La quête du serpent à plumes: Arts et religions de l'Amérique précolombienne. Hommage à Michel Graulich 2503541410, 9782503541419

Michel Graulich est l'un des plus grands specialistes des religions de l'ancien Mexique. Directeur d'etud

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French, Spanish Pages 482 [484] Year 2011

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La quête du serpent à plumes: Arts et religions de l'Amérique précolombienne. Hommage à Michel Graulich
 2503541410, 9782503541419

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LA QUÊTE DU SERPENT À PLUMES ARTS

ET RELIGIONS

DE

HOMMAGE

L'AMÉRIQUE

À MICHEL

PRÉCOLOMBIENNE

GRAULICH

BIBLIOTHÈQUE DE L'ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES

SCIENCES RELIGIEUSES

VOLUME

146

Illustration de couverture : Représentation du dieu Quetzalcoatl,

Codex Borbonicus, pl. 20. Photothèque de l’Assemblée nationale.

LA QUÊTE DU SERPENT À PLUMES ARTS

ET RELIGIONS

DE

HOMMAGE

L'AMÉRIQUE

À MICHEL

PRÉCOLOMBIENNE

GRAULICH

Sous la direction de

Nathalie RAGor, Sylvie PEPERSTRAETE et Guilhem OLIvIER

BREPOLS

en

La Bibliothèque de l'École des Hautes Études, Sciences religieuses La collection Bibliothèque de l'École des Hautes Études, Sciences religieuses, fondée

en

1889 et riche de plus de cent trente volumes,

reflète la diversité des

enseignements et des recherches menés au sein de la Section des sciences religieuses de l’École Pratique des Hautes Études (Paris, Sorbonne). Dans l'esprit de la section qui met en ceuvre une étude scientifique, laique et pluraliste des faits religieux, on retrouve dans cette collection tant la diversité des religions et aires culturelles étudiées que la pluralité des disciplines pratiquées: philologie, archéologie, histoire, philosophie, anthropologie, sociologie, droit. Avec le haut niveau de spécialisation et d'érudition qui caractérise les études menées à l'EPHE, la collection Bibliothèque de l'École des Hautes Études, Sciences religieuses aborde aussi bien les religions anciennes disparues que les religions contemporaines, s intéresse aussi bien à l'originalité historique, philosophique et théologique des trois grands monothéismes — judaïsme, christianisme, islam — qu'à la diversité religieuse en Inde, au Tibet, en Chine, au Japon, en Afrique et en Amérique, dans

la Mésopotamie et l'Égypte anciennes, dans la Grèce et la Rome antiques. Cette collection n'oublie pas non plus l'étude des marges religieuses et des formes de dissidences, l'analyse des modalités mémes de sortie de la religion. Les ouvrages sont signés par les meilleurs spécialistes français et étrangers dans le domaine des sciences religieuses (chercheurs enseignants à l'EPHE, anciens élèves de l'École,

chercheurs invités. ..).

Directeur de la collection: Gilbert DAHAN Secrétaire de rédaction: Cécile GUIVARCH Secrétaire d'édition: Anna WAIDE Comité de rédaction: Denise AIGLE, Mohammad Ali AMIR-MoEzzi, Jean-Robert ARMOGATHE, Jean-Daniel Dubois, Michael Houseman, Alain Le BouLLuEc, Marie-Joseph PIERRE, Jean-Noël ROBERT

© 2011

Brepols Publishers n.v., Turnhout, Belgium.

All rights reserved. No part of this publication may be reproduced, stored in a retrieval system, or transmitted, in any form or by any means, electronic, mechanical, photocopying, recording, or otherwise without the prior permission of the publisher. D/2011/0095/72 ISBN 978-2-503-54141-9

Printed on acid-free paper

BIOGRAPHIE

Né en 1944 à Orroir, en Belgique, Michel Graulich s'intéresse à PAmérique ancienne des son adolescence. Il commence toutefois ses études par une licence en histoire de l'Antiquité, à l'Université de Gand, et consacre son mémoire aux poésies latines de Venance Fortunat (vr siecle)! Il se lance ensuite, à l'Université Libre de Bruxelles, dans une licence en histoire de l'art

et archéologie. L'orientation «civilisations non européennes » y est alors en plein essor et c'est sous la houlette d'Annie Dorsinfang-Smets qu'il fait ses premiers pas d'américaniste avec, en 1970, un mémoire consacré au sacrifice humain chez les Aztéques. Ce théme qui lui est cher va l'accompagner tout au long de sa brillante carrière. Jeune assistant à PULB, Michel Graulich commence, très logiquement, sa

thése de doctorat en poursuivant ses recherches sur le sacrifice humain. Mais, alors qu'il décortique les données disponibles sur les fétes des vingtaines en quéte de renseignements sur les sacrifices qui s'y déroulaient, lui vient l'idée du décalage du calendrier indigène qui va le conduire à une profonde réinterprétation des fétes en question. I] réoriente donc sa thése, qu'il soutient le 10 janvier 1980 et qui est couronnée, en 1982, au concours annuel de l'Académie Royale de Belgique (Classe des Lettres). Ses « mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique » sont connus dans le monde entier et ont grandement contribué à une meilleure compréhension de la religion aztèque. Peu après, Michel Graulich succède à Annie Dorsinfang-Smets et développe les cours sur l'Amérique ancienne à l'ULB. Aux cours et séminaires spécialisés d'histoire de l'art et archéologie, viendront s'ajouter des cours d'histoire des religions. En 1990, le chercheur est également nommé directeur d'études à l'EPHE, Section des Sciences Religieuses, où il dispensera son savoir quinze années durant. Les cours donnés à l'EPHE lui permettront de développer ses recherches, notamment sur Montezuma II et sur le sacrifice humain chez les

Aztèques, auquel il consacrera finalement un remarquable livre en 2005, trente ans après son mémoire de licence sur le même sujet. La boucle est bouclée. Les enseignements de Michel Graulich ont marqué, pendant près de trente ans, de nombreuses générations d'étudiants, à Bruxelles comme à Paris. Un certain nombre d'entre eux se sont à leur tour orientés vers la recherche,

suivant les traces érudition hors du mais aussi d'un disponible et doté

du maitre. Tous ont gardé le souvenir d'un professeur d'une commun, pouvant manier la critique de manière redoutable homme d'une incroyable gentillesse, toujours à l'écoute, d'un étonnant sens de l'humour. Sylvie Peperstraete

L'ŒUVRE

DE MICHEL GRAULICH

«Mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique » Michel Graulich a consacré un large pan de ses recherches à l'étude des mythologies mésoaméricaines. Sa thèse doctorale, intitulée Mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique, et soutenue à l'Université Libre de

Bruxelles en 1980, se concentre autour de deux thémes principaux que sont la compréhension des récits mythiques et l'interprétation des rites!. Tout au long de sa carrière Michel Graulich continuera à développer, approfondir et enrichir les nombreuses hypothèses et thématiques diverses abordées dans Mythes et rituels?.

1. M. GRAULICH, Mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique (‘Académie Royale de Belgique, Mémoires de la Classe de Lettres”), Collection in-8?-2* série, t. LX VII, Fascicule 3,

Bruxelles, Palais des Académies, 1987. Cet ouvrage est la publication de la première partie de la thèse de doctorat de M. Graulich, complétée d’un résumé de la seconde partie. Les chapitres de la seconde partie de sa thèse, tous consacrés aux fêtes des vingtaines, absents de cet ouvrage, ont

fait l'objet de publication sous forme d'articles dans diverses revues scientifiques : M. GRAULICH, «Les origines classiques du calendrier rituel mexicain», Boletín de Estudios Latinoamericanos y del Caribe 20 (1976), p. 3-16; «La structure du calendrier agricole des anciens Mexicains»,

Lateinamerika Studien 6 (1980), p. 99-113; «Ochpaniztli ou la fête aztèque des semailles», Anales de Antropología 18, 2 (1981), p. 59-100; «Quecholli et Panquetzaliztli, une nouvelle interprétation», Lateinamerika Studien 10 (1982), p. 159-73; «Les mises à mort doubles dans les rites sacrificiels des anciens Mexicains», Journal de la Société des Américanistes 68 (1982),

p. 49-58; « Tlacaxipehualiztli ou la fête aztèque de la moisson et de la guerre », Revista Española de Antropología Americana

12 (1982), p. 215-54; « Tozoztontli, Huey Tozoztli et Toxcatl, fétes

aztèques de la moisson et du milieu du jour», Revista Española de Antropología Americana 14 (1984), p. 127-64; «El problema del bisiesto mexicano y las xochipaina de Tititl y de Huey Tecuilhuitl », Revista Española de Antropología Americana 16 (1986), p. 19-33; « Miccailhuitl : The Aztec Festivals of the Deceased », Numen 36, 1 (1989), p. 43-71.

2. M. GRAULICH, «Los mitos mexicanos y mayas-quichés de la creación del sol », Anales de Antropología 24 (1987), p. 289-326 ; « Double Immolations in Aztec Sacrificial Ritual », History of Religions 27, 4 (1988), p. 393-404; «L'arbre interdit du paradis aztèque », Revue de l'Histoire des Religions 207, 1 (1980), p. 31-64; « Afterlife in Ancient Mexican Thought » dans B. ILLIUs, M. LAUBSCHER (éd.), Circumpacifica, Festschrift für Thomas S. Barthel, 2 vol., Francfort, Bern, New York, Paris, Peter Lang, vol. 2 p. 165-87; «Les fêtes mobiles des Aztèques», Annuaire de l'École Pratique des Hautes Études, Section des Sciences Religieuses 99 (1992), p. 31-7; «Las

brujas de las peregrinaciones aztecas », Estudios de Cultura Náhuatl 22 (1992), p. 87-98; « Aztec Festivals of the Rain Gods», des Aztèques

/ndiana

(suite) », Annuaire

13 (1995), p. 21-54;

de l'École Pratique

des

«Fétes mobiles et occasionnelles

Hautes

Études,

Section

des Sciences

Religieuses 102 (1995), p. 25-31; « Fêtes mobiles et occasionnelles des Aztèques (suite et fin)», Annuaire

de l'École Pratique

des Hautes

Études, Section

des Sciences

Religieuses

103

(1996),

9

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

Les mythes des anciens Mexicains avaient depuis longtemps attiré l'attention de chercheurs tels que Eduard Seler, Konrad T. Preuss, Herman Beyer et d'autres encore qui ont judicieusement interprété certains d'entre eux?. Les fétes des vingtaines et leurs rituels avaient également donné lieu à la publication de divers travaux^. Cependant jamais ces mythes n'avaient fait l'objet d'une étude globale et n'avaient ainsi été mis en liaison avec les rituels des fétes. C'est l'un des grands apports de Michel Graulich que d'avoir interprété les rituels, et plus particuliérement ceux des vingtaines, au travers des mythes. La méthodologie de Michel Graulich s'inspire de celle développée par Georges Dumézil dans son travail fondateur sur la mythologie des peuples indo-européens et des travaux de Claude Lévi-Strauss sur les mythologies américaines. Dans une démarche comparatiste, Michel Graulich réunit de façon exhaustive toutes les données mythiques à disposition, rapprochant les plus diverses et les plus contradictoires en apparence, les mettant en parallèle, les comparant inlassablement. Exploitant au maximum ces récits mythologiques, méme si nombre d'entre eux sont tronqués, fragmentaires ou mentionnés uniquement par bribes ou allusions, Michel Graulich reconstitue la trame de chacun, identifie les variantes pour mieux les réduire, établit des rapprochements entre les mythes construits sur le méme modèle et arrive à en dégager un système. Il n'hésite pas à établir avec bonheur des comparaisons très fécondes entre les différents groupes mésoaméricains, faisant appel aux récits mayasquichés du Popol Vuh, mais également aux mythes contemporains, démontrant d'ailleurs au passage la profonde unité des mythes mésoaméricains.

p. 33-9; « Autóctonos y recién llegados en el pensamiento mesoamericano », dans A. GARRIDO ARANDA (éd.), Pensar América. Cosmovisión mesoamericana y andina, Cordoue, Cajasur y Ayuntamiento de Montilla 1997, p. 137-55; « Atamalcualiztli, fiesta azteca del nacimiento de Cintéotl-Venus», Estudios de Cultura Náhuatl 32 (2001), p. 359-70; «Les paradis récurrents

du Mexique ancien. Représentations du temps dans les religions» dans V. PIRENNE-DELFORGE, Ó. Tunca (éd.), Actes du Colloque organisé par le Centre d'Histoire des Religions de l'Université

de Liège (‘Bibliothèque de la Faculté de Philosophie et Lettres de l'Université de Liege" 286), Droz, Genève

2003, p. 87-94.

3. Par exemple: E. SELER, Collected Works in Mesoamerican Linguistics and Archaeology. J. E. S. Thompson, F. B. RicHARDsoN (éd.), Lancaster, California, Labyrinthos, 1996, vol. V, p. 3-101; K.T. PREuss, H. BEvER, Obras completas 1. Mito y Symbología del México Antiguo, Mexico, El México Antiguo 10; W. Jimenez Moreno, «Tula y los Toltecas según las fuentes históricas », Revista Mexicana de Estudios Antropológicos 5 (1941), p. 79-83; R. GirarD, Le Popol-Vuh.

Histoire culturelle des Maya-Quichés,

Paris, Payot,

1954; R. MORENO

DE LOS ARCOS,

«Los cinco Soles cosmogónicos », Estudios de Cultura Náhuatl 7 (1967), p. 183-210.

4. Par

exemple:

E. De

JowcHE,

«Le

Calendrier

Mexicain.

Essai

de

synthèse

et

de

coordination », Journal de la Société des Américanistes 3, n° 2 (1906), p. 197-227; J. BRoDA,

« Tlacaxipehualiztli: A Reconstruction of An Aztec Calendar Festival from Sources»,

Revista

Española

de Antropología

Americana

5 (1970), p.

197-274;

16th Century J. BRopA,

«Las

fiestas aztecas de los dioses de la lluvia: una reconstruction según las fuentes del siglo xvi», Revista Española de Antropología Americana 6 (1971); A. López AUSTIN, «Fiesta del fuego nuevo, según el Códice Florentino », Anuario de Historia 3 (1963), p. 73-91; A. LóPEZ AUSTIN, «Religión y magia en el ciclo de las fiestas aztecas», Religión, mitología y magia 2, Mexico,

Museo Nacional de Antropología, 1969, p. 3-29.

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L'œuvre de Michel Graulich

La première partie de Mythes et rituels est consacrée à une relecture des grands cycles mythiques mésoaméricains. Leur analyse minutieuse a conduit Michel Graulich à la conclusion novatrice que ces mythes racontent toujours la méme histoire, celle d'une ère ou d'un peuple, congue sur le modèle d'un jour et basée sur l'union puis la disjonction des contraires et leur équilibre gráce à l'alternance. Les mythes d'origine Le théme central des mythes d'origine (Création de la terre, Tamoanchan)

est celui d'une rupture entre ciel et terre suite à une faute originelle. Pour sa démonstration, Michel Graulich s'appuie principalement sur le mythe de l'arbre brisé de Tamoanchan, récit souvent laissé pour compte car crédité à tort d'une trop forte influence biblique. Son étude lui permet de démontrer comment le couple primordial, Tonacatecuhtli et Tonacacihuatl, vivait au Tamoanchan dans une parfaite harmonie avec ses enfants jusqu'à ce qu'une transgressiond'interdit consistant à cueillirune fleur, ce qui cache une souillure d'ordre sexuel, entraîne le bris d'un arbre. Cet acte/faute a pour conséquence la rupture entre ciel et terre, l'expulsion des dieux fautifs sur terre, l'irruption des ténébres, l'apparition de la mort. La faute est un acte de création qui entraine l'apparition du mais, de l'Etoile du matin et la succession des générations en compensation de la perte de l'immortalité. Le Tamoanchan d'avant la faute, c'est le temps de «l'union des contraires » où règne l'indifférencié des origines et l’immortalité ; la faute entraîne la «disjonction des contraires ». Présentant une structure comparable, le mythe de la création de la terre par le déchirement de Tlalteotl, étre primordial chaotique, permet d'introduire un certain ordre dans l'univers et entraîne l'apparition des plantes utiles mais là encore au prix d'une rupture avec l'empyrée du couple créateur. Michel Graulich insiste sur une notion fondamentale qui apparait des les origines : celle de la dette. Les dieux ont payé de leur vie pour l'apparition des plantes utiles, ils ont versé leur sang pour créer l'humanité. Les hommes, les macehualtin, «mérités par la pénitence», sont irrémédiablement débiteurs des dieux auxquels ils doivent « payer leur dette» par la pénitence, l'offrande et le sacrifice. La création du quatrième Soleil

Suivant le fil de la théorie de Michel Graulich, pour renouer le contact avec l'empyrée, pour instaurer «l'équilibre des contraires», il faut une médiation et l'intervention d'un ou de héros qui, gráce à leur sacrifice, permettront de vaincre l'obscurité et la mort. L'analyse qu'il propose des mythes de la création du quatrième Soleil en est un remarquable exemple.

5.

Dans

son ouvrage

Le sacrifice humain

chez les Aztéques,

Paris,

Fayard,

2005,

Michel

Graulich répond aux critiques qui lui ont été faites sur l'authenticité préhispanique du mythe de Tamoanchan. Il y démontre longuement l'universalité temporelle et spatiale du mythe du paradis perdu et de l'arbre rompu en citant des exemples de Babylone à l'Amérique en passant par l'Inde et l'Afrique (Chapitre I, p. 61-74).

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N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

Selon les différentes versions de ce mythe, les dieux restés dans l'obscurité,

conséquence de la fin du troisième Soleil, se réunirent à Teotihuacan pour créer les nouveaux luminaires du monde. Tecciztecatl 4 Silex fut choisi pour devenir Soleil et Nanahuatl Lune. Mais au moment de s'élancer dans le bücher Tecciztecatl recula et ce fut Nanahuatl qui se jeta le premier dans la fournaise et devint Soleil. Tecciztecatl le suivit et se transforma en Lune. Soleil resta immobile dans le ciel, exigeant le sang du sacrifice des dieux pour se mettre en marche, ce qui fut fait. Comme le démontre Michel Graulich, par leurs sacrifices respectifs Nanahuatl et Tecciztecatl rétablissent le contact avec l'empyrée dont les dieux avaient été exclus aprés la faute de Tamoanchan et instaurent les deux au-delás pour les méritants que sont le Tonatiuh IIhuicac et le Tlalocan. Nanahuatl ne peut pas renouer complétement avec l'empyrée perdu mais il établit un équilibre basé sur l'alternance du jour et de la nuit, de la saison sèche (assimilée au jour) et de la saison des pluies (assimilée à la

nuit). En contrepartie de ses dons, l'astre naissant demande des coeurs pour l'alimenter. C'est le début de la guerre sacrée que l'on retrouve également dans le mythe des 400 Mimixcoa, armés par l'astre naissant mais massacrés ensuite car ils ne lui rendaient point hommage. Les mises à mort des guerriers sont d'ailleurs toujours doubles, destinées au soleil pour ce qui est du coeur arraché et à la terre pour ce qui est de la téte décapitée. La structure du mythe de Teotihuacan est tout à fait comparable à celle du récit des aventures des jumeaux du Popol Vuh qui vont affronter les seigneurs du Xibalba et passent par le bücher et la mort pour renaitre et devenir Soleil et Lune. Cette trame apparait également dans le mythe de la jeunesse de Quetzalcoatl et perdure encore dans nombre de mythes contemporains$. Poursuivant son analyse du mythe de Teotihuacan, Michel Graulich souligne également l'importance du sacrifice. C'est par une véritable pénitence purificatrice, où il offre son sang sur des épines et se libère ainsi de son corps, que le sacrifice de Nanahuatl lui permet d'augmenter son feu intérieur, de retourner auprés de ses créateurs et d'étre sacré soleil. Les pénitences de Tecciztecatl ne sont que du faux sang et parconséquent son sacrifice est considéré comme inférieur. Le mythe de Teotihuacan est le prototype de tout sacrifice humain et il instaure un modéle de comportement à suivre par les humains: par le biais des pénitences on allège son pesant corps terrestre; par le sacrifice ultime de soi on peut vaincre la mort et acquérir une survie dans un au-delà glorieux.

6. Pour exemple: A. ICHON, La religion des Totonaques de la Sierra, Paris, Éditions du CNRS, 1969; R. WiLLIAM García, Mitos Tepehuas, Xalapa, Universidad Veracruzana, 1972; G. M. FosTER, Sierra Popoluca Folklore and Beliefs, Berkeley, University of California, 1945,

p. 177-250; G. García DE León, «El universo de lo sobrenatural entre los nahuas de Pajapan, Veracruz», Estudios de Cultura Náhuatl 8 (1969), p. 279-311; I. KeLLY, «World View of a Highland Totonac Pueblo » dans A. Pompa v Pompa (éd.), Summa anthropologica en homenaje a Roberto J. Weitlaner, Mexico, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1966, p. 395-411 ; J. E. S. ThomPson, Ethnology of the Mayas of southern and central British Honduras, Chicago,

Field Museum of Natural History ("Anthropological Series" 17), n°1, 1930.

12

L'œuvre de Michel Graulich

Le code «nouveaux venus-conquérants-soleil (et surtout soleil levant); agriculteurs-autochtones-soleil déclinant-lune »

Le mythe de la création du soleil et de la lune à Teotihuacan permet à Michel Graulich de montrer que le contraste entre Nanahuatl et Tecciztecatl a aussi une dimension sociologique. Selon son analyse, il exprime l'opposition fondamentale entre les nomades/nouveaux venus/conquérants/humbles mais vaillants/solaires et les autochtones/civilisés mais décadents/agriculteurs/sédentaires ayant perdu leur vaillance/lunaires. La lutte entre le

nouveau venu et l'autochtone, entre l'ainé et le cadet, est un théme récurrent

en Mésoamérique qui, comme le démontre notre auteur, apparait dans bien d'autres cycles mythiques: la lutte entre Quetzalcoatl et ses oncles fratricides qu'il met à mort sur le Mixcoatepec ; le combat que Huitzilopochtli livre à sa naissance contre sa sœur la lune et ses frères les 400

Huitznahuas ; la lutte

des jumeaux du Popol Vuh contre leurs frères aînés Hunbatz et Hunchouen, savants lettrés, qu'ils transformeront en singes, etc. Les Quatre Soleils et les bouleversements introduits par les Mexicas

Les mythes des éres ou Soleils cosmogoniques racontent l'histoire de plusieurs ères qui se succèdent et se terminent dans des cataclysmes, chacun associé à un élément:

Soleil de Terre, Soleil de Vent, Soleil de Feu, Soleil

d'Eau, Soleil de Mouvement. Deux groupes de sources rapportent les mythes des ères, l'un faisant état de quatre Soleils, l'autre de cinq. Cette dernière tradition à cinq Soleils, bien moins répandue que la première, est principalement attestée dans les sources sur les Mexicas (Leyenda de los Soles et Historia de

los Mexicanos por sus Pinturas). Elle serait le résultat des changements opérés par les Mexicas qui firent de leur avènement le début d'une nouvelle ère, d'un nouveau Soleil, le cinquième, dominé par le mouvement. Approfondissant cette interprétation déjà proposée par Chavero, Vaillant et Brundage”, Michel Graulich interprète la succession des Soleils comme une lutte fratricide entre Quetzalcoatl et Tezcatlipoca, l'un étant l'agent destructeur du Soleil de l'autre pour devenir Soleil à sa place. L'introduction d'un cinquième soleil par les Mexicas se traduit alors par une permutation entre les Soleils d'Eau et de Terre. Ce changement de l'ordre des Soleils entraine un bouleversement dans la logique de succession des Soleils ainsi que dans l'évolution des nourritures et des transmutations des humains, lesquelles reflétaient jusqu'alors une idée de progression. Les Mexicas firent naître leur Soleil à Coatepec près de Tula et imposerent leur dieu Huitzilopochtli dans les rites et les temples en lieu et place de Quetzalcoatl, mais l'histoire ne leur laissa pas le temps de diffuser leur réforme au reste de la Mésoamérique.

7. À. CHAVERO, Agüeros,

1904,

«Calendario p. 260;

G.

Azteca», dans Obras

C. VaiLLANT,

Aztecs

1, Escritos diversos, Mexico, Victoriano

of Mexico.

Origin,

Rise

Nation, Baltimore, Penguin Books, 1965, p. 85-86; B. C. BRUNDAGE, Mexica Aztecs, Londres, University of Texas Press, Austin, 1972, p. 5.

and

Fall of the Aztec

À Rain

of Darts.

The

13

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

Le «modèle du jour »

Un des aspects importants de la théorie de Michel Graulich est l'idée que le modele du jour structure la pensée mythique et historique des anciens Mexicains.

Le soleil/jour naît au milieu de la nuit et l'astre diurne fait demi-

tour au milieu du jour pour retourner vers l'Est; l'aprés-midi c'est seulement son reflet que l'on voit dans le ciel gráce à un miroir d'obsidienne, c'est donc un faux-soleil, un soleil-lune. Un jour, un Soleil, une ère, une vie d'homme ou

l'histoire d'un peuple sont conçus «suivant le modèle du jour, de l'alternance de la lumière et de l'obscurité, d'une montée au zénith, d'un déclin et d'une descente au nadir». Ainsi, suivant la thèse de Michel Graulich, s'instaure sur

le modéle du jour une succession de cycles qui structurent l'espace et le temps des anciens Mexicains. A l'aprés-midi dominé par un faux-soleil, reflet de l'astre véritable visible seulement le matin, correspondent la seconde moitié de la saison sèche et l'au-delà Tlalocan. La nuit, le Soleil voyage dans le monde souterrain, le Mictlan, le pays des morts et le temps est celui de la saison des pluies. A son lever, le Soleil, jeune et vaillant, parcourt le ciel et la Maison du Soleil et sur le plan saisonnier on est dans la première partie de la saison sèche. Le récit de «l'histoire» toltèque dominé par la figure de Quetzalcoatl illustre bien ce modèle. La première partie du mythe narre les aventures de Mixcoatl, vaillant guerrier solaire invincible jusqu'à sa rencontre avec la chtonienne et autochtone Chimalman. Séduit par ce personnage qui cherche à sédentariser le migrant, il perd sa force guerrière, sa force de mouvement. Affaibli, Mixcoatl est assassiné par ses frères mais il a un fils posthume: Quetzalcoatl. Mis au courant du triste destin de son pére, ce dernier va chercher ses ossements pour les enterrer sur le Mixcoatepec. S'ensuit une lutte avec ses oncles fratricides pour la consécration du temple dédié à Mixcoatl, chacun voulant procéder à Pallumage du feu. Vainqueur, Quetzalcoatl met ses oncles à mort. Cet épisode du Mixcoatepec est une variation ritualisée sur le thème de la création du quatrième Soleil où l'allumage du feu remplace le saut dans le brasier. Le jeune Quetzalcoatl conquérant, nouveau venu, soleil levant, en lutte

avec ses oncles autochtones et lunaires n'est plus le méme dans la seconde partie de sa vie. A Tollan, cité paradisiaque oü tout pousse en abondance et qui ressemble fort au Tlalocan, vit un vieillissant et lunaire Quetzalcoatl. On est dans l'aprés-midi et une faute va conduire à la rupture. C'est Tezcatlipoca qui entraine le Serpent à Plumes à fauter en lui faisant boire du pulque; ivre, il fait venir sa sœur et passe la nuit avec elle. Prenant conscience de ses égarements, Quetzalcoatl quitte Tollan et s'en va vers l'Est pour mourir. Dans d'autres versions c'est Huemac — personnage en tout point lunaire— qui, par ses appétits sexuels hors normes ou en tombant dans les pièges tendus par Tezcatlipoca, conduit Tollan à la catastrophe. Dans tous les cas, il s'agit de la fin d'un soleil lunaire qui marque la fin d'une ére. Aprés sa mort dans le bücher, la réapparition de Quetzalcoatl sous l'aspect de Vénus annonce un nouvel áge. Dans la seconde partie de Mythes et rituels, Michel Graulich propose une réorganisation et une nouvelle lecture du calendrier rituel. I] part du constat qu'au moment de la Conquéte, les fétes des vingtaines, au contenu pourtant 14

L'œuvre de Michel Graulich

nettement agricole, étaient en décalage par rapport à l’année réelle et aux phénomènes naturels saisonniers qu'elles étaient censées célébrer. Il suggère et démontre que les anciens Mexicains n’ajustaient pas leur année de 365 jours sur l'année tropique, qu'ils n'utilisaient ni bissexte ni intercalation. A la différence de ses prédécesseurs, qui ont généralement interprété les fétes des vingtaines en fonction de leur position dans l'année en 1519, sans tenir compte du décalage, Michel Graulich propose une réorganisation de ce calendrier qu'il constate en avance d'une demi-année sur l'année tropique. Partant de deux vingtaines dédiées aux Tlaloques et dont les noms font explicitement référence à des phénomènes saisonniers, Atlcahualo, « Arrêt des Eaux » et Atemoztli, « Chute des Eaux », Michel Graulich va reconstruire une année « idéale ». Atlcahualo, placée en 1519 entre le 13 février et le 4 mars, est

replacée à la fin de la saison des pluies et Atemoztli, située en 1519 entre le 10 et le 29 décembre, est déplacée en juillet au cœur de la saison des pluies. Les autres fêtes s'organisent logiquement à la suite en deux groupes parallèles, définissant deux demi-années. L'une commençant par Ochpaniztli, terrestre et nocturne et correspondant à la saison des pluies, l'autre débutant par Tlacaxipehualiztli, céleste et diurne et renvoyant à la saison sèche. L'étude des contenus des fêtes met également en lumière le parallélisme de certaines d’entre elles, ce qui renforce cette réorganisation du calendrier. Poursuivant sa reconstitution du calendrier, Michel Graulich détermine

avec précision la date à laquelle fêtes du calendrier et année réelle correspondaient : l'an 682 de notre ère. L'auteur va plus loin en affirmant que les anciens Mexicains laissaient volontairement se décaler leur calendrier pour plusieurs raisons: en ayant de l'avance par rapport au phénomène naturel, le rituel pouvait influencer l'événement et donnait toute puissance aux prétres. En outre, toute intercalation aurait perturbé l'ingénieuse organisation qui permettait aux cycles de 365 et de 260 jours de coincider entre eux tous les 52 ans et de coincider tous les 104 ans avec le cycle vénusien de 584 jours. Ainsi réorganisées, les fétes forment un ensemble logique et structuré auquel Michel Graulich a donné une interprétation nouvelle. I] lui est vite apparu évident queles structures du mythe et de l'année rituelle coincidaient, les rituels des vingtaines réactualisant bien souvent les grands mythes. En outre, à l'instar des mythes, les fétes des vingtaines reproduisent également l'histoire d'une ére, d'un Soleil. Montezuma ou l'apogée et la chute de l'empire aztéque

Poursuivant inlassablement sa quéte de connaissance du passé précolombien, Michel Graulich s'est intéressé à une figure particuliérement importante de l'histoire aztèqueet lui a consacré un livre: Montezuma ou l'apogée et la chute de l'empire aztéque?. Cet ouvrage s'inscrit dans le renouveau en France, à partir des années 1980, des études biographiques. Comme le signalait Pierre Bourdieu, il s'agissait de dépasser la soi-disant opposition entre

8.

M. GRAULICH,

Montezuma

ou l'apogée et la chute de l'empire aztéque, Paris, Fayard,

1994.

15

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

histoire individuelle et histoire collective?. Pour ne citer qu'un exemple, à travers l'examen de la vie de saint Louis, Jacques Le Goff présente un tableau de la société, la religion, Part et l'imaginaire de la France du xir siecle!”, Cela étant, le brillant médiévaliste consacre la plus grande partie de son livre à la difficile recherche de la personnalité de Louis IX, au-delà du stéréotype du roi et du modèle du saint. De la méme façon, Michel Graulich à qui nous devons, comme nous l'avons signalé, divers ouvrages sur les mythes et les rites des anciens Mexicains!!, s'interroge sur la possibilité de connaître un souverain mexica de la fin du xv* siècle et du début du xvr siècle. Le caractere officiel ou hagiographique de la plupart des documents consacrés à saint Louis, à une époque où émerge à peine le concept d'individu, conduit Le Goff à émettre la question suivante: Saint Louis a-t-il existé? Pareillement, Graulich se demande dans quelle mesure un portrait fidèle d'un personnage préhispanique est réalisable à partir de sources partisanes et contradictoires. La fascination suscitée par la figure tragique de Motecuhzoma II, dernier empereur intronisé des Mexicas, ne pouvait manquer d'attirer les spécialistes de l'ancien Mexique. Pourtant, comme le signale Graulich, ... les spécialistes du passé précolombien ont habituellement une formation d'archéologue ou d'anthropologue, non d'historien. Quant aux historiens, ils s'intéressent à la Conquéte et à ce qui l'a suivie, non à ce qui l'a précédée. De plus, ils n'aiment guére les mythes, alors que ceux-ci sont essentiels dans l'histoire qui va nous occuper... (p. i.

En effet, l'utilisation des mythes pour analyser les actes de Motecuhzoma constitue l'un des aspects les plus novateurs de l'ouvrage de Graulich. Mais revenons aux sources disponibles pour l'étude de la vie du dernier souverain mexica. Il s'agit principalement des récits des Espagnols, certains témoins directs des événements de la Conquéte, et des écrits des Indiens et des religieux qui réalisèrent leurs œuvres à l'époque coloniale. Confrontant ces sources, Graulich conclut que les premieres, en général, sont plus fiables que les fameux écrits qui constituent ce que l'on a appelé «la vision des vaincus ». Ces derniers permettent néanmoins d'élucider bien des événements obscurs de la Conquête, tout en éclairant la perspective indigène sur cet épisode tragique de leur histoire. En outre la «confiance» de Graulich vis-à-vis des sources espagnoles est relative ; il démontre par exemple que l'Historia verdadera de la conquista de Bernal Díaz del Castillo, fréquemment utilisée par les historiens qui célébrent l'extraordinaire mémoire du vieux conquistador, doit étre employée avec circonspection. En effet, Graulich surprend Bernal Díaz à plusieurs reprises en flagrant délit de mensonge ou d'exagération manifeste. Mensonge lorsqu'il affirme que les Mayas ouvrirent les hostilités lors du premier contact à Cabo Catoche — on soupgonne méme que Bernal

9. P. BourDIEu, Choses dites, Paris, Le sens commun, Minuit, 1987, p. 43. 10. J. LE Gorr, Saint Louis, Paris, Gallimard, 1996. 11. M. GRAULICH, Mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1987; Quetzalcóatl y el espejismo de Tollan, Anvers, Instituut voor Amerikanistiek, 1988.

16

L'œuvre de Michel Graulich

Díaz ne participa point à l'expédition de Córdoba — ou quand il raconte que Cortez détruisit les idoles des Totonaques de Cempoala. De méme, Graulich signale les différences entre les récits espagnols ou encore les silences significatifs durant des moments difficiles ou des épisodes peu glorieux. Nous savons par exemple que suite à la destruction des statues du Grand Temple, Motecuhzoma enjoignit à Cortez d'abandonner Mexico-Tenochtitlan, un fait que le futur marquis del Valle passe sous silence dans ses Cartas de relación. I] peut ainsi rejeter la faute du soulévement des habitants de la capitale sur l'arrivée de Narváez et de ses troupes. Au sujet des sources indigènes, la critique de Graulich s'exerce d'une autre façon. Il s'agit en effet de reconstructions des événements élaborées après la Conquéte, souvent dans le but de minimiser la résistance aux envahisseurs voire d'exalter la collaboration de certains groupes avec les Espagnols. A plusieurs reprises, Graulich relève les incohérences des récits qui se fondent sur la Chronique X. Il cite par exemple l'anecdote rapportée par Diego Durán qui prétend que les conquistadors découvrirent dans le palais d'Axayácatl les épouses de Motecuhzoma ou bien des jeunes femmes cloitrées qui fuyaient Pincontinence manifeste des envahisseurs. Et Durán d'ajouter «... no creo que la virtud de los nuestros fue tanta que le aconsejasen que perseverasen en su castidad y honestidad [...] Y si eran las mujeres de Motecuhzoma, tampoco es de creer le guardarían fidelidad a un príncipe [...] preso y en cadena...» Comme le signale Graulich, il est difficile de croire que Motecuhzoma ait choisi le palais méme où il allait héberger les Espagnols pour y cacher ses épouses ou de jeunes vierges! Limitées lorsqu'il s'agit de reconstruire le passé tel que l'historiographie européenne prétend le faire, les sources indigènes s’avèrent fondamentales pour appréhender les schémas mythiques préhispaniques qui présidèrent aux descriptions autochtones de la Conquête tout en expliquant certaines actions de Motecuhzoma. Mais revenons à la structure du livre dont la première moitié est dédiée à la période qui précède l'arrivée des Espagnols. Après une brève présentation des mythes de création et de l'histoire des Mexicas, Graulich traite de l'éducation de Motecuhzoma II, de son accès au pouvoir, des guerres et des réformes administratives et religieuses du nouveau souverain. Un peu à la façon de Jacques Soustelle dans son célèbre ouvrage La vie quotidienne des Aztéques", Graulich dépeint avec érudition et élégance le monde indigène à la veille de la Conquête. Attardons-nous sur certains points particulièrement importants de cette première partie, notamment en ce qui concerne la politique mise en œuvre par Motecuhzoma Xocoyotzin dès son arrivée au pouvoir. Graulich démontre que les campagnes militaires incessantes durant le règne du huey tlatoani n'étaient pas dues au hasard mais poursuivaient des objectifs précis: consolider l'empire en y intégrant des enclaves indépendantes, par exemple la zone de Oaxaca, et surtout saper la puissance de la

12. J. SousTELLE, La vie quotidienne des Aztéques à la veille de la conquête espagnole, Paris, Hachette, 1955.

17

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

Vallée de Puebla, où résidaient les principaux adversaires de la Triple Alliance. C'est dans ce contexte que l'auteur analyse la célèbre «guerre fleurie» de l'époque de Motecuhzoma I, dont les objectifs consistaient à entrainer les troupes tout en assurant la capture de prisonniers destinés au sacrifice. Cela étant, Graulich souligne que ce type de guerre permettait surtout à la Triple Alliance de contróler et d'isoler ses ennemis traditionnels, épuisés par des affrontements répétés, tout cela sous l'apparence d'une idéologie «chevaleresque». De fait, il semblerait que la population de la Vallée de Puebla ait diminué à cette époque tandis qu'elle augmentait sur le Plateau central. Quant aux réformes administratives, elles devaient permettre une meilleure cohérence de l'empire et un contróle plus strict de la noblesse. Sur le plan religieux, Motecuhzoma promut également des changements significatifs comme le passage de la féte du Feu Nouveau de l'année 1 Lapin à une année 2 Roseau. En effet, les années 1 Lapin s'étaient révélées désastreuses, marquées par des famines, et il convenait de débuter le nouveau régne sous de meilleurs auspices. En outre, 2 Roseau était le nom de calendrier de Tezcatlipoca qui, identifié avec Huitzilopochtli, patronnait le cinquième Soleil des Mexicas. Ce que Graulich appelle «une véritable révolution religieuse» devait entrainer d'importantes répercussions rituelles, comme le passage de la féte du Feu Nouveau

de la vingtaine de ochpaniztli

à celle de panquetzaliztli dont la

signification allait changer. Alors que cette derniére vingtaine commémorait le sacrifice de Nanahuatl-Quetzalcoatl qui se transforma en Soleil, avec la réforme de Motecuhzoma, la fête de panquetzaliztli en vint à reproduire la victoire de Huitzilopochtli, Soleil des Mexicas, sur les forces nocturnes. Cette

substitution de Quetzalcoatl par Huitzilopochtli eut de graves conséquences lorsque les Espagnols furent assimilés au «Serpent à Plumes» qui revenait pour «récupérer son royaume ». L'un des éléments les plus novateurs de l'ouvrage de Graulich consiste à démystifier la soi-disant lâcheté de Motecuhzoma face aux Espagnols. Plusieurs témoignages laissent à penser que le roi mexica jugeait son empire, riche mais décadent, sur le point de disparaître, à l’image de l'empire toltèque qui l’avait précédé. Toutefois, après avoir pris la mesure des envahisseurs, Motecuhzoma adopta une attitude volontaire pour contrecarrer la progression des troupes espagnoles vers sa capitale. Graulich révèle que le souverain mexica, à l’occasion, s’inspira de précédents mythiques. Cela explique un épisode énigmatique qui eut lieu alors que les Espagnols se trouvaient encore sur la côte du Golfe du Mexique. Motecuhzoma envoya à leur rencontre un dignitaire qui ressemblait tant au capitaine des conquistadors que les Espagnols eux-mêmes, amusés, Pappelerent Cortez! Graulich détecte avec finesse que le tlatoani prétendait reproduire de cette façon la manœuvre de Tezcatlipoca à Tollan qui avait présenté un miroir face à Quetzalcoatl dans le but de l’affaiblir et de le tromper. Inutile de préciser que la confrontation de Cortez avec son «double indigène » le laissa imperturbable. Parallèlement, Motecuhzoma employa des moyens que nous jugerions aujourd’hui plus «concrets» pour lutter contre les envahisseurs. Prenons l'exemple du massacre de Cholula, fréquemment cité pour condamner la violence gratuite de Cortez et de ses troupes. D’après Graulich, plusieurs 18

L'œuvre de Michel Graulich

éléments confirment la thèse d’une embuscade: accusé par Cortez, Motecuhzoma avoua que certaines de ses troupes se trouvaient dans les environs de la ville. Argument capital, la garnison espagnole de Veracruz fut attaquée précisément au moment même de l'embuscade à Cholula. Graulich souligne à juste titre l'intérét tactique d'en finir avec les conquistadors à ce moment-là: il s'agissait d'une ville fermée oü l'efficacité de l'armement espagnol était moindre; de plus, d'un point de vue mythique, c'était la cité d’où Tezcatlipoca avait expulsé Quetzalcoatl. Nous partageons le jugement de Graulich qui considère que cette embuscade, de méme que celle tentée à Mexico durant la féte de roxcatl en l'absence de Cortez, est tout à l'honneur

de Motecuhzoma, qui essaya avec les moyens à sa disposition de lutter contre les Espagnols. C'est pourquoi l'image du tlatoani orgueilleux et tyrannique peut étre placée parmi les mythes forgés par les vaincus de la Conquéte selon des précédents mythiques bien identifiés par l'auteur. Ainsi, plusieurs sources d'inspiration indigene expliquent comment l'absence de reconnaissance vis-à-vis des dieux, voire la volonté de s'identifier à eux provoquèrent immanquablement le chátiment du roi transgresseur, bouc émissaire de la catastrophe que fut la Conquête. À partir de témoignages indigènes et de ceux transmis par les religieux, s’est diffusée l'image d'Indiens sans défense, immobilisés par de superstitieuses angoisses, Indiens qui ne réagirent pour se défendre qu'acculés par de sanguinaires envahisseurs. Cette interprétation de la Conquéte véhiculée par Las Casas et d'autres, relayée par des historiens désireux — à juste titre — de condamner l'invasion européenne, ne résiste guère à l'épreuve des faits. Les analyses rigoureuses de Graulich permettent d'en finir avec ce lieu commun de l'historiographie de la Conquéte, lieu commun soit dit en passant calomnieux et humiliant pour les anciens Mexicains. Le spécialiste belge démontre brillamment que les Mexicas — peuple guerrier et conquérant, faut-il le rappeler — résistérent et se défendirent et surtout que Motecuhzoma ne fut pas ce souverain superstitieux et láche ayant trahi son peuple sans combattre. Le sacrifice humain chez les Aztéques Parmi les manifestations religieuses des peuples de l'ancien Mexique, la pratique du sacrifice humain est sans doute celle qui a le plus frappé les esprits, depuis les témoignages espagnols au xvr siècle jusqu'aux interprétations des spécialistes modernes. L'intérét de Michel Graulich pour ce théme remonte à ses premieres années de recherches sur le Mexique ancien puisqu'il devait y consacrer son mémoire de licence". Quelques années plus tard et suite à une série de cours à l'EPHE consacrés au sacrifice humain^, Michel

13. «Le sacrifice humain chez les Aztéques de Mexico», mémoire Libre de Bruxelles, 1970, sous la direction d'Annie Dorsinfang-Smets. 14.

M.

GRAULICH,

«Le

sacrifice aztèque

I», Annuaire

de licence, Université

de l'École Pratique des Hautes

Études,

Section des Sciences Religieuses 104 (1995-1996), p. 51-66; «Le sacrifice humain aztèque», Annuaire de l'École Pratique des Hautes Études, Section des Sciences Religieuses 106 (19971998), p. 33-44; «Le sacrifice humain aztéque (suite) », Annuaire de l'École Pratique des

19

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

Graulich publia en 2005, chez Fayard, Le sacrifice humain chez les Aztéques,

véritable somme sur ce sujet à la fois polémique et passionnant. Inutile d'insister sur l'érudition et le caractère systématique de la recherche dans toutes les sources disponibles (archéologiques, pictographiques et écrites), non seulement sur les Mexicas mais aussi sur d'autres peuples de l'ancien Mexique. En revanche, l'approche comparatiste de l'auteur — déjà employée dans ses précédents ouvrages — prend une dimension plus ample. En témoigne le premier chapitre dédié aux mythes, oü l'auteur n'hésite pas à comparer certains motifs mythiques mésoaméricains (comme l'arbre interdit du paradis) avec des récits de la Bible, de l'Inde ancienne ou encore

de peuples actuels de l'Afrique ou de l'Australie. L'existence de similitudes entre les mythes mésoaméricains et la tradition judéo-chrétienne n'est pas forcément due à des emprunts liés au contexte colonial qui présida au recueil des traditions indigènes, mais participe d'incontestables points communs entre les deux religions qui frappèrent les religieux espagnols. Comme l'ajoute l'auteur, «... au Pérou, où il n'y avait guère de ressemblances avec le christianisme, les Espagnols se sont abstenus d'en fabriquer» (p. 45). Graulich applique parfois cette approche comparatiste aux rituels: ainsi lorsqu'il évoque les Khonds de l'Inde qui faisaient pleurer les victimes sacrificielles afin de susciter des pluies abondantes, tout comme les Mexicas qui établissaient la méme association entre les sanglots des enfants destinés au sacrifice et les futures précipitations (p. 209). De méme, l'interprétation du mythe de Yappan — un personnage qui, à travers des pratiques ascétiques, menace de se transformer en scorpion à la piqüre mortelle — nous semble particuliérement novatrice lorsque l'auteur a recours à des données de l'Inde: Il semble donc que les pénitences et les macérations permettent méme d'obtenir des avantages que les dieux n'ont aucune envie et aucun intérét à concéder. Est-ce parce qu'elles donnent de la puissance par elles-mémes, indépendamment des dieux, par exemple en augmentant considérablement le feu intérieur, l'ardeur, le tonalli du praticien, ou les dieux sont-ils non seulement obligés au

sens habituel dans ce contexte, mais proprement contraints, un peu comme les dieux hindous liés et menacés par les ascéses de leurs dévots rivaux ?

Sans succomber à des tentations diffusionnistes ou à des simplifications abusives, la «méthode comparatiste» prudente et rigoureuse de Michel Graulich — à certains égards proche de celle proposée par Marcel Detienne? — ouvre incontestablement de nouvelles perspectives interprétatives, au-delà d'une singularité mésoaméricaine qui parfois s'apparente à un isolationnisme obtus. Revenons au début de l'ouvrage où Graulich présente une brève historiographie du sacrifice humain en Mésoamérique ainsi que diverses opinions émises sur ce thème polémique depuis le xvr° siècle. Pour simplifier, nous

Hautes

Études,

humain

aztéque (suite) », Annuaire de l'École Pratique des Hautes Études, Section des Sciences

Section

des Sciences

Religieuses

107

(1998-1999),

Religieuses 108 (1999-2000), p. 65-74. 15. M. DETIENNE, Comparer l'incomparable, Paris, Seuil, 2000.

20

p. 41-49;

«Le

sacrifice

L'œuvre de Michel Graulich

dirons que depuis le xix* siècle, deux grands types d'interprétation ont été avancés pour expliquer le sacrifice humain aztèque: une explication «énergétique» considérant le sacrifice comme un moyen d'alimenter et de vivifier les divinités et ce qu'elles représentaient — selon un schéma inspiré par les théories de Sir James Frazer —, et une approche plus «spirituelle » selon laquelle l'acte sacrificiel rachetait les fautes et facilitait Pacces à des au-delàs glorieux. Tout au long de l'ouvrage, Michel Graulich combine ces deux théories, les fonctions et significations du sacrifice humain se révélant extrémement diverses selon les participants et les contextes rituels. C'est ainsi que Graulich développe l’hypothèse selon laquelle le sacrifice représentait un chátiment et une expiation. En effet, la présence des dieux exilés sur la terre au moment de la création du Soleil et de la Lune à Teotihuacan ne s'explique que par la transgression qu'ils réalisérent au «paradis» de Tamoanchan. Pour donner suite à leur sacrifice, les dieux regagnèrent le ciel oü furent créés les au-delàs du Soleil et de la Lune, destinées post-mortem

des deux grandes catégories de sacrifiés: les guerriers qui accompagneront l'astre solaire et les esclaves rituellement baignés qui atteindront le Tlalocan, parfois situé dans la lune. Transgresseurs également — ils n'offrent pas leur gibier à Soleil et Terre, s'enivrent et couchent avec des femmes — les dieux appelés Mimixcoa apparaissent dans le mythe d'origine de la Guerre Sacrée comme les prototypes des guerriers sacrifiés. Quant aux animaux souvent immolés, les mythes les présentent comme fautifs, incapables de parler et donc de vénérer leurs créateurs ou bien de découvrir la direction correcte oü le Soleil fera son apparition. La deuxiéme partie de l'ouvrage examine en deux gros chapitres les différents acteurs et le déroulement du sacrifice humain aztèque. Graulich insiste sur le róle fondamental des sacrifiants — reprenant la définition classique d'Hubert et Mauss — qui s'identifient à leurs victimes, meurent symboliquement par leur truchement et ainsi acquièrent des mérites et la promesse d'un au-delà glorieux. En effet, comment expliquer l'absence dans l'inframonde obscur du Mictlan des vaillants guerriers voire des souverains qui n'étaient pas morts sur le champ de bataille ou sur la pierre de sacrifice? En fait, en offrant des victimes substituts, ces importants personnages étaient à méme de sortir du royaume souterrain des morts afin d'atteindre le paradis du Soleil, demeure des guerriers défunts. L'auteur détecte dans les sources les preuves de cette identification entre les sacrifiants et leurs victimes, par exemple le fait que les guerriers étaient ornés à l'image des victimes sacrificielles qu'ils avaient capturées, victimes identifiées aux Mimixcoa offerts à Soleil et Terre dans le mythe d'origine de la Guerre Sacrée. Graulich remarque que les prisonniers de guerre étaient dans un premier temps intégrés à la communauté et que, à l'image des Tupinambas du Brésil, on leur offrait parfois des épouses rituelles. Quant aux esclaves issus de campagnes militaires, du tribut des cités conquises ou des tribunaux, ils représentaient la deuxieme catégorie de sacrifiés. Certains étaient baignés rituellement et personnifiaient les dieux durant les rites. Etant donné l'absence de cérémonie d'intégration au groupe, Graulich considère que ces esclaves appartenaient à la communauté. Quant aux témoignages concernant le sacrifice de condamnés à mort, ils constituent 21

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

«une confirmation de plus du fait que la mort sacrificielle est expiatoire» (p. 203). Graulich ne néglige pas la dimension sociale du sacrifice humain — une critique souvent adressée aux historiens des religions — et souligne l'aspect public des rites durant lesquels le sacrifiant est exposé à la vue de divers groupes sociaux avec lesquels il établit des relations de réciprocité à travers des dons. Ainsi, Graulich explique que «le sacrifiant recueille ici-bas gloire, prestige, promotion et relations. Son goüt de la guerre et son esprit guerrier sont encouragés, le butin, les dons et les récompenses l'enrichissent, l'intérét

de l'Etat est servi» (p. 164). En outre, l'auteur perçoit une véritable course au prestige chez les Aztèques, aux niveaux aussi bien individuel que collectif, par l'intermédiaire de la destruction — sacrifice de victimes, ostentation de richesses et largesses des banquets. Ce système dont la finalité était de vaincre les rivaux — tant à l'intérieur de la communauté que vis-à-vis de l'extérieur (on invitait les ennemis pour qu'ils assistent à l'exécution de leurs compatriotes) — rappelle les fameux potlach des Indiens de la cóte nord-ouest d'Amérique du nord. Nous sommes donc aux antipodes de la théorie douteuse de captation et de préservation des énergies défendue par Christian Duverger 5! Le dernier chapitre est consacré au déroulement du sacrifice. L'auteur examine avec minutie les différents espaces oü avaient lieu les sacrifices (temples, autels, pierres de sacrifice, lieux d'exposition des cránes) ainsi que

les instruments de sacrifice. Signalons l'interprétation originale selon laquelle «les têtes décharnées étaient des os-semences. Mettre les têtes dans ce verger [le tzompantli constitué de hauts máts soutenant des "branches" auxquelles étaient fixées les tétes de mort] devait peut-étre assurer la reproduction des guerriers ennemis » (p. 266). Quant à l'attitude des victimes face à leur tragique destin, elle oscillait entre l'acceptation résignée ou volontaire (surtout pour les représentants de dieux) et le désespoir voire l'évanouissement, parfois atténué par l'ivresse ou l'usage de drogues. Les différentes techniques d'exécution font également l'objet de descriptions précises — extraction du cœur, décapitation, crémation, sacrifice à coups de flèches — à partir des sources anciennes et des travaux des anthropologues physiques. Au sujet de la pratique qui consistait à écorcher les victimes, Graulich propose une interprétation double: d'une part, le fait de revétir la peau d'un guerrier sacrifié représentait vraisemblablement «l'indispensable assimilation, l'osmose du vainqueur et du vaincu et leur mort et résurrection»; d'autre part, les porteurs de peau se débarrassaient d'elle comme s'il s'agissait d'une souillure et l'enterraient comme des semences. La dernière partie de ce livre est dédiée au «festin cannibale», un thème extrémement polémique comme en témoignent les vives réactions suscitées par la théorie de Michael Harner (1977)! visant à expliquer l'anthropophagie aztèque par des carences en protéines. Outre les incontestables aspects rituels

16. C. DUVERGER, La fleur létale. Économie du sacrifice aztéque, Paris, Seuil, 1979. 17. M. HARNER, «The Ecological Basis for Aztec Sacrifice», American Ethnologist 4 (1977), p. 117-135.

22

L'œuvre de Michel Graulich

du cannibalisme, Graulich souligne ses composantes vengeresses et gastronomiques, en particulier vis-à-vis des guerriers captifs sur le champ de bataille. I] examine l'importance de la «cuisine du sacrifice aztéque» 5, les victimes bouillies relevant de la culture (sacrifice religieux) tandis que celles róties,

pratique associée à la nature, renverraient à un sacrifice de type alimentaire. En conclusion, Graulich considère brièvement les possibles explications de la multiplication des sacrifices humains dans l'ancien Mexique: absence d'animaux domestiques de grande taille qui constituèrent, dans d'autres civilisations, les victimes privilégiées du sacrifice ; raisons sociales inspirées du modèle de René Girard, la participation/complicité aux sacrifices consolidant une cohésion sociale fragile dans de grandes cités pluriethniques. L'abondance des matériaux réunis, la rigueur des analyses et le caractère novateur des interprétations caractérisent Le sacrifice humain chez les Aztéques de Michel Graulich qui constitue d'ores et déjà un ouvrage incontournable sur un des thémes les plus fascinants de l'histoire ancienne du Nouveau Monde. Les arts de l'Amérique ancienne

Michel Graulich a enseigné les arts de l'Amérique ancienne pendant prés de 30 ans. C'est donc tout naturellement qu'il y a consacré une grande part de ses recherches. Il est l'auteur de deux ouvrages généralistes sur l'art préhispanique, l'un concernant les Andes et l'autre la Mésoamérique, ainsi que de plusieurs études de pièces mésoaméricaines conservées aux Musées Royaux d'Art et d'Histoire (Bruxelles) ou dans des collections privées. Mais ce sont surtout les monuments religieux du Mexique central qui ont retenu son attention. Il s'est particulièrement intéressé au Grand Temple de MexicoTenochtitlan et à la sculpture aztéque monumentale, s'attelant à l'étude de nombre de chefs-d’œuvre de l’art mexicain. Non content d'en proposer une analyse iconographique minutieuse, le chercheur s'est également penché sur le probléme de la datation des ceuvres et a mené une réflexion approfondie sur la nature de l'image mésoaméricaine. Le Grand Temple de Mexico-Tenochtitlan

Avec

sa douzaine

de phases

d'amplification

et les milliers

d'objets

retrouvés en son sein, le Grand Temple de Mexico-Tenochtitlan offre, il est

18. Allusion à l'ouvrage séminal de J.-P. VERNANT, M. DETIENNE, La cuisine du sacrifice en pays grec, Gallimard, Paris, 1979. 19. M. GRAULICH, L'art précolombien. Les Andes ("Grammaire des Styles”), Paris, Flammarion, 1992; M. GRAULICH, L'art précolombien. La Mésoamérique (“Grammaire des Styles”), Paris, Flammarion, 1992; M. GRAULICH, M. GRAULICH-DorPÉE, «Une grande statue en terre cuite du Veracruz (Mexique)», Bulletin des Musées Royaux d'Art et d'Histoire 48 (1978), p. 35-48;

M. GRAULICH,

M. GRAULICH-DoPPÉE,

Sculptures mayas,

olmèques et de la Côte

du Golfe aux Musées Royaux d'Art et d'Histoire ("Corpus Antiquitatum Americanensium””, Bruxelles, Union Académique Internationale, 1990; M. GRAULICH, L. CROCKER, Chefs-d'euvre inédits d'art précolombien. Mexique, Guatemala, Paris, Payot, 1985.

23

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

vrai, de belles perspectives de recherche. Michel Graulich a longuement étudié le symbolisme de la pyramide principale, dont la bipartition refléte à merveille le dualisme de la pensée mésoaméricaine. Pour ce faire, et afin de démontrer l'ancienneté de cette pensée duale au Mexique central, il n'a pas hésité à remonter jusqu'au vin siècle pour faire des rapprochements avec les magnifiques peintures murales du site de Cacaxtla (Puebla), dont bien des éléments préfigurent les Aztéques?. I] s’est également beaucoup intéressé aux problémes d'interprétation posés par les contradictions entre les données archéologiques et celles fournies par les sources ethnohistoriques?!. Ces contradictions abondent en effet, dés que l'on se penche sur des points de détail. Michel Graulich a notamment contesté la chronologie généralement admise pour les différentes phases connues par la pyramide principale. Ce sont surtout les premières phases qui l'ont préoccupé, car il les estime bien plus anciennes que ce qu'affirment les sources. S'appuyant sur une réinterprétation radicale de l'histoire de Mexico et sur les fouilles dites de la Cathédrale, qui ont révélé la présence de céramique toltèque dans les couches les plus anciennes, il a suggéré que l'ile était occupée depuis longtemps avant que les sources n'y fassent arriver les Mexicas semi-nomades de leur terre d'origine mythique, probablement par des Toltèques, dont le dieu tutélaire était Quetzalcoatl. De plus, a-t-il souligné, tout, dès les premières phases de l'édifice, est typiquement mésoaméricain, ce qui témoignerait d'une acculturation bien trop rapide pour étre vraisemblable de la part des prétendus nouveaux venus. Le statut de l'image au Mexique ancien

Michel Graulich s'est également attardé sur la question du statut de l'image au Mexique ancien. En nahuatl, explique-t-il, «image de quelque chose » se dit teixiptla, terme qui peut aussi désigner un remplagant, un substitut, celui qui personnifie quelqu'un ou quelque chose. Une image devant représenter, fonctionner, communiquer,

elle doit faire illusion et se veut réaliste. C'est

ce qu'expriment les informateurs de Sahagün lorsqu'ils affirment que le bon artiste «apprend à mentir» à la matière, qu'il «imite le vivant». Or, observe Michel Graulich, les images aztèques ne nous donnent pas l'impression

20.

A. DORSINFANG-SMETS,

M. GRAULICH,

« Nouvelles découvertes d'archéologie mexicaine:

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p. 94-118; M. GrauLicH, «El simbolismo del Templo Mayor de México y sus relaciones con Cacaxtla y Teotihuacan», Anales del Instituto de Investigaciones Estéticas 79 (2001), p. 5-28. 21. M. GRAULICH, «Les incertitudes du Grand Temple», dans A. EGGEBRECHT (éd), Les Aztèques Trésors du Mexique ancien, Bruxelles, Musées Royaux d'Art et d'Histoire, 1987, p. 121-131, 224-227; M. GRAULICH, «The Aztec “Templo Mayor” Revisited», dans N. SAUNDERS (éd.), Ancient America. Contributions to New World Archaeology (“Oxbow Monograph” 24), Oxford, Oxbow Books, 1992, p. 19-32.

24

L'œuvre de Michel Graulich

d’être réalistes : comme celles d’autres civilisations anciennes, elles ignorent la perspective, individualisent peu, ne rendent guère d’expressions, ont un respect approximatif des proportions... S’il y a un décalage entre l’image et l'objectif qu'on croit atteint, le réalisme, conclut-il, c'est parce que créer une image fidèle est incompatible avec ce qu'on a appelé une vision « pré-copernicienne » du monde, c'est-à-dire une vision où l'homme ne se voit pas avec recul??. Quelle que soit la civilisation, dès lors que la pensée prend du recul, on assiste au développement, dans l'art, de techniques destinées à rendre la perspective”, L'iconographie de la sculpture aztéque monumentale

Michel Graulich a aussi dédié de nombreux articles à la sculpture monumentale. Auteur d'études iconographiques minutieuses de chefs-d’œuvre de l’art aztèque, il est parvenu à attirer l'attention sur des éléments qu'aucun chercheur n’avait relevés, et a proposé nombre d’interprétations nouvelles. Il a montré que l’iconographie des chac mool et des pierres de sacrifices était bien plus variée et complexe que ce que l’on imagine généralement ?*. Analysant la riche iconographie du Teocalli de la Guerre Sacrée, il souligne que les dates 1 Lapin et 2 Roseau flanquant l'escalier du monument ne renvoient pas seulement au Feu Nouveau de 1507 mais aussi aux deux destinataires traditionnels de la guerre sacrée, Soleil et Terre, et ce d'autant plus que Motecuhzoma II profita de sa fameuse réforme pour relancer la guerre fleurie?. Michel Graulich a également montré que le célébre mais trés complexe « Calendrier aztèque» ou «Pierre du Soleil» s'efforce de représenter l'astre solaire sous

22.

M. GRAULICH,

P. PETIT,

«Art

primitif et troisième

dimension»,

Baessler

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24. M. GRAULICH,

«Einige

Anmerkungen

zu

den

mesoamerikanischen

Skulpturen

mit

der Bezeichnung “Chac Mool"», Mexicon 3-5 (1981), p. 81-87; M. GRAULICH, «Quelques observations sur les sculptures mésoaméricaines dites “Chac Mool"», Jaarboek van het Vlaams Instituut voor Amerikanistiek (1984), p. 51-72; M. GRAULICH, «Sacrificial Stones of the Aztecs », dans J. de DunAwp-Fonzsr (éd.), The Symbolism in the Plastic and Pictorial Representations of Ancient Mexico ("Bonner Amerikanistische Studien" 21), Bonn, Holos Verlag, 1993, p. 185-201. 25. M. GRAULICH, «Reflexiones sobre dos obras maestras del arte azteca: la Piedra del Calendario y el Teocalli de la Guerra Sagrada», dans X. Noaugz, A. Lórgz AUSTIN (éd.), De Hombres y Dioses, Mexico, El Colegio de Michoacán, El Colegio Mexiquense, 1997, p. 155207; M. GRAULICH, « Nuevas consideraciones en torno al Teocalli de la Guerra Sagrada », dans G. OLIVIER (coord.), Símbolos de poder en Mesoamérica (“Serie Culturas mesoamericanas” 5), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Históricas,

Instituto de Investigaciones Antropológicas, 2008, p. 163-174.

25

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

tous ses aspects?*. Le chercheur s'est aussi penché sur les représentations de la divinité Terre, Tlalteotl, et a notamment examiné les grandes statues dites

de Coatlicue et de Yollotlicue. C'est avant tout la déesse Terre qui est figurée, conclut-il, décapitée car c'est ainsi que le rite réactualisait le mythe avec deux flots de sang symbolisés par des serpents qui jaillissent de son cou. La construction géométrisée de ces sculptures évoque quant à elle l'architecture de Teotihuacan, qui reproduit la nature en la soumettant à l'ordre rigoureux de la culture, domestiquant de la sorte l'affreux monstre? Michel Graulich a aussi approfondi les études existantes sur le vase Bilimek, établissant un rapport entre l'éclipse solaire représentée au-dessus du visage en haut-relief, la grande tzitzimitl figurée à l’arrière du vase et l'image supérieure de la planche 18 du Codex Borgia, qui montre les ténèbres qui s'installent lorsque la lune se superpose au soleil? Enfin, il a identifié et analysé l'iconographie complexe d'un grand fragment de relief provenant de Texcoco, qui représente Coyolxauhqui. Théme, composition et atours sont comparables à ceux de la sculpture de la déesse trouvée en 1978 au pied de l'escalier du temple de Huitzilopochtli

à Mexico.

Au lieu d’un crâne, comme

celle de Mexico,

la

Coyolxauhqui de Texcoco porte sur les reins un soleil mort, mais cela ne doit pas étonner outre mesure puisque les Mésoaméricains établissaient des liens étroits entre le soleil déclinant de l'aprés-midi et la lune”. Les problèmes de datation des œuvres aztéques

Enfin, les problèmes de datation des sculptures aztèques et les difficultés qui s'ensuivent pour reconstituer l'évolution de leur style et de leur iconographie ont fait, quatre années durant, l'objet des cours de Michel Graulich à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes’. Le chercheur a commencé par expliquer les différents obstacles empêchant de dater précisément les œuvres. D'une part,

26. M. GRAULICH, «La piedra del sol», dans J. ALCINA FRANCH, M. LEGN-PORTILLA, E. MATOS MocTEZUMA (éd.), Azteca mexica, las culturas del México antiguo, Madrid, Sociedad Estatal Quinto Centenario, Lunwerg Editores, 1992, p. 291-295; M. GRAULICH, «Reflexiones sobre dos

obras maestras del arte azteca: la Piedra del Calendario y el Teocalli de la Guerra Sagrada ». 27. M. GRAULICH, «Les grandes statues aztéques dites de Coatlicue et de Yollotlicue », dans R. THIERCELIN (éd.), Cultures et sociétés, Andes et Méso-Amérique. Mélanges en hommage à Pierre Duviols, Aix-en-Provence, Université de Provence, 1991, vol. 1 p. 375-419; M. GRAULICH, «Relieves mexicas de Tlaltéotl-Tláloc con influencia teotihuacana», dans P. LESBRE, M.J. VannE (éd.), Le Mexique préhispanique et colonial. Hommage à Jacqueline de DurandForest, Paris, L'Harmattan,

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30. M. GRauLICH, «Monuments religieux du Mexique Central postclassique», Annuaire de l'École Pratique

M. GRAULICH,

des Hautes

« Monuments

l'École Pratique

des Hautes

Études, Section des Sciences Religieuses

religieux du Mexique

Études, Section des Sciences Religieuses

M. GRAULICH, « Monuments

religieux du Mexique

l'École Pratique

Études, Section des Sciences Religieuses

26

des Hautes

109 (2002), p. 65-72;

Central postclassique

II», Annuaire

de

110 (2003), p. 71-77;

Central postclassique III», Annuaire de 111

(2004), p. 59-64;

L'œuvre de Michel Graulich

le contexte archéologique est souvent inconnu. D'autre part, certaines sculptures portent des glyphes de dates mais, le calendrier aztéque étant cyclique, le nom d'une année pouvant varier d'une région à l'autre et certaines dates ayant avant tout une valeur symbolique, il convient de s'en méfier. Michel Graulich part dés lors du plus certain, le régne de Motecuhzoma II, pour ensuite remonter dans le temps en s'appuyant, quand cela est possible, sur les données archéologiques du Grand Temple de Mexico-Tenochtitlan, à la chronologie relative bien établie. Il souligne toutefois que, bien que certaines sculptures portent parfois le glyphe de Motecuhzoma, un diadème seigneurial, la prudence s'impose car ce diadéme peut aussi simplement désigner la royauté, le seigneur, ou le grand guerrier glorifié aprés sa mort. Plusieurs monuments peuvent ainsi être attribués au règne de Motecuhzoma II parce qu'ils font référence au Feu Nouveau de 1507 et à la réforme qui l'a accompagné. C'est le cas de plusieurs imitations en pierre de faisceaux de roseaux liés ensemble, qui portent des glyphes renvoyant à 2 Roseau, ainsi que du célèbre Teocalli de la Guerre Sacrée. Mais c'est également le cas, moins évident à première vue, d'un relief à l'effigie de Tlalteotl au centre du corps de laquelle est figurée une pierre de jade d’où sort Tezcatlipoca. Ce dernier tend les mains vers un ceil-étoile. La sculpture porte le glyphe 2 Roseau et la scène peut vraisemblablement être interprétée comme une représentation de l'allumage de feux-étoiles dans le ciel par Tezcatlipoca en 2 Roseau, d'oü l'attribution car Motecuhzoma II, ayant déplacé la féte du Feu Nouveau de l'an 1 Lapin à 2 Roseau, l'a notamment justifié par cet allumage de feu par Tezcatlipoca. De plus, peut-on observer, le Feu Nouveau de 2 Roseau 1507 étant en méme temps une relance de la guerre sacrée, le pied de Tezcatlipoca est, sur cette sculpture, remplacé par le glyphe de la guerre, eau-feu. En raison du lieu de leur découverte, à trés faible profondeur, et de leur

iconographie complexe, Michel Graulich estime également pouvoir assigner au règne de Motecuhzoma II deux autres chefs-d’œuvre de l'art azteque: la Coatlicue et le «Calendrier aztèque » ou «Pierre du Soleil». Cette dernière a parfois été assignée à Axayacatl, en raison de la présence du glyphe 13 Roseau qui peut certes correspondre à 1479, mais qui est aussi et surtout l'année de la naissance du Soleil et son nom. Avec ces ceuvres, nous avons affaire, souligne

le chercheur, à des sortes de traités théologiques, extrémement denses de significations, qui sont typiques de Motecuhzoma II. Sont également attribuables à ce tlatoani le « Bloc du Métro », qui commémore des sacrifices pour conjurer la famine du début de son règne, ainsi qu'un brasero figurant Tlaloc et trouvé près d'un petit temple imitant le style de Teotihuacan. Enfin, Michel Graulich a suggéré que le grand cuauhxicalli habituellement attribué à Motecuhzoma I devrait plutót étre attribué à son successeur, Axayacatl, d'autant plus que les sources ethnohistoriques en parlent et que les

M. GRAULICH,

«Monuments

religieux du Mexique Central postclassique IV», Annuaire de

l'Ecole Pratique des Hautes Etudes, Section des Sciences Religieuses

112 (2005), p. 53-59.

27

N. Ragot, S. Peperstraete, G. Olivier

principales conquêtes de ce tlatoani y figurent *!. Au-dessus de la première conquête et sous la dernière se trouve certes une couronne royale, mais c'est à tort qu'elle fut prise pour le glyphe de Motecuhzoma I : elle renvoie en fait à la royauté mexica dans son ensemble. Par rapport au cuauhxicalli de Tizoc, postérieur d'à peine une dizaine d'années, l'évolution est remarquable, note Michel Graulich. Non seulement la pierre de Tizoc est le premier monument qui nomme un roi et l'assimile à Huitzilopochli, mais son style est nettement plus souple, naturel, avec des vues de trois quarts. Les travaux de Michel Graulich ont révolutionné notre approche et notre compréhension des civilisations précolombiennes. L'originalité et la nouveauté de ses hypothèses, toujours rigoureuses, ont permis d'ouvrir de nouveaux horizons aux études précolombiennes, de démontrer l'intérét des recherches basées sur une approche critique des textes et l'utilisation de toutes les sources disponibles. L'incroyable richesse du matériel étudié, la finesse et Pingéniosité des théories proposées dans les publications de Michel Graulich en font une œuvre de référence indispensable pour toutes les personnes intéressées à comprendre et à étudier les sociétés mésoaméricaines. Qu'à

travers

ces pages,

Michel

Graulich,

notre

maitre

et ami,

trouve

l'expression de notre sincére admiration et reconnaissance. Nathalie Ragot, Sylvie Peperstraete et Guilhem Olivier

31. M. GRAULICH, «On the so-called “Cuauhxicalli of Motecuhzoma Ilhuicamina", The Aztec Sánchez-Nava monolith », Mexicon 14-1 (1992), p. 5-10; M. GRAULICH, «Nota sobre el llamado “Cuauhxicalli-temalacatl de Motecuhzoma Ilhuicamina"», Cuicuilco 5-4 (1999), p. 239-250.

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36

PREMIÈRE PARTIE

Mythes et rituels de la tradition religieuse mésoaméricaine

37

LOS REYES

SUBTERRÁNEOS!

Alfredo LóPEz AUSTIN

Instituto de Investigaciones Antropológicas, Universidad Nacional Autónoma de México

Introducción? Si la ciencia enuncia no sólo proposiciones sujetas a la crítica metódica, sino dudas que surgen del ejercicio de la investigación, esta ponencia es muy científica, pues está compuesta en una alta proporción por dudas. En efecto, hoy son más las incógnitas que me perturban que las eventuales respuestas que ofrezco; pero he visto en esta reunión académica la oportunidad de compartir inquietudes de mis avatares en el campo de la historia. Don Juan Tutul Xiu

Según dijo hace alrededor de setenta años el capitán Cituk a Alfonso Villa Rojas, en la antigüedad estas tierras peninsulares estuvieron bajo el feliz dominio de los mayas. Pero cuando reinaba sobre ellas don Juan Tutul Xiu, asentado en esta Ichcaan-sihó en que nos encontramos, llegaron los tres primeros hombres blancos. El rey no dio importancia a los forasteros. Estos, en secreto, se acercaron a sus tres hijas y muy pronto mancillaron el honor real, embarazando a las doncellas. Indignado, el rey expulsó a los extranjeros ; pero los ofensores volvieron por el mar oriental con muchos de su raza, lograron la adhesión de algunos nobles mayas y derrotaron al agraviado don Juan. El rey y sus adictos se vieron precisados a emigrar al oriente, siguiendo como camino un túnel con entrada en Tulum, vía que se prolonga bajo el fondo del mar. Antes de partir don Juan dejó en Tulum su retrato grabado en

1. Este texto fue presentado como ponencia en el Segundo Congreso Internacional de Cultura Maya, el día 16 de marzo de 2005, en la ciudad de Mérida, Yucatán. 2. Las interesantes conversaciones que sostuve con Margit Frenk, Antonio García de León,

Mercedes de la Garza Camino, Alessandro Lupo, Luis Millones y Virginia Molina Ludy antes de la redacción de este trabajo lo enriquecieron considerablemente. Agradezco a estos amigos y colegas su paciencia y contribución.

39

Alfredo Lôpez Austin

piedra, y prometió que hubieran subordinado a el Sol para acabar con hubiesen mantenido una

algún día regresaría. Si para entonces los mayas se sus dominadores, correría una cortina negra sobre el mundo; en cambio, si al menos algunos mayas conducta digna y conservado el conocimiento de sus

antiguas escrituras, don Juan Tutul Xiu retornaría para reinar, como antes,

entre los suyos. Hay quienes han querido seguir el camino del tünel; pero han regresado atemorizados al oír los ruidos de los habitantes subterráneos?. Nuevos testimonios de mayas de Quintana Roo, recogidos en lengua maya en 1974 y 1975, agregan valiosos informes a la historia de don Juan Tutul Xiu: los itzás — o sea la gente de don Juan — fueron quienes fijaron los linderos de la tierra, y construyeron a media noche los grandes templos. Se dice que habitan hoy en el reino subterráneo del rey maya y que, simultáneamente, se encuentran encantados como figuras de barro y piedra en los restos arqueológicos*. La existencia de otros personajes: Puebla, Veracruz, Michoacán

Si tomo como motivo central de mi ponencia la interesantisima historia de don Juan Tutul Xiu es, precisamente, porque la naturaleza de los personajes, los episodios y las circunstancias del relato aparecen aquí y allá, a lo largo y a lo ancho del territorio poblado por los herederos de la gran tradición mesoamericana. Y las narraciones aparecen con significativas variantes, omisiones y adiciones, hasta formar las piezas de un rompecabezas que nos revela la existencia de una armazón subyacente. Veamos algunos ejemplos de estas biografías fabulosas paralelas. Frederick Starr, el etnólogo estadounidense, publicó en 1900 breves pero sustanciales noticias de las creencias otomíes de Tlacuilotepec, al norte de Puebla, relativas al rey que ha permanecido ausente durante siglos, pero que prometió su regreso. Mientras llega la fecha de su retorno, el rey otomí da salud y buenas cosechas a sus sübditos terrenales, y por ello recibe culto. Como extraño distintivo, el rey se llama Moctezuma”. Años después, al estudiar las imágenes de papel recortado, Hans Lenz proporcionó detalles del culto otomí a Moctezuma y dio al personaje la fama negativa de mal aire, causante de accidentes y enfermedades*. Si cambiamos abruptamente de escenario, de las alturas del centro de México a

las costas orientales, a Jáltipan, Veracruz,

encontraremos

entre

3. A. ViLLA RojAs, Los elegidos de Dios. Etnografía de los mayas de Quintana Roo, México, Instituto Nacional Indigenista, 1979, p. 441; R. REDFIELD, A. VILLA Rojas, Chan Korn. A Maya

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mexicano,

México,

Secretaría de Educación

Pública,

1973,

Los reyes subterráneos

los nahuas de la región otras notas esenciales del personaje: Moctezuma era un caudillo que, acosado por los enemigos de su pueblo, optó por huir levantando un gran puente sobre el mar. Como venía de «arriba», llevó a la costa las piedras necesarias para su obra. No las cargó; éstas se movían milagrosamente cuando las arreaba como si fueran bestias. La construcción quedó inconclusa debido a que la salida del Sol minó su poder. Moctezuma huyó, y las piedras formaron la serranía de San Martin’. De oriente a occidente en otro movimiento brusco, llegamos a Michoacán,

para hallar a don Antonio Siguangua, rey de Jarácuaro, quien era de la raza de los khuanhári. Los khuanhári fueron los gigantes que dieron nombre a los actuales pueblos tarascos y determinaron sus linderos. Los kKhuanhári hicieron la guerra a los reinos vecinos ; pero su buena fortuna concluyó cuando llegó a bendecir el mundo Dios o Jesús o Santiago o San Pedro o Vasco de Quiroga o un simple sacerdote. Los kKhuanhári se negaron a recibir la bendición; para evitar que la bendición cayera sobre ellos, se sepultaron y se convirtieron en las figuras arqueológicas que hoy salen a luz al cavar la tierra?. Volvamos a Puebla, ahora al sur, a la región habitada por una de las etnias

mesoamericanas que reciben el nombre de popolocas. Si Gú es su rey. Fue hijo de una mujer y un venado; pero, ignorante Si Gú de su ascendencia, flechó a su padre, lo cortó en pedazos y lo dio a comer a su madre. Tras el parricidio, Si Gú abandonó el hogar materno y comenzó su caminata por el mundo. Lo pudo hacer porque era un gigante que con diez pasos salvaba la distancia entre Tehuacán y la ciudad de México, en parte volando y en parte apoyando los pies en la cima de las montañas. En otras versiones, Si Gú es un niño que se traslada a grandes distancias montado en un caballito mágico. Pese a sus poderes, fue atacado por la gente de Matamoros y tuvo que huir, perforar los montes y esconderse en ellos. Fue, además, el mago que edificó la ciudad de México en un lago que tenía en su centro un mezquite?. Una de las facultades más notables que se atribuyen a Si Gú es el dominio de todas las lenguas del mundo. La biografía del dios de los popolocas es casi igual a la de Mazatzin Moctezuma, de quien hablan los nahuas de la misma región. Junto a la iglesia de Tepexi de la Seda — nos dice Carmen Cook de Leonard — se erigió una estatua a este personaje. Junto a la efigie del señor se colocó la figura de un venado. La explicación que dan los nahuas es que la figura del animal no sólo se refiere al nombre de Mazatzin, sino que éste fue hijo de padre venado y madre humana. Mazatzin Moctezuma, ignorando su ascendencia, en hazaña paralea a la de Si Gú, flechó a su padre y lo hizo barbacoa. Enterado de su

7. Informe de Alfonso Rodríguez, recogido y publicado por A. GARCÍA DE LEGN, «El Dueño del Maíz y otros relatos nahuas del sur de Veracruz », Tlalocan 5-4 (1968), p. 349-357. 8. P.Carrasco, «Pagan Rituals and Beliefs Among Chontal Indians of Oaxaca», Anthropological Records 20-3 (1960), p. i-1v, 87-117, 105-106. 9. K. JácKLEIN, Un pueblo popoloca, México, Instituto Nacional Indigenista, Secretaría de Educación Püblica, 1974, p. 275-277.

41

Alfredo Lôpez Austin

delito, se fue a vivir a Tepeaca, donde se casó con una princesa, y posteriormente fundó un imperio y se convirtió en el Rey del Mundo". Los reyes oaxaqueños Si tales hazañas se narran en el sur de Puebla, más al sur y al sureste, en

el vasto territorio oaxaqueño, las historias de los reyes heroicos adquieren las dimensiones de leyendas étnicas; su registro documental se retrotrae por siglos, y las promesas del retorno de los personajes portentosos llegan a ser elementos de peso en los movimientos indígenas contra la opresión. Del siglo xvii proceden tanto una relación de conflictos como un relato docto. La relación corresponde a las rebeliones de la Villa de Nejapa en 1660, cuando se convocó

a los mixes, en nombre de don Pascual de Oliver, gobernador

indígena que había sido vejado por un sacerdote autoritario. Se incitó a los mixes a la lucha « porque Condoique, su rey, cuando los espafioles gobernaron este reino se había retirado y escondido en una laguna donde estaba, y saldría a gobernar su reino, y ellos era preciso le obedeciesen »!!. El relato docto es nada menos que de fray Francisco de Burgoa, quien en su Geográfica descripción cuenta que Condoy, el mencionado rey de los mixes, ser sin ascendencia humana, había salido de una cueva perteneciente al Cempoaltépetl ya en edad perfecta. Tras una heroica vida en la cual combatió a los zapotecos, cansado ya de la guerra y como postrer hazaña, Condoy volvió a su cueva de origen, acompañado de muchos de sus guerreros. Estos llevaron consigo grandes cantidades de oro y otros despojos de sus conquistas. El rey cerró la gruta por dentro y viajó en forma subterránea hasta tierras remotas". Las descripciones de la vida de Condoy se mantienen vivas. Muchos mixes actuales prefieren llamar Cong Hoy a su rey, y en sus relatos aportan valiosos detalles. Algunas versiones cuentan que nació de un huevo, recogido por una pareja de ancianos; tras crecer milagrosamente luchó contra Moctezuma; dejó su pesadísima corona en México, anunciado que cuando alguien pueda ponérsela cambiará el gobierno. El rey todavía se encuentra en un tünel que abrió bajo el Cempoaltépetl'*. Otros dicen que el héroe se enfrentó al «Rey Cristiano », que luchó contra españoles y zapotecos. Cuando los zapotecos cercaron al rey mixe en el cerro lipxkup, prendieron fuego a la vegetación con

10. C. Cook DE LEONARD, « The Painted Tribute Record of Tepexi de la Seda», en M. GaMIO, R. NonRiEGA (éd.), A William Cameron Townsend en el vigésimo quinto aniversario del Instituto Lingüístico de Verano, México, Instituto Lingüístico de Verano, 1961, p. 87-107, 94. 11. L. GONZÁLEZ OBREGÓN, Rebeliones indígenas y precursores de la independencia mexicana en los siglos xvi, xvii y xvii, México, Ediciones Fuente Cultural, 1952, p. 386-387. 12. F. de BunGoa, Geográfica descripción de la parte septentrional del polo Ártico de la América, México, Gobierno del Estado de Oaxaca, Universidad Nacional Autónoma de

México, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, Universidad Autónoma Benito Juárez de Oaxaca, Grupo Editorial Miguel Ángel Porrúa, 1997, cap. Lxi, fol. 302v. La historia la repite C. BRASSEUR, Viaje por el istmo de Tehuantepec, México, Fondo de Cultura Económica, Secretaría de Educación Püblica, 1984, p. 108-109. 13. W. S. MiLLER, Cuentos mixes, México, Instituto Nacional Indigenista, 1956, p. 105-109.

42

Los reyes subterráneos

el propósito de quemarlo; pero el rey, antes de que las llamas lo alcanzaran, se introdujo en el monte". Curiosamente, los zapotecos cuentan una historia similar. Al mismo año del levantamiento de Nejapa y a similares impulsos y creencias de los de sus vecinos mixes corresponden las rebeliones zapotecas de la región. En 1660 los zapotecos afirmaron que Congün, su rey, había salido ya de su laguna encantada, oculta en el interior de un monte, con el anuncio de un temblor de

tierra. Era la señal de que liberaría a su pueblo del yugo español^. Hay noticias del rey zapoteco mucho más próximas a nuestros días; fueron publicadas por Elsie Clews Parsons en 1936. Cuenta esta autora la historia de Montezuma, el señor de los monumentos arqueológicos. Las antiguas construcciones habían sido levantadas por una raza anterior a la humana, generación que movía los bloques de piedra como si fueran de ligera paja. Pero la ruina de esta raza constructora vino con el advenimiento de una nueva época, iniciada con los primeros rayos del Sol. El rey Moctezuma y sus sübditos, dañados por la luz solar, se escondieron bajo la tierra; los constructores se convirtieron en piedra y Montezuma viajó a la ciudad de México. Ahora el rey regresa cada año a la Danza de la Conquista. Mientras se encuentra en su reino escondido, concede a su pueblo salud y buenas cosechas a cambio de culto! Pasemos a los chontales. Fane Kantsini, su rey, también nació de un huevo.

Una mujer recogió el huevo y lo llevó a su casa. El huevo gritó, se quebró y de él salió un niño. El niño creció a una velocidad milagrosa. Hizo un arco utilizando para la cuerda las raíces de un maguey, y con esta arma, tras prolongada batalla, derrotó al ejército zapoteco. No quedó un solo enemigo vivo. De los cuerpos de los vencidos quemó la mitad, y entregó los cadáveres restantes a su pueblo para que los consumiera. Cuando los chontales celebraban la fiesta caníbal del triunfo en la cumbre de una montaña, el rey desapareció. Se supone que entró a la cueva de la que originalmente había surgido el huevo. Otra versión de la historia de Fane Kantzini narra que éste visitó y ofendió al rey caníbal de Cerro Jilote, diciéndole que no le gustaba la puerta de su casa. El rey lo retó a que la cambiara. Fane Kantzini cambió la puerta con sus artes mágicas. El rey, indignado, ordenó encarcelarlo y cocinarlo; pero Fane Kantzini cavó un túnel con su flecha y fue a salir al cerro Pita Yo, por Santa María Lachixonace. Después de su huída, el héroe empezó a cometer graves tropelías, pues transformado en águila robaba niños. Siguió combatiendo, y estaba en lucha contra los enemigos cuando decidió marcharse ; pero prometió

14. A. M. BaraBas, M. A. BARTOLOMÉ, El rey Cong Hoy. Tradición mesiánica y privación social entre los mixes de Oaxaca, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, Centro Regional de Oaxaca, 1984, p. 48-57, 60-71. 15. L. GONZÁLEZ OBREGÓN, «Rebeliones», p. 392-393. 16. E. C. Parsons, Mitla. Town of the Souls and Other Zapoteco-Speaking Pueblos of Oaxaca, Mexico, Chicago, The University of Chicago Press, 1936, p. 221-222, 289-292. 17. P. Carrasco, «Pagan», p. 113, basado en el relato de Manuel Martínez Gracida publicado en 1910; A. M. BARABAS, M. A. BARTOLOMÉ, El rey, p. 59-60.

43

Alfredo Lôpez Austin

a su gente que regresarfa. Desde entonces, los chontales no se sienten solos, pues saben que el rey volverá!*. , Loschinantecos recuerdan a su virrey por lo mucho que ayudó a su pueblo. E] fue quien deslindó el terreno de Jocotepec, aprovechando que podía volar como pájaro; luego abrió los caminos, compuso los ríos y arroyos y acabó con el peligro de las bestias salvajes. Terminada su obra, se metió en una hondura cercana a Jocotepec, y se dice que ya está muy lejos; pero que, pese a su ausencia y distancia, hoy sigue protegiendo a su gente contra las enfermedades!?. Los chinantecos recuerdan también a otro personaje o, tal vez, al mismo héroe desde otra perspectiva. Es el rey chinanteco que quería que un sacerdote lo bautizara; pero lo hizo desistir un danzante que hacía el papel de Malinche en el baile. Advirtió el danzante al rey que la bendición del cura le rajaría la cabeza, y el rey, atemorizado, renunció a su propósito. La falta del bautismo impidió al rey chinanteco reinar sobre la tierra: por ello hizo un túnel y se fue a la ciudad de México, donde se quedó definitivamente”. Alessandro Lupo, en una extensa comunicación personal, me proporcionó informes sobre Ndeah, « El Huérfano» o «El Bastardo », personaje portentoso a quien se atribuye la creación de montañas y lagunas en el territorio huave. Según los huaves, la madre de Ndeah, una joven virgen, fue duramente castigada por su embarazo, en realidad sin culpa, pues se debía a un milagro. El niño nació con atributos prodigiosos: era un rayo. Estaba ayudando a su madre cuando llegaron unos extranjeros desde la ciudad de México en busca de quien fuese capaz de portar una corona. Los huaves de San Mateo, deseosos de que el bastardo fracasara en la prueba, llamaron al niño; pero resultó que la corona le quedó perfectamente y Ndeah se fue a reinar en México. Todavía antes de marchar creó animales y sal en beneficio de sus ingratos paisanos. El joven llevó la prosperidad a México; pero también allá sufrió envidias y terminó por irse, sin que nadie supiera más de él?1. Los Montezumas del Norte

Considero que los anteriores ejemplos sirven ya para mostrar un sustrato mítico que se ha ido desarrollando a partir de la colonia temprana y hasta el presente en muy diversos sitios del territorio mesoamericano. Sin embargo, otras historias similares se repiten mucho más allá de las antiguas fronteras de Mesoamérica: los relatos similares alcanzan el norte y occidente del

18. A. M. BanaBAs, M. A. BARTOLOMÉ, « Héroes culturales e identidades étnicas. La tradición mesiánica de mixes y chontales», en F. NAVARRETE, G. OLIVIER (coord.), ET héroe entre el mito y la historia México, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Históricas, Centro Francés de Estudios Mexicanos y Centroamericanos, 2000, p. 213-234, 230-233. 19. I. FáBREGAS SALA, Cuentos y leyendas chinantecas, México, Oficina de Misiones Salesianas, 1990, p. 193-195. 20. R. J. WEITLANER, Relatos, mitos y leyendas de la Chinantla, introd. y notas de M. S. Molinari, M. L. Acevedo y M. Aguayo Alfaro, México, Instituto Nacional Indigenista, 1981, p. 222-223. 21. A. Luro, comunicación personal del 29 de enero de 2005.

44

Los reyes subterráneos

actual estado de Nuevo México y los territorios pimas y pápagos de Sonora y Arizona. Sería prolijo el tratamiento puntual de las hazañas de personajes como el l'itoi de los pápagos y los pimas, el Poseyemu de los tewas o el Poshayanki de los zuñis, conocidos todos ellos por sus nombres y, además, por el nombre comün de Montezuma. Ya se hará en otra oportunidad una exposición más detallada de su carácter, poderes, relaciones y aventuras. Baste por ahora decir que el nombre de Montezuma aparece junto al del dios Poseyemu — todavía como dos personajes vinculados, pero diferentes — en boca de los indígenas de la región de Santa Fe en tiempos de la gran rebelión de 1680 en contra de los españoles”. En el acervo de los relatos de los dioses septentrionales destacan su calidad de seres civilizadores ; su mando sobre razas ancestrales, anteriores al amanecer del mundo ; su carácter de constructores de los sitios arqueológicos ; su actuación en el árbol central del cosmos; la creación de la diversidad de

los pueblos y el don de su lengua distintiva a uno de dichos pueblos; la lucha contra el monstruo ctónico que es derrotado cuando el héroe se deja tragar y perfora las entrañas a la bestia; la lucha contra el gran par, que puede ser Dios o el Demonio; su poder sobre la lluvia ; la huida al inframundo y el viaje por túneles subterráneos;

la promesa

de retorno;

la fundación

de la ciudad

de México; su actual estancia junto al Sol o en un lago subterráneo, y el que, además de llamarse Montezuma, los sitios arqueológicos sean llamados también montezumas para indicar que le pertenecen”, El cierre del periplo: Chiapas y la Península de Yucatán

Después de este recorrido por las lejanas tierras del norte, cerremos el periplo para retornar al área maya, a Chiapas, donde nos encontramos con Juan López, el guerrero de Bachajón. López ha sido indentificado con un personaje real que participó en el levantamiento tzeltal de 1712-1713; pero la biografía que aquí y por ahora interesa es la fantástica. Hijo de una virgen que se refugió en una cueva, Juan es un enano prodigoso que usa un sombrero parecido a un yelmo; su sombrero lo hace invulnerable ; es inmune a las balas

y al fuego; lucha contra el rey de los ladinos y derrota al ejército guatemalteco. Ya como rey de los indios Juan López se convierte en una carga para su gente, por lo que los propios bachajontecos lo decapitan y arrojan su cuerpo a una cueva. Juan resucita; se convierte en uno de los cuatro pilares cósmicos y carga el mundo sobre sus espaldas. Se dice que se fue a la ciudad

22. A. A. BANDELIER, «The ‘Montezuma”’ Anthropologist 5-4 (1892), p. 319-326, 321-322.

of

the

Pueblo

Indians»,

The

American

23. R. J. PARMENTIER, « The Mythological Triangle: Poseyemu, Montezuma, and Jesus in the Pueblos», en W. C. STURTEVANT (éd.), Handbook of North American Indians, vol. 9; A. ORTIZ (éd.), Southwest, Washington, Smithsonian Institution, 1979, p. 609-622, 611-614, 618-619; D. Bar, Pima and Papago Ritual Oratory. A Study of Three Texts, San Francisco, The Indian Historian Press, 1975, p. 31-32; J. GALINIER, «De Montezuma a San Francisco: El ritual wi :gita

en la religión de los pápagos (tohono o'odham)», en X. Noaugz, A. López AUSTIN (éd.), De hombres y dioses, México, El Colegio de Michoacán, El Colegio Mexiquense, 1997, p. 255-326, 262-263, 286, 313-315.

45

Alfredo Lôpez Austin

de México, de donde vuelve en secreto a ayudar a los indios y a castigar a los ladinos. Juan prometió que regresará cuando su gente lo necesite y lo invoque golpeando las piedras”. Si en el cierre del periplo volvemos a la Península de Yucatán, encontraremos al Batab Tráscara y su gente encantada, cuyo fragor nocturno se oye aún en las ruinas de Cobá”. También se cuenta en la península la historia de los dos reyes rivales, Tzek y Huitzilopochtli, hijo éste de la gallina Kux Keyem. Ambos reyes se retaron a romperse cocoyoles en la cabeza, y en la competencia Tzek quedó vencido y muerto, con el cráneo roto?. Tras la victoria, la gente de Huitzilopochtli construyó el Palacio del Rey Adivino en Uxmal. Esto fue antes del primer amanecer del mundo. Un sustrato cosmológico común

Pese a interés en Nacen los del héroe recurren a

que la generalización no es posible, resaltan características de sumo la producción de algunas de las historias de los reyes subterráneos. relatos en situaciones de opresión o de peligro en que el regreso significa la liberación o — al menos — la venganza. Los sojuzgados la creencia de una fatal solución escatológica, una destrucción que

dará origen a un mundo radicalmente diferente, algunas veces salvador, otras,

aniquilador de la humanidad entera; y es así porque el sustrato mítico es «la vuelta de la tortilla », la catástrofe de la era, provocada por la rebelión de los seres del inframundo que pugnan por la inversión cósmica”. Los relatos se

24.

J. Arias,

San

Pedro

Chenalhó.

Algo

de

su

historia,

cuentos

y

costumbres,

Tuxtla

Gutiérrez, Gobierno del Estado de Chiapas, Consejo Estatal de Fomento a la Investigación y Difusión de la Cultura, Instituto Chiapaneco de Cultura, 1990, p. 71-74; U. KôHLER, Chombilal Ch'ulelal, Alma vendida. Elementos fundamentales de la cosmología y religión mesoamericana en una oración en maya-tzotzil, México, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto

de Investigaciones Antropológicas, 1995, p. 21; U. KóuLER, « Formas y procesos de sincretismo entre los tzotziles», en A. Lupo, A. LÓPEZ AUSTIN (éd.), La cultura plural. Homenaje a Italo Signorini, México, Universidad Nacional Autónoma de México, Università di Roma «La Sapienza », 1998, p. 171-187, 174-175; P. PrrarcH Ramón, Ch'ulel: una etnología de las almas tzeltales, México, Fondo de Cultura Económica, 1996, p. 176-177; J. de Vos, «Leyendo una

leyenda maya : Juan López, rey de los indios », en Investigaciones recientes en el área maya, San Cristóbal de las Casas, Sociedad Mexicana de Antropología, 1984, vol. I, p. 277-292, 277-289.

J. Artas no lo llama Juan López ni Wan Lopis, sino « Kayleytic (Nuestro rey)»; sin embargo, varios episodios de su relato, entre ellos la forma en que el personaje recoge con el sombrero las balas que le son disparadas y las lanza contra sus enemigos, lo identifican con Juan. 25.

A. ViLLA Rojas, Los elegidos, p. 439-440.

26.

Véase

Kom, 27.

otra

competencia

entre

dos

reyes

p. 331; A. ViLLA Rojas, Los elegidos, F. de

A. LIGORRED

PERRAMÓN,

míticos

en R. REDFIELD,

A. ViLLA

RoJas,

Chan

p. 440-441.

Consideraciones

sobre

la

literatura

oral

de

los

mayas

modernos, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1990, p. 111-113.

28. P. R. Sui.Livan, «Contemporary Yucatec Maya Apocalyptic Prophecy: The Ethnographic and Historical Context», tesis de doctorado en filosofía, The

John Hopkins University, Baltimore,

Maryland, 1983, p. 97-98, 124; M. H. Ruz, «Credos que se alejan, religiosidades que se tocan. Los mayas

contemporáneos », en M. de la Garza

CAMINO,

M. I. NÁJERA

CORONADO

(éd.), Religión

maya, Madrid, Editorial Trotta, 2002, p. 321-363, 324; M. H. Ruz, « Aproximación a la cosmología tojolabal», en L. Ochoa, T. A. LEE Jr. (éd.), Antropología e historia de los mixe-zoques y mayas

46

Los reyes subterráneos

fundan en la imagen de la latencia casi imperceptible de la parte oculta del cosmos, la realidad de los ancestros prehumanos, los antiguos constructores de los sitios arqueológicos, que aün los habitan y se hacen oír durante la noche”. Las narraciones se han revivificado cuando el retorno del héroe se ha pretendido hacer presente en los movimientos indígenas que luchan contra el dominio, el despotismo, la marginación y la pobreza. Los relatos no son idénticos. Las historias populares se componen concordando la narrativa con la geografía regional, las tradiciones locales, el contexto social y político específicos y la oportunidad histórica. Como en el resto de las expresiones de la tradición mesoamericana, el gran valor de las historias de los reyes subterráneos reside en la dialéctica de su derivación de un núcleo cultural común y del vigor y colorido del particularismo. En la diversidad de las historias se cruzan caracteres y episodios semejantes y subyace en todas un pensamiento común, antiguo, profundo, sistematizante, revelador de directrices que construyen el sentido de la existencia humana. Se descubre en los episodios de la vida de estos reyes portentosos, como en la unión de las piezas de una gran aventura ideal, el conjunto de nodos de una inmensa red paradigmática. Sin generalizar los relatos, hay rasgos conspicuos que permiten la reconstrucción panorámica : el protagonista es un rey que se caracteriza por ser tanto un creador como el eje de la futura transformación. Es patrono universal de la humanidad y patrono particular de los grupos humanos. Por una parte posee la universalidad del civilizador, conocedor de todas las lenguas del mundo,

dador de nombres a las cosas, segmentador de la humanidad en distintos pueblos, distribuidor de tierras cuyos linderos señala; por otra, puede vincularse a una etnia o a una comunidad creando su entorno geográfico, otorgando la lluvia a su gente, asegurando sus cosechas, protegiendo a sus hijos contra las enfermedades... o castigando sus faltas con privaciones o abandono. Es hijo de padre desconocido, concebido milagrosamente. Frecuentemente se lo llama Moctezuma o Montezuma. Entre sus notables hazañas está la lucha contra uno de sus padres y la perforación del monstruo ctónico que lo traga. Huye de este mundo, vencido por el amanecer prístino o por el incendio, y para salvarse penetra en la tierra con su ejército y sus tesoros*. Promete su retorno, que se incrusta en la fatalidad de un ciclo cósmico, y el ciclo se

(Homenaje a Frans Blom), México, Universidad Nacional Autónoma de México, Brigham Young University, 1983, p. 414-440, 426; M. H. Ruz, Los legítimos hombres. Aproximación antropológica al grupo tojolabal, México, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Filológicas, Centro de Estudios Mayas, 1981-1986, vol. II, p. 55; R. M. LAUGHLIN, Of Cabbages and Kings. Tales from Zinacantán, Washington, Smithsonian Institution Press, 1977,

p. 151; D. ATIENZA DE FRuros, « Hunahpú, Ixbalanqué y Xut : análisis de la estructura de un mito tzeltal en el tiempo», Revista Espanola de Antropología Americana 33 (2003), 29. A. M. Tozzer, Mayas y lacandones. Un estudio comparativo, México, Indigenista, 1982, p. 106; A. ViLLa RoijAs, Los elegidos, p. 439-440. 30. H. B. NicHoLsow, The "Return of Quetzalcóatl”: Did it Play a Role Mexico, Lancaster, Labyrinthos, 2001, p. 8, hace notar que Quetzalcéatl, en tesoros en montes, cuevas y ríos.

p. 253-276, 265. Instituto Nacional in the Conquest of su huida, oculta sus

47

Alfredo Lôpez Austin

simboliza con la corona de oro de la nueva era*!. Su ejército está integrado por una generación de ancestros, prehumana, constructora de los monumentos que ahora son ruinas arqueológicas. La primera luz solar transforma a sus seguidores en esculturas y objetos arqueológicos, seres encantados que adquieren vida cuando impera la oscuridad nocturna. E] rey vive en una ciudad subterránea rodeada por las aguas de un lago, centro del mundo que se comunica radialmente por una red de tüneles. Líneas de investigación: el nombre de Montezuma

Varios de los rasgos enunciados abren líneas de investigación que, más allá de las historias de los reyes subterráneos, hacen que en el complejo explicativo puedan incluirse relatos, creencias, ritos, símbolos pictóricos y otras formas de expresión de la cosmovisión mesoamericana. El primer ejemplo es el nombre de Moctezuma o Montezuma, propio no sólo del rey subterráneo, sino de divinidades que reciben culto hoy en día. Ya me referí al Moctezuma adorado por los otomíes del norte de Puebla. Otros casos son el de Montizón, que entre los totonacos es el Dueño de la Tierra, macho y hembra, a quien se piden las buenas cosechas”, y el de Santazoma entre los tepehuas, dios dador del sustento que tiene bajo su dominio las enfermedades que afligen a los hombres y a quien éstos agravian constantemente por orinar y defecar sobre su rostro?. En los tres casos, Moctezuma, Montizón, Santozoma es la deidad

de la tierra. ¿Por qué sus nombres? Se ha aducido que los otomíes dieron a un dios terrible el nombre de un tlatoani terrible, conquistador, que les fue odioso por sus invasiones y tropelías**, o que los tepehuas confundieron el dominio del gobernante mexica sobre sus tierras con el poder del dios de la tierra? ; pero estas explicaciones se desvanecen ante la pluralidad y variedad de personajes sobrenaturales que han sido y son así llamados. La dificultad aumenta en tanto la lejanía de los mexicas es mayor en el tiempo y en el espacio. La presencia de la figura de Montezuma en lo que hoy es el norte y noroeste de México y el suroeste de los Estados Unidos ha hecho correr mucha tinta, sobre todo desde los años en que eran ya inminentes la guerra entre ambos países y la subsecuente pérdida de más de la mitad de nuestro territorio nacional. Mis referencias serán escuetas. El tlatoani Motecuhzoma se hizo famoso en la cuenca superior del Río Grande desde que allá llegaron los indígenas del centro de México que acompañaron en la colonización a los españoles**; pero es necesario agregar una importante vía que permitió que la leyenda absorbiera el nombre del t/atoani mexica: Adolph F. A. Bandelier

31. Véase la interpretación de M. Mowroríu VILLAR, «Los antiguos itzáes y otros relatos de Chan Kom, Yucatán», Tlalocan 9 (1982), p. 367-371, 367-368. 32. A. ICHON, La religión de los totonacas de la sierra, México, Instituto Nacional Indigenista, 1973, p. 146-147. 33. R. WiLLiAMS García, Los tepehuas, Xalapa, Universidad Veracruzana, Instituto de Antropología, 1963, p. 159-161, 193-194. 34.

H. Lenz, El papel,

35.

R. WiLLIAMs García, Los tepehuas, p. 193.

p. 122.

36. R. J. PARMENTIER, « The Mythological», p. 617-618.

48

Los reyes subterráneos

hizo notar que las danzas de los matachines, introducidas en el territorio de los indios pueblos por los franciscanos en épocas coloniales tempranas, tenían entre sus personajes al Monarca y a La Malinche, y que la figura del primero estaba íntimamente ligada a la de Motecuhzoma *. ¿Por qué se fundieron posteriormente las historias del dios Poseyemu y de Montezuma ? En un estudio notable, Richard J. Parmentier elabora tres hipótesis, no exclu-

sivas ni contradictorias: un recurso político del gobierno mexicano en los difíciles tiempos previos a la guerra contra los Estados Unidos; la similitud estructural y simbólica de los personajes, y la evolución de la religión de los indios pueblos en presencia del catolicismo español*. Con relación a la primera hipótesis, existe un informe del Comisionado de Asuntos Indígenas, publicado en Washington en 1864, que atribuye la fama de Montezuma entre los indios pueblos a una historia escrita en la ciudad de México, nunca impresa, que circuló en Nuevo México en el mencionado año””. Además, en el norte de México los restos arqueológicos, en general, reciben el nombre de montezumas. « Hoy en día — decía Bandelier en 1892 — cuando uno pregunta por “ruinas” a los indios de El Paso del Norte, no entienden y contestan que no las hay: pero si uno pregunta por las montezumas, enseguida señalan las manchas donde los montículos, cubiertos por cerámica, indican la antigua existencia de edificios de asentamientos indígenas »*?. Así se conocían los restos, al menos hasta la época de mi adolescencia, cuando

íbamos al desierto en busca de las puntas de flecha de las montezumas. ; Por qué los norteños damos tal nombre a los sitios arqueológicos? Se ha dicho que la causa fue la identificación que se hizo en la colonia temprana de las ruinas del norte con las casas de un Montezuma ya histórico, ya legendario. La noticia más remota es de 1664, cuando Francisco de Gorráez Beaumont

y Antonio de Oca Sarmiento se refirieron a Paquimé como «las casas de Montezuma »*!. Sin embargo, no sólo en el norte llamamos montezumas a los restos arqueológicos ni a sus supuestos habitantes invisibles*. Otras causas más profundas parecen estar presentes. Líneas de investigación: la calidad regia

Sigamos la pista de la calidad regia del personaje mítico. Tenemos algunos ejemplos en los cuales el gobernante es rey, aunque no se llame Motecuhzoma.

37. A. F. A. BANDELIER, « The *Montezuma' », p. 325. 38. R. J. PARMENTIER, « The Mythological », p. 616-618, 620. 39. A.F. A. BANDELIER, «The *Montezuma'», p. 323-324;

R.J. PARMENTIER,

«The

Mythological», p. 620; R. J. PARMENTIER, «The Mythological», p. 187-195, cita a John Ward como autor del informe de la New Mexico Superintendency, publicado en Report of the Commissioner of Indian Affairs for the Year 1864. 40.

A. E. A. BANDELIER,

41.

A. F. A. BANDELIER, «The

« The

*Montezuma'

», p. 322-323.

*Montezuma' », p. 320;

véase el resto de la discusión en 319-

323; R. J. PARMENTIER, « The Mythological », p. 618. 42. Se designan así en muchos lugares de la Repüblica. En Oaxaca, por ejemplo, el término se usa en plural cuando se hace alusión a los personajes sobrenaturales (E. C. Parsons, Mitla, p. 289).

49

Alfredo Lôpez Austin

Siguangua, por ejemplo, es el nombre de un famoso gobernante tarasco de principios de la colonia?. Otro caso es el del Tráscara peninsular. Si no es rey, es un batab. ¿Y el nombre de Tráscara? También en el Viejo Mundo hay historias maravillosas. Después de que Jesús fue crucificado, los hermanos Marta, María Magdalena y Lázaro, junto con Maximino, partieron de las costas orientales del Mediterráneo en una embarcación carente de provisiones, propulsores e instrumentos. En la nave prodigiosa arribaron a las costas de Marsella. Tierra adentro, en un bosque próximo al Ródano, moraba un terrible dragón que tenía atemorizados a los comarcanos. Marta lo asperjó con agua bendita y le mostró una cruz, con lo cual la bestia se tornó tan mansa como una oveja. Marta la amarró por el cuello y la llevó a un paraje donde los paisanos la alancearon y mataron a pedradas. El monstruo, llamado Tarasca, pasó a ser parte de la iconografía de Marta, y siglos más tarde su aterrorizante efigie desfiló cada año delante de la procesión de Corpus“. Es posible que algün espafiol — catalán por mayor precisión — comparara algün monolito arqueológico en forma de serpiente con el horripilante armatoste de las fiestas religiosas de su pueblo — animal entre terrestre y marino, provisto de enormes y agudos dientes —; es posible que la comparación se hiciese en presencia de algün maya, y es posible también que el nombre del dragón, Tarasca, quedara asociado en la mentalidad del indio con el ser sobrenatural que para él estaba oculto en la escultura, el mismo que desde entonces sería denominado Tráscara. Siguiendo la pista de los reyes, será posible incluir, por afinidad, más personajes regios a la lista, con el fin de entender el carácter del complejo mítico estudiado. Un ejemplo importante será el rey Votán, aunque su historia este deformada por la fantasiosa imaginación del obispo Núñez de la Vega. Pese a la rebuscada descripción del obispo, Votán conserva en ella características que permiten identificar su carácter mítico: es divisor y repartidor de tierras, distribuidor de lenguas

entre

los pueblos,

creador

de bestias,

ocultador de tesoros, columna cósmica, constructor a soplos de los antiguos edificios y, sobre todo, corazón del pueblo*. Su figura pertenece al grupo de los Montezumas.

43.

D. E. LóPEZ

SARRELANGUE,

La

nobleza

indígena

de

Pátzcuaro

en

la

época

virreinal,

México, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Históricas, 1965, p. 244. 44. S. de la VorÁGINE, La leyenda dorada, Madrid, Alianza Editorial, 1987, vol. I, p. 419420;

M.

MONTERROSA

PRADO,

L. TALAVERA

SOLÓRZANO,

Repertorio

de

símbolos

cristianos,

México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 2004, p. 194; M. ALonso, Enciclopedia del idioma, Madrid, Aguilar, 1991, vol. 3, p. 3893. 45.

FRAY F. NÚÑEZ

DE LA VEGA,

Constituciones Diocesanas del Obispado

de Chiapa,

México,

Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Filosóficas, Centro de Estudios Mayas, 1988, p. 275. Sobre la calidad de la obra del obispo, M. del C. León CÁZARES, M. H. Ruz, «Estudio introductorio» a Fray F. NÚÑEZ DE LA VEGA, Constituciones Diocesanas,

p. 19-252, y en particular p. 128-138. Sobre la fantasiosa historia que se ha tejido sobre Votán, el significado mítico y las interpretaciones arqueológicas de su figura, véanse M. H. KERKHOFF, «‘La Probanza de Votán' : Apéndice fantasma del “Popol vuh° », América Indígena 44-4 (1984), p. 713-746; y C. NAVARRETE, « Anotaciones atemas no resueltos: Votán, las “Columnas de Been”

50

Los reyes subterráneos

El Dueño, su ejército y su mundo

La personalidad de los reyes se va perfilando en tanto se aproximan a la figura del Dueño del Monte Sagrado, señor de la tierra, guardián de las riquezas subterráneas que surgen cíclicamente a la superficie terrestre y patrono tanto de la humanidad en su conjunto — en su aspecto universal — como de cada pueblo en sus advocaciones particulares. Por ello se afirma — para dar un simple ejemplo — que habla todas las lenguas del mundo y, al mismo tiempo, dona a cada pueblo su lengua particular. En cuanto a Dueño, hasta nuestros días se le conoce con el nombre de El Rey**. Debo apuntar aquí que Leonardo López Luján y yo ofrecemos una descripción mucho más puntual de tan complejo personaje en un estudio acerca del Monte Sagrado y de su Dueño, recientemente publicado”. Y así como los reyes subterráneos acusan su origen mítico en la concepción del Dueño, su reino y su ejército se ubican en el gran recinto subterráneo que forma el vientre del Monte Sagrado. Por ello su palacio se encuentra en medio del lago que describen las fuentes etnográficas como morada del Dueño*. Los túneles por los que viaja Montezuma son las vías de todos los ríos del mundo que tienen su origen en el gran depósito, según el texto de fray Bernardino de Sahagún.* La gente del rey subterráneo son los dioses expulsados del paraíso paterno que con su propia sustancia dieron origen a los distintos seres mundanos. Vivieron las aventuras del mito y, con la primera salida del Sol, sus formas quedaron fijas, se cubrieron de materia dura y se convirtieron en las distintas clases de criaturas que poblarían el mundo. Como criaturas tuvieron que someterse al ciclo de la vida y de la muerte: existirían como

y las rocas-estelas del sur de Mesoamérica », Anales de la Academia de Geografía e Historia de Guatemala 65 (1991), p. 9-55. 46. Véase, como ejemplo, G. GonzÁLEz Cruz, M. ANGUIANO, «La historia de Tamakatsiin », Estudios de Cultura Náhuatl 17 (1984), p. 205-225, 223. 47. A. López AUSTIN, L. López Luján, Monte Sagrado-Templo Mayor, México, Universidad

Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, Instituto Nacional de Antropología e Historia, México, 2009. El tema de los reyes subterráneos se desprende de dicha investigación. Una somera mención de este último se encuentra en A. LÓPEZ AUSTIN, «Los paradigmas, el núcleo duro y la idea de la muerte en Mesoamérica », en L. LóPEz LujÁN, P. CARRASCO, L. CUE (éd.), Arqueología e Historia del Centro de México. Homenaje a Eduardo Matos Moctezuma, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, El Colegio Nacional, 2006, p. 355-367. 48. Por ejemplo, entre nahuas de Veracruz (F. BÂEZ-JORGE, A. GÓMEZ MARTINEZ, Tlacatecolotl y el Diablo. La cosmovisión de los nahuas de Chicontepec, Xalapa, Gobierno del Estado de Veracruz, Secretaría de Educación y Cultura, 1998, p. 28-29); nahuas de Puebla (M. E. ARAMONI BURGUETE, Talokan Tata, Talocan Nana : Nuestras raíces. Hierofanías y testimonios de un mundo

indígena, México, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, 1990, p. 128); chinantecos (R. J. WEITLANER, «Relatos », p. 94), y tzeltales (J. Nash, In the Eyes of the Ancestors. Belief and Behavior in a Maya Community, New Haven y Londres, Yale University Press, 1970, p. 23). 49.

Fray

B. de SAHAGÜN,

Códice Florentino.

Manuscrito

218-20 de la Colección Palatina

de

la Biblioteca Medicea Laurenziana, México, Secretaría de Gobernación, Archivo General de la Nación, 1979, lib. XI, cap. xii, párrafo 1°: fol. 223v. Véanse también F. STARR, « Notes», p. 17; E. HERMITTE,

Poder sobrenatural y control social en un pueblo maya

contemporáneo,

México,

Instituto Indigenista Interamericano, 1970, p. 42.

51

Alfredo Lôpez Austin

individuos en forma de materia sutil — «almas », pudiera decirse — dentro de minerales, plantas, animales y seres humanos, seres éstos vulnerables al paso del tiempo y, por lo tanto, destructibles; pero los dioses de su interior — sus «almas » — serían inmortales; saldrían de los cuerpos destruidos, viajarían al más allá y quedarían guardados en el gran depósito del Monte Sagrado hasta ser reciclados.

Son, en resumen,

los «padres-madres », los dioses conver-

tidos en «semillas-corazones » de los seres mundanos, la parte sutil de los creadores-criaturas que permiten la continuidad de las clases de los seres que existen en la era presente sobre la superficie de la tierra. Veamos algunas de sus características que estos seres comparten claramente con la gente de Montezuma. La primera, sus poderes iniciales en una existencia premundana cuando los materiales y los instrumentos trabajaban solos. ¿No se caracterizó el ejército subterráneo por haber construido los grandes monumentos con silbidos, o «con soplos », como aparece en la descripción de Votán? Entre los mayas, los ancestros de los hombres fueron las varias razas cuyas características se afinaron hasta cumplir los atributos requeridos por los dioses”. ¿No son éstos los enanos del rey que se escondieron ante los primeros rayos del Sol? Aquellos protohombres — al mismo tiempo antecesores y ancestros — se hundieron en la tierra o se convirtieron en piedra al salir el Sol, y muchos de ellos son los constructores ya transformados en restos arqueológicos”. Incluso, cuando se llega a leer en algunas de las narraciones que el portentoso retorno al poder del rey maya oculto se

50. Popol Vuh. Las antiguas historias del Quiché, A. Recinos (trad.), México, Fondo de Cultura Económica, 1964, p. 70; R. REDFIELD, A. VILLA Rojas, Chan Kom, p. 12, 121; A. VILLA Rojas,

Los

elegidos,

p.

289-290;

C. GuirERAs

HoLMEs,

Los

peligros

del

alma.

Visión

del

mundo de un tzotzil, México, Fondo de Cultura Económica, 1965, p. 161-162; G. H. GossEN, Los chamulas en el mundo del Sol, México, Instituto Nacional Indigenista, 1979, p. 383-384; V. Cruz,

J. HERNÁNDEZ,

legítimos hombres,

S. GóMEz,

M.

H. Ruz,

O. SCHUMANN,

«Los

dos

mundos»,

en

Los

vol. I, p. 15-17; P. R. SuLLIVAN, «Contemporary », p. 97; M. de la Garza,

«Los mayas. Antiguas y nuevas palabras sobre el origen», en J.

MowAn Ás-Ruiz (coord.), Mitos

cosmogónicos del México indígena, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1987, p. 15-86, 57; D. ATIENZA DE FRUTOS, «Hunahpú, Ixbalanqué», p. 274; J. B. ALCORN, Huastec Mayan Ethnobotany, Austin, University of Texas Press, 1984, p. 61; T. J. IBACH, «The Man Born of a Tree: A Mixtec Origin Myth», Tlalocan 8 (1980), p. 243-247, etc.

51. Entre

una abundantísima

bibliografía pueden

consultarse

C. Gurreras

HOLMESs,

Los

peligros; A. M. TozzER, Mayas, p. 179-180; J. E. S. Thompson, Ethnology of the Mayas of Southern and Central British Honduras, Chicago, Field Museum of Natural History 274, Anthropological Series 17-2, 1930, p. 166; J. E. S. THoMPsoN, Historia y religión de los mayas, México, Siglo Veintiuno Editores, 1975, p. 409-412; R. REDFIELD, A. VILLA RoJas, Chan Kom, p. 331;

W. R. HoLLAND,

Medicina

maya

en los Altos de Chiapas.

Un estudio del cambio

socio-

cultural, México, Instituto Nacional Indigenista, 1963, p. 71-73; G. H. GossEN, Los chamulas; G. H. GossEN, «Cuatro mundos del hombre: Tiempo e historia entre los chamulas», Estudios de Cultura Maya 12 (1979), p. 179-190; M. de la Garza, «Los mayas», p. 69-73; V. MOLINA Lupv, «La ideología étnica a través de la historia», tesis de doctorado en antropología, Centro

de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social, México 1993, p. 133-134. 52. Popol Vuh, p. 122-123, dice que los primeros padres se convirtieron en piedras en

el

primer

amanecer.

Véanse

E. C. Parsons,

p. 179; P. R. SuLLIVAN, «Contemporary»,

52

A. M. TozzrER,

Mayas,

p. 97; V. MouiNA Lupv, «La ideología»,

Mitla,

p.

216-217;

p. 206;

Los reyes subterráneos

vincula con la reposición del cordón umbilical por el que circulará la sangre revivificadora?, debe pensarse en la figura cósmica que equipara el principio del mundo y la formación de su centro al establecimiento prístino del gran ombligo cósmico**. ¿No es dicho tiempo inicial el que se marca con la gran dispersión de los pueblos aún no nacidos? Es entonces cuando se da su lengua distintiva a cada grupo humano que emigra de la mítica Tulán, semillero de seres humanos, para ocupar el sitio en que recibirá los primeros rayos solares de la era naciente”. Interpretación de algunos símbolos

Esta guía ha de servirnos para interpretar símbolos míticos fundamentales, entre ellos la bendición que derrota al rey subterráneo y a su gente. En la mitología colonial la bendición es equivalente — símbolo alterado — de la salida prístina del Sol. La transformación del símbolo se debe a la prédica evangélica. El tiempo anterior a la llegada del cristianismo se empató al tiempo mítico. Los antepasados mayas paganos se confundieron con las generaciones prehumanas. En esta forma, la bendición — esto es, la evangelización — se hizo sinónimo del inicio de la vida presente, de la razón de la existencia del mundo. Otro símbolo mítico es la ciudad de México, figura del centro indígena prehispánico a partir de la conquista. La ciudad de México se convierte, como arquetipo, en la imagen de la ciudad oculta en el vientre del Monte Sagrado, la rodeada por las apacibles aguas de un lago?". La antigua gente (los dioses guardados bajo la tierra) se ligan así con los ciclos: con la sucesión de la vida y de la muerte; con la salida y la desaparición de los astros; con las fases del día, la noche y las estaciones; con las vueltas calendáricas;

con la profecía

convertida en fatal retorno, en fin, con los procesos de creación de los dioses

A. R. SANDSTROM, Corn is Our Blood. Culture and Ethnic Identity in a Contemporary Aztec Indian Village, Norman y Londres, University of Oklahoma Press, 1991, p. 242 y 247. 53. V. R. BRICKER, El Cristo indígena, el rey nativo. El sustrato histórico de la mitología del ritual de los mayas, México, Fondo de Cultura Económica, 1993, p. 312-313; V. MoLiNA Luny, «La ideología », p. 136, 140. 54. Una explicación sumamente clarificadora se encuentra en A. GEBHARDT DOMINGUEZ, « El origen de la creación según los ch'oles», Tlalocan 13 (2001), p. 49-58, 49-50. Véanse también A. M. Tozzer, Mayas, 55.

p. 179;

M.

A. LÓPEZ AUSTIN, Los mitos

H. Ruz, «Credos»,

p. 328.

del tlacuache Caminos de la mitología mesoamericana, México,

Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1996, p. 408-409;

A. Lórgz AUSTIN, L. LóPEZ LUJÁN, Mito y realidad de Zuyud.

Serpiente Emplumada

y las transformaciones mesomericanas del Clásico al Posclásico, México, El Colegio de México, Fideicomiso Historia de las Américas, Fondo de Cultura Económica, 1999, p. 59; G. H. GossEN, «Cuatro

mundos»,

p. 182-183.

56. A. LóPEgz AUSTIN, Los mitos del tlacuache, p. 56. 57. Véase M. C. ANZURES v BoLaÑos, « Tláloc, señor del monte y dueño de los animales. Testimonios de un mito de regulación ecológica», en B. DAHLGREN (éd.), Historia de la religión en Mesoamérica y áreas afines. 11 Coloquio, México, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1990, p. 121-158, 146-147; V. MoLINA Lupv, «La ideología», p. 198-199.

53

Alfredo Lôpez Austin

que también cumplen su ciclo en el aviso de la destrucción de su actual obra: la vuelta de la tortilla^*. El mito realizado

El mito colonial se ubicó en el nicho de la geometría y la dinámica de la antigua cosmogonía mesoamericana. La opresión aportó el segundo de los factores. Los pueblos indígenas se fincaron en la lógica de los ciclos, y la respuesta mítica fue el retorno, ya como la emancipación, ya como la destrucción del mundo del hombre, en el regreso de los ancestros prehumanos. El mito fue anhelo de libertad o de venganza; pero, de cualquier manera, el deseo de que llegara el fin de la opresión secular. Y el mito ya libertario, ya escatológico — construcción utópica de una casi total desesperanza —, se unió al acontecimiento histórico o a la memoria histórica — fiel o imaginativa, indígena o ladina — para hacerse presente en los líderes portentosos, cubiertos por los mantos sacros. La figura de Jacinto Uc, venerada, denostada,

registrada, inventada o novelada, será la de Rey Jacinto Uc Canek Chichán Moctezuma”. Eso fue en 1761 ; pero otros, antes y después que él, a lo largo de los siglos, se han dado títulos de reyes, o en forma más precisa se han llamado Montezuma, y han invocado la fuerza de los seres sobrenaturales para buscar su alianza o para identificarse con ellos en el fin de la presente edad del mundo*. Conclusiones

El problema de los reyes subterráneos es arduo, y cada uno de sus ramales ofrece una pluralidad de incógnitas. La investigación está en proceso y este artículo es sólo una etapa del camino. Ya es posible, sin embargo, enunciar algunas conclusiones.

58. M. MoNroLíu VILLAR, Cuando los dioses despertaron. Conceptos cosmológicos de los antiguos mayas de Yucatán estudiados en el Chilam Balam de Chumayel, México, Universidad

Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1989, p. 81-82. 59. V. R. BRICKER, El Cristo, p. 146; M. H. Ruz, «Los rostros de la resistencia. Los mayas ante el dominio hispano», en M. del C. León, M. H. Ruz, J. ALgos García (éd.), Del katún al siglo. Tiempos de colonialismo y resistencia entre los mayas, México, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, 1992, p. 85-162, 132; J. P. VigugiRA, Indios rebeldes e idólatras. Dos ensayos

históricos

sobre

la

rebelión

india

de

Cancuc,

Chiapas,

acaecida

en

el año

de

1712,

México, Centro de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social, 1997, p. 130; M. del C. VALVERDE VALDÉS, «De vírgenes, profecías, cruces y oráculos: Religión y rebelión en el área maya», en M. de la GARZA CAMINO, M. I. NÁJERA CORONADO (éd.), Religión maya, Madrid, Editorial Trotta, 2002, p. 283-319, 297, 301-302; P. BRACAMONTE Y Sosa, La encarnación de

la profecía. Canek en Cisteil, México, Centro de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social, Instituto de Cultura de Yucatán, Miguel Ángel Porrúa, 2004. 60.

V. R. BRICKER,

El Cristo;

M. A.

BARTOLOMÉ,

A. M.

BARABAS,

La

resistencia;

M.

H. Ruz,

«Los rostros»; P. BRACAMONTE Y Sosa, La conquista inconclusa de Yucatán. Los mayas de la

montana, 1560-1680, México, Centro de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social, Universidad de Quintana Roo/Miguel Ángel Porrúa, 2001.

54

Los reyes subterráneos

En otros trabajos he propuesto que la antigua mitología mesoamericana fue construida en forma paulatina, en el ritmo histórico de muy larga duración, por numerosas sociedades distribuidas a lo largo y ancho de un vastísimo territorio. En pocas palabras, he defendido la cocreación del mito. No creo, por tanto, que podamos atribuir con justicia la cuna de un solo mito a un solo y exclusivo pueblo generador y difusor. Los mitos se van integrando lentamente, por piezas, por trozos de razón y ensueño que se pegan a un meollo imantado. Ahora, frente a un mito indígena colonial, debo sostener

lo mismo: existe la cocreación, la producción paralela en la que los diálogos forman cadenas de ida y vuelta por miles de kilómetros. Como segunda conclusión propongo que el estudio óptimo del mito es el que ataca simultáneamente sus dos dimensiones. Una dimensión es la de la gran historia, en su gran tiempo y gran espacio, la cocreación mítica que engloba sociedades distantes, pero que comparten principios cosmológicos, que están sujetas a condiciones e impactos históricos comunes y que reciben los mismos influjos exógenos*!. En buena parte, el método adecuado es el comparativo. La otra dimensión lleva a la historia regional y a la producción mítica propia, la que toma en cuenta las particularidades de una cultura circunscrita en los distintos niveles de una tradición, un devenir propio de peculiares acontecimientos, vivencias y transformaciones, y la recepción de específicas ideas externas. Unidas las dos dimensiones, podremos entender mejor la producción. La tercera conclusión es otra propuesta: la apertura de los parámetros culturales. Nos anclamos demasiado en Mesoamérica sin considerar que su producción de pensamiento puede encontrar suelo fértil en culturas que ofrecen un nicho con más similitudes cosmológicas de las que sospechamos. Sea dicho esto, por ahora, con relación a las tradiciones septentrionales.

