Un commentaire historique des Poroi de Xénophon


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UN COMMENTAIRE HISTORIQUE DES POROI DE XÉNOPHON

CENTRE

DE RECHERCHES D'HISTOIRE ET DE PHILOLOGIE de la IV11 Section de l'École pratique des Hautes Études

III

HAUTES

ÉTUDES DU MONDE GRÉCO-ROMAIN 8

PHILIPPE GAUTHIER Directeur d'études à /~des Hautes Études Professeur à l'Université de Na11q Il

UN

COMMENTAIRE HISTORIQUE DES POROI DE XÉNOPHON

Ouvrage publié a•-ec lt• concours du Centre national de la Recherclœ scientifique

GENÈVE • PARIS LIBRAIRIE DROZ 11, rue Massot 1976

C 1976 by Librairie Droz

À Édouard Will

TABLE DES MATIÈRES

Avant-propos . Liste des principales abréviations

IX XIII

Introduction I. L'auteur et la date II. Le titre: poroi et prosodoi 111. Le but: trophè et misthos

1

7 20

Commentaire Chapitre I •Xénophon et l'impérialisme; la notion de dikaion •Xénophon partisan de la cité ouverte? . •Xénophon et l'Attique: vue d'ensemble . Chapitre Il . •Xénophon et les métèques: vue d'ensemble Chapitre III . •L'eisphora de Xénophon: impôt. contribution volon• taire ou emprunt? .

Chapitre IV . • Le jugement de Xénophon sur la. richesse des mines . •Xénophon, la concurrence et le marché . • La valeur du projet minier de Xénophon •Xénophon et la défense du Laurion . •Le témoignage de Xénophon sur l'éphébie Chapitre V . • Athènes en temps de paix attire tous les hommes: bilan ou rêve? . •Xénophon et l'hégémonie pacifique . Chapitre VI . • Xénophon, le programme des Poroi et les oracles .

35 42 52 52 56 73 75 97 110 119 129 164 185 193 196 204 212 216 220

Appendices

1. Xénophon et ses contemporains: la portée des Poroi II. Xénophon devant Je « tribunal de l'Histoire »: Athènes et Rhodes

223 232

TABLE DES MATIÈRES

VIII

Ill. Xénophon aujourd'hui: le témoin d'un monde et d'un idéal . IV. Aperçu de la fortune critique des Poroi .

Addenda Indices .

238 254 267 269

AVANT.PROPOS Cet ouvrage a été entrepris en 1965, sur une suggestion de M. &iouard Will. A cette date. les Poroi n'avaient jamais fait l'objet d'un commentaire historique développé. L'édition procurée par J.H. Thiel (Amsterdam, 1922), point d'aboutissement d'un siècle de recherches philologiques, off rait une base solide. Les nombreuses études de détail consacrées aux Poroi, surtout en Allemagne, appelaient des mises au point ou des discussions, que K. von der Lieck, dans un bref ouvrage de jeunesse (Cologne, 1933), avait à peine entrevues ou amorcées. Mon travail était fort avancé lorsque j'appris, en 1971, qu'une édition commentée venait de paraitre en Italie, due aux soins de G. Bodei Giglioni. Saisi d'abord par le découragement, je fus rassuré ensuite en constatant que l'ouvrage que j'achevais ne ferait pas double emploi avec celui de l'éditrice italienne. G. Bodei Giglioni a composé une copieuse introduction historique aux Poroi, dont le texte est édité et traduit ensuite; pour ma part, j'ai rédigé un commentaire détaillé, suivant le texte ligne après ligne, un peu à la manière des commentaires d'outre-Manche (et c'est seulement pour la commodité du lecteur que je me suis décidé à reproduire, au fur et à mesure du commentaire, le texte établi par Thiel, en indiquant les points où je me séparais de celui•ci). Quant au fond, le lecteur verra chemin faisant que je suis en désaccord sur des points essentiels avec l'éditrice italienne. Ce qu'il me faut dire dès à présent, c'est que la perspective d'ensemble dans laquelle G. Bodei Giglioni a situé les Poroi me paraît fausse. Les brèves remarques qui suivent, en contribuant à expliquer ce jugement négatif, pourront servir d'avantpropos. Quiconque s'apprête aujourd'hui à commenter les Poroi devrait dire d'abord, me semble•t-il, ce qu'il pense du paradoxe suivant. Xénophon ne passe pas pour un esprit imaginatif ni pour un penseur profond. On le dit terne, quelquefois ennuyeux, souvent mesquin. Les historiens de la littérature répètent volontiers qu'il incarne Je type même du Grec moyen, ajoutant, il est vrai, quïl est par là même un très précieux témoin. Or voici qu'en écrivant les Poroi, Xénophon se métamorphose soudain, aux yeux des modernes s'entend, en un penseur original et même un peu fou. Le terne chroniqueur des Helléniques est loin: voici un utopiste, « qui fait preuve d'une grande audace intellectuelle», ou encore « un expert en économie» (G. Bodei). Négligeons la réponse

X

AVANT-PROPOS

consistant à dire que Xénophon n'est pas l'auteur des Poroi: la parade est vaine. Reste la question: est-il légitime d'opposer les Poroi à tout le reste de l'œuvre de Xénophon? Faut-il. pour espérer comprendre l'auteur de cet opuscule. oublier ce qu'on sait de Xénophon? Peut-être invoquera-t-on La Fontaine: Quel esprit ne bat la campagne? Qui ne fait châteaux en Espagne? Picrochole, Pyrrhus, la laitière, enfin tous. Autant les sages que les fous! Chacun songe en veillant: il n ·est rien de plus doux.

Mais précisément, les rêves de Perrette sont aussi prosaïques que logiques; ils nous font connaître. autant ou mieux qu'un tableau de sa vie quotidienne, les soucis, les espoirs, bref la vie de la laitière. De même, il faut croire que le médiocre Xénophon, quand il faisait des projets d'avenir pour Athènes, restait lui-même, c'est-à-dire « un Grec moyen». J'estime donc que le paradoxe rappelé plus haut est une création des modernes. due principalement à deux causes. La première est la volonté des économistes ou des historiens de l'économie de se trouver des ancêtres grecs. Les Poroi furent annexés ainsi. bien à tort, à la littérature d'économie politique. On crut y apercevoir « les premières expressions de la pensée économique occidentale» (G. Bodei); on s'émerveilla de voir que l'auteur du traité connaissait la loi de l'offre et de la demande. se souciait des variations du prix du blé ou de la circulation de la monnaie. Ériger des banalités en découvertes, ce n'est pas très grave. Ce qui l'est davantage, à mon avis, c'est de prendre les observations d'ordre économique faites par Xénophon ici et là pour des preuves d'intentions économiques de l'auteur ou pour des expressions d'une analyse, voire d'une théorie économique. Je suis convaincu et j'espère convaincre le lecteur que Xénophon, en écrivant les Poroi, ne songeait nullement à faire de l'économie politique. Le but n'était pas la renaissance économique ni l'augmentation des forces productives de !'Attique. Le but était d'ordre politique, les moyens étaient d'ordre fiscal. La fiscalité s'exerçant principalement sur les revenus tirés des domaines publics ou des échanges, il était fatal que Xénophon fit des observations ou des constatations relatives à ce que nous appelons la vie économique, mais rien de plus. L'autre cause d'erreur est dans l'appréciation de «l'utopie». Il est vrai quïl y a quelque chose d'excessif, voire de fantastique, dans certaines propositions des Poroi. Mais, tout le monde en conviendra, Xénophon n'édifie pas un système ex nihilo; pour lui. !'Athènes idéale (qui n'est

XI

A V ANT-PROPOS

d'ailleurs pas la cité idéale) n'est pas à construire, mais à reconstruire (car elle existait au ye siècle et pourrait, selon lui, exister à nouveau bientôt). Xénophon se borne à développer sans génie, à prolonger jusqu'à l'absurde les tendances et les institutions d'une démocratie de son temps. Aussi son traité est-il comme un miroir, qui nous fait voir tantôt la cité concrète de 355, tantôt la cité future conforme à ses projets. Entre l'une et l'autre il n'y a pas de rupture logique; et ron pourrait soutenir que la seconde est aussi intéressante pour nous que la première. Car c'est au moment où le miroir devient grossissant (là est le caractère fantastique) que nous découvrons des traits ignorés ou mal connus. Ces remarques indiquent dans quel esprit j'ai abordé le commentaire des Poroi. Je n'ai pas vu dans l'auteur de ce traité un économiste, qu'il faudrait juger d'après les sciences économiques modernes, ni un utopiste, auquel il conviendrait de donner tantôt un brevet d'idéalisme, tantôt une camisole de force. J'ai vu en Xénophon un témoin, honnête et estimable, le digne frère de l'auteur de l'Économique, des Mémorables et de la République des Lacédémoniens; j'ai donc essayé de recueillir et de déchiffrer les renseignements qu'il nous livre sur les institutions, l'économie et la société de la cité athénienne, voire sur la mentalité antique. Ce faisant, je ne doute pas d'avoir commis des erreurs et d'avoir négligé maint détail. D'autres. plus perspicaces ou mieux préparés. y verront plus clair quelque jour. J'espère du moins qu'une orientation nouvelle aura été donnée ainsi à l'étude des Poroi, selon le vœu exprimé naguère par M. 1. Finley, auquel je rends hommage au seuil de cette étude. J"ai connu trop tard son Ancient Economy pour en faire mon profit (f ai ajouté au dernier moment quelques renvois dans les notes); mais c'est souvent en méditant ses études antérieures sur l'économie grecque que j'ai compris ou cru comprendre certaines notations, à première vue étranges, des Poroi. Ma reconnaissance va également à M. Louis Robert, qui a bien voulu lire et annoter mon manuscrit, et à Paul Goukowsky. dont les remarques sur le texte grec m'ont été précieuses. Je dédie cette étude à Édouard Will: il y retrouvera, je pense. le souvenir de fréquentes et bonnes discussions et surtout. je l'espère. un témoignage de reconnaissance et d'amitié. Nancy. janvier 1975.

LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS ANDRËAD~ = A. M. Andréadès, A History of Greek Public Finance, éd. traduite du grec, revue et augmentée (Cambridge, Massachusetts. 1933). ARDAILLON= E. Ardaillon. Les mines du Laurion dons /'Antiquité (Paris. 1897). BoDEI = G. Bodci Giglioni. Xenophontis De Vectigalibus. introd., texte et trad. (Florence, 1970). 8oECKH = A. Bocckh,Die Staatshaushaltung der Athener 1, 3• éd. par M. Fraenkel ( Berlin. 1886). BoLKESTEIN= H. Bolkcstein. Wohltiitigkeit und Armenpflege im vorchristlichen Altertum (Utrecht. 1939). = H. R. Breitenbach, s. i•. Xenophon, dans PW IX A 2 ( 1967). BREITENBACH 1569-1928. Bull. épigr. = J. et L. Robert. Bulletin épigraphique (paraissant dans la Rei11e des études grecques, Paris). Le chiffre qui suit la référence de l'année renvoie au numéro du bulletin. C .\WKWELL= G. L. Cawkwell, Eubulus, dans Journal of hell. Studies 83 (1963), 47-67. CHAMBRY= E. Chambry, Xénophon, Revenus, trad. et notes (avec d'autres œuvres de Xénophon). coll. Garnier (Paris. 1958). CORET= C. G. Cobet. Nm•ae lectiones quibus s, 6 volumes publiés par L. Robert (Paris. 1938-1968). HOLZAPFEL= L. Holzapfel. Ober die Abfarsungs:eit der dem X,•nophon :ugL'schriebenen Poroi, dans Philologus 41 (1882). 242-269. IG = /nscriptione.î graecae (Berlin). LAUFFER = S. Laufîer, Die Bergwerkssklaven vCJnLaureion. dans les Abhandlungen der ... Akademie der Wi.uenschaften und der Literatur im Main:. n° 11 et 12 (Wiesbaden, 1955et 1956). MARCHANT= E. C. Marchant, Xenophon. Scripta minora. introd .. texte et trad., coll. Loeb (Londres, 1925). PôHLMANN= R. von Pôhlmann, Geschichte der so:ialen Frage und des So:ialismu.ç in ckr antiken Weil, 3c éd. en deux volumes. avec un appendice dû à F. Oertel (Munich, 1925). PW = Pauly-Wissowa, Real-Enqclopiidie der Altertum.rYris.renschaft(Stuttgart. 1892 et années suivantes). ROHL = F. Rühl, Xenophon, Scripta minora, introd. et texte, coll. Teubner (Leipzig. 1912).

XIV

LISTE DES PRINCIPALES

ABRÉVIATIONS

SCHARR= E. Scharr. Xenophons Sraars- und Gesel/Jcht{/isid(•a/ und sânt· Zei1 (diss. Halle, 1919). SCHWAHN= W. Schwahn. Die xenophontische Poroi und die arhenùche Industrie im vierten Jahrhunderr. dans Rhein. Museum 80 ( 1931). 252-278. Sy/1.3 = W. Dittenberger. Sylloge inscriptionum gra ttlç t}ouÀflç22 • Notons encore que si le poros est bien toujours, en ces circonstances, un fonds alimenté par les revenus, il peut arriver d'une part qu'il serve au remboursement d'avances faites par les particuliers (en sorte que le poros-fonds vient en conclusion d'un poros-moyen d'argent: cf. l'inscription de Kymè d'Éolide citée supra à la note 19, avec l'interprétation de J. et L. Robert. Bull. épigr. 1973, 370). et d'autre part qu'il soit encore insuffisant. tel magistrat ou tel particulier devant apporter le complément 23 .

••• Revenons à Xénophon. La lecture de son ouvrage rend manifeste que les poroi auxquels il songe sont destinés à être la source de nouvelles prosodoi, ou à être responsables de l'augmentation des prosodoi existantes 24 . De là des formules comme prosodous paréchesthai (1, 2) ou 111

Op. cil .. 89-90. Dans un décret (incomplet) de Kymè d'Éolide: H. W. Pleket. Texls on tht· Emn. Hist. nfthe Gre,·lc World (Textus minores XXXI. Leyde, 1964), n° 38, 1. 7: cf. aussi 1. 3; voir lïnterprétation décisive de J. et L. Robert, Bull. éptgr. 1973, 370. 20 A Colophon: A. Plassart et Ch. Picard, Bull. corr. hell. 1913, 237. 21 A Mylasa: A. W. Persson, Bull. corr. l,('1/. 1922, 397; sur l'emploi d'apotasscin, cf. J. et L. Robert. Hellenica IX (1950), IS-16; L. Robert. Nou\'elles insc. d(' Sardes. 17. 22 A Athènes: /G IP. 674, li. 20-21. 23 Cf. L. Robert. Et. anat. (Paris. 1937). 347. 24 Rappelons que dans d'autres œuvres Xénophon emploie poros au sens de v 1toÀÀ.ii'>v. Comment des pénètes avaient-ils pu être désignés comme triérarques? Puisque la distance entre pauvreté et richesse est réduite et que la roue de la fortune tourne vite (surtout au IVe siècle), il est facile de comprendre que tel plousios puisse devenir pénès et réciproquement. Ce qui peUt surprendre (et scandaliser) un contemporain de X., ce n'est donc pas qu'un pauvre mais qu'un indigent devienne riche: tK 1ttroxoc; 1tÀ.oootoç (Lysias XXX, 27; Dém. 111, 29; Prooimion Lill, 3). Ainsi, le ta8at, ce n'est pas exactement « se nourrir» (comme serait tptq>ta8m, cf. Écon. V, 13), mais plutôt «assurer son entretien», cf. par exemple Mém. Il, 7,6: Meyaptrov o{ rcÀ.&îato1àrcô tçroµ16orco1iw; 6tatpéq>ovtat. Le substantif sous-entendu dans t.1e tf\ç éautéov est naturellement rc6À.troç,contenu dans le sujet o{ rcoÀîtm (cf. infra V, 1: t1e rc6À.troç).Il faut noter encore qu'on n'a pas àno mais t.1e tf\ç tautéov. L'idée n'est donc pas d'assurer l'entretien des citoyens ..iyriTltà xptiµata lxouaa, et plus loin füà tô yflç anaviÇ&1v àya9ilç (III, 2,18); cf. Antiphon (frg. 1. 2 Gemet) à propos de Samothrace: tà µtv xp1ia1µa Kai tpycia1µa µttepà aùtflç €Otl.

ônroç ôt yv(J}(J8'fl, ott àÀ118tç TOüto 1tprotov Àr:yro,ô111y11croµa1 t'lV q>ocrtvtflç 'AtttKflç. X. ne songe pas à la valeur et à la répartition des terres cultivables (cf. au contraire Écon. XVI. 1: ttiv q,001vtflç yflç), mais aux particularités climatiques et géologiques du territoire, fondamentales pour les prosodoi.

3. ÛÙICOÜV tO µÈVtàÇ ropaç tv9aôt 1tPQ.Ottq>xaÀEii 8a.À1tecr1v èvtuyxa.voucrtv· Jt(l)tÉpotçii 'V'JXECJtv Il y a un chiasme. X. présente deux affirmations complémentaires: 1) Athènes est à peu près au centre de la Grèce, 2) laquelle est au centre du monde habité. Puis il justifie cette affirmation-ci (argument climatique), avant de revenir à la première (argument par la navigation). Je suivrai l'ordre de X. La Grèce au centre de l'oikouménè: cf. Aristote, Polit. VII, 1327 b 29-30, cité par G. Bodei, Lm-uv. Chez le philosophe l'affirmation n'est pas justifiée, elle est seulement une pièce de sa théorie de l'esprit des peuples d'après les climats (cf. Montesquieu). Chez X. au contraire, l"affirmation reçoit sa justification de constatations climatiques faites ailleurs: « plus on s'éloigne d'Athènes, plus on rencontre des froids et des chaleurs difficiles à supporter». L'argument paraît singulier, qui fait conclure de la modération du climat au centre géographique. Idée analogue dans Cyr. VIII, 6,21-2, à propos des possessions de Cyrus: ccson empire avait pour limites à l'est l'Érythrée, au nord le PontEuxin, à l'ouest Chypre et l'Égypte, au sud l'Éthiopie, régions dont les extrémités sont presque inhabitables soit à cause de la chaleur, soit à cause du froid . . . Cyrus, lui, tv µtaq> to6tcov t'lV 6imtav K0tT10-ciJ16VOÇ, résidait . . . soit à Babylone, soit à Suse ou à Ecbatane». Or cette conception d'un «milieu» géographique modéré est inséparable de la représentation de la terre sous la forme d'un disque, dont la Méditerranée forme le centre (un méson tempéré), et dont les extrémités nord et sud sont inhabitables à cause de la chaleur ou du froid. X. est ici, comme Hippocrate, un héritier de la science ionienne 1 5 • is Cf. H. Berger, Geschichte der wissenschaftlichen Erdkundt> der Griechen1 (Leipzig.

1903), 77-84. et, sur X. en particulier, 70 et 120 (Berger cite C_vr. VIII. 6. mais non les Poroi), 225 (X. et la science ionienne).

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LES ATOUTS DE L'ATTIQUE

Athènes au centre de la Grèce: Thiel renvoie à lsoc. IV (Panég.). 42 (èµ1t6p1ov tv µtcrq> tflç ·E,J,.aôoç tôv nttpmci) et à X. lui-même (Hel/. VII. J.3 - moins net). L ·accord entre Isocrate et X. est à noter: pour l'un comme pour rautre. qui écrivent à un moment (380 et 355) où l'archè est dissoute. la situation du Pirée suffit à expliquer sa prospérité. et « la surabondance des produits qu'on y trouve à acheter ►>. Au siècle précédent. les mêmes phénomènes étaient expliqués (au moins partiellement) par la puissance athénienne (cf. Thue. Il, 38.2. ôtà µtyt9oç tfjç 1t6À.Eroç; Ps-X. II. 7, ôtà tT)VàpX,T)V tf1ç 9aÀ.at-r'lÇ).Cf. Appendice Il.

61t6cro1 t' èiv aù PouÀ.rt0rocnv à1t' ècrxatrov ti)ç 'EÀ.À.aôoç èn" ëcrxata àqnKtcr8a1, navtEÇ oùtot rocr1tEpKÛKÂ.out6pvov tàç 'A811vaç 111tapa1tÀtoucr1v111taptpxovta1. La situation centrale d'Athènes est ensuite expliquée et illustrée par une image empruntée à la géométrie. Le tornos est le compas (en bois) utilisé par les architectes ou par les charpentiers pour tracer des cercles 16 • La Méditerranée et le monde grec sont donc comparés à un immense cercle, dont Athènes occuperait le centre. Tout voyageur qui se rend « d'une extrémité à l'autre» doit suivre un diamètre. donc passer par Athènes. Compte tenu de l'amplification métaphorique d'une part et des réserves de X. d'autre part (cf. «à peu près au milieu». «passer près d'Athènes»). l'affirmation est recevable. et les écoliers européens qui voient toujours le nom d'Athènes planté en plein milieu des cartes du monde grec n'y contrediront point. Cependant, l'affirmation a une portée beaucoup moins grande que ne le suggère X. Celui-ci, raisonnant toujours en termes de commerce (source de prosodoi), croit que d'avoir démontré la position centrale d'Athènes suffit pour conclure à la prééminence des ports athéniens, points de passage obligés. Ce faisant, il admet implicitement et de manière simpliste que les communautés placées « aux extrémités» 1) ont un égal besoin de communiquer entre elles, 2) sont, en ce qui concerne les échanges, des partenaires d'importance comparable. Dès lors, le «centre» est privilégié. En fait, les exigences et les variations du trafic commercial n'ont cure d'un tel schéma. Et ce qui était encore crédible en 355 ne le sera plus trente ans plus tard, la fondation d'Alexandrie et du royaume lagide accélérant l'essor de Rhodes. 16

Cf. notamment A. Orlandos. Les matériaux de construction (cité supra). t. 1, 44 et note 7, et t. Il, 65 et note 2 (références).

1, 7

51

7. Kai µ11v où 1t&pipput6ç yc oùoa ôµcoç roo1tcp vftooç 1tdo1v àvtµotç 1tpooayctai t& Â.Etat · àµq,t0aÂ.aoooç yap èo'tt. Il est clair que X. songe ici seulement aux avantages commerciaux: r Attique n'est pas une île, mais elle est amphitha/assos et jouit donc, à l'égard des vents, des mêmes avantages qu'une île. Il n'y a pas à rapprocher (comme font Thiel ad /oc. et G. Bodei, Lv) les passages de Thue. I, 143,5 et de Ps-X. 11, 15, où les avantages militaires de l'insularité sont soulignés. C'est une autre question.

Kai .Katà yftv 6t noÂ.Â.à6txetat tµ1t6p1a · ii1tttpoç yap èO"tlV. « Par voie de terre aussi (Athènes) reçoit beaucoup de marchandises».

Il faut laisser Je neutre pluriel tµ1t6p1a, transmis par les manuscrits (èµ1tôp1a M. tµn6p&ta - forme plus tardive - ABC), justement maintenu par Dindorf et cité par Liddell-Scott s. v. (« merchandise » ). Thiel, Marchant, G. Bodei corrigent en tµnopiq (« riceve, grazie al commercio, moiti beni anche per via di terra», G. Bodei), ce qui donne à la phrase de X. une tournure insolite. Thiel justifiait sa correction ainsi: oooiv ai Kai aù-cai 1tÂ.eiotovà1tt1ouo1 têbv J3apJ3aprov. « Apparaissent des préoccupations de caractère militaire» (Bodei, Lv ). Non, ou secondairement. X. considère toujours l'aspect commercial. Le choix des termes le montre: « tandis qu'à la plupart des cités les Barbares, par leur voisinage, procurent des ennuis, Athènes au contraire ... ». S'il s'agissait de la sécurité de la cité athénienne, comparée à celle des cités grecques en général, le propos serait exagéré, voire ridicule. Car bien des cités du Péloponnèse, de Béotie ou de Phocide, sans parler des insulaires, seraient aussi éloignées des Barbares, donc aussi «en sécurité» qu'Athènes. La proposition n'aurait aucun sens. Mais X., parlant de « la plupart des cités», ne pense qu'aux grandes cités commerçantes, rivales éventuelles d'Athènes. Dès lors, l'affirmation est vraie et elle acquiert tout son sens. Il suffit de penser à Byi.ance

52

LES REVENUS DU TERRITOIRE

et aux soucis que lui procure le voisinage des Thraces (Polybe IV, 38, 1 et 45), aux cités du littoral thrace de la mer Égée (dont les Athéniens connaissent bien les problèmes depuis le v• siècle, et à l'époque même où X. compose les Poroi, cf. les affaires de Chersonèse de Thrace), aux cités du Pont-Euxin, dont la prospérité commerciale peut être remise en question par les incursions des Scythes (cf. par ex. Dém. XXXIV, C. Phormion, 8 à propos des cités du Bosphore cimmérien), voire à certaines cités de la côte d'Asie mineure (cf. par ex. la convention entre Érythrées et le tyran d'Atamée Henneias, conclue vers 350 [H. Bengtson, Staatsvertriige II, 262], qui fait entrevoir les craintes qu'inspire à une cité ionienne le voisinage et l'hostilité des Perses). • X.

PARTISAN DE LA

« CITt

OUVERTE»?

G. Bodei (p. LV-LVI) conclut le commentaire du chap. 1 par les réflexions suivantes: « Dans les querelles pour savoir si la proximité de la mer exerçait ou non une influence nocive sur la cité [querelles vives au IV• siècle, indique-t-elle en note, comme en témoigne Aristote. Polit. VII, 1327 a], X. prend parti résolument en faveur de la deuxième solution. La mer non seulement n'est pas une source de corruption, mais encore peut, dans le cadre global des propositions des Poroi, contribuer au renforcement des vertus de justice dans les rapports internationaux». Et d'opposer X. à Platon (cf. notamment Lois IV, 705 a). En face d'une conception qui prône, conformément à un idéal ancien, le farouche isolement de la cité, c'est « une nouvelle moralité qui nait», liée à la conception d'une « cité ouverte». préfiguration d'une « koinè méditerranéenne». - Si intéressant que puisse être un tel débat. il n'y a pas lieu, me semble-t-il, de rouvrir ici. Platon se préoccupe des nomoi, X. des poroi. La différence des points de vue est telle qu'aucune comparaison n'est possible. Et parler d'une« nouvelle moralité» fait sourire quand on songe au but étroitement civique des projets de X. •X.ET

L"ATTIQUE

VUE D'ENSEMBLE

Le chap. I des Poroi a sans doute été le plus maltraité par les

commentateurs modernes. Les uns. soulignant que la brièveté du développement sur «l'agriculture» jure avec l'intérêt manifesté par X. pour cette activité (cf. Écon.), concluent que les Paroi ne sont pas de X.; les autres se gaussent d'un « tableau idyllique» de l' Attique qui a dû paraître comique aux Athéniens eux-mêmes. Citons L. Gernet: « Le X. des Rel·enus voulait réhabiliter la terre d' Attique et la montrait plus

1. 7

53

riche qu·on ne le faisait» 17 • Busolt et Swoboda opposent le jugement raisonnable de Thue. I, 2.5 à « la description en forme de panégyrique de la nature du territoire faite par X.» 18 • J. Luccioni rapproche malencontreusement l'éloge de l'Attique composé pour le chœur d'Œdipe à Colone, v. 668-719 19 • Le contresens vient de loin. En effet, A. Brinkmann a montré 20 que le rhéteur Aetius Aristide, au ne siècle de notre ère, avait systématiquement démarqué le chap. I des Poroi pour composer son éloge de I' Attique 21 • La démonstration de Brinkmann est décisive: on tient là un magnifique exemple de plagiat littéraire; mais aussi, faut-il ajouter, de contresens historique. Car X. n'avait pas songé un instant à faire «réloge de l'Attique»; et d'avoir utilisé ces pages des Poroi exposa Aelius Aristide, dès l'Antiquité, aux critiques de ses lecteurs (cf. Proclos, cité par Brinkmann): critiques justifiées, comme le seraient ici celles des modernes. Car si l'on considère, au point de vue de l'histoire économique. les ressources de l' Attique, il ne convient de louer ni la fécondité du sol ni le climat. Von der Lieck emprunta la bonne voie. Après avoir justement rapproché Ps-Aristote, Écon. II, 1, 1346 a {pour une cité, KpatiO'tll npoooôoç ri à1tà nov lôirov tv til x_ropqyryvoµtvrov), il définit le but de X. comme « die Nutzbarmachung der gennanten Naturprodukte für die Staatseinkünfte » (p. 26). Mais il poursuit: « Comment comprendre cette exploitation? L'auteur n'en dit rien. On pourrait songer à des monopoles de production . . . à une exploitation directe [Von der Lieck rejette ensuite, à bon droit, ces deux hypothèses]... à l'affermage à des particuliers» (marbre, mines. salines). - Il n'y a point à poser ces questions. X. n'a qu'un but dans ce chapitre 1: rappeler quelles prosodoi sont dues à la physis de l' Attique. Il le fait brièvement: d'une part. cela est connu, d'autre part il n'a rien à proposer (la phy sis est ce qu'elle est, don des dieux). Pourquoi en parler alors? Pour rappeler aux Athéniens, singulièrement aux orateurs, que les rentrées fiscales dues à la situation de l' Attique sont loin d'être négligeables, mais à condition que règne la paix. Or, de cette paix les Athéniens 1

• L. Gernet. L't1ppro1•üionnn11ent ,l'Athèm•J en hlé (Puhl. Fac. lettres Paris. vol. 25. 1909). 298. 111 Busolt-Swoboda.Grù•,·hischeS1aa1skund,•Il (Munich. 1926). 758 n. l 111 &.,; idie.'ipolitiques el .rncialt•sdt• Xénophon ( Paris, 1948 ), 284. !o Zu Xenophons Poroi, dans Rht•it1. Mus. 67 (1912). 135-7. 21 Cf. Panathénaique, éd. Dindorf pp. 156-162; A. Boulanger. Al'lius Ari.1tidt• (Paris. 19:!lJ a négligé ce point.

