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French Pages 111 [74] Year 2012
les auteurs
Nathalie Schipounoff est diplômée du CELSA et de l’ESIEE. Après plus de 15 ans dans des grands groupes comme Télé Diffusion de France, Orange ou Lagardère Active (Psychologies magazine) en tant que responsable études, responsable marketing, chef de projet ou directeur de Business Unit Web, elle accompagne aujourd’hui les entreprises dans leur transformation digitale en management et stratégie.
Chasseur de têtes puis fondateur d’une maison d’édition, Stéphane Malochet est aujourd’hui coach et formateur. Il accompagne depuis 10 ans managers et dirigeants dans la mise en œuvre de leurs projets professionnels. Formé à l’analyse systémique et à la Process-Com, il est membre du réseau iLead. Il se consacre tout particulièrement au développement de la performance et de l’engagement des équipes de ses clients.
Vos relations avec votre supérieur se sont détériorées ou ont tout simplement mal démarré ? Quelles qu’en soient les raisons, le constat est là et vous ne pouvez plus continuer comme ça. Stress, boule au ventre, injonction, contre-injonction, sentiment de dévalorisation, de harcèlement, manque de politesse... Comment sortir de cette spirale qui vous entame, pour ne pas dire vous mine, au point que vous commencez à vous demander si ce n’est pas vous le problème ? En quatre chapitres, les auteurs proposent des pistes d’action pour reprendre les rênes de cette relation et mettre les bonnes cartes de votre côté. Il est temps de dire non à votre chef pour qu’il arrête de vous dévaloriser, de vous stresser, voire de vous harceler et que vous puissiez enfin reprendre du plaisir à aller au boulot !
et si
est une collection d’ouvrages mode d’emploi, écrits dans un style simple et dynamique, destinée à vous faciliter la vie au boulot, dans votre vie perso et dans vos relations. Rédigé par un ou des experts du sujet, chaque ouvrage propose des méthodes, des outils, des conseils et des exercices pour dépasser vos blocages et changer durablement.
et si une collection dirigée par
Stéphanie Brouard. Avec une formation initiale en ingénierie économique et gestion des ressources humaines, et plus de 12 ans d’expérience dans différents cabinets de conseil et formation (Cegos, EFE-CFPJ, BPI Groupe), Stéphanie est aujourd’hui consultante au sein de Kea Prime, filiale de Kea&Partners. Elle conçoit des dispositifs à destination des managers et de leurs équipes pour les accompagner dans le développement de leur efficacité professionnelle et personnelle. Elle est spécialisée en ingénierie pédagogique, toujours à la recherche d’approches et de solutions innovantes avec deux idées forces : l’efficacité et le plaisir.
Fabrice Daverio. Après avoir été manager chez L’Oréal et LVMH, Fabrice Daverio est devenu consultant, formateur et coach. Formé au coaching, analyse transactionnelle, approche systémique et communication d’adhésion, il dirige aujourd’hui le CFPJ Entreprises et Leadership, département du Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes qui forme à la communication. Fabrice conçoit et anime des formations au leadership et à la communication d’influence. Il a traduit avec d’autres consultants l’ouvrage de référence sur la Théorie Organisationnelle de Berne, co-écrit et co-coordonné plusieurs ouvrages de communication, développement personnel et management.
dans la même collection
Nathalie Schipounoff Stéphane Malochet
Et si j’apprivoisais mon chef ! Se protéger du management toxique mode d’emploi Sous la direction de Stéphanie Brouard et Fabrice Daverio
Groupe Eyrolles 61, Bd Saint-Germain 75240 Paris Cedex 05 www.editions-eyrolles.com
Dans la même collection : Et si j’assurais en public !, de Gracco Gracci Et si je supportais mieux les cons !, de Bruno Adler Et si je choisissais ma vie !, de Gilles Noblet À paraître : Et si je prenais mon temps !, de Catherine Berliet Et si je me mettais à la formation !, de Stéphanie Brouard
En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l’éditeur ou du Centre Français d’Exploitation du Droit de Copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. Attention : la version originale de cet ebook est en couleur, lire ce livre numérique sur un support de lecture noir et blanc peut en réduire la pertinence et la compréhension © Groupe Eyrolles, 2013 ISBN : 978-2-212-55518-9
Sommaire Introduction
Chapitre 1 Pour qu’il reconnaisse enfin ma valeur Les clés pour changer Se préparer en amont Entretenir un juste équilibre Mieux se connaître pour mieux communiquer Bien négocier son salaire En préparation de l’entretien d’évaluation Pendant l’entretien À la fin de l’entretien Et pourquoi changer ? Essayez quand même
Chapitre 2 Pour qu’il arrête de me stresser Les clés pour changer Une seule constante dans l’univers : le changement Laisser venir le « flow » Res-pi-rez ! Et pourquoi changer ? Essayez quand même Pour aller plus vite... freinez !
Chapitre 3 Pour que notre relation reparte du bon pied Les clés pour changer Le dauphin et sa stratégie Le triangle dramatique L’assertivité : plus qu’une méthode, une posture de vie Quelles sont les conséquences, pour nous et pour les autres, d’un comportement non assertif ? Comment sortir de ces comportements non assertifs ? Et pourquoi changer ? Essayez quand même « Je lui ai dit “non” avec le sourire... et il m’a souri en retour ! »
Chapitre 4 Pour qu’il cesse de me harceler Les clés pour changer Faire le bon diagnostic Tenir un journal de bord Réagir pour ne pas laisser la situation empirer Formaliser ses échanges pour constituer des preuves Pour l’écrit, rester factuel Ne pas s’isoler Reprendre des forces Et pourquoi changer ? Essayez quand même Table des exercices
Introduction « Tu vois, le monde se divise en deux catégories : ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui creusent. Toi, tu creuses. » Clint Eastwood dans le film Le Bon, la Brute et le Truand de Sergio Leone
D’accord, votre boss n’est pas armé, quoique... Il n’y a pas mort d’homme, quoique... la souffrance au travail ne cesse de progresser, à coup de productivité, d’organisation et de réorganisation ; 60 % des salariés se disent « stressés » et le coût social du stress en France est évalué en hypothèse basse par l’INRES à 3 milliards d’euros. Les nouvelles technologies (e-mails, messagerie instantanée, SMS...) peuvent cristalliser des relations de plus en plus déshumanisées : géolocalisé et « accessible » 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, vacances comprises, grâce au dernier smartphone qui vous a été remis par l’entreprise. Vous vous surprenez à ne plus vous offusquer des e-mails sans « bonjour ». Les e-mails de réponse affichant un « merci » vous insupportent même, parce qu’ils spamment pour rien votre boîte e-mail, qui n’en finit pas, d’ailleurs, de s’engorger.
À qui s’adresse ce livre ? Cet ouvrage est au service de tous les salariés et professionnels dont les relations avec leur supérieur se sont détériorées ou ont tout simplement mal démarré, quelles qu’en soient les raisons. Le constat est là. Vous ne pouvez plus continuer comme ça. Vous voulez bien être son collaborateur mais, disons simplement, plus son « jouet ». « – Déshabillez-vous. – Pardon ? – Déshabillez-vous. Vous allez faire le tour de la salle de rédaction tout nu, nous allons pouvoir juger de l’effet comique. – M. le Président, je... – Je vous dis de vous déshabiller. [... Blennac commence à se déshabiller...]
– Mais qu’est-ce que vous faites, Blennac ? – Je me déshabille, M. le Président. – Si je ne vous avais pas arrêté, vous vous mettiez tout nu? Et vous faisiez le tour de la salle de rédaction... – C’est vous qui me... me l’avez demandé, M. le Président ! – J’ai une question importante à vous poser, Blennac. Qui de nous deux est le monstre? Moi qui vous demande d’ôter votre pantalon ou vous qui acceptez de montrer votre derrière? – Je ne sais pas, M. le Président. – Tout le problème est là, je crois1. » Nous avons tous un boss, que nous soyons cadre dirigeant, employé, cadre moyen, technicien, enseignant, consultant, assistant... et personne n’est à l’abri d’un manager qui n’en est pas un. Stress, boule au ventre, injonction, contre-injonction, sentiment de dévalorisation... Comment sortir de cette spirale, de cette relation qui, au quotidien, vous entame, pour ne pas dire vous mine au point que, de victime, vous commencez à vous remettre en question et à vous demander si ce n’est pas vous le problème ? Et même s’il n’y a pas mort d’homme, que dire de ce manque tout simplement de respect, de politesse et de cette anxiété qui vous gagne chaque jour un peu plus ? Dans notre métier de coach et de formateur, nous constatons quotidiennement que certaines situations managériales génèrent des souffrances inutiles, que certaines pratiques sont non seulement « datées et ringardes », mais inadaptées et contre-productives pour ceux-là mêmes qui en usent. C’est aussi le message que nous souhaitons adresser à ceux d’entre vous qui sont managés et managers, ou qui le deviendront un jour.
Des pistes efficaces pour réajuster, voire transformer, les relations au travail Dans un contexte économique complexe, obtenir l’obéissance de ses collaborateurs n’est plus suffisant. C’est l’engagement de chacun dans la réalisation de ses rôles et de ses responsabilités qui est devenu indispensable.
Et pour atteindre cet engagement, chaque collaborateur doit comprendre les enjeux, la vision et se sentir partie prenante de l’effort collectif. Ce sont les conditions de la performance. La bienveillance, l’esprit de développement humain, le respect sont de formidables leviers de cette performance. Ces stratégies, souvent cousines de l’écoute, du partage d’information, de la proximité, sont les traits communs du management actuel et de la société de l’information dans laquelle nous sommes aujourd’hui complètement engagés. Nous ne parlons pas de la fin de la directivité, car, comme tous les parents le savent, elle contribue, dans certains contextes, à donner les règles du jeu, les normes et les directives. Mais elle doit être proportionnée, opportune et servir un but d’apprentissage et de développement. Nous vous proposons, en quatre chapitres, de reprendre les rênes de votre relation avec votre supérieur, de prendre conscience des enjeux, de relativiser aussi, dans certains cas, et surtout de mettre les bonnes cartes de votre côté.
Il est grand temps ! Il est temps de mater votre chef pour qu’il arrête de vous dévaloriser, de vous stresser, voire de vous harceler, pour que votre relation puisse repartir, si possible, du bon pied ou que vous puissiez tout simplement mieux vivre votre travail au quotidien. Ces longues heures passées au bureau ne devraient pas seulement vous permettre de gagner un revenu, elles devraient vous permettre de vous sentir bien, de vous réaliser. Du latin populaire trepalium, « machine à trois pieux » destinée à immobiliser les chevaux pour les ferrer, le travail n’a plus vocation à être un instrument de torture dans nos sociétés. Et c’est à vous, en partie, d’en décider. __________
1. Réplique extraite du film Le Jouet de Francis Veber avec Pierre Richard et Michel Bouquet.
Chapitre 1
Pour qu’il reconnaisse enfin ma valeur
Après avoir lu ce chapitre, vous communiquerez plus facilement sur vos qualités et vos talents. Vous pourrez mieux convaincre votre chef de votre valeur et vous serez plus armé pour négocier votre rémunération.
« Dès les premières minutes de mon entretien d’embauche, j’aurais dû réagir. Mais quand on cherche du travail, ce n’est pas toujours évident de négocier. Je venais de suivre mon conjoint en province et l’annonce de cette société – “cherche adjoint(e) commercial(e) expérimenté(e)” – a tout de suite retenu mon attention. J’aimais beaucoup cette marque pour être déjà consommatrice de leurs produits et j’avais surtout besoin de travailler. Je connaissais mes chances : je présente bien, je parle deux langues, et j’avais déjà travaillé comme responsable d’une boutique de luxe, quand j’étais encore sur Paris. Lorsque j’ai pu rencontrer le responsable, après avoir envoyé mon CV, tout s’est d’ailleurs passé très vite. Il n’a pas manqué de souligner la qualité de mes références et de ma présentation. “Vous êtes embauchée ! Ah, bien entendu, vous serez au SMIC, avec une prime sur le résultat à la fin de l’année. Nous sommes en province, vous savez bien.” Je n’ai pas sourcillé, malgré mon expérience et mon âge. J’étais trop contente de trouver enfin du travail après quatre mois passés dans cette nouvelle ville. Les débuts se sont bien passés, mais, malgré mon assiduité, mes heures supplémentaires, le nombre de clients en progression, mon responsable semblait ne rien remarquer. Je savais que la société cherchait une responsable de boutique pour le début de l’année. J’avais déjà tenu ce type de responsabilités et j’essayais de montrer chaque fois que je le pouvais ma motivation, mais pour mon patron, c’était normal, et j’avais l’impression de faire juste partie du décor. Comment faire pour qu’il reconnaisse enfin ma valeur ? »
Vu et entendu
Les clés pour changer SE PRÉPARER EN AMONT La préparation et le diagnostic en amont sont déterminants et il est, bien souvent, recommandé d’agir et d’évaluer les enjeux dès les premiers contacts avec votre employeur (ou futur employeur), c’est-à-dire dès l’entretien d’embauche. C’est un moment clé. Il est plus difficile, après cette étape, de renégocier ses conditions de travail ou de faire évoluer son poste, mais pas impossible. Les employeurs (entrepreneurs ou cadres) ont, eux, l’habitude de réaliser des diagnostics et leur avis se forge du coup assez rapidement sur leur collaborateur. Ils peuvent aussi se tromper, bien sûr. C’est pourquoi le temps a son importance et la confiance se gagne, à condition que vous sachiez vous valoriser. Bref, l’essentiel est de parvenir à communiquer tout simplement sur votre valeur et le travail que vous réalisez. Mais en avez-vous pleinement conscience vousmême ? Et de manière vraiment objective ? Votre supérieur connaît-il vos attentes, le détail de votre journée, les livrables ou les tâches supplémentaires que vous effectuez ? En quoi cette reconnaissance ou cette promotion tant attendue s’inscrit-elle vraiment dans votre projet professionnel ? Autant de questions auxquelles il est nécessaire de répondre au préalable. Les clés pour changer passent donc par une évaluation de vos compétences et autres qualités en phase avec le poste actuel ou la mission convoitée. Le diagnostic de la situation s’effectue de votre point de vue, mais également du point de vue de votre responsable et de votre entreprise. Les thèmes à investiguer sont donc aussi bien de l’ordre de l’évaluation de vos talents, de votre posture, de votre capacité à communiquer, à trouver le bon canal au bon moment, à négocier ou à travailler sur l’affirmation de soi, que de la connaissance des besoins et de la culture de l’entreprise, sans oublier les marges de manœuvre estimées ou effectives de celle-ci. Sur l’« affirmation de soi », nous vous invitons à lire dans cet ouvrage les pages consacrées spécifiquement à cette thématique et à l’assertivité, initiée par le psychologue new-yorkais Andrew Salter (voir chapitre 3 « Pour que notre relation reparte du bon pied », p. 65).
