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French Pages 132 [152] Year 1983
1^1 saur
La Carte manuscrite et imprimée du XVI e au XIX e siècle Journée d' étude sur l'histoire du livre et des documents graphiques Valenciennes 17 novembre 1981 Sous la direction de Frédéric Barbier
K*G*Saur München · New York-London · Paris 1983
CIP-Kurztitelaufnahme der Deutschen Bibliothek La carte manuscrite et imprimée du XVIe [seizième] au X V I I I I e siècle / Journée d'Etude sur l'Histoire du Livre et des Documents Graphiques, Valenciennes, 27 novembre 1981. Sous la dir. de: Frédéric Barbier. — München ; New York ; London ; Paris : Saur, 1983. ISBN 3-598-10478-2 NE: Barbier, Frédéric [Hrsg.]; Journée d'Etude sur l'Histoire du Livre et des Documents Graphiques c.l¿pt-ioni
ph.0\)¿nQ.¿0ite.i
. Mais les cartes plus
savantes
étaient également très recherchées par les éditeurs étrangers : Oronce Fine était un succès de librairie à Venise en 1536 et le libraire Francesco d'Asola, successeur des Aide, lorsqu'il dem a n d a au Doge et au Sénat le privilège d'imprimer les cartes de Fine et l'exclusivité de les introduires dans les possessions vénitiennes, invoqua l'engouement pour ces cartes d'une tí
de. nobtíó
vínÁ.t-Le.ni"
"¿n¿¿n¿-
(1). Il est également curieu χ de consta-
ter que les premières cartes des provinces françaises de Nicolas Sanson, au nombre de sept (2), furent un siècle plus tard publiées primitivement à Amsterdam chez Jan Jansson, libraire d'Amsterdam vers 1645. Les libraires français au contraire ne prenaient pas de risques. Leurs premières publications de cartes portèrent sur des documents "popu.¿a.¿/izi"
qui avaient fait ailleurs la preuve
de leur succès. Le premier foyer de l'édition cartographique
fut
Lyon, où l'imprimerie se développa à la faveur du commerce. Alors que Paris était encore sous la tutelle de
l'Université,
les imprimeurs lyonnais, pour la plupart d'origine
germanique,
imprimaient des livres en langue vernaculaire et illustrés. Parmi ces illustrations, on trouve quelques cartes, mais des vues de villes qui intéressaient le milieu des
surtout
commerçants
11
lyonnais. C a r t e s et vues é t a i e n t encore gravées sur b o i s , oe qui excluait une g r a n d e p r é c i s i o n du tracé. Ces b o i s é t a i e n t
impor-
Gíogiaph¿z
tés tels q u e l s , c o m m e p a r e x e m p l e les p l a n c h e s de la
de Ptolémée de G r ü n i n g e r , qui furent r é é d i t é e s à L y o n s en 1535 et 1541, après a v o i r servi à S t r a s b o u r g en 1522 et 1525 bois du Voyage
de B r e i d e n b a c h
(Mayence i486
; Lyon
D'autres p l a n c h e s é t a i e n t copiées sur p l a c e , comme les tions de ce m ê m e
; o u les
1490). illustra-
V o y a g e , g r a v é e s à L y o n dès 1488 dans le
cuivre
par des i m p r i m e u r s v e n u s d ' A l l e m a g n e et qui c o n s t i t u e n t le p r e mier exemple f r a n ç a i s de gravure en taille
douce.
L ' o e u v r e é t r a n g è r e la plus imitée au X V I o c e r t a i n e m e n t la Coimogtctph-Le
siècle fut
très
de S e b a s t i a n M u n s t e r , p a r u e à Baie
en 1544, m a i s qui é t a i t d i f f u s é e en f r a n ç a i s à p a r t i r de
1552.
Il vint c e p e n d a n t u n t e m p s où le public français e x i g e a des
car-
tes qui lui f u s s e n t p l u s p a r t i c u l i è r e m e n t d e s t i n é e s et qui fussent donc p l u s q u ' u n e simple t r a d u c t i o n
: e n 1575,
lorsque
les l i b r a i r e s p a r i s i e n s C h e s n e a u et Sonnius r é é d i t è r e n t à P a r i s cette Coimogtiaphle.
de M ü n s t e r , ils a j o u t è r e n t soixante
cartes
s u p p l é m e n t a i r e s p o u r c o m p o s e r u n p r e m i e r tome e x c l u s i v e m e n t
con-
sacré à la F r a n c e
que
; ils s o u l i g n è r e n t b i e n dans leur p r é f a c e
M ü n s t e r avait t r o p p r i v i l é g i é l ' A l l e m a g n e , et que leurs
compatri-
otes r é c l a m a i e n t a u c o n t r a i r e des d e s c r i p t i o n s des p a y s et des villes de F r a n c e
(3).
C e p e n d a n t , l ' i n s t a b i l i t é p o l i t i q u e qui r é g n a i t en F r a n c e au m o m e n t des g u e r r e s de r e l i g i o n n'était p a s f a v o r a b l e à la p u b l i c a t i o n des c a r t e s . L y o n avait d é c l i n é avec la f i n des guerres d ' I t a l i e et les é d i t e u r s p a r i s i e n s ne se t o u r n a i e n t
pas
v r a i m e n t encore v e r s la g é o g r a p h i e . Le pur p r o d u i t de cette
épo-
que de t r o u b l e s fut le m o d e s t e Theatre de F r a n c e
Ftiançoyi,
premier
atlas
: i m p r i m é en 1594 à T o u r s - où la Cour s'était
réfu-
giée - aux frais d u libraire M a u r i c e B o u g u e r e a u , il fut ment gravé p a r u n a r t i s t e v e n u des F l a n d r e s , G a b r i e l Concrétisant
entière-
Tavernier.
la v o l o n t é des p a r t i s a n s d ' H e n r i IV, il fut
présen-
té comme un s y m b o l e de l'unité n a t i o n a l e , mais son c o n t e n u t o g r a p h i q u e n ' é t a i t p a s inédit
: sur ses d i x - s e p t c a r t e s ,
seulement p a r a i s s a i e n t p o u r la p r e m i è r e fois, trois
cartrois
étaient
copiées sur des c a r t e s f r a n ç a i s e s et onze é t a i e n t i m i t é e s d e s cueils des f l a m a n d s O r t e l i u s et M e r c a t o r
(4).
re-
12
Dans les années I62O-I63O, cette situation se modifia pour plusieurs raisons. D'une part les conditions politiques changèrent et le pouvoir royal se renforça. La monarchie vit l'intérêt des cartes, tant pour l'administration du royaume que pour la défense des frontières. Elle en fit donc exécuter de plus en plus et cette impulsion ctynamisa tout le marché des cartes gravées. D'autre part le public devint de plus en plus friand de cartes : les publications étrangères avaient créé chez lui un besoin, ainsi qu'une exigence de nouveauté et de qualité. Les progrès de l'enseignement (par les jésuites notamment) accentuèrent cette tendance dans le courant du siècle, et ouvrirent la voie à la cartographie pédagogique et scolaire. Un autre marché naquit concurremment, celui des cartes militaires, dites "ddUtei du théâtre, de ¿a gueAKe", qui intéressaient autant les militaires eux-mêmes que le public qui suivait le cours des événements. Dans ces conditions, les libraires ne reculèrent plus devant les mises de fonds importantes que requièrent les publications cartographiques. Ces libraires ne firent cependant pas de l'édition des cartes leur activité principale, car ils étaient tous des marchands de tailles douces, c'est-â-dire d'estampes portant sur tous les sujets. Ils avaient eux-mêmes souvent reçu une formation de graveurs ou bien étaient issus de familles d'orfèvres, mais ils n'avaient jamais été initiés à la topographie ou à la géographie. Certains vinrent aux cartes par le biais de l'enluminure, tel Nicolas I Berey, qui était "e.n¿u.m¿ne.u.K dz catitei ma.k¿nz¿", mais pour la plupart d'entre eux, la carte n'était encore qu'une image parmi d'autres. Il fallut plusieurs décennies pour que le public lui-même se familiarise avec les cartes et en I6O9 par exemple, on vit à Rouen un marchand libraire parisien taxé, parce que la caisse de globes et de cartes marines qu'il importait en France était assimilée à de la
"cameloteriez
et papéeKi
pe¿nti"
et non pas à des marchandises de
librairie (5). Ceci signifie que les problèmes de précision, de véracité et d'exactitude des cartes étaient encore étrangers aux marchands. Leur objectif majeur était, alors qu'ils disposaient de moyens techniques suffisants grâce aux nombreux graveurs venus des Flandres, de publier des cartes en nombre important et surtout de devancer leurs concurrents. Attirer le public par
13 l'argument de la nouveauté et de l'inédit, tel était leur but. Ces marchands étaient p e u nombreux, une quinzaine au plus
(6),
mais cela suffit pour épuiser les cartes originales et créer une pénurie de documents à publier. Or il était capital pour les libraires d'éditer une grande variété de cartes car ils pouvaient alors les réunir en recueils ou en atlas et ainsi en vendre un plus grand nombre à la fois. A ce propos, une ordonnance royale d'avril 1668 dut mettre fin à un procédé commercial
discutable
qui obligeait les clients,lorsqu'ils voulaient une carte, à acheter l'atlas entier. On imposa alors aux libraires de vendre les cartes à la pièce au prix double, toutefois, de celui des cartes en recueils. La première attitude des marchands fut de copier en masse les cartes étrangères, et en particulier les belles cartes hollandaises d'Ortelius et de Mercator d'abord, des Hondius, de Jansson et des Blaeu ensuite. Le droit d'auteur n'étant pas protégé au delà des frontières, il suffisait de payer un graveur pour exécuter la copie ; Abraham Peyrounin joua fréquemment ce rôle pour Pierre Mariette. Dans le même temps, les cartes hollandaises, en français, continuaient d'être vendues à Paris, et Melchior Tavernier était le très officiel revendeur des cartes "e.t ¿e. ve.nde.Ht auiit
â Patiti chzz MelahtoA Tave.Antzi. .. ".
Cependant, les cartes ne tardèrent pas à trouver en France même de nouveaux auteurs, en la personne des ingénieurs militaires. Le nombre des ingénieurs en effet allait
croissant
depuis que Sully, devenu surintendant des fortifications
en
1600, en avait créé plusieurs dans les provinces frontières de l'est du royaume. Leur rôle était de veiller à la fortification des villes, mais ils prenaient également part à des travaux de voirie, de ponts et de canaux et, avec l'aide d'un dzi diiitni",
"aonduatzal
c'est-à-dire d'un cartographe, ils levaient même
des cartes topographiques. En outre, lors des sièges et des batailles, certains ingénieurs avaient pour mission d'en conserver la représentation. Les éditeurs trouvèrent donc auprès d'eux des cartes inédites qui intéressaient directement le public
français
et dont ils achetaient les manuscrits à des prix raisonnables. Melchior Tavernier fit en ce domaine un grand travail de prospection, mais il ne fut pas le seul. L'éditeur et marchand de tailles douces Jean Boisseau réunit près de quatre cents croquis de
14
l'ingénieur Claude de Châtillon dans un recueil intitulé la Topographie. {¡KançA-l.i.e... Cette Topographie, fut éditée en 1641, 1648 et 1 6 5 5 , mais Châtillon était mort depuis 1 6 1 6 , et Boisseau dut donc se livrer à une difficile collecte des originaux dispersés, ce qui montre l'urgence pour les éditeurs de trouver de la matière pour leurs publications. Le succès entraîna les ingénieurs à publier leurs propres oeuvres ; Christophe Tassin
était "Commlaalre.
ordinaire. dui gu.e.rre.¿, gíographe. da noi &t
aui¿l marchand d'imagèi" et il publia à ce titre plusieurs atlas. En 1642, Sébastien de Beaulieu, ingénieur du roi, commissaire ordinaire et contrôleur provincial de l'artillerie, reçut l'exclusivité des plans et des vues des batailles royales ; cent cinquante et un de ces plans furent ensuite réunis en un recueil
intitulé les Grandit, conquetzi
dz Loali Li Grand.
C'est dans ce contexte que Melchior Tavernier "découvrit" vers 1635 le géographe abbevillois Nicolas Sanson. Ce dernier, qui exerçait les fonctions d'ingénieur en Picardie tout en continuant le commerce familial, n'avait pas le don des affaires, mais une vocation profonde pour la géographie. Tavernier commença par être son agent à Paris, puis son éditeur attitré. Nicolas Sanson fut ensuite le cartographe le plus prolifique du XVIIo siècle, mais il ne put que très rarement endosser le risque commercial de la publication de ses oeuvres. L'étude des cartes des Sanson que j'ai réalisée dernièrement s'est révélée indissociable de celle de leurs éditeurs : Melchior Tavernier, Pierre I et Pierre I Mariette puis, pour Guillaume Sanson, Alexis-Hubert Jaillot. Le processus de l'édition d'une carte au XVIIo siècle demande ici à être détaillé. Elle requiert, de la part de l'éditeur, un gros investissement financier, car il doit avancer le salaire de l'auteur, celui du ou des graveurs, le cuivre, les frais d'impression et d'enluminure, ainsi que toutes les opérations de débit. Il commence donc par acheter une carte manuscrite, mais ne se charge pas de la demande de privilège qui est faite par l'auteur, qui lui délègue ensuite ce privilège. S'il s'agit d'une série de cartes, la livraison des manuscrits est échelonnée dans le temps et on voit par exemple, en 1672, Guillaume Sanson livrer ses cartes à Jaillot de trois semaines en trois semaines. Jaillot les lui paie un prix très élevé,
15 176 livres pour les cartes en deux feuilles et 88 livres pour les une feuille. Dans ce cas précis, l'éditeur s'engage à publier les cartes dans un délai de deux ans. L'auteur est soumis à des impératifs de dates à respecter, mais aussi de format de la carte, qui doit être celui de la feuille définitive, et de lisibilité. Sur ces points, les chicaneries sont sans nombre. Sanson ne peut corriger ses épreuves qu'une fois, alors qu'il voudrait le faire deux fois, et ne doit pas les conserver chez lui plus de quinze jours. Les manuscrits des cartes perdent toute valeur lorsqu'elles ont été gravées et les inventaires après décès ne les signalent plus que "pûux.
mtmú¿A&".
L'éditeur recrute ensuite un graveur, tandis qu'il choisit par ailleurs le cartouche, lequel est en général exécuté par un graveur différent. Il arrive qu'intervienne, pour la nomenclature de la planche, un troisième graveur, spécialisé dans la gravure de la lettre. Le graveur principal habitait fréquemment au domicile de l'éditeur. D'autres y venaient travailler un ou plusieurs jours par semaine. Les horaires étaient en général de 6 heures du matin à 8 heures du soir, non compris le temps des repas. Les salaires des graveurs étaient calculés à la carte pour le tracé géographique
(René Michault recevait de Mariette 30 livres par
carte d'une feuille sans le cartouche) ou au nombre de mots pour la lettre "d'an
: Jean Liébaux était payé 3 livres les cent mots
dlitaui-i
c.a.p¿ta.¿e.i,
cont-inu." >ioma.lne.i
&t
et 4 livres les cent mots cLuth-íi".
"littKLi
Le temps nécessaire à la gra-
vure était naturellement variable, mais dans une étude récente, M. Jäger a calculé qu'il fallait en moyenne treize jours pour une carte de 50 χ 40 cm (7). Si l'on additionne le coût du manuscrit celui du cuivre
(80 livres
environ)
(10 livres environ) et celui de la gravure
livres environ), on constate qu'une planche
(30
cartographique
demandait l'important investissement de 120 livres. Or il semble que ces planches se dépréciaient assez rapidement
car,
lors de l'inventaire des biens de Jeanne Berey, femme d'AlexisHubert Jaillot, en 1675, les cuivres de G. Sanson ne furent prisés que 75 livres pièce et seulement la moitié de cela e n 1712 à la mort de Jaillot lui-même. Ceci s'explique par l'usure des cuivres, par le caractère périmé des informations
cartogra-
16 phiques, mais il faut peut-être envisager aussi une sous-estimation- des inventaires pour faciliter le rachat du fonds par les successeurs. Aux frais d'établissement de la planche s'ajoutaient les frais d'impression. Les libraires imprimaient en général euxmêmes leurs cartes, sur une presse unique entreposée dans le grenier de leur maison. Les chiffres de tirages nous sont très mal connus ; ils n'étaient certainement pas très élevés inventaires ne mentionnent jamais plus de deux cents
: les
exemplaires
d'une même carte. Il n'était au reste pas avantageux pour le marchand d'imprimer trop de cartes identiques par avance, car il avait peu de place pour les entreposer et elles risquaient de s'abîmer et de se défraîchir. Si l'on compte que les cartes étaient vendues au prix moyen de dix sols la feuille, un tirage de deux cent cinquante exemplaires était nécessaire pour amortir leur coût de fabrication. Les marchands cherchaient avant tout à proposer à leur clientèle un échantillonnage varié de cartes "en btanc." ou " d¿v-Liíe.¿",
c'est-à-dire avec les limites lavées à l'aquarelle,
en feuilles ou "co¿tíe.¿",
c'est-à-dire assemblées. Il est pro-
bable qu'ils procédaient entre eux à des échanges et à des achats et la quantité de cartes stockées dans leur boutique dans les réserves est souvent impressionnante
ou
: il y avait
ainsi en 1675 chez Jaillot, 10.600 cartes en deux feuilles de G. Sanson et 3.000 cartes en une feuille du même. Dans tous les cas, les bénéfices étaient minces, surtout si on les calcule sur de longues périodes. Il arrivait en effet que certaines cartes connussent un succès passager, mais elles se périmaient assez vite et les éditeurs étaient contraints de toujours se renouveler. Ceci leur était difficile, même en usant de subterfuges, comme Jaillot qui réédita toutes les cartes de G. Sanson dans un format légèrement plus petit, sans
consulter
1'auteur. L'édition des cartes en France avait tout de même atteint, dans la seconde moitié du XVII o
siècle, un stade enviable de
prospérité et d'autonomie. A la fin du siècle en effet, ce n'étaient plus les cartes hollandaises qui étaient copiées en France, mais les cartes françaises que l'on imitait aux Pays-Bas la plupart des cartes de Sanson-Jaillot furent ainsi
contrefaites
17 par le libraire d'Amsterdam Pierre Mortier. La cartographie française était donc intellectuellement adulte et son commerce, vivace,même si, individuellement, les marchands n'étaient pas très fortunés. Une preuve en est le regroupement des marchands de cartes et d'instruments scientifiques dans l'Ile de la Cité, sur le fameux Quai de l'Horloge ; j'y ai relevé trente-cinq adresses de boutiques spécialisées aux enseignes évocatrices. Toutefois, dans les années I68O-I69O, ce mode d'édition reçut un coup très rude lorsque les savants de l'Académie des Sciences commencèrent de réformer la cartographie, à l'aide notamment d'instruments de mesure et d'observation plus précis. Le public averti commença à comprendre que les cartes antérieures contenaient des erreur, et il devint scientifiquement et commercialement impératif de publier des cartes qui aient reçu la caution de l'Académie des Sciences. De nouveaux éditeurs profitèrent de cette mutation, tel, avec plus ou moins d'honnêteté, Nicolas de Per. Et si l'on vit encore la diffusion des anciennes cartes se poursuivre au XVIII o siècle (comme celles des Sanson par Gilles et Didier Robert de Vaugondy par exemple), une nouvelle période était commencée, qui devait conduire la cartographie française à son apogée dans le cours du siècle.
Mireille PASTOUREAU Bibliothèque Nationale
18
N O T E S
1. G.THIBAULT, Vi la yogue di quclquü dans B-Lbllothìqui d ' humanlimi
llvlii {¡lançali à I>inlic,
it Rinaliianci,
2 (1935),
p. 61-65. 2. Champagne et Brie, Bourgogne, Provence, Maine, Anjou, Saintonge en deux feuilles. 3. Voir Mireille PASTOUREAU, La
atlai ¿mpllmíi in F l a n a avant
1700, dans imago Mundi, 32, 198O, p. 45-72. 4. Voir F. de DAINVILLE, li pliml&l atla¿ di Fiance.. .. , dans Kita
da $5° conglìi national du
Anmcy
iocl&t&i ¿avantii Chambíiy-
I960, Paris, 1961, p. I-50.
5. B.N., Mss. Fr. 22113, p. 30. 6. Les principaux sont Tavernier, Boisseau, les Mariette père et fils et les Berey père et fils, mais il faut citer aussi Van Lochom, Messager, Montcornet, Langlois, Boissevin, A. de Fer, Vouillemont etc. 7. E. JAGER, Lohni ίίίι lile.knu und Stichil von Landkaitin. .. , dans W ¿-iti cha ^t, Tichnlk und G a ch-Lchti. . . Fatichi-L^t Albucht
Timm, Berlin, 1980, p. 109-128.
éui
19
LES CARTES ANCIENNES DU SERVICE HYDROGRAPHIQUE DE LA MARINE CONSERVEES AUX ARCHIVES NATIONALES.
Les très riches collections de cartes constituées
depuis
le XVIIè siècle par le Dépôt des Cartes et plans de la Marine, devenu en 1890 le Service hydrographique, ont été, à l'époque contemporaine, dispersées en plusieurs dépôt. Pressé par des questions de locaux, le Service hydrographique effectua en 1921 un gros envoi aux Archives nationales qui comportait en particulier la série de cartes dont nous allons parler et qui constitue aujourd'hui la sous-série 6 JJ du fonds Marine. Après la S e c o n d e guerre mondiale, le Service hydrographique envoya à la Bibliothèque nationale, Département des cartes et plans, un très important ensemble de documents cartographiques, bien connu de tous qui s'intéressent à la géographie. Plus récemment,
ceux
l'évacuation
des locaux de la rue de l'Université entraîna le transfert
au
Service historique de la marine au Château de Vincennes d'un certain nombre de pièces. Ce n'est pas ici le lieu de faire l'histoire du Dépôt des cartes et plans, rappelons seulement qu'il fut créé en 1720 par le Conseil de Marine au temps de la Polysynodie. En réalité d'ailleurs, il existait de manière informelle depuis plusieurs décennies, car on avait commencé à collectionner les documents cartographiques dès l'arrivée de Colbert aux affaires de la Marine, c'est à dire vers 166O environ. Lorsqu'en 1720, le premier directeur du Dépôt, le Chevalier de Luynes, capitaine de vaisseau prit ses foncti ons3 il trouva donc des series deja constituées et qui ne vont cesser de s 1 enrichir de diverses manières au cours
20 des s i è c l e s a u p o i n t de c o n s t i t u e r a u j o u r d ' h u i , si l ' o n r a p p r o che e n e s p r i t les d e u x p a r t i e s c o n s e r v é e s rue de R i c h e l i e u et rue des F r a n c s - B o u r g e o i s , u n des plus b e a u x e n s e m b l e s phiques
cartogra-
français.
La sous-série
6 J J d u fonds d u Service h y d r o g r a p h i q u e
u n e n s e m b l e fort h é t é r o g è n e et elle ne c o n s t i t u e n u l l e m e n t
est une
série a u sens a r c h i v i s t i q u e d u terme. Il s'agit b i e n p l u t ô t d'une c o l l e c t i o n factice c o n s t i t u é e a r b i t r a i r e m e n t de
documents
de p r o v e n a n c e d i v e r s e m a i s p a r m i lesquels o n p e u t q u a n d m ê m e d i s t i n g u e r q u e l q u e s g r o u p e s a s s e z c o h é r e n t s . Il faut
toutefois
r e c o n n a î t r e que la m é t h o d e de v e r s e m e n t a d o p t é e par les
ingé-
n i e u r s du S e r v i c e h y d r o g r a p h i q u e a contribué à a g g r a v e r
les
d i s p a r i t é s . E n e f f e t , en 1921, ils n'ont envoyé aux
Archives
n a t i o n a l e s que les p o r t e f e u i l l e s dont ils p e n s a i e n t
n'avoir
plus l ' u t i l i s a t i o n p r a t i q u e . La série n ' e s t d o n c p a s
complète,
c e r t a i n s n u m é r o s m a n q u e n t mais d o i v e n t se r e t r o u v e r dans
la
p a r t i e c o n s e r v é e a u D é p a r t e m e n t des cartes et p l a n s de la B i b l i o t h è q u e n a t i o n a l e . Le c l a s s e m e n t de ces d o c u m e n t s , d a n s
certaines
p a r t i e s tout a u m o i n s , est fort loin d ' ê t r e aussi r i g o u r e u x on p o u r r a i t le s o u h a i t e r .
Il n ' e x i s t e , de p l u s , a u c u n
qu'
instrument
de r e c h e r c h e i m p r i m é , de sorte que cette s o u s - s é r i e n ' e s t
pas
d ' u n a c c è s t r è s facile p o u r les c h e r c h e u r s qui en i g n o r e n t q u e f o i s les r i c h e s s e s . C'est p o u r q u o i j'ai p e n s é q u ' i l
quel-
serait
p e u t - ê t r e u t i l e de les p r é s e n t e r d'une m a n i è r e u n p e u p l u s
dé-
taillée . L ' e n s e m b l e de 102 p o r t e f e u i l l e s c o n s e r v é aux A r c h i v e s t i o n a l e s p e u t se d i v i s e r en six g r o u p e s que n o u s a l l o n s
na-
examiner
r a p i d e m e n t , c e r t a i n s d ' e n t r e eux d é p a s s a n t d ' a i l l e u r s les l i m i t e s chronologiques
f i x é e s à notre j o u r n é e d ' é t u d e
d'aujourd'hui.
Seuls les 76 p r e m i e r s a r t i c l e s r e t i e n d r o n t n o t r e a t t e n t i o n ,
les
28 d e r n i e r s c o n t e n a n t des d o c u m e n t s n ' a y a n t r i e n à v o i r a v e c
la
cartographie. Le p r e m i e r de ces g r o u p e s c o n t i e n t les cartes et c a r t o g r a p h i q u e s r e l a t i f s aux g r a n d s v o y a g e s de
documents
circumnavigation
e x é c u t é s p a r la m a r i n e f r a n ç a i s e p e n d a n t la s e c o n d e m o i t i é
du
X V I I I è siècle et la p r e m i è r e m o i t i é du XlXè s i è c l e , c'est à dire p e n d a n t l'âge d'or de la n a v i g a t i o n à v o i l e s . Le p r e m i e r v o y a g e r e p r é s e n t é est celui de B o u g a i n v i l l e L'Etollz
(1766-1768).
sur la Bou.dzu.ie. et
Le p r e m i e r d o c u m e n t i n d i q u e d ' a b o r d les
21 routes
suivies
par
les deux navires
des cartes m a n u s c r i t e s
et les dix n e u f
de l ' e m b o u c h u r e
îles Malouines
(Falkland), du détroit
l'archipel des
Samoa ou des Navigateurs,
(Nouvelles-Hébrides),
d'une
partie
B r e t a g n e , de la N o u v e l l e - G u i n é e , Ces cartes
très partielles
due des i g n o r a n c e s navigateurs Vient Bouiiote.
ensuite
portés
russes
et des documents
en France
les
fornie
et des
côtes de Corée
cartes
françaises
Les
de L a p é r o u s e
concernent
relève Iles
français la baie
Il s ' a g i t
cette
essentiellement
les côtes
Cali-
des
prece
envoyé
e t l a Re.c.hzn.c.he. 2 et
3. L e
ont été rapportés. l'Australie,
Nouvelle-Bretagne, Salomon,
rap-
de
travail
e x p é d i t i o n q u i a si m a l
o u e s t de
la
précieux.
l'Eipésianc&
avec
250 documents
les îles
On y
et ce s o n t d o n c , à
les p o r t e f e u i l l e s
puisque près de
Ils
la T a s m a n i e ,
Nouvelle-Irlande,
les M o l u q u e s
fini
concernent
et p a r t i e
la
Nou-
des
îles
Sonde. Les portefeuilles
siècle
conduits
Dumont
d'Urville Avec
puisqu'il Cook.
les
et des
d u voyage de d ' E n t r e c a s t e a u x ,
a u c o u r s de
velle-Guinée,
Ceux-ci
et de T a r t a r i e .
a été fructueux
de la
l'éten1
s u r 1 'Aitn.ota.be. e t
les o f f i c i e r s
particulièrement
(1791-1793), remplissent
Nouvelle-Calédonie,
Java.
idée de
p a r 31 d o c u m e n t s .
d e ces r é g i o n s
cartes provenant
à la recherche
et de
Iles Hawaï, p a r t i e de la côte de
mières
titre, des m o n u m e n t s
Nouvelle-
vivaient
de la Mer d ' O k h o s t
levés par
par Lesseps.
