L' Université Laurentienne: Une histoire 9780773591073

L'histoire fascinante de la croissance de l'Université Laurentienne et de ses innovations en l'éducation

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French Pages 460 [454] Year 2010

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Table of contents :
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Table Des Matières
Introduction
Illustrations couleur
PARTIE A: LES RACINES
1. Les origines de l’Université Laurentienne
2. La fondation de l’Université Laurentienne, 1958–1960
PARTIE B: STRUCTURES EN ÉVOLUTION
I. La gouvernance universitaire
3. Les défis des années soixante, 1960–1972
4. Une ère de transition, 1972–1985
5. La période contemporaine, de 1985 à nos jours
II. Programmes d’enseignement et de recherche
6. Composer avec de dures réalités : la mise en place des programmes d’enseignement de base, 1960–1985
7. Bâtir sur les acquis : la recherche et les études supérieures, 1985 à nos jours
PARTIE C: LE DÉVELOPPEMENT DES IDENTITÉS
I. Les étudiantes et étudiants
8. La Berkeley de Sudbury : trouver sa voix, 1960–1972
9. Nous savons qui nous sommes : explorer de nouvelles identités, 1972–1985
10. Ici, c’est pas Berkeley : les étudiantes et étudiants, de 1985 à nos jours
II. Enseignement en français et bilinguisme à la Laurentienne
11. Les années 1960 à 1971 : un optimisme démenti
12. Les années 1971 à 1984 : faire sa place
13. De 1984 à aujourd’hui : tout va très bien madame la Marquise!
III. Les femmes à la Laurentienne
14. Dans un monde d’homme : les premières années, 1960–1972
15. Décidément aucune raison de se réjouir : établir la situation des femmes, 1972–1985
16. Politiques et pratiques en faveur de l’équité et de l’égalité, de 1985 à nos jours
IV. Les relations au sein de la fédération
17. Affrontement, détente et accommodement, 1960–2010
V. Le corps professoral à la Laurentienne
18. Les premières années, 1960–1972
19. Consolidation et reconnaissance syndicale, 1972–1985
20. Des grèves et du contrat social à la croissance et à l’expansion, de 1985 à nos jours
Conclusion
Notes
Une note au sujet des sources
Bibliographie
Index
A
B
C
D
E
F
G
H
I
J
K
L
M
N
O
P
Q
R
S
T
U
V
W
Z
Sources des documents visuels
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L' Université Laurentienne: Une histoire
 9780773591073

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l, u n i v e r si t é L au r e n t i e n n e

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l,université laurentienne Une histoire

linda ambrose, matt bray, sara burke, donald dennie et guy gaudreau Sous la direction de Matt Bray

Publié pour l’Université Laurentienne par McGill-Queen’s University Press Montréal & Kingston | London | Ithaca

© McGill-Queen’s University Press 2010 ISBN 978-0-7735-3786-6 Dépôt légal 3e trimestre 2010 Bibliothèque nationale du Québec Imprimé au Canada sur papier non acide qui ne provient pas des forêts anciennes (100% matérial post-consommation), non blanchi au chlore Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (padié) pour nos activités d’édition. Nous remercions le Conseil des Arts du Canada de l’aide accordée à notre programme de publication. Toutes les démarches possibles ont été effectuées en vue de communiquer avec les détenteurs des droits d’auteur des illustrations et photographies qui figurent dans le présent ouvrage. Si vous pouvez fournir des renseignements supplémentaires en ce qui concerne les droits d’auteur et les permissions, veuillez communiquer avec le département d’histoire, Université Laurentienne, Sudbury (Ontario) p 3e 2c 6.

catalogage avant publication de bibliothèque et archives canada L’Université Laurentienne : une histoire / Matt Bray … [et al.]. Publ. aussi en anglais sous le titre: Laurentian University. Comprend des références bibliographiques et un index. ISBN 978-0-7735-3786-6 1. Université Laurentienne de Sudbury – Histoire.  I. Bray, R. M. (Robert Matthew), 1944–  II. Université Laurentienne de Sudbury.

le 3.l 268l 3814 2010   378.713’133   c 2010-902212-2

Composé dans 10/12 Minion avec Meta+ Dessin du livre & mise en pages par Garet Markvoort, zijn digital

dédicace Nous dédions cette histoire à tout le corps professoral, le personnel de soutien et les étudiantes et étudiants de l’Université Laurentienne des cinquante dernières années.

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table des matières

Introduction  |  xi Illustrations couleur  |  avant la page 3 partie a  |  les racines 1. Les origines de l’Université Laurentienne  |  3 Guy Gaudreau 2. La fondation de l’Université Laurentienne, 1958–1960  |  17 Matt Bray

partie b  |  structures en évolution I.  La gouvernance universitaire

Matt Bray 3. Les défis des années soixante, 1960–1972  |  33 4. Une ère de transition, 1972–1985  |  59 5. La période contemporaine, de 1985 à nos jours  |  79 II.  Programmes d’enseignement et de recherche

Donald Dennie 6. Composer avec de dures réalités : la mise en place des programmes d’enseignement de base, 1960–1985  |  102 7. Bâtir sur les acquis : la recherche et les études supérieures, 1985 à nos jours  |  135

partie c  |  le développement des identités I.  Les étudiantes et étudiants

Sara Burke 8. La Berkeley de Sudbury : trouver sa voix, 1960–1972  |  163 9. Nous savons qui nous sommes : explorer de nouvelles identités, 1972–1985  |  183 10. Ici, c’est pas Berkeley : les étudiantes et étudiants, de 1985 à nos jours  |  201 II.  Enseignement en français et bilinguisme à la Laurentienne

Guy Gaudreau 11. Les années 1960 à 1971 : un optimisme démenti  |  214 12. Les années 1971 à 1984 : faire sa place  |  229 13. De 1984 à aujourd’hui : tout va très bien madame la Marquise!  |  247 III.  Les femmes à la Laurentienne

Linda Ambrose 14. Dans un monde d’homme : les premières années, 1960–1972  |  265 15. Décidément aucune raison de se réjouir : établir la situation des femmes, 1972–1985  |  273 16. Politiques et pratiques en faveur de l’équité et de l’égalité, de 1985 à nos jours  |  285 IV.  Les relations au sein de la fédération

Matt Bray 17. Affrontement, détente et accommodement, 1960–2010  |  296

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ta b l e d e s m at ièr e s

V.  Le corps professoral à la Laurentienne

Linda Ambrose 18. Les premières années, 1960–1972  |  306 19. Consolidation et reconnaissance syndicale, 1972–1985  |  318 20. Des grèves et du contrat social à la croissance et à l’expansion, de 1985 à nos jours  |  327 Conclusion  |  339 Notes  |  349 Une note au sujet des sources  |  403 Bibliographie  |  405 Index  |  411 Sources des documents visuels  |  423

ta b l e d e s m at ière s

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introduction

En 1960, l’Université Laurentienne accueillait sa première cohorte d’étudiants, répondant ainsi à l’explosion démographique de l’après-guerre tout en se dotant d’un modèle bilingue unique en son genre. Une bonne quarantaine d’années plus tard, des canadianistes de son département d’histoire se disaient que la préparation d’une histoire de leur université serait une façon appropriée de célébrer son cinquantième anniversaire en 2010. Aucune étude intégrale du sujet n’existait alors, quoique Gwenda Hallsworth ait rédigé un court historique dans le cadre du 25e anniversaire de la Laurentienne, Le beau risque du savoir : Un bref historique de l’Université Laurentienne / A venture into the realm of higher education: A brief history of Laurentian University, qui porte surtout sur ses premières années. Nous n’avons pas immédiatement donné suite à l’idée, mais par coïncidence, quelques semaines plus tard, Douglas Parker, vice-recteur à l’enseignement et à la recherche (Affaires anglophones), nous approchait à la demande de la rectrice de l’époque, Judith Woodsworth, pour nous proposer exactement la même idée. De toute évidence, les astres s’alignaient. Tout d’abord, trois d’entre nous avons accepté de relever le défi – Linda Ambrose, Sara Burke et Matt Bray, rejoints bientôt par Guy Gaudreau et Gaétan Gervais. Malheureusement, la santé défaillante de Gaétan l’a obligé à se retirer du projet, mais nous avons pu recruter pour prendre sa relève le sociologue Donald Dennie, ancien doyen de la faculté des sciences sociales et des humanités et étudiant de la première cohorte de la Laurentienne. Même si l’an 2010 nous semblait encore bien loin, nous savions que le temps deviendrait vite un facteur, car en plus de nos responsabilités régulières à l’enseignement et à l’administration, nous avions tous d’autres projets de recherche en cours qui demeureraient prioritaires. La rectrice Woodsworth, sensible à notre dilemme, est venue à notre secours en embauchant Charles Levi pour entamer l’étape initiale des recherches. Les titres de compétence de Charles étaient excellents. Après avoir obtenu un doctorat en histoire de l’Université York en 1998, il a été pendant trois ans recherchiste principal du projet d’histoire de l’Université de Toronto d’où est issu, en 2002, l’ouvrage fort bien accueilli de Martin L. Friedland, The University of Toronto: A History. Au fil des années 2004 et 2005, Charles a rassemblé une grande partie de la documentation sur laquelle repose notre étude. Travailleur infatigable, il a exploré les archives nationales et provinciales en plus de celles de la Laurentienne, par-

couru les journaux tels que le Sudbury Star et le Northern Life et mené nombre d’entrevues avec plusieurs personnalités importantes des premières heures de la Laurentienne, pour ne mentionner que trois des nombreuses tâches que ses recherches ont comportées. Il a également produit, sur divers aspects de l’histoire de l’Université, une série de rapports qui ont jeté un éclairage précieux sur les contextes de nos chapitres individuels. Quoique Charles ne soit aucunement responsable de l’utilisation que nous avons faite du fruit de son labeur, notre dette envers lui est immense. La liste des autres groupes et personnes à qui les auteurs doivent leur reconnaissance est longue. Au fil des années, l’Université Laurentienne (le rectorat, le programme travail-études du Centre de placement, le fonds de recherche Un vaste et merveilleux pays) et le service des emplois d’été du ministère du Développement du Nord et des Mines ont financé une série de projets de recherche où ces étudiants nous ont rendu des services inestimables : Josée Blanchette, Jennifer Levin Bonder, Kaleigh Bradley, Jennifer Desjardins, Rachel Desjardins, Amélie Dugas, Maya Holson, Andréanne Joly, Brian Kett, Kathleen Labbe, Eric Larocque, Sarah MacDougall, Jason Mercier, Jessica Morrison, Seana Murdock, Sarah Myllymaki, Casey Owens, Jenna Smith, Christina St-Onge, Francine Tisdelle. Nous sommes reconnaissants aussi de l’aide que nous ont apportée l’archiviste de l’Université Laurentienne, Marthe Brown, et son personnel, la bibliothécaire Nancy Ladouceur, Mary-Catherine Taylor du centre d’audiovisuel et l’archiviste de la ville du Grand Sudbury, Shanna Fraser. Nous tenons aussi à reconnaître l’appui d’organismes tels que l’Association générale des étudiants et l’Association des étudiantes et étudiants francophones, plusieurs départements de l’Université, tant de l’administration que de l’enseignement, qui nous ont donné accès à leurs collections de documents et de photographies, ainsi qu’aux personnes fort nombreuses dont le nom se retrouve dans les notes en bas de page, les encadrés latéraux et les légendes des photographies. Nous devons également remercier nos collègues et associés d’hier et d’aujourd’hui qui ont bien voulu commenter les interprétations que nous développions, répondre à nos questions sur certains détails, ou lire et commenter des extraits de nos ébauches. Ces collègues sont Brian Aitken, Stephen Andrews, Stephen Azzi, Peter Beckett, Nelson Belzile, Larry Black, Bruce Burke, Dieter Buse, Jean-Charles Cachon, Ron Chrysler, Danielle Coulombe, Wes Cragg, Leda Culliford, Hermann Falter, Gaétan Gervais, Douglas Hallman, Margaret Kechnie, Andrii Krawchuk, Andrea Levan, Edward Monahan, Douglas Parker, Pat Pickard, Amanda Schweinbenz, Ashley Thomson, Micheline Tremblay et Carl Wallace. Leurs efforts, que nous apprécions grandement, ont énormément amélioré nos textes, bien qu’ils n’aient aucunement à répondre du contenu de l’ouvrage ou de l’orientation des interprétations. Ces aspects de l’ouvrage, ainsi que toute erreur ou omission qu’il contienne, sont à imputer à ses auteurs seulement. Nous tenons aussi à remercier de leur patience et de leur engagement les personnes qui ont transformé notre manuscrit en deux publications, l’une anglaise, l’autre française. Les réviseurs Jennifer Nault, Sylvie Rodrigue et Normand Renaud ont habilement rehaussé la cohérence et l’uniformité de l’ensemble de nos

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textes stylistiquement divers et les traducteurs Frédéric Demers (de l’anglais au français) et ici aussi Sylvie Rodrigue et Normand Renaud (du français à l’anglais et de l’anglais au français) ont adroitement traduit les textes révisés. Enfin, nous devons exprimer notre gratitude à McGill-Queen’s University Press et particulièrement à Philip Cercone, Joan McGilvray, Anna Lensky et Adrian Galwin pour leurs efforts des plus divers en vue d’assurer la publication de notre ouvrage dans les délais prévus. Sur une note plus personnelle, les auteurs tiennent à reconnaître les contributions d’une autre personne à la réalisation de ce projet. Comme le sait bien toute personne qui a travaillé dans un contexte universitaire, la personne qui contribue le plus au bien-être d’un département est sa secrétaire, bien que ce titre ne décrive plus adéquatement l’importance critique de cette fonction, s’il ne l’a jamais fait. C’est certainement le cas au département d’histoire de l’Université Laurentienne. Nous avons été extrêmement chanceux d’avoir pu profiter depuis trente ans de la présence de Rose-May Démoré, qui a géré les affaires du département avec énormément de compétence, de patience et de bonne humeur, ce qui a favorisé une atmosphère de coopération et de bonne volonté dont nous avons tous bénéficié d’innombrables façons. À part les deux premiers chapitres d’introduction qui retracent les origines nord-ontariennes de l’institution et qui examinent les circonstances immédiates de sa fondation, nous avons structuré l’histoire de l’Université Laurentienne autour de six grands thèmes – la gouvernance universitaire, l’évolution des programmes d’études, le bilinguisme et le biculturalisme, les étudiants, l’association des professeurs et le rôle des femmes – répartis en deux grandes catégories : l’évolution des structures et le développement des identités. Nous reconnaissons que ces thèmes ne sont certainement pas exhaustifs, mais nous croyons qu’ensemble, ils englobent les composantes fondamentales de l’expérience Laurentienne afin qu’ils puissent tenir en un seul volume. Aucun découpage chronologique n’accommode parfaitement tous ces thèmes – les tournants décisifs des uns ne coïncident pas nécessairement avec ceux des autres. Néanmoins, la plupart se laissent intégrer dans les trois grandes périodes que nous avons adoptées aux fins de l’organisation de l’information : les défis des années soixante, de 1960 à 1972 ; l’ère de transition, de 1972 à 1985 ; et la période contemporaine, de 1985 à nos jours. Un chapitre additionnel sur les relations de la fédération nécessite une explication particulière. Au début du projet, nous nous sommes retrouvés devant un problème épineux : comment intégrer les histoires distinctes, mais associées, des trois institutions confessionnelles fédérées, l’Université de Sudbury, l’Université Huntington et l’Université Thorneloe. Après de mûres réflexions, nous avons décidé qu’étant donné que chacune de ces trois institutions a l’intention de documenter sa propre histoire institutionnelle, nous allions nous limiter à un chapitre général sur les relations fédératives, tout en reconnaissant que le rôle vital de ces institutions dans l’histoire de la Laurentienne s’en trouve sous-représenté. De même, notre traitement plutôt superficiel des trois institutions affiliées à la Laurentienne, le Collège universitaire de Hearst, le Collège universitaire Nipissing à North Bay et le Collège universitaire Algoma à Sault-Sainte-Marie, ces deux derniers étant

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maintenant autonomes, découle du fait que dès le tout début et peu importe les nuances légales, chacune existe à titre d’institution distincte qui a sa propre histoire. Les projets de coécriture posent des défis particuliers. De nature, les historiens tendent vers l’individualisme, en apportant à leur travail leurs expériences et leurs philosophies particulières, tant professionnelles que personnelles, qui façonnent leurs interprétations du passé. C’est d’autant plus le cas quand le sujet à l’étude est l’institution même à laquelle les auteurs sont associés depuis dix à cinquante ans, selon le cas. La situation se complique du fait de la complexité de la Laurentienne, une université bilingue et multiculturelle fondée par trois partenaires de confessions religieuses différentes. Des divergences d’opinions ont inévitablement surgi parmi nous, mais aucune n’était fondamentale. Comme l’indique le fait que chaque auteur signe ses sections de l’ouvrage, nous avons réglé la question en reconnaissant que chaque auteur assume la responsabilité de ses textes respectifs. Chacun a fait la lecture critique des ébauches de ses collègues et le rédacteur en chef, Matt Bray, a fait certaines interventions éditoriales comme l’élimination des redondances inutiles, mais nous n’avons aucunement tenté de ramener nos vues parfois divergentes à un seul cadre interprétatif. En ce sens, la rédaction de cette histoire reflète l’expérience Laurentienne par excellence qu’est le compromis, sans laquelle l’Université n’aurait jamais vu le jour et encore moins survécu pour fêter son cinquantième anniversaire.

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partie a  |   les r acin es

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l’édifice alphonse raymond, 1976.  |  L’École des sciences de l’éducation francophone occupe l’édifice Alphonse Raymond.

vue aérienne des install ations sportives du campus .  |  Cette vue aérienne présente les installations sportives du campus de la Laurentienne, qui comprend les pistes extérieures de 200 et de 400 mètres et le gymnase Ben Avery, qui abrite une piscine de dimension olympique.

l a salle de lecture brenda wall ace .  |  Des étudiants profitent de cet espace ensoleillé dans la salle de lecture Brenda Wallace de la bibliothèque J.N. Desmarais. La salle de lecture a ouvert ses portes en mai 2001.

l a bibliothèque j .n . desmarais en hiver .  |  La bibliothèque J.N. Desmarais abrite les archives de l’Université Laurentienne, une variété de fonds d’archives de groupes miniers, syndicaux, sociaux, culturels et ethniques ainsi que les fonds de personnes notables de la région de Sudbury et de sa communauté francophone.

l’école de médecine du nord de l’ontario.  |  Première école de médecine à voir le jour au Canada en plus de trente ans, l’emplacement sudburois de l’École de médecine du Nord de l’Ontario ouvre ses portes en 2005 et fête la collation des grades de sa première cohorte en juin 2009.

l a pl age l aurentienne .  |  Durant les mois d’été, la plage privée de la Laurentienne sur le lac Nepahwin est surveillée par des sauveteurs. C’est un lieu apprécié des étudiants, des employés et professeurs.

le tipi sur l a pl ace des fondateurs .  |  Le tipi érigé sur la place des fondateurs symbolise l’identité triculturelle de la Laurentienne et son engagement envers les étudiants, les programmes et la communauté autochtones.

l’école des sciences de l’éducation anglophone .  |  La nouvelle école anglophone des sciences de l’éducation, ouverte en 2008, occupe un édifice qui respecte des principes de conception écologique.

l’édifice des sciences à l a tombée de l a nuit.  |  L’édifice Fraser, qui abrite la faculté des sciences et de génie, l’auditorium Fraser et le Salon des anciens, se dressent contre la silhouette nocturne de la ville de Sudbury.

le campus en hiver .  |  Ce paysage évocateur du Monde de Narnia montre la beauté du campus de la Laurentienne en hiver.

vue du campus de l a l aurentienne depuis le parc bell .  |  Paysage familier pour les résidents de Sudbury et les touristes, voici la vue sur le campus qu’offre le parc Bell.

toitures enneigées des résidences étudiantes .  |  Voici la vue qui s’offrait aux fenêtres de la résidence des étudiants mariés, du côté de l’édifice Parker, un jour d’hiver de 1976.

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Les origines de l’Université Laurentienne guy gaudreau

La fondation de la Laurentienne, en 1960, ne marque pas le début de l’enseignement universitaire dans le nord de l’Ontario. Dès 1913, le Collège du Sacré-Cœur, et par la suite l’Université de Sudbury, développent par le biais de leur enseignement une tradition universitaire. À plusieurs égards, l’Université Laurentienne en tire son origine. Quelques programmes, tel celui de génie minier, y sont introduits. Certains acteurs de la future université, notamment des membres du personnel et du Conseil des gouverneurs, y œuvrent déjà. Aussi faut-il rappeler les grandes lignes de cette préhistoire animée par un ordre religieux centenaire qui a laissé ses marques dans l’histoire canadienne depuis la Nouvelle-France, soit la Compagnie de Jésus. La création d’un collège classique La présence des jésuites sur les rives de la baie Georgienne remonte au début de la Nouvelle-France. Après une longue éclipse, ils reviennent en 1842 à des activités missionnaires auprès des communautés amérindiennes de l’île Manitouline1 et ce, à la demande pressante de l’évêque Power de Toronto. L’avancée de la colonisation et de l’exploitation forestière dans la région des Grands Lacs ainsi que les contacts plus fréquents entretenus avec les Amérindiens incitent le clergé catholique à y développer des missions2. Quand le Canadien Pacifique ouvre sa ligne ferroviaire transcontinentale, au début des années 1880, c’est au tour de l’évêque de Peterborough de leur demander d’apporter des soins religieux aux milliers de terrassiers et journaliers qui y sont à pied d’œuvre3. En 1883, les jésuites arrivent à Sudbury en même temps que la compagnie ferroviaire. Ils y fondent alors une mission qui deviendra paroisse. Appelée Sainte-Anne-des-Pins, cette paroisse bilingue dessert la population catholique du petit village qui n’a encore qu’une vocation ferroviaire et forestière. Occupé à construire un bâtiment servant de chapelle, d’école et de

presbytère – la première église sera mise en chantier en 1887 –, le père Hormidas Caron achète un terrain de 300 acres du Canadien Pacifique en prévision de besoins futurs de la communauté. Pense-t-on déjà à un collège4? Quoique ce projet d’un collège classique ne soit encore qu’un rêve lointain, il faut comprendre le contexte de l’époque et la place de cette institution pour la communauté jésuite. Au moment où le curé Caron conclut la transaction, en 1886, les jésuites dirigent déjà deux collèges classiques au Canada français : le collège Sainte-Marie de Montréal, institution alors bilingue, et le Collège universitaire de Saint-Boniface à Winnipeg, dont la direction leur a été confiée par l’évêque l’année précédente5. En 1886, aucun collège n’offre de cours en français en Ontario ; deux institutions collégiales bilingues, fondées au milieu du 19e siècle – Saint-Joseph d’Ottawa, devenue université en 1866, et L’Assomption, dans la région du Détroit6 –, ayant abandonné l’enseignement en français ; l’Université d’Ottawa redeviendra bilingue à compter de 1901. Ce n’est qu’au début du 20e siècle que le projet d’une institution collégiale prend corps peu à peu. Les activités minières dont l’avenir était encore incertain dans les années 1890 affichent dorénavant une pérennité que soulignent la création, en 1902, de l’International Nickel Company, et les investissements de l’entreprise américaine dans la région. La colonisation s’y développe rapidement grâce au judicieux et lucratif tracé du Canadien Pacifique qui favorise l’ouverture de nombreuses paroisses catholiques à vocation agricole, dans la Vallée au nord de Sudbury et dans la région du Nipissingue. Les jésuites y jouent certes un rôle prépondérant. Ainsi, quand le diocèse de Sault‑Sainte‑Marie est fondé en 1904 à même le territoire du diocèse de Peterborough, il « compte 31 000 fidèles, six prêtres séculiers, 30 pères jésuites et une centaine de missions7 ». La forte présence jésuite dans les paroisses du diocèse explique sans doute pourquoi le nouvel évêque accueille la requête du supérieur provincial des jésuites en date du mois d’août 19058. À cette époque, on discute déjà de la possibilité que ce collège voie le jour à Sault-Sainte-Marie plutôt qu’à Sudbury, mais l’évêque laisse le choix de son emplacement aux jésuites. Comme la construction tarde, faute de personnel jésuite enseignant, l’emplacement du site n’est pas arrêté tout de suite. Mais à compter de 1910, l’arrivée de deux autres transcontinentaux dans la région de Sudbury, une population catholique plus nombreuse qu’à Sault-Sainte-Marie et un plus grand nombre de paroisses canadiennes-françaises à proximité font pencher nettement la balance en faveur de Sudbury. En mars 1912, le Père Général des jésuites à Rome donne le feu vert. Les travaux commencent peu de temps après et le 25 août, Mgr Scollard bénit la pierre angulaire. Il était temps, car depuis la fondation en 1909 du Sudbury High School, les élites franco-sudburoises craignent qu’une partie des élèves canadiens-français soit attirée par la nouvelle école secondaire anglophone. Néanmoins Mgr Scollard est très clair sur la vocation bilingue de l’institution appelée Collège du SacréCœur. Bien sûr, comme un des objectifs visés est la formation d’un clergé séculier, le Collège est destiné uniquement à une clientèle masculine. Toutefois, la forme du bilinguisme n’a pas été clairement spécifiée par Scollard. Une lettre de l’évêque au Provincial des jésuites, en date du 31 mars 1912, laisse

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l e s r ac ine s

entendre qu’il s’agit d’offrir deux programmes complets du cours classique, un en français et l’autre en anglais. Compte tenu des difficultés de réunir un corps professoral suffisant et compte tenu de la dimension exiguë du Collège, il est impossible au recteur de répondre au souhait de l’évêque. « Alors pour contourner le problème, les jésuites se dotent donc d’une pédagogie bilingue assez particulière : le professeur, s’il le peut, parle les deux langues dans la salle de classe9. » Comme le personnel enseignant provient surtout du Québec et qu’il est surtout unilingue français, l’enseignement en anglais disparaît rapidement de sorte qu’en 1916, l’institution cesse d’être bilingue. Ce n’est pas seulement par patriotisme que les jésuites transforment leur collège qui deviendra bientôt un bastion de la francophonie nord-ontarienne. La loi du nombre, à cette époque comme aujourd’hui, joue pleinement dans les calculs puisque, vers 1910, il y a environ 11 000 catholiques anglophones tandis qu’il y a près de 33 000 catholiques francophones10. Ainsi en se dotant d’une institution religieuse privée, en dehors des mécanismes de contrôle d’un État provincial où il est largement minoritaire, le Canada français du Nouvel-Ontario peut continuer à faire comme s’il était majoritaire, même en ces terres ontariennes où s’applique alors le sinistre Règlement XVII qui interdit l’enseignement du français dans les écoles publiques. Mais un jour viendra, à la fin des années 1950, où il devra assumer pleinement ce statut de minoritaire, à savoir quand il se dotera d’un enseignement supérieur élargi consenti par la majorité. Le Collège du Sacré-Cœur Ainsi, les Canadiens français disposent dorénavant d’une institution privée de niveau secondaire, soit les cinq premières années du cours classique, et de niveau universitaire, les trois dernières années de ce cours. L’éducation offerte, qui s’adresse aux meilleurs talents des écoles primaires, est essentielle à la formation de son élite tant professionnelle que religieuse. Il s’agit d’un lieu de culture où les valeurs chrétiennes et celles de la culture française et catholique sont inculquées et reproduites. Qu’est-ce que ce cours classique et qui sont les étudiants qui fréquentent le collège? « Au 20e siècle », explique Gaétan Gervais, « le collège classique reste dans le Canada français la forme dominante de l’enseignement supérieur11. » Le cours se déroule sur huit ans, un an ayant été ajouté au programme d’études à l’automne 1929. Le contenu du cours est essentiellement le même que celui des autres collèges classiques du Canada français. Le Collège offre, en outre, des cours préparatoires à l’entrée au cours classique pour ceux dont le dossier scolaire à l’élémentaire serait inadéquat. L’enseignement y est progressif et les principales matières enseignées de façon régulière sont le français, le latin, le grec, les mathématiques et la religion12. C’est aussi un programme où les activités parascolaires demeurent tout aussi formatrices que l’enseignement proprement dit. Même si ses trois dernières années de cours offrent l’équivalent d’une formation universitaire, il ne confère pas automatiquement de diplôme universitaire. En effet, le cours se termine avec l’attribution d’un baccalauréat ès arts délivré

Les origines de l’Université Laurentienne

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le collège du sacré-cœur .  |  Fondé en 1913, le Collège du Sacré-Cœur, un collège classique dans la tradition de la société de Jésus, est l’ancêtre direct de l’Université de Sudbury et indirectement, de l’Université Laurentienne. Pendant près d’un siècle, il a répondu aux besoins éducatifs des catholiques et des Canadiens français du nord-est de l’Ontario et du nord-ouest du Québec.

par une université aux finissants des collèges qui réussissent ses examens. Cela explique pourquoi il est crucial que le Collège s’affilie à une université reconnue pour diplômer ses finissants. En outre, cette affiliation facilite le passage des étudiants du Collège vers une université. Le choix de l’affiliation est nécessairement limité puisqu’il est restreint aux universités françaises ou bilingues afin d’assurer la réussite des examens du baccalauréat à ses finissants. Au début, le Collège se tourne vers l’Université d’Ottawa. Dès 1913, le Provincial des jésuites est en pourparlers avec le recteur de l’université de la capitale. En attendant une entente qui aura des conséquences sur le programme d’études, ce dernier est calqué sur celui du collège Sainte-Marie de Montréal. Finalement, l’entente est signée en 1916, ce qui force le Collège à revoir son programme d’études selon les exigences de l’Université d’Ottawa qui émet les diplômes. Puisque les autres universités ontariennes reconnaissent le baccalauréat de l’Université d’Ottawa, il faut bien s’y plier. Les oblats, qui contrôlent l’Université d’Ottawa, et les jésuites n’ont toutefois pas la même approche ni la même conception des programmes d’études. Réputés dans le monde de l’éducation, les jésuites ont du mal à se plier aux exigences des oblats et les dissensions mènent à la rupture de cette affiliation en 1927. Une nouvelle entente est conclue avec l’Université Laval. Reste la question de la reconnaissance des diplômes pour la poignée de finissants qui se dirigent vers l’Université de Toronto afin d’y poursuivre leurs études. Si l’Université Laval a dorénavant un gros mot à dire sur le programme du Collège,

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l’Université de Toronto a aussi, théoriquement, ses propres exigences d’admission. Jusqu’en 1934, un seul des finissants du Collège est refusé13 et huit finissants y sont admis sans difficulté, quatre en droit et quatre en pédagogie. (En effet, pour enseigner au secondaire, il faut d’abord obtenir un baccalauréat avant de suivre une formation en pédagogie que ne dispense pas l’École normale d’Ottawa.) Mais en 1934, l’Université de Toronto refuse d’admettre deux finissants du Collège qui ont pourtant réussi les examens de l’Université Laval. Cela provoque rapidement une réforme du programme d’études qui doit cependant toujours tenir compte des critères de l’Université Laval. La solution est de réduire le nombre d’heures de grec afin d’offrir plus de mathématiques, d’anglais et de sciences14. Bien que cela soit sa finalité première, le Collège ne prépare pas seulement des bacheliers. En fait, peu d’étudiants complètent avec succès tout leur cours classique. Selon les calculs effectués par Josée Valiquette, parmi tous ceux qui amorcent le cours, seulement 17 pour cent environ le terminent15. Si la grande majorité interrompt le programme en cours de route, ce n’est pas nécessairement à cause d’un échec ou d’un manque de moyens financiers16. C’est que les études ont plusieurs finalités. Pour tous ceux qui se destinent à l’enseignement au primaire, la réussite des examens d’immatriculation après la versification – la troisième année du cours classique – permet d’accéder directement à l’École normale d’Ottawa. Cela explique le fait qu’en 1950–1951, par exemple, sur les 32 qui ont réussi cet examen, seulement 14 sont revenus au Collège l’année suivante17. Toujours dans cette même veine, l’admission à des programmes universitaires ne requiert pas obligatoirement la réussite des examens du baccalauréat. Comme l’écrivait Claude Galarneau, spécialiste des collèges classiques, « les départs [des collèges] ont lieu surtout après la rhétorique et c’est souvent le fait des futurs médecins, avocats et notaires pour parvenir plus vite à la profession choisie18 ». Cela est vrai également au Collège du Sacré-Cœur puisque la réussite des examens de rhétorique, après la sixième année du cours, ouvre les portes des séminaires et des universités. C’est ainsi que les « professeurs jésuites au Collège du Sacré-Cœur ont généralement complété la rhétorique avant d’entrer chez les jésuites19 ». Par ailleurs, en 1950–1951, sur les 30 rhétoriciens qui ont réussi l’examen et reçu leur diplôme d’humanités, 19 sont revenus au Collège20. Quelques mots maintenant au sujet du corps professoral. L’examen du corps professoral laisse voir une nette prépondérance des jésuites, qu’ils soient pères ou scolastiques, c’est-à-dire en formation pour le devenir. Une partie de cette formation, appelée régence, dure trois ans au cours desquels le candidat doit enseigner dans un collège, ce qui explique pourquoi le nombre de scolastiques est à peu près le même que celui des pères. Le diplôme universitaire importe peu à cette époque, mais la formation dans un scolasticat, comme celui de l’Immaculée-Conception de Montréal, qu’elle soit terminée ou non, reste alors la règle. Règle que l’on contourne seulement pour embaucher des laїcs en certaines disciplines spécialisées. Seuls quelques jésuites sont originaires du Nouvel-Ontario ; la grande majorité provient du Québec qui n’est pas perçu comme une terre étrangère, car on considère alors Sudbury comme faisant partie intégrante du Canada français. Leur

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séjour au Collège dure quelques années pour les scolastiques, et ne dépasse guère plus d’une dizaine d’années pour les pères. Sauf pour quelques-uns, on ne fait pas carrière au Collège, car ce dernier fait partie d’un réseau éducationnel et ecclésiastique où la mobilité du personnel est de rigueur. Du côté étudiant, le nombre annuel varie autour de 200 jusqu’au début de la Deuxième Guerre mondiale et aux environs de 300 par la suite. Ils proviennent de trois régions selon des proportions assez semblables, soit plus ou moins 15 pour cent. Il s’agit du Nord-Est et du Sud ontariens et du Nord-Ouest québécois, cette dernière région étant privée de Collège jusqu’au début des années 1940. Environ la moitié est originaire de la région de Sudbury. C’est dans ce contingent que l’on retrouve les externes. Pour beaucoup d’autres, cette institution collégiale est non seulement un lieu de formation mais aussi un lieu de résidence où ils doivent suivre à la lettre, 24 heures par jour, de sévères consignes où la prière et les études occupent une place centrale. L’examen des professions exercées par les étudiants du Collège, sans que l’on connaisse le type ou la durée de l’itinéraire académique qui suit le séjour au Collège, révèle une situation plus complexe que celle généralement véhiculée. On n’y forme pas seulement de futurs prêtres, médecins ou avocats, ces nobles vocations tant prisées au Canada français. Si 137 des finissants du cours classique occupent ces professions, 156 se lancent en enseignement, en administration ou dans divers autres métiers et professions21. Chez les non-finissants, les déclarations d’occupation, consignées dans les palmarès annuels du Collège, indiquent un poids encore plus considérable des occupations dites moins nobles, dont un fort contingent d’enseignants, rappelant ainsi la situation présente à la Laurentienne. Comme l’institution demeure privée et confessionnelle, elle ne peut compter sur les subventions de l’État provincial, mais seulement sur les contributions des parents, sur les dons du clergé régional et, surtout, sur le fait que le personnel enseignant clérical n’est pas rétribué. Même si les salaires représentent moins de 10 pour cent du budget du Collège – salaires versés au petit nombre de professeurs laïques, à quelques domestiques et sous forme d’honoraires aux médecins et dentistes consultés –, il faut bien trouver des revenus pour assumer un budget totalisant, en 1949–1950, un peu plus de 107 000 $22. Selon Gérald Blais, les élèves proviennent de toutes les classes sociales23 et une entrevue menée auprès du père Guy Courteau, ancien recteur, laisse à penser que la majorité était issue de familles d’agriculteurs et de journaliers24. Il est difficile de mesurer la justesse de cette estimation puisque les dossiers des élèves n’ont pas été conservés. Si on prête foi à la seule étude disponible effectuée par Bertrand à partir d’un examen des métiers des pères de famille de 283 élèves en 1962, les familles sont surtout de classe modeste et leur revenu ne dépasse pas ceux de la classe moyenne. Ainsi, en ordre décroissant, il observe notamment la présence de 87 pères de famille impliqués dans le commerce – mais pas nécessairement commerçants –, de 74 mineurs, 26 ouvriers, 22 travailleurs œuvrant dans les transports, 20 agriculteurs et 16 mécaniciens25. L’œuvre des étudiants, fondée en 1916, et le système de bourses, mis en place lors de la crise des années 1930, allègent

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sans nul doute le fardeau de plusieurs familles modestes et contribuent à attirer les meilleurs cerveaux issus des écoles élémentaires. Un certain nombre de professeurs et administrateurs qui feront carrière à la Laurentienne sont issus de cette solide école de formation. Les Hugues Albert, Donald Dennie, Gaétan Gervais, Gérard Lafrenière, Ronald Henry, Ronald Perron et Pascal Sabourin y ont été formés et ont reproduit dans leur enseignement et leur gestion administrative une partie de ce qu’ils y avaient appris. Des projets de création d’une université Albert Plante qui a rédigé une histoire de l’institution, publiée en 1938, ne fait aucune mention de transformer le Collège en une université, pourtant l’occasion aurait été bien choisie, si l’idée faisait déjà l’objet de discussions. Peut-être à cause des incertitudes provoquées par la crise des années 1930, ce projet n’apparaît qu’au début des années 1940. En 1941, les jésuites reçoivent l’appui de leur Provincial pour créer une université à Sudbury. L’économie, fouettée par la guerre, entraîne une prospérité qui se généralise à tous les secteurs économiques ; le contexte est ainsi davantage propice à de nouveaux développements en matière d’éducation. Un tel projet avait sans doute besoin de nombreux appuis et notamment de celui de l’Ordre de Jacques-Cartier, cette société secrète du Canada français alors très active et qui avait comme bras politique et visible l’Association canadiennefrançaise de l’éducation de l’Ontario (ACFEO). La présence de l’Ordre à Sudbury a été brièvement examinée par Pierre Ouellette qui a montré l’ampleur de ses interventions non seulement dans l’éducation, mais aussi dans le champ économique26. Ajoutons que J.-Raoul Hurtubise, député libéral fédéral et militant de longue date, en est membre et qu’il siège au conseil de direction de l’ACFEO provinciale à Ottawa. Quoique l’histoire de l’Ordre soit, pour l’essentiel, encore à rédiger, on peut avancer que les deux organismes ont été consultés puisque c’est Hurtubise qui achemine la requête. Officiellement, l’ACFEO a donné son appui au projet en octobre 194427. Fort du soutien du maire Bill Beaton et du député provincial CCF 28 de Sudbury, Bob Carlin, la requête devient projet de loi et ce dernier est adopté en première lecture le 4 mars 1945. C’est dans ce projet que le nom de l’Université de Sudbury est mentionné pour la première fois. Le Sudbury Star en faisait écho dans un article publié le 12 février29 dans lequel on rapporte que le Collège souhaite fonder une université « non confessionnelle » et que Carlin appuie le projet parce que l’institution universitaire rendrait les études supérieures beaucoup plus accessibles aux classes modestes. La non-confessionnalité de ce projet universitaire, tout comme son caractère bilingue30, en a sans doute fait sursauter plus d’un autant parmi la communauté protestante incrédule31 que chez les irlandais catholiques et les Canadiens français. Le projet, tel qu’annoncé dans le Sudbury Star, fait fi de la dimension catholique et unilingue française du Collège jésuite. Cette non-confessionnalité, en partie factice, s’explique par le fait que le projet propose une structure universitaire com-

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plexe où peuvent coexister un collège universitaire non confessionnel et bilingue – qui serait susceptible de recevoir un financement de l’État – et une université toujours catholique qui resterait entre les mains des jésuites et qui chapeauterait le tout. En somme, l’embryon du projet de 1960 était déjà sur les planches, même si la formule mise de l’avant en 1945 ne mentionnait pas de structure précise. Pour devenir réalité, il restait néanmoins deux autres lectures du projet de loi. Le 4 mars 1945 le projet de loi passe en première lecture, mais quatre jours plus tard les trois députés de langue française à Queen’s Park, tous de la région d’Ottawa, décident de s’opposer au projet. Averti de cette volte-face, Raoul Hurtubise fait parvenir un télégramme aux dissidents les avertissant que l’ACFEO appuie ce projet de loi et qu’il est de leur devoir d’en faire autant. La crise est évitée. Cependant, avant que le projet ne passe en troisième lecture, le gouvernement minoritaire de George Drew est défait le 22 mars 1945 et le projet […] est relégué aux oubliettes32.

Le prochain épisode se termine de manière aussi décevante pour les jésuites. Après avoir été mis de l’avant à deux reprises, soit en 194633 et en 1947, le projet n’aboutit pas, le gouvernement s’abritant derrière le prétexte de la tenue d’une commission royale d’enquête sur l’éducation, la commission Hope, pour reporter à plus tard le vote. Pourtant, les jésuites comptaient beaucoup sur les projets de création de nouvelles universités qui sont alors dans l’air pour faire passer leur projet. En effet, Ottawa à l’époque a besoin d’une université anglophone qui pourrait naître d’un agrandissement du Collège Carleton. À Windsor, le Collège l’Assomption cherche également à devenir université34. Ce développement universitaire, qui répond aux besoins d’une économie urbanisée moderne, va s’accélérer au cours des années 1950 alors qu’on adopte 51 lois universitaires nouvelles ou amendées entre 1951 et 196435. Selon Alphonse Raymond, ancien recteur du Collège du Sacré-Cœur, il ne fait pas de doute que l’implication de députés libéraux dans le dossier explique le refus du gouvernement conservateur Drew, ce dernier ne voulant pas fournir de capital politique à ses adversaires en acquiesçant à leur demande36. Malgré l’appui apporté par l’ACFEO , qui est renouvelé en mars 1947 dans une lettre envoyée par son président Émile Désormeaux au premier ministre, l’opposition des oblats ne fait aucun doute, selon Boutin et Gervais, et apporterait de l’eau au moulin de ceux qui voient d’un mauvais œil ce projet jésuite. La non-confessionnalité officielle du projet universitaire apparaît sans doute, aux yeux de certains membres influents de la communauté protestante, comme une mascarade et une manœuvre de catholiques trop envahissantes. Ces échecs répétés à Queen’s Park vont mettre le projet en veilleuse et modifier la stratégie à suivre dans l’avenir. Selon certains jésuites, toujours favorables au projet, la charte du Collège, adoptée par le gouvernement ontarien en 1914, renferme déjà des pouvoirs universitaires qui auraient encore force de loi. Cela avait d’ailleurs été brièvement discuté en 1944, mais les avocats consultés avaient émis l’opinion que ces pouvoirs étaient périmés, même s’ils paraissaient avoir été bien réels37, et qu’il fallait une nouvelle charte.

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alphonse raymond.  |  Né à Verner, à l’est de Sudbury, le père Raymond est un défenseur des droits des Canadiens français et des catholiques du nord-est de l’Ontario. Il est recteur du Collège du Sacré-Cœur de 1952 à 1959, puis le premier recteur de l’Université de Sudbury.

L’Université de Sudbury À la suggestion de son prédécesseur, le recteur Alphonse Raymond veut, dès son arrivée en 1953, vérifier cette question en y cherchant la possibilité d’instaurer une université tout en évitant un vote à Queen’s Park. Après quelques demandes restées lettre morte adressées à Gaston Vincent, avocat et président de l’ACFEO provincial – silence qui s’explique encore par les réticences des oblats de l’Université d’Ottawa –, ce dernier lui soumet finalement un avis juridique à la fin de 1955. Selon Vincent, la charte de 1914 servant de constitution juridique au Collège du Sacré-Cœur lui accorde effectivement des pouvoirs d’« établir […] et maintenir des facultés, collèges universitaires et autres institutions équivalentes38 ». Restent encore plusieurs étapes à franchir pour Raymond, à commencer par la reconnaissance des diplômes d’un Collège devenu université. Si l’Université Laval et celle de Toronto ne prennent pas trop de temps à répondre, il en va autrement pour l’Université d’Ottawa ; réticents, les oblats retardent la réponse jusqu’à l’automne 1956. Parallèlement, Raymond se rend à Queen’s Park afin d’informer le gouvernement provincial de ses démarches, histoire de s’assurer de son appui et, en temps et lieu, de son soutien financier. Désirant ne pas compromettre ses chances d’obtenir une École normale à Sudbury, il préfère ne rien dévoiler encore de la reconnaissance des autres universités de ses diplômes, de peur de faire avorter le projet mais, le 15 décembre 1956, il envoie un communiqué de presse aux médias afin de faire connaître le changement de statut du Collège. À l’avenir, la nouvelle Université de Sudbury délivrera elle-même ses propres diplômes et mettra sur pied de nouveaux programmes et de nouvelles facultés. Parmi les priorités, il y a la création d’un service d’éducation permanente39. On connaît mal le contexte qui explique cette autre visite de Raymond au ministre de l’Éducation de l’Ontario en janvier 1957. Ayant en main les lettres des trois universités consultées et étant accompagné de Gaston Vincent et des députés

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de Sudbury et de Nickel Belt, Gerry Monaghan et Rhéal Bélisle, Raymond rencontre le ministre de l’Éducation qui, tout en admettant le bien-fondé de la requête, ne reconnaît pas à l’Université de Sudbury ses pleins pouvoirs universitaires. C’est pourquoi il suggère un nouveau vote en Chambre afin de nommer officiellement cette nouvelle institution universitaire du Nord et de valider son statut d’université à part entière. Le 30 mars 1957, la loi est adoptée en troisième lecture40. Si le vote se déroule favorablement cette fois, c’est que Monaghan et Bélisle ont troqué l’appui d’autres députés qui avaient besoin de leur vote au sujet d’une requête de l’Université Carleton41. En juin 1957, l’Université de Sudbury tient sa première collation des grades et remet un baccalauréat ès arts à vingt finissants. Le recteur de l’Université Laval, Mgr Alphonse-Marie Parent, assiste même à la collation des grades42. Raymond caresse plusieurs projets pour la nouvelle université. Il souhaite offrir des programmes qui répondent aux divers besoins du Nouvel-Ontario, en éducation, en sociologie, en sciences et même en génie minier et forestier. Une école de commerce et une école de musique et de chant grégorien sont aussi prévues. Dans une entrevue accordée au Sudbury Star et publiée le 14 février 1957, il précise que son premier projet est l’ouverture d’une faculté des arts en français que l’on prévoit construire à gauche de l’aile primitive du Collège. Une faculté des sciences bilingue constitue le deuxième projet dont l’emplacement prévu, sur la rue Jogues, correspond à celui du présent Conseil scolaire catholique du Nouvel-Ontario. Au début, on prévoit offrir seulement les deux premières années de cours. Reste la question du financement. Le coût de la faculté des arts est alors estimé à 600 000 $ et celui de la faculté des sciences à un million de dollars. C’est sans surprise que l’on apprend la visite de Raymond à Toronto, au printemps 1957, pour rencontrer le premier ministre Leslie Frost et le ministre de l’Éducation Dunlop. Il n’est pas le seul à faire cette démarche puisque le pasteur Earl Lautenslager de l’Église Unie du Canada est déjà venu plaider la cause d’une université que son Église souhaiterait administrer43. Raymond et Lautenslager avaient déjà cherché à s’entendre au sujet de l’université. Le pasteur aurait souhaité que son Église collabore au projet universitaire. Raymond avait refusé estimant que les jésuites étaient les plus compétents en cette matière, car ils étaient impliqués dans l’enseignement universitaire depuis 1913 et que, de toute façon, le projet prévoyait déjà un enseignement bilingue où catholiques et non-catholiques étaient les bienvenus44. Le refus de Raymond de collaborer avec l’Église Unie s’explique en partie par le fait que la communauté jésuite de Sudbury est loin de faire consensus au sujet de ce projet universitaire. Plusieurs craignent d’y perdre rapidement langue et foi en étant noyés dans une majorité anglophone et protestante. Raymond ne dispose donc pas d’une grande marge de manœuvre. Dès l’été 1957, l’Université s’organise. Faute de ressources, les cours universitaires se limitent au programme en arts et se donnent encore au Collège du SacréCœur uniquement en français. L’espace et la demande pour des cours en anglais font alors défaut. On y accueille néanmoins une première étudiante, Mlle Anita Chevrier, qui devient ainsi la première étudiante universitaire nord-ontarienne

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à suivre des cours dans la région. L’année 1957 est aussi celle d’une première affiliation, celle du Séminaire de Hearst, qui se joindra plus tard à l’Université Laurentienne. Tout en demeurent sous le contrôle des jésuites, l’Université se dote, au printemps 1958, d’un organe consultatif laїque45, sans pouvoir réel : un conseil des régents aviseur. Constitué de douze membres influents issus de différents milieux, ce conseil témoigne en quelque sorte de l’ouverture de l’Université face à la communauté sudburoise toute entière. Certains des membres de ce conseil laisseront leur nom à des bâtiments de l’Université Laurentienne. Ainsi on trouve trois présidents ou vice-présidents de grandes entreprises, Ralph D. Parker de l’Inco, Horace J. Fraser de la Falconbridge et Ben Avery des papetières d’Espanola et de Sturgeon Falls. Y siègent aussi l’homme d’affaires de Timmins, Conrad Lavigne, de même que plusieurs autres Canadiens français dont deux avocats, Gaston Vincent et Jean-Noël Desmarais, ainsi que deux juges et un médecin. Dans le cadre de son programme d’éducation permanente, l’Université de Sudbury embauche, en 1958, le personnage sans doute le plus controversé de son histoire, Alexandre Boudreau. Fort de son expérience dans la formation de coopératives de pêcheurs dans les Maritimes, Boudreau organise des cours sur le syndicalisme, en anglais et en français, pour les ouvriers de Sudbury. Sous son influence, certains d’entre eux fondent le Northern Workers Adult Education Committee et se donnent comme mandat de chasser les communistes du syndicat Mine, Mill. Ce dernier, qui représente les 18 000 travailleurs de l’Inco et de la Falconbridge, a mené en 1958 une grève très dure qui a laissé des séquelles. Nous sommes alors en pleine Guerre froide et plusieurs attribuent ce conflit à l’influence communiste. Les cours de Boudreau ont du succès et un de ses étudiants, Don Gillis, remporte la présidence aux élections syndicales de 1959. Trois ans plus tard, les travailleurs de l’Inco décident majoritairement de changer d’allégeance syndicale et de s’affilier, non sans difficultés et après bien des débats acrimonieux, aux Métallos-Unis d’Amérique, centrale dont les membres de l’exécutif ont une approche plus pragmatique et généralement conciliante. Ainsi, Boudreau a servi, dans une certaine mesure, de catalyseur à un groupe de mineurs mécontents de la direction du Mine, Mill. Certes, son travail a été applaudi par les élites locales, les dirigeants des entreprises et le gouvernement, tous heureux de voir arriver un syndicat moins militant. Néanmoins, Boudreau est devenu un personnage diabolique pour plusieurs travailleurs et intellectuels inspirés par un programme de gauche. En outre, son association avec l’Université de Sudbury a terni l’image qu’ils avaient de cette institution et de l’église catholique. L’ironie est que, grâce au travail du député ouvrier Bob Carlin du Mine, Mill, la première tentative de créer l’Université de Sudbury avait eu lieu 15 ans plus tôt. Afin d’offrir une plus large gamme de programmes, les jésuites cherchent plus d’espace. Aussi décide-t-on de louer, pour l’année universitaire 1958–1959, l’Édifice Empire au centre-ville de Sudbury ; on y offre des cours universitaires dissociés complètement du Collège du Sacré-Cœur. L’argent manque, mais on emprunte. Les frais de location et les salaires versés aux professeurs laїques embauchés notamment pour les nouveaux cours de génie proviennent de la vente de lots de

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le recteur émile bouvier , université de sudbury, 1961.  |  Nommé recteur de l’Université de Sudbury en janvier 1959, le père Bouvier devient le premier recteur de l’Université Laurentienne à l’été 1960.

la rue Brébeuf et de terrains aux Sœurs grises de la Croix qui y construisent le Collège Notre-Dame46. C’est au cours de cette année 1958–1959 que se donnent les premiers cours aux étudiants anglophones de Sudbury et de la région. Une section anglaise du Baccalauréat ès arts de même que les cours de génie – offerts seulement en anglais – sont alors disponibles. Parmi le personnel embauché en génie, Artin Tombalakian fera une longue carrière à l’École de génie de l’Université Laurentienne. La quadrature du cercle L’Université de Sudbury ne peut pas indéfiniment repousser la question des octrois gouvernementaux. Comme l’avoue Raymond dans ses mémoires, « [i]l fallait se rendre à l’évidence que nous n’aurions pas d’octrois et qu’il était utopique de vouloir diriger une université de Sudbury sans octrois. Nous aurions végété avec notre petite faculté des arts et nos deux années de Génie47 ». L’implication du gouvernement, sollicitée par les jésuites, s’avère déterminante dans la configuration du projet universitaire encore en gestation et sur lequel le texte suivant se penche en détail. Plaçons néanmoins quelques jalons pour clore ce récit axé sur la contribution des jésuites de Sudbury. Les jésuites vont bien tenter de réconcilier leurs aspirations, doublement minoritaires, avec les intérêts gouvernementaux, résolument sensibles aux requêtes des autres groupes religieux et linguistiques. Mais ils ne parviendront pas à faire reconnaître leur droit d’aînesse en matière d’enseignement universitaire dans le Nord ontarien. Ils ont pourtant remplacé, en 1959, le recteur Raymond, trop près de l’ACFEO , par un autre jésuite, Émile Bouvier qui, fort d’un mandat reçu directement du Vicaire général des jésuites48, laissera tomber les ultimes compromis

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qu’avaient été prêts à faire Raymond et l’ACFEO , en faveur d’un projet de fédération où ils se contenteront de jouer le rôle de second violon. Même sur le plan linguistique, les garanties arrachées ou consenties à Bouvier et stipulant qu’il y aura égalité entres les cultures française et anglaise, « en autant que cela sera possible49 », en laissera plus d’un circonspect. Ainsi l’éditorialiste du journal Le Droit d’Ottawa, Camille L’Heureux, allait avec raison souligner, le 10 mars 1960, soit avant même la création officielle de l’Université Laurentienne, les dangers d’une telle formulation, car « l’expérience politique nous a[vait] appris ce que vaut une telle garantie ». Avant de conclure, quelques mots au sujet de l’École normale de Sudbury dont l’histoire est intimement liée à celle de l’Université de Sudbury50. Fort de l’avis juridique de 1955, les jésuites s’empressent de réclamer la création d’une école normale à Sudbury, école qu’ils voudraient rattacher à leur charte universitaire. En dépit de l’appui de l’ACFEO , l’Université d’Ottawa, qui ne voit pas d’un très bon œil l’arrivée d’une école concurrençant la sienne, parvient à bloquer le projet. En octobre 1961, et après avoir dû faire des compromis sur la question de l’Université Laurentienne, le Provincial se dit prêt à faire construire et à administrer les édifices requis, si cela est nécessaire51. L’année suivante, le discours du trône du gouvernement provincial annonce finalement la construction d’une telle école dont l’affiliation universitaire demeure indéterminée, faute de consensus52. Cette bataille pour le contrôle de l’École, les jésuites, mais aussi l’ACFEO l’ont gagnée ; cette dernière avait même menacé de retirer sa promesse de verser 100 bourses d’études, si la Laurentienne en devenait la tutrice. Le gouvernement se rallie et s’engage à consulter le recteur de l’Université de Sudbury avant de nommer le principal de l’École normale, ce qui sera fait de sorte que la nomination du jésuite Jacques Martineau comme principal n’étonne personne. Cette école ouvre ses portes en 1963 dans des locaux loués et déménage dans l’édifice actuel en 1970. Devenue l’École des sciences de l’éducation en 1974, elle est finalement rattachée à l’Université Laurentienne en 1975. L’Université rebaptise l’édifice en l’honneur d’Alphonse Raymond, peu de temps après sa mort, survenue en 1978. Forts de leur expertise en enseignement universitaire, plusieurs jésuites joueront un rôle de premier plan dans l’organisation de la Laurentienne au cours des premières années de son existence, que ce soit à la bibliothèque, dans les sciences, ou aux départements de français ou d’histoire. Dans les activités sociales et culturelles, qui se dérouleront en français, ils seront également très actifs en reproduisant à l’Université leurs pratiques du Collège. Dans la fondation d’une école normale à Sudbury, leur lobby auprès du gouvernement ontarien aura gain de cause en dépit des objections des oblats avec qui ils ont maille dès la fondation du Collège. Malgré leur échec pour transformer l’Université de Sudbury en une université laїque et financée par le gouvernement, malgré la faiblesse des garanties arrachées lors des négociations sur le plan culturel et linguistique et malgré l’épisode du Mine, Mill, il convient de reconnaître la présence et l’expertise universitaires

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coll ation des grades de l’université de sudbury, 1960.  |  Cette collation des grades de l’Université de Sudbury, au printemps 1960, est la dernière de sa courte période d’indépendance à titre d’institution conférant des grades universitaires.

que les jésuites ont acquises dans la région à compter de 1913. À n’en pas douter, il s’agit là des origines de l’Université Laurentienne. Étant forcés de collaborer sur une base égalitaire avec les deux autres groupes religieux et de reconnaître le rôle marginal de l’Université de Sudbury dans la nouvelle institution, les jésuites détiennent néanmoins une carte maîtresse dans les discussions avec le gouvernement : ils sont à l’œuvre à Sudbury depuis quatre décennies. Ainsi, le gouvernement ne peut qu’accepter Sudbury comme lieu de la nouvelle institution et ce, après leur avoir fait perdre la face sur plusieurs aspects essentiels de leur projet universitaire. En effet, n’eût été d’eux, il n’est pas certain que le lobby efficace des groupes de North Bay, actifs depuis 1948 et regroupés depuis 1959 sous un organisme non confessionnel appelé le Northeastern University Committee, ne soit pas parvenu à attirer chez eux la nouvelle université.

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La fondation de l’Université Laurentienne, 1958–1960 matt bray

Au milieu des années 1950, le phénomène du baby-boom – que les démographes voient comme un porc passant dans l’estomac d’un python! – laisse présager d’importants défis au système universitaire ontarien naissant. Prenant acte de l’urgence de la situation, le gouvernement du premier ministre provincial Leslie Frost soutient l’émergence de nouveaux établissements d’enseignement postsecondaire dans le sud de l’Ontario, dont plusieurs, telles l’Université de Waterloo et l’Université de Windsor, naissent de la transformation de collèges confessionnels préexistants. Le Nord n’y échappe pas : plusieurs groupes, autant confessionnels que laïques, nourrissent aussi le rêve d’avoir une université locale1. Tel que mentionné précédemment, l’Université de Sudbury est déjà bien engagée sur cette voie, mais un obstacle de taille demeure encore : son affiliation religieuse lui bloque l’accès à toute subvention provinciale. À l’automne 1958, le recteur sudburois Alphonse Raymond imagine un compromis qui, espère-t-il, permettrait de surmonter cette difficulté, mais des problèmes de santé le forcent à démissionner, laissant à son successeur, le père Émile Bouvier, le soin d’aborder l’idée avec le gouvernement de la province. Exposant brièvement les difficultés financières criantes de l’établissement au ministre de l’Éducation W. J. Dunlop en janvier 1959, Bouvier fait valoir le déficit annuel avoisinant les 150 000 $ pour l’année universitaire en cours et chacune des deux années à venir, et le besoin d’un investissement de 1,25 million de dollars pour bâtir un nouveau pavillon de génie. Afin de se qualifier pour des subventions gouvernementales, l’Université de Sudbury offre de transformer son Conseil des régents en un Conseil des gouverneurs qui aurait autorité en matière financière. Dunlop refuse. Bouvier tente aussi d’obtenir des subventions pour le programme de génie, faisant valoir les précédents établis par l’Université Waterloo et l’Université d’Ottawa, mais les fonctionnaires provinciaux déterminent que le programme de deux ans de l’Université de Sudbury n’est pas nouveau et, faute de posséder des caractéristiques « uniques » le distinguant des autres programmes ontariens, ne correspond pas au critère d’admissibilité2.

earl s . l autensl ager , 1960  |  Le révérend Earl Lautenslager, pasteur de l’Église unie St-Andrew’s de Sudbury, joue un rôle essentiel dans l’établissement de l’Université Laurentienne et la création de l’Université de Huntington, dont il sera le recteur de 1960 à 1963.

Bien que les fonctionnaires ministériels reconnaissent la sagesse politique qu’il peut y avoir à offrir une subvention à l’Université de Sudbury, le premier ministre Frost refuse d’ouvrir la boîte de Pandore du financement provincial pour les établissements d’enseignement confessionnels, comme le père Bouvier l’avait proposé. Bien au-delà du principe général en jeu, la réalité politique est telle que le gouvernement doit tenir compte des perspectives des autres groupes nordontariens qui ont eux aussi commencé à s’intéresser à cette question3. Tout particulièrement, le Conseil général de l’Église unie du Canada avait mandaté en septembre 1958 un comité sur le rôle de l’Église dans la création de nouvelles universités au Canada. Le représentant nord-ontarien y est le révérend Earl S. Lautenslager, de l’église St-Andrew’s à Sudbury, un défenseur dynamique et déterminé du protestantisme, de l’Église unie, du nord de l’Ontario et de sa communauté. À la fin novembre 1958, grâce à ses efforts, le comité désigne le nord de l’Ontario comme emplacement privilégié pour une « université non romaine ». Sans attendre, Lautenslager convie des délégués des six presbytères nord-ontariens de l’Église unie à venir à St-Andrew’s en décembre pour débattre de cette idée4. Lautenslager ne manque pas de sources de motivation. L’une d’elles est assurément les répercussions possibles de l’initiative de l’Université de Sudbury sur le protestantisme et, plus précisément, sur l’Église unie dans le nord de l’Ontario. « Si nous n’agissons pas, les catholiques romains nous fermeront les portes de chaque communauté avec un projet de collège », écrit-il dans sa lettre d’invitation. Et si cela devait se produire, précise-t-il sur un ton quelque peu mélodramatique dans l’allocution qu’il prononce à la rencontre de Sudbury en décembre, « je prévois que certains, tôt au tard, demanderont que le nord de l’Ontario devienne une province séparée à dominance catholique romaine5 ». Le sentiment d’urgence se voit aussi alimenté de l’intérieur par les fidèles nordontariens de l’Église. Avant même la première rencontre du National Committee

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on Universities, le presbytère de North Bay convoque des délégués des presbytères du Nord-Est ontarien pour évaluer les mérites de cette ville comme site d’une éventuelle université. S’inscrivant dans une campagne vieille d’une décennie et revigorée en 1958 par les fonctionnaires municipaux de North Bay et du district et par la chambre de commerce locale, cette initiative aboutit à la création du Northeastern University Committee (NEUC) en février 1959. Vaste regroupement non confessionnel présidé par l’inspecteur local des écoles publiques, J. W. Trussler, le NEUC souhaite élever l’université sur les fondations du North Bay College (Scollard Hall), l’école secondaire catholique romaine pour garçons administrée par la Congrégation de la Résurrection et affiliée au St. Jerome’s College de Waterloo. Pendant la rencontre au presbytère, seuls les délégués de North Bay votent en faveur d’une motion demandant au comité national de l’Église unie d’endosser la candidature de North Bay. Certains participants, dont le révérend Lautenslager, trouvent la nature séculière de cette initiative difficile à digérer. « Je ne connais aucune chambre de commerce qui ait jamais fondé une université, commente-t-il pendant la rencontre de Sudbury. S’il y jamais eu un mince espoir, c’est celui-ci6. » La centaine de délégués de l’Église unie qui se retrouvent à Sudbury le 10 décembre appuient dans l’enthousiasme l’idée d’une université, endossent à l’unanimité la création de la Northern Ontario University Association (NOUA) et créent un comité exécutif de trente personnes présidé par Lautenslager. Une semaine plus tard, à North Bay, ce comité approuve une constitution définissant ainsi les buts de la NOUA  : « Fonder et faire vivre dans le nord de l’Ontario un établissement de haut savoir de calibre universitaire, protestant par ses origines et son administration, ou à tout le moins un collège protestant au sein d’une université fédérée. » La constitution charge le comité exécutif – et, par extension, l’ensemble des membres – de faire pression et de promouvoir l’idée au sein de l’Église unie et de la « grande famille réformée et protestante » du nord de l’Ontario, de même qu’auprès du gouvernement, du monde de l’éducation et de l’opinion publique7. Pour éviter de prendre trop de responsabilités, le comité exécutif met sur pied une sorte de conseil de sages composé des membres du comité exécutif eux-mêmes et de cinq délégués provenant de chacun des presbytères participants de l’Église unie. Si le comité exécutif s’autorise à émettre des recommandations relativement à des questions critiques telles que l’emplacement, l’achat de terrains et les termes des ententes de fédération, la décision de la NOUA appartiendrait toutefois au conseil des sages. De plus, comme il serait difficile de réunir ces membres disséminés sur un grand territoire, le comité exécutif délègue plusieurs de ses pouvoirs à un sous-comité exécutif de neuf membres. Cette solution ne fait malheureusement qu’ajouter à la confusion générée par le chevauchement des responsabilités des uns et des autres : le sous-comité exécutif, le comité exécutif, le conseil des sages, les presbytères et, sur le plan national, l’Assemblée générale de l’Église unie et son conseil des collèges et des écoles secondaires8. Au cours des quatorze mois qui suivent, la NOUA aborde trois dimensions interreliées du projet. Les efforts du comité exécutif au début de 1959 portent surtout sur une campagne d’adhésion au projet visant à démontrer à Queen’s Park l’ampleur du soutien accordé au sein de l’Église unie à l’idée d’une université dans le

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nord-est de l’Ontario. Lautenslager explique aussi que si la campagne portait fruit, la NOUA verrait sa position consolidée par rapport à un éventuel partenaire catholique comme l’Université de Sudbury. Les chefs de file sont Richard Bowdidge, un officier de relations publiques embauché en mars, et le révérend J. W. Edward (Ed) Newbery, devenu directeur général à plein de temps de la NOUA en juillet. En décembre, les effectifs dépassent les 12 000 membres, preuve d’un soutien sérieux. Cet appui pave la voie à une seconde campagne, visant cette fois à lever des fonds pour la construction d’une université de l’Église unie officieusement baptisée, en mars, du nom de Silas Huntington, le prêcheur itinérant dont l’activité missionnaire sans relâche, à la fin du 19e siècle, avait permis que s’implante en sol nordontarien le méthodisme, principal précurseur de l’Église unie. Malgré quelques petits pépins, cette campagne fonctionne bien, elle aussi, et des promesses de dons totalisant 1,2 million de dollars, contre un objectif initial de deux millions, sont déjà obtenues à la fin novembre9. Décider quel genre d’établissement d’enseignement postsecondaire devrait être l’Université Huntington s’avère plus problématique. On écarte d’emblée qu’elle puisse devenir une université confessionnelle liée à l’Église unie ; ses frais de fonctionnement nécessiteraient assurément du financement public, mais cet argent – le premier ministre Leslie Frost avait été très clair à ce sujet avec la délégation de l’Église unie venue le rencontrer à Queen’s Park en décembre 1958 – ne serait pas versé si l’établissement était confessionnel. L’affiliation avec une université déjà existante, vraisemblablement située dans le sud de la province, constitue une autre possibilité. La formation de l’Université de Sudbury a toutefois créé le précédent inverse, par la désaffiliation du Collège du Sacré-Cœur d’avec l’Université Laval. Du reste, cette seconde possibilité génère bien peu d’enthousiasme dans le nord de l’Ontario, que ce soit au sein de l’Église unie ou en dehors10. En vérité, le projet d’université s’impose à la conscience des Nord-Ontariens comme un symbole de l’influence démographique et économique croissante de la région au sein de la province. En moins de trente ans, la population au nord et à l’ouest de la rivière des Français avait doublé pour atteindre 700 000 personnes et les ressources forestières et minérales avaient contribué plus encore à l’économie provinciale – aussi bien privée que publique – que cette croissance démographique le laissait supposer. Dans le Nord-Est, des villes comme SaultSainte-Marie, Sudbury et North Bay se métamorphosent en centres urbains dynamiques, laissant leur passé de villes frontière frustes loin derrière elles en dépit de perceptions à l’opposé qu’elles continuent de susciter. L’optimisme est contagieux dans les années 1950 et Earl Lautenslager est loin d’être seul à penser que la région obtiendra prochainement le statut de province. Pour ces gens, tout lien officiel avec une autre université entraînerait une forme de subordination au Vieil-Ontario bien incompatible avec le destin du Nouvel-Ontario11. Tôt en 1959, la Northern Ontario University Association conclut que seul un établissement non confessionnel incorporant des collèges confessionnels, calqué sur le modèle de l’Université de Toronto, pourrait obtenir du financement provincial et que la création d’une université autonome dans le nord-est de l’Ontario exige une coopération entre plusieurs partenaires régionaux. Se donnant la mis-

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sion de forger ce partenariat, le comité exécutif de la NOUA approche d’abord le Northeastern University Committee et l’Université de Sudbury, puis s’ouvre aux Églises anglicane, presbytérienne et baptiste avec, dans ces derniers cas, des résultats partagés12. Les premières discussions avec le NEUC ne sont guère productives. En entrevue au Daily Nugget de North Bay en avril 1959, Richard Bowdidge déplore que le NEUC « ne s’intéresse qu’à promouvoir Scollard Hall. Il s’est lié au développement de cette école et a clairement fait savoir qu’il ne veut rien savoir d’une université qui ne s’y situerait pas. » L’insistance de la Congrégation de la Résurrection à garder « contrôle de chaque facette de la vie au sein de l’école », une proposition irrecevable pour les protestants, complique les négociations. Le NEUC , pour sa part, se méfie des motivations de la NOUA qu’il soupçonne – non sans raison – d’être un paravent du rival régional de North Bay, à savoir, Sudbury. Sans surprise, les relations entre les deux se tendent et aucune négociation sérieuse n’a lieu jusqu’à plus tard dans l’été13. Comme l’entrevue de Bowdidge le laisse entendre, le cœur du contentieux opposant la NOUA au NEUC , et ultimement sa dimension la plus critique, porte sur l’emplacement. Au fil des ans, huit communautés – Cochrane, Timmins, Kirkland Lake, Haileybury, New Liskeard, North Bay, Sudbury et Sault-SainteMarie – avaient, à différents moments, été mentionnées comme futur site universitaire, quoique les cinq premières, en 1959, ne sont plus guère envisagées. Si SaultSainte-Marie constitue la seconde agglomération la plus populeuse du Nord-Est, son éloignement du centre de l’écoumène régional et des principaux réseaux de transport lui laisse peu de chances14. L’enjeu est considérable pour North Bay et Sudbury, les deux principaux candidats. Chacun perçoit l’obtention d’une université comme un jalon essentiel vers le statut de premier centre métropolitain du nord-est de l’Ontario. Les aspirations de l’un et de l’autre reposent sur des bases légitimes. Pour North Bay, c’est son titre de « porte du Nord », de plaque tournante d’un vaste réseau de transport – le Canadien Pacifique, le Canadien National, l’Ontario Northland Railways et les routes 17 et 11 – se rejoignant à cet endroit. Quatrième ville du Nord-Est par sa taille, North Bay est géographiquement plus près que toute autre d’un plus grand pourcentage de la population régionale. À titre de siège de l’École normale provinciale, la ville se targue déjà d’être un centre scolaire pour la région. Joliment située sur les berges du lac Nipissing et sans structure industrielle lourde, North Bay, prétextent ses partisans, possède « l’ambiance d’une communauté universitaire », une allusion peu subtile à ses avantages environnementaux sur son grand rival15. De fait, comme le montrerait la suite des choses, une image de rustre communauté minière défigurée par des décennies d’émanations de soufre constitue un obstacle majeur contre l’obtention de l’université. Ignorant résolument le problème, les défenseurs de Sudbury rappellent qu’il tombe sous le sens d’y implanter l’établissement, car la ville compose déjà le premier centre urbain du nord-est de l’Ontario. D’abord et avant tout, arguent-ils, ses 80 000 habitants lui confèrent un avantage économique et politique décisif sur tous ses concurrents, et surtout North Bay, dont la population compte pour moins du tiers. Trois nouveaux hôpi-

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ralph d. parker   |  Vice-président principal de l’International Nickel Company of Canada, Ralph Parker joue un rôle clé dans la création de l’Université Laurentienne. Il devient le premier président du Conseil des gouverneurs, poste qu’il occupe jusqu’en 1965, où il est nommé président honorifique.

taux, ouverts au début des années 1950, avaient placé Sudbury à l’avant-garde des soins de santé dans le Nord-Est, tandis que l’ouverture du centre commercial du Nouveau-Sudbury, plus tard dans la décennie, avait bonifié son pouvoir d’attraction commercial. Au chapitre du transport, en plus du nouvel aéroport, le récent achèvement de la route 69 entre Sudbury et Parry Sound avait créé un lien routier complémentaire aux liens ferroviaires existants avec Toronto, accentuant du coup le rôle de la ville à titre d’entrepôt entre le nord et le sud de l’Ontario16. Trois autres facteurs jouent faveur de Sudbury. D’abord, l’Université de Sudbury s’y trouve déjà et tout plan global pour accommoder les besoins en éducation postsecondaire du nord-est ontarien devrait en tenir compte. Contrairement à certains membres, Lautenslager, président de la NOUA , accepte cette réalité, quoiqu’avec certaines réserves relativement aux visées des catholiques romains dans la région. Lors de la fondation de l’assemblée en décembre, Lautenslager rapporte avoir déjà rencontré le recteur Raymond. Ce dernier croyait fermement que la province finirait par subventionner l’Université de Sudbury en tant qu’établissement confessionnel, mais Lautenslager croit que devant l’échec éventuel de ses ambitions, l’Université Sudbury accepterait de se fédérer à l’université projetée. À la fin mars 1959, le comité exécutif de la NOUA convie d’ailleurs officiellement l’Université de Sudbury à venir discuter de cette possibilité17. Ensuite, l’industrie minière responsable des dégâts environnementaux ajoute paradoxalement du poids à la candidature de Sudbury. Les deux grandes compagnies, International Nickel (Inco) et Falconbridge Nickel, fournissent à ce moment 80 pour cent du nickel mondial, ce qui leur vaut, à Inco surtout, une très grande influence à Queen’s Park. Leur influence s’exerce aussi régionalement, car, malgré la récession de la fin des années 1950, les mines demeurent l’épine dorsale de l’économie sudburoise, y employant près de 30 pour cent de sa main-d’œuvre. Enfin, et cela est important, après des décennies de contributions au développement social et aux installations sportives des villes d’entreprise telles que Copper Cliff et Falconbridge, Inco et Falconbridge, à la fin des années 1950, commencent à s’intéresser au problème plus vaste de l’éducation postsecondaire18.

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L’intérêt des deux compagnies minières à soutenir le projet d’université nordontarienne peut avoir plusieurs sources. L’avenir prouverait assurément que l’accessibilité immédiate à l’éducation postsecondaire est avantageuse pour la recherche et le recrutement de main-d’œuvre. Inco et à Falconbridge voient sans doute aussi d’un bon œil la croisade anticommuniste d’Alexandre Boudreau, directeur de l’éducation permanente à l’Université de Sudbury, contre leur syndicat commun récemment formé, l’International Union of Mine, Mill and Smelter Workers19. Ces facteurs ne suffisent toutefois pas à expliquer le rôle névralgique de Ralph Parker, premier vice-président des opérations canadiennes d’Inco, dans la campagne en faveur de l’université. Ayant vécu trente ans à Sudbury avant de s’établir à Toronto en 1958, Parker se soucie personnellement du bien-être de la communauté et en particulier de sa jeunesse dont l’avenir, croit-il, dépend de son accès à l’éducation. Déjà président du Conseil des régents de l’Université de Sudbury, il s’associe à la NOUA en février 1959 en devenant « éminent bienfaiteur » de celle-ci. Il fait clairement savoir dès le départ que son association ne sera pas purement honorifique et demande à recevoir l’ordre du jour et le procès-verbal de chaque réunion du comité exécutif. Parker ne tarde pas à exprimer ses préférences en faveur d’une université non confessionnelle, mais prête à s’affilier à tous les groupes religieux, et sise à Sudbury, un appui qui rehausse évidemment la candidature de la ville20. L’influence du premier ministre Leslie Frost explique peut-être aussi les efforts de Parker dans ce dossier. Harold Bennett, directeur émérite du Victoria College de l’Université de Toronto et acteur clé dans la création de la Laurentienne, a narré un jour les circonstances de l’engagement de Parker en ces termes : Au printemps de 1959, M. Ralph Parker […] a reçu un appel de M. Leslie Frost, le premier ministre de l’Ontario. Il lui a dit à peu pris ceci : « Ralph, mon vieux, je veux que tu me fasses une faveur. Débarrasse-moi de ces gens de Sudbury. Un dénommé Lautenslager a réuni tous les ministres de l’Église unie entre Muskoka et Moosonee dans ce qu’il appelle la Northern Ontario University Association, et voilà que les anglicans et les romains (français comme irlandais) embarquent dans son truc. Je voudrais que tu leur dises que la province ne peut pas subventionner de collèges associés à des églises, mais que s’ils peuvent s’unir derrière une université non confessionnelle, ils gagneront leur prix, surtout si un petit peu d’argent du nickel vient arrondir la somme21. »

Le récit hypothétique de Bennett livre plusieurs impressions révélatrices à propos de la relation entre Frost et Parker, de la volonté du premier ministre de voir une université dans le nord de l’Ontario et, sur la question de l’emplacement, d’une flèche supplémentaire dans le carquois sudburois : le « petit peu d’argent du nickel » qui pourrait être offert22. Le premier ministre Frost lui-même constitue le troisième facteur faisant pencher la balance en coulisse du côté de Sudbury. En 1948–1949, Frost avait servi comme ministre des Mines, ce qui lui avait valu de rencontrer des cadres d’Inco comme Parker et de consolider ses liens avec le Nouvel-Ontario. Pendant son mandat de premier ministre (1949–1961), l’économie nord-ontarienne est floris-

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sante à la fois dans le secteur des mines et de la forêt, et, conséquemment suite à la création de plusieurs parcs provinciaux, en tant que destination touristique23. À l’hiver 1958–1959, l’intérêt de Frost pour le nord de l’Ontario englobe l’éducation postsecondaire, peut-être parce qu’une récente étude provinciale sur les coûts et l’expansion des universités a révélé qu’à peine 5 pour cent des étudiants universitaires de l’Ontario venaient du nord, même si 11 pour cent de la population y vit. Il encourage plusieurs fois la Northern Ontario University Association à persister dans son projet, vantant les mérites d’une alliance avec l’Université de Sudbury. Son plus fort appui vient en avril 1959 quand, lors d’un autre entretien avec une délégation de la NOUA , il détaille certains éléments de procédure relatifs à toute nouvelle université : 1) les établissements confessionnels ne toucheront aucune subvention directe ; 2) des fonds seront versés à la portion fédérée d’une université réunissant deux établissements confessionnels ou plus ; 3) le premier ministre suppose que l’université fédérée se trouvera à Sudbury, mais pense qu’une fédération gagnera à ratisser plus large au plan régional24. Considérant leur origine, ces énoncés pèsent lourd. Il faut moins de deux semaines au comité exécutif de la NOUA pour adopter un plan provisoire en faveur de l’établissement d’une université nord-ontarienne qui devient la base des négociations futures. Muet sur la question de l’emplacement, ce plan revendique « une fédération de collèges résidentiels confessionnels et potentiellement non confessionnels fonctionnant sous l’autorité d’un Conseil des gouverneurs non confessionnel […] [L]e Conseil des gouverneurs dominerait les facultés communes et, par elles, les normes de l’université. Les collèges confessionnels demeureraient responsables de matières telles que l’étude des religions et la philosophie25 ». Dans l’intérêt du projet, le premier ministre Frost offre à la mi-juin de réunir les divers groupes religieux intéressés. Cela pousse l’Université de Sudbury à agir. Fort du soutien de Gaston Vincent, président de l’Association canadiennefrançaise d’éducation en Ontario (ACFEO), et des évêques Carter de Sault-SainteMarie, Lévesque de Hearst et Tessier de Timmins, Bouvier demande à la NOUA de nommer deux membres pour siéger avec deux représentants de Sudbury à un comité exploratoire dirigé par Ralph Parker, choix logique considérant ses liens avec les deux groupes. Lautenslager suggère en retour que ce comité se compose de Parker et de délégués des Églises catholique romaine, unie et anglicane, une solution qui se concrétise en juin quand l’archevêque anglican W. L. Wright du diocèse d’Algoma accepte de se joindre à Bouvier et à Harold Bennett, le représentant de l’Église unie26. La seule réunion du comité Parker a lieu le 2 septembre en présence d’Ed Higgins, surintendant des écoles publiques à Sudbury, qui siège à la place de l’archevêque Wright. La déclaration d’intentions initiale du rapport résume le plan provisoire de la NOUA . Une section particulièrement critique porte sur « la reconnaissance du principe de coopération interconfessionnelle ». L’article premier stipule que si le premier recteur est catholique romain, le premier président du Conseil des gouverneurs doit être protestant, ou vice versa. Le suivant interdit de faire passer tout test de religion aux professeurs et aux étudiants. Le troisième et, à court terme, le plus polémique – mais aussi le plus important, ultimement, en tant que source du

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mandat bilingue et biculturel de la Laurentienne – déclare « que le principe de la dualité des cultures et des langues devra s’appliquer dans la mesure du possible » au sein de l’université fédérée. Le rapport, enfin, propose que, si toutes les parties en appuient les recommandations, Parker devrait présider un comité chargé de les appliquer, auquel siégeraient deux représentants de chacune des trois confessions. Tous les quatre signent le rapport27. Avec l’approbation de l’évêque Carter de Sault-Sainte-Marie comme du supérieur provincial de la Société de Jésus, le Conseil des régents de l’Université de Sudbury approuve le rapport Parker, le 25 septembre, puis nomme le père Bouvier et l’avocat sudburois J.-N. Desmarais au nouveau comité d’application. Cette décision divise les rangs catholiques romains. Le président Vincent de l’ACFEO démissionne du conseil avec colère, arguant que les jésuites, dans les faits, ont cédé le contrôle de l’Université de Sudbury et trahi les intérêts scolaires des catholiques du Nord28. La NOUA et l’Église anglicane du Canada avalisent aussi le rapport. La première nomme Harold Bennett, du Victoria’s College, et Harold Vaughan, secrétaire du conseil des collèges et des écoles secondaires de l’Église unie, au comité d’application ; la seconde y délègue l’archevêque Wright et le chanoine S.  M. Craymer. Bennett qualifie les séances du comité de « longues et ardues », notant que « MM.  Bouvier et Vaughan abandonnent toute retenue et se collettent avec cette véhémence dont seuls sont capables des clercs assiégés ». La première réunion, le 20 novembre, se conclut par un accord sur quelques points essentiels, mais à la réunion suivante, une semaine plus tard, les négociations achoppent sur deux questions critiques. L’une porte sur « l’étendue de la reconnaissance de la dualité culturelle » au sein de la nouvelle université. L’autre émane d’un organigramme soumis par Sudbury qui, selon Bennett, réduit les « collèges protestants » au rang de simples « collèges juniors […] dominés par l’Université de Sudbury », laquelle réclame une sorte de droit d’aînesse en vertu des ses racines dans le Collège du Sacré-Cœur. Bouvier, Bennett et Wright agissent pour sauver la situation en formant un sous-comité spécial mandaté pour négocier ces articles, mettant ainsi le succès à portée de main en ce début du mois de décembre29. Les efforts des deux comités Parker ne signifient pas que la Northern Ontario University Association abandonne l’option du Northeastern University Committee. À la même réunion de juin 1959 où l’aval est donné à l’initiative de l’Université de Sudbury, le sous-comité exécutif résout de créer un comité mixte NOUA–NEUC pour explorer « des aires de collaboration possible ». Des discussions préliminaires tenues en août débouchent sur une rencontre officielle entre les deux groupes à North Bay au début de novembre. Le président Trussler du NEUC explique qu’en accord avec le North Bay College, son comité propose de demander une charte provinciale pour une université non confessionnelle à North Bay, et invite l’Université Huntington à s’y fédérer et à y déménager. Les représentants de la NOUA rétorquent en suggérant que l’union d’une université et de collèges juniors, engageant Huntington, l’Université de Sudbury, le North Bay College et un collège de Sault-Sainte-Marie répondrait mieux aux besoins du Nord-Est onta-

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rien. L’idée, relate Ed Newbery, « n’a reçu aucun encouragement » de la part du NEUC . Newbery rapporte quand même au sous-comité exécutif de la NOUA que le NEUC offre « une solution tout à fait possible et, à plusieurs égards, attrayante », quoique, de façon ironique à la lumière de sa future carrière, son raisonnement focalise surtout sur ce que l’option de North Bay permettrait d’éviter : le risque que de « graves problèmes » surgissent en travaillant avec l’Université de Sudbury à cause de « l’attitude inflexible des jésuites, bien visible ailleurs, et particulièrement […] leur insistance sur un programme bilingue30 ». Au début décembre, les choses ont suffisamment progressé à l’Université de Sudbury comme à North Bay pour que le conseil des sages de la NOUA se réunisse et débatte des procédures et des options de fédération. Le conseil approuve d’emblée la déclaration d’intentions du premier rapport Parker recommandé par le comité exécutif de la NOUA , puis adopte, aux fins de référence lors des discussions à venir, la section du rapport consacrée au « principe de coopération », à un amendement majeur près : l’article stipulant que « le principe de la dualité des cultures et des langues devra s’appliquer » se voit en effet considérablement diluer par l’insertion des mots « sera reconnu » à la place de « devra s’appliquer31 ». Le conseil des sages accepte aussi en principe le rapport de Newbery sur les discussions avec le Northeastern University Committee, bien que certains faits dévoilés pendant le débat créent des remous. Il ressort que Vaughan et Bennett sont tous deux accrédités auprès du conseil des collèges et écoles secondaires de l’Église unie, signifiant que les négociations de la NOUA avec l’Université de Sudbury se déroulent au niveau « national », alors que celles avec North Bay ne sont conduites « qu’au niveau des associations ». Pour remettre la balance en équilibre, le conseil des sages dit au conseil des collèges et des écoles secondaires de s’impliquer directement, lui aussi, dans les discussions avec le NEUC . Les sages, enfin, créent un comité « d’enquête » composé d’un représentant de chaque presbytère et le chargent de faire des recommandations concernant l’emplacement de la nouvelle université. Le comité se rencontre deux fois, d’abord à la fin décembre et de nouveau juste avant la seconde réunion du conseil des sages en janvier 196032. Les négociations entre la NOUA et l’Université de Sudbury s’accélèrent durant les semaines suivantes. À la fin décembre, un accord provisoire est conclu sur les deux questions divisant le comité Parker, laissant à ce dernier une seule source de controverse : le nom à donner à la nouvelle université fédérée. Bouvier insiste vigoureusement en faveur de « Université de Sudbury », tandis que Vaughan et Bennett militent pour « Université du nord de l’Ontario », la préférence personnelle de Lautenslager que la NOUA a déjà inscrite sur les entêtes de son papier à lettres. Le compromis soumis par Ed Newbery est « Université Laurentienne de Sudbury – Laurentian University of Sudbury ». Bennett se remémore plus tard avoir été surpris de la bonne disposition de Bouvier envers le nom jusqu’à ce qu’il découvre que « ce que je – comme Newbery – tenais pour un référent géographique évoquait pour lui […] un saint martyr! » Moins enthousiaste, l’archevêque Wright juge qu’il n’y « a pas de meilleure suggestion à l’heure actuelle33 ». La réunion du comité exécutif de la Northern Ontario University Association à l’église St-Andrew’s de North Bay, le vendredi 15 janvier 1960 en matinée, s’ouvre

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entrée principale du campus au centre-ville de l’université l aurentienne , édifice empire , rue elgin , 1960.

dans une atmosphère de drame épique. Dix-huit hommes et une femme, de même qu’un nombre indéterminé de membres du conseil des sages qui ont été invités, attendent avec impatience la présentation de Vaughan sur les deux négociations récemment conclues. Peu auraient prédit quelle bombe Vaughan laisserait tomber sur l’auditoire. L’orateur revient d’abord sur les négociations avec l’Université de Sudbury que Bennett et lui-même, tous deux accrédités et « responsables devant » le Conseil général de l’Église unie et son conseil des collèges et des écoles secondaires, tient-il à rappeler, ont menées sous les auspices du comité Parker. Les pourparlers avaient débouché sur une « formule » en faveur d’un établissement « public et gratuit » qui s’appellerait Université Laurentienne de Sudbury, d’après la ville où il se situerait ; qu’un Conseil des gouverneurs et un Sénat dirigeraient ; qui compterait une faculté des arts dans le collège universitaire non confessionnel, de même que des facultés des sciences et des sciences appliquées, toutes soumises au Conseil et au Sénat ; et que trois collèges confessionnels ou plus s’y ajouteraient. Le sous-comité exécutif du Conseil général de l’Église unie et le comité exécutif de son conseil des collèges « s’apprêtent tous deux à recommander la participation de l’Église unie dans ce projet », ajoute Vaughan34. L’option de North Bay est rapidement évoquée. Ignorant totalement le Northeastern University Committee, Vaughan passe en revue les discussions avec le Supérieur provincial de la Congrégation de la Résurrection, dont l’Ordre « n’envisage aucune expansion dans le champ universitaire », c’est-à-dire au-delà de la première année, ni n’est prêt à injecter du capital, encore qu’il pourrait « participer » à un collège consacré aux arts libéraux à North Bay. Si une université fédérée ouvrait ses portes à Sudbury, pronostique Vaughan, la Congrégation ne pourrait guère refuser de s’y affilier35.

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Vaughan insiste sur plusieurs autres éléments. La province, croit-il, ne passerait pas outre à l’Université de Sudbury à cause des décennies d’engagement du Collège du Sacré-Cœur dans l’enseignement supérieur, pas plus qu’elle « négligerait la densité de la population francophone » dans la région de Sudbury. Il admet que l’Université Huntington pourrait choisir de s’implanter ailleurs que sur le site principal de l’université fédérée, mais prévient que le conseil des collèges et des écoles secondaires veut des « preuves concrètes » de la présence de l’Église unie à cet endroit. Peut-être avec une ironie délibérée, Vaughan conclut en remerciant la NOUA « pour la liberté qu’elle leur a laissée, Bennett et lui, au cours des négociations ». L’auditoire en reste quelque peu abasourdi. Les délégués attendaient des orientations, noterait plus tard le révérend Dwight Engel de Sudbury, mais « bien peu se doutaient qu’elles seraient si fermes et précises36 ». La réunion fait relâche peu après la présentation de Vaughan pour permettre au comité exécutif de s’asseoir avec le Northeastern University Committee, comme l’avait recommandé le comité d’enquête. On sait peu de choses sur les discussions, mais elles ont dû être difficiles. Quand le comité exécutif de la NOUA reprend ses travaux ce soir-là, les partisans de North Bay, menés par le trésorier Thomas Palmer, passent à l’offensive en proposant une motion contre le nom « Université Laurentienne de Sudbury » et contre la localisation à Sudbury de l’Université Huntington, si celle-ci devait voir le jour. Ils perdent à neuf voix contre six. Une résolution demandant au comité exécutif de préparer une motion réglée sur l’exposé de Vaughan pour dépôt devant le conseil des sages, incluant un addenda recommandant en mots vagues de reprendre les négociations avec la Congrégation de la Résurrection, est ensuite adoptée à neuf voix contre cinq, mais seulement au terme d’un long débat et de l’échec de plusieurs propositions d’amendement37. Quarante-neuf délégués des six presbytères de l’Église unie dans le Nord-Est ontarien participent à la deuxième réunion du conseil des sages, le matin du 16 janvier. La déclaration d’ouverture de Vaughan fait valoir sans détour l’opinion des conseils supérieurs de l’Église unie selon laquelle il faut se fédérer avec l’Université de Sudbury et l’Université Huntington doit se situer sur le campus principal, à Sudbury. « Une discussion animée s’ensuit », dit laconiquement le procèsverbal. La séance est ensuite levée pour permettre au comité d’enquête de se rencontrer. Par quatre voix contre deux, il adopte une motion déposée par deux membres laïques, l’un de North Bay et l’autre du Témiscamingue, rejetant la fédération avec l’Université de Sudbury et réclamant des discussions supplémentaires avec celle-ci, avec la Congrégation de la Résurrection ou avec tout autre groupe prêt à installer l’université ailleurs qu’à Sudbury. C’est le site, non le partenaire, qui pose problème38. Quand le conseil des sages se réunit de nouveau en après-midi, se souvient un délégué de Muskoka, « tous les points de vue se font entendre », le président Lautenslager de la NOUA défendant la candidature de Sudbury et le trésorier Palmer celle de North Bay. Au cœur du débat sur la première motion pour approuver une charte provisoire créant « une Université Laurentienne de Sudbury fédérée […] à laquelle participerait l’Église unie » se trouvent les résolutions du comité d’enquête, qui recommande explicitement le rejet de ce projet, et du comité

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signature de l a loi constituante de l’université laurentienne , le 28 mars 1960.  |  De gauche à droite : R. J. Boyer, J.-N. Desmarais, R. D. Parker, J. E. Fullerton, L. J. Côté. R. Béslisle, E. Bouvier, E. S. Lautenslager ; assis : le juge en chef Dana Porter.

exécutif de la NOUA , qui lui accorde un soutien ambigu. Au terme de la période de discussion prévue, un vote à main levée se conclut par l’adoption de la motion à la plus petite des majorités, 24 contre 23, plus deux votes non comptabilisés pour cause d’abstention ou d’absence. Sans surprise, la proposition du révérend R. B. Hallett de North Bay que le vote devait être unanime est battue39. Deux résolutions supplémentaires font ensuite l’objet de discussions. La première, telle une branche d’olivier tendue aux défenseurs de North Bay, recommande que le conseil des collèges et des écoles secondaires de l’Église unie négocie « avec les Pères de la Résurrection ou tout autre […] groupe intéressé afin de développer notre collaboration ». Dès son adoption, la motion ancrant l’Université Huntington à Sudbury, motion de la plus haute importance, est soumise comme premier article d’une résolution omnibus. Ses autres articles proposent d’établir un établissement d’enseignement postsecondaire à North Bay en conjonction avec tout groupe prêt à s’affilier à Huntington ou à la Laurentienne, puis de réserver à cette fin 20 pour cent du capital souscrit de Huntington. La motion est adoptée. Sudbury accueillera aussi l’Université Huntington40. Deux jours plus tard, le secrétaire exécutif Newbery fait circuler au sein du comité exécutif de la NOUA une note de service revenant sur les événements de North Bay. Perspicace, quoiqu’un brin schizophrène, l’analyse célèbre l’établissement des Universités Laurentienne et Huntington, mais manifeste aussi regret et indignation envers le déroulement des faits. « La majorité du conseil des sages, écrit Newbery, estimait que le site de North Bay convenait globalement mieux pour une université et, toutes autres choses étant égales par ailleurs, il aurait sûrement été choisi. » Seulement, ces autres choses n’étaient pas toutes égales, concède-t-il

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en qualifiant les avantages de Sudbury de « facteurs critiques […] enlevant toute possibilité de librement choisir ». Le recul d’un demi-siècle confirme la perception de Newbery à l’effet que l’Université Laurentienne de Sudbury n’est pas née à cause de la décision chimérique d’une personne parmi quarante-sept. Des forces parmi lesquelles les intérêts des trois groupes religieux fondateurs, le gouvernement provincial et l’industrie locale ont déjà bel et bien usurpé l’autorité du conseil des sages, ne lui laissant guère que le pouvoir – heureusement non exercé – de plonger les conseils supérieurs de l’Église unie dans l’embarras41. Les partenaires fondateurs de la Laurentienne ne perdent pas de temps à mettre le train législatif en marche. Le 25 janvier 1960, au nom d’une délégation réunissant l’Université de Sudbury, l’Église catholique romaine, l’Église unie et l’Église anglicane, Ralph Parker soumet l’entente au Comité provincial des affaires universitaires de l’Ontario et au premier ministre Frost, lequel déclare immédiatement la nouvelle université admissible aux subventions. Deux semaines plus tard, la Législature ontarienne reçoit quatre projets de loi privés incorporant l’Université Laurentienne (non confessionnelle), l’Université Huntington (unie), l’Université de Sudbury (catholique romaine) et l’Université Lalement (un collège catholique romain de théologie mort-né). Un accroc de dernière minute surgit au sujet de la charte de la Laurentienne. Le document omet l’article critique portant sur le rôle des collèges fédérés que Bouvier, Bennett et Wright ont négocié. Les protestations de Vaughan et de Bennett permettent d’y réinsérer la formulation originale, à l’exception du passage sur la création du Collège universitaire non confessionnel, reportée sine die. Le 28 mars 1960, en l’absence du lieutenant-gouverneur, le juge en chef Dana Porter donne la sanction royale à la loi créant l’Université Laurentienne de Sudbury42. La controverse entourant la naissance de l’Université Laurentienne voile la grande portée historique de l’événement, non seulement pour le nord de l’Ontario, mais aussi pour la province et même le pays. La création d’une université fédérée, non confessionnelle, bilingue et biculturelle, et incorporant des collèges théologiquement distincts est révolutionnaire dans le Canada de 1960, plus encore dans la soi-disant zone perdue du Nord ontarien. Après tout, cela survient avant que le seul établissement d’enseignement postsecondaire linguistiquement comparable en Ontario, l’Université d’Ottawa, ait abandonné son statut confessionnel, avant que l’expression « Révolution tranquille » n’ait investi le vocabulaire canadien pour rendre compte de la transformation de la société québécoise et avant que la Commission royale sur le bilinguisme et le biculturalisme ou la Loi sur les langues officielles n’ait même été imaginée. Il s’agit d’une expérience osée, audacieuse même, du point de vue de l’éducation postsecondaire et il n’est pas étonnant que les plus enthousiastes partisans de la Laurentienne eux-mêmes connaissent parfois les affres du doute. Et pourtant, malgré certains défis considérables occasionnels, le temps confirmerait la sagacité des fondateurs de la Laurentienne.

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l e s r ac ine s

partie b  |  structur es en évolution

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Les défis des années soixante, 1960–1972 matt bray

La loi qui crée l’Université Laurentienne de Sudbury établit une gouvernance bicamérale – Conseil des gouverneurs et Sénat –, comme c’était devenu la norme dans les universités canadiennes. Le Conseil se voit charger de gouverner l’Université et d’en gérer les finances. La province nomme six des vingt-quatre gouverneurs et les trois Églises fondatrices, les autres. À certains égards, les premiers conseils sont très homogènes, leurs membres, exclusivement masculins, proviennent de l’élite sociale, entrepreneuriale ou professionnelle nord-ontarienne et en particulier sudburoise. (Faustina Kelly Cook, seule femme à y siéger durant la première décennie, n’y est nommée qu’en 1962.) Mais à d’autres égards, ces conseils sont délibérément diversifiés, car, vu le caractère fédéré de la Laurentienne, il faut considérer les appartenances religieuses et linguistiques de chacun. Les gouverneurs initiaux comptent quatorze protestants, neuf catholiques romains et un juif. Six sont francophones. À titre de vingt-cinquième membre d’office, le premier recteur ajoute un septième francophone et un dixième catholique romain. La plupart des gouverneurs ont fréquenté l’université, mais seul Harold Bennett, l’ancien directeur du Victoria’s College de l’Université de Toronto, possède quelque expertise dans la gestion universitaire, ce qui lui confère une influence notable durant les délibérations du Conseil1. Le milieu des affaires sudburois joue un rôle déterminant dans la gestion de la Laurentienne pendant la première décennie d’existence de celle-ci. Ralph Parker, de l’International Nickel Company, dirige le Conseil des gouverneurs jusqu’à ce qu’il en obtienne la présidence honoraire, en 1965, et soit remplacé par Horace Fraser, de Falconbridge Nickel, qui occupe le poste jusqu’à sa mort quatre ans plus tard. Le Conseil délègue d’emblée des pouvoirs considérables à ses comités permanents, dont le plus important est le comité exécutif. Dans sa première incarnation, ce comité compte deux protestants anglophones, dont l’un, Benjamin Avery, vice-président du conseil de la KVP Sutherland Paper d’Espanola, occupe la pré-

sidence, deux catholiques romains francophones, un juif anglophone, le président du Conseil Parker ainsi que le recteur, membre d’office. Par le biais du comité exécutif principalement, le Conseil assume le plein contrôle des affaires universitaires et des finances, une responsabilité essentielle, car, jusqu’en 1967, la Laurentienne compte un seul employé de bureau, qui porte simultanément les chapeaux de surintendant, de trésorier et d’agent des finances. Par le biais de son comité exécutif, le Conseil se mêle aussi de questions internes à l’Université et relevant de l’enseignement ou de la recherche. Tout en admettant, par exemple, qu’on ne puisse pas « transférer » la prérogative du recteur, le comité exécutif recommande à sa seconde réunion, en mai 1960, la création d’un comité consultatif sur les nominations composé de trois gouverneurs – ce nombre passe à cinq en 1965 – et chargé de conseiller le recteur au sujet de l’attribution de postes de professeur à temps plein. (L’attribution de postes administratifs est déjà du ressort du Conseil.) Ce comité consultatif n’est pas qu’un béni-oui-oui, tant s’en faut. En 1961, il assure ainsi au Conseil avoir « minutieusement étudié et approuvé » la liste des nominations pour l’année universitaire à venir et continue d’agir de la sorte jusqu’à sa dissolution en 19692. À la différence du Conseil et de son comité exécutif, actifs sur plusieurs fronts, mais en phase avec ce qui se passe ailleurs, le Sénat, responsable des politiques universitaires en matière d’éducation, se mêle rarement d’autres sujets. Cela s’explique en partie par sa composition, car même après que ses effectifs sont doublés, en 1962, le Sénat accueille encore plusieurs administrateurs à temps partiel, peu enclins à défier le statu quo en matière de gouvernance. L’instabilité du corps professoral peut aussi y être pour quelque chose. Le nombre de professeurs quadruple entre 1963 et 1968, et pour la seule année 1966–1967, les nouveaux représentent la moitié du corps enseignant, vingt-quatre d’entre eux remplaçant des professeurs partis. Une telle croissance et un tel taux de renouvellement peuvent nuire au développement d’un esprit de corps3. Le recteur dirige l’administration interne de l’Université avec l’aide du doyen des arts et sciences, seul administrateur de niveau supérieur. Trois hommes occupent cette fonction pendant les cinq premières années, une situation qui en affaiblit l’autorité et consolide celle du Conseil. Les qualités personnelles de chaque recteur et le climat régnant à la Laurentienne pendant le mandat de chacun y contribuent aussi. Le rectorat du père Émile Bouvier, 1960–1961 Sur la recommandation de l’ancien comité de négociation, le Conseil des gouverneurs désigne le père Émile Bouvier, alors à la tête de l’Université de Sudbury, comme premier recteur de la Laurentienne. Parfaitement bilingue, le catholique romain Bouvier fait contrepoids au protestant Parker, à la tête du Conseil, comme l’article sur la dualité religieuse du rapport Parker le prescrit. C’est le choix logique à la lumière de cette exigence et des effectifs squelettiques de l’administration, car la nouvelle université aurait bien besoin du leadership d’un homme possédant la stature et l’expérience de Bouvier. Celui-ci avait obtenu un doctorat en économie

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l’université huntington , rue l arch , vers 1961.  |  L’Université Huntington achète son propre édifice au centre-ville de Sudbury, l’ancien salon funéraire Jackson and Barnard au 83, rue Larch. Comme le note avec humour le Sudbury Star en 1960, il faudra modifier certaines structures du bâtiment.

de l’Université Georgetown et fait des études postdoctorales à Harvard aux côtés d’illustres professeurs tel Joseph Schumpeter. Il s’était joint à la faculté d’économie politique de l’Université de Montréal en 1941 et, quatre ans plus tard, y avait fondé la Section des relations industrielles, son domaine de spécialisation. Bouvier était passé ensuite à l’Université Ibero Americano de Mexico, en 1951, où il est resté jusqu’à ce qu’il devienne recteur de l’Université de Sudbury en 19584. La relation entre le recteur Bouvier et certains membres du Conseil est difficile d’entrée de jeu. À cette époque de vives complicités linguistiques et de croyances sectaires, les racines catholiques romaines et francophones du recteur, de même que ses liens avec l’Université de Sudbury, sèment des doutes quant à son impartialité. Peu après sa nomination, une situation accentue d’ailleurs ces soupçons. L’enjeu porte sur le rôle des collèges fédérés. Les négociations entourant la fondation avaient paru résoudre cette question, mais l’article à son sujet avait été omis de la première version de la loi créant la Laurentienne. Les protestations de l’Église unie en permettent la restauration partielle, mais la fonction du collège universitaire non confessionnel demeure non précisée5. La loi établissant l’Université Laurentienne de Sudbury vient à peine de recevoir la sanction royale, en mars 1960, qu’un article du quotidien Le Droit, d’Ottawa, remet cette question à l’avant-plan. Le texte affirme qu’en vertu de la loi, « la Laurentienne ne [peut] établir de facultés [et] instituts […] déjà existants à l’Université de Sudbury », et que la nouvelle université doit louer les services de cette dernière pour tout enseignement dans ces domaines. Cela signifie qu’avec des départements bien établis en arts et en sciences, l’Université de Sudbury deviendrait le principal établissement d’enseignement de la Laurentienne. Huntington – et plus tard Thorneloe, l’université fédérée anglicane – proposerait des cours en philosophie et en sciences religieuses, les domaines spécialement assignés aux collèges confessionnels, tandis que le collège universitaire non confessionnel se

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verrait réduit à n’être guère plus qu’un vecteur de subventions provinciales au profit des collèges religieux6. La prétention du Droit se voit renforcer par l’appui public que le recteur Bouvier lui-même lui donne devant la section sudburoise de la Société historique du Nouvel-Ontario, en avril, puis à Kingston, en juin, à la conférence nationale de la Canadian Universities Foundation. Ses collègues protestants, dit-il en avril, ont concédé un droit d’aînesse à l’Université de Sudbury et accepté que le collège universitaire reçoive son enseignement de celle-ci et obtienne une subvention pour défrayer les coûts de cet enseignement, des bibliothèques et des laboratoires de la Laurentienne. Le recteur de Huntington, Earl Lautenslager, son directeur, Ed Newbery, de même qu’Edward Higgins, actif au sein de l’Église anglicane pour fonder ce qui deviendrait l’Université Thorneloe, contestent toutefois vigoureusement cette affirmation7. Le problème s’envenime pendant l’été 1960 en partie parce que ni le Conseil, ni le comité exécutif ne siègent du fait des ennuis de santé de leurs présidents respectifs, Parker et Avery. L’obligation faite par la loi aux collèges confessionnels de négocier une entente de fédération avec la Laurentienne permet sa résolution à la fin juillet, après que l’Université de Sudbury soumet un texte la désignant comme principal collège d’enseignement de la fédération. Les représentants de Huntington jugent celui-ci « complètement irrecevable » et demandent que « soit confirmé l’établissement d’un collège universitaire actif, administré et dirigé par l’Université Laurentienne de Sudbury ». Pressentant que cela ne pourrait se faire avant que la Laurentienne n’ouvre ses portes, tous s’entendent pour que les deux collèges offrent les cours nécessaires pendant l’intérim. L’Université de Sudbury paraît avoir remporté cette manche8. Il n’en est pas ainsi. Fin août, ayant appris que le versement des subventions provinciales dépendrait de la conclusion de toutes les ententes de fédération et de la désignation sans équivoque de la Laurentienne comme établissement non confessionnel, le Conseil des gouverneurs forme un sous-comité incluant le recteur Bouvier pour s’atteler à cette tâche. Les négociations avec Huntington et l’Université de Sudbury sont ardues, mais brèves. Bouvier fait volte-face au début septembre et recommande au comité exécutif non seulement de créer le collège universitaire, mais aussi de réfléchir à « l’opportunité que l’Université Laurentienne, au moyen du collège universitaire, prenne charge de la faculté des arts et des sciences », ce qui signifie que l’Université de Sudbury n’offrirait plus d’enseignement qu’en philosophie et en sciences religieuses. Au moment de transmettre ces recommandations au Conseil, le comité exécutif joint une condition stipulant clairement que le collège universitaire doit « perpétuer le système d’éducation bilingue offert à l’Université de Sudbury ». Question de bien rassurer les catholiques romains et les francophones, il désigne Bouvier à la direction du collège. Trois jours plus tard, le Conseil adopte les résolutions et approuve les ententes de fédération parallèles avec Sudbury et Huntington, lesquelles sont paraphées lors d’une cérémonie publique deux semaines à peine avant le début des cours9. En plus de clarifier le rôle des collèges fédérés, le débat autour du collège universitaire a d’autres répercussions sur la gouvernance de l’Université. L’inquiétude

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accrue relativement au dévouement du recteur Bouvier envers la Laurentienne élargit les fossés religieux et linguistique entre les collèges fédérés et au sein même du Conseil. Lors de la rencontre qui voit l’approbation des ententes de fédération, les gouverneurs nomment Harold Bennett adjoint du recteur Bouvier, le Conseil s’ingérant ainsi encore plus loin dans les affaires internes de l’Université. Cumulée à ses responsabilités de gouverneur, de secrétaire du Conseil, de membre du comité consultatif sur les nominations et de conseiller spécial et secrétaire du comité exécutif, cette nouvelle fonction hisse Bennett au rang de recteur « fantôme ». Le Conseil voit la sagesse de cette nomination se confirmer l’année suivante, à la suite de la démission abrupte du recteur Bouvier. Le recteur « fantôme » peut tout naturellement assurer l’intérim pendant qu’une minutieuse chasse au successeur permanent se met en branle10. Bennett a expliqué un jour la démission de Bouvier par « l’important déficit » accumulé par la Laurentienne durant sa première année en fonction, mais le véritable motif se trouve ailleurs. En juin 1961, Bouvier congédie de l’université le père Yves Ferland, vétéran professeur au Collège du Sacré-Cœur et à l’Université de Sudbury et doyen des arts et sciences. Bouvier l’accuse d’insubordination pour avoir pris la tête d’une « clique » montée contre lui et d’incompétence professionnelle pour ne pas savoir bien encadrer les étudiants et leur permettre de venir en classe sans leur chemise, leur cravate ou leur veste. Le vrai problème sous-jacent entre les deux hommes, cela dit, en est un d’animosité exacerbée plus tôt dans l’année après que le bruit a couru que Ferland avait informé le père Richard, supérieur provincial de la Compagnie de Jésus, de certaines inconvenances commises par Bouvier et pour lesquelles celui-ci avait été réprimandé11. Ferland peut compter sur le soutien d’un groupe de jeunes professeurs actifs au sein de la toute jeune Association des professeurs de l’Université Laurentienne de Sudbury (APULS , plus tard APUL), menée par Jacques Peltier, président, et Kenneth Pryke, vice-président. Au-delà du bien-être personnel de Ferland, ils se soucient du précédent que constitue la sanction arbitraire du recteur, compte tenu que la permanence professorale n’a pas cours à la Laurentienne. Ils suivent initialement l’avis de leurs collègues jésuites et s’en remettent à l’Ordre, mais quand Bouvier, début juillet, repousse les efforts du père Richard pour réintégrer Ferland, ils convient le secrétaire de direction de la Canadian Association of University Teachers, Stewart Reid, à enquêter. Au terme de rencontres avec les dirigeants de l’A PULS et des représentants des jésuites, Reid retourne à ses quartiers avec une opinion négative de Bouvier, qu’il juge « autoritaire », mais convaincu que Ferland serait réintégré12. Cela ne se produit pas. En août, le père Richard informe plutôt Reid que Ferland a été muté au Collège Sainte-Marie de Montréal, ajoutant souhaiter que cela ne soit pas perçu comme une reddition devant Bouvier pour ce que Richard lui-même considère comme « un renvoi arbitraire et injuste ». Reid rétorque qu’il faut clairement faire savoir que le père Bouvier a mal agi. Plus tard dans la journée, Richard autorise Reid à informer « officieusement » les professeurs que Bouvier démissionnerait sous peu. Le mandat du premier recteur de la Laurentienne se termine donc de triste manière à la fin septembre. Quoique bref, il établit néanmoins d’impor-

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tants précédents eu égard au rôle du Conseil, du recteur, du Sénat et de l’Association des professeurs13. Le Conseil des gouverneurs de la Laurentienne crée sans attendre une bourse en l’honneur du recteur fondateur, puis, en 1973, l’École des sciences de l’éducation lui décerne le prix Rhéal-Bélisle en reconnaissance de son rôle dans la fondation du collège. Après son passage à la Laurentienne, le père Bouvier devient directeur du département d’économique à l’Université de Sherbrooke, où il reste jusqu’à sa retraite dix ans plus tard. Le père Bouvier est décédé en 198514. Le rectorat intérimaire de Harold Bennett, 1961–1963 Le rectorat par intérim d’Harold Bennett influence lui aussi la mise en place du système de gouvernance. Les nombreuses fonctions consultatives que Bennett exerce laissent voir toute la valeur que les gouverneurs accordent à son expérience d’administrateur universitaire. Cela ne signifie pas qu’il ait, comme recteur, pleine liberté d’action dans la gestion de l’Université, bien qu’il possède une plus grande marge de manœuvre que d’autres. En janvier 1962, par exemple, le comité exécutif confie la gestion des contrats d’embauche du personnel de soutien et des professeurs à Bennett et au président du comité des finances, responsabilité transférée après son départ à un comité ad hoc du Conseil. Conscient, malgré tout, que c’est à titre de gouverneur qu’il a le plus de champ libre, Bennett est attentif à ne pas empiéter sur les prérogatives du Conseil. Qui plus est, à titre de gouverneur, il comprend bien les sensibilités religieuses et linguistiques de ses collègues du Conseil et le besoin, pour un recteur intérimaire anglophone protestant à la maîtrise du français bien imparfaite, d’obtenir leur soutien15. À tout considérer, le rectorat de Bennett renforce le rôle du conseil de supervision des affaires internes de l’Université. Ainsi, vers la fin de l’année 1961, le comité exécutif entreprend d’examiner chaque transaction financière, ligne par ligne, depuis le niveau départemental en montant. Son approbation est requise pour que le département d’histoire puisse transférer 50 $ d’une poche à l’autre ou que celui d’économique puisse acheter une calculatrice. La légende qui, sous la photographie des membres du comité exécutif parue dans le Sudbury Star en octobre 1964, dit « ces hommes dirigent les affaires de la Laurentienne au jour le jour » n’exagère guère : le comité exécutif procède à la microgestion d’importantes facettes de la vie universitaire16. Les manques à gagner limitant les hausses salariales, l’expansion des programmes et certaines acquisitions essentielles pour la bibliothèque sont le principal défi de la Laurentienne sous le rectorat de Bennett. Chaque année, la Laurentienne commet un déficit qu’un subside provincial de dernière minute parvient à combler. Au cours de ses trois premières années, elle reçoit 1,1 million de dollars d’aide de la province, une somme qu’un fonctionnaire de l’État qualifie, avec justesse, de « déraisonnable vu l’envergure et la portée de ses activités ». Contre toute attente, les inscriptions à la Laurentienne demeurent faibles durant ces années, résultant, selon les mots du doyen des arts et sciences articulés en 1963, non seulement en des déficits, mais aussi en un « corps professoral surdimensionné17 ».

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La construction du nouveau campus du chemin du lac Ramsey, dont l’inauguration officielle a lieu le 8 octobre 1964, demande aussi beaucoup de temps et d’énergie à Bennett et au Conseil. Ce dernier écarte d’emblée le centre-ville de Sudbury comme site possible, faute d’espace et d’y retrouver une atmosphère convenant à un complexe éducatif comme celui qui est envisagé. Au demeurant, la majorité des gouverneurs favorise un emplacement dans les alentours du club de golf Idylwylde. L’achat du terrain de golf lui-même faillit aboutir au printemps de 1961, mais un début de révolte des membres menée par l’homme d’affaires Ben Merwin amène le Conseil à réfléchir aux conséquences de s’aliéner certains des plus influents citoyens de la ville à l’aube d’une campagne de souscription. C’est donc sur les terres à l’est de l’Idylwylde, plus vastes, qu’il porte son choix à l’automne 196118. Le rassemblement des lots commence sans tarder. En décembre 1961, près de 120 hectares sont acquis par achat ou expropriation – un pouvoir d’exception consenti à la Laurentienne par la loi – et une centaine d’autres s’y ajoutent dans les trois années suivantes. Au même moment, l’historien de l’architecture de l’Université de Toronto et consultant en urbanisme Thomas Howarth entreprend les plans du campus et de ses principaux pavillons. La planification préliminaire permet au Conseil, au printemps en 1962, de prendre certaines décisions critiques, la plus importante étant que la première phase du programme de construction devrait inclure « la bibliothèque et le Podium, ainsi que des fondations pour la construction future d’une bibliothèque, d’un réfectoire, d’une salle d’assemblée, d’un pavillon des arts, d’un édifice de salles de cours, d’un pavillon de sciences, d’un complexe sportif, de résidences pour professeurs, de routes, d’un édifice de services et d’aménagement paysager ». Des restrictions budgétaires forcent l’abandon des résidences professorales et retardent l’achèvement du complexe sportif, mais pour le reste les choses vont comme prévu. La construction commence pour de bon tôt en 1963 et, si elle progresse avec régularité pendant les deux années suivantes, des arrêts de travail entraînent un léger report du début de la session universitaire en 1964 et laissent la plupart des édifices partiellement complétés, bien qu’utilisables19. Directement liée à la construction, la première campagne de souscription de la Laurentienne constitue un défi essentiel à relever, car les politiques gouvernementales limitent la contribution de Queen’s Park à 50 pour cent des coûts en capital approuvés. Au printemps de 1962, avec en poche 500 000 $ provenant de la Fondation NICU (une agence de la Falconbridge Nickel dirigée par le gouverneur Horace Fraser), le Conseil met sur pied un comité de campagne de souscription présidé par Ben Avery et fixe son objectif à 7,5 millions de dollars – plus tard haussé à 9 millions. Le Conseil du Trésor provincial confirme en juillet son engagement pour 3,5 millions de dollars en capital applicable à la première phase de la construction, permettant du coup au chantier de se mettre en branle20. C’est à l’occasion d’un souper organisé par la Chambre de commerce de Sudbury et du district, en septembre 1962, que le Conseil des gouverneurs lance sa Campagne de financement des fondateurs. L’International Nickel Company of Canada y annonce un don de 2,5 millions de dollars, censément le plus important don

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d’entreprise à un établissement d’enseignement jamais enregistré jusqu’alors au Canada. Petites ou grandes, les contributions d’entreprise se multiplient au cours des quinze mois suivants : 100 000 $ de la KVP Sutherland Paper, 30 000 $ du Sudbury Star, 10 000 $ de la Sun Life, et 5 000 $ chacun des magasins Dominion, de la brasserie Labatt et de la fondation Atkinson, pour ne citer que quelques exemples. De nombreux citoyens donnent aussi à titre personnel. Fin novembre 1963, la campagne n’est plus qu’à 84 000 $ de son objectif, un exploit remarquable21. Bennett a dit plus tard que ses années comme recteur de la Laurentienne ont été « parmi les plus heureuses » de sa carrière grâce à la coopération du personnel de soutien et du corps professoral qu’il avait obtenue. Du point de vue de la gouvernance universitaire aussi, leur stabilité les distingue des précédentes et des suivantes, très mouvementées. C’est largement une question de chance, puisque le mandat de Bennett précède le tourbillon social révolutionnaire qui emporte le monde de l’éducation postsecondaire peu de temps après. Mais cette stabilité témoigne tout de même des qualités d’administrateur du recteur, car, comme son successeur le découvrirait rapidement, la direction d’un établissement aussi complexe, par la religion et la langue, que la Laurentienne est remplie de pièges, tels que les modalités changeantes de gouvernement. Au printemps 1971, la Laurentienne confère à Bennett un doctorat honorifique en reconnaissance de ses nombreuses contributions aux premières années de la Laurentienne22. Les années turbulentes du rectorat de Mullins, 1963–1970 La présidence intérimaire de Bennett dure près de deux ans, un terme étonnamment long considérant que le choix de son successeur, à l’époque, relève du Conseil des gouverneurs exclusivement, mais partiellement explicable par les restrictions budgétaires et par la difficulté à dénicher de bons candidats. Suivant la démission de Bouvier, le Conseil avait demandé à Horace Fraser de créer un comité pour trouver son successeur. Ce comité ne compte que deux membres : Fraser et Ralph Parker, président du Conseil. Pendant l’année qui suit, Fraser dresse une liste de cinquante individus, dont la moitié, après examen plus poussé, s’avèrent trop peu qualifiés. Parker et Fraser en gardent quatre, dont deux se disent intéressés au poste. Les gouverneurs rencontrent les deux hommes, deux anglophones bilingues, en mai 1963. Le Conseil les juge tous deux adéquats, mais n’en retient aucun, car son premier choix, Christian Jensen, professeur de français à l’Université du Manitoba, n’est pas disponible avant 1964. En lieu et place, il autorise Parker et Bennett à « nommer celui qui, dans leur esprit, saura prendre charge du rectorat […] selon les conditions d’embauche répondant le plus aux besoins de l’Université ». Parker offre le poste en juin au directeur des études anglaises à l’Université Laval, Stanley G. Mullins, lequel accepte un mandat débutant le 1er septembre23. Homme de contrastes dont la sensibilité poétique semble contredire le style autoritaire de gestion, Stanley George Mullins possède plusieurs atouts, soit le bilinguisme, l’anglicanisme qui, en théorie, lui confère une certaine neutralité envers les deux confessions dominant l’Université, un attachement personnel au nord de l’Ontario – sa femme Leatha vient de Sault-Sainte-Marie et la famille passe

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stanley g . mullins .  |  Recteur de l’Université Laurentienne, 1963–1970.

ses vacances estivales à son chalet de Thessalon, tout près – et, selon le Sudbury Star, une « solide formation universitaire ». Né à Bristol en Angleterre, il a étudié à Toronto, où sa famille s’est établie quand il avait trois ans. Après l’obtention de son diplôme du Riverdale Collegiate Institute, il décroche en 1943 un baccalauréat spécialisé de l’Université de Toronto. Il intègre ensuite l’armée canadienne et sert trois ans en Angleterre, en Italie et dans le nord-ouest de l’Europe, méritant ce faisant le grade de capitaine. Démobilisé, il retourne à l’Université de Toronto d’où il obtient une maîtrise en langues romanes, en 1948, puis s’inscrit à des études de doctorat en littérature anglaise à l’Université Laval. En 1951, sa scolarité terminée, Mullins devient professeur d’études anglaises à Laval, puis directeur du programme en 1958. Bien que Mullins ait peu d’expérience dans la gestion universitaire, le Conseil estime que son service militaire en temps de guerre et ses dix années comme réserviste de l’armée, couronnées par son accession en 1958 au poste d’officier commandant du 103e dépôt de ressources du personnel, à Québec, compenseraient les faiblesses de son curriculum vitæ24. Capital pour l’évolution de la gouvernance universitaire, le mandat du recteur Mullins est de loin le plus difficile dans l’histoire de la Laurentienne. Au cœur des problèmes, il y a le déploiement de ce complexe de forces sociales que la seule mention des années soixante signifie, cette panoplie de changements qui éprouvent la patience des figures d’autorité même les plus progressistes : croissance exponentielle des inscriptions, expansion des établissements d’enseignement postsecondaire, radicalisme étudiant, transformation des mœurs sociales et sexuelles, pilule, découverte des drogues, Révolution tranquille au Québec, protestations contre la bombe atomique et la guerre du Vietnam, déserteurs étatsuniens, montée du féminisme, agitations urbaines, etc. Mais Mullins contribue à son propre malheur. Cet habitué du commandement militaire ne sait pas composer avec les défis posés par ces bouleversements, même si la Laurentienne se trouve bien loin de l’épicentre des soulèvements sociaux25. Le premier test sérieux que Mullins doit subir vient d’une direction inattendue, à savoir le doyen des arts et sciences, Gérard Bourbeau, qui succède à Ferland à

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l’automne 1961. Bourbeau n’a pas beaucoup expérience administrative, mais sa solide formation universitaire – un doctorat en minéralogie des sols de l’Université du Wisconsin – et son séjour dans l’armée, où il a atteint le grade de major pendant la guerre sans toutefois avoir servi outre-mer – peuvent laisser supposer un terrain d’entente avec le nouveau recteur. Au contraire, tout comme deux pôles chargés à l’identique se repoussent, Bourbeau remet sa démission au Conseil dès février 1964, cinq mois à peine après l’entrée en fonction de Mullins. À celui-ci, il reproche son « attitude méprisante envers la fonction et la personne du doyen ». Bourbeau énonce dans sa lettre de démission plusieurs cas où le recteur a passé outre à sa fonction et rencontré personnellement des professeurs de sciences pour des questions tombant nettement sous la responsabilité du décanat26. Différentes tentatives menées dans les deux mois suivants, par un sous-comité exécutif d’abord et par le Conseil ensuite, puis par un comité de médiation du Conseil pour finir, ne parviennent pas à résoudre le différend entre les deux hommes. Les gouverneurs font beaucoup pour satisfaire Bourbeau, avalisant plusieurs de ses propositions pour clarifier les diverses chaînes d’autorité au sein de l’Université et proposant même de fusionner le décanat au nouveau poste de vicerecteur à l’enseignement et à la recherche. Bourbeau refuse. Peut-être espère-t-il, comme le veut une rumeur qui circule, forcer la démission de Mullins et avoir accès au rectorat. « Je n’acceptais pas qu’un homme ayant une telle formation devienne recteur, confie-t-il d’ailleurs au Sudbury Star. Il aurait dû être vicerecteur. » Mais Bourbeau n’a aucune chance de gagner un duel contre Mullins. Malgré l’estime que le Conseil a pour lui – et les concessions offertes suggèrent que celle-ci est élevée –, il n’allait pas remplacer un recteur six mois après que ses deux plus influents membres l’avaient choisi. Bourbeau quitte la Laurentienne cet été-là, donnant au rectorat de Mullins un premier goût amer27. Au cours des deux années suivantes, une convergence de problèmes provoque une autre crise de gouvernance focalisant sur le recteur. L’un de ces problèmes concerne la volonté de l’Association des professeurs de négocier un accès à la permanence. De longues discussions durant l’hiver 1963–1964 culminent avec le rejet par l’A PULS de la dernière proposition de règlement, que le Conseil adopte tout de même en mai après que Mullins l’a assuré qu’une entente avait été conclue. De nouvelles négociations permettent d’accoucher d’une politique en janvier 1965, mais le prix en est un effritement de la confiance des professeurs envers le recteur comme le Conseil28. L’épineuse question des relations entre la Laurentienne et ses trois universités fédérées – les universités de Sudbury, Huntington et Thorneloe, établie en 1963 – compose un autre problème. Au départ, les collèges perçoivent le recteur Mullins comme un adversaire déterminé « à ne laisser aux universités confessionnelles et à leurs dépendances qu’une place minime », comme Ed Newbery l’écrit en 1964. Un an plus tard, Mullins se voit placer sous surveillance quand le Conseil crée un comité spécial sur le bilinguisme. L’existence du comité reflète principalement l’insatisfaction des gouverneurs francophones, remontant à 1964, alors que Mullins avait publiquement fait état de « l’échec » du bilinguisme à la Laurentienne. Le comité des relations publiques du Conseil avait à cette occasion recommandé

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que « dans toute manifestation “externe” engageant l’Université et pouvant influencer la perception publique de la Laurentienne […] le recteur exprime l’opinion du comité des relations publiques du conseil ». Si la directive a été transmise à Mullins, elle n’a guère d’effet29. Bien que le rapport du comité spécial sur le bilinguisme, déposé en 1965, reconnaisse un fort degré d’insatisfaction envers « l’efficacité au quotidien du fonctionnement normal de l’Université », tout spécialement au sein des collèges fédérés, il ne va jamais jusqu’à directement critiquer Mullins. En coulisse, par contre, les remarques négatives sur son travail formulées par des interlocuteurs comme le père Rodolphe Tremblay, secrétaire général de l’Université de Sudbury, et les gouverneurs Robert Campeau et Conrad Lavigne ne passent pas inaperçues. Bien révélatrice est la lettre du recteur de Huntington Newbery au gouverneur de la Laurentienne Don James. « Jim Meakes [président du comité spécial] m’a téléphoné deux jours avant notre réunion des gouverneurs pour discuter de certains développements, y écrit Newbery. Il m’a très directement demandé si j’allais coopérer avec Mullins si le rapport était favorable à son maintien en poste. » Le rapport l’est en définitive. La situation, peut-on y lire, n’est pas la responsabilité d’« un seul homme », car d’incontrôlables facteurs humains ont pesé dans la balance, comme le passage de trois recteurs en cinq ans et les perturbations conséquentes à la démission de Bourbeau. Le rapport concède même que le Conseil mérite une part du blâme pour n’avoir pas su « définir les buts de la Laurentienne, clarifier les relations internes entre la Laurentienne et les collèges fédérés et aider le recteur à promulguer et appliquer une marche à suivre à la fois claire et compatible ». Tout cela peut bien être vrai. Il n’en reste pas moins que l’idée suivant laquelle le Conseil devrait se mêler davantage des affaires internes de la Laurentienne exprime une bien mauvaise lecture des sables mouvants de la gouvernance universitaire au Canada30. À sa parution, en 1964, le recueil A Place of Liberty : Essays on the Government of Canadian Universities, réunissant des appels d’éminents universitaires canadiens, tels Frank M. Scott de McGill, en faveur d’une rénovation en profondeur du système, résume bien la philosophie des forces de changement en émergence au même moment au sein des cercles intellectuels canadiens. La Canadian Association of University Teachers et la National Conference of Canadian Universities and Colleges – devenue plus tard l’Association of Universities and Colleges of Canada (AUCC) – concluent simultanément que les puissantes forces démographiques de changement dans le Canada de l’après-guerre se répercuteraient non seulement sur le nombre et la taille des établissements d’enseignement postsecondaire, mais aussi sur leur gouvernance. Dans cet esprit, les deux associations établissent une commission mixte dédiée à « l’examen et l’évaluation en toute neutralité de la structure et des pratiques actuelles de gouvernement […] des universités au Canada31 ». La commission est coprésidée par deux sommités internationales en éducation, Sir James Duff, ancien vice-chancelier de l’Université de Durham, et Robert Berdahl, politologue étatsunien à l’Université d’État de San Francisco. Après une tournée de campus canadiens de tailles et de complexités variées – mais pas celui

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de la Laurentienne –, Duff et Berdahl déposent leur rapport, University Government in Canada, au printemps 1966. Il ne faut guère se surprendre que le document appuie le système bicaméral de gouvernance universitaire, dans lequel la responsabilité première des finances revient à un Conseil des gouverneurs et celle des questions académiques à un Sénat ; la plupart des universités canadiennes, comme la Laurentienne, fonctionnent déjà ainsi. Plus radicales sont, d’une part, son affirmation voulant que les deux sphères de responsabilité ne soient pas comme deux compartiments étanches, c’est-à-dire que les problèmes financiers, par exemple, se répercutent souvent de telle manière sur l’enseignement que le Conseil des gouverneurs doit associer le Sénat aux prises de décision, et, d’autre part, son insistance pour que le Sénat soit sous contrôle professoral. Le rapport argue aussi, mais sans trop s’y attarder, qu’en toutes matières relatives aux programmes et à l’enseignement, le Sénat doit tenir compte des conséquences financières qui, pour le Conseil, sont de la plus haute importance. Le Sénat, déclare-t-il de manière générale, doit avoir « la capacité explicite de faire des recommandations au Conseil sur tout sujet d’intérêt pour l’Université ». D’autres suggestions ne sont pas moins révolutionnaires : le Sénat devrait élire les membres du Conseil des gouverneurs, et vice versa ; les comités mixtes du Conseil et du Sénat, se charger de questions telles que la planification à court et à long termes ; et le Sénat, passer en revue le budget global de l’Université. Ceux que le statu quo n’enchante pas trouvent dans University Government in Canada à la fois un projet de réforme et le prétexte à son lancement32. L’historien Michiel Horn a beau soutenir que « le rapport Duff-Berdahl a peu influencé » la gouvernance des universités canadiennes, il joue un rôle critique à la Laurentienne où, arrivant dans la foulée de l’enquête sur le bilinguisme, sa pertinence est indéniable. Le recteur Mullins le porte à l’attention du Conseil, mais les gouverneurs ne le commentent pas. Ici comme ailleurs, la réception la plus enthousiaste vient de l’Association des professeurs. La parution du rapport coïncide avec une hausse des inscriptions étudiantes à la Laurentienne, laquelle crée un urgent besoin de professeurs. Or la perception d’isolement de Sudbury et sa mauvaise réputation environnementale désavantage l’Université au chapitre de l’embauche et du maintien en poste de son personnel. Le boom économique minier du milieu des années 1960 aggrave le problème en exacerbant le manque déjà criant de logements dans la communauté, conférant du coup à la jeune Association des professeurs un poids certain auprès de la direction de la Laurentienne33. Le rapport Duff-Berdahl incite l’A PULS à renouveler ses efforts, d’abord appliqués à l’automne 1965, pour accroître le nombre et le pourcentage de professeurs au Sénat. Le recteur Mullins promet d’aborder la situation, mais rien ne survient jusqu’à ce qu’il propose, en mars 1966, la création d’un comité mixte sur la représentation professorale combinant professeurs et sénateurs, devançant tout juste une motion à cet effet que l’A PULS entend déposer. Deux mois plus tard, au terme de ses délibérations, le Sénat adopte de nouveaux critères d’éligibilité qui donnent la main haute aux professeurs. Tenues sous les nouvelles règles, les élections d’octobre produisent un Sénat beaucoup plus volontaire34. Dans ce contexte de confiance en hausse au Sénat et parmi les professeurs, le Conseil des gouverneurs provoque involontairement le premier accrochage d’une 44

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lutte de quatre ans pour la gouvernance universitaire quand, en janvier 1967, il crée un comité ad hoc pour modifier la loi ayant donné naissance à l’Université Laurentienne de Sudbury. Aux yeux des gouverneurs, les recommandations conçues pendant l’année ne visent qu’à dépoussiérer la loi un peu : éliminer « de Sudbury » du nom officiel de l’université, par exemple, ou voir à la nomination d’un chancelier. Le comité reçoit l’aval des collèges fédérés en décembre, à la suite de quoi, au début de 1968, le député provincial de Sudbury, Elmer Sopha, présente à la Législature ontarienne un projet de loi privé contenant les modifications. Après sa première lecture en mars, le projet de loi se retrouve en commission parlementaire35. C’est à ce moment qu’une délégation opposée au projet, menée par le président de l’Association générale des étudiants (AGE), Étienne St-Aubin, et deux professeurs de philosophie à Huntington, Wesley (Wes) Cragg et Garrick (Garry) Clarke, empêche le projet d’aboutir. L’« objection générale », selon Clarke, est que les clauses du projet « semblent placer le contrôle de l’Université […] dans les mains du recteur et du Conseil des gouverneurs ». Les protestataires mettent aussi en lumière un manquement plus crucial, à savoir que le Conseil n’a consulté ni les professeurs, ni les étudiants au sujet des modifications proposées. L’argument fait mouche auprès des fonctionnaires provinciaux qui avaient prévenu le Conseil qu’une telle négligence pourrait saborder tout le processus. Au terme d’un bref débat, le comité législatif décide de ne pas présenter le projet de loi, statuant que les professeurs et les étudiants de la Laurentienne devraient être consultés pour qu’il puisse être déposé de nouveau36. Cette victoire encourage l’A PUL à faire pression sur le Sénat pour l’établissement d’un comité mixte, avec le Conseil, sur l’étude des pratiques de gouvernance. En juillet 1968, un comité de sélection du Conseil et du Sénat recommande la création d’un comité consultatif du recteur (CCR ) sur les structures et procédures consultatives. Mandaté « pour étudier les canaux de communication, les structures et procédures consultatives et les secteurs décisionnels au sein de l’Université Laurentienne », le CCR compte sept membres appartenant au Sénat, à l’A PUL ou à l’AGE , contre trois représentants à peine venant du Conseil et des cadres administratifs. Sa première réunion, en octobre, voit l’élection d’un représentant de l’A PUL , Doug Williamson, directeur du département de géologie, comme président. La discussion « ample et franche » sur les affaires universitaires qui s’y déroule ensuite se conclut sur une demande d’accès à plusieurs documents de gouvernance, y compris le rapport Duff-Berdahl. Les réunions suivantes s’avèrent encourageantes elles aussi. La proposition visant à autoriser la circulation des procès-verbaux de toutes les instances de gouvernance atteint partiellement son objectif, le Conseil choisissant de ne distribuer que « les résumés de ses procèsverbaux, avec toute réserve […] jugée pertinente37 ». Les étudiants de la Laurentienne n’ont jamais recours au genre d’activisme extrême qui frappe les universités nord-américaines au cours de l’hiver 1968–1969, comme on le verra plus loin, mais ils continuent d’insister pour se faire entendre au sein de l’administration. L’AGE fait preuve de stratégie en demandant, en octobre 1968, que le Sénat ajoute à ses effectifs six sièges avec voix au scrutin pour les étudiants. Malgré l’opposition de certains de ses membres, le Sénat répond favorablement à la requête estudiantine en décembre38. Les défis des années soixante

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Les professeurs aussi font sentir leur poids, notamment grâce au CCR sur les structures et procédures consultatives. En février 1969, ils font circuler un questionnaire demandant que les sénateurs évaluent le rôle du Sénat au sein de l’Université. Citant le rapport Duff-Berdahl, selon lequel le Sénat devrait pouvoir « faire des recommandations au Conseil sur tout sujet d’intérêt pour l’Université », le questionnaire dresse une liste de neuf rôles que le Sénat pourrait jouer : passer en revue le budget de fonctionnement de l’Université, recommander la nomination des administrateurs, établir des politiques et des procédures relatives à l’embauche des professeurs, collaborer à la sélection d’un recteur, etc. Il y a là les grandes lignes de l’esprit des réformes qui seraient promues au cours des années suivantes. Les réponses au questionnaire appuient le renforcement du rôle du Sénat dans toutes les sphères d’action39. L’A PUL devient aussi plus proactive et relance le Conseil au sujet de la question des salaires, qui préoccupe ses membres. Jusqu’en 1965, les gouverneurs fixaient l’échelle salariale sans réellement tenir compte des professeurs. À compter de cet hiver-là et pendant les années suivantes, les professeurs ont la possibilité de venir présenter leur point de vue devant le Conseil ; c’est moins qu’une négociation, mais plus qu’une consultation. Les premiers signes de discorde apparaissent à l’automne 1967, quand le recteur Mullins et des représentants de l’Association des professeurs sortent d’une rencontre de travail sur les échelles salariales pour l’année 1968–1969 avec des versions divergentes des discussions. Pour résoudre le problème, le Conseil mandate un comité ad hoc de trois personnes, dont le recteur, pour s’asseoir avec les représentants professoraux40. Ainsi ouvertes, les négociations officielles achoppent sur l’échelle salariale pour l’année 1969–1970. De décembre 1968 à avril 1969, l’APUL rejette trois propositions de règlement. À la mi-avril, les professeurs posent un geste sans précédent en refusant de décerner les notes finales et de dispenser de l’enseignement à distance. Le comité exécutif du Conseil change de tactique quelques jours plus tard en confiant les négociations – accompagnées de strictes directives – au vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, Roland Cloutier, et au contrôleur financier, Carl Nurmi. Ces derniers concluent un règlement avec les négociateurs de l’A PUL , que le Conseil amende, mais les professeurs rejettent cette seconde version en dénonçant « l’arbitraire du processus ». Malgré tout, comme la remise des diplômes approche à vive allure, l’A PUL lève son moratoire sur l’attribution de notes aux étudiants41. Pour prouver le bien-fondé de la position patronale, le recteur Mullins fait circuler dans les semaines suivantes un tableau illustrant que la plus récente offre s’inscrit tout à fait dans la lignée des autres universités ontariennes. Quand, comme le veut l’usage, il fait parvenir des contrats individuels aux professeurs sur la base de cette offre, l’APUL réplique en demandant à ses membres de les retourner non signés. Plus de quatre-vingts le font, avec pour résultat que deux rondes additionnelles de négociations permettent d’assouplir les derniers irritants. Une réunion extraordinaire du comité exécutif du Conseil approuve l’entente à la fin mai. Ainsi prend fin le premier arrêt de travail professoral à la Laurentienne42. Les tensions en sont tout de même accrues, préparant du coup le terrain à une prochaine crise. Au début octobre 1969, le recteur Mullins demande son avis à la

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communauté universitaire en prévision du plan de développement sur cinq ans qu’il déposerait dans trois semaines devant le Committee on University Affairs (CUA) de l’Ontario. Devoir réagir dans un si court délai met les professeurs et les étudiants en furie. À leur demande, le Conseil accepte le principe d’une représentation « tripartite » – le recteur au nom de l’Université, l’APUL et l’AGE –, chose bien inhabituelle que Queen’s Park accueille non sans consternation43. Le recteur Mullins présente son plan quinquennal à l’occasion d’une réunion extraordinaire du Sénat, à la mi-octobre. L’assemblée générale des étudiants le rejette sous prétexte de non-représentativité parce que la communauté universitaire n’a pas été correctement consultée. En plus de déplorer l’absence de mécanisme de planification à long terme, l’A PUL critique aussi la substance des propositions du recteur. Devant le Sénat aussi bien que le CUA , l’Association questionne en effet la pertinence de créer des facultés de beaux-arts et d’arts appliqués, de médecine et de droit à la lumière des besoins universitaires les plus actuels de la Laurentienne44. Tandis que cette scène se joue, une autre, plus explosive, se prépare en coulisse. En septembre 1969, le CCR sur les structures et procédures consultatives recommande d’ajouter sept membres sans voix au chapitre au Conseil – deux chacun venant du Sénat, de l’A PUL et de l’AGE , et un de l’Association représentant les étudiants à distance – et quatre au comité des finances, à savoir un de chacun des quatre regroupements énumérés ci-dessus. Après examen de la recommandation deux jours à peine après l’épisode embarrassant de l’audience auprès du CUA , le comité exécutif propose plutôt d’ajouter un membre de chaque Association au Conseil, mais aucun au comité des finances, mettant ainsi la table pour un affrontement lors de sa réunion du 31 octobre. D’entrée de jeu, le président de l’A PUL , Garry Clarke, et celui de l’AGE , Pierre Fortin, défendent les quatre individus – dont Douglas Los, un futur président du Conseil – désignés par leur Association respective en vertu de la proposition du CCR sur les structures et procédures consultatives. Au moment de les remercier, le président du Conseil William Shea mentionne que la question serait traitée quand elle apparaîtrait à l’ordre du jour. Fortin croit voir là une tactique pour noyer le poisson et en fait part à quelque 250 étudiants massés dans le Grand Salon. Un très grand nombre d’entre eux prend position dans le Salon des gouverneurs, au 11e étage, et entonne des refrains. Sans y avoir été invité, Fortin pénètre dans la salle du Sénat et entreprend de s’adresser au Conseil, forçant l’ajournement de la réunion. Shea rencontre les étudiants pendant la pause et les assure que leurs opinions recevraient « la plus grande attention45 ». L’action étudiante atteint partiellement ses buts. Quand la question est ramenée sur le tapis en après-midi, deux gouverneurs, Conrad Lavigne et le juge Anthony Falzetta, proposent d’ajouter au Conseil sept membres sans droit de vote, comme le CCR l’avait suggéré. La motion est adoptée après le rejet d’un amendement réduisant ce nombre de sept à quatre. Eu égard au comité des finances, le Conseil se range derrière l’avis du comité exécutif et ne fait rien. Les représentants de l’APUL et de l’AGE accèdent immédiatement à leurs sièges – les deux sénateurs ne feront de même qu’en 1970 –, établissant ainsi une ligne directe entre ces organismes et le Conseil qui se révélerait rapidement fort précieuse. Le Sénat se fait aussi plus

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transparent, en novembre, en votant pour mettre fin à la vieille pratique de tenir ses réunions à huis clos46. L’Association des professeurs pousse simultanément en faveur de la formation d’un comité de planification à long terme, une réforme dont le fiasco devant le CUA a souligné l’urgence. Sur la recommandation de l’APUL , le comité exécutif du Conseil prie le Sénat de créer un comité ad hoc qui le rencontrerait pour discuter avec lui de l’idée. À l’occasion de cette rencontre, au début décembre, le comité sénatorial ad hoc, présidé par l’historien Gilbert Stelter, adopte la position la plus radicale en suggérant, dans l’esprit du rapport Duff-Berdahl, la formation d’un comité mixte du Conseil et du Sénat chargé de formuler « les objectifs à long terme de l’Université » et de développer un plan quinquennal « concernant autant les programmes […] que les budgets, l’équipement et les opérations ». Un tel comité, suppose-t-on au Sénat, préparerait le budget annuel de toute l’Université, et pas seulement celui portant sur l’enseignement et la recherche, tandis que le comité des finances du Conseil devant le recevoir pour approbation compterait en son sein des professeurs et des étudiants. Le comité exécutif refuse d’entériner une vision aussi radicale. En lieu et place, il suggère que le Sénat mandate un comité de six membres pour coordonner la planification à long terme avec le comité de construction et de planification du Conseil. Cette conception de la « planification » s’écarte tellement de ce que le Sénat a en tête que même le recteur Mullins insiste pour que le procès-verbal souligne son abstention au moment du vote47. L’idée qu’un comité budgétaire universitaire puisse accueillir des professeurs et des étudiants ne va pas aisément disparaître. En novembre, le comité exécutif répond aux pétitions de l’A PUL et de l’AGE à ce sujet et invite le Sénat, « en tant qu’instance où toutes les composantes de l’Université sont représentées », à mettre sur pied un « comité du budget universitaire » responsable devant le comité exécutif du Conseil. Le Sénat va rapidement de l’avant avec la création d’un comité sur « le budget de fonctionnement et la planification universitaire à court terme ». La question de l’autorité de ce comité se pose ensuite. Les sénateurs plaident que chaque soumission budgétaire au comité des finances du Conseil doit passer par lui. Le comité exécutif, pour sa part, lui reconnaît le droit de se prononcer « sur tout aspect du budget de fonctionnement », mais pas davantage48. Les relations entre le Sénat et les professeurs, d’un côté, et le Conseil, son comité exécutif et le recteur, de l’autre, se détériorent rapidement au début 1970. Lors d’une réunion du Sénat, en janvier, le comité ad hoc sur la planification à long terme se plaint du refus du Conseil de le traiter comme un partenaire égal, insistant sur le fait que le comité de construction n’est pas un forum approprié. L’APUL soutient le Sénat sur ces questions et a un grief supplémentaire, à savoir les négociations salariales enlisées qui risquent de créer plus de discorde encore que l’année précédente. Pour sa part, le comité exécutif réitère sa décision de n’ajouter aucun professeur ou étudiant au comité des finances et campe sur ses positions relativement à la planification à long terme, plaidant pour que l’expérience du comité de construction ait la chance de se faire valoir49. L’exaspération des professeurs et du Sénat envers le recteur Mullins s’amplifie aussi. Dans un rapport de janvier 1970, Garry Clarke résume ainsi le point de vue

