Climat, la Terre et les Hommes 2759808815, 9782759808816


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Climat, la Terre et les Hommes
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Dans la même collection

Le laser Fabien Bretenaker et Nicolas Treps, préface de C. H. Townes

Le monde q11antique Michel Le Bellac, préface d'A. Aspect

Les planètes Thérèse Encrenaz, préface de J. Lequeux Nnissnnce, évolution et ·m ort des étoiles James Lequeux

La fusion thermonitcléaire contrôlée Jean-Louis Bobin

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Physique et biologie Jean-François Allemand et Pierre Desbiolles

La cryptologie Philippe Guillot

L'avent11re dit gnmd collisionneitr IHC Daniel Denegri, Claude Guyot, Andreas Hoecker et Lydia Roos, préface de C. Rubbia

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Table des matières

Préface Avant-propos Introduction 1

Le système climatique: l'atmosphè1e et l'océan La Terre, planète chauffée par Je Soleil . . . .. . 1.2 L'atmosphère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.2.1 Gradient de température et stabilité verticale de l'atmosphère 1.2.2 La convection .. 1.2.3 La subsidence . 1.2.4 Les vents . . .. 1.3 L'océan . . . . . . . . . 1.3.1 La circulation océanique de surface 1.3.2 La circulation océanique profonde : circulation thermohaline . . . . . . 1.4 Échanges atmosphère océan . . . . . . .. 1.5 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . .. 1.1

2 Les acteurs du climat et leurs interactions 2.1 Le cycle de l'eau . . . . . . . . . . . . . . . 2.2 Le cycle du carbone . . . . . . . . . . . . . 2.2.1 Les océans et Je cycle du carbone . 2.2.2 La partie continentale du cycle du carbone . . . . 2.3 L'effet de serre . . 2.4 Les nuages . . . . . . . . .. . 2.5 Les aérœols . . . . . . . .. . 2.5.1 Effet direct des aérosols

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2.5.2 Effet indirect des aérosols . 2.5.3 Effet global . . . . . . . . . 2.6 Rôle de !'océan dans la machine climatique 2.7 Interactions cryosphère-climat . . 2.8 Interactions biosphère continentale - climat 2.9

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TntPrartions cl11 climat avPc lPs mntinPnts

et la lithosphère . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.10 Les échanges de matière et les temps caractéristiques des processus climatiques . . . . . . . . . . . 2.11 Forçages, rétroactions et sensibilité climatique 2.12 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

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Diversité des climats et variabilité à grande échelle 3.1 La diversité des climats. . . . . . . . . . . . 3.1.1 Le rôle du soleil . . . . . . . . . . . . 3.1.2 La diversité géographique des climats 3.1.3 La variabilité météorologique . . . . . 3.2 Les modes de variabilité: oscillations océan-atmosphère 3.2.1 El Niflo - La Nif\a . . . . . . . . . . . . . . . ... 3.2.2 L'oscillation nord-atlantique (NAO, North Atlantic

Oscillation) . . . . . . . . . 3.2.3 Autres exemples d'oscillations . 3.3 Conclusion . . . . . . . . . . . . . 4 La modélisation du climat 4.1 Une évolution rapide des modèles de climat 4.2 Les fondements des modèles de climat . 4.2.1 Grilles et résolution . . . . 4.2.2 Les paramétrisations physiques . 4.2.3 Les autres composantes des modèles de climat 4.2.4 Le couplage entre les composantes 4.3 L'ajustement des modèles . . . . 4.3.1 Les différents types de simulations 4.3.2 Les ensembles multi-modèles . . . 4.3.3 L'évaluation des modèles . 4.4 Les modèles de complexité intermédiaire 4.5 Les modèles régionaux . 4.6 Conclusion . . . . . . . . . . . . .

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Table des m8llères

S Le réchauffement 5.1 Les températures mesurées depuis 1880 . . . . . . . . . . . . 5.2 Des témoins du réchauffement dans l'environnement . 5.2.1 Les températures extrêmes . . . . . 5.2.2 Fonte de la banquise et des glaciers . . . . 5.2.3 Phénologie des êtres vivants . . . . . . . . 5.3 Qu'est-ce qui peut faire changer Je climat? . . . 5.3.1 Les changements globaux . . . 5.3.2 Les changements régionaux . 5.3.3 Le court terme . 5.4 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . .

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6 Les perturbations du climat, facteurs anthropiques et naturels 6.1 Le dioxyde de carbone CO, . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6.1.1 L'accumulation du CO, dans!' atmosphère . . . . . . 6.1.2 L'origine anthropique du CO, ajouté à!' atmosphère 6.1.3 Les puits naturels de CO, . . . . . . . . . 6.2 Autres gaz à effet de serre . . . . . . . . . 6.2.1 La vapeur d'eau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6.2.2 Le méthane CH. . . . . . . . . . . . 6.2.3 L'oxyde nitreux ou protoxyde d'azote N,O . . . . 6.2.4 Les gaz industriels : CFC, HCFC, SF6... . . . . . 6.2.5 La contribution indirecte de gaz réactifs . . . . . 6.3 La part des divers gaz à !'effet de serre additionnel . . . 6.4 Le changement d'usage des sols . . . . . . . . . . . . . . 6.5 Les autres causes possibles de perturbation du climat . 6.5.1 Les aérosols . . . . . . . . . . . 6.5.2 Trainées des avions à réaction 6.5.3 Les volcans . . . . . . . . . . . 6.5.4 La contribution du soleil . . . 6.6 Effet combiné des différentes perturbations . . . 6.7 Détection et attribution des perturbations anthropiques sur Je climat récent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6.7.1 Simulations avec des ensembles de modèles . . . . . 6.7.2 Détection/attribution des différents facteurs en jeu . 6.8 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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7 Variations passées du climat 7.1 Forçages et rétroactions . . . . 7.1.1 Les forçages . . . . . . .

LE CLIMAT

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7.1.2 Les rétroactions . 7.2 Archives et proxies ... 7.2.1 Sur les continents 7.2.2 Dans les océans .. 7.2.3 Datation des archives climatiques .. 7.2.4 Incertitudes sur les reconstructions . 7.3 Les derniers 60 millions d'années : de la Terre « serre » à la Terre « glaciaire » . . . . . . . . 7.3.1 Les glaciations du Quaternaire . . . . 7.3.2 Entrée en glaciation . . . . . 7.3.3 Sortie de glaciation . . . . . 7.3.4 La période interglaciaire actuelle : !'Holocène . . 7.4 Instabilités abruptes . . . . . . . . . . . . . . . ... 7.4.1 Les événements de Dansgaard-Oeschger .. 7.4.2 Autres instabilités . . . . . . 7.5 Le dernier millénaire . . . . . . . . 7.5.1 Les facteurs de l'évolution du climat 7.5.2 Reconstruction de l'histoire du climat du dernier millénaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7.5.3 Que nous apprend Je climat du dernier millénaire ? . . . 7.6 Changements climatiques en cours et futurs dans la perspective de!' évolution passée du climat . . . 7.7 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Quel climat demain? 8.1 Tester un ensemble de possibles : les trajectoires radiatives représentatives . . . . . . . . . . . 8.2 Les projections climatiques . . . . . . . . . . . . . . . . 8.2.1 L'évolution de la température . . . . . . . . . . . 8.2.2 La répartition géographique du réchauffement . 8.3 Couplage entre Je climat et Je cycle du carbone . . . . . 8.4 Incertitudes sur!' amplitude du réchauffement simulé . 8.4.1 Réponse directe au CO, . . . . . . . . . . . . . . . 8.4.2 Les nuages . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8.4.3 Autres sources d'incertitudes dans les modèles . . 8.5 Incertitudes et horizon temporel . . . . . . . . . . . . . . 8.5.1 Incertitudes liées à la variabilité interne du climat. 8.5.2 Autres sources naturelles d'incertitudes . . 8.6 Cycle hydrologique et extrêmes de précipitation . . . . .

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Table des m8llères

8.7 La fonte de la calotte glaciaire et la circulation thermohaline de l'océan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8.8 Traduction environnementale, études de vulnérabilité et d'impacts . . . . . . . . . . . . 8.8.1 Les événements extrêmes . 8.8.2 À l'échelle régionale . 8.9 Conclusion . . . . . . . . . . . . .

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9 Conclusion

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Index

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Des livres récents sur le climat

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Des sites internet qui parlent du climat

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LE CLIMAT

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Préface «Paris Gimat 2015 ». Initialement connu du seul cercle des initiés, ce nom prend progressivement une signification pour un public élargi, et ce d'autant plus que la conférence organisée aux Nations-Unies à New-York en septembre 2014 a mis en exergue l'importance de ce rendez-vous pour notre climat. Des personnes de plus en plus nombreuses sont sensibilisées à ce qui en sera l'objectif clé: mettre en oeuvre des mesures qui permettent qu'à long terme Je réchauffement moyen lié aux activités humaines n'excède pas 2 °C par rapport aux conditions qui prévalaient avant Je début de l'ère industrielle. Ces personnes ont compris que si nous n'adoptons pas un mode de développement moins émetteur qu'aujourd'hui en gaz à effet de serre, ce réchauffement pourrait atteindre Je double d'ici la fin du siècle et avoir alors des conséquences auxquelles il serait extrêmement difficile et très dispendieux de s'adapter. Mais beaucoup se posent aussi des questions face à cet immense défi. Que peut-on vraiment connaître des conditions climatiques qui régneront dans une centaine d'années et au-delà? Les conséquences du réchauffement sont-elles aussi négatives qu'annoncé? Ne serait-il pas plus simple de s'y adapter plutôt que de modifier notre mode de vie? Quelles solutions mettre en œuvre et à quel

coût? À!' évidence, si une réponse négative- ou simplement trop incertaine - était apportée à la première de ces questions, les autres perdraient de leur pertinence. Le diagnostic des scientifiques du climat est la clé de voûte du débat sur Je réchauffement climatique, ses conséquences et les solutions à mettre en œuvre pour y faire face. C'est à cette tâche que s'est attelé Je GIEC - Je Groupe d'experts Intergouvernemental sur !'Évolution du Climat - qui depuis 25 ans a publié 5 rapports complets en 3 volumes chacun : Je premier de ces volumes est consacré aux« Eléments scientifiques du changement climatique», Je deuxième a pour objet« les impacts, la vulnérabilité et l'adaptation», et Je troisième« l'atténuation»; l'ensemble de ces trois documents est complété par un rapport de synthèse. Ces rapports du GIEC, auxquels ont contribué des milliers de scientifiques, jouent un rôle essentiel dans les négociations climat grâce, notamment,

aux « résumés pour décideurs » qui une fois adoptés par les gouvernements constituent le socle de ces négociations. Ce sera à n'en pas douter de nouveau le cas pour « Paris Climat 2015 », conférence qui fera largement référence aux conclusions du 5e rapport du GIEC publié en 2013 et 2014. Les rapports du GIEC se doivent d'être très complets sur l'ensemble des aspects abordés, les différents chapitres faisant un état des lieux des recherches les plus récentes dans leurs domaines respectifs. Le revers de la médaille est qu'ils sont très volumineux - près de 1500 pages pour le dernier rapport sur les aspects scientifiques - et difficilement abordables pour les non spécialistes. Par ailleurs, seuls les résumés techniques et les résumés pour décideurs sont accessibles en français. Il est donc indispensable, pour qui souhaite s'intéresser à l'avenir de notre climat à travers les rapports du GIEC ou d'autres lectures, de disposer d'un manuel d'introduction à la complexité de la machine climatique. C'est à cet objectif que répond l'ouvrage de Jean Poitou, Pascale Braconnot et Valérie MassonDelmotte. Rédigé par trois chercheurs du Laboratoire des Sciences du Climat et de !'Environnement aux compétences complémentaires, ils' appuie en partie sur les rapports du GIEC auxquels deux d'entre eux ont contribué. Très didactique, d'écriture extrêmement abordable et ne requérant pas de connaissances préalables, il est remarquablement organisé. Nul doute que «Le climat - la terre et les hommes» atteigne l'objectif qu'il s'est fixé à savoir« apporter les informations dont ils peuvent avoir besoin à ceux dont c'est le métier de transmettre la connaissance aux jeunes générations ». Au-delà, je suis convaincu qu'il sera extrêmement utile à tous ceux qui s'intéreffient à l'avenir de notre climat, dont la maîtrise sera au centre de la conférence Paris Climat 2015.

Jean ] OUZBL Directeur de recherche au CEA Membre du bureau du GIEC

Préface

Avant-propos Le climat de la Terre a connu un réchauffement notable dans les dernières décennies. Les principales conclusions du dernier rapport du Groupe international d'experts sur le changement climatique (GIEq confirment le caractère inédit et l'origine anthropique des modifications en cours. L'ampleur et la cause de ce réchauffement, ses impacts à venir, sont cependant l'objet d'interrogations, de doutes, de remises en cause. Avec un langage clair, explicité de nombreuses illustrations, sans aucune formule mathématique, mais sans rien concéder à la rigueur scientifique, ce livre introduit le lecteur au fonctionnement présent et passé du climat et explore les voies vers son évolution. Conçu pour apporter les informations dont ils peuvent avoir besoin à ceux dont c'est le métier de transmettre la connaissance aux jeunes générations, ce livre est aussi fait pour tous ceux qui souhaitent comprendre le fonctionnement du climat : lycéens, étudiants ou plus généralement tous ceux qui se sentent concernés par le monde qu'ils lègueront à leurs enfants. Le livre décrit d'abord les acteurs du climat, leurs nombreuses interactions et le rôle de l'environnement, dépendant du climat et agissant sur ce même climat. Il explique la modélisation du climat, un outil indispensable pour décrypter les observations et explorer les risques futurs. Nous sommes les témoins d'un climat qui est en train de changer et, nous verrons dans quelle mesure, nous en sommes les acteurs. L'étude des climats du passé permet d'appréhender la réponse du climat à différentes perturbations naturelles, et sa variabilité intrinsèque. Les modèles qui nous ont aidés à comprendre le fonctionnement du climat nous permettent finalement d'anticiper les avenirs possibles.

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Introduction Au cours du dernier siècle, et particulièrement depuis 1970, la Terre a vu la température moyenne de sa surface augmenter à un rythme soutenu. Ce phénomène est clairement mis en évidence par l'ensemble des mesures effectuées par les stations météorologiques et océanographiques réparties à la surface du globe et par les systèmes d'observation embarqués à bord des satellites météorologiques. Cette évolution est l'une des manifestations d'un bouleversement en cours, beaucoup plus vaste, qui est une modification du climat de la Terre. Que désigne-t-on sous ce vocable de climat? En grec, klima signifiait inclinaison. Les grecs ont utilisé ce mot, klima, pour qualifier une bande de latitude : à une date donnée, tous ses points voient le soleil avec la même inclinaison. On retrouve le mot climat avec cette même acception en France au Moyen Âge. Vers la fin du XIVe siècle, le sens du mot évolue pour désigner une région géographique plus restreinte, caractérisée par sa végétation. Ce n'est que plus récemment que le mot climat a pris son sens actuel lié à la météorologie : le climat d'une région se définit par l'ensemble des conditions météorologiques que l'on y rencontre à chacune des saisons. Il est d'usage fréquent de caractériser un climat par ses conditions météorologiques moyennes, mais le climat comprend en fait l'ensemble de toutes les conditions observées, y compris les extrêmes, chacune avec sa propre fréquence de récurrence (exemple: crue centennale). Une condition météorologique donnée est au climat ce qu'un événement est à l'histoire. Il est donc évident que la connaissance d'un climat nécessite des observations sur plusieurs décennies, au moins trois. Ce climat, cette distribution de ces événements météorologiques, dépend de la région et de la saison; c'est le climat qui conditionne l'environnement et en particulier la faune et la flore qui prospèrent dans la région considérée. Par opposition, la météorologie conditionne ce que vous allez faire à un moment donné. Ainsi défini, le climat a été, jusqu'au milieu du xxe siècle, du ressort des seuls géographes qui ont pu classer les régions en fonction de leur climat, caractérisé entre autres par la végétation locale.

Le climat, nous venons de Je voir, s'applique à une région. Qu'est-ce alors que Je climat de la Terre? En fait, il s'agit d'un raccourci de langage. Il est plus juste de parler de machine climatique de la Terre ou de système climatique global. Toute modification du climat de la Terre affecte l'ensemble du fonctionnement de la machine climatique. Cette modification se manifestera d'une façon ou d'une autre, différemment, dans tous les climats de la Terre. Machine thermique alimentée par la seule énergie reçue du Soleil, la machine climatique redistribue cette énergie à la surface du globe. De même que Je climat conditionne !'environnement,!'environnement réagit sur Je climat dont il peut fortement affecter les caractéristiques. Toutes les composantes des couches externes de la Terre - atmosphère, hydrosphère, cryosphère, lithœphère, biosphère- participent au fonctionnement de la machine climatique et interagissent avec elle et entre elles. Par son action sur l'environnement qu'il modifie à sa guise, l'homme interagit avec Je climat et peut Je modifier. Pour attester de l'action de l'homme sur Je climat, Je chimiste prix Nobel Paul Crutzen a baptisé « Anthropocène »la période présente de l'histoire de la Terre. Comment connaît-on Je climat, comment élucide-t-on ses ressorts, comment comprend-on ses mécanismes? Un travail de recherche hautement pluridisciplinaire, compte tenu de tous les acteurs en jeu dans la machine climatique, est nécessaire. Ce travail nécessite l'observation minutieuse du climat actuel, mais aussi la reconstitution des climats du passé, depuis les siècles qui nous précèdent jusqu'au début de l'histoire de la Terre, une tâche d'autant plus ardue qu'on s'éloigne davantage du temps présent et que les vestiges des climats sont de plus en plus ténus. Observation, mais aussi, nécessairement modélisation pour tester la pertinence, Je rôle, l'importance relative, de chaque composante du système climatique dans la survenue du phénomène directement observé ou reconstruit à partir de différentes archives climatiques. Les modèles sont indispensables pour comprendre, pour distinguer ce qui est essentiel de ce qui ne l'est pas, pour quantifier la part de chaque acteur. Et dès lors qu'il y a des modèles dûment validés, il est possible d'utiliser Jeurs simulations pour appréhender ce que pourra être Je futur. Le futur du climat, ses impacts sur nos sociétés, sont maintenant un sujet de préoccupation majeure non seulement des scientifiques, mais aussi des médias et de la société civile à l'échelle mondiale. Le climat, nous l'avons dit, est en train de se réchauffer à l'échelle globale, 0,85 °C en moyenne globale depuis 1900, Je triple dans l'Arctique. Dès la fin du XIXe siècle, mais plus spécialement depuis la fin des années 1950, des scientifiques prédisent une augmentation de la température de surface du globe à cause des quantités considérables de dioxyde de carbone que l'homme injecte dans l'atmosphère, où plus de la moitié de ce qui est émis va s'accumuler pendant un à plusieurs siècles. En 1957, l'océanographe

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lntroducUon

américain Roger Revelle disait à ce sujet : « l'lwmme est en train de faire une expérience de géophysique à grande échelle camme il n'y a jamais pu en avoir dans le passé et qu'an ne pourra jamais reproduire dans l'avenir». En 1988, l'ONU dans Je cadre de son programme sur l'environnement (UNEP, United Natians Enviranment Program) et l'organisation météorologique mondiale ont créé Je Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) : des chercheurs de tous les pays unissent Jeurs efforts pour établir l'état de la science du climat soumis à l'action de l'homme, par la synthèse - la cinquième a été publiée fin 2013 - des publications scientifiques s'y rapportant. Le travail de recherche dont Je GIEC fait la synthèse mobilise des équipes très nombreuses dans la totalité du monde. En France, ce sont près d'un millier de personnes qui y consacrent Jeurs efforts. Ce livre a pour ambition de vous faire connaître les rouages de la machine climatique, de vous faire découvrir comment les chercheurs les déchiffrent et quelles projections il est possible de faire pour l'avenir à partir de l'état actuel des connaissances.