Conception au Chili,
lesquelles
de L a p é r o u s e
représenté
des cartes m a n u s c r i t e s Kouriles
dans
Célebes
une b o n n e
de
Cyclades
siècle.
le v o y a g e
(I785-1788)
des Grandes
Iles
nous donnent
géographiques
du XVIIIè
sont des
de M a g e l l a n , d e T a h i t i ,
des côtes de la
des
autres
du Rio de la P l a t a ,
4
par Baudin
8 concernent
le p o r t e f e u i l l e
des voyages
(I80I-1803), Freycinet
(I826-I829), Laplace
contient
Il s ' a g i t ,
à
XlXè
(I83O-I839).
9 nous revenons
I88 d o c u m e n t s
du
(I818-182O),
gravés
au XVIIIè
sur les trois
o n s ' e n d o u t e , de r e p r o d u c t i o n s
siècle voyages
de c a r t e s
de
an-
glaises . Les p o r t e f e u i l l e s de D u m o n t
d'Urville
Du second groupe, entièrement
l o à 12 s o n t
autour du monde
en dehors
consacrés
je n e p a r l e r a i p a s
des
limites
au second
voyage
(1837-1839)· longuement
chronologiques
car
de n o t r e
il
est
pro-
22 gramme. Il s'agit en effet de la masse documentaire
considérable
recueillie au cours de nombreuses missions scientifiques
exécu-
tées au siècle dernier par des bâtiments de la Marine nationale dans les zones les plus variées. (Portefeuilles 13 à 29 couvrant la période
I820-I87O).
A partir du portefeuille 30, commence un troisième groupe dénommé Cartes hydrographiques diverses dont le contenu, comme cette appellation le laisse deviner, est très hétérogène. Ce sont ce que nous appellerions aujourd'hui les dossiers de documentation générale du Dépôt des Cartes, c'est pourquoi les documents d'origine étrangère y sont très nombreux. On y trouve d'abord des cartes générales indiquant les variations de la boussole et le régime des vents dans les mers les plus
fréquentées,
fruit des travaux de Bellin et de Halley avec mises à jour successives entre 17OO et 179^· Viennent ensuite quelques
cartes,
gravées pour la plupart, du Pacifique vers 1750, huit feuilles d'une carte donnant le détail des nouvelles découvertes d u Capitaine Cook sur lesquelles sont indiquées les routes suivies par d'autres navigateurs ayant parcouru le Pacifique denuis
I7OO.
Une autre carte de 17 90-1792 concerne le voyage autour du monde du capitaine marseillais Etienne Marchand sur le
So¿¿d&.
La suite de ces documents est classée suivant un ordre géographique, avec d'abord la Mer du Nord et l'Océan glacial arctique représentés par plus d'une centaine de pièces. Il s'agit en général de cartes gravées d'origines diverses,
française,
anglaise, danoise, hollandaise, suédoise. La plus grande partie est du XVIIIè siècle, quelques-unes sont plus récentes. La zone couverte va de l'Angleterre et du Nord de la Prance jusqu'à la Baltique et aux pays scandinaves, y compris
l'Islande,
le Spitzberg, l'île Jan Mayen, la Nouvelle-Zemble, le Groenland Le portefeuille 31 contient des documents du même genre sur l'Europe du Nord, surtout la mer Baltique et les côtes hollandaises et anglaises. Ces 79 pièces sont principalement anglaise
, hollandaise et suédoise. On y relève
d'origine
également
quelques plans de ports. La plupart sont gravées mais
certaines
sont manuscrites et proviennent des travaux du capitaine de vaisseau de Bombelles. La majeure partie date de la seconde moitié du XVIIIè siècle.
23 Le portefeuille 32 (69 pièces) concerne la Grande-Bretagne et les îles voisines, essentiellement les côtes avec de nombreux plans de ports et d'embouchures de rivières, quelques vues de villes côtières. Documents d'origine anglaise pour la plupart, quelques-uns français, la majeure partie de la seconde moitié du XVIIIè siècle. Le portefeuille 33 (73 pièces) couvre les côtes ouest de l'Irlande, la Manche et les côtes françaises de l'Atlantique. Quelques cartes sont d'origine anglaise mais la plupart sont dues aux travaux français de Bellin, du Chevalier de Beaurain, de l'abbé Dicquemare, de la Bretonnière et Méchain, de JeanBaptiste Degaulle et de Magin, c'est dire qu'ils datent également de la seconde moitié du XVIIIè siècle. Le n° 3^ (99 pièces) concerne les côtes de France, Atlantique et Méditerranée, auxquelles s'ajoute la péninsule ibérique. Certaines de ces cartes sont liées à des événements précis, ainsi l'une d'entre elles représentant les côtes du Sud de la Bretagne porte l'indication des feux et des mouillages des escadres ennemies en 1759 s une autre indique la position de l'escadre anglaise qui attaqua Belle-Isle en avril 1761 avec un dessin représentant une dizaine de vaisseaux anglais au mouillage. Une carte anglaise de l'embouchure de la Gironde avec partie du cours de la Garonne et de la Dordogne comporte des vues de la tour de Cordouan et un tableau des pavillons portés par les différents navires qui fréquentent la rivière de Bordeaux vers 176Ο. Parmi les cartes du Portugal, on remarque celle des environs de Lisbonne avec une vue de la ville dessinée avant le célèbre tremblement de terre de 1755· On ne s'étonnera pas du nombre important des plans et cartes de la région de Gibraltar, le plus ancien de 1718, indiquant les ouvrages fortifiés qui protègent la place. Les cartes de Méditerranée englobent les côtes d'Espagne et de France, les Baléares, la Corse, Malte et une partie des côtes d'Italie. Travaux français pour la plupart, datant du XVIIIè siècle en majorité, quelques-uns du XIXè. Le portefeuille 35 concerne une mission hydrographique en Guadeloupe en I867-I869.
24 Avec le n° 35 bis (132 pièces) nous revenons en Méditerranée orientale, en Mer Noire et sur les côtes occidentales d'Afrique. Un certain nombre de ces cartes sont manuscrites comme celle de l'embouchure du Dniepr de 1780 ou le plan du port d'Alexandrie en 174 9. Très nombreux documents d'origine étrangère, surtout anglaise et hollandaise mais aussi russe pour la Mer Noire. Les côtes occidentales d'Afrique sont couvertes depuis le Cap Bojador jusqu'à celui de Bonne Espérance. On y trouve même un plan du palais du roi de Ouidah au Dahomey. Le n° 36 (68 pièces) est aussi consacré aux côtes ouest et sud de l'Afrique à partir de l'Angola et contient de nombreuses cartes anglaises et hollandaises de Dalrymple et de Van Keulen. On y trouve également des cartes plus générales de l'Océan Atlantique et surtout une série de documents cartographiques manuscrits portant les routes suivies par divers navigateurs dans l'Atlantique, l'Océan Indien, les mers de Chine et le Pacifique. Certaines de ces cartes datent de la seconde moitié du XVIIè siècle et concernent les expéditions du Siam de 1 6 8 7 1 6 9 5 , des voyages en Chine et aux Indes en I 6 9 8 - 1 7 O I .
Les autres
sont du XVIIIè siècle et nous donnent les routes suivies lors de certains voyages de découverte comme ceux de Cook et d'Etienne Marchand. Les portefeuilles 37 et 38 (191 pièces) sont consacrés aux archipels de l'Atlantique (Bermudes, Canaries, Açores, Iles du Cap Vert, Ascension, Sainte-Hélène, Malouines, Fernando de Noronha) aux côtes Est de l'Amérique du Nord et de la zone arctique au nord de l'Amérique. Les documents d'origine anglaise et hollandaise sont toujours nombreux et un groupe très important concerne l'océan glacial, Terre-Neuve et le Canada. Le n° 38 contient de nombreuses cartes des côtes américaines dressées au XlXè siècle et un groupe de cartes des Antilles et du golfe du Mexique plus anciennes d'origine anglaise, espagnole et française. Certaines de ces cartes portent des indications précieuses pour l'histoire de l'économie, ainsi une carte de la Jamaïque de I763 donne l'implantation des sucreries, des moulins, des plantations, des villages etc. Le n° 39 (148 pièces) contient un ensemble disparate de documents concernant les Antilles, l'Amérique du Sud, l'Océan Pacifique, l'Extrême-Orient, les Indes néerlandaises, l'Océanie,
25
l'Océan Indien, la Mer Rouge et les côtes orientales d'Afrique. Beaucoup de ces cartes d'origine française anglaise ou hollandaise sont du XVIIIè siècle, quelques-unes du XlXè . On y relève des cartes manuscrites de parties des Iles Salomon et de la Nouvelle-Zélande levées en 1769 par Surville lors de son voyage dans ces régions sur le St-3ea.n-Za.ptl&te. Parmi les pièces particulièrement remarquables, citons une carte manuscrite de la Mer des Indes de Blaeu (1688) et une autre de Peter Goos d'une qualité esthétique tout à fait extraordinaire. Le portefeuille 40 (112 pièces) est entièrement consacré aux rivages de l'Océan Indien, depuis les côtes orientales d'Afrique jusqu'à l'Extrême-Orient. Une bonne quantité de ces cartes est due aux travaux de Bellin, de d'Après de Mannevillette (extrait de son Neptune Orientât), de l'abbé de la Caille et de Darlrymple, l'hydrographe de la Compagnie anglaise des Indes. On y trouvera également des relevés de routes suivies par divers navires français entre l'Ile de France et les Indes lors des recherches menées dans ces régions par l'abbé Rochon et le chevalier Grenier en 1770-1771 pour trouver une route plus directe entre Port-Louis de l'Ile de France et Pondichéry. A partir du n° 43, commence un nouveau groupe de documents de caractère beaucoup plus géographique qu'hydrographique consacré surtout aux zones continentales. On peut y trouver d'abord, sous le n° 43 des mappemondes destinées à illustrer des ouvrages sur l'Antiquité, oeuvres de géographes Sanson, Delisle et d'Anville ; certaines d'entre elles remontant à la première moitié du XVIIè siècle. Viennent ensuite les cartes des Gaules puis de la France du XVIIIè siècle. Les numéros 44, 45, 46 et 47 contiennent en feuilles la carte de France levée par les Cassini. Les portefeuilles 48 et 49 concernent la France (167 pièces). On y trouve de nombreuses cartes administratives par gouvernements ou élections ayant pour auteurs tous les grands géographes des XVIIè et XVIIIè siècles : Sanson, Jaillot, Robert de Vaugondy, d'Anville, Guillaume Delisle, de Fer. Il existe également des plans de forêts, surtout de la région parisienne : Compiègne, Sénart, Rambouillet, et des cartes axées sur les environs d'une ville, par exemple Amiens, Avesnes, Landrecies, Louvain, Möns, Ath, St Omer, Calais, Boulogne, Lille, Tournai,
26 Cambrai, Bapaume, Douai, Valenciennes pour ne prendre des exemples que dans la région flamande, artésienne et picarde. Le portefeuille 49 contient encore quelques plans de batailles de la guerre de sept ans et un certain nombre de cartes itinéraires de la France par provinces ou généralités. Un portefeuille 49 bis inséré ici sans raison très valable est entièrement consacré aux travaux cartographiques exécutés pendant le sièce de Paris en I87O-1871 par l'ingénieur hydrographe Manen. Les numéros 49 ter, 49 quater, 5° à 52 et 53 bis contiennent l'énorme documentation réunie par le grand hydrographe Beautemps-Beaupré lorsqu'il entreprit vers 1802 la construction de sa monumentale carte hydrographique des côtes de France dont la perfection fut telle qu'elle resta en usage jusqu'à une époque récente. Les numéros en question concernent les côtes de Belgique, des Pays-Bas, d'Allemagne jusqu'en Baltique, c'est-à-dire les régions qui furent intégrées à la République ou à l'Empire entre 18OO et I8l4. Au milieu des levés exécutés par BeautempsBeaupré et son équipe se trouvent de nombreux documents plus anciens, du XVIIIè voire du XVIIè siècle, principalement dans le 51 bis et le 52, qui contiennent tout un lot de cartes des PaysBas autrichiens. Au milieu de cet ensemble, le portefeuille 50 bis est consacré aux Iles Britanniques, 67 pièces des XVIIè et XVIIIè siècles . Avec le n° 53 nous repassons en Allemagne et trouvons 102 cartes dont certaines du milieu du XVIIè siècle concernant les opérations militaires de la guerre de Trente ans. La plupart sont du XVIIIè siècle. Les numéros 54, 54 bis et 54 ter concernent les travaux hydrographiques exécutés sous l'Empire par Beautemps-Beaupré en Adriatique sur les côtes d'Istrie et de Dalmatie. Je signale au passage que certains de ces documents sont d'une qualité esthétique exceptionnelle. Les 54 quater et 55 nous ramènent en Allemagne du Nord et dans l'Empire avec des cartes d'évêchés, d'électorats, de duchés, de principautés auxquels sont joints quelques plans de villes et des documents établis pendant la guerre de Sept Ans indiquant les positions et les mouvements des armées. Quelques pièces du XVIIè mais la grande majorité est du XVIIIè.
27 Les portefeuilles 56
à 58 contiennent des cartes et plans
de même nature concernant la Hollande, les Pays-Bas autrichiens, les principautés d'Allemagne, l'Empire, les pays Scandinaves, la Pologne, la Russie, l'Espagne, l'Italie et les Balkans. On y relève de très nombreux plans de villes, avec quelquefois des vues panoramiques, et aussi un nombre important de cartes établies à l'occasion des guerres de Succession d'Espagne et d'Autriche et des guerres russo-turques du XVIIIe siècle. Pour l'Espagne et l'Italie, de nombreux documents sont des essais de reconstitution de la géographie antique; ainsi on trouve dans le n° 58 une carte de la Grèce fédérée sous Agamemnon par Sanson en 1 6 6 6 , une autre par d'Anville en 1740 pour servir à l'illustration de l'H-iito-itiz
anc-cznm
de Rollin. Certaines sont
manuscrites. Ce n° 58 contient aussi une série de plans en couleur de villes et de batailles de l'époque de la guerre de sept ans auxquels on a souvent joint des notices historiques. Tous les théâtres d'opérations sont représentés, en Europe et hors d'Europe depuis les combats d'Allemagne jusqu'à ceux du Canada (Louisbourg, Québec, Port Carillon), de Minorque, de la Guadeloupe et des côtes de France . A partir du n° 59 nous quittons l'Europe pour l'Asie, principalement l'Asie Mineure avec, ici aussi, les travaux des géographes comme Sanson, Delisle et d'Anville, relevant de la géographie historique : Empire des Assyriens, Arménie ancienne, Royaume de Mithridate, parties de l'Empire romain, royaume des Troyens, Inde ancienne et empire des Parthes, Retraite des Dix Mille, expéditions d'Alexandre etc... Vient ensuite un ensemble de cartes concernant la Sibérie, le Kamtchatka et surtout la Chine et le Thibet d'après les travaux des jésuites, oeuvre de d'Anville. Le n° 59 bis contient des documents de nature similaire sur la Terre Sainte (101 pièces). Le portefeuille 60 concerne l'Afrique ancienne mais surtout l'Amérique du Nord et les Antilles. Cartes pour la plupart de d'Anville, de Delisle, de Buache et de Bellin. Certaines sont liées aux voyages de découvertes dans le grand nord canadien ou dans l'Océan Pacifique. Les Antilles sont représentées par plusieurs cartes de Saint-Domingue, de la Jamaïque et des petites
28 Antilles
: Dominique, Sainte-Lucie, Martinique, Grenade, lb bago,
Barbade. Pour Saint-Domingue, on remarque un tableau général des habitations des paroisses de la Petite-Anse, de Limonade et du quartier Morin d'un grand intérêt. De même un plan de la Jamaïque de I75O environ porte de nombreuses indications sur les paroisses, habitations, sucreries etc... Le n° 6l est entièrement consacré à l'Amérique du Nord. Il s'agit surtout de documents cartographiques relatifs à la guerre de l'Indépendance des Etats-Unis mais on peut y consulter aussi de nombreuses cartes du Canada dont une manuscrite de I688 qui donne les noms des habitants et des habitations des environs de Québec et une carte du Canada et de la Louisiane par le P. Louis Hennequin de 1683· Avec le portefeuille n° 62 commence un groupe de documents de nature différente
: les Neptunes et atlas. C'est dans cette
partie de la sous- série 6JJ que se trouvent les pièces les plus anciennes remontant au XVI o
siècle.
Le premier de ces atlas est celui d'Herrera qui date de 1597 et concerne ce que l'on connaissait alors du continent américain du nord et du sud. Vient ensuite un exemplaire incomplet de l'atlas anglais de Greenville Collins de 1686. Ne sont représentées ici qu'une partie de l'Angleterre, la vallée du St-Laurent jusqu'à Québec, Terre-Neuve, les Iles Vierges aux Antilles et l'embouchure de 1'Indus. Certaines de ces cartes sont illustrées de superbes dessins. L'atlas de Blaeu bien connu et l'atlas maritime de Brukner de 1749 complètent ce portefeuille. Dans le n° 63 se trouve l'atlas maritime de Darlrymple, chef d'oeuvre de la cartographie anglaise du XVIII o
siècle, pu-
blié à partir de 177^· L'exemplaire conservé ici est incomplet mais comprend quand même II8 cartes intéressant les régions suivantes
: cStes du Brésil, Océan Indien, Chine et Extrême Orient,
Philippines, Océan Pacifique, partie des côtes d'Afrique. On y a joint une quinzaine de cartes provenant de d'Après de Mannevillette, capitaine de vaisseau et hydrographe de la Compagnie des Indes, concernant diverses parties de l'Océan Indien.
29 Les numéros 64 à 67 contiennent le blzptum
At¿antÁ,qae.
de
Wallet-Desbarres publié en Angleterre en 1777· Comme son nom ne l'indique pas, cet ouvrage ne concerne que l'Amérique du Nord et plus précisément le Canada et le versant atlantique des future Etats-Unis. Le numéro 68 est constitué par un atlas anglais de 1797, celui de William Heather et par un atlas de l'Adriatique établi en 1822-1824. Nous revenons avec le numéro 69 aux travaux français avec l'atlas de Simon Mentelle de 1779 qui concerne surtout l'Europe. On trouve aussi quelques cartes des Antilles et des mappemondes sur lesquelles ont été portées les routes suivies par Bougainville et Cook. Nouveau groupe d'un très grand intérêt, les portefeuilles 70 à 75 qui proviennent des collections particulières de Guillaume Delisle et de ses fils. Je ne peux entrer dans le détail de ce fonds privé constitué presque uniquement de documents manuscrits d'une richesse considérable puisqu'il comprend environ l400 pièces. Les documents cartographiques conservés ici sont complétés par les archives personnelles des Delisle, en particulier la très riche correspondance de Guillaume conservée dans la sous-série 2JJ. Les collections de cartes réunies par les Delisle concernent presque toutes les régions du monde et l'on y trouve des documents fort anciens, par exemple sur les navigations hollandaises dans les eaux arctiques en 1594-1595· De nombreux documents datent du XVIXème siècle. Le classement qui n'est pas toujours rigoureux, se présente de la manière suivante : le n° 70 concerne surtout l'Europe, l'Asie mineure et la Terre Sainte, les numéros 71 et 72 la France, le numéro 73 à nouveau l'Europe, le numéro 74 l'Asie, le numéro 75 l'Afrique et l'Amérique. La cartographie française est spécialement abondante puisqu'elle remplit à elle seule deux gros portefeuilles de plus de 400 pièces. La Flandre et le Hainaut y sont représentés par une série de cartes (n° 71, pièces 33 et suivantes établies, semblet-il, au moment des campagnes de Louis XIV. La pièce 49 concerne précisément les environs de Valenciennes). Toutes les provinces sont représentées et on trouve également des cartes du cours de certains fleuves ou rivières, la Loire en Gâtinais et en Touraine,
30 l'Andelle en Normandie, de la Garonne et de la Dordogne. Une carte indique même les "lieux où il conviendrait de mettre des garnisons pour s'opposer aux gens de la R.P.R.". (n° 72 pièce 87) Le portefeuille 73 concerne essentiellement l'Espagne, la Russie, l'Italie, la Grèce et la Turquie. Les documents sur la Russie d'Europe et d'Asie sont nombreux et on peut y voir des relevés d'itinéraires de voyageurs ou de diplomates comme le baron de Mayerberg, ambassadeur de l'Empereur en Moscovie de l66l à 1663 et des cartes du cours des principaux fleuves. L'Italie est surtout représentée par des travaux de géographie historique et il en est de même pour la Grèce et l'Asie mineure. Le portefeuille n° 74 consacré à l'Asie ne contient qu'une vingtaine de pièces concernant la Chine et la Tartarie mais certaines sont d'un grand intérêt comme les itinéraires d'ambassadeurs russes de Moscou à Pékin en 1620, 1653 et 1676. Le reste de ce portefeuille est constitué de documents relatifs à l'Asie mineure et à la Terre sainte et il s'agit encore une fois de recherches de géographie historique, mais on y trouve aussi de nombreux itinéraires. A la fin, une vingtaine de pièces concernent les Indes, le Siam, l'Indonésie, la Cochinchine et le Tonkin. Dans le n° 75, 124 pièces sont des cartes d'Afrique portant surtout sur la moitié nord de ce continent ; Egypte, Abyssinie, Barbarie, Tunisie, Maroc, Mauritanie, Sénégal, Côtés de Guinée, Congo et côtes occidentales jusqu'au Cap, le reste concerne l'Amérique avec des documents d'origine espagnole remontant au XVIème siècle. Un bon nombre de ces cartes intéressent le Canada depuis les origines de la colonisation française c'est-à-dire depuis Jacques Cartier et Champlain grâce aux renseignements recueillis par Lescarbot. D'autres, un peu plus récentes, sont des croQuis établis d'après les relations des Jésuites à partir des années 163O. Guillaume Delisle s'est à l'évidence beaucoup intéressé à l'histoire de la découverte du continent américain et il a accumulé sur ce sujet une documentation spécialement riche qui commence aux voyages espagnols de Ponce de Léon en Floride en 1512, de Narvaez en 1527-1528, de Fernando de Soto en 1539-1543. La partie concernant les Antilles est moins riche mais le continent sud-américain est très largement représenté depuis le Mexi-
31 que jusqu'à la Patagonie et au détroit de Magellan. De nombreux itinéraires ont été soigneusement relevés depuis celui de Francisco d'Ulloa en 1539 jusqu'à ceux des navigateurs comme Lemaire et Schouten, Froger, Bigot de la Canté, Beauchesne, Frondad, qui se sont attachés, tout au long du XVIIème siècle, à explorer les routes menant à cet océan Pacifique dont les Espagnols
voulaient
faire leur chasse gardée. La collection de cartes constituée par Delisle semble donc d'un intérêt de premier plan pour l'histoire de la géographie. Grâce à elle, on peut voir comment travaillait un savant de la seconde moitié du XVIIème siècle et avec quel soin il s'efforçait de réunir toute la documentation disponible. Les deux derniers portefeuilles dont nous aurons à parler, numéros 76 et 76 bis proviennent aussi d'un géographe
:
Nicolas Bellin, auteur célèbre en son temps d'un nombre
Jacquesconsidé-
rable de cartes du monde entier. Beaucoup moins riche que le fonds Delisle, le fonds Bellin permet lui aussi d'approcher la méthode de travail de ce géographe en chambre qui cartographia à p e u près tout le monde connu sans jamais quitter Paris. Comme on a p u le constater, je l'espère, au cours de cet exposé, le fonds de cartes anciennes du Service
hydrographique
conservé aux Archives nationales est un ensemble riche et complexe intéressant pratiquement tous les pays du monde même les zones les plus continentales, qui mériterait d'être mieux connu des historiens. Il constitue, pour le XVIIème et le XVIIIème
siè-
cle, dans une moindre mesure pour le XVIème, une source de premier plan pour l'histoire de la science géographique et de ses progrès qui s'accélèrent sensiblement à partir de 1750. Il présente aussi bien d'autres ressources
: pour l'histoire de l'art,
celle des grands voyages, des opérations militaires, de
l'occupa-
tion du sol, pour l'histoire du navire aussi car nombreux sont les vaisseaux dessinés, souvent avec grand soin, sur certaines de ces cartes ; documents précieux pour l'étude de l'évolution des divers types de bâtiments. Mais le fonds du Service hydrographique conservé à la Bibliothèque nationale est aussi d'une extrême richesse. Il
fau-
drait parvenir un jour à mettre à la disposition des chercheurs un catalogue collectif de ces cartes ou tout au moins un guide
32 dans lequel conservateurs du Département des cartes et plans des Archives nationales, unissant leurs efforts, reconstitueraient sur le papier l'unité d u fonds. Est-ce un rêve impossi ble ?
Etienne Taillemite Inspecteur Général des Archives de Prance
33
Après-midi : Présidence de Monsieur Roger Desreumaux, Professeur aux Facultés catholiques de Lille.
LES CARTES DU HAINAUT LEVEES AU DEBUT DU XVIII o SIECLE PAR LES INGENIEURS GEOGRAPHES MASSE
Dans une communication faite à la Commission historique du département du Nord le 25 février 198O, nous avons étudié les "qucLDiti" et les mémoires de la partie française de la Flandre, de l'Artois et du Hainaut contenus dans la Carte générale de la frontière des Pays Bas, levée de 1724 à 1737, par les ingénieurs géographes Claude — François et Claude-Félix Masse. Dans une autre, faite au Premier Congrès de l'Association des cercles francophones d'histoire et d'archéologie de Belgique, qui s'est tenu
à Comines du 28 au 31 août 198O, nous avons présenté la
frontière entre la France et les Pays Bas, contenue dans cette même carte. La première a été publiée dans le bulletin de la Commission historique du Nord (1) tandis que la seconde l'a été dans les Actes du Congrès de Comines (2). Notre propos, dans notre communication, est d'étudier plus en détail la partie française du Hainaut au moyen des cartes levées et des mémoires écrits par les trois ingénieurs du Roi (3)· Avant la publication des cartes gravées de la frontière entre les terres du roi de France et celles de la Maison d'Autriche, dressées par Cassini entre 1750 et 176O puis par Capitaine en 179Ο, pour la partie française et les cartes dressées par Ferraris de 1771 S 1777, pour la partie autrichienne, une carte de la frontière entre la mer du Nord et la Moselle, restée inédite, fut levée de 1724 à 1737 par les ingénieurs géographes Masse.