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LES REVENUS DU TERRITOIRE

pourraient avoir perdu jusqu'au goût. et oublié les avantages qui en découlent. « S'il paraît manifeste que pour tirer de la cité tous ces revenus l'état de paix est une nécessité ... »: ainsi commence la conclusion de X. au chap. V. Tous ces revenus, oui. y compris ceux qui ont été évoqués au chap. 1. Raisonnant en termes de fiscalité, X. n'avait pas à traiter de l'agriculture. Dans la cité athénienne du ive siècle (il en allait sans doute différemment dans d'autres cités). il n'existait pas d'impôt sur le revenu foncier. Vouloir que les particuliers. tel l'Ischomaque de l'Écon., s'enrichissent grâce à une meilleure exploitation de leurs terres, cela ne présentait guère d'intérêt pour les finances publiques. Comparons avec l'Hiéron, où la perspective est différente. On lit en IX, 7 sq.: « L'agriculture elle-même (fi y&ropyia aùt,;). qui est de toutes les activités la plus utile, et celle où habituellement la philonikia intervient le moins, ferait de grands progrès si l'on proposait des prix (d ttç à:0Àa 1tpott8&i11), par domaines ou par villages, à ceux qui travaillent le mieux la terre; pour ceux des citoyens qui se tourneraient vers cette activité en donnant toutes leurs forces il en résulterait de grands biens», Kai yàp a{ 1tpoooô01 aüçotvt' av, 1cai Tloroq,pom'.>VllKtÀ. (il s'agit naturellement de prosodoi privées, puisque yàp explicite ce qui précède: totç trov 1toÀ.nrov). Le ton et jusqu'aux mesures proposées (les prix) font penser à certains passages des Poroi ( infra chap. II et Ill). Mais la ressemblance s'arrête là. Les buts sont différents. Pour le tyran du Hiéron, il s'agit de faire en sorte que les citoyens s'enrichissent le plus possible, afin qu'ils puissent payer les impôts et les taxes de toute nature exigés à tout moment par le tyran. L'augmentation des revenus individuels entraîne celle des revenus du tyran, mais non point au sens où prospérité privée et prospérité de la communauté se conjuguent, car il y a au contraire disjonction entre les revenus privés et les revenus publics, ceux-ci étant accaparés par un seul homme (cf. Hiéron VIII, notamment in fine). En d'autres termes, l'agriculteur-propriétaire du Hiéron est tenté de laisser ses champs en friche, puisqu'il sait que l'essentiel des revenus qu'il en tire va dans les caisses du tyran. La création de prix, en suscitant l'émulation. permettrait, selon X .• de corriger cet état d'esprit. Il est clair que de tels problèmes ne se posent pas dans une cité comme Athènes. X. n'a pas à reprendre dans les Poroi des conseils de ce genre. Il se contente donc de présenter un rapide bilan. dans lequel le revenu des taxes portuaires se taille la part du lion. Il suffit pour s'en convaincre de relire ce bilan avec X. lui-même.

1, 7

I Les biens saisonniers

II Les biens aidia

III L'atout géographique

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1. Le climat est tel que certains produits viennent en Attique plus tôt ou persistent plus tard que dans d'autres cités: on nous les demande donc de ces cités (- taxes à la sortie du Pirée ou dans les marchés). 2. La mer est féconde: X. songe soit aux taxes de marchés (cf. à propos d'Athènes le témoignage du scholiaste d'Homère. 1/iadeXXI, 203: tv t~ àyopavoµucci)v6µcp'Afh]vairov 6ttcnaÀta1 ix8i>rovteai tn.r.Àll(l)V tÉÀ.f1, cité par Thiel. 42). soit aux revenus que la cité tire de l'adjudication des salines et des droits de pêche, comme à Byz.ance (cf. Ps-Aristote, tcon. II, 2, 1346 b 20): à Cyzique (cf. J. et L. Robert, Hellenica IX [1950).94-7); à Délos (par exemple /G XI 2, 161 A. 1. 36; cf. Th. Homolle, Bull. corr. he/1. 1882. 66-7); à Myconos (Sy//.3 1024, 1. IO). 1. Le marbre: « beaucoup de Grecs et de Barbares nous en demandent» (l'accent est donc mis sur l'exportation - taxes portuaires). 2. Les mines d'argent: ccaucune des cités voisines n'en a». X. pense moins ici à l'adjudication des concessions minières (cf. chap. IV) qu'au commerce de l'argent (cf. chap. Ill) et aux revenus que la cité tire de l'affiux des commerçants. 1. Athènes est au centre de l'oikouménè, donc les commerçants doivent y faire escale (- taxes portuaires, de marchés. taxes personnelles). 2. Pas de voisinage barbare: avantage supplémentaire d'Athènes par rapport aux autres grandes cités commerçantes.

On le voit. tout cela est cohérent et même bien composé (sinonI toujours convaincant). Et il est aisé de comprendre la démarche de X. Le « tableau idyllique» des ressources du territoire n'a jamais existé que dans resprit des modernes qui ont vu (et voient encore, cf. G. Bodei) dans les Poroi un essai sur l'économie athénienne et qui, dès lors, faisant chausser rétrospectivement à X. leurs propres lunettes, lui ont prêté l'intention d'écrire un 1e chapitre sur « ragriculture », un 2e et un 3e sur « le commerce», un 4e sur «l'industrie». Une fois coulé dans les moules modernes, le texte ancien devient impénétrable et ridicule.

CHAPITRE

II

LES REVENUS PROCURÉS PAR LES MÉTÈQUES

1. To(.>trovµèv oùv ànavtrov, rocr1tEpdnov, voµiÇro aùtT)V tT)Vxropav aitiav tlvat. Et 6è npoç totç aùtoq,utcnv àya8otç

1tprotov µèv téov µEtoiKrovè1t1µtÀ.t1aytvo1to. Le substantif épiméleia et le verbe épiméleisthai reviennent fréquemment dans rœuvre de X. Deux sens sont possibles (cf. P. Chantraine, dans son édition de r Écon. [ColJ. Univ. France, 1949), 85 note 1): 1) le soin - avoir du soin; 2) l'attention (ou la surveillance) - prendre soin de (ou veiller à; l'épimélètès est le curator). C'est naturellement le sens n° 2 que nous avons ici, et, s'agissant d'étrangers, on pense aussitôt à la formule courante des décrets accordant (à des étrangers) la proxénie ou tel autre privilège: tàv ôt tou ôt11tm ÈntµEÀ.dcr0m aùtoO to(>Ç tE crtpat11yoùç 1eaititv l}ouÀ.riv1eaitoùç 1tputcivetc;,onroc;av µ116'ixp' tvè>ç àôud'Jtat 1. Mais X. ne songe pas ici seulement à une protection «négative» (éviter les injustices). Traitant dans l'Hiéron (VIII, 9- IX, 3) de l'épiméleia au sens de contrôle ou de surveillance (sens n° 2), il distingue deux catégories d'épiméleiai: les unes (contrôles répressifs) suscitent la haine, les autres (contrôles sélectifs) engendrent la reconnaissance; il développe ainsi le dernier point: tè> µèv yàp ôtôâmcttv d tcrn J}tÀ. ncrta 1eai tè>v 1eciÀ.À.1crta taûta Èçtp-yaÇ6µevov ènmvEiv 1eai nµàv, aÜtll µèv fi tmµt).f;m ôtà xapitrov yiyvetm. C'est précisément cette épiméleia que X. va préconiser à l'égard des métèques athéniens: elle consiste à accorder des honneurs ou des avantages aux plus dignes d'entre eux.

AütT) yàp ~ 1tp6cro6oçtéov KaÂ.Â.icrtrov ˵o1y&601eEt&lva1, è1tEi1t&p aütoùç tpéq>OVt&Ç 1eai 7tOÂ.Â.à ©q)&Â.OÜVtEÇ tT)V7tOÂ.lV où Â.aµJ3avoucr1 µ1cr86v,àAÀà µ&toi.1e1ov 1tpocrq,tpoucr1v · Thiel commente très bien: « Cives mis thon bouleutikon, ekklesiastikon, dikastikon accipientes publice aluntur, cum inquilini se ipsi sustineant nec vitam economicam detrectent. Verba autoùç tptq,ovr&ç et où Â.aµf3a1

Cf. pour !'Attique l'index chronologique dressé par J. Pec!irka, The Formula for the Grant of Enktesis in Allie Inscriptions (Prague, 1966), 152-159, où sont mentionnés une quinzaine d'exemples.

Il. 2

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vooo1 µ1m}6v prorsus idem significant ». En effet. il s'agit bien d"un raisonnement par opposition. toujours dans une optique fiscale. Il en ressort que le fait d'« être nourri» par la cité est la même chose que ((recevoir un misthos » ( cf. supra Introduction II 1). Ainsi. le Charmide du Banquet se déclare fier d'être devenu pauvre (pénia. IV. 29) et de vivre maintenant des salaires publics. Il compare les riches citoyens aux cités de vtatllV rté>Àtvànµiaç ÔOKEitoiç µttohcotç napÉ):ttv, Il conviendrait d'abord de « retrancher tout ce qui, sans être utile à la cité, semble constituer pour les métèques des atimiai ». Il n'y a pas d'autre exemple du pluriel atimiai dans l'œuvre de X. Le singulier atimia, qui s'applique au 1v~ siècle à l'exclusion du corps civique (ce que nous appelons « l'atimie » ), est employé aussi par X. au sens d'« affront» ou de « marque de déshonneur» (cf. Lac. Pol. IX, 6; Cyr. V, 5,26; Hel/. III, 4,9). Thiel (excursus IV, 45-46) estimait que tel était le sens ici. Dès lors, l'analyse serait la suivante. À Athènes, comme dans les autres cités, l'infériorité des métèques par rapport aux citoyens était marquée 1

Cf. Harpocration. s. v. (cité par Thiel. ad /oc.): Boeckh. 446 sq.: Ph. Gauthier. S_rmbola(Nancy, 1972). 121-2. 3 Cf. supra p. 11-2 et note 12.

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LES MÉTÈQUES

non seulement par les exclusives qui les frappaient (par exemple les métèques n'avaient pas accès à la propriété foncière). mais encore par le traitement peu honorable qui leur était réservé dans les domaines où ils étaient associés aux citoyens. Ici, X. aurait reconnu implicitement qu'il y avait deux sortes d'atimiai: 1) celles qui rapportaient de l'argent à la cité (ôcra ... roq>EÀoùvtatllV 1t6Àtv) et que X., en bon conseiller péri porôn, n'aurait pas songé à supprimer (l'acquittement du métoikion, des xénika té/è au marché, le mode de paiement de l'eisphora, dont les métèques acquittaient globalement le 1/6. auraient pu faire partie de ces atimiai); 2) celles qui ne rapportaient rien à la cité et que X. propose de supprimer. Malheureusement, on ne voit guère en quoi auraient consisté ces atimiai. Thiel songeait à l'obligation de skaphèphorein dans la procession des Panathénées et en général à l'infériorité des métèques dans la vie religieuse (exclusion, lors des sacrifices, de la distribution des parts des victimes). Mais, plutôt que l'exclusion ou l'infériorité (normale dans les Panathénées). les textes suggèrent l'association des métèques à la vie religieuse de la cité (cf. /G 12,84, 1. 25; 188, Il. 51-53). Plus récemment, G. Bodei (p. Lx1v) a imaginé que dans le domaine judiciaire le recours au polémarque, dont les pouvoirs se seraient affaiblis au IVe siècle, aurait été pour les métèques une marque d'infériorité. Cette hypothèse ne repose sur rien (faut-il rappeler qu'au IVe siècle le polémarque avait également à recevoir les plaintes des proxènes et des isotèles, c'est-à-dire de personnages que la cité honore?). Certains ont cru résoudre l'énigme en imaginant un chiasme. On aurait ici, et pour l'ensemble du chapitre II, deux propositions (A et B) suivies de deux développements (B I puis A 1 ):

A àq,tÀ.mµEvµtv ... àttµiru;, B àq,tÀ.mµEv6t Kai tè>crucrtpatEi>Ecr8at... toiç àcrtoiç · B 1 µtyaç µtv yàp 6 Kiv6uvoç à1tÔ>v,µtya 6t Kai tè> àmtvm (jusqu'à la fin de II, 4) I A Kai µEtafü66vtEÇ... toiç µttoiKmç ... Kai toù imttKoù (jusqu'à la fin du chap. Il). Dès lors, les atimiai seraient l'exclusion des riches métèques de la cavalerie, l'incapacité où ils se trouvaient de devenir propriétaires de leur maison, l'absence de magistrats chargés de les protéger (les métoikophylakes). - Cette hypothèse, présentée autrefois par M. Clerc (Les métèques athéniens [Paris, 1893]. 230). a été développée à nouveau récemment par G. Bodei, pp. Lx111-Lxv. Elle implique qu'on entende

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11,2

les atimiai comme des infériorités d'ordre juridique ou politique (au sens où l'on parle de l'atimie), et qu'on rejette par conséquent l'avis de Thiel qui avait insisté. en invoquant les parallèles xénophontiques. sur le sens d'« affront» («atimia sensum contumeliae hic habet. juris minuti non habet ». p. 46). G. Bodei a cru concilier les deux points de vue en produisant un passage bien connu d'Aristote (Polit. III, 1278 a). où le métèque est défini comme 6 téov nµéov µ1' µ&téxrov, d'où il suivrait que I'« atimia peut être considérée en généra) comme une limitation totale ou partielle au regard des honneurs ou bien des droits politiques et civils» (p. txm). Mais il faut lire Aristote un peu plus loin: tiµaç yàp Àtyoµ&v &lvm tàç à PXa.ç ( 1281a 32). Ainsi, le métèque est celui qui ne peut exercer la moindre charge (archè), et l'atimia est simplement le fait de n'être pas (ou de n'être plus) citoyen, donc de n'avoir pas accès aux archai. Il est clair que X. parle de tout autre chose. Résumons. 1) Le sens d'« affront», attesté dans l'œuvre de X. (cf. supra) et défendu par Thiel. semble mieux convenir ici que celui d'« atimie ». Les privilèges que X. propose d'accorder (l'accès à la cavalerie, à la propriété immobilière) ne concernent qu'une minorité de métèques (ceux qui auront été jugés «dignes»); au contraire, la proposition de supprimer les atimiai semble concerner tous les métèques. La suppression des atimiai n'a donc rien à voir avec une modification du statut des métèques. 2) Il s'agissait plutôt, pour X., de mettre fin à des pratiques déshonorantes pour les métèques, pratiques sans doute autorisées en raison de l'infériorité de leur statut, mais qui accusaient encore celle-ci et étaient inutiles. X. songeait-il à certaines procédures judiciaires expéditives et brutales (l'apagôgè), plus fréquemment employées contre les métèques que contre les citoyens, à l'exclusion de certains gymnases ou de certaines tètes? ciq>éÂ.OtµEV ôt Kai tô

O'UO'tpatEUE0'0at

Ô1tÀitaç

µEtO\KOUÇ

toiç dototç. X. est le seul auteur (de cette époque) à mentionner, pour Athènes, la participation des métèques aux campagnes comme hoplites. Sans doute Isocrate semble-t-il faire écho (en 356) aux propos de X.: « autrefois, quand on équipait des trières, on embarquait comme matelots lesétrangerset lesesclaves, on envoyait les citoyens en armes; maintenant, nous utilisons les étrangers comme hoplites et nous forçons les citoyens à ramer» (VIII, Sur la paix, 48). Mais le rapprochement (auquel procède G. Bodei p. Lxv1) est sans valeur. Car les xénoi d'Isocrate qui servent «maintenant» comme hoplites sont des mercenaires, non des métèques; 9

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LES MÉTÈQUES

quant à ceux qui servaient «autrefois» comme rameurs, c'étaient en partie des métèques, mais aussi des alliés d'Athènes 4 • Une fois écarté le texte d'Isocrate, il n'y a aucun auteur pour appuyer l'allégation de X. Lorsque M. Amit déclare (/oc. cit., 163) q~'il était courant d'enrôler au IVe siècle des métèques comme hoplites, il ne peut citer, en dehors des Poroi, que Thucydide et Diodore . . . traitant du vc siècle. Thiel ad /oc. notait la difficulté, relevait que les métèques servaient plutôt dans la flotte (lui aussi, il est vrai, invoquait, à l'exception de Dém. IV, 36, uniquement des textes relatifs au vc siècle; mais on pourrait ajouter d'autres références, cf. Dém. L, 11), et trouvait finalement l'explication suivante: X. aurait insisté sur le cas des métèques enrôlés comme hoplites, bien que cela n'eût concerné qu'une minorité, parce qu'il songeait aux métèques riches (ou aisés). Les métèques enrôlés comme rameurs étaient de pauvres hères, qu'il importait peu de maintenir à leurs métiers. En fait, la participation des métèques comme hoplites, en tout cas comme fantassins, aux campagnes athéniennes est amplement attestée par les textes épigraphiques. Voici deux hommes, Nikandros d'ilion et Polyzèlos d'Éphèse, qui ont été métèques à Athènes pendant quelque vingt-cinq ans, de 348/7 à 323/2. On les loue de ce qu'« ils ont participé à toutes les campagnes sur terre et sur mer, prenant les armes avec le peuple, avec un beau zèle, à leurs frais» (/G 112, 505 [Sy//.3 346), li. 37-40). Le privilège, accordé à des métèques ou à des étrangers susceptibles de s'installer plus tard comme métèques, de cnpan;&:cr0m µstà 'A9T1V«irov(cf. /G 112, 287, 351, 360, 545; Hesperia 2 (1933], n° 16) signifie sans doute que les métèques étaient habituellement rangés à part dans des unités de troupes légères, tandis que les privilégiés étaient désormais comptés comme Athéniens 5 • On note que le privilège militaire est toujours associé au privilège fiscal: tàç Eimpopàç Eimptpctv µctà 'A9llvairov. Or, pour payer l'eisphora « avec les Athéniens». il faut être rangé dans une symmorie et avoir déclaré un timèma, lequel p9uvait du reste servir de base à l'enrôlement comme hoplite. Au contraire, les métèques «ordinaires» ne déclaraient 4

Cf. M. Amit dans Athenaeum 1962. 162-4. qui souligne justement le caractère fallacieux. purement rhétorique. de la comparaison d'Jsocrate; Ph. Gauthier dans Re,·. h. K'· 1971. 44-60. 5 Wilamowitz (Hermes 1887, 215) avait cru pouvoir conclure de l'expression employée par X. (to (Jt)(Jtp«n:uta6m) que les métèques athéniens servaient dans les mêmes unités que les citoyens; c'était un élément entre bien d'autres de sa théorie des métèques •puyEçKai /\uôoi ». Ce rapprochement suggère une interprétation simple. X. cite à dessein le groupe, relativement homogène, des Barbares venus du royaume perse, parce que celui-ci est le royaume barbare par excellence: les Perses exceptés. ses habitants. à la fois parce qu'ils ont une mentalité d'esclaves et parce qu'ils ignorent l'entraînement physique. ne sauraient faire de bons hoplites. On pense aussitôt aux soldats d' Agésilas, voyant en Asie « les corps blancs [des prisonniers barbares]. parce qu'ils ne se mettaient jamais nus. gras et mous, parce qu'ils allaient toujours en chars», et concluant que combattre contre eux «c'était comme de combattre contre des femmes» (Agés. I, 28). Ainsi, au mépris particulièrement fort pour ces Barbares d'Asie s'ajouterait un reproche ironique à l'égard des Athéniens (qui osent utiliser de telles recrues). Il est probable que d'une manière générale, et singulièrement au point de vue militaire, « les autres Barbares» ainsi les Thraces ou les Scythes - n'encouraient pas (aux yeux de X.) le même mépris. et ne devaient donc pas être cités ici. • Cf. IG 112, 1956. avec les remarques d'H. Pope, Non-Athenians in Attic Inscriptions (New-York. 1935), 67-8, et de M. Launey. Recherches sur les armées hellénistiq,ws t. 1 (Paris, 1949), 67-9.

Il, 5

65

n poç0€

t(Î) àya9cî>'t(Î) tOUtOUÇèK tOÙ O"UV't► 10 • Or ces magistrats sont présents lors de l'affranchissement, en tout cas ils ont donné leur approbation (cf. cruvEu6mctovtrov);ce qui signifie (cf. les actes delphiques) qu'ils n'élèveront aucune réclamation par la suite, au nom de l'orphelin, à propos de l'esclave qui vient d'être affranchi: il semble donc que les orphanophylakes de Naupacte avaient à protéger le patrimoine et les intérêts des orphelins. 10

us

Lorriens tk l'Ouest (Paris, 1952), t. li. 123.

70

LES MÉTÈQUES

A Gorgippia

également, sur la côte au S.E. du Bosphore cimmérien, le nom orphanophylax apparaît dans une inscription, malheureusement très mutilée 11 • D. M. Pippidi a rapproché les orphanistai attestés à Histria, « chargés de défendre les intérêts des orphelins mineurs» 12 • Ce qui nous ramène à Athènes, puisqu'une définition de Suidas mentionne s.v. 6pcpav1cnéi'.,v · ôpcpavunai da1v o{ toùç ôpcpavoùç tpéq>ovtEÇ,t\ ôpcpav1cnai 4PX11•A8T1V11>du IV• siècle qu'étaient les tétradrachmes athéniens, le profit réalisé sur les monnaies au dehors était maigre, comparé au bénéfice sur la revente des marchandises, qui pouvait atteindre parfois 100%8 • b) D'autre part, et secondairement, les Grecs ont toujours estimé dangereux le transport d'argent par mer 9 • L'affirmation de X. est donc vraie; mais considérer la monnaie comme une kalè emporia est excessif. Ce n'est pas de gaîté de cœur que des emporoi eussent quitté le Pirée, nantis seulement de «chouettes». X. a le tort de présenter comme le résultat d'un libre choix (cf. fiv ôt µ11 l3ouÀtovtm)ce qui n'était qu'un pis-aller. Le «modernisme» incontestable de la proposition de X. (payer une partie des importations en argent) a naturellement séduit les commentateurs «économistes», son caractère excessif leur a échappé 10 • Ajoutons que l'examen des trouvailles monétaires vient confirmer nos réserves. Tandis qu'entre 450 et 400, les tétradrachmes athéniens, frappés en grand nombre, circulaient largement en dehors d'Athènes, de la Grande-Grèce au Levant, et œ pour des raisons autant politiques que commerciales, en revanche au IV• siècle, les monnaies d'Athènes, bien que toujours cotées et recherchées en dehors d'Athènes, circulent beaucoup moins 11 • L·arrêt, durant plus de dix ans, • Cf. Lysias XXXII, 25: d"après R. Bogaert. qui commente très bien notre passage Unt. class. 1963. 87-8), le bénéfice sur les tétradrachmes athéniens était. à Delphes en 346 14 (comptes des naopes). de 7,1~,~; à Olbia, au début du IV• siècle, peut-être de 10~,~9 Cf. lsocr. XVII, 35; Dém. L, 28; C. Préaux. L'É µ11 oùx_i npo0uµroç iiv tOÙÇ7tOÀ.itaçEÎÇtà totaùta EÎcrT}V à.1tè>1e01voüycvtcr0m), où le passage serait en effet parfaitement à sa place. On hésitera pourtant à accepter une solution aussi rude, et j'adhérerai ici aux remarques de G. Bodei, p. LXXXI : l'annonce prématurée des bénéfices perçus est psychologiquement vraisemblable.

cI> µèv yàp liv ôéKa µvaî ft eiac:popà yéV11ta1,&anep vauttlCOVcrxeôov è1ti1teµ1ttOV aùtq> yiyvetat, tptCÎ>~OÀ.OV ti\Ç ftµtpaç À.aµ~avovtt · cI> ôé y' liv névte µvaî, nÀ.Eîov fi tnitpttov. (10) Oi ôé ye nÀ.Eîcrtot'A911vairovnÀ.EiovaÀ.11'l'Ovtat Kat· Èvtautov ii ocra liv EiaevtyKcootv · o{ yàp µvàv 1tpotEÀ.taavteç èyyùç ôuoîv µvaîv npoooôov ëçoua1, X. prend trois exemples, allant du plus riche au plus modeste des contribuables. 1) Le citoyen riche, qui versera une eisphora de 10 mines (1.000 drachmes), percevra, à raison d'un triobole quotidien (cf. IV, 17), 180 drachmes par an, soit un peu moins de 2 mines, donc presque le 1/5 de son eisphora, comme le note justement X. (schédon épipempton). 2) Le citoyen aisé, versant 5 mines et touchant lui aussi 180 drachmes par an, recevra 35/100 de son eisphora, donc plus du 1/3 (pleion è épitriton). 3) Enfin, le citoyen moins fortuné, versant 1 mine et

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EISPHORAET MISE DE FONDS

touchant toujours 180 drachmes par an. reœvra presque deux fois le montant de son eisphora. Il n'y a donc pas d'erreur dans les calculs de X. Mais les chiffres choisis le sont-ils au hasard (cf. Von der Lieck. 22: « Die angeführten Zahlen sind belanglos »)? Je ne le crois pas, sans pouvoir malheureusement le prouver. tant sont maigres nos données sur l'eisphora athénienne. Notons cependant que X. lui-même distingue nettement deux groupes: les Athéniens qui versent 10 ou 5 mines sont les plousioi. soit une minorité; car, écrit-il. « la majorité des Athéniens» versera I mine. Ceux qui versent moins ne sont pas mentionnés. On croirait volontiers que les chiffres avancés par X. sont des chiffres moyens, correspondant aux obligations des anciennes classes soloniennes ( qui ne jouent plus guère de rôle au IVe siècle): pour beaucoup d'eisphorai, les citoyens de la première classe auraient eu à verser en gros les uns 10 mines, les autres 5; la majorité des contribuables aurait acquitté plus ou moins d'une mine, les plus modestes acquittant une demi-mine ou moins encore. Or, nous savons que Démosthène (ou plutôt son tuteur au nom de son pupille) a acquitté une eisphora de 5 mines (Dém. XXVII. 7). ce qui s'accorde avec les chiffres de X .• puisque la fortune de Démosthène faisait de celui-ci l'un des plus riches de sa symmorie. - Invoquons aussi les sarcasmes de Démosthène à l'égard d'Androtion. Ce dernier avait été chargé, quelque temps avant la composition des Poroi, au début de la Guerre des Alliés. de recouvrer les sommes dues au titre d'eisphorai anciennes (cf. R. Thomsen, Eisphora, 218-226). Selon l'orateur, Androtion. tout en molestant les citoyens, n'aurait pas fait rentrer beaucoup d'argent: « Il a recouvré aux dépens de Leptinès de Koilè 34 drachmes, aux dépens de Théoxénos d'Alopékè 70 drachmes. un peu plus peut-être aux dépens de Callicratès. fils d'Euphéros ... À quoi bon les énumérer tous un par un: il n'y en a pas un dont la dette fût supérieure à une mine» (Dém. XXII, 60). Il n'importe guère ici que ces arriérés aient porté sur une ou sur deux eisphorai (cf. R. Thomsen. /oc. cit.); il est clair que pour les auditeurs de Démosthène tout chiffre inférieur à une mine était jugé, à propos d'une eisphora, médiocre. Or. les personnages énumérés sont des hommes riches 21 • Il est manifeste, d'après le contexte. que ces euporoi versaient plus d'une mine à chaque eisphora. Pour faire saisir l'importance des gains que feraient les plus gros payeurs, X. établit une comparaison avec le prêt maritime 22 • Pourquoi 21

Cf. J. K. Davîes. Athen. Prop. Fami/it•J (Oxford. 1971), n" 9046 (Leptinès). 8157 (Callicratès): 13519 (le fils de Tclestès). 22 Sur le nautikon, cf. L. Bcauchet. Hür. droit prfré IV (Paris. 1897), 272-324 (avec

m.10

95

cette comparaison? Certainement pas parce que le prêt maritime était « le placement de capitaux le plus usité» (Von der Lieck, 22-23), mais bien parce que c'était celui qui comportait les plus gros intérêts, de 20 à 30°/4 d'après les plaidoyers du corpus démosthénien. Il est compréhensible que X. invoque l'exemple du nautikon à propos de ceux qui verseraient la plus lourde eisphora, 1.000 drachmes. Car seuls ces Athéniens riches ont les moyens d'employer leur argent à des prêts maritimes (dont le montant se situe fréquemment entre 2.000 et S.000 drachmes), et d'autre part ils seraient, dans le projet de X., les payeurs les moins bien rétribués. En leur promettant la perception annuelle du 1/S de leur mise, X. leur démontre du même coup qu'ils feraient un gain comparable à celui que rapporte - mais avec de gros risques - le prêt maritime. Pour les Athéniens qui paieraient S mines, l mine ou moins, le gain est tel que toute comparaison est impossible ... et inutile. Soulignons que la comparaison avec le nautikon porte uniquement sur les gains, et non sur la nature ou les modalités de l'opération envisagée. L 'eisphora n'est pas un prêt, et n'implique ni contrat, ni remboursement, ni paiement d'intérêts. X. n'emploie cette comparaison qu'à titre d'argument «parlant». Mais ce faisant il a égaré certains commentateurs modernes (cf. infra•, p. 101).

1eai taüta tv 1t6Â.Et,ô ôox:Ei trov àv8pco1tivrov àaq>aïJ:atat6v tE 1eai 1toÂ.uxpov1rotatov Elvat. « et cela dans une cité, ce qui est la plus sûre et la plus durable

des choses humaines». Sur la confiance en la cité. cf. Mém. I, 4, 16 (même expression qu'ici) et Isoc. VIII, 120 (cité par Thiel, ad foc.). La valeur locative de tv demande à être précisée. X., à mon avis, ne veut pas signifier ici que l'avantage consiste à rester sur place (à Athènes) plutôt qu'à s'embarquer 23 • Cette interprétation me parait irreœvable pour trois raisons. 1) Elle exigerait l'article (tv ti} 1tôÀ.f:t). 2) Ce n'est pas le fait de rester dans une cité qui assure la sécurité des revenus (le prêteur à la grosse ne quitte pas sa cité, et l'argent même qu'il prête est souvent employé sur place par l'emprunteur pour rachat d'une cargaison). 3) L'éloge de la polis, chose sûre et durable, les textes); U. Paoli. Studi di diritto attico (Florence. 1930). t• partie; G. M. Calhoun. dans J. Econ. and Business Hist. 2 (1930), 579-584; H. Bolkestein. Econ. Life (Leyde, 1958). 112-114; J. Rougé. Recherches (Paris, 1966), 345-348; S. C. Humphreys. dans Ann. Sc. norm. mp. Pi.sa 39 (1970), 17-18. 13 Ainsi Von der Lieck (p. 42): « und zwar in der Stadt, d.h. ohne das Risiko bei Seedarlehcn»; E. Chambry: «sans quitter la ville»; G. Bodei: ); G. Bodei, LXXX IV (ccprestito forzoso ►> ). que je cite ci-après.

102

IMPÔT ET EMPRUNT

« Mutuationes publicas, quales nos habemus, non habuit antiqua Graecia », écrivait Thiel (p. 48), qui n'en admirait que plus l'originalité

de la proposition de X. Avant lui, K. Riezler avait insisté sur l'absence de crédit public à l'intérieur des cités; il estimait que les emprunts faits par les cités aux trésors des dieux, ne comportant pas ou guère d'intérêts, ressortissaient plutôt au pillage, et que les emprunts faits aux particuliers étaient presque toujours, des « Zwangsanleihen » 31 . Au vu des documents connus en 1907 ou en 1922, de telles affirmations étaient déjà un peu trop abruptes. Elles le seraient davantage aujourd'hui, l'épigraphie ayant apporté beaucoup d'exemples nouveaux, concernant notamment la fin du ive et le Ille siècle (l'étude de ces documents a été entreprise par L. Migeotte). Ce qui reste vrai, semble-t-il, c'est 1) que les cités empruntaient plus souvent à des étrangers qu'aux citoyens; 2) qu'elles éprouvaient souvent les plus grandes difficultés à rembourser le capital et à acquitter les intérêts dans les délais prévus, d'où l'appel à la générosité de riches citoyens qui avançaient les sommes nécessaires au remboursement, leur propre dédommagement étant garanti par la cité sur les revenus ordinaires. - Quoi qu'il en soit, de la lecture de ces textes il ressort que la proposition de X. n'a rien à voir avec de tels emprunts. Mais, dira-t-on, négligeons ici le rôle (hypothétique) qu'eussent joué les étrangers, et considérons que cette eisphora eût été l'affaire des seuls Athéniens. L'eisphora de X. n'est-elle pas comparable aux emprunts publics d'aujourd'hui, l'État emprunteur s'engageant moins à rembourser les prêteurs qu'à leur verser une rente? Impossible, me semble-t-iJ, d'accepter cette comparaison. Négligeons même le fait qu'aujourd'hui le souscripteur d'un emprunt public a la possibilité, par la suite, de négocier ses titres au cours du jour (l'emprunt étant coté en Bourse), donc de rentrer en possession de son capital. Restent trois différences ou difficultés majeures. D'abord, l'emprunt n'est pas (ou est rarement) obligatoire, l'eisphora l'est toujours, relativement aux personnes et relativement au montant. Ensuite, le paiement des intérêts, s'agissant d'un emprunt, est égal pour tous, à proportion des sommes versées. Qu'on paie, d'après notre passage, aux uns 18%, à d'autres 36%, à la majorité 183%, cela ne paraît pas surprendre les commentateurs 32 •

.li Ober Finan:en und Monopole im alten Grit·chenland (Berlin. 1907). 56-62 et 66-68; dans le même sens. cf. K. J. Beloch. Gr. G,•sch. Ill 12 (Leipzig-Berlin. 1922). 447-449. 32 Seul Von der Lieck, me scmblc-t-il. a relevé (p. 24--5) le caractère utopique d'« intérëts ,, aussi inégaux. ce qui l'amena inévitablement. mais un peu tard. à se demander si la contribution des riches n'eût pas tenu de l'impôt plutôt que du prêt.