LE CLIMAT

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Le système climatique : l'atmosphère et l'océan Le climat régnant sur Terre, très divers selon les régions, est fabriqué par une machine thermique à deux fluides, l'air et l'eau, qui reçoit son énergie du Soleil et évacue son excès d'énergie vers l'espace. Dans ce premier chapitre, nous allons présenter les protagonistes et leurs rôles respectifs dans cette machine thermique.

ID La Terre, planète chauffée par le Soleil Pour décrire la machine climatique, commençons par en présenter le décor et les différents intervenants (figure 1.1). La Terre est une planète du système solaire. Le Soleil lui fournit de l'énergie sous forme de rayonnement électromagnétique. Sphère rigide, légèrement aplatie, la Terre tourne sur elle-même et décrit une ellipse autour du Soleil. L'axe de rotation de la Terre est incliné, actuellement de 22,4°, par rapport à la normale au plan de l'ellipse (plan de l'écliptique). C'est cette inclinaison qui est responsable de l'alternance des saisons. La Terre est baignée dans une enveloppe gazeuse, l'atmosphère. Elle est recouverte sur 71 % de sa surface par des océans, d'une profondeur moyenne de 3 800 m. Les continents qui émergent de la mer sont répartis très inégalement à la surface du globe; la majorité d'entre eux se trouvent dans l'hémisphère nord; leur surface est rugueuse. Dans les hautes latitudes et altitudes, la surface (sol ou mer) est éventuellement couverte de neige ou de glace. De la végétation recouvre une large fraction des continents.

iâ(Ciii;IWll La Terre reoowerte à 70 % d'eau, balgnarn dans l'atmosphère. La mappemonde en haut à droite met clairement en évidence la disparité entre les deux hémisphères concernant la répartition des continents, qui va jouer un rôle Important dans la répartition des grands types de climats et les évolutions du climat global.

La quasi-totalité de l'énergie de la machine climatique provient du soleil. Celui-ci émet de !'énergie sous forme de rayonnement électromagnétique, dans l'ultraviolet, Je visible et Je proche infrarouge. Il en arrive à la Terre un flux de 1360 W /m2 hors de l'atmosphère pour une surface perpendiculaire aux rayons du soleil. Compte tenu de la sphéricité de la Terre, Je flux reçu par une surface au sol est maximum dans les régions où les rayons du soleil arrivent perpendiculairement à la surface à midi, dans la wne intertropicale, et minimum aux hautes latitudes. Cette disparité géographique d'énergie reçue va être en partie compensée par Je fonctionnement de la machine climatique. Le contraste thermique va engendrer des différences de densité dans les fluides, atmosphère et océans, qui entourent la Terre. D'où des forces s'exerçant au sein de ces fluides, forces qui vont entraîner des mouvements. La Terre étant en rotation sur elle-même, ces mouvements des fluides seront soumis aux forces de Coriolis. Ils seront affectés par Je relief de la surface et contraints par les positions des continents. La Terre reçoit l'énergie du Soleil sous forme de rayonnement électromagnétique. Elle en renvoie directement vers l'espace une partie variable suivant la réflectivité de la surface (albédo). Cet albédo est élevé sur les nuages, très variable à la surface du globe, selon la nature de cette surface : faible sur les océans ou sur les forêts, particulièrement élevé sur les surfaces enneigées ou englacées. La fraction de l'énergie incidente qui n'est pas rediffusée est absorbée et

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Chaplre 1. Le système c/lm81/que: fatmosphère et focéan

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l!llll!!l?!'I iij(iji!;j4fj Bilan radiatif de la Terre (flux d'énergie Incidente - flux d'énergie sortante) en fonction de la latitude en moyenne annuelle. Dans les basses latltudes, la Terre reçoit plus d'énergie qu'elle n'en émet. Dans les hautes latitudes, la Terre émet beaucoup plus d'énergie qu'elle n'en reçoit. Cela signe un transfert d'énergie des basses latitudes vers les hautes latltuctes, car à l'équilibre Il n'y a pas d'accumulation d'énergie dans le système. Ainsi le transport de chaleur a pour effet d'équilibrer le bilan d'énergie local.

transformée en chaleur. La Terre se refroidit par émission de rayonnement électromagnétique, essentiellement infrarouge compte tenu de la température de la Terre, la seule forme d'énergie susceptible de s'échapper vers l' espace. La température moyenne de la Terre sera stable si le bilan, énergie reçue moins énergie sortante, moyenné sur une longue période (30 à 100 ans), est nul en moyenne. Le climat s'établit naturellement pour assurer cet équilibre entre énergie incidente et énergie sortante. Nous avons vu que la quantité d'énergie reçue varie beaucoup avec la latitude. Qu'en est-il de l'énergie sortante ? Les mesures des composantes du bilan radiatif (rayonnement solaire incident; rayonnement solaire diffusé et rayonnement tellurique, sortant hors de l' atmosphère) sont effectuées par satellite, depuis les mesures des campagnes ERBE (Earth Radiaticm Budget Experiment : mesure du rayonnement réfléchi et émis par la Terre). Comme le montre la figure 1.2, la quantité d'énergie qui repart vers l'espace n'est égale à celle qui arrive du soleil que très localement. Aux basses latitudes, ce qui repart est très inférieur à ce qui arrive. Nous avons la situation opposée aux hautes latitudes où ce qui part vers l'espace est très supérieur à la quantité LE CLIMAT

de chaleur incidente. Il y a donc transport d'une partie de la chaleur de l'équateur vers les pôles. Cette chaleur est transportée par les deux fluides des enveloppes externes de la Terre, l'atmosphère et l'océan, les contributions de chacun des deux fluides variant notablement avec la latitude (figure 1.3).

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lii(iji!-!4f8 Transports d'énergie par rooéan et l'atmosphère en pétawatts (1 pétawatt = 1015 watts= un million de milliards de watts). L:ooéan et l'atmosphère se partagent œ tiansport d'énergie.

Nous allons donc étudier successivement le fonctionnement de chacun de ces deux fluides dans la machine climatique.

ID L'atmosphère L'atmosphère est l'enveloppe gazeuse de la Terre. Si elle s'étend sur plusieurs centaines de kilomètres d'altitude, l'essentiel de la masse est concentrée dans les premiers 10 km. Au repœ, l'atmosphère obéit aux lois de l'hydrostatique: les forces de pesanteur sont équilibrées par les forces de pression. En d'autres termes, la pression à une altitude h est le poids de la colonne d'air de section droite unité, située au-dessus de cette altitude. La pression normale au niveau de la mer étant 1 013 hPa, on en déduit aisément que la colonne d'air de 1 m2 de section a une masse de 1 033 kg. La pression atmosphérique décroît de façon exponentielle avec l'altitude (voir la figure 1.4). L'atmosphère est globalement peu absorbante pour le rayonnement incident en provenance du Soleil. L'essentiel de la chaleur de la basse atmosphère - les 10 à 15 premiers kmilomètres au-dessus de la surface - provient de la surface, chauffée par le rayonnement solaire qu'elle absorbe et, comme on le verra au

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Chaplre 1. Le système cl/mat/que: fatmosphère et focéan

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i#(dil-1419 Variation de la température de l'atmosphère avec l'altitude. La pression correspondante est Indiquée sur

raxe vertical de droite.

chapitre 2, par l'effet de serre atmosphérique. La surface communique de la chaleur à !'atmosphère de trois façons différentes : - par conduction, sous forme de chaleur sensible; - sous forme de chaleur latente: la chaleur de vaporisation de l'eau est de 2 257 kJ · kg- 1 • Quand il y a évaporation d'eau, que ce soit à partir d'eau libre, à partir de la végétation ou à partir d'un sol humide, le processus d'évaporation absorbe une telle énergie, emportée sous forme latente par la vapeur d'eau. Ce processus permet de restituer une même quantité de chaleur à plus faible température que la chaleur sensible. La chaleur latente est transportée verticalement et horizontalement. Là où la vapeur va se condenser, elle restituera à l'atmosphère ambiante sa chaleur de vaporisation (figure 1.5). - sous forme de rayonnement infrarouge, dont la plus grande partie sera absorbée dans la basse atmosphère (voir chapitre 2.2). Le flux de rayonnement infrarouge ne dépend que de la température exprimée en kelvin, ce qui explique qu'il est relativement homogène comparé aux autres flux. La chaleur est transportée verticalement dans la basse atmosphère par convection. Ce transport dans un milieu compressible est naturellement limité en extension verticale (voir section 1.2.1). La basse atmosphère ou troposphère va donc avoir une température décroissante avec l'altitude, et ce jusqu'à une altitude que l'on appelle la tropopause, vers 10 000 km, variable avec la latitude et la saison. Au-dessus de la tropopause, la température croît avec l'altitude dans LE CLIMAT

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ConcMllS4fÎOfl

Vapeur d'eau

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Évapo- frG11SpirafiOfl AbsorpfiOfl de chclCW'

i#!ijil-i#J.. L:évaporation de l'eau absorbe de la chaleur, qui est stockée dans la vapeur sous forme de chaleur latente. Lorsque la vapeur se reoondense, cette chaleur est restituée à l'air amblant.

une couche très stratifiée, la stratosphère. Cette croissance avec l'altitude est la conséquence de l'absorption de rayonnement ultraviolet par l'ozone stratœphérique. Dans les couches supérieures de l'atmosphère, la température décroît à nouveau avec l'altitude dans la mésosphère, la couche la plus froide de l'atmosphère, avant de se réchauffer dans la couche la plus externe de l'atmosphère, la thermosphère, lllté du 00 2 dans l'eau : forte dans les eaux froides qui vont entraîner le carbone vers le fond de l'océan par la circulation thermohaline, faible dans les eaux chaudes qui 1.()nt au contraire relâcher leur surplus de CO,. D'autre part, les organismes marins consomment du 00 2 pour la production de matière organique qui va alimenter toute la chaîne trophique. Une faible part de cette matière va être enfouie dans le rona aes OCéans. La proauetlon ae coquilles ca1ea1res va réémettre autant ae CO, qu·11 en sera stocKé aans le calealre.

ces flux naturels. Globalement, l' océan absorbe actuellement environ 25 % du COi émis annuellement par les activités humaines.

2.2.2

La partie continentale du cycle du carbone

Aux échelles de temps humaines

Sur les continents, la végétation est Je grand acteur du cycle du carbone, du moins pour ce qui concerne Je court terme pour Je CC)i. En période de végétation active, les plantes absorbent Je C02 qu' elles transforment en sucres LE CLIMAT

El

libérant de l'oxygène: c'est la photosynthèse. Des mesures en conditions atmosphériques contrôlées ont permis de déterminer l'influence de la température et de la concentration atmosphérique du CXh sur la photosynthèse. L'efficacité de la photosynthèse croît avec la température jusqu'à un seuil d'environ 30 °C au-delà duquel elle décroît. Une augmentation de la teneur en C02 de l'atmosphère commence par fertiliser les plantes accroissant leur photœynthèse; audelà d'un seuil en concentration qui dépend du type de plante, l'efficacité de la photosynthèse sature. Ce seuil est déjà atteint pour les plantes herbacées des régions tropicales. Pour la plupart des plantes des autres régions, ce seuil se situe aux alentours de 1 000 ppmv (1 000 parties par million en volume), une concentration qu'on espère ne jamais atteindre. Le métabolisme des végétaux brûle une partie des sucres formés par la photosynthèse, rejetant du C02 dans l'atmosphère. Le bilan photosynthèserespiration varie selon les saisons. Dans les latitudes extra tropicales où les saisons sont marquées, l'absorption de Cüi est dominante en période de végétation, printemps et été, alors que seule l'émission de C02 persiste dans la période hivernale de repos. Le bilan global annuel est une absorption nette de COi représentant 60 Gt (60 gigatonnes) de carbone par an. Le carbone ainsi absorbé se retrouve d'abord dans la partie aérienne des plantes, mais est aussi largement transporté puis stocké dans la partie souterraine, les racines. De plus, la litière composée des détritus des végétaux sur le sol renferme aussi un stock appréciable de carbone. Cette litière est décomposée par des micro-organismes dont l'activité est favorisée par une température et une humidité élevées. En présence d'oxygène, la décompœition produit du C02. En conditions anoxiques, par exemple quand le sol est saturé en eau, la décompœition produit du méthane, un gaz à effet de serre puissant, dont la durée de vie dans!' atmosphère est d'environ 10 ans avant qu'il ne soit oxydé en C(h. En conditions d'équilibre climatique, on pourrait s'attendre à ce que respiration et photosynthèse s'équilibrent dans les espaces naturels. En fait, il y a lessivage par les eaux d'une partie de la matière organique des sols qui est transportée vers les océans par les fleuves. Ce flux représente 0,8 Gt de carbone par an. La variabilité climatique induit également une forte variabilité interannuelle du flux net de C02 comme le montre la figure 2.6. Actuellement, sous l'action de l'homme, le stockage de carbone par les surfaces continentales est diminué de 1,8 Gt par an du fait de la déforestation et de pratiques agricoles comme le labour. Mais il est aussi augmenté de 3 Gt par an, à cause de l'effet fertilisant du C02 accompagné des dépôts d'azote d'origine atmosphérique dans les régions fortement marquées par l'action de l'homme, et des effets du changement climatique. Ainsi, les surfaces continentales stockent approximativement 1,2 Gt de carbone par an. Olaplre 2. Les acteurs du climat et leurs Interactions

Continent

セョキュN@

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Océan

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2000 2003 2005

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1984

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2000

2004

i#(dil;i#lfl Anomalies des accumulations de

00 2 dans l'atmosphère à l'échelle du globe. Les w.leurs sont calculées par différence avec la tendance à long terme et en soustrayant les variations saisonnières. Les effets liés à la varlablllté c limatique sont bien visibles : les périodes de El nャセッ@ (en grisé, voir chapitre suivant) sont souvent accompagnées d'une augmentation des flux continentaux vers l'atmosphère; l'éruption du Plnatubo a provoqué un refroidissement (période marquée par les deux barres noires) et a donné lieu à une diminution des flux continentaux et océaniques.

Aux échelles de temps géologiques

Aux Jongues échelles de temps, l'atmosphère reçoit des quantités appréciables de COi des volcans (figure 2.7). Actuellement ce flux est de l'ordre de 0,1 Gt de carbone par an, soit 1 % des rejets dus à l'action de l'homme. Mais si l'on cumule ces rejets sur des millions d'années, cela fait des volumes tout à fait conséquents, que la nature élimine puisqu'on ne retrouve pas dans l'atmosphère ces gigantesques quantités de carbone. Le mécanisme majeur de cette élimination est aussi une conséquence du volcanisme. Les volcans déversent à la surface des quantités massives de roches silicatées. Ces roches sont lentement attaquées par les eaux des sols acidifiées par Je dioxyde de carbone qu'exhalent les sols. Cette attaque, qui transforme la roche en argiles et oxydes divers, libère des ions Ca2+ et des ions bicarbonates HC03, ions qui sont entraînés par les eaux dans les océans où ils se recombinent pour former du calcaire :

Le bilan est qu'une molécule de COi sur deux est séquestrée dans Je calcaire et donc éliminée de l'environnement fluide. Ceci est un processus géologique majeur qui séquestre environ 70 Mt de carbone par an sous forme de calcaire dans les océans. Des micro-organismes, qui prolifèrent dans des conditions plus LE CLIMAT

El

chaudes, favorisent ce processus où ils pourraient jouer un rôle essentiel dans l'acidification des eaux. Globalement, l'altération des roches, silicatées ou carbonatées, met en jeu quelques 300 Mt de carbone par an. Les carbonates formés vont peu à peu retourner dans Je magma par les phénomènes de subduction, magma qui pourra être repris par les volcans bouclant la boucle. C'est cette grande boucle qtù assure la régulation à long terme du C02 atmosphérique (figure 2.7).

Flux de carbone (en Gt par an)

C02

© M6One atm0spner1que.

À côté de ce processus de séquestration minérale, il existe un autre moyen de séquestration de carbone pour de très Jongues périodes, sous forme organique dans les sols ou les sédiments marins : la matière organique qtù s'est accumulée dans les sédiments échappe à l'action de l'oxygène. Ce sont ces stocks plus ou moins transformés, en charbon, en pétrole ou gaz naturel, que l'homme exploite comme il Je peut pour ses besoins énergétiques.