34 C'est 'pour perfectionner la connaissance de cette frontière, après la Paix d'Utrecht que le marquis d'Asfeld, Directeur général des Fortifications de France, fit appel à Claude Masse, ingénieur géographe de son service dont il avait apprécié les levés de deux cartes de l'Océan celle du Médoc et celle du Bas Poitou Aunis et Saintonge. Pour réaliser son projet, il le transféra de la Rochelle à Lille en 1724 puis à Valenciennes et à Mézières où jusqu'en 1737 3 avec l'aide de ses deux fils, il ne leva pas moins de 32 "qu.aAA.êi" depuis Dunkerque jusqu'à Thionville, de chaque côté de la frontière entre la Flandre française et la Flandre impériale, le Hainaut français et le Hainaut impérial, la Champagne, le Pays messin, le duché de Lorraine et l'évêché de Liège, les duchés de Namur, de Bouillon et de Luxembourg. Rappelons brièvement la vie et la carrière des trois ingénieurs. Né en I652 à Combloux dans le duché de Savoie, Claude Masse est remarqué par Louis XIV en visite à Toul en 1677 où il était dessinateur de François de Ferry, directeur des
fortifica-
tions de Champagne et de Picardie et il suivit ce dernier à la Rochelle en 1679· Il fut chargé, en I688, de lever les cartes des côtes du Ponant, de la baie de Bourneuf à Arcachon. Nommé à Lille en 1724 pour lever, avec ses deux fils, la carte des Pays-Bas, il se retira en 1734 à Mézières où il mourut en 1737· François Masse, né à la Rochelle en 1706, ingénieur en 1726 et employé au levé de la carte des Pays-Bas jusqu'en 1748, ingénieur en chef à Lille en 1749, capitaine du Génie en 1757 s est mort au siège de Marpurg (Allemagne) le 15 avril 1757- Claude-François Masse, né S la Rochelle en 1712, ingénieur en 1731 et employé au levé de la carte des Pays-Bas jusqu'en 1743> capitaine du Génie en
1751,
lieutenant-colonel à Bordeaux en 1770, retiré en 1777j est décédé à la Rochelle en I786. La carte générale de la frontière des Pays-Bas, levée par les ingénieurs géographes Masse, ne fut jamais terminée par eux et leurs travaux ne servirent pas à leurs successeurs. Mais, si les cartes des Masse restèrent dans les cartons du Dépôt des Fortifications, elles n'en sont pas moins précieuses pour l'histoire de la cartographie, en particulier les mémoires qui accompagnent les "quaitiii" et aussi les relevés des monuments qui restèrent dans
leurs papiers
personnels.
35 Les c a r t e s d ' a s s e m b l a g e d e s t r o i s p a r t i e s de la c a r t e rale e x i s t e n t
D u n k e r q u e à M a u b e u g e , e s t u n e c o p i e sur p a p i e r h u i l é Claude Masse
géné-
encore. La première, qui couvre la frontière
de
d'après
(4). L a s e c o n d e , q u i c o u v r e la f r o n t i è r e de
c i e n n e s à G i v e t , a été é t a b l i e p a r M a s s e fils e n 1 7 3 6
Valen-
(5).
La
t r o i s i è m e , q u i c o u v r e la f r o n t i è r e de R o c r o y à M e t z , a é t é blie par Masse Cadet
( 6). N o u s a v o n s r e p o r t é sur une
d ' a p r è s G u i l l a u m e de L i s l e , d r e s s é e la f r o n t i è r e
actuelle
éta-
carte
en 1 7 0 4 , s u r l a q u e l l e
figure
(7), le q u a r r é B , e x t r a i t d e l a p r e m i è r e
les q u a r r é s A , 2 1 , C , 22, 27, 2 8 , 29, 23, 3 0 , 3 2 , e x t r a i t s d e seconde. Ces onze cartes particulières
couvrent une partie
H a i n a u t a u t r i c h i e n o u i m p é r i a l et t o u t le H a i n a u t
français
et la
du (fig.
2). Le q u a r r é B , q u i c o u v r e les e n v i r o n s d e D o u a i , n e q u ' u n e p a r t i e de l ' O s t r e v e n t a v e c P e c q u e n c o u r t
(8).
contient
Bouchain
d e v a i t f i g u r e r d a n s le q u a r r é Ρ q u i ne s e m b l e p a s a v o i r é t é Le q u a r r é A c o u v r e V a l e n c i e n n e s , C o n d é et S a i n t - A m a n d Cette d e r n i è r e v i l l e , a p p a r t e n a n t a u T o u m a i s i s l'intendance
d u H a i n a u t , a v e c B o u c h a i n et
Le q u a r r é 21 c o n t i e n t
levé. (9).
f r a n ç a i s et à
Mortagne.
les e n v i r o n s de M ö n s et de
Saint-Guislain
(10). Le q u a r r é C c o n t i e n t Le q u a r r é
les e n v i r o n s d u Q u e s n o y
22 c o n t i e n t M a u b e u g e et B a v a y
(11).
(12).
Le q u a r r é 27 c o n t i e n t T h u n , B e a u m o n t , S o l r e - l e - C h â t e a u Barbançon
Le q u a r r é les e n c l a v e s
28 c o n t i e n t une p a r t i e de l ' E v é c h é de L i è g e
françaises
Le q u a r r é
de P h i l i p p e v i l l e
2 9 contient Charlemont
et de M a r i e n b o u r g
et les d e u x G i v e t
Le q u a r r é 23 c o n t i e n t L a n d r e c y et A v e s n e s
Le q u a r r é
32 q u i c o u v r e u n e g r a n d e p a r t i e de la
(14).
(15)·
(17).
Thiérache,
ne c o n t i e n t que l a p a r o i s s e de A n o r e n H a i n a u t f r a n ç a i s Hainaut
avec
(16).
Le q u a r r é 30 c o n t i e n t L i e s s i e s , T r e s l o n et C h i m a y
l'extrême
et
(13)·
ét
S u d d u H a i n a u t a u t r i c h i e n a p p e l é de nos j o u r s B o t t e
(18).
du
36 Les limites du Hainaut français furent modifiées suivant les occupations et les traités
(Aix-la-Chapelle en 1668, Nimègue
en
1 6 7 8 et Utrech en 1 7 1 3 ) . L'intendance d u Hainaut dont le cheflieu était à Maubeuge depuis I 6 7 8 ,
fut transférée à Valenciennes
en 1720. Condé y fut incorporé en 1730 tandis que Cambrai, Bouchain, Saint-Amand et Mortagne ne le furent qu'en 1754. Si nous comparons la carte du Hainaut en 1579 par Jacques de Surhon (19) ou celle de Guillaume de l'Isle de 1702 sur laquelle Renier Chalón a placé la frontière de 1848, donc actuelle
(20),
avec la carte héraldique du Hainaut par Braun et Hogenberg de 1588
(21) ou celle de Dumont de 1774
(22), nous constatons qu'à
l'époque où les Masse levaient leurs cartes, sur les 24 principales villes du Hainaut, 10 sont dans le Hainaut français dont les deux enclaves françaises, en terre autrichienne, de Philippeville et de Marienbourg et 14 sont dans le Hainaut autrichien.
Condé,
Pecquencourt, Bouchain, V a l e n c i e n n e s , Bavay, Landrecies, Maubeuge et Avesnes sont actuellement dans le département du Nord. Philippeville et Marienbourg sont dans la province belge de Namur. Saint-Guislain, Leuze, Chièvres, Ath, Lessines, Enghien, Hal, Soignies, Möns, Roeulx, B r a i n e - l e - C o m t e , Binche, Beaumont et Chimay sont la province belge du Hainaut. A part une permission de l'Evêque de Liège, les Masse ne purent obtenir l'autorisation d'exécuter des levés dans les PaysBas autrichiens et durent copier des cartes imprimées ou des cartes levées par des ingénieurs français pendant
l'occupation
par Louis XIV, des parties méridionales du Hainaut autrichien.
Ils
indiquent dans les titres de leurs cartes, avec beaucoup de scrupule, qu'il ne faut pas trop compter sur la " / u.ite.&¿ e." de telle ou telle partie de plusieurs quarrés et qu'ils ont dessiné certains bourgs en noir et non en rouge comme ceux qu'ils ont pu lever. Masse cadet rédigera une "Ozic.K-iptA.on m¿¿¿ta¿ie. du Ha.yna.ut ¿Kanço^A
&t autK¿ch¿en"
dt ta
caute,
dans laquelle nous notons :
Le Comté de Haynaut est un grand fief que ses comtes ou Seigneurs relevoient directement de la couronne de France nos Roys de la première et de la seconde race
sous
: il en a esté
demembré sous la troisième et est passé sous la domination de l'Espagne qui la possédé en entier jusqu'à la réunion que le feu
37 Roy Louis XIIII afaite de la partie la plus considerable et la mieux fortiffiée de cette province par conquête et par traités confirmés par celuy d'Utrecht. Cette partie est connue présentement sous le nom de Haynaut françois et celle qui est restée a la maison d'autriche par le meme traité et que la Reyne de hongrie possede aujourd'huy, est communément apellée Haynaut autrichien. Le haynaut françois comprend la Chatellenie de Bouchain, la Prevosté de Valenciennes ou est Condé, Celles du Quesnoy, de Bavay, de Maubeuge ; les territoires de Landrecy, d'Avesnes, de philippeville, de Marienbourg et les villes de Charlemont et de Givet (23). Le haynaut autrichien comprend la Chatellenie d'Ath, les Prévôtés de Möns et de Binche, le Baillage d'Enghein, le Comté de Beaumont et la Prevosté de Chimay (24). Des 11 quarrés qui couvrent une petite partie du Hainaut autrichien et tout le Hainaut français - et par extension l'intendance du Hainaut - nous n'étudierons, en totalité, que le mémoire et la carte du quarré A et, en partie, ceux des quarrés 21, C, 22, 23 et 27 dont les limites sont les mêmes que celles des arrondissements actuels de Valenciennes et d'Avesnes. C'est à Valenciennes que Claude Masse rédigera le 17 avril 1726 un mémoire sur le quarré A : Mémoire Sur la Carte des Environs de Valenciennes, Condé Et ,St Amand que représente le pays en 1'Estât quii étoit aux années 1724 et 1725 ou Se trouve partie de la fiandre françoise et partie du haynaut Imperial ou Autrichien appelé vulgairement terres d'Espagne. Il se trouve sur cette Carte presque toute la Prévôté Comte ou gouvernement de Valenciennes ; il ne manque Sur cette Carte des terres qui Sont de cette Comté que les paroisses au Sud de Valenciennes qui Sont, Main, Monchaux, Querenain et Artres et sur cette même Carte Se trouve tout le gouvernement de Condé. Ce gouvernement n'a dans Sa dépendance que les paroisses de Condé, du Vieux Condé, D'hernie, Thivecelle, qui se trouvent au Sud et au Midy de la Riviere de haine et la dépendance de ce village se trouve enclavé dans la Comté de Valenciennes qui est borné du côté du Nord ou Septentrion par la Rivière de haine cest pourquoy un petit bout de la Ville de Condé est enclavé dans le prévôté de Valenciennes Surtout l'ouvrage a Corne de la
38 porte de Valenciennes. Il se trouve aussi dans cette Carte Onze paroisses du gouvernement de Bouchain Qui fait partie de l'Ostrevant : il y a encore au bas de cette Carte du Côté de l'Est trois paroisses du gouvernement du Quesnoy. Il se trouve dans cette Carte du Côté de l'Ouest ou Occident un bout de la fiandre françoise ou prévôté de St Amand qui est Limité du Côté de l'Est par la Rivière d'Escarpe et cette prévôté de St Amand a dans sa dépendance une grande étendue de terres et de bois du côté du Sud Est jusqu'à la prévôté de Valenciennes. Il se rencontre dans cette Carte à la jonction des Rivières de l'Escaut et de l'Escarpe quatre paroisses qui font une petite contrée particulière que l'on appelle communément comte de Mortagne qui sont Mortagne, Flines, Chateau l'Abbaye et la Breville, elle etoit devant la paix d'Utrecht (conclue en 1713) du gouvernement et dépendance de Tournay, dont les limites n'étoient pas encore decidée en 1725 ; la france pretend que ces paroisses luy appartiennent les Impériaux quelles Sont du Tournaisis ou terres imperialles et jusqu'au temps que ces discutions soient levées par le Congrès de Cambray ou autres traittés elles ne payent depuis plusieurs années aucuns subsides ny a la france ny a l'Empereur l'Intendant de L'Ille leur ayant fait de rudes deffences de ne rien payer a Tournay parce que la juridiction s'etend jusqu'à la Comté de Valenciennes, l'Ostrevant, la prévôté de St Amand et le gouvernement de Condé en étant (25)· Il se trouve dans cette Carte du Côté du Nord une paroisse appellée Thun, enfermée dans l'intendance de Lille ou fiandre francoise, qui est terre Imperialle ce qui est fort genant aux habitants qui ne peuvent Sortir sans passer Sur les terres de france et au Nord de Thun a gauche de l'Escaut Se trouvent les paroisses de Espain et de Maude qui sont enclavées et melées dans les terres Imperialles mais les Eglises Sont Sur les terres de france, il y a au Village de Maude une rue de presque 700 toises de Longueur du côté de L'Est ou Levant qui appartient a Lempereur et la partie de cette rue du côté de l'Ouest apartient a la france ; l'on n'a pas marqué exactem^ Sur cette Carte les différentes enclaves de ces deux paroisses entremellées dans les terres des deux empires l'on n'a pas non plus déterminées exactement les limites de la paroisse de la Plaine qui est terre imp e r i a n e non plus que les limites de la paroisse de flines a eau»·
39 que oes limittes la ne sont point décidées et que une grande partie des terres de Sa dépendance Sont entremellées avec celles des paroisses adjacentes du Côté du Nord et de l'Est ce qui ne se peut pas même bien limites jusqu'à tant quii Soit décidée a qui des deux monarchies cette paroisse apartiendra. Cette Carte represente le pays en l'estât quii etoit aux années 1724 et 1725 que le sY Masse Ingenieur du Roy la levée on ne peut pas compter exactement Sur la partie de cette Carte qui est dans les terres et dependances de l'Empereur dont plusieurs Villages qu'on a mis en detail ont été copiés Sur des Cartes qui ont été levées et que je n'ay pu verifier et d'autres ne sont placées que par alignement ou en a mis les Eglises et maisons en elevation qui Sont Baisy
Baisieux , Angre et Angreau
Quievrain n'est aussy que d'idée et l'on n'est pas Sur de Sa grandeur ny de Sa figure et encore moins du terrain qui l'environne pour les Villages de Wier Brenissart
Bernissart
Wiers
, Pervez
, hensies et Roizin
Peruwelz ,
Roisin , ont été
copié Sur des Cartes levées autrefois geogetriquem^ par des ingénieurs du Roy. Il entre dans cette Carte partie du Cours des Rivières de l'Escaut, de la Scarte, de la haine, de l'honeau et plusieurs autres petites rivières ou gros Ruisseaux (26) (fig. 3)•
De cet important mémoire de 6l folios dont Claude Masse a placé, en introduction, la situation géographique de la carte du quarré A, nous citerons les descriptions de quelques villes et villages du Hainaut français, à l'exclusion de la Prévôté de Saint-Amand et du Comté de Mortagne (27).
La chapelle de Notre dame de Bon Secours est situé Sur une hauteur au bout d'une grande allez qui vient de Condé et une autre qui va a Pervez
Péruwelz
cette chapelle est fort joli et
aux limites des deux monarchies tous les peuples des environs tant des terres de france que de celles d'Empire y ont une grande devotion et Si rendent de toute part en grand nombre particulièrement aux festes de la Vierge.
40 Raisme
Raismes
est un Village Situé dans un fond entouré
de Bois au Nord et a L'ouest et au Sud l'Eglise est jolie.M
le
Comte de Cernay y a une belle Maison il y avoit autrefois une grosse tour Sur une butte de terre qui a été Razée en I676. L'on compte en cette endroit 63 feux. Beuvrage
Beuvrages
est un Village dans un terrain un peu
haut ou il y a un magnifique chateau qui appartenoit au Duc D'Achot et qui la vendu au dernier Siecle a l'Archeveque de Cambray pour y établir un Seminaire qui ny est plus il y a dans le même Village du C5té du Sud un Ancien chateau enceint de fossez pleins deau et il faudroit du Canon pour le prendre il peut soutenir un coup de main il y a beaucoup de jardinage dans ce village et plusieurs jolies maisons bourgeoises et cest une des promenades de Valenciennes et il y a des Belles prairies au Nord entrecoupées de grands fossez qui entourent des terres labourables Ion y compte 30 feux. Le village d'Anzin est sis dans un terrain haut dou commence une fontaine il y a a l'ouest une Butte remarquable ou etoit autrefois l'idole d'Isis que l'Empereur Valentinien fit abatre en 367 ; ce mont est apresent une belle cariere de Sable d'où l'on tire presque tout celuy qui S'employe a Valenciennes et pour construire les chemins pavées et en joignant ce mont il y a un calvaire ou les peuples de Valenciennes
vont Souvent il y a a
l'Est de ce village et sur les bords des coteaux qui tombent sur le Canal du Noir Mouton plusieurs bonnes Carieres de pierres blanches qui Sont en partie a découvert et d'autres Sous terres ou l'on tire de la pierre blanche et du Moilon Ion y compte environ 50 feux. Bruay est un Village dans un fond Entouré de prairies ou il ny a rien de remarquable a Côté du chemin de Condé entre les villages de Bruay et d'Escaupont se trouve une plaine haute la ferme de St Vincent a l'Est de la quelle il y a une petite redoute de terre ou l'on tenoit un detachement aux dernières guerres Ion y compte 80 feux. Presnes est un gros Village du Gouvernement de Valenciennes il a une rue de près de 5OO toises de longueur pavée de Size sur le bord d'un petit coteau qui tombe sur L'Escaut l'Eglise est joly et a un haut clocher en fleche couvert d'Ardoise on y a
41
établie une Verrerie depuis quelques années ou on fait des Bouteilles de gros Verre mais ce qu'il y a de plus
remarquable
au Nord Est de ce Village dans le hameau du Treu de fresnes au Coin du bois de même n o m est une Cariere a houille ou houillere ou charbonnière de fresnes
; elle a été découverte en 1718. Il y
a un puys de 35 toises de profondeur et l'on travailloit en 1724 a une autre cela occupe plus de 100 hommes et 30 chevaux pour faire tourner les roues qui epuisent les Eaux qui est défaut de cette Cariere ce qui est un grand bien pour la france parce que l'on ne seroit pas obligé d'aller chercher la houille ou charbon de terre Sur les terres de l'Empereur qui fait Sortir beaucoup d'Argent du Royaume Car il entre actuelement beaucoup de charbon qui vient du Côté de Möns que Ion mène par chariots dans le Cambrésis dans l'Artois et Picardie Sans compter une prodigieuse quantité qui descend Sur la Rivière de haine dans des grands Bateaux a Condé et ensuite par l'Escaut jusqu'à Mortagne et r e montent l'Escarpe jusqu'à Doiiay, Arras, Lislle et autres Villes de la fiandre francoise Sans ce qui desend dans des Bateaux jusqu'à Tournay et ensuite par l'Escaut jusqu'à Gand et Anvers qui se distribue par toute la fiandre imperialle. Cette houille ou charbon de terre Sert a Cuire la Chaux les Briques et pour toutes les forges de toutes Espeses outre qu'il S'en brûle beaucoup l'hiver dans les maisons de distinction pour chauffer les domestiques et on en brûle aussi dans plusieurs maisons
bour-
geoises et particulièrement chez le menu peuple ce qui Epargne beaucoup de bois et en fait diminuer le prix et celle de fresne est fort propre pour ce dernier usage aussi bien que pour les fours à Chaux et a Briques mais elle n'est pas si bonne que celle de Möns pour les forgerons parce quelle brûle trop Viste et gate le fer et la Cendre qui en provient est d'un grand debit pour fuler les terres et principalement une espece de s. foin de tresfle qu'on appelle dans ce pays Tranenne qui est d'un grand Secours pour la Nouriture des chevaux dans le pays ou il ny a point de foin. Ces charbonnières de fresne reussisent bien et en 1724 on en commença une Seconde et on a perfectionnées les Machines tant pour epuiser les Eaux que pour elever le charbon dont l'on a déjà chargé beaucoup Sur l'Escaut dans les grands Bateaux proche la Sence du Certeau. Voicy comment a été découverte cette houilliere des Particuliers S'unirent ensemble et firent
42 un fond pour en faire les Avances Sans Scavoir ou ils pouvoient S'établir ils s'adressèrent a un homme fort âgée qui ne pouvoit presque plus marcher et le menerent a une houilliere du côté de Charles Roy dou il partit monté Sur un petit cheval avec Sa Baguette a la main escorté dautres hommes cette Baguette le Conduisit tout a travers champ a la piste d'uhe Vaine de Charbon qui le mena jusque vers Maubeuge et puis le ramena au travers les champs passer Sur le pont de Condé cette même baguette le Conduisit au Coin du Bois de fresne joignant le hameau du Treu ou il leur dit de creuser qu'infailliblement ils trouveroient du Charbon et les entrepreneurs Se mirent après. Mais ils penserent abandonner leur travail par le grand Epuisement d'Eau et la profondeur de la Mine ce qui avoit épuisé leurs bourses comme ils etoient au dernier Ecû et tout a fait rebuté de cet ouvrage le hasard voulut que 2 jours après ils trouvèrent la Mine qui est un banc de 5 pieds de hauteur a plus de 33 toises d'aprofondissem^ du dessus de la Superficie de la terre jay apris ces circonstances Sur les Lieux des Ouvriers qui en ont fait l'Etablissement, Ion compte en cette paroisse 42 feux. Escaupont est un Village Situé au bord de l'Escaut dans une plaine basse de prairies et de communeaux du côté de l'Est et des terres labourées le long de l'Escaut tout le Village s'innonae quand les Ecluses Sont fermées a Condé Ion y Compte 17 feux. Tivechelle
Thivencelles
est un Village Sis au Nord est et
au bord de la Rivière de l'honeau. Son terrain est bas et presque tout en prairies qui Sont toutes innondées aussi bien que le Village quand les Ecluses de Condé Sont fermées et est du gouvernement l'Eglise est basse et n'a qu'un Campagné pour Clocher Ion Compte 41 feux en cette paroisse. Crespin est un Village Sis a l'ouest et Sud joignant la Rivière de l'honeau et est traversée de plusieurs rues qui Sont pavées et les maisons bâties suivant l'usage du pays partie en brique et l'autre en terre le tout couvert de paille il y a au Nord au milieu de ce Village une grosse abbaye de l'ordre de S^ Benoist mais l'Eglise est des plus Simples et des mal ornées aussy bien que la paroisse qui est joignant il ny a de ramarquable que la tour du Clocher qui est terminé par une fleche Couverte d'ardoise fort haute il y a 3 grandes Cours dans Son abbaye
43 et des grands jardins au Nord de la Rivière de L'auneau, l'abbé est un Religieux Electif et cette abbaye possede une grande etenduë de terrain elle a été fondée en .... l'on tient quils deveroient etre 40 religieux et il ne sont que 8. L'abbé est Seigneur de la paroisse qui joint aux terres de l'Empereur la paroisse fait face a la place qui est grande il y avoit autrefois une Maison de Ville qui a été brûlée les armées de france y ont compez plusieurs fois dans les dernieres guerres il y a peu de jardinage mais toutes les Maisons Sont environnées d'Oubloniere aussy bien qu'au Village d'herny
Hensies qui est dans les
terres de l'Empereur cette plante qui produit la graine pour faire la Bierre s'entortille au tour des perches qui ont de 12.15 a 18 pieds de haut l'on les arrache tous les ans et l'oublon repousse au printemps l'on cueille la graine vers la fin d'aoust quand il est une fois planté cest pour tres longtemps mais il demande beaucoup de Soin pour Sa griculture celuy de ce Village est fort estimée Ion Compte dans Sa paroisse 140 feux. Au Sud de ce Village est la Chapelle et fontaine de S^ Landelin qui avoit été Voleur et qui Se retira dans cet endroit pour faire penitence avec dautres scélérats de Son partie et Comme ils Mouroient de Soif ils eurent recours a la Misericorde de Dieu qui fit Sortir une abondante Source qui est ajourdhuy devant la Chapelle qui est Enceinte de Maçonnerie toute ronde et produit d'Escellente eau et en abondance et ils ont a l'abbaye de crepin le Corps de ce S. Lambert et la Canardiere de Condé (fig. 10) Sont de la paroisse de Crespin. Queverchain
Quiévrechain
C'est un Village Sur le penchant
dun Coteau du Coté de l'Est il appartien au Seigneur du Même Nom l'Eglise est d'une Moyenne grandeur Ion y Compte 43 feux il y a une grosse ferme a l'abbé de Crespin on passe au bout de ce Village la petite Riviere du Carnoy ou Rainette ou Sebourg Sur un pont de bois en temps de paix et rompues en temps de guerre il y a au dessous de ce pont environ a 120 toises un beau moulin d'Eau et entre le pont et le Moulin la rivière a 7•ou 8. toises de largeur et au dessous du Moulin 8. a 9 pieds. Le chateau est un grand quarré d'environ 30 toises qui appartient au Seigneur de même nom il a Eté deffensif et a Soutenu un Siege contre les francois au guerres precedentes il ny a plus que quelques tourelles et les fossez qui etoient plein deau et larges de 9 a 10.
44 toises etoient comblez en 1724 et ce n'est apresent qu'une grosse ferme. Vuy
Vick
C'est un Village fort Etendue dans un terrain bas
Marecageux enceint de prairies ou Ion coupe du foin et lautre partie est en paccage le tout traversée de grands fossez bordez d'arbres de Saule et aubiers la partie qui est un peu plus elevée que les prez est en terre labourées l'Eglise est assez joly et a un Clocher a fleche il y a proche un Calvaire 3 partie des prez et paccage de cette paroisse du Coté du Nord et de l'Ouest s'innondent quand Ion ferme les Ecluses de Condé ce qui n'arive qu'en temps de guerre les abords de ce Village Sont tres diffidi cile l'hiver il apartient a M qui est au Service de l'Emperuer l'on y Compte 50 feux. Couroube
Quarouble
C'est un Village Situé dans une plaine
basse les chemins Sont bordez de fossée pleins deau il y a beaucoup d'arbres frutiers dans ce Village qui appartient au Chapitre de Cambray l'Eglise paroissiale est d'une Moyenne grandeur mais a un clocher fort joly avec une belle fleche bâtie en 1724. Ion Compte en ce lieu 65 feux. Le Village d'Hönning
Onnaing
est Situé dans une plaine
basse et il est d'une grande etendue aplusieurs grosses fermes les Chanoines de Notre Dame de Cambray en Sont Seigneurs les chemins autour de ce Village Sont plein deau ce qui le rend tres Mauvais l'hiver qoyque ce Soit dans ce Village et a l'Est Sud Ouest ou passe le grand chemin de Valenciennes a Möns, l'Eglise d'honning est grande a une grosse tour quarré qui luy sert de clocher qui est terminé par une fleche partie de l'Enceinte du Cimtiere est percé de Crenaux cella n'empeche pas que les françois ne la pillasse après la bataille de Malplaqué en I709 Ion compte en cette paroisse 15O feux. St Sauve
Saint-Saulve
est de la Banlieu de Valenciennes
il est Sis au bord de l'Escaut d u Coté de l'Est il ny a de remarquable que l'abbaye des Bénédictins fondé en 8IO il y a un assez beau clocher l'Eglise est mal ornée elle est joignant l'Eglise paroissialle qui est petite il y a dans l'abbaye trois grandes Cour mais le tout fort irregulier aussy bien que les bâtiments qui n'ont rien de remarquable il y a plusieurs
fermes
qui dépendent de cette paroisse aui ade grandes prairies et Communeaux en paccage au Nord Ion y Comte 45 feux.
