Taisez-vous Nihoul! 9089070044, 9789089070043

En 1996 la Belgique découvre l’horreur après l’arrestation de Marc Dutroux qui fut reconnu, par la cour d’Assises, comme

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French Pages 192 [191] Year 2008

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Table of contents :
1. Lettre à monsieur mon boucher
2. Je voulais vous dire…
3. Une certaine Marleen…
4. La femme
5. La vie de nuit…
La nuit tous les chats sont gris…
6. Journalistes ou journaleux?
7. La politique…
...et ses hommes de (de) main!
8. Jean Marc Connerotte…
Juge d'instruction
9. Michel Bourlet…
Procureur du Roi
10. Eddy Suys…
11. Raymond Drisket…
Chef d'enquête… à l'essai
Les interrogatoires…
12. La série des témoins X…
Les autres témoins X
Regina Louf en remet une couche
13. Marie-France Botte,
Une Baronne peu reluisante!
14. Les clubs de rencontres
Les différentes catégories
Quelles sont ces différentes catégories?
Les phantasmes et les tabous
La clientèle
15. Faulx-les-Tombes
Les soirées d’orgies…
16. La Commission Dutroux, Nihoul et consorts
17. Marc Verwilghen…
Ministre de la Justice
18. Le juge Langlois
19. Informateur codé 52.746
20. Mes procès…
Le procès S.O.S.Sahel
Le procès Asco
Conclusions
21. Ma vie en prison
Prison d’Arlon
22 Le procès du siècle
Les autres avocats de la défense
Les parties civiles
Les défenseurs…
Le procès démarre
Les moments forts du procès
Les divagations de Dutroux
La comparution des petites Sabine et Laetitia
La démagogie
Le plus grand moment
Les témoins douteux
La famille Olphavens - Van Oost
Philippe Saussez et sa femme Nadia
Daniel Roiseux
Réquisitoires et plaidoiries
Les réquisitoires
Les plaidoiries des parties civiles
La famille Lambrechts
La famille Marchal
La famille Dardenne
La famille Delhez
Les plaidoiries de la défense
Marc Dutroux
Michelle Lartin 176
Michel Lelièvre 178
Michel Nihoul 178
Le dernier mot
Retour à Arlon
Le jury revient pour délibérer
Le verdict
La dernière étape
23. Et maintenant?

Taisez-vous Nihoul!
 9089070044, 9789089070043

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MICHEL NIHOUL

TAISEZ-VOUS NIHOUL!

»

TAISEZ-VOUS NIHOUL!

Taisez-vous Nihoul!

© 2008, Michel Nihoul en Sea-n publishîng www.sea-n.be Couverture: guzzo.be Presse: New Goff

ISBN: 9789089070043 NUR: 402 Tous droits réservés. Aucune partie de cette édition ne peut être dupliquée, sauvegardée dans une base de donnée automatisée ou rendue publique, sous quelque forme ou de quelque manière que ce soit, qu’elle soit électronique, mécanique, par photocopie, enregistrement ou de toute autre manière, sans un accord écrit préalable de l’éditeur.

MICHEL NIHOUL

TAISEZ-VOUS NIHOUL!

Si tous ceux qui disent du mal de moi savaient ce que

je pense d’eux, ils en diraient encore plus.

Sacha Guitry

SOMMAIRE

1.

2.

Lettre à monsieur mon boucher

Je voulais vous dire...

11 13

3.

Une certaine Marleen...

15

4.

La femme

16

5.

La vie de nuit ... La nuit tous les chats sont gris...

19

6.

Journalistes ou journaleux?

22

7.

La politique... ...et ses hommes de (de) main!

28

Jean Marc Connerotte... Juge d'instruction

34

Michel Bourlet... Procureur du Roi

40

8.

9.

10. EddySuys...

11.

Raymond Drisket... Chefd'enquête... à l'essai Les interrogatoires...

12. La série des témoins X... Les autres témoins X Regina Louf en remet une couche

45

48 54

58 65 67

7

13.

Marie-France Botte, Une Baronne peu reluisante!

14. Les clubs de rencontres

74

Les différentes catégories

77

Quelles sont ces différentes catégories?

77 79 81

Les phantasmes et les tabous

La clientèle 15.

70

Faulx-les-Tombes Les soirées d’orgies...

86

88

16. La Commission Dutroux, Nihoul et consorts

92

17. Marc Verwilghen...

97

Ministre de la Justice

18. Le juge Langlois

108

19. Informateur codé 52.746

115

20.

21.

Mes procès...

Le procès S.O.S.Sahel Le procès Asco

123 130

Conclusions

133

Ma vie en prison

134

Prison d’Arlon

22

Le procès du siècle Les autres avocats de la défense Les parties civiles Les défenseurs... Le procès démarre Les moments forts du procès Les divagations de Dutroux La comparution des petites Sabine et Laetitia

8

123

135

146 147 150 152

157 158 159 160

La démagogie

161

Le plus grand moment

164

Les témoins douteux La famille Olphavens - Van Oost Philippe Saussez et sa femme Nadia Daniel Roiseux

165 166 168 170

Réquisitoires et plaidoiries

171

Les réquisitoires Les plaidoiries des parties civiles

171 174 173

La famille Lambrechts La famille Marchai

La famille Delhez

173 174 175

Les plaidoiries de la défense

175

La famille Dardenne

Marc dutroux Michelle martin

175 176

Michel lelièvre Michel nihoul

178 178

Le dernier mot Retour à Arlon

183 184

Le jury revient pour délibérer

185

Le verdict La dernière étape

186 188

23. Et maintenant?

191

9

1. Lettre à monsieur mon boucher

Monsieur mon boucher, J’aime, tout comme ma femme, venir dans votre étal pour y choisir les meilleures côtes à l’os de mon quartier, celles-là qui font l’admiration de mes invités.

Monsieur mon boucher, comme vous connaissez parti­ culièrement bien tous vos clients, vous aviez, comme de nom­ breuses personnes, appris que j’avais édité mon premier livre.

Et comme vous vous intéressez tout particulièrement à ce que fait votre charmante clientèle, vous aviez demandé à ma femme de vous en fournir un exemplaire gratuitement.

Peut-être était-ce là un signe indirect de votre part pour

démontrer à ma charmante compagne que vous pouviez vous intéresser au côté différent que l’apprenti scribe que j’étais,

aurait pu vous faire découvrir. Mais voyez-vous, monsieur mon boucher, et vous n’y

avez probablement pas songé, si j’ai passé des heures à pondre ce livre, c’est bien sûr pour qu’on le lise, mais aussi, pardon-

nez-moi, dans l’espoir que cela me rapporte quelques maigres bénéfices.

11

Alors, voyez-vous, monsieur mon boucher, à l’aube de termi­ ner ce nouveau bouquin, je vous demanderai, lorsqu’il sortira

en librairie, et même si ce n’est que pour faire semblant que vous vous y intéressez, de bien vouloir l’acheter. Car, voyez-

vous, le petit bénéfice que me rapportera ce modeste travail me permettra encore de venir acheter chez vous ces merveil­

leuses côtes à l’os, qui épatent tellement mes convives, mais que moi, je n’oserais jamais vous demander de me fournir gra­ tuitement.

12

2. Je voulais vous dire...

Et oui, je voulais vous dire beaucoup de choses. Mais, lorsque je soulevais ce sujet, on me répondait «Oh! Cela n intéressera

personne» ou même «Cela est trop dangereux» ou tout sim­ plement «Tu cherches des ennuis?»

Depuis lors, dans ma tête, tournent mille et une ques­ tions. Que faut-il faire? Faut-il vraiment s’écraser? Non. J’ai toujours dit que non seulement je mourrai

debout, mais que, de plus, je leur expliquerai, à ces gens mal

informés, désinformés par «une certaine presse» dont le papier

était noirci d’abominables informations, ce qu’il en est réelle­ ment. Et je leur démontrerai, surtout, pourquoi, malgré que je sois loin d’être un «saint», on a voulu me présenter comme

le «Diable».

Ce que je vais donc vous raconter, ce sont des faits ou des anecdotes authentiques, que j’ai vécus, que j’ai subi, et

que j’ai décidé de coucher sur papier sans haine et surtout sans crainte, malgré les judicieux et fermes conseils qui me sont

parvenus par... de bons amis!

Cet ouvrage n’est pas un règlement de compte, mais que l’on sache bien que les menaces ne m’impressionnent pas, que je suis un homme libre et que je n’accepterai pas des attitudes

comme celles d’un cabinet politique qui a envoyé des «men­ tors» chez le journaliste Georges Huercano-Hidalgo pour lui 13

recommander la plus grande prudence lorsqu’il écrivait le livre «Moi, Michel Nihoul». Je n’accepterai pas non plus qu’un éditeur se donne le droit de censurer mes écrits pour des soi-disant nobles causes

comme l’a fait l’éditeur bruxellois Luc Pire, avec les écrits de Georges Huercano-Hidalgo et de Catherine Lorsignol lors de

la relecture de ce même livre. Si monsieur Pire aime caresser la

chèvre et le choux c’est son problème, mais qu’il sache que

moi je ne suis pas un suceur de bites.

Je vous propose donc de vous raconter, sans détour, avec des mots simples mais sincères, même s’ils vous paraissent par­ fois choquants, ce que j’ai vécu, ce que j’ai constaté, ce que je

sais et ce que je ressens. Je vous propose aussi de revivre avec moi des souvenirs

qui me paraissent agréables, même s’ils ne sont pas toujours

considérés comme innocents par «les gens biens». Et, au cas où cela devrait vous laisser un mauvais goût

dans la bouche, même si vous me détestez - peut-être encore

plus après avoir lu cet ouvrage - sachez que je l’ai fait sans aucun but de détruire, mais pour qu’on puisse en tirer une

leçon pour construire, un jour, ne fut-ce qu’un moment de bonheur à quelqu’un.

Enfin, si ce document pouvait inciter seulement une per­ sonne à reconnaître ses torts, ou tout simplement à faire quel­

que chose de bien, alors j’en sortirai vraiment heureux. Mais, comme chante Pierre Perret, «Le bonheur c’est toujours pour

demain».

14

3. Une certaine Marleen...

Je la trouvais trop jeune pour me donner des conseils et pour­ tant...

Je ne l’écoutais pas, croyant que les 15 années qui nous séparaient me permettaient de penser quelle ne connaissait encore rien de la vie et quelle avait tort.

J’estimais que je ne pouvais pas perdre la face vis à vis de

cette merveilleuse beauté que je pensais avoir séduite. Je n’imaginais pas quelle fut aussi désintéressée et telle­

ment amoureuse, attendant d’un homme qu’il lui donne tout simplement de l’affection.

Son sourire entourait ses merveilleuses lèvres que je nar­ rerais pas d’embrasser.

Lorsque je lui faisais l’amour, je me sentais tellement

bien que j’avais l’impression de pénétrer son âme. Je sentais quelle avait raison, mais je trouvais chaque fois une excuse pour me prouver le contraire. Non, j’avais tout

simplement rencontré l’amour et je ne voulais pas l’admettre. Elle a été avec moi d’une patience qu’aucune autre n’au­

rait pu être, elle a fait de moi, du misogyne que j’étais devenu, un homme tout simplement amoureux et heureux. C’est ma compagne depuis 25 ans et j’espère pour l’éternité.

Aujourd’hui, je me dis que si j’avais su que je l’aimais autant, je l’aurai aimé d’avantage. 15

4. La femme

Depuis la nuit des temps, la femme est pour les hommes, et par­ fois pour les autres femmes, un sujet d’approche très délicate. D’après les Saintes Ecritures, la femme serait la première

personne sur cette terre qui aurait trahi l’homme en lui pré­

sentant une pomme... Vous connaissez la suite...

Malgré ce, disons, lourd passé la femme reste, dans les réunions masculines, le sujet de conversation par excellence.

Alors qu’en est-il? Qui est-elle vraiment? Que représente-t-elle dans la vie sur cette terre? En un mot comme en cent, com­ ment la cataloguer?

Je pense, sans vouloir la vexer, car je la respecte au plus haut degré, que la femme pourrait parfois être comparée à

l’automobile... Bof, ben oui, pourquoi pas car les hommes, excusez du peu mesdames, aiment, chérissent et envient les belles mécaniques tout comme ils le font pour vous.

Cependant il faut distinguer des catégories bien différen­ tes parmi ces beaux mâles - que les hommes croient être - en

ce qui concerne la manière dont ils voient leur... Qu’allais-je

dire leur... femme ... ou leur voiture? A vous de choisir.

Il y a ceux qui en rêvent mais qui n’en ont pas et qui, pour­

tant, feraient n’importe quoi pour en avoir une. Il y a ceux qui sont franchement contre et qui préfèrent d’au­ tres moyens d’évasion. 16

Il y ceux qui en ont une, par habitude familiale, c’est comme cela de père en fils.

Il y a ceux qui les considèrent comme une première nécessité, il faut qu elles soient là prêtes à démarrer au quart de tour.

Il y a ceux qui aiment les belles carrosseries et qui aiment les montrer. Il y a ceux qui sont attirés par les lignes extravagantes sans

pour cela s’occuper du moteur.

Il y a ceux qui aiment les résistantes, qu’ils pourront user sans problème.

Il y a ceux qui, pour épater les copains ou les voisins, la cou­ vrent de gadgets. Il y a ceux qui ne la sortent que le week-end.

Il y a ceux qui trouvent quelle leur coûte trop cher mais qui ne veulent pas s’en séparer.

Il y a ceux qui la bichonnent, qui la couvent, qui sont malades

dès quelle est imparfaite.

Il y a ceux qui la prêtent très facilement pour montrer aux copains qu’ils ont la meilleure.

Il y a ceux qui rêvent d’emprunter celle de leur voisin. Il y a ceux qui comparent et qui veulent l’échanger avec leurs

copains pour des essais rapides. Il y a ceux qui sont malades dès quelle est hors de leur vue et qui ont peur qu’on la leur vole. Il y a ceux qui la critique sans même savoir pourquoi. Il y a ceux qui en parlent comme d’un souvenir lointain.

Il y a ceux qui connaissent toutes les sortes, tous les modèles et qui s’en vantent.

Il y a ceux qui aiment celles des autres pays et des autres con­

tinents.

17

Il y a ceux qui sont fidèles à leur pays envers et contre tout. Il y a ceux qui en ont entendu parler et qui racontent leurs

pseudos aventures. Il y a ceux qui préfèrent les carrosseries en silicone pour épater

la galerie. Il y a ceux qui se vantent en disant trop de bien d’elle. Il y a ceux qui s’en plaignent tout le temps. Il y a ceux qui l’achètent dans le but de la revendre. Il y a ceux qui la louent à l’heure, à la journée ou au mois. Il y a ceux qui pensent être des experts et qui n’arrêtent pas de conseiller les autres.

Il y a ceux qui déclarent qu’ils n’auront jamais d’ennui avec la leur. Il y a les taiseux qui ne donnent leur opinion, ni avant, ni

après les essais. Il y a les pingres qui calculent tout le temps ce que ça coûte Il y a ceux... Non, non je m’arrête...

Enfin, comme vous voyez, il y a ceux... et encore ceux...

Et puis, il y a «nous», oui nous, toi et moi cher lecteur mâle. Car nous c’est autre chose et il va sans dire qu’évidemment

nous, on n’est pas comme ça... Enfin, en tout cas... Non, je n’ai rien dit.

18

5. La vie de nuit... La nuit tous les chats sont gris...

La vie de nuit... Oh! Mon dieu, qu’est ce qu’on m’en parle. On dirait que c’est un tabou, que les gens qui vivent la nuit

ne sont pas des êtres normaux, qu’ils ont des choses à cacher,

des mystères et je ne sais quoi encore. Mais vous savez, il y a des tas de gens qui vivent la nuit:

des pompiers, des ambulanciers, des médecins, des infirmières, des policiers, des chauffeurs de taxi, des surveillants, des pilotes de ligne, des hôtesses de l’air, des.. .et des... et encore beaucoup d’autres que chacun d’entre nous trouve naturel de trouver

éveillés et à notre disposition quand nous avons besoin d’eux.

Ma conscience me rappelle à l’ordre:

Bof, cestpas drôle ce que tu nous racontes là Nihoul. Mais dis donc, tu nous prends pour des sots, tu sais quand meme bien ce dont ils veulent que tu parles: des autres, de ceux dont ne parle

jamais, ceux qui organisent les vies de nuit et, surtout, ceux qui

en profitent. Et oui, la vie de nuit vue comme ça, elle n’est pas comme

les autres. Les gens de nuit sont des êtres à part... Dois-je en

rajouter? Non, vous avez tous et toutes entendus ce genre

d’élucubrations. Et pourtant c’est vrai, la vie de la nuit est réellement dif­

férente. Mais aussi tellement attrayante par ses mystères. En 19

effet, la nuit, il n’y a plus d’heure, plus de contraintes, le temps

peut s’arrêter sur un visage, sur une blague ou sur une conver­

sation dite philosophique. Les heures ne sonnent pas la nuit,

comme honteuses de rappeler à l’ordre.

Quand on entre dans le monde des fastes de la nuit, on pénètre dans un monde secret par ses mystères, un monde

attirant par ses rencontres insolites, merveilleux par ses lumiè­ res et ses strass. Et trop souvent décevant quand le rideau

tombe et que l’artiste apparaît démaquillé sous les feux impi­

toyables de la réalité.

Mais la nuit, c’est aussi un concentré de moments excep­ tionnels. Où le travelo discute au bar avec le PDG. Où le

Magistrat enlace la femme aux mœurs légères qu’il prétend

vouloir réconforter. Où le fermier fortuné quitte les bras d’une femme pulpeuse pour aller traire ses vaches. Où le ministre tente de convaincre la prostituée qu’il comprend ses difficultés.

Où le cocu se noie dans une boisson trop forte pour lui. Où l’écrivain vient, dans le brouhaha, de trouver la phrase clef. Où

le marin devient capitaine. Où la pute devient comtesse. Où le

bègue devient chanteur. En un mot comme en cent, la nuit

c’est le plus grand concentré de confessions intimes et de déli­ res, ceux-là même qui énervent tellement les moralistes. Et puis la fin de la nuit, c’est le moment où l’on rentre

chez soi, avec sa femme ou sa conquête d’un soir, avec ses espoirs, avec ses rêves, avec ses phantasmes irréalisés que l’on

conserve pour les lendemains qui chanteront. Mais c’est encore le moment où, traversant la ville débarrassée de son immense trafic et de sa pollution quotidienne, l’on s’adresse à son chauf­

feur pour lui demander de rouler moins vite. Car, à cet instant,

on peut baisser la vitre pour deviner, dans l’air ambiant, cette capitale qui s’éveille. C’est aussi le grand moment de réflexion. 20

Non seulement sur toutes les conneries d’un soir que l’on vient de vivre, mais aussi sur les moments de rêves volés en ces

heures où les gens, dit normaux, dorment, prétendent-ils, du

sommeil du juste. La vie nocturne existera toujours car elle est une échappa­

toire nécessaire aux dures réalités de la vie quotidienne. C’est la nuit que se construisent les plus grands rêves. C’est la nuit

que s’élaborent les plus grands phantasmes mais aussi les plus grandes désillusions. On grimpe à ce point si haut et si vite, la nuit, que le retour dans la réalité peut s’avérer très douloureux.

Les gens qui vivent la nuit depuis un certain temps, je parle de la nuit en fête, ont de grandes difficultés à retrouver

une vie de jour. Cette vie nocturne devient une drogue, une

nécessité dont on se sépare difficilement. Faire la fête, rire, rire et encore rire... Et, parfois, pour ne pas pleurer.

21

6. Journalistes ou journaleux?

C’est une profession particulièrement difficile que celle de journaliste. En effet, ils sont formés pour d’abord soutirer des informations et, de plus en plus souvent, poussés à dénoncer des scandales. Et certains sont prêts à aller très loin pour y arriver

Nous constatons que les journalistes doivent constam­ ment lutter pour la liberté d’expression et que leur situation n’est pas toujours facile dès qu’ils ont à prendre une position

et surtout une attitude envers les politiques. Ces journalisteslà, qui osent malgré les pressions exprimer leurs idées démo­ cratiques et fondées, je les admire et je les encourage, mais ils

sont rares. Mais il y a les autres, ceux que j’appelle les journalistes de caniveau. Ils se reconnaîtront très bien. A vrai dire, ce type de personnage me paraît assez proche du gangster. Est-ce bien

l’objectivité qu’ils désirent sous l’étendard de la liberté? N’est-

ce pas plutôt le scandale, le profit sous toutes ses formes, la crainte à inspirer, l’argent bien entendu, qui les font agir? Mais poser la question, n’est-ce pas déjà y avoir répondu?

Certains journalistes n’hésitent pas à piéger les gens. Ainsi, n’oubliez jamais que de nombreux journalistes qui vous

appellent au téléphone enregistrent votre conversation, sans votre permission, pour mieux vous enfoncer. 22

Les plus dangereux sont peut-être les journalistes de télé­

vision, qui peuvent faire le montage qu’ils veulent en studio et, partant, vous faire dire n’importe quoi. En ce qui concerne la télévision, pour moi, parmi les qua­ tre télévisions belges, la pire a été celle qui a couvert toute l’af­

faire Dutroux avec la complicité de madame Dominique

Demoulin. Je parle de RTL-TVI. Cette journaliste a totalement manqué, à mon avis, du respect élémentaire pour sa profession

en démontrant tout au long des huit années d’instruction son manque total d’indépendance. Ainsi, elle n’a jamais caché sa proximité avec les Comités blancs tout en ayant été discrètement

membre, dès le départ, du Comité de Soutien à Julie et Melissa. D’ailleurs, elle ne pourra contenir sa joie, en exultant, à la plus

grande stupéfaction de ses collègues, dans les couloirs du Palais de justice de Liège lorsqu’elle apprendra mon renvoi devant les assises. Dès lors, comment croire encore à l’impartialité de RTLTVI qui lui confiera la couverture du procès d’assises à Arlon? Mais elle n’est pas la seule à RTL-TVI, on peut également

admirer le talent d’un certain Pascal Vrebos qui a, lui aussi, une idée toute faite de ma responsabilité dans cette affaire. Il n’hésite pas à mentir ce Pascal Vrebos. Pour simple

exemple, je me souviens de l’avoir eu au téléphone pour lui

demander d’assister à une émission de «Controverse» lorsqu’il me rétorqua, très étonné: «Mais pourquoi voulez-vous y parti­ ciper?» Je lui réponds: «Mais tout simplement eu égard au fait

que vous avez invité les parties civiles, à savoir les Russo». Il me jure que ce n’est pas vrai. Mais le lendemain les Russo étaient sur le plateau. Alors, j’ai décidé ce jour-là que je n’irai plus sur

le plateau de cet individu. N’avait-il donc rien compris, vu

qu’après le procès, il me courra encore après pour que je parti­ cipe à une de ses émissions (très...) spéciales? Il faut dire que 23

bien peu osent refuser une invitation à cette émission de pseudo-information, à ces débats qui semblent manipulés. Un

refus, c’est un crime de lèse-Vrebos. Et gare à celui qui nargue le roitelet, jamais plus il ne sera invité à la grand-messe domi­ nicale célébrée par Pascal «c’est incroyable ce que vous me

dites-là» Vrebos. La preuve? Il contactera mon avocat pour lui dire que j’avais tort... Pauvre type! Le professeur de sociologie à 1’ Université Libre de

Bruxelles, Claude Javeau, est également critique envers Vre­ bos. Après le procès d’Arlon, il déclarera dans les médias: «Ce

monsieur, qui est membre du Conseil Supérieur de la Justice, s'est permis de refaire le procès tous les dimanches. On y a entendu des

propos indécents et des prises de position poujadistes qui nourris­ sent le sentiment d'insatisfaction, l'idée de « tous pourris». Sans

oublier que lorsque les parents Russo étaient invités sur le pla­ teau de son émission, c’est eux qui choisissaient les journalis­

tes. C’est la conception du débat contradictoire selon Pascal

Vrebos. Il faut dire que ce personnage infatué et fat se targue de ne pas être journaliste mais bien animateur. Voilà qui auto­

rise, sans doute, toutes les dérives!

Mais ce n’est pas tout. Le directeur des infos de RTLTVI, à savoir un certain Stéphane Rosenblatt, a été poursuivi

devant le tribunal pour faute professionnelle grave. En effet,

dans le cadre du procès d’Arlon, il n’avait rien trouvé de mieux

que de s’assurer les services du «journaliste» Michel Bouffioux.

Et ce dernier avait diffusé sur l’antenne de RTL-TVI une de mes lettres privées qui plus est couverte par le secret profes­

sionnel puisqu’elle était adressée à mon avocat. Mais voilà, ces deux sinistres personnages furent sauvés par la prescription!

Belle mentalité, en tout cas, que celle de ce «Mossieur». Et maintenant ce charmant individu, probablement fier de son 24

œuvre, peut continuer à agir à l’aise, avec la bénédiction de ses

patrons. C’est d’ailleurs lui qui, aujourd’hui encore, dirige le

journal de 19H, chaque jour sur RTL-TVI. Bravo! La chaîne RTL-TVI a décidément pris de mauvaises

options dans ce dossier. Oh! bien sûr, dans les trois autres sta­ tions, il y a également des journalistes qui étaient de la même trempe que Dominique Demoulin. A la RTBF, il y a notam­ ment un certain Benoît Ballon-Perrin ou encore José Dessart

qui ne firent pas mieux que leurs collègues du privé. Mais, au moins sur la chaîne de service public, il y avait à côté de cela des

courageux qui se sont vraiment battus pour que la vérité éclate tels que Léo Stoops ou Caroline Van den Berghe de la VRT,

Gérard Rogge et Georges Huercano-Hidalgo de la RTBF. Et puisque nous parlons des courageux, relevons en pas­ sant l’attitude du journaliste Jean-Frédéric Deliège du Soir

Magazine, qui est, à mon avis, le seul qui a osé déclarer devant les caméras de télévision que: «mal informé, il avait écrit des

conneries à mon sujet». Quelle belle leçon de courage, de modestie et de professionnalisme. Et puis... Et puis il y a le plus fort, le plus grand, celui qui n’a peur de rien, celui qui se croit tout permis, qui préjuge, qui écrit n’importe quoi du moment que ça rapporte et qui, en finale,

ne regrette rien.

Non, rien de rien, il ne regrette rien. Et le déclare d’ailleurs, fièrement, devant les caméras.

Il n’a aucune conscience professionnelle, il n’a aucun respect, il se croit invincible et se permet tout. Il s’appelle «Michel Bouffioux». Il est un peu au journa­

lisme ce que Georges Marchais était à la politique française. Le pitre qui aboie sans fondement. Mais à cette différence que 25

Marchais, lui, croyait en ce qu’il faisait et, surtout, voulait construire quelque chose de meilleur. Alors que Bouffioux ne

fait que démolir. Qui plus est, Marchais savait rire et faire rire.

Bouffioux est un triste sire compassé.

Oh! Bouffioux, cette palme d’or du journalisme de

contre-vérité, a collaboré avec pratiquement tous les journaux qui se sont séparés de lui, les uns après les autres, pour ses

bons articles et pour sa grande objectivité. Aujourd’hui, on peut suivre les prestations de ce «génie de l’info» sur les anten­

nes de RTL-TVI, le dimanche auprès de son grand ami Pascal Vrebos. Des deux, on ne sait qui est l’acolyte et l’autre le

grand-prêtre! Mais que Michel Bouffioux se réjouisse, j’ai

mieux pour lui que ces prestations dominicales d’une banalité affligeante. Je vais lui offrir une tribune unique, une occasion merveilleuse de s’exprimer en toute liberté, devant un public d’un autre niveau que les Comités blancs et consorts. Je parle

du tribunal où je m’apprête à le traîner et où il sera, espérons-

le, défendu par son conseil habituel, Me Georges-Henri Beauthier. Tout un programme! La palme d’argent revient, quant à elle, à un certain

Douglas De Coninck du journal flamand «De Morgen» qui, à l’instar de Bouffioux, et avec la complicité d’une certaine

Marie-Jeanne Van Heeswyck, délire complètement.

La question me fut posée de savoir pourquoi je n’attaque pas tous les journalistes, vu qu’ils ont pratiquement «tous» dit du mal de moi un jour ou l’autre.

La réponse est simple: la presse a été influencée par le

procureur du Roi Michel Bourlet qui lui a balancé n’importe quoi au début de l’affaire. Il est logique que lorsqu’un procureur se permet de faire

des déclarations devant un parterre de journalistes, ceux-ci 26

répercutent ces déclarations. Si ces déclarations s’avèrent com­ plètement fausses, le grand responsable est le procureur et non le journaliste.

A un certain moment, les journalistes de qualité se sont rendu compte que cela ne tournait pas rond. Ils ont entamé leur

propre enquête parallèle, pour s’apercevoir que les déclarations

de Bourlet devaient être prises avec la plus grande prudence. A partir de ce moment, ils rectifieront le tir pour rappor­ ter la vérité.

Certains d’entre eux m’ont téléphoné et même écrit pour me présenter leurs excuses.

Mais d’autres se sont entêtés et continuent encore à

déclarer n’importe quoi. Alors, à ceux-là, il est temps de don­ ner une leçon d’équité.

27

7. La politique... ... et ses hommes de (de) main!

Il était un temps ou les hommes politiques étaient plus res­

pectés. Même ceux qui étaient en désaccord avec eux ou avec

leurs discours ne les insultaient pas si facilement en public ou dans les médias. Aujourd’hui, le politicien n’est pratiquement plus respecté et, de plus, doit pouvoir répondre à chaque ins­

tant de ses actes publics, ce qui l’oblige à faire pas mal de

transactions sous le manteau, de mentir au peuple, sinon les

contradicteurs se révolteraient. Mais les politiciens méritent-ils encore notre respect? S’il est indéniable que l’affaire du Watergate, qui a démontré qu’un Président des Etats-Unis, considéré comme

étant l’homme le plus puissant du monde, a dû démissionner

suite à l’entêtement de deux chroniqueurs, il est incontestable que ce fait a déclenché des idées passionnelles et parfois ina­

déquates chez certains journalistes qui ont souvent dépassé les limites acceptables. Partant de là, la porte était ouverte à tous

les jeunes loups, souvent inconscients, qui se croyaient dès lors autorisés d’attaquer tout le monde, et surtout de n’im­

porte quelle manière, dans le but de pouvoir, à leur tour, entrer dans la cour des grands.

Certes, il est incontestable que les citoyens sont en droit

d’exiger des comptes de ceux qui, non seulement les gouver­ 28

nent, mais aussi tirent profit de leur argent. En effet, si vous

placez de l’argent dans une société, vous pouvez, pour le

moins, exiger des comptes du conseil d’administration. Alors, pourquoi n’en serait-il pas de même des autorités souveraines de ce pays, qui pensent utopiquement vous satisfaire en vous présentant des comptes plus ou moins magiques? Ce n’est pas

parce que ces mêmes dirigeants ont rendu l’impôt obligatoire, et trop souvent insoutenable pour la plupart des belges, et qu’ils ont, de surcroît, la prérogative de vous créer les pires

embêtements s’ils estiment, tout simplement, que vous ne vous êtes pas acquitté de votre dû, qu’ils ne doivent pas, à leur

tour, justifier scrupuleusement ce qu’ils font de votre argent. Cependant, cela ne justifie qu’en partie le fait qu’on ne

les respecte plus.

Autrefois, les grands hommes d’Etat provenaient très

souvent de familles riches, de familles intouchables qu’on n’osait pas critiquer publiquement car leur pouvoir était

énorme. Aujourd’hui, ils viennent de tous bords (ce qui est normal et démocratique), ainsi, l’on peut admirer le travail des partis qui recrutent parfois n’importe qui dans l’unique but de ramasser des voix. L’on voit de plus en plus sur les listes

électorales des personnalités connues du grand public, non

par leurs capacités politiques, mais simplement du fait qu’ils

ont fait la une des médias ou qu’ils sont connus par leurs exploits sportifs ou autres. Il est vrai que chaque citoyen peut, même sans aucune

formation, se présenter sur une liste électorale. Il est égale­

ment vrai qu’aucun critère de sélection n’est exigé à l’excep­ tion d’avoir un casier judiciaire vierge. Ainsi un illettré peut devenir parlementaire, il suffît simplement de récolter les voix

nécessaires pour accéder à ce poste. Et comme les voix sont 29

données par toutes les catégories, il faut parfois s’attendre au

pire. La démonstration la plus cinglante avait été faite, il y a

quelques années, par le comique Coluche en France où, dans

le simple souci de monter un gag, Coluche à sa plus grande surprise constatait qu’il récoltait plus de 10 % des voix au pre­

mier tour des élections présidentielles. Il en fut tellement

effrayé lui-même, qu’il s’empressa d’annoncer dans tous les

médias qu’il ne s’agissait que d’un gag et qu’il se «retirait» des listes électorales. Faudra-t-il alors s’étonner d’être déçu de constater la

manière dont le pays est dirigé. Mais que cherchent vraiment ces prétendants dirigeants

si ce n’est purement et simplement que le beau côté de la pro­

fession et l’argent quelle rapporte. Beaucoup veulent devenir riches, le réaliser dans des

temps records, mais grâce à la presse plus libre, à la télévision et la radio, les Belges peuvent, s’ils le veulent, déceler plus rapidement les nullards, les félons, les déprédateurs et les lar­

rons qui encombrent notre gouvernement, voire nos institu­ tions. Faut-il dès lors s’étonner de constater qu’à chaque cycle

l’on décèle des scandales et que l’on assiste parfois à une héca­

tombe politique. Ça c’est pour ceux qui veulent faire quelque

chose mais à côté il y a ceux qui ne font rien et se contentent

de récolter leurs émoluments... tant que ça dure.

Enfin, il y a le système lui-même qui est assurément très blâmable, même s’il n’est certes pas très connu de tous les élec­ teurs.

Il faut bien constater que notre système est souffrant, il

commence même à se putréfier. Nous luttons, mais sans espé­

rance. La police, et la surveillance des citoyens, est tellement méthodique depuis des années que les opposants ne peuvent 30

concrètement rien, qu’il serait même outrageusement insensé

d’essayer de s’opposer au régime en place sans automatique­ ment devoir faire face à des représailles exemplaires. La démo­

cratie n’existe pratiquement que dans les discours politiques, car l’étau se resserre et chaque citoyen est aujourd’hui kid­

nappé d’une manière telle, que s’il en avait conscience, il ne se coucherait plus sans crainte.

Chaque parti rêve d’une large majorité d’incondition­

nels, de militants de base dont la confiance soit absolue. Ils

ont accepté de participer à une action, ils ont voté, désigné des responsables chargés d’étudier les problèmes, ils n’ont plus

donc qu’à devenir des inconditionnels. Le militant moyen doit appliquer les consignes élaborées

par les bureaux politiques ou les comités directeurs. S’il n’est pas inconditionnel, s’il a tendance à discuter les motivations

plutôt qu’à obéir aux instructions, il détruit tout. Il est libre de penser autrement que selon la doctrine, sur un sujet parti­ culier, mais son action doit suivre cette doctrine. Sans une

action de masse, plus d’efficacité. Donc, c’est l’échec. Un mili­

tant qui veut donc progresser au sein d’un parti, doit, avant tout, être un inconditionnel.

Le danger évident c’est le totalitarisme des partis et des syndicats, on aliène une part définie de sa liberté pour un but

précis et progressivement, insensiblement, le parti ou le syn­ dicat risque d’empiéter de façon inexorable sur tous les autres

aspects de la liberté. L’exemple nous est souvent démontré

lorsque, par exemple, un parti veut faire passer une nouvelle procédure ou une nouvelle loi. Tout le parti vote pour cette nouvelle loi. Pas un homme du parti ne trouve normal d’être

contre. N’est-ce pas une alarmante emprise? Et puis on doit absorber, sans sourciller, des contrevérités souvent scandaleu­ 31

ses. Je sais bien que pour certains partis, et, pas nécessaire­ ment des partis extrémistes, la vérité se confond avec l’effica­

cité, le rendement, et donc la puissance. Une chose est consi­ dérée comme vraie si elle donne un bénéfice au parti, si elle accroît la cohésion de ses membres, si elle prépare son acces­

sion au pouvoir ou au succès.

Prenez l’exemple d’un dirigeant de parti qui lance une

injure personnelle contre l’opposition, l’inconditionnel de ce parti doit approuver l’insulte. D’ailleurs, l’emprise progressive

du parti sur sa liberté l’a peut-être suffisamment conditionné pour qu’il réagisse ainsi. Et c’est ainsi que le citoyen glisse sans le vouloir, et même

très souvent sans s’en rendre compte, dans un système où il perd toute liberté, quelle soit d’expression ou d’action, alors

qu’il pense que les partis politiques au pouvoir luttent réelle­ ment pour une plus grande démocratie et une plus grande liberté, ce qui est véritablement chimérique.