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de l’A PUL  : « Depuis octobre, le recteur Mullins s’est de plus en plus coupé des professeurs. Ses efforts pour démettre certains professeurs sans égard pour la procédure ou pour leur refuser la permanence ont été bloqués par l’Association, avec l’appui de la CAUT. Piètre intermédiaire entre les professeurs et le Conseil, il a très souvent été ignoré par l’Association. » Le Sénat, soupçonnant Mullins de ne pas transmettre ses opinions aux gouverneurs, lui ordonne avec netteté, en février, d’y voir50. Le début mars voit s’intensifier une campagne, prétendument menée par le président Clarke de l’A PUL et les sénateurs Wes Cragg et Gil Stelter, pour forcer le départ de Mullins. « Le Sénat universitaire est sous l’emprise d’un caucus antiMullins, écrit le Globe and Mail le 7 mars, et des exemplaires de sa résolution pas encore adoptée retirant toute confiance à M. Mullins circulent au sein du campus. » Commentant « l’affaire Mullins » la semaine suivante, le Sudbury Star rapporte que le recteur, louangé par le quotidien comme « administrateur hors pair », compte malheureusement demander un congé de deux ans au Conseil des gouverneurs. Un groupe de professeurs d’expérience menés par le directeur du département de travail social, Conn Ashby, rencontre le comité exécutif du Conseil « afin de le renseigner sur la perception du rôle du recteur au sein de l’Université […] d’étaler les raisons pour lesquelles un changement au niveau du rectorat était […] nécessaire et de contribuer à accomplir cela de la manière la plus civilisée qui soit ». L’A PUL appuie ces initiatives et demande que le Conseil et le Sénat se mettent immédiatement à la recherche d’un successeur51. La crise atteint son paroxysme le 18 mars quand, « dans les meilleurs intérêts de l’Université », le Conseil refuse la demande du recteur Mullins de partir en congé en juillet 1970. Réagissant avec colère, le Sénat adopte le lendemain deux motions de censure visant Mullins et le comité exécutif, dans ce cas-ci pour usurpation de l’autorité du Conseil. Il exige aussi qu’une réunion du Conseil et du Sénat se tienne dans les deux semaines suivantes pour résoudre le problème et délègue quelquesuns de ses membres auprès du recteur pour l’inciter à refuser la décision du comité exécutif relative à son congé. Tant l’APUL que l’AGE appuient ces gestes52. L’absence du recteur Mullins et du président du Conseil Shea, tous deux à l’extérieur de Sudbury, pendant la dernière semaine de mars met tout sur la glace, mais les tensions restent vives. Le 1er avril, l’AGE précipite les événements en convoquant une assemblée étudiante publique au Grand Salon pour ratifier les résolutions sénatoriales de censure. Après des heures de discussion – l’opinion est loin d’être unanime –, le sénateur étudiant Scott Merrifield en appelle à « l’occupation » du foyer du Grand Salon. Une soixantaine d’étudiants s’y installent et émettent un communiqué demandant qu’une réunion publique du Conseil et du Sénat ait lieu au plus tard le 6 avril. Si aucun règlement concernant le rectorat et le rôle du comité exécutif n’y est conclu « à la satisfaction du Sénat », déclarent les étudiants, le Sénat devrait suspendre « les fonctions officielles relatives à l’enseignement53 ». À l’approche de son délai de deux semaines, le Sénat perd lui aussi patience. Il adopte le 2 avril des résolutions visant à forcer une résolution du problème, la plus critique étant un nouvel ultimatum au Conseil. Affirmant que les gouverneurs

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l’avaient « insulté » en refusant de le rencontrer, le Sénat décrète qu’à moins d’une rencontre d’ici là, « toutes les fonctions de l’Université liées à l’enseignement cesseront le 3 avril à 17 h ». À l’incitation de ses membres étudiants, le Sénat accepte que la bibliothèque reste ouverte et la soumission volontaire des notes en l’absence d’examens finaux. Parce que la rencontre désirée n’a pas lieu dans les délais fixés, l’Université Laurentienne connaît sa première « interruption d’enseignement », selon l’euphémisme alors employé, à compter du 3 avril54. La crise pousse le président Dalton Caswell à convoquer ce soir-là une réunion extraordinaire du comité exécutif. Arguant qu’il serait impossible de réunir tout le Conseil aussi rapidement, le comité exécutif demande au Sénat de désigner six membres pour le rencontrer et organiser la séance conjointe. En réunion à Toronto, le recteur Mullins revient à la hâte. Il réitère son désir de prendre un congé de deux ans, mais suggère, compte tenu du calendrier, que celui-ci ne commence qu’en juillet 1971. Et surtout, il se montre ouvert à abandonner son poste à tout moment après le mois de juin 197055. Le Sénat réplique le lendemain à la proposition des « six contre six » du comité exécutif en suggérant que ses six membres rencontrent tout le Sénat siégeant comme un seul comité. Cela dit, à la reprise de l’assemblée sénatoriale quelques heures plus tard, quatorze membres du Conseil arrivent. Un comité ad hoc recommande que la réunion mixte du Conseil et du Sénat se tienne le 9 avril, avec une séance à huis clos sur la question du rectorat et une autre, publique, sur la gouvernance universitaire. La délégation du Conseil et le Sénat approuvent tous deux cet arrangement56. Le jeudi 9 avril 1970 est une journée mémorable. En après-midi, le Conseil des gouverneurs réuni en séance extraordinaire prend position sur les principales questions en litige. Même sans droit de vote, les professeurs et les étudiants prennent une part active aux échanges, inaugurés par les interventions des délégués du comité exécutif et du Sénat. La discussion qui s’ensuit révèle que le principal différend entre les deux camps porte sur le moment de la démission du recteur de Mullins, le comité exécutif préférant qu’il reste jusqu’en juin 1971 pour donner à la Laurentienne le temps de trouver son successeur. Le procès-verbal du Conseil indique toutefois que « les récents développements » rendent « peu probable » qu’« une telle dernière année en fonction soit profitable au recteur comme à l’Université ». Le Conseil résout alors de se mettre à la recherche d’un recteur par intérim pour le 1er juillet 1970 et d’un candidat pour occuper le poste de façon permanente. Plus tard en soirée, Shea annonce la décision au Conseil et au Sénat réunis à huit clos au Salon des gouverneurs57. Fort attendue, la séance publique s’ouvre au Grand Salon à 21 h 35 sous la présidence du vice-recteur Cloutier. Aux dires du Sudbury Star, la foule est « antipathique ». Le Conseil, le Sénat, l’A PUL et l’AGE font chacun une déclaration d’ouverture, quoique seule la première offre le moindre suspense. D’entrée de jeu, le président du Conseil Shea éteint la mèche en annonçant que la Laurentienne aurait un nouveau recteur intérimaire à compter du 1er juillet et assure l’auditoire que le comité de sélection compterait un nombre égal de représentants du Conseil, des professeurs et des étudiants. Il résume ensuite les autres mesures adoptées par le Conseil. Celui-ci ajoute d’abord quatre membres votants au comité des finances, 50

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le grand salon de l’université l aurentienne en construction , 1963.  |  À peine un an après que cette photographie du futur Grand Salon est prise, le nouveau campus de l’Université Laurentienne près du lac Ramsey ouvre ses portes.

dont un élu par le Sénat, un par l’A PUL et deux par l’AGE . Il propose ensuite de créer un comité permanent sur la planification à long terme composé d’un nombre égal de membres provenant du Conseil et du Sénat. Pour contrer la perception d’un contrôle excessif exercé par le comité exécutif sur les affaires universitaires, enfin, il s’engage à tenir quatre réunions supplémentaires en 1970 (dont une conjointement avec le Sénat), et peut-être même des séances mensuelles au cours des prochaines années universitaires58. Le Sénat et les professeurs se disent évidemment satisfaits du résultat de la séance. Décidé à « consolider ses gains et aller de l’avant sans heurts », le Sénat met fin à l’interruption d’enseignement le lendemain et prend des mesures pour que la remise des diplômes se déroule au moment prévu. Moins enthousiastes, les militants étudiants déplorent que des décisions engageant l’avenir de la Laurentienne se prennent encore derrière des portes closes. Malgré cela, ils acceptent eux aussi d’« interrompre » leur occupation du foyer du Grand Salon59. Sans surprise, le recteur Mullins – « première victime du nouvel ordre des choses », selon le Sudbury Star – voit les choses d’un autre œil. Maître de la cérémonie de remise des diplômes en mai, il remplit ses fonctions de manière « impassible ». Son adresse présidentielle effleure les événements récents, le recteur y remerciant « les quelques professeurs demeurés loyaux » de leur soutien et en appelant à l’évolution, plutôt que la révolution, dans la gouvernance universitaire. Il évoque aussi d’obscurs « charlatans et valets », une expression qu’un professeur non identifié qualifie de « saisissante ». Pour le reste, les professeurs choisissent prudemment de ne faire aucun commentaire60. Par delà la question de la gouvernance – un avertissement très direct –, le mandat de Mullins est témoin d’une transformation majeure à l’Université Laurentienne. Grâce à une politique adoptée en 1965 par laquelle la province s’engageait à couvrir 85 pour cent du coût des projets approuvés et, dans le cas de la Laurentienne, appliLes défis des années soixante

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quait même la formule rétroactivement à la première phase de la construction, l’Université est inondée de subventions pendant une demi-décennie. Des changements d’envergure ont lieu sur le campus, avec notamment l’ajout de huit étages à l’édifice R.-D.-Parker et l’inauguration de plusieurs autres projets : le troisième étage de l’édifice des classes, le planétarium Doran (avec l’aide financière de W. J. Doran, président de Doran’s Northern Ontario Breweries Limited), l’édifice des sciences II, l’édifice et l’auditorium Horace-J.-Fraser, trois résidences (collège universitaire, étudiants célibataires et étudiants mariés), l’agrandissement de l’édifice d’activité physique B.-F.-Avery, y compris la piscine de dimension olympique, et enfin l’École des sciences de l’éducation61. Le portrait d’ensemble des finances de l’Université s’améliore lui aussi radicalement sous Mullins. Les trois cents diplômes du printemps 1970 sont plus nombreux que tout le corps étudiant de l’année d’avant son arrivée en poste. Les inscriptions se multiplient par six pendant ces sept années, ce qui accroît nettement le montant des subventions reçues, surtout après la réforme de 1967 par laquelle la province adopte une formule de financement basée sur les « revenus de base » et liée au nombre d’étudiants. Le gouvernement Robarts débloque de nouvelles subventions pour les « secteurs universitaires émergents » et même des fonds spéciaux pour l’éducation bilingue62. La Laurentienne, enfin, avait bien changé sur le plan de l’enseignement à la fin du mandat de Mullins. Le corps professoral quadruple pour composer avec l’influx d’étudiants. L’Université substitue aussi ses diplômes généraux en arts et sciences des premiers temps par des diplômes disciplinaires de trois ans, y greffe quelques programmes spécialisés de quatre ans, fonde cinq écoles professionnelles et déblaie le terrain pour de futures études supérieures. Si les subordonnés hiérarchiques de Mullins, tel le vice-recteur Roland Cloutier, y sont pour beaucoup dans ces réalisations, il faut tout de même noter que celles-ci se conforment à un plan d’ensemble esquissé par le recteur en personne en 196463. Le président du Conseil Shea n’énumère pas que des platitudes quand, à la dernière réunion du Conseil à laquelle participe Mullins, il souligne l’apport du recteur au développement de la Laurentienne. Dans le rapport annuel 1969–1970, le recteur intérimaire Cloutier salue lui aussi l’homme avec lequel, à titre de doyen et de vice-recteur, il a travaillé pendant cinq ans, et pas toujours dans l’harmonie. Tout en insistant sur « le dévouement entier » de Mullins envers la Laurentienne, Cloutier admet que ni le style de gestion du recteur, ni sa vision d’avenir n’ont su réunir le campus. « Je crois malgré tout, ajoute-t-il, que le principal grief contre lui était inhérent à la nature de sa fonction. IL ÉTAIT LE RECTEUR . Il symbolisait l’autorité à un moment où, aux quatre coins du monde, la société en général et les universités en particulier rejetaient toute forme d’autorité. » Cela est indéniable, mais il demeure que, comme beaucoup d’autres, le recteur Mullins, trop accroché à ses prérogatives, n’a pas su flairer ni la force, ni la direction du vent de changement en matière de gouvernance64. L’adversité révèle le caractère d’un homme, dit-on. À cet égard, Stanley Mullins montre une remarquable force de caractère. Il profite de son congé de la Laurentienne pour s’inscrire à l’Université d’Ottawa au doctorat en littérature anglaise,

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qu’il décroche en 1972. Il revient en 1973 au département d’anglais de la Laurentienne, fervent défenseur de la littérature canadienne et des études canadiennes alors que celles-ci peinent à se faire prendre au sérieux. Directeur du département entre 1980 et 1983, il s’implique activement dans les affaires de l’Université Thorneloe et en devient le premier directeur du programme des arts de la scène. À l’occasion de sa retraite de la Laurentienne en 1986, Thorneloe lui décerne un diplôme honorifique en littérature, puis le fait professeur émérite en 1991. Stanley Mullins vivra à Kagawong, sur l’île Manitoulin, jusqu’à sa mort en 200365. Le dénouement du rectorat de Cloutier, 1970–1972 Bien des observateurs veulent voir dans le départ du recteur Mullins une panacée qui mettrait fin aux maux de gouvernance de la Laurentienne, ce n’est pas ce qui se produit. Le dernier acte n’est pas encore joué. Celui-ci débute à la fin avril 1970 quand, suivant la promesse de son président Shea, le Conseil mandate, pour trouver un recteur intérimaire (à compter du 1er juin) et un recteur permanent, un comité composé d’une majorité de professeurs et d’étudiants, mais dirigé par un gouverneur. Eu égard au recteur par intérim, le comité recommande trois candidats internes au début juin : Garry Clarke, président de l’APUL , Roland Cloutier, vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, et Wynn Watson, directeur des études supérieures. Le Sénat les approuve tous avant de transmettre leurs noms au Conseil qui, sans surprise, choisit Cloutier66. Roland Cloutier devient doyen des arts et sciences en septembre 1965, après que plusieurs doyens intérimaires ont occupé le poste à la suite de la démission de Bourbeau. Professeur de science générale à la faculté des arts de l’Université d’Ottawa, Cloutier possède un excellent dossier (un doctorat de l’Université McGill et une longue liste de publications), encore que son expérience en gestion universitaire soit limitée. Le travail de Cloutier au décanat fait une telle impression sur le Conseil que ce dernier lui offre à l’automne 1966 la double fonction de vicerecteur à l’enseignement et à la recherche et aux services étudiants et de doyen, soit la même combinaison que Bourbeau avait naguère refusée. Cloutier accepte, mais doit vite se rendre à l’évidence que la charge de travail est trop lourde. À sa demande, le comité exécutif lui adjoint deux vice-doyens, l’un pour les arts et l’autre pour les sciences. Cette solution ne suffit pas non plus et, au printemps 1969, l’Université élève Gerald Vallillee, spécialiste des études anciennes, au rang de doyen par intérim des arts et sciences67. À la lumière de l’expérience administrative diversifiée de Cloutier, il est étonnant que ce dernier décide de conserver le vice-rectorat et la présidence intérimaire, surtout quand il devient évident que les problèmes de gouvernance sont loin d’être réglés. L’épineuse question du rôle du comité exécutif demeure entière. À la fin avril, par exemple, ce comité entend plusieurs griefs déposés par des professeurs contre l’Université. Même s’il détermine en fin de compte qu’il n’a pas autorité pour les trancher, son geste soulève les protestations du Sénat qui lui demande de justifier son intervention dans une « situation interne concernant l’éducation ». Trois semaines plus tard, le Sénat va plus loin en pressant le Conseil

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de reconstituer le comité exécutif pour y inclure des professeurs et des étudiants, puis d’en modifier les attributions « afin que les pouvoirs décisionnels appartiennent à l’ensemble du Conseil68 ». Du point de vue du Conseil, c’est le rôle du Sénat qu’il faut réexaminer. Bien décidé à devenir « un partenaire égal [du Conseil] dans l’établissement des politiques universitaires », selon les mots de Garry Clarke, le Sénat élargit ses horizons en scrutant le détail de toute une panoplie de politiques en vigueur, y compris sur les nominations. En avril, il ordonne à Cloutier de lui soumettre chaque nouvelle nomination à un poste de professeur et mandate un comité pour élaborer la procédure entourant la nomination de cadres supérieurs. Le rapport initial de ce comité va dans le même sens que Duff-Berdahl en affirmant que « chaque décision prise au sein de la communauté universitaire se répercute sur l’enseignement et la recherche » et, de là, est sujette à examen par le Sénat. Ce dernier résout alors d’y aller de recommandations sur « tous les administrateurs, responsables ou non de l’enseignement et de la recherche », et demande instamment que les professeurs et les étudiants soient majoritaires aux comités mandatés pour trouver les prochains recteur et vice-recteur. Le Conseil lui reconnaît un tel droit relativement au rectorat par intérim, mais il hésite à en faire un principe de portée générale69. C’est dans ce contexte de divergences qu’un nouvel affrontement entre le Conseil et le Sénat se profile à l’horizon. Les négociations salariales pour l’année 1970–1971 entre un comité de neuf membres nommés par le comité exécutif – sept gouverneurs, le vice-recteur Cloutier et le contrôleur financier Nurmi – et l’APUL s’étant enlisées pour des raisons principalement monétaires, cette dernière, pour les relancer, propose au début de l’année 1970 de recourir à l’arbitrage. Le comité exécutif refuse sèchement l’idée initialement avant de convenir, en mars, que l’arbitrage exécutoire pourrait être utilisé « à certaines conditions » après que toutes les autres possibilités auraient été épuisées. Il accepte aussi de ne soumettre aucune offre de contrat aux professeurs avant qu’une entente ait été conclue. Des pourparlers irréguliers se poursuivent pendant l’été, sans grand résultat70. Les négociations viennent à peine de commencer pour de bon, en septembre, qu’une rumeur voulant que le comité exécutif ait concédé aux nouveaux professeurs des salaires plus élevés que ceux stipulés dans sa dernière offre de contrat déclenche une réaction en chaîne. Le comité de négociations salariales du Conseil menace d’abord de démissionner en bloc en raison du fait qu’il venait de se faire couper l’herbe sous le pied, mais il ne le fait pas. Répondant au risque de dérapage imminent des pourparlers, l’A PUL décide, le 14 septembre, d’en appeler à la médiation du ministre des Affaires universitaires, Bill Davis, qui reçoit formellement cette demande trois jours plus tard71. Pendant ce temps, le comité exécutif exacerbe les tensions de deux manières. D’une part, il envoie à chaque professeur individuellement ce que l’A PUL qualifie d’« offres de contrat », signées de la main du recteur Cloutier, à l’encontre de ce qui avait pourtant été convenu. De l’autre, le président du comité exécutif, Dalton Caswell, partage avec la presse des données au sujet de l’offre du Conseil, y compris des renseignements sur le statut salarial du président de l’A PUL , Garry Clarke. Outrée de ces gestes, l’Association fait parvenir à Davis une lettre cinglante, le 17 septembre, affirmant que les offres de contrat professoral « avaient été paraphées 54

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à l’aide d’un tampon [imitant la signature de Cloutier] sans son consentement [et] envoyées au mépris de son opposition à leur soumission dans le présent contexte », des faits que Cloutier lui-même confirme plus tard. L’A PUL publie aussi un communiqué de presse condamnant l’abus de « renseignements confidentiels » par le comité exécutif et insistant sur le fait que l’impasse n’est redevable qu’au refus de ce dernier de se soumettre à l’arbitrage, comme il l’avait pourtant promis. L’APUL réitère le lendemain sa demande de médiation auprès de la province72. Le Sénat se jette dans la mêlée le 20 septembre en réaffirmant sa motion de censure d’avril envers le comité exécutif et en votant une motion de censure contre celui-ci pour « usurpation de l’autorité du recteur » et « mauvais usage de renseignements confidentiels ». L’assemblée générale de l’AGE au Grand Salon, le 23 septembre, va plus loin encore en réclamant la démission du comité exécutif, son remplacement par un nouveau comité comprenant des professeurs et des étudiants et « possédant des pouvoirs de recommandation limités » et le déclenchement d’une grève si cela ne se produit pas. Réuni de façon « non officielle » en l’absence du recteur Cloutier, le comité exécutif réplique par un communiqué de presse défendant son action et qualifiant les accusations du Sénat de « hâtives et non fondées ». Le Conseil, quant à lui, réaffirme sa confiance dans le comité exécutif le 25 septembre, rejette l’arbitrage forcé et demande à son comité de négociations salariales de poursuivre son travail73. Pour le Sénat, c’est la goutte qui fait déborder le vase. Trois jours plus, au terme d’un long et houleux débat, il approuve le début d’une autre « interruption » d’enseignement pour le 1er octobre, crée un comité ad hoc pour l’organiser et, dans un ultime effort pour ne pas avoir à se rendre à cet extrême, demande au Conseil une réunion conjointe pour le 30 septembre. Celui-ci décline l’invitation. Sur la foi d’un avis juridique, le recteur Cloutier déclare que le Sénat n’a pas l’autorité pour décréter une telle interruption. Il prévient aussi les professeurs qu’en y donnant suite, ils risquent de se rendre coupables d’une « négligence professionnelle » potentiellement grave. S’appuyant sur le même avis, le comité exécutif recommande quelques jours plus tard que le Conseil demande « une injonction » ordonnant au Sénat de mettre fin à l’interruption74. Le campus est plus partagé d’opinion qu’en avril au sujet de l’interruption en dépit des efforts du Sénat pour rallier la communauté, au moyen notamment d’une assemblée publique à l’auditorium Fraser, le 1er octobre. Les professeurs de sciences expriment les plus grands doutes sur sa légitimité. Le Conseil des sciences approuve une résolution, le 2 octobre, faisant part de ses inquiétudes quant aux répercussions sur les étudiants. « Tout en comprenant pleinement les raisons justifiant une interruption à ce moment-ci », peut-on y lire, le Conseil « regrette cette décision et demande au Sénat de revenir sur ses positions. » Environ 30 pour cent des cours continuent initialement de se donner, mais ce pourcentage chute à mesure que régresse l’assiduité en classe75. Les désaccords entre professeurs expliquent partiellement pourquoi l’A PUL aborde l’interruption avec plus de circonspection qu’on aurait pu l’imaginer, considérant son rôle dans sa proclamation. À cela, il faut ajouter qu’à l’encontre de la position initiale de l’A PUL , des organisations comme l’Ontario Council of University Faculty Associations (OCUFA) et la Canadian Association of UniverLes défis des années soixante

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sity Teachers (CAUT) s’opposent, par principe, à toute intervention gouvernementale. Chose importante, le 5 octobre, après la venue de représentants des deux organisations précitées, l’A PUL s’abstient d’évoquer toute médiation provinciale, mais conseille tout de même à ses membres d’appuyer l’interruption du fait qu’un comité mixte OCUFA–CAUT serait créé en l’absence de progrès76. Pendant ce temps, les autres parties intéressées – le Conseil, le Sénat et l’AGE – pressent Queen’s Park de s’impliquer. L’idée suscite d’abord de l’opposition, le sous-ministre des Affaires universitaires l’écartant d’ailleurs par crainte « du sérieux précédent que l’intervention du ministre créerait ». Le ministre Davis n’en invite pas moins des délégations de l’AGE et du Sénat à le rencontrer. Les étudiants, le 6 octobre, et les sénateurs, le lendemain, demandent tous de l’aide pour résoudre le conflit non pas salarial, mais plutôt sous-jacent à la crise sur la gouvernance universitaire. Davis les écoute avec sympathie, mais réitère son impuissance à agir tant que l’interruption d’enseignement demeure en vigueur. Le Sénat comprend le message. Le 8 octobre, « en geste de notre volonté de contribuer à la résolution du problème de l’Université », il décrète que les cours reprendraient le 13 octobre, au retour du l’Action de grâces77. Le comité exécutif revient de sa propre rencontre avec Davis, le 14 octobre, convaincu que celui-ci est « bien au fait » de la situation à la Laurentienne et satisfait de sa volonté de résoudre la crise. Ses membres seraient sans doute moins confiants s’ils avaient eu vent du changement d’opinion du sous-ministre Stewart, dont l’influence sur la pensée du ministre est indéniable. Dans une note à Davis, Stewart fait remarquer « l’attitude plutôt rigide » du Conseil de la Laurentienne qui « s’est habitué [du temps de Mullins] à […] prendre des décisions sur la base d’ententes avec le recteur et peine à cerner le sens du mouvement actuel en faveur d’une plus grande participation de la part des professeurs ». Contrairement à sa première idée, Stewart recommande qu’une « équipe de médiation » conseille le recteur, une solution que Davis accepte78. Le candidat de Davis pour diriger l’équipe, J. G. (Gerry) Hagey, constitue un choix inspiré à bien des égards. À la fin des années 1950, Hagey avait supervisé la transformation des Waterloo College Associate Facilities, la branche non confessionnelle du Waterloo College, en Université de Waterloo et, le premier, avait occupé son fauteuil de recteur. Son expérience de première main relativement aux péripéties d’un jeune établissement de haut savoir allait s’avérer fort précieuse. Tout aussi important est le fait qu’il n’est pas un gestionnaire d’université traditionnel. Après avoir décroché son baccalauréat en arts en 1928, Hagey avait passé vingt ans aux relations publiques chez B. F. Goodrich avant de devenir recteur de son alma mater, Waterloo College, en 1953. Son expérience dans le monde de l’éducation et celui des affaires en fait un interlocuteur crédible aux yeux du Sénat comme du Conseil79. Hagey informe Davis à leur première rencontre qu’il préfère travailler seul. Il exige aussi de pouvoir faire un examen préliminaire de la situation avant de se commettre envers elle. Anticipant sur sa venue à Sudbury le 10 novembre, il fait prudemment circuler sur le campus une note rappelant qu’il est mandaté « pour vous assister, non vous commander ». Ses rencontres à l’Université l’ayant

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convaincu qu’une solution au conflit est possible, Hagey accepte de servir comme consultant à condition que l’Université ne soit pas liée par ses recommandations et seulement « aussi longtemps que vous [Davis], la Laurentienne et moi-même trouverons mes services utiles80 ». Les quatre mois suivants sont fort occupés. Hagey rencontre des officiels, des professeurs et des étudiants de la Laurentienne, assiste aux réunions du Conseil, du Sénat et d’autres, et évalue de manière générale la procédure de gouvernance, le tout lui permettant d’inscrire en contexte son rapport final, daté du 12 mars 1971. Il contribue aussi à résoudre plusieurs épineuses questions, dont la négociation d’une entente salariale sur deux ans. En montrant que les échelles de salaires à la Laurentienne sont comparables à celles en vigueur aux universités Brock, Trent et Lakehead, il persuade l’A PUL de revoir ses attentes à la baisse et le Conseil d’encourir un déficit résultant d’une offre bonifiée. C’est aussi grâce à son intervention que le Conseil et le Sénat s’entendent sur la composition du comité de sélection d’un recteur, un enjeu qui retarde le processus de plusieurs mois81. Proposant une très fine analyse de la gouvernance à la Laurentienne et de son évolution, le rapport final de Hagey doit beaucoup au rapport Duff-Berdahl et porte l’empreinte de ses quinze années d’expérience comme recteur. Au sein de la « petite université » des premières années qui comptait peu d’étudiants, de professeurs et de gestionnaires, écrit-il, « le Conseil des gouverneurs établissait les politiques et prenait charge du plus gros de la planification, préparait les budgets de fonctionnement et d’équipement et prenait régulièrement part aux opérations quotidiennes de l’établissement ». En partie par habitude, en partie par ignorance de ce qui se faisait ailleurs, le Conseil a persisté dans cette voie bien après que la Laurentienne était devenue un établissement « multifacultaire » au milieu des années 1960. Éveillé, pour sa part, aux pratiques de gouvernance démocratiques qui balaient les campus de l’Amérique du Nord, le corps professoral relativement jeune, diversifié et plus idéaliste de la Laurentienne cherche à faire en sorte que plus d’autorité revienne à son association et au Sénat, entraînant le mouvement du pendule du changement dans la direction opposée82. Un de fils conducteurs du rapport Hagey est la certitude qu’une structure administrative sous-développée loge au cœur des difficultés de gouvernance de la Laurentienne. Ce n’est pas la première fois qu’une telle idée est soumise au Conseil. En mai 1969, l’Université avait embauché la firme Kates, Peat, Marwick and Company pour faire l’étude de son organisation et de ses pratiques de gestion. La principale critique de son rapport de mars 1970 était que « l’organisation administrative officielle fonctionne mal et est incapable de collaborer de manière efficace avec les autres composantes organisationnelles ». Aucune mesure n’a fait suite aux recommandations à cause des questions plus urgentes qu’il fallait alors régler, mais il est clair que le plaidoyer du rapport pour une administration plus forte et capable d’arbitrer les demandes concurrentes du Conseil, du Sénat, des professeurs et des étudiants influence Hagey83. Hagey offre quelques suggestions au Conseil. À l’encontre des réprimandes du Sénat, il lui conseille d’espacer ses rencontres avec lui. « Moins ils [les gouverneurs] s’impliqueront dans la gestion détaillée de l’Université, explique-t-il, plus

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ils seront capables de développer une organisation administrative compétente qui se méritera le respect des professeurs et du personnel de l’Université. » Il invite le Conseil à abolir son comité permanent sur les négociations salariales pour laisser la question à l’administration. Faisant nettement écho au rapport Duff-Berdahl, il conseille aux gouverneurs de « respecter le droit du Sénat, ou de tout autre individu ou groupe, de faire des recommandations au Conseil sur des questions de politiques ou de procédures universitaires pour lesquelles l’approbation du Conseil est requise ». Hagey donne aussi raison au Sénat sur la pertinence de limiter l’autorité du comité exécutif. Ce dernier, recommande-t-il, devrait s’abstenir de faire toute recommandation au Conseil dans « les domaines de responsabilité des autres comités permanents du Conseil », transmettre au Conseil les recommandations des autres comités sans les commenter et « agir au nom du Conseil seulement si le Conseil lui-même l’a instruit de le faire84 ». Bien qu’il soit nettement favorable à un rôle accru pour le Sénat dans la gouvernance universitaire, Hagey le juge quand même coupable de « surengagement administratif », critiquant le fait qu’après la démission de Mullins, « il avait voulu aborder et trancher toutes les questions qui lui étaient soumises, sans égard au fait qu’elles tombaient ou non sous [sa] compétence ». Conséquemment, dit-il, les réunions trop fréquentes consacrent trop de temps à exécuter un ordre du jour trop souvent voué à des problèmes qui, même s’ils relèvent de l’autorité sénatoriale, devraient être délégués à des sous-comités. Pour remédier à la situation, il invite le Sénat à voir à ce que ses comités permanents couvrent tout le champ des responsabilités sénatoriales, mais pas plus, et de s’en remettre à ses recommandations. Le Sénat, insiste-t-il, doit, comme le Conseil, établir des politiques sans s’égarer dans les détails administratifs85. Bien qu’offrant une évaluation mordante du problème de gouvernance de la Laurentienne, le rapport Hagey reçoit un accueil mitigé de la communauté universitaire. Quelques-uns se sentent peut-être visés par les remarques directes de Hagey ; pour certains, sa recommandation controversée et quelque peu gratuite de transformer l’Université de Sudbury en collège francophone unilingue en diminue l’autorité. Cela dit, s’il n’a pas de répercussions aussi immédiates qu’on aurait pu le penser, il n’est pas sans conséquence pour autant. Le rapport et les événements qui y ont conduit précipitent une transformation critique dans la répartition des rôles entre les entités de gouvernance au sein de l’Université – Conseil, recteur, administration, Sénat, Association des professeurs, étudiants – qui façonne l’évolution de la Laurentienne pour les quinze années à venir.

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Une ère de transition, 1972–1985 matt bray

Bien avant le dépôt du rapport Hagey, le Conseil des gouverneurs de la Laurentienne a adopté plusieurs de ses recommandations sur la gouvernance universitaire. Ainsi, en novembre 1970, suivant l’avis du consultant, il a ajouté au comité exécutif deux sénateurs – l’un provenant du corps professoral et l’autre du corps étudiant – à titre de membres non votants. Il a également invité le Sénat et l’AGE à se donner des représentants au sein des autres comités et à nommer des gouverneurs élus membres votants du Sénat (un statut remplacé par celui d’« observateurs » non votants en 1974). Cet esprit de réforme et de transparence perdure. Le conseil autorise la circulation des procès-verbaux aux membres sans droit de vote en 1972, puis admet en son sein l’Association du personnel administratif de l’Université Laurentienne et « tous les segments de l’Université qui ne sont pas représentés à l’heure actuelle [par les autres associations de personnel] ». Il donne un siège – sans droit de vote – à l’Association des anciens de l’Université Laurentienne quatre ans plus tard, et un autre encore à l’Association des étudiants francophones (AEF) en 1977. Après avoir préparé des directives concernant les séances à huis clos, enfin, il rend ses réunions publiques en décembre 1976. Le secret ayant naguère enrobé les délibérations du Conseil est désormais chose du passé1. En partie par volonté, en partie par chance, la composition du Conseil change d’autres manières encore au début des années 1970. Il cesse d’être une chasse gardée masculine en 1973 – si on exclut la courte période où il retrouve cette situation dans les années 1980 – quand trois femmes en joignent les rangs, deux avec voix au chapitre et l’autre, sans droit de vote, représentant les employés de bureau. Dans une lettre au ministère des Collèges et Université de l’Ontario datée de 1976, le président du Conseil J.-N. Desmarais relève une autre importante transformation. « La présence de la grande entreprise et de l’industrie qui était peut-être quelque peu écrasante, écrit-il, ne compte aujourd’hui pour presque rien. » Desmarais se soucie de la capacité de la Laurentienne à lever des fonds, mais le déclin de l’implication du monde des affaires est peut-être, en revanche, un facteur ayant

conduit le Conseil à desserrer son emprise sur les leviers de gouvernance durant la décennie suivante2. Soucieux de donner suite à la vision de Hagey au sujet du renforcement de la gouvernance universitaire, le Conseil crée en novembre 1970, avec le Sénat, un comité spécial mixte d’enquête. Hagey lui-même en préside la première réunion qui se consacre à l’embauche d’un vice-recteur à l’administration et d’un autre à l’enseignement et à la recherche. Sur sa recommandation, le Conseil approuve en janvier suivant le choix de Frederick J. Turner, ancien trésorier de l’Université Carleton, comme vice-recteur à l’administration temporaire. Turner sert jusqu’en 1975, après quoi l’ancien ingénieur municipal de Sudbury Thomas L. (Spike) Hennessy lui succède. Par comparaison, l’incertitude continue de plomber le vice-rectorat à l’enseignement et à la recherche. À l’exception de l’année 1975–1976 où le poste reste vacant, les années 1970 voient s’y succéder des occupants temporaires (Hugues Albert, Laurent Larouche – à temps partiel – et Chrysologue Allaire) dotés de responsabilités élargies concernant les affaires francophones. La nomination d’un vice-recteur permanent à l’enseignement et à la recherche ne survient qu’avec Francis J. (Frank) Turner, l’ancien doyen de la faculté de service social de l’Université Wilfrid-Laurier, à l’été 1979. La décennie voit le roulement de personnel caractériser aussi les autres principaux postes de gestionnaire de la Laurentienne : le secrétaire, les directeurs de l’éducation permanente, des services étudiants, des services informatiques et des terrains et bâtiments, et, enfin, le contrôleur financier3. Conformément aux recommandations du rapport Hagey, le Conseil revoit sa pratique d’interventions continues dans les affaires internes par un transfert de responsabilités à l’administration de la Laurentienne. Ainsi, il dissout son comité permanent sur les négociations salariales en avril 1971 et confie le mandat de ce comité à une équipe chapeautée par le vice-recteur à l’administration Turner. Deux ans plus tard, cette pratique est si solidement établie qu’à l’occasion d’une réunion du comité exécutif pour ratifier un protocole d’entente avec l’APUL , « on fait valoir que de tels protocoles ne devraient être soumis qu’une seule fois au comité exécutif et au Conseil, et non par étapes successives ». À la fin 1971, le Conseil cesse aussi de se prononcer sur les modifications particulières aux budgets départementaux, tandis que le comité exécutif abandonne l’année suivante une autre prérogative en approuvant rétroactivement chaque nomination faite par l’administration qui cadre dans les budgets attribués4. Les gouverneurs abandonnent certaines responsabilités au profit du Sénat, qui démontre un enthousiasme étonnamment modéré envers le rapport Hagey. En mars 1971, après en avoir débattu, le Sénat remercie son auteur « pour l’énorme travail investi dans la préparation du rapport et pour la clarté et la justesse de ses vues », puis en réfère les recommandations à ses différents comités, sans grande conséquence. Bien révélateur est le peu d’attention que le Sénat accorde aux avertissements de Hagey concernant les périls à déborder de ses champs de compétence pour envahir le terrain de la gestion quotidienne des affaires universitaires. Cela s’explique aisément, car le Sénat, fraîchement vainqueur de ses luttes de pou-

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musée et centre des arts de l’université l aurentienne .  |  L’Université Laurentienne gère le Musée et centre des arts à compter du milieu des années 1960 jusqu’au milieu des années 1990, apportant ainsi une contribution essentielle et unique à la vie culturelle et intellectuelle de Sudbury et de la région.

voir, vit des heures fastes, mais la redistribution des sphères d’autorité parmi les instances de direction s’en trouve compliquée5. Désireux de remodeler la gouvernance de la Laurentienne selon les principes de « décision participative » balayant à l’époque les établissements d’enseignement postsecondaire canadiens, le Sénat se donne un rôle accru relativement à certains enjeux, dont quatre d’importance vitale. L’un est l’adoption, au printemps 1971, de protocoles de sélection des directeurs de département et d’école, des doyens et des vice-doyens par les professeurs, un changement radical par rapport à l’ancien processus de nomination émanant d’« en haut ». Un autre concerne la planification. Le Sénat crée en novembre un comité permanent sur la planification académique à long terme et, l’année suivante, un comité ad hoc sur le même thème qui se penche sur le premier plan quinquennal global de la Laurentienne. Sa publication en 1973 sous le titre de « Pour la planification de notre avenir » renforce le rôle central du Sénat dans la planification académique à l’université6. Le Sénat acquiert aussi une influence sans précédent dans le processus budgétaire de l’Université. La première étape se joue à l’été 1970 quand, de concert avec le contrôleur financier Carl Nurmi, le comité ad hoc du Sénat sur le budget de fonctionnement et la planification à court terme revoit le budget de 1970–1971 pour dépôt devant le comité des finances du Conseil. Des négociations entre le Conseil et le Sénat plus tard dans l’année permettent de transformer le comité sénatorial ad hoc en comité permanent. Au printemps 1972, le Sénat en élargit le mandat, initialement restreint au budget concernant l’enseignement et la recherche, à l’examen, « de concert avec le vice-recteur à l’administration », des subventions d’une autre nature. Le Sénat, dès lors, devient le socle du processus budgétaire. Le comité sénatorial permanent, auquel siègent le recteur, le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche et le contrôleur financier, établit le budget – sans omettre de maintenir le comité des finances du Conseil informé –, puis le Sénat approuve le document avant de le transmettre au Conseil pour adoption. Non sans débat et même hésita-

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tion parfois, le Conseil adopte les propositions budgétaires à peu près telles quelles au cours des années suivantes7. En partie à cause de ses compétences budgétaires accrues, le Sénat devient aussi un acteur de premier plan relativement aux ressources humaines. Ainsi, en avril 1971, il crée un comité sur les nominations et les promotions qui, en plus d’approuver les embauches de nouveaux professeurs et les remplacements, gère aussi les assignations au sein des départements. D’autres comités sénatoriaux répondent aux demandes de permanence et de sabbatique, et d’autres encore entendent les appels sur ces questions et s’occupent de situations comme le non-renouvellement du statut des professeurs à forfait. Loin d’entériner machinalement les recommandations de ces comités, le Sénat les débat à fond, ce qui, entre autres choses, en rend les réunions plus fréquentes et plus longues. Une conséquence additionnelle est le désengagement progressif de l’Association des professeurs de la Laurentienne au sein de la gouvernance. Tout en jugeant cela « bien », le président de l’APUL Garry Clarke prévient les membres que « cela ne garantit aucunement que le Sénat ou les unités pédagogiques […] utiliseront leurs ressources de façon plus rationnelle ou responsable que le Conseil ou l’administration », d’où l’important rôle de « chien de garde » incombant à l’Association8. Le rectorat d’Edward Monahan, 1972–1977 Pour asseoir son autorité, le Sénat profite aussi du statut affaibli du recteur par intérim Roland Cloutier, lequel, pris dans le feu croisé des affrontements de l’automne 1970, a perdu la confiance des professeurs. À titre d’ancien recteur luimême, Hagey favorise un rectorat fort et, après son arrivée à la Laurentienne, s’emploie à relancer la recherche d’un nouveau recteur, que le choc entre le Conseil et le Sénat a bloquée. Des difficultés sur le plan de la procédure compliquent malheureusement l’entreprise9. En avril 1971, le comité de sélection d’un recteur composé de représentants du Conseil, du Sénat, des étudiants et de l’administration convient d’une liste courte de trois candidats : trois hommes catholiques, dont un seul vient de l’interne et deux sont francophones. Début mai, les candidats rencontrent les différents corps de la Laurentienne dans le cadre d’un « cirque » semi-public, selon les souvenirs de l’un. Le Conseil et le Sénat évaluent ensuite la viabilité de chacun d’eux, votent de façon officieuse, puis font et refont leurs classements. Le Sénat juge les trois « acceptables », quoiqu’avec « une forte préférence » pour l’un d’eux, tandis que le Conseil en préconise un autre, mais par moins que les 70 pour cent exigés par son propre règlement. Pour sortir de l’impasse, le Conseil demande de nouveaux noms au comité de sélection, mais celui-ci recommande plutôt qu’un nouveau comité entreprenne sa propre recherche avec l’objectif d’une nomination en juillet 197210. En coulisse, les parties cherchent une solution à cet embarrassant imbroglio. Des facteurs tels que les idées des candidats sur la gouvernance universitaire ont certes de l’importance, mais l’élément critique, vu le statut bilingue de la Laurentienne, est la maîtrise du français du candidat que le Conseil comme le Sénat jugent le plus acceptable : Edward J. Monahan, secrétaire adjoint à la direction de

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edward j . monahan .  |  Recteur de l’Université Laurentienne, 1972–1977.

la Canadian Association of University Teachers. Si les « critères d’évaluation » du comité de sélection ne stipulent pas que le « bilinguisme intégral » est nécessaire, on se demande néanmoins si « Le candidat est bilingue? Sympathique au bilinguisme? ». Après des semaines de tractations de coulisses et un nouveau rapport du comité de sélection, le Sénat décide en juin de soutenir la candidature de Monahan. Pendant la discussion, Wes Cragg rappelle que Monahan « comprend le français » et se montre prêt à apprendre le français de conversation, « sensible à la présence culturelle française » et disposé à « consacrer des fonds à la promotion de la présence culturelle française à la Laurentienne en surplus des formules usuelles de financement ». Cet engagement suffit clairement à rallier les esprits dubitatifs, car la motion à l’appui du candidat est adoptée à dix-sept contre un, avec deux abstentions, lors d’un vote secret. Prenant acte lui aussi de la détermination de Monahan de devenir « couramment bilingue », le Conseil des gouverneurs approuve sa nomination à l’unanimité trois semaines plus tard11. Un problème subsiste pourtant. Monahan n’est pas disponible. Ayant appris, en juin, qu’aucun des trois candidats finalistes n’avait été retenu et que tous trois avaient même été exclus de la nouvelle quête, il a accepté un mandat de trois ans à titre d’adjoint du recteur de l’Université Queen’s, John Deutsch. Bien qu’il ait été tenu informé des derniers développements. Monahan est tout de même pris de court le 1er août, sa première journée à Queen’s, quand le président du comité exécutif du Conseil, Norm Wadge, lui téléphone pour lui offrir le rectorat. Deutsch ayant accepté de le libérer au terme d’une année à Queen’s, un arrangement jugé recevable par la Laurentienne, Monahan accepte un mandat effectif à compter du 1er juillet 1972. D’ici là, le Conseil convient de reconduire le recteur par intérim Roland Cloutier dans ses fonctions, encore que sa santé défaillante le contraint au début de 1972 à laisser sa place au vice-recteur par intérim Hugues Albert12. Monahan arrive à la Laurentienne avec un impressionnant bagage de diplômes, à savoir un baccalauréat spécialisé en philosophie et en histoire ainsi qu’une

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maîtrise et un doctorat en philosophie, tous trois de l’Université de Toronto, de même qu’une licence en études médiévales du Pontifical Institute de cet établissement. Sa carrière universitaire a débuté en 1953, par trois années passées comme professeur adjoint de philosophie à l’Université Villanueva, en Pennsylvanie, suivies d’une autre à l’Université Xavier de Cincinnati, en Ohio. En 1957, il a rejoint le département de philosophie de l’Université St. Francis Xavier, en Nouvelle-Écosse, où il est resté jusqu’en 1965. C’est alors qu’il a entrepris un mandat de cinq ans auprès de la CAUT, une de ses tâches consistant à promouvoir les recommandations du rapport Duff-Berdahl. Il a eu, durant ces années, l’occasion de se familiariser avec la situation « trouble » existant à la Laurentienne13. Même si Monahan en viendra un jour à juger son passage à la Laurentienne comme « la période la plus excitante et la plus productive » de sa carrière, il a peutêtre à l’occasion des arrière-pensées quant à la sagesse de son choix. Des défis financiers sans précédent l’attendent d’emblée : inscriptions en baisse, revenus insuffisants et flambée des coûts. De petits déficits annuels résorbés par des subventions provinciales ponctuelles ont été la norme dans les premières années, puis cela a changé au milieu des années 1960 en raison de la forte hausse des inscriptions et de l’adoption par l’Ontario d’une formule de financement jumelée à des distributions de subventions additionnelles aux petites universités et de subventions au bilinguisme pour la Laurentienne et l’Université d’Ottawa. Dotée d’un fonds de réserve de plus d’un demi-million de dollars au début des années 1970, la Laurentienne entrevoit l’avenir avec optimisme. Une baisse des inscriptions à l’échelle de la province à l’automne 1971 anéantit toutefois les rêves de voir le nombre d’étudiants doubler et de nouvelles facultés en médecine et en droit s’ajouter d’ici le milieu de la décennie. Au lieu des 2 400 projetées, les inscriptions à temps plein à la Laurentienne chutent sous les 2 000, ce qui se traduit par un manque à gagner et un déficit d’exploitation14. Les déficits deviennent la norme sous Monahan. Les inscriptions stagnent parce que plus de jeunes Nord-Ontariens qu’on l’a escompté choisissent d’étudier ailleurs en province, parce que le taux de rétention est décevant et parce que le gros des enseignants de la région, très nombreux à suivre des cours dans les années 1960, ont maintenant leur diplôme en poche. S’ajoute à cela une tendance chez les étudiants à délaisser les secteurs traditionnels tels les arts et les sciences, les mieux dotés sur le plan professoral, au profit des écoles professionnelles, de commerce par exemple, plus coûteuses, mais comptant un nombre insuffisant de professeurs. De plus, le financement provincial ne suit pas la progression de l’inflation, de sorte que le financement de l’Ontario par étudiant passe sous la moyenne provinciale canadienne durant la décennie. Au printemps 1974, son fonds de réserve désormais épuisé, l’Université doit couvrir ses déficits à même son flux de trésorerie, une situation malsaine. La province agrée bien sûr aux demandes d’aide. En septembre, elle commence à pleinement financer les inscriptions aux collèges fédérés, comme la Laurentienne le souhaitait depuis longtemps, et, au mois de mars suivant, elle attribue à l’Université une subvention « nordique » spéciale. Les déficits s’accumulent quand même, menaçant même de rendre la dette impossible à gérer. En février 1976, devant la perspective d’un manque à gagner d’un demi-million

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de dollars pour l’année universitaire à venir, Monahan se tourne une fois encore vers le premier ministre Davis et une fois encore, la province répond à l’appel. Une subvention nordique doublée et des mesures d’austérité budgétaires permettent d’équilibrer le budget tout en contribuant 100 000 $ à la réduction de la dette. Si la mesure offre un soulagement immédiat, son coût s’avère ultimement élevé, tant pour Monahan – blâmé par certains dans la communauté universitaire pour les suppressions dans les programmes et le corps professoral – que pour son successeur, qui devra composer avec un gouvernement provincial beaucoup moins bien disposé envers le bourbier de la Laurentienne15. Sur une telle toile de fond, les pratiques de gouvernance participatives évoluent par tâtonnements, non sans heurts. Deux sénateurs étudiants démissionnent en 1971 pour protester contre les valses-hésitations du Sénat. Bien qu’il soit inquiet, dans les premières années de son mandat, que le système devienne trop « populiste », Monahan laisse aller, préférant s’attaquer à de plus pressantes questions administratives. Il relève tout de même certaines failles dans une note de service datée de novembre 1974 et adressée au Sénat : les procédures de sélection des principaux administrateurs s’avèrent impossibles à suivre ; le droit concédé aux départements de déterminer leurs propres règles de sélection d’un directeur a entraîné un chaos (63 directeurs en quatre ans, la plupart ne servant que pendant une année) ; et les vingt comités permanents du Sénat comptent plus de 200 membres, nombre qui triplera même éventuellement, un total nettement exagéré par rapport aux 245 professeurs. Qui plus est, expliquera plus tard Monahan, l’enthousiasme des professeurs comme des étudiants s’est amenuisé au point où il devient difficile de recruter de nouveaux membres et d’avoir quorum aux réunions. Le doyen des sciences Doug Williamson, pourtant critique envers les mesures d’attrition des coûts de l’administration, abonde dans le même sens : « notre insistance pour que chaque corps imaginable et parfois inimaginable soit représenté, sans égard à sa pertinence ou à la tâche à accomplir, n’est ni logique, ni pratique, et ne contribue peut-être qu’à accroître la division et l’insatisfaction envers les instances participatives de la gouvernance universitaire ». Quelque chose doit changer16. Le Conseil en convient, quoique surtout à cause des difficultés budgétaires de l’Université. En juin 1975, le comité exécutif commande au comité des finances de modifier le processus d’établissement du budget afin que le comité budgétaire du Sénat puisse déposer un budget équilibré pour l’année 1976–1977. Ce dernier fait savoir en septembre qu’il y est parvenu et que « les [deux] Comités ont établi une procédure mixte permettant au comité des finances de participer aux étapes du processus d’établissement du budget », premier pas vers un contrôle accru du Conseil sur le budget17. En décembre, alors que le mandat de Monahan tire à sa fin, le Conseil établit un comité mixte avec le Sénat chargé d’évaluer la performance de ce dernier et de déterminer s’il faut lui chercher un successeur. La gouvernance universitaire retient le gros de l’attention de ce comité. La communauté universitaire, apprendil, partage largement l’opinion de Monahan au sujet des ratés de la démocratie participative telle qu’elle se pratique à la Laurentienne. Les plaintes concernent un peu tout : trop de comités à trop de niveaux, incapacité des membres des comités

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de convenir de solutions, réduction du Sénat au statut de forum pour « vues conflictuelles », sans égard pour les besoins d’ensemble de l’Université, etc. Les solutions suggérées divergent, mais engagent généralement une rationalisation du fonctionnement du Sénat et de ses comités, de même qu’un renforcement du rectorat. Le rapport déposé en avril 1976 fait donc sa priorité de la création d’un comité mixte du Conseil et du Sénat pour revoir les procédures de gouvernance de la Laurentienne18. Ce nouveau comité voit le jour dès l’été. Présidé par la gouverneure Mary Weaver, il a le mandat d’évaluer « l’administration universitaire et ses comités ainsi que leur fonctionnement afin d’en accroître l’efficacité et le bon fonctionnement ». Son rapport paraît en mai 1977 au terme d’un travail minutieux. Tant les professeurs que les administrateurs, conclut-il, consacrent trop de temps aux divers comités, au détriment de l’enseignement et de la recherche dans le premier cas et du leadership universitaire dans le second. Toute réorganisation devrait veiller à ce que les professeurs puissent « être réellement entendus » dans le cadre de la sélection du personnel administratif clé, mais les administrateurs, bien que responsables devant le corps professoral, doivent disposer de l’autorité de déterminer et d’appliquer toute politique. Une confiance mutuelle accrue éliminerait le besoin d’avoir autant de comités, avance le rapport, permettant du coup à chacun d’assumer ses responsabilités plus efficacement19. Le moment fait foi de tout, dit-on, et cela vaut pour le rapport Weaver. Si ses recommandations concernant les affaires francophones mènent à la création, en 1978, du Conseil de l’enseignement en français – dont le deuxième directeur, Gaétan Gervais, devient membre du comité du budget au début des années 1980 –, ses retombées se voient globalement atténuées par l’annonce concomitante que Monahan quitterait la Laurentienne au terme de son mandat, en juin 1977. Malgré tout, en ciblant cet enjeu, le comité mixte du Conseil et du Sénat sur l’administration universitaire pose un jalon de plus dans l’évolution de la gouvernance de la Laurentienne. Au départ, le recteur Monahan ne prévoyait pas démissionner. En novembre 1975, il informe le président du Conseil, Desmarais, qu’il est disposé à accepter un nouveau mandat de trois ans, conditionnel à une évaluation de son travail comme le stipulaient ses conditions d’embauche. Le Sénat et le Conseil établissent en conséquence un comité mixte d’évaluation. Le processus est bien enclenché quand le président du Conseil des universités de l’Ontario, John Evans, recteur de l’Université de Toronto, offre à Monahan de devenir directeur général du CUO . Après réflexion, ce dernier accepte ce qu’il qualifiera plus tard de « nouveau défi sur une scène plus vaste » et informe le Conseil des gouverneurs de sa décision en mars 197620. Un sondage de l’A PUL menée dans le cadre de l’évaluation de son rendement, que d’aucuns estiment avoir contribué à la démission de Monahan, révèle une opinion divisée au sujet du mandat du recteur. Près de 70 pour cent des professeurs ont participé au sondage. À la première question – le recteur devrait-il être reconduit? –, une pluralité des répondants dit non. À la seconde – un comité de sélection d’un recteur devrait-il être créé? –, 60 pour cent répondent oui. Le rapport final du

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paysage du campus .  |  Au milieu des années 1970, le campus de l’Université Laurentienne s’est déjà profondément transformé.

comité d’évaluation du rendement du recteur dresse un bilan également mitigé du travail de Monahan. Commentant d’abord ses forces, il dépeint le recteur comme « un excellent gestionnaire qui a fait émerger du chaos une stabilité administrative et une efficacité fonctionnelle », ce dont la Laurentienne avait cruellement besoin et une des pierres angulaires de son mandat originel du point de vue du Conseil comme du Sénat. Ce succès impressionne d’autant que le vice-rectorat a été en proie à bien des vicissitudes pendant la même période. Le rapport souligne aussi la valeur de ses échanges avec Queen’s Park et sa bureaucratie, des contacts qui ont plus d’une fois permis à l’Université d’esquiver des dilemmes financiers. Le document, enfin, fait l’éloge de l’approche « consensuelle » de la gouvernance interne que Monahan a préconisée et qui a minimisé les « conflits majeurs » au sein de l’institution, une allusion, entre autres choses, aux crises d’embauche aux départements de travail social et de sciences infirmières qui avaient monopolisé une bonne part des énergies du recteur21. En revanche, ce même mode de fonctionnement consensuel appliqué en l’absence d’une direction claire émanant du rectorat apparaît à certains comme une faiblesse dans la démocratie participative pratiquée à la Laurentienne. D’autres encore, en sciences principalement, mettent en doute la direction que Monahan souhaite insuffler à la Laurentienne, au sujet notamment de l’orientation vers l’interdisciplinarité. Le rapport note en terminant que pour certains, le travail de Monahan sur le plan des relations publiques a laissé à désirer. Ces critiques font valoir que Monahan n’a pas su bien représenter l’Université à l’échelle de la communauté, ni à celle du Nord ontarien. Le reproche ne manque pas de fondement – les relations communautaires ne figuraient pas parmi les priorités de Monahan –, mais personne n’a à redire contre l’éthique de travail du recteur, ni ne prend le soin d’indiquer quelles activités il aurait dû sacrifier au profit de cette question. Après son passage à la Laurentienne, Monahan applique cette même éthique de travail au Conseil des universités de l’Ontario, où il sert le système universitaire ontarien

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avec brio pendant près de quinze ans. Il profite de son départ à la retraite en 1991 pour revenir à des racines de chercheur et écrire une histoire du CUO 22. Le recteur Henry Best, les collèges affiliés et les défis de la gouvernance, 1977–1984 La facilité exemplaire avec laquelle on désigne le successeur du recteur Monahan fait contraste avec les difficultés procédurales qui avaient entouré la nomination de celui-ci. En avril 1976, le Sénat et le Conseil approuvent la composition et les attributions d’un comité de sélection du recteur dirigé par Jean-Noël Desmarais, président du Conseil, et comprenant trois gouverneurs, trois sénateurs, deux étudiants et un membre de l’administration. Le comité établit pendant l’été sa liste de critères de sélection, sur laquelle, comme cela deviendrait la norme, le « bilinguisme intégral » figure en tête, et ratisse large pour dénicher de bons candidats. Parmi les sept qu’il rencontre, c’est Henry B. M. Best qu’il classe premier sur la liste courte, fin novembre. Le Conseil et le Sénat entérinent tous deux sa nomination deux semaines plus tard23. En Henry Best, fils du Dr Charles Best, lui-même associé du Dr Frederick Banting dans la découverte de l’insuline au début des années 1920 et récipiendaire d’un doctorat honorifique de la Laurentienne en 1971, le fauteuil du recteur trouve un occupant aux nombreux atouts. Parfaitement bilingue, il cumule une solide formation universitaire – maîtrise en arts et doctorat en histoire de l’Université Laval – et une expérience d’administrateur au sein des mondes politique et universitaire. À la fin des années 1950, avant d’entreprendre son doctorat, Best a servi d’adjoint administratif à plusieurs ministres conservateurs à Ottawa, chose qui, espère-t-on, servira bien la Laurentienne auprès du gouvernement Davis à Queen’s Park. En 1964, il devient professeur à l’Université York, où sa carrière suit une double voie académique et administrative : chargé de cours en histoire canadienne et directeur des services étudiants de 1966 à 1969, puis professeur agrégé d’histoire, doyen associé du Collège Atkinson et coordinateur intérimaire des études canadiennes de 1971 à 1973. Best, dont un des mandats consiste à redorer le blason de la Laurentienne dans la communauté, constitue « une copie carbone biculturelle de la communauté sudburoise en soi [et] devait sembler parfaitement taillé pour le poste », selon Norm Tollinsky du Northern Life24. Le mandat de Best coïncidant avec la plus longue période de ralentissement économique depuis les années 1930 en Ontario, le principal défi du nouveau recteur concerne inévitablement la situation financière de la Laurentienne. Les facteurs qui ont tracassé son prédécesseur – financement inadéquat, hausse des coûts, faible croissance des inscriptions (le nombre d’étudiants à plein temps n’a franchi le cap des 3 000 que dans les années 1980) – compliquent toujours un peu plus l’établissement d’un budget. Si celui pour 1978–1979, le premier établi sous ses auspices, ne rompt pas la fragile entente entre le Conseil et le Sénat, certaines clauses controversées sur le personnel excédentaire, surtout en sciences, n’augurent rien de bon25.

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henry b . m . best.  |  Recteur de l’Université Laurentienne, 1977–1984.

La crise s’aggrave l’année suivante. En août 1978, le premier ministre Davis nomme Bette Stephenson ministre des Collèges et Universités, poste qu’elle occupe pendant six années et demie. À la différence de ses prédécesseurs, Stephenson n’a guère de sympathie pour les appels à l’aide financière des universités ontariennes, la Laurentienne en particulier. Les subventions de fonctionnement de celle-ci ont doublé depuis 1973, note la ministre peu après son entrée en fonction, alors que ses inscriptions n’ont grimpé que de 12 pour cent. La valeur de ses subventions pour chaque étudiant à plein temps ou son équivalent s’était accrue de 86 pour cent, de loin le plus haut taux dans la province. Il ne faut donc pas s’étonner que le plaidoyer de Best suivant l’annonce de compressions dans les subventions à la Laurentienne, en 1979, ne fait pas reculer Stephenson26. Au même moment, le comité budgétaire du Sénat peine à équilibrer son budget pour l’année 1979–1980. Des mois de délibérations l’ont convaincu qu’il n’y parviendrait pas sans fortes répercussions au sein de l’Université. En juin 1979, il fait circuler l’ébauche d’un document suggérant d’éliminer quatre départements qui attirent peu d’étudiants, mais qui sont au cœur du modèle universitaire : philosophie, langues modernes, anthropologie et géologie. La suggestion produit l’onde de choc recherchée, non seulement au sein de la Laurentienne, mais à travers toute la région. Décidé à éviter une solution aussi draconienne, Best appelle à l’aide Stephenson et le ministre des Affaires du Nord, Léo Bernier. Des particuliers comme le président régional de Sudbury Doug Frith ajoutent leur voix à la défense de la Laurentienne. Le fait que peu de membres du personnel enseignant ait effectivement été déclarés excédentaires alors que l’Université a dégagé des surplus depuis trois ans affaiblit sa propre cause. Les démarches n’aboutissent pas, lais-

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sant la Laurentienne dans les limbes budgétaires. Répudiant l’idée de supprimer des départements entiers, le Sénat approuve un budget déficitaire que le Conseil rejette, mais qui, au bout du compte, sert à l’Université de plan financier détaillé pour l’année27. Préoccupé par les ratés budgétaires de la Laurentienne, le ministère des Collèges et Universités y dépêche en août 1979 un agent des affaires universitaires, Peter Wright, pour évaluer la situation. Wright attribue les difficultés de la Laurentienne à plusieurs facteurs : l’incapacité des membres du comité budgétaire du Sénat de distinguer les intérêts de l’Université de ceux de leur propre département ou division, des méthodes « simplistes » de prévision des revenus et des dépenses, l’absence de tout plan de développement à terme communément accepté qui puisse orienter le processus budgétaire et, « en partie, le fait que le Conseil a délégué plusieurs de ses pouvoirs au Sénat, consciemment ou inconsciemment28 ». En réponse aux pressions ministérielles, le Conseil et le Sénat confient au recteur Best, en septembre 1979, la direction d’un comité mixte de cinq personnes chargé « de faire des suggestions concernant la révision du processus budgétaire ». Le comité budgétaire institué, note le rapport final déposé en novembre, est trop gros, sa composition changeante et ses membres dénués d’expertise et non responsables des décisions – une situation qui laisse à désirer. En lieu et place, le rapport propose qu’un nouveau comité budgétaire, composé du vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, du vice-recteur à l’administration et des doyens des facultés, « se rapporte au recteur, lequel soumettra le budget final au Sénat, aux fins de renseignement, et au conseil […] pour autorisation ». Le Conseil et le Sénat acceptent ces recommandations, à un changement près. À l’insistance du Sénat, le Conseil remplace « fins de renseignement » par « consultation », un terme ambigu que le premier entend dans le sens d’approbation et le second dans un sens moins contraignant. Bien que le Sénat soutienne le contraire, une dimension vitale de son autorité en matière budgétaire vient de passer entre les mains du Conseil29. À court terme, le nouveau processus budgétaire ne règle pas le dilemme financier de la Laurentienne – seules l’amélioration de la situation économique de la province et une hausse des inscriptions au milieu des années 1980 allaient y parvenir –, mais il permet d’atténuer les tensions au sein de l’Université. Elle redonne surtout au Conseil foi dans le processus budgétaire. Ainsi, quand le nouveau comité propose un déficit d’un demi-million de dollars pour l’année 1981–1982, les gouverneurs acquiescent. Cela lui vaut la collaboration prudente du Sénat qui, l’année suivante, accepte d’équilibrer le budget par une réduction des dépenses de trois quarts de millions de dollars, des compressions d’une magnitude qu’il a jusqu’alors refusé d’envisager30. Les problèmes financiers plombant le rectorat de Best affectent la Laurentienne d’autres manières, particulièrement en accélérant l’accréditation de l’Association des professeurs de l’Université Laurentienne à titre d’agent négociateur légal pour les professeurs et les bibliothécaires. Ce rebondissement doit surtout aux craintes accumulées par les professeurs en réaction à des années d’incertitudes financières et aux mesures radicales proposées, mais pas toujours appliquées, pour les régler. Que cela survienne en 1979 pendant la pire crise de la décennie et deux années et

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demie à peine après que les professeurs aient officiellement refusé de se syndiquer ne relève assurément pas du hasard31. La syndicalisation du corps professoral modifie certains aspects de la gouvernance universitaire. Ainsi, en mai 1979, à la veille du vote des professeurs, le Conseil des gouverneurs décrète que toute question relative aux relations avec le personnel serait étudiée à huis clos, en présence des seuls membres votants. Il crée aussi un comité des relations avec le personnel composé de gouverneurs ayant droit de vote et chargé de représenter le Conseil dans la négociation et l’application des conventions collectives. Les seules exceptions concernent la responsabilité du comité exécutif du Conseil quant aux « conséquences financières globales » des négociations et l’autorité du Conseil pour la ratification finale. Par ailleurs, le comité des relations avec le personnel ne distribuera ses procès-verbaux qu’à ses membres. La nature secrète de ces mesures, bien qu’explicables par des exigences de confidentialité, renverse la tendance à l’ouverture qui a marqué les travaux du Conseil ces dernières années32. Dans la foulée de la syndicalisation, les opposants à l’A PUL plaident qu’en entraînant la disparition de l’esprit collégial et « un durcissement du front entre “eux” et “nous” », la syndicalisation diminuerait le rôle des professeurs dans la gouvernance universitaire. Les partisans rétorquent que la syndicalisation, ailleurs, a « préservé le degré de participation des professeurs à la gouvernance universitaire [et souvent même] accru leur participation à la gestion, en plus de clarifier et de détailler les procédures opérationnelles et les droits des professeurs ». Ce débat se poursuit dans les années subséquentes, mais dans l’immédiat, comme cela s’était vu ailleurs, la syndicalisation altère le mode d’action des professeurs sur les affaires universitaires en faisant passer l’autorité du Sénat sur la gouvernance entre les mains du syndicat33. En septembre 1979, Garry Clarke, ancien président du Sénat comme de l’A PUL , rédige une note de service intitulée « Le rôle du Sénat de la Laurentienne selon la convention collective des professeurs ». Bien que sa conclusion voulant que le Sénat, « en tant que lieu caractéristique – et central – de direction collégiale », soit appelé à « dépérir » à la suite de l’accréditation lui paraisse, de son propre aveu, « un pronostic trop pessimiste », son analyse est pénétrante. Clarke prédit que l’autorité du Sénat souffrirait des termes de la convention collective négociée par l’Association des professeurs et sans doute aussi de la volonté du Conseil de reconquérir les pouvoirs cédés naguère. Le budget, les nominations et promotions et la planification universitaire constituent selon lui les trois sphères de responsabilité sénatoriales les plus à risque34. Les pronostics de Clarke s’avèrent passablement justes. Rappelons que le contrôle du processus budgétaire migre rapidement du Sénat à l’administration. Peu après, la première convention collective de la Laurentienne établit des règles pour les nominations et les promotions qui donnent à l’association professorale le pouvoir de désigner la moitié des membres du nouveau comité du personnel de l’Université, laissant au Sénat le reste. Deux ans plus tard, le Conseil reconnait aussi à l’A PUL le droit de nommer les membres du comité professoral divisionnaire et du comité du personnel de la bibliothèque. Eu égard à la planification, une

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étape clé a été franchie plus tôt quand, non sans protestations, les quatre représentants sénatoriaux des professeurs ont été remplacés par les quatre doyens au sein du comité de planification universitaire, plaçant du coup l’autorité entre les mains des administrateurs. La conclusion de Clarke est mordante : la représentation de l’Université « entendue comme communauté de savoir autogérée et responsabilisée par les décisions de représentants élus [au Sénat] semble avoir disparu au profit [de celle] d’une institution publique légalement responsable devant son agent subventionnaire (gouvernemental), ses étudiants payeurs et sa communauté (par le biais du Conseil), d’une part, et, de l’autre, liée par contrat légal avec tous ses employés35 ». Les crises financière et économique des années 1970 affectent aussi la gouvernance de la Laurentienne du point de vue de ses rapports avec ses collèges affiliés. Le Collège universitaire de Hearst, en 1963, a été le premier à parapher une entente d’affiliation, encore que son association à l’Université de Sudbury datant de 1957 signifie qu’il avait fonctionné sous le « parapluie » de la Laurentienne depuis la création de celle-ci. Le Collège universitaire Algoma de Sault-Sainte-Marie intègre ensuite le giron, en 1965, suivi du Collège universitaire Nipissing de North Bay l’année suivante. À ces deux établissements, les cours commencent en 1967. Nipissing et Algoma s’irritent d’emblée de ce qu’ils tiennent pour de pesantes restrictions imposées par Laurentienne sur leur développement, faisant plusieurs fois appel à la province pour obtenir plus d’indépendance et, si possible, le statut d’université en bonne et due forme. La Laurentienne, à sa décharge, réplique que le Nord-Est ontarien ne peut pas supporter trois universités séparées, ni par son économie, ni par sa démographie. Deux enquêtes provinciales, la Commission Wright sur l’éducation postsecondaire en Ontario (1972) et l’enquête de David Cameron commanditée par le Conseil économique de l’Ontario et intitulée The Northern Dilemma: Public Policy and Post-Secondary Education in Northern Ontario (1978), recommandent la désaffiliation pour Nipissing et Algoma. Ces conclusions sont ignorées parce que les données liées aux finances et aux inscriptions – le gouvernement Davis place Algoma sous tutelle en 1976 au terme d’une commission royale d’enquête provinciale – semblent donner raison à la Laurentienne. La province demeure malgré tout au défi de transformer le système de la Laurentienne en un réseau décentralisé qui serait à la fois viable sur le plan financier et intégré sur le plan universitaire36. La ministre Stephenson, responsable des Collèges et Universités, se montre obstinément déterminée à résoudre cette question, au plus grand malheur du recteur Best qui se voit contraint d’y consacrer beaucoup de temps et d’énergie pour des résultats minimaux. En plus des efforts constants du Conseil ontarien des affaires universitaires (COAU) et d’un comité provincial sur le rôle des universités ontariennes dans l’avenir, trois autres commissions ou comités buteront sur ce problème au début des années 1980. La séquence commence en 1981, avec un comité du COAU dirigé par l’ancien recteur de l’Université McMaster, Arthur N. Bourns, et chargé, en accord avec Best et les dirigeants des trois collèges universitaires affiliés, de proposer des changements structurels au système de la Laurentienne. Bien que seul Algoma manifeste le moindre enthousiasme envers le plan de Bourns de

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créer une université unique à plusieurs campus – Nipissing et Hearst s’y opposent complètement, tandis que l’appui de la Laurentienne dépend de ce que la nouvelle université soit très centralisée, une voie inacceptable aux autres –, Stephenson accepte la recommandation du COAU d’aller de l’avant et, à l’automne 1982, charge un comité, présidé par un de ses prédécesseurs au ministère, Harry Parrott, d’étudier l’éducation universitaire dans le Nord-Est ontarien37. Déposé en octobre 1983 au terme de six mois d’audiences publiques dans cinq communautés du Nord-Est ontarien – Hearst, Sault-Sainte-Marie, North Bay, Sudbury et Timmins –, le rapport du comité Parrott développe la proposition de Bourns. De façon prévisible, chaque établissement voit l’idée des multiples campus par la lentille réfractive de sa partialité. La Laurentienne juge les structures de gouvernance proposées encombrantes, trop décentralisées et insuffisamment aptes à protéger les intérêts des francophones, et s’oppose par ailleurs au nouveau nom suggéré d’Université Champlain. Nipissing rejette le rapport pour les raisons inverses : trop peu d’autorité revient aux campus périphériques. Également préoccupé de la menace à son caractère francophone, Hearst abonde dans le même sens. Seul Algoma donne à l’idée un soutien inconditionnel38. La Laurentienne et ses affiliés échouent à s’entendre sur une réponse commune au rapport Parrott durant l’hiver 1983–1984. En mai, le gouvernement opte conséquemment de transmettre le rapport à une commission sur le développement futur des universités ontariennes, menée par l’ex-président de Northern Central Gas Edmond Bovey et chargée de concevoir un plan d’action en vue d’une restructuration de tout le système provincial. La responsabilité de préparer la réponse de la Laurentienne échoit au successeur du recteur Best, John Daniel, lequel réussit à semer le doute sur les propositions du comité Parrott. Le rapport Bovey de janvier 1985 voit l’idée d’une Université Champlain délaissée au profit d’un nouveau conseil de coordination et de subventions additionnelles au système déjà en place. L’arrivée au pouvoir des libéraux de David Peterson dans la foulée de l’élection provinciale de février 1985 rend toutes ces propositions caduques. Le nouveau ministre des Collèges et Universités, Greg Sorbara, délaisse les grandioses projets de restructuration de sa prédécesseure au profit d’une approche plus pragmatique, à savoir la négociation de nouvelles ententes d’affiliation donnant aux collèges plus d’autonomie académique. Ces ententes sont dûment signées en 198639. On ne pouvait résoudre si aisément le dilemme sous-jacent au système de la Laurentienne, aussi la relation entre celle-ci et ses établissements affiliés demeuret-elle tendue. La mise en tutelle d’Algoma prend fin en 1986 et, deux ans plus tard, ce collège et Nipissing réitèrent leur demande de désaffiliation, avec cette fois des résultats très différents à court terme. Tôt en 1989, les difficultés financières persistantes du Collège Algoma poussent le ministère des Collèges et Universités à lui imposer de nouvelles contraintes, dont un article confiant à la Laurentienne la supervision de ses finances, une situation qui prévaut pendant plusieurs années. Au même moment, Nipissing connait une tout autre fortune. Il demande officiellement à la province une charte universitaire à l’automne 1989. Le gouvernement néo-démocrate de Bob Rae, élu en 1990, se montre réceptif à la demande et, en novembre 1992, Queen’s Park approuve un projet de loi privé élevant le collège au

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rang d’université indépendante. Algoma, pour sa part, obtient finalement satisfaction en 2008, alors que le gouvernement libéral de Dalton McGuinty lui confère le statut d’université40. À la différence des relations frustrantes entre la Laurentienne et ses établissements affiliés, les efforts du recteur Best pour mieux intégrer l’Université dans la communauté sont couronnés de succès. Pendant ses quinze premières années, la Laurentienne a entretenu des relations changeantes avec la communauté, en dépit des efforts du Sudbury Star, principal promoteur de l’Université, qui n’a de cesse de claironner le potentiel éducatif de celle-ci et de souligner sa valeur économique et culturelle pour Sudbury. En dépit, pourtant, de la couverture détaillée des activités universitaires, la Laurentienne et la communauté n’arrivent pas à vraiment se rejoindre, surtout après que la première ait déménagé sur le chemin du lac Ramsey en 1964. « Université ni de ville, ni de banlieue », la Laurentienne doit payer le prix de son « insularité », note le chroniqueur du Star Ian Green41. Un des premiers efforts pour combler cette distance, très fructueux jusqu’à ce que l’Université lui retire son soutien au milieu des années 1990 en raison de contraintes budgétaires, est le projet du centenaire du Canada porté conjointement par la Laurentienne et la Chambre de commerce de Sudbury et du district. C’est en 1966 que le Conseil des gouverneurs est saisi d’une proposition de la chambre d’acheter la propriété de « Bell Rock » de l’homme d’affaires sudburois W. J. Bell et d’en convertir le manoir en musée et en centre des arts administrés par l’Université. Intrigués, prudents, les gouverneurs n’acceptent l’offre en principe qu’après avoir obtenu l’assurance que les règlements provinciaux leur permettaient de consacrer une partie du budget de fonctionnement à un tel dessein et que la Chambre de commerce a accepté des conditions limitant la responsabilité financière de l’Université. Malgré cela, la négociation d’une entente officielle et la rénovation du site repoussent à 1969 le transfert à la Laurentienne. Si l’engagement de l’Université dans les opérations pendant les trois décennies suivantes n’est pas allé sans controverses, le Musée et centre des arts de l’Université Laurentienne ajoute à Sudbury et au district une dimension culturelle vitale qui leur manquait jusque-là42. Au début des années 1970, des contraintes administratives et financières limitent l’engagement communautaire de la Laurentienne, mais les années Monahan n’en sont pas dépourvues pour autant. Des professeurs venus à Laurentienne en pensant n’y être que de passage prennent racine dans la communauté et privilégient des objets de recherche d’intérêt régional comme le développement urbain, l’environnement et les Amérindiens. « Notre situation géographique a fortement contribué au caractère régional de l’Université Laurentienne, qui, dès lors, a des obligations plutôt uniques envers cette région », commente en novembre 1975 le doyen des sciences Doug Williamson43. Si plus d’un facteur pousse le Conseil des gouverneurs à faire de l’amélioration des relations communautaires une des priorités du recteur Best, aucun ne pèse aussi lourd que le besoin, en ces temps d’inscriptions stagnantes, de convaincre un plus grand pourcentage des étudiants locaux de fréquenter la Laurentienne. À cette fin, durant sa première année en poste, Best invite les employés de la Lau-

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l a l aurentienne et les efforts de reverdissement du bassin de sudbury.  |  Rien n’illustre mieux l’impact de l’Université Laurentienne sur sa communauté que sa participation aux efforts de reverdissement de Sudbury, une initiative à grand succès lancée dans les années 1970 où le département de biologie de l’Université joue un rôle de premier plan.

rentienne, tout l’hiver durant, à une série de soupers à sa résidence de la rue John, auxquels assistent aussi des Sudburois sans lien direct avec l’Université. Appréciés au sein des cercles universitaires comme en dehors, ces soupers établissent une norme de sociabilité jamais vue avant, ni depuis, pour le cabinet du recteur. Ils permettent également de personnaliser les rapports entre la communauté et l’Université, polissant l’image de celle-ci auprès de celle-là et vice versa44. Au début de l’année 1978, la Laurentienne crée un groupe de travail sur la fréquentation de l’université et les relations communautaires. Celui-ci entreprend divers projets, dont plusieurs ont été sporadiquement tentés par le passé : diffuser des entrevues avec des professeurs, des étudiants ou des administrateurs sur les ondes de la télévision locale (encore que le créneau horaire du dimanche, 23 h 15, est loin d’être idéal) ; établir un contact permanent avec les responsables du Sudbury Board of Education et le personnel des écoles secondaires ; et avoir une journée portes ouvertes sur le campus vouée à promouvoir les programmes autant que les installations de l’Université. La Semaine de la Laurentienne 1978 marque aussi l’inauguration des Conférences Falconbridge, une série de présentations rendues possibles grâce aux dons de la Falconbridge Nickel et de ses employés à la mémoire de cinq cadres de l’entreprise ayant péri dans un accident d’avion près de Barrie, en Ontario, en septembre 1977. Pendant trois décennies, l’événement permet d’entendre plusieurs érudits et penseurs de calibre international, dont le

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géophysicien Tuzo Wilson de l’Université de Toronto, l’astronaute canadienne Roberta Bondar, le scientifique étatsunien Linus Pauling et la juriste canadienne Beverley McLaughlin, pour n’en nommer que quelques-uns. Après son achat de la Falconbridge Nickel en 2006, Xstrata Nickel fait don de 100 000 $ à la Laurentienne afin que les Conférences commémoratives Xstrata Nickel perpétuent le lien vital entre l’Université et la communauté dans son ensemble45. D’autres développements favorisent le rapprochement de la Laurentienne et de la communauté durant les années 1970. L’un d’eux est le rôle central du département de biologie au sein du Comité consultatif technique de mise en valeur de la végétation, créé conjointement par le gouvernement, la Laurentienne et le secteur privé pour servir de fer de lance du reverdissement de Sudbury. La reconquête de plus de 3 300 hectares de verdure au cours des trente années suivantes transforme le visage et l’image de la communauté. De même, au printemps 1978, la Laurentienne accueille la conférence Sudbury 2001, commanditée par le Comité de Sudbury, vaste organisme communautaire dédié à relancer l’économie locale qui subit les contrecoups d’importantes mises à pied dans le secteur minier. Plusieurs professeurs et le recteur Best y participent46. Si la décision de Best d’élever au rang de gouverneur de la Laurentienne Elmer McVey, président du Conseil du travail de Sudbury et du district, améliore les relations de celle-ci avec un segment de la communauté normalement peu engagée dans les affaires universitaires, elle suscite aussi de l’opposition chez certains gouverneurs. À l’insistance du recteur, l’Université Thorneloe nomme McVey à l’un des sièges anglicans, à la suite de quoi plusieurs gouverneurs menacent de démissionner. Best se souviendra plus tard que McVey a contribué généreusement aux délibérations du Conseil, particulièrement sur les questions relatives aux relations de travail, et qu’il a su gagner le respect de tous ses collègues47. Le sport aussi contribue à rapprocher la Laurentienne et la communauté, en partie grâce au soutien local apporté à des équipes de réputation nationale comme les Lady Vees, championnes canadiennes de basketball universitaire de 1975 à 1979, et en partie à cause des installations ultramodernes que la Laurentienne offre à la communauté. Trois lieux se distinguent. Il y a d’abord la piscine, inaugurée en 1972 et renommée Piscine de l’or olympique (aujourd’hui Piscine de l’or olympique Jeno Tihanyi) en honneur d’un diplômé de la Laurentienne, Alex Baumann, dont la carrière de nageur culmine en 1984 avec deux médailles d’or aux Jeux olympiques de Los Angeles. La piste synthétique aménagée conjointement par la ville et la Laurentienne en 1974 vaut à l’Université une réputation sportive internationale dès 1976, quand l’équipe d’athlétisme de la République démocratique allemande (l’Allemagne de l’Est) la choisit pour son entraînement préolympique. Les Jeux panaméricains juniors d’athlétisme qui se déroulent à l’Université en 1980 ajoutent à sa notoriété, tout comme le font les Jeux canadiens pour les personnes handicapées et les Jeux d’été de l’Ontario en août et en septembre 1983, respectivement, et les Championnats du monde juniors d’athlétisme en 1988. En 1980, enfin, la Laurentienne inaugure officiellement le parcours vita des Voyageurs, un réseau de pistes de ski de fond s’entremêlant à celles des autorités locales de préservation

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de la nature, véritable bénédiction pour une communauté aussi diversifiée par sa composition ethnique comme son climat48. De telles initiatives font en sorte que les relations entre l’Université et la ville se trouvent nettement améliorées au début des années 1980, à preuve la hausse des inscriptions et la plus forte rétention des étudiants de la région. S’il est vrai que la situation économique difficile peut inciter plus d’un étudiant à rester près de la maison, il faut aussi considérer que plusieurs diplômés de la Laurentienne enseignent dans les écoles de la région et que leurs enfants suivent leur trace, ajoutant au sentiment d’appartenance de la communauté envers l’Université. La Laurentienne souligne cet état de fait à l’occasion du centenaire de Sudbury, en 1983, en conférant des doctorats honorifiques à cinq bâtisseurs du Nord ontarien, les hommes d’affaires sudburois J. C. McIsaac, Clifford Fielding et W. B. Plaunt, la citoyenne honoraire de Sudbury Mary Whalen, quatre-vingt-treize ans, et le pionnier du développement des médias J. Conrad Lavigne, de Timmins49. Puisque les réalisations de Best en matière d’engagement communautaire établissent un précédent que ses successeurs ne pourraient pas ignorer, c’est justice qu’il tire personnellement profit de ce rapprochement. Au printemps 1981, comme il l’avait déjà fait au sujet du recteur Monahan, le Conseil lance un processus d’évaluation devant déterminer la pertinence de prolonger le mandat de Best. Une fois encore, l’Association des professeurs sonde ses membres à ce sujet. Il n’a jamais été question de rendre publics les résultats, aux dires du président de l’APUL Oiva Saarinen, mais à la mi-avril le journal Northern Life publie un article selon lequel il existait parmi les professeurs un courant favorable au rejet de Best. La communauté et l’Université réagissent à cette nouvelle en serrant les rangs autour du recteur. Le journal lui-même louange les efforts d’intégration de l’Université au sein de la communauté faits par Best et demande son maintien en poste, comme du reste le fait Paul Reid, président de la Chambre de commerce de Sudbury et du district. Quoique divisée, l’Association des professeurs se joint au Conseil des gouverneurs pour censurer le reportage du Northern Life et, en mai, le Conseil prolonge le mandat de Best de deux ans, jusqu’à 198450. À défaut d’être totalement dénuées des péripéties qui marquent son premier mandat, les deux dernières années en poste du recteur Best connaissent plus de stabilité administrative. Cela s’explique partiellement par le fait que, le temps et l’attention du recteur se voyant de plus en plus sollicités par des enjeux comme les relations avec les établissements affiliés, il faut accroître les responsabilités des vice-recteurs à l’administration et à l’enseignement et la recherche. Ce dernier poste, occupé depuis 1979 par Frank Turner, assume une responsabilité croissante dans les affaires internes, une évolution que vient confirmer sa promotion au poste de vice-recteur exécutif en 1983. Le vice-rectorat à l’administration demeure vacant après la démission de Spike Hennessy en 1979, mais deux ans plus tard, Ron Chrysler, qui a succédé à Carl Nurmi comme contrôleur financier en 1978, devient adjoint du recteur pour les finances et l’administration, puis en 1983 vicerecteur aux finances et à l’administration, avec un accroissement correspondant de ses responsabilités. Cette répartition des tâches libère le recteur de la gestion

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quotidienne des questions administratives et académiques et, de concert avec la définition plus serrée des rôles du Conseil, du Sénat et de l’association des professeurs, clarifie la gouvernance de l’Université51. L’association entre la Laurentienne et le recteur Best ne prend pas fin en même temps que le rectorat de ce dernier. Après un congé sabbatique, il y revient en qualité de professeur au département d’histoire, où il demeure jusqu’à sa retraite en 2000. Toujours actif au sein de la communauté pendant ces années, il donne beaucoup de son temps à la Galerie d’art de Sudbury et au marché local des fermiers, pour ne nommer que deux exemples. Le décès de Best à l’âge de 69 ans, en 2006, donne lieu à un important service commémoratif qui témoigne de la haute estime qu’avaient pour lui l’Université et la communauté.

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La période contemporaine, de 1985 à nos jours matt bray

Du point de vue de la gouvernance, les vingt-cinq années suivantes de la Laurentienne se déroulent fort différemment des vingt-cinq premières. L’habitude et la séparation des rôles des diverses instances – Conseil, administration, Sénat, Association des professeurs – favorisent une saine évolution, moins d’attention étant accordée aux mécanismes de gouvernance et plus à l’enseignement et à la recherche, les deux missions pédagogiques au cœur de l’Université. Les pratiques de gouvernance continuent de changer, mais de façon plus progressive que par les années passées et à l’intérieur d’un cadre plus nettement défini, tantôt par la négociation, tantôt par l’établissement d’un précédent. Si les conflits subsistent durant ces décennies, l’administration se substitue de plus en plus au Conseil et à son comité exécutif comme cible du mécontentement du Sénat et de l’Association des professeurs. Le rectorat de John Daniel, 1984–1989 À mesure que s’accroît le rôle de l’administration, le recteur gagne en importance dans la hiérarchie de la Laurentienne et donne le ton à la gouvernance. Cela vaut certainement pour John S. Daniel, nommé par le Conseil des gouverneurs au printemps 1984 sur la recommandation d’un comité de sélection mixte où siègent, comme cela est maintenant la norme, le Conseil, le Sénat et les étudiants. Britannique d’origine, bilingue, Daniel a été vice-recteur à l’enseignement et à la recherche de l’Université Concordia de 1980 à 1984 et, pendant les deux années précédentes, vice-recteur aux services d’apprentissage à l’Université Athabasca. Diplômé d’Oxford (métallurgie, avec félicitations du jury, 1965) et de l’Université de Paris (doctorat ès sciences physiques, 1969), il a d’abord enseigné au département de génie des métaux à l’Université de Montréal avant de devenir directeur des études à la Télé-Université, toujours au Québec, en 1973. Comme le suggèrent ses nominations à Athabasca, à Télé-Université ou encore à la présidence de l’International Council for Distance Education (1982–1985), Daniel possède une

john s . daniel .  |  Recteur de l’Université Laurentienne, 1984–1989.

expérience reconnue dans le domaine de l’enseignement par correspondance. Son profil correspond bien avec le programme de formation à distance de la Laurentienne qui, pendant son mandat, s’étend à tout le Canada et même à l’étranger1. Daniel arrive en poste muni d’une confiance en soi s’appuyant sur son expérience d’administrateur de niveau supérieur. Sa courbe d’apprentissage est plus courte que celle des autres et il n’hésite pas à affirmer l’autorité de son cabinet et de l’administration. Quelques mois après avoir entrepris son mandat en juillet 1984, il soumet au Sénat un rapport critique envers le processus budgétaire de l’Université, lui reprochant de ne pas accorder aux départements et aux écoles de délais suffisants pour embaucher les nouveaux professeurs, de ne pas engager adéquatement le comité de la planification académique (COPA), ne pas définir clairement le rôle du Sénat et de placer les doyens et le directeur du Conseil de l’enseignement en français en conflit d’intérêts à titre de demandeurs et d’arbitres. Daniel réorganise alors les procédures, restreignant la composition du comité au recteur et aux vice-recteurs et arrangeant des consultations avec les départements et les écoles, les principaux cadres de l’Université et le COPA . Il établit aussi un calendrier de huit mois culminant avec le dépôt du budget au Conseil en avril, quoique divers imprévus, l’incertitude concernant le financement provincial en particulier, rendent cela souvent impossible. Ces procédures connaîtront certains changements par la suite (en 1988, par exemple, le vice-recteur associé aux programmes de langue française se joindra au comité), mais le cadre général restera sensiblement le même pendant le quart de siècle suivant2. Le recteur Daniel confronte aussi le Sénat sur d’autres questions. L’une d’elles concerne la procédure de nomination d’un successeur au vice-recteur exécutif Frank Turner, dont le mandat s’est terminé le 30 juin 1984, mais qui est demeuré en poste durant l’été à la demande de la Laurentienne. Après avoir sondé les professeurs, en septembre, Daniel informe le Sénat de sa décision de fusionner ce poste avec celui du vice-recteur à l’enseignement et à la recherche et de transférer la responsabilité de la convention collective des professeurs à un nouveau poste dédié aux relations avec le personnel enseignant. Annonçant du même souffle la

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nomination intérimaire de l’historien et doyen des sciences sociales Angus Gilbert comme vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, il demande au Sénat de former un comité de sélection composé de représentants du Conseil, du Sénat luimême et des étudiants et présidé par le recteur. Le Sénat s’exécute, mais précise que le comité doit « présenter le candidat de son choix au Sénat pour recommandation et au Conseil pour approbation3 ». Même si le Sénat et le Conseil approuvent tour à tour, en mars et en avril 1985, le choix de Charles Bélanger, directeur de la recherche institutionnelle à l’Université de Montréal, la procédure, du point de vue sénatorial, a été enfreinte parce que le Conseil a déposé une offre officielle anticipée à Bélanger au début mars. L’explication de Daniel voulant que les circonstances aient exigé d’agir rapidement et que l’omission du dépôt de cette offre au Sénat se veut une simple une inadvertance est appuyée par sa note à l’exécutif du Sénat, datée du 8 mars, concernant la nomination. Insatisfait, le Sénat ordonne à son exécutif de revoir avec le Conseil les procédures de nomination des administrateurs de haut rang. « Il est entendu, dit la motion, que ces procédures devront refléter la tradition de consultation qui a été établie au fil des ans à cette université et que le Sénat jouera un rôle majeur dans lesdites procédures4 ». Cela survient alors que le Conseil aspire à rendre les principaux administrateurs davantage responsables, à la fois devant lui et devant la communauté universitaire dans son ensemble. À l’automne 1985, par exemple, Daniel et les deux vice-recteurs soumettent au Conseil une revue de l’année écoulée et annoncent les objectifs pour l’année à venir, une pratique devenue la norme depuis. Les gouverneurs expriment de même des regrets envers leur décision, en 1980, de conférer au recteur le pouvoir de nommer les doyens sur l’avis d’un comité de professeurs ou d’un conseil dominé par eux. Plus généralement, la dévolution d’autorité vers l’administration rend le choix des administrateurs de haut rang par le Conseil plus critique encore, donnant à celui-ci la possibilité d’influencer – en théorie tout au moins – les orientations de l’Université. Le Conseil propose à cette fin de pousser la revue plus en détail de manière à y inclure une évaluation annuelle de performance de tous les cadres supérieurs de l’administration5. En avril 1985, le Conseil forme un comité ad hoc sur la procédure de sélection et d’évaluation des administrateurs de haut rang dont les effectifs sont plus restreints – deux sénateurs et trois gouverneurs – et le mandat plus large que ceux envisagés par le Sénat. Il doit concevoir « une procédure de décision » pour la nomination du recteur, du vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, des doyens, du bibliothécaire en chef et des autres cadres de l’administration relevant du vice-recteur. C’est exactement ce que fait son rapport final, déposé au Sénat en janvier 1986 et au Conseil un mois plus tard, en proposant une procédure minutieuse engageant tant le Sénat que le Conseil et requérant l’approbation finale de ce dernier en toutes circonstances. À compter de ce moment, de concert avec le Sénat et l’Association des professeurs, le Conseil réévalue ponctuellement la procédure dans le souci de refléter les nouvelles politiques de l’Université sur des sujets comme le bilinguisme et l’équité en matière d’emploi, en 1989, et, en 1994, de remplacer des administrateurs de haut rang ayant été promus6.

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Le rapport du comité ad hoc n’aborde pas la question de l’évaluation annuelle de la performance des principaux cadres de l’administration, mais le comité exécutif du Conseil adopte en 1986 les recommandations du recteur Daniel sur toutes ces instances à l’exception du rectorat. Durant l’année, un processus officieux d’évaluation prend forme en vertu duquel le président du Conseil et d’autres gouverneurs doivent rencontrer annuellement le recteur pour évaluer sa performance et recevoir son rapport sur celle des vice-recteurs (enseignement et recherche, d’une part, et administration, de l’autre). En 1993, le comité exécutif du conseil officialisera cette manière de faire en créant un comité d’évaluation composé du président du Conseil, du vice-président, du président de l’exécutif et de l’ancien président. Cinq ans plus tard, le Conseil le transformera en comité permanent de révision et de rémunération des cadres supérieurs, accentuant plus encore sa supervision des principaux membres de l’administration de l’Université7. Pour fortifier sa position envers le Conseil et le Sénat, le recteur a la bonne fortune d’entamer son mandat au moment où l’amélioration de l’économie ontarienne permet à la province de délier les cordons de sa bourse au profit du financement de l’éducation postsecondaire. Les inscriptions à temps plein augmentent quant à elles d’un tiers entre 1984 et 1989 pour atteindre environ 4 300. Cette conjoncture assure à la situation financière de la Laurentienne une santé qu’elle n’a pas eue depuis la fin des années 1960. Les subventions s’accroissent à un rythme annuel de 7 à 9 pour cent, encore que l’inflation et les changements ponctuels à la formule de financement provincial – tels que les « enveloppes de financement ciblées » imaginées par les libéraux de David Peterson en 1987 pour endiguer la hausse des dépenses en éducation postsecondaire – grugent ces sommes. Malgré tout, la Laurentienne, au début des années 1990, est parvenue à repayer sa dette et même à se constituer une réserve dépassant les 2 millions de dollars8. La situation financière améliorée de la Laurentienne se révèle être une épée à double tranchant. D’une part, elle annonce de difficiles négociations contractuelles entre l’administration et les syndicats de l’université, particulièrement ceux des professeurs et des employés de soutien. Après plus d’une décennie de restriction et de pression inflationniste, ces groupes entendent bien « se rattraper » sur le plan des salaires, des pensions et des avantages sociaux. Devant eux se dressent une administration et un Conseil circonspects, doutant que la Laurentienne soit sortie du bois et également prêts à recourir à négocier selon une stratégie de risque calculé. Le recteur Daniel, que les professeurs passent à deux doigts d’accueillir avec une grève à l’automne 1984, doit composer avec deux arrêts de travail généralisés en 1985 : une courte grève des professeurs en septembre et une autre, plus longue, par les employés de soutien en octobre et novembre. La décennie se clôt sur le déclenchement d’une autre grève par l’A PUL en septembre 1989, allant cette fois-ci du début des cours à la première semaine d’octobre. Fait révélateur, même si le litige porte sur les habituelles questions matérielles les plus élémentaires, l’Association des professeurs accuse non pas le Conseil ou son comité exécutif, mais l’administration de négocier de mauvaise foi et d’exercer un contrôle excessif sur les affaires universitaires9. D’autre part, les finances plus solides de la Laurentienne à la fin des années 1980 permettent ce que la hausse des inscriptions rend nécessaire : l’expansion, à tous les 82

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cycles, des vieux programmes et départements et la création de nouveaux, la fin du gel des embauches de professeurs et la création d’une série de centres de recherche, trois mesures qui contribuent à l’épanouissement intellectuel de l’Université. Ces circonstances réveillent même le rêve de nouveaux chantiers de construction, les premiers depuis la fin des années 196010. Sur ce front, les années Monahan et Best ont été exceptionnellement maigres. Le gouvernement de l’Ontario n’a pratiquement pas octroyé de fonds à la Laurentienne pour ses dépenses de capital, tandis que le climat incertain pour les affaires, dans le secteur minier particulièrement, n’a guère offert d’occasion de solliciter le secteur privé local. Le Conseil des gouverneurs avait formé un comité de développement à cette fin en 1973, mais sa grande réussite a été de recueillir 600 000 $ pour l’expansion du programme de génie en 1976, et même cela lui a été difficile malgré un don initial de 300 000 $ de l’International Nickel. Malgré tout, à l’hiver 1978–1979, le Conseil et le Sénat appuient l’idée d’une importante collecte de fonds dont le lancement coïncidera avec le vingtième anniversaire de la Laurentienne en 1980. La collecte n’a pourtant pas lieu, le projet rencontrant des obstacles répétés en chemin dont, principalement, la détérioration de l’économie, culminant au début des années 1980 dans la pire récession de l’Ontario depuis la Grande Dépression, et les autres appels de fonds lancés à la communauté, à l’Inco en particulier, par Science Nord, le centre des sciences nouvellement inauguré. La campagne ne débute qu’en 1982 et sa portée est limitée, la communauté universitaire elle-même contribuant pour près de la moitié du million de dollars recueilli la première année. Le démarchage public auprès du monde des affaires demeure en suspens, quoique le travail de coulisse du recteur Best et d’un dirigeant de la Falconbridge Nickel et ancien gouverneur de la Laurentienne, Marsh Cooper, pave la voie à un succès de taille. Aucune annonce publique n’est faite – Best racontera plus tard que Paul Desmarais, président de Power Corporation, a demandé que rien ne soit révélé avant le lancement de la campagne –, mais en juin 1983, le recteur remercie Desmarais de « l’intérêt que vous continuez de manifester à l’égard de la Laurentienne et de votre souscription pour la nouvelle bibliothèque universitaire11 ». La Laurentienne sait très tôt qu’en matière d’infrastructures, sa priorité est une nouvelle bibliothèque. Les bibliothécaires, les professeurs et les étudiants se sont plaints de la bibliothèque existante, étalée sur cinq étages dans l’édifice Parker, avant même la construction de la « tour ». Coûteuse, car il faut poster des employés à plusieurs sorties à la fois, peu conviviale, elle est à court de fonctionnalités et, au début des années 1980, d’espace de stockage. Quand le recteur Daniel propose au Conseil, à l’automne 1984, de donner un nouveau souffle à la campagne de financement dans le cadre du vingt-cinquième anniversaire de la Laurentienne, la nouvelle bibliothèque se retrouve encore en tête de liste des projets, en compagnie d’un centre étudiant, autre installation manquant cruellement au campus12. Les événements, politiques cette fois-ci, viennent encore une fois surseoir aux meilleures intentions. Devenus minoritaires à l’élection du printemps 1985, les progressistes-conservateurs de Frank Miller cèdent le pouvoir en juin aux libéraux menés par David Peterson et soutenus par le Nouveau Parti démocratique. La politique de décentralisation des services adoptée par le nouveau gouvernement La période contemporaine

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minoritaire – et maintenue après que les libéraux obtiennent leur majorité, en 1987 – profite nettement à Sudbury, qui voit le ministère du Développement du Nord et des Mines s’y installer en 1990 et, deux ans plus tard, le Centre WilletGreen, un important complexe de recherche provincial sur les mines et le minerai, ouvrir ses portes sur le campus de la Laurentienne. Tout aussi important, le contexte politique provisoire – l’« entente » de 1985 entre libéraux et néo-démocrates n’a qu’une espérance de vie de deux ans – crée une occasion de lancer un nouvel appel à l’aide en capital à la province13. Les plans en vue d’une nouvelle campagne de développement de l’Université Laurentienne s’accélèrent à l’hiver 1986–1987 sous le leadership de James Grassby, un cadre de l’Inco à la retraite. La campagne reçoit en mai un coup de main du ministre des Collèges et des Universités, Greg Sorbara, qui, prétextant des besoins des installations devant être transférées à Sudbury, annonce que le gouvernement Peterson couvrira les deux tiers du coût de la nouvelle bibliothèque. Cumulée aux engagements reçus par l’Université lors de précédentes campagnes, cette contribution laisse un manque à gagner d’à peine 5 millions sur les 15,5 millions de dollars initialement ciblés. Le manque est rapidement comblé et l’objectif dépassé, dixhuit mois avant l’échéance, grâce à des dons d’un million de dollars chacun de Power Corporation, de la famille Desmarais et de l’International Nickel, un don de 300 000 $ de la Falconbridge Nickel et une pléthore de contributions plus petites, mais non négligeables, d’entreprises et de particuliers de la ville et de la région14. Commencée à l’été 1988, la construction de l’édifice de la bibliothèque dure dixhuit mois, ce qui permet à cette dernière d’investir ses quartiers en février 1990. Nommée en honneur de J.-N. Desmarais, membre fondateur du Conseil des gouverneurs de la Laurentienne, elle ouvre officiellement ses portes en coïncidence avec la collation des grades du printemps. Le Conseil espère aussi que l’aménagement du centre étudiant commencera immédiatement, mais divers obstacles – contraintes financières, insatisfaction des étudiants envers les dimensions et la conception du plan initial consistant à agrandir le troisième niveau de l’édifice Parker – retardent l’achèvement du projet jusqu’à 1992. À l’exception du Centre de ressources pour l’éducation en matière de santé, que le gouvernement Peterson a promis de financer en 1990, en fin de mandat, mais qui ne sera complété qu’en 1993, il s’agit là du dernier grand investissement de la décennie pour la Laurentienne15. L’Université canadienne en France (UCF) s’avère une des initiatives les plus controversées du recteur Daniel, mais aussi une des plus stimulantes pour ceux qui y participent. Le plan, tel qu’expliqué au Conseil en juin 1986, consiste à mettre sur pied « un programme intensif d’une année en France pour des étudiants canadiens de premier cycle recrutés en nombre sensiblement égal au sein d’universités de langue anglaise et de langue française […] largement basé sur des cours de deuxième année de sciences humaines et de langue et […] conçu pour développer le bilinguisme des leaders de demain dans différents secteurs de la société canadienne ». Créée de concert avec Sam Blyth, président de la firme de voyages étudiants Blyth and Company de Toronto, et modelée sur son Lycée canadien qui offre un programme scolaire de niveau secondaire pour les élèves ontariens à Saint-Jean-Cap-Ferrat, non loin de Nice, l’UCF prévoit s’installer à Villefranche84

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sur-Mer, tout près. Les négociations avec Blyth, responsable de l’infrastructure du nouveau campus, convainquent le Conseil d’appuyer celui-ci en février 1987, mais seulement au terme de longs débats sur sa viabilité financière. Au même moment, le Sénat approuve le commencement en septembre 1987 du programme universitaire convenu par un comité de professeurs dirigé par le coordinateur du projet et doyen des humanités, Douglas Parker. Ce même Parker deviendra ensuite premier directeur de l’UCF, servant jusqu’en 1992 avant d’être remplacé par Walter Schwager, ancien doyen des sciences sociales16. L’avenir suggérera que « Villefranche » aurait eu plus de chance de succès en repoussant son lancement d’un an, mais en 1987, la réaction extrêmement positive à l’idée même de l’UCF dans les autres universités canadiennes, source de la majorité des 200 inscriptions pour l’automne, augure bien. Comme Parker l’expliquera plus tard au président du Conseil Alan Querney, la première session génère néanmoins plusieurs plaintes qui se traduisent par le départ d’environ 15 pour cent des étudiants à Noël. Ces départs résultent partiellement des attentes irréalistes envers la capacité de l’UCF à rendre ses étudiants couramment bilingues « comme par magie ». La plupart s’explique toutefois par les lacunes du campus encore en chantier : hôtels peu enviables et éloignés au lieu de résidences étudiantes sur le campus même, service de navette onéreux et inconfort des salles de cours « sombres et froides » à cause d’une génératrice trop peu puissante, inconfort d’ailleurs aggravé par deux mois de pluies « torrentielles ». La situation s’améliore nettement à la session suivante, mais la réputation entachée de l’UCF handicapera son potentiel de recrutement dans les années subséquentes17. Si peu de gens remettent initialement en question les objectifs bilingues et biculturels de l’Université canadienne en France, son corps étudiant de taille changeante et son écrasante majorité anglophone commencent à susciter des débats sur la pertinence, pour une petite université ontarienne au mandat régional, d’avoir en France une antenne ne desservant même pas ses propres étudiants en priorité. Le départ à l’automne 1989 du recteur Daniel, principal allié de l’UCF, n’aide en rien celle-ci. Une évaluation lancée par le recteur intérimaire Bélanger recommande quand même, en octobre 1990, de reconduire l’entente avec Blyth, citant à l’appui la qualité du programme universitaire de l’UCF, la valeur de l’expérience étudiante en soi et le crédit que l’UCF apporte à l’Université. Le Sénat approuve en novembre sa reconduction au terme d’un vote serré. Après de longues négociations, la Laurentienne signe avec Blyth une nouvelle entente de cinq ans valable à compter de juillet 199218. Une analyse budgétaire ayant conclu que l’UCF n’entraîne pas de « perte nette de revenus pour l’Université », le comité d’évaluation passe outre aux questions financières. Son rapport note quand même que « si cette hypothèse d’indépendance économique devait s’avérer non fondée […] il faudrait évaluer l’UCF […] du point de vue de son coût net ». L’encre a malheureusement à peine le temps de sécher sur le nouveau contrat passé avec Blyth qu’une nouvelle baisse des inscriptions à l’automne 1991 – la première d’une série – et des compressions dans le financement provincial donnent à cette mise en garde tout son sens. Le COPA réitère en 1992 que le programme de l’UCF est « solide », mais la situation financière La période contemporaine

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envenimée de la Laurentienne contraint l’administration, en 1994, à renégocier son entente avec Blyth pour y réduire ses responsabilités. Une autre ronde de négociations ouverte un an plus tard dans la foulée des nouvelles compressions gouvernementales aboutit, cette fois-ci, à la fermeture précipitée de l’UCF au début juillet 1996. L’expérience outre-mer de la Laurentienne, dont le recteur Ross Paul dit, au début de son mandat, qu’elle « confère de la classe » et contribue à la réputation de l’Université en tant qu’établissement « ouvert sur le monde et créatif » lorsqu’il s’agit de « combler les besoins des Canadiens », prend ainsi fin19. Le départ du recteur Daniel de la Laurentienne en 1990 n’a pas dû causer de surprise même si, à la fin de 1987, au terme de l’évaluation de sa performance par le comité exécutif du Conseil, les gouverneurs ont approuvé de renouveler son mandat pour cinq ans, une première du genre dans l’histoire de l’Université. Témoignant de la grande estime dans laquelle le Conseil tient Daniel, cet appui trouve son écho au Sénat, qui soutient vivement le recteur, et chez 60 pour cent des membres de l’A PUL , un groupe notoirement exigeant. Les signes du destin se manifestent six mois plus tard, quand le Conseil accède à la requête du recteur pour obtenir un congé d’étude de dix mois et s’inscrire au programme d’études nationales et internationales destiné aux cadres supérieurs du Collège militaire royal, à Kingston. Trois mois après le début de son congé, Daniel annonce qu’il quittera son poste de recteur en juillet 1990. L’explication suit peu après, alors qu’il est nommé vice-chancelier de l’Open University, en Grande-Bretagne, poste qu’il occupera onze ans et qui lui vaudra d’être adoubé chevalier en récompense de ses contributions à l’éducation supérieure en Grande-Bretagne. Sir John Daniel agira comme sous-directeur général de l’UNESCO pour l’éducation entre 2001 et 2004, avant de prendre la tête du Commonwealth of Learning, à Vancouver, une organisation dédiée « au développement et à la transmission des connaissances, des ressources et des technologies concernant l’éducation à distance » au sein du Commonwealth britannique20. En rétrospective, on réalise que le discours sur « l’état de la Laurentienne » prononcé par Daniel devant les professeurs à la fin de 1988 a tout d’un adieu alors qu’il identifie le double mandat, soit à l’interne de « s’assurer que l’institution est proprement gérée et d’améliorer au maximum la qualité des ressources et des services à la disposition de l’enseignement et de la recherche », et à l’externe « de faire en sorte que les gouvernements, les écoles et la communauté dans son ensemble appuient ce que vous [les professeurs] faites ». Il évalue ensuite les quatre dernières années et demie sous ces angles, concluant, sans surprise, mais avec raison, que l’Université a fait de grands progrès. Être plus crédible aux yeux de la province, plaide-t-il, a aidé la cause financière de la Laurentienne, grâce à quoi celle-ci a pu accroître de 38 pour cent son offre de cours en français par étudiant, étendre la portée de son programme d’éducation à distance par la création du réseau Contact Nord et développer les installations de recherche liées au Nord ontarien, dont l’Institut de géomécanique. Du point de vue de l’enseignement et de la recherche, la Laurentienne a aussi crû d’autres façons, note Daniel en soulignant que le nombre de professeurs à temps plein y a doublé depuis qu’il est en poste,

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ce qui améliore le potentiel de l’Université sur le plan des études supérieures, et que les coûts administratifs de celle-ci sont inférieurs à ceux de toutes les autres universités de l’Ontario, même si elle a renforcé son équipe d’administrateurs. Il affirme, pour conclure, que les relations entre l’Université Laurentienne et sa communauté se sont améliorées, rappelant au passage une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques qui avait insisté sur le rôle clé de la Laurentienne dans le relèvement de Sudbury de la récession dévastatrice du début des années 1980. Daniel insiste dans son discours sur le fait que ce sont les efforts concertés du Conseil, de l’administration et des professeurs qui ont rendu ces réalisations possibles. Cela est sans doute vrai, mais son propre leadership a aussi contribué au succès de la Laurentienne, chose que celle-ci reconnaîtra explicitement ce jour de 2006 où elle lui décernera un doctorat en droit honoris causa21. Le rectorat de Ross Paul, 1991–1997 À l’automne 1988, le Conseil des gouverneurs, le Sénat et l’A PUL approuvent tous la recommandation du recteur Daniel que le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche Charles Bélanger devienne recteur par intérim pour l’année 1989–1990. Le choix du remplaçant de Bélanger pose davantage problème. Ses responsabilités sont ultimement partagées, le directeur des études supérieures Lloyd Reed devenant vice-recteur intérimaire aux programmes et à la recherche et le doyen des sciences sociales Michael Dewson, vice-recteur intérimaire aux relations avec le personnel enseignant22. La démission du recteur Daniel bouleverse cet arrangement. Sans attendre, les gouverneurs créent un comité mixte du Conseil et du Sénat chargé de trouver le prochain recteur, encore que le processus de sélection ne commence qu’au début de 1990. En avril, puisque le comité peine à dénicher un candidat convenable, le comité exécutif du Conseil discute d’un plan de réserve au cas où personne ne serait choisi avant le 30 juin. Ainsi en va-t-il : comme aucun candidat n’obtient les 70 pour cent d’appuis nécessaires au sein du comité, le Conseil et le Sénat décident en août de relancer le processus avec, cette fois, une échéance fixée au 31 décembre. À l’aide d’une autre agence de recrutement de cadres, la seconde quête s’avère expéditive. En janvier 1991, le comité recommande la nomination de Ross H. Paul, un choix que le Conseil et le Sénat avalisent sans délai23. La démission de Daniel se répercute aussi sur les dispositions administratives intérimaires. En juin 1990, le Conseil prie Bélanger de rester en poste jusqu’à la nomination du prochain recteur. Acquiesçant, il demande que les nominations des vice-recteurs par intérim Reed et Dewson soient prolongées elles aussi. La situation se complique du fait que Bélanger informe le Conseil qu’il n’entend pas servir pendant sa dernière année comme vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, que les événements ont repoussée à 1991–1992. Le Conseil doit donc, à la fin de 1990, créer un autre comité de sélection. Dès le mois de février 1991, le Sénat et le Conseil approuvent la nomination, pour cinq ans, de Paul Cappon, professeur agrégé de sociologie à l’Université McGill et directeur du Centre d’études

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ross h . paul .  |  Recteur de l’Université Laurentienne, 1991–1998.

sur le sida à l’Hôpital général de Montréal. Il en résulte une situation inusitée où les deux principaux administrateurs de l’Université entament simultanément leur mandat24. À bien des égards, les compétences universitaires et l’expérience administrative du recteur Paul s’apparentent à celles de son prédécesseur. Bachelier en économie et en mathématiques de l’Université Bishop’s au Québec, il détient une maîtrise en administration de l’éducation de l’Université McGill et un doctorat en éducation comparée, avec spécialisation en éducation à distance, de l’Université de Londres. Toujours comme Daniel, Paul arrive muni de talents d’administrateur au Québec et en Alberta. Après avoir été doyen des arts au Collège Dawson de Montréal, il devient vice-recteur à l’enseignement et à la recherche à l’Université Athabasca, un poste qu’il occupe pendant dix ans jusqu’à sa nomination comme recteur intérimaire pour l’année 1990–199125. À d’autres égards, le rectorat de Paul se distingue d’emblée très nettement de celui de Daniel. Dans une sorte de bilan qu’il dressera peu de temps avant de quitter la Laurentienne, Paul reconnaîtra que les importantes compressions budgétaires provinciales des dernières années de son mandat lui auront posé un de ses plus gros défis. Dire les choses ainsi tient presque de l’euphémisme. Toujours critique, la politique de financement provincial marque ces années à un plus fort degré que d’habitude. Elles s’ouvrent sur l’introduction, par le gouvernement Rae, du « financement différentiel » – l’établissement de planchers et de plafonds d’inscriptions pour chaque établissement –, une stratégie de contrôle des dépenses provinciales visant à contenir toute croissance non régulée dans les grandes universités pendant que les petites universités demeureraient capables d’accueillir plus d’étudiants. Ce plan avantage la Laurentienne dans la première moitié des années 1990, ses effectifs étudiants à temps plein atteignant près de 5 500 en 1994–1995. D’un point de vue financier plus large, par contre, la croissance n’a pas que du bon. En dépassant son niveau plancher, la Laurentienne, nonobstant la hausse des frais de scolarité, n’engrange pas les importantes subventions que l’ancien système lui aurait valu et qui lui auraient permis de se prémunir contre l’orage financier qui s’annonce26.

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D’autres facteurs échappant au contrôle de la Laurentienne font aussi contrepoids aux effets positifs du surplus d’inscriptions, parmi lesquels une inflation en hausse et un gonflement de la dette publique, fédérale comme provinciale, qui finiront par causer les compressions les plus radicales jamais subies par l’Université à ce point de son histoire. Le gouvernement provincial néo-démocrate laisse d’abord savoir, fin 1991, que les subventions n’augmenteront que de 2 pour cent ou moins à chacune des trois prochaines années. En vérité, ces projections pèchent par optimisme. En décembre 1992, la province annonce une réduction, plutôt qu’une hausse, des subventions en 1993–1994 et un retour, l’année suivante, au niveau de 1992–199327. Puis viennent de mauvaises nouvelles. Au printemps 1993, le gouvernement instaure le « contrat social », un plan pour réduire le budget provincial de 6 milliards de dollars, dont un tiers à même les subventions au secteur public. Contrairement à ce qui a été promis, les sommes allouées aux universités chutent de 8,5 pour cent en 1993–1994, sans compter les réductions de salaire imposées à leurs employés par le « contrat social », et des compressions supplémentaires surviennent les deux années suivantes. La Laurentienne réagit en augmentant ses frais de scolarité (35 pour cent sur trois ans), en éliminant certains sports (hockey féminin sur gazon et de gymnase, curling masculin et féminin) en 1993–1994 et en fermant huit programmes à faibles inscriptions en 1995–199628. Puis viennent des nouvelles pires encore. Dans le sillage du budget de mars 1995 des libéraux de Jean Chrétien annonçant d’énormes réductions des transferts aux provinces, les Ontariens élisent, le 8 juin, les progressistes-conservateurs de Mike Harris, tout entier dédiés à l’avènement d’une « révolution du bon sens » qui restaurera les finances publiques provinciales. N’aidant en rien, les inscriptions à temps plein à la Laurentienne chutent en 1995–1996 après quinze années de croissance stable ; c’est la première de cinq années consécutives de baisse. Pardessus le marché, les conséquences financières frappent de plein fouet au moment même où prend fin le « contrat social », alors que les syndicats s’attendent à des hausses de salaire longtemps refusées. L’année 1996–1997 s’avère une authentique annus horribilis. Avec 400 étudiants à temps plein en moins, la Laurentienne se retrouve dangereusement près de son niveau plancher, sous lequel ses subventions se verront réduire. La restriction budgétaire atteint 7 millions de dollars. Pour se conformer à son obligation de produire un budget de base équilibré, l’Université hausse les frais de scolarité de pas de moins de 20 pour cent et conçoit un programme de retraites anticipées. Soixante-cinq employés de la Laurentienne, dont vingt-cinq professeurs, s’en prévalent, ce qui permet des économies à long terme, mais, dans l’immédiat, un déficit de dépenses uniques de 2,3 millions de dollars à résorber en cinq ans. La fusion de plusieurs divisions administratives, la réduction du corps professoral par le non-renouvellement des contrats à durée limitée et le non-remplacement des retraites, la fermeture hâtive de l’Université canadienne en France, un an avant terme, et la fin de tout soutien financier au Musée et centre des arts de l’Université Laurentienne complète la liste des principales mesures d’austérité. Le profil financier de la Laurentienne change énormément pendant le premier mandat du recteur Paul. Ses revenus globaux chutent de 9,3 pour cent. La part des

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subventions provinciales passe de 77 à 66 pour cent de ceux-ci et celle des frais de scolarité, de 18 à 29 pour cent. La taille du corps professoral s’amincit de 7,7 pour cent, alors que 13 pour cent des autres postes disparaissent29. Ces péripéties affectent évidemment la gouvernance de la Laurentienne, quoique dans une moindre mesure que celles de la période comparable des années 1970. Si cela s’explique partiellement par la maturité de l’Université acquise au fil des années et par la généralisation d’un mode survie imposé à tous ses secteurs, le crédit doit aussi revenir au recteur Paul. Administrateur pragmatique selon son propre jugement, sa tendance à rechercher la coopération plutôt que la confrontation favorise l’aplanissement des aspérités dans les pratiques de gouvernance. Cela s’observe particulièrement sur le plan des relations de travail. Malgré les multiples restrictions budgétaires et les effets délétères du « contrat social » du gouvernement Rae sur tous les employés, la Laurentienne demeure remarquablement dénuée de conflits pendant son rectorat30. Ces années difficiles braquent les projecteurs sur un aspect clé de la gouvernance universitaire, à savoir la responsabilité administrative, tant à l’interne qu’à l’externe. Le rapport « Governance and Accountability » préparé en 1993 par un groupe d’étude indépendant au nom de l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université se dit préoccupé par un excès d’autorité des administrations et insiste sur l’importance d’une gouvernance autonome et d’un rôle accru pour les sénats. Déposé la même année, le rapport du Groupe de travail sur l’obligation de rendre des comptes des universités, mis sur pied par le gouvernement provincial, est de prime importance pour les universités ontariennes. Examinant la gouvernance universitaire sous tous ses angles, il met aussi l’accent sur la nature multidirectionnelle de la responsabilité des administrateurs d’université. Dans ce contexte, et à l’insistance du recteur Paul, le Conseil de la Laurentienne, à l’hiver 1994–1995, pose les bases d’une collaboration plus étroite avec le Sénat en initiant une série de réunions entre leurs comités exécutifs respectifs31. La réunion conjointe de mars 1995 se penche sur trois questions critiques. Concernant le processus d’évaluation de l’Université, les gouverneurs plaident et les sénateurs conviennent que le Conseil doit être informé en tout, car la programmation universitaire a souvent des répercussions sur les finances ou sur les conventions collectives qui forcent le Conseil à intervenir. La seconde question, la restructuration du Conseil et du Sénat, provient directement du rapport du Groupe travail sur l’obligation de rendre des comptes des universités. Une directive du ministère de l’Éducation et de la Formation (MEF) faisant suite au rapport demande à chaque conseil de gouverneurs d’une université ontarienne d’accorder un plein droit de vote aux représentants des professeurs, du personnel et des étudiants. Cela entre en conflit direct avec la loi constituante de la Laurentienne, laquelle interdit spécifiquement aux professeurs et au personnel de détenir un poste avec droit de vote au Conseil, mais pas les étudiants qui, en 1986, se sont vus attribuer un des sièges non confessionnels avec droit de vote. La directive se répercute aussi sur le Sénat, car en avril 1994, en accord avec d’autres directives du MEF, un comité ad hoc du Conseil sur la restructuration a proposé de nouvelles procédures faisant passer la responsabilité première de la nomination des représentants professoraux entre les mains de l’association des professeurs. Tout en convenant 90

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que le Sénat doit continuer d’exercer un rôle dans le processus de sélection, les gouverneurs n’ont aucune suggestion à offrir sur la manière d’y parvenir. Le problème disparaîtra en 1996 quand le nouveau gouvernement Harris abandonnera tout plan de restructuration au profit du statu quo32. Une autre proposition du Groupe de travail sur l’obligation de rendre des comptes des universités inspire la troisième grande question débattue à la réunion conjointe des comités exécutifs de mars 1995. Il s’agit cette fois du rôle du Sénat dans le processus budgétaire. En plus d’insister pour que les préparatifs budgétaires se fassent « de manière transparente en consultation avec les principales structures internes, en particulier le Sénat », le groupe de travail suggère que le Sénat reçoive des mises à jour en cours d’exercice établissant les chiffres réels en comparaison avec les estimés du budget. Bien que gouverneurs et sénateurs de la Laurentienne s’entendent globalement sur le besoin de lier plus solidement la planification universitaire et son pendant financier, aucune procédure particulière du genre que recommande le groupe de travail ne sera mise en place avant septembre 1997, alors que, sur la foi d’une lettre d’entente entre l’administration et l’A PUL signée pendant des négociations collectives, le Sénat créera le comité des comptes de l’Université Laurentienne33. Élu par le Sénat, le comité des comptes comprend une majorité de professeurs, dont le président de l’A PUL ou son représentant, et son mandat consiste à « examiner les dépenses faites par l’Université l’année précédente ». À cette fin, il a accès aux états financiers annuels vérifiés de la Laurentienne ainsi qu’aux rapports remis au comité des finances du Conseil qui comparent les dépenses réelles et les données du budget, et peut aussi demander des renseignements additionnels aux cadres de l’Université. Enfin, il est autorisé à soumettre au Comité des finances du conseil des recommandations qu’il fera ensuite parvenir au Sénat, en compagnie de la réponse du comité, à titre informatif34. En offrant au Sénat, et aux professeurs plus particulièrement, un mécanisme pour surveiller les affaires financières de l’Université de façon continue, le comité des comptes, qui entre en fonction en 1999, modifie l’équilibre de la gouvernance à la Laurentienne. Tout en affirmant l’intégrité de la vérification financière de l’Université, ses rapports au Sénat critiquent régulièrement l’incapacité du système comptable à fournir « des renseignements précis, compréhensibles et faciles à utiliser ». Ils expriment aussi plusieurs préoccupations relativement au processus budgétaire : irrégularité, manque de transparence, fréquents retards, mode de déclaration des dépenses « confondant », évaluation insuffisante des coûts administratifs et liens trop ténus avec les priorités stratégiques de l’Université. À la longue, le comité des comptes devient de plus en plus frustré de ce que ses suggestions pour remédier à ces problèmes sont rarement appliquées, même si le Conseil et l’administration en prennent note et parfois même les appuient. Du point de vue du Sénat et des professeurs, en somme, les efforts du comité des comptes pour faire plus de lumière sur les affaires financières de l’Université ne suffisent pas à rendre le Conseil et l’administration plus responsables quant aux finances35. Il va dans dire que les sombres perspectives financières de la Laurentienne affectent ses projets de construction et d’aménagement. La province a payé une partie des rénovations de l’édifice Parker et la reconstruction de la Place des fondateurs La période contemporaine

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au milieu des années 1990, mais le grand projet de l’Université, une nouvelle résidence étudiante, se voit sans cesse reporter pour cause de contraintes budgétaires. Les nouvelles qui parviennent du front des campagnes de souscription sont plus encourageantes. Au printemps 1996, le gouvernement Harris annonce la création du Fonds fiduciaire d’initiative pour les étudiantes et étudiants de l’Ontario (FFIEEO), un programme par lequel Queen’s Park injectera une somme équivalente, au dollar près, à celle offerte en bourses étudiantes avant le 31 mars 1997. En octobre, le Conseil approuve une nouvelle campagne de financement dont l’ambitieux objectif est d’amasser 10 millions de dollars dans les six prochains mois36. Gordon Gray, président de Rio Algom Limited, dirige cette campagne intitulée Bâtir sur du solide. S’adressant à la communauté universitaire elle-même, la première étape est inaugurée en grande pompe en janvier 1997, le recteur Paul y allant d’une grosse contribution personnelle pour donner l’exemple. Dominée par le don d’un million de dollars de la fondation Baxter-et-Alma-Ricard, cette étape remporte un vif succès et les 5,5 millions de dollars recueillis avant l’échéance provinciale sont multipliés par deux après le don équivalent du FFIEEO . Paul annonce immédiatement que la seconde étape commencera en septembre, avec cette fois-ci l’objectif d’amasser 15  millions de dollars. Sans l’incitatif provincial, les choses s’avèrent plus ardues, mais l’Université célébrera sa réussite en juin 2000 en dévoilant un Mur des donateurs à la bibliothèque J.N. Desmarais37. La nette amélioration de la situation des Autochtones sur le campus compte aussi parmi les actifs du bilan du recteur Paul. C’est grâce aux efforts d’Ed Newbery au début des années 1970, comme le relate ailleurs ce livre, que l’Université de Sudbury est devenue le siège des études amérindiennes à la Laurentienne. Avec la multiplication des programmes consacrés aux Premières nations et la hausse du nombre d’étudiants autochtones, il est devenu de plus en plus impératif, pour la Laurentienne elle-même, de s’en occuper sur le plan administratif. Un premier pas s’accomplit en ce sens sous le recteur Daniel, alors que le nouveau programme de travail social autochtone de l’Université met en place un mécanisme de reddition de comptes annuels à l’Assemblée des Premières Nations de Robinson-Huron, le précurseur du Conseil de l’Université Laurentienne pour la formation des Autochtones (CULFA) créé par le recteur Paul en 1991 en conformité avec des directives du ministère provincial des Collèges et des Universités. Chargé de conseiller le cabinet du recteur « sur tout ce qui relève des programmes d’étude et de soutien ciblant les étudiants autochtones à l’Université Laurentienne », le CULFA réunit des représentants de toute une gamme d’organismes des Premières nations de l’Ontario. C’est sur sa recommandation, formulée au printemps 1993, que l’Université embauche un premier conseiller en orientation autochtone38. À l’automne 1993, le Sénat et le Conseil des gouverneurs transforment le Conseil de l’Université Laurentienne pour la formation des Autochtones, jusqu’ici simple comité consultatif du recteur, en entité légalement constituée et mandatée, selon le Sénat, pour « faire des recommandations sur toute question concernant la population étudiante autochtone et la communauté autochtone en général ». Pendant les quinze années suivantes, le CULFA travaillera diligemment à la fois pour développer l’offre de cours et de programmes – un programme spécialisé de quatre ans

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en études amérindiennes et un certificat d’études en droit des Autochtones (offerts en anglais seulement) – et pour élever les Autochtones dans la hiérarchie administrative de l’Université. L’Association des étudiants autochtones fera de même. En 1999, par exemple, quand le recteur Watters propose de créer un double vicerectorat à l’enseignement et à la recherche pour les affaires francophones et anglophones respectivement, le Sénat adopte un amendement proposé par un étudiant autochtone instituant un troisième vice-recteur responsable des affaires autochtones, quoique cette mesure reste lettre morte. Malgré tout, en reconnaissance du poids toujours plus pesant des Autochtones sur le campus – en 2009, le nombre d’étudiants autochtones correspond à 10 pour cent de la population étudiante anglophone et 14 pour cent de son pendant francophone –, la Laurentienne décrète que sa mission est à la fois bilingue et triculturelle. Du point de vue administratif, cela se traduit par la nomination, en 2009, d’une directrice de l’enseignement et de la recherche, affaires autochtones, responsable du recrutement d’étudiants autochtones, des affaires étudiantes autochtones, de l’enseignement et de la recherche concernant les Autochtones et de l’établissement de liens avec les communautés autochtones39. À l’exception d’une note discordante, la campagne Bâtir sur du solide représente l’apogée du rectorat de Paul, homme apprécié et très respecté au sein de l’Université comme de la communauté sudburoise. En décembre 1995, le Conseil et le Sénat acceptent rapidement sa demande de renouvellement de mandat. En juillet 1997, toutefois, son second mandat vient à peine de commencer qu’il remet sa démission, en vigueur six mois plus tard, afin de devenir recteur de l’Université de Windsor. La fausse note survient juste avant son départ, alors que court sur le campus une rumeur voulant que le Conseil ait consenti des honoraires spéciaux à Paul, qui en a remis une partie à la campagne de souscription sous forme de contribution personnelle. Au Sénat, quelques-uns sont suffisamment mécontents pour proposer, à la séance de décembre 1997, une résolution incitant le recteur à agir avec honneur et à rembourser les honoraires perçus. La résolution reçoit peu d’appui, signe que l’incident n’affecte pas vraiment sa réputation, une conclusion qui s’impose d’ailleurs à la lumière des chaleureux adieux publics que lui fait la communauté universitaire. Paul remplira deux mandats comme recteur de l’Université de Windsor avant de prendre sa retraite en 200840. Le rectorat de Jean Watters, 1998–2001 Ce n’est qu’en octobre 1997, trop tard pour trouver un candidat avant le départ du recteur sortant, que le comité de sélection d’un nouveau recteur créé par le comité exécutif du Conseil dans la foulée de la démission de Paul se met sérieusement au travail. Le Conseil nomme en décembre le sociologue et ancien doyen des sciences sociales Geoffrey Tesson à titre de recteur intérimaire, lui qui, l’année précédente, était devenu le premier candidat de l’interne à accéder de façon permanente au poste de vice-recteur à l’enseignement et à la recherche depuis la création de ce poste en 1967. Confiée à une agence de consultants professionnels, la recherche progresse rondement et en février 1998, le comité soumet pour approbation le nom

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jean r . watters .  |  Recteur de l’Université Laurentienne, 1998–2001.

de Jean R. Watters au Sénat et au conseil. Les deux instances avalisent sa nomination pour un mandat de cinq ans commençant en août 199841. Premier francophone choisi comme recteur depuis le père Émile Bouvier presque quarante ans plus tôt, Watters suscite un certain scepticisme parmi la communauté universitaire non pas à cause de son expérience universitaire, assez conventionnelle, mais parce que son profil administratif ne l’est pas. Originaire du Québec, il a consacré ses études postsecondaires à l’éducation : baccalauréat et maîtrise de l’Université de Calgary dans les années 1970, puis doctorat de l’Université de Montréal en 1984 avec spécialisation en éducation des adultes. Comme administrateur, Watters compte également sur une expérience pancanadienne. Il est devenu directeur du Bureau de l’éducation des adultes de l’Université de Sherbrooke dans les années 1980 et a présidé une firme de consultants d’Edmonton dans le secteur de la planification et de la recherche stratégiques au début des années 1990. De façon plus immédiatement pertinente, il vient à la Laurentienne non pas en provenance du monde universitaire, mais après quatre années passées comme président fondateur du Collège Boréal, le collège francophone d’arts appliqués et de technologies de Sudbury42. Profitant et souffrant tout à la fois de ne pas être très bien connu, le recteur Watters entame son mandat dans une ambiance d’incertitude que ses premières adresses à la communauté universitaire, en septembre 1998, ne permettent guère de dissiper. Sa déclaration devant le comité exécutif du Conseil et le Sénat, un mois après son entrée en fonction, concernant son but de faire de la Laurentienne « l’université la plus innovatrice en Ontario d’ici cinq ans » apparaît à certains comme étant déconnectée de la réalité politique et financière. Comme les autres établissements d’enseignement postsecondaire de la province, la Laurentienne continue d’essuyer des pertes comptables, résultat d’inscriptions en déclin – le scénario catastrophique se concrétise en 1997–1998 lorsque le nombre d’étudiants à temps plein tombe à 4 100, sous le niveau plancher établi par le système de financement différentiel, quoique la province n’impose heureusement pas de pénalité –, du gel de ses subventions provinciales et de ses engagements pour réduire sa dette. Cette situation perdure pendant tout le mandat de Watters. Les douloureuses

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compressions budgétaires affectant toutes les facettes de la vie universitaire auxquelles se livrent les dirigeants, chaque année, sont loin de favoriser d’audacieux nouveaux projets43. En septembre 1998, les remarques de Watters devant le Sénat comme quoi, « la question n’est pas de savoir s’il y aura une université francophone [en Ontario], mais plutôt quand et où cette université francophone [ouvrira ses portes] », perturbent aussi la communauté universitaire, soulevant l’espoir chez les uns et la crainte chez les autres relativement aux visées ultimes des plans de restructuration encore imprécis du recteur. Aucun de ces sentiments n’a lieu d’être. Du point de vue de la gouvernance, un changement introduit tôt en 1999 vient appliquer à la haute direction les principes du bicaméralisme déjà partiellement en vigueur au niveau des départements et des décanats. Malgré les quelque quarante années d’existence de la Laurentienne comme institution bilingue, ce changement suscite une grande dose de controverse ; le comité du Conseil, par exemple, dans une des rares occasions où le vote est consigné, adopte de justesse la résolution d’avril créant les nouveaux postes de vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, l’un pour les affaires francophones, l’autre pour les affaires anglophones. En juin 1999, au terme des recherches appropriées, le Sénat et le comité exécutif du Conseil approuvent les nominations respectives d’André Roberge, vice-recteur associé aux affaires francophones, et de Douglas Parker, professeur d’anglais et ancien coordinateur de l’Université canadienne en France, à ces deux postes44. En le libérant de la responsabilité de s’occuper des questions administratives journalières de la Laurentienne, les deux vice-rectorats permettent à Watters, comme il l’explique au Conseil, de se concentrer sur ses obligations « externes » telles que voir aux relations avec les gouvernements et de servir au sein de groupes de travail comme ceux, consacrés aux technologies d’apprentissage, de l’Association des collèges et universités du Canada et du gouvernement provincial, respectivement. À cet égard, son approche des affaires internes s’avère beaucoup moins « interventionniste » que celle de ses prédécesseurs. Il choisit ainsi de ne pas présider le comité du budget, s’en remettant plutôt au vice-recteur à l’administration Ron Chrysler, même si la responsabilité de le présenter devant le Conseil et le Sénat demeure sienne. Elle était désormais bien loin, l’époque où les recteurs, comme Monahan, agissaient comme leur propre vice-recteur à l’enseignement et à la recherche pour la gouvernance interne de l’Université45. Cela ne signifie pas que Watters n’agit pas à l’interne, car plusieurs initiatives d’importance sont lancées pendant son mandat, dont une portant spécifiquement son imprimatur. Comme le suggère son travail à l’externe au sein des groupes de travail, Watters est un défenseur précoce et ardent des possibilités qu’offrent les nouvelles technologies de communication au monde de l’éducation. La clé de voûte de son plan pour faire de la Laurentienne un chef de file en innovation consiste à engager celle-ci dans une révolution « sans fil », une mesure visionnaire que les non-initiés en matière de technologie peuvent pleinement apprécier avec du recul. Il appuie le projet d’école de médecine dans le Nord de l’Ontario dans ses premières étapes, malgré les résistances de quelques-uns au Conseil. Watters soutient de même le vice-recteur aux affaires anglophones Parker et son équipe de

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gestionnaires dans leur quête, ultimement fructueuse, en faveur d’un programme de baccalauréat en enseignement de langue anglaise. Le recteur caresse enfin le projet que la Laurentienne et le Collège Georgian, à Barrie, en Ontario, s’entendent pour offrir des programmes conjoints de baccalauréat en arts et en commerce et administration. Que toutes ces initiatives prennent leur envol alors même que la Laurentienne demeure dans un marasme financier est tout à son honneur46. Au départ, le Conseil des gouverneurs réserve au recteur Watters un accueil bien plus chaleureux que ne le fait la communauté universitaire dans son ensemble. Les relations entre le recteur et certains membres du Conseil se durcissent toutefois au fil du temps. Les gouverneurs se plaignent de plus en plus de ce qu’ils jugent être la propension de Watters à annoncer de nouveaux projets trop rapidement ou sans avoir suffisamment consulté le Conseil ou la communauté universitaire. La situation atteint son point critique au printemps 2000 quand le comité exécutif du Conseil propose une série de recommandations visant « à aider M. Watters à répondre aux attentes du Conseil ». Le recteur s’oppose à ce qu’il considère comme un empiètement du Conseil sur les plates-bandes de l’administration. La résolution est toutefois adoptée au terme d’un débat. Sans appuis solides au sein de la communauté universitaire, la situation du recteur devient de plus en plus périlleuse. Il annonce un an plus tard qu’il démissionnera le 1er juillet 2001 pour devenir recteur de la Technical University of British Columbia, un établissement plus directement branché sur ses intérêts et ses domaines d’expertise47. Les années Woodsworth, 2002–2008 En juin 2001, sur la recommandation du comité exécutif, le Conseil des gouverneurs nomme Herman Falter comme recteur par intérim. Membre du département de chimie, Falter a occupé plusieurs postes administratifs au fil des ans, dont, plus récemment, celui de vice-recteur intérimaire à l’enseignement et à la recherche durant l’interrègne séparant les recteurs Paul et Watters. La situation se trouve embrouillée du fait de la démission du vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, affaires francophones, André Roberge, devenu recteur de l’Université Sainte-Anne, en Nouvelle-Écosse. Le comité de sélection formé pour pourvoir à ce poste recommande de confier l’intérim à Gratien Allaire, ancien vice-recteur adjoint, affaires francophones. Son mandat durera finalement plus d’un an, le Conseil optant, tôt en 2002, d’interrompre la recherche d’un successeur jusqu’à l’embauche du prochain recteur. Ce ne sera donc qu’en janvier 2003 qu’entrera en fonction le nouveau vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, affaires francophones, Harley d’Entremont48. Le comité mixte – Conseil, Sénat, étudiants – de sélection du futur recteur constitué en juin 2001 se met au travail sans délai. À la mi-décembre, il suggère un nom : Judith Weisz Woodsworth. Moment déterminant de l’histoire de la Laurentienne, le Sénat et le Conseil des gouverneurs approuvent rapidement l’accession d’une première femme au rectorat. Née à Paris, Woodsworth grandit à Winnipeg, mais c’est à l’Université McGill qu’elle entreprend ses études postsecondaires, y décrochant un baccalauréat en français et en philosophie. Une licence ès lettres de

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judith w. woodsworth .  |  Rectrice de l’Université Laurentienne, 2002–2008.

l’Université de Strasbourg s’en suit, puis vient un doctorat en littéraire française de l’Université McGill une fois encore. De 1974 à 1980, Woodsworth enseigne la langue et la littérature françaises à l’Université de Toronto, d’abord, puis au Collège Huron de l’Université Western Ontario, et travaille à la division de la Défense nationale du Bureau de la traduction. Elle rejoint ensuite le département d’études françaises de l’Université Concordia, à Montréal, où elle occupe un certain nombre de postes administratifs, dont celui de directrice du département, au cours des dix-sept années suivantes. En 1997, l’Université Mount Saint Vincent d’Halifax la nomme vice-rectrice à l’enseignement et à la recherche pour cinq ans49. Comme John Daniel, son prédécesseur des années 1980, Woodsworth a le bonheur de prendre sa charge alors que, sur le plan financier, commence à s’éclaircir le ciel orageux qui a menacé les universités ontariennes et la Laurentienne en particulier pendant toute la décennie précédente. En novembre 2001, le Conseil des gouverneurs a résolu que le budget de l’Université pour 2002–2003, en plus de ne pas être déficitaire, doit relever le redoutable défi de réduire la dette. Au printemps 2002, toutefois, plusieurs aubaines inespérées dont un remboursement de taxe de vente provinciale valant 1,7 million de dollars ont tôt fait de considérablement améliorer la situation. La manne continue de tomber après l’entrée en fonction de Woodsworth. Cet automne-là, le gouvernement provincial annonce qu’il majorera de 50 pour cent la subvention nordique de la Laurentienne. Les inscriptions à cette dernière connaissent ensuite une poussée parce que plus d’élèves du secondaire qu’on l’avait prévu suivent un programme d’études accélérées afin de devancer la « double cohorte » qui doit arriver l’an prochain à l’université, alors que les élèves ontariens de 12e et de 13e année accéderont en même temps à l’éducation postsecondaire50. L’incidence sur la Laurentienne de la double cohorte, un engorgement miniature semblable à celui qui a présidé à la fondation de l’Université elle-même, ne se fait pas attendre. Les demandes d’inscription en première année donnant la Laurentienne comme premier choix augmentent de 101 pour cent. L’automne venu, les inscriptions bondissent de 21 pour cent, la plus forte hausse en Ontario.

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Cette explosion estudiantine se prolonge pendant les trois années subséquentes. En 2006–2007, le nombre total d’étudiants inscrits à la Laurentienne dépasse 9 100, une croissance de 44 pour cent par rapport à 2002–2003, soit deux fois la moyenne provinciale. Le financement s’accroît de façon tout aussi extraordinaire. En 2006–2007, les revenus d’ensemble de l’Université – à l’exclusion des établissements fédérés – atteignent 131 millions de dollars, ce qui représente 39 pour cent de plus qu’en 2002–2003. Au déficit accumulé de plus d’un million de dollars s’est substitué un surplus de près de 1,5 million de dollars. Les perspectives financières de l’Université n’ont jamais semblé si bonnes51. En mai 2003, alors qu’elle défend le budget 2003–2004 devant le Sénat, la rectrice Woodsworth note que les revenus générés par la double cohorte permettront à l’Université d’envisager de nouvelles dépenses pour la première fois depuis une décennie. Réduit à sa plus simple expression, cela signifie mettre sur pied de nouveaux programmes d’enseignement et de nouvelles installations de recherche, procéder à des embauches, à commencer par des professeurs, et répondre aux besoins d’espace d’un personnel et d’un corps étudiant toujours plus nombreux. Forte des ressources financières accrues à sa disposition, la direction de la Laurentienne avance avec vigueur sur tous les fronts. Entre 2002 et 2006, le corps professoral grossit de 27 pour cent, un contraste frappant avec la quasi-absence d’embauches de la décennie précédente. Au terme d’un long exercice de planification stratégique initié par le Conseil des gouverneurs à l’arrivée de Woodsworth, l’heure est au lancement de nombreuses initiatives en enseignement et en recherche, certaines, comme l’École de médecine du Nord de l’Ontario et le baccalauréat en enseignement de langue anglaise, ayant déjà fait l’objet d’une réflexion et d’autres, comme la série de programmes de doctorat, étant complètement nouvelles. Sur le plan de la recherche, enfin, l’Université prend véritablement son essor : les sommes obtenues quadruplent entre 2003 et 2006 pour atteindre 38 millions de dollars, tandis que le Centre for Excellence in Mining Innovation, une des clés du premier rang canadien de la Laurentienne pour l’augmentation des fonds de recherche cette année-là, ouvre ses portes en 200752. Le coût des ressources humaines et de la construction des nouveaux édifices est le talon d’Achille de cette remarquable expansion. En 1999, le gouvernement Harris avait créé un programme d’infrastructure appelé SuperCroissance en vertu duquel près de trois quarts de milliard de dollars se destinaient au secteur universitaire. Ce programme a injecté des fonds supplémentaires pour la construction de la salle de lecture Brenda-Wallace et du laboratoire d’informatique, cette annexe de la bibliothèque de l’université ouverte en 2001 et dont l’origine se trouve dans un don des familles Wallace et Fielding à la mémoire de l’épouse de l’ancien président du conseil James Wallace. Pour le reste, à cause d’inscriptions en baisse et du peu d’espace additionnel dont elle a besoin, la Laurentienne ne s’est pas très bien classée aux concours du programme SuperCroissance. Mais juste comme ses besoins ont augmenté en flèche, le nouveau gouvernement libéral de Dalton McGuinty a mis fin au programme, forçant l’Université à financer elle-même des immobilisations comme la nouvelle résidence ouest, le pavillon de l’École des

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sciences de l’éducation (programme anglais) et les ajouts au complexe sportif BenAvery, tous des engagements financiers à long terme53. Comme en bien d’autres occasions par le passé, la prospérité de la Laurentienne s’avère brève, prenant abruptement fin en 2007–2008. Si la légère baisse des inscriptions après la diplomation de la double cohorte l’année précédente contribue à ce revers de fortune, les principaux facteurs sont la forte bonification des salaires et des avantages sociaux et la hausse substantielle des dépenses de fonctionnement – de l’ordre de 33 pour cent dans ce cas-ci – qui se traduisent par un déficit de 1,4 million de dollars et des projections budgétaires plus sombres encore pour 2008–2009. Le comité du budget attaque de nouveau le problème en examinant minutieusement chaque dépense. Parsemé de « compressions », de « réductions » et de « gel » au sujet, entre autres, des postes de professeurs, des comptes pour imprévus et du personnel de soutien, son rapport 2008–2009 demande une diminution des dépenses de l’ordre de 6 millions de dollars, marquant un retour en force du régime minceur54. D’autres mauvaises nouvelles s’ajoutent à la précédente. Peu de gens à la Laurentienne ou ailleurs ont prévu la crise économique mondiale de l’automne 2008, une conjoncture malheureuse à tous égards qui se répercute évidemment sur Objectif 50, l’ambitieuse campagne que la Laurentienne a lancée en janvier afin de recueillir 50 millions de dollars pour ses noces d’or en 2010. Le projet phare de cette collecte de fonds présidée par Scott McDonald, un diplômé de la Laurentienne en commerce et ancien vice-président général aux ressources humaines et à la durabilité chez Vale Inco, est la construction, sur l’emplacement du chalet Robertson, du Centre d’études sur les lacs Vale Inco, où sera basée la future Unité conjointe d’écologie d’eau douce de la Laurentienne. Suivant la tradition de sa prédécesseure, Inco Canada, Vale Inco donne le coup d’envoi de la campagne avec un don de 4,5 millions de dollars. Grâce aussi aux généreuses contributions d’acteurs tels que le ministère de la Formation, des Collèges et des Universités (5 millions), Industrie Canada (5,152 millions), FEDNOR (2,475 millions) et le Fonds du patrimoine du Nord de l’Ontario (2 millions), la Laurentienne parvient à rassembler les 20 millions requis pour le projet dès mai 2009, un exploit incroyable compte tenu de l’effondrement dévastateur de l’économie dans les huit mois précédents. La campagne Objectif 50 continue, mais son rythme s’est ralenti55. La Laurentienne continue aussi, sans toutefois pouvoir compter sur l’intendance de la rectrice Woodsworth. Celle-ci remet sa démission au Conseil en février 2008 et l’Université Concordia annonce peu après qu’elle en deviendra rectrice et vicechancelière à compter du 1er août. En dépit des difficultés financières accablant l’Université au moment de son départ, Woodsworth a présidé à une remarquable transformation à tous égards : le nombre d’étudiants inscrits, les nouveaux programmes d’enseignement (de premier cycle et, surtout, de cycles supérieurs), les fonds et les installations de recherche, les infrastructures. Les astres se sont assurément trouvés bien alignés, qu’il s’agisse de la double cohorte ou de la prospérité économique de l’Ontario, mais la rectrice Woodsworth, par son approche consultative, mais décisive, de la gestion et sa volonté de maintenir les étudiants au centre

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de la réflexion et de l’action, mérite une part du crédit pour ces réalisations qui ont conféré à la Laurentienne un statut sans précédent au sein du monde universitaire canadien. Le début d’une nouvelle ère : Dominic Giroux, 2009– En avril 2008, le comité exécutif du conseil forme un comité de sélection pour trouver le replaçant de Woodsworth et charge entre temps Robert Bourgeois d’assurer l’intérim. Reflet, peut-être, d’une conception différente du rôle du recteur, la nomination de Bourgeois étonne. Les recteurs intérimaires sont traditionnellement sortis de la filière de l’enseignement et de la recherche, mais Bourgeois servait comme vice-recteur à l’administration depuis 2006, moment du départ à la retraite de Ron Chrysler après vingt-trois ans à ce poste. Toujours selon la tradition, les recteurs intérimaires possèdent une longue association avec l’Université, comme dans les cas de Geoffrey Tesson en 1997 et d’Herman Falter en 2001, mais cela ne vaut pas pour Bourgeois. Il faut préciser que les deux autres candidats logiques au poste, les vice-recteurs à l’enseignement et à la recherche aux affaires francophones (Harley d’Entremont) et anglophones (Susan Silverton), ont fait savoir qu’ils ne solliciteront pas de nouveaux mandats, d’Entremont pliant bagages en août 2008 et Silverton l’été suivant. C’est donc avec une équipe de cadres supérieurs bien différente que la Laurentienne entame son second demi-siècle. Le cours des événements suggère aussi qu’une autre philosophie administrative inspirera ce demi-siècle qui s’ouvre. En décembre 2008, le Conseil des gouverneurs et le Sénat appuient le choix de Dominic Giroux, recommandé à l’unanimité par le comité de sélection du recteur. Titulaire de baccalauréats en sciences sociales et en éducation de l’Université d’Ottawa et d’une maîtrise en administration des affaires de l’École des Hautes Études commerciales, à Montréal, Giroux arrive à la Laurentienne après avoir été sous-ministre adjoint au ministère de l’Éducation et à celui de la Formation, des Collèges et des Universités de l’Ontario. Auparavant, il a servi comme directeur des finances de deux conseils scolaires francophones, un dans l’Est ontarien et l’autre dans le Sud. Fait à noter, il reçoit deux prix de leadership en 2008, un premier, en éducation, de l’Université d’Ottawa et un second de la communauté d’affaires de Montréal. Peu usuelles selon les précédents établis à la Laurentienne – il est le premier recteur à n’avoir jamais occupé de poste universitaire précédemment et le premier depuis Stanley Mullins à ne pas posséder de doctorat –, les compétences et l’expérience de Giroux reflètent une autre vision, défendue par certains, de la nature du leadership universitaire. Selon ses termes, les individus les plus qualifiés pour prendre la tête d’un établissement d’enseignement postsecondaire ne viennent pas nécessairement du milieu universitaire. De fait, l’Université d’Ottawa trace la voie plus tôt en 2008 en nommant au poste de recteur et vice-chancelier Allan Rock, un ancien de l’université (B.A., LL.B.) surtout connu pour avoir été ministre dans le gouvernement libéral de Jean Chrétien dans les années 199056. Bien que ce glissement suscite la méfiance des puristes, il se pourrait qu’il constitue la suite logique dans l’évolution de la gouvernance universitaire. À

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dominic giroux .  |  Recteur de l’Université Laurentienne, 2009 à aujourd’hui.

mesure qu’ils gagnent en taille et en complexité, les petits établissements d’enseignement postsecondaire comme la Laurentienne se muent en entités juridiques de premier ordre – le budget total de la Laurentienne en 2007–2008, par exemple, atteint presque 150 millions de dollars – et l’expertise en affaires et en gestion ne peut plus y être l’apanage du seul vice-recteur à l’administration. En devenant plus représentatif de la communauté dans son ensemble, le Conseil des gouverneurs se détourne simultanément du monde des affaires : en 2007–2008 encore, à peine une poignée de ses membres votants vient de l’entreprise privée. Au même moment, la spécialisation des fonctions des cadres supérieurs tend à s’atténuer. Les vicerecteurs à l’enseignement et à la recherche assument plus d’autorité que jamais sur les affaires internes de l’Université, tandis que le recteur accorde plus d’attention aux questions externes telles que les relations avec le gouvernement, les collectes de fonds, les relations publiques et le Bureau des diplômés. Seul le prochain demisiècle pourra dire si la nomination d’une personne dotée de qualifications administratives comme celles du recteur Giroux constitue un tournant dans la saga sans fin de la gouvernance universitaire, à la Laurentienne comme ailleurs.