Attention
Le développement personnel, en particulier lié à l’estime de soi ou à l’affirmation de soi, reste avant tout une démarche personnelle dont les voies sont multiples, voire infinies. Elles peuvent parfois conduire à une démarche plus thérapeutique. Les séminaires, les stages, l’accompagnement d’un coach ou d’ouvrages spécialisés sont des accélérateurs. Ils permettent de trouver plus rapidement les méthodes, voire les tiers les plus en résonance avec votre « être intérieur » pour développer vos talents, votre potentiel et ainsi « grandir ». L’objectif est de passer de l’idée à l’action. Mais le pas essentiel doit démarrer et se poursuivre en toute autonomie : il faut aller à son rythme, partir à sa propre rencontre, améliorer la connaissance de soi et ses qualités relationnelles, et être, surtout, bien accompagné.
ENTRETENIR UN JUSTE ÉQUILIBRE Pour vous revaloriser auprès de votre supérieur, le plus important est de maintenir le bon équilibre entre : 1. Votre personnalité, votre capacité à travailler en équipe ou en interactivité ; 2. Ce que vous souhaitez communiquer et la façon de procéder ; 3. Les « jeux de rôles » en entreprise qu’impliquent les relations avec un responsable hiérarchique. L’enjeu est donc de procéder par étapes et, tout d’abord, par celle de mieux se connaître. Comme le disait Lao Tseu : « Celui qui connaît bien les autres est instruit, celui qui se connaît est sage. » L’objectif, ici, est de pouvoir relativiser, et surtout de mieux appréhender le fait que tout le monde ne fonctionne pas de la même manière, à commencer par vous et votre supérieur. De plus, il y a souvent un (voire des) écart entre ce que l’on est, ce que l’on pense être, ce que l’on imagine que les autres perçoivent de nous et ce qu’ils perçoivent effectivement... Réduire les écarts entre ces différentes images de nousmêmes est une piste non seulement tangible, mais aussi passionnante pour mieux communiquer avec les autres. C’est une belle aventure que de partir à la rencontre de soi et de son expression dans la relation avec l’autre. Plus vous êtes vous-même, moins vous vous dénaturez, plus les messages que vous envoyez sont cohérents et limpides.
MIEUX SE CONNAÎTRE POUR MIEUX COMMUNIQUER Pour vous y aider, il existe des tests qui permettent d’appréhender de manière plus « objective » sa personnalité, et notamment le test du MBTI®, inspiré des
travaux de Jung et complété par ceux d’Isabel Briggs Myers et de sa mère, Katherine Cook Briggs. Ce test, dont les recruteurs et les grandes écoles (pour conseiller une orientation) sont très friands, a pour objectif de révéler ses qualités en termes de leadership et de communication, et de mieux définir ses préférences en termes d’orientation, d’énergie (Extraversion ou Introversion ?), de recueil de l’information (Sensation ou Intuition ?), de prise de décision (Pensée ou Sentiment ?) ou de mode d’action (Jugement ou Perception ?).
À noter Concernant le test du MBTI®, il ne s’agit pas pour autant de se laisser « enfermer » dans les résultats du test, aussi reconnu soit-il. En l’occurrence, ils s’affichent sous la forme de quatre lettres selon les seize combinaisons possibles correspondant aux seize types de personnalités détaillées dans un rapport personnalisé de plusieurs pages. Exemple de type de personnalité : « ESPJ » pour Extraversion/Sentiment/Perception/Jugement. J’aime à penser que la nature humaine est beaucoup plus complexe que cela. Mais l’idée est de travailler à partir de ces résultats pour mieux se connaître, améliorer l’image que les autres peuvent se faire de soi et appréhender le profil possible de son supérieur. Ce test, d’une centaine de questions, est payant, d’une part parce que la société OPP (http://www.opp.eu.com/fr/Pages/home.aspx) en détient les droits et, d’autre part, parce que sa vertu réside surtout dans le débriefing et l’accompagnement d’un consultant certifié. Vous trouverez néanmoins des versions gratuites ou explicatives on line, certes moins approfondies, sur le site d e similarminds.com (en anglais) ou sur http://www.16-types.fr/test.html (en français). Les modes de communication à privilégier entre les différents profils y sont aussi explicités. Sur le site intelligence-creative.com, vous pourrez déterminer si vous ou votre boss s’apparente plus ou moins à l’une des seize personnalités précitées grâce à Paul Tieger et Barbara Barron-Tieger, qui ont autorisé la reproduction gratuite de leur test. Il existe aussi des tests, comme celui de Belbin® ou TMS (Team Management System), qui permettent de distinguer votre rôle fonctionnel en entreprise : à titre individuel, celui pour lequel votre expérience, vos talents sont requis et, en situation collaborative, votre aptitude à travailler avec des qualités de réflexion,
d’action ou de relation qui vous sont naturelles (spontanées), possibles (« Si personne n’occupe ce rôle, je peux le prendre ») ou à éviter (« Même si j’en ai l’expertise, je ne m’épanouis pas à le faire ». En guise d’illustration, prenons l’exemple, dans la vie privée, d’une fête ou d’un week-end à organiser entre amis. Spontanément, certains vont s’occuper de coordonner les différents membres ou de promouvoir l’événement, d’autres vont proposer de faire les courses, d’autres encore seront systématiquement invisibles au moment des tâches logistiques, mais ils auront pensé à apporter une guitare ou à s’occuper des jeux pour les enfants... pour que le week-end ou la fête soit réussi. Voici donc quelques-uns des rôles que chacun peut prendre spontanément au sein d’une équipe. En entreprise, et selon les tests et leurs résultats, on parlera de huit ou neuf profils différents : l’innovateur, le coordinateur, le promoteur, le développeur, le finisseur de tâches, l’analyste, le soutien, le supporteur... À l’inverse des tests psychométriques, c’est-à-dire des tests de personnalité comme celui du MBTI®, leurs résultats ne sont pas figés dans le temps car ils sont l’agrégation à un instant « T » de nos motivations, de nos capacités intellectuelles, de nos expériences, de notre tempérament, de notre apprentissage des rôles... Ils nous confortent dans l’idée qu’il n’y a pas de profil meilleur qu’un autre, que la connaissance de soi, la diversité et l’interaction sont les vraies clés d’amélioration. Ces tests sont, hélas, aussi payants et nécessitent un coach certifié, mais l’autoévaluation, le questionnement d’amis ou de collègues proches peuvent permettre de mieux se situer, plutôt que d’avancer complètement à l’aveugle sur le sujet et de se priver d’une approche plus ouverte que votre seul point de vue. Pas de certitude en la matière, mais au moins une conviction : tout le monde ne fonctionne pas de la même manière et n’apporte pas la même valeur ajoutée dans la dynamique d’une équipe, à commencer par vous et votre boss, ne serait-ce qu’en termes de personnalité, de mode de communication, de fonctionnement en interaction ou d’aspirations et ce, indépendamment, ou du moins partiellement, de vos fonctions réciproques. Ainsi l’adage se vérifie : « Ce n’est pas la fonction qui fait l’homme, mais l’homme qui fait la fonction. »
Bon à savoir Ces tests peuvent être demandés auprès des ressources humaines de votre entreprise ou à l’occasion de vos entretiens annuels. Si vous avez passé des tests au moment du recrutement, vous pouvez en demander les résultats. Vous
trouverez tout le détail sur le bilan de compétences à l’adresse : http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F2282.xhtml. Le bilan de compétences peut être accompli sur proposition de l’employeur avec le consentement du travailleur, ou à l’initiative du travailleur. Il est réalisé par un prestataire extérieur à l’entreprise, selon des étapes bien précises. Les salariés peuvent demander à bénéficier à cette occasion d’un congé, sous réserve d’une certaine ancienneté, expliqué sur ce site officiel. Il existe aussi des méthodes pour mieux identifier les chemins décisionnels en interne, le bon canal de communication au bon moment et, bien sûr, tout l’apport des techniques de négociation, à commencer par celle pour négocier votre salaire, qui reste a priori la plus simple expression de votre valeur. Car vous valez, malheureusement trop souvent dans la tête de votre employeur, ce que vous êtes payé...
BIEN NÉGOCIER SON SALAIRE L’idée est, avant tout, de vous apporter un autre angle de vision sur la négociation salariale. Tout manager sait à l’avance que la grande majorité de ses collaborateurs vont lui demander, à un moment ou à un autre, une augmentation. Au mieux, il a une enveloppe qu’il va pouvoir distribuer. Mais vos chances d’obtenir une évolution de salaire significative, a fortiori si vous êtes déjà en poste, sont souvent maigres et la probabilité d’obtenir l’augmentation de votre fixe se résume à une chance sur deux : « oui » ou « non ». Le montant, même dans le cas d’un « oui », n’est que très rarement celui de vos rêves. Le plus souvent, c’est d’ailleurs tout simplement un « non » net, suivi du sacro-saint : « C’est la crise », ou carrément l’annonce, avant même les entretiens, du « gel des salaires ». Le but est d’augmenter vos chances dans le cadre d’une négociation individuelle, ce qui ne prévaut pas, bien entendu, une négociation collective.
En préparation de l’entretien d’évaluation 1. Listez tout ce qui est potentiellement négociable « individuellement » au sein de votre entreprise : fixe, variable, primes (d’arrivée, de départ, de dépassement d’objectifs, de déménagement...), formation, chèques cadeaux, montant du remboursement des notes de frais, remboursement kilométrique, avantages en nature (voiture, appartement, téléphone mobile, ordinateur portable, tablette, forfait téléphonique et/ou Internet), vestiaire et frais de
représentation, télétravail, aménagement du temps de travail, responsabilités, collaborateur (assistant(e), stagiaire, intérimaire, junior en CDI...), logiciels et bureautique, espace de travail (bureau fermé versus open space), stockoptions, changement de titre, changement de poste, progression de salaire dans un an, ou révision du variable dans six mois... 2 . Faites vos comptes à court et moyen terme. Exemple : quel est le plus avantageux pour vous entre une augmentation maintenant de 1,5 %, certes acquise mais arrachée presque après supplication et qui vous laisse la sensation désagréable d’avoir été non seulement en position de demande, mais d’être fortement redevable de ce « privilège », OU une journée de télétravail avec la prise en charge de votre facture téléphonique et de votre équipement informatique à la maison, moins les frais de transport et surtout la fatigue si vous habitez loin, OU encore un changement de titre avec une formation qui vous permettra d’être plus légitime pour une nouvelle augmentation dans six mois de 3 ou 4 %, et de toute façon de présenter un meilleur CV pour évaluer sur le marché ce que vous valez vraiment ? 3. Ne vous enfermez jamais dans une seule option et ouvrez les portes de la négociation « gagnante/gagnante » : quel est l’avantage pour vous, en fonction de votre projet de vie privée et de votre projet professionnel, mais aussi quel est l’avantage pour l’entreprise ? Par principe, n’oubliez pas que ce qui est pris n’est plus à prendre... Pour négocier votre salaire, la période la plus indiquée est, certes, l’embauche. Dans tous les cas, pour demander une augmentation ou la négociation de conditions plus favorables, le préalable est qu’elle puisse être justifiée de la manière la plus factuelle possible : progression de l’inflation, dépassement notoire d’objectifs, surcharge de travail liée à un remplacement, étude des salaires dans la profession pour le même poste, ancienneté, évolution de la grille des salaires prévue dans votre convention collective, nouvelles responsabilités, etc., et surtout la qualité du travail réalisé ! Pour ce faire, tenez un journal de bord, et compilez-y régulièrement vos résultats, vos succès, les e-mails de félicitations, les retours positifs de clients et les chiffres clés démontrant la progression de votre activité (nombre ou durée de dossiers traités, nombre de nouveaux clients acquis, progression des ventes ou de rétention de clients, etc.) ou la façon dont vous avez résolu tel ou tel problème. Rédigez et formalisez aussi votre journée type, avec les horaires. Face aux objectifs fixés, argumentez et illustrez vos résultats. N’attendez pas le dernier moment pour faire ce genre de bilan. Il est préférable de le réaliser au fil de
l’eau pour être mieux préparé à votre entretien annuel ou semestriel. L’objectif est de démontrer la valeur que vous apportez ou que vous pouvez apporter à l’entreprise et qui justifie les conditions que vous souhaitez obtenir en échange.
Truc et astuce Prévoyez une chemise dans laquelle vous glisserez, tout au long de l’année, les différents éléments factuels illustrant votre activité et votre performance. C’est le meilleur moyen de ne rien oublier, mais aussi de gagner du temps au moment de la préparation de votre entretien annuel.
À ce propos, avant de démarrer, êtes-vous bien sûr de ce que vous souhaitez vraiment obtenir à l’issue de l’entretien ? Concrètement, de manière Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste, et dans quel laps de Temps ? Et si vous ne l’obtenez pas, quel est votre plan B ?
Pendant l’entretien 1. Rappelez les faits marquants les plus significatifs évoqués ci-dessus en allant chercher des « oui » auprès de votre responsable. Si besoin, démarrez l’entretien sur les critères de satisfaction ou de validation des objectifs pour
pouvoir les reprendre habilement dans le déroulement de vos réalisations. Par exemple : « Tu es d’accord avec moi : j’ai réussi à traiter avec succès les dix nouveaux comptes prospects que tu m’as confiés avec un score de 85 % en recommandation, soit de 10 % supérieur à l’objectif fixé. » 2 . Veillez à employer des termes positifs et constructifs (d’où l’indispensable préparation) et, si possible, la terminologie utilisée par votre supérieur (prenez ses mots à lui : ce sont ceux qu’il comprend le mieux !). 3 . Valorisez-vous quand vous parlez de votre travail et de votre personne (émetteur), mais n’oubliez pas de valoriser votre supérieur ou votre entreprise (récepteur du message). Ainsi, évitez, en parlant de vous, d’user de qualificatifs comme « petit », « un peu », « pas grand-chose », « facile », ou de phrases avec des négations. Formulez-les de manière simple, concise et, une fois de plus, positive ! Vous aurez choisi, en amont, les axes de négociation possibles et la stratégie à privilégier. Par exemple : démarrer par une augmentation du fixe et du variable, mais proposer, le cas échéant, la possibilité d’une journée de télétravail qui vous permettrait d’être plus efficace sur l’administration des ventes, tout en restant complètement joignable par téléphone et/ou visiophone et/ou chat. Si l’on ne peut pas revoir votre fixe cette année, peut-on envisager une prime sur le nombre de dossiers traités supplémentaires ? Ainsi avez-vous réfléchi à plein de propositions et de questions... Mais n’oubliez pas, lors de l’entretien, que votre supérieur a des intérêts a priori opposés aux vôtres, c’est-à-dire que son but est, le plus souvent, de « lâcher le moins possible », de donner ce qu’il peut au mieux, mais aussi, en principe, de continuer à travailler avec un collaborateur motivé et impliqué.