45 Rombies est un Village Situé au plus haut terrain de ce quartier a l'extremité de Roides coteaux qui tombent a u Nor jusqu'au Rousseau de Carnoy ou de Rainette il y a dans ce fond un beau Moulin a eau il ne paroist rien de remarquable dans ce village qu'une grande Ravine du Coté de l'ouest Ion y compte 22 feux. Sebourqueau
Sebourquiaux
est Situé dans un fond Sur la
Riviere de Carnoy ou il ny a rien de remarquable qu'un b e a u Moulin a lau l'Eglise est p e u de chose cest une annexe de Sebourg il y a beaucoup d'arbres frutiers autour des maisons et jardins de ce Village et Principalement des Noyers. Sebourg est un Village à l'Est de Valenciennes Situé a u Sommet d'une hauteur qui tombe du Côté de l'Est jusqu'au ruisseau Ce lieu est considérable tant par sa grandeur que par de jolies Maisons bâties de briques et couvertes de paille il apartient a un Vicomte qui en porte le N o m qui y a une petite m a i s o n basse ce qui rend cet endroit remarquable c'est les reliques de S
Druon qui y a ete Berger qui est mort il a environ 600 ans
Son Corps est dans l'Eglise paroissialle le clocher est fort joly les peuples Circonvoisins ont une grande devotion a ce sí dont la feste est au mois de juin il y abondent de toutes parts pendant 8 jours qui est le temps de l'octave quils a p p e l lent ducasse on compte dans ce Village ΐΊΟ feux y compris Sebourqueau et il y a autour de ces Maisons beaucoup fruties et des Bonnes fontaines il
d'arbres
y a au Sud de ce Village le
pont de Tonvois qui est a fleche qui leve un pont levis q u a n d on veut ou passe le grand chemin de Valenciennes a Bavay et de Maubeuge le Village de Sebourg est partagé en deux par le Ruisseau ou Riviere de même N o m le Coteau d u Coté de l'Ouest est roide et fort haut celuy du Cote de l'Est est plus doux et moins elevé il y a dans le V a l l o n quantité darbres fruties Surtout des Noyers a l'Ouest du Village il y a trois chapelles il y avoit une Ancienne tour dans ce Vallon deffensif qui fut pris par les francois en I676 et ensuite razé la tradition dit quelle avoit été bâtie par u n Roy gaulois pour bloquer l'ancienne et fameuse Ville de Bavay. Jenlain, les Villages de Jenlain, d'eth, et de Brises n'ont rien de remarquable et Sont du gouvernement d u Quesnoy
Bry
46 devant l'Eglise de Jenlain est au Sommet d'une Ravine et Son Cim e , tière est fermée et flanqué par des tours Crenelées il y a a l'Est de ce Village qui est bâtie Sur le panohant d'un Coteau un moulin a eau et a Eth il y a un chateau enceint de fossez plein deau. Estroeux
Estreux
est un Village Situé Sur une plaine haute
qui a une ravine à l'Ouest et dautres au Nord il y -± dans ce Village plusieurs grosses fermes et autour beaucou'j d'arbres fruitiers et au Nord'ouest est environ a 500 toises de l'Eglise il y a trois puits dou on tire de belles pierres de taille blanche que Ion mene a Valenciennes et ailleurs mais pour en faire un bon usage il faut les laisser hiverner a lair. C'est de ce Village où vient la grande ravine du Rouleur qui commence au Nord de Curgies et Conduit beaucoup deau an temps de Pluye de Sable et de Boue et Combloit la Riviere de Ronnelle et pour l'éviter on a fait un aqueduc Sous terre entre Valenciennes et le Moulin du Rouleur et cet ouvrage a été d'une grosse depence ayant plus de 400 toises de longueur on compte en celieu 25 feux. Sautin
Saultain
est un Village dans une plaine haute d'où
commence un petit ruisseau qui est presque a Sec tout l'Esté, et il ya en celieu plusieurs grosses fermes et maisons bourgeoise et une Commanderie appartenant aux Moines de S^ Jean de Valenciennes on y compte 30 feux il est entouré de jardinage ou il y a beaucoup darbres frutiers. Curgies est un Village Scitué au terrain le plus haut qui Soit au Sud-Est de Valenciennes l'Eglise est grande il y a un beau clocher quarré il y a encelieu plusieurs grosses fermes Ion y compte 36 feux les environs de Ce Village sont entourés de jardinages ou il y a beaucoup d'arbres frutiers. Prezeau
Préseau
est un grand Village Scitué partie dans un
fond et partie Sur une hauteur ou Commence au dessus un petit ruisseau le chateau est proche l'Eglise enceint de fossez plein deau il y a au Nord et au Sud de ce Village Sur les chemins qui y abordent des grandes ravines les Coteaux depuis Prezeau jusqu'à la Cense de Simon Sont haut et tombent du C5té du Sud jusqu'aux prairies du Vallon le terrain entre Prezeau et Aulnoy est le plus haut de ce quartier Surtout en approchant de Prezeau Ion y compte 40 feux.
47 Aulnoy est un Village dans un fond coupé en deux par la petite riviere de Ronnelle ou il y a un beau Moulin a Eau a l'ouest de ce Village il y a une profonde ravine demême qu'a l'Est c'est une des promenades de Vallenciennes et lorsqu'on veut mepriser une fille ont dit quelle a été a Aulnoy. On y compte 20 feux. Famars est un Village Sis Sur une plaine haute qui tombe un peu éloigné du Côté de louest et de l'Est ou s'Ecoulent des ravines profondes il y a a la droite le grand chemin qui va de Valenciennes au Chateau Cambresis l'Eglise paroissiale est joignant le Chateau qui apartient a M r s de famars et de Caumont Sis Sur un terrain un peu elevé est ceint encore en partie de tres Anciennes murailles dont les parements Sont tous degradées ils Sont partie de pierre dure brutte et moilon mal arrangé mais un Mortier tres dur et environ de 4 pieds en 4 pieds il y a des bandes de grosses thuilles ou briques plates d'environ un pouce depaisseur Sur un pied de largeur comme etoient bâtis les murs des Romains et que le Vulgaire appelle Sarazins il est vray Semblable que ce chateau a été considerable dans l'antiquité aussy dit-on que cetoit l'ancien Valenciennes et que les faubourgs de Bavay S'etendoient jusqu'à ce lieu le Vulgaire tient quii partoit de ce chateau un voûte qui communiquoit jusqu'à Bavay ou Ion voit l'entrée dessous ce chateau la tradition assure que ce chateau ou Ville S'appelloit la Ville des femmes et quelle étoit fort grande et en labourant on trouve beaucoup de vestiges de maisons et des Anciennes monoye Surtout dans un Vallon du Côté de l'Est de ce Village que jay encore trouvé en 1724 des Anciens historiens assurent que ce famars etoit une des Villes considerables des Nerviens qui etoient les peuples de ces provinces Sur qui les Romains les Subjuguèrent et Ion peut croire que Famars etoit une fameuse forteresse quand Jules Cesar prit la Ville de Bavay 58 ans avant la Naissance de Jesus christ puisque Cesar auguste fit decoler le Duc hauvis Seigneur de famars parce quii avoit fait entrer du Secours dans Bavay par le Soûsterain Susdit au Nord de Famars environ a 120 toises Ion découvrit en 1724 et 25 plusieurs vestiges de Bâtiments entre autres une acqueduc de 2 pieds edemie de largeur Sur 3 a 4 de hauteur bordé dun pouce de Siment enduits contre des Murs d'environ 7 pieds au dessus des terres labourables et il ne paroist pas quii ait été voûté, il y a aparence
48 qu'en cet endroit il y avoit des Bains par les fragments qu'on en découvre les fondations etans de grais il Sy trouve quelques pierres bleues, les briques ou pavés que Ion rencontre il ni en a presque point d'Entieres elles avoient 13 a 14 lignes d'Epaisseur Sur 11 a 12 pouces de large et fermoient un rectangle le tout posse en mortier de Siment fort gros point battu menu comme celuy d'aujourdhuy il est fait avec des Briques du grais et piere bleues pilez on y compte 20 feux. La Briquette. Ce hameau qui est Sur le chemin de Valenciennes a famars prend Son Nom de ce que les terres des environs Sont excellentes pour faire la Brique aussy y a til plusieurs fours qui se construisent en plaine Campagne Sans aucunes façon que les Briques meme ce que Ion ne peut pas faire dans plusieurs provinces de france principalement entre la Loire et les Monts pirennées ou Ion fait des fours expres qui Sont Stables et coûtent beaucoup faute d'avoir l'usage et la comodité du Charbon de terre. S^ Leger est une petite paroisse l'Eglise est Sise Sur une petite butte au bord des Prairies de Bourlain il ny a rien de remarquable dans cette paroisse. Trie Trith est un Village joignant l'Escaut au bord d'un petit Coteau et le chateau de ce lieu est Sis dans un Isle de la Riviere a côté un moulin a eau a drap ou fouloir et tordoir ou Moulins a huille de Colsats et Navettes on passe en ce Village l'Escaut Sur plusieurs ponts. Prouvy est un village au Nord de l'Escaut Sur le panchant dun coteau l'Eglise est assez jolie et a un beau clocher et joignant ce village un beau Moulin a eau et plus haut les vestiges de deux a poudre c'est l'endroit ou l'Escaut est le plus aisée a traverser entre ces Moulins le terrain étant labourable principalement la langue de terre qui forme l'Isle des Moulins, et les prairies audela Sont fermes les francois les avoient commencé quand ils firent les lignes de Denain c'etoit pour garder ce partage que les allies avoient faits doubles retranchements quand ils etoient Campez a Denain et a Hauchin en 1712 et c'est a ce Village ou passe l'armée de Dom jean d'Autriche en 1656 pour attaquer les lignes et retranchements que les françois avoient faits entre le Village d'Auby bonne Sperance et Valen-
49 ciennes on y compte environ 36 feux. Rouvignies est un gros hameau ou il y avoit un chateau au bord de l'Escaut qui a été razé aux guerres du l8è siècle. Auvrechain [ Wavrechain] c'est un petit village dont l'Eglise a été ruiné dans les guerres du commencement du l8è siècle il ny a rien de remarquable qu'une grosse ferme depuis ce village jusqu'à Valenciennes en Suivant les prairies de l'Escaut c'est un coteau en terre labourable d'une pente douce et au sommet de ce Coteau est la Cense d'hurthebise qui appartient aux jésuites de Valenciennes elle est remarquable par les grands gardes qui tenoient les alliez en 1712 quand ils etoient Campées à Denain. Aubry est un Village joignant les bois de St Amand ou de Vicogne ou il y a un chateau et une ferme entourée de fossez pleins d'eau d'où commence le petit ruisseau qui va tomber a l'abbaye de Vicogne Ion y compte environ 40 feux. Erehain [ Hérin Jet Oisy Sont deux Villages presque joignant dans une grande plaine ou il ny a rien de remarquable que quelques prairies Ion Compte en ces Villages environ 18 feux. Belain [ Bellaing] est un Village Sur le penchant dun Coteau qui tombe fort doucement a louest jusqu'au bord des prairies ou il y a un chateau enceint de fossez plein deau. Aveluy [ Haveluy] est un Village Scitué dans un fond qui a des prairies du Côté de l'Est et au Nord il y a des grosses fermes. Wallers est un gros Village Scitué dans un fond traversé de plusieurs rues tres incommode l'hiver par les eaux, l'Eglise n'a rien de remarquable il y a dans ce Village un chateau ruiné Situé Sur une petite butte qui etoit flanqué par 4 tours on y a Souvent tenu des postes dans les guerres du Commencement du l8è siècle tant les francois que les Alliés on y Comptoit en 1724 95 feux les habitants Sont rustiques étant gens qui Sont la plupart occupé dans les bois. Helesme [ Helesmes] est un village Scitué dans un fond ou il ny a rien de remarquable que les francois avoient enfermée de lignes au Nord et a louest en I709 on y compte 36 feux.
50 Lourche [Lourches]
est un^petit village Sis au bord de l'Escaut
du côté.du Nord ou il y a une assez jolie eglise et 2 grosses fermes on compte en ce village 10 feux. Denain est un gros village ou Bourg Sis au bord et au Nord de la Rivière de l'Escaut dans une belle plaine toute labourée il est traversée de plusieurs rues ou il y a des grosses fermes l'Eglise paroissiale est grande et enceinte d'un Cimetière il y a au bout de l'Eglise un gros clocher quarré, proche de la paroisse du Côté de l'Est est l'abbaye des Dames de même nom qui Sont des chanoinesses fondées en 768 et augmenté en 805 par l'Empereur Charles Magne il ny a rien de remarquable dans cette abbaye qui est assez grande et vaste Ion Compte dans
1Έ-
tendüe de la paroisse 85 feux il y a quelques années quii ny en avoit que 70. Denain est remarquable et Sera connu a toute la postérité par l'action qui Sy p a s s a le 24è juillet
1712.
Condé est une petite ville ou forteresse qui a de Longueur environ 400 toises et de largeur environ 300 intérieurement entre Ses murailles Size au pied d'un petit Coteau qui est au Nord ou Se joignent les Rivieres de l'Escaut et de la haine Ion croit son origine fort ancienne, qui commença par un chateau qui fut bati par Condius Capitaine Nerviens 48 ans avant la naissance de Jesus christ pour S'opposser aux Conquestes de Julies Cesar Siz au Confins de ces deux Rivieres qui enveloppe une tour qu'on croit avoir ete bâtie par jusle Cesar dans
laquel-
le Se retirerent beaucoup de peuples du Pays Sous Sa protection et Sous celles des Rivieres entre le 8è et 9è Siècle pour Se garantir de la fureur des Normands ou peuples barbares du Nord qui firent des Ravages dans ce pays la aussy bien qu'en france et il sy battit ensensiblement autour de ce chateau des Maisons au pied de la hauteur par la Suite enceint de foibles murailles elle fut prise en 1478 par les francois Sous le regne de Louis XI ensuite reprise par Maximilien archiduc elle fut Surprise en I 5 8 O par les huguenots et pillée, les francois l'on prit trois fois aux Siecles passés Scavoir en 1649 et en 1655 et enfin la derniere fois a été en 1 6 7 6 Sous le Regne de Louis 14 qui 1'assiégea en personne elle fit une petite resistance et elle Se rendit a discretion. Ce Monarque la fit ensuite fortifier et en a fait une des meilleurs places de toutes ces provinces cy, tant
51 par Ses beaux ouvrages que par ces inondations, il y a une Egl. Colegíale, une paroisse, des Capucins, des Religieuses
Soeurs
grises établies en 1480 et les Capucins Sont établis en 1644 et une hôpital, peu de Maisons de remarques et habitans, le Prince de Crouy en est Seigneur il y a une fort jolie Maison ou il residoit avec Sa mere en 1724 cette terre a changé divers fois de Seigneur et appartient a la Maison de Bourbon l'on tient que les Seigneurs de Condé ont donnez quantitez de terres marécageuses aux environs qui ont été desseichées a condition quils demeureroient dans cette ville pour la peupler. L'Eglise Colegialle de Condé dediée a la Ste Vierge et aux Saints innocents est fort ancienne et elle doit Son origine a St Wasnon cette Eglise avoit Servie a un Monastere de Religieux que les Normands avoient ruinées elle fut retablie en 965 et on y mit les Chanoines qui y Sont aujourd'huy au nombre de 25 il y a dans cette Eglise plusieurs tombeaux Anciens elle a été brûlée en 1439 la ville avoit été ruinée entièrement quelque temps auparavant
; Sii ne Se fait pas un gros negoce a Condé ce n'est
pas faute quii ny ait des Commoditées Car il y a toujours un tres grand Nombre de Bateaux qui remontent et descendent a la faveur de la grande ecluse proche le chateau et ces Bateaux restent en grand nombre dans la Ville audessus de l'Ecluse jusqu'à l'entrée de la haine il S'y en est construits qui ont jusqu'à 17 toises de longueur et de largeur jusqu'à 13 a 14 pieds et 8 pieds de haut ils Sont destinées communément a transporter du charbon de terre ou houille quils vont charger a St Guillain et au dessous et remontent jusqu'à Möns et puis descendent
l'Es-
caut jusqu'à Mortagne et remontent la Scarpe en passant Sur le pont qui est a fleche qu'on leve aisement et puis passent
au
Sas ou Ecluses de Thun que Ion ferme quelquefois avec des p o u trelles continue jusqu'à une ec luse qui est au dessous le Chateau de la Motte et ensuitte jusqu'à un moulin ou il y a
une
belle Ecluse a Vanne que Ion leve par le moyen d'un Arbre Vertical qui fait toirner un Essieux ou Arbre Orizontal cette Ecluse est fort Simple et a 8 a 9 pieds de chutte celle de Condé en a près de 14 de chutte et Se ferme avec des Poutrelles les Bateaux qui passent a Condé payent des gros droits puis que Ion tien que le Bureau du Roy en reçoit plus de 100000 ecu par ans Sans Compter ce qui revient
à l'Etat Major.
52 Valenciennes.Cette Ville qui est Size dans un fond est traverse par la Riviere de 1'Escaut ou Se joint la petite riviere de Ronnelle formant ensemble plusieurs bras dans Son enceinte qui font moudre plusieurs Moulins qui Sont d'une grande utilité au publique Surtout aux brasseurs et taneurs, elle est dominée a l'ouest par les Coteaux d'Anzin et de la porte Notre Dame et au Sud par la hauteur de Ste Catherine ou de la porte de Cambray d u Côté de l'Est les hauteurs Sont plus elougnées et ne Sont Nullement préjudiciable a ces fortifications cette ville a de Circuit intérieurement Sur ces remparts environs deux milles toises non compris la Citadelle ou une petite lieu de france et dans Ses diametres environ 600 toises d'une figure Eliptique ou Oeuf elle est traversée de Nombre de belles et larges rues dont la pluspart donnent a l'entrée des portes, bordées de belles maisons presque toutes bâties de briques Couvertes de Tuilles plates quelques unes d'ardoises Sa grande place a de longueur près de 100 toises Sur environ 25 de largeur et celle de St Nicolas ou le marché aux Bestes en a 60 Sur 40 et il y en aplusieurs autres petites toutes irregulieres qui n'ont rien de remarquable l'Escaut est traversée par 6 ponts dont il y en a de bois et un tres grand nombre dautres sous différents Canaux, il y a Sept paroisses qui Sont St Geri, St Nicolas, Notre Dame la chaussée, St Jaques, St Vaast, Notre Dame la grande et St Jean paroisse du Clergé et des etudians les quatre dernieres sont fort petites St Jaques est de l'Eveché d'Arras aussy bien que St Vaast les grands Carmes les jesuistes et le Couvent de la Magdelaine St Vaast Se trouve aussy d'Arras quoyque la Nouvelle eglise bâtie au Sud de l'Escaut parce que l'ancienne etoit a l'ouest de cette Riviere Sur le chemin qui Sorte par la porte avancée de Notre Dame a l'ouest de la Citadelle l'Escaut fait communément la Separation de l'archeveché de Cambray et de l'Eveché
d'Arras.
Les principaux Munastere Sont St jean, chanoines Reguliers de Ste Genevieve c'est le plus beau de la Ville. Notre Dame la Grande aux moines d'hasnon Solidement bâtis et fort vaste avec des grandes galleries hautes c'est ou s'assemble le Clergé regulier et irregulier les Magistrats et les peuples aux festes Solennelles ou publiques. Les jacobins les Augustins, les Chartreux, les Capucins,
53 les g r a n d s C a r m e s
les j e s u i s t e s
les R e c o l e t s
les p e t i t s
Carmes
q u i ont t o u s des g r a n d s et v a s t e s e g l i s e s b i e n o r m é e e x c e p t é Carmes desohaux qui n'en nont qu'une petite tous leurs
Sont v a s t e s o u il y a n o m b r e de r e l i g i e u x il y a u n p e t i t tre de St Gery
; il y a a u s s y n o m b r e de C o u v e n t de
dont les p r i n c i p a l e s
chapi-
Religieuses
Sont le B e g u y n a g e , B e a u m o n t , les
les C a r m e l i t e s , l a M a g d e l a i n e , les B r i g i t t e , les
Clarises,
Urselines,
St M e r y , les R e c o l e t s et q u e l q u e s a u t r e s C o m m u n a u t e z q u i ne p o i n t c l o i t r é les p l u s r e m a r q u a b l e s q u i ne Sont p o i n t
Sont
communes
en f r a n c e S o n t le B e g u i n a g e q u i o c c u p e n t u n g r a n d t e r r a i n en p a r t i c u l i e r
les
bâtiments
vivent
et o f f i c i e n t a u x C o e u r s c o m m e les c h a n o i n e s
dans
des f o r m e s ont la l i b e r t é de se p r o m e n e r et de Se m a r i e r o n t curé p a r t i c u l i e r
avec deux chapelains
; l ' h ô p i t a l est g r a n s
un mais
m a l b â t i e , il y e n a u n a u t r e a p p e l é e les C h a r t i e r e s o u o n m e s t les V i e i l l e s g e n s
la t r o i s i è m e est L h a u t e l l e r i e
les a u m ô n e s et o u o n C a t h e c i s e les e n f a n s
les e n f a n s
ou on
distribue
un autre ou on
eleve
t r o u v é e s et a u t r e s p a u v r e s des d e u x Sexes il y e n a
un autre appellé
les e n f a n s b l e u s o u o n e l e v e les e n f a n s
orfelins
des d e u x Sexe o n l e u r f a i t a p r e n d r e des m e t i e r s et e t u d i e r le v e u l e n t et S o n t le l i b e r t é dy d e m e u r e r : j u s q u ' a 21) a n s , donnoit autrefois
c e n t E c u s aux f i l l e s p o u r les m a r i e r
avec
l ' E p a r g n e que f e r o i t les p a r e n s de l e u r s b i e n s c e l a l e u r l i e u de S ' E t a b l i r
ce q u i n ' e s t p l u s a u j o u r d ' h u y
autre appellé lhopital
S'ils on
donnoit
il y e n a u n
St j a q u e p r o c h e la p o r t e de T o u r n a y
les p e l e r i n s o u o n l e u r d o n n o i t a u t r e f o i s l ' h o s p i t a l i t é
pour
pendant
t r o i s j o u r s et e n ce t e m p s ils ne l ' o n p l u s que p e n d a n t u n e
nuit,
il y a p l u s i e u r s
de
C h a p e l l e s d o n t les p r i n c i p a l e s
St P i e r r e p o u r les M a g i s t r a t s
Sont celles
o u il y a une m u s i q u e
fondée
de St J e a n C o m m a n d e r i e de M a l t h e , c e l l e V i c o g n e t t e o u de dance, celle de l'autellerie Valenciennes
que I o n t i e n e s t r e la 1er de
dou etoit lancien chateau.
n o m b r e de C o n f r é r i e s sions a v e c c h a c u n s
Il y a u n t r e s
grand
en cette Ville qui font Souvent des
proces-
l e u r f l a m b e a u de C i r e b l a n c h e j o i n t e a
prodigieuse quantité q u ' o n allume dans certaines Eglises
fait q u ' o n e n c o n s u m e p l u s e n c e t t e V i l l e q u e d a n s
d o n t le c h e f S ' a p p e l l e
la
festes dans
p r o v i n c e s e n t i e r e s d u R o y a u m e c e t t e V i l l e est g o u v e r n é p a r M a j o r et p a r les M a g i s t r a t s
Celle
l'inten-
q u i e x e r c e n t la j u s t i c e et
les
des 1'Estât
police
P r é v o s t il y a q u a t r e C o n s e i l l e r s et 15 o u
16 E c h e v i n s et a u t r e s o f f i c i e r s e n c h a r g e il ny a n y p r e s i d i a i
ny
54 Baillage ny autres Cours inférieur ny Supérieur ils appellent de leurs Criminelles et Civil au parlement de Douay et autrefois a Tournay et precedament a Malines quand ils etoient Sous la dommination d'Espagne au Commencement du l8ème Siecle on y avoit etablie un presidiai ou cours Souveraines qui a été revoqué depuis quelques années. Les bâtiments publiques Sont la Maison de Ville grande et vaste ou on administre la justice ou Se tient la foire france au mois de Septembre et proche la prison la halle y est joignant ou il Se vend une tres grande quantité de Bled étant le principal Commerce de ce pays la, il y a plusieurs autres Maisons de remarques dont quelque unes ont eu autrefois le titre d'autel parce qu'il est issu de cette Ville nombre de gens de distinction entre autre trois empereurs qui y sont né, les principales maisons da present Sont l'intendance qui est le refuge des Moines de Vicogne, celle du Comte de Cernay et autres car on y comte plus de 60 carosses Roullans la pluspart a gens qui ont fait fortune dans des entreprises aux dernieres guerres, le befroy est une belle tour a un bout de la place ou un particulier a fondé une Musique pour divertir le peuple les jours de Marché ce que le peuple aiment beaucoup dans ce pays, le principal Commerce qui Sy fait est e n dentelle et toilles fines que Ion appelle toilettes on pretend quii y a des années quii Sy en est vendu pour plus de onze cent mil livres, les Bouracans
(28) etoit
autrefois tres estimées mais cella est tout a fait tombé, il y avoit une Manufacture de tapisserie qui na point reussy il y en a apresent une de petites étoffés qu'on appelle Cazenettes et une de bas au metier et toutes Sortes de Marchand et artissants et ouvriers comme aux autres Villes dont les principaux Sont Orfevres qui travaillent beaucopp pour les Eglises qui Sont Magnifiquement ornées dans les festes, il y a cinq compagnie de Serments d'environ Vingt cinq hommes chacunes qui pretent Serment de fidélité à la Ville et au Roy et Sont obligés de faire le Service en temps de guerre quand il est necessaire et jouissent pour cette effet de beaucoup de privileges et quand ils montent la garde ils jouissent du privilege des cantines Comme les troupes il y a beaucoup de portefaix ou crocheteur appelé dans le pays ports aux Sacs n'étant permis qu'a eux de porter le bled et c'est un metier car il ny a aucuns marchands ny artisan qui ait la liberté de travailler ou de vendre publiquement Sans avoir ete reçu a la
55 maîtrise cella S'etend jusqu'aux vendeuses d'herbes. Lon Compte environ dans cette Ville 18 a 20 Milles ames ce qui augmente tous les jours aussy bien que les maisons, la garnison est ordinairement Nombreuse en infanterie et Cavalerie et logent chez le bourgeois qu'en payant Surtout les officiers quand les Cazernes
Sont
pleines qui Sont payez Sur le fond de la Ville que lon dit avoir de gros revenus puisque la ferme des Ootrois monte a plus de cent cinquante mil livres. Cette Ville est a present la Capitale du Haynaut
francois,
ou Resident l'intendant et presque tous les gens qui ont le maximum des affaires du Roy. L'on nest pas fort Sur de l'origine de cette Ville les annales disent qu'un Roy Gaulois qui etoit en Guerre contre les Nerviens battit une forteresse ou Chateau en
avant la
Naissance de jesus christ pour Bloquer Bavay, Beaucoup devant que les Romains eussent conquis ce pays la et quii Se retrancha dans les Isles de l'Escaut pour enfermer Ses munitions pour former le Siege de la fameuse Ville de Bavay Capitale des Nerviens
que
Cesar auguste prit et détruisit après deux Batailles 58 ans avant la Naissance de jesus christ Un Capitaine Gaulois ou Nervien nommé Brennus en jetta les premiers fondements environ 399 ans avant la Naissance de Jesus christ Mais le plus Sur établissement de cette Ville est par l'empereur Valentinien premier qui la fit enceindre de Murailles et en jetta les fondements 367 ans de l'Ere chrestienne, après la mort de Valentinien elle fut désolée par les Huns et ensuitte par les Vendalles et au 4ème Siecle elle tomba Sous la domination des premiers Roys de france et puis les Normands la détruisirent dans le 8ème Siecle l'on dit qu'elle
s'est
agrandie des Ruines de Pamars Size sur une plaine haute ou les habitans avoient Moins de Douceur pour la Vie et la temperie de lair qu'a Valenciennes qui a la facilité des jardinages des Bonnes aux et une air temperé plus chaud que froid a proportion d u climat puisqu'il y crois plus de toutes les legumes fleures fruits et Arbriceaux que dans les Provinces les Plus meridionales d u Royaume aussy le peuple Se portent Communément bien et vivent vieux la Boisson ordinaire est la Bierre le Bled qui crois ment dans ces campagnes est du froment et tous autres
ordinaireSortent
de Bled, Si la pluspart de ces habitans ne buvoient tant d ' e a u de
56 vie qu'ils font ils se porteroient beaucoup mieux particulièrement les femmes et cet eau de vie causent une pâleur a celles qui en boivent trop et leur gattent le Corps et ne vivent pas vieili e s on les appellent blazés. Cette Ville a eu des Seigneurs particuliers a été autrefois Sous ladomination des 1ers Roys de france des Comtes d'Haynaut et de flandres et dautres principalement de la Maison d'Autriche jusqu'à lan 1678 que Louis 14 Roy de france en forma le Siege et ces troupes le prirent d'Assaut au mois de Mars par la Mauvaise garde des habitans et de la Garnison elle a soufert aux Siecles passez plusieurs calamitez par la peste et par les guerres Civiles et de Religion et fut la lere qui se revolta de l'obeissance de Philippe Second Roy d'Espagne et prit le partie des Huguenos et Calvinistes appelées dans le pays parpaillos et en 1567 elle fut assiégé par Dom jean d'Autriche Sous la Conduite de Noir Carme qui la prit adiscretion le 24 de Mars après 3 mois de Siege et punit de mort 36 de Ses principaux Mutins et privat la la Ville de tous Ses privileges elle prit encore une autre fois le parti des Rebelles des Pays bas et fut repris par le Duc d'Albe qui fit batir la Seconde Citadelle dont la 1ère avoit été bâtie apeupres ou est celle daujourdhuy que les habitants prirent et raserent et la Seconde fut razée par le traité de pacification et la 3ème qui Subsiste aujourduy aeté bâtie après la prise par les francois comme il est dit cy devant aux depans des habitans a qui le Roy donna grace du Sac et du Pillage, en 1656 les franai cois assiegerent cette Ville Sous les Ordres d u Ma de Turesne et de La ferté et Dom Jean d'Autriche et le prince de Condé vinrent au Secours et en firent lever le Siege
(29)·
Dans le mémoire du quarré 21, qui contient les environs de Möns et de Saint-Guislain, Claude Masse indiquera que n'ayant p u travailler en terre autrichienne, les environs de ces deux villes "ont S"? Pol maZtizi
ztz
aop¿z¿
lngzn¿zuA. dz cz
¿υ,Λ unz
oid-Lna¿Jiz
pay¿
CaKtz ¿zvzz
du. !oy
touque.
zxactzmznt lz¿
pan ¿z 5"?
