Physiologie de l’entrainement et de la performance sportive: De la pratique à la théorie 2807334938, 9782807334939

Cette cinquième édition mise à jour établit un lien constant entre les bases physiologiques et leurs applications pratiq

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French Pages [332] Year 2021

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Table of contents :
Avant-propos
1 La performance sportive
2 Le muscle : transformateur d’énergie
3 Le système cardiovasculaire : élément clef de la performance sportive
4 La ventilation pendant l’exercice
5 Environnement physique et performance sportive : température et altitude
6 L’entraînement sportif
Unités de mesures, symboles et conversions
Glossaire
Bibliographie
Index
Table des matières
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Physiologie de l’entrainement et de la performance sportive: De la pratique à la théorie
 2807334938, 9782807334939

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Physiologie de l’Entraînement et de la Performance Sportive (PEPS)

Collection dirigée par le Professeure Véronique Billat Physiologiste de l’exercice et de l’entraînement sportif (www.billatratining.com ; https://www.researchgate.net/profile/Veronique-Billat) et le Dr Jean-Pierre Koralsztein, Médecin du Sport, CEO Billatraining https://www.researchgate.net/profile/Jean-Pierre-Koralsztein La collection Sciences et pratiques du sport réunit essentiellement des ouvrages scientifiques et technologiques pour les premier et deuxième cycles universitaires en sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), sans omettre les professionnels du sport (médecins, entraîneurs, sportifs). La collection Sciences et pratiques du sport réunit essentiellement des ouvrages scientifiques et technologiques pour les premier et deuxième cycles universitaires en sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), sans omettre les professionnels du sport (médecins, entraîneurs, sportifs). La collection a pour objectifs de : • consolider un objet scientifique au champ des activités physiques et sportives ; • conforter un champ nouveau de connaissances. Il s’agit d’explorer les activités physiques et sportives pour en faire un objet de recherche et de formation. Cette collection comprend deux séries d’ouvrages, dans deux formats différents : • une série SCIENCES DU SPORT composée d’ouvrages donnant les bases des sciences d’appui appliquées à la performance sportive ; • une série SCIENCES PRATIQUES des activités physiques et sportives (APS) confrontant les savoir-faire aux méthodologies scientifiques cela pour une APS particulière.

Sciences du Sport V. Billat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La physiologie de l’entraînement et de la performance sportive. De la pratique à la théorie (5e édition) V. Billat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . VO2max à l’épreuve du temps N. Boisseau et al . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Femme sportive. Spécificités physiologiques et physiopathologiques F. Carré. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Cardiologie du sport en pratique D.L. Costill, J.H. Wilmore, W.L. Kenney . . . . . . . . . . . . . . . . . Physiologie du sport et de l’exercice. Adaptation physiologique à l’exercice physique (7e édition) R.H. Cox . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Physiologie du sport (3e édition) A. Dellal. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . De l’entraînement à la performance en football A. Dellal. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Une saison de préparation physique de football (2e édition) F. Durand. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Physiologie des sports d’endurance en montagne H.H. Fink, A. Mikesky. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nutrition du sport F. Grappe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Cyclisme et optimisation de la performance. Science et méthodologie de l’entraînement (3e édition) F. Grappe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Puissance et performance en cyclisme. S’entraîner avec des capteurs de puissance P. GrimsHaW et al. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Biomécanique du sport et de l’exercice S. JoWett, D. Lavallée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Psychologie sociale du sport C. Martin. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Tennis. Optimisation de la performance W.D. MC Ardle, F.I. Katch, V.L. Katch . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nutrition & performances sportives T. Paillard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Optimisation de la performance sportive en judo R. Paoletti . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Éducation et motricité. L’Enfant de deux à huit ans J.R. Poortmans, N. Boisseau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Biochimie des activités physiques et sportives (3e édition) D. Rey et al. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le football dans tous ses états D. Riché . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Epinutrition du sportif D. Riché . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Micronutrition, santé et performance P. Robinson . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le coach sportif T.W. Rowland . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Physiologie de l’exercice chez l’enfant C.M. Thiébauld, P. Sprumont. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’Enfant et le sport. Introduction à un traité de médecine du sport chez l’enfant C.M. Thiébauld, P. Sprumont. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Sport après 50 ans E. Van Praagh . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Physiologie du sport : enfant et adolescent

Pratiques du Sport

V. Billat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Entraînement pratique et scientifique à la course à pied V. Billat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’Entrainement en pleine nature V. Billat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Révolution marathon V. Billat. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Révolution trail V. Billat, C. Colliot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Régal et performance pour tous L. Candy, E. Gaildry. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Se préparer aux épreuves écrites du CAPEPS. De la connaissance à l’argumentation K. Jornet, Burgada, F. Durand . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Physiologie des sports d’endurance en montagne G. Millet, F. Brocherie, R. Faiss, O. Girard . . . . . . . . . . . . . . Entraînement en altitude dans les sports collectifs G. Millet, L. Schmitt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . S’entraîner en altitude. Mécanismes, méthodes, exemples, conseils pratiques O. Pauly . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Posture et gainage. Santé et performance O. Pauly . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Posture et musculation. Initiation, rééducation, prévention, performance O. Pauly . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Posture et coordination. Éducation et performance M. Ryan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Nourrir l’endurance

Véronique Billat

Physiologie de l’Entraînement et de la Performance Sportive (PEPS) 5e édition édition augmentée de :

Physiologie & méthodologie de l’entraînement de la pratique à la théorie

Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web : http://www.deboecksuperieur.com

De Boeck Supérieur, 2021 Rue du Bosquet, 7 – B-1348 Louvain-la-Neuve

5e édition

Tous droits réservés sauf pour une citation dans une revue, la reproduction ou l’utilisation de cette ouvrage sous quelque forme que ce soit, connue ou à venir, incluant la xérographie, la photocopie, le stockage d’informations et d’utilisation dans un moteur de recherche, est interdite sans autorisation écrite de l’éditeur.

Dépôt légal : Bibliothèque nationale, Paris : octobre 2021 Bibliothèque royale de Belgique, Bruxelles : 2021/13647/109

ISBN 978‑2-8073‑3493‑9

Avant-propos

L’entraînement a été conçu à partir de l’observation de la compétition lorsque le grand prix Nobel de physiologie Archibald Vivian Hill, dont nous fêterons le centenaire de son prix Nobel, a réussi dès les années 20 à découvrir les métabolismes énergétiques qui sous-tendent la notion de puissance et d’endurance. Depuis, les nouvelles technologies ont donné l’illusion d’un progrès dans les méthodes d’entraînement alors qu’il ne s’agit que de mesures parfois inutiles. La science de l’entraînement requiert en premier lieu d’avoir des hypothèses qui vont être testées, validées par des résultats et des publications scientifiques et pratiques. J’ai écrit ce livre pour donner les bases qui vont permettre d’aller au-delà de vos intuitions habituelles en maîtrisant la physiologie de la performance. Qu’est-il essentiel de connaître pour s’entraîner ? Quels sont les facteurs énergétiques de la performance et leur marge de progression ? Nous partirons donc (chapitre 1), ainsi que le fit Archibald Vivian, de l’analyse de la performance sous l’angle bioénergétique, avec l’analyse des records du monde de la course pour l’espèce humaine (hommes et femmes), puis nous

montrerons qu’il est possible de caractériser une personne par sa propre courbe de performance pour ensuite proposer, de le faire au cœur même de la performance en course à pied. Beaucoup de sport sont à base de course ou tout au moins, l’utilise pour la préparation physique. Cette démarche d’analyse de la course sur toute la plage de vitesse individuelle va permettre d’avoir une quantification précise du profil bioénergétique de la personne (ou de vous-même !). Pour autant, après ce constat de vitesse et de durée, il faut pouvoir entrer dans les causes intimes de ses limites. Dans les chapitres 2, 3 et 4 nous étudierons les facteurs musculaires, cardiaques et respiratoires. Puis, parce que la performance se réalise dans des conditions précises nous aborderons celles particulières de l’altitude et de la température pour envisager également notre empreinte sur cet environnement à travers l’empreinte carbone de notre entraînement et performance. Enfin nous serons prêts à profiter du chapitre 6 qui vous propose un panel complet des tests d’évaluation des facteurs énergétiques de la performance en y ajoutant le facteur perception en relation avec le déroulé de

5

Avant- propos

PHYSIOLOGIE ET

MÉTHODOLOGIE DE L’ENTRAÎNEMENT

l’effort en compétition. Nous allons dépasser les tests qui imposent des puissances et vitesses, pour aller comme en compétition, vers des efforts auto-régulés (« self pace »). Avoir un ouvrage de base résumant toutes les notions historiques qui ont construit nos référentiels de la physiologie de l’entraînement va vous permettre de vous libérer

des poncifs et autres « légendes urbaines » qui peuvent nous enfermer et nous donner des certitudes aliénantes. La formation, est la condition de notre libération et de notre ouverture d’esprit, notre tolérance. Véronique Billat

Dédicace Je dédicace ce manuel à toutes ces générations d’étudiants qui m’ont inspirée et à toutes leurs questions qui m’ont poussée hors de ma zone de confort pour y répondre. Ils sont les professionnels d’aujourd’hui et j’espère qu’ils vont continuer à se poser des questions comme j’ai pu le faire à 18 ans quand il a fallu comprendre comment mieux s’entraîner avec moins de kilomètres et moins de blessures ; ces 40 années de recherche physiologiques sur le terrain, je vous les sou-

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mets pour enrichir votre propre quête de l’entraînement optimal personnalisé. Merci de me poser encore et toujours des problématiques les plus folles, en apparence ! Merci à Laurence H., Iman M., Claire M., Florent P., JPK, Arnaud F., Nathalie L., Brigitte G., Cécile C., Guy C., Mohamed A. de m’avoir soutenue dans mon combat pour l’indépendance de la pensée ! Ils se reconnaîtront ici.

La performance sportive

1 1. Théorie bioénergétique de la performance sportive

1.

1.1

Théorie bioénergétique de la performance sportive Historique

1.1.1 Définition de la performance sportive La performance sportive est prise dans le sens du mot « parformer », emprunté à l’Anglais (1839), qui signifie accomplir, exécuter. Ce terme vient lui-même de « parformance », qui signifiait accomplissement en ancien français. Ainsi on peut définir la performance sportive comme une action motrice, dont les règles sont fixées par l’institution sportive, permettant au sujet d’exprimer ses potentialités physiques et mentales. On peut donc parler de performance sportive, quel que soit le niveau de réalisation, dès l’instant où l’action optimise le rapport entre les capacités physiques d’une personne et une tâche sportive à accomplir. L’approche bioénergétique de la performance sportive en est une parmi d’autres comme l’approche psychologique, biomécanique, sociologique, cognitive. Elle n’est pas exclusive, mais reste essentielle pour appréhender les caractéristiques énergétiques, en particulier la quantité d’énergie nécessaire à la réalisation d’une épreuve sportive et le type de transformation mis en jeu en fonction de la durée et de l’intensité

de l’exercice ainsi que de sa forme (continue-discontinue).

2. Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

Nous considérerons donc un groupe de spécialités sportives présentant des similitudes quant aux facteurs limitatifs et aux qualités énergétiques requises. La course et la natation, par l’analyse de leurs records, offrent un moyen simple d’appréhender la performance sur son versant bioénergétique.

1.1.2 Analyse bioénergétique des performances en course et natation La notion de record est relativement moderne puisque, jusqu’aux années 1870, seul le classement comptait. En effet, peu importaient les temps mis pour parcourir les distances, et de ce fait la notion de vitesse de déplacement en tant que performance était ignorée. Il était par conséquent impossible de comparer les performances et de recenser un record national, mondial. Le record apparaît dans le dictionnaire (« Oxford English Dictionary ») en 1880 « a record is a performance or occurence remarkable among, or going beyond, others of same kind : especially, the best recorded achievement in any competitive sport ». La meilleure performance, réalisation, dans toute compétition sportive, est donc qualifiée de record. La première utilisation du mot « record » dans ce sens est recensée dans un ouvrage sur la natation (Wilson W. : The swimming instructor, a treatise on the arts of swimming and diving,

7

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

p. 137, Cox, London 1883). Le défaut de chronomètre fiable peut être une explication possible à cette absence de record enregistré. Mais peut-être le concept de « record » correspond-il à la notion de rendement qui trouve son avènement avec l’ère industrielle en cette fin du XIX e siècle. En 1868 et 1913 naissaient les fédérations internationales de natation et d’athlétisme qui devaient respectivement établir les listes de records dès 1890 et 1914. L’objectif de ce premier chapitre est de comprendre les déterminants énergétiques des records de deux types de locomotion humaine : la course et la nage. 2,4 12 11

1,8

9

1,6

8

1,4

7

1,2

6

1,0

5

Course

Cette courbe nous permet de constater que l’animal et l’homme accusent une perte de vitesse en fonction de la distance et de la durée de l’exercice. Pour l’établissement de ce profil énergétique caractéristique de l’espèce humaine, on peut prendre les records du monde du moment du 100 mètres au 1000 kilomètres à la course (tableau 1). L’étude de la forme de cette courbe permet alors d’appréhender « l’homme énergétique ». En effet, on peut ainsi envisager des tranches de durées d’exercice pour lesquelles : – la perte de vitesse est peu sensible : de 10 à 20 secondes par exemple, on reste à 36 km/h et de 1 heure à 2 heures de course, on ne perd que 1 km/h ; – ou, au contraire, on observe des cassures montrant d’énormes pertes de vitesse pour des temps assez proches : de la première à la deuxième minute de course, on passe de 33 à 28 km/h.

1 Hommes en natation 2 Femmes en course 3 Femmes en natation 4 Hommes en course

2,0 10

Natation

Vitesse moyenne : Yards par seconde

2,2

1 2

3

4

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10 11 12 13

14 15 16

Temps : centaines de secondes

Figure 1

z

Temps

Temps

Relation vitesse-temps en course et natation. (D’après A.V. HILL, 1927).

Figure 2

^

Les différentes formes de courbe utilisées couramment dans l’analyse des records olympiques et du monde.

Distance

Distance

Puissance

Distance

8

L’étude de cette courbe a permis aux physiologistes du début de siècle de supposer et de déceler des similitudes quant aux facteurs limitatifs et aux qualités énergétiques requises pour ces différents couples de vitesse-durée qui vont déterminer la performance : temps mis sur une distance donnée fixée par le règlement fédéral international. Cette analyse de la relation intensité-durée avait déjà été largement investiguée par A.E. Kennelly (1906) avec les records du monde de l’époque comme 4 minutes et 12 secondes au mile ou 13 heures 26 minutes 27 secondes au 100 miles par exemple. En effet, plusieurs techniques d’analyse mathématique ont permis d’évaluer la part des métabolismes impliqués (selon la durée de l’exercice réalisé à vitesse maximale).

(vitesse)

Date

En 1906 paraît le premier article sur une étude prospective des records à la course. Son auteur, Kennelly (ingénieur électricien à Harvard), aborde pour la première fois la forme de relation qui lie la vitesse au temps. Par la suite, le physiologiste et prix Nobel, Archibald Vivian Hill (1927) apporta sa contribution à ce type d’étude et fut un véritable pionnier concernant la bioénergétique de l’exercice musculaire. Nous lui devons la connaissance de nombreux concepts (consommation maximale d’oxygène, dette d’oxygène) qu’il utilisa pour expliquer la forme de la relation vitesse-temps en natation et en course à pied, aussi bien pour les hommes que pour les femmes (figure 1).

Temps

Plusieurs types de graphes ont été communément utilisés pour examiner cette courbe des records c’est-à-dire des temps réalisés sur les différentes distances imposées par les règlements internationaux en

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Chapitre 1

natation et en course à pied : le graphe de la relation temps-distance, vitesse-temps des derniers records en date et les différentes formes de courbes de ces records (figure 2). La figure 3 est un exemple de la relation vitesse-distance des records du monde en course à pied (elle montre la perte de vitesse en fonction du temps) selon une échelle logarithmique pour pouvoir mettre sur le même graphe un exercice de 10 secondes à 11 jours.

1.1.3 Les modèles de la performance sportive Ainsi que nous l’avons remarqué, on peut observer des points de rupture dans cette courbe représentant la diminution de la vitesse en fonction de l’allongement de la durée de l’exercice. Cela nous permet d’envisager que l’homme a plusieurs façons de produire l’énergie nécessaire à la contraction musculaire selon la durée et la distance de course. Nous envisagerons dans ce chapitre les différents métabolismes (ensemble de réactions chimiques transformant l’énergie sous ses différentes formes : chimiques, calorifiques, mécaniques à l’intérieur de l’organisme humain) qui expliquent la forme de cette relation vitesse-durée. Grâce à l’analyse des records du monde du 100 m au 1000 km (tableau 1a) en course à pied, des modèles empiriques de la relation entre la vitesse et son temps limite (temps record) ont été élaborés lors de la première moitié du XXe siècle afin d’appréhender l’endurance humaine. D’autres modèles tentèrent d’expliquer (et parfois de prédire) la performance (réalisation d’un temps sur une distance) sur la base de caractéristiques bioénergétiques de plus en plus élaborées. On peut observer a) que la différence entre les records masculins et féminins est de 10 ± 2 % en moyenne mais avec une différence majeure : les records féminins ont un âge moyen de 16 ans (2001) ± 11 ans, alors que les records masculins sont plus récents avec un âge moyen de 10 ans (2007) ± 7 ans. Il faut remarquer que la vieillesse des records féminins (tableau 1b) est le fait de coureuses exceptionnelles qui avaient explosé les records de l’époque du 100 au 1500m dans les années 80. Toutefois, ces records ne sont actuellement pas très différents de ceux des records masculins plus récents. Cela signifie que a) les records masculins sur ces distances sont revenus à des valeurs supérieures de 10 % alors que ces excellentes coureuses de l’époque avaient rapproché les records féminins des records masculins, ce qui laisse un soupçon de dopage mais non démontré à ce jour (le bénéfice du doute est la règle).

b) que la progression des records en 20 ans est de l’ordre de 1 à 4 % selon les distances, ce qui paraît faible en valeur relative mais énorme sur la ligne d’arrivée. Les chronos sont parlants et il ne faut pas considérer que les performances vont désormais plafonner sauf si on les regarde avec des modèles mathématiques qui sont plus performants pour prévoir la taille d’un poisson rouge en fonction de la taille de son bocal ainsi que d’aucuns le font (modèle de Gomperz, 1825). En effet, celui-ci prédit que si la taille du bocal est petit le poisson rouge souffrira de nanisme (encadré 0). Cela vaut pour les records du monde qui ne doivent pas être enfermés dans le bocal du poids du passé et considérer que les records sont désormais dans un océan dont on ne connaît pas la taille avec notamment une étendue de la pratique de la course de compétition sur la terre entière et l’accès à une qualité d’éducation, de vie et de soin qui progresse. La science de l’entraînement sur mesure est l’avenir des records avec notamment un réseau de travail interdisciplinaire collaboratif.

Figure 3

z

La relation vitesse-distance des records du monde en course à pied 2017 montre la perte de vitesse en fonction du temps selon une échelle logarithmique pour pouvoir mettre sur le même graphe un exercice de 10 secondes à 11 jours.

La dichotomie observée entre les modèles selon notre classification (empirique et bioénergétique), n’est pas toujours satisfaisante car certains modèles dit « empiriques » proposent une explication d’ordre physiologique des grandeurs obtenues. De plus, les modèles « bioénergétiques » sont basés sur les résultats d’expérimentations ; ils présentent aussi, dans une certaine mesure, un caractère empirique. Ainsi que l’ont proposé Péronnet et Thibault (1989), le regroupement thématique des modèles peut l’être en fonction de leur formulation mathématique (hyperbolique ou logarithmique). Cependant, nous avons considéré que cette partition qui a le mérite d’être

9

Chapitre 1

Tableau 1a

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

^

Vitesses record de l'espèce humaine (sexe masculin) en fonction de la distance et de la durée en course à pied (au 1er avril 2021)

Distance

Temps en 1997 (h, min, s)

Temps en 2021 (h, min, s)

vitesse (km/h) 1997

vitesse (km/h) 2021

vitesse (m/s) 2021

date du record actuel

Evolution depuis 24 ans

100 m

9,85

9,58

36,55

37,58

10,4

2009

2,8 %

200 m

19,32

19,19

37,27

37,52

10,4

2009

0,7 %

400 m

43,29

43,03

33,26

33,47

9,3

2016

0,6 %

800 m

1min41,11

1min40,91

28,48

28,54

7,9

2012

0,2 %

1000 m

2min12,18s

2min11,96s

27,24

27,27

7,6

1999

0,1 %

1 500 m

3min27,37s

3min26,00s

26,04

26,21

7,3

1998

0,7 %

2 000 m

4min50,81s

4min44,79s

24,76

25,28

7,0

1999

2,1 %

3 000 m

7min25,11s

7min20,67s

24,26

24,51

6,8

1996

1,0 %

5 000 m

12min39,74s

12min35,36s

23,69

23,82

6,6

2020

1,0 %

10 000 m

26min27,85s

26min11,00s

22,67

22,92

6,4

2020

1 %

20 km route

56 min 55 s

55 min 21 s

21,08

21,68

6,0

2010

2,8 %

21,100 km route

59 min 24 s

57 min 32 s

21,31

22,00

6,1

2020

3 %

25 km route

1h13min55,8s

1 h 11 min 18 s

20,29

21,04

5,8

2012

3,7 %

30 km

1h29min18,1s

1 h 27 min 13 s

20,16

20,64

5,7

2016

2,4 %

42,195 km

2 h 06 min 50 s

2 h 01 min 39 s

19,96

20,81

5,8

2018

4 %

100 km

6 h 13 min 33 s

6 h 09 min 14 s

16,06

16,24

4,5

2018

1 %

200 km

16 h 32 min 20 s

15 h 57 min

12,09

12,54

3,5

1999

3,7 %

408,77 km

48 h

48 h

8,52

8,52

2,4

1997

0,0 %

1 023,2 km

144 h (6 jours)

7,11

7,11

2,0

1997

1 028,4 km

144 h (6 jours)

7,14

2,0

1999

1 609 km

278 h

5,79

1,6

2000

(1 000 Miles)

(11,5 Jours)

5,0 %

ln = logarithme néperien du temps exprimé en secondes. . . * Ces vitesses sont proches de la vitesse minimale sollicitant V O2max : la vitesse aérobie maximale (VAM) ou V O2max selon les auteurs.

simple, ne montrait pas avec force, la différence de démarche entre des physiologistes qui tentaient d’élaborer des modèles en partant des caractéristiques bioénergétiques d’endurance des humains et celle des mathématiciens qui s’intéressaient davantage à la forme mathématique de la relation vitesse- durée en observant la courbe des records du monde sur l’ensemble des distance de compétitions officielles. Après la présentation de ces différents modèles, nous envisagerons de nouveaux paramètres physiologiques permettant des développements possibles de cette

10

modélisation de l’endurance humaine. di Prampero (1989), ou Péronnet et Thibault (1989), ont déjà souligné que la modélisation de la courbe d’endurance (relation vitesse- durée) permettait de comprendre la contribution et les caractéristiques des différents métabolismes énergétiques. Pour notre part, nous considérons que l’enjeu actuel d’une telle approche est également de constituer un outil d’analyse théorique de l’amélioration de l’endurance selon tel ou tel type d’entraînement et d’envisager les progrès de l’homme sans moyens illicites.

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Distance

Record Féminin (h, min, s)

Vitesse Femme (m/s)

Vitesse Femme (km/h)

Date du Record Féminin

Différentiel en % entre Records masculins et féminins

100 m

10,49 s

9,53

34,3

1988

9 %

200 m

21,34 s

9,37

33,7

1988

10 %

400 m

47,6 s

8,40

30,3

1985

10 %

800 m

1min53,28s

7,06

25,4

1983

11 %

1000

2min28,9s

6,72

24,2

1996

11 %

1 500 m

3min50,07s

6,52

23,5

2015

10 %

2 000 m

5min23,75s

6,18

22,2

2017

13 %

3 000 m

8min06,11s

6,17

22,2

1993

9 %

5 000 m

14min06,62s

5,91

21,3

2020

12 %

10 000 m

29min17,45s

5,69

20,5

2016

10 %

20 km route

1 h 01 min 25 s

5,42

19,5

2017

11 %

21,100 km route

1 h 04 min 31 s

5,40

19,4

2015

10 %

25 km route

1 h 19 min 53 s

5,23

18,8

2010

10 %

42,195 km (mixte)

2 h 14 min 04 s

5,19

18,9

2019

11 %

100 km

6 h 33 min 11 s

15,3

2000

5 %

4,24

.

.

*ces vitesses sont proches de la vitesse minimale sollicitant V O2max (vV O2max) ou . Vitesse Aérobie Maximale (VAM) ou V O2max selon les auteurs

Ainsi que nous l’avons évoqué précédemment, l’analyse de la relation intensité-durée avait déjà largement été investie par Kennelly dès 1906 (Kennelly, 1906), à partir des records du monde de l’époque (4 min et 12 s au mile ou 13 h 26 min 27 s au 100 miles). Kennelly avait élaboré une « ébauche de loi sur la fatigue des vitesses de course chez l’animal » la notion « d’animal » se référant, dans cette étude, à l’homme et le cheval. Celui-ci découvrait une relation entre VT, vitesse qui peut être maintenue pendant un temps T, et T lui même : KV T = ----Tn

dans laquelle K est une constante dépendant du type de travail et n, un exposant variant de 1/8 à 1/9. Puisque VT = L /T, logT = 9/8 logL – 1,2307 ou L est la longueur de la course en mètres Selon ce modèle empirique, doubler la distance de course revenait à augmenter le temps de course de 118 %. Kennelly conseillait aux athlètes désireux de

Chapitre 1

Tableau 1b Vitesses record de l’espèce humaine (sexe féminin) en fonction de la distance et de la durée en course à pied (au 1 avril 2021). La différence entre les hommes et les femmes est stable depuis 4 ans et plus proche sur 100 km que sur le marathon où la différence de puissance devient de plus en plus déterminante considérant les nouvelles stratégies de course chez les masculins. Notons que les records masculins ont creusé l’écart de 1 % en 4 ans en raison du projet « sub 2 hours » qui a relancé la course au record absolu masculin. Cela n’a pas été le cas chez la femme pour qui la barre des 2 h 15 min a cependant été franchie ces 4 dernières années. Les nouvelles chaussures en carbone ont été utilisées sur le marathon et vont rentrer en action sur piste. Toutefois il faut être capable d’utiliser ce gain de rigidité de la semelle en carbone qui, combiné à de la mousse permet un gain d’énergie élastique et facilite la flexion plantaire au décollage, diminuant ainsi le temps d’appui au sol. Il faut cependant être capable d’encaisser cette rigidité accrue et produire le gain d’impulsion par celle de la force.

battre un record du monde, de s’attaquer de préférence à ceux dont les points étaient situés au-dessus de la ligne décrivant cette relation. Il mit également en évidence la ressemblance de ces relations chez l’homme et le cheval, en ayant eu soin de distinguer la marche (pour l’Homme et le cheval) du trot et du galop (la course pour l’homme). Il avait eu l’intuition que la différence de coût énergétique selon le type de locomotion, pouvait modifier la relation vitesse/temps. Vingt ans après, Kennelly (1926) aborda la notion de pente de la relation vitesse (exprimée en log km.h-1) dans un diagramme à double échelle logarithmique, et comparait celle-ci en fonction du sexe et du type de locomotion humaine : cyclisme, patinage, course à pied, aviron à 8 barreurs, marche, natation (nage libre). Juste après Kennely, Meade (1916) soulignait alors le caractère fiable des records du monde et la possibilité de les exploiter pour en déduire les caractéristiques physiologiques de l’homme. En effet, en partant du nouveau record du mile (1609 m couverts alors

11

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Encadré 0 Un poisson rouge ne devrait jamais être mis dans un bocal : la croissance d’un poisson rouge dans un bocal, ou un trop petit aquarium, conduit inéluctablement à un phénomène appelé le nanisme spatial. Ce nanisme spatial est principalement provoqué par une sousalimentation dans un trop petit volume : si on nourrit un poisson rouge correctement, il grandira selon la courbe de la figure 3. Mais dans un trop petit volume, il est impossible de lui donner à manger valablement, sinon le cycle de l’azote « explo-

serait » très vite, conduisant à la mort du poisson rouge avec la pollution engendrée par les déchets de la nourriture. Quand on conseille d’utiliser un volume de 50 litres par jeune poisson rouge, cela permet de l’alimenter à des doses à peu près normales. En-dessous, cela devient impossible et on arrive à ce stade de nanisme spatial. Ce n’est pas le volume du bac qui est en cause, mais la capacité de filtration, d’épuration qu’il faut voir ; or généralement, la filtration (standard) d’un petit bac ne permet pas de traiter (et retraiter) beaucoup de déchets.

par Norman Taber en 4 min 02 secondes, il s’interrogeait sur les limites des performances humaines. En établissant la relation entre l’allure (temps au mile) et la distance, il remarquait alors que les courses les plus longues (au delà de 10 miles), étaient de meilleur niveau (c’est à dire placée au dessous de la courbe décrivant cette relation). Il l’expliquait par le fait qu’elles étaient courues par des professionnels plus motivés. Il en déduisait alors que les records amateurs avaient de larges possibilités d’amélioration. En 1934, Meade constatait que la courbe de la relation vitesse — distance n’était probablement pas logarithmique et ne correspondait donc pas à l’équation décrite par Kennelly (1926). L’analyse mathématique de la courbe puissance — durée se poursuivait par les travaux des allemands Grosse-Lordemann et Müller (1937) qui reprenaient les travaux de Kennelly, sur la base des records mondiaux de course de leur époque. De leurs résultats, ils formulaient des équations descriptives dont une seule fut reprise ultérieurement par Tornvall 25 ans plus tard (Tornvall, 1963). Cette équation est la suivante : logt = logP + b Cette équation pouvant s’écrire : t = 10 (alogP + b) Où P est la puissance soutenue (watts) ; t est le temps pendant lequel cette puissance P peut être soutenue (secondes, s). a et b ont les valeurs estimées respectives de – 3,04 et 10,01, ces valeurs étant obtenues empiriquement par une analyse des moindre carrés sur 8 points expérimentaux en prenant le logarithme de P comme une variable indépendante (variable placée en abscisse) tandis que les paramètres a et b sont très

12

variables d’une personne à l’autre. Cependant ni Grosse-Lordemann et Müller ni Tornvall ne leur ont donné une quelconque signification physiologique. L’approche descriptive se poursuivait par les travaux de Francis (1943). Ce dernier, traçait graphiquement la courbe entre la vitesse et le logarithme de la distance de course, puis la comparait avec une courbe de type hyperbolique. Cette dernière permettait de prédire de façon satisfaisante la vitesse sur des distances comprises entre 400 m et 19 km. L’équation hyperbolique proposée par Francis à partir des points expérimentaux issus de l’observation de la relation vitesse — temps du 400m au 19 km était la suivante : (log d – 1,5) (v – 3,2) = 6,081 Où d est la distance en mètres et v est la vitesse en mètres par secondes. L’asymptote horizontale de l’hyperbole correspondait à une vitesse de « non fatigue » (supposée pouvoir être maintenue indéfiniment) que Francis identifia alors comme étant celle du « trot de chien » (vitesse de 3,2 m/s soit 11,5 km/h). Cette vitesse était supposée pouvoir être maintenue indéfiniment (nonobstant la question du sommeil). Il donne l’image du trot de chien (« dog trot ») qui illustre parfaitement cette impression qu’ont les coureurs de pouvoir trotter indéfiniment à une vitesse donnée qui est proche de 50 % de la vitesse associée à la consommation maximale d’oxygène (pour la plupart des coureurs entraînés). Le modèle de Francis suggère déjà un modèle dans lequel les caractéristiques bioénergétiques humaines pourraient être incorporées. Nous pouvons donc déjà constater que ces modèles empiriques fournissent des outils pour mesurer l’endurance d’un sportif. Afin de pouvoir comprendre les facteurs physiologiques discriminants de cette endurance et de la performance résultant sur une distance de course,

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Ainsi, les équations mathématiques empiriques proposées successivement depuis un siècle par les mathématiciens et physiologistes pour décrire au plus près cette courbe de la performance humaine en course et en natation sont de type : –

parabolique de la forme y = axn



hyperbolique de la forme y = a/x



exponentielle de la forme y = a [exp(bx)] + c [exp(dx)]+…

Plusieurs auteurs, à travers l’histoire, ont préférentiellement utilisé l’une ou l’autre de ces relations ; on peut citer les Français Scherrer et Monod (1960) qui ne se sont pas contentés de décrire par l’analyse graphique la courbe de la relation record-distance de course, mais ont tenté une explication physiologique pour développer la notion de vitesse critique. Pente de la relation distance-temps, celle-ci est en fait la vitesse qui détermine théoriquement un seuil de fatigue qui peut être utilisé pour définir des vitesses d’entraînement. L’intérêt de l’analyse historique des records du monde est de pouvoir prédire les records à venir, sans pour autant oublier que les facteurs sociaux et économiques sont partie prenante de cette évolution. Ainsi, il est absurde de considérer que les femmes battront les hommes en 2020 sur le marathon en spéculant sur l’évolution plus rapide de la courbe des performances (Whipp et Ward, 1992), mais en oubliant que le marathon féminin n’est seulement apparu qu’aux Jeux Olympiques de Los Angeles (1984). Sur le plan énergétique, il est évident qu’en aucun cas les femmes ne pourront battre les hommes (Péronnet, 1993). Les records de vitesse féminins sont de 8 % inférieurs aux masculins sur 100 m et de 10 % en demi-fond et fond (du 800 m au marathon). En natation, la différence est similaire (-5 % sur 400 m à -10 % sur 100 m nage libre). Concernant l’évolution des records du monde, on peut noter que les vitesses du record du monde de marathon de 1983 (figure 4) dépassaient déjà celles du 1500 m de 1928 et qu’en natation, la vitesse du record du monde du 1500 m nage libre actuel dépasse celle du 200 m de 1956. De 1956 à 1983 les records du 400 m et du marathon se sont améliorés respectivement de 3,3 % et 6,9 %, alors qu’en natation ils s’amélioraient de 10,9 et 16,6 % sur 100 m et 1500 m nage libre.