La caja de Pandora

Concluida aquí esta etapa, destapemos la caja de Pandora del siguiente paso: existe en Perú un interesante mito colonial, aún vivo, cuyo personaje central ha recibido el nombre de Inkarrí. La partícula «inka» se refiere a la identificación de este personaje con Atahualpa; «ri» es la pronunciación quechua de la palabra española «rey ». Esto haría ya al personaje un equivalente andino del rey Montezuma. Pero hay más: segün algunas versiones del mito, Inkarrí fue hijo de una virgen y de padre desconocido, posiblemente el Sol. Se cuenta que fue decapitado — como se dice de Juan López —, aunque

61. Nunca deben descartarse ni las semejanzas por construcciones paralelas, pero independientes, en otras partes del mundo, ni las influencias externas que, precisamente por la coincidencia de algunas concepciones, pueden completar el cuadro de las similitudes entre creaciones de pueblos que sí están vinculados histórica y culturalmente. Es obvio que no sólo en América se han imaginado los reinos subterráneos, y no son remotos algunos aportes europeos, asiáticos o africanos en las concepciones indígenas. En una conversación sobre el tema, Margit Frenk mencionó como ejemplo de construcción paralela e independiente la idea del reino lacustre y subterráneo que recogió Cervantes de su propia tradición y que plasmó en el Quijote. Este tema es uno de los que quedan para posterior desarrollo.

55

Alfredo Lôpez Austin

la historia oficial registre que Atahualpa murié ejecutado por garrote. Sin embargo, Inkarrí vive, pues se trata de un dios del principio del mundo. Vive hoy y vivió «cuando no existía el Sol », y es el soberano de los /íaupa-machu, seres que se secaron con los primeros rayos solares. Con ellos, Inkarrí fue el gran constructor; las piedras obedecieron sus órdenes y se levantaron por sí mismas para ordenarse en los monumentos colosales. Hoy se espera que Inkarrí regrese de su reino subterráneo para recuperar el poder que arrebataron los españoles a los indios. Mientras llega su día, vive en una ciudad perdida, selvática, llamada Paititi, o en otra llamada Cuzco, llena de oro y

plata, que está dentro de un cerro en forma de bóveda, como un subterráneo grande, y que se comunica con todos los pueblos del mundo por medio de túneles. Sería interesante continuar esta historia; pero por ahora llego a la extensión adecuada para este artículo, y reservo respuestas para cuando éstas adquieran la madurez requerida frente a la duda metódica.

56

CERFS MÉLOMANES

ET CHASSEURS LUBRIQUES:

CHASSE, MUSIQUE ET ÉROTISME DANS L'ANCIEN MEXIQUE!

Guilhem OLIVIER

Instituto de Investigación Históricas Universidad Nacional Autónoma de México

En souvenir d'une longue conversation sur Richard Wagner une nuit de juillet 2003, à Santiago du Chili.

Dans un article séminal, Michel Graulich a analysé les liens étroits qui existaient entre la chasse et le sacrifice dans l'ancien Mexique. Après avoir insisté sur la proximité homme-animal dans les ontologies indigènes, l'auteur démontre que la guerre était assimilée à une véritable chasse à l'homme dont la finalité était l'obtention de victimes sacrificielles identifiées à du gibier. Il s'agissait donc d'un système idéologique qui privilégiait le modèle cynégétique sur le modele agricole, indépendamment des conditions économiques de ces sociétés. Ces idées seront développées dans plusieurs passages de son grand ouvrage sur Le sacrifice humain chez les Aztéques?. Or, le cerf^ occupait une position centrale dans ce système de pensée, à la fois gibier par excellence et modele de l'offrande sacrificielle, dont

1. Jeremercie Rodolfo Ávila, du Centre d' Études Mexicaines et Centraméricaines (CEMCA),

qui a réalisé les dessins illustrant cet article. 2. M. GRAULICH, «Chasse et sacrifice humain chez les Aztèques», Bulletin des Séances de l'Académie Royale des Sciences d'Outre Mer 43-4 (1997), p. 433-446. 3. M. GRAULICH, Le sacrifice humain chez les Aztéques, Paris, Fayard, 2005.

4. J'utilise par commodité le terme «cerf». En fait, les cervidés présents sur les territoires mexicain et centraméricain ont été classifiés par les spécialistes en cinq espèces : le cerf rouge ou wapiti

(Cervus

elaphus),

une

sorte d'élan, et le cerf mule

ou à queue noire (Odocoileus

hemionus), habitants des zones septentrionales arides du Mexique; le cerf à queue blanche (Odocoileus virginianus), présent sur tout le territoire mésoaméricain (en fait, la plupart de nos données le concernent);

le temazate

rouge ou chevreuil

(Mazama

americana)

qui habite les

foréts tropicales de la Cóte du Golfe, du Yucatan et en général le sud-est et une partie du sudouest du Mexique; enfin, le temazate gris (Mazama pandora) que l'on rencontre dans les foréts des États du Chiapas, Campeche et Quintana Roo (S. A. LeoroLD, Wildlife in Mexico, Berkeley et Los Angeles, University of California Press, 1959, p. 501-523).

57

Guilhem Olivier

l'immolation était considérée comme

N

équivalente à celle d'un prisonnier

de guerre (fig. 1)*. Rarement abordées à ma connaissance, les connotations

sexuelles de la chasse au cerf permettent d'approfondir l'étude du symbolisme complexe du cervidé et de poursuivre l'exploration des aspects guerriers et sacrificiels des pratiques cynégétiques en Mésoamérique.

Figure n° 1: Cerf atteint par une flèche (Códice Borgia, pl. 22).

Dans les mythes anciens, ceux qui vont à la chasse comme Mimich, Xiuhnel ou les Mimixcoa sont confrontés à des déesses qui se présentent comme des proies (biches ou jaguars) qui se laissent chasser ou bien se transforment en tzitzimime qui les séduisent puis les tuent, parfois au moment précis de l’acte sexuel*. De méme, la déesse Itzpapalotl, « Papillon d'Obsidienne », qui dévore les quatre cents Mimixcoa avant de succomber face aux fléches de leurs cinq frères (dont Mixcoatl), pouvait apparaître sous l'aspect d'un cerf bicéphale?. Quant au dieu de la chasse Mixcoatl, après avoir tiré en vain des flèches sur la déesse Chimalma, anticipant toutefois sa fécondation, il congoit avec elle Quetzalcoatl (fig. 2).

5. M. GRauLicH, Mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique, Bruxelles, Académie Royale, 1987, p. 341; Id., «Chasse et sacrifice», p. 435-438; Id., Le sacrifice humain, p. 190; G. OLIVIER, «Le cerf et le roi : modèle sacrificiel et rite d'intronisation dans l'ancien Mexique », Journal de la Société des Américanistes 94-1 (2008), p. 191-230. 6. «Leyenda de los Soles », dans J. BIERHORST (éd.), Códice Chimalpopoca. The Text in Nahuatl with a Glossary and Grammatical Notes, Tucson et Londres, The University of Arizona Press, 1992, p. 92-94; Id., dans J. BIERHORST (trad.), History and Mythology of the Aztecs. The Codex Chimalpopoca, Tucson et Londres, The University of Arizona Press, 1992, p. 151-153. 7. «Anales de Cuauhtitlán », dans J. BIERHORST (éd.), Códice Chimalpopoca, p. 3; Id., dans

J. BIERHORST (trad.), History and Mythology of the Aztecs, p. 23; «Historia de los mexicanos por sus pinturas», dans J. García

ICAZBALCETA (éd.), Nueva colección de documentos para la

historia de México, Mexico, Salvador Chavez Hayhoe, 1941, p. 217.

58

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

It

RE

Figure n? 2: Mixcoatl, le dieu de la chasse (Códice Borgia, pl. 15).

Cette union est cependant fatale pour Mixcoatl, une source précisant qu'il perd à cette occasion «le cerf qu'il portait [équivalent à un tlaquimilolli, “paquet sacré"], grâce auquel il était toujours vainqueur»?. Des récits semblables ont été recueillis chez les Huichols au début du xx* siècle: le dieu Kauyumari, appelé aussi Parikuta Muyeka, «... blesse des cerfs avec ses fléches. Immédiatement, les animaux blessés se transforment en femmes qui tentent de séduire le chasseur qui les poursuit jusqu'à l'inframonde... »?. Il est sans doute significatif que dans certaines chroniques qui rapportent des «événements historiques », l'issue d'une partie de chasse peut également étre un mariage. Ainsi, tel Golaud rencontrant Mélisandre aprés s'étre perdu à la chasse dans le célébre opéra de Debussy, ce fut durant une expédition cynégétique que Huactzin, roi de Cuauhtitlán, fit la connaissance de sa future épouse Itztolpanxochi, la fille du souverain de Culhuacán, qui s'était égarée dans la forêt.

8. «Historia de los mexicanos », p. 217; «Leyenda de los Soles», p. 94; id., p. 153. Précisons que Chimalma s'apparente plus à une femme-jaguar qu'à une femme-cerf, comme l'a signalé M. GgAULICH, Mythes et rituels, p. 176. 9. K. T. Preuss, Fiesta, literatura

y magia

en el Nayarit.

Ensayos sobre coras, huicholes y

mexicaneros, J. JÁUREGUI, J. NEURATH (éd. et trad.), Mexico, Instituto Nacional Indigenista, Centre d'Études Mexicaines et Centraméricaines, 1998, p. 278. 10. «Anales de Cuauhtitlán », p. 63-64; id., dans J. BIERHORST (trad.), History and Mythology, p. 31. À propos du monde amazonien, Stephen Hugh Jones signale que «L'ethnographie régionale abonde d'ailleurs de parallèles symboliques entre la prise de gibier à la chasse et celle des femmes en mariage, ainsi qu'entre l'alimentation et la sexualité» (S. HuGn Jones, « Bonnes raisons ou mauvaise conscience? De l'ambivalence de certains Amazoniens envers la consommation de viande », Terrain 26 (1996), p. 136.

59

Guilhem Olivier

La chasse et la sexualité semblent donc étroitement imbriquées dans ces récits dont les issues divergent, depuis la capture de gibier ou de femmes jusqu'à la séduction et la mort des chasseurs imprudents ou lubriques. Nous retrouvons une équivalence manifeste entre la chasse aux cervidés et une attaque sexuelle dans une invocation inclue dans le Rituel des Bacabs. Texte difficile assurément, présentant de surcroit des expressions fort crues, indignes de figurer dans les dictionnaires des missionnaires, ce qui explique qu'un éminent spécialiste de la langue maya comme Ralph Roys ait renoncé à proposer une traduction!!. Heureusement nous disposons aujourd'hui de la version de Román Arzápalo Marin, traducteur averti d'origine maya": ... Plusieurs chapitres composent mon discours à Hun Sactah Ik,

«Le Grand

Vent blanchi », età Top Kay Ik « Vent de chansons obscènes ».

Rappelle-toi le chant de la fornication ; qui se chante dix fois. Incitante est sa masculinité et avec le liquide de son membre il lubrifie son entrée. Mes chants transcendent, mes chants s'étendent par les grands vents. Ici ils passent de fagon subtile prés du cerf. Va la traverser, va lui óter la virginité, la beauté à ta petite biche.

Va te placer sur l'endroit délicieux de ta petite biche, jusqu'à la dixiéme couche de l'inframonde, oü le vent se dissipe...

Les connotations érotiques de ce texte sont évidentes et le chasseur maya, en déclamant l'invocation, anticipe la capture de l'animal décrite clairement comme une possession sexuelle. Précisons que ce texte fait partie d'un riche corpus de «conjuros » anciens et modernes prononcés par les chasseurs afin d'assurer le succès de leurs entreprises cynégétiquesP. L'ethnographie nous offre également des données suggestives relatives à la dimension érotique de la chasse. Par exemple, les Mixtéques actuels de Yosotato (Oaxaca) utilisent l'expression «tirer un cerf» pour signifier l'acte sexuel. De méme,

ils établissent un lien entre la chasse au cerf avec

des rets et la séduction d'une jeune femme à travers une autre expression «s'attacher une jeune fille (amarrarse una chamaca) », qui signifie la séduire. Des données semblables découlent de l'analyse des réves prémonitoires des chasseurs. Toujours selon les Mixtèques, la femme rêvée représente l'animal qui sera chassé le lendemain". De méme, la vision onirique d'une femme

11. Ritual of the Bacabs, R. Rovs (éd. et trad.), Norman, University of Oklahoma Press, 1965, p. 113. 12. Ritual de los Bacabes, R. ARZÁPALO MARÍN (éd. et trad.), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Filológicas, Centro de Estudios Mayas, 1987, p. 419-420.

13. Voir en particulier la longue invocation en langue nahuatl pour la chasse au cerf transcrite par H. Ruiz DE ALARCÓN, « Tratado de las supersticiones y costumbres gentilicas que oy viuen entre los indios naturales desta Nueua España», dans F. Benítez (éd.), El alma encantada, Mexico, Fondo de Cultura Económica, 1987 [1892], p. 161-166. 14. E. Karz, «Des racines dans la “Terre de la Pluie". Identité, écologie et alimentation dans le haut pays mixtèque », thèse de doctorat, Université de Paris X-Nanterre, Paris 1990, p. 256.

60

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

embrassée anticipe la capture d’un cerf chez les Mixes de Oaxaca". Quant aux Lacandons du Chiapas, ils interprètent le songe d’un baiser donné sur la bouche d'une femme comme l'annonce d'un prochain banquet de gibier!é. On pourrait aisément multiplier les exemples pour d'autres régions du continent américain". De fait, les hommes peuvent utiliser des procédés identiques, à la fois pour attirer les femmes et pour chasser les cerfs. Interrogée dans les années 1930, María Chona, Indienne Papago, rapporte que : ... Nous conversions [les femmes] au sujet d'une racine que les hommes utilisent pour attirer les cerfs et qui sert aussi à séduire les femmes. Elle a une odeur douce et forte et on peut la percevoir dans les mains moites de l'homme qui danse prés de nous. Cette racine puissante a été utilisée pour de nombreuses conquétes amoureuses. Quelquefois, transformée en homme, elle [la

racine] s'approche d'une femme endormie et lui inspire des rêves 9.

Une méme logique pourrait expliquer l'usage de certaines fleurs (huacalxochitl — Philodendron sp.) par les anciens chasseurs du Mexique qui les portaient sur leur couvre-chef « afin de trouver ainsi des proies plus nombreuses et mieux disposées»!?. Précisons que des fleurs semblables

15. F. J. Lire, The Mixe of Oaxaca. Religion, Ritual and Healing, Austin, University of Texas Press, 1991, p. 45. 16. R. D. BRuCE, Lacandon Dream Symbolism. Dream Symbolism and Interpretation among the Lacandon Mayas of Chiapas, Mexico, Mexico, Ediciones Euroamericanas, 1979, p. 234, 237.

17. En Amérique du Nord, les Navahos considèrent que rêver d'une femme à la maison ou bien de faire l'amour avec elle constituent un augure positif pour la chasse au cerf (W. W. HiLL, The Agriculture

and Hunting Methods

of the Navaho

Indians,

New

Haven

et Londres,

Yale

University Press, 1938, p. 109, 114). Les Achuar d'Équateur interpretent le réve d'une femme dodue et nue qui s'offre au chasseur comme un présage positif pour la chasse au pécari (P. DescoLa,

La

nature

domestique.

Maison des Sciences de l'Homme,

Symbolisme

et praxis

dans

l'écologie

des Achuar,

Paris,

1986, p. 325). Un bel exemple chez les Cree du Canada, où

un chasseur identifie un lynx femelle prise au piège avec une ravissante créature dont il avait rêvé

(R. BRIGHTMAN,

Grateful

Prey.

Rock

Cree

Human-Animal

Relationships,

Angeles, Oxford, University of California Press, 1993, p 24). 18. R. UNDERHILL, Biografía de una mujer pápago, Mexico,

Secretaría

Berkeley,

de

Los

Educación

Püblica, 1975, p. 90. À propos d'un mythe tacana où apparaissent de nombreuses règles de chasse dont l'une consiste à se laver avec les feuilles parfumées d'un arbuste, Claude

Lévi-

Strauss mentionne que « Les chasseurs indiens de la Virginie s'oignaient le corps d'une racine d'Angelica, "the hunting root" et, contrairement à l'habitude, ils se mettaient alors sous le vent

du cervidé, certains que l'odeur le ferait s'approcher» (C. Lévi-SrRAuss, Mythologiques. Du miel aux cendres, Paris, Plon, 1966, p. 297-298). Quant aux Tukano de Colombie, ils utilisent

«diverses plantes magiques (tádéxka) qui procurent le succès dans la chasse et dans l'amour» (G. REICHEL

DoMarov,

Desana.

Le symbolisme

universel des Indiens

Tukano

du

Vaupés,

Paris,

Gallimard, 1973, p. 106, 239). 19.

F. HERNANDEZ,

Historia

natural

de

Nueva

Universidad Nacional Autónoma de México,

España,

dans

Obras

completas,

Mexico,

1958, II, p. 390. Je remercie vivement Leonardo

López Luján à qui je dois cette référence. Nous retrouvons cette fleur dans les mains d'un singe — animal associé aux excès sexuels — dont la statue est conservée au Musée du Quai Branly (L. López

Lujan,

M.

F. FAUVET-BERTHELOT,

Aztèques.

La collection

de sculptures

du Musée

du

Quai Branly, Paris, Quai Branly, 2005, p. 138).

61

Guilhem Olivier

(teccizuacalxochitl) auraient été utilisées pour des plaisirs coupables par les concubines de Motecuhzoma II”. Le symbolisme sexuel de la chasse au cervidé transparait également à travers certaines danses: parmi les Coras de Santa Teresa (Nayarit), la danse

du cerf représente un jeune homme poursuivant une jeune femme qui arbore des bois de cerf?!. Durant la méme danse réalisée par les Mexicaneros de l'état de Durango, des acteurs déguisés en chien montent sur le personnage jouant le róle du cervidé et simulent un acte sexuel. En fait, la chasse au cerf est assimilée au rapt des femmes durant les fétes?. Il est dés lors éloquent de retrouver le cerf comme objet d'échange dans certaines pratiques matrimoniales. Ainsi, les Indiens de Zacatecas décrits au xvir siècle par José Arlegui : «... pour arranger leurs mariages ces barbares chassent un cerf et l’amènent à la porte de la fiancée et si le père et la jeune fille acceptent l'animal, ils considèrent que la jeune fille est leur épouse »#. Les Coras actuels conservent des coutumes semblables, le beau-père demandant un cerf en échange de sa fille”. Parfois, c'était la peau d'un cervidé qui était remise en échange d'une fiancée, ainsi chez les anciens habitants du Nuevo León dont les coutumes scandalisèrent le chroniqueur Alonso de León”. On songe également au mythe maya-kekchi dans lequel le héros solaire se pavane en portant un cerf tous les matins devant la maison de Lune et de son futur beau-père. Hélas, le jeune présomptueux glisse piteusement sur de l'eau de chaux répandue sur le chemin par la jeune fille. Son chargement se brise en tombant, révélant n'étre qu'une peau de cervidé remplie de cendres et de feuilles?*. L'échange de peau de cerf contre des femmes devient métaphorique dans la langue des Otomis

20. B. de SaHAGÚN, Florentine Codex. General History of the things of New Spain,C. E. DIBBLE, A. J. O, ANDERSON (éd. et trad.), Santa Fe, New Mexico, The School of American Research, University of Utah, 1950-1981, XI, p. 209.

21. P. E. Cove, of Public

«"Hapwan

Ceremonial

Chanaka”

Tradition

(“On top of the earth") : The Politics and History

in Santa

Teresa,

Nayarit,

Mexico»,

thése

de

doctorat

en

Anthropologie, The University of Arizona, 1997, p. 165. 22.

N. P. ALVARADO

Sous,

Atar la vida, trozarla muerte.

El sistema ritual de los mexicaneros

de Durango, Morelia, Michoacán, Universidad Michoacana de San Nicolás de Hidalgo, 2004,

p. 233, 236. 23.

J. ARLEGUI,

Crónica

de la provincia

de N.S.P.S.

Francisco

de Zacatecas,

Mexico,

1851

[1737], p. 143. Des données identiques sont mentionnées à propos des Indiens du Nuevo Santander (Tamaulipas) à la méme époque (V. SANTA María, Relación histórica de la colonia del Nuevo Santander y costa del seno mexicano, dans Estado general de las fundaciones hechas por D. José de Escadón

en la colonia del Nuevo Santandery costa del seno mexicano,

Mexico,

Talleres Gráficos de la Nación, 1930, II, p. 399-400). 24. P. E. Cove, «“Hapwan Chanaka”», p. 164. 25.

A. LEÓN,

Historia

de

Nuevo

León,

con

noticias

sobre

Coahuila,

Tamaulipas,

Texas

y

Nuevo México, Monterrey, Universidad Autónoma de Nuevo León, 1961, p. 29. De méme, pour

pouvoir se marier, les Zuñis du Nouveau Mexique doivent avoir tué deux cerfs sans abimer leur peau, c'est-à-dire en les étouffant de leurs propres mains. Ensuite, ils remettent les deux peaux de cerfs en parfait état à leur futur beau-père (B. TEpLock, Rituels et pouvoirs avec les Indiens zuñis, Nouveau Mexique, Paris, Plon, 2004, p. 123). 26. J. E. S. Thompson, Ethnology of the Mayas of southern

and central British Honduras,

Chicago, Field Museum of Natural History ("Anthropological Series" 17, 1), 1930, p. 126.

62

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

de la Sierra de Puebla: en effet, Jacques Galinier signale que le mot siphani signifie «peau de cerf», mais aussi «une belle jeune fille »?”!

Figure



3: La

fête de la vingtaine

de quecholli

(B. de SAHAGÚN,

Primeros

Memoriales, Norman, University of Oklahoma Press, 1993, fol. 252r).

Les associations érotiques et matrimoniales du cervidé pourraient être en rapport avec une série de jeûnes et de prohibitions sexuelles que James Frazer avait décrits à propos de divers peuples de chasseurs à travers le monde. Le savant écossais signalait avec perspicacité que l'«on parait supposer en général que le mauvais effet de l'incontinence n'est pas d'affaiblir celui qui S'y livre, mais d'offenser, pour une raison ou pour une autre, les animaux qui, en conséquence, ne se laisseraient pas prendre »?*. Avant de revenir sur ce point, examinons quelques unes de ces pratiques rituelles parmi les anciens chasseurs mesoaméricains. La chasse collective qui avait lieu durant la vingtaine de quecholli était précédée par une série de jeünes et d'autosacrifices (fig. 3).

Les guerriers et les jeunes gens s'identifiaient à des cerfs et s'extrayaient du sang afin d'obtenir le succés à la chasse. Il y avait un jeüne général et

27. J. GALINIER, La moitié du monde. Le corps et le cosmos dans le rituel des Indiens otomi,

Paris, Presses Universitaires de France, 1997, p. 235. de mariage» faites de cuir de cervidé des Algonkins épidermes pendant le coit ». Dans ce cas, la couverture époux tandis que les cervidés sont censés favoriser la

On songe également aux «couvertures qui servent à «prévenir le contact des établit une «disjonction temporaire » des «conjonction des amants» hors mariage

(C. Lévi-SrRAUSS, Mythologiques. L'origine des manières de table, Paris, Plon, 1968, p. 319-320). 28. J. FRAzER, Le Rameau d'Or. Tabou et les périls de l'âme, Paris, Robert Laffont, 1981, I,

p. 593-614.

63

Guilhem Olivier

« ... personne ne dormait avec sa femme». Dans sa description de la même vingtaine célébrée par les habitants de Tlaxcala, Huexotzinco et Coatepec, Diego Durán précise que les seigneurs et les chasseurs qui participaient à la battue «... avaient jeüné cinq jours avant ce jour [de la féte] sollicitant Pabondance de gibier»*. De même les Maya-Yucatéques vénéraient le dieu de la chasse « ... et ils se perçaient la langue et lui faisaient des sacrifices pour obtenir le succès à la chasse... »?'. Des chasseurs zapotéques du xvir siècle, Balsalobre rapporte qu'ils réalisaient «... une pénitence de trois jours et un jeûne de vingt-quatre heures » en l'honneur du «dieu Nogana qui est celui de leur ancétres». Il mentionne également «trois jours de pénitence» avant de présenter une offrande au «dieu de l'enfer» — réalisée dans l'église soit dit en passant! — en un jour spécial pour solliciter la capture de cerfs?. De nombreux témoignages ethnographiques attestent la persistance de ces préparatifs rituels méticuleux. Prolongés et rigoureux sont les jeünes auxquels s'astreignent les chasseurs Huichols avant de participer à la chasse au cerf qui fait partie de la quête du peyorl#. Séparés de leurs épouses durant neuf jours, les chasseurs chontales s’alimentent une seule fois par jour et prennent un bain dans une source avant de partir à la chasse*. De méme, les chasseurs nahuas du Guerrero doivent multiplier les jeünes (juntar varios ayunos) avant de partir chasser le cerf?. Quant aux Tlapanèques de la méme région, éloignés eux aussi de leurs épouses, «leur jeüne consiste à s'abstenir de certains condiments à l'odeur forte, comme l'ail et l'oignon ; en manger est, métaphoriquement parlant, considéré comme l'équivalent de l'acte sexuel »*,

29.

B. de SaHacún, Florentine Codex, ll, p. 134-135.

30.

D. DuRÁN,

Historia

de

las

Indias

de

Nueva

España

e

islas

de

Tierra

Firme,

2

vol.

J. R. ROMERO, R. CAMELO (éd.), Mexico, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, 1995, II, p. 82-83. 31. F. Scores, E. B. ApAMs, Don Diego Quijada, alcalde mayor de Yucatán, 1561-1565, Mexico, Biblioteca Histórica de Obras inéditas, vol. 14, 1938, p. 61. 32. G. BALSALOBRE, « Relación auténtica de las idolatrías, supersticiones, vanas observaciones de los indios del obispado de Oaxaca», dans F. BENÍTEZ (éd.), El alma encantada, Mexico,

Fondo de Cultura Económica, 1987, p. 238, 250. Un autre témoin zapotèque de San Miguel Sola ajoute que «avant d'aller à la chasse, il doit se baigner à l'aube durant trois jours et ne doit pas s'unir à ses femmes durant trois nuits» (H. BERLIN, Las antiguas creencias en San Miguel Sola, Oaxaca, México, Hambourg, Hamburgischen Museum für Vólkerkunde und Vorgeschichte, 1957, p. 39). 33. C. LumHoLTZ, El México desconocido, Mexico, Instituto Nacional Indigenista, 1986 [1904], II, p. 153; K. T. Preuss, Fiesta, literatura, p. 276. 34. P. Carrasco, Pagan Rituals and beliefs among the Chontal Indians of Oaxaca, Mexico,

Los Angeles, University of California "Anthropological Records" 20, 3 (1960), p. 98. 35. A. HémonD, «Pratiques cynégétiques et nouveaux discours écologiques chez les Nahuas du Balsas (Mexique) », JAIBA, revue d'Ethnobiologie 38-2 (1996), p. 275. 36. D. DeHouve, «Les rituels cynégétiques des Indiens mexicains», dans I. SipÉRA (éd.), La chasse. Pratiques sociales et symboliques, Paris, De Boccard, 2006, p. 196. En revanche, les

exigences imposées aux chasseurs nahuas d'Ichcatepec (Veracruz) semblent fort modérées : la veille de la chasse, les relations sexuelles du chasseur vertueux seront limitées à son épouse légitime (L. Reyes García, Pasión y muerte del Cristo Sol, Xalapa, Universidad Veracruzana, 1960, p. 37)!

64

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

Parfois, ces jeûnes s'étendent au-delà de la période de chasse, par exemple chez les Mazatèques d'Oaxaca qui s'abstiennent de s'unir à leurs épouses aprés avoir consommé la chair de leurs prises de chasse, sous peine de se transformer en mauvais tireurs *. Dans le méme sens, on comprend que les entreprises cynégétiques d'un chasseur amoureux aient été condamnées irrémédiablement

à l'échec:

ainsi, chez les Huichols, «... seuls les coeurs

purs peuvent participer à la chasse ; aucun cerf ne se laisserait prendre dans un piège tendu par un amoureux, le cerf le découvrirait immédiatement, bramerait et repartirait en courant d’où il vient »?*. De ce fait, avant d'arriver à Wirikuta, les Huichols réalisent une confession publique de leurs « péchés sexuels »*. Pour expliquer le caractére généralisé de ces précautions rituelles préalables aux entreprises cynégétiques, il convient d'examiner les rapports entre les chasseurs et le Maitre des Animaux. Figure complexe et peu étudiée en Mésoamérique, le Maitre des Animaux peut apparaitre sous les traits d'un animal de grande taille qui protège ses congénères ou bien sous un aspect anthropomorphe, qui peut se confondre avec une divinité du panthéon en général associée aux montagnes et/ou à la terre. Nous limitant ici au Mexique central“, Tepeyollotl, «Cœur de la Montagne », l'aspect jaguar de Tezcatlipoca, est décrit comme «le Seigneur des Animaux » (fig. 4)*. Quant à Mixcoatl, divinité tutélaire des chasseurs, elle entretient des liens étroits

avec les cervidés: de fait, «Serpent de Nuage» se transforme en cerf dans un récit mythique? tandis que deux catégories de cervidés décrits par les informateurs de Sahagún présentent des allusions claires à Mixcóatl?. Ainsi, le tlamacazcamazatl (« Cerf Prétre») est crédité d'une peinture noire autour des yeux (mixtetlilcomolo), identique à celle du dieu Atlahua, un avatar de

«Serpent de Nuage».

37.

Autre description révélatrice, l'iztac mazatl («cerf

C. INCHAUSTEGUI, Relatos del mundo mágico mazateco, Mexico, Secretaría de Educación

Püblica, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1977, p. 107. Aprés avoir chassé des cerfs, les Navahos ne partageront la couche de leurs compagnes qu'aprés avoir pris un bain de vapeur (W. W. 38.

HiLL, The Agriculture,

C. LumnoLrz,

El México

p. 113).

II, p. 40.

De

méme,

B. G. MYERHOFF

(Peyote

Hunt.

The Sacred

Journey of the Huichol Indians, Ithaca et Londres, Cornell University Press, 1974, p. 174-175)

explique que les Huichols qui vont piéger un cerf ne peuvent pas étre amoureux, ce qui explique le faible nombre de jeunes qui participent à ce type de chasse. 39.

B. G. MYERHOFF,

Peyote

Hunt,

p.

131-136;

A. GUTIÉRREZ

DEL ÁNGEL,

La peregrinación

a

Wirikuta: el gran rito de paso de los huicholes, Mexico, Instituto Nacional de Antropología e Historia, Universidad de Guadalajara, 2002, p. 130-132, 177.

40. Dans un ouvrage en préparation, nous analysons les nombreuses données disponibles dans les sources anciennes et les matériaux ethnographiques sur le Maítre des Animaux. 41.

Codex

Telleriano-Remensis.

Ritual,

Divination,

and

History

in

Manuscript, E. QUIÑONES QUEBER (éd.), Austin, University of Texas Press, 42. Relación de Michoacán, F. MIRANDA (éd.), México, Secretaría de 1988, p. 293-294; Voir l'interprétation de M. GRAULICH, Mythes et rituels, 43. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, XI, p. 15. 44. B. deSanacUN, Primeros Memoriales, T. SULLIVAN et al. (éd. et trad.), of Oklahoma Press, 1997, p. 108.

a

Pictorial

Aztec

1995, fol. 9v. Educación Pública, p. 183-184. Norman, University

65

Guilhem Olivier

blanc ») est qualifié de «Seigneur des Cerfs», lequel fonctionne comme un double de la divinité ancestrale Iztac Mixcoatl,

le «Père des Peuples»*.

Outre ces figures protectrices des animaux, les chasseurs avisés invoquent et pourvoient en offrandes de nombreuses entités divines parmi lesquelles le dieu du Feu et les divinités des Montagnes occupent une place centrale“.

Figure n° 4: Tepeyollotl, le « seigneur des animaux » (Códice Borbónico. El libro del Ciuacoatl. Homenaje para el año del Fuego Nuevo. Libro explicativo del llamado Códice Borbónico, F. ANpERs, M. JANSEN, L. REYES (éd.), Graz, Mexico, Akademische

Druck- u. Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1991, pl. 3).

Quoi qu'il en soit, les sources signalent avec insistance la nécessité de prévenir la susceptibilité des «Maîtres des Animaux». À ce propos, les narrations indigènes sont extrêmement riches en épisodes durant lesquels des chasseurs ou leurs parents transgressent les normes sexuelles et cynégétiques et offensent le Maitre des Animaux. Les fautes les plus courantes concernent les relations sexuelles prohibées, en particulier l'adultére de l'épouse du chasseur. En conséquence, ce dernier échoue irrémédiablement dans ses entreprises de chasse. Les amants coupables, notamment de consommer le gibier du chasseur, sont chátiés de facon exemplaire, fouettés voire exécutés

45. T. BENAVENTE ou MOTOLINIA, Memoriales o Libro de las cosas de la Nueva Espana y de los naturales de ella, E. O' GoRMAN (éd.), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigacines Históricas, 1971, p. 10. 46. H. Ruiz DE ALARCON, « Tratado de las supersticiones », p. 161-166.

66

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

par le chasseur trompé ou par des serpents, iguanes ou scorpions, émissaires vindicatifs du Maître des Animaux“. D'autres récits décrivent les infortunes des chasseurs transgresseurs, contraints à réaliser des offrandes dans le meilleur des cas — lorsqu'ils ont couché avec leur femme la veille de la chasse —, fouettés avec la queue d'un iguane comme conséquence d'un don de gibier à leur maîtresse ou encore rendus fous, égarés dans la montagne comme «un animal sauvage », pour le méme délit*. Les chasseurs excessifs ne sont pas épargnés, certains abusant des pouvoirs octroyés par de prodigieux talismans (les fameux bézoards): il en est qui renoncent définitivement à leur office, certains s'effraient et tombent malades, d'autres enfin peuvent

en mourir*”. Un destin à la fois cruel et extrêmement révélateur est assigné à un chasseur excessif dans un récit tlapanèque: transformé en cerf par le Maitre des Animaux, il fut condamné à être tué à plusieurs reprises par des chasseurs durant sept longues années! Mais son calvaire n'en finit pas là et le malheureux fut attaché dans la demeure du Maitre des Animaux oü des biches lui arrachèrent avec les dents des morceaux de chair tandis que les cerfs violaient son épouse avec leurs bois??. Cette inversion des rôles entre le chasseur et sa proie se retrouve dans de nombreux mythes; elle traduit à la fois la proximité entre l'homme et l'animal, ce dernier pouvant constituer un double de celui-là, ainsi que l'intimité voire l'identité entre le «capteur» et sa proie. À la suite de Michel Graulich, nous avons traité ailleurs de l'identité entre le sacrifiant et sa victime dans de nombreux rituels sacrificiels mexica,

le cerf et le prisonnier assimilé à un Mimixcoa constituant les prototypes des victimes sacrificielles (fig. 5)?'. Revenons au récit tlapanèque dont l'issue tragique illustre également l'équivalence entre le fait de manger et l'acte sexuel", à travers les chátiments infligés aux deux transgresseurs, le chasseur excessif tout comme son épouse adultère.

47. R. J. WEITLANER, Relatos, mitos y leyendas de la Chinantla, México, Instituto Nacional Indigenista, 1981, p. 112-113; C. INCHAUSTEGUI, Figuras en la niebla. Relatos y creencias de los mazatecos, Puebla, Mexico, Premiá, Tlahuapan, 1984, p. 52-54; L. REvES GARCÍA, D. CHRISTENSEN,

El

anillo

de

Tlalocan.

Mitos,

actuales de los estados de Veracruz y Puebla,

oraciones,

cantos

y

cuentos

de

los

nawas

Mexico, Centro de Investigaciones y Estudios

Superiores en Antropología Social, Fondo de Cultura Económica, 1989, p. 81-82; P. VAN DER Loo, «Thematical Units in Mesoamerican Religions: Why Deer Hunting and Adultery are a Dangerous Combination», Ecology

in Mesoamerican

dans D. Carrasco Traditions, Londres,

(éd.), The Imagination BAR,

of Matter, Religion and

1989, p. 38-39.

48. Ch. WacLEv, Santiago Chimaltenango. Estudio antropológico-social de una comunidad indígena de Huehuetenango, Guatemala, Seminario de Integración Social Guatemalteco, 1957,

p. 187-188; A. García DE LEÓN, «El universo de lo sobrenatural entre los nahuas de Pajapan, Veracruz », Estudios de Cultura Náhuatl 8 (1969), p. 294; D. DeHouve, «Les rituels», p. 198. 49.

R. J. WEITLANER, Relatos, p. 131; A. F. Burns,

Una

época de milagros.

Literatura oral del

maya yucateco, Mérida, Universidad Autónoma de Yucatán, 1995, p. 130-131. 50. P. Van DER Loo, « Thematical Units », p. 38-39. 51. G. OLIVIER, « Le cerf et le roi», p. 201-210.

52. C'est peut-être la raison pour laquelle un informateur zuñi déclara à Barbara Tedlock (Rituels et pouvoirs, p. 126) que la chair de cerf était meilleure que celle de boeuf, tout en ajoutant «... plus délicate, plus tendre, comme

les femmes.

En particulier, les femmes zuñis,

67

Guilhem Olivier

Figure n° 5: Un Mimixcoa, prototype des guerriers sacrifiés assimilés à des cervidés (Codex Telleriano-Remensis, fol. 40r).

Des sanctions plus clémentes peuvent être infligées dans la demeure du Maitre des Animaux: soigner les bétes blessées par le chasseur maladroit, voire, si elles ont été tuées, contribuer de manière singulière à leur renais-

sance. Dans les années 1930, Schultze Jena recueillit le récit suivant auprès des Pipils de langue nahuatl d'Izalco (Salvador)? : après avoir blessé un cerf, un chasseur se trouva nez à nez avec une jeune fille qui le rudoya pour avoir tué ses frères. Elle l'emmena chez son père — le Maître des Animaux - qui lui montra les os de ses rejetons et exigea réparation. Le chasseur épousa la jeune fille et, au long de dix années, «chaque jour deux faons naissaient ». Enfin,

dans un récit huichol, un chasseur nommé Kupéme mourut pour s'étre uni à une femme-cerf, elle même transformée suite à la rupture d'un jeûne. Le père Soleil annonça alors au chasseur lubrique: « Désormais tu t'es transformé en homme-cerf, j'allongerai ton pénis afin que tu puisse procréer des faons. Chaque mois d'octobre tu seras en rut et tu auras ainsi une famille afin que les hommes ne détruisent pas ta race »*, Il s'agit clairement, pour le Maitre des Cerfs — le Père Soleil dans cet exemple huichol — d'employer un couple de transgresseurs, coupables de relations sexuelles prohibées, afin de repeupler la race des cervidés en péril d'extinction face à la voracité des hommes. Ces récits s'intégrent à un schéma général d'échanges de type matrimonial entre le Maitre des Animaux et les chasseurs, comme l'a démontré

ces dears |qui se prononce comme deer, cerf] à deux jambes qui ont l'embonpoint de ceux qui adorent le mais ». 53. L. SCHULTZE-JENA, Mitos y leyendas de los pipiles de Izalco, San Salvador, Cuscatlán, 1977 [1935], p. 30-31. 54. R. M. Zoo, Los huicholes. Una tribu de artistas, Mexico, Instituto Nacional Indigenista, 1982, II, p. 213.

68

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

Edwin Braakhuis pour l'aire maya”. En effet, les matériaux présentés révèlent que le chasseur considére sa proie comme une épouse, le Maitre des Animaux se transformant en beau-père. I] incombe donc au chasseur de réaliser un «service » — à l'image de celui imparti par l'époux en échange de sa femme — auprès du Maitre des Animaux. Outre les invocations et les offrandes destinées à obtenir les proies-épouses, on comprend mieux dès lors l'insistance de nos sources sur l'abstinence sexuelle du chasseur, indispensable pour ne pas offenser le Maître des Animaux, beau-père irascible. Nous sommes face à un système de pensée cynégétique très proche de celui d'autres peuples de chasseurs de par le monde. Ainsi, en Sibérie, le chaman des Toungouses prend l'aspect d'un renne femelle pour attirer les máles vers les chasseurs. L'attraction entre le chasseur et sa proie est indispensable selon les Youkaghirs, qui affirment que si le renne n'est pas amoureux du chasseur, il ne se laissera pas tuer par ce dernier. De méme, Roberte Hamayon a analysé comment les peuples sibériens assimilent la chasse à un échange entre les hommes et les esprits des animaux. Afin de légitimer la prise d'animaux, il est nécessaire d'acquérir un statut de « preneur de femme ». Pour ce faire, une «alliance matrimoniale» métaphorique s'établit entre une épouse cervidé femelle — la proie par excellence — et le chaman dont la fonction consiste à faciliter la capture des animaux de la forét. Le chaman doit donc «s'animaliser» durant le rituel en imitant le renne qui lutte contre ses rivaux et s'accouple avec la femelle. À l'issue du rituel, le chaman s'écroule: il est devenu offrande des esprits qui le dévorent, tout comme le cervidé avec lequel il s'identifie". De nombreux exemples sud-américains confirment que la chasse est considérée comme un processus de séduction des proies, parfois par l'intermédiaire des Maîtresses ou des Maîtres des Animaux. C'est le cas des Tukano de Colombie qui congoivent une relation d'échange réciproque entre les hommes et les animaux: en compensation des proies chassées, le chaman

offre à Waí-maxsé,

le Maître des Animaux,

les âmes de certains

individus transgresseurs ou ennemis qui se transformeront en gibier. En outre, le chaman copule en réve avec les femelles des animaux pour contribuer à la multiplication du gibier. Chez les Achuar d'Équateur, «la chasse est une entreprise éternellement recommencée de séduction des animaux dont l'issue n'est jamais certaine». I] convient d'établir des relations cordiales, voire d'alliance avec les méres des animaux et surtout avec les amana, animaux

particuliers qui protègent chaque espèce distincte de gibier avec lesquels les chasseurs entretiennent des liens personnels par l'intermédiaire de chants

55. H. E. M. BRAAKHuUIS, «The Way of All Flesh. Sexual Implication of the Mayan Hunt», Anthropos 96 (2001), p. 391-409. 56. E. Lor FALk, Les rites de chasse chez les peuples sibériens, Paris, Gallimard, 1953, p. 5556, 76, 153-154. 57. R. HAMAYON, «Le sens de l'"alliance" religieuse. "Mari" d'esprit, “femme” de dieu», Anthropologie et Société 22-2 (1998). Numéro spécial, Médiations chamaniques. Sexe et genre, p. 25-48. 58. G. REICHEL DoMarov, Desana, p. 90, 160-161.

69

Guilhem Olivier

enjôleurs, les anent?. L'idée de séduction des proies se retrouve chez les Candoshi du nord du Pérou; cependant « aucune compensation n'étant prévue en échange [des proies], la liaison dangereuse que le chasseur entretient avec le gibier est l'expression accrue de l'idéologie prédatrice déguisée en séduction amoureuse »9?, Quant aux Cree du Canada, ils semblent partagés entre ces deux types d'idéologies — échange réciproque avec les animaux et prédation sans contrepartie. Quoi qu'il en soit, ils accordent une grande importance à la séduction des proies, les animaux se conduisant comme des femmes qui s'offrent au chasseur. Dans ce but, il est indispensable d'obtenir le concours des Maitre des Animaux et surtout des esprits Pawäkan avec lesquels les chasseurs entretiennent des relations étroites, voire « amoureuses ». Le succés

des entreprises cynégétiques est assuré à la fois à travers le respect à l'égard des proies et au moyen d'offrandes, de chants et de banquets, véritables sacrifices où sont conviées les entités protectrices des animaux et des chasseurs'!, Revenons prudemment en Mésoamérique pour introduire de nouveaux personnages, en l'occurence Tlazolteotl et Xochiquetzal, déesses associées à la fertilité, à la sexualité, et... aux cervidés. En effet, elles sont parfois

représentées dans les codex avec des bois de cerf ou des tétes de cerf comme heaumes (fig. 6, 73%.

Jacinto de la Serna mentionne que Pon sacrifiait une prostituée durant la troisième fête mobile qui correspondait au jour «1 cerf»9. Or Tlazolteotl —qui préside la treizaine commençant par ce jour— était, tout comme Xochiquetzal,

la déesse

patronne

des

prostituées

(ahuianime)*.

De

fait,

on disait de ces «femmes perdues» qu’elles «suivaient le chemin large, le chemin du lapin, le chemin du cerf », chemin qui conduisait précisément à la chute dans «le filet du lapin, le filet du cerf» 9. Il s’agit de signifier que les transgresseurs peuvent tomber métaphoriquement dans des filets, mais cela révèle aussi l'existence d'un lien entre la transgression et le destin de proie des chasseurs. De fait, le cervidé apparait associé à des excès sexuels dès l'époque classique. D'anciennes céramiques mayas présentent un cerf en train de séduire une femme nue qu'il finit par emporter sur son dos. Le caractère

59.

P. DescoLa,

60.

A. SURRALLÉS,

La nature domestique, Au

p. 320-322.

cœur du sens. Perception,

affectivité,

action

chez les Candoshi,

Paris,

Centre National de la Recherche Scientifique, Maison des Sciences de l'Homme, 2003, p. 144. 61. R. BRiGHTMAN, Grateful Prey, p. 89, 103-104, 111-116, 122, 127, 132, 187, 196-201, 228-230. 62. Codex Laud, MS Laud Misc. 678, Bodleian Library Oxford, C. A. BURLAND (éd.), Graz, Akademische Druck- u, Verlagsanstalt, 1966, pl. 42; Códice Borgia, E. SELER (éd.), Mexico, Fondo de Cultura Económica, 1963, pl. 59. 63.

J. de la SERNA,

supersticiones,

dioses,

Manual

de ministros

de

Indios para

ritos, hechicerías y otras costumbres

el conocimiento

de

sus

idolatrías,

gentílicas de las razas aborígenes

de México, dans F. Benítez (éd.), El alma encantada, 1987, p. 350.

64. G. OLIVIER,

« Homosexualidad

y prostitución

entre los nahuas

y otros pueblos

del

Posclásico», dans P. EscALANTE GONZALBO (éd.), Historia de la vida cotidiana en México, Mexico, El Colegio de México, Fondo de Cultura Económica, 2004, I, p. 324-326. 65. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, X, p. 56; L. M. BURKHART, «Moral Deviance in

Sixteenth Century Nahua and Christian Thought: The Rabbit and the Deer», Journal of Latin American Lore 12 (1986), p. 124.

70

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

o

Figure n° 6: Tlazolteotl représentée avec des bois de cerf (Codex Laud, pl. 42).

Figure n? 7: Xochiquetzal représentée avec un heaume de cerf (Códice Borgia, pl. 59).

« dissolu » attribué au cerf se manifeste par la présence sur ses oreilles du glyphe de l'ordure et de l'excrément (la volute caban)**. De méme, dans de nombreux textes en langue nahuatl analysés par Louise Burkhart*, le lapin et le cerf sont associés, respectivement, à l'ivresse et aux excès sexuels. Opposés au jaguar et à l'aigle, modèles virils des chasseurs et des guerriers, les lapins et les cerfs désignent les transgresseurs, les captifs, veules et féminisés. Une anecdote incluse dans l’œuvre de Juan Suárez de Peralta** illustre parfaitement cette opposition. Afin de mettre à l'épreuve un capitaine hábleur nommé

66. S. Houston, K. TAUBE, D. STUART, The Memory of Bones. Body, Being, and Experience among Classic Maya, Austin, University of Texas Press, 2006, p. 220. 67. L. M. BURKHART, « Moral Deviance», p. 118-120. 68. J. SUÁREZ DE PERALTA, Tratado del descubrimiento de las Yndias (noticias históricas de Nueva

España), F. GÔMEz DE OROZCO (éd.), Mexico, Secretaría de Educación Pública, 1949, p. 57-58.

71

Guilhem Olivier

Ajayacatzin, Motecuhzoma II l'envoya combattre les vaillants Tarasques d'Acambaro. Mais au lieu de lutter, le dit capitaine démontra sa couardise en s'enfuyant. Le souverain furieux infligea à Ajayacatzin un chátiment à la fois exemplaire et révélateur: . il l'obligea à revétir une chemise d'indienne qu'ils appellent hueypili ; et le coiffa d'une tête de lièvre écorchée avec ses oreilles sur les siennes et des sabots de cerf sur ses pieds, et de cette facon il l'exhiba honteusement un jour de marché [...] et ensuite il ordonna qu'on lui coupát le membre de la génération afin qu'il n'y eüt plus de descendant d'un homme si láche et si hábleur.

Outre le fait d'étre revétu d'insignes de lapin et de cerf qui manifestent sa lácheté*?, le malheureux Ajayacatzin est habillé en femme et chátré de surcroît, accentuant ainsi sa féminisation comme victime^.

Autre personnage décrié nous l'avons vu, la prostituée (ahuiani) est décrite par les informateurs de Sahagün comme saoûle, ivre [...] comme une victime de sacrifice, comme une victime fleurie, comme un esclave qui a été baigné, comme une victime divine, comme celui

qui périt en l'honneur des dieux [...] elle vit comme un esclave baigné, comme la victime fleurie”.

Cette comparaison entre l'ahuiani et une victime sacrificielle est certes destinée à établir un lien entre leurs funestes destinées", mais cette insis-

tance dans la métaphore signifie aussi la possibilité réelle d'étre sacrifiée, par exemple en tant qu'images (ixiptla) de déesses?. Ces éléments, de méme que l'assimilation des ahuianime à des «biches-proies» dans certaines compositions poétiques", pourraient expliquer pourquoi, à Tlaxcala, durant la fête de quecholli, ... les femmes publiques se manifestaient, putes et déshonnétes; elles s'offraient en sacrifice,

en vétements

convenus,

pour qu'elles fussent comme

celles appelées maqui qui allaient à la guerre avec la soldatesque pour mou-

69. Dans l'ancienne Rome, on qualifiait de cervi (cerfs) les soldats peureux qui fuyaient devant l'ennemi (M. PASTOUREAU, Seuil, 2004, p. 66).

Une

histoire symbolique

du Moyen

Âge

occidental,

Paris,

70. On songe aux prisonniers des Incas, lesquels, lors des entrées triomphales de l'armée à Cuzco,

étaient

vêtus en

femmes

(R. T. ZuiDEMA,

La

civilisation

inca

au

Cuzco,

Paris,

Presses

Universitaires de France, 1986, p. 74). 71. B. de SAHAGON, Florentine Codex, X, p. 55; Id. dans A. Lórgz AUSTIN, Cuerpo humano e ideología. Las concepciones de los antiguos nahuas, Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1980, IT, p. 265-266, 275-276. 72. B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, IV, p. 25.

73. Les ahuianime pouvaient se vendre comme esclave et, dans le cas où elles ne remplissaient pas convenablement leurs obligations serviles, elles pouvaient effectivement mourir sur la pierre de sacrifice (B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, IV, p. 95; A. ZonirA, Relación de la Nueva España, E. Ruiz MEDRANO, J. M. Leyva, W. AHRNDT (éd.), Mexico, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, 1999, I, p. 362). Sur le sacrifice des prostituées, voir G. OLIVIER, « Homosexualidad », p. 318-319. 74. Cantares Mexicanos. Songs of the Aztecs, J. BIERHORST (éd. et trad.), Stanford, Stanford University Press, 1985, p. 368-369, 408, 496, 510.

72

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

rir ; ou bien elles se rendaient où elles allaient être sacrifiées et tuées, avec des

couteaux cruels, comme des personnes dégoútées et désespérées, à la façon d'un vœu ou d'une promesse qu'elles auraient fait à leurs idoles... ”.

Ce texte confirme que les prostituées, proies des désirs sexuels des hommes et des guerriers en particulier, faisaient fonction, à l'instar des cerfs — effectivement sacrifiés en quecholli —, de victimes sacrificielles. Rappelons à cet égard que cette condition de transgresseur et de coupables assignée à la fois aux cerfs et aux prostituées comme victimes de sacrifice correspond parfaitement au modèle de «sacrifice comme expiation» que Michel Graulich a brillamment exposé. Dans le mythe d'origine de la guerre sacrée, les Mimixcoa — assimilés à des cerfs — ne sont-ils pas dépeints comme des ivrognes lubriques qui négligent leurs devoirs vis-à-vis de Soleil? En conséquence ils sont sacrifiés et se transforment en modèles des victimes offertes à Soleil et Terre”. L'origine solaire des instruments de musique et les rapports entre les cervidés et l'astre du jour nous conduisent à examiner d'étranges procédés cynégétiques qui consistaient à attirer les cerfs au moyen d'instruments à vent. De fait, l'élaboration d'instruments de musique à partir de bois, de sabot, d'os ou de peau de cerf était courante en Mésoamérique”. Ainsi, on conserve des sifflets en os, en céramique ou en corne de cerf qui furent

75. F. Las Navas, Cuenta antigua de los indios naturales desta Nueva Espana [a qual guardaron y observaron hasta agora en nuestros tiempos (col. "Antigua del Museo Nacional de

Chapultepec” 210), p. 174. Ce passage est reproduit par J. de TORQUEMADA, Monarquía Indiana, M. LEÓN-PoRTILLA et al. (éd.), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigacines Históricas, 1976, III, p. 427. 76. M. GRAULICH, « Aztec Human Sacrifice as Expiation », History of Religions 39-4 (2000),

p. 352-371. 77.

«Leyenda

de

los

Soles»,

p.

92;

Ibid.,

p.

150-151;

M. GRauLICH,

«Aztec

Human»,

p. 362-363. 78. Précisons que ces techniques existaient également dans d'autres régions du monde, par exemple en Grèce ancienne où Aristote affirme que «les biches se laissent prendre à la chasse quand on joue de la flüte ou qu'on chante, et elles se couchent de plaisir » (ARISTOTE, Histoire des animaux, P. Louis (éd. et trad.), Paris, Les Belles Lettres, 1969, III, 75; J. AYMARD, Essai sur les chasses romaines des origines à la fin du siécle des Antonins (Cynegetica), Paris, De Boccard,

1951, p. 335-337). 79.

Parmi de nombreuses références, et en nous limitant aux sources écrites anciennes, on

peut citer les Crónica

«omichicahuaztli de venado » utilisés par les Mexicas (H. ALVARADO TEZOZOMOC,

mexicana,

M. ORozco

y

BERRA

(éd.),

México,

Porrúa,

1980,

p.

301,

561),

les

«silbatos hechos con las cañas de los huesos de venados» et les «carapachos de tortugones grandes con astas de venado» dont jouaient les Mayas du Yucatán (D. DE LANDA, Relación de las cosas de Yucatán, À. M. GaRIBAY K. (éd.), Mexico, Porrúa, 1986, p. 39; D. LéPEZ DE CocoLLupo, Historia de Yucatán, Campeche, Comisión de Historia, 1954, I, p. 180) ou encore

les tambours á membrane en peau de cerf décrits chez les Mexicas et les Tarasques (G. DE MENDIETA,

Historia

eclesiástica

indiana,

J. GARCÍA

ICAZBALCETA

(éd.),

Mexico,

Porrúa,

1980,

p. 141; Relación geográfica de Cuiseo de la Laguna dans Relaciones geográficas del siglo xvi: Michoacán, R. ACUNA (éd.), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de

Investigaciones Antropológicas, 1988, p. 82).

73

Guilhem Olivier

utilisés comme appeaux*. Peints sur des vases mayas, des chasseurs déguisés en cervidés portent à la bouche des sifflets et des conques, sans doute pour attirer leurs futures proies*!. Parmi les témoignages ethnographiques, on peut citer les Nahuas de Pajapan (Veracruz) qui utilisent un sifflet confectionné avec un roseau et une membrane vibratoire en peau de cerf?. Au Yucatán, dans le village de Chan Kom, on utilise un sifflet en bois ou bien on souffle avec le nez pour imiter l'appel du cerf?. Attention toutefois, à l'approche des chasseurs, le dieu Zip — un petit cerf affublé d'un nid de guépes entre les bois — siffle à travers ses sabots, provocant la fuite de ses protégés. C'est pourquoi les chasseurs prononcent des invocations spéciales destinées à garantir sa discrétion**. D'autres appeaux méritent de retenir notre attention, en particulier ceux que les Mixes de l'état de Oaxaca appellent « gamitadera», pour la confection desquels une aile de chauve-souris est nécessaire? Pedro Hendrichs Pérez, qui parcourut dans les années 1940 la région du río de las Balsas (Guerrero), nous offre un témoignage précis sur ce singulier instrument et ses effets: ... la «gamitadera» se fait avec deux petits morceaux de roseau, l'un d'un diamétre plus petit de facon qu'il entre dans l'autre. On couvre une extrémité du plus petit roseau avec une petite toile, comme la membrane d'une aile de chauve-souris [...] Cet appeau se place à courte distance face à la bouche ouverte et avec la gorge on imite l'appel de la biche. Certains chasseurs m'ont assuré que ce petit instrument est si efficace qu'il est préférable de monter sur un arbre avant d'en jouer, car ce n'est pas seulement la biche qui se présente sur place pour chercher son faon, mais arrivent aussi le cerf et d'autres animaux qui espérent en profiter comme le chat sauvage, le tigre [jaguar] et méme un grand serpent («la mazacoata »), et si le chasseur n'est pas sur ses gardes, il peut avoir une peur bleue?5.

L'efficacité de cet appeau est telle qu'elle transforme notre chasseur en véritable Orphée indigène, méme si cet extraordinaire pouvoir d'attraction musical ne semble pas garantir la docilité des animaux réunis!

80.

J. E. S. THoMPsoN

(Maya Archaeologist,

Norman,

University of Oklahoma

Press,

1963,

p. 95-96) mentionne la représentation d'un chasseur tuant un cerf avec un couteau sur un sifflet en céramique découvert à Lubaantun (Belize). 81. D. REENDS BUDET, Painting the Maya Universe: Royal Ceramics of the Classic Period, Durham et London, Duke University Press, 1994, p. 263; S. Houston, K. TAUBE, D. STUART, The Memory of Bones, p. 220, 264. 82. A. García DE LEÓN, «El universo», p. 307. 83. R. REDFIELD, A. ViLLa Rolas, Chan Kom, a Maya village, Washington, Carnegie Institution of Washington, 1934, p. 48. Au début du xx* siècle, les Mayas du Yucatán imitaient le cri des jeunes faons avec des sifflets en corne (A. TozzEr, Mayas y lacandones. Un estudio comparativo, Mexico, Instituto Nacional Indigenista, 1982 [1907], p. 72, 96). 84.

R. REDFIELD, A. VILLA Rojas,

Chan

Kom,

p. 351.

85. W. S. MILLER, Cuentos mixes, Mexico, Instituto Nacional Indigenista, 1956, p. 254. 86. P. HENDRICHS PEREZ, Por tierras ignotas. Viajes y observaciones en la región del río de las balsas, Mexico, Editorial Cultura, 1945, I, p. 47-48.

74

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

Figure n? « Papillon

8: Itzpapalotl, d'Obsidienne »,

avec des ailes ornées de motifs terrestres (Códice — Borgia, pl. 66).

Figure



9:

Le

dieu

chauve souris avec des ailes ornées de motifs terrestres

(Códice Borgia, pl. 44).

Certains traits de l'iconographie de la déesse Itzpapalotl, «Papillon d'Obsidienne », pourraient contribuer à éclaircir la fonction de ces appeaux étonnants. En effet cette redoutable divinité — que nous avons déjà mentionnée comme pouvant se métamorphoser en cervidé — porte sur ses ailes des losanges marqués au centre d'un point, motifs associés à l'eau, à la terre et à la nuit (Fig. 8)". Des motifs identiques couvrent les ailes d'une divinité qui apparaît sous l'aspect d'une chauve-souris (Fig. 9)%,

87. Códice Borgia, pl. 66. 88. Códice Borgia, pl. 44; G. OLIVIER, «Las alas de la Tierra: reflexiones sobre algunas representaciones de ltzpapálotl, *Mariposa de Obsidiana', diosa del México antiguo», dans P. LEsBRE, M. J. VABRE (éd.), Le Mexique préhispanique et colonial. Hommage à Jacqueline de

Durand-Forest, Paris, L'Harmattan, 2004, p. 105-107.

75

Guilhem Olivier

Comment expliquer que des ailes de chauve-souris aient le pouvoir d’attirer les cerfs? Examinons un mythe ancien d’origine de la musique: le dieu Tezcatlipoca envoya son double Yohualli Ehecatl, « Vent Nocturne », à la maison du Soleil qui était alors la demeure exclusive des musiciens colorés. Le chant de Yohualli Ehecatl ayant provoqué une réponse des musiciens séduits, ces derniers descendirent sur la terre où ils permirent désormais aux hommes de vénérer leurs divinités par des chants et des danses. Etre nocturne lié à l’inframonde, la chauve-souris, dotée d'ailes terrestres,

pourrait elle aussi provoquer la chute des cerfs «solaires» entre les mains des chasseurs. Rappelons que le cerf porte le soleil dans le Codex Borgia, la lune étant soutenue par un lapin *?. Les cervidés seraient alors équivalents aux musiciens colorés qui, malgré l'avertissement du Soleil, ne purent résister à l'appel musical du « Vent Nocturne ». Pour renforcer cette interprétation, citons un autre mythe oü intervient la chauve-souris «... que les dieux envoyèrent afin qu'elle mordisse une déesse qu'ils appellent Xochiquetzal qui veut dire Rose, qu'elle lui coupát ce qu'elle a à l'intérieur du membre féminin et étant [la déesse] endormie elle le coupa et l'amena aux dieux »°!.

Nous sommes à nouveau en présence du théme de l'attaque sexuelle, d'autant plus que Xochiquetzal — représentée, nous l'avons dit, avec une téte de cerf comme heaume (Fig. 7) — apparait comme l'objet par excellence de la convoitise sexuelle des dieux, tels Tezcatlipoca, Piltzintecuhtli ou Huehuecoyotl, à Tamoanchan”. Quant aux connotations viriles de la chauve-souris, elles ne

sauraient étre plus explicites, le mythe consigné dans le Codex Magliabechiano précisant que cet être nocturne naquit du sperme de Quetzalcoatl”! Ces données mythiques permettent donc de mieux comprendre l’utilisation, à première vue si singulière, d'un appeau à membrane de chauve-souris pour attirer les cerfs. Le tableau que nous avons dressé des cervidés comme proies sexuelles féminisées” et victimes sacrificielles est incomplet. Parallèlement à ces fonctions, les cerfs présentent également un aspect fécondateur que nous avons entrevu dans un mythe tlapanèque, lorsque le cerf viole l'épouse du chasseur avec ses bois. D’autres données historiques et ethnographiques abondent en ce sens, à l'image de ce prêtre maya-yucatèque «à qui on emmenait les Indiennes qui n'étaient pas corrompues afin qu'avec un couteau ou une corne

89. A. THEVET, «Histoyre du Mechique, manuscrit français inédit du xvi* siècle», E. de JONGHE (éd.), Journal de la Société des Américanistes, nouvelle série 2 (1905), p. 32-33. 90. Códice Borgia, pl. 33. 91. Códice Magliabechiano. Libro de la vida. Texto explicativo del llamado Códice Magliabechiano, F. ANDERS, M.JANsEN (éd.), Graz, Mexico, Akademische Drucku. Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1996, fol. 61r. 92.

Codex

Telleriano-Remensis,

fol. 10v, 13r, 22v.

93. De fait, dans le Códice Borgia (pl. 49) et dans le Codex Vaticanus 3773 (E. SELER (éd.), Berlin et Londres, Edinburgh University Press, 1901-1902, pl. 24), la divinité chauve-souris arbore le couvre-chef de Quetzalcoatl.

94. Claude Lévi-Strauss signale que les cervidés sont «des animaux nombreuses langues sud-américaines (Bororo, Jivaro, Mundurucu, (C. LÉvi-STRAuss, Mythologiques. Du miel aux cendres, p. 294).

76

féminins» dans de

Yupa,

Guarani,

etc.)

Cerfs mélomanes et chasseurs lubriques

de cerf ils les corrompissent, pour que leurs époux puissent avoir des relations avec elles»”. On songe au héros huichol Kauymari qui brisa les dents des vagins des femmes avec des bois de cerf”. D'autres récits assignent au sabot d'un cervidé une fonction similaire, par exemple dans un mythe maya-kekchi où l'empreinte d'un petit cerf (yuK) qui marcha sur Lune, fut à l'origine de son vagin”. Au début de cet article, nous avons signalé que la guerre était assimilée à une chasse à l'homme et que le sacrifice de cervidés était équivalent à celui de prisonniers de guerre. Dans ce contexte, la mise en évidence par Michel Graulich du róle fécondateur des guerriers morts à la guerre ou sur la pierre de sacrifice est particulièrement suggestif?*. Dans un autre travail, nous avons également souligné les caractéristiques viriles des victimes sacrificielles — identifiées à la fois aux Mimixcoa et aux cervidés —, victimes humaines

et animales (Fig.

que l'iconographie

1, 10)”. De méme,

présente

parfois

avec

le sexe découvert

il convient d'insister sur la similitude des rituels

mortuaires réservés aux guerriers sacrifiés avec ceux réalisés avec les os et les cránes des cervidés, toujours dansle souci d'assurer la renaissance des hommes

et des animaux

immolés'?.

A ce stade de la recherche, comment

peut-on concilier les caractéristiques féminines attribuées aux cervidés et aux victimes sacrificielles dans certains contextes et les traits fécondateurs qui parfois leur sont aussi assignés? La possibilité d'un changement de statut sexuel des victimes au moment de la capture ou du sacrifice pourrait être envisagée, selon un modèle que Maurice Bloch a élaboré en étudiant le sacrifice des bovins chez les Dinka du Soudan'?!. Des données amazoniennes peuvent également orienter nos réflexions: les Jivaro par exemple assignent «un rôle fécondant au meurtre cynégétique» et considèrent que «la reproduction du gibier est placée sous la dépendance des humains prédateurs ».

95. «Relación de Popola, Sinsimato, Samyol, Tixholop y Tixmukul», dans Relaciones histórico-geográficas de la gobernación de Yucatán, 2 vol., M. DE LA GARZA (éd.), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Filológicas, Centro de Estudios Mayas, 1983, IT, p. 217. 96. R. M. ZINGG, Los huicholes, 1, p. 584; II, p. 223-224, 233. 97. J. E. S. Thompson, Ethnology of the Mayas, p. 129; L'aspect fécondateur du cerf est

également attesté en Occident : « Comme dans l'Antiquité gréco-romaine, le cerf reste au Moyen Áge un symbole fort de lubricité et de sexualité. Nombreux sont les prélats et les pasteurs qui interdisent

à leurs ouailles de "faire le cerf", c'est-à-dire, lors du carnaval

ou de fétes

traditionnelles, de se déguiser en cerf et d'arborer un sexe masculin gigantesque avec lequel on simule l'acte charnel » (M. PASTOUREAU, Une histoire symbolique, p. 356, note 46). 98.

M.

GRAULICH, Mythes

et rituels, p. 334-336;

Ibid., Le sacrifice humain,

p. 192-198.

99, Códice Borgia, pl. 18, 21, 22; G. OrivigR, «Le cerf et le roi», p. 208-209. La nudité ostensible des prisonniers se retrouve chez les anciens Mayas (S. Houston, K. TAUBE, D. STUART, The Memory of Bones, p. 207-213). 100.

G. OrivigR, « Le cerf et le roi», p. 198-201.

101.

M. BrocH, La violence du religieux, Paris, Éditions Odile Jacob,

1997, p. 131-136.

De

méme, à propos des Baruya de Nouvelle Guinée, Maurice Godelier (La formation des grands hommes, Paris, Fayard, 1996, p. 107) explique que «En [langue] baruya, un gibier, par exemple, une fois mort, devient féminin».

77

Guilhem Olivier

D'une part, le Maître du gibier reproduit les animaux sous forme de proies féminisées offertes aux chasseurs qui les tuent et les fécondent. D'autre part, durant un rituel d'initiation oü ils sont confrontés au spectre d'un vaillant guerrier (l'arutam), les guerriers sont séparés de tout principe féminin mais dotés cependant de la capacité des femmes à générer des enfants à travers la capacité de tuer des ennemis!%. Toujours en Amazonie, il est question de la «féminisation du meurtrier, sa fécondation ou possession par la victime,

situation qui doit étre rituellement transmuée en un pouvoir spécifiquement masculin de création» '?. En Mésoamérique, des témoignages historiques et ethnographiques attestent d'un processus d'identification du guerrier à son prisonnier ainsi que du chasseur à sa proie qui se traduit par la prohibition dans les deux cas de consommer ses propres victimes^. Nous avons proposé comme conséquence de ce phénomène que les guerriers mexica intégraient ontologiquement leurs ennemis, identifiés à la fois aux Mimixcoa — rappelons que Mixcoatl était la divinité tutélaire de leurs principaux adversaires de la Vallée de Puebla — et aux cervidés^. Si les guerriers mexica s'identifiaient à leurs ennemis à travers la guerre et le sacrifice et acquéraient à leurs dépens des pouvoirs

fécondateurs,

les femmes

mexicas,

elles, s'identifiaient à la

déesse Tlazolteotl lorsqu'elles donnaient naissance à des enfants (Fig. 11)1%. On s'explique mieux dés lors pourquoi les nouveau-nés étaient identifiés à des ennemis, l'accouchement étant assimilé à une bataille durant laquelle la femme capturait un prisonnier de guerre!”. En outre, on attribuait une origine étrangere à Tlazolteotl, la déesse qui présidait aux enfantements, dont nous avons vu qu'elle était identifiée à une biche5. Pour finir, la fonction d'ancétre octroyée à Mixcoatl, à Tlazolteotl sous son aspect de Toci, « Notre Aïeule », de

méme qu'aux cervidés explique également ces fonctions génésiques complémentaires qui se manifestent de façon éclatante dans l'idéologie cynégétique mésoaméricaine99,

102. A. C. TayLor, «Le sexe de la proie. Représentations jivaro du lien de parenté », L'Homme 154-155 (2000), p. 323-329. 103. E. Viveiros DE CASTRO, «Le meurtrier et son double chez fusion rituelle», dans M. CanrRv et M. DETIENNE (éd.), Destins pensée en Afrique Noire, vol. 14, Paris, École Pratique des Hautes 104. G. OLIVIER, «Le cerf et le roi», p. 204-205. 105. G. OrivigR, «El simbolismo sacrificial de los Mimixcoa: identidad entre los mexicas», dans L. LóPEz LujÁn et G. OLIVIER la tradición

religiosa mesoamericana,

Mexico,

INAH,

UNAM,

les Arawete: un exemple de de meurtriers. Systèmes de Études, p. 95. cacería, guerra, sacrificio e (éd.), El sacrificio humano en

2010.

106. G. OLIVIER, « Pourquoi “enfanter des ennemis” ou les aspects guerriers de TlazolteotlIxcuina», dans J. CoNTEL (éd.), Mémoire d'ici et d'ailleurs. Hommage à Ernest T. Hamy (18421908) (sous presse). 107. T. SULLIVAN, «Pregnancy, childbirth, and the deification of the women who died in childbirth », Estudios de Cultura Náhuatl 6 (1966), p. 63-95. 108.

G. OLIVIER, « Pourquoi

109.

T. BENAVENTE

213.

78

ou

“enfanter des ennemis"».

MOTOLINIA,

Memoriales,

p. 10; G. OLivier,

«Le

cerf et le roi», p. 211-

Los reyes subterráneos

Figure n? 10: Mimixcoa fécondateur avec un phallus postiche (Códice Borbónico, pl. 30).

Figure n? 11: Tlazolteotl capture un prisonnier identifié avec un enfant symbolisé par le collier situé au-dessus de lui (Códice Borgia, pl. 63).

79

DE CHAIR ET DE PLUMES: DONNÉES

SUR LE SYMBOLISME

DANS LA CULTURE

DU DINDON

AZTÈQUE

Nicolas LATSANOPOULOS

Bureau de l'Archéologie de Seine-Saint-Denis

Elles ne craignent ni la pluie, personne ne se retrousse mieux qu'une dinde, ni le soleil, une dinde ne sort

jamais sans son ombrelle

Jules Renard, Histoires naturelles, Dindes.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, le plus grand des gallinacés américains et le seul animal qui, avec le chien, ait connu une domestication

véritable, n'a jamais fait l'objet d'une étude compléte dans le champ des recherches mésoaméricanistes. En dehors de la monographie généraliste d'Abbie W. Schorger!, l'essentiel des contributions se limite à deux articles de Doris Heyden et Ana María Velasco, qui posent la place du dindon dans l'économie symbolique et alimentaire des Aztéques?. Un numéro spécial de la revue Ethnozootechnie, coordonné par Frangois Poplin à l'occasion des célébrations de 1992, est entiérement consacré à ce brillant représentant de la faune native du Nouveau-Monde*. À noter enfin que, ces dernières années,

l'essor des études sur la cosmovision mésoaméricaine et sur la perception du milieu naturel a redoublé l'attention portée à la faune et à la classe des oiseaux en particulier“.

1. A. SCHORGER, Oklahoma, 1966.

The

wild turkey:

its history

and

domestication,

Norman,

University

of

2. D. HEYDEN, « Guajolote, guajolote : ¿quién eres en realidad? », dans C. VEGA Sosa (coord.), Documentos y códices sobre Mexico, Primer Simposio ("Colección Científica" 286), Mexico, Instituto Nacional de Antropología e Historia, p. 173-192; D. HEYDEN, A. Ma. VELASCO, « Aves

van y aves vienen: el guajolote, la gallina y el pato», dans J. Lona (coord.), Conquista y comida. Consecuencia del encuentro entre dos mundos, Mexico, Instituto de Investigaciones Históricas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1997, p. 237-253 19941). 3. Ethnozootechnie 49 (numéro spécial, Le dindon) (1992). 4. Pour les Aztéques, J. KENDALL, « The thirteen volatiles representation and symbolism », Estudios de Cultura Náhuatl 22 (1992), p. 99-131 ; M. GILONNE, La civilisation aztéque et l'aigle

81

Nicolas Latsanopoulos

Tour à tour offrande sacrificielle ou simple pourvoyeur de chair et de plumes, oiseau réservé à l’usage des dieux et de la noblesse ou bien consommé par toute la société, l’histoire culturelle du dindon en Mésoamérique est mouvementée et varie d’une culture à l’autre. Cette diversité ne déroge pas à la règle dans les hautes terres centrales du Mexique où le dindon fut à la fois animal d'offrande et animal de bouche”. Dans cette contribution, je tâcherai d'apporter de nouveaux éléments de réflexion sur la dimension symbolique du plus familier des oiseaux mésoaméricains, dans la Vallée de Mexico du postclassique. Pour cela, j'aurai principalement recours à l'inestimable corpus d'informations recueillies par le missionnaire franciscain Bernardino de Sahagün auprès d'Indiens lettrés, conscient que les informations obtenues devront étre enrichies à l'avenir par une étude plus exhaustive des sources écrites. Aprés une présentation des caractéristiques générales des dindons en Mésoamérique, une révision des noms et des expressions en langue nahuatl relatives à l'oiseau et un survol rapide des maigres représentations du gallinacé dans l’art mobilier aztèque, je porterai mon attention sur l'usage de ses plumes et, pour finir, proposerai une lecture du motif d'une énigmatique étoffe rituelle dont le centre de la composition est occupé par un dindon. Dindon(s): noms et représentations chez les Aztèques

On rencontrait deux espèces sylvestres de dindons dans l'aire mésoaméricaine: le dindon sauvage (Meleagris gallopavo), qui constitue la race type et le dindon ocellé (Agriocharis ocelata), beaucoup plus méridional, puisqu'il ne se trouve que dans l’actuelle péninsule du Yucatan‘. Le dindon ocellé pouvait étre gardé en captivité, mais n'a jamais été domestiqué. Quand on parle du dindon domestique, il faut donc entendre la forme domestiquée du dindon sauvage, deux catégories clairement définies dans la taxonomie naturelle des Aztéques qui distinguaient le totolin, le dindon domestique, du quauhtotolin, le «dindon de la forêt», à savoir l'authentique dindon sauvage. À ce sujet, dans le onzième livre de son Historia general, Sahagán commente: « Hay gallinas monteses y gallos; son como las gallinas y gallos domésticas de

royal, Paris, L'Harmattan, anciens Mexicains:

1997;

la symbolique

M. SAUTRON-CHOMPRÉ,

Le chant lyrique en langue nahuatl des

de la fleur et de l'oiseau, Paris, L'Harmattan,

2004.

À citer,

pour l'aire maya, M. DE LA GARZA, Aves sagradas de los Mayas, Mexico, Centro de Estudios Mayas, Instituo de Investigaciones Filológicas, Universidad Nacional Autónoma de México,

1995 et M. RivERA DoraDo, P. Asensio Ramos, A. Ma. MARTIN Díaz, «Pajaritos y pajarracos: personajes y símbolos de la cosmología Maya», Revista Española de Antropología Americana 34 (2004), p. 7-28. 5. R. VALADEZ, La

domesticación

animal,

Mexico,

Universidad

Nacional

Autónoma

de

México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, Plaza y Valdes, 2003, p. 98-100. 6. Il est difficile, sinon impossible, de préciser l'aire de répartition originale des deux espèces de dindons à l'époque préhispanique; pour la distribution du dindon sauvage, voir cependant A. STARKER LEOPOLD, Fauna silvestre de Mexico. Aves y mamíferos de caza, Mexico, Editorial Pax México, 2000, p. 304-309, fig. 102; voir également A. SCHORGER, The wild turkey, p. 4850.

82

De chair et de plumes

esta tierra, así en el tamaño, como en la pluma, como en todo lo demás »?.

Ce passage est évidemment à nuancer, car il existe bel et bien des différences entre dindons sauvages et dindons domestiques : d'un cóté, un oiseau vif, à la silhouette élancée, monté sur de hautes et robustes pattes et excellent coursier,

de l'autre, un oiseau plus ramassé et empâté, piètre voilier et au tempérament plus indolent?. Toutefois, en dépit de ces contrastes, l'étude des restes osseux des dindons découverts en contexte archéologique ne permet pas toujours de trancher sur leur statut sylvestre ou domestique?. Le dindon était si commun et sa silhouette si ordinaire qu'il faisait office de modèle de référence pour décrire les spécificités d'autres espèces d'oiseaux, comme le quapetlahuac ou quapetlanqui, «tête chauve » (Tantale

d'Amérique, Mycteria americana), à la téte déplumée aussi grosse que celle du dindon?, ou encore la chachalacametl (Ortalide chacamel, Ortalis vetula),

au «cou aussi fin que celui du dindon»!. De méme, on retrouve le nom de l'oiseau dans une variété d'amarante

(totoloauhtli), tandis que le fruit du

Sapote noir (totolcuitlatzapotl) est comparé à la fiente de l'oiseau"?". Les sources écrites apportent parfois des précisions sur les parties corporelles du dindon. Ainsi, la patte et les aptitudes à la course de l'oiseau servaient à qualifier métaphoriquement les marchands, connus pour marcher sur de longues distances, dans le binôme lexical in totolicxitl, in xomatzalli, “la patte

7.

B. de SAHAGÜN,

Historia

general

de las cosas

de Nueva

España,

4 vol., A. Ma.

GARIBAY

(éd.), Mexico, Porrúa, voir Livre 11, cap. 2, p. 241.

8. Dans le cadre d'études sur la faune préhispanique, la connaissance du profil biologique et éthologique (morphologie, comportement, chant, régime alimentaire, habitat...) des espéces étudiées est devenue indispensable. Des travaux récents montrent tout l'intérét d'une approche pluridisciplinaire faisant directement appel aux sciences naturelles. Voir G. Espinosa PINEDA, El embrujo del lago:

el sistema lacustre de la Cuenca

de México en la cosmovisión mexica,

Mexico, Instituo de Investigaciones Históricas, Instituo de Investigaciones Antropológicas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1996 et N. CARETA, Fauna mexica: naturaleza y simbolismo, Leyde, CNWS Publications, 2001. Précisons que, par souci de normalisation, nous

avons suivi dans cet article une nomenclature ornithologique mise à jour, celle de M. WALTERS, L'inventaire des oiseaux du monde, Lausanne, Delachaux et Niestlé, 1998.

9, C'est le cas, par exemple, de l'unique spécimen de dindon recensé en contexte d'offrande dans l'enceinte du Grand Temple de Mexico, dans l'annexe de l'offrande 9. T. ALVAREZ, A. OCARA, « Restos óseos de vertebrados terrestres de las ofrendas del Templo Mayor, Ciudad de México», dans O. J. PoLaco (éd.), La fauna en el Templo Mayor, Mexico, Instituto Nacional

de Antropología e Historia, Proyecto Templo Mayor, 1991, p. 105-148, p. 110. L'offrande était placée dans la plate-forme sud du temple principal, du cóté de la pyramide de Huitzilopochtli. Le dindon se trouvait sur la gauche d'un squelette complet de jeune jaguar en position assise, tourné vers le sud-est. Pour une description détaillée de Poffrande, voir L. López LuJÁN, Las ofrendas del Templo Mayor de Tenochtitlan, Mexico, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1993, p. 431-432.

10. Les conséquences dramatiques attachées à la capture du tantale méritent d’être soulignées : la prise de l'oiseau — à la chair réputée savoureuse — était censée causer le décès des seigneurs ou celle de guerriers sur le champ de bataille. B. de SaHacún, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 32. La relation entre cet échassier et une divinité contrólant la destinée des hommes, une des

fonctions particulières de Tezcatlipoca, est envisageable mais reste à établir. 11. B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 53. 12. Ibid., Florentine Codex, Livre 11, chap. 13 p. 287 et chap. 6, p. 117-118.

83

Nicolas Latsanopoulos

de dindon, le pied griffu”'. Dans un chapitre consacré aux fêtes célébrées à Tlaxcala en 1538, le franciscain Motolinfa décrit en détail la décoration d'une

chapelle recréant le Paradis terrestre et fournit à l'occasion l'une des rares mentions concernant la fameuse barbe du dindon: ...Pues aves no faltaban chicas ni grandes, en especial de los papagayos grandes, que son tan grandes como gallos de España; de éstos había muchos, y dos gallos y una gallina de las monteses, que cierto son las más hermosas aves que yo he visto en parte ninguna; tendría un gallo de aquellos tanta carne como dos pavos de Castilla. A estos gallos les sale del papo una guedeja de cerdas más ásperas que cerdas de caballo, y de algunos gallos viejos son más largos que un palmo ; de éstas hacen hisopos y duran mucho".

Les « hysopes » mentionnés par Motolinía seraient l'équivalent du goupillon servant à asperger les fidéles d'eau bénite dans la liturgie chrétienne. Voyons maintenant quels étaient les noms que recevait le dindon. Pour commencer, une mention toute particulière doit être accordée à la forme divinisée de l'oiseau,

Chalchiutotolin,

«dindon

précieux,

de jade»,

unique

occurrence où l'oiseau est directement rattachable au cycle du calendrier rituel et à l'une des divinités majeures du panthéon mexica, le redoutable et redouté Tezcatlipoca. Chalchiutotolin est le patron de la treizaine 1 Eau, patron du signe de jour Tecpatl (silex) et de la dix-septième treizaine Mazatl (cerf).

Si le terme totolin servait à désigner le genre locutions étaient également employées. Ainsi, on trouve ihuiquen ou ihuiquentzin, «qui est xiuhcozca, «collier de turquoises, de pierres genre à totolin, on trouve oquichtotoli,

dindon au sens large, d'autres dans le Codex de Florence, couvert, vétu de plumes» et précieuses». Par l'ajout du

« dindon mâle » et cihuatotoli, « dindon

femelle». Dans son Vocabulaire, Molina propose le terme tlaquequezani pour désigner le dindon mále: c'est le dindon qui s'accouple, qui monte la dinde en la foulant des pattes". On rencontre enfin huexolotl — à l'origine de l'aztéquisme guajolote — généralement traduit par «grand Xolotl» (et,

13. Ibid., Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 56. La fuite par voie terrestre plutót que par l'envol est un trait caractéristique de la famille des gallinacés. Modèle de résistance physique et de vélocité chez les Aztéques, la course de l'oiseau était percue comme un signe de couardise et de timidité dans d'autres cultures amérindiennes. Ainsi, les Cheyennes ne mangeaient pas de dindon de peur de devenir láche, mais utilisaient les plumes pour empenner leurs fléches; chez les Papago — qui ne consommaient pas l'oiseau — les plumes de dindon ne convenaient qu'à des fins cérémonielles, alors que les Navahos se nourrissaient de l'oiseau et utilisaient ses plumes dans la confection des flèches. Voir A. SCHORGER, The wild turkey, p. 354-355, p. 361. 14. T. de BENAVENTE dit MotoLinía, Historia de los Indios de la Nueva España, Cap. dansJ.

Mexico,

GARCÍA

ICAZBALCETA

Porrúa,

1980

(éd.),

Colección

[1858], p. 85-86.

de

documentos

Phénomène

unique

para

parmi

la historia

de

México,

la classe des oiseaux,

XV, t I,

un

bouquet de crins noirs, croissant avec l'áge, se développe sur la poitrine des dindons des deux sexes. 15. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 53. 16. Ibid., chap. 2, p. 53-54; F. HERNANDEZ, Obras completas, Tomo II, Historia Natural de Nueva Espana, Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, p. 333. 17. A. de MoLiNa, Vocabulario en Lengua Castellana y Mexicana y Mexicana y Castellana, Mexico, Porrúa, 1970 [1571], p. 65.

84

De chair et de plumes

par extension, « grand monstre »), un terme traduisible par « grand serviteur, grand esclave». A notre sens, la référence au dieu protéiforme Xolotl est difficile à justifier: on ne connaît aucune source rapprochant, d'une manière ou d'une autre, le dindon à Xolotl, une divinité mineure du panthéon aztèque,

connue pour avoir refusé de se sacrifier à Teotihuacan et qui, dans sa fuite, multiplia les apparences pour mieux se dissimuler avant d'étre rattrapée et tuée par le Soleil. Si l'on pense à l'origine mythique des dindons comme humanité métamorphosée lors d'un changement d'ére ou de soleil, il conviendrait d'accorder un statut identique aux poissons et aux singes, eux aussi hommes du passé réduits à l'état de béte. En revanche, le dindon était connecté à Quetzalcoatl, dont Xolotl était le jumeau: dans la liste des treize volatiles et des treize Seigneurs du jour — deux des trois séries d'influence des treizaines avec celle des Seigneurs de la nuit — le dindon est l'oiseau du neuvième seigneur, Ehecatl-Quetzalcoatl et préside le jour 9 Vent, nom calendaire du dieu du vent Ehecatl?. Dans son acceptation de «grand esclave», la définition de huexolotl apporte un éclairage nouveau sur la perception indigène de l'animal domestique, celle d'une créature asservie et soumise, à la manière des esclaves ou des

prisonniers de guerre. Le dindon domestique a beau être perçu comme un « maítre »?! (des viandes), son existence au côté des hommes est définitivement

placée sous le joug de la servitude. On sait que dans certaines circonstances, le dindon véhiculait une charge négative et humiliante. Deux pages du Códice Matritense de la Real Academia de la Historia (fols. 70-71r) contiennent des

formules de salut et d'injures en usage parmi les nobles et les gens du peuple de la société aztèque. On y apprend que les macehuales — chez qui l'affront

18. Siméon fournit une double définition de uexolotl : « gallo», puis « pez que tiene una cresta en el dorso ». R. SIMÉON, Diccionario de la lengua nahuatl o mexicana, Mexico, Siglo Veintiuno,

1999 [1885], p. 753. La seconde définition est attribuable à l'axolot/, un urodèle aquatique (Amblystoma mexicanum), pouvant passer toute sa vie à l'état larvaire. Quant à la définition de «grand Xolotl», elle semble s'étre généralisée avec l'étude de C. RoBELO, Diccionario de aztequismos, Cuernavaca, 1904, p. 449-450. Pour B. Leander, l'étymologie « grand serviteur »

s'explique par les cortéges prolongés du mâle. B. LEANDER, Herencia cultural del mundo nahuatl a través de la lengua, Mexico,

SepSetentas,

1972, p. 182.

19. A. Caso, Los calendarios prehispánicos, Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, 1967, p. 18-26, 191. Par ailleurs, Kendall suggère que le bec du dindon, surmonté de sa caroncule, aurait servi de modèle au masque d'Ehecatl: J. KENDALL, «The thirteen volatiles»,

p. 124. Pour Espinosa Pineda, c'est le bec dentelé des Harles (canards piscivores du genre Mergus), qui serait à rapprocher du masque fréquemment pourvu de dents du dieu du vent. Voir G. EspiNosA PINEDA, El embrujo del lago, p. 156-165.

20. Dans une illustration de la premiere prédication de l'Évangile à Tlaxcala, une paire de dindons est placée à cóté d'un couple de captifs entravés au cou et aux mains, eux-mémes situés, dans le plan de l'image, sous un groupe de nobles tlaxcaltéques: D. MuNoz CAMARGO, Relaciones geográficas de Tlaxcala, R. ACUNA (éd.), Mexico, 1999, fol. 238r. 21. B. de SAHAGUN, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 53. Dans sa description du dindon,

Sahagún emploie le terme t/acahuah, «seigneur, maître d'esclaves», après avoir mentionné que le gallinacé « guide les viandes», selon la traduction de Dibble et Anderson; il faut donc entendre l'expression comme l'évocation des mérites culinaires de l'oiseau : la chair du dindon est supérieure à toute autre, elle les précéde en qualité.

85

Nicolas Latsanopoulos

est cru et direct — se traitent de «gros dindon», totolpole et rabaissent leur interlocuteur au statut, digne de mépris si l'on se fie au contexte de l'énoncé, d'animal domestique: «tu es semblable à un chien, à un dindon. Ta place se trouve là où est la merde, l'ordure», «ca çano titzcuitli ti totoli cuitlapá tlaçolpä mo chamonemiya » ?. Le terme totolin était également utilisé à titre dépréciatif dans la description du mauvais lapidaire, «stupide, [comme] un dindon », « xolopitli, totoli »?. Même chose pour le plumassier sans qualités, dans la formule «iolloquimilli totolin iitic cochticac », «son cœur est couvert (c'est-à-dire rude, lourd d'esprit), un dindon dort à l'intérieur »?*.

Ces exemples nous montrent que l'image du dindon n'évoquait pas uniquement les illustres rois du passé et la noblesse impériale comme l'a soulignée Doris Heyden, qui se base sur un bref passage de l'Histoire des Indes du dominicain Diego Durán. Dans le discours prononcé par Nezahualpilli à l'occasion de l'élection de Motecuhzoma, il est en effet rapporté: «... tenéis presente toda la nobleza mexicana que es de plumas riquísimas, caídas de las alas y colas de aquellos excelentes pavos, de aquellos reyes pasados »”. A l'évidence, ces anciens rois et «honorables dindons » font référence aux habitants du soleil 4 Pluie, Quiauhtonatiuh (ou Tletonatiuh), dont les rescapés

furent transformés en dindons après avoir été frappés par une pluie de feu destructrice et dont les nobles aztèques se considéraient les descendants directs. Il est bien connu que la plume fait le bel oiseau ; chez les Azteques, la noblesse était reconnaissable, entre autres, par le privilège du port de plumes fines. C'est dans le sens de marqueur social qu'il faut comprendre l'image de la plume comme «l'ombre des seigneurs et des rois» dans la tournure métaphorique que donne Durán”.

22.

P. EscALANTE,

«Insultos y saludos de los antiguos nahuas.

Folklore e historia social»,

Anales del Instituto de Investigaciones Estéticas 61 (1990), p. 29-46, voir p. 32-33 et p. 35. 23. 24.

B. de SaHacún, Florentine Codex, Livre 10, chap. 7, p. 26. Ibid., chap. 7, p. 25.

25.

D. Durán,

Historia

de

las

Indias

de

Nueva

España

e

Islas

de

tierra

firme,

2

vol.

A. M. GariBAY (éd.), Mexico, Porrúa, 1984; cf tomo 2, cap. 52, p. 397. Le terme polysémique ahaztli, «aile» au sens large, renvoie aussi à la dinde abritant ses petits sous l'aile; FRAY B. DE

SAHAGÚN, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 55. La figure de l'oiseau protégeant sa couvée sous ses ailes — et la dinde est réputée exemplaire en cela — est utilisée pour décrire la femme noble, protectrice et maternelle, qui «étend ses ailes et sa queue sur les siens», ibid., Livre 10, chap. 13, p. 45; le diphrasisme «la queue, les ailes», cuitlapilli, ahtlapalli, servait également à

désigner le peuple ou l'homme du peuple; ibid. Livre 6, chap. 43, p. 244-245. 26. Il existe plusieurs versions du mythe des Quatre Soleils qui divergent sur l'ordre et les durées de chaque ère. Voir H. B. NicHoLson, «Religion in Prehispanic Central Mexico», dans R. WAUCHOPE,

G. EKHOLM,

I. BERNAL

(éd.), Handbook

of Middle American Indians. Archaeology

of Northern Mesoamerica, vol. 10, Part 1, Austin, University of Texas Press, 1971, p. 395446 et M. GRAULICH, Mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique ("Mémoires de la Classe des Lettres", t. 68), Bruxelles, Académie Royale de Belgique, 1987, p. 72-98. Dans la version de la Leyenda de los Soles, les habitants du quatrième soleil sont nommés pipiltin, «nobles, enfants». Voir Códice Chimalpopoca. Anales de Cuauhtitlan y Leyenda de los Soles, P. FELICIANO VELÁSQUEZ (éd. et trad.), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Historia, 1945, p. 119. 27.

86

D. DurÁn,

Historia de las Indias, Tomo

1, cap.

11, p. 116.

De chair et de plumes

Avant d'aborder ce que disent les sources sur l'usage des plumes du dindon dans la société aztéque, passons briévement en revue quelques figurations du gallinacé dans l'art mobilier. Celles-ci sont rares: une discrétion imputable au rôle plus que discret que joue l'oiseau dans le champ mythique? Parmi le nombre réduit d'objets aztèques à l'effigie du gallinacé publiés ou exposés au public, figure une sculpture sur pierre, en ronde-bosse, dépeignant un dindon faisant la roue — sans aucun doute la posture la plus emblématique du gallinacé —, le cercle parfait formé par les plumes de la queue traité à la façon d'une couronne de papier plissé (fig. 1)?*.

Figure n? 1: Sculpture de dindon faisant la roue, basalte (h. 22 cm), provenance inconnue. Coll. Barbier-Mueller (Inv. 503-15 ; ex-coll. Josef Mueller). Dessin de l'au-

teur d’après Ritual art, 2000, p. 301. Cette intéressante sculpture, de provenance inconnue, est stylistiquement

similaire la région celle du forme de (fig. 2)?.

aux sculptures de petit format du type hacha-palma, originaires de de la Côte du Golfe. Dans la sphère du foyer et, plus précisément, domaine culinaire, on trouve un petit pilon ou main de mortier en téte de dindon, identifiable à la caroncule pendant sur le cóté du bec

28. Ritual art of the New-World. Precolumbian America. Collection Barbier-Mueller, Milan, Skira, 2000.

29. La collection Vischer du Musée Ethnographique de Bâle conserve d'autres exemples de pilonsaviformes dont certains sont décorés d'unetéte de canard. Voir G. BAERAND, U. BANKMANN, Altmexikanische Skulpturen der Sammlung Lukas Vischer, Museum für Vôlkerkunde Basel, Ancient Mexican Sculptures from the Lukas Vischer Collection, Ethnographic Museum Basel

(Corpus americanensium antiquitatum, Union Académique Internationale), Bále, Wepf & Co. AG, 1990, p. 164-167.

87

Nicolas Latsanopoulos

Figure n? 2: Pilon en forme de tête de dindon, pierre volcanique (h. 10,4 cm), provenance inconnue. Museum für Vólkerkunde de Bâle (MfV Basel IVb 621). Dessin

de l’auteur d’après G. Baeranb, U. BANKMANN, Altmexikanische Skulpturen, p. 168-169.

1990,

Ce pilon servait probablement à écraser les ingrédients contenus dans un bol, comme les typiques molcajetes réservés à la préparation des sauces. Un bon exemple d'association entre Poiseau et le feu domestique se rencontre sur un brasero tripode (anafre ou hornillas), surmonté de trois protomes de

dindons, provenant d'Azcapotzalco (Fig. 3). Parmi les objets provenant de contextes archéologiques connus, il faut citer une flüte tubulaire de terre cuite à l'extrémité décorée d'une téte de dindon (Fig. 4). Les aérophones (sifflets, ocarinas...) aviformes sont attestés dans toute la Mésoamérique et celui-ci est

l'un des rares cas recensé chez les Aztéques?. Actuellement présentée dans la Salle Mexica du Musée National d'Anthropologie de Mexico, cette flüte à cinq perforations et membrane mirliton provient d'un dépôt rituel qui fut localisé sur le cóté ouest du temple du Feu Nouveau de Huixachtecatl (actuel Cerro de la Estrella). Daté de la phase Colhua tardif (950-1150 aprés J.-C.),

ce dépót est donc antérieur à l'installation des Mexicas et à la fondation de leur capitale dans la lagune de Mexico”. Pour clore ce rapide recensement,

30. Autres exemples d'instruments sonores en forme de dindon : ocarina zapotéque provenant de la tombe 29 de Monte-Albán (entre 500 et 100 av. J.-C.), A. PIMENTEL Díaz, «La música y los instrumentos antiguos », dans M. DALTON PALOMO, V. LOERA Y CHAVEZ C. (coord.), Historia

del arte de Oaxaca, vol. 1, Oaxaca, Instituto Oaxaqueño de las Culturas, 1997, p. 343-371 (voir P. 359, fig. 8a et p. 371); pour les Mayas, sifflet en forme de dindon faisant la roue de l'île de Jaina, Campeche (Classique tardif), dans Maya, P. ScuMipr, M. DE LA GARZA, E. NALDA (éd.), Milan, Bompiani, Centro Nacional de la Cultura y de las Artes, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1998, p. 524-525, cat. 45; sifflet aviforme de Colima, oiseau à corps massif faisant la roue, dans J. GALLAGHER, Companions of the Dead. Ceramic tomb sculpture from ancient West Mexico, Los Angeles, Museum of Cultural History, University of California, Los Angeles, 1983, p. 67, fig. 74. 31. R. VELAZQUEZ CABRERA, «Ancient aerophones with mirliton», — Studien zur Musikarchäologie VI, Orient-Archäologie Band 22 (2006), p. 363-373, voir p. 364 et p. 370, fig. 5.

88

De chair et de plumes

on mentionnera un sceau plat de terre cuite sur lequel est figuré un dindon monté au sommet d'une tige où s’enroule une liane fleurie (Fig. 5)*. L'oiseau,

trés stylisé, mais auquel ne manque ni la caroncule du bec ni la barbe de la poitrine qui le caractérisent, n'est pas représenté complètement ; il pourrait tout aussi bien s'agir d'une figure emblématique, d'un insigne religieux ou militaire, que d'un ornement décoratif ou d'un objet ludique.

eL , À

Figure n? 3: Brasero domestique du type anafre ou hornillas, provenant d'Azcapotzalco. Salle Mexica du Musée National d'Anthropologie de México. Dessin de Pauteur d'aprés photo de l'auteur.

Figure n? 4: Flüte à cinq perforations et membrane mirliton (long. 20,5 cm), Temple du

Feu

Nouveau

de Huixachtecatl,

México

D.F.,

Phase

Colhua

tardif (950-1150

ap. J.-C.). Salle Mexica du Musée National d'Anthropologie de México (n? inv. 10-150344). Dessin de l'auteur d’après photo de l'auteur.

32. J. Enciso, Sellos del Antiguo México, Mexico

1947, p. 150, «Astas con aves enfloradas»,

fig. 2.

89

Nicolas Latsanopoulos

Figure n° 5: Dindon monté au bout d'une perche, sceau plat en terre cuite. Dessin de l'auteur d'aprés J. Enciso, Sellos del Antiguo México, 1947, p. 150, fig. 2.

La plume et le dindon

De façon générale, les Aztèques distinguaient deux catégories de plumes d'oiseau: les plumes fines et précieuses, tlazohihhuitl, « plumes rares », réservées à la confection d'ouvrages décoratifs, d'éléments de parure et d'ornementation destinés aux images et aux personnificateurs divins, aux nobles et aux guerriers, et les plumes ordinaires, macehualihhuitl, « plumes des gens du peuple », d'usage courant, parmi lesquelles figurent les plumes de dindon, mais aussi celles de nombreuses espèces lacustres de la Vallée de Mexico (principalement hérons, aigrettes et canards)?. Selon Sahagün, les plumes dites ordinaires étaient largement exploitées par les plumassiers avant qu'ils ne recourent aux plumes colorées d'oiseaux «exotiques» gráce à l'essor du commerce et du tribut. C'est sous le règne d'Ahuitzotl (1487-1502), dont les

guerres de conquête dans la région d'Oaxaca marquèrent un tournant décisif dans l'expansion économique et militaire de l'empire aztèque, que la valeur des plumes en vint à se transformer complétement*. Ce renouveau eut des conséquences directes sur l'essor de l'activité et du statut social de la corporation des plumassiers, les Amanteca, ainsi que sur la création de costumes de prestige réservés aux élites. Des facteurs d'ordre écologique ont également

33.

B. de SaHaGún, Florentine Codex, Livre 9, chap. 19, p. 89-90.

34. C'est à cette époque que le reotzanatl ou tzanatl (le Quiscale —ou Cassique— à longue queue, Quiscalus mexicanus

ou bien le Quiscale des marais, Quiscalus major, anciennement

Cassidix palustris), fut ramené des terres chaudes de Cuextlan et Totonacapan jusque dans la Vallée de Mexico où il ne tarda pas à se multiplier après s'étre échappé des volières où il était maintenu en captivité. Importé par le roi, hautement prisé pour ses plumes de couleur noir et jaune, il était interdit de blesser ce «passereau Livre 11, chap. 2, p. 50.

90

impérial».

B. de SaHacún, Florentine

Codex,

De chair et de plumes

pu influencer cette évolution : la Vallée de Mexico, située à la limite méridionale de la région néarctique, se trouve à la lisière de la région néo-tropique, peuplée d’espèces d'oiseaux au plumage beaucoup plus bariolé. Avant toute chose, il serait bon de remarquer que la majorité des vocables ayant trait à l'oiseau font usage du substantif totolin qui, selon nous, est un terme générique désignant les dindons domestiques, sans distinction de sexe. Or totolin est fréquemment — sinon systématiquement — traduit par « dinde », ce qui laisse entendre que seules les plumes de dindes étaient utilisées. Ceci est également vrai pour Sahagün qui, dans la version en espagnol du Codex de Florence, traduit invariablement totolin par «dinde». Dans l'attente d'arguments plus solides, nous sommes amenés à croire que les Aztèques employaient aussi bien les plumes de dindes que celles de dindons, les livrées de chaque sexe étant de surcroît quasiment identiques?. Si le plumage du dindon sauvage est naturellement noir et lustré, à reflets bronzés, la livrée du dindon domestique, sous l'action de la sélection

humaine, souffre d'importantes variations chromatiques: certains dindons, note Sahagün, «sont couleur de fumée, d'autres presque noirs, d'autres comme les plumes du corbeau, brillants, certains blancs, certains cendrés, couleur de cendres, certains de couleur fauve, certains couleur de fumée »?6.

Les plumes de dindon qu'offre la vendeuse de plumes sont « noires, blanches, jaunes, rouge clair, fauves, de couleur carmin»*.

Par ailleurs des nuances

existent chez les oiseaux à livrée noire: l'extrémité des plumes de la queue est couleur noisette chez le dindon sauvage, blanche chez le dindon domestique. I] ne sera pas question ici de chercher à isoler les conceptions liées à l'oiseau sauvage et domestique, ni de s'attarder sur les questions soulevées par les variations chromatiques des dindons dans les manuscrits figuratifs du

35. La livrée des máles est plus vive que celle des femelles. Autre nuance chez le dindon sauvage: la bordure à l'extrémité des plumes de la poitrine est noire chez les máles, brune chez les femelles; A. SCHORGER, The wild turkey, Plate 40. 36. B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 53. Dans son Histoire, les livrées sont simplement blanches, rouges, noires ou fauves (B. de SAHAGÚN, Historia general, Livre 11,

cap. 2, p. 258). Remarquons au passage que l'atotolin, « dindon aquatique» (Pélican d'Amérique, Pelecanus erythrorhynchos), est dit « blanc comme le dindon mále ». Considéré comme le maitre

des oiseaux aquatiques, c'est leur « miroir» saisonniers.

Voir B. de SAHAGÚN,

car il les précède et les guide dans ses mouvements

Florentine

Codex,

Livre

11, chap. 2, p. 27 et p. 29-30.

On

se demande pourquoi Dibble et Anderson traduisent acoyotl, «coyote d’eau» (l'Anhinga noir, Anhinga anhinga), par « dindon aquatique ». 37. Ibid., Livre 10, chap. 25, p. 92. 38. S. OrsEN, «Fish, amphibian and

turtle

remains

from

archaeological

sites,

Part

1:

Southeastern and Southwestern United States; Appendix: the osteology of the Wild Turkey », Papers of the Peabody

Museum

of Archaeology

and Ethnology

56 (2), Cambridge,

Harvard

B. University, 1968. Le Codex de Florence précise que l'extrémité de l'aile du dindon sauvage est blanche; B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 29. Ceci a de quoi surprendre

car si les rémiges des ailes sont effectivement barrées de blanc chez le dindon sauvage, la couleur de leur pointe — blanche ou brune — n'obéit à aucun patron stable.

91

Nicolas Latsanopoulos

centre du Mexique, un problème capital qui nécessiterait à lui seul la révision complète du corpus iconographique*. En s'en tenant aux informations recueillies par Sahagün, la gamme des usages de plumes de dindon chez les Aztèques était variée et s'appliquait tout spécialement à l'ornementation des dieux, des prétres, des victimes sacrificielles et des guerriers. Ainsi, les petites plumes du cou, totolquechtapalcatl, plumes dites «de couverture » dans le langage ornithologique, se retrouvent dans l'un des ornements du dieu du feu Milintoc: la statue divine était couverte de «fleurs de feu », tlalchinolxochitl, dont les plumes, très brillantes,

paraissaient embrasées*. Par ailleurs, dans son Historia general, Sahagún précise que ce dieu portait une couronne, dont le sommet «était décoré de plumes trés noires, si noires qu'elles resplendissaient, formées sur le coudes dindes et des dindons»*!. Pendant le mois de toxcatl, «sécheresse», on célébrait principalement Tezcatlipoca et, à sa suite, Huitzilopochtli. L'empereur parait lui-méme le personnificateur de Tezcatlipoca de précieux atours et «lui emplumait la tête avec des plumes blanches de dindon, collées avec de la résine »?. Cette coiffe était remplacée par un aztaxelli, le plumet fourchu de plume de héron, lorsque le fastueux costume du dieu était échangé contre celui d'un guerrier, à l'approche de sa mort*. Après le sacrifice du représentant de Tezcatlipoca, la féte se concentrait sur le personnificateur de Huitzilopochtli, surnommé Teicauhtzin, « Vénérable frére cadet». On sacrifiait des cailles, on encensait

l'image du dieu, puis un groupe de jeunes filles dansait autour du foyer du temple, accompagnées par les prétres du lieu; ces derniers, le visage teint en noir, portaient au front des rosaces de papier plissé et des plumes blanches de dindon sur la téte**. Ces prêtres arboraient également un sceptre de palme aux extrémités décorées des plumes noires et brillantes de l'oiseau tzanatl et

39, Kendall attribue les tétes rouges couvertes d'excroissances bleues au Dindon sauvage (dans le Codex Borgia et le Codex Magliabechiano par exemple) et les tétes bleues couvertes de pustules rouges au Dindon ocellé (Codex Borbonicus, Codex Tudela) et s'interroge sur la présence du Dindon ocellé, natif de la péninsule du Yucatan rappelons-le, dans les hautes terres centrales du Mexique: J. KENDALL, « The thirteen volatiles», p. 122. Rien n'exclut que le Dindon ocellé (l'oiseau vivant, sadépouille ou uniquement ses plumes) ait pu faire l'objet d'échanges à longue distance. Une piste suggestive est fournie dans la description des atours de la statue en bois de Huitzilopochtli, dont «las plumas del penacho eran de pavos verdes, muy hermosas y muchas en cantidad », D. DurÁn, Historia de las Indias, Tomo 1, cap. 2, p. 19. 40. B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, Livre 2, chap. 37, p. 161. Parmi la description des objets

confectionnés avec des plumes courantes, Sahagün rapporte que les plumassiers élaboraient des boules de plumes t/atelolohyotl à partir des petites plumes du cou du dindon, /bid., Livre 9, chap. 19, p. 89-90. 41. B. de SAHAGUN, Historia general, Livre 1, cap. 37, p. 221. C'est le seul passage où Sahagún parle à la fois des plumes de la dinde et du dindon. 42. Ibid., Livre 2, cap. 24, p. 153. Dans le Codex de Florence, il est simplement dit que la tête du personnificateur «était couverte de plumes, de duvet d'aigle», FRAv B. DE SAHAGÚN, Florentine Codex, Livre 2, chap. 24, p. 69. 43. B. de SAHAGUN, Florentine Codex, Livre 2, chap. 24, p. 70. 44. B. de SAHaGÚn, Historia general, Livre 2, cap. 24, p. 158 et Florentine Codex, Livre 2,

chap. 24, p. 75.

92

De chair et de plumes

cuitlacochin*. Hormis Tezcatlipoca et Huitzilopochtli, le prêtre gardien du dieu Xipe à Yopico, chargé des atours du personnificateur divin Tequitzin, devait s'assurer que ce dernier füt correctement emplumé avec des plumes blanches de dindon, «in iztac totolihuitl »*.

Tous les quatre ans, pendant le mois d'izcalli, dédié à la renaissance du feu, de nombreux captifs étaient sacrifiés; à minuit, on coupait la mèche de cheveux des prisonniers devant le feu, puis «on leur couvrait toute la téte d'un emplátre fait de résine et de plumes de dinde blanche, aussi bien les hommes que les femmes »*". En xocotl huetzi, «le fruit tombe » (c'est la mort du feu qui était célébrée alors), les prisonniers destinés à étre brülés vifs en l'honneur du

dieu du feu portaient une coiffe similaire: le corps peint en blanc, ils portaient des ornements de papier blanc et la téte était couverte de plumes blanches (l'espèce n'est pas précisée). En ce qui concerne les guerriers, l'usage de plumes de dindon est mentionné à deux reprises dans les pages relatives aux armes et insignes martiaux des Mexicas du Códice Matritense de la Real Academia de la Historia (fol. 68-69r): dans la confection d'une tunique de capitaine, totoli-

hhuiehuatl, où seules de délicates plumes recourbées étaient intégrées à la pièce de tissu et dans l’insigne du «coyote noir», tlapalcoyotl*. A cela, il faudrait probablement rajouter l'« insigne du dindon », uexolotl, un mannequin du gallinacé couvert de plumes, monté sur un châssis végétal^?. Par ailleurs, Sahagün fournit une description de la cérémonie de commémoration tenue sur la tombe des guerriers : une javeline et une rondache ayant appartenu au défunt, ainsi qu'une mante et un pagne, étaient attachés à une tige de mais à neuf noeuds ; du drapeau de papier accroché à l'extrémité de la tige pendait un colibri, retenu par un fil blanc ; des panaches de plumes d'aigrette liés à des fils (ou des cordes) couverts de plumes blanches de dindon étaient noués à la tige ; l'ensemble était ensuite brûlé dans un récipient sacrificiel quauhxicalco?!.

45. Au sujet du tzanatl, cf note 33. Le cuitlacochin est le Moqueur à bec courbe (Toxostoma curvirostre). Ce dernier était un oiseau à forte charge symbolique: son chant lancé à la fin de la saison des pluies était considéré de mauvaise augure, car il annonçait de violentes averses; si le chant du moqueur était suivi par l'apparition du pipixcan ou pipitztli (Mouette de Franklin, Larus alors 46. 47. 48. 49.

pipixcan) et du necuilictli ou tletlecton (Faucon émerillon, Faíco columbarius), il risquait de geler. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, Livre 2, chap. 2, p. 44-45. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, Livre 2, Appendix, p. 213. B. de SAHAGON, Historia general, Livre 2, cap. 37, p. 186. Ibid., Livre 2, cap. 29, p. 223. T. SUuLLIVAN, «The arms and insignia of the Mexica», Estudios de Cultura Náhuatl 10

(1972), p. 155-193, voir p. 176-177 et 186-187. 50. Fol. 78v; T. SULLIVAN, « The arms and insignia », p. 184-185. La nature des plumes utilisées dans la confection du uexolot! n'est pas évoquée explicitement. Si ces dernières appartenaient vraisemblablement à l’espèce figurée, il faut toutefois préciser que la plupart des plumes noires mentionnées dans le Códice Matritense sont celles du cacalotl (le Grand corbeau, Corvus corax). 51. B. de SAHAGÚN, Historia general, Livre 2, cap. 33, p. 203 et Florentine Codex, Livre 2,

chap. 33, p. 136.

93

Nicolas Latsanopoulos

Pendant les cinq jours néfastes nemontemi, l'activité de toute la cité était totalement interrompue ; dans les maisonnées, personne ne devait manier de balai, «ils chassaient simplement la poussière avec un éventail ou bien la plume de vol d'un dindon, la plume primaire d'un dindon» (totolmamaztica, totolaauitztica)”?.

En résumé, ce recensement préliminaire a permis de montrer que l’usage de plumes de dindon était largement codifié et rattachait l'oiseau à deux divinités majeures du panthéon aztéque : d'une part Xiuhtecuhtli-Milintoc, le vieux dieu du feu, à qui l'on destinait des plumes de couleur noire, et d'autre part Tezcatlipoca, dont l'effigie, le personnificateur et les prétres arboraient des plumes de couleur blanche. Les plumes noires et brillantes renvoient directement au feu et à l'obsidienne. Déjà, dans l'énumération des couleurs du plumage du dindon domestique, c'est le champ sémantique du feu (cendres, fumée) qui prime*. L'épisode mythique de la métamorphose des hommes en dindons aprés une pluie de feu semble avoir prévalu dans l'identité symbolique de l'oiseau, tout comme il est resté prégnant dans les pratiques de sorcellerie contemporaine, lorsque le sorcier nahualli-tlahuipuchtli passe au-dessus du feu lors des rites de transformation?*. Une autre qualité remarquable de la livrée sombre du dindon est la façon dont celle-ci réfléchit la lumière: les plumes noires et brillantes possèdent les mêmes propriétés que certaines roches. Nous avons vu plus haut que Milintoc portait une couronne réalisée avec

les plumes

éclatantes

du

cou

du

dindon;

or

l'idole

de

Xiuhtecuhtli

portait une couronne analogue de pointes de projectiles? — que l'on suppose être d'obsidienne — faisant directement pendant à la couronne de plumes de Milintoc. Leur aspect étincelant est également à rapprocher de la surface réfléchissante d'un miroir ou de celle de l’eau“, et souligne l'importance que jouait la perception visuelle dans les sociétés mésoaméricaines””.

52.

B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, Livre 2, chap. 38, p. 171.

53. Ceciest valable pour les plumes noires du corbeau, mais également pour la livrée étincelante des colibris ou encore les plumes écarlates cuezalin de l'ara rouge. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 43, p. 24-25, p. 23. Remarquons au passage que l'appariement de l'ara et du corbeau constitue l'énoncé d'une devinette pour désigner la bataille, à l'image du passage d'un incendie: « Qu'est-ce qui est guidé par les plumes rouges de l'ara et suivi par les corbeaux? C'est la guerre». /bid., Livre 6, chap. 43, p. 239. 54. R. MARTÍNEZ GONZÁLEZ, «Le nahualli-tlahuipuchtli dans le monde nahuatl », Journal de la Société des Américanistes 92 (1-2) (2006), p. 111-136. 55. B. de SaHaGÚn, Florentine Codex, Livre 1, chap. 13, p. 30.

56. Ceci explique peut-étre pourquoi les plumes de dindon et les éléments aquatiques sont couverts du méme motif de bandes alternées dans le Codex Borbonicus. Le recours à l'image du miroir se retrouve dans le jargon ornithologique moderne: la barre de plumes iridescentes (dites aussi « spéculaires») que portent certains canards et perroquets à l'aile est désignée par le terme «miroir ». 57. Au sujet du concept de « brillance », voir N. SAUNDERS, « Catching the light : technologies of power and enchantment in Pre-Columbian goldworking », dans J. QuiLTER, J. Hoorzs (éd.), Gold and power in ancient Costa Rica, Panama, and Colombia, Washington, D.C., Dumbarton Oaks

Research Library and Collection, 2003, p. 15-47. La prévalence de ce concept en Mésoamérique explique peut-être pourquoi les informateurs de Sahagún s’appliquèrent à décrire si finement la peinture faciale des prêtres du temple de Huitzilopochtli pendant les célébrations de toxcatl :

94

De chair et de plumes

À ce niveau de l'étude, il est encore délicat d'expliquer le recours aux plumes blanches dans la sphère de Tezcatlipoca. On gardera en mémoire que ces plumes proviennent essentiellement du dindon domestique, désigné comme « grand esclave». Mélées à de la résine, elles forment un emplátre voué à couvrir la téte des personnificateurs divins dont la vie culminera dans un sacrifice sanglant. I] peut étre avancé, pour le moment, que les plumes blanches du dindon sont la marque d'une servitude compléte et servent à qualifier l'individu destiné à satisfaire l'appétit insatiable des dieux. Autour de la

«mante du feu du diable»

Passons maintenant à l'analyse d'une étoffe de tissu rituelle connue sous le nom de « manta del fuego del diablo». On connaît deux versions de cette mante venant clore la section des étoffes rituelles du Codex Tudela (f. 88v)

et du Codex Magliabechiano (fol. 7r), deux manuscrits pictographiques tirés d'un prototype aujourd'hui perdu (Fig. 6 et 7). Si l'on s'en tient à la glose en espagnol du Codex Tudela, ces étoffes richement décorées étaient portées lors de certaines fétes rituelles par les hauts dignitaires et leur motif renvoyait à la divinité célébrée à cette occasion”. La mante qui nous intéresse est remarquable à double titre: alors que la section des étoffes comprend en moyenne quatre mantes par page, la «mante du feu du diable» occupe une page entière ; ce grand format autorise un dessin fouillé qui fait écho à une composition beaucoup plus complexe que le reste des étoffes où domine un motif simple, traité de manière relativement schématique. Nous sommes donc en droit de nous demander si le décor de cette mante n'était pas destiné à fixer un autre type de discours, plus complexe, requérant une iconicité plus dense.

leurs lévres et autres parties du visage étaient couvertes de miel, de sorte qu'elles donnaient l'impression de briller sur le fond noir du visage.

B. de SAHAGÚN,

Historia general,

Livre 2,

cap. 24, p. 158-159. Le principe de chatoiement, et son corollaire le feu, s'étendait à tous les éléments naturels à surface réfléchissant la lumière, comme c'est le cas pour l'ambre « qui produit des étincelles» (tletlexochyoh), le fruit du yucca ou encore la fleur teocuitlaxochitl, comparés à des braises. B. de SanacUN, Florentine Codex, Livre 11, p. 203, 225 et 229; il explique sûrement

le succès remporté par les céramiques totalement brunies ou à surface métallescente, les pièces lapidaires en pierre fine totalement polies ou encore les articles d’orfèvrerie. 58. Le Codex Tudela (fol. 85v) parle de «mantas dedicadas a los demonios y cada uno de los seriores y principales se las vestían las fiestas y las tenyan en memoria de los demonios a quien eran dedicadas»;

dans le Codex Magliabechiano

(fol. 2v), la mention est plus brève: «son las

mantas o vestidos que los indios usaban en las fiestas que adelante se dirán con todos los días que las tales fiestas traían de solemnidad...»; voir J. J. BaraLLa RosApo, «El Códice Tudela o Códice del Museo de América y el Grupo Magliabechiano», Thése de doctorat, Madrid, Universidad Complutense de Madrid, 1999, p. 368.

95

Nicolas Latsanopoulos

eZ

D

QE

A

a $. Y

Figure n° 6: Mante rituelle, Codex Tudela f. 88v. Dessin de l’auteur d’après photo généreusement fournie par J. J. Batalla.

Figure n° 7: Mante rituelle, Codex Magliabechiano f. 7r. Dessin de l’auteur d’après fac-similé dans Codex Magliabechiano CL. XIIL3 (B.R. 232), Graz, Akademische Druck- u. Verlagsanstalt, 1970,

96

De chair et de plumes

Le motif de la mante consiste en un dindon déplumé lié au moyen de deux cordes à une tige, venant couper la vignette rectangulaire en deux moitiés égales, l’une parsemée de pointes de projectiles, la seconde couverte de flammes émanant de sous le corps de l'oiseau. Ce motif ne possède aucun parallèle figuratif, bien qu'il existe des mentions écrites d'étoffes décorées de dindon(s): dans la description des Otomis du Codex de Florence, sont

recensés des tissus confectionnés à base de fibres d'agaves, décorés du motif totolitipetlaio?, un motif décoratif que l'on retrouve cité parmi les modéles de capes ou petits manteaux en fibre d'agave que vend l'artisan spécialisé. Le motif est également cité parmi la liste des jupes (naguas) que portent les femmes nobles participant aux célébrations du mois huey tecuilhuitl, « grande fête des seigneurs »*!. Mais revenons à la description de la mante. Le dindon est facilement reconnaissable à sa téte dénudée couverte d'excroissances circulaires, à la caroncule

allongée placée au-dessus du bec et à son front marqué de profondes rides, qui lui confèrent un aspect bosselé. La présence d'un ergot, petit éperon corné situé à l'arriére du tarse des pattes, indique qu'il s'agit d'un dindon mâle‘. La position du corps est difficile à établir: si l'on se fie à l'orientation de la téte de l'oiseau, les ailes seraient ramenées sur la partie ventrale de l'oiseauet les deux éléments aux bords dentelés, délicats à identifier, couvriraient le dos. Si

le dessin du Codex Tudela n'a jamais été mis en couleur, le tlacuilo du Codex Magliabechiano a pris soin de rehausser le fond chair de la téte et du corps par des touches de lavis rose et de couvrir les excroissances de la téte d'un bleu opaque, identique à celui utilisé pour retoucher l'extrémité des flammes. Hormis de légères différences dans le traitement des pattes, les ailessont pendantes dans le Magliabechiano et vraisemblablement nouées entre elles dans le Tudela. On retrouve ces deux fagons de représenter les ailes de l'oiseau dans une série de scènes du Lienzo de Tlaxcala où des dindons cuisinés et embrochés sur des tiges sont offerts, en compagnie de dindons vivants, aux troupes et aux alliés de Cortés*. D'un point de vue purement gastronomique, les ailes bridées indiquent que l'oiseau est partiellement préparé. Pourtant,

59.

B. de

SAHAGÜN,

Florentine

Codex,

Livre

10,

chap.

29,

p.

180.

La

traduction

de

totolihtipetlayoh varie selon les auteurs: pour Garibay, il s'agit de «dindes en plein vol» (dans B. de SAHAGÜN,

Historia

general,

vol.

IV,

Vocabulario,

p. 360), tandis

que

pour

Dibble

et

Anderson il s'agirait plutôt de «dindon à l'intérieur entrelacé comme une natte ». Jacqueline de Durand-Forest traduit le terme nahuatl par «manteau aux joncs entrelacés», de tollin, joncs; petatl, natte; -yo, suffixe adjectival: J. de DuRANp-Fonzsr (trad.), L'histoire de la Vallée de Mexico. Troisiéme relation et autres documents originaux de Chimalpahin Quauhtlehuanitzin, 2 vol, Paris, L'Harmattan, 1987; vol. 2, p. 123 et note 365. Cette lecture n'explique pas le

redoublement de la syllabe initiale to-. 60.

B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, Livre 10, chap. 10, p. 73. Il n'est pas précisé si l'artisan

est d'origine otomi, un groupe ethnique connu l'agave. 61.

pour étre spécialisé dans l'exploitation de

Ibid., Livre 2, chap. 27, p. 99 et Id., Historia general, Livre 2, cap. 27, p. 176.

62. Cette excroissance, propre à la famille des gallinacés, est absente chez les dindes. 63.

Lienzo de Tlaxcala, M. de la Torre (éd.), Mexico, Cartón y Papel de México, 1983; voir

par exemple p. 2 et p. 28. Si l'on s'en tient à une mention du Codex de Florence, les ailerons

97

Nicolas Latsanopoulos

bien qu'il soit «habillé», c'est-à-dire plumé, il n’est pas totalement paré: on ne lui a coupé ni la tête ni les pattes. Le dindon est lié à une tige noueuse (les feuilles sont insérées au niveau des noeuds, comme

chez le mais), par des

cordes blanches ornées de duvets et terminées par une longue plume blanche. Une zone convexe, délimitée par une ligne ondulante, se découpe précisément sous le corps du dindon. Il s'en échappe six longues langues de feu papillonnantes. Dans le Codex Tudela, cet espace semi-circulaire renferme de petites volutes, signe conventionnel de fumée. On peut en déduire qu'il s'agit de la bouche d'un foyer ou d'un four, ou encore de la masse de braises et de charbons d'un grand brasier**, semblable à celui qui figure à côté du paquet funéraire destiné être consumé par le feu dans une scène de funérailles du Codex Magliabechiano (fol. 66). Dans les deux planches, les pointes de projectiles se détachent avec netteté sur un fond blanc. Entièrement encrées, elles évoquent la noirceur de l'obsidienne. Moins nombreuses dans le Magliabechiano que dans le Tudela (huit pointes au lieu de onze), car de taille supérieure, elles sont orientées de

façon aléatoire, pointant dans diverses directions. De forme triangulaire, à encoches latérales et bords droits, ces pointes de projectile sont bien connues des registres archéologiques et iconographiques?". Le jeu de contraste entre le fond de la mante et les éléments qui s'y superposent est net dans la version colorée du Magliabechiano: pointes de projectile noires sur fond blanc et flammes jaune vif sur fond sombre renvoient à l'opposition lumière/obscurité, jour/nuit,

mais aussi chaleur/froid.

On

serait tenté de voir, dans les pointes

de projectile virevoltantes, une évocation du ciel criblé de fléches du champ de bataille, à moins qu'il ne s'agisse d'une allusion au cinquième niveau de l'inframonde aztèque, /tzehecayan, le «lieu du vent d'obsidienne ».

grillés de dindon constituaient une gourmandise trés appréciée. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, Livre 11, chap. 2, p. 56.

64. Un passage de Sahagún décrivant un trou dans le brasier où sont jetées les victimes en xocotl huetzi est particuliérement éclairant à ce sujet : «al tiempo que los arrojaban alzábase un gran polvo de ceniza, y cada uno a donde caía allí se hacía un grande hoyo en el fuego, porque todo era brasa y rescoldo »; B. de SAHAGÜN, Historia general, Livre 2, cap. 29, p. 188.

65. Dans cette scène, la forme trilobée du brasier renvoie à la forme schématique de la gueule du monstre terrestre, le grand dévoreur de corps dont la bouche constitue un seuil de passage entre la surface terrestre et l'inframonde, le monde des vivants et celui des morts.

66. Dans le Tudela, deux orientations opposées alternent Magliabechiano, le peintre a ajouté une ligne médiane qui reléve directement de la technologie lithique et correspond à sur les pointes bifaciales à section triangulaire. 67. Pointes de flèches chichiméques en obsidienne de la

successivement. Surles pointes du bifurque aux extrémités. Ce détail la zone de contact entre deux faces catégorie D2d, dans F. RODRIGUEZ

LounEr, Les Chichimèques (“Collection Études Mésoaméricaines" 12, Mexico, Centre d'Études Mésoaméricaines et Centraméricaines, 1985, p. 102, fig. 71, p. 205, Pl. 7, fig. 6; pointes bifaciales découvertes à Tenochtitlan, Texcoco et Tlatelolco, dans A. PAsTRANA, K. HiRTH,

« Biface production and craft specialization, a view from Sierra de las Navajas, Hidalgo», dans K. HirTH

(éd.), Mesoamerican

lithic technology,

experimentation

and interpretation, Salt Lake

City, The University of Utah Press, 2003 (voir fig. 14-1 à 14-3). Cas figuratifs: voir par exemple le Codex Borbonicus, fol. 6 et fol. 12.

98

De chair et de plumes

Un aspect du dessin reste cependant ambigu: le dindon est-il empalé, comme cela est suggéré par la tête au bec ouvert, placée dans l’axe précis de la tige, ou bien est-il simplement attaché, ce qui expliquerait le recours aux cordes autour du cou et des pattes? La présence de longues feuilles placées à espace régulier le long de la tige dans le Codex Tudela plaide en faveur de la seconde hypothèse. La glose du folio 88v du Codex Tudela ajoute « gallo q(ue) d(e)sta manera asaban ». On ne peut évidemment pas se contenter de cette lecture culinaire, méme si, à bien des égards, les offrandes livrées au feu servent à le nourrir, de

méme que le pulque versé sur le sol étanche la soif de la terre. C'est un dindon vivant — il n'est pas mutilé et son œil est ouvert — qui est figuré sur la mante, à la manière d'une victime sacrificielle ou d'un pénitent. Il est déplumé, c'està-dire dépouillé de sa parure naturelle, de ses ornements, de la méme fagon que certains captifs étaient entièrement dénudés avant le sacrifice. Sahagün ne rapporte-t-il pas que l'on retirait tous les ornements de papier des captifs destinés à étre jetés vivants, mains et jambes liés, dans un grand brasier situé face à la statue de Xiuhtecuhtli en xocotl huetzi* ? Marque d'humiliation ou encore d'humilité : le futur roi ne devait-il pas se soumettre, presque nu, à une phase de jeûne et de pénitence préliminaire à son intronisation? Il passait une longue période, assis prés d'un feu, comme cela est représenté dans le folio 54v du Codex Tudela. Ce qui précéde pourrait expliquer la présence des deux éléments aux bords dentelés couvrant le dos de l'oiseau: une mante et un pagne (de plumes ?) pour préserver l'oiseau pénitent de la nudité totale. De tout ce qui précède, un élément revient avec insistance: le feu. Une féte,

célébrée

en

izcalli,

«croissance»,

le dix-huitieme

mois

de

l'année

solaire aztèque consacré au dieu du feu Xiuhtecuhtli, retient l'attention. Cette cérémonie impliquait la capture de petit gibier terrestre et aquatique par les jeunes, gibier qui était ensuite remis aux vieux prétres du dieu puis jeté dans le brasier dressé devant l'effigie divine ; une fois cuites, les plus grosses prises étaient retirées du feu, placées sur le bord du foyer puis consommées par les prétres?. En échange, les jeunes gens recevaient des galettes accompagnées de crevettes et de sauce au piment. La cérémonie était renouvelée dix jours plus

tard;

une

nouvelle

statue

du

dieu

— sous

la forme

de

Milintoc

cette

fois-ci — était confectionnée. Le Codex de Florence mentionne que les proies étaient suspendues à des bâtons ou à des tiges". Ces animaux (batraciens,

68. En toute logique, ces feuilles ne dindon. C'est pourtant le cas dans le claire et bien équilibrée. Si le tlacuilo — qui ruine sensiblement la clarté de qu'esthétique.

devraient pas apparaître si la tige traverse le corps du Codex Magliabechiano où prédomine une composition du Codex Tudela a jugé nécessaire de rajouter ce détail la composition — c'est plus par souci d'ordre rationnel

69. Et d'ajouter qu'ils étaient totalement nus, car «no tenían más necesidad de vestiduras, ni otra cosa, como que luego habían de morir»; B. de SAHAGÚN, Historia general, Livre 2, cap. 29,

p. 187-188. 70. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, Livre 2, chap. 18, p. 33, p. general, Livre 1, cap. 37, p. 219-222. 71. B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, Livre 2, chap. 18, p. 161.