{¡ia.nc.0-L&
ztoiznt
130)".
Si nous remarquons, dans ce mémoire que les descriptions assez importantes de Möns et de Saint-Guislain ont été extraites des Vz¿¿c.zi
dz¿
Pay¿-Ba¿
(31), nous constatons que celles des
villes et villages d u quarré A, transcrites ci-dessus
(Cf. Note
57 29), ont été recueillies sur place par Claude Masse qui habitait Valenciennes. Elles sont précieuses car elles reflètent, en plus des impressions personnelles de l'auteur, la situation géographique, historique, religieuse et démographique de ces communes à cette époque et dont les renseignements, surtout pour les plus petits villages, sont très importants pour leur histoire. Nous pourrions comparer les observations de Claude Masse dans le mémoire du quarré A avec d'autres récits de voyage, notamment celui du sieur Nomis, en 1714 (32) ou avec le mémoire de l'intendant de la Flandre Wallonne de 1698 dans l'édition critique de Louis Trénard (33)· Nous ne citerons que la description de Valenciennes faite par Elie Richard, avocat au parlement de la Rochelle qui était ami de Claude Masse et qui fit en 1708, en pleine guerre de la Succession d'Espagne, un voyage en Flandre, en Hollande et en Allemagne.
» Valenciennes est une grande ville des Pays Bas dans le Haynau qui est fcres ancienne et fort négociante. Elle a de belles fortifications et une bonne citadelle et l'Escaud qui la divise en plusieurs Isles, en remplit les fossés. On y void un grand nombre d'Eglises, mais il y en a peu de belles : celle des Cordeliers, qui est passable, renferme de vieux tombeaux des Comtes de Haynaud. Le reste de la ville n'a rien de Singulier. Le Roy en personne assiégea cette place ne 1677 et la prit d'assaut, mais il empescha le pillage et n'exigea des habitans qu'une modique pour construire la Citadelle. Depuis ce temps la cette place est restée au Roy par le traitté de Nimègue. On trouve a une demi-lieue de cette ville la belle Abbaye de Vicogne de l'ordre des Prémontrés et je diray a ce sujet, qu'il ny a guere de pays si fertile et si peuplé que le Haynaud, puisqu'on y conte jusqu'à 24 villes murées, 950 villages, 26 abbayes et grand nombre de Chateaux"(34).
Parmi les abbayes situées dans les environs de Valenciennes, nous transcrirons les descriptions de celles de Vicoigne, Crespin, Saint-Saulve, Bonne Espérance, Denain et Fontenelle, faites par Claude Masse dans le mémoire consacré à la carte du quarré A
:
58 Abbaye de Vicogne [ VicoignéJ
Cette abbaye est Situé dans·
une plaine basse au Nord Ouest et proche le Village de Raisme joignant le chemin qui conduit de Valenciennes a St Amand elle est Environné de grands bois de trois cotez est très Vaste en Bâtiments ayant 6 a 7 cours Son eglise est bâtie a la gothique et tres Superbe tant par quantité de belles chapelles Statues et bas reliefs qui entourent presque tout l'Eglise l'appartement de l'abbé est aussi magnifique tout enceint d'un gros enclos de bone murs d'un grand circuit puisqu'il y a près de 400 toises de Diamètre et entouré de fossez pleins deau, elle est tres riche et a un grand nombre de Corps Saints, elle est desservie par des Religieux premontes qui sont au nombre de... Ont tient Son établissement en 1125 par un prestre Nommé Guy Compagnon de St Norbert, l'abbée est un Religieux qu'ils elisent de leur Communauté, ils ont une Magnifique
Bibliothèque.
Abbaye de Crespin, cette Abbaye est Size au bord et a l'ouest de la Riviere de l'hosneau dans le Village du Même Nom elle na rien de remarquable l'Eglise est petite et mal ornée elle est desservie par des Bénédictins elle a ete fondé en.... L'Abbaye de St Saulve est a l'Est de l'Escaut au bout du Village de même nom il ny a rien de remarquable elle est desservie par des Bénédictins non reformé fondez lan 801 par l'Empereur Charlemagne en memoire du dit Saint qui avoit ete Eveque d'Angoulesme et qui proche de la fut tué et enterré dans un Ecurie par les fils du Prévost de Valenciennes les peuples du pays y ont une grande devotion pour la maladie de leurs Bestiaux. Bonne Sperance est un monastere d'hommes a la campagne il est desservie par des grands Carmes Situé environ a l600 toises de Valenciennes au Nord Ouest dans des bois entre les Villages d'Auby, d'Anzin et de Beuvrage ce monastere est fort jolie Surtout l'Eglise quoyque fort petite qui est bien decorée ils sont pour le moins une 3 0 a l n e de Religieux étant le Noviciat de la Province les peuples de la .province y vont en devotion particulièrement les Vendredys ils ont proche un hermitage ce Monastere fut fondée en .... par le Duc d'arscot qui etoit Seigneur de Beuvrage. Abbaye de Denain, cette abbaye a ete fondé en 768 par S t e Aldeberte Comtesse dostrevant et augmenté en 805, par 1'Em-
59 pereur Charlemagne elle est habité par des Chanoinesses qui portent un habit blanc avec un surplis de toille fine et un grand Manteau Doublé d'Hermine quand elles sont à l'office, elles Sont toutes demoiselles et ne font point de voeux et peuvent se marier, l'abbesse a titre de Comtesse le Second instituteur est St René fondateur de cette abbaye qui avoit 10 filles qui furent les premieres chanoinesses elles ont des Chapelains pour Celebrer
l'of-
fice divins elles psalmodient comme des Ecclésiastiques et a la sortie de l'Eglise elles S'abillent en Seculieres et ont tout liberté cette abbaye n'a rien de remarquable elle est Size au Nord de l'Escaut et joignant le Bourg du même Nom. Abbaye de fontenelle cette abbaye est Size au bord de l'Escaut du côté de l'Est entouré de prairies qui S'innondent en temps de guerre quand les ecluses Sont fermées a Valenciennes elle a ete inhabité depuis 1709 jusqu'en 1712 étant toute noyez et il y reside apresent des Religieuses de Lordre de Citeaux elle a ete fonde en 1212 par deux demoiselles filles du Seigneur d'Aulnoy, yl ny a rien de remarquable en cette abbaye qui ont leur abbesse Elective les Roturières y entrent comme les Nobles, le Sujet de l'Etablissement de cette Abbaye vient d'un hermite qui avoit une Chapelle proche delà ou il y avoit une fontaine en 1216 cet hermite implora avec ferveur le Secours du Ciel pour faire cesser une cruelle peste qui desoloit Valenciennes et les te· Annales disent que la S Vierge luy apparut et luy dit que le Seigneur avoit exaucé Ses prierres en memoire de cette délivrance on fait une procession Solemnelles tout autour de dehors de la ville qui S'appelle le St Cordon ils disent que la Vierge avoit entouré ce chemin qu'ils font avec ce St Cordon et on le Concerve en l'Eglise de Notre Dame avec Veneration. Tous ces Monastere établis a la Campagne ont des Maisons a Valenciennes ou ils Se retirent en temps de guerre on les appelle refuges et l'abbaye de St Amand Se tient à Tournay et a present a Douay. Outre ces monastere a la Campagne il y a plusieurs Chapelles mais fort peu ou l'on celebre la Messe la plus part n'étant que des petits quarréés ou Oratoire Situé au bord des chemins ou il y a une petite image et il y a peu de Croix qu'en quelques endroits qu'on appelle Calvaire dont les Principaux sont ceux de la paroisse de Maude Sur le chemin de Tournay
60 a
Valenciennes celuy d'Anzin, celui d'honin [Onnaing]
et autres
car presque tous les Villages de ce pays ont leur Calvaire entouré de quelques arbres ou ils vont faire leurs prieres cela n'empeche pas qu'il ny ait bien des huguenos caché Surtout dans la prévôté de St Amand
(35)·
Parmi les fleuves, rivieres et ruisseaux décrits par Claude Masse dans le mémoire du quarré A, nous citerons
l'Escaut
et son affluent la Rhonelle dans leur traversée des environs de Valenciennes : ... elle [L'Escaut]
Coule depuis Denain jusqu'à Valencien-
nes dans de belles prairies fermes en quelques endroits un p e u marecageux ou il Se Ceuille de bon foin mais plus mauvais au dessus de Denain le terrain étant plus marecageux et Si elle n'etoit pas si Sinueuse elle seroit plus rapide Car elle fait moudre entre Denain et Valencienne cinq grands Moulins qui ont dumoins 8 a 9 pieds de chut'te chacun, qui sont ceux de Denain, de Prouvy, de Trie et ceux de la porte Notre Dame de Valenciennes qui sont les. derniers de dessus cette Riviere elle est Sujette a Sortir de Son lit quand les pluyes Sont abondantes ou Lhiver a la fonte des Neiges comme elle est tres bourbeuse quelle traine avec elle beaucoup de limon appelle dans le pays accoulins Son fond Se hausse insensiblement aussy bien que les prairies autour ou elle depose ces vases ou bouës quand elle deborde et presque tout les hommes et bestiaux qui tombent dedans n'en Sortent point surtout quand elle est basse ne pouvant point grimper Sur ces bords... cette Riviere traverse Valenciennes et fait moudre un Moulin dans les fossez de la Citadelle et Son lit Se remplie de boue dans la Ville et Comble les fossez pour peu quelle trouve jour a y entrer ; elle Se partage en deux a la Citadelle et le bas du Côté de l'Est est plus Considerable, celuy de l'ouest appelée le Canal de Noir Mouton n'est proprement qu'un Canal Artificiel de 3-4.5· a 6 toises de largeur et profond de 6.8.10. a 12 pieds avec des digues a droite et a gauche pour empecher Son débordement dans les prairies de même que la partie au Sud de Valenciennes et plusieurs endroits au dessous ou elle ne flotte point contre les terres fermes et labourées ces deux branches Se rejoignent au hameau de la folie ou on fit en 1710 un batardeau pour la faire refouler et Sortir hors de Son Lit et Se repandre dans les prairies...
6ι La Rhonnelle vient de divers Sources de la forest de Mormal et par la S'ecoulent les eaux des étangs et fossez du Quesnoy joint a plusieurs fontaines formant tous ensemble
une
petite Riviere de 6.9· a 12 pieds de largeur ou il ny a l'Eté dans les grandes Seicheresses que 3 ou quatre pousses deau qui coulent dans des vallons parties en prairie et terres
labourées
fait moudre un b e a u Moulin au Village d'Aulnay et trois au V i l lage de Marly et deux dans la Ville de Valenciennes qui a la verité ne moudent que l'été et quand les eaux Sont basses que par Ecluses ou Saccade et l'on nouvre les Vanes de ces Moulins que quand le Canal est p l e i n et ils Sont d'un grand Secours à Valenciennes et cette petite riviere Sert a former une inondation entre les chiffres de la carte 10. et 11. elle Noye une partie des Maisons du Village de Marly et refoule
jusqu'au
dernier Moulin et peut meme innonder partie du V a l l o n a l'Est de la Carne des Capucins Marqué 9· au Plan (fig.12)
(36).
Parmi les principaux chemins partant de Valenciennes, décrits par Claude Masse dans le mémoire du quarré A 5
nous
citerons celui de Valenciennes à Cambrai: Pour aller a Cambray on Sort par la porte de Cambray marqué 12. a la Carte (fig. 12) et au bout des glacis on tourne
court
a l'ouest et ensuite on traverse le faubourg de Ste Catherine qui est pavé jusqu'à une Croix et puis de la on le Suit le long du Coteau qui tombe du Côté de l'Escaut jusqu'à la Cense du Poirier et puis jusqu'au Coin du bois de fontenelle ou Ion tourne
Court
a l'ouest jusqu'à une petite chapelle dans un chemin bas jusqu'au Village de Main et par la on evite celuy qui est le plus droit et Sur la hauteur a u panchant d'un Coteau jusqu'à la Cense de lftopital ou il y a de tres Mauvais pas aussy bien qu'au coin du Bois de fontenelle ou il y a un tres dangereux bourbier ce chemin de Valenciennes a Cambray est des plus Mauvais particulièrement
en
hiver ou on a bien de la peine a s'en retirer il auroit b e s o i n de prompte reparations Mais coirai il est a l'extremité de l'intendance du haynaut cela fait qu'on le néglige quoyque ce Soit la grande route de Paris en la basse Allemagne et pays d u N o r d on propose d'en faire un Nouveau qui ira tout droit de la porte avancée de Notre Dame jusqu'à Denain a Bouchain et de Bouchain a Cambray en Sortant de Valenciennes on passe dans la belle
Sai-
62 son a l'Est du faubourg de Ste Catherine
(37)·
Du mémoire du quarré 21, écrit par Claude Masse le 5 décembre 1731 à Lille, nous écarterons les discours sur les villes de Möns et de Saint-Guislain, extraits des Oit.izzi Va.y¿-Bai
dm
(Cf. note 31)· Nous ne citerons que les descriptions
de quelques villages frontaliers à l'époque et qui le sont encore de nos jours : Flamingrie [ la Flamengrie]
ce Village est situé sur un
terrein haut, au bord du grand chemin de Bavay a Sebourg ; il joint aux terres de l'Emperuer du côté du Nord et du Sud, il ny a rien de remarquable, m1" de Roizin en est seigneur on y compte environ 35 feux ; M r s de Malthe y ont une Commanderie de l'hôpital . Betrechies [ Bettrechies]
ce Village est situé sur le
sommet d'un terrein haut, a l'ouest duquel coulle la petite riviere de Louvignies, qui Vient de St Vaast dans un fond bordé de coteaux élevez et escarpez, couvert en partie debois et au nord de ce Village la riviere tombe dans le hauniaut aulong du bois d'Encatte, on y compte 22 feux. Gusegnies ( Gussignies]
ce Village est Situé sur un ter-
rein haut, au bord de la riviere de hauniaut qui la traverse en partie, et fait la separation des deux Monarchies, la riviere coulle dans des prairies en plusieurs endroits bordées de coteaux escarpez dont partie sont en rochers de pierres bleues, cette riviere n'est presque qu'un torrent large de 6.9·
a 10 pieds sur
1.2. a 3 pieds de profondeur et est guyable presque par tout et n'est dificile a traverses qu'a cause de ses Escarpemens qui sont éloignez l'un de l'autre de cent 200.300 jusqu'à 400 toises, l'hauniaut se trouve grossie audessus de ce Village par la riviere qui vient de St Vaast. Il y a un chateau qui est peu de chose, on y compte environ 29 feux. Hergies est un hameau situé sur une hauteur au nord de la riviere de l'hauniaut et au bord d'un petit ruisseau qui y tombe, il y a une Eglise assés grande où le curé de hon Vient dire la messe fêtes et Dimanches après l'avoir dite a hon, il y a dans ce hameau quelques carrières de pierres bleues.
63 Bellignies ce Village est situé sur lebord du grand chemin de Bavay a Condé et traversé par la riviere de l'hauniaut qui y fait tourner un moulin adeux roues, cette riviere coulle dans des prairies de peu de largeur entre des coteaux roides et escarpez et en plusieurs endroits de rochers, il y a quelques fontaines, mr le Marquis de Bellignies en est Seigneur, il y a un Chateau qui est assés joli avec une grosse Tour, on y Compte environ 32 feux. Hon [ Hon-Hergies] ce Village est situé sur des Coteaux assés élevéz et qui tombent .apic et par chute de rochers en plusieurs endroits, traversé par la riviere de l'hauniaut qui y fait tourner un moulin, et au bord de la chaussée des Romains allant de Bavay a Möns, ce Village est d'une grande Etendue on y Compte environ 75 feux, il y a plusieurs fontaines de même que dans tous ceux de ces quartiers là, surtout dans les prairies et chemins creux. Gognies Cauchie [ Gognies-Chaussée] ce Village est traversé par la chaussée des Romains allant de Mastricht a Bavay et par plusieurs petits ruisseaux qui y font tourner un moulin, audessus duquel il y a un Etang, cette.chaussée des Romains fait la separation des deux Monarchies de france et d'Empire, depuis le bois de la Lagniere jusqu'à la cense du bois Bourdon, par consequent moitié de la Principale rue de ce Village est a la France et lautre a l'Emperuer, Mr. le Comte d'Egmont en est seigneur Ion y compte 32 feux, il y a aussi dans ce Village la Cense Goutreule qui est de la dépendance de Möns et enclavée dans celle de France (38). Du mémoire du quarré C, écrit par Claude Masse le 30 mars 1732 à Lille, nous avons extrait les descriptions de Locquignol, d'Haspres, de Solesmes et du Quesnoy dont les plans sont placés en cartons dans la carte particulière de ce quarré (fig. 6) : Locquignol dont l'on amis un plan particulier a coté de Carte a la figure 2. Dans la partie de la forest de Mormal Contenue en cette Carte, il y a un espace Vuide en terres labourées, prairies et maisons qui forment un hameau environ dans le milieu, ou il y a un chateau de figure irréguliere appellé de Locquignol qui est du domaine et appartient au Roi, avec quelques terres et prairies qui peuvent Valoir 3000 [livres] par an, c'est le principal manoir de la forest ou maison Seigneuriale, qu'on avoit
64 retranché et fortifié au commencement du 18e siècle. Il est enceint de. bons fossés on y tenoit un détachement et il faudroit du canon pour le prendre, c'est une protection contre les parties qu'autrement ils S'y réfugieront et ils incommoderoient tres fort les Garnisons des Villes du Quesnoy et de Landrecy. Haspre [ Haspres] dont 1',οη amis un plan particulier à côté de la Carte a la figure 3. C'est un village situé dans un fond traversé par la riviere de Seille qui y fait Tourner un moulin, on la traverse sur un pont de pierres, c'est ou passe l'ancien chemin de Cambrai à Valenciennes qui forme des grandes ravines du Coté de Louest et rend labord de ce Village dificile, il à Eté autrefois retranché et l'on y voie encore des Vestiges, le Prince Eugène y avoit son quartier général pendant le Siege de Bouchain en 1711 et avoit fait autour des retranchemens. partie de ce Village a Eté Brulé par accident en 1729· Ce qu'il y a de plus remarquable dans cet endroit est Sa prévôté qui a Eté fondée pour des Bénédictins en 765 par pépin Roi de France les premiers religieux y furent Envoyés de l'abbaye de Jumiege près de Roiien, .mais l'an 1044 cette Prévôté fut cedée a l'abbaye de St Waast Darras, par l'échangé de la Prévôté Dangliecourt dans le Beauvoisis. On compte dans ce Village environ 94 feux. Solesmes dont l'on amis un plan particulier a côté de la Carte a la figure 4 . C'est un gros Village dependant du gouvernement du Quesnoy il est Sis dans un fond, l'on compte dans l'Etendue de sa paroisse environ 210 feux, Son Eglise est grande et Bien Voûtée enveloppée d'un mur de 24 toises de face flanquée par quatre Tours percées de Crenaux a deux Etages ou Se retirent les habitans en tems de guerre avec leur Effets et bestiaux, ce Village appartient a M L'archeveque de Cambray, Il y a trois fermes et Un moulin et a l'Extrémité du Village du Coté de Loüest, Il y a une grosse maison ou chateau enceint de fossés, ce Village a Eté presqu'entièrement consumé par les flammes en 1730. Il Jouit de quelques privileges qui Sont Exemption de droits pour bierres Vin et Eaux de Vie, il y a dans ce Village plusieurs Fontaines, Surtout celles qui Viennent de la fontaine Bayard qui forment Un petit ruisseau qui passe dans le Village .-et fait moudre Un moulin, l'armée des alliés a Eté Campée En 1712 dans ce Village et aux environs.
65 ... La
Ville ou forteresse du Quesnoy est
considérable
par ses Fortifications et son heureuse Situation n'Etant point commandée quoiqu'elle occupe Un païs haut, ou sont les Sources de diverses Fontaines et ruisseaux qui forment des Etangs et remplissent Ses Fossés qui Sont larges et profonds et neopeuvent Se Saigner que d u côté du Nord, l'on ne dit rien Sur la bonté de ses fortifications en l'Etat qu'elles Sont aujourd'hui, les ingénieurs de la place en Etant mieux Instruits que moy et leurs mémoires accompagnés des plans particuliers plus en grands, l'on a mis Seulement a la colonne a droite de cette Carte a la figure I r e un plan particulier
(fig.6) pour faire Voir a peu près en
l'Etat qu'Etoit cette ville quand le Roy la prit Sur les Espagnols et qui peut donner a connoitre combien les francois ont fait augmenter et perfectionner ses Fortifications depuis que cette place est Sous lobeissance du Roy... Cette ville n'est point autrement peuplé, on y compte 550 feux II s'y fait peu de commerce, qu'un peu de toilette et de petites Etoffes. Il y a un couvent de Religieuses fondé en 1233 qui n'étoit alors qu'un hôpital mais qui fut Erigé en abbaye en 1262 par Jeanne et Marguerite
Comtes-
se de haynault qui y mirent des religieuses de l'ordre de St Augustin. Il y a un couvent de recolets, un de recollectines, un des Soeurs noires et un beau College ou des pretres
Seculiers
Enseignent les humanités bati par la libéralité de Louis 14. Il n'y a dans cette Ville qu'une paroisse qui Est assés jolie et un beau Clocher, la maison de Ville est proche, la place d'armes est petite, le Chateau ou loge le gouverneur n'a rien de remarquable qu'une Tourette qu'on apelle l'Ecritoire qui Est assés Elevée Elle sert de guet, il est Separé de la ville d u coté de son Entrée par un fossé revetu le reste Enveloppé de beaux Jardins, Il n'est point défensif, apparemment qu'il Etoit plus considérable quand les Comtesses du haynault qui y residoient. Ce qui rend la Ville q u Quesnoy considerable Est Sa prevosté
ou
gouvernement qui est d'une grande Etendue et d'un bon revenu, elle Comprend 48 bourgs et villages, avec la belle forest de Mormal... Le Quesnoy incommodoit beaucoup les Villes de Cambray, V a l e n c i e n nes, Möns et autres qui appartenoient aux Espagnols devant
l'an-
née 1677 quand Louis le grand se rendit maitre de Cambray.
Quoi-
que le Quesnoy ne soit Eloigné que trois lieues de V a l e n c i e n n e s , le Climat y Est plus froid, aussi bien qu'aux autres villes voi-
66 sines a cause que cette Ville occupe un Terrein plus haut Et les Eaux des sources qui sont aux Environs S'Ecoulent au nord a Loüest et a l'Est de même que celles de la forest de Mormal (39).
Le mémoire du quarré 22 qui est celui de Maubeuge et de Bavay a disparu et nous ne connaissons la carte particulière que par une copie d'après Masse par Daudet de Fontame (fig.7). Toutefois nous pouvons citer quelques lignes d'un " M è m o r e iun. ¿a ¿tí do. Bavay dam
li Pay¿ d'Halnaat"
qui accompagne un pian
de cette ville et qui a été écrit par Claude Masse le 30 mars 1732 à Lille et dans lequel il précise :
...il est probable et sans contestation que Bavay a été tres fameux au premier siècle puisqu'en 1731 que je levois la carte de ce pays cy, jai reconnu en divers endroits les Vestiges de l'acqueduc qui conduisoit les eaux de la fontaine de floursies, qui est aplus de cinq lieues de Bavay, environ a l'Est et nord' Est d'avesnes, où on dit qu'il y a deux grosses sources, ce qui est sûr, puisque Ion découvre en divers endroits dans les terres hautes, le sommet des Voûtes de L'acqueduc que le Vulgaire appelle buise, dont on Voit encore des Vestiges al'hermitage du bois de Louvignies que Ion a défait depuis quelques années mais au Village du Vieu Mesnil, il reste au commencement de ce Village al'Est de l'Eglise, au bord d'un grand chemin quantité de morceaux de gros mur de cet acqueduc, bâti d'un exellent mortier de sable graveleux, les parties
et massifs de ses murs étòient fon-
dés sur pierres brutes, et autres parties où le terrain baissoit Ion voit des fondations de pilles d'arcades, et au bout de ce Village du côté du Sud au commencement d'une grande plaine, Ion voit les Vestiges d'un grand mur où passoit cet acqueduc, apparanment que cet oit quelques portiques du Village du Vieu Mesnil a celui de Boussiere, il paroît le sommet de cet acqueduc qui s'enfonçoit dans terre en quelques endroits, pour attraper le niveau de 8 a 10 pieds a ce que disent les habitans ; et dans les Vallons il y avoit apparanment des arcades, dont les fondations ont été entièrement arrachées, mais au commencement du Village de Boussiere l'on trouve ala partie la plus haute, nombre
67 de Vestiges en descendant du côté de la Sambre, un gcand nombre de ces pilles qui étoient communément de 18 a 20 et 22 pieds de distance, et les dez deses pilles ou massifs auroient 7 a 8 pieds de largeur... (40).