Cependant, même si les vitesses sont plus élevées sur une même distance, la forme de la courbe liant la vitesse et la distance en course à pied reste similaire, à 50 ans d’intervalle (figure 4) (King et Black, 1984). Il a été démontré que, pour les distances supérieures au 100 m en natation et au 400 m en course à pied, les records étaient réalisés à vitesse constante. Battre ces records ou réaliser un léger footing revient à accomplir un travail qui nécessite un transfert d’énergie sous différentes formes. Nous avons abordé les modèles énergétiques qui analysent la perte de vitesse en fonction de l’allongement de la distance de course. À présent, nous allons découvrir ceux qui, au sein même de chaque distance de course, modélisent la variation de la vitesse de course ou la distance de course. Les premiers modèles inter-courses permettent de détecter les points forts d’une personne sur le plan métabolique (aérobie/anaérobie) alors que les seconds (intra-course) permettent de déboucher sur des critères d’optimisation de gestion d’allure de course. L’allure est définie comme l’inverse de la vitesse, c’est-à-dire comme un temps nécessaire pour courir une distance. On parle alors d’une allure au 1 000 m, par exemple 3 min au 1 000 m est une allure qui correspond à 20 km.h-1. Le modèle Keller/Hill, fondateur de l’optimisation des allures de course en fonction de sa distance, est fondé sur le second principe de mécanique énoncé trois siècles plus tôt par Issac

Figure 4 10

1983

Courbes vitesse-distance pour les records mondiaux masculins en course en 1928, 1956 et 1983 (distances 100 m au marathon).

1956 1928 9

Puissance (vitesse), m/s

les physiologistes ont attribué des significations aux paramètres des équations de la relation liant la vitesse et la durée d’exercice.

Chapitre 1

8

7

6

5 0,1

1,0

10,0 Distance, (km)

100,0

13

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Newton, philosophe, mathématicien, physicien, alchimiste, astronome et théologien anglais.

1.1.4 Modèles mathématiques de la performance sportive fondés sur la seconde loi du mouvement de Newton Isaac Newton, fonda au XVIIe siècle, la mécanique moderne du mouvement de Newton dont il a énoncé trois lois : –



principe d’inertie : « Tout corps persévère dans l’état de repos ou de mouvement uniforme en ligne droite dans lequel il se trouve, à moins que quelque force n’agisse sur lui, et ne le contraigne à changer d’état » ; principe

 Fi

fondamental

de

la

dynamique :

= ma qui montre que pour accélérer une

masse m de 1 kg de 1 m.s-2, il faut développer une force F d’1 N; –

14

les travaux de Keller se limitent au plan de la connaissance physiologique. L’école française de mathématiques est de très haut-niveau tout comme la tradition physiologique de Claude Bernard, père de la méthode expérimentale. Nous allons donc vous proposer de découvrir à 40 ans d’intervalle les modèles de Hill et de Keller. Le modèle Keller complète le modèle de Hill (Furusawa et al, 1927, Best et Partridge 1928, Hill 1928), lui-même basé sur la loi de Newton et de la thermodynamique, en postulant que le rendement optimum de la machine humaine était de 38 % et qui était très peu mathématique mais physiologique. Plutôt que de travailler sur des sujets dits plus sérieux tels que les maladies ou l’industrie, Hill a décidé de s’intéresser aux disciplines athlétiques, un choix justifié par plusieurs raisons : –

les processus athlétiques sont simples et mesurables lorsqu’ils sont accomplis au maximum des capacités énergétiques de l’homme ;



les athlètes peuvent répéter sans danger leurs performances et représentent donc de bon sujets expérimentaux ;



le côté amusant de travailler sur un sujet scientifique rafraîchissant.

principe des actions réciproques : « Tout corps A exerçant une force sur un corps B subit une force d’intensité égale, de même direction mais de sens opposé, exercée par le corps B ». La mécanique est le domaine de tout ce qui produit ou transmet un mouvement, une force et une déformation. La biomécanique du sport cherche à augmenter le rendement mécanique, c’est-à-dire le rapport entre d’une part, l’énergie biologique dépensée par l’organisme (les joules issus des métabolismes aérobie et anaérobie) et d’autre part, la puissance et la vitesse produites par le geste. Le muscle est donc un transformateur d’énergie chimique biologique en mécanique. Le rendement humain est de 25 % en montant les escaliers de la tour Eiffel (procédé vérifié sur une bicyclette ergométrique) ce qui est similaire au rendement d’une machine à vapeur.

C’est sans doute pour une de ces raisons que le physicien Joseph Keller, produira des équations contribuant à mieux comprendre l’optimisation énergétique de la course de 100 m. Aujourd’hui, la science du sport est une discipline légitime et le Conseil National des Universités lui dédie la « Section 74 - Sciences et techniques des activités sportives ». Il serait à présent nécessaire de rompre ces barrières de section afin d’élaborer des modèles de performances sportives par une approche transdisciplinaire fédérée autour d’une problématique posée par un spécialiste émanant des Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives.

Les deux modèles fondateurs de cette analyse mécanique et énergétique de la course, sont ceux d’Archibald Vivian Hill et de Joseph Keller. Archibald Vivian Hill, a reçu la moitié du prix Nobel de physiologie et de médecine en 1922 pour son travail ayant mis en évidence la production de chaleur dans le muscle. Joseph Keller est un physicien des années 70, spécialiste de la quantification de l’énergie de l’atome (le « EBK » : Einstein-Brillouin-Keller théorème). Parmi les plus de 400 publications de Joseph Keller dans le domaine de la physique de haut-vol, on compte une dizaine d’écrits sur le sujet du sport. Les records en course fascinent les chercheurs qui travaillent aujourd’hui de plus en plus en interdisciplinarité car

Quarante ans plus tard, le physicien Joseph Keller reprend les travaux de Hill (dont le modèle est basé sur la loi du mouvement de Newton). Ce modèle envisage de battre les records en course à pieds grâce à une analyse intra-course de la variation de vitesse (accélération) en relation avec la différence, à chaque instant de la course, entre la force propulsive et résistive. La production de force implique la prise en considération de l’évolution des réserves énergétiques en fonction du niveau de débit d’énergie maximale durant la course. Hill et Keller se sont particulièrement intéressés à l’étude des limites de la course de sprint. Leur objectif était d’étudier les stratégies de conversion énergétique afin de déterminer s’il était possible, en modifiant la

Théorie bioénergétique de la performance sportive

répartition de la vitesse de course, d’en améliorer la performance (la vitesse moyenne). La question posée était de savoir si un 100 m devait être couru au maximum de bout en bout ou bien en adoptant une stratégie plus économe dans une phase de course entre le 30 m et le 60 m par exemple. On parle alors d’une alternative à la « stratégie maximaliste de bout en bout ». Ce modèle est basé sur la seconde loi du mouvement de Newton qui stipule que l’accélération a(t) ou d(v)/d(t) du coureur au temps t est égale à la différence des forces propulsives et résistives. Le principe est d’appliquer la seconde loi de Newton, sur l’axe horizontal, au coureur de masse m, en postulant que ses muscles lui donnent une force de propulsion constante F positive mais aussi une force de résistance (articulaire et musculaire) qui s’oppose au mouvement et qui croît avec la vitesse v. Dans ce modèle, l’accélération du coureur (le différentiel de vitesse sur le différentiel de temps, (dv/ dt), est donc égale à la force exercée par le coureur au temps t (force propulsive), f(t) , moins la résistance opposée au coureur à une vitesse donnée R(v) (forces résistives) selon l’équation : dv/dt = f(t) - R(v) Lorsque le coureur court à vitesse constante, on obtient alors : dv/dt = 0 On remplace alors dv/dt par 0 dans l’équation x : 0 = f(t) - R(v) On obtient bien ce dont on se doutait empiriquement : l’accélération est nulle puisque que les forces propulsives et résistives sont égales : f(t) = R(v) Cela confirme qu’à vitesse constante, l’énergie dissipée par les forces résistives (internes et externes) est égale à la force générée par l’athlète pour sa propulsion en avant. La force propulsive est sous le contrôle du coureur et elle a pour limite la force maximale du coureur que nous appellerons Fmax. Concernant les forces résistives R, Hill avait démontré, dans ses travaux nobélisés, que la grande majorité de l’énergie dissipée en course est interne au coureur (l’énergie associée à la contraction musculaire et aux frottements articulaires). En réalité, cette chaleur musculaire est due, non pas à une sorte de viscosité ou à des frottements musculaires relatifs aux effets mécaniques de la contraction musculaire comme le décrivait Hill, mais plutôt à la chaleur générée par les réactions métabo-

Chapitre 1

liques associées au contrôle musculaire (voir chapitre II, 1.2.4). Hill postulait que la résistance effectivement ressentie par le coureur augmentait linéairement avec la vitesse v. Dans ce cas, la résistance R est une constante R0 multipliée par la vitesse de course. La résistance du vent n’augmente pas de façon linéaire avec la vitesse et contribue seulement à 3 % de la résistance totale. L’approche linéaire fournit donc une bonne première approximation des forces résistives. À partir de l’équation initiale de l’accélération postulant que la résistance augmente de façon linéaire avec la vitesse, le calcul intégral qui consiste à définir une fonction de variation de la vitesse par le temps puis à établir la distance couverte à chaque instant de course accélérée, a permis de vérifier le modèle sur des courses réelles comme celle de la médaille d’or de CarlLewis au championnat du monde (1987) (Pritchard WG et Pritchard JK, 1994). Charles Best et R.C. Partridge (1928) avaient déjà validé la théorie de Hill avec un dispositif expérimental ingénieux qui consistait à faire tirer un câble avec jauge de contrainte, à un sprinter depuis les starting-block afin de mesurer la distance de course atteinte en fonction du temps selon les forces de résistance réelles appliquées au coureur grâce à ce câble résistant attaché à la ceinture du coureur au niveau de son centre de masse. Ils vérifient bien l’hypothèse selon laquelle (équation x) la résistance est proportionnelle à la vitesse de course. Un sprinter peut exercer une force maximum que nous avons appelée Fmax tout au long de la course sur une distance très réduite, puisque comme nous allons le voir dans le point suivant, le travail (W) et donc l’énergie dépensée est le résultat (le produit) de la force appliquée sur une distance. Le coureur dépense des calories (des joules ; 1 J = 4,18 calories) en appliquant une force propulsive sur une distance de course. Le coureur de fond applique des forces moindres sur une distance plus longue. La question de l’optimisation des records passe donc par la résolution de la répartition optimale de cette force en fonction de la distance de course. Il est peut être plus judicieux de « relâcher » son effort au cours du 100 m qui est déjà une course très longue lorsque l’on sait que la force maximale est celle produite par une détente verticale avec une charge supplémentaire proche de celle de son propre poids (voir chapitre VI pour l’estimation de la force et de la puissance maximale notamment avec le myotest page 205). Pour cela, Keller a posé une équation définissant que l’athlète a une énergie disponible E(t) en fonction du temps t et qu’au fur et à mesure que cette énergie est dépensée à une puissance qui est le produit de la force par la vitesse (fv), cette énergie peut être

15

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

reconstituée à un débit égal à  (qui est en fait la consommation d’oxygène par minute permettant de reconstituer l’ATP en miroir avec la baisse du rapport ATP/ADP qui est le signal d’augmentation de la consommation d’oxygène). Ainsi, nous pouvons dire que la force déployée conditionne la stimulation de la consommation d’oxygène. Cela laisse de belle perspective pour l’entraînement moderne que nous discuterons au chapitre VI. Il importe . entre temps de bien cerner les facteurs limitant de VO2max (voir chapitres II, III, IV) y compris dans les environnements spécifiques abordés au chapitre V. Le coureur a donc une réserve d’énergie initiale E0 au temps t0 = 0 et E(t) en fonction du temps t dont le taux de diminution est défini par la différence entre le taux de renouvellement de l’énergie () et le taux (le débit) d’énergie (joules) qui dépend de la puissance de l’exercice (joules.s-1 ou watts) : E(t) = ( - fv). Selon l’équation de Keller, le coureur peut donc continuer sa course tant qu’il a des réserves énergétiques disponibles, mais la question est de savoir à quelle vitesse. La question du choix de variation de vitesse est donc fondamentale pour l’optimisation des records. Au niveau cellulaire, les réserves énergétiques incluent des sources d’énergie disponibles pour la cellule et son métabolisme plus ou moins rapidement ainsi que nous le verrons dans le chapitre II. La fibre musculaire est une cellule qui a besoin d’ATP pour se raccourcir et transformer ainsi l’énergie chimique en énergie mécanique (25 %) et en énergie thermique (75 %). L’activité musculaire, ainsi que nous le détaillerons dans le chapitre II, est dépendante de l’hydrolyse de l’adénosine triphosphate (ATP), l’hydrolyse étant la fixation des ions H+ et OH- provenant de la dissociation de l’eau. L’ATP est maintenu en faible quantité dans la cellule musculaire et doit donc être régénérée à partir de l’énergie fournit par l’oxydation des substrats (lipides et glucides) ce que l’on appelle le métabolisme aérobie (avec oxygène) et également par la fermentation (avec production d’ions H+ et acidose induite) des sucres (métabolisme anaérobie c’est-à-dire sans oxygène) ou par l’énergie stockée dans des réserves de créatine phosphate (CP) ne nécessitant ni oxygène ni fermentation. Dans son modèle, Keller postule que le sportif utilise uniquement le métabolisme anaérobie, mais l’on sait, à présent, grâce aux mesures ambulatoires de consommation d’oxygène au cours de . 100 m en sprint, que le sprinter est à 100 % de son VO2max dès la mi-course et que l’énergie anaérobie va pouvoir d’autant plus faire la différence que le niveau de

16

.

VO2max est déjà sollicitée. Nous reviendrons sur la question dans la partie entraînement du chapitre VI qui propose une nouvelle approche moderne intégrative de l’entraînement énergétique qui ne sera plus divisé en différents types d’entraînement en fonction de l’endurance, la résistance, la puissance ou les forces (ces deux dernières notions étant, par ailleurs, souvent confondues). Le modèle de Hill-Keller (1973 et 1974) permet d’expliquer qu’un coureur de 100 m a d’abord une forte accélération au démarrage puis une vitesse pratiquement constante au-delà de 30 m (voir même décline pour certains sprinters). La course de sprint serait alors dépendante de la force du coureur alors que la course de demi-fond dépendrait des réserves énergétiques du coureur. Mais nous savons que la force musculaire conditionne également le temps de contact au sol qui doit être le plus court possible pour minimiser le coût énergétique de la course d’un marathonien. Les facteurs limitant des records ne sont donc pas aussi différents entre le sprint et les courses longues. En particulier lorsque l’on applique la formule de Keller réécrite sous la forme suivante pour une course d’une distance inférieure à 291 m : V(t) = Vmax [1- exp (- t/)] Vmax est la vitesse maximale en mètres et exp est la fonction exponentielle. Vmax est égale à  multiplié par F ( la force de propulsion en avant) où  est un paramètre homogène (de même dimension) à un temps caractéristique en début de course (temps très court car on est à Vmax). On obtient des valeurs de forces maximale de 735 N pour une course de Carl Lewis (de poids égal à 80 kg) en 9,86 secondes, et une vitesse maximale de 11,65 m.s-1, soit une Force maximale de 9,19 N .kg-1 ce qui nous permet de donner comme repère l’incroyable puissance maximale de 30 W par kg pour un rendement énergétique de 30 % (alors qu’il est sans doute meilleur chez un sprinter élite capable de restituer l’énergie élastique emmagasinée dans ses sarcomères à chaque contact au sol). Rappelons que la puissance par kg pour des consommations maximales d’oxygène de sportifs élites est de 8 W par kg au maximum et que cette puissance ne peut être maintenue que 4 min. On voit donc l’effet délétère du temps sur la puissance dégagée par l’être humain. Les entraîneurs et athlètes sont constamment à la recherche de cette optimisation énergétique en répartissant les forces du coureur tout au long de la course. Ils procèdent par des réglages successifs selon la méthode empirique par essais et erreurs ou alors avec des hypothèses précises en jouant par exemple

Théorie bioénergétique de la performance sportive

sur un facteur de réglage des starting-blocks par exemple qui vont conditionner l’angle du coureur dans ses premiers mètres de course. Au-delà de ces éléments techniques, vous pouvez faire l’expérience de courir un 100 m avec la stratégie maximaliste de bout en bout ou bien en partant vite, en relâchant votre effort (sans le couper pour autant) puis en terminant au plus fort de votre puissance énergétique de réserve. Au contraire, vous pouvez partir en vous réservant pour faire une course en accélération croissante. Notez vos sensations, comparez votre courbe de fréquence cardiaque (oui même sur un 100 m nous verrons les raisons plus tard) avant de continuer ce chapitre. Reprenons donc l’exposé de notre 100 m « bioénergétique ». Les échanges d’énergie au cours de ce 100 m en particulier et au cours de la locomotion en général, font partie d’un processus de transfert énergétique assez complexe. En effet, les muscles génèrent de l’énergie mécanique par la conversion de l’énergie chimique (voir chapitre II, 1.2.4, page 78 pour les détails du processus). À chaque foulée, l’énergie mécanique des muscles est utilisée pour accélérer et décélérer les bras et les jambes de telle sorte que l’énergie cinétique et potentielle de ces membres changent constamment, avec quelques transferts énergétiques d’un segment corporel à l’autre. Les muscles sont capables de stocker et restituer l’énergie élastique. Une partie de l’énergie mécanique est dégradée en énergie thermique (de la chaleur est alors produite). Au terme de plusieurs étapes intermédiaires, l’énergie chimique libérée par les muscles, est convertie soit en énergie thermale soit en travail externe (mécanique) produit par le corps. Le travail externe peut être décomposé en plusieurs composants :

possible, au départ, que par le transfert direct d’énergie chimique en énergie mécanique. En effet, tous les gestes sportifs sont réalisés grâce à notre capacité d’extraire l’énergie des nutriments (toute substance chimique utilisable par l’organisme sans digestion préalable), notamment les glucides, lipides, protides, que nous puisons dans notre alimentation pour les transférer aux protéines contractiles des muscles sollicités. La contraction musculaire n’est possible que par ce seul transfert d’énergie. Pour autant, définir l’énergie n’est pas aisé, puisqu’elle n’a pas de taille, d’unité ou de masse. On peut seulement mesurer les effets de la transformation d’énergie dans ses différentes formes : Énergie chimique (100 %)  Énergie mécanique (25 %) + Énergie thermique (75 %). La première loi de la thermodynamique, stipule que l’énergie est conservée sous différentes formes. Ainsi, elle ne se crée pas mais se transforme. Selon notre activité, nos besoins d’énergie prendront telle ou telle forme. Ainsi, lorsque nous bougeons, l’énergie est sous sa forme mécanique et thermique et le repos permet de reconstituer de l’énergie chimique. L’énergie des aliments se mesure en joules ou en calories (1 calorie = 4,18 joules), ce qui n’est pas sans rappeler l’unité utilisée pour quantifier le travail accompli exprimé également en joules (J).

1.2.2 La puissance En bioénergétique la puissance permet de décrire et quantifier l’activité musculaire sur un plan mécanique. Pour mesurer la puissance, il s’agit d’abord de quantifier la force et le travail.



l’addition de l’énergie cinétique associée au mouvement horizontal de l’athlète (que nous appellerons ensuite l’énergie cinétique horizontale) ;

La force mesure la capacité à accélérer de 1 m . s -2 une masse de 1 kg selon la deuxième loi de la mécanique énoncée par Newton : F=ma



le travail externe associé au mouvement vertical du corps contre la gravité ;

où m est la masse (en kg) et a l’accélération (en m . s –2).



et le travail externe produit contre la force de trainée (drag en anglais).

Le travail est l’application d’une force (F, en newtons) sur une distance (d, en mètres) selon la formule : W=Fd

1.2

Énergie et puissance

1.2.1 L’énergie L’organisme doit être sans cesse approvisionné en énergie sous sa forme chimique pour satisfaire ses différentes fonctions. Cela nous amène à définir ce qu’est l’énergie. Toute forme de travail biologique n’est

Chapitre 1

Le terme de travail, qui est l’application d’une force sur une distance (l’unité de mesure étant le kilogramme par mètre ou le newton par mètre), peut être pris au sens de quantité d’énergie produite, alors exprimée en joules, sans aucune référence à une vitesse ou à une puissance. En effet, nous verrons que parcourir 10 km à 10 ou 20 km/h, pour un même coureur,

17

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

représente le même travail, la même dépense énergétique : soit 4,18 kjoules par kilomètre et par kilogramme de poids de corps transporté. La puissance dépend de l’énergie que nous sommes capables de transférer par unité de temps. Ce travail (W) par unité de temps est donc mesuré en joules par seconde. Ces dernières sont des watts dans le système international d’unités de mesure. Cette puissance mise en œuvre va nous permettre de courir, nager, nous déplacer à une certaine vitesse. Si dans le travail, le temps n’est pas pris en considération, par contre la puissance (P) intègre celuici puisqu’elle exprime la quantité de travail accomplie par unité de temps (t) : P = W/t = f  d  t –1 (Précisons que l’exposant négatif affecté à « t », revient à placer « t » sous une barre de fraction : t –1 = 1/t).

1.3

Du coût au rendement énergétique des locomotions sportives

1.3.1 Coût énergétique L’énergie totale dépensée dépend avant tout de la distance parcourue et du poids de la personne, c’est-à-dire du travail (W) accompli. Cependant, nous avons vu précédemment que la puissance de l’exercice (exprimé soit en watts soit en joules . s -1) diminuait de façon très brutale (exponentielle, hyperbolique ou parabolique selon les modèles précédemment présentés) en fonction de la durée de l’exercice. Cela revient à dire que, même si le coût énergétique par unité de distance parcourue ne dépend pas directement de la vitesse, cette dernière conditionnant la durée de l’exercice (et donc la distance parcourue) va déterminer la dépense d’énergie totale d’un sportif. Ainsi par exemple, courir un l00 m ou nager un 25 m demande moins de 80 kilocalories (soit l’équivalent énergétique fourni par une banane), alors que courir un marathon ou nager 10 km nécessite, pour cette même personne de 80 kilogrammes, l’équivalent énergétique d’une journée entière (sans activité physique), soit environ 2 500 kilocalories. On dépense 4 fois plus d’énergie par unité de distance en nageant qu’en courant en raison du milieu aquatique qui crée de grandes résistances à la progression alors que, pour la course à pied (dans l’air), celles-ci sont négligeables jusqu’à 20 km . h–1. Ceci nous renvoie à la notion de rendement énergétique.

18

1.3.2 Rendement énergétique Toutes les réponses physiologiques enregistrées lors de l’exercice dépendent de sa durée et de sa puissance. Le rapport entre la dépense énergétique d’un exercice, estimée .par la consommation d’oxygène par le muscle notée VO2 et la puissance correspond au rendement () selon la formule :  (en %) = Puissance mécanique / puissance biologique  100 où la puissance mécanique est exprimée en watts convertis en kjoules . min–1 et la puissance biologique . en VO2 en l . min–1 convertis en kjoules.min–1. La conversion des kilojoules en litres d’oxygène est possible parce que l’équivalent calorique d’un litre d’oxygène consommé à partir de l’oxydation des glucides est d’environ 21 kJoules. Prenons comme application du calcul du rendement le modèle d’exercice le plus simple : celui de la bicyclette ergométrique de type Monark à poids. En effet, cette bicyclette est calibrée pour permettre le calcul de la puissance mécanique produite par le sportif. La force de freinage (« f ») est appliquée sur la roue à l’aide d’une courroie mise en tension par un poids suspendu à son extrémité. Or la puissance « P » est le produit de cette force de freinage (« f ») par la vitesse de pédalage (« V ») du sportif (fréquence de pédalage en cyclisme) et le développement de la bicyclette (D en mètres) : P (kgf/min) = f (kgf)  V (nombre de tours/min)  D (m) À chaque tour de pédale, la bicyclette avance (virtuellement car elle est fixe) de 6 mètres (qui est le développement D) contre une force de freinage (« f ») de 1 kilogramme. Le kilogramme force (kgf) est une unité exprimant la force de freinage exercée par le poids qui détermine la tension de la courroie sur la roue de la bicyclette. Le kilogramme force est en fait la force définie comme le poids d’une masse de 1 kg. On l’appelle ainsi pour le distinguer du kilogramme désignant la masse. 1 kgf = 9,81 Newtons, unité du système international (conventionnel) désignant la force. L’encadré 1 donne les unités utilisées pour quantifier la force, la puissance et l’énergie de l’homme à l’exercice. Si le sportif pédale à la fréquence de 60 tours par minute (1 tour par seconde) parcourant à chaque tour 6 mètres (développement de la bicyclette) contre 1 kilogramme force, sa puissance de pédalage sera alors de :

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Puissance (kgf  m/s) = 1 (kgf)  6 (m) / 1 (s) = 6 (kgf  m/s) Or 1 kgf = 9,81 newtons soit  10 newtons. C’est pourquoi 6 (kgf  m/s) vont nous donner 60 newtons  m/s ; sachant que la puissance s’exprime dans le système d’unités internationales (SI) en watts et que 1 watt = 1 N  1 m/s, si le sportif pédale à la fréquence de 60 tours par minute (1 tour par seconde), parcourant à chaque tour 6 mètres (développement de la bicyclette) contre 1 kilogramme force, il va produire une puissance de : Puissance (watts) = 6 (kgf  m/s) = 60 newtons  m/s = 60 watts À chaque incrément (augmentation) de 50 watts de la puissance, avec l’application d’une force de freinage sur la roue de 1 kilogramme et une fréquence de pédalage de 50 tours par minute, on trouve expérimentalement que le cycliste augmente sa consommation d’oxygène de 0,6 l . min-1. En effet, La puissance mécanique est de : 50 watts = 50 joules . sec-1 = 3000 joules . min-1 = 3 kjoules . min-1 La. puissance biologique pour fournir 50 W est . égale au VO2 de repos (0,3 l . min-1) + VO2 correspondant à 50 watts (0,6 l.min-1) ;

.

Donc la consommation d’oxygène (VO2) pour pédaler contre 50 watts est de 0,9 l . min-1; sachant que l’équivalent calorique d’un litre d’oxygène consommé est d’environ 21 kjoules, la puissance biologique correspondant à 50 watts d’énergie mécanique sera de : 0,9 x 21 kJoules . min-1 = 18,9 kJoules . min-1

1.3.3 Rendement brut (b) et rendement net (net) On distingue le rendement brut (b), appelé ainsi parce qu’il inclut la consommation d’oxygène de repos, du rendement net (net) qui tient seulement compte de l’énergie dépensée pour accomplir l’exercice et omet celle du repos. On peut alors calculer, à partir de l’exemple précédent, les rendements brut et net.

 Le rendement brut (b) sera de : b (en %) = 3 kjoules . min-1/18,9 kjoules . min-1 = 0,158 = 15,8 % Ce rendement est très bas et témoigne d’un important gaspillage d’énergie. Par contre, si l’on retire la consommation d’oxygène de repos de la dépense énergétique totale,

Chapitre 1

afin de ne prendre en compte que l’énergie nécessaire à l’exercice de pédalage, le rendement dit « net » (net) va être alors supérieur au rendement brut.

 On calcule alors le rendement net (net) ainsi : On sait que la puissance mécanique est de 50 watts = 50 joules . sec-1 = 3000 joules . min-1 = 3 kjoules . min-1 . Or, la puissance biologique égale au VO2 correspondant à 50 watts est l’équivalent de 0,6 l . min-1 ce qui équivaut à : 0,6 21 kJoules . min-1 = 12,6 kJoules . min-1 On aura donc le rendement net (net) : net (en %) = 3 kJoules . min-1/12,6 kJoules . min-1 = 0,238 = 23,8 % Il faut remarquer que la différence entre le rendement net et brut diminue avec l’augmentation de la puissance de l’exercice et donc de la consommation d’oxygène totale, dans laquelle la consommation d’oxygène au repos va représenter une part de plus en plus négligeable.

1.3.4 Coût et rendement énergétiques en course à pied La façon la plus simple de calculer le coût énergétique de la course à pied est de mesurer la consommation d’oxygène à une vitesse inférieure au début d’intervention du métabolisme anaérobie (sans oxygène) dans la couverture énergétique. En effet, pour les hautes vitesses (vitesses record du 100 au 800 m), il est difficile d’estimer le coût énergétique de la course à pied à partir de la consommation d’oxygène, puisque l’oxygène (O2) n’intervient pas (sur 100-200 m) ou pas uniquement sur 400-800 m (de par la durée de l’exercice) dans la transformation de l’énergie chimique en énergie mécanique. La vitesse idéale pour mesurer le coût énergétique de la course par la consommation d’oxygène est égale à 60 % de la vitesse record du sportif sur un 1 000 mètres. Ainsi pour un coureur réalisant le 1 000 m en 3 minutes (20 km/h), le coût énergétique sera évalué à 12 km/h. On constate alors qu’il consomme 42 mlO2 . min-1 . kg-1 à 12 km/h soit à 200 m/min (pour homogénéiser les unités par minute). Il aura donc un coût énergétique (CE) : CE (mlO2.min-1.kg-1) = 42 mlO2 . min-1 . kg-1 /200 m . min-1 = 0,210 mlO2 . m-1 . kg-1 = 210 mlO2 . km-1 . kg-1

19

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Encadré 1 Les unités permettant de mesurer la masse, le poids, la force, la puissance et l’énergie. Les unités du système international (SI) sont indiquées en italique  La masse qui mesure la quantité de matière d’un corps dont l’unité est le kilogramme (kg) : 1 kg = 2,204784 livres  La force : La force est le produit de la masse par l’accélération. f s’exprime en newtons (N) du nom de celui qui a mis en évidence la relation liant la force, l’accélération (a) et la masse (m) selon la formule : f = m (kilogramme)  a (m/s2). Le newton est donc l’équivalent de la force que communique à un corps d’un kilogramme, une accélération d’un mètre par seconde au carré. 1 N = 1 kg  1 m/s2  Le poids : Le poids est une force particulière. En effet, le poids « p » est la masse « m » sur laquelle est appliquée la gravité « g » qui est l’accélération des corps en chute libre grâce à l’attraction terrestre qui, par définition, a une valeur de 9,80665 m/s2 (on l’arrondit à la valeur de 9,81 m/s2) Le poids est produit de la masse par l’accélération : p = m  g Le poids s’exprime en newtons. Puisque p (newton) = m (en kilogramme)  g (en 9,81 m/s2) on a pour 1 newton 1 / 9,81 ou plus précisément 1 / 9,806665 = 0,101972 kg force. 1 N = 0,101972 kgf 1 kgf = 9,80665 N  Travail et Énergie : Le travail (W) est défini comme étant l’application d’une force (f) sur une distance (d) : W=fd L’unité du travail et de l’énergie est le joule (J) Une autre unité de mesure de l’énergie est la calorie qui n’est pas une unité du

système international mais qui est encore couramment utilisée en nutrition car elle donne des valeurs moins élevées que les joules et donc plus faciles à manipuler mentalement. En effet 1 calorie = 4,1868 joules ; 1 kcal = 4,1868 kJ et de fait 1 kJ = 0,238846 kcal (1 kcal = 103 cal = 1 cal). Travail et énergie sont des grandeurs voisines, puisque le travail accompli entraîne une dépense d’énergie, et utilisent donc la même unité, puisque du travail accompli va dépendre la quantité d’énergie dépensée. De même, l’énergie calorifique renvoie à l’énergie sous la forme thermique puisque la définition de la calorie se réfère au réchauffement d’un gramme d’eau. En effet la calorie est la quantité d’énergie qu’il faut pour réchauffer de 1 °C (entre 14,5 et 15,5 °C) un gramme d’eau, 1 kcalorie ou Cal étant la quantité d’énergie qu’il faut pour réchauffer de 1 °C (entre 14 et 15 °C) un litre d’eau. Attention : sur les emballages des aliments, leur valeur calorique est souvent exprimée en Calories ce qui est égal à 1 kcalorie soit 4,18 kJoules (unité du système international). Une anecdote pour mémoire : Monsieur Joule qui donna son nom à l’unité du travail et de l’énergie était brasseur de bière de son état. Peut-être les sensations de réchauffement dues à l’alcool et de rafraîchissement dues à une pression mousseuse avaient-elles inspiré Monsieur Joule dans ses méditations sur les transferts d’énergie !