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Composer avec de dures réalités : la mise en place des programmes d’enseignement de base, 1960–1985 donald dennie

Au cœur de toute université se trouvent, en général, l’enseignement de cours et de programmes menant à un diplôme quelconque de premier, deuxième ou troisième cycles ainsi que la recherche qui, en principe, doit alimenter et nourrir les connaissances sur lesquelles s’appuie l’enseignement. Si ces deux raisons d’être fondamentales peuvent varier selon les époques, les cultures et la priorité qui leur est accordée, il n’en demeure pas moins que ce sont bien les pierres angulaires de l’institution. L’Université Laurentienne ne dévie pas grandement de ce principe. On peut affirmer que pendant les vingt-cinq premières années de son histoire, la Laurentienne a été principalement une institution d’enseignement de programmes de premier cycle dont la mission était d’offrir une éducation de niveau universitaire à la population de la région du nord-est de l’Ontario. Ce n’est qu’au milieu des années 1980 que la Laurentienne a commencé à accorder une plus grande priorité à la recherche. Le présent chapitre tente premièrement de retracer cette histoire en résumant le développement des programmes d’enseignement depuis 1960 et en exposant sommairement les structures bureaucratiques qui l’ont accompagnée. Ce chapitre analysera ensuite le développement de la recherche qui s’est opéré grâce aux centres de recherche, aux programmes de subvention et aux structures administratives et réglementaires que l’institution a cru bon d’établir pour encadrer et promouvoir cette fonction essentielle. De façon globale, il est possible d’affirmer que les programmes d’enseignement et la recherche ont évolué du général au spécialisé. Les programmes d’enseignement se sont développés pour répondre aux besoins des étudiants, surtout en fonction de leur nombre, et ce, au diapason de l’évolution des diverses disciplines ; ils se sont également développés pour refléter la situation financière de l’Université. Ce développement a été beaucoup plus prononcé au niveau du premier cycle, où l’on retrouve les baccalauréats et les certificats, surtout

ancienne bibliothèque de l a l aurentienne au centreville de sudbury.  |  Le père Filion, bibliothécaire en chef, explique le système de catalogage par carte à ses collègues, les bibliothécaires en chef Bruce Peel de l’Université d’Alberta et Peter Russell de l’Université de Toronto.

dans les premières décennies de l’histoire de la Laurentienne, qu’au niveau des études supérieures, lesquelles ont connu leur essor au cours des vingt dernières années. Le baccalauréat est le premier diplôme universitaire octroyé aux étudiants qui normalement sont diplômés des écoles secondaires et qui répondent aux exigences établies par l’université fréquentée. Ce diplôme varie selon les disciplines, de sorte que les universités décernent un baccalauréat ès arts, un baccalauréat ès sciences et des baccalauréats dans diverses disciplines professionnelles dont le service social et les sciences infirmières, entre autres. Les exigences et la structure mêmes du baccalauréat ont varié au cours de l’histoire de la Laurentienne. Les études de premier cycle : 1960–1985 L’Université Laurentienne a accueilli sa première cohorte d’étudiants en septembre 1960. Héritière en grande partie des programmes et des cours de l’Université de Sudbury, la Laurentienne se concentre au départ sur des programmes d’arts et de sciences bien qu’elle offre aussi trois programmes dits professionnels. Lors de sa première année de fonctionnement, en 1960–1961, la fédération qu’est l’Université Laurentienne comprend le collège de l’Université de Sudbury (institution catholique administrée par les pères jésuites), le collège de l’Université Huntington (institution de l’Église unie) et le Collège universitaire, institution non confessionnelle. Le troisième collège fédéré, Thorneloe (institution de l’Église anglicane), se joindra à la fédération en 1963. Cette fédération se partage les programmes d’enseignement comme suit : les deux institutions confessionnelles sont responsables surtout de l’enseignement et de l’administration des programmes de philosophie et de sciences religieuses alors que le Collège universitaire est responsable de tous les autres programmes1. L’Université de Sudbury, tout comme le Collège universitaire, offre des programmes en français et en anglais alors que Huntington et Thorneloe n’offrent

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que des programmes en anglais2. Cette caractéristique n’a pas changé au cours de l’histoire de ces institutions. La première cohorte d’étudiants a le choix des programmes suivants : un baccalauréat ès arts (les programmes de littérature française, histoire, philosophie, économie, politique, biologie, chimie, physique et mathématiques offerts en français, et ceux d’english, french, political economy, history, philosophy, biology, chemistry, physics and mathematics offerts en anglais) ; un programme d’études d’un an en génie ; un baccalauréat en administration (bachelor of commerce), offert en anglais ; et un baccalauréat ès sciences en sciences infirmières. Le programme de B.A. avec options, qui recrute le plus grand nombre d’étudiants, offre une éducation dite libérale décrite comme suit : Sa mission essentielle est de former l’élite dont dépend le progrès d’une civilisation. C’est l’œuvre d’une université de préparer les hommes capables d’occuper les postes de commande et de servir la société en la conduisant à son plein épanouissement et à sa perfection. Aussi doit-elle participer activement au maintien et au développement des connaissances humaines par les recherches scientifiques et les études approfondies. Elle doit promouvoir et orienter le progrès intellectuel, spirituel et social du corps professoral et des étudiants. Elle doit collaborer avec les institutions et les pouvoirs civils et religieux. En outre, l’Université Laurentienne croit à la transcendance des valeurs spirituelles, morales et humaines. Au sommet de la hiérarchie des valeurs, elle place les valeurs surnaturelles transmises par la Révélation chrétienne3.

Cette orientation générale, héritée de l’Université de Sudbury, est fondée sur un curriculum en vertu duquel, rappelle le secrétaire général au Sénat, tous les étudiants sont exposés à une gamme de disciplines qui ont pour objectif de former leur esprit dans la tradition des arts libéraux tels que développés dans la civilisation occidentale4. Toutefois cette philosophie va changer de façon radicale au cours des premières années de l’histoire de l’Université Laurentienne, car cette dernière a été établie au moment où les universités canadiennes commencent à être transformées de fond en comble. From 1955 onward, Canadian universities were completely transformed from what had usually been, with only one or two exceptions, small, struggling undergraduate institutions into large, diverse institutions with wide ranges of undergraduate and professional programs and, in most instances, an impressive array of graduate programs5.

Les universités québécoises vont aussi connaître une transformation à compter des années 1960 lorsque le gouvernement libéral nouvellement élu procède à une refonte du système d’éducation. La structure des collèges classiques, champions de cette éducation libérale, est démantelée. Les quelques collèges classiques de l’Ontario français commencent aussi à disparaître au cours de cette décennie6. Le recteur de l’Université Laurentienne, Stanley Mullins, reconnaît bien ce changement fondamental qui est en voie de transformer l’institution qu’il dirige :

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If the years immediately preceding 1967–1968 left any doubt concerning the role of the university in society, events of the past year have removed such doubt. The university is not only in the modern world, it is – in its present form – at the service of contemporary society. Newman’s concept, cherished though it may be by many dedicated to the liberal arts, is as dead as nineteenth-century liberalism. Knowledge has progressed too rapidly, the demands of an egalitarian society have been too pressing, the needs of a world harnessed to the force of technology have been too omnivorous7.

Face à l’évolution rapide de la philosophie de l’enseignement universitaire, la Laurentienne se voit déjà obligée de se tenir au diapason de cette évolution et ainsi de transformer ses programmes et ses structures. Par conséquent, en 1963, le recteur de l’époque demande au Sénat d’entreprendre une réorganisation des cours. Selon lui, ces derniers devraient être regroupés en divisions, ce qui simplifierait leur administration et procurerait un meilleur encadrement pour les programmes. L’organisation des cours et des programmes devrait s’inspirer, dit-il, de celle que l’on retrouve dans les universités américaines8. À compter de l’année universitaire 1963–1964, la Laurentienne, par l’intermédiaire de comités et sous-comités du Sénat, se lance dans une révision de ses programmes pour leur donner un encadrement différent, plus conforme à celui qui se dessine dans d’autres institutions universitaires canadiennes, soit une spécialisation selon les disciplines. Ce passage d’un programme général (qui oblige tous les étudiants à suivre des cours obligatoires tels le français, l’anglais, la philosophie et les sciences religieuses) à des programmes fondés sur une spécialisation disciplinaire, d’une orientation religieuse à laïque, n’est pas étranger, semble-t-il, à la transition qui se dessine dans le corps professoral. À ses débuts, la Laurentienne comptait sur des professeurs formés non seulement dans le cadre de l’éducation libérale mais qui provenaient aussi de divers ordres religieux. Le recrutement de nouveaux professeurs laïques, visant à offrir un nombre croissant de cours, amène une vision nouvelle à la question du développement et de l’encadrement des programmes. En témoigne une déclaration du doyen intérimaire des arts et des sciences à l’effet que l’année 1963–1964 avait été productive relativement à la révision du curriculum et des programmes et que cette révision reflétait la prédominance de professeurs laïques au sein de la faculté. Cette révision et cette transition vers une spécialisation disciplinaire passent obligatoirement par la scission de la faculté des arts et des sciences en facultés différentes dans lesquelles sont regroupées les diverses disciplines comme cela se produit ailleurs. Cette restructuration n’est pas étrangère à celle qui s’effectue dans d’autres universités, même les plus renommées comme celle de Western Ontario, à London. In 1957 pressures for the breakup of the historic Faculty of Arts and Science were already evident. The actual separation into distinct faculties of Arts and Science occurred several years later after a period of often acrimonious debate between the two sides. In the late 1960s, I was fascinated to see the same course of events, and to hear the same arguments, as

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the single Faculty of Arts and Science at the University of Western Ontario split into three separate faculties of Arts, Social Sciences and Science. Remarkably the same process, with the same arguments pro and con, occurred while I was president of Dalhousie, leading in this case to the formation of a Faculty of Arts and Social Sciences and a Faculty of Science9.

À l’Université Laurentienne, ces changements se traduisent d’abord par l’établissement de programmes de quatre ans (dits de spécialisation en français et honours en anglais) à compter de 1966–1967. La création des facultés est précédée par la nomination, en 1967, de doyens adjoints en sciences, en humanités, en sciences sociales et, au début des années 1970, dans les écoles professionnelles. Le tout est couronné, en 1975, par l’établissement de quatre facultés distinctes. Ainsi, la faculté des arts et des sciences se scinde en trois, soit celles des humanités, des sciences sociales et des sciences tandis que les programmes professionnels sont regroupés dans la faculté des écoles professionnelles10. La création de ces quatre facultés répartit des disciplines et des programmes à la fois semblables et différents dans chaque faculté. Les humanités et les sciences réunissent des disciplines bien établies. Les deux autres facultés regroupent des disciplines relativement nouvelles ou dont l’enseignement dans les universités canadiennes est récent (les sciences sociales) ou encore des disciplines à caractère professionnel et appliqué (écoles professionnelles). La mise en place des facultés au sein de la Laurentienne (et ailleurs) donne lieu à de nombreuses contestations. Le regroupement selon les disciplines

Dès ses débuts, un genre de spécialisation linguistique s’est établi à la Laurentienne et a causé des ennuis et des tiraillements politiques surtout au cours des années 1970 et 1980 (comme l’analyse de façon détaillée le chapitre de Guy Gaudreau dans ce livre). Alors que le baccalauréat ès arts avec options est principalement offert en français et en anglais, les programmes d’études professionnelles ne sont offerts qu’en anglais hormis quelques cours en français. De plus, à compter des années 1970 surtout, les programmes en sciences sont offerts majoritairement en anglais. La scission des arts en deux – soit humanités et sciences sociales – s’effectue surtout à cause de la croissance considérable des programmes en sciences sociales au cours des années 1960 mais aussi parce que ces deux groupes de disciplines s’inspirent de paradigmes théoriques et surtout méthodologiques très différents. Les humanités reposent sur des disciplines de base (english, français, philosophie, sciences religieuses, études classiques, langues modernes) dont l’objectif consiste à étudier les langues et les textes de l’Antiquité aux temps modernes, qu’ils soient littéraires, philosophiques ou religieux. Au cours des années, des disciplines axées sur d’autres formes artistiques et créatrices traditionnelles (théâtre, musique) ou plus contemporaines (communication) viennent se greffer à ce corpus. En soi, cette gamme de disciplines et de programmes n’a rien qui la distingue de celle des autres universités. Ce qui la rend à la fois plus distinctive et complexe, c’est la répartition de ces programmes au sein du Collège universitaire.

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des étudiants dans un l aboratoire de l angue dans les années 1970.

Au cours de ses vingt premières années, le Collège universitaire a la responsabilité des programmes d’english, de français et de french, de philosophie (en collaboration avec les collèges fédérés) et de langues modernes. Voyons-les en détail. À ses débuts, le programme d’english enseigne surtout la littérature anglaise (plus précisément britannique) avec quelques cours de langue qui sont obligatoires pour les étudiants des autres disciplines. Au cours des années 1970, des cours de littératures canadienne et américaine s’ajoutent au corpus du programme ainsi qu’un cours sur la littérature des femmes et un sur le film, orientations qui prendront plus d’importance dans les années 1980. Quand on cesse d’obliger les étudiants à suivre des cours en english à la fin des années 1960, cela affecte considérablement le nombre d’inscriptions à ce programme. Le programme de français ressemble au programme d’english en ce qu’il offre des cours de composition et de grammaire et surtout des cours de littérature française. En 1970, quelques étudiants se révoltent contre l’orientation trop européenne du programme et réclament des cours sur la culture, la littérature et la langue franco-ontariennes. Dans une lettre adressée au secrétaire du Sénat, un chargé de cours d’un autre département, Pierre Bélanger du département de sociologie, affirme que le programme du département de français constitue un colonialisme culturel qui perpétue l’aliénation culturelle des Franco-Ontariens11. La première étape se situe au tournant des années soixante-dix, lorsqu’un groupe d’étudiants, des Franco-Ontariens pour la plupart, exprimèrent leur insatisfaction et leur désaccord au sujet du contenu des programmes et des cours de littérature offerts par le département de français de l’Université Laurentienne. Moyen de contestation utilisé : « l’occupation ». Ils exigeaient alors plus de cours de littératures canadienne-française et québécoise. Cette première manifestation, très radicale, provoqua les autorités en place à un point tel qu’ils n’eurent d’alternative que d’apporter de profondes modifications au programme. Mise à part le moyen, l’occupation, encore très à la mode à l’époque, et mise à part la vague nationaliste et indépendantiste qui provenait du Québec et déferlait sur tout le

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Canada français, cette manifestation, à incidence fortement culturelle, transposait bien la revendication et le sentiment des étudiants franco-ontariens : au centre d’une profonde crise d’identité, ils voulaient d’abord et avant tout, ici et maintenant, des auteurs et des œuvres canadiens-français et québécois. Ils affirmaient dès lors leur refus et leur incapacité de se reconnaître exclusivement dans les cours de littérature française, et lançaient alors une revendication comparable à celle des étudiants québécois qui, peu de temps auparavant, posaient les mêmes gestes12.

Bien qu’un cours sur la littérature canadienne d’expression française ait été offert depuis 1963, le département crée donc, à compter de 1976, des cours qui portent sur la littérature et la culture franco-ontariennes et canadiennes-françaises. C’est aussi à cette époque qu’il inaugure des cours sur la linguistique. De plus, le département commence à offrir le programme de french à compter de 1962–1963 à l’intention des étudiants anglophones qui veulent parfaire leurs connaissances de la langue et de la littérature françaises. Ce programme sera offert à ses débuts dans le cadre du programme de langues modernes mais deviendra, par la suite, la responsabilité du département de français. Les langues modernes, de leur côté, offrent tout un arsenal de cours de langue et de littérature pendant les vingt premières années de la Laurentienne. En plus de cours de french, ce programme offre des cours d’espagnol, d’allemand, d’italien, de russe, d’ukrainien et de finnois (ces deux derniers pendant quelques années seulement au cours des années 1970). Arrêtons-nous maintenant à l’enseignement de la philosophie. Ce programme est réparti dès le début entre le Collège universitaire et les trois collèges fédérés, d’où la nécessité de créer un département conjoint dès 1964. Toutefois, à la fin des années 1960, Huntington et Thorneloe cessent d’offrir des cours en philosophie et leurs professeurs se joignent au corps professoral du Collège universitaire. Depuis 1970, le département conjoint ne comprend que le Collège universitaire et l’Université de Sudbury, le premier n’enseignant qu’en anglais et le deuxième en anglais et en français. Au cours de la première décennie, le programme offrait des cours de philosophie ancienne, médiévale, moderne et contemporaine ; dans les années 1970, il commence à offrir des cours spécialisés tels que philosophie et art, philosophie de l’éducation, philosophie des sciences, etc. Tout comme pour le programme d’english, l’élimination de cours obligatoires en philosophie pour la plupart des étudiants à la Laurentienne à compter de 1969 influe considérablement sur le nombre d’inscriptions à ce programme. Le programme de sciences religieuses/religious studies repose, quant à lui, sur la collaboration entre les trois collèges fédérés (Université de Sudbury, Huntington et Thorneloe). À ses débuts, le programme est axé prioritairement sur la Bible et la religion. À compter des années 1970, le programme se divise en trois blocs : la tradition judéo-chrétienne, les religions du monde et les problèmes religieux contemporains. À l’Université de Sudbury, dans les années 1970, deux programmes axés sur les traditions et les cultures des peuples fondateurs du Nouvel-Ontario viennent s’ajouter aux programmes conjoints de sciences religieuses et de philosophie, à

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j . w. edward newbery   |  La relation de Newbery avec l’Université Laurentienne commence lors de sa nomination au poste de directeur général de la Northern Ontario University Association en 1959, puis se poursuit lorsqu’il devient le deuxième recteur de l’Université Huntington. Son plus long mandat, cependant, sera au programme d’études amérindiennes de l’Université de Sudbury, créé en 1971.

savoir : le programme d’études amérindiennes13 qui s’appellera d’abord indiennesesquimaudes14 et ensuite amérindiennes-esquimaudes15, et celui de folklore animé notamment par le père Lemieux. S’agissant du programme d’études amérindiennes, il naît dans la mouvance d’un renouveau d’intérêt, aux niveaux politique et universitaire, pour la question des peuples des Premières Nations. Le militantisme de certains groupes autochtones, principalement aux États-Unis, contribue à ce regain d’intérêt. Au Canada, le Livre blanc du gouvernement libéral de Pierre-Elliot Trudeau, publié en 1969, avait relancé la polémique au sujet du sort réservé aux communautés amérindiennes du Canada. Cet avant-projet de loi avait pour objectif d’éliminer la loi et la bureaucratie qui gouvernaient le statut des Autochtones et de leur garantir ainsi une certaine égalité au sein de la société canadienne. Ce projet a suscité un tel tollé de la part des Autochtones et de plusieurs personnes non autochtones que le gouvernement a décidé de le retirer en 197116. Ed Newbery, professeur au département de sciences religieuses de l’Université de Sudbury et recteur de l’Université Huntington de 1962 à 1968, alimente l’intérêt pour un programme interdisciplinaire en études amérindiennes qui serait fondé sur le fait que l’avenir des communautés « indiennes » passe obligatoirement par un renouveau psycho-spirituel, car la culture, la société et la civilisation émergent de la foi. Ayant identifié et rappelé les résultats de la confrontation entre les peuples européens colonisateurs et les peuples des Premières Nations, le professeur Newbery est d’avis que le temps est venu de rétablir l’esprit et l’attitude des Amérindiens à l’égard de la nature et de faire renaître, à partir d’un inconscient racial, un rôle productif en écologie et en conservation17. En 1971, l’objectif plus concret d’un tel programme est présenté au Sénat. Intitulé « An Interdepartmental Programme in American-Eskimo Studies. Rationale », il se lit partiellement comme suit :

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The programme is intended to acquaint students as fully as possible with the situation of, especially Canada’s, native people. This includes their pre-Colombian life, their confrontation by in-coming Europeans and the consequence of this, the treaties, the reservation system, the Indian Act and its revisions, the problems of integration, acculturation, assimilation, native rights, identity and education, language, the secret of the people’s endurance and their renaissance, the present worth of their ancient insights in the light of modern problems sociological and ecological, twentieth century aspirations and the non-Indian role in respect to these. It is a study which is related to several disciplines in the university and the hope is to draw upon these for a programme which is broad in its coverage, expert in its handling and integrated in its bearing upon the Indian’s future18.

Ce programme interdisciplinaire comprend au départ des cours provenant des programmes de sociologie, sciences religieuses, histoire, anglais, philosophie, anthropologie, géographie et science politique. Lors d’un forum au sujet des programmes d’études amérindiennes organisé à l’Université Trent de Peterborough en février 1973, le programme de l’Université de Sudbury est critiqué pour ne pas avoir suffisamment de contenu amérindien et pour dépendre trop de la bonne volonté des départements qui y participent19. Outre les objections soulevées lors du forum, il connaît également des problèmes relatifs à des visions divergentes quant à sa nature et à ses objectifs. Pour ses pionniers, le programme a une fonction expérimentale telle qu’exprimée dans l’approche du professeur Newbery. Mais pour certaines disciplines des sciences sociales surtout, le programme devrait être plus « académique ». Par exemple, les trois professeurs du programme d’anthropologie présentent une critique de ce programme au Comité des programmes du Sénat. En somme, ces professeurs croient que le programme d’études amérindiennes doit être repensé à partir de recherches, de planification et d’organisation plus solides et ce, par des spécialistes qui s’y connaissent en ce qui a trait aux besoins en éducation post-secondaire des peuples des Premières Nations de la région20. À la suite de tels commentaires et d’autres, le recteur nomme un comité externe chargé d’évaluer le programme. Ce comité remet son rapport en novembre 197521. Il recommande le maintien de ce programme, la refonte du programme de cours ainsi que l’embauche d’un ou deux professeurs et l’établissement d’un comité ad hoc de planification pour la préparation d’un programme de cours et d’une structure administrative. Les auteurs du rapport notent les visions divergentes par rapport à ce programme : la vision expérientielle et religieuse et la vision plus universitaire axée sur la recherche et les critères académiques. Les auteurs recommandent une approche qui combine les deux visions. En 1976, le comité ad hoc remet son rapport en recommandant un programme de cours axé sur un contenu amérindien : des cours de langues en ojibway et en cree et des cours portant sur divers aspects de la culture, de l’éducation, de l’identité et de la religion des Amérindiens. Tous ces cours doivent avoir la cote NATI et le programme ne sera donc plus interdisciplinaire comme à ses débuts. Le rapport recommande enfin que ce programme soit intégré à la faculté des humanités mais

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qu’il soit une unité administrative et d’enseignement au sein de l’Université de Sudbury22. Le Sénat de l’Université Laurentienne approuve cette refonte du programme en 1976 ; il est demeuré essentiellement le même, comportant toujours des cours sur l’apprentissage des langues ojibway et cree et de divers aspects des cultures amérindiennes. Un autre programme de l’Université de Sudbury est celui de folklore à compter de 197523. Il s’agit d’un programme comportant six cours de trois crédits qui constituent, dans le jargon, une continuation. Le folklore est la science des traditions, des usages et de l’art populaire d’un pays, dans ce cas le Canada français. Le programme est relié au Centre franco-ontarien de folklore dirigé par le père Germain Lemieux, s.j., qui a commencé son programme de recherche en 1948. Le collège de l’Université Huntington inaugure son programme général et spécialisé de musique, qui offre des cours en histoire, en appréciation et en théorie de la musique en plus de cours d’interprétation. Le collège de l’Université Thorneloe aussi devient progressivement responsable du programme d’études classiques pendant cette période ; dans le cadre de ce programme, on donne des cours de grec et de latin ainsi que des cours portant sur des auteurs grecs et romains. Le latin, qui avait été à l’honneur au collège classique, perd sa place en 1960 si bien qu’on se dit surpris, lors d’une réunion du Sénat en 196125, de son absence du curriculum. Réflexe symptomatique de la philosophie des arts libéraux de cette époque, « [i]t was stated that it could not be seen how a B.A. degree could be given if Latin were not included among the compulsory subjects for all students since this subject was considered an essential element of culture. » Un programme de « continuation » en langue et littérature latines sera établi en 1963 et un programme de concentration en 196926. Thorneloe commence à offrir des cours (suffisants pour une « continuation ») en études sur la femme en 197827. Si au début de l’Université Laurentienne, les cours et programmes en sciences sociales n’étaient pas aussi nombreux que ceux en humanités, leur croissance au cours des années 1960 et 1970 reproduit celle enregistrée dans les autres universités canadiennes et québécoises. Dans son rapport au Conseil des affaires universitaires en 1969, le recteur fait état du déséquilibre entre les deux divisions des arts. Within the Faculty Arts and Science, disquiet is experienced because of the growing imbalance between humanities and social science programmes. During the last two years […] some Humanities courses have lost more than half their enrolment. One must be on guard here against the notion that students, who were formerly compelled to take Humanities courses, now follow their real interests in shifting to Social Sciences. The problem is of much greater complexity than that. Under the old curriculum, the Humanities flourished in all years ; and this fact indicates that students, when once exposed to the great themes in history, philosophy, language and literature at university level, continue to follow these programs after all direction or compulsion (an ugly word) had lapsed 28.

La scission entre les humanités et les sciences sociales qui s’effectue graduellement au cours des années 1960 est donc due à cette croissance des effectifs étu-

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des étudiants dans l a salle de lecture de l a bibliothèque de l’université l aurentienne dans l’édifice fédéral , rue l arch en 1961.

diants en sciences sociales mais aussi au fait que, de façon générale, ces dernières mettent beaucoup plus l’accent sur la théorie et les méthodes que les humanités. Dès la première année de son existence, la Laurentienne a commencé à offrir des cours dans certaines disciplines des sciences sociales soit en histoire, en géographie (en anglais seulement), en économie et science politique ainsi qu’en psychologie et en sociologie, dont les cours respectifs sont offerts par le programme de philosophie. Passons-les en revue. Aux débuts de la Laurentienne, le programme d’histoire est sans doute le plus complet – en plus de celui d’économie – ce qui reflète le développement qu’a connu cette discipline à l’Université de Sudbury. Il comprend des cours en histoire médiévale et contemporaine ainsi qu’en histoire du Canada, de l’Angleterre et des États-Unis. En 1965, le programme se divise en deux grandes branches, soit l’Europe et l’Amérique du Nord, depuis le Moyen-Âge29. Le programme offre aussi des cours dans d’autres domaines tels l’Europe ancienne et médiévale, l’Asie, la Chine, le Japon et l’Amérique latine ainsi qu’en méthode et en historiographie. Le programme d’économie ayant aussi fait l’objet d’un certain développement à l’Université de Sudbury, il comprend donc un bon nombre de cours au départ, soit en théorie, en histoire économique du Canada, ainsi que sur la monnaie, le système banquier et la finance. Dans les années 1970, on y ajoute des cours en développement économique du Canada et en micro-économie. À l’époque, ces cours sont déjà utilisés par le programme de commerce, comme ils le sont d’ailleurs encore aujourd’hui. Quant au programme de science politique, il est d’abord jumelé au programme d’économie en 1964, mais devient autonome en juillet 1967 et se développe rapidement dans les années 1960 et 1970 dans les quatre spécialisations suivantes : gouvernement canadien, relations internationales, politiques comparées et administration publique.

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N’offrant que quatre cours à ses débuts, le programme de géographie est jumelé pendant quelques années (de 1962 à 1970) au programme de géologie – prend aussi un essor important. Dans les années 1970, il comprend des cours de cartographie, des populations, de géographies régionales, de géographie du Canada ainsi que de géographie urbaine, politique et économique. Cet ensemble de cours se scinde éventuellement dans deux grandes spécialisations, soit la géographie physique et la géographie humaine. C’est sans aucun doute le programme de psychologie qui connaît la croissance la plus fulgurante au fil des ans. À partir d’un cours offert dans le cadre du programme de philosophie, il atteint déjà le statut de département en 1962 (bien qu’il soit jumelé au programme de sociologie à compter de 1964). Il deviendra rapidement le programme avec le plus grand effectif d’étudiants dans les sciences sociales et les arts en général, comme en témoignent deux rapports au comité exécutif du Conseil des gouverneurs. Le premier, en 1962, mentionne que l’Université a dû louer une classe spéciale (on se souviendra que la Laurentienne avait encore ses locaux au centre-ville) pour accommoder le nombre inattendu d’étudiants (90) dans un des cours de psychologie offerts à l’été 1962, en plus d’embaucher un assistant pour la correction des travaux30. Le deuxième, soit un rapport du doyen en 1963, mentionne que le nombre de professeurs en psychologie ne sera pas suffisant en 1963–1964 et encore moins en 1964–1965 si les prévisions quant au nombre d’étudiants qui opteront pour une concentration dans ce domaine s’avèrent fondées31. Le nombre de cours offerts se multiplie rapidement : en plus des méthodes et des théories, les cours comprennent le développement, la motivation et l’affectivité, la personnalité, l’apprentissage, la psychopathologie, la connaissance. Bien qu’ils se regroupent en deux grandes sections, soit l’expérimentation et la clinique, la plupart des cours forment encore le noyau de son programme32. Abordons maintenant le programme de sociologie, qui se dissocie de celui de psychologie à compter de 1969, et fait l’objet d’un débat entre les collèges fédérés et le Collège universitaire en 1962. En effet, en avril 1962, le doyen des arts et des sciences livre sa pensée au recteur Bennett : It seems to me that Sociology is certainly among those academic sciences which should not be taught by the denominational colleges. Otherwise it could become exposed to denomination biases which are incompatible with the discipline itself […] So far officials of the University of Sudbury have expressed their interest in teaching social work or catholic social teachings. But I am very much against teaching the science of sociology in the federated colleges for the reason that, as has been alleged, it is apparently a controversial subject33.

La question est résolue à l’automne 1962 lorsque les collèges fédérés décident de cesser d’enseigner la sociologie pour des raisons d’ordre financier. Le doyen Bourbeau résume ainsi cette décision : Dr Bennett and I concur in restoring the responsibility for the teaching of Sociology to the University College in 1963–1964 under the Department of Psychology and under the

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leadership of a competent Canadian sociologist holding a Ph.D. in Sociology. The end in view is to inaugurate in due course a Department of Sociology in University College34.

Le programme de sociologie se développera aussi rapidement au cours des années 1970 surtout ; il se spécialisera principalement dans les domaines de la famille, de la socialisation, de la criminologie, de la sociologie du droit et de la société canadienne, en plus évidemment de la théorie et des méthodes surtout quantitatives. Déjà dans ces années, un débat entre les partisans des méthodes quantitatives férus de statistiques et des méthodes qualitatives anime les réunions de ce département. Inauguré en 197235, le programme de concentration en anthropologie est jumelé au programme de sociologie dont il devient une continuation. Ses trois professeures (une francophone et deux anglophones) réussissent à offrir un ensemble de cours qui initient les étudiants aux domaines importants de la discipline, soit physique/biologique, socioculturel et linguistique ainsi qu’archéologique. C’est en 1971 que des professeurs des sciences sociales commencent à discuter d’un programme interdisciplinaire en études canadiennes36. Ces discussions se situent dans la mouvance d’un certain regain de nationalisme canadien (surtout anglais) à la suite de plusieurs événements, dont le centenaire du Canada en 1967, la flambée du nationalisme québécois dans les années 1960, et de publications portant sur l’état de l’enseignement au sujet du Canada dans les écoles. In 1968, inspired by the Centennial celebrations, A.B. Hodgetts published What Culture? What Heritage? Hodgetts examined the teaching of Canada in hundreds of schools and concluded: « We are teaching a bland, unrealistic consensus version of our past ; a dry-asdust chronological story of uninterrupted political and economic progress told without the controversy that is an inherent part of history 37. »

Le programme est établi néanmoins après cause en 1971 et les cours débutent en septembre 197238. En plus de cours de base (CANA) en études canadiennes que se partagent plusieurs professeurs, le programme s’appuie sur des cours de diverses disciplines dont l’économie, l’anglais, le français, la géographie, l’histoire, la science politique, les sciences religieuses, la sociologie et l’anthropologie. Cette structure interdisciplinaire cause des problèmes budgétaires dès 1975. Dans une lettre adressée au coordonnateur du programme, le recteur Monahan affirme que ce programme doit être intégré aux programmes respectifs des divers départements qui y participent afin de devenir partie intégrale de la charge de travail des professeurs. This has not occurred for a variety of reasons. As a result, the programme continues to depend on overload payments to provide instructional support. Given the small enrolment in the courses which are peculiar to the programme, it is questionable whether the University should maintain the programme. The Budget Committee is inclined to judge that, unless the instructional needs of the programme can be met from within the regular

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course assignments of the faculty in the participating departments, i.e. without overloads, the programme in its present form should be abandoned39.

En réponse, le comité de coordination indique qu’il est trop tôt pour juger du succès du cours CANA 1000 surtout que ce dernier ainsi que le programme n’ont pas eu de publicité. De plus, il existe dans la région de Sudbury une demande importante pour ce genre de programme compte tenu de l’adoption, en 1974, de l’enseignement de programmes en études canadiennes au niveau des écoles secondaires. Enfin ce programme de B.A. est jugé nécessaire pour servir de base au programme proposé de maîtrise en études canadiennes40. Le programme se poursuivra et deux autres cours (CANA 2000 et CANA 3000) seront offerts au cours des années suivantes. Toutefois, la question budgétaire ainsi que celles de la structure et de la qualité du programme demeureront à l’ordre du jour jusque dans les années 1980 et 1990. Un autre programme interdisciplinaire dans les sciences sociales est celui de droit et justice41, mis sur pied pendant cette période. Au départ, il comporte des cours en sociologie, philosophie, science politique, psychologie. Ce sont des professeurs de philosophie qui, remarquant la baisse considérable d’inscriptions dans leurs cours après la décision du Sénat de cesser de les rendre obligatoires, ont conçu ce programme. Avec l’aide de professeurs en criminologie surtout, ils ont élaboré un programme qui ne serait pas en droit, c’est-à-dire de nature professionnelle, mais plutôt inspiré par les arts libéraux en ce sens qu’il combinerait des aspects moraux tels les droits individuels et collectifs, et des aspects juridiques. Il s’agit du premier programme du genre au Canada, et il s’avère très populaire auprès des étudiants. Au fil des ans, il perd son caractère interdisciplinaire à mesure qu’il élabore ses propres cours sous la désignation JURI . Changeons maintenant de faculté pour examiner les écoles professionnelles. Leur création, à la fin des années 1960, engendre un malaise au sein de l’Université. Ce malaise est perceptible dans les extraits qui suivent. Ainsi, dans une lettre du directeur de biologie au doyen adjoint des sciences, en 1969, le premier mentionne la nécessité de définir des priorités pour le développement de l’Université. Selon lui, la croissance a été gérée prudemment jusqu’à présent. But now, clouding this careful growth, we find that we have become encrusted with a layer of partially academic units. In some cases these units seem to be more responsible to some outside professional organizations than to the university. This alone must make the academic worth of these units suspect42.

Le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, Cloutier, fait aussi écho à ce malaise dans le cadre du rapport du recteur au Conseil des gouverneurs. Some difficulty has been experienced in coordinating the work of the main academic unit, the Faculty of Arts and Science, and that of the newly created Professional Schools. In reviewing the situation, one is tempted to explain the opposition between the academic

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unit and the professional ones as a « lonely child reaction ». Laurentian University, since its inception, had been exclusively a one unit institution. With the establishment of the Professional Schools, several problems became evident to the members of the Faculty of Arts and Science namely: the relative status of a Director of a Professional School and that of a Dean of a Faculty, the relative value of a professional degree and that of a traditional academic one, finally the relative budgetary priority given to the Professional Schools with respect to the Departments of the Faculty of Arts and Science43.

Pas étonnant alors que, dans son rapport au Conseil des affaires universitaires de l’Ontario, le recteur Mullins fait état des relations tendues entre la faculté des arts et sciences et les écoles professionnelles : Members of this Faculty feel that the establishment of professional units, many of which have commitments to professional organizations, to industry, and to government, weakens the traditional concept of a university: devotion to truth and learning, a philosophy that sees in knowledge its own power44.

Ce malaise, qui s’est poursuivi pendant de nombreuses années, est né lorsque la Laurentienne a inauguré trois nouveaux programmes professionnels : le baccalauréat ès sciences de quatre ans en éducation physique et hygiène, celui de quatre ans en service social (seulement en anglais) en 1967–196845 et celui de science du langage pour former les traducteurs et interprètes en 1968–196946. Dès sa première année, l’Université compte trois programmes professionnels : administration des affaires, génie et sciences infirmières. Seul le programme en administration des affaires (qui deviendra le programme de commerce ainsi que l’École de commerce) peut offrir des cours et un diplôme sans interruption dans les domaines de la comptabilité et de la gestion des entreprises. Mais l’École, en collaboration avec celle d’éducation physique, inaugure, en 1972–1973, le nouveau programme de baccalauréat en commerce en administration des sports (SPAD)47. Dès ses débuts, ce programme contingenté s’avère très populaire en grande partie parce qu’il s’agit de l’un des seuls programmes de son genre non seulement en Ontario mais au Canada. Combinant des cours en commerce et en éducation physique, seulement en anglais, il attire des étudiants de partout au pays. Le programme de génie, qui avait débuté en 1958, est restreint à un an d’études en 1960 parce que l’Université n’avait pas les laboratoires nécessaires dans ses locaux au centre-ville pour satisfaire les exigences de l’Ordre des ingénieurs. C’est seulement à partir de 1966–1967, lorsque le nouveau campus sera ouvert, qu’il peut offrir un programme de deux ans avec spécialisations en quatre domaines (mais seulement en anglais), soit génie chimique, génie civil, génie métallurgique et génie minier ou géologique48. Aussitôt remis sur pied, le programme doit traverser une autre crise (il en connaîtra de nombreuses au cours de son histoire). En effet, en 1970, le rapport « Ring of Iron49 » recommande la fermeture du programme à la Laurentienne, c’est-à-dire que l’Université cesse d’admettre des étudiants en première année dès septembre 1971, en alléguant que les programmes de génie déjà offerts dans les

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le pl anétarium doran au début des années 1970.

autres universités du sud de la province suffisent pour répondre à la demande. L’Université Laurentienne lance alors une campagne de lobbying auprès des recteurs des universités de la province ainsi qu’auprès du Committee of Deans of Engineer-ing of Ontario Universities pour conserver son programme. La campagne réussit, et le programme de deux ans est maintenu. I am happy to report that with the support of key members of the Committee including the Dean of Engineering of the University of Toronto we were able to protect and secure the maintenance of the two year engineering program at Laurentian University 50.

Le programme continue son expansion au cours des années 1970. En 1971–1972, la Laurentienne commence à offrir une spécialisation en génie mécanique51. En 1973–1974, elle offre un programme de deux ans en génie chimique, civil ou mécanique et de trois ans en génie minier ou traitement du minerai52. Enfin, à compter de septembre 1977, elle est en mesure d’offrir un programme de quatre ans en génie minier et traitement du minerai, grâce à une campagne de levée de fonds auprès de l’industrie minière ; ces fonds permettent l’achat d’équipement de laboratoire53. Il faut mentionner que cette expansion du programme de génie n’est pas survenue sans une certaine opposition à l’intérieur de l’Université (pour des raisons financières surtout), y compris celle du département de géologie qui songeait déjà à créer un programme de géologie minière. Ouvert en 1960, le baccalauréat en sciences infirmières est suspendu en 1963. Le recteur de l’Université informe le Sénat que le Conseil des gouverneurs a demandé que le programme ne soit plus offert parce que l’association locale des infirmières se dit réticente à reconnaître un diplôme décerné par une institution qui n’a pas de personnel enseignant qualifié54. En 1965, à la suite du rapport de la Commission royale d’enquête sur les services de santé (mieux connu sous le nom de « Rapport Hall » d’après son président, le juge Emmett Hall), qui recommande l’établisse-

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ment d’une école de sciences infirmières à l’Université Laurentienne55, le recteur met sur pied un comité ad hoc pour étudier la question. S’appuyant sur la requête des deux écoles locales d’infirmières pour que la Laurentienne établisse une école de sciences infirmières, le recteur s’adresse au ministre adjoint des affaires universitaires pour obtenir l’autorisation de mettre sur pied un tel programme56. En mai 1965, le ministre adjoint répond que le comité des affaires universitaires a donné son approbation. Le Sénat et le Conseil des gouverneurs l’approuvent à leur tour en 196657 et, après avoir reçu l’approbation de l’Ordre des infirmières de l’Ontario, on y admet les premières étudiantes en septembre 1967. Mais tout se passe comme si l’histoire de l’École de génie se répète pour les sciences infirmières. En effet, au début des années 1970, le rapport KerginTurner recommande la fermeture de l’École des sciences infirmières à la suite d’une évaluation de son programme. In the early 1970s, the programme was reviewed and serious concern about the programme was expressed by the nursing profession, by the Ontario Region of the Canadian Association of University Schools of Nursing and by the College of Nurses. Indeed, there was a recommendation that reached the Senate that the School of Nursing be closed. As a result of strong community input, the programme was not closed, but serious measures were taken to change the programme […] in the fall of 1972, 73 or 74 there was a decision taken not to admit a first year class58.

À la suite des mesures prises par l’Université, l’École commence à réadmettre des étudiantes à compter de septembre 1975. Quelques mots sur le programme en service social qui veut répondre au besoin de travailleurs sociaux dans le nord de l’Ontario. C’est ce qu’affirme le recteur intérimaire, Roland Cloutier, dans le rapport annuel de l’Université au comité des affaires universitaires en 1970 en rappelant qu’un tel programme refléterait la mission régionale de la Laurentienne. It is the shortage of competent social workers in this north-eastern part of Ontario which has forced us to introduce a four-year programme in Social Work. At the risk of seeming facetious, let it be said that it takes more than natural kindness and an easy smile to qualify as an efficient member of a social agency. Social Work is a science which rests heavily on the classical human disciplines. It is a science different from all other sciences because of its multi-discipline approach59.

Biensûr, Cloutier rappelle que le programme se doit d’être bilingue en raison du caractère bilingue du Nord-Est ontarien ; il dit souhaiter que des cours en français puissent être offerts sous peu, aussitôt que des professeurs et des ressources seront disponibles. Il faudra cependant attendre la fin des années 1970 pour que les cours en français soient offerts dans ce programme. Le besoin de traducteurs et d’interprètes non seulement dans le nord de l’Ontario mais à l’échelle du pays justifie sans aucun doute un programme de sciences du langage. On se souviendra que l’adoption au niveau fédéral de la Loi sur les ser-

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vices en français en 1968 favorisé le développement du bilinguisme dans la fonction publique du Canada, provoquant ainsi le besoin de traducteurs et d’interprètes diplômés. Pour les francophones, l’année 1975–1976 est importante puisqu’elle marque l’inauguration de l’École des sciences de l’éducation. Celle-ci est le résultat de l’intégration de l’École normale de Sudbury, le 1er juillet 1975, à l’Université Laurentienne. L’École des sciences de l’éducation offre un programme d’un an conduisant au brevet d’enseignement pour les étudiants de langue française qui veulent enseigner dans les écoles élémentaires francophones ontariennes60. L’École Normale de Sudbury a pris naissance en 1963 lorsque le gouvernement de l’Ontario lui donnait la charte nécessaire pour desservir la population francophone du nord de la province. Dès 1965 on prévoyait que l’École Normale serait appelée à avoir avec l’Université Laurentienne des liens des plus rapprochés. Durant l’année 1970–1971, le Sénat créait un comité « ad hoc » afin d’étudier l’intégration de l’École Normale. À sa réunion du 14 juin 1973, le Sénat a établi le comité qui a soumis le projet d’intégration approuvé à la réunion du 21 mars 197461.

Un programme de baccalauréat en éducation62 permet aussi aux étudiants de se doter d’une préparation générale (surtout en psychologie) avant d’être admis au brevet. Les étudiants de langue anglaise peuvent poursuivre leur B.Ed. au collège Nipissing de North Bay, affilié à l’Université Laurentienne à compter de 196763. Passons à la faculté des sciences où les programmes sont regroupés plus naturellement en raison de leur nombre restreint mais aussi de leurs affinités. Délimités assez nettement par leurs objets d’étude (la nature en général, organique ou inorganique, de niveaux micro- et macro-) ainsi que par leurs méthodes de recherche qui prônent, sauf pour les mathématiques qui sont d’un ordre plus intellectuel et abstrait, l’expérimentation et l’observation. Les disciplines scientifiques ont aussi des frontières passablement étanches par rapport aux arts et aux écoles professionnelles. Au cours de leur développement et de leur évolution toutefois, les frontières entre les sciences sont devenues beaucoup moins clairement définies. Despite borderline cases, the Science departments constitute a natural entity traditionally interlocking in their way of thinking, methodology, content, in the very often very specialized equipment and facilities they use and share64.

Par exemple, le programme de biologie comprend des cours en zoologie, en botanique, en anatomie et en physiologie. Le programme offre peu à peu des cours en écologie (plantes, animaux, insectes, terrains arides), domaine dans lequel il se spécialise. Il faut aussi mentionner la biologie de l’eau fraîche. Déjà au cours des années 1970, le programme se fait reconnaître pour son travail de reverdissement des terrains industriels stériles, ce qui devient une des forces du département et se reflète dans ses cours et sa recherche65. D’ailleurs, la question de l’environnement commence à s’intégrer, dans les cours et les projets de recherche, non seulement à la biologie mais à d’autres programmes de sciences.

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des étudiants dans un l aboratoire de chimie en 1961.

Quant au programme de chimie, il se penche sur les aspects physique, organique et inorganique de la matière. Le domaine de la biochimie, qui étudie les réactions chimiques dans des milieux biologiques tels que les cellules ou avec des objets biologiques tels que les protéines, prend de plus en plus d’importance au point de devenir un programme de quatre ans en 1978–197966. Les étudiants peuvent aussi poursuivre des programmes spécialisés combinés en biologie-chimie, chimie-physique, chimie-géologie et physique-géologie67. Si les mathématiques enseignent au départ le calcul, l’algèbre et la géométrie, à compter de 1970, les cours en informatique commencent à se développer. Quant à la physique, ses cours portent sur les éléments essentiels de la discipline, soit la mécanique, l’électromagnétisme, la thermodynamique et la mécanique quantique. L’Institut d’astronomie, établi en 1967–1968, offre ses premiers cours en 1968–1969 et leur nombre augmente progressivement au fil des ans68. Ces derniers sont ajoutés au programme de physique. Durant les années 1970, le département est rebaptisé le département de physique et d’astronomie. La construction du planétarium Doran à cette époque contribue à la popularité de cette matière, non seulement à l’Université mais aussi dans la région. En 1961–1962, la géologie s’est jointe à ces quatre disciplines en offrant seulement quelques cours ; jumelée au programme de géographie aux débuts, la géologie atteint son statut de département en 1967. L’ajout et la continuation de ce programme – qui n’est pas enseigné dans toutes les universités – trouvent leur justification et leur raison d’être dans la relation du programme avec le milieu de Sudbury, soit sa spécificité géologique et son industrie minière. It should first be recognized that Laurentian University enjoys an unrivalled geological setting, strategically located close to the junction between the Archaean, Huronian and Grenville geological provinces, with the Sudbury Nickel Irruptive straddling the contact,

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Ta bl e au 6,1  |  i nscr i p t ions au x Pro gr a m m e s , 1961–197 8 Programme

1961–1962

1965–1966

1969–1970

1973–1974

1978–1979

61,5 26,7

77,3 13,8

60,3 13,9

40,0 11,5

30,6 8,9

Écoles professionnelles Commerce 7,8 5,4 8,3 SPAD Génie 3,9 3,5 2,3 Sciences infirmières 1,9 Éducation physique 7,5 Service social 3,8 Traduction 1,9

12,1 2,2 2,3 2,3 12,2 6,4 10,8

19,8 5,2 6,2 5,6 9,7 6,0 7,9

Arts Sciences

Source : Brief Presented by Laurentian University to the Ontario Council on University Affairs, 17 mai 1979.

and providing the setting for one of the world’s largest concentrations of copper-nickel sulphites. Given these unique natural advantages, in addition to our location at the heart of a vast mineral industry […] we should spare no effort to capitalize on such a favourable situation69.

Des cours en minéralogie, en pétrologie, en exploration minière et en dépôts de minerais reflètent à coup sûr ce rapport au milieu. Dans les années 1970, le programme s’oriente progressivement vers les sciences de la terre, domaine qui prendra beaucoup d’importance après 1980. En somme, ces disciplines aux objets d’étude très vastes se développent à partir d’une base déjà établie aux débuts de la Laurentienne. À l’aube de sa troisième décennie, le poids relatif des programmes – mesuré par le nombre d’inscriptions – se modifie considérablement, comme illustre le tableau 6,1. Le développement des programmes des écoles professionnelles, principalement vers la fin des années 1960, a modifié sensiblement la physionomie de l’Université Laurentienne par rapport à ce qu’elle était à ses débuts. Les arts en général avaient perdu la moitié de leurs effectifs étudiants ; les sciences le deux tiers. Cette nouvelle répartition des effectifs étudiants, alliée aux difficultés financières qu’a connues la Laurentienne, allaient créer de nombreuses tensions entre les facultés ainsi qu’au sein du corps professoral. Cours d’extension

Dès sa première année, la Laurentienne a mis en place un service appelé d’Extension de l’enseignement qu’elle hérite de l’Université de Sudbury qui l’avait

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établi à la fin des années 195070. Pour répondre à sa mission d’offrir des cours et programmes à la population du nord-est de l’Ontario, l’Université permet aux étudiants de 21 ans ou plus qui n’ont pas terminé leur douzième année d’école secondaire de s’inscrire à des cours universitaires offerts par ce service, suite à une entente avec le doyen de la faculté des arts et des sciences. Voyons ce qu’en dit l’annuaire de 1960–1961 : Outre l’enseignement régulier que dispensent écoles et facultés, l’Université offre à la population du Nouvel-Ontario l’occasion de se cultiver, grâce à des cours complémentaires dont la variété s’inspire des besoins intellectuels de la région : cours du soir, séminaires intensifs, cours de formation sociale à la portée des ouvriers, des mineurs et des cultivateurs. La Faculté des arts et des sciences organise aussi des cours du soir pour les adultes qui désirent obtenir un baccalauréat à longue échéance. Ce degré a la même valeur qu’un baccalauréat obtenu par « cours d’extension » dans les autres universités de l’Ontario. De plus, le Centre de Culture populaire organise pour les différentes classes professionnelles des cours spéciaux de civisme et d’administration publique [ainsi que] des cours de comptabilité, de gérance et de relations industrielles71.

En 1960, l’Extension offre des cours de deux façons : soit sur campus pendant l’été et l’hiver, soit par le biais de la télévision. Il s’agit d’une pratique que l’Université de Sudbury avait inaugurée en 1957. Le poste local CKSO (le précurseur du poste local de CTV), en 1958, avait offert à l’Université de Sudbury de diffuser des cours universitaires. En 1960, la Laurentienne poursuit cette expérience. « It is the first venture of its nature, although modest, in the history of Canadian universities », affirme un communiqué de presse de l’Université pour annoncer que deux cours seront offerts cette année-là72. Ces deux cours sont economics 10 (offert en anglais par les professeurs Lucien Michaud, Cedric Rabin et Jacques Peltier) et français 12 (offert par André Girouard), qui ont lieu deux fois par semaine, les mercredis et samedis matins. Notons que les étudiants ont également la possibilité de rencontrer leurs professeurs une fois par mois sur le campus. Au milieu des années 1960, l’Extension commence ses pratiques novatrices en introduisant des cours sur bandes vidéo. C’est également pendant cette période que des cours commencent à être offerts dans diverses municipalités du nord-est : Timmins, Elliot Lake, New Liskeard, Kirkland Lake, Englehart, Cobalt, Sturgeon Falls, et même dans des communautés telles que Bracebridge et Parry Sound. Les professeurs de la Laurentienne, à temps plein et partiel, se rendent dans ces localités une fin de semaine sur deux pour offrir des cours pendant trois heures le vendredi soir et trois heures le samedi matin. En plus des professeurs, une équipe d’administrateurs se rend dans ces communautés pendant deux semaines au début des cours afin d’y inscrire les étudiants. Pour la plupart, les étudiants inscrits à ces cours sont des enseignants aux cycles primaire et secondaire qui cherchent à terminer leur B.A. et ainsi améliorer leur niveau académique. Il faut comprendre que le ministère de l’Éducation de l’Ontario avait commencé à exiger que les étudiants admis à l’École normale ou au Teachers’ College aient leur baccalauréat.

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Quelques chiffres sont à cet effet éloquents. Ainsi, de 1970 à 1984, « a total of 10 745 off campus courses were taken, 7 715 (71.8 percent) of them by women73 ». De 1970 à 1994, selon Mawhiney et Paul, 5 761 étudiants – dont les trois quarts étaient des femmes – ont reçu leur B.A. grâce à des cours à distance. L’Extension change de nom pour s’appeler, à partir de 1974–1975, le Centre d’éducation permanente74. C’est au cours de cette période également que le Centre commence à donner des cours dits multimédias, c’est-à-dire offerts par le biais de la télévision, par correspondance, par audio ainsi qu’en classe par un professeur. Les études supérieures, 1960–1985 Les programmes de maîtrise constituent les premiers diplômes d’études supérieures dans le système universitaire. Pour y être admis, l’étudiant doit, règle générale, avoir complété un baccalauréat spécialisé de quatre ans dans une discipline quelconque afin d’avoir suivi les cours nécessaires qui le préparent aux cours du deuxième cycle. Les programmes d’études supérieures peuvent être offerts par une université à la suite d’un processus d’approbation relativement long, lequel requiert en Ontario le sceau du Conseil des Études supérieures75. Ce Conseil doit s’assurer que le programme de cours est approprié et surtout que les professeurs qui seront appelés à les enseigner ont les compétences nécessaires ainsi qu’un dossier de recherches et de publications ainsi qu’une habileté à superviser une thèse. De plus, le Conseil effectue de façon régulière (habituellement à tous les sept ans) un examen des programmes pour s’assurer que ces derniers respectent leur engagement et maintiennent un niveau de qualité jugé adéquat. L’Université a commencé à planifier et à implanter des programmes de maîtrise relativement tôt dans son histoire. En effet, dès le printemps 1967, le recteur Mullins affirme, lors d’une réunion du Sénat, que l’une des tâches principales du Sénat au cours de la prochaine année académique sera de planifier l’ouverture de programmes d’études supérieures. Lors de la réunion suivante, en avril, le recteur déclare que la planification des études supérieures doit commencer immédiatement76. Pour ce faire, le Sénat établit l’École des études supérieures pour les programmes de deuxième cycle77 ; suivra, en 1972, le Conseil des Études supérieures78. En mai 1968, le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche tient des rencontres avec des départements qui ont indiqué un intérêt à établir de tels programmes. Les ambitions dans ce domaine ne sont certes pas timides puisque douze départements participent à ces rencontres. At that time, nine departments indicated positive interest. These were: Biology, Chemistry, English, Français, Geology, History, Mathematics, Philosophy and Physics. The Departments of Classical Studies, Economics and Psychology preferred to wait a few years79.

En fait, il semble que presque tous les départements songeaient à soumettre au Conseil des Études supérieures une demande d’approbation pour un programme de maîtrise. Divers documents mentionnent, en plus de ceux nommés ci-dessus,

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les départements de chimie, génie, science politique et sociologie. Dans son rapport au Comité des affaires universitaires en 1970, l’Université inclut les réflexions personnelles du directeur des études supérieures au sujet des études supérieures qui prévoient 18 programmes de maîtrise entre 1969 et 1974 en plus d’un programme possible de doctorat en psychologie80. On est assurément très optimistes. Les disciplines de biologie, chimie, géologie et physique (ce programme prendra le nom de physique appliquée au début des années 1980 et reviendra à son appellation originale en 2007) sont les premières à se doter de programmes de maîtrise ès sciences (M.Sc.) qui débutent tous en 1970–197181. Dans son rapport annuel de 1970, le recteur écrit à leur sujet : Programmes in four departments were approved by the Ontario Council of Graduate Studies: Biology, Chemistry, Geology and Physics […] only Biology and Physics accepted graduate students in September 1969. Two graduate programmes (French, Philosophy) were not approved. One (Mathematics) is now in the process of reappraisals. Briefs are being prepared by the Departments of History and English with appraisals to be conducted in 1970–7182.

Cette situation soulève l’ire de certains programmes des humanités et des sciences sociales. Quatre départements (english, français, histoire et philosophie) se réunissent pour discuter de leur situation respective par rapport aux études supérieures. Ils se disent défavorisés par rapport aux sciences, en ce qui a trait à l’espace et aux ressources de la bibliothéque. De plus, ils se plaignent du manque d’orientation précise, de la part de l’administration, à l’égard du développement des programmes de maîtrise. Sans vouloir créer de conflits entre les arts et les sciences, ils réitèrent leur intention de poursuivre le processus d’approbation de leurs programmes à la condition que l’Université accepte de les appuyer. Enfin, ils demandent à l’administration de définir une orientation précise pour l’ensemble de l’Université : Finally, a general policy is required for a framework within which our own problems and those of the university as a whole can be planned. The creation of a graduate structure is therefore seen as a matter of urgency83.

C’est en 1968 que l’École des études supérieures voit le jour pour structurer davantage ces divers programmes de Laurentienne et, quatre ans plus tard, apparaîtra le Conseil des Études supérieures. En général, les évaluations négatives pour les départements mentionnés se rapportent au manque d’espace, de ressources bibliothécaires et/ou de ressources professorales. Dans certains cas, l’orientation ou la spécialisation du programme est considérée trop vague ou étroite. Par exemple, le comité d’évaluation du Conseil des Études supérieures décide de ne pas approuver le programme en histoire en octobre 1971 pour trois raisons : i) l’orientation (histoire européenne et histoire du nord de l’Ontario) est trop étroite ; ii) les ressources de la bibliothèque ne sont pas adéquates et iii) les ressources professorales ne sont pas suffisantes (plus pré-

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cisément : les professeurs n’ont pas la compétence nécessaire dans les domaines de spécialisation proposés)84. Le département a ensuite l’occasion de répondre à cette évaluation négative. À la suite d’une rencontre avec le comité d’évaluation en avril 1972, le programme est approuvé. La situation concernant le programme de mathématiques est semblable ; l’évaluation lui reproche une orientation trop catholique ainsi que des ressources de bibliothèque insuffisantes. Le programme est approuvé par le Conseil des Études supérieures en 1970 (et par le Sénat en 1972 à la suite de certains retards) mais, avant qu’il puisse admettre ses premiers étudiants, le gouvernement ontarien impose un embargo sur le financement de nouveaux programmes d’études supérieures. Une lettre du ministre des Collèges et Universités au recteur intérimaire, en mars 1971, informe ce dernier de nouvelles directives dont le but est d’équilibrer les inscriptions aux études supérieures avec les demandes et les besoins réels de la société85. Le recteur lui répond qu’une telle décision aurait une incidence très sérieuse sur les programmes de l’Université, menant même à leur élimination, et le ministre précise que l’embargo ne s’applique qu’aux programmes qui n’ont pas encore d’inscriptions pour l’année universitaire 1970–197186. Les nouvelles directives du ministre font partie d’un réexamen des programmes d’études supérieures en Ontario qui fait suite à l’établissement du Advisory Committee on Academic Programmes (ACAP) par le Conseil des Études supérieures à la fin des années 1960. Howard C. Clark, l’un des premiers membres de ce comité consultatif, explique ainsi l’objectif de ce comité. The creation of ACAP and the work it undertook were bitterly resented in many of the universities. After much acrimonious discussion, the committee developed a process in which all the supporting documentation for a provincial set of graduate programs (for example, in chemistry or sociology) would be placed in the hands of a group of international consultants who would visit all programs, engage in any other consultation thought necessary, and develop a report containing recommendations on the future of each program. On the basis of this, ACAP would develop its own report for submission to the COU [Council of Ontario Universities]. […] the work of ACAP did curb the ambitions of all universities and prevented the introduction of a flood of ill-conceived and hastily devised graduate programs […] it was the work of ACAP that eventually led to the fairly rigorous and continuing quality assessment of all Ontario graduate programs now conducted through the Ontario Council of Graduate Studies87.

En plus de l’embargo qu’il impose sur le financement des nouveaux programmes d’études supérieures, le gouvernement exige aussi la préparation de plans de cinq ans devant être soumis à ACAP et approuvés par ce dernier. Par conséquent, l’Université prépare, en 1972, un plan de cinq ans88. Après avoir rappelé le besoin d’études supérieures pour stimuler la recherche, le rapport mentionne le besoin de développer des programmes dans tous les secteurs afin d’éliminer les ressentiments éprouvés par les départements qui n’en ont pas ainsi que par les programmes en français. Il recommande la continuation des programmes existants

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soit biologie, chimie, géologie et physique, l’établissement des programmes déjà approuvés en mathématiques (bien qu’il recommande que le programme soit à la fois théorique et appliqué), english89 ainsi que celui en histoire90 qui était sous évaluation. Le programme en histoire, qui se spécialise en histoire sociale du 19e siècle, en Europe et en Amérique du Nord, est le premier à être offert en français et en anglais. Il recommande aussi des maîtrises en éducation physique pour 1973 et en psychologie pour 1974 en notant qu’ils sont prêts à être soumis à l’évaluation. Des programmes en sociologie et science politique sont recommandés pour 1975 et en commerce pour 1976. En mai 1972, l’ACAP avise l’Université qu’elle ne peut approuver ce plan quinquennal principalement pour des raisons financières, mais aussi, comme on peut le lire ci-dessous, pour des raisons académiques. In short, ACAP ’s tentative view of the enrolment prospects causes one to question Laurentian’s financial ability to provide staff, student stipends, and extra library funds for all the proposed programmes. ACAP is inclined to believe that a small number of programmes might be more viable, particularly if they were of a kind not readily available elsewhere in the province91.

En général, le comité provincial se dit plus intéressé par la suggestion d’un programme comme celui en études nordiques parce qu’il n’est pas offert dans la province d’ailleurs, cela devient un de ses leitmotivs (surtout en ce qui a trait aux petites universités). Après avoir noté que les programmes en histoire et en english sont reliés parce qu’ils couvrent la même période, le comité propose à la Laurentienne d’étudier la possibilité de développer un programme de maîtrise en humanités qui regrouperait english, histoire et français. Quant aux programmes en psychologie, sociologie et science politique, il se dit incapable de les appuyer parce qu’ils existent déjà ailleurs. Les programmes en éducation physique et en commerce, quant à eux, n’obtiennent pas son appui parce que, selon lui, il ne s’agit pas de disciplines centrales. Face à cette réalité, le directeur des études supérieures se dit d’avis que, vu une période financière difficile et le refus d’ACAP  : « there is little doubt that graduate planning at this university must be reviewed and reshaped to fit the present and future resources92. » Il demande donc à tous les départements qui ont des programmes existants ou en développement de les repenser en fonction des ressources professorales, de l’inscription estudiantine et de la compétence des professeurs relativement aux études supérieures. Entre-temps, le comité de la planification académique (COPA) prépare un plan pour le développement des programmes de premier cycle et d’études supérieures qu’il soumet au Sénat en mai 197393. Le rapport énonce que les programmes de baccalauréat doivent être de grande qualité et recommande l’établissement de programmes interdisciplinaires en sciences de la terre, en humanités, en études canadiennes et en éducation en plein air (outdoor education). Au niveau des études supérieures, il recommande de nouveaux programmes interdisciplinaires en sciences de la terre, en études canadiennes et en enfance et développement, soit

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jack porter et lucille dennie .  |  Registraire de l’Université Laurentienne de 1975 à 1996, Jack Porter connaît beaucoup de succès comme entraîneur de l’équipe de hockey des hommes, les Voyageurs, à la fin des années 1960, au début des années 1970 et de nouveau dans les années 1980.

des programmes pour lesquels les ressources financières et humaines peuvent être puisées dans un bassin regroupant plusieurs départements et écoles. De plus, il recommande des programmes pour lesquels il existe un besoin identifiable et une demande substantielle. Pour faire écho en quelque sorte à ce rapport du COPA , l’École des études supérieures soumet un nouveau plan quinquennal (1974–1979)94 dont l’idée centrale peut se résumer ainsi : In summary, this proposal is the result of a long (sometimes painful) process of maturing during which we have profited of the expert advice of many individuals and groups, not the least of which has been ACAP. We are confident that we are presenting now a five-year plan which is within the capabilities of our human and financial resources which will serve with high quality programmes an important cross-section of our northern population.

L’École recommande la continuation des programmes en biologie, géologie et histoire ; il recommande que les programmes de chimie, english et physique admettent des étudiants en septembre 1974 à la condition de présenter au Sénat prochainement des propositions pour établir des programmes conjoints avec d’autres départements (il suggère que le programme d’english soit intégré à un programme possible en études canadiennes) ; il recommande enfin l’élimination du programme de mathématiques. Sa recommandation la plus importante toutefois est au niveau de l’établissement de quatre programmes interdisciplinaires ; en sciences de la terre, en études canadiennes, en enfance et développement ainsi qu’en science. Le comité provincial approuve ce nouveau plan quinquennal en 197495. Le programme english devra cesser d’admettre des étudiants quand le nouveau programme de maîtrise en études canadiennes sera approuvé. Il en est de même pour les programmes de chimie et de physique, qui devront cesser d’admettre des étudiants quand un nouveau programme interdisciplinaire en sciences sera

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approuvé, s’il y a lieu. Le comité ajoute que, dans l’éventualité où ces programmes ne seront pas approuvés, l’Université devra décider si english, chimie et physique peuvent continuer comme programmes indépendants, mais ACAP se réserve le droit de donner ou non son approbation. Les responsables du programme proposé en études canadiennes ayant indiqué qu’il sera impossible de l’établir avant 1978 et le programme en science n’ayant jamais vu le jour, l’Université et ACAP permettent la continuation des trois programmes96. Dans le cas de physique, il s’est redéfini en physique appliquée. Le programme de mathématiques est presque mort-né puisque l’Université a donné suite à son plan de cinq ans et l’a éliminé au cours de sa première année d’existence. Au-delà du plan quinquennal, l’Université a lancé des projets de collaboration avec d’autres universités au milieu des années 1970 : i) la maîtrise en français offerte conjointement avec l’Université d’Ottawa97 ; ce programme n’a duré que quelques années ; en 1984, il a été jugé fragile, discontinu et moribond dans un rapport qui a passé en revue la situation des études supérieures à la Laurentienne. Ce rapport mentionnait qu’une maîtrise en français était désirable pour desservir la population francophone de la région mais que le corps professoral du département n’était pas en mesure d’en établir un à lui seul98 ; ii) une collaboration avec l’Ontario Institute of Studies in Education (OISE) qui permet l’enseignement de certains cours de cet institut ainsi que de cours au choix de l’Université Laurentienne à Sudbury ; iii) en commerce, des négociations ont eu lieu avec l’Université York pour permettre que la première année du programme M.B.A. soit enseignée à la Laurentienne ; cependant, le gel des programmes d’études supérieures dans les petites universités à cette époque empêche ce projet de voir le jour. Le programme de commerce a toutefois pu établir un diplôme d’études supérieures en administration des affaires99. Seul programme interdisciplinaire identifié dans le plan quinquennal, études en enfance et développement ira de l’avant. Les discussions entre les trois programmes participants, sociologie, psychologie, éducation physique, permettent l’élaboration du programme qui est évalué et approuvé à la fin des années 1970 ; il admet ses premiers étudiants en 1980–1981. Ce programme « vise à donner aux étudiants une vue intégrée du développement de l’homme depuis la conception jusqu’au début de l’âge adulte100 ». Offert en français et en anglais par des professeurs des trois disciplines, ce programme prend le nom de développement humain et se donne un pendant en sciences (M.Sc.) pour accompagner la version M.A. en 1997–1998. Toutefois son objectif demeure essentiellement le même : « donner aux étudiants une vue intégrée du développement humain101 ». En somme, au cours de cette période de 1960 à 1980, la Laurentienne a d’abord nourri de grandes ambitions relativement au développement de programmes d’études supérieures. Cependant, ces ambitions se sont heurtées, au début des années 1970, à certaines réalités bureaucratiques et financières qui ont sérieusement limité le nombre et l’étendue des programmes. Pour certains à la Laurentienne, ces obstacles bureaucratiques ont été dressés à l’égard des petites universités au profit des institutions de grande taille établies de longue date.

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D’ailleurs, dans sa présentation au Conseil des affaires universitaires en 1977, la Laurentienne l’avait clairement évoqué : The system approach over the past few years, in particular the Five-Year Plan, has imposed on us, in common with other “emerging” universities, levels of constraint and scrutiny to which the majority of universities have not been subject and which have had the effect of preventing Laurentian from consolidating and stabilizing its graduate programme. The freeze has imposed a fresh constraint at a time when some hope of such consolidation and stabilization seemed at last possible. Universities with established programmes, operating within a much greater overall budget and total range of programmes, have a degree of flexibility in adapting their finances and plans to cope with sudden changes in procedure or financing. A small university which is still in the process of establishing its minimum graduate and research basis has no such flexibility ; the impact of the freeze is necessarily immediate and severe102.

Un an plus tard, le mémoire présenté au comité reprenait le même argument mais dans un ton différent, en concluant que : George Orwell once pointed out that anyone had the right to dine at the Ritz, all that was needed was the money. If we follow the metaphor – (and we recall that the prototype for an Appraisal brief was for a PhD in Gastronomy) – we find ourselves being cast for the role of Lazarus, looking south to the tables of Dives.103

La recherche 1960–1985 : une activité simple et solitaire La recherche est une activité essentielle et de plus en plus exigée pour tout professeur universitaire. À l’Université Laurentienne toutefois, elle n’a pas toujours été aussi prioritaire qu’elle l’est aujourd’hui. En effet, pour bien comprendre l’évolution de cette activité, il est nécessaire de distinguer deux périodes : la première, de 1960 à 1984, et la deuxième, de 1985 à aujourd’hui. Pendant les premières 25 années de l’histoire de la Laurentienne, la recherche effectuée par les professeurs était beaucoup moins complexe qu’aujourd’hui ; elle avait aussi tendance à être une activité plutôt solitaire alors qu’aujourd’hui elle s’effectue davantage de façon collective ou en équipe. Jusqu’en 1984, la recherche consistait, règle générale, en une quête régie par peu de règles. Le professeur effectuait soit une recherche contractuelle ou appliquée ou une recherche fondamentale ou théorique. Dans le premier cas, le professeur obtenait des fonds d’un organisme communautaire ou d’une industrie quelconque, comme celle de l’industrie minière, pour effectuer une recherche dont l’objectif était en grande partie défini et déterminé par le bailleur de fonds. Dans le deuxième cas, le professeur effectuait une recherche pour vérifier une hypothèse, du moins dans les sciences naturelles et sociales, ou pour en connaître davantage sur un événement ou un personnage historique ou encore une création littéraire ou musicale par exemple. Pour mener à bien cette recherche fondamentale, le chercheur devait en général solliciter des fonds, soit au-près d’une fondation, soit,

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jusqu’en 1978, auprès du Conseil national de recherches, du Conseil des Arts du Canada ou du Conseil de recherches médicales / Medical Research Council qui étaient les principales agences subventionnaires au pays. Dès les débuts de l’Université Laurentienne, une distinction assez nette se développe, au niveau de la recherche, entre les sciences d’un côté et les arts de l’autre, distinction bien résumée dans un rapport présenté au Comité des affaires universitaires en 1968. Departmental reports show nearly all members of the teaching staff busily occupied in their chosen niche. All our scientists enjoy supporting grants from outside agencies and produce results accordingly. In the Arts faculty, Research is a more personal enterprise and hence difficult to assess. Not infrequently a scholar’s life work will be comprised in a single book not published until after his retirement ; while all too often, prodding from university administrations results in an unhealthy eagerness to publish no matter what. Assessment of the Arts teacher will continue to be based on his scholarly reputation among colleagues and pupils rather than on a quantitative analysis of works in print.104

Les documents existants ne permettent pas de retracer avec beaucoup de fiabilité les recherches qu’ont pu effectuer les professeurs de la Laurentienne au cours de cette période. Toutefois les rapports annuels du recteur au Conseil des gouverneurs permettent de repérer certaines informations à ce sujet. Par exemple, le professeur Havel de science politique est responsable du premier livre publié par les Presses de l’Université Laurentienne au sujet de sa recherche sur la politique dans la région de Sudbury105. Quelques professeurs en biologie commencent à effectuer des recherches sur la qualité de l’eau des lacs de la région et se lancent dans le projet de reverdissement de la région. Le rapport de 1966–1967 indique que des professeurs en sciences ont obtenu des subventions du Conseil national de recherches d’une valeur totale de 40 700 $ au cours de cette année106. Mais en général, la recherche constitue un défi pour une université de la taille de la Laurentienne. Une allocution du recteur Edward J. Monahan au corps professoral de la Laurentienne en septembre 1974 permet toutefois de dresser un tableau des défis et des réalisations en recherche. « En tant qu’institution d’enseignement universitaire, la Laurentienne a une responsabilité d’effectuer de la recherche et nous devons être continuellement engagés dans ce domaine », a-t-il dit107. Selon lui, la Laurentienne éprouve de nombreuses difficultés à cet égard et ce, à cause de trois facteurs : i) parce que les membres du personnel enseignant sont relativement jeunes et préoccupés par le besoin de terminer leur doctorat, l’Université n’a pas les mêmes ressources que les universités établies de longue date ; ii) le système de financement des universités en Ontario procure un avantage marqué aux universités établies qui ont de nombreux programmes d’études supérieures, surtout de doctorat, en vertu desquels elles peuvent recevoir des subventions accrues permettant de bâtir des installations de recherche ; iii) la Laurentienne ne bénéficie pas de dotations ni d’appui du secteur privé. Malgré ces facteurs, l’Université réussit tout de même à obtenir des subventions de recherche, surtout dans le secteur des sciences, en provenance du Conseil

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national de recherches. Selon le recteur, le montant de ces subventions s’élevait à 1,25 million de dollars en 1974, ce qui a permis de financer des projets individuels, d’embaucher des assistants de recherche et de faire l’achat d’équipement nécessaire. De plus, d’autres professeurs ont reçu quelques subventions du Conseil des Arts, du Conseil de recherches médicales et du Defense Research Board en plus de fonds pour la recherche contractuelle. La Laurentienne reçoit aussi une somme annuelle de 25 000 $ du Conseil national de recherches (CNR ) que le recteur alloue à sa discrétion aux professeurs désirant effectuer des recherches dans le domaine de juridiction du CNR . En 1974– 1975, l’Université doit aussi commencer à recevoir une somme annuelle du Conseil des Arts pour faciliter des projets de recherche dans les humanités et les sciences sociales. Elle a également établi un fonds (25 000 $), à partir de son propre budget, pour faciliter la recherche dans tous les domaines. Toujours selon le recteur Monahan, l’Université a établi un fonds de recherche qui doit être accru de 25 000 $ par année jusqu’à ce qu’il atteigne 1 pour cent de son budget annuel. Il fait ainsi allusion à une proposition adoptée par le Sénat le 23 septembre 1973 à l’effet : Que le Sénat approuve la création d’un fonds de recherche qui proviendrait des revenus généraux d’exploitation. Le fonds s’élèverait au début à 25 000 $ et serait augmenté de 25 000 $ à chaque année jusqu’à ce que l’allocation annuelle atteigne 1 % du revenu général d’exploitation de l’université. Le fonds serait administré par le recteur sur le conseil du comité de recherche108.

Ce comité de recherche, mis sur pied par le Sénat, avait comme mandat de maintenir une liste complète des projets de recherche en cours à l’Université, d’encourager l’utilisation coopérative des ressources et l’échange d’informations en signalant aux membres de la communauté universitaire les divers besoins en recherche des groupes de la région. Le Sénat avait de plus recommandé que l’Université embauche un coordonnateur de la recherche et « que les études nordiques figurent parmi les sujets de recherche à l’Université Laurentienne ». Dans son allocution, le recteur mentionne que l’Université n’a pas les ressources nécessaires pour établir un bureau de recherche. Il appuie toutefois la recommandation du Sénat par rapport aux études nordiques en affirmant qu’il souhaiterait que davantage de professeurs de l’Université fassent des recherches sur les problèmes reliés « à notre région et au Nord ». Au début des années 1980, le doyen des sciences sociales, en décrivant la situation de sa faculté, affirme aussi l’importance de la recherche à la Laurentienne sans toutefois mentionner de projets de recherche spécifiques. Ainsi, à l’époque, la recherche est perçue comme un élément essentiel de la mission de la Laurentienne. Toutefois les moyens de la réaliser à grande échelle ne sont pas encore réunis. Les sciences ont un avantage certain grâce surtout au Conseil national de recherches du Canada établi en 1916 alors qu’il s’appelait le Conseil consultatif honoraire de recherches scientifiques et industrielles dans le but d’aider l’industrie secondaire, d’encourager la recherche scientifique et de conseiller le gouvernement sur des

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questions scientifiques. Une partie de son mandat consiste à accorder des subventions aux universités pour fins de recherche scientifique109. Quant aux arts en général, la situation est plus difficile. Non seulement les fonds sont-ils moins disponibles, mais les petites universités ont beaucoup de difficultés à en obtenir. Les difficultés financières qu’a connues la Laurentienne au cours des années 1970 ont inhibé le développement d’une infrastructure de recherche (locaux, personnel, équipement, centres de recherche, études supérieures) qui aurait permis aux chercheurs d’obtenir des fonds. De plus, dans les arts, on ne retrouve pas d’orientation plus ou moins commune, la recherche s’effectuant surtout sur une base individuelle110. L’établissement du Conseil des Arts du Canada en 1957 avait permis aux professeurs en arts d’obtenir des subventions pour la recherche. Mais c’est surtout la création, en 1978, de deux conseils de recherche/agences subventionnaires au niveau fédéral qui va contribuer à la promotion de la recherche dans les universités canadiennes, y compris la Laurentienne. Le Conseil de recherches en sciences naturelles et génie (CRSNG) ainsi que le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) s’avèrent, depuis leurs débuts respectifs, des sources de subvention très importantes dans ces deux grands domaines du savoir111. À la Laurentienne, les professeurs des sciences et du génie surtout obtiennent de nombreuses subventions pour poursuivre des recherches dans leurs disciplines respectives. Les professeurs des autres facultés ont toutefois relativement moins de succès à obtenir des subventions de la part du Conseil de recherches en sciences humaines en particulier, une des raisons étant que le CRSNG a un budget de subventions beaucoup mieux garni que celui du CRSH . L’activité de recherche est certes une entreprise généralement individuelle au cours de cette période. N’empêche que quelques instituts de recherche ont été créés, favorisant ainsi la réalisation de projets collectifs. Le premier est le Sudbury Cardio-Thoracic Foundation dont la section expérimentale apparaît sur le campus de la Laurentienne en 1965. Son objectif est de procurer des installations pour l’étude et la thérapie de troubles cliniques reliés aux systèmes circulatoires et pulmonaires. Cette unité de recherche est reliée au Conseil des hôpitaux de Sudbury112. Parce que ces recherches doivent être effectuées sur des animaux, une animalerie est établie dès 1969. Les conditions de recherche dans cette installation ayant été jugées insatisfaisantes, on construit un édifice en 1981, relié à l’édifice des sciences, pour permettre la recherche scientifique sur les animaux113. De son côté, l’Institut d’astronomie est né en 1967–1968 afin d’assurer des cours en astronomie mais aussi de gérer un planétarium ouvert au public de la région. De plus, à compter de 1968, l’Institut compte deux télescopes dont un fournie par la NASA (l’agence spatiale américaine responsable du programme spatial) dans le but de suivre la trace de satellites. Un autre institut de recherche est celui sur les microparticules, fondé le 1er juillet 1969. Il prend la « forme d’un organisme interdisciplinaire offrant des études au niveau supérieur et des moyens de recherche dans le domaine de la physique des micro-particules et de la technique114 ». Cet institut représente le volet de recherche du programme de maîtrise en physique (cet institut et celui d’astronomie ont été

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réunis au département de physique en 1973 pour devenir le département de physique et d’astronomie). En 1976, six professeurs franco-ontariens de diverses disciplines se réunissent pour établir l’Institut franco-ontarien afin de promouvoir la recherche, la publication et la documentation sur l’Ontario français. À l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de sa fondation, la Revue du Nouvel-Ontario publie une rétrospective des réalisations de l’Institut et de sa raison d’être. L’Institut franco-ontarien est né du besoin ressenti par les fondateurs de mieux connaître la communauté franco-ontarienne, de documenter cette connaissance et de la diffuser. C’est dans le projet de connaissance, qui convient bien à une institution universitaire, que l’Institut franco-ontarien s’insère dans cette mouvance sociale. L’Institut a été fondé afin de promouvoir la recherche, la publication et la documentation sur l’Ontario français115.

L’Institut a fondé la Revue du Nouvel-Ontario en 1978 pour promouvoir et permettre la publication de textes qui font état de recherches sur l’Ontario français. Il a aussi organisé des colloques portant sur les réalités franco-ontariennes et a effectué des recherches autant appliquées que théoriques sur l’Ontario français. Une autre revue, Revue de l’Université Laurentienne / Laurentian University Review, établie en 1967, permet aux professeurs, tant anglophones que francophones, de publier des textes faisant état de leurs recherches dans des domaines aussi divers que les humanités, les sciences sociales et les sciences ; elle accorde une priorité aux articles avec une orientation interdisciplinaire et qui portent sur les études canadiennes. Cette revue cesse de publier en 1987, ayant perdu sa subvention du Conseil de recherches en sciences humaines l’année précédente. En 1984, le Centre de recherche sur l’exploitation minière et l’environnement minier (CREMEM) (en anglais : Centre in Mining and Mineral Exploration Research – CIMMER )116 voit le jour à la suite d’une subvention de 1,5 millions de dollars provenant du gouvernement fédéral. En établissant ce centre, la faculté des sciences et du génie vise à capitaliser sur l’emplacement unique de l’Université Laurentienne au cœur du complexe minier le plus important au monde. Il s’agit d’un institut voué à la recherche et au développement interdisciplinaires (qui regroupe des chercheurs de nombreuses disciplines en arts et en sciences) reliés à l’exploration et à l’exploitation des dépôts de minerais. Plus précisément, le CREMEM tente de regrouper les recherches reliées au secteur minier effectuées dans plusieurs départements de l’Université et de leur donner une orientation. Il coordonne aussi les installations et les activités de levée de fonds pour appuyer un effort de recherche interdisciplinaire reliée à l’industrie minière117. Il a depuis lors donné naissance au Centre de recherche en géomécanique (CRG) et au Centre de recherche en exploration minière (CREM). La faculté a aussi tenté de créer une école des mines, mais ce projet est demeuré sans lendemain jusqu’à présent. Le rapport émis par le Task Force on Academic Priorities de l’Université, en 1986, traite de façon assez éloquente de la disparité entre les facultés au niveau de l’obtention de subventions de recherche. Ce groupe de travail avait pour mandat de

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Ta bl e au 6, 2  |  mon ta n ts de s su bv e n t ions de r ech erch e se l on l e s facu lt é s , 1980 –1986 Faculté

Montant reçu $

Pourcentage de total

165 005 99 635

2 1

8

818 666 429 276

9 5

9

Écoles professionelles (1980–1985)

1 248 614

13

9

Sciences et génie (1981–1986)

6 520 129

70

63

Total

9 281 325

100

89

Humanités (1981–1986) collège universitaire collèges fédérés Sciences sociales programme enfance et développement (1980–1985)

Nombre de récipiendaires

faire des recommandations à l’Université par l’intermédiaire du Sénat au sujet des priorités que devrait se donner la Laurentienne dans le domaine de la recherche et des programmes d’enseignement. En ce qui a trait à la recherche, le rapport fait état du manque presque total de données portant sur la recherche ; les données existantes, selon lui, étant disparates et difficiles à trouver. Pour dresser un tableau de la répartition des montants de subventions de recherche reçues de 1980 à 1986 selon les facultés, le groupe de travail mène un sondage auprès des professeurs de toutes les disciplines (voir tableau 6,2 118). On peut conclure que la plupart des projets au cours de cette brève période sont orientés plutôt vers la recherche appliquée. En sciences, par exemple, près de 5 millions de dollars proviennent de sources autres que le CRSNG . Dans les trois autres facultés, les fonds proviennent en grande partie du CRSH , soit des fonds du Conseil lui-même ou des fonds remis à l’université par le Conseil pour allocation interne. Déjà au milieu des années 1980, une culture de recherche avait émergé dans les sciences naturelles. C’est pour répandre cette culture à l’ensemble de l’Université que l’administration du recteur John Daniel et celle du vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, Charles Bélanger, développent, dès 1985, une série de mesures et de politiques.

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e n s e ig n e m e n t e t r e c h e rc h e

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Bâtir sur les acquis : la recherche et les études supérieures, 1985 à nos jours donald dennie

Les études de premier cycle : bâtir sur les acquis À compter de la troisième décennie de son histoire, l’Université Laurentienne bâtit sur les acquis des deux premières décennies non seulement au niveau des programmes de baccalauréat mais aussi au niveau des programmes d’études supérieures. Les programmes qu’elle a développés se spécialisent ; de nouveaux professeurs viennent y ajouter des orientations nouvelles et différentes ; la recherche, qui commence à prendre plus d’importance, accroît le corpus de connaissances dispensées dans les programmes d’enseignement et contribue à l’éclosion de programmes de deuxième et troisième cycles. Pour l’instant, poursuivons l’histoire du développement des programmes de baccalauréat. En 1980, la faculté des sciences accueille un nouveau – mais ancien – programme, soit celui de l’École de génie ; car à la suite de sérieux différends entre le bureau du recteur et la direction (ainsi qu’une partie du corps professoral) de l’École survenus en 1978, cette dernière est mise sous tutelle. L’option qui se présente est la suivante : fermer l’École ou la fusionner à la faculté de sciences. À la suite de vives discussions et moultes réunions, le Conseil académique des sciences approuve une fusion, décision que le Sénat entérine peu après1, le tout ayant pour effet de créer la nouvelle faculté des sciences et génie. La décision n’est pas aussitôt consommée que l’École doit entamer le processus de renouvellement de son agrément. Ce renouvellement, qui est initialement refusé en raison de la confusion autour de son appartenance, est accordé peu de temps après, à la suite de changements au sein de son personnel enseignant. Assurée de survivre, l’École remanie son programme au début des années 1990. Vingt ans plus tard, en 2000, l’École se retrouve encore menacée de perdre son agrément à compter de 2002 ce qui mène le recteur à établir le Presidential Advisory Committee on Engineering (PACE) afin d’étudier la situation et de recommander des solutions. Ce comité recommande entre autres une révision du programme de baccalauréat et l’établissement d’un programme de doctorat2. À compter de

des étudiants dans le parcours à obstacles des inscriptions , 1992.

2002–2003, l’École adopte (avec la bénédiction du Sénat) le programme suivant au niveau du bac : première année commune, deux programmes de quatre ans, un en génie et l’autre en génie chimique avec options en génie environnemental et métallurgie extractive3. Dans les cinq autres programmes, une certaine spécialisation se développe progressivement, principalement dans les domaines environnemental, écologique et médical, de manière à mieux répondre à l’air du temps. De leur côté, les professeurs de chimie ajoutent un programme de biochimie pour créer le département de biochimie. En 1986, ces changements s’expliquent ainsi : Because chemistry is a mature and central science, the complex and varied knowledge base of the discipline is enormous and increases almost exponentially almost every year. The net effect of this expansion has been to spawn off from the central discipline any subdisciplines which, in many cases, such as biochemistry, have become recognized disciplines themselves4.

Le programme établit en outre des certificats en chimie environnementale et chimie médicale à compter de 19995. Au programme de mathématiques s’ajoute celui d’informatique, ce dernier prenant de plus en plus d’expansion à compter des années 1980. À la fin des années 1970, le doyen des sciences avait mentionné au vice-recteur à l’enseignement et à la recherche qu’à cause de considérations financières, tout développement futur en mathématiques serait probablement dans la direction de l’informatique6. En 1984, deux programmes autonomes de B.Sc. et de B.A. sont établis en mathématiques et en informatique respectivement7. Enfin le B.Sc. en informatique devient le B.Cosc. en 2000. La géologie se définit de plus en plus comme science de la terre au point tel qu’un programme de B.Sc. portant ce nom est établi en 19818. Cette spécialisation se concrétise davantage par l’établissement de deux programmes. Celui de sciences de la terre environnementale (B.Sc.), en collaboration avec biologie, phy-

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sique, chimie et géographie9, a pour objectif d’étudier la complexité de l’environnement naturel et les effets de l’activité humaine et la vie sur Terre. Le programme de sciences de la terre10 (B.A.) est offert en collaboration avec géographie et se veut une compréhension équilibrée de l’environnement naturel. Ce programme établit aussi des concentrations en géologie minière et solid earth science qui seront éliminées en 1996 à la suite de l’examen des programmes académiques effectué par le COPA . Cette spécialisation croissante amène le département, dès 1991, à vouloir changer son nom à sciences de la terre. Le doyen de la faculté des sciences et de génie, Reid Keays, justifie ainsi cette modification du nom. There are at least two dozen Geology departments in universities across Canada and around the world that have evolved in departments of Earth Sciences over the last twenty years in order to support broader undergraduate programmes and encourage modern research directions11.

Le département de géographie s’est initialement objecté à ce changement en alléguant qu’il allait créer une confusion avec le programme de sciences de la terre établi précédemment. Il finit par laisser tomber son objection et le Sénat approuve le changement de nom en 1995. Au cours des quinze dernières années, ce programme s’est aussi spécialisé dans le domaine des dépôts minéraux à la suite de l’établissement de liens plus étroits avec l’industrie minière. Le programme de physique s’est spécialisé dans le biomédical en créant cette option en 1996 et s’est joint à l’Institut Michener de Toronto pour l’établissement d’un programme de radiation therapy en 200212. Plusieurs membres de son corps professoral ont aussi participé – et participent encore – au projet de laboratoire SNO qui, depuis son établissement en 1990, a atteint une renommée internationale (voir à ce sujet la section qui porte sur la recherche dans ce chapitre). La biologie développe, à compter de 1997, des options au sein de son programme dans les domaines du biomédical, de l’écologie et de la zoologie13. L’option forensic biology est devenue, en 2004, un programme autonome, soit celui de forensic science14 (science médico-légale). Ce programme combine des cours de biology et chemistry en plus de ses propres cours disciplinaires. Cette spécialisation accrue des programmes en sciences est le résultat, selon l’ancien doyen de la faculté des sciences et génie, Rizwan Haq, de deux facteurs. D’abord toutes les disciplines scientifiques ont connu une croissance phénoménale de leur corpus de connaissances, ce qui a mené – comme on a pu le constater dans le cas de chimie – à la création de nombreuses sous-disciplines. Ensuite, à la Laurentienne, les sciences se sont branchées sur le milieu régional, ce qui explique leur engagement dans les domaines de l’environnement, de l’écologie et du médical (ce dernier étant relié à l’établissement du Centre de cancérologie du nord-est de l’Ontario à Sudbury ainsi que celui de l’école de médecine rurale et nordique). En plus de ces spécialisations, les frontières entre les disciplines scientifiques, relativement étanches il y a cinquante ans, se sont rétrécies, ce qui a mené dans plusieurs cas à l’interdisciplinarité. Selon Haq, ces frontières se devaient de devenir

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moins rigides afin de pouvoir trouver des solutions à des problèmes qui transcendaient chacune d’elles. Au niveau des programmes interdisciplinaires, il faut mentionner ceux de behavioural neuroscience15, et de sciences libérales16. Pour réussir ce dernier programme, les étudiants doivent prendre un minimum de neuf cours de sciences naturelles dans au moins trois départements ; au moins un cours dans deux des départements suivants : chimie, mathématiques et informatique ainsi que physique et astronomie ; deux « continuations » dans des départements différents ; un cours au choix en humanités ou en sciences sociales et cinq autres cours au choix dont deux peuvent être des cours autres que de sciences. Dans les humanités, quatre nouveaux programmes, soit ceux de theatre arts17, fine arts18, communication studies19 et communication publique20 sont inaugurés par les collèges Thorneloe, Huntington et l’Université de Sudbury respectivement. Les programmes de theatre arts et fine arts sont des programmes entre institutions, le premier entre la Laurentienne et le collège Cambrian, le deuxième entre le Cambrian (music et theatre production), le collège Huntington (music), Thorneloe (theatre arts) et la Laurentienne. Cet arrangement stipule que les étudiants font une partie de leurs études au Cambrian et l’autre sur le campus de la Laurentienne. Le programme de communication studies en est un autre qui repose sur la collaboration de deux institutions, Cambrian et Huntington ; en vertu de celui-ci, les trois premières années de cours sont offertes sur le campus de Huntington et la quatrième au Cambrian. Les étudiants inscrits dans ce programme peuvent se spécialiser en journalisme, en relations publiques ou en advertising. Le programme de l’Université de Sudbury est offert uniquement à la Laurentienne et comprend deux volets, soit ceux de journalisme et de relations publiques. Au cours de l’année universitaire 2004–2005, l’annonce de l’élimination du programme de music par le collège Huntington soulève de fortes réactions autant dans la communauté sudburoise que dans la communauté universitaire. Les réunions du Sénat de décembre 2004 et janvier 200521 s’avèrent particulièrement houleuses. Mais la controverse s’apaise lorsque la rectrice de l’Université Laurentienne, Judith Woodsworth, annonce que la Laurentienne va assumer la responsabilité du programme. À la suite de négociations entre la Laurentienne et Huntington, le nouveau département de music est établi par le Sénat en juin 200622. Il aura pignon sur rue dans le nouvel édifice de l’école de l’éducation anglophone inauguré en 2008. Les programmes existants en humanités subissent aussi des modifications. Ainsi le programme d’english se divise en quatre volets : littérature, drame, rhétorique et film23. En français, un programme d’études cinématographiques avait été établi à la fin des années 1980 mais le COPA a recommandé son élimination en 1995. Dans ces deux programmes, la féminisation du corps professoral a pour conséquence la création de cours qui portent davantage sur l’apport des femmes à la littérature et à la création. Le nouveau programme spécialisé en langues modernes est établi en 1992 et les programmes en langues allemande et russe sont éliminés en 199524. Les sciences sociales inaugurent les programmes de labour and trade union studies25, psychologie des sports (qui combine des cours d’éducation physique et de psychologie26) et celui d’études de la santé offert uniquement en français27. Il s’agit

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en sei g ne m en t e t rec h erc h e

des étudiants en sciences de l’activité physique montrent leur habilité au canotage .

de trois programmes interdisciplinaires. Le programme labour studies (offert seulement en anglais) combine des cours de sociology, economics, commerce, law & justice, political science et women’s studies. Ce programme veut non seulement initier les étudiants au monde du travail et des syndicats mais aussi faire revivre l’histoire ouvrière et syndicale de la région de Sudbury, qui s’est avérée très mouvementée au cours du 20e siècle. Le programme en études de la santé comprend des cours de sociologie, science politique, sciences infirmières, économie, folklore et histoire. Les programmes existants connaissent aussi des changements. Ainsi le programme d’histoire intensifie ses cours concernant le nord-est de l’Ontario ainsi que l’Ontario français en général et la féminisation de son corps professoral s’amorce à la fin des années 1990. Ces développements amènent le COPA à suggérer, en 2002, que le département entreprenne une révision de son programme pour incorporer les nouvelles opportunités que présente l’expertise du corps professoral dans les domaines de l’histoire sociale y compris celle des femmes, des Franco-Ontariens, des francophones et des Canadiens français. Le programme d’anthropologie obtient son autonomie administrative à la fin des années 1990 et devient un département au début des années 2000. À ces spécialisations du début, l’anthropologie ajoute des volets en anthropologie médicale ainsi qu’en anthropologie médico-légale (ce dernier volet contribue, avec l’option biologie, à l’établissement du programme de forensic science en 2004). La faculté des écoles professionnelles, quant à elle, inaugure trois nouveaux programmes et redéfinit celui d’éducation physique et d’hygiène. Les trois nouveaux programmes sont ceux d’études du mouvement coopératif en 1981–1982 (B.A. général) qui devient, en 1986–1987, un B. Com. spécialisé en administration des coopératives28 ; celui de kinesiology (B.Sc. spécialisé)29, et celui de native human services, un programme de service social qui s’ajoute aux programmes anglophone et francophone de l’école30. Ce programme de baccalauréat spécialisé, qui constitue le deuxième volet des programmes destinés aux étudiants autochtones à la Laurentienne – mais qui est aussi disponible aux étudiants nonautochtones – a pour but de former des travailleuses sociales et travailleurs sociaux pour œuvrer

Bâtir sur les acquis

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auprès des collectivités amérindiennes autant que non amérindiennes. Le programme d’éducation physique et d’hygiène inaugure trois programmes spécialisés distincts en 1986–1987, soit ceux de promotion de la santé, kinésiologie (B.Sc.), et activité physique en plein air qui se joignent au programme original31 . En collaboration avec les universités McMaster et Ryerson, la Laurentienne lance son programme de sages-femmes qui confère un diplôme de baccalauréat en sciences de la santé (sages-femmes) en 1993–199432. Enfin à la fin de la décennie, le programme en arts d’expression est inauguré pour permettre aux étudiants francophones de pouvoir obtenir un diplôme dans le domaine du théâtre et de la production culturelle33. Lors de sa réunion du 17 juin 1999, le Sénat avait approuvé ce programme à la suite d’une manifestation théâtrale de la part des étudiants qui suivaient des cours en arts d’expression. La Laurentienne ne fait pas que bâtir ; elle élimine aussi quelques programmes dont celui d’études canadiennes. En 1988, à la suite d’une révision externe du programme (toujours à caractère interdisciplinaire avec trois cours de CANA et des cours d’autres disciplines des humanités et des sciences sociales), le Comité de planification académique avait recommandé que le programme soit éliminé en affirmant qu’il n’existait pas de volonté collective (de la part des départements impliqués) de développer et de s’engager envers ce programme. Les inscriptions dans le cours de première année étaient suffisantes, mais celles dans les cours de deuxième et troisième années ne l’étaient pas ; de plus, le comité s’est dit préoccupé par la qualité générale du programme34. Bien que les collèges Thorneloe et Huntington aient chacun offert d’assumer la responsabilité du programme, la Laurentienne décide de ne pas accepter cette offre car, selon le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, il ne s’agit que de lettres d’intention et non de propositions fermes et concrètes35. Présentée au Sénat, lors de sa réunion du 8 décembre 1988, la proposition d’éliminer le programme est défaite. Lors de la prochaine réunion, le 19 janvier 1989, le recteur John Daniel informe les membres – à la suite d’une question – que la Laurentienne a définitivement écarté les offres soumises par les deux collèges fédérés. Toutefois à compter de 1989, seul le cours CANA de première année est offert, ce qui mène à la refonte du programme en 199136. Le Sénat vote en faveur de l’élimination du programme en 1996 à la suite d’une révision de tous les programmes effectuée par le COPA . Une des écoles les plus anciennes de la Laurentienne, celle des traducteurs et des interprètes, cesse d’admettre de nouveaux étudiants à compter de 2002. Cette démarche avait été précédée en 1998 par le transfert des cours et du programme de l’école au département d’études françaises37. Au cours de cette cinquième décennie, deux programmes majeurs sont établis à l’Université Laurentienne. Le premier est l’école de médecine du Nord de l’Ontario, école gérée conjointement par l’Université Laurentienne et l’Université Lakehead de Thunder Bay. Bien que l’école n’ait qu’un seul doyen, ses programmes d’enseignement, principalement en anglais, sont offerts complètement sur les deux campus. L’enseignement pratique a aussi lieu dans de nombreuses communautés rurales et urbaines du nord de l’Ontario, dans des milieux autochtones, francophones et anglophones.

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inauguration officielle de l’école de médecine du nord de l’ontario , campus de sudbury, 2005.  |  De gauche à droite : l’honorable Dalton McGuinty, premier ministre de l’Ontario, Roger Stasser, doyen de l’emno , la rectrice Judith Woodsworth, le député provincial Rick Bartolucci, et le maire du Grand Sudbury David Courtemanche.

L’École accueille sa première cohorte d’étudiants en septembre 2005 et sa première remise des diplômes a lieu au printemps 2009. L’un de ses objectifs est de former des médecins qui pourront revenir établir leur pratique dans le nord de l’Ontario. Lors de son établissement, il s’agissait de la première école de médecine au Canada au cours des trente dernières années38. Crée à l’âge numérique, l’École a pu développer un curriculum électronique (e-curriculum). La Laurentienne nourrissait depuis ses débuts l’ambition d’établir une école de médecine. En 1969 et 1970, dans son rapport au Comité des affaires universitaires de l’Ontario, l’Université, par l’intermédiaire de son recteur, mentionne la nécessité d’établir une école de médecine. In health matters, it is accepted that the concept of regionalisation requires, in each region, a Health Sciences Center and its contained Medical School, both to train the broad spectrum of Health-Care Personnel and to be involved in service to, and research into problems peculiar to the particular region. The Ontario Council of Health in its report recommends this solution to the Hall Commission’s broader recommendations regarding the Regional Organization of Health Care39.

Le recteur intérimaire Roland Cloutier mentionne que les centres de sciences de la santé, y compris les écoles de médecine, sont échelonnés comme des bijoux précieux le long de la frontière sud de l’Ontario mais que les régions du centre et du nord, avec leurs problèmes géographiques, environnementaux et démographiques, en sont complètement privées. Il mentionne que les professionnels de la santé de la région de Sudbury appuient fortement l’établissement d’une école de médecine et d’un centre de sciences de la santé à l’Université Laurentienne. Une pétition à cet effet avait circulé dans le nord de l’Ontario appuyant une telle école40. Au début des années 1970, le gouvernement provincial formule de nouvelles directives pour l’établissement de nouvelles écoles médicales lesquelles prévoient un centre d’enseignement satellite pour la Laurentienne. Dans son rapport

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au Comité des affaires universitaires en 1973, le recteur Monahan affirme que : « recent decisions not to proceed with the establishment of the proposed satellite teaching centre are deplored since this means that the long needed improvement in regional medical educational facilities has once again been delayed ». Le recteur a dû se rendre à l’évidence qu’une école de médecine à la Laurentienne ne deviendrait pas réalité dans un avenir rapproché ou même lointain puisque, dans son rapport de 1975, il déclare que la Laurentienne n’a aucun projet immédiat pour ajouter d’autres écoles professionnelles que ce soit en médecine, en droit ou en dentisterie. L’initiative de revenir sur le dossier de l’école de médecine à la Laurentienne a débuté en 1999 lorsque l’administration a établi comme priorité le domaine de la santé et a nommé un directeur des initiatives de la santé41. Fort de l’appui du rapport McKendry42, le projet d’une telle école pour le Nord est approuvé par le gouvernement provincial. Il est intéressant de noter que le rapport McKendry et le lobbying effectué par les deux universités du nord reprennent essentiellement le même argument qui avait été utilisé au début des années 1970, à savoir qu’une telle école formerait des médecins qui seraient plus aptes à s’établir dans le nord après l’obtention de leur diplôme. Le Sénat de l’Université approuve le programme d’enseignement de l’École le 19 avril 2005. La Laurentienne avait exploré la possibilité d’établir un programme de B.Ed. uniquement en anglais en collaboration d’abord avec l’Université Lakehead et ensuite avec l’Université Nipissing à la fin des années 1990. Finalement, elle a décidé d’entreprendre ce programme seule. La création d’un programme de baccalauréat en enseignement (B.Ed.) uniquement en anglais a été approuvée par le Sénat en janvier 200343, et a reçu l’agrément du Collège des enseignants de l’Ontario en mai 200344. Il s’agissait d’une décision importante afin de former des enseignantes et enseignants anglophones, ce qui a permis une croissance au niveau des inscriptions. Contrairement au programme de l’École des sciences de l’éducation qui reçoit les étudiants après leur diplôme universitaire (c’est donc un programme qui fait suite au B.A. ou au B.Sc.), le programme de B.Ed. anglais est un programme de 5 ans pendant lesquels les étudiants étudient simultanément dans une discipline de B.A. ou de B.Sc. et en éducation. Pendant leurs quatre premières années, ils suivent à la fois des cours en éducation et des cours dans d’autres disciplines. Seule la dernière année est consacrée uniquement à l’éducation. La première cohorte a été admise en 2003 et a reçu son diplôme en 200845. Pour sa part, le programme de e-business est inauguré en 200246 pour les étudiants qui ont un intérêt à la fois en informatique et en gestion des affaires. Il s’agit d’un programme interdisciplinaire qui combine des cours principalement en informatique et en commerce. Enfin, l’Université s’intéresse à l’établissement d’une école d’architecture à la fin des années 2000. Cette proposition recueille d’ailleurs l’appui financier du Conseil municipal de la ville du Grand Sudbury. En juin 2009, le Conseil des gouverneurs et le Sénat approuvent en principe la création d’une école d’architecture, et la Société de gestion du Fonds du patrimoine du nord de l’Ontario attribue

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Ta bl e au 7,1  |  i nscr i p t ions au x Pro gr a m m e s , 1985–2 007 Faculté Arts*

1985–1986 N %

1990–1991 N %

1 112 34

2 273 51

1996–1997 N %

2002–2003 N %

2007–2008 N %

1 991 46

Humanités









7

778 10

Sciences sociales









1 263 21

1 426 18

Arts général**











1 335 22

1 553 19

Sciences et génie

530 16

841 19

630 11

731

9

493

410

5

Sciences général** Écoles professionelles











Gestion

911 11

4 488 100

1 541 35

8

2 338 28

3 287 100

1 656 37



1 823 31

Total

1 645 50

559 12



388

4 373 100

5 932 100

8 147 100

Sources : Rapport statistique des inscriptions, 1986, 1991, 1997, Bureau du secrétaire général ; Inscriptions, 2002, 2007, Bureau de la recherche institutionnelle. * Les rapports statistiques du secrétaire général ne distinguent pas les humanités des sciences sociales à cette époque. ** Les étudiants sont inscrits dans des programmes en humanités, en sciences sociales ou en sciences mais n’ont pas encore déclaré de concentration ; cette catégorie ne commence à paraître, dans les rapports, qu’en 2002.

700 000 de dollars pour le développement du projet, ce qui permet d’espérer que cette proposition se concrétisera rapidement. Poids relatif des programmes

Le tableau 7,1 montre le poids relatif des programmes entre 1985 et 2007. Au chapitre 6, le tableau 6,1 avait montré que le poids relatif des programmes de 1961 à 1978 s’était grandement modifié et ce, en faveur des écoles professionnelles aux dépens des arts et des sciences. Le tableau 7,1 dévoile que ce poids se modifie encore à compter des années 1980. Les arts en général comptent environ 50 pour cent des inscriptions totales, ce qui signifie un retour du pendule vers ce secteur. Les sciences ont aussi regagné du terrain. Les écoles professionnelles ont conservé une bonne proportion des inscriptions ; l’établissement de l’école anglophone des

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sciences de l’éducation en 2002 ainsi que de la faculté de gestion en 2005 ont augmenté cette proportion qui avait accusé une baisse graduelle à compter de 1990. Certificats et diplômes

Au cours des années 1980 surtout, la Laurentienne commence à développer et à offrir des programmes de certificat et de diplôme dans plusieurs domaines. Cela dit, l’Université avait inauguré le diplôme bilingue à la fin des années 1960 à la suite de l’élimination de l’exigence d’une deuxième langue ; ce dernier devient le certificat du bilinguisme à compter de 1973–1974. Pour l’obtenir, l’étudiant devait réussir un examen oral et écrit47. Un programme menant à un certificat est une série cohérente de cours de premier cycle qui sont normalement au niveau de la première, deuxième et troisième année. Il exige l’obtention d’un minimum de 30 crédits qui peuvent tous être comptabilisés en vue d’un baccalauréat mais non d’un autre certificat ou d’un diplôme. Un diplôme par contre est une série cohérente de cours dont la majorité sont au niveau de la quatrième année et qui exige aussi la réussite de 30 crédits. Ces cours peuvent entrer en ligne de compte pour un deuxième grade mais non pour un autre diplôme. Ce dernier intéresse surtout les étudiants qui ont déjà obtenu un baccalauréat général de trois ans et qui veulent obtenir l’équivalent d’une quatrième année dans une même discipline. Puisque les règlements universitaires ne permettent pas à un étudiant d’obtenir deux grades, soit un baccalauréat général et un baccalauréat spécialisé dans une même discipline, le diplôme permet à l’étudiant d’obtenir l’équivalent de ce deuxième grade. Des candidats adultes particulièrement aptes à suivre un programme en raison de leur expérience peuvent aussi être acceptés pour l’obtention d’un diplôme. Règle générale, les certificats sont de nature interdisciplinaire alors que les diplômes sont surtout concentrés dans une discipline. Extension et collaboration

Le Centre d’éducation permanente a concentré ses efforts sur les cours par correspondance en inaugurant son programme ENVISION en 1987–198848. De plus, en 1987, à la suite de l’établissement de Contact North | Contact Nord, le Centre commence à offrir des cours par téléconférence. Depuis les années 1990, de nombreux cours sont offerts en ligne, une tendance qui ne cesse de prendre de l’ampleur. En outre, la Laurentienne offre ses programmes dans les universités affiliées de Nipissing (North Bay), Algoma (Sault-Sainte-Marie) et Hearst depuis les années 1960. Deux de ces universités (ou collèges universitaires) sont devenues depuis lors des institutions autonomes. Il s’agit de Nipissing qui a obtenu sa charte universitaire en 1992 et d’Algoma qui a obtenu la sienne en 2008. Le Collège de Hearst demeure la seule institution universitaire complètement française en Ontario. Au cours des années, l’Université Laurentienne a établi des programmes offerts en collaboration avec d’autres institutions, parfois privées comme dans le cas de

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l e co l l èg e u n i v er s i ta i r e d e h e a r s t C’est en 1953 que Monseigneur Louis Levesque fonde le Petit Séminaire de Hearst. À l’époque, l’Ontario interdit toujours l’existence d’écoles secondaires bilingues ou françaises publiques. Pour poursuivre des études secondaires, on doit fréquenter des high schools anglais ou des écoles privées bilingues et confessionnelles. Dans ce contexte, seule une minorité privilégiée peut poursuivre des études au-delà du niveau primaire. En dotant son diocèse d’un Petit Séminaire, l’évêque de Hearst entend offrir aux jeunes hommes du nord-est de l’Ontario la possibilité de faire des études secondaires, tout en inscrivant son diocèse dans la tradition scolaire catholique ontarienne. En septembre 1953, on accueille les 35 premiers élèves. On offre alors une formation qui s’inspire du programme scolaire enseigné dans les collèges classiques du Québec. Très rapidement, le fondateur de même qu’un de ses principaux collaborateurs, le révérend Maurice Saulnier, décident de modifier le programme scolaire afin de le rendre compatible avec celui des écoles secondaires ontariennes. Dès 1957, on signe, avec l’Université de Sudbury, une entente d’affiliation qui permet d’offrir un premier programme universitaire. La même année, on entreprend la construction d’un nouvel édifice. Ce sont ces locaux qui abritent encore aujourd’hui le campus de Hearst. Pour financer ses projets éducatifs, Mgr Levesque doit constamment faire appel à la générosité de la population du diocèse. Entre 1957 et 1959, une souscription diocésaine permet de recueillir plus de 345 000 $, ce qui représente environ 50 % des coûts de construction de l’édifice. En 1959, le Petit Séminaire de Hearst est incorporé comme société sans but lucratif et prend le nom de Collège de Hearst. Au moment où s’amorce la nouvelle décennie, la jeune maison d’enseignement compte un nombre grandissant d’étudiants tant au palier secondaire que postsecondaire et s’apprête à multiplier ses champs d’études universitaires. En 1961, ses sept premiers finissants obtiennent leur grade universitaire. Comme l’institution n’a pas de charte universitaire, les diplômes d’abord délivrés par l’Université de Sudbury sont par la suite conférés par l’Université Laurentienne. C’est en décembre 1963 que sont signées les ententes qui marquent le début d’une longue et fructueuse affiliation avec la toute nouvelle Université Laurentienne. Quelques mois auparavant, on avait accueilli un premier groupe d’étudiantes dans le programme préuniversitaire, soit l’équivalent de la 13e année. Leur arrivée transforme à jamais le visage de l’institution, car presque 75 % des diplômes ont été depuis remis à des femmes. Avec la création des écoles secondaires publiques de langue française, le Collège de Hearst cesse d’offrir des programmes d’études secondaires et le pensionnat ferme ses portes en 1970. Ces transformations obligent l’institution à revoir et à reformuler une partie de sa mission. Le conseil d’administration tout comme le corps professoral se laïcisent, grâce notamment au retour de plusieurs jeunes professionnels ayant été formés au Collège de Hearst. Parmi eux se trouve

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un jeune professeur de sociologie, Raymond Tremblay. Premier laïc à occuper le poste de directeur des études, puis celui de recteur, Raymond Tremblay dirige depuis les destinées de l’institution. En 1971, l’Ontario reconnaît l’institution comme établissement universitaire public, ce qui lui permet d’être dorénavant financée à 100 pour cent par la province. L’année suivante, l’institution devient le Collège universitaire de Hearst et accroît les programmes d’études à temps partiel qui vont, au cours des années suivantes, permettre aux enseignantes et aux enseignants de toute la région de parfaire leur formation. Le corps professoral se rend alors dans les diverses communautés et enseigne en soirée à cette population à temps partiel. L’ouverture du campus de Kapuskasing, en 1976, permet d’augmenter les services offerts à cette clientèle. Malgré ce dynamisme, la situation financière du Collège universitaire de Hearst demeure fragile. La population étudiante à temps partiel, principalement formée du personnel enseignant de niveau primaire, diminue à mesure que ce groupe obtient le baccalauréat. En 1978, une crise financière menace l’existence même de l’institution. Les nombreuses interventions auprès des autorités gouvernementales convainquent le gouvernement ontarien que la plus petite institution universitaire de la province et la seule de langue française doit être sauvée. Une subvention spéciale de 200 000 $ lui permet, en 1980, de survivre et de poursuivre, non sans difficulté, sa mission et la diversification des services ce qui mène, entre autres, à l’établissement en 1988 d’un campus à Timmins. En 1995, des coupures gouvernementales obligent le Collège à déclarer une autre urgence budgétaire, ce qui entraîne l’élimination de programmes d’études et la suppression de plusieurs postes. Les compressions salariales et les augmentations de tâches consenties par les membres du personnel permettent d’assurer la survie de l’institution. Jugeant qu’il faut accroître plutôt que de réduire les services, l’institution décide de prendre un nouveau tournant et introduit ses programmes d’études à plein temps à Kapuskasing et à Timmins. Jusque-là, seul le campus de Hearst offrait cette option. En élargissant son mandat régional, elle réussit ainsi à augmenter ses inscriptions. De plus, afin de se démarquer des collèges communautaires de langue française nouvellement créés en Ontario, elle adopte un nouveau nom d’affaires : Université de Hearst. Comptant déjà près de 1 000 finissants et finissantes, l’Université de Hearst contribue depuis bientôt 60 ans à la vitalité éducative, culturelle et économique de sa région. Elle doit d’abord ses succès au soutien indéfectible du diocèse de Hearst et de la population du Nord-Est ontarien.

l’Université canadienne en France avec la compagnie Blyth, mais surtout publiques, en général des collèges d’arts et de technologie appliqués. En 1987–1988, la Laurentienne établit l’Université canadienne en France gérée conjointement par l’Université et la compagnie de voyage Blyth and Company. « Il s’agit d’un programme conçu pour permettre aux étudiants anglophones et 146

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francophones de toutes les provinces de passer une année dans le sud de la France tout en continuant à accumuler des crédits universitaires reconnus au Canada49 ». Ce campus outre-frontières offre principalement un programme d’un an constitué de cours de littérature, de musique, d’histoire, d’études classiques et de langues. Chaque année, l’Université canadienne en France développe un thème autour duquel se greffent les cours. Sur un autre front, en 2001, la faculté des humanités et des sciences sociales a commencé un partenariat avec le Collège Georgian, dans la région de Simcoe, en vertu duquel plusieurs de ses programmes sont offerts, uniquement an anglais, aux étudiants de cette région. À partir de 54 étudiants et de trois programmes en 2001, ce partenariat compte maintenant 1 000 étudiants à plein temps qui peuvent obtenir leur B.A. en huit disciplines, ainsi qu’un baccalauréat en administration des affaires et suivre le début du programme de service social. Par ailleurs, l’Université offre son programme anglophone en sciences infirmières en collaboration avec trois collèges d’arts et de technologie, soit St. Lawrence (Cornwall), Northern (Timmins) et Sault (Sault-Sainte-Marie) depuis le début des années 2000 à la suite d’une décision du gouvernement provincial d’exiger que les infirmières obtiennent un diplôme universitaire afin de pratiquer leur profession50. Finalement, en 2002, l’Université s’est associée à l’Institut Michener de Toronto pour offrir un programme de B.Sc. en radiation therapy51, et en 2006, l’École de service social a signé une entente avec l’Université Sainte-Anne, en Nouvelle-Écosse, afin d’offrir, via son programme en ligne52, tout son programme de baccalauréat. Études supérieures depuis 1985 Depuis le début des années 1980, la Laurentienne a mis sur pied une douzaine de nouveaux programmes de deuxième cycle. Elle doit toutefois en suspendre un, soit celui d’english, en décembre 1983, à la suite d’une évaluation négative effectuée par le Conseil des études supérieures de l’Ontario. Cette évaluation conclut que le programme a besoin d’améliorations majeures et que, par conséquent, les inscriptions au programme doivent cesser immédiatement. Cette conclusion est fondée sur le fait que le programme n’a pas suffisamment de ressources professorales et de plus que le corps professoral n’a pas un dossier suffisant dans les domaines de la recherche et des publications. L’Université porte cette évaluation en appel en notant que le programme répond à des besoins régionaux et que la spécialisation du début (littérature victorienne) imposée par le Conseil des études supérieures est devenue trop étroite compte tenu que les intérêts des professeurs ont évolué53. Le vice-recteur à l’enseignement et la recherche prend finalement la décision de cesser les inscriptions au programme « until such time as we have made a firm decision on our future intention re this programme » ; il allègue, de plus, qu’il sera impossible de recommencer le programme sans qu’il ne satisfasse aux conditions d’une réévaluation54. Déjà, en 1980, le programme de géologie, dont les inscriptions sont relativement faibles, avait été menacé de fermeture surtout pour des raisons financières. Il peut Bâtir sur les acquis

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continuer lorsque la situation commence à se redresser au sein du programme de géologie. Exception faite de ces deux programmes, l’Université a procédé à établir les programmes suivants entre 1980 et 2000 et ce, dans les quatre facultés. En sciences, une maîtrise en génie minier, inaugurée en 1988–1989 en collaboration avec l’Université Queen’s, permet aux étudiants inscrits aux études supérieures de cette université de compléter la majorité des exigences pour ce diplôme à l’Université Laurentienne. Cette collaboration cessera en 1995–1996 lorsque l’École de génie établira ses propres programmes en ressources minérales55, soit un programme de maîtrise en génie – qui exige des cours et un projet industriel –, et une maîtrise en science appliquée – qui exige des cours et une thèse. Établis en consultation avec l’industrie locale, il s’agit de programmes interdisciplinaires qui admettent des étudiants diplômés en génie ainsi qu’en science à temps plein et partiel. L’École des sciences de l’éducation, de son côté, commence à offrir une maîtrise en éducation (M.Ed.) conjointement avec l’Université d’Ottawa en 1988–198956 ; elle cessera d’être offerte toutefois en 1992–1993 à cause de problèmes administratifs et de conditions trop exigeantes pour les étudiants, principalement celle de vivre en résidence à l’Université d’Ottawa. Dans les écoles professionnelles, la maîtrise en administration des affaires (M.B.A) débute en 1986–198757, tandis que l’École de service social accueille ses premiers étudiants francophones à la maîtrise en service social (M.S.S.) en 1992– 199358, et ses étudiants anglophones au masters of social work (M.S.W.) en 1996– 199759. Ces deux programmes sont offerts à temps partiel, les étudiants, qui pour la plupart travaillent à plein temps, participant à des sessions intensives de quatre jours à toutes les six semaines. En 2008, le Conseil des études supérieures donne la permission à l’École de commencer à admettre des étudiants à plein temps après avoir entrepris la révision de son programme. Un autre de ces programmes est celui de maîtrise en orthophonie, offert conjointement avec l’Université d’Ottawa, démarre en 1994–199560. Il a pour objectif « de former des professionnels capables de travailler en français en Ontario. Les candidats devront posséder une connaissance des principes fondamentaux de la psychologie et de la linguistique et recevront une formation hautement spécialisée dans le domaine des troubles de la communication61 ». Contrairement aux autres programmes offerts conjointement, les étudiants qui suivent leurs cours à la Laurentienne reçoivent leur diplôme de cette université. En 2000, alléguant la difficulté de pouvoir recruter des professeurs compétents dans le domaine, l’Université Laurentienne cesse d’offrir ce programme. Au niveau des sciences sociales, le département de sociologie commence à offrir son programme de M.A. en 1994–199562 ; il s’agit d’un programme complètement bilingue qui se spécialise dans le domaine de la recherche sociale appliquée. La faculté des humanités n’est pas en reste en inaugurant un programme de maîtrise interdisciplinaire en 1996–199763. Intitulé interdisciplinary master of arts in humanities : interpretation and values, ce programme se définit comme suit : « inquiry into how our interpretation and values shape the world around us and how we are shaped by the interpretation and values of others is traditionally the

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province of the humanities and is expressed through textual study: liberal, critical, philosophical and religious. Our programme is designed to stress the commonalities between our various humanities disciplines64 ». Pendant dix ans, le programme est offert conjointement avec les collèges fédérés ; en 2006, le Collège universitaire assume seul la responsabilité de ce programme tout en comptant sur l’apport de certains professeurs des collèges fédérés. Sa planification en humanités avait débuté en mai 1990 après que plusieurs professeurs ont exprimé au doyen de la faculté un intérêt pour l’établissement d’un programme interdisciplinaire65. Depuis 2000, cinq programmes de deuxième cycle ont été créés : le programme en ligne de la maîtrise en administration des affaires, le programme en sciences infirmières (M.Sc.N.)66, le diplôme gradué en science communication67, la maîtrise en activité physique (M.A.P.)68 ainsi que la M.A. en psychologie69. Le département de mathématiques a soumis, pour fins d’évaluation, un programme de deuxième cycle avec une spécialisation en computational science, domaine à l’interface des mathématiques et de l’informatique. Le doctorat Le doctorat ou Ph.D. représente la deuxième étape des études supérieures. L’obtention d’un tel programme par une université exige aussi un processus d’approbation rigoureux à la fois à l’intérieur de l’université ainsi qu’auprès du Conseil des études supérieures de l’Ontario. Tout comme la maîtrise, le programme de doctorat est soumis à une évaluation externe rigide à tous les sept ans. Pour obtenir l’autorisation du CeSO d’offrir un programme de doctorat, un département ou une faculté doit avoir un corps professoral compétent dans la matière et ayant un dossier acceptable de recherches et de publications ainsi que de supervision de thèses. Selon l’ancien directeur des études supérieures, Lloyd Reed, le gouvernement provincial avait interdit à l’Université Laurentienne et aux autres universités de taille semblable de développer et d’offrir des programmes de doctorat dans les années 198070 pour lesquels elles recevraient le financement de la province, interdiction qui a duré jusqu’à environ 1999–2000. Selon le doyen des études supérieures, Paul Colilli, le gouvernement a levé son embargo à cette époque et la Laurentienne a alors décidé de développer et d’offrir des programmes de doctorat pour plusieurs raisons. D’abord le profil de recherche du corps professoral s’était amélioré considérablement, de plus pour maximiser le potentiel de financement et créer un environnement de recherche, l’Université a cru bon d’établir ces programmes. Le gouvernement fédéral a lancé ses programmes de chaire de recherche et du fonds d’innovation à la même période pour encourager les universités canadiennes, indépendamment de leur taille, à effectuer de la recherche. La double cohorte allait aussi augmenter le nombre d’étudiants et le gouvernement provincial voulait accommoder tous les étudiants qui désiraient poursuivre des études supérieures. Pour ce faire, le gouvernement libéral a établi un fonds pour l’expansion des programmes d’études supérieures. Par conséquent, la Laurentienne a décidé de se préparer en conséquence en établissant surtout des pro-

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ryan mailloux , le premier étudiant de l a l aurentienne à obtenir un doctorat – en sciences biomolécul aires – , lors de l a remise des diplômes en juin 2008.

grammes de doctorat. Enfin, l’Université était d’avis que de tels programmes dans des domaines stratégiques seraient d’un bénéfice certain au niveau des sources de financement, que ce soit au niveau de l’industrie ou du gouvernement. Depuis la levée de l’embargo au début de la décennie 2000, la Laurentienne a établi six programmes, dont quatre en sciences, un en écoles professionnelles et un dernier en sciences humaines. Notons que, dans la décennie qui a précédé, ses propres programmes de troisième cycle, la Laurentienne avait inauguré un programme en collaboration avec l’Université d’Ottawa, soit le Ph.D. en psychologie clinique en 1992–199371. Ces programmes sont ceux de boreal ecology72 (biologie), biomolecular sciences73, natural resources engineering (génie)74, mineral deposits and precambrian geology (géologie)75, rural and northern health76 et sciences humaines/ human studies77. Le programme de boreal ecology (offert uniquement en anglais) définit son objectif comme étant « the study of all aquatic and terrestrial aspects of boreal ecosystems (genetic, physiological, morphological, behavioural and ecological) at micro- and macro-habitat scales with emphasis on structural systems, impacts of disturbance, restoration and species sustainability and conservation ». Le département de biologie avait tenté auparavant d’établir un programme de doctorat conjoint avec l’Université de Guelph en 1993. Selon la lettre d’entente proposée entre les deux universités, ce programme permettait, aux professeurs de la Laurentienne possédant les compétences requises, d’offrir des cours et de superviser des étudiants du programme de doctorat de Guelph. Les professeurs de la Laurentienne auraient été nommés au rang de professeur associé (adjunct) et auraient pu donner les cours à Sudbury ou à Guelph. Les étudiants, qui auraient été inscrits au programme de Guelph, auraient aussi pu effectuer leurs recherches à Sudbury78. Le Comité de la planification académique a refusé toutefois d’approuver ce programme conjoint en soulevant des questions d’ordre financier puisqu’un tel programme exigerait des ressources additionnelles. De plus, le programme n’attirerait pas de nouveaux étudiants à la Laurentienne puisque ces derniers seraient inscrits

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à l’Université de Guelph. Enfin, « les membres du COPA s’étaient demandé pourquoi ne pas proposer un programme de doctorat pour la Laurentienne79 ». Quant aux étudiants du programme de biomolecular sciences, ils doivent être formés pour des carrières en enseignement universitaire ou en recherche, ou pour des carrières dans l’industrie biotechnologique, pharmaceutique ou biomédicale. Ce programme s’appuie sur la participation des membres du corps professoral des départements de biologie, chimie et biochimie, physique, de l’École d’activité humaine, de l’École de médecine ainsi que du personnel du Centre régional de cancérologie et de l’Hôpital régional de Sudbury. Le programme de natural resources engineering se spécialise, de son côté, dans les domaines du génie minier, de la robotique, de l’automation et des technologies avancées. Il donne suite au programme qu’il avait tenté d’établir conjointement avec l’Université Queen’s. Ce programme ainsi que celui en mineral deposits disent vouloir bénéficier de l’emplacement géographique de la région de Sudbury pour fonder leurs études et leurs recherches. Tout comme le département de biologie, celui de géologie avait aussi entrepris des discussions pour l’établissement d’un programme de doctorat en collaboration avec d’autres universités ; avec les universités Ottawa et Carleton d’abord en 1996, et en 1997 avec l’Université de Western Ontario. Dans les deux cas, les discussions n’avaient pas abouti. En ce qui a trait aux discussions avec les universités Ottawa et Carleton, les pourparlers avaient achoppé au printemps de 1996, selon le doyen de sciences et génie de l’époque, parce que les départements, à Ottawa et Sudbury, n’avaient démontré qu’un appui mitigé au projet. Toutefois, dès la levée de l’embargo, le département a pu utiliser la documentation préparée dans le cadre de ces discussions pour proposer son propre programme. Le programme de rural and northern health donne suite aux objectifs du plan stratégique de l’Université Laurentienne qui identifie le secteur de la santé rurale et nordique comme l’une de ses priorités. En tant que programme interdisciplinaire, il s’appuie aussi sur l’établissement de l’École de médecine du Nord de l’Ontario dont la spécialisation est de former des médecins pour les milieux ruraux et nordiques. Enfin le programme en sciences humaines/human studies, le seul programme de Ph.D. complètement bilingue, a comme thème fondamental celui du développement humain. Le programme de doctorat en sciences humaines a pour champ le développement humain. Il a pour objet l’être humain comme être social et comme être unique ; l’interdisciplinarité constitue son outil d’analyse et son moyen d’étude, l’interdisciplinarité puisant dans des disciplines traditionnelles des humanités et des sciences sociales afin de créer de nouvelles connaissances et un nouveau paradigme appelé interdisciplinarité80.

Il forme les étudiants francophones dans quatre domaines : cognition et communication, études régionales et culturelles, études franco-ontariennes et francophones, et santé. Les étudiants anglophones peuvent se spécialiser dans l’un des cinq domaines suivants : développement humain, critique du genre et de la

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sexualité, études régionales et culturelles, interprétation sur les valeurs et éthique en relation avec la politique, et santé. Ce dernier programme avait été précédé, au cours des années 1990, par des tentatives d’élaborer un doctorat en développement humain, tentatives demeurées sans lendemain à cause d’un manque d’un corps professoral ayant les compétences nécessaires pour participer à un programme de ce niveau. La Laurentienne a pu décerner ses premiers diplômes de troisième cycle peu avant son cinquantième anniversaire. Recherche – 1985 à aujourd’hui Entré en fonction en juillet 1984, le nouveau recteur Daniel ne perd pas de temps à afficher ses couleurs en ce qui a trait à la recherche. Dans une entrevue accordée au Northern Life, il affirme que l’une de ses priorités consiste à développer la capacité de recherche à la Laurentienne. Selon lui, l’Université doit surtout concentrer ses efforts dans le domaine de la recherche sur les ressources nordiques (faisant ainsi écho à l’ancien recteur Monahan). Ce sera difficile, dit-il, mais il faut travailler systématiquement au développement de la recherche81. Au cours de son mandat, l’administration Daniel-Bélanger est responsable des développements suivants : l’établissement d’un bureau de la recherche qui se greffe à l’École des études supérieures et qui devient, en 1986, l’École des études supérieures et de la recherche ; l’embauche d’une responsable de la recherche afin d’aider les professeurs dans leur demande de subventions ; la publication du Bulletin de recherche à l’Université Laurentienne (de 1990 à 1999) qui renseigne les professeurs-chercheurs au sujet des subventions de recherche. L’administration propose une politique visant la procédure pour la création et le financement des centres et instituts de recherche que le Sénat adopte82. Elle inaugure une politique concernant les frais administratifs reliés à la recherche, établit le Fonds de recherche de l’Université Laurentienne (FRUL) qui procure des subventions modestes pour permettre aux chercheurs de démarrer des projets de recherche. Depuis l’adoption de la politique, les centres de recherche ne cessent de se multiplier à la Laurentienne. En 1985, l’Université comptait trois instituts ou centres de recherche, soit l’Institut de recherche sur les microparticules, l’Institut francoontarien et CIMMER . Aujourd’hui, l’Université Laurentienne compte près de vingt centres de recherche qui soutiennent, dans diverses disciplines, maints projets de recherche fondamentale et appliquée83. Présentons-les. Le Centre d’excellence en innovation minière (CEIM) est une coalition d’instituts et d’universités travaillant dans les principaux domaines de recherche jugés pertinents et importants pour l’industrie minière. Créé sous l’impulsion de l’Ontario Mineral Industry Cluster Council qui souhaite tirer le meilleur parti des atouts et installations minières considérables déjà en place dans la région, le CEIM permet de hisser la ville de Sudbury au rang des éminents établissements internationaux et en fait la rivale dans le domaine des recherches menées par le secteur minier. Le Centre se concentre sur l’exploration minière, l’extraction souterraine, l’ingénierie des procédés miniers intégrés, l’automatisation et la télérobotique, l’environnement et la remise en état du terrain. 152

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Pour sa part, l’Unité conjointe d’écologie d’eau douce (UCEED), fondée en 1989 sous la direction de John Gunn, offre des possibilités de recherche dans des domaines prometteurs (écologie réparatrice, science de l’environnement et gestion des ressources aquatiques) grâce à des programmes d’études qui profitent aux membres du corps étudiant de tous les cycles, au gouvernement et au grand public. Le Centre s’occupe aussi du changement climatique, de la réhabilitation des espèces halieutiques menacées de disparition, des interactions entre le zooplancton et les communautés de poissons dans les lacs agressés par la pollution acide. À l’aube du deuxième demi-siècle de la Laurentienne, l’UCEED s’apprête à déménager dans son nouvel emplacement, le Centre d’études sur les lacs Vale Inco, érigé sur l’ancien site du chalet Robertson, et qui représente le projet signature de la campagne de financement de l’Université. Le Centre de recherche sur les matériaux miniers (CREMM), affilié au département des sciences de la Terre, a pour mission de promouvoir et d’intensifier les travaux de recherche et les programmes d’études interdisciplinaires dans le domaine des sciences des matériaux de même que leurs relations à tous les aspects du secteur minier et de l’industrie des minéraux. Les membres du Centre s’intéressent à des domaines tels que les matériaux avancés optimisant les procédés miniers et la protection de l’environnement, la caractérisation des matériaux miniers, les sciences de la séparation et l’ingénierie des procédés minéraux. Un autre centre de recherche est celui en développement humain (CRDH), établi en 1987 sous la direction de John Lewko, chef des études en enfance et développement, est une unité interdisciplinaire qui appuie une gamme d’activités de recherche appliquée menées avec le concours de plusieurs unités d’enseignement. Les initiatives de recherche comprennent le mieux-être des personnes âgées, l’éthique de l’environnement et la prise de décisions inhérentes, le passage de l’école au milieu de travail, les jeunes Autochtones, l’enfance en difficulté, les changements physiques au cours de la croissance, le développement des émotions, le développement neuropsychologique, le développement sociorelationnel, la famille et la socialisation. Que dire de l’Unité de recherche sur les ressources humaines en matière de santé dans les milieux nordiques créée en 1992 sous la direction de Ray Pong? Elle est transformée en 1997 pour devenir le Centre de recherche en santé dans les milieux ruraux et du nord (CRSRN). Il s’agit d’un organisme de recherche conjoint situé à l’Université Laurentienne et à l’Université Lakehead. Le Centre effectue des recherches interdisciplinaires sur la santé de la population, les ressources humaines et les soins de santé afin de mieux comprendre les conditions qui règnent dans le secteur, notamment celles des régions rurales et du nord. Des chercheurs associés au Centre étudient la gestion, l’organisation et l’efficacité des services de santé dans les régions rurales et le nord, de même que la formation, la répartition et l’utilisation des fournisseurs des soins de santé. La Station de recherche d’Elliot Lake (SREL), créée en 1992 pour soutenir les travaux de recherche sur les effets écologiques du rayonnement faiblement radioactif des résidus d’uranium extraits des mines de la région d’Elliot Lake, offre une large gamme de services d’analyse des matières inorganiques et radionucléides pour le compte de sociétés privées, et à titre complémentaire, dans le cadre des analyses Bâtir sur les acquis

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l’observatoire de neutrinos de sudbury, 1997.  |  Depuis le milieu des années 1980, des chercheurs du département de physique de la Laurentienne sont des membres clés de l’Observatoire de neutrinos de Sudbury, un détecteur de ces particules émises par le soleil, aménagé deux kilomètres sous terre dans la mine Creighton de Vale Inco. Les résultats de l’observatoire, reconnus dans la communauté scientifique mondiale, confirment de nouvelles propriétés des neutrinos.

du sol, du fumier, des plantes et des tissus d’origine animale, des opérations des usines d’épuration des eaux usées et de la surveillance des effets et des recherches sur l’environnement. Passons au Centre de recherche en géomécanique (CRG), fondé en 1987 et dirigé par Peter Kaiser, se consacre à la recherche appliquée dans le domaine de la mécanique des roches et du contrôle des pressions des terrains. Ses travaux, qu’il mène de concert avec l’industrie minière canadienne, portent sur le soutènement des terrains sujets aux secousses, les problèmes géomécaniques liés au minage à grande profondeur, l’analyse du rapport risque/coût/bénéfice et l’utilisation des relevés microséismiques dans la conception des mines. L’Institut franco-ontarien (IFO) que nous connaissons bien est créé en 1976 et a comme objectifs d’effectuer des recherches, de produire des publications, d’organiser des colloques et des conférences et de recueillir de la documentation sur divers aspects de la population franco-ontarienne. Ses travaux de recherche portent surtout sur l’éducation, la santé, le troisième âge, la culture et la société. L’Institut nord-ontarien de recherche et de développement (INORD), datant de 1987, se spécialise, de son côté, dans les questions sociales et économiques du nord-est de l’Ontario. Il diffuse sur son site Internet des articles, communications et rapports de recherche. L’objectif de l’INORD est de favoriser des recherches en collaboration avec des professeurs de sciences sociales et des groupes issus des secteurs public, privé et bénévole du nord-est de l’Ontario. Le Laboratoire d’automatisation des mines de l’Université Laurentienne (LAMUL), projet conjoint entre l’École de génie et l’Inco cherche, à compter de 1993, à promouvoir et faire avancer l’enseignement de la robotique minière et l’application de nouvelles technologies dans le secteur minier. Il s’efforce d’apporter du savoir-faire dans l’automatisation des mines et de forger des liens solides avec les sociétés canadiennes qui s’intéressent aux nouvelles technologies minières. Plusieurs objectifs animent le Centre de recherche en exploration minière (CREM) dont la recherche concertée université-gouvernement-industrie, autant fondamentale qu’appliquée, sur les gisements minéraux et la géologie précam154

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brienne, donner une vision de base des gisements minéraux et de leurs cadres géologiques, aider l’industrie minière canadienne à découvrir des gisements de minerai, et enseigner aux géologues les techniques de recherche en exploration minérale. Le Société de recherche appliquée en innovation minière et de réhabilitation (MIRARCO), établie en 1998, est une entreprise sans but lucratif de recherche appliquée et de services techniques formée grâce à la collaboration de l’Université Laurentienne et des secteurs public et privé. Elle favorise l’innovation minière et jette le pont entre les chercheurs et l’industrie. Tout le monde connaît sans doute l’Observatoire de neutrinos de Sudbury (ONS), surnommé « l’œil du Canada sur l’Univers », le projet scientifique international que dirige le Canada dans la mine Creighton d’INCO , à deux kilomètres de profondeur. Fondé en 1990, l’Observatoire est devenu au Canada un établissement souterrain permanent où une équipe internationale de 130 chercheurs s’emploient à mieux faire connaître et comprendre comment s’opère la fusion nucléaire au soleil et à trouver dans les neutrinos de nouvelles propriétés qui ont modifié les lois fondamentales de la physique. Cette vague de centres de recherches a atteint aussi les sports avec l’Institut de marketing du sport (IMS), établi en 2001 avec un financement provenant de diverses sociétés privées et organismes sportifs. Il analyse le financement des sports, des loisirs et de l’activité physique au Canada. Deux nouveaux centres de recherche ont été établis en 2008. Le premier, axé sur la santé et la sécurité au travail, réunit des chercheurs de diverses disciplines dont les sciences de l’activité physique et du développement humain ; le deuxième, axé sur la justice et les politiques sociales, regroupe des chercheurs de nombreuses disciplines. En 2006, l’Université Laurentienne a aussi inauguré, à la bibliothèque J.N. Desmarais, le Centre de données de recherche (CDR ) qui permet aux chercheurs, surtout dans le domaine des sciences sociales, de consulter les données de Statistique Canada sur le campus84. Comme on s’est rendu compte, cette explosion des centres de recherche à la Laurentienne est reliée étroitement à l’expansion de l’industrie minière dans la région de Sudbury depuis les années 1990. Le tiers des centres de recherche ont, en effet, des liens étroits avec l’industrie minière, soit au niveau du financement, soit au niveau de la collaboration. Ils ont aussi des liens importants avec le développement des programmes d’études supérieures en sciences, dans les écoles professionnelles, en humanités et en sciences sociales. Le domaine de la santé, visiblement relié à l’École de médecine, s’avère, depuis au moins dix ans, une source importante de financement pour la recherche. L’établissement en 2000 des Instituts de recherche en santé du Canada, en vertu d’une loi fédérale entrée en vigueur le 7 juin 200085 n’est certes pas étranger au lancement de nombreux projets de recherche dans ce domaine à la Laurentienne. Planification stratégique et infrastructure

Compte tenu de cette augmentation notable des activités de recherche depuis 1985, la Laurentienne a cru bon de se doter d’abord de plans stratégiques de recherche et ensuite d’une infrastructure plus imposante pour gérer ces activités. L’Université Bâtir sur les acquis

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élabore des plans stratégiques depuis 1972 dans le but d’orienter son développement dans le secteur académique86, mais c’est seulement en 200087 qu’elle adopte un plan stratégique axé uniquement sur la recherche. En 2004, le Sénat révise ce plan88, lequel définit cinq axes de recherche : i) les ressources minérales ; ii) les sciences de l’environnement ; iii) l’essor économique, politique, social et culturel de la région ; iv) la santé ; et v) les sciences souterraines. Dans ces domaines, l’accent porte autant sur la recherche fondamentale que sur la recherche appliquée, qui vise à résoudre les problèmes et est menée en étroite collaboration avec des partenaires industriels et publics de la région. Ces cinq axes de recherche, qui s’appuient tous sur l’un ou l’autre des centres de recherche décrits précédemment, sont intimement liés à la région d’abord du Grand Sudbury et ensuite du nord de l’Ontario. L’intention du plan stratégique est d’orienter l’expansion des recherches et de l’enseignement des études supérieures dans ces domaines pour la création d’une réputation internationale. Il veut aussi guider l’allocation des ressources au sein de l’Université. Dans le cadre de cette allocation de ressources, il faut mentionner le programme des chaires du Canada. Établi en 2000 par le gouvernement fédéral, ce programme veut créer des chaires de recherche dans les universités canadiennes afin de leur permettre de développer une excellence en recherche à l’échelle mondiale que ce soient dans les domaines des sciences naturelles, du génie, des sciences de la santé et des sciences humaines. Lors de sa mise sur pied, le programme avait pour objectif de créer 2 000 professorats de recherche dans les universités canadiennes89. L’Université Laurentienne en profite et se voit attribuer un total de sept chaires de recherche en avril 200090 ; cette allocation, ajustée périodiquement, dépend du montant de subventions de recherche obtenues par les chercheurs de l’Université à partir des agences subventionnaires nationales. Le professeur Gustavo Arteca, du département de chimie et biochimie, est le premier récipiendaire d’une chaire de recherche à l’Université Laurentienne. À l’aube de son cinquantième anniversaire, l’Université compte sept chaires91. De toute évidence, la recherche prend un essor considérable à la Laurentienne après 1985, particulièrement depuis le début des années 2000. L’administration de l’Université devient de plus en plus consciente du fait que l’infrastructure mise en place depuis 1986 pour encadrer ces activités ne peut plus répondre aux besoins. Le bureau de la recherche, intégré à l’École des études supérieures, n’est plus adéquat pour orienter et gérer cet aspect de la vie universitaire. Par conséquent, en 2003, le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, Douglas H. Parker, annonce au Sénat l’établissement du poste de vice-recteur associé à la recherche afin d’assurer que les progrès dans le domaine de la recherche se poursuivent et croissent92. Selon Parker, le mandat du détenteur de ce poste est d’assumer et d’assurer un leadership dans la recherche ainsi que l’administration de la recherche à la Laurentienne. « De plus, le détenteur du poste devra promouvoir et appuyer la recherche des membres du corps professoral, gérer tous les contrats de recherche et les subventions des conseils subventionnaires (CRSNG , CRSH , IRSC) ainsi qu’être responsable de la supervision administrative des centres de recherche. Le vice-recteur associé à la

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recherche sera aussi responsable des chaires de recherche du Canada à la Laurentienne, du bureau de la recherche ainsi que du bureau qui gère les questions reliées à la propriété intellectuelle93 ». La création de ce poste permettra au bureau du doyen des études supérieures de se concentrer uniquement sur le développement et la gestion des programmes de deuxième et troisième cycles. De plus, le Conseil des études supérieures et de la recherche est amputé de ses responsabilités dans le domaine de la recherche. En septembre 2004, Liette Vasseur commence ses fonctions en tant que vice-rectrice associée à la recherche. Quand elle quitte la Laurentienne à l’été de 2009, une autre réorganisation au sein de l’administration jumelle les responsabilités liées aux études supérieures et à la recherche pour former un poste, celui de vice-recteur à la recherche et aux études. De plus, l’Université Laurentienne établit en 2004 le Conseil de la recherche dont le mandat est de faire des recommandations au Sénat ou, tel qu’approprié, par l’intermédiaire des comités du Sénat, au sujet de toute question reliée à la recherche. Ce comité doit aussi encourager et faciliter la recherche, développer et maintenir des directives appropriées pour les programmes de recherche, faciliter le développement de nouveaux programmes de recherche et faire des recommandations au sujet de la planification de recherche à long terme94. En janvier 2005, le Sénat adopte un changement au titre de ce conseil qui se nomme désormais le Conseil de recherche, développement et créativité95 afin de refléter les activités des membres du corps professoral dans ces trois domaines importants de la vie universitaire. Cette nomenclature vient ainsi reconnaître l’importance du domaine des humanités qui est axé davantage sur la créativité, par exemple dans les sphères de la littérature ou du théâtre. Le mandat de ce nouveau Conseil doit donc inclure la formulation de recommandations non seulement au niveau de la recherche mais aussi en ce qui a trait au développement et à la créativité. Le bureau de la recherche, du développement et de la créativité, présidé par la vice-rectrice associée et sous la gouverne du Conseil de recherche, a donc des responsabilités et des fonctions multiples. En plus de celles déjà énumérées – centres de recherche, chaires de recherche du Canada, FRUL , conseils et assistance liés à la préparation des propositions de financement, promotion de recherche –, le bureau est de plus en plus responsable de la gestion de nombreuses politiques, autant internes (développées et approuvées à la Laurentienne) qu’externes (développées et adoptées surtout par des agences et ministères gouvernementaux). Ces politiques ont pour effet de transformer de façon considérable, depuis quelques années, la conduite de la recherche non seulement à la Laurentienne mais aussi dans l’ensemble des universités et des établissements de recherche au Canada. Les subventions de recherche

Les changements apportés à l’infrastructure de recherche depuis 1985 ont certes eu un impact sur le montant des subventions de recherche obtenues par le corps professoral de l’Université Laurentienne. Ce montant s’était élevé à plus de 9 millions de dollars de 1980 à 1986 et a plus que doublé de 1989 à 1994.