Les partis politiques sont dirigés par des hommes avides de pouvoir, et qui veulent faire passer d’abord leurs idées, qui leur assureront leur position sociale ou celle de leurs amis, qui

leur assureront l’impunité, et qui leur permettront de pou­

voir, à leur gré, faire taire définitivement les contradicteurs. Il

est donc utopique de penser qu’un parti politique a comme priorité le bien-être des citoyens, car, si c’était le cas, il y a longtemps que dans notre pays, qui se proclame démocrati­

que et qui ose donner des leçons, il n’y aurait plus de sansabris ou de gens réellement pauvres, étant donné que contrai­ rement aux discours politiques préélectoraux, ce thème est loin d’être la préoccupation première de ces personnages que

l’on nomme ‘Grands’. Il faut bien se dire que si les citoyens

étaient réellement égaux, s’ils connaissaient la «Vérité» et non 32

‘leur vérité’, ces gens-là n’auraient plus le pouvoir. Ce pouvoir

tellement convoité par ces hommes et ces femmes qui se

croient supérieurs aux autres et qui sont capables de tout, et

encore plus, pour le garder. Vous ne me croirez pas si je vous dis qu’aujourd’hui et encore demain, il y a et il y aura encore des crimes qui, serviront soit à camoufler des faits pour le

moins répréhensibles, soit à garder à tout prix le pouvoir!

Depuis quelques temps, on entend et on lit toute une série de manifestes, de prises de position, d’affirmations, de slogans inquiétants pour la liberté.

Inquiétant pourquoi? Pour les raisons invoquées qui

démontrent souvent un esprit complètement faussé, polarisé. Egalement par la méthode: celle du slogan d’apparence simple et convaincante, en réalité simpliste et subtilement mensonger.

Mais qui va changer cela, et comment? Oh! je vous entends déjà me dire «moi je connais quelqu'un qui va...» Oui,

moi aussi, laissez le faire, ils vont vite le calmer...

33

8. Jean Marc Connerotte... Juge d'instruction

Revenons quelques années en arrière. Un avocat de l’ombre

vient d’être nommé juge d’instruction à Neufchâteau, il s’ap­

pelle Jean- Marc Connerotte. Le Bâtonnier de l’Ordre des avocats et les membres du

barreau de Connerotte respirent, c’est contre lui qu’ils ont eu le plus de plaintes en sa qualité d’avocat au Barreau, mais

«Ouf», il est parti. Fort de sa nomination purement politique, notre nouveau juge d’instruction prend donc ses quartiers à Neufchâteau.

Comme beaucoup de petits avocats dont les affaires ne marchaient pas bien, et qui ont été nommés à la magistrature par l’unique biais politique, il a une dent longue contre les

ténors du barreau et il se montre très acariâtre dans les dos­ siers. Il faut dire qu’à cette époque, il y a deux sortes de magis­ trats: ceux dont les affaires ne sont pas florissantes en qualité

d’avocat et qui se tournent vers la magistrature et ceux qui entrent dans la magistrature par conviction.

Et puis un jour... l’affaire Cools, «l'assassinatd'un minis­ tre», tombe, par ricochet, dans son fief. Mais voilà, malgré sa hargne et celle du procureur Michel Bourlet, l’enquête du

juge Connerotte lui est, injustement, retirée pour être transfé­ rée à Liège et confiée à la juge d’instruction Véronique Ancia. 34

Et pourtant, ils tenaient le bon bout avec Richard Taxquet, Pino Di Mauro, Alain Van Der Biest, et toute cette bande de pieds nickelés comme le confirmera le procès Cools!

Et là, pour la première fois, les grands spécialistes du droit en Belgique vont tomber le cul par terre. Que fait le petit juge? Il écrit une lettre au Roi qui se

retrouvera plus tard dans la presse. Le sieur Connerotte ne sait-il donc pas que d’une part le juge d’instruction est tenu

non seulement au secret, mais à la discrétion pour le moins élémentaire? Ne sait-il pas non plus que sa Majesté le Roi ne peut rien faire

dans le domaine de la justice, que cela n’est pas de sa compé­ tence? Alors que cherche ce petit juge?

Il démontre déjà qu’il recherche la gloire, il pense que les médias vont l’aider à diriger son cabinet de juge d’instruction comme «II» l’entend. Il pense qu’il va changer les lois et le pro­

cessus de la justice, il le prouvera encore plus tard en réacti­ vant ces mêmes méthodes grotesques. Et puis, arrive l’enlèvement de la petite Laetitia. Cela se

passe le 9 août 1996 à Bertrix dans le ressort du parquet de Neufchâteau. Cet enlèvement provoquera la perte d’un mons­ tre nommé Marc Dutroux, chez qui l’on découvrira deux petites filles enfermées dans des conditions effroyables et

inhumaines. On a retrouvé, non seulement la petite Laetitia,

mais aussi une autre petite fille qui répond au nom de Sabine Dardenne et qui est séquestrée et violée depuis 4 mois. Par la

suite les cadavres de cinq personnes: Julie, Melissa, Ann, Eefje et Bernard Weinstein seront également retrouvés.

C’est le début d’un délire collectif, d’arrestations irres­

ponsables et d’un déballage médiatique ahurissant dont la

Belgique ne s’est jamais entièrement remise. 35

Le juge Connerotte et le procureur du Roi Bourlet sont élus Chevaliers Blancs par le peuple. On se pousse au portil­ lon du Palais de Justice de Neufchâteau, qui se transforme peu

à peu en véritable forteresse, pour ne fut-ce que voir ou arra­ cher quelques paroles à ces deux génies.

Alors, les bruits le plus fous circulent, on ira jusqu’à déclarer «Enfin un juge d'instruction qui fait son boulot».

Il faut dire que cette enquête avait démarré, à Liège, à la suite de l’enlèvement des petites Julie et Mélissa au mois de juillet de l’année précédente. La juge d’instruction qui ins­

truit ce dossier s’appelle Martine Doutrèwe. Belle femme,

intelligente et très courageuse. Mais à Liège, on pédale dans la choucroute. Depuis un an que dure cette enquête, on n’a pas

fort avancé, on n’a même pas avancé du tout. Aujourd’hui, on sait que les querelles entre la gendarmerie et la police judi­

ciaire avaient fait que madame Doutrèwe n’avait pas été mise au courant d’éléments importants retenus par la gendarmerie.

Des éléments qui auraient pu conduire à une arrestation beau­ coup plus rapide de Dutroux. Mais ne nous égarons pas,

essayons de comprendre objectivement pourquoi le juge Connerotte a réussi là ou d’autres ont échoué. Contrairement à ce que beaucoup de gens peuvent pen­

ser, le rôle du juge d’instruction est de diriger les enquêtes de façon à découvrir la vérité et arrêter les coupables quels qu’ils soient. Le juge d’instruction doit, et ce serait impossible autre­

ment, avoir une grande confiance dans ses enquêteurs tout en gardant un œil vigilant et la totale direction de l’enquête. A

cette époque, il y avait en Belgique le choix entre la police judiciaire (PJ.) et la gendarmerie (B.S.R.). Dans le cas de l’enlèvement de la petite Laetitia, beau­

coup de gens ignorent que c’est le hasard qui a tout déclenché. 36

En effet, c’est grâce à un simple agent de quartier qui a bien fait son travail, en effectuant une enquête de voisinage, que des renseignements importants ont pu être consignés dans le dos­

sier. Entre autres, les déclarations d’un jeune homme, Benoit

Tinant, qui dans la vie exerce sa mémoire en retenant les

numéros de plaques minéralogiques. Interrogé par l’agent de quartier, il se rappellera avoir aperçu, le jour de l’enlèvement (en fait c’était la veille alors que Dutroux était en repérage),

une camionnette blanche, inconnue, qui était bizarrement sta­ tionnée. Il en donnera le numéro de plaque presque correct.

C’est toujours cet agent de quartier qui interrogera une

religieuse, Sœur Etienne {de son vrai nom Madeleine Aubry), qui se souviendra, elle aussi, d’une camionnette blanche très

sale qui faisait beaucoup de bruits. C’est donc sur ces renseignements que l’on remontera

directement jusque Dutroux. Ce n’est donc pas grâce au génie d’un magistrat que cet enlèvement, et puis d’autres, furent

élucidés, comme le pensent, encore aujourd’hui, beaucoup de monde, mais bien grâce au travail consciencieux d’un agent de quartier et à celui de la gendarmerie, avec son chef d’en­

quête monsieur Masson, qui apporteront le nom de Dutroux sur un plateau d’argent au juge Connerotte.

Connerotte, aiguillonné par Michel Bourlet qui pense

ainsi effacer l’injure faite à Neufchâteau dans l’affaire Cools, attrape alors des ailes et signe de nombreux mandats d’arrêt

en blanc. Oui, en blanc, du jamais vu. Mandats qu’il distri­ buera aux enquêteurs. Et certains, comme l’inspecteur de la

police judiciaire Raymond Drisket, n’en demanderont pas plus pour se prendre pour Colombo. Ils profiteront allègre­ ment de l’irréflexion de ce juge (alors entouré de distingués juristes dépêchés par la gendarmerie pour lui éviter de com­ 37

mettre trop de bourdes...) pour provoquer une série d’arres­

tations écervelées. Le simple fait qu’un juge d’instruction donne, non pas un, mais des dizaines de mandats d’arrêt en

blanc aux enquêteurs est la preuve indiscutable qu’il ne maî­ trise pas son dossier. Et donc qu’il est incapable de le diriger. La demande de récusation du juge Connerotte pour l’af­ faire du «souper spaghettis» n’est pas un hasard. Si ce juge avait agi normalement et avec compétence dans ce dossier,

aucun avocat n’aurait voulu le déboulonner. Mais voilà, les grands ténors du barreau, comme Maîtres Julien Pierre et Fré­

déric Clement de Clety ne pouvaient pas envisager de procé­ der à une défense digne de ce nom face aux méthodes de ce

juge. Ainsi ce magistrat n’avait aucune notion du classement d’un grand dossier judiciaire. Si son successeur, le juge

Jacques Langlois n’y avait pas remis d’ordre à temps, il eut été impossible, même pour les magistrats et les membres du jury, de s’y retrouver lors du procès d’assises. Connerotte classait

simplement tous les P.V. en les empilant les uns sur les autres au fur et à mesure de leur rentrée. Le dossier comportera

450.000 pages... Sans commentaire. Si ses errements ne s’arrêtaient qu’à ça, on aurait toujours

pallier le problème en entourant le juge de gens compétents. Mais voilà, sa méthode d’enquête était tout simplement hon­ teuse. Il a inculpé et écroué seize personnes pour, finalement,

n’avoir plus que trois coupables. Et dire que la Belgique s’est

permise de critiquer le juge d’instruction d’Outreau (Nord de la France) alors qu’il avait, malgré tout, des témoignages et des

accusations précises contre les inculpés même si tout finit par s’effondrer. Connerotte lui, n’avait que son imagination. Aujourd’hui, tous les magistrats sont conscients que

Jean-Marc Connerotte est loin d’être un juge d’instruction 38

fiable. Lors du renouvellement de son mandat, sa hiérarchie avait donné un avis défavorable à sa nouvelle nomination.

Mais le ministre de la justice de l’époque, un certain Marc

Verwilgen adepte de la théorie du grand complot dans cette affaire, une fois de plus, n’en a fit qu’à sa tête. Et Jean-Marc

Connerotte resta juge d’instruction.

39

9. Michel Bourlet... Procureur du Roi

«Si on me laisse faire». C’est la phrase qu’il lançait devant les

médias du monde entier au début de l’affaire Dutroux. Fier qu’il était, le grand patron du parquet de Neufchâ-

teau qui tenait, enfin, sa revanche sur ces Liégeois qui l’avaient injustement ridiculisé et méprisé dans l’affaire Cools. Telle­

ment fier qu’il se croyait tout permis et surtout lorsque son frère sera nommé directeur principal de la justice, autrement

dit celui qui dirige la machine judiciaire juste en dessous du

ministre de la justice Je me souviens qu’il arrivait aux chambres du conseil

débraillé avec la toge ouverte, posant genoux sur le bureau du prétoire, en un mot comme en cent, ne faisant aucun com­ plexe car il se sentait chez lui et voulait le montrer.

Ainsi, ne respectant pas les us et coutumes de la justice, je l’ai surpris à plusieurs reprises à couper un avocat dans sa

plaidoirie pour sortir une ânerie quelconque. Mais surtout pour, en définitive, démontrer qu’il était capable de déstabili­

ser l’adversaire par n’importe quel moyen.

Ben oui, il était le maître dans son village, le bougre. Et,

dans son fief, on le saluait sur son passage, tout comme au siècle dernier on saluait le curé ou l’instituteur. Aujourd’hui, on le salue probablement encore, par habitude, mais beaucoup sou­ 40

rient derrière son dos en évoquant ses fantasmes, ses déclarations

folles et, surtout, cet entêtement qui ont provoqué sa perte.

Bien sûr, il a déclaré à qui voulait l’entendre qu’il n’a pas demandé son renouvellement en tant que Procureur de Neufchâteau pour laisser la place aux jeunes. Mais ce qu’il oublie de préciser c’est que, peut-être bien rencardé par son frère, il savait

qu’il ne serait pas reconduit. Dès lors pourquoi postuler?

Autant éviter l’affront. Il a cru, ensuite, être nommé au poste de Juge de Paix. Mais voilà, monsieur Bourlet, aujourd’hui

les temps changent, et la pression politicienne qui vous avait

fait arriver n’a plus les mêmes pouvoirs. Alors, estimez-vous

heureux d’avoir pu être nommé à une place de débutant en tant que substitut à la Jeunesse et de ne pas vous être tout

simplement retrouvé au chômage, même si c’est par pitié. Ah

oui! la pitié, parlons-en... Mais n’est-ce pas ce qui vous a le

plus souvent personnellement manqué dans votre merveil­ leuse carrière! Mais bon, je suppose que vous n’avez aucun regret. Des

gens comme vous ne regrettent rien. Probablement par prin­ cipe et par entêtement. Il est vrai que le Parquet, que vous avez si brillamment représenté, ne reconnaît jamais ses fautes. Dans son chef, ce

serait inconvenant, bien sûr, pour des gens supérieurs comme

vous. Comment est-il possible que certains détracteurs se per­

mettent de déclarer que de tels encéphales pourraient faire la moindre erreur dans leur jugement? Vous savez, monsieur le Proc..., pardon, je ne suis pas

encore habitué, monsieur le substitut du procureur à la Jeu­ nesse, je vais vous faire un aveu: j’aime l’ordre et la justice, je

trouve que c’est indispensable dans un pays démocratique qui veut que son peuple vive en bonne harmonie. Cela vous 41

étonne, peut-être, mais c’est comme cela. Toutefois, j’ai hor­

reur des êtres qui ont un certain pouvoir et qui en abusent,

comme vous l’avez fait dans l’affaire qui nous a confrontés. N’est-il pas dommage, et cela n’aurait pourtant fait que

vous grandir, que vous n’ayez pas eu le courage de reconnaître vos erreurs?

Rappelez-vous simplement que, devant un parterre de journalistes, vous déclariez en novembre 1996 que vous vous apprêtiez à ramener, à Neufchâteau et par cars entiers, de «gros

poissons» impliqués dans des affaires de pédophilie autour de Dutroux! Certains de vos enquêteurs faisaient alors le tour des

rédactions pour obtenir des photos d’hommes politiques,

d’hommes d’affaires, de membres de la famille royale lorsqu’ils étaient jeunes. Parce que, évidemment, ces histoires horribles

d’assassins pédophiles racontées par cette Régina Louf dont

l’imagination pornographique avait de quoi rendre jaloux le plus prolixe des scénaristes de cinéma X, étaient anciennes. N’est-il pas dommage que suite aux déclarations intem­

pestives et aux promesses ridicules que vous avez cru devoir faire, vous n’ayez pas eu, lorsqu’il en était encore temps, tout

simplement le courage de remettre les choses au point comme l’aurait fait tout homme simplement honnête? Mais voyez-vous Monsieur, le courage, on ne le reçoit

pas avec un diplôme ni avec une toge de magistrat. Le cou­ rage, on l’a en soi, comme une sève qui vous grandit au fur et

à mesure des expériences, des joies et des souffrances. Le cou­ rage est le fait de reconnaître les choses simplement, avec la

modestie que nous devrions garder, nous petits êtres humains que nous sommes.

Et pourtant je vous ai tendu la perche! Je vous ai dit à travers les médias qu’il n’y avait pas de honte à se tromper, 42

qu’il n’y avait pas plus à demander pardon, et qu’il n’y en avait encore moins à pardonner. Mais vous vous êtes entêté et de plus, n’avez-vous pas tout

simplement été lâche? Rappelez-vous durant le procès d’assises

à Arlon, comme je comparaissais libre, nous nous rencontrions

tous les jours dans le couloir. Vous vous êtes cru obligé de venir

chaque jour à moi pour me serrer la main, pour prendre de mes nouvelles, pour vous enquérir de ma santé, voire si tout allait

bien. Enfin, en un mot comme en cent, presque pour me cajo­ ler. .. quelle hypocrisie ... quel cinéma... Et je parie que vous n’en avez même pas honte.

Vous avez été plus loin, faut-il vous le rappeler? Lors des dernières chambres du conseil de Neufchâteau,

vous avez insisté pour que les familles flamandes aient le

secours de traducteurs pour comprendre ce qui se passait, et c’est tout à fait normal, vu que c’est vous, et vous seul, en qua­ lité de procureur qui aviez la responsabilité du bon déroule­

ment de ces audiences.

Mais alors, expliquez-moi, Monsieur Bourlet, pourquoi lors de la chambre des mises en accusation de Liège, vous avez

demandé que l’ordonnance de la chambre du conseil de Neufchâteau soit déclarée nulle, eu égard au fait que des tiers {en

Occurrence les interprètes) étaient présents dans la salle! N’est ce pas tout simplement de l’hypocrisie et de la

lâcheté? Mais poser la question n’est-ce pas déjà y avoir

répondu? Je vous en conterai encore d’autres dans cet ouvrage, et

croyez-moi, quoique vous en pensiez, je le ferai sans aucune haine, mais aussi sans aucune crainte, alors que je sais déjà que vous chercherez un mobile pour me punir de l’imprudence

ou, de l’impudence à vos yeux, que j’ai eu de dévoiler ce que 43

vous auriez voulu tenir secret. A moins que je me sois lourde­

ment trompé et que vous reconnaissiez enfin votre terrible erreur. Mais là je rêve, n’est-il pas? Enfin, aujourd’hui, lorsque je fais le bilan du massacre que vous avez commis, je n’ai

qu’une phrase qui me vient à l’esprit. Vous ne devinez pas, Monsieur Bourlet?

«Ils vous ont laissé faire!»

44

10. EddySuys...

C’est lui qui est nommé à la tête de la 23ème Brigade de la

police judiciaire. Cette brigade est chargée de l’enquête me

concernant, alors que Dutroux, Martin et Lelièvre sont inter­ rogés par la gendarmerie. Eddy Suys foncera dans cette enquête croyant avoir

décroché l’affaire du siècle. Il établira des contacts avec les magistrats de Neuf-

château et avec le magistrat national André Vandoren. Rien ne lui sera refusé, il obtient immédiatement tout ce qu’il demande, tant en hommes qu’en matériel. Ainsi, il exige

de disposer d’une puissante Mercedes dont le modèle est inac­ cessible en Belgique, peu importe, on lui louera ce bolide au

Luxembourg.

Toute la police judiciaire sera mobilisée pour cette

enquête, et Eddy Suys se prend pour le Pape des commissai­ res. On constatera même que lorsque le grand patron de la

police judiciaire belge, Christian De Vroom, revient de vacance et demande à Suys de le mettre au courant, celui-ci

refuse en prétextant qu’il travaille sous les ordres uniques du

magistrat national. Ambiance!

Ce doux rêveur croit être sur la piste d’un réseau très puis­ sant et exige d’être protégé. Il exige une protection de la police

de Gand autour de son domicile, une protection rapprochée 45

qui le suivra dans tous ses déplacements personnels y compris

lorsqu’il va acheter ses petits pains à la boulangerie du coin. La

gendarmerie établira également un système de surveillance particulièrement sophistiqué pour couvrir ses trajets entre Gand et Bruxelles. Bref, même notre Roi ne demande pas ça.

Eddy Suys rencontrera chaque semaine Patrick Debaets,

chargé par le juge Connerotte de recueillir les témoignages des fameux témoins X dont la célèbre pornocrate XI, de son vrai nom Régina Louf.

L’association de ces deux «génies» sera le début de l’orga­ nisation du délire collectif. Debaets se répand sur les horreurs

des déclarations des X, sur les noms des «puissants» cités par

ces folles et tant Suys que son dauphin Drisket réceptionne­

ront ces informations en les cautionnant sans vérification. Suys ne s’arrêtera pas la, ainsi il annoncera à la télévision VTM l’arrestation imminente d’un commandant de gendar­

merie. Il ira jusqu’à exhiber un mandat d’arrêt établi au nom de l’ancien Premier ministre Léo Tindemans!

Lorsque je serai interrogé à la PJ de Bruxelles par d’autres enquêteurs que Drisket, je m’apercevrai que ceux-ci ne veulent

pas jouer dans le même jeu que le duo Suys-Drisket. Il sera démontré par la suite que c’est ce groupe de l’excellent

Philippe Beneux qui avait raison. Et il faudra également constater qu’après des centaines d’heures de travail de ce

groupe, lorsque le commissaire Beneux déposera son rapport chez le procureur Bourlet, rapport qui débouchait sur mon

innocence dans ces histoires d’enlèvements, de viols et de

meurtres d’enfants, Michel Bourlet le remballera en lui ordon­ nant de recommencer l’enquête. Bourlet ne voulait pas raison­

nablement admettre qu’il s’était trompé. Il pensait donc qu’en agissant de la sorte, Philippe Beneux et ses hommes allaient 46

enfin découvrir l’inacceptable ce qui justifierait ses déclarations intempestives. Est-ce l’attitude normale et saine que doit avoir

le chef de corps du Parquet de Neufchâteau? Le patron de la police judiciaire?

Suys poursuivra ses divagations jusqu’au jour où, peut-être

enfin lassé de son comportement, la hiérarchie lui offrira une promotion. Il sera nommé en poste à l’étranger où il sera rejoint

par sa compagne jusque-là journaliste à RTL-TVI où elle s’oc­ cupait, avec Dominique Demoulin, de... l’affaire Dutroux! Mais la situation ne se purifiera pas pour autant. La suite allait

être orchestrée par un certain inspecteur Raymond Drisket!

47

11. Raymond Drisket... Chef d'enquête... à l'essai

Je ne sais pas s’il était beau, comme il le prétendait, mais il

était chaud comme le sable brûlant, l’inspecteur. Voilà-t-il pas qu’on lui confie une grande enquête à ce

petit inspecteur de l’ombre. Et là, il faut dire que même s’il n’a pas de grandes méthodes, il a en tout cas l’art de bien se placer. Ben oui quoi! Il sent directement la chance qu’il a de pouvoir

monter en grade et il la prend dans n’importe quelle condition. Il poursuivra aveuglément l’œuvre de son supérieur Eddy

Suys et le calquera dans ses délires. Drisket et Suys emploie­ ront les mêmes méthodes, celles qui mèneront leur enquête à la catastrophe.

Qui est Raymond Drisket?

Tout au long de ces huit années d enquête, je peux dire que j’ai eu l’occasion de l’analyser.

Il essayera de me démontrer qu’il est un excellent enquê­ teur, un excellent pilote de voiture, un excellent dragueur, un excellent juge, un excellent juriste, un excellent psy, un excel­ lent chef d’enquête, un excellent justicier impartial, mais

après huit années passées à ses côtés, je ne peux être d’accord

avec lui sur aucun de ces points. Mais je suis certain qu’il était tout simplement: «La grenouille qui voulait se faire aussi

grosse que le bœuf.» 48

Raymond Drisket, «Ray Drisket» comme il le fera imprimer

sur ses nouvelles cartes de visites. Mais ça, comme nous le chuchoterons certains journalistes, «c est parce qu'à l'époque il doutait de son orientation sexuelle». Méchantes langues, va.

La méthode «Drisket» est simple: il commence par gueu­ ler, gueule encore, puis il se moque et, enfin, il conteste tout ce que vous dites. C’est la méthode primitive et brutale qui

doit peut-être faire mettre bas les vaches qui attendent une césarienne. En tout cas, ce n’est pas celle qui m’émeut. Sans mauvais jeu de mots...

Et ça l’énerve le petit Drisket que je ne réagisse pas à son show. Ca le rend fou.

Après quelques jours de délires, je contemple l’artiste et, las de son numéro ridicule, je lui précise que s’il veut conti­

nuer dans sa méthode grotesque, je ne lui parlerai plus et ne

répondrai plus à aucune question. Ma dernière phrase est sim­ ple: « Vous me parlez comme à un être humain, sinon le dialogue est terminé et nous nous retrouverons devant le juge d'instruction à qui vous devrez rendre des comptes».

Je respecte beaucoup les enquêteurs, ils exercent un métier très difficile, mais je veux également qu’ils me respectent, et il

n’y a rien de pire pour un enquêteur que d’avoir devant lui une personne qui ne répond à aucune question, je dis bien aucune. Alors la méthode est simple, cette personne passera devant le

juge d’instruction et pourra expliquer le pourquoi de son atti­

tude et, à la limite, exiger un autre interlocuteur. Probablement poussé par son collègue Olivier Bogaert, qui est loin d’être un imbécile, Drisket abandonnera son sys­

tème pour un autre qui consistera à être très poli, à essayer de m’épater en se vantant de tas de réussites dans de grandes

enquêtes que soit-disant il dirigeait. Je fais semblant de le 49

croire. Il est aux anges et passera des heures à me relater des

faits inventés de toute pièce. Un simple exemple: il me racon­

tera dans les détails que c’est lui qui a été délivrer les petites Sabine et Laetitia, alors qu’il n’était même pas sur place. Sa méthode consiste aussi à ne pas transcrire tout ce que

vous dites parce qu’il ne veut jamais reconnaître ses torts et veut tout diriger. C’est ainsi que lors de notre première entre­

vue qui durera cinq heures, il parviendra à ne remplir que

deux pages de déclarations et éliminera tout ce qui ne l’inté­ ressera pas. Entre autre le volet drogue et ce malgré mon insis­ tance. C’est ainsi, également, que je lui donnerai des ren­ seignements vitaux pour la justice qu’il ne daignera pas

transcrire car il n’est obsédé que par une chose «m’enfoncer». Un exemple est celui où il me confrontera à un certain

Jamal Lamaizi qui demeure à Laeken. Ce repris de justice était une nouvelle fois tombé dans les filets de la justice pour escro­

querie. Il n’avait rien trouvé de mieux que de créer de fausses

a.s.b.l. avec de faux documents et de faux cachets pour pren­ dre des dizaines d’abonnements GSM auprès de Belgacom.

A l’époque Belgacom ne coupait les lignes qu’après trois

mois de non-paiement des factures. L’on a ainsi découvert qu’il devait une somme importante.

Ce même personnage qui trafiquait dans la drogue avec

les portiers de boites de nuit, fera partie d’une bande qui des­ cendait des voitures volées vers le Maroc, son pays d’origine,

et trafiquera dans tout ce qui pouvait lui rapporter.

Le 12 juin 1997, je serai confronté à ce «gentlemen» dans le bureau de Bruxelles de Drisket. En effet, Lamaizi croyant

que j’étais à l’origine de sa chute, il pensa à se venger. Ainsi, après l’appel à la délation collective lancé par le juge Conne-

rotte via le 0800, il se rendit à la gendarmerie de Bruxelles 50

pour y déclarer qu’entre janvier et juin 1995 (on ne peut être plus précis!) je lui avais remis de la fausse monnaie anglaise

afin de l’écouler. Il déclare: «C'est bien Nihoul qui ma proposé

d'écouler ces faux billets, ... j'en ai gardé un pour collection!»

Alors, où sont les autres? Qu’en a t’il fait et pourquoi ne vientil en parler que plus d’un an après?

Il est évident que cette déclaration est purement un aveu d’avoir écoulé de la fausse monnaie. Mais pas de réaction, ni de la gendarmerie, ni de Drisket!

Lamaizi déclarera être le propriétaire de trois sociétés et de deux a.s.b.l.. En réalité, il n’est propriétaire de rien du tout

et émarge au chômage. Confronté à ce sinistre individu, je

donnerai des éléments à Drisket qui lui permettront d’ouvrir une enquête sérieuse sur les activités troubles du personnage. Mais cela n’intéresse absolument pas Drisket qui ne recherche

que des éléments contre moi en employant toujours la même méthode: ne retranscrire que ce qui l’intéresse et, comme par

hasard, ce jour-là Drisket opérait seul à la confrontation. Or,

cela aussi c’est interdit! Drisket, voyant que rien ne peut m’être reproché dans

cette affaire abandonnera le filon mais ira encore plus loin dans ses méthodes. Il communiquera régulièrement aux médias des parties d’éléments du dossier, voire des parties de

PV (qui, prises hors de leur contexte pouvaient me faire pas­ ser pour coupable et, par conséquent, me nuire énormément aux yeux du grand public). Il répondra même à des journalis­

tes sur des questions essentielles du dossier entre autres devant

les caméras de télévision. Des violations de son secret profes­ sionnel qui ne lui vaudront aucun problème. Pourtant, dans

un autre procès important très médiatisé (l’affaire Pandy), on

a déboulonné l’enquêteur principal pour moins que cela. Mais 51

lorsqu’on doit constater que le procureur du Roi Michel

Bourlet employait les mêmes méthodes, on ne peut qu’enre­ gistrer les errances de la justice et, en qualité de présumé cou­ pable (ce que j’étais...), se dire qu’on a intérêt, avec de pareils gens et de pareilles méthodes, à être très vigilant. Drisket, à l’instar d’autres comiques comme les gendarmesques enquêteurs Debaets et Bille, croira donc avoir trouvé

la montre en or qui le fera monter dans sa carrière. Il est

comme un enfant à qui on lui promet le parc Disneyland jusqu’à la fin de ses jours.

Il continuera dans ses délires durant plusieurs mois, m’interrogeant sur tout, sauf sur les enlèvements. C’est ainsi,

que, lassé par cette manière débile de mener l’enquête, je lui pose un jour la question «Mais, dites-moi, quand va-t-on enfin

parler des enlèvements d’enfants, en effet, sauferreur de ma part,

c’est bien pour cela que je suis arrêté?». Sa réponse fut surprenante: «Monsieur le juge Connerotte,

Monsieur le procureur du Roi Bourlet et moi-même (ben

voyons...) avons décidé de commencer à vous questionner sur les

enlèvements à partir de l’année prochaine»!!! Authentique! Je suis donc arrêté depuis le 15 août et ce n’est que cinq ou six

mois plus tard que l’on estime devoir enfin m’interroger sur ces faits primordiaux.

Je rapporterai ces paroles devant la chambre du conseil de Neufchâteau, déclaration à laquelle le procureur Bourlet n’eut

aucune réaction malgré l’interrogation pertinente du Président Moinet. Non, Michel Bourlet préféra ne pas entendre...!

Toutefois, le juge d’instruction Connerotte venait d’être

démis deux jours auparavant, et c’est monsieur le juge d’ins­ truction Jacques Langlois qui allait lui succéder; A partir de ce

jour, les choses allaient changer. La justice reprenait des galons. 52

La méthode «Connerotte, Bourlet et Drisket» est donc

claire. Ils n’ont, depuis mon arrestation, aucun élément à

charge contre moi. De plus, tant Marc Dutroux que Michelle Martin et Michel Lelièvre déclareront durant ces huit années

d’enquête que, non seulement je n’ai rien à voir dans les enlè­ vements, mais que de plus, je n’étais au courant de rien. Très rapidement, les trois génies de l’enquête ont réalisé, j’en suis

convaincu, qu’ils fonçaient droit dans le mur avec moi. Mais ils ne pouvaient pas l’admettre puisque, sans moi, leur

absurde théorie du grand réseau pédophile, dont j’étais l’in­ dispensable rouage, s’effondrait. Alors Drisket a enquêté sur

tout et, surtout, sur n’importe quoi. Même sur ce qui n’avait aucun rapport avec les enlèvements. Il fallait, absolument,

trouver quelque chose. A n’importe quel prix. Même celui qui consistait à mouiller un innocent dans cet immonde histoire

d’enlèvements, de viols et de meurtres d’enfants.

Après le départ du commissaire Eddy Suys, Drisket cal­ quera ses exigences sur celles de cet ancien chef qui avait pour­

tant tout raté dans cette enquête. Ainsi je verrai ce magnifique inspecteur réagir comme un bambin devant une montagne de

sucrerie lorsqu’on lui promit une nouvelle voiture qu’il rece­

vra quelques temps après. Quelle merveille! Il n’arrêtait pas de

vanter son pouvoir à obtenir «Le véhicule» dont il rêvait. «Ah, ça, je Val exigé et ils ne pouvaient pas me le refuser».

Dès ce moment, ce fut la décadence de Drisket qui pen­ sait, en fait, avoir tous les pouvoirs. L’égarement régnait et il a

vraiment pensé qu’alors tout «lui» était permis. Je n’ai, à priori, aucune animosité envers ce type. Mais

pour moi il reste un «petit» et il faut reconnaître que lui don­ ner ne fut-ce qu’une parcelle d’un quelconque pouvoir est dangereux et inconscient. 53

Après ma libération en 1999, de nombreux journalistes me

parleront de Drisket. Ils étaient, me disaient-ils, dégoûtés par

ses méthodes et par son manque d’objectivité. Ils me confir­

meront que cet inspecteur leur avait donné des éléments du dossier (ce qui est interdit) mais en en camouflant des parties

importantes ce dont ils ne s’aperçurent que bien plus tard. Pour Drisket, cela était parfait: à son instigation la presse écor­ nait chaque jour un peu plus son «meilleur» client! N’y a-t-il

pas de quoi s’inquiéter sur la déontologie de ce brillant poli­

cier toujours d’active et, aujourd’hui, commissaire!

Les interrogatoires... Je suis souvent hilare en lisant les commentaires de certains

journalistes sur le sujet bien précis des interrogatoires. Ils ne savent pas. Alors comme il faut remplir les colon­ nes de leurs journaux, ils inventent.

Lorsqu’on parle avec des détenus ou des anciens détenus,

l’on constate qu’ils ont une manière très personnelle de relater leurs interrogatoires. Un jour, je questionnais un grand enquêteur, qui n’avait rien à voir avec mon affaire, sur les méthodologies d’enquêtes

dites «serrées». Il m’expliqua sans aucun détour qu’aujourd’hui, on ne frappait pratiquement plus les prévenus pour les faire parler, qu’on employait des méthodes plus dissuasives et psychologiques pour arriver aux aveux des criminels. Ainsi,

on a pu constater que l’enquêteur Michel Demoulin a obtenu les aveux de Marc Dutroux, par son intelligence à le pousser à se vanter de ses crimes.

Il faut malheureusement constater que Michel Demoulin, 54

grand enquêteur, ne fut nullement remercié de son travail gigan­ tesque et supérieur. Il fut même mis à mal par les avocats Beau-

thier et Fermont lors du procès d’assises d’Arlon. Sans aucune honte, ils critiqueront de manière imbécile et non fondée le tra­

vail de cet enquêteur. Maître Rivière, probablement affecté par les propos affligeants et diffamatoires de ces deux avocats des

parties civiles, remit de l’ordre et de la dignité au procès en remerciant, au nom de sa cliente, Sabine Dardenne, ce grand

Monsieur qui était probablement l’un des sauveurs de sa cliente. Mais pour en revenir aux méthodes d’enquête, mon

interlocuteur m’expliquera que tous ces pseudos durs qui se

trouvent en prison, on devrait parfois les frapper pour qu’ils

s’arrêtent de parler.

Mes interrogatoires furent quelque peu differents. Au début, comme je l’ai déjà développé, l’enquêteur Drisket gueulait, croyant ainsi m’impressionner. Par la suite le

ton changera mais on essayera de m’avoir à l’usure. Par exem­ ple, on m’embarquera à Arlon à 5 heures du matin pour

m’emmener à Bruxelles et m’interroger jusqu’à 18 heures. De

là, on me ramenait à Arlon pour m’interroger jusque 3 heures du matin. On voulait donc m’avoir à l’usure.

Il est évident que dans de telles conditions, des phrases ou des mots qui peuvent vous paraître insignifiants, risquent de vous échapper. C’est sur ces peccadilles que les «VAU­ TOURS» vous attendent, car autrement ils n’ont rien. Donc,

ce n’est que par ces méthodes, pour le moins critiquables, qu’ils peuvent apporter de l’eau à leur moulin.

Je n’ai jamais été frappé, mais j’ai été menacé très sou­ vent verbalement par l’enquêteur Drisket qui me faisait un

chantage sur mes enfants. En effet, ayant fait arrêter mon ex­ femme, il voulait que j’avoue en échange d’un bon placement 55

de mes enfants. Sinon ce serait l’horreur pour eux. Cela faisait partie des méthodes de ce personnage.