 La puissance : La puissance est définie comme étant le travail accompli par unité de temps. A travail produit égal, l’exercice le plus puissant sera celui qui accomplit ce travail le plus rapidement. Puissance en watts (W) = Travail (joules) / t (secondes) Il faut faire attention à ne pas confondre l’abréviation qui désigne le travail (W) et celle qui désigne le watt (W). L’unité de mesure de la puissance est le watt (W).

L’économie de course est la traduction littérale de « Running Economy » (Daniels et al., 1986), utilisée dans les articles scientifiques anglo-saxons. L’économie de course est la consommation d’oxygène pour une vitesse sous-maximale donnée. Dans l’exemple précédent, l’économie de course est de 42 mlO2 . min-1 . kg-1 à la vitesse de 12 km/h. Attention toutefois aux pro-

20

blèmes de traduction. En effet, un coureur qui aura une « économie de course » élevée (en mlO2 . min-1 . kg-1 à une vitesse donnée) sera moins économe que celui qui en aura une plus basse (42 mlO2 . min-1 . kg-1 à la vitesse de 12 km/h pour le coureur économe et 48 mlO2 . min-1 . kg-1 à la vitesse de 12 km/h pour le moins économe).

Théorie bioénergétique de la performance sportive

1.3.5 Comparaison du coût énergétique de la course sur tapis roulant et sur piste Pour une question de stabilité des conditions environnantes qui participent au coût énergétique et un parfait contrôle de la vitesse de course, la plupart des estimations du coût énergétique se déroulent en laboratoire sur tapis roulant. La validité de la simulation de course sur tapis roulant peut cependant être sujette à caution. Pugh (1970), grâce à un tapis roulant installé dans une soufflerie laminaire, a évalué la part du coût énergétique consacré à la lutte contre la résistance de l’air. Il précise que, pour des vitesses inférieures à 260 m/min (15,6 km/h), aucune différence significative n’est observée entre la course réalisée sur tapis roulant et celle à l’extérieur. Au-dessus de cette vitesse, la consommation d’oxygène (donc le surcroît . de dépense énergétique, VO2) augmente de façon exponentielle avec la vitesse :

.

VO2 = 0,002  V3

.

où VO2 est exprimé en ml . kg-1 . min-1 et V3 en m/s. On peut mesurer l’économie de course brute . (VO2) à une vitesse donnée (V) sur tapis roulant par l’équation de Léger et Mercier (1984) (« brute » car la consommation d’oxygène de repos est comprise) :

.

VO2 = 2,209 + 3,1633 V

.

où V est la vitesse de course en km/h et VO2 est la consommation d’oxygène (ml.kg-1.min-1) à la vitesse V. Cette régression a été validée à partir de 10 études pour un total de 130 sujets (71,5 % d’hommes et 28,5 % de femmes) entraînés (50 %), non entraînés (31,5 %), données non précisées pour les 18,5 % restants. Cette formule est validée entre 8 et 20 km/h. Sur piste, une consommation d’oxygène (coût énergétique aérodynamique) est à ajouter à celle envisagée sur tapis roulant. Ainsi, l’énergie nette de la course contre la résistance de l’air, est calculée selon l’équation de Pugh (1970) :

.

VO2 = 0,00354 Ap V3

.

où VO2 = la consommation d’oxygène supplémentaire (en l/min) due à la lutte contre la résistance de l’air ; Ap = la surface en m2 du coureur projetée sur le plan frontal lorsqu’il court ; Ap = 26,6 % de la surface corporelle = 0,44 m2 pour une surface corporelle de 1,66 m2 en prenant l’exemple d’un coureur de 1,70 m et 60 kg. V = la vitesse du vent et du déplacement (m/s)

Chapitre 1

Prenons l’exemple d’une course à 15 km/h (4,166 m/s) sans vent, pour laquelle le sportif va consommer :

.

VO2 à 15 km/h = 0,00354 Ap V3 = 0,00354  0,44  4,166 3

.

VO2 à 15 km/h = 0,112 l/min soit par rapport au tapis roulant où on a appliqué l’équation de synthèse de Léger & Mercier (1984) :

.

VO2 à 15 km/h

= 2,209 + (3,1633  15) = 49,65 ml.min-1kg-1

Pour le coureur de 60 kg, cela représente une consommation d’oxygène de 49,65 x . 60 = 2,979 l/min, le . VO2 à ajouter pour donner le VO2 à 15 km/h sur piste ne représente donc que 0,112/2,979 = 0,037 soit 3,7 %, ce qui est négligeable si l’on considère que les . erreurs de mesure de VO2 peuvent entrer dans cette fourchette de pourcentage. Par contre, pour la meilleure performance mondiale sur marathon (presque 20 km/h) ou le record du monde du 5 000 m (presque 23 km/h), il devient important de ne pas négliger cette composante aérodynamique qui peut représenter la marge nécessaire pour battre ces vitesses record.

1.3.6 Coût et rendement énergétiques en natation : l’influence de la technique sportive Le nageur doit lutter contre des forces opposées à son déplacement dans l’eau. Ces forces dépendent : a) de la forme du corps en contact avec l’eau ; b) des forces de friction eau/surface du corps ; c) de la formation de la vague. Cet ensemble est constitutif de la « force de traînée du corps dans l’eau » (« drag force » en anglais) et est notée Fd (F force et d comme « drag » c’est-à-dire « traînée » en anglais) dans la plupart des articles scientifiques (di Prampero et al., 1974 ; Toussaint et Hollander, 1994). La force de traînée Fd est donc calculée par l’équation suivante : Fd = K  Ap  v2 où K est une constante incorporant la densité de l’eau (qui est moindre en mer que dans une piscine) et le coefficient de traînée, où Ap est la section frontale dans l’eau et où v est la vitesse de nage (Toussaint et Hollander, 1994).

21

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

L’énergie dépensée par le nageur à une vitesse donnée doit être égale ou opposée à Fd. Ainsi la puissance mécanique (P) est le produit de la force de traînée (Fd) par la vitesse soit : P = Fd  v. Di Prampero (1974) a procédé par ajout de forces additionnelles. Le nageur nage le crawl à vitesse constante en tractant une plate-forme portant une poulie au bout de laquelle sont suspendus des poids additionnels. Le nageur expire dans des sacs de Douglas afin de mesurer la consommation d’oxygène supplémentaire attribuée à l’augmentation de Fd. Ce chercheur a pu ainsi mesurer le rendement de la nage en partant de l’équation : P = Fd  v

.

VO2 = P / 

.

où P et VO2 sont les variations de puissance et de consommation d’oxygène dues à l’augmentation de la force de traînée (Fd) générée par les poids ajoutés.  le. rendement mécanique est égal au rapport entre P et VO2, c’est pourquoi on obtient alors :

.

P / VO2 Si on remplace P par Fd  v, on obtient alors la formule :

.

Fd  v / VO2 La vitesse de nage résultante sera alors de :

. .

v = VO2(net)   / Fd où VO2 net est la consommation d’oxygène à la vitesse (v) moins la consommation d’oxygène de repos (0,3 l/min). Le coût énergétique (CE) de la nage est de : CE = 58,5 ml d’O2/m équivalent à 293 kcal/km (5  58,5  1000 ml d’O2). Si l’on veut comparer le coût énergétique de la course et de la nage, on peut rappeler que l’organisme consomme environ 1 kilocalorie (4,18 kjoules) par km parcouru et par kilogramme, soit 70 kcalories pour un homme de 70 kilogrammes parcourant 1 kilomètre. Ainsi la nage nécessite une dépense énergétique de 293 kcal/km, 4 fois plus coûteuse (293/70 = 4,2) par unité de distance que la course. C’est pourquoi, 10 % de gain sur le rendement va entraîner plus d’augmentation de vitesse de nage que ne le permettrait l’amélioration de la consommation maximale d’oxygène ou de la puissance anaérobie lactique.

22

La technique de nage et la morphologie restent la clef du succès en natation. Des scientifiques qui furent nageurs et/ou entraîneurs (Holmer, Costill, Chatard) ont bien cerné la question. Nous recommandons aux optionnaires STAPS natation et aux entraîneurs de s’y référer, l’article de synthèse de Toussaint et Hollander (1994) les citant tous.

1.4

Transferts d’énergie

1.4.1 Métabolisme : définition Le métabolisme est défini comme l’ensemble des échanges physiques et chimiques qui permettent les transferts d’énergie et qui se déroulent dans l’organisme, incluant la croissance, la maintenance, les transformations physiques et chimiques. Le métabolisme implique deux processus fondamentaux : l’anabolisme défini comme le processus de construction (telle l’augmentation de la masse musculaire), et le catabolisme, processus de dégradation. Nous avons vu au point 1.1.2 que tous les gestes sportifs sont réalisés grâce à notre capacité à extraire l’énergie des nutriments (toute substance chimique utilisable par l’organisme sans digestion préalable), notamment les glucides, lipides, protides, que nous puisons dans notre alimentation pour la transférer aux protéines contractiles des muscles sollicités. La contraction musculaire n’est possible que par ce seul transfert d’énergie.

1.4.2 Les transferts d’énergie par l’Adénosine Triphosphate (ATP) Les muscles ne peuvent pas directement extraire l’énergie utile à leur contraction à partir des aliments. Nous disposons d’un intermédiaire entre l’énergie libérée par les aliments et l’énergie nécessaire à la contraction musculaire. Cet intermédiaire est un composé phosphoré : L’ATP ou Adénosine Triphosphate dont la cassure libère l’énergie directement utilisable par la cellule musculaire pour sa mise en tension selon la modalité qui est décrite ultérieurement au chapitre II. L’ATP : adénosine triphosphate est donc un véritable « intermédiaire énergétique » entre les muscles et les nutriments. Elle est indispensable à l’organisme puisqu’une cellule sans ATP meurt rapidement. La structure de l’ATP se compose de trois parties principales (figure 5) : (1) l’adénine, (2) le ribose, (3) trois phosphates liés. La formation de l’ATP se fait par la combinaison de l’adénosine diphosphate (ADP) et d’un phosphate inorganique (Pi) c’est-à-dire apporté par l’alimentation, cette association nécessitant une grande énergie (7 kcal par mole d’ATP resynthetisée à partir de l’ADP et du Pi). Une partie de cette énergie est

Théorie bioénergétique de la performance sportive

stockée dans les liaisons chimiques entre l’ADP et le Pi. Aussi, ces dernières sont-elles qualifiées de liaisons « à haute énergie ». Lorsque l’enzyme ATPase rompt cette liaison, l’énergie (les 7 kilocalories qui avaient permis de former l’ATP) est libérée. Cette énergie peut alors contribuer à réaliser un exercice bref, comme une simple détente verticale. Mais l’ATP sert surtout d’intermédiaire, de monnaie d’échange énergétique, entre les nutriments et le muscle. En étant synthétisée, l’ATP permettra donc de disposer immédiatement d’énergie pour la contraction musculaire, ces stocks baissant rarement grâce à la mobilisation d’autres composés phosphorés, molécules permettant de resynthétiser rapidement de l’ATP. Un véritable cycle de l’ATP s’opère, pouvant se résumer par la réaction suivante : ATP  ADP + Pi + énergie ATPase

Comment alimente t-on cette synthèse de l’ATP pour la poursuite de l’exercice ? Cela dépend de sa vitesse (puissance), de sa durée (qui est liée à l’intensité ainsi que nous l’avons vu dans les modèles précédents), de sa modalité d’application : continue, discontinue à l’instar des sports collectifs et des entraînements dits « fractionnés » pratiqués par les sportifs qui préparent des épreuves continues et intenses comme dans le cas d’un coureur de 1 500 m. Nous allons décrire le catabolisme qui utilise les nutriments pour fournir aux fibres musculaires le composé phosphoré, l’adénosine triphosphate qui apportera l’énergie nécessaire à la contraction musculaire; nous apprendrons que l’ATP est continuellement resynthétisée (anabolisme). Elle est une forme essentielle de stockage d’énergie dans la cellule. Sa structure est présentée en figure 5. Les nutriments, se transformant en ATP, sont les carburants nécessaires à l’exercice. Ainsi par les aliments et l’ATP, l’énergie peut être stockée sous une forme chimique dans l’organisme avant de pouvoir être transformée en mouvement (forme mécanique de l’énergie) par les muscles. Toutes les cellules1 de l’organisme ont la capacité de convertir les nutriments en une forme d’énergie biologiquement utilisable. Ce processus est qualifié de « bioénergétique » et il est fondamental pour comprendre la forme de la relation vitesse-temps, qui exprime le fait que l’être humain ne peut courir à 36 km . h-l (36 km/h) que quelques secondes seulement et plusieurs heures à 16 km/h.

Adénosine triphosphate (ATP)

NH2 C C

C

C

O

O

O

C C

N

N

C

C

C

OH

OH

O

P

O

OH

C

P OH

O

P

Figure 5 Composition moléculaire de l’ATP et de la CP.

N

N

Chapitre 1

OH

OH

O

Créatine phosphate (CP) OH C O

O

CH3 C

N

C NH

N

P

OH

OH

1.4.3 Lois des transferts d’énergie dans l’organisme Nous avons évoqué la première loi de la thermodynamique dite « de la conservation d’énergie » qui stipule que toute énergie ne peut être détruite mais est transformée d’une forme en une autre. La seconde loi de la thermodynamique précise que le résultat de ces transformations énergétiques est un désordre croissant (appelé l’entropie). La seconde loi de la thermodynamique précise également que seule une forme d’énergie ordonnée, organisée (appelée énergie libre) peut être utilisée pour accomplir un travail. Cela signifie que l’entropie augmente à chaque fois que des transferts énergétiques sont opérés dans la cellule, de l’énergie libre étant utilisée (l’entropie augmente lorsque l’énergie libre diminue). Conformément à la seconde loi de la thermodynamique, tout système va d’un niveau d’énergie élevé, vers un niveau à basse énergie. La contraction musculaire en est un parfait exemple puisque l’énergie chimique contenue dans les aliments (sous forme de liaison entre les atomes) est transformée en énergie mécanique (le mouvement) mais surtout en énergie thermique qui augmente la température corporelle jusqu’à 40 °C à la fin d’un marathon. Cette accumulation de chaleur constitue un facteur limitatif de la performance ainsi que nous l’examinerons dans le chapitre traitant de l’environnement physique de la performance sportive. La chaleur résulte d’une agitation de molécules effectivement assimilée à un désordre, ce qui est conforme à la seconde loi de la thermodynamique. L’organisme humain ne peut réutiliser cette chaleur dite « endogène » (créée par notre propre corps). Il lui faut donc, par un ensemble de réactions chimiques,

23

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

transférer l’énergie sous ses formes diverses ainsi que nous l’avons précédemmment évoqué. Les réactions chimiques cellulaires permettent le transfert d’énergie dans le corps grâce à la cassure des liaisons chimiques (dites liaisons à haute énergie) entre les atomes des diverses molécules. On peut citer par exemple, la cassure du glucose (molécule à 6 atomes de carbone, 12 atomes d’hydrogène et 6 atomes d’oxygène : C6Hl2O6) en 6 molécules de dioxyde de carbone (CO2) et 6 molécules d’eau (H2O) comme résultat des oxydations cellulaires (libération d’un atome d’hydrogène) au sein de la mitochondrie. En effet, si le glucose a un haut niveau d’énergie libre (4 kilocalories pour un gramme), l’eau n’a aucun pouvoir calorique (c’est pourquoi les sportifs mettent des préparations à base de glucose dans leur boisson de ravitaillement pour les épreuves supérieures à 1 heure).

1.4.4 Réactions chimiques endergoniques et exergoniques (stockant ou libérant de l’énergie) Ce transfert d’énergie dans la cellule apparaît comme le résultat d’une série de réactions chimiques. Beaucoup de celles-ci requièrent, pour leur amorce, de l’énergie supplémentaire à celle du réactant (molécules destinées à être rompues dans la réaction chimique). On qualifie ces réactions chimiques qui ont besoin d’énergie additionnelle pour leur « lancement », d’« endergoniques ». Cependant, puisque de l’énergie

1 La cellule est l’unité de base de l’organisme, la plus remar-

Chaque enzyme ne peut réagir qu’avec un réactant particulier, qualifié alors de substrat énergétique. Un exemple d’enzyme qui peut, selon l’organe où il intervient, agir alternativement dans un sens ou un

(1) La membrane cellulaire (également appelée membrane plasmique) est une barrière semi- perméable qui sépare la cellule de son environnement extracellulaire. Les deux fonctions les plus importantes de la membrane cellulaire sont d’englober les composants cellulaires et de réguler le passage des différentes substances à l’intérieur aussi bien qu’à l’extérieur de la cellule.

biologie moléculaire est de comprendre la composition et la régulation des gènes (100 000 dans l’organisme). Chaque gène est responsable de la synthèse d’une protéine en particulier. Des signaux cellulaires régulent la synthèse des protéines en déclenchant ou en stoppant les gènes spécifiques. Il importe donc de mieux comprendre ces facteurs qui jouent sur les gènes. La biologie moléculaire est une discipline scientifique en plein développement et offre un intérêt nouveau à la science de l’exercice qui pourrait mieux comprendre les effets de tel ou tel type d’entraînement sur la synthèse protéique par les signaux cellulaires régulateurs. Dans une revue remarquable, Booth (1991) présente l’application de la biologie moléculaire à l’exercice.

(2) Le noyau, qui porte bien son nom quant à sa forme et à ses fonctions, contient tous les composants cellulaires des gènes qui vont permettre à la cellule de se reproduire à l’identique, donnant la carte génétique, véritable carte d’identité de la personne. Les gènes sont composés de la double hélice d’acide désoxyribonucléique, l’ADN, qui sert de base au code génétique. En bref, la fonction des gènes est de réguler la synthèse protéique qui détermine la composition et l’activité cellulaires. Le champ de la

(3) Le cytoplasme (appelé également le sarcoplasme dans les cellules musculaires) est la partie fluide de la cellule située entre le noyau et la cellule membranaire. Sont également contenues dans le cytoplasme, diverses structures (organelles) spécialisées dans des fonctions particulières, comme la mitochondrie, véritable « usine à oxygène », considérée comme la centrale énergétique de la cellule puisque impliquée dans la conversion oxydative des nutriments en énergie utilisable par la cellule.

quable pour les activités sportives étant la cellule ou fibre musculaire squelettique que nous détaillerons dans le chapitre II et qui est capable de se raccourcir. La structure commune à toutes les cellules de l’organisme peut être divisée en trois parties fondamentales (figure 6).

24

est ajoutée à la réaction chimique, le produit de cette réaction contient plus d’énergie que le réactant initial (le « substrat énergétique »). La réaction de la transformation du glucose en gaz carbonique est dite « exergonique » puisque elle dégage de l’énergie (à partir du glucose). Beaucoup de réactions chimiques sont dites « couplées » puisqu’elles associent une réaction chimique à une autre, l’énergie libre de la première (de type exergonique) servant à déclencher la seconde (de type endergonique). Les enzymes, protéines particulières, permettent d’accélérer ou de favoriser le déclenchement de ces réactions en évitant d’avoir recours à de l’énergie additionnelle. Ainsi les enzymes diminuent l’énergie d’activation nécessaire au déclenchement de la réaction. Ils régulent aussi le cours de ces réactions et en contrôlent le déroulement, assurant de cette façon l’intégrité de l’organisme. Par exemple, à la fin d’un 400 m, l’organisme a une concentration musculaire d’acide lactique d’environ 20 fois celle de la valeur de repos, contribuant à rendre acides le muscle et le sang. Une enzyme (la phosphofructokinase) bloque la réaction de transformation du glucose en acide lactique afin de ne pas tomber en-dessous d’un taux d’acidité (ou pH, potentiel hydrogène1) compatible avec la vie.

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Chapitre 1

autre de la réaction chimique, est l’enzyme lacticodeshydrogénase (LDH) assurant la transformation d’un intermédiaire de la dégradation du glucose (glycolyse), l’acide pyruvique (C3H4O3) en acide lactique (C3H6O3) au sein du muscle squelettique, et inversement lorsqu’elle agit dans le muscle du cœur (le myocarde). La LDH a, en effet, plusieurs formes chimiques (isoenzymes) dont les isoenzymes LDH-M (M comme muscle) et LDH-H (H comme heart). Outre le pH sanguin, la température corporelle agit sur l’activité des enzymes (ceci étant développé ultérieurement dans le chapitre II). Ainsi, chaque enzyme a une température optimum où elle est la plus active. En général, une petite augmentation de la température corporelle permet une augmentation de l’activité des enzymes, d’où la nécessité d’un échauffement préliminaire à tout exercice maximal de moins de 2 heures. Au-delà, il est préférable de partir avec la température corporelle la plus basse possible puisque, nous l’avons vu, la chaleur associée à la contraction musculaire pouvait s’accumuler et s’avérer être un facteur limitatif de la performance de longue durée. Le résultat de cette légère augmentation de température est donc une augmentation de la production d’ATP, ceci grâce à l’accroissement de la vitesse des réactions chimiques catalysées par les enzymes. Au contraire, une baisse de la température corporelle a pour effet une baisse de l’activité enzymatique.

1.4.5 Métabolismes et reconstitution de l’ATP à l’exercice Dans le cytoplasme et la mitochondrie se déroulent les réactions chimiques permettant de métaboliser les« carburants pour l’exercice1 » les lipides, glucides, protides pour la resynthèse de l’A.T.P. le composé directement utilisé pour la contraction musculaire. De l’efficacité de ces métabolismes va découler la performance, c’est-à-dire le maintien d’une puissance d’exercice sur une durée, une distance fixées par le règlement sportif. Après avoir catabolisé l’ATP en ADP selon la réaction : ATP  ADP + Pi + Énergie les muscles squelettiques ont une remarquable capacité d’ajustement de resynthèse d’ATP à partir des besoins de l’exercice. Ceci est possible grâce à trois métabolismes (figure 7) qui interviennent selon l’intensité et la durée de l’exercice.

Figure 6

z

Modèle de base d’organisation de la cellule animale.

De l’exercice le plus intense (et court) au moins intense (et long), il s’agit :

25

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

1

La mesure du pH L’eau se décompose très peu au plan ionique par le produit [H+]  [OH-] dans l’eau pure, parfaitement neutre, il y a autant d’ions [H+] (protons H+) que d’ions [OH-] et le produit de leur concentration (10-7  10-7) est constant et égal à 10-14. Par définition « la puissance hydrogène » ou pH s’exprime comme le logarithme négatif de la concentration en ions hydrogène soit : pH = - log [H+] Le pH de l’eau serait égal à - log 10-7 = 7 En pratique, une augmentation de la concentration en ions H+ entraînera une diminution du pH ; inversement une augmentation des ions OH- entraînera une augmentation du pH. La concentration moyenne des protons H+ dans le sang est de 4  10-8 moles/litre. Le pH sanguin sera donc égal à 7,40. Il faut attirer l’attention sur le fait qu’en physiologie humaine on parle d’acidose pour un pH inférieur à 7,40 alors qu’en toute rigueur l’acidose est considérée pour un pH < 7. Il en est de même pour l’alcalose, la physiologie humaine parlant d’alcalose pour des pH sanguins > 7,40 alors que là encore la limite stricte est un pH > 7.

1) de la cassure (réaction de Lohman) de la phosphocréatine ou phosphorylcréatine (PC) dans le cytoplasme en créatine (C) et phosphate inorganique (Pi)

Ce métabolisme est appelé « anaérobie » (ne faisant pas intervenir l’oxygène), alactique (n’entraînant pas d’accumulation lactique puisque la glycolyse n’intervient pas). 2) de la formation d’acide lactique à partir des glucides dans le cytoplasme, appelé le « métabolisme anaérobie lactique », puisque l’accepteur des ions H+ est l’acide pyruvique qui est réduit en acide lactique (anaérobie, signifiant sans oxygène) C6H12O6  Lactate + 2 ATP 3) de l’oxydation des lipides et des glucides dans la mitochondrie, appelé le « métabolisme aérobie » puisqu’il fait intervenir l’oxygène comme accepteur final des ions H+; cela signifie que l’oxygène va former de l’eau et du dioxyde de carbone selon la réaction : C6H12O6 + 6O2  6 CO2 + 6 H2O et d’une façon générale pour tous les substrats : ADP+ substrat (glucide, lipide, protide) + O2  CO2 + ATP Ainsi que nous l’avons souligné, les trois processus énergétiques interviennent de façon préférentielle selon la durée et l’intensité de l’exercice car ils sont caractérisés par :

 leur « puissance » c’est-à-dire la vitesse de dégradation des substrats (glucides, lipides, phosphocréatine) qui va permettre « in fine » d’assurer un taux de resynthèse d’ATP par unité de temps.

PC  C + Pi Pi + ADP  ATP

 leur « capacité » c’est-à-dire la quantité totale d’ATP resynthétisée. Figure 7

^

La « Roue » de l’ATP illustre la position centrale de l’ATP dans le métabolisme musculaire. A droite sont schématisées les réactions couplées à une synthèse d’ATP ; à gauche celles qui puisent leur énergie à partir du couple ATP-ADP : 1 représente la réaction de Lohman, 2 le métabolisme anaérobie lactique et 3 le métabolisme aérobie (voir texte). W et Q désignent le travail et le dégagement de chaleur dus à la contraction musculaire.

Potentiel d'action Ca++ lié ATP

Ca++ libre

Glycogène contraction musculaire

2

AMP

IMP

Lactate ADP + Pi

O2 3

Actomyosine W+Q

26

Phosphorylcréatine 1 Créatine

CO2

Ces notions de puissance et capacité renvoient aux unités de puissance c’est-à-dire le watt, et au joule pour la capacité qui rend compte du travail dont va dépendre l’énergie totale dépensée (en joules, en kilocalories). Nous reprendrons cette terminologie de capacité et de puissance (terminologie que les entraîneurs ont utilisée depuis 1950), dans le chapitre VI traitant de l’entraînement. Les entraîneurs distinguent en effet schématiquement des entraînements en « puissance » et en « capacité » dans l’idée que certains types d’exercices permettraient, pour un métabolisme donné, de développer le taux d’ATP produit par unité de temps (puissance) ou de durée totale (capacité), c’est-à-dire la quantité totale d’énergie produite par ce métabolisme. Toutefois, il est actuellement difficile de sérier les types

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Chapitre 1

1

Des carburants pour l’exercice : les glucides L’organisme utilise des nutriments qui sont les sucres, les graisses et les protéines consommés quotidiennement pour fournir aux cellules l’énergie nécessaire à leur activité aussi bien lorsque la personne est au repos que lorsqu’elle pratique un sport. À l’exercice, les premiers nutriments utilisés pour fournir cette énergie mécanique, sont les graisses et les sucres (les protéines contribuant seulement à 5 -15 % de l’énergie totale dépensée).  les sucres, appelés aussi hydrates de carbone, sont composés (d’où leur nom) d’atomes de carbone, d’hydrogène et d’oxygène. Les stocks d’hydrates de carbone sont une source d’énergie rapidement disponible (4 kilocalories libérées pour 1 gramme de glucose utilisé). Les plantes synthétisent les hydrates de carbone à partir de l’interaction entre le CO2, l’eau (H2O) et l’énergie solaire par le processus appelé photosynthèse. Les hydrates de carbone existent sous trois formes : (1) les monosaccharides, (2) les disaccharides, et (3) les polysaccharides. (1) Les monosaccharides sont les sucres dits « simples  » comme le glucose et le fructose. Le glucose est le sucre le plus connu puisque c’est celui qui circule dans le sang qui en contient 1 gramme par litre. Le taux de glucose par litre de sang s’appelle la « glycémie ». Celle-ci peut varier de 1,3 g/l à la fin d’un exercice de 2 à 10 minutes à 0,7 gr/l en fin de marathon. Cette faible glycémie explique la démarche titubante de certains marathoniens dans les ultimes mètres des 42,195 km ! Le cerveau est un organe qui utilise exclusivement le glucose pour son propre métabolisme, la lucidité du sportif étant donc étroitement liée au maintien de la glycémie. Le glucose peut être trouvé directement dans les aliments, les jus de fruits et les sodas, mais il peut être formé dans le tractus intestinal à partir du clivage (de la cassure) de sucres plus complexes que nous allons examiner. Le sucre contenu dans les fruits ou le miel est le fructose qui est le plus sucrant des sucres simples mais aussi celui qui sera assimilé le plus lentement ne provoquant pas, au contraire du glucose, d’augmentation brutale de la glycémie. Cela est important pour l’activité sportive puisqu’au repos la prise de glucose entraîne une augmentation brutale du taux de sucre dans le sang (hyperglycémie), alertant ainsi l’organisme, qui va alors libérer des messagers dans le sang (des hormones) pour ramener ce taux à la normale (1 g/l). La glycémie va alors baisser voire même en dessous de la glycémie normale. Ainsi on qualifie « d’hypoglycémie réactionnelle » cette baisse de la glycémie consécutive à l’ingestion d’une dose massive de

glucose. On caractérise chaque sucre par son influence sur la glycémie. Ainsi, en prenant pour référence l’hyperglycémie qui suit la prise de glucose, on classifie chaque sucre et l’importance de l’hyperglycémie qu’il provoque par rapport à celle du glucose. On attribue la valeur arbitraire de 100 à l’hyperglycémie provoquée par le glucose (qui disparaît en quelques minutes), le fructose ayant la valeur de 30 en raison de la faible hyperglycémie qu’il provoque (figure 8). Le tableau 4 vous donne ainsi toutes les valeurs (les « index glycémiques ») des sucres et des aliments qui composent notre alimentation. Il importe de connaître cette hiérarchie pour pouvoir gérer sa ration de sucre précompétitif ou préentraînement. Il est cependant conseillé d’attendre d’être actif (en phase d’échauffement par exemple) pour ingérer toute substance dont l’index glycémique serait supérieur à 70 (index du riz blanc). En effet, l’exercice bloque la sécrétion de l’hormone (l’insuline) responsable de l’hypoglycémie réactionnelle.

Glycémie mmol/l 8

7

6

5

4

0

30

60

90

120 temps (min)

Figure 8 Évolution de la glycémie après apport de 50 g de glucose (*), de muësli + eau (V), de muësli + lait (v), de barre chocolatée () ou de biscuit chocolaté (z) chez l’un des sujets faibles consommateurs de lipides.