À la fin de l’entretien 1. Si vous n’avez pas obtenu ce que vous souhaitiez ou pas de réponse précise sur la tendance de la conclusion, surtout ne fermez pas les opportunités de pouvoir en rediscuter. « Je comprends très bien que tu ne puisses pas me répondre tout de suite. Je peux, d’ici là, te transmettre ma journée type avec le nombre de dossiers à traiter et ceux traités effectivement. Est-ce que l’on peut se revoir un quart d’heure la semaine prochaine, lundi ou mardi, matin ou aprèsmidi ? » Bref, l’idée est d’obtenir un autre entretien pour poursuivre la négociation. 2. De la même manière, si la proposition qui vous est faite ne vous satisfait pas complètement, voire pas du tout, saluez malgré tout les efforts entrepris
par votre boss et demandez-lui la possibilité de vous revoir un quart d’heure (même méthode que ci-dessus) pour évoquer ensemble les gains de productivité possibles sur le nombre de dossiers traités (pour placer et argumenter à nouveau la nécessité pour vous d’une journée de télétravail, par exemple, plus la possibilité de pouvoir envisager d’ici cette prochaine entrevue une autre solution alternative qui aille dans votre sens). Parlez son langage et restez convaincu que la négociation démarre vraiment, et seulement, quand on vous a dit « non », à condition sans doute d’en faire un moment constructif et positif pour les deux acteurs en présence. L’improvisation ne s’improvise pas et le temps est un des facteurs clés de succès. Les règles d’influence d’une bonne communication en interne nécessitent trois prérequis : 1. Cela va mieux en le disant. 2. Pour convaincre, il vaut mieux être convaincant soi-même. 3. Il faut connaître la personne ciblée, ses habitudes, son mode opératoire, ses disponibilités si l’on souhaite obtenir une communication efficace. Bref, partez du principe que votre supérieur vous a engagé justement pour ne pas s’occuper de ce que vous faites et que son avis sur vous se fait à travers les quelques échanges que vous pouvez avoir avec lui, ce que l’on dit de vous au sein de l’entreprise, ou à travers des chiffres dans des tableaux de bord. Pour le reste, il n’est pas devin : n’imaginez pas un seul instant qu’il sait ou qu’il a un regard bienveillant et continu sur toutes les bonnes actions que vous réalisez au quotidien, a fortiori en silence : c’est regrettable mais, le plus souvent, il n’en a pas le temps. Votre principal atout : lui en faire gagner. Plus vous communiquez sur ce que vous réalisez, plus vous avez de chances que cela se sache, à condition de trouver la bonne façon, le bon canal et le bon moment en fonction de l’interlocuteur visé. Plus vous êtes explicite sur ce que vous ressentez, ce que vous réalisez et sur les feed-back que vous attendez ou émettez, plus l’efficacité sera au rendez-vous. Pour ce faire, introduisez des éléments mesurables, réalistes et concrets, tout en employant le vocabulaire des personnes que vous souhaitez convaincre. Apprenez le langage de votre boss ! Pour vous y aider, voici les huit règles d’une communication d’influence qui vous permettront de gagner en efficacité. Privilégiez une communication : 1. Claire, dont la compréhension est immédiate et sans ambiguïté ; 2. Réaliste, c’est-à-dire justifiée et factuelle ;
3. Différenciée pour qu’elle puisse s’extraire de l’« infobésité »2 environnante ; 4. Mémorisable, grâce à des phrases courtes et un vocabulaire concret ; 5. Mobilisatrice, elle doit concerner et impliquer le public visé ; 6. Déclinable, éventuellement sur d’autres supports (écrit, on line...) ; 7 . Durable, afin de permettre à vos interlocuteurs de s’y retrouver d’une intervention à l’autre ; 8. Et enfin fédératrice, dans le sens où elle facilite le rappel de l’ensemble des actions dans le contexte pressenti.
La clé majeure est de construire votre vision, votre projet professionnel en dehors de la simple logique du : « J’ai droit à... » Pour être mieux reconnu, privilégiez plutôt la logique suivante : « Pour me réaliser professionnellement, j’ai besoin de... afin d’atteindre à court ou moyen terme tel objectif. Et voilà ce que je peux apporter à cette entreprise. » Alors oui, il y a un peu de méthode « Coué », de psychologie ou pensée positive dans tout cela. Vous connaissez sans doute la citation de John Fitzgerald Kennedy (1961) : « Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous. Demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays. » Elle fut particulièrement efficace au moment de l’élection de John Fitzgerald Kennedy, elle le sera pour vous lors de votre entretien avec votre boss. Car votre valeur dépend de celle que vous apportez. N’hésitez pas à être ambitieux pour vous-même, tout en restant réaliste bien sûr. Plus l’objectif que vous souhaitez atteindre est clair pour vous, plus il le sera pour les autres, et donc pour votre supérieur. Plus il se traduit par des comportements observables et mesurables qui vont aussi dans le sens de l’entreprise, plus vous avez de chances de l’atteindre.
Une des difficultés peut résider dans le fait d’être confronté à une surcharge, à un manque de moyens. Le fait de l’exprimer, voire de s’en plaindre, est souvent peu audible par votre supérieur, car il vous a justement engagé pour surmonter ce manque de moyens et qu’il est fort possible qu’il soit lui-même confronté au même problème, si ce n’est plus. Par contre, lui parler en termes d’analyse des risques peut l’amener à prêter une oreille beaucoup plus attentive. Le risque se mesure en termes de probabilité qu’il a d’advenir et en termes de gravité sur l’activité de l’entreprise. Si, par exemple, votre supérieur vous demande des objectifs que vous jugez inatteignables, vous pouvez ne rien dire et espérer qu’il se rendra compte, en fin d’année, des efforts incroyables que vous aurez fournis pour les atteindre (ou finalement ne pas les atteindre...). Et l’heure des comptes arrivera à un moment ou à un autre. Le fait de ne rien dire signifiera pour lui votre « consentement », pour ne pas dire votre « acceptation », du transfert des responsabilités de son côté au vôtre. En revanche, si vous lui indiquez tout d’abord que, bien entendu, il peut compter sur vous pour faire le maximum dans ce sens, mais que vous aimeriez le revoir dans la semaine, le jour et l’heure qui lui conviennent, pour lui présenter un benchmark, les bonnes pratiques de la concurrence, afin d’évaluer les risques potentiels de ne pas atteindre vos objectifs, vous devriez obtenir ce rendezvous. S’il vous répond que c’est la crise, que c’est comme ça ou que c’est la direction qui l’a décidé, vous pouvez lui envoyer par e-mail votre petite étude
(une page synthétique maximum) avec une matrice « probabilité/gravité »3 et un plan de secours ou de prévention au cas où... Vous serez dans une autre posture au moment des bilans de vos actions. Si, en plus, les objectifs n’ont pas été atteints, lors de la prochaine fixation d’objectifs il vous écoutera de manière plus attentive encore. Le temps et la communication sont vos alliés pour l’atteinte de vos objectifs et pour vous valoriser. À noter, enfin, que le choix des mots est aussi déterminant. Pour aller plus loin, vous pouvez consulter l’ouvrage de Marshall B. Rosenberg Les Mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs). Introduction à la communication non violente4.
D’accord/pas d’accord IN FINE, ON EST OBLIGÉ D’ACCEPTER LES OBJECTIFS QUE L’ON NOUS FIXE
Effectivement, il vaut mieux concentrer son énergie à s’organiser pour les atteindre.
En même temps, on peut nourrir la réflexion avec des chiffres, des faits, des études afin de proposer d’autres alternatives en mesurant les risques et en ajustant les ressources, les moyens ou les spécifications.
Et pourquoi changer ?
Après tout, chacun son rôle : c’est lui, le manager ! Vous, vous n’êtes qu’un simple collaborateur. C’est le manager qui a la charge de ses équipes, non ? C’est à lui d’assurer la protection, l’harmonie, la motivation, la performance de ses équipes. C’est aussi à lui de faire monter en compétences son équipe et de rendre des comptes sur les résultats de ses collaborateurs. Ce n’est quand même pas au collaborateur d’aller démontrer ce qu’il vaut ou de rappeler à son chef ce pour quoi il est payé. S’il ne se rend pas compte de la valeur de ses coéquipiers, s’il ne fait pas de retours constructifs et réguliers, de deux choses l’une : soit il est mauvais, soit c’est le collaborateur qui n’est pas vraiment à la hauteur. De toute façon, dans une entreprise, tout se sait, non ? ! On ne va pas en plus prendre du temps pour se vendre et promouvoir en interne son propre job. Flagorner son chef chaque fois que l’on quitte le bureau ou débattre haut et fort à la pause-café ou à la cantine de ses propres mérites, c’est un peu indécent, non ? ! Et tout le monde n’est pas « commercial » dans l’âme. En termes de carrière, d’évolution, de grille salariale, qui a l’information et les perspectives ? C’est encore lui. Il est tout de même le mieux placé pour savoir ce que valent les membres de son équipe. C’est même son job, non ? Vous avez raison, mais au regard de la pression croissante sur le « middle management », souvent coincé entre le marteau et l’enclume, les reportings de plus en plus serrés et nombreux, ou la mise en place d’une organisation matricielle à deux têtes, les managers ont de moins en moins de marge de manœuvre, de visibilité sur les changements en cours dans l’entreprise. Pire, avec l’effet de la crise, la pression qu’ils mettent sur leurs collaborateurs ou le manque de moyens sont souvent décuplés à leur propre niveau. Le vent souffle souvent plus fort en haut de la pyramide, et les facteurs de productivité et de rentabilité à court terme se sont développés au détriment du facteur humain. Lui-même ne sait pas toujours à quelle sauce il va être mangé. Vous gagnerez à mieux vous faire connaître, à communiquer sur votre activité, vos besoins, vos intérêts de manière claire pour éviter tout malentendu, contresens, projection, voire imagination... Rappelez-vous : la communication a horreur du vide. Si vous ne l’insufflez pas, d’autres s’en chargeront de toute façon à votre place. Vous êtes le mieux placé pour faire connaître votre valeur et ce que vous apportez à votre entreprise.
Essayez quand même
Vous avez sans doute remarqué, vous aussi, dans les parcs, les aires de jeux, avec quelle facilité les enfants en bas âge, qui maîtrisent à peine le langage, arrivent à entrer en contact avec un futur camarade de jeu, pourtant jusqu’alors inconnu. Le simple fait de pencher la tête du même côté, de sourire de la même façon, d’imiter les gestes de l’autre est l’indicateur d’une volonté d’établir un lien avec ce dernier. Cette imitation s’opère souvent de manière inconsciente sous la forme d’une coïncidence simultanée et significative dans le non-verbal, et de manière beaucoup plus consciente quand il s’agit, par exemple, de respecter les codes vestimentaires dans une entreprise. Sans vous dénaturer
ni vous forcer, ce qui nuirait au naturel de la démarche, observez les expressions, les terminologies, les façons de poser des questions et d’y répondre de votre supérieur. Utilise-t-il des verbes d’action, est-il sensible à la précision des mots, aime-t-il avant tout les faits et les chiffres ? Le moment pour échanger avec son boss est, aussi, déterminant car lui-même est soumis le plus souvent à une forte pression et à un agenda surbooké. Renseignez-vous sur son agenda auprès de son assistant(e) bien sûr, mais aussi sur ses habitudes. Vous pouvez en outre commencer à vous entraîner avec vos proches – votre conjoint, vos enfants, vos amis – pour vous préparer à cette rencontre et, quand vous vous sentirez prêt, procédez avec votre boss comme suit.
Exercice
POUR PARLER À SON BOSS ET SE VALORISER Si votre supérieur est davantage disponible en fin de journée, plutôt que d’aller simplement le saluer avant de partir, profitez-en de temps en temps pour lui glisser « que le dossier X est réglé », le nombre de ventes que vous avez réalisées... « Bonne soirée ! Ah, au fait, j’ai pu éviter à nouveau une nouvelle réclamation sur le produit x27, c’est réglé. Le SAV a eu aussi l’info. À demain. » Si vous souhaitez parler d’un point en particulier, d’une aspiration, d’un ressenti, n’hésitez pas à demander un rendez-vous, même court, plutôt qu’un échange entre deux portes. Faites-le avec parcimonie et prenez soin de préparer ces échanges pour qu’ils soient efficaces, mémorisables et permettent de valoriser votre professionnalisme. Privilégiez des échanges courts qui vont à l’essentiel. Quand l’entretien est terminé, dites-vous que c’est terminé. Ne continuez pas par e-mail, à la machine à café ou chaque fois que vous croisez votre supérieur. Ne vous imaginez pas qu’en vous plaignant à vos collègues de votre manque de reconnaissance, les choses vont se régler d’elles-mêmes.
Pensez « efficacité » : de la mesure Un seul leitmotiv : valorisez-vous directement auprès de votre chef, tout en lui faisant gagner du temps sur la connaissance des dossiers, les tendances, la température chez les clients, l’avancement de l’activité... mais sans trop en faire, c’est-à-dire à bon escient, et en restant factuel et concis.
Pro/perso Vous avez remarqué, il y a toujours des amis pour vous raconter leur dernier succès, leur dernier achat, les choses extraordinaires ou remarquables qu’ils ont réalisées, telle personne plus ou moins connue avec qui ils ont échangé, ou l’ami de l’ami qui connaît telle célébrité. C’est d’ailleurs un peu fatigant, à force. Même à la maison, pour des tâches pourtant anodines, votre conjoint a le chic, dès qu’il a débarrassé la table ou rangé l’établi, de le faire connaître à tout le monde. Ou encore cet ami qui explique pendant une demi-heure avec quel soin il a choisi le dessert, comment il a trouvé « la » boulangerie et quelle boulangerie !, celle qui est réputée comme ceci ou comme cela. Vous, vous avez juste cavalé toute la journée, fait les courses, vérifié les devoirs des enfants, préparé en un temps record un super-dîner pour huit convives et à peine pris celui de vous changer. Pendant le repas, vous avez juste eu le temps de vous asseoir entre le fromage et le fameux dessert apporté par votre invité et dont tout le monde parle en ce moment à table avec des : « Hum, c’est vraiment délicieux ! » Votre conjoint, lui, n’a pas quitté la table, mais il a eu le temps, par contre, de placer pendant le dîner que : « Votre plat était très bon, mais, dommage, pas assez salé. » Ce n’est pas votre style de vous « la raconter », vous aimez recevoir, faire plaisir. Vos amis le savent. Ils vous connaissent bien et vous apprécient. Mais alors, pourquoi étiez-vous prêt(e) à lâcher le tablier ou à ravaler votre salive pour ne pas égorger votre conjoint quand il a glissé sa petite remarque ? Pour lui, c’était sans arrière-pensée, juste sincère et « il s’est permis de le dire, justement parce que c’était bon », mais cela vous a malgré tout piqué.
