvre mais aussi de la partie qu'il introduit. 5. Conclusion La production écrite ne s'opère jamais ex nihilo mais demande que l'écrivant, et en particulier l'écrivant non natif, connaisse le « script» de cette production et en particulier sache mobiliser des ressources langagières avant de passer à l' elocutio proprement dite. Ces ressources peuvent être déjà disponibles et il importe alors d'être capable et de les saisir et de les retraiter pour en faciliter l'introduction dans le discours cible. Chez les non-natifs, on constate une utilisation très différente des ressources disponibles en fonction des sujets qui apparaissent dotés de filtres culturels très efficaces (cf. Bouchard à paraître). Ces ressources connaissent deux modalités très contrastées: elles peuvent exister dans « l'air du temps» (intertexte) ou dans une « bibliothèque» plus manifeste (interdiscours). Dans ce dernier cas, elles peuvent même être rendues explicitement obligatoires par la situation contraignante d'écriture (épreuve académique de synthèse de documents par exemple) qui exige une production interdiscursive tenant compte objectivement du corpus de discours imposé et de ses sources énonciatives. Mais d'autres ressources pour une autre part, et de manière complémentaire, demandent à être construites par l'écrivant lui-même. Ce sont des ressources ad hoc, des écrits « intermédiaires» et provisoires, comme les notes et les plans... Alors que les premières vont réapparaître à la surface des discours-cibles, celles-ci sont généralement destinées à se fondre dans le texte cible. Elles n'ont pas vocation à être réécrites de dicto mais plutôt de re. Au cours de la rédaction conversationnelle, cette fusion nécessite, après une première formulation et un stockage sous la forme de matériaux neutralisés, des remises en ordre et un traitement linguistique complexe. Paulo et Maïté, étudiants déjà bien engagés dans leurs cursus universitaires respectifs sont un bon exemple des possibilités de transposition de cette expertise scripturale en langue étrangère. Ils maîtrisent parfaitement le script de l'écriture académique; ils savent également se doter de ressources langagières en les préconstruisant. Par contre, leur capacité à capter des ressources discursives dans leur environnement est déjà plus différentielle. Paulo en particulier semble plus sensible que Maïté aux formulations des textes écrits. Mais c'est la maîtrise des préconstruits textuels « de bas niveau », comme les nomina-
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lisations, qui leur pose le plus de problèmes alors qu'ils jouent un rôle tant dans les listes de notes que dans le document-cible. Références bibliographiques Adam J.-M. et Revaz F., 1989, « Aspects de la description du texte descriptif: les marqueurs d'énumération et de reformulation », Langue Française 81, Paris, Larousse. Bereiter C. et Scardamalia M., 1987, The Psychology of written composition, London, Lawrence Erlbaum Associates. Bouchard R., 1996, « L'interaction comme outil d'analyse: l'étude du processus rédactionnel», in Interactions et cognition 2/3, Paris, L' Harmattan. Bouchard R., 1999, « La Réalisation orale des discours spécialisés », Bidul2, Cief, Université Lumière - Lyon 2. Bouchard R., 2000, « Ecriture en L2, registres, préconstructions, des questions pour la seule didactique des langues et/ou pour la RAL ? », ELA 120. Bouchard R., 2001, « Production écrite et contrôle de la production en "fin" d'apprentissage de l'écrit en L2 : les conflits entre usage et emploi, préconstruction et syntaxe», in M.-M. de Gaulmyn, R. Bouchard et A. Rabatel (éds), Le Processus rédactionnel: écrire à plusieurs voix, Paris, L'Harmattan. Bouchard R. (à paraître), «Production écrite en FIe et cultures "linguistiques-scolaires"» in F. Cicurel et alii (éds), La Didactique des langues face aux cultures linguistiques et éducatives, Presses de la Sorbonne. Bouchard R. et M.-M. de Gaulmyn, 1997, «Médiation verbale et processus rédactionnel: parler pour écrire ensemble», in M. Grossen et B. Py (éds), Pratiques sociales et médiation symbolique, Berne, Peter Lang. Bouchard R., Simon J.-P. et Vourzay M.-H. (à paraître), « L'inteftextualité au service de l'interdiscursivité. Etude de la production d'une "synthèse de document". A la recherche de "lieux communs" », in P. Marillaud (éd.), L'Intertextualité, Actes du colloque d'Albi 2003. Fabre C., 1990, Les Brouillons d'écolier, Grenoble, L'Atelier du texte. de Gaulmyn M.-M., 1999, « Les techniques syntaxiques de reformulation : du plan écrit au cours magistral», Bidul 2, Cief, Université Lumière - Lyon 2.