27

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

(2) Les disaccharides sont formés par la combinaison de deux monosaccharides. Le plus connu des disaccharides est le sucre de table, le saccharose, qui est composé (qu’il soit de canne ou de betterave) d’une molécule de glucose et d’une molécule de fructose. Le maltose est également un disaccharide composé, quant à lui, de deux molécules de glucose. Aux États-Unis, le saccharose représente 20 % de l’apport calorique de la ration alimentaire quotidienne, ce qui est un peu supérieur aux Européens qui privilégient davantage les sucres à assimilation plus lente (au faible index glycémique) comme l’amidon des céréales. Leur association avec des protéines et des lipides ralentira leur assimilation (par exemple les pâtes au parmesan). Ces sucres, plus complexes, sont les polysaccharides appelés ainsi parce qu’ils sont composés de plus de moins deux monosaccharides. (3) Les polysaccharides à trois monosaccharides sont plutôt de petite taille alors que les polysaccharides composés de centaines de monosaccharides sont de grande taille. On distingue les poly-

saccharides végétaux (l’amidon et la cellulose, l’enveloppe des cellules végétales) des polylsaccharides animaux contenus dans les muscles et le foie, qui sont la forme de stockage animale des sucres (appelée le glycogène). L’être humain, au contraire d’autres mammifères, est dépourvu des enzymes digestives nécessaires à la digestion de la cellulose qui va composer la part essentielle des fèces. C’est pourquoi la prise régulière de légumes (crus ou cuits) évite la constipation, mais doit être diminuée la veille d’une compétition de longue durée pouvant entraîner des diarrhées à l’effort. Dans les végétaux, on trouve également l’amidon (contenu dans les céréales, les haricots, les pommes de terre et les pois), sucre complexe digestible, grand pourvoyeur d’hydrate de carbone. Après son ingestion, l’amidon est clivé (cassé) pour former des monosaccharides pouvant alors fournir de l’énergie directement utilisable pour fabriquer l’ATP, carburant exclusif des muscles pour leur contraction.

Des carburants pour l’exercice : les lipides  L’acide gras est un constituant des triglycérides qui sont les graisses de l’organisme humain. Les stocks de graisse de l’organisme sont des carburants adaptés aux exercices prolongés puisque les molécules de graisse possèdent une grande énergie par gramme de lipide (9 kilocalories) soit environ deux fois plus qu’un gramme de glucose ou de protéine qui libère 4 kilocalories. Les lipides sont insolubles dans l’eau et peuvent être trouvés dans les plantes et les animaux. Les lipides sont classés en trois groupes selon leur complexité (comme les glucides) : (1) lipides simples, (2) lipides composés et (3) lipides dérivés. (1) Les lipides simples ou neutres sont communs dans l’organisme et sont essentiellement des triglycérides. Ceux-ci sont composés de trois molécules d’acides gras libres et d’une molécule de glycérol (qui n’est pas une graisse mais un type d’alcool). Les triglycérides constituent la forme la plus courante de stockage des graisses dans l’organisme. En cas de besoin, pour les courses de plus de 30 minutes, mais également au repos surtout à jeun, les triglycérides vont être scindés en leurs composants : le glycérol et les acides gras qui peuvent être utilisés comme substrats.

(2) Les lipides composés sont la combinaison de graisses neutres avec des molécules non graisseuses. Les graisses composées, tout comme les graisses simples, sont utilisées par les muscles à l’exercice. Un exemple de graisse composée est le groupe des phospholipides qui sont la combinaison d’un acide phosphorique avec des lipides et sont synthétisés dans chaque cellule de l’organisme. Le rôle biologique des phospholipides va de la conservation de l’intégrité des membranes cellulaires à la constitution d’une gaine autour de la cellule nerveuse. La lipoprotéine est un autre lipide composé formé dans le foie puis transporté dans le sang grâce à son association avec une protéine, molécule soluble dans l’eau. (3) Enfin, la troisième catégorie de lipides est constituée par les lipides dérivés qui sont des graisses ne pouvant être utilisées comme substrat pendant l’exercice. Ces molécules sont synthétisées à partir d’autres molécules de lipides des deux autres catégories. Le plus connu des lipides dérivés est le cholestérol qui est un constituant de toutes les membranes cellulaires et qui peut être synthétisé par les cellules elles-mêmes. De plus, le cholestérol est nécessaire à la synthèse des hormones sexuelles (comme la testostérone, hormone mâle ou l’œstrogène et la progestérone, hormones femelles).

Des carburants pour l’exercice : les protides ou protéines Les protéines sont composées de plusieurs sous-unités : les acides aminés. Il existe 20 acides aminés nécessaires à l’organisme pour former les différents tissus, les enzymes, les protéines, etc. Neuf acides aminés sont qualifiés d’« essentiels » parce que non synthétisés par l’organisme qui doit se les procurer dans l’alimentation. Les acides aminés essentiels se trouvent dans les protéines d’origine animale : la viande, le lait, l’œuf, celui-ci étant la protéine complète de référence où se trouvent tous les acides aminés essentiels. Les légumineuses (pois, lentilles, haricots) sont une excellente source d’acides aminés essentiels, mais moins digestibles, devant être associés à des céréales (maïs, riz, blé, avoine, orge,…) pour obtenir les 20 acides aminés nécessaires. Cent grammes de viande (blanche comme le poulet ou rouge comme le bœuf) contiennent 15 g de protéines, alors que 100 g de riz (cru) en contiennent 7,5 g (avec seulement quelques-uns des acides aminés essentiels). Les protéines

28

sont formées par l’association de plusieurs acides aminés réunis par des liaisons chimiques. Les protéines peuvent être utilisées comme carburant en cas de jeûne ou d’exercice prolongé, chaque gramme de protéine fournissant, comme les glucides, 4 kilocalories. Les protéines doivent alors être scindées en acides aminés pouvant contribuer à la fourniture énergétique de deux façons. La première par l’alanine, acide aminé qui est converti en glucose dans le foie et ensuite stocké sous forme de glycogène hépatique. Ce glycogène va pouvoir être dégradé en glucose pour être transporté par la circulation sanguine vers les muscles à l’exercice. Dans la seconde façon, certains acides aminés (l’isoleucine, l’alanine, la leucine, la valine, etc.) peuvent être convertis en intermédiaires métaboliques (composés qui participeront au métabolisme énergétique directement dans la cellule musculaire).

Théorie bioénergétique de la performance sportive

d’entraînement en fonction des effets sur tel ou tel métabolisme d’autant que la modalité d’entraînement est intermittente. Quelles sont les limitations de la capacité et de la puissance de ces trois métabolismes ? Lorsque le niveau de production d’ATP ne satisfait pas au besoin de l’exercice, le sujet va être obligé de ralentir son allure. La performance va donc diminuer si elle se caractérise par un temps sur une distance donnée.

1.5

Métabolismes et exercice

1.5.1 Métabolismes et intensité de l’exercice Nous avons vu que la source immédiate d’énergie pour la contraction musculaire était l’ATP. La quantité totale d’ATP à l’intérieur de la cellule musculaire est cependant limitée à 0,02 mol1 chez l’homme, ce qui ne permet . de réaliser qu’un exercice de 2 secondes à 70 % de VO2max (voir tableau 2 p. 31) ou une seule détente verticale par exemple. En effet, la quantité d’énergie est disponible à partir des réserves d’ATP (10 à 30 % de ces réserves sont mobilisables) et est extrêmement limitée. C’est pourquoi il faut considérer l’ATP davantage comme un médiateur des conversions énergétiques entre l’énergie chimique des nutriments et l’énergie mécanique développée par le muscle en tension que comme une source d’énergie. La puissance maximale .du métabolisme aérobie a été calculée à partir d’un VO2max de 4 litres par minute dont 72 % seraient utilisés par les jambes actives (Jorfeldt et Wahren, 1978), pour une masse musculaire de 20 kg. La puissance maximale du processus aérobie à partir de l’oxydation des acides gras libres (lipides) est de 50 % de la puissance maximale aérobie. 30 minutes de délai d’atteinte de la puissance maximale du processus d’oxydation des lipides correspondent au temps nécessaire à la mobilisation des acides gras à partir du tissu adipeux.

1.5.2 Capacité des trois métabolismes énergétiques 1° Métabolisme anaérobie alactique Les réserves musculaires de phosphocréatine (PC) peuvent être (contrairement à celles d’ATP) entièrement utilisées, ce qui représente une capacité suffisante pour maintenir le niveau de production . d’ATP pendant environ 20 à 30 secondes à 70 % de VO2max (voir tableau 2). Cependant pour un exercice maximal de sprint, ces réserves seront épuisées en moins de 10 secondes (Sahlin, 1985).

Chapitre 1

1 On définit une mole comme étant la quantité de matière (en g) qui indique le poids molaire, ionique ou

atomique relatif de cette substance. Ainsi par exemple : • Poids molaire de l’eau (H2O) : 18  1 mole de H2O = 18 g H2O • Poids atomique de l’ion sodium Na : 23  1 mole d’ions Na+ = 23 g Na+ • Poids molaire du chlorure de calcium (CaCl2) (40 + 2  35,5) = 111  une mole de CaCl2 = 111 g CaCl2 (une mole de CaCl2 contient 2 moles d’ions Cl- et une mole d’ions Ca2+) Une mole par litre (mol/l) définit une concentration c’est-à-dire une quantité de matière par unité de volume. 1 mmol = 10-3 mole.

2° Métabolisme anaérobie lactique La quantité d’ATP qui peut être resynthétisée à partir du métabolisme anaérobie lactique par la formation d’acide lactique est d’environ 0,7 moles si tout l’acide lactique est accumulé à l’intérieur des muscles. Dans ce cas, la concentration d’ions H+ atteindra un niveau tel que la glycolyse anaérobie, et donc la formation d’acide lactique, sera inhibée (par l’action de l’acidose sur l’enzyme phosphofructokinase qui contrôle la glycolyse) (figure 9). Cependant, l’acide lactique peut être enlevé des muscles producteurs par le foie qui resynthétise du glucose à partir de l’acide lactique (cycle de Cori, figure 10) et par le cœur qui possède un isoenzyme de la lacticodéshydrogénase oxydant l’acide lactique en acide pyruvique. L’exercice peut alors être poursuivi et l’augmentation de la concentration d’ions H+ ne limitera pas la performance, toute la réserve de glycogène pouvant être alors utilisée pour former 5,2 mol d’ATP. 3° Métabolisme aérobie L’exercice de plus longue durée (supérieure à 10 minutes) nécessite l’oxydation complète des réserves de glucides et/ou d’acides gras dans la mitochondrie. La complète oxydation des réserves de glucides et de glycogène devrait donner 70 moles d’ATP et devrait permettre de . réaliser un exercice de 93 minutes à 70 % de VO2max (voir tableau 2). Les stocks d’acide gras permettent quant à eux de fournir de l’ATP pendant plusieurs jours et ne constituent pas un facteur limitatif pour .un exercice d’une puissance inférieure à 30-50 % de VO2max . D’autres facteurs limitatifs interviennent alors comme l’hyperthermie due à l’accumulation de chaleur endogène et son corollaire, la déshydratation. Cependant, la puissance de ce processus de resynthèse

29

Chapitre 1

LA

Étage Phase I Phase nécessitant de l'énergie

(1)

ATP

Réaction

Enzyme

Glucose

Hexokinase

ADP Glucose-6-phosphate

(2) (3)

PERFORMANCE SPORTIVE

ATP

ATP fourni

Phosphoglucoisomérase -1 Phosphofructokinase

Fructose-6-phosphate

-1

ADP (4)

Fructose-1,6-biphosphate

(5)

Glycéraldéhyde-3-phosphate + dihydroxyacétone phosphate

Aldolase

Triose-phosphate isomérase

Phase II Phase génératrice d'énergie

(6)

NAD

(7)

ADP

Glycéraldéhyde-3-phosphate NADH (2) 1,3 diphosphoglycérate ATP

Glycéraldéhyde-3phosphate déhydrogénase

+2

Phosphoglycérate kinase

(2) 3-phosphoglycérate Phosphoglycéromutase

(8) (2) 3-phosphoglycérate (9) (10) ADP

Énolase

H2O (2) phosphoénolpyvurate ATP (2) pyvurate 2H+

(11)

Pyruvate kinase

+2

NADH NAD

2 lactate ATP fourni au total de 2

Figure 9

z

Métabolisme anaérobie du glucose. Glycogène Glucose Pyruvate Lactate FOIE

Pyruvate sanguin Lactate sanguin

Glucose sanguin

Figure 10 Cycle de Cori.

30

^

Glucose

Pyruvate

Glycogène

Lactate

MUSCLE

d’ATP à partir des acides gras est très basse, et donc incompatible avec la plupart des vitesses exigées en compétition, même sur 100 km en course à pied . où les vitesses sont seulement de l’ordre de 70 % de VO2max .

1.5.3 Intervention couplée des métabolismes et intensité de l’exercice L’enchaînement des métabolismes en fonction de l’intensité de l’exercice (du repos à 120 % de . VO2max ) est schématisé en figure 12. L’avantage des métabolismes anaérobies est qu’ils ont une haute puissance de resynthèse d’ATP, permettant des exercices de grande force et de grande vitesse (et donc puissants) (figure 11). De plus, leur délai d’intervention est nul, puisqu’ils ne requièrent pas d’oxygène et ne dépendent pas des délais d’ajustement du débit cardiaque. Par contre, leur capacité (quantité d’énergie totale fournie par les métabolismes) est très faible (tableau 2). L’intensité de l’exercice (et donc sa durée) détermine l’utilisation préférentielle des glucides ou des lipides (voire même des protides en cas d’exercice de très longue durée et de jeûne). On définit le « cross over concept » (que l’on peut traduire par « concept de croisement métabolique ») (Brooks et Mercier, 1994) qui indique qu’au-dessous de la vitesse de début d’accumulation lactique, le sportif va utiliser un « mélange » de lipides et de glucides (figure 13 et tableau 3). Au-dessus de cette intensité, comprise entre 60 et 90 % de la vitesse correspondant à la consommation maximale d’oxygène, l’ATP sera surtout resynthétisée à partir des glucides, du glycogène. Il en est de même pour les exercices de sprint . (à 140-200 % de la vitesse associée à vVO2max ). Ainsi deux repères permettent d’apprécier la part respective des substrats, et surtout des glucides dont la réserve est limitée à un exercice maximal de 60 à 70 minutes : . – la vitesse . à 100 % de . VO2max c’est-à-dire la vitesse à VO2max , vVO2max ; – la vitesse au seuil lactique comprise, selon le niveau d’entraînement en endurance,. de 60 (pour les moins entraînés) à 90 % de VO2max (pour les plus entraînés), Nous verrons, en étudiant la structure du muscle (dans le chapitre traitant de la stucture et de la contraction musculaire), que celui-ci est composé de fibres spécialisées dans la resynthèse d’ATP selon les métabolismes aérobies (ce sont les fibres dites « à contraction lente ou de type I ») et d’autres spécialisées dans la resynthèse d’ATP sans utiliser d’oxygène (fibres à contraction rapides de type IIb). Entre ces deux types, on trouve un type de fibres à contraction rapide mais qui seraient capables d’utiliser de l’oxygène à un débit

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Processus énergétiques

Énergie disponible (mol ATP)*

Tableau 2

Temps de. maintien maximal 70 % de VO2max (min)

Stock énergétique dans l’organisme humain : quantité d’énergie disponible calculée à partir de 20 kg de muscle contenant 70 mmol/kg de muscle frais et à partir des réserves glycogéniques hépatiques de 500 mmol. La masse adipeuse a été évaluée à 15 kg. Le temps de maintien maximal a été évalué pour 70  % d’une consommation maximale d’oxygène de 4 litres par minute en postulant que chacun des processus intervient exclusivement.

Processus anaérobie : ATP

0,02

0,03

P.C.

0,34

0.5

0,7 à 5,2

0,9 à 6,9

70

93

8000

10600

Glucides (CHO)  Lactate Processus aérobie : Glucides (CHO)  CO2 + H2O Lipides (Acides Gras libres) CO2 + H2O

Chapitre 1

* Rapellons que 1 mole d’ATP libère 7 Kcalories quand elle se scinde en ADP + Pi

1.5.4 Contrôle métabolique et intensité de l’exercice : du sprint au marathon

Seuil CHO Seuil de lactique la phosphocréatine

Temps maximal de travil (mn)

moindre que les fibres I : ce sont les fibres II a. Les lipides sont surtout utilisés par les fibres lentes qui sont mises en jeu pour les exercices d’intensité modérée ne dépassant pas 5 fois le métabolisme de repos (tableau 4). En revanche, les glucides interviennent à toutes les puissances d’exercice dans des proportions croissantes en fonction de l’intensité. Dans cette zone d’effort autour du seuil de début d’accumulation lactique, l’arrêt de l’exercice est conditionné par l’épuisement des réserves de glucides. Cependant seules les fibres sollicitées auront épuisé leurs réserves.

Les substrats utilisés sont différents selon la durée et l’intensité de l’exercice. En effet, on distingue trois grands compartiments de la relation puissancetemps (figure 14) :





des exercices de. moins de 6 secondes (à environ 200 % de vVO2max ) pour lesquels la phosphocréatine (PC) est utilisée ; des exercices de dix à cent fois plus longs . (60 et 600 secondes à 130 % et 100 % de vVO2max respectivement) pour lesquels seuls les glucides sont utilisés ; des exercices 100 fois plus longs (1 heure . 40 minutes à environ 70 % de vVO2max ) pour lesquels un mélange de glucides et de lipides est à la base de la resynthèse d’ATP avec l’utilisation de l’oxygène dans la chaîne respiratoire mitochondriale. C’est pourquoi les sportifs désireux de perdre de la masse grasse devront donc réaliser un exercice en dessous du seuil de début . d’accumulation lactique à environ 60 % de VO2max et ce, pendant au moins 20 minutes, pour que le métabolisme des lipides soit mis en jeu prioritairement.

H+ et phosphocréatine

60

0

.

% VO2 max

1400

Temps maximal de travail estimé à diffé. rentes charges (en % de V O2max). On part de l’hypothèse que. le temps de maintien à 100  % de V O2max . est de 6 minutes et à 68  % de V O2maxde l’ordre de 116 minutes (Bjöckman et al., 1984). La courbe est très dépendante de l’état d’entraînement, déplacée à droite pour les athlètes entraînés en endurance et à gauche pour les non entraînés. Le facteur limitatif de la performance, quand l’intensité de l’exercice est supérieure à celle. du seuil lactique (de 65  % à 85  % de V O2max), est le glycogène musculaire stocké (CHO). Au-dessus du seuil de la phosphocréatine, la réserve de phosphocréatine ou d’ions H+ accumulés limite la performance.

1200 Puissance mécanique maximale 1000

Puissance totale créée



120

Figure 11

800

Métabolisme de la créatine phosphate

600

Figure 12

Glycolyse anaérobie

400

Métabolisme aérobie

200

0 0,25 0,5 1

5

10

30

60

Durée de l'exercice épuisant (min)

120

Diminution de la puissance mécanique maximale créée sur une bicyclette ergométrique, en tant que fonction du temps à l’exercice. La contribution estimée des apports énergétiques des différents métabolismes est indiquée au-dessous de la courbe.

31

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Tableau 3 La part des lipides et des glucides dans la dépense énergétique en fonction de l’intensité de l’exercice (en pourcentage de la consommation maximale d’oxygène ou de la fréquence cardiaque de réserve). bpm = battements par minuteþ; CHO = hydrates de carbone (sucre).

Tableau 4 La puissance maximale du métabolisme anaérobie a été calculée par Hultman et Sjöholm (1983). La puissance maximale est exprimée en mol ATP/kg/s et par kg de muscle sec.

Dépense énergétique par minute à cette intensité d’exercice (kcal.min-1.kg-1)

.

Fréquence cardiaque (FC) (bpm)

VO2 (ml.mn-1.kg-1)

.

%VO2max ou % FC réserve

% lipide

% CHO

75 (repos)

4,2

21

13

62,8

40,7

85

7,3

36,5

23

66,8

36,7

100

8,1

40,5

25

43,3

60,0

102

8,4

42

26

62,1

41,4

105

9,2

46

28

47,7

55,7

110

9,7

48,5

30

44,9

58,5

112

10,0

50

31

39,7

63,5

116

10,9

54,5

34

57,8

45,7

117

11,4

57

35

45,6

57,8

125

14,7

73,5

45

40,3

62,9

131

15,5

77,5

48

59,1

44,4

141

17,2

86

53

43,0

60,3

157

21,6

108

67

37,2

66,0

184

26,0

130

80

18,6

83,8

Puissance maximale (mol ATP/kg/s)

Processus énergétiques

Délai d’atteinte de la puissance maximale (sec, min)

Besoin d’O2 (mmol O2 /ATP)

Processus anaérobie : ATP

11,2

< 1 sec

0

P.C.

8,6

< 1 sec

0

Glucides (CHO)  Lactate

5,2

< 5 sec

0

Processus aérobie : Glucides (CHO)  CO2 + H2O

2,7

3 min

0,167

Lipides (Acides Gras libres)  CO2 + H2O

1,4

30 min

0,177

Figure 13

32

1° Le sprint 100 Lipides 50

Entraînement

90

40

80

30

70 Hydrates de carbone

20

60

10

50

0

Repos

20

40

60

Puissance aérobie (%)

80

100

40

Hydrates de carbone (%)

60

Lipides (%)

Accroissement relatif de l’énergie provenant de l’utilisation des hydrates de carbone et décroissance de l’énergie provenant de l’utilisation de l’oxydation des lipides en tant que fonction de la puissance générée par le métabolisme aérobie. Le point de croisement des 2 courbes (« cross over concept ») correspond à une participation accrue du métabolisme des hydrates de carbone au détriment de celui des lipides. Le déplacement vers la droite de la courbe des lipides est influencé par l’entraînement.

Un des problèmes majeurs des efforts brefs et intenses est de satisfaire immédiatement l’énorme demande d’énergie qui augmente la vitesse des réactions de la glycolyse de 1 000 fois par rapport au repos. Se pose ainsi la question du contrôle des enzymes qui catalysent les réactions qui ne sont pas à l’équilibre (encadré 2) : la phosphorylase, le 6-phosphofructokinase et la pyruvate kinase. Le biochimiste anglais Newsholme (Newsholme et al., 1986 et 1997) avance l’hypothèse suivante pour expliquer une augmentation des flux

Théorie bioénergétique de la performance sportive

glycolytiques en rapport avec la puissance accrue : la présence de l’enzyme fructose-diphosphatase dans de grandes variétés de muscles d’animaux laisse à penser que cette enzyme joue un rôle clef dans la régulation de la glycolyse par une opération de cycle-substrat (encadré 2) entre le fructose-6-phosphate et le fructosebi (ou di)phosphate (voir figure 9 p. 30). Le rôle de ce cycle chez l’homme est considéré comme augmentant la sensibilité du contrôle métabolique au niveau de la phosphorylation (ajout d’un phosphate) du fructose-6phosphate et modifiant la concentration des régulateurs de l’enzyme 6-phosphofructokinase. La rapidité des réactions enzymatiques nécessite une température intramusculaire proche de 38 °C. Lorsque le sujet est au niveau du métabolisme de repos, la vitesse du cycle sera très basse. Cependant, l’anticipation d’un exercice intense permettrait, selon Newsholme (1986), d’augmenter la vitesse du cycle (appelé cycle « futile » puisque ne produisant pas d’ATP et tournant à vide en attendant que l’exercice débute, figure 15). De tels cycles accroîtraient la sensibilité au changement de concentration des régulateurs de la phosphofructokinase. Le fructose 6-phosphate, conduirait alors à un ajustement plus rapide des réactions enzymatiques, eu égard à l’augmentation de la demande d’ATP par unité de temps de 1 000 fois la valeur de repos. Ainsi, un sprinter dans ses startingblocks, outre son échauffement qui le prépare à produire un niveau maximal d’ATP par unité de temps,

Taux de renouvellement de l'ATP (mmol/s) 20 Phosphocréatine Seuil de phosphocréatine 15

10

Lactate

Seuil lactique

E1 Substrat  A  B  P E2

Pour revenir de B en A, il faut une autre enzyme E2. Il s’établit donc un « cycle substrat » . On distingue des réactions proches ou éloignées de l’équilibre.  Réaction à l’équilibre : Prenons par exemple deux enzymes E1 et E2 qui ont une activité sensiblement égale : 110 pour E1 et 100 pour E2 (en unité arbitraire). La

Source anaérobie :

Seuil des sucres Source aérobie :

Oxydation des sucres 5 Oxydation des lipides 0 0

25

50 . 75 % VO2 max

100

125

aura une augmentation du taux sanguin des hormones du stress : l’adrénaline et la noradrénaline. Dès que le sprinter a démarré, le niveau d’hydrolyse de l’ATP augmente de façon très importante. Ce processus entraîne une baisse rapide de la concentration en phosphocréatine (permettant au taux d’ATP de se maintenir) et une baisse des citrates avec une augmentation des phosphates, de l’adénosine mono-phosphate et de l’ammonium (NH4+). Il en résulte alors une augmentation à son maximum (rétroaction positive) de l’activité de l’enzyme

Encadré 2 - Les cycles substrats Un substrat S est transformé en un produit P par une enzyme spécifique E1 ayant une vitesse maxi. male (V max) et une affinité (mesurée par la concentration de substrat pour laquelle la vitesse . de la réaction atteint la moitié de la V max). Nous avons la réaction suivante :

Chapitre 1

différence est de 10 unités, cette différence déterminant le « flux métabolique » : dix molécules seront peu à peu transformées de substrat en produit. Mais la différence entre E1 et E2 étant faible, une légère modification de la concentration du substrat va rapidement le transformer en B. On atteindra alors très vite un équilibre en A et B

Figure 14 Taux de renouvellement estimé de l’ATP à partir des différentes sources d’énergie pendant un travail des membres inférieurs (Jorfeld et al., 1978). On part de l’hypothèse que le Turn-Over de l’ATP augmente linéairement avec la charge de travail et que le temps de maintien à . V O2max est de 6 minutes. Cela donne un turn-over de l’ATP de source anaérobie de l’ordre de 16  % du total . (2,4 mmol ATP/s) à 100  % de V O2max, soit 15 mmol/s d’ATP au total. Le seuil des sucres est défini ici comme l’intensité où l’oxydation des graisses est suffisante pour renouveler tout l’ATP nécessaire. Le seuil lactique est défini ici comme l’intensité où la lactatémie excède 2 mmol/l (et non 4 mmol/l, comme classiquement). Le seuil de phosphocréatine est défini ici comme l’intensité où la totalité de la phosphocréatine stockée est en déplétion dans le muscle à l’exercice.

 Réaction non à l’équilibre : Si E1 a une activité de 11 (il transforme 11 molécules de S en P) alors que B a une activité de 1, le flux (la différence entre E1 et E2) est toujours de 10 mais, lorsque l’on augmente la concentration de A, la majeure partie est transformée en B puis directement en produit P. On parle alors de flux « orienté » (Poortmans, 1992).

33

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Figure 15 Changement de la vitesse du cycle et du début de la glycolyse qui peut exister : a) avant un 100 mètres, b) au départ d’un 100 mètres, c) durant un 100 mètres. La flèche supérieure représente l’action de l’enzyme phosphofructokinase et la flèche inférieure celle de l’enzyme fructose biphosphatase. Le flux résultant est la différence entre les débits des deux réactions.

55

a 5

2,000

b 1,950

c

51,000 1,000

phosphofructokinase, favorisant ainsi la resynthèse d’ATP à partir de la glycolyse. Les besoins d’ATP sur le 100 m nécessitent ce « relais » rapide entre la phosphocréatine et la glycolyse. La haute performance des coureurs de 100 m à moins de 10 secondes dépendrait en partie de la sensibilité du contrôle enzymatique de la glycolyse qui doit être très fine et très rapide. L’entraînement au départ peut favoriser, outre les questions de réglage technique, la mise en action métabolique à prendre en compte au même titre que la mise en action neuro-musculaire (recrutement de nombreuses unités motrices pour mobiliser un maximum de fibres musculaires en un minimum de temps). Peut-on alors envisager une amélioration de la performance maximale de courte durée et des exercices de sprint enchaînés sur une longue période (exemple du football) par des régimes enrichis en glucide ? En effet, les joueurs de football couvrent 47 % de leurs quelque 4 700 kcalories quotidiennes avec les glucides. Cela représente 596 grammes de glucide, soit l’équivalent de 120 morceaux de sucre n° 4 (pesant 5 grammes chacun) (Jacobs et al., 1982). Le football est un sport mixte requérant des sprints répétés toutes les 3 minutes pendant deux périodes de 45 minutes séparées par 15 minutes de récupération. Ces données permettent d’entrevoir que, pour une performance de sprint (60-400 m en course à pied, 50-100 m en natation, 200-1 000 m en vélo) il n’est pas important de suivre un régime enrichi en glucide c’est-à-dire couvrant plus de 50 % de l’apport énergétique global. Par contre, la compétition est préparée par des entraînements qui doivent stimuler l’organisme

34

sur un volume de travail suffisant. Ainsi, Gaitanos (1990 dans Williams, 1993) a montré que les réserves de glycogène intramusculaires étaient réduites de 30 % au terme de 10 répétitions de 6 secondes accomplies à une intensité maximale sur bicyclette, séparées par 30 secondes de récupération passive (240 contre 340 mmol par kilogramme de muscle frais). Le plus intéressant était qu’entre la dernière répétition et la dernière récupération, il y avait une diminution de glycogène 2 fois moins importante qu’entre la première répétition maximale et la fin de sa période de récupération. Ce fait signifie une réduction de la glycogénolyse, mais également un meilleur rendement énergétique grâce à l’augmentation de la consommation d’oxygène permettant de resynthétiser 12 fois plus d’ATP à partir d‘une molécule de glucide, que par le métabolisme anaérobie (36 ATP contre 3 ATP respectivement). Ce facteur justifierait l’importance d’une consommation maximale d’oxygène satisfaisante (> 60 ml . min-1 . kg-1) et ce, même pour les sprinters. D’ailleurs, les nageurs de 100 m couvrent une douzaine de kilomètres par jour pour préparer un effort d’une minute seulement. Cela est également dû aux contraintes d’adaptation au milieu aquatique qui nécessitent un grand nombre d’heures passées dans l’eau. Les sprinters coureurs font rarement des kilomètres à allure lente ! La spécificité du geste sportif, confrontée aux besoins énergétiques, reste encore à explorer pour dégager des principes d’entraînement fiables. Cependant, les répétitions de fractions de 30 secondes à vitesse de compétition nécessitent un métabolisme aérobie élevé, puisqu’au terme de 10 exercices maximaux de 6 secondes, on n’est pas loin d’atteindre la consommation maximale d’oxygène. Toutefois, le régime enrichi en glucide peut favoriser la récupération entre deux séances d’entraînement de sprint. Le chercheur norvégien Bangsbo (1991), spécialiste des aspects énergétiques du football, a demandé à 7 joueurs professionnels de simuler leurs déplacements en match, qui consistaient (après enregistrement) en un enchaînement de courses rapides et lentes de 15 secondes, sur tapis roulant jusqu’à épuisement. Après un régime enrichi en glucide, sur 2 jours seulement à 600 grammes quotidiens couvrant 56 % de l’apport énergétique, les joueurs parvenaient à courir 900 m supplémentaires par rapport au test réalisé avec leur régime habituel. On entrevoit dès lors les possibilités d’amélioration des performances en match, avec un régime enrichi en glucide, 2 à 3 jours avant le match. Dans la perspective d’un stage d’entraînement quotidien, voire

Théorie bioénergétique de la performance sportive

biquotidien, 600 grammes de glucides sont recommandés pour restaurer le glycogène en 24 heures. La resynthèse de glycogène la plus rapide apparaît immédiatement après l’arrêt de l’exercice. En effet, Ivy (1991) a montré que l’ingestion de 3 grammes de glucide par kilogramme de poids de corps, consommé toutes les 2 heures, permettait la restauration la plus rapide de glycogène musculaire. Bien entendu, les sucres sont apportés par toutes les céréales et leurs produits dérivés, ainsi que par les fruits. Pour autant, le sucre de table, après l’exercice (le muscle étant imprégné d’insuline, hormone qui favorise la pénétration du glucose dans la cellule), n’est pas déconseillé, dans les boissons chaudes notamment. 2° Les épreuves de moyenne durée comme le demi-fond Il importe, au contraire du marathonien, que le demi-fondeur ne mobilise pas ses graisses mais plutôt ses glucides qui lui assureront un taux de renouvellement de l’ATP bien supérieur. Sur 3000 m (courus à . 98 % de VO2max ), le métabolisme anaérobie couvre 15-20 % de la resynthèse d’ATP. Ainsi le glucose sera complètement oxydé dans le cycle de Krebs et la

Chapitre 1

chaîne respiratoire mais, en plus, le flux glycolytique étant tellement important pour faire face à la demande d’énergie, du glycogène sera dégradé en acide lactique par réduction de l’acide pyruvique, permettant ainsi de fournir un coenzyme indispensable au déroulement de la glycolyse : la nicotine adénine dinucléotide (NAD) (encadré 3a). Le demi-fondeur a donc besoin de fibres musculaires rapides, notamment riches en enzyme phosphofructokinase (PFK), mais également de fibres lentes pour oxyder l’acide lactique produit. La consommation maximale d’oxygène est le principal facteur limitatif de la performance (mais non discriminant pour des coureurs de haut niveau, le coût énergétique pouvant davantage « faire la différence »). L’entraînement à des vitesses sollicitant la consommation maximale d’oxygène permet des adaptations cardiovasculaires et enzymatiques. Sachant que l’oxydation des lipides fournit moins d’ATP que celle des glucides, le coureur étant à sa consommation maximale d’oxygène sur un 3 000 m n’a pas intérêt à utiliser les lipides qui feraient chuter sa vitesse de course.