160-161;

fd., Historia

99

Nicolas Latsanopoulos

reptiles, poissons et petits oiseaux) devaient être obtenus par piégeage ou bien collectés à la main dans l'environnement lacustre de la vallée. A notre grand dépit, il est fort douteux que le dindon ait fait partie de ces prises. Au nombre des individus qui rejoignaient directement la maison du Soleil à leur mort, se trouvaient ceux qui, à l'instar des guerriers morts sur le champ de bataille ou pendant le sacrifice gladiatoire, étaient jetés dans le feu, percés par des javelines ou encore fléchés”?. Le traitement par le feu et par les flèches était donc assimilé à la mort du guerrier sur le champ de bataille, lui-même assimilé à un grand brasier?*. Mais la mort par le feu pouvait aussi constituer un chátiment. En témoigne l'une des sanctions judiciaires appliquées sous le regne de Nezahualcoyotl, le souverain légiste de Texcoco, telle que la rapporte Torquemada : « Al que revolvía un reino con otro y era amigo de llevar y traer nuevas de alteración, hacía morir atado a un palo de encina a manera de asador y puesto a las llamas del fuego, donde moría rabiando»”. Alors que les Mexicas cherchent à se libérer du joug des Tépanèques en leur déclarant la guerre, Itzcoatl aurait déclaré qu'en cas de défaite, lui et ses compagnons d'armes «se livreraient à la plébe qui pourrait les cuire à la broche et les manger » ^. Là encore, c'est la notion de châtiment que l'on retrouve associée à l'exposition au feu. Au terme de ce parcours, il faut bien reconnaitre qu'il reste difficile de préciser avec certitude la signification de cette énigmatique étoffe, les circonstances rituelles et la divinité à laquelle elle était destinée, si toutefois elle remplissait effectivement cette fonction. Nous avons pu voir que, sous l'apparence d'une scène triviale de grillade, l'oiseau, déplumé mais toujours vivant, attaché et non pas traversé par la tige qui le retient, est assimilable à une victime sacrificielle et à un pénitent. C'est le captif de guerre ou l'esclave, voire le souverain incapable de gouverner avec discernement, qui nourrissent et vivifient le feu, un principe fondamental, à l'origine de toute chose dans la pensée aztèque. C'est aussi le futur roi qui, en tant que descendant de la noblesse mythique du quatrième Soleil, transformée en dindons comme nous l'avons vu, recevra la charge difficile de tlatoani grâce au brasier divin. Conclusion

En détournant à notre avantage les mots de Jules Renard placés en épigraphe, on peut dire que les dindons ne craignent plus ni la pluie, ni le soleil puisqu'ils sont nés d'une pluie de feu cataclysmique. Il reste encore

72.

Ibid., Livre 3, chap. 3, p. 49.

73. Chez les Aztèques, le brasier (achinolli) était intimement associé à la guerre si bien que certains auteurs, comme Garibay, traduisent tlalchinolxochitl non pas par «fleurs de feu» mais par «fleurs de guerre». Au passage, ne prétendait-on pas que celui qui marchait sur les pierres du foyer domestique risquait d’être fait prisonnier à la guerre? B. de SAHAGÚN, Historia general, Livre 5, Apéndice, p. 33. 74. J. de TORQUEMADA, Monarquía Indiana, vol. 1, Mexico, Instituto de Investigaciones Históricas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1975, Livre 2, cap. 53, p. 230. 75. Cité dans M. GRAULICH, Le sacrifice humain chez les Aztéques, Paris, Fayard, 2005, p. 22.

100

De chair et de plumes

de nombreux aspects à développer au sujet de la symbolique du dindon dans la culture aztèque, à commencer par la place exacte qu’il occupe dans les pratiques domesticatoires et sacrificielles, le degré d’intimité qui le lie à Tezcatlipoca ainsi qu’au monde de la sorcellerie et de la sexualité, la relation qu'il entretient et qu'il partage avec le vautour, comme lui chauve et ridé... Les sources consultées restent muettes sur un point: existait-il un lien entre Nanahuatl le bubonneux qui, le premier, sauta dans le brasier de Teotihuacan et se convertit en Soleil, et le dindon, dont la peau déplumée de la téte et du cou présente des boursouflures et des excroissances charnues aisément assimilables à des bubons? En soulignant avec justesse le parallèle entre le dindon et le cincocopi, ce «faux mais » dont se nourrissaient les hommes précédant l’avènement du cinquième soleil, celui du peuple aztèque, Michel Graulich a donné une belle définition de cet oiseau: « Le dindon est à l'oiseau ce que le cincocopi est au mais: il lui ressemble fort, mais il ne l'est pas vraiment; il parait un oiseau, mais il ne vole pas...» ^5. Il est temps de clarifier l'identité encore fumeuse de ce dróle d'oiseau.

76.

M. GRAULICH, Mythes et rituels, p. 93-94.

101

EL HUESO DOS ELEMENTOS

Y LA SANGRE:

CENTRALES

EN LA IMAGEN

DE LOS ANTIGUOS

CORPORAL

TARASCOS

Roberto MARTINEZ GONZÁLEZ Instituto de Investigaciones Históricas, Universidad Nacional Autónoma de México

En términos conceptuales, el ser humano no es una entidad perfectamente delimitada sino que se trata de un producto progresivamente elaborado por la intervención de fuerzas y entidades naturales, sociales y sobrenaturales. Desde un punto de vista sociológico, la condición humana, más allá de una caracterización biológica, está dada por la interacción entre el mundo social, que modela el comportamiento del individuo en la producción de la identidad personal y su adscripción al grupo, y las cualidades psico-fisiológicas, que le dotan de una cierta singularidad y permiten su reconocimiento como sujeto en la comunidad. En otras palabras, la propia concepción de lo humano implica un diálogo con la sociedad y el ambiente natural en que se desenvuelve. A través de analogías, las cualidades humanas son usadas para la interacción y apropiación de los objetos circundantes mientras que, simultáneamente, nos valemos del medio para figurar nuestro propio funcionamiento. Como cualquier otro elemento tangible, el cuerpo humano se encuentra sujeto a mültiples y diversos mecanismos de interpretación; de suerte que, para la cultura, éste constituiría un conjunto finito de significantes que, al ser manipulados, se convierten en generadores de muy distintos simbolismos. En otros términos, el cuerpo puede ser entendido como una suerte de texto en el que, para su construcción, intervienen tanto elementos interiores como exteriores ; siguiendo a Weisz, sostenemos que considerar al organismo como texto significa «aislar el cuerpo como un espacio de actividades discursivas y un lugar donde se juegan distintos sentidos » . Así, el organismo funge simultáneamente como soporte y contenido de la significación; es metáfora en la aprensión del mundo y sujeto de simbolismo

1. G. Weisz, «Personificaciones somáticas », Poligrafías. Revista de literatura comparada, (1996), p. 65-82.

1

103

Roberto Martinez González

cuando usamos al mundo para entenderlo a él. Y es en este sentido que «el estudio de la imagen corporal nos permite identificar las particularidades de un pueblo, sus concepciones culturales más profundas como el ordenamiento del cosmos y la representación que tiene de sí mismo »?. A pesar de que, en Mesoamérica las nociones de cuerpo y persona han sido abundantemente estudiadas, este tema sigue siendo mínima e insuficientemente trabajado en el caso purépecha — ya sea contemporáneo o antiguo. Hasta el momento, la obra que más información ha proporcionado al tema en cuestión, en época prehispánica, es la de Sepülveda; que, estando particularmente dedicada al estudio de los sistemas médicos, presta poca atención a tópicos como la concepción del sueño y las entidades anímicas?. Contamos con textos monográficos, como los de Van Zantwijk*, Carrasco?, Beals? y Foster”, que nos aportan, de manera aislada, algunos datos de interés para la materia en cuestión. Entre los documentos que nos pudieran ser más ütiles figura un nümero relativamente alto de escritos sobre medicina indígena; podemos, por ejemplo, citar los trabajos de Young?, Serrano?, Motte-Florac '9, Jiménez

Cortés!!, Cárdenas",

Argueta!*,

Sasson

y la Dirección General

2. J. C. AcuaDo VÁZQUEZ, Cuerpo humano e imagen corporal. Notas para una antropología de la corporeidad, México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, Universidad Nacional Autónoma de México, 2004, p. 23. 3. M. T. SEPÜLvEDA, La medicina entre los purépecha prehispánicos, México, Instituto de

Investigaciones Antropológicas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1988. 4. R. VAN ZANTWUK, Servants of the saints. The social and cultural identity of a Tarascan community in Mexico, Holanda, Van Gorcum et Compagnie, 1967. 5. P. CARRASCO, El catolicismo popular de los tarascos, México, SepSetentas, 1976. 6. R. BEALS, « The Tarascan », en E. Voor, R. WauchorE (éd.), Handbook of Middle American Indians, vol. 8., Austin, University of Texas Press, 1969, p. 725-773. 7.

G. FosTER,

Tzintzuntzan:

los

campesinos

mexicanos

en

un

mundo

de

cambio,

México,

Fondo de Cultura Económica, 1972. 8. J. YounG, «Health care in Pichátaro: Medical decision making in a tarascan town Michoacán, México », Tesis de doctorado, University of California Press, Riverside, 1978.

9. E. SERRANO Michoacán:

CARRETO,

«Procesos

biosociales

y bienestar

en la región

purépecha

of

de

salud, reproducción y diversidad », Diario de Campo 22 (2002), p. 26-27.

10. E. Morte-FLorac, «Santos, humores y tiempo: El clima y la salud entre los p'urhépecha de la Sierra Tarasca (Michoacán, México)», en M. GOLOUBINOFF, E. KArz, A. LAMMEL (éd.), Antropología del clima en el mundo hispanoamericano, Quito, Biblioteca Abya-yala, 1997.

11. T. Jiménez Cortés, « Breve descripción del empacho entre los purépechas de Arantzpacua, Michoacán », en R. CAMPos Navarro (éd.), El empacho en la medicina (siglos xvi-xx), México, Instituto Nacional Indigenista, 2000.

Mexicana,

antología

12. J. I. CARDENAS, «El embarazo y el parto entre los p'urhépechas de la ribera del Lago de Pátzcuaro », en A. CASTILLEJA

GONZÁLEZ,

V. VALENCIA

VALERA

(coord.), El Lago

de Pátzcuaro:

su gente, su historia y sus fiestas, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1993, p. 205-209. 13. A. ARGUETA, Medicina purépecha en la región del Lago de Pátzcuaro, Morelia, Dirección

General de Culturas Populares Unidad Regional de Michoacán, 1982. 14.

Y. Sasson,

«La medicina en Las Canoas, Mich. », Tesis de Maestría, Escuela Nacional de

Antropología e Historia, Instituto Nacional de Antropología e Historia, México, 1980.

104

El hueso y la sangre

de Culturas Populares. Por último, debemos mencionar la obra de Juan Gallardo Ruiz que, aunque versa principalmente sobre las prácticas médicas, constituye hasta la fecha el más amplio análisis del sistema de creencias que los purépecha de Cherán han construido en torno a la noción de persona4. La información es escasa y fragmentaria, mas consideramos que, a través de la comparación entre datos procedentes de diferentes épocas y regiones es posible, al menos, reconstituir una imagen superficial de la representación tarasca del cuerpo; esa es la intención principal de nuestra investigación actual. Si bien es cierto que estos pueblos se han visto particularmente afectados por los sistemas de pensamiento mestizo-occidentales, tampoco podemos negar que, cuando menos, una parte de sus prácticas y creencias es de origen prehispánico””. Para abordar la imagen corporal, es necesario comenzar por reconocer y decodificar los diferentes signos que intervienen en su construcción — es decir las partes del cuerpo portadoras de sentido; y, para ello, se deberán definir las asociaciones que estos establecen con otros elementos culturales en los distintos contextos en que aparecen. Esto nos permitirá identificar sus significados y funciones al interior de ese sistema simbólico que constituye la cosmovisión'*. El hecho de estudiar los distintos signos al interior de múltiples contextos temporales nos permitirá, así, integrar una mayor cantidad de variantes del fenómeno y los diversos tipos de textos que se estructuran, según las condiciones específicas, en torno al conjunto de símbolos estudiado. Siendo que lo que aquí se expone no son más que resultados preliminares, deberemos conformarnos con tratar dos componentes fundamentales para la comprensión de la imagen corporal tarasca; el hueso y la sangre. Persona y cuerpo en el discurso tarasco

La palabra «persona» figura cinco veces en la Relación de Michoacán", mientras que «gente» aparece en 157 ocasiones; «persona» siempre se refiere a individuos singulares, en tanto que «gente» puede aludir tanto a un grupo en general como al pueblo o plebe”. De modo que, aparentemente,

15.

DiRECCIÓN

GENERAL

DE CULTURAS

POPULARES,

Notas

sobre

el curanderismo

en la Meseta

Tarasca, México, Cuadernos de Trabajo, Secretaría de Educación Pública, 1982. 16. J. GALLARDO Ruiz, Medicina tradicional p'urhépecha, Zamora, El Colegio de Michoacán, Universidad Indígena Intercultural de Michoacán, 2005. 17. Véase R. BEALS, Cheran. À sierra tarascan village, Washington, Smithsonian Institution of Washington, 1946; P. CARRASCO, El catolicismo popular.

18. Entendida como un sistema simbólico — construido a partir de la unión de diferentes subcódigos que comparten una serie de signos, significados y nociones — en que los ritos, los mitos, las creencias y las imágenes religiosas serían los textos en que se emplea dicho sistema de significación. 19.

J. ALCALÁ,

Relación

de

Michoacán:

Instrumentos

de

consulta,

en

C. ESPEJEL

(comp.),

C. A. VILLALPANDO (desarrollo), Zamora, El Colegio de Michoacán, 2008, fol. 2, 13, 36, 37v, 123v. 20. J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol., 2, 2v, 3, 6, 7, 7v, 1Ov, 11, 6v, 12v, 16, 16v, 17, 17v, por citar

algunos ejemplos.

105

Roberto Martinez González

el español de la época — tal como se emplea en dicha fuente — reconocería dos expresiones de humanidad; una a título genérico y otra individual. Cabe aclarar que, aun cuando no estuvieran cristianizados, en el discurso del autor

de la Relación de Michoacán” sí se reconoce plenamente a los indígenas como personas. La palabra por la que se traduce « gente », purépecha hangamariqua, es la misma que se emplea para « gentío », « gente plebeya, villanos », « maceguales, la gente común» y «hombres trabajadores »”. Lo interesante es que, en los diccionarios antiguos, el término por el que se traduce « persona », « hombre, o persona de razón», cuiripu, — el concepto que subraya la singularidad del sujeto — comparte su raíz con «cuerpo» y «carne »; algo que pareciera indicar que, para el purépecha, la especificidad del ser está dada por su cuerpo y no por una cierta esencia inmaterial”. Todavía en Charapan, «gente» se dice khuiripu y «carne» khuirípeta^; ni el español contemporáneo ni el de la época dotan de un sentido semejante a la palabra cuerpo — véase, por ejemplo, la cantidad de veces que la Relación usa «cuerpo» para referirse a cadáveres”. Aparentemente, este «cuerpo » se encuentra íntimamente ligado a la vitalidad, pues de acuerdo con Jacinto Zavala «la radical kui “significa criar, crecer, o hacer mercedes”. Además, como podemos ver de una revisión

de las palabras terminadas en pu en el Diccionario de Gilberti, la mayoría de ellas se refiere a cosa viva o que sirva para la vida »?*. Aunque se sobreentiende que una parte de ella es ofrendada a las deidades, en la Relación de Michoacán, la carne de las víctimas sacrificiales, animales

o humanas, aparece como algo constantemente comido por hombres — principalmente, sacerdotes y gobernantes”. De modo que este elemento no sólo aparecería como definitorio de la condición humana sino que, hasta cierto punto, también sería la parte que mayoritariamente le corresponde para su aprovechamiento — nótense, en cambio, las restricciones que se refieren al uso de la piel en el caso de los venados ofrecidos a Curicaueri%.,

21. Ibid., fol. 2. 22. Diccionario grande de la lengua de Michoacán, B. WanREN (éd.), Morelia, Fimax Publicistas, 1991, vol. II p. 457; M. GiLBERTI, Diccionario en lengua tarasca o de Michoacán, A. PENAFIEL (dir.), México, Palacio Nacional, 1901/1962, p. 137, 439; Relaciones geográficas del siglo xvi. Michoacán, R. AcuÑa (éd.), México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1987, p. 81. 23. Diccionario grande, vol. I p. 415, 561 ; vol. II p. 139; M. GiLBERTI, Diccionario, p. 437. 24. P. VELÁSQUEZ GALLARDO, Diccionario de lengua phorhepecha, México, Fondo de Cultura Económica, 1978, p. 159. 25. J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol. 31v, 40v, 48v, 59, etc. 26. A. JaciNTO ZAVALA, Mitología y modernización, Morelia, El Colegio de Michoacán, Gobierno del Estado de Michoacán, 1988, p. 18. 27. J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol. 19, 64, 64v, 83v, 84, 84v, 85. 28. Ibid., fol. 64.

106

El hueso y la sangre

La sangre en la lógica del don

Uno de los componentes del ser humano la sangre; ya que, en el discurso mítico, ésta sino que, además, condiciona las cualidades en la sociedad y establece el más corriente sobrenaturaleza. Segün los relatos del siglo xvi:

que más produce sentido es no sólo hace posible la vida, y funciones de los individuos medio de intercambio con la

...Los hombres decían aver hecho los dioses de ocho pelotillas hechas de ceniza [o ceniza y metales], ruciadas con sangre que se sacó de las orexas un mensagero que los dioses del cielo enviaron para eso, llamado Curiti Caheri, que quiere decir gran sacerdote; y a cabo de averlas tenido algunos días en un bacín, de las quatro salieron varones ; y de las otras quatro, mujeres [...] Y por averles contentado a los dioses, les echaron la bendición, y comenzaron a

multiplicar y de allí vinieron los demás ?.

En origen verde» imagen

el Lienzo de Jicalán — también llamado de Jucutacato —, el lugar de lleva el nombre de Chalchihuitl Ahpazco «en el cajete de piedra y se muestra a un grupo de hombres emergiendo de un vaso. Esta se acompaña de la glosa « Del cajete de piedra preciosa verde vinieron

los creados de ceniza, y la casa de los dardos y los toltecas, todos los nahuas,

y los poseedores (trabajadores) de la pluma de quetzal y los taladradores de piedra (que fabricaban cuentas de piedra preciosa verde) y los que hacían el resplandeciente adorno pulido para el pelo»*. Como bien lo ha demostrado Roskamp, se trata de un texto creado por grupos nahuas que fueron incorporados al imperio michoacano”. En la Relación de Michoacán la ceniza aparece constantemente como restos de la destrucción de los cadáveres de gobernantes y guerreros durante su rito funerario”. En otra ocasión, el término ceniza parece referirse específicamente a los ancestros de los señores: «aquellos señores que guardaron de la ceniza, ques los primeros que fueron señores, que decía es esta gente que los hombres hicieron los dioses de ceniza». En términos genéricos, el purépecha de la época de contacto habría estado formado por dos clases de materias; una de origen divino y otra derivada de los resto de los humanos

29. F. RAMÍREZ, «Relación sobre la residencia de Michoacán [Pazcuaro]», en Relación de Michoacán, F. MIRANDA (éd.), Morelia, Fimax Publicistas, 1980, p. 359-360. También Relaciones geográficas, p. 36. 30. E. SELER, «Los antiguos habitantes de Michuacan», en J. ALCALÁ, Relación de Michoacán, M. F. MENDOZA et al. (éd.), Zamora, El Colegio de Michoacán, Gobierno del Estado de Michoacán, 2000, p. 147-233; H. RosKAMP, La historiografía indígena de Michoacán: el Lienzo de Jucutacato y los Títulos de Carapan, Leiden, Research School, CNWS, 1998, p. 116. 31. H. RoskAMP, La historiografía; ibid., «Historia, mito y legitimación: el Lienzo de Jicalán»,

en

J. E. ZáéaArTE

HERNÁNDEZ

(coord),

La

Tierra

Caliente

de

Michoacán,

Zamora,

Gobierno del Estado de Michoacán, El Colegio de Michoacán, 2001, p. 119-151. 32. J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol. 20, 31v, 58, 58v, 76v, 131. 33. Ibid., fol. 26v.

107

Roberto Martinez González

pasados. Lo cual concuerda con lo descrito en los mitos nahuas de la misma época”, Considerando que, como sostiene Mauss, «el regalo no devuelto rebaja a aquel que lo acepta », el don de sangre por parte de las deidades obliga al hombre a « pagar con la misma moneda »**. Ya sea por el sacrificio de enemigos y delincuentes o por el autosacrificio, la sangre es la parte del ser humano que se ofrece más explícitamente a los dioses**. Incluso en época colonial se seguían encontrando restos de tales dones. Se menciona haber encontrado entre los indígenas «una piedra llena de sangre e questava enbuelta en ello muchas mantas en que parecía averse sacrificado». Un español llamado Pedro de Molina dijo que «una vez halló una cara de onbre hecha de piedra tan grande como la mano e que allí vido sangre derramada »?. Aun en los casos en que se llegaba a derramar dicho elemento de manera accidental se procuraba dedicarlo a las deidades «descalabrándose alguno, alimpiábase con la mano la sangre por que no cayese [borrado] en el suelo y ruciábanla en los dedos hacia el cielo para dar de comer a los dioses »#. Se dice que durante la guerra « abajan los dioses del cielo a comer sangre »*. Es tal vez en ese sentido que su nombre tarasco, yuriri, «lo que fluye » parece particularmente adecuado; pues, de alguna manera, alude a este intercambio de sangres de los dioses a los hombres — al momento de la creación — y de los hombres a los dioses — en el transcurso de sus vidas*, Aun cuando es muy sabido que los tarascos practicaban la antropofagia, carecemos de dato alguno que pudiera sugerir el consumo habitual de la sangre humana *. Incluso contamos con datos que describen con claridad el carácter profundamente perjudicial del consumo e, incluso, contacto con dicho líquido vital. En relación a un sortilegio para la guerra, se dice sobre ciertos brujos-espías: ...Antes que peleasen con sus enemigos, iban aquellas espías y llevaban de aquellas pelotillas de olores y plumas de águilas y dos flechas ensangrentadas y entraban secretamente en los pueblos y ascondíanlo en algunas sementeras,

34.

Códice

Chimalpopoca.

Anales

de

Cuauhtitlan

y Leyenda

de

los Soles,

P. F. VELÁZQUEZ

(éd.), México, Instituto de Investigaciones Históricas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1945, p. 21, 5; J. ToRQuEMADA, Monarquía Indiana, M. León-PorTILLA (éd.), México, Porrúa,

1986,

vol.

II p. 7; J. MENDIETA,

siglo xvi, J. G. ICAZBALCETA

(éd.), México,

Historia Porrúa,

eclesiastica

indiana;

obra

escrita

a fines

del

1980, p. 78.

35. M. Mauss, «Essai sur le don. Forme et raison de l'échange dans les sociétés archaiques », l'Année Sociologique, 1923-1924. 36. J. ALCALÁ, Relación, fol. 10-10v; Relaciones geográficas, p. 342. 37. ARCHIVO GENERAL DE INDIAS, Justicia, «El Fiscal contra don Pedro de Arellano sobre

cierto oro que tomó a los indios de Michoacán y demás cosas de que fue acusado », W. BENEDICT, A. CARRILLO CazARES, S. MÉNDEZ HERNÁNDEZ (éd.), en B. BogHM antiguo, Zamora, El Colegio de Michoacán, 1994, p. 335-441. 38. J. ALCALÁ, Relación, 2000, p. 365. 39.

F. MIRANDA

(éd.), Relación,

(coord),

1980, p. 147.

40. J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol. 97-97v, 110. 41. Relaciones geográficas, p. 108, 166, 291; F. RamírEz, «Relación Michoacán », p. 361 ; F. MIRANDA (éd.), Relación, 1980, p. 247, 76.

108

El Michoacán

sobre la residencia de

El hueso y la sangre

o cabe la casa del señor, o cabe el cu, y volvíanse sin ser sentidos, y eran aquel-

los hechizos para hechizar el pueblo?.

La sangre humana es tan contaminante que su contacto con el agua puede trastornar su gusto para hacerla imbebible. ...Tenían al cuello unos collares de huesos llamados

taro pu-uta, que eran

colorados y estaban todos ensangrentados de la sangre que saltaba de los sacrificados y lleváronlos a lavar a un agua — que está en la casa de Don Pedro gobernador de Pázcuaro — y puso nombre Tariácuri aquel lugar Carupu-uta — el cual tiene hasta el presente día. Y dice la gente que por eso aquel agua de allí no es sabrosa porque se lavaron allí entonces aquellos huesos o conchas.

Así mismo se nos indica que al momento del contacto con los españoles, ciertos « hechiceros » « hiciéronles en creyente, que el agua con que se bautizaban, que les echaban encima las cabezas, que era Sangre y que les hendían las cabezas a sus hijos y por eso no los osaban bautizar, que decían que se les habían de morir »**. Todavía, en la actualidad, se supone que «toda la sangre humana ajena al cuerpo lo daña, y una gota sobre la piel puede producir erupciones que sólo se curan con hierro candente»*. Es siguiendo este mismo orden de ideas que con «las piedras manchadas de sangre producto de un accidente, [las sikuamecha] confeccionan un “entierro” que busca atraer ‘la calamidad” a la persona odiada »**. Y, en el caso de una embarazada, basta

con mirar la sangre para que ésta tenga un efecto nocivo para el feto; se supone que «si la embarazada ve a alguna persona herida, el producto al nacer tendrá sangre en la misma región del cuerpo que el herido »*7. Sólo contamos con dos excepciones a lo expuesto, la primera se refiere a una mujer poseída por una deidad que, antes de ser sacrificada, pide que se le de a beber el líquido hemático: « Esta diosa Cuerávaperi se revestía en alguno, de improviso, y caíase amortecido y después fbase él mismo a que le sacrificasen y dábanle a beber mucha sangre y bebíala»**. En la segundo, tenemos la vaga mención por parte de Gilberti de una cierta «bruja que chupa sangre» — en ambos casos se trata de personajes y situaciones muy excepcionales. En la actualidad, se considera que la calidad de la sangre condiciona el estado de salud de un individuo; quien la tiene «fuerte », será vigoroso,

42. 43. 44.

J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol. 15. F. MIRANDA (éd.), Relación, 1980, p. 193-194. J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol. 35.

45. B. BARBA DE PIÑA CHAN, «Apuntes no sistematizados para un estudio de la curandería mágica en Michoacán», en I. LAGARRIGA (coord.), Primer anuario de la Dirección de Etnología y Antropología Social, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1995, p. 373-391. 46. J. GALLARDO Ruiz, Medicina, p. 136. 47. J. I. CÁRDENAS, «El embarazo », p. 205-209. También C. R. ACEVEDO BarBa et al., Mitos de la Meseta Tarasca, un análisis estructural, Aguascalientes, Universidad Nacional Autónoma de México, Universidad Autónoma de Aguascalientes, 1982, p. 68-69. 48.

J. ALCALÁ, Relación, 2008,

49.

M. GILBERTI, Diccionario, p. 230.

fol.

10v.

109

Roberto Martinez González

mientras quien la tiene «delgada» y «pobre » tenderá a enfermar”. « La salud consiste en tener mucha sangre, y bien irrigada la nuca. [...] La muerte llega cuando se enfría la nuca. [...] Se habla de mala y buena sangre, refiriéndose a

personas con problemas de restablecimiento lento o rápido »?!. ...Se cree que la respiración está asociada a la circulación de la sangre y a la digestión. [...] La circulación defectuosa de la sangre también provoca pesadillas durante el sueño (Tzikuamu arhini ka tsanarhini), aflicciones, dolores

de cabeza y mareos durante la vigilia. Todo esto causa inapetencia y malfunciones biológicas”.

Las personas de tez oscura tienden a tener sangre caliente y « pensamiento » fuerte, por ello son resistentes a enfermedades frías como el « susto» y el «aire». Quienes tienen la piel más clara son de sangre fría y «pensamiento » débil, pero son menos proclives a contraer enfermedades calientes como el «mal de ojo» y la hechicería o «daño»*. Al mismo tiempo, la fuerza del líquido hemático también se encuentra asociada a la masculinidad, un mayor coraje, un temperamento agresivo y una gran valentía. Sin embargo, esta cualidad sanguínea también puede ser nociva para el entorno, pues se dice que «una sangre fuerte, es capaz de producir mal de ojo»?*. En tales casos, se supone que el daño recibido por la persona — sobre todo, un recién nacido — deriva del sobrecalentamiento del mismo fluido vital*. Obviamente, dichos conceptos se encuentran relacionados con la creencia en un cierto elemento calórico — llamado «esfuerzo» en Tzintzuntzan — que infunde

vitalidad al ser humano

durante

la vida; un hombre

es caliente

al

nacer y alcanza su punto más frío en la vejez”. Siendo que contienen mayor o menor cantidad de calor, los componentes corporales pueden tener más o menos temperatura; el estómago, los intestinos, el excremento, la saliva y las venas son calientes, mientras que el sudor, el cabello y las verrugas son fríos”. La cuestión es que, para estar saludable, un organismo debe mantener un cierto equilibrio térmico; cuando el cuerpo «se encuentra alterado por la excesiva concentración del calor en una de las partes del cuerpo [...] también está en peligro por la pérdida de calor, cuando una parte del cuerpo se ve invadida por el frío»*, El balance entre ambos polos depende de las cualidades de los alimentos que se consumen, de las acciones que se realizan — comer, dormir, etc. —, de la exposición al medio físico, de estados y procesos transitorios — como la menstruación o el embarazo —, de acciones rituales

50. G. FosTER, Tzintzuntzan, p. 131. 51. B. BARBA DE PINA CHAN, « Apuntes», p. 373-391. 52.

J. GALLARDO

Ruiz, Medicina,

p. 88-91.

53. Ibid., p. 115. 54. P. VELASQUEZ GALLARDO, La hechiceria en Charapán, Michoacán, Michoacana de San Nicolás de Hidalgo, 2000, p. 126-136. 55. A. JaciNTO ZAVALA, Mitología, p. 88. 56. G. FosTER, Tzintzuntzan, p. 130-131. 57. B. BARBA DE PINA CHAN, « Apuntes», p. 373-391. 58. G. FosTER, Tzintzuntzan, p. 183.

110

Morelia, Universidad

El hueso y la sangre

— como el bautizo y la extremaunciôn — y de las experiencias emotivas que viva el sujeto en virtud de sus relaciones con sus pares y con la sobrenaturaleza?. Aunque no es muy claro si se trata o no de metáforas introducidas por el uso del español, contamos con algunos datos que asocian a la sangre con la pertenencia a un determinado grupo. En el mito fundacional de la Relación de Michoacán, se dice que, al encontrarse los chichimecas con los tarascos

islefios, dijeron: « Pensábamos que no teníamos parientes, mas todos somos de una sangre y nascimos juncto »*. En la actualidad, se cuenta que, cuando los españoles invadieron a los tarascos, Tangaxoan II dijo « Tenemos que salir al frente;

sabemos

que

nos

van

a matar,

pero

confío

en ustedes;

nuestros

hijos reforzarán nuestra sangre »?'. Lo interesante es que, como en el mito de creación los hombres fueron creados a partir del líquido hemático de Curiti Caheri, se podría decir que todos los hombres son de la misma sangre. En síntesis, la sangre se encuentra ligada tanto a la pervivencia del organismo — en cuestiones como la vitalidad, la respiración y la digestión — como a la personalidad o las funciones intelectuales — la masculinidad, la agresividad, la valentía. Sus cualidades, fuerte o débil, buena o mala, caliente

o fría, condicionan el desarrollo del individuo tanto porque se relacionan con sus cualidades personales como porque le hacen más o menos propenso a provocar o contraer males como el «mal de ojo» o el «aire». Tomando en cuenta dichas circunstancias no resulta sorprendente que, para algunos ritualistas, « el “alma” se puede hallar en la sangre (/urhiri) o en todo el cuerpo desde los pies hasta la cabeza, pues en todo el cuerpo la sangre circula. Es decir, la sangre y el alma son los principios vitales que el corazón se encarga de distribuir por todo el cuerpo». Tomando en cuenta lo anterior, podemos suponer que aquello que se entrega a los dioses en el sacrificio no es sólo la vitalidad de la víctima sino también una parte de carácter y personalidad. Al respecto, cabe mencionar que, según la Relación de Michoacán, se ofrecen la sangre y los corazones de los sacrificados «para que vayan sus ánimas con las ofrendas a la madre Cuerauaperi »9. El hueso y su esencia vital en el intercambio predatorio

Hemos dicho que se solía cremar a los guerreros y gobernantes en sus funerales. Mas, las fuentes documentales antiguas guardan absoluto silencio en lo que respecta al tratamiento dado a los muertos comunes. En el contexto arqueológico, se observa exactamente lo opuesto; los restos quemados son demasiado raros (alrededor de trece cremados contra más de cuatrocientas

inhumaciones) como para poder establecer un patrón y se observa una relativa

59. Ibid., p. 186; E. Morre-FLoRAc, «Santos, humores y tiempo », p. 187-190. 60. J. ALCALÁ, Relación, fol. 69v. 61. CoNsEJO NACIONAL PARA LA CULTURA Y LAS ARTES, Cuentos purépechas, México, Editorial Diana, 1994, p. 109. 62.

J. GALLARDO

63.

F. MiRANDA

Ruiz, Medicina, (éd.), Relación,

p. 85. 1980, p. 104.

111

Roberto Martinez González

abundancia de inhumaciones — preferentemente, sencillas, individuales y en posición flexionada$^. Si, como dijimos, las cenizas representaban principalmente los restos de los ancestros de los señores — es decir, de aquellos con muertes más gloriosas —, los huesos serían advocaciones de los muertos de la gente comün. Entre los fines que podían correr los cuerpos de las víctimas sacrificiales — preferentemente los guerreros enemigos — encontramos una cierta tendencia a su conservación ya sea en manos de sus captores o de la ciudad en general. Se dice que « era por la fiesta de Hunisperaquaro, cuando velaban con los huesos de los cautivos en las casas de los papas»9. Y, aunque se le califica de «loco y mal hombre», no está de más mencionar el caso de Máhiquasi, de quien se comenta que «y tien[e] un atabal de un muslo de hombre y tañe con él y con un brazo tañe hecho trebejo, y con la calavería de un hombre bebe vino »%. Al parecer, algunos de los restos óseos «extra» que acompañan entierros corresponden a este tipo de prácticas, lo mismo que los huesos con cortes perpendiculares tipo omichicahuaztli que se han encontrado en Huandacareo y Tzintzuntzan. No obstante, en algunos casos, es también posible que los segmentos de un cadáver antiguo fueran simplemente removidos de su depósito original para presentarlos como ofrendas a un individuo, edificio o entidad sobrenatural. Puaux pudo notar en Las Milpillas que, algunos de los huesos desarticulados que aparecían en un entierro correspondían a las partes faltantes de otro; como si, en algún momento, se hubiera extraído un hueso antiguo para depositarlo como acompañante de un nuevo difunto”. Aunque, por supuesto, ya no existe el sacrificio humano, vale la pena mencionar que todavía algunos brujos y ritualistas suelen robar y conservar huesos ajenos como amuletos. ...En Charapán, durante el aprendizaje las novatas tienen que ir varias veces a los panteones de noche, tienen que violar un sepulcro y obtener un dedo o unas costillas. Los huesos se usan como amuletos de los cuales se esperan poderes mágicos [...] Con estos mismos huesos de la mano, las mujeres pueden penetrar a una casa o tienda que está herméticamente cerrada, sin que los propietarios se percaten'*,

Hoy en día, en Cuanajo, hay un personaje llamado t 'ipinskata, descrito como un encapuchado que lleva una vela y se dedica a robar gallinas. Este

64.

Véase

L. F. Núñez

ENRÍQUEZ,

R. MARTÍNEZ

GONZÁLEZ,

«Prácticas

funerarias

mexicas

y purépechas: el problema de la confrontación entre datos etnohistóricos y arqueológicos », Ancient Mesoamerica,

65. 66.

en prensa.

E. MIRANDA (éd.), Relación, 1980, p. 207. J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol. 87-87v.

67. O. Puaux,

«Les

pratiques

funéraires

tarasques:

approche

archéologique», Tesis de doctorado, Université de Paris I, París, 1989. 68.

112

P. VELASQUEZ

GALLARDO,

La hechiceria, p. 130.

ethnohistorique

et

El hueso y la sangre

personaje debe portar un fragmento de un cadáver para ser eficaz ; se dice que lleva «una jícara con el dedo pulgar de una persona recién fallecida »*. Al segundo caso pertenecen las cabezas ensartadas en varales, que menciona la Relación de Michoacán, y cuyos análogos arqueológicos pudieran algunos de los grupos de cráneos aislados — en especial los que conservan el maxilar inferior y las ültimas vértebras — localizados en Tzintzuntzan,

Tres

Cerritos,

Huandacareo,

las Milpillas

e Ihuatzio.

Los

restos de los inmolados en los funerales sefioriales eran sepultados a espaldas del templo de Curicaueri”, tal como según Seler fueron encontrados por Lumholtz?.

En lo tocante a otros restos, Beaumont

comenta que, en unas

pinturas que observó, «se ven, igualmente, sus yácatas, que eran unos osarios, donde sepultaban los huesos de los que morían sacrificados y encima formaban unos cerritos de piedras a mano» ?. La idea del osario se encuentra igualmente presente en los diccionarios antiguos; se traducen las palabras vni hatziraquaro por «ossario donde echan los huessos » y vniendo por «carnero donde echan los huesos de los difuntos »”*. De modo que, aunque los datos Son escasos, estos nos hacen suponer que lo más comün era su enterramiento y depósito final en osarios. Efectivamente, en Tzintzuntzan y Huandacareo, se han podido encontrar grandes concentraciones de huesos largos en montículos. En Tres Cerritos, se localizaron entierros de individuos que tenían los brazos cruzados en las espaldas, como si estuvieran atados, y sin manos. En el mismo sitio, se observaron cráneos fracturados por percusión; tal como hubiera sucedido en una ejecución por desnucamiento^. Lo interesante es que el tratamiento dado a los restos de los enemigos capturados resulta más parecido al de los hombres comunes de la comunidad

69.

B. CÁRDENAS

Morelia,

FERNÁNDEZ,

Universidad

Los

Michoacana

cuentos

de

en lengua

San

Nicolás

p'orhé:

de

un punto

Hidalgo,

de

Presses

vista

sociocrítico,

Universitaires

de

Perpignan, 2003, p. 378-380. 70.

F. MiRANDA

(éd.), Relación,

1980, p. 112.

71. Ibid., p. 276. 72. E. SELER, «Los antiguos habitantes de Michuacan », p. 147-233. 73. P. BEAUMONT, Crónica de Michoacán, México, Publicaciones del Archivo General de la Nación, Talleres Gráficos de la Nación, 1932, II p. 26. 74. Diccionario, I p. 139, 533. 75.

D. F. RUBIN

DE LA BoRBOLLA,

« Arqueología tarasca», en 4rta Reunión

de Mesa

Redonda :

El Occidente de México, México, Museo Nacional de Historia, Sociedad Mexicana de Antropología, 1948, p. 29-33; R. CABRERA CASTRO, «Tzintzuntzan, décima temporada de excavaciones», en B. DAHLGREN et al. (coord.), Homenaje a Román Piña Chan, México, Instituto

de Investigaciones Antropológicas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1987, p. 531565; M. CASTRO LEAL, Tzintzintzan. Capital de los tarascos, Morelia, Gobierno del Estado de Michoacán, 1986; M. T. CABRERO, La muerte en el Occidente del México Prehispánico, México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1995, p. 51-56; A. Macías Govria, «Los entierros de un centro ceremonial tarasco », en Estudios de antropología biológica. IV Coloquio de Antropología Física Juan Comas (1986), p. 531-559; Ibid., Huandacareo : lugar de juicios, tribunal, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1990; ibid., « Tres cerritos en el desarrollo social prehispánico de Cuitzeo», Tesis de doctorado en antropología, Universidad Nacional Autónoma de México, Facultad de Filosofía y Letras, México, 1997; O. Puaux, «Les pratiques ».

113

Roberto Martínez González

que al de los propios guerreros muertos en combate ; tanto en los datos etnohistóricos como en los contextos arqueológicos se mantiene la idea de que estos deben ser sepultados en el propio territorio como si se tratara de almacenar algo. Ese algo se manifiesta como un remolino en un relato contemporáneo: se cuenta la historia de un pastor que siempre llevaba cargando los huesos de su esposa muerta. A su patrón le da curiosidad y, un día que el pastor estaba ausente, decide abrir el bulto. « Entonces sucedió lo insólito. Tan pronto como sacó el bulto, empezó a bailar involuntariamente. [...] De repente volteó, vio a

los borregos que también estaban bailando en medio de un remolino de polvo y el señor no sabía que hacer ». Al describirse el funeral de un guerrero, se nos dice que sus parientes se reunían en su casa y se decían: «¡ Murió en la guerra, hermosa muerte es y de valentía es! ¿Cómo nos dijo ?, ¿ Cómo otra vez vendrá el pobre ?»””. Como si se presupusiera que, de alguna manera, al destruir sus restos a través de la cremación, se habría de asegurar la incorporación del guerrero a una nueva vida. Hemos dicho que, al menos en las fuentes documentales, aquello de lo que se alimentan los dioses es del corazón y la sangre de los sacrificados; en todo caso, no contamos con indicio alguno de que alguna entidad sobrenatural hubiera podido alimentarse de huesos. En algunos casos, parece factible que el almacenamiento de los segmentos óseos de los difuntos de la comunidad se encuentre ligado a la idea de que, a partir de ellos, es posible generar vida de nuevo. Esto se hace visible en el relato sobre un personaje cuyos restos producen vida bajo la forma de un ciervo. ...El dios llamado Cupanzieeri jugó con otro dios a la pelota, llamado Achuri Hiripe y ganóle y sacrificóle en un pueblo llamado Xacona y dejó su mujer preñada de Sirata Tapezi, su hijo, y nació y tornáronle a criar en un pueblo, como que se lo habían hallado. Y después de mancebo fuese a tirar aves con arco y topó con una iguana y díjole: — No me fleches y diréte una cosa: El padre que tienes ahora no es tu padre, porque tu padre fue a la casa del dios Achu Hirepe, a conquistar, y allí le sacrificaron. Como oyó aquello, fuese allá a probarse con el que había muerto a su padre. Y vencióle y sacrificó al que había muerto a su padre y cavó donde estaba enterrado y sacóle y echóselo a cuestas y veníase con él. En el camino estaban en el herbazal una manada de codornices, y levantáronse todas en vuelo. Y dejó allí su padre por tirar a las codornices, y tornóse venado el padre^.

Tal como sucede en el rito, aquí el cuerpo del adversario es sepultado en el proprio territorio. El guerrero —puesto que se dice que fue a conquistar- se

76.

L. MONDRAGÓN,

J. TELLO,

A. VALDEZ,

Relatos purépechas,

p'urhépecha

México, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, 1995, p. 87. 77.

FE. MIRANDA (éd.), Relación, 1980, p. 250.

78.

F. MIRANDA

114

(éd.), Relación,

1980, p. 301.

uandantskuecha,

El hueso y la sangre

torna víctima sacrificial y la víctima se convierte en venado o, lo que es lo mismo, en presa de caza”. E] hecho de que el padre del protagonista acabe por transformarse en ciervo no es casual, pues, de acuerdo con Barba de Pifia Chan, «la sangre de

venado alivia, reconforta la fatiga, quita palpitaciones, punzadas y dolor de corazón. Es la única que usa el tarasco como equivalente a la del hombre »**. En Tzintzuntzan, en la fiesta de Corpus, las personas «se acercan a probar la “sangre de venado” (alcohol con coca), que es indispensable para ese momento »$!, En el relato fundacional uacüsecha — desde su inmigración a la Cuenca de Pátzcuaro hasta la conquista de Michoacán -, resulta claro que el estado chichimeca implica una serie de comportamientos que anteceden a los del tarasco del momento de la llegada de los españoles ; el hombre real es, en este sentido, el que se produce a partir de la alianza con los lugarefios?. Antes de la unión, los chichimecas sólo ofrendan venados, después del encuentro

aparece el sacrificio humano*. Durante el proceso migratorio, se cubre a la deidad patrona con pieles de ciervo, mientras que, después de asentado el reino, se le envuelve con mantas?*. Lo interesante es que, al relatarse el primer sacrificio chichimeca, la víctima, el sacerdote Nacá, se ve envuelta en

una supuesta cacería de venados en la que la presa termina por ser él. ...La gente que estaba en la celada empenzáronse a sacrificar las orejas y ruciaban las yerbas con la sangre, porque pensase Nacá que fuese de algün venado que habían flechado; y empenzáronla a echar aquella sangre en las pisadas que habían hecho, falsas, de venado. Y salieron al camino. Unos y otros andaban en torno por el camino, diciendo: — Por aquí, mas por aquí fué. [...] Díjoles Nacá: — hijos, hoy topé con vosotros, ; no me daríades un pedazo para hacer la salva a los dioses? Respondieron los chichimecas : — no has de hacer la salva, mas llevarás un cuarto dél al hombro. [...] Y despidién-

dose Nacá, díjoles: — quedaos en buen hora, hijos, que yo me voy. Y ellos le dijeron: — ve en buen hora, hermano. Y apartóse un poco dellos. Entonces dijo Haramen, que era valiente hombre, a su hermano Cétaco: — hermano,

mira que se va, ¿ qué haremos? Y sacó una flecha de su carcaj y hincósela en las espaldas, y fuese derecho a él y echole los brazos por el cuello y asieron

79.

Tal como lo señala Faugére, para los michoacanos, el ciervo es el animal emblemático de la

actividad cinegética; aun cuando en los contextos arqueológicos sus restos no representen más que un cinco por ciento. B. FAUGÈRE, «Le cerf chez les anciens P'urhépecha du Michoacán (Mexique): guerre, chasse et sacrifice», Journal de la Société des Américanistes, 94: 2 (2008), p. 109-142. 80.

B. BARBA

DE PINA CHAN,

« Apuntes », p. 373-391.

81. S. SALDÍVAR PÉREZ, « Tzintzuntzan : tradiciones y leyendas de mi pueblo», en A. CASTILLEJA GONZÁLEZ,

V. VALENCIA

VALERA

(coord.),

El Lago

de

Pátzcuaro:

su gente,

su

historia

y sus

fiestas, 1993, Morelia, Instituto Nacional de Antropología e Historia, p. 155-179. 82. R. MARTÍNEZ GONZÁLEZ, «La dimensión mítica de la peregrinación tarasca », Journal de la Société des Américanistes, en prensa.

83.

Veáse F. MIRANDA (éd.), Relación, 1980, p. 22, 38, 59-60, 75, 110.

84.

J. ALCALÁ, Relación, 2008,

fol.

11v.

115

Roberto Martinez González

todos dél. Y dijoles Nacá: — hermanos, paso, paso que me hiriréis, que cierto sois chichichimecas*. Como bien señala Olivier (2008, comunicación personal), si el nombre de

Nacá estuviera en náhuatl tendría el significado de «carne ». Así, el venado aparecería como una suerte de alteridad genérica que comprende tanto a los adversarios y enemigos como al ancestro muerto. Es en este sentido que la guerra por la obtención de víctimas sacrificiales es descrita en términos de cacería: una vez alzado el nuevo Cazonci, «decía

que quería ir de caza. [...] E íbase derecho a una frontera que estaba cerca, de sus enemigos, Cuinacho, y hacía allí una entrada de presto y tomaba cien cautivos o ciento cincuenta »*. De hecho, cuando vemos las descripciones de los atuendos de guerreros tarascos, notamos la continua presencia de ornamentos de piel de jaguar y de venado; las piezas de cérvido deberían sefialar su condición de presas potenciales, en tanto que las de felino estarían subrayando su rol de cazadores*”. Esto último se apoya en que, por lo común, son el carcaj y las muñequeras quienes están hechas en cuero de predador — es decir, justo aquello de dónde se extraen las flechas y con lo que se dispara — y las piernas — una de las partes más apreciadas para el consumo humano — las que portarían uñas de venado. El otro es el que es «comida » — ya sea humano o animal —, pero todos estamos en la posibilidad de convertirnos en alimento de alguien más. Es probable que sea por esta razón que comerse a alguien del mismo grupo resulta tan repugnante, pues ello significaría pasar a formar parte del otro (ver, por ejemplo, la afrenta que significó para Zurumban el haberle hecho comer la carne de su sacerdote Nacá)*8.

La equivalencia entre la cacería y la guerra, y el sacrificado y el venado ha sido ampliamente tratada por Graulich y Olivier para el caso general de Mesoamérica”. Entre otras cosas, Olivier subraya las semejanzas entre los ritos mortuorios de los guerreros enemigos y el tratamiento dado a los restos de los venados cazados. Según Dehouve, los tlapanecos de Guerrero dan un tratamiento semejante al funerario a los restos de los venados que cazan; separan la carne con cuidado de no romper los huesos y depositan estos últimos en alguna cavidad del cerro para devolverlos al Señor de los

85. Ibid., fol. 82v-83v. 86. EF. MIRANDA (éd.), Relación, 1980, p. 259, 284-285. 87. J. ALCALÁ, Relación, 2008, fol. 16, 16v, 30v, 31v, 33, 89v. 88. Ibid., fol. 84v. 89. M. GRAULICH, «Chasse et sacrifice humain chez les Aztèques», Bulletin des séances de l'Académie

royale

des

sciences

d'outre-mer,

43-4

(1997),

p. 433-446;

G. OLIVIER,

«Le

cerf et

le roi: modèle sacrificiel et rite d'intronisation dans l'ancien Mexique», Journal de la Société des Américanistes, 94-] (2008), p. 191-230; ibid., «El simbolismo sacrificial de los Mimixcoa: cacería, guerra, sacrificio e identidad entre los mexicas», en L. López Luján, G. OLIVIER (éd.), Nuevas perspectivas sobre el sacrificio humano en Mesoamérica, México, Instituto Nacional

de Antropología

e Historia, Instituto de Investigaciones Históricas,

Autónoma de México, 2010, p. 453-482.

116

Universidad

Nacional

El hueso y la sangre

animales y esperar a que se regeneren”. En nuestro caso, es preciso destacar que las mismas restricciones rituales que, en otros pueblos, se imponen a la cacería, aquí competen a la actividad bélica; este es el caso de la abstinencia sexual previa a la actividad cinegética entre los nahuas y los huicholes?!, y una equivalente prohibición en el caso de la guerra tarasca: «¡ Mirad que no os halláis como de burla! Si no cautiváredes o matáredes los enemigos no será sino por el olvido que tuvistes con las mujeres en vuestros pueblos, por los pecados que hicistes con ellas »”. En el relato de Cupanzieeri, vemos que el hueso sería la parte de la vida que no se extingue y las diferencias entre las especies servirían para destacar los roles de cazador-guerrero y presa-víctima sacrificial. Lo singular aquí es que, a diferencia de lo que sucede con la sangre, esta fuerza vital almacenada en los restos óseos no parece estar dotada de personalidad o especificidad. Acorde con esto, los purépecha de la sierra consideran que, «durante tres años hay en la tumba “algo de la esencia del muerto” y por ello le llevan ahí sus ofrendas. Pasado este tiempo, creen que el espíritu del difunto ha dejado de tener personalidad propia »?*. En resumen, si los huesos son pensados como poseedores de un cierto poder generativo, tendríamos que el almacenamiento de los restos de los enemigos implicaría la apropiación predatoria de su fuerza vital. Mientras que el hecho de quemar los cuerpos de los propios guerreros muertos, o sus representaciones, podría, muy probablemente, tener la intención de impedir la perdida de energía vital por parte de la comunidad a través su consumo y almacenamiento entre los rivales. La guerra alimenta a los dioses pero también permite el intercambio de energía fecundante entre los dos grupos. Consideraciones finales

A partir de lo expuesto, podemos ver que, aunque el hueso-ceniza y la sangre participan igualmente en la constitución del ser humano, sus propiedades aparecen como diametralmente opuestas. La sangre es líquida y caliente, el hueso es sólido y, por lo regular, frío. La sangre viene de los dioses y es alimento de los mismos, el hueso y la ceniza derivan de los hombres del pasado y no parecen ser alimento de nadie. La sangre del otro es nociva para el ser humano, el hueso del enemigo es un botín preciado que, al menos, algunos hombres conservan incluso después de la muerte (en las sepulturas). La sangre se vincula con la salud y las cualidades personales pero se modifica por las acciones humanas en sociedad, la influencia del medio

90.

D. DEHOUVE,

El venado,

el maíz y el sacrificio ("Cuadernos de Etnología” 4), México,

Instituto Nacional de Antropología e Historia, 2008. 91.

E. LAzos,

L. PARÉ,

Miradas

indígenas

sobre

una

naturaleza

entristecida.

Percepciones

del deterioro ambiental entre nahuas del sur de Veracruz, México, Instituto de Investigaciones Sociales, Universidad Nacional Autónoma de México, Plaza y Valdés, 2000, p. 65; C. LUMHOLTz, México desconocido, México, Instituto Nacional Indigenista, 1981, vol. II, p. 40. 92.

F. MIRANDA

(éd.), , Relación,

93. D. SIERRA CARRILLO, (2002), p. 62-69.

«La

1980, p. 245.

muerte

entre

los tarascos»,

Arqueología

mexicana,

10-58

117

Roberto Martínez González

y la alimentación; en cambio, el hueso carece de personalidad y, segün los mitos, su cualidad vital es tan genérica que puede ser empleado para producir vida de una especie diferente. La sangre se comercia con las deidades bajo la lógica del don y contradon, en tanto que el hueso se intercambia entre los hombres bajo un sistema predatorio. La sangre es un flujo continuo, el hueso representa lo permanente. Mientras que la carne, lo humano por definición, parece significar el estado transitorio del ser en su situación presente. Todo esto nos muestra que, para los purépecha el cuerpo no es sólo cuerpo, sino un sitio en que se construye la personalidad individual a través de las interacciones con el medio natural, social y sobrenatural. En este sentido, la

muerte supone la destrucción del sujeto, en cuanto a que se extingue la unidad del ser, pero se conserva la posibilidad de vida; la vida y la personalidad son pensadas como disociadas mas dicha distinción no se reduce a la separación entre cuerpo y alma sino a la diferencia entre componentes corpóreos de naturaleza variable.

118

RELATOS, RITOS Y EMOCIONES

ENTRE

LOS NAHUAT

SIERRA NORTE DE PUEBLA,

DE LA

MEXICO

James M. TAGGART Franklin and Marshall College

Las investigaciones llevadas a cabo por el Profesor Michel Graulich! muestran cómo los nahuas de la época antigua actuaron, en sus ritos, los episodios de los mitos para movilizarse con fines económicos, sociales, políticos y religiosos. En este trabajo, se trata el mismo tema con respecto a los nahuat que hoy en día viven en la Sierra Norte de Puebla. El tema de la vinculación entre los mitos y los ritos en las culturas indígenas de México hoy en día es problemático debido a los cambios tan rápidos en las épocas recientes. En un trabajo cuidadosamente detallado, Galinier? descartó el valor de los mitos para interpretar la significación de los ritos contemporáneos de los Otomí porque unas narrativas cosmográficas han desaparecido y otras solamente son conservadas por especialistas y ancianos que ya no tienen la misma autoridad ahora que tenían en las épocas anteriores. Galinier ha concluido con razón que la significación de los ritos de hoy en día es preconsciente o subconsciente porque los practicantes no pueden o no están acostumbrados a ofrecer una explicación verbal al etnógrafo que viene de afuera de la cultura. En este trabajo se presenta una mirada diferente y se ofrecen ejemplos de como los mitos (relatos) y los ritos son estrechamente vinculados entre los

Nahuat de la sierra norte de Puebla. No cabe duda que los relatos nahuat han cambiado mucho, que unos son conocidos solamente por los ancianos, y que à veces no tienen mucho que ver con los ritos que yo había observado durante varias épocas de trabajo de campo en Huitzilan de Serdán entre 1968 y 2008. Sin embargo, otros relatos son muy vinculados con ritos y son muy ütiles para comprender porque los nahuat gastan tantos recursos en su vida ceremonial. Los relatos que tienen una relación muy estrecha con los ritos forman parte de la plática sobre las emociones que toma lugar, más que nada, en el domicilio entre miembros de la misma familia.

1. M. GRAuLICH, Myths of Ancient Mexico, Norman, University of Oklahoma Press, 1997; Ritos aztecas: Las fiestas de las veintenas, México, Instituto Nacional Indigenista, 1999. 2.

J. GALINIER,

The

World

Below:

Body

and

Cosmos

in

Otomí

Indian

Ritual,

Boulder,

University Press of Colorado, 2004, p. 4, 234, 235.

119

James M. Taggart

Los narradores cuyos relatos que son presentados aqui son de una familia que he conocido desde 1968, cuando comencé mi trabajo de campo en Huitzilan. Un miembro de esta familia me enseñó su idioma y me ha ayudado de manera continua en muchas tareas durante más de cuarenta años. Su familia es muy extensa y consiste en varias casas en la vecindad de Calyecapan, que en nahuat quiere decir «lugar de la última casa del pueblo » ; la llaman así porque está ubicada en la salida norte del pueblo. En las conversaciones grabadas entre 2005 y 2008, los nahuat, tanto hombres como mujeres, hablaron sobre las cargas emocionales de las palabras que utilizan para designar los sentimientos. Dos palabras les llamaron más la atención que otras:

ellas eran la envidia (nexicoliz) y el amor (tazohtaliz). Los

narradores explicaron las significaciones de estas y otras palabras al narrar sus experiencias personales. Mi tesis en este trabajo es que la plática sobre las emociones, que incluye recontar relatos, explica desde el punto de vista de los nahuat como ellos intentan de construir por los ritos los sentimientos de acuerdo a las relaciones de trabajo y las formas de comprender el mundo, tanto visible como invisible. Es posible que los ritos de los nahuas de la época antigua tenían una función semejante pero no se sabe por seguro porque los archivos históricos contienen muy poca información sobre como los nahuas manejaban su vida emocional. Para llenar este hueco se puede aprovechar de la etnografía de los nahuas que todavía conservan aspectos de su idioma y su cultura original. Por supuesto que la cultura de los nahuas contemporáneos no es la misma que la de las elites que actuaron los episodios de los mitos en Tenochtitlán. En opinión del Profesor Graulich, las elites mantenían un calendario mediante el cual

ordenaron los ritos que era diferente del de los macehualmeh o gente comün?. Sin embargo, se supone que los ritos y los mitos de las elites originaron de la cultura de los macehualmeh que fue reproducida dentro de la familia e inculcada en el cuerpo de cada persona. No cabe duda de que tanto la cultura de los macehualmeh como los conceptos sobre las emociones actuales han sido influenciados por los frailes, los sacerdotes, los hablantes de español, la escuela y la cultura popular. Por otro lado, se supone aquí que los nahuat de la Sierra norte, tanto como los de otras partes de México y durante épocas anteriores, han interpretado la cultura que viene de afuera segün sus propios modos de comprender el mundo. Durante el siglo xvi, por ejemplo, los nahuas, al trabajar bajo la mirada de los frailes, cambiaron el sentido de la palabra amor o tlazohtaliz para que estuviese apegada a su cultura cuando tradujeron un drama del español al nahuatl^. En la época contemporánea, los nahuat? de Huitzilan también han

3.

M. GRAULICH, Ritos.

4.

L. BURKHART,

Holy

Wednesday:

a

Nahuatl

Drama

from

Early

Colonial

Mexico,

Pennsylvania, University of Pennsylvania Press, 1996. 5. El nahuat que se habla en Huitzilan es conocido como el T dialecto de Zacapoaxtla que ha perdido el TL pero en otros sentidos es muy semejante al nahuatl. F. KARTTUNEN, An Analytical Dictionary of Nahuatl, Austin, University of Texas Press, 1983, p. xi.

120

Relatos, ritos y emociones entre los nahuat de la Sierra Norte de Puebla, Mexico

traducido muchos cuentos de origen español y los narran a su manera para que se encuentren apegados a su cultura, que es muy diferente de la de Españaf. La teoría nahuat de las emociones

A pesar de sus orígenes diversos, muchos relatos de hoy en día forman parte de la plática sobre las emociones que muestra una teoría de los sentimientos segün cual los nahuat invierten tantos recursos en sus ritos o «costumbres ». Voy a comenzar con los conceptos más básicos de la teoría, que me fueron explicados por varios nahuat y que son importantes para comprender la vinculación entre los relatos y los ritos en la cultura contemporánea de Huitzilan. De todas las emociones mencionadas por los nahuat, el amor (tazohtaliz) y la envidia (nexicoliz) se destacan más que otras y son los

enfoques de las ceremonias más importantes del pueblo. Las emociones y el cuerpo

Tanto los nahuas de la antigüedad como los narradores de Huitzilan dijeron que ellos sentían las emociones en varios centros del cuerpo". Muchas emociones comienzan en el corazón y luego se extienden «como la maza cuando una mujer hace tortillas»? hasta alcanzar el estómago y las tripas. Por ejemplo, se sienten el amor (tazohtaliz) y la envidia (nexicoliz) primero en el corazón (yolloh) y luego en el estómago (ipox). Los celos (chahuatiliz) siguen

otra ruta porque comienzan en el estómago y van al corazón debido a que son producto del deseo (tanequiliz).

Los nahuat distinguen entre la envida y los celos (chahuatiliz) al decir que la envidia es más mala que los celos. La envidia es una variante del enojo (cualayot) mientras que los celos vienen del deseo que es una clase de amor. Por pertenecer al deseo, los celos comienzan en el estómago y se extienden al corazón, una ruta que es inversa a la de la envidia. Otras emociones como el duelo (rayolcol) comienzan en la cabeza y se extienden por todo al cuerpo pasando primero al corazón, luego al estómago y finalmente a los intestinos. Así es porque uno percibe en la cabeza una tragedia y luego siente los efectos del duelo en las partes del cuerpo arriba mencionadas más o menos en el orden indicado. Se puede ver que la clasificación de las emociones de manera diferente depende del informante. Una pauta presente en la plática de muchos narradores es que uno siente las emociones como grados de calor o de frío. Por ejemplo, el miedo (mahuiliz) es una emoción que enfría el corazón; en tanto que uno siente en el corazón la fortaleza, o la firmeza o el esfuerzo y la animosidad como calor. El enojo, por otro lado, curiosamente no se siente en el corazón ni como frío ni como calor.

6.

J. TAGGART,

The Bear and his Sons: Masculinity in Spanish and Mexican

Folktales, Austin,

University of Texas Press, 1997. 7. A. LÓPEZ AUSTIN, The Human Body and Ideology: Concepts of the Ancient Nahuas, Salt Lake City, University of Utah Press, 1988, p. 181, 190, 193-194. 8. F. KARTTUNEN, Án Analytical, p. 135.

121

James M. Taggart

Las emociones y los sabores

Otra pauta, tal vez más importante, es el hecho de que las emociones tienen sabores. Muchos nahuat asociaban el amor con el dulce. Por ejemplo, una mujer explicó que sabía que su madre la quería diciendo: «Pues nos quería porque nos cuidaba. Cuando tenía algo me convidaba con una poquita de panela, cuando entonces ella se la comía» (Pos techtazohtaya porque techcuidaro. Como tehza quipiya como nechhuanti tzictzin panela, cuatca (ihcuac catca) panela quicuiya). E] dulce, como el sabor del amor, se aprecia

también en el mito del origen del pulque. Segün una variante del mito, el pulque se originó de una mujer que había dado a luz a un nifio que después murió. La mujer se quedó con leche en los pechos sin tener a nadie para mamar. Le dolían los senos y ella y su marido se fueron a ver al cura para pedirle consejo. El cura le dijo que enterrara la leche materna en un hoyo del cual creció el mezcal con cuya miel se elabora el pulque. La bebida del pulque tiene un sabor muy dulce y los que lo toman no se pelean sino que se llevan bien a través del amor. Por otro lado, se experimenta el conjunto de las emociones del sufrimiento (tequipachol), el duelo (tayolcol), y el enojo (cualayot) y la envidia (nexicol) como el sabor amargo (chichic) que viene del hígado (eltapach). Un nahuat

explicó la vinculación entre el sufrimiento y el sabor amargo de la siguiente manera. ...En nuestro hígado es donde tenemos la cosa pequeña que se llama amargura. Se la encuentra allí. Si una vez tenemos el duelo, bastante sufrimiento,

es allí donde tenemos aquella cosa amarga. Uno comienza a vomitarla pero es puro verde... Porque el duelo sube en lo que llamamos la amargura. Allí se encuentra el duelo o el enojo. (/n toeltapach ompa ye ticpiyah non tzictzin, non, quenin quiliya, non chichic. Ompa ahci non. Como ceppa telcenca ticpiyah non tayolcol, telcecna tequipacholiz, ompa ticpiyah nohon chichic. Pehua mihzota, pero nochi quiltic ya... Porque tayolcol... te ehcoti pero tech

in non tiquiliah te chichica. Ompa ahci non tayolcol o cualayot).

Las asociaciones entre los sabores y las emociones tienen su origen en la memoria de la niñez. En la generación de muchos de los narradores la relación entre el dulce y el amor surgió cuando el nifio estaba mamando la dulce leche de la madre y gozando del amor maternal. La asociación entre la amargura y el sufrimiento, el enojo, el duelo y la envidia tal vez tiene su origen en el momento en que el niño fue destetado por la madre y ella untaba sus pezones con «la yerba amarga» o chichicxihuit. Para la gran mayoría de los niños, el acto de ser destetado tiene lugar durante el sexto mes del embarazo siguiente porque, segün los nahuat, la leche ahora es para el hijo que está en el vientre materno. Entonces la primera experiencia con la envidia ocurre después de que el niño o niña sean destetados y cuando sigue deseando la dulce leche de la madre. El blanco de la envidia es el hermano o la hermana menor que está próximo a nacer.

122

Relatos, ritos y emociones entre los nahuat de la Sierra Norte de Puebla, Mexico

La memoria emocional

Los nahuat creen que la memoria emocional es la parte de la persona que aguanta más que el cuerpo, y por lo tanto es como el concepto de alma de la religión cristiana. La palabra nahuat para la memoria es talnamiquiliz?, y los informantes dijeron que es como el aire (ehecat) y que continua activa después de que el cuerpo se deshace. La memoria consiste en muchas cosas que incluyen los sentimientos o las emociones que uno sentía en el cuerpo antes de que se le deshiciera. Por ejemplo, si uno fue envidioso durante la vida, entonces él o ella sigue siéndolo después de la muerte, y lo mismo ocurre si uno fue cariñoso. Por lo tanto, uno tiene que tratar a ciertos muertos con cuidado porque pueden ser peligrosos si guardan envidia en su memoria. Los difuntos que fueron envidiosos durante la vida en ocasiones vienen por los vivos y se los llevan al mundo de los muertos con ellos, porque desean tener aquello de lo que gozan los vivos durante su vida. Lo que gozan los vivos es el amor, sobre todo el amor maternal.

Los vivos que son llevados por los difuntos envidiosos mueren de lo que se llama la enfermedad de envidia o nexicolcocoliz. En las historias recopiladas sobre casos de nexicolcocoliz,

las víctimas normalmente

son niños.

Una historia típica narrada por un hombre trata de su hermano menor que murió cuando el narrador tenía apenas diez años. Hablando de la muerte de su hermano muchos años después, el narrador dijo: ...recordamos cuando tuve a mi hermano. Él era un chico pequeño. Y le agarró la disípela'? en su cabeza. Y trataba de curarle. Pero no le dio y no se aliviaba. Le había agarrado la enfermedad de la envidia. Pero durante Todos Santos,

pues estaba a la mera hora, como decimos, y empeoraba. Estaban tocando las campanas por los muertos. No me recuerdo si era entonces. Tal vez sí lo era. Yo también oí a mi madre cuando dijo: «Me lo llevan los muertos. » C.. tiquelnamiquih ihcuac nicpiya ce nocniuh catca. Non oquichpil conet. Huan quicui tezipela tech itzonteco. Huan quipahtitoya. Pero ahmo nin mac-

toc ahmo moyolcoli. Ma ya quicuic nexicolcocoliz. Pero tech Todos Santos, huei hora yetoya, pos yetoya, ma tiquihtocah, ma tanautoya. No nez mero tatzilinitequeh ca nin animameh.

Ahmo niquelnamic cox ihcuac, nez ihcuac

ye yetoya ya. No nicactoc quilito nonan.

quitquilia,

Quilia,

'Neh,' quilia,

nechhuiaqueh,'

animameh.")

Después de narrar esta historia personal, el hombre nahuat añadió que «donde hay envidia, hay amor. » Es decir, que los muertos tenían envidia y su blanco era el hermano menor del narrador porque él era el ultimogénito o taxocoyot, el consentido, y por ser el ültimo niño de la familia había gozado más recientemente de la dulce leche maternal. El narrador negaba que él sintiera envidia por su hermano menor que murió de nexicolcocoliz a pesar de que el narrador era el penültimo nacido en su familia. Por lo tanto, él fue

9.

F. KARTTUNEN, An Analytical, p. 275.

10. Disípela se refiere a erisipelas (erysipelas), una enfermedad las síntomas de cual son la fiebre y la acumulación de edema, un líquido de tipo suero abajo de la piel.

123

James M. Taggart

destetado por su madre cuando ella untaba los pezones con la yerba amarga durante el sexto mes de su próximo embarazo del hermano menor que, años después, murió de nexicolcocoliz. Él negaba sentir envidia por su hermano menor porque el hecho de ser reconocido como envidioso es muy malo en la cultura nahuat. El tequiuh Según muchos narradores uno es envidioso por su tequiuh, un concepto que tiene muchas acepciones diferentes. Según Karttunen!!, el teqiuh o tequiyoh se refiere a «cosa que tiene o da trabajo, trabajoso, difícil. » Otra palabra parecida es tequiyo, que se refiere al «trabajo de imposición de tributarios, ejercicio de trabajo y el mismo trabajo, trabajo, obra, ocupación. » Los nahuat de Huitzilan dan otras significaciones a la palabra tequiuh, una de cuales se refiere a la naturaleza o el destino de uno. Por ejemplo, se dice que uno nace con el destino de ser envidioso y que, a pesar de que haga el esfuerzo de disfrazarla, la envidia se revela en la conducta cotidiana.

Por ejemplo, el mismo narrador que contó la historia de su hermano menor que murió de nexicolcocoliz también dijo saber que su hermano mayor tenía el tequiuh de envidioso por la razón siguiente. Un sobrino contó al narrador que su padre, el hermano mayor del narrador, le había dicho que no había lugar suficiente en su milpa para sembrar con él. E] narrador lo tomó como muestra de que su hermano mayor era envidioso porque quería toda la cosecha para é] y no quería compartirla con su hijo. Para el narrador, constituye una de muchas otras pruebas semejantes que muestran que su hermano mayor tiene el tequiuh de ser envidioso a pesar de que trataba de disfrazarlo. E] tequiuh y la memoria se encuentran vinculados porque uno nace con el tequiuh que formará parte de la memoria de la persona después de su muerte. Por ejemplo, el hermano mayor referido va a llevar su envidia al mundo de los muertos cuando haya fallecido. Y, por lo tanto, es posible que vaya a amenazar a sus parientes vivos principalmente en Todos Santos cuando venga por los niños que se enfermarán de nexicolcocoliz. La envidia no se le quita a uno con facilidad, pero sí puede curarse al cambiar el corazón (moyolpata) o enderezar el corazón tuerto (quiyolmelahua) del envidioso. La

curación normalmente que no sea envidioso. corazón pero se siente es el órgano que tiene

requiere recibir muchos consejos por parte de alguien Como se mencionó anteriormente, la envidia viene del en el estómago. Por tener su origen en el corazón, éste que ser enderezado por el curandero.

Los relatos y los ritos

Los nahuat actuales de Huitzilan cuentan relatos y practican ritos para enderezar el corazón de la colectividad, reconociendo que la envidia es más fuerte que el amor. En este sentido, los nahuat son semejantes a los indígenas de la Amazona que también se esfuerzan para promover el amor y reducir el

11.

124

E. KARTTUNEN, An Analytical, p. 275.

Relatos, ritos y emociones entre los nahuat de la Sierra Norte de Puebla, Mexico

efecto del enojo". Los paralelismos entre los nahuat y los indígenas amazónicos son muy estrechos si uno toma en cuenta que, en la clasificación nahuat, el enojo y la envidia son dos variantes de la misma emoción. Sin embargo, los nahuat cuentan relatos y practican ritos a su manera y de acuerdo con los requisitos de su estructura social. En el primer lugar, las narraciones y rituales tienen el propósito de promover el amor en el seno de la familia cuya estructura tiene mucho que ver con la organización del trabajo. Lo ideal, algo que solamente a veces se puede ver en la práctica, es vivir en familias extensas donde los hombres trabajan como uno (ce coza tequitih) para llenar el granero con el maíz que las mujeres convierten en comidas muy sabrosas. En la Sierra de Puebla, así como en muchos otros lugares", los nahuat dicen que quienes trabajan juntos se quieren y que los que no trabajan juntos ya no se quieren. Un hombre nahuat que vive en Huitzilan lo explicó en la siguiente manera: « Uno quiere al otro cuando los dos trabajan juntos porque dos personas pueden hacer lo que uno no puede hacer trabajando solo. » (« Como yehha tequiti quittac cual tacat. Cual centequitih, no quitazohta, porque yeh quichiutoc den nen chihuazquia

ahmo nihueli »). Es decir, que promover el amor es otra manera de preservar las relaciones familiares consistentes en trabajar como uno. Las dos maneras comunes de formar la familia extensa es por patrilocalidad y matrilocalidad. En la mayoría de los casos (el 80 por ciento), los nahuat de Huitzilan practican la patrilocalidad, que quiere decir que los esposos comienzan su vida en pareja viviendo y trabajando como uno en la familia del marido.

En una reducido nümero

(20 por ciento de casos), las

parejas viven en matrilocalidad con la familia de la esposa. Existe una amplia variación porque las parejas cambian mucho de domicilio, mudándose de una casa a otra y separándose para vivir después en su propia residencia. Y, desde el punto de vista de los nahuat de Huitzilan, una razón esgrimida para explicar tanta mudanza y separación es la envidia entre los miembros de la familia. Por lo tanto, los relatos y los ritos tienen la función de reconocer las formas que puede adoptar la envidia, el peligro que ella representa, y ofrecer las maneras de controlarla y promover el amor. Los narradores de los relatos plantean el problema de la envidia y pintan un cuadro muy detallado sobre las formas en que aquélla puede surgir en las relaciones que se establecen en el seno de la familia.

12. J. OvERING, A. PAssAs, «Introduction: conviviality and the opening up of amazonian anthropology », en J. OvERING, A. Passas (dir), The Anthropology of Love and Anger: Aesthetics of Conviviality in Native Amazonia, Londres, Routledge, 2000, p. 1-30.

the

13. C. Goop, « “Trabajando como uno”: Conceptos nahuas del grupo doméstico y la persona», en D. RogicHAux (dir), Familia y parentesco en México y Mesoamérica: antropológicas, México, Universidad Iberoamericana, 2005, p. 275-294.

Unas

miradas

125

James M. Taggart

Relatos que son lecciones (neixcuitilmeh)

Las narraciones que circulan en la tradición oral de los nahuat de Huitzilan son diferentes de los mitos que fueron recopilados bajo la dirección de los frailes durante el siglo xvi, y que han sido interpretados por el Profesor Graulich en su trabajo sobre los nahuas de la antigiiedad". Además, la palabra «mito» alberga una carga que no encaja muy bien con los relatos que circulan en la tradición oral de los nahuat de Huitzilan. En la clasificación folklórica de narraciones orales, el mito aborda hechos verídicos que tienen lugar en un pasado remoto, en un mundo diferente del nuestro y posee una actitud sagrada e implica a personajes que no son humanos". El mito es diferente de la leyenda y del cuento popular o «folktale» porque los hechos de la leyenda acontecen en el pasado reciente y en el mundo de hoy con personajes que son seres humanos, mientras que los del cuento popular no son verídicos y pueden suceder en cualquier lugar y cualquier época con personajes de varias clases. E] problema es que en las narraciones que circulan en la tradición oral de los nahuat mezclan las características que definen las clases de relatos clasificados por los folkloristas. Desde el punto de vista de los nahuat, todos son lecciones o neixcuitilmeh con las que «comprenden su mundo »!* tanto visible como invisible. Todos son verídicos, pero la diferencia clave es que unos tratan de personajes conocidos personalmente y otros no. Desde e] punto de vista externo a la cultura de los nahuat, unos son variantes de cuentos populares que circulan en la tradición oral de España hoy en día y que han sido traducidos y adaptados por los nahuat para que estén apegados a su cultura que es muy diferente de la española. Otros son testimonios o historias personales que incluyen sueños a través de los cuales un hombre o una mujer puede comprender el mundo invisible. Por lo tanto, sería más exacto introducir la palabra « lección» o neixcuitil en lugar de la de mito, que posee una carga conceptual externa a la cultura nahuat. Lecciones masculinas sobre la envidia entre los hombres

Un ejemplo de una lección o neixcuitil que trata la envidia entre hombres es un relato conocido por los folkloristas con el título de « Los dos viajeros », que tiene mucha popularidad tanto España como en México". En las variantes narradas por hombres en España un hermano deja al otro en el bosque, donde se queda por la noche y sube a un árbol para dormir con más seguridad. Cuando está arriba, oye a unos diablos que llegan al pie del árbol y hablan de sus planes y maldades para acabar con dos pueblos escondiendo el agua o enterrando sapos que chupen la sangre de todos sus habitantes. Al día

14.

M. GRAULICH, Myths.

15. W. Bascom, «The 78 (1965), p. 3-20.

Forms of Folklore: Prose Narratives», Journal of American

Folkore

16. M. RosaLDo, «Toward an Anthropology of Self and Feeling », en R. SHWEDER, R. LEVINE (dir.), Culture Theory: Essays on Mind, Self, and Emotions, Cambridge, Cambridge University Press, 1990 [1984], p. 137-157. 17.

126

J. TAGGART,

The Bear, p. 144-172.

Relatos, ritos y emociones entre los nahuat de la Sierra Norte de Puebla, Mexico

siguiente, el hermano baja del árbol y salva a las víctimas y llega a casa con una buena recompensa. Cuando el otro hermano se da cuenta de la riqueza que trae su hermano, le tiene envidia y se va al mismo bosque y sube al mismo árbol para ganar la misma recompensa. Sin embargo, los diablos regresan al árbol y están enojados porque han sido frustrados a la hora de hacer sus maldades. Ellos encuentran al otro hermano subido al árbol y sospechan que era él el responsable de frustrarles sus planes siniestros, y lo matan. Los dos hermanos han sido convertidos en tres por los nahuat de Huitzilan. Además, la lección moral ha sido transformada para significar que es bueno que los hermanos trabajen como uno en vez de separarse, porque nunca se puede anticipar lo que puede pasarles en el porvenir. En las tres variantes que han sido narradas por tres hermanos nahuat, uno de los tres hermanos es abandonado en el bosque por no hacer sus tareas. Cuando el hermano perezoso regresa a casa con mucho dinero ganado como recompensa por haber salvado a las víctimas de los diablos, los otros hermanos, que eran trabajadores, se

dan cuenta que vale la pena no separarse del hermano perezoso. La lección es que, si todos los hermanos hubieran mantenido una relación de trabajar como uno, entonces todos podrían aprovecharse de la buena suerte del ganador. Esta lección encaja bien con la vida en el seno de la familia extensa porque muestra cómo los hermanos deben seguir trabajando como uno cultivando el maíz que ellos mismos juntan en el granero del grupo doméstico a pesar de que la envidia pueda surgir entre ellos. Surge la envidia, por ejemplo, cuando varios hermanos trabajan como uno y unos trabajan más que otros o tienen más hijos que están comiendo más del trabajo de todos. Además, los hermanos guardan en la memoria la envidia que surgió durante la niñez cuando la madre untaba los pezones para destetar al hijo en el sexto mes del siguiente embarazo. Lecciones masculinas sobre la envidia entre mujeres

Otra clase de disgustos frecuentemente mencionada surge entre las mujeres de la casa, sobre todo entre la suegra y la nuera en la familia patrilocal. Los problemas que surgen entre mujeres se expresan en relatos que no tienen contrapartes en la tradición oral de España debido a que la pauta de residencia en muchas zonas de aquel país es la matrilocalidad'*. Es decir, que en España es muy poco comün que la suegra y la nuera trabajen juntas en la misma casa como suelen ocurrir en Huitzilan en la familia patrilocal. La envidia surge entre la nuera y la suegra porque ambas mujeres son las beneficiarias del trabajo del mismo hombre: el esposo/hijo. La envidia surge porque la madre o la nuera cree que es ella quien debe de beneficiarse con el maíz o el dinero que él ganó por su trabajo. Los relatos que circulan en la tradición oral de Huitzilan que tratan la envidia en la relación entre la suegra y la nuera son de dos clases. Una consiste en testimonios que suelen ser narrados por los hombres y que tratan de brujas que chupan la sangre

18. J. Tacaanr, Enchanted Maidens : Gender Relations in Spanish Folktales of Courtship and Marriage, Princeton, Princeton University Press, 1990, p. 17-40.

127

James M. Taggart

de los nifios pequefios. Esas brujas se conocen con nombres diferentes dependientes de la zona. En Tlaxcala poseen varios nombres -tlahualpuchis, tlahuelpoches, tlahuelpochitzi-'? mientras que en la sierra norte de Puebla se

las llama nahualmeh. A pesar de que los nombres sean diferentes, los relatos son semejantes. La bruja es una joven que, al alcanzar la edad de mujer, comienza a tener apetito por la sangre humana. Va en busca de sangre durante la noche y primero se saca una de las piernas por la rodilla, se transforma en totola (pavo) y vuela a casa de su víctima atravesando las paredes. Normalmente la víctima es un niño pequeño, aún lactante, que duerme entre los brazos de su madre. La bruja chupa toda la dulce sangre, alimentada por la dulce leche maternal, y deja al niño muerto. Las historias que recopilé en Huitzilan fueron narradas por hombres y, por lo tanto, expresan un punto de vista masculino. Son testimonios que fueron repetidos por los narradores después de que ellos los habían oído de otros, que los habían escuchado a su vez de otras personas que eran los testigos. Normalmente, el testigo es un hombre casado cuya vecina le avisa de que su esposa se va de noche a chupar la sangre de los niños del pueblo. Entonces, el marido comienza a espiar a su mujer y se da cuenta de que sí, de que de veras ella es una bruja que chupa la sangre. Siente cuando ella se levanta hacia medianoche y espía cuando se quita la pierna y se convierte en una totola blanca. Mientras la mujer va de viaje en busca de víctimas, él hace lumbre y quema la pierna. Cuando ella llega a su casa, lo hace gritando porque le duele la pierna. El marido cuenta a su madre lo ocurrido, se junta la gente del pueblo que ha perdido a muchos niños y castigan a la mujer. Los narradores masculinos invocan la mala relación entre la suegra y la nuera en muchas variantes cuando dicen, por ejemplo, que el marido cuenta a su madre lo que ha visto cuando su esposa se convierte en totola blanca. Invocar la mala relación entre las dos mujeres es una manera de reconocer los problemas entre ellas que amenazan la estabilidad de la familia extendida. Cuando se pelean la nuera y la suegra, entonces es difícil mantenerse en una relación de trabajar como uno. El narrador identifica el problema entre las dos mujeres como envidia por pintar a la esposa como una nahual, pues, en su papel de nahuales, harían toda clase de maldades porque ellas tendrían tequiuh de envidiosa.

Es curioso que el blanco de la envidia de la esposa nahual sean los niños del pueblo que gozan de la dulce leche o del amor maternal. En la opinión de Nutini y Roberts, los tlaxcaltecos echan la culpa a la esposa nahual cuando en realidad es la esposa/nuera que mata a su propio niño para cobrar la venganza sobre su suegra?”. Sin embargo, los datos de Nutini y Roberts son pruebas indiciarias. Además se puede interpretar los relatos sobre la esposa nahual

19. H. Nutin1, J. RoBERTs, Blood-Sucking Witchcraft: an Epistemological Study of Anthropomorphic Supernaturalism in Rural Tlaxcala, Tucson & London, University of Arizona Press,

20.

128

1993.

H. Nurini, J. RoBERTS, Blood-Sucking, p. 176-193, 248-289, 316-325.

Relatos, ritos y emociones entre los nahuat de la Sierra Norte de Puebla, Mexico

que chupa la sangre de niños pequeños en otra forma: echar la culpa a la esposa/nuera por la muerte de niños lactantes se debe a que los narradores son hombres que tienen relaciones muy estrechas con la madre en el seno de la familia patrilocal. Se puede ver cómo los narradores echan la culpa a los personajes del otro género al examinar cómo los relatos de la mismo índole tratan sobre los muertos que vienen por los niños para llevarlos al mundo de los muertos. Los blancos de la envidia también son los niños que están mamando todavía, y por lo tanto gozando de la dulce leche materna. También, como se mencionó anteriormente, esos relatos abordan casos de «la enfermedad de envidia» o

nexicolcocoliz. Los relatos de este tipo son narrados tanto por mujeres como por hombres, pero de diferentes formas según el punto de vista del narrador. Muchos son testimonios de sueños en los cuales un hombre o una mujer pueden ver el mundo invisible, que es tan real como el mundo visible. Cuando el narrador es hombre, entonces los personajes son mujeres que vienen del mundo de los muertos para llevarse a los niños que se mueren de nexicolcocoliz. Es muy común que la muerta envidiosa sea una abuela que viene por su nieto o nieta, pero que el verdadero blanco de su envidia sea en realidad la nuera o la madre del hijo. Según los hombres, las dos mujeres son rivales y se pelean por la lealtad de los nietos. Un hombre nahuat dijo que su mujer, que apenas había dado a luz a su último hijo, también estaba dando el pecho a su nieto, el niño de su hijo mayor, para socavar a la nuera. La joven mujer había querido que su marido dividiera la casa y dejara de trabajar como uno con su padre porque ella y su suegra no se llevaban bien. Las dos mujeres se habían peleado mucho, hasta el punto de que la nuera había ido a la Presidencia Municipal para presentar sus quejas acerca de su suegra. El punto de vista de la mujer

Segün los testimonios de las mujeres, la relación suegra-nuera es mucho más variable y complicada de lo que revelan los relatos y los comentarios de los hombres. Es cierto que unas suegras critican y maltratan a sus nueras. Pero otras, que han deseado que sus nueras les quieran como si fueran sus propias hijas, rompen en lágrimas porque las nueras les hablan mal de ellas y de sus hijos. También existen familias en las que la suegra y la nuera se llevan bien porque la suegra ayuda mucho cuidando a sus nietos cuando están enfermos y comparte la comida con la nuera. Es decir, que los relatos narrados por los hombres pintan un cuadro de la suegra o la nuera que es muy simplista en comparación con lo que dicen las mujeres cuando refieren sus historias particulares. No es sorprendente que las mujeres vean lo que ocurre dentro de la familia con una mirada diferente a la de los hombres, y que por ello utilicen relatos del mismo índole para expresar su propio punto de vista. Los relatos narrados por mujeres son normalmente testimonios personales de sus propios sueños sobre nexicolcocoliz. Muchos de los sueños recordados y narrados por las mujeres de Huitzilan tratan de un niño o una niña pequeña que todavía está mamando y que es amenazado por un hombre muerto que viene del mundo de los muertos por él. Normalmente, el hombre que viene por el niño o la niña 129

James M. Taggart

no pertenece a la familia de la sofiadora, pero no cabe la duda de que se trate de un envidioso y a veces ha sido reconocido como alguien que fue nahual en vida, pero ya ha muerto hace varios años. Se pueden interpretar los sueños narrados por mujeres de muchas maneras, una de ellas es la que apunta a que tanto los hombres como las mujeres pueden ser envidiosos y amenazar a la familia. Desde el punto de vista de la mujer, la envidia surge en el hombre porque quiere la dulce lecha que le fue negada cuando fue destetado en su niñez. Pero ; por qué es un hombre poco conocido y de una familia diferente a la de la sofiadora el que viene por su hija debido, aparentemente, a que tiene envidia de que ella esté tomando la dulce leche y gozando del amor maternal? Se puede contestar esta pregunta examinando más detalladamente la vida de las mujeres que han narrado sus suefios en forma de testimonio. Como

se mencionó más arriba, las narraciones de los

sueños son muy personales, y por lo tanto son diferentes de los testimonios repetidos varias veces por los hombres en forma de relatos. Es decir, que los testimonios de los hombres son más anónimos mientras que los narrados por mujeres definitivamente no lo son, y, por lo tanto, la mujer tiene que plantear el problema de la envidia dentro de su familia y en su matrimonio de una forma disfrazada. Por ejemplo, la mujer que narró su suefio acerca de un hombre muerto que era nahual y que había venido por su hija también había dicho, en otra ocasión, que ella sentía que su marido la quería mucho porque le daba alhajas cuando venía de la ciudad de Puebla, donde trabajaba. Sin embargo, la misma mujer dijo que su suegra la odiaba porque quería que su hijo le diera todo el dinero que ganaba. Por lo tanto, la narradora no quería vivir con su suegra de acuerdo con la pauta de patrilocalidad. También dijo que estaba frustrada con su marido porque él no quería enfrentar a su madre y defender los derechos que ella poseía como esposa. Es decir, ella necesitaba sentir que su marido la quería y, por lo tanto, no quería criticar a su marido abiertamente sino expresar la frustración con él indirectamente en forma de un sueño en el que un hombre (muerto) había amenazado a su hija. Además, ella tenía una

relación muy estrecha y cariñosa con su padre, con quien vivía por no poder vivir con su suegra. Entonces es posible que ella haya escogido como blanco de su furia a un hombre para ella comparativamente remoto (él no era su pariente, vivía en otra vecindad y había muerto desde hace muchos años) y conocido como nahual con el tequiuh de ser envidioso. Los ritos

Como se dijo anteriormente, los ritos tienen el propósito de cambiar el corazón

(moyolpata)

o enderezar el corazón

tuerto (quiyolmelahua)

de la

colectividad. Son dos conjuntos de ritos en especial los que tratan de prevenir y de resolver los problemas que surgen dentro de la familia. El primer conjunto tiene lugar durante la fiesta de Todos Santos que, según Johanna Broda?!, es

21. J. Brona, J. Bropa,

130

«Ciclos

C. Goop

agrícolas

en la cosmovisión

prehispánica:

(dir.), Historia y vida ceremonial en las comunidades

el ritual mexica»,

en

mesoamericanas:

los

Relatos, ritos y emociones entre los nahuat de la Sierra Norte de Puebla, Mexico

una de las ceremonias que tiene antecedentes en el calendario agrícola de los nahuas de la época prehispánica. Actualmente, la fiesta de Todos Santos toma lugar durante los ültimos días de octubre y el primer día de noviembre. El aspecto clave de los ritos es la ofrenda de comida que se pone en el altar de la casa familiar para los muertos que vienen del otro mundo. La ofrenda tiene el propósito de dar de comer a los muertos, algunos de los cuales todavía son recordados como envidiosos durante la vida. Como fue anotado anteriormente, Todos Santos puede ser una época peligrosa para los nifíos pequefios, que pueden enfermarse con la enfermedad de la envidia o nexicolcocoliz;

fue en esas fechas

cuando

murió

el hermano

menor

del

narrador antes mencionado. Se supone que dar de comer a los muertos es un antídoto contra la envidia, porque los muertos que tenían el tequiuh de haber sido envidiosos buscan el amor cuando vienen por los nifios que están gozando de la dulce leche maternal. Recibir la comida de una mujer es una señal del amor según muchos nahuat, tanto hombres como mujeres. Sin embargo, los ritos de Todos Santos no son dirigidos a ninguna relación en particular. Los narradores de los relatos, tanto hombres como mujeres, identifican las relaciones de género como uno de los puntos problemáticos dentro de la familia. Por ejemplo, fue indicado que los narradores masculinos echan la culpa a las mujeres por problemas que surgen en la familia, representados por la muerte de los niños que están todavía mamando y gozando del amor maternal. También las mujeres echan la culpa a los hombres por la mortalidad infantil cuando narran sus sueños de hombres muertos que vienen por sus hijos pequeños. La práctica de echar la culpa al otro género es un síntoma de muchos de los problemas que surgen entre el hombre y la mujer dentro del matrimonio. El matrimonio es una relación equivalente a trabajar como uno o motequipanoah en la que la mujer y el hombre hacen tareas complementarias de las que debe surgir el amor entre los esposos. Muchos nahuat hombres y mujeres afirman que la relación de motequipanoa es un buen ejemplo de cómo el amor y el trabajo están estrechamente vinculados. Por ejemplo, las mujeres dicen que sienten que el marido las quiere porque él va a su milpa, donde cultiva el maíz que está en el granero, y por lo tanto ella no tiene que salir de casa en busca de la comida. Los hombres dicen que sienten el amor de su esposa cuando ella les espera con su café y sus tortillas”. Sin embargo, muchos son los problemas que surgen en la relación matrimonial, como los celos y la envidia, cuando, por ejemplo, la esposa cree que el marido está trabajando para otra mujer. Un conjunto de ritos realizado durante las fiestas de boda persigue el propósito de cambiar el corazón (moyolpata) o enderezar el corazón tuerto (quiyolmelahua) de los hombres y las mujeres en el matrimonio. Los ritos

ritos agrícolas, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, Universidad Nacinal Autónoma de México, 2004, p. 35-60. 22. J. Tacaanr, Remembering Victoria: a Tragic Nahuat Love Story, Austin, University of Texas Press, 2007.

131

James M. Taggart

de los nahuat de Huitzilan poseen antecedentes prehispánicos, uno de cuales es el uso del adorno denominado «el árbol de flores» o xochicuahuit. Este adorno tal vez representaba el árbol de reino celestial de Tamoanchan del cual cierta diosa cortó una flor y rompió una rama, fue así expulsada, cayó a la tierra y dio a luz a Cinteotl, el dios del maíz?. Tanto en el rito de los nahuat de la Sierra de Puebla como en el mito de la antigüedad, el personaje principal es una mujer que juega un papel muy importante” relacionado con la comida. Entre los actuales nahuat de la Sierra un episodio del conjunto de ritos tiene lugar durante la comida, cuando la familia del esposo presenta a sus compadres, los padrinos de boda, una ofrenda de guajalotes y un banquete. Después de observar la ofrenda y la comida por un momento, una mujer, normalmente la madrina de boda, ofrece su comida a su marido, mientras

que el padrino y él le ofrecen su comida a ella. El intercambio siempre es iniciado por una mujer. Un nahuat explicó la significación del intercambio de la manera siguiente: ... Cuando [...] le da de comer, [cuando] el compadre está sentado en una mesa, o en la tierra, porque antes no había una mesa, le dan de comer al

compadre, le sirven sus tortillas. Le sirven la comida. Le traen el guajolote, la carne de guajalote, la llevan así como regalo. Entonces no está vivo, pero si está cocinado y se lo presentan adornado. Él lo mira en un chiquihuite o una cazuela grande. Entonces, le sirven las tortillas. Por lo menos dos canastas o

dos vasijas de calabaza, esas vasijas de calabaza grandes. Entonces le sirven esas tortillas al compadre. Él termina de mirar esas tortillas. Cuando comen,

comienza la comadre. Ella toma una tortilla y cada uno [los ocho participantes importantes] da una. Todos los compadres le dan una al otro. Entonces ellos comienzan a remojar [las tortillas] en [la salsa de] su carne. La comadre le da

a su compadre y la otra comadre le da a su compadre. O su ahijada la remoja así [y se la da], que quiere decir que ellos tengan ese amor bastante grande. Es bastante limpio porque ella come lo que como yo. Y de lo que come [ella], pues yo como. Entonces es muy bello. (Cuando... quitatamaca, motaliti te compadre tech mesa, o ma talixco porque catca ahmo cuiya mesa, quitamaca in compadre quichiliti in taxcal. Quichiliti tapalol. Cuiquilia huehuechot, huehuechonacat, como cuica ihcon, como quimacayot, bueno entonces ahmo

quinex[tlia como yoltoc, pero como tachihchiuh entonces ompa quichilia ca chiquihuit o ca cazuelas huehhuei. Entonces ompa quichilia taxcal. Quiera ome canasta o ome

xicalazto ca ya non xical huehhuein.

Entonces ne tax-

cal de quimacazque ne te comadre. Ne taxcal quittaqueh quitamiz. Cuando tacua, primero pehuaz de comadre. Quicuiz ce taxcal, huan nochi quimacaz ce ce. Nochi ni compañeros ce ce quimaca. Entonces pehuah motapaltiliayah ninacauh. De comadre, quimacaya nicompadre, huan occe te comadre quimaca nicompadre. O itocay quitapaltiliaya ihcon para quihtoznequi yehhan

23. M. GrauLicH, «Myths of Paradise Anthropology 24 (1983), p. 575-588.

Lost

in

Pre-Hispanic

Central

Mexico»,

Current

24. L. Bagz, «El poder simbólico de las mujeres (Las ritualistas nahuas de la sierra norte de Puebla)», dans J. BRopa, C. Goop (dir.), Historia, p. 235-253.

132

Relatos, ritos y emociones entre los nahuat de la Sierra Norte de Puebla, Mexico

quipiyaqueh ce ne tazohtaliz telcenca huei ya. Telcenca chipahuac porque yeh quicuaz lo que ten nicuazquia. Huan de yeh quicuazquia, pues neh nicuaz. Entonces ye non telcualtzin »).^?

Esimportante que sea una mujer quien comience el intercambio de comida porque la madre ha sido identificada por los nahuat -más que el padre- como la persona que les daba el amor durante su niñez. Cuando hablan de cómo y cuándo sentían el amor, muchos nahuat dijeron que fue cuando su madre les esperaba con su café y con sus tortillas. Como se ha mencionado, también dijeron que sentían el amor de su esposa de la misma manera. El amor que sentían de su padre fue diferente. Los hombres dijeron, por ejemplo, que sentían el amor del padre porque fue él quien les había ensefiado a trabajar. Sin embargo, pocas mujeres asociaban el sentimiento de amor con el padre y algunas dijeron que, mientras que vivía la madre, a él las hijas no le llamaban la atención. Después de la muerte de la madre es otra cosa, pues el padre las necesita entonces porque no puede preparar él su comida o lavar su ropa. Entonces tiene que ser la mujer la que ofrece al hombre la comida, un acto en el seno de un rito importante que representa el amor que debe de existir en el matrimonio, entendido sobre todo como una relación en la que se debe trabajar como uno (motequipanoah). Conclusiones

Los relatos y los ritos son dos aspectos complementarios de la cultura de los nahuas, tanto hoy en día como en la época prehispánica, y esto ya ha sido reconocido por el Profesor Graulich; enfocarse en los unos sin comprender los otros conducirá a entender a medias la cultura. Los detalles de esta vinculación recíproca han cambiado, porque, entre los nahuat actuales, muchos ritos ya no son actuaciones de los eventos que ocurren en los relatos. Entre los nahuat contemporáneos la relación entre los ritos y los relatos es muy estrecha, aunque en otro sentido. Hoy se narran los relatos para identificar y construir la envidia como un sentimiento negativo que puede surgir en las relaciones del trabajo, y se practican los ritos para crear lazos del amor entre aquellos que trabajan juntos. Desde el punto de vista nahuat, la envidia y el amor son dos caras de una misma

moneda ; donde existe el uno también

se encuentra el otro; uno

siente los dos primero en el corazón y después en el estomago; los ritos que neutralizan el uno también promueven el otro. Estas dos emociones surgen mucho en las conversaciones cotidianas de la familia nahuat. La charla consiste en narraciones que incluyen tanto historias personales como sueños, testimonios de otros repetidos por los oyentes y cuentos populares que, tal vez, son de origen español. Narrar estos relatos es compartir lo que Michelle Rosaldo”* llamaba las formas de comprender el mundo que dan sentido a lo que siente uno dentro de su cuerpo. Dar sentido

25.

J. TAGGART, Remembering, p. 78.

26. M. RosaLpo, « Toward an Anthropology».

133

James M. Taggart

quiere decir dar nombres, conceptos, esquemas y el lenguaje con el que uno puede expresarse de acuerdo con su cultura. En este sentido, las emociones son construcciones que vienen de fuera, del mundo exterior al cuerpo de uno? Para el etnógrafo, así como para los nahuat, escuchar relatos es necesario para comprender el sentido de los ritos practicados, que pocas veces le son explicados tanto al antropólogo como a los participantes.

27. C. Lurz, Unnatural Emotions: Everyday Sentiments on a Micronesian Atoll and their Challenge to Western Theory, Chicago, University of Chicago Press, 1988.

134

DEUXIÈME PARTIE

Calendriers et rituels

135

LA DANSE DE L'ÉRAFLURE OU LA RÉCONCILIATION

(TLAUAUANALIZTLI)

DES ANTAGONISMES

Claude-François BAUDEZ Centre national de la recherche scientifique

Michel Graulich a été l'un des rares à soupçonner l'étroite relation entre le sacrifice de soi et le sacrifice de l'autre dans les religions mésoaméricaines!. Il a spécialement insisté sur l'antériorité de l'autosacrifice sur le sacrifice humain dans la mythologie?. Dans un travail récent?, j'ai voulu montrer que ce n'était pas seulement dans le mythe que l'autosacrifice était premier. Traditionnellement, le nom de la fête mensuelle t/acaxipehualiztli est traduit

par «desollamiento de hombres» ou écorchement des hommes. Or ce n'est pas tant l'écorchement des victimes qui est au cœur du rituel, que le port de leur peau. Comme l’a remarqué Schultze Jena* cité par Broda, xipehua n'est pas une forme passive; aussi le nom du dieu Xipe Totec doit étre traduit par Notre Seigneur l'Ecorcheur et non l'Ecorché. Endosser la peau de l'ennemi revient symboliquement à s'identifier à lui. Si on abolit la différence entre soi et l'autre, c'est afin que ce dernier, c'est-à-dire la victime, puisse apparaitre comme substitut de soi. En l'immolant, c'est un autre soi-méme que l'on sacrifie. Bien que les chroniques présentent tlauauanaliztli (l’action de rayer, l'éraflure), comme un épisode essentiel de la fête tlacaxipehualiztli, on perçoit mal le lien logique entre un rituel qui consiste à écorcher l'ennemi pour se vétir de sa peau, et une danse qui mime un combat inégal entre une victime entravée et pourvue d'armes fictives, et des guerriers libres et bien armés.

1. M. GRAULICH, Le sacrifice humain chez les Aztéques, Paris, Fayard, 2005, p. 148, 371 note 2. 2. Ibid. p. 54. f" 3. C. FE BAUDEZ, «Sacrificio de “Sí”, sacrificio del “Otro”», dans L. LórEz LUJAN, G. OLIVIER (éd.), El sacrificio humano en la tradición religiosa mesoamericana, Mexico, Instituto Nacional

de Antropología e Historia, Instituto de Investigaciones

Históricas, Universidad Nacional

Autónoma de México, 2010. 4.

L. ScHuLTZE-JENA,

Wahrsagerei,

Himmelskunde

und

Kalender

der

alten

Azteken

(“Quellenwerke zur alten Geschichte Amerikas” IV), Stuttgart, Verlag von W. Kohlhammer, 1950, p. 395; J. BRopA, «Tlacaxipeualiztli: A Reconstruction of an Aztec Calendar Festival from 16th Century Sources», Revista Española de Antropología Americana 5 (1970), p. 197-273.

137

Claude-François Baudez

Nous voulons montrer ici que les deux rituels convergent vers le méme but: abolir l'antagonisme ou la différence entre soi et l'ennemi, en s'identifiant à lui, et en faisant en sorte qu'il s'identifie à vous. Avec tlacaxipehualiztli vous devenez l'ennemi en portant sa peau; avec tlauauanaliztli vous inoculez à l'ennemi votre propre nature afin qu'il devienne votre semblable. L'affrontement est inégal, on l'a dit: la victime est seule contre plusieurs assaillants, ses mouvements

sont entravés, ses armes sont fictives, elle est

presque nue sous ses oripeaux de papier. Cette inégalité est essentielle, car le rite ne peut se dérouler que si les Mexicas sont «vainqueurs». Mais ce n'est pas seulement un combat truqué, c'est un faux affrontement: son but en effet n'est pas de vaincre l'adversaire-victime, mais de le rayer, de l'érafler. La danse aux allures guerrières cesse avec le premier sang, et c'est cela qui doit nous étonner. En effet, les guerriers du soleil sont suffisamment nombreux et bien armés pour tuer leur victime impuissante; pourquoi donc arréter la danse à la premiére écorchure? C'est qu'avec celle-ci le but du rituel est atteint; la poursuivre n'a plus de raison d'étre. Nous suggérons qu'au premier contact, aussi superficiel soit-il, de leurs armes avec le sang de la victime, celle-ci devenait par contagion un guerrieraigle ou un guerrier-jaguar, tout comme les meilleurs guerriers mexicas. Il en était de méme dans le sacrifice humain oü le coeur de toute victime, une

fois offert au soleil, devenait la précieuse figue de l'aigle (/a preciosa tuna del águila), et ne se distinguait en rien du coeur du guerrier mexica mort au combat ou sacrifié sur l'autel. Ainsi, l'éraflure transformait l'Autre en réplique de Soi. Sa mise à mort équivalait donc à un autosacrifice, but recherché par le rituel. Une fois son cœur arraché, la victime était dépouillée et un homme revétait sa peau, s'identifiant à son tour à son adversaire d'antan; postérieurement le xipe revétait les

attributs du dieu Xipe Totec, confirmant ainsi l'assimilation. Les deux chevaliers-jaguar qui dansent le tlauauanaliztli sur la page 83 du Codex Nuttall n'ont pas d'autre arme offensive qu'un gantelet pourvu de griffes (voir fig. 1). Le guerrier de droite, qui n'est autre que le roi mixtèque 8 Cerf, griffe ou raye la victime en pleurs, un certain 10 Chien. L'attaquant, comme le défendant, portent les attributs (yopitzontli, pagne et rubans aux extrémités fourchues) et les couleurs (rouge et blanc) de Xipe Totec. Nous

avons là un véritable «corps à corps» dans lequel la patte du jaguar remplace la maquahuitl, épée à tranchant d'obsidienne. Ce contact direct entre rayeur et rayé permet d'interpréter la « rayure» comme la transmission, par le sang, des propriétés du vainqueur à la victime. Une fois rayée, celle-ci devient l'égale du guerrier mixtèque (s'agissant ici de 8 Cerf). L'opération est facilitée par l'identité des costumes qui indique que les deux parties se sont placées également sous l'égide de Xipe Totec. La croyance en une transmission par le sang de propriétés du donneur ou de l'instrument utilisé semble avoir été assez répandue en Mésoamérique et au-delà. Nous en donnons ci-après quelques exemples. Quand un noble mexica se perçait les oreilles avec un poingon en os pour offrir son sang, il utilisait — le plus souvent semble-t-il — un instrument taillé dans un os de félin ou de rapace. Au cours des cérémonies qui précédèrent son intronisation, Moctezuma prit 138

La danse de l'éraflure (tlauauanaliztli)

Figure ! : La danse tlauauanaliztli dans le Codex Nuttal (p. 52). À droite, le roi 8 Cerf, Griffe de Jaguar, déguisé en jaguar, Griffe 10 Chien, attaché au temalacatl.

trois poingons: il se fit saigner les oreilles avec le poingon en os de jaguar, les mollets avec l'os de puma, et le devant des jambes avec l'os d'aigle*. Dans un rapport de 1537, le vice-roi Antonio de Mendoza? raconte que le futur souverain subissait l'épreuve appelée yacaxapotlaliztli ou percement du nez, opération exécutée avec un poinçon en os d'aigle et avec un autre en os de jaguar. La scène est illustrée sur la page 52 du Codex Nuttall et sur la planche xiu du Codex Colombino'; cette dernière image confirme le caractère sacrificiel de l'opération car le patient, le dirigeant mixtéque 8 Cerf, est couché sur une pierre de sacrifice. L'Historia tolteca-chichimeca? raconte comment les chefs toitèques Icxicóatl et Quetzaltehuéyac exécutèrent une série de rites, parmi lesquels le percement du nez, pour faire accéder des chefs chichimeques à la royauté:

5. Fray D. Durán, Historia de las Indias de Nueva Espana e Islas de la Tierra Firme, A. M. GaniBAY (éd.), Mexico, Porrúa, 1967, II, p. 400. 6. P. CARRASCO, «Rango de tecuhtli entre los nahuas tramontanos», Tlalocan, 5-2 (1966),

p. 133-161. 7. The Codex Nuttall. A Picture Manuscript from Ancient Mexico, Z. NuTTALL (éd.) with new introductory text by A. G. Miller, New York, Dover, 1975; « Códice Colombino», dans Códice Alfonso Caso. La vida de 8 Venado, Garra de Tigre (Colombino-Becker I), Mexico, Patronato Indígena, 1996. 8. Historia tolteca-chichimeca, P. KiRCHHOFF, L. ODENA GUEMES, L. REYESs García (éd. et

trad.), Mexico, Centro de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social, Fondo de Cultura Económica, Estado de Puebla, 1976, p. 160-172.

139

Claude-François Baudez

«...luego lexicóatl y Quetzaltehuéyac le perforaron el septum a los tepilhuan chichimecas con el hueso de águila y el hueso de jaguar». Une image du méme manuscrit montre Icxicóatl pergant le nez du chef chichimèque Tecpatzin *. Aux multiples exemples tirés des chroniques qui indiquent que l'origine des os destinés à pénétrer le corps humain n'était pas innocente et qu'elle provenait en général de félins et de rapaces, il faudrait ajouter les découvertes dans des dépóts de fondation ou dans des sépultures d'instruments de méme nature. Ainsi dans la sépulture (Ofrenda V) au pied de la Casa de las Aguilas du Templo Mayor de Tenochtitlan, on a recueilli vingt-six poinçons fagonnés dans des os de félins et de rapaces; ces instruments étaient soit utilisés par le défunt au cours de sa vie, soit par ses proches au cours des funérailles!?. Tous ces cas démontrent que les poinçons destinés à percer le corps humain n'étaient pas taillés dans n'importe quels os, mais dans ceux de rapaces ou de félins. On est donc en droit de supposer l'existence d'une relation symbolique nécessaire entre l'utilisateur du poingon et l'animal qui en a fourni la matière. L'autosacrifiant, comme le dirigeant à qui l'on pergait le septum, pouvait espérer bénéficier des qualités de ces animaux, au premier chef la vaillance. De méme, pensons-nous, les aigles et les jaguars qui griffaient la victime attachée au temalacatl, lui transmettaient leur nature et faisaient d'eux leur égal. La transmission à un individu de qualités exogènes par éraflure de sa peau, c'est-à-dire par contact avec son sang, est le propre du scratching, rite qui précède le jeu de lacrosse dans les ethnies du sud-est des Etats-Unis, en particulier chez les Cherokee. Le medicine man utilise, pour érafler le joueur, un instrument à plusieurs pointes (faites de dents, de piquants, d'épines, ou d'os, etc.), auquel est fixé un élément de l'animal ou de la plante dont il souhaite inoculer les qualités. Une plume de dindon sauvage, par exemple, fixée à l'instrument, transmettra au joueur la rapidité que l'on reconnait à cet oiseau. Si les pointes sont les crochets du serpent à sonnettes, l'homme soumis à ses éraflures pourra, au cours du jeu, frapper ses adversaires aussi soudainement que le crotale qui attaque. Avant la partie, le joueur regoit sur les membres et la poitrine une centaine de coups de scratcher qui le font superficiellement saigner, suffisamment pour que la ou les qualités désirées soient transmises à son organisme. Les écorchures ont aussi pour fonction d'absorber les lotions et les crémes fabriquées à base de plantes qui vont transmettre leurs vertus magiques à l'intéressé. Ainsi la décoction des feuilles poisseuses de la plante dite «lame de couteau», étalée sur les éraflures, aidera le joueur à ne pas se séparer de ses crosses au cours de la partie".

9. Ibid., fol. 21r. 10. L. López Luján. La Casa de las Águilas. Un ejemplo de la arquitectura Tenochtitlan, Mexico, Fondo de Cultura Económica, 2006, I, p. 244.

religiosa

de

11. Expression anglaise qui, incidemment, traduit exactement tlauauanaliztli. 12. T. VENNUM JR., American Indian Lacrosse. Little Brother of War, Washington & Londres, Smithsonian Institution Press, 1994, p. 186; Lacrosse Legends of the First Americans, Baltimore, The John Hopkins University Press, 2007, p. 93.

140

La danse de l'éraflure (tlauauanaliztli)

Le rituel de tlauauanaliztli, dans la version du Codex de Florence", peut

étre décomposé en plusieurs étapes: Étape 1. Préambule

Plusieurs jours avant que ne commence la danse, l’intention d’assimiler capteurs et captifs est déjà manifeste. Les futures victimes, destinées à être « rayées », puis sacrifiées, sont présentées quatre fois devant le peuple, et vétues alternativement en blanc puis en rouge, les couleurs de Xipe Totec. Leurs «capteurs» sont habillés de rouge et partiellement emplumés; comme les futurs «rayés », ils tiennent en main les attributs du dieu, le bâton à sonnailles

(chicauaztli) et le bouclier. Avant le combat fictif, captifs et «capteurs » participent à la même «danse des captifs». «Les sacrifiants se paraient donc des mémes couleurs que les victimes ainsi que du duvet sacrificiel, s'identifiant à elles et au dieu de la fête, Xipe»". Étape 2. La danse proprement dite Le tlauauanaliztli est en réalité plus une danse qu'un véritable combat. Les musiciens et chanteurs qui l'accompagnent portent le yopitzontli'? et sont donc sous l'égide de Xipe Totec. Elle est accompagnée de chants et de musique. Elle joue un affrontement entre une victime pourvue d'armes fictives et attachée à une grande pierre ronde à trou central (temalacatl),

et des guerriers libres et bien armés qui se présentent en plusieurs vagues: deux jaguars, puis deux aigles suivis, si nécessaire, par quatre «aurores» !. Il ne s'agit pas de tuer la victime mais de la «rayer» (tlauauana). La victime doit jouer le jeu et agir comme lors d'un vrai combat: elle doit danser, mais aussi lutter, et se défendre au mieux avec ses armes inoffensives. Pendant ce simulacre, les «capteurs », réunis auprès du tzompantli, dansent tout en obser-

vant attentivement le comportement de leurs captifs ; en effet, chaque guerrier ne pourra tirer gloire de sa capture que si son captif se montre vaillant. La danse prend fin au premier sang versé par la victime. La danse simule un combat qui met aux prises deux groupes antagonistes : d'un cóté, l'ennemi représenté par un captif, future victime; de l'autre, des guerriers du soleil mexicas. Broda" observe que le mot tlauauanqui s'applique autant aux agresseurs «rayeurs» qu'à la victime «rayée». La premiere éraflure prouve le contact des armes, griffes et serres des guerriers du soleil, avec la victime. Celle-ci est dés lors transformée, devenue semblable à ses

assaillants.

13. B.de SAHAGÜN, Florentine Codex. General History of the things of New Spain,C. E. DIBBLE, A. J. O. ANDERSON (éd. et trad.), Santa Fe, the School of American Research and the University of Utah, 1950-1981, II, p. 50 et suiv. 14. M. GRAULICH, Le sacrifice humain chez les Aztéques, p. 159. Le méme auteur revient sur

l'identité sacrifiant-sacrifié p. 216 et suiv. de son ouvrage. 15.

D. DuRÁN,

16.

D'aprés D. DurÁn, Historia de las Indias de Nueva España, I, p. 98, ces quatre personnages

Historia de las Indias de Nueva

España,

ll, p. 173, 277.

étaient vétus respectivement de blanc, de vert, de jaune et de rouge. 17. J. BRopA, « Tlacaxipehualiztli», p. 202, note 3.

141

Claude-François Baudez

Étape 3. Le sacrifice

La victime est alors détachée, puis sacrifiée sur place, par arrachement du cœur par le personnage appelé Youallauan (Buveur nocturne) ou Totec. C’est seulement au moment du sacrifice que Xipe joue un rôle actif: partout ailleurs, le rôle du porteur de peau consiste essentiellement à prêter son costume et ses couleurs aux antagonistes qui deviennent alors semblables. La danse, le combat simulé et l'éraflure ont transformé l'Autre en une réplique de Soi. Sa mise à mort équivaut donc à un autosacrifice, but recherché par le rituel. Le sacrifice de l'Autre est alors le sacrifice de Soi. Étape 4. Écorchement et port de la peau

Après son sacrifice, la victime est dépouillée et un homme revêt sa peau, s'identifiant

à son

tour

à son

adversaire

d'antan;

postérieurement

le xipe

revétira les attributs du dieu Xipe Totec, confirmant ainsi l'assimilation. Tlauauanaliztli est donc le rite par lequel les Mexicains s'assimilent à leurs adversaires. C'est aussi une mort rituelle suivie de renaissance. La corde qui joint la taille de la victime au temalacatl est appelée tonacamecatl, c'està-dire la corde (mecatl) de subsistance (tonaca), une métaphore du cordon ombilical'?. La victime est alors comme le fœtus relié à la matrice (le temala-

catl). Après le sacrifice, elle renaît sous ses propres traits, avec la méme peau, cette fois portée par un xipe. La victime assimilée à un foetus est évoquée en d'autres circonstances par l'attention prétée à la région ombilicale. Dans la première partie de tlacaxipeualiztli, les jeunes guerriers provoquent les xipeme en leur pinçant le nombril; cette atteinte à leur dignité est peut-étre également une allusion à leur future renaissance. D’après Mendieta”, les mères s'approchaient des xipeme qui allaient demander l'aumóne dans les maisons, et cherchaient à s'emparer d'un morceau de peau auprès du nombril ; si elles y parvenaient, elles mangeaient ce débris, ou le conservaient comme une relique, ou le donnaient à leurs enfants.

18. Le cordon ombilical se dit xicmecayotl. La corde qui, dans le tlauauanaliztli, relie le captif au temalacatl, se dit aussi aztamecatl (aztatl = grue) ou centzonmecatl (centzon = 400).

Il s'agit de la corde décorée (d'un très grand nombre) de plumes blanches de héron, la parure du guerrier mort au combat, comme dans la représentation du t/auauanaliztli dans le Codex Magliabechiano 301? (Códice Magliabechiano. Libro de la vida. Texto explicativo del llamado Códice Magliabechiano, F. ANDERS, M. JANSEN (éd.), Graz & Mexico, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1996). 19.

B. de SaHaGún, Florentine

Codex

lI, p. 50; A. López AUSTIN, Cuerpo humano

e ideología.

Las concepciones de los antiguos nahuas, 3* éd., Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, 1989, p. 216 fait du nombril, pour l'homme nahuatl, un des points les plus importants, le centre de son organisme. «Recibir en él un daño es sinónimo de ser víctima de burla, engaño,

desdén, y de pérdida de la estimación y de la honra. » Sur le dessin de la page 218 de son ouvrage, il en fait le centre de la dignité. 20.

142

G. de MENDIETA, Historia eclesiástica indiana, Mexico, Porrúa, 1971, p. 101.

La danse de l'éraflure (tlauauanaliztli)

L'animateur de la danse, Cuetlachueue, Vieux Loup, est un personnage extrêmement ambigu qui abolit l'opposition entre « rayeurs» et « rayés »”. Il apparait à la fois du cóté des assaillants dans son róle du bourreau qui attache le captif à la pierre et qui lui remet ses armes factices, et du cóté de la victime dont il est l'oncle ou le parrain. Dans la danse des tétes coupées qui a lieu après les sacrifices, Cuetlachueue reste ambigu: en dansant, il présente aux quatre directions la corde qui attachait les victimes, tout en pleurant et se lamentant sur leur sort. Après le sacrifice, le capteur badigeonne les lèvres de toutes les idoles du sang de son captif, dont le corps dépecé sera consommé par sa famille?. Ainsi les dieux et les hommes communient ensemble. Bien que n'ayant pas un rôle direct dans le tlauauanaliztli, deux groupes sont les témoins indispensables du rite. Les dieux composent le premier groupe: tous les dieux d’après le Codex de Florence, les plus importants d'entre eux selon Durán*. Ce dernier précise que les personnes qui les incarnent portent la peau des ixiptla (représentants) de ces divinités. Il est difficile d'imaginer une présence plus réelle! Les dieux évoluent en attitude de «capteurs » en tenant des Indiens (simples figurants?) comme des captifs. Durán appelle cette manifestation neteotoquiliztli, qu'il traduit par reputarse por dios”. Pour bien montrer qu'ils constituent un seul corps ils s'attachent les uns aux autres par la jambe”. Les dieux sont alors des témoins actifs dont la présence est indispensable pour que le rite soit efficace. Les nobles étrangers et les ennemis que Moctezuma invite secrétement pour que la population de Tenochtitlan ne les reconnaisse pas, sont assimilés aux dieux et apparaissent aussi par conséquent comme des témoins indispensables. Ils assistent au tlauauanaliztli depuis un endroit appelé tzapocalli?5,

21. Selon les auteurs, Cuetlachtli est traduit par loup (Molina, Siméon, Anderson et Dibble), ours (version espagnole de Sahagún), puma (Durán) ou kinkajou (Seler). Voir J. BroDa, « Tlacaxipehualiztli », note 49, p. 213-214.

22. Ce dernier ne fait pas partie des convives du banquet: «...But the captor could not eat the flesh of his captive. He said: "Shall I perchance eat my very self?" For when he took [the captive], he had said: “He is as my beloved son”. And the captive had said:^"He is my beloved father" [Mais le capteur ne pouvait consommer la chair de son captif. Il disait : “Devrai-je alors me manger moi-méme?”. Car au moment de faire son prisonnier, il avait dit: "Il est comme mon fils bien-aimé" et le captif avait dit: "Il est mon pére bien-aimé"]» dans B. de SAHAGÜN, Florentine Codex ll, p. 54. 23. D. Durán, Historia de las Indias de Nueva España, 1, p. 97, nomme, en plus de Xipe Totec, le soleil (Tonatiuh?), Huitzilopochtli, Quetzalcoatl, Macuilxochitl, Chililico, Tlacahuepan,

Ixtlilton et Mayauel. Une liste différente est produite ailleurs (ibid., II, p. 172) par le méme auteur :...[los sacrificadores]... «todos venían vestidos en hábito de los dioses». Il s'agirait ici

de costume et non de la peau d’ixiprla sacrifiés. La liste comprend Huitzilopochtli, Quetzalcoatl, Toci, Yopi, Opochtzin, Totec et Itzpapalotl. 24. Ibid. 25. Les dieux qui figurent sur les peintures murales de Santa Rita Corozal sont également liés les uns aux autres. Voir T. GANN, «Mounds in northern Honduras», American Ethnology Annual Report, 19 (1900), p. 655-692. 26.

H. ALVARADO

TEZOZÓMOC,

United States Bureau of

Crónica mexicana, M. ORozco v BERRA (éd.), Mexico, Imprenta

y litog. de I. Paz, 1878, p. 621-622.

143

Claude-François Baudez

décoré avec des feuilles de zapote, comme le site où se trouvaient les dieux avant de s'approcher du temalacatl. Comme les dieux, ils s'asseoient dans des sièges somptueux, quecholicpalli?, décorés avec des branches et des feuilles de zapote et avec des plumes de la spatule rose, emblématiques de Xipe Totec. Les chroniques expliquent la présence d'étrangers et ennemis invités par Moctezuma comme une manœuvre d'intimidation de la part de l'empereur. Ce sont en fait les représentants des adversaires auxquels les Mexicas veulent s'identifier et, en tant que tels, leur présence est indispensable. Avant leur départ, l'empereur leur remet des présents ainsi qu'aux meilleurs guerriers mexicas, démontrant ainsi sa volonté de les traiter en égaux. En résumé, nous avons voulu montrer que le «sacrifice gladiateur» ou tlauauanaliztli, comme l'ensemble de la fête t/acaxipeualiztli dans laquelle il s'inscrit, ont le même but: abolir l'antagonisme et la différence entre les Mexicas et leurs ennemis, les «capteurs» et les «captifs», les bourreaux et leurs victimes?, La danse tlauauanaliztli se présente comme un combat, non seulement inégal, mais truqué, qui cesse à la première «rayure». Celle-ci fait de la victime l'égale de ses assaillants, et son sacrifice, qui suit immédiatement la danse, peut apparaitre comme le sacrifice de Soi. D'autres procédés que la propre «rayure» sont mis en ceuvre pour assimiler Ego et Alter. Ainsi, on utilise le mot «rayés» pour désigner tant la victime que ses assaillants ; capteurs et captifs veillent et dansent ensemble; les antagonistes portent le méme costume de Xipe Totec; le meneur de jeu, Vieux Loup, soutient les deux camps, etc. Le processus d'assimilation est déclenché dés la capture sur le champ de bataille où le «capteur» apparait comme le pere bien-aimé et le captif comme le bien-aimé-fils. La victime, d'abord rayée, est mise à mort,

puis dépecée et portée dans la famille du «capteur » qui va la manger au cours d'un banquet rituel. Il est interdit au «capteur» de manger de sa propre chair; sa famille par contre doit la consommer et ainsi étendre l'assimilation. Aprés le port de la peau de l'autre, l'anthropophagie est le meilleur moyen d'établir la confusion. On va donner au rite une efficacité particulière en faisant participer deux groupes de témoins. Les dieux, qui forment un seul corps, sont doublement présents à la cérémonie car les hommes qui les incarnent portent à la fois le costume et la peau de leur ixiptla. Les étrangers, parmi lesquels des ennemis, sont les témoins de la métamorphose que le rite engendre. Etrangers et divinités sont installés dans le méme environnement qui les place eux aussi sous l'égide de Xipe Totec. Ce Porteur de Peau est l'image divinisée du rite,

27. B. de SAHAGON, Florentine Codex II, p. 50. 28. Voir E. VivgiRos DE CASTRO, «Le meurtrier et son double chez les Araweté: Un exemple de fusion rituelle », dans M. CAR TRY, M. DETIENNE (dir.), Systèmes de pensée en Afrique Noire, 14

(1996), p. 77-104. Un examen des procédés symboliques à l’œuvre dans la détermination de la «personne» du tueur par sa victime permet de conclure que l'agression guerriére amérindienne se présente comme un processus de transformation rituelle du Soi, marqué par la primauté du point de vue de l'ennemi.

144

La danse de l'éraflure (tlauauanaliztli)

confondant Ego et Alter; il n'a pas de rôle actif, sauf celui de sacrificateur. Il ne bénéficie pas plus que les autres dieux de sacrifices ou d'autres offrandes. Son róle essentiel est celui de témoin, de patron, auquel les uns et les autres empruntent le costume pour acquérir la méme identité.

145

PARA PENSAR LAS FUNCIONES SOCIALES DEL SACRIFICIO HUMANO EN LA SOCIEDAD

MEXICA

Federico NAVARRETE Instituto de Investigaciones Históricas, Universidad Naciona Autónoma de Mexico

En su monumental

obra Le sacrifice humain

chez les Aztéques Michel

Graulich! ha propuesto la interpretación más completa y compleja presentada hasta ahora sobre los significados religiosos, míticos y simbólicos del sacrificio humano entre los pueblos nahuas de Mesoamérica y en particular entre los mexicas. A partir de su descripción y análisis exhaustivos, se puede proponer que los sacrificios, tanto de seres humanos como de animales y de dioses — seres humanos convertidos de manera bastante literal en imágenes, o ixiptla de las deidades —, funcionaban como un lenguaje universal para la interacción entre los humanos y las fuerzas sobrenaturales. Se trataba de acciones intencionales que establecían, mantenían y modificaban las relaciones entre ellos: desde propiciar los dones divinos hasta transformar a los hombres en dioses; desde garantizar el correcto funcionamiento del cosmos hasta asegurar un destino favorable a los hombres después de la muerte ; desde expiar y purificar a la persona o comunidad que fungía como sacrificante, hasta destruir y aniquilar a sus enemigos. Estas acciones tenían un contenido simbólico, es decir, aludían metafórica y analógicamente a realidades diferentes, en planos cósmicos y en tiempos distintos, pero también contenían elementos eficaces y literales, pues provocaban transformaciones tangibles y concretas en sus instigadores y sus participantes?. Por ello, Graulich insiste con toda razón en que no debemos buscar una explicación única para el sacrificio humano entre los pueblos mesoamericanos.

1. M. GRAULICH, Le sacrifice humain chez les Aztéques, Paris, Fayard, 2005.

2. Tambiah propone que es precisamente este juego entre lo que define como los elementos metafóricos y los elementos metonímicos, lo que da su eficacia al ritual: S. J. TAMBIAH, « Form and Meaning of Magical Acts: A Point of View», en R. HORTON, R. FINNEGAN (éd.), Modes of Thought.

Essay

on

thinking

on

Western

and

non-Western

Societies,

Londres,

Faber,

1973,

p. 199-227.