Attendre que les autres reconnaissent ce que vous faites pour eux, ou simplement les efforts que vous fournissez au quotidien, peut vous entamer sans que vous vous en rendiez compte. Par principe, on ne réalise jamais vraiment et on ne peut mesurer à son exacte valeur l’effort ou le prix de l’action de quelqu’un d’autre. En revanche, on mesure bien les siennes. Demandez de l’aide si vous en avez besoin. Indiquez vos limites. Partagez vos moments choisis. Bref, communiquez, communiquez, là maintenant, tout de suite et pas demain quand il n’y aura plus personne pour s’en rappeler. Bien sûr avec votre style, votre nature, de manière simple, avec humour si besoin, mais communiquez : il en restera toujours quelque chose de positif, à commencer pour vous. __________
2. Infobésité : surcharge informationnelle ou surinformation. 3. Matrice de criticité des risques. 4. Marshall B. Rosenberg, Les Mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs). Introduction à la communication non violente, La Découverte, 2004.
Chapitre 2 Pour qu’il arrête de me stresser
Après avoir lu ce chapitre, vous saurez que le stress n’est pas une fatalité. En pratiquant des exercices corporels et psychologiques, vous allez contribuer à l’amélioration de votre bien-être professionnel.
Vous ne savez pas vraiment quand cela a commencé, mais, depuis quelque temps, vous vous sentez très fatigué. Cela remonte peutê-tre au moment où a été annoncé un changement capital dans le fonctionnement de votre boîte. On allait vous « implémenter » un « ERP » de dernière génération... Il vous avait fallu quelques explications de vos collègues informaticiens pour comprendre qu’il s’agissait du logiciel de gestion de votre entreprise, que cela allait modifier les méthodes de travail, du commercial à la livraison, en passant par la comptabilité. Il y a aussi le changement d’attitude de votre chef. Il vous met une pression de plus en plus forte. Il vous demande de vous former à toute une batterie de nouveaux logiciels qui, selon lui, sont maintenant « absolument indispensables » à la réalisation de vos tâches quotidiennes. Comme si, jusque-là, vous ne travailliez pas correctement avec vos outils actuels (que vous maîtrisez très bien d’ailleurs). Et comme il vous sent réticent, il ne vous lâche plus. Votre autonomie se restreint de jour en jour. Surtout, il vous tanne pour que vous suiviez toutes les formations techniques et pour que vous abandonniez, dans les plus brefs délais, vos logiciels actuels pour les nouveaux. Vous êtes très inquiet car vous n’êtes pas sûr de pouvoir faire cette transition sans dégât. Et puis, tous les efforts qu’il vous demande de faire, qu’est-ce que vous allez y gagner, vous ? Ce n’est pas clair. Vous savez l’énergie et les soucis que cela vous coûte, mais pour le reste ? Et puis, d’expérience, vous savez qu’il ne vous dit jamais merci quand vous faites ce qu’il vous demande. Du coup, depuis quelques semaines, vous commencez à présenter un certain nombre de symptômes que vous savez être probablement causés par ce « stress » dont on parle de plus en plus.
Vu et entendu à la terrasse d’un café
Les clés pour changer Face à un contexte de changement, vous avez toujours la possibilité de choisir la posture du roseau (souplesse et adaptation...), plutôt que celle du chêne (résistance jusqu’à ce que...). Et puis, au-delà du stress, comment développer une expérience professionnelle qui va vous apporter de la satisfaction et, pourquoi pas, du bonheur au quotidien ?
UNE SEULE CONSTANTE DANS L’UNIVERS : LE CHANGEMENT Nos entreprises sont aujourd’hui placées dans des situations où le changement est de plus en plus fréquent et de plus en plus rapide, à la fois en termes de technologie et de métiers, mais aussi de marché et d’environnement concurrentiel. Sur Internet, un concurrent peut littéralement surgir en quelques secondes ! Imaginez l’équivalent dans le monde physique : ce serait comme si un constructeur automobile voyait immédiatement apparaître au coin de la rue une nouvelle usine déjà entièrement construite et en activité, avec le personnel et le réseau de distribution opérationnels ! Ces changements sont des facteurs de stress. Tout comme les conséquences qu’ils ont au sein même de l’entreprise sur les relations au travail.
À noter Le stress en France en quelques chiffres5 :
60 % des salariés se disent stressés ;
60 % des cadres se disent en état de fatigue chronique ; 60 % des arrêts de travail sont dus au stress ; le stress représente 3 milliards d’euros de coût social ; le stress cause un suicide par jour en France ; la dépression est la deuxième maladie au monde (en passe de devenir la première dans moins de dix ans). Tout changement est un facteur de stress, un « stresseur ». Et plus il est forcé, complexe et inexpliqué, plus il va provoquer les réactions primaires au changement que sont la passivité, la suradaptation ou la rébellion. Le stress lié au changement dépend de facteurs variés : un changement des orientations stratégiques de l’entreprise ; un changement des produits ou services de l’entreprise, de ses technologies ; une modification de l’organisation, du rythme de travail. Changer, c’est d’abord accepter de quitter une zone de confort connue pour un nouveau territoire. C’est accepter que l’avenir sera différent du passé. Et que « tout n’était pas forcément mieux avant ». La bonne question à se poser devant tout changement est donc : « Ai-je les ressources nécessaires pour faire face à ce changement ? » Or, de nombreuses personnes conçoivent tout changement comme forcément négatif pour elles. En effet, la tendance naturelle de chaque individu va vers la résistance aux changements car elle maintient un équilibre précaire. Mais dans cette posture de victime, elles ne se posent pas cette question des ressources. L’autre question à se poser, après celle des ressources, est : « Si je ne possède pas actuellement les ressources nécessaires, où pourrai-je les acquérir ou qui pourrait m’aider à les acquérir ? » Il en résulte que l’on souffre beaucoup du stress lié au changement quand on ne croit pas en ses propres capacités à trouver les ressources nécessaires, que cela soit de manière directe ou indirecte. Une autre clé pour diminuer son stress face au changement est de se familiariser avec la notion d’impermanence. Vous connaissez la formulation du scientifique français Lavoisier : « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. » Si, sur notre planète, la somme des atomes reste égale à travers le temps, les éléments qui constituent l’écosystème global bougent, vivent, meurent. L’impermanence est donc une loi tout à fait naturelle. L’idée
que l’on s’en fait peut être anxiogène, mais on peut également accepter ces évolutions pour ce qu’elles sont. Votre métier change, demandez-vous ce que vous avez à gagner dans ce changement. Ne plongez pas dans la pensée automatique : « C’était mieux avant. » Identifiez les opportunités cachées derrière les contraintes. Alors, comment modérer ces inquiétudes liées au changement sous toutes ses formes ? La recherche de reconnaissance auprès de notre environnement professionnel et, en premier lieu, auprès de notre supérieur hiérarchique est une solution extrêmement fructueuse. Les messages de reconnaissance que nous recevons nous donnent le sentiment d’appartenir vraiment à l’entreprise. Ils sont les pierres angulaires de notre identité professionnelle. A contrario, le manque de reconnaissance est une des principales causes de stress évoquées par les salariés. Sans reconnaissance, nous exprimons un ensemble de comportements négatifs (frustration, agressivité, impatience...). N’hésitez pas à demander de la reconnaissance à votre chef. Si c’est un bon manager, conscient de l’importance de ce « carburant du développement », il vous en donnera pour diminuer votre stress et augmenter votre engagement professionnel.
LAISSER VENIR LE « FLOW » Diminuer son stress sur le chemin de la recherche du bonheur, c’est la promesse d’un courant de la psychologie actuelle, dont Mihaly Csikszentmihalyi, en développant sa théorie du « flow », est l’un des représentants mondialement reconnus. Le flow, littéralement le « flux » en français, est l’état de conscience si singulier que l’on peut atteindre lorsque l’on vit une expérience dans laquelle on est particulièrement immergé, avec un niveau élevé de concentration et d’implication. Cet état développe chez le sujet un ressenti d’accomplissement et de réussite, condition essentielle du sentiment de bonheur. Cet état de « flow » peut s’atteindre dans le cadre professionnel, mais aussi dans la sphère privée. Cela met en œuvre nos compétences, nos envies, nos capacités. Quand nous sommes dans cet état, nous touchons à ce que Mihaly Csikszentmihalyi appelle l’« expérience optimale ». Chacun peut éprouver ce sentiment et, selon cet auteur, l’expérience optimale comprend huit composantes essentielles :
1. La tâche à réaliser comporte un défi ; elle n’est pas triviale, elle requiert une aptitude particulière, mais elle reste réalisable (il ne s’agit pas de se fixer des projets irréalistes et irréalisables). 2. La tâche demande une concentration complète. Toute notre attention doit être canalisée sur cette action. 3. Le but de cette concentration est précis et bien compris. 4. L’activité génère un feed-back immédiat, on sait quand on a atteint son objectif. 5. L’effort produit n’est pas ressenti comme une douleur ou un désagrément. On est tellement impliqué dans la tâche, qu’on laisse de côté les soucis de la vie quotidienne. 6. Nous contrôlons notre action, ce n’est pas elle qui nous contrôle (nous ne sommes pas sous dépendance). 7. On ne se lamente plus sur soi, on enrichit son expérience de vie. 8. Le temps ne passe plus de la même manière ; les journées peuvent sembler des minutes, ou des heures ressembler à des jours. Cette expérience optimale fabrique, pour celui qui la vit, un état de satisfaction et de réalisation de soi particulièrement propice au renforcement de l’estime et de la confiance en soi.
RES-PI-REZ ! De nombreuses méthodes, simples et à appliquer au quotidien, permettent de se tenir à l’écart des effets néfastes d’un chef ultra-stressant. Et souvent, les premières solutions passent par le corps. Avec, en premier lieu, les techniques respiratoires. Elles entrent dans ces techniques physiques qui ont un effet global sur notre corps, et notre humeur bien sûr. Il ne vous a pas échappé que nous respirons de manière automatique « sans y penser ». Notre cerveau gère cette activité comme des millions d’autres, pour nous maintenir en vie. Or, dans une situation stressante, nous pouvons remarquer que notre respiration change. Hyperventilation ou, au contraire, apnée impactent notre rythme cardiaque et provoquent un effet général de mal-être caractéristique des états de tension.
Passez en mode manuel ! Littéralement, reprenez le pilotage de votre respiration pour réguler votre activité cardiaque et revenir à un état satisfaisant.
Il existe de nombreuses techniques apparentées au yoga respiratoire. La respiration calmante est une technique simple et immédiatement efficace.
Source : Manager au quotidien, sous la direction de Stéphanie Brouard, Eyrolles, 2009.
Exercice
DE RESPIRATION CALMANTE Imaginez devant vos yeux un triangle, pointe en haut. La ligne montante de gauche sera votre inspiration, la ligne descendante de droite votre expiration, et la ligne horizontale du bas la phase de suspension de votre respiration, poumons vides. Cette respiration se pratique sur trois temps (secondes) sur chaque étape, au moins pendant deux minutes. À l’issue de ce cycle, vous allez vous sentir apaisé et serein.
Un autre exercice de yoga respiratoire utile est la « respiration carrée ». Son but est de rétablir une « cohérence cardiaque » satisfaisante.
Source : Manager au quotidien, sous la direction de Stéphanie Brouard, Eyrolles, 2009.
Exercice
DE « RESPIRATION CARRÉE » Cette fois-ci, imaginez un carré devant vos yeux. Les deux verticales représentent vos inspirations et vos expirations, et les deux horizontales les phases de retenue. Le cycle est le suivant : inspiration sur trois temps ; retenue de votre souffle, poumons pleins ; expiration sur trois temps ; et enfin retenue, poumons vides.
Intéressons-nous aussi aux apports des arts énergétiques chinois. Le chi gong illustre parfaitement les bienfaits de ces techniques ancestrales.
Exercice
DE CHI GONG Postez-vous idéalement devant une fenêtre de votre bureau. Laissez votre regard balayer le paysage qui s’offre à vous. Si vous avez la chance de bénéficier d’un horizon de toitures variées, c’est encore mieux. Vos bras sont relâchés le long de votre corps. Vous respirez paisiblement et régulièrement, vos épaules sont basses et détendues. Au bout de quelques secondes vous allez ressentir le besoin de plier légèrement les genoux. Ce sont les bienfaits de la pesanteur terrestre. Acceptez cette pression et fléchissez sensiblement. Cela va participer à la sensation d’« ancrage » que nous recherchons. Vous êtes maintenant de plus en plus détendu. Votre regard flotte sur l’horizon sans s’attacher à un point particulier. Imaginez maintenant qu’un fil invisible parte du haut de votre crâne vers le ciel. Ce fil vous permet de redresser la tête. Sans pour autant modifier le reste de votre posture, votre regard se lève, votre champ de vision s’élargit. Vous respirez toujours amplement et calmement. Au bout de quelques minutes dans cette position, vous vous sentez éveillé et calme, confiant et en capacité de vous confronter aux
situations professionnelles de la journée.
Bon à savoir Nous sommes doués pour fabriquer nous-mêmes notre propre malheur, comme le prouvent les « PAN » (pensées automatiques négatives). Comment se produisent-elles ? Dans une situation de stress professionnel, nous sommes pris dans le triangle émotionnel suivant : entre ce que nous pensons (« Mon chef me met une pression intolérable »), ce que nous ressentons (de l’angoisse, de la colère...) et ce que nous faisons (je m’oblige à obéir, je me rebelle, j’attaque...). De nombreuses pensées automatiques surgissent sur notre écran mental. En nous racontant « une histoire », souvent anxiogène, ces pensées distordent la réalité. De quelles manières le font-elles ? Voici quelques exemples qui vous sont peut-être familiers. On saute immédiatement à la conclusion : « Cela va mal finir... » On va exagérer ou minimiser la situation : « Je n’ai pas compris tous les éléments de la formation... Je suis vraiment nul en informatique, je n’y arriverai jamais ! » On va « surgénéraliser » et donner une conclusion globale sur un fait particulier : « Je n’ai pas su quoi lui répondre sur le moment, je ne suis vraiment pas assez intelligent pour ce poste... » Que faut-il faire pour éviter les effets dévastateurs de ces pensées automatiques négatives ? Eh bien, dans un premier temps, il faut les identifier comme telles, et non comme des constats objectifs. Ensuite, il faut reformuler ce dialogue interne en une tournure positive. Et, enfin, s’imposer un regard plus objectif et rationnel sur la situation.
D’accord/pas d’accord LA PRESSION EST NÉCESSAIRE POUR RELEVER DES DÉFIS
Sous pression, on est galvanisé et l’on peut même se surpasser.
Ça, c’est si tu te mets toi-même la pression parce que tu l’as décidé. Mais si c’est une pression mise par ton chef, elle peut te tétaniser.