Encadré 3a - Les réactions d’oxydoréduction et le rôle du NADH (sa navette dans la mitochondrie) Lorsqu’une molécule accepte des électrons à partir d’un donneur d’électrons, on dit alors qu’elle est « réduite » ; lorsqu’une molécule donne ses électrons à une autre molécule, on dit qu’elle procède à une réaction « d’oxydation ». Les réactions « d’oxydoréduction » sont toujours couplées. En d’autres termes, une molécule ne peut pas être réduite sans qu’une autre ne soit d’abord oxydée. La molécule qui donne ses électrons est appelée un « équivalent réducteur » alors qu’une molécule qui accepte les électrons est un « agent oxydant ». Le phénomène d’oxydation n’implique donc pas nécessairement l’oxygène. Cependant, le terme « d’oxydation » vient du fait que l’oxygène a tendance à accepter les électrons. Ainsi, l’oxygène est un agent oxydant très fort. Les cellules utilisent cette propriété de l’oxygène comme accepteur final des électrons à la fin de la chaîne respiratoire, c’est ce qu’il advient lors du métabolisme aérobie (aérobie signifiant que l’oxygène est impliqué dans les réactions d’oxydo-réduction). Deux molécules jouent également un rôle important dans ces réactions d’oxydoréductions, ce sont le « Nicotinamide adénine dinucléotide (NAD) et la Flavine adénine dinucléotide (FAD). Chaque molécule de NAD et de FAD peut accepter 2 électrons selon les réactions réversibles :

FAD + 2H+  FADH + H+ et NAD + 2H+  NADH + H+ À propos de la navette du NADH dans la mitochondrie : Le NADH généré pendant la glycolyse doit être reconverti en NAD afin que la glycolyse continue (ceci se passant dans la seconde partie de la glycolyse). La conversion du NADH en NAD peut se faire lorsque l’acide pyruvique (C3H4O3) accepte les protons hydrogènes (H+) pour former de l’acide lactique (C3H6O3). Cependant, lors du métabolisme aérobie (lorsque la glycolyse n’est pas trop rapide pour les possibilités de la chaîne respiratoire), la conversion du NADH en NAD peut également s’effectuer par la navette du NADH à travers la membrane mitochondriale. Le NADH largue alors ses hydrogènes dans la mitochondrie où se déroule la chaîne de transport des électrons, les protons H+ étant pris en charge par l’oxygène pour former de l’eau et du dioxyde de carbone.

35

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

À l’opposé du marathonien qui ne doit pas ingérer de glucides dans les 4 heures qui précèdent le départ de la course, afin de maintenir un taux d’insuline sanguin très bas pour éviter l’utilisation des glucides, le coureur de demi-fond pourra, au milieu de son échauffement qui dure environ 1 heure, ingérer un verre de boisson sucrée. La technique de la biopsie musculaire qui permet de mesurer le contenu en fibres musculaires de type lent et rapide avec leurs enzymes spécifiques fut mise au point, au début des années 70, par les physiologistes scandinaves. Ainsi il devenait possible de mesurer les effets de l’entraînement sur le métabolisme, via les enzymes spécifiques de la glycolyse anaérobie comme la PFK (phosphofructokinase) ou la SDH (succinate déshydrogénase), enzymes clefs du cycle de Krebs, fournisseurs d’équivalents réducteurs, FADH, NADH à la chaîne respiratoire (encadré 3). Les régimes enrichis en glucide ont-ils une influence sur la performance maximale continue de moyenne durée (demi-fond) ? Pendant un exercice exhaustif de 4 à 6 minutes . à 90 %-100 % de VO2max , nous avons vu que les fibres rapides IIa étaient dépléties en glycogène. Un régime enrichi en glucide permet également d’améliorer l’endurance de 36 % (6,65 contre 4,87 minutes de temps de maintien appelé le « temps limite ») lors . d’un exercice sur vélo réalisé à 105 % de VO2max (Maughan et Poole, 1981). Cependant, ces auteurs suggéraient davantage une augmentation des capacités « tampons » (capacités à neutraliser l’acidité) du muscle qu’une prévention de l’épuisement des réserves de glycogène qui n’apparaît pas dans un délai de temps d’exercice (même maximal) aussi court. De même, un exercice maximal de 6 secondes entraîne la resynthèse d’ATP de façon équivalente par la phosphocréatine et la glycolyse anaérobie (se déroulant dans le cytoplasme et induisant l’accumulation d’acide lactique). La disponibilité de glycogène n’est pas un facteur limitatif des performances de courte durée, ainsi qu’en témoigne la concentration de glycogène intramusculaire après un effort de course et de pédalage exhaustif de 6 secondes, 30 secondes et . 120 secondes (à 110 % de VO2max ) (Boobis, 1987). 3° Cas du marathon

 Intervention des lipides L’énergie nécessaire pour resynthétiser l’ATP au cours d’un exercice . long (2h10 min) et assez intense (85 % de VO2max ), tel le marathon, est obtenue à partir de l’oxydation des lipides et des glucides (et du glycogène, forme de stoc-

36

kage des glucides chez l’animal). Il importe de maintenir constante la glycémie, (taux de glucose sanguin = 1 g/l) sous peine d’avoir des malaises et des vertiges, à l’instar de certains marathoniens en fin d’épreuve. Lors de la Bêtaoxydation1 ( oxydation), les lipides doivent être transformés en glycérol et en acides gras libres pour être ensuite transformés en acétylcoenzyme A avant d’être incorporés dans le cycle de Krebs. Mais les réserves de lipide contenu dans les cellules adipeuses doivent être transportées dans le sang pour pouvoir rejoindre les cellules musculaires. Les lipides étant non solubles dans l’eau (et donc dans le sang), il faut alors un transporteur qui est une protéine (l’albumine). C’est cette combinaison chimique entre molécule de protéine et acide gras qui restreint le débit d’utilisation des lipides. En effet, le complexe albumine et molécule de lipide est dissocié lors du passage dans les muscles actifs en raison de la très faible concentration intramusculaire de lipides due à leur continuelle oxydation. L’entraînement sur longue distance permet d’augmenter cette concentration. Ce mécanisme de transport des lipides par l’albumine est très efficace puisqu’une grande quantité de lipide peut être rapidement transportée depuis les cellules adipeuses vers les cellules musculaires. Cependant, le prix à payer est une limitation du niveau d’oxydation des lipides dans le muscle à cause du bas niveau de diffusion des lipides depuis l’albumine jusque dans le muscle. Ceci implique la limitation de la vitesse de resynthèse de l’ATP, égale à la moitié seulement de celle possible à . VO2max . Des séances longues de 30 km sont donc conseillées aux marathoniens pour améliorer la mobilisation des lipides du tissu adipeux

1 La

Bêtaoxydation ( oxydation) des lipides (figure 16) ne pourra se faire en raison de l’inhibition des enzymes mitochondriales responsables de la dégradation des triglycérides en acides gras libres. La  oxydation est le processus qui oxyde les acides gras libres (libérés des triglycérides) pour former l’acétylcoenzyme A (acétyl-CoA) qui est nécessaire au cycle de Krebs. La  oxydation apparaît dans la mitochondrie et implique une série d’étapes catalysées par des enzymes depuis un acide gras activé jusqu’à la production d’acétylCoA. Il y a un jeu de balance entre la resynthèse d’ATP par la phosphorylation oxydative à partir des glucides et des lipides.

Chapitre 1

Théorie bioénergétique de la performance sportive

vers les cellules musculaires. Des entraînements effectués le matin à jeun (avec une barre de céréales dans la poche) favoriseront cette adaptation à l’utilisation préférentielle des lipides. En effet, l’énergie est stockée sous forme de graisses dans les cellules adipeuses ou sous forme d’un sucre complexe (composé de plusieurs molécules de glucose) : « le glycogène » qui se trouve dans les muscles et le foie.

 Intervention du glycogène Le glycogène est le polysaccharide contenu dans le tissu animal. Rapellons que les polysaccharides sont des sucres à assimilation lente et permettent de faire face à une baisse de la concentration du glucose sanguin (hypoglycémie). Plus l’index glycémique (tableau 5) d’un aliment riche en glucide est bas, plus il permettra de stocker le glucose sous forme de glycogène. Le glycogène est synthétisé à l’intérieur des cellules du muscle (300 g de glycogène) et du foie (100 g) en liant des milliers de molécules de glucose entre elles. Il permet de stocker le glucose qui va pouvoir être disponible à l’exercice. En effet, le muscle brise le glycogène en glucose dans le processus appelé la glycogénolyse (lyse signifiant « casser ») dont la fonction est de synthétiser l’ATP. La glycogénolyse se déroule également dans le foie, le glucose étant libéré dans le sang et transporté aux différents tissus (ensemble de cellules ayant la même structure et la même spécialité) de l’organisme. Cependant, au contraire du cheval, l’homme ne stocke qu’une faible quantité de glycogène qui lui permet seulement 1 à 2 heures d’exercice (selon l’intensité) pour un sportif moyen ayant suivi un régime alimentaire varié, non enrichi en sucres (polysaccharides surtout). Pour courir le marathon, les sportifs d’une part suivent un régime hyperglucidique et d’autre part s’entraînent sur de longues distances, parfois le matin à jeun, pour augmenter l’utilisation des graisses à des vitesses de course inférieures ou égales à celle de la compétition. La vitesse de compétition sur marathon est donc inférieure à la « vitesse au seuil lactique » (voir chapitre IV, 2.4 et chapitre VI, 1.5.4) pour que le marathonien puisse courir plus de 2 heures grâce à l’utilisation des lipides, en plus de son stock de glycogène (qui serait insuffisant pour une telle durée d’exercice). En effet, audessus de la vitesse au seuil lactique, seuls les sucres peuvent fournir l’énergie nécessaire à la

Glucose

Glycérol + 3 acides gras

Triglycéride

3 phosphoglycéraldéhyde Acide pyruvique Acétyle + CoA

Coenzyme A (CoA)

CoA

Acétyle – CoA

Cycle de Krebs

Bêta Oxydation

H2 H2

Entrée dans la chaîne de transport d'électrons

2Co2

Figure 16 resynthèse d’ATP permettant la contraction musculaire. Contrairement à une idée reçue, pour perdre de la masse grasse c’est-à-dire pour « maigrir », il est impératif de courir, nager, pédaler à des vitesses lentes permettant de bavarder avec son compagnon de route en dessous du seuil lactique, et de « brûler » ainsi ses graisses en utilisant les lipides. Approximativement, on peut considérer que l’hyperventilation est le signe de l’atteinte du seuil lactique. En revanche, pour battre le record de l’heure en course ou en cyclisme, il est indispensable d’utiliser des sucres, au rendement énergétique meilleur que celui des graisses. En effet, pour une même quantité de travail (c’est-à-dire de joules disponibles), les lipides nécessitent une consommation d’oxygène supérieure par unité de temps, expliquant la moindre puissance (vitesse) possible. De plus, les sucres sont indispensables pour métaboliser les graisses qui ne peuvent à elles seules resynthétiser l’ATP. C’est pour cette raison que tout entraînement doit être compatible avec une restauration des stocks de sucres sous forme de glycogène dans le foie et les muscles en activité.

Voies métaboliques de dégradation des acides gras et du glycérol provenant d’un triglycéride.

Ainsi, au terme d’une compétition ou d’un entraînement ayant épuisé les réserves de glycogène, il est impératif de boire, puis d’ingérer des aliments riches en sucres simples et complexes (jus de fruits, pâtes, riz, …). D’autre part, les séances effectuées à des vitesses supérieures ou égales au seuil lactique devront être espa-

37

Chapitre 1

Tableau 5 Index glycémiques de quelques aliments riches en hydrate de carbone, en référence au glucose. D’après la table internationale d’index glycémique (Miller, 1995).

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Hydrates de carbone au goût non sucré Catégories d’aliment

Index glycémiques

Pâtes

Index glycémiques

Sucres



Fettuccinis

62



Glucose (tablette)

102



Macaronis

64



Glucose (poudre)

97



Raviolis à la viande

39



Fructose

30



Spaghettis (enrichis en protéines et bouillis 7 min)

37



Saccharose (sucre de table ou sucrose)

65



Spaghettis blancs (classiques bouillis 8 min)

51



Lactose (sucre du lait)

48



Miel

73



Pâtes complètes

47



Vermicelles

55

Céréales graines

Fruits

(A ne pas confondre avec les préparations pour le petit déjeuner comme par exemple le muësli) –

Blé concassé (cuit 20 min)

46



Couscous (semoule de blé dur)

61



Maïs

68



Riz blanc

55



Riz complet

50



Pomme

36



Jus de fruit

40



Abricot

31



Banane

53



Raisin (avec la peau)

25



Jus de raisin

48



Kiwi

52



Mangue

55



Orange

43

Céréales pour le petit déjeuner (marque référencée Kellogg’s)

Boulangerie



Croissant

67



All bran (28 % de son)

30



Tarte fruits maison

59



Corn Flakes

77



Quiche au fromage

55



Crispies

87



Pain complet à 80 %

70



66



Baguette

85

Muësli (valeur moyenne de 4 marques)



Rice Krispies

82



Special K (enrichies en protéines à 15 %)

54

Légumes à tubercules

Laitage



Carottes

80



Lait entier

27



Pommes de terre

71



Crème glacée

61



Pommes de terre nouvelles (plus riches en eau)

83



Patates douces (plus riches en fibres)

54

62

Légumineuses

Confiserie



Lentilles vertes

28



« Mars » (non glacé)

68



Soja

15



Chocolat noir 70 %

49



Haricots rouges

20



Pop Corn

55

Snacks

38

Hydrates de carbone au goût sucré Catégories d’aliment



Chips de maïs

72



Chips de pomme de terre

54



Cacahuète

14

Théorie bioénergétique de la performance sportive

cées d’au moins 48 heures pour permettre la récupération des stocks initiaux de glycogène. Sur marathon et pendant les épreuves de plus de 90 minutes, les graisses permettent de compléter l’énergie libérée par les sucres. Les graisses, ou molécules de lipide, contiennent les mêmes atomes que les sucres (carbone, hydrogène, oxygène). La seule différence est le rapport entre les atomes de carbone et d’oxygène (C6H12O6 pour le glucose et C16H32O2 pour l’acide palmitique). Les lipides sont utilisés au repos ainsi que dans les efforts longs et peu intenses (en dessous du seuil lactique). De plus, un délai de 20 minutes est nécessaire à leur sollicitation. Ainsi, même si en termes de dépense énergétique, courir 5 km en continu équivaut, à vitesse égale, à une course fractionnée de 5 fois 1 000 m, la répartition de la couverture énergétique entre les lipides et les sucres sera différente. En effet, la course continue favorisera l’utilisation des graisses alors que la course fractionnée sollicitera, à vitesse égale, davantage les glucides. Un coureur confirmé qui accomplira un 10 km en 30 minutes (à 20 km/h) puisera davantage dans les sucres (glucose sanguin + glycogène hépatique et musculaire) que le coureur « du dimanche » qui terminera cette course en 1 heure. En effet, le coureur de bon niveau utilisera (selon Péronnet et al., 1991) 9 g de glucose sanguin circulant + 137 g de glycogène musculaire (sur les 300 g de réserve) + 18 g de glucose hépatique (sur les 100 g de réserve). Le coureur de faible niveau utilisera : 12 g de glucose circulant + 121 g de glycogène musculaire + 9,7 g de glycogène hépatique. La moins grande utilisation de glycogène par le coureur lent sera compensée par une mobilisation deux fois plus élevée des acides gras (10,3 g contre 5,5 g pour le coureur de bon niveau). Il n’est pas possible de transférer le glycogène de fibres musculaires non sollicitées aux fibres en activité, consommatrices de glycogène. De plus, la mise en jeu respective des types de fibres et donc leur épuisement en glycogène sont très différents selon la puissance de l’exercice. En effet, les chercheurs norvégiens Vollestad et Blom (1985), ont montré que 60 minutes . de bicyclette . à 43 % de vVO2max (vitesse associée à VO2max ) entraînaient une déplétion (épuisement) des réserves de glycogène dans presque toutes les fibres I, et dans seulement 20 % . des fibres IIA. Après 60 minutes à 61 % de VO2max , toutes les fibres I étaient en déplé-

Chapitre 1

tion et 65 % des fibres . IIA. Enfin, après 5 minutes à 91 % de vVO2max la lactatémie s’élevait à 15 mmol.kg-1 de masse musculaire fraîche (soit 10 fois la valeur de repos) et toutes les fibres I et IIA étaient dépléties en glycogène. Cette déplétion accrue . des fibres lentes entre 43 % et 90 % de vVO2max indique une mise en tension progressive des fibres musculaires de type I. L’alternance des intensités d’entraînement permet donc la mise en jeu des différentes fibres musculaires, dans des proportions différentes conditionnant une sollicitation spécifique des réserves glycogéniques. Il importe de prendre en compte cette réalité pour élaborer des séances et des cycles d’entraînement sportif. De même, une alimentation enrichie en glucide sera indispensable pour restaurer les réserves de glycogène intramusculaire et hépatique après un. entraînement réalisé entre 40 % et 100 % de vVO2max . Les entraînements se font bien souvent dans la zone d’intensité et de durée déplétissant le plus en glycogène les fibres musculaires de type I et IIa, c’est-à-dire à 70 à 90 % de la consommation maximale d’oxygène. Pendant un exercice à cette intensité, le métabolisme des acides gras libres et du glycogène utilise les substrats qui fournissent l’énergie nécessaire à la rephosphorylation de l’ADP en ATP. Cependant, lorsque la concentration intramusculaire de glycogène tombe en dessous d’une valeur critique, la resynthèse d’ATP est ralentie puisque les intermédiaires mitochondriaux du cycle de Krebs (NAD, FAD) sont moins disponibles (voir encadré 3a p. 35). Clyde Williams (1993), chercheur britannique en sciences du sport, spécialiste de la nutrition et plus particulièrement du métabolisme des glucides, rappelle le consensus scientifique concernant la part respective des glucides (50 %), lipides (35 %) et protéines (15 %) dans l’apport calorique quotidien. Il rappelle la proportion de chacun des nutriments observés chez des sportifs entraînés, hommes et femmes, sur un apport calorique très variable chez les hommes selon leur sport mais surtout les différentes études considérées : de 3 000 à 5 200 kcalories pour les coureurs de fond et les nageurs respectivement. Concernant les femmes, les valeurs données sont plus homogènes : de 1 900 à 3 500 kcal pour des coureuses de fond et des nageuses.

39

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

La part des glucides varie entre 43 et 60 % des apports énergétiques, cette amplitude étant similaire pour les hommes et les femmes.

glucides augmentait la performance pour des exercices de longue durée. Il rappelle que, pour obtenir 50 g de glucides, il est nécessaire de préparer 60 g de riz, 65 g de pâtes ou 75 g de lentilles, ces aliments une fois cuits pèseront respectivement 210 g, 195 g et 230 g soit deux bonnes assiettes. Ces sucres complexes devront représenter au moins la moitié de la ration glucidique totale. Ces sucres au faible index glycémique (surtout lorsqu’ils sont additionnés d’un peu de beurre ou de fromage), permettent de ralentir l’oxydation des glucides en favorisant celle des acides gras libres grâce à un faible taux sanguin d’insuline. Le taux de glycogène intramusculaire se trouve ainsi épargné.

Les plus gros consommateurs de glucide sont les triathlètes masculins et les coureurs de fond (60 % de la ration énergétique sont couverts par les glucides). Ces coureurs de fond avaient un apport calorique quotidien de 3500 kcal dont 46 % de glucide (429 g), 42 % de lipide et 12 % de protéine. Pendant un régime enrichi en glucide, la part des glucides s’élevait à 64 % (597 g) avec une réduction de celle des lipides (24 %) et le maintien de celle des protéines (12 %). L’augmentation de seulement 10 minutes du temps d’exercice pouvait expliquer le fait que la ration habituelle comportait déjà 47 % de glucide ; cependant, 10 minutes représentaient tout de même 9 % d’amélioration de l’endurance, ce qui peut s’avérer déterminant en compétition. En effet, les 5 derniers kilomètres d’une course de 30 km ont été courus plus rapidement après un régime enrichi en glucide, entraînant une amélioration significative de la performance globale de 4 minutes (127 contre 131 minutes) (Williams et al., 1992). Cela peut représenter plusieurs dizaines de places au classement final. Pour les très longues épreuves (dont la durée est supérieure à 3 heures), après les glucides et les lipides, les protéines constituent la dernière catégorie des nutriments de l’organisme, certainement la moins impliquée dans la fourniture énergétique mais primordiale pour la structuration des cellules. La quantité de glucide idéale, pour restaurer les réserves de glycogène, reste encore à déterminer selon les types d’exercice et le niveau d’entraînement des sujets. De plus, les délais d’efficacité de l’ingestion de glucose sont très controversés, puisque Coyle et al., 1985 ont montré que, pour des niveaux de glycogène intramusculaire très bas, l’ingestion de boisson glucosée, 15 minutes avant le départ, s’avérait . efficace avant un exercice intermittent à VO2max alors que Snyder et al., (1993) concluaient, à l’opposé, sur l’inefficacité d’une telle pratique. Par précaution, le sportif n’attendra pas les dernières minutes précédant la compétition pour s’alimenter en glucose. Guezennec (1995), dans une revue de question sur les sucres complexes et l’exercice, donne quelques recommandations pratiques en commençant par l’affirmation que l’ingestion de

40

1.6

Entraînement et effets sur les métabolismes

1.6.1 Le métabolisme de l’exercice Le glycogène est synthétisé à l’intérieur des cellules du muscle (300 grammes de glycogène) et du foie (100 grammes) en liant des milliers de molécules de glucose entre elles. Il permet de stocker le glucose qui va pouvoir être disponible à l’exercice. En effet, le muscle brise le glycogène en glucose dans le processus appelé la glycogénolyse (lyse signifiant « casser ») dont la fonction est de synthétiser l’ATP. La glycogénolyse se déroule également dans le foie, le glucose étant libéré dans le sang et transporté aux différents tissus (ensemble de cellules ayant la même structure et la même spécialité) de l’organisme. Cependant, au contraire du cheval, l’homme ne stocke qu’une faible quantité de glycogène qui lui permet seulement 1 à 2 heures d’exercice (selon l’intensité) pour un sportif moyen ayant suivi un régime alimentaire varié, non enrichi en sucres (polysaccharides surtout). Pour courir le marathon, les sportifs suivent d’une part un régime hyperglucidique, et d’autre part s’entraînent sur de longues distances, parfois le matin à jeun, pour augmenter l’utilisation des graisses à des vitesses de course inférieures ou égales à celles de la compétition. Si l’on considère la vitesse de compétition moyenne sur le marathon celle-ci est comprise entre 75 et 85 % de la consommation maximale d’oxy. gène (VO2max ) à une vitesse inférieure à la « vitesse au seuil lactique » (notion développée dans le chapitre IV (point 2.4) et chapitre VI (point 1.4.4). Cette intensité permet d’utiliser la bétaoxydation (Cf. figure 16, p. 37) en plus de la glycolyse pour alimenter le cycle de Krebs en acétyle coenzyme A (figure 17a, La phosphorylation oxydative).

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Cette subdivision entre processus intra et intercellulaire peut paraître arbitraire mais elle a des avantages pratiques. En effet, pour passer du repos à l’exercice, l’accélération du transport de l’oxygène dépend de phénomènes physiologiques à forte valence biophysique et biochimique ; l’augmentation de l’utilisation de l’oxygène à travers la seconde série de facteurs est, au moins pour les exercices de courte durée, essentiellement dépendant des processus biochimiques intracellulaires. Nous verrons que cette conception qui consiste à séparer le transport de l’oxygène des réactions de dissociation de l’ATP en ADP et Pi (phosphate inorganique) pour les exercices de courte durée est à présent obsolète étant donné que la resynthèse de l’ATP par la créatine phosphate est étroitement liée à la rapidité de la phosphorylation oxydative. .Nous avons vu qu’un sprinter mobilise 100 % de VO2max en quelques secondes.

1.6.2 Effets de l’entraînement en endurance Une étude de Gollnick et al. (1973) avait mis en évidence les effets de 5 mois d’entraînement en endurance, à raison de 4 séances d’une heure à 75-90 % de . VO2max par semaine. Il fallut aux sujets deux semaines de ce type d’entraînement pour terminer . 1 heure d’exercice à. 75 % de VO2max . La puissance était alors de 65 % V.O2max afin d’assurer l’adaptation progressive à 75 % VO2max . Parallèlement au dosage enzymatique, les auteurs avaient mesuré les effets de . l’entraînement sur VO2max et les réserves de glycogène intramusculaire. Après ces deux . semaines d’entraînement, une augmentation de VO2max a été observée chez les 6 sujets explorés (+ 3,6 à 25 %), la valeur moyenne passant de 3,9 à 4,5 l/min. La concentration intramusculaire des enzymes SDH et PFK a augmenté de 95 % et 117 % respectivement. Néanmoins, le pourcentage de fibres lentes et rapides (mesuré dans le muscle vaste externe), n’a pas été modifié par l’entraînement en endurance (32 % et 36 % de fibres lentes avant et après entraînement). Cependant, la surface occupée par les fibres lentes s’est accrue puisqu’elle est passée de 5,495 2 à 6,778 2 alors que celle des fibres rapides a diminué (6,638 2 à 6,1392). Le rapport des surfaces des fibres lentes par rapport aux fibres rapides a augmenté (0,82 avant et 1,11 après entraînement). En revanche, le potentiel oxydatif s’est accru à la fois dans les fibres lentes et les fibres rapides. L’activité anaérobie (mesurée par l’activité de l’enzyme alphaglycérophosphate déhydrogénase) a

Chapitre 1

augmenté seulement dans les fibres rapides. Les réserves intramusculaires de glycogène sont passées de 72 mmoles d’unité glucose par kg de muscle frais (valeurs trouvées généralement chez des sujets non entraînés en endurance) à 182 mmoles d’unité glucose par kg de muscle frais, soit presque trois plus. L’augmentation n’était pas différente dans les fibres lentes et rapides. Les résultats de cette importante étude montraient alors clairement les adaptations métaboliques du muscle à l’entraînement. Ils mettaient également en évidence que la typologie des fibres musculaires n’était pas modifiée par l’entraînement à l’âge adulte, mais que leurs surfaces absolues et relatives pouvaient varier. Par la suite, d’autres auteurs ont mis en évidence que le nombre de capillaires par fibre musculaire pouvait augmenter de 50 % après deux mois d’entraînement quotidien de 30 à 60 min à 70-80 % de . VO2max (Henriksson, 1992). Quatre semaines suffisent à faire redescendre aux valeurs initiales le taux des enzymes oxydatives. Cette diminution apparaît plus rapidement .que celle du nombre de capillaires et de la valeur de VO2max , ce qui relance le débat des facteurs limitatifs de la consommation maximale d’oxygène, que nous aborderons après avoir considéré l’apport d’oxygène aux muscles par les fonctions cardio-ventilatoires (chapitre IV, I.6 et I.9). Au bilan, on peut retenir que les athlètes entraînés en endurance ont 3-4 fois plus d’enzymes oxydatives et 2-3 fois plus de capillaires par fibre musculaire, assurant donc un plus grand apport et une meilleure utilisation de l’oxygène par la fibre musculaire.

1.6.3 Effets de l’entraînement de sprint Concernant les effets de l’entraînement de sprint, dans une étude plus récente de Nevill et al. (1989), après 2 mois d’entraînement bihebdomadaire composé de deux répétitions de 30 secondes séparées par 10 min de récupération, une troisième séance comprenant 6 à 10 répétitions de 6 à 54 secondes, et enfin une quatrième séance composée de 2 courses . exhaustives à 110 % de VO2max séparées par 5 minutes de récupération passive, ces auteurs constatent alors les effets suivants :

 concernant la performance sur 30 secondes, les sujets augmentaient leur vitesse de course de 12 % sur le test maximal de 30 secondes, correspondant à une puissance mécanique moyenne (mesurée grâce à un tapis roulant non motorisé) égale à 606 ± 36 watts avant entraînement et 681 ± 134 watts après entraînement. La

41

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Figure 17a La phosphorylation oxydative dans la mitochondrie.

Précurseur énergétique essentiel (alimentation, tissu adipeux)

Pyruvate

Acide gras

Pyruvate déshydrogénase

Hélice de Lynen

acétyl CoA

CO2

Cycle de Krebs

CO2

H2 O2

O2

NADH2 FADH2

ADP + Pi

NAD+

ATP

FAD+

H2O

O2

e–

e–

e–

H+ H+

H+

H+

Chaîne respiratoire

42

ATP synthétase phosphorylation oxydative

Théorie bioénergétique de la performance sportive

puissance maximale dite « puissance de pic » et la puissance moyenne étaient améliorées de 12 et 6 %. Cependant, la puissance finale n’était pas significativement différente puisque les sujets terminaient leur effort à moins de 300 watts, cela signifiant que l’entraînement leur permettait d’être plus puissants mais moins endurants puisque incapables de soutenir la puissance dès la 15e seconde.

 Cette amélioration de la performance s’accompagnait d’une plus grande accumulation d’acide lactique et d’une concentration en noradrénaline, hormone qui permet d’activer l’enzyme phosphorylase b en phosphorylase a, favorisant ainsi la transformation du glucose en hexokinase (première réaction de la glycolyse, figure 17). La lactatémie était supérieure après entraînement (13,0 ± 3 vs 13,7 ± 3 mmol/l). Le pH sanguin postexercice était plus bas après entraînement (de 7,17 ± 0,11 à 7,09 ± 0,11). La consommation d’oxygène, mesurée pendant le sprint de 30 secondes, n’augmentait pas avec l’entraînement; elle restait à 15,5 ml . min.-1 . kg-1, ce qui représentait seulement 27 % de VO2max pour . une puissance d’exercice égale à 200 % de VO2max (un dixième seulement de la puissance d’exercice étant assuré par le métabolisme aérobie).

 Les

concentrations de phosphocréatine intramusculaire et la consommation d’oxygène, mesurées pendant la course de 30 secondes, étaient inchangées après entraînement de sprint. C’est pourquoi les auteurs concluaient que la resynthèse d’ATP supplémentaire par unité de temps, était rendue possible par une augmentation de 20 % de cette resynthèse à partir de la glycolyse anaérobie grâce à l’activité enzymatique de la PFK (phosphofructokinase, figure 17b) et par une augmentation des capacités tampon du muscle, un pH sanguin inférieur en fin d’exercice correspondant à un flux de protons H+ plus grand.

 La puissance de pic et la puissance moyenne enregistrées lors de la course exhaustive de 2 minutes n’étaient pas significativement différentes. Aucune modification des réponses métaboliques n’avait été trouvée.

 Un entraînement ne comprenant qu’une séance

spécifique de courses maximales de 2  2 minutes avec 5 minutes de récupération passive ne suffit pas à améliorer la performance de ce type

Chapitre 1

d’effort. Les 4 séances hebdomadaires de sprints courts s’avèrent inefficaces pour compléter cette séance spécifique et ce, même chez des sujets non entraînés.

1.7

Modèles théoriques de la relation puissance temps basés sur les caractéristiques bioénergétiques humaines

En 1927 déjà, Hill publiait dans son ouvrage « Muscular movement in man » une explication physiologique de la forme de cette relation vitesse-durée d’exercice mise en évidence par Kennelly. Il publia cette équation : V = S / (tB) + (R – A) / B Où V est la vitesse, S est la capacité énergétique (S comme Stock) et R est le débit d’énergie au cours de l’exercice. A et B sont des paramètres dépendant des caractéristiques physiologiques du coureur : « A » étant la consommation d’oxygène de repos et « B », le débit d’énergie pour une vitesse donnée, exprimé en équivalent d’oxygène à une vitesse donnée (soit l’économie de course selon la définition de Daniels et al., 1986). Pour les courtes distances (limites non précisées), « S » est petit et « R » large ; pour les longues distances, S est plus grand et R plus petit. Ce modèle de Hill fut repris ultérieurement par Llyod (1966). Dès 1954, Henry commentait les travaux de Lietzke (1954) essayait d’introduire un début d’explication physiologique concernant les ruptures de pente de la relation vitesse – temps décrite précédemment. Il évoqua l’épuisement des réserves disponibles pour leur transformation en énergie mécanique, réserves que renouvellent en fonction de la durée de l’exercice, les métabolismes anaérobie alactique et lactique ainsi que le métabolisme aérobie. Proposant une explication plus physiologique de la perte de vitesse en fonction du temps, Henry (1954) affectait alors une constante « a » à chaque partie de la courbe générale de la relation vitesse/temps selon une double échelle logarithmique : dy / dt = a1e–k1t + a2e–k2t + a3e–k3t + a3e–k3t + a4e–k4t + a5e–k5t Où dy / dt représente la vitesse (dérivée de la distance y par le temps t), où a : représente un débit d’énergie traduit par une perte de vitesse due à la déplétion des réserves énergétiques (a1 pour le métabolisme anaérobie alactique et les réserve de phosphocréatine, a2 pour le métabolisme anaérobie lactique, a3 (2,96), a4 (3,54) et a5 (pour le métabolisme aérobie et les réserves de glycogène, lipide et protide. Le facteur a1 est négligeable car les proté-

43

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

ines sont peu mises en jeu dans le métabolisme énergétique.