147

Federico Navarrete

E] presente ensayo planteará algunas líneas de reflexión sobre las funciones sociales y políticas de los sacrificios humanos entre los pueblos nahuas. Claro que lo que nosotros llamamos religión no se puede ni se debe separar de lo que llamamos política, economía o sociedad, menos aün en el caso de los pueblos mesoamericanos; pero es necesario extender las propuestas y los hallazgos de Graulich, y tantos otros autores que han tratado el tema, a nuevos terrenos y también estar dispuestos a modificarlos en función de lo que encontremos en ellos. Por otro lado, la utilización de los plurales no es casual: pues parto de la premisa que estas funciones sociales eran tan mültiples como eran variadas las formas de occisión ritual que se practicaban. Por ello, no pretendo presentar conclusiones firmes, sino proponer nuevas vías para la investigación y la reflexión que permitan aprovechar lo que se ha logrado en la interpretación religiosa y mítica del sacrificio, para continuar la necesaria y siempre insuficiente reflexión sobre esa institución social tan compleja y tan problemática. Es importante aclarar, también, que cuando hablo de funciones no estoy buscando causas, como suele hacer el funcionalismo. Decir que el sacrificio servía para cimentar y legitimar el poder, o para definir y confirmar la identidad étnica de los grupos, no significa afirmar que esa utilización o significado, ese «para qué», del sacrificio sea necesariamente una razón o una causa, es decir un «por qué », de su surgimiento. Una institución social tan compleja y tan exitosa como ésta, que duró milenios y se transformó en mültiples ocasiones, puede cumplir funciones diferentes en momentos y contextos distintos, sin que tales funciones sean necesariamente la causa que la originó ; en muchos casos, incluso, la utilización que se hace de ella puede terminar siendo contradictoria con los objetivos y funciones originales que tenía?. Mi hipótesis central es que el sacrificio no sólo servía como una forma de interacción y un lenguaje simbólico para mediar las relaciones entre los seres humanos y las fuerzas sobrenaturales, sino que también servía para establecer relaciones entre los propios seres humanos, relaciones de poder y de dominación, pero también de intercambio de identidades y de fuerzas vitales. Y a mi juicio relaciones y estos vínculos entre los seres humanos eran tan importantes para el funcionamiento de la institución del sacrificio, como las religiosas?*.

3. Bloch ha planteado que los rituales, por su alto grado de formalización tienden a cambiar más lentamente que sus entornos sociales, pero que esto no impide que adquieran funciones diferentes conforme se transforman sus contextos históricos: M. BLocH, From Blessing to Violence: History and Ideology in the Cirumcision Ritual of the Merina of Madagascar,

Cambridge, Cambridge University Press, 1986. 4. Sigo aquí, en parte, las ideas planteadas por Vernant y Detienne sobre el sacrificio entre los griegos: M. DETIENNE, Gallimard, 1979,

148

J.-P. VERNANT

(éd.), La

cuisine

du sacrifice

en pays

grec,

Paris,

Para pensar las funciones sociales del sacrificio humano

El problema de la escala

Cualquier interpretación de las funciones sociales del sacrificio humano deben

partir de una evaluación

de la escala de esta institución, es decir,

una estimación del número de personas que eran sacrificadas anualmente en México-Tenochtitlan y los otros centros políticos de Mesoamérica. La mayoría de los autores que han intentado hacer esta estimación han elegido como punto de partida la descripción que hace Diego Durán de la fiesta de consagración de la ampliación del Templo Mayor bajo el tlatoani Ahuítzotl en 1487, en la que afirma que se sacrificaron 80.400 hombres?. Igualmente citan la afirmación del obispo Zumárraga de que 20.000 cautivos eran sacrificados anualmente en México-Tenochtitlan. Estas « estadísticas », sin embargo, son poco confiables. Ya diversos autores han señalado que a los conquistadores y autoridades coloniales españoles les convenía exagerar la escala de las prácticas sacrificiales mexicas, para así legitimar su conquista”. Además, las cifras fueron compiladas muchos años después de los eventos referidos, cuando el culto sacrificial ya había desaparecido; además, hay que tener en cuenta que las cifras en esa época se utilizaban más para expresar órdenes de magnitud, o superlativos, que para referirse a realidades cuantitativas demostrables?. En efecto, ni el estado mexica ni los españoles llevaban a cabo censos sistemáticos, ni conocemos registros detallados y sistemáticos del número de personas sacrificadas en los diversos templos de la ciudad. Por ello, me parece que no podemos tomar literalmente estas cifras, y menos proponer a partir de ellas que el sacrificio cumplía una función de control demográfico, como lo hizo Cook”, o para sugerir que servía para suplir la falta de proteína animal en la dieta mesoamericana, como propuso Harner?. Por ello, me parece que la mejor manera de abordar el problema de la escala es pensar en las implicaciones sociales y políticas de sus posibles

5.

D. Durán, Historia de las Indias de Nueva España e Islas de Tierra Firme, México, Porrúa,

1967, p. 333-341. 6. S. F. Cook, « Human Sacrifice and Warfare as Factors in the Demography of Pre-Colonial Mexico», en J. A. GRAHAM (éd.), Ancient Mesoamerica. Selected Readings, Palo Alto, Peek Publications, 1970, p. 279-298. 7. Véase, por ejemplo, W. ARENS, The Man-Eating Myth, New York, Oxford University Press, 1979 y P. HassLER, Menschenopfer bei den Azteken ? : eine quellen- und ideologiekritische Studie, Berna, Peter Lang, 1992. Ambos autores, de hecho, utilizan este argumento para negar

la existencia de los sacrificios humanos y de la antropofagia mexica. 8. Alfonso Mendiola hace una crítica similar a las cifras presentadas por Bernal

Díaz

del Castillo en su Historia verdadera de la conquista de la Nueva España: A. MENDIOLA, Bernal Díaz del Castillo: verdad romanesca y verdad historiográfica, México, Universidad Iberoamericana, 1995, 9. S. E. Cook, «Human Sacrifice and Warfare». 10. M. HarnNER, « The Ecological Basis for Aztec Sacrifice», American Ethnologist 4 (1977),

p. 117-135. Otra deficiencia del argumento de Harner, como ha sido señalado por muchos críticos, es partir de la premisa de que la ausencia de animales domesticados de gran tamario en Mesoamérica significaba necesariamente una deficiencia de proteínas en la dieta de los habitantes de la región.

149

Federico Navarrete

órdenes de magnitud y compararlas con lo que las propias fuentes nos dicen sobre la institución del sacrificio y sobre la sociedad mexica. En este sentido, si planteamos que las víctimas sacrificiales se contaban en las decenas de millares en México-Tenochtitlan y probablamente en los millares en los otros centros políticos del Altiplano Central, debemos reconocer las consecuencias dramáticas que esto tendría para la organización social de la región. En primer lugar, la escala de los ejércitos y poblaciones involucrados en un intercambio tan cuantioso y constante de prisioneros, y víctimas sacrificales debería ser inmensa. Para poder capturar 20.000 cautivos al año, los mexicas deberían enfrentarse a tropas enemigas que fueran al menos varias veces más numerosas; y ellos mismos deberían sufrir bajas de varios miles de guerreros cada año y ser capaces de reponerlas continuamente para no perder su capacidad militar frente a enemigos tan numerosos. La movilización necesaria para ello hubiera necesitado una militarización aün más completa de la sociedad de la que los fuentes nos indican. Por otro lado, para poder sacrificar tantas personas al año, los mexicas debían mantener una población cautiva de varias decenas de millares guerreros enemigos en México-Tenochtitlan en todo momento, es decir, una proporción muy alta de la población urbana total estimada. Como las fuentes nos indican que los cautivos no trabajan, y de hecho disfrutaban en muchos casos de una vida de lujos y comodidades, mantener una parte tan alta de población ociosa y dependiente hubiera significado un lastre significativo para la economía mexica. Las descripciones que tenemos de la manera en que los cautivos eran recibidos en el seno de la familia de su cautivador, del lento y laborioso proceso de identificación entre ambos, de la cuidadosa preparación del cautivo para el sacrificio y luego de la fastuosa celebración de los banquetes antropofágicos y la conmemoración de la hazaña con la erección de insignias, apuntan a que estos rituales requerían mucho tiempo, recursos y esfuerzo por parte del sacrificante y sus allegados!!. Si el número de sacrificios anuales hubiera excedido las decenas de millares, esto significaría que una proporción muy alta de las unidades domésticas mexicas estarían involucradas en todo momento en la costosa y laboriosa atención de un cautivo, distrayéndose de sus actividades productivas y sus obligaciones tributarias, así como también de las militares. Por otro lado, la masificación del sacrificio militaría en contra de una de

las funciones sociales que se la ha reconocido generalizadamente : legitimar los privilegios de una élite de guerreros en el seno de las sociedades mesoamericanas. En efecto, si una proporción muy alta de la población mexica tenía un cautivo cada año, eso significaría que el status social y los privilegios vinculados con esta hazaña perderían su carácter excepcional y gran parte de su valor social, contrariamente a lo que afirman las fuentes.

11. Este proceso es descrito detallada y sensiblemente por el propio M. GRAULICH, Le sacrifice humain, y también por I. CLENDINNEN, «The Cost of Courage in Aztec Society», Past and Present, 107 (1985), p. 44-89.

150

Para pensar las funciones sociales del sacrificio humano

Por el contrario, las fuentes y los análisis contemporáneos más serios sobre los rituales sacrificiales muestran que capturar a un enemigo, recibirlo en el seno de la unidad familiar y luego sacrificarlo y compartir sus despojos con los miembros del entorno social era un logro poco comün. Igualmente, las transformaciones operadas en el cautivador por su identificación con su cautivo-sacrificado y la consecuente purificación y modificación de su identidad individual y social parecen haber sido eventos excepcionales, o cuando menos poco comunes, que marcaban la vida de los guerreros de una vez para siempre. En pocas palabras, se puede afirmar que las descripciones cualitativas del sacrificio no son compatibles con la supuesta masificación de esta institución y sugieran más bien que tenía una escala cuantitativa relativamente reducida. Muy diversas fuentes y autores contemporáneos, sin embargo, coinciden en señalar que la escala del sacrificio parece haber aumentado de manera significativa a lo largo del corto siglo del esplendor imperial mexica. Carrasco atribuye este aumento a una creciente «paranoía cósmica » provocada por la inestabilidad del dominio mexica sobre su creciente número de tributarios". Conrad y Demarest lo atribuyen al funcionamiento mismo de la maquinaria imperial mexica, impulsada por las ambiciones de los guerreros que deseaban elevar su status capturando enemigos en la guerra y por la necesidad de conseguir más tributos para financiar las campañas militares cada vez más onerosas. Segün su análisis esta expansión terminó debilitando al propio estado mexica al grado que facilité su colapso a la llegada de los españoles!”. Estas propuestas parecen confirmar que un aumento radical en la escala del sacrificio habría provocado serios problemas militares, económicos y políticos a los mexicas. Por estas razones, me parece que las funciones económicas, políticas y sociales del sacrificio mexica no dependían necesariamente de su gran escala y de un supuesto impacto masivo en la población, el consumo de proteínas o las posibilidades de acumulación de riqueza. Por ello debemos analizar el funcionamiento social de esta institución a un nivel cualitativo diferente, lo

que, sin embargo, no lo hace menos importante. El poder depredador

Un rasgo recurrente de las representaciones del poder en Mesoamérica, y particulamente en la tradición tolteca, es su clara identificación con los animales depredadores, particularmente águilas y felinos. Esta analogía entre la soberanía política y el poder de los animales carnívoros para matar y consumir a sus presas, no es exclusiva de los estados mesoamericanos, desde

luego, pero vale la pena analizar con mayor detenimiento su relación con el sacrificio.

12. D. Carrasco, City of Sacrifice. The Aztec Empire and the Role of Violence in Civilization, Boston, Houghton Mifflin, 1999, p. 73-77. 13.

G. W. ConNRAD,

A. DEMAREST,

Religión

e Imperio.

Dinámica

del expansionismo

azteca

e

inca, Madrid, Alianza, 1988.

151

Federico Navarrete

Hernán Cortés relata en sus Cartas de relación que durante los días finales del sitio de México-Tenochtitlan y México-Tlatelolco, los tlaxcaltecas y los mexicas solían intercambiar todo tipo de injurias, entre ellas amenazas de que cautivarían, sacrificarían y comerían a sus enemigos, lo que segün Cortés procedían a hacer cada noche al terminar los enfrentamientos del día. Cabe sefialar también que los mexicas insultaban a los españoles afirmando que no comerían su carne, como sí lo hacían con la de los tlaxcaltecas'^.

Este proceder no puede tomarse como un indicio cierto del funcionamiento de la institución sacrificial antes de la conquista, pues fue registrado en el momento más álgido de una guerra cuyas dimensiones y formas desbordaron de una manera brutal las normas tradicionales de la guerra en MesoaméricaP. Sin embargo, parece hacer explícito el vínculo que siempre existió entre el triunfo militar, la toma de prisioneros, el sacrificio y el consumo de la carne de los sacrificados. En este sentido, la vinculación entre la depredación animal y el poder político en Mesoamérica iba más allá de una analogía simbólica: ejercer la soberanía significaba, de una manera literal, matar a los enemigos derrotados y devorar sus cuerpos. Desde luego que el poder no siempre era ejercido, ni podía ser ejercido, de esta manera, pero sí debía serlo en momentos claves, de fundación, de consagración y de confirmación de la soberanía. Por ello se puede proponer que una función esencial del sacrificio humano era precisamente mostrar y confirmar de una manera püblica y espectacular la dimensión depredadora del poder. E] mismo episodio de los multitudinarios sacrificios realizados para consagrar la ampliación del Templo Mayor bajo Ahuítzotl nos muestra de manera elocuente cómo esta manifestación violenta del poder podía, y de hecho debía, ir acompañada de una elaborada diplomacia. Durán nos relata las delicadas negociaciones que entablaron los mexicas con sus enemigos más acérrimos, a quienes nunca habían podido derrotar en el campo de batalla, como los tlaxcaltecas, los mexicatzincas, los yopis y los tarascos, para invitar a sus dirigentes a presenciar la celebración. En estas negociaciones se estableció de manera explícita un pacto de no agresión que permitió que los gobernantes enemigos entraran disfrazados a México-Tenochtitlan y ahí fueran testigos de los sacrificios, muchas de cuyas víctimas eran originarias de sus pueblos. Una vez terminados los rituales, el t/atoani mexica les obsequió todo tipo de joyas y adornos, plumas preciosas y mantas, y partieron de México-Tenochtitlan « ... contentos y Seguros, y no menos espantados de ver la majestad de México y la muchedumbre de cautivos que habían muerto »!*, La misma dialéctica entre las meticulosas reglas y procedimientos que rodeaban al sacrificio y el carácter irreductible de su violencia se aplicaba también en el despliegue del poder militar mexica que insistía en seguir

14,

H. Cortés,

Cartas de Relación,

México, Porrúa,

15. I. CLENDINNEN, « ‘Fierce and Unnatural Cruelty” Representations 33 (1991), p. 65-100. 16.

152

D. Durán,

Historia de las Indias, p. 333-341.

1988.

: Cortés and the Conquest of Mexico»,

Para pensar las funciones sociales del sacrificio humano

siempre las reglas de la «guerra justa» mesoamericana, pero que podía alcanzar niveles de violencia inauditos en el caso de enfrentamientos con pueblos que consideraba «rebeldes» o que le ofrecían una resistencia contumaz, como sucedió con la ciudad de Oaxaca".

Por ello, podemos afirmar que el hecho de que el poder en las sociedades toltecas se asociara con la depredación animal no significa que careciera de reglas y que se ejerciera de una manera arbitraria, o «salvaje», en el sentido que el pensamiento occidental dio a las prácticas sacrificiales y antropofágicas amerindias, englobándolas bajo el concepto denigrante de « canibalismo »5. Una comparación pertinente se puede encontrar en las formas de concebir y ejercer el poder de los reyes polinesios, particularmente en Hawai, donde el soberano era considerado un conquistador extranjero que estaba por encima, o más allá, de las normas que regían a la sociedad, como el tabú del incesto y la prohibición de la antropofagia, de modo que su legitimidad y su poder se derivaban precisamente del hecho de que rompía esas reglas?”. Este ejemplo nos remite, a su vez, a los relatos sobre el nacimiento de Huitzilopochtli y el supuesto origen del sacrificio humano en Coatépec, cuando Huitzilopochtli, el dios patrono de los mexicas, atacó por sorpresa a las personas que se oponían a sus órdenes, o que lo querían destruir, y los aniquiló para después devorar sus corazones”. El carácter arbitrario y violento de este acto de poder corresponde al concepto náhuatl de tetzahuitl, un portento o suceso extraordinario y temible, que era parte del nombre de Huitzilopochtli Tetzauhtéotl?^'. Por ello, este relato se puede interpretar también como una explicación del origen del poder en la sociedad mexica, que es vinculado claramente con la violencia irreductible del sacrificio”.

17.

Ibid., p. 225-235.

18. Américo Vespucci, por ejemplo, explicó las prácticas sacrificiales y antropofágicas de los tupinambás, afirmando que era « su natural comer carne humana, costumbre cruel e irracional.

» A. VEsPUCCI, «Carta fragmentaria relativa al tercer viaje (septiembre-diciembre 1502)», en A. Vespucci,

El Nuevo

Mundo.

Cartas

relativas

a sus viajes y descubrimientos,

Buenos

Aires,

Editorial Nova, 1951, p. 167. He analizado este tema en F. NAVARRETE LINARES, La invención de los caníbales, México, Castillo, 2006. 19. M. SAHLINS, [stas de la historia, Barcelona, Editorial Gedisa, 1990.

20. Durán narra una versión más «histórica» de este relato en el contexto de la migración mexica,

D. Durán,

Historia

de

las

Indias,

p.

33-34;

Sahagún,

presenta

una

versión

más

«mitológica » al hablar del origen de los dioses, véase la traducción de León-Portilla enJ. ALCINA FRANCH, « El nacimiento de Huitzilopochtli : análisis de un mito del México Prehispánico », en J. ALCINA FRANCH (éd.), El mito ante la antropología y la historia, Madrid, Siglo xxi, 1984, p. 99-126. 21. F. NAVARRETE, « Estudio introductorio », en C. DEL CASTILLO, Historia de la venida de los

mexicanos y de otros pueblos e Historia de la conquista, México, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, 2000. 22.

F. NAVARRETE, Los orígenes de los pueblos del Valle de México:

México, Universidad Nacional Autónoma

los altépetl y sus historias,

de México, Instituto de Investigaciones Históricas,

s.f., cap. 4. Graulich también enfatiza la vinculación entre esta historia y el poder conquistador de los mexicas: M. GRAULICH, Mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique, Bruxelles,

Académie Royale de Belgique, 1987, p. 226.

153

Federico Navarrete

Sacrificio e identidad

Algunos pueblos amazónicos, particularmente los tupi-guaranies, también consideran la depredación como una forma esencial de la sociabilidad humana y humana-animal, manifiesta en la cacería, pero también en la guerra, en las relaciones entre los géneros y en las relaciones entre hombres y antepasados. Segün el análisis de Viveiros de Castro sobre los araweté, cuando los diferentes grupos humanos, animales y divinos se devoran unos a otros no sólo establecen relaciones de reciprocidad, sino también crean profundos vínculos identitarios entre sf”. De acuerdo a esta interpretación, la antropofagia tupí reflejaría una apertura existencial que hace que la identidad propia sólo puede ser definida de manera plena por medio de la incorporación, literal y metafórica, de la identidad ajena?*. Una intepretación similar se puede plantear en el caso del famoso pasaje en que Tlacaélel supuestamente propuso a Moteuhczoma Ilhuicamina la institución de la llamada guerra florida contra los enemigos de los mexicas en el Valle de Puebla, es decir, una guerra cuyo principal objetivo sería tomar cautivos para el sacrificio humano.

En su discurso, el cihuacóatl señala, en

primer lugar, que Huitzilopochtli no gusta de comer la carne de los prisioneros de pueblos lejanos, porque: «... no le son gratas las carnes de esas gentes bárbaras, tiénelas en lugar de pan bazo y duro y como pan desabrido y sin sazón, porque, como digo, son de extraña lengua y bárbaros ». En cambio, la carne de estos enemigos más cercanos le resultará preferible: «... la gente de los cuales pueblos tendrá nuestro dios por pan caliente que acaba de salir del horno, blando y sabroso” ». Si bien la cercanía con los pueblos del Valle de Puebla es definida estrictamente en términos geográficos, en el contraste que se establece con los pueblos más distantes queda implícito que también son pueblos nahuatlacas que comparten elementos identitarios claves con los mexicas. De hecho, el prolongado intercambio de prisioneros de guerra entre los mexicas y estos pueblos podría ser interpretado también como una forma de intercambio recíproco que creaba lazos identitarios, de ahí el rechazo a entablarlo con pueblos de otra matriz cultural. En este sentido, se puede comparar con las otras formas de intercambio que existían entre los diferentes pueblos tolteca-chichimecas del Altiplano Central : el intercambio de dioses, de esposas, de bienes culturales y de mercancías. Quiza por ello en todo el pasaje Tlacaélel se refiere metafóricamente a la captura de enemigos en la guerra como un mercado al que acude el dios mexica, y su pueblo, para comprar sus alimentos: ...que se busque un cómodo y un mercado donde, como a tal mercado, acuda nuestro dios con su ejército a comprar víctimas y gente que coma, y que bien

23. E. VIVEIROS DE CASTRO, From the Enemy's Point of View. Humanity and Divinity in an Amazonian Society, Chicago, University of Chicago Press, 1992. 24. Ibid., «O mármore e a murta: sobre a inconstáncia da alma selvagem », en E. VIVEIROS DE CASTRO, À inconstáncia da alma selvagem, Sào Paulo, Cosac & Naify, 2002, p. 223-224. 25. D. DuRÁN, Historia de las Indias, p. 233.

154

Para pensar las funciones sociales del sacrificio humano

así, como

a boca de comal,

de por aquí cerca halle sus tortillas calientes

cuando quisiera, y se le antojare comer, y que nuestras gentes y ejércitos acudan a estas ferias a comprar con su sangre y con la cabeza y con su corazón y vida las piedras preciosas y esmeraldas y rubíes y plumas anchas y relumbrantes, largas y bien puestas, para el servicio del admirable Huitzilopochtli?. Los intercambios culturales e identitarios, así como mercantiles, entre los

pueblos tolteca-chichimecas del Altiplano crearon vínculos de reciprocidad entre ellos y produjeron una convergencia en sus identidades culturales, toltequizando a los pueblos chichimecas y chichimequizando a los pueblos toltecas, hasta que terminaron por integrarlos en una red cultural y económica y en un sistema político altamente integrado. En este sentido, se podría plantear que la captura de prisioneros para el sacrificio creaba una relación de «reciprocidad negativa», tal como es definida por Marshall D. Sahlins?, en que el deseo de venganza por los cautivos hechos en ocasiones anteriores impulsaba a realizar nuevas batallas y tomar nuevos cautivos, lo que a su vez daría motivos para enfrentamientos y capturas ulteriores. En este sentido, los vínculos históricos e identitarios que terminaron por unir a México-Tenochtitlan y a Tlaxcala, mediados por la captura, el sacrificio y la antropofagia, eran quizá tan estrechos como los que unían a la primera ciudad con sus aliados texcocanos, aunque con una valencia muy distinta. Esta propuesta nos lleva de regreso las ideas de Viveiros de Castro, quien propone que las relaciones de reciprocidad negativa y de venganza a lo largo del tiempo eran esenciales para construir la identidad de los pueblos tupís y para crear un sentido del tiempo y del devenir histórico entre ellos”. De esta manera llegamos a una conclusión aparentemente trillada, al afirmar que la historia y la identidad mexicas se construyeron alrededor del sacrificio, desde el inicio de la migración cuando ofrendaron las vidas de los mimixcoa, pasando por la fundación de México-Tenochtitlan, consagrada por un acto sacrificial, hasta llegar a las apoteóticas ampliaciones del Templo Mayor en la cumbre de su poder y la sangrienta destrucción de su ciudad durante la conquista. Sin embargo, a la luz de estas propuestas se puede plantear que dicha historia sacrificial no servía para demostrar el carácter excepcional, o incluso « mesiánico », de los mexicas y de los vínculos que establecieron con los dioses, y tampoco su responsabilidad exclusiva por mantener el equilibrio del cosmos, tal como propuso Caso y como han continuado afirmando tantos autores”. Lo interesante, desde la perspectiva que propongo, es volver a interpretar esta historia para comprender los vínculos entre humanos que fueron establecidos y confirmados por medio de los

26.

Ibid., p. 232-233.

27.

F. NAVARRETE,

Los orígenes.

28. M. SAHLINS, «On the Sociology of Primitive Economics, Nueva York, Aldine, 1972, p. 185-277. DE CASTRO,

«

O marmore

Exchange»,

en

M. SAHLINS,

29.

E. VivEIROS

30.

A. Caso, El pueblo del Sol, México, Fondo de Cultura Económica, 1953.

Stone

Age

e a murta».

155

Federico Navarrete

incesantes sacrificios, vínculos que se tejieron tanto dentro de la sociedad mexica, como también con los otros pueblos de la región; vínculos que nos muestran, una vez más, que los mexicas eran parte de un universo cultural mucho más amplio.

156

AD MEMORIAM: CÉRÉMONIES POST-FUNÉRAIRES ET HOMMAGES AUX DÉFUNTS CHEZ LES AZTÈQUES

Nathalie RAGoT Université Paris VIT

Chez les Aztèques, la crémation ou l’enterrement du corps du défunt constituait l’acte paroxystique du rituel funéraire mais non la fin. Suivaient diverses cérémonies respectant un calendrier régulier s'étalant sur plusieurs années. C'est à l'étude de ces pratiques et des relations que les vivants entretenaient avec la mémoire des défunts qu'est consacré cet article. Nous verrons comment se déroulaient les cérémonies post-funéraires tant sur le plan individuel que collectif en étudiant les rituels réalisés par les familiers des défunts et la place accordée aux disparus dans les fétes. Nous nous intéresserons ensuite aux relations qui continuaient à exister entre vivants et défunts en examinant les manifestations de culte aux ancétres et les cas de « divinisation » de certains défunts. Je reprends ici un thème que j'avais abordé rapidement dans ma thèse. Michel Graulich, qui a eu la bienveillance de diriger mes recherches, avait souligné que les divers aspects des relations entre les vivants et les morts mériteraient d'étre approfondis. Cet hommage qui lui est rendu me parait le lieu adéquat pour tenir enfin compte de sa remarque. Déroulement des cérémonies post-funéraires Quatre années de cérémonies individuelles

L'ensemble des cérémonies post-funéraires suivait un calendrier précis qui s'étalait sur quatre années, ce qui correspond au temps nécessaire au défunt pour rejoindre son au-delà. La finalité de ces cérémonies était d'aider le mort à quitter la terre puis de soutenir ses pas durant le long et pénible voyage semé d'embüches qu'il entreprenait sur les chemins de l'inframonde pour atteindre

157

Nathalie Ragot

son ultime demeure!. Une partie du matériel déposé avec le défunt au cours de son rituel funéraire devait d'ailleurs lui servir à affronter ces épreuves. Par l'intermédiaire des cérémonies post-funéraires, les vivants continuaient à l'aider pendant quatre années ponctuées de moments clefs?. Le premier rituel avait lieu tout de suite aprés l'incinération. Une fois refroidis, les cendres et les restes osseux étaient réunis avec la pierre-coeur qui avait été placée dans la bouche du cadavre et les méches de cheveux coupées dans l'enfance et à la fin de la vie. Le tout était déposé dans une boite en pierre pour les seigneurs ou dans un simple récipient en céramique (olla) pour les plus humbles. Selon les informateurs de Sahagün, l'urne cinéraire et son précieux contenu étaient enterrés dans une des pièces de la maison (ou du patio, ou dans le temple du quartier ou calpulli en fonction de la qualité du défunt) tout de suite aprés l'incinération?. Selon d'autres sources, dans le cas

d'un seigneur, une effigie en bois à son image était composée et placée sur cette boite. Cette cérémonie avait pour nom quitonaltia, « donner du tonalli »* et devait «animer» l'image du défunt. Selon López Austin, cette effigie avait pour fonction d'attirer à elle les différents fragments de tonalli localisés dans

1. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex. General History of the things of New Spain, C. E. DIBBLE, A. J. O. ANDERSON (éd. et trad.), Santa Fe, New Mexico, The School of American Research, University of Utah, 1950-1981, III, p. 41-46; B. de SAHAGÜN, Primeros Memoriales, T. SULLIVAN et al. (éd. ettrad.), Norman, University of Oklahoma Press, 1997, p. 177-178; B. de SAHAGÜN, Historia general de las cosas de Nueva España, J. GARCÍA QUINTANA, A. LÓPEZ AUSTIN (éd.), Mexico, Cien de México, CONACULTA, 2000, I, p. 327-330; J. de ToRQuEMADA, Monarquía Indiana, Mexico, Porrúa, 1986, II, p. 82, 522, 527; T. BENAVENTE ou MoTOLINIA, Memoriales o Libro de las cosas de la Nueva Espana y de los naturales de ella, E. O'GoRMAN (éd.), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Históricas, 1971, p. 305; G. de MENDIETA, Historia eclesiástica indiana, Mexico, Porráa, 1993, p. 183-184; B. de Las Casas, Apologética Historia Sumaria, E. O'GoRMAN (éd.), Mexico, Instituto de Investigaciones Históricas, 1967, IT, p. 463;

Religión,

costumbres

e historia de los antiguos mexicanos,

libro explicativo del llamado

Códice Vaticano A, F. ANDERS, M. JANSEN, L. REvES GARCÍA (éd.), Mexico, Graz, Fondo de Cultura Económica, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1996, pl. 2r-v; N. Racor, Les au-delás aztéques, Oxford, BAR International Series 881, 2000, p. 85-98.

2. Quand le disparu était un seigneur, une dizaine ou une quinzaine d'esclaves étaient mis à mort le quatrième jour parce que :«... Ils disaient que durant ce temps de quatre jours, l'àme allait en chemin et avait besoin d'aide, et avec ceux qu'ils tuaient ils pensaient, les aveugles, lui envoyer une grande aide» dans T. MoroLiNiA, Memoriales, p. 306. Aussi B. de Las Casas, Apologética, Il, p. 464; J. de TORQUEMADA, Monarquía, i. 2, p. 522; J. de MENDIETA, Historia, p.

163;

Codex

Telleriano-Remensis.

Ritual,

Divination,

and

History

in

a

Pictorial

Aztec

Manucript, E. QUIÑONES QUEBER (éd.), Austin, University of Texas Press, 1995, fol. 2r. 3. B. de SAHAGÜN, Historia, p. 330; B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, TI, p. 45. 4. T. MorouiNiA, Memoriales, p. 305-306; P.JonuANssoN, Ritos mortuarios nahuas precolombinos, Mexico, Secretaria de Cultura Estado de Puebla, 1998, p. 176; B. de LAs Casas, Apologética, I, p. 463; G. de MENDIETA, Historia, p. 163; J. de TORQUEMADA, Monarquía, II, p. 522; El Códice Tudela y el grupo Magliabechiano: la tradición medieval europea de copia de códices en América, J. I. BATALLA RosApo (éd.), Madrid, Colección Thesaurus Americae, 2002, fol. 58r.

158

Cérémonies post-funéraires et hommages aux défunts chez les Aztéques

les cheveux et les ongles dispersés au cours de la vie, afin le réceptacle funéraire”. Nous y reviendrons. Durant les quatre jours qui suivaient les funérailles, nourriture, de fleurs et d'encens étaient déposées sur le du réceptacle cinéraire. Pour les seigneurs, les offrandes

de les réunir dans des offrandes de lieu d'enterrement se faisaient sur le

lieu de la crémation et/ou devant la boite contenant les restes du défunt et s'y

ajoutaient des victimes humainesf. Ces hommages duraient les quatre jours qui suivaient la crémation parce que c'était le temps nécessaire au teyolía pour quitter la terre et commencer son voyage dans l'inframonde, moment important où le défunt devait avoir particulièrement besoin de l’aide de ses proches’. Ces offrandes se répétaient les 20°, 40°, 60° et 80° jours. Pour les seigneurs, de nouvelles effigies à leur image étaient brülées et des victimes humaines immolées*. Le 80° jour? revétait un caractère spécial, on disait que c'était comme cabo del año, «fin de l'année », et marquait donc la fin d'un cycle. Ce jour-là, une nouvelle statue représentant le seigneur défunt était brülée, et le sang et les cœurs de victimes humaines allaient, pour la dernière fois, rougir le brasier où se consumait la statue. Pour les gens du commun, on brülait les vêtements qu'ils avaient laissés sur terre. Nous le verrons, ce 80* jour était important car il correspondait à la fin des prescriptions de «deuil» et des rituels de séparation avec le mort. Aprés cette date, les hommages au défunt (offrandes de nourriture, fleurs, vin d'agave, encens, petits animaux, cailles, papillons et

lapins) n'avaient plus lieu qu'une fois par an, le jour anniversaire de la mort.

5. Lestrois entités animiques hébergées dans le corpsétaient le teyolía, le tonalli et le ihíyotl. À la mort de l'individu, chacune d'entre elles avait un destin différent : le teyolía, hébergé dans

le cœur, allait rejoindre l'au-delà. Le tonalli, logé dans les cheveux et les ongles, restait en partie sur la terre après la mort. Enfin, le ihifyotl, moteur des passions, se dispersait sur la superficie de la terre et pouvait se transformer en êtres fantomatiques ou en maladies (yohualehécatl ou « vent nocturne»). A. LÓPEZ AUSTIN, Cuerpo humano e ideología. Las concepciones de los antiguos Nahuas, Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1984, I, p. 217-219, 253, 357-361, 364-365, 368. 6. B. de SAHaGún, Historia, I, p. 329-330; Ibid., Florentine Codex, WI, p. 45; T. MoToLINIA, Memoriales, p. 305-306; Códice Yahuitlan, W. Jiménez Moreno, Mareos HIGUERA (éd.), Mexico, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1940, p. 41.

7. Pour le teyolia du défunt qui abandonne le monde des vivants 4 jours après les funérailles voir : G. de MENDIETA, Historia, p. 97; J. de TORQUEMADA, Monarquía, I], p. 82; B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, Il, p. 150; A. Lórez AUSTIN, Cuerpo humano, 1, p. 364-365; N. Racor, Les au-delàs, p. 81.

8. T. MoToLINIA, Memoriales, p. 305-306; B. de SanAGÜN, Primeros Memoriales, p. 179. 9. Cechiffre de 80, soit 4 x 20, correspond à 4 mois du calendrier rituel. On retrouve le chiffre

4 en association avec les rituels funéraires à plusieurs reprises (le teyofía quitte la terreau bout de 4 jours; il y a 4 années de voyage dans l'inframonde avant d'arriver à l'au-delà). 10.

D. DurÁn, Historia de las Indias de Nueva

(éd.), Mexico, Historia,

Il,

Porrúa, p.

1984,

329-330;

II, p. 300;

H. Alvarapo

Espana

e islas de Tierra Firme, A. M. GARIBAY

B. de SAHAGÜN, TEzozoMwoc,

Florentine

Crónica

Codex,

Mexicana.

II, p. 44; Códice

Ibid.,

Ramírez,

M. Orozco v BERRA (éd.), 1987, p. 436, 456; T. MorouiNiA, Memoriales, p. 305-306; B. de Las Casas, Apologética, II, p. 464; J. de TORQUEMADA, Monarquía, ll, p. 523; G. de MENDIETA, Historia, p. 163; B. de SAHAGÚN, Primeros Memoriales, p. 179.

159

Nathalie Ragot

À la date du quatrième anniversaire du décès une fête était donnée, on y dansait, buvait et pleurait «... en se rappelant ce mort et d’autres défunts». Ainsi s'achevaient les rites post-funéraires. Si les offrandes cessaient au bout de quatre années c'est parce que le mort, arrivé au terme de son voyage dans Pinframonde, n'avait plus besoin de l'aide qu'elles lui apportaient. D'ailleurs, selon les informateurs de Sahagún, tous les présents qui lui avaient été offerts pendant les quatre ans, le défunt les remettait à Mictlantecuhtli quand il arrivait en sa présence". Pour les guerriers incinérés, les choses se déroulaient suivant un schéma comparable. 80 jours aprés la crémation du paquet funéraire représentant le guerrier et l'enterrement des cendres, les veuves faisaient des offrandes de nourriture à l'endroit de l'incinération. Les couvertures et les vétements du défunt étaient brülés. La méme cérémonie d'offrande se renouvelait 80 jours plus tard". Il faut souligner le singulier silence des sources concernant les hommages rendus aux défunts enterrés. Quel que soit le mode de traitement des corps, enterrement ou crémation, tous les défunts devaient faire le voyage dans l'inframonde'^. Par conséquent, tous devaient pareillement bénéficier des offrandes post-funéraires, méme si les textes n'ont pas gardé la trace de ces pratiques pour les défunts inhumés. Dans tous les cas, aprés quatre années se terminaient les cérémonies funéraires, mais les liens avec les défunts n'étaient pas pour autant définitivement rompus. Des hommages leur étaient régulièrement rendus à l'occasion des fétes du calendrier rituel. Hommages communautaires aux défunts Fétes

Catégories de défunts honorées

Miccailhuitl

Tous les défunts

Huey Miccailhuitl

Tous les défunts

Toxcatl

Guerriers; Ancêtres

Tepeilhuitl

Tlaloques

Quecholli

Guerriers

Titil

Tous les défunts;

Izcalli

Tous les défunts

3*, 8°, 12° fêtes mobiles

Cihuateteo

11. T. MoroLINIA, Memoriales, TORQUEMADA, Monarquía, Il, p. Florentine

Codex,

Cihuateteo

p. 306; B. de Las Casas, Apologética, Il, p. 464; J. de 523; G. de MENDIETA, Historia, p. 163; B. de SAHAGÚN,

Ill, p. 44.

12.

B. de SAHAGÜN,

13.

D. DuRÁN,

Florentine

Historia,

Codex,

II, p. 155;

The

Il, p. 43. Codex Magliabechiano

and the Lost Prototype

of the

Magliabechiano Group, E. HiLL Boone (éd.), Berkeley, London, University of California Press, 1983, fol. 71v, 72r; Códice Tudela, fol. 55r. 14.

160

N. Raaor, Les au-delàs aztéques, p. 88-89.

Cérémonies post-funéraires et hommages aux défunts chez les Aztéques

Sept fêtes, sur les dix-huit que compte le calendrier solaire, mentionnent des rites en l’honneur des défunts. Deux des noms de ces fêtes, ou vingtaines,

y font d'ailleurs directement référence: Miccailhuitontli, «Petite fête des morts» et Huey Miccailhuitl, « Grande féte des morts». Toutes les catégories de défunts étaient honorées dans les fétes, comme le montre le tableau

précédent. Miccailhuitontli, «Petite féte des morts», ou Tlaxochimaco, « Offrande

de fleurs » : d'aprés Durán et Tovar c'était la féte des enfants innocents morts mais, comme l'a souligné Michel Graulich, le diminutif indique seulement que la fête est mineure par rapport à la suivante. Un des principaux rites consistait à aller chercher un grand tronc d'arbre, appelé xocotl, et à le ramener rituellement en ville. Hormis le nom de la fête, il y a peu de mentions d'hommages rendus aux défunts. Le Codex Telleriano-Remensis mentionne des rituels de dépót d'offrandes de nourriture et de boisson sur les sépultures des défunts'*. Selon Sahagún, la population allait chercher des fleurs et en ornait la statue de Huitzilopochtli; on fleurissait peut-étre aussi les tombes des défunts". Selon les Costumbres, le jour de la petite fête des défunts, «... ils tuaient tous les captifs et les esclaves qu'ils avaient et chacun sacrifiait son esclave au dieu ou démon qu'il tenait en dévotion ». Michel Graulich l'interpréte comme une possible référence à des sacrifices en l'honneur des défunts illustres «divinisés» mais par ailleurs on sait que les sacrifices humains en l'honneur des défunts cessaient au bout de quatre années. En Huey Miccailhuitl,

« Grande fête des morts» ou Xocotl Huetzi «le fruit

tombe », dernière fête de l'année, le rite principal consistait à ériger dans la cour du Grand Temple le tronc qu'on était allé chercher dans la féte précédente. Au sommet était fixée une effigie en pâte de tzoalli appelée xocotl, ainsi que de longues cordes. Selon Sahagün, cette effigie représentait un homme vétu d'ornement de papier et portant les attributs d'un guerrier mais elle pouvait, selon d'autres sources, prendre l'aspect d'un faisceau d'armes, d'un oiseau en páte multicolore, d'un paquet funéraire orné de boules de duvet, d'un masque d'Otontecuhtli (señor de los Otomis, dieu du Feu, des

seigneurs et des guerriers morts) ou encore être une victime humaine. Après une danse, des jeunes gens se précipitaient pour grimper le long du tronc et le premier arrivé à son sommet jetait l'effigie à terre après s'étre emparé des ornements ; il était ensuite traité comme un guerrier ayant fait un prisonnier. Dans son analyse des fétes des vingtaines, Michel Graulich a démontré que pendant ces deux dernières fêtes de la saison sèche que sont Miccailhuitl

15. M. GRAULICH, Mythes et rituels du Mexique ancien préhispanique, Académie Royale de Belgique, Mémoires de la Classe de Lettres, Collection in-8?-2* série, t. L XVII, fasc. 3, Bruxelles, Palais des Académies, 1987, p. 381. 16. Codex Telleriano-Remensis, fol. 21?, p. 254. 17.

B. de SAHAGÜN,

Historia, t. I, p. 221-222;

M.

GRAULICH,

Mythes

et rituels, p. 381.

18. «Costumbres, Fiestas, Enterramientos y Diversas Formas de Proceder de Los Indios de Nueva España», F. GoMEz DE Orozco (éd.), Tlalocan 11-1 (1945), p. 45; M. GRAULICH, Mythes et rituels, p. 384.

161

Nathalie Ragot

et Huey Miccailhuitl, on célèbrait les morts qui descendaient sur et dans la terre afin de la féconder et l'effigie, clairement associée à un guerrier, était projetée au sol dans un acte de fécondation de la terre!”. Tous les défunts étaient invités à participer, comme le révèle le commentaire du folio 2v du Codex Telleriano-Remensis : pendant trois jours on jeünait en l'honneur des morts et le jour de la féte, tandis que les prétres sacrifiaient, « ... chacun dans sa maison montait sur le toit et, tournés vers le Nord, ils faisaient des grandes

oraisons aux morts de leur lignée et à grand cris il disaient: Venez vite car nous vous attendons »?, Toxcatl,

«Chose

sèche»,

était une

fête en

l'honneur

de Tezcatlipoca

et Huitzilopochtli. Selon le manuscrit des Costumbres et le Codex Tudela on rendait hommage aux défunts en divers endroits. Dans le temple de Huitzilopochtli, au pied de la statue du dieu, on déposait pour les défunts des présents de nourritures, des piéces de tissu et des vétements. Comme l'indique le lieu de dépót, ces offrandes ne concernaient certainement que les défunts qui allaient rejoindre l'au-delà du Soleil, c'est-à-dire les guerriers et les sacrifiés. Dans les maisons, chacun faisait une féte et offrait aux «images» de ses «pères et ancêtres » défunts de l'encens et des papiers couverts du sang d'auto-sacrifice?!. Tepeilhuitl, «Fête des Montagnes », ou Huey Pachtli, était la première des

grandes fétes dédiées aux eaux et à Tlaloc et on y fétait les Tlaloques, ces petits aides de Tlaloc qui versaient l'eau des pluies. On commémorait également les défunts morts d'une maladie aquatique ou d'une fagon en rapport avec l'eau, lequel mode de trépas les conduisait au Tlalocan où ils devenaient des Tlaloques. Dans ce dessein, on confectionnait des petites montagnes en páte d'amarante qu'on appelait ecatotonti et qui représentaient les Tlaloques et les défunts. Au lever du jour, on les déposait sur des oratoires en roseaux et on leur offrait divers plats de nourritures et de l'encens. Les participants «chantaient et buvaient du pulque en l'honneur de ces dieux et de leurs défunts»?. Cette cérémonie était appelée calonühuac, terme qui peut être traduit par «on est couché, on reste dans les maisons”? ». En Quecholli,

«Spatule rose», Mixcoatl était à l'honneur et avec lui on

commémorait les guerriers défunts. Le cinquième jour de la fête leur était dédié. Des fléches miniatures étaient fabriquées. Sur chaque tombe étaient déposées quatre flèches et quatre torches nouées ensemble et accompagnées de deux tamales sucrés. Au bout d'une journée, ces offrandes étaient brülées

19.

M.

GRAULICH,

Mythes

et rituels, p. 385-390, 390.

20. Codex Telleriano-Remensis, fol. 2v, p. 254; aussi Relaciónes Geográficas del siglo xvi: Antequera, R. ACUNA (éd.), Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1984, III, p. 200; J. de TORQUEMADA, Monarquía, IT, p. 298. 21. «Costumbres, Fiestas», p. 42; Códice Tudela, fol. 15r, p. 409. 22.

B.DE

ToRQUEMADA,

SAHAGÚN,

Historia,

Monarquía,

l,

p.

239-240;

Ibid.,

23. A. Wimmer, Dictionnaire de la langue nahuatl l'adresse www.sup-infor.com, entrée «calonohuac ».

162

Florentine

Codex,

ll,

p.

131;

J. DE

ll, p. 279.

classique,

consultable

sur

internet

à

Cérémonies post-funéraires et hommages aux défunts chez les Aztéques

et les cendres enterrées dans les sépultures des défunts pour qu’elles leur parviennent. Un autre rituel, toujours en l’honneur des guerriers morts, consistait à prendre une tige de maïs qu’on ornait de bandes de papier et au pied duquel on déposait les bannières, les boucliers, les capes et les pagnes du défunt attachés par un fil rouge. À l'extrémité de la tige de mais, on accrochait un petit colibri et une parure de quatre cents plumes de héron”. Les plumes de héron sont typiques du guerrier, de méme que le colibri qui est la forme aviaire qu'il endosse dans l'au-delà. Il est intéressant de souligner cette assimilation du guerrier défunt à la tige de mais, car de son vivant il est assimilé à un épis. En effet, comme l'a démontré Michel Graulich, «à l'époque aztèque faire la guerre signifiait moissonner pour les dieux et, lorsque les paysans faisaient la récolte du mais, ils attaquaient rituellement les épis de mais comme si c'étaient des ennemis »?. Selon les gloses du Codex Magliabechiano à l'occasion de la vingtaine de Tititl, dédiée à Cihuacoatl, on «célébrait la fête des défunts ». Des effigies à

base de torche d'ocote étaient fabriquées et parées à l'image des défunts. On leur offrait des présents de nourritures et tous les participants mangeaient et buvaient avant d'incendier les représentations des défunts. Cette cérémonie s'appelait «quixehuilotia, ce qui veut dire qu'ils mettaient leur figure ou souvenir»?$, Le texte précise que tous les défunts étaient commémorés en Tititl même si Pillustration qui accompagne le texte représente manifestement une statue funéraire de guerrier (peinture stellaire de Mixcoatl, ornement de nez des guerriers défunts, chien bleu autour du cou, boules de duvet dans les

cheveux). La description insiste sur la façon d’habiller l'effigie si elle représente une femme. Cette féte était d'ailleurs principalement consacrée à CihuacoatlIllamatecuhtli et aux femmes guerrières. Les Primeros Memoriales précisent que lors de la danse qui suivait le sacrifice d'Illamatecuhti, les prêtres étaient déguisés en «femmes divines », c'est-à-dire en tzitzimime. Comme l'a analysé Michel Graulich, on honorait certainement là particulièrement les femmes guerrières, comme on avait honoré les guerriers défunts dans la fête parallèle de Quecholli?. Les femmes mortes en couches, les Cihuateteo, étaient également honorées lors des 3*, 8° et 12° fêtes mobiles correspondant aux jours ce mazatl, « 1 cerf »,

ce quiáhuitl, «1 pluie», ce ozomotli, «1 singe». Ces jours-là, ainsi que les jours ce calli,

«1 maison» et ce quauhtli, «1 aigle», la venue des Cihuateteo

était particulièrement redoutée car elles trainaient de terribles maladies dans leur sillage et leur rencontre pouvait étre fatale. A ces dates, les autels dédiés aux Cihuateteo, situés aux croisées des chemins, étaient décorés de papiers et l'on y déposait diverses offrandes: pains en forme de papillons, d'éclairs,

24. 25. 26. 27.

B. de SAHAGÚN, Historia, I, p. 243; Ibid., Florentine Codex, ll, p. 135-136. M. GRAULICH, Le sacrifice humain chez les Aztéques, Paris, Fayard, 2005, p. 327. Codex Magliabechiano, fol. 44v, A5r, p. 199, aussi folio 71v-72r. M. GRAULICH, Mythes et rituels, p. 375; B. de SAHAGÚN, Primeros Memoriales, p. 66.

163

Nathalie Ragot

des tamales, etc.?? dans le but d'apaiser leur courroux. Le dixième jour de la vingtaine /zcalli, aprés avoir offert des tamales au feu, on en déposait un sur les sépultures de tous les défunts ?. Manifestations de deuil et prohibitions rituelles À la mort d'un individu, ses proches pleuraient, criaient, on entonnait

des chants funèbres pendant et après les funérailles. I] existait également des manifestations de deuil collectives au moment du décès d'un seigneur qui incluaient pleurs, cris et jeüne. Pour le défunt roi de Tezcoco, Nezahualpilli, «les pleurs et le jeüne de ses femmes et de ses fils et de tous ses parents durèrent quatre-vingts jours »??. Au Michoacan, la mort du calzoncin était suivie d'un deuil général pendant lequel il était interdit de moudre du mais, allumer du feu et faire des marchés. Les gens devaient étre tristes pendant cinq jours dans leurs maisons?'. Des détails supplémentaires sur ces prohibitions comportementales sont mentionnés à propos des guerriers défunts. Durant quatre-vingts jours après la crémation, les veuves et les parents des guerriers morts au combat ne devaient plus laver ni leur visage, ni leurs cheveux, ni leurs vêtements; ils devaient également suivre un jeüne partiel en ne mangeant qu'une seule fois par jour. Passé ce temps, les prétres cuauhuehuetque se rendaient dans les maisons des défunts afin de «... recueillir toutes les larmes, gémissements et sanglots et les ramener au temple». Ensuite, c'était les achcacauhtin qui allaient auprés des endeuillés et leur grattaient délicatement le visage pour óter la saleté dont ils étaient couverts. Cette crasse était recueillie sur des papiers, lesquels étaient solennellement jetés au pied d'une montagne appelée Yahualiuhcan, «lieu rond ». Ensuite, les veuves se rendaient au temple pour y faire des offrandes de papiers et de copal, « ... avec quoi elles étaient libres de tout deuil et de toute tristesse »*. La fin de ces restrictions comportementales marquait leur retour à une vie normale dans la société. A cette contrainte de se salir, d'amonceler la saleté sur soi, il faut ajouter que durant le rituel funéraire des guerriers, des chanteurs revétus de manteaux tres sales et tachés, le front ceint de bandeaux crasseux, chantaient « ... des chants de deuil et de la saleté

que le deuil et les larmes entraînent avec eux. [...] On appelait ces chants tzocuicatl, ce qui veut dire "chant sale" o “de porqueria”»*. Selon Doris

28. B. de SAHAGUN, Historia, Codex, I, p. 79, IT, p. 36-38, IV, 29. B. de SAHAGON, Historia, 30. D. Durán, Historia, II, p.

I, p. 79, 170-173, 356, 371, 392, 400, 408-409; Ibid., Florentine p. 10, 41, 81, 93, 107. I, p. 267; Ibid., Florentine Codex, 1, p. 167. 474, aussi 154-155, 289-290. De méme, à la mort de Axayacatl,

tlatoani de Tenochtitlan, les parents du défunt et tout le peuple jeünérent quatre-vingts jours durant (voir /bid., p. 300). Selon les Primeros Memoriales (p. 179), à la mort d'un roi, les rites

d'abstinence en son honneur duraient vingt jours. 31. Relación de Michoacán, F. MIRANDA (éd.), Mexico, Secretaría de Educación Pública, 1988, p. 293-294. 32. D. Durán, Historia, II, p. 155, «llamaban a esta cerimonialas reliquias de las lágrimas », aussi p. 289-290;

33.

164

H. ALVARADO

TEzozowoc,

D. DurAN, Historia, ll, p. 288-289.

Crónica Mexicana,

p. 428.

Cérémonies post-funéraires et hommages aux défunts chez les Aztéques

Heyden, la crasse jouait alors le rôle « d’une métaphore visuelle du deuil »?*. Tous ces éléments renvoient à des rituels de mise à l'écart de la société, du

moins visuelle, des parents du défunt suivi d’une cérémonie de purification et de réintégration dans la communauté. Mais ces pratiques se doublent d’un aspect pénitentiel. À l’appui de cette hypothèse, je mentionnerai des comportements similaires adoptés par les familiers des marchands ou des guerriers partis en expédition. Quand le marchand s’en allait au loin (il était d’ailleurs pour cela considéré comme un guerrier) ses parents, sa femme ou ses fils ne se lavaient plus ni la tête, ni le visage que tous les quatre-vingts jours, « ... laissant ainsi entendre qu'ils faisaient pénitence pour leur fils ou pour leur mari, ou pour leur père qui était absent» ?. De la méme façon, quand les guerriers partaient en campagne, leurs femmes ne se baignaient plus la figure et se levaient la nuit pour balayer?*. Patrick Johansson suggère que ces pratiques dedeuil réalisées hors contexte funéraire, pourraient avoir pour finalité de protéger le guerrier de la mort?. Mais on retrouve des pratiques comparables dans le cadre des sacrifices humains. Par exemple, durant la fête de Tlacaxipehualiztli où le maitre du captif sacrifié et ses parents ne se lavaient pas la téte jusqu'à la fin de la féte «... faisant ainsi pénitence pour leur captif défunt». I] est manifeste que les prohibitions rituelles imposées aux proches d'un défunt devaient jouer un róle de catalyseur social de la douleur mais elles affichent également un aspect manifestement pénitenciel dont il faut tenir compte. Néanmoins il est difficile de savoir avec certitude la raison et la fonction de ces pénitences. Avaient-elles un caractère purificateur pour ceux qui avaient approché le défunt? Ou bien la pénitence pouvait-elle d'une façon ou d'une autre « profiter » au défunt? En renforcant ses pas sur le chemin de Pinframonde par exemple ? Pour terminer, il faut souligner que cette date du quatre-vingtième jour correspond à celle du cabo del año, un des moments importants des cérémonies post-funéraires comme nous l'avons signalé précédemment. L'importance accordée à ce quatre-vingtiéme jour pourrait résider justement dans le fait qu'il marquait la fin des rituels de prohibitions imposés aux proches des défunts. Il pourrait aussi étre un indice que les familiers de tous les défunts, pas seulement les guerriers, devaient étre soumis à ces restrictions.

34. D. HEYDEN, «El mito de la muerte de los guerreros: ¿que pasa con sus viudas?», dans B. DAHLGREN

(éd.), Historia de la Religión en Mesoamérica

y areas afines, Il coloquio, Mexico,

Universidad Nacional Autónoma de México, 1990, p. 117. 35. B. de Sanacún, Historia, I, p. 386. 36. D. Durán, Historia, Il, p. 164; J. B. Pomar, «Relación de Texcoco », dans R. ACUNA (éd.), Relación geográficas del siglo xvi: México, vol. III, Mexico, Universidad Nacional Autónoma

de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1986, p. 68-69. 37.

P. JoHANSSON,

Ritos

mortuarios

nahuas

precolombinos,

Mexico,

Secretaría

de

Cultura,

Gobierno del Estado de Puebla, 1998, p. 172. 38. B. de SAHAGÜN, Historia, I, p. 187.

165

Nathalie Ragot

Relations avec les défunts Des autels domestiques

Les offrandes aux défunts étaient réalisées sur le lieu d’inhumation du récipient funéraire, le plus souvent dans une pièce ou dans la cour de la maison ou dans le temple du calpulli. Cette coutume d'enterrer les cendres du défunt dans le sol de l'habitation traduit une volonté de garder ses ancétres prés de soi et renvoie à la notion de lignage. Il existait certainement des autels domestiques ou des oratoires dressés en l'honneur des disparus. Il n'y a pas de témoignage archéologique de ces structures et c'est seulement à partir des textes que l'on peut identifier leur existence et imaginer leur aspect. Ainsi, pendant la féte de Tepeilhuitl, pour honorer les défunts du Tlalocan, on faisait des images en forme de montagnes que l'on posait sur des oratoires en roseaux dressés pour l'occasion? Il devait également y avoir dans les maisons des «autels» installés en permanence et entretenus quotidiennement. Lors des funérailles d'un seigneur, pour l'accompagner dans l'au-delà, on immolait un serviteur «... qui le servait comme un chapelain, mettant de la lumiere et de l'encens sur les autels et les braseros que le seigneur avait dans sa maison »*. Sur ces autels domestiques devait être placé un élément symbolisant le défunt auquel on rendait régulièrement hommage. Motolinfa mentionne à propos des seigneurs qu'apres le cabo del año, «... chaque année ils rendaient hommage devant la boite, et alors ils sacrifiaient des cailles ou des lapins, des oiseaux et des papillons et ils mettaient devant la boite et l'image beaucoup d'encens et des offrandes de nourritures »“!. A quelle boîte et à quelle image fait-il référence? Certainement pas au réceptacle contenant les cendres du défunt, sa pierre-cœur et ses mèches de cheveux puisque celui-ci était inhumé comme le rapportent d'autres textes et comme en témoignent les excavations de matériel funéraire du Templo Mayor“. Par contre, on se rappelle qu'on faisait une image du défunt lors de la cérémonie dite de quitonaltia et c'est donc certainement cela qui servait de support à tous les hommages qu'on lui rendait*. Pour le monde maya, Landa atteste d'une pratique comparable mais plus élaborée où l'image du mort est une statue qui contient des éléments physiques du défunt:

39.

B. de SaHacún,

ToRQUEMADA,

Historia,

Monarquía,

I, p. 239-240;

Ibid., Florentine

Codex,

Il, p. 131-132;

J. de

ll, p. 279.

40. J. de TORQUEMADA, Monarquía, Il, p. 521. 41. T. MoroLiNiA, Memoriales, p. 305-306. 42.

B. de SAHAGÜN,

ofrendas

del Templo

Historia,

1993;

Historia,

Mayor

X. CHAVEZ

p. 330;

Ibid., Florentine

de Tenochtitlan,

BALDERAS,

Rituales

Mexico, funerarios

Codex,

UI, p. 45;

Instituto Nacional

L. López

LujAN, Las

de Antropología

e

en el Templo Mayor de Tenochtitlan,

Mexico, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 2007. Motolinía ne mentionne pas de mise en terre de la boîte qui contenaient les mèches de cheveux, la pierre cœur et les résidus de la crémation, Memoriales, p. 330. 43. T. MorouiNiA, Memoriales, p. 305-306; B. de Las Casas, Apologética, II, p. 463; G. de MENDIETA, Historia, p. 163; J. de TORQUEMADA, Monarquía, Il, p. 522; El Códice Tudela, fol. 58r, p. 421.

166

Cérémonies post-funéraires et hommages aux défunts chez les Aztéques

...Ils mettaient les cendres dans des statues creuses, faites de terre, quand [les

défunts] étaient des grands seigneurs. Les autres gens importants faisaient à leurs parents des statues de bois, auxquelles ils laissaient l'occiput creux, et ils brülaient une partie du corps et mettaient les cendres dedans et bouchaient; et ensuite ils arrachaient le cuir de l'occiput et ils le collaient là, et enterraient

les restes comme de coutume ; ils gardaient ces statues avec grande révérence entre leurs idoles“,

Les «images» des défunts devaient étre nombreuses puisque représentant les ancétres disparus, et regroupées dans une piéce de la maison. C'est du moins ce que l'on peut imaginer à partir des données transcrites par Durán à propos des offrandes réalisées par les femmes des guerriers partis en expédition: ...Dans cette pièce elle sortaient les ossements des prisonniers que leur mari avait capturé à la guerre et elles les enveloppaient dans des papiers et les accrochaient aux poutres, et ensuite elle prenaient un brasero et faisaient de la lumière et elles mettaient de l'encens et elles posaient le brasero sous les os longs et devant toutes les autres petites idoles qu'ils avaient, qui étaient inombrables et elles les encensaient*.

La pratique d'honorer des «images» de ses défunts semble avoir perduré avec la colonisation. Dans les procès d'inquisition, un certain Don Juan est accusé d'avoir, à la mort de sa sceur, fait une statue à son image à laquelle il rendait régulièrement hommage avec des offrandes de nourriture, chocolat, fleurs et vin“. Les rares indications que fournissent les sources sur le «culte aux ancêtres » concernent les seigneurs et, par conséquent, il est difficile de savoir si cette pratique concernait toutes les couches sociales de la population ou seulement les ancétres «illustres », c'est-à-dire les nobles et seigneurs. « Divinisation » de certains défunts

Après avoir présenté comment les défunts étaient honorés dans le cadre communautaire et privé, nous voudrions nous intéresser aux liens que les vivants entretenaient avec certains disparus que leur fonction sur terre ou leur fagon de mourir dotait d'un statut particulier, à savoir les seigneurs, les Tlaloques, les Cihuateteo et les sacrifiés. Les seigneurs Le cadavre du tlatoani de Tenochtitlan était habillé successivement des parures de Huitzilopochtli (ou Tlazolteotl), Tlaloc, Yohuallahuan (aspect de

44. D. de Lanpa, Relación de las cosas de Yucatán, À. M. GARIBAY K. (éd.), Mexico, Porrúa, 1986, p. 59-60. 45. D. Durán, Historia, II, p. 164-165. Voir aussi J. de TORQUEMADA, Monarquía, II, p. 298; Códice Tudela, fol. 15r, p. 409. 46. Processos de Indios idólatras y hechiceros, L. GONZALES OBREGON (éd.), Mexico, Secretaría de Relaciones Exteriores, Publicaciones del Archivo General de la Nación vol. 3, 1912, p. 202.

167

Nathalie Ragot

Xipe) et Quetzalcoatl”. Le fait de revêtir le corps du roi d’un vêtement caractéristique d’une ou de plusieurs divinités soulève la question de sa possible déification dans l'au-delà. Interrogation renforcée par le fait que les rois et les seigneurs étaient de leur vivant des personnes extraordinaires puisque les représentants des divinités, leurs ixiptla; ils étaient «mis à leur place», «ils étaient leurs dossiers, leurs flütes». Considéré comme l'oreille et la voix de la

divinité sur terre, le tlatoani ne pouvait pas étre regardé dans les yeux, seuls d'autres rois avaient ce privilège. Certaines informations fournies par les chroniques vont dans le sensd'une déification post-mortem des seigneurs et des rois: ...Ils couvrirent tout le corps de bitume divin. Ainsi le roi Ahuitzotl resta consacré dieu et canonisé au nombre des dieux^.

...Ils l'appelérent Teotihuacan parce que c'était le lieu d'enterrement des seigneurs. [...] Le défunt était ainsi appelé à sa mort: si c'était un homme on lui donnait le nom divin de Cuecuextzin; si c'était une femme, on l'appelait Chamotzin. [...] Les vieillards disaient: «celui qui est mort est devenu dieu ». Quand ils disaient «1l est devenu dieu », cela veut dire qu'il était mort*°.

...Ils commencèrent à faire des statues aux hommes importants qui mouraient [...], ils leur faisaient des statues en mémoire de leurs hauts faits ; et après ils les adoraient comme dieux?!. ... Ce mois là [hueymiccailhuitl]

ils donnaient le nom de dieu à leurs rois

défunts, et à toutes ces personnes insignes qui étaient mortes vaillamment dans les guerres où aux mains de leurs ennemis, et on leur faisait des sta-

tues (hacian sus idolos) et on les mettait avec leurs dieux en disant qu'ils s'en étaient allés au lieu de leurs délices et de leurs récréations en compagnie des autres dieux”,

Ces références peuvent effectivement étre interprétées comme des témoignages évidents de la déification post-mortem du roi, voire des grands seigneurs. Néanmoins, comme le souligne Brundage, si la croyance en la déification du roi existait vraiment il ne pouvait s'agir que d'un dieu sans juridiction et sans pouvoir?. En dépit des honneurs funéraires dont on

47.

H. ALVARADO

TEzozoMoc,

Crónica

Mexicana,

p.

455;

D. Durán,

Historia,

II,

p.

298;

M. GRAULICH, Mythes et rituels, p. 262. 48. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, VI, p. 41-55; B. de Las Casas, Apologética, IT, p. 378; A. Lórgz AUSTIN, Cuerpo humano, vol.1, p. 459; M. GRAULICH, «La royauté sacrée chez les Aztèques de Mexico»,

103. 49.

Revista Española

de Antropología Americana

28 (1998), p. 99-117,

102-

D. Durán, Historia, II, p. 394.

50. Mythes

B. de SAHAGON, et pensée

Florentine

religieuse

des

Codex,

X,

anciens

Mexicains,

p.

192;

A. Lórgz Paris,

AUSTIN,

IHEAL,

Les paradis Maisonneuve

de

brume.

&

Larose,

1998, p. 273. 51. D. Muñoz CAMARGO, Historia de Tlaxcala, L.. Reyes García (éd.), Mexico, Universidad Autónoma de Tlaxcala, 1998, p. 155. 52. J. de ToRouEMADA, Monarquía, IT, p. 298. 53. B. C. BRUNDAGE, The Jade Steps. A Ritual Life of the Aztecs, Salt Lake City, University of Utah Press, 1985, p. 197-198.

168

Cérémonies post-funéraires et hommages aux défunts chez les Aztéques

entourait les rois disparus, il n'existe pas de traces d’un culte officiel à leur sujet. Le défunt roi était un mort particulier puisque ixiptla de la divinité de son vivant et, comme tout mort méritant, il réussissait à vaincre la mort

pour renaître dans l'au-delà du soleil. Il passait ainsi du côté des dieux et devenait certainement une divinité mineure à leur cóté, assumant peut-étre la fonction de porteur du ciel**. Ajoutons que le défunt roi gardait certainement dans l'autre monde un statut spécial correspondant à son rang terrestre. Le riche trousseau funéraire et les accompagnants mis à mort pour le suivre dans l'au-delà devaient lui permettre de recréer son train de vie dans l'autre monde”. Les rois et seigneurs défunts étaient honorés en tant qu'ancétres mais rien ne laisse supposer qu'un culte s'organisait autour de leur mémoire avec statues à leur image, temple et sacerdotes dévolus à leur service. À ce propos, il est significatif que les fouilles du Templo Mayor n'aient pas mis à jour de sculptures représentant un t/atoani mexica ou du matériel traduisant une quelconque forme de culte aux défunts dirigeants. Certaines sources mentionnent des formes de culte aux ossements de chefs défunts, voir de communication avec eux au travers de reliques. Cependant, il s'agit de figures semi-historiques, d'hombre-dios, devenus les ancétres de la tribu et divinisés (Mixcoatl, Camaxtli, Quetzalcoatl, Huitzilopochtli) ou

encore des figures importantes des récits de pérégrination?*. Par exemple, aprés la mort de Huitzil, le chef des Mexicas, on fit de ses ossements un paquet sacré, tlaquimilolli, par l'intermédiaire duquel les pérégrinants pouvaient communiquer avec la divinité”. Dans le monde maya, ce sont les têtes des seigneurs Cocom auxquelles on réservait un traitement particulier. Après l'avoir cuite et dépouillée de ses chairs, la téte était coupée en deux et on ne gardait que la face, l’arrière de la tête étant reconstitué avec du caoutchouc. Ces tétes retravaillées étaient placées à cóté des statues des ancétres et des dieux et honorées les jours de fétes?*. A notre connaissance, les dépouilles des tlatoque historiques de Tenochtitlan ne faisaient pas l'objet d'un culte.

54. M. GRAULICH, Mythes et rituels, p. 261-262. 55. N. Raaor, Les au-delàs aztéques, p. 68-70. 56. A. Lórgz AUSTIN, Hombre dios, religión y política en el mundo náhuatl, Mexico, Universidad Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Históricas, 1989, p. 105-127. 57. C. DEL CasriLLo, Fragmentos de la obra général sobre historia de los Mexicanos, F. del Paso v Troncoso (éd.), Florence, 1908, p. 92. Voir aussi: A. TELLO, Libro segundo de la Cronica miscelànea en que se trata de la conquista espiritual y temporal de la santa provincia de Xalisco, Guadalajara, Imprenta de la Republica Literia, 1891, p. 30; A. DE HERRERA, Historia general de los hechos de los castellanos en las islas y tierra firme del mar oceano, Decada Tercera, Madrid,

1726, p. 101. Il faut souligner la différence entre les bultos mortuarios, qui sont les paquets funéraires réalisés autour des corps des défunts, et les aquimilolli, qui sont les paquets sacrés faits à partir des restes matériels des divinités et auquels on rendait un culte à l'intérieur des temples. Voir G. OLIVIER, «Les paquets sacrés ou la mémoire cachée des Indiens du Mexique Central (xv*-xvr* siècles) », Journal de la Société des Américanistes 81 (1995), p. 116. 58. D. de LAwDA, Relación de las cosas de Yucatán, p. 59-60; A. Lórgz AUSTIN, Hombre dios, p. 140.

169

Nathalie Ragot

Tlaloques et Cihuateteo

D’autres défunts peuvent être considérés comme des divinités mineures dotées d’une certaine influence sur la vie quotidienne des hommes et auxquelles était rendu un véritable culte. Nous avons déjà mentionné que les élus de Tlaloc, c’est-à-dire tous ceux qui mouraient d’une façon ou d’une maladie en rapport avec l’eau (noyade, foudroiement, goutte, lèpre, etc.), devenaient des Tlaloques. Par conséquent,

ils bénéficiaient du culte rendu à ces divinités dont les sources décrivent divers aspects lors des fêtes de Tepeilhuitl, Atlcahualo, Atemoztli ou Etzalcualiztli?.

Autre catégorie de défunts qui acquérait un statut particulier dans l'audelà : les femmes mortes en premières couches. Assimilées à des guerrières mortes au champ d'honneur de l'accouchement, leur trépas leur valait le titre de Cihuateteo, « Femmes divines». Elles rejoignaient l'au-delà Cihuatlampa où elles accompagnaient le soleil du midi au soir. La nuit, elles descendaient sur terre et leur venue était particuliérement redoutée à certaines dates car elles amenaient avec elles d'horribles maladies et s'attaquaient aux humains. Ces jours-là, nous l'avons vu, leurs autels étaient particulièrement décorés?? et on peut vraiment parler d'un culte aux Cihuateteo. Celui-ci est également attesté par les remarquables sculptures en pierre les représentant‘. A deux pátés de maisons du Grand Temple de Mexico-Tenochtitlan, prés du croisement des actuelles avenues du 16 Septiembre et Isabel la Catolica, en 1907,

furent mises au jour quatre sculptures de Cihuateteo qui pourraient bien indiquer l'emplacement d'un temple dédié à leur culte?. Les guerriers morts au combat et les sacrifiés

Le glorieux trépas des guerriers tombés au champ d'honneur ou sous le couteau du sacrificateur leur donnait accés à la Maison du Soleil, au-delà

privilégié. Ils entraient ainsi dans le monde des dieux, sans pour autant faire l'objet d'un culte. Cependant, il est intéressant de souligner que tant la communauté que le sacrifiant, c'est-à-dire le «propriétaire» du sacrifié, continuaient à entretenir un rapport particulier avec ces défunts par l'intermédiaire du malteotl et du tzompantli.

59. 60.

B. de Sanacún, Historia I, p. 176-178, 199-209, 239-241, 254-255. Cf. supra. B. de SAHAGÚN, Historia I, p. 79, 170-173, 356, 371, 392, 400, 408-409;

Florentine in

Codex,

Mesoamerican

l, p.

19,

II, p. 36-38,

Linguistics

and

IV, p.

10, 41,

Archaeology,

81, 93,

J. E. S.

107;

E. SELER,

ThomPson,

Collected

F. B. RicHARDSON

Id.,

Works (éd.),

Lancaster, California, Labyrinthos, 1996, vol. 3, p. 154. 61. Voir Dioses del México antiguo, Mexico, Antiguo Colegio de San Idelfonso, Instituto Nacional de Anthropología e Historia, 1996, cat. 210, 211 ; Aztecs, Londres, Royal Academy of Art, 2002, cat. 143, 144, 145.

62. S. Mareos HIGUERA, «Herencia arqueologica de México-Tenochtitlan. Catálogo », dans E. Maros MocTEZUMA (Coord.), Trabajos arqueológicos en el centro de la ciudad de México (Antología), Mexico, Secretaría de Educación Pública, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1970, p. 226-227; H. B. NicHoLson, E. QUIÑONES KEBER, Art of Aztec Mexico. Treasures of Tenochtitlan, Washington, 1983, p. 68.

170

Cérémonies post-funéraires et hommages aux défunts chez les Aztéques

Le sacrifiant établissait un lien unique avec la victime sacrificielle qui se prolongeait après la mise à mort. Lors de la fête de Xocotl Huetzi, la veille du sacrifice, on coupait une mèche de cheveux à la future victime. Le sacrifiant gardait précieusement cette relique capillaire dans une boite en roseau appelé tzonpetlacalli, «coffre des cheveux ». Il «... Pacerochait aux poutres de sa maison, en un endroit public pour qu'on sache qu'il avait capturé à la guerre: tout le temps de sa vie il le laissait accroché »9. Les propriétaires des sacrifiés mis à mort lors de la fête de Tlacaxipehualiztli gardaient Pos long de la jambe. Le fémur était enveloppé dans de multiples papiers et mantas, formant ainsi une sorte de «paquet sacré», orné d'un masque et suspendu dans une pièce de la maison aux côtés des images des ancêtres‘. On l'appelait malteotl, «dieu captif»9 et on l'honorait régulièrement par des fumigations ou des offrandes alimentaires$9. Les os des captifs pouvaient également participer à des cérémonies. La Relación de Michoacán mentionne «la fête de Hunisperaquaro, quand on veillait avec les ossements des captifs dans les maisons des prétres. [...] Et le sacrificateur entrera pour raconter l'histoire des ossements et tous commenceront à chanter »*". En plus de signaler à tous la vaillance de son propriétaire*, le paquet malteotl semble également avoir possédé la vertu de le protéger dans ses expéditions militaires de son vivant et de l'aider dans l'au-delà aprés son trépas. Selon Durán, quand un guerrier était au loin, sa femme cessait de se laver visage et cheveux en signe de deuil et de tristesse et balayait la nuit en signe de pénitence. Elle faisait des offrandes et encensait les malteotl de son époux tout en priant «le seigneur de tout ce qui existe, du ciel, de la terre, de l'air, du soleil, de l'eau, de la nuit et du jour » d'épargner la vie de son époux. A sa mort, le propriétaire du malteotl ou des dépouilles de sacrifiés (cheveux,

papier, vétements)

voulait étre brülé ou enterré avec, enmenant

63. B. de SAHAGÚN, Historia, I, p. 225; Ibid., Florentine Codex, Il, p. 114. La pratique est aussi mentionnée pour les fêtes de Toxcatl et Tlacaxipehualiztli : Códice Tudela, fol. 20r, p. 408, 412; « Costumbres, Fiestas», p. 43, 47; J. B. Pomar, «Relación de Texcoco », p, 63. 64. D. Durán, Historia, II, p. 164-165. 65. De maltia, «faire prisonnierquelqu'un» et teotl, «dieu», R. SIMÉON, Diccionario de la lengua náhuatl o mexicana, Mexico, siglo xxi, 1994, p. 252, 490; B. de SAHaGÚn, Florentine Codex, II, p. 60, illustration n°12. 66. «Costumbres, Fiestas», p. 47; El Conquistador Anonymo, Relación de algunas cosas de la nueva

espana,

y de la gran ciudad de Temestitán México, J. GARCÍA

ICAZBALCETA

(éd.), Mexico,

Colección de Documentos para la Historia de México, 1858, p. 386; J. B. Pomar, «Relación de Texcoco », p. 63; B. de SAHaGún, Florentine Codex, ll, p. 60; Ibid., Historia, I, p. 186-187. Voir l'illustration 12 du livre II du Codex de Florence. 67. J, ALCALÁ, Relación de Michoacán, J.M.G. Le CLezio (éd.), Paris, Gallimard,1984, p. 198.

68. Le corps du sacrifié était mangé «... salvo los huesos, que se les quedaba por trofeo y serial de su esfuerzo y valentía, poniendolos en su casa, en parte donde los que entrasen los pudiesen ver» (J. B. Pomar, «Relación de Texcoco», p. 63). Aussi B. de SAHAGÚN, Historia, I,

p. 225. 69.

D. DurAN, Historia, ll, p. 164-165.

171

Nathalie Ragot

ainsi avec lui les preuves de sa vaillance terrestre”. Ces reliques devaient lui apporter de l’aide durant son voyage dans l’inframonde, voyage dont l’un des obstacles était le passage du vent d'obsidienne, itzehecayan, où le vent coupe comme des couteaux. Les dépouilles des captifs que le défunt avait pris le

protégeaient pour ne pas qu'il souffre/!. Un autre usage intéressant d'une partie du corps du sacrifié est celui réservé à sa téte exposée sur le tzompantli. Le tzompantli était une plateforme en pierre sur laquelle s'élevait une structure en bois composée de madriers disposés verticalement et réunis entre eux par des perches horizontales. Sur ces perches, des tétes ou des cránes étaient enfilés transversalement par les tempes". Le tzompantli apparait comme un instrument de prestige pour les guerriers aztéques, le prolongement de la mort glorieuse sur le champ de bataille. | Dans une grotte à Ixtapantongo, Etat de Mexico, une peinture rupestre de l'époque Post-classique représente une femme décapitée à cóté d'un arbre d’où pendent des crânes et des bannières. C'est une des représentations les plus anciennes d'un tzompantli". Cette image de l'arbre à cránes n'est pas sans rappeler l'épisode du Popol Vuh où Hun et Vucub Junajpu, père et oncle des futurs jumeaux, sont convoqués au Xibalba pour affronter les puissances de l'inframonde sur le terrain de jeu de balle. Ils tombent dans les pièges tendus par les seigneurs du Xibalba et sont mis à mort. La téte de Hun Junajpu est coupée et accrochée à la fourche d'un arbre, lequel se met immédiatement à donner des fruits semblables à des calebasses. Inquiets de la fertilité soudaine de cet arbre, les seigneurs de Xibalba en interdisent l'accés mais Xquic, la fille de l'un d'entre eux, s'en approche quand méme. La téte/fruit de Junajpu lui crache dans la main et la met enceinte ^. Le tzompantli est comme un arbre à cránes et les tétes accrochées à ses branches sont comme des fruits”. Los est comparé au noyau du fruit, il est future semence”.

70.

«Costumbres,

Florentine

Codex,

Fiestas»,

p. 43;

Códice

Tudela,

fol.

15r,

p. 408-409;

B. de

SAHAGÚN,

Il, p. 49, 114: Ibid., Historia, I, p. 327-328.

71. B. de SAHAGÜN, Historia, I, p. 327-328. 72. A. de TapiA, Relación, J. GARCÍA ICAZBALCETA (éd.), México (“Colección de Documentos para la Historia de México"), 1866, II, p. 583; B. Diaz DEL CasriLLo, Historia verdadera de la conquista de la Nueva Espana, J. RAMIREZ CABANAS (éd.), Mexico, Porrúa, 1977, I, p. 182-183; E. GALDEMAR, «Le Tzompanili. Lieu où les têtes chevelues coupées sont alignées», Mémoire de DEA, Université Paris I, 1988, p. 12; N. Racor, «Les Tzompantli de Tenochtitlan », dans J. ConTEL (éd.), Mémoire d'ici et d'ailleurs. Hommage à Ernest T. Hamy (1842-1908), sous presse. 73. Códice Vaticanus A, pl. 57r, p. 265; T. MoroLiNiA, Memoriales, p. 74. 74. A. VILLAGRA CALETI, «Mural Painting in Central Mexico» dans R. WAUCHOPE, G. R. WiLLeY (éd.), Handbook of Middle American Indians, Austin, University of Texas Press,

1971, vol. 10 (1), p. 135-156, fig. 27. D'autres exemples d'arbres à cránes apparaissent dans les codex (Codex Borgia, pl. 19, 45, 49, 50, 51, 52). 75. Popol Vuh, El libro del albor de la vida y las glorias de dioses y reyes, D. TEDLOCK (éd.), Mexico, Diana, 1993, p. 102-106. 76. M. GRAULICH, Le sacrifice humain, p 265-267, 321. 77,

172

M.

GRAULICH,

Mythes

et rituels, p. 113.

Cérémonies post-funéraires et hommages aux défunts chez les Aztéques

Les têtes des captifs/guerriers sacrifiés sont accrochées sur le tzompantli, comme les fruit d’un arbre, pour signifier leur future renaissance. Comme l’a proposé Guilhem Olivier, c’est peut-être avec une signification similaire que le malteotl était suspendu dans le patio des maisons des guerriers#. Il est bien démontré que pour les Aztèques la mort n’était pas l’anéantissement de tout mais le début d'un processus de renaissance. L'aspect fécondant de la mort, si nette dans les mythes, apparait également dans les rapports avec les défunts. On faisait appel à eux en Huey Miccailhuitl pour féconder la terre et assurer la continuation du monde, les ossements des guerriers défunts étaient suspendus comme des fruits dans le possible espoir de leur «renouvellement ».

78.

G. OLIVIER,

Mexique»,

«Le

cerf et le roi: modèle

sacrificiel

Journal de la Société des Américanistes

94-1

et rite d'intronisation

dans l'ancien

(2008), p. 200.

173

LOS MESES DOBLES EN EL CALENDARIO MIXE Y SUS IMPLICACIONES PARA EL ESTUDIO DE LAS FIESTAS EN MESOAMÉRICA

Gustavo TorRES CISNEROS Misión Permanente de México ante la ONU,

Ginebra

Introducción'

Algunos estudiosos de la religión mesoamericana piensan, no sin razón, que las fiestas católicas de hoy en día recubren antiguos y complejos rituales de origen prehispánico: por ejemplo los ritos de siembra, la celebración de los muertos, las primicias del maíz, los sacrificios en los campos y, de manera más evidente, rituales como el del palo volador, hoy enmarcado por la industria del turismo. En la mayoría de los casos no ha quedado claro si estos ritos corresponden a una estructura calendárica, así sea ésta parte del cristianismo, o bien si se trata sólo de survivals que han perdido su carácter estructural. Entre los mixes tenemos un campo privilegiado para abordar tales cuestiones. Primero porque los mixes son un pueblo indígena relativamente aislado, que pudo haber preservado muchas tradiciones antiguas; segundo, porque entre los mixes existe todavía, aunque con algunas aberraciones, el calendario mesoamericano, es decir, el calendario adivinatorio de 260 días, y

el calendario anual de 365 días ; además por supuesto del calendario cristiano sobre el cual se basa la mayoría de los rituales públicos. Estas condiciones, me parece, nos permiten preguntarnos: ¿el calendario mixe era el mismo que el azteca o el maya? ¿Los mixes conocían los mismos ritos que estos pueblos? ¿El calendario católico reemplazó o recubrió los ritos del calendario mixe”? ¿Cómo funcionaba este calendario? ¿Los mixes

1. Este artículo forma parte de una investigación más amplia, dirigida por Michel Graulich (Sección de Ciencias Religiosas de la EPHE), y a quien el autor desea rendirle homenaje con esta modesta contribución. Cf. G. Torres, «Les Visages de Soleil et Lune. Configurations calendaires, mythiques et rituelles du temps chez les Mixes de l'Oaxaca, Mexique», Paris, Thèse de Doctorat, École Pratique des Hautes Études, Section des Sciences Religieuses, 5* Section, Sorbonne, 2001.

175

Gustavo Torres Cisneros

ajustaban o no su calendario ritual al año real? ¿Cuál era la finalidad de este calendario? Es del dominio general que una de las grandes creaciones de la civilización mesoamericana fue su sistema de cómputo del tiempo. Este consistió en la combinación de varios calendarios : el adivinatorio de 260 días que combina 20 signos con 13 numerales, y el calendario anual de 365 días compuesto de 18 meses de 20 días más 5 días aciagos; también

se tenía conocimiento del

ciclo venusino de 584 días?. En este artículo me referiré sólo al calendario anual, agrícola, de 365 días,

de los mixes de Oaxaca. Mis objetivos son dos: primero, tratar de ordenar y, hasta donde sea posible, hacer inteligible este calendario, que no ha sido estudiado sistemáticamente ; propondré una correlación mes a mes con el calendario azteca y maya, y expondré algunos de sus problemas y aberraciones. Segundo, se ha pensado, erróneamente, que el calendario mixe es sólo agrícola. Deseo mostrar que éste sí tenía un contenido ritual; sugiero, a manera de hipótesis, que dicho calendario anual fue «vaciado» de sus rituales en el proceso de evangelización, cuando se confrontó con el calendario cristiano y sus problemas de ajuste por medio de los bisiestos. El calendario mixe anual como calendario ritual

Pueblo indígena de antigua tradición mesoamericana, los mixes se localizan al noreste del Estado de Oaxaca y al sur de Veracruz. Con los zoques y los popolucas forman la familia lingüística mixe-zoque cuya forma

2.

Puede

nos ocupa:

consultarse

la siguiente

R. ACUNA,

«Calendarios

con los Calendarios

Mayas»,

lista,

Estudios

no

exhaustiva,

Antiguos

de

literatura

sobre

del Altiplano de México

de Cultura Náhuatl

el tema

que

y su Correlación

12 (1976), p. 279-311;

J. BRoDA,

« The mexican calendar as compared to other mesoamerican systems», Acta Ethnologica y Linguistica 15 (1969); P. Carrasco, W. MILLER, R. WEITLANER, «El Calendario Mixe», El México antiguo IX (1959), p. 153-172; A. Caso, «El Calendario Mixe», Revista Mexicana de Estudios Antropológicos XIX (1963), p. 63-74; A. Caso, «Calendrical systems of Central Mexico», en R. WauchorE (éd.), Handbook of Middle American Indians, Austin, University of Texas

Press,

1971,

vol.

10, part.

1, p. 333-348;

B. N. CoLby,

L. M.

CoLaY,

The

Daykeeper.

The Life and Discourse of an Ixil Diviner, Cambridge, Massachusetts and London, Harvard University Press, 1981; M. Enmonson, The Book of the Year. Middle American Calendrical Systems, Salt Lake City, University of Utah Press, 1988; M. EpMoNsoN, Sistemas Calendáricos Mesoamericanos. El Libro del Ano Solar ("Serie de Culturas Mesoamericanas" 4), México, Instituto de Investigaciones Históricas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1995; G. GossEN, «A Chamula Solar Calendar Board from Chiapas, Mexico», en N. HAMMOND (éd.), Mesoamerican Archaeology. New Approaches, Duckworth, London, 1974, p. 217-53; E. De JoNGHE, «Le calendrier mexicain: essai de synthèse et de coordination», Journal de la Société des américanistes de Paris 3 (1906), p. 197-227; B. TEDLOCK, Time and the Highland Maya, Albuquerque, University of New Mexico Press, 1993 [1982]; R. TENA, El Calendario Mexica y la Cronografía ("Colección Científica, Serie Historia"), México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1992 [1987]; I. WEITLANER, «A Chinantec Calendar», American Anthropologist, N.S., 38-2 (1936), p. 197-201; R. WEITLANER, L.Jouwsow, «The Mazatec Calendar », American Antiquity 11-3 (1946), p. 194-197.

176

Los meses dobles en el calendario mixe

primitiva, el proto-mixe-zoque, segün autores como Kaufman y Justeson, fue la lengua hablada por los olmecas arqueológicos". Entre los mixes ha sido posible encontrar todavía el antiguo calendario que, se dice, rige las actividades agrícolas a lo largo del año. Incluso para Walter Miller, quien encontró el calendario adivinatorio de 260 días en Camotlán, su existencia le fue desconocida^*.

Fue en diciembre de 1953, en San Juan Mazatlán, que Irmgard Weitlaner descubrió por vez primera este calendario agrícola. Algunos meses más tarde, en mayo de 1954, Walter Miller y el padre de Irmgard, Roberto Weitlaner, se dirigieron al mismo pueblo para profundizar en la información. En esa época, Villa Rojas? escribía que los datos colectados estaban todavía inéditos y que Roberto Weitlaner iba a darlos a conocer en un proyecto futuro de carácter comparativo que nunca vio la luz. A partir de este momento otros calendarios agrícolas fueron reportados por los etnólogos que trabajaban en la región. Limitándose a las tierras bajas mixes, la distribución de este calendario está más restringida que la del calendario adivinatorio. De las seis versiones conocidas en total, tres provienen de Mazatlán, una de Chiltepec y dos de Guichicovi. Sin embargo, pienso que el nümero es inferior. En principio, la versión de Chiltepec (agencia de Mazatlán) dada por Beulink parece ser una copia de la primera versión de Mazatlán. Luego, las dos versiones de Guichicovi y Piedra Blanca parecen provenir de la misma fuente. Así, se tendrían hasta ahora cuatro versiones diferentes, de las cuales tres de Mazatlán y una de Guichicovi.

3. Cf. L. CAMPBELL, T. KAUFMAN, «A Linguistic Look at the Olmecs», American Antiquity 41-1 (1976), p. 80-89. También: G. Torres, Méj Xéew. La Gran Fiesta del Señor de Alotepec, México, Comisión Nacional para el Desarrollo de los Pueblos Indígenas, 2003; G. TORRES,

Mixes de Oaxaca (“Monografías de Pueblos Indígenas"), México, Comisión Nacional para el Desarrollo de los Pueblos Indígenas, Programa de las Naciones Unidas para el Desarrollo, 2004. 4. W. MiLLER, en «Algunos manuscritos y libros mixes en el Museo Nacional», en Tlatoani 1-2 (marzo-abril, 1952), p. 34, escribía: «es de interés notar que los mixes no recuerdan — o

niegan saber — los nombres mixes de “tiempos” o “meses” que antiguamente habrán usado y que habrán de corresponder a los 13 grupos de 20 días». Hay un error evidente, se debe leer: 18 grupos de 20 días. A. ViLLa Rojas en sus «Notas Introductorias» a los Cuentos Mixes de W. MiLLER

("Biblioteca

del

Folklore

Indígena”

2), México,

Instituto

Nacional

Indigenista,

menciona esta cita bajo un tono de reproche, pero Miller tenía razón sin duda cuando hablaba de Camotlán donde el calendario de 365 había sido olvidado. 5. A. VILLA Rojas, «Notas Introductorias », p. 47-48.

177

Gustavo Torres Cisneros

I. Guichicovi (W. y W. ;

II. Mazatlán A (Villa Rojas)

Fechas

Mann) 1

2

|Muh

Se pizca maíz

kahpud/Muuj cajpud

de temporal y se machetea y se siembra chahuite

|Hakkahpud/Jak | Mismas ocupa-

cajpud

3

ciones y se pizca el café.

|Muh shruwu'u/Muj shuwü

Mismas ocupa| ciones del mes anterior.

Muj kaj-pu'ut ipts

| Sesiembra yuca,

| «humedad»

| 1/20/XI

malanga, camote y caíía. Se cosecha maíz de temporal

Jak kaj-pu'ut lipts | Las mismas

| «más humedad»

21 XI/10

| ocupaciones que el | XII. anterior

Muj shruwu'u ipts | Se empieza a rozar| 11/30 XII «hay sol» «calor »| o preparar la milpa llamada chahuite o de sol (tonamil en otras partes)

4

|Hak

shruwu'u/Jak shuwuü

X

Mismas

Jak shruwu'u ipts

ocupaciones y

«más sol»

| como en el anterior 31 XII/I9 I

se siembra frijol,

también café pero se cree que no producirá mucho. 5

|Kudyuush

Últimas siembras | Ta'ak'an ipts de chahuite. «menos calor» «el tiempo

Continúan | las mismas ocupaciones

20 1/8 II

| Tiempo de

9-28 II

caliente pasa»

6

|Taag am

Se deshierba el

[pts tugú'u «que

chauite y se baja el| entra». «entrar en| desyerbar la café cortado un rincón de la | «milpa del sol» casa o de bosque »

7

|Nuudz

se roza para el temporal

Kudyuúsh ipts Nada especial. «murciélago», Ocupados «donde comienza» en pequeños «el principio»

8

9

| Muh kaa/Muj kaá

|Ishtuguü

Se sigue rozando y se siembra la

menesteres

Se siembra plátano. Se inicia

milpa jaguem

la roza de la nueva

gaam. Mismas ocupa-

milpa de temporal Se quema y se

ciones en jaguem

gam y en las vegas de los ríos para que la milpa esté ya seca antes de los crecimientos

178

| Muj kaa ipts «tigre»

Nuudzí'i ipts | «calabaza»

1/20 III.

siembra

21 111/9 IV

10/29 IV

Los meses dobles en el calendario mixe

III. Mazatlán B (Lipp) Mih kaHpu"t «gran pueblo»

Fechas

Este y los siguientes 3 meses se | 15 X/3 XI |refieren a los primeros pueblos mixes que marcaron la ruta de peregrinación. Clima frío,

IV. Mazatlán C| Fechas (Duijnmeijer) Méj kajpu'ut | 16 X/4 XI

se cosecha maíz, se queman

Hak kaHpu"t «pueblo negro»

Mih Sohwi «gran

árboles gruesos. Se cosecha maíz ; se prepara el | 4/23 XI Jaag kajpu'ut | suelo para la siguiente siembra; se cortan los arboles para descomposición Se prepara el suelo para planta- | 24 X1/13 XII | Méj¡ xuwe'& ción de primavera; se plantan

|5/24 XI

|25 XI/14 XI

roble » (large oak árboles y arbustos ; las aves

grove)

comen mucho maíz y frutas

Hak Sohwi

La plantación de arbustos

«chêne noir » (roble negro)

continúa; se prepara la tierra; se cortan árboles

Kudyu:S «murciélago»

Los vampiros chupan mucha |sangre del ganado, signo de que se deben hacer ofrendas

14 dic/21

Jaag xuwe'& || 15 XII/3I

[3-22 1

Ta'agam

4-23I

23 1/11 II

Méj kaa

24 1/12 II

Ipts tégé'é

13 11/4 III.

Kudyééxy

5/24 III

ala tierra; comienza el buen tiempo; se pizca el café; los

Mih ka: «gran jaguar»

árboles plantados florecen. | Mejora el tiempo; se planta maíz de invierno; se pizca café

Ipc tigi"«; en la | Buen clima; se planta el maíz casa?» de invierno

| 12 11/3 III

Ta:k am «lugar | Periodo «delicado» (ama :ysi) |4/23 III de tierras de mucha vigilancia; empieza la húmedas»

siembra del maíz de invierno; se

queman los M: ci"«calabaza| El maíz de de agua en las áreas (Cucurbita se queman

campos temporal se siembra | 24 111/12 IV hámedas y bajas; los campos.

| N&dsi'i

25 111/13 IV

moschata)»

179

Gustavo Torres Cisneros

10 | Muh shoosh/

Muj shosh

También para

sembrar la milpa

Muj shrooshr ipts

| «gran sorda »

de lejos jaguen

caam y se pizca el maíz de chahuite 11 | Hak shoosh/Jak | Mismas shosh actividades 12 | Hootsoon/ Jootzon

13 | A'shroom/

Ashoom 14 | Ap

Se siembra chile,

La milpa está en su plenitud; se

30 IV/19 V

«milpa del sol ». Se siembra la

milpa de temporal Jak shrooshr ipts «más sorda »

Limpiando milpa | Jo tsoon ipts «ya de temporal y salió» o «ya sembrando piña — | cerró»

camote y piñas

| Cosechan la

| Azhro'om ipts

|Siguelasiembra

| Limpiando la milpa de temporal

|20 V/8 VI

9-28 VI

Tiempo de

29 VI/18

«montón de

sembrar chile y

VII

ramas »

camote

| Ap ipts

«abuelo»

|Tiempo de sembrar plátano

19 VII/7 — | VIII

siembra plátano;

en estos días hay mucho sol ;

15 | Nushamun/ Nushamuú

muchos rozan y siembran caña de azúcar Últimas siembras | Nushramú'u de piña. ipts «al lado del fuego»

16 | Muh oo/Myj 06 | Se limpia y se siembra frijol.

Muj oo ipts «color pinto» o «manchado »

17 | Hak oo/Jak 06

Jak oo ipts

| Mismas

actividades

18 | Tzadzook/ Tzadzoc Tzadzook

«más

color pinto »

Tiempo de sembrar frijol y caña | Continúa la

| 8-27 VIII

28 VIII/16 IX

17 IX/6 X

siembra de lo anterior y de « jicalpextle »

Empieza la pizca

|Tzadzókipts«si

|Lo mismo que el

de café en las

nos queremos

anterior

cercanías

mucho»

Días sobrantes,

Tzadzók unk

unk/Tzadzoc ung| muertos o menti|«elhijo del mes rosos que dicen la | anterior» verdad

180

Rozando para la | siembra de frijol

No se hace nada.

| Hay que cuidarse. Es tiempo «delicado »

|7-26 X

|27-31 X

Los meses dobles en el calendario mixe

MiA So:3 «gran | Se siembra el maíz; roza y sorda » quema

131V/2 V

Mé&j xoox

14 IV/3 V

Ha:k So: «más | Se planta maíz; durante estos

|3-22 V

Jak xoox

4-23 V

23 V/11 VI

Jodsoon

24 V/12 VI

12 VI/1 VII

| Axo'om

13 VI/2 VII

sorda »

meses se debe tener mucha precaución

Hoco:ñ

Se siembra maíz ; se cosecha

«l'estomac » maíz de tierras hámedas «hígado » o «abandonar (el trabajo rápidamente) » Aaso"m «boca» | Se siembra plátano, chile y o «montón de | tomate: se limpian los campos ramas » de maíz Ap Ipe Se siembra frijol, caña de «ancestro, azúcar y plátanos; se limpian viejo » los campos de maíz

NiSami «días de| Tiempo de relativa baja preciperro » « periodo | pitación; periodo de mucho seco, caliente» | peligro. Se limpian los campos de maíz ; «se anillan»

Ap ipts

322 VII

|22 VII/10 VIII

Né&xamé'é

23 VII/11 VIII

11/30 VIII

Méj oo

12/31 VIII

los

MiH o:

árboles para secarlos y luego cortarlos Se cosecha maíz de las áreas

«gran baño »,

húmedas; se queman árboles;

«catarro »

se acarrea madera para la construcción de casas Se siembra café; se prepara la

Hak o: «más

2-21 VII

[31 VIII/19 IX | Jag oo

1-20 IX

baños », « cuando| tierra; se cosecha maíz

se pudre un cuerpo (i.e. árbol)»

Mih ca :cok «gran piedra»

Se planta café; se cosecha maíz | 20 X/9 XI

Méj tsadso'k

|21 IX/10 X

Muc ça:çok, «pequeña piedra »

Periodo delicado, ninguna actividad realizarse; los que nazcan en este periodo estarán «encantados » y gozarán de buena fortuna

Mu tsadso'k

11-15 X

10-14 X

Tabla 1.

181

Gustavo Torres Cisneros

En la Tabla 1 resumo los datos disponibles sobre el calendario anual. Dejaré pasar por alto las connotaciones climáticas de los meses, ya que éstos no parecen corresponder a alguna estación del año. Tal y como se le ve ahora, el calendario mixe parece poseer un carácter agrícola similar al de los chinantecos, mazatecos, chiapanecos y nimuyas. Segün las palabras de Charles Mann, entre los mixes de las tierras bajas todas las fases de la agricultura están guiadas por este calendario: ... The calendar, based on the ancient Mesoamerican calendar, is made up of

eighteen twenty day months and is rigorously followed in cleaning the fields, planting, weeding and harvesting. Dispensing information as to what work should be done during particular twenty-day periods is one of several functions of the keeper-of-the-days, who has at his command both the agricultural and the ritual calendarsf.

Es este aspecto del calendario que hace afirmar a Villa Rojas que el calendario mixe ha controlado sin duda la vida práctica de los indios — es decir, los trabajos agrícolas —, razón por la cual el autor lo vincula con aquél descrito por el cura de Valladolid, Pedro Sánchez de Aguilar, en 1596: ...Esta cuenta de diez y ocho meses, y los seis días de Caniculares son los mismos 365 de nuestro año solar: seruianles de muchos vtiles, y particularmente para saber los tiempos en que auian de rozar sus montes, y abrasarlos, y esperar las aguas, y sembrar su trigo maiz, y las otras legumbres, que siembran en diferentes tiempos. Y como nuestros labradores en España obseruan tales, y tales dias, y dizen, Octubre echa pan, y cubre, y otros refrancillos. Assi no mas ni menos usauan, y vsan estos Indios sus refrancillos, en estos 18 meses,

y seis dias de Caniculares para sembrar y mirar por su salud, y curarse como nosotros en Verano, Estio, Otoño, y Inuierno?.

Pero no nos equivoquemos, esto puede ser verdad en el calendario actual que ha sido fijado al año real. Sin embargo, no se ve cómo un calendario que se desajustaba progresivamente con relación a las estaciones pudo controlar la vida práctica de los indígenas. Michel Graulich? ha demostrado que, en el siglo xvi, por ejemplo, los aztecas iban a buscar las ültimas mazorcas en los campos, para la recolección, mientras que ya no había mazorcas. Además, está más que probado que, sin la ayuda de este calendario agrícola, los indígenas han seguido desarrollando la agricultura del maíz.

6. Ch. E. Mann, College, 1958, p. Calendars Among 7. P. SÁNCHEZ DE

«Ethnography of the Lowland Mixe», M.A. Thesis, México, Mexico City 32; también: Ch. E. Mann, R. CHapwick, «Present-Day Use of Ancient the Lowland Mixe», Boletín de Estudios Oaxaquenos, 19 (1960), p. 3. AGUILAR, «Informe contra Indolorum Cvltores del Obispado de Yvcatan »,

en

Troncoso

F. del

Paso

Hechicerías

y

y

otras

(éd.),

Costumbres

Tratado Gentilicas

de

las de

las

Idolatrías, Razas

Supersticiones,

Aborígenes

de

Dioses,

México,

Ritos,

México,

Ediciones Fuente Cultural, 1953 [1639], p. 294. 8. M. GRAULICH, Mythes et Rituels du Mexique Ancien Préhispanique, Bruxelles, Académie Royale de Belgique, 1987; /d., Ritos Aztecas. Las Fiestas de las Veintenas, México, Instituto Nacional Indigenista, 1999.

182

Los meses dobles en el calendario mixe

En el calendario prehispánico azteca, el mejor documentado, los nombre de las veintenas hacen alusión, en su mayoría, a los ritos de tal o cual fiesta o

más raramente a los fenómenos climáticos (que permiten tratar de reconstituir un calendario ideal original). El calendario mixe conserva aün la estructura prehispánica de 18 meses de 20 días más 5 días pero, ¿su contenido es el mismo? En la reconstrucción que presento enseguida tendré la ocasión de mostrar que los nombre de los meses reflejan un origen prehispánico y que este calendario tenía mutatis mutandis, un contenido ritual como el de los mayas o el de los aztecas. Los meses «dobles»

Es de notar que, además del mixe, casi todos los calendarios mesoame-

ricanos comportan meses « pequeños » y « grandes» que forman pares; es a esta forma de los meses que llamo «estructura de los meses dobles ». La comparación de los calendarios anuales por medio de la estructura de los meses dobles no es nueva. Paul Kirchhoff? ya había llamado la atención sobre tal estructura del calendario mesoamericano en el 38? Congreso Internacional de Americanistas de Stuttgart y Munich de 1968. Comparó varios calendarios, incluido el mixe, pero su reconstrucción es muy confusa. Stewart!? por su lado, trató de probar la hipótesis según la cual, en la base del calendario anual, en Mesoamérica, se encuentra un calendario lunar.

Segün el autor, en las 18 veintenas observamos 10 meses que forman pares («chico» + «grande »), lo que reduce la lista a una cifra de 13 meses. Así,

encuentra que los meses que forman «pares» son: tozoztontlilhuey tozoztli, tecuilhuitontlilhuey tecuilhuitl,

miccailhuitontlilhuey miccailhuitl y pachtontlilhuey pachtli".

Julián H. Stewart prosigue su investigación comparando las listas de los calendarios

otomi,

matlatzinca,

tarasco, chiapaneco,

quiché,

cakchiquel

y

mixe. El autor tiene pues el mérito de haber tratado de encontrar la correlación entre los meses a partir de la estructura de los meses dobles. Pero si había tomado el buen camino, Stewart cometió algunos errores que no le

9. P. KiIRCHOFF, «Las 18 fiestas anuales en Mesaomérica : 6 fiestas sencillas y 6 fiestas dobles», Verhandlungen des XXXVIII Internationales Amerikanistenkongresses, Stuttgart-München, 12 bis 18 Augustus, 1968, Band III, München, Kommissionsverlag Klaus Renner, 1968, p. 207 y ss. 10. J. D. SrewaArT, «Structural Evidence of a Luni-Solar Calendar in Ancient Mesoamerica », Estudios de Cultura Náhuatl 17 (1984), p. 171-191.

11. El 5° grupo, según Stewart, sería tititl e izcalli de acuerdo con una glosa confusa de Cristóbal del Castillo. Nada demuestra que tititl e izcalli sean meses « gemelos», aunque dos dioses viejos, la vieja diosa lunar Ilamatecuhtli y el viejo dios del fuego Xiuhtecuhtli, fuesen celebrados en ellas. Por el contrario, los meses «gemelos»

quechollilpachtontli me parecen

cumplir esta función más fácilmente por los argumentos que veremos a continuación.

183

Gustavo Torres Cisneros

permitieron encontrar una solución satisfactoria, especialmente en el caso del calendario mixe". Algunos nombre de los meses del calendario mixe van acompañados de los prefijos méj («grande») y jak («todavía más, más») que se encuentran mutatis mutandis en los calendarios nahua, quiché, cakchiquel, tzeltal, otomi,

matlatzinca y tarasco, donde hay pares de meses que tienen el mismo nombre, pero uno «chico» y el otro «grande »!*. En el calendario mixe tenemos los pares siguientes : Muj kaj-pu'ut ipts | Muj shruwu'u ipts

| Muj shrooshr ipts

| Muj oo ipts

Jak kaj-pu'ut ipts

| Jak shrooshr ipts

Jak oo ipts

|Jak shruwu'u ipts

En el calendario azteca los meses « gemelos » son: Teotleco/pachtontli

Tepeilhuitl/huey pachtli

Tozoztontli

|| Tecuilhuitontli

| Miccailhuitontli/tlaxochimaco

| Huey tozoztli | Huey tecuilhuitl | Huey miccailhuitl/xocotl huetzi

Para abordar la cuestión es necesario partir de dos hechos: que el calendario mesoamericano no admitía intercalaciones y que éste se desajustaba a razón de un día cada cuatro años con respecto a las estaciones; y que en el siglo xvi las posiciones de las veintenas mexicanas y mayas no diferían entre ellas más de un día. O sea, que estos calendarios eran esencialmente los mismos y se habían empezado a desplazar a partir del mismo momento. Es natural imaginar entonces que entre los mixes esta misma correspondencia debió existir, pero no la conocemos. Hasta hoy nadie ha podido establecer una correspondencia mes a mes, tarea a la cual me voy a consagrar.

12. Stewart, p. 184 (Cuadro 5) observa que las listas matlatzinca y mixe presentan tres pares, aunque no se trate de los mismos.

Además,

la lista mixe mostraría una variación en relación

con el patrón nahua en que habría correspondencia con el par nahua formado por el 3° y 4° meses tozoztontli y huey tozoztli. Comparando el material de los mayas, Stewart encuentra «representaciones parciales» del patrón otomi, matlatzinca, tarasque, chiapaneco y mixe. Y agrega: «As far as I can see, the evidence of the Chiapanec and Mije lists consists of structural parallels without indications of either phonological borrowing from or semantic relationship to the Nahuan tradition». Si Stewart estaba en la buena dirección, ¿por qué se equivocó ? Primero, porque no le puso atención a los nombres de los meses mixes, pues veremos que hay una relación entre los meses oo (mixe) y uo (maya). Pero sobre todo porque tomó la lista de los meses mixes a partir de los días nefastos que hacen comenzar la serie de 18 meses. En su interés por encontrar los 13 meses de su hipótesis, Stewart descuidó estos importantes detalles. 13. Como, por ejemplo, miccailhuitl y huey miccailhuitl, que significan «pequeña fiesta de los muertos» y «gran fiesta de los muertos» o tozoztonili y huey tozoztli o aún pachtontli y huey pachtli. Los calendarios mayas de los tzotziles y tzeltales presentan también una duplicación de sus meses, lo que acontece también con los cinco últimos días del año. Entre los tzotziles, por

ejemplo, el 122mes muctazac, que pareciera significar « gran Zac» contrasta con el mes precedente zizac, probablemente «pequeño Zac». Cf. J. E. S. ThomPson, Maya Hieroglyphic Writing. Introduction, 2** ed., Norman, University of Oklahoma Press, 1960 [1950], p. 111, 118-119.

184

An

Los meses dobles en el calendario mixe

Sabemos que, hoy, el año mixe comienza el 1° de noviembre con el mes méj kaj puut (pero puede comenzar también el 15 y 16 de octubre según otras listas). En un momento dado el calendario mixe se fijó sobre el año cristiano. Como el año fue fijado, es legítimo tratar de establecer una correspondencia entre los meses mixes y los aztecas, no por sus nombres (pues estos no nos dicen nada por el instante) ni por sus fechas, sino por la estructura del conjunto, siempre respetando el orden de los meses. Después de varios intentos, he aquí la correlación que propongo y que, en mi opinión, se demuestra por la coincidencia de la estructura de los meses « gemelos » (ver Tabla 2). Si se hace coincidir lo mejor posible los pares de los meses del año mixe y azteca, se llega en efecto a la correspondencia establecida en la Tabla 2: Azteca

Maya

Mixe

Ochpaniztli

Zip

Tzatzok ipx «si nos queremos mucho »; Méj tzatzok

«gran piedra » Teotleco/ pachtontli | Zotz

Méj kajpu'ut ipx

Tepeilhuitl/huey pachtli

Zec

Jak kajpu'ut ipx «más humedad »

Quecholli

Xul

Panquetzaliztli

Yaxkin

Atemoztli

Mol

Tititl

Ch'en

«humedad», «pueblo grande»

Méj xééw ipx «hay sol», «calor», «gran roble» || Jak xééw ipx «más sol» Ta'ak'am ipx ? «menos calor », « el tiempo caliente pasa », «lugar de tierras húmedas » Ipx tugé ? «que entra », « entrar en un rincón de la casa o de la selva », «en la casa»

Izcalli

Yax

Kudyééxy ?

«murciélago », «donde comienza », «el

principio » Atlcahualo Tlacaxipehualiztli

Zac | Ceh

Mej kdá ipx? «jaguar», «gran jaguar» Néétzi i Ipx ? «calabaza »,

«calabaza de agua »

muctazac Tozoztontli

Mac

Huey tozoztli

Kankin

Toxcatl

Muan

Méj xoox ipx «gran sorda» | Jak xoox ipx «más sorda » Jo tsoom «ya salió », «está cerrado », «estómago »,

«hígado », Etzalcualiztli

Pax

«abandonar el trabajo rápidamente »

Axro'om ipx « montón de ramas », « boca »

Tecuilhuitontli

Kayab

Huey tecuilhuitl

Cumku

|Apipx «gran piedra »,

«ancestro », « viejo»

Miccailhuitontli/ tlaxochimaco

Pop

Méj oo ipx «color manchado o pinto», «gran baño », «catarro»

Huey miccailhuitl/xocotl huetzi

Uo

Jak oo ipx «más color pinto », «más baños», «cuando un cuerpo (un árbol) se pudre »

| Néxramé'é ipx « al lado del fuego », « periodo seco, caliente »

Tabla 2.

185

Gustavo Torres Cisneros

¿Qué tenemos ahora? Un examen superficial revela una armonía entre los meses « gemelos » aztecas y mixes. La distancia entre los meses dobles de ambos calendarios es prácticamente exacta. Para la reconstrucción del calendario mixe, desajustado, me he apoyado en el análisis de los ritos del calendario azteca según las investigaciones de Michel Graulich *. Mej kaj puut y jak kaj puut Pachtontli y huey pachtli concuerdan con méj kaj puut y jak kaj puut. Las

traducciones de méj kaj puut son «humedad » y «pueblo grande » ^. En el sistema que propongo este mes corresponde a teotleco «la llegada de los dioses»-pachtontli que, en el calendario ideal, reconstruido por M. Graulich, debía caer al principio de la estación de lluvias. En este mes se le rendía culto a las mujeres divinas; luego se celebraba la llegada a la tierra de los dioses masculinos expulsados del paraíso. Venus era adorado como

14. Se sabe que el calendario se desajustaba pero sin embargo el contenido de sus ritos dramatizaba los trabajos agrícolas y los mitos de la creación. M. GRAULICH (Mythes et Rituels du Mexique Ancien Préhispanique) ha propuesto una reconstrucción única que examina la totalidad de los ritos de las veintenas. Este calendario hace comenzar el año con la fiesta de ochpaniztli, una fiesta de siembras y de principio de la estación de lluvias; así tlacaxipehualiztli se encontraría al principio de la estación seca y los otros meses «estacionales » (Caída de las Aguas, Cosa Seca, Detenimiento de las Aguas) se encontrarían en su lugar en el año real. 15. En Alotepec, uno de mis informantes me confirmó que Méj Kajpuut se acerca a la traducción de « pueblo grande ». En efecto, méj significa « grande» o « mayor », lo que tendremos que retener durante el examen de los meses siguientes. Es claro que si se buscara la connotación literal de

«humedad», sería en vano, pues el equivalente de humedad es nik o nikpé (en mixe de

Totontepec y de Coatlán). Por otro lado, me es difícil pensar que el informante, conocedor de la lengua, se equivocara en este aspecto. La palabra kajpu'ut se parece fonéticamente a cajpun «pueblo» en el dialecto de Totontepec (A. SCHOENHALS, L. SCHOENHALS, Vocabulario Mixe de Totontepec (Serie de Vocabularios Indígenas « Mariano Silva y Aceves» 14), México, Instituto

Lingúístico de Verano, 1982 [1965], p. 18. Los términos kajp o kahp en mixe de Coatlán y de Cacalotepec respectivamente tienen el mismo significado (S. HOOGSHAGEN, H. HALLORAN, Diccionario Mixe de Coatlán, México, Instituto Lingüfstico de Verano,

1993, p. 29; también:

B. Srross, « Oppositional Pairing in Mesoamerican Divination Day Names», Reprinted From Anthropological Linguistics, 25-2 (Summer

1983), p. 221). B. Srross,

«Oppositional Pairing »,

p. 219, sugiere que kahpun «pueblo» está asociado a la diosa maya de la luna que preside el número 1 y el 17? día del calendario maya caban «tierra»; además preside el 17° mes kayab [k'ayab]. El argumento es que esta diosa ha sido identificada también como diosa de la tierra. Ahora bien, en yucateco kab significa «tierra, pueblo», y en mixe «pueblo», como se ha visto, es kahpun. B. SrRoss, «Oppositional Pairing», p. 221, piensa que kahpun (pueblo) está semánticamente próximo de «tierra» y «casa». Sin embargo, la demonstración no está bien cimentada. Parece difícil decir si verdaderamente ambos términos comparten la misma raíz. He demostrado en otro lugar que los significados de pu'ut son muy ricos. Recordaré aquí algunas de sus connotaciones: « venado » (en Juquila según Quintana), «amarillo »; pütz «podrido » ; putzp «pudrir » (S. HOOGSHAGEN, H. HALLORAN, Diccionario Mixe de Coatlán, p. 180). En la variante de Totontepec tenemos: pu'ut «sucio, suciedad», pu'uts «pudrir, podrido, fermentado»; puu'x «aparición de la mata de maíz» (A. SCHOENHALS, L. SCHOENHALS, Vocabulario Mixe de Totontepec, p. 89-90; cf. también F. BELMAR, Estudio del Idioma Ayook, Oaxaca, Imprenta del Comercio, 1902, p. 141-143.

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Los meses dobles en el calendario mixe

dios del fuego. Se celebraba la abundancia del pulque y de los dioses lunares hijos de la Tierra-Luna. Ahora bien, el pulque está asociado a la luna y ésta al agua de la lluvia fertilizante. Por otro lado, la llegada de los dioses hace alusión probablemente a los Tlaloque, los dioses de la lluvia. La traducción «humedad » parece aquí encontrarse en su lugar. Jak kaj puut se traduce por «más humedad »'”. El mes paralelo es tepeilhuitl-huey pachtli, la «fiesta de los cerros», antes del solsticio de verano.

Esta era la primera gran fiesta de las aguas y de los Tlaloque, a los que se consideraba que habitaban las cimas de los cerros y donde reunían las nubes de lluvia. Los ritos tenían por finalidad la obtención de la lluvia y el crecimiento del maíz sembrado en abril. Además, esta fiesta estaba consagrada a los 400 conejos que se confundían con los Tlaloque, aspecto que no tiene nada de sorpresivo puesto que los conejos y los Tlaloque son seres lunares: la luna es el Tlalocan y la luna y las montañas son recipientes de agua. Una fiesta semejante es compatible, al parecer, con la apelación en mixe « más humedad » 55, Mej xé&w ipx y jak xéàw ipx

Los meses dobles mej xééw ipx y jak xéew ipx no tienen en principio una correspondencia, pero sabemos que quecholli y panquetzaliztli son meses que, por sus rituales, podrían considerarse gemelos.

16. Según el guardián de los días de Guichicovi, A. Montero, hubo un gran temblor que destruyó (quebró) los pueblos de Méj Kajpuut, el 1° de noviembre (R. WEITLANER, I. JOHNSON WEITLANER,

«Nuevas

versiones

sobre

calendarios

mixes»,

Revista

Mexicana

de

Estudios

Antropológicos XIX (1963), p. 52). Todavía no sé cómo comprender esta afirmación sorprendente, que podría tal vez recordar un mito de creación semejante a la creación-destrucción de los Soles aztecas. Ahora bien, puede ser que esta glosa haga referencia a un hecho histórico real. 17. Mis informantes en Alotepec me dieron la traducción « ya no hay más gente », pero sólo, me parece, por oposición al mes precedente. En mixe de Coatlán jak significa «más, aún » (S. HOOGSHAGEN,

H. HALLORAN,

Diccionario Mixe de Coatlán, p. 180). En Tlahuitoltepec jääk

significa «todavía». Como he señalado vamos a encontrar este vocablo en los cinco meses que forman pareja con los meses que comienzan por méj o « grande». R. DuiNMEUER, en «De Mixe Kalender van Oaxaca, Mexico», Doctoraalscriptie, Archeologie en Cultuurgeschiedenis van Indiaans Amerika, Rijks Universiteit, Leiden, 1996, p. 185, afirma que, en mixe, «negro» es tsix como,

en efecto, lo traduce

F. BELMAR

(Estudio del Idioma Ayook,

p.

177):

tzish «negro»,

«ennegrecer». Ahora bien, me parece que este término connota la oscuridad en el sentido de baño

de vapor o temazcal (tsixc, tziix, tzishk) y suciedad o tizne (viixe, jác, yajtzix) (Cf.

A. SCHOENHALS, H. HALLORAN,

L. SCHOENHALS,

Vocabulario Mixe

Diccionario Mixe de Coatlán,

de Totontepec,

p. 327, 338;

p. 281, 284;

F. BELMAR,

S. HOOGSHAGEN,

Estudio del Idioma Ayook,

p. 177). En mixe el término más común que designa «negro» es yak o yik, según la variante. Se podría aún pensar que «pueblo negro» y «más humedad » no se excluyen completamente pues en la estación de lluvias, de las tormentas, el cielo está cubierto y falta la luz.

18. Esta interpretación parece confirmarse con la afirmación de Fray Diego Durán en su Historia

de

las Indias

de Nueva

España

e Indias

de

la

Tierra

Firme,

México,

Porrúa,

1984

[1967], I. p. 153, según la cual los pachtli (plantas epifitas a partir de las cuales la fiesta toma su otro nombre huey pachtli) «debían a la humedad su color pardusco ». Por otra parte, el pachtli alude al pulque y éste se encuentra asociado estrechamente a la luna (ver M. GRAULICH, Mythes et Rituels du Mexique Ancien Préhispanique, p. 146 s.).

187

Gustavo Torres Cisneros

Estas fiestas estaban consagradas a divinidades asociadas con el fuego solar: Mixcoatl-Venus en quecholli, luego Quetzalcoatl-Huitzilopochtli-Sol en panquetzaliztli. ; Qué se observa? Los meses mixes significan «Sol» y «Más Sol», lo cual está de acuerdo, me parece, con quecholli y panquetzaliztli. En mi correlación, méj xééw ipx concuerda con quecholli, una fiesta

consagrada a Mixcoatl, la «serpiente de nubes», el dios de la guerra y la caza; el que engendré a Quetzalcoatl, la «serpiente emplumada». Mixcoatl se confunde con Tlahuizcalpantecuhtli, la estrella de la mafiana. En tanto ciervo, Mixcoatl es el animal que porta el sol. Jak xééw

ipx corresponde

a panquetzaliztli

«izamiento

de banderas»,

veintena que hace par con Quecholli. Ambas fiestas tienen un significado solar. Panquetzaliztli era en el siglo xvi la fiesta del dios tutelar de los aztecas Huitzilopochtli?. Entre los mayas yucatecos el mes xul que corresponde a quecholli era el de la espera de Kukulkan, nombre maya de Quetzalcoatl ; se encendía el fuego nuevo, luego el 1* día de yaxkin o «21°» de xul, Kukulkan nacía bajando del cielo. Por otro lado yaxkin se traduce corrientemente por «sol verde »; es decir, un sol joven, como los frutos aún no maduros.

El mes matlatzinca in thechotahui significa «gemelos», lo que Michel Graulich pone en relación con los gemelos del Popol Vuh o con Nanahuatl y Tecciztecatl que se vuelven Sol y Luna lanzándose en una hoguera. En efecto, panquetzaliztli era una fiesta mayor para Huitzilopochtli y una fiesta menor para Tezcatlipoca ; era la creación del sol y como tal remite a Teotihuacan, el lugar de la creación a la medianoche. Muchos autores han visto en panquetzaliztli el triunfo de Huitzilopochtli sobre su hermana Coyolxauhqui y los 400 Huitznahua sobre el Coatepetl. Este mito, una variante del triunfo de Quetzalcoatl sobre sus tíos en el Mixcoatepetl, ha sido interpretado también como la victoria del sol sobre la luna y las estrellas, el día sobre la noche??. Considero que estos argumentos son suficientes para reforzar la idea que «Sol» y «Más Sol» se encuentran bien en correspondencia con quecholli

19. Sin embargo, los ritos muestran de manera irrefragable que este dios había reemplazado un dios más antiguo, Quetzalcoatl, quien era a veces honrado en quecholli y que se quemaba en panquetzaliztli bajo el nombre de Nanahuatl (B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, General History of the Things of New Spain, 12 vol., A. J. O. ANDERSON, C. E. DiBBLE (ed. y trad.), Santa Fe, New Mexico, The School of American Research and the University of Utah, 1981, II; ibid., Historia General de las Cosas de la Nueva Espana. Primera Versión Integra del Texto Castellano Conocido como Códice Florentino, 2 vol., 2* ed., A. LÓPEZ AUSTIN, J. GARCÍA QUINTANA (éd.), México, Consejo Nacional para las Culturas y las Artes, lib. II; ver M. GRAULICH, Ritos aztecas,

p. 209. Lo que sea, nadie pondría en duda que ambas son divinidades solares. 20. La victoria de Quetzalcoatl tiene lugar a media noche, igual que la creación del Sol en Teotihuacan; es a medianoche también que los gemelos del Popol Vuh se lanzan a la hoguera y que Huitzilopochtli vence sobre el Coatepetl. Ahora bien, este pasaje es de gran interés puesto que lo anterior acontece durante las peregrinaciones, cuando los aztecas buscaban la tierra prometida. Cuando el calendario estaba en armonía con las estaciones, esta fiesta debió caer en

el solsticio de verano. Es la veintena que se encuentra a la mitad de la estación de lluvias y, como esta estación está asociada a la noche, corresponde a la media noche. El sol nace a media noche,

a la mitad de la estación de lluvias, en su viaje por el inframundo. La noche es también la época de las peregrinaciones que se presentan en quecholli con los ritos de caza.

188

Los meses dobles en el calendario mixe

y panquetzaliztli. Además, me parece muy elocuente, en apoyo de esta hipótesis, que los informantes de Lipp le hayan asegurado que los cuatro primeros meses del calendario agrícola (a saber: méj kajpu'ut, jak kajpu'ut,

méj xréwé'é y jak xréwée'e) están ligados a los primeros pueblos o rancherías de los mixes que marcaron la ruta de la peregrinación?!. Mëj xoox ipx y jak xoox ipx Tozoztontli

y huey tozoztli coinciden con méj xoox ipx y jak xoox ipx. La

traducción de méj xoox ipx es sin duda « gran víbora sorda ». En la correlación que propongo este mes corresponde a tozoztontli, « pequeña vigilia », entre los aztecas”. Jak xoox ipx «más víbora sorda» corresponde con huey tozoztli «gran vigilia». Estos dos meses, méj xoox y jak xoox, confirman la correlación que propongo pues tanto tozoztontli como huey tozoztli son meses « gemelos ». En ambos se celebraban las cosechas y la abundancia del maíz”. Meéj oo ipx y jak oo ipx Según mi reconstrucción méj oo corresponde a miccailhuitontli/tlaxochimaco y jak oo a huey miccailhuitl/xocotl huetzi. Aquí la lista maya confirma mi correlación. En efecto, entre los mayas yucatecos el mes pop y uo equivalen a tlaxochimaco y xocotl huetzi. De esta maneta jak oo se encuentra bien en relación con uo. Supongo que oo y uo son los mismos meses, con una diferencia de pronunciación. ¿De dónde proviene el préstamo? No me es posible encontrar una respuesta a esta cuestión, pero creo que la antigüedad del calendario es evidente.

21. Cf. F. J. Lire, The Mixe of Oaxaca. Religion, Ritual and Healing, Austin, University of Texas Press, 1991, p. 57. También R. DuiNM&uER, «De Mixe Kalender van Oaxaca», p. 185.

22. En cuanto a las serpientes, resulta interesante que los informantes de Sahagún (Florentine Codex, lI, p. 57) afirmen que esta fiesta era venerada por los coateca, los habitantes del calpulli

o barrio de Coatlan, «el lugar de la serpiente». Hacían ofrendas a su divinidad Coatlicue o Coatlan tonan. 23. Algunos ritos tenían lugar en los campos. La gente buscaba flores y matas de maíz con las cuales las estatuas de los dioses eran ornamentadas. Se buscaba pues el «espíritu del maíz » Cinteotl del cual se hacía una imagen de 7 mazorcas que se volvía el «corazón del granero» y cuyos granos eran conservados para las siembras del año siguiente. Se buscaba también serpientes que se cocinaban antes de ser comidas y ofrecidas. Según D. DuRÁN (Historia de las Indias, vol. I, p. 247-249) en tozoztontli se hacía ayunar a los jóvenes de menos de 12 aiios,

luego se les sacaba sangre de las orejas, la lengua y otras partes del cuerpo. Enseguida se les ataban huesos de serpientes, piedras, imágenes; etc. Estas alusiones a las serpientes son el único vínculo, conjetural esta vez, que encuentro entre los meses dobles xoox-jak xoox y tozoztli-huey tozoztli. Ahora bien, nunca escuché decir entre los mixes que la víbora sorda sea un substituto

del maíz. Según M. GRauLICH (Ritos aztecas, p. 332s), es probable que las serpientes, como para los totonacas actuales, pero también las raíces y las puntas de maguey sean substitutos del maíz.

189

Gustavo Torres Cisneros

Ap ipx y néxramé e ipx

Tecuilhuitontli y huey tecuilhuitl forman igualmente un par, pero es posible que ap ipx y néxramé e ipx hayan sido meses dobles. Las traducciones de ap son «abuelo», «ancestro », « viejo», como en la palabra apxééw, que

significa « Todos Santos o la fiesta de los abuelos», de los ancestros. El mes azteca que le corresponde es tecuilhuitontli, la «pequeña fiesta de los sefiores» que hace par con Auey tecuilhuitl «la gran fiesta de los señores ». La correlación que propongo se confirma por los meses quiché y cakchiquel pues se encuentra, en la misma posición, « primera fiesta del ancestro» y « segunda fiesta del ancestro» en referencia a los jefes de linaje, donde la relación con los «señores » parece evidentemente? : Nabe mam

o nabey mam/ucab

mam

o rucab mam

Las traducciones de néxramé e ¡px son «al lado del fuego », « periodo seco, caliente» y «días del perro». Parece que en este mes que, en el calendario fijo al año, cae entre los meses de julio-agosto, la traducción «periodo seco» o «al lado del fuego» se encuentra fuera de contexto, pues se trata de los meses de mayor abundancia de lluvia; lo anterior hace pensar que se trata de otro ejemplo que indica que el calendario se desfasaba en relación con las estaciones del año”. Nada en las traducciones permite encontrar un lazo evidente con su correspondiente azteca huey tecuilhuitl «la gran fiesta de los señores ». Se sabe que tecuilhuitl y huey tecuilhuitl se consagraban a las diosas de la sal así como a Xilonen y al sol poniente bajo la forma de Xochipilli. La única relación que distingo, muy vaga por lo demás, con las traducciones «al lado del fuego » y «periodo seco» sería que en su posición original huey tecuilhuitl/néxamé'e caía en el mes de enero-febrero, es decir, en medio de la estación seca. Ta'ak'am ipx, ipx tugé, méj kdd, kudyëëxy y néétzii ipx Los meses

ta'ak'am ipx, ipx tugë, méj kid, kudyééxy y néétzi'i ipx no

son meses dobles, pero no pueden serlo a causa del desorden en el que se encuentran según las listas conocidas. Ahora bien, estos meses se encuentran

24. A. Caso, Los calendarios prehispánicos (“Serie de Cultura Nahuatl” 6), México, Instituto de Investigaciones Históricas, Universidad Nacional Autónoma de México, 1* ed., 1967 : tabla XI; también M. GRAULICH, Ritos Aztecas, p. 373s. 25. E. J. Lire, «The Mixe Calendrical System: Concepts and Behavior», Ph.D. New School of Social Research, New York, Ann Arbor, University Microfilms International *KKA830353, 1983, p. 189, da la traducción « días del perro », lo cual no es exacto. Ahora bien, podría ser que

la posición actual del mes se encuentre en la base de esta última traducción : este mes cae entre el 22 de julio y el 10 de agosto en el calendario fijo, o sea, cerca de la canícula («el pequeño can») pues en occidente, en junio-julio tiene lugar la salida heliaca de Sirio (Sothis para los antiguos egipcios) la estrella más brillante de la constelación del Gran Can. He aquí un ejemplo de traducción en relación con las concepciones occidentales, si fuese el caso. R. DUINMENER,

«De Mixe Kalender van Oaxaca », p. 190, traduce este mes por « vapor de agua» causado por el calor del sol durante las lluvias. Luego, lo pone en relación con el mes azteca atemoztli «caída de aguas» y el otomí ancandehe « descenso de aguas ». Sin embargo, en el sistema que propongo atemozili debe corresponder a uno de los cinco meses « caóticos» mencionados antes.