Je ne marchais pas dans la combine du rigolo et un jour, il me menaça physiquement. Avec son collègue Carette, ils s’approchèrent de moi, menaçant et gueulant que j’allais leur

dire ce qu’ils voulaient entendre. Ils avaient tous les deux la main sur leur revolver. Ce jour-là j’ai cru, un moment, qu’ils

avaient perdu la raison. En fait, la raison ils l’avaient réellement perdue. Drisket rêvait de sa nouvelle carrière, il ne parlait plus que des avanta­

ges et du pouvoir qu’il retirait de cette enquête. Ils étaient

devenus les Starsky et Hutch de la police judiciaire et ils agis­ saient comme ces flics de série C.

L’ennui pour Raymond Drisket sera la nomination du juge Langlois: il ne pourra plus faire ce qu’il veut bien qu’il tente

toujours de mener sa politique d’indépendance. Fort de l’ap­ pui du procureur Bourlet, il se permettra même de critiquer

le juge Langlois devant les assises.

Aux Assises Drisket sera égal à lui-même, il laissera tou­ tes les portes ouvertes, c’était probablement à son avis, lui qui

m’a toujours considéré comme coupable, la seule manière de faire croire qu’il n’avait jamais préjugé. Il démontrera ainsi

qu’il manque totalement de courage.

Il se basera sur les déclarations qui se dévoileront comme plus que fantaisistes d’un pompiste d’Arlon pour déclarer que j’utilise de fausses cartes de crédit. Il étayera sa thèse en ajou­

tant à cela le témoignage d’un sinistre bandit de nationalité marocaine. (Voir chapitre «Le procès du siècle, les témoins» )

Un membre du jury lui posera la question suivante: «La quasi-totalité des témoins disent avoir vu Nihoul à bord ou à côté d'un véhicule qui n était autre que la camionnette Renault Trafic 56

de Dutroux. A-t-on retrouvé dans ce véhicule des traces (cheveux, poils, empreintes digitales, etc..) de Nihoul?»

L’inspecteur Drisket, qui a pourtant supervisé toutes ces

huit années d’enquêtes à mon sujet, dira qu’il est incapable de répondre à cette question. Et le procureur Michel Bourlet ne l’aidera pas non plus! Pourtant la réponse figure dans le dossier

d’instruction. Est-il besoin de le préciser? Elle est négative... Sa conclusion nous laissera sans voix: «Rien ne permet d’affirmer que Nihoul n’a pas été à Bertrix le jeudi 8 août 1996». Huit ans d’enquête pour en arriver à pratiquer la dou­

ble négation. Quelle lâcheté!

Sa mission était d’amener des faits, des preuves indiscuta­ bles de ma présence aux côtés de Lelièvre et de Dutroux. Et

comme après ces huit longues années d’enquête, uniquement menées à charge à mon égard, il est incapable de donner la

moindre preuve ou établir le moindre fait, il doit tout simple­ ment le dire. Mais il a préféré s’en tirer par une pirouette séman­ tique! Jurer de dire toute la vérité, rien que la vérité, et ne pas le

faire devant une cour d’assises, c’est particulièrement gonflé.

C’est ce même homme qui lors du deuxième jour de mon incarcération alors que je lui demandais «Que direz-vous

quand vous vous apercevrez que je suis innocent et que vous vous êtes trompé?» m’a répondu «Je men fous complètement!»

Aujourd’hui, il est incontestablement un des grands res­ ponsables de cette grave erreur judiciaire qui m’a complète­

ment ruiné tant matériellement que physiquement et qui a

martyrisé tous les miens, mais pour imaginer qu’il pourrait avoir un peu de regret, il faudrait peut-être d’abord croire qu’il

lui reste un peu de dignité ou de conscience.

57

12. La série des témoins X...

Le 15 août 1996, une Gantoise de Tl ans, mariée et mère de

4 enfants regarde la télévision.

Le journal télévisé montrera Dutroux, menotté par les gendarmes en civil, qui sortira de la maison de Marcinelle

suivi des petites Laetitia Delhez et Sabine Dardenne. A la vue de ces images elle s’engouffre dans la salle de

bain s’agenouille et crie «Merci mon Dieu, merci! Enfin ils ont pu en libérer deux!».

Ces policiers lui apparaissent comme les sauveurs du monde, comme «les chevaliers blancs» dont elle rêve depuis sa

jeunesse. Elle soupire «Pour moi, ils ne sont jamais venus!». Deux jours plus tard, elle regarde le journal télévisé chez

Tania, sa meilleure amie. Elles ont fréquenté la même maison d’accueil pour femmes en détresse «Tegen haar will» sise rue

Guinaer à Gand.

Cette fois, c’est moi quelle voit descendre les marches

du palais de justice de Neufchâteau entouré de gendarmes qui essaient de me protéger de la foule qui hurle «A mort».

Elle prétend alors à son amie quelle me reconnaît, et

toute la nuit Tania essaie de la persuader de contacter les magistrats de Neufchâteau. Cette femme s’appelle Regina Louf. Elle sera surnommée

58

XI par le parquet afin de garder l’anonymat. Elle sera une des

plus acharnées contre moi. C’est finalement Tania qui téléphonera, à Neufchâteau,

au juge d’instruction Jean Marc Connerotte. Elle s’adressera au magistrat en néerlandais «Ik ben ene Tania uit Gent». Plus

tard, la chose étonnera plus d’un observateur lorsqu’on

apprendra quelle parle parfaitement le français.

Il se fait que l’adjudant Patrick Debaets est justement pré­ sent, à ce moment précis, dans le bureau du juge Connerotte.

Debaets est un des patrons de la 3° SRC, brigade financière de la BSR de Bruxelles. Lui et ses hommes sont chargés de réaliser des enquêtes financières sur Dutroux et ses présumés compli­

ces. Objectif: déterminer si des mouvements d’argents seraient susceptibles de démontrer l’existence d’un trafic d’enfants.

Heureux hasard donc. L’adjudant Patrick Debaets, par­ fait bilingue, se trouve dans le bureau du juge Connerotte, qui n’entrave pas un mot de flamand, pile poil au moment où

ce dernier reçoit un coup de fil de Tania qui s’exprime en fla­

mand! Et que fait le juge chestrolais? Il passe la communica­ tion à Debaets qui lui traduit les propos de Tania. Des propos

où l’on parle de réseau pédophile et où l’on parle de Nihoul!

Il n’en faut pas plus au juge Connerotte pour demander à Patrick Debaets d’interroger au plus vite Régina Louf.

Quelle erreur que de confier à un spécialiste, même éminent,

des enquêtes financières de haut niveau l’interrogatoire d’une présumée victime d’un réseau pédophile. Une erreur qui va

polluer tout le dossier Dutroux et qui va conduire aux plus grands délires de toute l’histoire judiciaire belge. L’adjudant

Debaets ne sera pas le seul responsable de ces délires. D’autres enquêteurs, des magistrats, des politiques, des psychiatres, des

59

journalistes manipuleront et tromperont l’opinion publique sans aucun scrupule.

Mais revenons à Debaets. L’adjudant est aux anges, il a passé la quarantaine et est, donc, responsable de la 3° SRC de

la BSR de Bruxelles. Cependant s’il a obtenu de bons résultats dans le domaine de la finance, il n’a aucune expérience dans le domaine de la psychologie. Mais il croit son heure arrivée et

s’imagine une fin de carrière couverte d’étoiles. Très ambitieux, il proposera de créer une nouvelle sec­

tion à Bruxelles qui serait une unité pilote en cas de fusion

entre la gendarmerie et la PJ. C’est naturellement lui qui diri­ gerait le tout.

L’Etat-Major de la gendarmerie est justement au centre de la tourmente suite à l’échec de l’opération «Othello» et,

dans le but de redorer son blason, il accordera tout à Debaets.

Absolument tout sera permis à cette nouvelle équipe qui décide de porter un grand coup à l’enquête. La première audition de Regina Louf aura lieu le 20 sep­

tembre 1996 après plusieurs rendez-vous manqués. Elle entre en piste en clouant les enquêteurs au sol. Elle déclare me connaître ainsi qu’Annie Bouty, l’avocat Michel Vander Elst,

Marc Dutroux et Bernard Weinstein. Ces déclarations font

l’effet d’une bombe car les noms quelle cite sont ceux dont toute la presse parle depuis plus d’un mois. Ce que la jeune femme raconte aux deux gendarmes dépasse l’entendement.

On atteint le fond de l’horreur et de la déchéance humaine. En substance, Régina Louf raconte quelle a été initiée dans

un réseau pédophile, à la demande de sa mère (elle-même vic­

time des mêmes agissements dans sa jeunesse), dès l’âge de deux ans. Elle en serait restée l’esclave jusqu’en 1995, bien

après être devenue majeure. 60

Debaets convaincra très facilement le très impressionna­ ble procureur Michel Bourlet que Regina Louf est des plus

crédibles. Et il recevra le feu vert pour investiguer à fond. C’est ainsi qu’en novembre, est créée la très officielle «antenne

de Neufchâteau de la 3ème SRC de la BSR de Bruxelles». Du

jour au lendemain, trente-quatre enquêteurs de la 3ème SRC abandonnent leurs dossiers financiers et suivent Debaets,

comme un seul homme, pour se consacrer exclusivement aux enquêtes sur les réseaux pédophiles. Ceux qui, malgré les

pressions, resteront dans leurs dossiers financiers seront véri­ tablement considérés comme des traitres. Et n’oublions pas les juges d’instruction financiers bruxellois qui verront la

quasi-totalité de leurs dossiers prendre des années de retard. Leurs cris, leurs lettres, leurs rapports resteront lettres mortes.

Les fins limiers de la 3eme SRC mènent désormais la danse. Ils sont accros aux déclarations de XI, Régina Louf, et de tou­ tes ses «collègues» puisqu’on comptera jusqu’à douze témoins

«X»... Je commencerai, si vous le voulez bien, par analyser les

déclarations quelle fera et qui ne me concerne pas, ainsi nous

pourrons déjà avoir une idée de la crédibilité de ce témoin

capital.

Regina Louf assure qu’à l’âge de dix ans, elle met un enfant au monde. Après avoir consulté de grands spécialistes

médicaux, il s’avérera quelle n’aurait pas eu la possibilité de mettre un enfant au monde à cet âge, vu que c’est entre dix et

onze ans quelle aura ses premières règles. De plus, si elle

déclare avoir été enceinte à l’âge de dix ans à l’école, personne ne l’aurait remarqué même aux cours de gymnastique quelle fréquentait. Elle dit également avoir allaité l’enfant sans que

personne ne s’en aperçoive! 61

Elle prétend aussi avoir été excisée très jeune, mais aucun

des médecins qui l’ont examiné, suite à ses déclarations à la

3eme SRC, n’ont pu le constater. Regina Louf est probable­ ment la seule femme dont le clitoris a repoussé après exci­

sion!!! Aujourd’hui, comme par hasard, Regina Louf a déve­ loppé une telle phobie des médecins que plus aucun d’entre

eux ne peut l’examiner. Dans ses élucubrations elle déclare: «De toute manière, on ne voit plus aucune trace explicite des sévices que fai subis». Elle déclare également que: «dans les années 80, fêtais le

personnage principal d'un réseau pédophile qui organisait avec

Tony des séances de débauches auxquelles participait Annie Bouty» mon ex-compagne. Dans ses délires pornographiques, elle évo­

que des séances dans un château royal avec des corps d’enfants pendus à des crochets de bouchers et un membre de la famille royale plongée dans une baignoire de sang afin de la rendre fer­

tile. Tout cela en ma présence et celle d’Annie Bouty.

Alors il faut s’arrêter quelques instants pour faire le point: Je ne connais pas du tout ce Tony, (qui fut l’amant de la

maman de Régina Louf aujourd’hui décédée), dont elle parle. Le personnage a été identifié et entendu par les enquêteurs et

il confirme mes dires. Annie Bouty n’a jamais fréquenté les clubs de partouze

que j’ai commencé à fréquenter après ma séparation avec elle,

soit en 1982.

Tant Annie Bouty que moi-même n’avons JAMAIS ren­ contré cette Regina Louf. Son cousin germain, Dany Poupaert, déclare n’avoir jamais rien remarqué non plus. Il déclare également que ce n’est qu’une divagatrice. Il a lui-même travaillé à l’hôtel quelle dési­

gne comme ayant été un centre de rassemblement pour pédo­ 62

philes et lui n’a jamais rien remarqué. Il dit avoir passé toutes ses vacances d’enfant avec elle sans jamais rien remarquer.

Ce cousin, très honnête et dont les dires ne sont ni contestables ni contestés par Regina Louf, la décrit comme

une psychopathe dangereuse. Mais voilà, ce serait trop simple de conclure là. Et les Debaets, Bille, Suys et les autres, que deviendraient-ils si la

logique démontrait tout simplement qu’ils font fausse route. NON, ce n’est pas possible, alors il faut reprendre les interro­

gatoires pour pouvoir justifier l’horreur et les scandales que

l’on a annoncés. XI, car ce n’est que sous ce pseudonyme quelle s’est fait

connaître au début, sent que ses témoignages battent de l’aile et, poussée par des gens aussi frelatés quelle, elle décide alors

de sortir de l’ombre, elle se montre au grand jour et dévoile au grand public s’appeler Regina Louf.

Le peuple retient son souffle, si cette femme ose donner

son nom et se montrer en public c’est quelle dit la vérité!

Certains journalistes appelés «d’investigations» s’empa­ rent de l’affaire, du côté francophone, Pascal Vrebos de RTL la fait venir sur le plateau du dimanche. Son ami Michel

Bouffioux, qui n’en demandait pas tant pour sortir ses âne-

ries, l’accompagne. Il est suivi comme son ombre par Marie Jeanne Van Heeswyck, alors maîtresse du journaliste de la

RTBF Paul Germain, qui marchera dans ses phantasmes. Plus

on est de fous... Côté flamand, Douglas De Coninck du jour­ nal «De Morgen» et Annemie Bulté croient tous «leur heure»

arrivée. Ils vont dévoiler l’impensable au pays.

Je fais une nouvelle pause pour réfléchir sur ce délire col­ lectif et répondre à une question qui m’est souvent posée

aujourd’hui: mais pourquoi n’avez-vous pas réagi? 63

A cette époque, je suis arrêté et considéré par les magistrats

de Neufchâteau comme le chef d’un important réseau pédophile. En face de moi, j’ai d’une part le procureur Michel Bourlet qui est convaincu non seulement de ma culpabilité mais de l’exis­ tence d’un énorme réseau international. Et d’autre part un juge

d’instruction qui s’appelle Jean Marc Connerotte qui prouvera qu’il est incompétent pour diriger une telle enquête car il est tout

simplement incapable de faire le tri des informations qu’il reçoit. Connerotte et Bourlet attiseront la rumeur sur la dange­

rosité du réseau pédophile en se déplaçant tous deux en Mer­ cedes blindées et accompagnés de gardes du corps. Notons que bien plus tard un jeune liégeois sera condamné pour avoir été l’auteur des menaces diffusées sur Internet contre les deux

magistrats. Des menaces qui relevaient du canular mais qui

tombaient fort à point! Et pour l’anecdote relevons, quitte à

me faire traiter de mesquin, que le juge Connerotte avait

rendu les plaques et suspendu l’assurance de sa voiture per­ sonnelle durant les quelques mois où il circulait en Mercedes avec chauffeur. Il n’y a pas de petit profit.

Plus sérieusement, suite aux déclarations débiles de ces

témoins X, j’ai «supplié» le chef d’enquête Raymond Drisket d’être confronté à ces femmes mais cela ne m’a jamais été accordé. Pourquoi? Soit Drisket ne faisait pas suivre mes demandes au juge Connerotte, soit celui-ci n’a pas cru bon devoir le faire.

Quoiqu’il en soit, je trouve inadmissible de la part de gens comme Bourlet et Connerotte d’accepter que ces femmes se

répandent en de telles accusations, me citent dans des faits

aussi graves et qu’ils ne daignent même pas me confronter à

ces accusatrices. Quelle «justice» ces deux hommes mènent-ils?

Et pendant ce temps, Regina Louf, qui se sent pousser des 64

ailes en rajoute. Il est vrai qu’avec les honneurs qu’on lui rend, il

n’y a pas de raison quelle se prive! Depuis le début avec Debaets, elle sent quelle est prise très

au sérieux. Il n’y a, dès lors, plus de raison d’arrêter de divaguer car au plus elle en rajoute, au mieux on la croit. Et le système de

De Baets, qui emploie ses méthodes d’enquêtes financières en l’aidant à trouver les réponses voire en les fournissant quand son imagination est en panne, la pousse également à se sentir

en confiance et à continuer sur le chemin des égarements. Dix-sept auditions et plus de 1.500 pages de procès-verbaux,

auquel il faut ajouter plus de 10.000 pages de vérifications et d’en­ quêtes assureront la gloire pour Regina Louf et l’horreur pour moi.

XI devient une gloire nationale et sera donc suivie par une série d’autres témoins X.

Les autres témoins X X2 est une ancienne employée d’un tribunal civil et travaille dans un service policier à Bruxelles. Elle viendra via le télé­

phone vert du juge Connerotte. Son témoignage est très vague, sans fondement, toutefois elle sera prise en considération car elle attaque principalement

la magistrature. Elle déclare avoir participé à des partouzes

organisées par des magistrats et des hommes politiques, dont des ministres. Elle ne donnera rien de précis, aucun nom, aucun lieu

mais uniquement des souvenirs d’ambiance; Elle intéressera cependant les membres de la commission Dutroux, Nihoul & consorts car ils espèrent par son canal trouver des indices de

protection de la magistrature carolorégienne. 65

X3 qui fait son entrée à Neufchâteau en novembre 1996,

racontera des scènes quelle aurait vécues et qui atteignent l’horreur.

Victime d’attouchements à 3 ans, abusée par son père, offerte comme enjeu lors de parties de bridge avec sa mère,

soumise à des séances de photos pornographiques, excisée par un médecin de la famille sur la table de la cuisine, obligée de

participer à la torture et aux meurtres d’enfants et d’animaux, contrainte de se livrer à des actes de cannibalisme, elle aurait été mutilée, violée, contrainte à la zoophilie et à la prostitu­

tion. Son calvaire aurait duré 9 ans dans les années 1950, et se serait déroulé dans des châteaux ou hôtels particuliers de luxe. Elle cite des personnages très importants du monde politique

et industriel et n’hésite pas à citer des noms de personnages appartenant aux plus hautes sphères de l’Etat ou évoluant

dans les plus prestigieuses organisations internationales. Aujourd’hui, elle se déclare trahie par Debaets et son

équipe. Elle fut outrée de voir une partie de son témoignage publié dans «Paris-Match» et «Télé Ciné Revue» grâce à une

fuite d’un personnage de la 3° SRC. X4 viendra à Neufchâteau par le canal de Théo Van

Dijck. Elle dénoncera également des actes de maltraitances de

ses parents. Son témoignage rappellera très fort celui de XI (Regina Louf) mais il faut constater quelle a fréquenté la mai­ son «Tegen haar will» de Gand tout comme XI.

Il y eu aussi un homme qui témoigna dans le même sens, il

sera baptisé Y. Il est âgé de 35 ans et est en thérapie depuis 4 ans. Il a été violé à l’âge de 5 ans par un curé, il sera entendu sous hypnose et déclarera avoir été victime d’un réseau local de pédophiles.

66

Regina Louf en remet une couche Fin octobre 1996, Regina Louf fait allusion à un meurtre qui

a eu lieu le 13 février 1984 à la Champignonnière située au coin de la rue de la Stratégie et du boulevard du Triomphe à

Auderghem. Tout a commencé avec un appel des pompiers par un habitant du coin qui a vu de la fumée sortant du bâtiment. Il est 20h45. Arrivés sur place les pompiers découvrent un corps

humain à moitié calciné et dont les pieds et les poignets sont attachés avec du fil électrique. L’horreur!

On décourvira qu’il s’agit de la jeune Christine Van Hees, alors âgée de 16 ans. Toutes les circonstances entourant cette mort mysté­

rieuse seront publiés, à l’époque, par le journal «Le Soir» avec moult détails.

Regina Louf m’accusera d’avoir violé, torturé et assassiné Christine Van Hees, à la Champignonnière, au cours d’un

meurtre rituel. Elle déclarera quelle assistait à cette séance. Elle précisera que cela se passait sous la direction d’Annie

Bouty, avec ma participation et celles de Marc Dutroux, Ber­

nard Weinstein, Michel Vander Elst, et quelques autres per­ sonnes. Les détails quelle donnera sont des plus sordides. Elle

prétendra avoir dû participer, avec Christine, à une soirée d’orgie et suite à cette orgie Christine aurait été punie, atta­ chée et brûlée vivante. Après l’incendie, Regina aurait été

emportée dans les bras de Tony, elle se serait endormie et se serait réveillé chez elle. Le lendemain, elle reprenait le chemin

de l’école comme si rien ne s’était passé.

Lorsqu’on analyse les déclarations de Regina Louf, on ne peut que constater que c’est une femme à la santé hors du 67

commun. Elle se remet sur pied en quelques heures après

avoir subi des sévices corporels et moraux terribles. Non, ce n’est pas crédible et pourtant Debaets et son équipe continue­

ront encore à la suivre dans ses récits ahurissants.

Lors de cette audition, elle prétend quelle avait 11 ans, c’est à dire que cela se serait passé en 1980. Cependant la mort

de Christine a eu lieu en 1984: elle avait 15 ans à cette épo­

que. Cinq jours plus tard, elle rectifiera et déclarera ne pas avoir été à l’école le lendemain du meurtre.

On lui présentera une série de photos pour quelle dési­

gne celle de Christine Van Hees, elle désignera à plusieurs

reprise la photo P10. La jeune fille qui est sur cette photo ne ressemble en rien à Christine. Mais les enquêteurs concluent:

«XI ne désigne pas la bonne photo, alors que la photo de Christine Van Hees se trouve dans le lot. En fait, c'est volontairement quelle

désigne la photo P10. XI refuse de désigner Christine Van Hees».

Cette magnifique conclusion et ce point important qui devraient être envoyés au juge d’instruction Van Espen, à

Bruxelles, qui instruit le dossier de la Champignonnière, sera

curieusement transmis au juge Langlois à Neufchâteau. Elle déclarera également avoir tué un enfant alors quelle

était majeure, cela aurait dû au moins faire réagir Debaets. Offi­ cier de police judiciaire, il aurait dû transmettre au juge d’ins­ truction pour inculpation. Mais non, tout cela semble normal! Aujourd’hui, il est prouvé que Regina Louf n’a jamais mis

les pieds à la Champignonnière. Il est également prouvé que

toutes ses accusations, comme celles des autres témoins X à

mon sujet, ne sont que des mensonges. Je me pose quand même la question de savoir pourquoi je n’ai jamais eu accès à

ces dossiers. Des dossiers qui, curieusement, ont été retirés dos­

sier d’instruction Dutroux. Certains ont probablement estimé 68

que l’étalage des délires sado-maso-pornographiques de Régina Louf et de ses émules concernant, entre autres, la famille royale

aurait vraiment fait trop mauvais genre. Et tant pis pour ceux

qui, sur base de ce ramassis de calomnies et d’élucubrations, ont été cloué au pilori en place publique.

Regina Louf a déclaré à la presse que j’ai refusé la confrontation avec elle ce qui est absolument faux. Alors pour lui donner cette chance d’être en face de moi et de dire ce

quelle pense devoir dire, j’ai décidé de l’assigner au tribunal prochainement, mais comme elle ne sera pas obligée de s’y pré­

senter en personne je crains quelle se contente de n’envoyer

que son avocate. Sinon, je me réjouis d’entendre les explica­ tions de ses calomnies.

69

13. Marie-France Botte, Une Baronne peu reluisante!

Dès l’annonce de la découverte des corps de Julie et Mélissa, le 17 août 1996, Marie-France Botte occupe le terrain médiatique. Elle sera présente aux côtés des parents lors des funérail­

les des enfants martyrs et occupera une place importante en posant pour tous les chasseurs d’images de l’époque. C’est l’époque où les politiques se cachent, ne sachant

quelle attitude prendre, mais elle, elle pose et de plus elle parle

pour dire tout et n’importe quoi. A l’instar du procureur Michel Bourlet, elle clamera qu’il

s’agit de grands réseaux de pédophilie et quelle possède des

listes de noms. Interrogée à Neufchâteau, elle sera incapable

d’en sortir un seul. Il faudra beaucoup de temps à notre petite Belgique pour s’apercevoir que cette femme n’est qu’une sale petite opportu­ niste qui profite de toutes les occasions pour se mettre en valeur

et s’enrichir. En effet, son stratagème est bien monté et, de plus, qui oserait à cette époque, contredire cette femme «exemplaire»

auréolée pour sa lutte contre la prostitution en Asie et qui, pour cette raison, vient d’être anoblie par le Roi Albert IL

L’histoire nous apprendra quelle usera de tous les strata­ gèmes pour arriver à ses fins morbides pour réussir dans la

gloire et la reconnaissance. 70

Elle s’acoquinera avec Claude Lelièvre, délégué général aux Droits de l’enfant, pour dénoncer un certain Pierre S. de la RTBF comme pédophile. Ce dernier sera licencié séance

tenante par l’administrateur délégué Jean-Louis Stalport qui

aurait peut-être pu mener une petite enquête intérieure avant de prendre une telle décision pour le moins gravissime. Il s’avérera que tout cela n’était qu’une machination et le

tribunal tranchera définitivement en donnant entièrement raison à Pierre S., mais malheureu-sement quelques années trop tard.

Il faut cependant observer que le «moraliste» Claude Lelièvre ne reviendra jamais sur ses accusations et ne présen­

tera jamais d’excuses même après la lettre cinglante que Pierre S. lui a envoyée pour lui rappeler les responsabilités qu’il porte dans la chute de sa carrière. Mais voilà, «Mossieur» Lelièvre

n’est-il pas, de part ses fonctions, bien au-dessus de ces pro­ blèmes qu’il considère peut-être comme faisant partie des aléas moraux de la vie? Il est étonnant de remarquer que tous ces gens qui font

injustement du tort à d’autres, se débattent plus pour trouver

des excuses à leurs actes de carnage qu’à tout simplement

reconnaître leurs torts. N’est-ce pas un grand signe de pau­ vreté intellectuelle et morale?

Pour en revenir à madame Marie-France Botte, elle continuera à poursuivre ses tribulations médiatiques en sédui­

sant un jeune animateur de la RTBF, Sacha L., pour se construire un petit monde imaginé de toute pièce par elle. Et

dominer certaines personnalités de notre pays. Elle arrivera ainsi à prétendre quelle avait un certain pouvoir sur le palais royal et quelle était soutenue par les plus

grands de ce pays. 71

Quoiqu’il en soit, elle récoltera des dizaines de millions

de francs au nom de ses diverses associations. Et, aujourd’hui encore, personne ne pourrait établir les véritables buts de ses activités.

Elle ira plus loin. Simulant une agression devant sa rési­

dence, elle déclarera «avoir reconnu «un ami de Nihoul» qui l’aurait attaquée. Après enquête tout cela s’avérera faux et sans aucun fondement. Marie-France Botte n’avait été agressée que dans sa petite tête. Ce n’était d’ailleurs pas la première fois

quelle déclarait faussement avoir été attaquée. En effet, elle

avait déjà déclaré quelle avait été agressée dans une ruelle de Bangkok «à titre d’avertissement par la mafia» et quelle avait été trois jours dans le coma. Cela s’avérera, par la suite, totale­

ment faux. Que faut-il en conclure? Que Marie-France Botte est également une de ces oppor­ tunistes qui essayera et arrivera à attirer l’attention sur elle avec l’affaire Dutroux, dans le seul but d’en tirer à la fois des

avantages et de l’argent, alors quelle ne connaissait pas la pre­ mière ligne du dossier.

Que le procureur de Roi de Neufchâteau Michel Bour-

let, grâce à cette aventurière miraculeuse se confortera dans

ses délires et autorisera même cette extravagante à assister à l’audition d’un témoin dans l’affaire Dutroux, ce qui est une violation du secret d’instruction, mais ce n’est qu’un des pre­

miers grands couacs d’une longue série. Que si le «Nihoul» que je suis, avait agi de la sorte, le

procureur Paul De Gryse, qui s’est tellement acharné contre

moi en 1996, aurait probablement réclamé 20 ans devant les tribunaux devant lesquels il m’avait traîné de 1996 à 1999,

alors que dans mon cas j’ai été condamné sur des rumeurs. 72

Aujourd’hui le procureur Paul De Gryse a été détrôné de son poste de Procureur. Il faut dire qu’en plus de la gestion catastrophique de son Parquet, il avait réussi à se ramasser, de

la part d’une magistrate, une plainte administrative, en juillet 2006, pour harcèlement sexuel. Néanmoins, il conserve (car

on ne peut faire autrement) un poste de substitut du procu­

reur à la jeunesse. Tiens, comme Bourlet! Alors, De Gryse et Bourlet, mêmes méthodes?

73

14. Les clubs de rencontres

Lassé des trahisons que j’avais subies de mon ex-compagne, je

songeais à ce que j’avais vu, à ce que j’avais considéré avec des yeux respectueux, candides, à ce qui m’avait ému et qui pour­

tant n’était plus qu’une façade, une vaine représentation. Tout un symbole, toutes mes attaches profondes s’écroulaient

comme un jeu de cartes.

Prisonnier dans le réseau des sensations et des erreurs ter­ restres, je ressentais le besoin de sortir, de faire la java. Que

me restait-il de ces souvenirs ensoleillés, vieux à peine de quel­

ques mois? Ils me paraissaient chimériques. Il ne pouvait plus y avoir pour moi de soleil joyeux. Dans mes soirées et mes nuits incontrôlées, mon frère

Daniel allait m’introduire dans un club de rencontres. Il les connaissait tous.

Clubs de rencontres? Sexe? Echangistes? Partouzeurs? Sadomasochistes? Homosexuels? Pédophiles? Drogues? Pho­

tos? Chantage? Alors quoi docteur, dites-nous ce qu’il s’y passe vraiment? L’amour physique est un des premiers plaisirs importants que Dieu ait concédés à l’homme. Il était malin le bon Dieu, car c’est le seul jeu qui ne s’est jamais démodé. (Aujourd’hui,

un gars qui invente un jeu qui tient dix ans, est qualifié de

génie). 74

Adam et Eve, qui d’après les Ecritures Saintes furent les pre­ miers à pouvoir goûter à cette merveilleuse chose que certains

hommes dénonceront plus tard comme impure, y consa­ craient déjà probablement beaucoup de temps vu qu’au Para­

dis terrestre ils ne devaient s’inquiéter de rien. Or, à cette épo­

que, il n’y avait pas de bouquin sur le sexe ni sur la manière de s’en servir. Certains déclarent d’ailleurs à ce sujet, qu’Adam ne savait pas quelle posture, ou quel geste, fît qu’Eve fut enceinte et qu’il dû les recommencer tous, et à plusieurs reprises, pour

enfin le savoir. Il est évident qu’Adam et Eve n’étaient pas des partouzeurs, ni des échangistes, en tout cas pas au début!

Comprenne qui voudra. Mais je pense que je m’attarde quelque peu et que je

commence à persécuter légèrement (pardonnez-moi l’expres­

sion) ceux qui veulent entrer directement dans le sujet. Dans les clubs de rencontres, comme dans la plupart des

commerces, l’on décèle deux catégories bien distinctes: ceux dits du haut du pavé et, indubitablement, ceux du bas du

fossé. La différence est que la première catégorie se remarque d’abord par les aménagements plus feutrés, plus propres et

plus luxueux par rapport à la seconde, mais aussi, et surtout, par la manière dont est tenu le club et par la sélection scrupu­

leuse de la clientèle.

N’ayant essentiellement fréquenté que les maisons de la

première catégorie, c’est tout naturellement de celles-là que je vous entretiendrai.

Il y a des clubs exclusivement conçus pour les grandes

partouzes, c’est-à-dire la grande mêlée, un peu comme au rugby. C’est, disons, 1 abattoir, car l’on ne sait plus très bien avec qui l’on est. Cela existe, j’en ai déjà vu, mais ce n’est pas

mon dada. 75

Ensuite viennent les clubs plutôt fréquentés par des

échangistes. Ils me conviennent mieux car je suis, en effet, plutôt de la catégorie des gens discrets (du moins en la matière), qui aiment faire l’amour avec une femme, voire avec

deux. Mais pas sur un comptoir, sous les projecteurs ou dans

une arène de toréadors. Dans cette catégorie de clubs, l’on pouvait, selon son choix, choisir un coin discret pour deux,

pour quatre ou même pour une dizaine de participants, sans être importuné par des indésirables. Ces endroits étaient net­

tement séparés du bar où ceux qui n’avaient envie que de

boire un drink pouvaient se prélasser à l’aise. C’est aussi pres­ que toujours au bar que se font les premières rencontres.

Personnellement, je préférais ces clubs ou la clientèle est

sévèrement sélectionnée, choisie, non sur sa position sociale, mais principalement sur la bonne éducation et la bonne tenue des membres qui exigent le respect d’eux-mêmes et des autres.

Dans un club bien tenu, il ne peut y avoir aucune contrainte pour les clients, chacun doit se sentir entièrement

libre. Je peux même dire, sans me tromper, qu’une femme se

sentira probablement plus en sécurité dans ce genre de clubs que dans la majorité des dancings, où elle risque non seule­

ment de se faire rudement draguer, mais encore d’être harce­ lée dans le cas où elle refuserait, et finalement de se faire encore insulter à la sortie. Dans ces clubs, il est précisé, et bien convenu, qu’un simple refus ne peut être remis en cause, sous

quelque prétexte que ce soit. Il n’est dès lors pas conseillé aux étourdis d’insister lorsque la dame résiste à leurs charmes.

Enfin, il faut également spécifier que dans ces clubs, dont l’in­ troduction n’est possible que par un ancien qui répond de

vous, les serveuses ne sont là que pour servir des boissons. Il 76

n’est pas question d’y trouver des prostituées qui tapinent

sournoisement, comme cela se pratique dans certains établis­

sements. Il s’agit alors de bordels déguisés, ce qui est contra­ dictoire avec l’objectif de l’institution.

Les différentes catégories Il faut savoir que les échangistes, les sadomasochistes, les homosexuels, les exhibitionnistes et voyeurs ou les pédophiles sont des catégories de genres bien distinctes qui ne se mélan­ gent pas. Leurs objectifs sont radicalement opposés. Ils ne peuvent donc s’accepter dans une même enceinte vu la diver­

gence de leurs fantasmes. Mais de plus, ils ne s’approuvent pas les uns les autres. Ainsi, par exemple, les échangistes appellent

les mélangistes des «touche pipi».

Quelles sont ces différentes catégories? échangistes:

Hommes et femmes qui s’échangent leur par­

tenaire pour faire l’amour avec caresses et pénétration des par­ ties sexuelles protégées (préservatif) ou non. mélangistes:

Hommes et femmes qui échangent des cares­

ses très poussées mais sans pénétration hors couple. Qui ter­ minent en général par faire l’amour, en couple, côte à côte. sadomasochistes

(sadomaso): personnes qui aiment et pra­

tiquent les violences sexuelles qui peuvent aller du soft (fessée légère, fouettement) au violent (blessures au cutter, mutilation, 77

etc..) en passant par les enfermements en cage, enchaînement,

fouettements violents, etc... Il y a ceux qui donnent (sado),

ceux qui reçoivent (maso) et ceux qui aiment les deux (sado-

maso). Les sadomasochistes fréquentent des clubs très fermés où il faut montrer patte blanche pour y entrer. les homosexuels

(homo): Hommes et femmes qui font

l’amour avec des personnes du même sexe. Il faut aussi noter une sous catégorie que l’on appelle les

bisexuels (bi). Ce sont des hommes ou des femmes qui prati­ quent l’amour avec les deux sexes. Aujourd’hui on peut

constater que 80 % des femmes sont bi, elles aiment faire l’amour avec une femme et souvent devant leur mari puis être prise par l’homme à qui, le plus souvent, elles donneront leur

partenaire. Il y a beaucoup moins d’hommes bi (environ 10 %) mais l’on en rencontre également.

Dans les bi, il y a les actifs (qui donnent) et les passifs (qui reçoivent). Dans les clubs à partouze de nombreuses fem­ mes commencent par être bi passives avant de devenir actives.