Ill, 11

IOJ

Enfin, quand il s'agit d'un emprunt, on fixe des délais pour les premiers versements d'intérêts: ici rien de tel. Pour mieux saisir combien ces traits (caractère obligatoire de l'eisphora, inégalité et imprécision relativement aux «intérêts») rendent inacœptable l'hypothèse d'un emprunt public, comparons notre passage des Poroi, comme l'ont fait parfois les commentateurs modernes, à l'emprunt milésien des années 200 (insc. du Delphinion, n° 147). Les Milésiens sont alors dans une situation économique et financière très critique. Ils estiment impossible de recourir à une eisphora, et font appel à la générosité des riches citoyens. On décide que les volontaires (tous bouloménous. l. 8) verseront chacun une somme identique de 3.000 drachmes (la fin du texte enseigne que la cité reçut au total 23 talents), contre versement d'une rente viagère de 30 drachmes par mois. Des délais et des garanties sont prévus. On voit que si œs dispositions peuvent être rapprochées des emprunts publics d'aujourd'hui, elles sont fort éloignées des propositions de X. Faire de l'eisphora de X. un emprunt public entraîne encore une difficulté majeure, bien visible à travers le commentaire de G. Bodei (pp. txxxv1-xc). L•«emprunt» prenant la forme d'une eisphora, tous les Athéniens n'auraient pas eu à verser qui 10, qui 5, qui une mine. Ces trois chiffres, on l'a noté, sont sans doute des ordres de grandeur, servant d'exemples pour X. En fait, les sommes versées eussent été de montants très divers. Et l'on peut croire qu'un grand nombre d'Athéniens, parmi les plus modestes, auraient eu à verser moins d'une mine, et que les indigents n'auraient rien versé du tout. Ces derniers, n'ayant versé aucun «capital», auraient-ils donc été exclus de ta distribution des « intérêts» (le triobole)? G. Bodei répond par l'affirmative. Mais, voici qu'en IV, 17, X. propose d'acheter des esclaves publics (loués à raison d'une obole par jour) en nombre tel qu'il y ait trois esclaves pour un citoyen: on retrouve donc le triobole quotidien ( = 180 drachmes par an), comme dans notre passage, et il est clair que œ triobole est à verser à tous tes citoyens. Pour résoudre l'apparente contradiction, G. Bodei en est réduite à écrire ceci: « Les trois oboles dont il parle en Ill, 9 n'ont rien à voir avec celles de IV, 17 (souligné par l'auteur]. Il s'agit de deux stades différents de la réalisation du programme: dans le premier cas, les trois oboles sont versées à titre d'intérêts à œux qui ont apporté leur contribution financière, dans le second cas, on pourra les distribuer à tous les citoyens» - et plus loin: « le triobole pour tous est pour X. une possibilité réelle, mais assez éloignée». - Reconnaissons à G. Bodei le mérite d'être logique

104

IMPÔT ET EMPRUNT

avec elle-même (ni Thiel ni Von der Lieck n'avaient tiré toutes les conséquences de l'hypothèse d'une eisphora..emprunt).Mais quelle singulière façon de combattre la pénia de la masse (cf. supra 1, l)! Tandis que les nantis eussent fait la queue aux guichets publics pour percevoir un triobole quotidien dont iJs n'avaient guère besoin, les plus pauvres. les bras croisés sur leur ventre creux, auraient formé des vœux pour que dans cinq ou six ans ils aient droit aux mêmes avantages ... L'absurdité est si évidente qu'on hésite à argumenter. Insistons seulement sur trois points. l) X. ne précise nulle part que les eisphérontes percevront le triobole aussitôt (ou dans un avenir proche). G. Bodei parait croire que la chose va de soi. Mais supposons une eisphora du 1/100, les citoyens apportant 60 talents à la cité. Et imaginons que pour cela 3.000 citoyens aient à verser environ une mine, quelques dizaines de nantis payant de 5 à 10 mines. S'il s'agit d'un «emprunt», la cité aura à verser sous forme d'~>(cf. infra), et d'autre part les agoraioi n'ont pas besoin de boutique. Ceux qui

tiennent boutique sont en dehors de l'agora: cf. le décret athénien sur les poids et mesures mentionnant « ceux qui vendent quelque produit i\ oîvoo1v èv tilt àyopêit i\ tv toiç èpyacrtripimç i\ toîç 1ea7t11À.d01ç fi à1to[811Kmç)(/G 112, 1013, 1.9). Ces halles de vente seraient construites « et au Pirée et dans la ville», c'est-à-dire auprès des deux agorai les plus importantes de l'Attique.

ciµa t' âv 1C6crµoçei11tij 1t6À.tt1Cai1toÀ.Àaiiiv à.no toutrov 1tp6croôo1yiyvotvto. « une parure pour la cité»: cf. Écon. XI, 9-10, et les exemples rassemblés par L. Robert, Ét. anal. (Paris, 1937), 349 note l.

14. ·Aya0ov ôé µ01 ôo1CeiElvat 7tEtpa0flvat, el Kai, rocr1tep tptT)pttÇ ô11µocriaç ti 1t6À.tçICÉICtlltO.t, oütro ICO.iÔÀ.1Ca6aç ônµocriaç 6UVUtOV ÔVYÉVOttO1CtflO'Ucr0at, ICUltUUtUÇ€1Cµt611µ6crta. 0'7tEPtp111pe1ç ... ootro 1eai 6ÀKci6aç). La réflexion approfondie consisterait à analyser, du point de vue de la cité, les avantages matériels, psychologiques et politiques de la possession d'une flotte commerciale: on la trouve seulement chez

108

CITÉ ET COMMERCE

les modernes, cf. réœmment G. E. M. de Ste-Croix, The Origins of the Peloponnesian War (Londres, 1972), 393-6, qui met en relation l'indifférence des cités grecques à l'égard de la flotte commerciale et l'impossibilité technique de transformer, en cas de besoin, les bateaux de commerce en bateaux de guerre. La cité pouvait-elle, inversement, utiliser des bateaux de guerre pour le transport des produits pondéreux? On l'imagine, en lisant par exemple le décret d'Olbia pour Protogén~ (B. Latyschew, JosPE l, 16; Sy/1.3 495), lequel entre autres bienfaits participa activement à la construction des fortifications, et, lit-on, « comme la cité acquittait un nolis aux particuliers qui apportaient les pierres, parce que les bateaux publics (ta ploia ta dèmosia) étaient en mauvais état et étaient dépourvus d'agrès, Protogénès promit solennellement de construire ces agrès etc. » (Il. 146-151). Les dèmosia ploia sont évidemment des bâtiments de guerre: s'ils avaient été en bon état, la cité les aurait utilisés pour le transport des blocs; eJle est obligée de s'adresser à des particuliers (citoyens ou étrangers), qui se chargent du transport moyennant paiement. Notons encore que la cité athénienne ne semble pas avoir éprouvé de gêne à utiliser, pour ses propres besoins, les bateaux de commerce des particuliers. Peu de temps avant la composition des Poroi (vers 360?), les Athéniens restaurent à leur profit le monopole de l'ocre produite par les Kéiens (cf. H. Bengtson, Staatsvertrâge Il, n° 320). Les exploitants kéiens devront charger la marchandise sur un bateau désigné par la cité athénienne, entendons celui d'un nauklèros avec lequel la cité aura fait affaire; et les Kéiens paieront eux-mêmes le nolis, pour le transport de Kéôs à Athènes. La cité ne débourse rien.

el yàp tcai toùto o{6v te ôv cpavei11,1toÂ.Â.1l iiv tcai à1to toutrov 1tp6aoôoç yiyvoito. Notons que si, pour tous les projets énumérés en III, 12-14, les K-aitdÀÀa Ôflµ{xna, en loyers, rentrées d'argent eussent consisté, o>0'1t&p seuls certains d'entre eux eussent donné lieu à adjudication. On peut croire que la cité, par l'intermédiaire des pôlètes, aurait loué au plus offrant sans doute les hôtelleries, les oikèseis pour les marchands, les taxes à lever sur les emplacements dans les halles de vente. En effet, tous ces revenus nouveaux pouvaient être affermés, comme les autres télè. Mais la location des navires de commerce? Il est à croire que des magistrats déterminés auraient eu à veiller au maintien de cette flotte. louant, pour un prix convenu, un bateau à un particulier, en exigeant caution (tn• tyyuTttrov) pour chaque bateau.

m. t4

109

On a vu que la notion de revenu fiscal (prosodos) était au centre du chap. III, comme elle était au centre des deux chapitres précédents. La première partie du Chap. III se termine par un rappel des propositions n'entraînant pas de dépenses, propositions faites dç tàç . . . aùçitaEtÇ trov npoo66c:ov; la deuxième partie, qu'on vient de commenter, s'achève par révocation de la 11:oll:r)11:poooôoçqui résulterait de l'application des projets de X.

CHAPITRE

IV

LES REVENUS PROCURÉS

PAR LES MINES

Le chap. IV forme à lui seul près de la moitié de l'ouvrage. Cette excroissance apparemment monstrueuse est en réalité justifiée. La réorganisation et le développement de l'exploitation du Laurion forment la clé de voûte du système. puisque X. va jusqu'à imaginer (IV, 17) qu'un jour le revenu tiré des esclaves mineurs pourrait assurer à lui seul la trophè des citoyens. Plus important que tous les autres. le projet relatif aux mines est aussi le plus audacieux. Mais la fragilité du tout n ·exclut pas, bien au contraire, la rigueur logique de la construction. C'est le chapitre le mieux composé des Poroi, celui où les mailles du raisonnement sont les plus serrées. La rigueur de la démarche et l"ampleur du chapitre veulent qu'on présente d'abord le plan de l'exposé. tel qu'il ressort aisément de la lecture ( cf. Thiel, en marge du texte; Von der Lieck, 43). Pl.AN

1)

Il)

DU CHAPITRE

IV

1-12: arguments en faveur d'une exploitation accrue des mines. 1) La richesse des gisements est à peine entamée. Ce n'est pas le travail. mais les travailleurs qui manquent ( 1-5). 2) La valeur de l'argent est stable, quelle que soit l'augmentation de la production et de la main-d'œuvre. Car les besoins d'argent sont infinis (5-12). 13-32: l'organisation proposée par X. 1) Elle n'est pas originale. mais s'inspire des expériences passées ( J4-15) et présentes ( t 6 ). 2) L'énoncé du projet (17). 3) Le projet est réalisable: les moyens pour acheter les esclaves () 8-19). 4) Le projet est réalisable: les moyens pour con.H'Tl'erles esclaves (20-21 ). 5) Le projet est raisonnable à court terme: la demande sera forte (22). 6) Le projet peut être réalisé par étapes (23-26). 7) Le projet est raisonnable à moyen terme: la multiplication des kainotomiai. souhaitable et possible. accroitra progressivement la demand'!. déjà forte initialement (27-32).

IV, 1

11J

les objections possibles; leur réfutation. 1) Objections relatives aux moyens financiers (le projet jugé irréalisable): a) le projet est trop ambitieux, eu égard à l'eisphora que l'on peut espérer obtenir. Réponse: - une réalisation progressive est dans tous les cas possible (33-35); - une réalisation progressive est même souhaitable (36-38). b) Je projet est trop ambitieux. eu égard à la demande probable (d'esclaves mineurs), i.e. aux moyens financiers des particuliers. Réponse: on adaptera l'offre à la demande (39). c) le projet est irréalisable, car il n'y aura pas d'eisphora du tout. Réponse: même sans eisphora, le projet peut être mis en route, grâce aux excédents de revenus (40). 2) Objections relatives aux conséquences du projet, en temps de guerre (Je projet jugé peu sûr. voire dangereux): a) l'abandon des mines: les esclaves dans l'année (4142). b) le maintien de l'exploitation: le Laurion-forteresse (43-

111) 33-48:

48).

IV) 49-50: les avantages complémentaires de /'organisation proposée par X. Des revenus supplémentaires pour la cité; des revenus supplémentaires pour les particuliers. V) 51-52: conclusion: une cité plus forte et plus disciplinée: la trophè des éphèbes.

••• 1-12. Arguments en faveur d'une exploitation accrue des mines 1) La richesse des gisements

1. Ta y& µ11v tipyup&ta &Î lCQtQO"lC&t>a0"8&i11 chç O&i, Les mines «d'argent» du Laurion étaient en réalité. on le sait. des mines de plomb argentifère. Une fois extrait des galeries ou des puits, le minerai devait être broyé puis lavé (cf. Ardaillon, 60 sqq.);

112

LES REVENUS DES MINES

la fusion dans des kaminoi permettait ensuite d'obtenir « le plomb d'œuvre », qu'on traitait à nouveau en le chauffant à l'air pour obtenir la séparation du plomb et de l'argent (cf. Ardaillon, 82-83). La richesse des filons, i.e. le pourcentage d'argent par tonne de minerai extrait. est objet de controverse entre les modernes 1 • Katamœoo.Ç&tv, c'est« construire». au sens d'agencer, donc d'organiser un système de telle sorte qu'il fonctionne convenablement (cf. infra IV, 33: Kataa1e&oo.o8&imiçt1'ç 1t6À.Eroç;l'expression K. n)v 1t6À1vest classique chez les philosophes du ive siècle, traitant de J'organisation de la cité idéale, cf. e.g. Platon, Rép. VIII, 557 d; Aristote, Polit. II, 1267b 30). Dans ce chapitre, X. emploie plusieurs fois ce verbe à propos des mines: IV, 11, 8apaoùvt&ç 1eataa1e&uaÇroµe8atv aùtotç; IV, 13 (même expression qu'en IV, 1); IV, 22, 7tOÀÀoiµèv t&v 1eat&aK&oo.oµtvrov; IV, 28, VOO)O'ti yàp 1tâ:A.1v 1eaTao1e&uâ:Çovtm; IV, 32, tè> 6riµoo1ov oôTro 1eataaK&uaÇ6µevov. Il est difficile de rendre ces expressions par une seule et même traduction. En tout cas, il faut éviter de traduire «exploiter» (et «exploitation», « les exploitants»). comme si l'on avait tpyaÇto8m (cf. infra ad IV, 3). Kataa1e&uâ:Ç&1v, c'est plutôt ici« organiser» l'exploitation des mines (ainsi traduit justement G. Bodei), et pour X. l'expression s'applique, selon les cas. à deux catégories d'opérations: 1) à l'échelle de l'État, elle désigne l'aménagement ou l'organisation d'ensemble du secteur minier, nécessaire à l'obtention de revenus substantiels; 2) à l'échelle des particuliers, elle désigne l'équipement (en matériel et en hommes) nécessaire à l'exploitation des concess10ns. Voir encore ci-dessous.

1taµ1toÀ.À.a liv voµiÇco x.ptiµata aÀ.À.cov 1tpocr6ôcov1tpocntvat.



aùtcov Kai aveu trov

« Sans compter les autres revenus», i.e. les revenus habituels. La proposition de X. ne tend pas à supprimer les revenus antérieurs, mais à fournir un revenu nouveau. Les revenus habituels sont notamment ceux que la cité athénienne tirait de l'adjudication des concessions aux particuliers (cf. infra ad IV, 49). Rappelons brièvement les trois problèmes essentiels, dont deux intéressent le lecteur des Poroi. 1) Le fondement juridique de cette « adjudication » publique est malaisé 1

Cf. G. Bodei. XCII et notes (entre 1.200 et 3.500 grammes par tonne); voir aussi R. J. Forbes, Studies in Ancient Technology, VIII (Leyde, 1964), 224-S (pourcentage d'argent par rapport au plomb), 226-245 (sur le traitement du minerai dans I' Antiquiti:; sur le Laurion en particulier, cf. 234, 235-6, 237-9).

IV. 1

113

à définir 2 • R. J. Hopper a noté le contraste entre d'une part le court terme des baux des concessions (3 ou 7 ans), le caractère aléatoire et peut-être peu rigoureux (l'ye µT)v xp6vcp oi 1tÀEiotot èiv8pro1tottytvovto tv àï...ï...' àei tà ëpya aùtoiç, où8eiç 1tci>1to-re ëpyou 111t6pT1crev, -rrovtpya.Çoµtvrov neptflv. Premier argument tiré de remarques sur la main-d'œuvre: même au temps où il y avait le plus d'hommes dans les mines (certainement avant 413/2. peut-être entre 431 et 415. quand la frappe des monnaies athéniennes était si abondante). «jamais personne n'a manqué de travail.

IV, 3

117

mais toujours les travaux (à accomplir) excédaient (les possibilités) des travailleurs». Comme ils se lisent ici pour la première fois dans les Poroi. il faut dire un mot des erga et des ergazoménoi. Les erga sont « les travaux», et tel est le sens ici (au travail en général - ergou sans l'article - répondent les travaux concrets de chacun des travailleurs - ta erga). Mais assez souvent dans les textes athéniens, l'expression est synonyme de ta argyreia. et désigne donc les mines du Laurion: dans les Poroi, cf. IV. 22,26,31,39 (bis) et 44; en dehors de X., cf. Isée Ill, 22; Dém. XXXVII, 4; XLII, 3, 17-21, 23, 31. Après avoir rassemblé ces textes, Lauffer (p. t 5) conclut justement « dass die Bergwerke und die Bergwerksarbeit besonderen Wert für Athen erlangten », et remarque que cela éclaire l'emploi systématique d'ergastèrion (dans un contexte minier). Ainsi, les erga sont à la fois les travaux et les lieux où l'on travaille, et en Attique ce sont par excellence les mines du Laurion. Sur l'ambivalence d'ergazésthai (et de oi ergazoménoi), cf. Lauffer (pp. 14-15). «Travailler», «travailleur», ces termes désignent tous ceux qui travaillent dans ou pour les mines, donc aussi bien les exploitants (les concessionnaires: des citoyens athéniens, parfois riches) que les ouvriers (des esclaves en majorité, mais aussi des hommes libres, cf. infra ad IV, 22), pour lesquels un terme plus précis est usité, oi ergatai (infra IV, 5). Citons deux exemples tirés des plaidoyers. D'un côté (Dém. XXXVII, 28), voici Pantainétos qui accuse Nicoboulos: « il a traité le minerai que mes esclaves avaient extrait» (t11v àpyupinv, fiv oi tµoi oiKttm 11pyaaavro). D'un autre côté (Hypéride. III, 35), Lysandre dénonce la fraude commise par le riche Épicratès à propos d'une mine, « qu'il exploitait déjà depuis trois ans» (o fipyaÇeto µtv iîôTJ tpia ft11). Citons encore l'anecdote relative aux mines de Lydie (Aristote, Mir. 52, 834 a), où dans la même phrase le verbe s'applique à Crésus, qui « faisait exploiter» ces mines, et aux «travailleurs» qui s'y réfugièrent pour leur perte ('Ev toiç nepi Aufüav µetallotç toiç nepi ntpyaµov, ii ÔllKai Kpoicroç Elpyacrato, noAiµou n voç yevoµtvou, Kattq:,uyov oi tpyaÇ6µevo1 ê1t· aùtà, toù ôt crtoµiou è1totKoôoµTJ8tvtoç à1tE1tviyTJo-av).En dépit de cette ambiguïté, on peut traduire sûrement ici « les travailleurs», i.e. la maind'œuvre: en effet, à la ligne suivante, et évoquant le temps présent, X. parle des andrapoda; et, au début de la proposition, l'expression oi pleistoi anthrôpoi désigne sûrement des esclaves (cf. IV, 14, à propos des «hommes» de Nicias). Rappelons que l'ambiguïté d'ergazésthai est l'un des arguments qui déterminent Lauffer à corriger le tableau habituellement sombre des

) )8

LA RICHESSE DES MINES

conditions de travail dans le Laurion : « Bergwerksunternehmer und Bergwerkssklave arbeiten hier gleichsam « Hand in Hand ». 'Epyacria ist die Arbeit des Unternehmers und zugleich des Sklaven » (p. 15). Il y a certainement du vrai dans ces remarques. mais le tableau n'est pas complet (cf. infra ad IV, 22).

4. Kai vüv 6è o{ 1eeKtT1µtvo1 tv toiç µetaÂ.Â.otçàv6pa.1to6a où6eiç toü 1tÂ.110ouç à7touç)ou bien les louent à des concessionnaires, ou bien les utilisent directement. s•ils sont eux-mêmes concessionnaires.

Kai yàp ôTJ ôtav µtv ÔÂ.iyot ôpooocoot x:ai ÇT1troo-1v, ôÂ.iya oIµat Kai tà 1p11µata eûpio-Kttat · ôtav 6t 1toÂ.Â.oi,

1toÂ.Â.a1tÂ.aoia 11àpyupittç àva 1tÀ.Eiovtçtni tô ëpyov toùto ëpxovtat. Sur l'anacoluthe, cf. Thiel, ad /oc., qui, à la suite de Dindorf, rapproche Cyr. IV, 3,12-13. - X. évoque le phénomène classique des « ruées vers l'or»: plus le minerai paraît abondant, plus les candidats à l'exploitation sont nombreux; le problème de la demande, donc de l'utilisation ou de la vente du métal précieux, ne se pose pas pour eux. Implicite ici, la croyance en la valeur constante de l'argent sera évoquée plus loin (IV, 10).

7. Kai yàp ÔT}Ë1tt1tÀ.a µév, tnetôàv {1eava nç KtT)O'lltat tü oîKi~, où µa.À.aftt 1tpocrrovoùvtat· àp-yi>ptovô& oùôeiç 1trooôtro 1toÀ.ùtKtitcrato, Ô>crteµ11ftt 1tpocrôeicr8at· Voici l'explication (ycip) de X., donc la suite logique du paragraphe précédent. L'observateur constate deux phénomènes opposés: 1) une production abondante d'objets travaillés, de blé ou de vin peut provoquer la mévente, la concurrence est donc néfaste; 2) une production abondante d"argent ne provoque rien de tel, ici la concurrence est possible, voire souhaitable. A ces deux observations X. apporte deux explications correspondantes: 1) f1tutÀ.aµtv, 2) dpyuptov 6t. S'il convient de marquer nettement les étapes du raisonnement de X., c'est d'abord pour clarifier certains points de vocabulaire. Il est manifeste que les épip/a comprennent les objets travaillés en broni.e ou en fer, le blé et le vin. On a parfois traduit à tort « le mobilier» (E. Chambry, «les meubles»; G. Bodei, «i supellettili»); mais le mobilier, c'est 1' tcataa1Œl>'l,employé un peu plus loin (IV, 8) et ailleurs chez X. (Cyr. III, 1,2; Agés. VIII, 7; Hiéron Il, 2; etc.). M. I. Finley, Studies in Land and Credit ... , 53, rapproche Aristote, Polit. II, 1267b, et définit

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L'EMPLOI DE L'ARGENT

les épipla ainsi : « Furnishings are wealth as objects of use or dis play, not in the productive sense of capital goods », et il renvoie à notre passage. La meilleure illustration de la variété des épipla se trouve assurément dans Écon. IX, 6-8. Ischomaque et sa femme rangent et classent leurs épipla; sont énumérés 1) les affaire5 nécessaires aux sacrifices (le maître de maison, comme les citoyens à l'Assemblée, s'occupe d'abord des hiéra); 2) les parures de ïete et les vêtements; 3) les couvertures; 4) les chaussures; 5) les armes; 6) ce qui sert au travail de la laine; 7) à la préparation des céréales et de la cuisine; 8) ce qui concerne le bain; 9) ce qui sert à la préparation de la pâte; t 0) les provisions du mois; 11) les provisions calculées pour une année. - Ainsi, les épipla sont tous les objets, ustensiles et provisions nécessaires à la vie d'un oikos. Dès lors, on comprend que des objets travaillés en bronze ou en fer puissent en faire partie, au même titre que des réserves de nourriture. Or, assure X., l'acquisition des épip/a est (et doit être) limitée à ce qui est suffisant pour l'oikos. Tout supplément est inutile (même idée dans Écon. III, 2). Le maître de l'oikos doit se borner à se procurer les outils ou les vivres qui manquent, à remplacer les objets détériorés, à prévoir le court terme ( une année). En termes économiques, on dirait que X., comme ses contemporains, ignorait la notion d'investissement productif. Mais ce commentaire serait peu adéquat. D'une part, la remarque de X. ne prétend pas résumer un rationalisme économique, justiciable d'une analyse de cette nature; elle est et se veut sinon une évidence pour ses lecteurs, du moins une remarque de simple bon sens. D'autre part, cette remarque doit être replacée, comme plus haut l'allusion à la ruine des bronziers, dans le cadre d'un marché local et rigide. « En revanche, pour l'argent, personne n'en a teUement qu'il n'éprouve pas le besoin d'en avoir davantage>►• X. énonce ici (cf. aussi Banq. IV, 35) une vérité connue des Grecs depuis Solon (frg. I, 71 Diehl, rapporté par Aristote et par Plutarque) jusqu'à Polybe, (XIII, 2,2-3, à propos de Scopas), en passant par Aristophane (Ploutos, 193-197) et Isocrate (VIII, 7). Hormis certains philosophes, prônant l'austérité ou la frugalité, la plupart des Grecs souhaitaient être riches, et les riches désiraient s'enrichir encore. Le concept et le désir (absents chez les Grecs) de l'expansion économique n'ont rien à voir avec le souci (bien attesté) de l'accumulation des richesses, de richesses qui serviront aux dépenses familiales ou civiques; cf. ci-dessous 8 • 8

C'f. tout récemment les justes remarques 1975). 42-45 et 163.

de M. 1. Finley. l 'éwnnmie antiqu«• ( Paris.

IV, 7

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à"A.) ..:· fJv no-1 yéVT)tat 1taµ1tÂ.rt8éç, tè> 1tsp1tteüov Katopt'.>ttovteç où6tv ftttov i\6ovtat fi xpcoµevo1aùtq:,. « Et si certains en ont à profusion. ils n'éprouvent

pas moins de plaisir à enfouir le superflu qu'à en faire usage». Ici, il ne s'agit point de biens mais de moyens 9 • Avec l'argent dont il dispose, le particulier doit veiller d'abord à ce qu'il y ait dans sa maison et pour sa famille des épipla en suffisance; ensuite il peut consacrer des sommes variables à l'accroissement de ses revenus (achats d'esclaves; participation à des opérations minières, commerciales, ou de crédit, etc.). C'est seulement une fois épuisées ces possibilités de dépense qu'apparaît l'argent péritteuon. S'il faut le préciser, c'est pour qu'on ne croie pas que le particulier auquel songe X. se soucie seulement de ses besoins élémentaires et ... enfouit l'argent de reste - ce qui serait en contradiction avec la mentalité évoquée plus haut en IV, 6. L'enfouisseur de X. n'a rien de commun avec l'avare d'Antiphon (frg. 57 Diels), d'Ésope ou de La Fontaine. D'après notre passage, le détenteur d'argent péritteuon a deux possibilités: enfouir ce superflu. ou le dépenser - ce que X. développera un peu plus loin. Dans les deux cas, il y a - ou il peut y avoir thésaurisation (cf. l'achat de bijoux, qu'on retrouve parfois aujourd'hui, à côté des monnaies. dans les trésors enfouis par les Anciens). L'enfouissement, on le sait, était l'équivalent du dépôt dans un coffre. Thiel (excursus IX, 50-51) voyait là un témoignage de la méfiance des Grecs envers les banques, et il attribuait cette méfiance à trois motifs principaux: 1) l'argent déposé en banque aurait servi notamment au crédit maritime. chose très risquée; 2) la mentalité populaire étant hostile au prêt à intérêt, les banquiers auraient été défavorisés en cas de procès, - ces deux motifs expliquant la fragilité des banques, les mouvements de panique quand survenait la nouvelle d'un naufrage ou d'un procès -: 3) enfin, l'enfouissement eût été jugé préférable au dépôt en banque par ceux qui voulaient masquer leur fortune, et ainsi échapper à certaines liturgies. -- Aucune de ces trois raisons n'est convaincante 10 • En fait, s'agissant d'un dépôt, la cave du banquier n"offrait guère plus de sécurité que le trou ou la cachette connue du seul propriétaire (et cela n'est pas vrai seulement de la Grèce antique). cf. R. Bogaert. Banques et banquiers. 377-378. En tout cas. 11

Sur la distinction entre les hiens nécessaires (Ill t1nankaia) et les hil'ns supernus lta péri/la). cf. Érnn. XX. 1; Hiéron Il. 2 et IV. 7; infra ad IV. 9. 10 Pour la réfutation du premier point, qui est le plus important. cf. R. Bogacrt, Chron. d'Éxyptt• 40 (1965). 14().156.

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L'EMPLOI DE L'ARGENT

il est de fait qu'encore au ive siècle, le péritteuon (qui, selon moi, ne comprend pas l'argent placé à intérêt) était généralement gardé (et caché) à la maison. X. constate une pratique, il ne dit pas qu'il l'approuve. Or, si les idées exprimées par le roi perse dans la Cyr. sont bien celles de X., il faudrait croire que celui-ci n'était nullement favorable à la thésaurisation. 1) Quand Cyrus renvoie la femme du roi d'Arménie avec l'argent qu'elle lui offrait, il lui déclare: « retoume-t-en avec l'argent que tu apportes, et ne le donne plus à enfouir au roi d •Arménie; prends sur cette somme pour équiper magnifiquement ton fils, achète ... de belles parures. Dans la terre, c'est assez d'enfouir le corps de chacun Bizos, Coll. Univ. France). de nous, après la mort» (Cyr. III, 3,3 -trad. 2) Et Cyrus à Crésus: « je suis, comme tout le monde, insatiable d'argent; mais sur un point il me semble que je diffère de la plupart des hommes. qui, ayant acquis le superflu, en enfouissent une partie, en laissent pourrir une autre, et se donnent bien du mal à compter, à mesurer, à peser, à gérer et à conserver le reste» (VIII, 2,20-21). - Pour comprendre quel pouvait être l'idéal xénophontique en la matière, il faut attendre IV, 9.