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En plus de ces subventions externes, le corps professoral a obtenu du financement interne pour des projets de recherche. Au cours de la période de 1989 à 1994, le montant global de ces subventions se chiffre à 1 087 527 $ dont 6 pour cent est allé aux humanités, 22 pour cent aux écoles professionnelles, 53 pour cent aux sciences et génie et 19 pour cent aux sciences sociales. Selon l’ancien directeur des études supérieures et de la recherche, Dieter Buse, ce dossier de recherche, mesuré selon l’obtention de subventions externes, est très bon comparativement aux universités de tailles petite ou moyenne. Les montants obtenus à la suite de contrats sont supérieurs à ceux obtenus par le biais des conseils subventionnaires tels le CRSH et le CRSNG . Toutefois, les critères pour juger de la recherche ne doivent pas se limiter aux seuls montants ou à la quantité des publications. Ces critères, quant aux publications, doivent aussi comprendre la qualité mesurée par le nombre de publications dans les revues de grande renommée. Ce dernier critère représente un élément où le corps professoral de la Laurentienne doit encore s’améliorer96. La somme totale des fonds obtenus pour financer les projets de recherche constitue un indice principal de la croissance de ce type d’activités à la Laurentienne. Selon la vice-rectrice associée à la recherche, « tout récemment, Research Infosource, qui classe annuellement les 50 meilleures universités au Canada, a placé la Laurentienne au premier rang en fonction de la croissance du financement total des recherches, y compris les fonds privés, parrainés et publics. En effet, l’Université a reçu un total de 38 600 000 $ en fonds destinés à la recherche, ce qui représente une croissance de 133 pour cent par rapport à 2005 où elle avait reçu 16 600 000 $97 ». Ces fonds de recherche proviennent de quatre sources : le gouvernement provincial (26,4 pour cent), l’industrie (10,3 pour cent), le gouvernement fédéral (27,4 pour cent) et les trois conseils subventionnaires (36 pour cent)98. C’est donc dire que l’établissement de centres de recherche et les programmes d’études supérieures ont eu un impact certain sur l’activité de recherche à l’Université Laurentienne au cours des vingt-cinq dernières années. Conclusion Ces deux chapitres énumératifs ont tenté de dresser un tableau sommaire du développement et de l’évolution des programmes d’enseignement et de la recherche à l’Université Laurentienne depuis sa fondation en 1960 jusqu’à aujourd’hui. Il est évident que ces deux grands domaines constituent des piliers de la vie universitaire et qu’ils ont connu des changements au cours des dernières cinquante années – et qu’ils en connaîtront encore plusieurs à l’avenir. De 1960 à 1985 environ, la Laurentienne a concentré ses efforts à développer d’abord des programmes de baccalauréat ou de premier cycle et, depuis la fin des années 1960, des programmes de maîtrise ou de deuxième cycle. Depuis 1985, l’Université a porté une attention plus systématique au développement de ses programmes d’études supérieures, autant au deuxième qu’au troisième cycles. Elle a de plus considérablement amélioré ses réalisations dans le domaine de la recherche99.

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Le défi que devra relever la Laurentienne au cours des années à venir sera de voir à ce qu’il existe un sain équilibre entre l’enseignement et la recherche, les deux piliers de la mission universitaire. C’est un débat amorcé dans plusieurs universités qui met en présence deux visions opposées du rôle de la recherche et de l’enseignement. Certains prétendent que l’enseignement et la recherche vont de pair, que les deux s’enrichissent l’un l’autre. Déjà en 1978, les partisans de l’enrichissement mutuel exprimaient que : In preparing a submission on the role and importance of research […] in a small university, such as Laurentian, I am assuming that the central justification for its pursuit is two fold: firstly, to augment knowledge and secondly, to enhance the quality of university education. Fundamental research is the base from which all significant advances of knowledge are made, whether the contributions arise from individual scholarship or large-scale research undertakings; it is essential for the vitality of academic institutions. Even in a small university […] our essential but modest involvement in scientific research plays a vital role in awakening in our students the creative and imaginative response, without which learning cannot flourish100.

D’autres au contraire prétendent que cet enrichissement mutuel constitue un mythe, que les deux activités sont en compétition. Cette position a été énoncée par Stuart Smith en 1991. Ce dernier avait présidé une commission d’enquête sur l’enseignement universitaire au Canada pour le compte de l’Association des universités et des collèges du Canada. Il avait conclu : Smith discussed growing professorial preference for research over teaching and a related desire to teach specialized courses. He argues that teaching and research were activities that competed for scarce time and resources. In so doing he challenged dominant ideas about teaching and research […] His view was that universities’ fundamental obligation is teaching and that research is secondary to teaching101.

À mesure que le profil de la Laurentienne s’orientera de plus en plus vers la recherche et les études supérieures, le débat au sujet de l’enseignement au niveau du premier cycle deviendra de plus en plus prononcé. Il s’agit d’un débat qui devra avoir lieu.

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partie c  |  le développement des identités

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l e s é t u di a n t e s e t é t u di a n t s

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La Berkeley de Sudbury : trouver sa voix, 1960–1972 sara burke « Bienvenue à la Berkeley de Sudbury! » (Allocution du président de l’age aux étudiants de première année, septembre 1970)

À l’automne de 1960, les restaurants du centre-ville de Sudbury commencent à constater qu’un nombre inhabituellement élevé de jeunes se présentent le midi. Ces nouveaux clients, qui sont pour la plupart de jeunes hommes bien mis et aux bonnes manières, sont les premiers étudiants à fréquenter l’Université Laurentienne. Le 19 septembre 1960, la nouvelle université ouvre ses portes avec enthousiasme, mais avec peu de présence physique – pas de salle à manger, de résidence, de centre étudiant ou d’équipements sportifs – et les cours se donnent dans divers édifices que rien ne destine à cet usage. Mais le caractère improvisé de ces installations dissimule une grande ambition : rassembler de jeunes Canadiens différents par leur langue et leur confession religieuse, francophones et anglophones, catholiques et protestants, dans un corps étudiant. Les premiers étudiants de la Laurentienne participent alors, selon la déclaration impressionnante du Sudbury Star, à « la plus grande expérience jamais tentée au Canada dans le domaine des études supérieures1 ». Durant les années de formation de l’Université, les étudiantes et étudiants de la Laurentienne réussiront à relever les défis de cette expérience, en prenant leur place sur le nouveau campus en 1964, en créant leur première association, leur premier journal et leur premier annuaire et surtout, en exigeant et en obtenant une voix aux échelons supérieurs de l’administration universitaire. Portés par la vague du mouvement radical des milieux étudiants de la fin des années 1960, les jeunes universitaires de Sudbury émergeront de leur première décennie avec le net sentiment de leur identité, la fierté de la place qui est la leur dans cette nouvelle université et la confiance en leur capacité de façonner l’avenir. En puisant surtout dans la population de Sudbury et du nord de l’Ontario, les inscriptions à la Laurentienne connaissent une croissance constante au cours des années 1960, mais le pourcentage de francophones dans l’ensemble diminue énormément après les cinq premières années et continuera de décliner par la suite. En 1960–1961, le nombre d’inscriptions est de 185, dont 52 pour cent sont

francophones. Cinq ans plus tard, on compte 1 773 inscriptions, dont seulement 12,5 pour cent sont francophones2. Sur le campus, les rapports entre francophones et anglophones sont souvent tendus et l’enjeu du bilinguisme est un thème central des débats tout au long des années 1960 et 1970. Toutefois, un facteur clef de l’activisme étudiant est la capacité qu’ont les deux groupes de se rejoindre et de mener ensemble une campagne efficace pour promouvoir les intérêts de l’ensemble du corps étudiant. À sa tournée du campus à ses débuts au centre-ville, un journaliste du Globe and Mail note avec un certain amusement le caractère disparate des divers édifices qu’occupe l’Université et en conclut que « la Laurentienne habite en ville3 ». L’Université occupe alors des locaux rues Larch, Elgin, Lisgar et Durham, y inclus les édifices Northern Ontario et DeMarco. Bien que tous ces édifices aient été hâtivement adaptés à leur nouvelle fonction, le Collège Huntington est sans doute celui qui a hérité des locaux les plus insolites : ses bureaux sont à l’étage d’un salon de billards rue Durham et ses classes dans une ancienne maison funéraire rue Larch. Un professeur qui enseignait à Huntington en 1961 se souvient que les casiers des femmes avaient six pieds en longueur et que « la salle d’étude des hommes avait des tuiles blanches, un éclairage très vif au plafond et un drain au sol4 ». L’Université de Sudbury, où se trouve le bureau du premier recteur de la Laurentienne, le père Émile Bouvier, a ses locaux dans l’édifice Empire rue Elgin. Les plus grands locaux – c’est ironique, vu le fait que les inscriptions y sont les moins nombreuses – sont affectés aux aménagements et à la bibliothèque du Collège universitaire, le collège non confessionnel, qui dispose de 5 000 pieds carrés dans l’édifice du gouvernement fédéral de Sudbury, rue Lisgar5. Comme il n’y a pas de résidences, les jeunes universitaires habitent des maisons de pension et des résidences privées un peu partout en ville. C’est à l’Université de Sudbury que sont inscrits la plupart, 135 des 185 étudiantes et étudiants à temps plein à l’automne de 1960, tandis que 36 sont inscrits à Huntington et 14 au Collège universitaire. La majorité est en première année ; on en compte 85 en deuxième et en troisième années, ceux-ci ayant auparavant fréquenté l’Université de Sudbury. Dès ses débuts, la Laurentienne attire aussi un grand nombre de personnes qui étudient à temps partiel aux cours du soir en vue d’obtenir leur diplôme, ainsi que des adultes dans des programmes ne menant pas à un diplôme, qui suivent des cours de perfectionnement dans des disciplines comme les mathématiques, l’électricité, le mouvement coopératif et le leadership6. Anticipant le rôle futur de l’Université dans le domaine des études amérindiennes, le département de l’éducation permanente offre des cours aux adultes des communautés des Premières Nations des environs7. Bien qu’ils soient conscients du fait que leur université est dans sa prime jeunesse, les étudiantes et les étudiants de la Laurentienne ne tardent pas à y créer les mêmes institutions qui caractérisent les universités plus anciennes dans la période de l’après-guerre. En 1960, le conseil étudiant déjà existant de l’Université de Sudbury élargit son mandat en devenant l’Association générale des étudiants de l’Université Laurentienne (AGE /SGA). La nouvelle AGE occupe alors des locaux à l’étage de l’édifice DeMarco : la moitié sert aux bureaux de l’exécutif, l’autre moitié

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sert à la fois de centre social et de salle de réunion. L’AGE regroupe des membres des deux langues officielles et l’exécutif consiste en une présidence et deux viceprésidences, l’une francophone, l’autre anglophone. La première constitution de l’AGE , adoptée en 1965, est bilingue également, sa conception étant inspirée de modèles fournis par des universités anglophones et francophones du Canada, y compris les universités d’Ottawa, de Toronto, de Montréal, McGill et Laval. L’ensemble de la population étudiante a le droit de vote pour la présidence, mais seuls les membres du groupe linguistique ont le droit de vote pour la vice-présidence de ce groupe8. Dès ses débuts, l’AGE exerce des pressions afin d’obtenir plus d’autonomie administrative, en exigeant le droit de gérer les finances de l’association et la création d’un tribunal responsable de la discipline étudiante. Dans le tout premier annuaire, Laurentiana, publié par l’association en 1963, le président de l’AGE déclare : « Quand les intérêts des étudiants sont en cause, il faut qu’on nous entende, il faut que nous soyons consultés, il faut que nos idées soient prises en considération9. » À l’époque de la mise sur pied de la Laurentienne, les étudiantes et étudiants du premier cycle dans les universités canadiennes sont étroitement surveillés et les recteurs et les doyens considèrent qu’en surveillant leur comportement moral et social, ils agissent « en lieu et place d’un parent ». L’administration présume que tous les jeunes, les jeunes femmes tout particulièrement, ont besoin d’une surveillance constante pour prévenir des cas d’inconduite comme les relations sexuelles avant le mariage, la consommation d’alcool, les jeux de hasard ou le vandalisme. Dans les résidences universitaires, les règlements sont stricts : il faut signer un registre à l’entrée et à la sortie, respecter le couvre-feu, limiter les heures de visites et, en ce qui concerne les femmes, être convenablement chaperonnées lors de toute sortie sociale10. On fréquente l’université non seulement pour faire des études, mais aussi pour se former le caractère de manière appropriée à de futurs rôles de chef de file en société. Parmi les premiers membres du personnel administratif de la Laurentienne, qui sont enracinés dans la tradition pédagogique des jésuites du Collège du SacréCœur, ce principe est peut-être soutenu plus fermement que dans les plus grandes universités canadiennes. En 1960, plusieurs de celles-ci ont déjà commencé à assouplir les règles ayant trait au comportement des jeunes universitaires. Le père Bouvier, premier recteur de la Laurentienne et avant cela de l’Université de Sudbury, avait critiqué le laxisme du père Ferland, le premier doyen des arts et des sciences, à l’égard de l’application du code vestimentaire, lequel exigeait que tous les hommes portent en classe chemise blanche, cravate et veston. Mais même après le départ de Bouvier, le Conseil de faculté de la Laurentienne appliquera un code vestimentaire rigoureux, en déclarant fermement en 1962 : « Le veston et la cravate sont obligatoires. Les coupe-vent et les chemises à col ouvert ne sont pas tolérés11. » On insiste particulièrement sur la sobriété des vêtements à la cérémonie de remise des diplômes à l’auditorium de l’école Sudbury Secondary : les hommes reçoivent la directive de porter « un veston de couleur sombre et une cravate de couleur appropriée », tandis que les jeunes femmes doivent « porter une robe de couleur pâle (blanche, de préférence) et des chaussures de couleur pâle12 ». En classe, on

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des étudiants donnent l’exemple du code vestimentaire , 1965.  |  Alors que les autres campus universitaires au Canada adoptent un code vestimentaire moins formel avec l’arrivée des années 1960, le premier recteur de la Laurentienne insiste pour que les hommes portent la chemise blanche, la cravate et le veston en classe.

n’a pas le droit de fumer, de manger ou de boire et on est tenu de faire preuve de courtoisie en respectant « la ponctualité et le décorum approprié13 ». Le premier doyen des hommes, Maurice Régimbal, est nommé en 1960 ; il a la responsabilité de superviser l’ensemble des activités étudiantes. L’exécutif du Conseil des gouverneurs décide de ne pas nommer son vis-à-vis pour les femmes, sous prétexte que chaque collège allait bientôt embaucher des doyens de leurs résidences lors du déménagement de l’Université sur le nouveau campus. Peu après sa nomination, la fonction attribuée à Régimbal est élargie ; il devient le doyen des étudiants et des étudiantes, afin de refléter l’étendue des responsabilités qui lui incombent dans un milieu d’enseignement mixte. En dépit du fait que l’AGE ait demandé une plus grande autorité en matière de discipline étudiante, l’Université met sur pied un tribunal disciplinaire où siègent exclusivement des membres du personnel administratif. En ces premières années, les femmes sont minoritaires dans la population étudiante et leurs rôles sociaux demeurent traditionnels. En 1966, par exemple, les étudiants sont presque quatre fois plus nombreux que les étudiantes : des 1 111 personnes inscrites à l’université, 850 sont des hommes et 261 sont des femmes14. Les membres de l’exécutif de l’Association générale des étudiants et du personnel du journal étudiant Lambda sont presque tous des hommes et dans toutes les questions d’intérêt public, la voix du corps étudiant de la Laurentienne est celle des jeunes hommes. Le père Bouvier avait donné le ton dans son mot du recteur de 1960 : « La Laurentienne est née, un nouveau corps étudiant est né, un nouvel esprit est né et une nouvelle génération d’hommes est née : les hommes de la Laurentienne15. » 166

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Alors que dans l’ensemble, le corps étudiant devient plus politisé à la fin de cette décennie, les étudiantes continuent de tenir un rôle secondaire dans la vie publique universitaire au cours de cette période. La représentation de « l’enseignement mixte » véhiculée par les médias, tant sur campus qu’à l’extérieur, conforte l’opinion qui prévaut depuis les années 1920, à savoir que la plupart des jeunes femmes qui fréquentent l’université ont des visées sociales plutôt qu’universitaires. Pour faire mousser les concours annuels de la rentrée, du retour des anciens et de la reine du carnaval, Lambda a une chronique hebdomadaire intitulée « Wench of the Week » (ou « la Poulette de la semaine » dans l’édition française Le Lambda), où l’on voit de jolies jeunes étudiantes que le photographe du journal a captées à l’improviste16. Les attitudes des premières cohortes étudiantes à la Laurentienne sont traditionalistes. Inspiré par le rapport Kinsey sur la sexualité humaine que les médias venaient de rapporter, Lambda mène en novembre 1963 son propre « sondage sur la sexualité ». À la question « Approuvez-vous les relations sexuelles avant le mariage? », seulement 48 pour cent des hommes et 20 pour cent des femmes se prononcent en faveur. Cette réaction nettement défavorable face aux relations sexuelles prénuptiales, en particulier chez les femmes, amène Lambda à se demander si la population étudiante de la Laurentienne fait preuve de moralité élevée ou bien de pruderie17. Les sports deviennent progressivement une composante centrale de l’identité étudiante à la Laurentienne. En 1962, le doyen Maurice Régimbal est nommé le premier directeur des activités sportives. Les premiers sports intra-muros qu’on organise sont le football, le hockey, le basketball, le volleyball, le badminton, le tennis, le curling et le golf. En attendant la fin de la première étape de la construction de l’édifice de l’éducation physique sur le nouveau campus en avril 1965, les athlètes de la Laurentienne doivent utiliser des équipements en divers lieux en ville : le YMCA , l’aréna de Sudbury et les écoles Sudbury High School et Lockerby Composite School. Le bureau de Régimbal occupe des locaux appropriés en ce sens qu’ils sont loués à l’étage du magasin de sport DeMarco rue Elgin18. À compter du printemps de 1962, l’Université organise un banquet sportif annuel pour rendre hommage aux meilleurs athlètes des sports intercollégiaux et intra-muros. Il fallait trouver un nom original pour les équipes sportives intercollégiales de la Laurentienne et, après deux ans de débats, on annonce au dîner annuel de mars 1964 qu’elles porteront le nom de Voyageurs. D’autres noms proposés étaient les Micmacs, Laurentian Shield (le Bouclier laurentien), les Sabres, les Cavaliers et les Météores. On retient les Voyageurs parce que ce nom évoque l’histoire et la culture du nord de l’Ontario et, ce qui importe peut-être plus, parce qu’il se passe de traduction. Pour le recteur de l’Université, Stanley Mullins, il s’agit aussi d’un choix idéaliste. Au banquet, il explique que ce nom « a une signification supplémentaire pour nous, non seulement parce qu’il connote les sentiers frayés vers l’inconnu, mais aussi parce que les voyageurs d’antan devaient absolument compter les uns sur les autres pour assurer leur progrès et leur bien-être19 ». Mais tout le monde n’embrasse pas le nouveau nom immédiatement, car certains se plaignent du fait que Voyageurs n’est pas un nom qu’on associe généralement à des équipes sportives. L’écusson et des blazers couleur d’or vif conçus pour les équipes universiTrouver sa voix

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l’équipe de hockey des voyageurs passe l a rampe .  |  Au cours des années 1960, l’équipe de hockey masculine de la Laurentienne s’impose comme l’équipe universitaire de la décennie, en remportant tous les championnats de l’Ontario Intercollegiate Athletic Association des saisons 1963–64 à 1970–71.

taires des Voyageurs soulèvent eux aussi la controverse. L’écusson – où figure un voyageur d’antan, barbu et coiffé d’une tuque – est dévoilé à titre de symbole officiel de l’athlétisme à la Laurentienne au banquet annuel de 1965 devant un public peu réceptif. Néanmoins, au printemps de 1965, le Sudbury Star peut rapporter que les jeunes universitaires de la Laurentienne sont maintenant fiers de leur nom et que la plupart ont fini par se dire que les blazers dorés si voyants ont au moins le mérite d’être remarquables. Mais l’écusson du « héros hirsute » mettra plus de temps à devenir généralement apprécié. En avril 1965, le nouvel édifice de l’éducation physique – auquel on donnerait plus tard le nom de Ben Avery – ouvre officiellement ses portes. Malgré l’accueil mitigé qu’on lui a fait quelques semaines plus tôt, l’écusson controversé des Voyageurs y figure de façon voyante, car il est peint en plein milieu du plancher du nouveau gymnase20. Les travaux se poursuivent toujours sur les champs de jeu et les courts de tennis, qui entreront en service l’année suivante. En raison des contraintes financières, tout l’éventail des équipements sportifs prévus, y inclus la piste extérieure et l’annexe pour la piscine olympique, ne sera complété qu’en 197421. Maurice Régimbal reconnaît l’importance des sports pour animer l’esprit collégial au sein de l’université naissante et pour nourrir de bonnes relations avec la communauté. En novembre 1963, il organise le premier « pep rally » (manifestation d’esprit scolaire) de la Laurentienne, qui a lieu avant un match de l’équipe de hockey universitaire à l’aréna de Sudbury et qui profite de l’enthousiasme d’une fanfare et une équipe de meneuses de cris qu’on vient tout juste de former. À part les meneuses de cris, qui assistent à toutes les parties que disputent à Sudbury les équipes de hockey et de basketball et qui souvent s’occupent de décorer la salle

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des étudiants parcourent le “bowling alley”.  |  Lors du déménagement au nouveau campus du chemin du lac Ramsey en 1964, les étudiants ont vite fait de donner au rez-de-chaussée de l’édifice des arts le nom familier de bowling alley ; ce long corridor évoque en effet une salle de quilles.

pour les danses à thème sportif, l’intérêt pour les équipes sportives universitaires chez la population étudiante diminue énormément après la première année22. Dans la première décennie du sport à la Laurentienne, c’est son équipe masculine de hockey qui émerge comme son équipe la plus forte, en remportant le championnat de l’Ontario Intercollegiate Athletic Association (OIAA) tous les ans de 1963–1964 à 1970–1971. De même, les équipes masculines de volleyball et de basketball font bientôt connaître la Laurentienne dans les réseaux sportifs provinciaux en remportant le championnat de l’OIAA dans l’une et l’autre discipline en 1962–1963. En 1969–1970, l’équipe de basketball masculin remporte à nouveau le championnat de l’OIAA et l’année suivante, en 1970–1971, l’équipe de volleyball masculin remporte de nouveau le championnat provincial. En comparaison avec le hockey, le volleyball et le basketball, le soccer masculin connaît un début plus lent, jusqu’à l’arrivée de Greg Zorbas comme joueur et entraîneur en 1969. Sous le régime d’entraînement rigoureux de Zorbas, l’équipe remporte son premier championnat de l’OIAA en 1969–1979, puis deux autres les deux années suivantes23. Au début des années 1960, la population étudiante de la Laurentienne attend impatiemment le déménagement de l’université à son nouveau campus au bord du lac Ramsey à l’automne de 1964. Au cours des quatre premières années, les étudiantes et étudiants ont de la difficulté à mettre sur pied l’éventail des activités, des sociétés et des clubs auxquels on s’attend normalement dans le milieu universitaire. En particulier, vu le manque d’une salle réservée aux activités étudiantes ou d’un espace commun, les jeunes universitaires ont tendance à s’isoler dans leurs collèges respectifs et ont peu de contact avec les autres à l’extérieur des classes. Les collèges organisent régulièrement à l’Halloween et à Noël des danses pour les étudiantes et étudiants ainsi que leurs invités, ou encore des soirées thématiques spéciales comme la fête « beatnik » que Huntington organise en décembre 1962 à « la morgue24 ». À compter du printemps de 1961, on organise un banquet formel suivi

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du bal de la remise des diplômes, qui a lieu d’abord à la salle Venetian de l’hôtel Cassio et ensuite dans le Grand Salon après le déménagement au nouveau campus. L’association étudiante se plaint d’être à l’étroit dans ses locaux au centre-ville et a hâte de s’installer au nouveau campus. « L’an prochain », se réjouit le journal Lambda en janvier 1964, « nous deviendrons une université dans tous les sens du mot. Nous nous débarrasserons des oripeaux d’une institution de deuxième rang et éparpillée et nous nous manifesterons physiquement d’une manière pleinement représentative de ce qui est sans doute la plus importante initiative éducative du Nord25 ». Le premier jour des classes, le 8 octobre 1964, les étudiants se disent épatés par leur nouveau campus « ravissant et boueux26 ». L’AGE obtient une suite de locaux au deuxième niveau de l’édifice de la bibliothèque (qui porterait plus tard le nom Parker), suite qui consiste en un hall d’entrée principal, un salon et deux petits bureaux, l’un pour le président et l’autre que se partagent les deux vice-présidents. L’Université compte presque 300 nouvelles inscriptions, son meilleur compte jusque-là, et comme la population étudiante n’est que 556 en tout, les étudiants de première année – coiffés de la petite casquette bleue obligatoire pendant « frosh week », la semaine des novices – sont beaucoup plus nombreux que les autres dans les attroupements qui se forment dans le long corridor de l’édifice des arts, immédiatement baptisé de l’appellation familière « bowling alley » (le boulodrome)27. Les étudiants peuvent maintenant tous manger tous au même endroit, en commandant un repas complet dans la salle à manger formelle du Grand Salon (bien qu’ils n’aient pas le droit de s’asseoir à la « grande table » réservée aux membres de la haute administration et au personnel enseignant), ou une soupe et un sandwich dans la cafétéria au sous-sol. Tous les deux sont gérés par l’entreprise Versafoods, qui fournit des services alimentaires aux universités à travers le Canada. En 1964, on peut y acheter un repas complet – dindon rôti, café et dessert – pour moins d’un dollar. Toutefois, les jeunes universitaires ont l’habitude d’un choix beaucoup plus vaste dans les restaurants du centre-ville et pendant les premières semaines, on se plaint à maintes reprises des prix qu’on trouve trop élevés28. Ces premières protestations donnent le coup d’envoi à un sujet de doléances qui restera longtemps d’actualité, soit la qualité et le prix de l’alimentation sur campus. En 1966, les jeunes universitaires protestent à nouveau, cette fois contre la décision prise par le recteur Mullins de restreindre l’accès à la salle à manger aux personnes qui achètent un repas complet. Deux ans plus tard, on organise un boycottage de la cafétéria pour exiger la hausse de la qualité et la baisse des prix29. En 1967, la planification d’un centre étudiant distinct – qu’on désigne du nom ambitieux du Centre du campus – avance mais ce projet sera retardé et éventuellement écarté, car on optera plutôt pour la construction d’un troisième niveau à l’édifice Parker, projet qui ne se réalisera que dans les années 1990. Une fois bien installés sur le nouveau campus, les étudiants et les étudiantes peuvent y déployer pleinement les traditions de la vie universitaire. Chaque automne, on les accueille à l’université dans le cadre de banquets et de danses. La semaine de la rentrée en octobre comprend un match de hockey ou de football et son point culminant est le couronnement de la reine de la semaine des retrouvailles. On forme des associations et des clubs étudiants pour encourager les interactions 170

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des étudiants de première année lors de l a semaine de l a rentrée , 1962.  |  Durant la semaine de la rentrée, les étudiants de première année doivent obéir à une variété de demandes souvent humiliantes de la part des étudiants des années supérieures, sous peine de passer devant un tribunal fantoche. Notez les petites casquettes distinctives, que tous les étudiants de première année doivent porter.

sociales, comme les clubs d’art dramatique, d’échecs et de curling, de même que des clubs axés sur les programmes d’études comme la société historique, créée en 1965 pour promouvoir la vie étudiante dans ce département. Une activité majeure parmi ces activités étudiantes qu’on instaure est la semaine des novices (« frosh week »), un fondement de la culture universitaire héritée des institutions universitaires pour hommes du 19e siècle comme les universités de Toronto et McGill, à l’époque où les étudiants de première année franchissaient le seuil de l’université en subissant diverses épreuves rituelles d’humiliation. Au cours des années 1960, tous les novices, tant les hommes que les femmes, sont tenus d’afficher leur statut en portant la casquette d’un bleu voyant et des vêtements saugrenus et en se rendant au centre-ville pour polir des chaussures, fournir des cigarettes et de la gomme à mâcher à leurs supérieurs estudiantins et, si la chance ou la docilité leur font défaut, subir un procès au tribunal fantoche. « C’est le moment de l’année où Sudbury ressemble plus à une ville universitaire qu’à une ville minière », commente le Sudbury Star en septembre 196630. Les peines qu’impose le tribunal fantoche peuvent inclure, pour les hommes, être mis en carcan et se faire raser la lettre « L » sur le crane, et pour les femmes, la peine peut comprendre un shampooing indélicat à la moutarde. Le point culminant de la semaine est encore un couronnement de concours de beauté, la « Frosh Queen » (reine des novices) lors de la danse des novices qui a généralement lieu à la salle du syndicat Mine, Mill31. Comme dans la plupart des universités, le contrôle du comportement des jeunes universitaires relève surtout des résidences. Il avait été plus difficile d’exercer cette surveillance dans les années où la Laurentienne était au centre-ville, car les étudiantes et étudiants habitaient indépendamment dans des maisons de pension et des résidences privées. La construction de résidences étudiantes sur le nouveau campus permet à l’administration universitaire d’observer de beaucoup plus près les interactions et les comportements des étudiants. Les premières résidences sont établies par les collèges Thorneloe et Huntington en 1964 ; celles de l’Université de Trouver sa voix

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les rédacteurs en chef du journal étudiant lambda .  |  Jusqu’en 1965, le journal étudiant Lambda est une publication bilingue pour les étudiants des deux groupes linguistiques. Par la suite, on commence à publier un journal francophone autonome, Le Lambda ; c’est le précurseur de l’Orignal déchaîné.

Sudbury et du Collège universitaire suivront en 1970. Au début des années 1970, la résidence des célibataires et la résidence des couples mariés s’ajoutent au complexe immobilier. C’est l’Université de Sudbury qui applique les règles les plus strictes en matière de contact entre les hommes et les femmes ; on y nomme aussi une doyenne des femmes pour surveiller le comportement des étudiantes qui habitent la résidence32. À Huntington, on forme un conseil de résidence qui s’occupe de problèmes de conduite étudiante et de la gestion de la résidence. Le droit de visite n’est accordé qu’aux universitaires qui sont en deuxième année ou plus ou qui ont plus de 21 ans et les visites aux chambres sont permises seulement lors des heures de visite affichées et à condition d’avoir signé le registre des visites à l’entrée. Bien que les cas d’entrave aux règlements, comme les incidents répétés de bruit excessif ou l’inobservation des heures de visites, relèvent du comité étudiant de la résidence, c’est au conseil de la résidence qu’il faut renvoyer toute démarche ayant trait à une expulsion33. Les règlements des résidences sont plus sévères pour les femmes que pour les hommes. À Huntington, par exemple, la doyenne de la résidence, Mary Hinde, Ph.D., déclare que les étudiantes ne doivent pas faire plus d’une sortie tard en soirée par semaine. « Est-ce que ce règlement s’applique aux hommes? Non, » répond-elle nonchalamment. « De ce point de vue, les deux résidences sont distinctes34. » Dans toutes les résidences, les rapports sexuels sont strictement interdits. À l’Université de Sudbury, ce règlement vise tout autant les couples mariés, comme le découvrent en 1969 un étudiant et une étudiante quand on leur demande de quitter la résidence après leur mariage, même s’ils ont toujours chacun leur chambre35. Pour l’ensemble des jeunes universitaires à la Laurentienne, les accusations d’inconduite grave sont étudiées par le tribunal disciplinaire universitaire, qui ne comporte aucune représentation étudiante. Comme le pourcentage des francophones décline au cours de cette décennie, l’enjeu du maintien du bilinguisme et du biculturalisme devient une bougie d’allumage de l’activisme étudiant chez les jeunes universitaires francophones. Assez tôt

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dans l’histoire de l’Université, ceux-ci assument un rôle politique de plus en plus marqué au sein de la population étudiante en ce qui concerne les droits des francophones, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du campus. En 1964, des étudiantes et étudiants organisent l’Association des étudiants canadiens-français du Nord-Ontario et réclament, auprès de la Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, des écoles secondaires françaises en Ontario. Dans les années qui suivent, leur activisme au sein de l’Université se présente sous des formes diverses : la protestation contre le fait que les cartes d’étudiant sont en anglais seulement, la campagne pour l’affichage bilingue sur le campus et la création de l’émission « Votre université vous parle » à la télévision locale36. En 1965, à la suite du rapport d’un comité spécial sur le bilinguisme, le Conseil des gouverneurs approuve des recommandations visant à renforcer le bilinguisme à l’Université, y compris la création d’un poste de direction « pour encourager la participation étudiante aux activités qui transcendent les divisions linguistiques et qui favorisent les rapprochements culturels37 ». Cependant, ce poste ne sera jamais créé, faute de fonds. Les tensions engendrées par la question du bilinguisme s’enracinent dans le fondement même de l’université naissante et la méfiance entre francophones et anglophones façonne la culture étudiante à la Laurentienne au cours de ses premières années. « Les agitateurs francophones à la Laurentienne ne comprennent-ils donc pas que leur cause est non seulement désespérée, mais vaine? », écrit un étudiant anglophone en 1962. « Ne comprennent-ils pas que ce sentiment profrancophone exagéré doit s’éteindre à la Laurentienne pour que la Laurentienne puisse exister dans l’unité38[?] » Jusqu’en 1965, le journal étudiant Lambda est bilingue, publiant des articles en anglais ou en français. C’est une solution de compromis qui ni l’un ni l’autre des deux groupes ne trouve convenable. Les anglophones s’objectent à la part disproportionnée du contenu francophone que l’équipe rédactionnelle « profrançaise » favorise, tandis que les francophones protestent contre la dominance croissante de l’anglais dans tous les aspects de la vie universitaire. En 1965, le journal commence à publier deux éditions distinctes, Lambda et Le Lambda. Immédiatement, Le Lambda adopte une position éditoriale critique face à l’administration universitaire et réclame un bilinguisme plus complet à la Laurentienne39. De son côté, en mars 1966, un éditorial de Lambda critique l’activisme étudiant francophone en qualifiant de « fanatisme passionné » la campagne en faveur de l’affichage bilingue sur les portes des toilettes. « Il va falloir un énorme travail extrêmement long et ardu de la part de chaque membre de la section française sans exception pour préserver la langue et la culture françaises à la Laurentienne », conclut cet éditorial pessimiste. « Je dois être honnête. Je crois que la tâche qu’affrontent les francophones du nord de l’Ontario est impossible40. » Jusqu’à la fin des années 1960, les problèmes linguistiques éclipsent toutes les autres préoccupations étudiantes. À part des références à la Révolution tranquille au Québec, le discours politique des francophones sur campus porte sur le problème du bilinguisme interne et manifeste peu d’intérêt soutenu pour des questions politiques extérieures à l’Université, comme le mouvement des droits civils ou la guerre au Vietnam. Il en va de même parmi les anglophones, où seule une petite

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minorité semble partager les grandes préoccupations qui commencent à mobiliser leurs vis-à-vis dans d’autres universités. Après une conférence sur l’apartheid en Afrique du Sud où peu de personnes se sont présentées en janvier 1965, un étudiant écrit dans Lambda que l’étroitesse de vue qui caractérise les rapports entre anglophones et francophones a engendré un groupe d’autruches à la tête enfouie sous le sable, si captivé par les disputes insignifiantes au sujet d’affiches sur les portes des toilettes qu’il ignore les problèmes cruciaux qu’affronte le monde. « L’Université Laurentienne est trop grande pour se laisser réduire à la petitesse de ce problème du bilinguisme », dit l’article. « Il faut qu’on nous inculque une conscience très vive de ce qui existe à l’extérieur de nos frontières étroites41. » Pourtant, la question des droits des francophones peut aussi susciter des sympathies chez les jeunes anglophones qui souhaitent rompre avec les attitudes coloniales britanniques et embrasser un nationalisme canadien plus indépendant. Lors d’une danse qui a lieu à l’hôtel International en novembre 1962, par exemple, un groupe de jeunes francophones et anglophones reste assis alors que l’orchestre joue « God Save the Queen », puis se lève et chante « Ô Canada » ensemble, sans accompagnement de l’orchestre, tandis que les musiciens remballent leurs instruments42. La première question à susciter un fort courant d’appui et à unir toute la population étudiante n’est pas l’apartheid ou la gouvernance universitaire, mais la création d’un espace social plus autonome sur campus, à savoir un pub étudiant. En 1967, l’AGE entreprend une campagne en vue d’établir sur campus un bar à gestion privée à l’intention de la population étudiante, dont le nom serait Nag’s Head. Loin de promouvoir l’alcoolisme chez les universitaires, écrit Lambda, un pub sur campus réduirait la consommation d’alcool en détournant les jeunes des tavernes et des hôtels de Sudbury. Ce plan reçoit l’appui de membres du personnel enseignant et d’entrepreneurs locaux qui créent un comité afin de promouvoir le projet auprès du Conseil des gouverneurs. À l’automne, le président de l’AGE distribue à tout le personnel enseignant une lettre qui leur demande de participer à une manifestation étudiante à l’appui du pub : « Sans aucun doute, la Laurentienne a besoin d’un lieu à ambiance conviviale où les étudiants peuvent fréquenter leurs pairs et où les professeurs et les étudiants peuvent “relaxer, discuter, chanter et se réjouir d’être en bonne compagnie”43 ». En novembre, plus de 700 étudiantes et étudiants se rassemblent au parc Mémorial au centre-ville de Sudbury pour manifester leur appui au Nag’s Head. Le Conseil des gouverneurs donne son accord de principe à l’idée et propose d’abord que le pub soit aménagé dans le nouveau Centre du campus, qui en est alors à l’étape de la planification initiale44. Mais la construction d’un édifice distinct pour un tel centre est retardée et le projet est éventuellement écarté, de sorte que le pub Nag’s Head n’ouvre jamais ses portes. Au lieu d’un pub géré au privé, l’AGE a commencé après 1971 à gérer son propre pub sur campus, le Cul-de-sac, qui plus tard sera rebaptisé le Voyageur. Après les manifestations à l’appui du Nag’s Head, l’AGE se donne un rôle plus ouvertement politique et les étudiantes et étudiants de la Laurentienne, tant francophones qu’anglophones, commencent à rattacher leurs propres préoccupations à celles du mouvement étudiant international qui traverse alors les universités nord-américaines et européennes. Comme d’autres études historiques l’ont docu-

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des étudiants manifestent en faveur du pub nag ’s head, 1967.  |  À l’automne de 1967, 700 étudiants défilent dans les rues du centre-ville pour manifester en faveur de la création d’un pub étudiant qu’on voulait nommer le Nag’s Head. Le projet ne se réalisera pas en raison de délais dans la construction du centre étudiant, mais depuis 1971, la sga gère son propre pub sur campus, originalement appelé le Cul-de-sac, puis le Voyageur et enfin The Pub Down Under.

menté, le mouvement étudiant canadien incitera les groupes activistes de plusieurs campus à défier l’autorité « en lieu et place du parent » de l’administration et à exiger une plus grande représentation étudiante dans la structure administrative de leurs universités. Les activistes étudiants se voient souvent comme des participants des mouvements nationaux ou mondiaux pour le changement social et avec leur insistance sur leur droit d’être entendus dans leurs propres universités vient une conscience grandissante de leur responsabilité de réagir aux injustices de la société45. Durant sa première décennie, la Laurentienne est gérée étroitement par le Conseil des gouverneurs ; la plupart des détails de l’administration quotidienne tombent sous la supervision directe de l’exécutif du Conseil des gouverneurs et du recteur. Cette structure administrative marginalise non seulement le corps étudiant mais le personnel enseignant et les autres paliers de l’administration. À mesure que les étudiants commencent à demander le droit d’être représentés et consultés dans le cadre de la gouvernance universitaire, ils trouvent chez le personnel enseignant des alliés fort utiles dans leur campagne contre le Sénat de l’Université46. En 1968, l’AGE lance la première d’une série de protestations qui, de concert avec le Sénat et l’Association des professeurs de l’Université Laurentienne, aboutiront à une restructuration majeure de la gouvernance universitaire. En mars 1968,

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le Conseil des gouverneurs tente d’apporter des amendements à la Loi constituante de l’Université Laurentienne par le biais d’un projet de loi proposé par un député à l’Assemblée législative ontarienne. Bien que ces amendements traitent de mesures de régie interne, le Conseil n’a pas d’abord consulté le Sénat, le personnel enseignant ou les représentants étudiants. L’AGE organise une protestation contre ce qu’elle appelle « ce genre de processus décisionnel à porte fermée47 ». En particulier, l’association s’oppose au fait qu’on ait proposé de modifier la composition du tribunal disciplinaire sans y ajouter une représentation étudiante. L’AGE organise une manifestation étudiante, prépare un mémoire et envoie une délégation à Toronto pour le présenter à Queen’s Park. Dans ce mémoire bilingue adressé au gouvernement, l’AGE déclare : « Il est certainement regrettable et frustrant que les grands corps universitaires, à savoir l’administration, le personnel enseignant et l’AGELU, soient seulement capables de fonctionner parallèlement et non ensemble et en cohésion pour l’avancement de l’Université48. » Après un débat de deux heures, le comité parlementaire vote de ne pas envoyer le projet de loi à l’étape du rapport et donne l’instruction au Conseil de ne pas le resoumettre sans d’abord mener le processus de consultation approprié. Manifestement agacé par cette action étudiante, le recteur Mullins affirme dans The Thorne, le journal étudiant de Thorneloe, que l’AGE aurait dû présenter ses doléances à l’administration avant de s’adresser à l’Assemblée législative. « L’image de la Laurentienne a souffert de la publicité qui a entouré cette affaire », dit Mullins à The Thorne49. À l’été de 1968, le Conseil accepte avec réticence d’accéder à la demande du Sénat qui exige une enquête sur la gouvernance universitaire et crée le Comité consultatif du recteur sur les structures et procédures consultatives50 ». Ce succès du combat contre les amendements du Conseil en 1968 est représentatif d’une tendance générale à la politisation de la culture étudiante à la Laurentienne, à l’atténuation des différends entre francophones et anglophones et à la radicalisation du mouvement étudiant partout au pays. Période de manifestations de militantisme étudiant en France, en Italie, en Allemagne de l’Ouest et en Tchécoslovaquie, l’hiver de 1968–1969 est aussi une période d’agitation dans les universités partout au Canada51. En novembre 1968, l’occupation de quatre étages de l’édifice de l’administration à l’Université Simon Fraser à Burnaby en ColombieBritannique est rompue par la Gendarmerie royale, qui y pénètre au petit matin et arrête 114 personnes. La controverse gronde aussi à Régina sur le campus de l’Université de la Saskatchewan. Après la publication d’une photographie jugée obscène dans le journal étudiant, Le Carillon, l’administration tente de censurer le journal. Lors d’un grand rassemblement en janvier 1969, les jeunes universitaires de Regina décident par vote de censurer le Conseil des gouverneurs et, en février, un groupe fait irruption dans une réunion du Conseil et harcèle les gouverneurs qui veulent quitter les lieux. En janvier, à l’Université de Moncton au Nouveau-Brunswick, la résurgence du nationalisme acadien amène les étudiantes et étudiants francophones à boycotter leurs classes et à occuper un édifice de l’université. Toujours en janvier, l’occupation étudiante du club du personnel enseignant et du centre des ordinateurs de l’Université Sir George Williams à Montréal dure environ deux semaines. Irrités par le temps que prend le Conseil des gouverneurs pour donner

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suite à une accusation de racisme portée contre un membre du personnel enseignant, les jeunes universitaires finissent par vandaliser la cafétéria et incendier le centre des ordinateurs, ce qui occasionne des dégâts d’environ 2  millions de dollars52. Tout au long de ce même hiver, Lambda et Le Lambda rendent compte avidement de ces événements tumultueux et d’autres53. Les chefs de file étudiants de la Laurentienne adoptent le discours caractéristique du mouvement étudiant partout sur le continent, qui incite la jeunesse à la conscience de soi et à lier les aspirations personnelles aux objectifs plus généraux du changement social54. « Cette année, c’est l’année du pouvoir étudiant », annonce l’éditorial de Lambda dans son édition de septembre 1968. « Les outils qu’il faut pour améliorer la Laurentienne sont à notre portée. Maintenant, c’est à nous, les étudiants, les professeurs et l’administration, de prendre ces outils en main et de créer la communauté universitaire idéale. » Dans cette même édition, l’AGE encourage la communauté étudiante à agir pour produire des réformes. En rappelant le succès remporté à Queen’s Park en mars, le président de l’AGE , Étienne St-Aubin, prévoit que l’association étudiante aura une orientation politique nouvelle : « Nous tentons de créer une AGE dynamique, volontaire, démocratique et positive », écrit-il. « L’époque où l’AGE passait pour un département parmi d’autres dans cette université, une simple agence de services étudiants sans vrai pouvoir politique, tire à sa fin, du moins on l’espère55. » En octobre, l’AGE envoie deux délégués au congrès de l’Union canadienne des étudiants à Guelph. Dans une entrevue accordée au Sudbury Star, St-Aubin souligne que le mouvement étudiant s’engage à apporter des réformes à l’Université, mais en n’employant que des moyens non violents. « Le pouvoir étudiant est le pouvoir humain56 », rassure-t-il. En ce même automne, l’AGE envoie aussi au personnel enseignant une lettre qui l’invite à communiquer avec les étudiants ouvertement et d’égal à égal. On lit dans cette lettre : « [P]eut-être que nous sommes assez naïfs ou optimistes pour penser que les choses peuvent changer en sachant fort bien que les choses doivent changer57. » L’air du temps cet hiver-là se fait bien sentir dans ce titre plus ou moins modeste à la une de son numéro de novembre : « Cette université appartient à l’étudiant! C’est cool. Mais n’inquiétez pas Mullins. Il n’a pas les tripes pour le prendre58. » Bien qu’ils collaborent avec leurs collègues anglophones, pour plusieurs étudiants francophones, l’enjeu de la gouvernance universitaire est indissociable du problème de la survie de la culture française à la Laurentienne, qui demeure leur préoccupation centrale. Alors qu’un mouvement étudiant aux assises plus larges émerge au cours de l’hiver, les francophones s’efforcent d’orienter le nouvel activisme de l’AGE vers la cause des droits des Franco-Ontariens. En octobre 1968, un groupe francophone présente au Conseil des gouverneurs un mémoire qui assène une critique cinglante au sujet de l’état actuel du bilinguisme et exige des mesures immédiates pour augmenter les inscriptions francophones et assurer que l’on continuera d’utiliser la langue française dans l’administration universitaire59. Critiqué par certains étudiants anglophones, ce mémoire a néanmoins l’appui des rédacteurs en chef des deux journaux, tant Lambda que Le Lambda, et le prési-

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dent de l’AGE lance un appel personnel à l’unité en cette matière. « La question du bilinguisme à l’Université Laurentienne soulève de profondes émotions et réactions », écrit St-Aubin dans Lambda en novembre. « Ces émotions entraînent généralement des actions teintées de haine et d’intolérance, principalement en raison de la haine et de l’intolérance que plusieurs personnes ont reçues en héritage60. » Quelques jours plus tard, le conseil de l’AGE adopte une résolution qui accorde au mémoire son appui de principe pour « assurer la survie du bilinguisme à l’Université Laurentienne61 ». La communauté étudiante manifeste une fois de plus sa nouvelle force politique en décembre 1968. À la suite de près d’un an de lobbying, l’AGE apprend que six sièges au Sénat, ainsi que deux sièges au comité du bilinguisme, seraient attribués à la représentation étudiante62. À la fin de l’année universitaire, les étudiants de la Laurentienne semblent bien avoir obtenu une voix au chapitre de la gouvernance universitaire sans avoir connu les troubles qui ont marqué les mouvements étudiants à Moncton, à Regina ou à Simon Fraser. « La réforme devrait et peut découler de discussions civilisées et de communications améliorées », dit un étudiant à Lambda. « Si les réformes comme celles que demande l’AGE dans son mémoire au comité consultatif du recteur sont mises en place, alors la Laurentienne pourra se vanter, et hautement, d’avoir réussi sa “révolution tranquille”63. » Cette attitude optimiste n’allait pas régner longtemps. Encouragés par leurs réalisations de l’hiver précédent, les jeunes universitaires de la Laurentienne sous-estiment la résilience de la structure administrative en place. Face aux demandes de changement, la principale réaction du Conseil des gouverneurs est de maintenir le statu quo. À l’hiver de 1969–1970, l’association étudiante confronte l’administration une fois de plus et l’activisme à la Laurentienne se radicalise. Le premier incident a lieu en octobre 1969 lorsque l’association étudiante et le personnel enseignant font front commun pour critiquer un mémoire préparé par le recteur Stanley Mullins et soumis au Comité provincial des affaires universitaires. Alléguant que Mullins a préparé son mémoire sans consulter les chefs de département, le personnel enseignant ou les étudiants, l’AGE organise une « journée d’étude et de sensibilisation » le lundi 20  octobre pour discuter des problèmes de l’Université. Cette séance attire une immense foule de 1 200 jeunes universitaires, donc l’assemblée doit se déplacer d’une salle de conférences à la cafétéria. Mullins ne se présente pas à la journée d’étude, donc après quelques heures passées à l’attendre, environ 200 jeunes s’enfilent dans l’escalier, parcourent les dix étages jusqu’au bureau du recteur et lui scandent impérieusement l’appel de se montrer. Les incidents de ce que Lambda allait baptiser « le lundi du réveil » prennent fin seulement après que Mullins émerge de son bureau et consent à répondre aux nombreuses questions que lui adressent tant des jeunes universitaires que des membres du personnel enseignant64. La semaine suivante, une autre foule nombreuse se rassemble, cette fois pour confronter les gouverneurs au sujet de la représentation étudiante à leur Conseil. Le comité consultatif du recteur, nommé l’année précédente pour étudier la question de la gouvernance universitaire, avait recommandé que sept membres sans droit de vote soient ajoutés au Conseil des gouverneurs, y inclus deux membres élus par

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l’AGE et un membre élu par l’Association générale des étudiants à temps partiel. L’exécutif du Conseil avait rejeté cette proposition et proposé plutôt d’accueillir au Conseil seulement quatre nouveaux membres – y inclus un représentant de l’AGE . Donc, le 31 octobre, lors d’une réunion plénière du Conseil, environ 250 jeunes occupent de nouveau le hall près de la salle du conseil et perturbent la réunion par leurs slogans et leur bruit. Le président de l’AGE s’adresse à la foule en disant : « Nous devons dire clairement au Conseil des gouverneurs que nous voulons une université démocratique. Nous voulons être entendus à tous les niveaux65. » Tard dans la journée, après que la foule a diminué, la séance du Conseil est levée et son président annonce que le Conseil a approuvé la proposition originale de nommer sept nouveaux membres observateurs sans droit de vote, y inclus trois représentants étudiants66. Le point culminant du radicalisme étudiant à la Laurentienne a lieu en avril 1970 lorsque les étudiants occupent pendant dix jours le Grand Salon et que le Sénat, qui voit leurs demandes d’un bon œil, suspend effectivement le fonctionnement de l’Université. Comme Matt Bray en discute dans un chapitre précédent, au cours de l’hiver de 1969–1970, un groupe de professeurs et d’étudiants au Sénat entreprend de s’opposer systématiquement au recteur sur un certain nombre de questions et, en janvier, lance une campagne pour obliger Mullins à démissionner en faisant circuler une résolution de défiance sur le campus67. L’exécutif du Conseil se dresse fermement contre les pressions croissantes qui s’exercent pour écarter Mullins et, à sa réunion du 18 mars, adopte deux résolutions qui soulèvent l’indignation du Sénat : la première rejette un appel du Sénat qui ferait ajouter des professeurs et des étudiants au comité des finances et la seconde rejette la demande du recteur qui souhaite obtenir un congé autorisé68. Le Sénat ne tarde pas à répondre. Lors de sa réunion, le lendemain, il adopte une motion de défiance envers Mullins et l’exécutif en adopte une aussi69. L’AGE suit l’exemple en adoptant sa propre résolution de défiance envers le recteur et le Conseil des gouverneurs. Elle se lit : « Il est convenu que nous remettons maintenant en question leur compétence pour administrer l’Université, puisque leur efficacité fait défaut devant la situation actuelle. Nous n’avons plus confiance dans ce corps administratif et nous espérons maintenant que le département des Affaires universitaires prendra d’autres mesures70. L’AGE a fait suivre cette résolution au gouvernement provincial71. Cette situation tendue explose le 1er avril 1970, lorsque les étudiants tiennent une assemblée de masse à la cafétéria pour protester contre les actions des gouverneurs. L’assemblée ayant voté a l’unanimité de soutenir le Sénat, le rédacteur en chef de Lambda déclare soudainement qu’il en a assez de la bureaucratie et lance l’appel à l’occupation assise du hall devant la cafétéria. Pendant qu’il quitte la salle suivi d’une vingtaine d’étudiants, le président de l’AGE promet son soutien, puis le « sit-in » commence. Le 2 avril, le Sénat prend la mesure extrême d’appuyer formellement l’occupation étudiante de l’édifice et donne aux gouverneurs un ultimatum : si le Conseil n’accepte pas de tenir une réunion conjointe avec le Sénat pour chercher une solution à la situation, le Sénat déclarera une suspension des activités universitaires et toutes les activités d’enseignement seraient annu-

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occupation du grand salon par des étudiants , 1970.  |  En avril 1970, les étudiants manifestent en occupant le hall d’entrée du Grand Salon pendant dix jours.

lées à compter du lendemain. Les jeunes universitaires lancent un appel au soutien à la communauté et les chefs du mouvement étudiant consultent des responsables syndicaux de Sudbury. Le même matin, ils commencent à piqueter devant des entreprises qui appartiennent à des membres du Conseil des gouverneurs et à distribuer des exemplaires de leur exposé de position aux travailleurs à l’entrée des usines de l’Inco. Le soir du 3 avril, le Sénat met sa menace à exécution, déclare un congé d’enseignement et ferme effectivement l’Université72. « Dans une situation qui serait sans précédent dans l’histoire universitaire canadienne », rapporte le Globe and Mail de Toronto, « les étudiants et les professeurs de la Laurentienne sont alliés contre le Conseil et le recteur, Stanley Mullins73. » Le conflit atteint alors une impasse, l’exécutif du Conseil des gouverneurs et le recteur d’un côté, le Sénat, les professeurs et les étudiants de l’autre. Les examens de fin de session sont suspendus, les jeunes traînent leurs sacs de couchage et leurs oreillers jusqu’au hall devant la cafétéria et les activités d’enseignement à l’Université s’arrêtent brusquement. Prenant la parole au nom du mouvement étudiant, l’éditeur de Lambda dit au Globe and Mail que l’occupation continuera jusqu’à ce que le Conseil confirme la démission de Mullins, établisse un comité de recrutement d’un nouveau recteur qui comprend une représentation des étudiants et des professeurs et prenne l’engagement d’apporter des réformes aux structures de la gouvernance universitaire74. Le Conseil bat en retraite et accepte de tenir une réunion conjointe publique avec le Sénat pour discuter de la crise. Après quelques jours de négociations, le Conseil et le Sénat arrivent à une entente et le Sénat met fin au congé d’enseignement le 10 avril. Après dix jours, les jeunes universitaires ramassent leurs coussins et leurs sacs de couchage et mettent fin à leur occupation du hall d’entrée75. Le Conseil vote d’accepter l’offre de démission du recteur Mullins le 1er juillet 1970.

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À la grande différence des occupations qu’ont connues les universités Simon Fraser et Sir George Williams, la police n’intervient pas pendant les dix jours que dure l’occupation à la Laurentienne. Dans la communauté, ce mouvement de protestation étudiante qui rejoint la tradition d’activisme syndical à Sudbury trouve des échos favorables. Des membres des syndicats participent au piquetage devant les entreprises locales qui appartiennent à des membres du Conseil des gouverneurs, la laiterie Copper Cliff Dairies et le restaurant A&W font don de nourriture au groupe qui occupe le hall, et le maire permet que sa voiture serve à la distribution de dépliants76. Les activistes étudiants et le Sénat remportent une victoire importante : Mullins démissionne, le Conseil consent à ajouter une représentation étudiante au comité des finances et à donner aux étudiants, par l’entremise du Sénat, une représentation au comité de recrutement d’un nouveau président77. Lors d’une assemblée d’orientation en septembre de cette même année, le président de l’AGE souhaite fièrement aux nouveaux étudiants de première année la bienvenue à « la Berkeley de Sudbury », en faisant allusion au campus de Berkeley en Californie qui est alors le grand foyer du radicalisme étudiant aux États-Unis78. La crise de la gouvernance à la Laurentienne n’est pas entièrement résorbée cependant, car à l’automne de 1970, l’administration se voit confrontée une dernière fois. Après le succès de l’occupation du printemps, les étudiants de la Laurentienne qui reviennent à l’automne continuent de faire preuve d’unité et de politisation. Les négociations salariales entre l’exécutif du Conseil et le personnel enseignant étant rompues, l’AGE convoque le 23 septembre une assemblée de masse et endosse une motion de censure du Conseil. Le 1er octobre, le Sénat finit par déclarer la situation intolérable et une fois de plus, déclare un congé d’enseignement, ce qui met le frein aux activités universitaires79. Quoique certains professeurs tentent de continuer leurs classes, la majorité des étudiants soutient le Sénat et boycotte les classes. Le 6 octobre, quatre autobus remplis d’universitaires de la Laurentienne se rendent à Queen’s Park, où le président de l’AGE présente au ministre de l’Éducation, William Davis, un mémoire qui expose les problèmes que connaît la Laurentienne et qui demande au gouvernement d’interposer sa médiation80. Après avoir rencontré Davis le 7 octobre, le Sénat adopte à la demande de celuici une résolution mettant fin au congé le 13 octobre, que le procès-verbal décrit comme « une manifestation de notre volonté d’aider à une résolution du problème de l’Université81 ». Davis demande alors à J.G. Hagey, recteur émérite de l’Université de Waterloo, de mener une enquête gouvernementale sur la situation82. Au cours de l’hiver, Hagey fait plusieurs séjours sur campus, rencontre des membres du Conseil, du Sénat et de l’association des professeurs, ainsi que des jeunes universitaires. Dans son rapport, soumis en mars 1971, Hagey appuie le concept de transférer des pouvoirs administratifs du Conseil vers un Sénat qui assurerait la représentation des intérêts du corps professoral et du corps étudiant. Dans son introduction, Hagey souligne le fait que les relations entre les étudiants et les corps administratifs des universités ont changé et que les étudiants demandent et obtiennent le droit d’être entendus quand l’université prépare ses plans et ses politiques83.

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La période de radicalisme à la fin des années 1960 unit temporairement les francophones et anglophones dans une cause qui était devenue prioritaire pour les deux groupes : obtenir que les étudiants aient un rôle politique dans la structure de direction de l’Université. Pendant les premières étapes du mouvement étudiant à la Laurentienne, les francophones assurent un leadership en puisant dans leur tradition d’activisme. Ils se montrent capables de mobiliser les anglophones à l’automne de 1968, quand l’ensemble du conseil de l’AGE endosse le mémoire sur le bilinguisme. Pour les francophones, l’enjeu de la gouvernance universitaire est étroitement relié à leur préoccupation avec la protection de la culture et de la langue françaises au sein d’une majorité anglophone croissante. Quand un mouvement aux assises plus étendues se développe au cours de l’hiver de 1968, les francophones prennent l’initiative et associent le nouveau radicalisme de l’AGE à leur campagne en cours pour les droits des Franco-Ontariens. Dans les décennies qui suivront, l’unité atteinte en ces années de radicalisme ne se maintiendra pas devant les différences profondément ancrées dans la population étudiante. Les étudiants et les étudiantes de la Laurentienne ont vécu l’impact du mouvement étudiant qui a traversé l’Europe et l’Amérique du Nord, mais leur politisation a ultimement servi à intensifier leur propre sens d’appartenance particulière à leur milieu. En 1971, l’annuaire Laurentiana est rebaptisé Slag et est dédié à la promotion de 1971 : « Aux gens dans l’ombre des crassiers, aux gens du Nord, de la Laurentienne et de l’avenir, salut84. »

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l e s é t u di a n t e s e t é t u di a n t s

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Nous savons qui nous sommes : explorer de nouvelles identités, 1972 à 1985 sara burke « Nous savons qui nous sommes… mais eux, qui sont-ils? » (caricature, Lambda, septembre 1970)

Une caricature publiée dans le journal étudiant Lambda en septembre 1970 juxtaposait deux personnages très différents : d’un côté, sous la mention « Us » (Nous), un jeune homme en jean, portant un veston et des perles, cheveux emmêlés et barbe cachant son visage ; de l’autre, sous la mention « Them » (Eux), un homme d’âge moyen, en habit et portant une cravate rayée, et au visage reflétant la frustration et la confusion. Le sous-titre se lit comme suit : « We know who we are… but who are they1? » À cette époque, les étudiants de la Laurentienne émergeant des protestations des années 1960 ne ressemblent guère aux jeunes hommes et jeunes femmes à l’allure soignée qui fréquentaient les cours dix ans auparavant. Nombreux sont les étudiants qui rejettent l’image sobre et conservatrice qu’ils associent à leurs parents ; ils se laissent pousser les cheveux, portent des chemises aux couleurs vives, teintes par nœud, et un jean délavé ; et ils écoutent de la nouvelle musique psychédélique associée à la contre-culture plus permissive. Cette transformation physique, cependant, marque seulement une partie du changement qui distingue la nouvelle génération d’étudiants de celle de ses prédécesseurs. Peutêtre plus significatives sont les perceptions modifiées des étudiants, par rapport à l’administration de l’Université et les uns envers les autres. Dans le passé, les étudiants essayaient de contourner les règlements universitaires tout en acceptant leur caractère essentiel dans le rôle de l’Université « en lieu et place d’un parent ». Vers la fin des années 1960, les étudiants de la Laurentienne avaient commencé à remettre en question la fondation même de ce pouvoir. Le mouvement étudiant qui avait donné naissance aux campagnes réclamant une réforme de la gouvernance universitaire avait affaibli le principe de l’autorité de l’Université « en lieu et place d’un parent » et avait eu un effet corrosif sur les attitudes des étudiants envers les symboles d’autorité2. En 1968, un éditorial dans le journal Lambda s’attaquait furieusement aux règlements régissant les résidences,

nous… et eux .  |  Au début des années 1970, la culture étudiante de la Laurentienne commence à refléter un nouveau courant de pensée qui remet en question le droit de l’administration de régir la conduite des étudiants et prône l’abolition des derniers vestiges du rôle parental de l’Université en ce qui a trait à la conduite et à la discipline étudiantes.

lesquels il dénonçait comme étant particulièrement restrictifs pour les femmes. Selon l’éditorial, « [l]es filles demeurant en résidence paient des frais très élevés pour les chambres, mais on les traite comme des enfants de deux ans. Signez le registre à l’entrée, signez le registre à la sortie – et gare à vous si vous avez le malheur de manquer le couvre-feu, vous vous ferez engueuler et vous perdrez vos permissions de sortie en soirée pour le reste de la semaine. C’est enfantin3! » De nombreux étudiants canadiens ne tolèrent plus ce qu’ils considèrent comme étant des attitudes dépassées concernant le comportement sexuel, et certains commencent à prendre part à la culture jeunesse qui est plus sexuellement permissive, définie par le sexe, les drogues et le rock ‘n’ roll4. Pendant un certain temps, le journal et l’annuaire affichent un contenu ouvertement provocateur en ce qui a trait au langage utilisé, au contenu sexuel et aux références à l’utilisation de drogues, comme si les rédacteurs étudiants tentent délibérément de piquer l’administration au point d’imposer une censure. Cependant, l’administration de la Laurentienne ne semble pas disposée à provoquer la révolte des étudiants et s’abstient de se mêler à la presse étudiante. En 1968, par exemple, le vice-recteur Roland Cloutier défend le Lambda contre les accusations du Conseil des gouverneurs, selon lesquelles le journal imprime du matériel qui porte atteinte à la pudeur, arguant qu’un système d’autocensure donnerait de meilleurs résultats auprès du comité rédactionnel qu’une ingérence ouverte5. La première indication qu’il existait une culture de drogue au sein de la population étudiante à la Laurentienne s’était manifestée à l’hiver de 1967, lorsqu’un article publié dans Le Lambda avait mentionné qu’un groupe d’environ vingt étudiants fumaient régulièrement de la marijuana et, qu’à un moment donné, presque

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la moitié de la population étudiante en avait fait l’essai, la drogue provenant généralement du district de Yorkville à Toronto. Le recteur Mullins avait rassuré les médias que l’usage de drogues de tout genre était moins répandu chez les étudiants à la Laurentienne qu’ailleurs dans d’autres universités, mais il avait néanmoins chargé le doyen des étudiants d’étudier la situation. La GRC avait également lancé une enquête pour examiner les propos du Lambda6. Au cours de la prochaine décennie, la consommation de marijuana est devenue un aspect commun de la culture étudiante à la Laurentienne tout comme aux autres universités partout dans le Nord de l’Amérique. Lors d’une réunion en 1976, le conseil de la SGA discute de la consommation ouverte de la marijuana au pub Voyageurs, s’inquiétant que le pub « fera l’objet d’une fouille policière et qu’il devra ensuite fermer ses portes. » Après de longues discussions sur l’inefficacité de la sécurité étudiante, la SGA recommande que les étudiants aillent fumer de la marijuana à l’extérieur du pub7. Partout au pays, les étudiants universitaires, y compris ceux de la Laurentienne, commencent à s’interroger sur les droits de l’administration de limiter le comportement des étudiants universitaires. Vers la fin des années 1960, le gouvernement met sur pied la Commission sur l’éducation postsecondaire en Ontario, responsable d’évaluer tous les aspects du système universitaire provincial, lequel est en plein essor. La Commission présente son rapport au gouvernement Davis en 1972. Celui-ci comporte une série de recommandations, dont la recommandation 58 proposant l’abolition de tous les vestiges du principe de l’autorité de l’Université « en lieu et place d’un parent8 ». L’administration de la Laurentienne, cependant, continue de vouloir faire respecter les règlements régissant la conduite des étudiants, surtout ceux vivant en résidence. Les étudiants contestent ces règlements, comme ils l’ont fait pour la gouvernance universitaire, et une fois de plus, ils se trouvent des alliés importants au sein du corps professoral siégeant au Sénat. En mars 1972, l’Université de Sudbury entame une poursuite en justice pour expulser trois étudiants de la résidence après avoir trouvé deux hommes prenant un café dans la chambre d’une femme, en après-midi, à 15 h. Les étudiants, refusant de déménager, reçoivent l’appui de la SGA , qui leur promet de payer tous leurs frais juridiques. Des groupes d’étudiants manifestent devant l’Université de Sudbury, portant des enseignes qui disent : « Watch where you drink your coffee » (Faites attention où vous choisissez de prendre le café). Le Sénat tranche fermement en faveur des étudiants, adoptant une proposition qui déplore le recours à une action judiciaire et le manque de procédures internes pour résoudre de tels conflits. Le Sénat en profite pour appuyer la recommandation 58 de la Commission, déclarant impraticable le principe de l’autorité de l’Université « en lieu et place d’un parent », et adopte une autre proposition qui recommande vivement l’abolition du rôle « maternel » joué par les institutions en ce qui a trait à la discipline et à la supervision du comportement des étudiants9. Cette nouvelle politique est raffermie en 1974, quand le comité exécutif indique au Sénat qu’il ne mettra pas sur pied un comité chargé d’examiner les questions de discipline touchant les étudiants étant donné que « la politique actuelle de l’Université […] n’est pas d’agir en tant que parent mais bien de traiter les étudiants

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comme des adultes et, par conséquent, que ceux-ci soient responsables de leurs actions devant la loi10 ». Conformément à la nouvelle politique, les nouvelles résidences pour étudiants célibataires et mariés qui ouvrent à l’automne 1973 ont peu de règles, les étudiants devant assumer la responsabilité de leur comportement et de leurs interactions. Un étudiant de troisième ou quatrième année est désigné pour chaque étage de chaque aile, et sa fonction principale, telle que l’explique le journal Lambda, « est d’être la personne-ressource pour les résidents s’ils ont un problème avec leur appartement11. » On cesse pour de bon d’avoir recours au principe de l’autorité de l’Université « en lieu et place d’un parent » en 1980, quand la Loi sur la location immobilière provinciale donne les mêmes droits aux étudiants vivant en résidence universitaire que ceux accordés aux locataires ordinaires en Ontario12. Une attitude antiautoritaire pousse également les étudiants à réévaluer leur comportement les un envers les autres, et à remettre en question certaines traditions établies au sein de la culture étudiante, qui leur semblent maintenant aptes à mener à l’exploitation ou à l’abus. Il n’est pas surprenant que l’une des premières cibles de cette nouvelle sensibilisation soit les brimades imposées aux étudiants de première année. En septembre 1969, un tribunal fantoche est interrompu lorsqu’un groupe d’étudiants compatissants de deuxième année ou plus, décrits dans Lambda comme étant des hippies aux cheveux longs, vient s’asseoir avec les nouveaux étudiants, chantant à voix haute et refusant de sortir13. L’année suivante, la SGA renonce aux activités traditionnelles de « frosh week », la semaine des novices, interdisant la tenue des tribunaux fantoches et du port des petites casquettes bleues et favorisant un programme d’orientation visant à traiter les étudiants de première année d’égal à égal14. En janvier 1973, la SGA remanie son concours traditionnel de beauté lors du carnaval d’hiver afin de refléter les perspectives changeantes chez les étudiants. Au lieu d’élire une reine du carnaval, on demande aux juges de choisir un couple du carnaval, qui sera évalué « en fonction de leur gentillesse, et de leur capacité à communiquer, à rencontrer les gens et à être sociables. » L’une des questions que l’on pose aux participants est la suivante : « Pensez-vous qu’on devrait traiter les femmes sur le même pied d’égalité que les hommes15? » Les étudiants de la Laurentienne, pour qui les sit-ins, les piquets et les rassemblements populaires des années 1969 et 1970 représentent le summum d’une politisation efficace, entament la nouvelle décennie avec un rôle défini dans la gouvernance de l’Université. Ce rôle se concrétise en novembre 1970, quand le Conseil des gouverneurs nomme un étudiant sénateur comme membre sans pouvoir de vote au comité exécutif, lequel est au cœur de la gouvernance universitaire. Ce ne sera toutefois qu’en 1986 que les étudiants de la Laurentienne obtiendront une représentation à voix active au Conseil16. Cependant, l’activisme politique dans l’ensemble de la population étudiante commence à diminuer au cours des années 1970. En 1971, deux représentants des étudiants auprès du Sénat démissionnent comme étudiants sénateurs, qualifiant de grincheux et indécis les autres sénateurs. L’année suivante, le journal Lambda annonce que l’on a seulement reçu neuf nominations pour les trente-trois postes

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vacants au sein de divers comités universitaires. « Le Sénat, avec son système complexe de comités, est un organisme encombrant et consommateur de temps », déclare le président de la SGA aux nouveaux étudiants en septembre 1974. « Cependant, il s’agit de l’ultime instance décisionnelle à la Laurentienne en tout ce qui a trait aux questions d’ordre académique. Pour le moment, les étudiants n’ont pas de voix17. » Le recteur de l’Université est d’accord. Dans son rapport d’octobre 1975, Edward Monahan constate que la plupart des étudiants manquent d’engagement pour siéger aux comités de la Laurentienne, et que bon nombre de sièges réservés aux étudiants restent vides l’année durant. Selon lui, les anciens étudiants se sont battus pour avoir une représentation à ce niveau, alors que leurs successeurs « abordent leurs études de façon un peu plus sérieuse et manifestent un intérêt moindre pour la gouvernance de l’Université18. » Les historiens ont argué que le mouvement des jeunes des années 1960 n’a que provisoirement masqué les anciennes divisions fondées sur la classe, la race, l’appartenance ethnique et le sexe, l’autorité constituée ayant largement été contestée au cours de la décennie suivante, allant du mouvement nationaliste québécois aux mouvements de défense des droits des femmes et des droits des Autochtones19. Les étudiants à la Laurentienne et ailleurs au cours des années 1970 et 1980 n’ont pas un tempérament moins politique ; ils commencent plutôt à s’identifier plus précisément selon des lignes définies par la langue, l’expérience, la culture, le sexe et l’orientation sexuelle. L’association des étudiants de premier cycle donne lieu à trois associations : la Students’ General Association (SGA) ; l’Association des étudiants à temps partiel de l’Université Laurentienne, formée en 1969 et l’Association des étudiant(e)s francophones (AEF), créée en 1974. En outre, en 1978, les étudiants de deuxième cycle à la Laurentienne fondent l’Association des étudiantes et étudiants aux études supérieures (AÉÉS). Divers groupes d’étudiants commencent également à reconnaître leur statut minoritaire collectif et à former des clubs pour exprimer les besoins que les plus grandes associations ne représentent pas adéquatement ; parmi ces clubs, mentionnons le Women’s Liberation Group (1969), l’International Students’ Organization (1972), le Native Students’ Club (1973) et la communauté d’étudiants homosexuels et d’étudiantes lesbiennes (1977)20. Après que le mouvement étudiant réussit en 1971 à obtenir une représentation au niveau de la gouvernance, les étudiants francophones se tournent à nouveau vers un activisme visant à assurer les droits linguistiques des francophones à l’intérieur et à l’extérieur de l’Université. À l’automne 1972, des étudiants francophones publient Réaction, un journal partiellement financé par la SGA , comme l’est Lambda. Mais l’ajout d’une deuxième publication étudiante officielle impose un fardeau financier assez lourd à la SGA et entraîne des conflits répétés entre les étudiants siégeant aux comités de rédaction21. L’année suivante, les étudiants francophones forment une association distincte de la SGA , soit la Maison des francophones, visant à desservir leurs besoins particuliers à la Laurentienne. À l’automne 1974, les étudiants francophones tiennent un référendum et votent en faveur de créer une association étudiante indépendante. La séparation est officielle. Bien que la SGA continue – en théorie – à être un organisme bilingue représentant l’ensemble des étudiants à la Laurentienne, les étudiants francophones fondent l’Association des étudiant(e)s

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francophones (AEF). Le journal Réaction est publié pour la dernière fois en 1980, mais en 1987, des étudiants francophones relancent leur journal séparé, qu’ils ont rebaptisé l’Orignal déchaîné22. Reprenant les stratégies qui avaient porté fruits lors des protestations de la fin des années 1960, les étudiants francophones lancent une campagne pour renforcer les droits des francophones et pour obtenir une reconnaissance politique distincte de la SGA23. En 1977, le Conseil des gouverneurs reconnaît la séparation des étudiants et crée un autre siège sans pouvoir de vote, pour un représentant de l’AEF. En 1976, la SGA donne à l’A EF l’un de ses six postes d’étudiants au Sénat et, peu après, elle cède un autre poste à un représentant de l’Association des étudiants à temps partiel de l’Université Laurentienne. L’A EF et la SGA forment un comité conjoint pour gérer le pub étudiant et négocient des questions comme le temps accordé à la musique française ou bilingue24. Une fois leur voix distincte reconnue officiellement au sein de la gouvernance universitaire, les étudiants francophones décident de se pencher sur l’amélioration des services offerts à la population étudiante francophone à la Laurentienne. En 1979, en vue de regrouper les services qui sont répartis partout sur le campus, ils demandent à l’administration d’échanger les bureaux actuels de l’A EF et du journal Réaction, ainsi que leur salon et leur vestiaire, contre des locaux au troisième étage de l’édifice des classes. Lorsque cette demande est refusée, des activistes interrompent l’utilisation de l’ascenseur dans l’édifice Parker et occupent pendant trois jours le onzième étage, où se trouvent le salon des gouverneurs, la salle du Sénat et le bureau du recteur25. Les membres de la SGA voient d’un œil critique ce qu’ils perçoivent comme étant des demandes audacieuses de la part de l’A EF et un militantisme désuet. « Tout au plus, le fait d’occuper l’édifice de l’administration nous ramène au bon vieux temps du mouvement des étudiants », déclare le président de la SGA dans Lambda. « Cela s’est bien passé à Woodstock, avec le mouvement pacifiste et avec Jimmy Hendrix. Mais cette époque de notre vie est maintenant révolue26. » Malgré tout, les tactiques de l’A EF s’avèrent efficaces. Le recteur Henry Best s’engage à rencontrer les leaders des étudiants francophones pour discuter d’un aménagement de locaux plus convenable et créer un meilleur point de regroupement des activités francophones sur campus. Il refuse cependant de permettre aux étudiants de poursuivre leur occupation une fois le congé d’études terminé, déclarant que les gens de l’extérieur ne font qu’empirer la situation. Deux semaines plus tard, l’administration, à la suite de négociations avec les étudiants, accède à la demande de ces derniers en leur donnant un local au troisième étage de l’édifice des classes afin de leur permettre de centraliser tous les services en français offerts aux étudiants ainsi que les cours de français à l’intention des étudiants en traduction27. Selon le président de l’A EF, « Il s’agit d’une victoire pour le bilinguisme28 ». Mais le sentiment de victoire est éphémère. Comme le décrit Guy Gaudreau ailleurs dans ce livre, les étudiants francophones deviennent de plus en plus critiques à l’égard de la politique sur le bilinguisme à la Laurentienne et contrariés par le nombre restreint de cours en français. Ils se révoltent en particulier contre le fait que les départements d’éducation physique et de commerce n’offrent aucun

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cours en français, que les facultés des sciences et les écoles professionnelles en offrent très peu et que même les cours en sciences sociales et en humanités offerts en français risquent toujours d’être annulés d’une année à l’autre. En 1980, un groupe de membres du corps professoral, d’étudiants, d’administrateurs et de représentants communautaires francophones forment un comité de travail pour examiner la possibilité d’une université franco-ontarienne, et commence à compiler des données statistiques pour définir le statut des étudiants francophones à la Laurentienne. Leur objectif final – objectif que le gouvernement provincial finira par juger financièrement impossible – est d’établir une université française dans le nord de l’Ontario, celle-ci pouvant être un nouveau complexe séparé ou une université autonome au sein de la Laurentienne. Les étudiants qui dirigent l’A EF appuient entièrement cette campagne, arguant que l’emploi généralisé du français est assombri par l’emploi de l’anglais à la Laurentienne, et que la politique sur le bilinguisme est un échec. L’idée d’une université francophone continue de faire l’objet de discussions au cours de la prochaine décennie, et certains étudiants anglophones s’inquiètent, convaincus qu’une institution francophone distincte viendrait taxer les ressources et affecter les inscriptions à la Laurentienne. En 1991, le conseil de la SGA s’oppose officiellement à l’établissement d’une université française29. Les étudiants autochtones réclament également une identité distincte sur le campus au cours des années 1970. À la suite de la publication du Papier blanc de 1969, où le gouvernement Trudeau annonce son intention d’abroger la Loi sur les Indiens, le mouvement nationaliste autochtone prend de l’ampleur et se concentre sur les droits des Autochtones et les luttes des Premières nations du Canada30. Au cours de la décennie précédente, l’Université avait offert des cours d’extension aux adultes provenant des communautés autochtones avoisinantes, mais n’avait fait aucun effort pour accommoder les étudiants autochtones au sein de la population étudiante générale jusqu’à la création du programme d’études amérindiennes en 197131. Le rapport Hall-Dennis de 1968 sur le système d’éducation en Ontario, qui critiquait sévèrement l’état du système d’éducation des enfants autochtones dirigé par le gouvernement fédéral et recommandait le transfert, aux conseils scolaires locaux, de toutes les écoles fédérales situées sur les réserves autochtones, et ce, avec la participation communautaire, avait eu pour effet d’alimenter l’intérêt pour les études autochtones. Le rapport avait également recommandé que l’on établisse un institut spécial pour les études amérindiennes canadiennes dans au moins une université ontarienne. En réponse à ce rapport, Edward Newbery, ancien président de l’Université Huntington et professeur d’études religieuses à l’Université de Sudbury, lance un séminaire sur la culture des Amérindiens de l’Amérique du Nord qui deviendra l’Institut des études amérindiennes en 197032. Cela débouche en 1971 sur le programme d’études amérindiennes-esquimaudes offert à l’Université de Sudbury qui, quatre ans plus tard, deviendra le département d’études autochtones – le premier en son genre au Canada. En 1970, l’Institut des études amérindiennes lance une étude sur la langue ojibway et embauche six jeunes Autochtones pour qu’ils visitent les communautés

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études amérindiennes   |  Le programme d’études amérindiennes, fondé en 1971, est une des premières initiatives formelles qui reconnaisse la nature triculturelle de la communauté Laurentienne.

des Premières nations et enregistrent sur cassette les entrevues avec les Aînés33. À l’époque, le programme d’études amérindiennes offre des cours à crédit en ojibway, enseignés par Stella Kinoshameg à l’Université de Sudbury pendant l’année universitaire ordinaire et sur l’île Manitouline pendant l’été. En 1973, la Fondation Donner accorde une subvention de 17 000 $ au programme d’études amérindiennes, permettant ainsi aux étudiants autochtones de recevoir une aide financière pour poursuivre une éducation universitaire. Le professeur Newbery, directeur du programme, fait en sorte que la moitié de la subvention soit utilisée pour appuyer des bourses de recherche destinées à ceux qui étudient des langues autochtones. L’année suivante, on octroie un total de 7 000 $ en bourses aux étudiants autochtones qui fréquentent la Laurentienne et mènent des recherches sur les problèmes de la transcription de la langue34. Au début des années 1980, le département offre des cours sur campus et à l’extérieur, y compris des cours pour les hommes et femmes des Premières nations incarcérés dans l’une de quinze prisons provinciales et fédérales. Cela se fait grâce à une subvention supplémentaire de 75 000 $ octroyée au département d’études autochtones par la Fondation Donner, en 1980, en vue d’appuyer son programme éducatif destiné aux Autochtones incarcérés et d’offrir des bourses aux étudiants salariés afin de leur permettre de poursuivre leurs études universitaires. Ce programme vise à améliorer la vie des Autochtones sur campus et à offrir une formation aux leaders de l’avenir en leur offrant des cours axés sur l’histoire, la culture et les préoccupations des Premières nations35. Le Native Students’ Club, premier club étudiant autochtone à la Laurentienne, voit le jour en novembre 1973. Il est composé de huit membres fondateurs. Il vise à « mieux orienter les étudiants autochtones pour leur permettre de s’adapter à la vie à la Laurentienne [et] agir en tant que système de soutien mutuel. » Le club accueille également des membres associés non autochtones qui sont, en général mais pas toujours, des étudiants du programme d’études amérindiennes. Ayant reçu des locaux à l’Université de Sudbury pour les études, les réunions et les acti-

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vités sociales, le club organise des événements comme des parties de patinage et des films portant sur la vie autochtone. Il publie également un journal autochtone, Akwesesne Notes, sur campus. En avril 1975, le club commandite un pow-wow autochtone à la Laurentienne36. Les étudiantes réclament également une identité distincte sur campus. Comme l’explique plus loin Linda Ambrose, l’impact de la deuxième vague du mouvement féministe au Canada se fait considérablement ressentir à la Laurentienne au cours des années 1970 et 1980. Vers la fin des années 1960, Lambda mentionnait sporadiquement certains développements controversés tels que l’arrivée de la pilule de contraception à l’Université de Western mais, en général, ses pages ne faisaient aucune allusion à l’émergence du mouvement féministe37. En octobre 1969, un petit groupe d’étudiantes se rencontre lors de la première réunion portant sur la libération des femmes à la Laurentienne afin d’évaluer « la situation actuelle des femmes. » On y discute de la commercialisation et de la dégradation du corps féminin, de l’inégalité dans le mariage et de la contraception. Il est significatif que les femmes parlent de l’absence de porte-parole, du fait que ce sont les hommes, en fait, qui dominent le mouvement étudiant actuel à la Laurentienne. En analysant la vague récente d’activisme – le sit-in, l’occupation du salon des gouverneurs et le rassemblement populaire de la SGA – les étudiantes constatent que seulement une ou deux femmes ont fait entendre leur voix. « En premier lieu, les femmes se sont vu obligées à accepter d’avoir une attitude inférieure – c’est-à-dire, de penser que leur avis ne vaut pas vraiment la peine d’être exprimé38. » Les étudiantes reconnaissent que leur vie à la Laurentienne est très différente de celle des hommes et, dans les années 1970, l’Université commence lentement à aborder leurs préoccupations. En 1973, elle forme le Comité consultatif du recteur sur le statut de la femme (CCR ) (presidential advisory committee on the status of women [PAC]) et en 1978, l’Université Thorneloe fonde le programme women’s studies. Quatre ans plus tard, l’administration approuve la première politique sur le harcèlement sexuel à la Laurentienne et la SGA endosse la recommandation du CCR d’établir un centre des femmes sur le campus afin de traiter des questions liées au harcèlement. En mars 1984, Lambda publie une édition spéciale en l’honneur de la Journée internationale de la femme, qui comprend des articles portant notamment sur le harcèlement sexuel provenant des professeurs, la contraception, le féminisme, la pornographie et le travail des femmes. La même année, le Centre des femmes ouvre ses portes dans le couloir « rue étudiante » (Student Street) situé au rez-de-chaussée de la résidence pour étudiants célibataires. L’initiative perd de son élan initial une fois que ses partisanes obtiennent leur diplôme. Ce n’est qu’en mai 1994 que le Centre a une présence permanente sur campus, quand il rouvre ses portes dans le nouveau Centre des étudiants situé au troisième étage de l’édifice Parker39. Les étudiants homosexuels et les étudiantes lesbiennes commencent à s’organiser durant les années 1970, mais leurs efforts de sensibilisation des étudiants aux droits des personnes homosexuelles se heurtent à une grande hostilité de la part de la population étudiante générale. Le premier groupe d’étudiants homo-

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ralliement étudiant.

sexuels au Canada avait vu le jour à l’Université de Toronto en 1969, et au début des années 1970, le mouvement des droits des homosexuels au Canada avait tenu ses premières manifestations publiques40. En janvier 1972, Lambda annonce discrètement la tenue d’une conférence animée par la York University Homophile Association intitulée « Sexuality and Human Rights » et invite les personnes intéressées à communiquer avec les organisateurs41. En 1977, lors d’une réunion tenue à la Laurentienne, la Fédération des étudiants de l’Ontario adopte une résolution déclarant son appui au mouvement homosexuel et endossant un programme en treize points proposé par la Coalition pour les droits des lesbiennes et des personnes gaies en Ontario. La résolution se lit comme suit : « Les personnes homosexuelles, comme groupe, ont souffert une grave injustice au sein de notre société et continuent de faire l’objet d’attitudes et de stéréotypes sexuels destructeurs et d’être les victimes de sexisme et d’homophobie. Elles se sont organisées en vue de surmonter l’oppression qu’elles subissent en tant que personnes homosexuelles et la première étape pour atteindre cet objectif repose sur l’obtention de l’égalité des droits de la personne. » Bien que la résolution ait manifestement l’appui d’un groupe d’étudiants de la Laurentienne, le président de la SGA se distancie des débats, indiquant au Sudbury Star que le rapport nuira à la crédibilité de la Fédération des étudiants de l’Ontario, et qu’il n’y a pas, à ce qu’il sache, de « clubs gays » à la Laurentienne42. Le journal Lambda reste pratiquement silencieux sur les questions touchant les personnes homosexuelles tout au long des années 1970, mais adopte une perspective plus critique au début des années 1980 en publiant une série d’articles controversés traitant du féminisme, de la pornographie et des droits des homosexuels. En 1983, après avoir reproduit un article provenant de Montréal et critiquant l’homophobie qui règne à l’Université Bishop, la rédactrice en chef du Lambda voit la

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coll ation des grades , vers 1972.  |  Cette cérémonie de collation des grades a lieu à l’aréna de Sudbury.

nécessité de défendre sa décision de publier du matériel portant sur les droits des homosexuels, en affirmant que : « Comme pour toute autre minorité, qui est mal comprise et fait face à la violence et à la répression, Lambda a la responsabilité de tenir ses lecteurs au courant des développements importants43. » En 1985 et 1986, Lambda risque consciemment de recevoir une réaction brutale d’un « secteur particulier de nos lecteurs » en publiant des éditions qui sont entièrement consacrées à des sujets touchant aux personnes homosexuelles. Un éditorial, appelant les étudiants à confronter l’homophonie, argue que la société doit reconnaître les droits qu’ont les personnes gaies et lesbiennes de se montrer au grand jour, « sans avoir peur de subir des sévices psychologiques, émotionnels ou physiques44. » Au début des années 1990, des membres de la communauté gaie, lesbienne et bisexuelle à la Laurentienne poussent les associations étudiantes et les journaux à reconnaître et à informer les étudiants au sujet de l’homosexualité et à les sensibiliser à l’homophonie. En 1993, l’Association of Gays and Lesbians of Laurentian – qui deviendra Pride à l’UL – lance une chronique régulière dans Lambda, intitulée « Out and About Gay », visant à encourager la discussion ouverte sur le fait d’être homosexuel de nos jours. Cette association compte environ 40 membres l’année suivante. À l’exemple d’autres universités, au printemps de 1995, le Centre de counselling et de ressources de la Laurentienne organise la « Journée du jean » et encourage tous les membres de la communauté universitaire à porter le jean afin de contester la discrimination et de démontrer leur appui envers les personnes gaies, lesbiennes et bisexuelles sur le campus45. Une circulaire intitulée Gay and Lesbian News annonçant une rencontre qui aura lieu en novembre 1995 transmet le même message : « Qui sommes-nous …[?] Frères, sœurs, étudiants, tantes, oncles, camarades de classe, professeurs, amis, voisins, athlètes, non-athlètes!, mères, pères46 ». Les campagnes des étudiants de la Laurentienne visant à créer un milieu plus tolérant se trouvent confrontées à un contexte de restrictions financières crois-

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santes et d’accommodements médiocres sur campus. Au début des années 1970, des inscriptions à la baisse entraînent une insuffisance de revenus et des déficits de fonctionnement47. La baisse se poursuit tout au long de la décennie. Ce n’est qu’au début des années 1980, lorsque la population étudiante à temps plein dépasse les 3 000, que la Laurentienne commence progressivement à se rétablir. Consciente du faible taux de rétention et sachant que de nombreux étudiants du nord optent de poursuivre leurs études à d’autres universités, la SGA insiste à plusieurs reprises pour que l’administration fournisse de meilleures installations aux étudiants. Le manque d’un centre des étudiants, en particulier, lequel avait été promis au début des années 1960, devient un enjeu important. Vers la fin des années 1960, on avait conçu les plans pour un centre sur campus qui hébergerait le pub proposé, Nag’s Head, ainsi que des locaux pour des activités sociales et pour des bureaux pour la SGA et le journal Lambda. Cependant, le projet avait été repoussé puis abandonné complètement dans le plan quinquennal annoncé à l’été de 1970. Au lieu d’accorder un centre séparé aux étudiants, on leur avait promis des locaux provisoires dans la nouvelle section de l’édifice Parker48. Décidée à améliorer les services aux étudiants, la SGA déploie d’intenses efforts de lobbying et, en septembre 1971, on lui cède une ancienne cafétéria, le Café Robot, située au deuxième étage. Deux ou trois soirs par semaine, le Café Robot loge un pub provisoire, le Cul-de-Sac (qui sera rebaptisé Le Voyageur) et le jour, les étudiants s’en servent comme salon, coin-repas, salle de cartes et salle d’étude. La SGA ouvre, en septembre également, un magasin sur campus, La Boutede, situé lui aussi au deuxième étage de l’édifice Parker, où l’on vend des articles de confiserie, des disques et des vêtements portant l’emblème du campus49. Au début, La Boutede s’annonce prometteuse sur le plan financier, affichant un profit net de 4 300 $ après ses trois premiers mois de fonctionnement, mais le magasin et le pub ont bientôt des difficultés financières, la majorité des revenus couvrant les salaires et coûts de fonctionnement. En 1975, la SGA négocie une licence permanente avec la Régie des alcools de l’Ontario, ce qui assure une meilleure stabilité à l’association et lui permet d’embaucher un gérant et de se déplacer en permanence dans des locaux plus grands situés dans la cafétéria inférieure, à l’étage en dessous du Grand Salon50. À l’automne de 1973, l’ouverture d’un nouveau complexe de résidences pour étudiants célibataires et étudiants mariés donne l’occasion de désigner de l’espace supplémentaire pour les activités sociales et récréatives des étudiants. La « rue étudiante » (Student Street), située au rez-de-chaussée de l’édifice pour étudiants célibataires, contient une épicerie, un magasin de vêtements et un restaurant, et l’administration annonce qu’elle prévoit fournir de l’espace pour des installations récréatives, telles des salles de cartes, et déplacer les bureaux de la SGA et du Lambda de la tour de la bibliothèque au nouvel édifice51. En 1982, la SGA engage ses membres à contribuer aux « Fonds de la Laurentienne ». Il s’agit d’un prélèvement additionnel de 20 $ par année, par étudiant, pour les cinq prochaines années, afin d’aider à financer des bourses pour étudiants ainsi que la construction de l’édifice du centre sur campus. On finit par laisser tomber l’idée d’un édifice séparé, et le

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notre équipe de soccer affronte mcgill .  |  Greg Zorbas arrive à la Laurentienne en 1969 en tant que joueur-entraîneur de l’équipe de soccer masculin. L’équipe s’entraîne rigoureusement, ce qui les mènera à leur premier championnat de l’oia a durant la saison 1969–70. Ils remporteront ce titre de nouveau aux deux saisons suivantes.

centre des étudiants ne verra pas le jour jusqu’à ce que le rajout au troisième étage de l’édifice Parker soit terminé en 199252. L’automne de 1971 marque un point tournant pour les équipes des Voyageurs lorsque la Laurentienne devient membre de l’Association sportive des universités de l’Ontario (ASUO), rejoignant quinze universités ontariennes et québécoises. Dans cette nouvelle ligue, les Voyageurs font face à une plus vive concurrence. Dans l’ancienne Ontario Intercollegiate Athletic Association (OIAA), les équipes de la Laurentienne avaient joué contre des équipes venant d’autres petites universités dans la province, par exemple Waterloo Lutheran (qui deviendra Wilfrid Laurier). Après 1971, les équipes se joignent à un circuit qui compte les universités York, Toronto, Carleton, Ottawa et Queen’s. Dans un article publié par le Sudbury Star en mars 1971, Maurice Régimbal, le directeur du service des sports, avoue qu’il s’inquiète que les équipes de la Laurentienne auront peut-être un rude parcours dans la nouvelle ligue53. Les athlètes de la Laurentienne relèvent le défi, cependant, et les Voyageurs connaissent une histoire extraordinaire au cours des années 1970 et 1980. Les équipes remportent le championnat provincial à maintes reprises : soccer masculin (neuf fois entre 1970 et 1990) ; ski alpin masculin (1971–1972) ; hockey sur gazon féminin (1971–1972) ; basketball féminin (huit fois entre 1974 et 1990, y compris une série de victoires successives sur cinq ans entre 1974 et 1979) ; volleyball masculin (1976–1977) ; ski nordique masculin (sept fois entre 1977 et 1990, y compris une série de victoires successives sur six ans entre 1977 et 1984) ; et le curling

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masculin (1988–1989). En 1971–1972, après avoir décroché la victoire au niveau provincial, l’équipe de soccer masculin remporte le championnat national de l’Union sportive interuniversitaire canadienne (USIC), une première pour l’Université Laurentienne54. Ce championnat national contribue à mieux faire connaître les athlètes de la Laurentienne, à l’intérieur et à l’extérieur de l’Université. En 1972, après avoir reçu très peu de soutien de la part des étudiants pendant la saison régulière et les éliminatoires, l’équipe des Vees remporte la victoire à la finale devant une toute petite foule de spectateurs. À l’époque, on parle d’une hausse des frais de scolarité et de l’endettement des étudiants, mais le compte rendu de la victoire que l’on peut lire dans Lambda évoque une nouvelle sensation de fierté qui caractérise sa couverture des sports en général : « La tentative courageuse de la Laurentienne de sortir victorieuse au Championnat canadien a débouché sur une victoire samedi dernier, les athlètes de la Laurentienne l’emportant 4 à 1 contre les Loyola Warriors de Montréal […] Bien que chaque équipe ait fait preuve d’habileté et de technique, l’équipe numéro un, les Vees, a réussi à déplacer le ballon de façon à se trouver avantagée, ce qui a donné un mouvement fluide et lui a permis de faire de superbes passes à l’offensive55. » Les succès répétés des équipes de la Laurentienne au cours des années 1970 leur ont valu de nombreux partisans parmi leurs pairs. Contrairement au petit nombre de spectateurs qui assistent à leur victoire en 1972, plus de 1 000 personnes viendront encourager l’équipe de soccer masculin lors de leur victoire dans la finale contre Waterloo aux championnats provinciaux de l’A SUO à la saison 1981–198256. Quand l’équipe bat celle de l’Université McGill par la marque de 2 à 1, en marquant son but gagnant dans la dernière minute de la deuxième période supplémentaire pour remporter ainsi la finale d’USIC en 1983–1984, les partisans de la Laurentienne sont présents en grand nombre. « Je n’oublierai jamais la foule de partisans qui se sont rués sur le terrain, ni la neige qui couvrait le sol », se remémorera plusieurs années plus tard Alex McGregor, gérant de l’équipe. « C’était probablement l’équipe la plus courageuse que j’aie jamais vue en termes de travail acharné, de volonté et de l’esprit sportif des Voyageurs57. » Au début des années 1980, la Laurentienne jouit d’une réputation d’excellence dans de nombreux sports, en particulier le basketball féminin, le ski nordique masculin et le soccer masculin. En 1982, Lambda demande à Sandy Knox, coordonnatrice des sports intercollégiaux, d’expliquer comment les équipes de la Laurentienne peuvent concourir à des niveaux si élevés malgré le nombre d’étudiants relativement petit. Selon Knox, comme la Laurentienne n’a pas un large éventail de sports, elle peut se concentrer davantage sur les sports auxquels ses équipes participent. « Nous avons un bon nombre d’entraîneurs de haut calibre et nous déployons beaucoup d’efforts pour recruter des athlètes, particulièrement des athlètes provenant du Nord ontarien58. » Bien que les sports féminins comme le tennis et le badminton existent depuis 1962, ce n’est qu’en 1968 qu’apparaissent les équipes compétitives intercollégiales féminines, lorsque la Laurentienne adhère à l’Ontario-Quebec Women’s Conference of Intercollegiate Athletics (OQWCIA) qui deviendra l’Association sportive intercollégiale des femmes de l’Ontario (ASIFO) en 1971. Enracinés dans les tradi196

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tions du 19e siècle provenant des plus anciennes universités pour hommes comme McGill et Queen’s, les sports intercollégiaux visaient principalement les sports masculins, mettant l’accent sur l’importance de la compétition dans l’éducation physique pour hommes. Vers la fin des années 1960, toutefois, le nouveau mouvement féministe conteste la dominance masculine dans les sports ainsi que dans d’autres volets de la société canadienne59. La nomination de Pat Pickard à titre de directrice du programme de sports pour femmes à l’automne de 1967 est un facteur clé qui donne l’élan aux sports féminins. Pickard croit fermement aux vertus de la culture physique compétitive pour les femmes et insiste auprès de l’Université pour que cette dernière finance un programme intercollégial pour les femmes, introduisant d’abord le volleyball et établissant par la suite ce qui s’avérera l’une des plus fortes composantes du programme de sports de la Laurentienne, à savoir l’équipe de basketball féminin, les « Lady Vees ». De nombreux obstacles se présentent à Pickard, en particulier le fait que l’on accorde généralement aux sports féminins une importance secondaire vis-à-vis des sports masculins. Par exemple, en 1967, elle n’arrive pas à obtenir les fonds nécessaires pour envoyer l’équipe de volleyball féminin à un tournoi à l’Université de Carleton, bien que l’équipe de hockey masculin se soit rendue à Windsor60. Le travail qu’elle accomplit pour les sports féminins reçoit un appui solide pendant la visite d’Abby Hoffman, vedette de l’équipe olympique canadienne pour les épreuves de piste et pelouse, qui donne un discours aux étudiantes et étudiants de la Laurentienne en mars 1972. Selon Hoffman, on n’encourage pas les athlètes féminins à exceller et on leur donne une position subordonnée, les sports féminins recevant les restants des sports masculins61. Au cours des années 1970, Pickard réussit à obtenir des ressources et des installations égales pour le programme de sports féminins et, en 1977, elle est nommée directrice des sports à la Laurentienne, devenant l’une des premières femmes au Canada à occuper un poste de directrice62. Le basketball féminin a suivi une trajectoire remarquable, passant rapidement de sports intra-muros en 1967 pour se classer au premier rang au plan des équipes de basketball féminin dans les compétitions intercollégiales canadiennes. Entre 1974–1975 et 1978–1979, l’équipe remporte le championnat provincial (ASIFO) ainsi que le championnat national de l’Union canadienne féminine du sport interuniversitaire63. Le « Bronze Baby », surnom donné au trophée décerné à la meilleure équipe de basketball féminin au Canada, demeure à Sudbury pendant cinq ans64. En janvier 1977, à la suite d’une compétition de la division Est que la Laurentienne remporte 74 à 14 sur son adversaire l’Université de Toronto, l’entraîneur de l’équipe torontoise se plaint devant les médias que l’équipe des Lady Vees nuit au bien-être de la ligue à cause de sa dominance en Ontario. « Nous sommes d’accord qu’il est plus difficile de jouer contre de bonnes joueuses », répond Pickard. « Mais nous croyons qu’il est difficile, voire impossible, de s’améliorer quand on joue contre des joueuses plus faibles65. » L’année suivante, l’équipe remporte de nouveau le championnat national, et son entraîneur, Norm Vickery, déclare : « Quand on est habitué à gagner, c’est plus difficile de perdre. La fierté entre en jeu parce que les filles essaient plus fort quand elles tirent de l’arrière. Ces filles refusent tout

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l’équipe féminine des voyageurs remporte le championnat national , 1975.  |  Des saisons 1974–75 à 1978–79, l’équipe basketball féminin 1975, les Lady Vees, remporte le championnat provincial (owia a ) et le championnat national (cwiau ). Le Baby Bronze, surnom donné au trophée de la meilleure équipe féminine de basketball au Canada, passe cinq ans à la Laurentienne.

simplement d’accepter une défaite66. » Dans une déclaration faite au Sénat en 1986, l’Université confirme que son engagement envers les sports féminins représente l’un des principes clés du Service des sports interuniversitaires : « Tous les volets du programme de sports interuniversitaires offriront l’équité en matière de possibilités pour les hommes et les femmes67. » Au début des années 1970, on rénove les installations sportives de la Laurentienne pour y ajouter une piscine de dimension olympique et une piste extérieure ayant une surface tout temps, ce qui permet au programme sportif d’acquérir une renommée internationale dans d’autres sports au cours de la décennie suivante. La piscine, la plus grande dans tout le nord de l’Ontario, ouvre ses portes en 1972 dans la nouvelle section du Centre d’éducation physique Ben Avery. Le Club de natation de la Laurentienne est formé grâce à cette installation. L’un des premiers enfants à s’inscrire au club de natation est Alex Baumann, alors âgé de neuf ans. Plus tard, il s’entraînera à la Laurentienne avec l’entraîneur Jeno Tihanyi. En 1984, Baumann rapporte la gloire à la Laurentienne et à la ville de Sudbury quand il décroche deux médailles d’or et établit des records mondiaux dans les épreuves du 200 et du 400 mètres quatre nages lors des Jeux Olympiques de Los Angeles. Après les Jeux Olympiques, Baumann retourne à la Laurentienne pour achever ses études en sciences politiques, tout en continuant de faire partie de l’équipe de natation universitaire68. Pour ce qui est de la piste extérieure, l’Université et la ville de Sudbury collaborent à sa construction, qui s’achève en 1974. La piste a une surface artificielle, à l’épreuve de toutes les intempéries, ainsi que des cercles de lancer réglementaires, ce qui, à l’époque, en fait l’une des meilleures au Canada. À l’été de 1976, cinquante membres de l’équipe olympique de l’Allemagne de l’Est en piste et pelouse se rendent à la Laurentienne pour y effectuer leur entraînement préolympique afin d’éviter la congestion au site olympique de Montréal. Grâce à ces installations, la

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événements sportifs à l’horaire , 1978.  |  Cette affiche de 1978 qui annonce des événements sportifs à venir témoigne de la popularité grandissante du sport universitaire.

Laurentienne a hébergé une large gamme d’événements sportifs, notamment les Jeux panaméricains juniors en 1979, le championnat de piste et pelouse des Jeux panaméricains juniors en 1980, les Jeux canadiens pour les personnes handicapées et les Jeux d’été de l’Ontario en 1983, puis les Deuxièmes Championnats du monde juniors d’athlétisme en 1988. Vers la fin des années 1980, le ski nordique prend de l’ampleur quand on crée le parcours vita des Voyageurs, un réseau de sentiers de ski de fond reliés aux sentiers de l’Office de protection de la nature69. Pendant que les athlètes connaissent des succès malgré les budgets restreints, le coût d’une éducation universitaire commence à toucher un nombre croissant d’étudiants. Au cours des années 1970 et 1980, des étudiants appuient la Fédération des étudiants de l’Ontario dans ses efforts de limiter les augmentations de frais, ou même de les réduire. En octobre 1972, les étudiants de la Laurentienne participent à un référendum de la Fédération des étudiants et votent en faveur d’une grève provinciale pour protester contre les frais de scolarité si le gouvernement refuse de retirer des nouvelles politiques concernant les frais de scolarité et les prêts étudiants. Quand le conseil de la SGA boycotte les frais de janvier, en guise de « mesure politique », le Sénat démontre son appui en renonçant à appliquer le règlement régulier interdisant aux étudiants n’ayant pas payé leurs frais de scolarité pour le deuxième semestre d’assister aux cours. À la demande du conseil de la SGA et du Lambda en janvier 1973 de « refuser de payer vos frais », plus d’un tiers des étudiants participent à la grève provinciale et refusent de payer leurs frais de scolarité. De nombreuses universités ontariennes, dont Western et York, sont sujettes à des sit-ins et des occupations de bureaux. À la Laurentienne, les étudiants activistes tiennent un moratoire d’une journée en ce qui a trait aux cours, prennent le contrôle des ascenseurs et occupent le hall au dixième étage, à l’extérieur du bureau de la trésorerie dans l’édifice Parker70. À la suite de ce premier événement provincial, le boycottage de la Fédération des étudiants de l’Ontario deviendra, pendant plusieurs années, un événement régulier du deuxième semestre. En février 1977, par exemple, la SGA , conjointement avec la Fédération des étudiants de l’Ontario, prend part à un moratoire d’une

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ex amen au gymnase .  |  Écrire un examen final dans le gymnase BenAvery est un souvenir que partagent des milliers d’anciens étudiants de la Laurentienne.

journée, au cours de laquelle les étudiants à l’échelle de la province boycottent les cours et dressent un piquet devant les bureaux de la main-d’œuvre pour protester contre la hausse de 100 $ des frais de scolarité prévue pour l’année suivante. En octobre 1977, un grand rassemblement d’étudiants représentant la SGA , l’Association des étudiants à temps partiel et l’AEF confrontent Harry Parrott, ministre des Collèges et Universités de l’Ontario, au sujet des changements proposés au Régime d’aide financière aux étudiantes et étudiants de l’Ontario, en particulier la hausse de la contribution minimale et le système d’accumulation des intérêts sur les prêts étudiants. En 1978, la majorité des étudiants à la Laurentienne choisissent de se donner une voix au niveau fédéral afin de protéger l’éducation postsecondaire  ; lors d’un référendum de la SGA , ils votent en faveur de se joindre à l’Union nationale des étudiants71. Les manifestations annuelles contre les augmentations des frais de scolarité se poursuivent dans les années 1980, ce qui offre un point d’intérêt commun pour les groupes d’étudiants sur campus, qui sont autrement très différents. En mars 1980, les étudiants francophones et anglophones de la SGA et de l’A EF mettent de côté leurs différends concernant l’espace et la représentation et organisent une occupation conjointe du onzième étage de la tour de la bibliothèque afin de protester contre une augmentation majeure des frais de scolarité. À l’exemple des étudiants francophones à l’Université d’Ottawa, l’AEF se joint officiellement à la Fédération des étudiants de l’Ontario en 198672. Cette approche coopérative utilisée par la SGA et l’A EF pour organiser une manifestation se poursuit au cours des prochaines décennies, à mesure que la hausse des frais de scolarité devient un problème central touchant tous les étudiants.

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Ici, c’est pas Berkeley : les étudiantes et étudiants, de 1985 à nos jours sara burke « Rendons-nous à l’évidence : les années 1960, c’est fini et ici, c’est pas Berkeley. » (Éditorial du Lambda, février 1995)

Après le fractionnement de l’activisme dans les années 1970, les étudiantes et étudiants de la Laurentienne deviennent plus conscients des complexités des enjeux sociaux, plus sensibles aux possibilités de dissension dans le corps étudiant et plus sceptiques face à l’efficacité de l’idéalisme enthousiaste comme moteur du changement social. La population étudiante à plein temps et à temps partiel est grande – plus de 5 000 après 1986 – et de plus en plus diversifiée. En 1986, la rédaction de Lambda déniche avec amusement un vieux numéro de 1968. L’illustration montre un poing dressé, accompagné du slogan : « Cette université appartient aux étudiants. C’est cool. » Le rédacteur en chef de Lambda reproduit cette page et y joint un éditorial mi-nostalgique, mi-condescendant sur l’idéalisme innocent du mouvement étudiant des années 1960. Son commentaire sur les idéalistes de son époque est le suivant : « J’espère qu’un nouvel activisme s’éveillera chez les étudiants de notre génération, un activisme axé davantage sur l’égalité, la justice et la liberté et moins sur le paraître et l’opportunisme1 ». Ces vaillantes paroles déguisent ce qui est en fait le malaise que l’engagement envers une cause politique ou idéologique éveille chez de nombreux jeunes universitaires. La gouvernance universitaire continue de souffrir du manque d’intérêt qu’elle soulève chez la population étudiante et les places prévues pour la représentation étudiante aux comités universitaires restent souvent vacantes2. À compter de la fin des années 1980, les préoccupations des étudiants sont de plus en plus le fardeau de l’endettement, les exigences qui accompagnent le travail rémunéré que plus de jeunes que jamais doivent avoir et le souci de planifier son avenir. En comparaison avec leurs précurseurs, les étudiants de la Laurentienne gravitent plutôt vers des causes humanitaires à envergure plus internationale, y inclus les campagnes d’Amnistie internationale pour les prisonniers de conscience, la fin de l’apartheid en Afrique du Sud, la lutte contre la propagation du sida et le programme de

« l aissez-nous notre bibliothèque », vers 1989.  |  Les étudiants en éducation physique manifestent contre la centralisation de tous les fonds bibliothécaires du campus à la nouvelle bibliothèque J.N. Desmarais, à cause de la distance qui la sépare du gymnase Ben-Avery.

parrainage des réfugiés qu’anime Entraide mondiale universitaire3. Les enjeux du milieu immédiat, cependant, semblent beaucoup plus problématiques et exposent des lignes de faille qui traversent le corps étudiant. Pendant la première grève de l’Association des professeurs de l’Université Laurentienne (APUL) en septembre 1985, l’exécutif de l’AGE prend la décision controversée de soutenir le personnel enseignant, son raisonnement étant que les professeurs mal payés finiraient par s’en aller ailleurs et que la qualité de l’éducation à la Laurentienne en souffrirait4. Peu de temps après que les professeurs obtiennent leur entente collective, le Syndicat des employés de l’Université Laurentienne (SEUL) a recours à la grève à son tour. Pendant cette grève de trente et un jours, le conseil de l’AGE reste indécis, son indécision étant le reflet de ses divisions. Dans un sondage de l’opinion étudiante sur la grève du SEUL en novembre 1985, 25 pour cent des répondants appuient le SEUL , 15 pour cent appuient l’administration et 60  pour cent sont neutres ou indécises. Après un débat acrimonieux, le conseil de l’AGE adopte une résolution qui affirme sa neutralité par rapport à la grève du SEUL . Or de son côté, l’Association des étudiants et étudiantes francophones (AEF) soutient plutôt les demandes des grévistes, à savoir le salaire égal pour un travail égal et un programme équitable d’évaluation des postes de travail5. La deuxième grève de l’A PUL , qui a lieu en septembre 1989, déclenche une réaction plus intense et plus fractionnelle. L’AGE organise une assemblée d’information au Grand Salon à laquelle assistent plus de 1 500 personnes. Après une confrontation houleuse, l’assemblée se dissout lorsque la moitié des étudiants s’en vont confronter les membres de l’APUL à leur piquet de grève, tandis qu’un autre grand groupe se masse devant l’édifice de la bibliothèque avec une pétition adressée au recteur exigeant que la grève prenne fin. Quelques jours plus tard a lieu une deuxième assemblée étudiante pour réclamer une fin à la grève, assemblée à laquelle participent des représentants de l’A EF et de l’AGE et qui est suivie d’une marche étudiante du campus jusqu’au centre-ville de Sudbury6.

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L’augmentation de la population étudiante au milieu des années 1980 mène à la construction, sur campus, des premiers nouveaux édifices depuis le début des années 1970. Le besoin le plus pressant est une nouvelle bibliothèque. La vieille bibliothèque dans l’édifice Parker est tout à fait inadéquate : l’espace y est beaucoup trop restreint pour y conserver la quantité de publications que requièrent les programmes en expansion ; de plus, les collections de l’éducation physique, de l’éducation et des sciences sont éparpillées un peu partout sur le campus. Les collections empiètent sur les espaces réservés aux tables de travail, donc celles-ci sont bondées et bruyantes. Comme l’indique le bibliothécaire en chef Andrzej Mrozewski à Lambda en 1985, il manque à l’édifice Parker des choses aussi nécessaires que des planchers renforcés, un système de surveillance centralisé et un environnement thermorégularisé. La construction d’un nouvel édifice consacré à la bibliothèque débute en 1988 et la bibliothèque J.N. Desmarais ouvre ses portes en février 1990. Une addition à la bibliothèque, la salle de lecture et salle d’ordinateurs Brenda Wallace, bâtie en 2001, fournit à la population étudiante une belle salle où étudier ainsi qu’un laboratoire informatique pour les études et la recherche7. Le deuxième besoin, qui est peut-être tout aussi urgent du point de vue de la population étudiante, est celui du Centre étudiant promis depuis belle lurette. Conçu à l’origine comme une composante du plan quinquennal de construction en 1970, ce projet connaît des délais et des réorientations successives. Quand on entreprend enfin au milieu des années 1980 de planifier sérieusement ce Centre, les associations étudiantes se disent insatisfaites des dimensions plutôt petites qu’on prévoit lui donner. En 1989, les membres de la SGA votent par référendum d’augmenter le prélèvement étudiant et de verser 15 $ de plus par étudiant au fonds de construction afin de permettre l’agrandissement de l’espace projeté. Après l’approbation de plans révisés qui prévoient un espace plus vaste et mieux adapté aux besoins étudiants, le nouveau Centre situé dans une extension du troisième niveau de l’édifice Parker est enfin bâti et ouvre ses portes en février 1992. Des bureaux jusque-là dispersés partout sur le campus déménagent dans le Centre, y compris les quatre associations étudiantes, l’AGE , l’A ETP, l’A EES et l’A EF, la station de radio du campus et les deux journaux étudiants, Lambda et l’Orignal déchaîné. Des locaux sont aussi disponibles pour les clubs, les jeux, les réunions et les activités sociales ainsi qu’un complexe de services étudiants agrandi8. Au cours des vingt années suivantes, l’Université apporte d’autres améliorations aux édifices destinés aux étudiants, soit l’ouverture de la résidence Ouest en 2006 et l’expansion du complexe d’éducation physique Ben Avery en 2009. Tandis que les aménagements à la Laurentienne dans les années 1980 ne s’améliorent que lentement, à l’automne de 1987, quelques étudiants de la Laurentienne se voient offrir la possibilité plus exotique de suivre des cours loin du campus enneigé de Sudbury, soit à Villefranche près de Nice dans le sud de la France9. À l’annonce du projet, les étudiants de la Laurentienne s’interrogent sur cette décision de l’administration qui dépense de l’argent sur une option coûteuse au bénéfice des « jeunes riches », alors qu’on a l’urgent besoin d’une nouvelle bibliothèque et d’un centre étudiant. « Si tout le temps, l’effort et l’argent investis dans Ville-

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caricature d’une agente de sécurité , 1983.  |  Dans les années 1980, la Laurentienne adopte de nouvelles politiques sur le harcèlement sexuel et l’équité en matière d’emploi. L’idée qu’une femme puisse occuper un poste d’agente de sécurité sur campus semble encore radicale et farfelue aux yeux de certains.

franche avaient été investis dans des projets à la Laurentienne, on y verrait peutêtre quelques améliorations », se plaint Lambda en 198710. Lambda et les associations étudiantes continueront de s’opposer au projet de Villefranche jusqu’à sa fin, en disant que le projet draine des ressources du campus de Sudbury et ne profite qu’à une minorité d’étudiants de la Laurentienne. En 1990, par exemple, Lambda commente le projet ainsi : « C’est évident que l’UCF est une université privée à financement public pour étudiants anglophones privilégiés11. » La culture étudiante antiautoritaire des années 1970 et le rejet du rôle de l’université « en lieu et place des parents » dans la plupart des universités canadiennes avaient permis aux jeunes universitaires de s’affranchir des restrictions démodées et d’adopter une approche plus expérimentale face aux drogues, à l’alcool et à la sexualité. Mais au milieu des années 1980, les étudiants de la Laurentienne et d’ailleurs éprouvent certaines des conséquences négatives de cette culture et tant l’administration que les associations étudiantes commencent à chercher une solution mitoyenne, en navigant entre le laissez-faire et la réglementation. Dans un sondage national mené par la Fondation de la recherche sur la toxicomanie à l’automne de 1988, les chercheurs concluent que le quart de l’échantillon de la population universitaire sondée boit excessivement, c’est-à-dire plus de 28 consommations par semaine. À la Laurentienne, le pourcentage de la population qui consomme excessivement est plus élevé que la moyenne (14 pour cent, en comparaison avec 11 pour cent) et les données de la Laurentienne indiquent que la fréquence des problèmes reliés à l’alcool, comme l’ivresse au volant, la gueule de bois et les classes manquées à cause de l’alcool, y est plus élevée12. Une étude portant sur la population étudiante de la Laurentienne dix ans plus tard, à l’automne de 1999, révèle que les habitudes de consommation d’alcool ont peu changé. La majorité des personnes qui répondent au sondage disent prendre douze consom-

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mations ou plus par semaine et 57 pour cent des personnes interrogées rapportent qu’elles ont subi des blessures reliées à la consommation d’alcool13. L’ancienne fonction de doyen des étudiants avait été éliminée au début des années 1970 et ce n’est qu’en 1985 que la Laurentienne nomme son premier coordonnateur des services étudiants, Padraig Blenkinsop, qui répond directement au recteur. Contrairement à son précurseur, Maurice Régimbal, qui avait la responsabilité de surveiller la conduite des étudiants, les principales responsabilités de Blenkinsop sont de promouvoir les clubs et les sociétés, de coordonner les services et de faciliter la communication entre les associations étudiantes de l’Université14. Au fil des années, l’état des six résidences étudiantes – Sudbury, Thorneloe, Huntington, Étudiants mariés, Étudiants célibataires et Collège universitaire – s’est progressivement dégradé. En plus des fenêtres fêlées et des tapis tachés, l’attitude du laissez-faire des années 1970 a installé dans les résidences un mode de vie où le vandalisme, le bruit et les fêtes débridées ne sont pas réprimés et les conseils étudiants des résidences disposent de peu de moyens pour réagir à ces problèmes. Au milieu des années 1980, le Collège universitaire est connu comme la résidence des fêtards et des joueurs de tours, la tradition s’étant installée de se faire des coups entre étages rivaux, par exemple en vandalisant les toilettes (enduire de miel les sièges des cuvettes est un coup classique). « Un des soucis principaux au Collège universitaire est l’image négative qu’elle projette », dit le représentant étudiant du Collège universitaire à Lambda en 1985. « Il semble qu’après que les étudiants y emménagent, ils finissent vraiment par se conformer à l’ambiance de la résidence et la légende se perpétue15. » S’inspirant de l’exemple d’autres universités ontariennes, Blenkinsop tente, en 1986, avec peu de succès évident, de mettre en place le programme CAPE (Campus Alcohol Policies and Education Programme), qui explique aux jeunes les dangers de l’alcool et qui encourage la modération. Recrutant pour ce faire Alex Baumann, athlète olympien et étudiant en science politique, le comité du programme CAPE lance une campagne de sensibilisation qui comprend des ateliers, un concours de boissons non alcoolisées et la distribution de documents auprès des étudiants de première année. En dépit de la participation de l’AGE , de l’A ETP et de l’A EF, les jeunes universitaires de la Laurentienne réagissent négativement à ce programme. « Le plus gros défi, ce sera d’amener les étudiants à lui donner une chance », admet le vice-président de l’AGE à la fin de la première année du programme16. L’initiative évolue et, en 1990, elle se présente comme le comité de la semaine de sensibilisation aux problèmes d’alcool, qui désigne annuellement en octobre une semaine où il présente une série d’activités, comme un souper aux spaghettis dont le but est d’informer les jeunes au sujet des attitudes responsables face à l’alcool. En 1987, Blenkinsop fait une deuxième tentative pour influencer le comportement étudiant. Le conseil de la vie universitaire, qui comprend neuf étudiantes et étudiants et neuf membres du personnel universitaire, est conçu comme un parlement des services étudiants sur campus. Son but est d’établir une série de sous-comités responsables de divers aspects de la vie étudiante comme les locaux, les droits, le logement et les activités ; ils cherchent aussi des solutions et font des recommandations sur une grande variété de questions reliées aux services étu-

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arrêt d ’autobus municipal .  |  L’emplacement de l’Université, loin du centre-ville, oblige les étudiants qui n’habitent pas sur le campus à voyager quotidiennement en voiture ou grâce au transport en commun.

diants. Cependant, une fois les comités établis, Blenkinsop a de la difficulté à les réunir et peu de progrès sont réalisés. On avance d’un pas en 1992 lorsque l’ouverture du nouveau Centre étudiant permet à l’Université de centraliser et d’agrandir les services aux étudiants et qu’à l’étage, on installe le Centre d’orientation et d’information, les Services aux étudiants autochtones, le Bureau des besoins spéciaux, le Bureau d’aide financière et le Bureau des logements hors campus17. Dans le cadre d’un plan de restructuration plus vaste en 1994, l’Université déplace les Services aux étudiants vers le secteur de l’enseignement et nomme un nouveau directeur, John Gonder, qui relève du vice-recteur à l’enseignement au lieu du recteur. La première tâche confiée à Gonder est de mener un sondage auprès de la population étudiante de la Laurentienne et de préparer un rapport qui recommanderait l’orientation future des Services aux étudiants en fonction des besoins de la population étudiante. Présenté en 1995, le rapport Focus on Students émet des recommandations très diverses pour améliorer l’expérience des étudiantes et étudiants, réglementer leurs comportements excessifs et établir des protocoles appropriés dans le but de protéger leurs droits. Après deux ans de discussion entre des membres de l’administration et les associations étudiantes, le Sénat approuve en 1998 une version révisée du Code de conduite de la population étudiante dans les domaines autres que les études et une nouvelle Charte des droits et responsabilités des étudiantes et étudiants. Bien qu’il ne s’agisse pas d’un retour à l’attitude paternaliste de l’autorité « en lieu et place d’un parent », le code est une tentative de réinstaller l’autorité de l’Université et de réduire l’autonomie étudiante. Le code accorde la majorité des voix au sein des organismes disciplinaires aux membres de l’administration plutôt qu’aux étudiants. En vertu de ce code, les personnes

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accusées d’inconduite, comme des infractions reliées à la consommation d’alcool, seraient jugées par un panel composé de deux représentants étudiants et de trois représentants choisis parmi le personnel de l’enseignement, de l’administration et des services de soutien. On prévoit aussi un jury d’audition des appels qui revoit les décisions du panel, mais la représentation étudiante y est minoritaire également18. Les étudiantes et étudiants autochtones sont de plus en plus présents à la Laurentienne. Dans les années 1980, le club des étudiants autochtones se transforme en la Native Studies Student Association puis, en 1994, en l’Association des étudiants autochtones (AEA), afin de répondre aux besoins de l’ensemble des Autochtones qui fréquentent la Laurentienne19. L’association compte en 1985 environ 60 membres et un conseil structuré qui organise des activités sociales et culturelles, comme des conférences portant sur des questions autochtones, l’accueil de pow-wows et de congrès et la tenue de rencontres sociales et de soirées de bingo dans leur local à l’Université de Sudbury. L’A EA assume aussi un rôle politique en faisant la promotion des droits des étudiants autochtones et en exprimant des points de vue distincts de ceux des plus grandes associations autochtones. Pendant la deuxième grève de l’A PUL en 1989, par exemple, l’association diffuse un communiqué de presse qui soulève la possibilité que les Autochtones aux études à la Laurentienne perdent leur aide financière du ministère des Affaires indiennes si la grève devait se prolonger20. Gerry Trudeau, président de l’association des étudiants autochtones et membre étudiant du Sénat en 1987, croit que les Autochtones aux études à la Laurentienne ont besoin d’établir des liens avec d’autres associations étudiantes autochtones en Ontario et ailleurs. Trudeau devient le commissaire national des affaires autochtones de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants et lance une campagne en vue de former une organisation nationale pour unir les associations étudiantes autochtones de tout le Canada. À l’automne de 1990, l’association des étudiants autochtones est l’hôte d’une conférence intitulée « Rebuilding Our Nations » (rebâtir nos nations) à l’Université de Sudbury, qui comprend un forum de discussion politique auquel participent Ovide Mercredi et Elijah Harper, un forum éducatif sur les événements de Kahnawake l’été précédent et diverses séances sur l’autonomie autochtone, le développement économique et les questions sociales21. En 1991, les étudiantes et étudiants autochtones participent à une occupation des bureaux du ministère des Affaires indiennes à Sudbury pour protester contre le plafond que le gouvernement fédéral impose au financement de l’éducation postsecondaire des Autochtones. « L’éducation postsecondaire est un droit des peuples autochtones et un droit établi par traité », explique le président de l’Association des étudiants autochtones à Lambda. « Le plafonnement des fonds est une violation directe des accords entre le gouvernement fédéral et les peuples autochtones22. » À l’automne de 1991, en reconnaissance de l’importance de la présence autochtone dans la composition culturelle de l’Université, on crée le Conseil de l’Université Laurentienne pour la formation des autochtones (CULFA) qui avise le recteur et les cadres supérieurs sur toute question touchant les étudiants autochtones. Le

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foire des carrières.   |  Le long corridor de l’édifice des arts accueille régulièrement des présentoirs et des foires d’information de toutes sortes, qui orientent les étudiants vers des programmes de deuxième cycle ou des possibilités d’emplois.

CULFA comprend des membres ayant droit de vote qui représentent les Premières

nations de l’Ontario ainsi que des membres sans droit de vote de l’association des étudiants autochtones et des membres du personnel enseignant des programmes Natives Studies et Native Human Services23. L’A EA et les Services aux étudiants autochtones parrainent à compter de 1995 une semaine de sensibilisation autochtone qui présente diverses activités tels des films, des ateliers et un pow-wow pour sensibiliser la population non autochtone de l’université aux préoccupations et aux problèmes des Premières Nations. Elijah Harper et Ovide Mercredi reviennent tous les deux à la Laurentienne à quelques reprises : en 1992, Harper donne une allocution lors d’un souper autochtone traditionnel qu’organise l’association des étudiants autochtones et, en 1999, il donne la conférence d’ouverture de la semaine de sensibilisation autochtone, tandis que Mercredi revient en 1997 pour le lancement de la semaine de sensibilisation autochtone, et en 1998 alors qu’il est professeur auxiliaire spécial à l’Université de Sudbury, où il donne quatre conférences publiques sur la politique autochtone. En tenant compte du fait que plusieurs personnes d’ascendance autochtone ont besoin d’être encouragés à se reconnaître comme tels, l’A EA et les Services aux étudiants autochtones commencent à organiser des événements d’orientation spéciaux en septembre pour les nouveaux arrivants et leurs familles24. « Être autochtone, ce n’est pas une affaire d’apparence ou une façon de parler », lit-on dans un article de Lambda. « Nous sommes ici parmi vous et nous essayons de survivre et de réussir tout comme vous25. » Au début des années 1990, l’augmentation des déficits des gouvernements fédéral et provincial entraîne de profondes compressions du financement provincial, ce qui oblige l’Université à augmenter les droits de scolarité, à annuler des programmes et à retarder des projets de construction. Comme le décrit Matt Bray, à l’automne de 1993, le gouvernement provincial introduit le « contrat social », un plan qui vise à réduire le budget en diminuant le financement du secteur public. Au cours des années qui suivent, la Laurentienne connaît ses compressions finan-

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cières les plus importantes de toute son histoire. Vu le gel du financement provincial, on suspend le projet d’une nouvelle résidence étudiante – la résidence Ouest n’ouvrirait pas avant 2007 – et les droits de scolarité augmentent de 35 pour cent en trois ans26. L’augmentation du coût de l’éducation universitaire dans les années 1990 devient à nouveau un enjeu rassembleur et la population étudiante fait front commun dans ses protestations. La majorité de la population étudiante de la Laurentienne étant issue de milieux socio-économiques modestes, elle est particulièrement éprouvée par ce fardeau financier accru. Une étude comparative de la population étudiante en première année dans les universités canadiennes menée à l’automne de 1988 révèle que les étudiantes et étudiants de la Laurentienne viennent de familles moins nanties, dépendent davantage du revenu d’emplois ou de l’aide de l’État pour leur soutien financier et proviennent plus souvent de familles où aucun des parents n’a terminé ses études secondaires27. À la fin des années 1980, l’AGE et l’A EF collaborent régulièrement pour orchestrer la participation de la Laurentienne aux événements provinciaux et nationaux de protestation contre la hausse des droits de scolarité et le sous-financement étatique : la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants organise annuellement en janvier une journée d’action et la Fédération des étudiants de l’Ontario organise en mars une semaine d’action28. Dans un effort pour faire converger les deux populations étudiantes, l’AGE crée un poste de direction des affaires bilingues et commence à parrainer annuellement, en février, une semaine d’action du bilinguisme qui fait la promotion du bilinguisme sur campus en invitant des conférenciers, en présentant des spectacles, des activités sociales et des films en français et en anglais. Lambda renoue aussi avec son ancienne pratique de publier une section française29. Pendant la période sombre du « contrat social » au milieu des années 1990, les associations étudiantes organisent un mouvement de protestation particulièrement soutenu. En mai 1994, le président de l’AGE écrit à Jack Porter, secrétaire du Sénat, en s’opposant à la proposition que le personnel enseignant prenne ses congés des « journées Rae » à la première semaine de janvier 1995, ce qui retarderait le début des classes du deuxième trimestre. Lors de la journée d’action nationale en janvier 1995, l’AGE et l’A EF organisent une grève étudiante qui comprend une marche jusqu’au centre-ville de Sudbury, un piquet et un boycottage des classes, afin d’attirer l’attention sur les effets néfastes des compressions continues du financement et de l’augmentation des droits de scolarité sur l’éducation universitaire30. Selon les médias, la grève étudiante à la Laurentienne, à laquelle participent plus de 600 personnes pendant toute la journée, est la troisième en ampleur dans toute la province, après celles de Toronto et d’Ottawa. En réponse à une critique du Sudbury Star selon lequel la protestation s’est dissipée rapidement, l’éditeur du Lambda défend le niveau de l’activisme étudiant à la Laurentienne par cette boutade : « Rendons-nous à l’évidence : les années 1960, c’est fini et ici, c’est pas Berkeley31. » Les compressions financières des années 1990 ont un effet important sur les sports à la Laurentienne. Le succès des sports interuniversitaires au cours des vingt années précédentes découle de la stratégie de ne pas diluer les ressources

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simul ation de parlement, 2010.  |  Le professeur Rand Dyck et l’étudiant Daniel Charbonneau, du département de science politique, organisateurs de la première simulation de parlement en 1993. Depuis 1998, cet événement annuel se déroule à la Chambre des communes à Ottawa.

en ayant des visées trop larges, donc de financer seulement un nombre restreint d’équipes à succès. Comme Sandy Knox l’expliquait en 1982, cette stratégie permet au programme sportif des Voyageurs à atteindre l’excellence en dépit du fait que la Laurentienne est une université petite et éloignée des grands centres. Les chefs d’équipe comprennent aussi l’importance du soutien des partisans ; l’équipe de basketball féminin et l’équipe de soccer masculin ont des groupes de partisans enthousiastes et loyaux, mais d’autres, comme l’équipe de hockey féminin sur gazon ou l’équipe masculine de course de fond, sont à peu près inconnues. En 1993–1994, les autorités des programmes sportifs doivent composer avec de profondes compressions et prennent la décision difficile de protéger le financement accordé aux équipes reconnues aux échelons nationaux en sacrifiant les sports à moindre succès : le hockey féminin en gymnase et sur gazon et le curling masculin et féminin. On soumet le hockey masculin à une évaluation qui doit déterminer s’il peut subvenir à ses propres besoins financiers32. Le programme de ski alpin avait déjà été supprimé en 1989. Le directeur Peter Ennis avait alors défendu cette décision en disant que ce sport était déjà dans une situation précaire : les athlètes étaient obligés de se passer des services d’un entraîneur et de se rendre aux événements dans leur propre voiture, car une démarche précédente en vue d’obtenir les fonds nécessaires pour élever ce sport au rang d’un sport universitaire pleinement

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l a mascotte des voyageurs

reconnu n’avait pas abouti. Selon Ennis, « la Laurentienne va réexaminer tous ses programmes sportifs au cours des deux prochaines années et si elle avait des fonds supplémentaires, ils iraient soit à ses autres programmes, soit à la création d’une autre équipe féminine33 ». L’Université ayant créé un poste de marketing des sports pour explorer des possibilités de financement de source externe, on compte en 1995 neuf équipes sportives universitaires qui ont des commanditaires communautaires. À compter de l’année 1995–1996, le soccer féminin est ajouté à la liste des sports interuniversitaires. À la fin de cette décennie, le programme d’athlétisme est examiné à nouveau et en 2000, l’Université annonce qu’elle concentrerait ses ressources sur les huit équipes interuniversitaires jugées les plus aptes à obtenir une reconnaissance à l’échelle nationale : basketball masculin et féminin, natation masculine et féminine, soccer masculin et féminin et ski nordique masculin et féminin. On retire les équipes de volleyball masculin, de course de fond masculine et féminine, les équipes masculines et féminines de piste et pelouse et – c’est la décision la plus controversée – l’équipe de hockey masculin. Bien que la décision d’éliminer le hockey déçoive plusieurs partisans des Voyageurs, l’équipe n’a pas réussi à soulever un intérêt suffisant chez la population étudiante et n’arrive pas à concurrencer les Wolves de Sudbury pour fidéliser un public dans la communauté34. Malgré ces compressions, les équipes de la Laurentienne continuent d’être redoutables dans les ligues interuniversitaires ontariennes. Les Voyageurs entrent de pied ferme dans les années 1990 alors que les Lady Vees, l’équipe de basketball féminin, remportent les championnats de l’Association sportive intercollé-

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giale des femmes de l’Ontario (ASIFO) et de l’Union sportive interuniversitaire canadienne (USIC) en 1990–1991, tandis que l’équipe de ski nordique masculin remporte le championnat de l’Association sportive des universités de l’Ontario (ASUO) en 1990–1991 et en 1991–1992. En 1991, on apporte des améliorations au terrain de soccer et de nouveaux gradins permettent d’accueillir en grand nombre les partisans des Voyageurs. L’équipe de soccer continue d’être l’une des plus fortes équipes laurentiennes, en remportant le championnat provincial en 1991–1992 et en 1994–1995. L’équipe des Lady Vees a elle aussi dominé la décennie, en remportant le titre provincial cinq fois, en 1991–1992, 1992–1993, 1994–1995, 1997–1998 et 1999–2000. Le basketball masculin progresse à la fin des années 1990 en prenant le titre provincial en 1997–1998 et encore en 1999–2000. L’équipe de ski nordique féminin se distingue aussi, en remportant le championnat provincial en 1991–1992, 1991–1992, 1994–1995, 1995–1996, 1998–1999 et 2002–200335. Les partisans des Voyageurs, surnommés les « Pot Bangers » (tape-casseroles), assistent en masse aux matchs à domicile, visages peints et casseroles en main pour faire le plus de chahut possible. Quand l’équipe de basketball masculin remporte la coupe Wilson du championnat provincial contre McMaster en mars 2000, un commentateur à la télévision affirme que les partisans de la Laurentienne sont les plus bruyants et les plus enthousiastes de tout le réseau des sports universitaires de l’Ontario36. Comme un partisan l’indique dans une lettre à Lambda, les succès sportifs de la Laurentienne sont tout à fait démesurés en regard de sa taille, de sa situation géographique et de son financement. « L’esprit de la Laurentienne est grandissant, magnifique et fier, dit la lettre, et de plus en plus, on le fait savoir aux autres universités canadiennes par le biais de sa plus dynamique manifestation : la Machine sportive de la Laurentienne37. » Avant la régression financière de la fin de la décennie, les années 2000 sont une période de croissance pour la Laurentienne. En 2003, la double cohorte de jeunes diplômés des écoles secondaires fait grimper le total des inscriptions de 21 pour cent et cette présence accrue se fera sentir pendant encore trois ans. L’augmentation des inscriptions entraîne une expansion des programmes tant au premier cycle qu’au deuxième cycle et de plus, la Laurentienne prend de l’expansion en établissant son programme au Collège Georgian à Barrie et à Orillia en 2001. Tout au contraire des premières années de l’institution, en 2009 les étudiantes de premier cycle sont plus nombreuses que les étudiants. Entre 1986 et 2007, les femmes représentent en moyenne 60 pour cent de l’ensemble des inscriptions au premier cycle et en 2007, le nombre d’étudiantes atteint un sommet de 5 510 inscriptions sur un total de 8 147, donc 67 pour cent de la population étudiante au premier cycle. En comparaison, le pourcentage de francophones diminue constamment après 1986 ; cette année-là, il était de 20 pour cent de la population étudiante, mais il ne représente plus que 17 pour cent en 200738. Les étudiants autochtones cessent d’être une minorité peu visible et sont maintenant reconnus comme l’un des trois groupes principaux dans la composition culturelle de l’Université. En 2007, on estime que le nombre d’Autochtones qui fréquentent la Laurentienne est de 650, ce qui représente environ 8 pour cent de la population étudiante au premier cycle39. Reconnaissance symbolique de cette

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évolution, à l’été de 1998 on hisse le drapeau anishinabek rouge et blanc parmi les drapeaux suspendus au Centre étudiant. Avec les drapeaux du Canada et de l’Ontario, le drapeau anishinabek figure maintenant bien en vue à côté du drapeau franco-ontarien vert et blanc qui est né de l’activisme des étudiants et des professeurs de la Laurentienne40. La population étudiante de la Laurentienne a toujours été diversifiée. Fondée comme une expérimentation du rapprochement des jeunes francophones et anglophones du Nord, au cours des cinquante dernières années, l’Université redéfinit sa composition culturelle de manière à reconnaître l’importance de la présence des jeunes des Premières nations. Pendant la première période du développement de la Laurentienne dans les années 1960, les étudiants se rallient pour se tailler une place dans la hiérarchie universitaire, en adoptant les tactiques activistes du mouvement étudiant afin de réclamer l’amélioration de leurs installations et l’augmentation de leur autonomie. On ne maintiendra pas l’unité atteinte en cette période au cours des décennies suivantes, les années 1970 donnant lieu au fractionnement de l’activisme alors que les étudiantes et étudiants forment de nouvelles communautés selon le sexe, la langue, la culture, l’orientation sexuelle ou l’expérience. La culture antiautoritaire de cette deuxième période affaiblit la conception traditionnelle de l’autorité de l’université « en lieu et place du parent » et la responsabilité de la conduite étudiante repose plutôt sur l’autonomie étudiante. Au milieu des années 1980, les jeunes universitaires de la Laurentienne sont plus sceptiques quant à l’activisme et plus conscients de la dissension ; plusieurs questions exposent des lignes de faille entre les différentes composantes du campus. La culture étudiante plus permissive qui émerge dans les années 1980 amène les étudiantes et étudiants ainsi que l’administration à s’inquiéter que, dans l’ensemble, la qualité de la vie étudiante aurait diminué ; des efforts pour créer un campus plus inclusif et tolérant caractérisent l’histoire récente de l’Université. L’histoire de la Laurentienne fait partie du contexte plus étendu de l’histoire de l’éducation au Canada et de bien des manières, les étudiantes et étudiants de la Laurentienne suivent des tendances semblables à celles qu’on observe dans les autres universités dans la période de l’après-guerre. Devant le défi de la diversité, cependant, l’expérience étudiante de la Laurentienne est unique. La complexité d’une université bilingue, triculturelle et nordique continue de représenter, comme le Sudbury Star l’avait prédit en 1960, l’expérimentation d’un modèle universitaire qui pose un défi de taille.

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e n s e ig n e m e n t e n f r a nç a i s e t Bi l i ngu i s m e

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Les années 1960 à 1971 : un optimisme démenti guy gaudreau

Rédiger l’histoire de l’enseignement en français et du bilinguisme à la Laurentienne en quelques dizaines de pages représente un défi de taille tellement il y aurait à dire. Des milliers d’étudiants franco-ontariens y ont appris une profession, y ont développé leur talent et le goût des études. D’ailleurs, rares sont ceux qui n’ont pas conservé d’excellents souvenirs de leur séjour. Plusieurs diplômés, qui ont poursuivi ailleurs une maîtrise ou un doctorat, ont mentionné que leur formation avait été plus qu’adéquate et qu’ils ne s’étaient jamais sentis défavorisés face à d’autres étudiants provenant des grandes universités. Force est d’admettre que, dans l’ensemble, les professeurs impliqués dans l’enseignement en français ont bien fait leur travail. De plus, si on compare les deux premières décennies à aujourd’hui, d’indéniables pas ont été franchis que ce soit au niveau de l’administration laurentienne, devenue réellement bilingue, ou de l’offre de programmes beaucoup plus variée qu’à l’origine. Les motifs de réjouissance abondent et doivent être reconnus. Ce qui frappe peut-être le plus, dans cette histoire oublieuse de tant de faits, c’est le rôle des individus dans cette évolution. Si le contexte politique extérieur, tant à Ottawa et à Toronto qu’à Québec, influence structurellement la destinée de la Laurentienne, il faut admettre également le rôle des forces internes qui passe par l’arrivée et le départ de nombreux individus : recteurs, administrateurs, professeurs et autres. L’historien, souvent suspect face au rôle du héros dans l’histoire humaine, est forcé d’admettre qu’un recteur, qu’un professeur peut faire une différence et faire accélérer l’histoire ou encore forcer les individus, pourtant dotés de la meilleure volonté, à de douloureux retours en arrière. Si les individus ont pu jouer un rôle considérable, c’est parce que le fonctionnement même de l’université les y invite en offrant comme contrat type aux administrateurs des mandats de cinq ans qui, bien que renouvelables, ne l’ont été, dans les faits, que très rarement. Ainsi l’université enregistre presque annuellement

des arrivées et des départs d’individus à des postes de direction. Cette précarité menace la continuité de l’institution. Il peut arriver facilement que deux administrateurs travaillent bien ensemble mais, dès que celui en position d’autorité quitte, les dossiers stagnent puisque le rapport de confiance et la complicité ne sont plus au rendez-vous. Les cas de ce genre sont nombreux. La personnalité des individus, tout autant que les situations de pouvoir, demeure un élément-clef du fonctionnement d’une université. On peut le déplorer, mais c’est ainsi. Un recteur nouvellement arrivé, comme John Daniel, peut facilement tout bouleverser et marquer l’histoire en la réorientant. Il ne faudra pas s’étonner de tous les conflits racontés dans ces pages ; conflits qui se nourrissent non seulement d’un personnel administratif changeant, mais aussi du fait que l’université est un monde d’idées habité par des spécialistes en la matière, prêts à se battre bec et ongles pour elles. L’université reste, à ce titre, un véritable champ de bataille d’idées et de principes dont la clientèle étudiante et la communauté extérieure sont rarement conscientes. Développer l’esprit critique, nous le pratiquons jour après jour. En outre, un des principes fondamentaux du fonctionnement universitaire demeure la liberté académique, indissociable de la liberté d’opinion. Cette liberté autorise et même favorise la dissidence et la contestation. Dans le monde occidental, l’université demeure sans doute l’institution la plus tolérante face à la dissidence. Et la Laurentienne peut être fière de sa conduite à ce chapitre. Les divergences d’opinion constituent assurément un des moteurs de la dynamique laurentienne. L’évolution tracée à grands traits se déroule en trois périodes qui coïncident avec celles déjà retenues pour d’autres parties de ce livre. Deux points tournants en ressortent, soit le début des années 1970 et le milieu des années 1980. Ils servent de marqueurs à cette histoire racontée dans une perspective critique qui ne ménage personne, pas même l’auteur de ce texte pour qui les gens heureux n’ont pas de belles histoires à raconter. La constitution juridique  Malgré le précédent historique que crée le gouvernement provincial, en 1960, en permettant le financement d’une université pour des programmes en français1, bien malin qui voudrait trouver dans les articles de la loi créant la Laurentienne une définition précise des modalités d’application du bilinguisme et de la place des programmes en français. L’article 4, paragraphe 1, alinéas a et c du texte de loi 151 rédigé en anglais, stipule, en effet : 4(1)(a) to establish and maintain, in either or both of the French and English languages, such faculties, schools, institutes, departments and chairs as determined by the Board […] […] 4(1)(c) to establish a college of the University within the Faculty of Arts and Science to be known as University College, which college shall give instruction in either or both of the French and English languages in such subjects.

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Les législateurs ne se sont pas aventurés sur ce terrain, ce qui a laissé aux gouverneurs et aux sénateurs de la Laurentienne, c’est-à-dire à la majorité, le soin de les définir. Cela va contribuer à faire de l’enseignement en français et du bilinguisme une histoire émaillée de nombreuses péripéties. Un élément du texte de loi doit être cependant souligné : l’offre de programmes est déjà prévue pour être asymétrique, car il n’y a pas d’obligation d’offrir les mêmes en anglais et en français. Une des raisons de cette asymétrie est qu’à cette époque, bien peu de gens estiment que la minorité franco-ontarienne, appelée encore canadienne-française pendant quelques années, a besoin de certains programmes comme la médecine, le droit ou le commerce2. En effet, la question du droit avait justement été soulevée, dès le début, à la réunion du Conseil des gouverneurs du 10 septembre 1960. Pour la grande majorité du conseil – mais non pour un Canadien français comme le juge Alibert Saint-Aubin –, il paraissait clair qu’un programme de droit ne serait jamais offert en français en Ontario. Pourtant, quinze ans plus tard, on enseignait le droit commun à l’Université d’Ottawa! Robert Campeau, membre du Conseil et homme d’affaires qui allait, quelques décennies plus tard, se faire connaître grâce à un court mais fulgurant parcours financier, avait bien tenté d’introduire un amendement, dès septembre 1960, afin de contraindre la nouvelle institution à garantir, à tout le moins, le maintien des cours en français. En vertu de sa proposition, le non-respect de cet engagement devait pouvoir entraîner un recours en justice. Son point de vue, toutefois, n’avait pas recueilli l’assentiment du Conseil qui avait suivi les recommandations de l’avocat embauché par la Laurentienne à l’effet que cela changerait l’entente initiale entre l’Université de Sudbury et l’Université Laurentienne3. Pour les jésuites de l’Université de Sudbury qui adhèrent, comme on l’a vu en première partie de l’ouvrage, à ce projet universitaire bilingue, cela va en quelque sorte de soi, puisqu’ils ont déjà transformé, en 1957, leur vieux Collège du SacréCœur, unilingue français depuis 1916, en l’Université de Sudbury, institution où s’offrent des cours en français mais aussi en anglais depuis 1958. Certes, tous les jésuites de la région n’ont pas accepté de gaieté de cœur cette mutation4 et quelquesuns rejoignent le camp de l’ACFEO provinciale et celui de l’ACFEO de Sudbury qui avaient fait des pressions pour l’établissement d’une université française et non bilingue. Comme bien des minorités, la communauté canadienne-française de l’Ontario est divisée, ce qui facilite la tâche de la majorité pour trouver des alliés partageant son projet d’une université bilingue. Selon Donald Dennie, qui a examiné l’histoire du bilinguisme à la Laurentienne dans un rapport bien documenté d’une trentaine de pages5, il est très éclairant de lire les annuaires de l’université de cette époque. Quoiqu’il y ait vu une certaine ambiguїté dans les intentions, nous retiendrons, pour notre part, l’énoncé de la mission culturelle de l’Université qui se veut une réponse aux partisans déçus d’une université homogène française. L’Université s’est engagée à sauvegarder et à faire épanouir les langues et cultures françaises et anglaises tant en classe qu’ailleurs entre ses murs. Le caractère bilingue de l’Uni-

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TA BL E au 1 1,1  |  L e s effec t i fs ét u di a n ts à l a L au r e n t i e n n e , se l on l e s grou pe s l i ngu ist iqu e s , 1960 –1969 Année universitaire 1960–1961 1961–1962 1962–1963 1963–1964 1964–1965 1965–1966 1966–1967 1967–1968 1968–1969 1969–1970 1970–1971 1971–1972 1972–1973

Francophones Nombre % 95 89 64 85 120 132 174 180 258 215 263 259 235

52 35 24 23 22 15 15 14 17 12 13 13 12

Anglophones Nombre % 88 166 200 276 436 769 956 1 084 1 242 1 558 1 829 1 764 1 623

48 65 76 77 78 85 85 86 83 88 87 87 88

Source : « Presentation to the Committee of University Affairs », novembre 1973, p. 29.

versité témoigne de la clairvoyance et de l’altruisme de tous ceux d’entre nous qui croyons [sic] que l’orientation de notre civilisation tend en notre siècle vers l’unité plutôt que vers l’isolement. L’Université elle-même veut être un foyer où les théories et les techniques de collaboration entre cultures peuvent être mises à l’essai et inculquées à la future élite de notre société canadienne6.