Toute la description de la reconnaissance par Claude Masse de l'aqueduc de Floursies ä Bavay ayant été publiée par René Jolin, nous renvoyons le lecteur à son étude (4l). Le mémoire du quarré 23 contient une assez longue description des "Peux VÁ.tle.i, de. gazile, qu.Í ¿ont Ave¿ne¿ it La.ndizc.y" Nous transcrirons quelques passages sur cette dernière forteresse:
...elle est d'une figure Ireguliere aprochant du Trapeze Ion en atribue les premieres fortifications aux françois elles estoient tres Irregulieres comme on peut le voir au Plan de la figure 3 (fig.9) elle a en sa plus grande longueur l80 toises et l40 environ en sa plus grande largeur, sa grande diagonale 235 toises et l'autre 230 d'une pointe de bastion a l'autre, par consequent fort petite percée de plusieurs rues bordées d'assez jolies maisons couvertes d'ardoises, Ion y compte environ 480 feux, la ville basse au nord de la Rivière est un ouvrage a courone iregulier qui renferme un faubourg et les cazernes de cavalerie et sert a couvrir les écluses de la Sambre au moyen des quelles onpeut former une grande inondation, il y a dans la ville une Eglise paroissiale un couvent de Dominicains, une maison de ville jolie, deux magazins apoudre un arcenal et des cazernes pour l'infanterie et la cavallerie, il y a aussi une belle fontaine qui passe dans la basse ville et traverse les fossez par des aqueducs de bois ; son enceinte quoique fort irreguliere est flanquée de 5 bastions comme on le peut remarquer au Plan de la figure 4 dont celui de l'Ouest ou du moineau est fort petit, les 4 autres ont esté refaits en partie et estoient aussi très petits et toute sa fortification ne consistoit anciennement qu'en un corps de place qui est 1'Estât a peu près ou elle estoit lorsque Charles quint l'assiegea en 1543...(42).
68 D u mémoire du quarré 27, nous avons extrait la description du bourg de Solre-le-Château :
Bourg situé partie dans un fond sur le penchant d'un coteau prennent naissance plusieurs petites fontaines, celieu est traversé par trois principales rues bordées d'assés jolies Maisons, il y a un convent de Soeurs grises et un hôpital, l'Eglise paroissialle est grande, et a un b e a u Clocher avec une Tour, et une fleche en Charpente, la Maison de ville est joignante, audessous est la halle ou se tient les marchés tous les mercredis, ce qu'il y a de plus remarquable, est un chateau
figure ovalle
très irrégulier, flanqué par 4 grosses Tours dont deux sont rondes, percées de creneaux et d'embrasures ou l'on peut mettre du canon dont il y en avoit quelques uns en 1731 et la principale de ces tours du coté de la porte a de diametre 30 pieds intérieurement et de hauteur 19 toises, et les murs d'Epaisseur 8 pieds 6 pouces, c'est une des plus belles qui soit des anciennes. Terminés par un parapet à machicouly et couvert d'ardoises en tierspoints, les prs Etages sont voûtés, c'est dommage que les embrasures n'aient poient été mieux disposées pour flanquer la porte, on entre dans cette place par un pont levis, il y a dans son enceinte, une chapelle et plusieurs logements antiques, le tout est entouré de fossés secs assés profonds et derriere un jardin ce r borde d'allees de charmille. L. le ρ de Croy en est Seig.; et ce l i e u lui donne le titre de Comte de Solre, on compte dans l'Etendue de sa paroisse 240 feux, il y a au nord un petit ruisseau qui y forme un étang et y fait tourner un moulin a deux roues, on a mis à la colonne a droite de la carte figure 3 un plan particulier de Solre le Chateau, avec la légende
(fig.11)
(43). Ainsi que nous l'avons indiqué au début de notre exposé, les ingénieurs Masse s'étaient constitué une collection personnelle de relevés de monuments parmi lesquels nous citerons ceux relatifs au Hainaut français conservés à la Bibliothèque du Génie (44) : - Le village, l'église et le château de - Le panorama
d'Avesnes-sur-Helpe.
Solre-le-Château.
69 - La canardière de Condé sur la paroisse de Crespin (fig.10) - La porte de Möns à Valenciennes
(fig.13)
- La porte de Cardon à Valenciennes
(fig.14).
- La tour de la Dodenne à Valenciennes
(fig.15)
- Le bastion des Capucins à Valenciennes
(fig.16).
René PAILLE.
N O T E S I o . PAILLE (René), "La F¿andie., tz Halnaut zt i' Aitali au début da KVllìz ilzctz d'apizi tzi Ingznlzuii ge.ogia.phzi Mauz", dans Buttztln dz ¿a Commliilon Hlitollquz du Hold, I981. 2°. PAILLE (René), "La canti dz tα {¡lontlllz zntlz ta Flancz zt tzi Payi-Bai autilchlzni tzvéz pai tzi Ingénlzuii-géogiaphzi Ma¿¿e" dans Kctzi du 1 zi Congizi dz t'Kaoclatlon dzi Czictzi d'hlitohz zt d'aichêotaglz dz Βztglquz, Comines, 198O-1982. 3°. La majeure partie de cette communication est extraite de la conférence que nous avons faite le 22 février I98I à l'Assemblée générale du Cercle archéologique de Valenciennes sous le titre : "Lz Halnaut fiiançali zt autilchlzn au début du Xl/IIIè ilzctz d'apizi tzi Ingénlzuii gzogiaphzi M a a z " . 4°. PAILLE (René) et LACROIX (Nelly), Lzi Ingznlzuli gzogiaphzi Ctaudz fiancali zt Ciaudz-fíttx. taie, La Rochelle, Rupella, 1979, n° 112/5a. 5°. 1bld. n° 113/2a. 6°. îbld. n° 113/14. 7°. "Lzi comtzi dz Halnaut, dz Namui zt dz Cambléili d'apizi caitz dz Gulttaumz dz Llitz dz V Acadzmlz dzi Sclznczi, dlziizz zn 7 704" dans Renier Chalón, Rzchzichzi iul tzi monnalzi dzi Comtzi du Halnaut, Bruxelles, 1848.
ta
8°. FAILLE-LACROCQ, op.cit. n° 112/8 pour le mémoire et 8a pour la carte. 9°. Ibld. n° 112/6a pour le mémoire et 6c pour la carte. 10°. Ibld. n° 113/5 pour le mémoire et 5b pour la carte.
70 11°. Ibid., n° 112/9 pour le mémoire et 9b pour la carte 12°, Ibid., n° 135/4 pour la carte qui est une copie d'après Daudet de Fondarne tandis que le mémoire a disparu. 13 o . I bld., n° 113/8a pour le mémoire et 8b pour la carte. 14°. I bid., n° 113/9a pour le mémoire et 9b pour la carte. 15 o . Ibid., n° 113/10 pour le mémoire et 10c pour la carte 16 o . llsld. ,n° II3/7 pour le mémoire et 7a pour la carte. 171· Ibld., n° 113/11 pour le mémoire et lia pour
la carte
18°. ibld., n° 113/13 pour le mémoire et 13a pour la carte. 19?. Nobilis: Hannoniae Comitatus Descrip . Auctore Iacobo Surhonio Montano, 1579. 20°. Supla.., note 7 et fig. 2. 21°. BRAUN (G.) et HOGENBERG (Fr.), Clultatum de.ic.nlptlo, 1572-1588, t.III. p.23.
oubli
t&IKaKum
22°. Reproduite dans Leuridan, "klmon.laZ dzi Communes du Vípan.tzmznt du HoKd", dans AnnaZzi de ¿a Soditi d'Studiò dt Za Vlovlncz dz Cambial, Lille, 1909. 23°. Les villes de Philippeville et de Marienbourg qui furent cédées par l'Espagne à la France par le traité des Pyrénées (1659), furent rendues au royaume des Pays-Bas par le deuxième traité de Paris (1715). 24°. FAILLE-LACROCQ, op.cit.,
n° 113/3·
25°• Ce n'est que le 13 juin 178O à la suite de l'application de la Convention de Bruxelles du l8novembre 1779 que cette contrée fut définitivement rattachée à la France. La ville de Mortagne-du-Nord commémora le bi-centenaire de cet événement les 14 et 15 juin 198O. 26°. FAILLE-LACROCQ, op.cit.,
n° 112/6a.
27°· Nous avons étudié la Prévôté de Saint-Amand et le Comté de Mortagne dans une communication faite le 3 mai 1981 devant le Comité archéologique et historique de Saint-Amand-lesEaux. 28°. Bouracan {ito^z non c.Kol&zz) est une espèce de camelot d'un grain fort gros, elle se travaille sur le métier à deux marches comme la toile. La trame est un fil simple, retours et fin filé; la chaîne est double ou triple, il y entre de la laine et du chanvre ; les bouracans ne se foulent point, on se contente de les faire bouillir dans de l'eau claire à deu» ou trois reprises, et de les bien calendrer ensuite ; on en fait des rouleaux qu'on nomme p-cèczi.Le bouracan pour être bon, doit être à grain rond, uni et ferré ; il s'en fait
71 beaucoup en Flandre et en Picardie, à Valenciennes, à Lille, à Abbeville, etc. (Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, tome 2, page 366). 29°. FAILLE-LACROCQ, op.cit.,
n° 112/6a.
30°. Ibld., n° 113/531°.
Hl&tolie génitale dei ?ayi-Ba.i, Conte.na.nt la ΰ eicAlptlon dei XVII ρκουΐηcei , Brusselle, François Foppens, 1720, tome 2, 267-278 et 329-331.
32°.
Un voyage, en Flandre, Aditoli et Picardie en 1714, publié d'après le manuscrit du sieur Nomis par Alex. Eeckman, Lille, Ducoulombier, I896.
33°. L'Intendance de. la fiandre Wallonne, en 169$. Edition critique du Mémoire "pour I'Initructlon du duc de Bourgogne" par Louis Trénard, Paris, Bibliothèque Nationale, 197734°. La Rochelle, Bibliothèque municipale, ms. 5>P35°. FAILLE-LACROCQ, op. cit., 36°
Ibld.
37°.
Ibld.
185.
n° 112/6a.
o
38 . Ibld. n° 113/5· 39°. 1 bld. n° 112/940°. Ibld.
n° 121.
41°. JOLIN (René). " L'aqueduc, de TlouMlei Annalei du
Ceft.de archéologique
42°. FAILLE-LACROCQ, op. cit., n° 43°. Ibld. n° 44°. Ibld.
113/8a
n° 39-
à Bavay",
de Moni, 113/7.
dans
tome 62, 1955·
LA CARTOGRAPHIE, SOURCE D'HISTOIRE
Les provinces septentrionales sont riches en cartes anciennes, manuscrites et imprimées. Les voyages lointains
stimulèrent,
au XVIè siècle, les hommes d'affaires, les explorateurs, les savants. Le
Portugais André Homen achève à Anvers, en 1559, son
immense carte manuscrite du monde ; Mercator, de son nom Gérard Kremer, de Ruppelmonde
, géographe flamand né en 1512, au servi-
ce de Charles Quint puis du duc de Juliers, conçoit dans le même grand port de l'Occident, sa mappemonde "à t'a ¿age. dzi ma.ti.Lni" en 1569 et publie plusieurs traités : Vz aia anna¿¿ aitA.onom¿c..L (1552), ChAonotCgia
a mundi
geogA.aphL.caz ad mzntzm
zx.oA.dlo ad annum
PtoZzmazi
(1568),
Tabutaz
A.zit¿tutaz (1578) .Sous l'impul-
sion du grand négociant et armateur Hooftman, l'atlas d'Abraham Ortelius, premier recueil scientitique de cartes, paraît à Anvers en 1570 sous le titre
: ThzatAum
oKbli
tzAAaAutn ;
ce géographe
de Philippe II, du nom d'Abraham Oertel publia ensuite Ve.uA.am dzaAumquz
capita
ζ vetA¿bui
nam¿imat¿bai
(1573)JSynonym¿a gzo-
gAo.pk.Lca (I578)... On le surnomma le "Ptolz miz du X VIS i¿zc.Zz". . . Une école cartographique se constitua ainsi dans les Paysbas. Jacques de Surhon, originaire de Möns, dessine, en 1547, la première carte du Hainaut puis celle de la région de Saint-Hubert, du Luxembourg, de l'Artois. Son fils Jean de Surhon dresse la carte du comté de Namur ; pensionné par Charles Quint, il prend le titre d'ingénieur des cartes des pays de par deçà
; il est
donc le premier cartographe attaché officiellement au souverain des Pays-Bas. Pour des raisons politiques et stratégiques, ses cartes ne furent pas publiées. Ortelius parvint, plus ou moins frauduleusement, à obtenir le cliché de la carte du Hainaut réalisée par le graveur Hogenberg de Cologne ; elle figure dans
74 l'Atlas d'Ortelius. Une carte qui dérive peut-être de celle de Surhon, figure dans la Veicliption
dei Payi-Sai de Guichardin
(Anvers, 1567 (2). Jacques de Deventer (1536-1575) devient géographe de Philippe II ; son KtZai dei viZZei est d'une rigoureuse exactitude ( 3 ) · La prise sur le réel s'affine progressivement et tout semble concourir à ce progrès de la connaissance, à cette mise en ordre des données, à cette exigence de rigueur (4). Au lendemain du Concile de Trente, le Concile provincial de Cambrai, en 1564, et le Synode diocésain de I568, insistent sur la nécessité pour les évêques de visiter périodiquement leur diocèse. Cette prescription provoque un travail de cartographie ecclésiastique, entre autres de Martin Doué, un peintre Lillois mort en 1638, de Guillaume Blaeu et son Théâtle du. mande (1643), de Judocus Hondius qui dressa la carte de la province ecclésiastique de Cambrai (5)-Le chanoine d'Ypres, Antoine Sanderus (1586-1664), reproduit, en l64l sa ÎZandlia iZZuitlata,
de nombreuses cartes, plans,
profils, vues générales, gravés par R. Blockhuyse : Bruges, Gand, Bailleul, Merville... Maître ès arts et licencié en Théologie de l'Université de Douai, Sanderus a le goût de l'histoire. Trop peu critique pour les périodes anciennes, il décrit bien son temps ; mais ce sont les documents iconographiques d'auteurs et de graveurs divers qu'il introduit dans son oeuvre, qui lui confèrent toute sa valeur. Les itinéraires de pèlerinage sont également cartographiés, en France, au XVIème siècle, par Charles Estienne : di pZuiieuu
Lei voyagei
endioiti dz fiance. et encoiei de Za. Telle Sainte.,
d'Eipaigne, d'ítaZie et d'autlei payi (1552) ; il s'agit de Saint-Jacques de Compostene, de Notre-Dame de Lorette, de Rome et d'une vingtaine de pèlerinages français. Cet humaniste a d'ailleurs publié la Guide dei ahem¿n¿ de Fiance, la même année qui couvre aussi les Pays-Bas méridionaux. Son livre, mieux documenté sur le Nord que sur le Sud, connut un grand succès et sa carte a été recopiée par Jean Boisseau dans son TabZeau géographique. i&i GauZei en 1645 (6). Cette fortune de la Gland Guide, de Charles Estienne, engendre une postérité au XVIIème siècle, liée au développement des voyages, aux nouvelles manières de voyager tournées autant vers la curiosité que vers la nécessité.
75 Ce nouveau genre littéraire qui se constitue, stimule aussi la production cartographique (7)· Les événements militaires : conquête de l'Artois pendant la Guerre de Trente ans, conquête de la Flandre wallonne durant la Guerre de Dévolution, les annexions progressives en Flandre maritime, en Cambrésis, en Hainaut au cours des conflits du règne de Louis XIV, incitent au développement de la cartographie dans ces provinces qui deviennent le théâtre des combats : cartes géographiques présentant les ensembles, cartes topographiques concernant les villes et leur plat-pays, plans des places fortes avec leurs remparts et leur citadelle, plans terriers couvrant des seigneuries... Nicolas Sanson d'Abbeville (I6OO-I667) est l'initiateur des cartes de cabinet établies à l'aide de mémoires ; ainsi, dessine-t-il la carte du Diocèse de 1 ' klzkzvzic.hz dz Cambiai, en I666 (8). Sébastien Pontault, chevalier de Beaulieu, (1613-1674) ingénieur et maréchal de camp publie, en 1667, un recueil intitulé : Piani zt ph.ol.Lli dzi pi¿nc.¿palzi v¿l¿zi zt Ιλζαχ coni¿déiablei dzi comtíi dz Ttandiz, d'Kloit, du. Halnaut, di Namui zt d'Alto ¿i zt dzi du.ch.zi dz Brabant, dz Guzldiz, dz Cambial, dz Limbouig zt dz Lu.x.zmbou.1g ; c'est un ensemble de cartes des provinces, des plans de vues scénographiques des villes offrant de réelles qualités artistiques (9)· Jean-Baptiste Nolin grave la carte de Flandre, en I69O, remarquable pour l'hydrographie... Pierre Duval, géographe ordinaire du Roi, dessine en 1687 Izi Xl/II piovlnczi dzi Payi-Bai... Parmi les plus féconds, les plus habiles, les plus documentés des cartographes des Pays-Bas, Josse de Hondt ou Judocus Hondius (1563-I6OO) travaille à Londres puis à Amsterdam, reproduit, en I606 l'Atlas de Mercator, devient le principal éditeur cartographique d'Amsterdam ; son fils, Henri, (1587-I638) continue son oeuvre avec son beau-frère Jan Jansson. En I629 Jan Jansson et Guillaume Blaeu se disputent les cuivres d'Hondius. Guillaume Blaeu (I57I-I638) est aussi à l'origine d'une dynastie de cartographes: c'est un élève de Tycho-Brahé qui fonde une des plus importantes entreprises de cartographie des Pays-Bas. Il est le cartographe de la Compagnie des Indes. Son fils Jean (15961673) est aussi un éditeur très prolifique: A t t a i dzi \>¿¿¿zi dzi Payi-Bai (1649). Il travaille avec son frère Corneille (10).
76 Cette maîtrise de l'espace se poursuit au siècle des Lumières, se développe en qualité et en quantité ; ces efforts se retrouvent dans toute la région (11). Les arpenteurs parcourent les villages et les chemins, découvrant les paysages et même les hommes avec leurs mentalités (12). Les cartes routières, les plans des villes, les plans-reliefs, les terriers se multiplient : Alexis-Hubert Jaillot est encore un fondateur de dynastie. Son fils dessine le Comtí de Hainaut diviié gei, Vlévôtéi
en Châtelleniei,
Balilla-
(1720) ; Villaret élabore, en 1769, la carte du
diocèse de Cambrai qui est la plus complète et la plus crédible ; Charles Havez, un ingénieur des Ponts et Chaussées de la province du Hainaut depuis 1722, exerce ses fonctions jusqu'à 1769, et laisse des cartes exactes et précises mais orientées vers ses préoccupations professionnelles
(13). Les voyages aiguisent l'es-
prit d'observation, la curiosité ; la mise au point d'instruments permet
de mieux connaître les distances
: une géographie des
philosophes succède à la géographie des humanistes ; une nouvelle vision des lieux s'impose et se reflète dans la cartographie ; pour les contemporains de Voltaire, les grands géographes sont avant tout des cartographes : Guillaume Delisle, Jean-Baptiste Bourguignon d'Anville, Philippe Buache
(14).
La moisson est ample et il n'est pas question de répertorier ces richesses des Pays-Bas mais de montrer que la carte, instrument du géographe, est aussi source d'histoire ; elle permet de connaître des données administratives, les péripéties d'une bataille, mais même des éléments des mentalités collectives. Penserait-on recueillir des informations sur les chanoinesses de Denain sur une carte de la généralité de Flandre réalisée en 1734 par le sieur Masse ? Dans le commentaire du carré A, l'abbaye de Denain, collège de chanoinesses, est ainsi présentée chanolneiiei
qui pon.te.nt un habit blanc. avec. un iuiplli
{¡¿ne et un gland manteau l'obice
: "elle eit habitée pan dei
; ellei iont toutei demoliellei
voeux et peuvent ie manie*. ; V abbeae ont dei chapelalni
de toile,
doublé d'heimlne. quand eliti iont à et ne iont point de
a title de Comteiie.
pout célébnen l'obice
divin ; tllei pialmo-
dlent comme dei ecc-léilaitlquei et, à la iontie de l'égllie, i'habillent
en iénuliénei
E Ilei
et ont toute líbente"
(15).
ellei
77 Claude Masse, ingénieur géographe, et ses deux fils accompagnent ainsi leurs cartes de mémoires dans lesquels ils rassemblent nombre de renseignements géographiques, statistiques, ethnographiques recueillis au cours de leur enquête dans les localités. Nous retiendrons trois thèmes susceptibles d'exposer les enseignements historiques d'une cartographie sérielle dans nos Bas-Pays méridionaux : le concept de Frontière,les données de l'économie, l'évolution des villages.
Pour la connaissance de la frontière maritime, nous disposons de nombreuses cartes, par exemple : Nicolas de Fer, Le Comté de Vtandnei
où ie trouvent
tei env¿n.oni de Vunk.en.que, avant
1668, puis Lei Fn.ontlin.ei de Fn.anc.e et dei Vai/¿-Bai (1743) précisées en 26 cartes ou encore : Hubert Jaillot, géographe de Sa Majesté, Le comté de Vta.ndn.zi diviié en iei baitt¿agei...,
châtettenZei,
te VKa.no. de Biugei et te Vayi de Waei, 1729
(A.D.Ν 3). Jaillot est le graveur des cartes de Sanson. La côte est divisée en quatre secteurs appelés
:bailliages
de Bourbourg, de Bergues-Saint-Winoc, de Furnes et le Franc de Bruges.Le dessin des dunes est très sommaire ; ce sont de simples petits monticules en alignement rectiligne. La côte est très droite, en arrière des bancs de sable, plus nombreux qu'aujourd' hui. Tous portent des noms, certains existent encore. Cette partie de la Flandre est peu habitée : Vieux Mardyck, Fort Mardyck fondé par Louis XIV en I67O qui y avait installé quatre familles de matelots picards ; les Huttes de Gravelines sont représentées par deux petites maisons... Au large, des dessins de bateaux dans la mer confèrent un cachet décoratif à la carte. Lei cantei dei pn.ov¿ncei dei Payi-Bai, de Ftandne de Halnaut, dieaézi
de Cambnéi¿i,
iun tei mémoíiei
contenant
te Vaché de
tei comtéi
Bnabant...
d'Eugeni. Henni ΐη,Ιίχ, 1744 (A.D.N. 2 8 5 )
révèlent un plus grand souci de géographie, en particulier en ce qui concerne le réseau complexe des canaux et des watergands ou l'assèchement des Moeres "La Grande Moun ou. Moene, pa.yi inondé ρan. ta men.". A cette date, les marécages sont encore très éten-
78 dus : ils collectent les eaux évacuées. L'assèchement a été réalisé par Wenceslas Cobergher, ingénieur des archiducs, au début du XVIIème siècle ; le canal de ceinture est visible sur là carte de 1729 bordé d'une vingtaine de moulins ; certains sont encore notés sur la carte de 1744. Le sol, asséché en 1624, est découpé en rectangles égaux par des rangées de canaux perpendiculaires (visibles sur la carte de 1729) ; mais en 1646, Dunkerque, assiégée par les Français, se défend en inondant son arrière-pays. C'était déjà la parade utilisée en 1579 quand le duc d'Anjou, frère de Henri III, tenta la conquête des Pays-Bas. La haute mer engloutit alors le travail de Cobergher. En 1752, un officier de la garnison de Bergues, le comte d'Hérouville, reprit ce travail d'assainissement qui fut achevé en 1826. Dunkerque est "la c.le.(¡ de la France et ve.dzttí ¿niultante. à V k ngle.te.fi.tt.ζ", comme le dit d'Argenson. La carte de 1743 montre la position de Dunkerque avec les fortifications de Vauban datant de 1683- Les forts, à l'arrivée des Français, en 1662, étaient en bois ; le Château Verd et le Château de Bonne Espérance avec trente pièces de canon, le Risban acheté en I683 avec 46 canons, le Fort Gaillard avec 20 pièces, le Fort Revers, En arrière, deux forts existent en 1729, trois en 1744 : le Fort-Louis, construit au début de la guerre de Hollande, avec système d'inondation ; le Fort-François, le Fort-Sapin. Les cartes mentionnent le camp retranché de I706 pour les opérations de siège, durant la Guerre de Succession d'Espagne. Ces indications précises s'expliquent par l'époque et par le rôle de la carte. Le cartouche de 1744 affirme : carte "tlèi détaillez, tizi nzcznalKe. poun. campe.me.nti e.t maJic-hzi du aimêzi". Cette carte est dressée pendant la guerre de Succession d'Autriche ; les Pays-Bas connaissent encore l'affrontement entre les Anglo-Hollandais et les troupes de Louis XV commandées par Maurice de Saxe : Fontenoy (1745), Rocoux (1746), Lawfeld (1747). La région n'est pas déserte : nombreux lieux d'habitat, nombreux chemins. Le mot " { ¡ K o n t i e l z " n'apparaît pas sur les cartes du XVIème siècle. On se contente d'écrire les noms du pays sans en délimiter l'étendue. Un utilise les termes "con¿¿ni, boln&i, acqu¿6¿-
79 tío ni..." Au XVIIème siècle, le vocable "^/lont-Llfie" l'emporte. Le signe conventionnel (des tirets chez Pierre du Val) se généralise. "Ttiontieie" se substitue à "t¿m¿te"
; le substantif évoque
"{¡lont de ba.tcLA.Zte." et s'applique essentiellement aux limites extérieures du Royaume. Les circonscriptions intérieures
: gouvernements, provinces,
pays... ne sont pas rigoureusement délimitées sur la carte ; souvent surchargée, voire confuse, la carte ne porte pas toujours de ligne, pointillé, tiret, ligne coloriée, concrétisant la limite. En revanche, les appellations sont mentionnées. Elles sont placées approximativement, une intention décorative l'emportant parfois sur le souci de rigueur ; elles sont multiples, car les Pays-Bas méridionaux devenus français au XVIIème siècle rassemblent des régions géographiques, des provinces historiques, des anciens pays. Peu de noms de c.Â.vÂ.tatei de la Betg¿c.a iecunda figurent sur les cartes : on repère la Morinie, la région de Saint-Omer. Les dénominations médiévales sont plus répandues : Hainaut, Mélantois, Pays de Weppes, Perrain, Baroeul, Gohelle, Ostrevant... L'histoire a pesé davantage sur la toponymie. Le mot Flandre reflète souvent l'extension maximale du Comté allant jusqu'à la Canche. Même avant la conquête française, apparaît, sur certaines cartes, l'expression PtandrZa. patii m&>i¿d¿onat¿i . L'Artois résulte du démembrement de ce grand Comté et le mot, lui aussi, prend de l'importance sur les cartes dominant, par ses caractères, les autres subdivisions
: Comté de Saint-Pol, Comté d'Hesdin, Pays
de Lalleu. Après la paix des Pyrénées (1659) et avant le traité de Nimègue (1678), l'Artois est partagé entre la domination espagnole et la présence française : la province est redevenue française "à ta ríieive
i nu.te.me.nt dei vtttei et ba¿tt¿agei
c.háte.ttzn¿e et gouvernance toutes à Sa Maj&ité
d'KX.h.e et de Satnt-OmeΛ
ou
qu-L demeurent
cathot-cque". On parle alors d'"Aitoli líier-
vé", parfois i,nkito¿i
{¡tamand".