En général les femmes connaissent mieux que les hommes les caresses exceptionnelles. LES EXHIBITIONNISTES (EXHIB) ET LES VOYEURS: Cette

catégorie est plus vaste qu’on ne peut l’imaginer. Il s’agit donc d’hommes et de femmes qui aime se montrer ou regarder

d’autres dans leur relation sexuelle mais sans être touchés par d’autres. Il faut cependant remarquer que dans les autres caté­

gories (échangistes et surtout mélangistes) il y a aussi des exhib ou voyeurs. Toutefois les exhib ou voyeurs non-échan­

gistes sont très vite écartés. 78

Ces trois catégories, échangistes, mélangistes, exhib et voyeurs

sont aujourd’hui repris plus largement sous le nom de

«coquins». les pédophiles:

Hommes ou femmes qui veulent avoir des

rapports sexuels avec des enfants. Il y a également plusieurs

catégories du soft (se contentant de caresses sexuelles) au hard (allant jusqu’aux violences). Cette catégorie n’est acceptée ni

tolérée par aucune autre. A ma connaissance, il n’existe pas de club de pédophiles.

«Pédé» est l’abréviation de pédéraste qui qualifie, en fait, l’homme qui entretient des relations sexuelles avec un jeune garçon (on ne parle pas ici de mineur d’âge). Il ne s’agit donc pas de l’abréviation de pédophile qui désigne l’homme, ou la

femme, qui est sexuellement attiré par les enfants parfois très

jeunes. Malheureusement, avec le temps, l’usage du terme «pédé» est devenu courant pour désigner les homosexuels

masculins. On devrait donc bannir cette expression de notre

langage et dire homosexuel ou, plus simplement, homo ou

gay: l’affaire Dutroux et ses dérives ont montré, à suffisance, les confusions qu’il y avait dans le grand public entre ces trois

formes de sexualité comme l’on appris, à leurs dépends, quel­ ques hommes politiques.

Les phantasmes et les tabous Il va de soi que nous avons tous des fantasmes. Celui (ou celle) qui me dirait qu’il n’en a pas serait un menteur.

Quant aux tabous, qu’est-ce qui est tabou ou non? La

réponse est très simple, si de nombreuses personnes veulent la 79

même chose ce ne sera plus tabou, sinon ce l’est. C’est aussi

clair que cela. Un exemple: il y a cinquante ans les femmes à la plage avaient des maillots entiers, pas encore de deux piè­

ces. Le bikini était tabou. Aujourd’hui les femmes sont seins nus et c’est accepté. Il en va de même dans la sexualité.

Je commencerai par parler du sexe masculin, autrement dit le pénis.

C’est un organe qui obsède les hommes. Les femmes, elles, s’y intéressent certes mais pas de la même manière. Pour elles ce

n’est pas vraiment la taille qui importe du moment qu’il fonc­ tionne bien. Le pénis a d’autres choses à dévoiler que sa taille.

L’histoire du pénis à travers les siècles regorge de détails croustillants. Le plus ancien phallus retrouvé est vieux de 100 millions d’années. Dans la Rome antique, les jeunes hommes

portaient autour du cou une chaîne avec un pendentif en forme de pénis qui était sensé les protéger. Au début de l’ère

chrétienne, les hommes devaient prêter serment non pas en

posant la main sur la bible mais en la posant sur leurs testicu­ les. C’est de là que vient l’expression «to testify» en anglais, de

même que «testimonial» en français. Enfin, pour les curieuses la taille moyenne du pénis au

repos va de 4 à 10 cm. Et ne présage en rien de la taille et de la capacité lors de l’érection. En érection le pénis atteint une

moyenne de 15 cm. Mais ça peut aller de 8 à 30 cm. Il est prouvé qu’un homme qui a un pénis de quelques

centimètres moindre qu’un autre peut faire jouir autant une femme. Le tout est dans la façon d’agir, mais surtout dans la

préparation de l’acte. Le vagin de la femme s’adapte naturelle­ ment à la taille du pénis de l’homme.

Le plus grand phantasme de la majorité des hommes est

de faire l’amour avec deux femmes dans le même lit. Cela n’est 80

pas nouveau, mais les langues se délient avec la libération des mœurs. Cette pratique était déjà courante dans les maisons

closes que fréquentaient nos aïeux.

Un grand phantasme masculin est aussi la sodomie de la femme. Il faut dire que lorsque cette pratique est bien menée,

beaucoup de femmes y trouvent réellement du plaisir. Il faut aussi noter la fellation, de plus en plus pratiquée à

la demande des hommes, dont une grande partie rêve d’éjacu­

ler dans la bouche de leur partenaire ou sur le visage. Le dernier phantasme en date est celui d’aimer les femmes

dont le sexe est entièrement rasé. Certains iront même jusqu’à préférer les femmes rasées avec de tout petits seins. Pour ma

part, j’ai des doutes quant aux idées de ces apollons qui, pour

moi, cherchent des femmes qui ressemblent à des très jeunes

filles. Je ne comprends pas très bien mais il est vrai que j’ai tou­

jours préféré les femmes qui ressemblent à de vraies femmes.

La clientèle J’ai souvent été très étonné d’entendre certaines personnes

parler des clubs quelles ne connaissent manifestement pas. Il est bien évident que la clientèle fréquentant ces clubs est très variée et que chaque personne qui fréquente ces endroits n’a pas nécessairement les mêmes objectifs ni les

mêmes aspirations.

Pour mieux comprendre prenons un exemple: les specta­ teurs d’un match de football. Certains y vont pour l’ambiance générale, d’autres y vont par

habitude, d’autres dans le seul but de voir marquer des goals,

d’autres pour faire du chahut, etc... 81

Il en est de même chez les personnes qui fréquentent les clubs, mais il faut être clair, tous les gens qui fréquentent ces

endroits n’ont pas un pénis à la place du cerveau. Non, la majorité sont des gens normaux, comme vous et moi, et qui y

viennent seulement pour y passer un bon moment sans obli­ gation de lendemain. Comme précisé plus haut, certains clubs trillent leur

clientèle sur le volet et c’est pour cela qu’on retrouve dans ces clubs des personnalités qui ne désirent pas s’amuser avec n’im­

porte qui. Lors de l’enquête du procès Dutroux, cela sera démon­ tré. Ainsi, dans le dossier d’instruction, on peut lire certains témoignages, couchés sur procès-verbal, qui vont dans ce sens. Je prendrais un exemple parmi d’autres, celle du 18 mars

1997 de madame Dolorès Bara, compagne de Michel Forgeot

et gérante du club des Atrébates (145 rue des Atrébates à 1040 Etterbeek). Cette déclaration photographiée dans le dossier est

reproduite ici:

82

PRO JUSTITIA Cejourd’hui

dix huit mars

mil neuf cent

nonante sept

Nous soussignés

à 10.00 heures ;

CLIPPE Michel, MDL KHALIFA Abdelhamid, MDL

sous-officier de gendarmerie en résidence à BSR de BRUXELLES - Antenne NEUFCHATEAU en habits civils ;

portons à la connaissance de Monsieur LANGLOIS. Juge d’instruction de et à NEUFCHATEAU, que dans le cadre de son dossier 86/96, nous procédons à l’audition de la nommée BARA Dolorès aux fins d’identification des personnes figurant sur les thermocopies extraites d'une cassette vidéo saisie au domicile du nommé NIHOUL Michel Ces thermocopies ont fait l’objet des PV 100.363/96 et 100.365/96 émanant de l’Antenne NEUFCHATEAU à CHARLEROI.

AUDITION

L’audition de la nommée BARA Dolorès fait l’objet de l’annexe 01 Parmi nos clients, je me souviens des personnes suivantes : - Bernard DEVISSCHER, ancien Juge de Paix d’ETTERBEEK, il participait aux partouzes et était un habitué ; - GODDERIS Aurel, Officier de Gendarmerie, participait également aux partouzes ; - MERCKX Eddy, participait, aux partouzes et venait de temps en temps avec des amis ; - ALEXANDRE, gendarme, je ne pense pas qu’il participait mais il aimait regarder ; - DUCHATEAU, gendarme, il venait boire un verre et jetait un coup d’œil ; - Le chanteur CARLOS, participait aux patouzes et venait chaque fois qu’il venait en Belgique ; - BLONDIN Daniel, un noir, il est avocat ; il participait aux partouzes et venait de temps en temps ; - REMACLE Jacques, avocat, participait aux partouzes et venait de temps en temps ; - NIHOUL Michel, participait aux partouzes et venait régulièrement. C’est là qu’il a rencontré Marleen DECOKERE ; - Le mari de Madame CUDELL, Juge d’instruction, il venait souvent aussi.

83

Pour ma part, j’étais très irrité lors des interrogatoires relatifs aux clubs, surtout par l’attitude du sieur Raymond Drisket

qui passera seize journées à m’interroger sur ces endroits. Il s’exténuera à vouloir me faire dire que les clients étaient des anormaux et que lors des soirées l’on y trouvait des mineurs

d’âge, de la drogue, des prostituées et que cela se terminait par du chantage sur des hommes politiques, sur des personnalités

ou sur ceux qui détiennent le pouvoir. Marc Verwilgen réagira de la même façon et l’écrira en

long et en large dans le rapport de la commission d’enquête approuvée et signée par les quinze éminences grises qui for­ maient cette belle assemblée. Belle hypocrisie, et surtout belle preuve de lâcheté de la

part de ces gens.

Ni l’un ni l’autre, ni aucun magistrat instructeurs tels que Bourlet ou Connerotte n’ignoraient, par exemple, qu’un

des membres fondateurs du club des Atrébates était le minis­

tre Serge Kubla, que j’ai souvent rencontré tant au club qu’en

partouze privée. Alors, pourquoi n’ont-ils pas voulu tout sim­ plement demander à Serge s’il y avait des mineures, de la dro­ gue ou s’il avait fait l’objet d’un chantage quelconque de ma

part, voire de quelqu’un d’autre? Pourquoi n’ont-ils pas posé

les mêmes questions à cet autre ministre, aujourd’hui décédé

et, dont les voitures officielles attendaient les membres du

Cabinet en double file? Et pourquoi, non plus, n’ont-ils pas interrogé les différentes célébrités ou personnalités politiques

qui fréquentaient ce club. Non, c’était trop simple, trop logi­

que mais la manière dont l’enquête a été menée par Bourlet et Connerotte à mon sujet n’a rien de logique. Alors ils ont pré­

féré m’accuser sans preuves et faire courir des rumeurs à mon sujet auprès de certains journalistes, qui, avides de potins et 84

de clabauderies des bas étages, n’attendaient que cela pour

noircir leurs journaux de ragots non fondés.

Les clubs de ce genre, qui aujourd’hui poussent comme des champignons, ne sont pas des lieux de décadence comme cer­ tains voudraient le faire croire. Bien sûr, il y en a de très mal tenus,

mais ces endroits ne sont pas frayés uniquement par des fêlés qui ne pensent qu’à forniquer, comme ont essayé de le faire croire des

Marc Verwilgen, Michel Bouder, Jean Marc Connerotte, Régina

Louf, Raymond Drisket, Vincent Decroly, Michel Bouffîoux,

Marie-Jeanne Van Heeswyck, Douglas De Coninck, Paul Ger­ main, Gino Russo... Pour ne citer qu’eux car il y en a des dizai­ nes d’autres, qui préfèrent s’ériger en donneurs de leçons, et pour certains d’entres eux, mieux cacher leur double, voire leur triple

vie sexuelle, qu’ils essaient de faire passer comme exemplaire. Il est tout à fait évident qu’un couple uni, qui n’a aucune

aventure est un couple modèle comme chacun de nous rêve d’avoir au début de sa vie, mais est-il heureux pour autant?

Aujourd’hui, à l’automne de ma vie, je puis vous dire que per­

sonnellement, alors que je connais intimement des dizaines de couples, je n’en connais aucun, je dis bien «AUCUN» qui n’ait jamais eu de problème de sexualité ou de «coup de canif dans le

contrat». Mais le principal est que cela s’arrange, car on ne détruit pas une vie commune pour une nuit ou un moment de folie. Aujourd’hui, après une vie sexuelle très bien remplie, je

peux vous affirmer une chose, c’est que le sexe n’a rien à voir

avec l’amour. Non, l’amour c’est tout autre chose, c’est telle­ ment beau qu’on ne peut le comparer avec une chose aussi matérialiste que le sexe. Mais ça, à 20 ans, je n’aurai pas pu le

comprendre. Comme disait Jean Gabin dans son unique chan­

son qui s’intitulait «Je sais», «Le jour ou quelqu'un vous aime, il

fait très beau» et bien oui, ce jour là, croyez-moi, il fait très beau. 85

15. Faulx-les-Tombes

A relire la presse de l’époque c’est un sujet brûlant qui a fait cou­

ler beaucoup d’encre et de salive. Mais qu’en est-il exactement? Le château de Faulx-les-Tombes avait été racheté par la commune d’Etterbeek (entité de Bruxelles) à monsieur Col­ lin, entrepreneur général, qui l’avait complètement retapé.

Situé dans un cadre relaxant, le château comporte deux grands bâtiments principaux, deux tours et 35 chambres équi­

pées de toutes les commodités. La chambre dite de «nuit de noce», située dans une des deux tours, est entourée d’un cou­

loir qui possède des ouvertures permettant d’y voir à l’inté­ rieur. Il paraît que ces ouvertures étaient destinées aux témoins privilégiés du mariage. Elles leur permettaient de

vérifier si la jeune femme que le Seigneur des lieux honorait était bien vierge. Pour ma part, je pense que s’il s’agissait d’une

seule fois dans la vie du Seigneur, on n’aurait pas fait telle­ ment d’investissements en bâtiment. Il est vrai qu’à une cer­

taine époque le Seigneur avait autorité à dépuceler toutes les

jeunes filles de ses serfs. Un bâtiment annexe qui abritait les anciennes écuries et servi­

tudes sera transformé dans le but d’y accueillir des classes ver­ tes de la commune.

Les espaces verts représentent dix-neuf hectares de terrains et de bois comprenant un manège à chevaux et, à l’époque, le 86

tout avait, donc, été acquis par la commune pour une somme

très intéressante. Cela pouvait être une excellente affaire. Le but continu du bourgmestre Léon Defosset, décédé

depuis, était de faire profiter les habitants de sa commune des

séjours dans ce domaine à des prix accessibles aux personnes les plus défavorisées. Léon Defosset, homme de gauche, avo­

cat de profession, ancien ministre, député et bourgmestre

durant de nombreuses années n’avait, à mon avis, qu’un grand souci: celui de rendre ses habitants heureux du mieux qu’il pouvait. C’était un homme qui aimait discuter avec ses admi­

nistrés, il passait des heures à essayer d’arranger leurs problè­ mes. J’ai eu l’occasion de le rencontrer souvent et même de

passer un week-end avec lui et sa charmante femme, ce qui

m’a permis de découvrir un homme qui se voulait simple et intègre. Mais, comme toujours, notre brave Léon n’avait pas

que des amis et était entouré de profiteurs.

Pour en revenir au château, la commune d’Etterbeek envoyait son personnel pour entretenir tant les bâtiments que

le parc, ce qui est normal vu que le but premier était de faire

profiter les habitants d’Etterbeek de ce coin fabuleux. Le château était géré par Michel Timmermans, frère de l’échevin des sports à Etterbeek.

J’ai connu le château en y assurant une émission de radio en direct et, à cette occasion, j’ai passé deux merveilleuses

journées qui m’ont permis de découvrir toute la beauté et la richesse du tourisme Namurois.

Léon Defosset vint nous rejoindre en week-end et, lors des conversations que nous avons eues, j’ai pu remarquer son

inquiétude sur la gestion du château qui commençait à embar­ rasser la commune.

87

Mon amie Marleen, gestionnaire en Horeca, fut chargée

de faire discrètement un rapport sur cette gestion. Le bilan était lourd: le gérant, Michel Timmermans, qui

était en quelque sorte «Dieu le Père», exigeait d’avoir un droit de cuissage sur le personnel féminin du château. Il allait jusqu’à

faire prendre des photos troublantes des serveuses lors de ses ébats avec elles ce qui lui permettait de les tenir par chantage.

Dans une de ses soirées de beuveries habituelles, il nous

expliqua que la comptabilité était très simple: il suffisait, par exemple en boissons, de prendre les factures d’entrées, de les multiplier par deux pour connaître le chiffre d’affaire (mais bien sûr il y avait les achats en noir).

Un jour, je vis arriver le comptable de la commune qui

venait passer deux jours pour vérifier les comptes. Ces deux jours, on les a passé en sorties débiles et Michel Timmermans,

après l’avoir copieusement reçu, lui a glissé une jolie fille dans les bras. Il va sans dire que les comptes étaient justes! Mais tout cela était bien calculé, si le château ne faisait pas de bénéfice, il ne faisait pas de grosses pertes, tout le

monde croyait s’en sortir.

Les soirées d'orgies... Lors de l’éclatement de l’affaire Dutroux, la presse, et particu­ lièrement le quotidien «La Dernière Heure» a déclaré que j’avais organisé des soirées «d’orgies» au château de Faulx-les-Tombes.

Que s’est-il réellement passé?

Tout d’abord, il faut être très clair, même si j’y ai participé, je n’ai jamais organisé de soirée de partouze ni d’orgie nulle part.

Un peu d’histoire... 88

Michel Forgeot et Dolorès Bara sont les patrons du club

d’échangistes «Les Atrébates». Ce club vient d’être fermé par

les autorités car à l’époque (et cela à changé aujourd’hui) ce genre de club était toléré mais pas admis. Michel Forgeot orga­ nisera alors une série de week-ends pour ses clients deman­

deurs et choisira des endroits insolites tant en Belgique qu’en

France. Ces week-ends se déroulaient uniquement avec des adultes consentants. Michel Forgeot connaît Didier Genart,

beau-fils et chef de Cabinet du bourgmestre Defosset. Didier Genart connaît le château de Faulx-les- Tombes, vu que c’est

lui, en sa qualité de président de la radio «Radio Activité», qui

organisera les émissions en direct du château dont j’ai déjà

parlé. C’est donc par le canal de Didier Genart que Michel

Forgeot louera le château pour un week-end de folie. C’est également par le truchement de Genart que des cars scolaires de la commune seront affrétés pour ramener des

clients de Bruxelles et que des gardiens avec des chiens garde­ ront le parc entourant le château. Belle organisation.

Une centaine de personnes assisteront à la soirée et le groupe Two mens’ sound, animé par Philippe Lafontaine et

Pipo, sera engagé pour animer la partie musicale. Toutes les chambres seront démunies de leur clef et, dans

l’immense grenier, des dizaines de matelas seront placés judi­ cieusement sur le sol pour qu’une grande partouze y soit or­

ganisée. Il n’y avait aucun mineur, toutes les personnes présentes

connaissaient parfaitement le but de la soirée. Ce fut le délire, on a même pu y admirer l’échevin des sports, frère du gérant, courir, toute la soirée, totalement nu et en érection, cherchant

une partenaire consentante, on est sportif ou pas!

C’était mémorable, soirée de folies et grande mêlée de 89

partouze. Pour ma part ce n’est pas mon dada, je préfère un

peu de discrétion. Le lendemain matin, on comptait les survivants. Ainsi je

me souviens d’avoir retrouvé notre ami Dan «directeur dune

société d'électroménager», endormi dans le couloir la tête sur sa

valise car il n’a jamais retrouvé sa chambre. Je me rappelle

aussi de Bernard, magistrat à Bruxelles, qui s’était endormi

presque nu et dont le fauteuil avec son locataire avait été hissé sur une table pour pouvoir faire le ménage.

Bref, en un mot comme en cent, c’était la grosse partouze accompagnée d’une solide beuverie.

Une deuxième soirée sera organisée au château quelques mois plus tard mais je n’y assisterais pas. Il faut donc constater que c’est de la méchanceté pure de

la part de certains journalistes d’avoir relaté qu’il s’agissait de mon organisation. Michel Forgeot, qui ne faisait que cela,

avait une liste d’adresse bien remplie d’intéressés et était bril­ lamment organisé pour ce faire. Cette liste d’adresse sera d’ail­

leurs remise aux enquêteurs et figure au dossier d’instruction. Il faut également être très clair et savoir que lors de toute

soirée ou week-end organisés par Forgeot, il n’y avait que des personnes majeures et consentantes, qu’il n’y a jamais eu de prostituées qui tapinait le client, qu’il n’y a jamais eu de dro­

gue et je n’ai jamais entendu parler de chantage. Toutes ces

élucubrations débiles et sans fondement sortiront tout droit de la tête du Juge Connerotte, du Procureur Bourlet et du

ministre Marc Verwilgen. Et tout cela sera repris en cœur par

les médias avides de sensationnel. Il faut préciser que le bourgmestre Defosset n’était pas au

courant du véritable but de ces deux soirées et, tout comme Didier Genart n’y a jamais assisté. En effet, il n’était pas 90

chargé en permanence des vérifications des comptes du châ­

teau comme ce membre socialiste du conseil communal, {du même parti que ïéchevin des sports Timmermans). Je veux par­ ler de Serge Moureau qui lui était parfaitement au courant et

connaissait les activités lucratives de Michel Forgeot, même

s’il ne fréquentait pas ce club, eu égard à son homosexualité. C’est ce même Serge Moureau qui (par hasard) fera partie de

la commission Dutroux-Nihoul & Co aux côtés de Marc Ver-

wilgen. (pendant cette commission Moureau fut surpris à dra­ guer un mineur place Fontainas à Bruxelles... ce qui explique

son retrait précipité de la politique! )

Comme le monde est petit! Le château a été revendu à des Japonais pour 19 millions

de francs belges, (un peu moins de 500.000 €) avec de nom­ breuses pertes si l’on pense que c’est ce qu’avait payé la com­ mune uniquement pour construire le restaurant.

Je ne crois pas qu’il y ait encore des soirées semblables au château. Mais aujourd’hui l’on doit constater que les deman­

dent pullulent et que les clubs d’échangismes poussent comme

des champignons surtout dans la partie flamande du pays.

91

16. La Commission Dutroux, Nihoul et consorts

En octobre 1996, la panique s’installe dans le gouvernement Dehaene. Suite à l’éclatement de l’affaire Dutroux, mais sur­ tout suite aux agissements, pour le moins critiquables, de la

gendarmerie nationale. Les politiques tremblent et réclament

à corps et à cris une commission parlementaire sur l’affaire dans le but de calmer les fougues d’une population en délire.

Une commission parlementaire sur une enquête judi­ ciaire n’est jamais, et c’est normal, constituée avant la fin de

cette enquête. Toutefois dans ce cas ci, les politiques nomme­ ront une commission d’enquête avant que l’enquête ne soit

terminée. C’est du n’importe quoi!!! Surréaliste? Peut-être, mais on est en Belgique où tout

semble possible... La commission d’enquête sur l’affaire «Dutroux, Nihoul

et consorts» est donc créée et il faut, tout naturellement, nom­

mer des commissaires choisis parmi les députés. Je vous passe les comédies et le jeu politico-politicien qui se sont déroulés pour nommer non seulement les commissai­ res, mais surtout le président de cette commission.

La place est postulée par le M.R. qui préconise Didier Reynders. Les socialistes, dont particulièrement un certain

Patrick Moriau {qui ne supporte pas Reynders) s’opposent à 92

cette nomination. Ils iront jusqu’à prétexter que Reynders possède des liens trop étroits avec la magistrature. {La sœur de Reynders est, à l’époque, juge d’instruction à Liège).

Dès lors ne pouvait-on également se poser la question de savoir s’il n’était pas inconvenant que deux commissaires

soient membres du comité «Julie et Mélissa», deux des victi­ mes de Dutroux?

Après moult remous habituels lorsqu’il s’agit de collabo­ rer entre les différents partis politiques, la commission sera

mise sur pied et se composera comme suit: Verwilghen Marc, président

VLD

Annemans Gerolf

Vlaams Blok

Decroly Vincent

Ecolo

De t’Serclaes Nathalie

P.S.C.

Dewael Patrick

V.L.D.

Eerdekens Claude

P.S.

Herzet Jacqueline

M.R.

Landuyt Renaat

S.P.

Maingain Olivier

M.R.-ED.F.

Moriau Patrick

PS.

Moureaux Serge

P.S.

Pieters Trees

C.V.P.

Vandenbossche Dany

S.P.

Vandeurzen J

C.V.P.

Van Parys Tony

C.V.P.

Bourgeois Geert {sans voix délibérative) VU.

Les audiences de la commission sont diffusées en direct sur les antennes de la télévision belge, ce qui encourage les seize vedet­ tes susnommées à transformer ce prétoire en cirque populaire. 93

Le premier fut Marc Verwilghen qui, opportuniste, com­

prit très vite qu’il pouvait sortir de l’ombre et se faire connaître du grand public. Il emploiera la méthode primaire de tout critiquer et

n’hésitera pas à user et abuser de son pouvoir pour rabaisser,

humilier voire injurier certaines personnes auditionnées. Le

bon peuple adorera, évidemment, voir un gendarme ou même un juge d’instruction se faire engueuler en direct. C’est le rêve

des «petits» qui se réalise. C’est inespéré pour ces gens trop souvent ignorés et, dans ce rôle, Verwilghen se surpasse.

Quelles parties de rigolades pour ce bon peuple qui ne cherche même plus à savoir où est la vérité. C’est comme au cirque, le meilleur moment que personne ne veut rater c’est

quand les clowns ramassent des tartes à la crème en pleine

figure. Et bien, il en est de même aux séances de la commis­ sion, on ne se rappelle pas toujours du fond de l’affaire mais on a tellement aimé quand le gendarme Michaux se faisait ridi­

culiser, quand la Juge Doutrèwe se faisait malmener, quand le

gendarme Lesage montrait son vrai visage et encore et encore... Oui, tout ça on l’a retenu.

Le pire est que Verwilghen et ses quinze acolytes pren­

dront des ailes et s’imagineront que tout leur est permis, ils refu­

sent même de m’entendre et préfèrent donc juger sans vouloir écouter la défense. Le résultat final de cette commission est plus que lamentable. Les conclusions déposées par les seize, qui sont

tous d’accord et qui signent le rapport final, sont remplies non seulement d’erreurs mais d’accusations gratuites et fausses en ce

qui me concerne. Ils s’en moquent, ce n’est pas eux qui devront en répondre devant la justice, mais éventuellement l’Etat belge.

Les nombreuses séances de cette commission permettent

également aux commissaires de venir parader devant les camé­ 94

ras de télévision dont les émissions connaissent une audience énorme. Il faut dire que les journalistes de la RTBF ont tou­

jours une longueur d’avance sur leurs collègues pour poser la bonne question, celle qui tue. Dès que la commission travaille

à huis clos, ils se rendent discrètement dans le camion de

retransmission où ils entendent tout ce qui se dit: les micros des caméras restent systématiquement ouverts dans la salle où

se déroulent les travaux!

Le grand spécialiste du show télé est certainement Claude Eerdekens, recordman des passages devant les camé­

ras, suivi dans la roue par Patrick Moriau et Vincent Decroly.

Ils démontrent à chaque passage qu’ils ne connaissent pas grand chose mais qu’ils sont prêts à tout dire! Ben oui...

Enfin, ça leur rapporte des voix et, finalement, n’est-ce pas le but recherché?

Patrick Moriau, grand donneur de leçons, est rattrapé

par ses affaires financières: il est inculpé pour avoir planqué

l’argent du PS au Luxembourg. Voilà qui l’empêchera de sié­

ger jusqu’à la fin des débats. Très sincèrement, ce ne fut pas une grande perte.

Aujourd’hui, on a découvert que Mo riaux se servira de l’affaire Dutroux pour essayer de réaliser son vieux rêve, à

savoir essayer de faire tomber le Roi alors qu’il a juré, par ser­

ment, fidélité à ce même Roi. Il se montrera très actif, jusqu’à

tromper les médias à l’étranger, pour faire croire que la royauté allait tomber en Belgique et que j’étais l’organisateur

d’une véritable mafia qui était dans tous les coups: Tueries du Brabant - Ballets roses - Trafic d’enfants ... J’en passe et des

meilleures. Il faut croire que ce fumeur de joints impénitent, baba-cool attardé des confins du Pays noir, était tombé amou­ reux d’une certaine Régina Louf. Dans un trip ultime, il n’hé­ 95

sitera d’ailleurs pas à trahir le huis clos de la commission en publiant ses souvenirs d’un commissaire. Mais ce «brave homme» est protégé par son immunité parlementaire. Enfin,

tant que des citoyens mal avisés voteront encore pour lui. La palme d’or du délire revient également, ex-aequo avec

Moriaux, au député du «Vlaams Blok» Gerolf Annemans qui n’hésite pas à trahir le secret des huis clos auprès de la presse,

et qui s’en vante publiquement. Il est vrai qu’il fait partie d’un parti d’extrême droite dont on connaît les élucubrations et les

méthodes. Mais, quoiqu’il en soit, il faudra tout simplement consta­ ter que pratiquement la moitié de ces députés, soit sept sur

seize, inconnus avant l’affaire, deviendront ministres. Comme quoi «il n’y a pas de petites méthodes pour arriver». Retenons de tout cela que Marc Verwilghen, obscur avocat à Termonde, deviendra le plus mauvais ministre de la Justice que la Belgi­

que ait jamais connu.

Après ma libération, j’ai demandé à être confronté

devant les caméras de télévision à ces «grands» donneurs de leçon où tout le moins à au moins un seul d’entre eux. Et bien j’attends toujours le premier combattant car, jusqu’à présent,

ils ont tous refusés. C’est beau le courage! Pour ouvrir leurs

grandes gueules, ils se poussent au portillon mais, lorsqu’il faut répondre de ses actes, on est aux abonnés absents.

96

17. Marc Verwilghen... Ministre de la Justice

Marc Verwilghen est né à Termonde le 21 septembre 1952. Issu d’une famille aisée il a fait des études d’avocat à la V.U.B.

(Vlaamse Universiteit van Brussel). Il pratique comme avocat stagiaire en 1975 et continue

d’exercer cette profession dans le petit fief de Termonde ou son père est surtout connu comme juge de Paix. Ses appari­ tions dans les tribunaux sont surtout pour y défendre des

affaires de divorces. Poussé par les relations de son père, il se lance dans la politique chez les bleus et devient conseiller

municipal député, en 1991. Un député plus discret à l’image de ce personnage fat qu’est Me Verwilghen.

Lors de l’affaire Dutroux, suite à la médiatisation gigan­

tesque et disproportionnée, une commission se met en place en 1996 et tous les partis se battent pour y obtenir les places de choix. Cela provoquera beaucoup de remous entre les par­ tis et ainsi, par un jeu de chaises musicales, Marc Verwilghen,

petit député de l’ombre, se voit confier le poste de président. D’un caractère opportuniste, il comprend vite que c’est le seul moyen pour lui d’être connu du grand public. En effet

avant cela, sauf à Termonde, personne n’a jamais entendu par­ ler de lui. Et il a raison, car s’il veut être connu il doit agir de

la sorte. Et, aujourd’hui, force est d’avouer, sans l’affaire 97

Dutroux, Marc Verwilghen n’aurait jamais été pressenti pour

aucun poste ministériel. Je vais être très honnête, et vous dire que moi aussi j’ai été

pris au piège. En effet lorsque la commission Dutroux a démarré, je l’observais en me disant aussi que cet homme pou­

vait faire de grandes choses, mais au fil du temps et à mesure de l’avancement des séances il fallait se rendre à l’évidence, les

seize comiques nommés à la commission venaient faire d’abord campagne électorale en direct. J’ai ouvert ce débat dans le cha­

pitre de «La commission Dutroux, Nihoul et consorts».

La commission terminée, voilà les élections et le 12 sep­

tembre! 999 Marc Verwilghen est nommé Ministre de la Jus­ tice jusqu’au 11 septembre 2003.

Ce sera une catastrophe. Il démontre qu’il accepte très peu le dialogue et qu’il veut

régner en «Maître absolu». Il le prouve lorsqu’on décembre

1999 - alors qu’au cours d’une conférence de presse je l’avais critiqué sur les antennes des télévisions belges - il menace les

journalistes et profite d’un podium de son parti (V.L.D.) pour hurler devant les mêmes caméras «Comment peut-on donner

la parole à des gens comme ça»! Ahurissant comme réponse, ne pourrait-on penser à une méthode d’extrême droite? Et

bien non «Môssieur Verwilghen», nous sommes dans un pays

qui se veut démocratique et vos méthodes sont inadmissibles, la liberté de parole existe en Belgique et sachez que mon père

s’est battu contre un certain Adolf Hitler en 1940 pour éviter de telles dérives, par conséquent je n’accepterai pas que vous

vouliez rétablir ces méthodes, tout ministre que vous êtes. Suite à cet incident, il exercera son autorité pour me faire

remettre en prison, en abusant de son pouvoir d’injonction

personnelle en sa qualité de ministre de la Justice. Cela malgré 98

l’avis négatif du procureur du Roi et du Procureur général de

Bruxelles.

Je serai libéré après onze jours. La magistrature assise donnera,

par cet acte, une gifle à ce ministre d’opérette. Aujourd’hui

Marc Verwilghen doit, entre autre, répondre de cet acte devant les tribunaux. Il démontre également pendant ces quatre années, toute

son incompétence à diriger un cabinet ministériel et sera

considéré comme le plus mauvais Ministre de la Justice d’après guerre. Lâché par plusieurs collaborateurs qui préfére­ ront démissionner, il devra son seul salut à son premier minis­ tre Guy Verhofstadt qui est du même canton que lui et qui n’a probablement personne sous la main pour le remplacer, à

moins qu’il se soit enfin rendu compte du désastre irréparable et, en calculateur averti, il pense peut-être déjà renvoyer le

cadeau laissé par Verwilghen à l’opposition après les élections. C’est d’ailleurs ce qui arrive.

En 1999 Marc Verwilghen sort un livre intitulé «Paroles

d’homme». Ce «chef d’œuvre» n’est qu’un ramassis de mensonges et de calomnies.

Scandalisé par les propos tenus par Verwilghen dans ce

livre, je voulais, comme la loi m’y autorise, y répondre par une lettre ouverte que j’ai rédigée et fait parvenir tant aux journa­

listes de la presse francophone que néerlandophone. Mais aucun n’eut le courage de la diffuser, confirmant ainsi que la

presse, qui se veut libre, courbe un peu trop facilement l’échine devant les politiques. Même lorsque ces derniers tom­

bent dans le déraisonnable pour le moins nauséabond. Aujourd’hui j’ai assigné ce brillant personnage devant la

justice pour qu’il réponde de ses insultes gratuites et menson­ 99

gères. En effet dans son livre, qu’il présentera très fièrement

devant les médias aux côtés des parents Russo, il conteste notamment une décision de justice qui me blanchissait totale­ ment dans l’enlèvement de la petite Loubna Benaîssa. De plus

les autres accusations portées contre moi et qui seront démon­

tées par la cour d’Assises en m’acquittant dans ce dossier, relè­ vent de la plus grande méchanceté gratuite et n’ont aucun

fondements dignes de ce nom. Et dire que c’est ce même illus­

tre moraliste qui déclarait sur les antennes de RTL-TVI qu’il avait déboulonné un magistrat suite au fait que ce dernier avait «préjugé»... Non je crois rêver...

Au regard de tout cela, et malgré certains conseils très impérieux, j’ai décidé que cette lettre paraîtrait intégralement dans ce livre, dans l’unique but que le public sache que je ne suis pas homme à me laisser intimider par un quidam, même

si celui-ci croit posséder l’exclusivité du pouvoir, ce qui lui

permettrait de faire tout et n’importe quoi! Cette lettre devait être diffusée en avril 1999. Vous la trouverez ci-dessous.

100

Lettre ouverte à monsieur MarcVERWILCHEN

«présumé honnête» De Jean-Michel NIHOUL, «présumé coupable, et condamné

d'avance, par des personnes présumées honnêtes».

Monsieur,

J'écris simplement cette lettre pour le grand honneur de l'avoir

écrite. Je fais mon devoir envers la Belgique qui est mon pays, envers ses habitants qui sont mes concitoyens, et Je doute que

vous fassiez le vôtre, monsieur. Ce que vous avez fait, monsieur, ce que vous avez écrit,

sera plus tard votre honte. Je n'ai pas, monsieur, la naïveté de croire que cette lettre

vous ébranlera, même un instant, car pour cela ilfaudrait être

un hommejuste, un homme digne, un homme honnête, et cela, vous ne l'êtes pas, monsieur.

Je passerai sur le fait que, dans votre ouvrage, vous dites

tout et n'importe quoi, mais je ne passerai pas sur le fait que vous mentez effrontément en parlant de moi, ni, que d'une manière honteuse vous tiriez des conclusions qui ne reposent

que sur des clabauderies de bas étage, car je vous mets au défi de me prouver le contraire par des faits irréfragables et non par

une conviction subjective. De plus, monsieur, vous avez réalisé ce chefd'œuvre avec la complicité de deuxjournalistes de caniveau qui vous servent la soupe à la cuiller, un peu comme si vous aviez vous-même rédigé les questions; Quoiqu'il en soit, vous les cautionnez;

101

Mais examinons votre œuvre capitale accomplie avec telle­

ment d\habilité, pillais dire sans réfléchir, avec intelligence, et dans laquelle vous révélez le contenu de votre tête-à-tête avec notre Roi! Dans laquelle vous trahissez certains huis clos afin de pouvoir prendre appui sur les (prétendues) déclarations du chefd'enquête Raymond DRISKET, qui ne seraient que des

états d'âme n'engageant que lui (vu qu'à ce jour le dossier est toujours vide), pour vous croire autorisé de m'accuser ouverte­ ment de trafiquant: de voitures, de drogues, d'êtres humains et

d'enfants. Tout cela n'existe cependant que dans votre esprit chagrin

et fantasmatique, et ne repose que sur des calomnies ; c'est une

nouvelle fois la preuve de votre acharnement débile et insensé. Puisque vous avez osé, j'oserai aussi, moi.