Dl L'effet de serre Hors de l'atmosphère, une surface perpendiculaire aux rayons du soleil située au niveau de la Terre reçoit de celui-ci un flux d'énergie de 1 360 W /m2 sous

El

Olaplre 2. Les acteurs du climat et leurs Interactions

forme de rayonnement électromagnétique. Cette valeur, qui se mesure par satellite, vient d'être réévaluée et ne varie que de ± 0,03 % avec les fluctuations de l'activité du soleil au cours de son cycle de 11 ans. Si l'on répartit cette quantité d'énergie interceptée par la Terre sur l'ensemble du globe, sphérique et éclairé sur une moitié à la fois, on obtient 340 W /m2 en moyenne sur La surface. Une partie de ce rayonnement est réfléchi ou rediffusé vers l'espace, tant par les particules et les nuages que par la surface du globe. Le reste est absorbé par la surface et converti en chaleur. La surface du globe, corps absorbant et à température non nulle, va émettre un rayonnement infrarouge avec une intensité qui varie comme la puissance 4 de la température absolue selon la loi de StefanBoltzmann. On peut noter au passage que ce phénomène tend à freiner les modifications de la température puisqu'une température croissante entraînera une augmentation de l'émission d'énergie sous forme d'infrarouges, et vice-versa lors d'une diminution de la température. L'émission de rayonnement de corps noir est donc pour le climat une rétroaction négative. Le climat est stable si la quantité d'énergie reçue par la Terre est, en moyenne sur une longue période, égale à la quantité qui repart. La quantité d'énergie à émettre se déduit du flux d'énergie solaire entrant et de l'albédo fraction de la lumière incidente qui est réfléchie par l'ensemble de la planète (surface et atmosphère) grandeurs qui sont mesurées toutes deux par satellite. Pour émettre la bonne quantité de rayonnement infrarouge qui équilibre le bilan, le corps émetteur doit être à la température de 255 K, soit -18 °C. On dit parfois que la température de la Terre serait de -18 ° C en l'absence d'effet de serre. Cette formulation, lapidaire, est en fait inexacte. La formulation correcte serait: une planète sans effet de serre, recevant le même flux d'énergie du Soleil que la Terre, ayant l'albédo actuel de la Terre et dont la surface ne se refroidirait que par rayonnement aurait une température de surface de -18 °C. Noter que ces conditions ne sauraient être totalement satisfaites que pour une planète dépourvue d'atmosphère. La température moyenne au sol est en réalité de +15 °C, alors que la température correspondant à l'énergie sous forme d'infrarouge rayonnée vers l'espace correspond bien à l'émission d'un corps à -18 °C. La température de la surface est donc plus élevée de 33 °C que celle que l'on déduirait du bilan radiatif. La quantité d'énergie qui sort del' atmosphère ne représente qu'un peu plus de 60 % de l'énergie émise sous forme de rayonnement infrarouge par la surface, calculée selon la loi de Stefan-Boltzmann. La raison de ce phénomène est l'effet de serre. En 1824, Fourier a découvert que l'atrnœphère est transparente à la lumière visible mais absorbe la« lumière obscure»; c'est ainsi qu'on appelait les

LE CLIMAT

Encadré 2. 1. Le corps noir.

On désigne sous œ nom un corps idéal qui absorbe totalement les ondes électromagnétiques sur l'ensemble du spectre et donc toute la lumière visible, ce qui fait qu'il est noir. Un tel corps émet un rayonnement électromagnétique dont le spectre, décrit par la loi de Planck, ne dépend que de la température (figure 2.8). La mesure d'une fraction de œ spectre permet donc de déterminer la température du corps émetteur. La puissance rayonnée est proportionnelle à la température absolue à la puissance 4. Un corps réel émet un tel rayonnement rut thenruque, s'il est lw-même absorbant de rayonnement électromagnétique. Une grande partie du spectre lumineux du Soleil correspond à une telle émission. La partie ultraviolette est partiellement provoquée par d'autres processus. 111/.tnSitl JOOOOK

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ljfrill-!f'l :I Spectre d'émission du corps noir pour diverses terl'l>ératll'es. Un oorps chauffé à 1 000 K émettra essentiel ement dans l'infrarouge et un peu dans la partie rouge du spectre visi!Jje; on le verra donc rouge sombre. 5 800 K est la températU"e de surface du Soleil 30 000 K est la température que peut atteindre un éclair dans un orage.

infrarouges. Pouillet a identifié les deux grands responsables de cette absorption : la vapeur d 'eau et le gaz carbonique. C'est Tyndall qui a effectué la mesure de l'absorption d ' un certain nombre de gazet a pris la pleine conscience du rôle climatique de l'effet de serre qui a reçu ce nom quand Arrhenius en 1896 a calculé les effets climatiques d ' un doublement du C02 atmosphérique. Il a donné à ce phénomène ce nom d 'effet de serre en hommage à Horace Bénédict de Saussure qui, dans la seconde moitié du xvme siècle avait construit une héliotherrnomètre, sur le principe d ' une serre multi-vitre super-isolée. Ce dispœitif portatif, véritable précurseur des panneaux solaires thermiques, était destiné à mesurer la quantité de chaleur qu' il pouvait recevoir du soleil à diverses altitudes. L'atmosphère est composée essentiellement d ' azote et d ' oxygène, mais aussi d ' un certains nombres de gaz à l'état de traces (tableau 2.1), dont certains sont

El

Olaplre 2. Les acteurs du climat et leurs Interactions

Formule chimique

Abondance (volume) en%

Azote

N2

78,08

Oxygène

02

20,95

Vapeur d'eau

H20

0 à 4 (selon la température)

Argon

Ar

0,93

Dioxyde de carbone

C02

0,039

Néon

Ne

0,0018

Hélium

He

0,0005

Méthane

CHi

0,00017

Krypton

Kr

0,0001

Hydrogène

H2

0,00005

Xénon

Xe

0,00008

Oxyde nitreux

N20

0,00003

Ozone

Ü3

0,000004

Gaz

IJ.i:l!#Jifjl Composition de l'air. Les pourcentages des gaz autres que la vapeur deau sont donnés pour l'air sec. Les gaz écrits en rouge absortlent des Infrarouges.

très absorbants pour les infrarouges. C'est Je cas pour tous les gaz dont la molécule est constituée de trois atomes ou plus, ou pour les gaz à molécule dissymétrique. Ces diverses molécules peuvent être excitées dans des modes de vibration: un photon dont l'énergie est égale à l'énergie d'excitation d'un de ces modes, est absorbé quand il rencontre la molécule qui se met à vibrer selon ce mode. De telles énergies correspondent à des raies situées dans Je domaine infrarouge du spectre lumineux. La densité de ces raies est telle que les raies individuelles ne sont souvent pas résolues: à l'échelle des figures, on voit des bandes spectrales d'absorption (figure 2.9). Le spectre de la lumière venant du Soleil s'étend de l'ultraviolet au proche infrarouge. Une part appréciable des courtes longueurs d'onde (UV) est absorbée par l'ozone dans la stratœphère, ce qui protège la biosphère de l'effet délétère des rayonnements ultraviolets. En l'absence de nuages, l'atmosphère est transparente pour la plus grande partie du reste du spectre solaire (figure 2.9). Le rayonnement thermique émis par la Terre se situe à de plus grandes longueurs d'onde. Mis à part pour une fenêtre bien visible sur cette figure, et qui est utilisée pour les observations spatiales de la Terre - par exemple par les LE CLIMAT

El

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Rayonnement transmis par l' atmosphère

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Vapeur d 'eau

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0.2

10 Longueur d'onde (µm)

70

i#!ijil-i#J!I En haut : en rouge, spectre d'émission du oorps noir pour la température de surfaoe du soleil, et spectre atteignant la surface terrestre après traversée de l'atmosphère. En violet, bleu et noir, spectres a·ém1ss1on au corps nôlr a 30, 260 et 210 K ; 1a température moyenne au soi est ae 288 K ; la température d'équilibre radiatif de la planète est de 255 K. Le spectre en bleu représente la fraction du spectre émis par la Terre qui ressort dans l'espace ; noter la bande autour de 10 i70Nf'>(l!MAT!QlJf'>[)f

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!ijiiji!;!#t8 Même sur une

simple région comme la Bretagne, Météo France Identifie 6 types de climats

bien différenciés.

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Chapitre 3. Diversité des c/kn8ls et varfabl/lé à gmnde échelle

Sur Terre règnent de nombreux climats différents. La figure 3.3 montre les grandes zones climatiques à la surface du globe, délimitées en fonction de la végétation caractéristique de chacune d'entre elles. Si la structure en bandes de latitudes est flagrante sur cette carte, on notera également une forte dépendance à la présence des reliefs montagneux et une dépendance à la plus ou moins grande proximité des océans dans la direction des vents dominants particulièrement marquée aux moyennes latitudes. La grande variété des climats est juste esquissée sur cette carte. Ainsi, dans un zoom sur une région comme la Bretagne, Météo France définit six climats différents (figure 3.4). Pour caractériser les conditions climatiques et leur évolution, il faut donc un réseau très fin d'observations. 3.1.3 La variabilité météorologique Le climat présente une grande variabilité spatiale, mais aussi une grande variabilité temporelle à diverses échelles de temps. C'est un fait d'observation quotidienne dans nos régions tempérées où Je temps est très changeant d'un jour à l'autre. Ceci est parfaitement illustré par la distribution de trois paramètres météorologiques au cours du mois d'août 2007 représentée sur la figure 3.5. Noter que les écarts de température d'un jour à l'autre peuvent être nettement supérieurs à la différence entre par exemple la température moyenne d'un climat au paroxysme glaciaire comme il y a 21 000 ans et la température moyenne actuelle, différence qui n'était que de 5 °C (chapitre 7). En allant vers des échelles de temps plus grandes, on observe évidemment les variations saisonnières, liées à la latitude et causées par l'inclinaison de J'axe de rotation de la Terre sur Je plan de l'écliptique. Ces variations saisonnières sont quasiment invisibles sur la température moyenne à la surface de la Terre. Les deux hémispères étant dans des saisons différentes, les effets s'annulent et la variation saisonnière de la température globale est faible. La moyenne globale est ainsi principalement représentative des fluctuations d'une année sur l'autre. C'est ce que l'on peut remarquer sur la figure 3.6.

m

Les modes de variabilité : oscillations océan-atmosphère Il existe un certain nombre de grands couplages océan-atmosphère qui se traduisent par des phénomènes climatiques majeurs. Le plus connu est l'oscillation australe El Nifto (El Nifto Southern Oscillation ou ENSO). Nous allons évoquer ici plusieurs de ces modes de variabilité. LE CLIMAT

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Slta'lilK.M.•• M· n,M.'\t 2007

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i#!ijil-i+J.. Ce jeu de données météorologiques mesurées à Strasbourg en aoOt 2007 Illustre parfaitement la grande w.rlabillté des conditions météorologiques d'un jour à l'autre.

Température globale de surface : moyenne mensuelle

Stations météo Température s globales (océans et continents)

.0 1996

1998

2000

2002

2004

2006

2008

2010

2012

lii!i!IM+Kil Température moyenne

globale à la surface du globe. La courtle noire est la moyenne sur les stations météorologiques, toutes situées à terre. La oourtle en rouge tient compte des continents et des océans. On note une forte varlablllté, même de mols à mols et une grande disparité entre les années. N.B. On appelle anomalie l'écart par rapport à une période de référence (Ici la moyenne sur 1951-1980). Ce qui nous Intéresse n'est pas la w.leur absolue de cet écart à la référence, mals son évolution au cours du temps (chapitre 5).

-

Chapitre 3. Diversité des c/kn8ls et varfabl/lé à gmnde échelle

3.2.1

El Nino - La Nina

Ce phénomène intéresse tout Je Pacifique équatorial du Pérou à l' Indonésie et nous est connu depuis l' arrivée des conquistadors au Pérou. On en retrouve les traces sur plusieurs millénaires dans les archives climatiques naturelles comme les coraux des îles du Pacifique. En situation normale (figure 3.7a), sous l'influence ùes hautes pressions

régnant sur Je Pacifique oriental et des basses pressions régnant sur Je Pacifique occidental, à l'équateur, les alizés soufflant d' est en ouest provoquent une forte évaporation sur l'océan. Cela se traduit par une forte activité convective dans l'atmosphère, accompagnée de précipitations soutenues sur Je Pacifique oriental, dans la zone de convergence intertropicale (voir la cellule de Hadley chapitre 1, section 1.2.4). Le vent poussant l'eau à l'interface air-mer, la a)

R6gime no 25 ° Cj par an a augmenté en moyenne de plus de 50 % entre 1950 et 2010, tant à Paris qu'à Toulouse. La w.rlablllté d'une année sur l'autre est Importante, mals les années ayant le moins de joumées estivales dans la demlère décennie en ont toujours eu au moins autant (à Paris) ou nettement plus (à Toulouse) que la moyenne vers 1950.

Chapitre 5. Le réchauffement

Hl Des témoins du réchauffement dans l'environnement La température globale s' est réchauffée de près d' un degré Celsius au xxe siècle, avec une accélération du réchauffement dans les dernières décennies. Ca réchauffement s'est imprimé de manière probante dans l'environnement, particulièrement dans la biosphère et la cryosphère. Quelques exemples vont illustrer ces impacts du réchauffement. 5.2.1

Les températures extrêmes

Le nombre moyen de jours de gel par an a décru, passant de 90 en 1950 à 62 en 2008 à Nancy, et de 44 à 26 à Toulouse. Le nombre de journées avec une température supérieure à 25 °C s' est sensiblement accru comme le montre la figure 5.5 pour Paris et Toulouse. Bien que chacune de ces courbes soit limitée à une seule localisation, elles sont représentatives d' un phénomène affectant de larges régions. 5.2.2 Fonte de la banqui se et des glaciers

L'un des exemples les plus frappants est la diminution de la surface de la banquise arctique à la fin de l'été. Sa surface moyenne en septembre a diminué de plus de 10 % par décennie depuis le début de son suivi par satellite en 1979. La tendance (figure 5.6) serait à une ao.."élération de ce phénomène. En outre, l'épaisseur de la banquise est elle aussi en nette diminution. On n'a pas encore un grand recul dans le suivi de ce phénomène, le premier satellite dédié a été lancé en 2003. La glace de la banquise est de plus en plus jeune : 57 % de la surface était constituée de glace de 5 ans ou plus en 1987 ; cette fraction était tombée à moins de 5 % en 2007. Comme la glace de mer s'épaissit avec les années, une glace plus jeune signifie une glace moins épaisse. C'est donc non seulement la surface de la banquise mais aussi son volume qui décroît rapidement. La banquise antarctique ne présente pas le même type d'évolution (voir l'encadré 5.2) du fait de conditions de circulation atmosphérique et océanique très différentes. L'Antarctique est un vaste continent entourant le pôle Sud. Ce continent et l'océan austral qui l'entoure sont protégés des incursions d' air ou d'eau chauds venant du nord par une circulation quasi ininterrompue des courants océaniques et des vents autour du continent dans le sens ouest-est. De ce fait, la région est beaucoup moins soumise au réchauffement que!' Arctique, et!' extension de la glace de mer a légèrement augmenté dans les dernières décennies, de façon variable avec les secteurs. Le phénomène de réduction de la cryosphère ne se limite pas à la banquise arctique. La plupart des glaciers continentaux ont vu leur volume baisser de manière très substantielle. Le volume d' un glacier est contrôlé par deux phénomènes : il est alimenté par les précipitations neigeuses; il perd de sa substance LE CLIMAT

Extenak>n de t. banquls• arctique ob••rvMi par Nt•tllt• depula 1979

i#!ijii-!41fl Depuis que

l'on peut suivre de façon continue la surface de la banquise par satelllte, on a

constaté une diminution très Importante de sa surface à la fin de l'été mals aussi une diminution à la fin de l'hiver : la surface libérée de sa glace par la fonte estivale ne regèle pas complètement en hiver. La décroissance de la surface sur le mols de septembre, de plus de 10 % par décennie en moyenne depuis 1!179, semble s'aooélérerdans la dernière décennie.

par fusion, par sublimation, ou, dans Je cas d'un glacier aboutissant à la mer ou un lac, par vêlage (formation d'icebergs). Dans Je cas des glaciers alpins, la dispru·ition se fait essentiellement pru· fusion de la glace. Si l'on excepte de rru·es

glaciers dans certains secteurs de !'Himalaya où les chutes de neige associées aux moussons ont augmenté, la quasi-totalité des glaciers continentaux sont en diminution depuis la fin du Petit Âge Glaciaire, et cette diminutions' est accrue dans les dernières décennies. Un exemple est donné sur la figure 5.7: Je nez de la mer de Glace a reculé de 1 800 m entre 1823 et 1995. Les calottes polaires du Groenland et del' Antarctique sont aussi affectées par Je réchauffement. La fonte d'une partie de leur glace contribue significativement à l'élévation du niveau de la mer. Ce point sera traité plus en détail dans la suite de l'ouvrage. Enfin, Je pergélisol, ce sol des ha ut es latitudes qui est gelé en profondeur, réagit également au réchauffement. La couche active superficielle (celle qui fond en été) devient plus profonde, déstabilisant certaines infrastructures et fragilisant Je littoral

ml

Chapitre 5. Le réchauffement

Encadré 5.2 La banquise arctique et la banquise antarctique.

La situation géographique des deux pôles est très différente. Le pôle Nord est au milieu d'une mer cernée par des continents. Les courants océaniques de swface y apportent de la chaleur et font dériver lentement la banquise du Pacifique vers)' Atlantique. Coincée entre les continents, la banquise ne peut avoir un déplacement d'ensemble. De ce fait, elle se fissure et les plaques de glace se heurtent et se chevauchent, ce qui accroît l'épaisseur de la glace et en favorise la longévité. Le pôle Sud est situé au milieu d'un vaste continent, )'Antarctique, entouré par l'océan libre. De ce fait, la banquise quise forme autour du continent peut se déployer largement et être entraînée vers de plus basses latitudes où elle va fondre en été. De plus, cette situation de continent polaire fait que les vents et les courants tournent continûment autour de lui pendant l'hiver austral, l'isolant des apports de chaleur venant des latitudes tempérées. Cela favorise la formation hivernale d'une large couronne de glace de mer autour du continent, glace qui va disparaître presque complètement en été (voir figure). Le réchauffement climatique accroît la fonte estivale de la glace de mer, mais il peut aussi accroître la surface gelée en hiver dans la mesure où une plus grande quantité d'eau douce est amenée à la mer par la fusion estivale de la calotte continentale. Cette eau douce, qui flotte en surlace, peut congeler plus facilement. Banquise arctique en haut et Antarctique en bas. La colonne de gauche montre la situation pour le mols de mars, début du jour à rlntérleur du cercle polaire nord et fin du jour pour le cercle polaire austral. La colonne de ctolte montre la situation symétrique : fin de rété boréal et début de l'été austral, en septembre. La banquise antarctique à la fin de rhhier est beaucoup plus vaste que la banquise arctique dans la même situation, décalée de 6 mols. Mals la fonte de la banquise antarctique est quasi totale alors que, dans la situation présente, malgré une fonte accrue, la banquise arctique ne perd qu'une fraction imitée de son extension au cours de l'été.