190

Los meses dobles en el calendario mixe

delante de atemoztli, tititl, izcalli, atlcahualo y tlacaxipehualiztli, dicho de

otra manera, los meses por los cuales el año azteca podía comenzar. Como sabemos, una de las cuestiones más difíciles de resolver, en cuanto

a los calendarios prehispánicos, es la del principio de año. Según varios cronistas (Motolinía, Cristóbal del Castillo, etc.) las poblaciones del altiplano lo comenzaban en meses diferentes, como lo señala Caso:

...los tlaxcaltecas empezaban el año por atemoztli ; las gentes de Teotitlan lo empezaban por t/acaxipehualiztli ; los de Meztitlan por panquetzaliztli y los texcocanos por atlcahualo |...]. El Códice Aubin principia el año en izcalli?5. El «congelamiento» del calendario anual

A] parecer, el catolicismo se impuso masivamente sobre el sistema de cómputo del tiempo anual y el ciclo de fiestas. La cuestión del desajuste se presenta como algo esencial en el estudio de este calendario, de su relación con las fiestas católicas, y de la manera en que fue « vaciado » de su contenido ritual para permanecer como un calendario agrícola, fijado al año, y que teóricamente debe ritmar el ciclo del maíz — o de la planta del café actualmente. A diferencia del calendario adivinatorio, el calendario anual — que no podía aceptar las correcciones a causa de su carácter vago — no resistió a la confrontación con el calendario cristiano. Según una hipótesis de partida, el único medio de sobrevivir fue el «congelamiento », como sucedió con otros calendarios durante la Colonia. Pero esta hipótesis no se sostiene pues los meses, en lugar de avanzar, se retrasan. O sea, si el calendario hubiera seguido desajustándose a partir de 1519, teotleco/pachtontlilméj kajpuut habría caído, en 1953, el 6 de junio.

Esto significa que entre 1519 y 1953 este mes habría podido ser «congelado » solamente en uno de los días comprendidos entre el 21 de septiembre y el 6 de junio, pero nunca en noviembre : pues entre 1519 y 1953, para tomar sólo este caso, hay 434 años, o sea, hay 105 días (cerca de 108 días, pero como los años

seculares 1700, 1800 y 1900 fueron comunes, no bisiestos, hay que días) o más de 3 meses de desajuste. Dicho de otra manera, la única explicación posible es que los mixes coincidir el principio de su año con la fiesta de Todos Santos. Lo probablemente a causa de su cercanía con la fiesta de los muertos

restar 3 hicieron anterior cristiana

(de hecho, Herrera”, en 1530, en sus Décadas ya estima esta posibilidad) en

el siglo xvi, así como con el Adviento, época que señala el principio litúrgico del año. La base de esta comparación es el sistema de fiestas «dobles ». Repasemos nuevamente la explicación. El único medio de encontrar el lugar original de las fiestas mixes es la correlación de las fiestas dobles. Esto funciona bastante bien, puesto que varias fiestas coinciden. Después verificamos esta estructura analizando las fiestas, los nombres, etc., lo que

26.

A. Caso, Los calendarios prehispánicos,

27.

A. De HERRERA,

de el Mar Occeano, p. 102.

Historia

Madrid,

p. 39-40.

General de los Hechos

Castellanos

en las Islas, y Tierra Firme

1730, Déc. III, Lib. III, cap. XIV, p. 100, 102; Déc. IV, Lib. IX,

191

Gustavo Torres Cisneros

confirma la hipótesis anterior con bastante seguridad. Enseguida, tratamos de explicar la posición anormal actual de las veintenas. Constatamos que la importancia de la fiesta de los muertos mixe (jak kajpuut-tepeilhuitl en este caso) coincide más o menos con la fiesta de los muertos cristiana en el

siglo xvi (30 de octubre). En el siglo xv1, el principio del año mixe, su primer mes (mej kajpuut, 21 sept.-10 oct.), coincide más o menos con las fiestas de los muertos de tepeilhuitl-quecholli o jak kajpuut-méj xéew (11-30 oct. y 31 oct. - 19 nov.), como se muestra en la siguiente tabla: Azteca

682 (según Graulich) | 1519 (XVI) | Mixe

Nemontemi

29 marzo | 2 abril

Ochpaniztli

| 35-22 abril

Teotlecopachtontli

23 abril|| I2 mayo

Tepeilhuitl- | 13 mayohuey pachtli | 1 junio Quecholli

1953-4

|1978

1995

|20sep.9 oct.

|21 sep. — 10 oct.

Tzatzok unk o 27- 31 nemontemi — | oct.

|10-14 oct.

|11-15 oct.

||. Méjkajpuut ipts

15 oct.3 nov.

|16 oct.-4 nov.

7-26 | 1 - 20 sep. | Tzatzok ipts | oct.

|21 sep. — | 10 oct. 11-30 oct.

31 oct.— | 2-21 junio | 19 nov.

2.Jakkaj| puut ipts 3. Méj xééw ipts

1-20 nov.

|21 nov./|4 - 23 10 dic. nov. | 11/30 dic.

|24 nov.13 dic.

5-24 nov. |25 nov.|14 dic.

Sin embargo, en el xvi los meses mixes continúan desajustándose. A un momento dado, los mixes manipulan el calendario. Se tienen pruebas certeras, ya que el calendario está fijo al año actualmente y hay dos principios de año diferentes, 15 de oct. y 1° de nov. De varias explicaciones posibles, dos resultan plausibles: antes de 1582, los mixes manipulan su calendario congelándolo y desplazándolo de tal manera que el año comenzara hacia el 5 de oct., de suerte que su 2° mes (jak kajpuut) coincidiera con la fiesta de los muertos, y que el año mixe y el año litúrgico cristiano tuvieran una cierta coincidencia. Pero en 1582, las fechas «saltan» 10 días y el principio de año pasa del 5 al 15 de oct., lo que cambia la correlación de su año con el nuestro y desplaza la fiesta de los muertos. Más tarde, ciertos pueblos pasaron a un principio de año mixe que cayera cerca de las fiestas de Todos Santos y de los muertos y más o menos con el Adviento, principio de año litárgico. La otra posibilidad es que los mixes hayan retenido la fecha del 15 de octubre, como se ve ahora, en función precisamente de la reforma gregoriana. En 1582, octubre saltó del 4° al 15° día del mes. Entonces los mixes manipularon el calendario en función de esta fecha. La diferencia de un día se explicaría porque el día cambia de medio día a medio día. Luego, ciertos pueblos desplazaron su principio de año a Todos Santos y a la fiesta de los muertos. Otra posibilidad es que el 15 de octubre sea la fecha de los 15 bisiestos que tuvieron lugar entre 1519 y 1582 (63 años/4 = 15). Sería una coincidencia enorme pues el calendario gregoriano «comienza » el 15 de octubre. Pero los 192

Los meses dobles en el calendario mixe

indígenas no comprendieron nada de estos cambios y fijaron el calendario a esta fecha... Hay que aceptar, sin embargo, que todo esto es muy hipotético y que se puede tratar de reconstruir casi sin cesar lo que pudo haber sucedido. Lo que es cierto y debemos tener en cuenta es que la relación aproximativa con la fiesta de los muertos en el siglo xvi y la solidez de la estructura «doble» de los meses, lo que está en la base de la comparación con las fiestas católicas actuales. Esta situación, unida a la desaparición de las grandes fiestas püblicas, vació al calendario prehispánico de sus ritos. E] calendario mixe no era un calendario urbano, sino uno de campesinos que, ciertamente, han llevado a cabo sus ritos agrarios independientemente de las grandes fiestas del calendario oficial desajustado, y que han provocado lo que Graulich identifica como «contaminación » en los sistemas calendáricos. Estos campesinos tenían necesidad, desde tiempos muy lejanos y hasta la fecha, de efectuar sus ritos en concordancia con la naturaleza y las estaciones. Son estos los ritos que han subsistido y que se han enraizado en el ciclo litürgico cristiano, mismos que se asemejan a los descritos por Pedro Ponce en el siglo xvi: 842. Ya que el maíz está para coger, en la sementera donde hay caña que lleva dos o tres mazorcas, que llaman xolotl luego el dueño da aviso al que es maestro de las cerimonias, que suele ser un viejo, y le dice cómo ha habido buen temporal en su sementera ; viene el maestro y, vista la caña con las dos o

tres mazorcas, manda se hagan dos géneros de tamales para otro día: tamales blancos y tequixtamales [...] 843. A] tiempo de coger la sementera, primero hacen invocación a la diosa Chicomecoatl [...].

844. Cogido el maíz, ya que lo han de echar en la tierra, lo saludan [...]?*.

Estos ritos no oficiales son los que tuvieron la mayor suerte de haber sobrevivido. Los campesinos reproducían en tiempo real y a pequeña escala — probablemente con sacrificios de aves, como podemos verificar in situ hoy en día — lo que los ritos oficiales de la ciudad hacían con desajuste en el tiempo y con magnificencia — y con numerosos y variados sacrificios humanos. Este calendario, el mixe, es un calendario de campesinos, muy práctico y atado a las actividades concretas del trabajo de los campos. Se adapta fácilmente a los nuevos cambios como, por ejemplo, los cultivos de café introducidos en el siglo xix. Los mixes son por supuesto un pueblo que nunca tuvo una organización social tan jerarquizada y variada como la de los aztecas, zapotecos, o mixtecos. Estos pueblos tenían sacerdotes que se encargaban de vigilar los ritos del Estado en un calendario esotérico mal conocido por el resto de la población analfabeta, iletrada y no iniciada en los misterios esotéricos de los grandes rituales. Esto no impide, pienso yo, que el calendario fuese similar aunque la grandeza de las fiestas debió ser ciertamente inferior.

28. P. Ponce DE León, « Tratado de los Dioses y Ritos de la Gentilidad », en Á. María GARIBAY (éd.), Teogonía e Historia de los Mexicanos. Tres Opúsculos del Siglo xvi, México, Porrúa, 1979 [1569], p. 126-128.

193

Gustavo Torres Cisneros

Conclusiones

He analizado el calendario solar mixe de 365 días. Tal como se le ve hoy, posee un carácter agrícola, y, sin embargo, parece ser muy diferente del antiguo calendario mesoamericano con nombre de ritos y ceremonias. La estructura de 18 meses de 20 días más 5 días es, sin embargo, prehispánica. A partir de la estructura de los meses « gemelos » es posible reconstituir, y por vez primera, el calendario agrícola mixe, y encontrar las correspondencias precisas. La hipótesis inicial se fue solidificando y reveló una armonía entre los meses «gemelos» aztecas y mixes. La distancia entre los meses dobles de los dos calendarios es exacta. Los rituales antiguos de los meses aztecas, así como la posición de ciertos meses mayas, como uo, confirmaron,

en algunos casos, la reconstrucción propuesta. Sobre el aspecto del bisiesto, la lógica de este calendario no admite intercalaciones; todo parece indicar que los bisiestos son un elemento extraño a la naturaleza del calendario prehispánico. Mi opinión es que los mixes estuvieron obligados a hacer el ajuste o a manipular el calendario a causa de la influencia del calendario católico y cuando se perdieron la armonía y las coincidencias. Finalmente, quisiera proponer que el método de la estructura de los meses dobles debería aplicarse al resto de los calendarios mesoamericanos para tratar de encontrar sus correlaciones, independientemente de los procesos de «congelación» o de « manipulación» de los calendarios que nos presentan fechas diferentes de las veintenas.

194

TROISIÈME PARTIE

L'étude des manuscrits

pictographiques

195

EL CÓDICE BORBÓNICO:

REFLEXIONES SOBRE LA PROBLEMÁTICA RELATIVA A SU CONFECCIÓN FÍSICA Y CONTENIDO

Juan José BATALLA Rosapo Universidad Complutense de Madrid

Todos los investigadores que nos dedicamos al estudio de las culturas indígenas mesoamericanas en general y a la cultura azteca en particular utilizamos, sobre todo para el análisis del sistema religioso que practicaban, el documento conocido bajo el nombre de Códice Borbónico, por ser una de las fuentes más importantes con las que contamos para el conocimiento de los calendarios indígenas, rituales religiosos, representación de deidades, etc. Así, Michel Graulich también ha utilizado a lo largo de sus estudios esta obra. De hecho, una de sus últimas publicaciones trata directamente sobre el Códice Borbónico!, estableciendo en la misma los dos posibles motivos que, en su opinión, justificaron el encargo por parte de Motecuhzoma II de este códice: sancionar el cambio de año de la celebración del Fuego Nuevo de 1507 (de 1-conejo a 2-caña) y la introducción, con el apoyo de los sabios de Culhuacan, del bisiesto en el año solar.

Ahora bien, como personalmente hemos venido insistiendo a lo largo de nuestros trabajos en lo relativo al método de estudio de los códices mesoamericanos, antes de proceder al uso de este tipo de documentación tenemos que llegar a un amplio conocimiento de la misma a todos los niveles?. De este modo, en lo referente al Códice Borbónico consideramos imprescindible,

1. M. GRAULICH, «Las fiestas del año solar en el Códice Borbónico », Itinerarios. Revista de estudios

lingüisticos,

literarios,

históricos

y antropológicos

8

(2008),

p.

185-194.

Debemos

indicar que este artículo de Michel Graulich, incluido en el dossier publicado en esta revista bajo el título Los Códices Mesoamericanos

como fuente de estudio de las culturas indígenas, se

corresponde, al igual que el resto de trabajos que contiene el mismo, con la edición de un grupo de las ponencias presentadas por varios investigadores en el Primer Simposio Europeo sobre Códices del Centro de México celebrado en la Universidad Complutense de Madrid del 28 al 30 de octubre de 2004. Sobre este particular, hemos de indicar que el resto de ponencias de ese evento fueron publicadas en el dossier titulado Estudio de Códices Mesoamericanos en Europa en la Revista Española de Antropología Americana 38-2 (2008), p. 121-266. 2. Véase J. J. BATALLA, «Los códices mesoamericanos: métodos de estudio», Revista de estudios lingüísticos,

literarios,

históricos y antropológicos

Itinerarios.

8 (2008), p. 43-65.

197

Juan José Batalla Rosado

como paso previo al acceso de su contenido, entender cuál fue su gestación física, pues en caso contrario caben posibilidades de no comprender bien lo descrito en sus apartados. Por ello, en estas páginas vamos a exponer cuáles son, en nuestra opinión, los principales problemas que plantea el Códice Borbónico para una interpretación precisa de la temática que recoge y de las razones que impulsaron a sus pintores o director(es) a recoger esos contenidos y no otros. Además, aprovecharemos el desarrollo de este trabajo para analizar la publicación mencionada de Michel Graulich. Descripción y contenido del Códice Borbónico

El Códice Borbónico es un documento pictográfico azteca que se encuentra en la Biblioteca de la Cámara de Diputados de París o antiguo Palais Bourbon, de donde toma su nombre. Compuesto por una larga tira de papel indígena plegada en formato de biombo consta de 36 hojas, aunque originalmente su nümero era como mínimo de 40, faltándole las dos iniciales y finales. De contenido calendárico-ritual, está pintado únicamente por una de sus caras, aunque la otra también recibió la capa de estuco para poder trabajar en ella. Por ello, podemos suponer que en el proyecto inicial de la obra esta iba a ser el doble de extensa. Tradicionalmente se divide en distintas secciones,

que por norma general se separan en dos partes debido, como veremos, a la diferenciación estilística que se establece entre los bloques de páginas 3-22 y 2338: Primera Parte Tonalpohualli-calendario de 260 días (p. 3-20)

Se presenta en 20 trecenas, una por página, faltando las dos primeras. Las pinturas se disponen en ellas de la misma forma: un Cuadro Mayor, con los dioses regentes y actividades de culto y objetos relacionados con los mismos, más dos franjas horizontales y dos verticales que recogen los signos calendáricos unidos a los Señores de la Noche, los Señores del Día y las Trece Aves Agoreras. Xiuhmolpilli-ciclo de 52 afios (p. 21-22)

Los signos calendáricos anuales, acompañados individualmente de uno de los Sefiores de la Noche, están colocados en los cuatro laterales de cada hoja,

dejando el centro para las Escenas Mayores representativas de Oxomoco y Cipactonal en la primera de ellas, mientras que en la segunda están reflejados Ehecatl-Quetzalcoatl y Tezcatlipoca. Segunda parte

Por norma general los distintos autores que han estudiado en profundidad el Códice Borbónico? la dividen también en dos partes: xiuhpohualli-ciclo

3. Entre otros: Pictérico de los

198

F. del Paso y Troncoso, Descripción, Historia y Exposición del Códice antiguos náuas en la Biblioteca de la Cámara de Diputados de París

El Códice Borbónico

de las fiestas del calendario anual de 365 días y xiuhmolpilli-ciclo de 52 años. Puesto que es la comúnmente aceptada, mantendremos esta separación temática, aunque, como tendremos ocasión de precisar es necesario reflexionar sobre una serie de problemas o dudas que plantea la definición de las páginas 23 a 36 como un xiuhpohualli y las 37 a 40 (las dos ültimas perdidas) como un xiuhmolpilli. No obstante, continuaremos dividiendo esta

segunda parte del Códice Borbónico en: Posible xiuhpohualli-ciclo de las Fiestas de las veintenas del calendario de 365 días. Su particularidad es que las hojas no se encuentran totalmente cubiertas de pinturas, quedando aproximadamente un 50% (cálculo visual) de su superficie vacío. Las Escenas Mayores se pintan entre las páginas 23 a 37, ambas inclusive. Xiuhmolpilli-ciclo

de 52 años,

aunque

realmente

los representados

son

54 (teniendo en cuenta las dos páginas finales desaparecidas). Se desarrolla en las páginas 23 (año 1-conejo), 34 (año 2-caña) y en las 37

y 38-40 (años 3-pedernal a 2 caña). Problemática general del Códice Borbónico

Uno de los problemas principales que plantea el Códice Borbónico es el de su datación temporal. Podemos afirmar que nos encontramos ante dos grupos de opinión claramente divididos. Por un lado, están aquellos autores que lo consideran prehispánico y por otro quienes no dudan en calificarlo como realizado en la época colonial temprana *, si bien en algunos casos como copia de un original prehispánico: «El manuscrito que se ha conservado en el Palacio Borbón probablemente es una copia hecha en los primeros años después de la Conquista. El original, ahora perdido, se pintó para el año 2 Caña, 1507, en el que se realizó la ceremonia del Fuego Nuevo »”. Para situarlo en un periodo u otro se han ofrecido argumentos de todo tipo, aunque ninguno de ellos consigue inclinar con claridad la balanza hacia un lado u otro. Ahora bien, Michel Graulich manifiesta que el Códice Borbónico «es posiblemente un códice auténticamente precolombino o, si no, una copia hecha en los primeros años de la conquista española. Pienso que fue encargado por Motecuhzoma II, como veremos, para dejar constancia de dos

(antiguo Palais Bourbon), México, Siglo Veintiuno Editores, 1980, p. 42-49; K. A. NoworNv, « Kommentar», en Codex Borbonicus, Graz, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1974, p. 11-25;

E. ANDERS,

M. JANSEN, L. Reyes

García, El libro del Ciuacoatl.

Homenaje para el año

del Fuego Nuevo. Libro explicativo del llamado Códice Borbónico, Graz, Madrid Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Sociedad Estatal Quinto Centenario, Cultura Económica, 1991, p. 17-18.

y México, Fondo de

4. Sobre este aspecto véase un detallado estudio en J. J. BarALLA, « Teorías sobre el origen colonial del

Códice Borbónico : una revisión necesaria», Cuadernos Prehispánicos

15 (1994),

p. 5-42. 5.

E. ANDERS, M. JANSEN, L. REYES García, El libro del Ciuacoatl, p. 59.

199

Juan José Batalla Rosado

reformas importantes »5. «El Códice Borbónico es pues, sin duda alguna, un documento que está relacionado con la reforma de la fiesta del Fuego Nuevo introducida en los años 1506-1507 por Motecuhzoma I [sic] »”. Por último,

debemos indicar que Michel Graulich?, tras afirmar que en la página 31 del Códice Borbónico se escenifica a la diosa del agua que « será sacrificada sobre espigas de maíz de cuatro colores », parece considerar que el documento es colonial debido a la ausencia en el mismo de la representación directa del acto de llevar a cabo sacrificios humanos, es decir, no aparece descrito en ningún lugar del códice la escenificación del instante preciso en el que se lleva a cabo la inmolación de la víctima con la figuración de sangre: ... Abro un paréntesis que fue pintado el Borbónico. directamente el sacrificio los inmolarán, personajes ficadores de dioses, pero el deseo de evitar ofender una composición del libro características resultan de

puede o no atañer al problema de la época en la cual Sorprende que en las fiestas nunca se represente humano. Muestran niños llevados a cerros donde vestidos con la piel de los sacrificados, personiningún sacrificio humano. [...] No se debe excluir a los españoles, lo que confirmaría la hipótesis de en la época colonial, pero creo más bien que estas una necesidad de concisión por falta de espacio.

Por nuestra parte, sólo podemos indicar que no estamos de acuerdo con lo expresado por este autor. En primer lugar respecto de la representación en la página 31 del códice de un sacrificio humano, pues en nuestra opinión lo escenificado es una mujer de pie sobre un entramado para proceder a pasearla en procesión?, y en segundo lugar debido a que precisamente la ausencia de escenas «sangrientas» relativas al sacrificio, para nosotros!” indica todo lo contrario:

6.

M. GRAULICH, « Las fiestas », p. 186.

7. Ibid., p. 192. 8. Ibid.,p. 191. 9. Véase J. J. BATALLA, «La perspectiva planigráfica precolombina y el

Códice Borbónico:

página 3l-escena central», Revista Española de Antropología Americana 23 (1993), p. 113-134;

«Los tlacuiloque del Códice Borbénico : una aproximación a su número y estilo», Journal de la Société des Américanistes 80 (1994), p. 62; El Códice Borgia: una guía para un viaje alucinante por el inframundo, Madrid, Biblioteca Apostólica Vaticana y Testimonio Compañía Editorial,

2008, p. 196-199. Nos consta que Michel Graulich conoce desde el mismo momento de su publicación los dos primeros trabajos mencionados, en los cuales desarrollo mi investigación relativa a que la representación de la página 31 no refleja el momento inmediato previo al sacrificio de la mujer, sino que esta se encuentra de pie sobre el entramado. Ahora bien, también somos conscientes que su opinión es tan contraria a la deducción que nosotros realizamos (epístola personal de Michel Graulich escrita el 23 de junio de 1995) que nunca la ha tomado en consideración, ni tan siquiera para criticarla con argumentos sólidos. Por ello, en el trabajo que estamos revisando de Michel Graulich, « Las Fiestas», sólo incluye una nota al pie en la página 191 para indicar « Para una interpretación diferente de esta escena, véase Batalla Rosado 1993a »,

remitiendo de este modo a mi trabajo sobre la perspectiva planigráfica precolombina, tratándose del único estudio de este autor donde menciona esa interpretación diferente de la escena. 10. J. J. BATALLA, «La perspectiva planigráfica», p. 131. Véase también J. J. BATALLA, «El Arte de escribir en Mesoamérica: el Códice Borbónico», Universidad Complutense de Madrid, 1992.

200

Memoria de Licenciatura, Madrid,

El Códice Borbónico

... Tras la explicación de esta escena, se confirma la ausencia de la representación del sacrificio humano en la tercera parte del Códice Borbónico. [...] Estas

características iconográficas del Códice Borbónico — perspectiva indígena plana, no plasmación del sacrificio humano y ausencia de sangre en el lugar donde supuestamente se lleva a cabo — nos reafirman en nuestra idea respecto a que nos enfrentamos ante un documento de origen prehispánico inacabado.

Además, si comparamos el Códice Borbónico con otros documentos de igual contenido y de claro origen colonial, como los códices Tudela, Magliabechiano, Vaticano A, etc., comprobamos que la escenificación violenta del sacrificio humano está presente en todos ellos de una manera explícita : ... Actualmente, las pruebas arqueológicas y etnohistóricas demuestran que el sacrificio humano era general a toda Mesoamérica. [...] Además, hay que tener en cuenta que desde los comienzos de la Conquista hubo un interés enorme por parte de conquistadores y en ocasiones religiosos de «exagerar » hasta límites insospechados el número de sacrificios que se llevaban a cabo. Por ello, las crónicas del siglo xvi y muchos de los códices o libros pintados que se llevaron a cabo en la época colonial inciden en este rasgo cultural mesoamericano, exagerándolo de manera que justificara la conquista y la esclavitud de los indígenas. Así, [...], será en los códices coloniales donde aumentará

el número de víctimas y la profusión de sangre. De esta manera se intentaba mostrar la «barbarie» de las culturas indígenas".

De todas formas, a través de la opinión que hemos expuesto de estos investigadores, casi podríamos afirmar que para ellos el Códice Borbónico es precolombino, al menos en su gestación, si bien reconocen la posibilidad de que el ejemplar que ahora conservamos pueda ser una copia de un original que ordenó pintar Motecuhzoma IL, aspecto con el cual nosotros no estamos, de momento, totalmente de acuerdo!?, prefiriendo considerar al códice como

prehispánico e inacabado". Pero ¿cuáles son los problemas que impiden datar físicamente y comprender con seguridad el contenido del Códice Borbónico? En nuestra opinión, la cuestión principal aún sin resolver del Códice Borbónico tiene que ver, en primer lugar, con la inexistencia de un estudio codicológico

11.

J. J. BATALLA,

12.

El propio Michel GRAULICH, Ritos Aztecas.

El Códice Borgia, p. 113-114.

Las fiestas de las veintenas, México, Instituto

Nacional Indigenista, 1999, p. 58, señala inicial mente que «el códice está fechado posiblemente en los inicios del periodo colonial, pero muy poco marcado por la influencia europea », sin embargo, remitiendo a una nota al pie de página, indica que «por mi parte, llamé la atención en el hecho que la iconografía de Tlaloc en el Borbónico presenta similitudes con un Chac Mool pintado de la fase II del Templo Mayor, lo que prueba que sus raíces se remontan a los orígenes mismos de ese complejo de edificios», con lo cual parece aportar una prueba de su origen prehispánico. 13. Consideramos inacabado al Códice Borbónico debido a que de la página 23 a 36 sólo está ocupado más o menos el 50 % del espacio, de la 37 a la 38-40 únicamente encontramos pintadas 3 figuras representativas del mes izcalli y 52 signos anuales, junto con un palo encendedor del fuego, quedando más del 80% en blanco. Finalmente, nos encontramos que el verso, pese a estar preparado para ello, se encuentra sin pintar en su totalidad.

201

Juan José Batalla Rosado

profundo del mismo.

En segundo lugar, la presencia en las páginas 23 a

38-40 del documento de un xiuhpohualli o ciclo de las veintenas unido al

desarrollo de un xiuhmolpilli o ciclo de 52 años, aunque realmente se recogen 54, que muestra la sucesión del primero durante dos años, también incide en la incomprensión total de las páginas 23 a 40 del documento. Por motivos de exposición metodológica de este trabajo, vamos a comenzar el desarrollo del mismo por el segundo apartado pues así tendremos ocasión de comprobar que varias de las soluciones a las cuestiones que plantearemos podrían tener respuesta realizando el análisis físico del documento. El xiuhpohualli Borbónico

y el xiuhmolpilli

de

la segunda

parte

del Códice

Esta segunda parte del Códice Borbónico muestra en el lado izquierdo de su página 23 la finalización del año 1-conejo en la decimoctava fiesta (izcalli) * para, a continuación, iniciar un nuevo ciclo anual con la primera, xilomana-

liztli, en el lado derecho de la misma página, año que finalizará en la página 37 de nuevo con el mes izcalli asociado al afio 3-pedernal. Ahora bien, ; por qué el rlacuilo no plasmó el año 2-caña, supuestamente el periodo a partir del cual se desarrolla al completo el xiuhpohualli, en la primera fiesta, es decir,

en la página 23 derecha, haciéndolo en la página 34, correspondiente al mes panquetzaliztli? De este modo, realmente el ciclo de fiestas parece iniciarse con izcalli en el año 1-conejo y antes de que termine este año, justo en la veintena decimosexta, panquetzaliztli, da comienzo

un nuevo

aíio, 2-caíia

(página 34), en el que sólo se desarrollan tres fiestas, para dar comienzo al año 3-pedernal de nuevo en el mes izcalli (página 37). No obstante, es posible que Michel Graulich tenga razón y que fuera debido a que Motecuhzoma II : «cambió no sólo el año del Fuego Nuevo, sino también la veintena en la cual tenía lugar », pasándola del mes ochpaniztli a panquetzaliztli «la gran fiesta del dios tutelar de Tenochtitlan », de esta forma « cambiar el año era pues una manera de glorificar a Huitzilopochtli y de imponerlo todavía más a todos los pueblos que participaban en la celebración del Fuego Nuevo en Culhuacan ; era también una manera más de sustituir a Quetzalcóatl-Estrella de la Mañana

como dios tutelar de México »!*. Por ello, pensamos que es posible que en esta sección del Códice Borbónico no debamos buscar una secuencia lógica de los dieciocho meses dentro de un año, sino que cabe la posibilidad de que lo que se pretendía era resaltar el año y mes dedicados a Huitzilopochtli. No obstante, podemos afirmar con certeza que la disposición reflejada en el Códice Borbónico es anómala, pues lo pintado así lo confirma. Ahora bien, hay una cuestión con la que ningün investigador ha contado y que puede hacer variar todo lo reseñado : el número de pintores que pudieron participar en la realización del Códice Borbónico. Este aspecto será tratado en el apartado

14. En esta cuestión estamos de acuerdo con lo expresado por F. ANDERS, M. JANSEN, L. REYES García, El libro del Ciuacoatl, p. 41, aunque M. GRAULICH, «Las fiestas», p. 193 considera que

izcalli es el primer mes del ciclo. 15.

202

M. GRAULICH, «Las fiestas», p. 188-189.

El Códice Borbónico

correspondiente al estudio codicológico del documento, donde veremos que la más que posible presencia de un tlacuilo que pinta exclusivamente estos signos anuales contenidos en las páginas 23 a 38-40 puede llevarnos a otras hipótesis. Además, hay todavía cuestiones pendientes relativas a la definición de este xiuhpohualli como un ciclo calendárico de 365 días de desarrollo normal.

Así, llama la atención que ciertos autores vean en estas páginas la representación escénica de las 18 fiestas anuales, una por mes, mientras que otros" no definan la totalidad de las mismas o que incluso no enmarquen alguna de ellas como festividad concreta. De esta manera, por ejemplo, mientras que los autores del último estudio completo del Códice Borbónico señalan que la escena del juego de pelota de la página 27 izquierda no es una festividad sino que «entre la sexta y la séptima veintena se celebra un gran juego ceremonial de pelota» '?, Michel Graulich no duda en señalar que el Códice Borbónico contiene «el calendario de fiestas mejor estructurado y más rico que se conoce », asociando la escena del juego de pelota al mes tecuilhuitontli9. Por otro lado, también deberíamos de preguntarnos ¿qué indican las líneas verticales negras que separan escenas dentro de una misma página ?, pues dependiendo de cómo se cuenten los espacios dejados por las mismas y los que producen los propios plegados del formato del documento, que en algunos casos impiden por su deterioro comprobar si hay o no línea vertical negra, el número de fiestas puede variar ostensiblemente junto con la extensión pictórica de las mismas. Así, retomando de nuevo el análisis de Michel Graulich”, este autor señala que : ... En cambio, no entendemos muy bien por qué motivo los mexicas habrían registrado sus fiestas, conocidas

por todos, en libros y, sobre todo, de una

manera tan arbitraria; algunas ocupan media página o menos, otras una página entera, pero la fiesta del Barrimiento, ochpaniztli, ; se desarrolla sobre tres páginas ¡ A veces sólo se representa la deidad principal de la veintena, otras veces es algün rito particular, no siempre muy significativo; un baile, por ejemplo, pero los había en cada mes...?!

16.

F. del

Paso

y Troncoso,

Descripción;

K. A. NowoTNY,

«Kommentar»;

N. C. C. Coucx,

The Festival Cycle of the Aztec Codex Borbonicus, Oxford, B. A.R. International Series, 1985; M. GRAULICH, « Las fiestas», p. 186; etc. 17. B. A. BRowN, European Influences in Early Colonial Descriptions and Illustrations of the Mexica Monthly Calendar, Doctoral Dissertation, Alburquerque, University of New Mexico, 1978. 18.

F. ANDERS,

M. Jansen,

L. REYES

GARCÍA, El libro del Ciuacoatl,

p. 202-204.

19. M. GRAuLICH, «Las fiestas», p. 187-188. Por otro lado, mientras que para F. ANDERS, M. Jansen, L. Reyes García, El libro del Ciuacoatl, p. 208-214, ochpaniztli sólo ocupa dos páginas, para M. GrauLicH, «Las fiestas», p. 188, se desarrolla en tres. 20. M. GRAULICH, «Las fiestas», p. 188. 21. Respecto de estas diferencias de extensión de las fiestas en el Códice Borbónico,

M. GRAULICH, «Las fiestas», p. 188-189, destacará ochpaniztli y panquetzaliztli (la primera por ocupar tres páginas y la segunda por reflejar el Fuego Nuevo), debido a que, en su opinión, eran las que Motecuhzoma II quería resaltar para justificar el cambio de año del Fuego Nuevo.

203

Juan José Batalla Rosado

Ahora bien, ¿no estaremos interpretando estas escenas equivocadamente? Esto puede ser debido tanto a que se estuviera describiendo otro sistema”, como a que algunas de las rayas verticales negras estén pintadas en los pliegues o que incluso se pusieran posteriormente de manera aleatoria y sin conocimiento preciso de la separación entre unos meses y otros. Finalmente, Michel Graulich? destaca en su trabajo la importancia de que los signos de los días y años plasmados en el tonalpohualli y en los dos xiuhmolpilli del Códice Borbónico sumen un total de 366: ... Una particularidad del Borbónico, ya señalada por Paso y Troncoso (1898 : 19). [...] Si calculamos el total de los glifos de días en el códice — días en el

sentido más amplio, incluyendo los nombres de los años que en realidad son días « portadores » del año- llegamos exactamente a 366, es decir, el número de días de un año bisiesto: los 260 días del tonalámatl, los 52 años-días del

“siglo” en las páginas centrales, los años-días 1 Conejo al principio de las fiestas, 2 Ácatl para la ceremonia del Fuego Nuevo en panquetzaliztli,

3 Pedernal

arriba de una segunda figuración del primer mes, izcalli en este códice, luego los 49 signos siguientes del «siglo » y los aíios 1 Conejo y 2 Ácatl otra vez, el ültimo con el signo de otro Fuego Nuevo. No podemos imaginar otro motivo para la presencia de exactamente 366 días-años que la reforma meditada por Motecuhzoma II. Una reforma que nunca tuvo tiempo de introducir, o que no introdujo tal vez porque se dio cuenta de que sólo podía funcionar si toda Mesoamérica la aceptaba y que, si no, crearía un inmenso caos.

No obstante, teniendo en cuenta la estrecha relación que Michel Graulich establece entre el tonalpohualli y el xiuhpohualli del Códice Borbónico, pues en su opinión «la parte adivinatoria del códice comparte referencias más o menos explícitas a las fiestas de las veintenas »?*, pensamos que realmente el nümero total de signos calendáricos dfa-año es de 369, pues en el Cuadro Mayor de la trecena 14 encontramos asociados a Xipe Totec otros tres días: 1-perro, 3-águila y 4-movimiento. Debido a ello, no nos parece que sea posible sustentar con claridad esta afirmación, aün cuando no tengamos en cuenta esos tres días extras reflejados en la decimocuarta trecena. Como vemos, son demasiadas las cuestiones que se pueden plantear respecto de la interpretación del Códice Borbónico. Ahora bien, gran parte de ellas tendrían posiblemente solución con un análisis codicológico profundo del documento.

22. Estamos pensando, por ejemplo, en las páginas centrales (29-47) del Códice Borgia, donde para algunos autores se reflejan una serie de ritos en un templo concreto, otros opinan que se trata de un xiuhpohualli, la descripción del paso del sol por el inframundo, etc. Véase esta discusión y las referencias bibliográficas en J. J. BATALLA, El Códice Borgia, p. 407-445. 23. M. GRAULICH, «Las fiestas», p. 193. 24. M. GRAULICH, « Las fiestas», p. 188. Véase también M. GRAULICH, « Elementos de las fiestas de las veintenas en las trecenas del Códice Borbónico», en S. RueDa, C. VEGA, R. MARTÍNEZ (ed), Códices y Documentos sobre México. Segundo Simposio, México, Instituto Nacional de

Antropología e Historia, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, 1997, IT, p. 205-220.

204

El Códice Borbónico

Para dar por finalizado este epígrafe, únicamente nos resta indicar que respecto de la confección física del Códice Borbónico actualmente se mantiene la región de Culhuacan?, debido a las múltiples apariciones de la diosa Ciuacoatl en el xiuhpohualli y a referencias a la zona chinampera por el resto deidades que se muestran*. Estudio codicológico del Códice Borbónico

Actualmente los investigadores especialistas en códices mesoamericanos estamos tomando conciencia sobre la importancia del estudio codicológico de estos documentos como paso previo al análisis de su contenido. De esta manera,

se han

realizado

estudios

de estas características

sobre diversos

documentos. Los resultados obtenidos han permitido llevar a cabo hipótesis sobre su datación y realización física que, de otro modo, hubieran resultado imposibles de plantear. Así, por ejemplo, el análisis codicológico del Códice Mendoza?’ indica que su tercera sección (etnográfica) no formaba parte del plan original de la obra y que se trata de un añadido coetáneo realizado con papel europeo sobrante de la composición de otros documentos; que el Códice Borgia consta de más fragmentos de piel de los que realmente se habían señalado, afianzando de este modo la particularidad de que una de sus secciones, la más extensa y debatida (páginas 29 a 47), es una adición que rompe la normalidad temática del documento”. Por ello, tal y como hemos indicado, los estudios codicológicos de los códices mesoamericanos se están convirtiendo en algo obligatorio para comprender los mismos a todos los niveles. En el caso concreto del Códice Borbónico nunca se ha realizado un análisis de estas características por especialistas en esta disciplina científica y con los medios materiales precisos para llevarla a cabo”. Por ello, dada la enorme problemática que se establece respecto de su datación prehispánica o colonial temprana, consideramos que sería muy útil contar con un estudio codicológico lo más completo posible para intentar determinar no sólo esta cuestión sino otras muchas dudas o preguntas que planteamos en las páginas anteriores respecto de esta obra, como hemos indicado uno de los

25.

H. B. NicHoLsoN, «Some Remarks on the Provenience of the Codex Borbonicus », Adeva

Mitteilungen 40 (1974), p. 14-18; F. ANDERS, M. JANSEN, L. REYES GARCÍA, El libro del Ciuacoatl,

p. 51-58; M. GRAULICH, «Las fiestas», p. 186-187, etc.

26. Los autores que más han desarrollado el origen del Códice Borbónico en el área de Culhuacan son F. ANDERS, M. JANSEN, L. Reyes García, El libro del Ciuacoatl, p. 51-58. 27. J. J. BATALLA, «Estudio codicológico del Códice Mendoza», Revista Española Antropología Americana

de

40/2 (2010), p. 229-248.

28. J. J. BarALLA, El Códice Borgia, p. 312-317, 378-382, 437-438; « Estudio codicológico del Códice Borgia», manuscrito.

29. El único análisis codicológico realizado al Códice Borbónico es el de J. de DURANDFOREST, «Codex Borbonicus. Description codicologique», en Codex Borbonicus, Graz, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1974, p. 27-32, manifestando en el mismo que no

pudo realizar ningún tipo de análisis o exámenes en laboratorio, con lo cual tuvo que llevar a cabo su labor de una forma visual.

205

Juan José Batalla Rosado

documentos principales dentro de los códices mesoamericanos en general y para el conocimiento de la cultura azteca en particular. De este modo, en nuestra opinión el análisis codicológico del Códice Borbónico debería comprender toda una serie de pasos que pasamos a describir, aunque en ningün caso deben entenderse como una realización cronológica. — Determinar con la mayor precisión posible la datación del documento. Para ello se debería utilizar el método más fiable y preciso que exista en este momento. Aunque ninguno de ellos pueda ofrecer una fecha exacta, una aproximación cercana puede resultar muy útil. —Radiografía completa del documento, recto y verso De este modo, podríamos comprobar, entre otras cuestiones, que no existe ninguna pintura oculta, como por ejemplo se aprecia a simple vista en la trecena 11, presidida por el dios Pahtecatl, donde se observa con claridad que el tlacuilo se equivocó en el momento de pintar la columna vertical exterior (plasmó los días con los Señores de la Noche) y tuvo que tapar lo pintado con una pasta de color blanco sobre la que volvió pintar las figuras que correspondían (los Señores del Día y las Aves Agoreras)*. Sería importantísimo analizar la composición física del material utilizado para tapar lo pintado, no sólo para entender cómo trabajaban los tlacuiloque sino debido a que en los Primeros Memoriales de fray Bernardino de Sahagún (segunda mitad del siglo xvi) se observa el mismo tipo de corrección mediante una pasta blanca en el folio 52v del manuscrito conservado en la Real Academia de la Historia de Madrid”. Por otro lado, aunque a través del original y sus facsímiles se observa claramente cuál fue el error del pintor del Códice Borbónico, mediante este análisis se podría determinar con precisión si el tlacuilo del Códice Borbónico se dio cuenta de su error una vez pintada la columna al completo o antes de finalizarla. —Estudio de los fragmentos de papel que componen el soporte físico. En el primer trabajo completo realizado al Códice Borbónico publicado originalmente en 1898, Francisco del Paso y Troncoso” manifiesta que el documento está realizado mediante una única tira de papel de amate de «15 metros y 80 centímetros de longitud », pues contabiliza las cuatro páginas que le faltan. No obstante, a continuación señala que:

30. Para una descripción detallada de este aspecto, véase J. J. BATALLA, «Los Tlacuiloque del Códice Borbónico. Análisis iconográfico de los signos calendáricos », Estudios de Historia Social y Económica de América

10 (1993), p. 15-16.

31. Actualmente un grupo de investigadores españoles estamos llevando a cabo en el Instituto del Patrimonio Histórico Español de Madrid el análisis codicológico completo de esta obra (los manuscritos de la Biblioteca del Palacio Real y de la Real Academia de la Historia). En

concreto, tras nuestra petición, se está analizando químicamente esta pasta correctora utilizada para tapar lo pintado. De este modo, poder comparar la composición de ambos materiales, de los Primeros Memoriales de Sahagún y del Códice Borbónico, podría resultar muy útil para establecer diferencias o semejanzas entre ambos. 32.

206

F. del Paso y Troncoso, Descripción, Historia, p. 2-4.

El Códice Borbónico

... aun cuando admitiéramos que las páginas 17 y 18 hayan estado separadas desde que se hizo la pintura, cosa muy discutible, siempre tendríamos que constaba el manuscrito de dos piezas, una de 7 y otra de 9 metros de longitud ; y en esto no cabria duda ninguna, porque pude cerciorarme de la continuidad de las otras páginas por medio de sus dobleces, examinando éstos uno por uno; tomando nota de su estado relativo, y comprobando así que ninguno está completamente desgarrado, salvo aquellos dos.

Aunque este autor no lo expresa directamente, hemos de suponer que su análisis de finales del siglo xix se llevó a cabo visualmente, pues en ningún momento indica la utilización de algún medio material físico o químico para realizarlo. Por ello, en cierta manera sorprende que con el mismo tipo de estudio, visual, Jacqueline de Durand-Forest,

muchas décadas después,

llegue a conclusiones totalmente diferentes. Así, para esta investigadora” el Códice Borbónico está compuesto por tantas hojas de papel de amate como páginas conserva, todas ellas adheridas mediante un pegamento. La media de longitud que ofrece de ellas es de 37 a 38 cm., si bien hay pedazos de 26 ó 27 cm. y otros de 41 ó 42 cm. Asimismo, aprecia que su unión se lleva a cabo de manera que no coincidan con los plegados del códice. Además de incluir un esquema de cómo se producen las uniones entre las hojas, explica que llevó a cabo su análisis sobre el verso del códice, ya que se encuentra sin pintar”, Finalmente, señala que la única unión perceptible se observa en la página 18, por ser muy gruesa e inhábil. Como vemos, parece claro que el Códice Borbónico precisa de un análisis con todos los medios físicos disponibles en la actualidad. A ello, hay que unir que una vez determinados con claridad los fragmentos que lo componen, resultaría importantísimo llevar a cabo análisis químicos de la composición del papel de cada uno de ellos. Entre los diversos motivos para ello, destaca la posible presencia de un fragmento en la página 37 del documento”, pues así parece apreciarse a través de los facsímiles publicados**, concretamente a los 29 cm. de la hoja, justamente donde se advierte la presencia de un pintor diferente que participa en una parte muy concreta del códice : la realización del segundo ciclo de años. Así, poder establecer que realmente en esa página

33.

J. de DurAND-FOREST, « Codex Borbonicus », p. 28.

34. Deseamos destacar este aspecto por lo adecuado que nos parece, ya que el verso del Códice Borbónico sería el lugar idóneo para llevar a cabo diferentes análisis, precisamente debido a que no hay ningún peligro de dañar pinturas, salvo que el estudio radiográfico de esta parte indicara lo contrario. 35.

Lamentablemente J. de DURAND-FOREST,

«Codex

Borbonicus»,

p. 28, no especifica los

lugares concretos de cada página donde se establecen las uniones, pero por lo expresado en su estudio, podemos suponer que en la 37 tiene que haber una unión de dos de ellos. 36. Codex Borbonicus, Graz, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1974; Códice Borbónico, Graz, Madrid y México, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Sociedad Estatal Quinto Centenario, Fondo de Cultura Económica, 1991. Pese a tratarse de los mejores facsímiles

con los que contamos en la actualidad, ninguno de ellos reproduce el verso por encontrarse en blanco, con lo cual los investigadores perdemos para nuestros estudios una parte importante del documento, aunque visualmente parezca que no contiene pinturas.

207

Juan José Batalla Rosado

hay otro fragmento y que su composición física es diferente al resto permitiría, como veremos al tratar del número de tlacuiloque que participaron en su confección, explicar por qué el trabajo de este pintor se desarrolla exclusivamente en las páginas 34, 37, 38, junto a las desaparecidas 39 y 407”. Finalmente, hemos de indicar que debido a su deterioro en el pliegue superior e inferior de la mayor parte de las dobleces de la tira hay pequeños fragmentos de papel ¿europeo? pegados como refuerzo, algunos de ellos con restos de letras que podríamos situar en el siglo xv1%%, con lo cual nos informarían de un intento muy temprano de arreglo del códice. Lo ideal como trabajo de restauración del documento sería la separación de los mismos y su análisis por separado. En ningún caso estos pequeños fragmentos de papel deberían ser destruidos, tomando además la nota pertinente respecto de su localización original. — Análisis de la capa de estuco que recubre todo el documento. El Códice Borbónico, pese a estar pintado por una sola cara, tiene la otra también estucada, con lo cual habría que llevar a cabo esta prueba en ambos lados. Una vez determinada su composición podríamos proceder a su comparación con la analizada en otros códices, o con la que se pueda realizar en estos. De esta manera se podrían comprobar los materiales usados para la confección del estuco y si hay ya alguno no prehispánico. —Estudio de la composición de las pinturas utilizadas en el códice para determinar también la posible presencia de diversos pintores. En la actualidad un grupo de investigadores italianos de la Universidad de Perugia han ideado un nuevo sistema de análisis de las pinturas por medio de láser que no precisa tomar muestras de las mismas, con lo cual no se dañaría el documento de ningún modo. Nos consta que esta exploración ya ha sido realizada con el Códice Cospi (Universidad de Bolonia, Italia), con el Códice Nuttall (British Museum, Gran Bretaña) y con los códices Trocortesiano y Tudela (Museo de América de Madrid, España). La determinación de los

componentes de las pinturas nos podría ayudar a datar el códice y a establecer el número de pintores. —Estudio de la composición de las tintas utilizadas para la realización de los breves comentarios que describen algunas de las figuras representadas en el documento. De este modo se podría determinar con claridad cuántos escribanos comentan el códice, pues se duda entre dos o cuatro”. A ello habría que

37. En la página 38 parece apreciarse una unión con otro fragmento de papel del que sólo conservamos unos 9 cm. 38.

F. del Paso

y Troncoso,

Descripción,

Historia,

p. 5, y J. de DURAND-FOREST,

«Codex

Borbonicus», p. 28, describen todos los tipos de papel usados para reforzar el códice tanto en el verso como en el recto. El primero de ellos identifica la letra que conservan algunos de ellos como «caracteres de forma gótica y escritos á mano, pareciéndome que se han de haber puesto los dichos refuerzos antes de que pasara el Códice a Francia». 39.

F. ANDERS,

M. JANSEN,

L. Reyes

García,

El libro del Ciuacoatl,

p. 24-25,

desarrollan

todas las opiniones al respecto del número de comentaristas que participaron en la explicación de algunas de las figuras y escenas del Códice Borbónico.

208

El Códice Borbónico

añadir las palabras que se conservan en alguno de los pequeños fragmentos que se pusieron como refuerzo de las esquinas en las dobleces del códice. — Análisis de la rayas verticales que dividen las escenas del xiuhpohualli. Como ya hemos seííalado, consideramos fundamental establecer con claridad cuántas son las líneas verticales de color negro que se plasmaron para separar las fiestas mensuales, ya que en los pliegues puede haber alguna que se haya deteriorado totalmente. Además, habría que comprobar con qué material están realizadas, pues del mismo modo que nunca se ha dudado que pertenecen a los tlacuiloque, bien pudieran estar confeccionadas con fórmulas occidentales, con lo cual también se podría determinar que no pertenecen a estos (comparando los resultados con los obtenidos de las pinturas), y si a los glosadores, si se demuestra que están realizadas con las mismas tintas%, —Determinar con el mayor grado posible de precisión el nümero de pintores que participaron en la plasmación de las imágenes en el códice. Hace ya bastantes años publicamos dos trabajos que trataban sobre el número de tlacuiloque que participaron en la realización del Códice Borbónico. En el primero de ellos, 1993, nos ocupábamos de los pintores que podrían haber participado en la realización de los signos calendáricos, concluyendo que eran tres? : uno de ellos había plasmado los glifos de los días en las páginas 3 a 10 del códice, otro los correspondientes a los días y años recogidos entre la 11 y la 22, ambas inclusive, y finalmente un tercer tlacuilo para los años contenidos en las páginas 23, 34, 36 y 37, suponiendo que también pintaría los que estarían en las dos últimas páginas desaparecidas. En el segundo de los estudios, 1994, intentamos ya extender la misma investigación a la totalidad del Códice Borbónico^, dando como resultado la presencia del mismo nümero de pintores: uno para los Cuadros Mayores del tonalpohualli, imágenes centrales del primer xiuhmolpilli y los signos calendáricos de las páginas 3 a 10, otro para los glifos del calendario augural de las hojas 11 a 20 y del primer ciclo de años, y, por ültimo, un pintor para la totalidad de las páginas 23 a 38. Tras el transcurso de quince años desde el último trabajo somos conscientes de que la asociación de las páginas 23 a 38 del Códice Borbónico a un ünico tlacuilo nos vino impuesta por la similitud del palo encendedor del fuego, como indicativo del Fuego Nuevo, pintado en las páginas 34 y 37 de la obra*, pues realmente es el ünico elemento ajeno a los glifos calendáricos que se puede comparar. Hoy pensamos que este gran parecido pudo deberse a una

40. Este aspecto supone una de esas afirmaciones que siempre se dan por sentadas. Por ejemplo ocurre lo mismo con los códices que están realizados en piel, como los componentes del mal llamado Grupo Borgia o los códices mixtecos prehispánicos: al tratarse de piel esta tiene que ser de venado. Pero que nos conste, nunca se ha demostrado en un laboratorio, pues como las crónicas del siglo xvi nos indican que las pieles eran de este animal, o también de ocelote, directamente añadimos que son de venado sin pruebas que lo certifiquen (para una discusión más amplia sobre este tema véase J. J. BATALLA, El Códice Borgia, p. 312-313). 4l. J. J. BarALLA, «Los Tlacuiloque del Códice Borbónico. Análisis», p. 21.

42. J. J. BATALLA, «Los Tlacuiloque del Códice Borbónico : una aproximación », p. 69. 43. Ibid., p. 68, Fig. 14.

209

Juan José Batalla Rosado

mera copia por parte de este pintor de los signos calendáricos de las páginas 23 a 38 del que se encontraba en la 34. Con esto queremos decir que siempre tuvimos en mente que el color y la iconografía de estos glifos anuales eran tan diferentes del resto de imágenes que parecían pintados por una persona que ünicamente se ocupó de este cometido. Por ello, consideramos que sólo un estudio físico-químico de las pinturas utilizadas podría determinar si realmente hay más pintores. Por otro lado, hay una idea en la que nunca hemos dejado de pensar: ; qué pasaría si los signos anuales del último xiuhmolpilli (p. 23, 34, 36 a 40) fueron

plasmados con posterioridad a la realización del códice?^! Es decir, ¿cómo deberíamos interpretar el ciclo de las veintenas si suponemos que no estaban asociadas a ningún año? Por ello es tan importante determinar de cuántos fragmentos de papel está compuesto el Códice Borbónico y si todos ellos están realizados con idéntico material. Si los dos ültimos pedazos de papel que conforman las páginas 37 y 38 fueran diferentes al resto, confirmarían que el códice se había alargado para reproducir el segundo xiuhmolpilli, tal y como parece que ocurrió con la sección central del Códice Borgia*. Obviamente, sin la existencia del estudio codicológico del Códice Borbónico,

todas estas hipótesis no son más que posibles vías de análisis sin confirmación de ningún tipo. Estas son las acciones que en nuestra opinión deberían llevarse a cabo en el Códice Borbónico, sin olvidarnos que también es preciso estudiar con la mayor profundidad posible el reverso del documento, pues al no contener ningún tipo de información pictórica y escrituraria nunca ha sido objeto de estudio ni de reproducción facsimilar. Reflexiones finales

A través de este trabajo hemos pretendido mostrar cuáles son los problemas interpretativos que, en nuestra opinión, aún pueden establecerse en lo relativo al conocimiento que tenemos sobre el Códice Borbónico. Como hemos tenido ocasión de comprobar, el principal de ellos es la ausencia de su estudio codicológico, pues incide directamente en la interpretación que se puede realizar de su contenido. Por ello, decidimos tratar en último lugar de este aspecto, pues la mayor parte de las preguntas que nos podemos hacer sobre lo expresado en las pinturas del documento puede encontrar la solución mediante la realización del mismo. Desafortunadamente, este rasgo no es exclusivo de este documento y la mayoría de los códices mesoamericanos

44. Aunque consideremos que el Códice Borbónico está inacabado es obvio que en algún momento concreto se dejó de pintar, con lo cual pensamos que posteriormente pudo ser retomado para plasmar este segundo xiuhmolpilli y que incluso se pudo alargar artificialmente para ello, añadiendo nuevos fragmentos de papel. 45. Como ya indicamos anteriormente, la presencia en la parte central del Códice Borgia (p. 29 a 47) de fragmentos de piel de muy poca extensión, comparados con el resto, nos ha llevado a concluir que la sección central es un pegote añadido a la composición inicial del documento.Véase J. J. BATALLA, El Códice Borgia, p. 312-317, 378-382, 437-438.

210

El Códice Borbónico

carecen también de este tipo de estudios, imprescindibles para comprender su gestación y el porqué de la información que contienen. Por otro lado, dado el lugar en el que se va a enmarcar este estudio, hemos aprovechado el mismo para analizar uno de los últimos trabajos publicados por Michel Graulich, maestro de un gran nümero de especialistas en cultura y, Sobre todo, religión mesoamericana. Cualquier análisis que se lleve a cabo Sobre esta temática está obligado a incluir las opiniones de Michel Graulich, aunque cómo hemos visto, algunas de ellas puedan ser también discutidas. De hecho, esta es la única manera que tenemos para avanzar en el conocimiento científico del área cultural mesoamericana.

211

DE QUELQUES

RELATIONS

ENTRE

LES SEIGNEURS DU JOUR,

LES SEIGNEURS DE LA NUIT ET LES DIVINITÉS ÉMERGEANT

DU BEC DES OISEAUX

Jacqueline DE DURAND-FOREST Centre national de la recherche scientifique

À l'instar des autres peuples de la Mésoamérique, les Aztèques pensaient que de nombreuses forces divines se faisaient sentir dans le monde et influaient, de manière plus ou moins décisive, sur les divers cycles du temps. Craignant leur susceptibilité et redoutant que le monde ne connaisse une nouvelle destruction, ils ont développé des procédés techniques permettant de scruter la volonté de divinités ambigués, aux réactions imprévisibles, et de conformer le comportement humain aux exigences de tels numina. Position du probléme

Dans le monde

aztéque, vie publique et vie privée étaient largement

subordonnées à des considérations fondées sur le calendrier divinatoire, le

Tonalpohualli ou compte des destins, qui comprenait, rappelons-le, 260 jours, chacun affecté d'un chiffre allant de 1 à 13, soit au total 20 «semaines» de

13 jours ou treizaines, placées sous l'égide d'un ou de deux dieux. En outre, les signes de jours patronnés par une divinité et les chiffres étaient porteurs d'influences diverses. À ces paramètres, s'en ajoutaient deux autres: la série des 9 Seigneurs de la Nuit et celle des 13 Seigneurs du Jour. Dans son commentaire au Tonalamatl Aubin, s'inspirant de Cristobal del Castillo, de Jacinto de La Serna et plus particuliérement du dominicain Juan de Córdoba, dont la grammaire zapoteque rassemble les expressions relatives au découpage du temps nocturne et diurne!, Eduard Seler a qualifié la série des 9 divinités, les Yoaltetecuhtin, de seigneurs des heures nocturnes, et celle des

1.

C. del CasriLLo,

Historia

de la venida

de los mexicanos

y otros pueblos

e Historia

de la

conquista, F. NAVARRETE LiNARES (trad.), Mexico, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1991, ch. 72, p. 217; J. DÉ CórDOBA, Arte del idioma zapoteco, Mexico, Secretaría de Educación Pública, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1987 (1° éd. 1578), p. 193-194; J. de La SERNA, Manual

de ministros

de indios, para

el conocimiento

de sus idolatrias y extirpación de

ellas, Mexico, Ediciones Fuente Cultural, 1953 (1° éd. 1892), p. 163 et suivantes.

213

Jacqueline de Durand-Forest

13 seigneurs, les Tonaltetecuhtin, de seigneurs des heures du jour?. De surcroît, se référant aux représentations du Codex Vaticanus A et aux indications de l'Histoyre du Mechique, les Tonaltetecuhtin lui ont semblé correspondre aux

13 Cieux, et les Yoaltetecuhtin aux 9 Régions souterraines?. Eduard Seler suppose, en effet, qu'à l'origine, les 9 Seigneurs de la Nuit n'étaient pas les divinités tutélaires d'une série de nuits, mais les « gardiens des 9 heures de la nuit», ce qui concordait avec le fait que le 5* dieu de la série, le Gardien de Minuit, était le dieu de la mort, Mictlantecuhtli, demeurant dans le 9* et plus

profond niveau sous la terre. La succession horaire des Seigneurs du Jour, évoquée par Eduard Seler, trouverait,

selon

ce dernier,

confirmation

dans

la planche

71

du

Codex

Borgia*, où l'on voit les 13 oiseaux entourant le Soleil en tant que personnage principal. La Lune et Vénus-Tlahuizcalpantecuhtli (représentée par son glyphe Ce Acatl) sont aussi présentes, mais en retrait, en position secondaire, réduites, conformément à certains mythes établissant une relation génésique entre la disparition de la lune dans les rayons du soleil du matin ou peu de temps avant la sortie de celui-ci. Sans les écarter, ces deux interprétations ne nous semblent pas correspondre à la présentation que donnent du tonalamatl plusieurs códices, notamment le Codex Borbonicus et le Tonalamatl Aubin?. Ces deux manuscrits offrent la particularité de rassembler en une seule planche tous les éléments propres à chaque treizaine. Ces éléments sont répartis dans deux colonnes de 13 cases chacune pour le Codex Borbonicus, et en 4 colonnes dans le Tonalamatl Aubin. Cette succession se fait toujours dans le méme ordre dans le Borbonicus, tandis que le Tonalamatl présente des anomalies. Dans ce dernier, en revanche, les oiseaux disposés dans une

colonne supplémentaire laissent apparaitre des divinités surgissant de leur bec (fig. 1). Ces 3 séries de dieux se présentant simultanément suggèrent des réseaux de relations que nous nous proposons d'analyser.

2.

E. SELER, The Tonalamatl of the Aubin Collection. An

Old

Mexican Picture Manuscript in the

Paris National Library (manuscrits Mexicains n°18-19), Duc de LouBAT (éd. et trad.), Londres,

1900-1901, p. 19-22. À propos des 13 oiseaux, Seler souligne le fait qu'ils ne sont pas présentés seulement comme des oiseaux, mais comme les «déguisements» des divinités qu'ils laissent émerger de leur bec, chaque oiseau en étant le naualli. Id., Gesammelte Abhandlungen zur amerikanischen Sprach-und Alterthumskunde, Graz, Akademische Druck- u. Verlangsanstalt, 1960-1967, vol. 4, p. 30. 3. Codex Vaticanus A ou Codex Rios ou Codex 3738, Graz, Akademische Druck- u. Verlangsanstalt, 1979; Histoyre du Mechique, manuscrit inédit du xvr siècle, E. de JONGHE (éd.), Journal de la Société des Américanistes 2 (1905), p. 1-41. 4. Códice Borgia, E. SELER (éd. et com.), Mexico, Fondo de Cultura Económica, 2 vol. + atlas, 1963. Nouvelle édition: Codex Borgia, K. A. NoworNv (com.), J. de DuRAND-FOREST, E. J. de DURAND (trad.), Graz, Paris, Akademische Druck- u. Verlangsanstalt, Club du Livre Philippe Lebaud, 1977. 5. Codex Borbonicus, K. A. NoworNv (com), J.de DurAND-FOREST (description codicologique), Graz, Akademische Druck- u. Verlagsanstalt, 1974; J. de DUuRAND-FOREST, F. Rousseau,

M.

CucuzL,

S. SzPiRGLAs

(éd.),

Los

elementos

anexos

del

Códice

Borbónico,

E. S. MoRALES SALES (trad.), Toluca, Universidad Autónoma del Estado de México, 2000.

214

De l'influence des divinités

Figure n? 1: Les treize oiseaux et les divinités émergeant du Tonalamatl Aubin

En annexe, plusieurs tableaux rappellent la disposition du calendrier divinatoire dans le Codex Borbonicus et le Tonalamatl Aubin (tableaux 1 et 2), les 20 signes de jours et leurs protecteurs (tableau 3), les chiffres et leur influence (tableau 4).

Un tableau unique (tableau 5) présente une vue synthétique et simultanée des 3 séries de divinités. Le tableau suivant (tableau 6) rassemble les carac-

téristiques principales et la zone d'influence de chaque divinité figurant dans l'une ou l'autre série. Pour débuter

par Xiuhtecuhtli,

le dieu

introducteur

de la série des 9

Seigneurs de la Nuit, trois treizaines ont particulièrement retenu notre attention, à savoir: la F, la X* et la XIX.

Bien que le Codex Borbonicus et le

Tonalamatl Aubin aient été amputés de la I treizaine, il est toutefois possible de la reconstituer à partir d'autres codex, tels le Vaticanus A et le Telleriano-

Remensis$, bien qu'incomplets. La XIX° treizaine ayant déjà fait l'objet d'une étude publiée", c'est donc sur la X* treizaine que se sont concentrés nos efforts;

C'est à partir d'elle, à titre d'exemple, que nous avons dressé le tableau n? 7, qui réunit les divers paramètres que le devin devait prendre en compte pour établir ses prédictions (détermination du jour du «baptéme » du nouveau-né,

6. Codex Telleriano-Remensis, E. QuiNoNES KEBER (éd. et com.), Austin, University of Texas Press, 1995. 7. J. de DurAND-FoREsT, «Du symbolisme à l'interprétation. La XIX* Treizaine du Codex Borbonicus et ses éléments secondaires », Cahiers d'Histoire de l'Amérique Coloniale 1 (2006),

p. 23-34.

215

Jacqueline de Durand-Forest

du moment favorable pour entreprendre un voyage, pour se marier, bref, pour toute entreprise). La finalité de ces rapprochements est de déterminer l’influence de ces divinités sur la treizaine. Nous comparerons enfin les résultats de notre analyse avec les données de la Historia General de Sahagún?. Description comparative des trois treizaines L'exemplarité de la Dixième Treizaine La X' treizaine débute en Ce Tecpatl (1 Silex) et s’achève en Matlactli omei

Itzcuintli (13 Chien)? ; elle est patronnée par Tonatiuh et par Mictlantecuhtli, le premier placé à la gauche, le deuxième à la droite d'un mát planté dans un bac rempli d'eau. Un «œil nocturne » ornant l'extrémité du mát, derrière lequel s'entrecroisent deux épines de maguey ensanglantées, se trouve situé sous un élément représentant le ciel nocturne. Un personnage à la chevelure blonde, pénitent ou prétre, grimpe le long du mát. Dans le coin inférieur gauche de la scène, un autre personnage, à la méme coiffure, tient une flèche : peut-étre s'agit-il d'un guerrier ou d'un prétre-guerrier (fig. 2). Autour des divinités protectrices gravitent des «éléments secondaires» de diverses natures ; certains apotropaiques (a), d'autres de caractère divinatoire (b).

—Des récipients contenant l'un une fleur et de l'eau, l'autre un cœur et une volute de fumée, un autre encore un oiseau et trois tiges de malinalli (?), enfin,

un brasier renfermant un os, une épine de maguey ensanglantée et un faisceau de flèches ou de zacate (baguettes de scarification).

—Le paquet funéraire ou bulto, le personnage dont la téte s'enfonce dans la terre, la cruche d'eau; le serpent bicolore et l'araignée, l'un et l'autre de nature particulièrement défavorable. Au-dessus et de part et d’autre du bac figurent 5 ornements en jadéite : une couronne xiuhuitzolli, une paire d'ornements

d'oreille xiuhnacochtli,

deux

ornements de nez yacaxiuitl, ainsi qu'un petit chien xolocozcatl accroché à une étole amaneapanalli. Cet ensemble constitue les ornements des guerriers morts, que le devin pouvait interpréter soit comme des augures, soit comme des offrandes à faire. Premiére Treizaine

en

Elle débute en Ce Cipactli (1 Monstre aquatique) et se termine 13 Acatl (13 Roseau). Elle a pour protecteurs les dieux créateurs

Ometeotl/Tonacatecuhtli

d'une

part,

Omecihuatl/Tonacacihuatl

de

l'autre,

mais la première partie fait défaut dans le Codex Telleriano-Remensis. Dans le Vaticanus À, les deux parties sont présentes, mais dissociées: les 5 premiers jours de la Treizaine avec Ometeotl/Tonacatecuhtli figurent sur une planche ; Omecihuatl/Tonacacihuatl, entourée des cases oü sont inscrits les 8

8. B. de SaHaGún, Historia general de las cosas de la Nueva España, Mexico, Porrúa, 1956. 9. Codex Borbonicus, pl. 10.

216

———a | a— A,

BET.

De l'influence des divinités

Figure n? 2: La dixiéme Treizaine du Codex Borbonicus

signes de jours restant, ne se rencontre que beaucoup plus loin. Dans ces deux manuscrits, les treizaines ne comportent pas d'éléments secondaires^. Rappelons que les dieux créateurs demeuraient dans l'Omeyocan (le lieu de la dualité), le 13° Ciel, où ils exerçaient leur fonction créatrice. Tonacacihuatl se fondait avec les déesses-méres et celles de la fertilité, Tonacatecuhtli, quant à lui, avec les dieux du feu, du mais et les divinités solaires.

Dix-neuvième Treizaine Elle commence en Ce Cuauhtli (1 Aigle) et s'achève en 13 Mazatl (13 Cerf). Elie est présidée à gauche par Xochiquetzal, à droite, par le dieu noir de la danse, déguisé en coyote. Cet animal porte l'omequetzalli, les 2 panaches de plumes de quetzal propres à Xochiquetzal ; son ornement nasal, le yacaxiuitl,

10.

Codex Telleriano-Remensis,

2° partie de la treizaine, fol. 8r, p. 19; Codex

Vaticanus À,

I" partie, pl. 12v; 2° partie, pl. 27r.

217

Jacqueline de Durand-Forest

caractéristique des souverains aztèques et des guerriers morts au combat, suggère qu'il est le nahualli de Tezcatlipoca — comme le confirment les attributs portés par l'animal dans la treizaine correspondante du Vaticanus A !. Des 18 «éléments secondaires » entourant les protecteurs, 8 ont un caractere divinatoire: le patolli, le tlachtli, l'homme décapité à côté du précédent (indiquant probablement le destin du joueur), le crâne sur la balle en hule (caoutchouc) ; le serpent partiellement enroulé autour du pied gauche de la divinité et le mille-pattes émergeant de dessous son siege sont des « symboles de luxure » ; le tzotzopaztli (couteau de tisserande), et enfin l'araignée, dont le

caractère divinatoire défavorable est bien attesté. Les autres «éléments secondaires» sont de nature apotropaique: les épines de maguey, le couteau de silex, le petit brasier contenant un papillon et un serpent à demi enfoncés l'un et l'autre dans le récipient ; un tripode d'oü émergent au centre une volute de fumée, à gauche une bande de coton non cardé, à droite une fleur; dans le coin inférieur droit, un petit récipient d'oü sort un serpent à la langue bifide rouge et bien visible. Dans une étude antérieure, nous avions remarqué que les «éléments secondaires » en rapport avec la mort (l'homme décapité, le couteau de silex et le cráne) se trouvent placés autour de Xochiquetzal, ce qui souligne le caractère ambivalent de cette dernière, et justifie la présence des «éléments secondaires » apotropaiques destinés à s'assurer la bienveillance de la divinité indispensable à l'accomplissement du sort attaché à cette treizaine. Analyse des 3 séries de divinités communes aux 3 treizaines

Il convient désormais de mettre en évidence les rapports qu'entretiennent les divinités des 3 séries dans leur ordre de présentation ; à cet effet, le tableau

n? 8 a pour fonction de fournir une vue synthétique de ces relations. De ce tableau, il ressort que les Yoaltetecuhtin (les 9 Seigneurs de la Nuit) et les Tonaltetecuhtin (les 13 Seigneurs du Jour) entretiennent entre

eux des relations qui sont déterminées par leur position respective dans la treizaine. Dans la X*, comme dans la F et la XIX*, il apparait à l'examen que ces relations sont de 3 types: le méme dieu ou l'un de ses avatars peut étre à la fois Yoaltecuhtli (1) et Tonaltecuhtli (2) et occuper la méme position dans la treizaine, ce que nous définissons comme un procédé d'insistance ( ): - en position

1,

Xiuhtecuhtli (1) — Xiuhtecuhtli (2)

le Yoaltecuhtli et le Tonaltecuhtli sont en relation d'opposition (———): - en -en -en -en

11.

218

position position position position

5, 6, 12, 13,

Mictlantecuhtli (1) — Tlazolteotl (2) Chalchiuhtlicue (1) - Mictlantecuhtli (2) Piltzintecuhtli (1) - Tlahuizcalpantecuhtli (2) Cinteotl (1) — Citlalinicue (2)

Codex Vaticanus A, pl. 35v-36r.

De l'influence des divinités

le Yoaltecuhtli et le Tonaltecuhtli entretiennent des relations de complémentarité (-.. —) :

-en -en -en -en -en -en

position position position position position position

2, 4, 7, 9, 10, 11,

Itztli (1) - Tlaltecuhtli 2) == Cinteotl (1) — Tonatiuh (2) Tlazolteotl (1) — Cinteotl (2) Tlaloc (1) — Quetzalcoatl (2) Xiuhtecuhtli (1) — Tezcatlipoca (2) Itzli (1) — Chalmecatecuhtli (2)

On observe ces mêmes types de relations entre les divinités émergeant du bec des oiseaux (3) dans le Tonalamatl Aubin et les Yoaltetecuhtin (1) ou bien les Tonaltetecuhtin (2): procédé d'insistance : - en position -en position

8, 10,

Tlaloc (3) - Tlaloc (2) Tezcatlipoca (3) — Tezcatlipoca (2)

relation d'opposition : - en position -en position

1, 12,

Tlahuizcalpantecuhtli (3) — Xiuhtecuhtli (1) & (2) Cinteotl (3) - Tlahuizcalpantecuhtli (2)

relation de complémentarité :

position position position position position

-en -en -en -en

position position position position

En regroupant

,

S UO DONNEE " » m M

- en -en -en -en -en

9,

12, 13,

Xochipilli (3) — Piltzintecuhtli (1) Xipe Totec (3) - Cinteotl (1) Yaotl (3) — Mictlantecuhtli (1) Uauantli (3) — Mictlantecuhtli (2) Xiuhtecuhtli (3) - Cinteotl (2) Tlaloc (3) - Tepeyolotl (1) Tlaloc (3) - Quetzalcoatl (2) Cinteotl (3) — Piltzintecuhtli (1) Xochiquetzal (3) - Citlalinicue (2).

les données

des deux

ensembles

d'influence, on peut

noter que, si, dans les positions 3, 4, 7, 9 et 13, les 3 divinités en présence

dans le Tonalamatl Aubin sont plutót favorables, dans les autres positions, en revanche, l'influence pouvait étre bénéfique ou défavorable; en dernier ressort, l'interprétation en était laissée à la discrétion du devin, en fonction de

sa science des signes, de ses aptitudes psychologiques, de celles des consultants, des circonstances enfin.

Malgré son jugement défavorable sur l'Astrologie judiciaire et sur ceux qui la pratiquaient, Sahagün s'étend néanmoins longuement sur cet art dans son Historia General. Il examine, en effet, les vingt treizaines du calendrier

divinatoire et passe en revue les treize signes ou «cases» composant chacune d'entre elles!?. S’il indique bien le nom de la treizaine, le même que celui de

12. B. de SAHAGÜN, Historia General, livre IV ch. 1-40, p. 313-368: p. 347-348; I* treizaine, ch. 1, p. 317-319; xix*treizaine, ch. 33, p. 360.

X* treizaine, ch. 21,

219

Jacqueline de Durand-Forest

la première «case», il ne précise généralement pas quelles sont les divinités protectrices de la treizaine. Il annonce, en revanche, si la treizaine est ou

non favorable, et signale ici ou là quel est le patron de telle ou telle «case ». Sahagün semble accorder moins d'importance à l'influence des signes qu'aux chiffres dont ils sont affectés (cf. tableau n? 4). Toutefois, Sahagün ne fait pas

mention des 3 séries de divinités, qui font l'objet de cette étude. Dans

le chapitre 21

de l'Historia

General,

concernant

la X* treizaine,

Sahagün indique que le premier jour était consacré à Huitzilopochtli, le dieu de la guerre. «On disait que ceux qui naissaient sous ce Signe seraient vaillants, honorés, riches... ». Quant aux filles du méme signe, « elles seraient

habiles en beaucoup de choses et généreuses en toutes sortes de nourritures, trés viriles, courtoises, discrètes...» La X* treizaine était donc très favorable,

comme l’étaient les treize cases qui la composaient. Bien qu'il soit fort peu disert sur la I* treizaine, Sahagün écrit qu'elle était très favorable, comme l'étaient les treize cases, dont il donne les noms

en nahuatl et en espagnol. L'enfant né durant cette treizaine deviendrait «Seigneur ou "Sénateur" et riche, s'il était le fils d'un dignitaire; vaillant, honoré, respecté de tous, et aurait de quoi manger, s'il était de basse extraction et de parents pauvres. » «Si c'était une fille, elle serait riche et aurait tout le nécessaire [...] pour offrir des banquets, des danses dans sa maison, et donner

de la nourriture et de la boisson aux orphelins et aux pauvres vieux... ». Toujours selon Sahagún, la x1x* treizaine était plutôt défavorable, bien que son signe, Ce Quauhtli (1 Aigle), n'ait pas été néfaste. Les hommes, nés sous ce signe, « seraient vaillants, courageux, hardis, osés, mais aussi dévergondés, impolis, présomptueux, beaux parleurs, flatteurs, effrontés; les femmes,

osées, dévergondées, insolentes, impudiques, promptes à empoigner, à griffer le visage des autres (femmes) et à déchirer leur huipil ».

Au cours de cette treizaine, les jeunes Cihuateteo descendaient sur terre et s'attaquaient aux enfants. Sahagün termine son commentaire en énumérant les treize cases et en indiquant, une fois encore, que leur influence était fonction du chiffre qui les accompagnait. A plusieurs reprises, le franciscain note que les troisièmes cases sont toujours favorables, tout comme les septièmes, qui permettent le baptéme immédiat du nouveau-né. A la différence des cases 4, 5, 6, 8 et 9 de caractere néfaste, les quatre dernières cases (10, 11, 12 et 13) sont toujours de

bon augure, gráce à leurs divinités protectrices, à savoir respectivement: Tlahuizcalpantecuhtli, Citlallicue, Tonatiuh, Tonacatecuhtli.

On remarquera que Tlahuizcalpantecuhtli est le 12* Seigneur du Jour; Citlallicue/Citlalinicue/Omecihatl, pour sa part, figure comme 13* Seigneur du Jour; Tonatiuh pourrait correspondre en partie à Yoaltecuhtli, le Soleil nocturne,

11* Seigneur du Jour. Tonacatecuhtli,

affecté à la 13* case chez

Sahagün, n'apparait pas parmi les divinités des 3 séries présentées ci-dessus. Xiuhtecuhtli fusionnait toutefois avec Ometeotl/Tonacatecuhtli dans son róle

de Teteo Innan Teteo Inta, la Mère et le Père des dieux.

Pour toutes les treizaines, Sahagün insiste sur les pénitences et les offrandes qu'il convient de faire, soit pour atténuer le mauvais sort prévu, soit pour préserver la bonne fortune annoncée. 220

De l'influence des divinités

Toutes ces indications permettent de mieux saisir le sens de certains éléments des planches consacrées à la divination dans les manuscrits pictographiques. À partir de ces informations et des observations qu'inspire l'examen des calendriers divinatoires, il apparait que le signe du 1* jour de la treizaine, qui donnait son nom à celle-ci, exerçait une influence déterminante sur l'ensemble de la treizaine, au méme titre que les divinités protectrices de la treizaine. A l'inverse, les signes de jours, leurs patrons, les chiffres dont ils étaient affectés, n'avaient qu'une influence limitée, ponctuelle. Il en allait de méme des 3 séries de divinités, dont les influences conjuguées, parfois opposées, venaient accroître le nombre des paramètres à la disposition du devin. Auprès de ses maîtres du calmecac, il en avait appris les ressources, le symbolisme complexe et si souvent ambigu, qui, par delà son apparente rigueur, devait lui permettre de moduler ses réponses comme de ménager sa réputation. Doctus cum Libro, il n'avait pas à craindre le rire d'un confrére, encore

moins d'une de ses « pratiques». Néanmoins, son «avenir» dépendait largement de sa capacité à jauger la situation, à peser avec soin les termes de ses réponses en fonction de l'importance de son consultant, de la gravité du cas soumis à sa science. Personne n'ignore le destin réservé au devin malheureux, à l'astrologue trop clairvoyant, à l'oracle tenu pour « menteur». Les exemples ne manquent point dans le monde classique comme dans les «empires» aztèque ou inca du Nouveau. Déterminer le jour favorable pour « baptiser » un nouveau-né n'engageait le devin que de fagon superficielle; tout autre chose était de pronostiquer le moment opportun pour une expédition lointaine d'un pochteca et le caractère favorable ou non de l'issue. S'agissant des affaires de l'Etat, c'était sa vie méme qu'il mettait en balance. On comprend mieux, dés lors, l'importance accordée à l'astrologie judiciaire dans la civilisation aztèque comme dans l’œuvre de Sahagün.

22]

Jacqueline de Durand-Forest

Y +]. IV

T + ois 13

Y +]. II

T + ois 12

Y +]. II

T + ois 11

Y +]. I

T + ois 10

Y +]. IX

T + ois 9

Y +]. VII

T + ois 8

T+ois. 1

:T+ois. 2

T + ois. 3

T+ois. 4

:T+ois. 5

:T+ois. 6

T + ois 7

Y +]. I

Y +]. Il

Y +]. II

Y +]. IV

Y +]. V

Y +]. VI

Y +]. VII

=>

Tableau n° 1: Disposition du calendrier divinatoire Codex Borbonicus T = Tonaltetecuhtin + oiseau Y = Yoaltetecuhtin + signe de jour

ois +div.

Y

j

ois + div

Y

j

ois + div

Y

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Y

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ois + divi

ois divi

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ois+ div!

T

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Y

Y

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j

«—

ois +divi

ois + div i ois+ div

Tableau 2 : Disposition du calendrier divinatoire Tonalamatl Aubin T = Tonaltetecuhtin + oiseau Y = Yoaltetecuhtin + signe de jour

222

De l'influence des divinités

I Cipactli

Xochipilli — Tonacatecuhtli

Monstre aquatique II Ehecatl Vent

Quetzalcoatl

III Calli

Tepeyollotl, dieu des caverns

Maison

IV Cuetzpallin Lézard

Ueuecoyotl, dieu de la danse

V Coatl

Chalchiuhtlicue ou Xochipilli= Chalchiuhtlatonac (Vat. B)

Serpent

VI Miquiztli

Tecciztecatl ou Metztli (dieu de la Lune)

Mort VII Mazatl Cerf

Tlaloc associé à Quiauhtonatiuh, le Soleil de pluie

VIII Tochtli Lapin

Mayauel, déesse du Pulque

IX Atl Eau

Huehueteotl ou Xiuhtecuhtli, dieu du Feu

X Itzcuintli Chien

Mictlantecuhtli ou Mictecaciuatl, dieu et déesse de l'Inframonde & de la mort

XI Ozomatli

Xochipilli, jeune dieu du printemps, dieu des fleurs

Singe XII Malinalli Herbe morte

Patecatl, dieu du pulque & de l'ivresse

Tezcatlipoca-Ixquimilli-Itzlacoliuhqui, dieu aux yeux ban-

XIII Acatl Roseau

dés, de la justice punitive, du chátiment

XIV Ocelotl Jaguar

Tlaelcuani-Tlazolteotl, déesse de l'amour charnel, de la luxure & de la confession

XV Cuauhtli

Tlatlauhqui Tezcatlipoca = Xipe Totec, dieu de la végétation

Aigle

& des orfévres

XVI Cozcacuauhtli Vautour

Itzpapalotl, déesse terrestre & guerrière chichiméque, apparentée à Tlazolteotl

XVII Ollin Mouvement

Xolotl, frére jumeau de Quetzalcoatl, dieu à téte de chien, de la Planéte Vénus, du Jeu de Balle

XVIII Tecpatl Silex

Chalchiuhtotolin, une des apparences de Tezcatlipoca, symbole de l'eau précieuse (sang)

XIX Quiahuitl Pluie

Tonatiuh, dieu solaire/Ometecuhtli, dieu primordial/Chantico = Ciuacoatl, déesse terrestre, du Feu

XX Xochitl Fleur

Xochiquetzal, déesse de l'amour, de la procréation, identifiée à Omeciuatl, déesse primordiale

Tableau n? 3: Les 20 signes de jours et leurs protecteurs selon les Codex Vaticanus B et Borgia

223

Jacqueline de Durand-Forest

Chiffre

Nahuatl

Influence

1

Ce

Variable

2

Ome

Indifférent

3

Ei/yei

Bon

4

Naui

Mauvais

5

Macuilli

Mauvais

6

Chicuace

Mauvais

7

Chicome

Bon

8

Chicuei

Mauvais

9

Chiconaui

Mauvais

10

Matlactli

Bon

11

Matlactli o(n)ce

Bon

12

Matlactli omome

Bon

13

Matlactli omei

Bon

Tableau n° 4: Les chiffres et leur influence selon Sahagún, Livre IV de la Historia General

224

De l'influence des divinités

Yoaltetecuhtin

Tonaltetecuhtin

Oiseaux & Divinités

I- Xiuhtecuhtli

1- Xiuhtecuhtli

1-Tlahuizcalpantecuhtli Colibri bleu

II- Itztli

2 -Tlaltecuhtli

2- Ixtlilton Colibri vert

III- Piltzintecuhtli

3- Chalchiuhtlicue

3-Xochipilli Faucon

IV- Cinteotl

4- Tonatiuh

4-Xipe Totec Caille

V- Mictlantecuhtli

| 5- Tlazolteotl

5-Yaotl Aigle

VI- Chalchiuhtlicue

6- Mictlantecuhtli

6-Uauantli/Teoyaomiqui Chouette

VII- Tlazolteotl

7- Cinteotl

7- Xiuhtecuhtli Papillon

VIII- Tepeyollotl

8- Tlaloc

8-Tlaloc Aigle

IX- Tlaloc

9- Quetzalcoatl

9-Tlaloc Dindon

I- Xiuhtecuhtli

10- Tezcatlipoca

10-Tezcatlipoca Chouette/Duc

II- Itztli

11- Chalmecatecuhtli/ Yoaltecuhtli

III- Piltzintecuhtli

12- Tlahuizcalpantecuhtli

IV- Cinteotl

13- Citlalinicue/Omecihuatl

11-Xochipilli Guacamayo-Arara 12-Cinteotl Quetzal

13-Xochiquetzal Perroquet

Tableau n° 5: Les séries des seigneurs de la nuit, du jour, des oiseaux et des divinités dans leur bec dans les Treizaines 1, 10, 19 du Tonalamatl Aubin

225

Jacqueline de Durand-Forest

Yoaltetecuhtin I- Xiuhtecuhtli

(Seigneur de la turquoise/de l'année)

Tonaltetecuhtin

1- Xiuhtecuhtli Représentant de la guerre, dispensateur des richesses,

Oiseaux / Divinités Colibri bleu

1-Tlahuizcalpantecuhtli (Seigneur de la maison

dieu du Feu, du centre de la terre, du

juge de la conduite des

de l’aube), — Aspect de

individus, il les éléve ou les

Quetzalcoatl en tant que

foyer, Seigneur de

abaisse en dignité. Partage le titre de Tloque Nahuaque avec Tezcatlipoca. Appelé «la Mère/le Père des dieux »

Vénus étoile du matin. Porteur du Ciel de l'Ouest. Feu céleste

2- Tlaltecuhtli

Colibri vert 2- Ixtlilton

l'Année, Porteur du Ciel du Nord. Feu terrestre II- Itztli (Obsidienne) Couteau sacrificiel d'obsidienne, instrument de

justice, aspect de Tezcatlipoca

(Seigneur de la terre, mále/femelle) dieu de la terre, monstre à

forme de crapaud avalant un couteau sacrificiel pour représenter la terre dévorant à l'ouest le Soleil ou la lumière du jour.

(le petit visage noir) dieu noir de la danse,

frére de Xochipilli et de Macuilxochitl, pouvoir curatif de son eau noire (itlilauh) sur les enfants.

III- Piltzintecuhtli (Seigneur-Prince)

3- Chalchiuhtlicue (Celle à la jupe de jadéite)

Faucon

dieu du jeune Soleil,

Déesse de l'eau courante,

pére de Cinteotl avec Xochiquetzal.

purificatrice ou dangereuse

(Prince-Fleur) dieu des fleurs, de la procréation, de l'amour

(noyade), épouse deTlaloc,

et du printemps, compagnon

régente du 4* Soleil.

de Macuilxochitl (dieu du chant, de la danse et du jeu)

3- Xochipilli

— dispensateur éventuel de maladies vénériennes et des

hémorroides. Assimilé parfois à Cinteotl.

IV- Cinteotl (Dieu de l'épi de mais) Appelé *Xochipilli' dans un Cantique.

4- Tonatiuh (Dieu-Soleil) Seigneur du jour, patron des guerriers, notamment dans le Codex Borbonicus

Caille 4- Xipe Totec [« région Yopi? dieu des TlapanèquesYopi/Zapotéques ?] (Notre Seigneur l'Ecorché) dieu du printemps et de la végétation, Tezcatlipoca rouge, envoie des maladies

d'yeux ; pendant masculin de la vieille déesse de la terre et de la lune.

226

De l'influence des divinités

V- Mictlantecuhtli (Seigneur du Mictlan/Infra-

5- Tlazolteotl [« Huasteca] (Déesse de l’immondice)

Déesse de la luxure,

(le guerrier) Dieu à la pein-

monde, dieu de la

préside aux naissances,

ture de danse du guerrier ;

mort)

protectrice des femmes

un des noms donnés à

Porteur du ciel du

médecins, à la tête des

Tezcatlipoca

sud (Borgia & Vat.

femmes mortes en cou-

B)

ches. Vieille déesse lunaire souvent confondue avec Teteoinnan-Toci. Déesse de la confession.

VI- Chalchiuhtlicue |

6- Mictlantecuhtli

Chouette

Cf. supra

Cf. supra

6- Uauantli/Teoyaomiqui (le Rayé/dieu des morts à la

Aigle 5- Yaotl

guerre)

Dieu à la peinture des prisonniers de guerre VII- Tlazolteotl Cf. supra

7- Cinteotl Cf. supra

Papillon 7- Xiuhtecuhtli. Cf. supra

VIII- Tepeyollotl

8- Tlaloc

Aigle

(Cœur de la

(Celui qui est fait de terre

8- Tlaloc

montagne) Aspect de Tezcatlipoca sous forme de jaguar; porteur du ‘miroir fumant". Dieu des cavernes et des collines.

ou couvert de terre) Créé par Quetzalcoatl et

Dieu de la pluie fécondante ou dévastatrice, dieu de la pluie de feu et de la foudre.

Tezcatlipoca, transformés

en serpents redoutables.

Demeure dans le Tlalocan,

Dieu du 3° Soleil.

région de l'Est.

IX- Tlaloc

9- Quetzalcoatl

Dindon

Partage avec Tezcatlipoca le titre de Nahaulpilli = Prince-Sorcier

(Serpent Plumes de Quetzal) Dieu créateur, préside au 2* Soleil.

9- Tlaloc

Dieu du vent (Ehecatl)

et la planète Vénus (Tlahuizcalpantecuhtli). Héros culturel, a apporté le mais aux humains et donné le Tonalpohualli au 1* couple de devins. I- Xiuhtecuhtli

10- Tezcatlipoca

Cf. supra

(Miroir fumant) Préside au 1* Soleil, qu'il a créé. Dieu du ciel nocturne, de la Grande Ourse, dieu du Nord, des jeunes Guerriers, du Telpochcalli

Chouette/Duc 10- Tezcatlipoca Dieu des Sorciers, omniscient, omniprésent, dieu des destins, donne et reprend la vie. Etroitement lié au dieu

primordial

227

Jacqueline de Durand-Forest

II- Itztli

11- 1) Chalmecatecuhtli/2)

Cf. supra

Yoaltecuhtli (le Seigneur Chalmeca/le Seigneur de la nuit)

| Guacamayo-Arara

11- Xochipilli Cf. supra

1) Peintures du dieu la mort, dieu des sacrifices. 2) Soleil nocturne

III- Piltzintecuhtli

12- Tlahuizcalpantecuhtli

Cf. supra

Vénus aux tendances mal- | 12- Cinteotl veillantes, décoche des Cf. supra fléches, entre autres, contre

| Quetzal

les souverains et les guerriers, bien qu'il représente les ámes des guerriers sacrifiés. IV- Cinteotl

13- 1) Citlalinicue/2)

Cf. supra

Omecihuatl

13- Xochiquetzal

(Celle à la jupe étoilée/la Dame 2) 1) Déesse du ciel nocturne et de la Voie lactée, —

(Fleur Quetzal) Jeune déesse de l'amour, de la fertilité, de la jeune lune ;

Ilamatecuhtli (Seigneur femme), vieille déesse lunaire et terrestre, com-

pagne du dieu du feu (C. Borbonicus), soit Mictecacihuatl, déesse de la mort (Tonalamatl Aubin).

Perroquet

contrepartie de Xochipilli ; demeure dans la partie la plus élevée du ciel, là où les enfants à naître sont “formés” et reçoivent leur Tonalli,

2* entité animique. Patronne des femmes enceintes, des courtisanes et des brodeuses.

2) Analogue à Tonacacihuatl, dame de la subsistance, déesse

primordiale Tableau n? 6: Caractéristiques et zones d'influence des divinités

228

Quiahuitl (XIX)

+

Xochitl (XX) -Cipactli (I)

++

Ehecatl (IT)

--

Calli (IIT)



Cuetzpallin (IV)

--

Coatl (V) *

2 Ome

=

3 Yei + 4 Nahui

--

5 Macuilli

--

6 Chicuace

=

7 Chicome

+

8 Chicuei --

13 Matlactli

--

Très favorable Favorable Mauvais

+

++

++ +

Piltzintecuhtli

Tlaloc ++/= | Xiuhtecuhtli ft Itztli --

Tepeyollotl 4

--

Tlazolteotl

++/=

Chalchiuhtlicue

+ [-

Mictlantecuhtli

++/=

Piltzintecuhtli ++/+ Cinteotl

==

Itztli

- /[*

Xiuhtecuhtli

acihuatl

Variable Indifférent Neutre *

++/=

+

Omecihuatl

Citlalinicue ou

+

Tlahuizcalpan-Tecuhtli

+

Tezcatlipoca + Chalmecatecuhtli ou Yoaltecuhtli

Quetzalcoatl

Tlaloc

Cinteotl

Mictlantecuhtli

Tlazolteotl

Tonatiuh

Chalchiuhtlicue

Tlaltecuhtli

Xiuhtecuhtli

Yoaltetecuhtin Tonaltetecuhtin J. de la Serna/A. Caso (1967) | (Sahagún, cases 10 à 15)

Mictlantecuhtli/Mictec | Cinteotl

Huehueteotl

Mayahuel

Tlaloc/Quiauhtonatiuh

Chalchiuhtlicue Xochipilli/ Chalchiuhtlatonac Tecciztecatl/Metztli

| Huehuecoyotl

Tepeyollotl

Quetzalcoatl

Tonacatecuhtli

Xochipilli

Xochiquetzal

| Tonatiuh

| Chalchiuhtotolin

Patrons

Tableau n° 7: Paramètres de la dixième Treizaine.

+

omei

Itzcuintli (X)

=

omome

+

Atl (IX)

12 Matlactli

+

10 Matlactli + 11 Matlactli once

9 Chiconahui

| Miquiztli (VI) + Mazatl (VID + Tochtli (VIIT) =

--

-—

1 Ce

Signes Jacinto de la Serna Tecpatl (XVIID

N° d'ordre Sahagún

Xochiquetzal

| Cinteotl

Xochipilli

Tezcatlipoca

Tlaloc

Tlaloc

Xiuhtecuhtli

Uauantli/Teoyaomiqui

Yaotl

Xipe Totec

Xochipilli

Ixtlilton

Tlahuizcalpan-tecuhtli

Divinités/oiseaux

sanuiaip sap 220u2njfui1 24

Jacqueline de Durand-Forest

Yoaltetecuhtin

(1) I

Xiuhtecuhtli

33

1

insistance L'aspect dangereux de Tlahuiz.est tempéré par l'influence bénéfique de Xiuh

H

Itzili

>

2

complémentarité L'aspect négatifde (1) et de (2) tempéré par (3) Iii

Piltzintecuhtli



3

complémentarité (1), (2) et (3) : bénéfiques IV

Cinteotl



4

complémentarité 1), (2) et (3): plutôt bénéfiques V

Mictlantecuhtli

—-—

5

opposition L'aspect négatif de (1) et de (3) est tempéré par (2) quand elle préside aux naissances VI

Chalchiuhtlicue

—->

6

opposition Quand (1) positive, elle tempère l'influence négative de (2) et de (3) VII

Tlazolteotl

>

7

complémentarité Dans sa fonction positive, (1) accroît l'influence positive de (2) et de (3)

VII

Tepeyollotl

>

8

+/- complémentarité L'influence maléfique de (1) est éventuellement tempérée par (2-3) IX

Tlaloc



9

complémentarité Plutót bénéfiques I

Xiuhtecuhtli

— complémentarité

L'influence maléfique de (2) et de (3) tempérée par (1)

230

10

De l'influence des divinités

Tonaltetecuhtin

Divinités

(2)

(3)

Xiuhtecuhtli

—->

1

Tlahuizcalpantecuhtli

opposition L'aspect dangereux de Tlahuiz.est tempéré par l'influence bénéfique de Xiuh Tlaltecuhtli

=->

2

Ixtlilton

3

Xochipilli [Piltz. : filiation]

4

Xipe Totec

5

Yaotl [Mictlant. : complé. ?]

opposition L'aspect négatifde (1) et de (2) tempéré par (3) Chalchiuhtlicue

— complémentarité

(1), (2) et (3): bénéfiques Tonatiuh

— complémentarité

(1), (2) et (3): plutót bénéfiques Tlazolteotl

> complémentarité ?

L'aspect négatif de (1) et de (3) est tempéré par (2) quand elle préside aux naissances

Mictlantecuhtli



6

Uauantli/Teoyaomiqui

complémentarité Quand (1) positive, elle tempére l'influence négative de (2) et de (3) Cinteotl



7

Xiuhtecuhtli

complémentarité Dans sa fonction positive, (1) accroît l'influence positive de (2) et de (3) Tlaloc

—— ——

8

Tlaloc

insistance L'influence maléfique de (1) est éventuellement tempérée par (2 -3) Quetzalcoatl



9

Tlaloc [Tlaloc : insistance]

10

Tezcatlipoca

complémentarité Plutôt bénéfiques

Tezcatlipoca

=3 insistance

L'influence maléfique de (2) et de (3) tempérée par (1)

231

Jacqueline de Durand-Forest

H

Itztli



11

complémentarité Influence plutôt négative de (1) et (2) tempérée par (3) HI

Piltzintecuhtli

e->o

12

Opposition Influence négative de (2) tempérée par (1) et (3) IV

Cinteotl

e->o

13

opposition Influence plutót favorable de (1), (2) et (3) Tableau n? 8: Interactions des divinités des 3 séries dans les Treizaines 1, 10, 19

232

De l'influence des divinités

Chalmecatecuhtli/Yoaltecuhtli

—-—

1l

| Xochipilli Yoaltecuhtli

12

Cinteotl | [Piltz.: filiation]

13

Xochiquetzal | [Cinteotl: filiation]

opposition Influence plutôt négative de (1) et (2) tempérée par (3) Tlahuizcalpan- Tecuhtli

o opposition

Influence négative de (2) tempérée par (1) et (3) Citlalinicue/Omecihuatl

> complémentarité

Influence plutót favorable de (1), (2) et (3)

233

ENTRE ET INSTRUMENTS LE SYMBOLISME

SCEPTRES DIVINS DE MUSIQUE CÉRÉMONIELS:

DES BÂTONS DE SONNAILLES AZTÈQUES

Aurélie COUVREUR

Centre national de la recherche scientifique

Plus de dix ans ont passé depuis ce jour de printemps où, jeune étudiante de l'université de Bruxelles, j'affrontais ma timidité et parlais à Michel Graulich de mon souhait de travailler avec lui sur les instruments de musique azteques. De la confiance qu'il m'accorda, en acceptant de me suivre dans ce projet malgré ses lacunes documentaires intrinsèques et celles de ma formation, sont nés un travail de fin d'études et, surtout, une passion pour

la recherche mésoaméricaniste qui ne m'a pas quittée depuis. Une invitation récente au second colloque de la Société des Américanistes de Belgique fut l'occasion de me replonger dans ce sujet qui n'est si cher. Le présent article est l'aboutissement de ce retour aux sources. En tant que boucle qui se boucle, le résultat de ces réflexions est naturellement dédié et offert à celui qui sut forer le feu mésoaméricaniste chez ses étudiants. Pour 52 ans? À la recherche de la matérialité d'un objet disparu

Contrairement aux autres instruments de musique aztèques (tambours à fentes teponaztli, tambours

à membrane, flütes, conques, etc.) on ne conserve

pas d'exemplaire archéologique du chicahuaztli, le báton de sonnailles azteque!. Cet objet ne nous est connu qu'au travers de ses représentations

1. Un sceptre en bois sculpté en forme de chicahuaztli a été mis au jour dans une cache de la Maison des Aigles, édifice situé dans l'enceinte cérémonielle de Mexico (L. LóPEz LuiÁn, La casa

de las Águilas,

un

ejemplo

de la arquitectura

religiosa

de

Tenochtitlan,

2. vol., Mexico,

Fondo de Cultura Económica, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, Instituto Nacional de Antropología e Historia, vol. 1, p. 202 et vol. 2, fig. 305). Malgré sa taille importante (une trentaine de cm) et les rainures aménagées dans son manche, il ne semble pas avoir été utilisé comme báton de sonnailles. En effet, dans ce dépót au matériel organique exceptionnellement bien préservé, aucun élément ayant pu servir de grenailles ne lui était associé (L. LórEgz LujÁN, communication personnelle).

235

Aurélie Couvreur

picturales et sculptées, de ses reproductions miniatures? et de ses évocations fréquentes dans les chroniques du xvr siècle.

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Figure n°1 : Différents exemples de représentations de chicahuaztli. Dessin de l'auteur. a) Codex Borgia, pl. 25 ; b) Codex Borbonicus, pl. 24 ; c) Codex Borgia, pl. 10; d) Codex Borbonicus, pl. 29; e) Primeros Memoriales, fol. 250r; f). D. Durán, Historia de las Indias..., vol. 2, chap. 49, p. 375 ; g) Aztecs, cat. 273.

Sa silhouette nous est pourtant familiére. Dans la plupart des images précolombiennes, il est constitué d'un manche allongé pourvu, en son sommet, d'une

zone arrondie dans laquelle est fiché un élément pointu plus ou moins complexe (fig. 1). La combinaison de ces éléments, l'un rond, l'autre pointu, n'est pas

sans rappeler la manière qu'avaient les anciens Mexicains de représenter le rayon solaire, notamment sous sa forme d'ornement d'oreille? (fig. 1c). Mais

il est également vraisemblable — et d'ailleurs compatible avec la remarque précédente — que l'élément arrondi corresponde au résonateur de l'instrument,

2. Le matériel archéologique déposé dans les caches d'offrandes aztèques était extrêmement riche et varié, et comprenait notamment des objets miniaturisés, comme des atours divins (sceptres, ornement de nez ou d'oreille...) et des instruments de musique. Les reproductions de chicahuaztli étaient réalisées en coquillage, bois, basalte, tezontle, pierre verte et travertin (L. Lórez Luján, La casa de las Águilas, vol.

I, p. 202). Pour des exemples de chicahuazili

miniatures, voir notamment Aztecs, Londres, Royal Academy of Art, 2002, cat. 129, 265, 273, 274, 275; A. EGGEBRECHT, E. EGGEBRECHT (coord.), Les Aztéques: trésors du Mexique Ancien, Hildesheim, Roemer- und Pelizaeus-Museum, 1987, cat. 293 et 294. 3. Codex Borgia |fac-similé], Madrid, Graz, Mexico, Sociedad Estatal Quinto Centenario, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1993, pl. 10; Aztecs, cat. 179 et 255.

236

Le symbolisme des bâtons de sonnailles aztèques

la zone concave dans laquelle étaient insérées les grenailles. Un chroniqueur comme Durán l'indique d'ailleurs clairement, lorsqu'en évoquant le chicahuaztli de Xipe Totec, il parle d'«un bâton avec des sonnailles au sommet »*. Cela étant, d'autres témoignages — dont des mentions du méme Durán — signalent que c'était le manche du chicahuaztli qui produisait des bruissements, et non un résonateur sommital. Le báton de sonnailles est ainsi dépeint comme «un báton qui était creux et qui avait des sonnailles; lorsqu'on le remuait pour marcher, les sonnailles résonnaient»?. Les renflements que présentent souvent les manches de chicahuaztli (fig. 1 d-e) pourraient renvoyer visuellement à la présence de grenailles dans cette zone. Ceci est d'autant plus probable que, dans une planche illustrant la chronique de Durán? (fig. 1f), le bâton de sonnailles apparait sous la forme d'un simple roseau, ce qui suggère que le chicahuaztli était une version ancienne du «báton de pluie» (palo de lluvia), instrument largement répandu de nos jours et constitué d'un roseau ou d'un bambou aux cavités chargées de grenailles. Toutefois, il est également possible que les renflements aient aussi eu une raison d'étre symbolique, puisqu'ils sont parfois assimilés aux ondulations de serpents isolés ou entremélés' (fig. 1g). Bátons de sonnailles, sceptres de divinités

Le báton de sonnailles chicahuaztli jouit d'un statut particulier au sein des instruments de musiques aztèques, car il est le seul à être également un emblème de divinité. À ce titre, il s'apparente aux sceptres qui caractérisent et individualisent les dieux: le t/achiyaloni, l'instrument de vision de

Tezcatlipoca; le xiuhcoatl, foudre de Mixcoatl, etc. À dieux se partagent le bâton est désigné par deux termes

l'arme ignée de Huitzilopochtli; le xonecuilli, le y regarder de plus près, il apparait que plusieurs de sonnailles en tant qu'embléme et que celui-ci distincts dans les sources écrites.

Les dieux porteurs de bátons de sonnailles

De manière systématique, le dieu écorché Xipe Totec tient à la main un Sceptre qui est nommé, décrit et représenté comme un báton de sonnailles. Cette association báton de sonnailles/dieu à peau d'écorché pourrait remonter à l'époque classique: dans l'iconographie zapotéque, en effet, le personnage

4. «un báculo con unas sonajas al cabo» (D. Durán, Historia de las Indias de Nueva Espana e islas de tierra firme, 2 vol., 2° éd., Mexico, Porrúa, 1984, vol. 2, chap. 39, p. 298).

5. «un báculo que estaba hueco dentro, y tenía sonajas, el cual en moviéndolo para andar luego las sonajas hacían su son» (D. DuRAN, Historia de las Indias, vol. 2, chap. 20, p. 228). Voir aussi B. DE SAHAGÚN, Historia general de las cosas de Nueva España, A. M. GARIBAY (éd.), Mexico, Porrúa, 1999, livre 9, chap. 15, p. 515; fbid., livre 1, chap. 17, p. 44. 6. D. DuRÁN, Historia de las Indias, vol. 2, chap. 49, p. 375. 7. Aztecs, cat. 235, 273 et 274.

237

Aurélie Couvreur

revêtu d'une peau arbore un bâton à l'extrémité supérieure arrondie, communément identifié comme un báton de sonnailles?. Mais au Postclassique, ce sceptre musical est aussi fréquemment figuré aux mains d'autres dieux qui, comme l'a montré Seler?, peuvent étre regroupés sous l'appellation de «divinités de l’eau!°, de la terre!! et du mais». Un relief en terre cuite de Teotihuacan laisse penser que cette association est, elle aussi, ancienne: le Tlaloc de l'époque classique y est représenté avec un sceptre dont le manche strié et l'arrondi supérieur rappellent tout à fait le chicahuaztli azteque!*. Enfin, dans l'iconographie aztèque, le bâton de sonnailles est en relation avec un troisiéme ensemble de divinités : les dieux en rapport avec l'apparition et la disparition de la vie: Tonacatecuhtli'^, Quetzalcoatl ? et Mictlantecuhtli$.

8. A. Caso, I. BERNAL, Urnas de Oaxaca, Mexico, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1952, p. 74; C. GONZÁLEZ GONZÁLEZ, « Relaciones de una deidad mesoamericana con

la guerra y el maíz. El culto de Xipe Totec entre los Mexicas», tesis de doctorado en Estudios Mesoamericanos, Universidad Nacional Autónoma de México, Facultad de Filosofía y Letras, Mexico, 2006, p. 25. 9. E. SELER, Collected Works in Linguistics vol. 3, p. 64.

and Archaeology, Culver City, Labyrinthos, 1992,

10. Un chicahuazili apparaît ainsi dans un récipient disposé aux pieds de Tlaloc (Codex Vaticanus B [Fac-similé], Graz, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1972, pl. 41). Il figure

aussi aux mains de prêtres de Tlaloc dans une représentation de la vingtaine d'atícaualo (B. de SAHAGÚN, Primeros Memoriales

[Fac-similé], Norman,

University of Oklahoma

Press,

1993,

fol. 250r.). Il est parfois brandi par des déesses dont les attributs iconographiques renvoient non seulement au mais, mais aussi à l'eau, notamment parce qu'elles portent la coiffe ou la tunique à pompons de Chalchiuhtlicue, la déesse de l'eau (Aztecs, cat. 109, 235, 284; A. EGGEBRECHT, E. EGGEBRECHT (coord.), Les Aztéques, cat. 147 et 148) ou bien encore le couvre-chef de Tlaloc (bid., cat. 284).

11. Le

chicahuaztli

SAHAGÚN,

Florentine

est mentionné Codex,

General

dans

l’hymne

History

of the

de la déesse terre Cihuacoatl things

of New-Spain,

C. E. DiBBLE (trad.), Santa Fe, Utah, The School of American

Research,

(B. de

A. J. O. ANDERSON,

University of Utah,

1950-1981 livre 2, app.. p. 236). Dieu des pluies mais également de la terre, Tlaloc est associé à l'ayauhchicahuaztli,

le chicahuaztli de brume

(Ibid., livre 6, chap. 8, p. 39; cf. infra).

Le

bâton de sonnailles est parfois tenu par Xochiquetzal, jeune déesse de la terre (G. Barr (éd.), Ancient

Mexican

Ceramics from

the Lukas

Vischer

Collection,

Ethnographic

Museum

Basel,

Bále, Friedrich Reinhardt Publishers, 1996, fig. 841 et 490).

12. Le chicahuaztli est brandi par le dieu du mais Cinteotl (Codex Borgia, pl. 52; Codex Vaticanus B, pl. 22) et par les prêtres d'une déesse du mais honorée en tozoztontli (B. de SAHAGÜN, Primeros Memoriales, fol. 250v). Fréquemment, des déesses du mais sont représentées avec, dans une main, deux épis de mais mûr et, dans l'autre, un bâton de sonnailles (Aztecs, cat. 109, 235, 284; 13.

A. EGGEBRECHT,

H. von WINNING,

La

E. EGGEBRECHT iconografía

(coord.), Les Aztéques,

de Teotihuacán:

cat.

147 et 148).

los dioses y los signos,

2 vol, Mexico,

Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Estéticas, 1987, vol. 1,

chap. 1, fig. 5. On pourra par exemple comparer cette image avec le Codex Vaticanus B, pl. 68; voir aussi fig. la. 14. 15. 16.

238

Codex Borgia, pl. 9; Codex Vaticanus B, pl. 28. Codex Borgia, pl. 36, 56, 73; Codex Vaticanus B, pl. 76. Codex Borgia, pl. 50, 56, 73; Codex Vaticanus B, pl. 20, 76.

Le symbolisme des bâtons de sonnailles aztèques

Ayauhchicahuaztli vs chicahuaztli: variations autour du báton de sonnailles

Dans les sources écrites du xvr siècle, les bâtons de sonnailles portés par les divinités sont désignés par deux termes nahuatl distincts: chicahuaztli et ayauhchicahuaztli. Le premier est systématiquement utilisé pour nommer l'emblème de Xipe Totec; le second est employé pour évoquer le bâton de sonnailles des divinités du mais, de l'eau et de la terre: les déesses Xilonen",

Chalchiuhtlicue?, Tzapotlan Tenan'” et le dieu Tlaloc?. A l'évidence, cette distinction entre les sceptres à sonnailles est avant tout symbolique. De la méme maniére que certains lieux ou objets rituels sont décrits comme

étant «de brume»

dans les sources anciennes?!, le «chica-

huaztli de brume» est clairement associé à des divinités en rapport avec le monde de Tlaloc. En tant que déesses du mais tendre et des eaux, Xilonen et Chalchiuhtlicue ont des affinités bien connues avec le dieu des pluies et de la terre??. Quant à Tzapotlan Tenan, la déesse qui incarne l'oxit/ (la térébenthine ou la résine de pin), elle s'apparente aux Tlaloque par la coiffe de papier tacheté d’ulli qu'elle partage avec eux?. Cette dichotomie symbolique est d'autant plus vraisemblable qu'en aucun cas, le chicahuaztli de Xipe Totec n'est qualifié d'ayauhchicahuaztli. Cela dit, il faut reconnaitre que l'inverse n'est pas nécessairement vrai: à quelques reprises, le sceptre de Xilonen?' et celui du dieu des pécheurs Opochtli? sont simplement appelés chicahuaztli — une variante qui pourrait s'expliquer par le fait que, méme s'il est spécifiquement «de brume», l'ayauhchicahuaztli fait partie de la famille des chicahuaztli^* et peut être désigné comme tel. À ce sujet, on notera d'ailleurs que

17. B. de 18. Ibid., 19. Ibid., 20. Ibid.,

SAHAGÜN, Florentine Codex, livre 2, chap. 27, p. 104. livre 1, chap. 11, p. 22. livre 1, chap. 9, p. 17. livre 6, chap. 8, p. 39.

2]. C'est le cas notamment d'un lieu appelé Ayauhcalco, «le lieu de la maison de brume», particuliérement fréquenté au cours des vingtaines consacrées aux divinités de l'eau et des montagnes comme

atemoztli (ibid., livre 2, chap. 16, p. 30), atlcahualo (ibid., chap. 20, p. 44)

ou tepeilhuitl (ibid., chap. 32, p. 131-3). On peut également citer l'exemple de la veste de brume (ayauhxicolli) portée par le prétre de Tlaloc (ibid., chap. 25, p. 87) et le dieu du mais Cinteotl (ibid., livre 9, chap. 17, p. 80). 22. Voir par exemple M. GRAULICH, Ritos Aztecas; Fiestas de las veintenas, Mexico, Instituto Nacional Indigenista, 1999, p. 364-368.

23. B. de SauaaUN, Primeros Memoriales, fol. 264r (à comparer par exemple avec la planche 261v du méme ouvrage). 24. B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, livre 2, chap. 27, p. 103. 25. Ibid., livre 1, chap. 17, p. 37. 26. Il convient de mentionner l'existence d'un autre type de chicahuaztli, l'omichicahuaztli,

littéralement le «chicahuaztli d'os». Bien qu'il soit apparenté au chicahuaztli et à l'ayauhchicahuaztli par son nom, cet instrument de musique est tout à fait distinct des bâtons de sonnaillespuisqu'il s'agit d'un racloir en os (/bid., livre 6, chap. 42, p. 239; Codex Vindobonensis, [Fac-similé], Madrid, Graz, Mexico, Sociedad Estatal Quinto Centenario, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1992, pl. 24; H. BEvER «Mexican Bone Rattles», Studies in Middle America 5 (1934), p. 321-343. Le chroniqueur

Fernando

de Alvarado

Tezozómoc parle à plusieurs reprises de l'emichicahuaztli mais il

239

Aurélie Couvreur

dans les Primeros Memoriales, les informateurs de Sahagün ne font aucune distinction lexicale entre les différents sceptres de ces mêmes divinités, qu’ils qualifient tous de chicahuaztli?. Si les sources ne détaillent pas deux technologies distinctes s’agissant du chicahuaztli et de l'ayauhchicahuaztli?, elles livrent des détails intéressants concernant leur mode d'utilisation. Les quelques témoignages disponibles insistent sur le dynamisme du joueurde báton de sonnailles: armé de l'instrument, il danse, saute, fait des demi-tours?... Les informateurs de Sahagún

soulignent que le chicahuaztli de Xipe Totec était agité et frappé avec force contre le sol: le personnificateur du dieu le percute contre le sol pour le faire résonner, il plante vigoureusement le bâton dans le sol pour qu'il bruisse*. Pendant les poursuites rituelles qui ont lieu au cours de la fête de t/acaxipehualiztli, les chicahuaztli sont utilisés pour frapper les personnes capturées. Un lien entre le báton de sonnailles de Xipe Totec et les coups répétés transparait dans ces témoignages, ce qui n'est pas le cas pour Payauhchicahuaztli. Les textes disent de celui-ci qu'il était agité, secoué?!, mais en aucun cas percuté contre le sol. Ce dernier usage rappelle celui de l'encensoir tlemaitl, dont le manche serpentiforme et creux servait de hochet que les prétres remuaient lors des rituels d'encensement”. Vers le symbolisme de l'ayauhchicahuaztli et du chicahuaztli

Comme souvent pour le Mexique ancien, aucune exégèse indigène ne nous est parvenue à propos de ces deux types d'instruments peut-étre distincts. Nous ne disposons pas non plus de commentaire aztèque concernant l'étymologie du mot chicahuaztli, qui dérive du verbe chicahua, lequel véhicule la

est manifeste que, dans la plupart des cas, il le confond avec le chicahuaztli (E. ALVARADO TEzozóMoc,

Crónica mexicana...

anotada por el Sr Lic. D. Manuel

Orozco y Berra, precedida

del Códice Ramírez, Mexico, Imprenta y litografía, 1878, chap. 55, p. 434; chap. 84, p. 584; chap. 102, p. 678). En effet, ses mentions concernent le sceptre de Xipe Totec, dont on sait,

par toutes les autres sources, qu'il s'agissait d'un báton de sonnailles et qu'il se nommait chicahuaztli. 27. B. de Sanacún, Primeros Memoriales, fol. 263 r, 263v et 264r.

28. Commeje l'ai souligné, les sources écrites et les images aztèques laissent penser que les bâtons de sonnailles étaient de deux factures distinctes : il s'agissait vraisemblablement ou bien d'un manche pourvu d'un réservoir à graines externe, ou bien d'un simple báton creux et rempli de grenailles. Il est évidemment tentant de rechercher un lien entre ces deux technologies et les deux termes vernaculaires utilisés pour désigner les bâtons de sonnailles, mais cette hypothèse ne peut pas étre évaluée en raison des lacunes de la documentation. 29. D. Durán, Historia de las Indias, vol. 2, chap. 49, p. 376. 30. B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, livre 2, chap. 20, p. 46; Ibid., livre 9, chap. 15, p. 69. 31. Ibid., livre 2, chap. 25, p. 84; Ibid., livre 6, chap. 8, p. 39. 32. Ibid., livre 2, chap. 35, p. 151; Codex Mendoza [Fac-similé], 4 vol., Berkeley, University of California Press, 1992, fol. 63r.

240

Le symbolisme des bâtons de sonnailles aztèques

notion de fortifier, grandir, gagner en puissance*, mais également de devenir adulte et mûrir*. L'ayauhchicahuaztli, la brume et la fertilité agricole

En raison de son qualificatif «de brume » et de son association récurrente avec des divinités de l’eau, de la terre et du maïs tendre, le symbolisme de

l'ayauhchicahuaztli peut être clairement cerné et semble assez spécifique. Manifestement,

comme

dans

le cas

de

l'encensoir

tlemaitl,

ses

bruisse-

ments rappellent et appellent magiquement la pluie et P'eau*. Lorsque le roi Ahuitzotl envoie des prêtres implorer Chalchiuhtlicue pour que l'aqueduc qu'il a fait bátir pour la ville de Mexico soit alimenté en eau, les célébrants agitent des bátons de sonnailles tout en souhaitant la bienvenue à la déesse de l'eau vive*. Dans la prière aux Tlaloque, on invoque les dieux pour qu'ils fassent tomber la pluie sur la surface terrestre en ces mots: «puissent les ayauhchicahuaztli ondoyer»* ou, pour reprendre la traduction poétique de Launey*, puisse-t-on «entendre rouler les crécelles de la brume »*. On peut dès lors proposer que par le biais des brumes humides qu'il libère, Payauhchicahuaztli permet de redonner des forces à la terre et, par conséquent, aux hommes qu'elle nourrit. Au-delà des brumes, il apparait que le son du chicahuaztli rappelait aussi le bruit de la grêle, autre phénomène associé aux dieux de la pluie et de la terre. C'est ce que suggère la description d'Opochtli dans le Codex de Florence, qui nous indique que lorsque des offrandes étaient déposées au pied de la divinité, un chicahuaztli était agité en son honneur et des grains de maïs

33. Selon qu'il est intransitifou transitif, le verbe chicahua signifie, respectivement « devenir vigoureux, prendre de la force, vivre jusqu'à un áge avancé» et «renforcer, fortifier, animer quelque chose ou quelqu'un» (to grow vigorous, to gather strength, to live to old age; to strenghten, fortify, animate something, someone), voir l'entrée «chicahu(a)» dans F. KARTTUNEN, An Analytical Dictionary of Nahuatl, Norman, University of Oklahoma Press, 1983. 34. Et ce, dans le cas où le verbe est intransitif. Voir A. WIMMER, Dictionnaire de la langue nahuatl classique, consultable sur internet à l'adresse www.sup-infor.com (mai 2009), entrée « chicahua ».

35. On notera que l'un et l'autre de ces objets peuvent étre assimilés à des serpents (cf. supra,

note;

E. PaszroRvy,

Aztec

Art,

New-York,

Harry

N. Brahams,

1983,

pl.

69).

Le

son

qu'ils émettaient était probablement mis en relation avec les crécelles du crotale, un serpent particulièrement visible en période humide History of Mexican Rattlesnakes, consultable details/naturalhistoryof00arms (mai 2009), p. 36. D. Durán, Historia de las Indias, vol. 2, 37. «... ma moloni yiauhchicaoaztli ... » (... Florentine Codex, livre 6, chap. 8, p. 39. 38.

M.

(B. L. AMSTRoNG, J. B. MurpHy, The Natural sur internet à l'adresse http ://www.archive.org/ 12). chap. 49, p. 375-381. May mist rattle board billow ...), B. de SAHAGÚN,

LAUNEY, Introduction à la langue et à la littérature aztéques, Paris, L'Harmattan,

1980,

vol. 2, p. 173.

39. On notera que dans cette prière, il est clairement exprimé que la terre Tlaltecuhtli ne parvient plus à «fortifier, à nourrir, à faire téter ce qui doit germer, ce dans quoi le peuple trouve sa subsistance, ses vivres» [c'est moi qui souligne] (/bid., vol. 2, p. 164; voir aussi B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, livre 6, chap. 8., p. 36). Cette allusion à la fortification n'est pas

sans rappeler la signification du verbe chicahua auquel chicahuaztli s'apparente.

241

Aurélie Couvreur

soufflé représentant des grêlons étaient étalés devant lui^?. Opochtli faisant partie de la grande famille des Tlaloque, les divinités associées aux pluies et à la terre, il est vraisemblable que son chicahuaztli était plus spécifiquement un ayauhchicahuaztli. Mais, contrairement à la pluie dont l'apparition était le plus souvent attendue et espérée, la chute de la gréle était clairement redoutée en raison des destructions qu'elles entrainaient dans les champs de mais fraîchement plantés*!. Il semble donc que la fonction de Payauhchicahuaztli n'était pas tant de libérer la pluie, la brume et la grêle, que de maîtriser ces phénomènes potentiellement trés destructeurs et, par extension, d'opérer un contrôle rituel sur la fertilité de la terre et sur la germination des pousses. Le chicahuaztli et la maturation du maïs Si Payauhchicahuaztli apparait lié aux phénomènes météorologiques de la saison des pluies et au mais tendre, le chicahuaztli est clairement en rapport avec le mais múr— tout comme Xipe Totec qui l'arbore systématiquement. Rappelons par exemple“ que la demeure du dieu est Cincalco, «le lieu de la maison du mais »* et que le même terme xipehua désigne aussi bien l'écorchement humain que l'épluchage des épis de mais mûr“. Quant au chicahuaztli, son association avec la maturité végétale est perceptible dans son étymologie puisque, rappelons-le, le verbe chicahua signifie «devenir vieux, mürir», y compris en ce qui concerne les plantes“. Dans le cas oü ce terme est appliqué aux cultures agricoles, il évoque l'idée de rendre plus fort ce qui est en germe, ce qui est tendre, de faire passer la plante tendre à l'état de plante mûre“. Par ailleurs, si le chicahuaztli rouge caractéristique de Xipe Totec est représenté aux mains de Cinteotl*”, le dieu du mais tendre, il est souvent

visuellement associé à des épis de mais mûr“. En outre, on ne peut pas manquer de constater qu'il existe un rapport visuel entre l'ornementation

40. B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, livre 1, chap. 17, p. 37. 4]. Ibid., livre 7, chap. 6, p. 20.

42. Pour de plus amples discussions sur ce sujet, voir M. GRAULICH, Ritos Aztecas, p. 309-319; C. GONZÁLEZ

GONZÁLEZ,

Relaciones

de

una

deidad

mesoamericana

con

la guerra

y el maíz,

p. 151-205. 43. D. DuRÁN, Historia de las Indias, vol. 2, chap. 67, p. 493-495; F. ALVARADO TEzozóMoc, Crónica mexicana, chap. 104, p. 672-678 ; M. GRAULICH, Quetzalcoatly el espejismo de Tollan, Anvers, Instituut voor Amerikanistiek, 1988, p. 204-206. 44.

A. WiMMER,

Dictionnaire de la langue nahuatl classique, entrée « xipehua».

45. F. KARTTUNEN, An Analytical Dictionary of Nahuatl, entrées « chicahu(a) », « chicahuac» et «chicahualtia»; B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, livre 11, chap. 6, p. 112. 46. Ibid., livre 10, chap. 18, p. 68. 47. Codex Borgia, 052; Codex Vaticanus B, pl. 22; Comparer avec Codex Borbonicus [Facsimilé], Madrid, Graz, Mexico, Sociedad Estatal Quinto Centenario, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1991, pl. 24 et 36. Sur les liens entre Cinteotl et le mais tendre, voir M. GRAULICH, Ritos Aztecas, p. 112-134. 48. Codex Vaticanus B, pl. 41; Codex Magliabechiano [Fac-similé], 2 vol, Berkeley, University of California Press, 1983, p. 78 [90]; Codex Borbonicus, pl. 20; B. de SAHAGÚN,

242

Le symbolisme des bâtons de sonnailles aztèques

habituelle du sceptre de Xipe Totec — un entrelacement de bandes rouges et blanches (fig. 2a) — et les atours similaires qui ornent la coiffure de déesses du mais mûr vétues d'une peau d'écorché* (fig. 2b).

A

»

Figure n? 2: Enroulements rouges et blancs dans l'attirail de Xipe Totec et des déesses du mais. Dessin de l'auteur. a) Codex Borgia, pl. 24 ; b) Codex Borbonicus, pl. 29.

Les données écrites viennent appuyer ce lien entre mais máür et chicahuaztli. Ainsi, dans l’hymne de Cihuacoatl, le balai de la déesse est comparé à la fois à un plant de mais mür et à un báton de sonnailles: «les balais remplissent mes mains; comme du mais d'un champ doré ; comme un báton

de sonnailles dressé»^*. Ce rapprochement métaphorique entre bâton de sonnailles et plant de mais mûr est d'autant plus significatif que, rappelons-le, c'est probablement dans l'extrémité arrondie du sceptre que se trouvaient les semences qui résonnaient, ce qui correspond à la physionomie de la plante. Soulignons en outre que, dans certains cas*!, l'extrémité du bâton de sonnailles

Primeros Memoriales, fol. 250v; Aztecs, cat. 109, 235, 284; A. EGGEBRECHT, E. ÉGGEBRECHT (coord.), Les Aztèques, cat. 147 et 148.

49. On comparera par exemple la planche 24 du Codex Borgia, et les planches 7 et 29 du Codex Borbonicus.

50. «Malinalla, nomac temj; a cáteumjlco; my hand; Like corn of godly field; Like ratile dans B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, livre traduction suivante : « Balai, balai remplit ma

chicavatzica motlaquechizca» (The brooms fill up stick upraised) (traduction d'Anderson et Dibble, 2, app., p. 236). Garibay propose quant à lui la main; l'Épi en semailles divines; appuyé sur un

manche de sonnailles» (Escoba, escoba llena mi mano; La Mazorca en divina sementera; en mástil de sonajas está apoyada) (B. de SAHAGUN, Veinte himnos nahuas, Mexico, Universidad

Nacional Autónoma de México, Instituto de Historia, 1958, p. 136-7). Ces hymnes anciens étant d'une portée symbolique particulièrement difficile à cerner, il existe d'autres interprétations de ce passage, comme celle de Patrick Saurin : « Le balai d'herbes emplit mes mains; Bien des fois, dans le champ divin; Elle va s'appuyer sur le bâton de sonnailles» (Teocuitlatl: chants sacrés des anciens Mexicains, Paris, Publications scientifiques du muséum, 1999, p. 129). 51. B. de SAHAGUN, Codice Florentino [Fac-similé], Mexico, Archivo General de la Nación, 1979, vol.1, livre 2, fol. 19v et ss; Codex Borgia, pl. 24, 61, 67.