La vérité, je la dirai, car je me suis juré de la dire, si la justice régulièrement saisie, ne la faisait pas pleine et entière ;

j'attendais pour ce faire, que l'enquête soit terminée, mais vous

en avez décidé autrement, sachantparfaitement que beaucoup

de personnes, tenues par le secret, ne peuvent vous répondre maintenant.

Mon devoir est donc de parler, je ne peux être complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de l'injustice et de la

machination, car voyez-vous, monsieur, je ne suis pas député moi, et je ne peux donc mentir à la Belgique entière, n'étant pas couvert par l'immunitéparlementaire, et quoiqu'il en soit,

je ne peux cautionner le ridicule qui vous couvrira lorsque la vérité sortira très bientôt, suite à l'enquête menée de main de maître par le très grand Monsieur qu'est monsieur le juge LANGLOIS et qui mérite tout notre respect, malgré les

rumeurs que vous faites courir sur lui.

102

Je suis dans iépouvante. Et ce n'estplus la colère, l'indi­ gnation vengeresse, le besoin de crier le crime, d'en demander

le châtiment, au nom de la vérité et de la justice; c'est l'épou­

vante, la terreur sacrée de l'homme qui voit, non seulement ce que vous faites, mais surtout ce que vous voulez réaliser. Je m'étais imaginé avoir vécu le pire de la tragédie que je

vis depuis trois ans. Toutes les péripéties dangereuses me sem­ blaient épuisées, je croyais aller vers un dénouement d'apaise­

ment et de concorde. Après la douloureuse bataille, la victoire

du droit devenait inévitable, la pièce devait se terminer heu­ reusement par le triomphe classique de l'innocent que je suis.

Et voilà que je me suis trompé, une péripétie nouvelle se

déclare, et si elle n'est pas tellement inattendue, elle est la plus

affreuse de toutes, assombrissant encore le drame, le prolon­

geant et le lançant vers une suite ignorée, devant laquelle ma raison se trouble et défaille.

Certes, depuis trois ans, les souffrances ne m'ont pas man­ qué. J'ai entendu les foules hurler à la mort sur mes talons, j'ai vu passer à mes pieds un immonde débordement d'outrages et de menaces, j'ai connu les désespérances des quartiers de haute

sécurité en prison. Il y a eu aussi mes deux procès, des spectacles

lamentables d'iniquité. Mais que sont ces procès à côté de vos actes, monsieur? Des

idylles, des scènes rafraîchissantes, où fleurit l'espoir. J'ai bien

assisté à des monstruosités, mais aujourd'hui, grâce à votre dynamisme, j'assiste au plus extraordinaire ensemble d'atten­

tats contre la vérité et contre la justice. Vous avez donné le plus triste spectacle au monde. Cela dépasse tout, vous aviez déjà déliré à mon propos en commu­ niquant le résultat de la commission, aujourd'hui je déclare

103

qu'à ma connaissance jamais un livre plus scélérat n'aura encore étéfourni à l'Histoire. Il n'y a là-dedans que des aveux de votre bassesse dont

demain la Belgique entière rougira. Ce que vous écrivez à mon sujet ne sont que sottises, cruautés et mensonges que vous étalez avec une impudence telle, que les générations futures en frémi­

ront de honte.

Le pire, monsieur, c'est qu alors que la Belgique s apprête à couronner cettefin de siècle, vous avez sali d'une tache de boue

le nom de notre Roi Albert II, car l'Histoire écrira que cest sous

son règne que la justice belge a fait la plus grosse erreurjudi­ ciaire du siècle.

Des hommes néfastes ont tout mené, ont tout fait, cest

d'abord le juge CONNEROTTE, le procureur BOURLET et vous-même monsieur, vous êtes l'affaire NlHOUL toute entière;

on ne la connaîtra que lorsqu'une enquête loyale aura établi nettement vos actes et vos responsabilités.

Vous apparaissez comme l'esprit le plus fumeux, le plus

compliqué, hanté d'intrigues romanesques, se complaisant aux

moyens de romans feuilletons à bas prix. Etje n'ai pas à tout dire. On a cherché des milliers d'heu­ res durant, et l'on a trouvé le plus grand vide.

Je déclare simplement que vous, Marc Verwilghen, chargé

d'instruire l'enquête sur l'enquête par le biais de la commission, êtes, dans l'ordre des dates et des responsabilités, un des grands

coupables de l'effroyable erreurjudiciaire qui a été commise.

Et pourtant vous connaissez la vérité, vous la connaissez

aussi bien que les deux chevaliers blancs de Neufchâteau, mais vous préférez entretenir les rumeurs, les mensonges, les déla­

tions, les infamies, les bassesses et ce uniquement parce que

104

nous sommes à la veille des élections et que vous briguez un poste important. Funeste erreur, monsieur, car cette vérité, ilfaudra bien quun jour quelqu'un la révèle à tous les belges que vous avez

leurré. Cette vérité, que tous les magistrats et les enquêteurs concernés connaissent, tout comme vous, et que personne n'ose même penser quelle sortira un jour, car il est évident que vous vous êtes tous mis dans une spirale dont vous ne savez toujours

pas comment en sortir.

Ma seule inquiétude est que la lumière ne soit pas faite et tout de suite, car dans ce tournoi qu est ce procès, vous vous êtes fait le champion d'une autre vérité que vous entendiez, dès le départ, faire accepter comme la vérité.

Quelle folie de croire qu'on peut empêcher l'Histoire d'être

écrite! Elle sera écrite, cette Histoire, et il n'est pas une respon­ sabilité, si mince soit-elle, qui ne se paiera.

Et ce sera pour la gloire finale de la Belgique, car je suis

sans crainte au fond, je sais que vous aurez beau attenter à la

santé et à la raison de mon pays, monsieur, il aura toujours des réveils triomphants de vérité et de justice. Ah, quel pauvre type vous faites, quelle nausée, quel

dégoût! Et dire que vous êtes là à vous salir les mains pour gar­ der en prison un homme qui, non seulement est innocent, mais

qui n'a rêvé que d'humanité et d'équité.

Ce qu'il y a d'ignoble encore, monsieur, c'est que vous avez

pris en otage des parents d'enfants assassinés, que vous vous êtes

servi de leur douleur pour leur faire croire que vous seul pou­ viez changer le système; ces parents réaliseront un jour que vous

les avez poignardé et ce jour-là, leur souffrance sera à nouveau mise à l'épreuve.

105

Ce qui est aussi terrible, c'est que vous voulez faire croire

aux belges que tout est pourri, non seulement le système, mais également la justice et tous les hommes politiques,

Non, monsieur, vous vasouillez, vous n'avez de leçon à donner à personne, etje vous remercierai, une fois pour toutes,

de ne plus prendre les belges pour des cons. Non, monsieur, ce n'estpas vous dont les belges ont besoin, ce nestpas un menteur, ce nestpas un démolisseur, mais un constructeur

fai eu, à de nombreuses reprises dans ma vie, l'occasion

d'admirer des gens qui, tout comme vous, se limitaient à démo­ lir et à critiquer le passé, ces gens n'ontjamais eu d'avenir, car

sachez que ceux qui ne parlent que du passé sont des gens dépassés.

Dégagez la piste, monsieur, il n'y a pas de place pour les gens comme vous, même les vrais clowns ont du respect pour le

public,

Jean MichelNIHOUL.

106

Le temps a passé, Verwilghen sortira confortablement des

élections en 2003. Beaucoup de belges n avaient pas encore compris. Il sera nommé par Verhofstadt ministre de la Coo­ pération au Développement où cela n’ira pas mieux. Débou­

lonné au bout d’un an, on le transférera à l’Economie où il a

terminé son mandat, probablement son dernier. Tout cela ne l’a pas empêché de prendre la grosse tête. Il a

quitté son petit fief de Termonde pour se domicilier à Knokke où il a brigué le mayorat qu’il avait «proclamé» enlever au bourgmestre Lippens l’une des grandes cibles de délires porno­

graphiques de Régina Louf. Il s’est cassé la figure aux élections en réalisant un score minable. Knokke n’a pas besoin d’un comique de seconde zone pour la gérer. Avec Verwilghen à sa

tête gageons que cette florissante station balnéaire, gérée depuis plusieurs génération par les Lippens, se transformerait

rapidement en une station blanéaire des bords de la Mer noire! Déchu, Verwilghen n’a plus, aujourd’hui, qu’à écouter la chanson de Charles Aznavour «Je me voyais déjà». Et essayer, enfin, de réfléchir. Si c’est dans ses moyens...

107

18. Le juge Langlois

Le 14 octobre 1996, la Cour de Cassation rend son arrêt qui

dessaisit le juge Connerotte de ses fonctions de Juge d’ins­ truction dans le dossier Dutroux.

La Cour suivra donc le réquisitoire de madame le Procu­

reur Général Liekendael en décidant quelle ne peut admettre que le juge a fait montre de partialité en assistant à un souper spaghettis avec les victimes, souper au cours duquel il recevra un cadeau et s’entretiendra notamment avec Laetitia Delhez

et sa famille. Un Magistrat doit impérativement être indépendant et ne pas, surtout en qualité d’instructeur, faire des apartés avec

une des parties du dossier d’instruction. Le juge Connerotte se devait de respecter la loi et il ne l’a pas fait. Michel Bourlet en a fait de même, mais la loi est mal­

heureusement différente pour les procureurs. C’est donc le juge Jacques Langlois qui sera chargé de

reprendre l’enquête à sa place.

Le grand public n’a pas compris cette décision de la Cour. Cependant il faut se rendre compte que si la Cour avait

accepté cette dérive du juge Connerotte, il n’y avait pas de rai­ son de ne pas en accepter d’autres. Que se serait-il passé, quel­

ques mois, quelques années plus tard, lorsqu’on se serait aperçu que ce juge d’instruction ne travaillait pas correcte­ 108

ment et accumulait, notamment, erreurs de procédure sur

erreurs de procédure? Il est, très sérieusement, à craindre que le dossier Dutroux ne serait jamais arrivé en Cour d’assises tel­ lement les (nombreux) recours en Cassation étaient à crain­ dre. Et avaient une chance d’aboutir. Poussé par une certaine presse et par certains politiques, le public accueillera très froidement l’arrivée du juge Langlois

et certaines parties civiles n’hésiteront pas à essayer, tout au

long de l’enquête, de déstabiliser cet homme qui effectuera pourtant un travail gigantesque et de grande qualité.

Ce sera notamment l’attitude des familles Lejeune et Russo qui, poussées spécialement par le journaliste Michel

Bouffîoux et par leur avocat Victor Hissel feront feu de tout bois pour contester toutes les attitudes de ce magistrat. Gino Russo déclare à travers les articles de Bouffîoux:

« Pour moi la vraie question est de savoir pourquoi Connerotte a été remplacé par un jeune juge d'instruction sans expérience» ou

encore en parlant du Juge « le plus grave cest de ne pas être res­ ponsable moralement, en tant qu'être humain». Il déclare encore

que le magistrat n’a pas effectué les devoirs complémentaires demandés par son avocat, mais reste incapable de les citer. Ce

sera l’éternelle attitude des Russo suivis en partie par Jean Denis Lejeune: critiquer tout sans savoir, critiquer sans vou­

loir comprendre. Ensemble, ils reprochent au juge Langlois d’avoir de­

mandé une quatrième expertise dans le cadre de viols des peti­

tes Julie et Mélissa. Ils n’ont pas compris que ce magistrat pré­

parait un dossier en béton pour la Cour d’assises. Dossier qui ne pourrait être contesté par personne. Mais comme les pre­

mières conclusions arrangeaient les Russo, il fallait s’arrêter là.

109

Gino et Carine Russo agissent toujours de la même

manière. Lorsque les conclusions les arrangent, l’enquête est

menée normalement. Mais lorsqu’elles ne les arrangent pas,

alors le juge est un mauvais magistrat, les enquêteurs des ripoux et les journalistes des désinformateurs! C’est naturelle­ ment un peu facile, mais un bon magistrat ne peut pas uni­

quement donner raison à l’une ou l’autre partie non. Son enquête doit être réalisée à charge et à décharge, en toute objectivité et sans contrainte.

Carinne Russo va plus loin, toujours avec l’appui de ce Bouffioux, elle insulte publiquement le juge Jacques Langlois

en le traitant de «Eichmann»! Elle espérait certainement que

le juge réagisse en portant plainte contre elle, ce qui l’aurait obligé à démissionner du dossier, mais cet homme ne se laisse

pas démonter par ces infamies et poursuit son travail sans détour.

Le public pense en majorité, et à tort, que le juge Lan­ glois n’a pas voulu accomplir tous les devoirs, toutes les

recherches nécessaires à l’affaire, et que l’attitude de Carine Russo est donc légitime. Mais n’y a t’il pas d’autres raisons

aux agissements de ces gens? Des journalistes, et même un enquêteur, me rapporte­ ront qu’à l’époque de l’enlèvement des petites Julie et Mélissa,

le couple Russo battait de l’aile. Il me sera rapporté quelle,

Carine, avait un amant présent à Grâce-Hollogne lors de l’en­

lèvement des deux gamines et lui, Gino, une maîtresse mineure puisqu’elle n’avait que 17 ans, mais majeure sexuelle­

ment vu quelle avait plus de 16 ans et était consentante. Une

ex-maîtresse qui se distinguera, d’ailleurs, quelques années

plus tard par ses démêlés «amoureux», et judiciaires, avec le chanteur Claude Barzotti. 110

Si c’est le cas, on peut s’imaginer qu’en découvrant cette

affaire, le juge Langlois a, pour le moins, dû être embarrassé. S’il avait employé les méthodes de son prédécesseur Conne-

rotte, il aurait vraisemblablement fait éclater l’affaire au grand jour, mais voilà, cet homme très digne, «responsable morale­

ment, en tant qu être humain», a probablement mesuré que les

Russo n’étaient pas coupables même si des reproches, qui ne touchent pas au pénal, peuvent leur être adressés dans le

déroulement de ce drame. Mais un juge d’instruction n’est ni

un curé, ni un conseiller conjugal. Ne pourrait-on, dès lors, se poser la question de savoir si

ce n’est pas «l’élément» qui a principalement déclenché leur

hargne envers ce juge. Quant à Jean-Denis Lejeune, au­

jourd’hui tout le monde peut constater qu’il n’a, lui non plus, de leçon de moralité à donner à personne sur le plan de la vie

privée.

Quant à Gino Russo, qui s’est cru autorisé de déclarer

sur le plateau de la RTBF, à l’émission «Mise au point» du 19 janvier 2003 qu’il ne voulait pas m’adresser la parole, ni

m’avoir en face de lui, car j’étais un partouzeur, et ce, sachant que j’étais dans l’impossibilité de lui répondre, je lui dis

aujourd’hui que moi je préfère avoir été un partouzeur que l’amant d’une mineure d’âge, surtout en étant marié et père

de famille. Alors qu’il se mette bien dans sa petite tête que des gens comme lui me dégoûtent. Malgré ces incidents, c’est très courageusement que le

juge Langlois continue son enquête sans sortir de la légalité, mais en accomplissant un travail des plus scrupuleux. Je considère que ce magistrat a fait admirablement son travail car ses propres sentiments {qui devaient être terribles,

étant lui-même père de petits enfants ) ne l’ont pas fait dévier de 111

sa mission et qu il a toujours enquêté à charge comme à

décharge, et ce malgré les pressions extérieures de tous bords. En un mot comme en cent, il a toujours traité tous les accusés en présumés innocents et non en coupables contrairement à

son prédécesseur. Je pense aussi que tous les soirs en bordant et en embras­

sant ses enfants, le cœur de ce papa devait terriblement souf­ frir, en pensant que ses petits risquaient peut-être un jour de

tomber sur un monstre comme celui sur lequel il était en train d’enquêter. Devant ce cas de conscience, il devait se sentir

vraiment tout seul.

La majorité du public ne se rend pas compte du sérieux avec lequel cet homme a travaillé, des difficultés qu’il a eues tout au long de ces huit années d’enquêtes à clôturer ce dos­

sier malgré le laxisme et l’incompétence du procureur Bourlet qui lui aussi, à l’instar de Connerotte, préjugeait. Bourlet se conduira non pas en allié, mais en véritable ennemi du juge car ce dernier n’était pas prêt à accepter les idées fantasmago­

riques et injustifiées de ce «procureur vedette» et ce comporte­

ment Bourlet le démontrera sans aucune gêne devant la Cour

d’assises. Je ne connaissais pas du tout monsieur le juge Langlois

avant qu’il ne soit nommé dans ce dossier, je n’en avais jamais entendu parler, je n’ai jamais eu aucune réunion avec lui sans être entouré des enquêteurs, je n’ai jamais demandé ni reçu de

régime particulier ou favorable de sa part, et il m’a toujours

considéré et traité comme un prévenu au même titre que

Dutroux, Martin ou Lelièvre. Je me souviens très bien de notre

première rencontre à son Cabinet, où il me déclare d’emblée, «je vous préviens quavec moi il ne faut pas essayer de biaiser\ fexige que vous répondiez à mes questions sans aucun détour». 112

Cette première entrevue m’a également démontré qu’il connaissait le dossier à fond, il me posera des questions aux­ quelles je ne m’attendais pas sur des points de détails incroya­

bles et qui avaient été oubliés par les enquêteurs.

Ce jour là, j’ai découvert en face de moi «un grand» juge

d’instruction. Aujourd’hui, avec le recul qui fait un peu tomber les pas­

sions, on constate que le travail du juge Langlois a été un

labeur exceptionnellement pointilleux, qu’il a passé en revue tout ce qui devait l’être pour arriver, malgré l’acharnement

ridicule de certains protagonistes à le faire échouer dans sa

mission, à conclure cette phénoménale enquête avec brio.

Il a été l’artisan d’un classement exceptionnel qui a per­ mis à toutes les parties de retrouver immédiatement n’importe

quelle pièce des 450.000 pages du dossier, ce qui n’était pas le cas de son prédécesseur, le juge Connerotte, qui se contentait

de classer les documents par ordre d’entrée.

Gino et Carine Russo ne viendront pas suivre les débats à la Cour d’assises, ce qui est incompréhensible et les motifs

qu’ils ont évoqués dans la presse relève de la plus haute fantai­

sie. Ils ont suivi tous les débats de la chambre du Conseil qui

naturellement se déroulaient à huis clos. Mais aux assises cela se passe en public et n’y avait-il pas surtout, dans leur chef, la

peur que l’une des parties puisse faire venir Carine Russo à la

barre des témoins, pour répondre, sous serment, à la question de savoir si c’était elle qui, le jour de l’enlèvement, avait envoyé

les petites jouer dehors pour rester seule avec son amant? Difficile, après cela, d’aller raconter n’importe quoi sur

les plateaux télé! Quoiqu’il en soit, ils étaient libres et ils ont fait leur choix. Mais alors pourquoi critiquer ensuite cette cour d’assises à laquelle ils n’avaient pas participé? 113

En conclusion, si l’on avait gardé la méthode Connerotte, aucun, je dis bien «AUCUN» avocat, magistrat ou membre du

Jury n’aurait pu s’y retrouver, et cela n’aurait pu aboutir qu’à une seule chose, à la diminution de la responsabilité des délin­

quants, voire l’acquittement d’un ou de plusieurs des trois cou­ pables, vu que le doute doit servir à l’accusé.

Monsieur le juge Langlois, qui connaît parfaitement son dossier, est venu durant cinq jours complets rapporter tous les

éléments du dossier. Comme on le lira plus loin, il l’a fait

d’une manière objective, structurée, compréhensive et bril­

lante, et ce malgré les interventions outrageantes, lamenta­ bles, pénibles et de très mauvais goût de certains et notam­ ment des avocats Beauthier et Fermon.

114

19. Informateur codé 52.746

52.746, c’est le numéro de code qui me fut attribué par le ministère de la justice, quelques jours après mon arrestation.

Cela ne démontre-t-il pas qu’une certaine panique s’est instal­ lée car on m’avait couvert dans des opérations d’infiltration?

On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre. De

même, on ne démantèle pas un réseau criminel en question­ nant les gens au coin d’un comptoir de bistrot.

La BSR de Dinant est une toute petite cellule d’enquête ne comprenant que sept personnes qui travaillent dans les locaux de la gendarmerie située en bord de Meuse. C’est avec cette brigade que je serai mis en contact le 17

mai 1995 par monsieur Desmet de la compagnie d’assurances

«Royale Belge» pour laquelle mon cabinet travaille dans le cadre d’enquêtes sur les vols de voitures de luxe. Le premier maréchal des logis Gérard Vanesse deviendra

mon contact permanent.

Suite à cette collaboration, nous avons démantelé un tra­ fic international de voitures dont le cerveau pour la Belgique

était un certain David Walsh, ressortissant anglais, tandis que

le cerveau international est un certain «Eric», ressortissant hol­ landais, qui possède non seulement un restaurant connu mais

également des kilomètres de serres de plantes et de fleurs à

115

Alsmeer près d’Amsterdam où il fait partie des dignitaires locaux, vu l’état de sa fortune. Après le coup porté à cette organisation en Belgique,

j’avais perdu la trace de Walsh au Maroc.

«Eric le Hollandais» ne trafique pas que dans les voitures, il est également un gros trafiquant international de drogue. Il chargera Walsh de livrer une grosse quantité de drogue

en Suède par la route avec une voiture immatriculée en Alle­ magne.

Walsh veut le doubler et vient en Belgique pour y vendre

la drogue à son compte. C’est ainsi qu’il contacte Annie Bouty, mon ex-compagne pour la rencontrer. Il pense qu’en sa qualité d’avocate, elle connaît des per­

sonnes intéressées d’acheter sa marchandise. Annie Bouty, qui sait que je recherche Walsh depuis un an, me prévient de son

arrivée. Avec la bénédiction du gendarme Vanesse, je m’infiltre auprès de Walsh et joue l’intermédiaire pour lui trouver un supposé acheteur. En réalité c’est la gendarmerie qui doit m’en

fournir un.

L’opération fonctionne bien, Walsh me remet 1.500 pilu­ les d’XTC en échantillon, il a également beaucoup de poudre

à vendre. L’opération que je monte se clôture par l’arrestation de Walsh qui ne sait pas quel jeu j’ai joué dans le circuit. Avec Gérard Vanesse il y aura encore deux autres opéra­

tions qui réussiront, la première consiste en une tonne de has­

chich en provenance du Maroc et la seconde en des quantités énormes d’héroïne qui transitent par la Belgique.

Pour y arriver, on organise des opérations intitulées «Undercover», c’est à dire par infiltration dans le milieu. Gérard Vanesse est très heureux des résultats. Lors d’une 116

réunion, il est établi que deux des trois gros fournisseurs de

drogue sur Dinant sont mis hors circuit, il en reste cependant

un, méconnu des services spécialisés, et c’est là que Michel Lelièvre intéresse Vanesse.

J’avais renseigné Lelièvre à Gérard Vanesse tout comme Dutroux. J’avais même spécifié à Gérard que Dutroux voulait

transformer sa maison de Sart- la-Buissière en bordel. Par après j’ai dénoncé les faux papiers et la volonté de Dutroux

d’importer des filles de l’Est.

Gérard Vanesse, inculpé et arrêté, confirme mes dires lors

d’une audition à Neufchâteau. Cela prouve que contraire­ ment à ce que déclare le procureur Bourlet, je n’ai jamais été

le cerveau de ces trafics, bien au contraire j’ai lutté contre eux.

Que le procureur se mette une fois pour toute en tête que si je n’avais pas dénoncé ces trafics, personne aujourd’hui n’en aurait eu connaissance. En effet ce n’est pas Dutroux qui s’en

serait vanté. Mais moi j’en parle à Drisket lors de notre pre­

mière entrevue où je suis entendu comme témoin et non comme prévenu. Je lui faisais confiance, funeste erreur! Audition de Gérard Vanesse du 30 septembre 1996 En ce qui concerne la filière de prostitution dont

NIHOUL m'a parle, je dois vous dire que cela devait question:

Avez-vous transmis ces deux dernières infor­

mations dans des rapports ou des procès verbaux? réponse:

Je n'ai rédigé ni rapport ni procès verbal

car cela était trop vague.

Le gros reproche que je fais aujourd’hui à la BSR de Dinant

est que lorsque je leur ai parlé de Dutroux et surtout de son intention de faire un club de sexe chez lui, ils ne m’ont pas 117

averti que Dutroux était surveillé pour des affaires de mœurs. En effet, mon attitude aurait été totalement différente et j’au­

rai pu en savoir plus sur les intentions de Dutroux, notam­ ment en me montrant intéressé par son idée, et qui sait, peut-

être m’aurait-il proposé des petites filles et là, on aurait certainement pu sauver Julie et Métissa. Mais voilà, la gendar­ merie n’a pas rempli son rôle. Aujourd’hui, on connaît les

conséquences dramatiques de cette attitude. Audition de Gérard Vanesse du 11 septembre 1996

Comment expliquez-vous que vous déteniez

question:

depuis la fin mai 1996des informations capitales dans le cadre du dossier qui nous occupe et que

vous

n'avez

informé

personne,

ni

avant

les

arrestations du 13 août, ni après cette date du 13 août. réponse:

Pour la bonne raison que j'ai eu des problè­

mes disciplinaires qui me tracassaient beaucoup et que cette affaire m'est sortie de la tète.QUESTION:

Etes-vous

conscient

assuré une certaine

que

vous

dés

lors

impunité ou une certaine

protection à ces individus, par votre silence.réponse:

Comme je vous 1

'ai dit,

j'étais tracassé.

Cela m'est sorti de la tête. Je vois mal comment

j'aurai pu assurer une protection a un type que je ne connaissais pas.-

Comme le déclare également Gérard Vanesse, la gendarmerie de Dînant avait tout misé sur le volet drogue, c’était semble-til leur priorité.

118

Audition de Gérard Vanesse du 2 oct.1996 question:

Donc, à ce moment l'affaire de stups était

prioritaire? réponse:

Oui, c'était tout à fait cela. J'en ai parlé

à mes chefs et au juge. J'ai établi un pv dans

le dossier de la Taro précisant que nous tempo­ risions afin d'exploiter cette information.

PV faisait également

suite à une

Ce

information

verbale que j'avais transmise au juge en charge

de 1 'affaire.

Je suis allé avec Michel Lelièvre à la BSR de Dinant où nous

rencontrons Gérard Vanesse et ses collègues. Le but de cette rencontre est de faire parler Lelièvre, de lui faire dire le nom

du dernier fournisseur de drogue, mais Lelièvre ne parle pas

lors de cette entrevue.

Sur le chemin du retour il m’explique qu’il a peur de cet homme et précise que sa vie est en danger et que par consé­

quent, s’il le dénonce, il est certain d’être liquidé.

Gérard me relancera plusieurs fois sur ce sujet, insistant pour que j’arrive à faire parler Lelièvre.

Un jour, vu la persévérance de Dinant, je dis à Gérard «pour moi il ny a quun moyen de le connaître, cest de faire sor­ tir le loup du bois».

Lorsque l’on veut faire sortir le loup du bois, il faut l’af­

famer pour qu’il vienne hors du bois chercher sa nourriture. Lorsque l’on veut qu’un dealer se découvre, il faut faire en sorte de lui couper son commerce, donc pousser son client à

ne plus lui commander pour qu’il entame des représailles, il faut alors surveiller et protéger son client dans l’attente de coincer le dealer lorsqu’il viendra pour le «raisonner». 119

C’est un système vieux comme la police et cela fonctionne très

souvent. Je propose donc à Gérard de fournir Lelièvre et ainsi de couper les ponts à son fournisseur. Audition de Gérard Varies se du 30 septembre 1996 question:

Comment étiez-vous certain de pouvoir ren­

contrer Lelièvre au siège de votre unité? Vous basez-vous uniquement sur la fiabilité de Nihoul? réponse:

Oui, je me suis basé uniquement sur la fiabi­

lité de Nihoul, d'autant plus que les renseigne­ ments qu'il m'avait déjà fourni étaient valables. question:

Votre stratégie selon ce que vous venez de

nous déclarer favorise 1'information en dépit de

toute règle du code pénal et du code d'instruc­ tion criminelle.

Comment pouvez-vous concevoir un tel état d'es­ prit de travail? REPONSE:

Ma

stratégie

ayant

pour

objet

d'amener

Lelièvre dans un certain climat de confiance pour pouvoir tirer le maximum de renseignements au sujet du véhicule et du trafic supposé. C'est ma stratégie.

Lorsque je commence les transactions avec Lelièvre, j’ai des

doutes sur Dutroux et pour savoir si ce n’est pas lui le fournis­ seur, je lui fais la proposition devant Dutroux. Dutroux n’est pas le fournisseur que nous recherchons, mais il veut garder Lelièvre sous sa dépendance et propose de s’occu­

per de l’affaire en dirigeant Lelièvre pour la vente. Ce n’est pas cela qui m’intéresse. Plus tard, je reprends donc contact avec 120

Lelièvre seul, car le but n’est pas de créer un nouveau réseau

mais d’en détruire un ancien. Dutroux propose de me payer la marchandise cash, alors que

Lelièvre ne la paie pas, cela prouve bien que mon objectif n’est pas de vendre pour en tirer un bénéfice mais bien pour péné­

trer le milieu. Mes ennemis diront que j’ai donné de la drogue

à Lelièvre pour payer les enlèvements d’enfants, c’est du plus grand ridicule car les enlèvements c’est Dutroux qui les dirige

et non Lelièvre, donc dans ce cas j’aurai préféré de traiter avec

Dutroux et non avec sa «petite main». Lelièvre marche dans le système immédiatement surtout qu’il ne doit pas payer momentanément les pilules. De plus,

comme il en recevra assez bien il commence à fournir les autres petits marchands de la région et prend ainsi le com­

merce pour lui seul. L’étau se resserre et je pense que l’on va aboutir, mais le 13 août 1996, Lelièvre sera arrêté avec Dutroux et Martin. Je cherche à contacter Gérard Vanesse mais il est malade

et donc intouchable. Je ne panique pas, je me dis que cela peut attendre.

Le 15 août, je me présente à la PJ de Bruxelles pour y être entendu comme témoin dans l’affaire Dutroux, je serai arrêté, non pour la drogue, mais comme le cerveau des enlè­

vements d’enfants. On connaît le résultat! Après plusieurs semaines d’enquête, Drisket qui lors de

notre premier contact n’a pas voulu prendre note de mes décla­ rations sur la drogue revient sur le sujet vu que pour le reste, il pédale dans la farine. Je lui rappellerai qu’il doit contacter

Gérard Vanesse et lui remettrai en mémoire l’affaire Walsh. 121

Drisket, en contradiction avec les techniques et les précautions les plus élémentaires fait savoir à Walsh que c’est moi qui l’ai

fait tomber et, bien sur, obtient de Walsh toutes les déclarations qu’il veut pour me charger. Toutefois, très étonnamment, je ne serai jamais confronté à Walsh pour vérifications. Walsh bénéfi­

ciera d’une conditionnelle et sortira de prison en promettant de se venger. Drisket, quant à lui, me dit qu’il n’en à rien à faire! Aujourd’hui le nom du trafiquant est connu, Lelièvre me

l’a dit et je l’ai répété à Drisket, mais personne ne bouge, peut-

être parce que cela ne ferait que conforter ma thèse... Le ministère de la justice me doit des sommes importantes

qui m’avaient été promises pour les opérations undercover réa­ lisées parfois avec de grands risques, j’ai également avancé des

dizaines de milliers de francs pour effectuer certaines enquêtes à l’étranger, mais lorsque Marc Verwilghen sera nommé ministre

de la justice, il profitera de son pouvoir pour ne pas me verser un cent, sans parler des insultes qu’il aura à mon égard. Cela

s’appelle de la vengeance gratuite et de la malhonnêteté, ce qui m’inspire à dire qu’il ne faut jamais collaborer avec la police ou

la justice, cela n’apporte que des emmerdes. La PJ ou la BSR, qui ont une mémoire sélective,

employaient toujours la même méthode: des opérations d’in­

filtrations étaient menées sans autorisation d’un magistrat, vu qu’habituellement ces derniers n’ont pas le courage de les cou­

vrir. Tant que cela fonctionnait bien, il n’y avait pas de pro­ blème et on récoltait les lauriers, mais lorsqu’il y avait un pépin, tout le monde ouvrait son parapluie. Bizarre, cela me

rappelle une affaire étrange, celle du commandant François, banni lâchement par les siens au début des années 1980! Mais

aujourd’hui cela a-t-il changé?

122

20. Mes procès...

Le grand combat du procureur Paul De Gryse sera de me faire condamner dans des procès qui ressemblent à des règlements

de compte.

Le procès S.O.S.Sahel On commencera avec le procès Nihoul et Associés dans lequel

on ajoutera le volet 8.0.8. Sahel. Mais lorsque ce dossier

Nihoul et Associés, qui dort dans les armoires du parquet depuis des années, arrivera au tribunal, on le baptisera urbi et

orbi dossier 8.0.8. Sahel. Pensez donc, une escroquerie à la charité, même présumée, cela fait plus «dégueulasse» qu’une histoire de commerce avec une petite caisse noire! En plus, à

ce moment, il fallait tirer à boulets rouges sur Nihoul qui commençait réellement à énerver le parquet dans l’affaire Dutroux.

En réalité, le parquet s’intéressera au dossier Nihoul et Asso­

ciés début janvier 1989. L’instruction sera menée par le juge d’instruction Jean Claude Van Espen, du parquet de Bruxel­

les, et dont la sœur Françoise, épouse de mon avocat Philippe Deleuze, est également la marraine de mon fils. 123

N’ayant pas trouvé de quoi fouetter un comptable dans ce

dossier, Jean Claude Van Espen se rejettera sur le volet de l’a.s.b.l. 8.0.8 Sahel dont je suis le président. Il m’accusera de

détournements de la Totalité des recettes de l’association (sans

pourtant jamais oser me rencontrer personnellement!). Il refu­

sera de tenir compte de l’avis de mon avocat, qui n’était autre

que son beau-frère. Il s’accordera avec ce dernier pour déclarer qu’il n’était pas mon avocat dans l’a.s.b.l., malgré des traces de

versements d’honoraires sur le compte de Deleuze. Ce dossier, qui a pourtant fait l’objet d’une enquête des plus poussées n’apportera rien de positif, et était destinée, comme beaucoup de dossiers dans lesquels le parquet a fait

preuve d’initiatives imprudentes, à la prescription. Je suis toujours arrêté dans le cadre de l’affaire Dutroux

depuis le 15 août 1996 et le procès 8.0.8. Sahel débutera le mercredi 23 octobre 1996 au palais de justice de Bruxelles.

Deux cents gendarmes encadrent le palais de justice dans le seul but de me protéger.

En temps normal, il y en aurait eu deux, peut-être quatre s’il

y avait eu des effectifs de réserve, car le procès qui va s’ouvrir est

un simple procès financier, comme il en défile des dizaines par an.

Mais cette fois, on frôlera l’émeute dans les couloirs du

palais. En effet, le public ne voit pas en moi l’auteur des faits qui me sont véritablement reprochés, et qui ne sont pas claire­ ment connus (vu que les journalistes annonceront un détourne­

ment de cent millions alors que ïa.s.b.l. nen a récolté en tout et pour tout que cinq millions (125.000 €) depuis sa création),

non, la population ne vient que pour lorgner celui que la

presse a présenté comme étant l’ennemi public dans l’affaire Dutroux, et surtout comme le cerveau du grand réseau pédo­

phile. Brrr ! Ambiance assurée! 124

Cette affaire date de 1989, et lors de la chambre du

conseil qui a eu lieu en 1992, le parquet avait annoncé que l’affaire serait prescrite en mars 1994. Mais voilà, il faut gar­

der Nihoul en prison, et à Neufchâteau, on commence à avoir

peur car le dossier est toujours aussi vide. Du moins en ce qui

le concerne. Les lois sont donc pour nous mais je devrais constater

que lorsque le parquet s’obstine, il obtient plus facilement rai­ son que l’accusé. Bien sûr vous pouvez aller en appel, puis en

cassation, puis devant la Cour européenne, mais alors 10 ans

après vous êtes toujours en prison, et cela vous coûte une for­ tune. Vous connaissez l’adage « lorsque ïon veut frapper un

chien, on trouve toujours un bâton,!» Le procès aura lieu devant la 49° chambre correction­ nelle et le tribunal est présidé par un jeune magistrat sans

beaucoup d’expérience, il s’agit de Michel De Grève, poussé

dans la magistrature par le ministre Jean Louis Thys, bourg­ mestre de Jette. Avant d’être nommé magistrat, cet avocat était plutôt spécialisé dans la défense des affaires de roulage.