L'extension de la banquise antarctique présente une forte variabilité tmt dans l'espace, selon les secteurs autour du continent, que dans le temps, d'une décennie sur l'autre.

LE CLIMAT

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!i!i!IM4D Comme la quasl-totallté des glaciers sur les continents, la Mer de Glace (figures du haut) a considérablement reculé depuis un siècle et demi. Alors qJe dans les années 1820 elle menaçait le village de Praz dans la vallée de O'lamonlx, son front de glace est maintenant loin de la vallée. Quand la photo à droite a été prise en 1995, li avait reculé de 1,8 km. Les aut·es glaciers ont connu une évolution comparable : les figures du bas montrent révolution du bilan de masse (enneigement moins fonte) de trois autres glaciers des Alpes depuis 1900. Les étés très chauds comme 2003 ont accéléré la perte de masse ; à l'inverse, les hivers très neigeux ou les étés frais ont ralenti celle-cl.

5.2.3 Phénologie des êtres vivants

Le réchauffement a déjà produit des modifications tangibles dans Je cycle végétatif des plantes et dans les zones occupées par des espèces animales et végétales. En France, on peut par exemple citer les dates de vendanges (figure 5.8) qui sont de plus en plus précoces sur tous les vignobles, avec un accroissement notable des teneurs en sucre du raisin. Les floraisons des arbres fruitiers sont avancées de 7 à 8 jours pour les pommiers, 10 à 11 jours pour les poiriers. Les forêts montent an altitude : 3 m par an pour les hêtres dans les Pyrénées.

Chapitre 5. Le réchauffement

Signalons néanmoins que cet effet est combiné à celui de!' abandon de pâturages d' altitude. Citons aussi les dates de débourrage des bourgeons plus précoces, les saisons de végétation active plus Jongues.

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lii!i!IM4J:8 Depuis 1940, les dates de début des vendanges sont de plus en plus préoooes dans l'année. À O'lâteauneuf-du-Pape, elles ont été avancées de trois semaines.

lii!i!IM4Jil LB.Ire de nldWlcatlon de la chenille processionnaire du pin s'est sensiblement étendue vers le nord au cours des dernières décennies. Cette progression semble liée essentiellement au réchauffement climatique. La carte de droite montre l'invasion de la région parisienne.

LE CLIMAT

La chenille processionnaire du pin, dont l'habitat est lié à la température, migre vers Je nord, à raison de 2,7 km par an depuis 1970, et 4 km par an dans la dernière décennie (figure 5.9). On constate également une évolution dans la migration des oiseaux. Ainsi, alors qu'aucune oie cendrée ne passait l'hiver en France jusque dans les années 1960, elles sont maintenant des milliers à ne plus faire Je voyage vers des contrées plus chaudes d'Espagne ou d'Afrique (figure 5.10) et on en trouve jusqu'en Scandinavie. La cigogne blanche a commencé à hiverner en France en 1990. De leur côté, les canards sont de moins en moins nombreux à passer l'hiver en France : ils préfèrent des contrées plus nordiques, plus froides. Ces évolutions que l'on observe chez de nombreux oiseaux communs se manifestent aussi avec les papillons. 18000

16000

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i#Mii-1411•1 Avec le réchauffement, les oies cendrées n'éprouvent plus le besoin daller en Espag"e ou en Afrique pour passer l'hiver. Elles sont environ 15 000 à hlbemer en France.

Une évolution similaire est observée dans les océans. Les espèces, plancton, poissons, migrent vers Je nord, au fur et à mesure que les eaux se réchauffent. Celles qui affectionnent une eau très froide voient leur espace de vie se réduire au fur et à mesure du réchauffement (figure 5.11 ). Le réchauffement de l'océan ne se limite pas aux eaux de surface. Les mesures automatisées des bouées ARGO ont mis en évidence un réchauffement important jusqu'à 2000 m de profondeur. Ainsi, on assiste à une augmentation de la chaleur contenue dans les océans qui contribue à une montée du niveau de la mer, au rythme actuel de 3 mm par an.

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Chapitre 5. Le réchauffement

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Annff lj!ijil-ijffl En haut, la concentration atmosphérique du cセ@ de 1970 à 2005 mesurée à Mauna Loa dans l'hémisphère nord et à Barlng Head en NotNelle-Zélande dans l'hémisphère sud. Le petit décalage de 6 mols entre les deux hémisphères correspond au tefll>S mis par le C0 2 de l'hémisphère nord pour envahir l'hémisphère sud. La très faible amplltude du signal saisonnier de l'hémisphère sud est en opposition de phase avec l'hémisphère nord comme le sont les saisons. Cette même figure montre aussi la diminution de la ooneentratlon de l'oxygène entre 1990 et 2004; l'unité verticale "' permeg '.). signifie pour million (le

dix millième du%). On y retrouve le signal saisonnier, en セーッウゥエョ@ de phase entre les deux hémisphères. L:aocrolssement du C02 s ·acoompagne d'une diminution de l'oxygène, montrant que le 002 est produit par combustion. La figure du bas met en regard les émissions annuelles de cartlone et la variation du taux de cartlone 13 dans le 00 2 atmosphérique. La diminution de la concentration relative de 13 C (l'échelle verticale est Inversée pour la clarté de la figure) signe rorlglne \'égétale, lointaine, de ces combustibles fossiles ; Il ne peut s'agir de cartlone minéral d'origine tellurique.

l' autre, avec les conditions météorologiques. En 2013, !'océan a capturé 29 % des émissions de l' homme, les continents 23 %. Le C(h qui s' accumule dans l' atmosphère y a une longue durée de vie, de plusieurs siècles à un millénaire. Il s' ensuit que 20 % au moins, des émissions actuelles, auront encore un effet dans l'atmosphère dans 1 000 ans.

LE CLIMAT

ID Autres gaz à effet de serre Le dioxyde de carbone n'est pas Je seul gaz à effet de serre que les activités humaines rejettent dans l'atmosphère. En fait, toutes nœ activités - agriculture, industrie, transports, production d'énergie - génèrent, soit directement, soit indirectement, des gaz à effet de serre ou des gaz précurseurs de gaz à effet de serre. Les principaux gaz sont le méthane CH4 , l'oxyde nitreux N20, les hydrocarbures halogénés, tels les fréons ou CFC (chlorofluorocarbures), les substituts du fréon depuis son interdiction par Je protocole de Montréal, les HCFC, d'autres composés fluorés tels l'hexafluorure de soufre SF6... et la vapeur d'eau. 6.2 .1

La vapeur d'eau

Commençons par la vapeur d'eau, principal gaz à effet de serre dans la nature. Elle est produite massivement par évaporation comme on l'a vu dans Je chapitre sur Je cycle de l'eau. La quantité d'eau contenue dans l'atmosphère est régie par la thermodynamique selon la relation de Clausius-Clapeyron. Il en résulte que la vapeur d'eau injectée par l'homme dans l'atmosphère n'en modifie pas Je contenu. De fait, la vapeur d'eau qu'on y injecte a un temps de résidence très court dans l'atmosphère, ne dépassant pas deux semaines, avant qu'elle n'en soit éliminée par les précipitations. Il n'y a donc pas accroissement direct de la teneur en vapeur d'eau du fait de l'action de l'homme. Ceci ne veut pas dire que la vapeur d'eau n'a pas d'effet sur Je réchauffement. Elle a un effet car, en vertu de la relation de Clausius-Clapeyron, plus l'atmosphère est chaude, plus elle peut contenir de vapeur d'eau. Le réchauffement entraîne une plus forte évaporation et une augmentation de la quantité de vapeur d'eau contenue dans l'atmosphère. Comme la vapeur d'eau est un gaz à effet de serre, cette augmentation du contenu en vapeur d'eau accroît l'effet de serre et renforce donc Je réchauffement. Il s'agit d'une rétroaction positive. Mais ce phénomène est indépendant de la quantité de vapeur d'eau émise directement par l'homme. 6.2.2 Le méthane CH,

Le méthane est un puissant gaz à effet de serre. Les modèles de climat ont permis de quantifier son impact sur Je climat par rapport au C02 (voir l'encadré 6.1, «Pouvoir de réchauffement global»). Le méthane est produit lors des fermentations anaérobies de substances organiques, dans les lieux humides et les rizières, dans les termitières, et dans la panse des ruminants. Il s'en dégage aussi une quantité notable Olaplre 6. Les perturt:Jefions du c/knat, facteurs anthropiques et neturefs

bétail

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iâ(CJll;ijifl(I Les différentes sources de méthane. Les ゥョウ・」エセ@

particulièrement les termites, et les lieux

humides, constituent l'essentiel des sources naturelles. L:augmentatlon de rélevage de ruminants, pour foumlr la viande pour la consommation humaine, est t11e source Importante de méthane.

dans les feux de forêt. L'exploitation des hydrocarbures fossiles est aussi une source importante de méthane : grisou dans les mines de charbon, fuites dans l'extraction et Je transport du gaz naturel (figure 6.3). Environ 40 % du méthane présent aujourd'hui dans l'atmosphère est d'origine naturelle et 60 % d'origine anthropique. Ce gaz est responsable directement de 15 % de l'effet de serre additionnel dû à l'homme. Sa durée de vie dans l'atrnœphère est courte, environ 10 à 20 ans. Sa concentration atmosphérique, liée aux émissions naturelles et anthropiques, avait augmenté de plus de 10 % au cours des deux dernières décennies du xxe siècle pour quasiment se stabiliser dans les premières années du XXIe siècle. Depuis 2007, elle a recommencé à augmenter (figure 6.4). Une petite fraction du méthane migre dans la stratosphère où il est détruit par oxydation, produisant du C(h, et de la vapeur d'eau et qui va avoir un impact sur Je climat (voir à la fin de ce chapitre). L'environnement recèle aussi des quantités considérables et très mal connues de méthane sous forme hydratée, les clathrates, stockés au fond des océans ou dans Je pergélisol; en outre, celui-ci recèle de très grandes quantités de matière organique dont la décomposition, lors d'un dégel, libérera du C02 et du méthane.

LE CLIMAT

6.2.3 L:oxyde nitreux ou protoxyde d'azote N 20

L'oxyde nitreux se forme naturellement dans les océans et dans les sols. Ces deux sources fournissent approximativement un tiers du N20 contenu dans l'atmosphère. Les engrais utilisés dans l'agriculture intensive sont responsables du reste, soit les deux tiers du N20 atmosphérique. Le N 20 a un temps de résidence un peu inférieur à 120 ans et contribue pour 5 % à l'effet de serre additionnel causé par les activités humaines. Sa concentration atmosphérique croît de façon à peu près constante (figure 6.4).

!i!i!IMi'IN En

haut : évolution de la concentration des trois principaux gaz à effet de serre émis par les activités humaines. En bas, accroissement de ces Olncentratlons. Le CO, volt son taux d'émission croitre au fll des années avec un petit creux en 2009 dO à la crise économique mondiale ; les années postérieures à 2010 (non représentées sur la figure) votent ce taux d'émission continuer à croitre. Les émissions de méthane, CH., ont décru au début du xx1• siècle (est-ce dO à un meilleur contrôle des fuites des gazoducs?) ; elles ré-augmentent depuis 2007. C.oxyde nitreux N 20 est en augmentation quasi

constante.

6.2.4 Les gaz industriels: CFC, HCFC, SF6...

Des compœés ayant des propriétés remarquables sont ou ont été synthétisés par l'industrie chimique pour exploiter ces propriétés. Ce sont par exemple les fréons, les fameux CFC ou chloro-fluoro-carbures, utilisés pendant des décennies comme fluide de refroidissement dans les installations frigorifiques, utilisés comme gaz propulseurs dans les bombes aérœols, utilisés comme solvant décapant dans la mécanique, et qui ont été condamnés à disparaître par Je protocole de Montréal à cause de leur effet destructeur sur la couche d'ozone stratosphérique. Mais outre cet effet sur l'ozone, possible grâce

Olaplre 6. Les perturt:Jefions du c/knat, facteurs anthropiques et neturefs

Encadré 6.1. Pouvoir de réchauffement globaL

Pour comparer les effets respectifs sur le climat des divers gaz à effet de serre, on a défini ce qu'on a appelé le pouvoir de réchauffement global, PRG. Le pouvoir de réchauffement global d'un gaz donné est le facteur par lequel il faudrait multiplier le réchauffement produit par du C02 pour obtenir le réchauffement produit par la même masse du gaz considéré au bout d'un temps donné. Il faut bien noter que la valeur du PRG dépend de l'échéance, et ce, à cause du temps de résidence et du devenir du gaz dans l'atmosphère. Ainsi, un gaz dont Je temps de résidence est bref voit son PRG décroître avec l'échéance alois qu'un gaz à temps de résidence long voit son PRG croître tant que l'échéance n'excède pas son temps de résidence. Le PRG du méthane tient compte du fait qu'il disparaît de l'abnosphère par oxydation, produisant de la vapeur d'eau qui est très rapidement éliminée, et du dioxyde de carbone dont le temps de résidence dépasse le siècle. De façon générale, quand on donne la valeur du PRG sans indication d'échéance, il s'agit du PRG à 100 ans. Le tableau donne les temps de résidence et les pouvoirs de réchauffement global de divers gaz à effet de serre produits par l'homme. Ces PRG sont l'un des résultats que produisent les calculs de transferts radiatifs inclus dans les modèles de climat décrits dans le chapitre 4. Gaz

Temps de

PRGà

PRGà

PRGà

résidence (ans) 20 ans 100 ans 500 ans Dioxyde de carbone : Cûi

» 1 siècle

1

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1

Méthane : CH4

12

72

25

7,6

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114

289

298

153

CFC-11: CCl3F

45

6730

4750

1620 9990

1700

5310

7370

Tétrachlorure de carbone : CC4

CFC-115: CCIF2CF3

26

2700

1400

435

HCFC-22 : CHCIF2

12

5160

1810

549

HFC-23 : CHF3 Hexafluorure de soufre: SF6 Trifluorure d'azote : NF3

270

12000

14800

12200

3200

16300

22800

32600 20700

740

12300

17200

PFC-14: CF4

50000

5210

7390

11200

PFC-116: CzF6

10000

8630

12200

18200

à leur remarquable stabilité chimique qui leur permettait de migrer jusqu' à la stratosphère sans être décomposés, ce sont également de très « efficaces » gaz à effet de serre (voir encadré).

LE CLIMAT

Les CFC ont été remplacés par les HCFC qui n'ont pas le même impact sur la couche d'ozone. Mais ces substituts des CFC ont un pouvoir de réchauffement très supérieur aux CFC. De ce fait, s'ils ne nuisent pas à la couche d'ozone, ce sont de puissants gaz à effet de serre. L'hexafluorure de soufre, très utilisé du fait de ses propriétés isolantes dans tout ce qui comporte des forts champs électriques, est aussi un gaz à effet de serre très puissant et, de plus, à temps de vie très long. L'industrie produit aussi d'autres gaz à effet de serre très puissants comme le trifluorure d'azote, mais leur concentration actuelle est heureusement très faible. 6.2.5

La contribution indirecte de gaz réactifs

L'atmosphère contient un certain nombre de gaz très réactifs produits partiellement de façon naturelle et partiellement par l'homme. Ce sont par exemple les oxydes d'azote, le monoxyde de carbone, des composés organiques volatils, les composés chlorés... Ces gaz peuvent agir comme précurseurs dans la production d'ozone troposphérique (voir ci-après), un gaz lui aussi réactif, qui participe à l'effet de serre. En outre, les gaz réactifs agissent sur le pouvoir oxydant de l'atmosphère et par là influent sur la durée de vie de gaz à effet de serre comme le méthane. Ainsi, la durée de vie du méthane CH4 est conditionnée par la concentration des radicaux libres OH, eux-mêmes produits par photolyse de la vapeur d'eau. Or le monoxyde de carbone CO est lui aussi détruit par oxydation par les radicaux OH. La présence de CO va réduire la concentration de ces radicaux et donc accroître la durée de vie du méthane, augmentant son pouvoir de réchauffement global. L'ozone 03 est naturellement présent dans la stratosphère où il absorbe les rayonnements UV de courte longueur d'onde. Mais l'ozone est également produit dans la troposphère par des réactions faisant intervenir d'une part les oxydes d'azote NO et N02 et d'autre part les composés organiques volatils ou le monoxyde de carbone CO. Les oxydes d'azote, regroupés sous le symbole NOx, sont produits dans les réactions à haute température entre l'azote et l'oxygène de l'air. Il s'en forme aussi dans la nature, par exemple par les éclairs. I.:homme les produit essentiellement lors de combustions, en particulier dans l'utilisation des combustibles fossiles pour la production d'énergie, qui sont la source des deux tiers des quantités de NOx présentes dans la troposphère. Ils sont détruits par oxydation en acide nitrique par les radicaux OH, et donc responsables d'une part des pluies acides; leur temps de vie est de l'ordre de la journée. Certains composés organiques volatils sont émis de façon naturelle par l'activité biologique de la végétation, des sols et des océans. Les hydrocarbures Olaplre 6. Les perturt:Jefions du c/knat, facteurs anthropiques et neturefs

sont aussi massivement émis par l'action humaine et leur taux atmosphérique ne cesse de croître. Ces composés sont facilement peroxydés et participent activement à l'action oxydante de l'atmosphère. Et comme on vient de Je voir, ils contribuent à la production d'ozone. Encadrt! 6.2. Pourquoi l'ozone est-il comptt! comme apport de l'homme à l'effet de serre,

et pas la vapeur d'eau.