Nicolas Sanson, d'une famille originaire d'Abbeville, donc proche de nos provinces, recourt à une véritable phrase pour intituler sa carte d'Artois en 1674 : Le. Comté d'Arto¿i qu'¿t eit pAéient&ment
d¿v¿ié en françoti
ieton
et Eipagnoti, par le
80 sieur Sanson, géographe ordi n a i r e du Roi, 167^(A.D.N.Carte 281). Ce cartographe précoce qui termina sa première carte à dix-huit ans, gagna la protection de Richelieu, s'intéressa particulièrement aux cartes ecclésiastiques dans l'espoir de découvrir un mécène ; il dessina aussi des cartes politiques et administratives. Après sa mort (1667), ses deux fils, Guillaume (+ 1703) et Adrien (+ 1718) ainsi que son gendre Pierre Moulart Sanson (+ 1730) et son neveu Pierre Duval (+ I683) poursuivirent son oeuvre. La carte, commencée en 1674 par Nicolas, est achevée par ses fils pendans la guerre de Hollande. Son intérêt réside dans le tracé de la frontière entre ce que possède déjà Louis XIV et ce qui reste à Charles II. C'est la même référence à la pénétration française qui se reflète à l'ouest dans les expressions : Pays conquis (Ardres) et Pays reconquis (Calais). En revanche, pour distinguer les différentes parties de la Flandre à l'époque moderne, les gouvernements ou les intendances, on utilise plutôt les appellations ethno-culturelles, même parfois des appellations à connotations linguistique : l'intendance de Lille est désigné par les titres Flandre gallicante ou gallicane, Flandre wallonne - bien qu'on n'y parle pas wallon - , Flandre française, parfois, tout simplement Flandres. Pour l'intendance d'Ypres puis de Dunkerque, on emploie Flandre occidentale, Flandre du côté de la mer, Flandre maritime, Flandre française occidentale, Flandre flamingante. Il semble que les adjectifs les plus fréquents provenaient de la langue : gallicane, flamingante... Ainsi apparaissent par les dénominations et parfois par des traits, les circonscriptions intérieures des Pays-Bas français aussi appelés Flandre au roi ou Provinces belgiques (l6). Un autre enseignement de la cartographie régionale concerne les frontières au sens actuel du thème. En ce domaine, le XVIIIo siècle apporte beaucoup avec les oeuvres de Belleyme, de JeanBaptiste Nolin, de Cassini, de Chauchard et Jolly, de Naudin, de Guillaume Delisle... Ce sont surtout les cartes des ingénieurs Masse qui illustrent l'évolution du concept de frontière. Pour compléter la connaissance après la paix d'Utrecht (1713), de la frontière entre Pays-Bas devenus autrichiens et les Pays-Bas français, le marquis d'Asfeld, Directeur général des fortifications, fait appel à Claude Masse, un Savoyard, ingénieur de son
81 service qui s'était distingué dans les levés de deux cartes des côtes de l'Océan Atlantique, celle du Médoc et de La Rochelle. Arrivé à Lille en 1734, aidé de ses deux fils François et Claude Félix, Claude Masse lève 32 "qaaAAéA" depuis Dunkerque jusqu'à Thionville, de chaque côté de la frontière
: Flandre française
et Flandre impériale, Hainaut français et Hainaut impérial. Ces ingénieurs géographes éprouvèrent le désir d'illustrer leurs cartes, leurs cartons, leurs plans par des profils de monuments : clocher et donjon de Solre-le-Château, plan de l'église abbatiale de Saint-Amand, coupe de la porte de Möns à Valenciennes. Ils s'intéressent aussi aux frontières linguistiques
: la Picar-
die, le Boulonnais, le Pays reconquis, l'Artois, la Flandre française, le Cambrésis, le Hainaut parlent des idiomes ou certains patois qui approchent du français ; tous parlent et entendent le Français ; mais au nord d'une ligne allant de Bourbourg à Saint-Omer, Cassel, Warneton, Menin, Courtrai et Oudenarde, on parle la langue flamande "qu.-i a be.a.uc.oup de. tiappoxt à La. tangue. te.uton.¿que ou Bai-Atte.mand it au Hollanda¿¿ Ba&A.a.gouZn,
e.i£ ti&i dL{¡ i¿c.¿Ze, aux.
ditClaude Masse
; leuA. pa£o¿¿,
ou
à appJie.ndfie,", nous
(17).
L'ensemble de la cartographie régionale, entre la paix d'Utrecht et la Révolution française, fournit surtout des éléments importants pour préciser l'évolution du concept de frontière et par suite les notions d'Etat, de domination, de souveraineté et de son transfert, les méthodes diplomatiques... La conjoncture internationale apparaît moins dramatique qu'au temps du règne de Louis XIV ; néanmoins, les guerres de Succession, si caractéristiques du XVIIIè siècle, risquent de mettre aux prises la France et l'Empire sur notre frontière septentrionale comme ce fut le cas en 1714-1748. Le traité d'Utrecht et même les traités qui l'avaient précédé avaient laissé subsister des points litigieux ; leur règlement suscita les conférences des limites. Une autre question compliquait la cartographie
: les traités de la
Barrière. La paix de Ryswick (1697) avait remis aux Etats généraux des Provinces-Unies la garde de onze places des Pays-Bas espagnols en vue d'opposer une barrière ä une mainmise française sur cette région et de sauvegarder ainsi l'indépendance de la Hollande. Par le traité de 1709, l'Angleterre remit à ses alliés Hollandais toutes ces places. Quand la paix d'Utrecht transmit
82 les Pays-Bas à l'Empereur, cette servitude fut maintenue et même confirmée en 17.15 puis en 1718 : les Provinces-Unies devaient assurer la garde de Namur, Tournai, Menin, Furnes, Warneton, Ypres et Knocke. Ce qui complique encore la cartographie, c'est l'existence des " t z i i z i con£ent¿e.u-6e¿" : Saint-Amand et ses dépendances, Halluin et Deulémont, certains villages de la châtellenie d'Ath... et des enclaves : dans la châtellenie de Lille, aux portes de la ville (Wazemmes, Esquermes, Marcq, Lézennes...) et inversement, des "exeZaue.¿" françaises dans les châtellenies de Tournai et d'Ath : Estaimbourg, Esplechin, Maulde... Le Siècle des Lumières, en ses efforts de clarification, d'observation, de précision, nourrit l'ambition de rationaliser l'espace ; le projet de Robert de Hesseln, proposant, en 1784, de subdiviser le royaume de France en une hiérarchie de carrés (Région, Contrée, District ...) symbolise ce rêve (18). En tout cas, au cours de ce siècle, la notion moderne de frontière linéaire, encore mal perçue au XVIIè siècle, se conçoit mieux dans les faits depuis le traité de Nimègue ( 1 6 7 8 ) . L'imbrication des unités administratives et religieuses donnait jusqu'alors la perception d'un espace organisé autour de centres, de bourgs, de forteresses qu'il s'agissait de conquérir et de maîtriser. La prise d'un chef-lieu de bailliage impliquait la conquête de la circonscription. Aussi, sur les cartes, ce sont surtout les noms de villages, d'églises, de moulins plus que des lignes qui se distinguent. Parfois, la ville engendre le nom de la contrée : Cambrésis, Tournaisis, Boulonnais... (19). Sous l'influence du Secrétaire d'Etat Louvois, surtout en Flandre et en Hainaut dont il reçut le commandement au lendemain d'Aix-la-Chapelle,on abandonne les méthodes de délimitation en usage depuis le traité des Pyrénées. Le Roi emploie des procédés audacieux : il fait Valoir ses prétentions exorbitantes sur des territoires au titre de dépendances juridiques, la prise de possession à main armée des places en litige suit l'argumentation des Chambres de réunion. Les préoccupations d'ordre stratégique sont presque toujours à l'origine des démarches de Louvois qui l'emporte sur le Secrétaire d'Etat Hugues de Lionne, sur le Contrôleur général Colbert, sur le Secrétaire d'Etat Colbert de Croissy.
83 D é s o r m a i s , on r e c h e r c h e , comme j u s t i f i c a t i o n , d'une
annexion,
une d é p e n d a n c e j u d i c i a i r e , p l u s ou moins fondée. Les
limites
d e v i e n n e n t des fronts avec leur a g r e s s i v i t é . Ce qui e x p l i q u e m u l t i p l i c i t é des plans de places fortes avec leur
la
citadelle,
oeuvre de V a u b a n . Cette p r i m a u t é des objectifs stratégiques n ' e x c l u t p a s intérêt c r o i s s a n t p o u r les aspects économiques 1763,
: abandon,
de la p o l i t i q u e d ' o u v e r t u r e de voies d'accès vers
un
en
l'étran-
ger, la r e c h e r c h e par V a u b a n d u "ρλ,ί casini", de la r é d u c t i o n des enclaves à p a r t i r d u traité de N i m è g u e , le d é v e l o p p e m e n t
d'une
p o l i t i q u e d ' u n i f i c a t i o n t e r r i t o r i a l e entrevue par M a z a r i n , haitée p a r C o l b e r t . . . Tout ceci se reflète d a n s des cartes
sou-
l'élaboration
successives.
La c e s s i o n de p l a c e s fortes repose d ' a b o r d sur les de justice p u i s , de p l u s e n p l u s , o n tient compte des
droits
relations
a d m i n i s t r a t i v e s . Ces r é u n i o n s de territoires c o n t e n t i e u x
sont
i m p u t a b l e s à Louis X I V , à L o u v o i s , à C r o i s s y , m a i s a u s s i à la m a u v a i s e foi des E s p a g n o l s
; en I8l4, ces r é u n i o n s ont été
con-
firmées p a r le t r a i t é de P a r i s , ce qui est u n signe. Les traités des limites au XVIIIè siècle ont permis échanges d ' e n c l a v e s
des
; ils ont été négociés de f a c o n r a i s o n n a b l e :
p r o c é d e r de proche e n p r o c h e , éviter de d é m a n t e l e r les
villages,
évaluer les t e r r e s e n litige... Des cartes encore i m p a r f a i t e s été j o i n t e s aux d o c u m e n t s . Par e x e m p l e , la g o u v e r n a n c e d i s a i t - o n d u côté français a u l e n d e m a i n du traité des a été cédée a u roi de France avec toutes ses d é p e n d a n c e s et a n n e x e s
ont
d'Arras, Pyrénées
appartenances,
; l'abbaye de Saint-Vaast étant
dans la ville d ' A r r a s , elle est cédée avec toutes ses
située dépendances,
c ' e s t - à - d i r e t o u s les v i l l a g e s , terres et s e i g n e u r i e s sur
les-
quelles l'abbé e x e r c e sa j u s t i c e , sans qu'il y ait à t e n i r d u lieu où ils sont s i t u é s . L'abbaye de Saint-Vaast
compte
ressemble,
dans cette c o n c e p t i o n , à u n c h e f - l i e u de b a i l l i a g e . Les E s p a g n o l s r é t o r q u e n t que la justice de l'abbaye
n'est
point a t t a c h é e à la ville d'Arras m a i s relève de l ' A s s e m b l é e
des
r e l i g i e u x qui se réunit à Douai. L a c o m p é t e n c e j u r i d i q u e ne
repo-
se p a s , à leurs y e u x , sur une b a s e g é o g r a p h i q u e . La q u e s t i o n r e s s o r t i s s a i t a u droit mais aussi à la g é o g r a p h i e .
(20)
84 Ces débats qui se poursuivent inlassablement pendant un siècle sont éta.yés par des enquêtes sur place, par des cartes et des plans, par des négociations aboutissant aux conventions des limites en 1 7 6 9 et en 1779· Même sans aborder la question des frontières dites naturelles qui relève du domaine de la diplomatie et de la politique, la notion de l'héritage de la Gaule, vue d'après les Comme.nta.lKzi de César, de l'existence d'un sentiment national, force est de constater les progrès de la conception linéaire de la frontière. Ils s'expliquent par des nécessités pratiques mais aussi par l'évolution idéologique et par l'affirmation de l'unité administrative. Ils attestent le recul des conceptions féodales, l'usure des cadres anciens, l'affirmation de l'esprit scientifique après Descartes, la recherche de l'efficacité... L'évolution des mentalités se reflète dans la cartographie mais, en revanche, la carte, dans la rigueur du trait, contribue à cette prise de conscience. L'espace est désormais circonscrit. C'est une oeuvre, est-il besoin de le répéter, qui s'est réalisée sans l'appui d'un système idéologique. La prise des gages, au gré des circonstances, précéda l'élaboration des plans d'expansion ; les théories furent déduites des réalisations concrètes. La France ne composait pas une nation ayant conscience d'elle-même, suivant l'expression d'Ernest Lavisse. Le roi et ses conseillers se préoccupaient des nécessités militaires et économiques tout· en respectant les anciennes divisions du pays, les privilèges des communautés, l'organisation judiciaire. L'examen des cartes administratives, militaires au XVIIè et au XVIIIè siècle révèle ces survivances et ces progrès. Le tracé des limites départementales, fantaisiste ou, à tout le moins, illogique dans son tracé, s'explique par ce passé : le Pays de Lalleu ou du duché de Cambrai s'y reconnaissent toujours (21).
Sous l'Ancien Régime, le tracé des cartes souffre, tout au moins jusque dans la première moitié du XVIIIè siècle d'une insuffisance de rigueur des données scientifiques. L'important est de constater cette exigence nouvelle
: les ingénieurs Chau-
chard et Jolly, chargés de la carte de Dunkerque à Landau, se plaignent, dans leur correspondance avec leur chef M. de Grandpré des travaux de leurs illustres prédécesseurs Masse et Cassini.
85 Dans les signes conventionnels de la carte de Cassini, rien n'est mentionné pour ces frontières sur les feuilles de Dunkerque et de Lille, en 1768 ; toutefois, des pointillés figurent sur la seconde mais rien sur la première, quant à la carte de Masse "dont il a {¡ait la moitié dan¿ ha. chambre", elle leur paraît confuse. De plus en plus, la carte doit fixer non seulement les limites des juridictions, des fortifications, mais elle doit traduire le paysage, comme la forêt de Mormal, représentée en 1746 dans le Recueil dei chemini et loutei Ke.lia.nt lei dif¡íé>ientzi \iillei du Moid de. la France, fait par l'Inspecteur des Ponts et Chaussées du Hainaut (B.N. Ge DD 2138). Elle doit inscrire le réseau des moyens de communication. Ainsi, dans l'oeuvre de Gaspard Baillieu, Calte paiticulilie de. ¿a. Chaitellenie de Lille où iont tei quatre. quaitizA-i de fileppei, Fe&ain, Pêuèle, Mêlanthoii et Cah&mbaut ( 1 7 0 7 ) , ce qui importe dans le paysage, ce sont les voies navigables, fortement accentuées plus que le réseau routier. Les chemins figurent ; celui de Lille à la Bassée traverse la Deûle à Haubourdin, grâce à un rétrécissement des marais que l'on discerne sur la carte. La route de Lille à Armentières, avec ses sinuosités, contraste avec celle qui mène ä Halluin, plus directe. Celle de Lille à Tourcoing, par Marcq-en-Baroeul et celle de Lille à Roubaix par Croix est l'ancêtre de notre Grand Boulevard actuel qui structure la Métropole Nord. On discerne l'importance des poñts sur la Marque : Tressin, Bouvines, Pont-à-Marcq, Hempempont. Dans la Caite. particulière dei
ZYLVÌIOYIÌ
Ual&nciennei. .. chez Eugène Henry Priex, 1 7 1 1
de Lille., Tournay, (A.D.N. 2 8 3 ) , un
des progrès constaté est le développement du réseau routier ; grâce à Sully, à Colbert, surtout grâce à l'Ecole des Ponts et Chaussées, le phénomène est amorcé dès le règne de Louis XIV, ne serait-ce que pour des raisons stratégiques. Une ordonnance du Conseil d'Artois (I68O) fixe la largeur des voies de communication: les chemins royaux doivent avoir 44 pieds (0,32 m χ 1(4) soit 14,08 m, les chemins de vicomtés : 32 pieds, les chemins de terroirs : 8 pieds, les sentiers : 4 pieds soit 1,28 m. La châtellenie de Lille, Douai, Orchies est assez bien pourvue de routes. On repère trois grandes voies plantées d'arbres (traits bordés de pointillés) : la chaussée de Lille-Tournai, celle de
86 Tournai-Douai, le grand chemin de Lille-Douai. Sur ce triangle ainsi délimité, se greffent plusieurs réseaux de petits chemins : Lille-Valenciennes par Cysoing et Saint-Amand, Lille-Arras par Lens. C'est la route de Paris qui est l'objet des préoccupations royales et des soins des intendants. Les intendants ont même tendance à délaisser les petits chemins pour les grandes routes, cependant moins utilisées mais qui offrent un intérêt stratégique. La carte de Friex, de 1711) montre que la région est favorisée en ce qui conserne les liaisons de village à village ; on distingue un vide seulement en Mélantois, mais il se comble au XVIIIè siècle alors que s'esquisse une relative convergence vers Orchies. Notre réseau contemporain a repris ces chemins, la permanence du tracé est frappante. Des capitales régionales émergent : Lille est une étoile à huit branches, c'est le siège de la Chambre des Comptes ; Tournai, étoile à neuf branches est le siège du Parlement ; Douai, étoile à huit branches, est le siège d'une Université. Les liaisons vers l'extérieur sont assurées par des routes royales (deux traits continus) et par des chemins (pointillé) (22). L'effort entrepris par Louis XV, par les intendants, par les ingénieurs au cours du XVIIIè siècle, implique un bon équipement en cartes. En 1724, le lieutenant pour le roi à Bouchain, M. de Cardon, élabore un projet de liaison routière de Bouchain à Valenciennes, il suscite des objections d'ordre militaire mais aussi d'ordre géographique : perte de terrains fertiles, inondations en mauvaise saison, traversée des marais... Charles Toussaint Havez qui assume de 1722 à 1769 la charge d'ingénieur des Ponts et Chaussées de la province dresse trois cartes générales du Hainaut avec ses chaussées Brunehaut, ses chemins pavés, ses chemins creux. Puis à la demande de Trudaine, directeur des Ponts et Chaussées du royaume, Havez réalise, en 17^6, dui
fioatti
du Ha¿naut
Vkttm
:48 cartes indiquent l'état des chaussées
(pavage, blocage, empierrement), l'élévation des ponts, des ponceaux, des acqueducs, les barrières tournantes de dégel... (23) En même temps, s'élaborent des cartes des postes par exemple·. J.G. Bonn, Ca/itzi l8
(AN. NN 156) .
dz¿
poitti
dm
Pay¿-Ba.¿
et
aati-Lchlini
87 Ce qui compte davantage pour la vie quotidienne, c'est le réseau et l'état des modestes chemins avec leurs ponts, leurs zones submersibles, leur boue... En cas de maladie grave, le curé doit pouvoir porter rapidement les sacrements, la pastorale dépend des eaux sauvages et des forêts qui rendent les sentiers impraticables. Routes et chemins constituent la charpente d'un paysage. Le paysan les emprunte quotidiennement, c'est la voie du travail, du commerce, de l'approvisionnement, c'est aussi le moyen du voyage, de l'ouverture, de l'évasion, de la rencontre, de la conversation, de l'information... Les plans révêlent, dans leur succession, le tracé, avec ses redressements, de la route de Lille à Valenciennes. Un piedsente de Lille atteint l'église de Sainghin-en-Mélantois, aboutit au pont de Bouvines en longeant le bois de l'ancien château ; elle atteint Gysoing qu'elle contourne pour éviter le droit de péage, elle monte vers l'église de Bourghelles rejoint la motte de l'ancien château ; à travers les bois défrichés au XVIIIè siècle, elle gagne le sommet de la côte de Bachy puis se dirige vers le château et vers Saint-Amand. Cette piedsente double la route de Lille à Valenciennes, par Bouvines et Saint-Amand. Cette route fut pavée entre Sainghin et Cysoing avant 1731 ; d'autres parties le furent en 1736, entre Cysoing et Bourghelles, le tronçon entre Bachy et Mouchin est pavé en 1771·.· Le pavage s'accompagne souvent de retouches au tracé ; il exige des milliers de journées de terrassement, de changement, de comblement, de charrois... L'axe principal du pays est la route de Lille à Valenciennes par Pont-à-Marcq ; c'est celle qu'emprunte Arthur Yoingen 1787 et c'est celle dont l'importance croît. Le pont qui franchit la Marque est réédifié en 1740. La carte
de Cassini indique ses
redressements, comme celui effectué en 1766 entre Pont-à-Marcq et Templeuve, car la route dessinait trop de sinuosités, était trop étroite ; sa chaussée était très fatiguée et son entretien était coûteux, selon le rapport de M. de la Phalecque, commissaire aux pavés et mayeur de Pont-à-Marcq. (24). Le pavage se répand surtout au XVIIIè siècle ; ainsi, en 1777, le seigneur d'Aignemont fait paver le chemin d'Ennevelin, à ses frais. Les Etats acceptent ce don. Le plan de 1784 porte ce chemin, pavé de grès , à partir de la drève d'Aigremont jusqu'à
88 la route de Douai-Lille ; tout le village est pavé. Les chemins, dit l'auteur du plan, sont impraticables, même en été. Les travaux se poursuivent en 1785 ; désormais, la communauté entretient cette voie parfois, à l'occasion d'un conflit, l'arpenteur lève le plan d'une rue. Les provinces septentrionales, ainsi cartographiées, donnent l'image d'un pays rural qui disposait, sous l'Ancien Régime, d'un réseau routier déjà dense. Toutes les grandes routes étaient pavées en 1 7 8 9 . Les chemins de village souffrâient des conditions naturelles : mais la volonté d'améliorer ce réseau se manifeste durant le règne de Louis XV.
La cartographie révèle ainsi les préoccupations économiques d'une région ; elle témoigne même des paysages, de la prise de possession du sol par l'habitat, des lieux et des itinéraires de pèlerinage. De nombreux documents, cartes gravées, recueils de plans et profils de places-fortes, atlas des villes cartes manuscrites permettent de prendre des vues d'ensemble dans les Pays-Bas méridionaux.Mais l'historien dispose aussi de Terriers comme celui des Biens des Dames du Saint-Esprit en la châtellenie du Cateau, dressé par le notaire Aubry-Dubochet, des Chasserels contenant la liste des propriétaires des parcelles soumises à redevances seigneuriales, des Plans des terres appartenant à une abbaye, levés par un arpenteur ; ces documents livrent des renseignements sur le paysage et l'exploitation du sol. Déjà des cartes comme La Caite. pait-LauZliKe. dz¿ env-Lioni de L¿tte, Tournai/, Va¿ínc¿enne.i . . . (Bruxelles, chez Eugène Henry Priex, 1 7 1 1 ) chatztlzntzi,
et ¿a caAte. du Comté
de. flanduz
d¿v¿ií
e.n ¿e.¿
par Hubert Jaillot (1729) attestent la présence
des bois et des forêts au début du XVIIIè siècle, malgré la densité de population. L'homme est cependant un défricheur. Les environs de Libercourt, Thumeries, Ostricourt, Hénin-Liétart sont boisés dans de fortes proportions ; le bois de Phalempin se prolonge par celui de Thumeries et de Libercourt dessinant un vaste ensemble forestier jusqu'à la Scarpe. Il subsiste des bois isolés: Cysoing, Rappes, Nomain, Rache, Bouvignies... Quant à la vallée
89 de la Scarpe, elle est marécageuse : "Tnhtizi ¿'on
t'ite.
te,í> touKb&i",
maA.ée.age.u¿e¿
d'où
dit le cartographe.
Le Tournaisis est, lui aussi, boisé : d'Orcq à Mortagne, la forêt est ininterrompue, elle se continue par le bois de Barry. Les voies font des percées rectilignes, empruntent parfois d'anciennes routes de chasse. Cette superficie boisée diminue au cours du XVIIIè siècle, sous l'influence de la poussée démographique qu'on appelle parfois, abusivement, "Aávo¿at¿oη pk-iqa&".
dtmogia.-
Au XlXè siècle, il ne subsiste que le Tournaisis et le
bois de Phalempin ; encore leur importance est-elle réduite. L'ère de l'urbanisation commence (25). A une échelle plus réduite, les cartes et les plans du Pays de Pévèle permettent des constatations voisines. L'arbre témoigne, dans le paysage, de l'intérêt porté par les paysans à cette richesse dans le.:cadre de leur exploitation, mais aussi de l'attention des propriétaires ruraux par l'importance des parcs seigneuriaux et abbatiaux. Le "ba.¿i¿n"
d'Orchies est aujourd'hui un openfield mais
la Pévèle périphérique est boisée. Des plans des XVIIè et XVIIIè siècles sont élaborés pour départager les propriétaires en litige, pour régler leurs conflits au sujet des coupes et des tailles d'exploitation. Les querelles mesquines engendrent souvent des sources pour l'historien. Au milieu du XVIè siècle, la Pévèle est le domaine de gros massifs boisés troués de jardins, de vergers. A Cysoing, on compte 7 % de manoire et jardins, 49 % de labours, M % de prés, 28 % de bois, 2 % de viviers. (26). Dans la banlieue lilloise : 10 % de jardins, 71 % de labours, 6 % de prés, 9 % de bois (27). A Raimbeaucourt, 56 % de labours, 11 % de jardins, 6 % de prés(28). L'arbre subsiste sous forme de gros massifs mais qui ne dépassent pas 9 1« de la surface ; cependant, ils donnent l'impression de dominer le paysage. Les défrichements ont donc transformé le paysage au XVIIIè siècle, sourtout en Pévèle septentrionale. On peut reconstituer le massif forestier à l'aide de toponymes : les Essarts à Louvil, le Bosquet Liévin à Cysoing, le Sart... Ce sont des phytonymes évocateurs du passé. Il existait un grand massif boisé entre
90 Templeuve, Cysoing, Bourghelles, Bachy, Genech. La carte de Cassini montre l'étendue du déboisement : ainsi, à Bourguelles, le bois Notre-Dame est partagé entre l'hôpital Comtesse de Lille et le chapitre cathédral de Tournai ; en 1760, les chanoines divisent leur part en 21 parcelles, le déboisement commence ; au XVIIIê siècle, il reste 21 % de terres boisées. En 1 7 0 6 , un arrêt réglemente l'exploitation des bois en Flandre, Hainaut, Artois l/8ème doit demeurer en "Réierve avec, définie, d'y ¿aire aucune coupe. ¿ani permi¿¿-¿on de Sa Majeité". En 1786, "it a été noni,tati que te chapitre de ¿'igt-Lie cathédrate de Tournai/ a preique entièrement détruit et défriché te boii qu'it poaède 3. Cobrieux iani en avoir obtenu ta. permiaion". Or, au XVIIè siècle, on décrivait Cobrieux comme une clairière : "Ce vittag e eit preique entièrement caché par tei boii qui t'environnent en grande partie". Les bois de la baronnie de Cysoing sont exploités par taille et abattage de gros arbres du même type : chênes, chêneau, "btanc boii" ; ces "v&ntei" sont mises en adjudication, les frais de coupe étant à la charge du preneur. Les forêts souffrent aussi des méfaits de la soldatesque qui incendie le bois de Cysoing en 1642. Au XVIIIè siècle, la Baronnie vend chaque année son bois de taillis en octobre, la haute futaie (chêne), en mars, les fagots en mai, la vente est extrêmement rentable, mais à la fin du siècle, on commence à s'inquiéter de cette exploitation excessive. Bachy, Cobrieux, Louvil étaient des clairières au Moyen-Age ; en 1 7 8 3 , Bachy compte 60 bonniers (le bonnier équivaut à 1 ha 42 a) de chênes appartenant au Comte de Palmes d'Espain (7000 chênes) et 82OO arbres de plantations particulières : bois blancs, ornes, peupliers... On a défriché 9 bonniers de bois taillis appartenant aux anciens prêtres de Tournay. Or, en 1549, on disait de Bachy : "ce vittage eit preique tout entouré de boii". Plus à l'est, les défrichements présentent les mêmes caractéristiques. Les bois qui subsistent sur les finages de Rumes, de Taintignies, de la Glanerie représentent le tiers des bois qui couvraient le sol au XVIIè siècle. La Veicription dei Varoiiiei du Vioceie de Tournai dit de Rumes : "Cette paroiae eit grande et contient pour te moini 1000 bonnieu, maii ta moitié eit en boii appartenant à diven ieigneun" de même "te hameau
91 de la
Glaneiie
(de Rumei),
il
zit
oí
&it
en glande.