243

Aurélie Couvreur

de Xipe Totec est double (fig. 2b). Cette gémellité n’est pas sans évoquer celle qui caractérise les épis de maïs mûrs dans l'iconographie aztèque”? (fig. 2a) et qui, par une redondance visuelle, met l’accent sur l’abondance de la céréale. Tout ceci nous indique qu’il y avait probablement un rapport étroit entre le chicahuaztli et le plant de maïs mûr, ce qui ne serait que logique vu les liens existant entre Xipe Totec, l'écorchement et la céréale. Le chicahuaztli, l'acte sexuel et la virilité masculine

Que le chicahuaztli soit associé à la sexualité est indéniable. Les représentations de couples engagés dans l'acte charnel sont clairesà cet égard: installés face à face sous une couverture qui leur masque le corps, les amants sont le plus souvent séparés par un embléme symbolisant l'étincelle de vie qui surgit à cet instant (fig. 3a). L'embléme en question est tantót un chicahuaztli*?, tantôt un silex?^' — deux attributs de Xipe Totec dont on soulignera d'ores et déjà les couleurs communes, le rouge et le blanc. L'association du báton de sonnailles et de l'apparition de la vie est d'autant plus évidente que Quetzalcoatl et Mictlantecuhtli, en tant que divinités délivrant et reprenant l'étincelle de vie, sont représentés avec un chicahuaztli à la main. S'agissant du sceptre de Xipe Totec, ce lien à la sexualité que présente le báton

de

sonnailles

n'a rien d'étonnant,

car

le dieu

écorché

est une

divinité à la virilité exacerbée^*. S'il est vêtu d'un pagne dans les codex, il n'est pas rare que ses effigies sculptées le présentent avec le sexe apparent? (fig. 3b). L'impudeur qui le caractérise alors n'est pas sans rappeler celle des Huastéques??, peuple connu dans l'imaginaire aztèque pour sa luxure, et qui emprunte à Xipe Totec certains de ses atours les plus typiques: la jupe de feuilles de sapote?? et le chapeau conique yopitzon* (fig. 3c). Par ailleurs, Xipe Totec est responsable de nombreuses maladies oculaires, dont les « carnosités de l'eeil » (ixnacapachiuiliztli), une affection qui peut être guérie par la plante

52. Voir par exemple Codex Borbonicus, pl. 7 et 27; Codex Magliabechiano, p. 78 [90]; Calendario

Tovar

dans

A.-M.

Vié-WHORER,

Xipe

Totec

notre

seigneur

l'écorché:

étude

glyphique d'un dieu aztéque, Mexico, Centre français d'études mexicaines et centraméricaines, 1999, pl. A.60. 53. Codex Borgia, pl. 9; Codex Vaticanus B, pl. 28. 54. Codex Vaticanus A [Fac-similé], Graz, Mexico, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1979, fol. 14. 55. Voir supra, notes 14 et 15.

56. Sur ce sujet, voir également J. L. Funsr « Flaying, Curing and Shedding : Some Thoughts on the Aztec God Xipe Totec» dans E. BOooNE (éd.), Painted Books and Indigenous Knowledge, Tulane, Middle American research Institute, 2005, p. 63-65. 57. E. Paszronv, Aztec Art, New-York, Harry N. Brahams, 1983, pl. 199; F. Sois OLGUIN, T. LEvENAAR

(éd.), Mexico,

Journey

to the Land

of the Gods, Art Treasures

of Ancient Mexico,

Amsterdam, Waanders Publishers, 2002, fig. 180. 58. B. de SauacUN, Florentine Codex, livre 3, chap. 5, p. 19. 59, A. M. GaniBAY K. (éd.), Poesía Náhuatl, 2e éd., Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Filológicas, 1993, p. 30. 60. Codex Borbonicus, pl. 30.

244

Le symbolisme des bâtons de sonnailles aztéques

necutic, également utilisée pour soigner les organes génitaux?'. De manière plus générale, les yeux et le regard sont étroitement liés à l'acte sexuel. Les péres ne mettaient-ils pas en garde leurs fils en leur disantde ne pas dévisager les femmes, ce qui équivaudrait à un adultére? ?

A

n

C

Figure n? 3: Le chicahuaztli, l'acte sexuel et la virilité masculine. Dessin de l'auteur.

a) Codex Borgia, pl. 9; b) Catalogue du musée du quai Branly, consultable sur internet à l'adresse www.quaibranly.fr, 2009, cat. 71.1878.1.1484 ; c) Codex Borbonicus, pl. 30.

Au-delà de la terminologie l'écorchement. pour décrire le appelé xipinili,

la virilité propre à Xipe Totec, il convient de souligner que utilisée pour décrire le sexe masculin fait également écho à Ainsi, un des termes utilisés par les informateurs de Sahagün pénis est xipehua, «écorché, pelé», tandis que le prépuce est ce qui peut se traduire par « membre écorché »9.

Au vu de ces observations, et pour en revenir au sceptre du dieu écorché,

on ne peut manquer de souligner que le manche du chicahuaztli est fréquemment orné d'enroulements rouge et blanc (Fig. 1a et 2a), qui certes renvoient aux couleurs habituelles du dieu, à celles de la peau écorchée* et à celles du silex, mais qui peuvent également étre une évocation des fluides intervenant lors de l'acte charnel. En effet, aux yeux des anciens Mexicains, les fluides

masculins libérés pendant le rapport sexuel sont non seulement le sperme,

61.

B. de Sanacún, Florentine

Codex, livre 1, chap. 18, p. 39; ibid., livre

11, chap. 7, $ 5,

p. 145. 62. Ibid., livre 6, chap. 22, p. 122. 63. Ibid., livre 10, chap. 27, $ 9, p. 123-124.

64. Lesinformateurs de Sahagün précisent en effet que les peaux portées en tlacaxipehualiztli étaient dégoulinantes de sang et de graisse (B. de SAHAGÜR, Florentine Codex, livre 1, chap. 18,

p. 39).

245

Aurélie Couvreur

mais également le sang, caractérisés par leur couleur blanche et rouge. En témoignent par exemple les mises en garde adressées aux hommes à la sexualité excessive, dont on disait qu'ils risquaient le dessèchement, le tarissement de leurs fluides, en l'occurrence « [le] sang, [la] couleur, [la] graisse, [le] sperme, [la] résine, [la] térébenthine» 9, c'est-à-dire des fluides rouges

dans les deux premiers cas, et blancs dans les suivants. L'idée selon laquelle l'origine de la vie est due à la combinaison de deux liquides, l'un blanc, le sperme, l'autre rouge, le sang, est d'ailleurs encore attestée de nos jours chez les Lacandons**. En outre, le fait que le chicahuaztli de Xipe Totec était battu sur le sol, contrairement

à l'ayauhchicahuaztli,

corrobore

la connotation

sexuelle et

masculine de ce sceptre, ce geste pouvant étre interprété comme une allusion à la fécondation de la surface terrestre par le bâton. Le chicahuaztli n'est d'ailleurs pas le seul attribut du dieu écorché à étre percuté rituellement au sol puisque les cailles, qui inspirent sa peinture faciale et dont on faisait de nombreux

sacrifices par décapitation, sont connues pour «se jet[er] au sol,

elles venaient frapper le sol, elles continuaient de se jeter elles-mémes sur la terre», Le chicahuaztli, la capture, le cordon ombilical

Un des traits iconographiques caractéristiques récurrent de Xipe Totec est la corde, qu'il porte à la ceinture ou sur le torse. Cet attribut, symbole de capture, concorde bien avec l'aspect guerrier de la divinité?. Le chicahuaztli n'est d'ailleurs pas exclu de cette sphère guerrière, comme en témoigne sa

65. «ca tlami in tezzo, in totlapallo, in tochiahuaca, ca tayo tlami, tlami in oxyotl, in ocotzoyotl...» (... terminan nuestra sangre, nuestro color, nuestra grasa; porque termina nuestro

semen;

termina

nuestra

resina,

nuestra

trementina)

(traduction

de

A. LóPEz

AUSTIN,

Cuerpo humano e ideología, 2 vol., 3* éd, Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1980, vol. 1, p. 331; voir aussi B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, livre 6, chap. 22, p. 125). 66.

M.

I. NÁJERA

CORONADO,

El

umbral

hacia

la

vida.

El

nacimiento

entre

los

mayas

contemporáneos, Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Facultad de Facultad de Filosofía y Letras, 2000, p. 41.

67. « Auh in çoçolti in oquechcotonaloque, tlapapatlatztinemj papatlacatinemj, tlalli ic moujujtequj, tlalli ic momomotla » (And the quail, when their necks were wrung, went fluttering away; they went trashing; they went striking the earth; they kept throwing themselves to the earth), B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, livre 2, chap. 24, p. 74. 68. Voir par exemple B. de SAHAGÜN, Códice Florentino, vol. 1, livre 1; Codex Borbonicus, pl. 20, 24, 36; Codex Magliabechiano, pl. 78 [90]. Lorsqu'elles sont revétues, les peaux d'écorché sont fixées par des liens en corde (A. EGGEBRECHT, E. EGGEBRECHT (coord.), Les Aztéques, cat.

207 et 208). 69. Les liens entre guerriers et cordes sont clairement exprimés dans le Codex Borbonicus (0pl. 11), où les deux animaux guerriers par excellence, l'aigle et le jaguar, portent non seulement l'ornement de front composé de duvet et de deux plumes d'aigle — un attribut martial bien connu appelé cuauhpilolli — mais également une imposante corde nouée dans le dos. À propos du cuauhpilolli, voir H. BEYER, «El cuauhpilolli, la borla de pluma del dios Mixcoatl », El Mexico

Antiguo 10 (1965), p. 312-325. Pour les connotations guerrières de Xipe Totec, voir notamment

246

Le symbolisme des bâtons de sonnailles aztèques

présence dans l’attirail des rois aztéques se rendant sur le champ de bataille". La corde joue également un róle extrémement important lors des rites de tlacaxipehualizti, la vingtaine dédiée à Xipe Totec, puisque c'est à cette occasion qu'est pratiqué le sacrifice gladiatoire, c'est-à-dire le sacrifice de captifs dotés d'armes factices et chargés de combattre des guerriers en armes alors qu'ils sont attachés par une corde à une énorme pierre ronde (fig. 4a). Comme l'a fait remarquer Graulich”, la corde qui rattache ainsi le prisonnier à la terre symbolise à l'évidence le cordon ombilical reliant l'homme à la matrice tellurique. I] est ainsi hautement significatif qu'elle soit nommée tonacamecatl, «corde de notre subsistance », et qu'elle soit représentée dans les codex par une torsade rouge et blanche? (fig. 4a) — ce qui rappelle évidemment la fonction et l'aspect du cordon ombilical. Les sources aztèques font d'ailleurs un rapprochement entre cordon ombilical et corde, puisqu'on conseille à la femme enceinte d'éviter de regarder les pendus sous peine que le bébé naisse enserré dans son cordon ombilical”*. Les discours à l'accouchée offrent également une assimilation limpide entre le nouveau-né encore relié à sa mère par le cordon et le prisonnier capturé: «quand le bébé était arrivé sur terre, la sage-femme [...] poussait des cris de guerre, qui signifiaient que la petite femme avait livré bataille, qu'elle était devenue un vaillant soldat, qu'elle avait pris un captif, qu'elle avait fait prisonnier le bébé» ^. Dans les codex, le cordon ombilical est généralement figuré par une bande à la texture boursouflée? mais il est parfois représenté par une simple corde, comme dans le cas fameux de la naissance de Cinteotl dans le Codex Borbonicus”.

M. GRAULICH, Ritos aztecas, p. 215-218, 279-319 et C. GONZÁLEZ GONZÁLEZ, « Relaciones de una

deidad mesoamericana con la guerra y el maíz », p. 209-267). 70.

F. ALVARADO TEZOZÓMOC, Crónica mexicana, 1878, chap. 84, p. 584. Comme dans d'autres

passages, le chroniqueur confond ici omichicahuaztli et chicahuaztli (cf. supra, note 26). Les détails qu'il fournit permettent en effet d'identifier le costume du roi à celui de Xipe Totec, notamment parce qu'il précise qu'il portait également la coiffe en plumes de spatule rose, typique du dieu écorché (B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, livre 9, chap. 15, p. 69). 71. M. GRAULICH, Ritos aztecas, p. 304 et 312.

72. Codices Becker I/H. Museum für Vôlkerkunde Wien, inv. n° 60306 und 60307, Graz, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1961, vol. 1, pl. 10. 73. B. de SaHAGÜN, Florentine Codex, livre 5, app., chap. 19, p. 189. 74. Ibid., livre 6, chap. 30, p. 167. 75. Codex Nuttall [Fac-similé], Madrid, Graz, Mexico, Sociedad Estatal Quinto Centenario, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1992, pl. 16; Codex Vaticanus B, pl. 40. 76. Codex Borbonicus, pl. 18. On verra également la planche 27[44] du Codex Laud ([Facsimilé], Graz, Mexico, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica,

1994). Cette image intrigante semble renvoyer au rite de la coupure du cordon ombilicaldu nouveau-né : sous un arc à la texture de corde, une femme présente un bébé à un être décharné. Avec un couteau de silex, celui-ci tranche la corde sous laquelle se tiennent la mère et l'enfant.

247

Aurélie Couvreur

Figure n° 4: La corde, le cordon ombilical et la peau d'écorché dans les codex. Dessin de l’auteur. a) Codex Becker, pl. 10; b) Codex Nuttall, pl. 16; c) Codex

Vaticanus B, pl. 19.

Que Xipe Totec soit, au travers de la corde, mis en relation avec la naissance et avec le cordon ombilical n'est pas contradictoire avec ce qui est connu à son sujet. En effet, méme si la portée symbolique de ce rite nous échappe, on sait qu'en tlacaxipehualiztli les porteurs de peaux d'écorchés et les guerriers renommés se livraient à des escarmouches lors desquelles ils cherchaient à se pincer mutuellement le nombril". En outre, il est à remarquer que le cordon ombilical du nouveau-né et la peau écorchée revétue par les dévots de Xipe Totec subissaient la méme fin rituelle : ils étaient l'un et l'autre séchés et enterrés. Les sources indiquent en effet que le cordon des garçons était confié à de vaillants guerriers pour qu'ils l'enterrent sur le champ de bataille, tandis que celui des filles finissait enfoui à proximité du foyer??. Quant aux dépouilles des écorchés de tlacaxipehualiztli et d'ochpaniztli, elles étaient pour certaines déposées en territoire ennemi ? ou exhibées à la sortie de la ville$%, ou bien,

dans la majorité des cas, enterrées dans des caches des temples ?!.

77. B. de SanAGÜN, Florentine Codex, livre 8, app. B, p. 85. 78. Ibid., livre 4, chap. 1, p. 3-4; Ibid., livre 5, app., chap. 9, p. 186; Ibid., livre 6, chap. 30, p. 169et chap. 31, p. 171-3. 79. C'est le cas du masque en peau écorchée porté par le personnificateur de Cinteotl en ochpaniztli, B. de SARAGÚN, Florentine Codex, livre 2, chap. 30, p. 123. 80. En ochpaniztli, la peau de la personnificatrice de Toci était évacuée et présentée sur une structure en bois érigée dans un lieu appelé Tocititlan et situé aux confins de la cité (B. de SAHAGÚN, Florentine Codex, livre 2, chap. 30, p. 125; D. DuRAN, Historia de las Indias, vol. 1,

chap. 15, p. 143, 148, 149). 81. Les informateurs de Sahagún mentionnent deux endroits du Grand Temple où étaient déposées les peaux (B. de SAuaGUN, Florentine Codex, livre 2, app., 186 et 189). Hs sont tous deux appelés Netlatiloyan, toponyme formé sur le verbe tlatilia qui a le double sens de «cacher, dissimuler » et de «brûler» (A. Wimmer, Dictionnaire de la langue nahuatl classique, entrée «tlatilia »). Cette polysémie de rlatilia induit des incertitudes de traduction, en tout cas pour le premier Netlatiloyan décrit dans le Codex de Florence (Ibid., p. 186). Ce lieu peut en effet étre interprété comme une cache ou un brasier, comme en témoignent les traductions divergentes

248

Le symbolisme des bâtons de sonnailles aztèques

En outre, on ne peut manquer de souligner que, dans les codex, la texture des cordons ombilicaux, boursouflée et parfois piquetée de taches rouges, rappelle incontestablement la manière dont sont représentées les peaux d'écorchés? (fig. 4b-c). Enfin, il est à noter qu'on retrouve Xipe Totec parmi les divinités à fortes connotations guerrières qui tiennent le cordon ombilical d'un homme dans les codex du groupe Borgia? ce qui peut témoigner de ses rapports avec la naissance humaine. Dans ce contexte, et constatant que le chicahuaztli est figuré avec la méme texture enroulée et les mémes couleurs que la corde tonacamecatl du sacrifice gladiatoire, il est à envisager que le chicahuaztli symbolise aussi le cordon ombilical, et constitue donc une évocation supplémentaire des liens entre Xipe Totec et cet organe. Conclusion

Si l'on s'en tient à une analyse purement musicologique, il convient de reconnaître que les sources aztèques sont peu loquaces au sujet du bâton de sonnailles. À peine peut-on signaler qu'il en existait vraisemblablement deux types différents, ce que l'archéologie peine à confirmer, et que pour qu'ils résonnent, ils étaient agités par le manche ou percutés contre le sol. Par contre, gráce aux sources écrites et figurées, il est possible d'approcher la riche polysémie que véhiculait cet instrument. Les contextes dans lesquels il intervenait et, en particulier, les divinités dont il constituait le sceptre permettent en effet d'envisager plusieurs aspects de son symbolisme qui, on le constate, sont trés complémentaires. D'une part, il a pu étre montré que, sous sa forme spécifique d'ayauhchicahuaztli, de chicahuaztli de brume, le báton de sonnailles sert manifestement

à la maitrise symbolique des phénoménes célestes, bénéfiques mais aussi potentiellement dangereux pour les cultures, et en particulier les pluies et la grêle. C'est à ce titre d'instrument cérémoniel puissant qu'il était Pembléme des divinités agraires et aquatiques. À l'instar des autres objets rituels portant le qualificatif « de brume », il est donc lié au monde de Tlaloc, à la saison des

pluies et au mais encore jeune. Mais d'autre part, lorsqu'il abandonne son qualificatif «de brume» pour étre le sceptre de Xipe Totec, le chicahuaztli voit son symbolisme s'étendre au mais mûr. S'agissant d'un instrument dont le nom renvoie à la croissance

d'Arthur Anderson et Charles Dibble (B. de SAHAGÜN, Florentine Codex, livre 2, app., p. 186)

et d'Alfredo López Austin («El templo mayor de Mexico-Tenochtitlan según los informantes indigenas», Estudios de Cultura Nahuatl 5 (1965), p. 75-102). Ceci dit, on notera que, dans ce cas

précis, Sahagún lui-même considère qu'il s'agit d'une cache (B. DE SAHAGÚN, Historia general de las cosas de Nueva

Espana, p. 162). En outre, et surtout, soulignons que d'autres sources

indiquent clairement que la plupart des peaux d'écorchés finissaient enfouies dans le sol (B. DE SAHAGÚN, Florentine Codex, livre 2, chap. 22, p. 58 et 189; B. de SAHAGÜN, Códice Florentino [Fac-similé], livre 2, chap. 22, fol. 26; D. DuRÁN Historia de las Indias, vol. 1, chap. 9, p. 100).

82. Comparer par exemple Codex Nuttall, pl. 16 ou Codex Vaticanus B, pl. 40 avec Codex Borbonicus, pl. 18ou Codex Vaticanus B, pl. 19. 83. Codex Borgia, pl. 15, Codex Vaticanus B, pl. 38 à 40.

249

Aurélie Couvreur

et à la fortification, cette ambivalence dans son rapport au maïs ne saurait nous surprendre, puisque la notion de renforcement des végétaux s’applique autant à la jeune pousse qu’à la plante mature. Et, à vrai dire, s’il est bien un point commun à l’ensemble des symbolismes qui étaient véhiculés par le chicahuaztli, c'est bien celui de représenter la fertilité et la fécondité. En effet,

rappelons que les deux autres champs symboliques qui ont pu être cernés concernent la fertilité humaine:

l'acte sexuel, le bâton de sonnailles incar-

nant l'apparition de l'étincelle de vie et sa décoration renvoyant peut-être au mélange de fluides qui se produit à cet instant ; et le cordon ombilical, dont les liens avec la succession des générations sont évidents. Le báton de sonnailles se révéle donc étre un des symboles majeurs de vitalité dans l'univers azteque. Il englobe la fécondité et la fertilité dans leur ensemble : il évoque tant la fertilité des plantes que celle des hommes; et il intervient aussi bien dans la croissance des jeunes pousses que pour incarner la maturation des épis. En outre, on notera qu'en tant qu'embléme rouge et blanc de Xipe Totec, ses liens avec la fécondité humaine semblent renvoyer également à deux póles complémentaires: l'un masculin, les fluides libérés par l'homme pendant la conception des enfants; l'autre féminin, les entrelacements du cordon ombilical maternel. Plus que tout autre instrument de musique, le chicahuaztli présente donc un symbolisme riche et polysémique. En l'occurrence, il apparait comme l'incarnation de la fertilité potentielle, dans toutes ses dimensions et toute sa complexité. Remerciements: Cet article n'aurait pu aboutir sans l'aide aussi amicale que précieuse d'Elodie Dupey García et de Leonardo López Luján.

250

EL CÓDICE DE TEOTENANTZIN Y LAS IMÁGENES PREHISPÁNICAS DE LA SIERRA DE GUADALUPE, MÉXICO! Leonardo LópEz LUJÁN Museo del Templo Mayor, INAH

Xavier NOGUEZ El Colegio Mexiquense

El llamado Códice de Teotenantzin es uno de los testimonios históricos más intrigantes de los relieves esculpidos en las peñas de la Cuenca de México durante el Posclásico tardío (fig. 1)?. Muchas son las incógnitas y las controversias que giran en torno a su nombre, su confección y su contenido. Aún así, los estudiosos de la religión mesoamericana y de las transformaciones que ésta experimentó tras la conquista española coinciden en acordarle un gran valor, pues lo consideran la única evidencia gráfica del culto a deidades femeninas en la zona del Tepeyac con anterioridad al fenómeno guadalupano*. El Códice de Teotenantzin es un documento en forma de tira que fue elaborado en la primera mitad del siglo xvur* Formó parte del célebre «Museo Histórico Indiano » del caballero milanés Lorenzo Boturini Benaduci (1698-1755), tal y como

se atestigua en el número

8-52 de los inventarios

1. Agradecemos la ayuda de Carmen Aguilera, Elvira Araiza Velázquez, Julieta Gil Elorduy, Alfredo

López

Austin,

Sonia

Arlette

López,

Luz

María

Mohar,

Ismael

Arturo

Montero,

Guilhem Olivier, Julio Romero y a todos los miembros del Proyecto Templo Mayor del Instituto Nacional de Antropología e Historia. 2.

W.

KRICKEBERG,

Felsplastik

und

Felsbilder

bei

den

Kulturvólkern

Altamerikas

mit

besonderer Berücksichtigung Mexicos, Band I: I Die Andenliinder. Il Die Felsentempel in Mexico, Berlin, Palmen Verlag vormals Dietrich Reimer, 1949; W. KRICKEBERG, Felsbilder Mexicos als Historische, Religiose und Kunstdenkmäler, Berlin, Dietrich Reimer Verlag, 1969. 3. X. Nocugz, Documentos guadalupanos. Un estudio sobre las fuentes de información tempranas en torno a las mariofanías en el Tepeyac, México, Fondo de Cultura Económica,

El Colegio Mexiquense, 1993, p. 155; X. Nocuszz, «De Tonantzin a la virgen de Guadalupe. El culto prehispánico del Tepeyac », Arqueología Mexicana 20 (1996), p. 52. 4. X. NoGuEz, Documentos, p. 152. 5. Acerca de la vida de Boturini véase, G. ANTEL El caballero andante. Vida, obra y desventuras de Lorenzo Boturini Benaduci 1698-1755, México, Museo de la Basílica de Guadalupe, 2007.

251

Leonardo López Luján, Xavier Noguez

de 1743-1744* y 1745-1746”, en el número 2-3 del inventario de 1823? y en el número 30 del catálogo del arqueólogo mexicano Ramón Mena”. Al igual que los demás tesoros de dicho museo, el Códice de Teotenantzin tuvo un

devenir azaroso, pasando por diversas manos y repositorios. Lo importante es que logró sobrevivir hasta nuestros días y que actualmente se encuentra bien resguardado en el fondo de testimonios pictográficos de la Biblioteca Nacional de Antropología e Historia, donde está catalogado con el nümero 35-86.

Figura n? 1: El Códice de Teotenantzin, BNAH.

Físicamente, el soporte del documento fue elaborado pegando — de izquierda a derecha — un cuarto de pliego, un pliego completo y un medio pliego de papel de 44 cm de alto, lo que da un ancho total de 117 cm. El papel es europeo de marquilla (de tina, grueso, lustroso y blanco) y deja ver en un par de ocasiones la filigrana «RR» del productor. En el reverso se encuentran la inscripción «Inveno 8 No 52» y una cedulilla de papel con la leyenda «Foja 4, vuelta la Diosa Teonantzin No 4 No 3». En el anverso, exactamente en el ángulo inferior derecho, hay una glosa alusiva a la escena ahí representada: «Estas dos pinturas son unos diseños de la diosa q.e los indios nombraban

Teotenantzin, que quiere decir Madre

de los dioses, á

quien en la gentilidad daban cultos en el serro de Tepeyacac, donde hoi lo

6. A. PENAFIEL, Monumentos del arte mexicano. Ornamentación, monumentos, 3 v., Berlin, A. Asher & Co., 1890, vol. 1, p. 67.

mitología,

tributos

y

7. P. A. López, «Inventario de los documentos recogidos a don Lorenzo Boturini por orden del Gobierno Virreinal », Anales del Museo Nacional de Arqueología, Historia y Etnografía Mi (1925), p. 53. 8. J. B. Grass, Catálogo de la colección de códices, México, Museo Nacional de Antropología, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1964, p. 140. 9. R. MENA, «La colección arqueológica de Boturini. Ejemplares desconocidos existentes en la Biblioteca Nacional», Anales del Museo Nacional de Arqueología, Historia y Etnografía 2 (1923), p. 64-65. Acerca de la historia y las características de dichos inventarios, véase J. B. GLass, «The Boturini Collection», en R. WaucHorE (ed. gen), Handbook of Middle American Indians, Austin, University of Texas Press, 1975, vol. 15, p. 473-486. 10, A. Caso, «Códice de Teotenantzin », en V. Guzmán Monroy (éd.), Estudios inéditos del Dr. Alfonso Caso existentes en la BNAH, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia,

1979, p. 1.

252

El Códice de Teotenantzin

tiene la Virgen de Guadalupe». En opinión de Mena!!, se trataría de una anotación del propio Boturini, pero es notorio que ésta no corresponde a la inconfundible escritura del desafortunado caballero. Valiéndose de la técnica de tinta y aguada, el artista del Códice de Teotenantzin representó una serranía de silueta ondulante. Se situó frente a ella para plasmar una dilatada vista desde el nivel de la llanura. En un primer plano y como foco de su composición, trazó dos tallas en bajorrelieve que figuran a divinidades prehispánicas femeninas, las cuales aparentan haber estado al pie de uno de los cerros de la formación. La diosa de la derecha se distingue por un amacalli, el conocido tocado de papel, cuerda y varas que reproduce la fisonomía de un templo. Arriba y al centro se percibe un tonaméyotl o trapecio-rayo que simboliza el año, flanqueado éste por cuatro rosetas de papel plisado, dos de las cuales están adicionadas de borlas. Más abajo hay dos pares de cuerdas horizontales y paralelas que enmarcan un elemento oval también de cuerda y dos quincunces de chalchihuites. El rostro de la diosa está señalado con trazos sumarios y redondeados. A sus costados luce dos orejeras circulares y, abajo, un collar de dos hilos con 18 pendientes similares a plumas. Finalmente, en la porción que correspondería a su quechquémitl y su falda, se observan diversos motivos geométricos irreconocibles. Por su parte, la diosa de la izquierda porta un extraño tocado enmarcado por una banda curva que se interrumpe al centro y que está dividida en secciones rectangulares. En medio se observa una retícula romboidal en la que

están

inscritos

cuatro

chalchihuites;

dos

cuerdas

horizontales

limitan

dicha retícula. Esta diosa también tiene un rostro redondo y confinado por dos hileras de flecos de papel, un par de orejeras circulares y un collar de un hilo. Por último, sobre su quechquémitl y su falda, se aprecia lo que pudiera ser una rodela con rapacejos. El artista detalló, ya en un segundo plano, el flanco de la serranía, particularizándolo con lo que parecen ser veredas, flujos de agua y escarpes, además de una rala vegetación y un par de edificios coloniales. Estos últimos, vale la pena decirlo, fueron delineados en una inusual perspectiva invertida; es decir, el artista tomó como base un único punto de fuga, situado adelante y no en el fondo de la composición, en este caso debajo de la divinidad de la derecha. Una sola realidad, numerosas interpretaciones

Como hemos dicho líneas arriba, existen notables discrepancias en cuanto a la denominación, la factura y la temática del Códice de Teotenantzin. En primer término, debemos advertir que no estamos ante un códice de factura indígena, ni tampoco ante la copia tardía de uno de ellos, tal y como alguna vez lo afirmó Alfonso Caso". El Teotenantzin es, por el contrario, la obra de

un artista entrenado en los estilos europeos!* que habría sido comisionado por el propio Boturini según la opinión de Antonio Pompa y Pompa y de muchos

11. R. Mena, « La colección », p. 64-65. 12. A. Caso, «Códice de Teotenantzin », p. 1. 13.

J. B. Grass,

Catálogo,

p. 140; X. Noaugz,

Documentos,

p. 152.

253

Leonardo López Luján, Xavier Noguez

autores más^. Si lo anterior es correcto, resulta plausible que el propósito del milanés hubiera sido obtener una imagen de los relieves prehispánicos para incluirla como respaldo visual del ensayo que proyectaba publicar sobre la Virgen de Guadalupe^^. Señalemos, en segundo término, que la palabra Teotenantzin es problemática en su etimología y en su construcción lingüística. Hasta donde tenemos noticia, no existe ningün registro referente a la antigua religión mexica que la consigne. Presuntamente, fue empleada a partir del año de 1648, cuando el bachiller Miguel Sánchez la incluyó en su Imagen de la Virgen María Madre de Dios de Guadalupe!. La primera ocasión que la menciona, lo hace en el siguiente contexto: ...en las historias que tratan de la gentilidad de los indios en esta halla que en aqueste monte adoraban un ídolo a quien llamaban la los dioses, y en su lengua Theothenantzi. Ídolo en su ignorancia de mación. Permitió la Virgen que en este mismo monte naciesen sus principiase su milagro y se fundase su habitación, para desmentir

tierra, se madre de toda estiflores, se y castigar

al demonio en su enseñada idolatría, y se conociese era sola ella la Madre del verdadero Dios, y el monte, que antes había sido altar de un ídolo sacrílego,

fuese después trono de una Virgen purísima"".

Ya en tiempos modernos, varios investigadores se han dado a la tarea de desentrañar el significado del vocablo Teotenantzin. Sintetizando los intentos de traducción publicados hasta la fecha, encontraremos que ha sido leído de muy diversas maneras: a) «nuestra madrecita Centéotl >"; b) «la venerable

14.

A. Pompa v Pompa, Álbum del IV Centenario Guadalupano,

México, Insigne y Nacional

Basílica de Santa María de Guadalupe, 1938, p. 14. Esta propuesta ha sido secundada, entre otros, por X. NoGuEz, Tepeyac»,

en

Documentos,

C. AGUILERA,

p. 152; C. AGUILERA,

I. A. MoNTERO

García

«Las deidades prehispánicas en el

(coord),

Tepeyac.

Estudios

históricos,

México, Universidad del Tepeyac, 2000, p. 36; R. MARTINEZ BARACS, « Tepeyac en la conquista de México : problemas historiográficos», en C. AGUILERA, I. A. MONTERO García (coord.), Tepeyac,

p. 65-66. Es interesante agregar que Boturini pidió al pintor Juan Martínez de Castro elaborar dibujos de la corona de la Virgen de Guadalupe para repartir y promover así su coronación (E. DE La TORRE

VILLAR,

R. NAVARRO

DE ANDA,

Testimonios

históricos

guadalupanos,

México,

Fondo de Cultura Económica, 2004, p. 405; J. CUADRIELLO, «La propagación de las devociones novohispanas: las guadalupanas y otras imágenes preferentes », en México en el mundo de las colecciones de arte, Nueva España 1, México, Grupo Azabache, 1994, p. 264). 15. Boturini (L. BOTURINI BENADUCI, Idea de una nueva historia general de la America Septentrional. Fundada sobre material copioso de figuras, Symbolos, Caracteres, y Geroglificos, Cantares, y Manuscritos de Autores Indios, ultimamente descubiertos, Madrid, Imprenta de

Juan de Zuñiga, 1746, p. 88) dice sobre este proyecto: «12. También Historia de mi Madre, y Señora de Guadalupe, y de la General de la meditaba imprimir, y comunicar al Publico, para rastrear mayores luces, historias». Hay que recordar que la Virgen de Guadalupe fue nombrada Ciudad de México en 1737 y en 1754 del reino de la Nueva España (D. de Guadalupe.

Imagen y tradición,

México, Taurus, 2002, p. 193-231).

16.

X. Nocuzz, Documentos,

17.

E. de La TORRE

18.

R. Mena, «La colección», p. 64-65.

254

VILLAR,

hice un Ensayo de la Nueva España, el que y materiales en ambas patrona principal de la A. BRADING, La Virgen

p. 152.

R. NAVARRO

DE ANDA,

Testimonios,

p. 238, 240.

El Códice de Teotenantzin

madre

de los dioses»?;

c) «la venerable

madre

de dios»;

d) «la venerable

madre de la gente»; e) «la madre de dios y de los hombres», combinación para expresar una idea cristiana??; f) «nuestra reverenciada madre»?! ; g) «la divina reverenciada madre de la gente »??, y h) «la madre piedra de los dioses» o «la divina madre piedra»”. Aunque sugerentes, estas propuestas carecen de fundamentos lingüfsticos. En efecto, para ser correcta, la traducción señalada con la letra a) tendría que derivar de Centeotenantzin; la b) de Teteo Innantzin (con doble n); la c) de Teotl Inantzin; la d) de Tenantzin; la e) de un difrasismo semejante a «in Teonantzin, in Tenantzin »; la f) de Tonantzin; la g) de Teteonantzin, y la h) también de Teteonantzin, composi-

ción inusitada y que no tendría sentido, pues no existía la creencia en tiempos prehispánicos de que los dioses fueran seres de materia pesada, perceptible. De acuerdo con Alfredo López Austin, la palabra Teotenantzin sería simplemente una construcción errónea que puede atribuirse a un momento posterior a la llegada de los españoles”. En cuanto

al contenido del Códice de Teotenantzin,

aún se discute el

emplazamiento preciso de los relieves en él representados. Caso dice que no hay manera de saberlo, pues la serranía no tiene expresado su nombre en forma jeroglífica”. Sin embargo, la mayoría de los investigadores afirman que los relieves se encontraban en el Cerro del Tepeyac — también conocido como «El Cerrito » —, seguramente basados en la glosa escrita en el anverso del códice y que ya hemos transcrito”. Algunos van más allá, al especificar que las dos imágenes fueron talladas donde luego se erigiría la iglesia del Cerrito” o al pie del flanco oriental de esa misma elevación”. Esta última propuesta se apoya en el Plano topográfico de la Villa de Nuestra Señora de Guadalupe y sus alrededores en 16907, el cual fue trazado para acompañar los Títulos de Santa Isabel Tola: ahí se marca con la letra O el sitio donde había una « Cabesa que demuestra con lo demas del cerro una figura extraña

19. R. MARTINEZ Baracs, « Tepeyac», p. 65-66. 20. X. NoquEz, Documentos, p. 152. 21. C. AGUILERA, « Las deidades », p. 36.

22. Ibid.; R. MARTINEZ BARACS, « Tepeyac», p. 65-66. 23.

Ibid.

24. Comunicación personal, mayo de 2009. 25. A. Caso, « Códice de Teotenantzin », p. 5. 26. Por ejemplo, R. MENA, «La colección», p. 64-65; Harry N. Abrams, 1983, p. 132. 27.

W.

28.

H. SeNTÍES

KRICKEBERG,

Felsbilder,

RoDRÍGUEZ,

La

E. PAszroRv, Aztec Art,

New

York,

p. 92. Villa

de

Guadalupe.

Historia,

estampas

y leyendas,

México,

Departamento del Distrito Federal, 1991, p. 142; H. SENríEs RoDRÍGUEZ, « Evolución urbana del Santuario de Nuestra Señora de Guadalupe», en C. AcuiLERA, I. A. MONTERO GARCÍA (coord.), Tepeyac, p. 206; X. Nocugz, Documentos, p. 154-155. 29. J. B. Grass, D. RoBERTSON, « À Census of Native Middle American Pictorial Manuscripts», en R. WAUCHOPE (ed. gen.), Handbook of Middle American Indians, Austin, University of Texas Press,

1975, vol.

14, p. 219-220;

Plano topográfico de la Villa de Nuestra Senora

de Guadalupe

y sus alrededores en 1690, México, Centro de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social, Insigne y Nacional Basílica de Guadalupe, 2004.

255

Leonardo López Luján, Xavier Noguez

deshecha en el dia por haverse levantado en d[ic]h[o] lugar la calzada que sube al cerro» (fig. 4k). En fechas recientes, Jesús Galindo e Ismael Arturo Montero

han dado a conocer una perspectiva distinta, concluyendo que los relieves no estaban en el Tepeyac, sino en el « macizo de la Sierra de Guadalupe »??. En principio, el problema del emplazamiento parecería de difícil solución pues, segün el parecer generalizado, no queda rastro de los relieves. Algunos sugieren que fueron destruidos en la primera mitad del siglo xvi — ya por órdenes del conquistador Gonzalo de Sandoval*, ya por las de fray Juan de Zumárraga —*?, lo cual resulta imposible si consideramos que las diosas se muestran completas en el Códice de Teotenantzin. En cambio, quienes proponen que estaban en el flanco oriental del Tepeyac, opinan que fueron destruidos entre 1779 y 1785?, cuando el arquitecto Francisco Guerrero y Torres construyó la escalinata que comunicaba la Capilla de El Pocito con la iglesia de El Cerrito*. Francisco Rivas Castro es el único que asevera haberlos visto, sosteniendo que sus vestigios son aün perceptibles en la base del cerro, justo atrás del exconvento de las capuchinas?. Otro desacuerdo digno de mención se relaciona con la fidelidad de la representación de los relieves en el códice. Según Pompa y Pompa, Boturini «los mandó pintar guiándose por las descripciones que de dicha diosa hacían los cronistas»?*. En contrapartida, Mena piensa que tanto la serranía como los relieves «han de haber sido tomados del natural »? y Caso lo secunda al afirmar que son «copia de esculturas que realmente existieron»??. Sea como fuere, existe un acuerdo en que la iconografía de las deidades esculpidas fue mal comprendida y erróneamente reproducida por el artista del Teotenantzin”, aunque hay quien argumenta que éste inventó conscientemente los atavíos faltantes en el relieve con la única finalidad de «complacer» a Boturini?. Concluyamos el apartado diciendo que son igualmente disímbolas las propuestas de identificación de las diosas representadas en el códice. La

30. J. GauiNbo TREIO, I. A. MONTERO García, «El Tepeyac en un sistema de observación astronómica en el México antiguo», en C. AGUILERA, I. A. MONTERO GARCÍA (coord.), Tepeyac, p. 52. 31.

H. SENTÍES

RODRIGUEZ,

La

Villa, p. 142.

32. F. Rivas CASTRO, « Nuevos datos arqueológicos del culto a deidades femeninas y masculinas en los cerros del Tepeyacac, Zacahuitzco y Yohualtecatl », Cuicuilco 20 (2000b), p. 22-23. 33.

D. LOPEZ SARRELANGUE,

Una villa mexicana en el siglo xvm: Nuestra Señora de Guadalupe,

México, Universidad Nacional Autónoma X. NoGuez, Documentos, p. 155. 34.

D. LórEz SARRELANGUE,

Una

de México,

Miguel Ángel Porrúa, 2005, p. 16-17;

villa, p. 200.

35. «Pudeobservar una cabeza, un dorso y los restos de las piernas, hoy destruidas» (F. Rivas CASTRO,

«Nuevos

datos»,

p. 22-23,

30). Para una opinión

contraria, véase F. Rivas

CASTRO,

« Madres antiguas y patronas coloniales: culto y sincretismo mariano en la Cuenca de México », en C. AGUILERA,

I. A. MONTERO

GARCÍA

(coord.), Tepeyac,

36. A. Pompa v Pompa, Álbum, p. 14. 37. R. Mena, «La colección», p. 64-65. 38. A. Caso, «Códice de Teotenantzin », p. 3-4. 39. Ibid., p. 1; X. Nocugz, Documentos, p. 153. 40. C. AGUILERA, «Las deidades », p. 36.

256

p. 130.

El Códice de Teotenantzin

divinidad de la derecha ha sido vinculada con Tonantzin?';

Teteo

innan*;

Chicomecóatl*;

una diosa del maíz,

Tonantzin-Toci-

el agua y la tierra*;

Ilamatecuhtli-Cozcámiauh^, y una deidad con amacalli que pudiera ser Toci, Chicomecóatl o alguna otra diosa del agua, la fertilidad o el pulque**. Por su parte, la deidad de la izquierda ha sido identificada como Chalchiuhtlicue?; una diosa del maíz, el agua y la tierra*, o como una deidad femenina de difícil identificación*. Galindo y Montero hablan de Cohuaxólotl y Chantico, pero sin especificar a cuál de las dos representa cada uno de los relieves??. Nuevas evidencias, nuevas propuestas

E] propósito de nuestro trabajo es ofrecer respuestas diferentes a los interrogantes arriba esbozados, a la luz del estudio de tres documentos inéditos y del análisis comparado del Códice de Teotenantzin con el Plano topográfico... Sobre esa base fáctica, pretendemos corroborar la pasada existencia de los relieves y la relativa corrección de su representación en el Teotenantzin, así como precisar su ubicación y proponer la posible advocación de las diosas esculpidas. Otro dibujo de los relieves

Dos de los tres documentos inéditos forman parte de las colecciones de la Biblioteca Nacional de Antropología e Historia. Son obra innegable de Guillermo Dupaix (c. 1750-1817), el capitán de dragones que, desde su llegada a la Nueva España en 1791, se hizo célebre por su afición a la arqueología. Se trata de un par de dibujos a carbón con breves anotaciones a tinta, los cuales fueron trazados por este explorador flamenco en una de las « correrías particulares » que acostumbró realizar antes de dirigir la Real Expedición Anticuaria (1805-1809).

E] primero de ellos es realmente asombroso, pues no sólo registra la existencia de los relieves a fines del siglo xvi o principios del xix, sino que certifica la nada despreciable fidelidad del Teotenantzin. Dupaix hace evidente en este dibujo que las imágenes estaban talladas en una formación natural (fig. 2). También nos deja claro que la deidad de la derecha aün se encontraba en buen estado de conservación, aunque con seíías de deterioro en

41.

R. MEna, «La colección», p. 64-65.

42.

W.

43.

A. Caso, «Códice de Teotenantzin», p. 3-4.

KRICKEBERG,

Felsplastik,

p. 108-109;

44.

E. PAszTORY, Aztec, p. 132;

F. Rivas

W.

CASTRO,

KRICKEBERG,

Felsbilder,

« Nuevos datos»,

p. 92.

p. 14, 19.

45. F. Rivas CASTRO, « Madres antiguas», p. 130. 46. C. AGUILERA, «Las deidades », p. 36. 47. A. Caso, «Códice de Teotenantzin», p. 3-4; F. Rivas CASTRO, « Madres antiguas», p. 130. 48.

E. PAszroRY, Aztec, p. 132;

49.

C. AGUILERA, « Las deidades », p. 36.

F. Rivas CASTRO,

«Nuevos

datos»,

p. 14, 19.

50. J. GALINDO TREJO, I. A. MONTERO GARCÍA, « El Tepeyac », p. 52. Esta interpretación se basa en una lectura incorrecta de un pasaje de fray Juan de Torquemada (Monarquía Indiana, 3 vol., México, Porrúa, 1969, vol. 1, p. 177). Ahí es claro que ambas divinidades no fueron veneradas

por los tlatelolcas en la Sierra de Guadalupe, sino en un lugar diferente.

257

Leonardo López Luján, Xavier Noguez

parte del rostro y los brazos. La diosa tiene en su tocado dos de los rosetones de papel que vemos en el Teotenantzin, los dos pares de cuerdas horizontales y los dos quincunces. Asimismo, se reproducen las orejeras circulares y el collar de dos hilos con pendientes similares a plumas, aunque sólo 10 de ellos. Pero a diferencia del Teotenantzin, la deidad sujeta sendos objetos rectangulares que pudieran representar cetros o armas. Adicionalmente, una glosa a la altura del tocado indica que era una «figura agigantada de relieve ». Otra anotación, típica del capitán, nos revela sus vagos conocimientos sobre el significado del arte prehispánico: «Representa desde luego este busto algun Dios, Rei, ó personaje de nota». Lamentablemente, la deidad de la izquierda

ya estaba destruida para aquel entonces, hecho que fue intencional segün la glosa: «Otra figura había al lado derecho de esta aca pero la picaron». Aün así, Dupaix tuvo el cuidado de registrar gráficamente los vestigios de la gran banda curvada del tocado, de la cual sólo subsistían siete secciones rectangulares en ese momento.

het.

Ql

£^

e

|

Figura n? 2: Dibujo de Guillermo Dupaix de los relieves que se encontraban « poco adelante de Guadalüpe », BNAH.

Una ültima glosa es contundente en cuanto a la localización de los relieves. En forma reveladora, señala que no estaban precisamente en el Tepeyac, sino hacia el noreste de este cerro: «Poco delante de Guadalupe, en un Cerrito, al lado izquierdo del Camino Real ». A este respecto, Delfina López Sarrelangue nos ilumina al apuntar que el camino real que conducía a Puebla y Veracruz

258

El Códice de Teotenantzin

atravesaba la Villa de Guadalupe justo frente a la Basílica”, hecho que también se constata en el Plano topográfico... En este ültimo documento se marca su trayectoria con una línea punteada, la cual pasa entre el flanco oriental del Tepeyac y El Pocito, para después bordear la Sierra de Guadalupe en dirección noreste. El que Dupaix hable de un «Cerrito» descartaría al Yohualtécatl como el sitio de los relieves, pues ésta es la mayor elevación de la Sierra de Guadalupe. La comparación de dos planos

Otro documento inédito, posiblemente compuesto en la primera mitad del siglo xix y hoy resguardado en la Biblioteca Teológica Lorenzo Boturini de la Basílica de Guadalupe, coincide con el Plano topográfico... al sefialar que al pie del Tepeyac se hallaba en realidad el relieve de una gran cabeza emplumada. Intitulado Ynventario razonado de los documentos interesantes a la historia de la Aparición. Pinturas y Papeles”, este manuscrito anónimo dice literalmente : ...Tuvo el Tepeyac una singularidad notable cuio conocimiento contribuye al intento, y puede verse copiada en dicho mapa [el Plano topográfico...]. La base del cerro (visto verbigracia desde el puente) tiene dos remates: el uno es donde esta la tienda de Dn Manuel Campos, y el otro enfrente del Pozito. En este huvo una cabeza gigantesca de medio perfil en cuia frente se veia un penacho. Se representa en aptitud de quien adora acia el oriente, cuia boca estuvo junto al manantial que fluye entre la Parroquia, o Yglesia de los Yndios y la casa que está enfrente y ocupaba poco ha Baraneta. Esta cabeza de piedra no estuvo separada de el cerro. Segun me parece, de el penacho no ha quedado mas que una peña como doblada hacia el oriente. En frente pues de tal penacho se dibuja en el mapa el Pozito, y en el espacio intermedio tres manantiales de agua, que no se cuando se ensolvarian, o taparian. Tambien en ese intermedio se demarca un camino y es el que venia de la Estanzuela, pasaba por entre la cabeza y Posito, y se dirige hasta el antiguo puente*.

Siendo así, entonces ¿ dónde estaban esculpidas las diosas ? Encontraremos las claves para resolver la incógnita si continuamos con el análisis del Plano topográfico... por nuestra cuenta y lo confrontamos con el Códice de Teotenantzin. Pero para ello es necesario cumplir dos premisas. Por un lado, debemos considerar que en el primer documento el suroeste está arriba y el noreste abajo, en tanto que en el segundo el suroeste se encuentra hacia la izquierda y el noreste hacia la derecha; por ello, los cerros Tepeyac, Zacahuitzco, Yohualtécatl y Coyoco se suceden de abajo hacia arriba en el

51.

D. Lórgz SARRELANGUE,

Una villa, p. 75.

52. Biblioteca Teológica Lorenzo Boturini, Insigne y Nacional Basílica de Santa María de Guadalupe,

México,

Ynventario

razonado

de

los documentos

interesantes

a la historia

de

la

Aparición. Pinturas y Papeles, ms. 4B-9. 53. Biblioteca Teológica Lorenzo Boturini, Ynventario, op cit., fols. 25v-26r.

259

Leonardo López Luján, Xavier Noguez

Plano topográfico... y de izquierda a derecha en el Teotenantzin”. Por el otro, hay que partir del supuesto de que el Teotenantzin representa una serie de rasgos geomorfológicos, biológicos y culturales, y que éstos fueron plasmados por el artista con la intención expresa de señalarle al espectador el lugar en que estaban los relieves. Aclarado lo anterior, veamos dichos rasgos uno a uno.

À continuación

los examinamos

en ambos

documentos,

marcándolos

con letras del abecedario en las figuras 3 y 4:

nm | suRoeerE

e.

EA

Figura n? 3: Esquema del Códice de Teotenantzin. Dibujo de J. Romero. a. Cerro del Tepeyac, de Guadalupe o El Cerrito (40 m)?

En la cima de esta pequeña elevación hay una ermita de una nave, dotada de una accesoria en su muro lateral este. En el Plano topográfico... observamos de frente las dos torres de la fachada, orientada hacia el suroeste,

mientras que la presencia de una sola torre en el Teotenantzin significa que estamos viendo el flanco derecho de la misma edificación. De ese lugar desciende, en este último documento, un trazo ondulante que pudiera aludir

a un sendero o una corriente de agua. Conviene mencionar que la ermita en cuestión fue construida en 1660 por el panadero Cristóbal de Aguirre y su esposa Teresa Peregrina. Medía 8.4 x 5.9 m y tenía una sacristía de 4.6 x 3.8 m. En el lado oriente estuvo el aposento de doña Francisca Medina, ocupado posteriormente por Boturini. Esta ermita cedió su lugar a una iglesia con planta de cruz latina, la cual fue erigida entre 1746 y 1750%,

54. En la figura 4 podemos (C. Castro,

J. CAMPILLO,

Decaen Editor,

constatar que la perspectiva pintada por Casimiro Castro

L. Auba,

G. RoDríGUEZ

topográfico. 55. H. Sentíes RopRÍGUEZ, La Villa, p. 3-4. 56. D. LórEz SARRELANGUE, Una villa, p.

p. 207-208.

260

(éd.), México

y sus alrededores,

1855-1856) desde un globo aerostático es muy

199-200;

H. SENTIES

México,

semejante a la del Plano

RopríGuEz,

«Evolución»,

El Códice de Teotenantzin

NORESTE +. OL

,

Version qui semble confondre Aculhua et empire tépaneque. Le glyphe du bras acolli n’apparaît que rarement associé à Tezcoco Acolhuacan"* alors qu'il semble caractéristique de la cité d'Acolman: il figure dans les glyphes de la ville !?” et sur la façade principale de son église érigée en 1556. Or la Relation Géographique d'Acolman est trés critique envers Tezcoco, refusant de partager un destin commun et présentant Nezahualcoyotl comme un tyran: «No conocían señor extraño, sino a sus sefiores naturales, hasta que [...] un Nezahualcoyotzin, s[efio]r de Tezcuco, se alió con Montezuma, señor de Méx[i]co, y tiranizaron toda la comarca »!*, I]

pourrait donc y avoir une possible contradiction ou erreur d'attribution de ce mythe fondateur dans la version véhiculée par Mendieta. Cependant, il ne faut pas non plus écarter d'office une attribution tezcocane. D'ailleurs Mendieta n'y voyait pas de contradiction, mentionnant Aculmaitl et Acolman, mais intitulant son chapitre: «De la creación de las criaturas,

especialmente del hombre, segün los de Tezcuco. » Et Alva Ixtlilxóchitl, dans ses premiers travaux, mentionne «de Zontecoma,

[descienden los de]

Aculhua, Cohuatlichan, Huexutzinco y otras partes »!?. Et si une scène de la planche 2 du Codex Xolotl distingue trois chefs — Acolhua, Chiconcuauh et Tzontecoma — devant Xolotl'?, la planche 2 associe bien le glyphe ethnique Acolhua au couple de Tzontecoma et de sa femme dans une caverne correspondant à l'emplacement de Coatlichan?!. Acolmiztli et Tezcoco Fray Andrés de Olmos

était loin d'étre aussi ignare pour confondre

Tezcoco et Acolman. Zorita, qui utilise son ceuvre (avant Mendieta) et reprend

ce passage, répète cette attribution tezcocane, contrairement à Mendieta. Il

124. Códice Techialoyan García Granados, Toluca, El Colegio Mexiquense, 1992, p. 27 n? 109. 125. F de Arva IxTLILXÓCHITL, Obras Históricas, i. 1, p. 312-313 (SRTC). 126. Codex Mendoza, fol. 3v et 5v (Tezcoco). 127. Codex Xolotl, pl. 5, 6, 8, 9; Codex Mendoza, fol. 3v (Acolman) et fol. 21v (Acolhuacan). 128. R. Acuña, Relaciones geográficas de Nueva Espana, Mexico, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1986, t. 7, p. 226. 129.

E. de Arva

IxTLILXÓCHITL,

Obras

Históricas, t. 1, p. 411

(Relación Sucinta).

130. Códice Xólotl, pl. 2 (D4), p. 33 (scène 020: G selon la classification de Marc Thouvenot). 131. bid., pl. 2 (A4), p. 35-36 (scène 020: C selon la classification de Marc Thouvenot).

336

Premiers fondateurs de Te zcoco

rapporte un troisième nom, Acolmiztli, fondamental pour l’ancrage tezcocan et non tépanèque du mythe: ...Fray Andrés de Olmos dice que los de Tlezcuco le dijeron que procedían de un hombre que nació en tierra de Aculma que está cinco leguas de Mexico y dos de Tlezcuco que se decía Aculmizth y que de éste tomó nombre el pueblo y se dice Aculhua y que Aculli quiere decir hombro y Aculma en el hombro'?.

Acolmiztli est le nom d'un personnage historique ancien, seigneur de Coatlichan, dont le glyphe apparait dans le Codex Xolotl'#. L'épouse de Techotlalatzin, Tozquentzin est glosée en nahuatl dans la Mappe Tlotzin comme étant la fille d'Acolmiztli de Coatlichan: «In Techchotlalatzin commocihuahuati, Tozquetzin Coatlichan ichpoch Acolmiztli. Techotlala épousa Tozquentzin, fille d'Acolmiztli de Coatlichan » ^. Mais celui-ci n'est jamais représenté comme seigneur de Coatlichan dans la méme Mappe Tlotzin. Acolmiztli est aussi et surtout le surnom que porte Nezahualcoyotl : « y el segundo [nombre], Acolmixtli, que quiere decir brazo de león, porque por su valor y brazo sujetó a toda la Nueva España »!#. I] est attesté sous forme de glyphe par le Codex Xolot[!%, Ces deux détails sont fondamentaux, car ils confirment le rattachement identitaire de Tezcoco au

xv* siècle à Acolmiztli. Ce mythe traduit par Thevet est malheureusement tellement déformé que l'on pourrait hésiter à l'incorporer à la tradition acolhua. Olmos l'aurait considéré comme fondateur de Tezcoco (en l'associant

à Acolmiztli), alors

que Mendieta quelques décennies plus tard le réassigne (à tort ou à raison) à Acolmanet Acolhua. Le mythe nous semble avoir été mal compris par Mendieta quand il l'a recopié. A la fin du xvr siècle, le passé lointain tezcocan est devenu quasi inconnu et le nom d'Acolmiztli n'évoque plus grand-chose pour Mendieta. C'est sans doute pourquoi il lui préfere celui encore compréhensible d'Acolhua et d'Acolman. On peut cependant signaler qu'il ne se limite pas à Tezcoco. La captation de l'appellation acolhua ou acolchichimeca semble un procédé de Phistoriographie tezcocane!*”. On retrouve en effet dans la représentation de Chicomoztoc de l'Historia Tolteca- Chichimeca un groupe présenté comme « Acolchichimeca» par la glose explicative. Son glyphe ou ethnonyme renvoie bien à un bras avec une courroie décorative et un flot s'échappant du

132. A. de ZoniTA, Relación, vol. 1, p. 155 (la parte, cap. 3). 133. Códice Xólotl, planches 3 (B4) et 4 (B4), p. 52 et 60 (scénes 030: C et 040: C selon la classification de Marc Thouvenot). 134. J. M. A. AuBIN, Mémoires, p. 64. 135. F. de Arva IxTLILXÓCHITL, Obras Históricas, 1975, t. 1, p. 404 (Relación Sucinta). 136. Códice Xólotl, planche 6 (C3), p. 86 (scéne 060: F selon la classification de Marc Thouvenot). 137.

FE. de ALVA IxrLILXÓCHITL, Obras Históricas, t. 1, p. 532 (Sumaria

relación de la historia):

«los aculhuas, que por orden y mandato de Xólotl poblaron la provincia de Aculhuacan, cuya cabeza fue y ha sido la ciudad de Tezcoco y de la misma nación de los reyes chichimecas ». On remarquera comment l'auteur parvient à évincer Coatlinchan au profit de Tezcoco.

337

Patrick Lesbre

sommet!#. Et le chef de ce groupe est appelé Tzontecomatl, ce qui là encore fait écho à ce mythe tezcocan qui ne nous est parvenu que par bribes. En conclusion, nous souhaiterions souligner un paradoxe. Robertson signalait la différence entre l'histoire mexica à coloration mythico-religieuse (migration guidée par des dieux et des prétres), et l'histoire acolhua plus réelle, plus proche d'événements historiques (migrations, installations, coexistence de groupes ethniques, apprentissage de nouvelles techniques)*. Pourtant l'histoire acolhua pourrait avoir été également à coloration mythicoreligieuse, comme le fragment de Thevet en donne un aperçu malheureusement trop parcellaire. I] oblige à s'interroger sur l'aspect contingent des sources coloniales: évangélisée plus tót (dés 1523 avec Fray Pedro de Gante), et négociant une position précaire d'allié de derniere minute de la conquéte espagnole, Tezcoco aurait-elle censuré plus tót les aspects religieux préhispaniques de son histoire?

138.

Historia

Tolteca

Chichimeca,

Mexico,

Secretaría

de

Educación

Püblica,

Instituto

Period,

Norman,

Nacional de Antropología e Historia, 1976, p. 167 (fol. 16r. Ms 51-53 p. 28). 139.

D. RoBERTSON,

Mexican

Manuscript

University of Oklahma Press, 1994, p. 135.

338

Painting

of the

Early

Colonial

LOS NÜMEROS

DEL MEXICO

ANTIGUO: CUENTAS

Y CUENTOS

José Luis DE Rojas Universidad Complutense de Madrid

¡ Capitán! ¡ Nos atacan los indios! é Son muchos ? Unos 3 003 mi capitän. j Vaya vista que tiene, soldado! No, mi capitán, es que vienen 3 delante

y unos 3000 detrás.

Las cifras nos tienen rodeados. Aparecen por todas partes aunque en algunas lenguas las tratemos de ocultar, como ocurre en castellano con «digitalizar» que pierde un poco la referencia a los números, lo que no ocurre en francés, por ejemplo. Pero aunque ahora hagamos tablas, cuadros y gráficas con gran facilidad gracias a la ayuda electrónica, el asunto no es nuevo y tenemos una gran cantidad de documentos llenos de cifras y números, que muchas veces, en nuestro afán de presentar un dato que avale nuestros razonamientos, tomamos sin la necesaria revisión crítica. Y lo hacemos con

un afán de exactitud que normalmente está muy lejos de las intenciones de quienes registraron las cifras. Es bastante frecuente en las cuentas antiguas que las sumas estén mal hechas, por ejemplo, pero nosotros tomamos cifras y más cifras y pensamos que cuánto menos redondas son, más exactas parecen. Y nada más lejos del espíritu de quienes las recogieron que ser exactos y proporcionar materiales para largas series de nümeros, porcentajes, promedios, proyecciones, etc., todo en aras de una exactitud que prácticamente nunca aparece. Cuando hay muchos nümeros parece que el trabajo es « más científico », entendiendo como tal también una «ausencia de malicia» como

si los números no fueran un lenguaje susceptible de tergiversación, un arma de argumentación que esgrimimos con frecuencia, eligiendo con cuidado la presentación de datos que más favorece a nuestros intereses, mostrando la parte llena o la vacía del vaso o promediando para que dos individuos tengan media vaca cuando la realidad es que uno tiene una y el otro ninguna.

339

José Luis de Rojas

Algunas cuentas

Corresponde a la naturaleza de esta contribución comenzar con el homenajeado, que con esa justa fama de riguroso que tiene ha dedicado páginas al análisis y comentario de algunas cifras. Michel Graulich en su artículo «L'inauguration du temple principal de Mexico en 1487 »! discute el número de prisioneros sacrificados en la inauguración del Templo Mayor. Presenta las distintas cifras que aparecen en las fuentes, más o menos entre 20000 y 80400, y se pregunta sobre las posibilidades de que tal evento se llevara a cabo. Para los cálculos reproduce la cita de Fray Diego Durán en su Historia? donde aparece la secuencia del sacrificio: cuatro filas con cuatro sacrificadores, actuando del alba al crepúsculo durante cuatro días. Esta cita es bien conocida y ha sido utilizada por distintos autores que él cita para verificar si se pudo hacer o si hay que corregir las cifras. Pasa revista Michel Graulich a las distintas opiniones que la posibilidad de que se realizara tal número de sacrificios ha generado, en las cuales se trata del tamaño de las filas según qué variables se tomen: anchura de las calzadas, número de hombres en cada hilera, etc. Menciona también las opiniones de quienes resuelven el problema cambiando la condición de las cifras que se ofrecen que no serían ya las de los sacrificados, sino las de los espectadores del evento. Aparece también la relación entre el tiempo necesario para realizar cada sacrificio y el tipo de este. No es lo mismo abrir el pecho por debajo de las costillas, que a través de estas, como tampoco lo es que el sacrificio termine en ese momento o que haya una segunda parte dedicada a Tlaloc que como bien señala Michel Graulich, estaba allí arriba junto a Huitzilopochtli. Y si había que cortar cabezas, como ocurría en algunos ritos, el asunto llevaba su tiempo. Menciona también? a quienes facilitan las cosas diciendo que había 19 sacrificaderos en lugar de 4, y tienen cabida los pocos que se han planteado qué se hacía con los cuerpos: Tezozómoc, citado por Prescott^, quien afirma que se arrojaban a la laguna de México detrás del peñón del Tezcotzinco. La última relación que presenta Michel Graulich es la del Tzompantli y la cantidad de cráneos que había en él, siguiendo las cifras de Andrés de Tapia y jugando con la verosimilitud de las mismas. Y no comentamos más, pues lo que procede es leer el artículo completo, quizás antes de seguir leyendo éste. Por nuestra parte, también hemos jugado con esas cifras, tratando de no acudir a datos externos, es decir, si vamos a calibrar la posibilidad de que fray Diego Durán tenga razón debemos respetar su contexto, esto es, cuatro sacrificadores durante cuatro días actuando de sol a sol, relevándose cuando

estaban cansados, lo que podría facilitar el mantenimiento del promedio. Aceptamos transitoriamente que las filas aunque muy largas sean posibles,

1. M. GRAULICH, « L'inauguration du temple principal de Mexico en 1487 », Revista Española de Antropología Americana 21 (1991), p. 121-143. 2. D. DurÁn, Historia de los indios de Nueva España e islas de Tierra Firme, Mss. Biblioteca Nacional de Madrid, 1581, capítulo xtv, ff. 131r-132r. 3. M. GRAULICH, « Ll'inauguration...», p. 126.

4. M. GRAULICH, «L'inauguration...» p. 127.

340

Los nümeros del Mexico antiguo : cuentas y cuentos

pues como mucho formarían los sacrificados del día, lo que las acorta considerablemente, y no nos vamos a adentrar en el tema de la custodia de tantos prisioneros ni en la voluntariedad con que participaban en los festejos. En esas condiciones, el promedio de tiempo dedicado a cada sacrificado es de unos 8,6 segundos. En ese tiempo hay que tenderlo en la piedra, abrirle el pecho, sacarle el corazón y retirar el cuerpo. A nosotros no nos parece viable, aunque hay gente que sostiene que sí lo es; y no estamos en condiciones de hacer experimentos en este campo. Normalmente terminamos aquí los cálculos, pero a nosotros nos preocupa todavía el «después» : aunque no hubiera más ceremonias, hay que retirar el cuerpo muerto y deshacerse de él rápidamente, pues antes de 9 segundos habrá otro, y después otro, por lo que no se pueden acumular retrasos. Además, el sacrificado ya no colabora, ya es mero peso muerto. Tezozómoc da un destino, pero no un procedimiento. Se pueden arrojar los cuerpos templo abajo, con suficiente fuerza para que superen las distintas plataformas, pero hay que llevárselos de allí, pues si se amontonan tendríamos que calcular si no acabaríamos tirándolos hacia arriba. Y todo ello necesita gente, mucha gente, tanta más gente cuanto más sacrificados haya. Y así llegamos a un tipo de objeción que no suele ser empleado: la cantidad de gente no sacrificada necesaria para sacrificar a tanta gente. Ya hemos mencionado la necesidad de guardias en el momento del sacrificio, pero es necesario reflexionar sobre el tiempo anterior: ¿ Dónde estuvieron alojados (o almacenados) los destinados al sacrificio? Encontrar

acomodo para 80400 no es fácil. ; Les daban de comer? Porque si lo hacían tendremos que movilizar un número grande de gente y de recursos. También es importante el después: ; cuántos hombres eran necesarios en lo alto de la pirámide para desalojar los cuerpos? ; cuántos en la parte baja para despejar el terreno? Los primeros puede que no fueran muchos, que con un par de «cuadrillas» por sacrificadero fuera suficiente (se entiende por turno, pues dada la duración de los sacrificios, también necesitarían relevos); pero para los segundos el asunto se complica pues tenemos que pensar hasta dónde los tenían que llevar. Probablemente hubiera más de un destino, pues más de ochenta mil cuerpos ocupan bastante espacio. Podríamos seguir con estas necesidades, pero creo que es suficiente con lo expuesto. Los meros números parecen decirnos que la cifra manejada quiere decir « muchísimos » y no trata de ser exacta. Podríamos entrar a ver cuantos podían ser esos « muchísimos », pero el ejercicio sería casi estéril. Aún tenemos otra relación : ¿qué población total es necesaria para permitirse suministrar tal número de sacrificados, que parecen ser hombres jóvenes, sin sufrir un considerable deterioro tanto en la cuantía como en la estructura de la misma? Pero regresemos al artículo de Michel Graulich y retomemos uno de sus argumentos : el sacrificio es un rito importante no una carrera sangrienta. Los ritos requieren su tiempo y los dioses una atención esmerada. No es baladí la mención de la ausencia de Tlaloc en la descripción de la faena y no es de recibo prescindir de lo que nuestros documentos, con Durán a la cabeza, nos transmiten continuamente: los ritos mexicas se dilatan en el tiempo, tienen preparaciones esmeradas y realizaciones pausadas que permiten transmitir

341

José Luis de Rojas

a los espectadores el mensaje?. Y esta objeción tiene tanta o más fuerza que todos los cálculos que podamos realizar. Para colmo, ni el propio fray Diego Durán tuvo mucha confianza en las cifras que daba: «lo qual se me higo tan yncreyble que si la historia no me forçara y el avello allado en otros muchos lugares fuera desta historia escrito y pintado no lo hossara poner por no ser tenido por honbre que escribe fábulas... »?. Aún así, no solemos resistirnos a las cifras. Y cuanto más grandes las cantidades, más nos gusta repetirlas. Parece que competimos para que nuestro objeto de estudio siempre sea « más » que el de los otros: más grande, más fuerte, más antiguo, más bello o más brutal. Es momento de ocuparnos de otra de las actividades más practicadas por los mexicas según las fuentes antiguas y los autores modernos: la guerra. Enormes ejércitos atacaron lugares lejanos, muchas veces por sorpresa. Mucha atención a la composición y logística de los ejércitos mexicas ha dedicado Ross Hassig, sobre todo en su libro Aztec Warfare”. Los números aparecen por muchas partes, por ejemplo en el cálculo del tamaño del ejército y su relación con la población total?. Con una población en la Cuenca de México de entre 1200000 a 2650000 habitantes se podría armar un ejército de entre 258000 y 560750 soldados : . .. However, there are no records of an army that large ever having been raised, and when large armies were mustered, they were drawn from an area much greater than the basin of Mexico. Even an army composed of men age 20 to 25 would generate

a minimum of 54,000 men in the basin, and one composed of

those 20 to 30 would generate 105,000. So it is apparent that the full military force of the basin of Mexico was not used in an offensive war [and a sizable

defensive contingent always remained in Tenochtitlan to protect the city from an opportunistic sneak attack]?.

No continúa con la línea marcada por él mismo, ni considera que hubiera que dejar también la gente que mantenía viva la ciudad, aunque puede que se tuvieran que arreglar con los mayores de 30 años. Y si aparecen cifras mayores que las que parecen posibles, pues basta con extender la zona de procedencia del contingente para que siga siendo posible reunirlo. Al menos se han planteado otras posibilidades. Le preocupan también el suministro de alimentos en campaña y las distancias. Para estas calcula la velocidad de marcha, relacionándolas con datos de los ejércitos de Estados Unidos y de la antigua Roma. Lo mismo le sirve para calcular las longitudes de las filas, que dependen del ancho de la calzada y de la separación entre hombres, llegando para nuestro gusto a un punto conflictivo que resuelve ampliando

5. M. GRAULICH, «L'inauguration...», p. 132-133. 6. D. DuRÁN, Historia, capítulo xLIv, f. 132r. 7.

R. Hassia, Aztec

Warfare.

of Oklahoma Press, 1988. 8. Ibid., p. 58-60. 9. Ibid., p. 60.

342

Imperial Expansion

and Political Control,

Norman,

University

Los nümeros del Mexico antiguo : cuentas y cuentos

el ancho de las columnas. Y es que tomando, como él hace, un xiquipilli de

hombres y poniéndolos en fila de a uno, la separación entre el primero y el último será de ¡ 24 kilómetros!, que en términos de marcha supone entre 6 y 10 horas de separación. Claro que en columnas de a dos, sería la mitad y en columnas de a cuatro, donde las calzadas lo permitían, la cuarta parte. Y si hay más columnas, deben salir en días posteriores, o por otros caminos, o caminar de noche. Retengamos el dato de que estos cálculos se refieren a unidades de 8000 hombres, pues veremos que los ejércitos que aparecen en la documentación suelen ser considerablemente más grandes. Menciona también los campamentos, pero no discute tamaños en ellos!?. Una de las grandes virtudes del libro de Hassig es la reconstrucción de las rutas que siguieron los ejércitos en las distintas campañas y el cálculo de las jornadas que debían recorrer. Sus mapas presentan los obstáculos del terreno, mostrando cómo los caminos daban muchas vueltas a veces, lo que redundaba en el aumento de las distancias a recorrer. En ocasiones, calcula el

costo de las expediciones en términos de los alimentos consumidos. Para él, las campañas eran posibles por el reabastecimiento sobre la marcha, aunque a menudo era necesario contar con porteadores para asegurar el paso por lugares hostiles. Tomamos un ejemplo que es la campaña de Motecuhzoma Ilhuicamina a Coaixtlahuacan!!. Juntó tropas de numerosos lugares hasta sumar un ejército de 200000 hombres y 100000 porteadores. El recorrido total duró entre 26 y 43 días de marcha, sin contar los combates, descansos

y reagrupamientos, por lo que habrían sido necesarios entre 7410000 y 12255 000 kilogramos de maíz, según su ratio de 7600 kilos de maíz diario para el mantenimiento de un xiquipilli (8000 hombres)". Recordemos que hay que contar a los guerreros y a los porteadores; y lo que echamos de menos ahora es la distribución de ese ejército en marcha pues según los cálculos ofrecidos antes, los últimos saldrían más de un mes después que los primeros y solamente se reencontrarían en el punto final, pues todos reemprenden la marcha cada día. Claro que eso nos facilita el problema del alojamiento: si en cada etapa solamente llegaban 8000 hombres, solamente tenemos que disponer alojamiento para esa cantidad y no necesitamos ya calcular cuanto espacio es necesario para poner a dormir a 300000 hombres. Volvamos al texto de Hassig esta vez con las campañas de Motecuhzoma Xocoyotzin, en las que las cifras alcanzan el máximo: ...Ihe Aztec army numbered 400,000, and when it reached Tototepec, the

soldiers entered and burned the temple and royal houses and slaughtered all the people above nine years of age. The Aztecs took 600 captives, the Acolhua 400, and the Tepanecs 350, and Quetzaltepec was also conquered .

Los datos proceden de Tezozómoc y Durán y pensamos que presentan algunas inconsistencias. Parecen pocos los prisioneros para un contingente

10. 11. 12. 13.

Ibid.,p. 72-74. Ibid.,p. 166-168. Ibid.,p. 64. Ibid.,p. 227. 343

José Luis de Rojas

tan grande, pero si hacemos caso de la noticia de la magnitud de la matanza a lo mejor son muchos, pues no creemos que se trate de prisioneros menores de 9 años. Dada la duración de la campaña (entre 41 y 68 días de marcha), la

logística de esta expedición debió ser muy difícil. E] aprovisionamiento sobre la marcha requiere una infraestructura que apenas hemos estudiado. Tampoco lo hemos hecho realmente con la infraestructura de los tributos y una aproximación a la misma es muy ütil. Para una parte aprovechamos el trabajo de Hassig con las rutas y la duración de los viajes. Los estudios de Hassig parecen estar ligados a las rutas, los transportes y sus costos. En una obra anterior a la citada" analizó el sistema de tlameme o cargadores y nos descubrió detalles de la organización, de los centros donde se los reclutaba, de los viajes, las cargas y los honorarios que cobraban, con documentación fundamentalmente colonial. Y en nuestros estudios casi siempre aparecen los tributos en una forma u otra, por lo que no es de extrañar que los caminos recorridos por Hassig y por nosotros se hayan juntado muchas veces. En lo referente a los números que nos ocupan ahora, los cálculos de los cargadores y de las jornadas necesarias para llevar los tributos que aparecen en los códices fueron presentados en un Simposio celebrado en Madrid en 2004 y publicados en 20085. Sorprendentemente con la gran cantidad de estudios que se han dedicado a cuantificar los tributos presentados en los grandes códices tributarios, casi ninguna atención se había dedicado a su movimiento. Para esto es necesario establecer cantidades antes, pero también se pueden hacer cálculos para las distintas cifras que se barajan, con las mayores diferencias centradas en las mantas y en los tributos en grano. En nuestro caso preferimos las cifras altas de mantas y las más bajas de los granos, de las que habitualmente se manejan!, pues hacemos más caso a las pictografías que a los textos. Los resultados han sido espectaculares por lo elevados. Para mover los tributos en la forma en que aceptamos que lo hacían, harían falta millones de cargadores por día, aceptando cargas de unos 23 kilogramos por cargador y jornadas en las que se recorrían unos 25 a 30 kilómetros. Convertidos los distintos productos a cargas nos da una cifra de 288 980 cargadores con los tributos que aparecen en la Matrícula de Tributos y de 331365 para los del Códice Mendoza, a los que hay que sumar los necesarios para mover el contenido de las trojes de grano. Siguiendo las pictografías, el total de estos asciende a 300000 para la Matrícula de Tributos y 504000 para el Códice Mendoza. La suma de ambos parciales conduce a unas cifras de 588 980 cargadores en la Matrícula

14. R. HassiG, Trade, Tribute and Transportation. The Political Economy of Sixteenth Century Mexico, Norman, University of Oklahoma Press, 1985. 15. J. L. de Rojas, J. J. BaraLLa, «Los números ocultos de la Matrícula de Tributos y del Códice Mendoza», I Simposio Complutense de Códices del Centro de México, Madrid, octubre de 2004 en Revista Española de Antropología Americana 38-2 (2008), p. 199-206. 16. J. L. de Rojas, Información sobre los tributos que los indios pagaban a Moctezuma,

México, Centro de Investigaciones y Estudios Superiores en Antropología Social, 1997.

344

Los nümeros del Mexico antiguo : cuentas y cuentos

de Tributos y 835365 en el Códice Mendoza" pero estos cálculos solamente reflejan un día de camino. Muchos de los productos llegaban de más lejos, y hay que multiplicar para cada provincia la necesidad de cargadores por los días de camino; como muestra tomamos la provincia de Taxco, situada a unos

6 días de camino (lo que significa 12 días de marcha, pues todos tienen que volver, aunque habría que estudiar si no lo hacían también cargados) requiere 123600 días de carga para llevar el tributo a Tenochtitlan'?. Más impresionantes son las cifras de la Coyolapan, situada a 16 días de camino, cuyas necesidades ascienden a 461 120 jornadas. Con dos provincias hemos llegado casi al total que mostramos en la tabla citada. Lo mismo podríamos decir de la producción: tejer las mantas requería el esfuerzo de un nümero ingente de tejedores. Las cifras son muy altas, como muy bien nos comentó Michel Graulich en el Simposio mencionado, pero si aceptamos la veracidad de los tributos registrados en los códices no tendremos más remedio que aceptar las cifras que estos acarrean. La alternativa es encontrar para la Mesoamérica prehispánica otros sistemas de producción más eficaces y el uso de medios de transporte que ofrecieran más posibilidades. Y esas alternativas deberían ir apoyadas por los datos: no nos sirve manifestar que los cargadores iban mucho más cargados si nuestros documentos avalan lo contrario, ni hacer las marchas más largas para que se ocupen menos días, si eso no está verificado. Aquí prima el principio de coherencia y casi diríamos de experimentación: dadas tales condiciones de transporte, se requieren tantos productores y tantos cargadores. Si cambiamos las condiciones, cambiarán los resultados. Nos encontramos ante un bosque de variables dependientes que nos llevan al «principio de estimación » que veremos más adelante. Además, los tributos se producían y se movían para algo. Estas cifras deben estar en consonancia con las de la población total. Si había poca gente, no es muy creíble que fueran capaces de realizar tantos esfuerzos, ni que fuera necesario hacerlos. Si había mucha, puede que hasta nos quedemos cortos. Las cifras de la población prehispánica de México, así como las del conjunto de América, ofrecen datos tan dispares que en realidad parece que no sabemos gran cosa. Los mínimos postulados para todo el continente están en algo más de 8 millones, y el máximo sobre los 100. Para Mesoamérica, la disparidad es similar, pues estamos ante mínimos de 3 millones y máximos superiores a 25. Para la ciudad de México, las cifras ofrecen también gran disparidad: los mínimos están en unos 60000 habitantes y el máximo en 1000000. Cada autor suele razonar sus decisiones, en función de la lectura de las fuentes en las que suelen constar casas, tributarios, familias o vecinos".

También se han utilizado la superficie de la ciudad y las densidades de población que se consideran posibles para hallar cifras viables, como ocurre con la «horquilla» 150000-200000 habitantes, tan utilizada por los autores anglo-

17. J. L. de Rojas, J. J. BATALLA, « Los números », p. 204-205. 18. Ibid., p. 205.

19. La discusión

pormenorizada

de las cifras se puede

ver en J. L. de Rojas, México-

Tenochtitlan. Economía y sociedad en el siglo xvi, México, El Colegio de Michoacán, Crónica de la Ciudad de México, Fondo de Cultura Económica, 1986, p. 66-76.

345

José Luis de Rojas

sajones. Hemos tratado también de verificar la posibilidad de estas cifras con cálculos «indirectos », es decir, cosas que tienen relación con las cifras totales

pero que ni las aclaran ni las determinan. Entre ellas están el tamaño de las casas, el número de metros cuadrados disponibles por individuo, el espacio destinado a usos comunes y a zonas de recreo, etc. También hemos tratado de aproximarnos a las cifras totales de población utilizando la estructura de la misma, las cifras que tenemos sobre trabajadores de distintos oficios y los porcentajes de población activa, en una mezcolanza de datos que aunque permiten verificar la posibilidad de las cifras altas, en realidad no afirman nada”, salvo que seguramente había muchas personas. Otro asunto relacionado con los tributos (pero no sólo con ellos) que no ha formado parte de las agendas de los investigadores hasta hace muy poco tiempo es el de dónde ponerlos: en origen, en destino y en camino. La búsqueda de almacenes en el México prehispánico ha sido anecdótica hasta hace bien poco?!, lo que no deja de ser sorprendente cuando miramos hacia otras culturas antiguas, y debe ser ligada a los tributos ya mencionados, pero también a los niveles locales de riqueza, a los transportes y a la producción y consumo. El almacenamiento es una parte de un proceso largo y complejo que podría constituirse en un indicador de la complejidad social y económica y para Mesoamérica apenas estamos comenzando a recorrer el camino. El almacenamiento y las cifras están relacionados con la producción y la productividad y con el consumo. Las dos primeras están asociadas a los niveles tecnológicos de los pueblos antiguos: la cantidad de alimentos que podían producir y el rendimiento por unidad sembrada. Ambos se cruzan por un lado, con los tipos de agricultura y sus posibilidades, y por otro con la cantidad de gente que se podía alimentar. No podríamos aceptar cifras altas de población sin aceptar también la existencia de una alta productividad o de una gran extensión de terreno dedicada a la obtención de alimentos. Hay muchos cálculos realizados para regiones concretas y otros de ámbitos mayores, y en todos hay que conocer los condicionamientos de los mismos para poder calibrar la posibilidad de su validez. Es decir, conocer las premisas del experimento para valorar los resultados. No es lo mismo que se hayan estudiado los métodos de un agricultor tradicional y medido sus resultados que encontrarnos con que un investigador no necesariamente experto en agricultura ha indicado a un indígena lo que tenía que hacer y ha medido los resultados. También nos puede ocurrir que mientras hacemos tal cantidad de cuentas y transformaciones para poder proyectar los cálculos, nos dejemos algo en el camino. Por ejemplo, para medir la capacidad alimenticia de la

20. VerJ. L. de Rojas, México-Tenochtitlan, para la estructura de la población y J. L. de Rojas « Cuantificaciones referentes a la ciudad de Tenochtitlan en 1519», en Historia Mexicana

142

(1986), p. 213-250, para las cifras de población activa y de trabajadores de los distintos oficios. 21. En junio de 2005 Dominique Michelet y Sevérine Bortot reunieron en el Centro de Estudios Mexicanos y Centroamericanos (CEMCA) en la ciudad de México a un grupo de investigadores para hablar sobre « Arqueología del Almacenamiento en tiempos prehispánicos desde el norte de México hasta el Altiplano Central». Los resultados del encuentro están en prensa.

346

Los nümeros del Mexico antiguo : cuentas y cuentos

agricultura prehispánica es frecuente que convirtamos todos los productos a maíz, sumando así los nutrientes aportados por el maíz, el frijol y la calabaza fundamentalmente. En teoría, eso es correcto, pues nos permite aproximarnos al nümero total de personas que se puede mantener, aunque las cifras varían mucho en función de las necesidades diarias promedio que aceptemos (otros cálculos en los que no hay manera de ponerse de acuerdo), pero en la práctica puede ocurrir que multipliquemos las tierras disponibles por la cantidad de maíz que suponemos que producen y olvidando que una de las claves de la agricultura mesoamericana es la siembra conjunta del maíz, el frijol y la calabaza. Con ello conseguían ahorrar trabajo, alargar la vida de los campos pues estas plantas absorben nutrientes diferentes y, lo que no es lo de menos, multiplicar las tierras al conseguir tres cosechas en vez de una en cada unidad sembrada". Si a eso le añadimos la posibilidad de conseguir varias cosechas anuales con sistemas como el de chinampas, es posible que tengamos que revisar nuestras cuentas con cuidado”, aunque no todo es crecer, pues en general a los antropólogos e historiadores metidos a agrónomos se nos suele olvidar guardar semillas para sembrar al año siguiente. Si bien con el maíz el problema no es muy grande pues la productividad por unidad sembrada es muy alta con lo que el porcentaje de semilla que hay que guardar es muy bajo, con otros productos como el trigo o la cebada, con las productividades europeas antiguas, había que guardar entre un tercio y un cuarto de la cosecha. Y eso es ya harina de otro costal. Las partes y el todo

Lo más importante es la coherencia. No podemos defender cifras muy altas de población con una capacidad de producción baja. No podemos aceptar movimientos masivos de bienes sin que haya un sistema de transporte suficientemente eficiente y en el caso mesoamericano, parece que la ünica manera de ampliar la capacidad de carga es mover más cargadores más días. No podemos poner en marcha inmensos ejércitos sin pensar en la forma de hacerlo. En algunos casos establecemos variables dependientes que a veces lo son tanto que acaban convirtiéndose en la pescadilla que se muerde la cola, o lo que de manera «más científica» llamaríamos una «retroalimentación positiva». Un ejemplo de eso sería el de la relación entre los componentes de un ejército, los cargadores que llevarían sus pertrechos y vituallas, los

22. Es

muy

importante

para

esto

la

lectura

de

trabajos

como

el

de

A.Ramos,

E. HERNÁNDEZ XoLocorzi, J. KoHash1, « Estudio de la tecnología agrícola tradicional en la Sierra de Puebla: I. Asociación de maíz y frijol », en Xolocotzia 1, México, Universidad Autónoma de

Chapingo, 1985, p. 411-413. Aprovecho para agradecer a Teresa Rojas que me haya facilitado el conocimiento de los trabajos de Efraín Hernández Xolocotzi y su importancia para el estudio de los cultivos prehispánicos. 23. Sobre la agricultura prehispánica de México son referencia obligada los trabajos de T. RoJas,

en especial

Las

siembras

Secretaría de Educación Pública, Antropología Social, 1988.

de ayer.

La

agricultura

Centro

de

Investigaciones

indígena

y

del siglo xvi, México,

Estudios

Superiores

en

347

José Luis de Rojas

cargadores que portaban lo que necesitaban los otros cargadores, etc.”. Las cifras altas conducen a otras cifras altas, y lo que tenemos que cuidar es ver qué números tienen alguna base real, aunque sea tan endeble como aparecer una vez en un documento, y cuales proceden solamente de nuestros cálculos. Otras veces cambiamos de criterio según afrontamos una parte u otra del conjunto social. De nuevo el ejemplo tiene que ver con la cuantía de la población. En los estudios sobre el siglo xvi se afirma continuamente que la población indígena sufrió una tremenda catástrofe tras la llegada de los españoles, siendo a fines del siglo un 5% de la que había a comienzos del mismo. Esa pérdida del 95% de la población es puesta, por supuesto, en el debe de los españoles. Con la misma finalidad se habla del expolio de la tierra que los indígenas sufrieron a manos de los españoles, sin reflexionar que ante una pérdida del 95 % de la población, lo que habría pasado es que la mayoría de las tierras habría quedado vacante y no habría a quien quitárselas. Es decir, que si aceptamos la despoblación en esos términos, no hubo necesidad de expolio para que las tierras pasaran a manos de los españoles; y si los españoles tuvieron que quitar por la fuerza las tierras a los indígenas, es que estos seguían existiendo. En fin, que aunque consigamos ser coherentes con nosotros mismos eso no garantiza que estemos acertados. Y ahora si cito a un clásico, Aristóteles, quien decía más o menos «el ignorante afirma, el sabio duda y reflexiona ». Contar con los vecinos

Que en este caso son los practicantes de otras disciplinas. Los que somos «de letras» tendemos a idealizar a quienes creemos capacitados para hacer cálculos exactos que se repiten una y otra vez, con los mismos resultados, pero en realidad ese pensamiento procede de nuestra ignorancia: cuando miramos lo que hacen los «científicos» nos damos cuenta de nuestro error y es que debemos dar la razón a lo que muchos científicos han mantenido desde que C. P. Snow? lo pusiera por escrito y probablemente desde mucho antes: no es justo que se considere inculto a quien no sepa quien era Shakespeare pero se considere normal que no sepamos la leyes de la termodinámica. Y así con otras muchas cosas. Basta examinar el control de la medida del patrón del metro en el Conservatoire des Arts et des Métiers en París, que nunca arroja la misma cifra, aunque las variaciones suelen darse en el orden del cuarto decimal, lo que no es trascendente para la vida diaria de las personas, pero puede ser decisivo para enviar un cohete a Marte. Si los historiadores supiéramos más historia de la ciencia sabríamos más de todo eso, incluso

24. Aunque una cita erudita referente a estos cálculos nos llevaría a los filósofos griegos discutiendo sobre la carrera entre Aquiles y la tortuga, en realidad el razonamiento se debe a R. Goscinny y A. Uprnzo en Obélix y Compañía. Y citar un cómic también es una manera de homenajear a Michel Graulich. 25. C. P. Snow, Las dos culturas y un segundo enfoque, Madrid, Alianza Editorial, 1977 [1955]. Ver también E. P. FiscHEr, El gato de Schródinger en el árbol de Mandelbrot, Barcelona, Crítica, 2008, p. 263-264.

348

Los nümeros del Mexico antiguo : cuentas y cuentos

de la trascendencia de los experimentos y de las teorías que acaban por ser falsas, pues son pasos, a veces decisivos, en las direcciones adecuadas.

Hay mucho mito en la ciencia y una manera amena de descubrirlos es leer libros como el de George Johnson Los diez experimentos más hermosos de la ciencia?*. Contemporáneo a ese libro es un brevísimo pero enormemente sugerente artículo de Juan M. R. Parrondo en /nvestigación y Ciencia? que se llama « Estimaciones » y nos alerta sobre la bondad de éstas y lo dudoso de las cifras exactas, comenzando con un ejercicio que Pietro Fermi solía poner a sus alumnos de Chicago: calcular cuantos afinadores de pianos había en Chicago (era un tiempo en que había gente que tenía un piano en casa). Y por calcular quería decir hacer una estimación a partir de los datos disponibles y su variedad. Y las diferentes vías por las que John Graunt estimó la población de Londres en 1662 es un excelente ejercicio teórico sobre este tema. Aunque aparezcan ahora, reflexiones como estas están en el origen de las páginas que anteceden. El oficio de contar historias Después de todo lo dicho la pregunta que surge es ¿hay que seguir haciendo cuentas? Y la respuesta es sí. Sí pero no de cualquier manera, sino de una forma controlada y explicada. Hacemos cuentas para contar historias, y la trama de éstas está basada muchas veces en los números que usamos. No son cifras asépticas, sino que suelen tener intencionalidad. Incluso en la forma de elegir cómo presentarlas estamos tergiversando la realidad. Esto es muy claro en el manejo de las monedas: segün nos convenga hablamos de pesos, reales o maravedises, que son unos mültiplos de otros. Si queremos que parezca mucho, usamos maravedises, si no hace falta destacar la cantidad,

con pesos nos basta. Y los reales quedan entre medias. Con las superficies pasa lo mismo y hablamos de metros cuadrados, de hectáreas, de caballerías o de kilómetros cuadrados a conveniencia del autor. Y con las unidades de peso, lo mismo: en las cuentas sobre la capacidad alimenticia de los tributos de Motecuhzoma no es lo mismo hablar de fanegas de 55 litros que de fanegas de 144, como hizo Friedrich Katz*. Y así sucesivamente.

Si queremos parecernos a los científicos deberíamos alejarnos de los alquimistas y buscar la transparencia. Con eso queremos decir que hay que dejar claras las premisas de las que partimos, incluyendo las razones de su aceptación, y proponer resultados que puedan ser comprobados. De esa manera se pueden seguir los razonamientos de los autores e introducir las variaciones que pensemos que son necesarias para mejorar la propuesta. Y otros podrán hacer lo mismo con nuestras cuentas, siempre en busca de mejorar nuestra

26. G. JouwsoN, Los diez experimentos más hermosos de la ciencia Barcelona, Ed. Ariel, 2008. 27. J. M. R. PARRONDO, «Estimaciones », en Investigación y Ciencia (Marzo de 2008), p. 8889. 28.

F. Karz,

Situación

social y económica

del

los

aztecas

en

los

siglos

xv y xvi,

México,

Universidad Nacional Autónoma de México, 1966, p. 94.

349

José Luis de Rojas

visión del pasado. La historia de la ciencia está llena de ejemplos de este proceder y haríamos bien en mirar un poco fuera de nuestra disciplina para tomar lo bueno de otras y desmitificar algunas cosas. Ver las cosas desde otra perspectiva suele aclarar mucho el panorama. Mucho tenemos que aprender sobre nuestro oficio abriendo nuestro campo de visión, y en eso, Michel Graulich también es un maestro.

350

DE AZTECA CAMBIO

A MEXICA.

DE GENTILICIO Y METAMORFOSIS

EN UNA ETAPA DE LA PEREGRINACIÓN

Patrick

JoHANSSON

Universidad Nacional Autónoma

de México

E] topónimo México y el gentilicio correspondiente mexica han sido, desde el siglo xvi, objeto de pesquisas que buscaban en el nombre un predicado etimológico que diera cuenta de su razón de ser. Se asumió generalmente que el gentilicio derivaba del topónimo! por lo que se enfocó el estudio sobre el nombre del lugar escogido por los hasta entonces nómadas o semi-nómadas para su asentamiento definitivo. Ahora bien, algunas fuentes indígenas? que relatan la gesta fundacional de México-Tenochtitlan señalan, antes de la llegada al valle de Anáhuac, un cambio onomástico de los migrantes. Segün dichas fuentes, en una etapa temprana de su «peregrinación» y después de algunas peripecias que culminaron con un encuentro con los llamados mimixcoa, el dios Huitzilopochtli cambió el nombre de su gente. Les dijo: «In axcan aocmo amotoca yn amazteca, ye ammexica»,? «ahora ya no os llaméis azteca, ya sois mexica ». Aun cuando es el dios el que impone el nuevo gentilicio a su pueblo, lo que implica una cierta trascendencia, la nominación no es arbitraria: es la consecuencia lógica (histórica o mitológica) de hechos y acontecimientos anteriores que culminan en un lugar y un momento determinados y justifican el cambio. En dicho lugar, los aztecas se vuelven mexicas, nombre gentilicio atribuido en una fase nómada y que los definirá a partir de este momento. No intentamos, en este artículo, buscar de manera exhaustiva las causas

eventualmente históricas del cambio de nombre, ni pretendemos reconstituir la red intrincada de relaciones simbólicas y más generalmente semiológicas

1. I. GuzMAN BETANCOURT (com.), Los nombres de México, México, Secretaría de Relaciones Exteriores, Porrúa,

1998.

2. «Códice Aubin, Ms. 40», en W. LEHMANN, G. KUTSCHER (éd.), Geschichte der Azteken, Berlín, Gebr. Mann Verlag, 1981; Crónica Mexicayotl, A. LEON (éd.), México, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Históricas, 1992. 3. «Códice Aubin», fol. 5r.

351

Patrick Johansson

que lo determinaron. Nos limitaremos a analizar una secuencia mitográfica contenida en el Códice Boturini^,

a situarla en «con-textos»

rituales

específicos que ayudan a comprenderla, y a emitir una hipótesis referente al gentilicio mexica. Breves consideraciones epistemológicas E] espacio reducido del que disponemos aquí nos obliga a enunciar de entrada algunos planteamientos teóricos y los fundamentos de nuestra hipótesis: el cambio de gentilicio de los migrantes tiene dos aspectos esenciales. Uno que atañe al nombre en sí y otro que concierne a los acontecimientos que motivaron dicho cambio, por lo que se debe considerar, aunque brevemente, las modalidades de atribución del nombre en la cultura náhuatl

por un lado y por otro, analizar detenidamente los hechos que condujeron al cambio onomástico. Por otra parte, la configuración pictórica de lo ocurrido en el Códice Boturini determina una producción « mito-gráfica» de sentido que es preciso definir en esta parte liminar del artículo. Finalmente, vinculamos la gesta aquí referida con un ritual por razones que es preciso señalar. El nombre En lo que concierne al primer rubro, antes de considerar los nombres gentilicios en sus aspectos verbales y pictográficos así como sus respectivas correspondencias, analizaremos brevemente el proceso nominativo indígena, en un marco macrocontextual. El relato pictográfico contenido en el Códice Boturini parece establecer un esquema análogo al que prevalece en la secuencia ritual que culmina con la imposición del nombre al recién nacido. En lo particular, el climax de dicho proceso: la colocación por los guerreros mexicas del ombligo del varón recién nacido en el campo de guerra (yaoc) tiene semejanzas con la colocación de la piel del muslo de la diosa Toci en el contexto ritual de la fiesta ochpaniztli, estrechamente vinculada con lo que acontece en la lámina IV del Códice Boturini, en la que situamos el cambio de gentilicio. El relato de los hechos que culminaron con el cambio de nombre

Lo ocurrido se expresó mediante textos orales y pictográficos, es decir, «tejidos » en cuya trama verbal e icónica se tejió un sentido que puede corresponder a hechos históricos o a mecanismos mitológicos de construcción de una identidad. En el primer caso un texto relativamente transparente refiere lo que fue y debemos de buscar el sentido en los hechos mismos y en su «crono-logía» histórica. En el segundo, el pasado y el presente, la realidad y la ficción se funden: los hechos se vuelven esquemas de acción narrativa en cuya opacidad metafórica el significante y el significado se permean de

4. P. JoHansson, « Tira de la Peregrinación. Códice Boturini », Arqueología Mexicana, edición especial códices 26 (2007).

352

De azteca a mexica

tal manera que una justa aprehensión del sentido producido por el texto pasa inevitablemente por el análisis de su discursividad propia?. Un relato mitográfico

Numerosas son las fuentes que refieren la Peregrinación. Entre ellas escogimos como texto-base la variante pictográfica de la gesta azteca contenida en el Códice Boturini ya que en ella el sentido se manifiesta mediante un discurso pictórico que complementa lo que aducen las fuentes verbales a nuestra disposición y porque constituye probablemente la versión pictórica cuya lectura, realizada por informantes indígenas en el siglo xvi, estableció explícitamente el cambio aludido*. En este contexto expresivo, una aprehensión visual de los gentilicios respectivos y de las peripecias que definen el cambio onomástico podría ser determinante para esclarecer su sentido. Conviene señalar aquí que los recursos expresivos de la mitografía son esencialmente formales.

La posición,

formas, la composición, de contextos verbales la lámina IV del Códice resumir lo acontecido en

etc., configuran el sentido sin por eso abstraerse más anecdóticos. Analizaremos específicamente Boturini correspondiente al cambio no sin antes las tres primeras láminas.

el tamaño,

el trazo, los colores, las

El «con-texto» ritual de la fiesta ochpaniztli

Aun con la ayuda de las variantes orales que relatan lo ocurrido, el sentido producido por la configuración mitográfica de la lámina IV resulta algo críptico. Un ritual del mes festivo ochpaniztli, estrechamente vinculado con la fase referida de la Peregrinación, ayudará a comprender lo que acontece en dicha lámina que justifique el cambio de nombre. Como ya lo señalamos, el hecho de que se lleve la piel del muslo de la diosa Toci, hasta el campo

de guerra (yaoc) situado en los límites del territorio

mexica establece analogías que nos parecen determinantes para la atribución del nuevo gentilicio. Nacimiento biológico y nacimiento socio-existencial

En el contexto cultural náhuatl prehispánico, el nifio que nace « brota» de la madre tierra. Después de una gestación durante la cual la madre libró un combate contra fuerzas antagónicas del que salió vencedora, llega el momento del parto: imiquizpan «el momento de su muerte »”?.

5. Esta perspectiva corresponde a la postura analítica del investigador y no concierne al receptor potencial indígena de un texto cuya aprehensión era «in-mediata», sensible y totalizadora. 6.

P. JOHANSSON,

La

palabra,

la

imagen,

y el manuscrito.

Lecturas

indígenas

de

un

texto

pictórico en el siglo xvi, México, Universidad Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Históricas, 2004, p. 171-273. 7. Códice Florentino (Testimonios de los informantes de Sahagün), Facsímil elaborado por el Gobierno de la República Mexicana, México, Giunte Barbera, 1979, libro VI, capítulo 30.

353

Patrick Johansson

Nacer

Los gritos bélicos de victoria de las parteras acogen a la criatura: ...Auh in otlalticpac quiz piltzintli, niman tzatzi in ticitl, tlacaotza, quitoznequi : ca ovel iaot in cihuatzintli, ca onoquichtic, ca otlama, ca ocacic in

piltzintli?. Y cuando el nifio llegó al mundo, luego grita la partera, quiere decir que peleó bien la mujercita, fue varonil, capturó [a un prisionero] : llegó el niño.

Luego, después de haber enterrado la placenta, referida como «su madre » (inantzin), que lo cobijaba, que lo envolvía (nic mapantivitz, inic oalquimiliuhtiuh) en un rincón de la casa (xomolco), la partera procede a cortar solemnemente el cordón umbilical (xictli). Al cortar el cordón umbilical, ésta

define el destino del joven mexica: .…Teoatl, tlachinolli molhuil, motequiuh : ticatlitiz, tictlaqualtiz, tictlamacaz in tonatiuh, in tlaltecuhtli? El agua, el fuego [la guerra] es tu compromiso, tu tarea.

Darás

de beber,

alimentarás,

darás

de comer al sol, al señor de la

tierra.

El cordón umbilical se conserva, se deja secar y posteriormente será confiado a unos guerreros que lo llevarán al campo de guerra (yaoc, ixtlahuacan) al que «pertenece » el recién nacido. El cordón umbilical de la niña es enterrado cerca del hogar (tlecuil). La atribución del nombre: un segundo nacimiento

Después de haber cortado el cordón umbilical, la partera se dispone a bañar una vez más al recién nacido. Se pone frente al Oeste (tonatiuh icalaquiampa itztica) para hacerlo. Los atributos masculinos bélicos del pequeño varón están ya dispuestos cerca de la cuna: un escudo pequeño, un arco pequeño, y cuatro pequeñas flechas (extendidas sobre una pequeña cama de semilla de amaranto),

así

como una tilma y un taparrabo. Las cuatro flechas, además

de la referencia a la guerra,

establecen el

espacio-tiempo existencial al que ya pertenece el niño: ...Quil ce tlapcopa pouhqui, quil ce cihuatlampa pouhqui, quil ce vitztlampa pouhqui, quil ce mictlampa pouhqui!°. Se dice que una pertenece al este, se dice que una pertenece al oeste, se dice

que una pertenece al sur, se dice que una pertenece al norte.

La partera le da después a probar un poco de agua (conpaloltia), pone también agua sobre su frente (iqua nepantla) y sobre su pecho (ielpan). Una antorcha de ocote (ocopilli) está ardiendo durante todo el ritual. Después de

8. Ibid. 9. Ibid. 10. Cédice Florentino, libro VI, capítulo 37.

354

De azteca a mexica

otro baño en aguas « azul-verdes » (matlalatl, xopaleoac) la partera proclama el «segundo nacimiento » del bebé : ...Xictlalcavi, ximiquani: axcan oc ceppa ioli, tlacati in piltzintli [...] oc ceppa quipitza, quimamali in tonan in chalchiuhtlicue!!. ¡Deja la tierra, vete! Ahora de nuevo llega a la vida, nace el niño [...] de nuevo lo forja, lo perfora nuestra madre Chalchiuhtlicue.

Lo levanta luego al cielo y lo ofrece sucesivamente

a Ometecutli

y

Omecihuatl, a Teteo innan, Citlallatona-Citlallin icue, para que le confieran un espíritu (quiihiyoti in maceoalli), a los habitantes del cielo Glhuicapipiltin),

para que también le otorguen un espíritu. Por fin ofrece al Sol, Tonatiuh, este nifio que lo va a alimentar y recrear mediante la guerra y su propia muerte al filo de la obsidiana. Llega entonces el momento de conferir el nombre al niño: «Auh niman uncan quitocamaca uncan quimaca in itlalticpactoca » "^,

« Y luego allá le da un nombre allá le da su nombre terrenal ». Este puede ser el nombre de un abuelo: «Ago icultzin quitocamamaz, quitonaleuaz »,? «Quizás cargará el nombre de su abuelo, lo animará ».

Al darle su nombre, la partera lo grita varias veces y dice lo siguiente (si su nombre es Yaotl): ... Yaotle, Yaotle xoconcui in mochimal xoconcui in tlacochtli, in tevevelli in laviltiloca tonatiuh "^. Yaotl,

Yaotl,

toma

tu escudo,

toma

tu flecha,

tu pequeño

escudo para

darle

gusto al Sol.

El ombligo del varón recién nacido es llevado al campo de batalla

Los jóvenes presentes en la ceremonia se precipitan entonces sobre la «ofrenda de comida del ombligo del nifio» (ixic iuen piltontli) toman lo que pueden y se van corriendo, gritando repetidamente su nombre y diciendo: « Tiacaoana xioalhuian, xicxicuenquaqui In yaotl»

?, «O guerreros, vengan,

vengan a comer el ombligo de Yaotl ». E] informante indígena precisa que los jóvenes representan a los que murieron en la guerra (yaoquizque). Al comer la ofrenda del ombligo, comen

simbólicamente el ombligo y consagran al ser que entró de lleno a la existencia con este segundo nacimiento, que constituye el conferimiento de su nombrealma. Después de la ceremonia, unos guerreros salen para dejar el ombligo al campo de batalla: «Auh in ixic piltzintli [...] quin yaoc concaoa »,' «Y el

ombligo del niño [...] luego lo van a dejar al campo de guerra».

11. 12. 13. 14. 15. 16.

Ibid. Ibid. Ibid. Ibid. Ibid. Códice Florentino, libro VI, capítulo 30.

355

Patrick Johansson

El nombre individual El nombre individual está definido por la partera ticit/ y por el sacerdote lector de destinos tlapouhqui algunos días después del nacimiento, en función de aspectos físicos, de lazos de parentesco y de determinismos calendáricos correspondientes a la trecena de días en la que ocurrió el nacimiento y que definen a su vez una fecha propicia para la ceremonia del bautismo". Tonaltocayotl : el nombre calendárico y el destino El nombre calendárico corresponde al día en que nace el individuo. El de Quetzalcóatl, por ejemplo, es 1-Acatl, fecha de su nacimiento. El nombre de Huitzilopochtli es 1-Tecpatl correspondiente al día de su nacimiento. El hecho de que la salida de Aztlan se realice en el año 1-Tecpatl es determinante en el contexto aquí considerado. Tlalticpactocayotl : el nombre «terrenal » El nombre en sí, escogido por la partera probablemente con el consentimiento de los parientes, parece deducirse de aspectos físicos percibibles principalmente en el rostro, de lo que podría haber ocurrido en el momento del nacimiento, cuando no es el nombre de un pariente (tocayo) que se confiere

a la criatura para que se beneficie de elementos anímicos específicos de dicho pariente. El nombre otorgado puede cambiar si algo importante ocurre en la vida del individuo que justifique tal cambio. Para dar tan sólo un ejemplo, recordemos la ceremonia del fuego nuevo de 1507 en la que Moctezuma mandó por todas partes buscar a un hombre cuyo onomástico contuviera la palabra xihuitl'8 «año» o «fuego », lo que parecía propicio en el contexto fatídico-astrológico del momento. Capturaron a un guerrero huexotzinca llamado Xiuhtlamin «flechador de fuego». Su captor, un tlatelolca llamado Itzcuin (perro) fue entonces llamado Xiuhtlaminmani «el cautivador de Xiuhtlamin» : /n tlamami

itoca itzcuin,

auh ic tocaiotiloc,

ic notzaloc xiuhtlaminmani??.

«El

nombre del captor era /tzcuin y entonces ya fue nombrado, fue llamado Xiuhtlaminmani ». El nombre del captor contiene ya un atributo que expresa mejor lo que es a partir de este momento"?. Ixtli, yollotl «rostro y corazón » : la personalidad

Como parte del ritual que culmina con el otorgamiento del nombre, la partera pone solemnemente agua sobre los labios de la criatura, sobre su

17. El término «bautismo» parece remitir a contextos cristianos de conferimiento de un nombre. Sin embargo, recordemos que baptizein significa más generalmente « sumergir» en griego, por lo que su uso resulta adecuado en un contexto ceremonial prehispánico en el que el agua desemperia un papel primordial. 18.

Cédice Florentino, libro VII, capitulo 12.

19. Ibid. 20. Algunas personas podían tener varios nombres los cuales constituían quizás «apodos» pero que ayudaban a discernir su ser. Nezahualcóyotl, por ejemplo, era llamado también Acolmiztli y Yoyontzin en ciertos contextos.

356

De azteca a mexica

frente y sobre su pecho, antes de derramar agua en otras partes del cuerpo. El gesto parece destacar el rostro (ixt/i) y el corazón (yollotl) como partes esenciales de lo que será la personalidad del ser nombrado en su andar existencial,

así como

su identidad.

El difrasismo

ixtli, yollotl más

que una

hermosa metonimia con valor metafórico, podría referir el doble arraigo de la identidad indígena: uno aparente, superficial (en el mejor sentido de la palabra), social, directamente reconocible. Otro encubierto, profundo, vital.

Los cinco sentidos se sitüan en el rostro. La voz que expresa lo que sale del corazón, ya sea un simple aliento ¿hiyotl o el aliento esculpido como palabra y canto, pasa también por los labios, parte constitutiva del rostro. La máscara gentilicia

Si el rostro y el corazón (ixtli, yollotl) son los aspectos esenciales de una personalidad individual, podrían constituir también, por analogía, los ejes estructurantes de una identidad colectiva. E] rostro de una persona refleja particularidades individuales y permite reconocerlo. En el caso de una colectividad, son los rasgos comunes que debe expresar el emblema identitario, ya sea sonoro o visual. Dicho emblema es de alguna manera el rostro de la comunidad por él referida, un rostro con rasgos permanentes : una máscara. En cuanto al corazón, tanto los contextos culturales como las peripecias que culminan con el sacrificio del colhua (qui) Chichilquahuitl en la consagración del templo de México-Tenochtitlan, muestran que constituye el corazón del templo y más generalmente de la nación. En el año 2-Pedernal los mexicas «lo consagraron (su templo) con el corazón del capitán nombrado Chichilquahuitl » (quiyollotique

in tlacateccatl yn itoca Chichilquahuitl)?.

Es el corazón de Teoxahualli el que consagra aquí el templo virtual mexica y quizás la atribución del gentilicio correspondiente, pero es el rostro que manifiesta la identidad. Aztlan y los aztecas

Antes de analizar el cambio de nombre en sí, es preciso considerar el gentilicio sustituido. En el caso de Aztlan, el nombre del lugar, cualquiera que sea su significado, produjo el gentilicio. Los aztecas son antes que nada los moradores de Aztlan por lo que la búsqueda del simbolismo asociado con el origen debe enfocarse al topónimo, al lugar del asentamiento original, más aün si consideramos que este lugar puede haber sido utópico. El significado más inmediato de Aztlan es el «lugar de las garzas». El topónimo podría expresar el hecho de que esta ave migratoria abundaba en el lugar así referido en cierta estación del año. El carácter « migratorio » del ave podría relacionarse de alguna manera con la migración azteca. Los atributos esenciales de Aztlan, son su insularidad y su blancura expresada mediante el color de la garza aztatl o mediante el acromatismo

21.

Códice Aubin fol. 25r.

357

Patrick Johansson

prevaleciente que citan la mayoría de las fuentes. Si consideramos (en términos arquetípicos) la geografía interior del hombre, el origen, Aztlan y sus moradores primigenios, los aztecas, representan la potencialidad todavía no manifiesta de algo que está a punto de cobrar vida, de nacer, de manifestarse, que no «tiene color» todavía. Para los mexicas, Aztlan es ante todo el lugar donde vivieron sus antepasados: ...Nuestros padres moraron en aquel felice y dichoso lugar que llamaron Aztlan, que quiere decir blancura: en este lugar ay un gran cerro, en medio del agua, que llamaban Culhuacan, porque tiene la punta algo retuerta hacia abajo, y a esta causa se llama Culhuacan, que quiere decir, «cerro tuerto». En este cerro había unas bocas o cuevas y concavidades donde habitaron nuestros padres y abuelos por muchos años: allí tuvieron mucho descanso, debajo de este nombre Mexitin y Azteca?.

El relato de la expedición (probablemente chamánica) a Aztlan por un grupo de nahuales corresponde al reino del cuarto tlahtoani mexica Motecuhzoma Mhuicamina. Fue redactado por Durán en la segunda parte del siglo xvi y quizás transcrito en su versión original en náhuatl antes. La mención Mexitin que figura con el vocablo azteca podría por tanto no ser funcional en términos narrativos. Segün dicho relato la madre de Huitzilopochtli, Coatlicue, sigue viviendo en aquel lugar misterioso y espera el retorno de su hijo quien ha de regresar después de su « peregrinación ». En esta versión, el «cerro tuerto» Colhuacan se encuentra en la isla y su cima (monamicyan literalmente « lugar de encuentro ») probablemente por su forma en espiral permite a los que bajan « remozar ». Nadie muere en Aztlan. Aztlan se asimila a un vientre materno que genera y regenera a los seres. Ahora bien, además de este arraigo del origen en lo más profundo de la psique humana y sin que haya contradicción alguna, podemos buscar una procedencia más «histórica» en ciertos documentos indígenas. En efecto, algunas fuentes? referentes a Tula y los toltecas evocan una división cuadripartita de un templo cuyo sacerdote era Quetzalcoatl. La parcialidad situada (u orientada) al sur (Huitztlampa Amilpampa

itzticaca) ^, donde prevalecía

lo plateado (iztacteocuitlatl) y se erigía la «casa del caracol» teccizcalli, se caracterizaba por su blancura”. Se evoca asimismo una «casa de las plumas » que se subdividía también en cuatro lugares (nauhtemanca). La parte orientada hacia el sur: Huitztlampa,

hacia el «lugar de las espinas », pero también Amilpampa, hacia «el lugar de las tierras de riego », constaba de una casa blanca Aztatzoncalli o Aztacalli o

22.

D. DurÁn, Historia de las Indias de Nueva

España e islas de Tierra Firme, J.

R. ROMERO

R. CAMELO (éd.), México, Consejo Nacional para la Cultura y las Artes, 1995, t. I, p. 269. 23. Códice Florentino, libro X, capítulo 29, p. 165. 24. Ibid (p. 166). 25. Ibid.

358

-

De azteca a mexica

«casa de plumas blancas » llamada así por las plumas blancas que cubrían los muros", En este contexto mítico-histórico, lo psiquico-arquetípico se tifie de historia y sugiere que los aztecas (futuros mexicas) podrían haber pertenecido al calpulli Aztacalli y haberse desprendido de la nación tolteca para migrar hacia el sur el «lugar de las espinas» y «lugar de las tierras de riego ». Además de estar relacionada con la garza y con un acromatismo simbólico de potencialidad transformadora, la blancura de Aztlan podría estar vinculada con la luna y todo lo que ésta implica en el contexto religioso náhuatl prehispánico. El color del astro (la ausencia de color) nocturno podría expresar lo anterior, en términos simbólicos y referir el hecho de que los aztecas veneraban entonces un numen selénico y que cambiaron, eventualmente a otro helíaco. Refiriéndose a Aztlan, el cronista mestizo Cristóbal del Castillo indica: «huey in atezcatl yn quitocayotía meztli iapan»?', «[Es] un

lago que llaman “el agua de la luna” o “el canal de la luna” ». Señala también: «Anepantla in canin metztli iapan, xochitlalpan, tonacatlalpan »?, « [es] una isla, allí [está] el agua de la luna [o el canal de la luna], es tierra florida, tierra

de nuestro sustento ». Como ya lo hemos señalado, tanto la palabra «azteca» como el glifo gentilicio correspondiente de la lámina II podrían derivarse de este concepto ácueo. La palabra hubiera evolucionado de atezcatl literalmente «espejo de agua» (lago), a azteca(tl) por metátesis?. En el glifo, el agua (atl) y el cuadrado (isla o cualquiera que sea su significado) podrían referir el complejo insular de Aztlan. Asociado de alguna manera con la garza o la blancura y con un grupo dominante al que estuviera enfeudado, el término náhuatl aztayo literalmente «lo de la garza » o «lo que concierne a la blancura » significa de hecho, según fray Andrés de Olmos, «esclavo» o «sirviente »*% Asimismo la expresión tlacotonililli yaztauh, ymecaxicol «su [penacho de plumas de] garza, su chaleco de cuerda están cortados» significa «libre», independiente*!. El sentido figurado de la expresión refleja indudablemente una relación de dependencia, sometimiento o subordinación real que se ve interrumpida, «cortada» como si hubiera sido una especie de umbilicalismo entre una entidad-madre y un retoño.

26.

Ibid.

27.

C. Del

CasriLLo,

Historia

de

la

venida

y

otros

pueblos

e

Histora

de

la

conquista,

F. NAVARRETE (ed. y trad.), México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 1991, p. 90. 28. Ibid.,p. 112.

29. En

la

metátesis

un

fonema

se

desplaza

dentro

Moteuczoma/Motecuhzoma/Moctezuma. 30. R. SIMÉON, Diccionario de la lengua náhuatl o mexicana, 1977. 31. Ibid.

de México,

una

palabra.

Ej:

Editorial Siglo xxi,

359

Patrick Johansson

La imagen de Aztlan en el Códice Boturini

Las fuentes verbales dan una imagen «paradisiaca» de Aztlan, del lugar que habitaron los abuelos y evocan una tierra rodeada de agua con el monte encorvado en medio de la isla. En la lámina I del Códice Boturini? la isla y el monte están separados por el agua que atraviesan los aztecas para distinguir Aztlan de Colhuacan quizás, pero también para ofrecer una imagen clara del origen insular y eventualmente del nombre que lo refiere. Es probable que un pigmento blanco haya expresado pictográficamente la «blancura » que entraña el nombre sin otros elementos referenciales más explícitos*. Sin embargo la imagen del gentilicio azteca que se encuentra en la lámina siguiente sugiere que la forma cuadrada/rectangular de la isla así como la orilla que circunda el agua son los rasgos semiológicos pertinentes que van a referir a los migrantes en algunas láminas. En el Códice Boturini el rectángulo no es perfecto en términos geométricos pero si observamos la forma de la isla en el Códice Azcatitlan?* y en el Mapa de Sigüenza nos percatamos de que la cuadratura es un atributo formal pertinente del lugar referido. En efecto, en estos dos códices la perfección del cuadrado (rectángulo) es un rasgo formemático indudablemente distintivo. La imperfección geométrica del rectángulo en el Códice Boturini se podría deber al hecho de que el trazo «temblante» de los perímetros respectivos remite a un formema altamente significativo en la pictografía indígena náhuatl y que corresponde a la flacidez del vientre materno de la mujer que acaba de dar a luz y al contorno de elementos excrementicios, en otros contextos. La ilustración correspondiente del Códice Aubin?, probable lectura del original a partir del cual fue elaborado el Códice Boturini*, representa también a Aztlan mediante el trazo « temblante » de la isla figurada como cuadrado. Una isla cuadrangular blanca rodeada de agua es la imagen de Aztlan. De la imagen de Aztlan al signo pictográfico-gentilicio azteca

Aztlan no parece estar referido mediante un signo toponímico explícito?”. Una isla blanca rodeada de agua expresa tanto el referente histórico o mitológico como su representación pictográfica. Ahora bien, en la lámina siguiente

32.

P. JoHANSSON, « Tira de la Peregrinación ».

33. El hecho de que el papel amate de los códices se ungiera de cal y de que el Códice Boturini es inacabado no permite ponderar al respecto. Cf. P. JoHansson, La palabra, la imagen. 34. Códice Azcatitlan, Fac-similé, R. BarLow (éd.), mise à jour par M. GRAULICH, L. LópEz LuIAN (trad.), coordination éditoriale D. MicxELer, Bibliothèque nationale de France, Société des Américanistes, París, 1995, láminas 1 y 2; Pintura de la peregrinación de los culhuaquemexitin (El Mapa de Sigüenza). Análisis de un documento de origen tenochca, M. CASTAÑEDA DE LA PAZ (éd.), México, El Colegio Mexiquense, Instituto Nacional de Antropología e Historia, 2006. 35. Códice Aubin, fol. 5r. 36. P. JoHansson, La palabra..., p. 171-273.

37. El gentilicio cuitlahuaca, presente en algunas lecturas de documentos pictóricos parece ser errónea. /bid.

360

De azteca a mexica

el contexto narrativo correspondiente a la enunciación de los diferentes barrios (calpultin) requiere la reducción de una imagen compleja a un signo glífico explícito que remita al nombre del lugar o al gentilicio correspondiente. Dicho signo glífico es la reducción homotética de la representación de Aztlan tal y como aparece en la lámina I. La isla (cuadrada) se reduce a un pequeño cuadro mientras que el agua que la rodea se transforma en el diminuto signo arquetípico del agua (at/) en la iconografía náhuatl. El cubre aquí dos lados de dicho cuadrado#. El signo glífico es la imagen esquematizada de lo que es Aztlan. Es posible que el interior del cuadro haya sido pintado de blanco pero no es una condición sine qua non a la comprehensión del glifo ya que la reducción homotética de la imagen de la lámina I, en el signo glífico de las láminas II y III, es clara. En lo que concierne a los nombres, si la imagen de Aztlan, en la lámina I, corresponde a un topónimo, el signo glífico de las láminas II y III parece remitir a un gentilicio si consideramos los glifos de los otros barrios? así como lo que aducen las fuentes verbales. El glifo gentilicio azteca remite a la representación de Aztlan como isla blanca cuadrada rodeada de agua sin que un elemento gráfico específico (más que el color blanco que pudiera haber sido pintado en el cuadro) corresponda directamente al nombre o a su significado. En Aztlan:

el templo-hogar

En la versión pictográfica del Códice Boturini, además de los barrios y de la pareja, se observan un templo en la isla y en lo alto del templo una caña y agua estrechamente vinculados que corresponden a un glifo. Una vez más, si el agua a(tl) es inconfundible, la caña puede representar una caña (acatl) como planta o como signo calendárico, una flecha (mitl) o un « palo de

fuego» (tlecuahuitl). Resulta curioso, además, que este mismo glifo aparezca en las láminas III y IV como antropónimo de un personaje, respectivamente portavoz de Huitzilopochtli y sacrificador, es decir probablemente sacerdote o guía espiritual. La posición del binomio glífico (o glifo bigráfico) en la cima del templo establece su carácter divino. Podría referir nominalmente una deidad, remitir

a un principio religioso potencial o manifiesto, o simplemente expresar ideográficamente lo que representa Aztlan en la parte liminar del relato. El glifo podría remitir al dios Amimitl ; mediante el agua (atl) y una duplicación de mitl (mimitl). La relación sería parcialmente fonética ya que el agua (atl) que refiere aa(mi) remite al sonido más que al sentido. En efecto, el sentido de aamimitl es «flecha de cacería ». Podría ser el significante pictórico del difrasismo atl, tlachinolli «agua, incendio (o fuego) » y profetizar el destino bélico de los aztecas. Más sencillamente podría expresar que Aztlan es el «hogar» de los aztecas mediante

38. La yuxtaposición del agua y de dos lados es más clara en la lámina III. 39. Por citar un ejemplo, son los tepanecas que son referidos mediante Azcapotzalco, Coyoacán o Tlacopan.

la piedra y no

361

Patrick Johansson

dos elementos simbólicos del hogar: el agua y el fuego, siempre vinculados en los contextos domésticos. La lectura del glifo podría ser en este ültimo caso tleamanalli «hogar» o «fogón» palabra compuesta de tlet! «fuego» y amanalli «estanque de agua» que corresponden respectivamente al agua y a lo que sería el palo de fuego del binomio glífico. De la misma manera pero en un macrocontexto cósmico, podría remitir a la unión entrañable del agua y del fuego en el simbolismo generativo indígena. La expresión mitográfica del cambio de gentilicio

E] texto pictórico que consideramos a continuación puede ser percibido a diferentes niveles semiológicos. Una lectura de superficie (como la que realizaron los informantes indígenas que adujeron la versión del Códice Aubin, y del Ms. 40)*? «ex-trae» lo legible, lo que se traduce en palabras. Ahora bien, la versión pictográfica que propone el Códice Boturini, además de referir visualmente hechos concretos, «con-figura» un sentido metafórico, ilegible en términos de transposición verbal, pero no menos significativo. E] cambio de gentilicio que se realiza en la lámina IV del Códice Boturini es la culminación pictórico-narrativa de lo que acontece en las láminas anteriores. Nos limitaremos a enunciar de manera esquemática el sentido formalmente producido por cada lámina y remitimos a otro trabajo nuestro para su análisis detallado*!. Los aztecas salen de Aztlan (Lámina I)

En la lámina I del Códice Boturini tanto los elementos gráficos como su composición permiten aprehender metafóricamente: —

Una relación hierogámica (copulativa) en una isla (Aztlan) expresada

por la yuxtaposición de una flecha y de agua (fuego/agua) en lo alto de un templo y por la presencia de una pareja (Chimalman/personaje masculino). — Consecutiva y consecuentemente, un personaje en una canoa (acalli) atraviesa una extensión de agua para dirigirse a una cueva (oztotl) en la fecha 1-Tecpatl, 1-Pedernal. El nivel metafórico podría ser aquí la fecundación por el simbolismo universal de la travesía y por el hecho de que el pedernal podría tener aquí un valor fálico*?. Más concretamente expresa la fecha de la salida de Aztlán de los migrantes. — En la cueva situada dentro del monte Colhuacan, un personaje: el dios Huitzilopochtli se está gestando. La filiación etimológica entre la cueva oztotl y la preñez otztic no deja lugar a duda a este respecto. La cima en espiral del monte confirma el carácter genésico-matricial de la cueva y de la montaña.

40. Códice Aubin, fol. 5r. 41. P. JoHANssoN, Mitografía de la peregrinación de los aztecas en el Códice Boturini, México (en prensa).

42. Ibid.

362

De azteca a mexica

Figura n? 1: Los aztecas salen de Aztlan. P. Johansson, « Tira de la Peregrinación. Códice Boturini », Arqueología Mexicana, edición especial códices 26 (2007). Los aztecas salen de Colhuacan (Lámina II)

La lámina II muestra la salida de Colhuacan. Más allá de lo que se refiere anecdóticamente, el sentido está producido por la composición ortogonal de dos grupos. Los ocho calpultin están dispuestos sobre un eje vertical mientras que los teomamaque, los portadores del dios, caminan sobre un eje horizontal orientados hacia la derecha. En la intersección de los ejes se encuentra el glifo gentilicio correspondiente a los aztecas. En este punto los cuatro caminantes parecen desprenderse del conjunto de los barrios. En todo caso el discurso visual produce el esquema narrativo : separación. Los aztecas se separan de los barrios (Lámina III) La lámina HI] prosigue con los esquemas «ruptura» y «separación» expresados respectivamente por la ruptura del árbol y los pasos divergentes que parten del gentilicio azteca y del representante de los calpultin que llora. La disyunción comer/llorar es asimismo visualmente aprehensible.

363

Patrick Johansson

Figura n° 2 : Los aztecas salen de Colhuacan. P. Johansson, « Tira de la Peregrinación. Códice Boturini », Arqueología Mexicana, edición especial códices 26 (2007).

Figura n? 3: Los aztecas se separande los barrios. P. Johansson, « Tirade la Peregrinación. Códice Boturini », Arqueología Mexicana, edición especial códices 26 (2007).

364

De azteca a mexica

El encuentro de los aztecas con los mimixcoa (Lámina IV)

Según lo establecen las fuentes verbales transcritas, después de haber sacrificado a los mimixcoa y haber entregado armas e insignias, Huitzilopochtli confiere a los aztecas su nuevo nombre gentilicio: mexica. Esta secuencia está plasmada en la lámina IV del Códice Boturini: Las palabras de Huitzilopochtli : /n axcan aocmo amotoca yn amazteca ye ammexica, « Ahora ya no os llaméis azteca sino mexica », corresponden a esta lámina. En este

mismo momento el dios les concede las insignias, rasgos distintivos de su nuevo estado. La expresión correspondiente oquinnacazpotonique se traduce literalmente como «les emplumaron las orejas ». Sin embargo, el significado del verbo potonia expresa más generalmente el hecho de plasmar algo sobre una superficie. En este caso, además de emplumar las orejas de los aztecas, se aplicaría una máscara sobre su rostro, máscara que borraría los rasgos gentilicios anteriores para conferir los nuevos. Como consecuencia de lo anterior,

los mexicas «tomaron su nombre» (ynic oquicuique yn intoca), como cogen el arco y la flecha en la lámina.

Figura n? 4: El encuentro de los aztecas con los mimixcoa. P. Johansson, «Tira de la Peregrinación. Códice Boturini », Arqueología Mexicana, edición especial códices 26 (2007). En términos visuales, a la simple separación sucede, en la lámina 1V, una

oposición frontal entre un grupo de cuatro migrantes y otro de tres personajes extendidos respectivamente sobre las biznagas y un mezquite, con el subsecuente sacrificio de los últimos. Las características de las oposiciones específicas antes mencionadas permiten reunirlas sobre la línea isotópica 365

Patrick Johansson

«confrontación » « separación », sólo que en este caso, la separación implica la « muerte » sacrificial de unos y consecuentemente el nacimiento del personaje situado sobre el plano superior, segün parece producirlo el discurso pictóricocompositivo de la lámina, así como los referentes contextuales de la oralidad. Visualmente hablando, dicho personaje parece resultar de la fusión de los cuatro personajes andantes y de los tres sacrificados. En efecto, la tilma que lleva y el corte de cabello corresponden a los primeros, mientras que las plumas que adornan su frente y sus orejas corresponden a los mimixcoa (o mimixcohua). En cuanto a la pintura facial (tlaantli) del personaje, parece ser la síntesis de la pintura que rodea los ojos de Xiuhnel y Mimich y del afeite de la boca de Teoxahual. — Las dos volutas del personaje que recibe las armas lo relacionan con la cabeza en el pico del colibrí que se encuentra en el primer bulto (Huitzilopochtli).