Les activités humaines injectent ces deux gaz dans les basses couches de l'atmosphère, directement pour la vapeur d'eau, indirectement pour l'ozone. Ces deux gaz y séjournent au plus quelques semaines. Et pourtant seule la contribution de lozone à l'accroissement de l'effet de serre est comptabilisée comme contribution des activités humaines à l'effet de serre. En fait, le contenu troposphérique en ozone dépend directement des polluants émis par l'homme, et croît avec les émissions de ces polluants. En ce qui concerne la vapeur d'eau, la quantité contenue dans l'atmosphère est contrôlée par la thermodynamique. On observe bien une augmentation du contenu atmosphérique liée à l'augmentation de la température, mais cette augmentation est indépendante des quantités injectées par l'homme dans l'atmosphère. En fait, tous ces gaz réactifs sont en interaction avec Je climat. Le climat conditionne leur formation et leur durée de vie dans l'atmosphère ; ils agissent sur Je climat soit directement par leur effet de serre, soit indirectement par leur production de l' ozone, gaz à effet de serre. L'ensemble de ces interactions est schéma tisé sur la figure 6.5. Les divers gaz contribuant à la production d'ozone, pour la plupart des gaz polluants qui détériorent la qualité de!' air, ont vu leur concentration augmenter avec les activités humaines. Il en résulte une augmentation de ln concentration

moyenne d' ozone, estimée à environ 40 % depuis Je début de l'ère industrielle. L'ozone ne s' accumule pas dans!' atmosphère ; son temps de vie est limité, allant de quelques jours à quelques semaines. Mais il est produit continûment. Sa concentration moyenne augmente et donc sa contribution à l' effet de serre.

ŒJ La part des divers gaz à l'effet de serre additionnel Nous avons vu, dans Je chapitre 2 , section 2.3 consacrée à l' effet de serre, que la vapeur d' eau était Je principal contributeur à l'effet de serre naturel dont ce gaz est responsable de plus de la moitié. Le C(h arrivait en seconde position. Pour ce qui est de l'effet de serre additionnel dû à l'action de l'homme depuis Je début de l'ère industrielle, Je C02 à lui seul compte pour 56 % de cette

LE CLIMAT

i#!ijil-ijjO.. Les gaz réactifs : méthane CH,, monoxyde de carbone CO, composés organiques volatils (COV) et les oxydes d'azote NO,. sont en Interaction avec le climat. Produits par !'activité biologique dans les sols ou par les combustions de cart>one fossile et de biomasse, Ils concourent à la production d'ozone et conditionnent le pou,., Ir oxydant de l'atmosphère qui rejall lt sur leur temps de vie. Par le forçage radiatif de l'ozone et du méthane, Ils participent à l'effet de serre. Le climat conditionne la production de ces composés par le biais de la température, !'humidité et la dynamique œ l'atmosphère, les orages et les précipitations.

Effet de serre naturel

Effet de serre additionnel dOàl'homme

!i!i!IMii!li!I Contribution directe des différents gaz à l'ef'et de serre naturel à gauche, et à l'effet de serre additionnel causé par les activités humaines à droite. La figure de gauche reprend celle du c hapitre Ill. La présente figure ne s'intéresse qu'à l'effet direct des gaz. En fait, certains d'entre eux, particulièrement le méthane, réagissent avec d'autres composants de la troposphère, voire de la stratosphère, générant d'autres espèces à effet de serre positif ou négatif et modifiant ainsi notablement l'ampleur de leur propre effet. Le bilan complet est donné sur la figure 6. 10.

Olaplre 6. Les perturt:Jefions du c/knat, facteurs anthropiques et neturels

augmentation (figure 6.6). Vient ensuite le méthane, suivi des CFC et de l'ozone; )' oxyde nitreux compte encore pour 5 %. C' est en raison de ce rôle dominant du C(h que ce gaz sert de référence pour les effets des autres gaz, par exemple pour leur pouvoir réchauffant global Ainsi les augmentations de concentrations atmosphériques des gaz à effet de serre sont souvent exprimées en équivalents C(h.

1111 Le changement d'usage des sols L'émission directe de gaz à effet de serre n' est pas la seule perturbation apportée par l' homme à l'environnement. Il a profondément modifié le paysage pour satisfaire ses besoins alimentaires avec l'agriculture (figure 6.7), pour ses besoins de logement et de déplacements avec l'urbanisation et la construction de voies de circulation, et via la déforestation pour dégager des surfaces agricoles et couvrir ses besoins en biomasse combustible...

-60

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-20

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lii!i!IMifi Depuis le début du Néolithique, l'homme a profondément modifié une grande partie des surfaoes continentales. Cette action continue. La figure montre révolution du pouroentage de terres affectées à l'agriculture ou à l'élevage entre 1870 et 1990. Les réglons qui étalentdéjàagrlooles à la fin du XIX• siècle le sont restées pour la plupart. Les forêts se sont parfois étendues suite à une déprise agricole, principalement dans le Nord-Est de l'Amérique et en Europe. Les espaoes cultivés ou pâturés ont beaucol.ll progressé sur le continent américain, en Asie et dans oertalnes réglons de l'Afrique.

LE CLIMAT

Changer l' usage des sols impacte Je climat à divers titres, comme évoqués dans Je chapitre 2. La végétation dense a un albédo faible, comme c'est Je cas des forêts et particulièrement des forêts tropicales. Les terres cultivées ont un albédo plus élevé en période végétative, et beaucoup plus faible quand la Terre est labourée. Le défrichage des forêts pour l'agriculture ou l' élevage se traduit donc par une augmentation de l'albédo. La situation est quelque peu différente dans les hautes latitudes enneigées une partie de l' année. Un sol ras est entièrement recouvert de neige et a donc un très fort albédo. Une végétation qui dépasse même peu de la neige fait immédiatement diminuer cet albédo. Le changement d' usage des sols agit donc sur Je climat par l' intermédiaire du bilan radiatif de la Terre. Le type de végétation a aussi une influence notable sur l' humidité atmœphérique et donc sur la nébulosité et les précipitations. Une forêt naturelle permet, par transpiration et évaporation, la présence d' une forte humidité dans l' atmosphère au-dessus d' elle et est donc propice à la formation de nuages. Un exemple de cet effet est montré sur la figure 6.8. En outre, si !' on fait appel à l' irrigation pour favoriser !'agriculture, on crée des zones à évaporation d'eau renforcée, évaporation qui consomme beaucoup

lii!i!IMiJ:NLes satellites météorologiques géostationnaires mesurent entre autres l'intensité de la lumière visible réfléchie par la Terre. Cette vue montre le sud-Qa(Ma)

lj!ijil-if i i18 Zoom sur l'évolution du climat et de la composition atmosphérique au oours des demiers 3,5 millions d'années. De haut en bas : Indice d'aridité du climat à travers le dépôt de poussières dans des sédiments marins de l'océan Austial (rouge) ; évolution du niveau des mers (bleu) ; é"'lutlon de la température de surface des océans tropicaux (noir) et évolution de la concentration atmosphérique en dioxyde de cartlone (en bas). ""ur les demlers 800 000 ans, la courtle verte de la figure du bas montre les mesures directes effectuées dans l'air piégé dans les carottes de glace antarctiques.

LE CLIMAT

paramètres orbitaux de la terre, et dont la fréquence et l'intensité ont changé au cours du temps. Ainsi, la période entre 2,6 et 1,3 Ma est marquée par des fluctuations glaciaires-interglaciaires de faible amplitude se produisant avec une périodicité d'environ 40 000 ans. Entre 1,3 et 0,8 Ma, les périodes glaciaires P-FIAur 800

700

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i#(dil;lfill Du haut en bas, les oourt:>es montrent, pour les demlers 800 000 ans, les w.riations des paramètres de rortilte terrestre : excentricité, obllqulté et précession, l'évolution de la composition atmosphérique en COi à partir des carottes de glace antarctiques (en vert), évolution de la température de surface des ooéans tropicaux à partir des sédiments marins (en rouge), de la température en Antarctique à partir de ranalyse Isotopique de plusieurs carottes de glace (violet) , la variation de la composition Isotopique de foraminifères benthiques (en vert) et les estimations des \9.rlations passées du niveau des mers (en bleu). Les enveloppes de couleur Indiquent les résultats de slmtJations transitoires conduites à l'aide de modèles de c limat, auxquels ont été fournis les changements des paramètres ortlltaux et l'évolution de la composition atmosphérique. Les petits carrés rouges sur raxe du haut, Indiquent la période Interglaciaire actuelle (H) et la précédente (LIG). Le petit lnsert en bas met en relief la vitesse, faible, des changements de température à la surface de la Terre lors de la demlère déglaciation.

Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

atteignent une intensité beaucoup plus prononcée et une durée moyenne de !' ordre de 100 000 ans. Cette transition, qui ne peut pas s' expliquer par les seuls changements des paramètres de l'orbite terrestre, pourrait combiner des effets de seuil, par exemple vis-à-vis de la teneur atmosphérique en gaz à effet de serre, et des changements de la réponse du climat au forçage orbital. Plusieurs théories s'opposent concernant principalement Je rôle respectif de la précession des équinoxes et de !'obliquité daru la mise en place des cycles glaciairesinterglaciaires. Les glaciations du dernier million d' années sont les mieux documentées grâce aux enregistrements paléoclimatiques issus d'archives naturelles continentales, polaires et marines. La figure 7.11 décrit l'évolution de la teneur atmosphérique en dioxyde de carbone ainsi que l'évolution du niveau des mers, de la température en Antarctique et de la température de surface des océans tropicaux. L'ensemble des indicateurs climatiques montre une très grande

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Anomalie de température de surface annuelle ("C)

iij(iji!-IUFJI Synthèse d'estimations du changement de température entre la demlère période Interglaciaire 128 à 125 000 ans avant l'actuel et la période prélndustrlelle à partir d'archives naturelles (en haut) et à partir de 16 modèles de climat (en bas).

LE CLIMAT

cohérence à l'échelle des variations glaciaires-interglaciaires qui correspondent à des réorganisations du climat global et à un équilibre entre les niveaux de gaz à effet de serre, le volume des glaces et la température à la surface terrestre. Ces variations de température sont modestes dans les régions tropicales, typiquement 2 à 3 °C entre maxima glaciaires et interglaciaires, et beaucoup plus intenses dans les régions polaires, 10 .,C en Antarctique, plus de 20 °C au Groenland (figure 7.12). Il faut sotùigner une certaine variabilité dans l'intensité, la durée et l'évolution du climat au cours des différentes périodes glaciaires ou interglaciaires. Les périodes interglaciaires se produisant entre 700 et 450 000 ans atteignent un réchauffement modeste par rapport aux périodes interglaciaires les plus récentes. La dernière période interglaciaire, il y a environ 125 milliers d'années, est marquée par des températures plus élevées aux deux pôles que pendant la période pré-industrielle (figure 7.12) et par un haut niveau marin de l'ordre de 6 mètres au-dessus du niveau moyen des mers avant l'époque industrielle. Les données issues des forages au Groenland suggèrent que la calotte groenlandaise a partiellement fondu en réponse à ce réchauffement et a pu contribuer entre 1,4 et 4,3 mètres à ce haut niveau marin (voir la figure 7.13). On en déduit que la calotte antarctique a également réagi et contribué pour plusieurs mètres à ce haut niveau marin, même s'il n'existe pas d'observations directes d'une déglaciation partielle del' Antarctique de l'ouest ou de certains secteurs potentiellement instables del' Antarctique de l'est. Comme on peut le voir sur la figure 7.11, la période interglaciaire qui s'est produite il y a environ 400 000 ans a été notablement plus longue que les autres, atteignant une durée de l'ordre de 20 000 ans. Le contexte orbital et principalement une faible excentricité de l'orbite terrestre seraient responsables de la durée exceptionnelle de la période interglaciaire il y a 400 000 ans, atténuant l'impact des variations de la précession des équinoxes. Ceci est particulièrement intéressant à souligner, dans la mesure où la période interglaciaire actuelle a débuté il y a environ 11 700 ans dans un contexte également de faible excentricité de l'orbite terrestre. Sans prendre en compte l'impact des activités humaines, l'évolution future des paramètres de l'orbite terrestre (figure 7.11) sera modeste, et devrait conduire à une durée exceptionnellement longue pour notre période interglaciaire en cours.

La fin des périodes interglaciaires passées est utilisée pour déterminer le seuil d'ensoleillement donnant lieu, pour une concentration de gaz à effet de serre donnée, au démarrage d'une glaciation. La comparaison entre les différentes périodes interglaciaires passées suggère qu'avec la concentration préindustrielle en dioxyde de carbone (environ 280 ppmv), les variations futures Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

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i#(dil-ifii(I Simulations de la topographie de la calotte de glace du Groenland lors de sa déglaciation de la demlère période lnterglaclalre, 11 ya121 à 126 000 ans. Les modèles sont Indiqués par leurs acronymes. Les carrés blancs Indiquent les sites de forages prc.fonds dans les glaces du Groenland. La présence de glace lors de la dernière période lnterglaclalre est prouvée au sommet du Groenland (forage GRIP, noté G), au nord (forage NGRIP noté NG) et au nord-ouest (forage NEEM noté NE). Elle est Incertaine au sud (forage Dye3 noté D). Les résultats de modèles d'écoulement de la glace, utills.ant le climat simulé pour cette demlère période Interglaciaire, ont été filtrés pour ne conserver que les simulations compatibles avec les changements d'altitude estimés au site de NEEM. Les configurations simulées, as.sez différentes, correspondent à une contribution de la calotte du Groenland allant de 1,4 à 4,3 mètres à la montée du niveau des mers de cette période.

de !'ensoleillement seront trop faibles pour provoquer une entrée en glaciation, pour plusieurs dizaines de millénaires à venir. Il y a une cohérence dans l'intensité des périodes glaciaires et interglaciaires telles qu' elles sont enregistrées dans différents paramètres du climat global : température en Antarctique, température de surface des océans tropicaux, gaz à effet de serre, volume des glaces. Cette relation étroite tient à la réponse des rétroactions rapides du climat (température, vapeur d'eau, glace de mer, nuage ...), aux perturbations radiatives liées à l'albédo des glaces et aux variations de l' effet de serre, et donc à la sensibilité du climat global à ces perturbations radiatives. Cependant, les mécanismes responsables de l' augmentation de l'intensité des périodes glaciaires et interglaciaires il y a environ 400 000 ans restent mal compris. Il semble que les périodes glaciaires les plus intenses soient suivies des déglaciations les plus importantes et donnent lieu à des périodes interglaciaires particulièrement chaudes.

LE CLIMAT

7.3.2 Entrée en glaciation

Dans l'état actuel des connaissances, la transition entre une période interglaciaire et une période glaciaire, particulièrement bien décrite pour la dernière entrée en glaciation, il y a environ 115 000 ans, se produit de la manière suivante : Je contexte orbital évolue au cours de la période interglaciaire, entraînant de faibles variations climatiques qui affectent essentiellement de façon régionale les moussons et les températures. Cette évolution se produit jusqu'à la conjonction d'une obliquité faible et d'une position de l'été de l'hémisphère nord lorsque la Terre est au plus loin du Soleil sur son orbite. Une telle configuration orbitale produit un minimum d'ensoleillement d'été dans l'hémisphère nord, un effet de la précession, et un minimum d'ensoleillement annuel aux deux pôles, un effet de l'obliquité; en même temps, l'ensoleillement annuel reste fort aux basses latitudes : l'effet de l'obliquité est opposé aux hautes et aux basses latitudes. Le refroidissement des hautes latitudes limite la fonte estivale de la neige, permettant ainsi l'accumulation de neige année après année. Des modifications du couvert végétal se produisent rapidement, entraînant un recul des zones de forêt au profit de la toundra, ce qui augmente l'albédo des continents et Je refroidissement. Le même processus se produit en réaction à l'extension des zones de banquise. En parallèle, Je maintien de températures clémentes aux basses latitudes favorise la présence de plus de vapeur d'eau et Je transport d'humidité, nécessaire pour la formation de calottes de glace. La circulation océanique dans l'Atlantique Nord (figure 7.14) est renforcée, principalement dans les eaux intermédiaires (2 000 m de profondeur), avec une augmentation du transport de chaleur vers Je nord par les courants marins. Il y a environ 70 000 ans, donc près de 45 000 ans après Je début du refroidissement des ha ut es latitudes, une modification de la circulation océanique profonde semble coïncider avec une baisse de la concentration en dioxyde de carbone dans l'atmosphère et Je refroidissement des régions tropicales. Le système climatique évolue alors progressivement vers un maximum glaciaire, caractérisé par un maximum de volume des glaces, un minimum de teneur en gaz à effet de serre et une température moyenne à la surface de la Terre de l'ordre de 9 à 10 °C, soit environ 4 à 5 °C de moins que pour Je climat préindustriel. Les modèles de circulation générale de l'atmosphère et de l'océan simulent correctement les grands traits du climat glaciaire (figure 7.12) mais semblent sous-estimer les changements de températures dans plusieurs régions, en particulier aux hautes latitudes, ainsi que les structures est-ouest de changements de température de surface océanique. L'une des incertitudes dans cette comparaison entre simulations et reconstructions porte sur les impacts des changements de concentration en poussières dans l'atmosphère glaciaire, ainsi que sur les Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

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impacts des changements de végétation, qui ne sont pas pris en compte dans les simulations présentées sur la figure 7.12 et peuvent engendrer des rétroactions locales ou via les couvertures des surfaces neigeuses ou englacées (banquise).