8-9. Kai µTtVôtav yt tù npattCOOlVa{ 1tOÂ.ElÇ, lcrx,upô>ç o{ av0pronot àpyupiou ôéovtat. o{ µi:v yàp èivôptç àµq,i onÂ.att KaÂ.àKai innouç àya0oùç Kai ol16t àpy6ptov ttµtci>tepov 1totei. Il faut grouper trois propositions : I ) « l'or n'est pas moins utile que l'argent»; 2) « mais, lorsque survient, d'une manière imprévue, une abondance d'or, cela fait baisser la valeur de l'or et augmenter celle de l'argent»; 3) nous devons être certains (IV, 11) « que l'argent ne perdra jamais de sa valeur». Deux points sont à considérer, étroitement complémentaires. Le premier est relatif à l'histoire des idées (la croyance en la fixité de la valeur de l'argent, contrastant avec la variabilité de la valeur de l'or), le second

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OR ET ARGENT

est un point d'histoire économique (la constatation de la dépréciation de l'or en œrtaines occasions). Pour le premier point, les commentateurs, depuis Boeckh jusqu'à Andréadès et Cawkwell. ont eu beau jeu pour relever les inconséquences de X. Il est juste, disaient-ils, de reconnaître que la .valeur de l'or par rapport à l'argent diminue lorsque l'or devient abondant, mais on attendrait la proposition réciproque. L'exploitation intensive du Laurion, en faisant augmenter la circulation de l'argent, devait entraîner à terme deux conséquenœs: d'une part, une appréciation de l'or par rapport à l'argent; d'autre part, et du fait que l'augmentation du numéraire n'aurait été accompagnée d'aucune augmentation parallèle de la production des biens réels, une hausse des prix, donc une dépréciation absolue de l'argent monnayé. La première conséquenœ n'était œrtainement pas ignorée de X. et de ses contemporains; mais le rôle premier attribué à l'argent s'explique aisément, comme l"ont noté Thiel, ad /oc., Andréadès (p. 387-388) et G. Bodei (p. Lxx1v). Les cités grecques, dans leur immense majorité (font exœption Cyzique, Lampsaque, Phocée et Mytilène, qui frappent encore de l'électrum), émettent au IVe siècle des monnaies d'argent. Seuls les rois perses frappent de l'or. Les Grecs sont donc habitués à un monométallisme de fait; l'argent étant le métal de référenœ (l'étalon immuable). l'or, marchandise parmi d'autres, était considéré comme ayant une valeur variable par rapport à l'argent. En revanche, la deuxième conséquenœ ne pouvait sans doute pas être aperçue par les Grecs du IVe siècle (pas plus qu'elle ne le fut après l'énorme augmentation de numéraire due au monnayage d'Alexandre et des diadoques - les Grecs n'ont pas eu leur Jean Bodin). On peut donc condamner le principe du raisonnement de X. Mieux vaut peut-être, comme l'ont fait Von der Lieck (pp. 46-49) et G. Bodei (pp. Lxxvn-Lxxvm), chercher à voir si les conditions particulières de l'économie athénienne et de la circulation monétaire au IVe siècle ne rendent pas quelque crédibilité à l'affirmation de X. Je reproduis les trois arguments avancés par G. Bodei: 1) « une grande partie de la monnaie aurait circulé en dehors de l'Allique»; .2) «la quantité de marchandises circulant en Attique se serait accrue de par les importations payées en argent», de sorte que les prix auraient pu demeurer relativement stables; 3) les besoins en argent du monde méditerranéen étaient immenses en comparaison de la productivité des mines (cf. supra). - Il est sans doute exact que l'exode d'une bonne partie de l'argent (produit à Athènes) vers l'Orient méditerranéen aurait oblitéré (comme œla s'était passé au ve siècle. lorsque la production des monnaies athéniennes était à

IV, 10

133

son zénith) les conséquences économiques, sur le marché de la cité. de l'accroissement de la production métallique. Après la conquête d'Alexandre, l'extension de l' oikouménè et la constitution de grands ensembles politico-économiques modifieront sensiblement les données du problème. Outre l'affirmation d'un principe. le texte de X. contient - et c'est le deuxième point - une observation intéressante. X. et ses contem• porains ont eu l'occasion de constater, sans doute à plusieurs reprises, que l'afflux d'or provoquait une diminution de la ratio or-argent. Thiel ne doutait pas de la véracité du fait, et il écrivait: « En partie parce que les rois de Macédoine commençaient à exploiter les mines d'or de Thrace, en partie parce que de nombreux trésors sacrés avaient été utilisés pour les guerres et remis dans le circuit commercial sous forme de monnaie, la ratio du prix de l'or et de l'argent se modifia peu à peu aux alentours de 350» (ad /oc.). De 1/14, elle serait passée assez vite à 1/10. Opinion analogue chez G. Bodei (p. xuv), qui croit que les premiers philippes d'or apparurent en Grèce vers l'époque où X. écrivait les Poroi, et que dès cette époque la ratio or•argent s'était établie à 1/10 (p. Lxxv). C'est une double erreur. La ratio or-argent, naturellement variable suivant les régions (elle n'était pas la même en Sicile, en Grèce péninsulaire ou en Asie) commence à être assez bien connue, au moins pour Athènes, grâce notamment aux études récentes de W. L. Thompson et de D.M. Lewis 15 . Ce dernier a montré que dès 406/5, lorsque les Athéniens fondent les Nikai pour frapper de l'or, la ratio était de 1/12, et que cette ratio avait peu évolué jusqu'en 355/4 (le dernier document étudié par Lewis est en effet, par une coïncidence toute fortuite mais intéressante pour nous, de la même année que les Poroi): 1/12; 1/12,15; 1/12,40; etc., tels sont les chiffres pour la première moitié du ive siècle. C'est seulement à partir des années 330 que la ratio s'établit à 1/1O. Cette relative stabilité s'explique. En effet, Georges Le Rider, qui publiera prochainement un Corpus des monnaies de Philippe II et que je remercie de ces renseignements, a établi, en se fondant notamment sur le témoignage des trésors, que le monnayage d'or de ce roi n'était pas antérieur aux années 345. Dès lors, deux choses sont claires. l) X., en 355/4, ne saurait faire allusion à des philippes encore dans les limbes. Et, d'une manière générale, l'idée selon laquelle tÀtµci'rta.t'èiv eÏfl tij 1t6Àet. Cf. supra ad IV. l et l l. et infra ad IV. 22 et 28. La fourniture d'une main-d'œuvre abondante ( = le projet de X.) est l'affaire des kataskeuazoménoi, et non des erga:oménoi.

aùtoç µi;v oùv ëyroye àq>' rov µtÀÀroÀ.Éyetvoùôév n àç,tô> 0a.uµaÇecr0atWÇÔUO'EUpEîOV îl BÇEUpflKCOÇ. îÙ µÈV yàp OOV Uç,ro Kai vov en 1tavteç ôproµev, tà ôi; 1tapo1x6µeva 1tâvtrov 1ea-rà taùtà aù àKouoµev · ( 14) tfiç µtvtot 1t6Àe(t)Ç1tcivu aç,tov 0a.uµcicrattô aicr0avoµÊVT}V 1toÀÀoùç1tÀout1Çoµévouç tç, aùtfiç iôtcotaç µ11µtµeicr0a.t îOUîOUÇ. Bel exemple de chiasme. X. invoque d'abord les expériences présentes, qu'il ne décrira (brièvement) qu'au § 16, puis les expériences passées, aussitôt rappelées (§ 14 et 15). On note l'insistance de X. sur les témoignages (et non sur les raisonnements), toute naturelle ici (ôproµsv ... à1eouoµsv), et sur l'unanimité qui s'en dégage. Le présent, nous le voyons tous; le passé, nous l'entendons raconter par tous ( = tous ceux qui l'ont vécu et qui sont encore parmi nous) de la même manière. Katà taùtâ, c'est « übereinstimmend » (Herzog, p. 474, qui cite des parallèles chez Platon, Théag. 129d; Isocrate, VIII, 12; et Lycurgue, C. Léocr. 93). Thiel, dans son apparat critique, approuvait l'interprétation de Herzog. Pourtant, on continue à traduire (Marchant, Chambry, G. Bodei): «nous apprenons qu'il en allait de même dans le passé». En fait, ce que souligne X., car cela méritait d'être relevé dans une civilisation orale où les témoignages et les souvenirs des uns contredisent ceux des autres (cf. Hérodote, passim; Thue. I, 22,3), c'est l'unanimité des «anciens» récitant la même litanie: oui, c'était bien comme cela 21 •

1tciÀat µi;v yàp ôit1tou oiç µeµÉÀf1KevÙKflKooµev ôtt NtKiaç 1totè ô NtK'.flpatou èKtitcra.to èv toiç àpyupeiotç XtÀiouç àv0pro1touç, oüç èKtivoç l:cooi~ tq'.) 0~Ki èçeµio0cooev, èq> • cp ô~oÀov µÈv àttÀ 11 SKcicrtou tfiç tiµtpaç à1toôtô6va1, tôv ô' àpt0µôv icrouç àti 1taptxe1v. 21

Sur les ccarchives vivantes» que constitue la mémoire des anciens et sur le rôle de ceux-ci dans la vie publique grecque, cf. par exemple dans un autre contexte (contestations territoriales) les témoignages des bergers, cités in extenso dans les documents d'arbitrage thessaliens: /G IX 2, 521 (cf. L. Robert. Hellenica VII, 155); à Gonnoi. un berger déclare: ccj'ai entendu dire par les anciens que les oikopédo situés à Pothnaieus appartenaient aux gens de Gonnoi ,, (B. Hclly, Gonnoi Il, Amsterdam, 1973, n° 93 B. 1. 20).

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NICIAS ET SOSIAS

Nicias, fils de Nicératos, est le célèbre Athénien. stratège malheureux, dont Plutarque écrivit la vie: cf. J. K. Davies, Athenian Propertied Families (Oxford, 1971), au n° 10.808. Né vers 475. il périt en Sicile en 413. Les faits rapportés ici, témoignant implicitement d'une forte exploitation des mines du Laurion. doivent concerner la dernière période de sa vie. entre 430 et 415 environ. Pour clarifier le commentaire d'un texte souvent discuté. je distinguerai trois points. l 0 ) Le contrat de louage. C'est celui que X. va proposer comme modèle à la cité (cf. IV. 17 et supra III, 9-10, où les chiffres retenus par X. impliquent un revenu identique à celui que percevait Nicias), lorsque celle-ci se substituera ~ux particuliers. C'était certainement un contrat de type courant (cf. les exemples. allégués ensuite, d'Hipponicos et de Philémonidès). Le propriétaire des esclaves louait ceux-ci à tel concessionnaire, « à la condition que (le concessionnaire) paie (apodidonai) une obole nette (atélè) par homme et par jour, et qu'il maintienne (paréchein) toujours le chiffre de l'effectif au même niveau ». Atélès, appliqué à une somme d'argent, à un revenu (et non pas à un produit ou à une marchandise - cette distinction, essentielle. n'apparaît pas bien dans l'index de la Sy/1.3 ), signifie «net», « sans déduction d'aucune sorte»; cf. Dém. XXVII. 9 (bis); XXVIII, 12; Sy/1.3 1044 (Halicarnasse), Il. 21-22; 1200 (Amorgos), Il. 19 et 20; cf. aussi D. Behrend, Att. Pachturkunden. 120 et note 96. On doit entendre ici que le preneur ne pouvait en aucune manière invoquer une charge ou un manque à gagner imprévus (maladie, blessure, intempéries) pour demander une remise sur les sommes dues. Outre qu'il avait à entretenir (nourrir, vêtir, loger) les esclaves, le preneur devait supporter tous les risques. naptxe1v est une correction nécessaire (mss. napetxev), proposée dès le XVJt'siècle par Leunclavius, et reprise par tous les éditeurs. L 'infinitif paréchein, comme apodidonai, doit s'entendre des obligations du preneur, comme le souligne la présence de µtv et de ôt 2 2 • Si l'on gardait 1tapdxev, outre que le rythme des propositions serait brisé, le sens serait peu satisfaisant: on devrait comprendre que Nicias louait ses esclaves ... et s'engageait à maintenir constant le nombre des esclaves loués. W. Schwahn, en 1931, soutint cette absurdité; pour la réfuter, 22

Je résume ici les commentaires pertinents de Herzog. p. 475-6. de Thiel. ad foc.. et de Lauffer. pp. 81-87.

IV, 14

139

Wilhelm (p. 26) invoqua judicieusement les contrats de l'Égypte lagide, par lesquels un propriétaire loue un troupeau athanatos, le preneur s'engageant à remplacer toute bête morte ou disparue 23 • Le rapprochement avec les contrats lagides permet également d'éviter les commentaires pathétiques (la clause concernant la fixité du nombre ne s'explique pas par le fait que les preneurs auraient souvent exigé trop d'efforts des esclaves loués, les tuant au travail; c'est une clause classique. prémunissant le bailleur contre les risques de détérioration). Le tarif d'une obole par jour et par homme, attesté ici par trois exemples (Nicias, Hipponicos, Philémonidès). considéré comme usuel par X. puisqu'il sert de base à ses calculs, se retrouve encore, à propos du Laurion, dans Hypéride, II (C. Lycophron), col. 11, l et 2: Dionysios(?) employait dans les mines (tv totç fpymç) des esclaves appartenant à Ariston et il versait à celui-ci, par l'intermédiaire de Théomnèstos, une obole par jour et par esclave 2 4 . Il est piquant d'observer qu'Hypéride, qui accuse Ariston d'être un sycophante, déclare que grâce à l'argent ainsi régulièrement perçu il est un athanatos sykophantès. « Immortel», oui, au sens où est immortel le cheptel d'esclaves loués: on tient donc là le terme même qui caractérisera les contrats lagides, et si Hypéride l'emploie par ironie, c'est, j'imagine, que le terme existait déjà dans l'Athènes du ive siècle pour définir ce genre de contrats de louage. Le revenu du propriétaire est calculé par X. pour une année de 360 jours. C'est ce qui ressort de IV, 23 (6.000 esclaves publics, loués à raison d'une obole par jour. rapporteraient à la cité 60 talents . . , ée dd 60 talents 3.600 mines tou emautou; 1ann compren one b = . = 360 6.000 o oes 1 10 mmes jours). Ces chiffres ont suscité des commentaires aberrants. Certains ont conclu à 360 «journées de travail» 25 • W. Schwahn (p. 256), tout en comprenant la même chose, ajouta que X. se trompait certainement; car, expliquait-il, si l'on retranche les jours de tète, l'année ne comprenait guère plus de 300 journées de travail. En réalité, comme l'ont montré notamment Wilhelm (p. 25-26), et LaufTer (p. 176-177), il s'agit d'unités :u Outre Wilhelm, â. principalement S. von Bolla-Kotek, Unters11ch11ngen z. Titrmiete 1111dViepacht (2- éd., Munich, 1969), 66-80; également A. Christophilopoulos, Rtv. int. droits Ant. 4 (Ml/anges F. de Visschtr 111, 1950). 297-301; et C. Préaux, Chron. d'Égypte 41 (1966). 161-164. qui, rapprochant les contrats lagides du texte des Poroi, trouve là un exemple de la continuité entre la Grke des cités et l'Égypte lagide . .i• Ou peut.ftre un peu plus, si Théomnéstos prenait un pourcentage au passage (d. LaufTer, 8>6). :u Ainsi F. Oertel, Rhein. Mus. 1930, 237; Wilsdorf 1 • 147-8: W. L Westermann. Slo-.e Systems, 15.

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NICIAS ET SOSIAS

de compte: le preneur s'engageait à payer pour 360 jours par an, quel que fût le nombre réel de journées de travail (nombre variable). Et cela était usuel dans les contrats de travail, où le salaire était habituellement calculé pour une année de 360 jours (ou de 390, s'il y avait un mois supplémentaire), indépendamment du nombre des jours fériés. Citons un exemple tiré des comptes d'Éleusis. En 329/8 (/G 112, 1672, a, 1. 11), l'architecte reçoit, lit-on, un salaire de « 2 drachmes par jour»; en 327/6 (/G 112, 1673, 1. 60), le même reçoit pour une année (de 13 mois; il y a donc 390 jours) la somme de 780 drachmes, ce qui fait exactement 2 drachmes pour chaque journée 26 • Ce type de contrat semble avoir été avantageux pour le propriétaire: tel qui a acheté un esclave 200 drachmes (cf. infra ad IV, 23) récupère le prix d'achat en 3 ans et 4 mois. Lauffer (p. 72) explique la haute rentabilité de la location d'esclaves mineurs par l'insuffisance de l'offre par rapport à la demande. En revanche, le preneur, outre l'exécution du contrat, devait assurer l'entretien des esclaves ( = 2 à 3 oboles par jour); pour lui, le profit (ou la perte) était à proportion de la réussite (ou de l'échec) de son exploitation (cf. Lauffer, pp. 73-76).

2°) La gestion de Nicias et le statut de Sosias. On raisonne sur trois textes. Plutarque. Vie de Nicias 4,2: « (Nicias) avait de grands biens (ètcÉK't'ltO 1toÀÀ.a- il s'agit de propriété) dans la région du Laurion qui, s'ils étaient source de beaux revenus, n'étaient pas d'une exploitation sans ri5ques. Et il entretenait là une grande quantité d'esclaves. et l'essentiel de sa fortune consistait en argent». X., Mém. 11, 5.2: « On dit que Nicias, le fils de Nicératos, acheta au prix d'un talent un épistatès pour ses mines d'argent». - Le troisième texte est notre passage des Poroi: « Nicias autrefois possédait mille esclaves, qu'il louait à Sosias le Thrace, aux conditions suivantes, etc. ». W. Schwahn (p. 257), estimant ces textes contradictoires, donnait la préférence à celui de Plutarque et au X. des Mém.; en revanche, il condamnait la version des Poroi comme une «invention», mettant en scène « un mystérieux Thrace, d'ailleurs tout à fait inconnu». Et de conclure que les Poroi ne pouvaient pas avoir été composés par X. Or, dès 1914 Herzog (p. 475) et en 1922 Thiel (ad /oc.) avaient reconnu que l'épistatès des Mém. et le Sosias des Poroi n'étaient sans doute qu'une seule et même personne. Et Wilhelm (pp. 20-23). renvoyant à Thiel, n'eut aucun mal à réfuter Schwahn, montrant que les conditions 2

" Sur le calcul des salaires, cf. G. Glotz. Journal des Savant.V 1913. 210-215: et en général A. Burford. Crafi.mwn in Grt·t·k and R,mwn Soâvµetoi1eoov èmµtÎ..f:ia ytvo1to; puis il développe en 11, 2: èmµtÎ..f:la y& µT}v fiô' iiv àpKdv µ01 ÔOJŒÎ KtÀ. Même chose en IV, 3,31,37. Il semblerait donc qu'ici 3

'

Cf. A. Wilhelm, Beilriige z. gr. lnsrhrifrenkunde (Vienne. 1909). 240-242; L. Robert.

Bull. mrr. ht'II. 1928, 161.

146

L"ACHAT D'ESCLAVES PUBLICS

également la proposition tù yr. µiJv PouÀi} JCTÀ.ne fasse que prec1ser ridée exprimée dans la proposition précédente: dans l'une comme dans rautre, il s'agirait des modalités de l'achat plutôt que des moyens financiers nécessaires à l'achat. De fait, comme X. n'écrit pas: « beaucoup d'esclaves». on ne voit pas pourquoi la cité eût été plus à même d'acheter des esclaves que les particuliers. La comparaison des moyens financiers serait peu justifiée. Au contraire, la comparaison des moyens pratiques serait pertinente. Car les particuliers n'avaient que la ressourœ de se procurer êles esclaves au marché, lequel n'était ni permanent, ni toujours suffisant. La cité, elle, aurait disposé, comme les particuliers, de ce moyen: mais elle aurait pu aussi faire un appel d'offre, le Conseil ordonnant au héraut public (c'est à cette époque Philoclès. fils d'Euclès. cf. Sy/1.3 186, avec les notes de J. Kirchner) de faire une proclamation: « que celui qui le veut amène (en vue de la vente) des esclaves au Conseil ... ►>. Au marché, le particulier devait. dans la plupart des cas. accepter le prix fixé par le vendeur (lequel avait acquitté au préalable. sur les esclaves importés, un 1/50 calculé d'après le prix qu'il comptait demander); dans l'hypothèse de X., les prytanes, voyant affiuer les vendeurs. auraient pu, eux. examiner, estimer, et enfin acheter les esclaves présentés. En définitive, je traduirais ainsi: « Quant à faire une estimation des esclaves, il est évident que l'État pourrait, bien mieux que les particuliers. s'y préparer; c'est ainsi qu'il serait facile au Conseil de faire proclamer par le héraut ... » etc. Que vaut la proposition de X.? Sans doute trop optimiste, elle pèche sûrement par excès de simplification. L'optimisme consiste à être persuadé que l'offre s'adapterait très vite et très facilement à une demande énormément accrue. Or. X. sait que l'offre du marché-agora ne serait pas suffisante. « Le premier venu» (6 pouÀ6µr.vc:>lEpè>vtoO 'Epyétou ). ou encore les deux à la fois, quand téménos et hiéron étaient liés (cf. /G 12, 94 [Sy//. 3 931).

Kai OÎKiaç, Le terme, s'il doit être groupé avec les deux précédents (ce qui n •est pas sûr, cf. infra ad IV. 49), désignerait ici les « maisons sacrées», i.e. les maisons appartenant à la divinité et louées à son profit. Les maisons sacrées d'Apollon à Délos ont fait l'objet d'une étude approfondie de S. Molinier, Les « maisons sacrées» de Délos au temps de l'indépendance (Paris, 1914), qui note (p. 13) que les loyers de œs maisons apparaissent dans les comptes déliens dès le début du ive siècle 36 , et qui explique comment le dieu devenait propriétaire de maisons, à la suite de dons ou de confiscations. À Athènes, des maisons sacrées appartenaient à Athéna Polias; on en a retrouvé des bornes: /G 12, 363, l. 24; 364, col. Il, l. 8; 367, 1. 6; W. S. Ferguson, u cr. les insaiptions de D61os, où l'on distingue les 1.no8ô,,m:11;tcµt\l(l)v t~ 'PT)vtiaç et les J&ta8cbcn:tçu:µtY(l)vty Ari).o: e.g. Sy/1.3 153 (années 377-374), 28-29. ,. cr. à prâent /nsc. Dl/os n• 98, avec le commentaire de J. Coupry (Paris. 1972).

148

LOCATION ET GARANTIES

Hesperia 1 (1938), 74 ([h]6poç [ohc]iaç hu;paç 'A8f\va.ç 1t0Àuiôoç). Ce sont de telles maisons qu'évoquerait X.

x:ai tÉÂ.l')rovoùvtat 1tapà tflç 1t6Â.tcoç. L'opposition avec le groupe précédent parait nette; il faut observer une fois de plus que le vocabulaire de X. est en conformité avec les textes officiels. Les téménè, les sanctuaires, les maisons sacrées font l'objet de misthoseis. en revanche les taxes sont «vendues» par la cité, «achetées» par les preneurs (cf. encore IV, 20, où X. oppose les misthouménoi des esclaves aux ônouménoi ou aux priaménoi des taxes). «Acheter» une taxe: cf. Andocide I, 133-134; Dém. XXIV, 39; Arist0te, Ath. Pol. XLVII, 2; Ps-Aristote. Écon. II. 2, 1350a 18; Plutarque, Alcib. 5, 2-5 (cf. Ardaillon, 169-170); lnsc. Delphinion, n° 150, l. 90; cf. aussi Sy/1.3 1000 (règlement de Cos), li. 1-16. D'une manière analogue, les concessions minières sont «vendues» aux preneurs, lesquels dans les listes des pôlètes (M. Crosby, Hesperia 19 [1950), 192 (et note 12) et 206 sqq.) sont toujours désignés par le terme «acheteur» (ôriètès). On loue un bien (privé, public, sacré), on achète un droit (celui de lever une taxe ou d'exploiter une mine): l'opposition s'éclaire si l'on se place au point de vue de la cité. Le bailleur garantit au preneur la jouissance d'un bien, conformément aux clauses du contrat, et il est garanti contre les risques de détérioration. Le vendeur, lui, ne revendique rien d'autre que le paiement du prix convenu dans les délais prévus. 4) Le projet est réalisable: les moyens pour conserver les esclaves

20. "01troçys µflv tà rovl')0évta crtj>Çl')tcu, tq> Ôl')µocricp ëcrn Â.aµpcivstvèyyuouç 1tapà tô'.>vµtcr0ouµtvrov, rocrnsp x:ai napà tô'.>vrovouµtvrov tà téÂ.T). Sur les garants que devaient présenter les télônai lors de l'adjudication, cf., à propos d'Athènes. le texte vivant de Plutarque, Alcib. 5 37 • Il était normal que la cité exigeât des garants, puisque les sommes dues par les télônai étaient à verser dans certains délais, qu 'e11esétaient capitales pour les prosodoi publiques,. et que les télônai risquaient de lever le pied. Mais pourquoi X. présente-t-il comme une nouveauté la proposition d'exiger des misthouménoi les mêmes obligations de cautionnement qu'on exige des ônouménoi? Nous savons en effet qu'à Athènes, dès le ve siècle (cf. /G 12, 94) et au ive siècle (cf. Dém. XXIV, 40), et aussi ailleurs 38 , r Cf. également. à propos de la Macédoine. Ps-Aristote. Émn. Il. 2. 1350 a 16-:!1; en général J. Partsch. Gr. Bürf!.H"hu/hrt•cht (Leipzig, 1909), 32)-4 et 397-8. 311 Ainsi à Délos: /nsc. Délos. n° 98. Il. 103, I07. 109; n° 104-8, face B. passim, a\el: le, remarques de J. Coupry. p. M.

IV, 21

149

la cité exigeait des garants de la part de certains de ceux qui prenaient en location des terres sacrées. Il suffisait donc, dans le cas présent, d'assimiler les esclaves publics aux autres biens publics mis en location. Nouveau, le procédé ne l'est donc pas pour qui étudie l'administration de la cité; mais il l'est, à juste titre, aux yeux de X., qui traite de la location des esclaves mineurs. Les Nicias et autres Hipponicos, propriétaires privés louant des esclaves, n'exigeaient pas de cautionnement; la cité, elle, louant des esclaves publics, en exigera, comme elle l'exige déjà des fermiers des taxes et des terres sacrées. Sur le vocabulaire (fyyuoç, alors qu'on attendrait tyyurit11ç), ~f. Partsch, op. cit., 95 et note IO; Thiel, ad /oc. et Proleg. XXIII. Un peu plus haut (111, 14), X. a employé la forme attique, È"f'YUîlt'lÇ-L. Gautier (La langue de X., 141) notait que X. était de ces Grecs qui, par leurs conditions d'existence, avaient favorisé l'évolution vers la koinè, en faisant des emprunts à tous les dialectes.

20-21. àÀÂ.àµT}vKai àèitKi;craiye f,ij.ovtep tÉÀ.OÇ rcptaµtvcp i) tep àvôpaTCOôaµ1cr8ouµÉVQ). àpyuptOV µÈv yàp TCÔ)Ç Kai q>o>pacre1ev èiv nç t6 011µ6cr1ovÈçay6µevov, 6µoiou toû ioiou OVtOÇaùtep; « Du reste, pour frauder, le fermier des taxes a plus de facilité que le loueur d'esclave». La comparaison qui suit (argyrion men ... andrapoda dé ... ) parait un peu boiteuse, car la fraude des télônai s'èxerçait sur

un revenu (l'argent à verser à la cité), celle des loueurs d'esclaves s'exercerait sur un capital. De fait. X. laisse entendre (cf. infra) que la fraude consisterait, pour le concessionnaire-loueur, à vendre clandestinement, à la fin du bail et pour un bon prix, tel ou tel esclave public, jeune et robuste, et à le remplacer par un sujet de moindre valeur. Boiteuse, la comparaison paraît en outre passablement artificielle. Car, lorsqu'un télônès ne s'acquittait pas de son dû, le problème n'était pas, pour la cité, de distinguer l'argent qui lui revenait (et qui avait été détourné) de l'argent qui appartenait légitimement au télônès. Il était plutôt de recouvrer les sommes dues, alors que le débiteur avait pris la fuite (Andocide 1. 92) ou qu'il refusait de s'exécuter (Dém. XXIV, 40 et 134-136; cf. P. J. Rhodes, The A thenian Boule [Oxford, 1972), 148-151). Autrement dit, le problème était quantitatif. il n'était pas qualitatif. Or, ce serait l'inverse à propos des esclaves publics qui seraient donnés en location. La cité voudrait retrouver en fin de bail non seulement le même nombre d'esclaves, mais encore (et sauf cas de mort ou de disparition, cf. supra ad IV. 14) les mêmes esclaves, et non des malingres. des impotents ou des vieillards. Voir encore ci-dessous.

LOCATION ET GARANTIES

dvôpét1to6aôt crecniµacrµtva tq>6riµocricpcniµa.vtpq> La « marque publique» serait imprimée sur chaque esclave public loué dans les mines 39 • Le texte de X. appelle deux remarques. 1°) Sur la nature de la marque. On sait que les Anciens marquaient les animaux. les esclaves privés qui s'étaient enfuis et avaient été repris, les prisonniers de guerre en de rares occasions. En 440. les prisonniers samiens avaient été marqués d'une chouette par les Athéniens. La chouette était donc sans doute la marque publique d'Athènes; on la retrouve sur les tablettes d'héliastes, sur les poids officiels de la cité (cf. L. Lacroix. loc. cit.; J. et L. Robert, Bull. épigr. 1973, 25), et c'est vraisemblablement la chouette qui aurait été imprimée sur le visage des esclaves publics loués dans le Laurion. 2°) Sur l'usage de la marque. Le texte de X. n'implique pas qu'à Athènes tous les esclaves publics étaient marqués. En dehors des Poroi, on ne peut toujours citer qu'un fragment d'Andocide (frg. 5 Blass), relatif au père d'Hyperbolos: celui-ci aurait été un esclave public, è tE 1troÀoùvt1x:ai tÈça.yovtt, X. fait allusion ici à une seule et même action (cf. tE ... Kai), déclenchée postérieurement à la découverte de la fraude; la vente frauduleuse (par le loueur) et l'exportation (par l'acheteur) étaient nécessairement liées. car nul n'aurait pu employer à Athènes un esclave 3"

Sur la marque. cf. le mémoire de P. Perdrizet. La mirae11l,•us,· hi.ttnire d«• Pandan• d'Echtdore, suivit• de rt•cherches sur la marque dam /"Antiquité. dans Archiv f. Religit>ns1riss. 14 ( 1911 ). 54-129; L. Lacroix. Les « hlaums » ck'i rillt'.'i graqt1t'.'i, Études d'ord,éolagie deus. 1 (Nancy. 195R). 106-109; P. Ducrey. Lt.· trai1> ne peut être que celui d'Orôpos, redevenu depuis peu possession athénienne. Si donc le 1/50 d'Orôpos était affermé à part. de même que le 1/50 du silos, peut-être en allait-il pareillement du 1/50 levé sur les esclaves, du moins aux époques où le trafic était important. Or. l'essor de l'exploitation minière dans les années 450-413 avait certainement entrainé une forte demande d'esclaves. Ainsi, si cette interprétation est juste, X. voudrait rappeler à ses lecteurs et faire rappeler par les «anciens>► combien l'importance du trafic avait fait monter à un haut niveau l"adjudication du l /50 des esclaves. Mais on eût aimé qu'il citât des chiffres. ou du moins un ordre de grandeur. « Avant les événements de Décélie »: en 413, une garnison péloponnésienne s'était fixée à Décélie, au N. de l'Attique. site que les .. - Cf. A11pti ÔÈ 1Cd1eeivo ôtt dpyacrµévcov dv8pro1trovèv toiç àpyupeiotç tv tq, 1tavti x_p6vq>àvapt0µT)tcov vûv oùôtv 6taq>tpet tà dpyupeta ft oia oi 1tp6yovot liµéov ovta èµv11• • • µoveuov auta. Cf. supra ad IV, 13 (tà napmxôµcva). X. a invoqué un peu plus haut les souvenirs des anciens, des octogénaires. L'imparfait tµvriµôvcoov montre qu'il s'agit maintenant des souvenirs de gens disparus, transmis par les anciens. La tradition orale permet ainsi de remonter à une génération antérieure (le sens relatif de progonoi est classique).