Figure 17b Voies métaboliques de synthèse de l’ATP à partir de l’oxydation des hydrates de carbone provenant du glucose sanguin ou du glycogène musculaire.

Glycogène musculaire

Dans ces mêmes années, Scherrer et al. (1954) étudiaient l’influence de la charge et de la fréquence imposées au travail musculaire dynamique local, pour préciser « quelques règles valables pour un travail musculaire de l’Homme ». La mesure d’un « seuil d’épuisement local » ou de « puissance critique » était alors fondée sur la constatation d’une relation simple reliant le travail limite et le temps limite. Ils l’énonçaient ainsi : « Lorsque l’on fait effectuer à un muscle, un travail dynamique poussé jusqu’au seuil d’épuisement, on constate que la durée de ce travail (tlim) et le travail effectué (Wlim) diminuent selon la puissance à laquelle se réalise ce travail. La relation entre le travail et le temps limite, pour des épreuves effectuées à différentes puissances, est en première approximation linéaire ». Cette relation se formule par l’équation :

Glucose Phosphorylase ATP

ADP

glucose sanguin

Glucose 1 phosphate TPi

Glucose 6 phosphate

(Hexokinase)

Fructose 6 phosphate ATP Phosphofructokinase ADP + Pi Fructose 1-6 Diphosphate Chaîne de transport des électrons

2 NAD+ 2 NADH

2 ADP + Pi 2 ATP 2 ADP + Pi

Wlim = a + btlim

2 ATP

2 Acides pyruviques Chaîne de transport des électrons

Où a et b sont des constantes.

2 NAD+ 2CO2

2 NADH

Poumons

2 Acétyle + Coenzyme A

Ce modèle reste l’un des plus précis pour prédire des temps limite pour des pourcentages donnés de la puissance maximale aérobie (de 90 à 120 % PMA) (Billat et al., 1999a). En 1960, puis en 1980, Wilkie met au point un modèle physiologique qui prend en compte l’inertie des métabolismes énergétiques en proposant le modèle suivant :

2 Acétyle CO - A

Wmax = Ate-1 + B – Bk-1 (1–e-kte)te-1 Cycle de Krebs

Acide oxaloacétique

Acide citrique

2 ADP + Pi 6 NAD+

Chaîne de transport des électrons

6 NADH

2 FADH2 +

2 FAD 2 CO2

2 ATP provenant du cycle de Krebs 18 ATP provenant de la chaîne de transport des électrons 4 ATP provenant de la chaîne de transport des électrons

Poumons

Où A est la quantité d’énergie maximale fournie par les métabolismes anaérobie (alactique et lactique) ; B est la puissance. métabolique aérobie maximale (correspondant à VO2max ) ; k .est l’inverse d’une constante de temps à laquelle VO2max est atteinte (égale à 0,1 s-1) ; (1 – e–kte)te-1 représente le fait que . VO2max ne peut être instantanément atteint dès le début de l’exercice ; t est la durée de l’exercice considéré. Ce modèle fut repris notamment par di Prampero ultérieurement. Ettema (1966) soulignait alors le fait que par l’équation de Frederick (1959), les performances sur courtes distances étaient surestimées lorsqu’elles étaient calculées à partir de points sur longues distances. Plutôt qu’une relation vitesse – temps, il propose alors une relation distance-tlim : D = a + b  t lim

44

Théorie bioénergétique de la performance sportive

Où tlim est le temps limite ; a est assimilé à une réserve de distance en mètres qu’il est possible de parcourir sur les réserves d’oxygène et l’énergie fournie par les métabolismes anaérobies ; b est la vitesse maximale (en m.s-1) compatible avec la reconstitution de ces réserves par les métabolismes aérobies. Ettema rapporta la similitude de son équation avec celle élaborée par Scherrer et Monod (1960) pour le travail dynamique local d’un groupe musculaire. De l’équation précédente Ettema tire : t lim = a  V – b

Où V est la vitesse en m.s-1, tlim le temps limite en secondes ; a,b sont des constantes dont la valeur diffère en fonction de la partie de la courbe étudiée donc du temps limite considéré, des métabolismes énergétiques sollicités et du type de locomotion utilisée. Ainsi, le temps limite à une vitesse considérée dépendrait de la différence entre cette vitesse et la vitesse maximale possible avec une reconstitution de l’énergie par oxydation, appelée « la vitesse critique » par Ettema, par extension aux travaux de Scherrer et Monod. Ettema calcula les vitesses critiques (m/s) pour la natation, la course, le patinage et le cyclisme à partir des records mondiaux à la date de 1965. Il obtint ainsi les valeurs respectives à chacune de ces locomotions humaines de : 1,43, 5,85, 10,6 et 13,5 m.s-1. Ces vitesses sont celles du record de l’heure pour la course alors que celle du cyclisme est très en deçà. Ettema n’avait peut-être pas suffisamment pris en compte la composante aérodynamique du coût énergétique du cyclisme qui compte pour 90 % du coût énergétique de ce type de déplacement (contre 10% en course à pied jusqu’à 20 km/h selon Pugh, 1971). Les valeurs du coefficient « a » calculées par Ettema pour la natation, la course, le patinage et le cyclisme à partir des records du mondiaux sont respectivement de 40, 240, 180 et 200 mètres. Ettema concluait que les lois de la fatigue mises en évidence, à partir de la relation puissance – durée du déplacement, par Kennelly (1926) recouvraient en fait les mécanismes physiologiques de renouvellement de l’ATP. Si l’on assimile le muscle à un transformateur d’énergie chimique en énergie mécanique, on peut prendre cette conclusion comme une évidence. Margaria et al. (1975), publiaient un modèle physiologique permettant de prédire le temps nécessaire pour couvrir une distance en considérant que le coût énergétique de la course est indépendant de la vitesse entre 10 et 20 km.h-1, le coût énergétique de

Chapitre 1

la course étant égal à 0,9 cal.m-1.kg-1 (Margaria, 1963) ; en effet, en dessous de cette zone, la foulée devient moins économe et marcher devient deux fois moins coûteux que courir pour couvrir la même distance alors qu’au dessus de 20 km.h-1, ainsi que nous l’avons précédemment noté, le coût énergétique augmente avec le coût aérodynamique. De plus, ce modèle postule que pour 1 minute d’exercice maximal, l’énergie fournie par la glycolyse anaérobie est équivalente à celle fournie par les processus oxydatifs . (le VO2max. ) ; ainsi, selon Margaria (1963), un athlète ayant un VO2max de 70 ml.mn-1.kg-1, possède un déficit maximal d’oxygène accumulé de 70 ml. kg-1. Cette estimation a été confirmée par Medbo et al. (1988) qui ont réactualisé le concept de déficit d’oxygène comme un moyen de mesurer directement la capacité anaérobie ; 1 litre d’oxygène (soit environ 21 kJ (pour un quotient respiratoire de 0,96) non consommé étant fourni par le métabolisme anaérobie. Ce modèle est le suivant :

.

.

m = 5 (VO2max – 6)  t + 5 VO2max Où m est la distance maximale (en mètres) couverte . dans le temps t (min) pour un VO2max donné (ml.min-1.kg-1). Bien que l’équation originale soit sous la forme proposée ci-dessus, elle peut apparaître douteuse dans ses dimensions. En effet, le membre de droite de l’équation correspond à la différence d’une distance (triple produit d’un coût énergétique, d’un débit d’énergie et d’un temps) et d’une vitesse (produit d’un coût énergétique et d’un débit d’énergie). En fait, pour conserver une cohérence sur le plan dimensionnel il convient d’écrire l’équation de Margaria sous cette forme :

.

.

m = 5 (VO2max – 6)  t + 5 VO2max  k Où la valeur de la constante 5 correspond en fait au coût en oxygène d’un mètre et où la valeur de k est égale à une minute. En appliquant numériquement ce modèle, on peut calculer que . si une athlète (demi-fondeuse de bon niveau) à un VO2max de 65,6 ml.min-1.kg-1, le temps prédit sur 3 000 m par cette équation est de 8 min 57 s. En effet on a alors : 3000 = 5 (65,6 - 6) t3000 + 5  65,6 = 5  59,6  t3000 + 328 3000 = 298  t3000 + 328 t3000 = 3000 - 328 / 298 = 8,96 min soit 8 min 57s Ce temps sur 3 000m correspond à une performance de niveau international réalisée par des

45

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

coureuses possédant des consommations maximales d’oxygène très supérieures (au delà de 70 ml.mn-1.kg-1). A l’inverse, pour une consommation maximale d’oxygène de 66,5 ml.mn-1.kg-1 (caractérisant des coureuses de l’équipe de France des années 80), on relève des performances sur 3 000 m comprises entre 9 min 10 s et 9 min 35 s (Péronnet et al., 1991). L’optimisme de ce modèle peut provenir d’un coût énergétique sousestimé pour ces vitesses de course. En examinant les paramètres de l’équation du modèle, Margaria et al. (1975) précisèrent toutefois que cette équation pouvait être modifiée selon l’état nutritionnel du sujet, le coût énergétique de sa course, et sa capacité à maintenir . son VO2max tout au long de l’épreuve. Au début des années 80, Moritani et al. (1981) reprenaient le modèle de Scherrer et Monod (1960) concernant le travail dynamique local et l’ont appliqué et validé pour un exercice général supra maximal réalisé sur ergocycle. Moritani et al. (1981) constatèrent que la puissance critique (80 % de la puissance maximale aérobie) était hautement corrélée et proche de la puissance d’exercice correspondant au dit « seuil anaérobie » (ventilatoire). De plus, la puissance critique était d’autant plus abaissée que l’hypoxie était marquée (la valeur du paramètre « a » n’étant pas modifiée). Cela confirmant l’hypothèse selon laquelle « a » représentait la réserve d’énergie anaérobie. A partir de ces résultats, on pouvait donc écrire que le travail limite Wlim est égal à : Wlim = a + b.tlim = AMAX + SVENT  tlim Où SVENT est la puissance correspondant au seuil anaérobie ventilatoire et AMAX la capacité maximale anaérobie. Cependant, Housh et al. (1989) montrèrent, plus tard, que la puissance critique ne pouvait être maintenue au delà de 30 min (chez des sujets moyennement entraînés). D’autre part, sur le plan théorique, le lien entre la puissance critique et le seuil anaérobie n’était pas évident si la puissance critique était déterminée à partir d’exercices dont la puissance est supérieure à la puissance maximale aérobie d’une durée inférieure à 4 minutes. Nous considérerons les méthodes de détermination des seuils lactique et ventilatoire dans le chapitre VI.

1.8

Modèle bioénergétique de l’optimisation de la variation de la vitesse de course en compétition

Les modèles précédents postulent une optimisation énergétique à vitesse de course constante. Or, l’observation de la réalité nous suggère que la modé-

46

lisation doit prendre en compte cette variation de vitesse spontanément choisie par les athlètes. Grâce aux analyseurs d’échanges gazeux portables (K4b2), il est à présent possible de mesurer, à chaque cycle respiratoire, la consommation d’oxygène d’une personne hors laboratoire. Ces équipements, de plus en plus légers, sont encore très onéreux mais ont permis de remettre en question des idées préconçues concernant la modélisation énergétique. Nous avons, par exemple, mis en évidence que sur une course de 100 m les coureurs atteignaient leur consommation maximale d’oxygène et de même sur un marathon lors de certaines phases de course, ce qui n’est pas classique. Nous avons demandé à des coureurs de réaliser un 10 000 m le plus vite possible sans consigne particulière. Puis, si le coureur avait couru son 10 000 m en 30 min (soit une vitesse moyenne de 20 km.h-1), nous l’avons contraint à suivre une moto à cette vitesse constante correspondant à leur vitesse moyenne. Nous avons alors mis en évidence que la vitesse constante induisait des augmentations des constantes physiologiques (fréquence cardiaque, consommation d’oxygène) de façon précoce au 7e kilomètre et que les coureurs avaient des difficultés à terminer l’épreuve même si aucune modification de la variabilité de la fréquence cardiaque n’était observée (Billat et al. 2009 a). Ayant donc constaté que la variation de vitesse semblait être favorable à l’optimisation de l’état stable physiologique dans les deux premiers tirs de la course, nous avons équipé d’un analyseur d’oxygène avec GPS, des coureurs de 800 et de 1 500 m en meeting officiel (Billat et al. 2009 b). Nous avons démontré que la variation de vitesse, dont la moyenne se situe à 120. et 110 % de la vitesse ou puissance associée à VO2max (VMA ou PMA vitesse ou puissance maximale aérobie) sur une distance de 800 m et 1 500 m était régulée par l’état des réserves anaérobies à l’instant t selon une équation linéaire différentielle du premier ordre. Si nous abordons la question par une simple transcription physiologique, nous pouvons écrire que la puissance anaérobie (PAN) qu’il faut utiliser à chaque instant est le rapport entre les réserves énergétiques anaérobie (ANS ou ANaerobic Stores) du coureur à l’instant t de son 800 ou 1 500 m et le temps limite tlim PAN qu’il court à ce niveau de puissance supérieure à celui de la puissance maximale aérobie qui est la puissance séquentielle (ou . instantanée) anaérobie (PAN). Il mobilise alors VO2max et un supplément énergétique anaérobie permettant au coureur de

Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

courir plus vite qu’à PMA (ou VMA). Cela peut s’écrire par l’équation :

l’instant t de la course que nous appellerons x qui est une variable.

PAN = ANS/tlim PAN (1)

Donc ANS = k2 – x (4)

Ainsi, en modifiant l’équation 1 on peut constater que le temps limite que le coureur peut tenir à PAN à l’instant t est le rapport entre l’état de ses réserves anaérobies à l’instant t (ANS) et la puissance anaérobie produite à cet instant (PAN).

Le déficit d’oxygène accumulé x à l’instant t (l’énergie anaérobie restant à l’instant t) est l’intégrale de la puissance anaérobie (PAN). En effet, la variable x est l’aire sous la courbe de la fonction PAN en fonction du temps. C’est pourquoi, à l’inverse, la dérivée de x en fonction du temps notée x’ est égale à PAN.

tlim PAN = ANS/PAN (2) où PAN est en watts, ANS en joules et peut être estimé par la valeur du déficit d’oxygène ainsi que nous vous l’expliquerons dans le chapitre VI, 1.3.5 et tlim PAN est en secondes. Puisque l’énergie anaérobie a une dimension finie (qu’il est possible d’améliorer par l’entraînement), le coureur de . demifond doit mobiliser au moins 100 % de son VO2max le plus long-temps possible sur la course afin d’épargner ANS qui sera mis à profit pour soutenir la plus haute PAN à chaque instant de course. Le coureur pourra épuiser ses réserves d’ANS dans la phase finale de sprint déclenchée dans les 200 et 500 derniers mètres du 800 m et 1 500 m. En effet, nous avons démontré que la course de 800 m était de type all-out s’apparentant à un long sprint avec une décroissance de la vitesse tout au long de la course sauf dans les 200 derniers mètres si tout va bien. Au contraire, le 1 500 m, est une course en vague, la vitesse fluctuant autour de 105 % de VMA dans une fourchette non négligeable de 100 à 120 % de VMA avec une augmentation de la vitesse dans les 100 derniers mètres de courses (figures 18a et 18b). Ainsi ANS est épuisée progressivement sauf pour certains qui ont réalisé des contre-performances en ayant épuisé leurs réserves 200 mètres avant l’arrivée. Ils finissent alors leur course à VMA, . voire moins s’ils ne parviennent pas à soutenir leur VO2max en raison d’une trop grande acidose qui inhibe alors la phosphorylation oxydative (phénomène expliqué au chapitre II, 1.5 et figure 17a). Le modèle énergétique du contrôle de la variation de vitesse est donc le suivant : tlim PAN = ANS/PAN = k1 (une constante) (3) où ANS instantanée (c’est-à-dire au moment t de la course) est donnée par la différence entre le déficit d’oxygène accumulé en fin de course que nous appellerons k2 une constante (qui plafonne au deux tiers de la course chez les moins bons coureurs) et la réserve anaérobie (le déficit d’oxygène accumulé instantané) à

Chapitre 1

L’équation 3 prend la forme d’une équation différentielle linéaire du premier ordre : (k2 – x)/x’ = k1 (5) Dont la solution est : x = k2 (1 – exp (-t/ k1)) (6) où exp est la fonction exponentielle Ainsi si l’on mesure ANS et PAN simultanément pendant la course et que le ratio tlim PAN est constant, cela démontre que pendant toute la durée de la course le coureur gère bien ses allures en fonction de l’état de ses réserves anaérobies. Nous avons mis en évidence que le modèle était vérifié pendant les deux tiers de la durée de la course et que le coureur choisissait ensuite de se mettre en « pilote automatique » dans le dernier tiers de la course en « jetant » ses dernières forces. Les mathématiques reflètent bien les sensations du coureur et cela ne se vérifie que sur le 1 500 m, le 800 m étant davantage une course de 400 m prolongée. Ainsi, dès 1976, le cubain Juantorena qui avait emporté le titre olympique sur 400 m et 800 m avait bien compris cette approche. Nous pouvons ainsi regretter que Marie José Perec n’ait pas eu le temps de courir le 800 m.

2.

Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

2.1

Sports continus et cycliques sur courtes et moyennes distances

2.1.1 Distance de compétition et métabolismes Le tableau 6 présente, (d’après Troup, 1984), la part respective des métabolismes aérobie et anaérobie sur les différentes distances de compétition en natation (tableau 5). Pour la course à pied il suffit de multiplier la

47

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Figure 18a.

. VO2 (ml · kg–1 · min–1) HR (bpm) 210

Vitesse (m · s–1)

Sujet 4 du groupe 800 m

7,5

7 160 6,5 110 6 60 5,5

. VO2 ml.min–1.kg–1

Figure 18b Variation de la vitesse , de la fréquence cardiaque (Heart Rate : HR) .et de la consommation d’oxygène (V O2) sur une course de 800 m et de 1500 m pour le sujet 4.

210

. VO2 (ml · kg–1 · min–1) HR (bpm)

HR bpm

117

108

98

Vitesse m/s

Vitesse (m · s–1) 8

Sujet 4 du groupe 1 500 m

190

7,5

170

7

150

6,5

130

6

110

5,5

90

5

70

4,5

50

4

30

3,5

10

3 1 21 41 59 77 95 . VO2 ml.min–1.kg–1

113

131

149

HR bpm

166

183

200

217

233

Temps (s)

Vitesse m/s

distance par 4 (puisque le coût énergétique de la course à pied est 4 fois moins important qu’en natation). En cyclisme, par temps calme, il faudra multiplier cette distance par 10. Ceci peut être utile pour les triathlètes qui doivent gérer les trois disciplines (voir plus bas).

48

88

78

68

58

48

24

36

5 12

10

2.1.2 La course de sprint prolongé (400 m en course à pied) et de demi-fond Un 400 m en course à pied a été étudié par Hirvonen et al. (1992) qui ont disséqué l’épreuve en faisant courir un 100 m, un 200 m et un 300 m sur les bases des temps de passage d’un 400 m réalisé à vitesse maximale. Cette expérience se fit en 2 jours à une semaine d’intervalle (le premier jour étaient courus le

Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

400 m et le 100 m, et le second jour, le 200 m et le 300 m). Les deux épreuves réalisées le même jour étaient séparées par 5 heures de repos passif. Cette expérimentation mit en évidence que, lors du premier 100 m, la phosphocréatine musculaire était abaissée de presque la moitié (15,8 ± 1,7 à 8,3 ± 0,3 mmol/kg). La concentration d’acide lactique intramusculaire s’élevait seulement à 3,6 ± 0,4 mmol/kg (la valeur de repos étant proche de 1 mmol/l). Après le 200 m, la phosphocréatine était abaissée à 6,5 ± 0,5 mmol/kg et la lactatémie était montée à la concentration de 8,3 ± 1,1 mmol/kg. A la fin du 400 m, les concentrations en ATP et en PC avaient diminué de 27 % et 89 % respectivement, alors que la lactatémie était de 17,3 ± 0,9 mmol/kg. Ainsi, les auteurs concluaient qu’après les 200 premiers mètres, la vitesse diminuait alors que les réserves de phosphocréatine n’étaient pas en déplétion (épuisées) et que la concentration intramusculaire d’acide lactique n’était pas à son maximum (la valeur de 25 mmol/kg avait été rapportée par Kindermann et Keul en 1977 sur un coureur de 400 m en 46 secondes). Il semblerait donc que les facteurs limitatifs soient également d’ordre neuromusculaire (conditionnant le nombre de fibres musculaires recrutées). Les lactatémies les plus importantes ne semblent pas être obtenues à l’issue du 400 m mais du 800 m selon une étude de Lacour et al. (1990). En effet, ces auteurs rapportèrent des concentrations sanguines d’acide lactique de 20,1 ± 2,2 ; 21,9 ± 2,1 ; 18 ± 2,7 mmol/l pour le 400, 800 et 1 500 mètres respectivement. Ces valeurs sont plus élevées que dans l’étude d’Hirvonen, mais il s’agissait non pas de coureurs de 400 m en 51 secondes mais de coureurs de l’équipe de France qui avaient accompli le 400 m entre 45,48 et 47,46 secondes (94,4 ± 1,6 % du record du monde contemporain de l’expérimentation en 1987). Sur 800 m, il s’agissait des meilleurs coureurs nationaux se situant sur la distance entre 1 min 43 s 95 et 1 min 49 s 25 (95,1 ± 1,9 % du record du monde). Les coureurs de 1 500 m avaient des records compris entre 3 min 34 s 91 et 3 min 35 s (96 % du record du monde). Les coureuses de 400 m et 800 m de niveau moindre (91,6 ± 21,8 % et 92,4 ± 2,1 % des records mondiaux), avaient les mêmes lactatémies. La part des métabolismes anaérobies sur 800 m est supérieure à 50 % et la concentration d’acide lactique est positivement corrélée à la vitesse (la performance) sur 400 m et 800 m (ce qui n’est pas le cas sur 1 500 m).

Tableau 6

Part des métabolismes aérobie et anaérobie dans la dépense énergétique ( %) Total anaérobie

Anaérobie Distances (mètres)

50 100 200 400 500 800 1500

ATP/CP Alactique

Chapitre 1

Aérobie

Glycolyse anaérobie lactique

98 80 30

2 15 65

100 95 95

5 5

20

55

75

25

10

20

30

70

Part des métabolismes aérobie et anaérobie dans la dépense énergétique (%) en fonction de la distance de compétition. Exemple de la natation d’après Troup, 1984.

Le calcul de la part du métabolisme anaérobie se fonde sur plusieurs postulats :

 que le temps d’ajustement de la consommation d’oxygène (délai d’atteinte de l’état stable) est d’environ 2 minutes (selon Péronnet et Thibault, 1987, 1989a) ;

 que les valeurs moyennes de consommation maximale d’oxygène mesurées chez les coureurs internationaux du 800 m et 400 m sont respectivement de 69 et 64 ml . min-1 . kg-1 (Svedenhag et Sjödin, 1985) ;

 que les réserves d’oxygène intramusculaire, pulmonaire et sanguine représentent 6 ml/kg (Astrand et al., 1964 ; Medbø et al., 1988) ;

 que la baisse de la concentration intramusculaire de PC et ATP représente 18 mmol/kg de muscle frais (Sahlin et al., 1979) soit, pour la course, une masse active de 25 % du poids de corps représentant un équivalent en oxygène égal à 16 ml d’O2/kg ;

 que la valeur de lactatémie de repos est de 1 mmol/l ;

 que la production d’une mmole de lactate par la glycolyse correspond à la même quantité d’ATP que la consommation de 5,6 ml d’O2 ;

 qu’enfin, l’augmentation de la lactatémie égale à 1 mmol/l équivaut à la consommation d’oxygène égale à 3,3 ml d’O2/kg (Margaria et al., 1971). De façon plus simple et moins précise, on peut estimer la part du métabolisme aérobie dans la

49

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

dépense énergétique d’une course de 800 m de la façon suivante : Prenons, par exemple, un coureur. de 800 m pesant 70 kg .qui a une vitesse associée à VO2max de 20 km/h (un VO2max de 70 ml.min–1.kg–1 ou 4,9 l/min pour 70 kg) et qui court . le 800 m en 2 minutes, soit à 24 km/h (120 % de vVO2max ). On peut constater alors qu’il aurait eu besoin de consommer pendant 2 minutes 120 %  4,9 2 = 11,76 litres d’O2 ; en réalité, il n’a pu . utiliser qu’en moyenne 90 % de son VO2max car le temps d’ajustement est de 2 minutes précisément (Péronnet et Thibault, 1987). Il a donc consommé pendant les 2 minutes du 800 m : 90 %  4,9  2 = 8,82 litres. Le déficit d’oxygène (chapitre VI, 1.4.5) est donc de 11,76 – 8,82 litres = 2,94 litres qui correspondent à 51,45 kjoules que le métabolisme anaérobie a couverts. Ces 2,45 litres représentent 25 % de l’énergie nécessaire pour courir le 800 m si on néglige l’augmentation du coût énergétique de la course qui devient très importante au-delà de 20 km/h.

2.1.3 Le triathlon Nouvelle discipline olympique à Atlanta, le triathlon est un sport fondé sur trois techniques gestuelles différentes (natation, cyclisme, course à pied) sur des moyennes distances de 1,5 km (natation), 40 km (vélo), 10 km (course). Le tout dure un peu moins de 2 heures, changements compris. L’enchaînement constitue justement la spécificité du triathlon, qui fait que la course à pied est fortement influencée par l’effort produit dans les deux parcours la précédant. Les chercheurs se sont attachés à comparer les consommations d’oxygène des triathlètes dans les trois disciplines sources (Kohrt et al., 1987 dans O’Toole 1995). Les triathlètes ont des consommations maximales d’oxygène très proches à vélo et à la course à pied et un peu moins pour la natation (100 % pour la course à pied, 95,7 % pour le cyclisme, 86,6 % pour la natation). Les nageurs et cyclistes spécialistes parviennent . à mobiliser 98-105 % et 93-95 % de leur VO2max à l’exercice spécifique respectivement. La technique de nage était à l’époque un facteur discriminant de la performance en triathlon ; les triathlètes actuels sont tous, au minimum, d’excellents nageurs, mais avant tout des triathlètes qui ont abordé cette discipline dans leur scolarité (le triathlon scolaire français étant très actif). Les concentrations lactiques et les niveaux de consommation d’oxygène situent le triathlon à 80 % de la consommation maximale d’oxygène ou, plus précisément, au niveau de « l’état stable maximal de la lactatémie du triathlète » (chapitre VI, 1.4.4) (O’Toole, 1995). Les changements de règlement quant au vélo (« le drafting », le

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pédalage dans le sillage d’un concurrent), ayant été autorisés, ceci rendait au triathlon un caractère plus tactique, impliquant des délais de récupération possibles en dehors .de la descente. Cette puissance moyenne de 80 % de VO2max recouvre une certaine régularité en natation et en course à pied, mais . présente des fluctuations importantes (40-110 % VO2max ) en vélo, à l’image du cyclisme en ligne. Le caractère intermittent de cette partie, intercalée entre deux exercices réguliers, permet alors aux triathlètes de se restaurer, surtout pour les triathlons, B, C et ultra (jusqu’à 11 km de natation, 500 km de vélo et 120 km de course à pied).

2.1.4 L’aviron L’aviron se déroule sur 2 000 m et ses méthodologies d’entraînement sont proches de celles d’un coureur de demi-fond avec des aspects techniques qui sont déterminants . pour l’efficacité (le rendement) du coup de rame. Le VO2max du rameur est très élevé mais la part du métabolisme anaérobie et déterminante : égal à 12 % de l’énergie totale pour des rameuses membres de l’équipe canadienne ayant en moyenne accompli la distance en 7 min 30 s (Pripstein et al. 1999). Ces valeurs sont encore supérieures chez les hommes de même niveau qui réalisent un temps inférieur (14 %) (Secher 1983). L’entraînement doit tenir compte de ces exigence énergétiques et ne pas rendre les rameurs trop « diesels » en travaillant surtout au seuil lactique, mais envisager un travail d’interval training court à haute puissance.

2.2

Sports à caractère intermittent

Une des questions préliminaires posées par les exercices intermittents qui rassemblent tous les sports composés de répétitions successives d’exercice plus ou moins intense est celle du délai de restauration des réserves énergétiques (tableau 7).

2.2.1 Délais de restauration des substrats énergétiques : du 40 m au 100 m course Conformément aux travaux antérieurs de Wilkie (1981), Hirvonen et al. (1987) ne trouvaient qu’une faible baisse de la concentration d’ATP. En effet, cette dernière ne diminue jamais en dessous de 60 % de la valeur de repos. Il semble donc que, pour une course supramaximale, la plupart des réserves de phosphocréatine soient utilisées pendant les premières secondes du sprint, au cours de la phase d’accélération dans les 40 premiers mètres. De plus, il s’avérerait que la puissance musculaire soit dépendante de cette capacité de mobilisation de la phosphocréatine.

Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

Cependant, on peut discuter cette hypothèse en estimant que c’est parce que les coureurs courent plus vite qu’ils mobilisent davantage de phosphocréatine, la question essentielle étant d’être capable de mobiliser le plus de fibres musculaires afin de produire la plus grande énergie mécanique possible dans le délai le plus bref possible. Quoi qu’il en soit, les entraînements doivent prendre en compte cette donnée, à savoir qu’au-delà de 40 mètres, la glycolyse intervenant de façon croissante avec les métabolites qu’elle génère (lactate et ions H+) peut être responsable d’un délai de récupération supérieur entre les séances d’entraînement. Concernant les exercices de sprint, les délais de restauration de la phosphocréatine sont à prendre en compte pour l’entraînement, sous peine de recourir au métabolisme anaérobie lactique, conduisant à une fatigue excessive c’est-à-dire l’impossibilité de maintenir la vitesse requise et d’enchaîner des séances d’entraînement sans récupérer. Cheetham et al. (1986) ont montré que 30 secondes de course maximale entraînait une diminution de la phosphocréatine de 64 % alors que la puissance chutait dès la 15e seconde. Le glycogène des fibres rapides baissait de 25 % et l’ATP de 37 %. Ainsi, l’ATP est relativement préservée grâce à la phosphocréatine dont les délais de restauration post-exercice ont été étudiés avec précision. En effet, Hultman et al. (1967) ont montré qu’à 2 min de postexercice, la phosphocréatine était resynthétisée à 84 %, 89 % après 4 minutes et à 97 % après 8 min d’un exercice épuisant de 10 min . (réalisé à presque 100 % de la puissance associée à VO2max ). En revanche, lorsque la récupération postexercice se déroulait avec un garrot entraînant l’occlusion de la cuisse, la phosphocréatine n’était pas resynthétisée, cela signifiant que l’oxygène est nécessaire à la resynthèse d’ATP, laquelle est donc impossible au cours d’un exercice anaérobie lactique par exemple. Brooks et al. (1971) estiment qu’il faut 1,5 l d’oxygène pour resynthétiser la phosphocréatine. Karlsson (1971) avait montré que la phosphocréatine était épuisée en . 2 min lorsque le sujet pédalait à VO2max jusqu’à épuisement (de 2 à 9 min). Hirvonen et al. (1987) avaient également noté une baisse de moitié de la concentration de créatine phosphate intramusculaire en fin d’échauffement (10,6 contre 22 mmol . kg-1). Il faut noter qu’au cours de cette heure d’échauffement, le coureur réalise des sprints de 20 à 40 m et que le délai entre la fin de l’échauffement et le prélèvement sanguin n’était que de 4 à 5 minutes. En compétition, les délais sont accrus par les questions réglementaires (chambre d’appel).