Si les effectifs étudiants lors de l’ouverture de l’Université garantissent néanmoins une égalité entre les deux groupes linguistiques, l’équilibre est aussitôt rompu puisque, au cours de l’année universitaire 1961–1962, les étudiants canadiens-français n’en représentent plus que le tiers. L’année suivante, ils en composent moins du quart, comme l’indique le tableau 11,1. Leur sévère minorisation, qui perdure jusqu’à aujourd’hui, sera sans doute une des composantes les plus stables de l’histoire de la Laurentienne. Cette répartition des effectifs donne une image assez juste, quoique sousestimée, du nombre de cours offerts. En effet, à l’hiver 1966, sur les 132 cours, 99 sont offerts en anglais et 33 en français, soit 25 pour cent. En 1970–1971, cette proportion de cours en français glisse sous la barre des 20 pour cent et s’y maintient. Selon le recteur Monahan, dans un document qu’il rédige en 19767, la hausse totale des effectifs, survenue dans la deuxième moitié des années 1960, et la minorisation croissante du nombre d’étudiants de langue française, s’expliquent notamment par la venue de nouveaux programmes offerts seulement en anglais du côté des écoles professionnelles (soins infirmiers, éducation physique et travail social). L’École de traduction, également nouvelle, ne parvient pas à faire contrepoids à cette arrivée

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le recteur mullins remet un diplôme lors d’une cérémonie en plein air au milieu des années 1960.

de nouveaux étudiants anglophones. Un autre facteur demeure, sans nul doute, l’absence, jusqu’en 1968, d’écoles secondaires françaises et publiques financées par le gouvernement ontarien de sorte que les étudiants franco-ontariens doivent fréquenter des écoles bilingues, ce qui incite un certain nombre d’entre eux à poursuivre leurs études en anglais. Pourtant, selon les attentes initiales, la Laurentienne devait accueillir un pourcentage d’étudiants franco-ontariens similaire au poids démographique qu’ils représentent dans la région, soit au moins le tiers. Le recteur Mullins, dans son discours lors de la collation des grades, en novembre 1969, montre qu’il est certes conscient de cet engagement moral face à la communauté franco-ontarienne et admet son échec à ce chapitre8. Échec dont il doit assumer une partie de la responsabilité en ayant prôné, à l’image de la majorité anglophone du pays, un bilinguisme de façade, pavé de bonnes intentions et dans lequel il suffit d’être sensibilisé à la langue de l’autre. Le souhait qu’il avait formulé, au début de son mandat à l’automne 1963, de faire de la Laurentienne une institution bilingue ne s’est pas matérialisé, bien qu’il ait identifié, à son arrivée, un début de solution, quand il avait mentionné que les étudiants devaient parvenir à suivre non seulement des cours de langue seconde mais des cours dans leur discipline enseignés dans une langue seconde9. Si, au début de son mandat, Mullins pouvait encore compter sur le fait que les étudiants étaient obligés de suivre un cours en langue autre que leur langue maternelle pour l’obtention de leur baccalauréat, cette obligation allait vite disparaître au milieu des années 1960 – avec forcément sa bénédiction tacite –, de sorte qu’on avait pu substituer le français par un autre cours de langue ancienne ou moderne10. Le déséquilibre linguistique qui se creuse dès les premières années ne tarde pas à provoquer des remous et à révéler des problèmes de fonctionnement sur le plan du bilinguisme. C’est ainsi que le seul doyen alors en poste, celui de la faculté des arts et des sciences, G. A. Bourbeau, remet, à l’automne 1963, un bilan très sévère

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andré girouard.  |  Jésuite et professeur de littérature française à la Laurentienne, il s’est originalement joint à l’Université de Sudbury en 1958. Durant les années 1960 et 1970, André Girouard est certainement le leader reconnu de la communauté francophone de l’Université, ce que confirme sa nomination en 1978 à la présidence du Conseil de l’enseignement en français.

des 12 derniers mois de son mandat où il pointe du doigt de nombreux problèmes au niveau du fonctionnement de l’Université, problèmes dont nous avons parlé dans un chapitre précédent. Parmi les questions secondaires qui l’avaient irrité, nous retenons le fait que la Laurentienne autorise la nomination de directeurs de département unilingues anglais. « The appointment of non-bilingual departmental chairmen in Laurentian University has established a precedent which denies to a French speaking professor the right to express his views and to make his requests in the language of his choice11 ». L’ampleur des critiques formulées en termes de structure universitaire amènera même le doyen à démissionner, le 30 juin 1964, privant ainsi les Franco-Ontariens d’une voix forte au sein de la haute administration. À l’automne 1963, les médias sudburois font peu de cas de la question du bilinguisme. L’heure est à l’optimisme et l’attention est alors tournée vers la construction du campus qui bat son plein et on se gargarise des versements de subventions et de dons qui donnent vie au campus sur le bord du lac Ramsey. La cause française devra attendre des jours plus favorables pour être entendue. Pourtant, des signes ne trompent pas. Ainsi Tom Bertrim, un étudiant anglophone déçu des récriminations d’étudiants militants francophones, lance un cri du cœur en décembre 1962 alors qu’il demande au mouvement profrançais de se rallier afin de créer un sentiment d’unité au sein de la cité universitaire. Le titre de son article, publié dans le Lambda du 14 décembre, est fort explicite puisqu’il s’intitule : « The français-anglais split… at Laurentian ». Il faut comprendre qu’au cours des années 1960, certains étudiants militants réclameront le bilinguisme notamment sur les billets d’admission, les cartes d’identité, les affiches sur les portes des toilettes et sur le matériel publicitaire de l’Association étudiante bilingue de la Laurentienne. Cela amène rapidement la tenue d’activités organisées seulement en français.

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Un autre signe apparaît en décembre 1963 : la création de l’Association des étudiants de langue française du nord de l’Ontario, connue sous l’acronyme d’A DELFNO 12. Cette association, dont l’animateur est le jésuite André Girouard, professeur au département de français, maintiendra ses activités pendant quelques années en regroupant des étudiants de la Laurentienne et des écoles secondaires privées et catholiques afin d’augmenter la participation des Canadiens français à l’université. Bien que la formation inadéquate des étudiants canadiens-français provenant d’écoles publiques anglaises ait entre autres amené la Laurentienne, en 1963, à mettre sur pied un programme appelé « Année préliminaire », il faut, selon Girouard, s’organiser pour réclamer des écoles publiques françaises et, par ricochet, produire davantage de diplômés de 13e année. À cette fin, on distribue un questionnaire dans toutes les écoles, on organise une pétition auprès des parents et des étudiants du nord de l’Ontario. Quand la Commission Laurendeau-Dunton sur le bilinguisme et le biculturalisme invite les groupes à soumettre un mémoire, elle s’exécute. Lors de sa troisième conférence annuelle, en décembre 196513, elle invite le vice-recteur Cloutier à prendre la parole, ce qui souligne par le fait même une certaine reconnaissance de l’Association auprès de la Laurentienne. L’ère des comités du bilinguisme Campeau relancera le débat sur le bilinguisme à la Laurentienne, à l’automne 1964, en exigeant un véritable bilinguisme. Et le Sénat, lors de la réunion du 26 novembre 1964, décide de former un comité – le premier d’une longue série – « aux fins d’étudier la portée académique du bilinguisme à l’Université Laurentienne pour ce qui regarde de l’enseignement14 ». Prévu le 30 septembre 1965, le rapport n’est pas encore reçu le 25 février, puisque le comité ne s’est toujours pas réuni, ce qui souligne sans doute une certaine insouciance. C’est peut-être dans ce contexte que le Conseil des gouverneurs reprend la question. James Meakes, gouverneur, de même que propriétaire du Sudbury Star, s’interrogera, à son tour, sur le bilinguisme laurentien, ce qui amène le Conseil à recommander la mise sur pied d’un autre comité chargé de rédiger, dans les six semaines15, un rapport soumis au Comité exécutif du Conseil, « for the better attainment of this goal, particularly in respect of maintaining in the administration of the University an equitable recognition of the two founding races16 ». Ce comité remettra le rapport Meakes, dont on a parlé dans un chapitre précédent et dans lequel on se préoccupe de biculturalisme et pas seulement de bilinguisme, faisant ainsi écho aux travaux de la Commission Laurendeau-Dunton qui publie, cette année-là, un rapport préliminaire largement diffusé dans les médias. Il n’est pas étonnant alors que le rapport Meakes recommande, outre la création d’un vice-rectorat dont le titulaire serait canadien-français et la nomination d’un Canadien français comme doyen, la mise sur pied d’un comité permanent du bilinguisme « chargé d’étudier les incidences académiques du bilinguisme17 ». Mais son mandat ne sera jamais, de l’aveu même du recteur Monahan, clarifié en termes opérationnels18, ce qui laisse croire à plusieurs qu’il s’agit en fait d’une manière de

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laisser stagner les dossiers insolubles et litigieux. Comme le souligne avec ironie Dennie, « l’ère des comités aviseurs sur le bilinguisme » venait de commencer. Ces changements administratifs auront peu d’effet. Le recteur Mullins en fera d’ailleurs écho l’année suivante, lors d’un discours à l’Alliance Canadienne qui tient sa réunion annuelle à la Laurentienne. « President Mullins says bilingualism a failure at Laurentian », titre le Sudbury Star du 24 mai 1966. Quoiqu’il eût fallu forcer les étudiants à suivre des cours de langue et de littérature dans l’autre langue pour instaurer un bilinguisme, il admettra, quelques mois plus tard, qu’un tel bilinguisme obligatoire entraînerait une baisse des inscriptions, rendant cette idée par le fait même impraticable19. Quand l’homme d’affaires de Timmins, Conrad Lavigne, défenseur de la langue et de la culture françaises au sein du Conseil des gouverneurs, est reconduit comme gouverneur en 1966, il profite de l’occasion pour demander des clarifications au ministre de l’Éducation de l’époque, Bill Davis, sur la véritable nature du bilinguisme laurentien. L’Université doit-elle être une institution bilingue complète comme l’aurait affirmé le premier ministre Robarts dans un discours en 1965 ou bien est-ce plutôt une université où, comme le reconnaît le recteur Mullins, les Franco-Ontariens peuvent suivre des cours en français20? La réponse du ministre éclaire beaucoup le sentiment dominant de la majorité anglophone. It was the intention, I believe, to provide for the students whose first language was either French or English to receive instruction in their own language in so far as this was practicable. I believe also that the University had as an objective the maintenance and promotion of both the English and French languages and cultures both inside as well as outside the classrooms. Again, however, I believe the latter objective has to be pursued in the light of practicability, since considerations of availability of staff, financial resources and the like must be taken into account21.

Ce n’est véritablement qu’à compter de 1966 que les coûts du bilinguisme seront progressivement introduits dans les débats, complexifiant encore davantage les enjeux. Mullins y fait allusion en indiquant que le peu d’inscriptions françaises ne compense pas les coûts élevés que le bilinguisme entraîne22. Pour son successeur, Monahan, il ne fait pas de doute que les premières subventions au bilinguisme accordées par le gouvernement provincial, en 1967, constituent un progrès considérable. Mais cette nouvelle enveloppe gouvernementale, fruit d’une mesure largement improvisée, va alimenter le débat pendant des décennies en ajoutant, aux questions non résolues, celle de l’usage approprié et transparent des sommes versées. Laissons le recteur Monahan nous livrer son point de vue à ce sujet. But the Grant was calculated on the concept of incremental costs, a concept that was not accepted at Laurentian as appropriate in the light of its particular circumstances – a small institution undertaking to provide French-language courses and programmes to a Franco-Ontarian community that was seriously disadvantaged economically, socially and culturally as well as educationally. More significantly, there was no clear statement of the

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government’s objectives re bilingualism. Not only there no agreement on the rationale for calculating the size of the Bilingual Grant ; there was no clear statement of bilingual objectives and priorities23.

Les interventions du département de français et un contexte politique favorable Si les forces agissantes en faveur du fait français à la Laurentienne sont, au niveau du Conseil des gouverneurs, Campeau et Lavigne, on peut dire que, du côté des professeurs, ce sont ceux du département de français qui sont alors les plus actifs. Quelques événements, survenus entre 1968 et 1971, illustreront notre propos. À l’automne 1968, alors que l’activisme étudiant atteint un sommet dans le monde occidental et quoique le mouvement étudiant laurentien soit jusqu’alors dirigé par des étudiants francophones, seuls capables d’être bilingues, la section française de l’Association étudiante (SGA) convoque une assemblée, le 25 octobre, et y invite le corps professoral. Cette assemblée fait suite au dépôt d’un dossier par la SGA auprès du Conseil des gouverneurs, la semaine précédente, qui réclamait un véritable bilinguisme. Le Sudbury Star avait fait écho à cette intervention en y consacrant un article : « Students request changes to restore ‘lost bilingualism’ at Laurentian University24 ». Pour donner plus de poids à leur requête et pour élargir leurs appuis, ils ont convoqué cette assemblée dont le procès-verbal, rédigé en français, sera par la suite traduit en anglais et conservé dans cette version25. Son examen atteste la présence de plusieurs professeurs du département qui soumettent et appuient des propositions. Sur les cinq professeurs qu’on peut reconnaître, il y a le jésuite André Girouard, de même que les professeurs Michel Bideau et Léandre Page, tous les trois du département de français26. Quant à la teneur de leurs propositions, elles se résument à réclamer des programmes en français dans les écoles professionnelles, un niveau minimal et « normal » d’inscriptions d’étudiants de langue française correspondant au tiers des inscrits – et non à 14 pour cent –, des secrétaires bilingues et la création d’un poste d’ombudsman, de préférence à un Comité du bilinguisme sans pouvoir. Cette dernière demande restera néanmoins lettre morte. En examinant les considérations soulevées dans leur dossier, on constate d’emblée l’impact du mouvement souverainiste au Québec. En effet, selon le Sudbury Star : « One conclusion reached in the brief is that Laurentian is a decisive factor in either national bilingualism or an independent Quebec27 ». À vrai dire, il ne faut pas s’étonner que la cause québécoise ait eu des répercussions à la Laurentienne et que les étudiants et les professeurs désirent surfer sur cette vague de fond ; tout le Canada et son nouveau premier ministre Trudeau, élu en juin 1968, réagissant, en quelque sorte, aux aspirations indépendantistes québécoises. Par ailleurs, en exigeant des secrétaires bilingues, on réclame l’application de la politique d’embauche adoptée en 1961 qui, de toute évidence, n’est pas mise en vigueur. La réaction des gouverneurs, enregistrée dans le procès-verbal de leur réunion du 29 novembre 1968, montre bien qu’on n’est pas prêts à appliquer cette politique d’embauche et qu’il vaut mieux, pour le moment, se contenter de vœux

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pieux comme la Laurentienne en aura tristement l’habitude : « That all applicants for academic and non-academic positions at Laurentian University should be willing to work in and be sympathetic toward a bilingual environment ». Il faudra attendre quelques années pour voir l’adoption d’une politique d’embauche plus coercitive. Pour ce qui est de l’objectif que les étudiants de langue française représentent le tiers de la clientèle totale, les gouverneurs affirment qu’il est, selon eux, déjà atteint, sans donner toutefois d’explications. Le recteur, lors de la réunion du Sénat, le 12  décembre 1968, précise le point de vue de l’administration sur cette épineuse question, d’ailleurs toujours d’actualité. En effet, Mullins argue que les étudiants inscrits à L’École des sciences de l’éducation, qui est alors une institution non encore affiliée à la Laurentienne, fait grimper le pourcentage à 30 pour cent puisqu’on doit ajouter ses 170 étudiants aux 289 existants, comparativement aux 1 243 étudiants de langue anglaise28. Sur la question d’ouvrir les nouvelles écoles professionnelles aux programmes en français, le Conseil se montre plus ouvert en décrétant : « That all professional schools and new faculties be officially designated as bilingual, and that the Frenchspeaking professors be provided as far as possible wherever the numbers of Frenchspeaking participants warrant29. » Ce faisant, il suit simplement la pratique mise en vigueur dans l’ensemble du système d’éducation en Ontario. Bien que votée au Conseil des gouverneurs, cette mesure, pour être mise en force, doit également être entérinée par le Sénat, à qui appartient le pouvoir d’adopter des programmes. Cela attendra un an, puisque c’est en décembre 1969 qu’on y approuve la même résolution30, le Sénat voulant donner suite à une nouvelle revendication émanant cette fois directement des professeurs du département de français. Encore ici, le contexte politique canadien explique sans doute le succès des revendications profrançaises à la Laurentienne. Rappelons que c’est en 1969 que la Loi sur les langues officielles du Canada est finalement adoptée. Non seulement cette loi fédérale vient-elle sensibiliser la majorité aux demandes légitimes d’un meilleur service en français à la Laurentienne, mais elle donne aussi du poids aux pressions exercées par les Girouard et les Lavigne de la Laurentienne31. Regroupés au sein du département de français, une quinzaine de professeurs signent un manifeste qu’ils font parvenir, en octobre, à l’administration32 afin de réclamer que le principe du bilinguisme soit intégré à tous les documents officiels de l’Université et ce, après avoir voté en réunion « que soient renvoyés aux expéditeurs tous les textes officiels qui sont libellés exclusivement en anglais et qu’on n’en tienne aucun compte33. » Lavigne fera parvenir ce manifeste au Conseil des gouverneurs qui le déposera dans le procès-verbal de la réunion du 31 octobre. Le constat qu’il fait alors, à titre de président du Comité du bilinguisme, est éloquent et accablant. May I state at the outset that we have no cause for alarm. The situation of the Bilingualism and Biculturalism at Laurentian is no worse. It is only as bad as it has ever been. From observations of some members of the B. & B. committee and checking over my 300 pages of

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l’université de sudbury, 1967.  |  À l’avant-plan, l’Université de Sudbury, nouvellement construite en 1967, offre un contraste frappant avec le reste du campus, où beaucoup de travaux restent à faire.

notes and minutes of the 1965 special committee looking into Laurentian’s mandate, I find little has changed since the special inquiry […] The B. & B. aspect of Laurentian is dependent on the 85 % majority for survival34.

Lors de cette réunion, Lavigne demandera une redéfinition des pouvoirs, de la composition et du fonctionnement du Comité du bilinguisme qui sera mise en place graduellement six mois plus tard alors que l’on décidera, dans un premier temps, d’en faire un Comité conjoint du Sénat et des gouverneurs. Mais est-ce un signal qu’il a été trop critique? Toujours est-il qu’il ne présidera pas à nouveau ce comité. Si on répond tardivement aux vœux exprimés par l’homme d’affaires de Timmins, ne perdons pas de vue que le Comité conjoint est formé dans le contexte d’une lutte entre le Sénat et les gouverneurs dans la définition de leur rôle respectif. Par la suite, le Comité s’intéressera à la dimension financière du bilinguisme et cherchera à obtenir de nouvelles responsabilités en ce domaine, marquant ainsi une volonté plus ferme d’interventions. Ainsi, en décembre 1970, le procès-verbal de la réunion rapporte que le coût direct du bilinguisme pour l’année en cours se chiffrerait à 375 000 $ ; cette somme ne comprend pas une foule de coûts supplémentaires. D’après les chiffres obtenus,

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il semblerait que chaque étudiant francophone qui s’inscrit à la Laurentienne vole la place d’un étudiant anglophone : pour cette raison, on ne tient pas compte dans ce calcul des 132 000 $ accordés pour le nombre d’étudiants francophones inscrits à la Laurentienne. De toute façon, il semble évident qu’il est difficile de savoir comment est administré le budget du bilinguisme35.

Ces propos paraissent révélateurs à plus d’un titre. Peu importe la véracité des chiffres avancés, personne ne semble alors connaître les implications financières du bilinguisme et, surtout, certains membres de l’administration semblent convaincus que le bilinguisme, pourtant à l’origine même de l’idée de créer la Laurentienne, est un boulet, signalant sans doute une méfiance et beaucoup d’incompréhension. En janvier 1971, le Conseil des gouverneurs recommande que 20 pour cent de la subvention obtenue par la Laurentienne, en 1971–1972, pour ses programmes et services en français, soit administré par le Comité. Au cours de la même réunion, on discute d’une demande adressée par la Maison française, puis on décide d’accorder à son responsable, le militant Girouard, un petit budget de 2 250 $ pour terminer la session d’hiver et pour couvrir les frais encourus au cours de l’été. Un autre jésuite du même département, Fernand Dorais, va commettre un coup d’éclat, en septembre 1971, coup d’éclat qui sera d’ailleurs rapporté en première page du Sudbury Star36. Lors de la réunion mensuelle du 23 septembre, il offre avec fracas sa démission comme sénateur, puis il rédige sur le champ un document justificatif dans lequel il affirme qu’il se trouve incompétent pour y siéger. M. F. Dorais a soudainement pris une conscience aiguë que, lorsqu’il faisait une intervention en français au Sénat, son intervention ne pouvait exercer aucun impact sur les deux tiers des membres du Sénat, qui, ignorant le français, ne pouvaient savoir la signification, ni la portée de l’intervention de M. Dorais. À toute fin pratique, donc tout se passait comme si M. Dorais n’avait pas parlé37.

Lui-même comprenant mal l’anglais, il ne pouvait que s’abstenir lors des votes tenus au Sénat, ce qui aggravait, à son sens, son incapacité à y siéger. Bien qu’il soit revenu sur sa décision, suite à des pressions, Dorais soulignait, de belle façon, un déséquilibre de la compréhension mutuelle, qui prévaut encore aujourd’hui, dans les échanges entre anglophones et francophones. Ne pouvant reprocher à la majorité anglophone de vouloir participer pleinement à des réunions où les échanges se font dans les deux langues, sans comprendre le français, il ne lui restait plus qu’à tirer sa révérence afin de les sensibiliser au malaise que suscitent toujours ces situations pour le minoritaire. La Maison française Quelle est cette Maison française? Un projet piloté par Girouard – encore lui –, qui consiste à regrouper dans un même lieu physique différentes activités socioculturelles francophones qui profiteraient de la présence d’une personne respon-

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chansonniers étudiants .  |  Remarquez au mur l’affiche d’une des premières éditions de la Nuit sur l’étang.

sable. Cette idée n’est pas nouvelle puisque, au dire même de son défenseur38, ces Maisons existent dans plusieurs universités ontariennes qui ont réservé quelques étages dans certaines résidences pour ceux qui veulent apprendre le français. Comme l’explique Girouard devant le Comité conjoint du bilinguisme, en novembre 1970 : La langue d’échange dans la Maison française doit être le français. Un ensemble d’activités culturelles est prévu pour permettre les échanges. Cette maison veut permettre les rencontres entre francophones et anglophones. L’animateur devrait être employé à plein temps, vivre en résidence, agir comme directeur intellectuel auprès des étudiants. La résidence est à l’Université de Sudbury mais on souhaite la création d’un édifice avec résidence à l’étage39.

Quoique la construction d’un nouveau bâtiment pour abriter cette Maison ne voie jamais le jour, et malgré une tentative d’en instaurer une aux résidences de Huntington, les activités de la Maison connaîtront un certain succès. Réunir et coordonner les clubs déjà existants, tels le journal étudiant, le ciné-club, le club de création littéraire et la Troupe universitaire40, constituent un mandat naturel pour cette Maison. Gérer les subventions versées par le Comité conjoint du bilinguisme et par la SGA représente un autre volet de ce mandat41. Malgré ses mérites, la Maison française ne marque pas encore une rupture dans l’histoire de la francophonie à l’Université Laurentienne. Le principal facteur de changement est à chercher ailleurs, soit l’obligation imposée à l’Université, alors en sérieuses difficultés, de revoir son fonctionnement, ce qui conduira

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au rapport Hagey dont nous avons parlé antérieurement dans une autre section de cet ouvrage. Tandis que la francophonie laurentienne stagne et même régresse en termes politiques, elle est animée d’une effervescence culturelle sans précédent que certains qualifient même de Révolution culturelle. Le rapport Hagey Ne revenons pas sur l’origine de ce rapport, mais arrêtons-nous, toutefois, sur une de ses recommandations afin de terminer cette première partie de l’histoire de la francophonie et du bilinguisme, à savoir la création d’un Collège français à l’intérieur de l’Université Laurentienne. Même si cette recommandation ne verra jamais le jour, la réflexion qui entoure cette proposition et les résistances qu’elle entraînera représentent un excellent témoignage de l’état d’esprit qui prévaut alors. Citons la troisième recommandation du rapport. Que l’on songe à la création d’un collège français à l’intérieur de l’Université Laurentienne. Le collège serait dirigé par un principal qui serait responsable devant le Recteur de l’Université. Voici quelques raisons qui motivent cette proposition : a) Une université vraiment bilingue n’est pas pratique. On rapporte que même l’Université d’Ottawa se rend compte de ce fait. b) Personne n’aime qu’on lui impose le français ou l’anglais mais choisir volontairement l’une ou l’autre est une question bien différente. c) Les étudiants anglophones aussi bien que francophones pourront s’inscrire à ce collège et on comprendra qu’ils désirent faire un effort particulier pour devenir bilingues. d) Le collège possédant son propre principal, il y aura un cadre supérieur de l’Université dont la première responsabilité sera de promouvoir la culture et la langue françaises. e) Bien que les étudiants inscrits au collège français aient la liberté de suivre n’importe quel cours à l’Université, ce collège aurait l’avantage de stimuler les départements à offrir plus de cours en français qu’ils ne le font maintenant. […] Plusieurs personnes croient fermement que l’Université Laurentienne doit être bilingue, mais la vérité est qu’elle ne l’est pas et qu’en toute probabilité elle ne le sera jamais. Cependant, un collège français bien organisé à l’intérieur de la Laurentienne susciterait sans doute l’intérêt des étudiants pour le bilinguisme et le biculturalisme42.

Cette recommandation, qui prône logiquement le regroupement des programmes en français et la nomination d’une personne responsable de leur développement, va pourtant être catégoriquement rejetée par le Conseil des gouverneurs, en avril 1971, après avoir habilement mandaté le Comité conjoint du bilinguisme de l’examiner et de soumettre sa propre recommandation. Or, les propos de Hagey avaient visiblement agacé les huit membres du Comité conjoint, tous franco-

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phones, qui affirment ne jamais avoir été consultés à ce sujet, soulignant du même souffle que cela créerait un ghetto. En somme, le modèle du Collège Glendon de l’Université York ne s’appliquerait pas à la situation nord-ontarienne. En fait, tout se passe comme si Hagey n’avait même pas reçu des francophones les appuis nécessaires. À ce chapitre, Dennie, dans son rapport déjà mentionné, a sans doute exagéré l’enthousiasme que cette séduisante idée avait provoqué chez eux. Outre le recteur de l’Université de Sudbury43, les huit membres du Comité conjoint dont le gouverneur Lavigne n’y ont pas adhéré non plus. L’examen du procès-verbal de la réunion du Conseil des gouverneurs révèle qu’au cours de cette même réunion, les gouverneurs rejettent une demande des étudiants francophones qui, insatisfaits du Lambda bilingue, désirent financer leur propre journal lancé depuis peu, soit le journal Réaction. Encore ici, les gouverneurs rejettent une proposition de séparer la communauté francophone de la majorité, tout comme la Maison française qui ne verra jamais physiquement le jour44. À l’heure où le séparatisme québécois bat son plein, peut-être que de telles idées déplaisaient souverainement!

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e n s e ig n e m e n t e n f r a nç a i s e t Bi l i ngu i s m e

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Les années 1971 à 1984 : faire sa place guy gaudreau

De la Troupe universitaire au Théâtre du Nouvel-Ontario Rendons à César ce qui appartient à César : l’Université Laurentienne, au début des années 1970 et alors qu’elle est en pleine crise, servira de berceau à quelques activités culturelles franco-ontariennes qui vont rapidement devenir des institutions reconnues partout en Ontario et même au-delà. Ainsi, la Troupe universitaire, qui existe et prolonge, depuis 1961, une longue tradition théâtrale du Collège du Sacré-Cœur, modifie son orientation à compter de 1969 sous l’impulsion, notamment, de Dorais1. Une création collective, qui s’inspire des courants contreculturels alors à la mode, est élaborée au cours de l’année universitaire 1969–19702. On répète l’expérience, l’année suivante ; à compter de l’automne, s’y joignent de nouveaux éléments : Pierre Bélanger, un ancien du Collège du Sacré-Cœur, qui assume la direction de la Troupe tout en étant chargé de cours au département de sociologie, et de nouveaux étudiants, notamment André Paiement, Gaston Tremblay et Robert Paquette3. Originaire du Témiscamingue ontarien et à peine plus âgé que ses jeunes étudiants baby-boomers, Bélanger précise sa vision du théâtre en rupture avec le théâtre traditionnel et inspiré sans doute par celui pratiqué par un jeune auteur de Montréal, Michel Tremblay. 1 Exprimer d’une façon réaliste la vie des gens de Sudbury et du Nouvel-Ontario ; « Il ne s’agissait pas d’amener le théâtre dans la rue, mais plutôt de mettre la rue sur la scène. » 2 Utiliser un moyen de création qui permettrait d’exprimer la réalité des gens dans l’immédiat, soit la création collective. 3 Incorporer aux spectacles plusieurs médias4.

Cette vision débouche sur une pièce culte dans l’histoire du théâtre en Ontario français, Moé, j’viens du nord ’stie!, dont la réputation est sans doute surfaite. La

première présentation a lieu sur le campus, le 1er février 1971. La pièce connaît un franc succès et on décide, comme cela était la coutume de la Troupe, de la diffuser lors d’une tournée nord-ontarienne. Nouveau succès qui incite Bélanger et certains membres de la troupe dont André Paiement, à faire du théâtre à l’extérieur du cadre laurentien. Ils en feront un projet d’été et profiteront du programme ontarien de la section Jeunesse et Loisirs du ministère de l’Éducation. Le Théâtre du Nouvel-Ontario, théâtre professionnel, venait de naître au cours de cet été 1971. Sans en avoir le titre, Girouard et Bélanger sont assurément des animateurs dans l’âme. Il faut dire qu’au tournant des années 1970, l’animation est sur toutes les lèvres dans le monde occidental. Le rapport Saint-Denis sur la vie culturelle en Ontario en avait réclamé pour tout le Nord, en 1969. La section régionale de l’Association canadienne-française de l’Ontario a embauché un animateur en bonne et due forme ; il est payé par une subvention du Secrétariat d’État à partir de janvier 19705. Les gouvernements voient dans l’animation une manière de se rapprocher du peuple électeur en valorisant sa culture6. Aux yeux des pouvoirs publics, l’animateur est perçu comme un incontournable agent de changement ; il doit servir à rapprocher près du peuple les lieux de pouvoir, contestés par les minorités et les mouvements étudiants, pacifistes et contestataires grâce à l’animation socioculturelle. À défaut d’investir dans de nouveaux programmes, Hugues Albert, vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, engage, à compter de 1972, un animateur francophone. Il aura la main heureuse en engageant le talentueux mais discret Yvan Rancourt dont il faudra bien un jour raconter le rôle essentiel dans toute la francophonie nord-ontarienne. Natif de l’Abitibi, ce dernier est arrivé sur le campus l’année précédente pour occuper la fonction de comptable-contrôleur auprès de l’Association étudiante, la SGA . Il connaît déjà les étudiants et, comme il l’a dit lui-même lors d’une entrevue réalisée à l’hiver 1996, il sera à « l’écoute de ce que les gens avaient rêvé et de ce qui faisait rêver les gens ». Franco-parole : la naissance de la Nuit sur l’Étang et de la maison d’édition Prise de parole À même la subvention du gouvernement fédéral du bilinguisme, transmise par le gouvernement ontarien, la Laurentienne dispose, en 1972–1973, d’un budget de 540 000 $ pour répondre aux besoins de la communauté universitaire francoontarienne7. Le service d’animation en obtiendra 20 000 $8. Les idées ne manquent pas de même que l’urgence de se dire. Au printemps 1973, Rancourt, Dorais et un groupe d’étudiants organisent un Colloque qui aura lieu les 15 et 16 mars 1973. Ce sera Franco-Parole dont l’objectif est de réfléchir sur l’avenir de la Laurentienne. Pour la première journée de l’événement, le journal Réaction publie un document de 144 pages qui sert de programme. « Après dix ans d’existence, une remise en question de cette institution s’impose9. » Une centaine de participants examinent à la loupe chacun des aspects et services de la Laurentienne afin de soumettre à leur tour des recommandations.

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Les retombées les plus tangibles de ce Colloque demeurent incontestablement la première Nuit sur l’étang, qui deviendra un événement annuel célébré à la Laurentienne pendant 25 ans. La publication d’un recueil de poésie Lignes-Signes, également appuyé par Rancourt, découle aussi de ce colloque ; cette publication donne naissance à la maison d’édition Prise de parole dont la réputation n’est plus à faire. Interrogé sur le rôle et la contribution de l’animateur dans de tels projets, Rancourt précise sa pensée : Quand on est un animateur, on n’est pas un leader et il ne faut pas essayer de mettre nos rêves personnels de l’avant parce que cela ne fonctionne pas, car aussitôt que tu n’es plus là, ça meurt […] Le mauvais côté de l’animation est que tu perdras ton poste parce que les gens se prennent en main et qu’ils décident qu’ils n’ont plus besoin de toi. S’ils le font, c’est probablement parce qu’on a réussi notre mandat10!

Tous les animateurs qui ont œuvré à la Laurentienne n’ont pas eu cette conception de leur travail. On pourrait même dire que les relations qu’ils ont entretenues avec le mouvement étudiant, au cours des années 1970, ont été, dans l’ensemble, plutôt tendues. Comme l’indiquait Gervais lors d’une entrevue réalisée en 1996, les animateurs, payés par le vice-recteur, étaient néanmoins au service des étudiants qui, eux, se considéraient comme étant leur véritable patron. Agissant parfois comme porte-parole, ils étaient accusés de prendre la place des élus étudiants. En somme, il s’agissait de situations qui pouvaient difficilement être harmonieuses. La création de l’aef et du drapeau franco-ontarien Dotés depuis quelques années d’un journal bien à eux, les étudiants francoontariens ne vont plus se contenter de la SGA , une association bilingue, pour les représenter, même si cette dernière est pourvue d’une section francophone et que, pendant longtemps, elle a monopolisé les postes-clefs au sein de l’Association. La bonne entente entre les étudiants franco-ontariens et anglo-ontariens, que Rancourt avait observée à la SGA au moment de son arrivée, est chose du passé. « Devant la marginalisation croissante que subissait la vice-présidente aux affaires francophones [de la SGA], la détentrice du poste, Thérèse Boutin, remet sa démission avec fracas11. » C’est lors d’une réunion au sujet de la réorganisation de la Maison française, tenue le 6 mars 1974, et réunissant étudiants et professeurs, qu’est lancée l’idée de mettre sur pied une association étudiante indépendante que l’on désire appeler la « Maison des francophones ». Un des responsables de la tenue de cette réunion est Dorais qui, en termes de leadership, a en quelque sorte remplacé Girouard, tenu à l’écart pour des raisons médicales. Si on discute de la réorganisation de la Maison française, c’est que le portrait de la situation de la communauté francophone a beaucoup évolué depuis peu et que, dorénavant, dans l’administration de la Laurentienne, on compte sur une structure administrative nouvelle, soit le Comité des affaires francophones dont le mandat, cette fois, va au-delà de la simple coor-

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dination des activités socioculturelles (ce qui était alors le mandat de la Maison française). C’est aussi parce que l’administration, l’année précédente, dans le cadre d’une large discussion sur l’avenir de l’université, (le rapport « Pour la planification de notre avenir » dont nous parlerons plus loin) a fait de belles promesses à la communauté universitaire de langue française. Un autre élément essentiel à la compréhension des événements qui conduisent à la création de l’A EF a été soulevé par Richard Théoret lors d’une entrevue dans le cadre du projet d’histoire du drapeau franco-ontarien12. Rédacteur au journal Réaction et premier vice-président de l’A EF, il est un observateur privilégié des événements. Selon lui, la génération étudiante de 1974 n’est plus celle des années 1960 qui provenait en partie des écoles secondaires anglaises ou bilingues. Pour cette nouvelle génération étudiante issue des écoles secondaires françaises, l’idée d’une association unilingue française apparaît comme une normalité. Aux yeux de ses promoteurs, la Maison des francophones deviendra un « centre de regroupement de tous les organismes et activités francophones des étudiants du campus de l’Université Laurentienne13 ». Si la SGA a l’avantage de ne pas forcer chaque étudiant à identifier et à choisir clairement son appartenance linguistique, il en va bien autrement de ce nouveau projet. Comme on le sait – et c’est le cas encore aujourd’hui –, un certain nombre d’étudiants franco-ontariens ne se sentent pas concernés par les activités et les représentations politiques francophones sur le campus, préférant se fondre dans la masse anglophone. Offrir une Association étudiante de langue française parallèlement à l’Association existante qui se présente comme bilingue ne peut pas faire consensus. Pour lancer le projet, on organise la tenue d’une élection de son premier Comité central à la fin avril. Parmi tous les étudiants dont la langue maternelle est le français, 58 pour cent participent au vote, ce qui laisse une forte minorité qui, tacitement du moins, n’approuve pas le projet ou se montre peu intéressée. Même si on s’estime dépositaire d’un mandat légitime, les membres du Comité central ont conscience qu’il faut faire davantage et susciter une plus large adhésion. Lors de leur première réunion, le 14 juin 1974, le Comité central de la Maison des francophones, appellation pour le moins gauchisante, décide de changer de nom pour se rapprocher du peuple, soit les « Canayens de l’Université Laurentienne, OntarioNord » dont l’acronyme devient CULON . Acronyme grivois auquel Dorais n’était sûrement pas étranger! On ne peut s’empêcher d’établir un lien entre l’ADEFNO et CULON , qui tous deux affirment haut et fort leur appartenance non pas sudburoise, mais nordontarienne. Il faut dire aussi que la dimension régionale de la francophonie laurentienne est dans l’air du temps. Les lecteurs du journal étudiant de langue française, Réaction, ont suivi, par exemple, la lutte pour une école secondaire de langue française en 1971 et 1972. Que dire alors du légendaire CANO , la Coopérative des artistes du nord de l’Ontario? Tout se passe comme si la petite minorité franco-ontarienne laurentienne cherchait, dans une région plus large, à accroître sa source de légitimité. Le nerf de la guerre étant toujours l’argent, CULON adresse une demande officielle à la SGA pour qu’elle lui verse les cotisations étudiantes encaissées, soit 27 $ 232

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par étudiant. Devant le refus de la SGA , qui, on peut le comprendre, remet en question sa légitimité et devant les pressions exercées par l’administration, il est convenu de tenir un référendum à l’automne dont la question est de savoir si on désire une association francophone autonome. Quatre cent trente étudiants dont la langue maternelle déclarée est le français sont conviés à ce référendum des 7 et 8 octobre. La participation est plus élevée qu’en avril, puisque 320 étudiants prennent la peine d’aller voter, ce qui donne un taux de participation de 74 pour cent. Et c’est avec une faible majorité de 56,5 pour cent que l’Association des étudiants francophones est née14, ce qui amène CULON à se saborder dans l’enthousiasme. Quelques mots sur ces années-phares de la francophonie laurentienne doivent être consacrés à la création du drapeau franco-ontarien, inauguré en 1975. Comme son histoire a été racontée dans un autre livre, contentons-nous de rappeler brièvement que c’est à la Laurentienne qu’est né ce symbole de la francophonie reconnu maintenant partout. Ce drapeau, œuvre du jeune professeur d’histoire Gaétan Gervais et de l’étudiant Michel Dupuis, a été hissé pour la première fois au mât de l’Université de Sudbury – et non pas de la Laurentienne – le 25 septembre 1975. Ce geste, qui passe vite inaperçu en dehors du campus, revêtira, au fil des ans, une puissance identitaire qui fait maintenant consensus et qui clôture de belle façon ces quatre années fastes de la francophonie laurentienne mais non de l’enseignement en français qui reste encore bien fragile. Pour la planification de notre avenir L’arrivée d’un nouveau recteur à l’été 1972 et la crise financière qu’affronte l’Université pendant quelques années ouvrent une ère nouvelle forçant l’administration à réfléchir sur l’avenir de l’institution et à se doter d’un premier plan de développement. C’est le Comité de planification académique qui prend naturellement le leadership en cette matière en amorçant des travaux qui s’occupent de cette question pendant toute l’année universitaire 1972–1973. En avril 1973, le Comité soumet au Sénat 20 propositions avec comme objectif d’en débattre et d’approuver le rapport final pour la dernière rencontre de juin15, lequel sera appelé « Pour la planification de notre avenir ». La teneur des recommandations interpelle assurément la francophonie laurentienne. Outre l’objectif irréaliste de voir « tout le personnel » capable d’une bonne connaissance de la langue seconde en cinq ans, soit la maîtrise d’un bilinguisme minimal, le Comité recommande notamment une hausse du nombre de cours offerts en français, des bourses d’études pour les étudiants bilingues et la mise sur pied d’un nouveau comité, soit celui des Affaires francophones qui coordonnera la révision et l’élaboration de programmes en français16. Ce comité, dans une certaine mesure l’ancêtre du présent Conseil de l’enseignement en français, sera finalement approuvé par le Sénat en décembre 1973. Il amorcera ses travaux dès janvier sous la présidence du vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, Hugues Albert, ce qui nous fait dire qu’il reste davantage représentatif de l’administration auprès de la communauté universitaire francophone que le contraire.

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l a levée du drapeau franco-ontarien , 1975.  |  Le drapeau franco-ontarien est hissé pour la première fois devant l’Université de Sudbury le 25 septembre 1975. Un des concepteurs du drapeau, l’étudiant Michel Dupuis, est debout au pied du mât tandis qu’un autre, le jeune professeur d’histoire Gaétan Gervais, préfère se fondre dans la foule ; on le voit à droite.

Sa mise sur pied relègue au second plan le Comité conjoint du bilinguisme qui, jusqu’alors, avait été l’instance administrative par excellence de la francophonie. En effet, le nouveau comité du Sénat reçoit un mandat fort étendu : « Tous les droits et intérêts des francophones du triple point de vue administratif, académique et socioculturel relèvent du Comité des affaires francophones. » Il peut étudier toutes les questions pertinentes à la francophonie et obtient un droit de regard sur la préparation des budgets alloués aux programmes et activités francophones. Tout en faisant la promotion de l’expression culturelle du fait franco-ontarien, il veillera à ce que les politiques touchant les francophones soient mises en pratique. En somme, tout un programme! Un des débats entourant l’adoption du rapport « Pour la planification de notre avenir » qui nous paraît digne d’intérêt est, sans contredit, celui sur le biculturalisme qui a lieu en juin 1973. Si la question du bilinguisme ne représente aucun enjeu majeur, il en va bien autrement de la question du biculturalisme. Selon le Sudbury Star du 22 juin17, plusieurs sénateurs souhaitent éliminer toute référence à ce concept, préférant la conception d’un Pierre Elliott Trudeau qui propose le multiculturalisme – dans lequel se confond le Canada français –, parce qu’il fallait être respectueux de toutes les communautés vivant au Canada. Malgré le point de vue très affirmé d’un Wes Cragg pour qui tout Canadien est forcément anglophone ou francophone, il semble bien que l’on assiste à la mise à mort de ce biculturalisme perçu comme étant trop exclusif.

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Plusieurs autres recommandations de ce rapport touchent la francophonie. Énumérons-les rapidement : 1) le bilinguisme sera dorénavant un atout dans les annonces de postes de professeur et de cadre ; 2) la capacité d’enseigner dans les deux langues sera un critère de promotion ; 3) le personnel en contact avec le public aura un bilinguisme intégral et pas seulement minimal ; 4) les programmes de deuxième cycle en français seront développés ; et 5) la bibliothèque devra accroître son nombre de livres en français et élaborer un programme d’acquisitions allant dans ce sens. L’origine de ces propositions vertueuses n’est pas qu’interne à la Laurentienne ; elle est à chercher également du côté provincial puisque deux commissions d’enquête provinciales, en 1972, avaient soulevé cette nécessité de faire plus pour les universités bilingues dans ses programmes et services en français et de reconnaître les coûts additionnels que cela entraîne. En effet, la commission Symons, chargée d’examiner l’enseignement en français au secondaire, avait fait un constat accablant sur la piètre programmation en français lorsqu’elle affirmait, en 1972 : « [T]he Ontario university system does not yet offer to Franco-Ontarians the opportunity to study in their own tongue the range and variety of courses which it has long been possible for English-speaking university students to take in their tongue in the province of Québec18 ». Même son de cloche de la Commission sur l’éducation postsecondaire en Ontario, la commission Wright qui, en décembre 1972, émet une série de 15 recommandations portant notamment sur « de meilleurs programmes dans les domaines de la science de la santé […] et d’éducation ainsi qu’en commerce et en éducation permanente19 ». Même les ressources des bibliothèques universitaires sont pointées du doigt. En fait, les autorités gouvernementales ontariennes ont conscience des répercussions qu’entraîne le traitement de la minorité franco-ontarienne sur l’unité canadienne20. La Laurentienne est prête à faire sa part. C’est pourquoi, en 1974, et suite à un rapport soumis par le Comité des affaires francophones, le Sénat en rajoute et adopte une politique de bilinguisation intégrale de son administration. En effet, près d’une trentaine de postes de responsables et d’administrateurs sont désignés comme exigeant un bilinguisme intégral parmi lesquels on note celui du recteur, des vice-recteurs, des doyens et celui du secrétaire-général. Le Sénat ira encore plus loin en décrétant « [q]ue les postes de directeur de département ou d’école offrant des programmes en français ou susceptibles de le faire soient désignés comme postes exigeant le bilinguisme intégral21. » Cela faisait beaucoup22. Toutefois, comme l’avouera plus tard le recteur Monahan : All of these recommendations were adopted by Senate, but not all of them have been implemented. Indeed, one can judge fairly that very few of these proposals, and only the least significant […] All faculty and administrative postings are now listed as bilingual preferred. Some academic units have taken seriously the request to seek actively for bilingual faculty ; but some have not. And bilingual faculty in many disciplines, especially those in which the University has been hiring, are still difficult to find. A number of recent appointees to senior administrative positions have been integrally bilingual, but not all. Only two

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une journée typique dans le « bowling alley ».

of the four Deans named in 1974 possessed this capability. And recent appointees to the offices of Vice-President (Administration) and Registrar lacked this capability. Other University officers whose positions pre-date 1973, including the President, have yet to meet fully this requirement. Second-language training for staff was expanded, with mixed results. A number of academic units have developed plans to expand their French-language offerings; but again these have been the exceptions to the norm. With the University facing retrenchment and resources at a premium almost everywhere, there has been little incentive to undertake to develop new programmes of any kind. French-language programmes have been no exception. Despite the adoption of an internal plan intended to strengthen the University’s commitment to bilingualism, the implementation of this plan has been largely thwarted by the shortage of the financial resources necessary to render it operational 23.

Certes, les difficultés financières expliquent en partie l’incapacité de l’Université à mettre en œuvre ses promesses en regard de la francophonie. Si Queen’s Park avait reconnu la nécessité d’offrir plus aux Franco-Ontariens, elle n’avait pas, selon Monahan, ajusté ses subventions en conséquence. Mais force est d’admettre que ces difficultés n’expliquent pas tout. L’embauche ou la nomination d’un unilingue à un poste décrété bilingue peut difficilement se justifier par des contraintes financières. L’exemple d’un non-bilingue provenant des plus hauts échelons de l’Université ne peut être qu’une incitation à se soustraire sans gêne aux politiques adoptées. Sur un autre plan, on doit reconnaître que ces années de piétinement en termes de programmes en français contrastent effectivement avec les belles avancées sur le plan culturel et même sur le plan de l’autonomie politique. Pendant ce temps, le Comité des affaires francophones n’est pas resté les bras croisés. Certes, il est alors privé d’un véritable président, puisque le poste de vicerecteur qui assume cette fonction est occupé de façon intérimaire (car on cherche alors un titulaire permanent). Mais comme il est en quête d’une nouvelle légitimité, le Comité, par l’intermédiaire de son secrétaire Benoît Cazabon, convoque

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les professeurs et les administrateurs francophones à une assemblée, qui a lieu le 7  février  1975, afin de discuter de la question. Bien qu’on ait occasionnellement assisté à de pareilles rencontres auparavant, on peut avancer que cette réunion annonce la création de l’Assemblée des professeurs francophones de la Laurentienne qui verra officiellement le jour l’année suivante, soit en avril 1976. Ce regroupement des professeurs francophones est toujours actif, malgré son statut informel. Nous y reviendrons, plus en détail, en troisième partie de ce texte. Trente professeurs assistent à la réunion au cours de laquelle sont votées, à l’unanimité, deux propositions. L’une affirme qu’il faut nommer un vice-recteur à l’enseignement et à la recherche de langue et de culture françaises et laisser le poste vacant jusqu’à ce qu’on puisse trouver le bon candidat. L’autre à l’effet que six autres titulaires de la haute administration doivent faire obligatoirement preuve d’un bilinguisme intégral et, à défaut de candidat interne compétent, qu’il faut recruter à l’extérieur. La missive que le Comité envoie aux gouverneurs, au recteur et aux sénateurs, le 11 février, est on ne peut plus claire. Le document s’inquiète de la nomination prochaine de deux vice-recteurs, de quatre doyens et du directeur des études supérieures. Déçu du système d’exception mis en place jusqu’alors pour contourner les règles de nomination et inquiet de la composition des comités formés pour procéder à ces embauches, le Comités des affaires francophones exige que le bilinguisme intégral soit plus qu’un critère de compétence mais qu’il soit une condition sine qua non. Mais rien n’y fait, même pas la lettre de protestation du 22 avril 1975 que l’A EF fait parvenir au recteur, à la suite de la nomination de deux unilingues, le doyen des sciences Douglas Williamson et le vice-recteur administratif Thomas Hennessy. La francophonie dans les départements : l’état des lieux Pour poursuivre l’évolution de la francophonie et du bilinguisme, il convient de s’arrêter sur la situation à l’échelle des départements. Un rapport préparé par le Comité de planification académique remis en avril 197524 dresse un bilan exhaustif grâce à un questionnaire envoyé dans chaque unité tant à la Laurentienne que dans les universités fédérées. En voici les résultats au tableau 12,1. Si on en croit ce tableau, près des deux tiers des professeurs, soit 87, maîtrisent alors les deux langues officielles tandis que 51 seraient unilingues. Ce résultat surprenant est dû notamment à la solide performance d’un département comme celui de sociologie qui est, à l’époque, le département le plus bilingue de l’Université et qui d’ailleurs produira plus que sa part de doyens. Les neuf professeurs de l’École de traduction, la dizaine des sciences religieuses, de même que les dix collègues du département de français qui ne sont pas tous aussi bilingues que le laisse croire le tableau, y sont aussi pour quelque chose. Mais là où le bât blesse le plus, c’est du côté de l’offre de programmes qu’il faut qualifier de chétive. Aucun en sciences! Et du côté des écoles professionnelles, c’est la misère. Dans certains cas, le personnel compétent pour offrir des cours en français est sur place, mais il est affecté aux programmes en anglais. Ainsi en sciences,

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TA BL E au 1 2 ,1  |  Bi l i ngu ism e du c or ps profe s s or a l et offr e de pro gr a m m e s e n fr a nç a is , se l on l e s dépa rt e m e n ts et éc ol e s , h i v e r 1975* Département ou École

Professeurs bilingues

Professeurs en voie d’être bilingues

Anglais 2 3 Astronomie 2 0 Biologie 2 3 Chimie 2 2 Commerce 0 3 Éducation physique 1 3 Études classiques 1 0 Français 10 1 Génie 0 0 Géographie 3 0 Géologie 0 2 Histoire 5 7 Langues modernes 5 2 Mathématiques 3 4 Philosophie 4 2 Psychologie 5 6 Physique 2 3 Sciences économiques 3 1 Sciences infirmières 1 0 Sciences politiques 2 4 Sciences religieuses 10 0 Service social 2 3 Sociologie et anthropologie 13 2 Traduction 9 0 Total 87 51

Programmes en français Ne s’applique pas Aucun Aucun Aucun Aucun Aucun Ne s’applique pas 3, 4 ans et maîtrise (temps partiel) Aucun 3 ans Aucun 3, 4 ans Ne s’applique pas Aucun 3 ans 3, 4 ans Aucun Continuation Aucun 3, 4 ans 3 ans Aucun 3, 4 ans (socio.) 3 ans (anth.) 3, 4 ans

* Ne comprend pas l’École des sciences de l’éducation.

neuf professeurs peuvent enseigner en français, mais ils sont répartis dans six départements. C’est pourquoi on offre seulement quelques cours en français dans toute cette faculté, soit quatre en 1974–1975. Pour les programmes de maîtrise, seul le département de français en propose un, et encore, seulement à temps partiel. Poursuivons l’analyse en reprenant à notre compte le constat accablant que dressait notre collègue Gervais dans un rapport qu’il a rédigé en avril 1976 et dont les recommandations seront reprises, sans succès, par le Comité du bilinguisme25. Ce rapport intitulé « Pour une réforme des programmes en français à l’Université Laurentienne » avait été préparé aux fins de discussions lors d’une réunion de l’Assemblée des professeurs francophones, à la demande du Comité des affaires

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francophones et du Comité du bilinguisme. S’il est un document qui détonne de toute la masse des autres déposés au Sénat, c’est bien ce texte, traduit par la suite en anglais par l’administration. Proposant le regroupement des professeurs francophones trop dispersés pour offrir des programmes cohérents et pensés pour la clientèle franco-ontarienne, ce rapport suggère la création de sept unités d’enseignement francophones homogènes. Comme tant d’autres recommandations, cette dernière ne verra pas le jour, car les professeurs francophones d’alors, tout comme ceux d’aujourd’hui, préfèrent nettement le regroupement disciplinaire plutôt que linguistique, affichant par le fait même une grande solidarité vis-à-vis des collègues anglophones de leur département respectif. Néanmoins, la réflexion qui entoure ce rapport nous permet d’approfondir l’examen de la situation concrète prévalant au sein des différents départements et écoles en termes de programmation en français. Selon Gervais, les faibles ressources consenties pour les cours en français ne doivent pas nous empêcher de repenser le modèle mis en place pour servir la majorité anglophone. « [N]ous sommes obligés de vivre dans des cadres qui ne sont que les calques serviles de modèles anglais. Ainsi, l’absence de planification globale et l’émiettement du savoir (émiettement fait à la mesure de la population majoritaire de langue anglaise) condamnent les professeurs de langue française à ne jamais offrir que des fragments de programmes26 ». Ce constat l’amène à réclamer la création d’un poste de vice-recteur responsable des programmes en français, ce qui sera obtenu plus tard. Pour les collègues anglophones, il est tout à fait normal d’estimer que leur vision des programmes s’applique à la minorité et constitue, pour nous aussi, la voie royale de la connaissance. Ce serait pratiquement contre nature si les départements cherchaient une structure de programmes spécifique à la communauté franco-ontarienne. Selon Gervais, les programmes en français sont rachitiques faute d’éventail de cours suffisants. Un baccalauréat qui repose sur trois professeurs n’a pas la même qualité que celui qui repose sur une huitaine de collègues. Pas étonnant que les étudiants franco-ontariens doivent prendre la moitié de leurs cours en anglais. Il y a peu d’étudiants franco-ontariens à la Laurentienne parce que plusieurs vont à Ottawa où ils peuvent véritablement étudier en français. Inspirée par le rapport Gervais, tout en étant inquiète de l’utilisation des subventions au bilinguisme, qui ne seraient pas affectées spécifiquement aux programmes en français, l’A EF intervient au même moment dans le débat en adressant au Sénat un manifeste au sujet du bilinguisme. L’Association soumet alors trois propositions dont certaines sont tout à fait d’actualité. 1 Que le Sénat académique de l’Université Laurentienne, au niveau de son organisation interne, soit scindé en deux chambres (l’une de langue anglaise, l’autre de langue française) et que les deux chambres détiennent conjointement les pouvoirs du Sénat de l’Université Laurentienne. 2 Que les subventions du bilinguisme soient gérées par le Comité du bilinguisme et du biculturalisme avec le Comité des affaires francophones sous la direction du vicerecteur à l’enseignement.

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3 Que les cours francophones cessent d’être parallèles aux cours anglophones afin de permettre un développement autonome des programmes francophones à l’Université Laurentienne.

Cette demande d’un Sénat bicaméral, lourde de conséquences, n’appartient pas en propre à l’A EF. Elle avait d’abord été formulée par le Comité des affaires francophones et envoyée au Sénat au mois de mars 1976. Elle avait reçu une réponse de son unilingue – mais pourtant secrétaire – Jack Porter qui avait esquivé la question en demandant que l’on définisse les modalités concrètes de ce bicaméralisme27. En outre, elle s’inscrit dans la foulée des travaux du Comité des citoyens de l’ACFO de Sudbury qui, dès 1971, avait exigé la création, au sein de l’Université, de deux sections indépendantes, l’une française et l’autre anglaise, tant sur le plan de l’enseignement, des services et de l’administration que des finances28. La victoire surprise du Parti Québécois, en novembre 1976, et la peur soudaine que le Canada se scinde en deux, allait, selon nous, sonner le glas de cette idée pour longtemps, malgré quelques soubresauts. L’Institut franco-ontarien et le Conseil de l’enseignement en français Bien qu’ils soient moins d’une dizaine de professeurs franco-ontariens parmi le corps professoral laurentien, ces derniers, menés par les Cazabon, Dennie et Gervais, lancent, en 1977, un groupe de recherche sur l’Ontario français, en invitant également à se joindre à eux des collègues d’autres universités ontariennes. L’Institut franco-ontarien venait de naître avec, comme objectif, de réfléchir aux différentes réalités franco-ontariennes autant du passé que du présent. Son premier directeur est Benoît Cazabon. Une revue, publiant seulement des textes rédigés en français et dirigée par Donald Dennie, voit le jour l’année suivante, la Revue du Nouvel-Ontario, qui concurrence en quelque sorte la publication savante bilingue dont l’Université s’était dotée, dix ans plus tôt, soit la Laurentian University Review / Revue de l’Université Laurentienne. Cette dernière avait bien tenté de répondre à la communauté franco-ontarienne en lançant, en 1971, un premier numéro consacré au « fait francophone du Nord de l’Ontario29 » tout en se donnant le mandat de « promouvoir la vocation universelle de la langue et de la littérature françaises ». Afin de répondre à cet objectif élargi, la revue avait publié des articles de nature diverse dont le seul dénominateur commun était d’être rédigé en français. Cette pratique de la revue bilingue explique sans doute la volonté de créer une autre publication savante dont le mandat serait spécifiquement francoontarien. Comme l’indique l’introduction du premier numéro de la Revue du Nouvel-Ontario : La revue veut aussi répondre à un autre objectif de l’Institut soit celui de servir de moyen d’animation pour les Franco-Ontariens. Dès ses débuts, l’Institut a voulu sortir des cadres strictement académiques et assumer un rôle d’animation en diffusant les résultats de recherche par des publications et la participation à l’action de groupes30.

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jacques berger et pascal sabourin , deux professeurs du département de français , feuillettent la revue du nouvelontario et d ’autres publications francophones .

Une autre étape dans cette lutte pour l’épanouissement de la communauté francophone sur le campus sera franchie en 1978 en profitant, encore une fois, d’une remise en question du fonctionnement de l’Université dont la croissance, bien qu’encore modeste, provoque de nécessaires ajustements. C’est pourquoi un Comité conjoint du Sénat et du Conseil des gouverneurs avait été mis sur pied en 1976. Après sept mois de rencontres hebdomadaires, le Comité avait accouché, en mai 1977, d’un autre rapport, le rapport Weaver31. Spécifiquement sur la question francophone, le comité avait constaté que le vicerecteur à l’enseignement et à la recherche sur lequel reposait, depuis la création du Comité des affaires francophones, la responsabilité ultime en cette matière, était surchargé de dossiers divers et qu’il n’avait pas le temps de respecter ses obligations en cette matière. Aussi fallait-il trouver une autre solution, laquelle prendrait un an à être acceptée par le Sénat, en raison notamment de l’examen approfondi par le Comité de planification académique du rapport Weaver. C’est en septembre 1978 que seront finalement créés le Conseil de l’enseignement en français (CEF) et le poste de directeur des programmes en français appelé à coordonner le Conseil. Sans les interventions de l’Assemblée des professeurs francophones et du Comité des affaires francophones, il n’est pas certain que l’administration aurait accouché d’une telle solution. En fait, depuis 1976, les membres du Comité des affaires francophones, pour protester contre la lenteur des réformes souhaitées, avaient décidé de jouer la politique de la chaise vide, paralysant ainsi le Comité, tout en concentrant leurs énergies sur l’Assemblée des professeurs, nouvellement mise en place. C’est cette dernière qui avait proposé la création du CEF dès 197632 et qui s’était dite prête à attendre les recommandations du Comité Weaver. Par la suite, le Comité des affaires francophones en avait formellement proposé la créa-

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deux étudiants lisent le journal réaction au début des années 1980.

tion en septembre 197733. Mais on devait attendre les recommandations du Comité de planification. La mise sur pied du CEF exige de multiples rencontres, car tout est à faire. Ainsi on se réunit à 11 reprises entre le 24 octobre et le 18 décembre 1978. Le fonctionnement est alors très collégial puisque c’est le secrétaire du CEF, Justin Lévesque, professeur de service social, et non le directeur, qui signe les procès-verbaux. Le CEF travaille main dans la main avec l’Assemblée. Le 22 mars 1979, c’est le CEF qui décide, comme si cela allait de soi, « qu’une réunion générale des professeurs francophones aura lieu le vendredi 6 avril 197934 ». Cette avancée marque assurément la plus grande rupture survenue jusque-là dans l’histoire de la francophonie laurentienne. En effet, la direction du Conseil est confiée à un directeur nommé par les membres élus dans les différentes facultés et services. « Les membres du Conseil ont procédé au choix du Directeur du C.E.F. : après consultation auprès de l’Assemblée des professeurs francophones35 ». Même l’Assemblée a été consultée, garantissant au directeur du CEF une solide légitimité. Revenu de ses problèmes de santé, Girouard est choisi à l’unanimité, et dégagé en partie de son enseignement pour se consacrer à ce dossier. Plutôt que représenter l’administration auprès de la communauté et puiser sa légitimité de l’administration, il devient la courroie de transmission des espoirs de cette communauté et il peut, en outre, compter sur l’Assemblée comme groupe de pression. Pouvoir s’y consacrer presque à plein temps et compter sur les intervenants provenant de tous les horizons universitaires permettront à son directeur de faire progresser les programmes en français. Parmi les réalisations du CEF et de son directeur Girouard, on peut identifier le programme d’Études coopératives adopté par le Sénat en 1981 et mis en place à l’hiver 1982. Tel est du moins le bilan qu’on faisait, en 1981, dans le Rapport annuel de l’Université publié pour souligner le 20e anniversaire de la Laurentienne36.

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Girouard aurait aimé notamment que son programme en communication puisse être implanté, mais le « gel des nouveaux programmes par le ministère des Collèges et Universités a mis un terme abrupt [à] ce […] programme37 ». L’échec qui lui fait sans doute le plus mal au cours de son mandat se terminant le 30 juin 1981, est son projet de transformer le CEF en une véritable Faculté38 et de faire de son poste de directeur un décanat avec tous les pouvoirs s’y rattachant soit, entre autres, celui de siéger au Comité du budget et de procéder à l’embauche de son corps professoral. En effet, le contrôle des fonds rattachés à l’enseignement en français, réclamé à plusieurs reprises, notamment en octobre 1979, lui a toujours été refusé par le Sénat39. Quant aux embauches, même de professeurs francophones pour lesquels il a pourtant rédigé les demandes de subvention auprès du Conseil de l’éducation franco-ontarienne, la procédure lui échappe totalement. Laissons à ce grand défenseur de la francophonie laurentienne le soin d’expliquer son point de vue. [N]ommés par le Sénat et par conséquent responsables devant le Sénat, les membres du Comité du bilinguisme et des affaires francophones ne représentent que dans un sens large la communauté francophone, dont ils n’étaient pas les mandataires, et leurs recommandations, en l’absence de tout mécanisme autorisé de consultation, avaient une portée bien affaiblie. Aussi il n’y a pas à s’étonner que le Comité du bilinguisme soit en état d’hibernation, et que le Comité des affaires francophones ait renoncé à toute activité deux ans avant la création du Conseil de l’enseignement en français. Le Conseil de l’enseignement en français a l’avantage sur les autres comités d’être le représentant officiel, auprès du Sénat, du secteur francophone et ses recommandations ont le même poids que celles d’un Conseil de Faculté. Toutefois, ce pouvoir de recommandation est affaibli par le droit reconnu aux Conseils de faculté de se prononcer sur les projets du C.E.F. comme si les membres qui le composaient n’appartenaient pas tout à fait à un véritable Conseil. Plus sérieuse est l’absence de tout droit concernant l’aspect budgétaire des programmes en français : les Doyens des Facultés traditionnelles continuent à approuver les budgets, à engager des professeurs pour ses programmes sur lesquels ils n’ont aucune juridiction, ou ils vont continuer à refuser pour des raisons budgétaires à créer des cours et des programmes en français40.

À nouveau malade et dans de pareilles circonstances, pas étonnant que Girouard refuse un second mandat et que l’Université doive mettre sur pied un comité de sélection, dès mars 1981, afin de lui trouver un successeur. Divisée sur la question d’une Faculté française, l’Assemblée des professeurs francophones demeure néanmoins convaincue de la nécessité d’obtenir de l’administration plus de pouvoirs pour le CEF. C’est pourquoi on décide d’appliquer à nouveau la politique de la chaise vide : on boycotte le processus de nomination mis en place pour remplacer le directeur du CEF en refusant de proposer des candidats. La manœuvre porte ses fruits puisque, au mois d’août 1981, Gervais est finalement nommé en remplacement de Girouard et obtient du recteur Best qu’il puisse siéger au Comité du budget et qu’il administre pleinement 5 pour cent de la subvention au bilinguisme41. En échange de quoi, le CEF s’engage à ne plus réclamer la Faculté française, ce qui ne sera pas sans déplaire à Girouard pour quelque temps.

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Pour Gervais, tout autant que Girouard, la source de sa légitimité vient clairement de la communauté franco-ontarienne et non de l’administration, même si, à l’inverse de Girouard, il doit sa nomination à cette dernière. D’ailleurs, l’administration a sans doute compris l’importance que « [l]e Conseil [soit] dirigé par un administrateur pédagogique supérieur nommé par l’Université42. » Gervais, dont le mandat sera renouvelé pour cinq ans à la fin de l’été 1983, n’entend pas moins poursuivre ses activités en étroite collaboration avec l’Assemblée de sorte que sa conception du rôle de directeur du CEF allait le conduire à mener des batailles musclées avec certains collègues et administrateurs laurentiens. Ayant reçu comme tâche de développer, pour le printemps 1982, un plan triennal « touchant le développement de la composante francophone des programmes d’études43 », le CEF, dirigé par Gervais, cible l’École de commerce « qui est la plus fréquentée de l’Université44 ». Selon lui, « il paraît inacceptable […] qu’elle persiste dans un unilinguisme total45 ». Le développement d’un programme de commerce en français représente sans doute le gain le plus décisif de Gervais à titre de directeur. Aujourd’hui considérée comme allant de soi, l’idée d’offrir en français une formation en ce domaine semblait, à l’époque, un non-sens aux yeux de bien des professeurs anglophones de cette École. Il était bien connu que la langue des affaires n’avait jamais fréquenté Molière! L’établissement d’un programme en français en ce domaine n’est pourtant pas un nouveau projet puisqu’il avait déjà été mis de l’avant par le Comité des affaires francophones dès 197446. Il marque, jusqu’à un certain point, un déblocage psychologique puisque tout programme pourra dorénavant être réclamé en français. Au-delà des barrières érigées par les mentalités, qui sont souvent les plus dures à surmonter, il faut souligner qu’un autre problème de fond est soulevé par l’introduction de programmes en français dans un département ou une école : c’est l’affaiblissement des programmes en anglais consécutif à une offre de cours en français non accompagnée de ressources supplémentaires. Seules des subventions additionnelles, dont la préparation des demandes est l’œuvre du CEF, peuvent autoriser de nouveaux programmes en français. Et cela restera vrai au cours des 15 années suivantes alors que seront mis en place des programmes en français dans les Écoles professionnelles et en sciences. S’agissant de l’École de commerce, la Laurentienne, grâce à la ténacité d’un Gervais, obtient finalement des autorités gouvernementales, en mars 1983, le financement de trois postes, appelés alors postes CEFO (financés par le Conseil de l’Éducation franco-ontarienne). Ces postes permettent de lever les dernières objections soulevées par l’École qui s’est opposée jusqu’alors à l’embauche d’un premier professeur, pourtant demandée dans le cadre d’une résolution du Sénat depuis l’automne 198247. L’ouverture d’un programme en français en commerce, à compter de l’année universitaire 1983–1984, va néanmoins avoir des contrecoups sur la santé de Gervais, qui doit interrompre son travail à compter de décembre 1983 et ce, jusqu’au mois de mai suivant. Pendant ce temps, à Toronto, le gouvernement met sur pied, en octobre 1982, un autre comité afin d’examiner la situation universitaire dans le Nord-Est ontarien. « Connu sous le nom de comité Parrott, ce dernier a remis son rapport en

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le recteur best porte un toast à l a communauté francophone de l a l aurentienne .

[octobre] 1983 et recommande une restructuration fondamentale du système universitaire laurentien48. » Proposant une fusion des différents collèges et universités, le rapport restera lettre morte en raison des objections des divers campus universitaires qui craignent de perdre leur autonomie. Répondant néanmoins à ce vœu d’une meilleure coordination des établissements universitaires du Nord-Est, la Laurentienne proposera notamment d’ajouter au CEF des représentants du Collège de Hearst. En outre, le recteur Best a trouvé une habile réponse pour contrer les demandes traditionnelles que le CEF et l’ACFO avaient adressées, quelques mois plus tôt, au Comité Parrott. En effet, Best avait confié au président du Conseil des gouverneurs : J’aimerais ajouter que la possibilité d’un Sénat bicaméral, et d’une Faculté ou d’un Collège français (… aucune de ces idées n’est nouvelle) a également été prise en considération mais, de l’avis général, le C.E.F. fonctionne maintenant très bien et il y a tout lieu de penser que nous obtiendrons des résultats vraiment améliorés si cet organisme assumait de plus vastes responsabilités49.

En somme, le CEF avait démontré une telle efficacité qu’on n’avait plus besoin de faire plus! Toutefois, le départ de Best, en 1984, provoquera l’arrivée d’une nouvelle équipe d’administrateurs qui vont imposer leurs visions du développement de la Laurentienne. Avant d’entamer cette troisième période de son histoire, un dernier élément doit être mentionné, soit l’épisode de la laborieuse décision rendue en 1983 d’accorder aux étudiants le choix de rédiger travaux et examens dans la langue de leur choix. Le tout commence en septembre 1981 quand le doyen des Écoles professionnelles demande au vice-recteur des clarifications concernant le règlement universitaire qui autorise les étudiants à se servir, à l’écrit, de la langue de leur choix. Ce règle-

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ment, qui n’avait jusqu’alors jamais provoqué de remous, prend une autre tournure quand des étudiants franco-ontariens, qui doivent suivre leurs cours en anglais, demandent insidieusement de pouvoir rédiger en français, faute de programmes en français dans les Écoles professionnelles. La question soulevée devient une véritable patate chaude et on comprendra que la réponse aura des répercussions politiques. Le vice-recteur Frank Turner s’en réfère alors au secrétaire du Sénat qui, à son tour, achemine la demande au Comité conjoint du bilinguisme une première fois, en octobre 1981. N’ayant reçu aucune réponse, la question est envoyée au même destinataire en février 1982, puis en mars, et à nouveau, en décembre. Finalement, la réponse arrive en mai 1983, soit 20 mois plus tard! C’est celle en vigueur encore aujourd’hui, c’est-à-dire que l’étudiant peut remettre un texte ou examen dans la langue de son choix et que la responsabilité de la correction incombe au professeur qui jugera de la meilleure façon d’en faire l’évaluation50.

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e n s e ig n e m e n t e n f r a nç a i s e t Bi l i ngu i s m e

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De 1984 à aujourd’hui : tout va très bien madame la Marquise! guy gaudreau

Ce troisième chapitre de l’histoire de la francophonie laurentienne laisse place à de nouveaux leaders dans la communauté universitaire : Girouard prendra sa retraite en 1986 et Gervais devra quitter l’année suivante. L’Assemblée des professeurs francophones qui avait jusqu’alors travaillé de pair avec eux se trouve, en quelque sorte, désorganisée et à la recherche de nouveaux porte-parole, rôle que ne pourra pas jouer à lui tout seul, le nouveau professeur de l’École de commerce, Jean-Charles Cachon. La question francophone n’est plus tellement posée par les professeurs et les étudiants, comme elle l’avait été jusqu’à maintenant, mais plutôt par l’administration qui se voit forcer la main par le contexte politique et judiciaire et qui va la récupérer en lui donnant sa propre légitimité et, bien sûr, des balises bien à elle. En effet, le contexte politique ontarien se modifie, à partir du milieu des années 1980, avec la Charte des droits et libertés, dans sa protection des minorités officielles, qui commence à avoir des retombées judiciaires sur le système d’éducation tandis que le gouvernement ontarien adopte, en 1987, la Loi 8 sur les services en français. De directeur à vice-recteur Renouvelé pour un mandat de cinq ans, en septembre 1983, Gervais, au retour de son congé de maladie, va poursuivre, grâce à l’appui des membres du CEF, le développement de programmes, notamment dans les Écoles professionnelles, soit en sciences infirmières, en éducation physique et en service social. Cela dit, l’arrivée de John Daniel, en 1984, modifiera les rapports jusque-là harmonieux qu’entretenait le CEF avec les autres administrateurs. En effet, Daniel revoit, peu de temps après son arrivée, la composition du Comité du budget et exclut Gervais et les doyens de cette instance décisionnelle cruciale. Présage de relations très tendues, ce geste, accompagné en 1985 de la nomination d’un nouveau vice-recteur, Charles

Bélanger, de qui relève Gervais, amènera ce dernier à s’exiler à Toronto, en 1987, et à travailler dans le cadre d’un prêt de service au ministère des Collèges et Universités. Il faut noter que ce départ n’est pas forcé par l’administration, car malgré les idées bien arrêtées et contestataires de Gervais, celle-ci fera preuve à son endroit – comme ce sera presque toujours le cas vis-à-vis d’autres opposants –, d’une grande ouverture d’esprit. Une des batailles que Gervais réussit néanmoins à mener à terme est celle de la bibliothèque où les achats de livres et de périodiques en français ne sont pas à la hauteur des attentes. Le bien-être des programmes en français réclame des efforts plus soutenus pour garantir une plus grande commande de livres en français. L’étudiant franco-ontarien a droit à des ouvrages dans sa langue maternelle. Dès octobre 1983, Gervais demande au conservateur de la bibliothèque des renseignements sur les budgets d’acquisition de livres en français. En dépit de multiples démarches, ces pressions ne permettent pas de faire avancer d’un iota la question du partage du budget d’acquisition. En janvier 1985, Gervais adresse donc au recteur 12 questions à ce sujet1. En les transmettant au secrétaire du Sénat, il demande que les réponses soient fournies lors de la réunion prévue au cours de ce même mois. En en faisant une affaire publique, quitte à se faire d’autres ennemis, il oblige le conservateur de la bibliothèque à rendre des comptes. Du point de vue de ce dernier et des responsables des programmes des sciences dont les périodiques, presque exclusivement en anglais, raflent la large part du budget d’acquisition, un livre est un livre, peu importe la langue ; comme des ouvrages de base n’existent qu’en anglais, il faut en tirer le meilleur rendement possible, étant donné les ressources disponibles limitées. Constatant néanmoins le peu de sommes affectées spécifiquement aux livres en français, le Sénat mettra sur pied, un an plus tard, le « Comité consultatif spécial du fonds de la bibliothèque en langue française » qui désignera Gervais comme président. Ce dernier remettra finalement le rapport du comité au Sénat, le 18 avril 1986, rapport qui recommande un fonds de rattrapage et une formule de répartition des budgets obligeant une certaine proportion de livres et de périodiques en français2. La création du poste de vice-recteur adjoint aux programmes et services en français, en remplacement du directeur des programmes en français, est recommandée par le Comité conjoint du bilinguisme après la tenue de neuf réunions entre novembre 1986 et mai 1987. Cette recommandation sera approuvée par le Sénat en janvier 1988. Ayant écarté la Faculté française, le Collège français et le Sénat bicaméral, les membres estiment que ce poste parviendra à répondre davantage aux nouveaux défis3. En effet, quelques événements politiques majeurs ont suscité cette remise en question. Outre la Loi 8, il faut mentionner le rapport Churchill qui souligne à grands traits la sous-scolarisation des Franco-Ontariens, mais aussi la création imminente de Conseils scolaires francophones homogènes en Ontario – le premier verra le jour en 1988. Ces conseils, comme on le sait, font suite à des victoires judiciaires consécutives à l’adoption de la Charte des droits et libertés de 1982. Incapable de s’entendre avec Bélanger, Gervais quitte son poste à l’été 1987. Il faudra six mois avant de redéfinir le poste et de trouver le bon candidat ou plutôt la

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dyane adam .  |  Nommée vice-rectrice adjointe à l’enseignement et aux services en français en juin 1988, Dyane Adam est la première femme à occuper un poste de cadre supérieur à l’Université Laurentienne. Dans ce rôle, elle saura se tenir sur la corde raide : au service de l’administration à laquelle elle doit sa loyauté, elle démontre néanmoins sa sensibilité aux besoins de la communauté francophone de l’Université et défend fermement les droits des femmes

bonne candidate, soit Dyane Adam. Fraîchement arrivée à la Laurentienne comme professeure de psychologie à l’été 1987, elle est nommée vice-rectrice adjointe aux programmes et services en français en janvier 19884. Première femme à occuper un poste de la haute administration, elle rentre en fonction, le 1er juin 1988, avec un discours féministe dérangeant. Elle siège au Comité du budget et assume, comme cela était convenu, la coordination du Conseil de l’enseignement en français. Nouvelle venue, elle ne peut pas entretenir les mêmes rapports ni la même complicité avec l’Assemblée des professeurs francophones. Sa légitimité, à l’inverse de celle de Girouard et de Gervais, provient forcément de l’administration, d’autant plus qu’elle ne connaît pas encore les professeurs francophones. Dans le cadre des soirées et des nombreuses rencontres informelles qu’elle organise, elle fait néanmoins avancer ses dossiers, calmant les craintes et les frustrations de certains, favorisant les échanges. Elle est douée d’habiletés consensuelles et d’un indéniable sens politique : sa nomination ultérieure comme Commissaire aux langues officielles du Canada ne fait que le confirmer. Plus largement, on peut avancer qu’elle a, en quelque sorte, profité du travail accompli par Gervais. Dès l’automne 1988, le recteur Daniel en fait le constat lorsqu’il clame que le nombre de cours offerts depuis 1984 a augmenté de 34 pour cent et que les inscriptions en français ont crû de 38 pour cent, ce qui se compare avantageusement au maigre 9 pour cent des inscriptions anglophones pour la même période. Comme le disait le recteur : « Vous connaissez tous la cause principale de ces changements intéressants. C’est l’implantation de nouveaux programmes, notamment chez [sic] les écoles professionnelles5 ». Au cours de son mandat de cinq ans, Adam mettra l’accent sur le développement de programmes de sciences en français grâce aux généreux appuis financiers du gouvernement ontarien dans le cadre de son programme de postes CEFO . Puisque le gouvernement ontarien avait modifié, à la fin des années 1980, sa politique de

De 1984 à aujourd’hui

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financement de ces postes en transformant ce programme de subvention unique et valable une année seulement en subventions récurrentes et renouvelables, cela garantissait à la Laurentienne un financement durable de ces postes qui n’auraient sans doute jamais vu le jour par la seule bonne volonté de la majorité laurentienne. L’arrivée d’une quinzaine de collègues en sciences va modifier progressivement l’image du corps professoral francophone en raison de leur pratique professionnelle où tout se passe en anglais, langue de communication universelle, mais néanmoins langue qui sape la fragile identité culturelle des Franco-Ontariens. S’ajoutent ainsi de nouveaux professeurs en sciences mais aussi ailleurs, qui ne sont toujours pas franco-ontariens, car l’Ontario français reste avare de ses fils et filles titulaires de doctorat. Ajoutons à cela le départ de ses leaders naturels et on comprend encore mieux le fait que l’Assemblée des professeurs perde sa sensibilité politique. La grande majorité des nouveaux venus, quand ils en sont capables, prennent du temps à saisir l’importance des enjeux politiques en milieu minoritaire. Au tournant des années 1990, l’Assemblée des professeurs francophones se trouve ainsi transformée et reléguée à un rôle secondaire. Déclassée par le Conseil d’enseignement en français accrédité – les modalités de son fonctionnement et la teneur des mandats de ses membres relevant toujours du Sénat –, l’Assemblée compte aussi plusieurs membres qui sont charmés par le style de gestion d’Adam. Pas étonnant alors que cette Assemblée, menée maladroitement par Yvan Morais et par l’auteur de ce texte, se tourne vers des activités sociales en organisant des fêtes de bienvenue aux nouveaux professeurs à l’automne et en s’occupant, après le départ d’Adam, en 1993, de l’organisation du Souper de la francophonie qu’elle avait lancé, de concert avec Raoul Étongué-Mayer, en 1990. C’est ailleurs que, dorénavant, se joue l’avenir de la francophonie laurentienne, soit dans les bureaux du vice-rectorat où on prendra un certains temps à concocter d’autres solutions de compromis, mais aussi dans la communauté franco-sudburoise qui, en 1989, fourbit ses armes pour une université française. Les tentatives d’instaurer un bicaméralisme On peut affirmer que le départ de Gervais, en 1987, a sans aucun doute rendu possible, à l’automne de la même année, la création du poste de vice-recteur adjoint. En effet, l’administration aurait eu bien du mal à créer ce poste s’il avait dû échoir au trop combatif et peu solidaire directeur du CEF. Son départ permet aussi au Comité conjoint du bilinguisme de reprendre du collier et de poursuivre la réflexion sur la structure administrative laurentienne dans un contexte politique particulièrement favorable à la francophonie ontarienne. Le Comité conjoint du bilinguisme tente, depuis plus de deux années [1987], de réviser les structures administratives actuelles pour qu’elles tiennent compte des nouveaux développements et des besoins particuliers en matière d’enseignement en français à la Laurentienne. À titre d’institution sollicitant la désignation en vertu de la Loi 8 sur les services en français, les critères de désignation qui sont ceux d’accessibilité, de disponibilité, de per-

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manence et de qualité des services et enfin d’une représentation efficace des Francophones à tous les paliers décisionnels, ont également agi comme toile de fond à cette démarche6.

Le premier fruit de la réflexion du Comité est livré par le recteur, en janvier 1989, soit peu de temps avant l’annonce de la création du premier Collège francophone ontarien, la Cité collégiale. Coїncidence? Nous ne le pensons pas. Daniel propose alors, aux fins de discussions, la création d’une Faculté de l’enseignement en français. Sa proposition, qui fait abstraction des obstacles qu’avait pourtant suscités ce projet au temps de Girouard, sera bien éphémère. En effet, dès le 17 février, le doyen Dewson informe le recteur qu’il a rencontré à deux reprises les professeurs de sa faculté – la première fois, seulement les francophones –, et que les réactions sont très hostiles7. Compte tenu que c’est au sein de la faculté des sciences sociales que le projet du recteur aurait le plus d’impacts, il vaut mieux chercher une autre solution. Cinq modèles de gestion des programmes en français seront par la suite développés par le Comité conjoint afin de trouver une solution. Outre une faculté française nouveau genre, on proposera aussi les modèles collégial, modulaire, bicaméral et un dernier, qui combine la structure modulaire et départementale. Ne nous arrêtons pas sur les caractéristiques de chacun, puisque seul le modèle bicaméral – tel que l’administration l’entendait au départ – suscitera des appuis, notamment de la part de l’Assemblée des professeurs francophones ; appuis qui seront jugés suffisants pour qu’il soit mis à l’essai pendant quelques années. Un sondage mené auprès de tous les professeurs francophones du campus aurait confirmé ce choix d’un bicaméralisme. Cependant, une quarantaine de professeurs signent une pétition exigeant un bicaméralisme où l’autonomie du secteur francophone serait beaucoup plus affirmée que ce qui avait été prévu au départ (avec un vice-rectorat aux affaires francophones, une parité entre francophones et anglophones à tous les échelons administratifs, etc.). Réexaminé au cours de l’année 1992–1993, cet aménagement administratif va faire l’objet d’un premier rapport approuvé par le Sénat en juin 19938, d’un second intitulé « La gestion de la francophonie laurentienne. Trois options », remis au printemps 1998 ainsi que de « Recommandations au recteur sur les modifications de la structure administrative » livrées en 1999 et dont la composante majeure sera approuvée la même année, parachevant ainsi le réaménagement administratif en faveur de la francophonie laurentienne. Ce qui frappe à l’analyse des documents relatifs à ce bicaméralisme rédigés au cours des années 1990, c’est la dramatique dilution du concept de bicaméralisme dont on est, par ailleurs, parfaitement conscients. « Le terme “modèle bicaméral” ou “option bicamérale” est mal choisi. L’Université ne peut pas fonctionner efficacement dans un modèle à deux chambres au niveau du conseil de faculté et aux niveaux supérieurs à celui-ci, et elle ne devrait pas essayer de le faire9. » Détournée de son véritable sens, l’expression demeurera néanmoins en usage et fera oublier celle plus juste que les auteurs de ces rapports avaient pourtant proposée, soit « la gestion des programmes par groupe linguistique », approuvée par le Sénat en juin 1993 ou cette autre expression plus récente de « bicaméralisme adapté10 ».

De 1984 à aujourd’hui

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Cette mascarade sémantique n’est pas innocente puisqu’elle va de pair avec une volonté de ne pas déplaire à personne ni à la majorité, et de composer à partir des situations forcément variables des différents départements et écoles. Les termes qui résument bien cette timide révision de la structure administrative sont pragmatisme et respect mutuel à l’échelle des départements et écoles. Aussi n’est-il pas question d’imposer un bicaméralisme là où les francophones ne sont pas parvenus à obtenir le contrôle de leur programme. « Le Sénat a […] adopté le principe du bicaméralisme, à mettre en œuvre selon la bonne volonté des départements et écoles11 ». C’est un bicaméralisme inversé et facultatif dont on parle à cette époque, qui se situe à des années-lumière des deux chambres paritaires réclamées par certains depuis le milieu des années 1970, soit l’application du bicaméralisme dans le vrai sens du mot, soit là où le pouvoir réel se trouve, au Sénat. Il ne faut donc pas se surprendre qu’une approche aussi timorée ne puisse qu’accoucher de réformes mineures, comme en témoignent les postes de coordonnateur de programme et de vice-doyen. Commençons par ce dernier poste, introduit à l’automne 1990. S’il existait auparavant des doyens adjoints, ces derniers ne faisaient qu’assumer certaines tâches secondaires afin de libérer les doyens. À partir de 1990, on maquille cette fonction en lui attribuant le titre de vice-doyen et on décrète qu’ils seront deux par faculté, un pour les programmes en français et l’autre pour ceux en anglais. Chacun sera responsable principalement de l’orientation des étudiants. « Naturellement, les questions reliées à l’administration de la convention collective continueront à relever du doyen12. » Quant aux coordonnateurs de programme – qui existaient déjà dans certaines écoles en 1990 et qui se sont progressivement répandus depuis –, ces postes ne sont nullement reconnus dans la convention collective. Même les réunions d’un programme en français d’un département ou d’une école n’ont aucune portée légale puisque le seul organisme administratif reconnu et compétent est celui de l’assemblée et de la direction départementales. S’agissant de ces coordonnateurs, certains auront une charge d’enseignement réduite, mais la plupart exercent cette fonction de manière informelle et sans aucune compensation de sorte qu’ils s’apparentent davantage à des coordonnateurs officieux. Pourtant, comme l’indique le rapport de 1993, l’un des principes fondamentaux de cette gestion approuvée au Sénat « est celui de garantir, pour chaque groupe linguistique, un rôle prépondérant dans l’élaboration et la gestion des programmes d’enseignement dans sa langue respective et dans le choix du personnel affecté à cet enseignement13 ». Cette autonomie demeure, dans la pratique, difficile à mettre en application, car l’assemblée départementale demeure souveraine. Seules l’adoption et la modification de cours d’un programme déjà existant pourront être traitées par groupe linguistique selon une structure parallèle en anglais et en français et ce, à compter de 1999. La prise en charge des programmes par les francophones connaît néanmoins de bons moments en 1997, notamment grâce au travail du vice-recteur aux affaires francophones, Gratien Allaire, arrivé à l’été 1993, pour remplacer Adam. Dans

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l ancement officiel d’un numéro de l a revue du nouvelontario , vers 1984.

les sciences sociales, les programmes en français s’organisent. C’est ainsi qu’au département d’histoire, les collègues impliqués dans l’enseignement de l’histoire en français tiennent leur première réunion en janvier de cette année-là. La concertation des cours en français au sein de la faculté débouche sur certains cours reconnus dans plus d’un programme, permettant ainsi une offre de cours plus variée. À l’automne 1997, on établit même une chambre francophone et une autre anglophone au Conseil de la faculté des sciences sociales. Ce dédoublement facultaire sera en place quelques années, puis abandonné au gré des remplacements des membres des différentes unités appelés à y siéger. Plus concrètement, à l’échelle des départements et des écoles, ce faux bicaméralisme se vit de manière bien différente selon les unités d’enseignement. Quelquesunes ont adopté des structures parallèles avec un comité francophone et un autre anglophone qui fonctionnent bien et qui garantissent la pleine autonomie des programmes en français. C’est le cas en service social et à l’École d’activité physique. En revanche, dans plusieurs départements, tout se passe en anglais lors des réunions afin d’éviter les mêmes frustrations que celles éprouvées par Dorais au début des années 1970. Dans d’autres, les échanges se font dans les deux langues. Les mises à la retraite peuvent bouleverser rapidement la situation, selon qu’il s’agisse de départs d’unilingues ou de bilingues. On ne peut pas clore cette section sur la place de la francophonie dans les structures administratives laurentiennes sans dire deux mots du poste de vice-recteur aux affaires francophones dont l’évolution, depuis une vingtaine d’années, marque un progrès considérable. Rappelons au départ que l’arrivée de Dyane Adam avait en quelque sorte permis la transformation du poste de directeur du CEF en celui de vice-recteur adjoint aux affaires francophones, titre dont héritera également son successeur, Gratien Allaire. De la même manière qu’Adam travaillait efficacement avec le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche Bélanger, on peut en dire autant du travail d’Allaire avec le vice-recteur, Geoffrey Tesson, dont il faut souligner l’ouverture d’esprit face aux besoins d’autonomie des francophones. C’est ainsi que personne ne sera vraiment surpris d’apprendre la promotion

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d’Allaire au titre de vice-recteur associé – et non plus adjoint – aux affaires francophones en 1996. Le non-renouvellement d’Allaire à ce poste, malgré les appuis de Tesson, va conduire, en 1998, à l’arrivée d’un vice-recteur associé aux affaires francophones, provenant cette fois de l’intérieur de l’institution, soit André Roberge, professeur au département de physique. Et dès le mois de mars 1999, à la suite des recommandations des Tesson, Roberge et Smith, le Sénat décrétera que le vice-rectorat à l’enseignement et à la recherche deviendra, pour la première fois, paritaire avec un titulaire chargé des affaires francophones et un autre chargé des affaires anglophones. Finalement, le souhait exprimé par Gervais, dès 1976, se concrétise. Toutefois, dès 2002, le recteur intérimaire Falter annonce, le 8 février, que le comité chargé de trouver un nouveau vice-recteur francophone – Roberge ayant quitté pour l’Université Sainte-Anne – est dissout et reprendra ses activités après l’arrivée de la nouvelle rectrice Woodsworth. Plusieurs collègues francophones craignent alors l’abolition de ce poste afin de rendre l’administration plus efficace. Ces rumeurs, fondées ou non, amènent l’Assemblée des professeurs francophones et son président (et auteur de ce texte) à monter aux barricades. Quelques courriels, la transmission d’une proposition votée presque à l’unanimité le 5 avril par l’Assemblée qui exige le maintien du poste, de même que l’intervention de la future rectrice vont permettre la poursuite des activités du comité de recherche qui, en janvier 2003, recommande la nomination de Harley d’Entremont qui, à l’inverse de ses prédécesseurs, sera même renouvelé dans ses fonctions en 2007. L’université française en Ontario Avec autant de sources de déception pour les francophones, qui s’étonnera de voir apparaître, à quelques occasions, l’idée d’une université française en Ontario? Deux épisodes doivent être relatés à ce sujet pour mesurer l’état d’esprit de la communauté universitaire. Le premier remonte à 1980. Différents intervenants signalent alors au gouvernement la nécessité de cette institution universitaire : l’AEF et le Conseil d’éducation franco-ontarien. Direction-Jeunesse embauche même un chercheur pour recueillir des données sur le statut des Franco-Ontariens à la Laurentienne. Le Comité d’action pour une Université française en Ontario, le CAUFO , est mis sur pied et présidé par Serge Dignard auquel se joignent Girouard du CEF, Georges Bélanger du département de français, Raymond Lallier des sciences de l’éducation, Roger Bernard du Collège de Hearst, de même que le recteur de l’Université de Sudbury, Lucien Michaud. Il faut dire que le faible nombre de programmes offerts en français à cette époque attise les frustrations et joue en faveur d’une telle réclamation. Un deuxième argument est d’ordre comparatif : la situation avantageuse de la communauté angloquébécoise. Comme l’avait mentionné Dignard lors d’une entrevue accordée au Sudbury Star, « if Québec’s English-speaking minority were forced into bilingual institutions, they would be screaming murder14 ». Un autre facteur, plus important peut-être, est celui de la transparence de la gestion des subventions au bilinguisme par la Laurentienne. Alors que le CAUFO 254

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inauguration officielle de l a bibliothèque j .n . desmarais par paul desmarais en juin 1990.

fait connaître sa position, le ministre Fisher des Collèges et Universités reçoit, le 2 juillet 1980, du sous-ministre Wilson, une note de service fort révélatrice à ce sujet. Yet the University has never made public its disposition of bilingualism grants and detailed expenditure on programs in French. This lack of public accountability may have created the feeling among Franco-Ontarian students and faculty that the bilingualism grant was not used wholly to fund courses in French. The feeling of powerlessness to improve the program and courses offering at the University could be the origin of the demand for a separate institution15.

Après avoir envoyé à Sudbury et à Hearst un de ses fonctionnaires, Claude Lacombe, pour rencontrer certains membres du CAUFO 16, le ministre ne donnera pas suite à ce projet jugé irréaliste qui ne correspond pas aux attentes de la population étudiante franco-ontarienne qui préfère, selon le sous-ministre Wilson, étudier dans une institution bilingue. Bien que toujours d’actualité au cours des années 1980 – la preuve en est le numéro spécial de la Revue du Nouvel-Ontario consacré en 1985 à l’université française en Ontario17 –, la question connaît un regain de popularité en étant discutée non plus seulement entre universitaires convaincus mais sur la place publique. Dès février, Hector-L. Bertrand, éditorialiste au journal Le Voyageur, appuie le projet d’une université française en cherchant à répondre au vœu du recteur Daniel de mettre sur pied une faculté française. Selon l’éditorialiste, « la seule solution efficace au problème actuel est la fondation d’une université publique française à Sudbury qui desservirait tout l’Ontario français. Ottawa vient d’obtenir un Collège postsecondaire français. À Sudbury maintenant de réclamer une université publique totalement française18 ». On ne saurait être plus clair. Au cours des 12 mois suivants de nombreuses interventions seront rapportées dans les journaux au sujet des vertus du bilinguisme et de l’université française. Il faut dire que le contexte politique a bien changé avec la Loi 8 et les retombées judiciaires de la Charte des droits et libertés qui encouragent la population

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nord-ontarienne à réclamer, à son tour, un Collège communautaire unilingue de langue française. Il y a aussi l’accord du Lac Meech, toujours d’actualité, puisque signé en avril 1987, accord qui devait être approuvé au plus tard le 23 juin 1990 par toutes les provinces canadiennes afin de reconnaître le Québec comme société distincte. Ces trois mesures qui profitent directement et indirectement à la cause francoontarienne dérangent néanmoins une certaine couche de la population anglophone19. C’est ainsi que dès le lendemain de l’éditorial de Bertrand, Daniel prend la défense du bilinguisme laurentien en mettant l’accent sur le fait que cela demeure la meilleure solution pour affronter des extrémistes tels que Jack Andrew, venu à Sudbury mener sa croisade anti-bilinguisme devant une foule de 900 personnes au Grand Theater, et Billie Christiansen, candidate du parti anti-bilinguiste, Confederation of Regions Party, défaite aux dernières élections fédérales de novembre 1988 et qui crie haut et fort sa déception d’avoir perdu son emploi à la Laurentienne parce qu’elle ne maîtrisait pas les deux langues officielles20. Habilement, le recteur utilise comme épouvantail le discours extrémiste de certains anglophones afin de valoriser une position modérée qui valorise son administration. Près de deux mois plus tard, Daniel ira plus loin dans une lettre au Sudbury Star. But the country is now debating the Meech Lake Accord and we at Laurentian are developing new organizational arrangements. Perhaps we shall call them the Ramsey Lake Accord! […] Like Canada, of course, Laurentian experiences separatist forces that would split it up […] I believe that northern Ontario will lose something valuable if the separatist forces win the day […] Canada has chosen neither to assimilate its minorities in a melting pot like the U.S.A., nor to promote separate development like South Africa, so a bilingual university makes sense in a region like northeastern Ontario21.

Pour faire la promotion de l’université française, un groupe d’universitaires est créé cette année-là. Il s’agit de la Société des universitaires de langue française de l’Ontario, la SULFO , dont un des porte-parole sur le campus est Jean-Charles Cachon. Ayant convoqué l’Assemblée des professeurs francophones, à l’automne 1989, il tentera, lors de cette réunion, de rallier les professeurs présents à ce projet. L’auteur de ce texte, alors nouveau professeur, n’avait pas été convaincu, pas plus du reste que la majorité des collègues présents dont un bon nombre était des universitaires fraîchement embauchés. Un des arguments évoqués contre ce projet était la crainte de créer une petite université de second ordre qui servirait plus de ghetto que de lieu d’épanouissement intellectuel. Si le fruit ne semblait pas mûr à l’intérieur des murs laurentiens, il l’était bien davantage à l’extérieur alors que la SULFO intervenait, par exemple, pour dénoncer les propos du recteur22 qui prétendait que la masse critique d’étudiants n’était pas atteinte23. On pouvait également compter sur l’éditorialiste du Voyageur, pour faire la promotion du projet et dénoncer les opposants qui, selon lui, ne sont pas seulement des anglophones, « mais trop souvent hélas d’un petit nombre

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de francophones venant de l’extérieur de notre province24 ». Dans la même édition du Voyageur, la SULFO fera paraître un encart sur deux pages afin de répondre aux neuf principales objections des opposants à l’université française25. Cet encart, qui connaît un certain succès, reprend intégralement un texte paru un peu plus tôt dans le journal étudiant L’Orignal déchaîné fondé, en 1987, par le dérangeant chargé de cours Normand Renaud et par un étudiant en histoire, Bruno Gaudette. Bien que le rédacteur de cet encart soit officiellement la SULFO , la paternité en revient en fait à Renaud, devenu ardent défenseur de l’université française en Ontario. Malgré quelques tentatives de relancer le débat, le projet disparaîtra peu à peu de la scène universitaire. Les six premiers mois de l’année 1990 connaîtront une période de tensions linguistiques qui nuiront sans aucun doute aux échanges d’idées. Rappelons le triste épisode du vote d’unilinguisme du conseil municipal de Sault-Sainte-Marie, au début de février 1990, de même que la mort de l’Accord du Lac Meech en juin. L’heure n’est plus à céder des concessions aux francophones du pays et encore moins à créer un précédent en Ontario. C’est pourquoi la communauté franco-ontarienne va mobiliser ses troupes vers un projet moins litigieux, celui de la création d’un deuxième collège de langue française pour le nord de l’Ontario. La francophonie laurentienne en 2007 : état des lieux Pour clore cette histoire, arrêtons-nous sur la situation de la francophonie aujourd’hui en examinant, dans un premier temps, l’évolution des inscriptions annuelles de même que l’état du bilinguisme et des programmes offerts en français à la Laurentienne et dans les universités fédérées, en se rappelant le portrait similaire que nous avions esquissé près de 35 ans auparavant. Commençons par les inscriptions telles que publiées dans les statistiques officielles annuelles du Secrétariat général et dont les données récentes sont reproduites au tableau 13,1. Si, au tournant des années 1970, l’administration était mal à l’aise devant le fait que la communauté franco-ontarienne ne composait pas le tiers des inscriptions, niveau considéré alors comme représentant sa juste part, on s’étonnera qu’aujourd’hui, personne ne s’indigne d’une telle minorisation de la francophonie étudiante, qui ne s’explique pas seulement par l’assimilation croissante de sa population. Après quelques années pendant lesquelles ce pourcentage a oscillé autour de 25 pour cent, au tournant des années 1990, grâce à l’arrivée de nouveaux programmes en français dans les sciences et les écoles professionnelles, voilà que nous retombons sous la barre des 20 pour cent. La présence relativement récente d’un contingent d’étudiants internationaux qui se dirigent exclusivement vers les programmes en anglais serait une explication commode, si on ne remettait pas en question le type de recrutement effectué. Certes, on pourrait retenir la langue maternelle des étudiants afin de gonfler la présence franco-ontarienne sur le campus. C’est d’ailleurs ce que l’administration préfère parfois retenir pour démontrer la place de la francophonie laurentienne, comme dans une brochure publiée, en 1993–1994, par l’Université et intitulée « La

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TA BL E au 13,1  |  Évolu t ion du nom br e d’ét u di a n ts à l a L au r e n t i e n n e au bac c a l au r é at et au x ét u de s su pér i eu r e s , à t e m ps pl ei n et à t e m ps pa rt i e l , se l on l a l a ngu e de s pro gr a m m e s*, a n n é e s choisi e s Année Français Bac.

Anglais 2e et 3e TOTAL Bac. cycles

2e et 3e cycles

TOTAL

1986–87 1988–89 1990–91 1993–94 1997–98 2000–01 2003–04 2006–07 2007–08

19 (8 %) 16 (9 %) 18 (10 %) 72 (27 %) 96 (28 %) 54 (17 %) 53 (13 %) 41 (7 %) 59 (9 %)

223 (92 %) 172 (91 %) 158 (90 %) 192 (73 %) 250 (72 %) 271 (83 %) 351 (87 %) 517 (93 %) 586 (91 %)

4 487 (80 %) 6 338 (77 %) 5 464 (74 %) 5 937 (77 %) 4 798 (78 %) 4 592 (79 %) 6 106 (80 %) 7 504 (82 %) 7 257 (83 %)

1 074 (20 %) 1 418 (23 %) 1 951 (27 %) 1 707 (23 %) 1 243 (21 %) 1 173 (21 %) 1 466 (20 %) 1 555 (18 %) 1 476 (18 %)

1 093 (20 %) 1 496 (23 %) 1 969 (26 %) 1 779 (23 %) 1 339 (22 %) 1 227 (21 %) 1 519 (20 %) 1 596 (18 %) 1 535 (17 %)

4 264 (80 %) 4 732 (77 %) 5 306 (73 %) 5 745 (77 %) 4 548 (79 %) 4 321 (79 %) 5 755 (80 %) 6 987 (82 %) 6 671 (82 %)

* Le critère de la langue principale du programme demeure une donnée qui surestime le poids des inscriptions françaises puisque certains étudiants suivent des cours en anglais tout en étant inscrits dans un programme en français en raison d’une meilleure offre de cours ; l’inverse est rarissime.

présence francophone à l’Université Laurentienne. Les réalisations concrètes ». Selon ce dernier critère, la place des francophones en 1991–1992 s’établirait à 29 pour cent plutôt qu’à 24 pour cent (si on retenait la langue principale des programmes), ce qui représente une différence non négligeable. Mais cette variable de la langue maternelle fait abstraction de l’assimilation survenue au primaire et au secondaire et même à la Laurentienne – en raison de la non-disponibilité de certains programmes – et surtout, elle ne modifie en rien la tendance observée au cours des dernières années. Les piètres résultats observés au niveau des études supérieures, en forte croissance, ne sont pas étrangers à cette situation, tout comme la mise sur pied, en 2003, d’un programme d’éducation en anglais, fort populaire. Il faudra certes s’interroger sur cette rareté d’étudiants franco-ontariens aux études supérieures et en connaître les causes. L’offre très asymétrique de programmes en français en est-elle responsable, comme c’était le cas pour les programmes du premier cycle au cours des deux premières décennies de la Laurentienne? Selon le site Internet

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officiel de l’Université en date de l’automne 2007, on compte 14 programmes de maîtrise et de doctorat offerts uniquement en anglais, contre 7 bilingues qui sont donc offerts complètement en français. On pourrait croire que les collègues dans les sciences sont les premiers responsables de cette déplorable situation. Inféodés à la langue de Shakespeare dans leur pratique de recherche et désirant, en toute bonne foi, offrir ce qu’ils estiment être le meilleur, ils n’ont pas pris conscience qu’une partie d’entre eux devaient leur emploi à la communauté franco-ontarienne qui, elle, même si elle ne semble pas le réclamer à grands cris, serait en droit de s’attendre à plus d’eux. Faisant abstraction de la dimension politique des programmes, ils cherchent à former les meilleurs chimistes ou biologistes adaptés au marché ontarien et nord-américain, suivant ainsi scrupuleusement les règles du jeu universitaire. Mais est-ce leur rôle de tenir compte de cette dimension politique de l’offre des programmes dans une institution bilingue? Leur demande de programmes d’études supérieures a été faite en toute bonne foi en n’exigeant pas au départ l’implantation de programmes bilingues de peur de trop demander de ressources supplémentaires et de voir ainsi leur requête refusée. Si on peut les excuser d’avoir fait abstraction de la chose politique, on ne peut pas en dire autant du bureau du vicerectorat aux affaires francophones qui doit même faire des enjeux politiques son pensum quotidien. Se sentant depuis Adam redevables à la Laurentienne dont la fonction première est de croître en tant qu’institution, plutôt qu’à la communauté franco-ontarienne à qui ils doivent pourtant leur poste, les titulaires du poste ont, dans l’ensemble, agi en accommodant leur mandat avec l’obligation absolue d’être solidaire vis-à-vis de leurs collègues administrateurs anglophones. Revenons maintenant à l’offre de programmes en français. Quelle est-elle exactement depuis une quinzaine d’années? Prenons-en la mesure. Force est d’admettre qu’il y a peu de nouveaux programmes en français au niveau du premier cycle. On peut nommer les programmes de Communication publique de l’Université de Sudbury, celui des Arts d’expression et celui d’orthophonie qui a eu un départ difficile passant d’un programme de maîtrise à un programme de baccalauréat. Pour les programmes offerts dans les deux langues, il faut ajouter celui de sages-femmes et on a fait à peu près le tour des gains. Mais il y a aussi les pertes, celles de traduction, d’études cinématographiques et des cours d’anthropologie en français. Le bilan demeure modeste comparativement à la coûteuse et unilingue École de médecine et au programme en éducation du côté anglophone. Blâmer seulement l’administration serait cependant beaucoup trop simpliste, car il faut reconnaître une paralysante apathie du corps professoral francophone, y compris dans les sciences sociales et les humanités, où le personnel est traditionnellement plus militant. On se contente des programmes existants. Privé depuis longtemps de leader de talent et dominé, pour les raisons que l’on sait, par la présence de collègues venant majoritairement du Québec, le corps professoral francophone vaque à ses occupations quotidiennes, comme s’il exerçait ses fonctions en milieu majoritaire. Tout va très bien madame la Marquise! Dans le prolongement de cette réflexion qui cherche encore des motifs de réjouissance, passons maintenant en revue les programmes qui sont effectivement

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TA BL E au 13, 2  |  E st i m at ion du bi l i ngu ism e du c or ps profe s s or a l et offr e de pro gr a m m e s e n fr a nç a is , se l on l e s dépa rt e m e n ts et éc ol e s , au tom n e 2 007 * Département, École ou Faculté

Professeurs bilingues

Professeurs en voie d’être bilingues

Anglais 2 10 Anthropologie 0 4 Arts d’expression 3 0 Biologie 7 10 Chimie et biochimie 14 5 Commerce* 16 16 Communication publique 2 0 Droit et justice 4 3 Études classiques 3 0 Études des femmes 0 2 Folklore et ethnologie 1 0 Français et orthophonie 10 3 (+2 à venir) Génie 2 15 Géographie 6 6 Histoire 9 6 Langues modernes* 5 2 Mathématiques et 9 10 informatique* Philosophie 7 4 Psychologie 6 10 Physique 7 3 Sages-femmes 0 1 Sciences de l’activité physicque 14 12 Sciences économiques* 5 8 Sciences de l’éducation 9 3 Sciences infirmières 9 19 Sciences libérales 1 0 Sciences politiques 8 3 Sciences religieuses 4 4 Sciences de la terre 2 13 Service social* 10 9 Sociologie 10 8 Théâtre 0 2 TOTAL 177 193

Programmes en français Ne s’applique pas Aucun 3, 4 ans 3, 4 ans 3, 4 ans 4 ans 3, 4 ans 3, 4 ans Aucun Aucun 3 ans 3, 4 ans Aucun 3, 4 ans 3, 4 ans et maîtrise Ne s’applique pas 3, 4 ans 3, 4 ans 3, 4 ans et maîtrise 3, 4 ans 4 ans 4 ans et maîtrise 3, 4 ans 3 ans, formation initiale 4 ans Continuation 3, 4 ans 3, 4 ans Aucun 3, 4 ans et maîtrise 3, 4 ans et maîtrise Aucun

* Cette estimation résulte d’une consultation effectuée auprès du corps professoral et auprès des secrétaires des différentes unités d’enseignement. Elle exclut les vice-recteurs et la rectrice, mais non le doyen ou la doyenne en poste dans la faculté correspondante qui sont alors comptabilisés dans leur département d’attache. Seuls les professeurs à plein temps sur le campus ou en congé sabbatique ont été retenus, qu’ils soient permanents ou non. Nous admettons que ce critère reste désavantageux pour un programme comme celui de sages-femmes.

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michel dupuis et gaétan gervais lors de l a cérémonie marquant le 30 e anniversaire du drapeau francoontarien , 2005.

offerts en français, à l’automne 2007, tout en faisant le portrait du bilinguisme du corps professoral (voir le tableau 13,2). S’il y a insuffisance de programmes en français, la faute ne doit pas être imputée à la sélection du corps professoral. La proportion de professeurs qui communiquent sur une base régulière dans les deux langues – telle était notre définition du bilinguisme utilisée pour la réalisation de cette enquête – paraît certes adéquate puisqu’elle compose plus de 40 % de tout le corps professoral. Il y a assurément la présence d’un solide contingent de collègues francophones partout sur le campus. Compte tenu de la faiblesse des inscriptions en français et même en tenant compte du nombre moyen d’étudiants par cours, force nous est de déduire, à partir de ce dernier tableau, qu’un nombre non négligeable de professeurs francophones offrent sur une base régulière des cours en anglais. Et pas seulement dans les programmes de maîtrise et de doctorat, mais aussi au niveau du baccalauréat. Plusieurs motifs sont à l’origine de cette situation. Certains candidats bilingues ont été embauchés à des postes en anglais dans des départements offrant les deux programmes, comme c’est le cas, par exemple, en chimie. Parfois, le programme compte de telles embauches même s’il n’existe pas en français ; telle est la situation en sciences de la terre ou en études classiques. Dans les départements bilingues, il est très tentant pour le professeur d’offrir le même cours dans les deux langues pour éviter une préparation de cours, pour consacrer plus de temps à la recherche ou parce que les ressources limitées forcent parfois les départements à attribuer à un professeur un cours en anglais où les inscriptions sont nombreuses plutôt qu’un cours en français avec peu d’étudiants. Enseigner à deux étudiants plutôt qu’à une quinzaine est rarement accepté avec enthousiasme. Mais si le doyen ou le vice-recteur ne joue pas son rôle de chien de garde, le programme en français peut en être affecté alors que l’idée qu’un programme puisse compter sur un grand nombre de professeurs bilingues est excellente, car elle permet à la clientèle étudiante d’être

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exposée à un plus large éventail de professeurs. Malheureusement, nous sommes convaincu qu’un potentiel de connaissances livrées en français est ainsi détourné au profit de la majorité! Grâce à la qualité de leur dossier de recherche et de publication, élément qui constitue un critère indispensable de l’attribution des programmes d’études supérieures par le ministère des Collèges et des Universités, les professeurs francophones contribuent d’une manière telle à l’ensemble des programmes universitaires que ces derniers, offerts en anglais – avec quelques cours en français parfois disponibles –, tomberaient sans leur contribution. Ne faudrait-il pas que la communauté franco-ontarienne, bien peu demandeuse, en profite à son tour? Malgré tout, quels progrès accomplis depuis 1975! La gamme de programmes de premier cycle, sans être complète, se compare très avantageusement à celle d’il y a 35  ans. Les sciences affichent plusieurs programmes complets, de même que les écoles professionnelles. Dans certains départements des sciences sociales, l’étudiant peut même suivre en français son baccalauréat et sa maîtrise, s’il le désire, sans aller à Ottawa. Outre ceux rattachés à un département, indiqués au tableau 13,2, il y a également deux programmes dont le corps professoral se répartit entre différentes unités. C’est le cas du programme de maîtrise en développement humain et du nouveau doctorat en sciences humaines, offerts tous deux dans les deux langues. Si le verre laurentien offert à la communauté franco-ontarienne paraît encore à moitié vide, s’il nous est offert seulement après des demandes toujours répétées, force nous est de reconnaître que, en ce temps de célébration du cinquantenaire de la Laurentienne, il est aussi à moitié plein. Certes notre soif est collectivement plus grande, mais il faut admettre que le contenu de ce verre assouvit celle de la plupart d’entre nous.

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en sei g ne m en t en f r a n ç a i s e t b il in g ui sm e

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Dans un monde d’homme : les premières années, 1960–1972 linda ambrose

Tandis que la Laurentienne tente de concilier les exigences politiques et structurelles associées à la fondation d’une université bilingue dans le Nord de l’Ontario, les revendications féministes déferlent par vagues sur le pays. À Sudbury, pourtant, et plus encore à la Laurentienne dans ses premières années, la présence globale des femmes n’est guère marquante. « Sudbury est une ville d’hommes, note un rapport de recherche universitaire en 1965. On y compte 107 hommes pour 100 femmes, comparativement à 101 hommes pour 100 femmes dans l’ensemble de l’Ontario et du Canada1. » En dépit de ce déséquilibre démographique entre les sexes, l’approche des années 1970 voit poindre des indices de changement à l’horizon pour la Laurentienne. La dynamique initiale laissant les femmes en marge de la nouvelle université, heureuses de faire un don occasionnel ou de servir le thé lors d’événements spéciaux, s’apprête à changer. Du point de vue des relations hommes-femmes, l’université qui ouvre ses portes en 1960 adopte fidèlement le modèle familier d’après-guerre, où des rôles bien distincts échoient à chaque sexe. L’expérience historique des femmes à la Laurentienne reflète toutefois les tendances de la société canadienne en général. Le mouvement des femmes et la redéfinition des politiques provinciales et fédérales sur la place des femmes dans la société, au travail et à l’université font sentir leurs effets à travers le pays. La Laurentienne n’y échappe pas, des revendications en ce sens suscitant l’application de nouvelles politiques sur le campus. Dès 1961, l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université, ou ACPPU, adopte une déclaration sur l’égalité des chances pour ses membres féminins qui affirme ceci : L’Association canadienne des professeures et professeurs d’université estime, qu’en accord avec le principe du salaire égal pour travail égal, il ne devrait y avoir, dans le corps professoral, aucune discrimination quant au sexe, en ce qui concerne le salaire, le statut et les tâches. Toute femme qui fait partie du corps professoral d’une université canadienne devrait avoir les mêmes avantages qu’un homme ayant la même compétence2.

Sur la plupart des campus canadiens, dont celui de la Laurentienne, il faudra une décennie au moins pour que le principe de l’égalité entre les sexes oriente les politiques et les gestes. L’histoire de cette évolution n’en sera pas une de progrès continu, mais bien de conflits et de transformations. Les changements se produiront souvent de mauvais gré, au terme d’une forte résistance. On s’étonne aujourd’hui de tout le chemin parcouru et du long temps qu’il faut pour le parcourir. Si la majorité convient que les universités n’ont pas encore réalisé l’utopie égalitaire pour tous, libre de toute forme de discrimination, elle admettra du même souffle que du point de vue de la situation des femmes, de grands progrès ont été accomplis à travers le pays, de façon générale, et à la Laurentienne, tout particulièrement. Cette dernière possède aujourd’hui des règles servant à prévenir le harcèlement (sexuel ou d’une autre nature), à appliquer le principe d’équité en matière de traitement salarial et de conditions de travail et pour empêcher toute discrimination dans l’accès aux bourses d’études ou de recherche et aux services de garde. Les exemples de ces progrès ne manquent pas. La toute première rectrice de la Laurentienne, Judith Woodsworth, a terminé son mandat en juillet 2008. Au moment d’écrire ces lignes, une femme préside le Conseil des gouverneurs et supervise le comité de sélection du prochain recteur (Carolyn Sinclair, présidente depuis 2007, est la deuxième femme à la tête du Conseil des gouverneurs ; Maureen Lacroix a occupé cette fonction de 2001 à 2004). Plusieurs femmes occupent des postes de direction au sein de l’administration, dont Susan Silverton, vicerectrice aux études, Liette Vasseur, vice-rectrice associée à la recherche, Denise Ouellette, secrétaire de l’Université, Anne-Marie Mawhiney, doyenne de la faculté des écoles professionnelles, et Huguette Blanco, doyenne intérimaire de la faculté de gestion. Les femmes comptent pour environ 36 pour cent du nombre total de professeurs, un taux encore loin de représenter la moitié du corps professoral, mais tout de même deux fois ce qu’il était au début des années 1970. En 2008, des trois douzaines de départements, de programmes et d’écoles que possède la Laurentienne, quatorze, ou 39 pour cent, ont une femme à leur tête3. Au premier cycle, enfin, les filles sont, en 2007, deux fois plus nombreuses (67 pour cent) à s’inscrire que les garçons (33 pour cent)4. Ces faits semblent décrire un établissement universitaire entièrement différent de la Laurentienne, cinquante ans plus tôt. Les combats engagés dans les années 1970 et 1980 relativement à la situation des femmes ainsi que les politiques et les pratiques instituées dans les années 1980 et 1990 expliquent cette transformation. L’observation des contextes panontarien et pancanadien permet de mieux saisir ce qui a poussé la Laurentienne à évoluer ainsi. Même si les femmes y font aujourd’hui bonne figure à ses divers paliers de direction, leurs positions, sur le plan individuel, sont fragiles. Tandis qu’elles quittent ces paliers pour accepter d’autres défis, il faut continuer, aujourd’hui et à l’avenir, de veiller à la place des femmes à la Laurentienne afin que la poursuite d’une réelle égalité entre les sexes connaisse enfin sa conclusion heureuse. Les femmes qui, dans les années 1960, font occasionnellement la manchette locale relativement à la nouvelle université le font habituellement à titre de per-

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sonnes de soutien ou de femmes d’exception. La plupart du temps, leur rôle de soutien est celui de bénéficiaire de la nouvelle institution ou de fidèle épouse de l’homme qui gère l’université ou y enseigne. L’autre identité médiatique, celle de femmes d’exception, s’applique à des étudiantes décrochant leur diplôme de la Laurentienne (quoiqu’en nombre nettement inférieur aux garçons) ou, plus rarement encore, à des professeures travaillant « dans un monde pour homme5 ». La seule présence des professeures leur suffit habituellement à faire la manchette, chaque embauche d’une femme comme enseignante est généreusement soulignée. Certaines professeures sont même présentées comme des défricheuses à la lumière de la carrière qu’elles se bâtissent. Bien moins susceptibles d’être remarquées sont les membres féminines du personnel administratif, elles dont le discret travail de coulisses comme secrétaire ou commis de bureau permet à toute l’entreprise de fonctionner normalement. Il n’est en effet pas facile de retrouver la présence des femmes à la Laurentienne dans les premières années, car les sources sont, au mieux, bien fragmentaires. Si on examine toutefois avec attention les documents d’archives sur la gouvernance et l’administration de l’Université, il devient possible de dégager une vision des multiples expériences des femmes à la Laurentienne durant la première décennie de celle-ci. Les coupures de presse ont aussi beaucoup de renseignements à livrer à ce sujet, encore que leur cible soit souvent ces femmes dont les réussites sont jugées exceptionnelles. Cela, encore une fois, reflète une tendance forte de la société canadienne voulant qu’on ne prête attention qu’aux femmes dignes de mention, un phénomène que les historiennes des femmes nommeront plus tard les women worthies, c’est-à-dire les pionnières ayant su s’établir dans un univers masculin par la force de leurs réussites. Elizabeth M. Granger Bennett, l’épouse du recteur du même nom, constitue un exemple de femme jouant un rôle de soutien clé, quoiqu’en arrière-plan. Elle devient l’objet d’attention médiatique quand, en décembre 1961, le Sudbury Star la présente comme ayant « une charmante personnalité, avec un adorable sens de l’humour, une force tranquille et un esprit vif ». Le journal s’empresse toutefois d’ajouter qu’« elle a bien plus que cela […] elle a aussi une “tête sur les épaules”6 ». Pour tout dire, la femme du recteur détient trois diplômes : un baccalauréat du Collège Victoria de l’Université de Toronto et une maîtrise et un doctorat de l’Université du Wisconsin, où ses résultats lui ont valu les grands honneurs académiques. Elizabeth Bennett a enseigné les langues modernes et été professeure de français sur trois campus avant de venir à Sudbury. Ce que le quotidien célèbre réellement est le prix littéraire Ryerson 1960 qu’elle vient de remporter pour son troisième roman, Short of the Glory. La journaliste Betty Meakes explique que même si sa trame narrative située dans la Nouvelle-France des années 1690 « nous semble éloignée dans le temps et par les mœurs », le livre porte un message très contemporain. Ce message, écrit-elle, concerne « les manières dont des gens de langues et de régions différentes peuvent apprendre à vivre ensemble en amitié et à apprécier leurs approches mutuellement distinctes de la vie. » Par sa formation universitaire et sa sensibilité manifeste aux enjeux de langue et de culture, Elizabeth Bennett constitue assurément une importante alliée et conseillère pour son

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des membres de l’ordre impérial des filles de l’empire font don d’une masse cérémoniale universitaire .  |  Les femmes, par le biais de leurs groupes communautaires, font des contributions importantes à l’Université à ses débuts. La masse cérémoniale de l’Université, un cadeau du chapitre local de l’oife , est faite de cuivre et de nickel de la région et ornée de pointes en or.

mari Harold Bennett, lequel parvient à se mériter le respect de ses collègues de l’administration et du Conseil en partie grâce à son approche toute en finesse des différences religieuses et linguistiques. La femme du recteur pourrait elle-même avoir fait une excellente rectrice, mais il faudra encore plus de quarante ans pour que la Laurentienne confie cette fonction à une femme. Dans les années 1960, les femmes comme Elizabeth Bennett sont toujours davantage louangées pour leur « chaleur et [leur] personnalité » que pour leur leadership ou leurs talents d’administratrices. Deux ans plus tard, les femmes font encore la nouvelle dans le Sudbury Star pour leur rôle de soutien à titre d’épouses des dirigeants de l’Université. Le journal rapporte que le recteur Mullins fera la tournée du nouveau campus au profit des « membres du Conseil et [de] leurs épouses ». Bien que les femmes participent à la tournée et à la réception qui s’ensuit, aucune méprise n’est possible sur la division sexuée des rôles. Quand le groupe de tournée se retrouve au centre-ville pour la réception, ce sont « les femmes des administrateurs » qui y servent les rafraîchissements7. Il arrive aussi parfois que les employées de l’université servent à boire lors d’événements mondains sur le campus. Le « thé de quatre heures informel » organisé à la bibliothèque au printemps 1963 pour remercier les donateurs de livres et d’ouvrages de référence voit Mme George McEwan, secrétaire du bibliothécaire en chef, faire l’hôtesse, « assistée par les membres du personnel de la bibliothèque8 ». Les femmes, dans ces premières années, apportent pourtant plus à la Laurentienne que leur talent d’hôtesses de mondanités ou leur présence auprès de leur mari lors de séances photo. Au milieu du vingtième siècle, les organisations féminines canadiennes continuent de contribuer de façon importante à toute une gamme d’œuvres et d’institutions de charité, comme elles l’ont fait depuis la fin du dix-neuvième siècle dans le cadre de groupes charismatiques et de clubs sociaux. À Sudbury, des femmes bénévoles, principalement celles ayant elles-mêmes fait des études postsecondaires, prennent l’initiative d’apporter leur concours à la jeune

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université de différentes manières. Au printemps 1964, le comité dédié à la Laurentienne de l’University Women’s Club of Sudbury offre par lettre « de présenter une masse d’apparat à l’Université, si tant est qu’un tel cadeau soit acceptable ». Lors de sa réunion du 15 avril 1964, le comité exécutif de la Laurentienne se dit « intéressé » par l’offre et fait savoir qu’il sera « heureux de discuter de la conception et d’autres détails si le club [décide] de déposer une offre concrète9 ». Les femmes de la collectivité continuent d’offrir divers dons d’objets, parmi lesquels des livres pour la bibliothèque, et des fonds pour la création de bourses10. L’Imperial Order Daughters of the Empire remet, à cette époque, plusieurs présents de grande valeur à l’université ; outre des cadeaux en argent, on compte aussi un drapeau et un mat pour le nouveau campus. L’University Women’s Club maintient sa relation étroite avec l’université après le déménagement de celle-ci sur le chemin du lac Ramsey, attirant même, à l’automne 1966, jusqu’à quatre-vingts membres de la Fédération canadienne des femmes diplômées des universités à une assemblée organisée par Mme Mullins à la nouvelle résidence de fonction du recteur, rue John11. Le club projette à cette occasion de commanditer la production d’un opéra, sans doute pour amasser des fonds dont la Laurentienne profitera directement par le biais des dons réguliers de l’organisation. Si les dons sont probablement le mode d’implication communautaire des organisations féminines de Sudbury le plus facilement identifiable, ils ne constituent pas pour autant l’expérience la plus directe des femmes avec la Laurentienne. Les femmes qui travaillent sur le campus sont des personnages clés. Grace Hartman, une des toutes premières personnes embauchées par l’Université, est une figure bien connue de la communauté sudburoise. S’intéressant aux perspectives d’emploi à l’Université à l’approche du déménagement vers le nouveau campus, cette ancienne commissaire d’école et conseillère municipale, qui deviendra en 1967 la première femme élue mairesse de Sudbury12, informe par écrit le comité exécutif que « lorsque l’Université [décidera] de nommer une doyenne des femmes », comme elle le présume, elle « [sera] heureuse qu’on pense à elle pour ce poste ». Le comité lui rétorque que ses compétences l’impressionnent, mais qu’il n’est pas certain qu’une doyenne des femmes sera requise, considérant que les universités fédérées engageraient elles-mêmes le personnel de leurs résidences, dont les doyens des résidences pour hommes et pour femmes. Comme Hartman est une candidate de choix pour un poste à l’Université, le comité décide de l’embaucher quand même plutôt que de rejeter sa demande. Au lieu du poste qu’elle a d’abord suggéré, on lui confie celui de directrice adjointe du service d’enseignement à distance. Fait intéressant à noter : au moment de régler les conditions de son embauche, Hartman négocie aussi le titre de son poste. Comme le révèlent les archives, « Mme Grâce Hartman [accepte] d’être nommée pour l’année 1964–1965 à temps plein et au salaire convenu, mais [préfère] le titre de directrice adjointe à celui d’adjointe du directeur ». Au-delà de la sémantique, l’insistance initiale de Hartman en faveur d’un titre suggérant un partage du pouvoir plutôt qu’un rôle subordonné annonce les revendications en faveur de mesures tendant vers l’équité d’emploi et de salaire, des mesures que la plupart des femmes à la Laurentienne devront attendre encore vingt ans.

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des étudiants de l’université huntington , 1960.  |  Dans les premières années de l’Université, le nombre d’étudiants dépasse le nombre d’étudiantes dans la proportion de 4 contre 1. Les étudiantes, à la Laurentienne comme ailleurs, ont tendance à se concentrer dans les programmes d’arts. Remarquez que ces étudiantes de Huntington portent en classe des tuniques universitaires.

La réalité estudiantine fait l’objet de longs développements ailleurs dans ce livre, mais il vaut la peine de relever ici que les plus anciens comptes rendus du vécu des étudiantes nous proviennent de photographies. La photographie de groupe des diplômés que publie le Sudbury Star chaque année de 1964 à 1966 suggère que la proportion de femmes parmi les finissants oscille autour de 25 pour cent13. Si une telle source permet d’estimer la proportion d’étudiantes sur le campus, il faut se tourner dans une autre direction pour espérer saisir la nature sexuée de leur vécu. La vie dans les résidences universitaires nous permet de jeter un précieux coup d’œil sur les expériences de la population étudiante féminine. Évoquant le régime d’éducation mixte d’autrefois, des normes de conduite différentes s’appliquent aux femmes et aux hommes vivant en résidence. L’Université Huntington impose des règles de conduite qui semblent à première vue valoir pour les deux sexes : pratiquer l’abstinence totale volontaire envers l’alcool, se détourner des jeux de hasard, fréquenter l’autre sexe au rez-de-chaussée seulement et non dans les chambres, etc. Au chapitre des couvre-feux, par contre, des règles plus strictes s’appliquent aux femmes. Une note de service datée du 18 janvier 1965 envoyée par la doyenne des résidences de Huntington, Mary Hinde, informe ses destinataires du changement suivant : « Dorénavant, les retours tardifs de sortie (après minuit du dimanche au jeudi, après 1 h 30 le vendredi et le samedi) seront limités à un par semaine […] Cette règle s’applique-t-elle aux hommes? – non ; les deux résidences sont distinctes sur ce plan14. » Ce traitement spécial imposé aux jeunes femmes s’explique de différentes façons. À un premier niveau, il s’agit simplement d’une extension des principes conservateurs établis dans la foulée du développement de l’éducation mixte, au début du siècle, alors que les femmes sont vues comme des êtres à protéger. Qu’encore dans les années 1960 les résidences de l’université confessionnelle Huntington soumettent les femmes à un régime différent des hommes n’est pas totalement surprenant, à la lumière des valeurs préconisées par les fidèles de l’Église méthodiste. De plus,

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sandy knox , kinésiologie et pat pickard, service des sports .  |  Sandy Knox et Pat Pickard, deux professeures qui ont beaucoup fait pour promouvoir les programmes de sports intercollégiaux pour les femmes, en faisant valoir que l’attribution de ressources adéquates est essentielle au succès de ces équipes.

si l’application de règles différentes pour chacun des sexes semble bizarre aux lecteurs du vingt-et-unième siècle, c’est loin d’être le cas pour la société de l’époque, particulièrement à Sudbury. Un sondage mené en 1972 par l’École de travail social de la Laurentienne révèle que 63 pour cent des 1 956 répondants sudburois pensent que « la place des femmes est à la maison15 ». Bien que les mentalités puissent être plus libérales au sein de la communauté universitaire que dans l’ensemble de la population, les parents des étudiants universitaires originaires de la région sont probablement tout à fait à l’aise avec l’application de couvre-feux et de restrictions différentes pour les femmes. Les étudiantes ne sont pas le seul groupe de femmes à faire l’objet d’une attention spéciale à la Laurentienne. Dans les années 1960, les femmes embauchées comme professeures par les universités ne manquent pas d’attirer l’attention en raison de leur petit nombre. Pat Pickard devient directrice des programmes féminins d’éducation physique en 1967 ; elle est l’unique femme parmi les huit professeurs engagés ce printemps-là16. Dans le cadre de son reportage sur les personnes nouvellement recrutées par l’Université à la fin de l’été et à l’automne 1968, le Sudbury Star présente chaque professeur, homme ou femme, à l’aide d’une description sommaire de ses champs d’expertise et de sa formation. Feuilleter ces coupures de presse au sujet des embauches de professeurs ne fait que réitérer le fait que la majorité des nouveaux venus sont des hommes. En 1964, le paysage local suscite chez une professeure (anonyme) arrivant à Sudbury pour y entreprendre sa carrière une réaction qui fait la nouvelle. Le panorama n’a guère impressionné la femme, raconte le chauffeur de taxi qui l’a fait monter à la gare sudburoise du Canadien National. « “C’est de la roche, rien que de la roche partout”, s’est-elle exclamée au chauffeur qui nous a dit que la nouvelle arrivée était prête à faire demi-tour et retourner là d’où elle venait17! » Celui-ci a tout de même assuré la nouvelle professeure que le nouveau campus est fort joli

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et qu’elle « ne trouverait pas mieux18 ». D’autres voix soulignent les avantages de Sudbury : la beauté de sa nature, mais aussi la diversité ethnique, la vie culturelle (concerts, expositions, réunions du Canadian Club) et les possibilités de pratiquer des sports comme le golf et la voile. En réponse au reportage fort peu flatteur qu’un quotidien de Toronto commet, à l’été 1965, au sujet de l’emplacement isolé de la Laurentienne, le chroniqueur local Robert Evans se montre agacé et rappelle que Sudbury est « une des villes les plus cosmopolites du Canada, et ne l’oubliez jamais19! » Les femmes ne sont sûrement pas les seules à réagir à l’emplacement isolé et au paysage désertique dans les années 1960. Le point de vue d’une professeure non identifiée que publie le journal local à ce sujet en est sans contredit un auquel souscrivent plusieurs des nouveaux arrivants. La couverture médiatique des embauches de personnel de soutien n’atteint pas toujours celle de professeurs, mais une manchette d’octobre 1968 annonce que : « Deux femmes et trois hommes engagés à la Laurentienne ». Les hommes ont été recrutés pour pourvoir aux postes suivants : traducteur, agent de counselling et programmeur débutant. Les deux femmes, diplômées universitaires, sont Jean Baxter, qui devient directrice des publications et adjointe du secrétaire général, et Marlène Cholette, programmeuse-analyste au sein du service informatique20. En dépit du conservatisme des attitudes révélé par les règles régissant les résidences, par le sondage auprès de la communauté et le fait que les nominations de femmes sont jugées particulièrement dignes de mention, on peut entendre des grognements annonçant que les choses ne seront pas les mêmes dans les années 1970. À la veille de la nouvelle décennie, il devient évident que la question des femmes pèsera d’un poids beaucoup plus lourd dans la vie universitaire. Un des premiers enjeux à émerger est celui des garderies. L’Association des professeurs le soulève à l’automne 1968 en chargeant un comité d’étudier la possibilité de créer un service de garde pour les enfants du personnel et des étudiants. Une garderie sera nécessaire pour que les femmes avec de jeunes enfants puissent pleinement participer à la vie du campus, que ce soient comme étudiantes, comme professeures ou comme employées de soutien. Soumis en avril 1969, le rapport de faisabilité n’est guère encourageant. Le document estime qu’il en coûterait 75 000 $ pour créer un service de garde, et que ce montant ne permettrait de fournir que de trente à trente-cinq places21. Il faudra encore cinq ans pour que ce rêve devienne réalité. En attendant, la question des services a été soulevée et mise à l’ordre du jour. De fait, cela se produit au moment où la Commission royale d’enquête sur le statut de la femme au Canada, qui tient ses audiences et reçoit des mémoires. « Il est fini, conclut la commission dans son rapport déposé en 1970, le temps où la société pouvait refuser d’offrir des services communautaires à l’enfance dans l’espoir de dissuader les mères de laisser leurs enfants pour aller travailler. Nous sommes dans une situation qui exige une réponse immédiate22. » Déferlant dans une seconde vague sur la société canadienne, le mouvement féministe doit prioritairement éveiller les consciences aux revendications des femmes pour espérer voir les choses changer. Des enjeux continuent d’être soulevés alors que l’onde de choc balaie le campus de la Laurentienne, en plein cœur d’un pays de roche et de mine. Or même la roche la plus dure subira l’action de

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des membres du personnel de l’université revoient le système de cl assement.  |  Au début, la répartition du travail selon le sexe caractérise le milieu universitaire. Les femmes prédominent dans les postes de secrétaires et de commis, où leurs services indispensables, bien que sous-estimés, assurent le fonctionnement de l’ensemble de l’Université.

l’eau si celle-ci submerge celle-là pendant assez longtemps. Des réformes législatives provinciales nées des problèmes soulevés par la commission royale commencent à faire sentir leurs effets sur les universités ontariennes, dont la Laurentienne. Le printemps 1971 voit se poser la question de l’admissibilité des femmes au régime de retraite de l’Université Laurentienne. Selon le régime en place, « tous les employés de sexe masculin seront admissibles à participer au régime après une année de service et toutes les autres employées de sexe féminin seront admissibles à participer au régime après trois années de service. » Une loi adoptée par Queen’s Park le 26 juin 1970, le Women’s Equal Employment Opportunity Act, contraint l’Université à corriger ce cas de discrimination sexuelle éhontée. Pour se plier à cette nouvelle loi, le comité exécutif de la Laurentienne décide, le 26 mars 1971, de réécrire la politique ainsi : « Tous les autres employés seront admissibles à participer au régime après une année de service23 ». Cet épisode n’est que le premier d’une série où la Laurentienne devra modifier ses pratiques en matière d’emploi afin de se conformer à des lois reflétant les avancées du féminisme. Les changements seront lents à se produire au cours des vingt années suivantes, mais l’épisode du régime de retraite annonce la suite des choses alors que les femmes à l’emploi de la Laurentienne commencent à réclamer leur dû en tant que participantes égales et entières au sein de l’Université. La seule existence de pratiques aussi injustes reflète un problème social plus général. Pour attirer l’attention sur les injustices sociales avec lesquelles les femmes doivent communément composer et pour appeler au changement, les études universitaires sur le rôle des femmes s’avèrent un puissant catalyseur. La recherche

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féministe y va de ses premiers pas à la Laurentienne, notamment au moyen de nouveaux cours se consacrant précisément à l’étude des femmes. C’est le cas du cours de sociologie « Women in Society », par exemple, dont le Sénat, à sa réunion de mars 1972 et sur recommandation du conseil de la planification académique, dit qu’il devrait être offert. Il faudra bien des années encore avant qu’un programme d’études féministes complet n’existe, mais ces cours dédiés à la place des femmes dans la société signifient qu’une part de l’attention de l’Université est tournée vers les femmes, ne serait-ce que pour demander : « Et les femmes? Que font les femmes? » De passage sur le campus en mars 1972, l’olympienne canadienne en athlétisme Abby Hoffman contribue aussi à braquer les projecteurs sur les questions féministes à la Laurentienne. Dans son discours, Hoffman attribue le peu d’athlètes féminines aux contraintes économiques, mais elle ajoute que le problème va audelà de l’économie pure ou d’un financement inadéquat du sport. Le problème, soutient-elle, participe de la société canadienne dans son ensemble, car « on inculque aux femmes non pas à exceller dans les sports, mais à se chercher un mari24 ». Le mot de Hoffman fait la manchette des médias locaux et inscrit sa visite dans la chaîne des événements visant à éveiller les consciences sur le campus. Les temps changent et la Laurentienne devra s’y faire et changer aussi. Ce ne sera pas toujours dans la joie, mais elle changera.

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Décidément aucune raison de se réjouir : établir la situation des femmes, 1972–1985 linda ambrose

Les gains des femmes sont nombreux entre 1972 et 1985, mais c’est sur le front de l’identification des problèmes plutôt que sur celui de leur résolution qu’ils surviennent principalement. Les résultats et les changements concrets viendront plus tard et s’appuieront, pour l’essentiel, sur les bases jetées pendant cette période critique. Comme dans le reste du pays, les femmes du nord de l’Ontario ont impatiemment attendu le rapport de la Commission royale d’enquête sur la situation de la femme au Canada, en 1970, lequel a documenté les réalités des femmes et clairement prouvé que les expériences de vie et de travail des hommes et des femmes sont, au Canada, à des lieues les unes des autres. Il s’impose toutefois que, dans le monde universitaire comme dans bien d’autres secteurs, les changements ne se produisent qu’avec lenteur et timidité. Dans la foulée des révélations de la commission royale, le comité sur le statut des femmes de l’A PUL lance en 1973 une des premières tentatives pour documenter la situation des femmes à la Laurentienne. Présidé par Kathryn Molohon du département de sociologie et d’anthropologie, ce comité est chargé de recueillir des données sur les femmes à l’Université Laurentienne. Comme l’explique le procès-verbal de sa réunion du 22 février, « l’Union des associations de professeurs des universités de l’Ontario (OCUFA) et l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université (ACPPU) se sont toutes deux mobilisées pour colliger des renseignements sur le statut des femmes dans les universités et pour parvenir à régler les “iniquités universitaires” entre les membres masculins et féminins du corps professoral. Fin janvier 1973, la direction de l’Association des professeurs de l’Université Laurentienne a reformé [sic] un comité sur le statut des femmes. Cela répondait à la demande de renseignements et de gestes faite par l’OCUFA et l’ACPPU au sujet du statut des professeures à la Laurentienne1. » Les données compilées par le comité sur le statut des femmes de l’A PUL permettent d’établir la présence des femmes au sein de quatre catégories : le personnel administratif (qui possède son propre syndicat et négocie salaires et avantages

johanne rioux , centre d’audiovisuel .  |  Johanne Rioux et le centre d’audiovisuel fournissent un appui technologique et des outils de communication aux professeurs, aux employés et aux étudiants.

sociaux avec le vice-recteur à l’administration), les employés de bureau (qui possèdent un syndicat distinct de l’A PUL et négocient également avec le vice-recteur à l’administration pour les salaires et les avantages sociaux), le personnel de la bibliothèque (qui négocie ses salaires et ses avantages sociaux avec le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche au sein de l’A PUL) et le corps professoral. Il y a 184 femmes au total dans ces quatre catégories en 1972–1973. Le personnel administratif compte soixante-six employés en tout, soit quinze femmes et cinquante-et-un hommes. Les employés de bureau présentent un tout autre visage : 122 secrétaires de sexe féminin contre quatre commis de bureau de sexe masculin. Le rapport précise qu’aucun des commis ne figure parmi les employés les mieux payés dans cette catégorie. À la bibliothèque travaillent dix bibliothécaires professionnels, cinq hommes et cinq femmes, et six employés de soutien de niveau supérieur : une femme supervise tout le personnel affecté au bibliothécaire en chef, dont les secrétaires, les étudiants, etc. ; cinq techniciens, dont quatre femmes, complètent le tableau. Enfin, la Laurentienne emploie 233 professeurs à temps plein ou partiel, doyens inclus, dont 37 femmes. Du point de vue hiérarchique, les femmes se répartissent ainsi : trois auxiliaires, quinze chargées de cours, quatorze professeures adjointes, trois professeures agrégées et deux professeures titulaires (toutes deux en sciences infirmières). Ces statistiques reflètent assez fidèlement celles de la Commission royale d’enquête sur le statut de la femme, dont le rapport a révélé que les universités emploient « approximativement six fois plus d’hommes que de femmes » et que ces dernières « se concentrent aux échelons inférieurs2 ». L’historienne Mary Kinnear explique que ce type de participation des femmes au monde universitaire n’a guère changé depuis les années 1920. « Les barrières officieuses, les critères d’embauche et de promotion imposés par les universités et une vision consensuelle parmi les hommes et les femmes sur ce qui constituait un comportement acceptable pour une femme », fait-elle valoir, « ont permis de minimiser la participation des femmes à la profession3 ».

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Ta bl e au 15,1  |  Per s on n e l de s ou t i e n et e nseigna n t à l’U n i v er si t é L au r e n t i e n n e , 1972–197 3 Catégorie professionelle

Nombre Employés de Employées de Pourcentage de femmes d’employés sexe masculin sexe féminin dans la catégorie

Personnel administratif Personnel de bureau Bibliothécaires Corps professoral

66 126 16 233

51 4 6 196

15 122 10 37

22,7 % 96,8 % 62,5 % 15,9 %

Source : aul , PO 63, IV, 44, « Laurentian University Faculty Association Committee on the Status of Women », 22 février 1973.

Ta bl e au 15, 2  |  Profe s seu r e s à l’U n i v er si t é L au r e n t i e n n e se l on l e r a ng, 1972–1973 Rang Professeure Professeure agrégée Professeure adjointe Chargée de cours Auxiliaire Total

Nombre

Pourcentage des femmes enseignant à la Laurentienne

2 3 14 15 3 37

5,4 % 8,1 % 37,8 % 40,5 % 8,1 % 100,0 %

Source : aul , PO 63, IV, 44, « Laurentian University Faculty Association Committee on the Status of Women », 22 février 1973.

La réalité n’a pas d’autres contours à la Laurentienne. En dépit des iniquités que l’A PUL vient de chiffrer, l’administration jure au Comité des affaires des universités avoir une politique sur l’égalité des chances en faveur de ses employées et de ses étudiantes. Le rapport qu’elle dépose devant ce comité en novembre 1973 répond à une série de questions qui lui ont été soumises, dont celle-ci : « Avez-vous une politique concernant l’embauche, la rémunération et la promotion de femmes dans tous les secteurs d’emploi de votre institution? » Sans pourtant citer de politique précise à l’appui, la Laurentienne rétorque qu’elle applique « une politique d’égalité des chances pour les hommes et les femmes qui englobe les nominations, les salaires et les promotions ». Chose intéressante, elle n’offre pas de déposer le texte de sa politique, malgré s’être dite prête à le faire lorsqu’interrogée sur des éléments comme la permanence et les sabbatiques. À la question « Avez-vous une politique d’égalité des chances pour les femmes relativement à l’admission aux divers programmes? », l’Université répond que « la même politique d’égalité des chances à l’admission vaut pour tous les programmes4 », mais n’offre toujours pas d’en déposer le texte.

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des femmes étudient à l a résidence du collège universitaire .  |  Les premières politiques des résidences établissent des règles de conduite différentes pour les femmes et les hommes en matière de couvre-feu ou de visites, mais au milieu des années 1970 ces différences sont éliminées.