LE CLIMAT

7.3.3 Sortie de glaciation

Alors que les entrées en glaciation sont des phénomènes graduels, liés à un ensemble de rétroactions positives du « système Terre », amplifiant !'effet initial des perturbations orbitales, la fin des périodes glaciaires se produit de manière plus brutale, en quelques milliers d'années. La séquence des événements a pu être reconstruite de façon assez précise (figure 7.15) pour la dernière déglaciation, grâce aux méthodes de datation radiométriques. Le niveau des mers commence à augmenter il y a environ 19 000 ans, marquant Je démarrage de la dernière déglaciation. Il est suivi d'un lent réchauffement de !'Antarctique et d'une augmentation des teneurs atmosphériques en dioxyde de carbone, qui se produisent en phase (à quelques siècles près, ce qui est l'incertitude sur la datation) alors que les températures de l'hémisphère nord restent froides. Cette situation de bascule entre hémisphères est liée à des réorganisations de la circulation méridienne de l'océan Atlantique (voir partie suivante), probablement en réaction à l'apport d'eau douce lors de la fonte des calottes de l'hémisphère nord. La remise en route du transport de chaleur vers!' Atlantique du Nord par la circulation océanique provoque un réchauffement brutal de l'hémisphère nord, une migration vers Je nord de la zone de convergence intertropicale, une intensification des moussons et une augmentation des teneurs atmosphériques en méthane (événement de« B0lling/ Aller0d »,il y a environ 14 700 ans), et une stabilisation temporaire des températures antarctiques et des teneurs en dioxyde de carbone. Cette embellie est brève, car un ralentissement de la circulation thermohaline entraîne un refroidissement dans l'hémisphère nord (c'est l'épisode du Dryas Récent), et une deuxième vague de réchauffement de !'Antarctique et d'augmentation de ln concentration atmosphérique en dioxyde de carbone. L'intensification de la circulation océanique entraîne une dernière phase de réchauffement de l'hémisphère nord, il y a environ 11 700 ans, marquant Je début de la période interglaciaire actuelle, appelée !'Holocène. Cette déglaciation comporte donc une superposition de bascules inter-hémisphériques, liées à la circulation thermohaline, et d'un réchauffement global, dans lequel Je retrait des calottes de glace de l'hémisphère nord et!' augmentation des teneurs en dioxyde de carbone et en méthane jouent un rôle amplificateur clé. Le déclenchement des déglaciations est certainement lié aux paramètres orbitaux mais également à des effets de seuil par rapport à l'extension des glaces continentales, dont les caractéristiques doivent encore être affinées. Pendant cette dernière déglaciation, une première synthèse des reconstructions de températures a permis d'estimer Je rythme du réchauffement, qui a été de l'ordre de 1 à 1,5 °C par mille ans (voir l'encart en bas de la figure 7.11). Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

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i#(dil-if i ..j Évolution du climat global lors de la dernière déglaciation, entre 22 000 et 6 000 ans avant le présent (Ici, 1950). De haut en bas, en vert : évolution du niveau moyen des mers (en vert) ; estimation de la température moyenne à la surface terrestre (en jaune), à partir de proxles ; concentration atmosphérique en dioxyde de cart>one (bleu) à partir des carottes de glaœs de l'Antarctique. Le moteur de ces changements est les w.rlations de l'ensoleillement d'été à 65 °N. Les variations de niveau des mers et de température au climat Interglaciaire actuel. En bas : selon les couleurs, estimation des sont des différences par イセーッエ@ changements de température selon les latltudes (à pattlr de proxles).

7 .3.4

La période interglaciaire actuelle : !'Holocène

Depuis 11 700 ans, Je climat est dans une configuration« interglaciaire», cette période étant appelée !' Holocène. Comme au sein des périodes interglaciaires précédentes (voir la figure 7.11 ci-dessus et Je texte correspondant), les tendances LE CLIMAT

!i!i!IMDl!il Simulations des changements climatiques d'li y a 6 000 ans par rapport au climat prélndustrlel, en réponse aux changements des conditions aux limites du climat : modWlcatlons des para.mètres astronomiques, concentration en gaz à effet de serre. Les résultats présentés sont la moyenne de 14 modèles numériques de climat. En haut : changement de telll>érature d'été Ouin à septembre) en ° C. En bas : changements de précipitations d'été Ouin à SE!)tembre) en mm par jour.

climatiques lentes (à l'échelle de plusieurs millénaires) sont affectées par les variations de !'ensoleillement. Ceci est illustré par Je résultat de modèles numériques de climat (figure 7.16), en réponse au paramètres astronomiques d'il y a 6 000 ans. Tous les modèles produisent un réchauffement des moyennes et hautes latitudes nord en été, en bon accord avec les estimations issues par exemple de l'analyse des pollens de cette période. Au cours des derniers millénaires, Je climat des moyennes et hautes latitudes nord s'est graduellement refroidi, en réponse aux changements de la configuration de l'orbite terrestre. Cependant, à l'échelle planétaire, les changements de température au cours de !'Holocène, comme au cours de la période interglaciaire précédente, ont été modestes. On estime en effet que la température moyenne à la surface terrestre n'a pas varié de plus de 2 °C par rapport au climat préindustriel. Les modifications les plus importantes apparaissent dans les caractéristiques des cycles saisonniers, en réponse aux modifications saisonnières de l'insolation induites par la précession des équinoxes. En réponse à ces changements saisonniers, les modèles simulent une intensification des moussons en Afrique du Nord, en Inde et en Asie du Sud-Ouest, en accord avec les informations issues de l'analyse de Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

niveaux de lacs, des pollens, ou des stalagmites (témoignant de précipitations plus abondantes). Ce changement de moussons est piloté par une réponse du contraste thermique inter-hémisphérique et entre continent et océan. Enfin, la période industrielle est marquée par une rupture profonde dans l'évolution de la composition atmosphérique. La figure 7.17 met en évidence l'augmentation brutale des teneurs atmosphériques en dioxyde de carbone, méthane et oxyde nitreux au cours des derniers siècles, sortant largement du cadre des faibles variations enregistrées dans les carottes de glace au cours de la période interglaciaire actuelle ou des valeurs mesurées au cours des cycles glaciaires-interglaciaires des derniers 800 000 ans. La teneur actuelle de dioxyde de carbone dans l'atmosphère (près de 400 ppmv en 2014) atteint des niveaux comparables à ceux estimés pour le climat du Pliocène, il y a 3 millions d'années. )10

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i#(dil-ifiQ Évolution de la teneur de trois gaz à eftet de serre dans l'atmosphère, au oours des derniers 10 000 ans (Ici déllnls par rapport à rannéede rélérenœ 2005) ; du haut en bas: dioxyde de cart>one (ppmv), méthane (p,:bv) et oxyde nitreux (ppbv).

Hl Instabilités abruptes Les périodes glaciaires sont marquées par une succession d'instabilités rapides du climat, se produisant à l'échelle de quelques décennies à quelques LE CLIMAT

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millénaires. Ces instabilités rapides du climat ne peuvent pas être expliquées par une réponse graduelle aux variations de l'orbite terrestre, et, si elles ont des répercussions globales, elles ont des signatures différentes selon les régions. Elles ont été découvertes et étudiées Je plus finement pour la dernière période glaciaire, qui a débuté il y a ,...,115 000 ans, et s'est achevée il y a ,...,11 700 ans, pour laquelle nous disposons d'archives climatiques à plus haute résolution. Elle a été marquée par 25 événements rapides. Ces instabilités rapides du climat se caractérisent par des conditions très froides aux moyennes et hautes latitudes de l'hémisphère nord, suivies de réchauffements qui durent de quelques centaines à quelques milliers d'années. 7.4.1

Les événements de Dansgaard-Oeschger

Les événements de Dansgaard-Oeschger, du nom des scientifiques danois et suisses qui ont contribué à les identifier dans les glaces du Groenland et dans de nombreuses autres archives à haute résolution, sont constitués d'une phase froide et du réchauffement qui la suit. Ces événements n'ont pas de périodicité bien définie et leur fréquence semble croître avec !'étendue des calottes de glace. Leurs caractéristiques diffèrent d'une région à l'autre et se superpœent à des variations régionales plus lentes telles que celles liées aux variations de l'orbite terrestre comme c'est Je cas des moussons, ou telles que l'englacement des continents de l'hémisphère nord. Ces événements de Dansgaard-Oeschger affectent la température de surface, la salinité et la ventilation des masses d'eau de l'océan Atlantique nord. Ils déplacent vers Je sud la zone de convergence intertropicale et les vents d'ouest. Ils entraînent, en Europe, de forts changements de végétation qui ont laissé leur trace dans les grains de pollens déposés dans les tourbières ou les sédiments marins et les concrétions calcaires. Dans les régions tropicales, on assiste à des modifications majeures du cycle de!' eau, conduisant à des alternances de périodes sèches pendant les phases froides, et humides pendant les phases chaudes, en Asie du Sud-Est, avec la situation opposée en Amérique du Sud. Enfin, ces événements de Dansgaard-Oeschger sont accompagnés de variations de la teneur en méthane dans!' atmosphère qui chute pendant les phases froides et augmente pendant les phases chaudes, reflétant ces réorganisations climatiques de grande échelle, qui modulent la production de méthane dans les zones humides tropicales ou boréales. Au Groenland, les variations de température entre les phases froides et les phases chaudes des événements de Dansgaard-Oeschger varient de 8 à 16 °C selon les événements, indépendamment du moment où ils se produisent dans la période glaciaire. Ces estimations proviennent de l'analyse de la diffusion thermique des gaz lors de leur piégeage dans Je névé, c'est-à-dire de la Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

zone où la neige est progressivement compactée pour se transformer en glace. Les changements de température de surface de la mer en Atlantique nord, au large de l' Europe, peuvent également dépasser les 12 °C. En Europe, les changements de végétation reflètent des variations de température de 5 à plus de 10 °C, et de fortes variations de la quantité de précipitations autour de la Méditerranée. Le mécanisme qui lie les événements de l'hémisphère nord à ceux de l' hémisphère sud commence à être bien compris, en particulier grâce à la synchronisation des échelles chronologiques des carottes de glace du Groenland et de l'Antarctique, par la mesure de la concentration du méthane piégé dans les bulles de gaz de la glace. Ainsi, chaque événement du Groenland a une contrepartie décalée en Antarctique : les phases froides du Groenland comcident avec un réchauffement progressif Antarctique ; les réchauffements abrupts du Groenland coïncident avec un maximum relatif - les climatologues disent un « optimum » - en Antarctique. Cette bascule inter-hémisphérique, d' abord identifiée sur les événements les plus intenses, se retrouve dans 24 des 25 événements de la dernière glaciation, à l'exception du tout premier. La séquence est la suivante : alors que l'Atlantique nord connaît une période de froid, l' Antarctique se réchauffe; puis la température augmente de façon abrupte en Atlantique nord, et la température en Antarctique commence à décroître; on observe ensuite un refroidissement continu et lent au Groenland, alors que dans d' autres régions, comme en Europe, les températures restent stables; la température chute ensuite rapidement en quelques centaines d'années dans la zone nord Atlantique-Europe, tandis que l' Antarctique commence à se réchauffer lentement. Ces caractéristiques ont conduit à décrire ces instabilités rapides comme une bascule inter-hémisphérique (figure 7.18). Dans les changements climatiques que nous venons de décrire, l'état de la circulation océanique méridienne de grande échelle, la circulation thcrrnohalinc, dans le bassin Atlantique, semble jouer un rôle important. Cette hypothèse a été testée à l'aide de modèles de climat (voir chapitre 6) en provoquant une réorganisation de la circulation océanique par un flux d' eau douce introduit artificiellement en Atlantique nord, et en simulant ses impacts. Ceux-ci sont cohérents avec les évolutions comparées des changements de température au Groenland, en Europe ou en Antarctique, ainsi qu'avec les indices disponibles par l' étude des sédiments marins. Dans les simulations climatiques, l'état de cette circulation océanique module la position de la zone de convergence intertropicale (ZCIT) : lorsque la circulation océanique est forte (phases chaudes au Groenland), la ZOT est située plus au nord (moussons intenses sur les continents de l' hémisphère nord, et faibles dans l'hémisphère sud), et vice-versa en cas de circulation océanique plus faible (phases froides au Groenland). Ce couplage entre cycle de l' eau tropical et circulation océanique est corroboré par les LE CLIMAT

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lj!ijil-if i l:l Instabilités rapides du climat glaciaire. En haut : marqueurs isotopiques des changements 18

de température au Groenland (& 0 , en pour mille) et oo Antarctique (&D, en pour mille) , en fonction de l'âge (du passé, à gauche, vers le présent, O pour l'année 1950, à droite). Au milieu : simulation de la réponse de la circulation océanique à un セーッイエ@ brutal d'eau douce. On observe un mécanisme de bascule Inter-hémisphérique qui tient à une modification de la clrculatlon méridienne de retournement de rocéan Atlantique, atténuée autour de l'Antarctique par !'Inertie thermique de l'océan Austral (schéma du bas).

enregistrements issus des stalagmites en Asie ou en Amérique du Sud (figure 7.19). La cause exacte de l'instabilité de la circulation océanique ellemême reste une énigme : s'agit-il d' un processus intrinsèque à la dynamique Olaplre 7. Varf8l/ons passées ru clmat

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i#(dil-ifiC:I Changements de moussons pendant les événements de Dansgaard-Oeschger. En haut : changement de température au Groenland déduits de l'analyse des carottes de glace. Au milieu et en bas : Indication des changements de précipitations en Asie du Sud-Est (milieu) et en Amérique du Sud (bas) à partir de la composition Isotopique de stalagmites. On note une antiphase entre les changements de précipitations entre l'Asie et l'Amérique du Sud, ce qui traduit des décalages nord-sud de la zone de convergence Intertropicale.

de l'océan lorsqu' il se refroidit ; ou est-elle liée à des injections d' eau douce dans certaines régions comme!' Atlantique nord causées par des instabilités des calottes de glace ; ou est-ce Je résultat des interactions océan-calottes de glace ?

7.4.2

Autres instabilités

Bien que moins documentée, une variabilité millénaire similaire existe aussi dans les périodes glaciaires précédentes, comme en témoignent les variations de température locale et de concentration en méthane enregistrées dans les glaces de!' Antarctique, les variations de températures de surface de l'Atlantique nord issues de l'analyse des sédiments marins, et les variations des moussons reflétées dans les stalagmites de Oüne. LE CLIMAT

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Certaines des phases froides longues coïncident avec des événements de Heinrich, identifiés dans les sédiments marins de !' Atlantique nord et correspondant à des débâcles de la calotte de glace qui couvrait l'Amérique du Nord (calotte Laurentide).

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Enregistrements et simulations d'une lnstablllté イセャ、・オ@ climat dans l'Atlantique nord, il y a 8 200 ans. Cet événement est causé par un afflux brutal d'eau douce du fait de la vidange du lac Agassiz, en Amérique du Nord-Est, formé par l'eau de fonte de la calotte laurentlde. À gauche, de haut en bas : température au Groenland, température de surface de l'Atlantique nord, taille des particules des sédiments marins (Indicateurs de !'Intensité des courants marins de fond), et Intensité de la circulation méridienne de l'océan Atlantique. Pour chaque paramètre, les traceurs Issus d'archives naturelles sont confrontés aux résultats de modèles de climat (traits de couleur). Les résultats de ces modèles sont représentés sous forme de cartes de changements de température de surface et de précipitations (à droite), ainsi que le signe des changements Issus d'archives naturelles (couleur des ronds : violet : plus froid ou plus sec ; gris : signe Incertain ; jaune : plus chaud ou plus humide).

Enfin, Je début de la période chaude actuelle, !' Holocène, est aussi marqué par l' occurrence d'épisodes de refroidissement, liés à l'injection brutale Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

d'eau douce dans !'Atlantique nord lors de la vidange de lacs pro-glaciaires. Les modèles de climat parviennent à représenter la structure et la vitesse de ce type d'instabilité, liée à une réorganisation rapide de la circulation de !'océan Atlantique (figure 7.20).

ID Le dernier millénaire 7 .5.1

Les facteurs de l'évolution du climat

Au cours du dernier millénaire, Je climat a subi des évolutions pour lesquelles on dispose de documents écrits. Ces évolutions résultent de !'action de facteurs liés à l'activité humaine, mais aussi de facteurs naturels. Les facteurs li és à l'activité humaine

Plusieurs facteurs anthropiques ont agi sur l'évolution du climat du dernier millénaire. Tout d'abord, cette période est marquée par une augmentation des 400

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LE CLIMAT

concentrations en gaz à effet de serre à partir des années 1750, en relation avec un impact croissant des activités humaines sur la compœition atmosphérique. Cette augmentation contraste avec des niveaux très stables de leur teneur au cours des derniers millénaires (figure 7.21). Les impacts des activités humaines comportent également des modifications de l'usage des sols: déforestation, urbanisation, activités agricoles, ainsi que des rejets de particules qui forment des aérosols) (voir chapitre 6). Les facteurs naturels

En parallèle, avec ces facteurs d' origine anthropique, des facteurs naturels ont également agi sur le climat. Tout d' abord, les changements lents de l'orbite terrestre ont un effet, détectable sur 1 000 ou 2 000 ans, sur la répartition de l' ensoleillement en fonction de la latitude et de la saison. Ce facteur ne modifie pas le forçage radiatif en

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lj!ijil-iffFI Forçage radiatif, évolution et simulation de la température moyenne à la surface de rhémlsphère nord au cours de la période 850-2000. (a) Es:lmatlons des dWférents termes du forçage. En haut, activité volcanique : deux estimations, en rouge et noir, à partir du dépôt d'aérosols 1.()lcanlques dans les glaces du Groenland et de l'Antarctique. Au milieu, activité solaire passée : plus leurs estimations à partir de dépôts d'aérosols oosmogénlques. En bas, Impact des changements de concentrations de gaz à effet de serre. (b) Enveloppe des estimations des changements de température (dégradés de gris reflétant la superposition des dWférentes estimations et de leurs barres d'erreur) et comparaison aux résultats de 8 modèles de climat : moyenne des simulations en trait épais ; gamme de 90 % de toutes les simulations en trait fin.