Chapitre 1

Toutefois, on pourrait s’interroger sur l’effet des faux départs sur le pool des phosphates. Le demi-temps de restauration des réserves de créatine phosphate est de 170 secondes, cela signifiant que, dans ce laps de temps, la moitié des réserves a été reconstituée. Il faudra cependant plus du double de temps pour que la réplétion soit totale (Harris et al., 1976). En outre, l’échauffement accroît le flux sanguin musculaire, rendant l’échantillon de muscle plus lourd (par kg de poids humide), et diluant la concentration de phosphocréatine. On sait cependant qu’une certaine température intramusculaire est nécessaire (38 °C) à la contraction et à la prévention des traumatismes (rupture des stries Z) ainsi que nous le confirmera l’étude de la structure de la fibre musculaire. De plus, la vitesse des réactions enzymatiques, « Km de l’enzyme » est dépendante de la température intracellulaire. Le Km (ou constante de Michaelis-Menten) définit l’affinité de l’enzyme pour son substrat et se caractérise comme la concentration du substrat pour laquelle la vitesse de la réaction est égale à . la moitié de la vitesse maximale (V max). Le terme d’échauffement qui signifie «exercice préliminaire» peut être pris en fait dans son sens générique. On sait à présent qu’il existe une intervention couplée des métabolismes avec l’étroite « coopération » entre la créatine kinase et la phosphorylation oxydative. Si par exemple l’on souhaite gravir l’Everest sans oxygène ou réaliser un sprint on va adopter une stratégie d’entraînement pour développer le nombre de mitochondries et de créatine kinase (encadré 8) pour favoriser la resynthèse de créatine phosphate pour fournir la synthèse d’ATP (encadré 3b) : Ainsi que nous allons l’expliquer en présentant la démarche de nos 30 ans de recherche, nous avons démontré par la modélisation de la variation de la vitesse de course au cours d’un 800m et 1500m, que la durée des phases de course courues à une vitesse supé. rieure à la vitesse associée à (référencé par les V O max 2 . valeurs de VO2max obtenues par une épreuve triangulaire classique) serait une simple équation différentielle linéaire du premier ordre dont le concept repose sur l’état des réserves dites anaérobie, c’est-à-dire le miroir du déficit d’oxygène maximal toléré par la personne (Billat et al., 2009b). Cependant cet article était lui aussi calqué .sur le paradigme de la dette et de l’existence d’un VO2max de référence qui ne peut être modifié au cours de l’exercice. L’idée d’un déficit d’oxygène par apport extrinsèque de l’environnement de FIO2 (Fraction Inspirée d’Oxygène imposée par l’environnement) ou par « excès de vitesse » conduisant à un défaut des possibilités oxydatives de l’organisme (apport intrinsèque) est le dogme central de la bioénergétique de l’exercice. Or nous savons que la variation de vitesse permet d’optimiser la vitesse

51

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Figure 19a Liaison phosphate à haute énergie

A. Structure simplifiée de la phosphocréatine (PC) montrant la liaison phosphate à haute énergie. B. Cassure de la phosphocréatine (PC) en créatine (C) et phosphore inorganique (Pi) avec fourniture d’énergie utilisée pour la resynthèse de l’ATP.

Énergie utilisable

Créatine

P

Créatine

Créatine Kinase

C A

P Pi

B

moyenne de course grâce aux réactions de la phosphocréatine détaillées en encadré 3c.

.

Nous avons pu augmenter VO2max en variant de façon empirique la puissance de l’exercice (Petot et al., 2012) en particulier grâce aux variations de puissance (la fameuse variation de l’accélération). Nous aurions donc des capsules de temps énergétiques qu’il s’agit de déterminer pour chacun, cette capsule de temps qui est probablement relative au temps final d’exercice c’est à dire au pourcentage du temps limite ou d’une distance limite de

course ainsi que nous l’avons démontré sur le 1500m (Billat . et al., 2009b). Nous avons en effet, constaté que VO2max de l’instant « t » peut être dépassé en milieu de course chez les plus performants ce qui leur permet d’augmenter leur vitesse finale probablement en raison d’une resynthèse de la créatine phosphate grâce. à cette surconsommation d’oxygène. . Davantage que VO2max ce qui est essentiel est que VO2max qui va permettre de resynthétiser en temps réel la phosphocréatine à condition que la navette entre la mitochondrie (lieu de sa phosphorylation à partir de la créatine) et le cytosol soit efficace. Cela dépendra (de façon non exclusive mais certainement) : 1. des enzymes créatine kinases mitochondriales ; 2. des canaux voltage dépendants (VDAC voltage active dépendant chanel en encadré 3d qui permettent cette navette de créatine phosphate entre la mitochondrie et le cytosol, et 3. de la créatine kinase cytosolique qui va catalyser la dissociation de la créatine phosphate en créatine et phosphate avec la libération d’un phosphate pour la synthèse d’ATP qui va se fixer sur la tête de l’actine qui va pouvoir basculer sur la myosine pour coulisser et raccourcir le sarcomère unité fonctionnel de la fibre muscu-

Encadré 3b - La créatine kinase dans la cellule musculaire (myofibrille) La mitochondrie, où la concentration d’ATP est toujours très importante, a pour fonction de catalyser la conversion de la créatine en phosphocréatine, impliquant la conversion de l’adénosine triphosphate (ATP) en adénosine diphosphate (ADP). Bien que l’équilibre de la réaction soit largement en faveur de la réaction inverse (de ADP en ATP), cette réaction a lieu car la molécule d’ADP formée (par consommation d’une molécule d’ATP) pour créer une molécule de phosphocréatine est immédiatement transformée en ATP par la mitochondrie, ce qui déplace l’équilibre de la réaction. Dans une myofibrille (partie cytosolique de la cellule musculaire), au début de l’effort musculaire, la concentration d’ADP augmente très rapidement et la concentration d’ATP diminue parallèlement. Cela déplace l’équilibre de la réaction et, par conséquent, la créatine kinase catalyse la réaction inverse, c’est-à-dire le transfert du radical phosphoryle de la phosphocréatine vers l’ADP pour la convertir en ATP. Ceci a pour but de régénérer rapidement de l’ATP. La phosphocréatine, par l’intermédiaire de l’ATP, constitue ainsi un réservoir d’énergie rapidement utilisable pour les muscles et d’autres organes comme, par exemple, le cerveau (métabolisme anaérobie alactique). La vue classique considère que la réserve de phosphocréatine ne permet de maintenir un effort que sur une très courte

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durée et que cette voie de production d’énergie laisse très vite place (au bout d’une dizaine de secondes) à d’autres voies de production d’énergie : à la dégradation du glucose en acide lactique (métabolisme anaérobie lactique) puis à la respiration cellulaire (métabolisme aérobie) qui prend le relai au bout d’environ deux minutes jusqu’à la fin de l’exercice musculaire. Cette séquence en série est . fausse puisque l’on sait que VO2max (tout au moins celui de référence d’un test triangulaire) est atteint en moins de 10 secondes lors . d’une course très rapide (200 % de vVO2max ou de VMA) et en . moins de 20 secondes sur un 400m (150 % de VO2max ) ou en 1 minute sur un 800m (120-125 % de VMA) et en 1 minute sur un 1500m (110-115 % de VMA). La créatine kinase était plus considérée comme une capacitance de composés phosphate à haute énergie, comme un signalisateur et un catalyseur de la phosphorylation oxydative, vue dynamique développée depuis la découverte des navettes de créatine phosphate entre la mitochondrie et la myofibrille de la cellule musculaire en particulier (Wallimann et al., 1992).

Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

Chapitre 1

Encadré 3c - Les réactions de la régénération de l’ATP pour favoriser l’hydrolyse de l’ATP, l’objectif final La réaction finale qui conduit à la production d’énergie nécessaire à la contraction musculaire est l’hydrolyse de l’ATP, l’ATP et l’eau réagissent pour produire l’adénosine diphospate (ADP), le phosphate inorganique (Pi), le proton d’hydrogène et de l’énergie (Roue de l’ATP Figure 7). Dans des conditions de pH cellulaire normal, le proton est libéré selon la réaction suivante qui est importante dans la compréhension des mécanismes de fatigue puisque cette réaction acidifie l’environnement cellulaire. La réaction de l’hydrolyse de l’ATP peut donc être résumée par le schéma suivant : ATP (adénosine triphosphate) + H2O (eau)  ADP (adénosine diphosphate) + Pi (phosphate inorganique) + H+ (proton) + Énergie Lorsque le pH (page 28) de la cellule tombe en dessous de 6,9 le proton peut s’attacher à la molécule de phosphate inorganique (Pi) qui peut ainsi tamponner la réaction en limitant l’acidose mais seulement dans de petites proportions. La régénération de l’ATP s’opère par la réaction de la créatine kinase, de l’adénylate kinase et de l’AMP désaminase : – Action de la créatine kinase (CK) Cette action permet d’utilise les réserves intracellulaires de la créatine phosphate(CrP) pour reconvertir l’ADP en ATP. Cette réaction consomme également un proton ce qui permet fournit un moyen de tamponner l’acidose. L’action de la CK est la plus rapide pour régénérer l’ATP dans la cellule mais elle est limitée par les réserves de CrP. Cette réaction permet de faire face aux variations rapides de puissance d’exercice et/ou de vitesse de déplacement. Cette production d’ATP est le supplément énergétique de la phosphorylation oxydative qui permet grâce à une baisse de vitesse de régénérer la CrP. Cette variation de vitesse est une des bases de notre méthode d’entraîne. ment à VO2max . En effet, la réaction de la créatine kinase fonctionne dans les deux sens selon l’environnement intracellulaire et permet une gestion de CK par la navette de la créatine phosphate selon la réaction de la créatine kinase illustrée dans la figure 19a : CrP (créatine phosphate + ADP (adénosine di phosphate) + H+ + (ion hydrogène)  Cr (créatine) + ATP (adénosine tri phosphate). Cette réaction intervient à chaque contraction musculaire puisqu’elle fournit l’énergie nécessaire à la recapture du calcium dans le réticulum sarcoplasmique qui libère la tête de l’actine sur la myosine et permet à la fibre musculaire de se relâcher (Figure 28). Belle leçon du vivant : il faut de l’énergie pour se relâcher ; la preuve qu’un cadavre est rigide parce

qu’il n’y a plus d’ATP nécessaire à recapter le calcium dans le réticulum cytoplasmique et ainsi relâcher les têtes de myosine. Pour ne pas contrarier la nature nous verrons que nous avons l’idée de lâcher la « la pression » (définie comme la force appliquée sur une unité de surface) c’est-à-dire la contrainte imposée au muscle pour favoriser la resynthèse de la CrP par l’intervention des créatines kinases mitochondriales (figure 19b). – Action de l’adenylate kinase Avec l’augmentation de l’intensité de l’exercice la réaction Adenylate Kinase (AK) augmente également son activité. Cette réaction combine 2 molécules d’ADP pour produire une molécule d’ATP et une molécule d’AMP. La présence d’AMP dans la cellule contribue à la stimulation du débit de la glycolyse. Cette réaction est la suivante : 2 ADP (adénosine diphosphate)  ATP (adénosine triphosphate) + AMP (adénosine monophosphate). – Action de l’AMP désaminase Une part de l’AMP produite par la réaction AK est convertie en inosine monophosphate (IMP) et en ammonium (NH4) à partir d’un proton (H+) et de l’ammoniac (NH3). Ainsi, cette réaction qui consomme un proton contribue à tamponner l’acidose induite par un exercice à haut débit glycolytique réalisé à vitesse . constant > VO2max selon la réaction de l’AMP désaminase : AMP (adénosine monophosphate + H+ + (proton)  IMP (inosinemonophosphate) + NH4 (ammonium) La régénération de l’AMP est associée à une activité intense qui ne permet pas à la navette CrP mitochondriale d’être suffisamment rapide pour fournir de la CrP ce qui peut induire une acidose en partie compensée par la réaction elle-même. Le NH4 stimule la glycolyse de même que la CrP stimule la phosphorylation oxydative. C’est pourquoi il est intéressant de réaliser des phases d’exercices intenses au sein même des exercices de longue durée pour stimuler les réactions énergétiques de récupération et de complémentation tout en élevant la vitesse moyenne de la course. Toute la difficulté est de modéliser la variation de vitesse et son niveau de consigne pour permettre cette élévation de la vitesse moyenne sans induire de fatigue précoce (la fatigue étant définie comme étant l’impossibilité de maintenir une vitesse ou une puissance donnée).

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Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

laire (figure 28) ; l’effet sera donc ensuite mécanique avec production de force qui est le signal mécanique de la contraction musculaire qui va recruter les unités motrices en rapport par le signal électrique qui déclenche la libération de calcium du réticulum sarcoplasmique. De plus, nous savons à présent, qu’il existe une communication bidirectionnelle et symbiotique entre le réticulum sarcoplasmique et la mitochondrie qui pourrait favoriser le passage des protéines facteurs de transcription du signal pour le codage de nouvelles protéines mitochondriales (Rossi et al., 2009). Les mitochondries sont maintenant largement reconnues comme un lien entre l’énergétique de la cellule, le stress oxydatif et la survie des cellules dans les maladies dégénératives liées à l’âge, le cancer, maladies cardiaques et le diabète. L’exercice est donc l’unique moyen de les augmenter en nombre et en efficacité (Tonkonogi et Sahlin, 2002 ; Zoll et al., 2002). Cela serait notamment possible par cette augmentation des canaux VDAC par exemple lui assurant le passage d’information avec le reste des éléments de la cellule comme le réticulum sarcoplasmique et le cytosol. Le temps nécessaire à l’atteinte de la consommation d’oxygène requise dans la fibre musculaire soumise à une impulsion (contraction) à 20 °C est de 8 secondes, 4 fois la constante de temps de 2 secondes (Mahler, 1985). Ce délai de réponse est indépendant de la durée du tétanos et cet ajustement de forme mono exponentielle (une phase rapide de montée est en miroir de la baisse exponentielle de la phosphocréatine). L’augmentation rapide de la consommation d’oxygène pour renouveler la créatine phosphate véritable condensateur de l’ATP implique que la séance d’entraînement sollicite des baisses rapides de phosphocréatine par des accélérations. Cette production de force régule l'équilibre dynamique énergétique en processus avant (feedforward) ou rétrospective (feedback), le tout étant couplé par les fonctions de l'ATP (figure 19c) (Kushmerick, 2005).

2.2.2 Le tennis La finale masculine 1996 du tournoi de RolandGarros a duré 2h30 min en trois sets de 58, 43 et 49 minutes. 25 aces ont été marqués, le vainqueur n’en ayant que 10 à son actif, mais il prit l’avantage sur les passings. Au service, la petite balle jaune fuse à plus de 150 km/h et on entrevoit que ce sport est composé d’un enchaînement d’actions très variées qui font appel, sur le plan énergétique, à tous les processus métaboliques. Chez les femmes, le match de la finale 1996 était long de 3h04 min (40, 63 et 81 min), un véritable marathon, sans aucun « ace » (point acquis par le seul service), mais avec de nombreux points marqués au filet (35) contre 32 pour les hommes. Ainsi que l’ont écrit les journalistes, à niveau technique égal, le jeu de

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jambes de Steffi Graf a fait la différence contre Aranxa Sanchez dans ce dernier set digne d’un semi marathon. Une étude de Bergeron et al. (1991) a été réalisée sur les joueurs américains de l’équipe première universitaire de 20 ans, s’entraînant tous les jours. L’objectif de cette expérimentation était de mesurer la réponse physiologique des joueurs pendant le match. Le profil énergétique des joueurs montre une puissance maximale aérobie très moyenne : 58,5 ± 9,4 ml . min-1 . kg-1 (proche de celle mesurée chez 200 jeunes de niveau régional français de 8 à 17 ans, selon Petit et al., 1996), d’autant plus surprenante qu’ils n’avaient que 10 % de masse grasse (pourcentage que prend la graisse sur le poids corporel total). La température en match était de 17 °C, ce qui est loin des 30 °C enregistrés à Paris, les contraintes physiologiques induites par la chaleur étant envisagées en chapitre V. Les joueurs portaient un fréquencemètre ; une canule souple était insérée dans une veine superficielle de l’avant-bras pour prélever les échantillons sanguins permettant de doser la lactatémie, l’hématocrite ( % de globules rouges par rapport au plasma), et donc d’évaluer la capacité de transport de l’oxygène mais aussi l’état de déshydratation. Le glucose sanguin (la glycémie) et l’hémoglobine étaient également mesurés. Les prélèvements étaient effectués avant et après les 10 minutes d’échauffement et à la 34e, la 68e, 85e et 90e minute (à la fin) du match en simple qui s’est déroulé en un set seulement. 3 balles neuves furent utilisées après les 3 premiers prélèvement en match, afin de ne pas induire de diminution de la vitesse de déplacement due au moindre rebond de la balle. Les joueurs étaient motivés par leurs entraîneurs pour gagner. Entre les jeux, les joueurs buvaient de l’eau à volonté. La fréquence cardiaque (FC) moyenne était de 144,6 ± 132 battements par minute (bpm), avec une augmentation continuelle jusqu’à 160 bpm à la fin du match. Bien entendu, des pics de fréquence cardiaque étaient enregistrés au cours d’actions comme les montées au filet. Les autres variables métaboliques étaient à leur niveau proche de celui enregistré lors de l’échauffement et donnaient un profil voisin de celui observé pour des exercices prolongés d’intensité modérée, avec une lactatémie stable (2,3 mmol . l-1) au cours du set. Au vu de ces résultats, on peut cependant émettre quelques réserves quant à l’engagement des joueurs, dont on ne sait s’ils avaient des primes de match. On retiendra de cette étude que les joueurs du dimanche peuvent se préparer utilement en courant régulièrement à faible vitesse (FC = à 130 bpm) pour avoir un fond de jeu suffisant et éviter ainsi la détérioration

Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

Chapitre 1

Figure 19b La navette phosphocréatine entre la mitochondrie et la myofibrille dans le cytosol de la cellule musculaire (d’après Wallimann et al., 1992)

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Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

Encadré 3d - VDAC Voltage Dependent-Anion Chanel (Canaux de voltage dépendant en anions) et entraînement VDAC est une protéine localisée dans la membrane externe de la mitochondrie et sur les points de jonction entre la mitochondrie et le réticulum sarcoplasmique par lesquels arrivent les ions calcium (Ca2+) qui déclenchent la contraction musculaire et dont la recapture en fin de contraction est coûteux en ATP. Son rôle est de par ses larges pores de favoriser les échanges des ions dans le calcium et les nucléotides de la cellule. Nous avons mesuré (données personnelles), chez des souris de race FVB (ayant une aptitude et appétence à la course), qu’un entraînement de seulement 2 semaines à raison de 5 séances hebdomadaires de 3 répétitions de 10 minutes entre 100 et 120 % de la vitesse critique, alternées avec des récupérations de 3 minutes à 60 % de la vitesse critique, permettait d’augmenter la vitesse critique ainsi que l’expression de la protéine VDAC. Ce résultat n’était pas observé chez des souris C57B6 qui est la souche généralement utilisée pour les expérimentations. Ces 10 séances réparties sur 2 semaines sont considérées comme un entraînement à court terme et de courte durée mais il ne faut pas oublier que la vie d’une souris est de 2 ans soit 40 fois moins que celle d’un humain et par conséquent, on peut selon la loi d’échelle non seulement de la masse mais du temps (la 4e dimension) que ces 2 semaines représentent 40×2 = 80 semaines soit presque 2 ans ouvrables (les souris ont aussi le droit de partir en vacances loin du tapis roulant). À noter que d’une souris à l’autre, bien que génétiquement identiques, 2 souris FVB montrent des différences d’aptitude . (VO2max et vitesse critique) de 30 %. Il est fondamental d’entraîner les animaux selon leur capacité individuelle pour étudier les effets de

l’entraînement. Très important : nous n’étudions sur les souris que les entraînements qui ont montré des effets positifs chez les humains afin de ne mieux comprendre les mécanismes moléculaires et ainsi compléter notre approche énergétique physiologique. Nous avons montré cette adaptation dans le muscle soléaire déjà considéré comme un muscle très endurant (postural) ce qui laisse espérer que l’entraînement bien calibré selon la puissance critique de la personne est la contrainte adéquate pour provoquer des synthèse protéiques avec ces nouvelles protéines. VDAC sert en effet de point de passage de l’enzyme comme l’hexokinase formant le complexe VDAC-HKII, (Garcia-Perez et al., 2011). Ce complexe accélère la glycolyse entre le cytosol et la mitochondrie ; de même que l’on a compartimenté intellectuellement le métabolisme aérobie du métabolisme anaérobie, nous l’avons fait entre la mitochondrie et le cytosol. Il ne s’agit en fait que d’un continuum énergétique spatial et temporel régi par des régulateurs de force (masse et accélération) qui vont déclencher un plan d’action en feedforward contrôlé par un mécanisme de feedback très fin (Kushmerick, 1995, 2005). Nous sommes loin d’avoir cerné le rôle de ces complexes protéiques canaux et enzymes qui pourraient être les activateurs métaboliques immédiatement disponibles (complexes enzymatiques latents prêts à intervenir comme les espions dormant des bons films d’espionnage). Cette hypothèse avait déjà été émise par le brillantissime zoologiste et biochimiste canadien Peter Hochachka décédé hélas bien trop jeune d’un lymphome en 2002.

Figure 19c La demande cellulaire en ATP et les apports en ATP par synthèse (d’après Kushmerick, 2005).

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Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

Processus de récupération

Délai minimum de récupération

Délai maximum de récupération

– restauration des réserves intramusculaires (ATP + CP)

– 2 minutes

5 minutes

– restauration du glycogène intramusculaire

– 10 heures (après un exercice continu concentrique)

46 heures

– 5 heures après un exercice intermittent

24 heures 72 heures

– 48 heures après un exercice à régime de contraction musculaire excentrique. – restauration des réserves de glycogène hépatique

– non connu

12-24 heures

– diminution de la concentration sanguine et musculaire d’acide lactique.

– pour la concentration sanguine : 30 minutes avec un exercice de récupération . active à 50-60 % de VO2max .

1 heure

– pour la concentration intramusculaire : 1 heure avec une récupération passive.

2 heures

– 10-15 secondes

1 minute

– restauration des réserves d’oxygène

technique due à une endurance trop précaire. On observera également que le tennis peut constituer un excellent sport pour améliorer l’endurance, à condition de faire des sets suffisamment longs, peut-être incompatibles avec les conditions de location des courts.

2.2.3 Le karaté Le karaté est une discipline qui réussit bien aux Français qui ont obtenu de nombreux titres de champions du monde. L’équipe du physiologiste italien di Prampero s’est tout récemment attachée à mesurer le coût énergétique du karaté (Francescato et al., 1995). Les karatekas accomplissaient 6 katas (enchaînement de gestes techniques sans opposition) de 10 à 80 secondes. La consommation d’oxygène représentait 11 % de la fourniture énergétique pour les katas de 10 secondes à 13 % pour les katas de 80 secondes, alors que l’énergie provenant de la glycolyse anaérobie (évaluée par l’accumulation d’acide lactique), était négligeable pour les katas inférieurs à 20 secondes et représentait 43 % pour les katas de 80 secondes. La question posée est donc la suivante : comment est couverte la totalité de la dépense énergétique ? La lactatémie de fin de kata de 80 secondes était de 5,8 mmol . l-1 au-dessus de la valeur de repos (1 mmol/l) . 90 % et 46 % de la dépense énergétique sont fournis par le métabolisme anaérobie alactique, respectivement pour les katas de 10 et 80 secondes.

Chapitre 1

Tableau 7 Les délais de restauration des différents substrats énergétiques et de l’oxygène en fonction du type d‘exercice épuisant réalisé.

2.2.4 Le football et le rugby Les effets immédiats d’un match de football sur les réponses physiologiques sont ceux occasionnés par des alternances de courses à intensités maximales (11 % du temps total de déplacement) et sous-maximales (20 %), à reculons (7 %), de sauts, de percussions, de phases de marche (25 %), de trot (37 %) (De Proft et al., 1988). Ceci est le profil des matchs anglais de première division de la fin des années 80, représentatif du football européen et japonais de l’époque (Yamanaka et al., 1988). Ainsi le rapport entre les distances parcourues à basse et haute intensité était de 2,2/1 pour les matchs très intenses (1,9/1 en rugby, McLean, 1992). Si l’on se réfère au temps, le rapport est plus important puisqu’il est de 7/1 pour les déplacements lents. En moyenne, chaque joueur a une pause de 3 secondes seulement toutes les 2 minutes, sauf si le soutien au porteur du ballon est moins effectif. Le footballeur ne couvre que 2 % de ses 8 à 12 km avec la balle au pied. Certaines situations d’entraînement de jeu à une touche de balle vont dans ce sens, la balle étant toujours plus rapide que le joueur. Au rugby, au contraire, la vitesse de déplacement du joueur (qui porte le ballon lorsque le jeu est à la main) est en moyenne plus élevée (de 5 à 8 m/s, selon McLean, valeurs mesurées lors du tournoi des 5 nations en 1990).

 les facteurs affectant l’intensité de l’exercice en football.

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Chapitre 1

LA

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Les études scientifiques ont dégagé des profils d’action type en fonction du compartiment de jeu des joueurs (pour la synthèse voir Reilly, 1994 ; Ebomoua, 1994). Le premier aspect est celui de la distance couverte au cours d’un match. Elle se situe entre 8 et 12 km selon le poste du joueur et le système de jeu adopté. En effet, Ebomoua (1994) rappelle les systèmes de jeu adoptés au cours des coupes du monde et fait un parallèle avec les procédés d’entraînement. Les Hollandais avaient en effet adopté le « football total » avec une défense et une attaque en bloc, les joueurs étant tous des défenseurs et des attaquants. Ebomoua démontre dans sa thèse que l’entraînement physique doit être différent selon les postes occupés par les joueurs : les avants courent plus vite et moins longtemps alors que les milieux et les attaquants doivent améliorer leurs processus énergétiques aérobies. Il obtient des performances supérieures en match par rapport à l’entraînement (vitesse et durée de déplacement). Les diverses études montrent que les milieux de terrain parcourent 12 km, les avants 9 km, les arrières 8 km et le gardien 4 km tout de même. Le gardien de but doit avoir une excellente détente verticale, laquelle est soustendue par le recrutement des fibres rapides. Ceci n’est pas vérifié pour les joueurs de champ, la fréquence de leurs sauts étant de un toutes les cinq minutes. Cependant, l’influence des règles est déterminante sur le profil énergétique sollicité dans une activité sportive. Depuis 1992, afin de réduire le nombre de passes des défenseurs au gardien, celui-ci doit jouer au pied si la balle est donnée au pied par un de ses partenaires. Cette modification n’a pas eu d’influence sur l’activité des joueurs de champ mais a obligé le gardien à se déplacer davantage. La puissance moyenne d’un match de football sollicite 75 % de la consommation maximale d’oxygène, autour de 165 bpm de fréquence cardiaque pour l’ensemble des joueurs sauf le gardien. La plus haute valeur de était trouvée chez les milieux de terrain de haut niveau, Smaros (1980) démontrant une étroite corrélation entre la valeur de et la quantité de déplacements ainsi que le nombre de sprints réalisés en match. Bangsbo et Lindquist (1992) ont montré une corrélation entre la distance parcourue en match et la vitesse moyenne d’un test de 2,16 km évaluant de façon indirecte la consommation maximale d’oxygène, en considérant

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que la vitesse sur. 2,16 km est proche de la vitesse associée à VO2max . De même, la vitesse à la concentration de 3 mmol.l-1 de lactatémie est corrélée à la quantité de déplacements en match. L’endurance, c’est-à-dire la capacité à soutenir un pourcentage élevé de la vitesse associée à , sur une durée donnée, est nécessaire (mais pas suffisante) à la bonne performance d’un footballeur de champ. En rugby, la glycolyse anaérobie est primordiale, eu égard à la vitesse de déplacement sur des durées parfois supérieures à 6-10 secondes. Ainsi les rugbymen pourraient traiter les « footeux » non seulement de « manchots » ainsi qu’ils le font déjà, mais également de « lents ».

 La dépense énergétique occasionnée par un match de football est en moyenne de 55 ± 10 kJ . min-1, soit 4950 kJ pour l’ensemble de la partie chez des joueurs tchécoslovaques (4950 kJ/4,18 = 1184 kcalories) (Seliger, 1968). Ces données ont 30 ans d’âge et sont peut-être en dessous des valeurs actuelles. Au contraire du hand-ball où les joueurs changent (« tournent ») entre les phases d’attaque et de défense comme en basket-ball, en hockey sur glace, où les changements sont plus nombreux, un joueur de football reste en général 90 minutes en match. Les diverses coupes (de France, d’Europe, intertoto) s’entrechoquent avec les matchs de championnat et ceux de l’équipe de France. Ces nécessités rendent toute leur importance aux qualités d’endurance requises. Les entraîneurs doivent donc imaginer des situations de jeu et de phase technique, sous-tendues par une sollicitation du métabolisme aérobie. Ceci ne doit pas occulter que les pics de lactatémie mesurés en match sont de 12 ± 3 mmol . l-1, (5 à 9 en rugby, McLean, 1992), soit la valeur obtenue à la fin d’un 3 000 m à chez des coureurs de demi-fond. Les questions d’entraînement seront abordées dans le chapitre VI, puisque la physiologie de l’exercice et la bioénergétique ont pour finalité de justifier, d’innover en matière de préparation physique grâce à une meilleure appréhension du rapport entre une activité physique et les réponses physiologiques observées en fonction des capacités physiques du sportif.

2.2.5 L’escalade Une étude (Billat et al., 1995a) a comparé la consommation d’oxygène, la fréquence cardiaque et la

Applications : Spécificités bioénergétiques des disciplines sportives

lactatémie entre deux voies d’escalade de niveau 7b (échelle de cotation de 3 à 9) travaillée (le grimpeur ayant fait des repérages préliminaires). Les deux voies différaient par le niveau d’engagement technique : la première voie était plus difficile sur le plan de la finesse des prises, et l’autre du point de vue de la déclivité (un surplomb), les prises étant plus des « bassines » (prises très larges et de préhension facile). Les deux voies de même durée (6 min) induisaient les mêmes réponses physiologiques :

Chapitre 1

Figure 20 Test par exercice de tirage.

 les fréquences cardiaques des grimpeurs étaient à leur niveau maximal (mesuré lors du test de mesure de à la course) ;

 les consommations d’oxygène étaient mesurées par la technique des sacs de Douglas, un expérimentateur tracté dans la voie suivant les grimpeurs avec l’embout buccal pour prélever des échantillons de gaz expiré toutes les minutes. Les consommations d’oxygène n’étaient pas différentes et ne représentaient que 46 ± 4,9 % du des grimpeurs en courant, mais étaient supérieures à la consommation maximale d’oxygène du tronc et des membres supérieurs mesurée par un exercice de tirage (figure 20).

 La lactatémie finale était supérieure pour la voie moins raide mais dont les prises étaient plus petites et plus difficiles à trouver (5,75 ± 0,95 contre 4,3 ± 0,77 mmol/l).

 Cela ne pouvait s’expliquer par un régime de travail musculaire davantage isométrique pour la voie techniquement plus difficile et nécessitant des temps d’arrêt plus importants.

 En revanche, la voie avec surplomb nécessite des actions rapides, ce qui détermine un temps total actif moins long entre les pauses (par exemple lancé de bras pour aller chercher une bonne prise). Au total, le temps de sortie des deux voies étant identique, cela signifie que le temps statique était supérieur pour la voie la plus raide.

 La relativement faible concentration d’acide lactique, similaire à celle obtenue à la fin d’un semi-marathon, peut s’expliquer par le fait que les masses musculaires les plus sollicitées sont réduites (même si les grimpeurs sont « forts en bras et en torse »).