Et pourquoi changer ? Toute la pression que vous met votre chef, c’est un peu comme un tsunami ; ça ne s’arrête pas avec un petit muret de pierre... Vous vous dites qu’il n’y a qu’à tenir le coup, après tout. Serrer les coudes et faire ce qu’il vous demande, même si cela vous coûte. En espérant que les vacances vont vous permettre de recharger les batteries. Et puis, vous avez votre famille et vos amis pour vous soutenir et vous aimer. Vous leur avez raconté par le menu les situations de plus en plus pénibles dans lesquelles votre chef vous met. Vous vous êtes beaucoup épanché et maintenant vous vous sentez de plus en plus fatigué, même dans la recherche de soutien auprès de vos proches. Après tout, quand on a l’impression que « cela ne peut pas être pire », on a tendance à croire que « cela ira mieux demain »... Eh bien, oui, cela ira mieux demain... si vous acceptez le fait que vous êtes en train de subir un stress fort et néfaste pour vous. Une fois ce constat fait, vous pourrez vous mettre en recherche de vos ressources pour les utiliser à bon escient. Vous pourrez pratiquer des exercices physiques (respiration, jogging, natation, danse, etc.) qui vous rechargeront en énergie positive. Vous essaierez les méthodes que vous propose la psychologie positive comme, par exemple, l’exercice suivant.
Exercice
POUR MIEUX GÉRER SON STRESS Dans le registre des approches purement psychologiques de gestion du stress, nous allons nous intéresser à ce que la PNL (programmation neurolinguistique) appelle l’« ancrage des ressources positives ». Pour utiliser cet outil, il faut l’avoir préparé à l’avance. C’est donc une méthode en deux temps. Prenons le cas suivant. Vous souhaitez trouver un « truc » qui vous permettra de ne pas perdre tous vos moyens quand votre chef entreprendra de vous déstabiliser, une technique vous permettant, tout au moins, de dépasser cette situation sans causer trop de dégâts. Dans la phase de préparation de cet ancrage, vous allez réactiver un moment parti-culièrement agréable que vous avez vécu par le passé. Trouvez une situation dans laquelle vous avez développé l’état (courage, sérénité, joie...) que vous souhaiteriez réactiver ultérieurement. Cette « tranche de vie » a pu se dérouler en famille, en vacances ou seul, peu importe. Il faut, en revanche, que vous vous en souveniez suffisamment clairement pour pouvoir vous replonger dans ce moment en utilisant vos cinq sens. Il s’agit de faire revivre les images d’alors, les sons qui vous entouraient, les sensations kinesthésiques (au toucher par exemple), les odeurs significatives et, éventuellement, le goût que vous aviez en bouche à ce momentlà. Une fois « char-gée » toute cette batterie de sensations, il faut l’ancrer physiquement en choisissant
un geste précis que vous pourrez reproduire au moment souhaité. Ce peut être se tenir le poignet, se pincer une phalange, serrer le poing... À vous de choisir. Pour associer la situation « revécue » au geste choisi, il faut faire le geste durant cinq à trente secondes jusqu’à ce que vous vous sentiez complètement imprégné de l’état que vous revivez. Juste après cela, faites tout à fait autre chose ; allez vous promener, donnez un coup de fil... Cela facilitera l’ancrage. Laissez passer un peu de temps (quelques heures) et testez l’ancre en l’activant par le geste. Vous sentirez alors revenir l’état souhaité. Si cela ne fonctionne pas, reprenez depuis le début. Attention, les effets de cet ancrage vont s’atténuer avec le temps si la technique n’est pas utilisée souvent. Alors faites-en un usage régulier, c’est une ressource de bien-être naturelle, renouvelable et complètement gratuite.
Essayez quand même POUR ALLER PLUS VITE... FREINEZ ! Voici un récit que m’a fait l’un de mes amis, cadre dans une agence de publicité où il est habitué à se trouver dans des contraintes de temps. Durant ses périodes de « charrette », il m’avoue que, comme tous les autres, il se met à accélérer son rythme de travail, de manière souvent frénétique. Il communique de plus en plus vite et s’immerge dans le « multitasking » (téléphone, e-mails, SMS...) avec de nombreux interlocuteurs. Il me confesse ressortir de ces périodes frénétiques complètement épuisé, comme « essoré » par un « lavelinge géant »... L’été dernier, il s’est laissé tenter, sur proposition de sa femme, par une retraite spirituelle dans un monastère bouddhiste zen. Ils ont été intégrés à un groupe, dont la tâche du matin consistait à préparer le petit déjeuner. « Nous n’étions que huit et nous n’avions qu’une heure pour préparer le petit déjeuner de quatre cents personnes, et tout cela en silence », me dit-il. Visiblement, la tâche lui semblait colossale. Il me raconte qu’un matin trois personnes manquaient au rendez-vous de cette « méditation du travail ». À 5 h 30 ils n’étaient plus que cinq pour réaliser le travail, déjà énorme pour huit. Très inquiet, il démarre en trombe, s’affaire à différentes tâches en même temps, précipite son pas ; bref, il retombe dans ses tendances habituelles : accélération et précipitation. « À ce moment-là, me dit-il, le moine qui s’occupait de nous, voyant notre accélération commune et mon stress, nous a demandé de nous rassembler à l’extérieur de la cuisine et de méditer quelques instants au son du tintement de cloche. Quelle perte de temps, pensais-je immédiatement ! Nous sommes déjà en retard et il nous interrompt pour ça, ce n’est vraiment pas le moment ! » Après cette courte pause, ils se sont tous remis au travail et... les portes de la salle de restauration ont ouvert à l’heure. Tout était prêt comme il se doit. « Je
ne sais toujours pas comment nous y sommes parvenus, me confie-t-il. Ce que je sais, c’est que ce jour-là, j’ai appris une belle leçon sur la vraie productivité, et je sais maintenant qu’elle ne rime pas avec précipitation et stress ! »
Pro/perso L’expérience optimale que nous avons décrite peut, bien sûr, se décliner dans la vie privée, notamment à travers ce que le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi appelle les « activités autotéliques ». Le terme « autotélique » vient du grec autos (soi) et telos (but ou fin). Cela signifie que l’activité que nous pouvons pratiquer pour diminuer notre stress doit avoir une fin en soi. Elle n’a pas d’autre but que de nous apporter le plaisir et le contentement. Même si, pour cela, nous allons devoir produire un effort qui, dans un autre contexte, pourrait nous paraître désagréable. Cela peut être, par exemple, courir un marathon pour ressentir la satisfaction intrinsèque que cela peut procurer, en oubliant, au passage, que votre idée première, il y a quelques mois, était de vous mettre à la course à pied pour perdre du poids. Pratiquer une activité autotélique, c’est la pratiquer pour elle-même et non pour ses conséquences. C’est ainsi que les jeux, les sports, les activités artistiques, le jardinage... sont des champs infinis de découvertes de ce type d’activité. Essayez-en certaines et trouvez la vôtre ! Comment la reconnaître quand vous la pratiquerez ? Eh bien, vous ressentirez un ou plusieurs des points décrits plus haut dans l’expérience optimale. Les heures passeront comme des minutes ou vous fournirez un effort physique intense sans avoir l’envie de vous en plaindre, vous pourrez vous satisfaire pleinement et sincèrement de la chose accomplie... par vous et pour vous. __________
5. Sources : Anact/INRS/Ipsos/Malakoff Mederic/Inserm/OMS.
Chapitre 3 Pour que notre relation reparte du bon pied
Après avoir lu ce chapitre, vous saurez affirmer votre point de vue avec confiance et rétablir une relation partie sur une mauvaise voie. Et ceci avec diplomatie, tact et efficacité.
Tout a débuté comme dans un conte de fées. Ce nouveau poste, cela faisait un moment que vous le convoitiez. Une belle entreprise, située idéalement à 25 minutes de votre domicile, et une évolution de poste prévue après la première année ! Ce n’est pas le paradis, mais on s’en rapproche. Surtout après ce que vous avez traversé dans votre précédent job. Mais passons, c’est de l’histoire ancienne. C’est lui qui vous a recruté : parmi dix autres « choix » possibles, il vous a pris, vous ! C’est vrai que vous correspondiez assez bien au profil de l’annonce ; l’expérience et les compétences étaient au rendez-vous. Il avait même apprécié votre intérêt pour les sports nautiques, un « plus » avait-il dit, car cela montrait votre « ténacité » et votre « résistance à l’effort ». Les six premiers mois se sont déroulés sans anicroche, presque une lune de miel. Puis il y a eu le contentieux avec le client principal de votre département. Rien à voir avec vous en particulier, mais à partir de ce moment-là, votre boss a changé, la pression sans doute. Reproche sur reproche à votre égard se sont succédé sans relâche. Il avait « perdu sa confiance en vous », vous a-t-il lâché un soir, au moment où, votre manteau sur le dos, vous vous apprêtiez à quitter le bureau (déjà en retard pour aller récupérer votre fille chez la nounou). Les bras vous en sont tombés ! Qu’aviez-vous fait pour mériter cela ? Depuis, il vous met une pression de plus en plus forte. Cela tourne au vinaigre, comment allez-vous vous sortir de cette situation pénible ?
Vu et entendu au rayon « management » d’une librairie
Les clés pour changer Pour rétablir une relation, vous savez que chacun doit y mettre du sien. Vous verrez ici que les dauphins ont des choses à nous apprendre. Puis vous découvrirez comment sortir d’un triangle particulièrement dramatique.
LE DAUPHIN ET SA STRATÉGIE Imaginez que vous êtes sur une plage magnifique, une de celles qui abondent dans les mers chaudes. Vous êtes là pour profiter des vagues déferlantes qui ont fait la réputation de l’endroit. Même si vous êtes surfeur débutant, vous savez que c’est la puissance, la hauteur de la vague qui va déterminer le niveau de difficulté et le plaisir que vous allez ressentir à l’affronter, la capter, la tutoyer en somme. Pour cela, autant se référer à un spécialiste : j’ai nommé le dauphin et sa fameuse stratégie6. La stratégie du dauphin se distingue de celle de la carpe et du requin. Quand la carpe attend passivement (de se faire oublier ou dévorer), le dauphin trouve une solution élégante, une voie médiane qui lui permet d’utiliser la force de la vague sans se laisser submerger par cette force. Quand le requin, guidé par son appétit de prédateur, va à l’affrontement par l’attaque brutale, la manipulation, l’emprise, etc., le dauphin, lui, tente une « percée » et, s’il le faut, assène un coup sur le museau du requin. Dans le cas présenté plus haut, une posture de dauphin pourra être très utile. En fait, il s’agit d’une approche tirée de la communication authentique non violente qui s’appelle l’« assertivité » (pour plus de détails sur l’assertivité, voir plus loin « L’assertivité : plus qu’une méthode, une posture de vie »). Cette approche se déroule en cinq étapes : 1. La première étape consiste à prendre la bonne « posture » psychologique, à être, en l’occurrence, dans l’état d’esprit suivant : « J’ai de la valeur, je suis compétent dans mon travail, je suis “OK” dans ma tête, et mon interlocuteur (qui me critique) a également de la valeur. Cela ne veut pas dire que je suis “parfait”. J’ai, bien sûr, mes limites et mes marges d’amélioration, mais ma confiance en ma capacité me permet de faire face à une critique. » Une fois dans cet état d’esprit « ++ », la critique n’est plus considérée comme une réprimande ou une punition, mais comme une information contributive à mon développement, mon apprentissage.
2. La deuxième étape consiste simplement à écouter pleinement mon interlocuteur. Mais est-ce si simple ? Si vous n’êtes pas complètement dans cet état d’esprit « ++ », vous risquez d’être tenté, soit par l’évitement (regarder la moquette ou l’immeuble d’en face à travers la fenêtre), soit par l’attaque ou la justification. Donc, écouter pleinement la critique, c’est garder un contact visuel avec l’autre, ne pas attaquer, ne pas fuir et ne pas se justifier. 3. Après cette deuxième phase, nous arrivons à l’étape primordiale de la « reformulation ». Comme son nom l’indique, il s’agit ici de reprendre les différents éléments de la critique en les résumant pour montrer que l’on a bien entendu et compris. Cette reformulation sert également à autre chose. Elle a un effet « caméscope » chez la personne qui a formulé la critique. En effet, s’entendre récapituler ses propres arguments par un autre leur donne une tout autre couleur. C’est ainsi l’occasion pour le « critiqueur » de prendre de la distance : « J’ai peut-être un peu exagéré là, en lui disant ceci ou cela. Auraisje poussé le bouchon trop loin ? » À l’issue de cette reformulation, le climat est apaisé, les éléments posés clairement sur la table. L’atmosphère est favorable et propice à la résolution des problèmes. 4. La quatrième étape pourra être celle du tri et de la priorisation parmi les demandes de votre interlocuteur : « Dans les trois points qui constituent votre critique, le sujet du... semble être le plus prioritaire, n’est-ce pas ? Les points suivants pourront-ils être traités ensuite ? » 5. L’étape finale débouche sur une proposition d’action. À ce stade, nous sommes ouvertement dans une phase de coconstruction de sortie de cette « mini-crise ». Les deux interlocuteurs ne sont plus en opposition (« J’accuse » pour l’un, et « Je me justifie » pour l’autre), mais en coréalisation du scénario qu’ils vont être amenés à dérouler ensemble ultérieurement.
À noter Faire preuve d’affirmation de soi tout en restant respectueux peut surprendre certains managers habitués à se confronter à des attitudes d’attaque ou de fuite, c’est-à-dire des relations de force se concluant par un clash ou de la soumission. Il est donc possible que votre boss réagisse de manière peu satisfaisante à votre première intervention. Qu’à cela ne tienne, laissez-lui le temps de s’accoutumer, la seconde discussion sera la bonne. Il en est de même en matière gastronomique ; il faut parfois un peu de temps pour apprécier la saveur d’un nouveau plat.
LE TRIANGLE DRAMATIQUE Il est parfois compliqué de déceler précisément les vraies causes du
« pourrissement » d’une relation avec son hiérarchique. Il se peut, dans certains cas, que les causes affichées de part et d’autre ne soient pas les seules en jeu. Comme le décrit subtilement le créateur de l’analyse transactionnelle Eric Berne, dans Des jeux et des hommes7, nous jouons dans certaines circonstances des « jeux psychologiques » qui produisent des effets que nous serions loin de désirer si nous en avions connaissance en amont. Ce qui veut dire qu’il n’est pas exclu que, sans vous en rendre compte, vous ayez une responsabilité dans le conflit qui vous oppose à votre boss. Si c’est le cas, il est possible que cette situation se renouvelle dans un autre contexte professionnel avec un autre hiérarchique. Découvrons le fameux triangle dramatique, dit aussi « triangle de Karpman ». Il est représenté par trois « positions », chacune occupant une des pointes du triangle : le persécuteur, la victime et le sauveur.