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l'activité solaire sont estimées, à l'aide de modèles de fonctionnement du Soleil, à partir des productions d'isotopes cosmogéniques (10 Be et 14C), et en tenant compte des effets liés aux vru:iations de champ magnétique terrestre. L'activité solaire est marquée par des cycles de 11 ans, et des périodes de minimum prononcé, dans les années 1050, 1250, 1450-1550, 1650-1700, ou au début du XIXe siècle. Les estimations les plus récentes suggèrent des variations de l'irradiance solaire de l'ordre de 0,1 % au cours des cycles de 11 ans comme entre périodes de faible et forte activité, ce qui se traduit par un forçage radiatif de l'ordre de 0,2 W /m2 (les estimations dans les années 1990 donnaient des valeurs 2,5 fois plus fortes). Au cours du dernier millénaire, il faut souligner une coïncidence entre périodes de faible activité solaire, et périodes de forte activité volcanique (figure 7.23), ce qui rend difficile la distinction du rôle respectif de chacun de ces facteurs sur l'évolution du climat. 7.5.2 Reconstruction de l'hi stoire du climat du dernier mill énaire

L'estimation des changements de température au cours du dernier millénaire repose sur des archives climatiques à haute résolution. Citons: les sédiments de lacs présentant des couches annuelles; les cernes annuels de croissance d'arbres qui fournissent différents paramètres tels que épaisseur, densité, composition isotopique; les glaciers; les coraux (figure 7.24). Ces enregistrements peuvent être datés à l'année près et ainsi permettre une estimation fine des changements de température, année par année. Ces données sont complétées par des mesures effectuées sur des archives à plus basse résolution comme les changements de pollens enfouis dans les sédiments de lacs, ou les changements de température de la mer déterminés à partir de plusieurs indicateurs dans les sédiments marins. À chaque archive et à chaque paramètre est associée une incertitude concernant sa traduction en température. Par exemple, dans les régions montagneuses ou dans l'Arctique, la croissance des arbres est étroitement liée à la durée de la saison de végétation et donc à la température. Mais on observe parfois des divergences liées à d'autres facteurs limitants, comme la disponibilité en nutriments ou en eau. Ainsi, au cours des dernières décennies, le réchauffement important ne s'est pas systématiquement traduit pru: une augmentation graduelle de la croissance des arbres. Ces enregistrements paléoclimatiques sont calibrés par rapport aux mesures directes de température disponibles à partir du milieu du XIXe siècle. Utilisés avec leurs incertitudes, ils servent, par des méthodes statistiques prenant en

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• lâj(C\ii;lffJil Diverses archives naturelles présentent des structures saisonnières qui permettent de les dater avec une précision annuelle. Les précipitations Il! les matériaux qu'entraîne le ruissellement marquent les sédiments ou la croissance des stalagnltes. La dlsponlblllté en eau et la température modulent la croissance des artlres. Celle des coraux dépend de la température et de la salinité de l'eau, elle-même conditionnée par les précipitations saisonnières. La structure des cristaux de neige formant les glaces polaires a une variation saisonnière bien vlsllle là où l aocumulation annuelle de neige est Importante (ex. : Groenland).

compte la cohérence spatiale des températures liée à la circulation atmosphérique de grande échelle, à estimer les variations de température à l'échelle d'un continent ou d'un hémisphère. L'utilisation de méthodes bayésiennes et de résultats de simulations climatiques longues a permis des progrès considérables dans l'estimation des incertitudes sur la température. La figure 7.25 montre les différentes estimations disponibles. Malgré des différences notables sur l'amplitude des variations de température, il faut souligner une convergence des 14 reconstructions pour l'hémisphère nord couvrant les derniers 2 000 ans. Les variations de température ont été modestes (typiquement moins de 2 uq et plusieurs intervalles doux (lors de la période médiévale, entre les années 950 et 1250 environ) et frais (lors de la période dite du Petit Âge de Glace, entre 1450et1850) sont identifiés. 7 .5.3

Que nous apprend le climat du derni er millénaire?

L'évolution du climat résulte de la superposition de plusieurs phénomènes : d' une part la réponse du climat aux perturbations radiatives dans un contexte proche de l'actuel, d'autre part la variabilité climatique dite interne et propre aux interactions entre la circulation atmosphérique et océanique. La moyenne des simulations climatiques permet d'estimer la part des changements qui est une réponse aux forçages radiatifs. La différence entre ces simulations et les estimations permet d'évaluer la part liée à la variabilité interne. Les simulations

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iâ!Hil;lfff'I Estimations des changements de température de surfaoe au oours des demiers 2 000 ans : 14 reconstructions cifférentes pour l'hémisphère nord ; 3 pour rhémlsphère sud ; 2 pour rensemble du globe. Les mesures de température sont représentées en trait noir. Le trait rouge pieln est déduit de profils verticaux de température dans des trous de forages tels que des mines.

climatiques sont parfois guidées par !'assimilation de données paléoclimatiques (voir encadré 7.1 sur l'assimilation) pour identifier la structure des circulations atmosphérique ou océanique. Le climat du dernier millénaire est simulé pour la période 850 à aujourd'hui en prenant en compte les forçages naturels et anthropiques décrits précédemment. Comme on Je voit sur la figure 7.26, la moyenne de 8 simulations réalisées avec différents modèles de climat océan-atmosphère est en bonne cohérence avec l'enveloppe grisée des différentes estimations de température de surface de l'hémisphère nord. L'utilisation de méthodes de détectioniattribution (voir chapitre 6) permet de conclure que la variabilité de la température moyenne à la surface de l'hémisphère nord ne peut pas être due uniquement à la variabilité interne du climat, et reflète donc en grande partie l'impact des changements de l'activité solaire et surtout volcanique sur Je climat. Le peu de différences entre les simulations avec forçage solaire faible (0,1 % de variations d' irradiance entre périodes de faible et forte activité) et fort (0,25 %) suggère un rôle déterminant du forçage volcanique. Des tests conduits avec un forçage solaire encore plus important (0,4 %) conduisent à des résultats irréalistes. Par contraste, les estimations de la Olaplre 7. Varf8l/ons passées ru clmat

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lâj(C\ii;lffJj Changements de température oontlnentaJe au oours du dernier millénaire, estimations (oourtles noires et enveloppes grises), simulations avec forçage solaire fort (bleu) et faible (rouge), enveloppes des simulations à 90 % (traits fins rouges et bleus), et observations météorologiques Qaune). Dans chaque région, les rectangles en haut de la figure permettent de repérer la période de 30 ans la plus chaude dans les estimations à partir de données paléocllmatiques, soit pour la période médiévale (950.1250), soit pour la période dite du Petit Âge de Glace (1450-1850).

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température moyenne de surface dans l' hémisphère nord pour la période 8501400 ont une variabilité plus grande que les simulations. Cela suggère un rôle significatif de la variabilité interne du climat,en particulier au début de l'anomalie climatique médiévale (années 950-1100), peut-être en relation avec un transport de chaleur plus important par les courants marins de !'océan Atlantique nord. Encsdré 7. 1. Assimillttion.

L'assimilation de données consiste à utiliser conjointement les connaissances que lon a d'un système : conditions initiales avec leurs incertitudes, représentation numérique modélisant les processus, observations de l'évolution du système, pour estimer certains paramètres des modèles ou pour avoir la meilleure estimation possible de létat initial du système. Grâce à la puissance des ordinateurs actuels, l'assimilation est très utilisée en météorologie où l'état initial conditionne l'état de l'atmosphère à quelques heures ou quelques jours. L'assimilation permet en particulier de rectifier les calculs de prévision en cours en rapprochant les variables simulées des observations au fur et à mesure qu'elles arrivent. Elle est indispensable pour caler les simulations et obtenir des prévisions fiables à plusieurs jours. L'assimilation sert aussi à rejouer toute l'histoire des données météorologiques pour produire un état cohérent dans lespace et le temps, des circulations atmosphérique et océanique.

Enfin, un progrès récent tient à!' estimation de changements de température à l'échelle de 7 zones continentales (figure 7.26), qui peuvent également être comparées aux simulations régionales. Dans les moyennes et hautes latitudes de l'hémisphère nord, une tendance lente au refroidissement est présente sur plusieurs millénaires et persiste jusqu'au milieu du XIXe siècle. Cette tendance est probablement liée à !'effet des changements lents de !' orbite terrestre et, pour Je dernier millénaire, à une activité volcanique intense. La comparaison entre simulations et estimations montre un certain nombre de coïncidences dans l'occurrence de périodes de plusieurs décennies chaudes ou froides, suggérant un impact détectable des facteurs naturels (activité du soleil et des volcans) sur l'évolution des températures même à l'échelle régionale (en particulier pour l'Europe). La période actuell e est particulièrement chaude

Une comparaison systématique, pour chaque estimation disponible, entre la température moyenne par tranches de 30 ou 50 ans et la température des derniers 30 ou 50 ans montre avec un bon niveau de confiance statistique que la période des derniers 30 ou 50 ans est la plus chaude des derniers 800 ans, et probablement la plus chaude des derniers 1400 ans. Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

Compte tenu du peu d'éléments disponibles pour l'hémisphère sud, il n'est pas possible de tirer de conclusions robustes pour Je moment pour cet hémisphère. Les quelques estimations disponibles suggèrent aussi un réchauffement récent exceptionnel dans Je contexte des derniers 800 ans au moins. La variabilité des températures est maximale en Arctique, où Je réchauffement récent semble exceptionnel dans Je contexte des derniers 2 000 ans. Ce résultat est cohérent avec quelques indicateurs de l'extension de glace de mer, qui indiquent que Je recul de la banquise arctique estival des derniers 30 ans est exceptionnel dans Je contexte des informations disponibles pour les derniers 1 450 ans. À l'inverse, la variabilité des températures reconstruites est particulièrement faible pour !'Australasie, probablement du fait de l'inertie thermique de l'océan qui atténue la variabilité de la température de l'air en surface. Les incertitudes restent majeures pour !'Antarctique, aussi bien dans l'enveloppe des estimations que dans les simulations, où l'effet des forçages naturels n'est pas détecté en l'état. Pour la période récente (industrielle), la comparaison entre simulations et estimations est biaisée autour de!' Antarctique car la plupart des simulations ne prennent pas en compte la diminution de la couche d'ozone, qui a des effets sur la circulation atmosphérique et Je climat régional antarctique. En identifiant les périodes de 30 ans les plus chaudes dans la période médiévale et au cours du xxe siècle (carrés verts dans la figure 7.26), on montre l'occurrence pendant la période médiévale de périodes de plusieurs décennies qui sont, dans certaines régions, aussi chaudes que Je milieu du xxe siècle, ou dans d'autres régions aussi chaudes que la fin du xxe siècle. Cependant, ces épisodes chauds régionaux ne se sont pas produits de manière synchrone dans les différentes régions, à la différence du réchauffement « global » observé depuis Je milieu du xxe siècle. Les événements extrêmes

Les enregistrements paléoclimatiques peuvent également permettre de caractériser les changements de modes de variabilité ou de fréquence d'événements extrêmes. Ainsi, pendant Je Petit Âge de Glace, des périodes d'activité ENSO faible par rapport au xxe siècle sont identifiées. Il n'est pas exclu qu'il y ait une augmentation de la probabilité d'occurrence d'événements El Nifto 1 à 2 ans après les événements volcaniques intenses mais cet effet n'apparaît pas clairement dans les simulations et semblent dépendre de l'amplitude des éruptions. L'oscillation Nord Atlantique, qui affecte fortement Je climat européen en hiver, montre une forte variabilité au cours des derniers 500 ans, et les phases positives récentes, comme dans les années 1990 ou pour l'hiver 2014, ne semblent pas exceptionnelles. En revanche, Je mode annulaire austral montre une LE CLIMAT

tendance positive nette depuis 1950, qui semble exceptionnelle dans Je contexte des derniers 400 ans et qui pourrait être due à la diminution de la couche d'ozone antarctique. Les données historiques ou paléoclimatiques montrent l'occurrence, au cours des derniers 500 ans, de crues plus intenses que celles mesurées depuis 1900 en particulier en Europe centrale, Europe du nord, Ouest de la région méditerranéenne ou Asie de l'Est. De même, les estimations de sécheresses passées montrent des épisodes de sécheresses au cours du dernier millénaire avec une intensité et une durée plus longue que celles observées depuis Je début du xxe siècle, dans de nombreuses régions. Il n'y a pas encore de vision d'ensemble des changements du cycle hydrologique au cours des derniers siècles ou millénaires. Des indicateurs de changements de précipitations issus de sédiments lacustres et/ou de stalagmites suggèrent des moussons plus faibles en Asie du Sud-Est et inversement plus intenses en Amérique du Sud pendant la période 1450-1850, suggérant un déplacement vers Je sud de la zone de convergence intertropicale, résultant de modification du gradient de température entre hémisphère nord et hémisphère sud. Ce changement est cohérent avec l'identification de périodes de sécheresses prolongées plus fréquentes en Asie et plus rares en Amérique du Sud pendant cette même période. Les comparaisons aux simulations paléoclimatiques ne sont pas concluantes sur ce point. Il faut souligner une cohérence entre des variations de température relativement modestes au cours des deux derniers millénaires et une stabilité de la teneur atmosphérique en gaz à effet de serre. En effet, Je cycle naturel du carbone est étroitement lié au climat, qui peut affecter les flux nets de C(h ou de CH.i depuis!' océan et les surfaces continentales. Niveau de la mer

Enfin, il y a également cohérence entre ces variations climatiques modestes, et la stabilité du niveau moyen des mers déterminé au cours des derniers millénaires, avec une précision de l'ordre de 25 cm pour les variations à l'échelle d'un siècle (figure 7.27). L'augmentation d'environ 2,5 mètres du niveau moyen des mers entre 6 000 et 2 000 ans avant l'actuel reflète essentiellement la déglaciation du secteur de Marie Byrd Land de !'Antarctique de l'Ouest, probablement liée à la fin de la réorganisation due aux changements glaciaires-interglaciaires. Les méthodes mises en œuvre pour estimer finement ces variations passées de niveau des mers combinent l'étude d'indicateurs dans les zones de marais salants, l'étude de coraux dans des micro-atolls particuliers, et l'étude de vestiges Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

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archéologiques directement liés au niveau des mers (par exemple, structures portuaires). Ces informations permettent de conclure que Je rythme actuel de montée du niveau des mers est exceptionnellement élevé dans Je contexte des variations centenaires au cours des derniers 2 000 ans.

Dl Changements climatiques en cours et futurs dans la perspective de l'évolution passée du climat Cet aperçu des connaissances portant sur l'évolution passée du climat à différentes échelles de temps permet de situer les changements en cours et futurs dans une perspective plus large que les mesures instrumentales. L'augmentation des concentrations atmosphériques en gaz à effet de serre depuis la période industrielle (1750) témoigne d'une rupture vis-à-vis des derniers millions d'années, et ces concentrations atteignent déjà des niveaux comparables à ceux estimés pour les phases chaudes du Pliocène. Les concentrations futures de LE CLIMAT

dioxyde de carbone pourraient d'ici à 2100 atteindre celles de !'Éocène. En ce sens, l'humanité joue Je rôle d'une force géologique, recréant, par la combustion des énergies fossiles, une atmœphère riche en gaz à effet de serre, comme celle qui avait conduit, à l'échelle géologique, à des climats plus chauds. Cette rupture a joué un rôle déterminant dans la recherche d'un terme permettant de caractériser l'impact des activités humaines sur l'environnement global, celui d' Anthropocène. Le réchauffement observé de 0,85 °C depuis la période préindustrielle, de même que la montée de 20 cm du niveau moyen des mers, constituent déjà une rupture par rapport à un climat et un niveau des mers relativement stables au cours des derniers 2 000 ans, voire au-delà. Au cours de la période interglaciaire actuelle, comme au cours de la période interglaciaire précédente, il faut souligner que la température moyenne à la surface du globe n'a pas varié de plus de 2 °C par rapport au climat préindustriel. Cependant, du fait de modifications de la répartition de l'ensoleillement suite aux variations des paramètres de l'orbite terrestre, les régions polaires ont subi pendant ces deux périodes interglaciaires des réchauffements de plusieurs degrés au-dessus du niveau préindustriel. La connaissance des climats passés, à partir du développement d'un ensemble de traceurs dans différentes archives, et l'amélioration des datations, permettent de décortiquer les mécanismes de fonctionnement du climat. Ainsi, elles ont révélé Je rôle de la circulation océanique profonde dans l'occurrence d'instabilités rapides du climat glaciaire, et la vulnérabilité de cette circulation à des afflux brutaux d'eau douce. Elles ont également démontré Je lien étroit entre la position de la zone de convergence intertropicale (et donc les moussons) et les gradients de température entre hémisphères. Enfin, elles démontrent la sensibilité du climat global à des perturbations radiatives, liées aux changements de concentrations en gaz à effet de serre, ou aux modifications de l'albédo terrestre liées à !'extension des calottes de glace pendant les glaciations. Les données paléoc!imatiques constituent autant de bancs d'essai qui montrent la capacité des modèles numériques de climat et de calottes de glace à représenter correctement les grands changements observés, à condition que les causes de ces changements soient bien connues. Ainsi, plusieurs aspects clés de ces changements passés, comme les gradients de température entre continents et océans, ou bien la sensibilité du climat, ou enfin !'amplification polaire sont correctement simulés (figure 7.28). Il reste de nombreux défis pour mieux tirer parti de ces informations sur les climats passés, en particulier à !'échelle régionale, ou bien lors des changements les plus rapides, pour évaluer plus finement les modèles de climat, et mieux comprendre les mécanismes à!' œuvre. Les données paléoclimatiques témoignent de couplages étroits entre climat, compœition atmosphérique en gaz à effet de serre, et niveau des mers. Ainsi, Olaplre 7. Varia/Ions passées ru clmat

les phases chaudes précédentes (Pliocène, dernière période interglaciaire) témoignent de la vulnérabilité des calottes du Groenland et de !'Antarctique à un réchauffement de plusieurs degrés, persistant pendant plusieurs millénaires (figure 7.29). Les résultats de modèles de climat et de calottes polaires sont globalement cohérents avec les données issues de plusieurs périodes passées de haut niveau marin. Ce constat est très préoccupant concernant les conséquences inéluctables à long terme de différents niveaux de réchauffement. Il faut en particulier souligner un seuil concernant la réponse de la calotte du Groenland, situé entre 1et4 °C au-dessus du climat préindustriel. L'état des connaissances concernant d'éventuels seuils ou vitesses de réponse pour la calotte antarctique reste très parcellaire, Je calcul de la figure 7.29 pour l'Antarctique ne reposant que sur une seule étude. En ce sens, la cible choisie par les représentants des gouvernements pour limiter Je réchauffement à 2 °C au-dessus du niveau préindustriel reflète une volonté de contenir l'évolution future du clirnat dans la gamme des variations connues par Hamo sapiens et les écosystèmes marins et terrestres au cours des deux dernières périodes interglaciaires. Le chapitre 8 fait état d'un réchauffement plus important simulé en réponse à une utilisation croissante des énergies fossiles, pouvant atteindre 5 °C d'ici à 2100. Un tel changement constituerait une rupture par rapport à l'amplitude et au rythme des changements climatiques des derniers millions d'années. Il faut souligner que Je réchauffement Je plus rapide connu, celui de la dernière déglaciation, s'est produit avec une vitesse de l'ordre de 1à1,5 °C par 1 000 ans au niveau global, comme on l'a observé sur la figure 7.11.

iEll Conclusion Les derniers 50 ans ont vu la construction de cette connaissance de l'histoire du climat, et sa compréhension, grâce à la synergie entre production de données issues d'archives naturelles, et modélisation numérique. De nombreuses questions restent néanmoins ouvertes, et forment autant de voies de recherches. Citons par exemple les causes exactes des instabilités rapides passées, ou bien les relations entre changement de climat moyen, et changement de la variabilité du climat, aux échelles de temps intra- et inter-annuelles. Un climat plus chaud semble, à l'échelle géologique, plus stable. Cependant, quelques enregistrements paléoclimatiques à haute résolution suggèrent que ce constat est à nuancer. Ainsi, la variance du clirnat antarctique était-elle environ 30 % plus élevée lors de la dernière période interglaciaire, localement plus chaude, qu'aujourd'hui. De même, il reste de nombreux points d'interrogation sur Je rôle exact LE CLIMAT

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i#(dil-iffJ:!i'I Amplification polaire Issue de la syn1hèse de données (oercles pleins) de la température de surface des mers (a) et de l'air au-dessus des continents (b), ainsi que de la moyenne de plusieurs modèles de climat. Les périodes considérées sont le réchauffement d'ici à 2100 dans un scénario de fortes émissions de gaz à effet de serre (modèles seuls, scénario RCP8.5) ; le refroidissement de la demlère glaciation ; les périodes chaudes du Pliooène et de l'Éocène. Les figures de droite Indiquent la moyenne des températures par bandes de latitudes, pour les simulations. Les nombres Indiquent rlntenslté des changements de température moyenne à la surface des océans, des continents, et en moyenne planétaire (océans et continents). Le réchauffement de l'océan Austral et de l'Antarctique est plus prononcé pour les climats passés (réponse sur plusieurs siècles) qu'à l'horizon de 2100, du fait du temps nécessaire pour la réponse du climat dans cette région.