Il n’existe en réalité aucune politique officielle sur l’égalité en faveur des femmes et la Laurentienne, comme tant d’autres universités, n’agit pas directement dans le dossier de l’égalité des sexes. L’Université de l’Alberta se montre plus honnête dans sa réponse, son rapport de 1975 sur la situation des femmes stipulant que « le groupe de travail du Sénat sur le statut de la femme a conclu, au terme d’une année d’étude, que la discrimination envers les femmes en fonction du sexe existe bel et bien à l’Université de l’Alberta5 ». La différence, bien sûr, est qu’en Alberta un groupe de travail spécialement constitué mène l’étude, tandis qu’à la Laurentienne le déni des administrateurs au sujet d’un possible problème tient lieu de réponse. On peut y voir une tentative de « camouflage », mais il serait plus juste d’interpréter la réponse de l’Université comme un simple manque de sensibilité. Il n’y a pas de conspiration pour maintenir les femmes en état d’infériorité à la Laurentienne, mais plutôt une absence de volonté consciente de leur donner la chance de prospérer. Pour tout dire, la nouvelle université nordique, comme tant de pans de la société canadienne, ne s’est tout simplement pas demandé s’il pouvait y avoir des iniquités inscrites dans sa logique même de fonctionnement. Un rapport sur la situation des femmes déposé en 1980 tire toutefois une conclusion qui refroidit les esprits : la situation […] à l’Université Laurentienne ne se distingue pas de façon notable de celles des autres universités. Et bien qu’il n’y ait décidément aucune raison de se réjouir, nous pouvons nous consoler du fait que notre situation délicate n’est ni unique, ni aberrante6.

En d’autres mots, la situation des femmes à la Laurentienne n’est pas mieux, mais sans doute pas pire, que celle des femmes sur les autres campus. Le rapport note quand même que les choses laissent à désirer. La période allant de 1972 à 1985 permet d’identifier et d’évaluer les problèmes, dont plusieurs ne feront l’objet de mesures concrètes que plus tard. Pour bien se représenter la situation à l’échelle provinciale, il importe de noter qu’au moment où l’A PUL établit ses statistiques sur les femmes, en 1973, le minis276

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des étudiantes de l’école des sciences infirmières .  |  Suite à la reconnaissance de l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, les premières étudiantes de l’École des sciences infirmières sont admises en septembre 1967.

tère des Collèges et des Universités de l’Ontario lance une étude sur la situation des femmes dans les universités de la province lors de l’année académique 1974–1975. Chaque université nomme, à titre de porte-parole, une personne chargée de colliger les données et de collaborer à la formulation des conclusions. Celles-ci paraissent en 1975 dans un rapport intitulé Women in Ontario Universities. L’Université Laurentienne s’y distingue entre toutes par le fait qu’elle a été la seule université à choisir un homme plutôt qu’une femme comme porte-parole. Cinq ans plus tard, le comité consultatif du recteur sur la situation de la femme se demandera pour la forme : « Cette note facétieuse dans notre histoire indique-t-elle que la Laurentienne a de la difficulté à reconnaître et à admettre la situation des femmes au sein de sa communauté7? » Pour ces femmes qui doivent composer avec la réalité de la vie à l’Université Laurentienne, la situation n’a rien de drôle. Source de consolation pour les uns, les statistiques indiquant que la participation des femmes à la Laurentienne correspond à la réalité des autres régions du pays peuvent aussi servir à justifier l’état des choses. Comme l’affirme le rapport de l’Université de l’Alberta de 1975, il ne suffit pas de comparer les campus entre eux, pas plus qu’il ne convient de se résigner à ce que ces déséquilibres se trouvent partout dans la société : Une des façons de rationaliser les injustices consiste à dire : « l’Université n’est pas différente du reste de la société! » Une telle attitude ne reflète toutefois pas l’autojustification traditionnelle de l’Université en tant que communauté d’érudits et banalise la situation privilégiée de l’Université. Celle-ci compose un milieu très protégé fonctionnant avec le soutien du reste de la communauté. Peu d’autres institutions jouissent de la même possibilité qu’elle de créer une communauté d’êtres humains fondée sur la valeur des personnes. L’université a donc la responsabilité d’incarner la dignité humaine au sein de son milieu. Si elle ne se préoccupe pas de ce qui arrive aux personnes, qui le fera8?

L’inclusion des enjeux féministes dans son enseignement est, pour l’université, une façon parmi plusieurs d’attaquer directement le problème. La Laurentienne le fait en lançant un programme d’études féministes en 1978, programme conçu, selon le quotidien local, pour « fournir un savoir universitaire approfondi capable

Établir la situation des femmes, 1972–1985

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de satisfaire ceux et celles que le mouvement des femmes a conscientisés9 ». Ce nouveau programme est assurément le produit de son époque, en ce sens qu’il vise à interpréter dans un cadre universitaire les enjeux que le mouvement des femmes a su placer à l’avant-scène. Quatre cours le composent et les étudiants doivent en suivre trois : le cours d’introduction obligatoire WOMN 1000E « Women in Modern Society » et deux autres parmi SOCI 2600E « Male and Female in Contemporary Society », ENGL 2700E « Women in Literature » et RLST 2390E « Women and Religion »10. Il faudra encore plus de dix ans pour qu’une étudiante n’obtienne un diplôme en études féministes, mais cette première offre de cours n’en représente pas moins une importante première étape dans la reconnaissance la légitimité universitaire des études sur les femmes11. D’autres signaux favorables aux femmes s’observent à la Laurentienne, même s’il est grossièrement exagéré de parler d’égalité. Trois femmes se joignent au Conseil des gouverneurs en 1973, quoique seules deux, Sara Speigel et Eleanor Copeland, y détiennent un droit de vote. La troisième femme, Billie Christiansen, secrétaire du recteur Ed Monahan, y représente le personnel de bureau de la Laurentienne12. En 1980, les statistiques concernant la participation des femmes au Conseil de vingt-quatre membres n’ont rien d’encourageant, car six femmes à peine y ont été nommées avec droit de vote pendant les vingt premières années d’existence de l’Université. De plus, avec la démission en 1984 de sœur Leona Spencer, qui y avait siégé depuis 1980, le Conseil redevient un cénacle masculin13. En ce qui concerne la présence féminine au Conseil, chaque pas en avant semble être suivi de deux pas vers l’arrière14. Les perspectives n’apparaissent guère plus reluisantes sur le front de la garderie, mais dans ce cas-ci, c’est aussi l’Association des professeurs et pas seulement l’administration qui ne parvient pas à dégager les fonds pour soutenir cette initiative. L’établissement célèbre son ouverture en 1974, six ans après que l’idée de doter le campus d’une garderie a été émise, grâce à une subvention du ministère des Services sociaux et communautaires. À la lumière des conclusions de l’étude de faisabilité qui jugeaient les coûts inabordables, le comité exécutif avait accepté de laisser la création de la garderie entre les mains du personnel administratif de l’Université. Malgré les demandes répétées de financement par les professeurs, l’administration et le syndicat font la sourde oreille. En octobre 1974, l’APUL continue d’affirmer ne pas avoir d’argent à donner à la garderie du campus, une position qu’un comité composé de professeurs et d’étudiants rapporte en soulignant qu’à l’encontre de la Laurentienne, « toutes les autres universités » appuient de tels établissements15. En 1980, la garderie de l’université existe à titre « de service de garde privé, incorporé, coopératif [et] bilingue » accueillant les enfants d’employés de la Laurentienne et de la grande communauté sudburoise. Parmi les parents qui l’utilisent, 55 pour cent sont des citoyens sans lien avec l’université, 32 pour cent des étudiants, 11 pour cent des membres du personnel de soutien ou de l’administration et deux pour cent des professeurs16. Les femmes ne font guère mieux sur le plan de l’échelle salariale et de la hiérarchie que sur celui de la représentation au Conseil et du financement de la garderie, établissement si crucial pour leur situation. Soupçonnant que les femmes

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dorothy zaborszky et margaret kechnie .  |  Dorothy Zaborszky (à gauche) et Margaret Kechnie, chefs de file du comité consultatif du recteur sur la situation de la femme. Elles rédigent d’importants rapports qui recommandent que l’Université prenne les mesures appropriées pour assurer l’équité des femmes, qu’elles soient étudiantes, membres du personnel de soutien, administratrices ou professeures.

se voient embaucher à un rang et à un salaire inférieurs à ceux de leurs pairs masculins, Dorothy Zaborszky, professeure adjointe au département d’anglais et increvable championne des droits des femmes sur le campus, confronte l’Université en 1974 à ce sujet. Elle fait valoir le cas d’une nouvelle collègue qui s’est vue nommer à un rang salarial nettement plus bas qu’un homme, même si elle détient un doctorat, des publications récentes et des années d’expérience. « Nous sommes en présence d’une discrimination éhontée fondée sur le sexe », conclut Zaborszky. Le vice-recteur Hugues Albert rejette ces accusations qui sont « totalement injustifiées et dénuées de fondement » selon lui. « Comme vous le savez pertinemment, répond-il, nous ne pouvons pas établir de comparaison entre des secteurs différents de l’Université ». Il fait ensuite remarquer que la collègue en question pouvait demander une réévaluation générale de son salaire, mais qu’elle ne l’a pas fait. Il y a toutefois de bonnes chances que cette femme ne savait pas qu’elle pouvait déposer une telle demande, car avant la syndicalisation, les nouveaux professeurs étaient mal renseignés sur leur droit de négocier leur salaire de départ, chose particulièrement vraie dans le cas des femmes. Les soupçons de Zaborszky voulant qu’il existe un écart salarial fondé sur le sexe se voient confirmer huit ans plus tard par le Sudbury Star. Celui-ci rapporte que les 208 professeurs masculins de la Laurentienne gagnent en moyenne près de 6 000 $ de plus que leurs 48 collègues féminines17. Dans les années précédant le syndicat et avant tout débat sur l’équité salariale ou en matière d’emploi, de tels incidents n’ont servi qu’à étoffer le dossier des féministes telle Zaborszky pour qui, quand bien l’Université prétendrait avoir une politique d’« égalité des chances » pour ses employées et ses étudiantes, tout n’est pas dit. Mais avant que tout puisse être dit, il faut encore documenter les faits et combattre des comportements largement acceptés. Pour que les choses changent, la preuve doit être apportée que la discrimination fondée sur le sexe est un phénomène répandu et systémique, même si on ne la pratique pas consciemment. Dans le sillage de l’étude de Queen’s Park sur la situation des femmes dans les universités

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de la province, le recteur Monahan crée le comité consultatif du recteur (CCR ) sur la situation de la femme en juin 1975. Ses attributions sont les suivantes : Évaluer la situation des femmes à l’Université Laurentienne du point de vue de leurs rôles à titre de membres du corps professoral, de l’administration, du personnel de soutien et du corps étudiant, et faire des recommandations sur toute question pertinente pour faire en sorte que toutes les femmes de la communauté universitaire reçoivent un traitement juste et équitable dans chaque dimension des activités de l’Université18.

La plupart des universités canadiennes mènent alors des études semblables, lesquelles suscitent des réactions allant « du soupçon à une sorte de tolérance sceptique19 ». À la Laurentienne, le CCR dépose un rapport préliminaire en août 1976, mais son rapport complet ne paraît qu’en 1980, après que le recteur Henry Best a réactivé le CCR sur le statut de la femme l’année précédente20. Présidé dans sa nouvelle incarnation par Dorothy Zaborszky, le CCR comprend aussi Bernadette Schell, professeure en commerce et administration, Eleanor Copeland, gouverneure, Élaine Dupuis, représentante des employés de soutien, Jean Baxter, administratrice, et les étudiantes Aniela Brown (temps partiel) et Lorna Williams, qui y remplace Sonya Popovich (temps plein). Le rapport de 12 pages est plus complet que celui de l’APUL , sept ans plus tôt, parce qu’en plus de fournir des statistiques, il recommande des pistes pour traduire « les idées en réalités concrètes21 ». Le document exprime aussi de l’impatience devant le peu de progrès des femmes à la Laurentienne. Sur un ton provocateur, il contraste les situations respectives des femmes et des francophones sur le campus. « Même si le pourcentage relatif de francophones est probablement inférieur à celui des femmes, peut-on lire, l’administration de l’Université a fait d’importantes ouvertures aux premiers, ce que nous approuvons vivement. Nous notons du même souffle que les femmes n’ont pas eu droit à de semblables ouvertures22. » Comme le montre Guy Gaudreau ailleurs dans ce livre, les ouvertures aux francophones sont l’aboutissement de beaucoup de protestations et de luttes ; les femmes n’ont toutefois pas réussi à s’unir de telle façon que leur voix puisse se faire entendre. Par ce parallèle qu’elles tracent entre les situations des femmes et des francophones, Zaborszky et son comité cherchent consciemment à établir que les batailles sur le statut des femmes à la Laurentienne prendront une tournure beaucoup plus politique. L’A PUL menant des démarches de syndicalisation à la même époque où paraît le rapport, Zaborszky et son comité espèrent que la nouvelle convention collective et ses dispositions interdisant la discrimination auront « un effet bénéfique sur la situation des professeures (comme de toutes les autres femmes)23 ». Le rapport de 1980 contient vingt recommandations grâce auxquelles il serait possible d’évaluer l’administration dans ses efforts pour favoriser un milieu juste et équitable pour les femmes. Six recommandations ont une portée générale, tandis que les autres se veulent plus précises, parmi lesquelles une concerne les étudiantes à temps plein, quatre les étudiantes à temps partiel, deux les professeures, trois le personnel de soutien, deux le personnel administratif, une la gar-

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derie et une autre le Conseil des gouverneurs. La recommandation portant sur les étudiantes à temps plein demande « que soit fortement découragée et éliminée toute forme de discrimination à l’égard des femmes étudiant à l’Université Laurentienne24 ». Son caractère très large en rend le degré d’application très difficile à mesurer. Que son énonciation ne soit pas plus précise peut s’expliquer par la frustration du comité à l’égard de l’apparente indifférence de ces étudiantes envers les questions féministes. La situation des étudiantes à temps partiel est bien différente. En 1977–1978, les femmes comptent pour 58 pour cent de tous les étudiants à temps partiel au Canada, mais à la Laurentienne le taux se situe à 64 pour cent cette année-là et à 68,3 pour cent en 1979–1980. Il y a pourtant des secteurs où les femmes sont nettement sous-représentées : en science, par exemple, où elles ne représentent que 0,9 pour cent du corps étudiant, et en génie, où pas une seule d’entre elles n’étudie. Le rapport émet des recommandations fort précises relativement aux étudiantes à temps partiel, appelant l’administration, d’une part, à se pencher sur les raisons pour lesquelles ces secteurs ne parviennent pas à attirer les femmes et, de l’autre, à offrir des services d’orientation académique conçus spécialement pour ces dernières et disponibles selon un horaire convenant à celles qui ont un emploi. Des contributions financières sous forme d’allocations et d’aide gouvernementale pour les femmes aux études à temps partiel figurent aussi au nombre des recommandations, tout comme la création d’une coopérative de garderie pour cette catégorie particulière d’étudiantes. Les recommandations concernant les professeures portent sur deux éléments. Il est d’abord demandé à l’Université de faire « des efforts soutenus pour dénicher des candidates qualifiées aux postes supérieurs dans l’administration ». Le rapport réclame ensuite que l’Université annonce tous les postes de professeurs à combler dans le CAUT Bulletin, University Affairs et, lorsque cela est approprié, dans les périodiques universitaires. Les annonces devront « clairement affirmer que les postes sont ouverts aux hommes et aux femmes » et les comités d’embauche devront inclure des femmes chaque fois que cela sera possible25. Le degré d’application de ces recommandations-là pourrait se mesurer. Le Sénat les ratifie le 19 juin 198026. La seule teneur de l’annonce d’un poste de professeur à combler et la composition du comité d’embauche suffiront à dire si l’Université s’y conforme. Mais s’il est facile de publier des offres d’emploi s’adressant aux deux sexes, engager suffisamment de femmes s’avère une autre paire de manches. Rendre les postes de professeurs-chercheurs d’université plus accessibles aux femmes ne va pas de soi et aucune politique destinée spécialement à corriger ce problème ne verra le jour avant plusieurs années encore. Les recommandations traitant du personnel de soutien et de l’administration sont elles aussi difficiles à appliquer. En effet, en demandant notamment « un effort pour éliminer le stigmate dévalorisant des aptitudes rattachées aux emplois féminins en général » et l’examen de « toute tendance à sous-estimer l’importance du travail des femmes », le rapport a dans sa mire des perceptions, des attitudes et des valeurs profondément inscrites dans la société et pour changer lesquelles il faudra bien plus qu’un vote majoritaire du Sénat. Le fait, pourtant, que le

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étudiants de l a l aurentienne, années 1960.

rapport soulève de telles préoccupations est fort significatif. Le type de problèmes que le CCR énumère dans son rapport dresse en effet l’ordre du jour de la décennie à venir, alors que l’Université s’attaquera à la tâche complexe, mais importante, d’assurer une plus grande égalité par le biais de mesures comme l’équité salariale, l’équité en matière d’emploi et la discrimination positive. S’il faut environ dix ans pour que ces problèmes fassent l’objet d’une attention régulière dans les initiatives stratégiques de l’Université, l’appel au changement que lance le rapport à leur sujet constitue un important catalyseur de ce processus. Moins de deux ans après la parution du rapport, l’A PUL critique sévèrement le recteur Best pour le manque de progrès des femmes sous sa gouverne. S’exprimant au nom de l’A PUL , Zaborszky et Lloyd Wagner affirment en 1982 que Best a failli à la tâche d’appliquer les recommandations contenues dans le rapport du CCR sur la situation de la femme, déposé deux ans plus tôt. Ils allèguent aussi que le recteur a même refusé de dégager des fonds pour envoyer un émissaire à la conférence de l’ACPPU sur le statut de la femme malgré l’offre de l’A PUL d’assumer la moitié du coût de cette initiative27. Alors qu’il aurait été relativement facile de payer pour avoir un représentant à la conférence de l’ACCPU, plusieurs des vingt recommandations requièrent de nouvelles politiques et des approches renouvelées (pour ne rien dire des attitudes) qui prendront des années à venir. Quand l’Université met trop de temps à bouger dans le sens de ce que demandait le rapport de 1980, certaines femmes décident de prendre les choses en main afin de changer les présomptions sexistes qui sont leur pain quotidien. Doris Parker, une secrétaire au bureau des services informatiques de la Laurentienne, passe à l’histoire en 1981 lorsqu’elle refuse de servir le café à son patron sous prétexte que cela ne fait pas parties de la description de tâches de son poste. Ce refus lui vaut d’être menacée de congédiement28, mais son syndicat décide de s’emparer de la cause et d’aller en arbitrage. Vétérane de 12 ans à l’Université, Parker s’est fait demander de servir le café aux réunions. Selon certaines informations, son supérieur aurait expliqué au conseil d’arbitrage du travail chargé d’entendre la cause qu’à son avis, « avoir une secrétaire qui demande à ses invités s’ils veulent du café

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le syndicat des employés de l’université l aurentienne et l’administration signent un contrat.  |  L’Université et le syndicat forment un système bipartite d’évaluation des emplois à la fin des années 1980, en vue de se conformer à la loi provinciale sur l’équité salariale qui entrera en vigueur en 1990.

rehausse son statut » de patron29. Le directeur du personnel de la Laurentienne confie au Sudbury Star que les secrétaires font normalement cela sans protester30. Restant toutefois sur ses positions, Parker fait la une nationale, le 13 juillet 1981, alors que le Globe and Mail titre : « Une secrétaire n’est pas une serveuse : l’arbitre tranche dans l’affaire du café ». Donnant raison à Parker, le jugement souligne que le service du café ne figure nulle part parmi les tâches d’une secrétaire selon la convention collective et que, considérant que « les temps et les mentalités ont changé », les femmes ne devraient pas avoir à accomplir cette tâche31. Moins d’un an après l’affaire du café, le campus est le théâtre d’un autre développement majeur, prenant, cette fois-ci, la forme d’une initiative stratégique visant toutes les femmes. Le 20 mai 1982, le Sénat adopte la toute première politique de l’Université en matière de harcèlement sexuel. S’exprimant au nom du CCR sur le statut de la femme, Jean Baxter, de l’administration, explique aux médias locaux que « le nouveau Code des droits de la personne de l’Ontario cherche à légiférer contre le harcèlement sexuel au travail, et ce qu’a fait le comité [de la Laurentienne], c’est de convenir d’une politique spécifiquement conçue pour les personnes en milieu universitaire32 ». Cette politique – une des premières adoptées par une université canadienne aux dires de Baxter – a comme double objectif de « décourager le harcèlement sexuel » et « mettre en place les procédures nécessaires pour permettre aux victimes de demander réparation33 ». Une des caractéristiques clés de la politique est sa définition précise de ce que constitue le harcèlement sexuel. Elle se lit comme suit : Toute proposition non sollicitée, à teneur sexuelle, verbale et/ou physique faite par une personne qui sait ou est censée savoir qu’une telle attention n’est pas sollicitée constitue du harcèlement sexuel si : a) un tel comportement a pour but ou pour effet de nuire au travail, aux études ou aux résultats scolaires d’un individu, et/ou de créer un environnement psychologique et émotionnel nocif pour le travail, les études et les résultats scolaires ; b) la soumission à un tel comportement est explicitement ou implicitement imposée comme

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directive ou condition à l’embauche, à l’éducation, au statut scolaire ou à la reconnaissance universitaire ; c) la soumission à ou le rejet d’un tel comportement par un individu sert de critère de décision concernant le statut scolaire ou universitaire et/ou la reconnaissance universitaire34.

Tous ne voient pas d’un bon œil ces nouvelles initiatives contre le harcèlement. Au printemps 1984, la présidente du CCR sur le statut de la femme, Janet Sabourin, explique au président de l’A PUL , Lloyd Wagner, que même si les politiques « ne peuvent prétendre à changer les attitudes, mais seulement à contrôler les comportements », elle espère que l’A PUL appuiera la politique puisque celle-ci offre « une voie pour les plaintes et un mécanisme en vertu duquel ces plaintes peuvent être traitées équitablement ». Sabourin souligne également que « l’objectif fondamental lorsqu’on dépose une plainte est de faire cesser le comportement offensant » et pas tant d’intenter une action punitive. Comme elle craint que l’A PUL hésite à donner son aval à une mesure qui conduirait les membres à porter plainte les uns contre les autres, la présidente du CCR encourage son homologue de l’APUL à l’appuyer personnellement. Elle lui mentionne toutefois que si son comité s’attend à recevoir le soutien de l’A PUL , il n’en a pas besoin. Sabourin dit ensuite que son comité et elle-même aimeraient savoir pourquoi l’A PUL aura décidé ne pas endosser la politique, si tel doit être le cas. « Mais épargne-nous l’argument qu’en cas d’application de cette politique, nous aurions une douzaine de plaintes de harcèlement sur les bras », insiste-t-elle35. Il ne fait aucun doute que les personnes qui ont applaudi quand Doris Parker a refusé de servir le café applaudissent une seconde fois quand elles se rendent compte que les femmes de la Laurentienne disposent d’une politique officielle qu’elles peuvent utiliser pour nommer et faire reconnaître des comportements déplacés adoptés à leur endroit à cause de leur sexe.

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Politiques et pratiques en faveur de l’équité et de l’égalité, de 1985 à nos jours linda ambrose

L’introduction de la politique en matière de harcèlement sexuel constitue la première de plusieurs initiatives mises en place à la Laurentienne durant les années 1980 afin de permettre aux femmes de s’approcher de l’horizon de l’égalité. La période de 1972 à 1985 est celle des études visant à documenter les problèmes affectant les femmes ; les dix années suivantes verront l’adoption de politiques destinées à les corriger. Encore une fois, ces initiatives participent d’un mouvement de réformes balayant le pays et l’Ontario plus particulièrement. On aurait tort de sous-estimer l’importance de ces changements législatifs ; ce sont eux qui donnent à la Laurentienne l’élan nécessaire pour agir sur les questions féministes. Les statistiques indiquent qu’au milieu des années 1980, la situation des femmes à la Laurentienne s’est améliorée par rapport à celle que l’étude de l’A PUL avait documentée plus de dix ans auparavant. Il y a 55 femmes parmi les 231 professeurs en service en 1985–1986, soit 21 pour cent. Si on observe une certaine ascension hiérarchique parmi les professeures à temps plein – quinze femmes sont professeures agrégées, contre trois à peine au moment du premier recensement –, la tendance conserve un air familier : les femmes s’agglomèrent dans les rangs inférieurs, quatre à peine occupant l’échelon de professeure titulaire et vingt-et-une, près de la moitié des femmes, celui de professeure adjointe. Elles comptent aussi pour 43 pour cent des chargés de cours et occupent deux postes d’auxiliaires sur quatre. La dure réalité du milieu des années 1980 est que, en contexte où les embauches sont rares, les femmes le sont encore plus. (Voir tableau 16,1.) Les femmes ne dirigent que quatre des 19 départements et écoles du campus en cette année 1985–1986. Elles occupent trois postes administratifs à peine, dont celui de doyenne des écoles professionnelles et un des deux postes d’adjoint du recteur1. Parmi les 252 employés à temps plein de la Laurentienne, à l’exclusion du corps enseignant, 146, ou 57,9 pour cent, sont des femmes, dont la grande majorité (106) fait un travail de bureau. Les femmes comptent d’ailleurs pour 92,2 pour cent de la main-d’œuvre dans cette catégorie. Des 40 femmes restantes, deux sont

Ta bl e au 16,1  |  Profe s seu r e s à l’U n i v er si t é L au r e n t i e n n e se l on l e r a ng, 1985–1986 Rang

Nombre

Professeure titulaire Professeure agrégée Professeure adjointe Chargée de cours Auxiliaire Total

Pourcentage des femmes enseignant à la Laurentienne

4 15 21 13 2 55

7,3 % 27,3 % 38,2 % 23,6 % 3,6 % 100,0 %

Source : Margaret Kechnie et Patricia C. Hennessy, « L’objectif de la Laurentienne : l’égalité d’emploi », Sudbury, Université Laurentienne, 1987, tableau 2, p. 44.

cadres supérieures, neuf, cadres intermédiaires, trois, superviseures, vingt-et-une, techniciennes et semi-professionnelles et cinq, travailleuses manuelles de spécialisation moyenne2. En 1986–1987, les femmes représentent 53,4 pour cent des 3 329 étudiants de premier cycle inscrits à temps plein et 40 pour cent des 100 étudiants inscrits aux cycles supérieurs3. En ce qui concerne les instances de l’Université, le Conseil des gouverneurs n’accueille qu’une femme parmi ses vingt-quatre membres, le Sénat en compte treize sur soixante-quatre, tandis qu’à peine cinq femmes dirigent un des vingt-quatre comités dont l’autorité s’étend à toute l’Université4. Le portrait qui se dégage de ces chiffres, les inscriptions estudiantines exceptées, n’est guère réjouissant pour les femmes. Vingt-cinq ans après sa fondation, la Laurentienne a encore du chemin à faire à titre d’employeur du point de vue de l’équité envers les femmes. Conscient de la besogne à accomplir en ce domaine, le Conseil des gouverneurs adopte en décembre 1985 la résolution suivante : L’Université Laurentienne soutient le principe d’égalité d’emploi pour les femmes et accepte d’élaborer des politiques afin d’assurer l’égalité entre les hommes et les femmes dans l’engagement, la promotion et les conditions de travail des professeurs, administrateurs et personnels [sic] de soutien5.

Pour s’assurer de progrès sur ce front, le Conseil convient lors de la même réunion de mener une étude à l’échelle du campus afin d’« identifier toute inégalité possible au sein de l’Université Laurentienne » et de « recommander les directives et procédés appropriés afin d’éviter de telles inégalités et les éliminer le cas échéant6 ». Le mandat se voit confié à la professeure de travail social Anne-Marie Mawhiney, qui, à titre de première coordinatrice de l’équité en emploi, doit voir à obtenir des fonds du gouvernement pour produire l’étude évoquée plus haut7. Anne-Marie Mawhiney se trouve toutefois en sabbatique lorsque son comité obtient les fonds demandés, de sorte que Margaret Kechnie, professeure d’études féministes à l’Université Thorneloe, et Patricia C. Hennessy, directrice des relations avec le personnel enseignant, deviennent co-coordinatrices du projet sur

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maureen l acroix .  |  Maureen Lacroix est membre du Conseil des gouverneurs de 1996 à 2009. Elle est la première femme à la présidence du Conseil, de 2001 à 2003.

l’équité en matière d’emploi. Grâce aux subventions de la Direction générale de la condition féminine du ministère des Collèges et des Universités de l’Ontario, Kechnie et Hennessy engagent Andrea Levan pour mener une recherche approfondie sur les femmes. Le rapport sur l’équité en matière d’emploi qu’elles préparent à partir de ce travail d’enquête paraît en 1987 sous le titre approprié de « L’objectif de la Laurentienne : l’égalité d’emploi ». Une partie du défi d’améliorer la condition des femmes consiste à éduquer la communauté universitaire sur le sens réel de l’équité en matière d’emploi et sur ce qu’il faudra faire pour l’atteindre. L’équité en matière d’emploi est un programme global en fonction duquel « nul ne se voi[t] refuser d’avantages ou de chances en matière d’emploi pour des motifs étrangers à sa compétence [et qui] requiert, outre un traitement identique des personnes, des mesures spéciales et des aménagements adaptés aux différences8 ». Les quatre groupes désignés par ce programme sont les femmes, les Autochtones, les personnes handicapées et les minorités visibles9. Il s’avère qu’en ciblant seulement les femmes, ce chapitre reflète bien l’ordre des choses à la Laurentienne, car les initiatives d’équité en matière d’emploi recommandées en 1987 ne font aucune place aux trois autres groupes. Cette perspective limitée se justifie par le fait qu’elle est aussi celle qu’a adoptée le gouvernement de l’Ontario, fondée sur l’idée que « la participation féminine à tous les niveaux du système éducatif [est] essentielle si l’on [veut] supprimer la sous-représentation dans le monde du travail en général10 ». Plus de vingt ans plus tard, à la Laurentienne et au-delà, encore beaucoup de travail reste à faire en matière d’équité pour les Autochtones, les personnes handicapées et les minorités visibles. Comme la législation sur l’équité en matière d’emploi vise à assurer l’égalité des chances dans le monde du travail, les programmes s’en inspirant accordent une attention particulière aux pratiques et aux procédures d’embauche. C’est même le cœur du rapport de la Laurentienne. Faisant écho aux idées avancées dans le

L’équité et l’égalité, de 1985 à nos jours

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séance de pl anification stratégique du seul .  |  Dans le contexte des changements apportés aux lois sur l’équité salariale et l’équité d’emploi, le Syndicat des employés de l’Université Laurentienne (seul ) protège ses membres avec vigilance, ce qui occasionne une grève de trois semaines pendant l’année universitaire 1985–1986.

rapport de 1980 sur la situation des femmes à la Laurentienne concernant la formulation des offres d’emploi et la nécessité de rechercher des femmes compétentes pour les postes de cadre supérieur, le rapport sur l’équité en matière d’emploi y va de recommandations précises pour un plan de cinq ans et un autre de dix ans. Une de celles-ci demande « que certains départements prioritaires fassent l’objet d’une attention particulière et qu’une action soit prise dans les cinq premières années du programme11 ». Ces départements sont ceux de service social, de biologie, de chimie, de commerce, de mathématiques et informatique et d’histoire. Le rapport les inscrit comme des priorités parce qu’ils ne comptent aucune femme parmi leurs professeurs12. En ce qui concerne le personnel non enseignant, le rapport sur l’équité en matière d’emploi révèle que les tendances de l’emploi à la Laurentienne suivent celles observées « dans le monde du travail en général ou dans les autres universités » en ce qui a trait à la nature des postes typiquement occupés par des hommes et des femmes respectivement. Ainsi, 72,6 pour cent des femmes employées sur le campus – à l’exclusion des professeures – occupent un travail de bureau, tandis que les femmes occupent 92 pour cent de tous les emplois de bureau. Simultanément, le service des installations ne compte qu’une femme, une secrétaire, parmi ses trente-cinq employés, alors qu’il n’y a que quatre hommes sur trente employés à la bibliothèque13. À la lumière de ces constatations, le rapport nomme « deux problèmes distincts », à savoir que les femmes sont « sous-représentées dans les postes de gestion et de supervision, autant par rapport au nombre d’hommes dans ces postes que par rapport au nombre de femmes en général » et, « deuxièmement, [que] les femmes sont virtuellement absentes des secteurs clés du domaine non enseignant, en particulier des postes traditionnellement réservés aux hommes14 ». Une des conséquences de ce problème est que les salaires des femmes se situent massivement au bas de l’échelle15. La question de leurs bas salaires constituera le prochain enjeu pour les femmes de la Laurentienne.

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Le gouvernement de l’Ontario adopte en 1987 sa Loi portant établissement de l’équité salariale dans le but de corriger la discrimination systémique, fondée sur le sexe, dans la rémunération du travail fait par les travailleuses de secteurs d’emploi définis comme féminins. Cette loi va plus loin que les mesures destinées à assurer un salaire égal pour un travail de valeur égale, car elle s’applique, de manière proactive, au secteur public ainsi qu’aux entreprises du secteur privé de plus de dix employés. Découlant des initiatives nées de la législation en matière de droits de la personne, l’équité salariale reprend certaines des préoccupations qu’avait soulevées le rapport du CCR sur le statut de la femme, en 1980, particulièrement celles qui concernent « la sous-évaluation des savoir-faire liés aux emplois féminins » et le fait que les salaires des postes occupés par des femmes formées « au travail de secrétariat et de bureau doivent être équivalents à ceux des postes spécialisés occupés par des hommes16 ». Ces préoccupations jumelles liées à la sous-évaluation du travail féminin et à la sous-rémunération des femmes par rapport aux hommes sont précisément ce que l’équité salariale veut régler. Quoique reposant sur le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale, l’équité salariale a une portée plus considérable, car il s’agit d’une comparaison d’emploi à emploi et non une simple procédure fondée sur des plaintes. Au lieu de partir de l’idée que les hommes et les femmes qui font le même travail doivent recevoir le même salaire, l’équité salariale compare les emplois traditionnellement occupés par des femmes et des hommes respectivement, établissant la valeur du travail de chacun pour l’entreprise ou l’organisme, puis veillant à ce que des emplois de valeur égale soient compensés également17. À la Laurentienne, la Loi sur l’équité salariale suscite une enquête à l’échelle du campus sur les emplois occupés par des femmes afin d’établir la « valeur » de ce travail pour l’Université dans son ensemble. La valorisation de chaque emploi est un processus complexe qui doit prendre en compte plusieurs facteurs, dont le savoir-faire, les efforts, les responsabilités et les conditions de travail de chaque poste. L’équité salariale n’est pas une évaluation de la performance de chaque travailleur, mais bien une réévaluation de la valeur du travail fourni à l’ensemble de l’organisation. L’intention à l’origine de cette initiative est de corriger la sous-évaluation usuelle des emplois traditionnellement occupés par des femmes. Une fois la loi provinciale adoptée, les employeurs tels que la Laurentienne n’ont d’autre choix que de s’y plier et de convenir d’une stratégie d’équité salariale qui devra être appliquée à compter du 1er janvier 1990. Dans ce cas-ci, pourtant, la Laurentienne a devancé le législateur. Cela ne s’est pas fait sans heurts, car à l’automne 1985, les membres du Syndicat des employés de l’Université Laurentienne (SEUL) ont déclenché la grève pour protester contre ce qu’ils estimaient être une échelle salariale injuste et un système arbitraire d’évaluation des emplois. La grève d’une durée de trois semaines a eu l’effet recherché. Le 1er juillet 1986, au terme d’une négociation, l’Université Laurentienne et le SEUL ont convenu d’un système d’évaluation conjoint des emplois. Comme l’explique le guide publié à cet effet, le système de points élaboré permet de systématiquement comparer les postes afin de déterminer la valeur d’un emploi par rapport à un autre18. Chaque emploi sur le campus – à l’exception des emplois de professeur – s’est vu attribuer

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un pointage selon une échelle appliquée à quatre catégories : les conditions de travail, la complexité de la tâche, le niveau de responsabilité et la compétence dans des domaines comme le calcul, les langues, l’expérience et la formation. En vertu du système conjoint d’évaluation des emplois, quatorze critères différents au sein des quatre catégories ont reçu un score, et le score total d’un emploi donné a servi à déterminer son échelon salarial. Ayant entrepris cet exercice et créé un système pour le maintenir et même le réévaluer de façon périodique, l’Université se trouve bien placée pour donner suite aux exigences de la loi en faveur d’un programme d’équité salariale. En conformité avec les dispositions de la législation qui a fixé le délai au 1er janvier 1990, la Laurentienne rend public son programme d’équité salariale le 22 décembre 1989. L’Université et ses employés ont travaillé de concert à sa préparation et le document assure les autorités du fait que « les deux parties étaient conscientes des problèmes d’équité salariale et ont vu à ce que le nouveau système les corrige ». La Laurentienne et le syndicat conviennent que le système d’évaluation des emplois élaboré trois ans plus tôt est dénué de tout biais en fonction du sexe, d’une part, et, de l’autre, que les facteurs et le système de pointage signifient que l’équité salariale est désormais en vigueur19. L’exercice conjoint d’évaluation des emplois et la révision des salaires dans une perspective l’équité ont valu des ajustements salariaux substantiels en 1985, 1986 et 1987 à plusieurs femmes au sein du personnel de soutien et de l’administration de la Laurentienne, particulièrement chez les secrétaires. En raison du chemin déjà parcouru grâce au système conjoint d’évaluation des emplois, le programme d’équité salariale dévoilé à la fin de 1989, applicable à 175 employés, n’entraîne aucun ajustement de salaire. Une fois encore, les auteures du rapport de 1980 sur la situation des femmes ont peine à retenir leur joie de voir enfin s’accomplir ce qui leur paraissait si abstrait et si difficile à définir moins de dix ans plus tôt. L’année 1989 est riche en rebondissements relativement aux enjeux féministes à la Laurentienne. Parmi les bonnes nouvelles, Norma McCrae-Ward y devient la première responsable des plaintes en matière de harcèlement sexuel, tandis qu’un programme d’études féministes digne de ce nom voit le jour. Des problèmes subsistent pourtant et des questions doivent encore être soulevées, par exemple pourquoi aucune femme ne siège sur le comité de sélection du recteur constitué plus tôt dans l’année. Le même mois où ont lieu le dépôt du programme d’équité salariale et le lancement des études féministes, la communauté universitaire sudburoise tombe sous le choc, comme le reste du pays, en apprenant par les médias l’horrible nouvelle du massacre de quatorze jeunes femmes à l’École polytechnique de Montréal, toutes des étudiantes en génie. L’épisode rappelle brutalement que même si les établissements d’enseignement supérieur au Canada font des progrès sur le plan de la question des femmes, de graves sources de préoccupation demeurent. Pour ceux et celles qui se sont complu à croire que les enjeux féministes sur le campus sont enfin réglés, l’horreur du massacre de Montréal met à l’ordre du jour la question de la sécurité à l’université et celle de la situation des femmes en général20.

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mesures de sécurité sur campus .  |  Quoique la Laurentienne soit une des premières universités canadiennes à adopter une politique sur le harcèlement sexuel en 1982, ce n’est qu’en 1989 qu’elle embauche Norma McCrae-Ward comme directrice du service de l’éducation et des plaintes en matière de harcèlement sexuel. Pendant son mandat, plusieurs mesures sont mises en place pour améliorer la sécurité sur le campus.

Cette conscience avivée rappelle que les activités du CCR sur le statut de la femme sont toujours d’une grande importance, malgré les gains enregistrés. L’analyse des activités récentes du CCR témoigne de l’évolution de son rôle. Depuis sa création en 1975, le CCR a produit des études et fait des recommandations qui ont plus tard abouti en changements sur le plan des politiques. Seulement, après la mise en place de certaines de ces mesures, le comité est devenu une sorte de chien de garde au service des femmes, offrant de l’information et du soutien sur une base individuelle. Le CCR accroît son rôle à compter des années 1990, intervenant non seulement sur le campus, mais aussi dans la communauté élargie. Sa participation à des événements à grand succès tels que le petit déjeuner annuel de la FAEJ en appui au Fonds d’action et d’éducation juridiques pour les femmes, un organisme national de bienfaisance, et son travail auprès du Centre des femmes de Sudbury en constituent deux exemples. Ce travail est rendu possible parce que les femmes sur le campus se sentent davantage en sécurité. Pour obtenir du soutien relativement à l’équité et à la dignité, chaque professeure et chaque employée de soutien peut désormais se tourner vers leur syndicat. Le CCR n’a plus à s’occuper d’un enjeu comme l’équité salariale, car les négociateurs en chef et les délégués syndicaux sont là pour cela21. L’autre voie d’évolution du CCR tient à ce que les professeures, qui l’ont dominé dans ses premières années, ont vu les employées de soutien et de l’administration y assumer un leadership toujours plus grand ces dernières années. L’événement Celebrate Women qui a lieu chaque année lors de la Journée internationale des femmes, en mars, illustre le nouveau rôle du CCR sur le statut de la femme. Le CCR a créé des prix pour souligner les réalisations de femmes exceptionnelles en lien avec l’Université, qu’il s’agisse d’étudiantes, de professeures, d’employées de soutien ou d’administratrices. Comme le rapporte La Gazette

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le centre des femmes de l’université , 1994.  |  Janice Porter (à gauche) et Sue Vanstone, à l’occasion de l’ouverture du Centre des femmes de l’Université Laurentienne en 1994.

de l’Université Laurentienne, « le but est de faire découvrir à la communauté des femmes qui ont su faire progresser la condition féminine et qui se distinguent par leur talent, leur détermination et leur courage22 ». L’identification de modèles et de mentors pour les autres femmes est une importante conséquence de ces prix. Au-delà de la célébration annuelle, le comité s’applique à plusieurs tâches : soutenir et développer le milieu de travail et d’étude des femmes de la communauté universitaire, et produire des recherches sur la situation des femmes à l’Université Laurentienne ; sensibiliser son milieu, et la communauté sudburoise en particulier, aux questions affectant les femmes et les soutenir, voire s’en faire les championnes, lorsque cela est approprié ; communiquer ses propres activités et réalisations au reste de l’université et à la communauté ; contribuer au développement de politiques qui le concerne ; et offrir ses conseils et ses recommandations sur la question de l’équité pour les femmes23. Ces fonctions diversifiées prouvent que le centre d’intérêt de ce comité est passé des batailles ciblées livrées dans les années 1970 et 1980 à des préoccupations plus générales concernant l’équité et la sécurité sur le campus. Les politiques d’équité en matière d’emploi se voient mettre au défi dans les années 1990, lorsque l’École de génie lance un processus d’embauche de nouveaux professeurs. Au printemps 1992, Doug Goldsack, doyen de la faculté des sciences et de génie, écrit aux directeurs des départements de sciences et de l’École de génie pour leur rappeler qu’à peine trois des soixante-dix professeurs de la faculté sont des femmes et qu’il faut « corriger ce déséquilibre24 ». Comme la faculté s’apprête à embaucher neuf nouveaux professeurs, Goldsack presse ses collègues de respecter les directives sur l’équité en matière d’emploi. Révélant qu’il entend demander d’être tenu informé du processus d’embauche sur une base hebdomadaire, il ajoute : « Je ne vois aucune raison pour laquelle certains de ces postes ne peuvent être occupés par des femmes et je vous encouragerai activement à dénicher des candidates qualifiées au cours des prochains mois25 ». À peine quinze des 115 étudiants de l’École de génie sont des femmes et un certain consensus existe au sein

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de la communauté sur le fait que la présence de modèles féminins pour ces étudiantes serait importante. L’École engage finalement deux femmes au printemps 1993, à la suite de quoi paraît dans les journaux locaux une lettre anonyme à l’origine d’une controverse. La missive dénonce l’École pour sa célébration hypocrite de l’arrivée des femmes à la Laurentienne, parce que l’administration l’a en vérité « forcée » à recruter des femmes26. L’identité précise du ou des protestataires demeure un mystère, puisque le directeur de l’École de génie, Anis Farah, défend les embauches. En fait, tout en notant la difficulté statistique d’engager des ingénieures en raison du petit nombre de femmes qualifiées, d’une part, et, de l’autre, le pourcentage minuscule de professeures dans les programmes de génie des autres universités ontariennes – 2 pour cent à l’Université Western Ontario, 4 pour cent à Toronto, 2,7 pour cent à Waterloo et zéro à Lakehead –, il informe le vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, affaires anglophones, que « lorsque la Laurentienne aura embauché une professeure à la faculté de génie, notre taux sera de 6 %, ce qui nous placera parmi les plus hauts taux [de la province]27 ». Le cas de l’École de génie souligne à quel point l’atteinte des cibles de l’équité en matière d’emploi à l’échelle de l’Université est chose complexe, compte tenu des variations dans la participation des femmes aux différentes disciplines. La faible présence des femmes comme étudiantes et comme professeures dans les programmes de sciences et de génie demeure un enjeu non seulement à la Laurentienne, mais à travers le pays aussi. Malgré toutes ces avancées, incluant les politiques et les mesures mises en place pour prévenir la discrimination contre les femmes dans les domaines du salaire, de l’accès aux emplois et du harcèlement, les problèmes subsistent. En effet, un nombre incalculable de témoignages de femmes confirment que ces politiques suscitent parfois plus d’animosité et de résistance à ce que les femmes prennent leur place au sein de l’Université, car les politiques elles-mêmes et la présence croissante de femmes sapent peu à peu le bastion de pouvoir masculin sur les campus canadiens. On en trouve des exemples parfois au pays et tout porte à croire que les expériences qu’ont vécues les femmes à la Laurentienne ne font pas exception. Un genre littéraire émerge même dans les années 1990, préoccupé de documenter le vécu des Canadiennes au sein du monde universitaire. Citons à ce propos Lifting a Ton of Feathers: A Woman’s Guide to Surviving in the Academic World (1994), de Paula J. Caplan, un livre auquel deux professeures de la Laurentienne, Mercedes Steedman et Mary Powell, ont participé ; Breaking Anonymity: The Chilly Climate for Women Faculty (1995), du collectif Chilly ; et Women in the Canadian Academic Tundra: Challenging the Chill (2002), d’Elena Hannah, Linda Paul et Swani Vethamany-Globus. Puisant dans les expériences individuelles de femmes universitaires, chacun de ses livres montre clairement que les problèmes et les défis affligeant les femmes n’ont pas disparu dans la foulée de l’adoption de politiques contre le harcèlement ou pour l’équité. Il n’est pas banal que ces publications reposent sur des récits personnels. La seconde vague du mouvement féministe à déferler sur le pays avait eu comme slogan « le personnel est politique » ; plus de vingt-cinq ans plus tard, ces témoignages individuels confirment que c’est toujours le cas. Si les détails propres à

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Ta bl e 16, 2  |  Profe s seu r e s pa r r a ng à l a L au r e n t i e n n e e n pou rce n tage du tota l , 2 008 Nombre total Hommes Femmes Tous les professeurs à temps plein Professeurs titulaires Professeurs agrégés Professeurs adjoints Chargés de cours Professeurs à temps partiel

Pourcentage de femmes

416

268

148

35,6 %

102 123 149 35 84

83 83 84 14 51

19 40 65 21 33

18,6 % 32,5 % 43,6 % 60,0 % 40,7 %

Source : Données compilées par Lee-Ann Fielding, agente de direction de l’APUL , 2008.

chaque histoire varient, les thèmes résonnent d’un écho familier aux oreilles de la plupart de celles qui ont dû relever le défi de vivre leur vie de femme et d’universitaire. L’information qualitative contenue dans ces récits nous provient d’enquêtes d’un genre bien différent des études quantitatives qui ont dominé les années 1970. Le message n’a toutefois pas changé : il y a encore loin de la coupe aux lèvres en ce qui a trait à l’avènement d’une égalité pleine et entière pour les femmes. On peut conclure, au moins partiellement, que ce sont l’implantation de politiques au sujet du harcèlement et de l’équité salariale et en matière d’emploi, comme celles de la Laurentienne, et les combats victorieux de gens comme Doris Parker, qui ont donné aux femmes le courage de s’affirmer et de narrer leurs propres histoires. Tous ces récits confirment les progrès accomplis, mais les statistiques actuelles montrent aussi qu’en termes d’égalité de participation, les universitaires de sexe féminin sont encore loin du compte à la Laurentienne. Des données compilées par l’A PUL en 2008 révèlent que parmi les 416 professeurs à temps plein, 148 (35,6 pour cent) sont des femmes. À y regarder de plus près, cela dit, on constate facilement que le nombre de professeures décroît à mesure qu’on monte dans la hiérarchie : 18,6 pour cent seulement des professeurs titulaires de la Laurentienne sont des femmes, alors que celles-ci comptent pour 32,5 pour cent des professeurs agrégés, 43,6 pour cent des professeurs adjoints et 60 pour cent des chargés de cours, qui forment aussi la catégorie d’enseignants la plus chichement rémunérée (voir tableau 16,2). Bien que la proportion de femmes aux échelons supérieurs se soit accrue depuis 1985, la vieille structure pyramidale groupant les femmes près la base demeure en place. Les optimistes disent que le verre est à moitié plein, les pessimistes qu’il est à moitié vide, et quelqu’un a déjà ironiquement fait remarquer que « le verre est trop gros pour rien ». À propos des progrès des femmes à l’Université Laurentienne, certains diront qu’un long chemin a été parcouru. D’autres rétorqueront que les progrès sont lents et décourageants. Tout le monde convient d’une chose : l’université n’est pas l’endroit idéal pour évaluer la condition féminine. Alors que les

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étudiantes surpassent en nombre leurs collègues masculins dans une proportion de presque deux pour un, c’est le contraire qui est vrai au sein du corps professoral, où les femmes comptent pour un peu plus du tiers des effectifs. Pendant ce temps, les départements et les programmes fonctionnent grâce au travail de coulisse d’un grand nombre de femmes qui continuent d’occuper des emplois traditionnellement réservés à leur sexe, et sans lesquelles la bonne marche de toute l’entreprise se verrait bloquée. Pour les femmes à la Laurentienne, le verre est-il à moitié plein, à moitié vide, ou les rapports entre les sexes sont-ils trop compliqués pour rien?

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l e s r e l at ion s au s e i n de l a f é dé r at ion

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Affrontement, détente et accommodement, 1960–2010 matt bray

Même si des ententes signées par la Laurentienne avec l’Université de Sudbury et l’Université Huntington en septembre 1960, puis avec l’Université Thorneloe en janvier 1963, en ont défini le cadre, les relations au sein de la fédération sont presque toujours conflictuelles pendant la première décennie d’existence de la Laurentienne. Des différences de principe et des détails d’application posent simultanément problème. Comme leurs Églises affiliées ont fondé la Laurentienne et nommé les trois quarts de son Conseil des gouverneurs, les universités fédérées, d’une manière rappelant l’argument des « droits provinciaux » avancé par le premier ministre de l’Ontario Oliver Mowat à la fin du 19e siècle, assurent que leur statut est au moins égal à celui de l’institution principale. Partageant au contraire un point de vue centralisateur semblable à celui du premier ministre du Canada John A. Macdonald, les dirigeants de la Laurentienne soutiennent qu’en vertu de leurs responsabilités réduites ces établissements occupent un rang subalterne dans la hiérarchie fédérative1. Si ces divergences d’opinions existent sous le court rectorat de Bouvier, les appartenances religieuses et linguistiques au sein de la fédération tendent alors à brouiller les lignes de démarcation. L’Université de Sudbury ne possède guère de raison de contester un établissement qui, dans ses aspects les plus essentiels, a jusqu’à tout récemment présenté les mêmes traits académiques et administratifs. Les choses se présentent différemment pour Huntington. Son futur recteur Ed Newbery, déplorant le rôle restreint des établissements fédérés, fait pression pour accroître la présence de ceux-ci au sein du Sénat et d’autres instances universitaires. Il se distingue aussi de son homologue de Sudbury, le recteur Oscar Boily, par ses soupçons selon lesquels Bouvier contrôle les nominations « pour maintenir les volets administratif et académiques de l’Université entre des mains catholiques2 ». La situation change quand Harold Bennett devient recteur intérimaire, fin 1961. Loin de récuser l’interprétation centraliste de la fédération – Bennett propose en

l’université de sudbury.

1963 de distinguer les responsabilités administratives des universités fédérées de leurs responsabilités éducatives comme collèges –, son passage au Collège Victoria de l’Université de Toronto lui permet toutefois de comprendre le point de vue des petites universités et leur dilemme financier tout particulièrement. Les Églises fondatrices avaient choisi le modèle fédératif pour que leurs universités puissent recevoir de l’aide financière provinciale, mais cette aide est sévèrement limitée par les politiques gouvernementales. À l’hiver 1962–1963, sur recommandation de Bennett, le Conseil accroît leur part des subventions et réduit les responsabilités administratives de la Laurentienne, haussant ainsi considérablement les revenus des universités fédérées. Ces dernières ne restent pas indifférentes. En 1961, Huntington prend ombrage de la suggestion de la Laurentienne que les universités fédérées « se concentrent sur les résidences et les affaires sociales [étudiantes] ». Un an plus tard, elles informent la Laurentienne qu’elles se montrent disposées à assumer la responsabilité initiale des résidences et des réfectoires du nouveau campus du chemin du lac Ramsey3. Alors que le passage de Bennett au rectorat fait en sorte d’améliorer les relations entre la Laurentienne et les universités confessionnelles, celui de Mullins a l’effet contraire. Quelques mois à peine après l’arrivée en poste de ce dernier, Ed Newbery se plaint que le nouveau recteur ait « apparemment l’intention de limiter les confessions fédératrices à “faire de la catéchèse”, comme l’a dit le père Matte [recteur de l’Université de Sudbury], dans une poignée de salles sur le campus ». Matte demande l’aide de l’ancien recteur de Huntington Earl Lautenschlager dans sa lutte contre Mullins et songe même à faire sortir Sudbury de la fédération. Une telle collégialité atténue quelque peu les divergences sectaires entre les universités : Newbery fait valoir auprès d’un associé « la gentillesse et la grâce de chaque jésuite » de l’Université de Sudbury avec lequel il a travaillé, mais il demeure méfiant envers « les méthodes “impérialistes” de l’ordre4 ». En 1963, un conflit relatif à une collecte de fonds – un sujet de la plus haute importance pour les universités fédérées, inadmissibles à l’aide financière pro-

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vinciale – lie plus solidement encore les trois contre la Laurentienne. Sudbury et Huntington mènent toutes deux des activités de financement, dans le second cas sous les auspices de la Northern Ontario University Association. Au début de la campagne du Fonds des fondateurs de la Laurentienne, les trois institutions fédérées acceptent de repousser tout nouvel effort jusqu’à ce que la Laurentienne atteigne son but. Juillet venu, l’objectif en vue, la Laurentienne les informe qu’elle est désormais prête à recevoir leurs demandes d’approbation de leurs collectes de fonds, une condition inscrite dans l’entente de fédération pour éviter toute concurrence directe. Les établissements fédérés n’ont jamais aimé cet article qui les contraint à cibler en priorité les donateurs « non industriels », comme les paroisses et les congrégations, et à quémander une permission à la Laurentienne. Aucune demande n’est déposée5. Les relations s’enveniment à l’hiver 1963–1964. Sudbury et Huntington attendent décembre pour déposer leur demande, soit plusieurs semaines après avoir commencé à collecter des fonds. Au terme de « longues discussions », le Conseil des gouverneurs les autorise à « mener une campagne pour recueillir des capitaux permanents au-delà des limites de leur ressort […] selon l’entente de fédération », mais il impose la condition que toute demande d’argent faite auprès de ceux ayant déjà contribué au Fonds des fondateurs doit mentionner qu’un deuxième don serait apprécié, mais qu’il n’est pas obligatoire. Le Conseil des régents de l’Université de Sudbury trouve cette restriction si choquante que son président, le sénateur Rhéal Bélisle, réclame en février une rencontre entre les dirigeants de la Laurentienne et de Sudbury pour « régler les désaccords des dernières semaines ». Le Conseil des gouverneurs de la Laurentienne accepte à cette occasion de supprimer la disposition offensante. Surtout, il crée en mars un Comité consultatif du recteur sur les relations au sein de la fédération « pour se pencher sur toute question concernant les relations dans la fédération qu’un des membres de la fédération aimerait soulever6 ». Si elles accueillent bien l’annonce de la création du comité, les universités fédérées se montrent tout de même insatisfaites de sa composition proposée. En plus du président et du secrétaire du Conseil, responsables de le convoquer, le CCR sur les relations au sein de la fédération compterait trois membres, à raison d’un nommé par chaque université fédérée. Le problème, pour ainsi dire, est que chacune doit choisir son candidat parmi la liste des gouverneurs de la Laurentienne nommés par son Église d’appartenance ; or le passé témoigne de ce que la loyauté première des gouverneurs ne va pas nécessairement aux établissements fédérés. Jugeant cette inquiétude recevable, le Conseil accroît la composition du comité afin d’y inclure les dirigeants des trois universités confessionnelles7. Le CCR sur les relations au sein de la fédération s’annonce comme une excellente initiative. À la demande de Sudbury et de Huntington, il entreprend à l’automne 1964 d’enquêter sur le fédéralisme et, à son insistance, l’année suivante, la Laurentienne réduit de moitié les frais administratifs exigés des établissements confessionnels. Le recteur Mullins continue malgré tout d’inquiéter. En mai 1965, devant le club Montessori de Sudbury, il donne à la fédération une interprétation férocement centraliste. La Laurentienne, affirme le recteur, « ne contrôle pas les

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l e s r el at i o n s au sein d e l a f éd ér at i o n

l’université huntington lors d’une des phases de construction .

actions avec droit de vote de ses compagnies à l’heure actuelle », en ce sens qu’elle ne nomme pas la majorité des membres de son conseil, même si sa loi constituante lui octroie les pouvoirs supérieurs. Elle seule peut recevoir des subventions provinciales, martèle-t-il, elle seule peut créer des facultés, écoles et instituts, ou permettre la fédération et l’affiliation d’autres établissements. « Nous [la Laurentienne et les universités fédérées] sommes partenaires, mais pas égaux dans l’accomplissement des volontés des fondateurs de notre institution », conclut Mullins8. Le moment choisi pour ce discours, quelques jours après que le Conseil des gouverneurs a créé un comité spécial sur le bilinguisme présidé par l’éditeur du Sudbury Star James Meakes, laisse penser que Mullins – et certains gouverneurs, sans doute – souhaite que les relations fédérales soient inscrites à son ordre du jour. C’est, en tout cas, ce qui survient, la question se trouvant rapidement au cœur des délibérations du comité. Lors d’une de ses séances de trois jours n’engageant qu’eux, les représentants des universités fédérées sont nombreux à se plaindre, et parfois amèrement, du traitement mesquin que leur réserve le recteur Mullins9. Le comité spécial dépose son rapport en juillet 1965. Ses passages sur les relations au sein de la fédération déçoivent nettement les institutions fédérées. Postulant l’existence, au sujet du rôle de celles-ci dans l’Université, de « divergences sincères » entre Mullins et « les autres », le rapport affirme de façon quelque peu péjorative que les universités confessionnelles conçoivent la Laurentienne comme « une “créature” des universités de Sudbury, Huntington et Thorneloe, conçue dans le cadre d’un mariage de convenance contracté dans le but commun d’obtenir une aide financière du gouvernement de la province de l’Ontario, autrement inaccessible à elles sur une base individuelle ». Par comparaison, le discours complet de Mullins devant le club Montessori figure en annexe et le résumé de ses principaux arguments apparaît dans le texte du rapport. Fait révélateur, outre la suggestion de

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transformer le CCR sur les relations au sein de la fédération en comité permanent du Conseil, chose que les gouverneurs font sans attendre, le rapport recommande seulement un examen plus poussé de la situation et davantage d’efforts de toutes les parties impliquées comme moyens d’améliorer les relations10. La partialité du comité Meakes sur la question des relations dans la fédération se devine d’une autre manière. Eu égard au processus de nomination au Conseil des gouverneurs, le rapport affirme que « le Conseil ne semble pas avoir l’obligation légale d’élire les personnes nommées par les Églises uniquement ». Des facteurs politiques s’avèrent toutefois plus pesants dans ce dossier. À l’hiver 1965–1966, le Conseil propose de modifier son règlement pour réduire de six à trois le nombre de gouverneurs nommés par chaque université fédérée. Le gouvernement provincial accepte l’idée, pour autant que les Églises fondatrices en fassent autant. Seul le Conseil des collèges et des écoles secondaires de l’Église unie se montre d’accord. Le Conseil des régents de l’Université de Sudbury et l’archevêque Wright, au nom du diocèse anglican d’Algoma, refusent, gênant ainsi les plans de la Laurentienne pour contrôler ses actions avec droit de vote, selon le mot de Mullins11. Les universités fédérées subissent un recul au début de 1966, alors que le Conseil des gouverneurs demande l’avis du ministère des Affaires universitaires sur la meilleure entente financière entre la Laurentienne et ses établissements affiliés. Une rencontre en mai avec les gouverneurs Parker, Fraser et Bennett à Queen’s Park voit le ministre William Davis adopter une position résolument hostile aux universités fédérées. Il n’était pas prévu que l’aide financière provinciale directe devienne accessible aux établissements d’enseignement postsecondaire confessionnels, affirme Davis, et ces derniers ne se qualifient pas davantage pour les subventions récemment annoncées pour résidences de premier cycle. Il informe aussi la délégation de « l’insatisfaction » du gouvernement Robarts envers la pratique de la Laurentienne consistant à remettre 50 pour cent de sa subvention du gouvernement canadien aux universités fédérées au lieu de se servir de la formule provinciale pour les frais de scolarité. Comme Ottawa a annoncé son intention d’allouer ces fonds aux provinces plutôt qu’aux universités directement, la situation augure mal pour les établissements fédérés. Davis réitère sa position en août lors d’une rencontre avec le comité exécutif de la Laurentienne, le CCR sur les relations au sein de la fédération et des représentants des Églises, affirmant du même souffle la disposition de la province à modifier la loi constituante de la Laurentienne pour y réduire le nombre de gouverneurs nommés par les universités fédérées. L’orageux conflit sur la gouvernance de la Laurentienne qui se prépare alors fait toutefois en sorte de mettre cette question en veilleuse pendant presque deux décennies12. Le balancier revient du côté des institutions fédérées en mai 1967 avec l’adoption par les gouverneurs d’une déclaration du CCR sur les relations entre la Laurentienne et les universités fédérées. Nettement favorable à celles-ci, le document en dix points déclare que les universités confessionnelles sont « parties prenantes » de la fédération, que leurs responsabilités académiques vont au-delà de la philosophie et des sciences religieuses et qu’elles jouent un rôle essentiel du point de vue de l’administration et de la vie étudiante. Le Conseil des gouverneurs décide égale-

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l e s r el at i o n s au sein d e l a f éd ér at i o n

l a chapelle st-mark de l’université thorneloe .  |  La chapelle St-Mark est érigée en 1968 avec l’appui financier de la famille Fielding de Sudbury. C’est la seule chapelle du campus qui occupe son propre édifice.

ment que cette déclaration sera soumise conjointement par le recteur Mullins et les dirigeants des trois universités fédérées au ministre des Affaires universitaires13. Les relations au sein de la fédération occupent davantage l’esprit des gouverneurs à la suite de cet épisode. Le président du CCR , Dalton Caswell, explique en octobre 1968 que le comité se réunit une fois par mois pour permettre aux partenaires de la fédération de « discuter ouvertement de toute question pouvant concerner les universités fédérées ou l’Université [Laurentienne] dans son ensemble ». Les sujets admissibles varient des questions de principe, comme les programmes d’enseignement des institutions fédérées, aux préoccupations plus concrètes, telles que les horaires, l’attribution des salles de cours et les services d’infirmerie sur campus, pour n’en nommer que quelques-uns14. La détérioration de la situation financière des universités fédérées annule malheureusement les gains sur le plan consultatif. La faible aide provinciale dont elles bénéficient les rend dépendantes de leur affiliation religieuse pour les subventions de fonctionnement et les fonds pour leurs dépenses en capital, à savoir la construction de pavillons administratifs, de salles de cours et de résidences. Quand ces fonds viennent à manquer, les universités fédérées n’ont d’autre choix que d’hypothéquer leurs biens, opération dont le coût fait gonfler les déficits de fonctionnement annuels, comme l’explique le recteur Newbery en 1967. La situation se trouve exacerbée du fait que cette année-là, comme le souhaite Queen’s Park, la Laurentienne accepte de revoir son mode de partage des subventions fédérales avec les établissements fédérés, encore que la province compense partiellement les pertes de ces derniers en subventionnant leurs étudiants à un équivalent de 50 pour cent du taux des établissements non confessionnels en vigueur selon la nouvelle formule15. Sans être à l’abri des pressions financières du moment, l’Université de Sudbury profite de l’influence de l’ordre des Jésuites pour maintenir ses programmes d’enseignement intacts pendant cette période difficile. Huntington et Thorneloe n’ont

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pas le même succès. Défait à la fois parce qu’il lui faut composer « avec l’attitude antipathique de l’Université et de l’État » et parce qu’il n’a pas su convaincre le Conseil des régents de prendre au sérieux les efforts de Mullins pour « neutraliser » Huntington, Newbery en quitte le rectorat en février 1968. (Il passe à l’Université de Sudbury un an plus tard et y crée le programme d’études amérindiennes.) La situation empire. En plus de son dilemme financier, le conseil de Huntington doit composer avec la grogne des professeurs et des étudiants relativement à ses pratiques de gouvernance, comme cela se produit sur le campus principal. Les régents créent en septembre un comité chargé de revoir la situation globale de l’établissement. Une de ses conclusions, particulièrement inquiétante, est que Huntington a utilisé des fonds assignés aux dépenses en capital pour couvrir ses déficits de fonctionnement. Au printemps 1969, soucieuse de réduire ses engagements financiers, l’institution abandonne son programme et ses professeurs de philosophie – dont Garry Clarke et Wes Cragg, deux importantes figures du mouvement de réforme de la gouvernance de la Laurentienne – au profit du collège universitaire, limitant son enseignement aux sciences religieuses16. Si la crainte de Huntington de devenir un simple dortoir sur le campus se concrétise presque un destin bien pire menace Thorneloe – sa disparition à titre d’institution confessionnelle et la vente de ses biens et équipements à l’Université Laurentienne. Comme l’explique une délégation de Thorneloe auprès du comité exécutif du Conseil de la Laurentienne en mars 1969, c’est une hypothèque de 375 000 $ qui fait problème. Malgré des revenus tirés des résidences étudiantes, l’établissement produit chaque année un déficit qui menace de grossir si, comme le veut la rumeur – qui s’avère ultimement fondée –, le diocèse anglican d’Algoma réduit ses subventions. Thorneloe offre donc de transférer à la Laurentienne tous ses biens à l’exception de la chapelle St-Mark en échange d’une prise en charge de l’hypothèque. L’institution anglicane exige aussi que la Laurentienne conserve le nom Université Thorneloe et s’engage « pourvu que cela soit possible et souhaitable » à maintenir « les traditions, coutumes, espérances et aspirations qui sont aujourd’hui celles de Thorneloe17 ». Le comité exécutif du Conseil accepte l’arrangement, mais a tôt fait de découvrir que son application serait difficile, car il faudrait d’abord modifier la loi constituante de l’Université Laurentienne. Dans le climat hostile de l’hiver 1969–1970, l’opposition venant de plusieurs groupes au sein de la communauté universitaire, et tout particulièrement de l’Association des professeurs de l’Université Laurentienne, contrecarre toute avancée en ce sens et en décembre, le conseil de Thorneloe libère la Laurentienne de son engagement à assumer le contrôle de l’établissement. Pour comprimer ses dépenses, la direction de Thorneloe va plus loin que Huntington, en éliminant du programme académique pour 1970–1971 la philosophie et les sciences religieuses, quoiqu’elle conserve une série de cours à distance dans cette dernière discipline18. Les universités fédérées voient les défis de la fin des années 1960 modifier radicalement à la fois leur perception et la réalité de leur place dans le système laurentien. Elles ne peuvent dorénavant plus prétendre que la Laurentienne soit un

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partenariat entre égaux sur le plan de l’autorité, sinon des responsabilités. Sur le plan financier, la période de vaches maigres au début des années 1970 renforce cette évidence, surtout auprès de Huntington et de Thorneloe, et fait de la survie à petite échelle un objectif plus réaliste. Afin de leur venir en aide, la Laurentienne demande au gouvernement Davis de subventionner les étudiants des universités fédérées sur la même base que ceux des établissements non confessionnels. Une lueur d’espoir apparaît à l’horizon à l’automne 1972, quand le recteur Monahan et les dirigeants des trois universités fédérées rencontrent le comité des affaires universitaires pour débattre de la question. La rencontre porte fruit et un an plus tard, le ministre des Collèges et Universités annonce qu’à compter de septembre 1974, les institutions confessionnelles se verront financées au même titre que les autres. En plus de grandement aider les établissements affiliés, le doublement des subventions permet à la Laurentienne de rétablir les frais administratifs exigés d’eux à leur niveau réel. Monahan estime que la Laurentienne tirera six fois plus de revenus de cette source dès la première année19. En plus de ces nouveaux revenus, les universités fédérées profitent aussi de ce que la nouvelle politique provinciale de financement modifie la position de la Laurentienne sur leur rôle en enseignement. Leurs étudiants pleinement subventionnés, les programmes exclusifs à ces universités ne menacent plus autant l’offre de la Laurentienne. En décembre 1974, le comité sur les relations au sein de la fédération recommande même qu’elles soient « encouragées à accroître leur charge académique » au sein de l’Université. Chacune le fait au cours des trois décennies suivantes, à la fois en reconstituant et développant leurs programmes conjoints de sciences religieuses et philosophie et en investissant des champs que la Laurentienne n’occupe pas directement : folklore (plus tard folklore et ethnologie de l’Amérique française) et études amérindiennes (plus tard études autochtones) à l’Université de Sudbury, études féministes et études anciennes à Thorneloe et musique (de concert avec Cambrian) à Huntington dans les années 1970 ; arts de la scène à Thorneloe et éthique (avec la Laurentienne et l’Université de Sudbury) à Huntington dans les années 1980 ; gérontologie à Huntington dans les années 1990 ; interarts (en collaboration avec la Laurentienne et le Collège Cambrian) à Thorneloe, études en communication (en collaboration avec la Laurentienne et le Collège Cambrian) à Huntington et communication publique (avec la Laurentienne et le Collège Cambrian) à l’Université de Sudbury dans les années 2000. Les questions spirituelles demeurent un sujet de prédilection pour les universités fédérées, mais cette diversification de leur enseignement, jumelée à leurs responsabilités bien ancrées en matière de résidences étudiantes, leur garantit de faire bien plus que de la « catéchèse » sur le campus20. La hausse des inscriptions et du financement des universités fédérées conséquente à l’expansion de leurs programmes allège leur fardeau financier, ce qui améliore leurs relations avec la Laurentienne. Des différends n’en continuent pas moins de se manifester ça et là, quand l’Université révise les arrangements en matière de partage des revenus ou hausse les frais de ses services administratifs, comme cela se produit à la fin des années 1970. Lors de la décennie suivante, la

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avec perspicacité et esprit, le northern life fait écho à l a commission parrott qui propose de renommer l a l aurentienne université champl ain .

fédération connaît des relations relativement harmonieuses, témoin la décision prise par les trois églises fondatrices en 1986 de réduire de six à cinq le nombre de gouverneurs nommés par elles21. Les problèmes reviennent en force avec le dépôt en 1992 du rapport final du comité de la planification stratégique de la Laurentienne. Ce comité, formé en partie pour se pencher sur la question de la concurrence avec les établissements fédérés pour les étudiants, recommande « dans un esprit de coopération » le réexamen des ententes de fédération. Ouverts à l’idée, les dirigeants des quatre établissements créent une commission des recteurs sur les universités fédérées présidée par le gouverneur Jim Smith et comprenant les quatre recteurs de même qu’un membre du Conseil des gouverneurs ou des régents et un professeur de chaque établissement. À compter d’octobre 1992, elle étudie dans le détail les relations au sein de la fédération en fonction de trois principaux thèmes : les études, les finances et la gouvernance. Déposé l’année suivante, son rapport intitulé « L’Université Laurentienne, une fédération axée sur la collaboration » suggère différentes manières de peaufiner le modèle de gouvernance de la Laurentienne axé sur la collaboration, tout en assurant l’uniformité des normes et des embauches universitaires à l’échelle institutionnelle au moyen de mécanismes tels qu’un comité de gestion de la fédération et un comité universitaire de la fédération. De plus, eu égard à la gouvernance, le Conseil de la Laurentienne modifie la composition de son comité des relations de la fédération en mars 1994 en y ajoutant un gouverneur ou un régent de chacune des universités fédérées, comme l’a recommandé la commission. Enfin, dans la foulée de la commission des recteurs et en partie à l’initiative du comité ad hoc de la Laurentienne sur la restructuration du Conseil, à l’œuvre au même moment, les universités fédérées acceptent de réduire de cinq à quatre le nombre de leurs représentants au sein du Conseil de la Laurentienne22. Les réformes du milieu des années 1990 donnent le ton au déroulement des relations fédératives au cours des quinze années suivantes. Grâce à la mise en

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place de mécanismes consultatifs formels (Conseil des gouverneurs, comité des relations de la fédération, comité de gestion de la fédération, comité universitaire de la fédération) et informels (réunions ad hoc des recteurs, des secrétaires, etc.), pour traiter d’une large palette de dossiers d’intérêt commun – financement, inscriptions, sécurité, pensions, services aux étudiants, etc. –, les relations entre la Laurentienne et les trois universités fédérées deviennent plus stables et équitables. Cela ne signifie pas qu’aucun conflit ne survient. Comme par le passé, le degré d’attention portée aux relations au sein de la fédération et la nature de celles-ci à tel ou tel autre moment continuent de dépendre de facteurs tels que la personnalité des individus occupant les postes clés, au niveau du rectorat tout spécialement, la situation financière et le portrait des inscriptions. Cela dit, comparativement à la volatilité des années 1960 et à l’inactivité des deux décennies suivantes, les relations récentes au sein de la fédération se caractérisent par une compréhension mutuelle et une coopération accrues. Comme l’écrit le recteur de l’Université de Sudbury Andrii Krawchuk en 2009 : « Par-delà le caractère distinct et l’autonomie de nos établissements, notre fédération demeure d’abord et avant tout un partenariat, une communauté d’institutions23. »

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l e c or p s prof e s s or a l

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Les premières années, 1960–1972 linda ambrose

À son inauguration au centre-ville de Sudbury en prévision de l’année universitaire 1960–1961, l’Université Laurentienne compte trente-quatre professeurs à temps plein et vingt-quatre chargés de cours dans ses rangs1. Vingt-trois professeurs demeurent en poste l’année suivante, mais six démissionnent et cinq prennent congé pour poursuivre leurs études. Quatorze nouveaux professeurs à temps plein s’ajoutent en 1961–1962 et neuf autres en 1962–1963, tandis que cinq s’en vont et six prennent congé. On le voit bien, un fort va-et-vient, toutes proportions gardées, affecte le petit nombre de professeurs en poste. À cette première période succèdent plusieurs années de forte expansion assortie d’un taux de renouvellement élevé. La croissance ralentit enfin dans les décennies suivantes et fait place à plus de stabilité. La baisse des inscriptions au tournant des années 1980 met un frein au développement des institutions postsecondaires et pousse les enseignants à la Laurentienne et ailleurs à protéger leurs emplois au moyen de la syndicalisation et de la négociation collective. Entre la fin des années 1980 et le début des années 1990, les conditions économiques et démographiques font en sorte que les universités canadiennes recrutent très peu de nouveaux professeurs. L’Université Laurentienne compte, en 2008, douze fois plus de professeurs à temps plein (416) et trois fois et demie plus de chargés de cours (84) qu’à l’origine2. Un fort taux de renouvellement a caractérisé les années précédentes en raison du remplacement de vétérans professeurs par de jeunes professeurs avec le doctorat actifs en recherche et désireux d’enseigner aux études supérieures. Ce « changement de garde » se répercute sur la culture institutionnelle, en cela que les personnes aspirant à se bâtir une carrière universitaire n’ont pas du tout la même expérience que leurs prédécesseurs trente ou quarante ans plus tôt. Ce chapitre retrace l’expérience changeante de tous ceux et celles qui, des tout débuts à aujourd’hui, enseignent aux étudiants, font de la recherche et donnent à la communauté à titre de professeurs à l’Université Laurentienne. Si la syndicalisation reçoit une attention particulière, c’est que les relations de travail entre l’Université

co r p s p ro f e s s o r a l d e l’u n i v er s i t é l a u r en t i en n e , 1960–1961 « Liste du corps professoral à l’Université Laurentienne » Quand l’Université a ouvert ses portes en 1960, il n’existait aucun mécanisme officiel de négociation collective. Par conséquent, les 31 membres du corps professoral ont négocié individuellement leurs conditions d’emploi directement avec le président.

Professeurs Bouvier, E., S.J., Ph.D., Georgetown-Harvard, Économie Cadieux, L., S.J., Ph.D., Laval, Histoire Ferland, Y., S.J., B.A., Lic. ès science, Montréal, Mathématiques L’Archevêque, A., M.D., Biologie [professeur invité] Leclaire, R., S.J., Ph.D., Georgetown, Physique Professeurs agrégés Robillard, F., S.J., M.Sc., Montréal, Physique Professeurs adjoints Allaire, C., S.J., M.A., Montréal, Chimie Almazan, V., M.A., Strasbourg, Langues Dupas, A., S.J., M.A., Loyola, Études anglaises et françaises Girouard, A., S.J., B.A., Montréal, Littérature française Scanlon, P., M.A., Wisconsin, Anglais Stingel, R., M.A., Toronto, Anglais, [professeur adjoint invité] Szelle, L., LL.D., Budapest, Science politique, Histoire Tombalakian, A., Ph.D., Toronto, Chimie Chargés de cours Barrera, M., M.A., Mexique, Espagnol Brodeur, L., B.A., Manitoba, Littérature française Carrier, Y., S.J., M.Sc.., Fordham, Biologie Devriendt, A., Dip., Mons et Colorado School of Mines, Génie Gueneau, J., S.J., M.A., Paris, Mathématiques Kampouris, J., Administration des affaires, Sociologie Kwei, A., M.A., Toronto, Physique Lafleur, P., B.A., Montréal, Français Lemieux, C., S.J., M.A., Laval, Histoire Michaud, L., S.J., B.A., Laval, Économie Pare, L., M.A., Fordham, Philosophie Peltier, J., B.A., Ottawa, Économie Pezet, J., B.A., Laval, département d’Extension Pryke, K., M.A., Duke, Histoire Rabin, C., B.Sc., Caroline du Sud, Économie Shea, J., B.A., Londres, Sociologie Sirtori, A., Lic.ès lettres, Milan, Langues Vachet, A., M.A., Ottawa, Philosophie

et l’Association des professeurs de l’Université Laurentienne se trouvent au cœur de l’expérience historique du corps professoral au sein de l’établissement. Au départ, les professeurs reçoivent des contrats de dix mois et doivent renégocier chaque année directement avec le recteur de l’université les conditions de leur embauche3. Pour chaque professeur, le recteur recommande ensuite au Conseil des gouverneurs des clauses concernant le salaire et le rang. En 1960, les salaires professoraux varient de 3 000 $ à 10 000 $, selon l’expérience et la compétence. Des trente-quatre premiers professeurs à temps plein, à peine quatre possèdent le doctorat et quatre autres la maîtrise. Les autres détiennent un baccalauréat, quoique plusieurs travaillent à compléter leur maîtrise. Les mieux rémunérés – sept professeurs touchent 7 500 $ ou plus en 1960–1961 – ont des doctorats, une expérience considérable en enseignement et, parfois, une charge administrative supplémentaire à titre de doyen ou de directeur de département4. La nature individuelle de ces arrangements signifie qu’un pouvoir considérable repose entre les mains du recteur et que l’arbitraire peut dicter ses décisions. Ce qui fait aujourd’hui figure de norme de la vie universitaire n’est pas encore en place : il n’existe ni politique d’attribution des permanences et des congés sabbatiques, ni mécanisme unique de nomination et de progression au sein d’un rang donné. Dans la première décennie d’existence de l’université, le corps professoral fait de l’obtention d’un semblant de sécurité d’emploi et de conditions de travail uniformes un but primordial. L’Association des professeurs de l’Université Laurentienne (APUL), bilingue, voit le jour dès la première année de vie de l’université, quoique son accréditation syndicale ne date que de 1979. Cela dit, dès les années 1960, l’A PUL négocie au nom de ses membres avec le Conseil des gouverneurs conformément aux objectifs de ses statuts : « 1) promouvoir le bien-être des professeurs et de l’Université ; 2) protéger la liberté d’enseignement, de pensée et de recherche au sein de l’Université et en améliorer la qualité ; 3) coopérer avec d’autres instances dont les intérêts pourraient être semblables ; et 4) s’occuper de toutes les autres questions qui pourraient intéresser l’Association ou ses membres5 ». À la lumière de l’arbitraire initial du Conseil et du recteur dans l’établissement des salaires, la recommandation des promotions et l’offre ou le renouvellement de contrats, il devient évident que les professeurs doivent travailler ensemble pour protéger leurs intérêts collectifs. Les archives de l’A PUL révèlent qu’en 1960–1961, vingt-sept membres acquittent la cotisation annuelle de 10 $ et l’association débourse 178,15 $ en activités sociales, en soutien à la Laurentian Theatre Guild, en condoléances, en frais bancaires et en fournitures de bureau. Deux ans plus tard, la cotisation annuelle passe à 15 $ et l’A PUL paie 240 $ pour se joindre à l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université (ACPPU)6. L’adhésion à cette association nationale est importante, car elle permet au corps professoral de la Laurentienne de se tenir informé des événements qui surviennent sur les autres campus relativement à la permanence, les sabbatiques et les pensions. À cette époque, en effet, les universitaires de tout le pays se mettent à l’activisme dans le but de protéger leurs intérêts professionnels. La croissance abrupte et largement improvisée des institutions postsecondaires de l’Ontario dans les années 1960 se traduit par le développe-

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des étudiants autochtones dans un cours d’éducation permanente , 1962.  |  Vu son engagement envers l’éducation permanente, dès 1962, la Laurentienne offre des cours à distance aux adultes dans diverses communautés du nord de l’Ontario.

ment accéléré de procédures spéciales pour tous genres d’enjeux concernant les professeurs. L’insatisfaction des professeurs d’un peu partout au Canada envers la gestion des questions concernant le personnel pousse ceux-ci vers de nouveaux niveaux d’activisme qui aboutissent finalement à leur syndicalisation7. À cette époque, comme cela a été mentionné ailleurs, les enjeux affectant les professeurs vont au-delà de leur rémunération et de leur sécurité d’emploi et concernent leur degré de participation et d’influence sur les instances décisionnelles. Dans un article de 1976 intitulé « Modes of University Government », W. M. Sibley a décelé trois périodes dans l’évolution de la gouvernance universitaire : autoritaire, jusqu’aux années 1960 ; participative, de la fin des années 1960 aux années 1970 ; et conflictuelle, à compter des années 19708. Toutes sont bien en évidence à la Laurentienne, quoiqu’elles paraissent souvent se chevaucher, étant donné que l’administration conserve une approche autoritaire et que les professeurs, de leur côté, demandent et obtiennent le droit de participer davantage aux prises de décision et à la gouvernance universitaire. La hausse simultanée du nombre de conflits témoigne que l’Association des professeurs et l’administration entrent dans une longue période de relations conflictuelles. Une autre section du présent livre traite des débats sur la représentation professionnelle au sein du Sénat et du Conseil, mais il importe de se souvenir que c’est dans le même contexte, au temps du rapport Duff-Berdahl (1966), que l’A PUL , comme les autres associations de professeurs à travers le pays, lutte pour mettre en place des politiques et des procédures précises en rapport avec l’attribution des permanences et des sabbatiques ou l’établissement de motifs acceptables de congédiement, par exemple – toutes choses que les universitaires prennent aujourd’hui pour acquises. Les événements de la

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Laurentienne sont typiques des enjeux soulevés sur les autres campus de l’Ontario et du Canada. Toutes ces questions générales sur les principes d’une juste rémunération, de sécurité d’emploi élémentaire et de représentation appropriée au sein des instances sont importantes pour le corps enseignant, mais il y a aussi, à Sudbury, certaines situations bien concrètes à régler : l’une des plus urgentes concerne le logement des professeurs. Attirer des professeurs est un défi colossal pour la Laurentienne à cause de la crise du logement à Sudbury. Le 31 mai 1961, le recteur Bouvier annonce que « cinq candidats détenteurs d’un doctorat ont refusé l’offre de l’Université Laurentienne pour plusieurs raisons, et particulièrement les problèmes de logement9 ». L’université soupèse plusieurs solutions à ce problème, y compris l’érection d’un complexe résidentiel pour professeurs à son futur campus du chemin du lac Ramsey – plan qu’il lui faut abandonner faute de moyens financiers. Le Conseil opte plutôt d’« étudier la faisabilité d’offrir un second prêt hypothécaire aux professeurs pour les soutenir dans l’achat ou la construction d’une résidence personnelle10 », s’inspirant en cela d’une pratique ayant cours à l’Université de Toronto et en vertu de laquelle celle-ci garantit elle-même les prêts hypothécaires consentis par les banques à ses professeurs. L’année suivante, le Conseil des gouverneurs adopte un règlement prévoyant les modalités d’approbation d’un second prêt hypothécaire pour ceux parmi ses employés qui souhaiteraient en faire la demande11. Pour importante qu’elle soit, l’aide financière au logement ne règle pas le principal problème frappant les nouveaux professeurs dès leur arrivée à Sudbury : il n’y a simplement nulle part où habiter. Les maisons à vendre sont rares et les loyers prohibitifs, en conséquence de quoi la Laurentienne décide de tâter le marché de l’immobilier. Au printemps 1967, le Conseil autorise le comité d’accueil du personnel, de concert avec le contrôleur, à réserver jusqu’à vingt appartements ou maisons à Sudbury à mesure qu’ils se libèrent durant l’été et d’en payer le loyer afin de les retenir pour les cinquante-et-un nouveaux professeurs devant s’installer à automne. En août, le comité exécutif reçoit un rapport statuant que les lieux suivants ont été réservés : « Immeuble d’appartements Caswell, 3 unités, coût net 367,50 $ ; immeuble d’appartements Benvenuto, 1 unité, coût net 50 $ ; immeuble d’appartements Commodore, 3 unités, coût net 176,25 $ ; immeuble d’appartements Lakeshore, 1 unité, coût net nil ; résidence McVittie – vacance en juillet et août 350 $ ; loyer de trois résidences meublées devant servir à loger de nouveaux professeurs pendant la recherche d’un logement satisfaisant : 1 270 $ ; total 2 213,75 $. Le recteur a mentionné que ce service offert par l’Université aux nouveaux membres du personnel a été très apprécié12 ». Cette liste de propriétés ne suffit toutefois pas à soutenir le rythme de la croissance anticipée. En conséquence, l’Université prend, en juin 1967, sa décision la plus controversée en matière immobilière, soit l’achat des tours Randolph, un immeuble d’appartements au centre-ville de Sudbury, au coin des rues Cedar et Drinkwater. La Laurentienne accepte de payer 235 000 $, incluant une mise de fonds de 75 000 $ et un taux hypothécaire de 7 pour cent sur le reste, pour cet édifice jugé « en bon état [et] nécessitant seulement des rénovations mineures

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immeuble résidentiel randolph , 2010.  |  Alors que le nombre de professeurs augmente rapidement après le déménagement au nouveau campus, la ville connaît une pénurie de logements. Donc, en 1967, l’Université achète l’édifice Randolph pour atténuer le problème. Cet arrangement est de courte durée, car l’administration vend l’édifice en 1972.

pour pouvoir fournir 23 unités résidentielles13 ». L’acquisition paraît logique et son emplacement pratique pour le personnel universitaire. Ce que personne n’a prévu, par contre, est la réaction énergique et le jugement sévère de l’opinion publique. Afin de prendre possession des appartements et les préparer à y accueillir les professeurs et le personnel plus tard dans l’été, l’université donne aux occupants un préavis de départ d’un mois à peine. « Un certain nombre et même une majorité de résidents […] sont des veufs ou des retraités, selon le Sudbury Star, ce qui rend la situation doublement pénible. Il s’est créé une impression générale voulant que le recteur de l’Université Laurentienne Stanley Mullins et le Conseil des gouverneurs de l’université soient des gens insensibles14. » De fait, sur la base de cette perception, quelques locataires évincés décident de protester directement auprès de Queen’s Park. Leur lettre au premier ministre Robarts est on ne peut plus claire : Nous trouvons incompréhensible et incroyable que notre Université locale, représentant trois Églises chrétiennes de notre communauté […] ait songé un seul instant à prendre contrôle de tout un immeuble d’appartements d’une telle façon que ses occupants se trouveraient dépossédés de leurs logements aussi sommairement. Nous nous demandons si l’achat de l’immeuble d’appartements par l’Université Laurentienne et la manière dont ses locataires actuels devraient le quitter ont reçu toute l’attention requise […] Nous, soussignés, avons soutenu la construction d’une université dans la communauté et plusieurs y ont participé par des dons ou autrement, mais jamais n’avons pensé que, ce faisant, vingtdeux familles environ pourraient un jour se voir forcées de quitter leur logement et chercher ailleurs où vivre dans le contexte résidentiel déjà chaotique de la région15.

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Commentant la lettre de protestation, le premier ministre Robarts capte l’essence de la situation en écrivant à Bill Davis, ministre à la fois de l’Éducation et des Affaires universitaires, que « le court délai d’un tel avis de vacance constitue de bien mauvaises relations publiques pour cette institution16 ». Davis répond au premier ministre que la Laurentienne, désespérant de trouver des logements, a complètement négligé les considérations d’image publique en rapport avec son projet de transformation de l’immeuble. Tentant de sauver la face et d’améliorer ses relations avec la communauté, l’Université rencontre la majorité des locataires et, en fin de compte, tous trouvent une solution de remplacement à l’exception d’un aîné qu’on autorise à rester dans l’immeuble. Début septembre, Davis fait savoir qu’il a abordé la question avec le recteur Mullins, lequel sait « que l’Université est consciente de son besoin de relations publiques saines et affirme que le jeu s’est maintenant calmé et qu’il n’y plus vraiment de problème17 ». Bien que le problème semble vouloir se résorber, le premier ministre se voit informé que « le fond du problème posé par l’acquisition d’un immeuble d’appartements par l’Université en est un de planification. Ce manque de planification à long terme s’observe aussi dans le projet de construction de résidences étudiantes18 ». Cinq ans après le désastre des tours Randolph – sur le plan des relations publiques à tout le moins –, l’Université vend l’édifice pour des raisons financières, dont le faible coût des loyers et le coût élevé de l’entretien19. À la décharge du recteur Mullins, gérer la forte expansion que connaît la Laurentienne à cette époque n’est pas simple. La croissance se mesure de plusieurs façons, de la construction du nouveau campus, la plus manifeste, au développement de nouveaux programmes d’études, autant de réalisations au service du nombre toujours plus élevé d’étudiants venant à la Laurentienne. Moins d’une décennie après la fondation, la population estudiantine atteint 2100, plus de dix fois les 185 étudiants à plein temps inscrits à l’automne 196020. Avoir plus d’étudiants signifie évidemment qu’il faut embaucher plus de professeurs, une règle que le journal local, à la fin des années 1960, explique ainsi : « le personnel de l’Université Laurentienne croît à l’image de la tour de sept étages au-dessus de l’édifice de la bibliothèque21 ». À l’automne 1967, la Laurentienne compte 140 professeurs à temps plein et chargés de cours, et 475 employés au total22. En croissance constante, le corps professoral se permet d’exiger davantage. Les universités de tout le pays se font concurrence pour recruter, parmi un bassin limité de chercheurs, un nombre suffisant de professeurs pour combler leurs rangs, et doivent souvent se tourner vers l’étranger. En janvier 1969, la Laurentienne emploie 164 professeurs, dont quatrevingt-six nés à l’étranger. Une impression existe selon laquelle la majorité des professeurs qui ne sont pas Canadiens viennent des États-Unis, mais la situation particulière de la Laurentienne est tout autre. Des quatre-vingt-six professeurs venus d’ailleurs, à peine huit sont étatsuniens. « L’Angleterre et la France comptent les plus forts contingents avec 18 et 11 respectivement, dénombre le Sudbury Star. L’Inde se classe troisième avec neuf ; puis les États-Unis ; l’Allemagne de l’Ouest, cinq ; le Pakistan quatre et la Belgique et la République arabe unie trois chacune. Il y a des professeurs de 26 pays à la Laurentienne23. »

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technologie pionnière de l’enseignement à distance .  |  Très tôt, la Laurentienne incorpore des technologies d’enseignement à distance dans ses salles de classe afin de mieux assurer l’accès à l’éducation universitaire dans toute la région.

Tandis que l’administration peine à suivre le rythme étourdissant de la croissance, l’A PUL fait des gains considérables relativement à la protection de l’intérêt de ses membres. Des négociations s’amorcent en 1963 entre l’Association des professeurs et le Conseil des gouverneurs pour convenir d’une politique d’emploi détaillant comment les professeurs obtiendraient leur permanence et avanceraient dans le rang, quelle serait leur charge d’enseignement et sous quelles conditions ils pourraient s’absenter. Les négociations sur ces questions se révèlent longues et ardues. Une certaine confusion s’installe au printemps 1964, à l’occasion de la collation des grades, alors que le recteur Mullins annonce prématurément la conclusion d’une entente sur la nomination, la promotion, la permanence, la charge d’enseignement et les absences des professeurs. L’A PUL s’alarme de cette annonce, car, bien qu’elle a vu une ébauche du document, elle a rejeté une partie de son contenu et convaincu le Conseil de poursuive les négociations sur ces questions24. L’entente finale est conclue plusieurs mois plus tard, quand les deux parties donnent leur appui à un document intitulé « Revised University Regulation 64–1 (December 31, 1964) Policy on Appointments, Tenure, Promotion, Teaching Load and Leave25 ». Si la politique maintient la pratique usuelle de confier les nominations au Conseil des gouverneurs sur recommandation du recteur, elle établit clairement aussi comment, au terme d’une période de probation variant selon le rang hiérarchique, les professeurs cesseront d’avoir à renouveler annuellement leur contrat et obtiendront leur permanence. La politique prévoit un mécanisme de licenciement d’un professeur, mais stipule que cela surviendra « seulement en cas d’immoralité, de manquement au devoir ou d’incompétence ou d’abandon de ses responsabilités universitaires26 ». Ces circonstances ouvrant la porte à un congédiement prêtent à interprétation et les décisions en matière de nomination appartiennent toujours

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au Conseil, mais l’adoption de cette politique représente un jalon historique, car il s’agit d’une des premières politiques sur la permanence établies au pays27. Le document consacre aussi des articles à plusieurs autres questions urgentes. L’avancement dans le rang relève du Conseil avec l’accord du recteur et sur la recommandation du directeur du département et du doyen de la faculté. La charge d’enseignement est fixée à neuf heures de cours par semaine ; pour les sciences, cela comprend la supervision en laboratoire. Les directeurs de département peuvent recommander la réduction d’une charge d’enseignement afin de favoriser la recherche et les professeurs accomplissant des tâches administratives voient leur charge d’enseignement diminuer sur approbation du doyen et du recteur. Parmi les autres importants gains des professeurs figure l’article sur les congés autorisés pour ceux qui souhaitent parfaire leur éducation, mener des recherches « ou s’adonner à toute autre entreprise professionnelle approuvée par le Doyen et le Recteur […] Un tel congé doit être dans l’intérêt de l’Université28. » La politique aborde aussi les sabbatiques, même si une de ses versions préliminaires avait statué que « d’ici à ce qu’il y ait plus d’uniformité parmi les universités canadiennes, aucune politique relativement aux congés sabbatiques ne sera définie à l’Université Laurentienne de Sudbury29 ». D’importants progrès sont accomplis jusqu’au moment de son approbation par l’APUL en janvier 1965 et la formulation définitive se lit ainsi : « L’Université admet qu’il est souhaitable d’accorder des congés sabbatiques à des fins d’étude ou de recherche. Pour l’instant, chaque cas sera évalué séparément30 ». Les gains que réalise l’A PUL avec la mise en forme de cette politique sont substantiels parce qu’ils énoncent les principaux enjeux et établissent les conditions d’embauche des professeurs, et bien qu’elle se verra précisée et renégociée au cours des années suivantes, la seule existence d’une politique écrite réglant la marche à suivre concernant les nominations, la permanence, les promotions, la charge de travail et les congés constitue une percée majeure. Aucune de ces questions n’est résolue pour toujours, mais la mise par écrit de la politique permet de clairement nommer les enjeux et à l’A PUL , dès lors, de faire preuve de vigilance dans la protection de l’intérêt de ses membres. Que cela s’accomplisse cinq ans à peine après sa fondation témoigne du caractère avant-gardiste de la Laurentienne parmi les universités canadiennes sur le plan des relations de travail. L’argent constitue aussi un enjeu. À l’automne 1965, le comité de l’APUL sur les salaires, les pensions et les avantages sociaux établit ses recommandations tout en précisant que la liste n’est ni complète, ni finale, car, selon les mots du président du comité, Joseph Chung, « certains des problèmes essentiels n’ont pas fait l’objet d’un examen et requièrent une attention minutieuse. Le comité pense d’autre part que les recommandations incluses dans ce rapport sont un minimum à atteindre pour assurer à la Laurentienne un développement raisonnablement sain et qu’elles devraient être portées à l’attention de l’administration sans délai31. » Le rapport se fonde sur l’idée que l’administration de l’Université Laurentienne doit garder trois objectifs en tête quand elle établit les salaires des professeurs : « 1) attirer des gens qualifiés venant d’autres professions ; 2) attirer des gens qualifiés venant d’autres universités ; et 3) surtout, retenir les membres du corps profes-

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soral déjà à la Laurentienne ». Pour permettre à l’Université d’atteindre ces buts, le comité compare les salaires de ses professeurs à ceux de deux autres groupes et conclut que la Laurentienne doit hausser la rémunération de ses professeurs de façon considérable. Les enseignants de niveau secondaire de Sudbury composent le premier groupe de comparaison. Le comité découvre que les professeurs de la Laurentienne possédant un même nombre d’années d’expérience en enseignement gagnent entre 13 et 24 pour cent moins que les enseignants au secondaire à l’échelle locale et que l’écart s’accroît avec l’ancienneté. Les autres professeurs d’université de l’Ontario forment le second groupe de comparaison et ici, le comité s’aperçoit que les salaires versés par la Laurentienne aux professeurs titulaires et agrégés sont inférieurs à la moyenne provinciale selon des écarts de 6,9 et 7,6 pour cent respectivement32. Anticipant que l’administration rejettera ces données, le rapport soutient que « l’expérience du corps professoral de la Laurentienne n’est aucunement plus limitée que celle des autres ailleurs dans la Province, comme leur compétence professionnelle n’est pas inférieure à [la] compétence des professeurs des autres universités ». Le comité croit même que les professeurs de la Laurentienne doivent être indemnisés pour « plusieurs facteurs régionaux préjudiciables inexistants aux autres universités ». Le rapport plaide aussi que les professeurs d’université au Canada « n’ont pas su profiter équitablement de la prospérité croissante du pays », comme le prouveraient les statistiques suivantes : « pendant la période allant de 1937–1938 à 1963–1964 […] alors que le revenu moyen par habitant au Canada s’est accru de 412 pour cent, le salaire typique d’un professeur d’université n’a augmenté que de 266 pour cent ». Sur la foi de ces calculs, le comité conclut que « si le salaire universitaire [moyen] avait augmenté aussi rapidement que le revenu moyen au Canada, il se serait situé à 16 440 $ en 1963–1964, contrairement au montant réel de 9 103 $ pour la même année33 ». Édifiant un argumentaire qui combine des comparaisons d’ordre local avec les employés des conseils scolaires à des comparaisons d’ordre provincial avec les autres universités, et même au revenu national moyen en dehors du monde universitaire, les auteurs du rapport espèrent convaincre l’administration de la Laurentienne que les professeurs sont largement sous-payés à Sudbury. Le débat ne s’arrête pas, pas plus que les niveaux de rémunération des professeurs ne s’améliorent vraiment dans les années 1960. De fait, le 31 juillet 1970, le président de l’A PUL , Garry Clarke, informe le président du comité sur les négociations salariales du Conseil des gouverneurs, F. B. Lavoie, que l’Association des professeurs et l’administration se trouvent encore loin d’une entente sur la question salariale et qu’une intervention de l’extérieur pourrait s’avérer nécessaire pour résoudre le problème. Clarke a la certitude que le désaccord entre les deux parties repose sur des « faits » plutôt que des « opinions ». Il souligne plus particulièrement que « le Conseil croit apparemment que des professeurs aux formations comparables gagnent plus à la Laurentienne qu’à toute autre université en Ontario », tandis que « le corps professoral, pour sa part, croit que des professeurs aux formations comparables reçoivent [à la Laurentienne] des salaires parmi les plus petits dans la province et, quand on prend le coût de la vie en compte,

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brian kaye , l aboratoire de recherches sur les particules fines .  |  Un des avantages du nouveau campus est ses locaux où installer des équipements de recherche, comme celui-ci qu’occupe le professeur Brian Kaye pour son laboratoire de recherches en particules fines.

beaucoup moins que dans les autres universités émergentes34 ». Au vu de cette impasse, l’A PUL suggère que la question soit soumise à l’arbitrage. Clarke fait cette suggestion à l’été, alors que la communauté universitaire tente toujours de se remettre de l’agitation du printemps. Le recteur Mullins s’était trouvé contraint de démissionner en avril 1970 après un vote de censure à son endroit et l’abondante couverture médiatique – y compris à la une du Globe and Mail – accordée au sit-in d’une semaine des étudiants appuyé par le Sénat. Pourtant, à l’approche de la session d’automne, avec Roland Cloutier désormais en poste comme recteur intérimaire, de nouveaux conflits pointent déjà à l’horizon. La protestation d’avril avait beaucoup attiré l’attention à cause de la coalition inusitée entre les contestataires étudiants et le Sénat, mais, ayant eu lieu juste après la fin des cours, ses répercussions avaient été minimes sur le fonctionnement de l’Université. À la mi-septembre, par contre, le Sudbury Star rapporte que les professeurs de la Laurentienne menacent de faire la grève en raison de leur dispute salariale35, ce qui, cette fois, risque de vraiment bouleverser l’ordre des choses, car les cours de l’automne viennent à peine de commencer. L’écart entre les parties est considérable : le comité exécutif de la Laurentienne prétend que son offre salariale représente une hausse de 13,49 pour cent, alors que l’Association des professeurs soutient qu’elle ne vaut que 7 pour cent. Les professeurs ne peuvent pas faire grève au sens strict, car ils ne sont pas syndiqués. En lieu et place, le Sénat décrète une « interruption » qui dure du 30 septembre au 13 octobre et cause la suspension des cours sur tout le campus, encore que plusieurs professeurs refusent de jouer le jeu et continuent d’enseigner. Si la rupture des négociations agit comme élément déclencheur, c’est la gouvernance de l’Université qui constitue la principale source de conflit. « Les législateurs [ailleurs] sont bien plus libéraux que le Conseil des gouverneurs ici », affirme le président de l’A PUL Garry Clarke, un sentiment que le professeur Don Wallace exprime à son tour en ces termes : « Nous croyons que le conflit va désormais bien au-delà des salaires et qu’il ne suffirait pas, pour le résoudre, de régler la question salariale36 ».

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Détail intéressant : alors que l’« interruption » s’apprête à entrer en vigueur, une assemblée générale des membres de l’APUL est convoquée pour débattre du bien-fondé de sa transformation en grève pleine et entière. Weir Reid, secrétaire de direction du syndicat Mine Mill and Smelter Workers, section locale 596, compte parmi l’assistance à une assemblée publique sur la question, où plusieurs étudiants invitent les professeurs à « avoir le cran de déclencher la grève37 ». D’autres raisonnent au contraire que « la grève est une arme moins efficace pour les professeurs d’université que pour presque tout autre groupe » parce que, comme le dit le professeur Don Wallace, les mineurs qui font la grève, par exemple, « savent à tout le moins qu’ils atteignent l’Inco. Je ne pense pas qu’une grève [des professeurs] pourrait atteindre le Conseil des gouverneurs38. » De plus, il n’est pas certain qu’une telle grève favoriserait le moindrement la résolution des questions en litige concernant une plus grande participation des professeurs aux décisions touchant les salaires, la permanence et les sabbatiques. La division de l’opinion relativement au sujet de la grève et même de la syndicalisation fera de nouveau surface lors d’une prochaine phase de l’histoire de la Laurentienne. Après la fin de l’interruption à la mi-octobre suivant l’intervention du gouvernement provincial, la médiation des nombreux problèmes affectant la Laurentienne, y compris le différend sur les négociations salariales, se voit confiée à l’ancien recteur de l’Université de Waterloo, J. G. Hagey. Le processus met en lumière la situation financière alarmante de la Laurentienne et son déficit budgétaire anticipé39. Avec l’aide de Hagey, l’A PUL et le Conseil des gouverneurs concluent une entente de deux ans qui règle ce qui a été, aux dires du médiateur, « une importante source de discorde entre les professeurs et le conseil pendant la crise40 ». Les deux parties conviennent que les nouvelles échelles salariales ont été « établies sur une base qui se compare favorablement avec celles en vigueur dans les autres universités ontariennes ». Prévoyant un maintien de la hausse des inscriptions l’année suivante et l’embauche de professeurs additionnels, elles s’entendent pour dire que « les échelles salariales rectifiées aideront la Laurentienne à attirer ces nouveaux professeurs41 ». Les faits feront plus tard mentir l’optimisme du communiqué de presse, car bien que la question salariale soit temporairement réglée, de nombreux débats importants marqueront la décennie suivante au sujet des meilleurs moyens à adopter pour continuer de préserver les intérêts des professeurs.

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Consolidation et reconnaissance syndicale, 1972–1985 linda ambrose

Comme plusieurs autres universités au pays, la Laurentienne connaît, dans les années 1960, une croissance sans précédent dont les conflits très médiatisés de l’année 1970 sont une des conséquences. Une étude commandée par l’Association des universités et collèges du Canada brosse le tableau suivant de la situation au Canada : La caractéristique la plus frappante du système universitaire canadien dans les années 1960 a été sa fulgurante croissance, à la fois par le nombre d’établissements, d’étudiants et d’enseignants, et par les sommes d’argent provincial et fédéral déversées dans le système. Plusieurs disciplines manquaient d’enseignants compétents et le prix à payer pour ces derniers s’est accru brusquement et constamment. La croissance des années 1960 s’est accompagnée de changements qui ont suscité de l’inquiétude parmi le corps professoral1.

L’« inquiétude » continuera d’affecter les professeurs de la Laurentienne au cours des quinze années suivantes, alors que l’A PUL progressera vers la reconnaissance syndicale et que ses membres débattront des conséquences d’une syndicalisation. Que les professeurs de la Laurentienne et de partout au Canada songent à se réunir en syndicat se veut tout à fait dans l’esprit du temps. Au terme d’une expansion aussi rapide dans les années 1960 et des affrontements historiques au sujet de la gouvernance universitaire, l’Université Laurentienne, comme tant d’autres campus, inaugure sa période que Sibley a qualifiée de « conflictuelle » et qu’Owen D. Carrigan nomme plutôt « le temps du syndicalisme ». Carrigan en explique ainsi le contexte : Au début des années 1970, la stagnation et même le déclin des inscriptions ont brusquement mis terme à l’expansion. Le marché de l’emploi s’est contracté et les attentes toujours plus grandes des professeurs se sont heurtées au climat d’austérité désormais prévalant au sein des universités. Une atmosphère d’insécurité et d’appréhension s’est installée. Devant

ces difficultés, les professeurs ont réagi comme l’avaient fait, dans des circonstances semblables, un si grand nombre de leurs concitoyens occupant des emplois de cols bleus : en s’organisant en syndicats2.

La Laurentienne compte assurément parmi les campus aux prises avec une baisse des inscriptions – et la pression financière qui s’ensuit –, mais d’autres récriminations dans l’air du temps se font simultanément entendre. Chaque personne souhaitant changer la façon dont l’administration la traite doit entreprendre des procédures légales individuelles. Certains le font. Les années 1970 sont riches en cas où des professeurs se plaignent de la façon dont ils sont traités, y compris la situation, perçue comme injuste, où un professeur se voit refuser un poste permanent et réembaucher à forfait sans promesse de permanence3, le soupçon – totalement fondé dans au moins un cas célèbre – que l’Université embauchait certains professeurs sans d’abord vérifier sérieusement leur formation universitaire4, et la décision unilatérale du recteur de relever le directeur du département des sciences et du génie de ses fonctions et sa tentative de le congédier5. En même temps, lorsque le mari et la femme travaillent tous deux pour la Laurentienne, payer celle-ci moins que celui-là à cause de la stabilité financière dont profite ce dernier fait figure de logique budgétaire acceptable6. Un jour de 1974, le député provincial de Sudbury, Bud Germa, écrit au ministre des Collèges et Universités, James Auld, au nom d’un ancien professeur de la Laurentienne pour demander une enquête publique sur les pratiques administratives ayant cours à l’Université. « Je sais que d’autres membres du corps professoral actuel sont mécontents, de dire Germa à Auld. Vous vous souviendrez qu’il y a environ un mois un autre professeur de cette université vous a parlé en personne de son insatisfaction à l’égard du fonctionnement de cette université. Je suis également certain que vous savez que d’autres plaintes ont été déposées contre cette institution7. » Qu’on aille jusqu’à en appeler directement au gouvernement au nom de particuliers dit bien la nature des problèmes affligeant les membres du personnel universitaire. Même si l’Université et l’Association des professeurs négocient déjà plusieurs questions de manière collective sans pourtant que cette dernière n’ait sa reconnaissance syndicale, l’APUL ne dispose d’aucun recours légal lorsqu’un de ses membres se trouve dans une situation qu’il juge relever d’un processus décisionnel injuste et arbitraire. Au sein de l’A PUL , les partisans de la syndicalisation sont convaincus que les membres seront mieux protégés après reconnaissance syndicale officielle selon les termes de la Loi sur les relations de travail de l’Ontario. « Le manque de clarté procédurale, surtout sur des questions clés comme la promotion, la permanence et l’arbitrage, était un problème très préoccupant sur plusieurs campus, explique Carrigan. Certains professeurs craignaient de n’avoir pas d’autre protection professionnelle que les fantaisies ou les caprices du Conseil et des administrateurs. Quand le temps est incertain, une telle garantie ne suffit pas8. » D’autres soutiennent que l’A PUL représente déjà convenablement ses membres et que l’Association n’a donc pas besoin de chercher à obtenir sa reconnaissance syndicale. Sur certains campus, pendant ce temps, des administrateurs universitaires se sentent

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une cl asse de l’édifice des arts .  |  Une classe typique dans l’édifice des arts : remarquez la petite taille de la classe, une caractéristique que la Laurentienne a tenu à conserver.

menacés par les demandes professorales toujours plus grandes et la tentative des associations de professeurs d’obtenir une plus grande force de négociation par des moyens légaux. Selon Carrigan : « Les membres du Conseil et les administrateurs ont conclu que les professeurs avaient désormais des attentes déraisonnables. Ils ont soutenu qu’il n’y aurait bientôt plus aucune autorité réelle à l’Université et qu’un chaos complet s’ensuivrait9. » Le débat sur la pertinence de se syndiquer va bien au-delà du retranchement derrière des positions favorables ou défavorables à la syndicalisation. Certains professeurs sont convaincus qu’avec la chute des inscriptions et l’accumulation des déficits, le nouveau rapport de force offert par la syndicalisation constitue le seul moyen de se prémunir contre de possibles compressions de personnel parmi le corps enseignant. D’autres ne sont pas aussi sûrs, affirmant que la syndicalisation n’est ni nécessaire, ni sage, car la politique en place sur la permanence confère déjà la sécurité d’emploi aux membres de l’A PUL . Garry Clarke, président de l’A PUL entre 1968 et 1971, s’affiche comme l’un des plus vigoureux opposants à la syndicalisation. Sa note de service intitulée « The Role of the Laurentian Senate Under Collective Agreement with Faculty » exprime la crainte qu’après l’obtention par l’A PUL de sa reconnaissance syndicale l’Université « ne contrecarre ou ne nuance les procédures ou les décisions du Sénat » et que le Conseil « ne recommence, en vertu de la Loi, à assumer les pouvoirs exercés depuis 10 ans par le Sénat10 ». L’argumentaire antisyndical proposé par Clark et d’autres est intéressant et bien propre au monde universitaire. L’inquiétude est que la syndicalisation dévaluera le statut professionnel des professeurs et abaissera ceux-ci au rang de simples travailleurs, sous contrat avec des « patrons » administrateurs d’université. Les récentes victoires ayant valu aux professeurs une meilleure représentation au sein de la gouvernance de l’Université constituent l’enjeu. Tout cela sera perdu, affirment les défaitistes, si les professeurs deviennent « de simples employés » de l’Université plutôt que des partenaires et des participants actifs au sein des structures décisionnelles.

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garry cl arke , président de l’apul .  |  Président de l’Association des professeurs pendant la tumultueuse période où les professeurs réclament avec succès d’être mieux représentés dans les processus décisionnels de l’Université, Garry Clarke est un des nombreux professeurs qui s’inquiète que la syndicalisation puisse menacer ces gains durement obtenus.

Les professeurs réticents ne sont pas que des traditionalistes s’irritant qu’on puisse envisager un autre modèle. Ils ont peur de certaines situations précises, parmi lesquelles, selon D. D. Carter de la faculté de droit de l’Université Queen’s, des organisateurs syndicaux bouleversant les relations collégiales, des communautés universitaires transformées en ateliers fermés, des rapports professionnels rigides en remplacement du rapport université-professeurs traditionnel, la solidarité syndicale se substituant à l’excellence universitaire, les piquets de grève tenant lieu de débat rationnel et une ingérence gouvernementale et syndicale dans l’administration des universités11.

Les mêmes peurs habitent les esprits des professeurs de la Laurentienne dont l’opposition à la syndicalisation est si forte qu’elle les pousse à décliner l’offre de participer à une rencontre de discussion sur le sujet. Le peu de soutien envers la syndicalisation se manifeste clairement lors d’une assemblée générale de l’A PUL , le 19 octobre 1976, alors qu’un vote a lieu pour déterminer si l’Association devrait aller de l’avant ou non avec l’obtention d’une reconnaissance syndicale. Bien qu’il y ait près de 250 professeurs, les résultats du vote donnent ceci : vingt-sept bulletins pour, sept contre et une abstention12. Ce nombre de bulletins équivaut à un peu plus de dix pour cent des effectifs de l’A PUL , un faible taux de participation qui prouve que la majorité se montre fort satisfaite du travail de négociation collective que l’A PUL a jusqu’ici accompli sans même avoir de reconnaissance syndicale officielle. Quarante-huit professeurs expriment ainsi leur point de vue dans une note de service : Relativement à la sécurité d’emploi, nous avons une politique qui découle d’une consultation entre le Sénat, l’Association des professeurs et l’Administration. À son établissement, elle était, à bien des égards, la première et la meilleure au Canada. Il se peut qu’il faille

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aujourd’hui la revoir. Mais une fois encore, personne n’a montré comment la politique actuelle est inadéquate, quels autres choix seraient préférables ou pourquoi il nous faut un syndicat pour négocier des améliorations13.

Malgré la faible assistance à l’assemblée, l’avenir confirmera que cette journée marque le début du mouvement vers la reconnaissance syndicale, même si les partisans du syndicat sont numériquement écrasés par les membres de l’APUL qui se disent heureux du processus actuel de consultation. À la lumière de ces débuts cahoteux, il serait trompeur de dire que le chemin de la syndicalisation est paisible. Un scrutin sur la question de la reconnaissance syndicale tenu en novembre 1976 auprès des membres de l’Association donne 99 votes pour le oui et 25 pour le non. Le taux de participation est encore très faible – ces 124 réponses représentent moins de la moitié des effectifs de l’A PUL – et le résultat n’est donc pas jugé assez probant pour que la syndicalisation soit approuvée. Un second scrutin est inscrit au calendrier du mois suivant. Le 8 décembre 1976, c’est un résultat bien différent qui tombe : 199 bulletins sont déposés, parmi lesquels 72 votent oui, 119 votent non et 8 sont annulés. La défaite est nette. La Gazette de l’Université Laurentienne rapporte que 287 bulletins ont été distribués, ce qui signifie que 88 membres – près d’un tiers des répondants admissibles – ont choisi de ne pas voter. Le résultat s’apparente à une revanche pour les quarante-huit professeurs signataires de la lettre ouverte sur la syndicalisation, car leurs arguments leur ont permis de convaincre leurs collègues de s’opposer au projet. Ils ont plaidé qu’« un syndicat de l’A PUL négocierait avec le Conseil des gouverneurs des conditions de service qui, depuis plusieurs années, sont de facto reconnues comme relevant du Sénat : nominations, promotions, permanences, licenciements, etc. Les professeurs offriraient ainsi au Conseil une occasion et un prétexte pour intervenir sur des questions qui, depuis six ans, sont réglées de manière autonome14. » Les adversaires de la syndicalisation ont gagné la première manche, mais le débat n’est pas clos. Trois importants facteurs se manifestent après l’infructueuse tentative de 1976 en faveur de la reconnaissance syndicale et ont pour effet de faire changer la direction du vent. Premièrement, un changement a lieu à la tête de l’A PUL . Après la fin du mandat de Lloyd Wagner à la présidence en 1976, Wes Cragg assume la fonction en 1976–1978, suivi de Roy Kari en 1978–1979 et de Harmann Falter en 1979–1980. Les trois sont des professeurs respectés, titulaires de doctorat, et sous leur direction, l’A PUL se mobilise pour tenter une autre fois d’obtenir sa reconnaissance syndicale et de négocier une première convention collective avec l’administration. Deuxièmement, et de plus grande importance, les nouvelles économiques n’augurent rien de bon. À l’automne 1977, le nouveau recteur, Henry Best, fait rapport au Conseil des gouverneurs que le nombre d’étudiants inscrits à temps plein est en baisse de 225, une diminution de presque 10 pour cent. Il s’agit d’un mauvais présage et d’un signe annonciateur, car des inscriptions en baisse en période de difficultés économiques se traduiront par des compressions budgétaires. Cette perspective fait émerger le troisième facteur qui fait ultimement pencher l’opinion en faveur de l’accroissement de l’inquiétude des professeurs pour leur sécurité d’emploi. Réduire le nombre de professeurs pour équilibrer son budget, y compris en

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licenciant des professeurs ayant obtenu leur permanence, constitue alors une idée abondamment débattue dans tout le pays, et l’édition 1979 du Guide de l’ACPPU consacre même toute une section à cette possibilité15. On y lit notamment qu’« en matière de situation financière critique, l’Association ou le syndicat du personnel universitaire devrait agir comme chien de garde des intérêts de ses membres16 ». La nouvelle direction de l’A PUL réalise que le déclin des inscriptions et la pression financière pourraient pousser la Laurentienne à déclarer un état de « situation financière critique », en quel cas la menace d’abolir des postes de professeurs deviendrait très réelle en dépit de la politique favorable sur les permanences négociées quelques années plus tôt. Le nouveau contexte financier suffit à l’A PUL pour reconsidérer la question d’une reconnaissance syndicale et à certains individus, dont Wes Cragg et Hermann Falter, pour changer d’opinion à ce sujet17. Un comité responsable de la syndicalisation voit le jour au printemps 1978, tandis que Roy Kari organise une rencontre avec des cadres de l’ACCPU pour discuter stratégies et procédures. L’automne venu, en prévision d’une assemblée de l’A PUL prévue pour le 13 octobre, Kari fait circuler aux membres une note de service qui aborde les préoccupations touchant à l’accréditation syndicale18. Le document contient deux annexes. La première, titrée « Some Suggested Advantages of Collective Bargaining », soulève dix points : efficacité, égalité de pouvoir, valeur juridique, résolution des situations d’impasse, communication, connaissance de l’université, problèmes individuels, détermination des politiques, garantie des droits et capacité d’offrir des salaires et des avantages sociaux concurrentiels ; la seconde, « Possible Negative Consequences of Collective Bargaining », aborde quinze éléments : coûts, flexibilité, moyens de pression, pouvoir syndical, nouveaux rapports de force, relations conflictuelles, exigences envers les professeurs, étudiants, problèmes de financement, diversité, droits des professeurs, perte de droits actuels non précisés, arbitrage externe et ancienneté. Kari prévoit consacrer cinq minutes à chacune de ces rubriques lors de l’assemblée d’octobre. Les opposants à la syndicalisation se montrent sans doute insatisfaits que si peu de temps de discussion est prévu, mais la formule fait en sorte de permettre d’aborder un vaste éventail de questions. Cette assemblée constitue la première étape d’un processus ayant cours pendant plusieurs semaines, alors que les dirigeants de l’APUL , désormais partisans de la syndicalisation, rencontrent individuellement leurs collègues indécis ou opposés pour les convaincre de reconnaître le bien-fondé de l’urgence en faveur de la reconnaissance syndicale. Un mois plus tard très exactement, le 13 novembre 1978, Kari indique aux membres du corps professoral qu’« une majorité absolue de professeurs a signé le formulaire d’adhésion [au syndicat], mais [que le recrutement] se poursuivra pendant encore une semaine19 ». À la fin du mois, le secrétaire de l’A PUL Ashley Thomson informe les professeurs au nom du comité de syndicalisation que 61 pour cent des professeurs et bibliothécaires à temps plein ont voté pour la syndicalisation et que Kari a entrepris des démarches en règle pour que la Commission des relations de travail de l’Ontario (CRTO) entende la requête de l’A PUL20. Le processus connaît divers retards tout au long de l’hiver et du printemps 1979. Au moins un professeur se demande si un « préavis suffisant » a été remis eu égard

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signature d’une entente collective , 1980.  |  L’administration et le corps professoral de la Laurentienne pratiquent la négociation collective et atteignent de bons résultats même avant que l’Association des professeurs devienne un syndicat accrédité. À la fin des années 1970, des inquiétudes quant à la sécurité d’emploi font pencher la balance en faveur de la syndicalisation. La première convention collective avec le syndicat, à l’automne de1980, est une étape marquante des relations de travail des professeurs de la Laurentienne.

à l’audience devant la CRTO , étant donné qu’il n’en a lui-même eu vent que la veille de son déroulement. Il allègue aussi que l’A PUL a utilisé « la coercition et l’intimidation » pour convaincre ses membres. Le professeur abandonne toutefois ses charges avant l’audience prévue en février par la CRTO pour entendre la plainte. La CRTO ordonne finalement la tenue d’un vote d’accréditation syndicale au début avril. La question inscrite sur le bulletin se lit ainsi : « In your employment relations with Laurentian University of Sudbury, do you wish to be represented by Laurentian University Faculty Association? » À peine 188 membres de l’A PUL y répondent, desquels 107 choisissent oui et 81 non. L’opposition ne meurt pas. Le 4 avril, un membre conteste la validité du vote du fait que l’avis annonçant officiellement le vote a circulé en anglais seulement. Il dénonce aussi la question comme erronée et confuse. En dépit de ces objections, la CRTO octroie à l’A PUL son accréditation syndicale le 9 juillet 1979. Chèrement acquise, cette victoire du comité de reconnaissance syndicale de l’A PUL n’est pourtant que le commencement d’un long et difficile processus de travail et de négociation entre l’Association des professeurs et l’administration. Dès l’annonce du résultat du vote, les deux parties se mettent au travail en vue de convenir d’une première convention collective, une tâche qui prendra finalement presque une année et demie. Les interlocuteurs ne partent pas de zéro, mais comme les professeurs sont désormais syndiqués, aucune des ententes passées

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conclues par l’A PUL avec l’administration n’est encore valide et tout peut revenir à la table de négociation. La mise s’avérant élevée pour chacune, les deux parties manifestent une inébranlable détermination pour s’assurer que l’accord en cours de réalisation ne laissera rien au hasard. À la recherche de leadership sur la manière de s’y prendre pour mener une négociation collective et pour écrire le contrat de travail devant en découler, c’est vers l’ACPPU, qui s’est qualifiée dans les années 1970 de « lobbyiste au service des professeurs », que se tournent les associations de professeurs du pays, dont l’APUL21. En réponse aux peurs des années 1970, explique le politologue Howard Clark, l’ACPPU a rapidement établi des balises pour la négociation collective, élaboré des clauses modèles pour les conventions collectives (qui favorisaient un transfert de l’autorité et du pouvoir au profit des professeurs) et, à titre d’organisme national, fourni de l’information ainsi que du personnel, des avis légaux et du soutien aux associations locales de professeurs engagées dans des négociations avec leurs administrations respectives. La stratégie était agressive et impressionnante, surtout si on pense que les considérations monétaires n’en constituaient pas forcément l’objectif premier. Elle accentuait beaucoup le besoin de se prémunir légalement en faveur du mode participatif de gouvernance, si nouvellement acquis22.

Commentant le rôle et le ton de l’ACPPU dans les années 1970, Carrigan explique que « même si, à bien des égards, les directives de l’ACCPU apportaient des améliorations notables aux procédures en vigueur dans certains établissements, la vigueur, l’agressivité même, avec laquelle la campagne s’est parfois déroulée a généré beaucoup de rancœur au sein des conseils et des administrations des universités. Cela a contribué à aggraver le conflit sur bien des campus23. » Si les négociations de 1979 à la Laurentienne se déroulent sans grand conflit, le recteur Best a quand même sur le cœur l’implication de l’ACPPU dans le processus. Le secrétaire de direction de l’ACPPU, Donald C. Savage, attentif envers le plus récent membre de la famille en forte croissance des syndicats de professeurs, observe ce qui se passe à la Laurentienne avec grand intérêt et une certaine impatience. Fin octobre 1979, il envoie à tous les professeurs de la Laurentienne une note déplorant que les négociations avancent si lentement et critiquant avec virulence le leadership du recteur Best24. Ce dernier réplique par sa propre note de service aux professeurs dans laquelle il accuse Savage d’avoir commis « la plus flagrante manifestation d’interférence scandaleusement inappropriée dans les affaires internes d’une université que j’aie vue dans ce pays25 ». Clairement, rien ne va plus entre ces deux-là, Best qualifiant même la lettre de Savage de « choquante » et de « grossièrement antiprofessionnelle » et accusant le secrétaire de direction d’« incroyable indécence » pour avoir tenté de transformer des collègues de la Laurentienne servant comme administrateurs en « adversaires anonymes ». Le recteur rappelle aux professeurs que les administrateurs ne sont pas de « “dangereux extraterrestres” parachutés du ciel », mais bien des collègues professeurs qui « pourraient bien retourner à l’enseignement à temps plein et servir au sein de l’équipe de négociation » au terme de leur mandat administratif. Il souligne aux professeurs sa

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l’entraîneur de natation jeno tihanyi et le médaillé d’or aux olympiques alex baumann .

profonde conviction « que les leaders de l’Association des professeurs et les membres de l’administration de l’Université Laurentienne sont des hommes et des femmes de bonne volonté qui rechercheront “la lumière et la vérité” avec sincérité et talent au cours des présentes négociations26 ». Conformément aux attentes de Best, la bonne foi prime des deux côtés de la table dans les négociations à l’interne et les deux parties parviennent à s’entendre sur une convention collective seize mois après que l’A PUL a obtenu sa reconnaissance syndicale. Le 27 novembre 1980, le Conseil des gouverneurs de la Laurentienne approuve ce premier contrat de travail27. Si l’occasion est prétexte à célébrer de part et d’autre, tous les problèmes n’ont pas été réglés par la syndicalisation de l’A PUL et la Laurentienne s’apprête à entrer dans une ère de relations de travail s’apparentant nettement au régime « conflictuel » décrit par Sibley. Henry Best troque le rectorat en 1984 pour une pleine charge d’enseignement au département d’histoire et c’est son successeur, John Daniel, qui devra affronter le syndicat des professeurs alors que la voie des règlements deviendra plus chicanière, menant même l’Association à user de son nouveau droit légal de faire la grève.

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Des grèves et du contrat social à la croissance et à l’expansion, de 1985 à nos jours linda ambrose

En septembre 1985, le journal étudiant Lambda déclare à la une que « pour la première fois dans les 25 ans d’histoire de l’université, les étudiants de la Laurentienne sont menacés par une grève de leurs professeurs1 ». L’affirmation est juste, mais fait jaser. La grève, au sens strict, n’a pas de précédent, mais, on l’a vu, d’autres conflits de travail ont déjà eu lieu. Le personnel plus ancien se souvenant très bien des « interruptions » de l’année 1970, il va sans dire que l’interruption des cours au début de la session d’automne invite plus d’une personne à mettre en parallèle les deux situations. En revanche, beaucoup de choses ont changé par rapport à ce qu’elles étaient quinze ans plus tôt. Il s’agit, tout d’abord, d’une grève déclenchée légalement par les membres de l’A PUL , première action du genre depuis la syndicalisation. La durée, ensuite, constitue une autre différence de taille. Tandis que les événements de 1970 ont duré plusieurs semaines, cette grève se règle en quelques jours à peine, permettant aux cours de reprendre le 16 septembre. La troisième différence majeure concerne les enjeux. La rupture des négociations salariales qui avait déclenché l’interruption de 1970 constituait seulement la pointe de l’iceberg, car les professeurs protestaient pour se faire entendre au sujet de toute une série d’enjeux relatifs à la gouvernance universitaire. Cette fois-ci, l’argent est l’unique enjeu, car la grève de 1985 porte entièrement sur les salaires. Les négociateurs de l’A PUL réclament initialement une hausse des salaires de 40  pour cent pour les professeurs, prétendant que cela est le prix à payer pour permettre à ceux-ci d’atteindre la parité avec leurs collègues du reste de la province. L’administration réplique immédiatement qu’« une comparaison entre la moyenne provinciale des salaires dans l’ensemble des universités de l’Ontario et la moyenne des salaires à la Laurentienne ne constitue pas une approche adéquate pour évaluer les salaires universitaires2 ». Mike Dewson, négociateur en chef de l’Université, soutient que les professeurs s’étant hissés aux plus hauts échelons de la hiérarchie salariale sont moins nombreux à la Laurentienne – c’est-à-dire qu’il y a moins de professeurs titulaires que dans les universités plus anciennes – et qu’à ce titre, il est raisonnable que le salaire moyen versé à la Laurentienne soit infé-

professeurs en grève , 1985.  |  Les membres du syndicat des professeurs exercent leur droit de grève et cessent de travailler en septembre 1985 alors que les échelles salariales sont l’enjeu principal. Les parties signent une entente après moins d’une semaine de grève.

rieur à son pendant provincial. L’administration ajoute qu’il serait plus réaliste de comparer la Laurentienne à quatre autres petites universités, soit Brock, Lakehead, Trent et Wilfrid-Laurier. À l’aune de cet ensemble, affirment les administrateurs, les professeurs de la Laurentienne sont les deuxièmes plus hauts salariés parmi les cinq établissements. L’Université, sur la base de ce classement, offre des augmentations de salaire de 3,85 pour cent dans un contrat d’un an. C’est tout un monde qui sépare les deux parties. La grève commence officiellement le lundi 9 septembre 1985, quelques jours après que « plus de 150 des 251 membres de [l’A PUL] se sont réunis en assemblée et ont voté à 88 pour cent contre la dernière offre de contrat de l’Université3 ». Les négociations menées tout au long de l’été avaient permis de résoudre certaines questions concernant l’évaluation de la performance des professeurs, la charge de travail, les nominations et renouvellements, les sabbatiques, les augmentations au mérite, les allocations versées aux directeurs de département et les procédures de plainte et d’arbitrage. L’échelle salariale demeurait toutefois un enjeu sur lequel aucune entente ne semblait possible4. Le Sudbury & District Labour Council accorde son soutien aux professeurs et une photographie des piquets de grève parue dans le Lambda présente un groupe de huit grévistes vêtus de panneaux sandwich sur lesquels on lit « Professeurs légalement en grève5 ». Chaque partie confie à la presse son inquiétude relativement à la réaction des étudiants à la grève et son espoir que cela ne bouleverse pas trop la nouvelle année universitaire. Kit Lefroy, vice-président externe de l’A PUL , rapporte que les professeurs sont « particulièrement préoccupés par les étudiants. À court terme, la grève sera considérablement incommodante pour eux6. » Le dérangement s’avère toutefois de courte durée, car les cours recommencent le lundi suivant. Les professeurs votent en faveur d’une entente même si plusieurs s’affichent « ouvertement mécontents de l’offre patronale de règlement7 ». L’offre consiste en une hausse de salaire de 15 pour cent étalée sur deux ans. Le recteur Daniel rapporte que « les deux parties sont insatisfaites de l’entente », mais fait valoir que l’A PUL a jeté plus de lest que l’administration parce que les négociateurs syn328

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dicaux se sont considérablement éloignés de leur demande initiale d’augmentations de salaire de 40 pour cent. Si le règlement contient certaines concessions favorables aux professeurs, il laisse tout de même l’APUL bien loin de son objectif d’atteindre la parité provinciale. Soulignant l’amertume persistante née du refus obstiné de l’administration de considérer la parité, Lefroy mentionne que pour obtenir un règlement, « nous avons cédé [sur la parité]. Mais je soupçonne que si cette question resurgit, il n’y aura aucun compromis ». Il poursuit en prédisant que des professeurs hautement qualifiés « vont commencer à s’en aller d’ici », avec comme résultat une éducation de moindre qualité à la Laurentienne8. Deux jours plus tard, le Sudbury Star réplique en éditorial que selon les configurations actuelles du marché de l’emploi universitaire, les professeurs n’ont peut-être pas le rapport de force qu’ils se sont imaginé : [Aucune] loi ne dit qu’un professeur ou toute autre personne doit continuer d’assumer un emploi insuffisamment rémunéré. Mais ceux qui iront chercher autre chose verront que le marché de l’emploi quelque peu limité dans le monde universitaire, comme il l’est pour les simples mortels. À notre époque, un doctorat ne suffit pas à assurer un chèque de paie9.

Le conflit a pris fin, mais il serait inexact d’affirmer que les problèmes sont résolus. « Nous ne nous contons pas d’histoires, confie le recteur Daniel à l’occasion du retour en classe après la grève. L’administration réalise que les frustrations de la semaine de conflit de travail vont perdurer10. » Or ces frustrations ne sont pas le seul enjeu sur lequel l’Université doit se pencher. Il est difficile de savoir si Daniel a prescience qu’un nouveau conflit se prépare. Quelques semaines plus tard à peine, en effet, les employés de soutien déclenchent une grève qui dure trois semaines. Aux dires de tous, les temps sont durs pour le recteur de la Laurentienne et un éditorialiste étudiant exprime bien les inquiétudes de plusieurs lorsqu’il écrit ceci : [P]lusieurs étudiants ont tourné le dos à la Laurentienne. Deux grèves en une session ont fini par éloigner beaucoup de gens qui croyaient y obtenir une éducation de qualité et, en conséquence, la ville de Sudbury et l’Université sont toutes deux perdantes. Il reste encore bien des problèmes à résoudre à l’Université et j’espère que le recteur Daniel saura créer une meilleure ambiance pour la plus importante frange de toute institution universitaire : les étudiants11.

Deux ans plus tard, avec l’approbation d’un nouveau contrat de travail réglant la question salariale pour deux années supplémentaires, Daniel annonce son intention de solliciter un second mandat, dont le début est prévu pour le 1er juillet 1989. Dans cette foulée, l’APUL mène auprès de ses membres une consultation dont les résultats témoignent de la satisfaction générale du corps professoral à l’égard du travail de Daniel, mais font quand même place à un grand nombre de commentaires très négatifs. Bernadette Schell et Pierre Simoni écrivent au Conseil des gouverneurs au nom de l’A PUL pour expliquer la réserve des professeurs. Ils notent que « s’il y a toujours des professeurs insatisfaits, peu importe l’identité ou

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séance de négociation avec l’apul .  |  Le niveau des salaires des professeurs de la Laurentienne est l’enjeu récurrent de toutes les négociations collectives des années 1980 et 1990, alors que l’équipe de négociation de l’apul tente d’obtenir pour ses membres la parité avec d’autres universités ontariennes.

la compétence des administrateurs, la liste et le nombre de commentaires négatifs [dans la consultation de l’A PUL] sont suffisamment sérieux pour exiger un effort concerté du recteur Daniel et du Conseil afin de renverser la situation12 ». Schell et Simoni font plus précisément état de préoccupations concernant « le style de gestion du recteur Daniel qui semble exclure les professeurs des principales décisions de gouvernance jusqu’à ce que celles-ci aient été prises ». Ce modèle de communication crée chez les professeurs des sentiments « de soupçon et de défiance » ; ils vivent avec ressentiment l’augmentation de leur charge de travail au sein des différents comités, situation d’ailleurs aggravée par l’impression répandue qu’en raison du style de gestion du recteur, ces comités sont « requis d’arriver à certaines conclusions préétablies13 ». Les auteurs attirent aussi l’attention sur la situation de l’antenne de la Laurentienne en France, à Villefranche-sur-Mer, laquelle, arguentils, « a prouvé la nécessité de contrôler les décisions du recteur », car les professeurs craignent que « des ressources aient été détournées de services essentiels et sousfinancés tels que la bibliothèque » afin de payer pour l’expérience outre-mer14. Les sentiments de mécontentement et de soupçon au sujet de la gestion et de dépenses malavisées galvanisent les professeurs lorsque vient le moment de négocier de nouveau les salaires, en 1989. Le recteur John Daniel étant en congé pour motif de formation cet automne-là, c’est au recteur intérimaire Charles Bélanger qu’il incombe de gérer les tensions qui ont émergé. Bélanger informe la presse en septembre 1989 que « les deux dernières années ont valu à la Laurentienne son plus grand nombre d’étudiants depuis ses débuts en 1960 ». Il y a, selon le Sudbury Star, 4 282 étudiants à temps plein (7 pour cent de plus que l’automne précédent) et au moins 4 000 à temps partiel15. Tandis que le recteur craint de mettre en péril ces statistiques portant sur les inscriptions, les professeurs se demandent pourquoi cette croissance ne se reflète pas sur leurs propres salaires, lesquels n’augmentent pas au même rythme que leurs collègues ailleurs en province. Les négociateurs étant sur le point d’entamer la dernière ligne droite, le porteparole de l’A PUL , Jean-Charles Cachon, explique aux médias que deux points critiques sont en jeu. Le premier consiste dans « le désir de l’Université de contrôler la permanence des professeurs, leur promotion et, dans le cas des employés à forfait,

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leur renvoi et le renouvellement ». Sur ces questions, l’A PUL souhaite maintenir son droit de grief. « Le second point en litige, dit simplement Cachon, est l’argent. » Le syndicat soulève de nouveau la question de la parité des salaires avec les autres universités ontariennes, expliquant que les professeurs de la Laurentienne se classent treizièmes sur quinze universités en termes d’échelons salariaux. Consciente que l’administration soutiendra encore que les petites universités de taille et d’âge semblables sont un étalon plus approprié, l’APUL tente de désamorcer cet argumentaire en soulignant que les professeurs de la Laurentienne gagnent 15 pour cent moins que leurs pairs de Lakehead16. À la demande de l’A PUL qu’il y ait des augmentations de salaire de 13 et 11 pour cent dans le cadre d’une entente de deux ans, l’Université rétorque en proposant 9 et 8,5 pour cent. Les membres de l’A PUL rejettent cette offre finale à 76 pour cent et, le lundi 11 septembre 1989, dressent leurs piquets de grève à l’occasion du second arrêt de travail des professeurs en moins de cinq ans17. Après deux semaines de conflit, les deux parties rompent et suspendent leurs négociations pendant cinq jours faute d’être parvenues à s’entendre après l’entrée en scène d’un médiateur. Ni l’une, ni l’autre n’avait prévu que la grève s’éterniserait et bien qu’il ne soit jamais facile de vivre avec la prolongation d’un conflit de travail, plusieurs professeurs conserveront d’excellents souvenirs de leur piquetage à cause des nombreux liens noués entre collègues. La « solidarité » sur les piquets de grève fait naître des amitiés entre des gens de différentes facultés qui n’avaient jusqu’alors jamais beaucoup eu l’occasion de se fréquenter, mais qui ont fraternisé pendant le conflit parce qu’ils se sont vus assigner aux mêmes quarts de piquetage. Les manchettes, pendant ce temps, révèlent une attitude ambivalente parmi les étudiants. Si certains évoquent une « seconde semaine d’orientation », d’autres expriment leur colère devant leur incapacité de suivre leurs cours même s’ils ont payé leurs droits de scolarité18. La troisième semaine du conflit, les étudiants autochtones disent craindre que la grève leur fasse perdre le soutien financier du ministère des Affaires indiennes du fait de leur incapacité de prouver qu’ils assistent à leurs cours, une de leurs conditions à remplir pour y être admissibles. Un communiqué de presse de l’Association des étudiants autochtones affirme que « les bourses couvrent la nourriture, le logement, le transport et les autres nécessités. La possibilité de perdre ce soutien restreint la capacité des parents de subvenir aux besoins de leurs enfants19. » Une telle perte, pour les étudiants qui sont eux-mêmes parents, pourrait signifier devoir aussi renoncer à des places en garderie subventionnées, ce qui compromettrait leur capacité d’étudier après la fin de la grève20. Lorsque les négociations reprennent enfin, le 29 septembre, le médiateur provincial impose un embargo sur les nouvelles21. Quelques jours plus tard, la manchette tant attendue apparaît enfin : « Les professeurs de la Laurentienne appuient l’entente à 77 pour cent22 ». Le règlement salarial leur accorde 6,5 pour cent d’augmentation rétroactive au 1er juillet 1989, 1 pour cent le 1er janvier 1990, 6 pour cent le 1er  juillet 1990, 2 pour cent le 1er janvier 1991 et entre 7 et 9 pour cent la troisième année, dépendamment de l’inflation et des allocations liées au coût de la vie. Chaque membre de l’A PUL reçoit de plus une prime à l’embauche de signature de 1 000 $. Ces gains financiers rapprochent les professeurs de la Laurentienne de

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des étudiants protestent contre l a grève des professeurs en 1989.  |  À l’automne de 1989, les professeurs de la Laurentienne font leur deuxième grève en moins de cinq ans et comme le mois de septembre s’achève, les étudiants s’inquiètent de voir leur année universitaire compromise par une longue grève. Une entente est annoncée le 3 octobre 1989 et les classes reprennent peu après.

la parité avec leurs collègues de l’Université Lakehead, à Thunder Bay, devenus la référence des négociateurs de l’A PUL . Même si les hausses salariales sont fort appréciées, la vraie victoire des syndiqués, confie Jean-Charles Cachon au Sudbury Star, porte sur la question des griefs, car la nouvelle entente précise en toutes lettres que huit des neuf membres du comité des promotions seront désormais des professeurs. « Auparavant, le recteur prenait toutes les décisions, explique-t-il. Aucun grief n’était possible, sauf dans des cas de discrimination extrême. Maintenant, tous les cas peuvent faire l’objet d’un grief23. » Bien que John Daniel occupe toujours officiellement le poste de recteur de l’Université Laurentienne pour l’année universitaire 1989–1990, il profite d’un congé pendant la dernière année de son mandat et se trouve en dehors du campus pendant toute la durée de la grève. Au mois à peine après la fin du conflit, il remet sa démission pour devenir vice-chancelier de l’Open University, en Grande-Bretagne. Le poste semble taillé pour lui, non seulement car il lui permet de rentrer dans son pays, de surcroît sur un campus où il avait déjà séjourné en tant que conférencier, mais aussi parce que Daniel s’est fait le champion de l’enseignement à distance et qu’il a décrit l’Open University comme une institution qui « s’occupe des adultes occupant un emploi et souhaitant poursuivre leur éducation et étudier à la maison24 ». Si les conflits de travail dominent le mandat de Daniel au rectorat, la Laurentienne connaît aussi, au même moment, des développements résolument positifs comme les nouvelles constructions d’une valeur de 60 millions de dollars, dont la nouvelle bibliothèque J.N. Desmarais et le projet du nouveau centre étudiant. Commentant son travail de recteur, Daniel dira qu’il est fier de ce que « la Laurentienne soit devenue une université beaucoup plus sérieuse » sous sa gouverne, un progrès mesurable, selon lui, « par le fait que le nombre d’étudiants a augmenté du tiers » depuis son arrivée et que « nous avons embauché certains très bons professeurs25 ». En vérité, le nombre de professeurs a augmenté, puis diminué sous Daniel. Il a atteint 324 en 1988, mais dans la foulée de la grève et au moment où s’en va le

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recteur, le corps professoral compte environ 300 personnes en tout. Bien que les inscriptions continuent de croître, aucune augmentation substantielle du nombre de professeurs ne surviendra avant la fin des années 1990, alors que le corps professoral dépassera les 350 membres pour la première fois de l’existence de la Laurentienne. La situation économique de l’Ontario explique en bonne partie que si peu de nouveaux professeurs soient embauchés dans la première moitié des années 1990. Quand Bob Rae passe à l’histoire, en octobre 1990, en devenant le premier premier ministre provincial élu sous la bannière du Nouveau Parti démocratique à l’est du Manitoba, l’Ontario se trouve au cœur d’une récession et le nouveau gouvernement doit composer avec un manque à gagner sur lequel il est en train de perdre tout contrôle. Projetant un déficit de 9,7 milliards de dollars en 1991–1992, le gouvernement Rae essaie de provoquer la reprise en engageant des dépenses publiques, d’abord, avant de s’en remettre à une série de mesures connues sous le nom de « contrat social ». Rae plaisantera dans ses mémoires du fait que ces stratégies le laissent dans « la position peu enviable où la gauche pense que Bay Street m’a envoûté et Bay Street pense que je suis maoïste26 ». Rae expliquera qu’en instaurant le contrat social à compter de 1993, ses objectifs sont « de convaincre les gestionnaires du secteur public et leurs syndicats du besoin de faire des économies et de parvenir à économiser sans compressions majeures dans les services offerts à la population, ni importantes suppressions de postes parmi les employés du secteur public27 ». Comme l’écrit l’historien Peter A. Baskerville, le contrat social [es]t résolument novateur. Il se [fonde] sur des économies obtenues en obligeant les employés du secteur public à prendre jusqu’à 12 « congés » non payés par année. Au lieu d’imposer des compressions budgétaires, le gouvernement Rae prom[et] que les travailleurs et leurs employeurs négocier[ont] des ententes « volontaires »28.

Rapidement baptisés « Jours Rae », ces « congés » non payés concernent tous les employés du secteur public gagnant plus de 30 000 $ par année. Obligation leur est faite de s’entendre avec leurs employeurs sur la façon de gérer cette exigence. La solution du contrat social laisse un goût particulièrement amer aux professeurs de la Laurentienne. Non seulement chaque membre de l’A PUL se voit-il imposer ces jours non payés, une mesure se traduisant par des ponctions salariales faites sur les chèques de paie mensuels, mais les salaires sont aussi gelés pour trois ans au niveau de 1993. Le bulletin de l’A PUL du printemps 1994 porte à l’attention des membres que « plusieurs universités d’Ontario ont continué d’offrir des augmentions progressives au même rang en dépit du contrat social », mais pas la Laurentienne, en résultat de quoi « nos salaires […] se trouvent distanciés par [ceux du] reste de la province à une vitesse alarmante29 ». Roy Kari exprime la même inquiétude en révélant aux membres de l’A PUL ce que le comité formé par l’Association pour négocier l’application du contrat social avait tenté de faire entendre à l’administration universitaire, à savoir que « les demandes d’augmentation de l’A PUL [sont] modestes, réalistes et nécessaires30 ». Kari rappelle en effet aux membres de

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retraite des chefs de département à l a fin des années 1980.  |  Des chefs de département et des administrateurs lors d’une retraite.

l’A PUL que leur salaire moyen est le plus bas de la province, que la faible valeur des augmentations progressives au même rang consenties par la Laurentienne enlève aux jeunes professeurs tout espoir d’obtenir un jour un salaire comparable à celui des professeurs plus âgés et que le non-paiement d’augmentations pendant la durée du contrat social aura des répercussions très nocives sur les plus jeunes professeurs pendant le reste de leur vie professionnelle, en plus de réduire la valeur de la pension des professeurs sur le point de prendre leur retraite31. À titre de remède, le contrat social s’avère une pilule bien difficile à avaler pour tous les employés du secteur public de l’Ontario, mais les membres de l’A PUL y sont particulièrement hostiles à cause du ressentiment que leur crée le fait qu’ils n’ont toujours pas obtenu la parité salariale provinciale, malgré leurs luttes répétées à ce sujet. L’avenir se dessine désormais encore plus sombre, car la seule perspective de combler le retard semble de moins en moins réaliste. Au même moment émerge une controverse concernant les modalités selon lesquelles les « Jours Rae » s’appliqueront aux professeurs. Les professeurs tiennent à prendre les congés obligatoires pendant la session d’enseignement afin de bien éveiller la population à leurs répercussions. L’administration est d’avis que chaque professeur devrait décider comment échelonner ses propres congés et quels cours annuler, tandis que la présidente de l’A PUL Wendy Jerome soutient qu’il serait beaucoup plus sensé de décider collectivement afin que les étudiants sachent à quoi s’en tenir et que le dérangement soit ainsi atténué. Elle demande, par exemple, que les quatre jours de congé sans solde tombent à la fin de la pause de Noël, ce qui repousserait le début des classes de quelques jours au début de janvier 199532. La solution semble logique et recueille l’adhésion des étudiants comme des professeurs, car dans le concret, elle signifie seulement que les vacances de Noël se prolongeront et permettront à chacun de passer plus de temps en famille. Début février 1996, le directeur du personnel fait parvenir à tous les employés une note de service bienvenue stipulant que les dernières déductions seraient prélevées ce mois-ci et qu’« à compter du 1er mars 1996, tous les salaires retrouveront leur niveau d’avant le contrat social33 ». Il n’y a guère d’autres motifs de célébration. L’héritage du contrat social laisse les professeurs de la Laurentienne toujours

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figure 19,1  |  Évolution des inscriptions étudiantes et des embauches professorales, 1988–200834

plus désavantagés sur le plan salarial, encore plus loin de la moyenne provinciale qu’ils l’étaient auparavant, et amers de n’avoir même pas reçu les modestes augmentations progressives au même rang qui auraient permis de composer avec l’inflation pendant le contrat social. Chaque séance de négociation des dix années suivantes ramènera cet héritage sur la table, en conséquence de quoi l’administration accordera plusieurs ajustements salariaux lors des négociations de 2002 et de 2005. Mais comme d’autres universités accorderont leurs propres ajustements au même moment, le rattrapage restera toujours une question non résolue. D’intéressantes tendances se distinguent lorsqu’on observe les données des vingt dernières années sur la croissance du corps professoral et celle des inscriptions étudiantes à la Laurentienne (Figure 19,1). Au temps du contrat social, dans la première moitié des années 1990, les inscriptions atteignent un plus grand nombre que jamais. L’Université comptant près de 8 000 étudiants entre 1992 et 1994, certaines facultés et certains programmes doivent composer avec les plus grosses classes qu’ils ont eues à gérer alors que les professeurs, au même moment, doivent prendre leurs « Jours Rae » et accepter les pertes de salaire qui s’y rattachent. La situation pousse certains membres de l’A PUL à se questionner sur leur charge de travail et l’Association à se préparer à renégocier les attentes relativement au nombre de cours qu’on peut raisonnablement exiger d’un professeur. Les inscriptions ne se maintiennent pas au même niveau dans la seconde moitié des années 1990, passant même sous la barre des 6 000 de 1998 à 2001.