Dans le cas qui nous intéresse ici, à savoir si vous vous sentez écarté par votre boss, il se peut que vous soyez dans la position de la victime. Ce rôle peut être assez confortable car il permet de ne pas avoir à se remettre en question. Il y a un coupable dans cette affaire, et c’est l’Autre ! Une des ressources de la victime est de solliciter l’aide d’un « sauveur ». Ce triangle est un univers fermé qui fonctionne en tournant sur lui-même. Il s’auto-alimente et permet à chaque acteur de passer successivement d’un rôle à l’autre... sans jamais trouver de porte de sortie. Le but est de ne pas y entrer. Prenons un exemple pour illustrer ce phénomène. Au supermarché, une femme fait les courses avec ses deux fils. Quand ils passent devant le rayon des jeux vidéo, les deux garçons se mettent à réclamer très bruyamment l’achat du jeu que tous leurs camarades de classe ont et qu’il leur semble impossible de ne
pas acheter là, maintenant, tout de suite. Ils se mettent à persécuter leur mère désarmée, qui commence à se plaindre. Elle s’installe dans le rôle de la victime : « Ce n’est pas le moment de faire des dépenses inutiles, nous sommes ici pour faire les courses, pas pour acheter des jouets. Vous n’en avez jamais assez, c’est tout le temps la même histoire ! » À bout d’arguments, elle menace d’en parler à leur père dès le retour à la maison. Aussitôt dit, aussitôt fait. Le père des deux garçons, une fois informé, s’en prend vertement à eux et s’énerve si fort que les deux nouvelles victimes de cette pièce de théâtre disparaissent, craintives, dans leur chambre, privées de dessert et de télévision pour la soirée. Le père est passé assez rapidement de la position de « sauveur de la mère » à celle de « persécuteur des enfants ». La mère, inquiète de la dureté du traitement infligé à ses garçons, va attaquer le père : « Je ne t’ai pas demandé d’être aussi brutal. C’est toujours pareil avec toi, tu ne sais pas te contrôler... » Ce scénario, qui vous rappelle peut-être des situations déjà vécues, est sans fin, et les rôles peuvent s’échanger à l’infini.
Attention Pour paraphraser Jacques Brel, on peut faire « rejaillir le feu d’un ancien volcan qu’on croyait trop vieux » dans une relation professionnelle. Ce n’est pas parce que votre chef semble avoir « perdu confiance » en vous et vous le montre par ses comportements et ses remarques que vous ne pouvez pas retourner la situation, et ainsi revenir à une relation au moins acceptable, voire complice. Nous avons parfois tendance à nous dire abusivement, dans un excès de pessimisme : « C’est foutu, il ne croit plus en moi, je n’ai plus qu’à trouver un autre job. » Méfions-nous de ces tendances négatives qui peuvent dissimuler les opportunités de rétablir une situation en notre faveur.
Alors, comment sortir de ce triangle dramatique ? Tout d’abord, il faut savoir
qu’il est plus facile de ne pas y entrer que d’en sortir. Il faut aussi reconnaître que se déplacer d’une pointe à l’autre du triangle n’est pas une solution de vie satisfaisante. C’est destructeur et très consommateur d’énergie. Refuser le statut de victime, c’est interrompre le jeu dès ses premières apparitions. Concrètement, cela nécessite parfois de « mettre les pieds dans le plat », de ne pas accepter les accusations, même implicites, de l’autre et de clarifier sans animosité la situation. C’est aussi s’observer avec une caméra virtuelle, qui va nous donner de nombreuses informations sur le thème : « Comment je me comporte avec lui. » Il faut s’écouter, accepter l’idée que l’on peut contribuer à conforter notre opposant dans sa position de persécuteur. Orienter cette caméra sur nous, c’est réaliser que nous avons aussi des outils et de l’énergie pour nous sortir nous-mêmes de cette situation difficile. Pour cela, il est important de ne pas rester collé à son émotion (« Il me rejette »), mais de prendre conscience de ses vrais besoins et de réfléchir à la manière de les satisfaire. Il faut donc ne pas rester uniquement dans le ressenti, mais se poser des questions simples : « Que se passe-t-il ? Que puis-je faire pour résoudre ce problème ? » Et, surtout, il faut transformer ses plaintes en demandes claires.
Exercice
POUR ÉVITER DE « TOMBER » DANS LE TRIANGLE DRAMATIQUE Faisons l’hypothèse que vous avez tendance à vouloir aider votre chef à sortir des mauvaises situations dans lesquelles il tombe. Vous connaissez son habitude à travailler dans l’urgence et à parfois frôler la catastrophe. Comme ces fois où vous devez rester jusqu’à 21 heures au bureau car il faut revoir avec lui l’intégralité de la présentation qu’il doit emporter le lendemain pour sa conférence au siège. Il « vous fait le coup » à chaque fois. Et vous, vous avez l’impression d’être son chien d’avalanche et d’arriver en sauveteur dans des situations de plus en plus inextricables. Mais quelles sont les conséquences pour vous ? Sûrement quelques soucis dans votre vie privée ? Le sentiment récurrent de faire passer votre travail avant tout, voire de vous sentir un peu « sacrifié » au profit des attentes de votre chef, et ceci pour quoi ? Alors, comment rétablir la situation ? Comment rendre le juste service en tenant le juste rôle sans entrer dans les débordements de la position de « sauveur » du triangle dramatique ? Dans un premier temps, écoutez la demande de sauvetage sans dire « oui » immédiatement. Prenez le temps de la réflexion, votre interlocuteur doit comprendre que sa demande n’est pas ordinaire et qu’elle nécessite chez vous un arbitrage, une prise de décision. Car vous avez sûrement pris d’autres engagements, vous allez devoir modifier votre agenda, donner un coup de fil ou annuler un rendez-vous. Ce temps de réflexion montre à votre interlocuteur que sa demande vous « coûte » quelque chose.
Deuxièmement, vous devez clarifier cette demande ! Car elle est parfois sournoise ou implicite. Rendez-la explicite et claire en lui posant une question simple : « Qu’attendez-vous de moi ? » Vous pouvez également vous demander si vous pouvez associer à ce travail une autre personne, constituer une équipe en somme. Cela donnera une dimension plus importante à ce qui pourrait avoir l’aspect d’une faveur ou d’un petit coup de main. Votre hiérarchique réfléchira à deux fois par la suite avant de vous faire une telle demande. Troisièmement, si vous décidez d’accepter la demande, faites-le avec conviction et avec le sourire, si possible. C’est une preuve d’engagement de votre part. Et cela doit être valorisé comme tel par votre hiérarchique. Mais n’oubliez pas de dire quelles sont les implications de cette demande pour vous. Précisez bien à votre chef : « Donnez-moi dix minutes avant de démarrer, je dois téléphoner à mon mari pour qu’il passe à l’école et annuler mon rendez-vous chez le médecin. » Il doit être informé que vous avez fait ce choix, que cela vous coûte quelque chose. Vous lui envoyez alors le message suivant : « Cette situation n’est pas reproductible à l’infini, n’en abusez pas. »
Pensez « efficacité » : de la mesure Les deux parties sont toujours gagnantes au rétablissement d’une relation « adulte/adulte », c’est-à-dire une relation saine, basée sur le respect et la compréhension mutuelle. Ce type de relation est tout à fait compatible avec la dimension hiérarchique incluse dans les échanges entre un N + 1 et son collaborateur. Mais un hiérarchique peut avoir pris l’habitude de s’adresser à ses collaborateurs comme un parent parlant à ses enfants. C’est une interaction parfaitement étudiée par l’analyse transactionnelle. Elle est fréquemment appliquée par les managers qui ont eux-mêmes vécu ce type de positionnement de collaborateur. Or, cette pratique, encore assez courante dans les entreprises, a un défaut majeur : elle confine un collaborateur dans une position d’enfant et limite ainsi sa capacité à prendre son autonomie, à apprendre par lui-même, en un mot à grandir. Pour passer d’une relation « parent/enfant » inadaptée à une relation « adulte/adulte » saine, c’est souvent au collaborateur de prendre les initiatives. La difficulté ici est de rééquilibrer la situation sans que le manager ne se sente attaqué par ces changements. C’est pour cela que les techniques que nous vous présentons ici (le triangle de Karpman, savoir dire « non », le DESC, etc.) sont à employer avec beaucoup de finesse et de bienveillance. Il ne suffit pas d’être convaincu d’avoir raison, de se sentir dans son bon droit, pour que cela fonctionne. Cela va même généralement dans le sens inverse. Les « mauvaises habitudes » d’un hiérarchique ne sont pas des « manies » dont il pourrait se passer du jour au lendemain. Elles font souvent partie d’un cadre de référence global de ses pratiques relationnelles. Le faire changer demande donc de la mesure, du respect et de la bienveillance. Pour cela, affirmer tranquillement et sans émotion ses besoins et ses limites (avec les outils susmentionnés) est un gage de succès durable.
L’ASSERTIVITÉ : PLUS QU’UNE MÉTHODE, UNE POSTURE DE VIE
Le mot vient de l’anglais assertiveness. Utilisé pour la première fois par Andrew Salter, il désigne la capacité à s’exprimer et à s’affirmer avec assurance et confiance en soi. Quand nous sommes dans des situations relationnelles simples, nous savons tous être assertifs. Il en va différemment quand le ciel s’assombrit et que nous sommes soumis à des pressions diverses. Dans ces situations (de stress notamment), nous pouvons adopter une des trois familles de comportements non assertifs : la fuite ou soumission, l’agressivité ou la manipulation. La fuite ou soumission regroupe tous les comportements passifs ou de fuite. On n’ose pas prendre la parole en réunion, on ne va pas se mettre en valeur. On va éviter à tout prix ce qui pourrait ressembler à une confrontation menant à un conflit. On sent que l’on manque de confiance en soi... L’attaque ou l’agressivité s’expriment par une plus grande réactivité. On va répondre sur le mode de l’attaque. Hausser le ton, parfois provoquer. L a manipulation, ou domination mentale, consiste à manipuler son interlocuteur pour obtenir de lui des comportements particuliers, qui vont
souvent à l’encontre de ses intérêts et sans lui donner nos objectifs réels.
Quelles sont les conséquences, pour nous et pour les autres, d’un comportement non assertif ? Un comportement passif génère de la frustration et des remords. « J’aurais dû dire à Boris ce que j’avais à dire ! Je me suis encore laissé impressionner par son bagou et son aisance verbale... Mais je sens que je vais être perdant(e) dans cette affaire. C’est lui qui va récupérer le poste que je convoite depuis si longtemps. » L’attaque est un formidable gaspillage d’énergie. Sous une apparente efficacité à court terme, les dégâts qu’elle génère peuvent durablement diminuer la confiance des autres envers vous. De plus, on se prive d’informations précieuses car, par prudence ou par crainte, nos interlocuteurs vont rester à une distance respectueuse de nous. L a manipulation permet parfois d’obtenir des résultats à court terme. Mais une fois le pot aux roses dévoilé, la crise de confiance est assurée. Et la relation laisse place à de la méfiance et de l’aigreur. La manipulation fabrique donc de la descension et de l’éloignement.
Comment sortir de ces comportements non assertifs ? Si vous avez tendance à être passif, essayez de dire « non » plus souvent. Dire non à une demande qui ne vous convient pas, ce n’est pas rejeter l’autre, mais juste refuser sa demande. Ce qui représente bien plus qu’une nuance : c’est fondamental ! Exercez-vous également à exprimer votre opinion, même si elle semble en désaccord avec celle délivrée par les autres. Entraînezvous d’abord sur des sujets anodins (vos goûts culinaires ou cinématographiques), vous passerez ensuite aux sujets plus lourds de conséquences. Dites « Je », parlez en votre nom. Si vous avez tendance à être agressif, une prise de recul face aux événements s’avérera enrichissante. Apprenez à reconnaître l’intérêt des idées des autres (ils ne peuvent pas avoir tout le temps tort, après tout). Souriez, mettez-vous en position d’écoute avant de donner votre avis. Faites de cette affirmation votre nouvelle devise : « Être plus intéressé qu’intéressant. » Enfin, si vous vous sentez adopter des comportements manipulateurs, ditesvous que pour construire une confiance durable chez les autres à votre égard, vous devrez abandonner certaines de vos méthodes. Affichez clairement vos buts quand vous avancez une requête. Soyez précis et sans ambiguïté. Faites preuve de bienveillance et de sincérité, vous verrez que cela finit toujours par
payer.
D’accord/pas d’accord L’ASSERTIVITÉ, C’EST SAVOIR DIRE « NON »
Il est important, dans certaines situations, de s’affirmer et de savoir dire « non » en toute sérénité.
En même temps, il est intéressant de bien cerner, derrière ce « non », à qui ou à quoi on dit « non » et, par conséquent, à qui ou à quoi on dit « oui ». Le plus important étant de se dire « oui » à soi-même.
Et pourquoi changer ? Après tout, s’il vous fait la tête, c’est qu’il a sûrement de bonnes raisons. Vous n’êtes finalement peut-être pas fait pour le poste. Il se peut que vous ayez eu « les yeux plus gros que le ventre », en quelque sorte. Vos ambitions auraientelles dépassé vos capacités ? Vous pourriez aussi bien vivre avec cet état de fait et le supporter. Oui, pourquoi ne pas vous retrancher dans votre bureau et faire vos heures, et rien de plus ? Somme toute, le travail, c’est le travail, pas besoin de bien s’entendre avec son chef. Vous ne serez pas le premier à avoir de mauvaises relations avec votre supérieur hiérarchique. Il s’y fera et, peutêtre même, reviendra-t-il vers vous tout seul avec le temps. Après tout, ce n’est pas à vous de faire des efforts, c’est à lui ! Et puis, vous avez déjà tenté, à maintes reprises, de rétablir le contact, mais rien n’y fait. Comme ce vendredi où vous aviez réservé vos vacances au ski en famille. Lui rendre service vous avait mis en retard pour votre propre départ le soir-même, mais vous teniez à lui montrer que vous étiez dévoué. Au final, le
résultat n’avait pas été au rendez-vous, bien au contraire. C’est à peine s’il vous avait remercié, et du bout des lèvres...
Bon à savoir Avant de vous lancer dans les « grandes manœuvres » auprès de votre N + 1, il serait prudent, d’une part, de vous entraîner dans un contexte plus léger et, d’autre part, de demander l’avis de personnes qui connaissent votre contexte professionnel. Si vous avez la possibilité, dans votre entreprise, de suivre une formation à la communication ou à la gestion du stress et des conflits, vous pourrez bénéficier d’un éclairage intéressant sur ces sujets. Les formateurs sont souvent des spécialistes de ces situations. Ils vous donneront des conseils précieux. Et surtout, au cours de cette formation, en apportant votre cas particulier, vous pourrez vous mettre en situation et roder votre approche et votre discours.