26. Kai tà vüv ÔÈ yryv6µeva 1tavta µaptupei Ott OÙlC civ note 1tÀ.f:ico àv6pa1to6a tKeî yévotto ft ocrcovèiv tà Ëpya ôé11Tat. oüte yàp ~a0ouç 1tépaç oüte û1tov6µcov oi 6pucr" , O"OVi.'EÇ eupt0"1COUO"l. Cf. Ardaillon, pp. 24-27 (galeries) et 27-33 (puits); Wilsdorf 1 , pp. 113117, et Wilsdorf 2 , pp. 1753-1757(avec les planches 5-9); Lauffer, pp. 21-22. Les hyponomoi sont certainement les «galeries». plus ou moins horizontales: le bathos, la «profondeur». ferait référence aux puits (phréata), creusés verticalement jusqu'à la rencontre du contact. Thiel, ad /oc.• note que l'argument d'une profondeur sans fin ne porte pas. puisque seuls comptent le nombre et l'épaisseur des couches utiles. Mais peutêtre X. a-t-il été impressionné par la profondeur des puits du Laurion (cf. Ardaillon, pp. 30-31). 7) Le projet est raisonnable . à moyen terme: la multiplication des

kainotomiai. souhailable et possible. accroitra progressfrement la demande, déjà forte initialement

27. Kai µ11v 1ea1votoµeiv ye oùôtv Tlttov ëçecrtt vûv fJ 1tp6ttpov. où toivuv oùo" et7tEÎV èiv ëxot docoç oùôtiç,

160

LES« NOUVELLES

TRANCHÉES>>

1t6tspov tv toîç Katan:tµ11µtvo1ç nÀsirov àpyuptnç toiç àtµ ntotç tcrti.

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X. le reconnaît implicitement ici: même en exploitant à fond )es mines actuellement en service, même en substituant des esclaves publics aux petits concessionnaires qui aujourd'hui travaillent de leurs mains, il sera impossible de trouver preneurs pour les x fois l 0.000 esclaves publics auxquels il songe. Il faut donc que l'aire d'exploitation soit agrandie. Précisément, les kainotomiai dont il va être question à présent sont les « nouvelles tranchées». i.e. les nouvelles attaques de gisement, par opposition avec les ergasimâ métal/a (qui sont les mines déjà en exploitation) ou avec les anasaxima, qui sont des mines anciennements exploitées, abandonnées puis rouvertes 49 • Temnein et ses composés à propos des kainotomiai: cf. Hypéride, Pour Euxénippos. 35 et 36; peut-être aussi Dém. XXXVII. 36.

28. Ti ôi;ta, Katvotoµoùvtt. Témoignage intéressant sur le faible niveau de l'activité minière en 355: il y a peu d'amateurs pour creuser de nouvelles galeries ou de nouveaux puits (ce sera bien différent vingt ans plus tard, si l'on en croit Hypéride, Pour Euxénippos. 36). Plus intéressante encore est l'explication de X. : « les gens des mines sont aujourd'hui trop pauvres [se. pour entreprendre des kainotomia1], car c'est depuis peu qu'ils organisent [ou équipent] à nouveau (les mines), et le risque est gros pour celui qui ouvre une nouvelle tranchée ... » - Aux conséquences de la conjoncture (la pénia des «organisateurs») s'ajoute une raison de fond (l'imponanœ du risque). À propos du premier point, deux remarques. 1) La pénia invoquée a trait uniquement aux revenus des mines (cf. vEcooti yàp KtÀ.), non à la fortune globale (aux «moyens») de tel ou tel Athénien propriétaire ou concessionnaire. Le revenu des kainotomiai est aléatoire; l'opération peut même se solder par une perte sèche, les dépenses n'étant couvertes par aucun revenu. Or, la reprise de l'exploitation du Laurion, les frais d'équipement et d'installation, ont entraîné «récemment» de lourdes dépenses pour « ceux des mines». Il faut donc attendre qu'à la suite de ces dépenses ils aient accumulé Sur ces distinctions, cf. M. Crosby, He.tperia 19 (1950). 196-199: R. J. Hopper, Ann. Br. Sch. Alh. 48 (1953). 201-3 et 234-7; J. Labarbe. La loi nawile de Thémistocle ( Paris. 1957). 59-61. •

11

IV, 29

161

un revenu suffisant - provenant des mines -- pour qu'ils se risquent à ouvrir de nouvelles galeries. Simple question de temps? Peut-être; mais ce délai - qui peut être assez long - ne fait pas l'affaire de X., d'où le projet qu'il présente ensuite. L'allusion à la reprise «récente» de l'exploitation des mines ne doit pas être négligée. On admet d'ordinaire que l'exploitation du Laurion, interrompue vers 407-406 (cf. Lauffer), reprit à partir de 394/3, la victoire de Conon à Cnide et la reconstruction de la flotte athénienne redonnant l'espoir et la sécurité aux Athéniens. Mais le néôsti de X. ne saurait renvoyer à quarante ans en arrière, tout au plus à quinze ou vingt ans. C'est pourquoi, si l'on peut admettre que certaines mines furent rouvertes dès les années 390, il est tentant de supposer que la « reprise» réelle ne survint qu'à partir de 377, i.e. à partir de la création de la 2c Confédération maritime, avec les besoins accrus en numéraire qu'elle entraîna pour la cité, (cf. récemment C. Wilson, Athenaeum 1970. 302-326). 2) « Ceux des mines» (ol ntpi tà µttaÀÀa) sont les mêmes qui OÂ.ÉO'tEpOV1ClVÔUVEUElV.

Deuxième moyen d'atténuer les risques: l'association entre particuliers. C'est bien, me semble-t-il, une deuxième possibilité qui est évoquée ici par X. ou, si l'on préfère, une proposition simple après un projet original. Il faut, à la suite de Thiel et de G. Bodei, garder le texte donné par )es mss., et ne pas corriger en 6pdtE 611,ve/ simi/e. Car, si X. avait voulu mentionner une pratique déjà en vigueur, il n'aurait pu le faire qu'à titre d'argument en faveur de la proposition précédente (l'exploitation par tribu), ce qui eût été indiqué de quelque façon. Bien plutôt, X. souhaite que, parallèlement à l'exploitation par tribu, les particuliers forment des associations pour exploiter les kainotomiai, diminuant ainsi leurs risques à défaut d'augmenter leurs chances. De telles associations existaient déjà pour )a ferme des télè, pour certaines liturgies (comme la triérarchie), les preneurs divisant les dépenses... et les revenus. Or, après 350, on a connaissance, notamment par les auteurs, de plusieurs cas d'association entre concessionnaires des mines: Dém. XXXVII. 38 (totç Kotvc.ovoOmµetaÀ.À.ou);XLII, 3; Hypéride, Pour Euxénippos, 35. Il n'est pas exclu que cette pratique ait été autorisée et encouragée après la publication des Poroi, cf. Herzog, p. 480. - Sur les conclusions que certains (Schônbauer) avaient prétendu tirer de ce passage à propos du régimejuridique des concessions, cf. G. Bodei, p. cv1.

µ11ôt µtvtot to0to q>opeicr8t, ci>çfi tô Ôflµ6crtov oütro KatacnceuaÇ6µE:vov 1tapaÂ.u1tT]O'Et toùç iôteotru; fi o{ lôtéotat tO ÔT)µÔO'tOV • à.À.À.'rocr,œp cruµµax.010O'Q)liv 1tÀ.tiouçcruVlÔXJtV, tcrxupottpouç dÂ.Â.T]Â.ouç 1toto0crtv,oütro 1eai tv totç

164

LE PROJETMINIER DE X.

àpyupeiotç oaq>1tep èiv 1tÀeiouç èpyaÇrovtat, tooq> 1tÀeiro tô:ya8à eup11aouai te x:ai èx:q>op11aoua1. Suivant Thiel, on doit considérer que la proposition porte sur l'ensemble des § 13-32 (et non pas sur les seuls § 30-31): c'est donc une remarque de conclusion. L'expression tô 6T)µ6cnovo'ÜtroKataEÀlµcbtat'liv Elfl til 1t6À.Et (IV, 13). - Le dèmosion, par opposition aux idiôtai, c'est « la République» ou «l'État», faute de termes plus adéquats (cf. supra IV, 18,19,20,21). Ainsi, l'État «s'équipe» en esclaves - d'abord 1200, puis bientôt 10.000, etc. - et, ce faisant, assure X., il ne lèsera point les particuliers. La remarque n'est pas neuve, elle ne fait que prolonger les réflexions de IV, 4-6, et de IV, 22. Les particuliers qui, actuellement, louent des esclaves aux concessionnaires, pourront continuer à le faire sans difficultés. Les modernes se sont montrés sceptiques. W. L. Westermann estimait que « les esclaves privés auraient été nécessairement réduits à un petit nombre. à cause de la concurrence des esclaves publics» 50 • C'est en effet assez probable. Mais la critique, comme on l'a noté ci-dessus, devrait porter à la fois sur IV, 4-6, sur IV, 22 et sur IV. 32.

• LAVALEUR DU

PROJET MINIER DE

X.

Faut-il attendre la discussion des objections possibles (§ 33-48) pour juger de la validité du projet? Ces objections, si elles portent surtout sur le projet minier, portent aussi sur l'ensemble des propositions énoncées au chap. III, et notamment sur l'eisphora qui est à la base de tout. On peut donc, dès maintenant, noter les qualités et les lacunes essentielles du projet minier. Les qualités résident principalement dans la rigueur de la construction: énonçant un projet hardi (X. prétend qu'il est dans le droit fil d'une tradition ancienne, mais c'est pour rassurer son lecteur), X. met tout son soin à démontrer qu'il est réalisable. Pour cela, il prend le lecteur par la main et il assemble devant lui. suivant un ordre logique, toutes les pièces nécessaires à la construction. Il apparaît alors. peu à peu, que les institutions de la cité se prêtent à la réalisation du projet, que les besoins et les moyens de la communauté sont compatibles avec celui-ci. Ainsi, la construction semble possible, voire facile. Pourtant, un doute saisit le lecteur· moderne. Car X. considère toujours les choses au point de vue des citoyens, délibérant Han. St. Cl. Phil. suppl. vol. ( 1941l. 466 ( = Slai·cry in Cla.,.~ical Antiquity, M. 1. Finlcy éd., Cambridge. 1960. 88). '

0

IV, 32

165

en Assemblée (ce sont eux qu'il voulait persuader, puisque ce sont eux qui auraient adopté ou rejeté son projet), jamais au point de vue des particuliers (Athéniens, étrangers, esclaves) qui, en tant qu'agents économiques. auraient appliqué, en cas de vote positif, son programme (cf. encore, sur ce point, infra ad IV, 39). Or, autre chose est le fonctionnement de la machine. Sans anticiper sur la suite, on peut relever trois lacunes. Je précise qu'en parlant de lacunes ou d'objections, il s'agit de celles qu'aperçoit le commentateur moderne, plus ou moins frotté d'économie. Quelles furent les critiques des Athéniens de 355/4 (qui n'adoptèrent pas le projet minier de X.)? Nous l'ignorons. mais il est à croire qu'elles étaient plutôt de nature politique et fiscale (la crainte de voir Athènes transformée en Doulopo/is, le refus de l'eisphora initiale). 1) X. décrit comment la cité achètera des esclaves publics (IV. 18), il ne s'interroge pas sur la capacité d'offre du marché des esclaves. Sans doute révélateur, ce silence est néanmoins fâcheux. Nicias n'avait-il eu aucun mal à se procurer les mille esclaves qu'il louait dans les mines? On peut en douter. Une partie de la main-d'œuvre devait être composée de spécialistes (cf. Sosias). qu'on ne trouvait pas n'importe où, ni à nïmporte quel prix. On l'a noté ad /oc., X. considère comme allant de soi l'adaptation de l'offre à la demande. et c·est seulement plus loin (IV. 36) qu'il en fera l'aveu: l'augmentation de la demande entraînera une hausse du prix des esclaves, - timide avant-propos à une réflexion qui manque. 2) Même incertitude à propos de la location des esclaves publics. Certes, X. s'interroge sur l'ampleur de la demande (IV. 22), mais il se montre alors plus optimiste que convaincant. Ainsi, quand il explique que les concessionnaires actuels prendront en location davantage d'esclaves. que d'autres deviendront employeurs d'esclaves. il ne fait aucune estimation. Le lecteur moderne eût aimé que X. rappelât combien d'esclaves privés (en chiffres ronds) étaient actuellement employés dans les mines, combien il y en avait eu avant 413, combien donc on pouvait espérer en louer. etc. Exprime-t-on ainsi un vœu anachronique, donc utopique? À coup sûr, X. et ses contemporains devaient ignorer Jes chiffres relatifs à la population servile de l'Athènes d'autrefois et de maintenant. Mais il y avait une tradition orale. fournissant des conjectures qu'il eût été intéressant de connaître (on a vu ci-dessus - ad IV. 25 que X. demandait aux anciens de se souvenir du « produit de la taxe des esclaves» au yc siècle ... sans qu'il avance lui-même. il est vrai. le moindre chiffre).

166

LE PROJET MINIER DE X.

3) Autre difficulté, peut-être la plus grave: conçue comme un moteur destiné à procurer la trophè aux citoyens, la machine construite par X. devrait tourner progressivement à un régime de plus en plus élevé. et œla sans interruption. La possession de plusieurs diuines de milliers d'esclaves n'est avantageuse que si la demande est constante. Or, l'exploitation minière semble avoir été, même dans les périodes de prospérité, assez discontinue et variable selon les années. L'argument des besoins illimités en argent (IV, 4-6), s'il est valable sur un plan psychologique général, ne l'est guère sur le plan pratique. qui est celui de la vie politique, obscurcie par les préoccupations à court terme et soumise aux variations de la conjoncture. Le besoin de sécurité (individuelle ou collective). la recherche de l'honneur (d'une famille ou d'une cité} peuvent, en fonction des circonstances. reléguer l'amour de l'argent à un rang plus modeste dans la hiérarchie des passions. Or, si, soudainement, au début de telle année, le nombre des conœssionnaires - donc des employeurs d'esclaves - venait à diminuer du tiers ou de la moitié, que ferait la cité de 10, de 20 ou de 30.000 esclaves inemployés, devenus des bouches à nourrir coûteuses et peut-être dangereuses? Tandis que les propriétaires privés, du fait du petit nombre (même les mille esclaves de Nicias sont peu de chose à côté des diuines de milliers d'esclaves publics dont il est question ici). pouvaient s'adapter, plus ou moins bien, aux situations changeantes, la cité, elle, eût été incapable d'ôter ces souliers de plomb (sauf à s'en débarrasser par la vente à bas prix ou par l'affranchissement). Comme ses contemporains, X. passe sans effort du plan privé au plan public: ce qui est bon pour un particulier est bon aussi pour la cité. De même que les qualités du bon chef de famille sont celles qui font le bon général ou le bon politique, de même la gestion des affaires privées peut inspirer celle des affaires de la cité. Il y a pourtant, suivant les domaines, des seuils à partir desquels les différenœs de degré se transforment en différences de nature. Peut-être X. pressent-il ces vérités, pour nous banales, lorsqu'il recommande de procéder par étapes et de ne pas commencer tout en même temps. Faisons suivre ces remarques du jugement sévère porté par un « technicien» (Wilsdorf2, 1766): «L'élévation du rendement des mines et l'exploitation privée ne sont pas traitées en détail dans les propositions de X .• mais seulement les possibilités d'emploi de la main-d'œuvre et l'augmentation de la population dans le secteur minier avec ses conséquences économiques. Des mesures techniques indispensables à lïntensification de l'exploitation, X., en raison d'une ignorance manifeste. ne dit rien; mais il fait exactement comme si l'unique problème était

IV, 33

167

de se procurer la main-d'œuvre. La nécessité de mettre en place, à côté des mines, d'abord des installations pour le traitement du minerai, d'assurer l'approvisionnement en eau de celles-ci par des réservoirs, ensuite de créer des installations pour la fusion. enfin la question des spécialistes et de la main-d'œuvre auxiliaire, - tout cela n'est pas mentionné d'un mot». Il est vrai - et on l'a souligné ci-dessus - que X., se plaçant exclusivement au point de vue de la cité, esquive les problèmes techniques qui se poseraient aux particuliers. Cependant, cela ne signifie pas que X. ignorait les problèmes techniques liés â la nécessité de transformer le minerai extrait. A défaut des laveries. il mentionne les fours (IV. 49). Et surtout, il distingue constamment les kataskeuazoménoi et les erga:oménoi, opposition qui, j'ai essayé de le montrer (supra ad IV, 1,11, 22.28). renvoie sans doute à deux catégories de personnes: d'une part « ceux qui équipent» ou « qui construisent» (les puits de mines. les laveries, les fours), d'autre part « ceux qui exploitent». C'est surtout pour ceux-ci (les concessionnaires) que l'offre de la main-d'œuvre est le problème primordial. Car beaucoup de concessionnaires, disposant de peu de moyens ou refusant d'investir dans des entreprises qui ne les retiendront peut-être que quelques années, veulent pouvoir louer - et non acheter - la main-d'œuvre nécessaire à l'exploitation. En revanche. les kataskeua:oménoi utilisent, au moins en partie, leurs propres esclaves dans les laveries et autres installations permanentes. C'est pour eux que le problème technique est essentiel. Cela étant, X. entend bien qu'à l'accroissement du nombre des concessionnaires et à l'essor de l'exploitation devra correspondre la remise en état et la multiplication des installations de traitement; il le dit expressément en IV. 11: « d'une part. avec confiance, envoyons le plus de main-d'œuvre possible dans les mines d'argent [ceci s'adresse aux exploitants). d'autre part avec confiance, équipons-les ... » - Peu prolixe sur les questions techniques, X. espère sans doute que les kataskeua:oménoi comprendront lïmportanœ de l'enjeu (sur ce vœu cf. aussi infra ad IV. 39). 33-48. Objecrions possibles: leur r~futalion 1) Objections relatives aux moyens financiers ( le projet jugé irréalisahle)

a) Le projet est trop ambitieux, eu égard à /'eùphora que l'on peut

espérer obtenir

33. Kai tµoi µèv 6ti Eip11ta1,chç èiv f)yoùµa1 Katacnœuaa9EiCTT)ç tflç 1t6Â.eroçiKavtiv èiv 1tâcr1v"A011vaio1çtpoq,tiv à1tOKOl VOÙ YEVÉ0"0at.

168

POUR UNE RÉALISATIONPROGRESSIVE

Cf supra ad IV, 1. « Organiser la cité» reviendrait à « organiser les mines » (IV, 13), si le projet minier suffisait à assurer, à lui seul, la trophè des citoyens, possibilité que X. a évoquée en IV, 17. Il y a, par conséquent, identité entre le triobole quotidien de IV, 17 et la hcaVll tpoqni de notre passage. Cf. supra Introduction Ill.

34. El 6t ttveç Â.oytÇ6µt:vot1taµ1t6Â.Àl1Ç èiv 6eiv àq,opµflç eiç taOta 1tcivta oùx T)yoüvtat hcavà av 1tote XPllµata eioevex8flvat, µT16' oütcoç à8uµoi>vtrov. (35) où yàp oütcoç fxe1, chçàvciylCTl liµa taOta 1tavta yiyveo8a1 il µT16&v oq,eÀ.oç aùtéov elvat. « Car il n'y a point de dilemme: ou bien réaliser tous ces projets à la fois, ou bien ne tirer aucun profit de ces projets». Les réalisations partielles seront source de profits (èv m 1eatà µtpoç il tè>liµa 1tavta 1tpatt&o8at · oi1eo6oµoüvttç tE yàp à0p6roç 7tOÂ.UtEÀ.ttlJ Kai aptatov dvat taùta 1tpâaaetv. Ei ô' aù ôui tàç êv tq> vüv 1toÂ.tµq> YEîEV11µtvaç e{acpopàç voµiÇet' èiv µl)ô' 6noüv ôuvacr0at dcrevEyKetv, uµetç ôt ôcra µtv 1tp6 t~ç EÎP'lVT}Ç xp1iµata tüpu:nce tà tÉÂ.TI,à1t6 tocroutrov Kai t6 è1t16v &toç ôtouceîtE ttiv 1t6Â.1v· ôcra ô' èiv tcpeupicrKlJ ôtà t6 dpl)vriv n: dvat Kai ôtà t6 8epa1teuea8a1 µetoi1eouç 1eai èµ1t6pouç ,cai ôtà to 1tÂ.f:16vrovcruvayetpoµtvrov àv8pro1trov 1tÂ.EiroEicrâyecr0at 1eai tçâyta8a1 Kai ôtà t6 ( tà) ÈÂ.Â.1µtv1aKai tàç àyopàç aùçavtcr9at, taüta Â.aµf3âvovteç 1eatacr1e&uâÇ&cr0e chç èiv 1tÂ.Eiata11tpoooôo1 yiyvotvto. La « guerre actuelle». qui se termine, est la Guerre des Alliés (cf. supra Introduction 1). Les eisphorai répétées des années antérieures à 355/4 sont évoquées aussi par Isoc. VIII, 20. - X. craint à bon droit, comme Démosthène à la même époque (Dém. XIV, 27). qu'au seul nom d'eisphora les Athéniens ne s'insurgent. Mais il n'est pas désespéré pour autant. La chronologie de la Guerre des Alliés est incertaine, cf. infra ad V, 11-12; sur la date et les conditions de la paix de 355/4, les sources sont singulièrement maigres et partielles: Diodore XVI, 22,2; Dém. XV, 26 (autonomie des cités). Il semble qu'au moment où il écrit X. sait que la paix est sur le point d'être conclue (cf. 1tpô tflç EÎPTIVTtÇ). Mais « l'état de paix» n'a pas encore commencé (tô elpftVTtv dvm) 51 • 51

Sur les deux sens, au IV• siècle, du mot eirént, cf. B. Keil, Eirene, eine philolog. ontiquar. Untersucluutg, dans Berichte sâchs. Gesellsch. Wiss. Leip=ig 68 (1916). n° 4; T. Ryder,KoiM Eirene (Oxford, 1965),XV.

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LE REVENU DES TAXES

Pour bien comprendre la proposition de X., il faut se souvenir que les télè étaient affermés, au début de chaque année (donc au début de l'été), pour des sommes déterminées, que les télônai avaient à régler ensuite à des dates fixées (au début de certaines prytanies), cf. BusoltSwoboda, Gr. Staatsk. Il, p. 1230 et note 7. Pour l'essentiel, par conséquent, les revenus de la cité ne pouvaient pas s'accroître au cours d'une année mais seulement d'une année à l'autre. Écrivant au cours de l'hiver 355/4, X. prévoit qu'avec le retour de la paix les télè seront affermés à l'été 354 pour des sommes nettement plus élevées que l'année précédente (celle-ci - 355/4 - ayant déjà été meilleure que 356/5: cf. infra ad V, 11-12). Le raisonnement est alors le suivant. Actuellement (année 355/4), c'est avec « les sommes produites par les télè » affermés l'été 355 que les Athéniens « administrent leur cité». Le total de ces sommes est sans doute assez médiocre. L'année prochaine (to épion éros), après de meilleures adjudications, le total des sommes à percevoir sera plus élevé. Ne vous servez, conseille X., pour l'administration de la cité en 354/3, que « d'une somme aussi grande» que celle utilisée l'année précédente. Et utilisez la différence comme aphormè pour la réalisation de mes projets. lesquels, on le sait, seront à l'origine de beaux et nouveaux revenus pour la cité. On a déjà eu l'occasion de souligner les fortes variations de revenus qu'entraînait le système de l'affermage, et de rappeler l'exemple de Rhodes (cf. supra ad li, 1 et Introduction II); on pourrait aussi utiliser l'exemple de Délos, bien qu'il concerne le Ille siècle. La cité de Délos affectait parfois au remboursement des sommes empruntées à Apollon la totalité du revenu de certaines taxes. Ainsi connaissons-nous, pour deux années consécutives, le revenu du 1/50, lequel passe de 14.200 drachmes en 279 à 17.900 en 278 5 2 • Les impôts affermés par le sanctuaire et connus par les comptes des hiéropes montrent. sur des chiffres beaucoup plus bas, des variations analogues: c'est ainsi que le nop8µdov tè> dç 'Pftv&1av (le sanctuaire affermait à un particulier le monopole du bac entre Délos et Rhénée) produisait des revenus très variables, comme le montre le tableau- suivant:

1 ~ IG XI .2. 161 A . .25-26 (cf. Th. Homolle. Bull. corr. h&tv toùç 9&oi>ç(Mém. 1, 4,18), toùç q,O..ouç (Anah. I, 9,20). toùç 1tai6aç (Cyr. VIII, 8,1). Précisément. ce dernier passage nous indique le ton juste. Cyrus. nous dit X., « honorait et soignait ses sujets (toùç ixp' tautq,) comme ses propres enfants, et les sujets vénéraient Cyrus comme un père». En «soignant» les esclaves publics, et aussi les métèques (cf. supra IV, 40), les Athéniens s'assureraient leur reconnaissance et leur attachement. Toute action de thérapeuein comporte, en effet, l'espoir de réciprocité, antithérapeuein (cf. Mém. I, 4. 18). Si X. a détaillé les soins à donner aux métèques et aux commerçants

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FORTS DANS LE LAURION

(supra chap. Il et III), en revanche il ne précise pas comment on pourrait «soigner» les esclaves. Le rapprochement avec les autres textes de X. (cf. ci-dessus) suggère des soins matériels (nourriture. vêtements), la soHicitude dans les rapports quotidiens. auxquels s'ajouterait l'espoir d'une récompense: la liberté. b) Le maintien de /'exploitation minière: le Laurion-forteresse

43. /\oyiÇoµat 6' ëyroye Kai noUµou ytyvoµtvou o{6v t' dvat µ11 tKÀ.Ei1ttcr8a1 tà àpyuptta. ëcrn µtv yàp 611nou nepi tà µétaÀ.À.af..v tü npoç µtÀ.ucrtcp, Ëcrtt 6' f..v tù 1tpè>çèipKtov tstxoç tv 0optKq>· à1tt:):tt ôÈ taùta àn" àÀ.À.T1À.rov àµq>i tà ÉÇllKOvta rches de poliorcétique grt>cque(Paris, 1974), 78-82.

IV. 44

179

deux ports. On comparera e.g. Polybe VII, 6, l, à propos d'une cité terrienne, Léontinoi (ft yàp trov A&ovtivrov n6Àtç tep µtv OÂ

v11x:01 t' âv tà fpya slç ëv èl; anétvtcov téi>vtsix,éi>v, x:ai Ei tl alcr0avono 7tOÀ.Sµtx:6v, ~pax,ù âv EiT) tx:acrtQ) elç tô àcrq>aÀ.tç à1tox,rop'flcra1. « Locus graviter corruptus », écrit Thiel, qui relève trois difficultés: « I 0 ) tç a1tavtrov tébv t&txébv ne va pas bien avec œ qui précède; 2°) aicr8avo1to éveille le doute; Je) 1tÀ.eiouç(§ 45) ne se rapporte à rien (cf. § 47) ». Les éditeurs et commentateurs ont hésité entre deux inter-

prétations (cf. G. Bodei, p. xxxm note 53): l) « Les mines seraient réunies en un tout ( = formeraient une unité de défense) en raison de toutes les forteresses»; ainsi Marchant et, pour la première partie, Thiel, qui propose de rétablir ensuite (après &lç êv): (roan: oÀiyouç µtv nouµimx; ~6tov Elvm à1t&ipy&1v)tç amivtCOVtébVtElXébV... &t 0& 7tÀ.EÎOUÇËÀ.00l&V KtÀ. 2) « 1 lavoratori convergerebbero da tutte le forteu.e in un punto solo»; ainsi G. Bodei, suivant l'hypothèse de Weiske et de Zurborg, faisant de tà Ëpya l'équivalent de o{ tpyatai (cf. aussi la traduction de Talbot). Cette hypothèse parait intenable. D'abord, tà fpya, ce sont bien « les mines » (cf. supra ad IV, 3 et Lauff er, p. 15), et les tpyatai sont mentionnés comme tels quand X. le juge nécessaire (IV, 5,22). Ensuite, le sens est peu satisfaisant. Imagine-t-on que les esclaves devraient, venant de toutes les forteresses, se réunir dans l'une d'entre elles? Mais les esclaves travaillent dans les galeries de mines, non dans les forteresses (cf. Thiel). lmagine-t-on plutôt que, cantonnés dans toutes les forteresses, les esclaves iraient travailler, groupés, en un seul endroit? Mais les galeries de mines sont dispersées, elles n'admettent pas un nombre indéfini de travailleurs: et comment trancherait-on entre les intérêts divergents des particuliers. concessionnaires et responsables de la main-d'œuvre louée? Ainsi, de quelque façon qu'on la retourne. cette hypothèse n'offre rien de plausible. La validité de la première hypothèse, en revanche, est renforcée par la suite du texte (cf. notamment b:ciatq>). Les sites fortifiés permettraient à chacun de « se retirer en lieu sûr». Ce sont donc des « Fluchtburgen » (Lauffer, p. 223). X. a mentionné Anaphlystos et Thorikos, et suggéré la construction d'un fortin à mi-distance des deux. Cela, parce qu'il est obsédé par le souvenir des événements de Décélie (ce qui est naturel) et qu'en conséquence il pense uniquement à une attaque par terre, donc venant du nord (cf. IV. 46). Dans cette hypothèse, le dème de Bésa forme le « ventre mou ». et la construction d'un fortin se justifie. Mais le système de défense du Laurion englobe aussi la forteresse de Sounion au sud (depuis les dernières années du ve siècle; cf. Thue. VIII. 4,

IV, 44

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et H. Mussche, Bull. corr. he/1.88 (1964], pp. 423-432). X. ne la mentionne pas, parce qu'il n'envisage pas d'attaque par mer, mais il l'évoque implicitement dans tç amivrrov tci>vn:1xci>v.Sounion, Anaphlystos et Thorikos sont aux angles d'un triangle de 10 kms de côté, le fortin de Bésa venant se placer au milieu du côté nord (cf. le schéma de Lauff er, p. 221). Grâce à ce dispositif de défense, les mines forment bien un tout, c'est-à-dire, du point de vue militaire, une unité susceptible d'être défendue. Il ne reste plus à X. qu'à faire fonctionner, par hypothèse, ce système; système qui, notons-le, a déjà eu l'occasion de fonctionner - moins le fortin de Bésa - dans les toutes dernières années de la guerre du Péloponnèse. mais trop tard alors pour corriger les effets désastreux de l'occupation de Décélie en 413 (néanmoins, l'exploitation du Laurion put se poursuivre, tout en déclinant, pendant quelques années, cf. LaufTer, pp. 220-225). Bien que le texte soit corrompu au § 44, le raisonnement d'ensemble de X. apparaît nettement. On peut le décomposer ainsi: 1) Le point de vue des défenseurs (ceux-ci ne subiront que de faibles dommages) L'exploitation du Laurion ne sera pas anéantie; la proximité des refuges assurera la sécurité des travailleurs; si l'ennemi vient en nombre, il ne trouvera rien à piller dans la région. 2) Le point de vue des agresseurs (ceux-ci subiront de lourds dommages) le problème des distances (donc des bases) se posera à eux; les petits détachements seront taillés en pièces avant d'arriver dans la région du Laurion; les gros détachements ne peuvent venir sans dégarnir dangereusement leurs bases; s'ils viennent néanmoins, ils ne pourront rester, faute de vivres. On note que l'analyse de X., conforme à la stratégie athénienne employée durant la guerre du Péloponnèse, tient compte de l'expérience des dernières années de la guerre (protection du territoire). La force principale d'Athènes (dont X. n'a pas à parler) reste la flotte. Sur la terre ferme, il n'est d'opérations que défensives (la population est à l'abri des remparts. à Athènes ou dans un des forts de l'Attique), combats de harcèlement menés par les cavaliers et les péripoloi contre les détachements ennemis ou contre les fourrageurs. Nul recours à des

182

LA DÉFENSE DU LAURION

mercenaires. Tout cela nous confirme que X. voit l'avenir sous les traits du passé. X. lui•même et les plus âgés de ses lecteurs ont vécu les années sombres de 413.405 au cours de leur adolescence ou de leur première jeunesse. Aussi les hypothèses envisagées ici par X. sont-elles construites à partir du souvenir de ces années, et il faut, pour comprendre ce passage, avoir sous les yeux les textes relatifs aux opérations menées par Agis et aux conséquences de ces opérations 60 • Se plaçant au point de vue des défenseurs, X. envisage une première hypothèse. Percevrait•on (il manque un nç après a{a6avolto) un mou• vement ennemi en direction du Laurion? Grâce au nouveau fortin construit à Bésa (qui servirait donc de «guette»), ce mouvement serait observé de loin. Le délai serait suffisant pour que chaque travailleur (t1eciotq>= chacun pour soi, à l'endroit où il se trouve) puisse se mettre à l'abri dans celui des trois refuges (Anaphlystos, Thorikos, Sounion) qui serait le plus proche (au maximum 6 kms) de son lieu de travail (Ppaxu = « à peu de distance»). Sur le danger qu'eût offert le refuge dans les galeries eHes•mêmes, cf. l'anecdote aristotélicienne citée supra ad IV, 3.