Mes avocats seront placés devant une décision scanda­ leuse, en effet, le dossier comporte 8 cartons et le président ne

leur accordera que deux semaines pour étudier l’affaire.

Mes avocats, que je ne connais que depuis mon arresta­ tion en août, ne connaissent rien à l’affaire. C’est donc une mission impossible. Même un avocat chevronné demanderait

quatre mois pour ce faire, mais voilà, on ne discute pas une

décision de justice même si elle est critiquable. Je comprends immédiatement la tournure de l’affaire, on veut ma peau quoiqu’il arrive.

Je suis malade, j’ai perdu vingt-trois kilos depuis mon

arrestation (fen perdrai 52), je marche difficilement, je souffre 125

beaucoup mais j’ai décidé de me battre et les médecins m’y

aideront en me donnant même de la morphine pour tenir le coup.

J’aurais trente minutes pour examiner le dossier plus que volumineux (merci monsieur le président, vous êtes trop bon ), et

m’apercevoir qu’une partie importante et capitale du dossier a été retirée.

Cette partie concernait 8.0.8. Sahel, mais également un

volet important qui concerne l’avocat Philippe Deleuze. Celui-ci avait trafiqué dans la comptabilité d’un interdit dont

il était le tuteur légal, au moyen d’un faux document, qu’il

m’avait demandé, et que je lui avais fourni.

Je me souviens particulièrement bien de cette affaire qui

éclata en janvier 1989. Lorsqu’il fut entendu par la police judiciaire, Deleuze avouera avoir fait usage d’un faux pour

couvrir son détournement. Le juge d’instruction qui s’occu­ pait de l’affaire, son beau-frère, Jean Claude Van Espen qui,

même s’il gardait un œil sur le dossier, le fit entendre et fit

suivre ce dossier par son collègue Benoit Dejemeppe, de la même tendance politique que Deleuze et lui. «Il faut savoir

que c est Deleuze qui fit nommer Van Espen comme juge d'ins­ truction par Paul Vanden Boeynants».

Deleuze me confiera quelques mois avant de mourir que ce jour-là il expliquera à Dejemeppe que la nomination du prochain procureur du Roi était entre les mains de ses amis politiques. Dejemeppe briguait ce poste auquel il sera nommé

peu de temps après. Il laissera Deleuze sortir libre alors que moi il m’arrêtera.

A la nomination du juge Dejemeppe au poste de procu­

reur de Roi, c’est Jean-Claude Van Espen qui reprit le dossier

à l’instruction. Puis le dossier fut oublié dans les placards du 126

parquet et le serait très probablement resté s’il n’y avait pas eu l’affaire Dutroux et le dynamisme du parquet à vouloir me

poursuivre. Lorsque cette affaire arrivera devant la 49° chambre cor­

rectionnelle, je profiterai des trente minutes qui me seront généreusement accordées pour examiner le dossier et m’aper­

cevoir que tout ce volet Deleuze avait disparu. Le code judiciaire est formel sur ce point: Lorsque des éléments d’un dossier manquent, ayant été retiré ou ayant dis­

parus, il y a un vice de procédure qui entraîne automatique­ ment la nullité de la procédure et qui aboutit automatique­

ment à l’acquittement du prévenu. Nous en ferons donc part au président De Grève au début du procès et je serai même très précis en lui demandant «Mon­

sieur le président, savez vous qu'une partie du dossier manque?» Il

me répondra par l’affirmative. J’ajouterai «Savez-vous que c'est après le passage du dossier chez le juge d'instruction que ces docu­ ments ont disparus?» Oui, dit-il. «Alors, monsieur le président ily a vice de procédure qui doit profiter au prévenu» Oui me répé-

tera-t-il encore mais il fera semblant de rien et n’en tiendra jamais compte! Alors, était-il incompétent ou manipulé?

L’attitude du procureur De Gryse sera exécrable. Il com­ mencera par contester la maladie de ma compagne (atteinte de sclérose en plaques), l’accusera d’avoir fourni un certificat médical de complaisance, se moquera ouvertement d’elle en demandant publiquement des détails sordides sur sa maladie

dans le seul but de la diminuer. Il poursuivra même le méde­ cin devant son tribunal pour faux, mais il perdra la partie. Dans le cadre de 8.0.8. Sahel, l’ignoble personnage

contestera tous les documents présentés par la défense en les

qualifiant de faux. Ainsi il contestera même les notes de télé­ 127

phone, d’électricité, de chauffage, et pour couronner le tout, la facture du Moniteur belge qui ne s’élevait qu’à quelques

centaines de francs. Comment l’a.s.b.l. aurait pu être reprise dans le Moniteur si la facture était fausse? C’est surréaliste. Mes avocats déposeront alors des conclusions pour exi­

ger que la comptabilité soit examinée par un expert compta­

ble judiciaire. Il est en effet impensable de poursuivre

quelqu’un sur le plan financier sans avoir préalablement fait examiner les documents par un expert, «cela n’aurait d’ailleurs

pas pris plus d’une journée» et bien dans ce dossier ce sera pour­ tant le cas, en effet, depuis 7 ans, le parquet n’a jamais fait examiner ces dossiers ( on ne peut pas dire que c’est par manque

de temps} et le président De Grève refusera de nous donner

satisfaction en répondant négativement aux conclusions de mes avocats!

Je crois rêver, je me pince pour me dire que nous som­

mes bien en Belgique et non en Corée du Nord ou en Chine, mais non, je ne rêve pas, et aujourd’hui je me dis que ce juge doit être fier de ses initiatives car il a rapidement été nommé

magistrat à la Cour d’Appel. De Gryse ira plus loin, lorsque je demanderai à pouvoir

examiner les comptes de la curatrice Claire Massart, vu que nous ne les avions jamais reçu, et surtout eu égard au fait

quelle n’aurait trouvé acquéreur que pour 1000 FB (25 €) alors qu’il y avait du matériel pour plusieurs millions. Très énervé par cette question, le procureur De Gryse

déclarera: «Je ne veux plus entendre quiconque critiquer le cura­ teur ou le juge d’instruction sinon, je fais usage du droit que me

donne mes fonctions, et il existe assez d’articles dans le code et assez de gendarmes dans la salle pour arrêter ceux qui voudraient déstabiliser le curateur ou le juge d’instruction». 128

Que c’est beau la démocratie! Et ce ne sera pas fini. Lorsque j’aurai «l’indécence» de

demander si la comptabilité de 8.0.8. Sahel a été examinée, le procureur répondra «Nous avons vérifié toutes les entrées de l'as­ sociation et les chiffres s'avèrent exacts. Quant aux états de sorties,

nous n'avons pu les vérifier car les documents se trouvaient au greffe du tribunal!»

Non, vous ne rêvez pas, relisez cette phrase plusieurs fois, il n’y a pas d’erreur. Le parquet me poursuit pour faux docu­ ments qu’ils n’ont même pas pu examiner après 7 ans!

Mieux encore, lorsque le procureur déclarera que le document signé par le président de Ouagadougou est un faux,

et ce uniquement suite aux déclarations de Robijn, je lui dirais

qu’il lui suffit d’envoyer un fax pour s’assurer de l’authenti­ cité, il me répondra « Non, je ne le fais pas, ce n'est pas à moi de le faire.». Ben voyons! Le procureur De Gryse fera des amalgames avec l’affaire

Dutroux, quant au président De Greve, il éclata de rire lors­ que je lui dis que j’allais bientôt être libéré dans l’affaire

Dutroux! Comment voulez-vous dès lors faire confiance à un président qui préjuge? En conclusion, ce procès d’opérette a été mené d’une manière honteuse pour notre démocratie, honteuse pour notre justice et honteuse pour notre jeunesse à qui ce tribunal aura donné milles raisons de ne plus croire à la justice.

Le jugement tombera le 30 décembre 1996, je serai con­ damné à trois ans de prison ferme avec arrestation immédiate

pour que je ne puisse être libre en faisant appel. Quelques jours plus tard, je serai libéré dans l’affaire Dutroux par la chambre des mises en accusation de Liège. Décidément il y a

beaucoup de hasards dans cette affaire. 129

Sachez que j’ai toutes les copies des comptes de S.O.S.

Sahel que je garde dans un endroit sûr. Non seulement je n’ai

jamais pris un cent, mais au contraire j’y ai mis de l’argent de ma poche. Je n’ai jamais demandé ni reçu d’argent pour mon

poste de président, ce que j’aurai pu faire. J’attends le moment très proche pour les sortir. Car l’affaire S.O.S. Sahel reviendra prochainement

devant les tribunaux bruxellois, mais cette fois, c’est moi qui suis partie civile contre les funestes Georges Frisque, Emile

Robijn et sa femme Jeannine Vandenbranden. Ils sont pour­ suivis pour escroquerie, faux, usage de faux et détournements.

Il faut rappeler que ce sont ceux-là qui me dénonçaient injus­

tement en 1988. Le public pourra donc enfin comprendre,

mais cela m’a coûté 20 ans de haine nationale.

Le procès Asco En 1994, je suis engagé par Jean-Louis Delamotte pour colla­

borer avec la firme Asco dont il est le gérant et dont le siège se

situe à Onnezies dans la région d’Hornu, près de la frontière française.

Mon travail consiste à diriger la société Sodicarro, qui est

établie à Saint-Domingue dans les Caraïbes. Lors de mes retours en Belgique je collaborerai avec Asco qui fournit les

pièces à Sodicarro. Asco Belgique s’occupait de l’achat et de la vente de véhi­ cules d’occasions destinés à l’exportation principalement en Afrique.

Asco achètera des véhicules accidentés pour en retirer les pièces et les envoyer par containers à la firme Sodicarro. En 130

république Dominicaine, les pièces d’occasions sont pratique­

ment inexistantes et le marché s’avère donc être fructueux.

Je me séparerai de Delamotte et de ces sociétés car je ne serai pas rémunéré et l’on me doit des sommes considérables.

Je porterai plainte contre Asco en 1994.

Et c’est suite à ma plainte que l’affaire sera mise à l’ins­ truction.

La société Asco dépend de l’arrondissement judiciaire de Mons, et c’est donc le tribunal de Mons qui est seul compétent.

Ne me demandez pas pourquoi ni comment le procureur Paul De Gryse fit venir cette affaire à Bruxelles. Ni pourquoi

de plaignant je me suis retrouvé accusé. Personne ne saura

vous répondre. Mais il ne faut pas oublier que le parquet

continue ses investigations à mon sujet, car dans l’affaire Dutroux, malgré deux ans d’enquête et deux cents enquê­

teurs, ils n’ont toujours rien!

Le fait d’avoir une affaire pendante devant le tribunal correctionnel alors que je suis en prison {condamné à 3 ans en

1996 et nous sommes en 1998) donne la possibilité au procu­

reur De Gryse de s’opposer à ma libération conditionnelle que je pourrai déjà avoir obtenue depuis un an. De plus, le minis­

tre de la justice est Marc Verwilghen, qui s’oppose également

à cette libération. Décidément je suis bien protégé! Lorsque le procès commencera, mes avocats plaideront d’emblée l’incompatibilité du tribunal à juger cette affaire, vu

quelle se situe hors de son territoire. Mais voilà, le président du tribunal est à nouveau Michel De Grève et il prendra cette affaire

malgré tout et me condamnera en me renvoyant en prison. Il se fait que j’avais écrit un premier livre sur l’affaire depuis ma cellule de prison dans lequel je crie à l’injustice. Je ne sais pas si c’est cela qui déclenchera la machine judiciaire. 131

Toujours est-il que je serai reconvoqué le 29 octobre 1998 devant le tribunal correctionnel de Mons pour la même affaire

ASCO! En Belgique, on ne peut juger quelqu’un deux fois pour

la même affaire sauf si le jugement a été cassé par la Cour de

Cassation ou s’il y a des éléments nouveaux. C’est le principe vieux comme le droit romain: non bis in idem.

Lorsque je me présente à Mons, je pense donc que l’on est en train de monter une nouvelle cabale contre moi. Le président Van Spitaels, qui préside le tribunal correc­

tionnel a quelques années de présidence derrière lui et n’est

pas un farfelu. Il expliquera que si cette affaire revient devant le tribunal de Mons, c’est suite à l’affaire Dutroux.

Le ministère public est représenté par le procureur

Henry, qui se montrera d’une objectivité exceptionnelle, il ne fera, contrairement à son confrère De Gryse et au président

De Grève, aucune allusion à l’affaire Dutroux, mais expli­ quera la situation d’une manière très saine. Cela fait du bien

de rencontrer des gens pareils. Mon avocat, Frédéric Clement de Clety plaidera brillam­

ment comme d’habitude. Il démontrera que je n’étais pas du tout le gérant d’Asco, que je n’avais jamais posé d’actes en

cette qualité, contrairement aux conclusions du président

Michel De Grève. Au fur et à mesure des débats la situation se clarifiait. Le jugement fut net: acquittement sur toute la ligne. Aujourd’hui encore je ne peux m’empêcher de penser à la différence de vision de ces deux magistrats (le président

Michel De Grève à Bruxelles et le président Van Spitaels à Mons)

qui avaient examiné et qui devaient juger exactement le même dossier, ce qui est un cas unique en Belgique. 132

Mais le pire, c’est que le ministère de la justice, dirigé par Marc Verwilghen, malgré le fiASCO du procureur De Gryse, ne tiendra jamais compte du deuxième jugement alors que c’est le seul valable. Je dus donc purger ma peine malgré tout.

Conclusions Comment faut-il qualifier l’attitude du procureur De Gryse, qui du statut de substitut se verra nommé Procureur sous le règne de Marc Verwilghen?

133

21. Ma vie en prison

16 août 1996 Arrêté depuis la veille à 19 heures et enfermé depuis 2 heures du

matin, j’ai passé la nuit au poste de police de Bruxelles ville.

Drisket me fait réveiller à 5 heures du matin pour m’em­ mener à la PJ, sise près du palais de justice de Bruxelles. On

ne me donne pas l’occasion de me laver ni de me rafraîchir.

Au pied du bâtiment de la PJ un photographe appelé par l’inspecteur est de faction, je proteste vivement mais Drisket me tient et m’oblige à le regarder en disant: «allez-y\ non mais

que croit-ilb>

Dans les locaux on me sert un café dégueulasse dans un

gobelet en plastique, il n’y a pas de lait ni de sucre. Menotté je pars pour Neufchâteau pour rencontrer le juge d’instruc­

tion Connerotte. Ail heures du matin nous arrivons près du palais de

justice de Neufchâteau, Drisket qui conduit le véhicule met­ tra longuement sa sirène en marche pour prévenir de notre

arrivée. La gendarmerie a placé des barrières «nadar» et tous les

médias ont été prévenus. Je ne suis donc pas encore arrêté, mais on a déjà ameuté toute la presse, bravo!

Le public crie, mais la révolte, la malédiction dans les 134

yeux de ces gens, je la repousse et mon cœur, tout comme ma

raison consentent à ce refus car je suis innocent. Le juge Connerotte est des plus lamentables et je dois

constater que son opinion est déjà établie avant de m’avoir entendu, son attitude n’est pas celle d’un homme digne de ce

poste. Lorsque j’entre dans son bureau, je le salue «bonjour

monsieur le juge»; Pas de réponse!

Il a le dos tourné vers la fenêtre et discute avec Drisket, je l’entends préciser «A moins le quart, ilfaut être dehors!»

L’interrogatoire est un vaudeville, c’est Drisket qui pose et qui répond aux questions et lorsque je dis «Mais qui est le

juge d'instruction iciï» Connerotte me rétorque «monsieur Drisket et moi c'est la même chose, je veux dire que nous sommes du même côté!!!»

L’injustice et l’incompétence de cet homme qui, à aucun

moment n’a osé me regarder, m’effraie, il ne connaissait rien

de mon rôle et cela ne l’intéressait même pas. C’est donc «ça» ce juge d’instruction qui veut faire la «Une» des médias?

Je serai arrêté comme, par la suite, une série impression­ nante d’autres personnes qui, tout comme moi, n’ont rien à

voir avec cette affaire.

Prison d'Arlon En me présentant à la prison, Drisket clame en vainqueur:

«Encore un dans l'affaire Laetitia». Son attitude est des plus igno­

bles, je suis poignardé au cœur, jeté à la poubelle, condamné d’avance, et il jubile en me laissant aux gardiens, il dit alors à ses semblables: « Bon, maintenant on va se payer une bonne bouffe». 135

J’entre dans un monde où tout est parfaitement ordonné et où tout m’accuse. J’éprouve maintenant une hâte anxieuse vis-à-vis de cette épreuve qui va exiger de moi des forces nou­

velles pour parer des chocs inévitables. Déçu de l’attitude du juge Connerotte qui a anéanti en

moi les derniers espoirs d’une justice équitable j’entre pour

affronter mon premier gardien qui lui, ne sait rien et qui n’est d’ailleurs pas là pour savoir.

Derrière la porte que l’on vient de pousser, le gardien res­ ponsable du vestiaire est assis derrière une table qui lui sert de

bureau, à côté de lui, un autre se tient debout. Le responsable prend ma fiche alors que le second lit par-dessus son épaule. Il

semblait impossible, cela se lisait dans leurs yeux, à ces hom­

mes qui me regardaient avec inquiétude, que j’avais pu com­ mettre un acte aussi horrible. Alors qu’ils lisaient, je les vis pâlir sous l’émotion. Tout

se passait dans un silence où l’on aurait pu entendre battre les

cœurs. Un détenu qui devait préparer mon paquetage, me fixait en me reprochant presque de vivre, (quelques jours plus tard

il me menacera de mort en m’apercevant au travers d’une

grille). Le chef, habitué, lui dit de sortir et, se tournant vers

moi, me dira calmement: «Ecoute, moi] ai 22 ans de maison, je nen ai rien à foutre de ce que tu a fait ou non, mais fais atten­ tion, tout le monde ne réagit pas comme moi». J’étais content d’entendre des paroles humaines et préve­

nantes. Ensuite on m’a conduit à la cellule 401. J’allais comme si j’allais là où vont finir les ténèbres. Depuis la veille je n’ai rien reçu à manger, je ne recevrai

rien avant le lendemain.

Nous sommes le samedi 16 août 1996, je passerai en 136

chambre du conseil le mardi suivant. Je n’ai dormi que trois heures la veille, on ne me laissera plus dormir jusqu’au mardi.

Je suis mis par le juge Connerotte au secret, donc je n’ai

droit à aucune lecture, aucune radio, aucun contact, et aucune information extérieure, à aucune visite, à l’exception de celle de mon avocat. Le temps passera avec une exaspérante lenteur. Le passé se glisse dans ma mémoire avec l’amertume, toute la douceur

et tous les plaisirs de la vie d’autrefois. Mon avocat, Maître Jean-Pierre Hostier est en vacances,

il faut donc rapidement pallier à ce problème, je n’ai aucun moyen d’en choisir un autre, car les ordres de Connerotte sont

précis: «Il faut qu’il craque!»

Ma compagne à Bruxelles se démène pour trouver un

avocat et par recommandation tombe sur Frédéric Clement de Clety et Virginie Baranyanka.

Dans la prison, en quelques minutes, le bruit de mon

arrestation et de mon incarcération se répand. Les détenus se révoltent, ne cessent de taper sur les murs et sur ma porte. Ils gueulent «A mort».

Le ton monte, les gardiens, dont certains avaient attisé le feu, prennent peur de l’ampleur de la révolte, ils ferment tou­

tes les grilles pour se réfugier au centre, j’ai l’impression que la prison va s’écrouler. Cela dure... un quart d’heure? que dis-

je. .. une heure, des heures? Je ne pourrai plus le dire, le temps n’a plus sa valeur; C’est l’enfer.. .l’enfer!

Pendant un court moment, le silence revenu me paraît

merveilleusement profond et rassurant, mais ce n’est qu’une

courte trêve, car l’émeute reprend de plus belle. Les gendarmes sont appelés à la rescousse et entourent la

prison alors que les détenus braillent de plus belle. 137

Il doit-être près de deux ou trois heures du matin quand

la révolte se calme. Les hommes ont du s’endormir, gorgés de cris et de hurlements, d’obscénités qui n’amusaient qu’eux,

heureux d’avoir cru rendre la justice. Les cris les ont saoulés, leur faisant oublier pourquoi ils

étaient là, eux, avec leurs fautes, leurs erreurs. Ils se sont trans­

formés en justicier d’un soir, gueulant par la fenêtre des sanc­ tions à prendre, croyant ainsi avoir rempli leur mission «d’honnêtes» citoyens!

Je crois alors que je vais pouvoir dormir, funeste erreur, les gardiens tapent sur ma porte toute la nuit pour comme ils

diront’ voir si je suis toujours en vie. Cela dure jusqu’au mardi.

Comme je ne sais pas dormir, je regarde par la fenêtre et je m’efforce de respirer à grands coups profonds, réguliers, pour reprendre mon calme. Fâce à moi s’élève un mur en

béton, m’empêchant ainsi d’avoir une vue sur le monde. Je ne puis que penser, réfléchir. Tous, je le devine, veulent repousser

ces cauchemars, ces idées noires de la première nuit. Ils appel­

lent à leur secours les lointains visages amicaux qu’ils savent anxieux depuis ce matin. C’est surtout un visage aimé qu’ils

cherchent dans le noir, qu’ils essaient, plus que les autres jours et que les autres nuits, de joindre à travers l’espace. Le jour se lève et je m’en réjouis car je dois, comme le prévoit le règlement, rencontrer le directeur, recevoir mon colis d’entrée qui comprend de quoi me laver etc... Mais je

ne rencontrerai personne et m’apercevrai, malgré mes deman­ des, que je ne peux absolument rien espérer d’eux.

L’adjudant chef donnera l’exemple en m’insultant: «Ren­

trez le fauve dans sa cage!» ouvrant ainsi la voie aux gardiens de «m’en faire voir». Et pour m’en faire voir, ils mettent le paquet, je ne reçois 138

pas de couverts pour manger et l’on ira jusqu’à laisser tomber ma nourriture sur le sol, prétextant que j’étais maladroit. Je

mange avec les mains car je dois me nourrir, résister à tout

prix, et cette vie intenable dure jusqu’à la première chambre du conseil, soit quatre jours plus tard.

C’est durant cette période qu’on me photographie pour présenter au public ce cliché mémorable ou même les miens

ne me reconnaissent pas. C’est la grande idée du juge Connerotte qui diffuse cette photo au public en lançant un appel à

témoins avec un numéro de téléphone gratuit 0800. Plus de mille personnes y répondront.

Le mardi matin, je passe devant la chambre du conseil. Je n’ai toujours pas reçu le minimum prévu, j’essaie en me

passant les mains dans les cheveux avec un peu d’eau de me

rendre un aspect d’être humain; je n’ai pas de quoi me laver ni me raser mais je suis plein d’espoir.

Le fourgon pénètre à Neufchâteau accompagné des sirènes de la gendarmerie. Toute la presse est présente, les camions de

retransmission, de nombreux photographes et caméramans

et, comme cela se passera lors de chacun de mes transferts, les cris des gens du peuple qui m’insultent au passage d’une

manière hargneuse et violente. Ces gens qui m’injurient qui me crache dessus et me jette des pierres alors qu’ils ne savent

rien de mon rôle. Combien de fois ai-je du traverser en silence cette foule hostile, qui ne voulait rien comprendre, qui me

préjugeait coupable et qui considérait que j’étais lâchement

protégé par les forces de l’ordre. La chambre du conseil, enfin! Depuis quatre jours, je supporte un toxique mélange d’inaction, d’impuissance et

d’incertitude à attendre et à rester face à ce pan de mur en 139

essayant de ne penser à rien, de chasser l’idée unique qui me revient toujours: Comment se fait-il que l’on m’accuse alors

que je suis innocent? Le juge d’instruction prendra la parole pour réclamer la prolongation de ma détention. Il n’a aucun argument, il bre­

douille des phrases incohérentes pour déclarer que des élé­ ments nouveaux arrivent; Lesquels? en réalité aucun, mais c’est le système Connerotte, il arrête les gens et ensuite seule­

ment il cherche des preuves. Il est la honte de cette enquête,

j’apprendrai trois ans plus tard que tant Dutroux que Lelièvre

et Martin déclareront que je ne suis au courant de rien.

Mes avocats plaideront durant une heure; Tout est logique, mais le procureur Bourlet suivra la demande de Connerotte et tout aussi péniblement demandera que je reste en prison. Je prends alors la parole, non seulement pour clamer

mon innocence, mais aussi pour rappeler devant le juge Connerotte la manière dont s’est passé mon interrogatoire dans son bureau, la méthode qui a fait que je n’ai pu m’expli­

quer. Il rétorquera sans honte qu’il ne s’en souvient pas! Je suis fou furieux de constater la lâcheté de ce sinistre

magistrat et surtout de constater le pouvoir que possède cet

incapable. Je sais maintenant qu’entre lui et moi, c’est devenu

une affaire personnelle. L’avenir me donnera raison. Du samedi au mardi je n’ai rien reçu pour me raser ni pour me laver; Le directeur, un certain Chalon, se complaira à

me rendre la vie impossible sans jamais me rencontrer, et ce

malgré les règlements très précis des prisons, mais le funeste ne se doute pas qu’à l’extérieur mes avocats remuent les cho­

ses et le journal «Le Soir», sous la plume du journaliste Guil­

laume, sortira un article qui dénonce les agissements de la pri­ son. Pris au piège, le sieur Chalon reçoit le mardi après midi, 140

la visite d’un délégué du ministère de la justice et commence à

paniquer. Je pourrais alors apprécier l’hypocrisie sans limite de ce piètre personnage.

On me change de cellule, et suis transféré à la neuvième aile de la prison; Une aile plus protégée dans laquelle ont été

placés Dutroux et Lelièvre; Je reçois enfin de quoi me rafraî­

chir, c’est tout ce que je demande. L’après midi la décision de la chambre du conseil tombe, le juge confirma mon mandat d’arrêt pour 28 jours.

Faire confirmer un mandat d’arrêt, que ce soit en chambre du conseil comme en appel à la chambre des mises en accusa­

tion, c’est très simple, et le procédé est toujours le même: Le

juge d’instruction et le procureur du Roi disent au président «Nous avons de nouveaux éléments que nous devons encore vérifier et nous vous demandons la prolongation afin que nous puissions

rapidementfaire ces devoirs d'instruction nécessaires». Comment voulez-vous qu’un président qui ne connaît rien du dossier réa­ gisse autrement qu’en accordant cette prolongation? Cette méthode est très efficace mais peut dévier sur des égarements et des erreurs de justice. On remarque que c’est invariablement

dans les jours qui précèdent les chambres de libération que les enquêteurs s’empressent de déposer de nouvelles pièces, qu’ils

ont parfois gardées dans leur tiroir, pour cet événement. En

accord avec mes avocats, je fais appel de la décision. Une semaine plus tard je serai transféré à la prison de

Namur, et lorsque j’arriverai dans cette prison je crois avoir

passé l’épreuve la plus pénible, mais c’était illusoire, on m’at­ tendait de pied ferme.

Dans cette vieille prison je serai placé dans une cellule ignoble et crasseuse. On oubliera même de m’apporter les repas, alors lors de la visite de mon avocat, maître de Clety, 141

furieux, interroge le directeur, un certain monsieur Gouver­

neur sur ce point précis car depuis deux jours j’ai été privé de

quatre repas.

Tout aussi hypocrite que le directeur Chalon, ce person­ nage rétorquera que c’est toute une organisation à mettre en

place, mais que cela va s’arranger. Cet horrible personnage se moque du monde et me le prouvera lorsqu’il me dira qu’il n’y

a pas de café et qu’il faut en acheter, ce que je ferai mais il fau­ dra 6 jours pour le recevoir. Lorsque je recevrai enfin cette

cantine avec du café soluble, comme par hasard il n’y aura

plus d’eau chaude! Il ira plus loin en me faisant apporter les trois repas le

matin comme cela on ne devra plus ouvrir la porte de la cel­ lule pendant la journée. Je devrai dès lors manger froid.

Aucune suite ne sera faite à mes demandes, ainsi je ne recevrai aucun livre de la bibliothèque ni aucun journaux même en les payant. Certains gardiens pousseront la plaisan­

terie jusqu’à venir m’insulter en espérant une mauvaise réac­ tion de ma part, mais je ne tomberai pas dans leur piège.

La télévision me sera enfin accordée mais le juge Conne-

rotte la fera enlever ainsi que tout ce qui se trouve dans ma cellule et poussera l’ignominie jusqu’à me confisquer mes

lunettes, ce qui m’empêchera de lire ou d’écrire; Lorsque mes avocats lui demanderont des explications il rétorquera que

c’est pour m’empêcher de me suicider! Je continuerai à subir les humeurs de Namur où je me

dois de constater que le directeur Gouverneur est le premier responsable de la vie de chien qui m’a été imposée dans sa navrante prison.

Mais un jour, on frappe au petit carreau de la porte. Cette ouverture permet aux gardiens de procéder, à tout 142

moment, aux surveillances sans devoir ouvrir.

Dans un premier temps, je ne me retourne pas, étant habitué à être injurié par les autres détenus. Mais cette fois,

on frappe différemment, sans agressivité et je regarde. Je vois le visage d’un codétenu qui me demande si ça va. Je n’en reviens d’abord pas mais lui répond positivement, alors il me

dis «Ne ten fais pas, ça va aller\ allez, courage.» J’ai perçu ce mélancolique regard dont je ne saurai dire s’il

contenait plus démesurément la tristesse ou la pitié de me voir abandonné. C’était la première fois, qu’un codétenu s’est adressé à moi d’une manière humaine. Et les années pourront s’ajouter

aux années, toutes les horreurs de la vie pourront s’accumuler devant mes yeux, mes yeux et mon cœur ne pourront jamais

oublier la tendresse infinie de cet humble visage. J’en avais les

larmes aux yeux. Je regarde encore, mais le carreau est vide... Il a disparu... C’était un Africain. Ces Africains qui nous donnent une leçon de total courage et de totale générosité. Je serai à nouveau transféré à Arlon ou le directeur, mon­ sieur Fonck est revenu; Le courant passe mieux entre nous.

Monsieur Fonck est un ancien militaire, il dirige sa prison avec une main de fer, même les gardiens doivent parfois subir

ses fougues, mais en principe, il met tous les prisonniers sur le

même pied d’égalité. La prison d’Arlon est trop petite pour

recevoir autant de prisonniers sous le régime de la haute sécu­ rité, par exemple elle ne possède pas, comme d’autres prisons, plusieurs préaux pour pouvoir séparer les différentes catégo­

ries de détenus mais, malgré les petits moyens mis à sa dispo­ sition et même si monsieur Fonck et moi ne sommes pas tou­ jours d’accord, il s’en tire très honorablement. Mon régime carcéral s’améliore, il est vrai que l’on vient très souvent me chercher pour m’interroger, cela m’arrange 143

car je peux alors sortir des quatre murs dans lesquels je passe

24 h sur 24. N’oublions pas que je suis en haute sécurité, cela veut dire que durant trois ans et demi je serai coupé du monde

et ne pourrai jamais rencontrer d’autres détenus.

Toutefois, certains gardiens commencent à comprendre que je ne suis pas le monstre que l’on a voulu présenter, bien au contraire et leur attitude changera de jour en jour et le dia­

logue commence à s’établir entre nous. Mon état de santé s’aggrave ce qui provoquera de nom­ breux transferts vers le centre médical de Saint Gilles dans la

région Bruxelloise. En 1996 cette partie de la prison est diri­

gée par le docteur Donneau qui décrocha cette place grâce à l’intervention de son beau-frère procureur général. Le centre était dirigé d’une manière lamentable, c’est le moins

que l’on puisse dire. Heureusement aujourd’hui ce médecin

chef est pensionné et a été remplacé par un jeune médecin beaucoup plus dynamique qui a repris les choses en main et

qui a véritablement transformé ce centre médical.

Je n’ai pas envie de détailler ma vie de malade en prison car je ne veux absolument pas que l’on pense que je recherche

de la pitié, mais je puis vous assurer que lorsque je suis sorti

de prison après trois ans et demi, dont près de deux ans passés

à Saint Gilles, mes médecins personnels m’ont souvent dit que je l’avais échappé belle (Perte de 50 kilos et trois opérations

lourdes). Il est vrai que cela aurait arrangé mes ennemis si

j’avais pu disparaître avant le procès, je les entends d’ici décla­ rer « Nihoul est parti avec son secretb>

Le plus grand support à Saint Gilles me sera apporté par l’aumônier JeffWauters; Je rencontrerai souvent cet homme qui ne me parlera de Dieu que lorsque je soulèverai moi144

même le sujet. C’est un être exceptionnel qui a son franc par­ ler mais surtout, c’est un homme qui se bat tous les jours pour donner un peu de bonheur à ceux qui en ont besoin et ce, sans jamais préjuger ni rien demander en retour, même pas d’assis­ ter à la messe. Aujourd’hui, je ne sais pour quelle cause, Jeff n’est plus à

la prison de Saint Gilles, il est retourné dans sa ville de Lou­ vain, mais il manque à beaucoup de détenus.

A ma sortie de prison il faudra plusieurs années pour me

rétablir et aujourd’hui je garde encore et pour le restant de mes jours, des séquelles de ces mauvais traitements.

145

22. Le procès du siècle

Je suis en réunion avec mes avocats, Frédéric Clément de

Cléty, avocat au barreau de Bruxelles, qui m’assiste depuis le début de l’affaire, donc depuis 8 ans et Xavier Attout, avocat au barreau de Charleroi, qui m’a été conseillé par le premier

car il est un des avocats de Belgique les plus habitués et très brillant en cour d’assises.

Frédéric Clément de Cléty est un homme direct, sans

détour, il dit ce qu’il pense et il pense ce qu’il dit. C’est un avocat brillant, qui connaît son métier mais qui veut encore

en apprendre tous les jours. Avec lui, il faut également être

franc et sans détour. Il déteste les êtres qui usent de louvoie­ ments, tout comme les faux culs.

Il n’a pas pour habitude de dire que tout va bien ou qu’il va

tout arranger. Il a dès les premières rencontres avec un client un esprit de synthèse exceptionnel. Grand plaideur, il se défonce quand il croit en une affaire. On ne présente plus Xavier Attout, c’est un grand ténor du barreau de Charleroi qui a fait ses preuves dans d’illustres

procès, d’une apparence très calme et très sereine, il peut

bouillir à l’intérieur. Il a l’art de toujours calmer les choses et sa grande expérience des cours d’assises le gratifie de cet ins­ tinct naturel de sentir quand il faut intervenir. Il est toujours là quand l’adversaire ne s’y attend pas. Il passe des heures à 146

préparer ses procès et ne va au combat que lorsqu’il est armé jusqu’aux dents. C’est donc soutenu par ces deux brillants techniciens que je vais affronter le jury populaire, je joue les «forts» mais en

moi-même je redoute ce procès. Pourquoi?

J’explique à mes deux ténors du barreau que les mem­

bres du jury penseront qu’après huit années d’enquête, avec l’appui de deux-cents enquêteurs (ce qui est unique dans ïhistoirejudiciaire belge) et avec les moyens exceptionnels que pos­

sède notre police, si le Parquet fait comparaître un gars devant la cour d’assises, c’est qu’il est coupable. Ce n’est donc pas en qualité de présumé innocent, mais de

présumé coupable que je rencontrerai mes juges. Maître Xavier Attout est nommé par toutes les parties de

la défense pour récuser les jurés potentiels. Moment très diffi­ cile, qui demande du doigté mais aussi de la chance. En effet,

personne ne connaît vraiment l’objectivité des douze mem­

bres qui seront désignés ainsi que des suppléants. On devra,

durant ce procès, sinistrement remarquer qu’un des membres effectifs du Jury, un certain Raymond Lardau, boucher de son

état, sera révoqué pour non-respect de la loi. Ce sinistre per­ sonnage se permettra d’une part de menacer le Président et la Cour de se suicider s’il était révoqué et, d’autre part, de com­ menter dans la presse, sans aucune honte, son avis sur les

débats secrets des jurés alors qu’il avait fait serment de ne rien révéler. Il est vrai que cet individu sera poursuivi par le tribu­

nal correctionnel pour coups et blessures dans une autre

affaire... Tout un programme. Les membres du jury sont nommés, tout comme les sup­ pléants, et là, le combat commence. 147

Je ne vais pas relater les différentes séances du procès qui

durera plus de quatre mois et qui ont longuement été com­ mentées par les médias du monde entier. Mais je donnerai

simplement mon avis sur les différentes positions de chacun. Sur les différents avocats et leur manière de faire, sur les par­

ties civiles et leurs réactions. Autrement dit comment j’ai res­

senti tout cela. Maître Xavier Attout me recommande le plus grand calme,

il connaît ma fougue à me défendre, et il craint que j’énerve les membres du jury en rétorquant à tout bout de champ. Il avait probablement mille fois raison. Mais très malade au moment

du procès, et placé sous médicaments, je devrai même par moment faire un effort réel pour suivre les débats.