Essayez quand même « JE LUI AI DIT “NON” AVEC LE SOURIRE... ET IL M’A SOURI EN RETOUR ! » C’est la « tranche de vie » que m’avait racontée une amie dont la relation avec son chef s’était passablement dégradée. Assistante personnelle d’un des dirigeants de la société, elle subissait depuis quelques mois ses attaques et son manque de considération. Elle m’avait raconté par le menu la « descente aux enfers » de leur relation. Se sentant coupable, elle n’osait rien lui refuser et se trouvait aujourd’hui dans des situations inextricables. Il fallait arrêter cela. Je lui avais conseillé, à l’époque, de traiter une demande abusive de la manière suivante : écouter complètement la demande de son chef avec attention et bienveillance. Ensuite, lui faire une rapide reformulation, puis un retour positif sur l’intérêt de cette requête. Enfin, affirmer fermement (mais toujours avec bienveillance) son impossibilité à répondre positivement à sa demande (en argumentant factuellement), mais sans se justifier outre mesure et surtout avec un sourire sincère. Elle était revenue vers moi sidérée pour me dire que, malgré ses craintes, non seulement il n’avait pas protesté, mais il lui avait souri en retour ! En fait, elle venait d’expérimenter les effets magiques d’un comportement assertif ! Nous allons présenter ici une technique très efficace : le DESC8. Il permet de revenir « à froid » sur un échange difficile, une dispute, une « agression » verbale. En revenant dessus, on fait preuve d’« affirmation de soi », mais on le fait sans violence et sans attaque ; avec « assertivité ». Imaginons le contexte suivant. En réunion, devant certains de vos collègues,
votre patron vous a réprimandé : « Votre rapport sur le client Speed Logistic était tristement banal, sans même une idée intéressante. » Vous n’avez pas su quoi répondre sur le moment, soufflé que vous étiez par tant d’exagération et d’injustice de traitement. De plus, vous ne vouliez pas l’affronter devant le reste de l’équipe. Vous avez d’ailleurs la conviction que c’est une de ses stratégies perverses que de vous dire cela devant les autres, sachant que vous allez avoir de grandes difficultés à « vous défendre » dans ces conditions. Vous êtes particulièrement « remonté » après cette réunion et vous ne savez pas comment faire pour réagir, et surtout éviter que cela ne se reproduise ! Car ce n’est pas la première fois qu’il tente ce genre d’humiliation publique, mais il n’était jamais allé aussi loin. Reprendre la main sur cette situation, ne pas se laisser marcher sur les pieds sans réagir et ouvrir la porte à de nouvelles voies de communication, voici une circonstance tout à fait adaptée à l’usage du DESC. Il s’utilise à froid, c’est-à-dire que votre tension émotionnelle liée à l’événement doit être redescendue. Vous ne devez pas mettre en pratique cette technique si vous êtes sous l’emprise de la colère ou d’une émotion trop forte. Car il va falloir faire preuve de contrôle émotionnel pour traiter avec calme des sujets qui vous ont blessé. Et plus précisément : Décrire les faits ; Exprimer son ressenti ; Suggérer un scénario de solution ; Conclure.
Exercice
DU DESC Vous allez donc solliciter un entretien avec votre chef le lendemain ou un autre jour de la semaine. Il ne faut pas attendre trop long-temps non plus, car il risque de ne plus se souvenir des événements en question. Au cours de la première étape (D), vous allez décrire les faits de la manière la plus neutre possible, sans évoquer ni montrer, par votre comportement, la souffrance ou l’exaspération que vous avez pu ressentir sur le moment. Nous sommes ici dans une description extrêmement factuelle, détaillée et sobre. Ne lésinez pas sur les détails qui donneront du poids au sujet. N’utilisez aucune tournure ironique, aucun sarcasme ; toute la première partie de votre description (D) doit rester neutre et surtout fac-tuelle. Vous pourriez alors dire : « Je souhaitais revenir sur un point particulier de notre réunion de lundi
dernier. Pendant la revue des affaires en cours, chacun des membres de l’équipe a présenté le niveau d’avancement de ses projets. À l’issue de ma présentation, vos remarques ont été – je vous cite : “Votre rapport sur le client Speed Logistic était tristement banal, sans même une idée intéressante.” » C’est au cours de la deuxième étape que vous allez pouvoir exprimer votre ressenti (E), en expliquant par exemple : « Il est important pour moi de vous dire que je me suis senti dans une situation très inconfortable à ce moment-là. J’ai ressenti cette critique comme excessive et humiliante en la présence de mes collègues. Je suis très affecté par cela et, une semaine plus tard, j’en ressens encore les effets douloureux. » La troisième étape (S) est l’occasion de retourner la situation en émettant une proposition de solution : « Dans un souci d’efficacité je vous propose la chose suivante pour nos prochaines réunions. Lorsque vous aurez une critique importante à me faire, si vous en avez le temps, merci de me la faire connaître avant la réunion, en aparté. Si cela n’est pas possible, je serai à votre entière disposition pour recevoir vos appréciations après la réunion. » La dernière étape (C) vous permettra de présenter les avantages mutuels liés à l’adoption de ce nouveau comportement : « Ainsi je pourrai accueillir en complète attention vos critiques et demandes de correction, et me donner les meilleures conditions d’améliorer mon travail et de répondre plus efficacement à vos attentes. D’un autre côté, cela n’affaiblira pas ma position dans l’équipe et la qualité du regard que mes collègues posent sur mon rôle de manager. »
Pro/perso Le DESC est complètement applicable dans le domaine familial. D’ailleurs, il est utile de tenter d’abord de le pratiquer dans cet environnement, ne serait-ce que pour vous entraîner. Prenons l’exemple de votre fils adolescent qui, depuis de longues semaines et malgré une lutte acharnée avec lui, semble toujours incapable de venir dîner dans la cuisine quand vous l’appelez et qui a besoin de se faire rappeler à l’ordre durant trente minutes. Voici la méthode déroulée sur ce cas concret. Vous n’aurez plus qu’à changer le prénom et adapter le contexte : D : « Thomas, j’ai constaté depuis six semaines un changement dans tes habitudes à l’heure du dîner. Auparavant, lorsque je t’appelais à table, tu venais, dans la très grande majorité des cas, dans les cinq minutes. Or, depuis six semaines, le premier appel ne suffit plus et il me faut te relancer cinq, voire dix fois, pour te voir arriver dans la cuisine. Ce qui représente, sur la semaine dernière, une durée de vingt à trente minutes de retard. L’argument que tu me présentes systématiquement est que tu dois terminer la partie en cours sur ta console de jeux vidéo. » E : « Je tiens à te dire que ce changement ne me convient pas du tout. Je prends cette attitude comme de l’indifférence et un manque de politesse de ta part. Tu réduis de plus en plus les temps de partage que nous avons en famille, et cela ne peut plus durer. »
S : « Voici ce que je te propose. Dès mon premier appel, tu sauvegardes ton jeu et tu viens sans délai dans la cuisine. » C : « Cela représente un double avantage. Le premier est que tu me feras plaisir, car je me sentirai respecté dans l’effort que j’aurai fait pour préparer ce dîner et content de conserver nos discussions du soir que j’apprécie tant. Le second avantage, que tu évalueras, j’en suis certain, à sa juste valeur, est que je serai sans doute dans de meilleures dispositions pour t’offrir ce nouveau jeu vidéo dont tu clames les mérites depuis des semaines. »
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6. Dudley Lynch et Paul L. Kordis, La Stratégie du dauphin, Les Éditions de l’Homme, 2006. 7. Eric Berne, Des jeux et des hommes, Stock, 1984. 8. La méthode DESC est issue des travaux de Gordon H. et Sharon A. Bower.
Chapitre 4 Pour qu’il cesse de me harceler
Après avoir lu ce chapitre, vous pourrez distinguer plus facilement les différents types de harcèlement. Doté du bon diagnostic, vous allez pouvoir éviter les pièges majeurs et prendre les bonnes décisions face à une situation de harcèlement moral au bureau.
Depuis l’incident avec l’un de nos clients, mon patron ne me laisse plus rien passer. C’est e-mail sur e-mail au sujet des dossiers qu’il vient à peine de me confier, quand ce n’est pas sa secrétaire qui me relance. Il m’a même appelé un dimanche soir sur ma ligne fixe parce que je n’avais pas répondu à son SMS dans la foulée. J’avoue ne pas tout comprendre car les consignes sont souvent contradictoires : un coup je dois accélérer, un coup ce n’est plus prioritaire. C’est d’autant moins compréhensible que, jusqu’à présent, il me faisait totalement confiance et me laissait une véritable marge de manœuvre, même en réunion d’équipe. D’ailleurs, en parlant de réunion, j’ai pris une vraie soufflante lors de la dernière revue de projet. Et depuis, les collègues me font moins de confidences, j’ai même parfois l’impression qu’ils cherchent à m’éviter. Il faut dire, aussi, que mon patron ne rate plus une occasion de me reprendre en public, de me couper la parole ou de me prendre à partie. J’en perds mes moyens, et même le sommeil. À présent, avant d’aller au travail, j’ai une boule à l’estomac.
Vu et entendu
Les clés pour changer FAIRE LE BON DIAGNOSTIC La première clé, et non des moindres, est d’établir le bon diagnostic : s’agit-il d’un mauvais moment à passer au regard de la pression exceptionnellement élevée que votre supérieur subit en ce moment et qu’il vous retransmet inconsciemment ? Est-ce un dysfonctionnement de votre organisation ? Vous pouvez ainsi vous retrouver dans un conflit de loyauté insoluble, comme celui d’être sous pression parce que l’objectif qui vous a été fixé s’avère irréalisable, compte tenu des moyens alloués. Par contre, s’il s’agit d’une action volontaire et durable qui vise sciemment à vous déstabiliser, à vous nuire, voire à vous terrifier, vous êtes bel et bien victime de harcèlement.
Attention Le fait d’être en conflit avec votre chef ne signifie pas que vous êtes en situation de harcèlement. Un conflit marque un désaccord, alors que le harcèlement se caractérise par de la malveillance qui vise très clairement, ou insidieusement, à vous nuire et à vous dégrader. Le harcèlement moral se distingue du harcèlement physique ou sexuel dans la mesure où, justement, il n’y a pas de passage à l’acte avec contact physique.
TENIR UN JOURNAL DE BORD La deuxième clé est d’ouvrir un journal de bord pour noter l’ensemble des incidents à votre encontre, vécus à l’oral ou à l’écrit, et de rassembler dans un dossier toute trace écrite pouvant vous permettre d’en établir, si besoin, la preuve en temps utile.
RÉAGIR POUR NE PAS LAISSER LA SITUATION EMPIRER Vous pouvez indiquer à votre supérieur, dans un premier temps à l’oral et en face à face, que vous n’appréciez pas, par exemple, le ton sur lequel il vous parle en public. Si votre demande reste lettre morte, bref s’il continue, il sera important de solliciter un rendez-vous avec lui pour lui préciser que, factuellement, ces agissements ont un impact direct sur la qualité de votre travail, et des conséquences sur votre motivation et votre bien-être au travail. Il est essentiel que vous puissiez lui indiquer vos limites, non seulement dans votre capacité à absorber les charges successives qui vous sont demandées
avec, à l’appui, un exemple de journée type minutée, mais également dans la façon dont vous entendez être respecté et ce, plus particulièrement en public.
FORMALISER SES ÉCHANGES POUR CONSTITUER DES PREUVES Si, à la suite de ce rendez-vous, que vous pourrez formaliser par un compte rendu ou un échange d’e-mails, votre supérieur ne revient pas vers vous, ne présente aucune remise en question ni changement d’attitude et ce, dans un délai raisonnable (deux à trois semaines maximum), vous pouvez en déduire de sa part un hermétisme affiché, voire assumé. L’évolution de la situation ne se fera pas à son initiative. Paradoxalement, vous venez de marquer un point car vous avez fait un pas vers lui pour résoudre la situation. Il pourra ainsi lui être reproché d’avoir laissé les choses empirer, à condition, bien entendu, de posséder une trace explicite de votre prise d’initiative. Pour ce faire, n’hésitez pas, par exemple, à passer par l’écrit pour vos demandes de rendez-vous en lui précisant de vous confirmer le créneau par retour d’e-mail. Si votre supérieur ou son assistante vous confirme le rendezvous à l’oral, renvoyez-lui un e-mail indiquant que vous avez bien noté le rendezvous tel jour, à telle heure, en précisant que ce rendez-vous est à votre demande. « Merci d’avoir confirmé le rendez-vous du xx/yy/20ZZ, suite à mon e-mail du xx/yy/20ZZ. » Si votre supérieur ne vous répond pas et refuse, en fait, de vous recevoir, là aussi formalisez les choses, tout en y mettant les formes : « Je comprends que votre emploi du temps soit particulièrement chargé, mais mes deux demandes de rendez-vous (cf. e-mails avec dates à préciser) n’ont pu aboutir à ce jour, alors que vous m’aviez vous-même indiqué l’importance de ce dossier dont j’ai la charge et pour lequel j’ai besoin d’avoir votre éclairage quant aux indicateurs de satisfaction et de marge de manœuvre. »
POUR L’ÉCRIT, RESTER FACTUEL L’écrit est aussi à double tranchant, d’où la nécessité de rester factuel, sans émotions, ni reproches, ni éléments qui puissent se retourner contre vous. Si vous avez le moindre doute, n’hésitez pas à demander conseil pour la rédaction de ces écrits (à des proches dans le juridique ou les ressources humaines, à des spécialistes)... Dans tous les cas, prenez bien le temps de vous relire. Mais l’avantage de l’écrit, c’est qu’une réponse peut toujours être faite pour repréciser les choses dans votre sens. Votre supérieur comprendra, à travers
ces écrits apparemment neutres, que vous n’avez pas l’intention de vous laisser faire et, s’il sait lire entre les lignes, que vous êtes « accompagné ». La proie qui semblait tendre et docile l’est déjà moins. Certains harceleurs changent de proie à ce moment-là, voire avant, quand ils sentent que la victime a du répondant et n’est pas décidée à se laisser faire, mais pas tous...
NE PAS S’ISOLER A fortiori si aucune de ces contre-attaques n’a pu être mise en place, le risque est de tomber dans une spirale infernale et durable, où les rôles sont même susceptibles de s’inverser au regard de l’extérieur : le harceleur devenant victime d’un collaborateur jugé peu fiable, incompétent et si fragile à la moindre remarque. Il est donc recommandé de prendre contact avec un délégué du personnel ou votre comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), ou encore, si nécessaire, avec votre médecin du travail. En fonction du déroulement des solutions apportées par votre entreprise, le conseil d’un avocat ou d’associations spécialisées n’est pas à négliger, voire est fortement préconisé, ainsi que le fait d’en parler à vos proches afin de relativiser ou de ne pas passer à la trappe certains détails qui auraient pu vous échapper. Non seulement vous êtes victime de harcèlement, mais, en plus, cette personne réussit à vous remettre en cause, à vous entamer et à vous isoler des collègues, de la RH, voire, par ricochet, de vos proches et de ceux qui vous aiment. Votre silence vous dessert, votre isolement, votre manque de confiance en vous, vos balbutiements, vos doutes sont incompréhensibles pour les autres, s’ils n’ont pas l’explication du contexte et de l’agissement néfaste de votre supérieur à votre encontre. Vous payez le prix fort, pour ne pas dire « double tarif » : celui de commencer à penser que, finalement, si votre supérieur vous harcèle, c’est qu’il y a forcément une raison. Votre harceleur réunit ainsi toutes les conditions pour continuer.