45. Et ôt Kai ËÀ.0ou:v1tÀ.tiouç1toÀ.tµtot, « Et même si les ennemis arrivaient en force». Dans les textes relatifs aux événements de 413-405, on retrouve notamment l'opposition entre les raids effectués par les seuls garnisaires de Décélie et les expéditions plus importantes menées grâce aux renforts (cf. e.g. le ôte µtv 1eai 1tÀ.E6vrovè1tl6vtwv de Thue. VIII, 27,4 qui évoque le nÀ.Eiouç f).0otEV des Poroi; Thue. VIII, 71,I: otpatiav noÀÀTlV- Poroi IV, 47: noÀ.Àfl 6uvciµe1). Certes, la situation des années 350 n'est plus celle de 413, et la crainte de voir s'établir une garnison ennemie sur le territoire n'est plus de saison. X. imagine donc comme bases ennemies possibles Je territoire des deux cités les plus proches par terre (cf. infra IV, 46); mais cela ne modifie pas son raisonnement.

Ô'flÀ.ov ott, el µèv critov ii o{vov ii 1tp6Jlata fç,coeüpoitv, àq>ÉÀ.otvt'èiv taùta · àpyupittôoç ôt KpatT1cravttç ti èiv µà.À.À.OV fi À.{00tÇ ËXOlf:V XP'flcr0at; Vu la pauvreté des sols. les ennemis venus en nombre, donc capables 110

Thue. VII, 19. 1-3; VII, 27. 3-28,2. avec le commentaire de K. J. Dovcr, Comnlt'nt. on Thue. (suite du commentaire d'A. W. Gomme. Oxford. 1970): VIII. 71. - Xénophon. Ht'II. 1. 1, 33-34. - Hel/. Oxyr. XII. 4-5, avec le commentaire d'I. A. F. Bruce. An Historirnl Comment. on the He•//. Oxyr. (Cambridge. 1967). 11S-6.

IV,47

183

d'organiser le pillage, n'auraient guère de butin à faire. Ce qu'ils pourraient prendre, ce serait le grain, le vin, les troupeaux laissés «en dehors» (des sites fortifiés), i.e. dans les bourgs ou dans les campagnes. On veillera à faire rentrer tout cela (ce ne sera pas simple pour les troupeaux, dispersés dans les pâturages de la montagne; Thue. VII, 27,5, évoque la perte - dans les années 412-410 - de ((tous les troupeaux»). Dans un pays désormais vide d'hommes, de troupeaux, de vivres, l'ennemi ne trouverait à prendre que des pierres. Thiel rapproche Écon. 1, 10-12.

nroç ôt

Kai 6pµ11crn1avdv notE 1t0Àtµ101 npoç tà µttaÂ.À.a; à7ttX,Elµtv yàp ô111toutéov àpyupEicov fi tyyutata 1t6À.1çMtyapa 1toÀ.ù1tÀ.Eiovtrov 1ttvta1Coaicov ataôicov · d1téX,Elôt fi µEtà taüta 1tÂ.T1CJtaitata9f1'3a1 1toÂ.ù1tÀ.Eîov trov êçaJCooicov. 46.

Les deux cités les plus proches du Laurion par terre sont bien l'une (Mégare) à plus de 500 stades (env. 90 kms), l'autre (Thèbes) à plus de 600 (env. 108 kms), en comptant à partir des citadelles de Mégare et de Thèbes (cf. fi 1t6Àtç Mtyapa et plus loin 0f\Pat), et en tenant compte des routes. X. indique ainsi que dans le meilleur des cas (en l'absence de combat). les ennemis seraient à trois ou à quatre jours de marche de leurs bases 61 • X. envisage des expéditions, non /'installation de garnisons ennemies sur le territoire comme en 413-405. S'il ne redoute plus ce danger, ce n'est pas que le système des fortifications rurales en Attique ait été sensiblement amélioré (le rôle de garnison permanente d'Éleusis, de Panakton, de Rhamnonte, n'apparaît, semble-t-il, que dans le dernier tiers du IVe siècle, cf. J. R. McCredie, op. cit.); c'est que les hégémonies disparues et les alliances nouvelJes rendent ce danger très improbable (cf. l'effondrement de la Ligue péloponnésienne - depuis 371 --. le déclin de la puissance thébaine - depuis 362).

47. "'Hv oùv 7tOpEUCOVtal tvtEü9tv 7t09Evè1ti tà àpyupElO,

1tap1tva1 aùtoùç ÔEllCJEl tflV 1t6Â.1v. Polis a ici, comme précédemment (polis Mégara), le sens de «ville». i.e. de refuge fortifié, (v Eiprpca de IV, 51 se rapporte sans doute à toutes les propositions que X. a faites au cours des chap. Il, III et IV. Ayant été amené à réaffirmer (IV. 49) que l'organisation du Laurion contribuerait puissamment à assurer la trophè des citoyens, X. en vient à estimer que le versement d'indemnités régulières pourrait être étendu. dans certaines conditions, aux éphèbes. Or, ce passage, important pour l'étude de l'éphébie au IVe siècle, a été négligé par les modernes 66 , sans doute parce que le terme «éphèbe» n'y figure pas. Or, l'absence du terme peut s'expliquer (cf. infra), et d'autre part le vocabulaire aurait dû retenir les historiens de l'éphébie: en IV, 51-52, en effet, presque chaque mot trouve son correspondant dans les décrets athéniens relatifs à l'éphébie.

51. npax0tvtC.OV "(Eµ1)v COVEÎP11KUÇUµq>T)µl tyro OÙµ6vov èiv xp11µacnv EÙ1toprottpav ttiv 1t6À.1vElva1, àÀ.À.àKai EÙ1tE10Ecrttpav Kai EÙtaKtottpav Kai EÙ1toÀ.EµrottpavyEvtcr8a1. Le choix et l'association de ces qualificatifs peuvent être éclairés de trois manières, d'ailleurs complémentaires. l) Il y a peut-être une référence au Socrate des Mém. (IV, 4). insistant sur la valeur de l'obéissance aux lois et aux magistrats d'une part (7tEt86µEvoç, IV. 1 et passim), sur ]a nécessité de l'eutaxia dans les expéditions militaires d'autre part; cf. J. Luccioni, X. et le socratisme (Paris. 1953). p. 163. 2) Il y a probablement une référence implicite à la Sparte d'antan (celle de Lycurgue), qui reste pour X. la cité guerrière par excellence (et le modèle des cités en général). De fait, le seul emploi d"eupolémos, en dehors des Poroi. se rencontre dans Écon. IV, 3, où X. pense visiblement à Sparte (cf. la note de P. Chantraine. Coll. Unfr. France. p. 46 note 3); et l'on rapprochera aussi Lac. Pol. VIII, 1, où X. rappelle que les citoyens de Sparte µaÀ.tCJta m:i0ovtm talç àpxatç n: t,t, Cf. toutefois J.O. Lofberg. Clau. Phil. 20 ( 1925). 330-335. Mais récemment ni Ch. Pélékidis. Hi.îtoire dt• lëpMhù· a11iquuÀ.aKi} t&tâyµ&vOt de la ligue de 338/6 (Dém. XVII, 1S), ni celui avec le stratège 6 unô tèi>vpacr1À.trovtni tfjç Kotvf\ç q,uÀ.mcf\ç 1eataÀEÀE1µµtvoçde la ligue de 302 (H. Schmitt, Staatsvertriige III, n° 446,3, li. 68- 72; cf. p. 79), ne sont convaincants. Ces magistrats ci étaient imposés par les rois macédoniens tout-puissants. Comment les Grecs auraient-ils accepté, en 3S5/4, d'écouter des magistrats délégués par une cité vaincue? Ajoutons que cette interprétation « panhellénique» s'accorde assez mal avec l'expression xàmv àv6pchx01ç(et non '"EÀ.À.fluÀ.aKa».Cawkwell estime «qu'Eschine faisait allusion à l'élection [de Démosthène] tni tô 8crop11e6vpour l'année 337/6. et qu'il choisissait. pour se moquer. le terme utilisé vingt ans plus tôt par X .• proposant de nouveaux magistrats pour travailler à la paix. Ici peut-être comme ailleurs dans les Revenus, ce que X. proposa, Euboulos le réalisa». - La conclusion parait trop abrupte. Après 35S, les Athéniens n'ont pas créé de magistrats appelés eirénophylakes. Nous ignorerons toujours si X. eût accepté d'assimiler ses eirénophylakes aux préposés au théôrikon, dont la réorganisation fut sans doute l'œuvre d'Euboulos en 354 1 • Néanmoins la remarque d'Eschine, même excessive, même sarcastique, est instructive; et je proposerais de développer 1

Rappelons que pour apprécier la signification et l'importanv, ... tiprivtKé>ç,dp11voxot6ç. cipTtvoq>uÂ.aE,.

v. 2

199

de Thiel. Celui-ci mamt1ent le texte, et comprend mncv6ç comme le latin solidus: « ferme, inébranlable» (se. pour les commerçants). Mais ,rmcv6ç (et m.ncvci, m>lCV&ç)évoque toujours chez X. quelque chose de dense (dans l'espace) ou de fréquent (dans le temps). On suivra donc plutôt ici les anciens commentateurs ou traducteurs: Weiske (cité dans le Thesaurus, s. v.), Zurborg (qui développe: 1t6Â.tv,tlç ftv nmcv6tepov (frequentius) àqmcvoDvtm - éd. de J874, p. 36), Sturz (Lex. Xenoph. [1803), p. 759: « ut omnes homines frequentius et saepius urbem adeant » ). La difficulté paraît tenir au fait que X. a mêlé dans la même proposition deux constructions ( 1. npoocptÂ.ecntpav ndatv àv0pmnotç nmdv tiJv 11:6Â.tv;2. notEiv (ô'>ate] navtaç àv0pmnouç nuKVottpouç àcptKVd0'0m dç tT)Vn6Â.tv).

2. El 6t nveç oütro yryvcixncouotv, chçtàv Tl1t6Â.tçEÎPT)VllV ayouoa 6tateÂ.ij, à6uvatrotépa te Kai à6oçottpa Kai ftttov ovoµaotT) tv til ~EÂ.Â.a6t&O'tat, Kai oùtoi ye, roç tµ il 66ç1J, 1tapay1yvro0Kouo1v. À ceux qui évoquent « la puissance et la gloire» de naguère X. va opposer « le bonheur et la prospérité». En dépit des apparences. la réplique de X. est pertinente; car, selon lui, le maintien de la paix et de la prospérité permettrait aux Athéniens d'obtenir à nouveau le « leadership» dans le monde grec ( un leadership «moral» et pacifique), donc une gloire nouvelle.

tù6atµovtotatat µtv yàp 6i]1tou 1t6À.E1çJ..i;yovta1, ai iiv nÀEîotov xp6vov f.v eipT]VlJ61an:Àroo1· X. répond d'abord à l'accusation de «débilité ►> (cf. àôuvatrottpa). Sa réponse est double (µtv . . . ôt ... ) : I) Les cités qui vivent longtemps en paix sont « les plus heureuses»; 2) de toutes les cités grecques, Athènes est la mieux faite pour prospérer en temps de paix. - Le second point paraît clair. Mais quel est le lien entre «bonheur» et «puissance»? L'explication se trouve dans Mém. IV, 4,16 sq., où l'on apprend que le plus grand des biens pour la cité, c'est l'homono_ia,obtenue par l'obéissance aux lois, et que là où les citoyens obéissent aux lois, « les cités sont les plus fortes et les plus heureuses» (a{ n6Â.etç icrx.up6tatai te Kai eùomµovtatatm yiyvovtm). Or, X. s'est dit convaincu ç dva1 tù 1t6ÀE11t6À.eµovri EÎPTlVTIV, âv liµe1vov taüta Kp18ei11ri ei nç tà 1tpoyeyEVT1µtva t.1tavacrK01toi11 tij 1t6À.Et1téi'.>ç à1tol3tl311Kev. ei>pticretyàp t6 tE 1taÀ.a1ovt.v dptiVlJ µtv 7tUVU7tOÀ.À.à xptiµata dç ttlV

1t6À.t v àvevex0tvta, 1taVT10tvta·

t.v 1toÀ.tµq>ôt taüta

1tf)ç EÙ1tOPT}CJEl, o{ ÔÈ 7tÀ.OUCJlOl tf\Ç dç tèv 1t6À.Eµov6a1tav11çà1taÀ.À.ay11crovta1, Le premier point rappelle l'exigence énoncée en I, 1 : remédier à la pénia du plèthos et faire que tous les citoyens puissent ôtatpÉv11v Kai eiç AeÀq,oi>ç La consultation de plusieurs oracles n'est pas inhabituelle; mais pour2 Sur les redevances ducs aux prêtres. cf.. outre Wilhelm. l'ouvrage ancien de J. Martha. Les sacerdoces atMniens (Paris. 1882), 11S-132: F. Sokolowski. Han. Theo/. Rev. 41 (1954).

153-159.

VI, 3

219

quoi X. choisit-il ces deux oracles-là 3 ? Le choix de Delphes, assez proche d'Athènes, souvent visité par les Athéniens (et par X. lui-même. avant et après l'expédition des Dix-Mille), n'a pas à être justifié. Ce qui paraît singulier, c'est la mention de Dodone, précédant même celle de Delphes. On a allégué la méfiance des Athéniens envers la Pythie, depuis que celle-ci avait « laconisé » (pendant la guerre du Péloponnèse). Mais, deux ans après la composition des Poroi, les Athéniens procèdent à une consultation solennelle de l'oracle apollinien (Syll. 3 204, cf. infra). H. W. Parke a supposé (op. cil., 139; et Greek Oracles [Londres, 1967), p. 114) que les conditions politiques de l'heure (l'occupation du sanctuaire de Delphes par les Phocidiens) rendaient plus malaisée, en 355/4, la consultation de la Pythie. Quoi qu'il en soit, la faveur croissante de l'oracle de Dodone auprès des Athéniens est attestée, entre 350 et 320, par plusieurs exemples de consultations publiques (cf. H. W. Parke, op. cil., pp. 139-143).

&1teptcr8a1toùç 8eoùç ei À.q)ovKai àµe1vov ei11 èiv tij 1t6Â.e1 oihro KatacrKtuaÇoµévlJKai aùtiKa Kai eiç tè>vË1te1ta xpovov. (3) el 6è taOta cruva1voîev,t6t' èiv aù q,ai11vx.pflva1 &1t&protâv ti vaç 8erov 1tpocr1to106µevo1 taüta KaÂ.Â.tcrtaKai ap1crta 1tpatto1µev àv · Notons, pour la dernière fois, que les formules employées et les techniques évoquées par X. sont celles-là mêmes qu'on trouve employées ou évoquées dans les textes officiels. X. n'invente rien, il est un fidèle miroir. Ainsi, >.4>v Kai aµEtvov est la formule rituelle dans les demandes et dans les réponses d'oracles•. - De même également la précision « pour le présent et pour l'avenir» figure dans le formulaire des oracles de Delphes, de Dodone, de Didymes (références dans P. Amandry, op. cil., p. 154 et note 2, qui rapproche d'ailleurs justement notre passage). - De même, enfin, la procédure en deux étapes. X. propose

que les envoyés d'Athènes demandent aux dieux d'abord si le projet présenté doit être favorable à la cité, puis - en cas de réponse positive - à quels dieux on devra sacrifier pour que tout se passe bien. Sur l'oracle de Dodone, cf. H. W. Parke, The Oracles of Zeus (Oxford, 1967), 1-163; sur celui de Delphes, H. W. Parke et D. E. W. Wormell, The Delphic Oracle, 2 vol. (Oxford, 1956), notamment le vol. 2 (textes). ' Cf. par exemple le texte contemporain des Poroi: Syll.3 204, Il. 24--5, 28, 50. Pour d'autres réfërenœs, cf. A. Wilhelm, Nnie &itrâge III (Sitz. Akad. Wien 175, 1913), 22-27; P. Amandry, La mantique apollinimM à Delphes (Paris, 1950), pp. 151-163 (Delphes; nombreux exemples), 171 (Dodone) et 164. Rappelons que X. emploie encore œtte formule dans Lac. Pol. VIII, S (Lycurgue à Delphes). 1

220

CITÉS ET ORACLES

On pense aussitôt aux ruses du jeune X. en 400 (Anab. III, 1,5--8)qu~ au lieu de poser au dieu de Delphes successivement les deux questions (1. dois-je partir rejoindre l'armée de Cyrus? 2. [après une réponse positive] à quels dieux dois-je sacrifier?), avait posé seulement la seconde, ce dont le blâma Socrate. Il ressort de cet épisode que la demande en deux temps était d'un usage courant (cf. P. Amandry, op. cit., l 56). Quand la décision était irrévocable ou hors de discussion, il ne restait plus qu'à savoir quels dieux se concilier. Au Je siècle avant notre ère, la cité de Caunos envoie l'un des siens consulter l'oracle de Gryneion. La question était formulée ainsi: « A la Bonne Fortune. Le peuple des Cauniens interroge pour savoir quels dieux se concilier afin d'avoir de belles et profitables récoltes». L'oracle répondit que les Cauniens devaient sacrifier à « Phoibos, fils de Létô, et à Zeus Patrôos » (J. Hel/. St. 1954, p. 85•86; J. et L. Robert, Bull. épigr. 1956, 274 a). J'ai invoqué ce texte de Caunos parce qu'il concerne une question posée et une réponse obtenue par une cité, comme l'eût été l'oracle auquel songeait X., comme le fut en 353/2 la question posée à Delphes par les Athéniens à propos de l'affermage des terres sacrées d'Éleusis. Le texte fort détaillé qui nous instruit de cette consultation 5 offre apparemment un excellent parallèle à la proposition de X.: même cité, même période, procédure analogue (dans la mesure. du moins, où à la première question posée l'oracle répond par la cléromancie); il ne suffit pas pour autant à faire de X. un homme qui est « bien de son temps». cf. infra.

oüç ô~ àvéÀ.ou;v 0touç, toutotç EÎKOÇKaÀ.À.lEPTJGavtaç èipx_ta0at toü ëpyou. aùv yàp 0tq> npattoµévcov EÎKOÇKai tàç 7tpaÇElÇnpotéval èni tè>À.q>OV Kai èiµElVOV àEi tù 7tOÂ.St. Notons seulement que l'expression cruv 9&Cî> (« Dieu aidant», dirionsnous). expression de valeur prégnante, est un véritable leitmotiv dans l'œuvre de X.; cf. notamment Hipp. V, 14; VI, l; VII, 3 et 14; IX, 3 et 8; Cyr. 11,4, 14, etc. • X.,

LE PROGRAMME DES PoROI ET LES ORACLES

D'après X., Socrate « affirmait que ceux qui ont à bien gouverner des maisons ou des cités ne peuvent se passer de la divination>> (Mém. 1, 1,7). La proposition finale des Poroi s'accorde bien avec les autres passages (surtout Mém. I, l et Cyr. 1, 6,1-6 et 44-46) où ~ Sy/1.J 204; F. Sokolowski. Lois .wcrét>sdes cités grt•cques. n" 3:?; analyse et résumé dans P. Amandry. op. cil .• 151-153; R. Flacelière. Dnins el oracles gras, 96-99.

VI, 3

221

s'exprime l'opinion de X. sur le rôle de la mantique, opm1on qui n'est pas celle de Platon. ni peut-être celle de la majorité des Athéniens 6 • Selon X., l'homme n •a pas à consulter les oracles pour les actes qui sont nécessaires et dont l'issue est prévisible: pour ceux-ci, il suffit d'acquérir les connaissances indispensables, puis de demander par des prières (et non par des oracles) la bénédiction divine (mais « il y a impiété, quand on n'a pas appris à monter à cheval, à demander aux dieux de vaincre dans un combat de cavalerie», etc. Cyr. 1, 6,6). En revanche, le recours à la mantique est nécessaire pour les actions adèla (non point «obscures», mais «incertaines»). Les dieux sont les maîtres du destin. Un oracle favorable n'est pas fait pour donner à l'homme la solution d'un problème trop compliqué pour lui, mais pour être le bâton de l'aveugle. qui donne la force d'entreprendre et l'espoir d'arriver au but. Précisément, X. estime avoir épuisé la discussion. Son projet lui paraît décidément bon, aisément réalisable, les avantages et les inconvénients en ont été pesés, les objections ont été réfutées. Voici qu'il se prend à espérer que les Athéniens, après délibération, décident de l'adopter (d taùta ô6çtttv i>µiv 1tp6:ttt1v), une majorité de citoyens rayant trouvé bon et avantageux. Il demande pourtant qu'on n'entreprenne rien sans avoir une réponse favorable des dieux. De fait, son programme, conçu pour le long terme, exigeant le concours de tous (notamment pour l'essor du Laurion), tendant à modifier profondément (par l'achat de dizaines de milliers d'esclaves) la composition de la population athénienne, fait naturellement partie des actions adèla dont l'issue est imprévisible. Les hommes, même les plus lucides et les plus raisonnables, ne peuvent décider de leurs actions que sur des «images» de l'avenir, celles-là même qu'ils se sont forgées; seuls les dieux savent ce qu'il adviendra de toute entreprise humaine (Cyr. 1, 6,44 et 46). Ainsi, il n'y a nulle contradiction, pour X., à s'en remettre, au sortir d'une longue argumentation, à la réponse oraculaire. Si celle-ci est positive, les Athéniens mettront tout leur cœur à l'ouvrage; si elle est négative, ce ne sera pas la preuve que le projet de X. est mauvais, ce sera seulement la reconnaissance d'une incompatibilité entre ce projet et l'avenir connu des dieux. X. sait que le meilleur des programmes peut aboutir au pire résultat. que le meilleur des remèdes peut rester sans efTet sur le malade, etc. " Cf.. outre A. Brémond. la piélé f!,rt'Cqm• (Paris. 1914). 77 sq. et Scharr. 266-273. l'analyse minutieuse d'O. Gigon, Komm('ltfar :. n~tett Buch rnn Xenoplton.1 ,l,,frm. ( Bâle, 1953), 8-16.

222

CITÉS ET ORACLES

Les actions humaines, même les mieux préparées et exécutées, n'ont

point d'efficacité si les dieux n'y mettent la main. Dans le monde de X., le théion est partout (on comparera par exemple avec l'interprétation rationaliste et psychologique d'un Polybe. X, 2,10).

APPENDICE

I

XÉNOPHON ET SES CONTEMPORAINS: LA PORTÉE DES POROI Les propos1t10ns contenues dans les Poroi ne furent pas adoptées par les Athéniens. Furent-elles débattues publiquement? Xénophon n'était pas un homme politique; les Poroi ne sont pas un discours. qu'un orateur aurait pu lire tel quel devant l'Assemblée. E. C. Marchant avait supposé que l'opuscule de Xénophon était adressé au Conseil des Cinq-Cents; rien ne le prouve. Xénophon dialogue parfois avec son lecteur; il espère que œ lecteur jouit de quelque influenœ dans la cité, puisqu'il imagine que son projet sera adopté par les Athéniens. Ce ou œs lecteurs, œ sont les prostatai, les orateurs influents et aussi, d'une manière générale, les notables de la cité; le dialogue ou discours fictif des Poroi, s'il s'adresse en principe à tous les Athéniens, s'adresse en fait d'abord à eux, qui se trouvent dans le plus grand embarras en 355/4. Xénophon connaissait œrtains d'entre eux. Or on a souvent noté des analogies entre telles propositions contenues dans les Poroi et telJes mesures proposées ou décidées sous l'intluenœ d'Euboulos à partir de 354. Sans chercher à établir - tâche impossible -· des rapports stricts de cause à effet. il est intéressant de suivre toutes les pistes qui permettent de reconnaître - ou de ne pas reconnaître le reflet, voire l'application, dans les années 350, des propositions de Xénophon. On suivra ici l'ordre des chapitres.

Chapitre Il ( les revenus tirés des métèques)

Un seul point mérite d'être discuté, à propos de l'enktèsis oikias (cf. Il, 6). Selon plusieurs savants, l'étude des décrets athéniens postérieurs à 350 montrerait que la proposition de Xénophon fut prise au sérieux, les Athéniens accordant alors plus volontiers (à titre individuel) l'enktèsis gès kai oikias 1 • Citons Cawkwetl: « C'est un fait que, tandis qu'avant la Guerre des Alliés l'octroi de l'enktèsis gès kai oikias parait avoir été relativement rare, après œtte guerre il est dispensé, à en juger d'après la documentation épigraphique, très libéralement. Naturellement, œla ne touchait que des individus privilégiés, mais œla suggère qu 'Euboulos 1

Cf. Herzog. 480: Cawkwcll. 64: G. Bodei. LVII-LVIII. note 42. et LXVII.

APPENDICE 1

a tenu compte, partiellement, des avis de Xénophon sur les moyens d'attirer les métèques». Vu la documentation actuellement à notre disposition - elle a été réunie et analysée récemment par J. Pecirka 2 -. cette hypothèse ne paraît pas fondée. Car il faut s'entendre. Il est vrai que les décrets accordant l'enktèsis sont peu nombreux pour la première moitié du IVe siècle (moins d'une dizaine), plus nombreux pour la deuxième moitié (une trentaine). Mais on n'aperçoit pas pour autant le lien avec les Poroi. D'abord parce que le relèvement de la courbe se situe moins vers 355-350 que vers 338-330, donc moins à l'époque (et sous l'influence?) d'Euboulos qu'à celle de Lycurgue. Ensuite parce que les décrets octroient presque toujours l'enktèsis de la terre et de la maison, et non ia seule enktèsis de la maison, comme le proposait Xénophon. Enfin et surtout parce que ces décrets, dans leur immense majorité, ne concernent pas des métèques, mais des xénoi, qui reçoivent aussi le titre de proxènes, qui vivent donc ordinairement dans leur cité et ne font à Athènes que de courts séjours. Pour ces étrangers, l'octroi de I'enk tèsis est un privilège et une assurance pour le cas où, à la suite de diverses circonstances, ils devraient s'installer durablement à Athènes. Mais ce ne sont pas des métèques au moment où le privilège leur est concédé. Xénophon, lui, imaginait des métèques venant se fixer à Athènes avec l'espoir d'obtenir l'enktèsis. La démarche est exactement mverse. Les deux seuls décrets qui pourraient iltustrer la proposition de Xénophon, et que cite J. Pefirka à cet effet. sont celui qui est proposé en 329 par Lycurgue lui-même en faveur d'Eudémos de Platées 3 • et celui, plus tardif, en l'honneur de Nikandros d'ilion et de Polyzélos d'Ephèse 4 • Encore ce dernier exemple est-il peu probant, car les honneurs (dont l'enktèsis) vont à des septuagénaires (le décret est adopté en 302/ 1, et l'on rappelle que les bénéficiaires ont acquitté l'eisphora à Athènes de 347 à 322: ils doivent être nés vers 370), à des étrangers qui ont été métèques autre/ ois, plusieurs décennies avant que le décret soit voté, et dont nous ignorons où ils ont vécu le reste de leur âge. Il me semble qu'après comme avant 350 l'enktèsis est restée un privilège politique parmi d'autres, la cité garantissant ainsi un statut enviable 2

The Formula for the Grant of Enktesif in Atlic Inscriptions (Prague, 1966); le même auteur, dans Eirene 6 (1967), 24-25, a montré ce qu'on pouvait tirer des inscriptions pour commenter Poroi Il. 6; cf. ci-dessous. 3 IG 112. 351 + 624 (S_vl/.3 288). ' JG 112.505 (Sy/1.3 346).

LA PORTÉE DES POROI

115

au bienfaiteur étranger qu'elle honore. pour le cas où il serait contraint de se fixer à Athènes, et que cela n·a rien à voir avec la volonté (supposée) d'attirer ou de retenir les métèques à Athènes.