— La posición sedente parece ser un compromiso entre la verticalidad dinámica de los cuatro teóforos y la horizontalidad de los tres mimixcoa extendidos en las biznagas y el mezquite. Dicha posición es sin duda, en el contexto pictógráfico del Códice Boturini, una referencia a un asentamiento. — En ambos grupos (teóforos aztecas y mimixcoa) los personajes masculinos

muestran

ünicamente

el brazo/mano

derecha,

mientras

que

los dos

personajes femeninos (Chimalma y Teoxahual) tienen los brazos colgando en una posición que sugiere una no-participación, un estado pasivo o el movimiento específico de los brazos que caracteriza a la danza nematlaxo, en la fiesta ochpaniztli. Señalemos que el sacrificador también tiene las dos manos aparentes. E] hecho de que el personaje reciba el arco y la flecha con la mano/brazo izquierdo podría ser el resultado de esta dialéctica visual. La lateralidad es relevante en este contexto ya que el dios tutelar de los mexicas entraña, en su nombre, un carácter izquierdo : opochtli, altamente significativo. — Los cuatro caminantes establecen un eje vertical móvil, reforzado por la mirada de los mimixcoa extendidos, dirigida hacia arriba. El mezquite, entre las dos biznagas, tiene también un carácter axial vertical ascendente. — Los tres mimixcoa extendidos establecen un eje horizontal inmóvil reforzado por la caja de red (chitatli o matlahuacal). — El conjunto flecha/arco se integra al conjunto vertical pero descendente por la orientación de la flecha. Cabe señalar que dicha verticalidad parece apuntar a la cara o rostro (ixtli) de Mimich y tiene un ángulo divergente en relación con la verticalidad. — Estos ejes establecen a su vez una ortogonalidad significativa. — El glifo antroponímico flecha (caña o palo de fuego)/agua que ostenta el sacrificador, permite establecer una relación visual directa con la flecha ascendente que alcanza el águila, descendiente del personaje y la biznaga

366

De azteca a mexica

sobre la cual está siendo sacrificado Teoxahual. La flecha remite al cielo (aire)

y al fuego, mientras que la biznaga? recuerda el agua y la tierra. — En lo que concierne al acto sacrificial que se está realizando, en la parte derecha de la lámina, sobre el eje horizontal, el hecho de que el supuesto sacrificador no tenga un cuchillo de pedernal (o de obsidiana) podría ser revelador de una modalidad específica de sacrificio o que se trate aquí de un desollamiento“*. — El conjunto flecha/agua del glifo antroponímico del sacrificador se reproduce en el conjunto arco/caja de red (chitatli). Visualmente, el mexica parece resultar de una convergencia (o una fusión) semiológica de esquemas pictórico-narrativos «con-figurados» en la lámina IV. Ahora bien, si el nacimiento del mexica es semiológicamente patente ¿existen acaso elementos pictográficos que puedan remitir al nuevo gentilicio? En la lámina IV, todos los personajes involucrados en la trama pictográfica están identificados mediante un glifo antroponímico, excepto la mujer siendo sacrificada y el personaje con el arco y la flecha. Como lo hemos sefialado anteriormente, gracias a otras fuentes «reconocemos» a la mujer mediante una lectura de su rostro: Teoxahualli « [la que tiene el] afeite divino». Sin

embargo, en este ültimo caso conviene preguntarse si la ausencia de glifo antroponímico específico es parte de la trama y remite a la anonimidad (nemontemi) o si un glifo explícito hubiera sido considerado como redundante o inclusive pleonástico. Si debemos de «leer el rostro» de Teoxahualli como si su nombre fuera inmanente a su rostro y a su ser, también lo debemos de hacer con el personaje que «nace » (tlacati) en esta secuencia ¿ cual sería entonces la lectura de su rostro, de su cuerpo o, eventualmente, de lo que hace ? El «con-texto» ritual de ochpaniztli

Como nace del últimos. rostro de

lo acabamos de expresar, el personaje ya consagrado como mexica encuentro con los mimixcoa y del subsecuente sacrificio de estos La tilma blanca es la de los teóforos caminantes mientras que el dicho mexica, con las plumas que adornan su frente y sus orejas, así

como la pintura facial transversal (t/aantli), lo asocian de alguna manera con

los mimixcoa. La pintura a nivel de los ojos de los hombres y el afeite de boca y mejillas de Teoxahual se volvieron una raya transversal a nivel de la nariz. En lo que concierne al sacrifico de los mimixcoa y más específicamente al de Teoxahualli, es posible que un desollamiento haya sucedido a la extracción del corazón. En efecto, en la lámina IV, la ausencia de cuchillo de sacrificio

así como la posición de las manos del sacrificador sugieren un desollamiento.

43. Recordemos que la biznaga (teocomitl) es una planta de las regiones semi-desérticas que puede contener grandes cantidades de agua. 44. A menos de que la ausencia del cuchillo se deba a una modificación intencional por parte del tlahcuilo, en el contexto colonial de la realización de la copia.

367

Patrick Johansson

De ser así, este acto sacrificial recordaría el desollamiento de la diosa madre Toci en el contexto ritual del mes ochpaniztli.

En una secuencia ritual de la fiesta, después de haber revestido la piel de la diosa, el sacerdote Teccizcuacuilli iba por su hijo Cinteotl a su templo en Pochtlan y le colocaba en el rostro la piel del muslo de la mujer-diosa sacrificada y desollada. ...Auh in imetz niman no iciuhca quixipeuhtivetzi, quimotlalochtia in umpa pochtlan. Conaquia in iconeuh itoca Cinteutl, in umpa canatiuh*. Y luego desollaban prestamente su muslo y lo llevaban rápidamente a Pochtlan se la ponía [el sacerdote representante de Toci] a su hijo de nombre Cinteutl allí lo alcanzaba.

El simbolismo genésico del muslo es universal pero en el contexto náhuatl prehispánico, el muslo de la diosa-tierra Toci es más específicamente la Luna. La perfecta homonimia entre metztli, « luna» y metztli, «muslo » no deja lugar a dudas. En la fiesta ochpaniztli, el representante de la diosa Toci llevaba a su hijo, quien llevaba la piel del muslo desollado en el rostro, al pie del templo de Huitzilopochtli. Toci elevaba las manos hacia lo alto del templo, hacía el sol, Huitzilopochtli, y se colocaba después al lado de su hijo Cinteutl: «/n uncan oquichixticaca imexaiac ietivitz», « Allá estaba esperando, llevaba su máscara de piel de muslo [o de luna] ».

Después de haberse colocado «en la orilla» del Templo Mayor, haber realizado otros actos teatro-rituales y haber sacrificado a algunos cautivos, iba de nuevo por su hijo Cinteotl Itztlacoliuhqui, quien seguía con la piel del muslo de Toci en el rostro. Luego, acompañado por muchos guerreros valientes, el representante de Cinteotl, partía hasta los límites del territorio mexica, yaopan «lugar de enemigos ». En el lugar llamado Popotl temi, en las laderas del Iztac tepetl, peleaban contra enemigos para colocar la máscara de piel de muslo en lo alto de una estructura de madera (cuauhticpac).

Seguía una distribución de armas e insignias por Moctezuma a los guerreros valientes^* y una danza solemne durante la cual todos lucían sus insignias y movían las manos (momatlaga) : ...Auh in tlaviztli, ic quimomaca iuhqui impatiuh muchioa, in quimiliuhca mochioa. Auh inic momatlaça tetecpan tivi in iuh omito iuhquin suchitl mantiuh, vel maviçohvi, quiiaiaoalo in teucalli*. Y las insignias que les dan expresan su valor, lo que los envuelve. Y así mueven las manos, se ponen en filas como se dijo, se van extendiendo como flores, gloriosos,

rodean

la casa del dios.

45. Códice Florentino, libro II, capítulo 30. 46. Códice Florenitno, libro II, capítulo 30. 47. Ibid.

368

De azteca a mexica

La entrega de insignias y armas confirma el carácter altamente identitario de la gesta festivamente recordada. Es probablemente en este contexto ritual que se cantaba y se bailaba el canto de Teteuh innan: ... Ahuia cogahuia xuchitla oia cueponca iehoa tonana teumechaue moquicica Tamoanchan avaiie avaiia yiao yia yiao aie aie aii aiiae^. Ahuia /as flores amarillas oia se abren ella (es) nuestra madre jÓ tú que tienes la piel del muslo de la diosa en el rostro, el lugar de tu partida es Tamoanchan ! avaiie avaiia yiao yia yiao aie aie aii aiiae.

La alusión, en este canto, a una diosa que «irradia gustosamente sobre la biznaga»

(teucontli pac(c)atona), el corazón del ciervo, a las «nuevas»

insignias faciales, a las flechas de las cuatro regiones cardinales ritualmente quebradas y a Xiuhnel y Mimich, lo relaciona lo expresado en la lámina IV del Códice Boturini. Es probable que el desollamiento de Teoxahual en dicha lámina refiera lo que se escenificaba y cantaba en el ritual de ochpaniztli. La piel del muslo/rostro de la luna podría ser lo que el personaje consagrado como mexica se ponía como máscara (mexxayactli) o se pintaba en el rostro. De ser así, la atribución del nuevo gentilicio, consecuente a lo allí ocurrido, podría estar relacionada con la máscara del muslo (o de la luna) : mexxayactli. El nuevo gentilicio: una hipótesis

La trama pictórico-narrativa del Códice Boturini no contiene una referencia glífica explícita al nuevo apellido gentilicio conferido a su pueblo por Huitzilopochtli, segün una (o varias) lecturas de este códice, y segün otras fuentes. El nombre en sí parece corresponder al texto oral complementario pero podría ser generado (o «detonado ») de alguna manera, por el discurso pictórico. Con base en la versión pictográfica que presenta el Códice Boturini de esta secuencia mitológica crucial, consideramos que es la máscara de la piel del muslo de Toci : metztli, la luna, la que constituye el eslabón entre lo que ocurrió y está ocurriendo en la lámina IV y el vocablo correspondiente que integra en un nombre propio la esencia del pueblo mexica a partir de este momento. Los mexicas serán los que «tienen afeite de piel de muslo de la diosa» (teome(z) xahue) y por tanto «cara de luna» si bien su corazón es esencialmente solar. Sugerimos por tanto, de manera hipotética, que el gentilicio que contiene, en una lapidaria brevedad, esta acción compleja nominalmente petrificada

48.

Códice Florentino, Apéndice al libro II.

369

Patrick Johansson

podría ser: «mex-ix-ca », es decir, «los del rostro de luna», con una evolución

fonética que condujo a la desaparición de la Por otra parte, el paralelismo simbólico xictli o xiemecatl y la piel del muslo de la eran llevados al campo de batalla, permite entre ambos: la piel desollada del muslo de máscara

(mexxayactli), correspondería

segunda quedando mexi(x)ca?. que se observó entre el ombligo diosa mexxayactli ya que ambos establecer una estrecha relación Toci que se pone Cinteotl como

a un verdadero umbilicalismo,

con

carácter selénico. De ser así el gentilicio mexica expresaría nominalmente lo anterior: me(tztli)-xic(tli)-ca, meztli

«muslo» o «luna», xictli

«ombligo »,

-ca sufijo marcador del carácter gentilicio de la palabra. La traducción sería: «Los del ombligo de la luna», no por las razones que fueron generalmente aducidas, partiendo del topónimo Mexico (Me-xic-co) «lugar del ombligo de la luna »*, sino por las que aquí expresamos. Epidermis de una parte del cuerpo con valor matricial, la piel del muslo, recortada y hecha máscara, tiene un valor umbilical. En ambos casos es un elemento carnal que se desprende de un cuerpo y que se lleva al mismo lugar. El ombligo xictli o xicmecatl y la máscara de piel de muslo mexxayactli parecen vincularse estrechamente en términos tanto simbólicos como actanciales en los contextos narrativos y rituales aquí aludidos. Si consideramos la primera opción gentilicia a la luz de la versión pictográfica del Códice Boturini y del ritual de ochpaniztli, el territorio mexica sería me(z)-ix-ca, «el lugar] donde está la cara de la luna» por tanto me(z)-ix-co.

En caso de que una asimilación metafórica ombligo/piel del muslo de la luna haya prevalecido, el gentilicio sería mez-xic-ca y me(z)-xic-co el topónimo. En ambos casos tanto el nombre gentilicio como el topónimo están relacionados con la máscara-piel del muslo que señala el territorio y sus límites. El ritual bélico que consistía en ir a colocar tanto el ombligo del recién nacido como la máscara-piel del muslo de Toci en las fronteras del territorio, recordaba,

cada vez que se realizaba, la razón de ser del vocablo gentilicio y, en última instancia, los límites mismos del territorio al que correspondía dicho nombre. La complejidad del proceso mitológico que se redujo a un nombre gentilicio alusivo podría explicar la ausencia de un glifo correspondiente. En efecto, los mexicas se verán referidos pictográficamente, en los códices, mediante la imagen del tunal (tenochtli) correspondiente a una etapa posterior de su peregrinación. Otra explicación de la ausencia de un glifo que exprese el nombre gentilicio podría ser que fuera un «apodo» que les hubieran dado los pueblos vecinos por la extraña modalidad sacrificial que parecía caracterizarlos. De ser así, los últimos en llegar al valle de Anáhuac, cualquiera que fuera su nombre, podrían haber asumido dicho apodo elaborando asimismo, retrospectivamente, una estrategia identitaria.

49. Debemos inferir un cambio morfofonémico en el que la [z] de mez(tli) se vuelve [sh]: mexy la [sh] de ix{1li) se dezplaza (metátesis) para fundirse con la [x] de mex- dando como resultado :

mexx-i-ca y luego mex-i-ca. 50.

370

I. Guzmán, Los nombres.

De azteca a mexica

E] paralelismo que establecimos entre la secuencia copulación-fecundación-gestación-nacimiento-corte del ombligo y bautismo, correspondiente a un ser humano, y la gestación mitográfica de los mexicas tal y como se presenta en el Códice Boturini, podría echar una luz (aunque tenue) sobre las circunstancias de la atribución, por Huitzilopochtli, de un nuevo gentilicio a su pueblo. En sendos casos una salida, una separación, el desprendimiento de un cuerpo, la entrega de armas e insignias, de un destino bélico teoatl, tlachinolli y de un nombre, vinculan ambos procesos. Es sin embargo la analogía entre la siembra del ombligo en el campo de guerra, situado en los límites del territorio, y la colocación de la máscara, hecha con la piel del muslo de Toci, en el mismo lugar, la que nos parece determinante para la atribución del gentilicio. Cortado el vínculo umbilical con Aztlan, la identidad tribal de los recién

llegados estaría en su máscara selénica, un rostro colectivo con matices sacrificiales.

371

CINQUIÈME PARTIE

Archéologie et religion en Mésoamérique

373

LE MONOLITHE COSMOVISION AU GRAND

DE TLALTECUHTLI: ET GUERRE

SACRÉE

TEMPLE DE MEXICO-TENOCHTITLAN

Sylvie PEPERSTRAETE Université Libre de Bruxelles

Le 2 octobre 2006, une équipe d'archéologues dirigée par José Álvaro Barrera Rivera faisait une des découvertes les plus importantes de ces dernières années au Grand Temple de Mexico-Tenochtitlan. Alors qu'ils dégageaient la base des escaliers de la phase VI, les chercheurs sont en effet tombés sur un gigantesque monolithe représentant la déesse de la Terre, Tlaltecuhtli (fig. 1)'. La sculpture, bien que brisée en quatre fragments, fut retrouvée en excellent état de conservation. Il fut alors décidé d'étendre la zone de fouilles, connue

sous le nom de «Casa de las Ajaracas»,

afin de

permettre le dégagement complet de la pierre. Peu aprés cette extraordinaire découverte, Eduardo Matos Moctezuma et Leonardo López Luján ont suggéré que les restes d'Ahuitzotl, le huitieme tlatoani mexica, qui régna de 1486 à 1502, pourraient avoir été ensevelis sous le monolithe?. Les deux auteurs ont toutefois souligné le fait qu'à l'heure actuelle, la zone n'a pas encore été fouillée complétement et qu'il ne sera donc pas possible de confirmer ni d'écarter l’hypothèse jusqu'à ce que nous sachions exactement ce qui se trouve sous la grande sculpture?. Leonardo

1.

J. Á. BARRERA

RivERA,

A. IsLas

DOMÍNGUEZ,

G. LóPEZ

ARENAS,

A. D. BARROSO

REPIZO,

U. Lina HERNÁNDEZ, « Hallazgo de lápida monumental con la representación de Tlaltecuhtli», Arqueología Mexicana 83 (2007), p. 20. 2. E. Maros MocTEzUMA, L. LórEz LujAn, « La diosa Tlaltecuhtli de la Casa de las Ajaracas y el rey Ahuítzotl », Arqueología Mexicana 83 (2007), p. 27-28. 3. J. ALgjo, « El monolito de Tlaltecuhtli podría serlápida mortuoria », consultable sur internet à l'adresse http ://terraeantiqvae.blogia.com/2006/111701-mexico.-identifican-a-monolito-como-

diosa-tlaltecutli.php (dernière consultation: 8 avril 2009); A. M. RonríGuEz, «Digitalizan fotografía de Tlaltecuhtli mediante 30 millones de puntos », consultable sur internet à l'adresse http ://www.jornada.unam.mx/2007/09/19/index.php ?section=culturagarticle=a04n1 cul (dernière consultation: 8 avril 2009).

375

Sylvie Peperstraete

li Figure n? 1: Monolithe représentant la déesse de la Terre, Tlaltecuhtli (dessin de l'auteur).

López Luján a d'ailleurs expliqué que les archéologues pouvaient envisager trois scénarios très différents quant à la nature de leurs futures découvertes : 1- les restes d'Ahuitzotl ;

2- de riches offrandes — comme ce fut le cas avec deux autres monuments majeurs du Grand Temple, le Chac Mool de la phase II et le monolithe de Coyolxauhqui de la phase IVb; 3- rien du tout‘. Nous attendons donc avec impatience la suite des fouilles archéologiques. Le but de cet article n'est pas de spéculer sur ce que l'on va trouver sous Tlaltecuhtli, mais de proposer une réflexion sur l'iconographie du monolithe et sur son symbolisme, tant par rapport à sa situation au sein du Grand Temple

4. F. CAMACHO SERVÍN, « El INAH emplea alta tecnología para develar los secretos del Templo Mayor», consultable sur internet à l'adresse http //www.jornada.unam.mx/2008/03/02/index.

php?sectionzcultura&articleza05n1cul (dernière consultation: 8 avril 2009).

376

Le monolithe de Tlaltecuhtli

que dans sa relation avec les mythes. La discussion nous permettra ensuite d'émettre des hypothèses sur l'usage rituel de la pierre. Mais je voudrais aussi et surtout rendre hommage à mon cher professeur Michel Graulich, qui s’est beaucoup intéressé au Grand Temple et aux rites qui s’y déroulaient, ainsi qu'à l'iconographie des divinités telluriques?. Le contexte archéologique du monolithe Situation au sein du Grand Temple

Le monolithe de Tlaltecuhtli a été découvert à la base des escaliers de la phase VI — l’une des plus récentes — du Grand Temple. Il fut recouvert, des l'époque préhispanique, par un sol appartenant à la phase VI alpha ou à la phase VIT*. La sculpture ne se trouve pas dans l'axe Nord-Sud de la pyramide, mais trois mètres plus au nord’, donc du côté dédié à Tlaloc. La téte de Tlaltecuhtli est orientée à l'Ouest et ses jambes à l'Est, contrairement à une autre déesse dont la représentation monumentale est sise au pied des escaliers — mais du cóté Sud de la pyramide, dédié à Huitzilopochtli : la Coyolxauhqui de la phase IVb?. La déesse Terre regardait donc en direction des escaliers qui s’élevaient au sommet de la pyramide. Les offrandes et les chambres

Au total, cent cinquante et une offrandes furent découvertes en trente ans dans le cadre des fouilles du Proyecto Templo Mayor?. Neuf d'entre elles sont

situées aux alentours du monolithe, dans le remplissage de la phase VIT. Leur contenu précis n'a pas encore été publié; pour le détail des offrandes découvertes jusqu'en 1991, voir l'excellent ouvrage de Leonardo López Luján !.. Ensuite et surtout, il y a les chambres localisées sous le monolithe. C'est une cavité située directement sous la sculpture qui a provoqué sa rupture et son effondrement au centre. Lorsqu'on l'a découverte, elle était remplie de pierres de tezontle!?. Mais ce n'est pas tout. Une équipe dirigée par Luis Barba, qui a prospecté toute la zone de fouille dite des « Ajaracas» avec un géoradar et un résistivimètre, a détecté un complexe de cavités à un niveau

5. Le présent article a été rédigé en avril 2009. Trois mois plus tard, grâce à la gentillesse et à la disponibilité de Leonardo López Luján, queje tiens à remercier ici, j'avais l'occasion de voir les fouilles en cours au Grand Temple et de rendre une visite au monolithe de Tlaltecuhtli en cours de restauration. J'ai donc amplifié ma description et mon interprétation initiales de cette magnifique sculpture, en fonction des informations communiquées par Leonardo ainsi que des nouveaux détails que j'ai pu observer suite à la restauration de l’œuvre. 6.

E. Maros MocTEZUMA, L. Lórgz LuJAN, «La diosa Tlaltecuhtli», p. 26.

7. 8. 9. 10.

Ibid, p. 28. Ibid., p. 29. [Information aimablement communiquée par Leonardo López Luján (juillet 2009). J. À. BARRERA RIVERA et al., « Hallazgo de lápida monumental», p. 20.

11.

L. Lórez

Luján,

Las

ofrendas

del

Templo

Mayor

de

Tenochtitlan,

Mexico,

Instituto

Nacional de Antropología e Historia, 1993. 12. J. A. BARRERA RIVERA et al., «Hallazgo de lápida monumental», p. 20.

377

Sylvie Peperstraete

inférieur, en dessous et à l'ouest du monolithe. López Luján et son équipe ont dégagé, juste à l'ouest du monolithe, ce qu'ils pensent être l’accès à ce complexe: une cavité carrée d'environ 1,5 métre de cóté, qui semble servir d'antichambre. L'archéologue note que l'on a affaire à un «espace vivant» car on y accéda à maintes reprises à l'époque préhispanique, durant plus de deux décennies. Un sceau de stuc indique que les chambres ne furent pas violées par la suite, Description physique

Le monolithe, de forme quadrangulaire, est l'un des plus impressionnants monuments jamais mis au jour au Grand Temple. Il mesure en effet 3,57 métres dans sa direction Nord-Sud et 4 mètres dans sa direction Est-Ouest^, tandis

que son poids est probablement d'un Le sommet de Tlaltecuhtli. Il est remarquablement

estimé à 12,3 tonnes. La pierre, de l'andésite rose, vient gisement situé à Tenayuca, non loin de Tenochtitlan'*. la pierre est orné, en haut-relief, d'une représentation de partiellement couvert de stuc et sa polychromie a pu étre restaurée. On remarque surtout du rouge, mais aussi de

l'ocre, du bleu, du blanc et du noir!*. Alors que le noir semble avoir été réservé

à la délimitation de contours sur les parties blanches, les autres couleurs ont été posées directement sur la pierre". Tlaltecuhtli est figurée de façon frontale. Elle est géométrisée, presque cruciforme. La déesse est dépeinte sous son apparence humaine et féminine. La plupart de ses attributs se retrouvent habituellement chez les divinités telluriques: une jupe ornée de cránes et d'os croisés, avec des glyphes de Vénus, des yeux stellaires et des rubans terminés par des coquillages 5; des cercles sur les joues; des cheveux emmélés; des griffes en lieu et place de mains et de pieds ; des cránes aux articulations. Son ventre est plissé et ses seins pendent?. Sa bouche est décharnée et elle porte des bannières de papier dans les cheveux. Un liquide, probablement du sang, part de la cavité centrale et arrive dans la bouche de la déesse. La position de la téte est inversée par rapport aux autres représentations connues de Tlaltecuhtli. Enfin, entre les griffes de son pied droit, on distingue un glyphe figurant une téte de lapin ainsi que deux cercles au-dessus et dix cercles en-dessous. Il peut étre lu soit comme 2 Lapin et 10 Lapin, soit comme 12 Lapin.

13. A. M. RopRÍGUEZ, «Digitalizan fotografía de Tlaltecuhtli ». 14.

E. Maros

MocrEzuMa, L. LórEz Luján, «La diosa Tlaltecuhtli», p. 23.

15. J. À. BARRERA RIVERA et al., «Hallazgo de lápida monumental», p. 20-21. 16.

E. Maros MocrEzuMA, L. Lórgz Luján, «La diosa Tlaltecuhtli », p. 23.

17. J. À. BARRERA RIVERA et al., «Hallazgo de lápida monumental», p. 21. 18. Les glyphes de Vénus et les yeux stellaires ne sont visibles que depuis la restauration du monolithe, c'est pourquoi on ne peut les observer ni sur les premiéres photos publiées ni sur mon relevé (fig. 1).

19. Ceci ne peut étre observé que depuis la restauration du monolithe.

378

Le monolithe de Tlaltecuhtli

Symbolisme de la situation au sein de la pyramide

Le monolithe de Tlaltecuhtli, situé en bas de la pyramide et de son côté Nord, dédié à Tlaloc, ne pouvait être placé à un meilleur endroit pour représenter la Terre dans sa quintessence. Le Grand Temple constitue en effet une synthèse de la vision qu'avaient les Aztéques de leur univers. On sait depuis longtemps que la pyramide et ses deux sanctuaires furent organisés, au niveau symbolique, autour du systéme typiquement mésoaméricain d'oppositions et complémentarités. Celles-ci ont été traduites horizontalement, par un contraste Sud-Nord, entre les cótés dédiés à Huitzilopochtli (associé au soleil et au ciel bleu) et à Tlaloc (dieu de la terre et de la pluie), mais aussi verticalement, par un contraste entre le haut

de la pyramide symbolisant le ciel, le jour, le soleil, et le bas qui représente la terre, la nuit et la lune””. Dans le cas des offrandes, cette symbolique verticale se marque plus nettement et l'emporte sur la symbolique horizontale: on retrouve donc des objets en rapport avec l'eau et la terre à la base de toute la pyramide, non seulement du côté Tlaloc mais aussi du côté Huitzilopochtli?!. Eduardo Matos Moctezuma a suggéré que c'était particulièrement la grande plate-forme frontale des temples jumeaux qui symbolisait la terre”. Et il semble en effet logique que la plupart des offrandes déposées dans des caches au sein de la terre, méme du cóté Sud, soient destinées aux divinités tellu-

riques. Plutót que d'étre restreintes à Tlaloc, elles étaient offertes à la terre elle-méme. En un sens, Tlaloc était un autre aspect, masculin, de la Terre,

comme l'indique son nom qui signifie «plein de terre», «terreux »?. Donc,

20. M. GRAULICH, «Templo Mayor, Coyolxauhqui und Cacaxtla», Mexicon 5-1 (1983), p. 91-93. 21. Le matériel aquatique occupe en effet une place prépondérante au sein du Grand Temple, tant par le nombre d'offrandes où il est présent (68 offrandes, toutes situées à la base de la pyramide, sur les 118 étudiées par L. LéPEz LujÁN, Las ofrendas) que par la quantité et la diversité des éléments. Dans la pensée des anciens Mexicains, les montagnes, auxquelles les pyramides étaient assimilées, étaient emplies d'eau, comme si c'étaient de grands vases. L'eau de mer, expliquent les informateurs de Sahagün, s'introduisait dans les terres par des conduits et circulait intérieurement et sous les montagnes: History

of the

Things

School of American

of New

Research,

Spain,

B. de SAHAGÜN, Florentine Codex:

A. J. O. ANDERSON,

1950-1982,

vol.

C. E. DiBBLE

11, p. 247-248.

(éd.

et trad.),

General Santa

Fe,

La mer était le symbole de la

fertilité absolue: elle était appelée huey atl ou «grande eau», eau dans sa forme absolue. Les offrandes marines pourraient alors signifier une volonté d'ancrer la mer et son symbolisme de fertilité dans la pyramide: cf. J. BRopA, « Templo Mayor as Ritual Space», dans J. BRopA, D. Carrasco,

E. Maros

MocrTEZUMA

(éd.),

The

Great

Temple

of Tenochtitlan.

Center

and

Periphery in the Aztec World, Berkeley, Los Angeles, Londres, University of California Press,

1987, p. 101. 22.

E. Maros

MocrEzuMA,

The

Great

Temple

of

the

Aztecs.

Treasures

of

Tenochtitlan,

Londres, Thames and Hudson, 1988, p. 130.

23. T. D. SuLLIVAN, « Tlaloc: A new etymological interpretation of the god's name and what it reveals of his essence and nature», dans E. CERULLI (éd.), Atti del XL Congresso Internazionale degli Americanisti (Roma-Genova 1972), Génes, Casa Editrice Tilgher, 1974, vol. 2, p. 213219; C. KLEIN, «Who was Tlaloc? », Journal of Latin American Lore 6-2 (1980), p. 155-204;

J. BRoba,

«Templo

Mayor

as Ritual Space»,

p. 105;

M. GRAULICH,

«Les

grandes

statues

aztèques dites de Coatlicue et de Yollotlicue», dans R. THIERCELIN (éd.), Cultures et sociétés, Andes et Méso-Amérique. Mélanges en hommage à Pierre Duviols, Aix-en-Provence, Université

379

Sylvie Peperstraete

en vertu de ce symbolisme vertical, la base de la pyramide est une référence à la terre et à la fertilité, qui dépasse la divinité Tlaloc en tant que telle. Dans ce contexte, une représentation de la déesse Terre, Tlaltecuhtli, ne pouvait

recevoir un meilleur emplacement que celui qu'avait le monolithe qui nous occupe dans cet article: à la fois à la base de la pyramide et de son cóté dédié à Tlaloc, il jouissait d'une situation dont le symbolisme jouait tant sur le plan vertical que sur le plan horizontal. Analyse iconographique

Le mythe rapporté par l'Histoyre du Méchique explique comment Tlaltecuhtli, déchirée au début des temps par Quetzalcoatl et Tezcatlipoca, reçut le don de faire naître les plantes indispensables à la vie; en échange, la déesse demanda à être nourrie de cœurs et de sang humains: «cette déesse pleurait parfois la nuit, car elle voulait manger les coeurs des hommes, et elle ne se taisait qu'apres en avoir regu; elle ne voulait pas non plus produire de fruits si on ne Parrosait pas de sang humain». Cette conception de la Terre illustre à merveille le dualisme vie-mort cher aux anciens Mexicains. Etre fertile par excellence, productrice des fruits qui permettent la vie, Tlaltecuhtli est en effet aussi le monstre assoiffé de sang qui la détruit. Or, à cet égard, le monolithe de Tlaltecuhtli, tant par son iconographie que par le symbolisme de sa situation au sein du Grand Temple, est une parfaite représentation des idées aztèques sur la question. Nous commencerons par nous pencher sur l'iconographie de la sculpture, étudiant chaque élément individuellement pour ensuite en venir à une interprétation globale. La táche n'est pas toujours aisée car, si Tlaltecuhtli est souvent mentionnée par les chercheurs, son iconographie a rarement été discutée en profondeur. Celle-ci est extrémement variée (cf. l'étude d'Elizabeth Baquedano et Clive Orton, qui identifient cent quarante-cinq éléments iconographiques différents qui peuvent étre associésà la divinité!) et donc fort complexe à analyser?.

de Provence, 1991, vol. 1, p. 397; J. métamorphoses», thèse de doctorat, 24. «Histoyre du Méchique », dans Tres opúsculos del siglo xvi, Mexico,

ConTEL, « Tlalloc: l'Incarnation de la Terre. Naissance et Toulouse, Université de Toulouse-Le Mirail, 1999. A. M. GARIBAY (éd.), Teogonía e historia de los mexicanos. Porrúa, 1965, p. 108.

25. Les études suivantes analysent et tentent de classifier les différents éléments iconographiquesque l'on peut trouver associés à Tlaltecuhtli: H. B. NicHoLson, « The birth of theSmoking Mirror», Archaeology 7-3 (1954), p. 164-170; ibid., « A fragment of an Aztec relief carving of the earth monster», Journal de la Société des Américanistes 56 (1967), p. 81-94;

ibid., «The iconography of Aztec period representations of the earth monster: Tlaltecuhtli», dans J. Lirvak

KING,

N. CASTILLO

TEJERO

(éd.), Religión

en Mesoamérica.

XII, Mesa

Redonda

de la Sociedad Mexicana de Antropología, Mexico, Sociedad Mexicana de Antropología, 1972, p. 225-226; E. BAQUEDANO, « Aspects of death symbolism in Aztec Tlaltecuhtli», dans J. DE DuRAND-FOREST, M. EIsINGER (éd.), The symbolism of the plastic and pictorial representations of ancient Mexico, a symposium of the 46th International Congress of Americanists (Amsterdam 1988) ("Bonner Amerikanistische Studien" 21), Bonn, Holos, 1988, p. 157-184; E. BAQUEDANO,

C. ORTON,

«Similarities

between

Aztec Tlaltecuhtli», Papers from

380

sculptures,

using

Jaccard's

the Institute of Archaeology

coefficient

in the

1 (1990), p. 16-23;

study

of

E. Maros

Le monolithe de Tlaltecuhtli

Eléments iconographiques communs à d'autres représentations de Tlaltecuhtli

De nombreuses représentations de Tlaltecuhtli dépeignent la Terre sous un aspect monstrueux, qui fait directement référence à la description qu’en donne l’Histoyre du Méchique. Cette source la présente en effet comme une

créature semblable au crocodile, « qui à chaque articulation avait plein d’yeux et de dents avec lesquelles elle mordait comme une bête sauvage»”. Dans le cas qui nous concerne ici, la déesse a un visage humain, mais les griffes en lieu et place des mains et pieds, tout comme les cránes aux articulations, sont un renvoi évident à ce cóté monstrueux. Comme c'est toujours le cas en sculpture, Tlaltecuhtli est figurée de façon frontale?’. Elle est géométrisée, presque cruciforme. Apres avoir comparé plusieurs sculptures en relief avec d'autres en ronde-bosse, Michel Graulich a suggéré, à la suite d'Eduard Seler,

que la position habituelle de la déesse doit étre interprétée comme celle d'une créature couchée sur la terre, membres repliés et préte à bondir, comme les félins dont elle a les griffes?*. Les

atours

de Tlaltecuhtli

sont,

eux

aussi,

trés courants.

La

divinité

porte une jupe décorée de cránes et d'os croisés, avec des glyphes de Vénus, des yeux stellaires et des rubans terminés par des coquillages: il s'agit de la célèbre citlalcueitl, la «jupe d'étoile» des déesses telluriques?. Allusion au ciel nocturne, la citlalcueitl peut être rapprochée, une fois de plus, du mythe rapporté par l'Histoyre du Méchique. En effet, lorsque Quetzalcoatl et Tezcatlipoca déchirèrent Tlaltecuhtli en deux au début des temps, ils firent la terre d'une moitié tandis qu'ils emportérent l'autre au ciel. Les os illustrent aussi le dualisme mort-vie omniprésent en Mésoamérique. Ils renvoyaient certes à la mort, mais étaient aussi considérés comme les noyaux du corps, donc des semences ou principes de vie. Vie et mort s'engendraient mutuellement et constituaient deux aspects d'une méme réalité*!, parfaite-

MocTEZUMA, « Tlaltecuhtli : Señor de la Tierra», Estudios de Cultura Náhuatl 27 (1997), p. 1540; L. HENDERSON, Producer of the Living, Eater of the Dead: Revealing Tlaltecuhtli, the TwoFaced Aztec Earth (“British Archaeological Reports. International Series" 1649), Oxford, Archaeopress, 2007.

26. «Histoyre du Méchique», p. 108. 27. E. BAQUEDANO, «Semejanzas entre la iconografía de los códices y de la escultura azteca o mexica», dans J. ALCINA FRANCH, E. Martos MoctezuMA, M. LEON PorTILLA (éd.), Azteca mexica, las culturas del México antiguo, Madrid, Lunwerg, Quinto Centenario, p. 44, observe

á juste titre que les représentations peintes de Tlaltecuhtli, dans les codex, présentent des attitudes plus variées que ses représentations sculptées. Par exemple, dans le Codex FejérváryMayer (Le livre astrologique des marchands: Codex Féjerváry-Mayer, M. León PorTILLA (éd.), Paris, La Différence, 1992) elle mange des cailles ou des êtres humains (pl. 17), ou génère des fruits (pl. 29). 28.

M. GRAUuLICH,

«Les

grandes

Abhandlungen zur Amerikanischen 1923, vol. 2, p. 790. 29.

statues

Sprach-

E. SELER, Gesammelte Abhandlungen,

aztéques»,

p.

398;

und Alterthumskunde,

E. SELER,

Berlin,

Gesammelte

A. Asher,

1902-

vol. 2, p. 790.

30. «Histoyre du Méchique», p. 108. 31. M. GRAULICH, «Les grandes statues aztéques », p. 396.

381

Sylvie Peperstraete

ment incarnée par Tlaltecuhtli. De même, les bannières en papier qui ornent la chevelure de la déesse, allusion à la mort et au sacrifice, sont habituelles

sur les représentations de déesses telluriques décharnées. Quant au ventre plissé et aux seins pendants, ils renvoient à une Terre d’âge mûr, qui a déjà enfanté à de nombreuses reprises. Une autre divinité tellurique présente au Grand Temple est figurée avec ces stigmates de la maternité: il s’agit de la Coyolxauhqui de la phase IVb. Comme nous le verrons, les similitudes entre ces deux déesses sont loin de s’arrêter là. Les spécificités du monolithe

Si la déesse Terre, telle qu’elle est figurée sur le monolithe, présente une attitude et des atours caractéristiques qui ont rapidement permis de l’identifier de manière certaine, plusieurs détails intriguent car ils sont tout à fait spécifiques à cette sculpture. C’est le cas du glyphe qui accompagne Tlaltecuhtli, «12 Lapin» ou «2 Lapin et 10 Lapin», de la position de la tête de la déesse et du flot de liquide qui part de la cavité centrale pour arriver dans sa bouche. Examinons ces éléments un par un. Le glyphe

Comment faut-il lire le glyphe qui accompagne la déesse ? Rappelons qu’il représente un lapin bordé de deux cercles au dessus et dix en dessous, et que deux lectures différentes, « 12 Lapin» ou «2 Lapin et 10 Lapin» ont été proposées. Mais, si le glyphe 2 Lapin, que l'on peut interpréter comme une référence au principal dieu du pulque, Ometochtli, est parfois associé à des divinités telluriques?, ni 10 Lapin ni 12 Lapin ne sont habituels sur les représentations de Tlaltecuhtli — le glyphe qui lui est habituellement associé est 1 Lapin, année de sa création dans les mythes. Eduardo Matos Moctezuma et Leonardo López Luján ont suggéré d'associer 10 Lapin à la date de la mort d'Ahuitzotl, 1502, car les restes du tlatoani pourraient avoir été enfouis sous

le monolithe?. Les fouilles n'ont cependant pas encore permis de confirmer ou d'infirmer cette hypothèse. Si par contre nous envisageons de lire le glyphe comme un tout, «12 Lapin » donc, les possibilités se réduisent. Dans sa liste de sculptures portant des glyphes de dates, Emily Umberger ne répertorie aucun autre exemplaire pourvu du méme glyphe**. Alfonso Caso, quant à lui, souligne que 12 Lapin est un jour de la 6* Treizaine, représenté dans les Codex Borgia et Vaticanus B?.

32. Cf. par exemple le «monolithe vert » : A. LóPEz AUSTIN, «Iconografía mexica. El monolito verde del Templo Mayor», Anales de Antropología 16 (1979), p. 133-153; E. PAszTORY, Aztec art, p. 156. 33. E. Maros MocTEzuMA, L. LóPgz Luján, «La diosa Tlaltecuhtli », p. 28. 34. E. UMBERGER, Aztec Sculptures, Hieroglyphs, and History, Ann Arbor, University Microfilms, 1981, p. 262. 35. A. Caso, «Nombres calendaricos de los dioses», El México Antiguo 9 (1961), p. 87; Codex Borgia. Biblioteca Apostolica Vaticana (Messicano Riserva 28) vollständige Faksimile-Ausgabe des codex im Originalformat ("Codices Selecti" 58), K. Noworwv (éd. et commentaire), Graz, Akademische Druck- u. Verlagsanstalt, 1976, pl. 66; Codex Vaticanus

382

Le monolithe de Tlaltecuhtli

Cette treizaine semble liée au vieux dieu de la lune, Tecciztecatl*, donc nous pouvons éventuellement y voir une allusion à un contexte nocturne et tellurique, mais rien de plus précis. À cet égard, il est intéressant de souligner que le glyphe 12 Roseau, figuré sur la téte de mort au milieu de la ceinture de deux autres célébres représentations de déesses telluriques, la Coatlicue et la Yollotlicue?", n'a à ce jour pas davantage été expliqué. La cavité centrale, la position de la téte de la déesse et le flot de liquide

La perforation circulaire au centre du monolithe est intrigante. Peu après la découverte de la sculpture, Eduardo Matos Moctezuma et Leonardo López Luján ont expliqué qu'on ignorait si elle avait été ou non pratiquée par les sculpteurs eux-mémes et que, dans ce dernier cas, elle pourrait correspondre au chalchihuite que l'on trouve souvent sur le ventre des représentations de la Tlaltecuhtli zoomorphe?*. Cette hypothèse était extrêmement séduisante. Nombreuses sont, en effet, les représentations de Tlaltecuhtli dont le ventre

est pourvu d'un grand chalchihuite. Le symbolisme qui s'en dégage aurait été parfaitement logique et approprié puisque, selon les informateurs de Sahagün, le jade était réputé être «la chair, l'àme»

(innacaio, intonal) des dieux de la

terre et de la pluie? et que Henry B. Nicholson a également montré que le jade pouvait symboliser le centre ou le cœur de la terre*. Cependant, la restauration du monolithe de Tlaltecuhtli a permis de révéler, aux bords de la cavité centrale, des éléments guillochés — habituellement utilisés pour dépeindre les extrémités de membres sectionnés — ainsi que les restes d'un relief figurant les pieds chaussés de sandales d'un personnage non identifié, ce qui suggere que le motif sculpté n'était pas un chalchihuite. Les fragments de ce relief n'ayant pas été retrouvés au cours de la fouille“, il est peu probable que nous puissions savoir un jour ce qu'il représentait exactement. Quid de la position de la téte de la déesse? Eduardo Matos Moctezuma et Leonardo López Luján observent à juste titre qu'elle est inversée par rapport aux autres représentations connues de Tlaltecuhtli*. Certes, Tlaltecuhtli est souvent représentée au dessous de monuments ou d'objets rituels en pierre, de fagon à ce que l'image de la terre repose directement sur la surface de ce qu'elle sy mbolisait?, et ce n'est pas le cas avec le monolithe. Mais surtout, la divinité est ici représentée de face — cf. ses seins et son ventre plissé —, alors

3773, Codex Vaticanus B : Biblioteca apostolica vaticana ("Codices Selecti” 36), F. ANDERS (éd. et commentaire), Graz, Akademische Druck- u. Verlagsanstalt, 1972, pl. 54. 36. E. SELER, Comentarios al Códice Borgia, Mexico, Fondo de Cultura Económica, 1963, vol. 2, p. 186. 37. E. PASZTORY, Aztec art, p. 158. 38. E. Maros MocTEZUMA, L. Lórgz LuJAN, «La diosa Tlaltecuhtli », p. 25-26. 39. B. de SaHaGún, Florentine codex, vol. 11, p. 69. 40.

H. B. NicHoLsoN,

«A

fragment»,

p.

82-83;

cf.

aussi

E. PAszTORY,

Aztec

art,

New

York,

Harry N. Abrams Inc. Publishers, 1983, p. 151.

41. Information aimablement communiquée par Leonardo López Luján (juillet 2009). 42.

E. Maros MocTEzuMA, L. LóPEz Luján, «La diosa Tlaltecuhtli », p. 25-26.

43.

H. B. NicHoLsoN,

«A

fragment », p. 87.

383

Sylvie Peperstraete

que les autres sculptures de Tlaltecuhtli à visage humain la montrent de dos, tête décapitée et renversée**, C'est que, et nous en arrivons ainsi à la dernière particularité de notre sculpture, il fallait bien inverser la position de la tête afin de permettre que le flot de liquide arrive à destination: dans la bouche de la déesse. Que signifient ces éléments iconographiques inhabituels? Comme nous allons le voir, ils sont vraisemblablement liés à l'une des fonctions du

monolithe. L'usage rituel du monolithe

D’après l'analyse iconographique qui précède, nous pouvons poser l'hypothèse que le monolithe de Tlaltecuhtli a dû fonctionner comme une pierre de dépeçage en l'honneur de la Terre, l'un des deux bénéficiaires de la guerre sacrée“. La partie centrale était sans doute destinée à recueillir le sang des victimes, qui arrivait ainsi directement à son destinataire comme l’illustre le flot de liquide arrivant dans la bouche de la divinité. Les analyses chimiques en cours actuellement nous révéleront probablement la présence de restes de sang humain à cet endroit. Des traces d'usure, présentes sur la face supérieure du monolithe, semblent en tout cas indiquer qu'on y est monté et descendu à maintes reprises*. Afin d'étayer l'hypothése et de montrer qu'elle s’intègre à merveille dans la conception aztèque de la Terre comme bénéficiaire de la guerre sacrée, je voudrais d'une part examiner les mythes et les ceuvres d'art qui y font référence et d'autre part mettre en évidence les points communs de notre monolithe avec une autre sculpture monumentale retrouvée au sein du Grand Temple: la Coyolxauhqui de la phase I Vb. Les mythes sur la guerre sacrée et la nécessité de nourrir Soleil et Terre

Soleil et Terre étaient à la fois la cause et les bénéficiaires de la guerre sacrée, puisque lors de son ultime étape — le sacrifice des captifs pris sur le champ de bataille — c'était à eux deux que les victimes étaient destinées. Or, comme l’a souligné Michel Graulich dans un article consacré à ces mises à mort, peu de spécialistes des religions mexicaines ont évoqué cette double nécessité de nourrir Soleilet Terre, le Soleil retenant habituellement

la majeure partie de l'attention*'. A l'instar de l'organisation de la pyramide

44. Un simple coup d'ail sur le tableau accompagnant l'étude de L. HENDERSON, Producer of the Living, p. 7, permet de serendre compte de cette particularité. La classification des différentes représentations connues de Tlaltecuhtli effectuée par l'auteur montre en effet clairement que la version féminine à visage humain de la Terre, appelée « 1B », est normalement toujours figurée de dos, le téte renversée et décapitée.

45. Je parle à dessein de «pierre de dépeçage» et pas de «pierre de sacrifices», car à mon sens il est plus probable que les victimes étaient mises à mort au sommet de la pyramide, puis qu'elles étaient précipitées dans les escaliers et atterrissaient sur le monolithe pour y étre dépecées. L'orientation de la sculpture, qui fait que la déesse regardait en direction des escaliers et pouvait ainsi voir arriver les corps, renforce l'hypothése. 46. Information aimablement communiquée par Leonardo López Luján (juillet 2009). 47. M. GRAULICH, «Les mises à mort doubles dans les rites sacrificiels des anciens Mexicains », Journal de la Société des Américanistes 68 (1982), p. 50-51. On notera cependant

384

Le monolithe de Tlaltecuhtli

principale de Mexico-Tenochtitlan et en vertu de la pensée duale chère aux anciens Mexicains, la Terre jouissait cependant d’une importance égale. On se souviendra que le mythe rapporté par l'Histoyre du Méchique explique comment la Terre exigea d'étre arrosée de sang humain en échange de la production des plantes utiles??. Aprés la Terre, c'est le Soleil qui naquit, et lors de son premier lever il fallut que les dieux se sacrifient eux-mémes pour le mettre en mouvement et lui permettre de suivre sa course dans le ciel”. Et d’après la Leyenda de los Soles”, immédiatement après débuta la guerre sacrée destinée à les alimenter tous deux, dans un mythe qui fait une sorte de synthèse des événements précédents?! : le Soleil créa les quatre cents Mimixcoa et les arma afin qu'ils les alimentent, lui, leur père, et Tlaltecuhtli, la terre, leur mère. Mais au lieu de s'exécuter, les Mimixcoa s'enivrerent et couchérent avec des femmes, et le Soleil ordonna alors à Mixcoatl et à

ses fréres de les détruire. C'est pourquoi les prisonniers de guerre que l'on sacrifiait étaient parés d'atours identiques à ceux des premieres victimes de la guerre sacrée, les quatre cents Mimixcoa, qu'ils représentaient??. Nombre de discours rapportés par les informateurs de Sahagün étayent ces mythes- ainsi, le nouveau-né de sexe masculin était accueilli par les paroles suivantes : « La guerre est ton métier. Tu dois donner à boire, à manger, au Soleil et à Tlaltecuhtli» et le champ de bataille était appelé le lieu où mangeaient et buvaient Soleil et Tlaltecuhtli?. Ou encore, dans un discours adressé à Tezcatlipoca, il est dit explicitement que les hommes n'avaient pas été envoyés ici-bas pour une autre fin que celle de «donner à boire, fournir de la nourriture, des offrandes, pour le Soleil, pour Tlaltecuhtli»*. Et, bien

entendu, les rites réactualisant les mythes, les sacrifices de prisonniers de guerre s'adressaient aux deux bénéficiaires de la guerre sacrée. Le Soleil recevait le coeur de la victime, extrait encore palpitant, trés logiquement puisque cet organe symbolisait le mouvement nécessaire à l'astre du jour pour poursuivre sa course dans le ciel. Ensuite, en l'honneur de la Terre, le sacrifié

était habituellement décapité — soit au sommet de la pyramide, soit au pied des marches où il avait été précipité —, produisant ainsi un flot de sang qui arrosait

que des publications plus récentes rectifient le tir. Voir notamment E. BAQUEDANO, N. JAMES, « War and sacrifice in Mexica state sculpture», dans J. DE DURAND-FOREST, G. BAupor (éd.), Mille ans de civilisations mésoaméricaines : des Mayas

aux Aztèques, Paris, L'Harmattan,

1995,

vol. 2, p. 357-375; L. HENDERSON, Producer of the Living, p. 16-20.

48. «Histoyre du Méchique», p. 108. 49. B. de SAHAGÜN, Florentine codex, vol. 7, p. 7-8. 50. «Leyenda de los Soles», dans J. BIERHORST (éd. et trad.), History and Mythology of the Aztecs. The Codex Chimalpopoca, Tucson, University of Arizona Press, 1992, p. 149-150. 5]. M. GRAULICH, «Reflexiones sobre dos obras maestras del arte azteca: la Piedra del Calendario y el Teocalli de la Guerra Sagrada», dans X. Noaugz, A. Lórgz AUSTIN (éd.), De Hombres y Dioses, Mexico, El Colegio de Michoacán, El Colegio Mexiquense, 1997, p. 178. 52. Ibid., p. 180. 53. M. GRAULICH, «Les mises à mort doubles», p. 51; B. DE SAHAGÜN, Florentine codex, vol. 6, p. 50, 171. 54. B. de SAHAGÚN, Florentine codex, vol. 6, p. 12.

385

Sylvie Peperstraete

la bénéficiaire. De façon significative, la plate-forme au pied de la pyramide où le corps atterrissait et était vraisemblablement dépecé était appelée la «table à manger »?5, c'est-à-dire, comme l’explique Michel Graulich, l'endroit oü se nourrissait Tlaltecuhtli. L'emplacement du monolithe de Tlaltecuhtli s'en trouve donc doublement justifié, à la fois sur le plan symbolique et sur le plan pratique. Références à la guerre sacrée et à ses deux bénéficiaires dans les œuvres d'art

L'iconographie mexica illustre abondamment les thèmes de la guerre et du sacrifice, notamment en sculpture, et associe de façon récurrente la guerre au sacrifice pour le soleil et pour la terre. Cependant, comme Pont observé Elizabeth Baquedano et Nicholas James, alors que nous pouvions nous attendre à ce que la guerre et le sacrifice y soient exprimés comme des obligations vis-à-vis du Soleil et de la Terre — ce que les auteurs proposent de formuler comme une équation (guerre et sacrifice) : (Soleil et, ou Terre) —, le

symbolisme cosmique et le sacrifice ne sont la plupart du temps figurés que de façon restreinte, allusive ou implicite sur les pièces dédiées à la guerre". Les piéces dédiées au sacrifice sont, elles, nettement plus explicites quant aux destinataires visés et notamment quant à Tlaltecuhtli. Une seule ceuvre, expliquent les deux auteurs, combine explicitement les deux themes: il s'agit du fameux Teocalli de la Guerre Sacrée?*. Ce célèbre monument représente une pyramide dédiée au Soleil et à la Terre, comme l'était le temple principal de Mexico-Tenochtitlan. Il doit son nom à Alfonso Caso, qui le baptisa ainsi car les reliefs qui l'ornent sont en rapport direct avec la guerre sacrée destinée à fournir des victimes qui alimenteront Soleil et Terre. Tous les personnages et l'aigle parlent en effet de la guerre sacrée, symbolisée par le glyphe de la guerre atl - tlachinolli qu'ils ont en guise de volute de parole. Les deux dates sur les rampes, 1 Lapin à gauche et 2 Roseau à droite, font bien sür allusion à la réforme de la féte du Feu Nouveau par Montezuma II, mais ce sont aussi celles de la naissance de la Terre et du Soleil. Or, Soleil et Terre, figurés

55. M. GRAULICH, «Les mises à mort doubles», p. 52-53. 56. B. de SAHAGÚN, Florentine codex, vol. 9, p. 65. 57. E. BAQUEDANO, N. JAMES, « War and sacrifice in Mexica state sculpture», p. 362-365.

58. Ibid., p. 367. Sur le Teocalli de la Guerre Sacrée, voir les études détaillées publiées par A. Caso, El Teocalli de la Guerra Sagrada, Mexico, Talleres Gráficos de la Nación, 1927; E. J. PALACIOS, La Piedra del Escudo Nacional de México, Mexico, Secretaría de Educación Püblica, 1929; M. GRAULICH, «Reflexiones sobre dos obras maestras del arte azteca: la Piedra

del Calendario y el Teocalli de la Guerra Sagrada»; M. GRAULICH, « Nuevas consideraciones en torno al Teocalli de la Guerra Sagrada», dans G. OLIVIER (coord.), Símbolos de poder en Mesoamérica ("Serie Culturas mesoamericanas" 5), Mexico, Universidad Nacional Autónoma

de México, Instituto de Investigaciones Históricas, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 2008, p. 163-174. Lire également les pages que lui ont consacré R. F. TowNsEND, State and Cosmos in the Art of Tenochtitlan, Washington D.C., Dumbarton Oaks, 1979, p. 49-63; C. KLEIN, « Who was Tlaloc? », p. 184-196; E. UMBERGER, Aztec Sculptures, Hieroglyphs, and History, p. 173-193; E. UMBERGER, «El trono de Moctezuma», Estudios de Cultura Náhuatl 17 (1984), p. 63-87; E. PAszTORY, Aztec art, p. 165-169.

386

Le monolithe de Tlaltecuhtli

respectivement sur la façade avant du sanctuaire du temple et sur la terrasse qui la précède, sont justement les principaux destinataires de la guerre sacrée. Ce lien est confirmé par le fait qu’au dessus de 1 Lapin est figuré un cuauhxicalli décoré de peau de jaguar, symbole de la terre, et au dessus de 2 Roseau, un autre mais avec des plumes d'aigle, symbole du soleil”. Le dispositif et le symbolisme de cette sculpture représentant une pyramide en miniature ne peuvent donc manquer de rappeler ceux de la pyramide principale de Mexico-Tenochtitlan, dans laquelle s’intègre parfaitement le monolithe de Tlaltecuhtli. Notons aussi que dans les deux cas, la déesse de la Terre regarde vers l'escalier de la pyramide — une attitude qui, pour Michel Graulich, suggère clairement qu'elle s'alimente de l'immolation des captifs$?. Le rapprochement entre le monolithe de Tlaltecuhtli et une autre sculpture mexica monumentale, la Pierre de Tizoc, s'impose également. Ce grand cuauhxicalli, orné sur son pourtour des conquétes des Mexicas jusqu'à celles de Tizoc (r. 1481-1486), présente également une image des deux bénéficiaires de la guerre sacrée: le sommet de la pierre montre le Soleil, creusé en son centre d'une cavité dont part une rigole qui permettait au sang des victimes sacrificielles de s'écouler et d'arriver jusque dans les máchoires de Tlaltecuhtli, représentée sous sa forme monstrueuse à la base de la sculpture. Outre le lien évident entre la guerre et le sacrifice des captifs destiné au Soleil et à la Terre, le parallélisme avec le monolithe de Tlaltecuhtli est frappant: on retrouve la cavité creusée, et le sang qui s'écoule jusque dans la gueule de la déesse Terre. L'hypothèse d’une pierre sur laquelle on dépeçait les victimes sacrificielles, dont le sang allait nourrir et fertiliser Tlaltecuhtli, s'en trouve

donc renforcée. La Coyolxauhqui de la phase IVb

Cette étude serait incompléte en l'absence d'une comparaison entre le monolithe de Tlaltecuhtli et une autre œuvre monumentale retrouvée au pied de la pyramide principale de Tenochtitlan: la Coyolxauhqui de la phase I Vb. Bien entendu, ce n'est pas la méme déesse qui est représentée, et c'est tout à fait logique puisque l'on se trouve cette fois du cóté de la pyramide dédié à Huitzilopochtli. La moitié Sud de la pyramide était en effet assimilée par les Mexicas au Coatepec, lieu qui vit la naissance de leur dieu tutélaire et sa victoire sur sa demi-sœur qu'il décapita et précipita au bas de la montagne. Mais hormis cela, les points communs sautent aux yeux. Tlaltecuhtli et Coyolxauhqui sont toutes deux des divinités telluriques, nocturnes et lunaires. Elles sont liées au sacrifice, Tlaltecuhtli en tant que bénéficiaire et Coyolxauhqui en tant que prototype de victime. Leur iconographie comporte d'ailleurs, comme

en commun.

l’a noté Lucia Henderson,

nombre

d'éléments

Les sculptures les représentant, toutes deux de dimensions

59. M. GRAULICH, «Nuevas consideraciones en torno al Teocalli de la Guerra p. 163-164. 60. M. GRAULICH, «Reflexiones sobre dos obras maestras del arte azteca », p. 180. 61.

Sagrada»,

L. HENDERSON, Producer of the Living, p. 20.

387

Sylvie Peperstraete

imposantes, étaient situées au pied de la pyramide et recevaient sans doute les corps des victimes sacrificielles précipitées depuis les sanctuaires au sommet. Dans les deux cas, des caches ont été retrouvées par les archéologues sous et aux alentours des monuments, certaines renfermant de riches offrandes.

Ces offrandes sont, dans leur immense majorité, en rapport avec le sacrifice et la fertilité. Les fouilles, toujours en cours aux alentours de Tlaltecuhtli,

permettront vraisemblablement d’en savoir plus sur le contenu précis de ces offrandes et il sera alors très intéressant de faire une comparaison détaillée avec celles retrouvées sous et aux alentours de Coyolxauhqui. Nous pouvons en tout cas d'ores et déjà affirmer que, si les fouilles du Grand Temple de Mexico-Tenochtitlan sont une source réguliére de surprises et de nouvelles découvertes, la pyramide principale fut pensée et construite de manière admirablement cohérente avec la vision du monde des anciens Mexicains. Chaque nouvelle invention vient parfaitement s'insérer dans ce microcosme, comme pour en éclairer et préciser l'une des nombreuses facettes.

388

LA DUALIDAD CONCEPTO

FUNDAMENTAL

VIDA-MUERTE: DE LA COSMOVISION

MEXICA

Eduardo Martos MOCTEZUMA Instituto Nacional de Antropología e Historia, México

Hace alrededor de siete mil años que el hombre que habitó lo que sería Mesoamérica descubrió la agricultura. Diversos cultígenos como el aguacate, maíz, frijol, calabaza chile y algunos más fueron domesticados gracias a la observación que el hombre mismo hizo de los cambios que ocurrían a lo largo del año trópico. Este acontecimiento trajo como consecuencia un cambio cualitativo dentro del proceso de desarrollo de aquellos grupos, pues de estar dedicados a la caza, pesca y recolección de frutos silvestres con una organización comunal y con asentamientos a veces fijos en cuevas o en campamentos temporales para poder acosar a la fauna, logró con la agricultura tener control de parte de su alimento que las plantas cultivadas le proporcionaban. De lo anterior devino, poco a poco, la presencia de nuevas formas de organización social, de una división del trabajo acorde con las nuevas formas de dependencia económica, asentamientos cerca de ríos, nuevos instrumentos que, como la

coa, le servían para las tareas que ahora necesitaban de su atención. Como era de esperar, un cambio substancial también ocurrió en la forma de pensamiento : el agua y la tierra fueron deificados pues gracias a la unión de ambos elementos se podía obtener la cosecha correspondiente. Fue lo que Gordon Childe denominó — y no sin razón— «Revolución Neolítica », en referencia a las primeras sociedades sedentarias y dependientes de la agricultura. Fue el producto, en pocas palabras, de la experiencia humana. Como decía el mismo Childe : no fue una catástrofe, fue un proceso. El hombre agricultor prestó una mayor atención a los cambios que la naturaleza mostraba. El observar el movimiento del sol unido a la presencia cíclica de una temporada de lluvias en que las plantas crecían y daban fruto y de una temporada de secas en que ya no había lluvia y las plantas perdían su verdor, fueron fundamentales para establecer uno de los conceptos esenciales de su pensamiento y de su concepción del universo circundante : la dualidad vida-muerte como parte esencial de un tiempo cíclico. Con esto se alcanzaba también uno de los grandes logros del hombre prehispánico: la creación del calendario, que desde aquel momento serviría como elemento rector de sus actividades cotidianas. 389

Eduardo Matos Moctezuma

Con lo anterior se consolidaba una manera diferente de ver el universo y por ende a concebir una estructura universal en donde los dioses jugaban papeles diferentes y eran ellos los entes creadores de todo lo existente. Todo ello se expresó a través de los mitos, por medio de los cuáles el hombre encontraba respuesta a su razón de ser y una explicación de su presencia en la tierra y de la acción de los dioses. Esta concepción universal, esta cosmovisión del hombre mesoamericano, fue elemento fundamental que tuvo cabal presencia en sociedades que muestran un nuevo cambio cualitativo en su proceso de desarrollo expresado en el surgimiento de las primeras sociedades complejas. Estas se manifestaron en concentraciones masivas alrededor de centros ceremoniales que poco después adquirieron el carácter de grandes centros urbanos con el surgimiento de características particulares, entre las que tenemos el Estado como rector de sociedades profundamente estratificadas, en las que existen dos grupos sociales diferentes: por un lado aquellos que ostentan el poder económico, político, social y religioso, y por el otro la población en general que se dedica a las diferentes ramas de la producción artesanal y a la explotación de la tierra. Con esta división estamos ante un fenómeno singular: el estamento que tiene el poder controla, inclusive, el conocimiento. Es así que todo lo relativo a la observación del movimiento de los astros, de los cambios de la naturaleza

y muchas cosas más son ahora potestad de sacerdotes que juegan el papel de intermediarios entre los hombres y los dioses. De ellos, pues, va a depender —a través de rituales, determinadas festividades y complejas ceremonias- que los dioses muestren su rostro benevolente hacia el hombre. Uno de los principios rectores de este pensamiento lo será, sin lugar a dudas, el de la dualidad vida-muerte que se presenta de manera cíclica, repetible, en que uno conduce al otro. Ya comentamos como surge a partir de la observación cotidiana que el hombre tiene del universo y de su propia presencia en la tierra. No creo exagerar si digo que, en la esfera del pensamiento y de la observación, este fue uno de los grandes logros del hombre que le permitía entender en base a su propia experiencia, que nada es inmutable. La creación del calendario mismo es la expresión de ese devenir constante del universo. Voy a analizar la manera en que la dualidad vida-muerte se presentó en el centro de México en una sociedad específica: los mexicas o aztecas. Antecedentes

Durante el llamado período preclásico (1800-100 a.C.) en el altiplano mesoamericano, la arqueología ha podido precisar una serie de hallazgos que permiten ver la manera en que esta concepción vida-muerte cobra presencia en diversas expresiones. Quizá la más palpable se da a través de la cerámica, en donde tenemos figurillas elaboradas en barro que presumiblemente nos están indicando este concepto. En efecto, en sitios como Tlatilco, cercano a la ciudad de México, se encontraron una enorme cantidad de entierros

acompañados de su ajuar mortuorio (vasijas, ollas, figuras humanas y de animales, etcétera...) las que, además

de ser indicativos de un culto a los

muertos y de una idea del más allá, también son portadoras del concepto 390

La dualidad vida-muerte

que venimos tratando. Tal es el caso de una pequeña máscara de barro que representa una cara que está dividida en dos partes : la de la izquierda tiene la mitad del rostro descarnado, en tanto que la derecha muestra la piel con parte de la nariz, los labios y la ceja (fig. 1). Desde el momento de su recuperación se comentó acerca de su posible significado. Para mí no cabe duda que es una de las maneras en que el hombre antiguo plasmó en el barro el concepto vida-muerte, en un rostro que muestra precisamente en sus dos partes tales atributos. Así, la temporada de lluvias y de fertilidad en que la tierra entrega sus dones contrasta con la temporada de secas en que falta la lluvia, las plantas no germinan y predomina lo seco. ; Qué mejor manera de expresarlo que ésta!

Figura n? 1 : Mascara vida y muerte, Tlatilco

Otras figurillas de barro de este temprano período son aquellas que muestran el cuerpo con dos cabezas (fig. 2). También han sido motivo de

interpretación sin faltar quien considere que bien podría tratarse de seres patológicos, o quienes piensan que, por el contrario, se trata de representar la dualidad en ellas. No hay que olvidar que muchas de esta figuras, la más de las veces femenina, también han sido consideradas como expresiones de fertilidad que tendrían como fin ser enterradas en los campos de cultivo para propiciar una buena cosecha.

391

Eduardo Matos Moctezuma

Figura n° 2: Figurillas de cuerpo con dos cabezas, Tlatilco

Teotihuacanos y toltecas

La primera gran ciudad del centro de México, Teotihuacan, presenta varios aspectos relacionados con este concepto. En primer lugar, está la concepción cuatripartita de la ciudad, dividida en cuatro grandes cuadrantes separados por dos ejes principales, uno norte-sur llamada Calle de los Muertos y otro la avenida este-oeste. Toda la ciudad está orientada en relación al movimiento solar, es decir, de oriente a poniente y así lo indican los grandes edificios que tienen el papel de ser «centros del universo» o axis mundi. En un principio pensamos que fue la Pirámide del Sol la que jugó este papel para después pasar un poco más al sur, a la Plaza de la Ciudadela, en donde el Templo de la Serpiente Emplumada o de Quetzalcóatl adquiere este carácter. Lo primero que observamos en relación a lo anterior es que estos dos ejes norte-sur y este-oeste están indicándonos una dualidad : éste último es el

lugar por donde nace el sol y el lugar por donde muere. Es el orto y el ocaso del astro. Probablemente la escultura circular de piedra que fue encontrado en 1964 frente a la Pirámide del Sol sea un señalamiento de esta observación. En ella vemos un rostro descarnado y una especie de halo que lo circunda, todo pintado de rojo (fig. 3). Pudiera tratarse de la representación del astro. La 392

La dualidad vida-muerte

pieza tiene vistas por ambos lados pero al estar colocada frente a la Pirámide solar ocupa el lado poniente del edificio, por lo que podría indicar el sol descarnado que va a bajar al mundo de los muertos.

M7,

Figura n? 3: El sol bajando al mundo de los muertos, Teotihuacan

Otra presencia de la dualidad vida-muerte la tenemos en la manera en que se construyó la Pirámide del Sol. Bien sabemos que se erigió sobre una cueva que tiene poco más de 100 metros de longitud. No ha faltado quien piense que esta cueva no era natural sino que fue hecha por los teotihuacanos. Sobre este asunto he comentado que no importa si la cueva es natural o artificial, o si una parte era natural y los teotihuacanos se encargaron de ampliarla. Lo que interesa es que el hombre teotihuacano construyó sobre una oquedad de este tipo ya que la cueva tiene un concepto dual en el mundo prehispánico: es entrada al inframundo, de ahí su relación con la muerte, a la vez que es lugar

o matriz del que se paren pueblos, con su contenido vital. Una vez más es la presencia de la dualidad vida-muerte. Otro caso que parece guardar relación con este concepto lo tenemos en el mural de Tepantitla, más conocido como el Tlalocan. En él vemos la escena de los personajes que juegan, cantan y nadan en la parte baja del mural. Encima de ellos está la figura de una enorme deidad acompañada de lo que podrían ser tlaloque. La deidad arroja dones a la tierra, en donde crecen plantas. Sin embargo, me interesa señalar la parte central de la figura de la deidad que está asentada sobre lo que pareciera ser una montaña que en su interior tiene granos o semillas. Es, nuevamente, la idea de la cueva en el interior del cerro

en la que están depositados los granos que habrán de alimentar al hombre. 393

Eduardo Matos Mocte zuma

Es la montaña sagrada que guarda el alimento primordial, es decir, la parte vital que mencionábamos antes. Y no olvidemos que la Pirámide del Sol que se ubica sobre la cueva representa una montaíia sagrada. Hay que advertir que, mucho antes del surgimiento de Teotihuacan, los olmecas habían representado diversos personajes emergiendo de una cueva. Quizá uno de los más interesantes sea aquel encontrado en Chalcatzingo de indudable influencia olmeca. Ejemplo de sobra conocido de lo anterior son las diferentes representaciones de la cueva como matriz paridora de pueblos. Es el caso que observamos

en la Historia Tolteca-chichimeca,

cuando

vemos

la imagen

del cerro curvo llamado Teoculhuacán y en su interior siete cavidades o matrices (Chicomoztoc o siete cuevas) de donde saldrán los pueblos que irán

a asentarse en parte de la región poblana cercana a Cholula (fig. 4). También en el Mapa de Cuauhtinchan 2 vemos algo similar, lo que posteriormente será tomado por los mexicas para validar su origen y procedencia.

Figura n? 4: Chicomoztoc en la Historia Tolteca-chichimeca

394

La dualidad vida-muerte

La dualidad vida-muerte entre los mexicas

Los mexicas guardaron memoria del pensamiento de sus antecesores y es así como incorporan a su propio bagaje mítico algunos de ellos. Recordemos que, tomado del pensamiento tolteca, tenemos la incorporación del concepto de la cueva-matriz de la que surgen pueblos. Existen varias representaciones en otros tantos códices que muestran la imagen del famoso Chicomoztoc o Siete Cuevas (o matrices) dentro de las que se encuentran personajes que habrán de salir de ellas para iniciar lo que muchos denominan la «peregrinación », entre ellos los mexicas (fig. 4). En realidad estamos ante una idea interesante:

los diversos pueblos que salen -o son paridos- de aun sitio de promisión. El sitio de promisión para su dios Huitzilopochtli (el águila parada sobre el a éste símbolo encuentran todo aquello que nos

estas cuevas van a dirigirse el mexica está indicado por nopal) pero antes de llegar recuerda lo hallado por el

tolteca cuando llegan a Cholula: peces, culebras, tortugas, tules, espadañas,

etc... todo de color blanco. También encuentran otro símbolo relacionado con la guerra y con la dualidad vida-muerte : el atl-tlachinolli o corriente de agua azul (vida) y la corriente de color rojo (muerte), que también ven en Cholula.

Como puede apreciarse, es evidente que el mexica toma de otros pueblos y particularmente del tolteca aquellos aspectos que considera importantes para su propia legitimación. La presencia de la dualidad vida-muerte la tenemos en varias formas, desde la manera en que se establece el calendario; la concepción que se tiene del universo;

mitos en los que se habla acerca de la dualidad; la vemos

también

expresada en edificios y cantos. En el caso del primero, no pasan desapercibidas las festividades y las deidades a que estaban dedicadas. Podemos observar cómo existen festividades en las que se rinde culto a determinados dioses relacionados con el agua y la fertilidad, en tanto que otras son deidades que guardan afinidad con la guerra, además del culto destinado al señor del fuego que en cierta forma sirve como parteaguas entre ambos. De la observación del calendario sugerí una hipótesis que es la siguiente: durante la temporada de lluvias la mayoría de la población campesina está dedicada al cuidado de las plantas, de su crecimiento y final recolección, lo que ocurre entre los meses de Huey Tozoztli (14 de abril al 3 de mayo aproximadamente), momento en que comenzaban las lluvias, hasta Tepehílhuitl (11 al 30 de octubre), momento en que se realizaba la

cosecha. No es de extrañar, por cierto, que ésta última estuviera dedicada a los cerros como lugares donde se forman las nubes, además de incluir sacrificios principalmente de mujeres que representaban otras tantas diosas, pues era una manera de agradecer la cosecha y de asegurar que la próxima temporada fuera abundante en lluvias. Pues bien, pienso que los campesinos, una vez liberados del trabajo del campo, estaban listos para ir a la guerra, pues recordemos que ellos eran, a la vez, guerreros que ayudaban al imperio en su expansión militar. Por lo tanto, creo que a partir de octubre o noviembre era cuando los contingentes mexicas se lanzaban a la conquista de otras regiones, tanto para asegurar un tributo periódico hacia Tenochtitlan como para obtener la cosecha enemiga que para ese momento también se había llevado a cabo. Un dato que ayuda en este sentido es que en el mes de Panquetzaliztli (entre los meses de noviembrediciembre) era cuando los prisioneros obtenidos en la guerra eran sacrificados 395

Eduardo Matos Moctezuma

en honor del dios solar Huitzilopochtli. Así tenían que alimentarlos por poco tiempo para llevarlos, finalmente, al sacrificio. Por otra parte, la misma concepción universal nos indica una visión cuatripartita del universo en su plano horizontal con un centro fundamental, tal como lo vimos en Teotihuacan siglos antes. Este plano horizontal está formado por dualidades, como es el eje norte-sur en que el primero es el lugar del frío, de la muerte, en tanto que el sur lo es de la fertilidad, de la

abundancia, con lo que volvemos nuevamente a la dualidad en él presente. En el eje este-oeste de igual manera queda plasmada la dualidad ya que por el oriente es por donde el sol es parido diariamente para combatir a los poderes nocturnos, es decir, el lugar del nacimiento que da vida mientras que el rumbo poniente es el lugar por donde el sol será devorado por la tierra en su diario devenir para pasar al inframundo o lugar de los muertos. Otro tanto ocurre con el plano vertical donde se presentan los niveles celestes y los del inframundo divididos ambos por la tierra, lugar en que habita el hombre. Los propios relatos de la Leyenda de los Soles nos dice de la forma en que, por la beligerancia de los dioses, estos combaten entre sí para dar paso a cuatro actos de creación-destrucción, de vida y muerte, para finalmente llegar al Quinto Sol creado por Quetzalcóatl en Teotihuacan. Esto merece especial atención, pues de este acto creador surgirá el género humano. Uno de los dioses poseedores de una presencia dual importante es Quetzalcóatl. Desde sus inicios, vemos como la deidad se va constituyendo a partir de lo que dijimos antes: lo celeste, representado en el ave, y lo terrestre, encarnado en la serpiente. Pero igualmente representa el lucero del alba y el del atardecer, es decir, que estamos ante un dios formado y exponente de dualidades: el cielo y la tierra; la mañana y el atardecer; y bien nos relatan los mitos la forma en que se da en él la vida y la muerte. En efecto, en relatos cómo la Leyenda de los Soles leemos cómo Quetzalcóatl tiene que bajar al Mictlan para recuperar a través del robo los huesos allí depositados. Para ello engaña a Mictlantecuhtli, Señor del inframundo, para hurtarlos y llevarlos a Tamoanchan.

Resulta interesante ver como

en el recinto de la muerte, el

Mictlan, que no es otra cosa que una matriz, se llevaran a cabo simbolismos del acto sexual representado en el momento en que Quetzalcóatl toca el caracol (símbolo de fertilidad, matriz que tiene vida en su interior) pero este no tiene

agujeros, por lo que llama a los gusanos para que lo perforen y penetren en él. Acto seguido llegan las abejas para que zumben en su interior y lo hagan sonar, con lo cual hay ya vida dentro del caracol. Pero al tratar de huir con los huesos, cae Quetzalcóatl y muere, resucitando enseguida y dirigirse a su nahual. Al llevar los huesos a Tamoanchan vemos nuevamente la presencia del acto carnal a través de colocar los huesos molidos en el lebrillo de la diosa Quilaztli y bañarlos con su sangre extraída del pene. De allí nacerá el género humano. Posteriormente y más concretamente entre los mexicas, la deidad adquiere el carácter de dios del viento. Por cierto, que ya con este carácter vemos como los templos dedicados a este dios tienen forma circular y en la parte alta se encuentra el santuario propiamente dicho, al cual se accede por una puerta que representa las fauces de la serpiente con su lengua bífida en el suelo. Esta forma del edificio la he interpretado como la serpiente enroscada cuya cabeza 396

La dualidad vida-muerte

está en la parte alta y por su boca se penetra a su interior, es decir, se entra a la matriz del ofidio. Esto implica que, en determinados rituales, los individuos son primeramente devorados por la serpiente para después sufrir una transformación en la matriz del animal y volver a renacer en algo nuevo. Vestigios de edificios circulares destinados al culto de este dios los vemos en El Corral, en Tula, Hidalgo; en Calixtlahuaca y en Malinalco, Estado de México (si bien

no sabemos si este ültimo estuviera dedicado al dios). De esto no hay duda en el caso de Calixtlahuaca, pues de allí proviene la imagen magnífica en piedra del personaje de pie con la típica máscara que caracteriza a Ehécatl. También se ha encontrado un edificio similar en Tlatelolco, ciudad mexica al norte de

Tenochtitlan, en donde se detectó en el interior de su plataforma una escultura en piedra del dios. En Tenochtitlan también tenemos la presencia del templo en su honor con forma circular, localizado debajo del sagrario de la Catedral, además de relatos que algunas fuentes nos proporcionan sobre el particular. Un dato que resulta interesante es aquella lámina del Códice Borgia en que se representa a Ehécatl-Quetzalcóatl espalda contra espalda con el señor del inframundo, Mictlantecuhtli. Aquí queda expresada esta dualidad de manera clara así como la relación existente entre ambas deidades. Una deidad que presenta elementos relacionados con el concepto vidamuerte es Tlaltecuhtli. Del estudio que realicé de las esculturas en piedra de la misma llegué a algunas ideas preliminares: a) Es una deidad a la que no se le rendía culto, quizá por su misión de devorar los cadáveres; b) No hay ninguna festividad mensual dedicada a ella; c) En la mayoría de los casos, su imagen labrada en piedra se colocaba boca abajo, pegada a la tierra; d) Se le presenta en posición de parto ; e) Puede tener figura zoomorfa o antropomorfa y en este ültimo caso puede ser masculina o femenina; f) Al parecer, en algunas ocasiones cubre su cabeza con la piel de un sacrificado. En el caso de los códices la vemos representada de manera mültiple en varios de ellos, por lo general simplificada, es decir, con la enorme boca abierta presta a devorar. El hecho de que se pinte en códices no contradice lo que decíamos en relación a que era una deidad colocada boca abajo y no visible, pues recordemos que los libros sagrados por lo general eran de manejo exclusivo de los sacerdotes y no de uso comün. Lo interesante de la deidad es que su enorme boca con afilados dientes servían para su función primordial: devorar los cadáveres, pero la posición de parto con las piernas abiertas y las manos levantadas (que nos recuerda la posición que guarda Tlazoltéotl pariendo en el Códice Borbónico) es de la mayor importancia, pues esta devoradora engullía a los muertos para parirlos a los destinos que se les deparaba segün la manera en que habían muerto. Era la «vagina dentata » con afilados colmillos por la cual se entraba a la matriz para ser paridos. Era una especie de rito de tránsito que llevaba de la muerte a otra vida o destino. Quizá la más clara representación de lo que venimos diciendo la tenemos en la enorme escultura de Tlaltecuhtli, en su versión femenina, encontrada el

2 de octubre del año 2006 frente al Templo Mayor de Tenochtitlan. Pasemos ahora a ver una de las expresiones arquitectónicas de mayor contenido de la dualidad vida-muerte entre los mexicas (fig. 5). Me refiero,

397

Eduardo Matos Moctezuma

Figura n° 5: Esquema del universo

desde luego, al principal templo o hueyteocalli más conocido como Templo Mayor. Algunas fuentes históricas sefialan que desde el momento en que iba a ser erigido, esto se realizó sobre el borde de dos cuevas y dos corrientes de agua sagrada que de ellas brotaban Como bien sabemos, el edificio tiene cuatro cuerpos superpuestos descansando sobre una plataforma general que lo sustenta. En la parte alta se encuentran dos adoratorios, uno dedicado a Tláloc, dios de la lluvia, de la fertilidad, y el otro a Huitzilopochtli, deidad

solar y de la guerra. Para llegar a ellos se sube por dos escalinatas que en su arranque tienen cabezas de serpientes. El hecho de estar dedicados a estos dos dioses nos muestra la presencia de la dualidad mencionada, pues bien sabemos que Tláloc se relaciona con todo aquello que provee vida (nubes, agua, granos, etc...) en tanto que Huitzilopochtli como deidad guerrera, tiene que ver con todo lo relacionado con la expansión del imperio y sus consecuencias (muerte en guerra o en sacrificio, imposición de tributo, etc...). Cada uno

de los lados que componen el edificio guardan estrecha relación con lo que los dioses que presiden los dos adoratorios superiores. Me refiero a los colores con los que estuvieron pintados, como lo relatan las fuentes históricas y la misma arqueología ha podido constatar, por lo menos en etapas tempranas del templo. También vemos la asociación que guardan determinados mitos con cada uno de estos lados. Es así como el de Huitzilopochtli es la imagen viva del mito que nos habla del nacimiento del dios en Coatepec, parido por su madre Coatlicue, quien nace para combatir al enemigo que en este caso está representado por Coyolxauhqui y sus cuatrocientos hermanos, los sureños. 398

La dualidad vida-muerte

Conforme a este relato, el combate se desarrolla en la montaña sagrada de Coatepec y Huitzilopochtli ataca a sus enemigos, los acosa, los anodada y los dispersa, en tanto que a la instigadora Coyolxauhqui la captura y la decapita en lo alto de la montaña, arrojando el cuerpo por la ladera del mismo el cual, al ir cayendo, se va desmembrando hasta llegar al fondo. ¿Qué sucede, entre tanto, con el lado de Tláloc ? Diversos autores pensamos que la parte dedicada a este dios también representa una montaña en la que se custodian los granos o semillas que habrán de sustentar al hombre. Guarda estrecha relación con otro mito en el que vemos cómo Quetzalcóatl acude a ciertas argucias para poder penetrar en el interior de la montaña sagrada y robar de allí los granos para entregarlos a los hombres. El dios logra finalmente su propósito. La razón de considerar el lado de Tláloc como una montaíia y, por ende, que en el caso del Templo Mayor de Tenochtitlan estaríamos ante dos montañas unidas entre sí, se ha prestado a discusión, lo que no viene al caso tratar en este trabajo ya que en breve habrá de publicarse el libro de Alfredo López Austin y Leonardo López Luján que tratan sobre el asunto. Lo que si resulta importante es que, en términos generales, la dualidad vida-muerte tiene presencia en el Templo Mayor de Tenochtitlan a través de los dioses Tláloc (lluvia, fertilidad, vida) y Huitzilopochtli (guerra, sacrificio, muerte).

Finalmente, recordemos como a través de la poesía el hombre nahua menciona la presencia de la dualidad. Lo vemos, por ejemplo, en aquel canto de Chalco que nos recuerda los lugares a los que irá el individuo después de la muerte. El camino del dios dual lleva a ellos. Dice: ... 4, Adónde iré? ¿Adónde iré? El camino del dios dual... ¿Por ventura está tu casa en el lugar de los descarnados ? ¿Acaso es el interior del cielo? ¿0 solamente aquí en la tierra es el lugar de los descarnados ?

(Traducción de Angel María Garibay) O este otro poema en donde se expresa la idea de cómo nadie perdura en la tierra: ¿ Adónde iré, ay? à Adónde iré? Donde está la dualidad...; Difícil, ah difícil! ¡ Acaso es la casa de todos allá

donde están todos los que ya no tienen cuerpo, en el interior del cielo,

o acaso aquí en la tierra es el sitio donde están los que ya no tienen cuerpo! Totalmente nos vamos, totalmente nos vamos.

¡ Nadie perdura en la tierra ! ¿Quién hay que diga: dónde están nuestros amigos ? ¡ Alegráos!

(Traducción de Angel María Garibay).

399

LA CIUDAD

MAYA

Y EL URBANISMO

CEREMONIAL

Miguel Rivera DoRADO Universidad Complutense de Madrid

El concepto de urbanismo

A pesar de las numerosas excavaciones llevadas a cabo en los ültimos cien años en todos y cada uno de los rincones del área maya, existen aún ciertos problemas que eluden persistentemente una solución completa y definitiva. Uno de los más acuciantes y significativos es el del urbanismo de los grandes y pequeños asentamientos que jalonan el territorio de las cuatro modernas repúblicas centroamericanas depositarias de los vestigios de aquella antigua civilización. El urbanismo maya es todavía un misterio porque los testimonios arqueológicos no son suficientemente explícitos, y porque no parece adecuarse a los patrones conocidos en el Viejo Mundo, tanto en lo que respecta a las trazas generales de las ciudades como en lo relativo a la funcionalidad de los espacios construidos, la circulación peatonal o el simbolismo de los distintos monumentos. Muchos libros publicados en las últimas décadas estudian la ciudad maya desde una u otra perspectiva!, pero todavía es imposible predecir la actuación de los urbanistas y arquitectos del pasado cuando se inician nuevas exploraciones, ni argumentar convincentemente sobre las causas de determinados arreglos urbanos. Nos movemos casi siempre en el terreno de las hipótesis, y yo voy a aportar en esta

1. Por ejemplo, G. F. ANDREWS, Maya Cities. Placemaking and Urbanization, Norman, University of Oklahoma Press, 1975; S. D. Houston (éd.), Function and Meaning in Classic Maya Architecture, Washington D.C., Dumbarton Oaks, 1998; M. Rivera DoRApo, La ciudad maya, un escenario sagrado, Madrid, Editorial de la Universidad Complutense, 2001 ; A. CiupaD,

M. J. IGLESIAS

PONCE

DE

LEóN,

M.

DEL

CARMEN

MARTÍNEZ

(éd.), Reconstruyendo

la

ciudad maya : El urbanismo en las sociedades antiguas, Madrid, Sociedad Española de Estudios Mayas,

2001;

A. HERRING,

Art

and

Writing

in the

Maya

Cities,

A.D.

600-800.

A

Poetics

of

Line, Nueva York, Cambridge University Press, 2005; G. Muñoz, Arquitectura Maya, Valencia, Biblioteca TC, General de Ediciones de Arquitectura, 2006; T. W. STANTON, A. MAGNONI (éd.), Ruins of the Past. The Use and Perception of Abandoned Structures in the Maya Lowlands, Boulder, University Press of Colorado, 2008.

401

Miguel Rivera Dorado

ocasión algunos nuevos datos y reflexiones a partir de las investigaciones y experiencias con que me he enfrentado en mi dilatada vida profesional. Hace ya muchos años, en un volumen de la Revista de la Universidad Complutense dedicado a la Antropología en España, publiqué un artículo sobre el concepto de ciudad en arqueología?. Me gustaría ahora, como preludio a la discusión del urbanismo y del urbanismo escenográfico, exponer nuevamente algunas de las razones aducidas entonces. Parece evidente que los tres procesos que conducen a un urbanismo definido por el crecimiento de la población, la concentración de esa población en un área relativamente pequefia, y la segura diferenciación social, se encuentran interrelacionados aunque sean componentes independientes de una línea particular de desarrollo, la que debe conducir a la cultura a su más alto grado de complejidad y diversificación. El problema al que se enfrentan los arqueólogos es el de la formulación cuantitativa de frases como « grandes poblaciones», «área pequeña», «especialización económica», «fuerte diferenciación interna », etcétera. Mientras que tales rasgos se pueden sugerir mediante la observación atenta del registro arqueológico, a través, por ejemplo, del tamaño y características de las estructuras residenciales, o de la distribución de los objetos y símbolos de estatus, o del hallazgo de talleres y espacios de culto, es mucho más arriesgado indicar el momento preciso en que la cultura cambiante atraviesa la frontera del urbanismo. Esto es así porque no todos los elementos diagnósticos evolucionan al mismo ritmo en cada una de las sociedades humanas. La especialización ocupacional, la producción de excedentes alimenticios, y el control político y administrativo sobre grandes masas de población son fenómenos de origen social a la vez que respuestas adaptativas a un determinado medio. De igual modo que puede haber una cultura muy desarrollada con una tecnología cercana a la de la Edad de Piedra, como sucede realmente con los mayas prehispánicos, o un gran imperio político sostenido por una civilización sin escritura, como sucede con los incas del Perú, también es teóricamente posible que haya una poderosa civilización de tipo estatal sin urbanismo. Por supuesto, existe una amplia tipología de ciudades segün las características u orientaciones básicas de las culturas en las que se originan; según Fox? pueden hallarse ciudades real-rituales, administrativas, mercantiles, coloniales e industriales, un esquema utilizado

por algunos autores mesoamericanistas para desentrañar la naturaleza del urbanismo del área maya*, pero que no contempla las numerosas situaciones intermedias o mixtas que se descubren tanto en la América precolombina como en los restantes focos civilizatorios antiguos. Otros investigadores prefieren atenerse a elementos fácilmente discernibles en las exploraciones

2. M. Rivera Donapo, «El concepto de ciudad en arqueología», Revista de la Universidad Complutense 24-97 (1975), p. 189-204. 3. R. G. Fox, Urban Anthropology: Cities in their Cultural Settings, Englewood Cliffs, Prentice-Hall, 1977. 4. Porejemplo,W. T. SANDERs, D. WEBSTER, « The Mesoamerican Urban Tradition », American Anthropologist 90-3 (1988), p. 521-546.

402

La ciudad maya y el urbanismo ceremonial

arqueológicas, así Laporte? dice que para definir a un sitio maya del sureste de El Petén como conjunto urbano se debe recurrir a los siguientes rasgos constitutivos : los conjuntos del tipo Grupo E, los conjuntos del tipo Acrópolis, la existencia de calzadas internas, y la presencia de terrenos para el Juego de Pelota. Es una interesante posibilidad, puesto que se hace descansar el concepto de urbanismo sobre construcciones cuyo valor económico (concentración de fuerza de trabajo y acumulación de excedentes agrícolas), social (referencia doctrinal, tanto política como religiosa), y simbólico (legitimación

del poder y de la ideología que lo sustenta), es evidente y forma parte del repertorio de las ciudades mundiales en la Antigüedad. Para lograr un índice representativo del grado de urbanismo presente en un yacimiento arqueológico, y poder establecer si se trata o no de una ciudad, propusimos en el artículo citado antes una fórmula numérica que tuviera en cuenta las siguientes características a las que se asignaba una puntuación concreta:

tamaño

o dimensiones

absolutas

del asentamiento,

es decir,

la

superficie total sobre la que se descubren restos de construcciones dispuestos sin solución de continuidad, pues a una distancia de más de 1 kilómetro entre edificios se considera ya otro asentamiento diferente. Aglutinación, rasgo que impone la relación entre unidades o conjuntos arquitectónicos, tanto de proximidad como más explícita a través de calzadas, etcétera. Volumen de la población, que es la cifra general de personas que se estima ocuparon el asentamiento en un momento dado. Densidad demográfica, que es una medida que resulta automáticamente de las dos anteriores, normalmente expresada en el número de habitantes por kilómetro cuadrado. Planificación urbana, que hace referencia a la intencionalidad en el planeamiento o disefio del asentamiento, a un orden particular en la distribución de edificios, plazas,

monumentos, y otras obras, y a la presencia o ausencia de ciertos elementos urbanos como calles o avenidas, alcantarillado, conducción de agua, orientaciones deliberadas de las construcciones, etcétera. La nucleación, por su

parte, implica que el asentamiento se organiza en torno a un foco o conjunto central que suele ser una concentración de edificios monumentales de carácter religioso o administrativo. La división social del trabajo, en fin, se aprecia por la cantidad de grupos de especialistas en tareas diferentes y no relacionadas directamente con la producción de alimentos; en arqueología los indicios provienen de espacios destinados a sacerdotes, funcionarios, artesanos, comerciantes, militares, etcétera, aunque muchas veces las pruebas

son indirectas y se desprenden de la abundancia o magnitud de los edificios religiosos o administrativos en sí, o de la calidad e iconografía de los trabajos artísticos. En relación con el rasgo anterior está la estratificación social, pues se parte de la idea de que una sociedad urbana, con economía diversificada y trabajadores de tiempo completo no cultivadores, tiene invariablemente un cierto sistema de organización jerárquica de los distintos grupos o segmentos poblacionales especializados que la componen. Por ültimo, el corismo hace

5. J. P. LaPonrE, « Dispersión y estructura de las ciudades del sureste de Petén, Guatemala», en A. CIUDAD

et al. (éd.), Reconstruyendo

la ciudad maya,

p. 137-161.

403

Miguel Rivera Dorado

referencia al número de campesinos que viven o trabajan en el perímetro del asentamiento; un lugar acorítico incluirá en sus límites una amplia población de agricultores, lo contrario sería propio de un lugar sincorítico. El índice (lu) que permitirá conocer si un asentamiento particular puede ser considerado una ciudad se obtiene sumando las medidas o valores de cada uno de los rasgos identificados y dividiendo el total precisamente por el número de características consideradas*. Si hacemos la prueba para un sitio como Oxkintok, por tomar un ejemplo bien conocido para mi, según la información de que se dispone después de las excavaciones llevadas a cabo desde 1986, y las inferencias y deducciones posibles, la fórmula numérica aplicable conduce a un resultado de 5,5. Hemos establecido la convención de que, para considerar un asentamiento como plenamente urbano, el índice lu tiene que tener un valor mínimo de 6, lo que no sucede en el caso de Oxkintok. Obviamente este asentamiento del Puuc es, según la fórmula, casi una ciudad,

y puede suponerse que una ampliación de las exploraciones permitiría añadir nuevos puntos a algunos de los apartados, aunque, ciertamente, al haber sido preparada esa fórmula con criterios generales obtenidos de la observación de las ciudades antiguas de ciertas regiones del Viejo Mundo, el urbanismo de la mayoría de los emplazamientos mayas va a lograr una calificación muy baja. Por ejemplo, Tikal no rebasa un 6,2, y solamente Mayapán de entre las analizadas superó el 7. Todo ello vuelve a poner sobre la mesa la cuestión de la necesidad de nuevas definiciones de urbanismo para culturas alejadas de las tradiciones del Mediterráneo y el Creciente Fértil. O también la exigencia de métodos de especificación y análisis del registro arqueológico en el área maya más refinados, con preguntas relativas a la planificación urbana que habitualmente no se hacen, como ¿de qué manera se deshacían los habitantes de los residuos orgánicos? ¿dónde están los indispensables almacenes? ¿cuáles eran los sistemas higiénicos? No obstante, hay que tener siempre presente que también en otras ciudades de la Antigüedad del Viejo Mundo se daban rasgos muy parecidos a los que encontramos en el área maya: en los orígenes, en Catal Hóyük, no existían calles, en Mesopotamia la distribución del espacio toma como referente principal el palacio, y la ciudad helenística se articulaba en función de los lugares de reunión o en los que se celebraban las festividades. Las ciudades de apariencia anárquica son muy frecuentes, aunque por lo general predomina la aglutinación de las construcciones. Se ha dicho que grandes urbes como Tebas, en Egipto, o Angkor, en Camboya, eran antes enormes monasterios o centros religiosos que verdaderas ciudades. La disposición de los edificios tenía que ver a veces con la existencia de un monumento de especial relieve, como sucede en Isfahan, por ejemplo, antes que con los criterios residenciales o económico-administrativos que guían ahora a los urbanistas occidentales modernos. Para un observador no experto la ciudad maya aparece como una disposición aleatoria de edificaciones de función dudosa. Incluso se podría decir que es una suerte de diseño impresionista porque, al igual que en este movimiento

6. Véase M. Rivera DoRADo, « El concepto de ciudad en arqueología ».

404

La ciudad maya y el urbanismo ceremonial

pictérico francés del siglo xix, los contornos de los elementos son desdibujados e imprecisos, los grupos de construcciones son como manchas de pigmento cuyos límites vienen establecidos por las relaciones entre sí, se da una enorme importancia a la luz en las orientaciones de los edificios y en la colocación de ornamentos, relieves o pinturas, y, finalmente, el color tiene un

protagonismo innegable pues todo está impregnado de vivos tintes que tienen valor simbólico y que son a menudo, en sus combinaciones y asociaciones, el mensaje mismo que el urbanista desea transmitir. Actualmente tenemos normas urbanísticas que clasifican, por decirlo así, y ordenan el suelo de las ciudades segün la situación y el valor económico — sujeto en sí a otra serie de factores igualmente significativos — o de acuerdo con las prioridades sociales. Cuando se hace una intervención con obras y construcciones hay que redactar un proyecto y esperar la aprobación municipal, y en ocasiones hay que tramitar una «recalificación » de ese suelo para destinarlo a otro uso de aquel que estaba establecido por las normas en vigor. No creo que fuera muy diferente el procedimiento entre los antiguos mayas, es decir, la autoridad para adjudicar suelo para la construcción, la provisión de fondos o medios para esa construcción, y la aprobación final del «proyecto» de edificación o remodelación, debían originarse en unas leyes sancionadas por la tradición cultural particular y por los intereses coyunturales del sistema de poder que rigiese el asentamiento. Tal coherencia, innegable en las realizaciones urbanísticas de toda civilización antigua, debe permitir a los analistas modernos el empleo de modelos de discriminación e interpretación. La escenografía

Muchos autores reconocen la índole escenográfica de la distribución de los elementos urbanos en las ciudades mesoamericanas. Teotihuacán podría ser quizá el mejor ejemplo, pero también Tikal o Uxmal y muchos otros sitios del sureste". Como los edificios mayas no permitían la concentración de la población en su interior, ritos y cultos se celebraban al aire libre en las plazas y espacios vacíos o abiertos. Por eso, las propias construcciones formaban parte de la decoración político-religiosa destinada a favorecer la emoción y el asentimiento de los fieles o sábditos, la fachada de una pirámide o templo era el equivalente del retablo mayor de una catedral cristiana (obra maestra de la doctrina y de la comunicación con los fieles que también se duplicaba en el exterior). Durante la colonia hubo muchas capillas abiertas, una de las más

famosas precisamente en Dzibilchaltún, que reproducían hasta cierto punto las condiciones prehispánicas, el principal emblema de identidad. Los templos mayas, como algunos templos egipcios, fueron edificados «para alguien ». Así, lo mismo que Seti I tiene su templo en Abydos, Ramsés II

7. Véase, por ejemplo, M. RivERA DoRADo, « Arquitectura y escenografía en la cultura maya antigua»,

en C. VipaL,

G. Muñoz

(éd.), La

Blanca

y su entorno.

Cuadernos

de arquitectura

y

arqueología maya, Valencia, Universidad Politécnica de Valencia y Proyecto La Blanca, 2007, p. 161-171.

405

Miguel Rivera Dorado

en Tebas o en Abu Simbel y Hatshepsut en Deir el Bahari, conocemos muy bien el de Janab Pacal en Palenque o el de Jasaw Chaan Kawil en Tikal. En uno y otro caso no son verdaderamente templos dedicados a los dioses, sino templos «sociales» o dinásticos, con frecuencia funerarios, en los que los dioses están presentes mediante efigies, relieves o inscripciones, para acompañar y proteger al personaje o la familia a los que corresponde el edificio. Esas imágenes o jeroglíficos, junto a la forma misma de la estructura y el lugar de la construcción, convierten en sagrado el espacio, y en é] oran, impetran, convocan, se comunican los dirigentes con las potencias sobrenaturales y con los antepasados, y allí — o en las proximidades, en el caso egipcio — son enterrados finalmente. José Miguel García Campillo? ha traducido los textos de varios dinteles de Chichén Itzá, encontrando en

ellos referencias a personajes divinos que son mencionados como « propietarios» de las respectivas construcciones, frecuentemente de tipo palaciego ; se trata con toda probabilidad de casas de los antepasados — mitificados y divinizados — o de individuos vivos o muertos que tienen un tratamiento de dioses; pero lo curioso del caso es que, morfológicamente, esos edificios no parecen templos ni cuentan con rasgos que les confieran a priori un carácter sagrado, lo que demuestra una vez más lo difícil que es asignar función a las estructuras arquitectónicas mayas sin contar con inscripciones jeroglíficas y representaciones adecuadas, o al menos algunos objetos asociados que se puedan interpretar con seguridad. Vale la pena recordar al respecto las palabras de Juan de Villagutierre Soto-Mayor: ...De los veinte y un Cues,

o Adoratorios,

que halló el General

los suyos, en la Isla (Tayasal), era el principal, Sumo

Sacerdote

Quincanek,

Primohermano

Ursúa,

y

y más grande, el del falso del

Rey

Canek.

[...]

Otro

grande Adoratorio, casi de la misma forma, y de la propia Fábrica, era el del Rey Canek, y de sus Antecesores, que habían sido Reyes en las provincias de Yucatán. [...] Otro Adoratorio, que era el de la Plaza, de que cuidaba

el Sacerdote Tut, que era su Principal Profeta. [...] Los demás Templos, o Adoratorios, eran comunes a toda la gente del pueblo, para los cuales tenían muchos falsos Sacerdotes. [...] No siempre entraban los Infieles, que querían, en ninguno de estos Adoratorios, sino es en el Campo, en sus Cavernas, en los Montes, Bosques, y Cuevas, idolatraban?.

No se dice «el templo de tal dios», como es habitual en otras religiones, sino que se hace mención del dedicatario humano, al igual que ocurre en ciertas pinturas medievales o del Renacimiento conocidas por el nombre del oferente (como el A/tar Paumgartner, de Munich, el Tríptico Portinari, de los Uffizi en Florencia, o la Virgen del Canciller Rolin del Louvre).

8. J. M. Garcia CAMPILLO, «Santuarios Itzá», en A. CIUDAD 9.

J. ViLLAGUTIERRE Soro-MavoR,

Condumex,

406

urbanos. Casas para los antepasados en Chichén

et al. (éd.), Reconstruyendo

1985, p. 500-502.

la ciudad maya,

p. 403-423.

Historia de la conquista de la provincia

de El Itzá, México,

La ciudad maya y el urbanismo ceremonial

Claude Baudez!° ha dado la importancia que se merecen a los recorridos rituales de los personajes dirigentes en la urbe maya. El investigador francés afirma que «el trazado de las ciudades y de los conjuntos arquitecturales, el plano y la elevación de los edificios, muestran que los mayas han construido escenarios microcósmicos para algunos de sus rituales». Los gobernantes llevaban a cabo déambulations dans un microcosme, como en los conjuntos de pirámides gemelas de Tikal o Yaxhá, o en la estructura 11 de Copán, que, al representar al universo, permiten los recorridos simbólicos, y lo mismo ocurre en los subterráneos del Palacio de Palenque o en el Satunsat de Oxkintok, y muy especialmente, por lo que toca al inframundo y sus significados, en las estructuras 12 y 24 de Copán, o en los interesantísimos edificios laberínticos de Yaxchilán y Toniná. Los edificios de la ciudad maya son elementos de un tejido simbólico que afecta a la funcionalidad individual de cada una de las estructuras o conjuntos y a la significación de la urbe como un todo. Por ejemplo, es muy probable que el diseño urbano, o al menos una parte especial de él, haya tenido en cuenta la imagen mental del universo compartida por las minorías dirigentes. No voy a entrar aquí a discutir este punto, al que me he referido en otras ocasiones! pero los cosmogramas de esta clase han sido detectados o mencionados en el área maya por diversos autores", y son muchos los que reconocen que algunos edificios, o incluso plazas, son representaciones cosmológicas?. Tal hecho no debería parecernos extravagante, es comün a bastantes culturas y, en una u otra medida, se descubre en la India, en China, en Egipto, o también

en el Occidente cristiano. Se ha sugerido, por ejemplo, que las pirámides egipcias de Gizeh están dispuestas de tal forma que reproducen las estrellas de la constelación de Orión, siendo el Nilo la Vía Láctea. Esos mismos astros

tenían una gran importancia para los mayas, segün las tesis de Schele y otros". Si la meseta de Gizeh es un cosmograma que reproduce una parte del cielo estrellado, no hay duda de que otras civilizaciones obsesionadas con la astronomía, con el cielo y con el tiempo, pudieron igualmente inspirarse en el firmamento nocturno para el diseño de sus centros ceremoniales, de los lugares sagrados de sus ciudades, o para establecer la disposición de ciertos edificios o complejos arquitectónicos mitológicamente significativos.

10.

C. F. Baupgz, Une histoire de la religion des Mayas, París, Albin Michel, 2002, p. 212-214.

11. Por

ejemplo,

M.Rivera

DonApo

«El

urbanismo

de

Oxkintok:

problemas

e

interpretaciones », Revista Española de Antropología Americana 28 (1998), p. 39-61 ; La ciudad maya.

12. Por ejemplo, W. AsHMORE,

«Construction

and Cosmology:

Politics and Ideology

in

Lowland Maya Settlement Patterns», en W. F. Hanks, D. S. Rice (éd.), Word and Image in Maya Culture. Explorations in Language, Writing, and Representation, Salt Lake City, University of Utah Press, 1989, p. 272-286; BAUDEZ, Une histoire. 13. Por ejemplo, L. SCHELE, P. MATHEWS (éd.), The Code of Kings. The Language of Seven Sacred Maya Temples and Tombs, Nueva York, Scribner, 1998. 14.

D. FREIDEL,

L. SCHELE,

J. PARKER

(éd.),

Maya

Cosmos.

Three

Thousand

Years

on

the

Shaman's Path, Nueva York, William Morrow and Co., 1993.

407

Miguel Rivera Dorado

Yo opino que muchas ciudades mayas reproducen esa idea del universo plásticamente, es decir, jugando con factores como la forma, el volumen, la

ornamentación, o la ubicación, y en ellas el sector del asentamiento que hace referencia, o representa directamente, la parte del cosmos que llamamos inframundo, tal vez el más meridional, puede incluir edificios como el Satunsat de

Oxkintok, en el cual creemos que se llevaban a cabo ceremonias relacionadas con el descenso al abismo telúrico, la muerte ritual y la renovación de la vida". De ahí que algunos de los parajes sagrados a que aluden las inscripciones, y que han sido a menudo calificados de míticos y fabulosos, puedan ser en realidad construcciones tipológicamente bien definidas por los arqueólogos en las que se celebraban determinados actos litúrgicos o conmemorativos mencionados en los jeroglíficos. El estudio de la estela 15 de Waká (El Perú) ha confirmado que ese monumento registra sucesos que implican al rey local, Kinich Bahlam, con alguna ceremonia realizada en un lugar llamado Wi-Te, tal vez un Wi-Te-Na. Al parecer, esta clase de edificios, asociados a

los reyes mayas vinculados a Teotihuacán, pueden haber sido adoratorios del fuego!5. Supongo que en ciudades como Copán, Toniná, Palenque o Balam Ku podrían descubrirse otros ámbitos sagrados de arquitectura convencional con connotaciones míticas o cosmológicas correspondientes a los lugares mencionados en los jeroglíficos. Al ser la religión maya de carácter iniciático, si juzgamos por la significación atribuída a numerosas portadas de templos, o a los juegos de pelota, o a los subterráneos y laberintos, es razonable que, al igual que sucedía en Grecia o en Egipto, se reprodujeran en las urbes los emplazamientos en los que transcurrían los mitos cosmogónicos o se designaran como tales determinadas localidades o territorios (recuérdese uno de los supuestos nombres prehispánicos de la actual Mérida o de un sitio de los alrededores, Ich Caan Sihó, y la toponimia maya contiene muchos otros términos de semejantes resonancias). La diferencia con la mayor parte de las corrientes de la tradición cultural occidental en lo que se refiere al orden cosmológico de la ciudad maya estriba en que, al ser imaginado como complemento o prolongación del sistema universal, con el que tiene que estar en perfecta armonía, sólo puede plasmarse topográficamente en estructuras interdependientes que transmitan el efecto de concordancia, de movimiento, de ritmo y de cambio, que el propio universo produce, efecto que constituye a mi modo de ver el núcleo de las creencias mayas a este respecto. Creo que las manifestaciones del modelo ideológicopolítico maya que se pueden rastrear de manera más concluyente en el patrón de asentamiento de ciudades como La Blanca y Oxkintok, investigadas por equipos españoles, se adecúan a esas constantes antes que a los típicos criterios de centralidad y dimensiones tan frecuentes en el Viejo Mundo, y que el poder que los gobernantes ejercían sobre sus territorio no era más que el

15.

M. RiverA DoRADo, Laberintos de la Antigüedad, Madrid, Alianza Editorial, 1995.

16. D. FREIDEL, H. L. EscoBEDpo, «Eliminando a los reyes sagrados y restableciendo a los dioses: Algunas consideraciones generales de la segunda temporada de campo en El PerúWaká,

Petén»,

XVHI

Simposio

de Investigaciones Arqueológicas

et al. (éd.), Guatemala, 2004, p. 343-348.

408

en Guatemala,

J. P. LAPORTE

La ciudad maya y el urbanismo ceremonial

corolario del que pretendían ejercer sobre el universo entero. En tal sentido, es indudable que la ciudad maya era un microcosmos, una representación del universo sobre el que asentaban sus pies, y la jurisdicción que se desprendía de su realeza divina, los dirigentes del período Clásico. Así, en mi opinión, la ciudad maya representa el cosmos en tanto que orden, un sistema ordenado jerárquicamente por una o varias divinidades, y dividido en partes arquetípicas como el cielo, el inframundo, o los puntos cardinales. La ciudad se opone a la selva que la rodea como el cosmos se opone al caos del que procede y que le cireunda. La naturaleza selvática es vista como el caos y la ciudad es el orden que impone la cultura de los hombres, es decir, la misma sociedad maya. La ciudad es lugar de ritos, palabra que en su etimología sánscrita (rita) quiere decir lo que está conforme al orden. El bosque salvaje, sin embargo, no posee contornos, ni límites, es desordenado e indomable, y produce una inquietante extrañeza, no sólo por el asombro y el desconcierto sino porque resulta profundamente ajeno. En las leyendas occidentales, la selva está habitada por criaturas enigmáticas y peligrosas, y los jóvenes sufren allí su iniciación en términos equivalentes a la muerte física y el descenso a los infiernos. E] hallazgo reiterado de inscripciones dedicatorias de edificios es un indicio más de que esas estructuras, y otras muy diversas, como plataformas o escalinatas, tenían su denominación específica, con toda seguridad en términos de la significación y funcionalidad de cada unidad y del complejo global, cuyo carácter representativo, en lo político y religioso, por encima de lo meramente habitacional, opino que está fuera de toda duda. Y lo mismo se puede decir de los grupos en sí: en Oxkintok se ha leído en alguna inscripción el topónimo sakumal, que hace referencia seguramente al grupo Ah Canul. Como sakumal se podría traducir por «lugar de los hermanos mayores », es posible que esté señalando la residencia de las personas principales del linaje gobernante, lo que viene corroborado por la cantidad de relieves hallados en el palacio CA-7 de ese grupo y por las características mismas del conjunto". Es decir, que para comprender el urbanismo maya hay que partir del catálogo de necesidades ideológicas de esa sociedad antes que del socorrido recurso a la especialización económica y el desarrollo político. No conozco una sola estructura arquitectónica de Oxkintok, y se han liberado y excavado más de cincuenta, que muestre de una manera obvia su función económica. No se han localizado almacenes o depósitos, que son tan frecuentes en Mesopotamia, o en los asentamientos incaicos, por ejemplo, ni talleres o centros de producción de cualquier clase, no existen quivalentes a las insulae romanas, ni hay huellas de mercados o puntos de distribución de mercaderías, y no se han identificado verdaderas residencias con sus servicios anexos. A muy duras penas, con notable esfuerzo digno de alabanza pero sujeto igualmente a críticas, varios autores han establecido que aquí o allá, en

17. M. Rivera DoraDo, «Arquitectura, gobernantes y cosmología. Anotaciones sobre ideología maya en los cuadernos de Oxkintok», Revista Española de Antropología Americana 25 (1995), p. 23-40.

409

Miguel Rivera Dorado

Aguateca o en Copán, hay estancias utilizadas por artesanos o escribas, pero las pistas son tan tenues y escasas que resultan poco concluyentes?. Lo que nos conduce a suponer que la ciudad maya es ante todo de carácter ceremonial e, insisto, representativo, donde la sociedad se siente reflejada por la vía político-religiosa, donde se procede a la endoculturación, y donde encuentra el escenario adecuado la sucesiva reproducción del modelo de relaciones y organización. Un ejemplo crucial nos lo proporcionan rituales como el juego de pelota, expresados en construcciones particulares de alto valor simbólico alo largo y ancho del área maya, en el que los gobernantes se glorifican como demiurgos vinculándose a los dioses creadores y fundadores. Conclusiones

Las ciudades mayas son ciudades de llanura, abiertas, concebidas para dar representatividad y cobijo a los linajes principales en un espacio construido que les permitiese desarrollar sus actividades político-religiosas según los preceptos y fórmulaciones de los mitos fundacionales. Las trazas urbanas tienen en cuenta la topografía del terreno, los arquetipos míticos — en los que confluyen cosmografía y cosmología — y las necesidades administrativas. Son ciudades con abundantes vacíos que se constituyen en elementos estructurantes de la morfología urbana, junto con los edificios de los tipos templarios y los tipos palaciegos. Los patios de los conjuntos arquitectónicos organizan y distribuyen las distintas estancias construídas, pero no hay mucha semejanza con los complejos residenciales teotihuacanos o las viviendas típicas del Próximo Oriente, pues aquí los sobrios paños ciegos exteriores de otros lugares se convierten en escalinatas, pórticos, y aun plataformas superpuestas más o menos ornamentadas. Mas los vacíos cruciales son las plazas ante las pirámides, lugares de congregación de gentes que asistían a las celebraciones, a las exhortaciones desde los templos, o a los actos rituales

de toda índole, y allí la perspectiva visual está dirigida a suscitar la impresión de elevación sobre el suelo, merced a las empinadas escalinatas que ascienden los pisos de los basamentos hechos de plataformas escalonadas rematadas por pequeños santuarios y cresterías que, como flechas, apuntan a los cielos abiertos por encima de la jungla. Resumiendo, en el urbanismo maya convergen a mi modo de ver tres propósitos: el político-representativo, que trata de exaltar y legitimar el sistema de poder, el social, que refleja la jerarquización de la sociedad, y el religioso-cosmológico, que pretende vincular el destino de la colectividad que habita la urbe con el del universo. Los dos primeros son característicos también de otras civilizaciones, y el tercero, aunque más raro, no es exclusivo

de los mayas. La apariencia urbana de la ciudad maya no es sino el reflejo simbólico de una realidad profunda cuyo carácter religioso no puede ponerse en duda. Pero lo que hace verdaderamente singular a este urbanismo es el

18. Véase T. Inomara, « King's People. Classic Maya Courtiersin a Comparative Perspective », en S. D. Houston y T. Inomara Press, 2001, p. 27-53.

410

(éd.), Royal

Courts of the Ancient Maya,

Boulder, Westview

La ciudad maya y el urbanismo ceremonial

diseño formal utilizado para la realización de esos tres propósitos, la ausencia frecuente de verdaderos patrones geométricos (hasta la forma pirámide tiene multitud de alteraciones), la variabilidad en las orientaciones, el uso funda-

mental y ordenador de los espacios libres de patios y plazas, las perspectivas contrastantes horizontales y verticales, el desdén por los ángulos rectos, la importancia de los volúmenes, la reiteración de plataformas y escaleras como recursos estéticos y simbólicos, la singularidad de los recorridos ambulatorios, y el valor dado a la omnipresente ornamentación y a los colores. La ciudad maya se configura y crece a la manera de los libros de Chilam Balam, muchos elementos variados y aparentemente inconexos, o hasta incongruentes, pero todos altamente significativos y obedientes a un plan que los vertebra y les confiere un profundo valor expresivo de incuestionable alcance cultural.

411

LA COLECCIÓN

DE ANTIGUEDADES

DE ÉDOUARD

MEXICANAS

PINGRET (1788-1875)

Isabel FERNANDEZ TEJEDO *

Universidad de Nottingham

Curioseando

entre los objetos de arte precolombino

casa de subastas de Drouot-Montaigne,

exhibidos

en la

en París, en junio de 2005, retuvo

mi atención una libreta con forro de cartón marrón dispuesta sobre una vitrina'. Al hojear el cuadernillo, manuscrito e ilustrado a color, leí en la

primera página: «textos y acuarelas de Edouard Pingret». Cualquier persona medianamente interesada en cuestiones de arte en México, no ignora, por haber visto colgados sus cuadros en las paredes del Museo de Arte de la Academia de San Carlos y en el Museo Nacional de Historia de Chapultepec, la importancia de este singular pintor francés en la vida artística de México. La emoción que me produjo descubrir el nombre del artista asociado a un texto con ilustraciones, se vio acrecentada al constatar que las acuarelas representaban objetos diversos del periodo precolombino: esculturas, cerámicas de varias formas, máscaras, collares, puntas de lanza, flechas y fragmentos

variados de monumentos y una que otra pieza de origen colonial. Las noticias sobre la colección de objetos precolombinos que Edouard Pingret formó durante su estancia de cuatro años y medio en México (1854-1855), han sido

en parte estudiadas por L. Ortiz Macedo, quien tuvo acceso a los documentos que los descendientes del pintor le facilitaron en Francia cuando el Banco de México adquirió varias pinturas que integran actualmente la colección Pingret de esta institución?. El cuadernillo o «carpeta» que mencionamos arriba, aún estaba en posesión de los familiares del pintor cuando Ortiz Macedo hizo su investigación. El Quai Branly lo adquirió posteriormente

1.* Mi reconocimiento a Carmen y Marta Nava por su apoyo en la realización de este trabajo. Agradezco a Christine Phillips el haberme invitado a la exhibición y venta de este cuaderno. 2.

L. Ortiz

MACEDO,

La colección

de arte del Banco

Nacional

de México,

México,

Fomento

Cultural Banamex, 1983, p. 75-83; L. Ortiz Macebo, Édouard Pingret, un pintor romántico francés que retrató el México del mediar del siglo xix, México, Fomento Cultural Banamex, 1989;

L. Ortiz

MACEDO,

Édouard

Pingret,

un pintor

romántico francés,

México,

Banamex,

2005.

413

Isabel Fernandez Tejedo

en la subasta püblica de 2005. En el estupendo y bien documentado libro que Ortiz Macedo editó en 1989 sobre Pingret, se dedican varias páginas a comentar el cuaderno y se incluyen algunos de los dibujos. El autor transcribe también un texto manuscrito en una hoja doblada tamaño carta que aparece a manera de prefacio?. Esta hoja está sellada al cuaderno con cera negra sobre la que se leen las siglas V. P. Ortiz Macedo atribuye el texto a Mme. Blanche Lanet, hija del pintor y lo fecha en 1875, a pesar de que en el original no aparece ni fecha ni firma. Mi investigación en los archivos nacionales y otros fondos documentales de Francia, me permitió encontrar información complementaria para extender y profundizar aspectos relativos a las peripecias por las que se vio envuelto el pintor durante la adquisición, expedición e intento de venta de su colección mexicana, y las repercusiones que tuvo para su vida una vez de regreso en Francia. Dado que la información en cartas, notas y cuadernos daba noticia también de la vida social tanto de México como de Francia durante la segunda mitad del siglo xix, me pareció digno de interés presentar con detalle esta faceta del coleccionista de «antigüedades aztecas», atento admirador y lector avisado de la historia precolombina y contribuir con ello a completar el perfil del artista, al que además de pintor de escenas de guerra, retratista, pastelista, dibujante, litógrafo y editor, debemos agregar coleccionista de arte precolombino. Existen tres cuadernos ilustrados con notas manuscritas de la colección de «antigüedades aztecas» de Edouard Pingret. Uno se encuentra en los archivos nacionales del Louvre y los dos restantes en el fondo de documentos preciosos del Quai Branly (Antiguo Museo del Hombre). Los llamaremos por el número 1“, 2? y 35 respectivamente, a fin de facilitar su identificación en este texto. Aunque los tres manuscritos presentan una selección y catalogación de algunas de las piezas más importantes de la colección del pintor, con explicaciones sobre el uso de algunos objetos, el contenido de cada uno de ellos es diferente, de la misma manera que el formato o soporte de presentación, el tipo de papel, el número de páginas y dibujos, las anotaciones en tinta o lápiz, la presencia o no de fotos, litografías y acuarelas. Los manuscritos son interesantes desde varios puntos. En primer lugar nos dejan un testimonio visual y escrito de una selección de piezas de la colección del pintor, así como una interpretación plástica del posible uso de varios de ellos. Este aspecto interpretativo, algunas veces puramente especulativo, se apoyó, en algunos casos, en lecturas de fuentes historiográficas y documentos manuscritos que el autor consultó en el Museo Nacional de México y en la observación meticulosa de piezas arqueológicas del mismo museo. Pingret realizó varios bocetos de

3.

L. OrTIZ MACEDO,

Édouard Pingret, p. 105-110.

4. Cuaderno 1 : E. PINGRET, Notes sur les antiquités aztéques de Mr. Pingret dans Archives des Musées Nationaux, citado: AMN (dossier Pingret, Antiquités Mexicaines) 14 janvier 1864, en A5-1864. 5. Cuaderno 2: E. PINGRET, 2* essai des notes sur les antiquités aztéques de Monsieur Pingretdans Musée Quai Branly, citado: MQB 70.2001.33.1. 6. Cuaderno 3 : E. Pingret, Carnet de dessins de Édouard Pingret, dans MQB, 70.2005.8.1.

414

La colecciôn de antiguedades mexicanas de Édouard Pingret (1788-1875)

piezas arqueológicas: un gran recipiente votivo con la imagen de Tláloc que apareció publicado en forma de litografía en Mythes de l'antiquité americaine?, y otros dibujos que se incorporaron en 1864 al acervo del Ministerio de la Instrucción Pública de Francia. El autor tenía el propósito de agregarlos al álbum sobre los trajes civiles y militares de Méxicof. En las calles, muros, paredes y escaleras de la ciudad el artista también escudriñó con avidez la presencia de vestigios escultóricos. El dibujo de la fig. 1, producto de sus observaciones en la urbe, fue enviado a Francia por Pingret en una carta fechada en México el 4 de diciembre de 1851, dirigida al conde Nieuwerkerke,

intendente general de los museos imperiales. En la misiva el artista explica haber encontrado ese «dios azteca » en el interior de una casa colonial, en el

—À

ángulo de un muro del piso bajo?.

Figura n? 1: Dibujo de un monolito de piedra enviado por Édouard Pingret en una carta al director de los museos imperiales, en AMN

A5-1851.

Pingret era un pintor instruido y su mirada estaba educada para reconocer los objetos de buena factura. Al referirse a los vestigios arqueológicos emplea siempre la palabra «obras de arte» y designaba a sus artífices como talentosos artistas indígenas dignos de admiración. Si las acuarelas que ilustran

7. Enel cuaderno 2, p. 56 bis, E. PINGRET presenta el dibujo del incensario con efigie de Tláloc que dibujó para Brasseur de Bourbour. En la p. 9 vuelve a afirmar haber hecho muchos dibujos para el mismo personaje. 8.

E. PiNGRET, cuaderno 2, p. 68.

9, «Carta de E. Pingret al Conde Nieuwerkerke, intendant général des Musées Impériaux du Louvre», dans AMN A5-1851.

415

Isabel Fernandez Tejedo

los cuadernos de Pingret están lejos de alcanzar la calidad de sus oleos y dibujos, no podemos perder de vista, sin embargo que fueron ejecutadas para servir de guía a una catalogación, una especie de recordatorio visual dirigido a despertar la curiosidad de las autoridades francesas para incitarlas a visitar los objetos reales de su colección. En los cuadernos 1 y 2, Pingret dedica algunas lineas a describir las peripecias empleadas por los viajeros y residentes coleccionistas (franceses, alemanes e ingleses) para procurarse los objetos más valiosos. Entre los métodos destaca, el robo descarado, la injusta transacción, la compra ilegal y las excavaciones clandestinas a cuenta de los propios coleccionistas, todo ello bajo la mirada cómplice o negligente de autoridades políticas y administrativas. Pingret afirma que en México nadie se interesaba en las antigüedades prehispánicas, salvo los descendientes de la nobleza indígena. Estos son «los ünicos que compran joyas antiguas por lo que es muy difícil conseguirlas, así las piezas en circulación, son pocas». Atribuía también el desinterés por los vestigios prehispánicos a la intervención de la iglesia que seguía condenando la religión autóctona por un supuesto origen demoniaco: «Supe que el arzobispo de México le pidió al director del Museo de México guardar las efigies de barro porque le hacían daño al pueblo y de esta manera se contribuía a borrar los restos de la idolatría»'?. Si la defensa del patrimonio artístico fue discreta durante los agitados años de la nación en ciernes, el gobierno de México realizó varias acciones para revalorar la cultura nacional. Además de la creación del Museo Nacional en 1825, dos afios después publicó un libro sobre la colección de las antigüedades que existían en el Museo, con litografías realizadas por J. Frédérick Waldeck y Pedro Robert!!. La prensa mexicana denunció el saqueo silencioso de piezas arqueológicas que «el inconsecuente y desagradecido» Waldeck estaba haciendo en el país". Pero los viajeros eran muchos y el pillaje incesante. Pingret lanza un juicio crítico sobre esos viajeros expoliadores de templos, museos y bibliotecas. Sin embargo la compra de piezas, principal método que el coleccionista empleó para adquirir sus antigüedades y que respondía a las formas legales de intercambio de obras de arte practicadas en Europa, no le provoca el mínimo escrüpulo. Denuncia por ejemplo al capellán de Santa Anna, el abad G. Psanner, de origen alemán quien segün Pingret poseía la colección más importante de antigiiedades mexicanas y de quien sospecha haberla adquirido ilegalmente y vendido a los ingleses, pues la colección mexicana del Museo de Londres tenía en 1854, 526 objetos y llego 5000 en 1864".

10.

E. PINGRET, cuaderno

2, p. 35.

11. E. I. EsrRADA DE GERLERO, «En defensa de América: la difusión de litografías de las antigüedades mexicanas en el siglo xix», México en el mundo de las colecciones de Arte, México, vol. 5 (1994), p. 23-36, 27. 12. «El Fenix de la Libertad», 14 de octubre de 1833, México, apud. ; A. AGUILAR OCHOA,

«La influencia de los artistas viajeros en la litografía en México», Anales del Instituto de Investigaciones 13.

416

Estéticas 76 (2000), p. 113-143,

E. PINGRET, cuaderno

2, p. 40.

122.

La colección de antiguedades mexicanas de Édouard Pingret (1788-1875)

Pingret no tiene palabras suaves para los mexicanos a los que acusa de negligentes, ladrones y poco refinados. La corrupción generalizada del país lo horroriza : «A la gente solo le interesa hacer dinero ». Escribió dos opúsculos sobre México, el primero, Notes manuscrites sur le Mexique, hoy desaparecido, fue remitido al Emperador Napoleón III, el 8 de noviembre de1862**. Es probable que tratara de la situación política de México en vísperas de la intervención francesa. El segundo es una novela intitulada Les voleurs au Mexique ^, también perdida. Los tres cuadernos que estamos comentando fueron realizados en Francia. Sabemos que el 14 de enero de 1864 el cuaderno 1 fue remitido a la dirección de museos, a la atención de Mr. Nieuwerkerke. El cuaderno 2 fue redactado

posteriormente, pues el propio Pingret lo llama «2 ensayo de notas sobre las antigüedades aztecas »!'. Este cuaderno es el más completo pues además de contar con un esmerado texto manuscrito, en donde se citan obras históricas

y anécdotas sobre la procedencia y adquisición de algunas piezas, contiene la mayor cantidad de dibujos. También incluye reproducciones en papel calca de las portadas de los dos únicos manuscritos de su colección, una fotografía del calendario azteca y una litografía de un vaso antiguo de Oaxaca, realizado por Pingret a petición de Brasseur de Bourbourg". El cuaderno 3 mantiene los principales dibujos de las piezas de su colección, pero el texto es más depurado y en él se omiten muchas de las notas corrosivas y ataques dirigidos a coleccionistas y funcionarios. Me parece que con este texto y sus dibujos el autor buscaba dejar atrás, las recriminaciones lanzadas a la administración francesa en los dos anteriores cuadernos, por haberlo privado del mérito de aparecer como el representante legal del museo mexicano del Louvre en México y de ver expuesta ahí su colección, como lo explicaremos a continuación. Édouard Pingret antes de llegar a México (1788-1850)

Los sesenta y dos años que residió Édouard Pingret en Francia antes de exilarse a México, transcurren sin duda en uno de los periodos más agitados de toda la historia moderna de ese país. Desde la revolución de 1789 hasta la instauración de la II Repüblica en 1848, se suceden vertiginosamente páginas sangrientas y gloriosas de su historia, con intervalos más tranquilos que conllevan a la recomposición de la clase política, la promoción de la burguesía por las armas y la administración, la exaltación de los valores nacionales, la conquista de los ideales republicanos y la eclosión del mundo de los negocios con algunos resultados espectaculares en la industria (Gobain, Ternaux,) y en la banca (Laffitte, Perregaux)'$.

14.

Ibid., p. 40.

15. «Carta de Pingret al conde Nieuwerkerke ». 16. E. PINGRET, cuaderno 2. 17. Ibid. p. 68. 18. J. CARPENTIER, F. LEBRUN, Histoire de France, Paris, Points Seuil, 2000, p. 241-249.