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4 «ilfaut d'abord xxx 0 ramasser les les arguments' »
La coordination de la parole-en-interaction et de l'inscription dans l'élaboration collective des topics par Lorenza Mondada
Je [...] me réfère [...] à une conception dynamique du discours conçu comme processus où se déploie l'activité conjointe des interlocuteurs. L'ensemble des discours forme un milieu vivant, mobile, plastique, évolutif, où naissent, croissent, s'alimentent, se reproduisent et meurent les flux de parole échangées qui dessinent des courants instables, mouvants, mais déposent au fil du temps des strates d'usages stabilisés. Double stratification, opérée par l'écriture qui fixe et conserve paroles et textes et par la grammaire qui classe et règle les états de la langue. (de Gaulmyn 2000 : 80)
1. Problématique « Ramasser des arguments» est un type d'activité récurrent dans les contextes professionnels: que ce soit dans des réunions de travail, des discussions entre experts, des séances de brainstorming ou des workshops, outre que dans des tâches scolaires exécutées à plusieurs, il est fréquent que les participants énumérent des arguments, des solutions, des hypothèses, des idées et qu'ils les mettent en commun en les inscrivant sur un support écrit, un transparent projeté, un écran visible pour tous, une feuille de papier déployée sur la table, ou au tableau noir. L'« air de famille» qui unit ces pratiques suggère un lien cons-
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titutif entre activités orales et écrites, entre interaction et inscription, entre parole et objets. L'étude des activités scripturales en interaction s'est développée dans plusieurs domaines, qui se différencient à la fois disciplinairement et par les terrains empiriques observés. D'une part, en linguistique, l'étude des rédactions conversationnelles (Dausendschon-Gay, Gülich et Krafft 1992 ; de Gaulmyn 1994a et 1994b ; Bouchard et de Gaulmyn 1997 ; Krafft et Dausenschon-Gay 1997) observe les modes de formulation spécifiques qui se déroulent dans ce type d'interaction, tenant compte de la façon dont les ressources linguistiques y prennent progressivement forme (Lehnen et Gülich 1997 ; Apothéloz 2001) et des transformations effectuées au fil des reformulations progressives des objets de discours (de Gaulmyn 2000), mais aussi, plus généralement, de l'intégration de ce travail sur les formes linguistiques dans un «système écrivant» plus large (Krafft et Dausendschon-Gay 1999). Dans ce premier cas, les interactions étudiées relèvent essentiellement du milieu universitaire, où des étudiants sont observés durant la réalisation d'une tâche liée à leurs études ou d'une tâche plus expérimentale administrée par les chercheurs. D'autre part, dans le domaine des workplace studies, inspirés de l'analyse conversationnelle et de l' ethnométhodologie, les contextes analysés sont plutôt ceux, non provoqués par les chercheurs mais documentés par eux dans une approche ethnographique, des pratiques de travail impliquant la manipulation de documents, éventuellement dans des environnements technologiques complexes (Suchman 2000). Dans ce cas, l'imbrication entre interaction et inscription est constitutive du travail effectué
-
par exemple dans les pratiques médicales traitant de
dossiers de malades (Dodier 1993 ; Berg 1994 ; Pettinari 1988), dans la recherche scientifique (Law 1986; Miecznikowski et Mondada 2001 ; Mondada 2002), dans les activités de surveillance caractéristiques des centres de contrôle (Heath et Hindmarsh 2000) - et organise à la fois les modes de travail et les objets produits par ce travail. Ce domaine présente l'intérêt d'avoir démontré très tôt le caractère problématique de l'autonomie supposée du verbal par rapport à l'écologie de la situation, aux médiations technologiques et aux « objets intermédiaires» (Latour 1994 ; Conein 1997 ; Jeantet 1998 ; Vinck 1999 ; Brassac et alii 1997). L'observation de la façon dont la parole-en-interaction se déploie dans des environnements structurés par des objets matériels est susceptible d'alimenter un renouveau de la manière dont la linguistique elle-même aborde un certain nombre de problèmes. En effet, une analyse détaillée de l'organisation séquentielle des activités (et non