Chapitre Ill ( les revenus tirés des commerçants) On peut noter trois points. 1°) Le souhait d'une justice rapide pour les commerçants maritimes (cf. Ill, 3) semble avoir été exaucé par la création des dikai emporikai, qui étaient jugées dans le délai d'un mois. C'est ce qu'ont noté la plupart des commentateurs. y compris les plus disposés à voir dans les Poroi un mélange de naïvetés et de chimères 5 • De fait, comme ra montré notamment L. Gernet 6 , c'est bien vers 350 que furent créées les dikai emporikai, confiées aux thesmothètes, ouvertes aux étrangers aussi bien qu'aux Athéniens et déclarées emménoi ( = qui se jugent dans le délai d'un mois)'. On ne peut guère douter que les Athéniens aient dû cette nouveauté à une proposition d'Euboulos ou de l'un de ses amis, et que cette réforme eût comblé les vœux de Xénophon. Désormais, pour une catégorie bien déterminée de délits et à condition qu'il y ait eu un contrat relatif à la place d'Athènes 8 , les commerçants athéniens et étrangers ont accès, dans un délai court, au tribunal populaire (auparavant, il semble qu'ils n'avaient accès qu'à des magistrats, sans doute aux nautodikai, dont on ne sait quasi rien): c'est là, incontestablement, une mesure propre à encourager les commerçants à venir au Pirée 9 • Si donc entre la proposition de Xénophon et cette innovation il y a bien une parenté, je serais tenté néanmoins de juger celle-ci plus lointaine qu'on ne le dit d'ordinaire. Car Xénophon ne songeait nullement à faire juger les commerçants par le tribunal populaire, il ne parlait que de magistrats; il proposait de décerner des prix aux magistrats les plus ' Cf. Boeckh, 702; A. Schaefer. Demo.~thmt•s und st'im• Zt'it 13 (Leipzig. 1885). 200 note 3; Herzog. 479; Andréadès. 385-6; Von der Lieck. 40-41; Cawkwell. 64; G. Bodei. LXXX. 6 Droit et société dans la Grèce ancienne ( Paris, 1955), 173-200 (étude parue d'abord dans Rev. ét. gr. 1938); cf. U. Paoli, art. emporos dans le Noi•. Dig. /ta/. VI (1960), 517-519. 7 La tentative récente d'Ed. E. Cohen, Ancient Athenian Maritime Courts (Princeton, 1973), 10-95, pour réfuter les conclusions de Paoli et de Gemet, m'apparait malheureuse (fai exprimé brièvement mon désaccord dans un compte rendu à paraître dans Rei·. ét. gr.). • Sur cc point (définition étroite des dikai emporikai), il me semble qu'Ed. Cohen a raison (op. cil., 96-157). 41 Cf. L. Gemct. op. cit., 182; Ph. Gauthier, S_l·mbola(Nancy. 1972), 198-205.

APPENDICE I

appréciés et les plus expéditifs, et non d'établir une règle de droit et une procédure applicables à tous les emporoi. Enfin, si les magistrats évoqués par Xénophon sont bien les épimélètes de l'emporion, comme j'ai essayé de le montrer dans le commentaire, alors il faut croire que Xénophon avait en vue non pas les dikai mais les phaseis: ce qui peut s'expliquer, car les retards dans les dikai étaient souvent imputables aux parties, tandis que les retards dans les phaseis étaient imputables aux magistrats compétents. 2°) Décerner des honneurs aux commerçants qui apportent d'importantes cargaisons de denrées utiles à la cité (III, 4): le conseil de Xénophon pourrait être illustré par les décrets honorant les emporoi importateurs de blé (cf. supra ad /oc.); mais il faut noter ici (comme à propos de l'octroi de l'enktèsis, cf. supra) que ces décrets sont postérieurs d'une vingtaine ou d'une trentaine d'années aux Poroi: contemporains de Lycurgue, de la disette des années 329-326, ils peuvent être invoqués pour faire comprendre la proposition de Xénophon, non pour en vérifier l'application. 3°) Reste la proposition de construire des hôte11eries, des maisons et des halles de vente pour les commerçants (Ill, 12-14). Tous les commentateurs 10 ont justement rapproché un passage de l'orateur Dinarque (I, C. Démosthène, 96), où celui-ci oppose au néant des actions menées par Démosthène les brillantes réalisations dues à Euboulos; il demande notamment: «Y a-t-il un bâtiment (oikodomèma) que Démosthène ait fait construire dans votre emporion, dans la ville ou en quelque endroit du territoire?» - De là on tire la conclusion qu'Euboulos, lui, avait fait construire à Kantharos quelque bâtiment public, sans doute destiné aux emporoi. Cela rappelle les oikèseis kai pôlètèria souhaités par Xénophon. Chapitre IV ( les revenus tirés des mines)

On a déjà noté, chemin faisant, une corrélation entre le souhait de Xénophon de voir s'associer les particuliers concessionnaires de galeries (IV, 32) et la mention de telles associations entre 350 et 330. Il est possible que les années 350 aient marqué le moment où la cité reconnut officiellement les associations de concessionnaires (pour certaines catégories de mines?), et que les Poroi aient été à l'origine de cette innovation. Une mesure comme celle-là était de nature à faciliter la reprise 10

Herzog. 479; Thiel. XXIV; Cawkwell. 64; G. Bodei, LXXXII et note 57.

LA PORTÉE DES POROI

227

de l'exploitation minière. D'autres du même genre (exemptions fiscales. cf. Dém. XLIII. 17-18; 31; supra ad IV. 12, où j'ai mentionné l'hypothèse de R. J. Hopper attribuant ces mesures à Euboulos) ont peut-être été proposées par Euboulos, dont nous savons qu'il s'intéressait aux affaires minières et qu'il suivait de près la perception des revenus des concessions 11 • Quel qu'ait été le rôle exact d'Euboulos. il est vraisemblable que des mesures furent prises, peu après la publication des Poroi, en faveur de l'exploitation minière. Et quel qu'ait été l'effet de cette législation, il est certain que l'activité minière connut un regain à partir de 350: en témoignent d'abord les fragments des listes des pôlètes 12 , également certains plaidoyers contemporains, et même l'orateur Démosthène, quand il affirme, en 341, que Philippe II pourrait bien convoiter les mines d'argent du Laurion 13 • Xénophon se serait naturellement réjoui de ce renouveau. D'abord parce qu'il prouvait que son apologie du Laurion était justifiée, au moins à court terme: il restait bien, comme il l'avait écrit, de fortes possibilités d'exploitation; c'était moins le fonds que la confiance qui manquait. Ensuite parce que les revenus de la cité augmentaient à proportion du nombre des concessionnaires (cf. Hypéride, Pour Euxénippos, 36). Mais le projet le plus original de Xénophon (l'achat puis la location de nombreux esclaves publics) fut-il jugé trop aventureux? On ne possède, en tout cas, aucun indice permettant de croire à une application, même partielle. Cependant, il est possible que le projet de X~ophon ait rencontré un écho, sous la forme d'une proposition présentée par Diophantos 14 • On raisonne ici sur un texte, malheureusement fort elliptique, d'Aristote (Politique II, 1267 b, 16-19). Le Stagirite, achevant de critiquer le système de Phaléas de Calcédoine, déclare: « Mais si vraiment il faut que ceux qui sont employés aux travaux publics (toùç tà Ko1và tpyaÇoµtvouç) soient des esclaves publics, alors il faut que cela soit fait de la même manière qu'à Épidamne ou conformément à l'organisation proposée autrefois à Athènes par Diophantos » (1ea0avt6ç1tot& KŒt&attuaÇ&v 'A8t1V11CJt).

11

Dém. XIX. 293. u Cf. M. Crosby, Hesperia 19 (1950), 189-312; 26 (1957). 1-12: Lauffer, 155-163. 13 Dffll. VIII, 45 (invoqué par Cawkwell, 64). Les liens entre rexploitation minière et l'activité politique anti-macédonienne ont été soulignés par S. Lauffer dans un article suggestif, Prosopograpl,isclte &merkungtn zu den allischen Grubenpachtlisten, dans Historia 6

(1957). 287-305. 14 Cf. notamment Cawkwell. 58 et note 67.

228

APPENDICEI

Pour établir un lien (hypothétique) avec les Poroi, on doit d'abord supposer que l'Athénien en question était l'homme politique, Diophantos de Sphettos, qui semble avoir fait partie des amis d'Euboulos 15 , et dont le nom est associé, comme celui d'Euboulos, aux distributions d'argent faites au titre du théôrikon 16 . La précision d'Aristote - f'lç à1tofüôoµtvrtç). À r Assemblée et à l'Héliée, les citoyens recevront le triobole; les prêtres, les bouleutes, les magistrats, les cavaliers (cf. VI, 1), les éphèbes enfin, recevront autant ou davantage. Dans tous les cas, soulignons-le. la trophè est inséparable de l'activité ou du service publics. 2) Pour les citoyens, ces indemnités sont des compléments. ou plutôt des compensations. Ce ne sont pas des moyens d'existence. Rappelons-le, les citoyens « pauvres» qui sont évoqués en I, 1 ne sont pas des indigents sans travail. Ce sont de petits propriétaires comme ceux qu'aimait Aristophane ou comme l'adversaire d'Eratosthène, défendu par Lysias, qui vit à la ville, mais qui part de bon matin travailler sur sa terre 2 • 2

Lysias 1. Sur le meurtre d'Ératosthène, 11. 13. 20, 22; cf. H. Bolkestein, Economie Life, 20-21.

242

APPENDICEIll

Ce sont « les foulons. les cordonniers, les charpentiers, les forgerons. les cultivateurs, les commerçants» qui, au dire de Socrate, formaient la majorité de l'Assemblée du peuple (Mém. 111. 7.6, cf. aussi Platon. Protagoras 319 d). Tous ces citoyens, qui ont besoin de travailler pour vivre, se trouvent désavantagés quand ils viennent siéger à l'Assemblée ou dans les tribunaux. Le triobole, trophè de l'animal politique. les indemnise. La démocratie directe peut devenir une réalité. 3) Il va de soi que dans ce système les Athéniens n'abandonnent pas pour autant leurs occupations ordinaires, ne délaissent pas durablement (sauf en cas de guerre) qui sa terre, qui sa boutique, qui son atelier. Tout au contraire. le traité des Poroi implique, de la part des Athéniens. un effort soutenu. Qu'on relise le chapitre 1. Qui exploite les domaines dont les fruits peuvent être vendus. la mer poissonneuse et les salines. qui donc exploite les carrières de marbre et les mines, sinon les Athéniens? L'essor du Laurion (chap. IV) implique qu'une multitude d'Athéniens se portent concessionnaires de galeries et prennent en location les esclaves publics, que d'autres se chargent des équipements nécessaires pour le traitement du minerai. pour le logement et le ravitaillement des hommes. Dans /'Athènes du triobole quotidien

1) Pour montrer à ses lecteurs la nouveauté de l'eisphora qu'il propose, Xénophon indique qu'elle permettra de verser plus tard, à chaque citoyen, trois oboles par jour pendant toute l'année, et ce chaque année (111, 9; cf. ÀT)\l'OVtm Kat' tvmut6v); il pense encore à ce triobole quotidien quand il suggère d'acheter des esclaves publics «jusqu'à ce qu'il y en ait trois pour un Athénien» (IV, 17). Ce triobole quotidien ne peut plus être défini comme une indemnité versée au titre d'une activité politique, ou du moins d'une activité politique définie suivant les normes habitue11es. Renonçant à l'impérialisme, les Athéniens ne sauraient désormais exercer d'activité publique que chez eux. Or, les 25 ou 30.000 citoyens ne peuvent pas « être de service» tous ensemble et tous les jours de l'année. Les héliastes sont au maximum 6.000 et ne siègent pas tous les jours de l'année; les bouleutes ne sont que 500, les prêtres et les magistrats sont quelques dizaines, l'Assemblée est réunie 40 ou 50 fois par an. 2) Dès lors, de deux choses l'une: ou bien le triobole est distribué chaque jour à chaque Athénien, indépendamment de toute activité publique, et il s'ajoute aux revenus privés que chacun tire de ses biens

LE TÉMOIN D'UN IDÉAL

243

propres, - mais alors le triobole n'est plus une trophè (sauf pour les indigents, comme plus tard la f rwnentatio pour la plèbe romaine), ce n'est qu'un «bonus», qui redevient trophè seulement les jours où le bénéficiaire, empêché de vaquer à ses occupations privées, s'occupe des affaires publiques (par exemple les jours où se réunit l'Assemblée); ou bien le triobole garde son caractère de trophè parce que tous les Athéniens sont considérés comme exerçant 24 heures sur 24 leur activité de politai, et l'on institue la démocratie directe permanente (les réunions de l'Assemblée sont multipliées, ainsi que le nombre des fonctions publiques; l'entraînement dans les gymnases ou la participation aux tètes religieuses, parties intégrantes de la vie civique, sont l'occasion de distributions d'indemnités), - mais alors les citoyens sont obligés de renoncer à toute activité privée, ils vivent en c> donné à trnphè et le rapprochement avec Plutarque. Pér. 12 (cf. p. CXX) montrent qu'ici G. Bodei a commis la même erreur que Hasebroek. négligeant révolution historique. Naturelle chez Plutarque. la confusion relative à la notion de troplré l'est moins de la part des historiens modernes.

APPENDICE

IV

APERÇU DE LA FORTUNE CRITIQUE DES POROI Depuis le début du XIXe siècle nombre de savants ont étudié les Poroi. Le nom et l'œuvre des principaux d'entre eux ont été cités au fil du commentaire. On voudrait, dans les pages qui suivent, non point établir, suivant fordre chronologique, une bibliographie complète des Poroi, mais seulement décrire l'évolution générale et marquer les principales étapes de la recherche moderne. Il était illogique, à mes yeux, de placer cet exposé avant le commentaire: à moins d'une plate énumération, la discussion eût été interminable et il aurait fallu produire par avance les pièces du dossier. Venant à la fin, ces pages, où l'on s'efforcera de situer à leur place les principaux commentateurs des Poroi, pourraient fournir la matière d'un premier index, celui des auctores recentiores. Quiconque étudie la «littérature» consacrée aux Poroi fait rapidement deux constatations. L'une, brièvement signalée ci-dessus (supra Introduction 1), a trait à la diversité des disciplines et des tempéraments intéressés. Les Poroi ont été analysés principalement par trois catégories d'érudits. En premier lieu, les philologues, fort actifs et nombreux au XIXe siècle, polémiquèrent entre eux puis abandonnèrent peu à peu la place dès le début du xxc siècle et définitivement à partir des années 1930. A côté d'eux, et parfois mêlés à eux.venaient les historiens s'occupant d'histoire politique (au sens large du terme. englobant l'histoire des institutions), c'est-à-dire presque tous les historiens du XIXe siècle et du début du xxc. Arrivèrent enfin, surtout depuis les années 1914-1920, les spécialistes d'histoire économique. Or une constatation digne de remarque est que ces différentes catégories de savants se sont réciproquement ignorées (à quelques - notables -· exceptions près, comme autrefois Boeckh ou récemment G. Bodei). Hasebroek, vers 1930. ou RostovtzefT, en 1941. en sont encore à douter ou à nier que Xénophon ait été l'auteur des Poroi. alors que pour les philologues cette question est réglée depuis les années 1870. L ·autre observation, non moins banale mais non moins instructive, porte sur le changement qui se produit vers 1914-1920. Les érudits du XIXe siècle, qu'ils eussent été formés à la philologie ou à l'histoire. étaient presque tous les adeptes ou les héritiers du positivisme. Pour eux.

LA FORTUNE CRITIQUE DES POROJ

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les Poroi étaient un document de valeur plus que douteuse, qu'il convenait de soumettre au crible d'une impitoyable critique. Aussi les philologues épuraient-ils et corrigeaient-ils d'abondance un texte jugé fautif, tandis que les historiens stigmatisaient les absurdités, les inconséquences ou les dangers des projets de Xénophon. Tant pis si, au sortir de ce filtre serré, il ne restait plus rien du document en question. Ne valait-il pas mieux avoir établi ce pur zéro plutôt que d'utiliser, comme s'il s'agissait de propos sérieux, des songes creux? A partir des années 1914-1920, un esprit nouveau souffle peu à peu. On essaie de comprendre plus que de critiquer. Les philologues montrent que le texte est moins corrompu qu'on ne l'avait cru. Les historiens, même s'ils concluent toujours à l'utopie, jugent l'auteur digne d'intérêt à cause des renseignements qu'il nous livre et de certains traits de mentalité. Enfin, les économistes se découvrent un ancêtre. Cependant, l'efTort de compréhension, dans l'ensemble, n'a pas été beaucoup plus fructueux que l'œuvre critique, tant les modernes (surtout les économistes) jugèrent Xénophon d'après leurs propres catégories.

1. L'ère de la critique 1. Le texte

Le travail des philologues a porté non seulement sur la critique de la tradition manuscrite, mais aussi sur l'identification de l'auteur et la détermination de la date du traité. Sur le premier point, et sans doute parce qu'il y avait beaucoup à faire, on en fit plus qu'il n'eût fallu. Poursuivant l'œuvre entreprise au XVIe s. par H. Estienne et J. Leunclavius (Lôwenklau) 1 , jugeant comme ceux-ci la tradition manuscrite très médiocre, les philologues accumulèrent les corrections. À cet égard, les éditions marquantes furent, après celle de J. G. Schneider (Leipzig, 1815), celles de L. Dindorf (éd. d'Oxford, 1866), d'A. Zurborg (éd. Weidmann, 1876) et de F. Rühl (éd. Teubner, 1912). Feuilletons cette dernière: la brosse et le pinceau du restaurateur ont laissé de nombreuses traces. On trouve à chaque page, outre de multiples corrections, plusieurs mots supprimés (placés entre crochets droits) ou ajoutés (entre crochets obliques) par l'éditeur, 1

Le premier avait publié à Genève, en 1561, une édition annotée des œuvrcs complètes

de Xénophon; le second d'abord une traduction des mêmes œuvres ( Bâle. 1569). puis une édition accompagnée d'une traduction (Francfort, 1596). Celle-ci provoqua, la même année, une vive réplique d'H. Estienne ((( ln Leunclavianae interpretationis errores insignes ... inquisitio H. Stephani»).

256

APPENDICE IV

lequel consacre l'essentiel de l'apparat critique (une di2:aine de lignes par page en moyenne) aux conjectures de ses devanciers; et cependant, on rencontre quatre fois la crux. À côté des éditeurs. les emendatores tiennent une place essentielle. Les principaux sont. en 1831 A. Bake 2 • en 1854 Th. Bergk 3 • en 1858 C.G. Cobet 4 , en 1871 J. N. Madvig 5 , en 1893 G. Kaibel 6 • Cette pluie de corrections n'a pas toujours été féconde. Car on a trop corrigé, sans tenir compte du contexte ou de la valeur technique des termes employés par Xénophon. Donnons un exemple. En III, 8, proposant de lever une eisphora de paix. qu'il espère rentable, Xénophon évoque par comparaison les eisphorai de guerre. qui sont à fonds perdu: ceux qui apportent leur contribution savent bien que oootnotE à1toÀT1\f/Ovtmâ âv E\OEVÉYKCOOtV oùôt µE0ÉÇOOOtV chv âv &iOEVÉyk'.COOl («il n'y aura jamais de remboursement des contributions ni de bénéfices à se partager»). Méconnaissant le sens financier de µEtÉlttv nv6ç. que R. Herzog expliquera en 1914. la plupart des éditeurs et des commentateurs concluent à une faute (cf. par exemple Zurborg: « neque enim ipsius pecuniae istius. quam solverant, participes fieri poterant ») et corrigent de diverses façons (cf. l'apparat critique de Rühl). Parallèlement, grâce à d'utiles discussions sur la langue et sur le style des Poroi, les philologues montrèrent que le traité était certainement l'œuvre de Xénophon. À cet égard, l'étude de Zurborg, en 1874, marqua un point d'aboutissement 7 • La question ne fut plus rouverte ensuite, sauf par les historiens. On se mit d'accord plus difficilement sur la date à laquelle le traité avait été composé: 355/4 (cf. supra Introduction )). Tout en travaillant d'arrache-pied sur le texte des Poroi (et des autres Scripta minora de Xénophon), les philologues tenaient à affirmer bien haut qu'ils n'agissaient point par admiration pour l'auteur. Comme les commentateurs dont il sera question ci-dessous, ils trouvaient les 2

Commentatio critica de libe/li.,; qui Xenophonti.'i nomine feruntur de rep. Athen. et dt• i·t•ctigalibus(Nova acta liter. societatis Rheno-Trajectinae IV), (Utrecht, 1831). 3 Dans Zeitschriftjür die AlterthumsK·issenschaft Ill (1854). 432. " No,•ae lectiones... in script ores graeco.,; (Leyde, 1858): sur les Poroi. pp. 755-7 · 5 Adi·ersaria cririca ad scriptores graecos er latinos 1 (Copenhague, 1871): sur les Poroi.

p. 364. t> Dans Hermes 28 ( 1893), pp. 45-48. 7 Il s'agit. rappelons-le, de l'étude (antérieure de deux ans à l'édition procuf6e par Zurborg chez Weidmann) intitulée De Xenophontis libello qui nOPOI inscribitur (Berlin, 1874): pour l'attribution à Xénophon, cf. pp. 18-32. Les conclusions de Zurborg sont reprises dans l'ouvrage, plus général, de L. Gautier, LA langue de Xénophon (thèse Genève, 1911).

LA FORTUNE CRITIQUE DES POROI

propositions de Xénophon utopiques ou absurdes: à leurs yeux. le fond était aussi médiocre que la forme. Ainsi. Zurborg rappelait que les erreurs ou les contradictions que renferment les Poroi n'étaient nullement des obstacles pour l'attribution à Xénophon: dans cet opuscule, comme dans les traités plus philosophiques, on retrouve. écrivait-il, la même « argumentandi tarditas », la même «judicii mediocritas » (d'où il résulterait que Xénophon, à l'aise dans les détails, est incapable d'embrasser un ensemble un peu vaste), enfin « eadem pietas paene superstitiosa » 8 • De son côté, F. Rühl jugeait bon de commencer son introduction par ces lignes: « Xenophontis opuscula saepe et diligenter legi; non quod auctorem amarem, sed quod ad vitam. mores, instituta Graecorum cognoscenda utilissima sunt ». Placé entre Thucydide (pour l'Histoire) et Platon (pour les dialogues philosophiques). Xénophon faisait repoussoir.

2. Les commentaires Les commentateurs ne sont pas plus tendres que les éditeurs. Le ton est donné dés 1817 par Boeckh, qui consacre un chapitre de sa Staatshaushaltung der Athener à une critique sévère des Poroi 9 • Boeckh jugeait l'opuscule de Xénophon aussi dangereux que chimérique. Dangereux d'abord, et pour deux raisons. En premier lieu à cause des avantages exorbitants consentis aux métèques (chap. Il). notamment l'exemption du service militaire: « Si les Athéniens avaient suivi les conseils de Xénophon, écrivait Boeckh, la prospérité d'Athènes aurait été menacée de l'intérieur. Car les citoyens auraient péri dans les combats, pendant que les étrangers auraient été en sécurité. Les citoyens auraient dû négliger leur travail, sacrifier leur fortune, pendant que les étrangers auraient tiré à eux tout le commerce, tout l'artisanat, et pour finir la propriété foncière» (p. 702). En deuxième lieu. à cause du pacifisme prôné au chapitre V. En 355, l'éloge de la paix n'était pas de saison, il fallait bander les énergies des Athéniens, et non les affaiblir en invitant au repos. Et Boeckh concluait: « Le méprisable parti de la paix à Athènes . . . porte une grande part de responsabilité dans le déclin de la liberté de tous les Grecs comme dans l'abaissement de la puissance et du rôle politique d'Athènes; il a livré l'État à ses ennemis - qui étaient pour lui des amis -, alors que le noble Démosthène assignait à sa patrie le rôle de premier combattant pour la défense de la liberté grecque menacée par le despotisme du Nord» (p. 706-7). Ainsi, la mise 1

Op. cil., p. 39. Je le citerai ci-après d'après la J• édition de la Staatshuushaltung der Atht•ner (procurée par M. Fraenkel en 1886). q

APPENDICE IV

en œuvre des projets de Xénophon eût conduit à la ruine de la communauté politique. Quant au caractère chimérique. Boeckh le voyait partout. La construction qui aurait permis, selon Xénophon. de verser le triobole quotidien. est à ranger panni les châteaux en Espagne (« Luftschloss ». p. 704 ). Le projet minier est irréalisable: « On ne peut croire qu'outre les esclaves privés. 60.000 esclaves publics auraient pu être employés longtemps d'une manière profitable dans les mines: tout au contraire. l'État ou les particuliers auraient été bientôt ruinés» (p. 705). Boeckh adoptait apparemment un ton plus doux pour conclure, mais cette douceur n'eût été qu'amertume pour le pauvre Xénophon: « La pieuse conclusion du chapitre VI réconcilie le lecteur avec le vieillard socratique, nonobstant les nombreuses faiblesses de l'opuscule. Plût à Dieu que tous les hommes d'État. avant chaque entreprise, aient pensé. comme Xénophon. à Lui!» (p. 707). L'autorité de Boeckh étant considérable, son jugement sur les Poroi fut celui de tout le XIX" siècle. En 1856, A. Schaefer renvoie son lecteur au livre de Boeckh et se borne personnellement à déplorer le pacifisme de Xénophon, inspirateur de la politique d'Euboulos. singulièrement de !'haïssable théôrikon. Après avoir résumé fidèlement les propositions contenues dans le chapitre V (arbitrages; alliance avec tous les Grecs pour garantir la sécurité de Delphes; guerres seulement défensives), il concluait: « Nous laissons ouverte la question de savoir si de telles mesures auraient pu atteindre leur but, mais ce qui est sûr. c'est qu'Athènes avait le devoir de ne pas laisser la Guerre Sacrée devenir pour la Grèce un foyer de peste. Si la conscience de leur ancienne renommée et de la crainte des dieux avait été encore vivante dans la communauté politique et chez ses chefs, c'est grâce à une intervention énergique que, d'entrée de jeu, le conflit aurait été rapidement liquidé: Athènes n'aurait pas laissé à Philippe l'honneur d'établir la paix sacrée en Grèce. Mais pouvait-on espérer cela, alors qu'on proposait comme unique but aux Athéniens de redresser leurs finances détériorées. de vivre chez eux dans l'abondance et de célébrer des tètes brillantes?» 10 . Ainsi, en dépit du bien-fondé de certaines propositions des Poroi et de la compétence reconnue aux hommes politiques pour lesquels le traité est composé 11 , l'opuscule de Xénophon et la politique qu'il préconise sont l'expression de la décadence athénienne. Demostht•ne.r und seine Z,•it (je cite d'après la 2• édition. parue à Leipzig en 1885-7), p. 194-5. 11 C'est-à-dire Euboulos et ses amis (les pages sur les Poroi sont dans un chapitre 10

LA FORTUNE CRITIQUE

DES POROI

259

Zurborg, en 1874, adopte le jugement de Boeckh 12 • On a vu plus haut qu'il attribuait à Xénophon « un raisonnement lent», « un jugement médiocre», « une piété superstitieuse». Il ne juge dignes d'intérêt dans les Poroi que les conseils relatifs à la défense du Laurion 13 • Un peu plus tard, Ch. Diehl, lui aussi, se déclare d'accord avec Boeckh. Lorsqu'il se risque (timidement) à excuser les exagérations et les erreurs de Xénophon, c'est en invoquant la passion politique et la hâte de la rédaction 14 • JI estime toutefois qu'il y a de bonnes choses çà et là, ainsi à propos de la monnaie 1 5 • En définitive, la critique historique du XIXe siècle, inaugurée par Boeckh, comporte deux aspects différents, qui semblent moins complémentaires que contradictoires. D'un côté, les Poroi sont disqualifiés en tant que document pouvant servir à l'histoire ou à la compréhension du IVe siècle athénien: naïvetés, chimères, utopies, châteaux en Espagne. tels sont les qualificatifs de rigueur. Il est entendu que l'historien moderne qui ferait fond sur ces rêveries serait bien mal inspiré. La leçon fut retenue: Ed. Meyer et K. J. Beloch s'abstinrent, comme A. Schaefer avant eux, d'utiliser les Poroi dans leurs exposés sur le IVe siècle 16 • D'un autre côté, on reconnaît aux Poroi une valeur - négative de témoignage: ce traité, dit-on, aurait reflété et en même temps encouragé la tendance pacifiste, bientôt défaitiste, qui causa la ruine d'Athènes. En face de Saint Démosthène et de ses émules, apôtres de la résistance armée et promis, comme tels, à la canonisation par la postérité, Xénophon est rangé, aux côtés d'Euboulos et des ses amis, parmi les mauvais génies de la cité, accusés de lâcheté ou de trahison. Triste fin pour l'officier de l'Anabase! Mais un traité peut-il à la fois être entièrement chimérique et traduire, voire influencer, la mentalité des contemporains? L'extrême sévérité de Boeckh ne s'explique-t-elle pas, au moins partiellement, par son admiration excessive pour le talent

intitulé Euboulos und das Friedenssystem); Schaefer (notamment p. 200) reconnait à Euboulos des qualités de gestionnaire, mais déplore l'usage «démagogique» qui était fait des nouveaux revenus (d. le 1/tjôrikon). u Op. cil., p. 38-39. 13 Op. cit .. p. 40. 1• Quo tempore, qua mente scriptus sit Xenophontis libellus qui nopo1 inscribitur (Paris, 1888). ., Op. cil., p. 62-3. 16 Ed. Meyer, Gesch. des Altertums (3• éd. Stuttgart, 19IOsqq.). V, p. 280 (cité par K. von der Lieck, p. 2); K. J. Bcloch, Gr. Gesch. (2" éd. Leipzig, 1922). p. 452, n'a qu'une phrase à écrire sur les Poroi: cet opuscule «enthilt keinen einzigen Gcdanken, der praktiscb zu verwirklicben gewesen wire )).

260

APPENDICE IV

et pour l'attitude de Démosthène et par la conviction (qui renforce l'admiration) que l'histoire vécue était la seule possible?

Il. L'ère de la compréhension Au début d'une brève mais dense étude sur les Poroi, R. Herzog notait fort justement que ce traité « bat es weniger an Kritikem ais an Erklarem gefehlt » 1 7 • Précisément, Herzog fut l'un des premiers à essayer «d'expliquer» plutôt que de «critiquer» les Poroi. Après avoir défendu la leçon des manuscrits pour plusieurs passages, et après avoir rapproché les propositions de Xénophon de faits ou d'institutions connus par d'autres sources, il concluait: « Ces données, empruntées à la vie réelle, nous montrent en tout cas que nous ne devons pas sourire des propositions de Xénophon, inspirées par un chaud patriotisme, comme s'il s'agissait des caprices d'un utopiste. On peut trouver les calculs des chap. III et IV trop optimistes; mais Xénophon lui•même, en IV. 33 sq .. fait les restrictions nécessaires. On regrette particulièrement l'absence de l'exposé détaillé de ces calculs - mais celui-ci avait peut-être été présenté à part [cette suggestion. entachée de modernisme, est à rejeter, Ph. G.]. Ainsi, ce traité, pour lequel ces remarques voudraient susciter un regain d'intérêt, appelle-t-il encore bien des recherches>>18 • Ce dernier vœu fut en partie exaucé huit ans plus tard, lorsque J.H. Thiel eut publié une remarquable édition des Poroi, qui reste de loin la meilleure dont nous disposions aujourd'hui. Herzog y apprécia sans doute le respect scrupuleux du texte (Thiel corrige beaucoup moins que ses prédécesseurs). les notes précises qui accompagnent le texte (notes portant tantôt sur la langue, tantôt sur les institutions). enfin l'introduction et les excursus où sont posées les questions essentielles au point de vue historique. J'ai eu souvent l'occasion, dans les pages précédentes, de rendre hommage au travail de Thiel. Ce que je voudrais plutôt souligner ici, c'est la nouveauté du point de vue. Thiel fut le premier, je crois, à tenter une réfutation en forme des affirmations de Boeckh 19 . Son raisonnement comprend deux parties. D'abord, Thiel soulignait l'enracinement de l'homme Xénophon dans la vie politique de son temps et les liens entre les propositions des Poroi et le «programme» d'Euboulos. Or. disait-il, ce programme ne pouvait pas être populaire, puisqu'il visait à mettre fin à la pauvreté de la masse 1 1

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Zu .'frnophon.,; Poroi. dans frstgahc· H. Blümnt•r (Zurich. 1914), p. 469. Loc. cil .. p. 480. :'.ENOüNTm: noPOI (diss. Amsterdam. 19:?2). pp. XXIII-XXX.