417

Isabel Fernandez Tejedo

En el trasiego político y social de este periodo en ebullición, Pingret se desempeña sin muchas privaciones. Nace en el seno de una familia de propietarios agrícolas y entre sus parientes se cuentan notarios y magistrados del departamento de Aisne, de donde es originario. A los 14 años llega a París con su padre, representante en la Convención, quien lo coloca en el taller de David. Alrededor de 400 aprendices artistas se han contabilizado entre los discípulos de esta influyente figura", pintor tanto de jacobinos exaltados como de notables y burgueses del nuevo régimen imperial. Pingret guarda de este breve episodio la influencia de las reglas neoclásicas y el gusto por el género histórico, gloria incontestable de la escuela francesa, con David como jefe de filas””. Trabaja también en el taller de Henri Regnault a partir de 1822. Si muchos artistas deseaban ardientemente el Premio de Roma para poder viajar a Italia y satisfacer sus anhelos de exotismo e inspiración en los inagotables vestigios de la capital del arte, Pingret tuvo el privilegio de contar con el peculio familiar que le permitió realizar estudios en la Academia de San Lucas en Roma y realizar viajes a Suiza y al norte Italia. Dan testimonio de estos paseos varias publicaciones aparecidas entre 1825 y 1834”!. Los críticos de la época veían con razón en la pintura de Pingret una cierta dificultad para tratar el paisaje y los espacios abiertos, y reconocían mayor soltura en sus vistas cerradas e íntimas”. Los dibujos muestran ya ese interés narrativotestimonial, casi etnográfico, que tanto le inspiraron las costumbres locales y los trajes populares tradicionales de las diferentes regiones de Europa y que posteriormente también dibujaría en México. Edouard Pingret aprovechó plenamente el desarrollo de la litografía en Francia para difundir imágenes en libros y fue en este campo en donde tuvo mayor éxito, como lo prueban las numerosas publicaciones que salieron a la luz? Pero la obra más prestigiosa de esta serie de libros ilustradas, considerada por Pingret « de gran éxito», fue la magnífica edición en cuero rojo con cantos dorados, de gran formato, editada por el pintor y dedicada, de su puño y letra a su Majestad la reina Victoria: Voyage de S. M. Louis-Philippe I" roi des francais au château de Windsor^. Su misión como pintor y editor de la obra fue dar una « crónica pintoresca de los lugares y personajes ilustres de

19. S. LEE, David, Paris, 2002, p. 97-99. 20. G. ScuunR, Les petits maîtres de la peinture, Paris, Les Éditions de l'Amateur, 1989, p. 9.

21. E. PINGRET, Un mois en Suisse, ou souvenirs d'un voyage, croquis et lithographies d’après nature par E. Pingret, Paris,

1825;

E. PINGRET, Recueil des costumes Suisses, dessiné d'apres

nature et litographies par Édouard Pingret, Paris,

1824-1826;

Promenades

sur le Lac de

Walenstadt et au pays de Grisons, par le Vte de Senonnes et E. Pingret, Paris, 1827; E. PINGRET,

Costumes des Pyrénées, dessinés d’après nature et lithographies par E. Pingret, Paris, 1834. 22.

Revue

23.

E. PiNGRET,

Francaise, XIII Monuments

(1830), Paris, p. 278. et

sites

les

plus

remarquables

du

département

de

l'Aisne,

litographies par E. Pingret, notes explicatives de M. Brayer, Paris, 1821; E. PINGRET, Vue pittoreques de Maisons-Lafitte, dessinées d'aprés nature par Ed. Pingret et litographies par Tirpenne, Bour, Monthelier, Paris, 1838. 24. E. PINGRET, Voyage de S. M. Louis-Philippe I* roi de francais Paris, 1846.

418

au château

de

Winsor,

La colección de antiguedades mexicanas de Édouard Pingret (1788-1875)

este evento »”. De nuevo Pingret muestra su interés por el testimonio visual, muy apreciado del püblico de la época, precursor del periodismo en imágenes. Durante mucho tiempo el Salón Anual de pintura de París fue la ünica manifestación oficial donde los artistas podían exponer y vender sus obras. Franquear sus puertas era un reto para los pintores de la época y aunque el número de cuadros admitidos fue siempre en aumento, algunas estimaciones señalan que al menos la mitad de los trabajos era rechazada*. Pingret ingresó al Salón desde 1810 y obtuvo varios reconocimientos". Dada la óptima situación en que se encontraban las artes durante el reinado de Luis Felipe su carrera iba en ascenso. Recibió así una comisión importante para realizar varias telas históricas cuando se renovó e] palacio de Versailles con miras a crear el Museo Imperial”. Realiza también muchos oleos de temas históricos? y retratos de notables y aristócratas?. Pingret no brilla como pintor de género pues no logra crear ni atmósferas ni animaciones ; relega los paisajes y los ambientes para dejar paso a los protagonistas en actitudes francamente estereotipadas. La revolución de 1848 con la consecuente caída de la familia de Orleáns fue la causa de «innombrables pérdidas económicas que lo obligaron (a Pingret) a expatriarse momentáneamente e ir a México a ejercer su talento de pintor de género y de retratista »?!. La residencia en México 1850-1855

Después de una corta temporada en Cuba, Pingret llega a México con un abundante equipaje compuesto entre otras cosas de pintura de «nuestros mejores maestros modernos que los mexicanos aun muy atrasados no supieron apreciar »?, por lo que el pintor tuvo que regresarlas a Francia cuando dejó el país. La comercialización de objetos de arte se inscribía plenamente en la moda europea del coleccionismo de antigüedades, tanto de objetos medievales como de remotas civilizaciones, por lo que el mercado adquirió en poco tiempo una dimensión internacional de la que quiso aprovecharse plenamente Pingret trayendo de Europa y llevando de México cuanto objeto le resultaba negociable.

25.

Ibid., introducción.

Véase también

la libreta preparatoria a la edición, Album

Pingret,

Département d'art grahiques BNF, RF6952 a RF7052. 26.

A. MARTINE-FUGIER, La vie d'artiste au xix*, Paris, Hachette, 2007, p. 141-147.

27. Una medalla de segunda clase en 1824 y otra de oro en 1831. El meritorio título de Caballero de la Legión de Honor le fue acordado en 1839, dans E. BÉNÉZIL, Diccionnaire des peintres, sculptures, dessinateurs et graveurs, vol 10, Paris, 1999.

28. Las telas están montadas sobre medallones y recuadros estucados en la Galería de las Batallas y hacen alusión a varios episodios militares: Combat d'Abou-Mane ; Prise d'Alexandrie; L'armée

29.

francaise

traverse les ruines de Thébes, entre otros.

Madame de Maintenon à Saint-Cyr y Molière faisant l'aumóne, entre otros.

30. Principe de Joinville;

Maurice

Paganani

y la Visita de la duquesa

de Berry

a la

manufactura de Saint-Gobain, entre otros. 31. E. PINGRET, cuaderno 2, carta introductoria. 32.

E. PiNGRET, cuaderno

1 p. 3.

419

Isabel Fernandez Tejedo

Pingret no es el viajero típico del siglo xix, su obra no se inscribe en la tradición de Linati, Egerton, Rugendas o Waldeck, por citar los más notables de esa primera mitad de siglo, aunque pueda compartir con ellos ciertos rasgos. A sus 62 años el pintor no buscaba en su viaje a México ni lo exótico, ni lo desconocido, ni los variados paisajes, ni el descubrimiento de ruinas o la curiosidad científica. Pingret viene a la capital para hacer negocios y recuperarse de su quiebra económica. Dibujó lo que vio en la ciudad de México, donde vivió sin hacer grandes viajes, urbe lo suficientemente mundana para encontrar en sus calles: aguadores, vendedores de todo tipo, serenos, charros

a caballo y demasiado pequeña para prescindir de las curiosas costumbres rurales; campesinos, tlalchiclero y pastores con vestimentas típicas. Pero su oficio de pintor lo ejerció sobre todo en el círculo de personajes notables y adinerados: terratenientes, diplomáticos, familias pudientes, políticos, obispos. Pintar era su oficio y en México lo ejerció con desenvoltura en un medio artístico menguado y poco competido, valiéndose de las estrategias que con buen resultado le habían asegurado en el pasado el éxito que aquí en México también encontró: exponer en la academia de San Carlos y vender a la clase acomodada. La noticia de la inauguración del museo mexicano del Louvre en París*, no fue del conocimiento de Pingret hasta finales de octubre de 1851?*. Sin perder tiempo el artista escribe una carta al director de los museos imperiales de Francia, ofreciendo sus servicios para fungir como negociante de antigüedades mexicanas, a nombre del Museo. Para cumplir su «misión con celo y probidad », bastaría con indicarle el monto que se deseaba invertir y poner el dinero en manos de su esposa en París. Pedía se le remitiera una carta con el nombramiento dirigida al ministro mexicano de Asuntos Exteriores y sugería evitar entrar en relación con las autoridades de la representación francesa en México, por razones que rehúsa especificar. Pingret era categórico respecto a las antigüedades que se podían encontrar en México. Las joyas y piedras preciosas antiguas eran escasísimas, más comunmente se encontraban ídolos y urnas funerarias, pero realizando varios viajes y excavaciones por las provincias reputadas por sus ruinas arqueológicas, explicaba, «tendríamos de que alimentar nuestro museo ». El artista se muestra entusiasta y se jacta de tener relaciones con los «directores de arte de México » quienes lo auxiliarían en todo. Sugiere además realizar varias reproducciones de los mejores y más bien conservados monumentos. El museo de México no es «muy grande por haber sido vendido parcialmente a los ingleses» y podríamos, prosigue, sin mayor problema, realizar varios moldes en vacíos o sobre estuco de la mayoría de las piezas. Envía incluso las dimensiones de cada uno de los monumentos

33.

La inauguración se llevó a cabo en 1850 en el sótano de la cour carrée du Louvre, con el

nombre de: «Musée d'antiquités mexicaines, algériennes et ethnographiques », posteriormente se le llamó: « Antiquités Américaines (Mexique et Pérou)», ver el libro editado sobre los objetos de la colección: H. A. PRÉVOST DE LONGPÉRIER, Notice des monuments exposés dans la salle des antiquités américaines

(Mexique

et Pérou) au Musée

du Louvre, Paris,

1850.

34. «Carta de Pingret al director de museos nacionales, 4 nov. 1851 » dans AMN, 1860.

420

A-5, 1851-

La colección de antiguedades mexicanas de Édouard Pingret (1788-1875)

imprescindibles? y pide instrucciones sobre el procedimiento de empaque. Menciona que ya los ingleses habían hechos moldes de los principales monumentos en 1820, mismos que se exhibían en Londres. Además, el museo

contaba en la época con un fondo documental importante de manuscritos jeroglíficos, mapas y papeles diversos que sugiere transcribir y calcar de los originales respetando los colores*. Pasado un mes sin respuesta, Pingret vuelve a escribir al director para pedir instrucciones y la confirmación de su misión. Habla ahora de la amistad que ha entablado con un mexicano, «naturalista muy instruido en todo lo que amerita estudio » que prestará sus luces a cambio de una retribución. Dicha persona, citada en otros papeles, era el arquitecto de la Hidalga, quien lo asistiría en todas las cuestiones técnicas, como sacar los permisos para hacer los moldes del calendario, realizar excavaciones con los indígenas en sitios de interés y transportar los gigantescos moldes desde la ciudad de México hasta Veracruz”. Pingret refiere finalmente sus influyentes vínculos con la esfera del poder, da el nombre del general Arista, jefe del gobierno en ese momento, al que había hecho un retrato (actualmente en Palacio Nacional);

el arzobispo de Puebla y la familia de Santa Anna, en especial el suegro del presidente con el que había estrechado una fuerte amistad. Pingret retrató a la joven Dolores de Tosta, segunda esposa de Santa Anna. Esta pintura, nos informa en un cuaderno, fue colgada de una cuerda y quemada con todas las pertenencias de la primera dama en una calle de la capital cuando Santa Anna fue destituido de la presidencia por onceaba y última vez en 1854, « Todo me será permitido... (se jacta Pingret) dado que a los mexicanos no les interesa el arte y son ignorantes»”. Al estar cerrando la carta, escribe el pintor, le llegaron a ofrecer un hermoso tambor de madera que dibuja e incluye en el texto (fig. 2) y que hoy forma parte de la colección del museo Quai Branly. Pingret agrega que el valioso instrumento tiene un homólogo adquirido por los ingleses por 500 piastras. Mientras tanto, la esposa del pintor exigía en una nota desde Francia, una respuesta oficial, ya que al parecer Edouard estaba comprando piezas sin contar aún con la confirmación oficial*. Conocemos el escrito de Nieuwerkerke fechado el 13 de enero de 1852 dando instrucciones al conservador del museo para que avisara de inmediato al interesado que no había

35. «El gran calendario azteca», el «altar de sacrificios» (piedra de Tízoc) y de la « famosa Teoyatimique » (Coatlicue). 36.

«Carta de Pingret al director de museos nacionales, 4 nov. 1851 » dans AMN, AS,

1851-

1860. 37. Pingret resalta la habilidad de la Hidalga quien había traslado la estatua de Carlos IV, en una sola noche, desde un extremo de la ciudad al otro. 38.

E. PINGRET, Cuaderno

39.

«Carta de Pingret dirigida al director de los Museos de Francia, 4 dic., 1851 », dans AMN

2, p. 40.

AS 1851-1860. 40. «Carta de Mme Pingret al intendente general de los museos imperiales del Louvre, 11 de enero de 1852» dans AMN,

A-5 1851-1860.

421

Isabel Fernandez Tejedo

fondos para nuevas adquisiciones*!. Desconocemos la reacción del Pingret ante la negativa del museo, pero el resultado tuvo poco o nulo impacto en su actitud ya que el pintor continuó comprando objetos diversos y aumentando día a día su colección. “EYES

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Figura n? 2: Dibujo de un instrumento musical o teponaxtli enviado por Édouard Pingret en una carta al director de los museos imperiales, en AMN A5-1851.

A] dejar México Pingret expidió a París 30 cajas en las que empacó las antigüedades mexicanas, obras de arte en general, objetos de historia natural y 50 onzas de oro destinadas a su hija. Tres cajas llegaron pulverizadas y por lo menos ocho, con los objetos más preciosos, desaparecieron en el naufragio del Clarisse-Emma de Nantes que encalló y perdió el cuerpo y sus bienes en la laguna de Campeche. A pesar de las pérdidas le quedaban aün 2,000 piezas arqueológicas y algunos documentos”. Casi el doble de la colección del Louvre que contaba en la época con 657 piezas*. Pingret regresa a Francia en 1855 e instala la colección en su domicilio personal. El 6 de octubre remite una invitación al director de los Museos Imperiales para darle a conocer los objetos traídos de México“. La dirección nombró a H. A. Prévost de Longpérier, de la academia francesa, autor en 1850 de las notas explicativas sobre los monumentos expuestos en la sala de antigüedades americanas*?. Cuando el comisionado se presentó en la casa del pintor éste se encontraba ausente y la colección, al decir del artista, no le fue mostrada en su totalidad. Argumento que retomara en las 4 cartas que se suceden y en las notas de los cuadernos 1 y 2. Ningún comentario ni nota posterior a la visita del delegado le fueron notificados. A pesar del silencio de la administración, la colección adquiere en el momento cierta notoriedad,

gracias a un artículo aparecido en el periódico Le Constitutionnel, en el que el autor, E. Tardieux, alaba el celo del coleccionista y el buen gusto del artista, sin dejar de levantar la duda sobre la autenticidad de alguna de las

41. «Carta de Nieuwerkerke al conservador de antigüedades, 13 enero de 1852» dans AMN, A-5, 1851-1860. 42. E. PINGRET, cuaderno 2, p. 4. 43. H. A. PRÉvosT DE LONGPÉRIER, Notice des monuments. 44. «Carta de Pingret a la dirección de museos, 6 de oct. 1855», dans AMN, A-5 1851-1860. 45. H. A. PRÉVOST DE LONGPÉRIER, Notice des monuments.

422

La colección de antiguedades mexicanas de Édouard Pingret (1788-1875)

piezas*. A raíz de la visita de Longpérier, el rumor sobre la falsedad de las piezas de la colección de Pingret se había difundido en el medio americanista como se puede constatar en la documentación fechada a posteriori. Pingret quiso entonces «ver a todas las personas capaces de esclarecerlo sobre el valor de su colección »*’. Varias personalidades de la cultura desfilaron por su casa intrigadas en conocer los objetos: Arsene Housfage, inspector de Museos Imperiales y vecino del pintor en el barrio parisino de Baujon* ; Edme-Francois Jomard, sabio egiptólogo; Alexis Aubin, antiguo profesor en México, quien reunió en México una de las más valiosas colecciónes de manuscritos pre y postcoloniales y por la que pedía la exhorbitante cifra de 600000 francos?. Pingret poseía dos manuscritos : uno de ellos era un título de propiedad comunal, descrito como «tira en cuero con un mapa del valle del Anahuac, realizada en colores» y el otro «diez hojas en papel maguey trazado en negro y colores »°?. ¡Este era parte de un manuscrito que Aubin poseía !, según lo verificaron los interesados, « pero ninguno quiso renunciar a su fragmento »*. Pingret anota además, en el cuaderno 2, «todos los documentos (de Aubin) estaban en el Museo Nacional de México », como lo

reconocen las publicaciones sobre éste, « de ahí a saber cómo llegaron a manos de Aubin es otro asunto: los depósitos de documentos raros en México no estaban catalogados, yo señalé a las autoridades en México la desaparición de muchos documentos »*. También Brasseur de Bourbourg visitó la colección sin mostrar ningún entusiasmo y Pingret descargó de nuevo su pluma en el cuaderno 2, haciéndose eco de un rumor popular que contaban los mexicanos sobre las 1000 piastras que el cura Brasseur dejó de pagar a un ebanista por las bancas de su iglesia, pasando por otros escándalos que lo obligaron a huir de la ciudad de México. El ninguneo y desinterés de los sabios y especialistas, el informe negativo de Longpérier quien ponderaba, sin embargo, la importancia de ciertas piezas, pero sobretodo la suspensión del presupuesto asignado para ampliar las colecciones de los museos de Francia, debido a los gastos de la campaña de Crimea, cerraron por un tiempo las negociaciones. Pasados siete años Pingret vuelve a tomar la pluma. Estamos en 1864, Francia ha intervenido militarmente a México y la ocasión le parece al pintor más que propicia para relanzar la venta de su colección: «Mi colección iba a adquirir el valor que nadie le quiso dar en 1855 ». Confiado en que finalmente se le reconocería algún mérito a sus opiniones, Pingret propone ahora a las autoridades francesas la adquisición en bloque del Museo Nacional de

46. «Antiquités Aztèques », 16 de diciembre de 1855, dans Feuilleton du Constitutionnel. 47. E. PINGRET, cuaderno 2, p. 6.

48. Este personaje, gozaba de un sueldo extraordinario por ejercer una función sobre la que no conocía gran cosa, dice Pingret y al no mostrar ningún interés en las piezas ahí reunidas recibe de Pingret el comentario de «contratista de casas amuebladas y escritor de folletones». 49.

E. PINGRET, cuaderno

50.

L. OrTIz

MACEDO,

2, p. 8.

Édouard Pingret,

un pintor romántico, p. 110.

51. Ibid., p. 50. 52. Ibid., p. 3. 53. Ibid., p. 5.

423

Isabel Fernandez Tejedo

México. Argumenta el despropósito e incluso da detalles y consejos sobre la forma en que se transportaría el calendario azteca y otras piezas monumentales. Sugiere también hacer excavaciones tres a cuatro metros por debajo de la catedral para encontrar antigüedades, e informa sobre la existencia de dos téchcatl, o altares sacrificiales incrustados en sendos palacios de la ciudad. Finalmente aconseja se recojan varias antigüedades y unos curiosos mastodontes conservados en el Palacio de Minería”. Ante la insistencia de Pingret, Longpérier es enviado nuevamente a reconocer la colección. En el informe a Nieuwerkerke el comisionado recapitula sobre todos los objetos que vio y destaca la existencia de algunas piezas auténticas y preciosas pero también de una extraordinaria cantidad de falsas. «Los sabios están igualmente de acuerdo con mis conclusiones, si las piezas fueran réplicas sobre moldes, tendrían interés pero son invenciones ridículas. Le podemos comprar 30 piezas pero no la totalidad »”. La propuesta es rechazada por Pingret quien no quiere dividir la colección. Pingret redacta entonces un documento con dibujos que llama Notes sur les antiquités aztéques de M. Pingret y que dirige a Nieuwerkerke el 14 de enero de 1864. Este manuscrito al que nosotros identificamos como el cuaderno 1, es la primera presentación de su colección con dibujos. En éste, Pingret critica abiertamente a Brasseur de Bourbourg, Angrand y Aubin. Posteriormente, consciente sin duda de que la virulencia de sus escritos podría dañar su imagen en el momento en que Francia se acercaba más a México, intentará recuperarlo, como lo confirman las tres notas que existen en el archivo. Las consecuencias le serán finalmente fatales. Pingret negocia entonces la venta de su colección con la casa Rollin et Feuardent, que está dispuesta a adquirir la totalidad de las piezas, aun a sabiendas de que muchas eran falsas. Esta solución sería ventajosa para el museo, dice Longpérier, pues se podrían adquirir entonces unos sesenta objetos notables, perfectamente auténticos, entre ellas varias esculturas de dimensiones importantes y otras más pequeñas de excelente factura. «Si Uds. cree disponer de 3,000 francos el museo haría una adquisición interesante »*. Pingret propone un precio de venta de 14000 francos por el lote completo, pero el tratante rehúsa el precio por excesivo, sin que se concluya el negocio. Longpérier entre tanto había recibido en su despacho varias visitas intempestivas del pintor, quien de forma « amenazante y enfermiza » estaba resuelto a venderle la colección entera y recuperar a como diera lugar el cuaderno 1. Explica que Pingret había hecho dos copias del cuaderno, pues temía que las injurias lanzadas contra Brasseur de Bourbourg y Aubin que allí aparecían, le causaran perjuicio en el momento en que la comisión científica, de la que eran miembros estos dos personajes, dictaminara sobre la adquisición de su colección””.

54. «Carta de Pingret a Longpérier, 12 septiembre 1863 » dans AMN, A-5 1856-1862. 55. «Carta de Longpérier al intendente de los museos, 12 abril 1864» dans AMN, AS, 18561864. 56. «Carta de Longpérier a Nieuwerkerke, 12 marzo de 1864» dans AMN, A-5, 1856-1864. 57. «Carta de Longpérier a Nieuwerkerke, 25 abril de 1864» dans AMN, A-5, 1856-1864.

424

La colección de antiguedades mexicanas de Édouard Pingret (1788-1875)

« Para remontar los tropiezos que desde hacia tanto tiempo le ponían y mostrar con justicia y de forma integral su colección mexicana», Pingret escribe directamente al Emperador por medio del cuaderno 2. En la primera página se lee este epígrafe : « Si el Emperador no puede ver todo, el Emperador debe saber todo». El cuaderno lleva un ex libris con las armas imperiales francesas y prusianas y la inscripción: «Bibliotheke, D. K. Museums fur Volkerkunde » [Biblioteca del Museo

Real de Arte Popular], huella de las

insospechadas andanzas del manuscrito, antes de ser adquirido por el Museo Quai Branly en 2001. A la muerte de Pingret en 1875, la colección íntegra pasó a manos de su hija Mme. Lanet, ünica hereda, al igual que el cuaderno 3, realizado por él mismo, sin duda para promover la venta de la colección. En 1909 los descendientes del pintor deciden rematar la colección de antigiiedades mexicanas a través de una venta püblica en la propia casa que ocupó el pintor antes de trasladarse a Normandía, donde falleció”. M. André Desvouges fungió como comisario de la venta y M. Henri Leman como experto. En el catálogo de la venta se menciona que la colección tenía alrededor de dos mil piezas: «1. Cerámicas y terracotas. 2. Importantes Manuscritos. 3. Instrumento de Música. 4. Estatua de una Divinidad. 5. Serpiente en granito. Piedra lunar esculpida. 6. Curiosa máscara humana

en obsidiana. 7. Cuchillos, Lanzas,

Puntas de Flechas, Hachas. 8. Hueso esculpido y grabados, etc., etc. »? ¿Se trataba de falsificaciones, de copias, de invenciones ridículas, o de auténticas

piezas cuya rareza no era reconocible en la época? Sin duda un poco de todo. Hoy sólo se ubica el instrumento de música o teponaztli adquirido por el Museo de l’Homme en 1952 en la venta de fondos del anticuario Kélékian,

el resto de los objetos se dispersaron sin que se pueda seguir su huella. El Museo Quai Branly posee además un dibujo en una hoja suelta del mismo teponaztli, antigua colección Ratton, realizado por Pingret*. El instrumento está representado en los tres cuadernos y la existencia de este cuarto dibujo podría quizás hacer referencia a los esbozos que Pingret confió a Brasseur de Bourbourg para que se publicaran en Francia*!, o también a los dibujos que pensaba editar en el álbum de trajes civiles y militares mexicanos.

58. 59.

L. Ortiz MACEDO, Édouard Pingret, un pintor romántico, p. 106. Ibid.

60. Hoja suelta con un dubujo de E. Pingret dans MQB 61. P. Monar, Édouard MQB-D000737-32416.

Pingret...

informe

manuscrito

D000737-32416. (2001),

en

MQB

D000737-32413,

425

SIXIÈME PARTIE

Religion et histoire à l'époque coloniale

427

LAS GENEALOGÍAS

DE LA FAMILIA

LA LEGITIMIDAD

MENDOZA

MOCTEZUMA.

DE LOS ILEGÍTIMOS

María CASTANEDA DE LA PAZ

Instituto de Investigaciones Antropológicas, Universidad Nacional Autónoma de México

Introducción

Las llamadas Genealogías de la familia Mendoza Moctezuma son unas pinturas que tiene su origen a finales del siglo xv11, periodo a partir del cual se elaboraron varias copias. En ella aparecen seis señores : tres en un plano superior y tres en un plano inferior, en orden invertido. Todos llevan un glifo onomástico, un texto alfabético que nos explica quiénes son y, en el caso de algunos de ellos, el glifo toponímico del pueblo donde gobernaron. La Genealogía comienza con Tezozomoc, a quien le sigue Cuacuauhpitzahuac, Moctezuma II, Cuauhtemoc, don Diego de Mendoza y don Baltasar de Mendoza. Sin embargo, hay que advertir que no estamos ante verdaderas genealogías. Las mujeres están ausentes y la relación no siempre es de padre a hijo. Se trata más bien de una selección de los señores más emblemáticos del pasado, los cuales están unidos, unos con otros, a través de una serie de líneas que

tienen la intención de señalar el parentesco que existe entre los personajes. Al respecto, ya nos decía Vansina que la memoria es selectiva. Actúa dejando información de lado, destacando lo que es importante para cierto momento histórico, siendo nuestro papel el de averiguar por qué se seleccionaron ciertos eventos y personajes, y no otros!. Este será, pues, el objetivo del presente trabajo. Tratar de saber quién o quienes hicieron las Genealogías, cuándo, por qué y para qué. Lógicamente, para ello se ha analizado la información pictográfica y alfabética de las pinturas, pero también

1. J. Vansina,

Oral Tradition as History, Wisconsin,

University

of Wisconsin

Press,

1985,

p. 20, 68, 191. Los objetivos aquí planteados constituyen también el tercer paso del método etnoiconológico. Sobre dicho método véase M. JANSEN, «The Art of Writing in Ancient Mexico: An

Ethno-Iconological

Perspective»,

Visible Religion.

Annual for Religious

Iconography

6

(1998), p. 86-113, y más recientemente M. Oupnk, «De tradiciones y métodos: investigaciones pictográficas», Desacatos 27 (2008), p. 123-138.

429

Maria Castañeda de la Paz

ha sido fundamental revisar los legajos que acompañan a algunos de estos documentos. Estos serán la clave para entender el contexto histórico en el que se elaboraron estas Genealogías y explicarán el por qué de la existencia de tantas copias. Pero antes de entrar en estas cuestiones se analizarán los antecedentes de estas pinturas y su estilo. Copias, antecedentes y estilo pictórico

Actualmente existen cuatro copias de este documento en diversas instituciones: — La de la Bóveda de Códices de la Biblioteca Nacional de Antropología e Historia (BNAH), catálogada con el núm. 35-11 (fig. 1: BNAH)?.

Es muy

probable que ésta fuera parte de los papeles del matrimonio formado por Roque García y Magdalena Morales de Mendoza. Estos papeles forman parte de un legajo que está en el Archivo Histórico de esta misma Institución, de donde en algün momento debió extraerse la pintura para bajarla a la bóveda de códices de la mencionada Biblioteca. — Una segunda copia está en el Archivo General de la Nación (AGN, Mapoteca, Nüm. Catálogo 1.126) y forma parte del expediente de Diego González Recuenco Mendoza Moctezuma (AGN, Tierras, 1586, exp. 1, fols. lv-2r) (fig. 2: AGN-1)*. — La tercera copia está también en el AGN (Tierras, 2692, parte 2, exp. 19,

fols. 64v-65r) y forma parte del expediente de los caciques de Axacuba y Tetepango (fig. 3: AGN-2)*. — La cuarta y ültima copia es la que resguarda la Hispanic Society de Nueva York (HC 397/497». Desafortunadamente esta última está descontex-

tualizada ya que es la única que no se halla acompañada de un legajo (fig. 4: H.S.). E] antecedente de las Genealogías de la familia Moctezuma podemos suponerlo en algunos de los retratos de la Relación Geográfica de Texcoco

2. Este documento se halla reproducido a color, pero de manera parcial y sin comentario alguno, en la revista Ciencia 57-4 (2006), p. 87. En su comentario al Códice Ixtlilxóchitl, S. van Doesburg

lo reprodujo completo en fotos en blanco y negro de buena calidad: S. van DorsBurG (éd.), Códice Ixtlilxóchitl. Apuntaciones y pinturas de un historiador. Estudio de un documento colonial que trata del calendario naua, Madrid, Graz, México, Sociedad Estatal Quinto Centenario, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, Fondo de Cultura Económica, 1996, p. 21-23.

3. La imagen de esta Genealogía puede consultarse en el buscador del AGN (http ://www.agn. gob.mx/guiageneral : «Mendoza Moctezuma». Abrir luego la carpeta Genealogía de Diego de Mendoza Austria y Moctezuma), digitalizada en muy alta calidad. Asimismo, véase una foto a color en el Catálogo Documental, cultura y derechos de los pueblos indígenas de México, México, Secretaría de Gobernación, Archivo General de la Nación, 1997, p. 97. Un dibujo a color puede consultarse en A. CHAVERO, México a través de los siglos, México, Editorial Cumbre S.A., 1884, vol. III, cap. X, entre p. 92 y 93.

4. La imagen de esta Genealogía puede consultarse en el buscador del AGN (http ://www.agn. gob.mx/guiageneral : «Mendoza Austria Moctezuma». Abrir luego la carpeta « Genealogía de la Casa Moctezuma; Tetepango, Hgo. »). 5. Esta copia ha sido reproducida en una foto a color en {{{uminated Manuscripts, Madrid,

The Hispanic Society of America, 2006, p. 165.

430

Las genealogias de la familia Mendoza Moctezuma

Figura n° 1: Genealogía de la familia Mendoza Moctezuma, Biblioteca Nacional de Antropología e Historia nám. 35-11

Figura n? 2: Genealogía de la familia Mendoza Moctezuma, Archivo General de la Nación (AGN, Mapoteca, Núm. Catálogo 1.126), forma parte expediente de Diego González Recuenco Mendoza Moctezuma (AGN, Tierras, 1586, exp. 1, fols. 1v-2r) 431

Maria Castañeda de la Paz

Figura n° 3: Genealogía de la familia Mendoza Moctezuma, AGN (Tierras, 2692, parte 2, exp. 19, fols. 64v-65r), forma parte del expediente de los caciques de Axacuba y Tetepango (Fig. 3: AGN-2)

1} 4

-

$

.

ripae

Figura n? 4: Genealogía de la familia Mendoza Moctezuma, Hispanic Society de Nueva York (HC 397/497)

432

Las genealogias de la familia Mendoza Moctezuma

(1986), los cuales hoy conocemos a través de la obra de Ixtlilxóchitl*. En base

a su estilo, y debido a que en dicha Relación se describe un «Retrato del rey con una manta de algodón azul », van Doesburg sugirió que el retrato al óleo de Moctezuma II que hay en una colección de Florencia podía estar inspirado en ése de rey con manta o tilma de algodón azul". En dicho retrato aparece un Moctezuma de cuerpo musculoso y en posición de tres cuartos. Sus piernas entreabiertas están ligeramente flexionadas, dando la impresión que una de ellas se adelanta, otorgándole cierto escorzo al personaje. Su cara se gira hacia un lado, aunque los ojos miran hacia el espectador. El personaje viste un maxtlatl y una tilma azul ricamente decorada, la cual deja parte de su torso desnudo. En su cabeza lleva la xiuhhuitzolli (diadema real de turquesa) y en una de sus manos una larga flecha. Por su estilo, y en base a la descripción de un sefíor con manta azul, Doesburg relacionó el retrato del señor de Texcoco y el de Moctezuma II, con el de los sefiores dibujados en la Genealogía de la familia Mendoza Moctezuma?. De hecho, es interesante observar que en alguna de las copias, el personaje que abre cada una de estas Genealogías — Tezozomoc- está dibujado con una tilma azul. Ahora bien, la composición y adaptación que hizo el pintor que hiciera la primera Genealogía también recuerda a la que en su momento realizó Gemelli Carreri. En cierto momento este italiano accedió a los retratos de los sefiores texcocanos, pero sustituyó sus nombres por los de los señores de

Tenochtitlan'?.

Así,

Nezahualpilli

(de

pie)

se

convirtió

en

Tizoc;

Nezahualcoyotl en A xayacatl; Cuautlatzacuilotzin en Ahuizotl ; Nezahualpilli (sentado) en Moctezuma;

y Tocuepotzin en Cuauhtemoc.

Esto es exacta-

mente lo que hizo el pintor de la Genealogía, pero seleccionando a los personajes más prestigiosos del pasado prehispánico y a otros de su interés, a los cuales ahora unió a través de una línea. Por todo ello también creo que los

6. «Relación de la ciudad y provincia de Tezcoco», en R. AcuÑa (éd.), Relaciones geográficas del siglo xvi: México, México, Universidad Autónoma de México, 1986, p. 21-113. En su

comentario al Códice Ixtlilxóchitl, Sebastián van Doesburg, p. 17-20 señala que entre los manuscritos que Ixtlilxochtil consulté estaba la Relación Geográfica de Texcoco. Debido a que la copia que actualmente existe de la obra de Pomar no tiene ilustraciones, las cuales sí se describen en el texto de la Relación, van Doesburg deduce que Ixtlilxóchitl se las apropió y las incorporó en la segunda parte del hoy llamado Códice Ixtlilxóchitl. 7.

S. VAN DOESBURG,

El Códice Ixtlilxóchitl, p. 20-21, 25.

8. S. van DorsBurG, El Códice Ixtlilxóchitl, p. 20. El autor se refería a la Genealogía de la

BNAH. 9. Para un exhaustivo estudio de los diferentes tipos de tilmas remito al lector al trabajo de J. OLKo, Turquoise Diadems and Staffs of Office. Elite Costume and Insignia of Power in Aztec and Early Colonial Mexico, Varsovia, Sociedad Polaca de Estudios Latinoamericanos, Centro de Estudios de la Tradición Clásica de la Universidad de Varsovia, 2005, p. 181-239. 10. A decir de S. van DoEsBurG, El Códice Ixtlilxóchitl, p. 27, los papeles de Ixtlilxóchitl

pasaron a formar parte de la colección del profesor y matemático don Carlos de Sigüenza y Góngora. Dicha colección fue consultada en 1697 por Gemelli Carreri quien litografió varios dibujos. 11.

S. van DozsBURG,

El Códice Ixtlilxóchitl, p. 27-28.

433

Maria Castañeda de la Paz

retratos de Texcoco fueron el precedente o la inspiracién para elaborar la Genealogía de la familia Mendoza Moctezuma. Es difícil saber cuál de las cuatro Genealogías se hizo primero porque todas son tardías y el estilo sólo depende de la destreza o habilidad del pintor. Aquí sólo diremos que todas son afines al género techialoyan, grupo definido por Robertson por su estilo tan particular!?. Como este autor señaló, los techialoyan son documentos del periodo colonial tardío, fechados en la segunda mitad del siglo xvi y primera mitad del siglo xvii, donde los personajes tenían poses y actitudes similares a las del arte barroco, vestían tilmas o pieles, llevaban incipiente barba y cargaban arcos, flechas o macanas, entre otras características. Sin embargo, fue Wood quien terminó aportando las evidencias que demostraban que las Genealogías pertenecían al corpus techialoyan, y lo hizo gracias al recién descubierto Techialoyan de Tolcayuca (Estado de Hidalgo)". Como ella observó, en la portada de ese techialoyan aparecía don Diego de Mendoza dibujado de manera casi idéntica al don Diego de la Genealogía que se resguarda en el BNAH (fig. 1)'*. No es además casualidad que tanto en el techialoyan como en la Genealogía de la BNAH también se utilizara el pan de oro en las xiuhhuitzolli y otros adornos de los personajes (fig. 1), recurso decorativo muy frecuente en documentos tardíos como el Códice Techialoyan García Granados". De estilo más naturalista es una de las Genealogías del AGN y la que se encuentra en la Hispanic Society de Nueva York. Las formas redondeadas y musculosas de los cuerpos humanos son más propias de este gusto romántico, que también queda expresado — en el caso de la del AGN —, mediante la incorporación de los personajes dentro de un paisaje (fig. 3 y 4). La Genealogía de la familia Mendoza Moctezuma: lectura e interpretación

A continuación iremos describiendo a cada uno de los personajes, sus glifos onomásticos y otros detalles que los acompañan. Nos servirá de referencia el texto alfabético que aparece junto a cada señor, del que ofreceré una lectura libre. No obstante, el lector podrá servirse del cuadro para comparar la transcripción de los textos que hay en cada una de las copias (cuadro 1). En líneas generales puede decirse que todos los representados son importantes gobernantes, como se indica a través de sus ricas tilmas, los maxtles,

y por la xiuhhuitzolli que cada uno lleva ceñida en su cabeza. Son además grandes guerreros como se expresa a través del prestigioso quetzalpatzactli, un tipo de insignia hecha de plumas verdes de quetzal que los señores solían

12. D. RoBERTSON, « Techialoyan Manuscripts and Paintings, with a Catalog », en R. WAUCHOPE (éd.), Handbook of Middle American Indians, Austin, University Texas Press, 1975, vol. 15, p. 253-280. 13. S. Woop, «Don Diego García de Mendoza Moctezuma. A Techialoyan Mastermind ? », Estudios de Cultura Náhuatl 19 (1989), p. 245-268. 14. S. Woop, «Don Diego», p. 254. 15. X. Noauzz, R. HERNÁNDEZ (éd.), Códice Techialoyan García Granados, México, Gobierno del Estado de México, El Colegio Mexiquense, 1992.

434

Las genealogias de la familia Mendoza Moctezuma

llevar en las batallas . Todos portan arco y flechas, haciendo alusión a su ascendencia chichimeca, la cual iba asociada a su carácter guerrero. El único que está fuera de estos cánones es don Baltasar de Mendoza, quien ya aparece vestido a la usanza española y asociado a otros elementos. Esta distinción, y el hecho de que sea el último señor de la Genealogía, muestra que él o algún descendiente reclamaba ciertos derechos a través de su parentesco. A continuación iremos describiendo a cada uno de ellos. « El emperador Tezozomoc, que fue señor de Azcapotzalco, de quien descendienden los sefiores de Santiago [Tlatelolco] y México [Tenochtitlan] »

Tezozomoc fue el creador del gran imperio tepaneca, cuya capital fue Azcapotzalco. Con el tiempo, Tezozomoc se convirtió en una figura legendaria a la que se seguían remitiendo muchos documentos tardíos como los techialoyan. En las Genealogías es el primero de los sefiores representados, en este caso a través de su glifo: una cabeza de perfil, la mitad cara y la otra mitad piedra". Junto a él se representó una xiuhhuitzolli, que suele ser parte del glifo de Moctezuma, aunque aquí quizás se dibujó en alusión a su título de huey tlatoani o «emperador». A sus pies, el glifo de Azcapotzalco, una hormiga (azca-tl) dentro de su hormiguero (azcapotzal-li) y el locativo

«en»

(co).

« Cuacuauhpitzahuac, primer rey de Santiago [Tlatelolco], hijo de Tezozomoc »

E] conjunto de las fuentes coinciden en señalar que Cuaucuauhpitzahuac fue el primer sefior de Tlatelolco y que éste era hijo de Tezozomoc. Esto significa que el linaje real tlatelolca tenía su origen en Azcapotzalco y que por tanto sus sefiores eran de ascendencia tepaneca, hecho que efectivamente corrobora la línea que une a padre e hijo. El glifo onomástico de Cuacuauhpitzahuac está junto a su mano alzada y se compone de unas ramas delgadas'*. Al lado de su quetzalpatzactli se comenzó a dibujar una xiuhhuitzolli, pero por alguna razón sólo quedó dibujada la banda roja con la que se la ataban. Entre las piernas del personaje se dibuja el glifo de Tlatelolco, un montículo arenoso, en cuyo interior hay un escudo con flechas y una macana. La inclusión de estas armas — a veces con un águila coronada con una xiuhhuitzolli — es en mi opinión una reelaboración tardía que se plasma con asiduidad en los documentos de este periodo. Puede verse, en dos ocasiones, entre el nopal del Códice Techialoyan García Granados (1992), en los fols. 10r y 12v de la

16. Sobre esta y otras insignias véase J. OLko, Turquoise, p. 250-286. 17.

Generalmente su glifo lleva también una voluta moteada.

Con o sin voluta, nunca se ha

podido ofrecer una lectura adecuada de este glifo onomástico. Sólo la piedra (te-t/) reproduce parte de su nombre. 18. Ramas de árbol (cuahuitl en composición cuauh-itl, que se reduplica) delgadas (pitzahuac). A veces se comparan con astas de venado por su similitud con las delgadas ramas de un árbol.

435

Maria Castañeda de la Paz

Ordenanza del Señor Cuauhtemoc (2000)", en los Anales de la conquista de Tlatelolco (1989), e incluso en la fachada de estilo neoclásico de la iglesia de Tlatelolco. « El monarca Moctezuma que fue del Imperio Mexicano »

E] personaje retratado debe ser Moctezuma II. Su glifo está representado por una simple xiuhhuitzolli en alusión a su rango de tecuh-tli o señor principal”. Pero a diferencia de Tezozomoc, al que le dan el título de emperador, el señor tenochca recibe el título de monarca. En la imagen aparece unido a Cuacuauhpitzahuac mediante una línea, aunque sabemos que entre ambos no había ningún vínculo de parentesco, por no decir que los separaban dos siglos de distancia. Mientras Cuacuauhpitzahuac fue el primer señor de Tlatelolco, Moctezuma II fue el último señor prehispánico, al que los españoles encontraron al llegar a Tenochtitlan. No obstante, debe hacerse notar que de manera intencional, alguien borró la glosa original alusiva a Moctezuma II en la Genealogía que está en la BNAH y añadió «(Neza)gualcoyol primero Rey de tescuco ». Obviamente lo hizo con claras intenciones que luego mencionaremos. «Don Fernando Cortés Moctezuma Huitzilihuitl,

nieto del Emperador Axacayatl »

Fernando Cortés es el nombre cristiano que Cuauhtemoc recibió poco antes de ser ahorcado por Cortés, en el camino de vuelta de Guatemala. Los autores de las Genealogías, sin embargo, añadieron los apellidos Moctezuma y Huitzilihuitl. El primero, sin duda, para vincularlo con el gran tlatoani de Tenochtitlan; el segundo, por lo que parece ser un problema de disyunción y, por tanto, de pérdida de relación entre el significado y el significante de su glifo onomástico”. Es probable que el pintor ya no entendiera que el glifo de Cuauhtemoc era un águila hacia abajo (descendiendo)? y por ello le dió la vuelta. A partir de entonces lo leyeron como Huitzililihuitl (« Plumón de colibri»), nombre que aún debía permanecer en la memoria colectiva, pues también era el nombre del segundo tlatoani de Tenochtitlan. Por otro lado, que Fernando Cortés Moctezuma Huitzililhuitl era Cuauhtemoc

lo

corroboran,

asimismo,

otros

documentos

tardíos.

Por

ejemplo, los trasuntos que en el siglo xvii se hicieron de las cédulas del 16

19, P. VaLLE, R. TENA (éd.), Ordenanza del Señor Cuauhtémoc, México, Gobierno del Distrito Federal, 2000. En un trabajo reciente, M. OuDuk y M. CASTAÑEDA DE LA Paz, «El uso de fuentes

históricas en pleitos de tierras: La Crónica X y la Ordenanza de Cuauhtemoc », Tlalocan (en prensa), determinan que la Ordenanza se elaboró a inicios del siglo xvi. 20.

En

R. H. BarLow,

J. MoNiARÁs-Ruiz,

«Anales

E. Limón,

M.

de DE

La

la conquista Cruz

PAILLÉS

de H.

Tlatelolco (éd.),

en

1473

Tlatelolco.

y

en

Fuentes

1521»,

en

e historia,

México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, Universidad de las Americas, 1989, vol. 2, p. 187. 21. Su nombre suele traducirse como « Nuestro (-mo) señor (tecuh-tli) enojado (zoma)» y

además de la xiuhhuitzolli, aparece representado un bezote como símbolo de su estatus. 22.

Sobre la disyunción véase M. OuD1k, «De tradiciones», p. 125-126.

23. Águila (cuauh-tli) que desciende (temo en tiempo pasado).

436

Las genealogias de la familia Mendoza Moctezuma

de agosto de 1563 y del 14 de abril 1523, donde este personaje aparece como Fernando Cuauhtemoc Huitzilihuitl o como Fernando Cortés Cuauhtemoc". Ahora bien, es asimismo a partir de la segunda mitad del siglo xvi cuando en el centro de México comienza a circular la idea de que Cuauhtemoc estaba casado con la hija de Moctezuma II y que ambos eran los padres de don Diego de Mendoza, el siguiente sefior retratado. En realidad, quizás sea eso lo que desea expresar la línea que une a Moctezuma II con su supuesto yerno, pero sobre ello se hablará más adelante. Para finalizar, sólo queda aclarar que Cuauhtemoc no era nieto de Axayacatl como sostiene la glosa. Axayacatl era padre de Moctezuma II, mientras que Ahuizotl lo era de Cuauhtemoc”. Un error histórico que parece estar motivado por el paso del tiempo y no por cierta intencionalidad. « Don Diego de Mendoza Austria

y Moctezuma,

hijo legítimo de don Fernando Cortés Huitzilihuitl » A diferencia de la documentación de finales del siglo xvii y de buena parte del siglo xvi, las fuentes del siglo xvi dan muy poca información sobre don Diego de Mendoza. Estas básicamente se limitan a decir que don Diego fue cacique y gobernador de Tlatelolco entre 1549 y 1562, aíio en el que murió dejando tres hijos: Melchor, Gaspar y Baltasar?*. Sin embargo, en los documentos del periodo colonial tardío — como en las Genealogías — es cuando este personaje aparece con los apellidos Austria Moctezuma” y cuando se dice — como indica la glosa —, que era hijo legítimo de Cuauhtemoc. Por este motivo es por el que aparece unido a su supuesto padre a través de una línea. Sea como fuere, el personaje se nombra a través de un glifo onomástico que representa la cabeza de lo que parece un león, pero que muy probablemente,

24.

A

pesar

de esas

fechas,

se trata de cédulas

reelaboradas

en

base

a documentación

más antigua. Véase M. CASTAÑEDA DE LA PAZ, « Apropiacién de elementos y símbolos de legitimidad entre la nobleza indígena. El caso del cacicazgo tlatelolca», Anuario de Estudios Hispanoamericanos

65-1

(2008), p. 21-47.

La cédula de 1563 está en el AGN

(Tierras 1593,

legajo 1, fols. 6v-8r). De la de 1523 hay varias copias en el AGN (Tierras 1586, exp. 1, fols. 1v5r; Tierras 2692, 2a. parte, exp. 10 [exp. 40], fols. 5v-9r o Vínculos, vol. 80, exp.5, fol. 3v-4v).

25. Axayacatl y Ahuizotl eran hermanos, por lo que sus respectivos hijos eran primos hermanos. Véase por ejemplo la Crónica Mexicáyotl, México, Universidad Nacional Autónoma de México, 1992, p. 114-115, 137, 143, 148-149, 167. 26. Crónica Mexicáyotl, p. 173-174. Para un estudio del cacicazgo de don Diego de Mendoza, véase R. López Mora, «El cacicazgo de Diego de Mendoza Austria y Moctezuma », en M. MENEGUS BORNEMANN,

R. AGUIRRE

SALVADOR

(éd.),

El

cacicazgo

en

Nueva

España

y Filipinas,

México,

Centro de Estudios sobre la Universidad, Universidad Nacional Autónoma de México, Plaza y Valdés Editores, 2005, p. 203-287. M. CASTAÑEDA DE LA Paz, « Apropiación de elementos », p. 2147, hace un estudio crítico del contenido de las fuentes relacionadas con el cacicazgo.

27. Existe un único documento del siglo xvi, donde don Diego aparece con todos sus apellidos (AGN,

Tierras,

1586,

n° 1, f. 9r), pero

se trata de un documento

que

el mismo

don

Diego

manipulé con ciertas intenciones. Al respecto, véase M. CASTAÑEDA DE LA PAZ, « Apropiación de elementos», p. 32-35.

437

Maria Castañeda de la Paz

y en su origen, el glifo era una tuza (tozan), el cual daba una aproximación fonética de su apellido español « Men-doza »?*. «Don Baltasar de Mendoza Moctezuma, hijo legítimo de don Diego de Mendoza de Austria Moctezuma,

nieto del Emperador Moctezuma,

sefior

de Tezontepec por ser línea recta de Nezahualcoyotl, como descendiente de sangre real de Huitzilihuitl y de los demás emperadores y reyes que fueron de esta Nueva España »

Se trata de la glosa más larga de las que aparecen en las Genealogías, debido a que una segunda mano añadió más información sobre don Baltasar, vinculándolo con Tezontetepec (véase cuadro 1). Es decir, que para alguno de sus propietarios fue importante afiadir esta información, a través de la cual hacía sus correspondientes reclamos. Ahora bien, entre los elementos que acompañan don Baltasar, no se ha podido leer su nombre o apellido. Al personaje simplemente lo vemos con papel en mano, lo cual parece indicar que recibió una cédula real del monarca español, cédula mediante la cual se le permitía vestir a la usanza española. De hecho, así lo vemos representado, con sombrero en la mano. Sin embargo,

es de la la la

probable que la cédula también expresara que le fue concedido un escudo armas por su participación, o la de sus antepasados, en las conquistas de Nueva España, junto a los españoles ?. Esta sugerencia viene motivada por representación de un yelmo como los que coronan los escudos de armas de heráldica europea??. Por otro lado, como ya mencionamos, hubo una segunda mano que se encargó de añadir que don Baltasar era señor del pueblo de Tezontepec (en el actual Estado de Hidalgo), a través de su parentesco con Nezahualcoyotl (véase cuadro

1). Sin duda,

esto está relacionado con la manipulación

de

la glosa que sufrió la Genealogía de la BNAH, donde Moctezuma II fue sustituído por Nezahualcoyotl, con el fin de reforzar más la vinculación del propietario de la Genealogía con el sefior de Texcoco. De hecho, Tezontepec

28. En la primera lámina del Códice de Tlatelolco aparece don Diego con un glifo compuesto por un pájaro (to-totl) para «don», una piedra (te-t/) y una tuza (tozan) para Mendoza (P. VALLE (éd.), El Códice de Tlatelolco, México, Instituto Nacional de Antropología e Historia, Benemérita Universidad Autónoma de Puebla, 2006).

29. Fueron muchos hijos y nietos de principales indígenas los que recibieron escudos de armas por esta labor. Sobre los escudos que se les dieron a algunos pueblos del centro de la Nueva España o a sus gobernantes, véase M. CASTAÑEDA DE LA Paz, «Central Mexican Indigenous Coats of Arms and the Conquest of Mesoamerica », Ethnohistory 56 (2009), p. 125-161. Para los escudos concedidos a los caciques tlaxcaltecas, véase M. Luque TALAVÁN, M. CASTAÑEDA DE LA

Paz, «Escudos tlaxcaltecas. Iconografía prehispánica y europea», Arqueología Mexicana XV82 (2006), p. 68-73. Para los escudos concedidos al pueblo tepaneca y a sus principales, véase M. CASTAÑEDA DE LA Paz, M. Luque TALAVAN, «¿Conquistadores o conquistados? Análisis pictográfico de los escudos concedidos al pueblo tepaneca por la Corona española», Actas del VI Coloquio Paul Kirchhoff (en prensa).

30. Diego Véase tienen

438

De hecho, entre la documentación de los descendientes legítimos e ilegítimos de don hay dos escudos de armas que hoy sabemos que no se le concedieron al cacique tlatelolca. M. CASTAÑEDA DE LA PAZ, « Apropiación de elementos», p. 35-41. Uno de esos escudos precisamente un yelmo igual al que aquí se representa.

Las genealogias de la familia Mendoza Moctezuma

parece estar representado por el glifo de un cerro con piedras en su parte superior. Aunque por su fisionomía estas piedras se asemejan más a los tecpatl o cuchillos de pedernal, lo más seguro es que la idea era pintar piedras de tezontle (tegontli) como parte del glifo toponímico de Tezontepec. Al lado se dibujó la cabeza de un coyote (coyotl) y sus patas, glifo que proporcionaría sólo una parte del nombre del señor de Texcoco: Nezahualcoyotl. El escudo y la macana, que en la iconografía mesoamericana suelen leerse como « guerra», parecen decir que mediante la guerra, Nezahualcoyotl conquistó Tezontepec, aunque no tenemos datos que evidencien este suceso histórico. No obstante, también podrían estar relacionados con la temática de la cédula,

donde gracias a la participación de sus antepasados en la conquista, se le otorgaron los privilegios. La legitimidad de los ilegftimos: los caciques otomíes del Estado de Hidalgo

E] punto de partida para conocer quién elaboró las Genealogías, cuándo y para qué, son los nombres y apellidos de sus propietarios, además de los pueblos donde éstos radicaban. Todos eran Mendoza o Mendoza Moctezuma y radicaban en Axacuba o Tetepango. Por otro lado, la glosa asociada a don Baltasar añadía también el sitio de Tezontepec, no siendo una casualidad que todos estos pueblos estuvieran en el actual Estado de Hidalgo. Se hizo entonces necesario revisar los documentos alfabéticos que acompañaban a estas pictografías, para así conocer el contexto histórico en el que se elaboraron. Se pudo entonces constatar cómo a partir de la segunda mitad del siglo xvi, algunas familias del Estado de Hidalgo insistieron en demostrar que eran descendientes del cacique y gobernador tlatelolca, don Diego de Mendoza (1549 y 1562).

Una de estas familias era la de don Roque García y su esposa doña Magdalena Morales y Mendoza, vecinos de las Minas de Pachuca, quienes llegaron a reunir una gran cantidad de documentos que hoy se encuentran en el Archivo Histórico de la BNAH?!. Ambos vivieron en la segunda mitad del siglo xvi, y mientras él decía ser cacique y principal del pueblo de Otumba [sic: otonpa], argumentaba que su esposa era cacica y principal de la villa de Tacuba [sic: Axacuba], de la parcialidad de Tlatelolco y del pueblo de Azcapotzalco, por ser descendiente de los gobernantes de dicha villa, parcialidad y pueblo*. O sea, del cacique y gobernador don Diego de Mendoza. Apoyado, pues, en este lazo parental y en las numerosas pictografías que recolectó (y probablemente elaboró), don Roque García hacía los correspon-

31. BNAH, Archivo Histórico, Colección Antigua, núm. 223. Todavía se conserva una partida de casamiento, un memorial, peticiones, executorias, dos escudos de armas y tres

copias de los retratos de la segunda parte del Codice Ixtlilxóchitl (los de Nezahualtpintzintli, de Cuauhtlatzacuitlzin y de Tocuepotzin). 32. El expediente se remite a varias fechas. La más temprana es 1655, fecha del enlace matrimonial entre Roque y Magdalena. No obstante, lo que hoy tenemos es un trasunto realizado en 1688. 33.

BNAH,

A.H., Col. Antigua núm. 223, fol. 3r.

439

Maria Castañeda de la Paz

dientes reclamos a la Audiencia para convertirse en gobernador, nada menos que de Tacuba, Tlatelolco y Azcapotzalco. Pero en las Minas de Pachuca también vivía Joseph Morales y Mendoza, hermano de doña Magdalena (véase cuadro 2), quien al parecer tenía todos los documentos probatorios del estatus de su hermana**. Según Joseph, el entroncamiento de la familia Morales y Mendoza con el cacique tlatelolca, don Diego de Mendoza Austria Moctezuma, venía a través de su madre, doña María de Mendoza (casada con don Miguel de Morales), prima hermana de

dofia Agustina de Mendoza Moctezuma. Sin embargo, argumentaba que para entonces, los papeles de hidalguía estaban en manos de la hija de Agustina, llamada Doña Juana de los Reyes Bravo de Mendoza“. E] problema es que el entroncamiento entre ambas familias no ha podido ser demostrado. Si trazamos el árbol genealógico de doña Agustina podemos asegurar que ésta era bisnieta de don Diego de Mendoza y nieta de don Baltasar, el hijo mayor del cacique tlatelolca, que es el que aparece en la Genealogía?*. Empero, no sucede lo mismo con la familia Morales de Mendoza. Y si bien es verdad que Agustina tuvo una hermana llamada María, de ninguna manera era la madre de Joseph de Morales y Mendoza, o de su hermana Magdalena de Morales. Esto, a pesar de que María, la hermana de Agustina, también tuvo una hija llamada Magdalena. Pero de apellido López y no Morales. Parece, entonces, que lo que José Morales hizo fue aprovechar esta similitud de nombres entre las dos familias para sus aspiraciones (véase cuadro 2). Harta de todo este asunto, podemos imaginar a doña Juana

de los Reyes diciendo que ni doña Magdalena ni su hermano Joseph de Morales, vecinos de Pachuca, tenían derecho al cacicazgo por ser ambos de descendencia otomí”. Lo que sucede, entonces, es que estos caciques de Hidalgo adquirieron algunos documentos de los descendientes de don Diego, cuando la hija de Agustina, doña Juana de los Reyes Bravo de Mendoza, empeñó algunas cédulas que la avalaban en la posesión de su cacicazgo**. No es una casualidad que dos de los compradores fueran Roque García y Joseph de Morales. Otro

34. 35. 36.

BNAH, A.H., Col. Antigua, núm. 223, fols. 9r, 10r, 11v. BNAH, A.H., Col. Antigua núm. 223, fols. 18r-18v. Efectivamente, en 1677 la nieta de Baltasar de Mendoza

era la que tenía todos estos

documentos, los cuales les fueron solicitados por su prima doña Juana para su copiado. Así como doña Agustina era nieta de Baltasar, doña Juana era nieta de don Melchor, el otro hijo de don Diego de Mendoza (AGN, Tierras, vol. 1593, leg. 1, fol. 42r-43r). Agustina se casó con Juan

Bravo de Lagunas y entre otros hijos tuvieron a Juana Bravo de Mendoza Moctezuma (ibid., fol. 9v-11v). 37. R. López Mora, «El cacicazgo», p. 250, 285. Véase asimismo G. FERNÁNDEZ DE RECAS, Cacicazgos y nobiliario indígena de la Nueva España, México, Universidad Nacional Autónoma

de México, 1961, p. 20. Debe ser entonces una manipulación aquella recogida en la probanza que hace Roque García (BNAH,

A.H., Col. Antigua núm.

223, fol. 34r), donde dice que doña

Juana de los Reyes reconoció a Joseph de Morales como hijo de su prima-hermana. 38.

R. LórEz Mora, «El cacicazgo », p. 281-286, transcribe el testamento de doña Juana de los

Reyes Bravo de Mendoza Moctezuma y su codicilo. En él está todo este asunto de las ventas. Véase asimismo AGN, Tierras, vol. 1783, exp. 1, fols. 48r-49v, 50v-52v, 55v.

440

Las genealogias de la familia Mendoza Moctezuma

comprador de aquellas cédulas fue don Sebastiän Rivas, cacique del pueblo de Tepozotlan, esposo de dofia Lara de Morales y Moctezuma, hermana de doña Magdalena. Este cacique, lógicamente, también afirmaría que a su mujer le pertenecían estos papeles de hidalguía y por lo mismo, a sus hijos y descendientes”. Por entonces, don Roque y doña Magdalena también se hicieron con cédulas reales y sus correspondientes escudos de armas, de los cuales hay copias en su expediente (véase nota 31). Pero como en otro trabajo se ha demostrado, estas cédulas no iban destinadas al cacique tlatelolca sino a un cacique de Axacuba y otro de Tlaxcala*. Estas actividades iniciadas por don Roque y doña Magdalena fueron continuadas por su hijo, don Diego García Morales o don Diego García Mendoza

Moctezuma.

En un interesante

artículo, Wood

identificó a este

personaje como un arriero itinerante que pintaba códices techialoyan por encargo de los pueblos*!. El se decía cacique y principal del Real y Minas de Pachuca, pero en 1702 señalaba que sus antepasados — en alusión a don Diego y su hijo Baltasar —, recibieron un privilegio de armas (cédula real con su correspondiente escudo) a través del cual se le otorgaban, entre otros señoríos, el de Tezontepec*. Es exactamente este el pueblo que se reprensentó en la Genealogías de los Mendoza Moctezuma. Por ello, es muy probable que éstas se hicieran en este periodo y que el autor de las mismas fuera don Diego García, como ya sugirió Wood y López Mora *. Conclusión

En base a la documentación analizada podemos decir que don Roque García y doña Magdalena de Mendoza, padres de Diego García, fueron los que dieron inicio al deseo de varias familias de emparentarse con el cacique tlatelolca del siglo xv1, don Diego de Mendoza. Ellos, y sus parientes colaterales, recolectaron pictografías y elaboraron otras nuevas, aunque por el discurso aquí analizado, parece que fue don Diego García, que decía ser descendiente de don Baltasar de Mendoza, el que dio origen a las Genealogías de la familia Mendoza Moctezuma. Esto implica que las pinturas aquí analizadas fueron hechas a finales del siglo xvi y principios del siglo xvii, lo cual se ve corroborado por su estilo techialoyan y por el hecho de que los personajes adornen sus apellidos con otros muy ilustres. Asimismo, por el doble discurso que por entonces se elaboró, y que don Diego García llevó a su máxima expresión. En este discurso se sostenía, por un lado, que el origen del señorío de Tlatelolco y Tenochtitlan tenía su origen en el de Tezozomoc de Azcapotzalco,

39.

BNAH,

A.H., Col. Antigua núm. 223, fols. 13r-14v.

40. M. CASTAÑEDA DE LA Paz, « Apropiación de elementos », p. 35-41. 41. S. Woon, «Don Diego», p. 245. 42. AGN (Tierras, vol. 1783, exp. 1, 46r). Véase asimismo AGN (Indios, vol. 34, exp. 78-81, fols. 86v-89v). 43. S. Woop, «Don Diego», p. 254; R. Lórgz Mona, «El cacicazgo», p. 257. Mientras la

primera autora se refiere a la Genealogía de la BNAH (fig. 1), la segunda se refiere a una de las del AGN ffig. 2).

441

Maria Castañeda de la Paz

como

también

expresaban

otros

documentos

de esa época:

el Códice

Techialoyan García Granados (1992) e incluso el Códice Azcatitlan (1995).

Por el otro, que don Diego de Mendoza era hijo de Cuauhtemoc y una hija de Moctezuma llamada doña María Xochimatzatzin. A través de este matrimonio, don Diego de Mendoza era la figura en la cual confluía la ascendencia tenochca y tlatelolca, además de la tepaneca de Azcapotzalco, adquiriendo tintes de héroe cultural. Se convertía así en un personaje interesante al que estar vinculado. Ya dijimos que en las Genealogías aquí analizadas no figuran las mujeres, que sí están en el Códice Techialoyan García Granados, y que también son parte de este discurso. Así lo corrobora el Arbol de la Cesárea Regia Prosapia, un texto alfabético elaborado en 1741 : [...] [1v] Arbol de la Sesarea Rexia Prosapia del Emperador Moctesu [sic]

Ultimo deste Ymperio Mexicano. Padre Lexitimo de [En el margen: hija] Dlofla

Maria

Motezuma

Cortez

Suchimatzatzin

muger

lexitima de D[oI|n

Fernando Quautemoc Huitzilihuit, Sobrino del emperador Moctezuma y su subsesor padre de [En el margen:

Nieto] D[oIn Diego de mendosa el viexo

apellidado Austria caso con D[oñila magdalena de Mendosa Quaquapitzahuac natural y Señora Casica desendiente por linea recta de los señores antiguos reyes de Ascaposalco apellido y casa Regia de Teçoçomoxi [...] (AGN, Tierras, 1593, leg. 1, fol. 1v).

Tenemos entonces que las Genealogías de la familia Mendoza Moctezuma son productos de la reelaboración histórica, donde el proceso de la estructuración estaba presente y que se manifiestaba a través de la selección (y eliminación) de una memoria que tendía a rememorar a aquellos personajes que fueron figuras claves en cierto proceso histórico?. En este caso, personajes de vital importancia para la identidad del periodo colonial tardío : grandes o heroicos guerreros (Tezozomoc y Cuauhtemoc), fundadores (Cuacuauhpitzahuac), importantes autoridades políticas (Moctezuma II) o héroes culturales (don Diego de Mendoza). En definitiva, los señores más emblemáticos del pasado,

a través de los cuales una serie de familias trataron de legitimarse con el fin de obtener las supuestas prerrogativas que el monarca español le otorgó al cacique tlatelolca en el siglo xvi.

44.

Sobre la elaboración de este discurso, véase M. CASTAÑEDA

DE LA Paz, «Filología de un

corpus pintado (siglo xvi-xvun) : de códices, techialoyan, pinturas y escudos de armas», Anales del Museo de América (en prensa). 45. J. VansiNA, Oral Tradition, p. 172.

442

Las genealogías de la familia Mendoza Moctezuma

BNAH (35-11)

AGN, Tierras 1586, exp. 1 fols. 1-2

AGN, Tierras 2692, 2a. Hispanic Society parte, exp. 19 [exp. 401, HC 397/497 fols. 64v-65r

(em)perador teçoço(mo)

el enperador, tecoco, moctci, señor que fue de escapusalco, de

el emperador tecomoxi

tzin señor que fue de (azca)pusasco (de) quien deçendieron Los Reyes de Santiago y Mexic(o) |

quien procedieron, los reyes de santiago, y

S[efñJor q[ue] fue de

ascapusalco de quien decendien los Reyes de s[a]ntiago y mexico

mexico

El Emperador Tecomoxi Senor que fue de Escapusalco de quien desendieron los Reyes de S[a]

nTiago, y Mexicol QuaquaPitzahuac PriMero Rey de Santiago Hijo (de) Teçoçomoxin

quaquau, picaguac primer rey de santiago, ijo del emperador, tecocomoctci

[otra letra y otra mano:]

[el gran monarca mon- | El monarca Mondesuma

El Monarca

(Fernando Cortes MoctezuMa Huichilihuil

Don Fernando Cortes Moctezuma

Nieto (del empe)rador Azacayacazin

D. ferna.ndo. cortes D[o]n Fernando montesuma guichiliCortes memdesuma guit, nieto del enpera- | huichilihuil dor asa(yacatzin) nieto del emperader Azacaycatezin

Diego de Mendoga de

D. diego. de mendosa | Don Diego de

D[o]n Diego de

Austria Mocte(su)ma

de austria, montesuma | Mendosa Austria y

(Neza)gualcoyol primero | tesuma, que fue del Rey de tescuco enperio mexicano

hijo lixitimo (...) fernando Cortes Moctesuma

Huichiguil

(D)on Baltasar de men-

D. baltasar de mendosa, montesuma

diego de mendonsa, de austria montesuma,

e(empe)rador Moctesuma

nieto del emperador.

descendiente (lign)ea recta de nezahualcoyotli huichiliguil y demás reyes deste Reyno

que fue del Ymperio mexicano

hijo ligitimo, de D. fer-| monctesuma nando cortes, monteshijo lexitimo de suma guichiliguil. D henanno cortes huichil(igui)l

doça Moctesuma hijo lixitimo de Diego de mendoca de Austria moctesuma Nieto del

Señor de tesontepeq[u]e

(Q)uaquaupusahuac primero Rey de santiago hijo de tecomoxi

hijo ligitimo. de Don

Huichilihuil Nieto del Emperador Azacayatzin 4 Mendoza Austria

y Moctezuma hijo legitimo de D[o] n Fernando Cortes

Huichiliguil. 5

D[o]n Baltasar de men-

D. Baltasar

de Mendosa y

teruma hijo lexitimo de d[o]

montesuma

[Otra mano :]

Moctesuma

por ser lenia recta de neçagualcoyol, como desendiente

(tachado) Moctesuma que fue del Ymperio Mexicano 3

dosa Austria y (mon) n Diego de mendosa austria y moctesuma nieto del emper(ador)

señor de tesontepeque

Quaquapitsahuac Primero Rey de Santiago hijo de Tecocomexi —2-

Moctezuma

hijo legitimo de D. Diego de Mendoza Austria Moctezuma Nieto

del Emperador Moctezuma,

de tesontepeque como desen(diente)

S[eñor] de tesonte-

lignea recta de necagual| peque desendiente (c)ollo (...) por lignea recta de de salgre[sic] real de [otra mano :] Nezagualcoyotli guichiliguil y de los chailuihuil y de los demas enperadores y reyes, que fueron desta demas reyes de ese huichiliguil, y Reino nueba españa demas Reyes de este Reyno 6-

Cuadro n° 1: Comparacion de los textos de las Genealogias de la familia Mendoza Moctezuma

443

PZOPUSIN

op SOJPIOIN er[Turej e] op À (ooJo[ore[ L) EZOPUSIA op 0321 uop op SIJUIPUIISI[ : c ,u o1pen

Diego de Mendoza + Magdalena Cuacuauhpitzahuac

TR Melchor

Gaspar

Baltasar + Ana de Castilla

|

Magdalena MM + Juan de Santa Ma. de los Reyes

María MM

Agustina MM

de los Reyes

José Gzlez. Recuenco

+

+

Q

Juan García Bravo

Magdalena López MM.

Juana de los Reyes Bravo de MM

yo, ” ^

Diego Gzlez. Recuenco Mendoza Moctezuma

-----

H DIAD 7

2Pd n] ap DP2UDISOD --- (¿Primas hermanas ?)

-----

María de Mendoza +

Miguel Morales

[ua

Roque García + Magdalena

Diego Garcia de Mendoza

Joseph

Lara

LES CONQUISTADORES

NOIRS DE MEXICO

Bernard GRUNBERG

Université de Reims Champagne-Ardenne

Les Noirs sont présents en Amérique dès la fin du xv? siècle. Ce sont d’abord les esclaves qui ont accompagné leurs maîtres. Mais, et on l'oublie trop souvent, ce sont aussi des Noirs libres et des affranchis qu'on retrouve en petit nombre aux Antilles, puis sur le continent. Certains, à l'exemple de Juan Garrido, le plus connu, seront de vrais conquistadores, à l'image de leurs compagnons blancs. Pourquoi l'histoire de ces hommes a-t-elle été occultée? Henri Kamen soulignait, il y a prés de quarante ans, qu'il n'existait que trés peu de recherches sur le róle historique du Noir en Amérique espagnole?. Depuis, il y a certes eu de nombreux travaux sur les Noirs mais uniquement au travers de la figure de l'esclave?. Il faut cependant rendre justice à Ricardo E. Alegría qui, dès 1990, livra une biographie de Juan Garrido*. Mais cet ouvrage méritoire, qui reprenait une transcription de l'/nformation de Mérites et de Services du conquistador, connaissait cependant des limites, dues à une faible connaissance des sources de l'époque et du monde des conquistadores.

1. Si les Espagnols emmenèrent avec eux des serviteurs indigènes (surtout de Cuba), aucun n'eut droit au titre de conquistador. Il y eut cependant une exception: Diego de Valbuena, un cacique de Cuba, venu en Nouvelle Espagne avec 40 de ses hommes, probablement après l'expédition de Narváez, pour prendre part à la conquéte de Mexico, fut le seul Indien à obtenir le titre de conquistador, cf. B. GRUNBERG, L'Harmattan,

2.

2001, n?

Dictionnaire des conquistadores

de Mexico, Paris,

103.

H. KAMEN, « El negro en Hispanoamérica (1500-1700) », Anuario des Estudios Americanos,

28 (1971), p. 121-137: «El aspecto más notable del negro en Hispanoamérica durante el período virreinal es que no existen apenas investigaciones sobre su papel histórico», p. 121. 3. L'un des premiers articles caractéristiques est celui de P. Bovp Bowman, « Negro slaves in early colonial Mexico», The Americas, 26-2 (1969), p. 134-151. Un petit livre récent montre que l'on est toujours ancré dans cette perspective: L. MONDRAGON Barrios, Esclavos africanos en la ciudad de México. El servicio doméstico durante el siglo xvi, Mexico, Ediciones Euroamericanas, 1999, 4.

R. E. ALEGRIA,

Juan

Garrido:

el conquistador

negro

en

las Antillas,

Florida,

México

y

California, San Juan, Centro de Estudios Avanzados de Puerto Rico y el Caribe, 2004 [1990].

445

Bernard Grunberg

Une réalité s'impose donc: les récits de la conquéte occultent, presque toujours, le rôle des Noirs (comme celui des femmes?). Il ne faut cependant

pas s'en étonner car la conquista affaire d'hommes blancs. Il faut l'époque, il fallait éviter de citer — tout comme ceux des femmes

fut d'abord une affaire de Castillans, une bien comprendre que, dans le contexte de la vaillance et l'héroisme des «étrangers» conquistadores — pour ne pas diminuer les

hauts faits des Castillans, a fortiori pour les Noirs, considérés soit comme

des individus d'un rang inférieur — méme s'ils étaient libres —, soit comme des esclaves, c'est-à-dire, dans les deux cas, des personnes qui ne pouvaient prétendre au méme rang que des hommes originaires d'Espagne. Malgié le silence fait sur ces «exceptions », en recoupant diverses sources, nous arrivons à savoir que des Noirs étaient bien aux cótés des Espagnols, lors de la conquéte de Mexico. Si nous n'avons trouvé aucune trace de Noirs dans les deux premières expéditions de découverte du Mexique entreprises par Francisco Herrnández de Cordoba et Juan de Grijalva *, il y avait, à l'arrivée de Cortés, des esclaves noirs aux côtés des Espagnols’. Cette information est corroborée par ce que nous savons de Juan Núñez Sedeño, qui, en février 1519, emmenait dans son navire un Noir?.

L'expédition de Narváez, qui arriva au Mexique avant la Noche Triste, comportait des Noirs libres et des esclaves noirs. Les découvertes archéologiques d'Enrique Martínez Vargas le confirment. En effet, des restes humains de Noirs, de Blancs et de Tainos ont été découverts sur le site de Calpulalpan (Tlaxcala). I] s'agissait des hommes et des femmes qui composaient l’arrièregarde des gens de Narváez, qui venaient de Veracruz et qui furent capturés puis sacrifiés à Zultepec?. La derniére expédition qui emmenait des Noirs à son bord fut celle de Francisco Ramirez [el Viejo], qui vint en Nouvelle Espagne sur son navire, à

l'automne 1520, alors que Cortés était à Tlaxcala, juste après l'arrivée de Díaz

5. B. GRuNBERG, «Beatriz Bermúdez Velasco et Beatriz Palacios: deux femmes conquistadores exemplaires», dans F. GuagLor, B. Mass (éd.), Passion de la découverte, culture de l'échange. Mélanges offerts à Cl. Prévotat & N. Moine, Langres, Ed. Dominique Guéniot, 2006,

p.

101-111;

idem,

L'univers

des

conquistadores.

Les

hommes

et leur conquéte

dans

le

Mexique du xvr siècle, Paris, L'Harmattan, 1993; idem, Histoire de la conquête du Mexique, Paris, L'Harmattan, 1995; idem, Dictionnaire. 6. On se reportera à Bernal Díaz del Castillo, Juan Díaz, Gonzalo Fernández de Oviedo, Francisco López de Gómara, etc. Cela est confirmé par les indigènes, cf. D. Durán, Historia de las Indias de Nueva España e islas de la Tierra Firme, Mexico, Porrúa, 1967, chap. Lxx. 7. D. DunáN, Historia de las Indias, chap. Lxx1, 10, p. 519: «trescientos hombres que venían,

sin otra gente de servicio de negros y criados que traían...». Traduction française de l'Histoire des Indes de la Nouvelle-Espagne

dans G. BAupor, T. Toporov, Récits aztéques de la conquête,

Paris, Seuil, 1983, p. 301. Historia

verdadera

conquista de la Nueva Espana (manuscrito «Guatemala »), J. A. BARBÓN Mexico, El Colegio de México, 2005, chap. xxi.

8.

B. GRUNBERG,

Dictionnaire,



717;

B. Diaz

DEL

CasriLLo,

RODRÍGUEZ

de

la

(éd.),

9. Lesseules informations dont nous disposons sont un article du journal La Jornada (Mexico, 2/8/2006) et une communication du professeur Patrick Johansson.

446

Les conquistadores noirs de Mexico

de Aux. Il emmenait 2 chevaux, 1 jeune garçon, 2 Noirs? et une quarantaine d'hommes, dont de nombreux archers ainsi que des armes; il débarqua à Veracruz avec ces hommes qui portaient des escaupils — vestes rembourrées de coton— impénétrables aux flèches, d’où le surnom de «bardés », dont ils

seront affublés, en raison de cette grosse et lourde armure de coton. De ces quelques Noirs, nous ne connaissons nominalement que deux d'entre eux, qui sont des conquistadores de Mexico: Guidela et Juan Garrido". Guidela, el chocarrero??

Né probablement avant la fin du xv* siècle, ce Noir est arrivé avec l'expédition de Pánfilo de Narváez. Rien dans les quelques documents que nous avons ne nous précise son statut. Il ne fait cependant aucun doute que ce conquistador était libre ou affranchi, car généralement, dans les chroniques de l'époque, on ne cite jamais le nom d'un esclave, ou, dans le cas contraire,

l'auteur précise toujours la qualité «non-libre» de l'individu cité. Si nous connaissons Guidela, c'est gráce aux témoignages de Bernal Díaz del Castillo et de Cervantes de Salazar. Il était le bouffon (chocarrero) de Narváez ; il sut

si bien retourner sa veste après la défaite de Narváez qu'il reçut une pièce d'or de Cortés pour lui avoir tenu un beau discours. Pour Bernal Díaz del Castillo, «un négre nommé Guidela, qu'avait amené Narváez et qui fut fort gracieux bouffon, s'écriait à tue-téte: Ayez égard que les Romains n'ont jamais fait telle prouesse !.. . » ^. Francisco Cervantes de Salazar est plus prolixe sur cet événement:

10.

Archives

B. GRUNBERG, 11.

«los

Générales

des

Indes,

Séville

[2 AGI], Audiencia

de México,

1064,

f. 54v.

verdadera,

chap.

CXXXIL;

;

Dictionnaire, n? 840.

de

las

albardillas»,

cf.

B. Diaz

DEL

CASTILLO,

Historia

AGI, Audiencia de México, 1064, f. 54v. (A. de ICAzA, Diccionario, n? 231); J. de TORQUEMADA, Monarquía

indiana,

Mexico,

Porrúa,

1975,

IV,

79;

B. GRUNBERG,

Histoire

de

la

conquête,

p. 148-150.

12. Certains conquistadores emmenérent mais nous ignorons tout de ceux-ci avant

avec eux des esclaves noirs pour leur service 1521, cf. D. Durán,

Historia de las Indias, LXXI,

10, p. 519. Une source postérieure, Herrera, reprise par Juan de Torquemada, indique que le chef des conquistadores avait, à Otumba, un esclave appelé Juan Cortés, cf. A. HERRERA Y TORDESILLAS, Historia general de los hechos de los castellanos en las islas y tierra firme del mar oceano, Madrid, 1601-1615, déc. II, livre X, chap. 13, p. 271: «Juan Cortés, esclavo negro del capitán general»; J. de TORQUEMADA, Monarquía indiana, IV, 72, p. 508: «Juan Cortés,

negro del capitán general», mais dans l'index de cette édition, il est précisé: «Juan Cortés, esclavo de Cortés»; aucun document, contemporain des événements, voire du xvi° siècle, ne vient confirmer cette information. Peut-étre est-ce une confusion avec un autre Noir, dont nous

reparlerons, qui vint avec Pánfilo de Narváez. 13.

B. Diaz Dg. CasriLLo, Historia verdadera, chap. cxxii ; F. CERVANTES

DE SALAZAR,

Crónica

de la Nueva Espana, Madrid, Atlas, 1971, IV, 87; B. GRUNBERG, Dictionnaire, n? 426.

14. «un negro que se dezía Guidela, que fue muy gracioso truhán, que traía el Narváez daba voces y dezía: “Mirá que los romanos no han hecho tal, hazaña”. Y por más que les dezíamos que

callasen

verdadera,

y no tocasen

chap.

cxxn,

sus atabales,

p. 332;

no

traduction

querían...», française:

dans

B. Diaz

B. Diaz

DEL

DEL CasriLLo,

CasriLLo, Véridique

Historia histoire

de la conquéte de la Nouvelle Espagne par le capitaine Bernal Díaz del Castillo, traduction de José-Maria de Heredia, Paris, Lemerre, 1878-1881, t. IT, p. 340.

447

Bernard Grunberg

... À ce moment-là, Guidela, un Noir plein de bonne humeur et de drólerie,

en applaudissant et flattant Cortés, comme le font à l'accoutumée ses semblables en de telles circonstances avec les vainqueurs, riant trés à propos et tapant des mains, s'approcha de Cortés et lui dit: «Félicitations, Hernando Cortés, notre vaillant capitaine, vous avez été fort habile contre ces poltrons.

Vous étes né sous une bonne étoile! Rendez gráces à Dieu d'étre victorieux car si vous aviez été vaincu, je ne sais ce qui vous serait arrivé ni si on vous aurait traité comme vous avez traité les vaincus. Assurément vous étes un homme de bien, et ce n'est pas sans raison qu'aussi bien ici qu'à Cuba on louait votre grande sagesse. Pour que vous vous persuadiez vous-méme que vous étes bien le seul à tout savoir, je vous dirai comment j'ai agi quand, au beau milieu de la nuit, vous avez fait irruption avec tant d'emportement en disant: « Ferme, ferme vite! », tout en empoignant vos pelles à four. J'ai pris aussitót la fuite en disant: « Vous n'aurez pas le pain de mon four », et pas comme l'autre imbécile de ma couleur, qui a voulu voler sans avoir des ailes.

J'ai grimpé sur un arbre, le plus haut et le plus garni que j'ai trouvé sur mon passage et j'y ai passé toute la nuit, tel un corbeau, le bec fermé de peur qu'un de vos hommes n'ait envie d'aller chasser en pleine nuit. Mon cœur n'arrétait pas de faire tic-tac. Finalement j'ai attendu de voir qui se révélerait le plus vil et vous voyant agir avec tant de bravoure, j'ai dit: «ça, c'est un vrai chef». Je ne me suis pas trompé et il n'est jamais bon que plus d'un coq chante dans le poulailler. Cortés s’amusa à entendre ce sacré bouffon et lui donna une riche couronne d'or qui pesait, selon Ojeda, plus de six cents pesos. Le Noir la posa sur sa téte, dansa quelques moments et dit bien des choses, dont celle-ci : « Capitaine: pour faire la guerre vous vous étes servi de cela autant que de votre bravoure et de votre courage ; si vous deviez m'enchainer, j'aimerais bien

que mes chaines soient en or, tant il est vrai que ceux que vous attacherez avec de telles chaines ne chercheront pas à s’en délier au plus vite » ^.

15.

F. CERVANTES DE SALAZAR, Crónica de la Nueva España, IV, 87, p. 24: «Estando todo en

este punto, Guidela, negro, hombre gracioso, aplaudiendo y lisonjeando a Cortés, como hacen lostales en semejante tiempo con los vencedores, riéndose muy de propósito y dando palmadas, se vino a do Cortés estaba. Dixol e: “Estéis norabuena, Hernando Cortés, merescido Capitan nuestro; buena maña os habéis dado con aquesos enalbardados; bien os ha dicho la suerte; dad gracias a Dios que si fuérades vencido como sois vencedor, no sé cómo os fuera, ni aun si os

trataran como habéis tratado a los vencidos. A fee que sois hombre de bien e que no en balde acá y en Cuba decian que sabiades mucho; y por que veáis que no sido vos sois el que lo sabéis todo, os diré que hice cuando a media noche acometistes con tanta furia, diciendo: “Cierra, cierra", con vuestras palas de horno. Eché a huir, diciendo: “No sacaréis pan de mi horno",

y no como el otro majadero de mi color, que quiso volar sin tener alas; subíme sobre un árbol, el mas alto que hallé y mas acopado, en el cual he estado toda esta noche como cuervo, y no grasnaba porque [a] alguno de los vuestros no se le antojase cazar a la media noche; estábame el corazón haciendo tifi, tafe, y, finalmente, estaba esperando cuál habrá de ser el más ruin; pero

como os vi acometer con tanto esfuerzo, dixe: "Este es un gallo”, y ha sido asi, y no es bien que en un muladar cante más de un gallo. Cortés se holgó con el chocarrero, dióle una rica corona de oro que (según dice Ojeda) pesaba más de seiscientos pesos. El negro se la puso, bailó un rato, dixo muchas cosas, y entre otras: Capitán: Tan bien habéis hecho la guerra con esto como

448

Les conquistadores noirs de Mexico

Hormis cet événement, nous n'en savons guère plus, si ce n'est par un témoignage de Andrés de Monjaras, qui était arrivé avec l'expédition de Cortés. En 1529, ce vecino de Mexico fait une longue déposition dans la résidence de Cortés. Il indique que, lors de la bataille de Mexico, Guidela eut une altercation avec

deux cousins, les Escalona, qui se termina par des coups de couteau, et Cortés ne punit que les deux cousins, bien que Guidela semblát avoir été l'agresseur Il est probable que l'attitude de Guidela vis-à-vis de Cortés lors de sa victoire sur Narváez lui ait valu la reconnaissance du chef des conquistadores et, dans le

cas de l'altercation qu'il provoqua, l'indulgence de son nouveau chef. Des documents d'origine indienne nous montrent également des Noirs au Mexique. Il s'agit de trois «peintures indigènes », qui nous montrent un Noir aux cótés de Cortés et qui peuvent d'ailleurs nous donner à penser qu'elles représentent peut-être cet ex-bouffon de Pánfilo de Narváez'”. Ses habits, sa lance, sa place à cóté du chef des conquistadores ne nous montrent pas un esclave mais bien un homme libre, un conquistador noir qui est sur le point de faire son entrée à Mexico (c'est le seul Noir connu arrivé avant la Noche Triste). Sa place à proximité de Cortés implique qu'il s'agit d'un homme de confiance.

Figure n?1 : Diego Durán, Historia de las Indias, planche 57.

con vuestro esfuerzo y valentia; si me echáredes en cadenas sean déstas, que a fee que a los que echáredes en ellas no se suelten tan presto"». 16. I. LOPEZ RAYON (éd.), Sumario de la residencia tomada a don Fernando Cortés gobernador y capitán general de la Nueva Espana y a otros gobernadores y oficiales de la misma, Mexico,

Tipografía Vicente García Torres, 1852, vol. I, p. 80: «E a dos primos que se dizen Escalonas lo fizo traer a la verguenza por que se defendieron de un negro que se dezia Guidela que los salio acuchillar». Ce témoignage, méme s'il est fait par un «muy grande e capital enemigo» de Cortés, semble fiable, car nous connaissons les deux cousins, Alejos de Escalona et Lucas de Escalona, cf. B. GRUNBERG, Dictionnaire des conquistadores, n° 285 et 287. 17. D. Durán, Historia de las Indias, planches LVII et LVIII ; Codex Azcatitlan, introduction de M. Graulich, Paris, Bibliothèque Nationale de France, Société des Américanistes, 1995,

planche X XIII.

449

Bernard Grunberg

Figure n° 2: Diego Durán, Historia de las Indias, planche 58. Le Codex Azcatitlan, qui doit dater, d’après Michel Graulich, du dernier

tiers du xvr siécle'*, nous montre aussi un Noir qui accompagne Cortés et qui tient son cheval, comme sur la planche 58 du manuscrit de Diego Durán. Michel Graulich souligne la similitude entre ces deux planches et note surtout que « Durán et l'auteur de l'Acaztitlan ont pu s'inspirer d'une méme source plus ancienne» ?,

[n

Figure n? 3: Codex Azcatitlan, planche XXIII.

18. 19.

450

Codex Azcatitlan, p. 17. Codex Azcatitlan, p. 137.

Les conquistadores noirs de Mexico

I] n’est pas étonnant que les Mexicains, à la différence des Espagnols, aient reproduit l'image d'un Noir aux côtés de Cortés, car jusque-là les indigènes n'avaient jamais vu d'hommes blancs ou noirs, ce qui ne manqua pas de les frapper d'étonnement, voire de crainte — du moins dans les premiers temps. Dans le Codex de Florence, les informateurs de Sahagün notent: ... Etil avait agi ainsi, Motecuhzoma, parce qu'il les croyait des dieux, il les prenait pour des dieux, il leur rendait un culte comme à des dieux. Pour cela ils étaient appelés, pour cela ils étaient nommés: les «dieux-venus-du-ciel » ; et les Noirs furent nommés: les « dieux sales »?.

Guidela a parfois été confondu avec le Noir qui était porteur de la variole. Nous savons, en effet, qu'un Noir de l'expédition de Narváez, porteur du germe de la variole, introduisit cette maladie sur le continent en contaminant les Totonaques, puis les Azteques: Retournons, à cette heure, au Narváez et à un négre qu'il avait amené, d'autant

plus noir pour la Nouvelle-Espagne qu'il infecta et emplit toute la terre de petite vérole dont il était couvert. La mortalité en fut grande, car, à ce que disaient les Indiens, oncques ils n'avaient eu semblable maladie?!.

Il est probable que Bernal Díaz del Castillo, qui connaissait Guidela, parle d'un autre Noir (esclave ou libre), venu avec la flotte de Narváez, qui contamina

les Indiens en répandant la variole. Ce pourrait étre cet individu qui s'enfuit à l'arrivée de Cortés, auquel Guidela fait allusion dans l'ouvrage de F. Cervantes de Salazar”, ou bien un autre individu que nous ne connaissons pas. Tout ce que nous pouvons encore dire sur ce « bouffon » est qu'il fut probablement tué par les Aztèques lors du siège de leur capitale car on ne trouve plus aucune trace de lui aprés 1521. Juan Garrido, le conquistador noir du Nouveau Monde Juan Garrido est, sans aucun doute, le conquistador noir le mieux connu,

méme si bien des aspects du personnage restent encore dans l'ombre. Le 27 septembre 1538, cet habitant « de color negro vecino desta dicha cibdad » fait une Información de Méritos y Servicios devant Fernando Pérez de

20.

B. de SAHAGÜN,

Historia

general

de las cosas

de Nueva

Espana,

Mexico,

Porrúa,

1969,

XII, 8. Traduction française du Codex de Florence: G. BAUDOT, T. Toporov, Récits aztéques de la conquéte, p. 63.

21.

B. Diaz DEL CasriLLo,

Historia

verdadera,

chap.

cxxiv, p. 336:

« Y bolvamos agora al

Narváez e a un negro que traía lleno de biruela, que harto negro fue para la Nueva España, que fue causa que se pegase y hinchiese toda la tierra d'ellas, de lo qual ovo gran mortandad; que, segund dezían los indios jamás tal enfermedad tuvieron Histoire véridique, t. II, p. 348. On retrouve le conquista de México, Madrid, Historia 16, 1987, viruelas a cempoala» et chez J. de TORQUEMADA, 22.

F. CERVANTES

DE SALAZAR,

»; traduction française: méme exemple chez F. chap. cu, p. 226 : «salio Monarquía indiana, IV,

Crónica de la Nueva

España,

B. Diaz DEL CASTILLO, López DE Gómara, La tambien un negro con 66.

IV, 87, p. 24: «y no como

el otro

majadero de mi color, que quiso volar sin tener alas».

451

Bernard Grunberg

Bocanegra, alcalde de Mexico, en présence de Martín de Castro, écrivain

public”. Il fait cette probanza ... dans le but de perpétuer sa mémoire, de montrer comment il a servi Votre Majesté pendant la conquéte et la pacification de la Nouvelle-Espagne depuis qu'est passé le Marquis del Valle ; en sa compagnie il s'est trouvé présent dans toutes les incursions, conquétes et pacifications faites toujours avec Cortés ; [il a fait tout cela] à ses frais sans recevoir de salaire ni d'encomienda, ni toute

autre chose?*,

C'est au bout de 30 années de bons et loyaux services envers la couronne d'Espagne qu'il entame cette procédure pour la présenter devant le roi ou toute autre personne afin qu'on lui rende justice et qu'il soit récompensé pour les services rendus à la couronne. Cette courte « Information de Mérites et de Services » et quelques autres documents épars nous permettent de retracer le parcours de cet homme en Amérique?. D'oü venait Juan Garrido? Si sa probanza est muette à ce sujet, nous pouvons trouver quelques informations dans une enquéte menée sur ordre de la métropole par le vice-roi, Antonio Mendoza, entre 1546 et le début de 1547,

qui a abouti à une liste de conquistadores et de colons du Mexique ; chaque individu y a droit à une notice, où sont mentionnées son arrivée au Mexique, ses actions dans

la conquéte,

éventuellement

son origine,

sa famille,

son

encomienda et sa situation à l'époque de la rédaction de Penquéte”. Voici la notice intégrale consacrée à notre homme: ...Joan Garrido, de color negro; es ya muerto; dize que él, de su voluntad, se vino a tornar cristiano a Lisboa, y estouo en Castilla siete años, y vino a

Santo Domingo, y estouo otros tantos; de donde hizo algunas entradas en otras yslas, de donde fué a San Joan de Puerto rrico y estuuo mucho tiempo, y despues vino a esta Nueua Spaña; y se halle, en la toma desta çibdad de México y en las demás conquistas, y después con el Marqués a la ysla; y que fué el primero que coxió y senbró trigo en esta tierra, de lo qual ha venydo aver lo que algo mas ay ; y truxo a esta Nueua Spaña muchas semyllas de verduras; y ques casado y tiene tres hijos, y está muy pobre y no tiene de qué se sustentar, y padesce necesidad”.

Cet Africain serait donc venu de sa « propre volonté» au Portugal, afin de se convertir au christianisme, puis il gagna l'Espagne, où il séjourna sept ans

23.

AGI, Audiencia

de México, 204, 3, fs. 1-8v.

24. IMS, f. Irv: «a mi costa syn me dar 25. Cette probanza a permis à Ricardo conquistador dès 1990 (cf. note 4) mais documents contemporains, non connus de 26.

[= IMS];

B. GRUNBERG,

Dictionnaire,

n? 368.

salaryo ny repartimiento de indios ni otra cosa». E. Alegría de faire la premiére biographie de ce son exploitation et son recoupement avec d'autres ce biographe, ont nécessité cette nouvelle étude.

AGI, Audiencia de México, 1064. Ce document est retranscrit intégralement par Fr. A. de

ICAZA, et a été publié par ce dernier, avec quelques petites erreurs, sous le titre: Diccionario autobiografico de conquistadores y pobladores de Nueva Espana, Guadalajara, E. Avina Levy,

1969 [1° édit. 1923]. 27.

AGl, Audiencia de México, 1064, fs. 39v-AOr. ; transcription dans A. DE ICAZA, Diccionario,

cf. n? 169.

452

Les conquistadores noirs de Mexico

avant de s'embarquer pour les Indes. Si nous ne pouvons dire précisément oü est né ce conquistador, il est probable qu'il décida de passer en Europe sur un navire portugais, qui devait faire la traite, probablement dans le golfe de Guinée. Il ne faisait pas partie des esclaves achetés par les négriers, c'était un homme libre. On apprend en effet dans sa probanza, comme dans les minutes notariales,

qu'il est vecino

de Mexico;

le fait qu'il soit habitant

(vecino)

implique obligatoirement que c'était un homme libre. A la question 2 de sa probanza qui demande s’il peut y avoir 28 ans environ qu'il est passé à SaintDomingue «syendo libre e horro »*, les sept témoins confirment unanimement cette situation, notamment les conquistadores Juan González de León,

qui connait Juan Garrido depuis 27 ou 28 ans et qui «lo tenia entonces e al presente lo tiene por horro»?, et Alonso de Escobar, qui le connaît depuis 30 ans et l'a vu passer «a la isla española por horro e libre »*%. Andrés de Tapia indique, lui aussi, que Juan Garrido était un «negro horro »?'. Ce que confirment, en outre, les fonctions que Juan Garrido exerga à Mexico, tout

comme son inscription comme conquistador. Pourquoi se décida-t-il à quitter sa terre natale? Nous n'en savons rien, si ce n’est, comme cela est indiqué dans la liste des conquistadores de 1546-1547, qu'il se «rendit à Lisbonne pour devenir chrétien», peut-étre convaincu par un homme d'Eglise?. De Lisbonne, il passa en Espagne, trés probablement en Andalousie, oü il resta 7 ans avant de partir en Amérique. En tenant compte de son « Information de Mérites et de Services», rédigée en 1538, dans laquelle il affirme avoir servi la couronne pendant 30 ans, il serait passé en Amérique en 1508; il arriva donc en Espagne en 1501 et au Portugal à la toute fin du xv° siècle. Nous pouvons raisonnablement penser qu'il naquit au début des années 1480. A peine arrivé aux Indes, il s'engagea dans l'expédition de Juan Ponce de León pour « pacifier » l'ile de Porto Rico. Puis il prit part à quelques expéditions contre les Caraibes à la Guadeloupe, à la Dominique et dans d'autres iles?. Peu après, il partit avec Juan Ponce de León découvrir la Floride, comme le confirment les conquistadores Juan González de León et Alonso Martín de Jérez, présents eux aussi dans cette expédition*. Il participe

28. IMS, f. 2r. 29. IMS, f. 5v. 30. IMS, fs. 8v. 31.

A. de Tarta, Relación de algunas cosas de las que acaecieron al muy ilustre señor don

Hernando

Cortés,

marqués

del Valle,

desde que se determinó

ir a descubrir tierra en la Tierra

Firme del Mar Océano, dans G. VÁZQUEZ (éd.), La conquista de Tenochtitlan, Madrid, Historia

16, 1988, p. 59-123, cf. p. 121. 32. AGI, Audiencia de México, 1064, fs. 39v. : «se vino a tornar cristiano a Lisboa»; A. DE Icaza, Diccionario, cf. n° 169. 33. IMS, f. 2r: «e fue a descobrir con Juan Ponce de Leon a la ysla de San Juan e de alli

fuemos a la ysla de Guadalupe e a la Dominica e otras yslas y en todas peleamos con los caribes e pasyficamos la ysla de San Juan». 34. IMS, f. 2v. : «e despues desto fue con el dicho Juan Ponce a descobrir la ysla de la Florida en todo lo qual travaje muy bien e serbi a su magestad con mi persona e a mi costa» et fs. 5v et 6r.

453

Bernard Grunberg

ensuite à la conquéte de Cuba et à la pacification de l'ile avec l'adelantado Diego Velázquez aux cótés de son camarade Juan González de León?. Il semble être revenu à San Juan, d’après un document daté de 151975, II reste donc à l'écart des expéditions de découverte du Mexique mais, l'information circulant trés vite dans les Antilles, les premieres nouvelles faisant état des grandes richesses de l'empire aztèque l’amènent à prendre part à la conquête de Mexico et de Nouvelle Espagne, d'autant plus que les iles connaissent un dépeuplement important et semblent alors sans perspectives d'avenir. Dans sa probanza, il affirme être arrivé avec Cortés ?. Nous savons cependant qu'il n'en est rien; en effet, il est classé officiellement parmi les «personnes qui sont venues après Cortés et Pánfilo de Narváez et sont tenues pour conquistadores et n'ont pas d'Indiens » 5, ce qui fait que, d’après son classement, il n'a pu arriver que dans une expédition postérieure à celle de Narváez. En fait, il est venu sur le navire de Francisco Ramírez [el Viejo], qui accoste à l'automne

1520, à l'époque oü Cortés est à Tlaxcala, et c'est d'ailleurs dans cette petite troupe qu'est attestée l'arrivée de deux Noirs ?. Juan Garrido insiste notamment sur sa présence «en la conquista de Tascala hasta tanto que se dieron de paz»*. Il faut ici, bien entendu, comprendre la pacification des alentours de Tlaxcala, notamment celle de Tepeaca. Il participe à la bataille de Mexico et aprés la chute de la capitale de l'empire aztèque, il part, avec Antonio de Carvajal, explorer la région de

35. IMS, f. 5v. 36.

AGI, Patronato Real, 198, n? 15 et 16.

37. IMS, f. 2v. : «yo pase a esta nueva España en compañia del Marques del Valle don Hernando Cortes y estuve con el syempre hasta que se conquisto e pacifyco toda la tierra e me halle y estuve presente en la conquista de Tascala hasta tanto que se dieron de paz». Cette erreur, volontaire ou non, est probablement

une «simplification» qui assimile, dans la

mémoire collective, les conquistadores de Mexico-Tenochtitlan aux membres de l'expédition de Cortés, alors que dans les listes officielles un classement, fondé sur la participation effective des conquistadores, est maintenu. 38. Relación secreta de conquistadores. Carlos

V que

se conserva

en

la Biblioteca

Informes

del

del Escorial

archivo

anos

personal

1539-1542,

M.

del

emperador

GONZALEZ-LEAL

(éd.), Guanajuato, Taller de Investigaciones Humanisticas de la Universidad de Guanajuato, 1979, p. 45; AGI, Audiencia de México, 1064, f. 39v (A. de Icaza, Diccionario, n° 169).

L'attribution de solares, d'encomiendas ne dépend pas de l'expédition mais de la participation à la «toma de México». 39.

B. GRUNBERG,

Dictionnaire des conquistadores, n° 840;

AGI, Audiencia

de México,

1064,

f? 54v (A. de Icaza, Diccionario, n° 231): «que su padre y un hermano de su madre pasaron a estra tierra quando vino a ella Miguel Diaz de Aux y truxo dos cavallos y un mozo y dos negros»; il faut noter ici que le navire de Miguel Díaz de Aux faisait partie d'une flottille composée de trois navires, qui arrivérent à Veracruz à l'automne 1520; le premier navire, commandé par Camargo, le second dirigé par Miguel Díaz de Aux, et le troisiéme, sous les ordres de Francisco Ramirez;

cf. B. GRUNBERG, Histoire de la conquête, p. 147-148; ces trois

bátiments sont souvent confondus et leur commandement est attribué à Miguel Díaz de Aux. Cf. aussi

B. Diaz

indiana

DEL

40. IMS, f. 2v. :

454

CASTILLO,

Historia

verdadera,

chap.

Cxxx;

J. de TORQUEMADA,

IV, 79.

«en la conquista de Tascala hasta tanto que se dieron de paz ».

Monarquía

Les conquistadores noirs de Mexico

Sirandaro avant de se diriger vers Zacatula*'. De retour à Mexico, ou peutétre avant son départ pour le Michoacán, il construit une chapelle appelée Ermita de los Mártires (la future église de San Hipólito)? en souvenir de ses camarades morts durant la bataille de Mexico, dont il put voir les tétes fichées sur des piquets à l'entrée des oratoires; peu aprés, toutes les dépouilles de ces conquistadores seront regroupées et enterrées dans ce sanctuaire, d'oü son nom d'église ou de chapelle des Martyrs, encore appelée la ermita de Juan Garrido en mars 1524, édifiée prés du pont Salto de Alvarado*, sur la route qui mène à Tacuba*!. Cette chapelle sera plus tard attribuée au conquistador Juan Tirado par Cervantes de Salazar, erreur reprise par Herrera et Torquemada*. Après la chute de Mexico, cet Africain vit à Coyoacán, en attendant la reconstruction de Mexico. Son nom montre qu'il est totalement « hispanisé », comme le prouvent également sa bonne maitrise du castillan et sa foi catholique. En 1524, mais probablement plus tôt, il est enregistré comme habitant (vecino) de Mexico et a obtenu, comme tout conquistador, un terrain pour bâtir sa maison (solar)*6. Au mois d’août 1524, il est chargé de la surveillance

du canal qui va de Chapultepec vers Mexico; en tant que doit veiller à ce que ni les porcs ni les Indiens ne souillent des dommages, afin que les habitants de la ville puissent notamment ceux qui ont des jardins (/iuertas) tout autour.

A.

Relaciones geográficas del siglo xvi: Michoacán,

R. ACUNA

guarda del agua, il l'eau et n'y fassent s'y approvisionner, Il doit aussi veiller

(éd.), Mexico,

Universidad

Nacional Autónoma de México, Instituto de Investigaciones Antropológicas, 1987, p. 262: «El descubridor fue el capitán Carvajal persona que envio el Marqués del Valle desde la provincia de Patzquaro donde quedaba el dicho Marqués. Vienieron a este pueblo tres españoles con el capitán y un negro entre ellos que se decía Juan Garrido». Sur Antonio de Cavajal, cf. B. GRUNBERG,

Dictionnaire, n? 200.

42. Actas de cabildo de la ciudad de México, Mexico, 1889-1906, cf. acte du 8/3/1524. 43. B. Diaz DEL CASTILLO, Historia verdadera, chap. civ, p. 500 f. 170v. 44. Actas de cabildo de la ciudad de México, cf. acte du 8/3/1524. 45. F. CERVANTES DE SALAZAR, Crónica de la Nueva Espana, IV, 124: «En memoria de los

muchos españoles que al pasar desta ultima puente murieron en aquel propio lugar donde fue mayor la matanza, después de conquistada y ganada México, uno de los que escaparon de no quedar allí, que se decía Juan Tirado, hombre de ánimo y muy buen cristiano, devoto de Sant Acacio y de los diez mill Mártires, sus compañeros, en reverencia dellos edificó una capilla que hoy llaman de los Mártires, donde por aquellos muertos todo el tiempo que el Joan Tirado vivió hizo decir misa, y después acá, refrescando aquella memoria y sancta obra, algunos conquistadores han hecho decir misas, aunque no tan continuadamente como Joan Tirado, el cual, en la postrimería y fin de sus dias murió bienaventuradamente, dando, no solamente

señales de cristiandad, pero de sanctidad, conosciendo claramente él y los que a su muerte se hallaron el favor e ayuda de Sant Acacio y de sus compañeros y aun el de las ánimas de purgatorio, especialmente de aquellas que en gracia en aquel lugar pasaron desta vida. Esta esta capilla cerca de otra iglesia, junto a la calzada que se dice Sant Hipólito, la cual, como ya esta. dicho, se edificó en memoria de la toma de México, porque aquel dia los cristianos, como después se dirá, a cabo de más de ochenta dias la tomaron, rindieron y subiectaron »; cf. aussi A. HERRERA Monarquía

46.

Y TORDESILLAS, Historia general de los hechos, 1, 10-11

et J. de TORQUEMADA,

indiana, IV, 72.

Actas de cabildo de la ciudad de México, cf. acte du 15/3/1524.

455

Bernard Grunberg

sur les arbres qui longent la chaussée de Tacuba. Il perçoit, pour cet office, un salaire de cinquante pesos. À la fin de l'année, il est remplacé dans sa fonction par des Indiens de Mexico”. En plus de cette première fonction, il est nommé portero, une sorte de concierge, du Conseil Municipal (cabildo) ;

il a la charge, entre autres, de convoquer les regidores et de mettre en place la table et les bancs pour le Conseil et il occupe en méme temps la fonction de crieur public (pregonero). Il sera reconduit dans cette fonction en 1525 et 1526, avec un salaire annuel de trente pesos d'or payable par tiers* mais il aura, comme d'autres, beaucoup de mal à se faire payer par la municipalité, puisqu'en 1538, le Cabildo demandera que lui soit payé son salaire pour toute la période où il avait été portero?. Pendant son mandat, il recevra, pour ses services, une huerta sur la route qui mène à Chapultepec”. Au

début

de

l’année

1525,

il est,

avec

l’alguacil

Blasco

Hernández,

témoin assermenté de la remise des varas pour l'élection des alcaldes et des regidores?'. Il demande que les autorités municipales établissent les titres officiels de ses terrains car, lors de la distribution de ceux-ci, il n'était proba-

blement pas présent sur place (il était alors au Michoacán)”. En 1527, il habite Mexico et doit emprunter soixante-dix pesos à J. Hernández del Castillo*. Il a probablement déjà songé à se tourner vers l'exploitation minière car, peu aprés, il achéte des esclaves, des outils et des bateas à Cristóbal López pour une somme de cent sept pesos, ainsi que des bateas à Sancho de Frias pour douze pesos et des pores à Juan Gómez pour vingt-huit pesos”*, Entre 1528 et 1535, il n'apparait plus dans les documents. Au début de 1535, il s'engage dans une nouvelle expédition d'environ trois cents hommes, montée et dirigée par Cortés. Après avoir touché la péninsule de Californie, devant les difficultés rencontrées (faim, maladies,

fatigue), Cortés retourne à Mexico en laissant sur place un certain contingent de l'expédition. On ne sait pas si notre conquistador noir repart avec Cortés ou s’il reste encore en Californie*. En tout cas, il réside à Mexico en

1536; il semble alors avoir arrêté l'exploitation minière car il tente de régler un différend qui l'oppose à son associé, Francisco de Baena, au sujet de la

47.

Ibid., cf. actes du 6/8/1524, 26/8/1524, 29/12/1524, 4/1/1525.

48. Ibid., cf. acte du 12/8/24; mais «por cada dia que faltare no teniendo justa occupacion le quiten 2 pesos». Notons que son successeur, Francisco González, recevra le méme salaire que lui, cf. acte du 4/1/1527. 49. Ibid., cf. acte du 19/11/1538. 50. Ibid., cf. actesdes 4/1/1525, 17/8/1526, 2/6/1525, 11/8/1525, 4/1/1525, 13/1/1525, 28/2/1525, 2/6/1525, 15/12/1525, 17/8/1526, 10/12/1526. 51. Ibid., cf. acte du 1/1/1525. 52. Ibid., cf. acte du 11/8/1525. 53.

A. MILLARES

CARLO,

J. I. MANTECON,

Índice y extractos

de los protocolos

del archivo

de

México de notarias (1524-1528, 1536-1538, 1551-1553), Mexico, El Colegio de México, 19451946, 2 vol., cf. n? 571. 54. Ibid., n? 1263466441674. 55. IMS, f. lv. ; AGI, Audiencia de México, 1064, fs. 39rv (A. DE Icaza, Diccionario, n° 169); B. Diaz

DEL

CasriLLo,

Historia

verdadera,

chap.

cc;

M.

Mar del Sur, Madrid, Cultura Hispánica, 1985, p. 105-111.

456

LEGN-PORTILLA,

Hernán

Cortés

y la

Les conquistadores noirs de Mexico

propriété de certains esclaves indiens et noirs?*. En 1538, il fait établir son «Information de Mérites et de Services », qui sera certifiée par sept témoins, quatre conquistadores de Mexico, Juan González de León, Alonso Martín de Jérez, Rodrigo de Salvatierra, Alonso Pérez (el bachiller), et trois colons

de Nouvelle-Espagne, Alonso de Escobar, Pedro de Vargas Pertiguero et Francisco Galindo, car il estime ne pas avoir été récompensé pour tous les services qu'il a rendus”. En 1544, nous savons qu'il est à Veracruz, où il a conclu un accord avec le muletier, Juan Bueno. L'année suivante, il est à

Puebla pour recouvrer 14 pesos, que ce dernier lui doit toujours”. Il meurt au cours de l'année 1546”, Juan Garrido a épousé, avant 1527, Francesca Ramirez, une Espagnole qui avait été au service de Rodrigo Rangel et qui, en 1527, dénonga à l'Inquisition les blasphémes et l'immoralité de son maitre? Dans un autre procés d'Inquisition, elle est encore citée en 1536, pour avoir utilisé des procédés magiques?.. Le couple avait trois enfants? et vivait, comme la plupart des conquistadores de Mexico, dans une relative pauvreté. Ce qui semble avoir été son action la plus éclatante, du moins celle que ses contemporains ont jugée comme telle, c'est d'avoir été le premier à semer et à récolter du blé en Nouvelle Espagne? et à y avoir introduit de nombreuses semences de légumes car les précédentes tentatives dans les iles avaient été infructueuses. Andrés de Tapia rapporte qu'aprés la chute de Tenochtitlan, alors que Cortés résidait à Coyoacán, un navire arrivé à Veracruz débarqua un sac de riz, dans lequel on trouva trois grains de blé. Cortés demanda à Juan Garrido de les semer mais ce dernier ne put faire pousser qu'un des grains, les deux autres ayant pourri. À partir de ce seul grain, il en récolta quarantesept, qui, à leur tour, furent semés et furent à l'origine du développement de la culture du blé au Mexique, ce qui procura à ce territoire une certaine autonomie frumentaire et permit à ses habitants de pouvoir acheter leur blé à un prix très bas: moins d'un real la fanègue en 1539,

56. A. MILLARES 57. En effet, il ne de sa probanza et conquistadores, p. n? 169). 58.

CARLO, J. I. MANTECON, Índicey extractos, n° 1828, détenait aucune encomienda, comme le confirment son classement dans la liste des conquistadores, 45; AGI, Audiencia de México, 1064, fs. 39rv (A.

P. Bovp-BowMAN,

Indice y extractos del archivo

de protocolos

1889, 2090. l'ensemble des témoins cf. Relación secreta de de Icaza, Diccionario,

de Puebla

de los Angeles,

México (1538-1556), Madison, Hispanic Seminary of Medieval Studies, 1988, cf. n? 134. 59. AGI, Audiencia de México, 1064, fs. 39rv (A. de Icaza, Diccionario, n? 169). 60. Archivo General de la Nación, Mexico [= AGN], Inquisición, I, 17, f. 64. 61. AGN, Inquisición, XVIII, 3, f. 52v : «la mujer de Juan Garrido negro que se dice Francisca

Ramírez dijo a esta declarante que le hiciese hechizos para que su marido la quisiese bien y se fuese della y la decazase y que esta declarante le dijo que no los sabía hacer e la dicha Francisca Ramírez le dijo pues une morisca me trujo un pedazo de soga de ahorcado e hizo ciertas cosas con ella y no valió nada». 62. 63. 64.

AGI, Audiencia de México, 1064, fs. 39rv (A. de Icaza, Diccionario, n° 169). Ibid., 204,3, f. 2. A. de Tarta, Relación de algunas cosas, p. 121: «Al marqués, acabado de ganar México,

estando en Cuyoacan le llevaron del puerto un poco de arroz [e] iban entre ello tres granos

457

Bernard Grunberg

Conclusion

Nous n'avons pu retrouver que deux conquistadores noirs de Mexico. Il y en eut sans doute, au moins, un troisième. Cette extrême minorité témoigne

cependant que des Noirs, libres ou affranchis, vivent aux cótés des Espagnols. L'exemple, certes unique, de Juan Garrido semble cependant montrer qu'il n’y a pas d'ostracisme ou de discrimination particulière. On pourra invoquer le fait qu'il soit souvent désigné par son nom chrétien, suivi de la dénomination «de couleur noire». Or, à cette époque, toutes les différences physiques servent

de surnom

pour

identifier un

individu;

ainsi

les noms

de certains

conquistadores, et plus tard de colons, sont souvent suivis d'adjectifs les caractérisant : bossus, manchots, sourds, aveugles, boiteux, etc. Il n'y a pas là

de trace de rejet ou de discrimination, c'est un simple signe distinctif permettant de reconnaitre une personne. Pour Juan Garrido, cela est évident: il est classé comme conquistador, il a obtenu le statut de vecino de Mexico et exerce des charges confiées à des «Blancs» avec un salaire identique aux autres Espagnols qui exercent le méme métier. Mais surtout, il a épousé une femme qui, d’après tous les documents en notre possession, semble être blanche, ce qui est exceptionnel pour l'époque. Quant à ses enfants, nous n'avons aucune information à leur sujet. Juan Garrido est cependant un cas exceptionnel ; cet Africain, aprés s'étre converti au catholicisme, s'est totalement intégré à la société espagnole. A l'époque de la conquéte de l'Amérique et à l'aube de la colonisation, cela était possible. I] en sera tout autrement par la suite.

de trigo, [v] mandó a un negro horro que lo sembrase: salió el uno, y como los dos no salían, buscáronlos y estaban podridos. El que salió llevó cuarenta y siete espigas de trigo. De esto hay tanta abundancia que el año de 1539 yo merqué buen trigo, digo extremado, a menos de real la hanega; y aunque después al marqués le llevaron trigo, iba mareado y no nació. De este grano es todo, y hase diferenciado por las tierras do[nde] se ha sembrado, y uno parece lo de cada provincia, siendo todo de este grano ». Gomara reprendra brièvement ce récit, cf. F. Lórgz DE Gómara, La conquista de México, chap. CCXLW, p. 485: «un negro de cortés que se llamaba segun creo juan garrido sembro en un huerto tres granos de trigo que hallo en un saco de arroz ; nacieron dos de ello y uno tuvo ciento ochenta granos».

458

ETNOHISTORIA Y MODELOS DE ASENTAMIENTOS TARDIOS EN EL VALLE DE LURÍN, PERÜ

Peter EEckKHOUT Universidad Libre de Bruselas

La costa central (y el valle de Lurín) es una de las zonas mejor documentadas del Perú antiguo, tanto a nivel de la investigación arqueológica! como de los datos etnohistóricos? y de las creencias religiosas?.

1. J. P. FELTHAM, «The Lurín Valley, Peru: AD 1000-1532», tesis doctoral, Londres, University of London, Institute of Archaeology, 1983; P. EECKHOUT, Pachacamac durant l'Intermédiaire récent. Étude d'un site monumental préhispanique de la Cóte centrale du Pérou ("British Archaeological Reports. International Series" 747), Oxford, Hadrian Books Ltd, 1999; M. CorNEJO GUERRERO, «La nación ishma y la Provincia inka de Pachacámac», Arqueológicas 24 (2000), p. 147-172; P. EeckHouT (éd.), Arqueologia de la Costa Central del

Peru en los Periodos Tardios - volúmen especial del Boletin del Instituto Francés de Estudios Andinos 33-3 (2004). 2. W. ESPINOZA SORIANO, « Bosquejo Historico del Pueblo de San Salvador de Pachacamac », en J. Martos

Mar,

J. PORTUGAL

MENDOZA

(éd.), El Valle de Lurín y el pueblo

de Pachacamac :

cambios sociales y culturales, Lima, Universidad Nacional Mayor de San Marcos, Departamento

de Antropología, 1964, p. 132-155; D. DAvILA BRICENO, « Descripción y relación de la provincia de los Yauyostoda, Anan Yauyos y Lorin Yauyos », en M. JIMÉNEZ DE LA ESPADA (éd.), Relaciones Geograficas de Indias (Biblioteca de Autores Espanoles" 188), Madrid, Ediciones Atlas, 1965 [1586, 1* ed. 1881], p. 155-165; M. RosrworowskI DE Díez Canseco, «Breve Informe sobre el Señorio de Ychma o Ychima», Arqueología Pontificia Universidad Católica 13 (1972), p. 37-

51; W. EsPiNOozA SoRiANO, «El Templo Solar de Paramonga y los Acuarios de Pachacamac», Boletin del Instituto Francés de Estudios Andinos 3-3 (1974), p. 1-22; K. SPALDING, Huarochiri. Andean Society Under Inca and Spanish Rule, Stanford, Stanford University Press, 1984; M. RosTworowsKI DE Dígz CANSECO, Pachacámac y el Senor de los Milagros. Una Trayectoria Milenaria, Lima, Instituto de Estudios Peruanos, 1992; P. PAREDES BoroNr Sinopsis

arqueológica e histórica del distrito San Pedro de Lurín ("Cuaderno de Divulgación Turistica y Ecológica" 1), San Pedro de Lurín, Municipalidad San Pedro de Lurín, 1995; M. RosrworowskI DE DíEz CANSECO, El Señorio de Pachacamac. El informe de Rodrigo Cantos de Andrade de 1573, Lima, Instituto de Estudios Peruanos, 1999; P. PAREDES Borowi, «Notas y comentarios

respecto a la continuidad de los Señores naturales del linaje de los Savac (Saba) en los padrones y repartimientos de tierras de 1733 y 1787 en el valle de Lurín », en P. EECKHOUT (éd.), Arqueologia de la Costa Central del Perú en los Periodos Tardíos, p. 735-782. 3. P. Duviors, «Un Inédit de Cristobal de Albornoz: La Instrucción para Descubrir Todas

las Guacas del Piru y sus Camayos y Haziendas », Journal de la Société des Américanistes 56-1

459

Peter Eeckhout

Desafortunadamente, como ya tuvé oportunidad de subrayarlo*, estas diferentes fuentes han sido usadas de manera bastante aleatoria o subjetiva por mucho tiempo, siendo el peso de los textos coloniales en las interpretaciones y descripciones del pasado pre-conquista y pre-inca demasiado grande respecto a los demás registros, especialmente el arqueológico. E] problema mayor resulta ser la falta de una metodología adecuada en el uso de los datos, lo que tuvo como consecuencia que no se tiene a la fecha una imagen clara de la organización social de los ychsmas [en español, los etnónimos se escriben con minúscula] que vivieron en la costa central durante los periodos prehispánicos tardíos. En el marco de este artículo, propongo esbozar tal organización, usando de las fuentes materiales y documentales. Me dedicaré primeramente al análisis del escrito más importante al respecto, la visita de Andrade de 1573, y después presentaré los datos procedentes del estudio del modelo de asentamientos en el valle de Lurín. Veremos, en

seguida, de qué manera se pueden combinar estos análisis para reconstituir la estructura del poder ychsma y su jerarquía en el valle de Lurín. Datos etnohistóricos

La visita de Andrade es el documento más completo respecto al tema de estudio, pero afortunadamente no es el único, así que, de alguna manera,

se pueden cruzar y comparar las informaciones de varias fuentes, así como de los autores modernos que han tratado del tema, principalmente Maria Rostworowski (quien editó la visita)?, Ponciano Paredes Botoni (quien usó de

la visita y otros documentos y archivos para reconstituir la trayectoria de los linajes dominantes del Lurín en el periodo colonial)? y Waldemar Espinoza (quien contribuyó en un estudio pluridisciplinario en el valle hace medio siglo y recopiló otras fuentes documentales antiguas)". Si empezamos con la visita de 1573, podemos ya precisar una serie de informaciones muy interesantes (Cuadro 1). Ante todo, me parece relevante

detallar el proceso que ha sido usado para realizar este cuadro: en un primer paso, hice una revisión sistemática de todos los datos vinculados con relaciones de poder, autoridad, y lazos de parentesco en los testimonios, así como los nombres y edades de los testigos. El lector interesado puede referirse de manera muy fácil a las informaciones mencionadas pues las páginas están precisamente indicadas. Estos datos han sido sintetizados en

(1967), p. 7-39; F. de AviLa, Ritos et Tradiciones de Huarochiri del siglo xvii, G. TAYLOR (ed. y trad.), Lima, Instituto de Estudios Peruanos, Instituto Frances de Estudios Andinos, 1987 [¿1608 9]; P. J. de ARRIAGA, La Extirpación de la Idolatría en el Pirú, Cuzco, Centro de Estudios Rurales Andinos « Bartolomé de las Casas», 1999 [1621].

4. P. EECKHOUT, «La sombra de Ychsma. Ensayo introductivo sobre la arqueología de la costa central del Perú en los periodos tardios», en P. EECKHOUT (éd.), Arqueología de la Costa Central del Perú en los Periodos 5.

M. RosrwoRowsKI

6. P. PAREDES

BOTONI,

Tardíos, p. 403-425. DE Díez CANSECO,

Sinopsis

El Señorio de Pachacamac.

arqueológica

e histórica

del distrito San Pedro

de Lurín;

P. PAREDES BoTONI, « Notas y comentarios respecto a la continuidad de los Señores naturales ». 7. W. ESPINOZA SORIANO, « Bosquejo Historico del Pueblo de San Salvador de Pachacamac ».

460

Etnohistoria y modelos de asentamientos tardios en el Valle de Lurín, Peru

el cuadro siguiente (Cuadro 2), enfocando sobre los títulos y cargos con los cuales los testigos se presentan. Resaltan de manera obvia dos elementos fundamentales: primero que existe una estructura jerárquica constando por lo menos de tres niveles de líderes: el nivel superior con un jefe que domina a todas las parcialidades del valle: Caringas, Anan Ychsma y Hurin Ychsma (fig. 1). El nivel medio con los jefes de estas parcialidades, y un nivel inferior con jefes de asentamientos como Pachacamac (asentamiento mayor de los Anan Ychsma, actual pueblo de Pachacamac, que no se debe confundir con

el gran centro costeño).

Cacique Princspal

|.

Cacique de

a

de

Anan Ychsma

Hurin

Ychsma

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| Cacique

Cscique del

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del :

Figura n° 1: Esquema de la estructura jerárquica.

Don Lun Lanan / Alonso Sabar

Alonso Sabat /

Juan Cuchigualla

Geronimo Calanco /

Don Domingo

Alonso Choque Guamani /

Alonso Macs Yauri

Martin Cache Macan À Farx mo Mallina

Figura n° 2: Esquema de la bipartición de los cargos.

461

Peter Eeckhout

E] segundo elemento resaltante es la bipartición sistemática de cada cargo, y en cada nivel de poder (fig. 2). Esto se ve tanto en el grado superior con Don Luis Loyan y Alonso Sabat citados como curacas principales, hasta el nivel de asentamientos, pues el pueblo de Pachacamac era mandado conjuntamente por Alonso Choque Guamani y Martín Cacho Macan. Además, si entramos en los detalles de los testimonios, donde se describen las relaciones entre

todos estos personajes en 1573, aparece claramente que los dos jefes que compartían un mismo cargo no eran iguales, o sea, uno mandaba al otro. Es el caso de Luis Loyan quien mandaba a Alonso Sabat, así como se le menciona explícitamente en la visita (cf cuadro 1). Tenemos pues en el caso del Lurín un ejemplo claro de curaca principal y segunda persona, tal como se conoce en la costa central y en la costa norte*. Esto se debe entender en el marco general de bipartición, cuadripartición y dualismo que también se observa en los asentamientos y en las divisiones sociales entre los grupos humanos. También en la visita se menciona a personas ya fallecidas en 1573, así como sus relaciones de parentesco y descendientes (fig. 3). Así, por ejemplo, Don Luis Loyan es hijo de Hernando Llaxahuyaca, quien fue también curaca principal del valle a la llegada de los Espafioles. Chamot Sabat al parecer fue la segunda persona de Hernando Llaxahuayca, y uno de sus hijos, Alonso, le sucedió en este cargo?. Vemos también que los demás hijos de ambos curacas tuvieron cargos, aunque menos importantes. Parece pues que los cargos se transmiten de una generación a la otra, y que se reproduce también el organigrama ancestral del poder en la región. Es interesante remarcar, como lo hace Rostworowski, «... que a la muerte de un miembro del poder dual, se elegía a un nuevo personaje, sin que el otro curaca tuviese que renunciar»?. A la fecha no conocemos este organigrama por completo, pero los datos disponibles son suficientemente coherentes como para sostener el modelo descrito. Otro elemento que llama la atención es que la descripción de cargos de todos los curacas abarca los campos políticos, económicos y judiciales, pero en ningún momento se hace mención de los aspectos religiosos. Esto ha sido también notado por Rostworowski y Paredes!!. Por supuesto podemos pensar que, en tiempos de represión de cultos y creencias tradicionales por parte del poder colonial, los indígenas hayan preferido ocultar estos aspectos "^, pero se debe recordar que el motivo principal de la visita de Andrade

8. Cf P. J. NeTHERLY, «Out of Many, One: The Organization of Rule in the North Coast Polities», en M. E. MosEgLEv, A. Corpy-CoLLins (éd.), The Northern Dynasties. Kingship and Statecraft in Chimor, Washington D.C., Dumbarton Oaks Research Library and Collection, 1990, p. 461-488.

9, Según ciertas evidencias, es posible que Llaxahuayca hubiera mandado los valles de Rímac y Lurín, mientras Sabat mandaba el Lurín bajo su autoridad (cf. M. RosrwoRowski DE DÍEZ CANSECO, Señorios Indígenas

de Lima y Canta,

Lima,

Instituto de Estudios Peruanos,

1978,

p. 51). 10.

M.

11.

M. RosrwoRowsKi

Rosrworowski

DE Dígz CANSECO, DE

Díez

CANSECO,

El Señorio de Pachacamac, El

Señorio

de

p. 18.

Pachacamac;

P. PAREDES

BOTONI,

« Notas y comentarios respecto a la continuidad de los Señores naturales ». 12. P. DuvioLs, Procesos y Visitas de Idolatrías. Cajatambo, siglo xvii, Lima, Universidad Católica del Perú, Instituto Francés de Estudios Andinos, 2003, p. 23.

462

Pontificia

Etnohistoria y modelos de asentamientos tardios en el Valle de Lurín, Perú

fue de comprobar el grado de evangelización en la encomienda, pues fue notoriamente casi nulo !*. Por lo tanto, uno puedo pensar que, con la notable excepción del santuario de Pachacamac, el valle había preservado sus estructuras tradicionales de poder, las cuales distinguían claramente entre la esfera religiosa y la esfera secular. Podemos pues deducir que los sacerdotes y los curacas formaban dos clases diferentes, la primera fuertemente reprimida por los españoles y la segunda, mantenida en sus funciones segün los intereses del gobierno colonial. | Herr

Eos husva ] Linag del

:

© Pelablean

|

|| Marin Cabo Macas :

Chama

Sahat

|