derñeuhe
le
plui
pafttie
de. peuple dani
Iti
de la
bo-Li"
pastoia
e
; de ces
massifs boisés, il ne subsiste aujourd'hui qu'un gros bois, mais la toponymie évoque oes défrichements
: Déroderie à Taintignies,
Sartaine à Rumes. La carte de François, comte de Ferraris, en 1777j montre encore de vastes étendues boisées en des lieux actuellement défrichés et cultivés (29)· Après avoir traversé Orchies, Arthur Young note, le 3 novembre 1 7 8 7 a vent je
penie
: "le
poui
4,
à Lille,,
extiaiie
nulle
patit
qui
l'huile
eit
entouré
de. colza
au monde"
de. piai
que je
n'en
de ai
moulini jamaii
vu,
(30). Les moulins font partie du
paysage flamand. Une "ioKet" de moulins s'élève du sud de Lille, à Thumesnil. Ce sont des moulins à huile, dit parfois la carte. En 1711, vingt-deux moulins tournent à Thumesnil ; une cinquantaine, dans le triangle Lille-Tournai-Douai, sont dispersés dans la campagne. A Orchies, on reconnaît des moulins à huile ; d'autres broient les écorces pour la tannerie. Le dernier brûle en 1914 ! Les plans affectionnent particulièrement les édifices isolés, au bord d'une route ; ce sont des points de repère pour l'arpenteur. Parmi eux, figurent les estaminets, les cabarets, les auberges... Certains lieux-dits les désignent
: de l'Alouette,
de la Targette, le Nouveau Jeu... Un plan indique la taverne des Quatre balots, près de la piedsente d'Orchies à Templeuve... Certains cabarets sont de véritables hôtelleries ou des relais de diligences, édifiés sur la grand'route... Les plans terriers sont d'excellents documents pour l'historien. Le plan terrier de Bouvines, en 1 6 6 5
(BML, Ms 737 3 8l feuil-
lets) est l'oeuvre de Jean Bayart. Il s'intitule génitale
du village
ΜΜλ-i lei
Abbi
et
et ieigneufiie religieux
de Bouvinnei
de l'Abbaye
:
Veic/iiption
appartenant
de Saint-Amandj
à
en fait,
la seigneurie correspond à la paroisse et au finage. Le plan indique les parcelles numérotées, l'église, le moulin de Sainghin, les censes (fermes), les piliers de justice... ; il est accompagné de quatre plans de détails. Le registre mentionne le nom du propriétaire de chaque parcelle, l'occupeur, les redevances en nature et en espèces... Le site de Bouvines bénéficie d'un relief, ce qui est rare
92 pour la Flandre. Le village est bâti sur le flanc droit de la vallée de la Marque qui, après avoir baigné pâturages et bois du pays de Pévèle, argilo-sableux, entaille le plateau crayeux du Mélantois. Il est à l'abri des inondations. Son finage épouse la courbe de la Marque. Le village est à la croisée de deux chemins: Lille-Valenciennes et Arras-Tournai, sur le fameux pont illustré par la bataille du dimanche 27 juillet 1214. Il compte de nombreux chemins et piedsentes. Celle de Lille à Valenciennes est parallèle à ce chemin, elle longe le bois de Sainghin, franchit la Marque par le même pont, se dirige vers Cysoing la petite ville voisine. De petits chemins circulent à travers le finage de Bouvine; chemin de Péronne, voie dite de Landas, voie de la Cauchie... , tous convergent vers l'église au centre du finage. Certains chemins coupent des parcelles ; ils sont postérieurs au tracé. Un chemin est pavé depuis le pont jusqu'à l'église, c'est un "poiWg& {¡ont ka.nt&", car cet endroit est "Vili d¿H-¿c,¿¿e. 3. ρααζΗ. psi¿ne.¿pa.¿e.mznt in fi-tueV. Plusieurs textes le mentionnent en 1606, l6l4, 1622. Les marais, dans la vallée, sont exploités communautairement par Bouvines, Sainghin, Péronne, Gruson, Anstaing..., c'està-dire 120 bonniers (1 ha, 42 a) soit 170 ares, dont cinq bonniers à l'Abbaye de Saint-Amand. Le terroir de cultures se situe au sud du village, au dessus de la zone inondable : 97 bonniers (137 ha) de terres labourables dont 58 à l'abbaye de Saint-Amand ; les prés et les bois occupent 21 bonniers (30 ha) ; il reste un ha de flégards, de zones incultes. Plusieurs petits ruisseaux sillonnent le paysage ; ce sont des "couAanti" ou des "l¿zz", tel que le rieu de Bourghelles, le courant de Noyelle... La Vieille Marque est un ancien cours, un méandre délaissé. Ces ruisselets sont franchis par de petits ponts, Un moulin à quatre ailes se dresse sur un monticule à Sainghin, les deux "ju.it¿c.e.¿" de Bouvines et du baron de Cysoing (trois petits carrés) illustrent les lieux de la répression. La forme des parcelles varie ; il n'y a pas d'uniformité dans le découpage du sol. Les grandes parcelles, coupées et recoupées au cours des générations deviennent des lanières disposées perpendiculairement aux chemins. Le plan de la seigneurie du
93 Colombier et des fiefs qui en dépendent à Bouvines, à Gruson et aux environs a été dressé par Olivier Six, arpenteur
(ADN, Plan
Lille 48) en 1695 ; il montre la réduction du nombre des parcelles de 11 à 4 entre I665 et 1695· C'est un regroupement
carac-
téristique . La place d'Infiere, dite en 1 6 6 5 afiKíntV^,
devient en l695 "ptanty
à G¿ílíi
"¿¿êga.A.d
pianti
Conitant",
it le preneur
à bail qui a charge d'entretenir les arbres et de récolter les fruits. En définitive, on distingue, sur le finage J>8% de terres labourables, 8% de prés bois, 47$ de marais, 6% de manoirs, selon les calculs de Paul Delsalle. L'évolution, avec les réserves qu'exige la sous-évaluation ou la surévaluation des parcelles, la part incertaine de Bouvines dans le marais commun, se décèle par un certain nombre de traits
: la canalisation de la rivière au
milieu du XVIIIè siècle a réduit l'étendue marécageuse qui était considérable, au profit des pâturages, la superficie boisée
s'est
réduite, la portion cultivée est stable (jusqu'au XXè siècle même). L'habitat peut être reconstitué grâce à ce terrier de 1665· Outre l'église, on distingue deux censes, le presbytère, quelques dizaines de maisons.L'église est au centre
du finage
ainsi que la cure et une cense appartenant à l'abbaye de SaintAmand, autour de la place et de la fontaine. Le hameau de Melchametz, près de la cense des Mottes, a quinze maisons, le hameau d'Infière, vers Gruson, a neuf maisons maisons se groupent
; près du pont, huit
; près du bois de Saint-Nicolas, vers
Péronne-en-Mélantois, cinq maisons
; au total, cinq hameaux et
62 maisons, sans doute 300 habitants. La constatation la plus surprenante est l'absence de bâtiments le long de l'axe principal du village. Sur la carte de 1773 (Vincennes J 10 C 652), l'église n'est plus isolée, des maisons bordent la chaussée qui mène du pont à l'église; c'est un élément de la route de Lille à Valenciennes, mais, en réalité, ce n'est pas elle qui exerce une attraction
; elle est moins fréquentée qu'au XVIIè siècle. Les
hameaux se reconnaissent encore, mais le centre s'est peuplé autour du lieu de culte. L'emplacement des églises semble, d'une manière difficile à justifier
générale,
; elle n'est pas au centre du finage à
94 Aix-en-Pévèle et à Tormignies ; elle a parfois été reconstruite au XVIIè siècle dans un endroit plus proche du centre : à Saméon, à Raches, à Maulde... D'après Paul Delsalle, le noyau initial de Bouvines est la cense de la Courte depuis l'époque carolingienne, peut-être gallo-romaine ; ce serait une villa citée seulement au Xllè siècle et appartenant à l'abbayede Saint-Amand, l'autel cité au XVIIè siècle. Le village est né entre ce domaine et la fontaine qui sourd au Sud-Est de la ferme de la Courte ; c'est là la place de Bouvines et non près de l'église ou du pont. Le déplacement vers la route de Lille à Valenciennes s'est produit entre 1665 et 1695 mais s'est poursuivi jusqu'à nous. La rue principale est, au XXè siècle, entre le pont et l'église, au sommet de la côte. Près du site de l'église, se situe déjà la nécropole gallo-romaine et mérovingienne ; quand on a reconstruit l'église en I88O, on a réemployé des pierres sculptées du XlVè siècle ; elles appartenaient à l'édifice élevé peu après la célèbre bataille. La cartographie consigne ainsi des permanences à coté des évolutions.
Ainsi, la carte est une "écA-c-ta-te" qui exige une "tzctuKe.". Elle reflète une réalité objective mais aussi les mentalités de l'auteur, de ses collaborateurs qui sont, dans une certaine mesure, tributaites de leurs temps. Les cartes, manuscrites et gravées, les plans, les terriers, les cadastres constituent de véritables documents d'histoire.
Louis TRENARD Professeur d'histoire moderne;et régionale de l'Université de Lille III.
95
N O T E S 1. Atlas de Mercator 1595) reedité à Bruxelles, aux Editions Culture et Civilisation. C'est l'oeuvre de Gérard Mercator, de son fils Rumold, de ses petits-fils Gérard et Michel ; 556 p., 107 cartes. Cartes de Ptolémée reconstituées par Mercator, 1578, 148 p., 28 cartes. 2. D'après les recherches de Maurice A. Arnould, professeur à l'Université libre de Bruxelles. 3. Jacques Deventer, (J.Roelofs, dit), plans des villes des Pays-Bas, 156O, reproduits dans l'Atlas de l'Institut National Géographique, Bruxelles, 1892-1913· 4. R.P. François de Dainville^
"les cartes anciennes de l'Egli-
se de France" dans Rev. H¿it. Egllie. ΐκ. , t.XL, n° 134, janv.-juin 195^, p. 31 5. Roger Desreumaux, "Aspects de la cartographie de la région du Nord aux XVIIè et XVIIIè siècles", dans Bail. F o.e..
Catko.
Lille., 1970, p. 38-51. 6. Robert Mandrou, "Histoire et cartographie : la France de Charles Estienne" dans A . E . S . C . , nov.-déc. 1961, p. 1121-1130. 7. G. Fordham, Lei loutzi de Ffiance. Etude, bibliographique iun. lei carta
routlirei
et lei Itlníralrei
15 52- 15 SO, Paris,
Champion, 1929·- Charles Mazouer, "Les guides pour le voyage de France au XVIIè siècle", dans la découverte de. la. F rancie, au Xl/112 i. Colloque de Marseille, 1979, Paris, C.N.R.S., 198O, 599-611. 8. Mireille Pastoureau, "Le premier Atlas mondial français : les "Cartes générales de toutes les parties du monde" de Nicolas Sanson d'Abbeville I658", dans Rev. Franç. Hlit. du livre,
96 n° 18, Janv.-Mars 1978, p. 87-105·
9- Sébastien Pontault, Chevalier de Beaulieu, plans et profils des principales villes... 1667· Reproduction de l'édition originale : Dunkerque, Kim, 1972, 5 vol. 260 p. 10. Françoise Crapet, La cartographie Xl/IIë et Xiailê ilecte
hlitorlque. ragionate. au*
; D.E.S., Univ. de Lille, 1962, IX -
53 p. : Philippe Jessu, Louli XII/ en Fiandre, Exposit. Hospice Comtesse, 1967, 184 p.
11. Guy Michaud et collab. Lei routei de Fiance , dei orlglnei jusqu'à noi joun, 12. R . D e s r e u m a u x >
Paris, 1959, 170 p.
"Arpentage en Cambrésis au XVIIIè s." dans
Ac tei lon.gr. tint. Sac.. Sav. Litte., 1976, Paris, B.N. 1978, p. 75 _ 91 ; "A propos d'arpentage au XVIIIè siècle : Lueurs sur la pastorale, la démographie à Vaulx-Vrancourt"(P. de C.) dans Eni embte, 1978, p. 227-235-
13· R. Desreumaux, "La bibliothèque de l'Institut Catholique de Lille. Cartes anciennes de la Région du Nord", dans Butt. Fac. Catho. de Litte., 1971, Ρ· 297-302 et 1972. p. 59-66. "Un cartographe hennuyer du XVIIIè siècle : Charles Havez", dans Littérature
et Reilglon,
Lille, 1966, p. 201-215.-
"Une carte du Hainaut de 1725", dans Rev. du Nord, t. XLVII n° 186 juill.-sept. 1965 p. 375-382. 14. Numa Broc, La Géographie
dei phltoiophei,
1974, 596 p. Voyagei et découvertei
Paris, Ophrys,
au Xl/IIIg ilecie,
expo-
sition, Lille, 1973, 103 p. Frédéric Barbier, L'image du monde ; cartei, at tai, tlvrei de voyage
(Xl/ë-Xl/IIIë i. ) ,
Valenciennes, 198I, 26 p.
15· Bibliothèque municipale de Lille, ms 542. Sieur Masse, Mémoire iur ta carte de ta génératlté
de Fiandre,
1734, ρ,82.
l6. Nous avons utilisé les remarques de Robert Hennard, Secrétaire général du Comité flamand de France.
97 17· René Faille, La Vla.nd.iz, Iz Hainaut zt l'Ah.toii au début da KVïïlz iizalz d'aptizi Izi ingzn-izuKi géogiaphzi Maaz. Bullztin de. ¿a Communion p. 1 1 9 - 1 5 2 . phzi Claudz
Lille,
hiitOKiquz da Notid, 1931, t. XLI,
R. Faille et Ν. Lacrocq, Lzi Ingénizuu
géogia-
fKançoii zt Claude. Félix Mane., La Rochelle,
1979. 18.
Pierre Delaunay, "Un projet de division géométrique du territoire français à la fin du XVIIIè siècle", dans Β ull. liblaiKiz anc. zt mod., n° 121, janv. 1970, p. 1-6. R. Faille, "La carte de France divisée en carrés, par Robert de Hesseln", dans op. c.lt., n° 127, août 1970, p. 122-127-
19. L. Trénard, "limites et frontières, contacts et affrontements: orientations de recherches", dans Bull, d'hiitoilz mod. zt contzmp., n° 12, Paris, C.T.H.S., 198O, p. 5-II. R. Desreumaux, "Géographie et cartographie historiques", op. cit., p. 6 6 - 6 8 .
L. Trénard, Monumznta hiitoiia.z Galliaium,
op. cit¡, p. 6 8 - 7 6 .
dans
L. Edouard Roulet, "Frontières et con-
tacts de civilisation", Colloque universitaire franco-suisse, 1977, Neucnâtel, La Baconnière, 1979, 239 P· 20. Nelly Girard d'Albissin, Gznziz dz la {AontizAz {lanca-bzig ζ. Lzi vaiiationi dzi limitzi i zptzntAionalzi
dz la ΐη,αηζζ dz
1659 à 1?S9 , Paris, Picard, 1970, 434 p. 21. René Robinet et Philippe Rosset, knckivzi dz la Vi.Kzc.tion Kégionalz du Géniz dz Lillz, Lille, 1979, 292 p. Placzi zt pA.ovi.nczi diiputzzi. Exposition de cartes et plans du XVè au XlXè s. Lille, 1 9 7 6 ,
46 p. Fernand Vercauteren, Plani en iz-
liz{ dzi villzi bzlgzi Izvéi pal Izi ingznizun
militaiizi
{feançaii, Xl/II-XIXè i., Bruxelles, Pro Civitate, I 9 6 5 . 22. R. Desreumaux, "Cartographie routière dans le Nord de la Il , France au XVIIIe s. Actes du Colloque Internat, de Spa, 1976, Bruxelles, 1978, p. 237-256. Il 23- R. Desreumaux, "Valenciennes, noeud routier au XVIIIe s. Mzlangzi Paul Lz{Kancq, Valenciennes, 1978, p. IO5-IO9.
98 24. Paul Delsalle, "Routes et chemins du Pays de Pévèle aux XVIIè et XVIIIè s* dans ketei da Congiei Nat. dei Soc.Sav., Bordeaux, 1979, Paris, BN, 1980 I, p. 25-40. 25. P. Delsalle, Lei mutat-ioni dz payiagei 1600- 17 S9 : l'exempte, da Payi de Pívzle, Mém. de Maîtrise, Univ. de Lille, 198O, 3 vol. 26. Serge Grozinski, "Changement et continuité dans deux seigneuries des Pays-Bas méridionaux : l'abbaye d'Anchin et la baronnie de Cysoing", dans Rev. du Ν old, t. LV, n. 219, oct.déc. 1973, p. 305-314. 27· Hugues Neveux, "Labeur et revenu de la terre au milieu du XVIè s. dans la région lilloise", dans Rev. Hlit. Hod. et contemp., t. XIX, oct.déc. 1972, p. 579-587· 28. Bernard Coussée,, Un v¿l¿a.ge
du Nosid : R a i m b e a u c o u K t , [ s . 1.] ,
1979. 29. Nous suivons les travaux de Paul Delsalle.- Bernard Duflos, Saméon,
telle
d' Abbaye,
Valenciennes, Lelièvre, 1973, 130 p.
30. Arthur Young, Voyagei en F l a n c e , 1787, 1 7 8 9 . Journal de voyages. Trad. Paris, A. Colin, 1976, p. 206.
99
DE L'UTILITE DES ARPENTEURS DU XVIIIè SIECLE
A la fin du XVIIIè siècle, La Continuation
de la Loi de.
ία vltte. de Litte, est à la fois un calendrier et l'annuaire de la cité. L'ouvrage paraît chaque année chez Henry, l'imprimeur des documents officiels. Il donne pour les douze mois à venir la liste des échevins, conseillers et personnalités diverses de Lille. Il précise même ceux des membres du Magistrat qui seront de service chaque semaine et la composition des différentes commissions, ainsi que les resposables des quartiers de la ville , en précisant la limite spatiale confiée à chacun. A partir de 1774 au moins (je n'ai pu consulter une collection complète), on voit apparaître à la suite quelques additions
: prennent rang dé-
sormais l'aumônier, le médecin et le chirùrgien de la ville, un à trois traducteurs-jurés de Flamand en Français ainsi que un à trois puis cinq arpenteurs-experts-jurés
: d'abord Charles-Louis-
Joseph Delannoy le jeune, rue Cocquerez puis rue d'Angleterre, ensuite François-Joseph Rohart, rue Saint-André et Mortelette, rue des Buisses, enfin Quique, place Sainte-Catherine, qui est également expert-maître-maçon, et Paul-Pierre Comer, sur le rivage de la Basse-Deûle qui, en 1789, est en même temps architecte et clerc des ouvrages de la ville. Un Cale.ndn.-ie.n. de ta fiandre, édité chez Peterinck à Lille publiait la liste des membres de 1'Etat-Major de la ville, de l'Intendance, du Bailliage, de 1'H6tel-de-Ville, de la Maréchaussée, de l'hôtel des Monnaies, de la Collégiale Saint-Pierre etc. Il contient entre autres pour I789 le nom de Vantourout, ingénieur géographe et arpenteur-expert-juré des domaines, rue Saint-André et, parmi les officiers du Siège Royal des Eaux et Forêts deux arpenteurs
: le Delannoy que nous avons déjà rencontré
et Dupont, rue de Saint-André.
100 A la même époque paraissait encore, chez Henry, le Ca.t&nd.&'Le.'i générât du
du gouvernement
de ta
ftandie,
da Ha¿n. Il donne les fêtes mobiles et la succession des
douze mois de l'année. Il comporte les services de postes et messageries, et surtout la liste des personnalités de l'armée, du clergé, de l'enseignement et des multiples administrations dans chacune des villes des deux généralités de Lille et de Valenciennes. Les arpenteurs des Eaux et Forêts sont indiqués : en 1764, à Lille, Mahieu rue de Fives et Mathon, rue de la Trinité ; à Valenciennes, Jean Toussaint Maillard et Jean-Philippe Rocquet. Pour Cambrai, c'est parmi les membres de la Société d'Agriculture qu'on découvre un certain Richard, arpenteur-juré. Au fil des années, apparaîtront dans le Ca.te.ndn.lzH.
des arpenteurs qui ne sont
pas nécessairement au service des Eaux et Forêts : Delebert et Alyot à Bavay, Looten, Herwyn et Delegher à Hondschoote, Boidin et Bousemaer à Armentières, Jonniau à Barbençon. En 1789, on retrouve pour la ville de Lille les cinq noms déjà repérés dans la Lo·L de LÀ.tte
et des arpenteurs auparavant signalés dans les
villes déjà citées. Mais ce n'est là qu'une faible partie de ceux qui effectivement pratiquent le levé des terres en notre région. Bien d'autres personnes apparaissent avec le même titre d'arpenteur-expert-juré dans les procès-verbaux de bornage ou d'arpentage et sur les multiples plans conservés dans les Archives. Il y a par exemple, parmi les plus prolifiques, Cottignies à Noyelles-les-Seclin, Telabre à Fontaine-Notre-Dame, Sanche à Neuvireuil, Boursiez à Walincourt,... De tous ces Arpenteurs, les mieux connus sur le plan juridique sont ceux qui dépendent des Eaux et Forêts ; le titre XI de l'Ordonnance du mois d'août 1669 précise leur nombre : deux par bailliage ou Maîtrise des Eaux et Forêts, leur caution : 1000 livres, leurs obligations de mesurage, bornage et visite des bois. Les commentaires de Daniel Jousse sur cette Ordonnance vont jusqu'à nous préciser leur rétribution quotidienne : 6 sols par jour en 1782. A la maîtrise de Lille, en 1789, ils s'appelent Delannoy et Dupont, à celle de Valenciennes Du Temple et Bouy, à celle du Quesnoy, Guyot et Delobert. D'après les renseignements fournis par les précédents CaÍendfi¿&n.¿,
il faut en ajouter un I
Givet, nommé Verdcheval et un autre à la Maîtrise de Nieppe ayant
101
son siège à La-Motte-au-Bois, Van de Lande habitant d'ailleurs à Steenbecque. Certains d'entre eux nous ont laissé des traces de leur travail sous forme de plans de forêt. On ne peut douter de la compétence de ces spécialistes. Cependant, une découverte dans la copie-de-lettres de Jean-Baptiste Carpentier m'oblige à plus de réserves envers les personnes qui portent un titre auquel des exemptions et privilèges sont attachés. Etaient-ils réellement capables de faire un levé de terrain ? Carpentier (dont la forte personnalité nous a été révélée par M. Robinet en 1978 au cours d'une magistrale conférence à la Séance annuelle de la Société des Sciences, de l'Agriculture et des Arts de Lille) était l'agent général de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, dit de Malte, à Lille, selon le Calzndntzn dz la Flandnz de 1789. Installé à Lille rue du Ban-de-Wedde depuis 1759, il était en fait gérant de biens au service de divers seigneurs. A la demande de sa soeur, épouse d'un certain Mahieu, d'Armentières, il s'efforce d'obtenir pour son neveu la survivance de la charge d'Arpenteur des Eaux et Forêts de Phalempin, une petite Maîtrise dite "La Mottz Madame". Il choisit un avocat parisien pour parvenir à ses fins en septembre 1778. Il lui écrit le 5 décembre : "Ce n'zit quz poun. joutn. dzi zxzmpttoni
qu' zllz (ma iozun.) a nztznu czttz pz-
tttz change ; ti lut ie.Jio.Lt (¡out uttlz de. i ζ mittle, en
poazaton
dz iuttz à cauiz que. c'zit dani le. momznt pn.zie.nt que. tout le. mondi te t ¿at t izi piovtitoni
de. botiion, comme vtn zt btznnz zt
qu'zllz dzvna znconz payzn. Izi tmpoti iun. c.zi obj'zti it voui dt(¡{¡zn.zz à lut znvoyzn. lei ttt>izi dz la. zhangz quz ion ¿tli ttznt dz ion gnand-pilz"
(A.D., Cumulus 497, f° 362). Cela traîne en
longueur. La soeur récrimine auprès du frère. Carpentier presse 30η avocat. Enfin, le 7 avril 178O, arrive une demande de renseignements de la Grande Maîtrise des Eaux et Forêts, à laquelle Carpentier répond loyalement que le grand-père Mahieu .zttz changz zn la {¡atiant dznznvtn Zi zxzmpttoni"
"poiizdott
pan. un ciutnz poun. pfLoittzn.
(A.D. Cumulus 498, f° 532). Le neveu s'engage à
aire choix d'un arpenteur local pour effectuer le travail de ornage et à le rétribuer. Mais la réponse ne satisfait pas le irecteur général des Eaux et Forêts qui, le 23 avril, refuse
102 l'agrément car le demandeur n'a "aucune, dzi quaZltéi poun zxztiçzn c zt o(¡(-Luz, n'ayant
nézzaalnzi
pai étudié t'ait di Ζ' anpentagz"
(A.D., Cumulus 499, f° 14). Carpentier replique :
ait vial
qu'lZ (alZZz iavoln Z'anpzntagz
d'anpzn-
poux, poiiédzn Ζa changz
tzun dzi Eaux it FoKzti zn atte. vlZZz, Sa Majzité poutiia blzn iupp/ilmzn. zt nzmbouizi azhzttzia.
zzi c.haxgzi, paizz quz pznonnz
ΊΖ zit czAtaln quz dzpuli Z'étabZlazmznt
d'aipzntzui
nz ¿zi
dzi o((¡lc zi
aux Eaux zt F oizti, IZ n'y a jamali zu pznonnz
dzi
p/copnlétalnzi dz zzi zh.an.gzi qui Zzi ont zxzncézi pah. zux-mzmzi. IZi Zzi ont toujoum
(¡alt dzaznvln
qu.1 iz iont (¡alt nzzzvoln anpzntzum
iont lei hom
pan dzi anpzntzum
à Za Ualtnliz.
d'état d' achztzn
qui iont aiizz nlchzi poun. Zzi azhzttzn, uolZà Za vénltz"
La nalion
czi zhangzi,
zt azux
n'zn voudnolznt
pai,
(A.D., Cumulus 499, f° 14-15). Il ajoute que le
grand-père n'a "¡amali zxznzz Za change d'anpzntzun ani qu'IZ a été zn zxznclcz, jourd'hui
zxpznti zn zit quz Zzi
du nommé
pzndant
vingt
zt Za MaZtnli ζ i ζ iznt enzonz au-
ChanZzi 0>iuzζ, pnopoiz pan (zu M. Mahlzu".
(A.D. Cumulus 499, f° 16). Finalement, il faudra se résigner à vendre la charge familiale à.... M. De Lannoy, arpenteur-juré à Lille, que nous connaissons par ailleurs, au mois d'août 1780. La conclusion de cet échange de correspondance est qu'il faut se méfier des titulaires qui n'ont pas justifié par des plans de leurs capacités : leur titre ne répond pas toujours à la réalité. A côté des Arpenteurs des Eaux et Forêts, dont le statut est bien déterminé, se trouve un grand nombre d'hommes qui portent un titre local : Arpenteur-expert-juré de telle ville, bourg U
%
K I
J
B
y
A
3°. Carte particulière du Quarré A (Vincennes, Archives du Génie)
6°. Cartons de la carte particulière du Quarré C Archives du Génie)
(Vincennes,
7°. Carte particulière d u Quarré 22 (Vincennes, Service historique de l'Armée de Terre)
8°. Carte particulière du Quarré 23 (Vincennes, Archives du Génie)
9°. C a r t o n s de la c a r t e p a r t i c u l i è r e d u Q u a r r é 23 Archives du Génie).
(Vincennes,
M U
I I
ι
10°. Plans, profils et élévations de la canardière de Condé (Paris, Bibliothèque du Génie).
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