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des variations de l'activité du Soleil et des volcans sur l' évolution du climat au cours des derniers millénaires, de l' échelle globale à l'échelle régionale. Enfin, les climats passés montrent qu' il existe une part déterministe à l'évolution du climat, liée au fonctionnement énergétique du système Terre en réponse à des perturbations radiatives, mais également une part qui est liée à des réorganisations de la circulation océanique et atmosphérique, plus difficiles à prévoir mais dont les caractéristiques peuvent être simulées. L'utilisation de simulations de climats passés et futurs, et leur combinaison avec les données paléoclimatiques démarre depuis peu. Elle pourrait permettre de mieux cerner certaines incertitudes sur l'évolution future du climat à différentes échelles de temps.

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Quel climat demain ? L'étude du climat et les efforts de modélisation pour Je comprendre n'ont pas comme but unique d'enrichir notre connaissance. Ils fournissent des éléments essentiels pour anticiper ce que pourrait être Je climat dans les années, les décennies et les siècles à venir. Le climat futur n'est pas une simple extrapolation du climat actuel. Les activités humaines, et en particulier les émissions de gaz à effet de serre, affectent l'équilibre énergétique de la planète. Les modèles de climat nous aident à en décrypter les différentes implications climatiques et environnementales. La question posée aux climatologues n'est plus de savoir si l'activité humaine réchauffe Je climat, mais plutôt d'en estimer l'amplitude et les conséquences, Jeurs caractéristiques régionales, Jeurs impacts sur les événements extrêmes et les possibles risques de rupture. Ce chapitre s'appuie sur Je travail de synthèse effectué par le GIEC et publié dans son se rapport (septembre 2013). Il aborde successivement les différentes projections, la caractérisation régionale du réchauffement associé et des grandes tendances des modifications du cycle hydrologique. Les incertitudes des projections sont abordées sous l'angle de la sensibilité climatique, c'est-à-dire de la façon dont la température varie en fonction de la perturbation radiative et des rétroactions liées à la réflectivité, la vapeur d'eau et des nuages. Afin de se munir de référence pour caractériser!'ampleur des perturbations envisagées, les résultats sont comparés aux situations climatiques passées et discutés en termes de conséquences environnementales ou sociétales.

Dl Tester un ensemble de possibles : les trajectoires radiatives représentatives La question qui se pose est d'estimer comment risque d'évoluer Je climat en réponse à différentes perturbations externes provenant de l'activité humaine, qui affPMPnt, à 1'iichP11P riigionalP

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tique du système climatique. Il ne s'agit pas de déterminer Je temps qu'il fera à une date précise dans Je futur, mais comment les caractéristiques de la météorologie risquent d'être modifiées pour différentes échéances temporelles. La figure 8.1 illustre ces trajectoires standardisées. Les deux scénarios médians reflètent respectivement une stabilisation à 4,5 W / m2 et 6 W / m2 audessus de la valeur actuelle à partir de 2100. Ils sont encadrés par deux scénarios plus extrêmes. Le scénario Je plus bas RCP2.6 présente un maximum à 3 W / m2 et ensuite décline pour atteindre un surplus de 2,6 W /m2 en 2100. À l'opposé, Je RCP8.5 représente une augmentation de 8,5 W / m2 en 2100: En termes de perturbation radiative, les scénarios RCP4.5 et RCP6 sont très proches des scénarios SRES (de!' anglais Special Repart Emissicm Scenarios) discutés dans les précédents rapports du GIEC. Le scénario Je plus bas (RCP2.6) n'a cependant pas d'équivalent parmi les anciens scénarios. Il préfigure une évolution très sobre en émissions de gaz à effet de serre.

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entre 1850 et 2250 du bilan radiatif de la Terre ou • forçage radlatW », en W/m2 • Les w.leurs pour la période historique (1860-2003) ont été obtenues à partir d'observations. Après 2005, les traits continus représentent les « RepresentaUve ConcentraUon PaJl'Mlays » (RCP : trajectoires représentatives pour la oonoentratlon). Les scénarios SRES utilisés pour les exercices précédents du GIEC sont lnciqués en traits pointillés (GIEC, 2001 et 2007).

Chaplre 8. Quel clmat œmaln?

RCP

i#(dii;ij:f j Succession des traitements : les forçages en 2100 correspondant à la trajectoire イ・ー←ウセ@

tative de oonoentration (RCP), sont d'abord traduits en concentrations et en émissions de gaz à effet de serre, qui sont ensuite Imposés comme oondltions aux llmltes au modèle de climat. Le moteur de révolution sera selon le cas les concentrations (cas général) ou les émissions. Le modèle les utilisera pour calculer les projections à la date cible.

L'amplitude de ces perturbations peut aussi être mise au regard de l'estimation du forçage radiatif estimé à 2,3 W /m2 sur les derniers 60 ans. Cette amplitude peut aussi être comparée, à la différence entre Je dernier maximum glaciaire et la période préindustrielle, estimée à 5 W /m2 ; cette différence est principalement due à la baisse de l'effet de serre et à l'albédo des calottes de glace en période glaciaire. Ces comparaisons indiquent que ces scénarios représentent des perturbations non négligeables du bilan radiatif de la Terre et donc du climat. Et l'évolution actuelle est sur la trajectoire du RCP8.5.

ID Les projections climatiques Les projections climatiques sont réalisées à la suite des simulations historiques décrites dans les chapitres 4 et 6. Les modèles de climat ne sont pas directement forcés par les RCP en W /m2 , qui ne permettraient pas la prise en compte de toutes les interactions en jeu. Il est nécessaire de prendre en compte l'évolution de chacune des composantes du forçage : les concentrations en gaz à effet de serre, les émissions d'aérosols, les distributions d'ozone troposphérique et stratosphérique, les cartes d'évolution de l' utilisation des sols faisant apparaître les modifications liées à !'agriculture et à la déforestation. Ces évolutions ont été LE CLIMAT

estimées à partir de différents modèles intégrés économie-climat. Chacune ne représente qu' une seule des multiples évolutions possibles parmi les combinaisons de gaz à effet de serre, aérosols et utilisation des terres menant au même forçage radiatif. Les modèles ayant différents niveaux de complexité, il n' est pas possible d' adopter exactement la même façon d'implémenter les différents forçages dans les différents modèles; certains négligent des perturbations ayant un faible impact global, comme l'usage des sols. Il existe ainsi une source d'incertitude sur les forçages effectivement introduits dans les modèles, incertitude liée à la façon dont les modèles sont construits (voir plus loin dans ce chapitre). Comme pour les simulations du climat historique, les simulations sont réalisées sous forme d' ensembles (voir chapitre 4), pour tenir compte de l'incertitude des conditions initiales et du bruit inhérent à la nature chaotique de l'atmosphère. Des simulations complémentaires permettent aussi de tracer les trajectoires climatiques en ne tenant compte que de l'un des forçages à des fins d' analyse. 8.2.1

L.:évolution de la température

La figure 8.3 illustre!' évolution de la température globale à partir de!' ensemble de simulations du projet CMJPS.

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lâMll-li :j l É\()lution de la température globale de l'air à 2 m au-dessus de la surface pour la période historique 1850-2005 et, au-delà, pour les différents RCPs. La température de référence (le zéro des changements) est la moyenne sur la période 1986-2005). Les enveloppes sont estimées à partir des réalisations des cifférents modèles du projet lntematlonal CMI PS. Le nombre de modèles considérés pour chaque expérience est Indiqué par les chWfres de la même couleur que les courtles. Les modèles n'ont pas tous effectué toutes les simulations au-delà de 2100, d'où des discontinuités dans l'estimation des barres d'erreur.

On retrouve les grandes tendances connues depuis les premières projections réalisées dans les années 1990. L'augmentation de la température globale de Chaplre 8. Quel clmat œmaln?

la Terre est d' autant plus élevée que la perturbation radiative est importante. Tous les scénarios, saufle RCP2.6, impriment un réchauffement supérieur à 2 °C par rapport à la période 1850-1900. Un réchauffement supérieur à 4 °C en 2100 est simulé pour le RCP8.5. La vitesse du réchauffement est très supérieure à ce que la Terre a connu dans le passé (voir chapitre 7). Le dernier grand réchauffement de l'ordre des ° C a eu lieu lors de la dernière déglaciation sur une période d' environ 10 000 ans. Un réchauffement d' une telle amplitude pourrait se produire au cours de ce siècle pour le scénario 8.5. Seul le RCP2.6 permettrait une stabilisation du réchauffement en dessous de 2 °C. Plus la perturbation radiative est forte, plus l'inertie du système est importante. Elle se traduit par une augmentation additionnelle de température pendant la période de stabilisation après 2100 supérieure à 0,3 ° C/10 ans pour le RCP8.5. L'élargissement de l'enveloppe présentant la dispersion des résultats des différents modèles en fonction du scénario traduit les différences de nombre de simulations entrant dans les estimations statistiques, mais également les différences de sensibilité climatique entre les modèles. La sensibilité climatique mesure l'intensité du réchauffement pour un doublement de CC)i. Elle est estimée à partir de simulations où seule la concentration de COi varie de 1 %/an jusqu' au doublement en 70 ans. Les valeurs vont de 2 à 4,5 °C selon les modèles de l'exercice C:MIPS. 8.2.2

La répartition géographique du réchauffement

Les grandes caractéristiques géographiques du réchauffement simulé sont de mieux en mieux comprises. En particulier, le réchauffement est plus marqué dans les régions polaires (figure 8.4). Cette amplification polaire se retrouve dans de nombreux changements climatiques. Elle est liée à la structure de l'atmosphère dans ces régions et aux rétroactions provenant de la fonte de la neige, de la banquise et de la calotte glaciaire. Ces surfaces blanches réfléchissent le rayonnement solaire et exercent un rôle d'isolant thermique entre l'atmosphère et la surface océanique ou terrestre. Leur fonte permet d' absorber plus de rayonnement solaire en surface, ce qui en renforce le réchauffement et, par effet de rétroaction positive, la fonte. Une autre caractéristique est que les amtinents se réchauffent environ 1,5 fois plus que l'océan. Contrairement aux idées généralement admises, ce n' est pas la différence d'inertie thermique qui est la principale responsable de cet écart, mais les différences d'évaporation entre les deux milieux. En effet, l'inertie thermique n'imprime un retard d'une surface par rapport à l'autre que pendant la période transitoire et non à l'équilibre, alors que ces différences de réchauffement continent/océan sont aussi présentesdanslessimulationsà l'équilibre. L'océan est un LE CLIMAT

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lii!i11Mi:t8 À gauche : modWlcation de température de l'air à 2 m au-dessus du sol, par degré de réchauffement global; à droite : modification des précipitations par degré de réchauffement global. Ces cartes représentent la moyenne d'ensemble des résultats des modèles CMIPS. En pointillés, les zones où tours les modèles sont en bon accord. Les champs sont obtenus en considéra.nt les différences entre les moyennes des années 2081-2100 et 1986-2005. La nonmallsation par la température globale est d'abord effectuée pour chaque modèle avant d'être moyennée. Les moyennes latltudes ainsi que les réglons tropicales humides volent leurs p·écipltations se renforcer alors que les déserts s'étendent. réservoir d' eau que l' on peut considérer comme infini au regard de l' humidité du sol fortement variable d' une région à!' autre. Le flux de chaleur latente émise par évaporation est, pour une grande partie de !'océan, le flux de chaleur qui permet de réguler le bilan thermique de surface; sur le continent, le flux de chaleur sensible joue un rôle plus important. Or, pour une même quantité d' énergie transmise à l' atmosphère, l'évaporation se fait à température plus faible que le transfert de chaleur sensible. Les effets très similaires d'amplification polaire et de différence de réchauffement terre/ océan sont également obtenus pour d' autres climats comme le climat glaciaire (chapitre 7). Grâce aux reconstructions paléoclirnatiques à partir des sédiments marins ou terrestres, il est possible d' indiquer que le ratio simulé entre le continent et l' océan est en bonne adéquation avec les reconstructions de températures obtenues de façon indépendantes à partir des enregistrements marins et terrestres, ce qui donne confiance dans les grandes caractéristiques des projections climatiques.

ID Couplage entre le climat et le cycle du carbone Les interactions entre le climat et le cycle du carbone modulent les changements climatiques et font l' objet de travaux spécifiques. De nombreux modèles Chaplre 8. Quel clmat œmaln?

du système Terre (voir chapitre 4) incorporent une modélisation du cycle du carbone. Ces modèles calculent les différents flux de carbone entre l'atmosphère, les surfaces continentales et l'océan. Dans les simulations classiques comme celles présentées dans la figure 8.2, l'évolution de la concentration des gaz à effet de serre, dont Je dioxyde de carbone, est imposée au cours de la simulation. Pour Je C(h, cette concentration est obtenue à partir de modèles géochimiques qui la calculent à partir des émissions de carbone en faisant l'hypothèse que Je cycle du carbone ne dépend pas du climat. Dans Je cas d'une simulation couplée climat-carbone, les émissions sont directement fournies au modèle de climat, ce qui permet de tenir compte à la fois de l'effet de l'évolution de la concentration en gaz carbonique sur Je climat, mais aussi de l'impact du changement de climat sur Je fonctionnement du cycle du carbone. Toutes les simulations couplées climat-carbone réalisées à ce jour indiquent que Je réchauffement climatique inhibe en partie Je puits de carbone par les océans et les continents, et qu'il y a donc plus de gaz carbonique quis' accumule dans l'atrnœphère que ce que l'on avait anticipé jusque-là. Ainsi pour RCP8.5 qui conduit à une augmentation de température d'un peu plus de 4 °C en 2100, ce couplage induit un excès d'environ 50 ppm de C02 dans!' atmosphère en 2100 et un réchauffement supplémentaire. Ces estimations permettent de percevoir l'incertitude provenant du changement de comportement du cycle du carbone avec Je réchauffement climatique. Elles montrent aussi une rétroaction pœitive entre Je climat et Je cycle du carbone qui se traduit aussi par un réchauffement plus important du climat dans ces simulations d'environ 5 °C. Au-delà de la mise en évidence de cette rétroaction positive, la large gamme de résultats obtenus par les différents modèles indique qu'il y a encore de nombreuses améliorations nécessaires pour représenter correctement Je cycle du carbone et son co11plagp avP.C lPS mocli'>lPs clP climat.

Ces modèles couplés climat-carbone peuvent aussi être utilisés pour mieux cerner les émissions fossiles anthropiques qui peuvent conduire à une évolution du taux de C(h atmosphérique fixé. Les émissions anthropiques compatibles ont ainsi pu être estimées à partir des projections présentées dans la figure 8.5. Pour tous les scénariœ, il faut réduire les émissions pour pouvoir stabiliser les perturbations radiatives, et ce, d'autant plus fortement que les stabilisations sont importantes. Pour Je RCP2.6, les émissions compatibles deviennent négatives après 2050, ce qui implique qu'il faut pouvoir enlever du carbone de l'atmosphère pour pouvoir rester dans l'épure de la perturbation radiative imposée pour ce scénario. Ces résultats permettent d'anticiper sur quelle trajectoire se placer, si l'on souhaite se maintenir en dessous des 2 ° C, qui font l'objet des négociations internationales.

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!i!i!IMf:Jil Estimation des émissions fossiles en mllllarcs de tonnes (Pg) de cartlone par an, compatibles avec les perturtlations radiatives des différents RCP.

ID Incertitudes sur l'amplitude du réchauffement simulé Les simulations réalisées avec des modèles différents permettent d' estimer!' amplitude des principes rétroactions et Jeurs incertitudes provenant de la façon dont elles sont représentées dans les modèles. Il est ainsi possible d'estimer que Je réchauffement induit au moment du doublement de la concentration en C(h dans!' atmœphère dans les simulations où la teneur en C02 atmosphérique est augmentée de 1 % par an est d' environ 2 °C (figure 8.6). Il peut se décomposer en différents termes. La réponse directe au C(h est d'environ 1,2 °C. Elle est renforcée pratiquement pour moitié par l'effet de serre additionnel résultant du changement de la répartition de la température et du contenu en vapeur d' eau de l'atmosphère. La fonte des surfaces englacées en diminuant la réflectivité de la surface renforce Je réchauffement, surtout aux hautes latitudes et sur les continents de l'hémisphère nord, et intervient pour quelques dixièmes de degrés à !'échelle globale. Dans les périodes transitoires, une partie de la chaleur est absorbée par l'océan, ce qui amortit Je réchauffement de l'atmosphère d'environ 0,4 °C. Enfin, les changements de couverture nuageuse ont aussi tendance à amplifier Je réchauffement d' environ 0,5 °C. 8.4.1

Réponse directe au C02

La réponse directe au CO, est bien modélisée, ce qui explique la faible dispersion entre les modèles (figure 8.6, droite).

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