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La tendance à la baisse s’inverse peu après et, comme le montre la figure 19,1, les inscriptions s’accroissent avec régularité tout au long des années 2000, passant de 5 968 étudiants en 2001–2002, à un sommet historique de 9 100 étudiants, en 2006–2007. Cette croissance possède plusieurs explications, dont le phénomène de la « double cohorte » qui se produit à la suite de la décision de la province d’éliminer la cinquième année du secondaire, consacrée au CPO (cours préuniversitaire de l’Ontario), ou 13e année comme on l’appelle communément. Deux fois plus de demandes d’inscription en première année que de coutume submergent le système universitaire ontarien en 2003 ; les données sur les inscriptions à la Laurentienne en sont le reflet. Mais la double cohorte n’explique qu’en partie la croissance de la Laurentienne, car les inscriptions continuent d’augmenter au cours des années suivantes et ne chutent pas autant qu’on l’avait prédit après la diplomation de la promotion de 2006. Diverses initiatives prises par la Laurentienne contribuent à la croissance globale, parmi lesquelles la nouvelle School of Education qui offre le baccalauréat en éducation en langue anglaise, les ententes d’articulation que la Laurentienne signe avec des collèges communautaires, l’expansion de ses programmes d’études supérieures et la mise sur pied de son initiative « Laurentian at Georgian » qui offre aux étudiants de Barrie et d’Orillia la possibilité de commencer, et parfois de compléter, leur baccalauréat dans le comté de Simcoe en étant inscrits à la Laurentienne. S’il s’avère très positif pour la santé financière de l’Université, un tel accroissement du nombre d’étudiants alourdit la charge de travail des professeurs et particulièrement des directeurs de département dont les programmes sont donnés au Collège Georgian, en plus de soulever une pléthore de questions au sujet des relations entre les deux campus. Il se trouve, en 2008, près de 1 200 étudiants inscrits aux programmes offerts par le biais du partenariat avec le Collège Georgian, une croissance rapide témoignant d’une popularité inattendue des programmes qui en étonne plus d’un. Au moment d’écrire ces lignes, l’A PUL a commencé à exprimer son insatisfaction au sujet de ses nombreuses préoccupations restées lettre morte concernant les répercussions sur ses membres de l’initiative « Laurentian at Georgian ». Dans les années 2000, le plus grand poids conféré à la recherche pour évaluer le succès des professeurs ajoute une source de pression supplémentaire sur les épaules de ces derniers. Le recrutement de nouveaux collègues à la fin des années 1990 pour remplacer ceux qui partaient laisse en effet les membres des comités d’embauche surpris du calibre des candidats. Peu de postes se sont ouverts dans la décennie précédente et comme les universitaires ressentent de plus en plus sous l’emprise du publish or perish, (publier ou périr) les candidats aux nouveaux postes enfin disponibles se présentent munis d’impressionnantes feuilles de route. Ils possèdent en majorité un doctorat, des publications avec arbitrage, des bourses postdoctorales et des subventions de recherche à leur crédit, envoyant par là le signal qu’ils sont en mesure d’aider la Laurentienne à accéder au vingt-et-unième siècle et à bâtir sa réputation dans les secteurs de la recherche et de l’enseignement aux études supérieures. Depuis sa fondation, l’Université Laurentienne s’est surtout fait connaître pour son enseignement au premier cycle, mais la dernière décennie voit sa renommée

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pour les études supérieures et la recherche s’améliorer. La création de la nouvelle école de médecine et l’introduction de six nouveaux programmes depuis 2004 contribuent à changer le profil de la Laurentienne. À l’automne 2007, son Bureau de la recherche, du développement et de la créativité (BRDC) célèbre les réussites des chercheurs. Le communiqué de presse émis en novembre par le BRDC révèle que la réputation enviable de la Laurentienne en recherche est en effet prétexte à célébrer grâce « aux chercheurs, à savoir plus de 130 professeurs et étudiants en sciences, en génie, en sciences sociales et en humanités, qui ont reçu aux niveaux national et provincial des subventions publiques totalisant, à ce jour, 5 345 529 $ en 200735 ». La vice-rectrice associée à la recherche, Liette Vasseur, se montre heureuse de souligner ces réussites. « Nous avons toutes les raisons de nous réjouir de nos récentes recherches fructueuses et sommes très fiers de nos professeurs qui comptent parmi les scientifiques les plus réputés de ce pays, explique-t-elle. Ils contribuent aux nouvelles découvertes qui auront un rayonnement durable sur la région, son économie et notre réputation36. » Cet accent sur la recherche se trouve au cœur du plan stratégique de la rectrice Woodsworth pour rehausser la réputation de l’Université. Cela est exactement ce que les gestionnaires de fonds de recherche publics et privés souhaitent entendre, mais c’est aussi une source de controverse parmi les membres de l’APUL . Certains professeurs se disent inquiets de ce que l’enseignement au premier cycle fasse les frais d’une telle préoccupation pour les résultats quantifiables. Cette inquiétude participe plus globalement d’un débat entre les universitaires canadiens sur les places respectives de l’enseignement et de la recherche, un débat dans lequel les voix de la modération en concluent que les deux ne sont pas mutuellement exclusifs, mais symbiotiques et complémentaires. Si cette conclusion nuancée va de soi pour la majorité des collègues, il ne fait aucun doute qu’une telle valorisation des résultats de recherche se traduit par des attentes et une pression d’un tout nouveau genre que les professeurs de la Laurentienne et d’ailleurs n’avaient pas connues dans les décennies précédentes. À l’approche du cinquantième anniversaire de la Laurentienne, les défis qui se posent aux professeurs sont bien éloignés des luttes de leurs prédécesseurs d’il y a un demi-siècle. D’ancienne institution n’offrant qu’un enseignement au premier cycle, l’Université Laurentienne est, à cinquante ans, passée au rang d’établissement proposant une vaste gamme de programmes de maîtrise et de doctorat. En 2007–2008, la population étudiante compte 8 147 étudiants au premier cycle et 633 aux deuxième et troisième cycles, alors que les professeurs y sont 393. Ces derniers s’inscrivent activement dans les trois axes du projet universitaire : enseignement, recherche et service à la communauté sur la base de leur expertise universitaire, à la fois sur et hors campus. Pendant ce temps, l’A PUL continue de veiller sur leurs intérêts. Les professeurs en poste depuis longtemps à la Laurentienne sont témoins d’une myriade de changements, depuis les tout débuts au centre-ville jusqu’aux développements récents sur les terrains du chemin du lac Ramsey. Cette évolution se voit façonnée au fil des ans par une combinaison de conjonctures politiques provinciales et de priorités universitaires en constante transformation. Depuis le milieu

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sheil a cote-meek .  |  En 2006, la professeure Sheila Cote-Meek des services humains autochtones est nommée au nouveau poste de directrice de l’enseignement, affaires autochtones. En 2010, elle est nommée vice-rectrice associée, programmes autochtones.

des années 1960, l’A PUL se montre fort habile à négocier d’importantes politiques concernant l’embauche des professeurs, la permanence, le licenciement et les congés sabbatiques ou de formation pour ses membres. Après dix-neuf années de lutte, de négociation et de compromis, les professeurs se syndiquent afin de protéger leurs intérêts et répondre aux nouveaux défis apparus dans la foulée d’une économie au ralenti et d’inscriptions sur le déclin. À bien à des égards, le récit de l’expérience collective des professeurs à la Laurentienne réitère ceux d’autres régions de l’Ontario et de tout le Canada, tout comme les relations de travail passées entre l’A PUL et l’administration font écho à des thèmes qu’on trouve à d’autres universités. La face de l’éducation postsecondaire en Ontario a dramatiquement changé ces cinquante dernières années et la Laurentienne a suivi le mouvement. L’histoire de ses professeurs, et particulièrement de leur Association et de leur militantisme, en est une de changements, de défis et d’évolutions. Naguère en poste au sein d’une université naissante éparpillée au centre-ville et où chacun devait négocier individuellement ses conditions de travail avec le recteur, travaillant aujourd’hui au sein d’une université multi-services où ils ont un syndicat pour les représenter, des programmes d’études supérieures, des subventions de recherche et près de 40 000 anciens étudiants à leur compte, les professeurs de la Laurentienne ont clairement franchi un immense chemin depuis leurs modestes débuts.

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conclusion

De divers points de vue, et notamment en termes de l’évolution des structures et du développement des identités, l’histoire de Laurentian University / l’Université Laurentienne se divise en trois parties : les défis des années 1960, une période de transition et la période contemporaine. Cela est vrai d’abord et surtout pour la gouvernance universitaire. Mises en place juste avant le début des bouleversements sociaux et politiques qui traversent l’Amérique du Nord au milieu des années 1960, les structures et les pratiques de la Laurentienne reflètent les conceptions traditionnelles de la gouvernance de type hiérarchique en éducation postsecondaire. Comme ailleurs au Canada, l’autorité dans cette nouvelle université appartient au Conseil des gouverneurs et, dans une moindre mesure en ce qui concerne les affaires internes de l’Université, au rectorat. Les organismes de représentation du corps professoral et du corps étudiant – le Sénat, l’Association des professeurs et l’Association générale des étudiants – n’ont pas beaucoup de pouvoir, non plus de stratégies pour l’acquérir1. De concert avec l’actualité mondiale, les bouleversements de la fin des années 1960 à la Laurentienne, qui entraînent la démission du recteur Stanley Mullins au printemps de 1970 et la rédaction du rapport Hagey un an plus tard, précipitent une importante redistribution du pouvoir du Conseil des gouverneurs vers le Sénat, le corps professoral et les étudiants. Bien que le pendule ne balance tout à fait aussi loin que le déplore J. A. Corry dans Farewell the Ivory Tower – « le rectorat et le Conseil des gouverneurs ont perdu beaucoup de leur pouvoir effectif », écrit-il, « ces pouvoirs retirés appartiennent maintenant au corps professoral, qui a de plus un droit de veto sur l’utilisation du pouvoir qui reste » – l’influence du corps professoral sur le processus décisionnel à la Laurentienne, notamment par l’entremise du sénat, ne grandit pas de beaucoup2. La deuxième phase de la trajectoire de la gouvernance à la Laurentienne, la période de transition qui s’étend du début des années 1970 au milieu des années 1980, entraîne un rajustement des relations de la gouvernance qui se concentre sur une structure administrative plus étendue et plus puissante. Ce processus fait en sorte que le pendule revient du côté des gouverneurs, bien que partiellement seulement. Une part importante de l’autorité retrouvée reste entre les mains du rectorat et de l’administration, qui assurent dorénavant la médiation entre les demandes rivales de plusieurs composantes de la gouvernance, y compris le Conseil des gouverneurs. Parallèlement, le Sénat perd graduellement la position dominante dans

les affaires universitaires qui est la sienne jusque dans les années 1970, en partie au profit de l’administration, mais aussi de l’Association des professeurs après que celle-ci devient en 1979 un agent négociateur légalement reconnu. Le rectorat de Daniel au milieu des années 1980 marque la consolidation de la gouvernance de la Laurentienne. Sinon à ses débuts, certainement à sa fin, les rôles et les responsabilités de chacune des principales composantes de la gouvernance sont clairement délimités. Ceci ne signifie pas que par la suite, la gouvernance de la Laurentienne ne change aucunement ou ne connaît aucun conflit. Qu’il s’agisse du Conseil des gouverneurs, du rectorat, du Sénat ou de l’Association des professeurs, le fonctionnement d’une institution dépend beaucoup de la personne ou des personnes clés qui s’y trouvent. Pendant les deux décennies et demie qui suivent, les personnalités interagissent selon les circonstances pour déplacer le pouvoir d’un côté puis de l’autre. Toutefois, ces déplacements ont lieu dans le cadre de limites établies et ne changent pas fondamentalement l’équilibre de la gouvernance universitaire. L’histoire des relations entre la Laurentienne et les trois universités fédérées se divise elle aussi en trois périodes distinctes. La première période – qui, comme celle de la gouvernance universitaire, comprend essentiellement les années 1960 – est à la fois la plus volatile et la plus cruciale pour la structuration de la relation. À ces débuts, les institutions fédérées considèrent que leur autorité collective est égale à celle de la Laurentienne en raison du rôle de première importance qu’elles ont joué lors de sa fondation. Mais les responsables de la Laurentienne s’opposent à cette interprétation et les crises financières, notamment celles qui secouent Thorneloe et Huntington à la fin des années 1960 et au début des années 1970, la rendent intenable. Un tournant décisif de la destinée des universités fédérées a lieu au milieu des années 1970, quand la province de l’Ontario commence à financer pleinement les étudiants des universités confessionnelles, ce qui leur permet dans les deux décennies qui suivent de prendre de l’expansion dans de nouvelles disciplines et de connaître une plus grande stabilité financière. Après une période de calme relatif, les relations de la fédération reviennent au premier plan au début des années 1990. En réaction aux questions qui refont surface tant du côté de la Laurentienne que des universités fédérées, la commission des recteurs sur les relations de la fédération recommande une série de mécanismes formels pour améliorer le mécanisme de collaboration de la gouvernance de la fédération. De concert avec les pratiques consultatives informelles déjà en place, ces mécanismes installent la période contemporaine où la coopération et la compréhension mutuelle des parties sont accrues. Il faut commenter aussi un autre aspect de l’évolution de la gouvernance de la Laurentienne. Dans le demi-siècle d’existence de l’Université, personne n’a complété deux mandats à la présidence ou à la vice-présidence, enseignement et recherche. Seule la vice-présidence, finance et administration a connu une stabilité, Ron Chrysler ayant occupé ce poste pendant presque un quart de siècle. Notons de plus qu’aucun recteur titulaire et seulement cinq vice-recteurs à l’enseignement et à la recherche (Roland Cloutier, Geoffrey Tesson, Douglas Parker, André Roberge, Patrice Sawyer) sont issus des rangs de la Laurentienne.

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On ne saurait expliquer ces anomalies, cas exceptionnel dans le milieu universitaire canadien, sans se livrer à des conjectures, mais ces deux observations ne peuvent pas être sans rapport entre elles. Une raison serait peut-être le facteur « messianique » : la quête d’un sauveur alors que l’institution est en situation précaire du point de vue des finances ou de l’enseignement semble avoir dominé le recrutement des cadres supérieurs. Cela expliquerait certainement le fait que si peu de candidatures proviennent de l’Université même. Dans une petite communauté comme la Laurentienne, surtout à ses débuts, mais même dans la période contemporaine, les professeurs et le personnel connaissent bien les forces, les faiblesses et les particularités de chacun et cette familiarité jouerait contre les candidatures internes. « Mieux vaut le péril qu’on ne connaît pas » semble avoir été la sagesse proverbiale qu’on respectait. Puis, invariablement, si les personnes choisies ne sont pas à la hauteur des attentes, si les défis de l’Université sont insurmontables, ou si des candidatures plus prometteuses se profilent, ces personnes partent, dans la plupart des cas en ayant acquis une réputation de compétence administrative. Bien que la Laurentienne ait généralement été bien servie par ses cadres supérieurs, on ne peut que s’interroger sur ce renouvellement fréquent a coûté du point de vue de la continuité et de la mise en œuvre du mandat éducationnel unique de l’Université. Le développement des programmes d’études se présente également comme une histoire à trois moments. À la fondation de la Laurentienne en 1960, un des premiers défis à relever est d’établir et d’offrir des programmes d’études pour le nord-est de l’Ontario. L’Université relève d’abord ce défi en donnant suite aux programmes que l’Université de Sudbury offrait depuis 1958 : un B.A. général, des options en arts et en sciences et quelques programmes dits professionnels. Bientôt, cependant, elle redéfinit ses programmes, comme beaucoup d’autres universités canadiennes le faisaient alors. La Laurentienne commence à offrir des programmes de quatre ans au milieu des années 1960 et, à la fin de cette décennie, elle compte des écoles professionnelles de travail social et d’éducation physique. Vers la fin des années 1960 également, elle établit aussi ses premiers programmes de deuxième cycle, surtout dans les sciences. Cette redéfinition des programmes entraîne aussi la division de la faculté des arts et des sciences en 1975, d’où l’on tire quatre facultés : humanités, sciences sociales, sciences et écoles professionnelles. En 1972, de nouveaux critères de financement mis en place par le ministère ontarien des Affaires universitaires obligent essentiellement la Laurentienne à investir plus de temps et d’énergie dans la planification du développement de ses programmes de premier et de deuxième cycles. Aussi favorise-t-elle davantage la recherche, bien que celle-ci demeure surtout l’activité solitaire de certains professeurs. Au début des années 1980, la plupart de ses programmes, surtout au premier cycle, sont relativement bien établis. Dans les écoles professionnelles, l’École de génie est intégrée à la faculté des sciences et une école des sciences de l’éducation voit le jour pour assurer la formation des enseignants francophones. L’arrivée d’un nouveau recteur en 1984 entraîne des changements importants, surtout dans le domaine de la recherche. La Laurentienne commence alors à structurer davantage cet aspect important de la vie universitaire, en adoptant des

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politiques pour le financement et la création d’instituts et de centres de recherche. Au fil des vingt-cinq dernières années, le nombre de centres de ce genre grandit et le financement obtenu des conseils de recherche, des fondations ou des sources gouvernementales connaît une augmentation importante. Avec ces activités de recherche, la Laurentienne établit aussi plusieurs programmes de deuxième cycle. Depuis l’an 2000, on a créé six nouveaux programmes de doctorat et plusieurs programmes de maîtrise également. L’École de médecine du Nord de l’Ontario, associée aux universités Laurentienne et Lakehead, vient aussi rehausser le profil de l’institution. Pour les étudiants, la complexité de l’expérience bilingue et triculturelle de la Laurentienne représente un défi non négligeable. À sa fondation, l’Université se conçoit comme un laboratoire visant le rapprochement de jeunes personnes du Nord de cultures anglaise et française, mais au cours des cinquante ans qui suivent, le profil culturel de l’Université se redéfinit en raison de l’importance croissante des étudiants des Premières nations. Dans la première période du développement de la Laurentienne dans les années 1960, les étudiants se heurtent aux divisions qu’entraînent les différences linguistiques et religieuses. Ils doivent mettre en place des institutions étudiantes universitaires – le gouvernement étudiant, le journal, l’annuaire, les clubs et sociétés et les sports interuniversitaires – alors que la nouvelle université se construit littéralement autour d’eux. Néanmoins, la première période, jusqu’en 1972, est une période faste, alors que les étudiants surmontent leurs différences et se rassemblent pour se tailler une place dans la hiérarchie universitaire, en adoptant les tactiques de l’activisme du mouvement étudiant international en vue d’améliorer leurs équipements et accroître leur autonomie. Cependant, il n’est pas possible de maintenir cette unité au cours des décennies difficiles qui suivent ; la deuxième période entre 1972 et 1985 est celle d’un mouvement morcelé de l’activisme alors que les étudiants forment de nouvelles communautés qui reposent sur le sexe, la langue, la culture, l’orientation sexuelle ou l’expérience. L’idée qu’une seule organisation puisse les représenter ne leur convenant plus, les étudiants de la Laurentienne créent un éventail d’associations, de groupes et de sociétés qui reflètent mieux la diversité de leurs besoins. De plus, plusieurs étudiants s’estiment affranchis des formes d’autorités traditionnelles. La culture antiautoritaire de cette deuxième période entraîne l’érosion du rôle de l’Université « en lieu et place du parent » et la responsabilité de la conduite de l’étudiant se déplace presque entièrement vers un contrôle individuel et collectif autonome. Dans l’époque contemporaine, de 1985 à nos jours, les étudiants de la Laurentienne voient l’activisme avec un plus grand scepticisme et sont plus conscients de la dissension ; par conséquent, divers enjeux comme les grèves de l’A PUL exposent des lignes de faille entre les diverses communautés sur campus. Par ailleurs, plusieurs étudiants doivent supporter le fardeau de multiples responsabilités – travail, études et famille – et l’endettement étudiant devient une préoccupation importante. Dans ce corps étudiant plus grand et plus divisé, la hausse du coût de l’éducation est une des seules causes capables de mobiliser l’ensemble des étudiants. La culture plus permissive qui émerge dans les années 1980 fait craindre aux étu-

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diants et à l’administration que dans l’ensemble, la qualité de la vie étudiante a diminué, notamment dans les résidences. La période contemporaine se caractérise par les efforts continus en vue d’atteindre l’équilibre entre la réglementation universitaire et l’autonomie du gouvernement étudiant et de rendre le campus plus inclusif et plus tolérant. Au cours de ces trois périodes aussi, les étudiants de la Laurentienne consolident progressivement leur présence physique au sein de l’Université, en passant de locaux improvisés dans des magasins, des immeubles à bureaux et même un salon funéraire au centre-ville de Sudbury à des installations incomplètes de leur nouveau campus « ravissant mais boueux », suivi finalement de l’obtention d’un pub étudiant, des locaux pour les événements et les loisirs et enfin un centre étudiant désigné. Comme les étudiants, le corps professoral de la Laurentienne vit de profonds changements au cours des cinquante dernières années. Imaginez la rencontre d’un groupe des premiers professeurs de la Laurentienne qui donnent leurs cours dans des lieux divers du centre-ville à l’automne de 1960 et un groupe de professeurs nouvellement embauchés qui commencent leur carrière universitaire en 2010. Leurs réalités respectives seraient très différentes à bien des égards. Non seulement leur expérience de l’enseignement serait-elle très différente, mais leurs attentes en matière de conditions de travail et de protection syndicale n’auraient aucune commune mesure. Au tout début, chaque professeur négocie individuellement ses conditions de travail avec le recteur et/ou un comité du Conseil des gouverneurs, puis le Conseil ratifie cette entente. Vers le milieu des années 1960, les ententes collectives sont en place et l’Association des professeurs de l’Université Laurentienne conclut avec l’administration des ententes historiques sur la permanence, la charge de travail et les congés autorisés. Il s’agit de gains considérables qui précèdent – et de loin – des acquis semblables dans d’autres universités au pays. Ces politiques, auxquelles s’ajoutent les luttes durement menées de 1970 en vue d’accroître la participation du corps professoral dans les processus décisionnels de l’Université, amènent la majorité de ses membres à conclure au milieu des années 1970 qu’il ne serait pas nécessaire de transformer l’A PUL en agent de négociation légalement reconnu. Alors que la croissance des inscriptions diminue tant à la Laurentienne que partout au pays dans les années 1970, il devient évident que les postes d’enseignement sont menacés dans un contexte où les universités tentent désespérément d’équilibrer leurs budgets. Alarmée par la possibilité que même le personnel ayant la permanence ne pourrait pas compter sur la sécurité d’emploi, l’APUL , conseillée par l’Association canadienne des professeurs d’université, incite ses membres à envisager l’option de l’accréditation syndicale. Bien qu’au début, l’idée soit rejetée par la majorité des professeurs, qui croient que la syndicalisation menacerait la participation du corps professoral aux processus décisionnels universitaires, en fin de compte le souci pragmatique de la sécurité d’emploi emporte le débat et, en 1979, l’A PUL est accréditée. Au cours des dix années suivantes, les membres du corps professoral ont exercé leur droit de grève à deux occasions (1985 et 1989), poursuivant ainsi leur lutte pour la parité salariale avec leurs collègues d’autres

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universités en province. Les années 1990 apportent de nouveaux défis, alors que l’A PUL traverse la tempête du contrat social avec ces « Jours Rae » et encaisse le coût des baisses d’inscriptions. Au seuil du 21e siècle, la Laurentienne est bien engagée dans la voie de sa transformation d’une université essentiellement vouée aux études de premier cycle en une université de recherche avec un nombre croissant de programmes de deuxième cycle et une série complexe d’ententes d’articulation de programmes avec d’autres institutions. La croissance des inscriptions et les nouvelles attentes en matière de productivité des professeurs chercheurs signifient que le corps professoral affronte de nouveaux défis qui ont peu à voir avec ceux que leurs collègues ont connus il y a à peine quelques décennies. En effet, si une nouvelle génération de membres de l’A PUL pouvait s’attabler avec ses précurseurs et comparer ses notes sur l’expérience de l’enseignement, de la recherche et des services rendus à l’Université Laurentienne, les deux groupes pourraient bien se demander s’ils discutent en fait de la même institution. L’histoire de la Laurentienne est une histoire de progrès à beaucoup de niveaux : la contribution du corps professoral à la gouvernance de l’Université, le développement de nouveaux programmes et des études supérieures, le rôle accru des étudiants dans les processus décisionnels. Ce sont toutes des raisons de se réjouir et de reconnaître une tendance fondamentale dans notre histoire, une évolution qui justifie certainement la célébration de ce 50e anniversaire. Néanmoins, en ce qui concerne l’éducation en français, force est de reconnaître que cette évolution est beaucoup moins impressionnante, en ce sens que le développement de la Laurentienne connaît deux régimes, la voie rapide pour la majorité anglophone et de longues périodes de piétinement pour la minorité franco-ontarienne, dont les progrès les plus nets remontent au passé, en gros à la période entre 1983 et 1993. Depuis, il n’y a pas eu grand-chose de comparable à la situation dont jouit actuellement la majorité, qui attire une clientèle plus nombreuse et diversifiée, notamment grâce à ses nouvelles écoles de médecine et d’éducation. Cela étant le cas, il faut rappeler que les deux périodes où la Laurentienne rompt avec cette tendance – le début des années 1970 et le milieu des années 1980 – ont un effet crucial sur le progrès de l’éducation en français. En 1973, on reconnaît le besoin de réformes administratives fondamentales à la lumière du rapport Hagey et « Pour la planification de notre avenir », en créant le premier corps administratif francophone homogène, le Comité des affaires francophones, dont découlent tous les développements qui suivront, comme la Direction de l’enseignement en français et le vice-rectorat aux affaires francophones. Dans cette même période, en grande partie grâce au service d’animation et à quelques professeurs impliqués dans la communauté, la Laurentienne a engendré trois institutions de premier rang de l’Ontario français, à savoir le Théâtre du Nouvel-Ontario, la Nuit sur l’étang et la maison d’édition Prise de parole. L’autre période qui rompt avec la tendance est celle du milieu des années 1980, une période de grand renouvellement dans les rangs du personnel. La communauté francophone de la Laurentienne perd deux de ses chefs de file coup sur coup

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quand André Girouard prend sa retraite en 1986 et que Gaétan Gervais quitte pour Toronto en 1987 parce qu’il est incapable de travailler avec la nouvelle administration établie par le recteur Daniel, qui arrive en 1984, suivi du vice-recteur Bélanger un an plus tard. Le contexte politique et constitutionnel au Canada et en Ontario aide aussi à modifier l’évolution de l’enseignement en français. Les retombées juridiques de la Charte des droits et libertés autorisent les plus grandes espérances pour l’Ontario, qui est toujours privé d’un système d’éducation autonome. La décision de créer les premiers conseils scolaires francophones et l’adoption de la loi 8 sur les services en français apportent d’importantes subventions pour le développement de programmes universitaires en français, qui feront grimper les effectifs étudiants franco-ontariens jusqu’au quart du total au tournant des années 1990. Depuis, leur nombre décline et on n’a pas vu émerger un leader capable de freiner cette tendance. Ce 50e anniversaire n’est certes pas une occasion de réjouissance pour les personnes qui croient que la communauté franco-ontarienne devrait représenter le tiers des effectifs, selon l’entente initiale. Comme pour les francophones, l’expérience des femmes à la Laurentienne n’est pas une histoire de progrès ininterrompu. Au début de l’histoire de l’Université, les femmes font certainement partie de l’histoire, mais leur présence est difficile à retracer, car elles n’ont pas une représentation égale dans le corps étudiant, le corps professoral, l’administration universitaire ou le Conseil des gouverneurs. Quand les femmes arrivent à se tailler une place en plus grand nombre, leur simple présence fait la manchette dans les journaux. Un endroit où les femmes sont bien représentées est celui où, justement, leur travail est sous-estimé, soit dans les rangs du personnel de soutien à titre de secrétaires et de commis. En dépouillant les journaux de la première période, on trouve des photographies prises lors de la collation des grades où les femmes forment moins du quart de la classe, ainsi que des reportages sur l’embauche de femmes dans les rangs du corps professoral où l’on souligne leur arrivée dans une profession dominée par les hommes. On peut lire aussi des reportages sur les œuvres de bienfaisance des femmes dans la communauté qui collectent des fonds pour des projets universitaires, qui se font hôtesses (souvent en servant le thé) ou qui accompagnant leur mari à des événements officiels de l’Université. Vers la fin des années 1960, la question du statut des femmes devient un sujet de préoccupation au Canada, alors qu’on s’intéresse à un vaste éventail de domaines où l’inégalité des sexes va tellement de soi qu’on ne s’en rendait pas compte jusque-là. De 1972 à 1985, l’attention portée à la question du statut des femmes part de la prémisse que la situation des femmes à la Laurentienne n’est pas meilleure, mais n’est probablement pas pire non plus, que leur situation dans les autres universités au pays. Cette constatation n’entraîne pas l’acceptation passive du statu quo, mais se traduit plutôt en une série d’études qui explorent la réalité des expériences des femmes. Ces analyses statistiques fournissent des données qui permettent des comparaisons entre les femmes et les hommes, mais aussi entre la Laurentienne et d’autres universités. Sous la direction du comité consultatif du recteur sur le statut des femmes, les rapports entreprennent non seulement de documenter les

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problèmes, mais de suggérer des solutions. On se penche sur des questions comme l’accès aux garderies, l’équité salariale, l’équité de l’emploi et le harcèlement sexuel et on propose des objectifs mesurables pour redresser ces problèmes. Au fil des vingt-cinq dernières années, on adopte des politiques grâce auxquelles les femmes à la Laurentienne profitent de diverses mesures conçues pour leur assurer l’équité et la protection. Le nombre de femmes aux études grandit, si bien qu’elles représentent maintenant les deux tiers de la population étudiante, le nombre des femmes parmi le corps professoral est passé de 16 pour cent à 36 pour cent de l’ensemble et l’Université a vu accéder une femme au rectorat et deux femmes à la présidence du Conseil des gouverneurs. Néanmoins, il ne s’agit pas d’une histoire de progrès sans entraves et avec les arrivées et les départs du personnel de l’administration, la représentation des femmes aux plus hauts échelons des structures décisionnelles est encore loin de la moitié. On constate des progrès, mais on peut encore souhaiter beaucoup d’amélioration. En 1962, dans une allocution devant le club des femmes universitaires de Sudbury dont le thème est la Laurentienne, image à petite échelle du Canada, le doyen des arts et des sciences Gérard Bourbeau estime avec optimisme qu’« on peut considérer que l’Université Laurentienne est l’accomplissement de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique en ce sens qu’elle découle de la fédération de collèges confessionnels en une entité bilingue et biculturelle3 ». Tout comme à l’échelle nationale, traduire cette vision en des structures et des pratiques largement acceptées par les diverses composantes linguistiques, culturelles et fédérées de l’Université n’est pas une tâche facile. Comme l’écrit le recteur John Daniel en 1989, « toutes les tensions que connaît le Canada sont présentes dans le réseau de campus, de centres d’études et d’étudiants autonomes qui composent l’Université Laurentienne. Sur le campus du lac Ramsey, nous enseignons et travaillons dans les deux langues […] Nous vivons et baignons dans les défis des relations fédérales-provinciales alors que […] [les] collèges ou les campus essaient de vivre ensemble en harmonie au sein de la Laurentienne4 ». Ces tensions et ces défis, qui selon certains nuisent au développement de l’Université, sont aussi une source de sa force. Elles contribuent aux vigoureux échanges intellectuels qui sont essentiels au progrès du savoir, qui est au cœur du mandat éducationnel d’une institution postsecondaire. Tout aussi importante est leur contribution aux attitudes de tolérance des idées, des opinions et des cultures différentes des nôtres, une réciprocité essentielle à l’existence continue d’une institution aussi diversifiée et complexe que la Laurentienne et indispensable à la société dans son ensemble. Enfin, le milieu intellectuel qui en résulte, toujours fascinant quoique souvent frustrant, a profité tout autant au corps professoral, au personnel administratif et aux étudiants, en élargissant leurs horizons et en ouvrant devant eux de nouveaux mondes non seulement à étudier, mais à conquérir. Que ce soit à cause de ses tensions et défis ou malgré eux, comme cette histoire le précise, la Laurentienne, après un demi-siècle, a de nombreuses réalisations concrètes à son actif. À ses débuts, l’Université est une toute petite entité qui offre des baccalauréats de trois ans dans un mince éventail de disciplines artistiques et scientifiques à seulement quelques centaines d’étudiants. Cinquante ans plus

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tard, elle est devenue une institution bilingue et triculturelle à facultés multiples qui confère des grades multiples (B.A., B.A. spécialisé, maîtrise et doctorat), que plus 9 000 étudiants fréquentent, qui offre une vaste gamme de programmes en diverses disciplines et professions et qui mène des recherches dans de nombreux domaines, dont plusieurs sont reconnus à l’échelle nationale et internationale. Au cours de ses cinquante années, la Laurentienne a conféré un grade à plus de 40 000 étudiants, la vaste majorité étant du nord de l’Ontario, et ses anciens se retrouvent partout dans la région, au Canada et partout dans le monde. D’autres façons importantes aussi, l’Université Laurentienne a bien servi le nord de l’Ontario et particulièrement la ville du Grand Sudbury, en jouant un rôle de premier plan pour atténuer l’impact du déclin de l’industrie minière comme employeur local après les années 1970 et opérer la remarquable transformation environnementale, sociale et culturelle de la communauté dans cette période. À l’automne de 1965, le Toronto Daily Star, dans un article généralement peu flatteur sur la nouvelle université et sa communauté, prédit que tout cela pourrait bien arriver. « Aujourd’hui, écrit alors le Star, la Laurentienne est un endroit désolant en comparaison des richesses culturelles de ses sœurs du Sud, mais il y a des indications que son potentiel est aussi riche que les grands gisements miniers sous ses pieds5. » L’histoire lui a bien donné raison.

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notes

Chapître 1 1 En accord avec les spécialistes en histoire de l’Ontario français tels que Gaétan Gervais et Michel Bock, nous utilisons la terminologie française pour désigner certains noms de lieux géographiques régionaux, p. ex., l’île Manitouline, Nipissingue … voir l’ouvrage de Michel Bock et Gaétan Gervais, L’Ontario français : des Pays-d’en-Haut à nos jours, Le Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques (2004), 271 p. 2 Pour une mise en contexte du renouveau des missions au Canada à cette époque, voir notamment l’introduction de l’ouvrage de Fernand Ouellet et René Dionne, Journal du père Dominique du Ranquet, s.j. 1843, Sudbury, Société historique du Nouvel-Ontario, 2000, 266 p. 3 Albert Plante, Vingt-cinq ans de vie française. Le Collège de Sudbury, Montréal, 1938, p. 16. 4 Robert Toupin, « Le rôle des jésuites dans l’enseignement classique et universitaire de la région de Sudbury », Revue de l’Université Laurentienne/Laurentian University Review, vol. 3, no 4, p. 73. 5 Guy Gaudreau et Michel Verrette, « Évolution des effectifs étudiants au Collège de SaintBoniface, 1885–1967 », Cahiers franco-canadiens de l’Ouest, vol. 6, no 1, 1994, p. 89. 6 Gaétan Gervais, « L’enseignement supérieur en Ontario français (1848–1965) », Revue du Nouvel-Ontario, vol. 7 (1985), p. 27–34. 7 Thérèse Boutin, « L’Université de Sudbury », 1982, tapuscrit, p. 3. 8 Plante, Vingt-cinq ans, p. 33. 9 Boutin, « L’Université de Sudbury », p. 5. 10 Ed. Lecompte, Les Jésuites au Canada au XIX e siècle, tome II, Livre XVIII, manuscrit déposé aux archives provinciales de la Compagnie de Jésus, cité par Plante, Vingt-cinq ans, p. 50. 11 Gervais, « L’enseignement supérieur », p. 34. 12 André Bertrand, L’éducation classique au Collège du Sacré-Cœur, Sudbury, Société historique du Nouvel-Ontario, 1988, p. 20. 13 Bertrand, L’éducation classique, p. 16. 14 Plante, Vingt-cinq ans, p. 136. 15 Josée Anne Valiquette, « L’évolution des effectifs étudiants du Collège du Sacré-Cœur, 1913–1960 », département d’histoire, Université Laurentienne, mémoire de spécialisation, 1993, p. 19. 16 Plante identifie ce facteur comme étant la première cause d’abandon des études ; voir, Vingt-cinq ans, p. 81. 17 Bertrand, L’éducation classique, p. 29.

18 Claude Galarneau, Les collèges classiques au Canada français (1620–1970), Montréal, Fides, 1978, p. 148. 19 Bertrand, L’éducation classique, p. 33. 20 Bertrand, L’éducation classique, p. 33. 21 Voir les annexes 6 et 7 du mémoire de Valiquette. 22 Bertrand, L’éducation classique, p. 43–44. 23 Gérald Blais, « Le Collège du Sacré-Cœur, Sudbury, Ontario », M.A., Université d’Ottawa, 1968, 93 p. 24 Blais, Le Collège, p. 69, cité par Bertrand, L’éducation classique, p. 30. 25 Bertrand, L’éducation classique, p. 30. 26 Pierre Ouellette, « Éducation et économie, 1927–1965 », dans Guy Gaudreau (dir.), Bâtir sur le roc, Sudbury, Prise de parole et SHNO , 1994, p. 67–74. 27 Boutin, « L’Université de Sudbury », p. 11. 28 CCF  : Fédération du commonwealth coopératif ; ancien nom du Nouveau Parti démocratique. 29 « Sacred Heart seeking status of university », Sudbury Star, 12 février 1945, p. 5. 30 « Studies suited to area slated for university », Sudbury Star, 13 mars 1945, p. 7. 31 Voir « Un cri de rage. Un cri de race. » (publié dans L’Ami du Peuple du 22 février 1945, p. 5) où l’on rapporte les propos d’un lecteur outré et dont la lettre fut publiée dans le Sudbury Star quelques jours plus tôt. 32 Boutin, « L’Université de Sudbury », p. 12. 33 Voir notamment les articles du Sudbury Star du 21 mars 1946 (« University of Sudbury bill is held over », p. 1) et du 22 mars 1946 (« Premier sends university bill back to committee », p. 1 et 2). 34 « State Sudbury logical site for university », Sudbury Star, 30 avril 1946, p. 1. 35 Gervais, « L’enseignement supérieur », p. 21. 36 Alphonse Raymond, « Origines universitaires à Sudbury », Revue de l’Université Laurentienne/Laurentian University Review, vol. 3, no 4, p. 68. 37 Alphonse Raymond, 1914–1978. Mes souvenirs recueillis, transcrits et annotés par Huguette Parent, s.c.o., Ottawa, Centre franco-ontarien de ressources pédagogiques, 1996, p. 91. 38 Gervais, « L’enseignement supérieur », p. 40. 39 « Jesuit Order extended charter of Sacred Heart », Sudbury Star, 17 décembre 1956, p. 1 et 3. 40 Raymond, « Origines universitaires », p. 69. 41 Raymond, 1914–1978, p. 98–99. 42 Boutin, « L’Université de Sudbury », p. 19. 43 Raymond, « Origines universitaires », p. 69. 44 Raymond, 1914–1978, p. 99. 45 « Sudbury University names 12-man board of regents », Sudbury Star, 8 mai 1958, p. 20. 46 Raymond, 1914–1978, p. 109–110. 47 Ibid., p. 118. 48 Entrevue menée par Thérèse Boutin avec Émile Bouvier à Montréal en août 1981 ; voir Boutin, « L’Université de Sudbury », p. 25. 49 Boutin, « L’Université de Sudbury », p. 28. 50 Pour plus de détails, voir Pierre A. Riopel, « La fondation de l’École normale de Sudbury (1957–1963) », Revue du Nouvel-Ontario, no 33 (2008), p. 95–132. 51 Lettre du recteur Oscar Boily à Roger Charbonneau, ACFEO , 2 octobre 1961, archives du Collège du Sacré-Cœur, cité par Boutin, « L’Université de Sudbury », p. 38. 52 Riopel, « La fondation de l’École normale», p. 125–127.

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Chapitre 2 1 Paul Axelrod, Scholars and Dollars: Politics, Economics, and the Universities of Ontario, 1945–1980, Toronto, University of Toronto Press, 1982, p. 54 ; Edward J. Monahan, Collective Autonomy: A History of the Council of Ontario Universities, 1962–2000, Waterloo, Wilfrid Laurier University Press, 2004, p. 4–5 ; Roger Graham, Old Man Ontario: Leslie M. Frost, Toronto, University of Toronto Press, 1990, p. 387 ; Émile Bouvier, « L’Université Laurentienne de Sudbury », Relations (mai 1960), p. 120. Voir aussi Edward F. Sheffield, « The Post-War Surge in Post-Secondary Education, 1945–1969 », dans J. Donald Wilson, Robert M. Stamp et Louis-Philippe Audet (dir.), Canadian Education: A History, Scarborough, Prentice-Hall of Canada, 1970 ; Doug Owram, Born at the Right Time, Toronto, University of Toronto Press, 1996 ; David Foot, Boom, Bust & Echo, Toronto, Macfarlane, Walker and Ross, 1996. 2 Bouvier, loc. cit. ; Archives de l’Ontario (ci-après AO), RG 3-23, boîte 186, dossier 279G , « Sudbury, University of, Sacred Heart College », F. A. Farrell à l’hon. L. M. Frost, 26 février 1959 ; RG 2-217, boîte 4, « Laurentian University of Sudbury 1959 », Bouvier à Dunlop, 23 janvier 1959 (2 lettres) ; C. F. Cannon, directeur principal de l’éducation, à Dunlop, 2 février 1959 ; RG 3-23, boîte 186, dossier « Sudbury University of, Sacred Heart », R. A. Farrell à Leslie Frost, 26 février 1959. 3 AO , RG 3-23, boîte 186, R. A. Farrell à Frost, 26 février 1959. 4 Archives de l’Université Laurentienne (ci-après AUL), P 109, II, A , 1, 11, Lautenslager à un frère dans le ministère de l’Église unie du nord de l’Ontario, 27 novembre 1958. Voir aussi AO , RG 2-217, boîte 5, « Northeastern University North Bay », Rev. Dr. E. S. Lautenslager, « A Statement on the “Northern Ontario University” and the Responsibility of the United Church of Canada », 9 janvier 1959 ; Richard Bowdidge, « Murray’s coffee played its role », Sudbury Star, 24 novembre 1984. Voir aussi Richard Bowdidge, « Honorary degree for Ed Newbery much deserved », Sudbury Star, 14 juin 1986. 5 AUL , P 109, II, A , 1, 11, Lautenslager à un frère dans le ministère de l’Église unie du nord de l’Ontario, 27 novembre 1958 ; ibid., Présentation de Lautenslager à l’église St-Andrew’s, Sudbury, 10 décembre 1958. 6 AUL , P 109, II, A , 1, 11, résumé des procès-verbaux de la NOUA , 1958–1960, novembre 1958 ; ibid., II, A , 4, 1, « The University Problem in Northern Ontario and the Part Being Played by the Northeastern University Committee in Solving that Problem » ; ibid., II, A , 1, 11, présentation de Lautenslager, 10 décembre 1958. 7 Dwight Engel, « The Founding of Huntington University », mémoire de baccalauréat, Emmanuel College, University de Toronto, 1961, 24–26. Engel, il faut le souligner, possède un point de vue unique sur la question parce qu’il siège au conseil des sages. AUL , P 109, II, A , 1, 11, résumé des procès-verbaux de la NOUA , 1958–1960, « Dec. 17 » ; AO , RG 2-217, boîte 5, « Proposed Constitution of Northern Ontario University Association » ; AUL , II, A , 1, 3, « The Northern Ontario University Association Constitution », 20 mars 1959. 8 AO , RG 2-217, boîte 5, « Proposed Constitution of Northern Ontario University Association » ; AUL , P 109, II, A , 1, 1, procès-verbal du sous-comité exécutif de la NOUA , 11 mai 1959 ; Engel, loc. cit., 30. 9 AUL , P 109, II, A , 1, 3, Lautenslager à « Dear Brother in the Northern Ontario Ministry », 27 février 1959 ; ibid., II, A , 1, 11, résumé des procès-verbaux de la NOUA , 1958–1960, « Mar. 17 » ; ibid., II, A , 1, 1, Note pour les membres du conseil des sages, « A University for “Northern Ontario (N.O.U.A. answers to some questions which have been asked recently”) », 5 décembre 1959 ; Brian Aitken, « Huntington, Silas », Dictionary of Canadian Biography,

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vol. 13, p. 495–496 ; Engel, loc. cit., p. 35–43 ; Richard Bowdidge, « An eye on everything », Sudbury Star, 26 september 1980. AUL , P 109, II, A , 1, 11, présentation de Lautenslager à l’église St-Andrew’s, Sudbury, 10 décembre 1958 ; AO , RG 2-217, Department of Education University Files, boîte 5, « Northeastern University North Bay, 1959–1961 », Rev. Dr. E. S. Lautenslager, « A Statement on the “Northern Ontario University” and the Responsibility of the United Church of Canada », 9 janvier 1959. Carl Wallace et Ashley Thomson (dir.), Sudbury: Rail Town to Regional Capital, Toronto, Dundurn Press, 1993, p. 168–214 ; Carl Wallace, « Introduction », Revue de l’Université Laurentienne (ci-après RUL), vol. 17 (1985) ; Oiva Saarinen, « Municipal Government in Northern Ontario : An Overview », RUL , vol. 17 (1985), p. 2 ; Gordon Brock, The Province of Northern Ontario, Cobalt, Ontario, Highway Book Shop, 1978, passim. AUL , P 109, II, A , 1, 3, Lautenslager à « Dear Brother in the Northern Ontario Ministry », 27 février 1959 ; ibid., II, A , 1, 5, procès-verbal du comité exécutif, 17 décembre 1958 ; ibid., II, A , 1, 1, procès-verbal du comité exécutif, 10 mars 1959 ; ibid., II, A , 1, 11, procès-verbal du sous-comité exécutif, 25 mai 1959. The Daily Nugget (North Bay), 21 avril 1959 ; AUL , II, A , 1, 11, résumé des procès-verbaux de la NOUA , 1958–1960, 29 janvier 1959, 12 février 1959, 5 mars 1959, 21 avril 1959 ; ibid., II, A , 4, 1, « The University Problem in Northern Ontario and the Part Being Played by the Northeastern University Committee in Solving that Problem » ; ibid., II, A , 1, 1, procès-verbal du conseil des sages, 5 décembre 1959 ; Engel, p. 47–48. AUL , P 109, II, 4, 2, « On the position and aims of the Northern Ontario University Association », sans date, janvier 1959 approximativement ; Toronto Star, « Haileybury seeking north university », 21 octobre 1959 ; Financial Post, 8 août 1959 ; AUL , P 109, II, A , 2, 3, « J. W. E. Summary of the Fact-Finding Committee », 30 décembre 1959. Ibid., II, A , 4, 1, « The University Problem in Northern Ontario and the Part Being Played by the Northeastern University Committee in Solving that Problem ». Plusieurs de ces affirmations avaient été faites une décennie plus tôt lors d’une précédente campagne en faveur d’une université. Voir AO , RG 3-17, Office of the Premier, boîte 462, « University for Northern Ontario », Chambre de commerce de North Bay à l’hon. George Drew, 15 janvier 1948. Oiva Saarinen, « The 1950s », dans Wallace et Thomson, op.cit., p. 196–199. AUL , P 109, II, A , 1, 11, présentation de Lautenslager, 10 décembre 1958 ; ibid., résumé des procès-verbaux de la NOUA , 1958–1960, 25 mars 1959. Saarinen, loc. cit., p. 193. En 1960, Inco produit 69 pour cent du nickel mondial, 12 pour cent pour Falconbridge. Voir F. B. Howard-White, Nickel: An Historical Review, Toronto, Longmans Canada, 1963, p. 221–226. Voir Mike Solski et John Smaller, Mine Mill: The History of the International Union of Mine, Mill and Smelter Workers in Canada Since 1895, Ottawa, Steel Rail Publishing, 1985, p. 137–138 ; AUL , 49, 2, boîte 11, Boudreau à J. K. Stern, American Institute of Co-operation, 28 novembre 1958 ; Toronto Telegram, 2 juin 1960. AUL , P 109, II, A , 1, 3, Lautenslager à « Dear Brother in the Northern Ontario Ministry », 27 février 1959 ; ibid., II, A , 1, 11, résumé des procès-verbaux de la NOUA , 1958–1960, 7 et 23 avril 1959 ; ibid., II, A , 1, 7, procès-verbal du sous-comité exécutif, « Report of interview with Mr. R. Parker », 23 avril 1959. AUL , PO 77, fonds Harold-Bennett, dossier 1, « Convocation Address at Laurentian University, May 29, 1971 ». Voir aussi Richard Bowdidge, « An eye on everything », Sudbury Star, 26 septembre 1980. Bowdidge y reconnaît aussi l’influence de Frost dans l’engagement de Parker.

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23 Richard S. Lambert et Paul Pross, Renewing Nature’s Wealth, Toronto, Ontario Department of Lands and Forests, 1967, p. 476–499. 24 Axelrod, op.cit., p. 88–89 ; Sudbury Star, 13 mai 1961 ; AUL , P 109, II, A , 1, 11, présentation de Lautenslager, 10 décembre 1958 ; ibid., II, A , 1, 1, Frost à Hillyer, 16 avril 1959 ; ibid., II, A , 1, 12, procès-verbal du sous-comité excutif de la NOUA , 11 mai 1959, rapport de l’entretien avec Frost, 29 avril 1959. 25 Ibid., II, A , 1, 1, « A Tentative Plan » ; Richard Bowdidge, « University issue is an old theme », Sudbury Star, 19 février 1983. 26 AUL , II, A , 1, 11, résumé des procès-verbaux de la NOUA , 1958–1960, 12 juin 1959 ; ibid., II, A , 1, 12, procès-verbal du sous-comité exécutif de la NOUA , 11 mai 1959, 18 juin 1959, 20 juillet 1959. 27 Ibid., « Report Submitted by the Special Committee called by Invitation of the University of Sudbury under the Chairmanship of Mr. R. D. Parker, 2 septembre 1959 » ; AUL , PO 77, fonds Harold-Bennett, dossier 1, « Convocation Address at Laurentian University, May 29, 1971 ». Le 29 septembre, le comité exécutif adopte une version légèrement revue et corrigée des trois paragraphes initiaux du rapport Parker à titre de « Déclaration d’intentions » officielle de la NOUA . Voir AUL , P 109, II, A , 1, 5, procès-verbal du comité exécutif, 29 septembre 1959. 28 Therèse Boutin, tapuscrit inédit, « Université de Sudbury », 1982, p. 29 ; Pierre Ouellette, « Éducation et économie, 1927–1965 », dans Guy Gaudreau (dir.) Bâtir sur le roc, Sudbury, Prise de parole et Société historique du Nouvel-Ontario, 1994, p. 86–87. 29 Ibid., II, A , 1, 11, procès-verbal du sous-comité exécutif, 10 septembre 1959 ; AUL , PO 77, fonds Harold-Bennett, dossier 1, « Convocation Address at Laurentian University, May 29, 1971 » ; Engel, p. 51–52 ; AUL , P 109, II, A , 1, 7, procès-verbal du sous-comité exécutif, 30 novembre 1959 ; ibid., II, A , 1, 1, procès-verbal du conseil des sages, 5 décembre 1959 ; Bouvier, loc. cit. 30 Ibid., 20 juillet 1959. Voir aussi ibid., II, A , 2, 4, lettre type, après le 20 juillet 1959, signée par Lautenslager, Newbery et Palmer, aux membres du presbytère de Sudbury, « Re : Special Meeting of Presbytery » ; ibid., II, A , 1, 1, rapport d’une réunion informelle des membres disponibles du Northeastern University Committee et de la Northern Ontario University Association, 24 août 1959 ; ibid., II, A , 1, 11, procès-verbal du sous-comité exécutif, 10 septembre 1959 ; ibid., II, A , 1, 8, « Northern Ontario University Association and Northeastern University Association [sic] Discussions, November 10, 1959 » ; ibid., II, A , 1, 7, procèsverbal du sous-comité exécutif, 30 novembre 1959. 31 Ibid., II, A , 1, 1, Lautenslager au révérand E. Robertson, Blind River, 17 octobre 1959 ; ibid., procès-verbal du conseil des sages de la Northern Ontario University Association, 5 décembre 1959. 32 Ibid. À la réunion suivante du comité exécutif, le 15 janvier 1960, Vaughan admet lui-même que cela est exact. Voir ibid., II, A , 1, 5, procès-verbal du comité exécutif, 15 janvier 1960. 33 Ibid., Lautenslager à E. Robertson, 17 octobre 1959 ; AUL , PO 77, fonds Harold-Bennett, dossier 1, « Convocation Address at Laurentian University, May 29, 1971 » ; Sudbury Star, « Pick “Laurentian” for north’s new university », 18 janvier 1960. Voir aussi AUL , entretien de Charles Levi avec Ed et Rena Newbery, 3 juin 2004. 34 AUL , P 109, II, A , 1, 5, procès-verbal du comité exécutif, 15 janvier 1960. 35 Ibid. 36 Ibid. ; ibid., III, A , 3, T. M. Palmer à Newbery, 10 avril 1960 ; Engel, p. 66. 37 AUL , P 109, II, A , 1, 5, procès-verbal du comité exécutif, 15 janvier 1960. 38 Ibid., procès-verbal de la seconde réunion du conseil des sages, 16 janvier 1960 ; ibid., procès-verbal du comité d’enquête du conseil des sages, 16 janvier 1960 ; The Daily Nugget (North Bay), « Sudbury group stalled formation of North Bay university », 7 juin 1984. n ot e s à pag e s 24–28

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39 Gordon Aiken, Looking Out on the 20th Century, tome 2, Orillia, Ontario, RO Publications, 1993, p. 618 ; AUL , P 109, II, A , 1, 1, procès-verbal de la seconde réunion du conseil des sages, 16 janvier 1960. Après recomptage, selon Aiken, un deuxième scutin secret favorise Sudbury par deux ou trois voix, mais cela ne n’est pas inscrit au procès-verbal. 40 Ibid. 41 Ibid., II, A , 1, 1, « Another Big Step Forward A University in the North » par J. W. E. Newbery, 18 juin 1960. 42 AUL , P 109, III, A , 3, Newbery au révérend Rev. T. E. Floyd Honey, conseil des missions outre-mer, 25 février 1960 ; Sudbury Star, 26 janvier 1960 ; Globe and Mail, 11 février 1960 ; AUL , dossier II, A , 1, 5, procès-verbal du comité exécutif, 4 mars 1960 ; Sudbury Star, 29 mars 1960. Chapitre 3 1 Glen A. Jones, Paul Goyan et Theresa Shanahan, « University Governance in Canadian Higher Education », Tertiary Education and Management, vol. 7, no 2 (2001), p. 136 ; Glen A. Jones, Paul Goyan et Theresa Shanahan, « The Academic Senate and University Governance in Canada », Canadian Journal of Higher Education, vol. 34, no 2 (2004), p. 38 ; Loi constituante de l’Université Laurentienne de Sudbury, 151, 1960 ; procès-verbal du Conseil des gouverneurs de l’Université Laurentienne (ci-après CGUL), 7 mai 1960 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.12230/1, boîte M 6, Rhéal Belisle à Leslie Frost, 2 mars 1960 ; ibid., John Robarts à G. W. Reid, 10 mai 1960 ; Sudbury Star, 21 septembre 1960. 2 Procès-verbal du comité exécutif de l’Université Laurentienne (ci-après CE xUL), 18 mai 1960 ; CGUL , 30 mai 1961, 25 mai 1964, 31 octobre 1969. 3 Jones, Goyan et Shanahan, p. 137–138 ; Loi constituante de l’Université Laurentienne de Sudbury, 151, 18, 1960. 4 Sudbury Star, 8 octobre 1964 ; Gazette de l’Université Laurentienne (ci-après gul), « Nécrologie – Rév. Père Émile Bouvier », 27 mars 1985 ; CGUL , 7 mai 1960 ; « Émile Bouvier (1906– 1985) », sur www.125.umontreal.ca/Pionniers/Bouvier.html. 5 Ibid., 14 juillet et 18 août 1960 ; AUL , III, A , 3, Newbery au rév. T. E. Floyd Honey, Conseil des missions outre-mer, 25 février 1960 ; ibid., II, A , 1, 5, procès-verbal du comité exécutif de la NOUA , 4 mars 1960. 6 Roger Poirier, « Sanction royale au bill de l’université Laurentienne », Le Droit, Ottawa, 29 mars 1960. Voir aussi L’Ami du Peuple, 31 mars 1960, et Émile Bouvier, « L’Université Laurentienne de Sudbury », Relations (mai 1960). 7 CE xUL , 18 mai 1960. Voir aussi AUL , II, B , 3, 2, « Nouvelles parutions », rév. Père Émile Bouvier, S.J., « The Creation of New Universities. The Laurentian University of Sudbury », 2 juin 1960 et « An ‘abnormal birth’ for 4 universities. Bouvier at Kingston », Sudbury Star, 2 juin 1960 ; AO , RG 2-217, Department of Education University Files, 1943–1964, boîte 4, « Laurentian University of Sudbury, 1960 », allocution de Bouvier à la Société historique du Nouvel-Ontario, 19 avril 1960 ; ibid., J. W. E. Newbery à C. F. Cannon, directeur de l’Éducation et autres, 19 avril 1960 ; AUL , P 109, dossier I, 4, Earl Lautenschlager à D. P. Best, 27 juin 1960 ; AO , RG 32-1-1, Department of University Affairs, Acc.18006, boîte M374, E. G. Higgins à C. F. Cannon, 28 juin 1960 ; AUL , I, 4, Lautenslager à D. P. Best, 27 juin, 28 juin 1960. 8 AUL , II, B , 1, 2, procès-verbal du Sénat de Huntington, 3 août 1960 ; ibid., ébauche de mémorandum de fédération, 11 août 1960 ; ibid., I, 4, Lautenslager à A. B. B. Moore, 16 août 1960 ; Sudbury Star, 2 septembre 1960.

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9 CGUL , 18 et 25 août 1960 ; Sudbury Star, 2 septembre 1960 ; CGUL 7 et 10 septembre 1960 ; Sudbury Star, 12 septembre 1960 ; AUL , F 64, 3, « Archives administration universitaire », rapport annuel de l’Université Laurentienne, 1960–1961. 10 AUL , II, B , 1, 1, Newbery à Avery, 29 août 1961 ; CGUL , 10 septembre 1960 ; Sudbury Star, 21 septembre 1960. 11 AUL , PO 77, fonds Harold-Bennett, dossier 1, « Convocation Address at Laurentian University », 29 mai 1971 ; Kenneth Pryke, journal personnel, 23–24 juin 1961. 12 Archives nationales du Canada (ANC), MG 28, I 208, Jacques Peltier, président, Kenneth Pryke, vice-président, Léo Paré, membre de la direction, André Vachet, membre de la direction, Association de professeurs de l’Université Laurentienne de Sudbury, à J. H. Stewart Reid, secrétaire de direction, Canadian Association of University Teachers, 5 juillet 1961 ; ibid., Reid à Gordon Turner, 14 juillet 1961 ; ibid., notes de Reid sur sa visite à l’Université Laurentienne, 10–11 juillet 1961 ; AUL , entrevue de Charles Levi avec Kenneth Pryke, 19 février 2005. Notons que Reid est fort sensible à la situation de Ferland, ayant lui-même démissionné du United College de Winnipeg à la fin des années 1950 à cause de ce qu’il considérait comme le renvoi injuste de son collègue, Harry Crowe. Crowe est réintégré dans ses fonctions, mais pas Reid, qui devient alors le tout premier secrétaire à temps plein de la CAUT. Voir Michiel Horn, « Unionization and the Canadian University : Historical and Personal Observations », Interchange, vol. 25, no 1 (1994), p. 41. 13 ANC , MG 28, I 208, notes de Reid, « Visit to my office Friday, August 4, 1961 by Father Boily and Father Richard, Provincial of the Order, at 11:30 a.m. » ; CE xUL , 25 septembre 1961 ; ibid., 31 janvier 1962 ; CGUL , 22 février 1962 ; ibid., 28 mai 1962. 14 CGUL , 22 février 1962 ; Sudbury Star, 12 mai 1973. 15 CE xUL , 18 octobre 1961 ; CGUL , 11 décembre 1961. 16 CE xUL , 29 novembre 1961 ; Sudbury Star, « These men run the day-to-day affairs of Laurentian », 8 octobre 1964. 17 AO , RG 44, Ministry of Finance Policy Planning Division, « Laurentian University 1960– 1966 », D. L. James, Comité des finances, Université Laurentienne, à John Robarts, ministre de l’Éducation, 23 novembre 1960 ; AUL , PO 77, fonds Harold-Bennett, dossier 1, « Convocation Address at Laurentian University, May 29, 1971 » ; CGUL , 26 octobre 1961 ; Sudbury Star, lettre à la rédaction d’Arnold McKee, département d’économique, 29 mai 1962 ; Sénat, 30 octobre 1961 ; AO , RG 2-217, boîte 4, commentaires du département d’économique sur la présentation du budget de l’Université Laurentienne, 1961–1962 ; ibid., RG 6-44, Ministry of Finance Policy Planning Division Subject Files, « Laurentian University 1960–1966 », Rapport, 1963–1964 ; AUL , F 65, 4, le doyen Bourbeau à Stewart Reid, CAUT, 13 février 1963. 18 AUL , I, 31, 3, Klemens Dembek, « Preliminary Study », 2 mai 1960 ; ibid., rapport de George C. Tate, comité des terrains, 21 juillet 1960 ; CE xUL , 3 décembre 1960 ; Sudbury Star, 19 janvier 1961 ; Sudbury Star, 8 et 15 février 1961 ; CE xUL , 22 février 1961 ; ibid., 22 février 1961 ; Sudbury Star, 28 mars 1961. Voir aussi The Historical Committee of Idylwylde Golf and Country Club, Idylwylde’s First Fifty Years, 1922–1972, Toronto, Canadian Yearbook Services, 1972. CE xUL , 5 avril 1961 ; ibid., 14 juillet 1961 ; LU, L 8, 2, 1961, Bemi and Murray, Architects, « Report on the selection of a site for Laurentian University, Sudbury, Ontario » ; CGUL , 26 octobre 1961 ; Sudbury Star, 28 octobre 1961. 19 AUL , I, 30, 4, « University Solicitors », Cassels, Brock, Des Brisay et Guthrie à R. D. Parker, 18 octobre 1963 ; ibid., I, 31, 3, « Real Estate Committee, 1961–1965 », Cassels, Brock, Des Brisay et Guthrie à H. Lemire, 12 janvier 1965 ; Sudbury Star, 8 octobre et 15 décembre 1961 ; CGUL , 28 mai 1962. 20 CGUL , 18 janvier 1961 ; ibid., 11 décembre 1961 ; Sudbury Star, 12 et 30 décembre 1961, 23 février 1962 ; CGUL , 28 mai 1962 ; CE xUL , 27 juin 1962 ; AO , RG 2-217. boîte 6, « Lauren-

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tian University, Sudbury », J. R. McCarthy au premier directeur, 12 juillet 1962 ; Sudbury Star, 3 août et 14 septembre 1962 ; CGUL , 14 septembre 1962. Sudbury Star, 14 et 15 septembre 1962, 8 octobre 1964, 25 mars, 17 avril, 30 juillet et 21 août 1963 ; CGUL , 9 décembre 1963. AUL , PO 77, fonds Harold-Bennett, dossier 1, « Convocation Address at Laurentian University, May 29, 1971 ». La Ville de Sudbury souligne aussi la contribution de Bennett en renommant le lac Mud en son honneur. L’association des professeurs avait demandé à participer au processus de sélection en novembre 1961, mais cela lui avait été refusé. Voir AUL , PO 63, II, A , 1, 1, Report of meeting between the Executive Committee and the President, 20 novembre 1961. CGUL , 26 octobre 1961 ; ibid., Annexe III, 18 mai 1963 ; AUL , P 077, « Laurentian University Presidential Prospects, 1963 », Don James à R. D. Parker, 5 juin 1963 ; CGUL , Annexe V, 30 juin 1963, R. D. Parker au professeur S. G. Mullins, 14 juin 1963 ; ibid., Annexe I, 30 juillet 1963, S. G. Mullins à R. D. Parker, 20 juin 1963. Le chalet familial de Thessalon est le lieu du pire cauchemar de tout parent, en août 1965, quand John Frederick, cinq ans, le plus jeune des fils du recteur Mullins, s’y noie. Voir Sudbury Star, 30 août 1965. Sudbury Star, 9 juillet 1963 ; The Northern Ontario Record, 20  juillet 1963 ; AUL , PO 77, « Laurentian University Presidential Prospects, 1963 », Horace J. Fraser au Conseil des gouverneurs, curriculum vitæ de Stanley George Mullins, 18 mai 1963. Voir notamment Doug Owram, Born at the Right Time, Toronto, University of Toronto Press, 1996 ; Cyril Levitt, Children of Privilege: Student Revolt in the Sixties: A Study of Student Movements in Canada, the US and West Germany, Toronto, University of Toronto Press, 1984 ; Myrna Kostash, Long Way from Home: The Story of the Sixties Generation in Canada, Toronto, Lorimer Press, 1980 ; John Kettle, The Big Generation, Toronto, McClelland & Stewart, 1980 ; Tim Reid et Julyan Reid, Student Power and the Canadian Campus, Toronto, Peter Martin Associates, 1969. AUL , I30, 4, « Board Correspondence », Bourbeau à Mullins, 4 février 1964 ; ibid., Bourbeau au Conseil des gouverneurs, 4 février 1964. CGUL , Annexe I, G. A. Bourbeau à H. Bennett, 4 mars 1964 ; ibid., 11 mars 1964 ; CE xUL , 15 avril 1964 ; Sudbury Star, 22 mai 1964 ; Globe and Mail, 23 mai 1964. Voir aussi CGUL , Annexe, 27 avril 1964, J. R. Meakes à R. D. Parker, 27 avril 1964, où Meakes, président du comité ad hoc, souligne que le comité n’a jamais discuté avec Bourbeau « de quelque aspect que ce soit de la permanence ou des compétences pour être recteur de l’Université Laurentienne – et le doyen n’a jamais mentionné à ce comité quelques circonstances que ce soit en lien avec “l’acceptation de candidatures à la fonction de recteur de la Laurentienne” ». Après son départ de la Laurentienne, Bourbeau se sent appelé par Dieu et se fait franciscain. Voir le Sudbury Star, 21 juillet 1964. CGUL , 18 mai 1963 ; AUL , PO 63, IV, 13, 2, décision de l’Assemblée générale de l’APULS , 16  avril 1964 ; CGUL , 25 mai 1964 ; AUL , P 063, IV, 13, 2, Règlement universitaire 64-1, 25 mai 1964, « Policy on Appointments, Tenure, Promotion, Teaching Load and Leave » ; AUL , I, 30, 4, Jean Havel, APULS , au Conseil, 26 mai 1964 ; ibid., Mullins au Conseil, 28  mai  1964 ; AUL , PO 63, II, A , 1, 1, Berg à Mullins, 11 janvier 1965. Voir également les remarques de Bourbeau concernant l’allocution de Mullins à la remise des diplômes, tels que rapportés dans le Globe and Mail du 27 mai 1964. Voir les chapitres 5 et 7 pour l’histoire du bilinguisme et celle des relations entre la Laurentienne et les universités fédérées respectivement. AUL , III, A , 1, 3, Newbery au rév. J. S. Bonnell, 24 juillet 1964 ; AUL , I, 30, 4, procès-verbal du comité sur les relations publiques, 19 octobre 1964.

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30 AUL , I, 30, 4, « The Report of the Special Committee of the Board of Governors of Laurentian University », p. 5–7 ; ibid., « Synopsis of Comments at June 3rd Meeting » ; ibid., Rodolphe Tremblay, S.J., secrétaire, Université de Sudbury, à J. R. Meakes, 3 juin 1965 ; ibid., Robert Campeau et Conrad Lavigne, « Laurentian University and its Related Problems » ; ibid., Robert Campeau à H. J. Fraser, 26 mai 1965 ; AUL , III, A , 1, 1, Ed Newbery à Don James, 13 juillet 1965 (nous soulignons). 31 George Whalley (dir.), A Place of Liberty: Essays on the Government of Canadian Universities, Toronto, Clarke-Irwin, 1964. Il n’est pas banal que le professeur de philosophie et activiste Garry Clarke était apparenté à la famille derrière cette maison d’édition. James Duff et Robert Berdahl, University Government in Canada, Toronto, University of Toronto Press, 1966, p. 3. Voir également AO , PO 63, IV, 49, Canadian Association of University Teachers, « Proposal to the Canada Council for support of a survey of Canadian university government », décembre 1960. 32 Ibid., IV, 4, Press Release, « Study of University Government », 11 septembre 1964 ; University Government in Canada, p. 32 ; Jones, Goyan et Shanahan, p. 137–138. Voir aussi Donald C. Rowat, « The Duff-Berdahl Report », CAUT Bulletin, vol. 14, no 4 (avril 1966) et Peter Cameron, « The Duff-Berdahl Report. Will the Patient Live? » CAUT Bulletin, vol. 15, no 2 (décembre 1966). 33 Horn, « Unionisation and the Canadian University », p. 44 ; P. B. Waite, The Lives of Dalhousie University, vol. 2, 1925–1980: The Old College Transformed, Montréal, McGillQueen’s University Press, 1998, p. 249–250 ; H. B. Neatby, Creating Carleton : The Shaping of a University, Montréal, McGill-Queen’s University Press, 2002, p. 153–154 ; AUL , Rapport du recteur de l’Université Laurentienne, 1965–1966, p. 1 ; AUL , F 62, 2, J. R. Mapstone à Roland Farrant, 14 septembre 1967 ; entrevue de Charles Levi avec Laurent Larouche, 21 avril 2005. La Laurentienne doit aussi faire face à la concurrence de l’Université Lakehead, récemment établie à Fort William, qui, au même moment, connaît, elle aussi, une croissance exponentielle de ses inscriptions qui l’oblige à embaucher 42 professeurs supplémentaires. Voir H. S. Braun, A Northern Vision. The Development of Lakehead University, Thunder Bay, Lakehead University Press, 1987, p. 93. 34 Sénat, 15 novembre 1965 ; PO 63, II, A , 1, 1, Griggs à la direction de l’APULS , 11 mars 1966 ; ibid., Griggs à Nicholson, 21 mars 1966 ; ibid., V, B , 2, procès-verbal de l’APULS , 28 mars 1966 ; ibid., Griggs à M. Fortier, 28 mars 1966 ; ibid., II, A , 1, 2, Rapport du comité mixte du Sénat et de l’association des professeurs sur la représentation professorale au sein du Sénat, 28 avril 1966 ; Sénat, 28 avril, 17 mai et 6 octobre 1966 ; ibid., V, B , 2, procès-verbal de l’APULS , 20 octobre 1966. 35 CGUL , « Rapport au Conseil des gouverneurs au comité spécial […] sur les modifications souhaitables à la Loi constituante de l’Université Laurentienne de Sudbury, 1960 », 17 mai 1967 ; ibid., 25 mai 1967 ; AO , PO 63, II, B , 2, Wesley Cragg, « Report on Representation of the Faculty Association before the Private Bills Committee of the Ontario Legislature on March 21st, 1968, with regard to Bill Pr. 47 (An Act Respecting Laurentian University of Sudbury) », 28 mars 1968. 36 AUL , PO 63, II, B , 2, « Report on Representation of the Faculty Association before the Private Bills Committee of the Ontario Legislature on March 21st, 1968 » ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.13856, boîte M 297, E. E. Stewart à W. C. Alcombrack, bureau du conseiller législatif, cabinet du procureur général, décembre 1967 ; ibid., RG 32, 1, 1, Acc.13856, boîte M 297, ébauche de proposition de l’APULS , 21 mars 1968 ; ibid., RG 32, 1, 1, Acc.13856, boîte M 297, E. E. Stewart au ministre, 22 mars 1968 ; Sudbury Star, 22 et 25 mars 1968 ; Étienne StAubin, « S.G.A. Presidential Report », dans The Thorne, publié par l’Association étudiante de l’Université Thorneloe, 30 mars 1968 environ ; dossiers personnels de Wesley Cragg,

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J. W. E. Newbery, « Regarding Huntington College and the Bill to amend the Laurentian University Act », 2 avril 1968. AUL , PO 63, II, B , 2, décision de l’APULS proposée par A. W.  Cragg, appuyée par M.  Perrault, 28 mars 1968 ; Avis de motion, Sénat, 27 mars 1968 ; Sénat, 29 avril 1968 ; CGUL , 31 mai 1968 ; CE xUL , 18 septembre 1968 ; AUL , P 063, IV, 28, Presidential Advisory Committee on Consultative Structures and Procedures, procès-verbal, 16 octobre et 7 novembre  1968 ; CGUL , 18 octobre 1968 ; AUL , P 063, IV, 28, Mullins à Williamson, 4 décembre 1968 ; CGUL , 29 novembre 1968. Sénat, 26 septembre, 24 octobre, 28 novembre et 12 décembre 1968 et 23 janvier 1969. L’AGE avait adressé une pétition au Sénat relativement à la représentation étudiante au début de l’année 1966, mais l’avait retirée en mars « jusqu’à nouvel ordre ». Voir Sénat, 24 mars 1966. CE xUL , 16 avril 1969 ; AUL , PO 63, IV, 28, comité consultatif du recteur aux membres du Sénat, 20 février 1968 ; ibid., Williamson à diverses personnes, 27 mars 1969. Ibid., II, A , 4, J. R. Winter, trésorier de l’APULS , à E. J. Monahan, secrétaire de direction adjoint, CAUT, 18 octobre 1965 ; ibid., A , 1, 1, J. Berg à Stanley Mullins, 20 octobre 1965 ; CE xUL , 17 novembre 1965 ; CGUL , 19 novembre 1965 ; CE xUL , 19 janvier 1966 ; AUL PO 63, IV, 34, version du recteur Mullins et version de Wynn Watson, président de l’APUL , procès-verbal, 15 août 1967 ; CGUL , 27 octobre 1967 ; AUL P 063, II, A , 1, 2, Mullins à Cloutier, 15 novembre 1967 ; CE xUL , 13 décembre 1967 ; AUL P 063, II, A , 1, 2, Gerry Vallillee, président de l’APUL , à ses collègues, 12 janvier 1968. CE xUL , 20 novembre 1968 ; PO 63, V, 2c, procès-verbal de l’APUL , 11 décembre 1968 ; CE xUL , 18 décembre 1968 ; PO 63, V, 2c, procès-verbal de l’APUL , 19 décembre 1968 ; CE xUL , 19 février, 19 mars et 16 avril 1969 ; PO 63, V, 2c, procès-verbal de l’APUL , 17  avril  1969 ; CE xUL , 22 avril et 6 mai 1969 ; PO 63, V, 2c, procès-verbal de l’APUL , 9 mai 1969. AUL , F 68, 1, Mullins aux membres du personnel enseignant, 9 mai 1969 ; ibid., Bulletin des négociations salariales de l’Association des professeurs de l’Université Laurentienne, nº 5, 14 mai 1969 ; PO 63, V, 2c, Procès-verbal de l’APUL , 21 mai 1969 ; CE xUL , 29 mai 1969. AUL , PO 63, II, B , 2, Mullins à Clarke, 3 octobre 1968 ; ibid., Clarke à Mullins, 22 octobre 1969 ; ibid., « Timetable of Recent Events », APUL au Conseil des gouverneurs, 31 octobre 1969 ; Sudbury Star, 18, 20 et 21 octobre 1969 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.14105/3, boîte AOH3, J. S. Bancroft à E. E. Stewart, 15 octobre 1969. Bien que la note de service de Mullins soit datée du 3 octobre, l’APUL ne le reçoit pas avant le 7. PO 63, II, B , 2, « Appendix », APUL au Conseil des gouverneurs, 31 octobre 1969 ; ibid., IV, 28, G. I. Clarke au recteur Mullins, 22 octobre 1969 ; Sudbury Star, 18, 20 et 21 octobre 1969. AUL , 49, 2, CCR sur les structures et procédures consultatives, procès-verbal, 10  septembre 1969 ; CE xUL , 22 octobre 1969 ; CGUL , 31 octobre 1969 ; Sudbury Star, 31 octobre et 1er novembre 1969. CGUL , 31 octobre 1969 ; Sénat, 20 et 27 novembre 1969. AUL , PO 63, II, B , 2, Clarke à H. Bennett, secrétaire, Conseil des gouverneurs, 30  octobre  1969 ; ibid., APUL au Conseil des gouverneurs, 31 octobre 1969 ; CGUL , 31 octobre 1969 ; CE xUL , 14 novembre 1969 ; Sénat, 20 et 27 novembre 1969 ; AUL , PO 63, II, B , 2, « A Proposal to the Executive Committee of the Board of Governors on LongRange Planning, December 10, 1969 », par le comité sénatorial ad hoc créé le 27 novembre et s’étant réuni le 3 décembre 1969 ; CE xUL , 10 décembre 1969 et 23 janvier 1970. CE xUL , 21 mai et 14 novembre 1969 ; Sénat, 20 et 27 novembre 1969 ; CE xUL , 23 janvier 1970. Sénat, 20 janvier 1970 ; AUL , PO 63, V, 2d, procès-verbal de l’APUL , 20 janvier 1970 ; CE xUL , 23 janvier et 19 février 1970. AUL , PO 63, V, 2d, « President’s Report », procès-verbal de l’APUL , 20 janvier 1970 ; Sénat, 19 février 1970 ; Sudbury Star, 14 mars 1970.

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51 Ibid. ; Globe and Mail, 7 mars 1970 ; Sudbury Star, 14 mars 1970 ; AUL , PO 63, V, 2d, procèsverbal de l’APUL , 16 mars 1970. 52 Sudbury Star, 19 mars 1970 ; CE xUL , 18 mars 1970 ; Sénat, 19 mars 1970 ; AUL , F 68, 1, note de service de D. H. Williamson, 6 avril 1970 ; ibid., PO 63, V, 2d, procès-verbal de l’APUL , 24 mars 1970 ; AUL , PO 63, V, 2d, appui de l’APUL aux motions de censure du Sénat, 24 mars 1970 ; Sudbury Star, 20 mars 1970. 53 Sudbury Star, 31 mars et 2 avril 1970 ; Globe and Mail, 2 avril 1970 ; Sudbury Star, 3 avril 1970 ; AUL , F 68, 1, « Position Paper of Students engaged in Occupation at Laurentian University », 2 avril 1970 (0 h 40) ; Sudbury Star, 3, 4 et 6 avril 1970. 54 Sénat, 2 avril 1970. 55 CE xUL , 3 et 4 avril 1970 ; CGUL , assemblée extraordinaire, 9 avril 1970. 56 Sénat, 2, 4, 6, 8, 9 et 10 avril 1970 ; Sudbury Star, 4 avril 1970 ; Globe and Mail, 6 avril 1970. 57 CGUL , 9 avril 1970. 58 Sénat, 9 avril 1970 ; 9 avril 1970 ; Sudbury Star, 9 et 10 avril 1970 ; AUL , PO 63, II, A , 1, 3, G. I. Clarke, président de l’APUL , à Douglas Wright, président du comité des affaires universitaires, 17 avril 1970. 59 ANC , « CAUT Papers », boîte 200, dossier 2, G. I. Clarke à Alwyn Berland, secrétaire de direction de la CAUT, 16 avril 1970 ; Sénat, 10 avril 1970 ; Sudbury Star, 10 et 13 avril 1970. 60 Sudbury Star, 10 avril, 30 mai et 1er juin 1970 ; Sénat, 10 avril 1970. 61 CGUL , 19 novembre 1965, 19 mai 1966. 62 Archives de l’Université de Toronto (ci-après AUT), B 72-0021, 019, Mullins à tous les professeurs, 6 juin 1967 ; Neatby, Creating Carleton, p. 108–113. 63 AUL , F47, 2, Mullins à R. B. Willis, Presidents’ Research Committee, Université Western Ontario, 8 septembre 1964. 64 CGUL , 26 juin 1970 ; AUL , Rapport du recteur, 1969–1970, 1–2. 65 GUL , 18 juin 1986. 66 CGUL , 24 avril 1970 ; CE xUL , 20 mai et 10 juin 1970 ; Sénat, 21 mai et 1er juin 1970 ; CGUL , 26 juin 1970. 67 CGUL , 22 janvier 1965 ; CE xUL , 4 août 1965 ; CGUL , 19 mai 1966 ; CE xUL , 23 novembre 1966 ; Sudbury Star, 12 décembre 1966 ; CE xUL , 17 mai, 26 juillet et 23 août 1967 ; CE xUL , 16 octobre et 20 novembre 1968 ; ibid., 20 novembre 1968 ; ibid., 18 septembre 1968, 19 février et 19 mars 1968 ; CE xUL , 16 avril et 18 juin 1969. 68 CE xUL , 19 août 1970 ; CE xUL , 30 avril 1970 ; Sénat, 30 avril et 21 mai 1970. 69 AUL , PO 63, V, 2d, procès-verbal de l’APUL , 6 mai 1970 ; ibid., Sénat, 30 avril et 21 mai 1970. 70 CE xUL , 19 septembre, 2 octobre et 20 décembre 1969 ; AUL , PO 63, V, 2d, procès-verbal de l’APUL , 20 janvier 1970 ; CE xUL , 23 janvier 1970 ; AUL , PO 63, II, B , 2, Dalton Caswell, président du comité exécutif, à B. F. Lavoie, président du comité des négociations salariales, 4  février 1970 ; AUL , PO 63, II, A , 1, 3, Clarke à Caswell, 18 février 1970 ; CE xUL , 19  février  1970, 20 décembre 1969, 18 mars 1970 ; ibid., 30 avril 1970 ; AUL , P 063, V, 2d, procès-verbal de l’APUL , 6 mai 1970 ; ibid., II, A , 3, David Pearson, secrétaire de l’APUL , au Conseil des gouverneurs, 7 mai 1970 ; CE xUL , 20 mai, 11 juin et 25 juin ; CGUL , 26 juin 1970. 71 Sudbury Star, 15 septembre, 1970 ; AUL , PO 63, VI, E .1, mémorandum de Roland Cloutier, 15 septembre 1970 ; Sénat, 20 septembre 1970 ; AUL , Po 63, V, 2d, procès-verbal de l’APUL , 14 septembre 1970. 72 Ibid., VI, E .1, mémorandum de l’APUL , 15 septembre 1970 ; ibid., II, A , 1, 3, G. I.  Clarke à W. G.  Davis, 29 septembre 1970 ; Sudbury Star, 15 et 16 septembre 1970 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.18006, Clarke à Davis, 17 septembre 1970 ; AUL , PO 63, VI, E .1, mémorandum de

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Roland Cloutier, 15 septembre 1970 ; AUL , PO 63, IV, 5, communiqué de presse de l’APUL , 17 septembre 1970 ; ibid., II, A , 1, 3, Clarke à Davis, 29 septembre 1970. Sénat, 20 septembre 1970, cité dans CGUL , 25 septembre 1970 ; Sénat, 24 septembre 1970 ; Sudbury Star, 24 septembre 1970 ; CGUL , 25 septembre 1970. Le 15 septembre 1970, Cloutier rédige un affidavit énumérant les accusations de l’APUL . Sudbury Star, 29 septembre 1970 ; Sénat, 28 septembre 1970 ; AUL , PO 63, II, A , 1, 3, Clarke à Davis, 29 septembre 1970 ; ibid., VI, E .1, Cloutier à tous les membres du Sénat et tous les membres de la communauté universitaire, 30 septembre 1970 ; Sudbury Star, 30 septembre 1970. Sudbury Star, 1er et 2 octobre 1970 ; AUL , G 7, Minutes of Faculty Council, Science Section, 2 octobre 1970. CE xUL , 7 octobre 1970 ; Sudbury Star, 3 octobre 1970 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.18006, E. E. Stewart au Ministre, 5 octobre 1970 ; AUL , PO 63, VI, E .1, procès-verbal de l’APUL , 5 octobre 1970. Sudbury Star, 3 octobre 1970 ; Sénat, 5 octobre 1970 ; CGUL , 5 octobre 1970 ; Sénat, 8  octobre  1970 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.18006, Note de E. E. Stewart, 1er octobre 1970 ; AUL , PO 63, VI, E .1, AGE , « Brief to the Members of the Ontario Legislature with regards to the crisis at Laurentian University », 6 octobre 1970 ; Sudbury Star, 6 et 7 octobre 1970 ; Globe and Mail, 7 octobre 1970 ; Sénat, 8 octobre 1970 ; Sudbury Star, 8 octobre et 9 octobre 1970 ; Toronto Daily Star, 9 octobre 1970. CE xUL , 28 octobre 1970 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.18006, E. E. Stewart au Ministre, 5 octobre 1970. Axelrod, Scholars and Dollars, p. 59–60 ; CE xUL , 28 octobre 1970 ; CGUL , 30 octobre 1970. ANC , RG 28, I208, boîte 128, dossier 31, CAUT phone log, Garry Clarke à « AB », 20 octobre 1970 ; Bibliothèque de l’Université Waterloo (ci-après BUW), documents de Hagey, A 790030/231, Hagey à Charles Hanly, premier vice-président de l’OCUFA , 20 novembre 1971 ; Sénat, 29 octobre 1970 ; AUL , I, 36, 3, résumés des rencontres J. G. Hagey et les représentants de l’AGE , 11 novembre 1970 ; ibid., J. G. Hagey et le Sénat, 12 novembre 1970 ; ibid., J. G.  Hagey et le Conseil des gouverneurs, 12 novembre 1970 ; Sudbury Star, 12 et 13  novembre  1970 ; CGUL , 30 octobre 1970 ; BUW, documents de Hagey, A 79-0030/231, « Hagey Memorandum to Laurentian University », sans date (antérieur au 10 novembre 1970) ; ibid., Hagey à Davis, 16 novembre 1970. AUL , F 65, 1, J. G. Hagey, « Consultant’s Report to Laurentian University », 12 mars 1971, 1 ; Sénat, correspondance, J. G. Hagey, rapport au Sénat, 19 novembre 1970 ; CE xUL , 25 novembre 1970 ; CGUL , Annexe II, 29 janvier 1971, « Agreement between Faculty Association Salary Negotiating Committee and Board’s Salary Negotiating Committee, December 16, 1970 » ; CGUL , 27 novembre 1970 et 29 janvier 1971 ; AUL , F 65, 1, J. G. Hagey, « Consultant’s Report to Laurentian University », 12 mars 1971, p. 2. AUL , F 65, 1, J. G. Hagey, « Consultant’s Report to Laurentian University », 12 mars 1971, p. 5–6 ; Sudbury Star, 23 mars 1971. CGUL , 29 novembre 1968 et 30 mai 1969 ; AUL , boîte 3, F 61, 1, « Report of Peat Marwick organisational review », 1970, dans « Dean’s Office », boîte 37 ; ibid., 61, 1, rapport du comité ad hoc de révision de l’administration, 19 janvier 1971. Ibid., J. G. Hagey, « Consultant’s Report to Laurentian University », 12 mars 1971, p. 6–9 ; CE xUL , 22 avril 1971 ; CGUL , 28 avril 1971 ; AUL , F 65, 1, J. G. Hagey, « Consultant’s Report to Laurentian University », 12 mars 1971, p. 2 et 8–9. Ibid., p. 5–6 et 10–13.

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Chapitre 4 1 CGUL , 27 novembre 1970 ; CE xUL , 12 février 1974, 21 janvier, 22 février et 18 avril 1972, 6 janvier 1976 ; CGUL , 10 décembre 1976. 2 Sudbury Star, 3 février 1973 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.18996, boîte 389, Jean-Noël Desmarais à Harry Parrott, 27 janvier 1976. 3 Université Laurentienne, Bureau du secrétaire général, notes du Sénat (ci-après, notes du Sénat), 1970–1971, Rapport de réunion du Comité ad hoc de révision de l’administration, 1er  décembre 1970, 19 janvier 1971 ; CGUL , 27 novembre 1970 et 29 janvier 1971 ; CE xUL , 12 mai 1972 ; CGUL , 28 avril 1971 ; Sénat, 17 avril 1975 ; CGUL , 30 mai 1975 ; Sudbury Star, 4 juin 1975 ; Edward J. Monahan, « The Test of a Presidency » (ci-après Monahan memoirs), manuscrit inédit, entre les mains de l’auteur, p. 322 ; Sénat, 17 mai 1979 ; CGUL , 25 mai 1979 ; GUL , août–septembre 1979 ; AUL , entrevue de Charles Levi avec Edward Monahan, 5 mai 2005. Le recteur Monahan se souviendra plus tard que son passage à l’Université Queen’s, où les doyens, à cette époque, relèvent directement du recteur et où le statut du vice-recteur à l’enseignement et la recherche n’a pas beaucoup d’envergure, l’a incité à ne pas insister sur la question du vice-recteur à l’enseignement et la recherche à la Laurentienne. Voir Edward Monahan à Matt Bray, 1er décembre 2008. 4 CGUL , 30 avril 1971 ; CE xUL , 26 octobre 1971, 18 avril 1972 et 5 juin 1973. 5 Sénat, 25 mars 1971. 6 Jones, Goyan et Shanahan, « The Academic Senate and University Governance in Canada », p. 39 ; Sénat, 13 mai 1971 ; CGUL , 9 avril et 26 juin 1970 ; Sénat, 13 juillet 1970 et 11 novembre 1971 ; CGUL , 26 janvier 1973, Sudbury Star, 3–4 avril 1973. 7 CGUL , 26 juin 1970 et 7 décembre 1973 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.18925, RC 4, P. J. Wright, à B. A. Wilson, sous-ministre adjoint, MCU, 15 août 1979. 8 Sénat, 30 avril 1971 ; ibid., 13 janvier, 24 février et 26 octobre 1972, 14 février 1974 ; AUL , PO 63, V, 2d, Association des professeurs de l’Université Laurentienne, Rapport du recteur, 6 mai 1970. 9 CGUL , 24 avril, 24 septembre et 28 octobre 1970 ; Sénat, 22 octobre 1970. 10 CGUL , 30 avril 1971 ; Sudbury Star, 3 mai 1971 ; Monahan memoirs, p. 303 ; Sénat, 5 mai et 20 mai 1971 ; CGUL , 7 mai, 21 mai et 25 juin 1971. 11 Ibid., 30 avril 1971, annexe II, « Report of the Laurentian University Presidential Search Committee », 28 avril 1971 ; Sénat, 7 juillet 1971 ; CGUL , 29 juillet 1971 ; Sudbury Star, 3 juillet 1972. 12 Monahan memoirs, p. 304–307 ; Sénat, 30 juin 1971 ; CE xUL , 22 février 1972. 13 AUL , entrevue de Levi avec Monahan, 5 mai 2004. Voir aussi Edward J. Monahan, « DuffBerdahl Conference on University Government », CAUT Bulletin, vol. 16, no 3 (février 1968), p. 54–62. 14 Monahan memoirs, p. 298 ; David M. Cameron, The Northern Dilemma: Public Policy and Post-Secondary Education in Northern Ontario, Toronto, Ontario Economic Council, 1978, p. 17–32 ; Sudbury Star, 1er et 8 octobre 1971 ; CE xUL , 23 novembre et 14 décembre 1971 ; Sénat, 25 novembre 1971 ; CGUL , 21 janvier 1972. 15 Howard Adelman, The Holiversity: A Perspective on the Wright Report, Toronto, New Press, 1973, p. 9–10 ; CGUL , 27 octobre et 1er décembre 1972 ; Sudbury Star, 24  novembre  1972 ; CGUL , 16 mars, 21 septembre et 7 décembre 1973, 18 janvier, 15 mars, 25 octobre et 6 décembre 1974 ; Friedland, The University of Toronto, p. 581 ; GUL , mars 1975 ; Sudbury Star, 23 octobre 1975 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.18006, boîte 389, Monahan à l’Hon. William Davis, 2 février 1976 ; Sudbury Star, 18 février 1976 ; Monahan memoirs, p. 323–326.

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16 Sudbury Star, 8 novembre 1971 ; AUL , entrevue de Levi avec Monahan, 5 mai 2004 ; ibid., F 66, 5, note de service de Monahan au Sénat, 5 novembre 1974 ; Sudbury Star, 20 octobre 1975 ; Université Laurentienne, Bureau du secrétaire général, correspondance du Sénat (ci-après, correspondance du Sénat), 1975–1976, Williamson à Jack Porter, 15 décembre 1975. 17 CE xUL , 10 juin 1975 ; CGUL , 19 septembre 1975. 18 Sudbury Star, 20 octobre 1975 ; correspondance du Sénat, 1975–1976, G. I. Clarke à la direction du Sénat, 27 novembre 1975 ; Sénat, 11 décembre 1975 ; CGUL , 16 janvier 1976 ; AUL , F 61, 2, Rapport du comité mixte de révision, 6 avril 1976 ; CGUL , 23 avril 1976. 19 Ibid., 28 mai 1976 ; Sénat, 17 juin 1976 ; AUL , F 65, 1, Report of the Joint Senate/Board Ad Hoc Committee to Assess and Make Recommendations to Simplify Academic Administration, 10 mai 1977 ; Sénat, 19 mai 1977. 20 Correspondance du Sénat, 1975–1976, Monahan à J.-N. Desmarais, président, Conseil des gouverneurs, 5 novembre 1975 ; CGUL , 21 novembre 1975 ; Sénat, 11 décembre 1975 ; CE xUL , 6 janvier 1976 ; Edward J. Monahan à Matt Bray, 1er décembre 2008 ; CE xUL , 19 mars 1976 ; Sénat, 25 mars 1976 ; CGUL , 26 mars 1976. 21 AUL , PO 63, V, 3, L. Wagner et B.-A. Gélin à P. Bruce-Lockhart, président, comité de révision, 3 février 1976 ; AUL , F 61, 2, Rapport du comité mixte de révision, 6 avril 1976 ; Monahan memoirs, p. 330–341. 22 AUL , F 61, 2, Rapport du comité mixte de révision, 6 avril 1976. Voir Edward J. Monahan, Collective Autonomy: A History of the Council of Ontario Universities, 1962–2000. 23 CGUL , 23 avril 1976 ; notes du Sénat, juin 1976–avril 1977, Rapport du comité de sélection du recteur par J.-N. Desmarais, 12 décembre 1976 ; Sénat, 9 décembre 1976 ; CGUL , 10 décembre 1976. 24 Levi, notes relatives à une rencontre avec Henry B. M. Best, 16 janvier 2004 ; Northern Life, 30 novembre 1977. 25 GUL , juin 1978, Énoncé de position du Conseil des Universités de l’Ontario, « The Present State of the Ontario University System » ; ibid., « System on the Brink », octobre– novembre 1979 ; Sénat, 25 mai 1978 ; CGUL , 26 mai 1978 ; notes du Sénat, février–octobre 1978, « Report of the Senate Budget and Short-Term Academic Planning Committee … 1978–1979 and Attached Minority Report », 25 mai 1978. 26 AO , RG 32, 1, 1, Acc.20958, « Laurentian, 1978/1979 », Bette Stephenson à Annette Goddard, 3 octobre 1978 ; ibid., Acc.20909, Best à Stephenson, 8 février 1979. 27 Ibid., Acc.18925, « Laurentian 1979 », « Laurentian – Possible Elimination of Four Departments », University Relations, 6 juin 1979 ; Sudbury Star, 6 juin et 14 juin 1979 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.20959, Frith à Stephenson, 20 juin 1979 ; ibid., Stephenson à Best, 4 juillet 1979 ; ibid., Acc.20216, Best à Stephenson, 13 novembre 1979 ; AUL , notes du Sénat, 1978–1979, Best au secrétaire du Sénat, 7 novembre 1979. 28 AO , RG 4, Acc.18925, P. J. Wright, agent des affaires universitaires, à B. A. Wilson, sousministre adjoint, MCU, « Visit to Laurentian University », 15 août 1979. 29 Notes du Sénat, septembre 1978–décembre 1979, « Rapport du comité ad hoc mixte du Sénat et du conseil sur le budget et la planification financière », 6 novembre 1979 ; Sénat, 15 novembre 1979 ; CGUL , 23 novembre 1979 ; correspondance du Sénat, 1981–1982, Jack Porter, secrétaire du Sénat, à Garry Clarke, secrétaire du comité de planification universitaire, 24 mars 1982. 30 Notes du Sénat, 1980–1981, Rapport du comité du budget de l’université, 3 avril 1981 ; CGUL , 5 juin 1981 ; AUL , notes du Sénat, 1980–1981, Rapport du comité du budget de l’Université, 11 mai 1982. 31 Voir le chapitre 19. 32 CGUL , 25 mai 1979.

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33 AUL , PO 63, I, B , 6, Paul Copper, Dick James, Bob Whitehead, Tony Beswick, Bob Cameron et Jim Davies, « On Certification », 30 mars 1979 ; ibid., B , 1, « Why ‘Y E S’? An Open Letter to the Faculty of Laurentian University re: Certification », par Roy Kari, Dieter Buse, Victor Clulow et Ashley Thomson, sans date, vers le 1er avril 1979 ; Jones et al., « Academic Senate », p. 40. 34 AUL , F 25, 1, « Negotiations 1979 », G. I. Clarke, « The Role of the Laurentian Senate Under Collective Agreement with Faculty », 13 septembre 1979. 35 Ibid., « Negotiations, 1979–1980 », Ashley Thomson et Louise Thirion-Nordstrom à tous les professeurs, 19 septembre 1980 ; Bulletin de l’APUL , vol. 1, no 1 (septembre 1981) ; CE xUL , 20 septembre 1977 ; AUL , F 25, 1, « Negotiations 1979 », G. I. Clarke, « The Role of the Laurentian Senate Under Collective Agreement with Faculty », 13 septembre 1979. 36 Trois jours avant que les cours ne commencent à Algoma, par exemple, Laurence Brown, de l’Algoma, dénonce l’attitude « coloniale » de la Laurentienne dans une allocution devant le club Kiwanis de Sault-Sainte-Marie et appelle la province à mettre un terme à l’affiliation « fastidieuse » du collège avec la Laurentienne. Voir Sudbury Star, 23 septembre et 28 septembre 1967. CE xUL , 8 août 1972 ; Sudbury Star, 5 avril 1978 ; Globe and Mail, 13 avril 1978. Au sujet des relations université-gouvernement, voir Cameron, The Northern Dilemma, p. 17–32 ; Edward J. Monahan, « University-Government Relations in Ontario : The History of a Buffer Body, 1958–1996 », Minerva, vol. 36, no 4 (1998), p. 347–366 ; Monahan, Collective Autonomy, passim. 37 Northern Life, Sudbury, 22 juillet 1981 ; Globe and Mail, 21 août 1981 ; Toronto Star, 20 août 1981 ; GUL , 10 septembre 1981 ; CGUL , 5 juin 1981 ; A. N. Bourns, A Proposal for Structural Change in the University System in Northeastern Ontario, Toronto, Gouvernement de l’Ontario, 1981, p. 1 ; Sault Star (Sault-Sainte-Marie), 28 novembre 1981 ; AUL , I, 36, 3, « Parrott Commission », Bette Stephenson à Henry Best, 29 octobre 1982 ; GUL , 2 novembre et 1er décembre 1982. 38 H. Parrott, Report of the Committee on University Education in Northeastern Ontario, Toronto, Gouvernement de l’Ontario, 1983, p. 1–2 ; GUL , 20 octobre 1983 ; Sudbury Star, 2 novembre, 4 novembre, 16 novembre et 17 novembre 1983 ; Sénat, 3 novembre 1983 ; Northern Life, 8 novembre et 23 novembre 1983 ; GUL , 9 novembre 1983 ; AUL , I36, 3, H. E. Brown, président, Conseil des gouverneurs, Algoma University College, et Anthony Blackbourn, président du Sénat, College universitaire Nipissing, à Bette Stephenson, 1er décembre 1983 ; Le Nord (Hearst), 9 novembre 1983 ; The Daily Nugget (North Bay), 20 octobre 1983 ; Sault Star, 22 octobre 1983 ; GUL , 20 octobre 1983 ; Sudbury Star, 20 octobre 1983 ; Sault Star, 9 novembre et 15 novembre 1983. 39 Ibid., 16 décembre 1983 ; CE xUL , 10 janvier 1984 ; Bulletin de l’APUL , vol. 3, numéro spécial (janvier 1984) ; CE xUL , 26 juillet 1984 ; GUL , 30 janvier 1985 ; CE xUL , 12 février 1985 ; CGUL , 22 février 1985. 40 Sault Star, 13 mars 1986 ; CE xUL , 11 avril 1989 ; CGUL , 13 octobre 1989, 5 octobre 1990, CE xUL , 10 novembre 1992 ; Sénat, 19 novembre 1992. 41 Sudbury Star, 8 octobre 1964 ; CE xUL , 26 mai 1961 ; Sudbury Star, 19 septembre 1963, 2  novembre 1961, 26 septembre 1962 ; Ian Green, « Laurentian and the community », Sudbury Star, 8 octobre 1970. 42 Gwenda Hallsworth et Peter Hallsworth, « The 1960s », dans Wallace et Thomson (dir.), Sudbury, p. 236 ; CGUL , 19 mai, 21 octobre 1966 ; CE xUL , 10 janvier 1968, 14 novembre 1969. 43 Ibid., 23 novembre 1971 ; Sudbury Star, 1er mai 1973, 5 février, 13 février, 4 novembre, 17 novembre et 18 novembre 1975. 44 AUL , entrevue de Charles Levi avec Ron Chrysler, 20 janvier 2005 ; GUL , mars 1978. 45 Northern Life, 14 décembre 2006, février 1978 ; CGUL , 10 février 1978.

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46 Ibid., 1er mars 1978 ; Oiva Saarinen, « Creating a Sustainable Community: The Sudbury Case Study », dans Matt Bray et Ashley Thomson (dir.), At the End of the Shift: Mines and Single Industry Towns in Northern Ontario, Toronto, Dundurn Press, 1992, p. 176. 47 Levi, notes relatives à une rencontre avec Henry B. M. Best, 16 janvier 2004. 48 GUL , février–mai 1979 ; CE xUL , 9 avril 1974 ; Northern Life, 14 janvier 1981 ; Sudbury Star, 13 mai et 12 août 1983 ; GUL , 12 novembre 1980. 49 Ibid., 18 mai 1983. 50 AUL , F 24, 4, « Laurentian University Report », 24 mars 1980 ; Northern Life, 18 avril et 22  avril 1981 ; AUL , PO 63, V, 3, L. Cortis à O. Saarinen, 5 mai 1981 ; GUL , 29 avril 1981 ; CGUL , 21 mai 1981 ; Sudbury Star, 2 juin 1981, Northern Life, 3 juin 1981. 51 GUL , 9 mars 1983. Chapitre 5 1 GUL , 14 mars 1984 ; www.ibo.org/ibworld/sept07/sirjohndaniel.cfm. 2 AUL , entrevue de Charles Levi avec Ron Chrysler, 20 janvier 2005 ; Notes du Sénat, mai 1984–mai 1985, Rapport du recteur sur le processus budgétaire, 20 septembre 1984 ; Sénat, 24 mai 1984 et 17 avril 1986. 3 Notes du Sénat, mai 1984–mai 1985, Rapport du recteur sur le poste de vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, 31 août 1984 ; ibid., John S. Daniel, addendum au rapport du comité exécutif déposé à la séance du Sénat de septembre 1984, 13 septembre 1984. 4 Sénat, 21 mars 1985 ; CGUL , 12 avril 1985 ; Notes du Sénat, mai 1984–mai 1985, John S. Daniel à l’exécutif du Sénat, 8 mars 1985 ; CE xUL , 12 mars 1985 ; GUL , 13 mars 1985. 5 CGUL , 18 octobre 1985 et 5 octobre 1990 ; CE xUL , 27 mars 1980 et 14 mai 1985. 6 CGUL , 12 avril 1985 ; Sénat, 16 janvier 1986 ; CGUL , 21 février 1986 ; CGUL , 13 octobre 1989 et 16 décembre 1994. 7 CE xUL , 8 avril 1986 et 12 octobre 1993 ; CGUL , 17 avril 1998. 8 GUL , 19 juin 1985 et 28 mai 1986 ; Notes du Sénat, octobre 1987–mars 1989, « 1988–89 Operating Budget Report », 12 mai 1988 ; GUL , 13 décembre 1989 ; ibid., 25 mars 1987 ; CGUL , 10 avril 1987 et 5 octobre 1990 ; Notes du Sénat, avril 1991–avril 1992, « Report of the 1992–93 Budget committee », 16 avril 1992. 9 Voir le chapitre 19 au sujet de l’APUL  ; Northern Life, 27 septembre 1989 ; Sudbury Star, 27 septembre 1989. 10 Voir le chapitre 4. 11 CE xUL , 11 décembre 1973 ; CGUL , 1er octobre 1976 ; Northern Life, 20 octobre 1984 ; Sénat, 18 janvier 1979 ; CGUL , 23 mars et 23 novembre 1979 ; AUL , F 35, 3, boîte 2, procès-verbal de la réunion du comité de gestion des fonds, 16 novembre 1981 ; CGUL , 4 décembre 1981 ; Sudbury Star, 13 mars 1982 ; Northern Life, 24 mars 1982 ; GUL , 24 mars 1982 ; Northern Life, 23 février 1983 ; CGUL , 28 octobre 1983 et 1er juin 1984 ; AUL , F 35, 4, 3, Henry Best à Paul G. Desmarais, 28 juin 1983 ; AUL , entrevue de Charles Levi avec Henry Best, 16 janvier 2004. Voir également Fred Lazar, « The national economy », dans R. B. Byers (dir.), Canadian Annual Review of Politics and Public Affairs, 1981, Toronto, University of Toronto Press, 1984, p. 213–216. 12 AUL , PO 63, IV, 22, Keyes D. Metcalfe au père P.-É. Filion, bibliothécaire en chef, 9 février 1966 ; ibid., A. Barnett, président, comité du Sénat sur la bibliothèque, à J. R. Harrison, 14 avril 1970 ; Sudbury Star, 13 mars 1982 ; Northern Life, 24 mars 1982 ; CGUL , 16 avril 1982 ; AUL , 68, 1, « Dean of Science », Rapport de Margaret Beckman, consultante pour la bibliothèque, avril 1971 ; CGUL , 19 octobre 1984.

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13 Ibid., 6 juin et 5 décembre 1986 ; Carl Wallace, « The 1980s », dans Sudbury, p. 278–279 ; Oiva Saarinen, « Creating a Sustainable Community: The Sudbury Case Study », dans At the End of the Shift, p. 178. 14 GUL , 17 juin 1987 ; AUL , F 35, 3, « Draft Proposal Laurentian University Development Campaign », non daté, juin 1987 environ ; CE xUL , 9 septembre 1986 ; CGUL , 6 juin et 5 décembre 1986 ; Sudbury Star, 6 novembre 1987 ; Northern Life, 9 décembre 1987 ; Sudbury Star, 14 avril 1988 ; Northern Life, 19 octobre 1988 ; GUL , 14 décembre 1988 ; Sudbury Star, 7 mai 1989. 15 CGUL , 5 juin et 13 octobre 1987, 4 juillet 1988 et 16 février 1990 ; GUL , 5 novembre 1986 et 27  juin 1990 ; CGUL , 14 mars 1989 ; CE xUL , 13 février 1990 ; CGUL , 13 février 1990, 12 février 1991, 14 février 1992 et 1er octobre 1993. 16 Ibid., 6 juin, 14 octobre et 5 décembre 1986 ; CE xUL , 10 février 1987 ; Sénat, 16 octobre 1986. Voir aussi AUL , entrevue de Charles Levi avec Douglas Parker, 23 février 2005. 17 Sudbury Star, 6 novembre 1986 ; AUL , N 34, 1, D. H. Parker à Alan Querney, 13 mars 1988 ; CE xUL , 13 octobre 1987 ; CGUL , 14 octobre 1988 ; Sudbury Star, 15 décembre 1989 ; AUL , entrevue de Charles Levi avec Douglas Parker, 23 février 2005. 18 CGUL , 8 décembre 1989 ; GUL , 16 décembre 1989 ; Notes du Sénat, mai 1990–mars 1991, Évaluation de l’Université canadienne en France, octobre 1990, passim, p. 59 ; Sénat, 15 novembre 1990 ; CGUL , 9 avril 1991. 19 Notes du Sénat, mai 1990–mars 1991, Évaluation de l’Université canadienne en France, octobre 1990, p. 40 ; ibid., mai 1992–décembre 1992, Rapport du comité de planification académique à l’assemblée ordinaire du Sénat de mai 1992 ; CGUL , 10 mai 1994 ; CGUL , 15 décembre 1995 ; CE xUL , 9 avril 1996. Voir aussi AUL , entrevue de Charles Levi avec Ross Paul, 18 février 2005. 20 CE xUL , 13 octobre 1987 ; AUL , PO 63, IV, 29, 1, Pierre Simoni, secrétaire, APUL , aux membres de l’APUL , 23 novembre 1987 ; Sénat, 19 novembre 1987 ; CGUL , 4 décembre 1987 ; ibid., 4 juillet 1988 ; www.col.org/colweb/site/pid/972. 21 GUL , 14 décembre 1988. 22 AUL , PO 63, IV, 29, 1, Schell aux membres de l’APUL , 12 septembre 1988 ; Sénat, 20 octobre 1988 ; CGUL , 2 décembre 1988 ; GUL , 29 mars 1989. 23 Notes du Sénat, mai 1990–mars 1991, Rapport du comité de sélection du recteur, 28 janvier 1991 ; CGUL , 3 novembre 1989, Sénat, 14 décembre 1989, CE xUL , 1er et 13 février 1990, CGUL , 16 février 1990 ; CE xUL , 17 avril et 27 juin 1990 ; CGUL , 28 août 1990, Sénat, 28 août 1990 ; CE xUL , 16 octobre 1990, CGUL , 28 janvier 1991. 24 CE xUL , 27 juin 1990 ; CGUL , 28 août 1990, CE xUL , 27 août 1990, AUL , PO 63, IV, 29, 1, Lucien Cortis, président, APUL , à A. A. Querney, président, Conseil des gouverneurs, 28 août 1990 ; CGUL , 1er juin et 30 novembre 1990. 25 GUL , 15 février 1996. 26 Ibid., septembre 1997, 23 avril 1993 ; Sénat, 28 janvier 1990 ; CGUL , 30 mai 1996. 27 Ibid., 4 octobre 1991 ; Notes du Sénat, avril 1991–avril 1992, Rapport du comité du budget pour 1992–1993, 16 avril 1992 ; CGUL , 4 décembre 1992. 28 Le chapitre 20 aborde l’impact général du « contrat social ». GUL , 7 mai 1993 et 19  janvier 1996 ; CE xUL , 15 juillet 1993 ; CGUL , 10 juin 1994. 29 CE xUL , 14 mars 1995 ; CGUL , 16 février 1996 ; GUL , 17 mai 1996 ; CGUL , 15 décembre 1995, 19  avril 1996 ; GUL , 15 mars 1996 ; notes du Sénat, novembre 1995–novembre 1996, 13 mai 1996, Proposition de budget 1996–1997. 30 GUL , Septembre 1997 ; AUL , entrevue de Charles Levi avec Ron Chrysler, 20 janvier 2005.

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31 Tom Booth, « The Evolution of University Government », CAUT /ACPPU Bulletin Online, vol. 55, n° 9 (novembre 2008) ; Jones, Goyan et Shanahan, « University Governance in Canadian Higher Education », p. 139 ; Monahan, Collective Autonomy, p. 164–175 ; http://communictaions.uwaterloo.ca/Gazette/1993 ; CGUL , 4 octobre 1991. 32 CE xUL , 12 octobre 1993 ; CGUL , 3 décembre 1993 et 12 avril 1994 ; CE xUL , 13 décembre 1994 et 14 mars 1995. 33 Groupe de travail sur l’obligation redditionnelle des universités : A Strengthened Framework, Toronto, Gouvernement de l’Ontario, 1993, p. 8 ; CE xUL , 14 mars 1995 ; Sénat, 18 septembre 1997 ; Notes du Sénat, novembre 1996–mars 1998, « Laurentian University Accounts Committee », réunion du Sénat du 18 septembre 1997. 34 Ibid. 35 Notes du Sénat, février 1999–juin 2000, Rapport sommaire du comité des comptes de l’Université, 3 mai 1999 ; ibid., Rapport sommaire du comité des comptes de l’Université 1999–2000, 1er mai 2000 ; ibid., septembre 2000–avril 2002, Rapport préliminaire du comité des comptes de l’Université au Sénat, mars 2001. 36 CGUL , 18 février et 14 décembre 1994 ; CE xUL , 10 décembre 1996 et 11 février 1997 ; CGUL , 28 février 1997 ; GUL , 20 novembre 1992 ; CGUL , 30 mai et 4 octobre 1996. 37 Ibid., 29 novembre 1997, CE xUL , 10 décembre 1996 et 11 février 1997 ; Sénat, 17 avril 1997, CGUL , 18 avril 1997 ; Sénat, 15 mai 1997, GUL , été 2000. 38 AUL , Notes du Sénat, mai–décembre 1992, Anne-Marie Mawhiney, « Report to Senate Laurentian University Native Educational Council », septembre 1992 ; GUL , 5 mars 1993 ; Sénat, 18 novembre 1993 ; CGUL , 3 décembre 1993. 39 GUL , 5 mars 1993 ; Notes du Sénat, avril–octobre 1995, « Laurentian University Native Education Council … Mandate and Terms of Reference », 1er septembre 1993 ; Sénat, 18 novembre 1993 ; CGUL , 3 décembre 1993. 40 CE xUL , 16 août et 12 septembre 1995 ; Sénat, 7 décembre 1995, CGUL , 15 décembre 1995 ; CE xUL , 16  juillet 1997 ; Sénat, 18 septembre 1997 ; GUL , septembre 1997 ; Sénat, 11 décembre 1997, GUL , janvier 1998. 41 CGUL , 10 octobre et 5 décembre 1997 ; GUL , novembre 1997 ; CE xUL , 11 novembre 1997 ; Sénat, 12 février 1998 ; CGUL , 13 février 1998. 42 GUL , mars 1998. 43 CE xUL , 8 septembre 1998, Sénat, 17 septembre 1998 ; Notes du Sénat, novembre 1996– mars 1998, Proposition de budget pour l’Université Laurentienne, 1997–1998, 22 mai 1997 ; Sénat, 18 septembre 1997 ; CGUL , 5 février 1999 ; Notes du Sénat, février 1999–juin 2000, 15 avril 1999 ; CGUL , 5 mai 2000 ; Notes du Sénat, septembre 2000–avril 2002, Rapport du comité des comptes de l’université, 13 décembre 2001. 44 Sénat, 17 septembre 1998 ; CGUL , 5 février 1999 ; CE xUL , 9 mars et 13 avril 1999. 45 CGUL , 28 septembre 2001 ; Ron Chrysler à Matt Bray, 3 décembre 2008. 46 CGUL , 11 juin et 1er octobre 1999 ; CGUL , 3 décembre 1999, CE xUL , 8 février 2000, CGUL , 25 février 2000 ; Sénat, 21 septembre 2000 et 15 mars 2001 ; CE xUL , 6 février 2001. 47 Ibid., 11 avril et 9 mai 2000 et 24 avril 2001. 48 CGUL , 8 juin et 28 septembre 2001 et 8 février 2002. 49 Sénat, 18 décembre 2001 ; GUL , 22 février 2002 ; news.concordia.ca/recent_stories/ 012486.shtml, « biography of Judith Woodsworth », et « View Judith Woodsworth’s C.V. » ; news.concordia.ca/recent_stories/012486.shtml, « Judith Woodsworth named new Concordia president and vice-chancellor », 29 septembre 2008. 50 CGUL , 30 novembre 2001 et 12 avril 2002 ; Sénat, 6 juin 2002 ; CGUL , 29 novembre 2002. 51 Ibid., 7 février et 28 novembre 2003. http://www.laurentian.ca/Laurentian/Home/ Departments/Institutional+Research/Other/Enrolment/Academic+Load.htm?

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Laurentian_Lang=en-CA ; CGUL , 6 février 2004 ; Rapport sur le budget de 2008–2009 présenté au Conseil des gouverneurs, 11 avril 2008, p. 3 ; États financiers de l’Université Laurentienne de Sudbury, exercice clos le 30 avril 2003 et exercice clos le 30 avril 2007. Puisque la Laurentienne a modifié la définition du statut « à temps plein » à l’automne 2004, il est impossible de comparer précisément les données d’avant et d’après la double cohorte concernant des catégories comme étudiants à temps plein et étudiants à temps partiel. 52 Sénat, 20 mai 2003 ; Rapport sur le budget de 2008–2009 présenté au Conseil des gouverneurs, 11 avril 2008, p. 3 ; CGUL , 3 octobre 2003 et 11 juin 2004. 53 CE xUL , 6 février 2001 ; Rapport sur le budget de 2008–2009 présenté au Conseil des gouverneurs, 11 avril 2008, p. 3–4. Puisque l’École de médecine du Nord de l’Ontario est une entité juridique indépendante, la Laurentienne n’est pas responsable de ses coûts de fonctionnement ou d’infrastructure. Cela vaut aussi pour l’Observatoire de neutrinos de Sudbury. 54 États financiers consolidés de l’Université Laurentienne de Sudbury, 2007–2008, p. 2 ; Université Laurentienne 2007–2008, tableau 1, prévisions budgétaires ; Rapport sur le budget de 2008–2009 présenté au Conseil des gouverneurs, 11 avril 2008, p. 7. 55 Communiqué (Université Laurentienne), 28 janvier 2008 ; Northern Life, 27 octobre 2008 ; Industrie Canada, août 2008 ; Université Laurentienne, Affaires publiques, communiqué de presse, 25 mai 2009. 56 Voir notamment Elizabeth Church, « Universities looking outside academia for leaders », Globe and Mail, 1er décembre 2008. Chapitre 6

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CGUL , 7 mai 1960.

Voir Annuaire de l’Université Laurentienne, 1960–1961. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1960–1961, p. 13. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 27 février 1962. Howard C. Clark, Growth and Governance of Canadian universities: An Insider’s View, Vancouver, UBC Press (s.d.) On pourra consulter pour en connaître davantage Paul-André-Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert, François Ricard, Histoire du Québec contemporain. Le Québec depuis 1930, Montréal, Les Éditions du Boréal Express, 1986, p. 598–610 ; Claude Galarneau, Les collèges classiques au Canada français, Montréal, Fides, 1978 ; Gaétan Gervais, « L’enseignement supérieur en Ontario-français (1848–1965) », Revue du Nouvel-Ontario, no 7 (1985), p. 11–52 ; André Bertrand, L’éducation classique au Collège du Sacré-Cœur, Sudbury, La société historique du Nouvel-Ontario, Documents historiques no 86, 1988. Laurentian University of Sudbury, President’s Report 1967–1968, p. 1. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 19 septembre 1983. Howard C. Clark, Growth and Governance, op.cit., p. 35. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 17 avril 1975 (les nominations des doyens des humanités, des sciences sociales et des sciences sont approuvées par le Sénat alors que la nomination du doyen des Écoles professionnelles est retardée). La nomination de doyens en 1975 avait été précédée par celle de doyens adjoints dans la faculté des arts et des sciences (celui des sciences en 1970–1971 et ceux des humanités et des sciences sociales en 1971–1972 peu après le regroupement des disciplines dans ces trois secteurs. Le doyen adjoint des Écoles professionnelles avait été nommé en 1972.

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11 Correspondance du Sénat 1970–1971. La lettre est signée par Pierre Bélanger, du département de sociologie en date du 26 novembre 1970. 12 Georges Bélanger, « L’enseignement de la littérature et de la culture », Revue du NouvelOntario, no 7 (1985), p. 54. 13 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1975–1976, p. 27. 14 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1971–1972 (dépliant bilingue inséré dans l’annuaire). 15 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1972–1973, p. 21. 16 On pourra consulter à ce sujet le livre de Sally M. Weaver, Making Canadian Indian Policy: The Hidden Agenda 1968–1970, Toronto, University of Toronto Press, 1981 ainsi que Harold Cardinal, The Unjust Society, Edmonton, Hurtig, 1969. 17 Voir AUL , F44, 3 « Religious Studies 1962–1972 », plus particulièrement le document intitulé « Indian Studies at Laurentian University » en date du 15 mai 1969. 18 AUL , LU H& , 2 « Senate ». 19 AUL , LU FG 7, 3 « Administration 1972–1973 ». 20 Note de service envoyée au Comité des programmes en date du 8 décembre 1974. Correspondance du Sénat, janvier–mai 1975. 21 J. Couture (Trent University) et S. Weaver (University of Waterloo), « Report of the External Committee for the Appraisal of the Native Studies Programme at Laurentian University », 14 novembre 1975. 22 « Report of the Ad Hoc Planning Committee on Native Studies Programme », Senate Briefs juin 1975–mai 1976. Le document est en date de mars 1976. 23 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1977–1978, p. 73 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 5 décembre 1974. 24 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 18 mai 1978 ; Annuaire de l’Université Laurentienne, 1980–1981, p. 83. 25 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 30 janvier 1961. 26 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 9 janvier 1969. 27 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1978–1979, p. 78 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 12 janvier 1978. 28 Laurentian University of Sudbury, Ontario, « Presentation to the Committee on University Affairs », 20 octobre 1969. 29 Matt Bray, Chair of History, « Statement of Programme Objectives », 25 mai 1977. 30 CE xUL , 25 juillet 1962. 31 CE xUL , 26 juin 1963. 32 On pourra aussi consulter deux rapports rédigés par le directeur du département de l’époque, R.H. Farrant, soit « A Report with Predictive Estimates and Recommendations », octobre 1970, et « A Tentative History of Psychology in Laurentian University and Affiliated Colleges », allocution prononcée dans le cadre du colloque « Psychology in the North » lors du Third Regional Psychology Conference, tenu au Nipissing University College, North Bay, 19 février 1982. 33 Note de service du doyen Bourbeau au recteur Bennett, 6 avril 1962, AUL , Acc.F 62, 2, « Dean’s Office Box 40 ». 34 Correspondance du doyen Bourbeau au recteur Bennett, 23 novembre 1962, AUL , Acc.F 62, 2, « Dean’s Office Box ». 35 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 décembre 1971 ; Annuaire de l’Université Laurentienne, 1972–1973, p. 21. En 1967, le directeur du département de psychologie avait écrit au recteur Mullins : « I would therefore emphasize that Laurentian University should fairly soon set up in Anthropology since field studies of archaeological, anthropometric, lin-

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guistics and social aspects could well be conducted from this region », AUL , Acc.F 62, 2 « Dean’s Office Box 40 ». Annuaire de l’Université Laurentienne, 1972–1973, p. 21. S. McMullin, « Canadian Studies », thecanadianencyclopedia.com. Le titre du rapport Symons est « To Know Ourselves : the report of the Commission on Canadian Studies », Ottawa, Association of Universities and Colleges of Canada, 1975. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 décembre 1971. Lettre de Edward Monahan à Matt Bray en date du 11 juillet 1975, AUL , LU G 18, 1 « Dean, Social Sciences and Humanities. Canadian Studies ». Lettre de Matt Bray au recteur Monahan, 28 juillet 1975, op.cit. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1977–1978, p. 226 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 décembre 1976. Lettre de W. Watson en date du 26 juin 1969, AUL , PO 63, IV, 28. President’s Report 1968–1969, p. 6. Laurentian University of Sudbury, « Presentation to the Committee on University Affairs », 20 octobre 1969, p. 2. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1967–1968, p. 17 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 31 mars 1966 ; CGUL , 19 mai 1966. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1968–1969, p. 50 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 31 mars 1966 ; CGUL , 19 mai 1966. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1972–1973, p. 22 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 décembre 1971. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1966–1967, p. 22. Son auteur, Dr Philip Lapp, avait reçu le mandat du gouvernement de l’Ontario pour étudier la rationalisation de la formation et des programmes de génie en Ontario en 1969. Il remet son rapport en décembre 1970. A. S. Tombalakian, « A Brief history of the Engineering School of Laurentian University », allocution prononcée par l’ancien directeur de l’École au banquet de graduation des étudiants de l’École, 11 mars 1995. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1971–1972, p. 23. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1977–1978, p. 73. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1978–1979, p. 33. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 19 décembre 1963. En 1961, le gouvernement fédéral avait établi cette commission royale d’enquête. La recommandation 35(1) porte sur l’établissement d’une école à la Laurentienne. CE xUL , 28 avril 1965. Procès-verbal de la réunion du Sénat, le 31 mars 1966 ; CGUL , le 19 mai 1966 (les trois écoles de sciences infirmières, service social et éducation physique ont été approuvées lors de cette réunion). Note de service de Wendy Gerhard, doyenne des Écoles professionnelles au vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, Frank Turner, 3 février 1975. Une des réactions de la communauté est celle d’un comité d’infirmières qui a soumis un document au Sénat demandant que l’école ne soit pas fermée mais que sa direction et son programme soient changés : « A Brief to the Senate of Laurentian University Re: the Kergin-Turner Report May 11, 1973 prepared by the Committee of Concerned Senior Nurses of Sudbury ». AUL , LU F 70, 1, « Dean of Science ». Acting President’s Opening Statement dans Laurentian University of Sudbury, « Presentation to the Committee on University Affairs », 14 decembre 1970, p. 7. AUL , LU F 67, 2, « Dean of Science ».

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60 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1975–1976, p. 86 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 décembre 1976 ; CGUL , les 25 mai 1973, 21 septembre 1973 et 15 mars 1974. Un comité ad hoc pour l’intégration de l’École normale à l’Université Laurentienne avait été établi en 1970 ; voir « Senate Committees and representations », rapport annuel 1970–1971. 61 GUL , vol. 1, no 7 (avril 1974), p. 1. On y lit aussi ce qui suit : « Une des propositions acceptées par le Sénat était que les locaux de l’École Normale soient désignés comme lieux d’identification francophone sur le campus […] Il est aussi entendu que la langue de communication et l’ambiance dans ces locaux seront françaises. » 62 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1977–1978, p. 23 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, le 22 septembre 1977. 63 CGUL , 21 octobre 1966. 64 « Science Council Report to Senate of Council’s meeting of 16 June 1971 », AUL , 31, 22, B , « Senate, Academic Council – Science ». 65 On pourra consulter à ce sujet « Brief History of the Biology Department », note de service du doyen des sciences au vice-recteur à l’enseignement et la recherché, 5 mai 1977, AUL , op.cit. 66 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1978–1979, p. 82 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 22 septembre 1977. 67 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1974–1975, p.27. 68 Voir entre autres l’Annuaire de l’Université Laurentienne, 1976–1977, p. 27. 69 Note de service de D. H. Williamson au doyen R. J. A. Cloutier, 23 mai 1968. La note de service avait pour objet le besoin d’études supérieures en géologie mais son discours représente bien les arguments proposés pour l’existence d’un programme de géologie soit-il de baccalauréat ou d’études supérieures. Il faut mentionner que les pères jésuites, fondateurs du Collège du Sacré-Coeur et de l’Université de Sudbury, avaient reconnu cet argument en établissant un cours de géologie en 1958. 70 L’histoire de ce service d’extension à l’Université de Sudbury est, selon certains auteurs, directement reliée à l’histoire des conflits entre l’entreprise minière de la région et les syndicats surtout celui du Mine, Mill. On pourra lire à ce sujet Mike Solski and John Smaller, Mine Mill: The History of the International Union of Mine, Mill and Smelter Workers in Canada Since 1895, Ottawa, Steel Rail Publishing, p. 137–138. 71 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1960–1961, p. 58. 72 AUL , F47, 2, « Public Relations 1959–1961, Press Release », 14 octobre 1960. 73 Anne-Marie Mawhiney and Ross Paul, « Women and Distance Education in Northeastern Ontario » dans Margaret Kechnie et Marge Reitma-Street (dir.), Changing Lives: Women in Northern Ontario, Toronto & Oxford, Dundurn Press, 1996, p. 311–318. 74 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1974–1975, p. 29. 75 On pourra consulter le site Internet du Conseil (www.ocgs.cou.on.ca) pour en apprendre davantage. 76 Procès-verbaux des réunions du Sénat, les 21 mars et 27 avril 1967. Deux ans plus tôt, un professeur de mathématiques avait demandé au recteur quand l’université prévoyait inaigurer des programmes de maîtrise et de doctorat dans sa discipline ; le recteur avait répondu qu’il espérait que le programme de maîtrise pourrait débuter en 1969–1970 et le Ph.D. peu après 1970. 77 Procès-verbaux des réunions du Sénat, 24 octobre, 28 novembre et 12 décembre 1968. 78 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 18 décembre 1972. 79 President’s Report 1967–1968, p.9. 80 Report to CUA , octobre 1970.

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81 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1970–1971, p. 22 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 25 septembre 1969 82 President’s Report 1969–1970, p. 9 et 11. 83 Lettre au doyen R. Cloutier, le 11 novembre 1968, AUL , LU K 66, 4, « Director, School of Graduate Studies 1968–1981 ». 84 Lettre du president du comité au directeur des études supérieures de la Laurentienne, 12 octobre 1971, AUL , LU K 67, 3. 85 Lettre datée du 8 mars 1971, AUL , RG 32, 1, 1, Acc.15129/4A , boîte 1 : « Laurentian University Operating Grants 1971–1972 ». 86 Lettres du recteur, 17 mars 1971 et du ministre, 29 mars 1971 ; op.cit. 87 Howard C. Clark, Growth and Governance, op.cit., p. 58–59. L’auteur mentionne que son évaluation de ACAP ne fait pas l’unanimité. 88 Senate Long Range Planning Committee, « Five Year Plan for Graduate Studies 1972–1977 », CGUL , 21 janvier 1972 et procès-verbal de la réunion du Sénat, 10 février 1972. 89 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1972–1973, p. 94 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 24 février 1972. Le programme de M.A. English est suspendu dans les années 1980 à la suite d’une revue externe du programme et de la décision du directeur des études supérieures de l’époque. 90 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1972–1973, p. 23. 91 Lettre du vice-président exécutif, M.  A. Preston, au directeur des etudes supérieures, W. Watson, 9 mai 1972, AUL , F 53, 2, « Graduate Studies Committee 1971–72 ». 92 Note de service de W.  Y.  Watson, 21 février 1973, AUL , F 53, 2, « Graduate Studies Committee September 1972 ». 93 Academic Planning Committee, « Planning for Tomorrow. Report to Senate », mai 1973. 94 School of Graduate Studies, « Five-Year Plan for Graduate Studies 1974–1979 ». 95 Report from the Joint CUA /COU Subcommittee on goals and objectives for graduate development concerning the five-year plan of Laurentian University, AUL , F 53, 2, « LU Graduate Council from September 1974 ». 96 Voir Graduate Studies Planning Paper No. 2, AUL , F 53, 2, op.cit. Ce document signé par le directeur des études supérieures, Edgar Wright rappelle que : « ACAP could not recommend for Laurentian any programmes in addition to those in the approved five year plan which, we believe, will fully extend the university’s resources ». 97 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1975–1976, p. 53 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 13 juin 1974. 98 « Graduate Studies – A Situation Review », 7 mars 1984, Senate Briefs, avril 1983–avril 1984. 99 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1974–1975, p. 45. 100 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1980–1981, p. 52 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 21 juin 1979. 101 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1997–1998, p. 82 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 10 décembre 1998. 102 Laurentian University, « Brief to OCUA on Graduate Studies », Senate Briefs, juin 1976– avril 1977. 103 Laurentian University, « Brief to the Ontario Council on University Affairs» , 12 mai 1978. 104 Laurentian University, « Presentation to the Committee on University Affairs », 20 octobre 1969, Appendix A , p. 2. 105 J.-E. Havel, Les citoyens de Sudbury et la politique : enquête sur l’information, le comportement politique et les partis politiques à Sudbury, Sudbury, Presses de l’Université Laurentienne, 1966. 106 Laurentian University of Sudbury, President’s Report 1966–1967, p. 64.

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107 Edward J. Monahan, « Address to the Faculty of Laurentian University », document photocopié de 21 pages (signé par l’auteur) en date du 13 septembre 1974. 108 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 23 septembre 1973. 109 On pourra consulter au sujet du développement d’une politique scientifique au Canada, Gwendolyne Evans Pilkington, Speaking With One Voice: Universities in Dialogue with Government, Montréal, History of McGill Project, McGill University, 1983. 110 Le mémoire de l’université Laurentienne présenté au Conseil ontarien des affaires universitaires en 1978 contient une section qui analyse la question de la recherche non seulement à la Laurentienne mais dans les petites universités en général. Voir « Brief Presented by Laurentian University of Sudbury to the Ontario Council on University Affairs », 12 mai 1978, p. E 1–23. 111 On pourra consulter le volume II du rapport du comité du Sénat sur la politique scientifique (mieux connu sous le rapport Lamontagne), Ottawa, 1972. 112 Laurentian University of Sudbury, President’s Report 1966–1967, p. 97–102. 113 CGUL , 6 mars 1981 et 12 avril 1985. 114 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1971–1972, p. 153. 115 Donald Dennie et Annette Ribordy, « Les vingt-cinq ans de l’Institut », Revue du NouvelOntario, no 25 (2001), p. 10. Les fondateurs de cet institut étaient Benoît Cazabon, Gilles Comtois, Gaétan Gervais, Roger Breton, Donald Dennie et Lucien Michaud. Voir aussi GUL , Vol. 5, no 1 (1977), p. 2. 116 Voir au sujet de CIMMER , CGUL , les 31 mai 1985 et 21 février 1986 ainsi que Northern Life, 1er juillet 1984. 117 A. E. Beswick, « Future Direction for CIMMER  », septembre 1986, AUL , L 4, 2 « Doyen des Sciences et de génie ». 118 « Report of Task Force on Academic Priorities », School of Graduate Studies and Research, avril 1986. AUL , I 2,3. Chapitre 7 1 Procès-verbal de la réunion du Conseil académique des sciences, 7 mars 1980, AUL , 31, 22, B , « Senate – Academic Council – Sciences » ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 20 mars 1980. 2 Report of the Presidential Advisory Committee on Engineering (PACE), « The Laurentian School of Engineering: Plans for the Future », 7 janvier 2000, Senate Briefs, fév. 1999–juin 2000. Le comité recommande que le programme de doctorat soit établi en collaboration avec l’Université de Toronto et l’Université Queen’s. L’Université Laurentienne a opté pour un programme autonome (lire la section sur le doctorat). 3 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 15 avril 2003. 4 Note de service du doyen de la faculté au vice-recteur à l’enseignement et la recherche, 13 juin 1986, aul , 31, 22, B , op.cit. 5 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 11 février 1999. 6 Note de service datée du 30 septembre 1979, aul , LU L 2, 1, « Dean Science and Engineering ». 7 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 19 janvier 1984. Le nom du département de mathématiques était devenu celui de mathématiques et informatique en 1979. 8 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 10 décembre 1981. 9 Procès-verbal de l réunion du Sénat, 21 juin 1990. 10 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1983–1984, p. 79 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 10 décembre 1981.

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11 Note de service du doyen de Sciences et génie au vice-recteur à l’enseignement et la recherche, 7 juin 1994, aul , 31, 22, B , op.cit. 12 Procès-verbaux des réunions du Sénat, les 20 juin 1996 et 20 juin 2002. 13 Le type et le nombre d’options ont varié depuis 1997. En anglais les options ont été biomedical, conservation and restoration ecology, wildlife and habitat ecology, forensic biology, zoology. En 2006, elles sont au nombre de quatre : biomedical, conservation and restoration ecology, terrestrial and aquatic ecology et zoology. En français, on retrouve trois options, soit biomédicale, écologie terrestre et aquatique, biologie intégrée. Voir Annuaires de l’Université Laurentienne, 2002–2004, p. 60–61 ; 2006, p. 34–35. 14 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 mars 2004. 15 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1985–1986, p. 87. 16 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1981–1982, p. 78–79 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 18 juin 1981. 17 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1980–1981, p. 83 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 28 février 1980. 18 Annuaire de l’Université Laurentienne, 2000–2002, p. 51 ; procès-verbal de la réunion du 10 décembre 1998. 19 Annuaire de l’Université Laurentienne, 2002–2004, p. 80 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 21 juin 2001. En 1981. Le comité de la planification à long terme du collège avait proposé au Conseil des régents l’établissement d’une école de communications qui serait bilingue et interdisicplinaire, aul , F 24, 4. 20 Annuaire de l’Université Laurentienne, 2006, p. 53–55 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 25 avril 2003. 21 Procès-verbaux des réunions du Sénat, 14 décembre 2004 et 18 janvier 2005. 22 Procès-verbal du Sénat, 20 juin 2006. 23 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1993–1994, p. 40. 24 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1995–1996, p. 46 ; procès-verbaux des réunions du Sénat, 11 février 1991 et 20 avril 1995. 25 Annuaire de l’Université Laurentienne, 2000–2002, p. 51 et 162 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 11 février 1999. 26 Annuaire de l’Université Laurentienne, 2000–2004, p. 202–203 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 20 septembre 2001. 27 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 janvier 2007. Ce programme bénéficie du financement du Consortium national de formation en santé. 28 Annuaires de l’Université Laurentienne, 1981–1982, p. 77 et 1986–1987, p. 82 ; procès-verbaux des réunions du Sénat, 26 février 1981 et 13 février 1986. 29 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1989–1990, p. 90 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 janvier 1986. 30 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1988–1989, p. 261–265 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 15 octobre 1987. Ce programme a d’abord fait partie de l’École triculturelle de l’École de service social mais a acquis son autonomie administrative en 2006 avant de demander son propre agrément de l’Association canadienne des écoles de service social en 2008. 31 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1986–1987, p. 82 et 89 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 janvier 1986. 32 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1993–1994, p. 39 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 18 juin 1992. 33 Annuaire de l’Université Laurentienne, 2000–2002, p. 69 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 17 juin 1999 au cours de laquelle seuls les cours de première année du programme

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ont été approuvés. Lors de sa réunion du 20 juin 2000, le Sénat a pprouvé les dernières trois années de ce programme. Report of the Academic Planning Committee to the Regular November 1988 Meeting of Senate, AUL , LU G 18, 1, Dean, Social and Sciences and humanities « Canadian Studies ». « ACAPLAN Report – Senate Meeting – December 1988 », dans Senate Briefs, octobre 1987– mars 1989. Le rapport est signé par Charles H. Bélanger, président du comité. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 14 février 1991. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 19 mars 1998. La résolution adoptée par le Sénat exigeait que ce transfert entre en vigueur 1er juillet 1998. Voir aussi le procès-verbal de la réunion du Conseil des gouverneurs, 29 mai 1998. Pour un bref historique de l’École ainsi qu’une description de son fonctionnement, consultez le site Internet www.normed.ca. Pour connaître les étapes importantes de l’établissement de l’École, consulter les procès-verbaux des réunions du Sénat, 10 février 2000, 13 décembre 2001, 18 mars 2003, 18 mars 2004 et 20 avril 2004. Voir aussi CGUL , les 3 décembre 1999, 25 février 2000 et 9 juin 2000. Il est intéressant de noter que lors de sa réunion du 28 mai 1962, Me Jean-Noël Desmarais avait suggéré la création d’une faculté de médecine à l’Université, suggestion qui est demeurée sans avenir immédiat. Acting President’s Opening Statement, 1970, p. 9, op.cit. ; voir aussi le rapport de 1969, p. 15–16. AUL , LU G 7, 2, « Dean of Science ». Le premier directeur de cette initiative en santé a été Geoff Tesson, qui a aussi été doyen de la faculté des sciences sociales et vice-recteur à l’enseignement et à la recherche. Dr Robert McKendry, « Physicians for Ontario. Too Many? Too Few? For 2000 and Beyond », Report of the Fact Finder on Physician Resources in Ontario, décembre 1999. Procès-verbaux des réunions du Sénat, 21 janvier 2003 et 20 mai 2003. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 20 mai 2003. Consulter l’Annuaire de l’Université Laurentienne, 1976, p. 71–74 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 21 janvier 2003. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 20 septembre 2001. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1973–1974, p. 29. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1987–1988, p. 101. Annuaire de l’Université Laurentienne, 1987–1988, p. 327. Cette aventure cessera en 1996. Le Conseil des gouverneurs a été saisi à plusieurs reprises de cette question (voir CGUL , les 6 juin 1986 et 24 octobre 1986) avant de décider de la fermeture prématurée du programme en décembre 1995 (voir CGUL , 15 décembre 1995). Voir le site Internet de l’Ordre des infirmières de l’Ontario (www.cno.org/reg/normemb/ prog) pour en connaître davantage au sujet de l’historique de cette nouvelle exigence et de la collaboration entre les collèges et certaines universités ontariennes ; voir CGUL , 8 décembre 2000. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 20 juin 2002. Le programme de B.S.S. a pu être développé pour être offert en ligne grâce au financement du gouvernement fédéral par l’intermédiaire du Consortium national de formation en santé établi en 2002. Note de service de D. H. Parker et E. Wright à F. J. Turner, 28 avril 1983, AUL , LU K 67, 3 et lettre de D. H. Parker à H. H. Yates, 7 février 1983, AUL , op.cit. Note de service de F. J. Turner à E. Wright 15 novembre 1983. Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1995–1996, p. 85 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 21 avril 1995. Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1988–1989, p. 64.

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57 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1986–1987, p. 43 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 19 mai 1983 ; procès-verbal de la réunion du Conseil des gouverneurs, 15 avril 1983. 58 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1992–1993, p. 90 ; procèsverbaux des réunions du Sénat, 21 janvier 1988, 16 mars 1989 et 20 avril 1989. 59 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1996–1997, p. 108 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 15 septembre 1994. 60 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 18 mars 1993. 61 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1994–1995, p. 78 ; procèsverbal de la réunion du Conseil des gouverneurs, 14 février 1992. 62 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1995–1996, p. 101–102 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 17 mars 1994. 63 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 20 avril 1995. Ce programme constitue pour certains la reprise de la maîtrise en English suspendue au cours des années 1980. 64 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1996–1997, p. 88. 65 Voir la note de service du doyen aux membres du corps professoral, 20 mai 1990, AUL , G 17, 3, « Dean Humanities and Social Sciences » et « Proposal for a Master of Arts in Humanities at Laurentian University », op.cit. 66 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2005–2006, p. 102 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 13 décembre 2001. 67 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2005–2006, p. 129–130 ; procès-verbal de la réunion du Sénat, 9 décembre 2003. Ce programme a pour objectif de former des étudiants capables de pouvoir communiquer ce qu’est la science ainsi que les questions soulevées par les développements dans le domaine des sciences. Les étudiants suivent leur programme à la fois à l’Université et à Science Nord. 68 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 76 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 20 juin 2006. Ce programme veut préparer des étudiants aux carrières en recherche, en enseignement et dans l’industrie. 69 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 96 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 20 juin 2006. 70 CGUL , 15 avril 1988. La Laurentienne a tout de même établi un programme de doctorat en psychologie clinique en collaboration avec l’Université d’Ottawa en 1995–1996 qui a fonctionné jusqu’en 2001. 71 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 1992–1993, p. 85–86. 72 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 39–43 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 20 avril 2004. 73 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 43–44 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 15 avril 2003. 74 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 58–62 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 9 décembre 2003. 75 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 63–67 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 16 mai 2002. 76 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 97–102 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 15 juin 2004. 77 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 80–84 ; procèsverbal de la réunion du Sénat, 21 juin 2005.

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78 Letter of Agreement between Laurentian University and the University of Guelph concerning cooperation in gradute studies in the biological sciences, Draft Agreement, 18 octobre 1994, AUL , LU G 9, 1, « Science and Engineering » 79 Note de service du président du COPA au directeur du département de biologie, 9 avril 1997, AUL , LU G 9, 1, op.cit. 80 Annuaire des études supérieures de l’Université Laurentienne, 2007–2008, p. 80. 81 Northern Life, 11 juillet 1984, p. 2. 82 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 19 janvier 1989. 83 Pour en connaître davantage sur ces centres, on pourra consulter le site Internet suivant : www.laurentienne.ca/recherches. 84 « L’exploration des réalités sociales canadiennes devient plus facile » La clé. Magazine de recherche de l’Université Laurentienne (hiver 2007), p. 8. 85 Consulter le site Internet www.cihr-irsc.ca pour un bref historique de ces instituts. 86 Rappelons le rapport intitulé « Report of the Task Force on Academic Priorities » en 1986 ; en 1993, le Sénat a approuvé le rapport intitulé « Force d’impulsion et occasion pour le Nord. Plan stratégique de l’Université Laurentienne » (procès-verbal de la réunion du Sénat, 21 janvier 1993) ; « Bâtir sur la qualité : Plan stratégique pour l’Université Laurentienne » de 2003. 87 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 14 décembre 2000. 88 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 21 septembre 2004. 89 Consulter le site www.chairs.gc.ca. 90 Le recteur de l’époque, M. Jean Watters, en fait l’annonce au Sénat (voir le procès-verbal de la réunion du Sénat, 20 avril 2000). 91 Consulter le site www.laurentienne.ca/recherche/chaires de recherche. En plus d’Arteca, les détenteurs des chaires de recherche sont Gregory Baiden, sciences naturelles et génie, chaire de recherche en robotique et automatisation des mines ; John Gunn, chaire de recherche en systèmes aquatiques et endommagés ; Balz Kamber, chaire de recherche en géologie précambrienne ; Aseem Kumar, chaire de recherche en sciences biomoléculaires et Nancy Young, chaire de recherche en santé des enfants dans les milieux ruraux et du nord. 92 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 16 septembre 2003. 93 Ibid. 94 Procès-verbaux des réunions du Sénat, 18 mai et 14 décembre 2004. 95 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 18 janvier 2005. La première politique portant sur les conflits d’intérêt a été adoptée par le Sénat en 1993 ; voir le procès-verbal de la réunion du Sénat, 18 janvier 1993. 96 Dieter K. Buse, Director, Graduate Studies and Research, « The Research Record Laurentian University 1989–94 : Productivity and Problems », procès-verbal de la réunion du Sénat, janvier 1996. 97 « Le premier mot », La clé, verso de la page couverture. 98 La clé (hiver 2008), p. 10. Selon la vice-rectrice associée, Liette Vasseur, 85 pour cent des fonds de recherche alloués par les conseils proviennent du CRSNG . 99 La bibliothèque Desmarais met maintenant à la disposition des chercheurs et des personnes intéressées un site Internet (LUZONEUL) qui donne accès gratuitement à des articles rédigés par des professeurs de la Laurentienne qui résument les résultats de leur recherche. Cette initiative s’insère dans le cadre d’un mouvement qui vise à rendre accessibles, de façon gratuite, les résultats de recherche publiés par des chercheurs. Voir la GUL (printemps 2008), p. 1.

