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Qu’est-ce qu’un dieu ? Et d’abord qu’est-ce que le divin ? À ces interrogations l’auteur entend apporter des éléments de réponse objectifs, que l’Histoire et la littérature grecques, l’archéologie, l’épigraphie, la philosophie et même la linguistique offrent à l’observateur attentif. Mais aussi les dieux apparaissent dans ce livre sous un jour différent de celui auquel nous ont habitués les mythologies classiques, tandis que les génies retrouvent la place que l’on aurait toujours dû leur laisser. Et s’éclairent les Mystères, d’Éleusis ou d’ailleurs, comme l’enseignement dit d’Orphée ou l’idée que l’on se fit d’une vie après la vie.
Gérard Lambin a longtemps enseigné à l’Université de Rennes 2. Il a déjà publié dix ouvrages en rapport avec la poésie grecque, et notamment l’œuvre homérique.
Gérard Lambin ASPECTS DU DIVIN DANS LA GRÈCE ANTIQUE
ASPECTS DU DIVIN DANS LA GRÈCE ANTIQUE
Gérard Lambin
ASPECTS DU DIVIN DANS LA GRÈCE ANTIQUE
Illustration de couverture : © wajan - 123rf.com
ISBN : 978-2-343-22228-8
26 €
9 782343 222288
Série Universitaire
Religions et Spiritualité fondée par Richard Moreau, Professeur émérite à l’Université de Paris XII dirigée par Gilles-Marie Moreau et André Thayse, Professeur émérite à l’Université de Louvain La collection Religions et Spiritualité rassemble divers types d’ouvrages : des études et des débats sur les grandes questions fondamentales qui se posent à l’homme, des biographies, des textes inédits ou des réimpressions de livres anciens ou méconnus. La collection est ouverte à toutes les grandes religions et au dialogue inter-religieux. Dernières parutions Pierre LAFFON DE MAZIÈRES, Le droit des relations ÉgliseÉtats chez Louis de Naurois et Henri Wagnon, 2020. Jean STERN, Notre-Dame de la Salette et son message authentique. Un discernement amorcé par le saint curé d’Ars, 2020. Jean-François FYOT, Guillaume de Saint-Thierry pour nous aujourd’hui, Actualité des Pères cisterciens, 2020. Pierre Holvoët, Les Évangiles bibliques de l’enfance de Jésus, 2020. Roger GIL, Hilaire de Poitiers et l’humanité souffrante du Christ, 2020.
Ngoc Tiem TRAN, L’Homo sapiens et l’émergence de la conscience. L’émergence de la conscience émotive, cognitive et spirituelle, 2020. Stanislas LONGONGA, Initiation à la lecture du Nouveau Testament, 2020. Dominique LE TOURNEAU, Jeanne d’Arc et l’éveil du sentiment patriotique royal / national, 2020. Christine CHAILLOT, L’Église assyrienne de l’Orient. Histoire bimillénaire et géographie mondiale, 2020.
ASPECTS DU DIVIN DANS LA GRÈCE ANTIQUE
© L’HARMATTAN, 2021 5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr/ ISBN : 978-2-343-22228-8 EAN : 9782343222288
Gérard Lambin
Aspects du divin dans la Grèce antique
DU MÊME AUTEUR La Chanson grecque dans l’Antiquité, Paris (CNRS Éditions), 1992. Homère le Compagnon, Paris (CNRS Éditions), 1995 (réimpression en 1998). L’Épopée. Genèse d’un genre littéraire en Grèce, Presses universitaires de Rennes, 1999. ANACRÉON, Fragments et imitations, Presses universitaires de Rennes, 2002. L’Alexandra de Lycophron, Presses universitaires de Rennes, 2005. ARISTOTE, La Poétique. Introduction, traduction, notes, étude, Paris (L’Harmattan), 2008. François HÉDELIN, abbé d’AUBIGNAC, Conjectures académiques, ou Dissertation sur l’Iliade. Édition critique, avec une introduction, des notes et une conclusion, Paris (Honoré Champion), 2010. Le Roman d’Homère. Comment naît un poète, Presses universitaires de Rennes, 2011. Le Chanteur Hésiode, Presses universitaires de Rennes, 2012. TIMOTHÉE DE MILET. Le poète et le musicien, Presses universitaires de Rennes, 2013.
Au cours de ma visite, en observant vos monuments religieux, j’ai même trouvé un autel portant cette inscription : « Au dieu inconnu ». Saint Paul.
I INTRODUCTION
On ne saurait dire le nombre des ouvrages consacrés depuis l’Antiquité à la religion grecque ou à la mythologie. Et pourtant les travaux des savants les plus éminents, les études les plus neuves, n’ont pas dissipé un certain embarras. Comment un homme à l’esprit aussi profond que Pindare a-t-il pu reprendre tant d’« histoires » — les mythes ne sont pas autre chose —, en refusant seulement d’admettre celles qui étaient « ornées d’une chamarrure de mensonges1 » ? Comment le Socrate du Phèdre peutil faire semblant de croire ce que l’on dit à propos d’un enlèvement divin2 ? Comment un savant nourri de philosophie, un polygraphe de l’envergure de Plutarque, a-t-il encore pu devenir prêtre d’Apollon, à Delphes, au temps où le « grand Pan » était déjà mort3 ? Et l’on s’étonne de la résistance du paganisme, qui, dans une région telle que le Magne (dans le sud du Péloponnèse), ne s’est effacé devant le christianisme qu’à partir du IXe siècle, pour disparaître seulement au XIe. Autre fait remarquable, cette religion morte a continué à vivre ! La paideia byzantine a laissé une large place aux héros et dieux du paganisme, dont la connaissance restait un marqueur social, indiquant une éducation Olympiques, I, v. 29. Platon, Phèdre, 229 b - 230 a. 3 Plutarque, Sur la disparition des oracles, 419 a-e. 1 2
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ASPECTS DU DIVIN DANS LA GRÈCE ANTIQUE vraiment hellénique. Et ces dieux, ces héros, romanisés, n’ont jamais été complètement oubliés en Occident, où les arts plastiques et la musique, aussi bien que la littérature, leur ont donné une seconde vie. Mais le divin des dieux, la divinité des divinités ? Cette question, la seule réellement importante, est passée au second plan, quand elle n’a pas été oubliée : Walter F. Otto, après avoir noté que l’on se borne habituellement à parler des représentations religieuses, en oubliant « l’être du divin », ajoute avec raison que, « sur la question de la teneur ontologique de cette foi », même la recherche récente passe « avec une étonnante légèreté »4. Posons donc la question : qu’était-ce qu’un dieu pour les Grecs ? Le mot « dieu » Le terme usuel en grec pour désigner un dieu est, comme on sait, θεός/théos, bien attesté depuis l’époque mycénienne jusqu’à nos jours. Et l’on ne peut guère douter que θεός soit à rapprocher de θέσπις (« d’origine divine »), θέσκελος (« merveilleux, prodigieux »), θεσπέσιος (« extraordinaire, prodigieux, divin »), θέσφατος (« annoncé par les dieux, fixé par les dieux »), où apparaît le thème sigmatique retrouvé dans l’arménien dikc (« dieux »), de *dhēs-es, ainsi qu’en phrygien5 et dans le latin festus (« de fête »), feriae < fēsiae (« fêtes »), et fānum