REPRENDRE DES FORCES Ne culpabilisez pas si vous vous êtes retrouvé démuni face à une telle situation, rien de plus normal quand on est confronté à ce processus destructeur qui vise justement à atteindre vos défenses. Mais rien n’est immuable. Soyez, si vous le pouvez, « tendre avec vous-même », reprenez des forces auprès de vos proches et de conseillers. Si c’est possible, arrêtez-vous (congé, voire arrêt maladie, a fortiori si votre état est dépressif) pour vous ressourcer, prendre le recul nécessaire et pouvoir, à votre retour, adopter la bonne tactique.
À noter Il existe des profils psychologiques de harceleurs dont les qualités de persévérance, de calcul stratégique, d’esprit procédurier ou d’ego surdimensionné sont paradoxalement très appréciées des entreprises. Les managers qui manipulent ne le font pas pour faire mal : ils peuvent être amenés à manipuler pour diriger ou aider. Mais un pervers narcissique aura soin de manipuler, dissimuler pour s’accaparer les qualités d’autrui, faire souffrir, voire détruire. C’est pourquoi les entreprises mettent parfois autant de temps à distinguer les patrons exigeants des harceleurs. Il faudra attendre, malheureusement trop souvent, un absentéisme inhabituel, plusieurs dénonciations de salariés ou des démissions dans un même département pour que la direction prenne enfin les bonnes décisions.
Il est parfois difficile et long de se reconstruire suite à une situation de harcèlement, et la victime en ressort rarement indemne, a fortiori si le harcèlement a duré plus d’un an, voire deux. Les salariés concernés sont amenés à résister passivement le plus longtemps possible pour des questions bien souvent économiques. Mais ils finissent la plupart du temps par craquer, du fait de la durée. Les effets collatéraux sur la santé physique ou psychique, sur les capacités relationnelles dans une nouvelle entreprise, voire dans la sphère privée, ne sont pas à négliger. L’épuisement psychologique subi par le harcèlement du fait de la confrontation répétée à l’échec et la douleur conduit souvent au burn out : « Leurs ressources internes en viennent à se consumer comme sous l’action des flammes, ne laissant qu’un vide immense à l’intérieur, même si l’enveloppe externe semble plus ou moins intacte », souligne le psychiatre Herbert Freudenberger, auteur des premières recherches sur le syndrome d’épuisement professionnel. Plus tôt vous pourrez mettre fin à cette spirale, plus tôt vous pourrez vous préserver. Cela ne veut, bien sûr, pas dire démissionner au plus vite et perdre vos droits, d’autant que vous en subissez déjà les préjudices. L’enjeu est de faire le bon diagnostic et de monter le dossier adéquat sans trop vous entamer. Vérifiez au préalable s’il s’agit d’une volonté organisée par la structure pour vous rétrograder, vous faire partir ou vous sanctionner, ou celle d’un seul individu mal intentionné. Le plus dur, pour la victime, est de ne pas entrer dans le jeu d’un pervers narcissique qui, par la provocation des joutes, des combats artificiels, peut la rendre au final « responsable de ce qui lui arrive » et inverser ainsi les rôles (cf. Le Harcèlement moral dans la vie professionnelle de Marie-France Hirigoyen 9). Autre écueil, et non des moindres, celui de vouloir sauver son chef. C’est, là aussi, l’une des qualités que le harceleur convoite chez sa victime dont le profil généreux, souvent empathique, responsable, voire coupable, introjecte la responsabilité. Vouloir sauver son chef, c’est poursuivre la relation de dépendance. C’est aussi un moyen détourné de survivre à la souffrance, à la culpabilité d’avoir investi peut-être autant de temps dans la relation « tortionnaire/victime ». C’est en fait le troisième sommet du trio infernal « bourreau, victime, sauveur ». Aucune des trois postures ne permet de sortir de ce schéma destructeur, qui fait tourner le dos à la réalité et ne fait que conduire à la répétition de situations de souffrance.
Et pourquoi changer ? Le fait d’en parler à son « harceleur » et de lui indiquer que les limites ont été dépassées, a fortiori si c’est votre supérieur, n’est-il pas le meilleur moyen d’activer plus de représailles et un harcèlement plus intense encore ? Si vous ne dites rien, si vous faites le dos rond, patientez encore un peu, il va se calmer, changer peut-être, s’en prendre à quelqu’un d’autre ou, qui sait, vous en être reconnaissant ? Se conforter dans le rôle de la victime est sans doute un bon moyen de ne pas se remettre en question et permet d’éviter une prise de risque dont l’issue peut s’avérer désastreuse. À très court terme, sans doute. Mais adopter le comportement de l’autruche ne permet, au mieux, que de « reculer pour mieux sauter » : un « tortionnaire » ne lâchera pas aussi facilement sa « proie ». Le peu de respect qu’il pouvait avoir encore pour vous vient de fondre comme neige au soleil. Vous faites partie des faibles à ses yeux et n’êtes plus digne de sa considération, c’est-à-dire de l’image qu’il se fait des membres de son équipe, reflet de son propre ego. Le schéma classique est de vous pousser inexorablement à la perte de confiance, à la faute et, dans l’idéal, à la démission, qui sera sans préjudice pour l’entreprise, et donc pour lui.
Bon à savoir Les sanctions prévues par la loi pour harcèlement10 Une entreprise peut licencier un salarié pour harcèlement sur la base de faits et de preuves car « si un doute subsiste, il profite au salarié », précise le Code du travail. Des sanctions peuvent être prises au regard de la nature des faits démontrés (e-mails, courriers, témoignages...) et une procédure de médiation
(liste disponible dans les préfectures) peut être envisagée entre le salarié et le harceleur, comme le stipule également l’article L1152-6. Il vous appartient, certes, d’en apporter la preuve, mais c’est aussi à l’employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral. Et à titre préventif, il peut être judicieux aussi de rappeler à son chef que la loi a prévu deux types de sanctions, dont l’une au pénal avec deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende (Code pénal, Art. 222-33-2).
Essayez quand même Pour sortir du syndrome « tortionnaire/victime » illustré en introduction de cet ouvrage – par la réplique de Clint Eastwood dans le film Le Bon, la Brute et le Truand : « Tu vois, le monde se divise en deux catégories : ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui creusent. Toi, tu creuses. » – , il va être essentiel d’apprendre ou de réapprendre à dire « non ». D’autant que, bonne nouvelle, votre boss, en principe, n’est pas armé et que votre vie, en principe, n’est pas en jeu. La première étape consiste à distinguer clairement : 1. Ce qui est effectivement en jeu et ce que vous risquez objectivement ; 2. La demande de la personne. Cela nécessite une véritable prise de conscience : refuser une demande, ce n’est pas rejeter une personne ou mettre en danger un lien de proximité, c’est simplement vous exprimer et affirmer votre position. Cette démarche, pour certains profils comme les empathiques, n’est pas pour autant si évidente. Elle réclame au préalable de bien connaître et de poser ses limites, ses désirs fondamentaux sans se noyer dans ceux de son manager pour exister ou survivre en milieu hostile. Écrivez-les au calme sur une page blanche et hiérarchisez-les en « + » et « - » par colonne, en fonction de leur nécessité pour vous (équilibre de vie, intérêt du travail, motivation, conditions de travail), pour votre manager et pour l’entreprise. Tirez-en les conclusions et les solutions alternatives. Dans la seconde étape, il s’agit de « valoriser », dans votre réponse, ladite personne et de développer un argumentaire rationnel et factuel pour ne pas prendre en charge la demande impromptue ou injustifiée. Soyez vigilant dans votre argumentation à développer, là aussi, une analyse des risques en termes de probabilité et de gravité (plus audible pour un décideur), plutôt que votre propre surcharge de travail, qui sera balayée d’un revers de manche par un contre-argument sur votre incapacité à vous organiser ou par un : « À votre avis, vous êtes payé pour quoi faire ? »
Pour vous aider à mieux distinguer la personne de la demande, il est important d e sortir du sentiment d’injustice, d’autant qu’il n’est pas générateur d’actions constructives, et de l’éternelle question de la victime : « Mais pourquoi est-ce toujours moi ? », façon Caliméro. Posez-vous plutôt les questions : « D’où vient sa colère ? Quel est son besoin derrière son message ? Quel est son problème ? Un besoin de réassurance (hyperanxiété), de domination sur les autres, de faire-valoir (manque ou surestime de soi), d’induction narcissique (besoin de provoquer des réactions chez les autres ou de les inhiber), le fait de ne pas pouvoir mettre de limites entre lui et les autres ? » Et, plus indispensable encore : « Qui est-il ou qui est-elle pour me parler comme ça ? » Là encore, le but de ces exercices est d’établir le bon diagnostic et de vous aider à mettre une saine distance entre vous et votre harceleur, et, surtout, à ne pas inverser les rôles dans le cadre d’une remise en question ici inappropriée.
Exercices
POUR POSER SES LIMITES Exemple de réponse à un harceleur qui vous hurle dessus et vous enjoint de tout laisser tomber pour relancer tous les clients par téléphone : « Vous avez raison, la relation client est déterminante dans ce dossier. Mais relancer tous les clients cet après-midi, c’est prendre le risque d’accélérer le processus de résiliation d’un plus grand nombre d’entre eux sans prise en compte des cas particuliers et des différents niveaux de satisfaction. D’autre part, mon après-midi était consacrée au recouvrement des mauvais payeurs. Il n’est pas possible de mener les deux actions conjointement. Quelle est votre priorité ? » Si votre supérieur continue à hausser le ton en vous hurlant que ce n’est pas son problème et que vous n’avez qu’à vous débrouiller : un, rappelez-lui qu’il n’a pas à vous parler sur ce ton et, deux, reprenez plus posément le fait que, matériellement, vous ne pourrez pas faire les deux, et que vous avez besoin de savoir qu’elle est SA priorité. S’il ne veut toujours rien savoir, rédigez un e-mail synthétisant les faits en indiquant, par exemple, que, faute de décision de sa part, vous poursuivez l’action initiale et que vous êtes à sa disposition dès demain matin pour mener l’action B. Cela ne va peut-être pas améliorer votre situation à court terme, mais vous aurez posé vos limites et la façon dont vous entendez être traité. Plus important, vous aurez renvoyé la responsabilité sur ses épaules et les vôtres en seront dégagées. Selon les profils, vous aurez parfois à survaloriser la personne ou, au contraire, à développer davantage les arguments factuels. Vous pouvez vous entraîner dans un premier temps avec vos proches (conjoint, enfants, amis...) lorsque l’un d’eux vous demande un service dans une situation banale. Exemple avec une demande de votre conjoint Votre conjoint : « Chérie, tu peux me trouver mes clés ? » Réponse : « Écoute, j’aimerais bien, mais je suis en train de me maquiller et je vais moi-même être en retard. Cherche encore dans tes poches. » Redemande de votre conjoint : « Je ne les trouve pas, tu ne sais vraiment pas où je les ai mises ? Tu
pourrais m’aider quand même. » Réponse de la salle de bain : « Tu sais, tu devrais toujours les mettre au même endroit sur le guéridon de l’entrée. Si tu ne les trouves toujours pas, je te laisse les miennes. Tu les mettras dans la boîte aux lettres en partant après moi. » Traduction : je ne t’aide pas à les chercher, mais je te propose une solution qui est gagnante pour nous deux : tu peux ne pas chercher, mais moi je ne perds pas de temps non plus. Votre conjoint : « C’est bon, je les ai trouvées, elles étaient dans la poche de mon imperméable. » Traduction : le temps et la responsabilisation sont souvent source de résolution des problèmes. Plus vous vous suppléez à l’autre, moins il se sent impliqué, et plus vous portez de responsabilités qui ne sont pas les vôtres.
Pro/perso Le harcèlement peut s’inviter aussi au sein du foyer ou dans des relations privées. Un compagnon, une conjointe, un mari, un parent, voire un soi-disant ami peut chercher à vous nuire plus ou moins sciemment. Les formes requises sont parfois étonnantes, comme l’a mis en évidence Taibi Kahler, psychologue du comportement. Employés au quotidien, certains messages, aussi bénins soient-ils en apparence, comme : « Sois fort », « Fais-moi plaisir », « Sois parfait », peuvent être en effet le reflet d’un véritable déni de l’autre, de ses émotions, de son droit à l’erreur, de sa liberté d’être. La façon dont l’autre nous parle est un indicateur non négligeable de sa bienveillance et de son respect à notre égard. Les années de mariage ou de vie commune ne justifient, en aucun cas, l’usage d’insultes, du déni systématique de vos projets, de votre rôle de mère ou de père, de votre capacité à vivre en commun ou en société. Les remarques systématiques et dégradantes sur votre physique, votre façon de vous habiller, de vous comporter ou de vous exprimer n’ont rien à voir avec l’amour. D’ailleurs, souvent, sous prétexte d’un amour inconditionnel, un proche peut se permettre de vous appeler cinq, dix, voire vingt fois par jour pour vous demander où vous êtes, ce que vous faites, avec qui vous êtes, etc. et vous réprimander si vous n’avez pas répondu suffisamment rapidement. Ces procédés sont là pour vous laminer, vous infantiliser, vous culpabiliser. Si cela vous rassure et vous conforte néanmoins dans l’idée d’une relation fusionnelle, ce n’est pas pour autant ce que l’on appelle « aimer ». Le plus souvent, si un proche vous parle mal, il y a de grandes chances que d’autres se le permettent à leur tour. Si un père parle mal à sa compagne, pourquoi l’enfant ne le ferait-il pas ?
Ces proches jouent sur vos peurs de l’abandon, de ne pas être suffisamment à la hauteur, de ne pas être digne « de »... Déjà, vous avez tellement de chances d’avoir été choisi par elle ou lui ! Tout comme au travail, vaincre le harcèlement dans le privé, c’est aussi vaincre ses propres peurs. __________
9. Marie-France Hirigoyen, Le Harcèlement moral dans la vie professionnelle, Pocket, 2002. 10. Voir la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 sur le site par exemple de Legifrance.gouv.fr de modernisation sociale applicable en matière de harcèlement moral et sexuel et sous réserve des dernières évolutions des textes de loi.
Table des exercices
Exercice pour parler à son boss et se valoriser Exercice de respiration calmante Exercice de « respiration carrée » Exercice de chi gong Exercice pour mieux gérer son stress Exercice pour éviter de « tomber » dans le triangle dramatique Exercice du DESC Exercice pour poser ses limites
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