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seulement des interactions verbales), inspirée de l'analyse conversationnelle et de l' ethnométhodologie, permet de rendre compte de la manière dont une variété de ressources langagières, gestuelles, spatiales, matérielles, sont mobilisées (et par là même configurées) par les interactants en s'ajustant aux contingences de l'action en cours et de sa temporalité (Goodwin 2000). Ceci permet d'envisager une reformulation de l'analyse de nombreux phénomènes classiques de la linguistique - comme le montrent par exemple des analyses récentes de la deixis et de son fonctionnement écologique (Hindmarsh et Heath 2000 ; Mondada à paraître a). Le cas qui nous occupe ici permet de reprendre une autre question classique, celle des procédés de construction interactive des topics. La notion de topic a été étudiée dans la littérature de différentes manières, en insistant notamment sur la structuration de l'information dans la phrase et dans le discours, sur la distribution et différenciation de l'attention, de la mémoire, de la connaissance partagée ou d'autres dimensions cognitives dans des processus de focalisation et de thématisation (p. ex. Lambrecht 1986 ; Givon 1992). Une approche interactionniste, voire conversationnaliste, de la topicalité la rattache plutôt à l'activité en cours, à l'organisation de l'interaction et de la participation (Mondada à paraître b). Plus particulièrement, nous aimerions montrer que les procédés de construction interactive du topic se structurent spécifiquement selon les types d'activités dans lesquels ils prennent place et que l'élaboration des contributions topicales dans l'interaction est sensible aux possibilités et contraintes de l'inscription qui les accompagne. Nous le ferons en nous focalisant sur la première partie de l' enregistrement qui fait l'objet des analyses de ce volume, en nous concentrant sur la façon dont des topics, traités comme des « arguments» par les participants, sont recherchés, discutés et inventoriés au début de la rédaction conversationnelle, où ils sont notés de manière synthétique sur une feuille, avant d'être repris pour être rédigés dans un texte. Notre analyse se limitera à séquentialité de cette activité, en privilégiant l'organisation tour par tour du listage collectif des arguments, ainsi que la superposition entre les tours de parole et les activités d'inscription. Pour ce faire, nous avons retranscrit la partie du corpus qui nous intéresse ici (la première partie, correspondant aux paragraphes 1-370 de la transcription intégrale figurant en annexe). En absence d'un enregistrement vidéo qui aurait permis de travailler de manière plus précise cet aspect, nous avons soigneusement transcrit tous les bruits audibles de traçage au stylo sur la feuille, en synchronisant le début et la fin (marqués par les crochets < et » de ces moments d'inscription (indiquée à la fin du segment par TRACE) avec la
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parole transcrite. Ceci nous a permis de reconstituer, sur la base des traces sonores d'une activité gestuelle, une des propriétés temporelles de cette activité d'inscription, qui nous semble devoir être prise en considération dans l'analyse du déroulement temporel de l'activité verbale - puisqu'elle s'imbrique en elle de manière structurante. Dans ce qui suit, nous allons donc analyser d'abord la définition endogène de l'activité par les participants (section 2) et son organisation séquentielle (3), pour ensuite détailler les modes d'introduction des topics proposés comme arguments (4) et les modes de développement collectif de ces topics (5), y compris dans des trajectoires divergentes marquées par des désaccords (6), en tenant compte de la manière dont ils sont finalement ratifiés et reformulés en vue de leur inscription (7). 2. La définition locale de l'activité L'activité dans laquelle sont engagés les deux participants leur est proposée par un tiers qui énonce une « consigne» au tout début de l'enregistrement (-~1
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