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100 « Brief Presented by Laurentian University of Sudbury to the Ontario Council on University Affairs », 12 mai 1978, p. E -1. 101 Tom Pocklington et Allan Topper, No Place to Learn: Why Universities Aren’t Working, Vancouver et Toronto, UBC Press, 2002, p. 100–111. Les auteurs citent le rapport de Smith : « Commission of Inquiry on Canadian University Education, Association of Universities and Colleges of Canada », Ottawa, 1991. On pourra retrouver des échos de ce débat dans Howard C. Clark, Growth and Governance, op.cit. ; Murray G. Ross, The University: The Anatomy of Academe, New York, McGraw-Hill, 1976 ; Royal Society of Canada, Realizing the Potential: A Strategy for University Research in Canada, Ottawa, Royal Society of Canada, 1991. Chapitre 8 1 Je dois beaucoup à Charles M. Levi, conseiller en recherche pour le Projet d’histoire de l’Université Laurentienne, qui a méticuleusement assemblé des dossiers de recherche, notamment sur la crise de la gouvernance des années 1968 à 1971 à l’Université Laurentienne. Je tiens aussi à remercier mon auxiliaire de recherche, Kaleigh Bradley, d’avoir habilement dépouillé les volumes des journaux étudiants. « “Co-operation, goodwill, understanding” – school builds on these tenets », Sudbury Star, 19 septembre 1960 ; « Sudbury’s university classes scattered across the city », Sudbury Star, 4 novembre 1960. 2 AUL , LU History Project File: Hagey Report, Charles Levi, Research Memo ; Trevor MacDonald, « A Study of Laurentian University and the Full-Time Students », thèse de B.A. spécialisé en géographie, Université Laurentienne, 1973. 3 « The downtown university », Globe and Mail, 23 mars 1964. 4 AUL , Charles Levi, entrevue avec Kenneth Pryke, 19 février 2005. 5 « Spirit of unity is the aim », Sudbury Star, 4 novembre 1960. 6 Ibid. 7 Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Keir, photographies : « Ojibway Indians Take Extension Course through LU, March 7, 1962 », 62-3-175 et 62-3-183. 8 AUL , LU History Project File: SGA /AGE , History of the Students’ General Association: The Years 1960 until 1998, s.d ; « Will French-English be reconciled? » ; « Constitution concerned with unity », Lambda, 18 février 1965. 9 Gérald M. Janneteau, « President’s Message », Laurentiana (1963), p. 23. La publication de Laurentiana est interrompue entre 1971 et 1982. 10 Catherine Gidney, A Long Eclipse: The Liberal Protestant Establishment and the Canadian University, 1920–1970, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2004, p.  6–47. 11 AUL , F48, 1, Extension Box 8, procès-verbal de la réunion du Conseil de faculté, 16 octobre 1962. Pour une discussion du rectorat du père Bouvier, voir le chapitre de Matt Bray sur la gouvernance universitaire de 1960 à 1972. 12 Sudbury Star, 16 mai 1962. 13 W.G. Fleming, Post-Secondary and Adult Education, Toronto, University of Toronto Press, 1971, p. 389. 14 « Laurentian is a man’s world in a four-to-one proportion! » Sudbury Star, 30  septembre 1966. 15 « Message of the President », GUL , 15 décembre 1960. 16 Voir par exemple Lambda, 4 octobre 1968 ; Lambda, 17 janvier 1969 ; Le Lambda, 7 mars 1969. 17 « Results of the sex survey », Lambda, novembre–décembre 1963.

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18 « Wide choice of activities offered students », Sudbury Star, 28 février 1963 ; AUL , Athletics Scrapbooks, I 22, 2, Varsity Sports, 1981–1982, « What’s in a name », s.d. 19 « The downtown university », Globe and Mail, 23 mars 1964. 20 « Laurentian pays tribute to top athletes, chooses nickname for school’s sports teams », Sudbury Star, 21 mars 1964 ; « Now is the time for all to offer good names for Laurentian teams », Sudbury Star, 19 mars 1963 ; chronique de Robert Evans, Sudbury Star, 8 avril 1963 ; « Laurentian sport notes », Sudbury Star, 2 avril 1965 ; AUL , Athletics Scrapbooks, I 22, 2, Varsity Sports, 1981–1982, « What’s in a Name », s.d.. 21 « Pool at Laurentian completed, can be used for competitions », Sudbury Star, 15 mars 1972. 22 « Laurentian sport notes », Sudbury Star, 1er novembre 1963 ; AUL , Athletics Scrapbooks, I 22, 1, Alumni Scrapbook, « Laurentian Sport Notes », s.d.. 23 Laurentian Athletics Marketing and Communications Department, « Laurentian Athletics: Voyageurs and Lady Vees History », 3 juin 2009 ; AUL , Athletic Scrapbooks, I 23, 1, Voyageur Highlights, 1983–1984, « A Retrospective Look at Voyageur Soccer », s.d. ; AUL , Athletic Scrapbooks, I 22, 1, Varsity Sports, 1977–1978, « Soccer », s.d. 24 « Wide choice of activities offered students », Sudbury Star, 28 février 1963 ; « A U. of S. student’s impression of Huntington », Lambda, 14 décembre 1962 ; « Dieu la sauve » [sic], Lambda, 16 novembre 1962. 25 Bob O’Riordan, « The new Laurentian », Lambda, janvier 1964. 26 AUL , LU History Project File: SGA /AGE , History of the Students’ General Association: The Years 1960 until 1998, s.d ; « S.G.A. announce new policies and new decor for student lounges », Lambda, 22 octobre 1969. 27 « New Laurentian campus now overrun by frosh », Lambda, octobre 1964 ; « Laurentian enrolment up 60 per cent », Sudbury Star, 23 octobre 1965. 28 « Cafeteria prices not too high », Lambda, 6 novembre 1964. 29 « Tempest in the dining room over heavy meals, light lunches », Sudbury Star, 25 mars 1966 ; « Laurentian students boycott dining hall », Sudbury Star, 5 février 1968. Pour la longue suite des débats sur la qualité du service alimentaire, voir par exemple : « Changes in food services start this week », Lambda, 6 février 1973 ; « Petition for replacing Saga », Lambda, 6 octobre 1982 ; « Saga should be replaced », Lambda, 6 mars 1986 ; « Students dying over rising price of grease at the cafeteria », Lambda, 28 janvier 1993. 30 « Frocked and feathered “lowly frosh” in for week of misery at Laurentian », Sudbury Star, 17 septembre 1966. 31 « Laurentian queen crowning and kangaroo court », Sudbury Star, 3 octobre 1964 ; « Laurentian frosh play role of garbage collectors », Sudbury Star, 21 septembre 1965 ; « Shoe shine duty for Laurentian frosh », Sudbury Star, 22 septembre 1965 ; « Laurentian picks homecoming queen », Sudbury Star, 5 novembre 1966 ; « L.U. homecoming queen crowned!!! », Lambda, novembre 1966 ; « All freshmen beware this is antic week for Laurentian frosh », Sudbury Star, 18 septembre 1967 ; « It’s dresses for all during frosh week », Sudbury Star, 16 septembre 1969 ; « Ku klux klangaroos kastigated? » Lambda, 24 septembre 1969. 32 « Welcomes “frosh” class to Laurentian », Sudbury Star, 7 septembre 1969 ; « Residence rules offer diversity », Lambda, 24 octobre 1972. 33 AUL , LU History Project File: Student Affairs – Residence, Visiting Privileges in Men’s and Women’s Residences of Huntington College, s.d. 34 AUL , Huntington, V, 3, Buildings – Residences Women 1964–65. 35 « University ruling stays, new meeting March 27 », Sudbury Star, 13 mars 1969. 36 « Les cartes d’identité », Lambda, 16 novembre 1962 ; « La fondation de l’AECFNO  », Lambda, mars 1964 ; « Émission bilingue de l’U. Laurentienne à CKSO  » Le Lambda, 26 avril 1966.

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37 CGUL , 9 juillet 1965, Report of the Special Committee. 38 « The Français-Anglais split at Laurentian », Lambda, 14 décembre 1962. 39 « J’accuse l’administration », Le Lambda, 26 avril 1966 ; « In memoriam : Le caractère bilingue de l’Université Laurentienne », Le Lambda, décembre 1967. 40 « Bilingualism’s prospects are dim at Laurentian », Lambda, 11 mars 1966 ; « Will FrenchEnglish be reconciled? » Lambda, 18 février 1965. 41 « Laurentian students are ostriches », Lambda, 18 février 1965. Une rare exception en cette période est l’article « Why are we in Vietnam? » Lambda, 26 février 1966. 42 « Dieu la sauve » [sic], Lambda, 16 novembre 1962. 43 AUL , 62, 1, Memos to Chairmen and Faculty, 1963–1968, J. D. Lamont to faculty, s.d.. 44 « Nag’s Head issue pushed », Lambda, 27 octobre 1967 ; « Students campaign for campus pub », Sudbury Star, 27 octobre 1967 ; « Over 500 march for pub », Lambda, 3 novembre 1967 ; « Nag’s Head », Lambda, 17 novembre 1967. 45 Roberta Lexier, « “The Backdrop Against Which Everything Happened”: English-Canadian Student Movements and Off-Campus Movements for Change », History of Intellectual Culture, vol. 7, no 1 (2007), p. 1–18 ; Doug Owram, « Youth Radicalism in the Sixties », Born at the Right Time: A History of the Baby Boom Generation, Toronto, University of Toronto Press, 1996, p. 216–247 ; Catherine Gidney, « War and the Concept of Generation: The International Teach-Ins at the University of Toronto, 1965–1968 », dans Paul Stortz et E. Lisa Panayotidis (dir.), Universities and War: Histories of Academic Cultures and Conflict, Toronto, University of Toronto Press, à paraître. 46 Dans son étude de la question de la gouvernance dans les mouvements étudiants sur le campus de Regina de l’Université de la Saskatchewan et de l’Université Simon Fraser, Robert Lexier soutient que le personnel enseignant a eu tendance à appuyer les demandes des étudiants en matière de participation, mais n’ont pas été jusqu’à appuyer la représentation égale. Roberta Lexier, « The Community of Scholars: The English-Canadian Student Movement and University Governance » dans Marie Hammond-Callaghan et Matthew Hayday (dir.), Mobilizations, Protests and Engagements: Canadian Perspectives on Social Movements, Halifax, Fernwood Publishing, 2008, p. 125–144. 47 AUL , F 55, 1, Thorneloe University Students’ Association, The Thorne, Étienne St-Aubin, « S.G.A. Presidential Report », s.d. 48 AO , RG 32, 1, 1, Acc.13856, boîte M 297, Laurentian University, Legislation, 1967, Memorandum from the SGA , 21 mars 1968. 49 AUL , F 55, 1, Thorneloe University Students’ Association, The Thorne, « Presidential Interview », s.d. 50 CGUL , 27 octobre 1967 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.13856, boîte M 297, Laurentian University, Legislation, 1967, E. E. Stewart to W. C. Alcombrack, s.d. ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.13856, boîte M 297, Drafts of the Amended Laurentian University of Sudbury Act, 5 octobre 1967 and 1968 ; AO , RG 32, 1, 1, Acc.13856, boîte M 297, E. E. Stewart to Minister, 22 mars 1968. 51 Arthur Marwick, The Sixties: Cultural Revolution in Britain, France, Italy, and the United States, c.1958–c.1974, Oxford, Oxford University Press, 1998, p. 584–675 ; Steve Hewitt, Spying 101: The RCMP’s Secret Activities at Canadian Universities, 1917–1997, Toronto, University of Toronto Press, 2002, p. 146–152, p. 163–164 ; Hugh Johnston, Radical Campus: Making Simon Fraser University, Vancouver, Douglas & McIntyre, 2005, p. 282–292 ; James M. Pitsula, New World Dawning: The Sixties at Regina Campus, Regina, Canadian Plains Research Centre, 2008, p. 240–282 ; James M. Pitsula, As One Who Serves: The Making of the University of Regina, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2006, p. 318–328 ; Jean-Philippe Warren et Julien Massicotte, « La fermeture du département de sociologie de l’Université de Moncton : histoire d’une crise politico-épistémologique »,

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Canadian Historical Review, vol. 87, no 3 (septembre 2006), p. 463–496 ; Joel Belliveau, « Moncton’s Student Protest Wave of 1968: Local Issues, Global Currents and the Birth of Acadian Neo-Nationalism », paper presented at the Canadian Historical Association Annual Meeting, Vancouver, juin 2008 ; Cyril Levitt, Children of Privilege: Student Revolt in the Sixties: A Study of Student Movements in Canada, the United States, and West Germany, Toronto, University of Toronto Press, 1984, p. 72 ; François Ricard, The Lyric Generation: The Life and Times of the Baby Boomers, trad. de Donald Winkler, Toronto, Stoddart, 1994, p. 111–127. Rebecca E. Klatch explore la théorie selon laquelle lors de périodes de changements rapides, comme les années 1960, il existe souvent au sein d’une même génération des groupes distincts et souvent antagonistes. Rebecca E. Klatch, A Generation Divided: The New Left, and New Right, and the 1960s, Berkeley, University of California Press, 1999, p. 1–16. Neil Compton, « Sir George Williams Loses Its Innocence », Canadian Forum (avril 1969), reproduit dans Tim et Juilletan Reid (dir.), Student Power and the Canadian Campus, Toronto, Peter Martin, 1969, p. 31–36 ; Hewitt, Spying 101, op.cit., p. 163–164 ; Johnston, Radical Campus, op. cit., p. 282–292 ; Pitsula, As One Who Serves, op.cit., p. 318–328 ; Belliveau, « Moncton’s Student Protest Wave of 1968 » op.cit. « Ottawa U holds out », Lambda, 15 novembre 1968 ; « RCMP arrest SFU demonstrations », Lambda, 29 novembre 1968 ; « Censorship in Saskatchewan », Lambda, 17 janvier 1969 ; « Crise à Moncton ! » Le Lambda, 24 janvier 1969. Patricia Jasen a signalé la contradiction inhérente dans la rhétorique du mouvement étudiant, qui tentait de réconcilier la promotion de la liberté individuelle avec une idéologie du changement social collectif. Patricia Jasen, « “In Pursuit of Human Values (or Laugh When You Say That)”: The Student Critique of the Arts Curriculum in the 1960s » dans Paul Axelrod et John G. Reid (dir.), Youth, University and Canadian Society: Essays in the Social History of Higher Education, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 1989, p. 263. Lambda, 24 septembre 1968. « Laurentian “student power” » Sudbury Star, 2 octobre 1968. AUL , LU History Project File: SGA /AGE , Wesley Cragg Papers, Étienne St-Aubin to Faculty, s.d. « This university belongs to the student! » Lambda, 15 novembre 1968. En octobre 1968, le journal étudiant du campus de Regina de l’Université de la Saskatchewan, Carillon, avait publié le même grand titre incendiaire (mais, évidemment, sans la référence subséquente à Mullins). Pitsula, As One Who Serves, op. cit., p. 322. « Mythe ou réalité ? » Le Lambda, 25 octobre 1968 ; « Students request changes to restore “lost bilingualism” at Laurentian », Sudbury Star, 19 octobre 1968. Étienne St-Aubin, lettre à l’éditeur, Lambda, 1er novembre 1968. AUL , LU History Project File: Bilingualism, Wesley Cragg Papers, Minutes of SGA Council, 6 novembre 1968. « Victoire de l’exécutif de l’A.G.E. – 6 étudiants au Sénat » Le Lambda, 6 décembre 1968 ; Université Laurentienne, Sénat, v. 9, 12 décembre 1968. « “The Quiet Revolution” – the S.G.A.L.U. », Lambda, 28 février 1969. « President’s brief runs into snag at Laurentian U. », Sudbury Star, 18 octobre 1969 ; « Teachin today! » Lambda, 20 octobre 1969 ; « Laurentian head under fire from students, faculty », Sudbury Star, 20 octobre 1969 ; « Teach-in turns on over 1200 », Lambda, 22 octobre 1969. « Students, governors clash at Laurentian », Sudbury Star, 31 octobre 1969. « Students get non-voting seats on board at Laurentian U. », Sudbury Star, 1er novembre 1969 ; « Students confront reluctant board », Lambda, 5 novembre 1969.

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67 « Mullins to leave Laurentian », Lambda, 19 mars 1970 ; « Laurentian’s President Mullins ready to seek sabbatical leave », Sudbury Star, 14 mars 1970. 68 CGUL , 9 avril 1970. 69 « 2-year leave for Laurentian head rejected », Sudbury Star, 19 mars 1970 ; « Laurentian SGA calls meeting », Sudbury Star, 31 mars 1970 ; « Senate and board clash over presidency », Lambda, 31 mars 1970. 70 Ibid. 71 AO , RG 32, 1, 1, Acc.18006, boîte M382, General Correspondence, 1970, Victor Cormier to Sirs, 23 mars 1970. 72 « Laurentian Senate allied with students on sit-in », Globe and Mail, 3 avril 1970 ; « Students’ sit-in continues », Sudbury Star, 2 avril 1970. 73 « Laurentian Senate allied with students on sit-in », Globe and Mail, 3 avril 1970. 74 « Laurentian board, Senate agree to meet », Globe and Mail, 6 avril 1970. 75 « Laurentian impasse continues : Await governors’ reply », Sudbury Star, 3 avril 1970 ; « Laurentian governors will meet Senate, but sit-in continues », Sudbury Star, 6 avril 1970 ; « Laurentian board, Senate agree to meet », Globe and Mail, 6 avril 1970 ; « Laurentian Senate discusses “details” for joint meeting », Sudbury Star, 7 avril 1970 ; « Laurentian future on the line », Sudbury Star, 9 avril 1970 ; « Decision-making power increased in historic talks », Sudbury Star, 10 avril 1970. 76 Sudbury Star, 10 octobre 1970. Bien que la police locale ne soit pas intervenue, on doit noter que la GRC a étroitement surveillé les activités étudiantes à la Laurentienne, pratique qu’elle a maintenue sur d’autres campus canadiens pendant cette période. Clint MacNeil, « RCMP Surveillance of Laurentian University, 1962–1978 », thèse du B.A. spécialisé en histoire, Université Laurentienne, 1998. 77 « Senate studies meeting results », Sudbury Star, 10 avril 1970. 78 « Freshmen are welcomed to Laurentian », Sudbury Star, 14 septembre 1970. 79 CGUL , 25 septembre 1970 ; Sénat, 28 septembre 1970 ; « Senate censures B.O.G. executive committee », Lambda, 24 septembre 1970 ; « Support your Senate, back student demands, liberate your university », Lambda, 29 septembre 1970. 80 Sudbury Star, 1er octobre 1970, 6 octobre 1970 ; « LU students picket at Queen’s Park », Lambda, 8 octobre 1970 ; AO , RG 3, 26, Office of the Premier, Robarts: Correspondence, boîte 426, dossier – Laurentian University, January – December 1969, Brief from SGA to Ontario Legislature, 6 octobre 1970. 81 Sénat, 8 octobre 1970. 82 AO , RG 32, 1, 1, Acc.18006, boîte M382, dossier – Laurentian University Faculty Association, 1970, Note of Senate Minutes, 8 octobre 1970 ; AO RG 32, 1, 1, Acc.18006, boîte M382, dossier – Laurentian University Faculty Association, 1970, William Davis to J. G. Hagey, 27 octobre 1970. 83 BUW, Doris Lewis Rare Book Room, Office of the President, A 79-0030, 231, J. G. Hagey, Memorandum to Laurentian University Board, Senate, Faculty, Staff and Students, 3  novembre 1970 ; AUL , I36, 3, Vice-President Executive, Laurentian University Faculty Association Consultation with Dr. J. G. Hagey, 10 novembre 1970 ; AUL , I36, 3, Vice-President Executive, Meeting of Dr. Hagey and Students’ General Association, 11 novembre 1970 ; Université Laurentienne, correspondance du Sénat, 1970–1971, J.  G. Hagey, Laurentian University of Sudbury, Report to Senate, 19 novembre 1970 ; BUW, Doris Lewis Rare Book Room, Office of the President, A 79-0030/231, Report by Dr. J. G. Hagey to the Senate and to the Board of Governors, Laurentian University, 10 décembre 1970 ; AUL , F 65, 1, J.  G. Hagey, « Consultant’s Report to Laurentian University » ; Université Laurentienne, Sénat, 25 mars 1971.

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84 « Dedication », Slag, 1971, p. 156. Chapitre 9

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« Us – Them. We know who we are … but who are they? » Lambda, 29 septembre 1970. Gidney, A Long Eclipse, 112–124. « Lambda editors niggers – damn right! » Lambda, 9 février 1968. Pour une discussion intéressante sur l’impact des attitudes de la contre-culture sur les activités des étudiants de premier cycle, voir Charles Levi, « Sex, Drugs, Rock & Roll, and the University College Lit: The University of Toronto Festivals, 1965–69 », Historical Studies in Education, vol. 18, no 2 (2006), p. 163–190. CGUL , 31 mai 1968. L’une des images les plus saisissantes de la publication du Lambda en 1970 est un dessin explicite pleine page d’une femme et d’un homme nus en train d’avoir des rapports sexuels. Lambda, 29 janvier 1970. « RCMP to probe drug smokers at Laurentian U », Sudbury Star, 10 février 1967. Pendant les années 1960, le district de Yorkville à Toronto était devenu un centre de la contre-culture pour les jeunes. Voir Stuart Henderson, « Toronto’s Hippie Disease: End Days in the Yorkville Scene, August 1968 », Journal of the Canadian Historical Association, New Series, vol. 17, no 1 (2006), p. 205–234. « Don’t bogart that joint my friend », Lambda, 26 janvier 1976. Blair Neatby et Don McEown, Creating Carleton: The Shaping of a University, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2002, p. 186–188 ; « Asks Laurentian removal of student conduct rule », Sudbury Star, 17 mars 1972. « Sudbury University’s eviction plans bring protest », Sudbury Star, 16 mars 1972 ; « Threat of court eviction irks Laurentian Senate », Sudbury Star, 17 mars 1972 ; « U. of S. is unfair to students, caused protest », Lambda, 21 mars 1972. AUL , F 70, 1, doyen des sciences, rapport du comité exécutif au Sénat, 14 février 1974. « Student Street, Married and Single Student », Lambda, 25 septembre 1973. « Residence students gain new rights », Lambda, 28 février 1980. « Ku klux klangaroos kastigated? » Lambda, 24 septembre 1969. « Freshmen are welcomed to Laurentian », Sudbury Star, 14 septembre 1970. L’importante exception à cette nouvelle politique sont les cérémonies d’initiation parrainées par la société des ingénieurs, qui conserve sa tradition de teindre les cheveux des nouveaux étudiants en mauve. Voir, par exemple, « Purple people everywhere!!! » Lambda, 30 septembre 1999. « Mr and Ms Carnival », Lambda, 30 janvier 1973. « We got it!! », Lambda, 27 octobre 1986. « 2 student senators resign posts », Lambda, 9 novembre 1971 ; « Committees require students », Lambda, 24 octobre 1972 ; « SGA /AGE welcome », Lambda, 6 septembre 1974. « Report depicts dismal picture », Sudbury Star, 20 octobre 1975. Alvin Finkel, Our Lives: Canada after 1945. Toronto, James Lorimer, 1997, p. 127–129. AUL , Correspondance du Sénat, 1978–1979, de Martin Purvis au secrétaire du Sénat, 8  novembre 1978 ; « Women’s liberation », Lambda, novembre 1969 ; « Native students club », Lambda, 20 novembre 1973 ; « International students », Lambda, 2 octobre 1973. « Council accepts executive budget », Lambda, 3 octobre 1972 ; « The shit has hit the fan », Lambda, 5 décembre 1972. « Open letter », Lambda, 23 octobre 1973 ; « Acclamations cancel election at Laurentian », Sudbury Star, 31 octobre 1974 ; « Message du président de l’A.E.F. » L’Orignal déchaîné, 14  septembre 1987. Pour la création du drapeau, voir Stéphanie St-Pierre, « Le drapeau franco-ontarien : “Puissent ses couleurs nous rallier dans une nouvelle amitié et frater-

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nité”, 1975–1977 », dans Guy Gaudreau (dir.), Le drapeau franco-ontarien, Sudbury, Prise de parole, 2005, p. 13–42. « Senate fucks francophones », Lambda, 20 novembre 1973 ; « Que faire? Laisse choir », Lambda, 16 novembre 1976 ; « The university – pour qui ? », Lambda, 2 février 1978 ; AUL , notes du Sénat, juin 1975 à mai 1976, « Manifeste de l’A.E.F. au sujet du bilinguisme » s.d. AUL , Correspondance du Sénat, 1978–1979, secrétaire du Sénat à Martin Purvis, 8 novembre 1978 ; « Un sénateur pour les francophones », Lambda, 17 février 1976 ; « SGA and AEF agree on pub renovations », Lambda, 13 janvier 1976. « A.E.F. stalks third floor space », Lambda, 6 décembre 1978 ; « Students disrupt elevator use at Laurentian », Sudbury Star, 15 février 1979. « Asking for the third floor is nothing short of foolish », Lambda, 28 février 1979. « Rules out further student occupation of university floors », Sudbury Star, 17 février 1979 ; « AEF confronts admin for 3rd floor space », Lambda, 28 février 1979 ; « Occupation celebration: AEF wins 3rd floor », Lambda, 4 avril 1979. « Laurentian bilingualism cited as victor in issue », Sudbury Star, 5 mars 1979. « Pourquoi une université francophone? » Réaction, février 1980 ; « Money exists for northern French university », Northern Life, 27 février 1980 ; « A new French university », Sault Star, 28 février 1980 ; « French university groundwork being laid at Laurentian », Sudbury Star, 16 juillet 1980 ; « SGA defeats motion supporting francophone university », Lambda, 19 novembre 1991. Arthur J. Ray, I Have Lived Here Since the World Began. Toronto, Key Porter Books, 1996, p. 313–337. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Keir, photographies : « Ojibway Indians take Extension Course through LU, March 7, 1962 », 62-3-175 et 62-3-183 ; « Dr. Newbery: Professor emeritus », Sudbury Star, 31 mai 1979. Living and Learning: The Report of the Provincial Committee on Aims and Objectives of Education in the Schools of Ontario [rapport Hall-Dennis] Toronto, Ontario Department of Education, 1968, p. 111–113, 190 ; R. D. Gidney, From Hope to Harris: The Reshaping of Ontario’s Schools. Toronto, University of Toronto Press, 1999, p. 151–152 ; « Laurentian site for Indian studies institute possible », Sudbury Star, 12 juin 1968. « Propose Indian studies department at Laurentian », Sudbury Star, 13 mai 1968 ; « Will use tape recorders to preserve Indian culture », 9 septembre 1970. « Indian-Eskimo studies may get large grant », Lambda, 11 janvier 1972 ; « Laurentian gets $17,000 for Amerindian studies », Sudbury Star, 22 mai 1973. « Native studies awarded $75,000 », Northern Life, 26 mars 1980. « Native students club », Lambda, 20 novembre 1973 ; Lambda, 23 mars 1975. « Western co-eds woo the pill », Lambda, 24 janvier 1967. « Women’s liberation », Lambda, novembre 1969. « Proposed women’s centre endorsed », Lambda, 23 mars 1982 ; « Sexual harassment can be handled », Lambda, 29 septembre 1982 ; Special Issue on International Women’s Day, Lambda, 8 mars 1984 ; « Who needs the women’s centre? We do », Lambda, 3 octobre 1985 ; « Laurentian University women’s centre », Lambda, 28 juillet 1994. Anne Perdue, « Out and Proud », U of T Magazine (été 2009), p. 39–44 ; Gary Kinsman, The Regulation of Desire: Homo and Hetero Sexualities. Montréal, Black Rose Books, 1996. « York holding a conference », Lambda, 11 janvier 1972. « Gay liberation surfaces briefly at college campus », Sudbury Star, 6 juin 1977. « From the editor’s pen », Lambda, 9 mars 1983 ; « It’s definitely not ‘gai’ Quebec », Lambda, 3 mars 1983. Pour d’autres articles traitant des questions liées au sexe, voir, par exemple : « Time to face female facts », Lambda, 25 janvier 1983 ; « Ottawa women fight to destroy

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pornography », Lambda, 30 mars 1983 ; « Male bias in student security hiring provincewide », Lambda, 6 octobre 1983. « Confront homophobia », Lambda, 14 février 1985 ; Lesbian and Gay Issue, Lambda, 13 février 1986 ; « Le malheur d’être gai », l’Orignal déchaîné, 9 février 1988. « LU should keep open mind », Lambda, 21 mars 1991 ; « Out and about », Lambda, 25 novembre 1993 ; « Stopping the madness: Where to begin », Lambda , 27 janvier 1994 ; « Speaking out », Lambda, 20 octobre 1994 ; « Jeans Day Thursday, March 16th », Lambda, 2 mars 1995. AUL , LU History Project File: Student Issues, Gay and Lesbian News, 23 novembre 1995. AUL , Senate Briefs, Summary of report on shortfall of registration, 15 décembre 1971 ; « Report depicts dismal picture », Sudbury Star, 20 octobre 1975 ; AUL , Appendix : Laurentian University Enrolment of full-time students, 1960–1985, dans Gwenda Hallsworth, Le beau risque du savoir : Un bref historique de l’Université Laurentienne / A venture into the realm of higher education: A brief history of Laurentian University, p. 39. « Laurentian students critical of five-year building plan », Sudbury Star, 5 juillet 1970. « New campus shop », Lambda, septembre 1971 ; « Laurentian pub opens, permanency is urged », Sudbury Star, 16 septembre 1971. « Pub loses $, store makes $ », Lambda, 14 décembre 1971 ; « Council accepts executive budget », Lambda, 3 octobre 1972 ; « Students to get control of campus pub », Sudbury Star, 13 janvier 1975. « Student Street », Lambda, 2 octobre 1973. « Laurentian fund », Lambda, 15 septembre 1982 ; « The Laurentian farce fund », Lambda, 5 décembre 1985. « Sees sports connecting link for community, university », Sudbury Star, 11 mars 1971. Laurentian Athletics Marketing and Communications Department, « Laurentian Athletics: Voyageurs and Lady Vees History », 3 juin 2009. « Soccer Vees win Canadian college championship », Lambda, 16 novembre 1972. « Vees thank all », Lambda, 17 novembre 1981. « All about the ’95 hall inductees », Lambda, 26 octobre 1995. « Laurentian – building a winning tradition », Lambda, 23 février 1982. M. Ann Hall, « Creators of the Lost and Perfect Game? Gender, History, and Canadian Sport », dans Philip White et Devin Young, eds., Sport and Gender in Canada. Don Mills, Oxford University Press, 1999, p. 5–23. AUL , Athletic Scrapbooks, I 24, 1, Women’s Volleyball, 1967–1982, « Girls Sports », s.d. ; AUL , Athletics Scrapbooks, I 23, 1, « Laurentian Voyageur, 1988–1989 », s.d. ; Amanda N. Schweinbenz, « An Examination of the History of Women’s Intercollegiate Athletics at Laurentian University », document présenté à the Canadian History of Education Association 15th Biennial Conference, Sudbury, Ontario, octobre 2008. « Economic restraint blamed for lack of women athletes », Sudbury Star, 7 mars 1972. AUL , Athletic Scrapbooks, I 23, 1, Laurentian Voyageur, 1988–1989, « Equality in athletics at Laurentian University », s.d. Laurentian Athletics Marketing and Communications Department, « Laurentian Athletics: Voyageurs and Lady Vees History », 3 juin 2009. AUL , Athletic Scrapbooks, I 22, 1, The Bronze Baby, 1975–1979, « The Bronze Baby », s.d. « University replies to U of T claims », Sudbury Star, 20 janvier 1977. « Laurentian women’s team takes 4th basketball title », Sudbury Star, 6 mars 1978. Université Laurentienne, notes du Sénat, « Statement on Interuniversity Athletics, Laurentian University », juin 1986.

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n ot e s à pag e s 193–198

68 « Pool at Laurentian completed, can be used for competitions », Sudbury Star, 15 mars 1972 ; « Swim club celebrates milestone », Northern Life, 28 avril 1983 ; AUL , Athletic Scrapbooks, I 23, 1, “Varsity Sports, 1984–1985, « Baumann puts school first despite top athlete status », s.d. ; AUL , Athletic Scrapbooks, I 23, 1, “Varsity Hi-Lites, 1986–1987, “CIAU Record,” s.d.. 69 « World-famed athletes training here », Sudbury Star, 13 juillet 1976 ; « First-class track sold East Germans on using Sudbury for last-minute drills », Globe and Mail, 21 juillet 1976 ; « Summer Games start Friday », Northern Life, 31 août 1983 ; « Dream became reality », Sudbury Star, 2 août 1988 ; « CIAU ’89 », Lambda, 3 mars 1989. 70 « Referendum results mediocre », Lambda, 17 octobre 1972 ; « Council kills trust fund », Lambda, 12 décembre 1972 ; « Withhold your fees », Lambda, 9 janvier 1973 ; « Laurentian sit-in blocks elevator », Sudbury Star, 19 janvier 1973 ; « Moratorium this Wednesday », Lambda, 23 janvier 1973 ; « Student rally to mobilize support for the boycott of classes », Lambda, janvier 1976. 71 AUL , LU History Project File: Student Issues, Richard Hoffman au corps professoral de la Laurentienne, 7 février 1977. 72 « Students confront Parrott », Sudbury Star, 5 octobre 1977 ; « L.U. boycott most successful in Ontario », Lambda, 15 février 1977 ; « Editorial: We need NUS for many reasons », Lambda, 11 octobre 1978 ; « Councilor defends SGA Price », Lambda, 17 janvier 1979 ; « Les étudiants “confrontent” les gouverneurs » , Réaction, mars–avril 1980 ; « Second annual tower occupation », Lambda, 31 mars 1980 ; « Second francophone association joins OFS  », Lambda, 6 février 1986. Chapitre 10 1 « The student movement? », Lambda, 22 septembre 1986. 2 « SGA responds to criticism », Lambda, 13 février 1992. 3 « To every Laurentian student », Lambda, 26 septembre 1985 ; « Amnesty International », Lambda, 19 octobre 1987 ; « HIV and AIDS : Let’s talk, before it’s too late! » Lambda, 13  octobre 1989 ; « AIDS Awareness Week », Lambda, 18 octobre 1990 ; « Refugee sponsorship at Laurentian », Lambda, 6 novembre 1997. Pour une discussion de l’apathie étudiante, voir « Frankly, my dear, i don’t give a damn! » Lambda, 9 novembre 1987. 4 « Profs on strike, education on hold », « Do it for yourself, support the strike », « Letters to the editor », Lambda, 12 septembre 1985. 5 « Students’ opinion of the LUSA strike », Lambda, [date?] novembre 1985 ; « SGA goes neutral », et « LUSA settles, dispute resolved », Lambda, 28 novembre 1985. 6 « LUFA strikes, students angry », Lambda, 14 septembre 1989 ; « Rally at Laurentian », Lambda, 21 septembre 1989 ; « Students rally again », Lambda, 28 septembre 1989. 7 « Laurentian library losing ground », Lambda, 12 septembre 1985 ; « Laurentian University launches construction of new computer and reading room », Lambda, juillet/août 2000. 8 « Campus centre not a priority: Daniel », Lambda, 8 avril 1986 ; « The progress so far … », Lambda, 23 mars 1987 ; « Students vote in referendum to pay more for bigger centre », Sudbury Star, 18 novembre 1989 ; « The student centre », Lambda, 3 août 1993. 9 Voir Matt Bray, chapitre 5, « La gouvernance universitaire : La période contemporaine, de 1985 à nos jours ». 10 « Villefranche … the scoop », Lambda, 23 février 1987 ; « Villefranche: No good for 99.77% of us », Lambda, 2 mars 1987. 11 « UCF : Université Canadienne en France » [sic], Lambda, 22 novembre 1990. Voir aussi « The case against UCF  », Lambda, 7 février 1991 ; « Renewed calls for an end to UCF  », Lambda, 9 janvier 1992.

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12 « Laurentian lifestyle: A report of a survey conducted at Ontario universities », Lambda, 10 novembre 1988. 13 « National Alcohol Awareness Week », Lambda, 21 octobre 1999. 14 « Coordinator of student services appointed », Lambda, 3 octobre 1985 ; « Clubs and societies: Any ideas? » Lambda, 5 décembre 1985. 15 « Residence problems », Lambda, octobre 1985. Voir aussi « Vandalism in residence », Lambda, 13 janvier 1989 ; « A quick break », Lambda, 26 octobre 1989. 16 « CAPE : Implementing it at Laurentian », Lambda, 25 mars 1986 ; « CAPE : Setting the record straight », Lambda, 22 septembre 1986 ; « CAPE should return to drawing board », Lambda, 1er décembre 1986. 17 « Council on student life filling positions », Lambda, 18 novembre 1987 ; « Message: “Drink responsibly” », Lambda, 28 octobre 1993 ; « Blenkinsop trying to get council on student life committees working », Lambda, 11 février 1988 ; « The student centre », Lambda, 3 août 1993. 18 « Bureaucratic shakeup leaves Paddy in the fray », Lambda, 22 septembre 1994 ; « New code of student conduct to be adopted by LU ’s student affairs », Lambda, 11 septembre 1997 ; « Notes from the file », Lambda, 20 novembre 1997. 19 « Smoke signals », Lambda, 2 novembre 2000. 20 « Nishnawbe news », Lambda, 27 septembre 1984. 21 « Native Students’ Association hosts special events », 3 octobre 1985 ; « SGA /AEF ’87 elections », Lambda, 16 mars 1987 ; « Need for a national native students’ association », Lambda, 18 novembre 1987 ; « Rebuilding Our Nations conference at LU  », Lambda, 15 novembre 1990 ; « Native culture », Lambda, 13 février 1992. 22 « What is the Indian way? What do we want? » Lambda, 1er octobre 1992. 23 Université Laurentienne, notes du Sénat, « Report to Senate, Laurentian University Native Educational Council », septembre 1992 ; « Laurentian University Native Education Council (LUNEC) Mandate and Terms of Reference », septembre 1993. 24 « Native Studies Students’ Association presents », Lambda, 22 mars 1990 ; « Laurentian Native Studies’ Student Association presents », Lambda, 29 octobre 1992 ; « Native Awareness Week », Lambda, 5 octobre 1995 ; « Native Students’ Association orientation events », Lambda, été 1996 ; « Resistance and a common vision », Lambda, 6 novembre 1997 ; « Notes from the file », Lambda, 15 janvier 1998 ; « Native Awareness Week commencement », Lambda, 4 novembre 1999. 25 « Who is an Indian?” Lambda, 26 octobre 1995. 26 AUL , G 7, 3, Science and Engineering Executive Council, Reid Keays to Science Chairmen, Director of School of Engineering, Vice-Deans, 4 mai 1995 ; Laurentian University, Office of the Registrar, Statistical Report on Enrolment and Admissions, 1986–1998. 27 « To see ourselves – survey of Laurentian’s first year students », Lambda, 2 février 1989. 28 Voir, par exemple, « OFS Week of Action », Lambda, 11 mars 1988 ; « Students hit the streets across Canada », Lambda, 5 février 1998. 29 Voir, par exemple, « Constitutional and bylaw revisions », et « The bilingual week of action », Lambda, 9 février 1989. 30 AUL , LU History Project File: Student Organizations, Heather Bishop to Jack Porter, 10 mai 1994 ; AUL , LU History Project File: Student Organizations, Jon Gonder to Members of Senate, 16 janvier 1995 ; « Students protest potential funding changes », GUL , 10 février 1995. 31 « Student strike: Whoops or wow … whatever », Lambda, 2 février 1995. 32 « Cross country running team: Best in a decade », Lambda, 10 octobre 1991 ; « Yes Laurentian, you DO have a field hockey team », Lambda, 19 novembre 1991 ; « LU makes decisions on future of athletics programs », GUL , 7 mai 1993. 386

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33 « LU ’s ski program dropped », Sudbury Star, 21 septembre 1989. 34 AUL , Athletic Scrapbooks, I 23, 2, Voyageur, 1992–1993, « Advisory Council Report to Address Future of Varsity Sports at Laurentian », s.d. ; « Investing in Varsity Athletics », GUL , 10 février 1995 ; « The scandal at the athletic department: Negligence and extreme prejudice », Lambda, 11 février 1993 ; « Restructuring of Laurentian University’s department of interuniversity athletics », Lambda, juillet/août 2000. Pour une critique de l’insuffisance de l’appui des partisans et de l’attention des médias pour l’équipe de hockey masculine, voir AUL , Athletic Scrapbooks, I 23,2, Voyageur Athletics, 1995–1996, « In Need of Hockey Fans », s.d. ; « Enough Is enough », Lambda, 19 novembre 1992 ; « Hockey Vee fan », Lambda, 10 décembre 1992 ; « The reasons for the varsity sport cuts », Lambda, 2 novembre 2000. 35 AUL , Athletic Scrapbooks, I 23, 2, Voyageur, 1991–1992, « Laurentian Makes History by Capturing both the OUAA and OUWAA Nordic Ski Titles », s.d. ; « Laurentian’s best kept secret », Lambda, 12 septembre 1991 ; Laurentian Athletics Marketing and Communications Department, « Laurentian Athletics: Voyageurs and Lady Vees History », 3 juin 2009. 36 « Laurentian captures Wilson Cup by defeating McMaster », Lambda, 16 mars 2000. 37 Letter to Peter and Co., Lambda, 21 mars 1991. 38 Université Laurentienne, Bureau du registraire, Statistical Report on Enrolment and Admissions, 1986–1998 ; Facts and Figures, Institutional Research Office. 1999 ; Institutional Research Office, Datamart, 2000–2007. 39 Ministère de la Formation, des Collèges et des Universités de l’Ontario, « 2006–07 MultiYear Accountability Agreement Report-Back For Laurentian », p. 3. 40 « The student centre », Lambda, 3 septembre 1995. Chapitre 11 1 Gaétan Gervais, « L’enseignement supérieur en Ontario français (1848–1965) », Revue du Nouvel-Ontario, vol. 7 (1985), p. 43. 2 La lutte pour l’enseignement en français à l’École de commerce de la Laurentienne, que nous abordons au chapitre suivant, est très révélatrice à ce sujet. 3 CGUL , 10 septembre 1960, p. 76. 4 C’est ainsi que le père Charles Dubé fut exilé à Gravelbourg en Saskatchewan pour avoir lutté contre une université bilingue. Pour cette question de l’ACFEO , des jésuites et de l’Université Laurentienne, voir Pierre Ouellette, « Éducation et économie, 1927–1965 », dans Guy Gaudreau (dir.), Bâtir sur le roc. De l’ACFÉO à l’ACFO du Grand Sudbury (1910– 1987), Sudbury, Prise de parole, 1994, p. 80–88. 5 Donald Dennie, « Historique du bilinguisme à l’Université Laurentienne : 1960 à 1985 », avril 1986 (dorénavant le rapport Dennie). Voir aussi sa note de recherche : « Historique du bilinguisme à l’Université Laurentienne », Revue du Nouvel-Ontario, no 7 (1985), p. 115–118. 6 Annuaire de l’Université Laurentienne, 1964–1965, p. 18. 7 Edward J. Monahan, « Bilingualism at Laurentian University », septembre 1976, p. 5. 8 « Laurentian studies needs of declining French enrolment », Sudbury Star, 3  novembre 1969, p. 15. 9 Voir le procès-verbal de la réunion du Sénat du 31 octobre 1963. 10 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 24 mars 1966. 11 G. A. Bourbeau, « Rapport de l’année 1962–1963 », octobre 1963. 12 On remercie Alain Daoust, Chantal Beaulne et Shelley Duquette d’avoir notamment dépouillé les journaux de cette époque et de nous avoir fait connaître les activités de l’ADELFNO. Alain Daoust, « Les années 1960 » ; Chantal Beaulne, « La bataille pour la francophonie sur le campus de la Laurentienne pendant les années 1960 » ; Shelley n ot e s à pag e s 210–220

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Duquette, « La première année de l’AEF  » ; textes inédits rédigés dans le cadre du cours d’histoire 4165 au cours de la session 1995–1996. « Third annual conference of ADELFNO  », Sudbury Star, 10 décembre 1965, p. 11. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 26 novembre 1964. Initialement, Meakes avait proposé un délai de 90 jours, ce à quoi Campeau s’était objecté et avait proposé un amendement qui fut adopté à l’unanimité. Voir le procès-verbal de la réunion du 20 mai 1965. CGUL , 20 mai 1965. CGUL , 25 novembre 1965. Voir Monahan, « Bilingualism », p. 6. Carole Ann Ranta, « Looking at Laurentian’s bilingualism president forecasts greater demand », Sudbury Star, 17 août 1966, p. 16. Conrad Lavigne à Bill Davis, 12 octobre 1966, AO , Laurentian University General Correspondence, RG 32, 1, 1, Acc.18006, boîte M377. Le dépouillement des archives a révélé que le ministre avait reçu d’autres lettres allant dans ce sens, notamment l’une de Jacques de Courville Nicol, président de la section française de l’Association étudiante de l’Université Laurentienne qui adressait au ministre un dossier signalant l’urgence d’agir, sinon « Laurentian, the Bilingual University of the North, will have become an English University ». Bill Davis à Conrad Lavigne, 28 octobre 1966, AO , RG 32, 1, 1, Acc.18006, boîte M377. « French enrolment low in the universities, but costly venture », Sudbury Star, 25 mai 1966, p. 3. Monahan, « Bilingualism », p. 8. Sudbury Star, 19 octobre 1968, p. 1 et 3. « Meeting of the French Section of Laurentian University, Friday October 25th, 1968 ». Les deux autres sont le jésuite Gilles Garand de sciences religieuses et Yvon Gauthier professeur de philosophie. « Students request changes », p. 1. En fait le recteur a arrondi les chiffres en sa faveur puisque le pourcentage s’établit plutôt à 27 pour cent. CGUL , 29 novembre 1968. Procès-verbal de la réunion du Sénat, 18 décembre 1969. Peut-être que cette loi n’est pas étrangère à la décision du Sénat, en mars 1969, d’adresser en français toute correspondance officielle à un membre d’expression française « lorsqu’il est possible de le faire ». Un an plus tard, le département goûtera, en quelque sorte, à sa propre médecine, en faisant l’objet d’un sit-in de ses étudiants qui réclament des cours de littérature franco-ontarienne plutôt que de littérature française. Manifeste du 22 octobre 1969. CGUL , 31 octobre 1969. Procès-verbal de la réunion du Comité conjoint du bilinguisme et du biculturalisme, 14 décembre 1970. « Quits Laurentian Senate, cites problem of language », Sudbury Star, 24 septembre 1971, p. 1 et 3. Fernand Dorais, « Démission comme membre du Sénat », 23 septembre 1971. Entrevue avec André Girouard réalisée par Michèle Riou et Marie-Josée Beaudry à l’hiver 1996, dans le cadre du cours HIST 4165FA . Procès-verbal de la réunion du Comité du bilinguisme et du biculturalisme, 30 novembre 1970.

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40 Josée Bisson et Marko Roy, « Le réveil : la naissance d’une association étudiante francophone à l’Université Laurentienne », texte inédit rédigé dans le cadre du cours HIST 4165FA , en 1996. 41 « La Maison française », Réaction, vol. 3, no 1 (septembre 1973). 42 J. G. Hagey, Mémoire présenté à l’Université Laurentienne, mars 1971, p. 23–24. 43 En fait, le recteur de l’Université de Sudbury, d’Auteuil Richard, s’était montré plutôt hésitant face à cette recommandation. Voir l’article du Sudbury Star du 24 mars 1971 intitulé « Mixed reactions to French college idea », p. 3. 44 Ce n’est qu’en mars 1979 que l’on consentira à accorder aux étudiants francophones un espace physique qui leur est réservé sur le campus de la Laurentienne soit les anciens locaux C 305, C 306 et C 318, devenus aujourd’hui des salles de cours. Cette concession fut obtenue après bien des demandes et à la suite de l’occupation du 11e étage survenue l’année précédente. Chapitre 12 1 Voir Michel Rodrigue, « 1970–1975. Une nouvelle vision : la création collective », dans Guy Gaudreau (dir.), Le Théâtre du Nouvel-Ontario, 20 ans, Sudbury, TNO , 1991, p. 14. 2 Marie-Élisabeth Brunet, « La troupe universitaire présente un happening », Le Voyageur, 21 janvier 1970, p. 7 ; « Du théâtre pas comme les autres », Le Voyageur, 28 janvier 1970, p. 16. 3 Micheline Fournier-Thibault, André Paiement (1950–1978) : Avant tout un homme de son temps, Sudbury, Prise de parole, 2004, p. 56. 4 Rodrigue, « 1970–1975 », p. 14. 5 Julie Lafrenière, « Des luttes au consensus, 1965–1982 », dans Guy Gaudreau (dir.), Bâtir sur le roc : De l’ACFÉO à l’ACFO du Grand Sudbury (1910–1987), Sudbury, Prise de parole, 1994, p. 119. 6 Pour en savoir plus sur le rôle du gouvernement fédéral dans cet engouement pour l’animation socioculturelle, voir Valérie Malenfant, « La contribution des gouvernements fédéral et ontarien à la révolution culturelle : le cas du Nouvel-Ontario, 1969–1977 », M.A. (histoire), Université Laurentienne, 2005, 191 p. 7 Voir Michelle Boucher, « Animation socioculturelle à la Laurentienne », texte inédit rédigé dans le cadre du cours HIST 4165fa au cours de la session 1995–1996. Voir aussi Michel Bock, Comment un peuple oublie son nom. La crise identitaire franco-ontarienne et la presse française de Sudbury (1960–1975), Sudbury  Prise de parole et Institut franco-ontarien, 2001, p. 58–63. 8 Rapport Dennie, p. 12. 9 Laurent Alie, Thérèse Boutin, Fernand Dorais, Réjean Grenier, Yvan Rancourt et Gaston Tremblay, « Éditorial », Réaction, 15 mars 1973, p. 6. 10 Entrevue avec Yvan Rancourt, hiver 1996. 11 Bock, Comment un peuple, p. 62. Boutin a expliqué son geste dans une lettre qu’elle a fait publier dans le journal étudiant ; voir Réaction, octobre 1973, p. 12. 12 Voir Stéphanie St-Pierre, « Le drapeau franco-ontarien : “Puissent ses couleurs nous rallier dans une nouvelle amitié et fraternité”, 1975–1977 », dans Guy Gaudreau (dir.), Le drapeau franco-ontarien, Sudbury, Prise de parole, 2005, p. 32. 13 Laurent Alie, « Élection à l’association étudiante francophone », Le Voyageur, 1er mai 1974, p. 7. 14 « Laurentian francophones vote “split” », Sudbury Star, 9 octobre 1974, p. 3.

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15 Stephen Nancoo, « Reaffirm bilingualism in Laurentian planning. New priorities outlined », Sudbury Star, 3 avril 1973, p. 1. 16 « Special scholarship programs: Bilingualism stressed in goals for Laurentian », Sudbury Star, 5 juin 1973, p. 1. 17 Voir l’article intitulé « Culture limit at Laurentian is criticized », p. 1. 18 T.  H.  B. Symons, Report of the Ministerial Commission on French-Language Secondary Education, Toronto, 1972, p. 56. 19 Rapport Dennie, p. 16. 20 Voir Report of the Committee on University Affairs of Ontario for 1972–73 and 1973–74, Toronto, 1974, p. 19. 21 Procès-verbal de la réunion du Sénat, 21 mars 1974. 22 Comme le montre l’épisode de l’élection du directeur du département de psychologie, en 1975, cette politique n’allait pas tarder à démontrer son caractère impraticable. En effet, le directeur alors en poste, M. Moroz, pressé par des collègues francophones, s’était enquis auprès du secrétaire du Sénat, Jack Porter, de la portée concrète de cette politique qui le rendait non éligible à son poste. Poste qu’il conservera pourtant. Voir la lettre de M. Moroz à J. Porter, 18 mars 1975. 23 Monahan, « Bilingualism », p. 11. 24 Ce rapport intitulé « The Work of the Long-Term Academic Planning Committee During the Period January 23, 1975–April 8, 1975 », compte comme signataires le recteur Monahan, le vice-recteur Larouche et les professeurs Buse, Kitching, Todd et Tombalakian. 25 Rapport Dennie, p. 18–19. 26 Gaétan Gervais, « Pour une réforme des programmes en français à l’Université Laurentienne », 1976, p. 2. 27 J. Porter à B. Cazabon, secrétaire du Comité des affaires francophones, 20 avril 1976. 28 Dennie, « Historique du bilinguisme à l’Université Laurentienne », p. 116. 29 Voir le vol. 3, no 4. 30 « L’émergence de réalités nouvelles », Revue du Nouvel-Ontario, p. 8. 31 Le titre exact de ce rapport est très explicite quant aux intentions initiales : « Report of the Joint Senate/Board Committee to Assess and Make Recommandations to Simplify Academic Administration ». 32 André Girouard, « Le C.E.F. Pourquoi? », document présenté au Sénat et rédigé le 15 octobre 1979, p. 2. 33 Proposition soumise par le Comité des affaires francophones à la réunion du Sénat, 22 septembre 1977. 34 Procès-verbal de la réunion du CEF, 22 mars 1979, p. 1. 35 « Rapport du Conseil de l’enseignement en français », GUL , vol. 6, no 4 (décembre 1978), p. 2. 36 Voir Rapport Annuel, Université Laurentienne, 1980–1981, p. 38. 37 « Le Sénat adopte un rapport de planification triennale », GUL , vol 10, no 4 (mai 1982), p. 1. 38 Voir André Girouard, Document d’étude du CEF no 4, 4 février 1981. 39 Voir le procès-verbal de la réunion du CEF, 11 mars 1980, p. 2. Voir aussi le Rapport du CEF au Comité du budget du 6 juin 1979. 40 Girouard, Document d’étude du CEF no 4, p. 2. 41 Compte rendu de la réunion de l’Assemblée des professeurs francophones, 5 mai 1986, p. 1. 42 Voir la 4e recommandation approuvée par le Sénat lors de la rencontre du 15 octobre 1981. 43 « Nouveau mandat confié au CEF  », GUL , 12 novembre 1981, p. 7. 44 « Le Sénat adopte un rapport de planification triennale », GUL , 5 mai 1982, p. 2. 45 « Le Sénat adopte un rapport de planification triennale », GUL , 5 mai 1982, p. 2.

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Procès-verbal de la séance du 3 décembre 1974 du Comité des affaires francophones, p. 2. Voir la note de service de David Gillingham à Jack Porter, 6 décembre 1982. Rapport Dennie, p. 21. Note de service de Henry Best au président du Conseil, 7 février 1984. Note de service d’André Lacroix, président du Comité conjoint du bilinguisme, à J. Porter, 11 mai 1983. Chapitre 13



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Gaétan Gervais à Jack Porter, 7 janvier 1985. Comité consultatif spécial du fonds en langue française, « Rapport au Sénat », 18 avril 1986. Voir Joint Committee on Bilingualism, « Proposed plan work for 1986–1987 », p. 1. « Nomination d’un vice-recteur adjoint », GUL , 3 février 1988, p. 3. « L’évolution de l’enseignement en français : Extraits de l’allocution du Recteur au corps professoral sur l’état de l’union », GUL , Rapport spécial, 14 décembre 1988, p. 3. « Rapport du vice-recteur à l’enseignement et de la vice-rectrice adjointe », réunion du Sénat, 19 avril 1990, p. 1. M. Dewson à John Daniel, 17 février 1989. « Rapport du vice-recteur à l’enseignement et à la recherche sur le modèle bicaméral », réunion du Sénat, 17 juin 1993. « Rapport du vice-recteur […] sur le modèle bicaméral », réunion du Sénat, juin 1993, p. 4. A. Roberge, R. Smith et G. Tesson, « Recommandations au recteur sur les modifications de la structure administrative », 18 février 1999, p. 5. « La gestion de la francophonie laurentienne. Trois options », 1998, p. 4. « Rapport du vice-recteur à l’enseignement et de la vice-rectrice adjointe », réunion du Sénat, 19 avril 1990, p. 4. « Rapport du vice-recteur à l’enseignement et à la recherche sur le modèle bicaméral », réunion du Sénat, 17 juin 1993, p. 1. « French university groundwork being laid at Laurentian », Sudbury Star, 16 juillet 1980, p. 3 B. A. Wilson à H. K. Fisher, « Study on French language education at the post-secondary level », 2 juillet 1980, AO , ministère des Collèges et Universités, Francophone and Native Affairs, RG 32, 1, 1, Acc.23300, RC 12, dossier 5020-4. C. Lacombe à B. A. Wilson, « Visit to Laurentian and Hearst », 5 août 1980, AO , MCU, University-General, RG 32, 1, 1, Acc.20216, RC 3, dossier 3030-5. Voir le volume 7 qui compte 128 pages dont 6 articles. Hector-L. Bertrand, «Une université française publique à Sudbury », Le Voyageur, 8 février 1989, p. 4. Voir Derek Nelson, « “Dialogue of the deaf” on bilingual policy », Sudbury Star, 28  février  1989, p. 4 ; Harold Carmichael, « More than 800 graduate from Cambrian College: Setting up separate community colleges by race and religion not a good idea », Sudbury Star, 29 mai 1989, p. 21 ; John Daniel, « Laurentian serves francophones, anglophones, natives “proudly” », Northern Life, 17 juin 1989, p. 4. « Daniel lends support to bilingualism », Sudbury Star, 10 février 1989, p. 2. John Daniel, «“Separatist forces” at work in Laurentian », Sudbury Star, 25 mars 1989, p. 4.  Benoît Cazabon, « French university », Sudbury Star, 10 août 1989, p. 5. « Laurentian president questions feasibility of French university », Sudbury Star, 1er août 1989, p. 3.

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24 Hector-L. Bertrand, « Nous sommes toujours en faveur d’une université française », Le Voyageur, 13 décembre 1989, p. 4 ; voir aussi ses éditoriaux du 1er novembre 1989 et du 28 février 1990. 25 Voir « L’Université de l’Ontario français. Les pessimistes ont tort ! », Le Voyageur, 13 décembre 1989, p. 12–13. Chapitre 14 1 J. E. Havel, Politics in Sudbury, Sudbury, Presses de l’Université Laurentienne, 1965, p. 5. Selon cette étude, « la proportion plus élevée d’hommes que de femmes indique que Sudbury attire les immigrants ». Au même moment, la proportion est de 107 hommes pour 100 femmes en Alberta et de 108 hommes pour 100 femmes en Saskatchewan. 2 Guide de l’ACPU 1979, Résolution du conseil, juin 1961, p. 40. 3 Ce total a été établi à partir de l’annuaire téléphonique de l’université pour 2008. Merci à Kaleigh Bradley pour son travail. 4 Aux cycles supérieurs, la proportion est de 57 femmes pour 43 hommes. Ces statistiques viennent du Bureau de la recherche institutionnelle de l’Université Laurentienne. Elles reposent sur des données compilées de 2000 à 2007 (Base de données du Bureau de la recherche institutionnelle). 5 Encore en 1980, le Sudbury Star présente Pat Pickard et Wendy Jerome de cette manière. 6 « Wife of Laurentian president at best in prize-winning novel », Sudbury Star, 16 décembre 1961. 7 « To receive guests », Sudbury Star, 19 octobre 1963 ; « Governors, wives tour site, Laurentian shows impressive progress », Sudbury Star, 22 octobre 1963, p. 3. 8 « Three have tea in library », Sudbury Star, 23 mai 1963, p. 15. 9 CE xUL , 15 avril 1964. En fin de compte, c’est l’IODE qui fournit à l’Université sa masse d’apparat. 10 « University Women’s Club scholarships presented to four Sudbury students », Sudbury Star, 20 septembre 1964. L’Imperial Order Daughters of the Empire est un autre groupe de femmes qui remet d’importants dons à l’université à cette époque. Voir notamment « Nickel chapter of IODE donates flag and flagpole to Laurentian », Sudbury Star, 29 octobre 1963, ainsi que la contribution de 8 000 $ du chapitre Elizabeth-Fry de l’IODE , selon l’article « Gift to Laurentian », Sudbury Star, le 13 novembre 1964. 11 L’Université acquiert la résidence de la rue John à l’automne 1965. La maison est décrite comme « une des seules, sinon la seule maison de Sudbury à posséder ce qu’il faut pour permettre au recteur de remplir ses fonctions, ayant de grandes salles de réception essentielles pour les réunions universitaires, une salle à manger séparée et un cabinet d’étude ». « Merwin home and two others nearby are bought by Laurentian University », Sudbury Star, 11 septembre 1965. 12 Pour de plus amples détails sur la carrière politique de Hartman à Sudbury, voir C. M. Wallace et Ashley Thomson (dir.), Sudbury: Rail Town to Regional Capital, Toronto, Dundurn Press, 1993, p. 207, 221 et 252. 13 Sudbury Star, 12 juin 1964, p. 13 : six femmes parmi les vingt-cinq diplômés, toutes de Huntington ; 5 juin 1965, p. 5 : treize femmes parmi les quarante-neuf diplômés ; et 24 juin 1966 : vingt-neuf femmes parmi les quatre-vingt-dix-sept diplômés. En 1961, les femmes représentent 13 pour cent de la population étudiante. Ce taux augmente à 18 pour cent en 1962 et se maintient aux environs de 24 pour cent jusqu’à 1968 et 1969, alors qu’il atteint 27 pour cent.

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14 AUL , Huntington, V, 3 Buildings – Residences Women 1964–1965. 15 « Students make survey of Sudbury. Most want women to stay at home », Sudbury Star, 11 janvier 1972. 16 CE xUL , 28 avril 1967. 17 « Perhaps views changed by now », Sudbury Star, 5 octobre 1964. 18 Ibid. 19 « Toronto paper sees Sudbury as mere “forest clearing” ». Sudbury Star, 27 août 1965. L’article est une réplique à Andrew Osler, « Bilingual Laurentian blasted out of the wilderness », Toronto Star, 25 août 1965. 20 « Two women, three men gain Laurentian posts », Sudbury Star, 1er octobre 1968. 21 AUL , po63, V, 2c procès-verbaux de l’APUL , 10 octobre 1968 ; ibid., 3 avril 1969. 22 Report of the Royal Commission on the Status of Women, 1970, p. 263. Pour en savoir plus sur la position et les recommandations de la commission, eu égard aux garderies, voir le chapitre 4 en particulier. 23 CE xUL , 25 mars 1971. 24 « Economic restraint blamed for lack of women athletes », Sudbury Star, 7 mars 1972. Pour en savoir plus sur Hoffman et sur la situation des femmes dans le sport au Canada, voir M. Ann Hall, The Girl and the Game: A History of Women’s Sport in Canada, Peterborough, Broadview Press, 2002 et Helen Lenskyj, « Whose Sport? Whose Tradition? Canadian Women and Sport in the Twentieth Century », International Journal of the History of Sport, vol. 9, no 1 (1992), p. 141–150. Chapitre 15 1 AUL , PO 63, IV, 44 « Laurentian University Faculty Association Committee on the Status of Women », 22 février 1973. 2 Mary Kinnear, « Disappointment in Discourse: Women University Professors at the University of Manitoba », Historical Studies in Education, vol. 4, no 2 (1992), p. 269. 3 Ibid. 4 Université Laurentienne, « Presentation to the Committee on University Affairs », 12 novembre 1973, Sudbury, Ontario, 7, « Status of Women ». 5 « Report on Academic Women », Université de l’Alberta, 1975, p. 2. 6 Comité consultatif du recteur sur le statut de la femme, « Status of Women Report », Sudbury, Université Laurentienne, 1979–1980, p. 4. 7 Ibid., p. 6. 8 « Report on Academic Women », Université de l’Alberta, 1975, p. 20. 9 « Men can discover new perspectives through women studies » [sic], Sudbury Star, 3 avril 1978. 10 Le département d’histoire offre un cours intitulé Women in Society à compter de l’automne 1979. « L.U. introduces course on women in society », Sudbury Star, 26 septembre 1979, p. 4. 11 En 1989, l’Université crée un programme menant à un diplôme en « études sur la femme », prouvant que l’offre de cours s’est grandement diversifiée au sein de plusieurs départements sur le campus. Le programme repose sur la collaboration de plusieurs départements, quoique l’Université Thorneloe, qui le gère, compte toujours au moins deux professeures d’études féministes à temps plein depuis 1989. Sur l’histoire de la création des programmes d’études féministes au Canada, voir Wendy Robbins, Margrit Eichler, Meg Luxton et Francine Descarries (dir.), Minds of Our Own: Inventing Feminist Scholarship and Women’s Studies in Canada and Quebec, 1966–1976, Waterloo, Wilfrid Laurier University Press, 2008.

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12 « Laurentian governors joined by three women », Sudbury Star, 3 février 1973. La première femme à siéger au Conseil des gouverneurs a été la docteure Faustina Kelly Cook vers la deuxième moitié des années 1960. 13 Sudbury Star, 3 février 1973 ; « Status of Women Report », 1980, p. 6 ; CGUL , 1er juin 1984. 14 Dans son rapport de 1980, le CCR sur le statut de la femme recommande notamment « [q]ue les trois universités fédérées – Sudbury, Thorneloe et Huntington –, de même que le gouvernement de l’Ontario, soient incités à nommer plus de femmes au Conseil des gouverneurs de l’Université Laurentienne ». « Status of Women Report », 1980, p. 7. 15 Sur cette question, voir AUL , PO 63, IV, 8, 15 et 29 octobre 1974 et 17 décembre 1974. 16 « Status of Women Report », 1980, p. 6. 17 Le salaire moyen des hommes se monte à 35 433 $ et celui des femmes à 29 801 $. Sudbury Star, 6 février 1982. 18 Sénat, 19 juin 1975. Voir aussi « Status of Women Report », 1980, d’où vient la citation. 19 « Preamble », « Report of the President’s Committee on the Status of Women at Mount Allison University », 17 juin 1975. 20 Ce qu’il advient du CCR entre 1976 et 1979 n’est pas clair, mais son mandat suivant sa réactivation figure au procès-verbal du Conseil du 10 décembre 1980. 21 « Status of Women Report », 1980, p. 1. 22 Ibid. 23 Ibid., p. 4. 24 Ibid., p. 6. 25 Ibid., p. 7. 26 J. M. Porter, secrétaire du Sénat, à P. E. Ménard, directeur du personnel, « Memorandum », 23 juin 1980, correspondance du Sénat, 1980–1981. 27 LUFA Bulletin, vol. 1, no 7 (mars 1982). 28 Le patron de Parker, Alan Ritchie, directeur des services informatiques, conteste l’affirmation voulant qu’il ait menacé la secrétaire de congédiement, mais elle raconte qu’il lui a dit « que si elle s’oppose tellement [à servir le café], elle devrait penser à se trouver un autre poste et qu’il l’aidera si elle le souhaite ». « Told to think about looking for another job: Secretary at Laurentian objects to serving coffee », Sudbury Star, 7 mars 1981, p. 1. 29 Wilfred List, « A secretary is not a waitress, arbitrator rules in coffee case », Globe and Mail, 31 juillet 1981, p. 1. 30 Branco Rayakovich, cité dans « Told to think about looking for another job: Secretary at Laurentian objects to serving coffee », Sudbury Star, 7 mars 1981, p. 1. 31 Sudbury Star, 7 mars et 20 juillet 1981 ; Globe and Mail, 31 juillet 1981. 32 « Laurentian adopts harassment policy », Northern Life , 7 juillet 1982, p. 10. 33 Ibid. 34 Pour le texte complet de la politique contre le harcèlement sexuel adoptée par le Sénat le 20 mai 1982, voir LUFA Bulletin, 2, 1er septembre 1982, ou CGUL , 24 septembre 1982. 35 AUL , PO 63, IV, 40, Janet Sabourin, présidente, Comité consultatif du recteur sur le statut de la femme, à L. Wagner, président, APUL , 6 avril 1984. Chapitre 16 1 Les statistiques dans cette section ont toutes été compilées par Andrea Levan, embauchée grâce au soutien financier de la Direction générale de la condition féminine du ministère des Collèges et des Universités à titre de recherchiste auprès des coordinatrices du projet sur l’équité en matière d’emploi Margaret Kechnie et Patricia C. Hennessy. Voir « L’objectif

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de la Laurentienne : l’égalité d’emploi », Sudbury, Université Laurentienne, 1987, p.  54, tableau 12. La nature exacte du troisième poste administratif n’est pas claire. Le rapport indique « directeurs », ce qui pourrait s’appliquer à une des quatre options suivantes : le Centre de recherche sur l’exploitation minière et l’environnement minier (CREMEM), le Conseil de l’enseignement en français (CEF), l’École des études supérieures et les services de la bibliothèque. Kechnie et Hennessy, « L’objectif de la Laurentienne », p. 56, tableau 14. Ibid., p. 64, tableau A3. Ibid., p. 68, tableau A10. CGUL , 13 décembre 1985, cité dans « L’objectif de la Laurentienne », p. 2. Ibid. « Remerciements », dans « L’objectif de la Laurentienne », . Canada, Loi sur l’équité en matière d’emploi, L.C. 1995, ch. 44, article 2, http://lois.justice.gc.ca/PDF/Loi/E/E-5.401.pdf. Pour en savoir plus sur l’équité en matière d’emploi, voir http://www.chrc-ccdp.ca/ employment_equity/default-fr.asp. Kechnie et Hennessy, « L’objectif de la Laurentienne », p. 2. Ibid., p. 16, recommandation 1.1. En vérité, il y a deux professeures munies de la permanence au sein du département de commerce au moment de l’étude. La liste est curieuse et pourrait s’allonger, car d’autres départements et programmes sans femme avec permanence mériteraient d’y figurer : philosophie, études de l’enfant, génie, géologie et physique et astronomie. Ibid., p. 46, tableau 4. Ibid., p. 27. Ibid., p. 29. Ibid., p. 28, schéma 5. Pour un aperçu historique de la législation canadienne en matière d’équité salariale aux niveaux fédéral et provincial voir http://www.collectionscanada.gc.ca/ archivesweb/20071123010213/www.justice.gc.ca/fr/payeqsal/6026.html « Status of Women Report », 1980, p. 7. Pour mieux comprendre l’équité salariale et ses enjeux, voir http://www.payequity.gov.on.ca/peo/french/overview.html Université Laurentienne et Syndicat des employés de l’Université Laurentienne, Joint Job Evaluation System Handbook. En vigueur le 1er juillet 1992, p. 1. Programme d’équité salariale de l’Université Laurentienne, 22 décembre 1989, approuvé par Branko Rayakovich, directeur du personnel de l’Université Laurentienne, et Gisèle Pageau, présidente du SEUL . « Campus sexism in spotlight following Montreal Massacre », Sudbury Star, 27 décembre 1989. Voir notamment Eileen Goltz et Pat Bailey, au nom du conseil de l’APUL , à tous les membres de l’APUL , « Report on the Meeting of Laurentian University Women Faculty Held January 31, 1992 », 13 mars 1992 ; AUL , J50, 3, Plan stratégique, « Teaching and Research ». « Status of Women achievement awards », GUL (été 2001), p. 22. Voir http://142.51.14.1/Laurentian/Home/Departments/Status+Of+Women/ Terms+of+Reference.htm?Laurentian_Lang=fr-CA. Doug Goldsack, doyen de la faculté de sciences et de génie, aux directeurs des départements de sciences, au directeur de l’École de génie et aux vice-doyens, 6 mars 1992, UL , G 8, 3, Sciences et génie, « Advisory Committee on Engineering ». Ibid.

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27 « LU “insists” on women », Sudbury Star, 19 juin 1993. Il est clair que l’Université fait tout ce qu’elle peut pour attirer des femmes à l’École de génie et se conformer au programme d’équité en matière d’emploi. Le directeur des relations avec le personnel enseignant demande un protocole d’entente de l’APUL par lequel celle-ci accepte la nomination d’une femme qui n’a pas encore son doctorat, mais se montre prête à s’engager à enseigner pendant trois ans et à prendre ensuite deux ans pour terminer ses études de IIIe cycle. Hermann Falter à Wendy Jerome, présidente de l’APUL , 16 février 1993. 28 A. Farah, directeur, École de génie, à P. Cappon, vice-recteur à l’enseignement et à la recherche, 24 septembre 1992. Chapitre 17 1 Voir notamment S. V. LaSelva, Moral Foundations of Canadian Federalism, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 1996, p. 42–45. 2 Sénat, 24 octobre 1960 ; AUL , P 109, II, B , 1, 1, Ed Newbery à Ben Avery, 29 août 1961. 3 Ibid., I, 30, 4, « The Report of the Special Committee of the Board of Governors of Laurentian University, July 9, 1965 », p. 26 ; AO , RG 6-44, Ministry of Finance Policy Planning Division Subject Files, Laurentian University 1960–1966, D. L. James, comité des finances, à John Robarts, ministre de l’Éducation, 23 novembre 1960 ; AUL , P 109, I, 1, 1, correspondance du Conseil des régents, Harold Bennett à Earl Lautenschlager, 29  octobre  1962 ; CGUL , 18 janvier 1963 ; CE xUL , 24 avril 1963 ; CGUL , 22 février 1962, AUL , II, B , 1, 2, Sénat de Huntington, 6 janvier 1961 ; ibid., II, I, 4, 2, Newbery au comité chargé de conseiller l’architecte, 26 mars 1962. 4 CGUL , 24 novembre 1964 ; AUL , III, A , 1, 1, Newbery à Claude de Mestrel, 6 novembre 1963 (c’est Newbery qui souligne) ; ibid., III, A , 1, 2, Newbery au rév. Foster Hilliard, 11 novembre 1963. 5 Ibid., I, 1, 1, Newbery à Donald Best, 30 août 1962 ; CE xUL , 20 février 1963 ; CGUL , 30 juillet 1963. 6 Ibid., 9 décembre 1963 ; AUL , I, 70, 4, Bélisle à Avery, 5 février 1964 ; CGUL , 11 mars 1964 ; CE xUL , 18 mars 1964 ; AUL , I, 1, 1, Newbery à Donald Best, 13 février 1964. 7 Ibid. 8 CGUL , 24 novembre 1964, 22 janvier 1965 ; Sudbury Star, 22 mai 1965 ; AUL , I, 30, 4, présentation de Mullins au comité spécial, 9 juin 1965, reproduit dans « The Report of the Special Committee of the Board of Governors of Laurentian University », 9 juillet 1965, p. 23. 9 Ibid., « Synopsis of comments made at June 3rd Meeting », procès-verbal de la quatrième réunion du comité spécial du Conseil, 15 juin 1965. 10 Ibid., III, A , 1, 2, Newbery à John S. Bonnell, 12 octobre 1965 ; ibid., I, 30, 4, « The Report of the Special Committee of the Board of Governors of Laurentian University », 9 juillet 1965, p. 4, 22 et 36–40 ; CGUL , 9 juillet 1965. 11 AUL , I, 30, 4, « The Report of the Special Committee of the Board of Governors of Laurentian University », 9 juillet 1965, p. 31 ; CGUL , 19 mai 1966. 12 CE xUL , 23 mars 1966 ; CGUL , 19 mai 1966 ; CE xUL , 22 juin et 12 août 1966. 13 CGUL , 25 mai 1967. 14 Ibid., 18 octobre 1968. 15 En 1961, par exemple, la NOUA a reçu des promesses de don valant plus de 1,3 million de dollars pour l’Université Huntington, mais à peine la moitié est versée quatre ans plus tard. Voir AUL , P 109, II, A , 2, 10, NOUA Financial Statements, 22 février 1961 ; ibid., II, B , 1, 1, D. P. Best à D. S. Holbrook, 28 juin 1965 ; ibid., III, A , 1, 5, Newbery à H. J. Muehlamm,

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24 mai 1967 ; ibid., Newbery à Donald Best, 29 mai 1967 ; ibid., F, 67, 3, Université Laurentienne, « Brief Regarding Laurentian University and Federated Colleges », mai 1967. Ibid., P109, III, A , 1, 6, Newbery au rév. D. Graham Tipple, 12 février 1968 ; ibid., Newbery au rév. R. C. Constant, South River, 19 février 1968 ; ibid., I, 1, 1, Staff Brief to R. T. Runciman, chair, Board of Regents, 26 septembre 1968 ; ibid., Runciman to Ladies and Gentlemen, 30  septembre 1968 ; ibid., « Interim report of the Huntington University Committee for Revision and Renewal », circa janvier 1969 ; CGUL , 19 février 1969 ; CE xUL , 19 mars et 16 avril 1969 ; Sudbury Star, 2 avril 1969. CGUL , 18 mai 1967 ; CE xUL , 19 mars 1969 ; Sudbury Star, 23 janvier 1970. CE xUL , 16 avril et 10 décembre 1969, 23 janvier 1970 ; AUL , 44, 3, F. A. Peake à G. Lafrenière, 12 janvier 1971. CE xUL , 8 août 1972 ; AUL , F, 70, 1, Monahan aux membres du Sénat, 13 février 1974 ; ibid., « Draft Agreement between Laurentian University and the Federated Colleges », 31 mars 1978. CGUL , 6 décembre 1974. CE xUL , 21 novembre 1978, 30 janvier et 16 mai 1979. Notes du Sénat, janvier 1993–janvier 1994, « Commission des recteurs sur les universités fédérées », 18 novembre 1993, p. 1 ; CGUL , 25 septembre 1992 et 1er octobre 1993 ; CE xUL , 8 mars 1994 ; CGUL , 22 avril 1994. Andrii Krawchuk, recteur, Université de Sudbury, « Responses to a request to the presidents of the federated universities on what they regard as essential qualifications for the position of President and Provost of Thorneloe University », sans date, transmis à Matt Bray, 16 juillet 2009. Chapitre 18

1 Vingt-quatre des trente-quatre professeurs à temps plein sont bilingues. CGUL , 25 août 1960, annexe V. 2 Statistiques fournies à l’auteure par le bureau de l’APUL , juillet 2008. 3 Pour consulter un échantillon du formulaire utilisé pour cet arrangement, voir AUL , PO 63, II, A , 1.2 « Faculty/Salaries ». 4 Voir CGUL , 25 août 1960, annexe V, 30 mai 1961, annexe III et 28 mai 1962, annexe III. 5 La constitution fait manifestement l’objet de plusieurs révisions au cours des premières années. Pour consulter deux versions de la première heure, voir AUL , PO 63, I, A , 1, « Constitution de l’association des professeurs de l’université laurentienne de Sudbury », 30 janvier 1961 et « Constitution of the Laurentian University of Sudbury Faculty Association, Revised text », 31 janvier 1963. 6 AUL , PO 63, III, 2, LUFA Financial Report, 12 mars 1962. 7 D. D. Carter, « Collective Bargaining for University Faculty: A Legal Perspective », Canadian Journal of Higher Education, vol. 5, no 1 (1975), p. 25–31 et Bernard Adell, « The Legal Framework of Faculty Collective Bargaining: Some Short Questions and Some Long Answers », Canadian Journal of Higher Education, vol. 5, no 2 (1976), p. 57–75. 8 W. M. Sibley, « Modes of University Government », Canadian Journal of Higher Education, vol. 5, no 1 (1976), p. 19–27. 9 Rapport annuel du Conseil des gouverneurs de l’Université Laurentienne (ci-après Rapport annuel du Conseil), 30 mai 1961. 10 CGUL , 24 novembre 1964. 11 AUL , PO 63, V, 2, b, Mullins aux professeurs et au personnel, 7 octobre 1965.

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12 CE xUL , 23 août 1967. 13 CE xUL , 21 juin 1967 ; « Laurentian takes initiative to find housing for new staff », Sudbury Star, 16 juillet 1967, p. 2. 14 « Present the Laurentian sde of Randolph Apartments issue », Sudbury Star, 14 juillet 1967, p. 2. 15 AO , RG 3-26, Office of the Premier, Robarts : correspondance, boîte 426, dossier « Laurentian University 1961–1965 », dossier « Laurentian University Jan–Dec 1967, Correspondence, Robarts, Davis, John R. Mason (Department of Economic and Development) and tenants of the Randolph Apartments ». 16 AO , RG 2-36, Robarts à Davis, 12 juillet 1967. 17 Ibid., Davis à Robarts, 7 septembre 1967. 18 Ibid., John R. Mason à Robarts, 24 août 1967. 19 CE xUL , 12 mai 1972. 20 « Sudbury’s university classes scattered across the city », Sudbury Star, 4 novembre 1960, p. 13. En plus des étudiants inscrits à temps plein, selon cet article, 429 personnes suivent des cours du soir en vue de l’obtention d’un diplôme et 188 étudient les mathématiques et l’électricité grâce au service d’enseignement à distance. 21 « Total of 51 new teachers will be at Laurentian when classes resume », Sudbury Star, 8 juillet 1967, p. 3. 22 Ibid. 23 « High percentage of foreigners on Laurentian University staff », Sudbury Star, 20  janvier 1969, p. Z 7. 24 AUL , PO 63, IV, 13, 2, Havel, vice-président de l’APUL , au Conseil des gouverneurs. 25 AUL , PO 63, IV, 13, 2, « Revised Regulation 64–1 (December 31, 1964) Policy on Appointments, Tenure, Promotion, Teaching Load and Leave ». Le 11 janvier 1965, le professeur Berg informe par écrit le recteur Mullins que l’APUL a approuvé le document après un amendement mineur qui substituait le mot plein temps par le mot permanent à deux endroits. 26 AUL , PO 63, IV, 13, 2 « Revised University Regulation 64-1 (December 31, 1964) ». 27 Michiel Horn fait valoir que l’Université de Toronto adopte des lignes directrices sur les embauches, les promotions et la permanence en 1967. « D’autres conseils de gouverneurs [font] le même genre de choses » à cette époque, dit-il. Michiel Horn, Academic Freedom in Canada: A History, Toronto, University of Toronto Press, 1999, p. 305. 28 AUL , PO 63, IV, 13, 2, « Revised University Regulation 64-1 (December 31, 1964) ». 29 AUL , PO 63, II, A , 1, 1, « Faculty Employment Policy in Laurentian University of Sudbury, S. G. Mullins, President, November 1963 ». 30 AUL , PO 63, IV, 13, 2, « Revised University Regulation 64-1 (December 31, 1964) », p. 6. 31 AUL , PO 65, II, A , 1, 1, « A Report [of] The Committee on Salary, Pensions and Fringe Benefits, Faculty Association of Laurentian University of Sudbury », octobre 1965. Le comité comprend J. Chung (président), économie, C. Botton, mathématiques, P. Matton, S.J., biologie, A. Queen, chimie, J. Willes, administration des affaires, et R. Winter, économie. 32 Ibid., tableau I, p. 13. 33 Ibid., p. 3. 34 AUL , PO 63, IV, 39, 1, G. I. Clarke à F. B. Lavoie, 31 juillet 1970. 35 « Laurentian teachers threaten strike over salary dispute », Sudbury Star, 15 septembre 1970, p. 1. 36 « Suggest plan to end recess at Laurentian », Sudbury Star, 3 octobre 1970, p. 3. 37 « Senate “Recess” at Laurentian Slices Attendance », Sudbury Star, 2 octobre 1970, p. 3. 38 Ibid.

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39 « Laurentian in “serious financial situation,” Senate is warned », Sudbury Star, 27 novembre 1970, p. 1. 40 « Laurentian “referee” advises Board, Senate to reform procedures », Sudbury Star, 23 mars 1971, p. 1 et 3. 41 AUL , F, 60, 3, « Press Releases », 2 février 1971. Chapitre 19 1 B. L. Adell et D. D. Carter, Collective Bargaining for University Faculty in Canada, Kingston, Ontario  The Industrial Relations Centre, Queen’s University, 1972, p. 3. 2 D. Owen Carrigan, « Collective Bargaining in Canadian Universities », International Journal of Institutional Management in Higher Education, vol. 1 (1er mai 1977), p. 19. 3 AUL , PO 63, II, A , 1, 1, Gaucher, Président, APUL , à l’ACPPU, 19 janvier 1963. Le président de l’APUL invite l’ACPPU à se pencher sur le non-renouvellement du contrat du professeur Léo Paré, du département de philosophie. Des situations semblables font encore l’objet de discussions plus de quinze ans plus tard. Archives nationales du Canada, Fonds ACPPU, dossier : Laurentienne – Généralités, Ted Bartley, agent de négociation collective à l’ACPPU, à Roland Penner, président, ACPPU, 12 juillet 1979. Bartley avise Penner qu’à la Laurentienne, « les nouvelles embauches semblent désormais toutes à durée prédéterminée […] De plus, plusieurs personnes recommandées par le Sénat au printemps dernier pour des nominations probatoires craignent de n’être embauchées qu’à la session, mais n’en savent toujours rien. Roy Kari me dit que […] les choses sont habituellement gérées au cas par cas. » 4 Le cas de Léandre Page, professeur de français, déclenche un tollé à l’été 1970 quand un collègue de Page découvre que ce dernier est « soupçonné d’avoir accumulé un dossier criminel étoffé en Europe avant son arrivée au Canada en 1965 ». Il s’avère que Page a inventé ses soi-disant qualifications universitaires. En appel d’une ordonnance d’expulsion, il remet finalement sa démission à l’Université le 4 août 1970. Le Sudbury Star consacre plusieurs articles à cette histoire. Voir notamment « Laurentian professor fights extradition over alleged record », 7 août 1970, p. 1, « Laurentian Senate meeting over french professor issue », 11 août 1970, p. 3, « Resignation of professor is accepted », 12 août 1970, p. 1 et 3. 5 Le cas d’Artin Tombalakian fait plusieurs fois les manchettes dans le cadre d’une bataille légale de 20 mois engagée après qu’Henry Best a remplacé Tombalakian à la direction de l’École d’ingénierie, en mars 1978. Le professeur refusant de se plier à la décision du recteur, celui-ci accuse celui-là de « comportement non professionnel et de négligence constante de ses devoirs [qui] mettent à risque la reconnaissance des nouveaux programmes d’étude de l’École ». « Bitter Tombalakian arbitration hearings begin », Sudbury Star, 19  septembre 1979, p. 4. Après la tentative de Best de faire renvoyer Tombalakian de l’Université, la cause se rend en arbitrage, où une entente est annoncée le 1er décembre 1979. Selon le Sudbury Star, les allégations se voient toutes retirées et l’Université accepte de payer les frais juridiques encourus par Tombalakian. « Hatchet buried on Laurentian legal hassle », Sudbury Star, 1er décembre 1979, p. 3. 6 De tels souvenirs de ces décisions et de la contestation professorale à leur endroit sont partagés par des membres de l’APUL comme Graeme Mount, qui a narré dans un courriel à l’auteure son travail au sein d’un comité chargé de se pencher sur ces questions. 7 AO , RG 32, 1, 1 Acc.1800 G , boîte RCM 386, dossier 3030-5-4 « Universities – General – Laurentian Staff Problems 1974 », Bud Germa, député provincial de Sudbury, à l’honorable James Auld, 22 juillet 1974. 8 Carrigan, « Collective Bargaining in Canadian Universities», p. 19.

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9 Ibid., 19. 10 AUL , F 25, 1, « Negotiations 1979 », G. I. Clarke, « The Role of the Laurentian Senate Under Collective Agreement with Faculty », 13 septembre 1979. 11 Carter, « Collective Bargaining for University Faculty: A Legal Perspective », Canadian Journal of Higher Education, vol. 5, no 1 (1975), p. 25. 12 Procès-verbal de LUFA , 19 mai 1976. 13 AUL , PO 63, I, B , 1 « An Open Letter on Faculty Certification », 17 novembre 1976. Les signataires sont 48 professeurs, dont Wes Cragg et Hermann Falter, qui adopteront une position très différente deux ans plus tard, quand ils serviront au sein de l’exécutif de l’APUL . 14 « An Open Letter on Faculty Certification ». 15 Canadian Association of University Teachers, CAUT Handbook, Ottawa, CAUT, 1979, p. 31–35. 16 Ibid, p. 31. 17 Wes Cragg et Hermann Falter comptent parmi les 48 qui signent le document de 1976 contre la reconnaissance syndicale. 18 AUL , PO 63, V, 2e, Roy Kari aux membres de l’APUL , 10 octobre 1978. « Re: The organization of the special meeting at 7:00 p.m. on October 13, 1978 ». 19 AUL , PO 63, I, B , 3 Kari aux professeurs, 13 novembre 1978. 20 AUL , PO 63, I, B , 3 Thomson aux professeurs, 30 novembre 1978. Se remémorant cette période, Ashley Thomson a confié à l’auteure qu’à cause de l’intensité de la campagne menée par l’APUL , il « connaissai[t] chaque membre et [savait] comment il ou elle voterait. Le résultat ne fit jamais de doute ». 21 CAUT Handbook, 1979, p. vi. 22 Howard C. Clark, Growth and Governance of Canadian Universities: An Insider’s View, Vancouver, UBC Press, 2003, p. 181. 23 Carrigan, « Collective Bargaining », p. 18. 24 Savage aux professeurs de l’Université Laurentienne, 30 octobre 1979. 25 Best aux professeurs de l’Université Laurentienne, 12 novembre 1979. 26 Ibid. Ashley Thomson, qui assume les fonctions de négociateur en chef de l’APUL , se souvient de certains moments plutôt légers durant les négociations, dont celui-ci : « Un jour où nous négociions au pavillon des Arts, les Snowbirds se donnaient en spectacle. Frank Turner [alors vice-recteur de la Laurentienne à l’enseignement et à la recherche] a suggéré que nous prenions une pause sur le toit du pavillon Parker, où nous pourrions bien apprécier leur performance. Nous l’avons fait. Est-ce que cela paraît conflictuel? » 27 Ce document est extrêmement important, car il couvre un vaste éventail de questions. Dans une note de service écrite aux membres de l’APUL quelques semaines à peine avant la ratification de la convention collective, Ashley Thomson offre une mise à jour encourageante selon laquelle « les négociateurs de l’association et du Conseil se sont entendus sur la plupart des principaux articles d’une nouvelle convention ». Il en énumère ensuite onze qui sont déjà réglés, dont une déclaration sur les droits et les devoirs des professeurs, un mécanisme officiel pour l’évaluation annuelle, un mécanisme permettant aux professeurs d’avoir accès à leur dossier personnel, une allocation professionnelle et « des procédures de grief qui permettront aux membres de porter leurs disputes en arbitrage ». APUL 25, 1 Université Laurentienne, 2 Personnel, « Negotiations 1979–1980 », Ashley Thomson à tous les professeurs, « Re: Negotiations », 19 septembre 1980. Chapitre 20 1 « Profs on strike, education on hold », Lambda, 12 septembre 1985, p. 1.

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2 Mike Dewson, négociateur en chef de la Laurentienne, cité dans ibid. 3 « Laurentian students to support teachers », Sudbury Star, 6 septembre 1985, p. 3 ; « Laurentian profs go out on strike », Sudbury Star, 9 septembre 1985, p. 1. 4 Dossier : LUFA-Viz, Richard Carrière, secrétaire de l’APUL , aux membres de l’APUL , 26 août 1985. La note de service contient deux pièces jointes : « Signed Off Articles » et « Monetary Proposals ». 5 Lambda, 12 septembre 1985, p. 1. 6 Ibid. 7 « University profs accept pact with reluctance », Sudbury Star, 14 septembre 1985, p. 1. 8 « Laurentian pact okayed classes resumed today », Sudbury Star, 6 septembre 1985, p. 1. 9 Éditorial : « Laurentian dispute », Sudbury Star, 18 septembre 1985, p. 4. 10 « Laurentian pact okayed classes resumed today », Sudbury Star, 6 septembre 1985, p. 1. 11 Éditorial : « Laurentian turmoil turned off students », Sudbury Star, 14 mai 1986, p. 4. 12 Bernadette Schell, présidente, et Pierre Simoni, secrétaire, APUL , à B. Lynch, président, comité exécutif, Conseil des gouverneurs, 23 novembre 1987. Dossier : LUFA-Viz. 13 Ibid. 14 Ibid. 15 « President says enrolment jeopardized by strike », Sudbury Star, 14 septembre 1989, p. 3. En comparaison avec les statistiques fournies par le Bureau de la Recherche institutionnelle, ces chiffres semblent gonflés, car les données officielles font état de 6 672 étudiants au total cet automne-là. 16 « LU contract talks resume today: Professors seek students’ support », Sudbury Star, 6 septembre 1989, p. 3. 17 « Laurentian University professors on strike », Sudbury Star, 11 septembre 1989, p. 1. 18 « Some students head home as Laurentian profs go out », Sudbury Star, 12 septembre 1989, p. 5. 19 « Native students concerned strike will affect funds », Sudbury Star, 29 septembre 1989, p. 3. 20 Ibid. 21 « Laurentian, faculty resume talks today », Sudbury Star, 29 septembre 1989, p. 1. 22 « Laurentian professors vote 77 per cent to accept contract », Sudbury Star, 3 octobre 1989, p. 3. 23 Ibid. 24 « Daniel’s decision to resign from Laurentian tough because he enjoyed time in Sudbury », Northern Life, 5 novembre 1989, p. 3. 25 Ibid. 26 Bob Rae, From Protest to Power: Personal Reflections on a Life in Politics, Toronto, Penguin Books Canada, 1996, p. 197. 27 Ibid., p. 204. 28 Peter A. Baskerville, Ontario: Image, Identity, and Power, Toronto, Oxford University Press, 2002, p. 226. 29 J.-C. Cachon, vice-président de l’APUL , « To the editor », Bulletin, printemps 1994, p. 3. 30 Roy Kari, ibid., p. 5. 31 Ibid. 32 Notes du Sénat, février 1994–mars 1995, Wendy Jerome, présidente de l’APUL , à Jack Porter, secrétaire du Sénat, au sujet des « Jours Rae », 2 mai 1994. 33 LUFA-Viz, B. Rayakovich, directeur du personnel, à tous les employés affectés par les ponctions du contrat social, 8 février 1996. 34 Source : Graphiques créés par Éric Larocque à partir de données fournies par le Bureau de la Recherche institutionnelle, 2008.

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35 Affaires publiques de l’Université Laurentienne, communiqué de presse, 28 novembre 2007. 36 Ibid. Conclusion 1 Cité dans Jones, Goyan et Shanahan, « University Governance in Canadian Higher Education », 137–138. 2 Ibid., 138. 3 « Strong public support urged for Laurentian U. », Northern Ontario Register, 1er décembre 1962. 4 « “Separatist forces” at work in Laurentian », Sudbury Star, 25 mars 1989. 5 « Bilingual Laurentian blasted out of the wilderness » Toronto Daily Star, 25 août 1965.

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une note au sujet des sources

Les archives de l’Université Laurentienne ont été la source principale de cette histoire institutionnelle ; affirmation remarquable, vu le fait qu’avant le milieu des années 1990, elles n’existaient même pas. Depuis une quinzaine d’années, l’archiviste Marthe Brown et son équipe assemblent une variété de collections ayant trait aux différentes facettes de l’enseignement et de l’administration à l’Université Laurentienne, qui nous ont grandement servies. Des sources autres que les archives nous ont aussi été précieuses, tels que les procès-verbaux et la correspondance du Sénat, du Conseil des gouverneurs et de son exécutif, des albums de découpures et photographies des divers bureaux et départements, des journaux tels que Lambda, Le Lambda, l’Orignal déchaîné et la Gazette de l’Université Laurentienne. Les journaux nous ont aussi fourni des informations et des perspectives locales (Sudbury Star, Le Voyageur, Northern Life), régionales (Sault Star, North Bay Nugget) et provinciales (Le Droit, Globe and Mail, Toronto Daily Star). D’autres sources utiles ont été les Archives de l’Ontario, plus particulièrement RG -2, ministère de l’Éducation, RG -32, ministère des Collèges et Universités, RG -6, ministère des Finances et RG -3, les documents de divers premiers ministres et les dossiers des Archives nationales du Canada. Une série d’entrevues réalisées par le recherchiste Charles Levi nous ont aidés à saisir l’ambiance de la vie à la Laurentienne, particulièrement à ses premières années. Enfin, nous avons puisé dans une abondance de sources secondaires, dont la liste apparaît dans la bibliographie.

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bibliographie

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Adam, Dyane, 249–251, 252–253, 259 Advisory Committee on Academic Programmes (ACAP), 125–128 Albert, Hugues, 9, 60, 63, 230, 233, 279 Allaire, Chrysologue, 60 Allaire, Gratien, 96, 252–254 Alliance canadienne, 221 anciens, 9, 59, 101, 200, 228 Andrew, Jack, 256 animalerie, 132 architecture, 142 Arteca, Gustavo, 156 articulation (ententes d’–), 138, 336, 344 Ashby, Connor, 49 Assemblée des professeurs francophones, 237, 241, 243, 247, 249–250, 256 Association canadienne des professeures et professeurs d’université (ACPPU) / Canadian Association canadiennefrançaise de l’éducation en Ontario (ACFÉO et ACFO), provinciale, 9–11, 14–15, 24–25, 216 ; Sudbury, 216, 240, 245 Association des anciens de l’Université Laurentienne, 59 Association des étudiants CanadiensFrançais du Nord-Ontario, 173 Association des étudiants de langue française du Nord de l’Ontario (ADELFNO), 220, 232 Association des professeurs de l’Université Laurentienne (APUL), 53, 72, 77, 86, 101, 274, 278, 282, 284, 337 ; accréditation, 70–71, 280, 318–324, 325–326, 339, 343 ; comité sur le statut des femmes, 273 ; conflit en matière de gouvernance, 1967– 1970, 44–51, 54–56 ; congé sabbatique, 62,

275, 308–309, 314, 317, 328, 338 ; « contrat social », 333–335 ; convention collective, 71–72, 80, 90, 252, 280, 320, 322, 324–326 ; création, 37, 308–309 ; grèves, 82, 202, 207, 288, 326–329, 330–331, 342–343 ; griefs, 54, 328, 330–331 ; logement des professeurs, 310–312 ; négociations salariales, 38, 46–47, 48, 54–57, 60, 181, 308, 314–317, 319, 327–330, 334 ; permanence, 37, 42, 49, 62, 275, 308–310, 313–314, 317, 319–320, 322–323, 330–331, 338, 343 ; politique d’emploi, 312–313 ; représentation des professeurs au Conseil des gouverneurs, 47 ; représentation des professeurs au Sénat, 44, 309 ; sécurité d’emploi, 306, 308–310 Association des universités et des collèges du Canada (AUCC), 43, 95, 159, 318 Association du personnel administratif de l’Université Laurentienne, 59, 82, 283, 291–292 ; évaluation conjointe des emplois, 289–290 ; grève 1985, 82, 202 Association sportive des universités de l’Ontario (ASUO), 195–196, 212 Association of University Teachers (CAUT), 37, 43, 49, 56, 63, 87, 263, 273, 281–282, 308, 323, 325–326 Association sportive intercollégiale des femmes de l’Ontario (ASIFO), 197–198, 212–213 athlétisme (sports), 167, 168, 195, 209–211, 269, 342. Voir aussi étudiants, athlétisme Auld, James, 319 Avery, Benjamin, 13, 33, 36, 39 Banting, Sir Frederick, 68

Baskerville, Peter A., 333 Baumann, Alex, 76, 198, 205, 326 Baxter, Jean, 270, 280, 283 Beaton, William, 9 Bélanger, Charles (recteur intérimaire, 1989–1991), 81, 85–87, 134, 152, 247–248, 253, 330, 345 Bélanger, Georges, 108, 254 Bélanger, Pierre, 103, 216–217 Bélisle, Rhéal, 12, 38, 298 Bell, W. J., 74 Bennett, Elizabeth M. Granger, 265 Bennett, Harold (recteur intérimaire, 1961– 1963), 23–27, 30, 33, 37–40, 113, 296–297 Berdahl, Robert, 43 Berger, Jacques, 241 Bernard, Roger, 254 Bernier, Leo, 69 Bertrand, André, 7–8 Bertrand, Hector-L., 255 Bertrim, Thomas, 219 Best, Charles, 68 Best, Henry B. M. (recteur, 1977–1984), 152, 243, 245, 280, 282, 322 ; bibliothèque, 39–40, 50, 70, 83–84, 92, 98, 103, 112, 124–125, 155, 164, 202–203, 235, 248, 255, 266–267, 274, 288, 330, 332 ; collecte de fonds, 83–84 ; défis de la gouvernance, 68–71, 77–78 ; nomination et biographie, 68, 78 ; relations avec les collèges affiliés, 72–74 ; relations communautaires, 74–76 biculturalisme, xiii, 24–25, 30, 68, 172–173, 220, 223–224, 227, 234 Bideau, Michel, 222 bilinguisme, 25–26, 30, 36, 81, 85, 93, 118, 144, 216–218, 251, 254–255, 260–261, 278 ; animation socioculturelle, 229–231 ; chefs/directeurs de département, 219, 235–237 ; Collège du Sacré-Coeur, 4–5, 9–10, 12, 216 ; comité du Sénat sur le bilinguisme, 220 ; Conseil des gouverneurs, 42–43, 172, 220–223, 225, 227–228, 299 (voir aussi comité du bilinguisme) ; coûts, 221, 224–225, 235 ; documents officiels, 223 ; enseignement en langue seconde, 218, 233 ; étudiants, 163–164, 173–176, 177, 182, 187–188, 209, 222, 232 ; financement, 52, 64, 221–222, 224–225, 230, 243, 254–255 ; journaux étudiants,

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173, 177, 188, 228 ; Laurentian University of Sudbury Act, 215–216 ; mise en œuvre, 216–217, 239–240 ; personnel administratif, 40, 62–63, 68, 79, 214, 219–220, 235–237 ; personnel de soutien, 222–223 ; personnel, 237–239, 245–246, 248–250. Voir aussi étudiants Blais, Gérald, 8 Blanco, Huguette, 264 Blenkinsop, Padraig, 205–206 Blyth, Sam, 84–85, 146 Boily, P. Oscar, 296 Bondar, Roberta, 76 Boudreau, P. Alexandre, 13, 23 Bourbeau, Gérard, 41–43, 52, 113, 218, 346 Bourgeois, Robert (recteur intérimaire, 2008–2009), 100 Bourns, Arthur N., 72 Boutin, Thérèse, 231 Bouvier, P. Émile (recteur, 1960–1961), 40, 94, 164–165, 296, 310 ; biographie, 34–35 ; création de l’Université Laurentienne, 14–15, 18, 24–26, 29–30, 38 ; recteur, Université de Sudbury, 14–15, 17–18 ; rectorat, 35–36 Bovey, Edmond, 73 Bowdidge, Richard, 20–21 Brown, Aniela, 280 Bureau de la recherche, du développement et de la créativité, 157 Buse, Dieter, 158 Cachon, Jean-Charles, 234, 256, 330–331 Campeau, Robert, 42, 216, 220, 222 Campus, centre-ville, 27, 35, 38, 164, 170 ; chemin du lac Ramsey, 13, 38–39, 50–51, 67, 74, 83, 163, 164–165, 170, 174–175, 187, 203, 207, 219, 224, 266, 269–270 Canadian Universities Foundation, 35 Canayens de l’Université Laurentienne, Ontario-Nord (CULON), 232 Caplan, Paula J., 293 Cappon, Paul, 87 Carlin, Robert, 9, 13 Caron, P. Hormidas, 4 Carrigan, Owen D., 318–330 Carter, D. D., 321 Carter, Mgr Alexander, 24 Caswell, Dalton, 50, 54, 301

Cazabon, Benoît, 236, 240 Certificats et diplômes, 102, 136, 144 Chaires de recherche du Canada, 156 Chambre de commerce de Sudbury et du district, 39, 74, 76 Charte des droits et libertés, 247, 248, 255, 345 Chevrier, Anita, 12 Cholette, Marlene, 270 Chrétien, Jean, 89, 100 Christiansen, Billie, 256, 278 Chrysler, Ronald, 76, 95, 100, 340 Chung, Joseph, 314 Cité Collégiale, 251 Clark, Howard, 325 Clarke, Garrick, 45, 47, 48–49, 53–54, 62, 71–72, 302, 315–316, 320–321 Cloutier, Roland (recteur intérimaire, 1970–1972), 46, 50, 52–55, 62–63, 115, 118, 141, 184, 220, 316, 340 Colilli, Paul, 149 Collège Boréal, 94 College Cambrian, 138, 303 collège communautaire de langue française, 146, 248, 255 Collège Dawson (Montréal), 88 Collège de l’Assomption (Windsor), 4, 10 Collège du Sacré-Cœur, 3, 10, 12–13, 15, 37, 165 ; affiliation, Université d’Ottawa, Université Laval, 6, 20 ; bilinguisme, 4–5 ; charte, 10–11 ; financement, 8 ; fondation, 3–4 ; personnel enseignant, 7–8 ; programmes, 5–7 ; provenance des étudiants, 8 collège français (de la Laurentienne), 58, 227, 245, 248. Voir aussi professeurs francophones Collège Georgian (Barrie), 96, 147, 212, 336 Collège Sainte-Marie (Montréal), 4, 6 Collège St. Jerome’s (Waterloo), 19 Collège universitaire, 10, 164 ; création et rôle, 26, 30, 35–36 ; langue d’enseignement, 215 ; programmes, 103–104, 106, 107–108, 113, 149 ; résidence, 51, 171–172, 204, 276, 302 collèges affiliés : Collège universitaire Algoma, 72–74, 144 ; Collège universitaire de Hearst, 13, 72–73, 144, 245, 255 ;

Collège universitaire Nipissing, 72–74, 119, 142, 144 comité consultatif du recteur sur les nominations, 34 comité consultatif du recteur sur les structures et procédures consultatives, 45–47, 176 comité consultatif technique de mise en valeur de la végétation, 75 comité d’action pour une université française en Ontario (CAUFO), 254–255 comité des affaires francophones, 231, 233–236, 239–244, 344 comité des comptes de l’Université Laurentienne, 91 comité provincial des affaires universitaires / Committee on University Affairs (CUA), 30, 47, 111, 118, 130, 178, 275, 303 commission Hope, 10 commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, 30, 173, 220 commission sur le développement futur des universités ontariennes, 73 communauté franco-ontarienne, 107–108, 133, 154, 213, 216–217, 218, 221, 230–233, 234–235, 239–240, 247–248, 256, 257, 259, 262 conférences Falconbridge (conférences commémoratives Xstrata Nickel), 75 Conseil de l’éducation franco-ontarienne, 243–244 Conseil de l’enseignement en français (CEF), 240, 254 ; création, 66, 241–243 ; direction, 80, 244, 249–250, 253 ; rôle, 242–245, 247, 250–251. Voir aussi comité des affaires francophones Conseil de recherches en sciences humaines, 132–133, 158 Conseil de recherches en sciences naturelles et génie (CRSNG), 132, 134, 157–158 Conseil des arts du Canada, 130 Conseil des études supérieures de l’Ontario, 123–126, 147–148, 149 Conseil des gouverneurs, 142, 216 ; et l’administration, 34, 38, 42–44, 57, 60, 65–66, 80–81, 87–88, 95–96, 175, 241 ; autorité et pouvoirs, 24, 26, 33–34, 40, 43, 53, 57–59, 60–61, 66, 70–71, 77, 181,

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215, 339 ; bilinguisme, voir bilinguisme ; collecte de fonds, 39, 59, 83, 92–93, 117, 134, 152, 297 ; comité du bilinguisme, 222, 223–225, 228, 233 ; composition, 33, 47, 59, 76, 84, 90–91, 101, 178, 181, 278, 286, 296, 300, 304, 346 ; construction, 39, 51–52, 83–84, 92, 98–99, 132, 138, 164, 174, 191, 194–195, 198, 203 ; évaluation du président, 63, 77, 93 ; finances/budget, 33–34, 44, 48, 57, 60–61, 65, 68–70, 80, 89–91, 97–99, 101, 224–225 ; gouvernance (conflits) 1967–1970, 44–51, 54–56, 175– 176, 178–181, 309, 316–317 ; négociations avec le personnel, voir Association des professeurs de l’Université Laurentienne, négociations salariales ; relations de la fédération 35–36, 42–43, 340, voir aussi chapitre 17 ; relations avec le personnel, 59, 71, 310–314 Conseil des universités de l’Ontario, 66–67, 125 Conseil du travail de Sudbury et du district, 76, 328 Conseil économique de l’Ontario, 72 Conseil national de recherches du Canada, 130–131 Contact Nord, 86, 144 “contrat social,” 86–87, 208–209, 327, 333–335, 344 Cook, Faustina Kelly, 33 Cooper, Marshall, 83 Coopérative des artistes du nord de l’Ontario (CANO), 232 Copeland, Eleanor, 278, 280 Corry, J. A., 339 Courteau, P. Guy, 8 Cragg, Wesley, 45, 49, 63, 234, 302, 322–323 Craymer, S. M., 25 d’Entremont, Harley, 96, 100, 254 Daniel, John S. (recteur, 1984–1989), 73, 88, 92, 140, 215, 247, 249, 251, 255–256, 330, 340, 345–346 ; collecte de fonds, 82–84 ; démission, 86, 332 ; nomination et biographie, 79–80, 86–87 ; nominations à l’administration, 80–82 ; grèves, 82, 326, 328, 329, 332 ; procédures budgétaires, 80 ; recherche universitaire, 134, 152 ; rectorat, 80, 86

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Davis, William, 54–57, 63, 68–69, 72, 181, 185, 221, 300, 303, 312 Dennie, Donald, 9, 216, 221, 228, 240 Desmarais, Dr Jean-Noël, 59, 66, 68 Desmarais, Jean-Noël, 13, 25, 29, 84 Desmarais, Paul, 83–84 Désormeaux, Émile, 10 Deutsch, John, 63 Dewson, Michael, 87, 251, 327 Dignard, Serge, 254 Dorais, Fernand, 225, 229–232, 253 Doran, W. J., 52 Drew, George, 10 Duff, Sir James, 43 Dunlop, W. J., 12, 17 Dupuis, Elaine, 280 Dupuis, Michel, 233–234, 261 École normale d’Ottawa, 7 École normale de Sudbury, 15, 119 École polytechnique (Montréal), 290 Éducation permanente (enseignement à distance), 60, 123, 144, 164, 189, 235, 267, 302, 309 ; Université de Sudbury, 11, 13, voir aussi étudiants, temps partiel Église anglicane, 21, 23–25, 30, 33, 35–36, 40, 76, 103, 300, 302 Église unie du Canada, 12, 18–20, 23–29, 33, 35, 103, 312 Engel, Rev. Dwight, 28 Ennis, Peter, 210–211 enseignement en français, vice-recteur (adjoint, associé) : affaires francophones, 250–254, 259, 344 ; autonomie de l’–, 248–250 ; Conseil des gouverneurs, 214– 215, 220–221 ; écoles professionnelles, 217, 222–223, 235, 237, 244–246, 249, 257, 260, 262 ; études supérieures, 125–126, 127–128, 235, 257–258, 262 ; évolution et offre de l’–, 103, 106–108, 118–119, 138–139, 148, 214–216, 220–225, 233–240, 242–244, 249, 252–253, 257–260, 262 ; faculté de l’enseignement en français (sciences sociales), 253 ; professeurs, 215, 222, 223–224, 235–236, 237–238, 240, 243–245, 249–251, 255, 259–261 ; regroupement de départements, 227–228, 238–239 ; sciences, 215, 237–238, 244, 248–253, 257, 259–262 ; subventions, 221–222, 225–226,

230, 235–236, 239, 243–244, 249–250 ; vice-doyen francophone, 252 ententes de fédération, 19, 24, 36–37 Étongué-Mayer, Raoul, 250 études interdisciplinaires, 67, 126–128, 132–133, 137–140, 142, 147–149 étudiants : activisme, 41, 44–50, 53–54, 164, 174–181, 187–188, 191–192, 199–200, 207–208, 222 ; activités parascolaires, 167–168, 181–185, 205 ; alcool, 165, 175, 204–205 ; Association des étudiants francophones (AEF), 59, 187–189, 200, 202–203, 205, 209, 231–233, 237, 239–240, 254 ; Association des étudiants à distance, 47, 178–179 ; Association des étudiants à temps partiel de l’Université Laurentienne, 187, 200, 202, 204 ; Association des étudiants aux études supérieures, 187, 203 ; Association of Gays and Lesbians of Laurentian (Pride@LU), 191–192 ; athlétisme, 76, 89, 167–169, 195–199, 209–212, 270, 272, 342 ; bilinguisme, voir bilinguisme, et Conseil des gouverneurs, comité du bilinguisme ; disponibilité de locaux sur le campus, 163–164, 169–170, 174, 188, 190, 194, 200, 202–203, 207, 225–226 ; « double cohorte », 97–99, 149, 212, 336, « en lieu et place des parents », 204, 205–206, 213, 342 ; étudiants à temps partiel, 146, 148, 164, 280, 330, voir aussi Association des étudiants à temps partiel de l’Université Laurentienne et Association des étudiants à distance ; inscriptions, 38, 41, 44, 52, 64, 68, 70, 74, 77, 82, 88–89, 94, 97–99, 140, 163–164, 170, 189, 194, 212, 259–260, 286, 303–305, 318–319, 320, 330, 333, 335–336 ; International Students’ Organization, 187 ; Lambda, 166–167, 170, 172–174, 177–180, 183–188, 181–184, 196–199, 201, 203, 208–209, 219, 228, 327–328 ; Le Lambda, 172, 173, 177, 184 ; Laurentiana, 165, 182 ; minorisation des étudiants franco-ontariens, 217 ; Native Students’ Association (NSA), 93, 207–208, 331 ; L’Orignal déchaîné, 188, 203 ; Réaction, 172, 187–188, 228, 230, 232, 242 ; résidences, 39, 52, 164, 171–172, 183, 186, 205, 226, 267–268, 276, 297, 301–303,

343 ; Students’ General Association (SGA) / Association générale des étudiants (AGE), 44–50, 54–55, 59, 164–165, 170, 174–180, 183–188, 190–194, 199–200, 205, 209, 222, 226, 229–232 ; tribunal responsable de la discipline étudiante, 44, 165, 171–172, 175–176 ; Université canadienne en France (UCF), 84–86, 204 Evans, John, 66 Evans, Robert, 270 Facultés : arts et sciences, 52, 103–106 ; écoles professionnelles, 106, 115–116 ; humanités, 106 ; gestion, 137 ; sciences, 106 ; sciences et génie, 132, 135 ; sciences sociales, 106, 111–112, 137 Falter, Hermann (recteur intérimaire, 2001–2002), 96, 100, 254, 322–323 Falzetta, Judge Anthony, 47 Farah, Anis, 293 Fédération canadienne des étudiantes et étudiants, 207 Fédération des étudiants de l’Ontario, 192, 199–200, 209 Femmes : administratrices, 264–265, 274–275, 278–281, 283, 285–286, 291–292 ; attitudes envers les –, 268–270, 277, 279, 281–284, 287–288 ; Celebrate Women, 291–292 ; Centre des femmes, 191 ; comité consultatif du recteur sur le statut des –, 191, 277, 280, 283–284, 290 ; commission royale d’enquête sur le statut des –, 270, 273–274 ; déjeuners de la FAEJ , 291 ; discrimination positive, 282 ; égalité des –, 264, 275, 282, 285–286 ; équité en matière d’emploi, 267, 279, 282, 286, 288, 292–293, 345–346 ; équité salariale, 267, 279, 282, 283, 286, 288–292, 293, 346 ; étudiantes, 166–167, 191, 210, 264–265, 267–269, 279–281, 286, 290–292 ; francophones en comparaison avec les –, 280 ; harcèlement sexuel, 191, 204, 283–284, 285, 290, 293, 346 ; membres du Conseil des gouverneurs, 33, 59, 278, 281, 286 ; niveau salarial, 275, 278–279, 319–320 ; personnel, 264–265, 270–271, 273–274, 278–282, 283, 285–286, 290–292 ; présidentes du Conseil des gouverneurs, 264, 285, 287 ; professeures, 263–264,

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415

268, 273–274, 279, 286, 291, 294 ; rapport de 1980 du CCR sur le statut des –, 276, 279–281, 288–290 ; rapport sur l’équité en matière d’emploi de 1987, 287–288 ; régime de retraite, 271 ; soutien à l’université, 264–266, 286 ; tuerie de l’École polytechnique, 290 Ferland, P. Yves, 37, 41, 165 Fielding, Clifford, 77 Filion, P. Paul-Émile, 103 Fisher, H. K., 255 Fortin, Pierre, 47 Franco-parole, 230 Fraser, Horace J., 13, 33, 39–40, 52 Frith, Douglas, 69 Frost, Leslie, 12, 17–18, 20, 23–24, 30 Galarneau, Claude, 7 garderie, 270, 278, 281, 331 Gaudette, Bruno, 257 Germa, Bud, 319 Gervais, Gaétan, 5, 9–10, 66, 231, 233–234, 238–240, 243–244, 247–250, 254, 261, 345 Gilbert, Angus, 81 Gillis, Donald, 13 Girouard, P. André, 122, 219–220, 222, 223, 225–226, 230–231, 242–244, 247, 249, 251, 254, 345 Giroux, Dominic (recteur, 2009–), 100–101 Goldsack, Douglas, 292 Gonder, John, 206 Gray, Gordon, 92 Green, Ian, 74 Groupe de travail sur l’obligation redditionnelle des universités, 90–91 Gunn, John, 153 Hagey, J. G., 56–58, 60, 62, 181, 317 Hall, juge Emmett, 117 Hallett, Rev. R. B., 29 Hallsworth, Gwenda, xi Hannah, Elena, 293 Haq, Rizwan, 137 Harper, Elijah, 207–208 Harris, Michael, 89, 91–92, 98 Hartman, Grace, 267 Hautes études commerciales de Montréal, 100 Havel, Jean, 130

416

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Hennessy, Patricia C., 286–287 Hennessy, Thomas L., 60, 77, 237 Henry, Ronald, 9 Higgins, Edward, 24, 36 Hinde, Mary, 172, 268 Hoffman, Abby, 197, 272 Horn, Michiel, 44 Howarth, Thomas, 39 Huntington, Rev. Silas, 20 Hurtubise, J.-Raoul, 9–10 Imperial Order Daughters of the Empire, 267 Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), 157 instituts/centres de recherche : Centre d’excellence en innovation minière (CEIM), 152 ; Centre de recherche en développement humain (CRDH), 153 ; Centre de recherche en exploration minière (CREM), 133, 154 ; Centre de recherche en exploration minière (CREMEM), 133 ; Centre de recherche en géomécanique (CRG), 133, 153 ; Centre de recherche en santé dans les milieux ruraux et du nord (CRSRN), 153 ; Centre de recherche sur les matériaux miniers (CREMM), 153 ; Institut d’astronomie, 120, 132 ; Institut de marketing du sport (IMS), 155 ; Institut de recherche sur les microparticules, 132 ; Institut franco-ontarien (IFO), 133, 154, 240 ; Institut nord-ontarien de recherche et de développement (INORD), 154 ; Laboratoire d’automatisation des mines de l’Université Laurentienne (LAMUL), 154 ; Observatoire de neutrinos de Sudbury, 137, 154–155 ; recherche en justice et politiques sociales, 155 ; recherche en santé et sécurité au travail, 155 ; Société de recherche appliquée en innovation minière et de réhabilitation (MIRARCO), 155 ; station de recherche d’Elliot Lake (SREL), 153–154 ; Sudbury Cardio-Thoracic Foundation, 132 ; Unité conjointe d’écologie d’eau douce (UCEED), 153 ; Unité de recherche sur les ressources humaines en matière de santé dans les milieux du nord, 153

International Council for Distance Education, 79 International Students’ Organization, 187 International Union of Mine, Mill and Smelter Workers, 23 James, Donald, 43 Jensen, Christian, 40 Jésuites, 3–7, 9–10, 12–15, 24–25, 37, 103, 165, 216–220, 222, 224–225, 301 Jerome, Wendy, 334 John, résidence de la rue –, 75, 267 Kaiser, Peter, 154 Kari, Roy, 322–323, 333 Keays, Reid, 137 Kechnie, Margaret, 279, 286–287 Kinnear, Mary, 274 Kinoshameg, Stella, 190 Knox, Sandy, 196, 210 Krawchuk, Andrii, 305 L’Heureux, Camille, 15 Lacombe, Claude, 255 Lacroix, Maureen, 264, 287 Lafrenière, Gérard, 9 Lallier, Raymond, 254 Larouche, Laurent, 60 Laurentian University of Sudbury Act, 12, 29–30, 33, 35–36, 39, 45, 90, 175, 300, 303, 320 Lautenslager, Rev. Earl S., 12, 18–20, 22–24, 26, 28–29, 36 Lavigne, J. Conrad, 13, 43, 47, 77, 221–222, 223–224, 228 Lavoie, F. B., 315 Lefroy, Kit, 328 Lemieux, P. Germain, 111 Levan, Andrea, 287 Lévesque, Justin, 242 Lévesque, Mgr Louis, 24 Levi, Charles, xi–xii Lewko, John, 153 liberté académique, 215 Loi 8 sur les services en français, 247–248, 250, 255, 345 Loi sur les langues officielles, 30, 223 Loi sur les relations de travail de l’Ontario, 319, 323

Los, Douglas, 47 Maison française (des francophones), 225–226, 215, 228 Martineau, Jacques, 15 Matte, P. Lucien, 297 Mawhiney, Anne Marie, 123, 264, 286 McCrae-Ward, Norma, 290–291 McDonald, Scott, 99 McEwan, Mme George, 266 McGregor, Alexander, 196 McGuinty, Dalton, 74 McIsaac, J. C., 77 McLaughlin, juge Beverley, 76 McVey, Elmer, 76 Meakes, Elizabeth, 265 Meakes, James, 43, 220, 299 Meech (accord du lac ‑), 256–257 Mercredi, Ovide, 207 Merrifield, Scott, 49 Merwin, Benjamin, 39 Michaud, Lucien, 122, 254 Miller, Frank, 83 ministère des Affaires du Nord de l’Ontario, 69 ministère des Affaires indiennes, 207, 331 ministère des Collèges et Universités de l’Ontario, 59, 69–70, 73–74, 84, 92, 99, 125, 243, 248, 255, 276–277, 287, 303, 319 ministère des Services sociaux et communautaires de l’Ontario, 278 Molohon, Kathryn, 273 Monaghan, Gerry, 12 Monahan, Edward J. (recteur, 1972–1977), 77, 83, 95, 278 ; bilinguisme, 187–188, 220–221, 235 ; démission, 66 ; nomination et biographie, 62–63, 67 ; procédures budgétaires, 65 ; programmes d’enseignement et de recherche, 114, 130–131, 142, 152, 217 ; rectorat, 63–67 ; relations communautaires, 67, 74 ; relations de la fédération, 302 Morais, Yvan, 250 Mrozewski, Andrzej, 203 Mullins, Leatha, 40, 267 Mullins, Stanley G. (recteur, 1963–1970), 44, 51, 100, 167, 170, 185, 218, 266 ; affaire Bourbeau, 41–42 ; bilinguisme, 42, 218, 221, 223 ; conflit en matière de

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gouvernance, 1967–1970, 44–49, 56, 58, 176–180 ; démission, 48–50, 179, 316, 339 ; nomination et biographie, 40–41, 52 ; programmes d’enseignement et de recherche, 104, 116, 123 ; rectorat, 51–53, 311–313 ; relations de la fédération, 42–43, 297–301 Musée et centre des arts de l’Université Laurentienne, 74, 89 Newbery, Rev. J. W. Edward, 20, 25–26, 29–30, 36, 42, 92, 109–110, 189, 296–297, 301 ; démission, 36–38 ; nomination, 14, 34 Northeastern University Committee (NEUC), 16, 19–21, 25–27 Northern Ontario University Association (NOUA), 19–26, 28, 109, 298 Nurmi, Carl, 46, 54, 61, 77 Oblats, 6, 10–11, 15 Ontario Council of University Faculty Associations (OCUFA), 56–57, 273 Ontario Intercollegiate Athletic Association, 169, 195–196 Ontario-Quebec Women’s Conference of Intercollegiate Athletics (OQWCIA ), 196 Ordre de Jacques-Cartier, 9 Ouellette, Denise, 264 Ouellette, Pierre, 9 Page, Léandre, 222 Paiement, André, 229 Palmer, Thomas, 28 Paquette, Robert, 229 Parker, Doris, 282–284, 294 Parker, Douglas, xi, 85, 95, 156, 340 Parker, Ralph, 13, 22–26, 29, 33, 34, 36, 40, 300 Parrott, Harry, 73, 200, 244–245, 304 Parti Confederation of Regions, 256 Parti québécois, 240 Paul, Linda, 293 Paul, Ross H. (recteur, 1991–1997), 86, 96, 123 ; nomination et biographie, 87, 93 ; rectorat, 88–89, 92–93 Pauling, Linus, 76 Peel, Bruce, 103 Peltier, Jacques, 37, 122

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ind e x

Perron, Ronald, 9 Peterson, David, 73, 82–84 Pickard, Patricia, 197–198, 269 Plante, Albert, 9 Plaunt, W. B., 77 Pong, Ray, 153 Popovich, Sonya, 280 Porter, Jack, 127, 209, 240 Porter, Janice, 292 Porter, juge en chef Dana, 29–30 Powell, Mary, 293 Premières Nations / autochtones, 74, 92–93 ; Association des étudiants autochtones (Native Students’ Club, Native Studies Student Association), 93, 190, 207–208, 213, 331 ; Conseil de l’Université Laurentienne pour la formation des autochtones (CULFA), 92, 207–208 ; études autochtones, 92–93, 109–111, 164, 189–190, 303 Presidential Advisory Committee on Engineering (PACE), 135–136 Prise de parole, 230–231, 344 professeurs francophones, 240–241, 248, 255 programmes d’études, études supérieures, 52, 86, 123, 124–126, 132, 147–148 ; activité physique, 149 ; administration des affaires (commerce), 126, 128, 148–149 ; biologie, 124, 125–126 ; chimie, 124–128, 151 ; éducation physique et santé, 126, 128 ; éducation, 148 ; enfance et développement / développement humain, 126–127, 153 ; english, 124, 126–128, 147 ; français, 128 ; génie, 148, 151 ; génie minier, 148 ; géologie, 124, 126–127, 147 ; histoire, 124–127 ; humanités, interprétation et valeurs, 152–153 ; maîtrise, 123– 124 ; mathématiques, 124–126, 128, 136, 149 ; orthophonie, 148 ; philosophie, 124 ; physique, 124, 126–128, 132 ; psychologie, 124, 126, 128, 149 ; ressources minérales, 148 ; science appliquée, 148 ; science communication, 149 ; science politique, 124, 126 ; sciences infirmières, 66, 103, 116–117, 147, 149, 217, 247, 274, 277 ; service social, 148 ; sociologie, 124–126, 128, 148–149 programmes d’études, études supérieures, doctorat : boreal ecology, 150 ; mineral

deposits and precambrian geology, 150 ; natural resources engineering, 150 ; psychologie clinique, 150 ; rural and Northern health, 150 ; sciences biomoléculaires, 150 ; sciences humaines, 150 programmes d’études, premier cycle – écoles professionnelles : administration des affaires / commerce, 12, 64, 96, 104, 112, 116, 139, 142, 147, 188, 216, 235, 244, 247, 280, 288 ; administration des sports, 116 ; e–business, 142 ; École de médecine du Nord de l’Ontario, 98, 137, 140–142, 151, 155, 259, 342, 344 ; École des sciences de l’éducation, 15, 38, 52, 119, 142, 148, 233, 341 ; éducation, 96, 98, 138, 142, 258–259, 328, 336 ; éducation physique et santé, 116, 138–139, 168, 188, 197, 198, 203, 217, 247, 253, 341 ; études du mouvement coopératif, 139 ; génie, 3, 12, 13–14, 17, 83, 104, 116–117, 124, 132, 133–137, 156, 158, 281, 290–292, 319, 337, 341 ; native human services, 139, 208, 332 ; sages-femmes, 140, 259–260 ; sciences infirmières, 67, 103, 116–117, 147, 149, 217, 247, 274, 277 ; service social, 49, 67, 113, 116, 118, 147, 217, 242, 247, 253, 269, 286, 288, 341 ; traduction, 217, 237, 259 – humanités : arts d’expression, 140, 259 ; arts de la scène, 53, 138, 303 ; communication publique, 138, 259, 303 ; communication studies, 138 ; english, 7, 53, 95, 101– 102, 106–107, 110, 114, 138, 279 ; éthique, 303 ; études autochtones, 92, 109–110, 164, 189–190, 303 ; études canadiennes, 53, 68, 114–115, 126–127, 128, 133, 140 ; études classiques, 106, 111, 123, 147, 248, 260, 261 ; études sur la femme, 111, 138, 191, 272, 277–278, 286, 290, 303 ; fine arts, 138 ; folklore (et ethnologie), 111, 139, 303 ; français, 104, 106, 114, 123–124, 126, 138, 140, 220, 237, 254 ; interarts, 303 ; langues modernes, 69, 106, 108, 138 ; musique, 106, 111, 138, 147, 303 ; philosophie, 24, 35, 45, 69, 103, 105–106, 108–109, 111–112, 115, 300–303 ; sciences religieuses, 35–36, 103, 105–106, 108, 114, 300, 302–303 – sciences : astronomie, 132, 138 ; behavioural neuroscience, 138 ; biochimie,

120, 136, 151, 156 ; biologie, 76, 104, 114, 115, 119, 130, 136–137, 288 ; chimie, 96, 104, 120, 136–138, 151, 156, 261, 288 ; informatique, 120, 136, 138, 142, 149, 203, 288 ; forensic science, 137, 139 ; mathématiques, 5, 7, 104, 119–120, 136, 138, 164, 288 ; physique, 104, 114, 120, 136–138, 154, 254 ; sciences de la terre (géologie), 45, 69, 113, 117, 120–121, 127, 136–137, 153, 261 ; sciences libérales, 138 – sciences sociales : anthropologie, 69, 110, 114–115, 139, 259, 273 ; droit et justice, 115, 139 ; économie, 38, 104, 112, 114, 122, 123, 139 ; études de la santé, 133 ; géographie, 110, 112–113, 114, 120, 137 ; gérontologie, 303 ; histoire, 15, 38, 78, 110, 112, 114, 139, 147, 171, 233, 257, 288, 326 ; labour and trade union studies, 133 ; psychologie des sports, 138 ; psychologie, 112–115, 119, 138 ; science politique, 110, 112–113, 114, 130, 139, 198, 205, 210 ; sociologie, 12, 107, 110, 112–115, 139, 229, 237, 272, 273 Pryke, Kenneth, 37 Querney, Alan, 85 Rabin, Cedric, 122 Rae, Bob, 73, 88–89, 196, 333–335, 344 Rancourt, Yvan, 230 rapport Churchill, 248 rapport Duff-Berdahl, 43–46, 48, 54, 57–58, 64, 309 rapport Hagey, 57–60, 181, 227–228, 339, 344 Raymond, P. Alphonse, 10–12, 14–15, 17, 22 recrutement des recteurs : 1960, 34 ; 1963, 40 ; 1972, 62–63 ; 1977, 68 ; 1984, 79 ; 1991, 87 ; 1998, 93–94 ; 2001, 96 ; 2009, 100 Reed, Lloyd, 87, 149 Régimbal, Maurice, 166–168, 183, 195 Règlement 17, 5 Reid, Paul, 77 Reid, Stewart, 37 Reid, Weir, 317 relations université-communauté, 38–39, 68–69, 74–78, 87, 229–233, 240, 266–267, 278, 291, 310–311, 343, 346–347 Renaud, Normand, 257 « révolution du bon sens », 89

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Revue de l’Université Laurentienne, 133, 240 Revue du Nouvel-Ontario, 133, 240–241, 253, 255 Robarts, John, 52, 221, 300, 311–312 Roberge, André, 95–96, 254, 340 Rock, Allan, 100 Russell, Peter, 103 Sabourin, Janet, 284 Sabourin, Pascal, 9, 241 Saint-Aubin, juge Alibert, 216 Savage, Donald C., 325 Sawyer, Patrice, 340 Schell, Bernadette, 280, 329 Schumpeter, Joseph, 35 Scollard, Mgr David J., 4 Scott, Frank, 43 Sénat, 53, 93, 135, 241, 250–251, 339 ; bicaméralisme, 95, 239–240, 245, 248, 249–250, 254 ; bilinguisme, 187–188, 220, 222–223, 233–234, 239–240, 243–244, 248, 251, 254. Voir aussi bilinguisme, Conseil des gouverneurs, comité du bilinguisme ; composition, 34, 43–45, 275 ; conflit sur la gouvernance, 1967–1970, 44–51, 54–57, 175–182, 313 ; « interruptions d’enseignement », 49–50, 54–55, 178–179, 313–314, 327 ; langue de travail, 223–224 ; planification académique, 43, 47–49, 51, 61, 71–72, 80, 97–98, 105, 110–111, 116, 122–127, 136–140, 142, 150, 155–156, 233, 237, 241–242, 271, 304, 341 ; questions budgétaires, 47–48, 51, 61–62, 65, 69–72, 80, 91, 99–100 ; recherche, 130–131, 134, 152 ; représentation au Conseil des gouverneurs, 43–44, 46–47, 51, 59 ; rôle, 34, 43–45, 54, 56–58, 59–61, 64–67, 70–71, 79, 81, 84–85, 90–91, 118, 185–187, 199, 205, 242–243, 274, 281, 283, 320, 322, 339–340 ; sélection des administrateurs à l’enseignement, 60–62, 80–82 Shea, William, 47–53 services informatiques, 60, 98, 203, 270, 282 Sibley, W. M., 309, 318, 326 Silverton, Susan, 100, 264 Simoni, Pierre, 329 Sinclair, Carolyn, 264 Smith, James, 304

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Smith, Ronald, 254 Smith, Stuart, 159 Société des universitaires de langue française de l’Ontario (SULFO), 256–257 Société historique du Nouvel-Ontario, 36 Sopha, Elmer, 45 Sorbara, Gregory, 73, 84 Speigel, Sara, 278 Spencer, Sister Leona, 278 St-Aubin, Étienne, 45, 177–178 Steedman, Mercedes, 293 Stelter, Gilbert, 48–49 Stephenson, Bette, 69, 72 Stewart, E. E., 56 subventions de recherche, 99, 130–132, 152, 157–158 Sudbury Board of Education, 75 Symons, Thomas, 235 Technical University of British Columbia, 96 Telé-Université du Québec, 79 Tessier, Mgr Maxime, 24 Tesson, Geoffrey (recteur intérimaire, 1997–1998), 93, 100, 253–254, 340 Théâtre du Nouvel-Ontario, 230, 344 Théoret, Richard, 232 Thomson, Ashley, 323 Tihanyi, Jeno, 76, 198, 326 Tollinsky, Norm, 68 Tombalakian, Artin, 14, 117 Tremblay, Gaston, 229 Tremblay, Michel, 229 Tremblay, P. Rodolphe, 43 Tremblay, Raymond, 146 Trent University, 110 Trudeau, Gerry, 207 Trudeau, Pierre Elliott, 109, 189, 222, 234 Trussler, J. W., 19, 25 Turner, Francis J., 59, 77, 80, 246 Turner, Frederick J., 60 Union canadienne des étudiants, 177 Union canadienne féminine du sport interuniversitaire (CWIAU), 187–188 Union nationale des étudiants, 200 Union sportive interuniversitaire canadienne (USIC), 196, 212 Université Athabasca, 79, 88

Université Bishops, 88 Université Brock, 57, 328 Université canadienne en France (UCF), 84–86, 95, 165, 204, 330 Université Carleton, 10, 12 Université Concordia, 79, 97, 99 Université d’Ottawa, 4, 6, 11, 15, 17, 52–53, 97, 111, 128, 148, 200, 227 Université de Calgary, 94 Université Durham, 43 Université de l’Alberta, 103, 276 Université de London, 88 Université de Montréal, 79, 81, 94, 165 Université de Paris, 79 Université de Sherbrooke, 38 Université de Strasbourg, 96 Université de Sudbury, 6, 15, 18, 34, 37, 206–207, 219, 224, 228 ; bilinguisme, 12, 25, 36, 216 ; confessionnalité, 5–6, 14, 17–18 ; Conseil des régents, 13, 17, 23–24, 297, 299 ; création de la Laurentienne, 12, 15–17, 19–20, 22, 24–29, 103–104, 111, 122, 341 ; drapeau franco-ontarien, 213, 231–234, 261 ; éducation permanente, 11, 13, 122 ; financement provincial, 10, 14, 17–18 ; fondation, 9, 11–13, 20 ; mouvements ouvriers, 13, 22 ; programmes, 3, 11–12, 14, 17, 92, 103, 108–110, 112, 138, 190, 216, 259, 301, 303 ; recteur, 5, 8, 12, 14, 10–12, 17, 35, 165, 254, 297, 305 ; relations de la fédération, 35–36, 42, 103, voir aussi le chapitre 17 ; résidence, 171–172, 185, 205, 225–226 ; rôle dans la création de la Laurentienne, 25–26, 29–30, 35–36 ; Séminaire de Hearst, affiliation, 13, 72, 145–146 Université de Toronto, 6, 7, 11, 20, 23, 33, 39, 41, 64, 66, 75, 97, 103, 192, 197, 265, 297, 310 Université de Waterloo, 17 Université de Western Ontario, Collège Huron, 97 Université de Windsor, 17, 93 Université du Wisconsin, 42 université française en Ontario, 144, 189, 250, 254–257 Université Georgetown, 35 Université Huntington, 164, 169, 189, 296–298, 301–303, 340 ; fondation, 18,

20, 25, 28–30 ; programmes, 35–36, 103, 108–109, 111, 138, 140, 301–303 ; relations de la fédération, 36, 42–43, 103, 298, 340, voir aussi chapitre 17 ; résidence, 171–172, 205, 226, 268, 297, 298–299 Université Ibero Americano de Mexico, 35 Université Lakehead, 57, 140, 142, 153, 293, 328, 331–332, 342 Université Lalement, 30 Université Laval, 6–7, 11–12, 20, 40–41, 68, 165 Université McGill, 43, 53, 87, 96–97, 165, 171, 195–197 Université McMaster, 72, 140, 212 Université Mount Saint Vincent, 97 université nord-ontarienne, 24 Université Oxford, 79 Université San Francisco State, 43 Université Sir George Williams, 176 Université St. Francis Xavier, 64 Université Ste-Anne, 96 Université Ste-Marie (Montréal), 37 Université Thorneloe, 176 ; chapelle St. Mark’s, 301–303 ; fondation, 36, 42, 103, 296 ; programmes, 35, 108, 111, 138, 140, 191, 301–303 ; relations de la fédération, 76, 340, voir aussi le chapitre 17 ; résidence, 171, 205 Université Villanova, 64 Université Wilfrid Laurier, 60 Université Xavier, 64 Université York, 68 University Women’s Club of Sudbury, 267, 346 Valiquette, Josée, 7 Vallillee, Gerald, 53 Vanstone, Sue, 292 Vasseur, Liette, 157, 264, 337 Vaughan, Rev. Harold, 25–28, 30 Vethamany-Globus, Swani, 293 Vickery, Norman, 197 Vincent, Gaston, 11, 13, 24–25 Wadge, Norman, 63 Wagner, Lloyd, 282, 284, 322 Wallace, Donald, 316 Wallace, James, 98 Watson, Wynn, 53

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Watters, Jean R. (recteur, 1998–2001) : démission, 96 ; nomination et biographie, 93–94 ; rectorat, 94–96 Weaver, Mary, 66–67, 241 Whalen, Mary, 77 Williams, Lorna, 280 Williamson, Douglas, 45, 65, 74, 237 Wilson, B. A., 255 Wilson, Tuzo, 76

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Woodsworth, Judith Weisz (rectrice, 2002– 2008), 138, 141, 254, 264, 337 ; démission, 99 ; nomination et biographie, 96 ; rectorat, 97–98 Wright, archevêque W. L., 24–25, 30, 300 Wright, Peter, 70, 72, 235 Zaborszky, Dorothy, 279–282 Zorbas, Greg, 160, 195

sources des documents visuels

6 11 14 16 18 22 27 29 35 41 51 61 63 67 69 75 80 88 94 97 101 103

Le Collège du Sacré-Cœur. Base historique du Grand Sudbury, MK 0203EN . Alphonse Raymond. Photographie fournie par l’Université de Sudbury. Le recteur Émile Bouvier, Université de Sudbury, 1961. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 61-411. Collation des grades de l’Université de Sudbury, 1960. Laurentiana, 1961. Earl S. Lautenslager, 1960. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 60-367. Ralph D. Parker. Laurentiana, 1961–1963. Entrée principale du campus au centre-ville de l’Université Laurentienne, édifice Empire, rue Elgin, 1960. Archives de l’Université Laurentienne, photographies des Affaires publiques, CD 2-DC 3. Signature de la Loi constituante de l’Université Laurentienne, le 28 mars 1960. Laurentiana, 1961–1963. L’Université Huntington, rue Larch, vers 1961. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 60-464. Stanley G. Mullins. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-PR54. Le Grand Salon de l’Université Laurentienne en construction, 1963. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-CO 23. Musée et centre des arts de l’Université Laurentienne. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-LM 26. Edward J. Monahan. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-PR53. Paysage du campus. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-AE 6. Henry B.M. Best. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel La Laurentienne et les efforts de reverdissement du bassin de Sudbury. Photographie fournie par Peter Beckett. John S. Daniel. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-PR 38. Ross H. Paul. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. Jean R. Watters. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel Judith W. Woodsworth. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. Dominic Giroux. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. Ancienne bibliothèque de la Laurentienne au centre-ville de Sudbury. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-LI 148.

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Des étudiants dans un laboratoire de langue dans les années 1970. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-TR 20. J.W. Edward Newbery. Laurentiana, 1961–1963. Des étudiants dans la salle de lecture de la bibliothèque de l’Université Laurentienne dans l’édifice fédéral, rue Larch en 1961. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 61-4-28. Le planétarium Doran au début des années 1970. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-PH 46. Des étudiants dans un laboratoire de chimie en 1961. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 61-410. Jack Porter et Lucille Dennie. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-RG 1. Des étudiants dans le parcours à obstacle des inscriptions, 1992. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-RG 11. Des étudiants en sciences de l’activité physique montrent leur habileté au canotage. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-CA 8. Inauguration officielle de l’École de médecine du Nord de l’Ontario, campus de Sudbury, 2005. Photographie fournie par le service des communications de l’École de médecine du Nord de l’Ontario. Ryan Mailloux, le premier étudiant de la Laurentienne à obtenir un doctorat – en sciences biomoléculaires –, lors de la remise des diplômes en juin 2008. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel L’Observatoire de neutrinos de Sudbury, 1997. Observatoire de neutrinos de Sudbury, photographie de Bob Chambers. Des étudiants donnent l’exemple du code vestimentaire, 1965. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 65-3-56. L’équipe de hockey des Voyageurs passe la rampe. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-SL 85. Des étudiants parcourent le « Bowling Alley ». Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, I 62, 4-173-2, photographie de René Dionne. Des étudiants de première année lors de la semaine de la rentrée, 1962. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 62-9-725. Les rédacteurs en chefs du journal étudiant Lambda. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-SG 18. Des étudiants manifestent en faveur du pub Nag’s Head, 1967. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 67-10-16. Occupation du Grand Salon par des étudiants, 1970. Sudbury Star, 2 avril 1970. Sudbury Star, photographie d’archives. Nous… et eux. Lambda, le 29 septembre, 1970. Études amérindiennes. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-NS 7. Ralliement étudiant. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-SL 29. Collation des grades, vers 1972. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 3-GR 128. Notre équipe de soccer affronte McGill. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-UE 350.

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L’équipe féminine des Voyageurs remporte le championnat national, 1975. Lambda, le 19 mars, 1975. Événements sportifs à l’horaire, 1978. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-SL 95. Examen au gymnase. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-TL 236. « Laissez-nous notre bibliothèque », vers 1989. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-SG 14. Caricature d’une agente de sécurité, 1983. Ollie Simpkins, Northern Life, le 12 octobre 1983. Arrêt d’autobus municipal. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-SL 124. Foire des carrières. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-UE 4. Simulation de parlement. Photographie fournie par Megan Yeadon. La mascotte des Voyageurs. Université Laurentienne, sports universitaires, photographie de John Sabourin, collection des photographies d’événements. Le recteur Mullins remet un diplôme dans le cadre d’une collation des grades au grand air au milieu des années 1960. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 3-GR 147. André Girouard. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-IG 47. L’Université de Sudbury, 1967. Photographie fournie par l’Université de Sudbury, A-135. Chansonniers étudiants. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-AF 9. La levée du drapeau franco-ontarien, 1975. Sudbury Star, 26 septembre 1975. Sudbury Star, photographie d’archives. Une journée typique dans le « bowling alley ». Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, I 64, 3-P 324, photographie de Karl Sommerer. Jacques Berger et Pascal Sabourin, deux professeurs du département de français feuilletant la Revue du Nouvel-Ontario et d’autres publications francophones. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-SL 175. Deux étudiants lisent le journal Réaction au début des années 1980. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-AF 8. Le recteur Best porte un toast à la communauté francophone de la Laurentienne. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-AF 11. Dyane Adam. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-WS 2. Lancement officiel d’un numéro de la Revue du Nouvel-Ontario, vers 1984. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-LI 165. Inauguration officielle de la bibliothèque J.N. Desmarais Library par Paul Desmarais en juin 1990. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 5-SE 404. Michel Dupuis et Gaétan Gervais lors de la cérémonie marquant le 30e anniversaire du drapeau franco-ontarien, 2005. Photographie fournie par Guy Gaudreau.

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Des membres de l’Ordre impérial des filles de l’Empire font don d’une masse cérémoniale universitaire. Sudbury Star, 19 mai 1966. Sudbury Star, photographie d’archives. Des étudiants de l’Université Huntington, 1960. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 60-728. Sandy Knox, kinésiologie, et Pat Pickard, service des sports. Sudbury Star, 17 janvier 1982. Sudbury Star, photographie d’archives Des membres du personnel de l’Université revoient le système de classement. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-TL 176. Johanne Rioux, Centre d’audiovisuel. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-UE 337. Des femmes étudient à la résidence du Collège universitaire. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-RL 64. Des étudiantes de l’École des sciences infirmières. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-NU4. Dorothy Zaborszky et Margaret Kechnie. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 5-SE 887. Étudiants de la Laurentienne, années 1960. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-SL 3. Le syndicat des employés de l’Université Laurentienne et l’administration signent un contrat. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-LS 2. Maureen Lacroix. Conseil des gouverneurs de l’Université Laurentienne. Photographie de Mike Dupont de Dupont Photography. Séance de planification stratégique du SEUL . Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-LS 1. Mesures de sécurité sur campus. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 5-CE 812. Le Centre des femmes de l’Université, 1994. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 1-WC 4. L’Université de Sudbury. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-US 6. L’Université Huntington lors d’une des phases de construction. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-HU 6. La chapelle St-Mark de l’Université Thorneloe. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-TH31. Avec perspicacité et esprit, le Northern Life fait écho à la commission Parrott qui propose de renommer la Laurentienne Université Champlain. Ollie Simpkins, Northern Life, 26 octobre 1983. Des étudiants autochtones dans un cours d’éducation permanente, 1962. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier, 62-3-175. Immeuble résidentiel Randolph, 2010. Photographie fournie par Rob Ambrose. Technologie pionnière de l’enseignement à distance. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-TL 165. Brian Kaye, laboratoire de recherches sur les particules fines. Archives de la Ville du Grand Sudbury, fonds Bob-Kier 69-10-9. Une classe de l’édifice des arts. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-TL 222.

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Garry Clarke, président de l’APUL . Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-UE 326. Signature d’une entente collective, 1980. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-LU 3. L’entraîneur de natation Jeno Tihanyi et le médaillé d’or aux olympiques Alex Baumann. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-IB 64. Professeurs en grève, 1985. Lambda, le 12 septembre, 1985. Séance de négociation avec l’APUL . Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 4-LU 2. Des étudiants protestent contre la grève des professeurs en 1989. Sudbury Star, 27 septembre, 1989. Sudbury Star, photographie d’archives. Retraite des chefs de département à la fin des années 1980. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 6-UE 245. Sheila Cote-Meek. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. Documents visuels en couleurs

No 1 L’édifice Alphonse Raymond, 1976. Photographie fournie par Richard Everitt. No 2 Vue aérienne des installations sportives du campus. Archives de l’Université Laurentienne, photographie des Affaires publiques, CD 2-AE 42. No 3 La salle de lecture Brenda Wallace. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. No 4 La bibliothèque J.N. Desmarais en hiver. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. No 5 L’École de médecine du Nord de l’Ontario, Université Laurentienne, centre d’audiovisuel,. No 6 La plage laurentienne. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel,. No 7 Le tipi sur la place des Fondateurs. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. No 8 L’École des sciences de l’éducation anglophone. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. No 9 L’édifice des sciences à la tombée de la nuit. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. No 10 Le campus en hiver. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. No 11 Vue du campus de la Laurentienne depuis le Parc Bell. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel. No 12 Toitures enneigées des résidences étudiantes. Photographie fournie par Richard Everitt. Couvertures

Première de couverture. Vue aérienne de l’Université Laurentienne. Université Laurentienne, centre d’audiovisuel, photographie d’AirScapes. Quatrième de couverture. Emblème de l’Université Laurentienne. Université Laurentienne, Conseil des gouverneurs.

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