Maître Frédéric Clément de Cléty ne me donne aucune instruction, il sait que je suis innocent, il a décidé de se battre

pour m’acquitter et il me laisse le libre choix de mes actes. Il

faut dire qu’il me suit depuis huit ans et qu’il me connaît par­ ticulièrement bien. Il sait par ailleurs que devant un tribunal

je ne mens jamais, donc il n’a pas peur. Je connais bien Clément de Cléty, et je sais ce qu’il pense surtout lorsqu’il ne dit rien, à son attitude, je sais qu’il cogite

et que «ça ne va pas se passer comme ça». Il a des qualités exceptionnelles, il est humain avant tout, et surtout il ne se

prend jamais au sérieux. J’ai appris, au fil des huit années qui nous ont amenés à ce procès, qu’avant une plaidoirie, il ne

faut pas lui parler, il ne faut pas en rajouter, non... Il faut tout simplement lui foutre la paix. Je comparais libre devant la cour d’assises, contrairement

aux trois autres inculpés qui sont en aveu, et cette liberté est

due au talent de mes deux avocats qui ont brillamment plaidé pour l’obtenir devant la Cour d’appel de Liège. 148

Cependant, il faut reconnaître qu’il est très malaisé d’ac­

cepter de comparaître dans une cage en verre blindée, au

même titre que les autres. C’est en quelque sorte une image

de culpabilité contre laquelle il faudra également se défendre.

Les autres avocats de la défense De son côté, Dutroux est défendu par trois avocats, Xavier Magnée, ancien Bâtonnier de l’ordre et éminent pénaliste, assisté par maître Rony Baudewijn (le comique sympathique de

service} et par Maître Martine Praet. Au départ, c’est l’un des grands ténors du barreau belge, Me Julien Pierre qui a

défendu Dutroux. Mais en janvier 2003, Dutroux décidait de s’en séparer pour confier sa défense à un illustre inconnu: Me Daniel Kahn assisté de Mes Rony Baudewijn et Martine

Praet. Derrière cette volte-face de Dutroux se cachait un véri­ table fou-judiciaire: mon meilleur ennemi Georges Frisque. Frisque et Kahn, deux agités du bocal dans ce dossier, cela ne

pouvait que mal tourner. Me Kahn en fut éjecté aussi rapide­ ment qu’il y était entré et retourna à son bien justifié anony­

mat. Le Festival de Kahn ne dura que ce que durent les

roses... C’est alors que Dutroux se décida à faire appel à un

grand format international: le sulfureux Jacques Vergés. L’ami et compagnon de route du génocidaire cambodgien Pol Pot assurant la défense d’un autre monstre, bien belge celui-là, voilà qui promettait des étincelles. Mais Me Vergés avait

mieux à faire. Alors, il fit appel à son ami le flamboyant et brillant Me Xavier Magnée qui, en octobre 2003, confirmait

qu’il assurait désormais la défense de Marc Dutroux aux côtés de Me Praet et Baudewijn. «Je serai le plus actif de tous, décla­ 149

rait-il à cette époque au Soir Magazine. Je serai l’avocat du

peuple qui petit à petit me fera confiance. Et on verra alors si

les bourgeois, qui me disent aujourd’hui qu’il est ignoble de défendre un grand assassin, ont eu raison. Si j’arrive à faire la

vérité, ce seront plutôt les victimes qui auront été bien défen­ dues». Du style, beaucoup de style, on vous disait...

Michel Lelièvre est défendu par Maître Olivier Slusny,

avocat au barreau de Bruxelles. Un malin, qui ne se laisse pas mener en bateau, et qui connais parfaitement la mission diffi­

cile qu’on lui a confiée. Cependant, Maître Slusny perdra un grand nombre de clients, eu égard au fait qu’il a accepté cette défense. Il faut lamentablement noter que ces gens n’ont rien

compris au sacerdoce d’avocat. Sinistre erreur de leur part, car j’ai pu constater et admirer la grande maîtrise du métier de cet

avocat que je respecte énormément. Michèle Martin est défendue par un quatuor composé des avocats Thierry Bayet, Sébastien Schmitz, Sarah Pollet et

Thierry Moreau.

Cette brigade, qui durant les huit années d’enquête évi­

tera les contacts avec les médias, réglera très bien ses violons et défendra avec une énergie sans pareil cette femme «soumise» à

ce monstre qu’est Marc Dutroux.

Les parties civiles Puis nous passerons aux parties civiles, mais avant de parler de

leurs défenseurs, je voudrais m’exprimer sur l’attitude de leurs clients. Les douleurs encaissées par ces parents qui ont perdu un enfant dans les circonstances horribles - que j’ai découvertes 150

dans les médias comme tout le monde - sont inimaginables et insupportables. Ce qu’ont subi ces parents dont les petites fil­ les ont été enlevées et violées par ce monstre, et bien que cer­

taines aient été sauvées par une chance extraordinaire, est éga­ lement tout aussi terrifiant et impardonnable. Je n’ai subi dans

ma vie que la perte d’un frère âgé de 13 ans, d’un neveu qui n’avait que 6 mois et de mes parents, pourtant cela est resté

horrible dans mon esprit. Alors je n’admettrai jamais que l’on remette en cause le chagrin de ces parents. Toutefois, il faut reconnaître que je respecte plus particu­ lièrement deux familles et cela eu égard à leur comportement. Il s’agit de la famille Lambrechts, qui a perdu sa petite

Eefje, et de la famille Dardenne dont la petite Sabine fut enfermée et violée par Dutroux dans des circonstances insou­

tenables. En effet, ces deux familles sont restées d’une dignité

exemplaire. Elles n’ont pas créé une a.s.b.l. pour récolter de l’argent, elles n’ont pas brigué un poste de directeur sans en avoir les compétences mais en profitant de la détresse politi­

que, elles n’ont pas voulu créer un parti politique ni vendu du

vin au nom de leur fille, elles ne se sont pas présentées sur des listes électorales, elles n’ont pas fait imprimer des cartes de

visite avec leur numéro de compte bancaire pour les distribuer

sur les marchés publics, et elles n’ont pas eu d’autres rêves ou projets lucratifs comme créer un musée, etc ... Non, en un

mot comme en cent, elles sont restées dignes et n’ont pas pro­

fité de ces évènements pour se faire de l’argent sur le malheur, voire sur la mort de leur enfant.

Non, je ne peux être d’accord avec cela. Croyez-vous que parce qu’ils sont restés dans l’ombre et dignes, les parents de

Eefje Lambrechts et de Sabine Dardenne ont subi moins de 151

peine que les autres? Non pas du tout, ces pauvres gens n’ou­

blieront jamais et leurs plaies ne se cicatriseront jamais.

Les défenseurs... La famille Lambrechts est défendue par de grands avocats,

Monsieur le Bâtonnier Luc Savelkoul, Maître Joris Vercraye et

Maître Mark Huyghes. Des gens réfléchis qui ne cherchent pas les coups d’éclat devant la presse, non, leur nom sont très connus et leur carrière est faite, alors nous avons pu admirer

des avocats qui étudient et qui défendent un dossier avec le

plus grand professionnalisme.

Sabine Dardenne est défendue par Maître Jean-Philippe Rivière, un ténor, qui suit l’exemple de son père, je dirai même plus, un des plus grands avocats francophones de Bel­ gique. Il a, contrairement à d’autres excités, le calme et le

bien-fondé des génies. Il a de plus l’art, non seulement de pénétrer les sujets, d’expliquer les choses avec beaucoup de simplicité, mais en plus de les communiquer avec une loqua­

cité fleurie d’émotions. Il sera accompagné de sa collègue Maître Céline Pariss. La famille Marchai, qui avait au départ d’autres avocats, dont le farfelu Victor Hissel, déclarera devant les médias que

ce dernier était devenu trop cher pour ce qu’il promettait d’apporter. Il semble que c’est aussi l’avis des familles Russo et Lejeune qui, malgré les millions ramassés dans leur a.s.b.l. ont préféré se séparer de cet illustre plaideur qui, auparavant,

s’était surtout illustré en défendant, devant la cour d’assises de Liège, Louis Dupont le sinistre curé de Kinkempois, qui était,

lui, bel et bien le chef d’un réseau pédophile démantelé par la 152

justice! Dans ce dossier-là Me Hissel fut particulièrement effi­ cace puisque son client fut condamné (pour viols de mineures d’âge...) à trois ans de prison avec sursis de cinq ans «à condi­

tion de séjourner dans un bâtiment religieux ou un monastère sous le contrôle de ses supérieurs».

Le sieur Marchai décidera donc de prendre un autre avo­ cat et, après avoir pratiquement lancé un appel d’offre dans

les médias accompagné d’une demande de fonds populaires

qui lui apportera beaucoup d’argent, se fera défendre par l’avocat Paul Quirynen qui sera prêt à soutenir les fantasmes

de ce personnage pour le moins fantasmagorique. Cet avocat jouera le jeu des Marchai, à savoir «Tous cou­

pables, la mort pour tous». C’est d’ailleurs ce que déclarera Paul Marchai lorsqu’on lui donnera la parole à la Cour d’Assi-

ses, «Qu’on les noie tous dans cette cage de verre» Belle men­

talité pour un professeur qui se doit d’enseigner, notamment la démocratie aux élèves, à moins que dans son école, et sur­

tout dans l’esprit de Marchai, il n’en soit autrement.

Et puis il y a la famille de la petite Laetitia Delhez, la famille qui a choisi un avocat de Bruxelles après avoir, comme par hasard, rencontré le juge Connerotte.

En effet, Maître Xavier Attout soulèvera ce problème à la

Cour d’Assise. Pourquoi l’avocat Georges-Henri Beauthier,

qui a été le défenseur du juge d’instruction Connerotte, peutil se permettre d’être également l’avocat d’une des parties civi­ les, avec laquelle «comme par hasard» ce même juge se faisait

remarquer en assistant à une soirée spaghettis organisée en soutien aux victimes de Dutroux? Pour le moins étrange non?

C’est suite à cette question que l’on a pu assister au show

du grand Beauthier qui, pris en flagrant délit, eu la plus belle réaction de coupable en hurlant comme un forcené, criant 153

qu’il voulait une interruption d’audience avec l’intervention

du Bâtonnier de l’Ordre. Après une interruption d’audience, la Bâtonnière de

l’Ordre d’Arlon le pria tout simplement de se calmer. Puis

nous apprendrons qu’il y aura encore une enquête discipli­ naire contre lui, notamment pour ses déclarations devant les

caméras. Le résultat de l’enquête disciplinaire, est cependant toujours tenu secret par le Conseil de l’Ordre des Avocats.

Tout le procès sera mené de la même manière par le duo d’avocats Beauthier et Fermon, un peu comme si le scandale

faisait partie de leur mission. Ces deux comiques du barreau ne chercheront, comme à

l’accoutumée, qu’à se trémousser devant les médias. Ainsi, on

les verra toujours se pousser pour être les premiers devant les caméras et les médias, pour donner leurs avis subjectifs sur le déroulement du procès et répandre leurs opinions frelatées dans le but, non seulement de se montrer au public, mais aussi indirectement d’influencer les jurés, sachant que ceux-ci

rentrant chez eux tous les soirs, ne peuvent pas ne pas suivre les télévisions ou les médias ou être influencé par leurs pro­

ches. Il ne faut pas se leurrer. Le pire, c’est que ces deux personnages, Fermon, militant

acharné d’extrême gauche membre du PTB venu pour déstabi­ liser les gens qui sont plus à droite que lui, et Beauthier, égale­ ment de gauche, qui vient pour être vu comme dans la majorité des affaires qu’il se propose de défendre, le pire disais-je, est

qu’ils se sont acharnés à faire croire à une jeune fille du prénom de Laetitia que j’étais coupable de son enlèvement alors qu’au­

cune preuve n’existait et que, surtout, ce n’était pas le cas. Mais, contrairement aux convictions et malgré le travail de

destruction de ces deux fantaisistes, il semble qu’il y ait quand 154

même quelque part un «Bon Dieu». Car malgré leurs pressions et malgré leurs méthodes, leur cliente, la petite Laetitia, trop

pure pour ces deux personnages, déclarera très honnêtement uniquement ce quelle avait entendu dans la bouche de Dutroux

qui parlait alors au téléphone. A savoir: «Michel ou Jean-Michel, oui c’est fait ou ça a marché». Elle le fera très sincèrement et sans

en rajouter, sans préjugé, et aujourd’hui j’ai beaucoup d’admira­ tion pour cette jeune fille qui a tout simplement voulu être très

honnête à ce procès auquel elle venait probablement tout sim­ plement pour essayer de comprendre et d’oublier. Tout le monde comprendra que si cette conversation a eu lieu le lundi 12 août (Laetitia a été enlevée le 9 août) et si

c’était moi au bout du fil, le simple fait d’avoir rencontré Lelièvre le samedi 10 et Dutroux le dimanche 11, vu qu’il est

venu enlever ma voiture pour la conduire à la réparation, fait tomber la thèse impensable que je puisse avoir attendu le lundi pour demander des nouvelles de l’enlèvement qui avait

eu lieu le vendredi et que j’aurai commandité! N’importe quel

enfant d’école primaire ne se laisserait piéger par cette théorie, mais voilà cela fait partie des méthodes du duo Beauthier -

Fermon, car à part cela ils n’avaient rien d’autre. Non contents de cette situation, la méthode du tandem

Beauthier - Fermon sera alors de pratiquer le «matraquage» se

basant sur le vieux proverbe «Mentez, mentez, il en restera

toujours quelque chose». Sans les réflexes de mes avocats, ils auraient peut-être pu réussir leur méthode. Par exemple un jour, ils déclareront sans

aucune honte après la comparution d’une ancienne de mes copines que «cette jeune femme était mineure»! Mes avocats rétorqueront «mais non, à l’époque elle avait 32 ans» et le sinis­

tre Beauthier de répondre avec son regard de cocker battu: 155

«Oh, nous sommes tous fatigués»... Sans commentaire...

C’est ce même «sombre» avocat qui mentira ouverte­

ment et sans vergogne devant les caméras de la télévision RTBF en s’adressant à moi, et ce, avant le procès.

«Et combien de petites filles avez-vous ramené des pays

de l’Est?» Pauvre mec, ignoble individu, accusation gratuite non fon­

dée et pure méchanceté. Mais il savait que je ne pouvais répon­ dre car je n’étais pas sur le plateau et il en profitait lâchement. Ces deux avocats utiliseront toutes les méthodes douteu­

ses jusqu’à leur défaite finale. Mais toutefois ils en sortiront

heureux et fiers. Bien sûr, ils ont perdu comme très souvent, mais on a parlé d’eux régulièrement, de plus ils sont apparus

dans tous les médias et ça c’est le plus important, en tout cas à

leurs yeux, et, de plus, ça leur rapporte de l’argent. Vous savez, l’avocat Beauthier, Georges-Henri, comme il

aime se faire prénommer à la manière des Rois et des Princes, alors qu’il s’affiche être très à gauche, je le connais bien depuis

plusieurs années, et je me souviens particulièrement bien d’un procès auquel j’ai assisté avec le plus grand intérêt.

Le procès se déroulait à Marche-en-Famenne, devant le tribunal correctionnel, et l’avocat Beauthier défendait un tuteur qui avait reçu de la justice la mission de diriger une

mineure d’âge placée par le Juge de la Jeunesse. Le but de cette

mission consistait prioritairement à trouver une famille d’ac­ cueil pour cette mineure. Ce tuteur ne trouva rien de mieux que de faire loger chez lui cette charmante mineure en (disait-il) attendant de trou­

ver une famille d’accueil. Mais voilà, il ne cherchera pas beau­

coup de famille d’accueil car il était particulièrement intéressé par les courbes de la jeune fille. 156

Ainsi il la dépucela et l’entraînera dans une vie plus

attractive à ses yeux, celle du plaisir de la chair. L’avocat Georges-Henri Beauthier plaidera comme un

défoncé, qu’il était tout à fait normal que de très jeunes filles

soient attirées par le sexe et que, dès lors, il fallait comprendre l’attitude de ce «pédophile»!!! Oui, vous ne rêvez pas. C’est ce même avocat qui, au

procès d’Arlon m’accusait (à tort) d’avoir voulu entraîner une jeune fille {d'après lui mineure) qui, certes, paraissait jeune,

mais qui, en réalité, au moment des faits avait 32 ans, sans

commentaire ...

Le procès démarre Après la désignation des 12 membres effectifs du Jury et des

12 suppléants, le procès peut enfin démarrer.

Le plus extraordinaire est que dans cette affaire, depuis 8 ans d’enquête, on n’a absolument pas trouvé de preuve contre moi et depuis 8 ans, ce n’est pas, comme le prévoit la loi, le

Parquet qui doit prouver ma culpabilité, mais au contraire moi qui doit prouver mon innocence. C’est inadmissible dans

un pays qui se veut démocratique. Mais voilà, ce sera la

méthode du parquet, intolérable et pourtant vraie. Vous savez, tous les grands organisateurs de crimes les préparent très attentivement, ainsi lorsqu’on leur posera la question de savoir ce qu’ils faisaient à ce moment, ils ont auto­

matiquement des personnes qui sont prêtes à leur donner cau­

tion de leur emploi du temps. Mais lorsque l’on vous inter­ roge sur des faits qui vous sont totalement étrangers et pour

des périodes vagues, aucun de nous n’a d’alibi vraiment posi­ 157

tif et surtout pas préparé, alors dans mon cas où les rôles ont été inversés, à savoir que c’est moi qui devais prouver mon

innocence, c’était parfois mission impossible.

Les moments forts du procès Je vais être très sincère avec vous et vous dire que lorsque

démarre le procès, je suis vraiment très malade. J’ai, entre

autre, un grave problème cardiaque et je crains, tout comme mes médecins de ne pas tenir le coup. J’en parle à Frédéric Clément de Cléty et je le fais jurer que s’il m’arrive quelque chose, je sois placé sous machine

jusqu’à la fin du procès. En effet, je suis certain d’être acquitté, et il n’est pas question de ne pas aller jusqu’au verdict, mes ennemis, dont le Procureur Bourlet rêvant probablement de ce

moment ou ils pourront déclarer «Il est parti avec son secret»!

Frédéric Clément de Cléty, qui ne le paraît pas toujours, est un homme très humain et, même s’il n’aime pas le mon­

trer, il s’inquiète pour moi. Je le connais bien mon Frédéric et lorsqu’il commence à me raconter des blagues c’est souvent

pour mieux cacher son inquiétude. Je me souviens, lorsque durant le procès je serai emmené d’urgence à la clinique d’Arlon, il me dira «Alors, tu a encore trouvé le moyen d'aller dra­

guer les jolies infirmières.». Quel merveilleux bonhomme, plein

d’humour, plein d’attention et de tendresse. Maître Xavier Attout et moi n’avions pas les mêmes rela­

tions vu que je ne le connaissais que depuis quelques mois,

mais j’ai également été très touché par la grande humanité de

ce Ténor qui est venu me rendre visite chaque jour à la clini­ que d’Arlon alors que rien ne l’y obligeait. 158

A la clinique d’Arlon j’y passerai 2 semaines et j’y ren­

contrerai de merveilleux praticiens qui me traiteront, non pas

comme l’accusé du procès Dutroux, mais comme un citoyen normal qui a besoin d’urgence de secours.

Tant le directeur que le cardiologue de l’hôpital, ses adjoints et les infirmières seront pour moi d’un réconfort extraordinaire et d’une compétence exceptionnelle, ils n’au­

ront pourtant aucun soulagement puisqu’ils découvriront après 8 jours que mes reins sont bloqués et qu’on parle de dia­

lyse. Leur grande expérience arrangera ce problème et après

deux semaines je pourrai sortir et revenir suivre le procès à la cour d’Assises.

Vous savez, je n’aime pas afficher mes sentiments, mais il y a des choses, des attitudes et des gestes que l’on ne peut

oublier sans une certaine émotion, alors aujourd’hui je vais descendre de mon piédestal pour vous dire d’abord à vous

deux, Xavier Attout et Frédéric Clément de Clety, ensuite à

tous les médecins et au personnel soignant de la clinique d’Ar­

lon, tout simplement «Merci».

Les divagations de Dutroux Le procès démarre et Marc Dutroux qui, pendant les 8 ans d’en­

quête déclarera que je n’étais pas au courant des enlèvements des enfants, changera d’attitude et d’emblée déclarera que je suis le chef du réseau et que c’est moi qui ai tout organisé.

Le ridicule ne tue pas, mais surtout pourquoi Dutroux agit-il de la sorte et seulement à ce moment?

Il est évident que s’il avait fait cette déclaration, totale­ ment fausse, durant les 8 années d’enquête, une confronta­ is

tion aurait automatiquement été organisée, et comme ses accusations gratuites ne reposaient sur rien, il aurait immédia­

tement été ridicule. Mais lorsque nous sommes devant la Cour d’Assises, le problème est différent, en effet, il est interdit de couper son

adversaire, lui poser des questions et le mettre à mal. Tout

passe par le Président qui donne la parole à l’un ou à l’autre. Toutefois, tout le monde comprendra directement que

Dutroux cherche n’importe quoi pour se faire remarquer, de sorte que ses mensonges, aussi pénibles que lui-même, se

retourneront contre lui au fur et à mesure des débats.

Dutroux ne fera qu’une chose, démontrer qu’en plus

d’être un monstre, il n’est qu’un lâche qui ne prend même pas ses responsabilités. Il démontrera qu’il n’est qu’un déchet de l’humanité qui mérite d’être enfermé à vie. Le pire c’est qu’en prison il a encore une trop belle vie. Je suis un homme très

conciliant dans la vie, mais dans le cas de Dutroux, je n’ai pas

peur d’écrire que pour moi, comme je suis contre la peine de mort, il ne faut pas la lui appliquer, mais il mérite qu’on l’en­

ferme dans la cache où il a enfermé et laissé mourir les enfants et bien sûr, dans les mêmes circonstances quelles, c’est à dire

plusieurs mois sans le ravitailler, ni se laver ou changer le vase

sanitaire. Que Dieu me pardonne mais, si lui le peut, moi je ne sais pas absoudre de tels actes.

La comparution des petites Sabine et Laetitia Qu’elles me pardonnent de les appeler les petites, mais qu’

elles sachent que jusqu’à mon dernier jour, je ne pourrai oublier les images à la fois troublantes et effrayantes que j’ai 160

capté à la télévision de ces deux petites filles tellement fragiles

qui avaient retrouvé la liberté. Leur passage devant la Cour d’Assise dut être pour elles un moment très difficile, se retrouver devant leur bourreau,

aussi froid qu’une pierre et sans aucun sentiment. Pour elles, cela devait être un grand choc.

Mais quel courage et quelle dignité de la part de ces deux

jeunes filles qui ont affronté le monstre avec détermination.

Quelle lâcheté de la part du monstre qui n’a même pas osé les

regarder. Ce type n’a rien d’un être humain, c’est une machine

à faire le mal.

La démagogie Je pourrais écrire un livre complet sur l’attitude démagogue de certains médias, témoins ou parties à ce procès, mais je n’ai

pas envie de vous ennuyer, il me semble plus à propos de tout simplement reprendre l’article d’une journaliste profession­ nelle. Celui-ci a paru dans Le Vif Express du 9 avril 2004 sous

la plume de Marie-Cécile Royen. Il résume parfaitement l’am­ biance du moment:

161

Des Proximités dérangeantes

Par Marie-Cécile Royen On savait que le procès Dutroux serait difficile.

A ce point

c'est

inquiétant.

La démagogie

autant dans la salle des Assises,

est

qu'à

à Arlon,

devant les caméras ou sur les pla­

1'extérieur,

teaux de télévision. Dernier exemple en date: les

prestations de Jean-Denis Lejeune et du dessina­ teur et humoriste Philippe Geluck à la RTBF et sur

RTL-TVI. Le premier, qui exerce une fonction d'in­ térêt publique à Child Focus, n'assiste qu'épiso­

diquement aux audiences. Au sortir de celles-ci, il déclare généralement,

ses questions

l'œil désappointé,

sont restées

sans réponse.

que

Mais,

quand l'occasion se présente d'en recevoir,

des

réponses fermes, par exemple à propos de la «piste

Ferette»

(du nom d'un affabulateur Hutois), dont

même Michel Bourlet dit qu'elle ne débouchait sur

rien, il n'est pas là. C'est un fait,

les parents Liégeois se sont

avancés très loin dans la «contre-instruction» et la médiatisation de cette piste, pourtant étudiée

dans les moindres détails par les enquêteurs de Neufchâteau.

Ils aideraient à la compréhension de

tous, qui les assurent de leur estime ou de leur compassion,

en admettant que réponse a été donnée

au moins à une de leurs questions. Au lieu de quoi,

Jean-Denis Lejeune se lance dans un plaidoyer en

faveur du rétablissement de la peine de mort pour

certains 1996,

types

de

crimes.

Ces parents

qui,

en

avaient refusé de s'associer à la pétition

de l'ASBL Marc et Corinne en faveur des peines

incompressibles auraient-ils à ce point changé?

162

Philippe Geluck,

lui,

évoque la «cour martiale»

pour les gendarmes qui ont raté leurs enquêtes. La

gendarmerie,

nouvelle cible! Après près de huit

années de retard,

certains s'aperçoivent que la

stratégie d'occupation du terrain judiciaire adop­ tée, avec la bénédiction des socialistes flamands, par l'ancien «corps d'élite» a conduit à la réten­

tion d'informations capitales.

Sans ce blocage,

peut-être

ou

aurait-on pu

souffrances

innombrables

sauver

aux

épargner

victimes

de

des Marc

Dutroux.. Mais les propos de l'humoriste belge,

qui avoue ne plus avoir confiance dans la justice de son pays, confinent à l'ignoble lorsqu'il atta­

que le-futur-témoignage de Sabine Dardenne sous le prétexte que son avocat, M° Jean-Philippe Rivière,

est également celui du gendarme René Michaux. Où l'on voit se redéployer la trame d'un nouveau com­

plot: Michel Nihoul, ancien indicateur de la gen­ darmerie,

Sabine manipulée par son avocat,

des

cassettes vidéo volatilisées à l'état-major, Jac­ ques Langlois, juge inexpérimenté mis sous la clo­

che par son chef d'enquête,

l'ex-gendarme Michel

Demoulin... A l'exception de notre confrère Plan-

chard, de la Libre Belgique, personne, sur le pla­

teau de RTL-TVI n'a ramené ces propos à des pro­

portions démocratiquement raisonnables.

Plus le procès va, plus les extrêmes se tou­ chent dans la dénonciation indistincte des insti­ tutions, bien loin des faits concrets - et affreux

- qui doivent être jugés à Arlon. A cet égard il faut rapprocher Le Dossier Nihoul, procès

Dutroux,

croire),

Dutroux, te

veel

de om

Herwig te

les enjeux du

Lerouge

geloven

(EPO),

(trop

pour

du

y

écrit par le député Vlaams Blok Gerolf

Annemans. Le premier auteur, qui a pioché allègre­

163

ment dans le dossier d'instruction, détaille, noms

à l'appui, tous les trafics d'influence dans les­ quels a trempé Michel Nihoul, pour etayer la thèse

de 1'

«organisation criminelle à quatre» chère à

M° Georges-Henri Beauthier et Jan Fermon. On ne

peut s'empêcher de penser que ceux-ci entraînent leur jeune cliente, Laetitia Delhez, dans un mau­ vais feuilleton pour assouvir leurs passions poli­ tiques - d'extrême gauche dans le cas de Jan Fer­

mon (Parti du travail de Belgique). Quant au député d'extrême droite,

il a tout

intérêt à jeter le discrédit sur la justice et la police et, en particulier, celles du sud du pays. Child Focus a repoussé son offre de lui reverser

le bénéfice des ventes de son livre.

Certaines

proximités sont vraiment dérangeantes.

Le plus grand moment Ce fut le moment le plus intense du procès, le moment le plus fort, les avocats Savelkoul et Vercraeye se lèveront pour décla­

rer: «A la demande des parents de Eejje, nous, les avocats de la famille Lambrechts voulons faire une déclaration: Eefje était une jeune fille qui voulait devenir journaliste, éprise de justice, elle

naurait pas accepté quà son procès un innocent soit condamné,

cest pourquoi nous nous désistons de notre partie civile contre monsieur Nihoul».

Vous ne pouvez pas vous imaginer ce qui se passe dans votre tête dans ce cas, vous ne réalisez pas tout de suite, et même si je sais que je suis innocent, pour la première fois depuis 8 ans 164

dans ce procès, je viens de découvrir qu’il y a encore des gens intelligents et foncièrement honnêtes. Aujourd’hui, trois ans après ce procès, il ne se passe pas une

semaine sans que je ne pense à ce moment. Merci Eefje, merci, car là où tu es, et où tu ne peux qu’être

heureuse, tu as certainement joué un rôle dans tout cela.

Merci monsieur et madame Lambrechts, je vous aime, car sous ma veste il y a un cœur qui a souffert mais qui n’oublie

pas.

Les témoins douteux Il n’y a pas eu que les enlèvements fait par Dutroux que l’on

me reprochera, il y a aussi l’enlèvement de la petite Loubna Benaïssa, retrouvée morte dans le fond du garage des Dero-

chette.

Egalement le meurtre de la «champignonnière» où

Regina Louf m’accusa d’avoir assasiné la jeune Christine Van Hees.

L’affaire Brichet dans laquelle Marie-Noelle Bouzet n’hésitait

pas à m’accuser ouvertement d’avoir enlevé sa fille alors qu’on retrouvera le cadavre de cet enfant chez Michel Fourniret.

Et puis l’affaire Gijsbrechts, l’affaire Kim et Ken puis d’autres et encore d’autres...

Mais l’affaire Dutroux compte également ses «vedettes» du

témoignage. Suite à l’idée du juge Connerotte d’ouvrir un numéro gratuit, incitant alors le peuple à la délation, il y a eu plus de mille témoins. Je ne les citerai pas tous, mais j’en repren­ drai quelques-uns choisis au hasard parmi les plus tenaces. 165

La famille Olphavens - Van Oost La palme d’or revient certainement à la famille OlphavensVan Oost qui demeure à Herent près de Gand et qui a été sur­

nommée par les médias «la famille flamande». Les trois membres de cette famille, le père Jean, la mère

Jenny et leur fils Dimitri déclareront que le 9 août 1996, jour de l’enlèvement de Laetitia, ils m’avaient vu à la piscine de Bertrix,

accompagné de Dutroux, Lelièvre, Martin et par la suite de

Monique Cherton. La mémoire de Jenny Van Oost se réveillait au fùr et à mesure des nouveaux éléments révélés dans la presse!

L’équipe «Au nom de la loi» de la RTBF fera une investi­ gation approfondie sur l’affaire et démolira complètement les

arguments de la famille Olphavens - Van Oost qui s’avèrent

des plus fantaisistes: le 9 août 1996 j’étais dans l’impossibilité

d’être à Bertrix. Suite à cette émission, Jenny Van Oost voulu se désister et c’est dans ce but quelle rencontrera le procureur Bourlet.

A l’issue de son entretien avec Bourlet elle change son témoignage, ce n’est plus le 9 mais le 8 août quelle nous a vu

à Bertrix.

Les palabres reprendront avec les enquêteurs, qui plus de deux ans après les faits me questionneront sur le 8.

On recommence et il se fait qu’après des mois d’enquête, j’ai dû prouver que le 8 je ne pouvais pas non plus être à Ber­

trix. Toute la matinée je suis au bureau d’où je passe de nom­ breux coups de téléphone, et vous vous imaginez bien que les enquêteurs ont, pour le moins, décortiqué la liste et n’ont pas

ménagé les correspondants que j’avais contacté, pour savoir si

c’était vraiment moi au bout du fil, l’après midi je suis avec Michel Vander Elst. 166

Il sera démontré que le 8 je n étais pas non plus à Bertrix. Alors Jenny Van Oost suivi de son mari dévoile le 3 juin 2000

(4 ans après) qu’ils n’étaient pas seuls et que deux autres témoins, voisins du camping, les accompagnaient, il s’agit de

la famille Van Malder-Forment. Questionnés, ces deux personnes déclarent qu’elles accompagnaient bien les Olphavens-Van Oost à la piscine de

Bertrix le 8, mais ils n’ont vu personne! Ils s’étonnent même d’avoir appris par la presse les décla­

rations de leurs voisins de camping, alors que ceux-ci ne leur

avaient jamais parlé de cette affaire. Ils déclareront qu’ils n’ont jamais vu ni Dutroux, ni Lelièvre ni Martin ni moi, ni personne du groupe cité par la

fameuse Jenny. C’était mal connaître Jenny qui ne s’arrêtera pas là, elle

déclare le 24 août 2000 que « Van Malder connaît Nihoul du

club «le Dolo» à Bruxelles.». Il sera prouvé que tout est faux.

Savez-vous que déjà le 21 mars 1977, après avoir pris connaissance d’un article dans le quotidien «Het Laatste

Nieuws» la famille Olphavens-Van Ooost s’est rendue à la BSR de Louvain pour apporter leur témoignage dans la dispa­ rition de Nathalie Gijsbrechts. Après l’avoir auditionnée à

plusieurs reprises, les enquêteurs Louvanistes déclareront que

c’est une demeurée et en feront part à Michel Bourlet qui n’en tiendra pas compte.

A ces délires, il faut ajouter que José Maschelin, journa­

liste au journal «Het Laatste Nieuws», suite à un article paru

dans la presse où il était question qu’un joueur de football avait été frappé par l’arbitre, fut contacté par Jenny Van Oost

qui lui signalait que son fils avait été frappé par un arbitre lors

du dernier match de football. 167

Mais pour conclure le volet de ces témoins privilégiés par

Michel Bourlet, il faut lire la lettre de 8 pages qu’adressait monsieur le juge Langlois au procureur Bourlet en date du 5 mars 2001. Cette missive reprenait tous les points évoqués ci dessus en y apportant tous les compléments d’éléments

nécessaires, il termine sa lettre en disant notamment:

Extrait

de

la

lettre

du

05.03.2001

du

juge Langlois au procureur Bourlet: Enfin et pour autant que de besoin,

votre

connaissance

février dernier, CONINCK,

que

dans

je porte à

son édition du

26

sous la signature de Douglas DE

le journal «de Morgen» publie un article

sous le titre «les enquêteurs de Neufchâteau crai­ gnent que dans l'affaire Nihoul,

ils n'aient été

induits en erreur par Belgacom»;

Je vous joins copie de cet article et de sa copie

conforme.

Lors de la Chambre du Conseil du 09 février der­

nier,

j'ai

évoqué

1'exploitation

du

mon

intention de

témoignage

poursuivre

OLPHAVENS

et

de

conclure et synthétiser le volet «Reconnaissance» préalable à l'enlèvement de Laetitia DELHEZ

(pt

IIA de la synthèse du dossier 86/96).

Le hasard a voulu que l'article précité invoque

l'alibi de Michel NIHOUL pour la journée du 08 août 1996,

des

le témoignage OLPHAVENS,

données

Belgacom

et

la

H. Jaspar, 99 à Saint-Gilles.

168

la fiabilité

téléphonie

Avenue

Je m'insurge contre de telles pratiques qui relè­

vent,

une nouvelle fois soit d'une violation du

secret de l'instruction ou de l'article 460 ter du code pénal en mettant en cause des personnes nom­

mément citées ainsi qu'un opérateur téléphonique qui a toujours collaboré de manière positive avec

1'instruction.

Le juge d’instruction s’insurge donc officiellement contre les

pratiques du procureur Bourlet, pratiques, il est vrai, très peu reluisantes. C’est également la preuve du «système Bourlet» que je

dénonce. Dans les 450.000 pages du dossier, je n’ai pas trouvé de

réponse du procureur à cette lettre, il préférera probablement contenir sa vengeance pour critiquer le juge Langlois lors du procès.

Philippe Saussez et sa femme Nadia. Pompistes à la station Esso route de Neufchâteau à Arlon, ces deux témoins déclaraient que le 8 ou le 9 août j’avais fait le plein d’essence à leur station. Ils préciseront que j’avais payé au moyen d’une carte de crédit établie à mon nom.

Comme je n’ai jamais eu de carte de crédit à mon nom, ni jamais mis les pieds dans cette station, je conteste donc les

faits. Le juge d’instruction fait vérifier toutes les cartes qui ont été employées dans cette station pour la période couvrant le

mois qui précède et suit l’enlèvement de Laetitia. 169

Aucune carte ne porte mon nom, de plus toutes les autres cartes appartiennent à des personnes ou des sociétés qui

reconnaissent avoir pris de l’essence à cette station. Ces deux témoins nébuleux viendront à la Cour d’Assises témoigner sous serment qu’il s’agissait bien de moi et répéte­ rons, sans aucune honte, que la carte était libellée à mon nom!