LA FORTUNE CRITIQUE DES POROI

261

sans nuire aux riches - démarche opposée à celle des démagogues. Il fallait donc convaincre les Athéniens par tous les moyens: pour Xénophon. ami d'Euboulos et homme de plume. la composition des Poroi fut un de ces moyens. Ainsi, beaucoup d'idées exprimées par Xénophon, loin d'être originales, seraient reprises du «programme» d'Euboulos. Comme ces idées reflétaient les vues d'un groupe politique et que certaines d'entre elles reçurent un début d'application, il faudrait croire, disait Thiel. qu'elles n'étaient pas aussi chimériques que Boekch le supposait. Cette première conclusion lui paraissant solide (en fait, les liens supposés étroits entre Xénophon et Euboulos sont fort mal documentés, et rien n'assure que celui-ci et ses amis auraient pu encourager ou approuver la rédaction des Poroi), Thiel entreprenait de montrer que les« dangers» et les «chimères» dénoncés par Boeckh (cf. supra) étaient en grande partie illusoires. Loin de causer la ruine de la communauté civique, l'enrôlement des citoyens était inspiré par le patriotisme de Xénophon et visait à renforcer la solidarité des citoyens. Dangereuse, la politique de paix prônée par Xénophon ne l'était qu'à moyen terme (à cause de l'irruption imprévisible de la Macédoine sur la scène internationale). Quant aux projets financiers de Xénophon, Thiel reprochait justement à Boeckh et à ses épigones de les avoir ridiculisés en ]es comparant indûment aux pratiques des États modernes et d'avoir méconnu les réserves et la prudence présentées ou recommandée par Xénophon à partir de IV, 33. Dans l'ensemble, les remarques et l'interprétation de Thiel étaient saines et utiles (cependant, je me sépare de lui sur deux points fondamentaux: la notion de trophè du dèmos, cf. supra Introduction 111,et la signification de l'eisphora de III. 9-10. supra ad /oc.). Thiel. qui aurait dû faire école, n'eut guère de postérité. Seul Wilhelm, en 1934, adopta une perspective analogue, et sur certains points il prolongea ou rectifia les conclusions de Herzog et de Thiel 20 • Aussi bien. tout se passe comme si. dans les années 1930, la recherche d'inspiration philologique était terminée. Le texte des Poroi est alors édité ou réédité partout (sauf en France): en Allemagne (depuis 1912: F. Rühl dans l'éd. Teubner, cf. supra). en Grande-Bretagne (depuis 1919 dans l'éd. d'Oxford. depuis 1925 dans l'éd. Loeb, par les soins d'E. C. Ad. Wilhelm. Unti>À.aKEÇ 71 l;EVoq>UÀ.aKEÇ72 OÎK&îCl (ta) 62 o{K6ru:6ov 67,189 opcpavoq>i>À.aK&Ç68 ÔO'IOV

211 itôuc;, fiôtwç 75, 84 9eparu:ÛElV ) 73, 177

203

1tapqe1v 46, 138 ru:Â.t«ÇElV193 ru:via cf. pauvreté 1U:~KOO'îTt (fi) 158, 173-4 ru:p1oooia 217 ru:pinoÂ.01 184, 192-3 ru:ptttEOOV{t6) 125-7 n6À.tç cf. polis. noÀ.ttda 35 1toÀ.oov8po:mia186 ffOVOt KQlKiVÔOVOl 208 1t6poç 7-19

157, 173-4

tµxopia (it) 121 tµ1t6p1a (ta) 51 fµxopoç 84, l 05 tniôomç 98 b:iKoopoç 127 t,nµt4:ta 56, 88, 123 fmxÀ.a (ta) 123 Ëpya {tâ) 117, 139, 180 tpyétÇea6m 112, 117, 135 tpyai;6µevo1 (o{) cf. exploitants. vailleurs eüxea6a1

µ&tOlKq)ÛÂ.OK&Ç68

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npoooôoç 7-19 1tpootKV6ç 199

278 7t(J)À.11 t'l pta 106 altoç 48, 121, 191 cruvall.âtt&tv 209 t&À. 11(tét) cf. taxes t01Cta:µ6ç 121 t6pvoç 50

INDEX DES MOTS GRECS

tpoqni cf. trophè unâ.PXovta(tà) 151·2 (j)tÀ.av8po.mia 88 xc1pottxv11ç 201 xtopoç 189

Ill. INDEX GÉNÉRAL (les mots jugés les plus importants sont en caractères gras) Acamanie 158. 173-4. 193 Achaiens 127 adjudicatiœ des concessions minières, 112-3 Aelius Aristide démarque les Poroi, 53 affermage des taxes en général, 14, 57, 86-7, 108, 157; en 355/4, 214; modalités, 172; cf. fermiers et taxes affranchissement d'esclaves à Naupacte. 69: dans le Laurion. 177-8 Agathocle 36, 198 Agésilas 36, 64. 120 Agis 182 agora 105-7; de Sounion, 186 agoranomes à Astypalée. 83 agriculture Xénophon et l'-, 3; revenus publics tirés de I'---. 53-55; revenus privés tirés del'-. 121-3 Agrigente 185 Agyrrhios 29 n. 14 Alexandrie 50, 236 alliés contingents envoyés par les -, 127 et Addenda; cf. cité et guerre amendes aux concessionnaires des mines, 12 Amphipolis emporionà -, 82 Ana ph lystos 178-9. 180-2, 185 Androtion 41, 94 Antigone le Borgne 15-17, 67. 96 approvmonnementde I' oikos, 123-4; de la cité en produits vitaux. 85-6. 235; cf. commerce arbitrage témoignages et-. 137; international, 197. 208-9 Arcadiens 90, 209 architecte salaire de l'-, 140 upnt besoins illimités en-. 125, 131, 166; - thésaurisé, 125-6; métal et monnaie. 126; circulation de I'-. 131; - et or, 131-4; mines d'- en Attique et ailleurs. 48-9; commerce de I'-. 55, 79; - du Laurion, 111-2 Aristide 25, 36 amtocratique convictions et tempérament de Xénophon, 3. 39. 44 Artabaze 96 artisanat 120, 129, 201 association dans les mines, 163, 226 Astypalée 83 Atamée 52 atelier où l'on vend, I07; dans les mines, 117. 187; monétaire d'Athènes, 150. 188 Adlènes au centre de la Grèce, 50, 236; prospère en temps de paix, 199 Albéniens et les propositions de Xénophon. 165, 223-231, 241. 253, 262 Athénogène 74

280 Attique autarcie

INDEX GÉNÉRAL

climat de l'-. 41

45, 49: ressources de l'-,

53

Babylone 49 banques et aphormè, 89; méfiance envers les-. 125; Pasion et Phonnion, 141; - et crédit, 201 Barbares voisins des cités commerçantes. 51 : métèques à Athènes, 63; évergètes, 96--7 berger à Gonnoi, 137 Bésa fortin à-, 179-185 bienfait notion de - en politique extérieure, 212 bienfaiteur cf. évergète blé cf. grain Bosphore Cimmérien 52. 80, 96-7 Boulê cf. Conseil boutiques 106-7 bronziers 120 budget dans les cités. 9 sq.; à Athènes, 27, 217 Byzance 51-2, 234, 236 Callias 44, 142 Callistratos d'Aphidna 13, 29 capital et revenu, 77; et aphormè, 89, 93, 104; - imposable, 90: pas de - imJX>sable pour les métèques, 99; - de l'emprunt, 102 carrières 48 Caunos et Rhodes, 11-12; et l'oracle de Gryneion, 220 cautions cf. garants cavaliers athéniens et métèques, 65-6; rôle stratégique des -, 184 centre géographique, 49-50 Chalcidique de Thrace 35, 80, 186 Charès 214 Charmide 57, 177 Chersonèse de Thrace 52, 234 chiffres concernant les esclaves mineurs, J42. 143, 155-6, 165 Chios 23, 72, 209 chouette marque publique à Athènes. 150 dté(s) et prostatai, 35; - alliées, 40, 96; - «ouvertes», 52; - refuges, 73-4; -, chose durable, 95; concorde dans la-, 128, 199; dépenses pour la-, 131; cf. aussi État et polis . dtoyeu et la fiscalité, 91, 99; homo politicus, 170, 240, 245; - et éphébie, 193-4; métiers des-, 241-2; cf. État Oéarchos 208 climat de l'Attique, doux, 45; modéré, 49 COllllllerÇUD attirés par le Pirée, 75, 200-205; saisis, 76; profits des -, 79; fret des-, 80; protection des, 81-4, 225-6; catégories de-, 84, 121; -dans une cité aux abois, 85; hôtelleries pour-, 105-6; honneurs aux-, 84-6,226; - étrangen à Athènes, 84, 239; - athéniens, 242, 249 commerce catégories de-, 121; terrestre, 51, 85; maritime et fret, 80; navires de -. 107; volume du-, 129; - et puissance navale, 234-7; - d'Athènes, en général,

INDEX GÉNÉRAL

281

20()..205;237; avec les cités voisines, 45-55: de l'argent. 55, 76; du grain, 82. 85-6, 235 compas 50 coacessiCNmaires des IIIÎlleS amendes aux, 12; - distingués des propriétaires. 117, 134, 167; louent des esclaves. 138, 142; - autourgoi, 153-4; - associés. 163; louent des maisons, 187: cf. exploitants coaœssiom minJèresrégime des-. 113-115; vente des-. 148 coacurrenœ dans l'artisanat, 120. 123. 129; dans les mines. entre les exploitants. 119: entre les esclaves privés et publics, 164 Confédération de Délos, 206; 2e - maritime : création de -. 207: - et l'essor du Laurion, 161; ruine de-, 6, 20 Conon 23, 161 Conseil (Bou/è) misthos du-. 28-9. 31, 218: le - et l'achat des esclaves publics, 146: le - à Rhodes, 233 contrat de louage, 138, 141 Corcyre-la-Noire 67 Corinthe 49, 78, 127, 178, 236 Cos 148, 158 crassiers 116 crédit pénurie de - au IVe s .. 80. 102; dans la cité, 121, 201 : cf. prêt Crésus et les mines, 117 Cyrus possessions de -, 49: - et la thésaurisation, 177 Cyzique taxes à-, 55, 158; frappe de l'électrum, 79, 132 Décélie occupation de-. 157-9, 175, 181-2 décrets honorifiques pour les importateurs de grain, 85; pour les commerçants. 88 Deigma 76 Délos port franc, 12; emporion, 82; taxes, 55, 172-4; ateleia à -, 135; maisons sacrées, 147 Delphes les Phocidiens à-. 4, 209-210; monnaies d'Athènes à-. 79; oracle de-. 219-220 Démétrios de Phalère 236-7 déaocratie et misthoi, 20-32; et prostatai, 35-1; - directe et pauvreté, 39, 230, 250-1 ; à Rhodes au III• s.(?), 233-4 Démosthène et ses tuteurs, 69; eisphora de -. 94; - contre Androtion, 94; - eirènophylax, 197; politique de-, 257, 259 Denys l'Ancien et l'eisphora, 92-3 et le destin dieux et la fécondité du sol, 46; - et la richesse du sous-sol, 48; des cités, 206; - et le sacré, 203; vœux et prières aux -. 211 ; - et oracles, 218-222 Diophantos de Sphettos 227-9 dirigeants dans les monarchies et dans les cités, 35-7 Dodone oracle, 219 dons aux cités, 97; - volontaires, 98 économique mentalité-, 245 sq. économiste Xénophon - (?), 2-3, 124, 129, 131, 264 Égine 45, 49, 206; monnaies d'-, 78

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eisphora en général. 13; à Syracuse, 92-3; à Athènes: généralités, 90: avant 355. 90, 171; arriérés d'-, 94; les métèques et r-. 58, 99; I'- proposée par Xénophon, 89-105, 155; l'«apport» des esclaves. 186 Éleusis esclaves publics à-, 31, 229; salaires à-. 140: prêtres d'-, 218 emporion magistrats de I'-, 80: règlement de I'-, 82 emprunt public, 101: à Milet. I03 émulatioo chez Xénophon, 83; dans l'agriculture, 54; entre commerçants, 84. 88; artisans, 130: métèques, 68: entre métoikophylakes, 71: entre magistrats et liturges, 83; entre rois, 97, 100: entre cités, 205, 212; cf. aussi prix enktèsis 67-8: 223-5 éphèbes trophè des -, 31 ; témoignage de Xénophon sur les -. 190-5 Éphèse 60 Épicratès riche concessionnaire, 117. 161 Épidamne esclaves publics à-, 227-8 Épidaure marbre du Pentélique à -, 47-8; atéleia à -. 135 épimélètes de l'emporion à Athènes, 80; ailleurs, 82; - des arsenaux, 80 équipement des mines par les propriétaires, 113, 151, 167; cf. propriétaires Érythrées 52, 98 esclaves terminologie chez Xénophon, 117, 151 ; font partie des biens nécessaires. 127; fourniront des revenus aux citoyens, 239; - pri'Vés dans le Laurion, 117; donnés en location, 138; l'exemple des - de Nicias, 140; - mêlés dans les mines à des travailleurs libres, 153; - fugitifs, 150, 159; - publics dans le Laurion: le problème de l'achat, 145, 170-1; de la marque, 150; du prix, 155-6; du nombre, 144, 155-6, 166; leur emploi dans l'armée, 176-7; se réfugieraient dans les forteresses, 180; - publics à Éleusis, 31, 229: dans l'atelier monétaire d'Athènes, 150; à Épidamne, 227-8; le projet de Diophantos, 227-9; affranchissement d'-, 69, 141; taxe sur les-, 157-8 ttat la notion d'- dans !'Athènes antique, 92, 251-2: - et fiscalité, 92, 148; - et armée, 176; I'- athénien et le projet de Xénophon: l'achat des esclaves, 145; la location, 164-6; l'-athénien et le Laurion, 113, 136, 188; noue commerciale

d'-, Étéonicos

107

23 étnagen procurent des revenus aux citoyens, 239; commerçants à Athènes. 84, 239; dans les mines, 134-6; invités à participer à l'eisphora, 96; nombreux dans une Athènes pacifique, 198-205; protégés en justice, 80-4, 225-6; décrets pour des -. 56; - à Rhodes et à Chios, 72; cf. aussi commerçants et métèques Eubée 49,91,96, 179,210 Euboulos action et innuence d'-, 6, 20, 29, 41, 134; «programme» d'-, 217-8; - et le théôrikon, 197, 258; - et la flotte, 233; un parent d'-, 91; les Poroi et -, 223-231, 260-1, 266; jugements sur -, 258-9 Eucharistos 86 Eudémos de Platées 224 Eumène II 88 Euthéros 153 Euthydème 38, 202 évergète(s) titre et listes d'-, 96; rois-, 97; -dans la cité, 98, 128 exil, exilés 72-3

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exploitats des terres, 121-3; des mines, distingués des propriétaires, 113; des ouvriers, 117; - des kainotomiai, 161; exemptés de certaines charges. 135-6; prennent en location des esclaves, J38; associés, 163 ; cf. concessionnaires exploitation tribale d'Orôpos, des kainotomiai, 162-3; - minière: cf. mines ferronniers 120 fermien des taxes (télônai), en général, 10, 14, 86-7, 157-8, 172; - et le métoikion, 57; - et garants, 148-9; - fraudeurs, 149. 150; Démétrios de Phalère qualifié de-, 237 fiscalité et exploitation minière, 135-6; mentalité relative à la-. 91. 99, 238-240; cf. taxes fortifications dans le Laurion, 178-182 fourrageurs 184 fours dans le Laurion. 112. 187-8 fret 80 garants I08; des fermiers des taxes et des locataires de biens publics, 148-9; vocabulaire, J49 gardiens (phylakes) goût de Xénophon pour les -, 71 garnison service de-. 192 géographie Xénophon et la science ionienne, 49: - des ports de !'Attique méridionale, 178-9 Glaucon et Socrate, 3, 4. 10, 36, 38 Gonnoi 137 Gorgippia 70 Gortyne code de-, 70; traité avec Lappa, 174 grain blé ou orge. 48; prix du -. 48, 121: - importé à Athènes. 82. 85-6; problème de l'approvisionnement des cités en -, 235; taxe sur le -. 158 Gryllos 91 Gryneion 220 Guerre des Alliés, 4. 5, 41, 223; chronologie. I 71. 214; eisphorai levées au cours de la-. 90, 91, 94, 100, 171 Guerre Sacrée (Je), 4, 208-9, 212, 258 guene et exploitation du territoire, 127; et exploitation du Laurion, 175-185; et baisse des revenus publics. 213: la - évoquée par Xénophon, 208; les défensives, 214-5 gymnases éphébes et-. 191-2 Gytheion 236 Hagnias 122 Halicarnasse 138 hégémonie d'Athènes au v• s., 206: au IV" s .. 207; prospérité, 234-6; cf. impérialisme Hégésiléôs 90-1 hellénotames 206 Héracleidès de Salamine 86, 121 héraut du Conseil, 146; prononce les vœux, 211 Hermeias 52

pacifique, 212; -

et

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Hiéron (de Xénophon) et l'agriculture, 54; et les panégyries, 203 Hippias d'Élis 202 Hipponicos 142-3 Histiée 206 histoire interprétation moralisante de Xénophon, 206-7, 212; cf. aussi passé Histria 70 honneurs cf. émulation. prix, décrets hoplites citoyens et métèques, 60-62; Barbares, 64; éphèbes et --. 193-4 hôtelleries 105 Hyperbolos 150 immortel cf. à9avatoç impérialisme et trophè, 25; et démocratie. 42; suscite la «défiance» des Grecs. 41 ; justification de I'-, 42; - et prospérité du Pirée, 50, 204, 238, 234-6; cf. aussi hégémonie impôt cf. fiscalité et taxes .indemnités dnques20, 87, 242; variations des -, 29; coût des -, 31; - des éphèbes, 191-4; cf. misthos et trophè indigents distingués des pauvres, 39, 250 intérêts de l'aphormè, 89; du prêt maritime, 95; des emprunts, l02 lschomaque et la surveillance de l'oikos, 71, 124; et la terre, 123, 189; esclaves d'-. 151; idéal d'-, 128 Isocrate et l'impérialisme, 42-4; philosophe ou sophiste, 202; et la primauté d'Athènes, 205 justice (notion) connaissance de la -. 37-8; démocratie, impérialisme et -. 42-44; pauvreté et - dans la cité, 44; - et réussite des cités, 206, 212 justice (institutions) pour les emporoi, 83-4; 225-6; cf. tribunaux

41.

Kéôs et l'ocre, 108 Képhisodôros 11 Képhisodotos 207 Képhisophon 83 Kition de Chypre 64 Kymè d'Éolide 18 K yparissia 51 Lacédémoniens ennemis d'Athènes au yc s.. sur mer. 23-24: en Attique, 185: alliés d'Athènes au IV" s., 207; cf. Sparte lampadédromie 192, 194 Lampsaque 132 Lappa 72, 174 Laurion stérilité agricole du -, 48. 182-3: - forteresse, 178-185; une «ville>► dans le - • 188 ; valeur des terres dans le -- , 189; cf. mines Lébédos et Téos. 15-17, 67-8, 96 Léontinoi 179 Leukôn et Athènes. 97 liturgies glorieuses. 83, 128: et les éphèbes. 194; à Rhodes. 234

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location des esclaves privés dans les mines, 138-144; des esclaves publics (projet de Xénophon), 147, 165; (projet de Diophantos), 227-9; à Epidamne, 227•8; des navires de commerce, 108; des terres publiques, 114, 136; des domaines sacrés, 147; des maisons, 147, 187 luxe civilisation du -, 126-7; goût du -, 128 Lycurgue l'Athénien 7, 29, 41; emprunts de -. 101; - et l'éphébie, 193; et l'enktèsis, 224; revenus d'Athènes sous-, 237 Lycurgue le Lacédémonien 190-1, 219, 244 Lydie 64, 117 Lysandre 24,235 Lysistratos 90 Lyttos 74 Macédoine taxes portuaires en -, 13, 157; mines, 133 main-d'euvre cf. travailleurs maison(s) pour les métèques, 66-8; sacrées, 147; publiques, 187 Mantinée bataille de -, 90 Marathon 176 marbre du Pentélique exporté, 47, 55; revenus publics tirés du-. 48 IIIU'Ché notion de -, 129, 236; agora, l05-6; - des esclaves, 146, 165; - de Sounion, 106, 186; cf. aussi taxes marque privée et publique, 150 Mausole 13-4 Mégare 49, 51, 183, 185 Memnon 13-4 mentalité de Xénophon, aristocratique, 39, 44: agonistique, cf. émulation; concernant l'histoire politique, 205; religieuse, 22()..2; idéal politique de Xénophon, 244; -des Athéniens à l'égard de la fiscalité, 91, 99, 238-240;-des producteurs, 129; - de rentier, 248-251 mercenaires en général, 127 et Addenda; à Athènes, 6().. 1; 63 ; et l'or perse, 134 métèques etmisthoi, 26; acquittent le métoikion, 57; l'eisphora, 58, 60, 61, 99; dans l'armée de terre, 59; dans la noue, 61; dans la cavalerie, 65; habitation des-, 67; enktèsis, 223-5; - et cultes, 58; - Grecs et Barbares, 63-4, 72-4; Sosias -. 141; - et la paix, 173: - source de revenus pour Athènes, 57, 73-4; danger (?) pour Athènes, 257 Milet emporion, 82-3; emprunt public à -, l03 minesd'argent du Laurion, terminologie, 117, 160; richesse des-. 111, 115. 116; jugement de Xénophon sur la richesse des-, 119; ancienneté de l'exploitation des-. 115; évolution d'ensemble de l'exploitation des-, 114; après l'occupation de Décélie, 159, 175; avant la rédaction des Poroi, 160, 161; après 350, 227; adjudication des concessions, 112-4; exploitation et propriété, 113, 134; maind'œuvre, 117; - ouvertes aux étrangers(?), 134-6; revenus privés tirés des-. 12, 154, 160--1;revenus publics, 114-5, 187-8; le projet de Xénophon, sa valeur, 164, 258; - en cas de guerre, 175-185; pas de mines d'argent dans les cités voisines d'Athènes, 48, 55; - de Lydie. 117 misdlos équivalent de trophè. 20--32,56-7; distribué aux citoyens grâce au revenu des taxes. 87: cf. indemnités civiques, salaire et triobole monnaies d'Athènes, comparées à celles des autres cités, 76: considérées comme

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une marchandise, 79; circulation des- au vcet au rvcs., 79, 132; approvisionnement de la cité athénienne en métal monétaire, 188; besoins des cités en monnaie, 127; - d'Egine, 78; d'électrum, 132; de Philippe II, 133; falsification des-, 77; cf. aussi argent Myconos 55 Mytilène 73, 96, 132. 21 l Naupacte 69 nautodikai 81, 82 Nidas propriétaire et loueur d'esclaves mineurs, 117, 118, 138-142, 143-4, 149, 165; rentier, 249 Nikandros d'llion métèque à Athènes, 60-1: 224 Olbia 79, 108 olivier culture de I'-, 122 Olynthe 44 Onomarchos 209 or et argent, 131-4 oracles Xénophon et les-. 218-222 orateurs dans la cité, 36-7: et le projet de Xénophon. 223 Orontés et Athènes, 96, 97 Orôpos le 1/50 d'-, 158: exploitation d'-. 162 orphelins protection des - à Athènes et ailleurs, 68-72 paix et revenus. 53, 173, 196-200; et puissance. 205. 257-8 Panathénées métèques aux-, 58; loi sur les-, 158 panégyries d'Actium, 173; d'Athènes, 203 Pangée 141 parure pour la cité, 65, 107, 128; - des femmes, 126-8 Pasion 141 passé évocation du - par les anciens, 137. 157. 213; par les ancêtres. 159: souvenirs des anciens, 175, 235; interprétation moralisante du -. 206 patrouilleurs 184. 192-3 pauvres, pauneté définitions de Xénophon et de ses contemporains, 38-9; - et démocratie, 40. 41, 57. 243; - et vilenie, 44: - dans les mines, 152, 160 pêche à Athènes, 46: taxes, 55 Pentélique cf. marbre Périclès à ses débuts, 157; orateur. 36; et la démocratie athénienne, 25, 217, 241. 253; stratégie de -, 185. Perses gouvernement des-. 35; monnaies, 79, 132, 134: - voisins dangereux. 52: Barbares du royaume -. 64 Phainippos 48, 121 Phasélites 80 Philémonidès 143 Philippe II en 354, 210; en 346, 4. 258; en 341, 227: monnaies, 133 Philoclés héraut athénien. 146 Phlious 44, 81, 127

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Phocidiens à Delphes, 4-5. 209-210. 219 Phrygiens 64 Pirée au centre de la Grèce. 50, 55, 236: port «agréable», 75; sûr. 76: importateur de grain, 82: port de transit et de redistribution, 200, 236: sa prospérité liée à l'impérialisme, 50, 204. 234-5: taxes levées au-. 55. 157-8: hôtelleries et halles de vente. 105-7. 226: sous Démétrios de Phalère. 237 Pisistrate 157 Platéens 72 Platon et la cité fermée, 52; disciples de -. 202 poètes à Athènes au IVe s.• 202-3 polémarque 58 pôlètes listes des -. 114. 136, 188: et les taxes portuaires. 158 polis ville, 183. 188: cité-territoire, 200; acropole, 213 Polyzélos d'Éphèse 60. 224 ports qualités des-, 75-6; hôtelleries près des-. l 05; causes de l'essor des - grecs. 235-6 prêt maritime, 94. 249: tokismos, 121, 125 prêtres salaires des -. 218 prix (récompense) aux propriétaires fonciers. 54: aux liturges et aux magistrats. 83: cf. émulation prix (valeur) des concessions minières, 113; du grain, 121: des esclaves, 146, 155-6: des terres, 189; variations des-. 129, 146. 169; - de revient, 130 profit(privé) des commerçants, 79; des propriétaires fonciers, 121, 189; des artisans. 129: des propriétaires d'esclaves, 140 propriétaires fonciers, 121-3, 130, 189. 241 ; dans les mines, 113, 118-9. 134, 151, 160-1. 167; - de navires, 84-5, l05, l08; d'esclaves, 138; de fours, 188 Protogénès d 'Olbia l 08 proxènes 58. 96. 224 qualitatif point de vue - en agriculture. 46; dans l'artisanat, 130 quantitatif cf. chiffres rameurs citoyens et étrangers, 59-62; esclaves, 176-7 ratio entre l'or et l'argent, 133 relations internationales et le dikaion, 42-44, 214-5 rentiers citoyens - à titre privé, propriétaires fonciers, 130-1: propriétaires d'esclaves, 138-143; en général, 243, 245, 248; «rentiers de l'État», 243, 250; cité rentière, 239-240 revenu(privé) d'un capital, 77, 89: des terres, 121-3; de l'artisanat, 130; des esclaves loués, 139 Rhamnonte 183 Rhodes après 227, 97; après 167, 11. 57; étrangers à-, 72; emporion, 82; - et la cité des Poroi, 232-237 riches.richesse définitions, 38-40; désir de richesses, 124; emploi des-. 126-8; les Athéniens riches et l'eisphora, 94, 100, 216-7; et le prêt maritime, 95; les riches et le projet de Xénophon, 170-1, 216-7 Rome et Rhodes en 167, 11-12; et la frumentatio, 40, 247-8; aristocratique, 233-4

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salaire notion de -,

23-4. 26; calcul des -, 140; - d'Euthéros, 153; - des prêtres, 218; cf. indemnités civiques. misthos, trophè salines en Attique. 46 Samos loi sur le blé, 40. 98, 248 : en 440, 150 Samothrace 45 Scythes 52, 64 Siphnos 49 Socrate et Glaucon, 3: et le dikai011,37-8; et Euthydème, 38: et robéissance aux lois, 190: et les sophistes, 202; et les oracles, 220 solde et indemnité de nourriture, 23-4, 26: des alliés, 127 Solon 77, 124 sophistes 202 Sosias esclave de Nicias, 136, 165: fonction et statut de-, 140-2 Sounion agora de-, 106, 186; fortification de-. 180-1 Sparte modèle de la cité pour Xénophon, 190,244; destin politique. 206-7; hégémonie de-, 235--6; cf. Lacédémoniens Straton 97 superflu argent-, 125--6; bien-, 126-7 sycophante 12; « immortel », 139 Syracuse eisphora à -, 92-3 Syriens 64

taxes en général dans les cités, 9 sq., 92; affermage des-, 14, 87, 148, 214; variation portuaires à Athènes, 48, 55, 86; à Rhodes, 11-12; du revenu des-. 173, 237; à Délos. 172-3, 174; en Macédoine, 13, 157 ;-de marché, 55, 86,108,237; - sur la pêche, 55; sur les métèques, 57, 87; sur les esclaves, 157-8; - exigées par le tyran, 54; taxes et mislhoi, 86-7; cf. aussi eisphora et iaottu1a Téleutias 46, 76 témoignages des anciens, invoqués par Xènophon. 137, 157, 213 Téos cf. Lébédos terrains à bâtir, 67, 189 terres publiques, 114; dans le Laurion, 189; cf. agriculture et propriétaires territoire ressources du-, 40; source de revenus publics, 53-5, 239: rendu inutilisable par la guerre, 127; protégé, 181, 185 Thasos 96 Théangéla 17 Thébes proche d'Athènes, 183, 185; alliée d'Athènes, 207: en 346, 4; reconstruite en 316, 97 théôrikon les préposés au -. 197-8, 229; distributions du -. 228, 248: jugements sur le -, 258-9 thésaurisation 125--6, 128 thesmothètes 84, 225 Thespiens 72 Thessalie 209, 211, 262 Thorikos port, 178-9; fortifié, 178, 185; bornes à-, 68; maisons à-, 187 Thraces voisins de Byzance, 52; Barbares, 64; mines de-, 133; le - Sosias, 140-2 Thucydide moraliste, 42; sur la prospérité du Pirée liée à l'imèrialisme, 50, 235;

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sur les fondements de la puissance athénienne. 217: sur la réussite de la démocratie athénienne. 241, 253 travaJ~travailleurs dans les mines: terminologie et catégories. 117-8; libres et esclaves, 153-4; dans l'agriculture. 120, 123; journées de -. 139: cf. esclaves Trézène 74, 179 tribunaux et misthoi à Athènes, 28-30; et étrangers. 83-4. 225-6 tribus exploitation par les tribus, 162-3 tribut et salaire, 57 triérarques prix aux-. 83 triobole alloué aux citoyens à l'Assemblée et dans les tribunaux, 29, 31-2; distribué plus souvent grâce à une réalisation partielle des projets de Xénophon, 156, 168, 241-2; -quotidien: sa signification, 20-21, 40, 242-5; distribué à tous grâce à l'utilisation de l'eisphora, 93, l01, l03-4, 144; cf. trophè troc et crédit, 80 tropbè dans les Poroiéquivalentdemisthos, 20-32,40, 56-7, 168,216; -et démocratie à Athènes et à Rhodes, 233-4; à Rhodes, 233-4; à Rome, 247-8; dans la cité de demain, 241-2; dans la cité du triobolequotidien. 242-5 ;-des éphèbes, 31, 191: des esclaves publics, 31, 229 troupeaux loués, 138-9; abandonnés ou mis en sûreté, 183 vin prix du-, 121; commerce du-, 200-201 vœux publics prononcés par le héraut, 211