Je pense que ces deux gugusses devraient se méfier des

vapeurs d’essence et, en tout cas, consulter d’urgence un oph­ talmologue.

Comme pratiquement tous les gens qui viennent de

Bruxelles et qui passent à Arlon ou au Luxembourg, je fais le

plein de ma voiture soit à Martelange, ou dans le Luxembourg qui se trouve à un jet de pierre d’Arlon, et où l’essence est très

nettement moins chère. Il serait stupide d’aller payer le prix

fort à Arlon. Les avocats Beauthier et Fermon qui feront feu de tout bois, plaideront que j’ai trafiqué une carte volée. C’est com­

plètement ridicule car si je pensais à réaliser un tel méfait, je n’irai pas idiotement écrire mon nom sur la carte, de plus

pour réaliser ce genre de chose, il faut être équipé.

Daniel Roiseux Ce témoin contactera le 9 décembre 1999, soit plus de trois ans après les faits, son neveu qui est gendarme à la brigade de Neufchâteau. Aux gendarmes qui l’entendront il déclarera m’avoir vu

avec Dutroux dans une camionnette blanche à Bertrix, le jour

de l’enlèvement de Laetitia.

Lorsqu’on lui demande pourquoi il a attendu plus de 170

trois ans pour faire cette déclaration, il dira «C'est en appre­ nant la libération de Nihoul que je me suis dit que quelque chose n allait pas et que je me suis confié à mon neveu».

Cela s’appelle un «faux témoignage» et c’est punissable de prison, mais voilà pour cela il aurait fallu que le procureur

Bourlet lève son petit doigt et cela ne l’intéressait pas.

Réquisitoires et plaidoiries LES RÉQUISITOIRES

A la cour d’assises, c’est le procureur général qui requiert le

premier et il est seul. Dans ce procès, tout est différent, l’on a

demandé au procureur du Roi Bourlet de siéger aux côtés du

procureur général Andries. Les bruits de couloir disent que

c’est du au fait qu’aucun procureur général ne veut défendre la thèse de Bourlet, et notamment «les grands réseaux». Un journaliste très crédible m’a certifié que le procureur général Andries lui aurait déclaré «ne pas être d’accord du tout

avec la requête de Bourlet». Si c’est le cas, et je pense que ce

l’est, je dirais simplement à monsieur Andries que moi, Nihoul, lorsque je ne suis pas d’accord avec un écrit, je n’ap­

pose pas ma signature dessus, mais vous, vous l’avez fait. Tout le monde attend avec impatience ce réquisitoire de

Bourlet, et tous seront déçus.

Déçus par le manque de professionnalisme et de préci­

sion de Bourlet qui lira mot à mot son long et ennuyeux réquisitoire d’une voix monocorde et en se reprenant conti­

nuellement.

Déçus par le ton de vengeance à mon égard de ce procu­ 171

reur qui n’apportera aucune preuve matérielle contre moi mais qui entraînera les membres du jury dans un éternel

brouillard.

La presse titrera: «LE REQUISITOIRE FEROCE DE MICHEL BOURLET» et aussi: «CONTRE NIHOUL, BOURLET SORT SON BAZOOKA».

En effet, Michel Bourlet s’évertuera durant de nombreuses heures à démolir l’enquête du juge d’instruction Langlois sur

les points me concernant, non pas en apportant des preuves contraires mais en plantant le doute pour l’ériger en convic­

tion de culpabilité contre moi.

En restant toujours dans le vague, il dira même aux

membres du jury «Si vous avez la conviction que Dutroux a enlevé Julie et Métissa, vous pouvez avoir la même conviction que Nihoul a participé à l’enlèvement de Laetitia». Réquisitoire miséreux, indigne d’un procureur et d’une

cour d’assises, il est vrai que Bourlet n’a jamais représenté le ministère public que dans son petit bled de Neufchâteau, que

son passage en cour d’assises est une première et, heureuse­ ment pour la justice, une dernière. Mais cela n’empêche que si ce procureur avait eu un minimum de fierté professionnelle, il ne se serait pas acharné de la sorte pour essayer d’abattre un homme innocent. Le réquisitoire du procureur général Andries qui suivra sera

tout autre et démontrera les grandes qualités de cet homme. «L’association de malfaiteurs avec Nihoul? Il ne faut pas se

plonger dans de sulfureux fantasmes de réseaux tentaculaires ou de

l’implication de gens importants» Il démontre ainsi qu’il n’est 172

pas d’accord avec le procureur Bourlet qui, dans les premiers

mois de l’enquête, avait annoncé, à plusieurs journalistes, l’ar­ restation de nombreuses personnalités que l’on ramènerait à

Neufchâteau par autocars entiers. Quant à ma participation à l’enlèvement de Laetitia, il n’en soufflera pas un mot, alors que

Bourlet traduira la position du ministère public bicéphale. Il s’adressera encore au jury en leur expliquant sa philo­

sophie «Qu est-ce que la justice? Faut-il confondre le nom dune vertu avec celle d'une institution? Comme institution, la justice

n'a rien de particulièrement vertueux, c'est une entreprise humaine. Il n'y a pas de raison que la justice fonctionne mieux que n importe quelle autre organisation humaine.» Ou encore

«La justice cest se méfier de ses impressions, de ses émotions.» Il évoquera aussi les progrès fulgurants de la police scien­ tifique, le caractère incontournable des analyses ADN. Mais il

rappellera «Malgré tout cela, qu aurions-nous fait si Benoit

Tinant ne nous avait pas donné les éléments de la plaque de

Dutroux et si le chefd'enquête Michel Demoulin n'était pas par­ venu à obtenir les aveux de Dutroux?»

Merveilleuse prestation de cet avocat général qui fut

saluée par tous les avocats de la défense et par certains de la partie civile.

173

Les plaidoiries des parties civiles LA FAMILLE LAMBRECHTS

Les avocats de la famille Lambrechts sont au nombre de trois: le

bâtonnier Luc Savelkoul, les avocats Joris Vercraye et Mark Huyghes seront constants dans l’attitude qu’ils adoptent depuis

le début du procès: sobriété, connaissance parfaite du dossier,

justesse des propos et fermeté. De grands avocats. Le père Lam­ brechts, contrairement à Marchai ne fera aucune déclaration, je l’ai observé tout le long du procès, cet homme, admirablement

digne, n’aura aucune attitude revancharde, il est abattu par la douleur, il souffre en silence, se demande pourquoi cela est

arrivé à sa fille et ne comprendra probablement jamais. LA FAMILLE MARCHAL

L’avocat Quirynen, qui représente la famille Marchai ne pourra s’empêcher de tomber dans l’ordinaire et de plaider à côté du dossier. Il terminera en demandant à la cour si Paul Marchai

pouvait prendre la parole en flamand, ce qui sera accepté. Marchai, fidèle à lui-même, ne put s’empêcher de déferler une litanie de grossièretés. Espérons que ça lui a fait du bien. LA FAMILLE DARDENNE

Sabine Dardenne était défendue par les avocats Jean Philippe Rivière etet Céline Pariss Ce fut un très grand moment, on

aurait pu entendre une mouche voler, toute la salle suivait et

dégustait les mots de ces avocats, mais particulièrement ceux de

l’avocat Rivière. 174

LA FAMILLE DELHEZ

Puis ce fut au tour des avocats Beauthier et Fermon qui repré­

sentaient Laetitia. Deux jours de plaidoiries pour ne rien apporter à ce pro­

cès si ce n’est une haine non dissimulée à mon égard. Je connaissais la pauvreté des plaidoiries de ces deux comparses,

mais là, on était gâté. Tout comme certains membres du jury, j’ai failli m’endormir à plusieurs reprises.

Les plaidoiries de la défense MARC DUTROUX

C’est à monsieur le bâtonnier Xavier Magnée que revint l’honneur d’ouvrir le tir.

Tâche très difficile car non seulement il s’agit de faits horribles, mais de plus son client est en aveux complets. Le Bâtonnier Magnée n’est pas n’importe qui, il choisira de

mettre un doute dans l’esprit des jurés en leur expliquant que l’enquête n’est pas terminée, qu’il y a certainement d’autres cou­

pables que ceux qui sont ici devant les Assises. Il suggérera au Jury de déclarer qu’ils ne peuvent donc juger car c’est leur droit. Toutefois, il faut se rappeler que Marc Dutroux avait

lâché l’irréparable, en effet, lorsque le Président Goux lui posera la question d’avoir des détails sur les réseaux, Dutroux

vexé répondra «Maisje suis un solitaire moi, je nai besoin de per­ sonne». A ce moment tout le travail de son avocat s’écroulait.

L’avocate Martine Praet plaidera pour la galerie, person­ nellement je ne la considère pas comme une grande pénaliste, 175

beaucoup de journalistes disaient qu’ elle était venue pour faire admirer sa nouvelle plastique suite aux opérations de chirur­

gie esthétique qu elle avait subies. Certains l’avaient baptisée «La Barbie». Maître Ronny Baudewijn était le troisième plaideur pour

Dutroux. Il plaidera avec un chapeau de magicien, sortant des

objets du chapeau comme un lapin, tout le monde riait, il

essayera ainsi d’attirer l’attention du jury et de détendre l’at­

mosphère. Il faut cependant préciser qu’il donnera une vue

correcte du mental de son client en ne l’épargnant pas, il déclarera même «Dutroux est un handicapé immatériel, un être

froid comme un poisson». MICHELLE MARTIN

Quatre avocats défendent Michelle Martin:

Thierry Bayet, Sébastien Schmitz, Sarah Pollet et Thierry Moreau.

Maître Sébastien Schmitz qui entame les plaidoiries s’en référera à l’illustre avocat français Robert Badinter, l’homme

qui a fait abolir la peine de mort en France. «Badinter a écrit

que la défense d'un accusé peut-être totale sans être insensible à la douleur des victimes. Notre défense de Michelle Martin sera totale

mais nous sommes très sensibles à leur douleur et nous la respectons. Nous avons de l'admiration pour leur courage et leur dignités. On avait compris que les plaideurs de Michelle Martin

allaient jouer dans l’humain. «Nous n avons pas pour but de justifier les actes commis par notre cliente. Notre rôle est d'abord de comprendre pourquoi cette

femme se retrouve devant vous». 176

Maître Thierry Bayet lui succédera pour s’attarder sur les six volets et les huit préventions pour lesquelles sa cliente doit être jugée. En bon technicien, il démontera toutes les accusa­

tions l’une après l’autre. Il dira aux jurés «Ne soyez pas guidés par votre cœur mais par votre tête», «Assumer la défense de la

femme la plus haïe du pays n'est pas chose facile. Mais c'est vous qui avez le fardeau le plus lourd à porter».

Maître Sarah Pollet commencera sa plaidoirie par ces paroles fortes « Comment une femme, mère de famille a t'elle pu

laisser faire une telle horreur? Pourquoi n'a Pelle pas alerté les autorités? Je n'ai pas de réponse». Puis «Michelle Martin cherche,

elle aussi, la réponse à cette question tous les jours.» L’avocate s’évertuera dans une plaidoirie très écoutée à démontrer que

sa cliente était ensorcelée par son mari. «C'est un psychopathe, un manipulateur, un menteur. Il s'entoure de personnes faibles et

jouit quand il a une emprise totale sur quelqu'un.». Puis vint Maître Thierry Moreau qui fit une prestation

exceptionnelle. Cet avocat a capté la cour d’une manière

incroyable.

« Quandfai rencontré la première fois Michelle Martin, elle m'a dit: Depuis que je suis en prison, je suis libre... Car en pri­ son Martin s'est affranchie de l'esclavage dans lequel Marc Dutroux

la maintenait, et aujourd'hui elle a terriblement honte. Elle sait

quelle est coupable, elle se sent coupable et elle se dit coupable. Elle ne veut pas échapper à ses responsabilités.» Il s’adressera aussi à

Sabine et Laetitia «Elle n'a pas votre courage, elle n'a pas votre per­ sonnalité, elle estfaible.» Il démontre ainsi qu’il ne demande pas

au jury de trancher sur la culpabilité de sa cliente mais qu’il faut

juger ses actes avec des circonstances atténuantes.

177

MICHEL LELIÈVRE

C’est l’avocat Bruxellois Olivier Slusny qui, aidé des avocats

Alexis Lejeune et Marie Jeanne Kayijuka plaidera pour Leliè­

vre, l’avocat Slusny quant à lui, assure la défense de Lelièvre depuis le début.

Il parlera d’abord de son client qui semble toujours affi­

cher un léger sourire « Un rictus, pas un sourire, le rictus de la honte». Puis il poursuivra «Il a conscience du tort causé, de l'énor­ mité de la tâche qui consiste à réparer. Ses sentiments restent pudi­

ques. Il ne veut pas donner l'impression qu'il cherche à se blanchir,

il ne veut pas faire étalage de demandes de pardon, mais une fois le procès terminé, ilfera sa démarche de manière privée».

L’avocat dira également «ce garçon est un faible, un déprimé,

un suiveur; il estfasciné par la puissance maléfique de Dutroux. Il tombe dans le panneau de Dutroux qui lui parle de réseau. Par

induction il pense que Dutroux enlève pour de l'argent». MICHEL NIHOUL

C’est Frédéric Clément de Cléty qui ouvrira le tir, ce sera le

moment le plus attendu par tous. Il plaidera d’une manière magistrale.

Il est évident que je ne saurai être tout-à-fait objectif sur la prestation de mes avocats. Aussi j’ai préféré rapporter ce

qu’ont écrit certains journalistes indépendants qui ont suivi les plaidoiries, journalistes que je ne connais absolument pas.

Catherine Ernens relatera très bien la situation en écri­ vant de M° Clément de Cléty:

178

«Il plaide. Il scande. Il respire entre les mots, les répète, appuie pour faire exploser leur sens,

pour

faire

suinter

l'innocence.



Clément

de

Cléty a passé sa matinée à déminer le champ de

bataille au milieu duquel Nihoul est assis depuis

Il a continué sur sa lancée l'après-

huit ans. midi.

Il

a enfoncé

le

clou qui

doit mener son

client à 1'acquittement.»

Daniel Lapraille décortiquera la plaidoirie comme suit: Il surprend par l'attaque de sa plaidoirie.



Frédéric Clément de Cléty décline avec talent et

émotion le Roi des Aulnes, de Johann Wolfgang von

Goethe.

«Qui chevauche si tard dans la nuit et le

vent.,.» Dans ce «dossier de laideur»,

le défenseur de

Michel Nihoul projette devant les jurés l'image de ce père qui galope dans le brouillard,

enfant

les

dans

brouillard,

bras,

comme

les

qui

se

meurt.

enquêteurs

avec son

«Dans

erraient

le

sur

d'autres pistes, tandis que des enfants mourraient

«, dit l'avocat. M° Clément de Cléty a demandé aux jurés, malgré les gens qui ventilent le brouil­ lard, de suivre la rivière qu'est le procès et sa source qu'est l'acte d'accusation. «Le brouillard,

c'est comme le carré blanc, des faillites vieilles de 20 ans, des histoires de faux papiers ou de car­ tes de crédit qui n'ont jamais existé»,

précise

1'avocat.

Chevelure mi-longue tirée vers 1'arrière,



Clément de Cléty plaide juste, marque des points,

recentre le procès. «Un procès au cours duquel je n'ai rien appris, j'aurai pu plaider le 15 octobre 1996», dit-il.

179

L'avocat évoque ce dossier Dutroux, devenu un

phénomène de société,

«d'une société belge qui a

vacillé sur ses bases».

raisons:

«Le

terreau

L'avocat en énumère les

fertile d'une Belgique en

crise; le sujet rassembleur que constitue le des­

tin des enfants;

l'irréparable «si on me laisse

faire» du procureur Bourlet qui a généré les spec­ tres des protections et des réseaux; les Mercedes

blindées des deux magistrats ; les treize mandats

d'arrêt décernés, dont certains délivrés avec dés­ involture; le 0800, appel à la délation, une honte

à la démocratie; une démagogie de politicards qui

ont fait carrière sur le cadavre des victimes avec des questions à mille voix lors de l'enquête par­

lementaire. » A

l'entendre,

même

s'il

avoue

n'avoir

rien

appris en cours de procès, M° de Clety a tout de

même assisté à des scènes qu'il n'avait jamais

vues: «Un enquêteur du roi qui torpille ses enquê­

teurs; un juge d'instruction mis à la question,

des avocats qui affirment que des enquêteurs par­ ticipent à

un état

totalitaire,

des enquêteurs

déloyaux. » On apprendra aussi que Frédéric de Clety préfé­

rerait presque plaider en

Iran ou en Corée du

Nord. «On vous demande de condamner Michel Nihoul,

car il ne peut pas prouver que... parce qu'il n'est pas impossible que... parce que rien ne permet d'ex­ clure que...»

«On

a

renversé

les

règles

de

la procédure»

déclare le Conseil «Or, personne en autant d'an­ nées, n'a pu prouver, démontrer qu'il y a la moin­ dre raison de croire que Michel Nihoul ait parti­

cipé,

ou

même

seulement

l'enlèvement de Laetitia. »

180

eu

connaissance,

à

Comme il l'a fait en commentaires déjà, M° de Clety a facilement mis à mal les témoignages «des

témoins

supers

crédibles,

dont

les

témoignages

sont incompatibles».

n'est

«Ce

endroit,

jamais

la

à

même heure,

au

même

dans le même véhicule et avec les mêmes

habits», remarque le défenseur de Michel Nihoul.

Téléphonie à l'appui, il a balayé tous ces témoi­

gnages,

rappelant

le

farfelu

caractère

de

la

fameuse famille flamande qui a parlé du 9 août

durant trois ans avant de dire que c'était le 8

août.

«Une thèse absurde»,

rappelle

les

témoignages

conclut l'avocat,

des

autres

qui

accusés,

affirmant haut et fort que Nihoul n'est en rien

concerné par les enlèvements. L'avocat met aussi en évidence les conclusions de Jacques Langlois, juge d'instruction,

du policier Drisket,

ou même

qui n'avait pas ménagé sa

peine pour charger Nihoul lors de l'audience. «Or,

en lisant à l'endroit et en français la conclusion

de l'enquêteur, on comprend qu'il explique que la remise des pilules d'ecstasy par Nihoul à Lelièvre

n'a rien à voir avec l'enlèvement de Laetitia Delhez»,

dit

l'avocat.

Les

échanges

téléphoniques

concernaient bien la voiture à réparer. «On a pas de langage codé avec le fils de Marc Dutroux ou sa

grand-mère»,

ironise l'avocat,

qui plaide l'ac­

quittement pour l'enlèvement de la Bertrigeoise.

Il n’y a rien à rajouter, c’était clair, précis et grandiose. Merveil­ leux plaideur, Frédéric Clément de Cléty a non seulement

démontré qu’il est un grand avocat, mais qu’il a un esprit excep­

tionnel de synthèse et qu’il connaît parfaitement son dossier. 181

Je laisserai à nouveau la parole à Catherine Ernens pour commenter la plaidoirie de Maître Xavier Attout. Elle titrera l’article «Appel à la logique». Maître Attout, l'autre avocat de Nihoul, a terminé

la

journée

par

une

qui

plaidoirie

a

duré

une

heure. Il fait appel à la logique des Jurés. Il a aussi voulu expliquer «les règles du jeu», c'est à

dire ce que disent les lois. Tout ceci dans la même

perspective: 1'acquittement de Nihoul. Il a soulevé un problème de preuves,

qui ne

permet pas de lever le doute. Il avance en exemple les contradictions entre les différents témoigna­

ges,

notamment quant à la présence de Nihoul à

Bertrix au début du mois d'août 1996.



Attout

logique,

demande

aux jurés

de

raisonner avec

«pensez aux témoins de moralité qui nous

ont tous dit que mon client n'était pas capable de commettre les faits qu'on lui reproche. Il n'est, de plus pas pédophile et n'aurait donc aucun inté­

rêt à enlever des enfants. Enfin, allé à Marcinelle»,

il n'est jamais

a-t-il remarqué.

«On a voulu

remplir deux autocars de pédophiles. Et puis fina­ lement il n'y avait plus que Nihoul dans un auto­ car et il n'est même pas pédophile.»

Il a fait son bilan des divergences sur l'affaire. «Nous avons ici deux procureurs,

c'est un luxe. Ce

devrait être plus simple. Mais non. M. Bourlet a été

beaucoup plus loin que M. Andries. Vous avez aussi

entendu les parties civiles,

leurs clivages.

avez entendu un parent se désister de sa

Vous

charge

contre Nihoul. Il ne fait pas ça pour le plaisir. Vous avez aussi entendu les avocats de Laetitia.»

182

Xavier Attout est enfin passé à «ce à quoi il tenait le plus». Il s'est adressé aux victimes et

à leur famille.»

C'est le grand-père de treize

petits enfants qui vous parle». Il s'est emporté. Il s'est avancé vers la cage de Dutroux.

«Si on

pouvait mettre toutes nos larmes ensemble et les placarder pour qu'on ne voie plus Dutroux.»

Il ne fallait rien ajouter, ces deux ténors ont été parfaitement

complémentaires et ont clairement expliqué la situation aux

jurés sans les massacrer par des plaidoiries interminables.

Le dernier mot Le dernier mot revient toujours aux accusés qui peuvent ainsi émettre soit une opinion, soit un complément de plaidoirie. Marc Dutroux qui avait laissé entendre qu’il parlerait lon­

guement, voire quelques jours, fut déstabilisé par le Président qui lui donnera la parole le vendredi soir. Il semble qu’il avait

écrit des dizaines de pages pour ce faire mais ne les avait pas sur

lui. Il commencera alors a «vouloir refaire le procès» en m’atta­

quant. Mes avocats réagissent et le Bâtonnier Magnée, qui se rend compte que Dutroux est en train de délirer, demande alors

au Président de pouvoir consulter son client quelques minutes ce qui lui sera accordé.

A la reprise Dutroux lira quelques textes ridicules et ennuyeux, ce qui ne fera que lui apporter l’antipathie des membres du jury.

Michelle Martin et Michel Lelièvre furent très brefs puis vint mon tour. 183

Il est établi dans le code belge que les jurés se retirent après les dernières paroles des accusés pour directement déli­

bérer et ainsi, ne pas être influencés par des tiers extérieurs. Mais dans ce procès ce ne sera pas le cas.

Je m’étais dit que j’expliquerai aux membres du jury tout le système d’opération d’infiltration mis en place avec la gen­

darmerie. Mais voilà, nous sommes vendredi soir et, il sera confirmé que les membres du jury rentreraient chez eux

durant le week-end, alors qu’allait-il se passer? Et bien ce qui s’est passé, à savoir que des journalistes

comme Pascal Vrebos de RTL, qui ne respecte pas grand chose, ont donné leur avis sur ma culpabilité lors du débat télévisé dominical. Cette attitude indigne n’était-elle pas pro­

grammée tout simplement pour influencer les membres du jury? Poser la question c’est déjà y répondre. D’autres le feront dans les colonnes des journaux.

Heureusement que j’avais, finalement décidé de me taire le vendredi. De ne pas donner à ces minables la possibilité de

retourner mes paroles contre moi et, lorsque j’ai vu et lu, je

me dis que j’avais bien fait. Mais dans mon esprit tournera toujours la même question: dans cette affaire, rien ne s’est

déroulé normalement, pourquoi?

Retour à Arlon Le lundi matin tout le monde est présent et le président Goux expliquera très bien aux jurés la méthode à suivre pour rendre leur jugement. Les membres du jury se retireront à la caserne militaire et

y resteront trois jours. 184

L’attente ne me paraît pas trop difficile en ce sens que j’estime que si les membres du jury veulent être objectifs, ils

ne peuvent, en aucun cas, décider trop rapidement. Je profite

de ces trois jours pour me balader et essayer d’oublier l’enjeu terrible de ce procès. Je suis accompagné d’un ami, qui me

sert de chauffeur, vu que depuis mes problèmes cardiaques

arrivés durant le procès, les médecins m’interdisent de

conduire. Je m’évaderai au Luxembourg et à la frontière fran­ çaise. Je devrai employer des méthodes de Sioux pour échap­

per aux caméras des télévisions. N’oublions pas qu’il m’était interdit de parler aux médias durant toute la durée du procès.

Le président Goux avait annoncé que l’on rappellerait toutes les parties deux heures avant le délibéré.

Le jury revient pour délibérer Après trois jours, nous sommes tous rappelés pour entendre la décision du jury. Escorté par la police comme chaque jour durant ce procès, je reviens au palais de justice d’Arlon. Je pense innocemment

que cela va aller très vite, mais là, je me trompe lourdement. Le système est tout autre, les prévenus n’entrent pas dans

la salle d’audience pour entendre la conclusion des jurés, non ils attendent dans une pièce adjointe. Comme il y a plus de quatre-cents questions auxquelles doivent répondre les mem­

bres du Jury, cela prend du temps. Cela durera trop longtemps, et puis les Jurés avaient

oubliés de répondre à une sous-question et devront encore se retirer durant une heure pour rendre leur verdict.

185

Cette attente avant de connaître le verdict fut, à mon

souvenir, un des moments les plus pénibles à endurer. Je suis assis dans une pièce adjacente au tribunal, à côté

d’un gendarme sympathique qui a, comme moi, suivi le procès et qui essaie de m’encourager. Mais... qu’en est-il réellement? Les pires questions me passent par la tête, «Le jury a-t-il com­

pris que j’étais innocent? N’aurais-je pas du dire ceci ou cela?» C’est horrible ce moment d’expectative qui n’en finit pas.

Vous savez, je vous l’ai déjà avoué, j’ai une grande gueule, mais là, je l’ai fermée et j’ai prié. J’ai imploré ce Dieu que j’avais délaissé depuis de nombreuses années pour lui dire que lui, qui

savait tout, était le seul capable de faire surgir la vérité et faire en sorte que l’on me déclare innocent comme je le méritais.

Le verdict Je rentre comme à l’accoutumée le premier dans cette cage en verre, je comparais toujours libre. Les trois autres détenus arri­

vent menottés, je les observe, Lelièvre et Martin ont visible­ ment peur, Dutroux comme à l’accoutumée n’a aucune expression, il regarde tout le monde de haut comme un

conquistador. Le verdict tombe, Dutroux est coupable de tout: kidnap­ peur, geôlier, violeur, chef de bande, assassin.

Le jury n’aura aucune pitié pour Michelle Martin, cou­ pable comme coauteur des séquestrations des six enfants, et

du viol de Yancka, elle est également reconnue coupable de faire partie de la bande dont Dutroux était le chef. Michel Lelièvre sera sévèrement jugé également, il n’est

pas un simple complice décide le jury, il est coupable, comme 186

coauteur des enlèvements mais aussi des détentions de An,

Eefje, Sabine et Laetitia. Puis ce fut mon tour, le jury répondra par un vote de

7 contre 5 aux questions 19, 21, 23, 57 et 90. La Cour se retire alors pour délibérer. Après une heure le verdict tombe, les magis­

trats professionnels estiment que je ne suis pas coupable, je suis

donc blanchi complètement pour tout ce qui touche aux enlève­ ments. Le jury retiendra cependant que je fais partie d’une asso­ ciation de malfaiteurs dans le cadre du trafic de drogue. Frédéric Clément de Cléty estime que le jury s’est

«arrangé» pour obtenir ce vote de 7 contre 5, afin de solliciter l’avis de la Cour.

Je regarde le procureur Bourlet, il n’est pas content, il n’a pas été suivi par la Cour.

Sur le parvis du palais de justice la foule se presse ainsi que

de nombreux journalistes qui n’ont pu entrer faute de place. Les avis à mon sujet sont divisés, certains me défendront en déclarant qu’il n’y a aucune preuve contre moi, d’autres,

comme les membres de comités blancs estiment que si je suis là

c’est que je suis coupable, « C'est honteux, ily a quelque chose qui ne tourne pas bien, je suis déçu, je ne m'attendais pas à ça de la part des jurés» crie René Lamelle. Ces gens n’ont décidément

rien compris, et je constate qu’il sera très difficile de faire com­

prendre à ces acharnés que je suis tout simplement innocent. Le verdict a fait voler en éclats la thèse des réseaux. En

dépit des excès de tous ordres, le procès a finalement rempli sa

fonction: purger les émotions. Mais les passions resteront toujours aussi fortes chez mes

détracteurs. Ainsi, on pourra admirer la mauvaise foi, tant de Vincent Decroly que de Serge Moureaux, qui viendront raconter n’importe quoi sur les plateaux de télévisions. 187

Nous sommes à la fin du procès, maintenant le ministère

public va requérir et la défense va plaider, puis la Cour et le

jury vont se retirer pour délibérer et fixer ensemble les peines.

La dernière étape Nous sommes à la seizième semaine du procès, tout le monde

est épuisé, mais ce n’est pas le moment pour les avocats de baisser les bras.

Le procureur Bourlet, qui a perdu une grande bataille essayera de se rattraper en réclamant de 15 à 20 ans contre

moi, je le regarde, pas lui, il m’écœure de plus en plus.

M° Clément de Cléty dira d’abord que le verdict des jurés m’a lavé des lourdes accusations liées aux enlèvements et

aux séquestrations d’enfants. « Un verdict de réconciliation» dit-

il «un verdict qui l'a fait sortir de cette cage de verre et de cette

salle d'assises pour le faire entrer dans une salle plus petite, celle du tribunal correctionnel». Il citera alors les peines infligées dans toutes les villes du pays pour ces faits en correctionnelle

«de 6 mois à 3 ans, je ne vais donc pas vous importuner pendant

des heures puisque nous sommes en correctionnelle». Se tournant alors vers le procureur Bourlet qui a requis de

15 à 20 ans, en le regardant dans les yeux il dit «J'ai envie,

monsieur le procureur, de vous poser la question: La justice ne vous sujfit-elle pas? Vous faut-il en plus la vengeance?», Bourlet

ne le regardait pas.

Il est midi moins trois minutes, le jury et la Cour se reti­

rent, il ne leur aura fallu que deux heures pour tomber d’ac­

cord sur les peines à infliger.

188

Dutroux:

Perpétuité

Martin:

30 ans

Lelièvre:

25 ans

Moi, je reçois 5 ans.

Pour Dutroux, tout le monde est d’accord, pour les autres les membres du jury ont eu la main lourde, mais voilà, en Belgi­

que il est impossible de faire appel. Le procureur Bourlet est dépité, il avait perdu une

bataille, il vient de perdre la guerre contre moi. Ce jour là, il ne me saluera pas. Il sortira de la salle sans piper un mot, je

suppose qu’il se rendait enfin compte qu’il n’était plus qu’un

homme aux théories ridicules. Aujourd’hui, je sais, par plu­ sieurs témoins qui me l’ont rapporté, qu’il continue à croire, comme d’autres, à ses théories fumeuses. Récemment, la

Chambre des mises en accusation de Liège a rendu un arrêt

contraignant le juge Langlois à, encore, effectuer des devoirs

dans le fameux «dossier bis». Six milles cheveux, poils et microtraces dorment dans ce dossier. Des experts vont devoir déterminer si leur analyse est réellement nécessaire. Si c’est le

cas, la justice devra débloquer un budget d’un million d’euros pour y arriver. Etonnante décision de la Chambre des mises

en accusation. Mais, lors de son audition par le Conseil Supé­ rieur de la Justice (CSJ), Cédric Visart de Bocarmé, qui était

candidat aux fonctions de Procureur général à Liège, s’était vu poser une question: «Si vous êtes nommé, allez-vous faire rou­ vrir le Dossier bis?». Au vu de la personne qui posait cette question, il s’y était engagé. Car cette personne n’était autre

que ... Pascal Vrebos! Eh oui, ce triste sire est membre du

CSJ, grâce à ses relations maçonniques, depuis sa création et

189

intervient donc ainsi dans les nominations de magistrats. Il n’y a vraiment qu’en Belgique que l’on peut voir un manipu­ lateur d’opinion siéger, avec voix délibérative, dans un organe

aussi important. Triste pays...

Je me présenterai à la prison de Bruges un mois plus tard.

Mais le parquet me réservait un dernier cadeau. Mon billet

d’écrou stipulait que j’avais été condamné pour enlèvement et trafic d’enfants! Je devrais encore faire intervenir mon avocat

pour faire changer cette horreur.

Après un tiers de ma peine je passerai devant la commis­ sion de libération conditionnelle, dans le dossier il y avait une lettre de ce «cher procureur Bourlet» qui déclarait, à nouveau,

que j’étais coupable de trafic d’êtres humains, ce qui est com­

plètement absurde. Décidément la pilule semble difficile à avaler. Cependant, avec l’aide mon avocat, la commission me libérera sans aucun problème. Quand au substitut Bourlet, je crains qu’il ne reste emprisonné, à perpétuité, dans ses men­

songes et ses fantasmes.

190

23. Et maintenant?

Après une telle expérience, on ne peut que garder un goût amer en bouche car qu’y a t’il de plus révoltant que l’erreur judiciaire.

Comme beaucoup de personnes, moi aussi je pensais

qu’avec les moyens actuels de tels dysfonctionnements ne pouvaient plus arriver, en tout cas pas chez nous, pas dans notre pays. Je n’aurai jamais soupçonné qu’un tel acharnement à

détruire aveuglément, puisse être organisé par des êtres humains dignes de ce nom, et suivi par les médias avec une telle virulence.

Mais je peux parfaitement comprendre, même si je ne l’admets pas, que des gens du peuple, peu habitués aux pro­

blèmes et aux rouages de la justice, puissent dans ces condi­

tions penser qu’il n’y a pas de fumée sans feu. Le seul avantage que je retire de ces horribles évènements

est que les masques de mes ennemis sont tombés, je peux

aujourd’hui compter facilement mes vrais amis et ce, même dans ma famille; Les lâches, les félons et les hypocrites sont décelés, et

tout compte fait cela m’arrange, et ça me coûte moins d’argent. Aujourd’hui, si j’entame une série de procès c’est surtout pour empêcher certaines fripouilles de persister dans leurs

attitudes dangereuses et inadmissibles, mais c’est aussi pour 191

rendre courage à tous ceux qui ont subi des injustices, pour leur dire qu’il faut toujours se battre et ne jamais perdre espoir, même si l’on est le pot de terre contre le pot de fer. Très modestement je continuerai également à donner des

conseils à ceux qui m’en demandent, je suis ouvert à tous les dialogues, à condition qu’ils soient sincères et utiles. C’est

dans ce but que j’ai créé mon site www.michelnihoul.be site que je consulte journellement et par lequel je réponds personnel­

lement aux questions. Je voudrai remercier mes proches et mes amis fidèles qui

le sont resté tout au long de ces dix années d’épreuves horri­ bles. Je pense plus particulièrement à ma compagne Marleen,

qui fut simplement héroïque, à mes enfants et particulière­

ment Jean Michel, Gentiane et Michèle et à mon avocat, Fré­

déric Clement de Clety, qui avec un courage hors du com­ mun, s’est battu à mes côtés pour me défendre avec brio et succès malgré les nombreux obstacles que certains débiles ont

voulu dresser sur sa route, mais aussi à sa merveilleuse colla­ boratrice, l’avocate Sabine Ruytinckx, qui a passé des centai­

nes d’heures, sans rechigner, dans ce pénible dossier. Et enfin, je m’adresse à vous lecteurs, au petit nombre

d’entre vous qui avez compris mon combat, à vous qui n’avez pas préjugé aveuglément de ma culpabilité malgré les horreurs répandues dans les médias, à vous qui m’avez écrit pour me

soutenir ou, qui m’avez soutenu en pensée; Pour vous, je ter­

minerai ce livre en vous adressant trois mots simples mais qui viennent du fond de mon cœur:

«Je vous aime»

192

Michel Nihoul (°1941) était un homme d’affaires à Bruxelles. En août 1996, il est présenté au grand public comme étant le cerveau dans le plus grand scandale de l’histoire de la Belgique: l’affaire Dutroux.

M IC H E L N IH O U L

■Ill l lW'l Ml 'li'rlrJl l 9789089070043 ISBN 9789089070043

TAISEZ-VOUS NIHOUL!

En 1996 la Belgique découvre l’horreur après l’arrestation de Marc Dutroux qui fut reconnu, par la cour d’Assises, comme un dangereux psychopathe criminel. Michel Nihoul fut arrêté et poursuivi comme étant l’organisateur des enlèvements et des massacres cruels des enfants. La grande majorité du peuple le désignait comme «l’ennemi public numéro un». Il a du se battre avec acharnement durant dix ans pour enfin prouver son innocence. Ce livre est un témoignage unique de cet homme qui est le mieux placé pour parler de ces faits: Il nous raconte des détails encore ignorés sur sa vie privée, sur son arrestation, ses interrogatoires, sa détention dans les quartiers de haute sécurité, ses moments difficiles et enfin le procès que la Belgique a qualifié de procès du siècle. Il sera difficile après ce livre écrit sans crainte et sans tabou de dormir tranquillement car vous saurez ce qui se passe autours de nous.