2.2.6 Le ski alpin Les chercheurs du pays du grand skieur Alberto Tomba, ont tenté de mieux comprendre les facteurs de la réussite en slalom spécial comparé au slalom géant (Veicsteinas et al., 1984 ; Saibene et al., 1985). La lactatémie finale en fin de Spécial et de Géant était de 11,7 ± 2,7 et 12,4 ± 1,9 mmol.l-1 respectivement chez des skieurs d’élite (contre 8 mmol . l-1 pour des skieurs de niveau régional ayant terminé le parcours géant en 77 secondes, soit 10 % de durée en plus). La puissance sollicitée en slalom spécial et géant représentait respectivement 191 % et 155 % de la consommation maximale d’oxygène des skieurs d’élite (52,4 ± 7,8 ml . min-1 . kg-1 pour un poids moyen de 78 ± 4 kg). Pour les skieurs de niveau régional, cette puissance relative n’était que de 127 % de (51,2 ± 4,7 ml . min-1.kg-1 pour un poids moyen de 72 ± 5 kg seulement). Ainsi les skieurs d’élite sont capables de développer une puissance moyenne pendant 55 secondes, près de deux fois celle de leur consommation maximale d’oxygène qui, même si leur est relativement modeste en valeur relative au poids de corps, reste considérable en valeur absolue puisque ces skieurs sont assez lourds. Leur puissance maximale anaérobie alactique (voir le mode de détermination au chapitre VI, 1.4.3 traitant entre autres de l’évaluation de l’aptitude énergétique et de l’entraînement) est de 17 watts par kilogramme de poids de corps (contre 13 pour les skieurs de niveau régional), ce qui est satisfaisant sans être exceptionnel.

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PERFORMANCE SPORTIVE

On peut donc conclure que la glycolyse anaérobie est déterminante au cours des slaloms spéciaux et géants. La part des métabolismes dans la dépense énergétique du slalom était respectivement de 40 %, 20 %, 40 % pour les métabolismes aérobie, anaérobie alactique et anaérobie lactique (Veicsteinas et al., 1984). La fréquence cardiaque atteignait sa valeur maximale en 30 secondes quels que soient le type de parcours et le niveau du skieur. Ces résultats sont en accord avec ceux de Sabeine qui a plus particulièrement étudié les sources énergétiques du slalom géant (82 secondes). Les skieurs consommaient 80 % de leur consommation maximale d’oxygène alors que la puissance sollicitée en exigeait 120 %. Ce déficit d’oxygène était compensé par les métabolismes anaérobies, l’accumulation lactique mesurée en fin de parcours étant égale à 6,8 ± 0,9 mmol . l-1. Ainsi le métabolisme aérobie ne couvrait que 100/120  0,8 = 0,66, soit 66 % de la dépense énergétique totale. Les sports cycliques de longues distances sont plus particulièrement évoqués dans le chapitre évaluation-entraînement à la fin de cet ouvrage. La science du sport est en effet très efficace pour conseiller les entraîneurs pour ces disciplines sportives dont la dépense énergétique, ainsi que l’intensité relative peut être appréciée de façon fiable par la consommation d’oxygène.

3.

Vers une nouvelle forme d’entraînement intégratif pour améliorer la synchronisation des métabolismes au-delà · du VO2max

L’amélioration de la consommation d’oxygène maximale et de la possibilité de resynthétiser de la phosphocréatine et d’éliminer l’acide lactique en cours d’épreuve du 100 m au marathon est possible par un entraînement qui sollicite toute l’étendue du registre de vitesse (de la vitesse à Lipoxmax (Cf. page 197) c’est-àdire à l’oxydation maximale des lipides jusqu’à la vitesse maximale sur 6 secondes). Il s’agit surtout de s’entraîner en accélérations (positives et négatives) plus ou moins fortes (0,0028 à 2 m. s-2 (Billat et al., 2018). La perspective d’utiliser des variations de vitesses a été permise par l’analyse des ondelettes. Rendons ici hommage à Yves Meyer, grand mathématicien Français et développeur des ondelettes et qui fut honoré du Prix Gauss en 2010 en Mathématiques ainsi que du prestigieux Prix Abel en 2017 (équivalent du prix Nobel

60

pour les mathématiciens). Son travail pluridisciplinaire eut l’ouverture d’esprit et la curiosité d’appliquer les ondelettes à la variation de vitesse en course et de publier avec nous sur ce sujet (Billat et al., 2006).

3.1

Les 5 règles à prendre en compte pour aller plus avant dans la recherche d’une nouvelle forme d’entraînement (intégrative)

Il y a 5 règles à prendre en compte pour aller plus avant dans la recherche d’une nouvelle forme . d’entraînement (intégrative) pour améliorer VO2max en temps réel au cours de l’exercice à vitesse variable :

3.1.1 l’ATP fournit l’énergie pour toutes les formes de travail musculaire et il faut le resynthétiser très rapidement à haut débit en sollicitant des exercices de durée et intensité différentes mais en accélération positive et négative plutôt qu’en cherchant à tenir constante de hautes vitesses. Récupérez en décélération puis réaccélérez. 3.1.2 La fonction de la créatine kinase est celle d’un « condensateur » biochimique à l’image d’un circuit électrique. Par analogie avec les machine (l’inverse du bio-mimétisme que l’on pourrait qualifier de « machine mimétisme » qui permet de simplifier et imager notre approche). Un condensateur est un composant électronique ou électrique élémentaire, constitué de deux armatures conductrices (appelées « électrodes ») en influence totale et séparées par un isolant polarisable (ou « diélectrique »). Sa propriété principale est de pouvoir stocker des charges électriques opposées sur ses armatures. La valeur absolue de ces charges est proportionnelle à la valeur absolue de la tension qui lui est appliquée. Le condensateur est caractérisé par le coefficient de proportionnalité entre charge et tension appelé capacité électrique et exprimée en farads (F). La relation caractéristique d’un condensateur idéal est : du i = C -----dt où :

Vers une nouvelle forme d’entraînement intégratif pour améliorer la synchronisation des métabolismes

– – – –

i est l’intensité du courant qui traverse le composant, exprimée en ampères (symbole : A) ; u est la tension aux bornes du composant, exprimée en volts (symbole : V) ; C est la capacité électrique du condensateur, exprimée en farads (symbole : F) ; du ------ est la dérivée de la tension par rapport au dt temps. Nous constatons que c’est la VARIATION de la tension dans le temps qui détermine la capacité du condensateur. Cette tension pourrait être comparée à la tension musculaire entre les stries Z du sarcomère (figure 27). L’action de la créatine kinase est comparable à un condensateur pour l’ATP et l’ADP et, par là même, cette action est d’importance centrale pour la contraction musculaire en tamponnant les concentrations d’ATP et d’ADP et leurs rapports, contre de larges variations à chaque contraction musculaire. La créatine kinase amortit l’amplitude de l’augmentation de l’ADP/ATP lors de l’exercice permettant le maintien d’une force constante appliquée dans le temps (puissance constante). Cette possibilité de maintien donne une marge de sécurité contre la fatigue (non maintien d’une puissance donnée) que nous allons pouvoir exploiter par une diminution de puissance ; cette diminution de puissance (décélération ou accélération négative) relâche la tension musculaire et permet de resynthétiser la phosphocréatine en épargnant la synthèse d’ATP par la glycolyse génératrice d’ions H+ pouvant se fixer sur les têtes d’actine à la place des ions calcium empêchant ainsi la contraction musculaire. La détermination de ce jeu d’accélération et décélération doit être finement définie pour chacun dans son amplitude et sa période (capsule de temps relatif au temps limite de l’exercice envisagé).

3.1.3 La somme des actions des ATPases fixe la demande énergétique selon probablement un mécanisme de feedforward affiné par l’entraînement (les athlètes sont capables de réguler leur métabolisme sur un 1500m ainsi que nous l’avons montré en 2009 (Billat et al., 2009b). Nous avons montré (Billat et al., 2017 en soumission) que l’être humain ajuste spontanément

Chapitre 1

son accélération à une consigne d’accélération dite « douce » (augmentation de la vitesse en fonction du temps de façon très progressive, « moyenne » et « forte »). La pente de vitesse en fonction du temps était une droite de pente faible pour la première accélération puis plus raide pour les autres. Les exercices étaient tirés au sort et séparés de 30 minutes de récupération passive. Le coureur part en courant à une vitesse de 8 km.h–1 (juste au-dessus de la limite marche-course). Les coureurs étaient des coureurs amateurs adultes, hommes et femmes de 30 à 50 ans. Les accélérations faciles, moyennes et fortes étaient de 0,03, 0,06 et 0,1 m.s-2 et les temps limites auxquels ils ne pouvaient plus continuer à accélérer étaient respectivement selon le niveau d’accélération relatif, de 12, 6 et 3 minutes (± 15 %). La perception du niveau relatif d’accélération est fonction du niveau de performance et de la spécialité. Ainsi, un demi fondeur qui court un 800m en 1min46s (à une vitesse MOYENNE . de 7,5 m.s–1 soit environ 120 % de sa vVO2max ) et qui doit partir en couloir sur 200m va devoir accélérer à plus de 110 % de son accélération perçue comme difficile (0,4 m.s-2) pour se placer au terme de ce premier virage. Les accélérations relativement perçues comme faciles, moyenne et fortes seront pour lui comprises entre 0,05 et 0,4 m. s-2). Contrairement à la consigne de vitesse, nous avons donc constaté qu’il était est plus facile pour un coureur de soutenir une accélération constante au cours du temps. L’entraînement en variation de vitesse a toujours été utilisée sous forme d’interval-training (Chapitre VI) mais il est probable que son efficacité était simplement due à la phase d’accélération positive et négative. En effet, pour réaliser des interval training . de 30s-30s à 100 et 50 % de vVO2max (pour . une vVO2max de 18 km.h-1soit 5 m.s–1 alterné avec 30s à 2,5 m.s-1) et atteindre ces vitesses en 5 secondes, il faut produire une accélération positive de 5/5 = 1 m.s–2 et négative de –2,5/5 = – 0,5 m.s–2 ou de –1 m.s–2 si on coupe son effort en 2,5 secondes. Ces quelques 5 secondes d’accélération et de décélération étaient probablement la partie efficace de l’entrainement. On peut donc rechercher l’efficacité d’un protocole d’entraînement selon son accélération, avec des plages de vitesses qui pourraient être moins fondamentales. Le Graal serait de courir entre 8 et 12 km.h–1avec des accélérations croissantes, et donc des exercices courts enchainées. Zatopek courait 100 répétitions de 400m à une allure moyenne relativement modeste pour lui

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.

(80-90 % de son VO2max ) ; l’efficacité de cette séance devait probablement due à ces 100 répétitions et donc 200 accélérations et décélération. Mais il n’avait pas besoin de courir 400 m pour cela et aurait eu avantage à réaliser 2 000 répétitions de 15 secondes accélérées et 15 secondes décélérées.

3.1.4 Ces produits (ADP, Pi, Cr) déterminent le processus de feedback ainsi que le pH cellulaire. L’augmentation des flux de créatine phosphate . et de la glycolyse au-delà de VO2max est limitée par la force musculaire et peut être obtenue par un entraînement en force et vitesse ainsi que nous l’avons présenté. Cette augmentation obtenue de la créatine kinase est corrélée à celle de la lactico-déshydrogénase qui permet d’assurer un flux de glycolyse en transformant l’acide pyruvique en acide lactique qui lui aussi joue un rôle tampon de véritable condensateur des ions H+ produits par le catabolisme des glucides dans le cytosol. Cette prise en charge des ions hydronium (ions H+ en solution aqueuse) par l’acide pyruvique qui va donc être réduit en acide lactique, permet de resynthétiser les équivalents réducteurs NAD (Nicotine Amine Di nucléotides cf. encadré 3a) qui sont indispensables dans les réactions de la glycolyse sous peine de voir une inhibition de cette dernière par la phosphofructokinase, enzyme glycolytique sensible au pH de la cellule. De même que la navette créatine kinase, les navettes lactate et glucose entre les fibres musculaires productrices et consommatrices d’acide lactique (comme le myocarde), sont essentielles pour le maintien de l’équilibre dynamique du muscle à haute puissance musculaire grâce à une amplitude de variation (d’accélération) que nous modélisons pour chaque personne en fonction de son profil énergétique mesuré par des tests et des situations de compétition. En effet, la mesure en compétition constitue la source la plus fiable de paramètres d’optimisation qui sont loin d’être stochastiques. Les protéines transporteuses du glucose (les GLUT 4) et du lactate (MCT, MonoCarboxylate Transporters) ont été finement analysées sous les effets de l’entraînement par le fameux physiologiste californien Georges A. Brooks à qui nous rendons hommage pour avoir osé affirmer qu’il existait une enzyme lactico-déshydrogénase (LDH) dans la mitochondrie permettant de retransformer le lactate au sein même de la mitochondrie

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(Brooks, 2002). Cela a engendré des débats passionnés car d’autres chercheurs n’ont pas pu reproduite cette mise en évidence ; mais n’oublions pas cette possibilité que les techniques modernes vont sans doute permettre de, le confirmer ou non. Il est également probable que le LDH mitochondrial soit un enzyme latent selon le concept de Peter Hochachka (Hochachka, 1994) et que son expression puisse être inhibée par les petits ARN mitochondriaux. Il ne faut non plus négliger la capacité à rejeter le CO2 produit du tampon des ions H+ par le bicarbonate sanguin. En effet, Le rôle du. transport et le rejet du dioxyde de carbone ( VCO2) également produit par l’oxydation du glucose . a été oublié mais il est fort à parier. que VCO2max existe et contribuer à délimiter VCO2max. Nous avons en effet, . observé un plafonnement des valeurs de VCO2 max chez des personnes non entraînées avec des valeurs de quotient .respiratoire de VO2 par . . faibles suggérant une limitation VCO2 avec une valeur de V O2 plafonnant voire même chutant (données personnelles).

3.1.5 Les produits de l’ATP ase et la synthèse d’ATP modulent la fonction des ponts d’union musculaire. La figure 21a dessinée par Kushmerick permet de visualiser cet équilibre énergétique dynamique (Kushmerick, 2005). En effet, nous considérons avec Martin Kushmerick, biophysicien de Seattle qui avec ses outils d’imagerie (voir sa page personnelle) a permis d’étudier in vivo le couplage ATP-oxygène) que le concept « d’homéodynamique » est plus approprié que celui « d’homéostasie ». En effet à l’exercice en particulier, l’organisme n’est pas dans un état figé (homéostasie d’après Cannon WB, 1932) mais dans une transformation (changement d’état ou homéodynamique d’après Yates (1993) qui peut être très différent selon la contrainte (« strain ») imposée.

3.1.6 En conclusion l’entraînement intégré pour développer la navette créatine kinase clef de voute du sprinter pour le maintien de sa vitesse maximale sur 100m et du coureur de fond pour sa signature de vitesse optimale permettant de varier la vitesse pour éviter la fatigue musculaire au même point de la courbe tension-longueur et force-vitesse

Vers une nouvelle forme d’entraînement intégratif pour améliorer la synchronisation des métabolismes

Chapitre 1

Figure 21a Diagramme des intersections des éléments de l’équilibre énergétique. (d’après Kushmerick, 2005)

Cette nouvelle forme d’entraînement nécessite d’abord de découvrir l’accélération qui convient à chacun pour déclencher cette cascade de réaction de la créatine kinase et de la navette créatine phosphate à son flux maximal. En résumé, la créatine kinase est la clef de la performance car elle permet : 1) de faire face à la demande de force à chaque contraction en fournissant à haut débit l’ATP 2) de tamponner l’acidose induite par le grand débit de la glycolyse qu’elle contient par ailleurs en fournissant le plus d’ATP possible sans avoir à recourir immédiatement à un gros débit glycolytique 3) de réguler la phosphorylation oxydative (Cf., figures 19a-c). C’est pourquoi la cinétique de la phosphorylation oxydative peut être augmentée par un entraînement de force-vitesse estimé par un test préliminaire (chapitre VI, 1.4.2). Le demi-temps d’ajustement est respectivement de 45 secondes à 15 secondes chez les non entrainés et entrainés. Cette cinétique est le corollaire de l’augmentation de la puissance tolérée qui elle-même dépends de la créatine kinase. Il est supposé exister un mécanisme de « feed forward » (anticipation) des besoins en oxygène. En effet, étant donné qu’il n’y a pas d’over shoot (rebond)

.

de VO2 par rapport à la puissance (Figures 18a et 18b) : rien de trop et d’inutile ce qui signifie un parfait ajustement en anticipation sur le recrutement des unités motrices avec une boucle de retro-contrôle par la pression partielle en CO2 (PCO2) et le pH qui vont contribuer à ce que l’on appelle l’effet Bohr (du nom d’un pysiologiste) qui est le phénomène de libération des molécules d’oxygène depuis l’hémoglobine. favorisant ainsi la fourniture d’oxygène en abaissant VCO2 dans la différence artério-veineuse. L’Effet Bohr désigne la diminution de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène (O2) lors d’une augmentation de la pression partielle en dioxyde de carbone (CO2) ou d’une diminution de pH. Expérimentalement, cela se traduit, tous les autres paramètres étant fixés, par un décalage vers la droite de la courbe de saturation de l’hémoglobine (chapitre IV, 1.9.4, figure 53). Un autre facteur favorisant l’effet Bohr est l’élévation de la température corporelle. De plus des ajustements de feedback potentiels sont supposés être également les chémoréflexes musculaires c’est-à-dire l’acidose intramusculaire (voir figure 21b). Pour maintenir la concentration en ATP au début de l’exercice même sous l’effet d’une très forte accélération (songez que même en début de footing l’on passe de 0 à 10 km/h en 2 secondes soit une accélération de (10/3,6)/2 = 1,39 m. s-2, ce qui est 10 fois supérieure à celle enregistrées au cours d’un 1500m.

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Les réactions de la créatine kinase et glycolytiques sont à développer par l’entraînement pour assurer un haut dont l’index . débit de phosphorylation oxydative . est VO2max . De même un haut VO2max assure la resynthèse rapide de la créatine kinase et la prise en charge des ions H+ dans le cycle tricarboxylique de Krebs avant de parvenir à la chaîne respiratoire de transport des électrons qui est un enchaînement de transfert de protons dont la synthèse de la réaction peut être écrite par l’équation : 6 ADP + 6 Pi + O2 + 2 NADH + 2 H+ g 6 ATP + 2 NAD + 2 H2O Ainsi une molécule d’oxygène est réduire en deux molécules d’eau par le transfert de 4 électrons à partir de 2 NADH. Il est possible qu’en début d’exercice la limite de la phosphorylation oxydative (et donc son ralentissent) soit le fait d’un manque de disponibilité des ADP puis de l’acétyle coenzyme A pour la fourniture de NADH (encadré 3a) au cycle de Krebs (voir figures 17a et b) et à la chaine respiratoire puis de NAD au niveau glycolytique pour la formation des NADH. Nous voyions que tout est imbriqué et que la sempiternelle scission aérobie/anaérobie est d’un formalisme erroné. La technique de résonances magnétique nucléaire (RMN) a montré qu’il fallait 20 . secondes d’exercice à puissance modérée (50 % VO2max ) pour parvenir à une stabilisation de la pression en oxygène intracellulaire entre 3 et 5 mm Hg. Les réserves initiales de PCr sont fondamentales et nous verrons que le challenge en cours d’exercice est d’assurer la resynthèse de la phophocréatine en étant justement . à un haut débit de la phosphorylation oxydative, le VO2max pouvant être décalé et repoussé vers de plus hautes valeurs au fur et à mesure que se déroule l’exercice. La grande question que nous . nous proposons de résoudre dans cette conjecture du VO2max temporel est que nous devons trouver pour chaque personne et proposer un modèle pour l’ensemble, qui satisfasse cette hypothèse que nous avons pour l’heure commencée à démontrer expérimentalement. Nous avons vu que pour la cinétique d’O2, l’échauffement est donc fondamental pour activer la créatine kinase avec un enchainement de petits sprints sous forme d’accélération progressive en prenant garde de rester immobile avant le départ pour reconstituer la phosphocréatine tout en ayant un taux élevé d’ADP. Cela est réalisé sur le terrain puisque ces quelques minutes passées sur la lignes de départ ont non seulement pour fonction de retrouver un taux initial de phosphocréatine (en maintenant une température corporelle élevée) mais elles permettent d’activer des cycles dits « futiles » (figure 15) mais qui sont loin de l’être ou alors en considérant (ce que je crois) que la futilité est utile tout comme la paresse,

64

pour être créatif, s’adapter à l’environnement en anticipant les événements par distanciation. La rapidité des réactions enzymatiques nécessite une température intramusculaire proche de 38 °C. Lorsque le sujet est au niveau du métabolisme de repos, la vitesse du cycle sera très basse. Cependant, l’anticipation d’un exercice intense permettrait selon Newsholme (1986) d’augmenter la vitesse du cycle (appelés cycles « futiles » puisque ne produisant pas d’ATP et tournant à vide en attendant que l’exercice débute, figure 15). Ces cycles permettraient d’augmenter la sensibilité au changement de concentration des régulateurs de la phosphofructokinase (le fructose 6-phosphate, permettant alors un ajustement plus rapide des réactions enzymatiques, eu égard à l’augmentation de la demande d’ATP par unité de temps de 1000 fois la valeur de repos). Ainsi, un sprinter dans ses starting-blocks, outre son échauffement qui le prépare à produire un niveau maximal d’ATP par unité de temps, aura une augmentation du taux sanguin des hormones du stress : l’adrénaline et la noradrénaline. Dès que le sprinter a démarré, le niveau d’hydrolyse de l’ATP augmente de façon très importante. Cela entraîne une baisse rapide de la concentration en phosphocréatine (permettant au taux d’ATP de se maintenir) et une baisse des citrates avec une augmentation des phosphates, de l’adénosine mono-phosphate et de l’ammonium (NH4+). Cela entraîne alors une augmentation à son maximum (rétroaction positive) de l’activité de l’enzyme phosphofructokinase, favorisant ainsi la resynthèse d’ATP à partir de la glycolyse. Les besoins d’ATP sur le 100 m nécessitent ce « relai » rapide entre la phosphocréatine et la glycolyse. La haute performance des coureurs de 100m à moins de 10 secondes dépendrait en partie de leur sensibilité du contrôle enzymatique de la glycolyse qui doit être très fine et très rapide. L’entraînement au départ peut favoriser, outre les questions de réglage technique, la mise en action métabolique qui est à prendre en compte au même titre que la mise en action neuro-musculaire (recrutement de nombreuses unités motrices pour mobiliser un maximum de fibres musculaires en un minimum de temps). Au cours d’un 100 m, au terme d’une accélération élevée (> 2m. s-2), la baisse de la créatine phosphate induit l’augmentation de la phosphorylation oxydative et du flux de la navette créatine kinase qui permet de remettre à la disposition du myofilament, de la créatine phosphate depuis la mitochondrie. En effet, Vladur Saks, le GRAND spécialiste de la navette créatine kinase, a montré que l’utilisation cellulaire de l’ATP et sa régénération dans la mitochondrie sont interconnectées par le flux de la créatine phosphate depuis la mitochondrie. La régulation en feedback de la respiration cellulaire

Vers une nouvelle forme d’entraînement intégratif pour améliorer la synchronisation des métabolismes

s’opère par la fluctuation de ce cycle de l’ADP, et des rapports entre le substrat et le produit de la réaction de la créatine kinase (ATP/ADP + Pi et PCr/Cr) la réaction pouvant opérer loin de son équilibre en tolérant des écarts (et donc des écarts de puissance de la contraction musculaire) (Guzun et Sacks, 2010, Guzun et al., 2011). Cependant, au- delà de ce rôle de transfert énergétique entre le cytosol et le cytoplasme, lieu de la contraction musculaire et de la réaction d’ATPase, la mitochondrie joue un rôle déterminant dans ce que l’on considère de plus en plus important dans l’énergétique cellulaire : le passage de l’information pour déclencher les adaptations plus rapides que celles dues au phénomènes enzymatiques et un peu moins que celles purement électriques et nerveuses par les micro ARN mitochondriaux qui vont contrôler l’expression des facteurs de transcription du signal. En effet, L’objectif majeur de notre unité de recherche à l’Université d’Évry ParisSaclay est de mettre en évidence la possibilité d’augmenter la consommation maximale d’oxygène grâce à des protocoles d’exercice à puissances variables dans différentes échelles de temps et d’espaces pré-définis ou stochastiques. La modélisation des caractéristiques de variation de puissance de l’exercice dans le temps et des facteurs biologiques associés est réalisée en collaboration avec l’école polytechnique, l’institut Mines-Telecom par l’ENSIIE, école d’ingénieurs d’Évry qui est le partenaire du laboratoire de biologie intégrative des adaptations à l’exercice.

Chapitre 1

Il a été démontré que le surentraînement était hautement corrélé à la monotonie de la vitesse d’entraînement c’est-à-dire le faible écart type de sa vitesse moyenne sur une semaine (Snyder et al., 1993). C’est pourquoi le balayage en accélération des vitesses de course permet de se prévenir de cet état de surentraînement. Au contraire, l’entraînement bénéfique même plus classique doit permettre d’induire les effets physiologiques que nous avons développés en 1.6 de ce chapitre.

3.2

· V O2max est le socle énergétique de tous les exercices courts et longs : du sprint au marathon

L’augmentation de la consommation d’oxygène maximale et de la possibilité de resynthétiser de la phosphocréatine et d’éliminer l’acide lactique en cours d’épreuve du 100 m au marathon participent à l’amélioration des performances. Classiquement, on pensait que la. sollicitation de la consommation maximale d’oxygène (VO2max ) n’était possible que dans les épreuves de demi-fond (1 500 m), et non dans le sprint ou le marathon (Billat et al., 2009b). En effet, d’après les théories classiques égrenée dans les manuels de physiologie, on peut se trouver devant trois puissances types . impliquant trois causes différentes de non atteinte de VO2max : (1) La puissance de sortie peut être élevée (supérieure à la vitesse critique (Cf. pages 45 et 228)), mais Figure 21b Schéma simplifié indiquant le contrôle de l’apport d’oxygène pour répondre à la demande d’oxygène pendant l’exercice par anticipation (feed forward) potentielle (ligne fine) et par retro contrôle (feed back, ligne épaisse). En ligne pointillée, le contrôle par feedback potentiel des chémoréflexes musculaires (d’après Hughson et al., 2001).

65

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

.

insuffisante pour atteindre VO2max (c’est par exemple la vitesse moyenne du marathon). (2) La puissance peut être très . élevée ou maximale, et suffisante pour amener le VO2 à son maximum avant l’épuisement (c’est le cas des épreuves de demifond). (3) La puissance peut être extrêmement élevée, de telle sorte que le sujet s’épuise.avant qu’un temps suffisant se soit écoulé pour que le VO2 atteigne son maximum (c’est-à-dire les épreuves de sprint) (Morton et Billat, 2000). Cette classification est la base du paradigme centenaire de la vitesse constante appliqué dans les labora. toires depuis la découverte du VO2max par AV Hill en 1923 (Hill et Lupton, 1923). Aujourd’hui, des technologies innovantes telles que les systèmes portables des échange gazeux respiratoires par cycle à cycle permettent aux chercheurs d’étudier la sollicitation de . VO2max pendant les sprints de 100 et 200 m chez les coureurs d’élite. En évaluant la physiologie fondamentale, nous avons, dans ce chapitre, expliqué que la variation de l’absorption d’oxygène par les tissus est directement proportionnelle aux variations du contenu en créatine (Cr) (Saks et al., 2000). De plus, ce qui est intéressant pour la physiologie intégrative, . c’est que cette relation réciproque étroite entre le VO2 pulmonaire et la phosphocréatine (PCr) a été démontrée par nos collègues Polonais pendant des exercices de haute intensité à puissance constante (Korzeniewski et Zoladz, 2015). Il existe donc une relation étroite entre la cinétique d’absorption de l’oxygène et les changements dans les rapports Cr/PCr. La déplétion rapide de la créatine phosphate pendant un sprint peut être un signal pour une augmentation rapide de V· O2 et éventuellement · O max. Par conséquent, notre première hypojusqu’à V 2 · O max peut être atteint pendant un thèse est que le V 2 · O max sprint, mais aussi que le temps relatif passé au V 2 peut être du même ordre de grandeur pendant les distances moyennes, et peut-être un facteur discriminant de la performance.

3.2.1 Atteinte du V·O2max dans le marathon De même que cela peut surprendre que V· O2max puisse être atteint dans le sprint court en raison de cette déplétion rapide de la phosphocréatine, il est possible que le marathon, qui est la plus longue distance d’endurance olympique, ait également des phases cou. rues à VO2max . Cependant, cela va à l’encontre des publications qui ont estimé que le . marathon ne suscite qu’une utilisation fractionnée du VO2max (di Prampero, 1986b). Cependant, les progrès technologiques permettent maintenant de mesurer le V· O2 cycle respiratoire par cycle respiratoire pendant tout un marathon.

66

Pourtant, 10 années avant la publication de ce modèle de di Prampero dans lequel la consommation d’oxygène sur le marathon n’était envisagée . que comme une fraction (85 % au maximum du VO2max ) un chercheur audacieux, .Michael Maron, avait publié la possibilité d’atteindre VO2max sur un marathon. Il .était d’ailleurs lui-même un des 3 coureurs dont le VO2 avait été mesuré sur 1 ou 2 km en utilisant des sacs Douglas depuis l’arrière d’un véhicule en mouvement (Maron et al., 1976). Ces expériences pionnières ont mis en lumière l’entraînement et . la performance sur marathon, car il a montré que le VO2max était atteint pendant le marathon et notre recherche confirme ses résultats. En effet, le paradigme de la vitesse constante perdure encore aujourd’hui, car il est déterminé par le rapport entre la production d’énergie et le coût de la course (di Prampero, 1986b) ; tout cela provient des expériences sur tapis roulant de la physiologie . à vitesse constante. On pense généralement que le VO2max n’est pas sollicité dans le marathon et qu’il faut . courir en dessous de la vitesse aérobie maximale (vVO2max ) afin de mainte. nir un état stable de VO2 inférieure au seuil de lactate (Zinner, 2016, Billat et al., 1994b). L’une des conséquences évidentes de la réponse de la composante lente (Cf. pages 227, 264, 273) est qu’elle crée une gamme de . vitesses, toutes susceptibles de déclencher le VO2max , à condition que . l’exercice soit poursuivi jusqu’à épuisement. Le VO2max peut être déclenché pendant un exercice à puissance constante, sur une gamme d’intensités qui peuvent être supérieures ou inférieures à la valeur minimale pour laquelle elle se produit pendant un exercice incrémental (Whipp, 1994). La recherche pionnière de Maron a rapporté que le . VO2max pouvait être déclenché pendant un marathon ; cependant, nous ne disposions pas à l’époque de mesures portables des échanges gazeux pour confirmer ce résultat remarquable (Maron et al., 1976). Aujourd’hui, les analyseurs portables des échange gazeux respiratoires, cycle respiratoire par cycle respiratoire, ont des délais de mesure minimes et peuvent être facilement portés en compétition.

.

Le plateau de VO2 à la fin d’un test d’exercice incrémental est utilisé comme un critère important pour . valider que le VO2max a été atteint (di Prampero, 1986b) ; cependant, la durée pendant laquelle les sujets peuvent maintenir ce plateau a été largement ignorée. Nous verrons plus en détail dans le chapitre 6, que le temps limite (temps de . maintien .ou Tlim) à la puissance minimale sollicitant VO2max (PVO2max , ou PMA puissance maximale aérobie) dans un test incrémenté classique du type VAMEVAL en en . course ou PAMEVAL . vélo, le temps limite à PVO2max (Tlim@PVO2max ), bien que reproductible, est très variable d’un sujet à l’autre (3-8 min) (Billat et al., 1994a). En effet, le temps

Vers une nouvelle forme d’entraînement intégratif pour améliorer la synchronisation

.

limite à PVO . . 2max est corrélé négativement avec PVO2max et VO2max , mais positivement avec le déficit maximal en oxygène, qui est un indice de la capacité à générer de l’énergie à partir du métabolisme anaérobie (c’est-à-dire la capacité anaérobie) (Billat et al., 2000 ; Billat et al., 2013). Cela signifie que l’on peut soutenir . VO2max grâce à notre capacité anaérobie c’est-à-dire notre faculté de supporter un gros déficit d’oxygène (figures 69 et 72 dans le chapitre 6). Par conséquent, alors que les débats se poursuivent. sur les facteurs limitants centraux et périphériques de VO2max (Bergh . et al., 2000 ; Ekblom, 2009), les facteurs. limitants du VO2max et de la capacité à maintenir le VO2max restent . à étudier indépendamment de la puissance à V O2max . PVO2max (Billat et al., 2013). Toutefois, il ne faut pas se limiter au temps limite à PMA, mais nous verrons qu’il est . plus intéressant d’examiner le temps limite à de l’exerVO2max lui-même en contrôlant la puissance . cice de telle sorte que le sportif reste à VO2max ave la puissance la plus faible . possible. Ainsi cela permet au sportif de tenir son VO2max le plus longtemps possible en variant la vitesse pour permettre des phases de récu. pération tout en restant à VO2max ! On crée « un crédit d’oxygène » et nous avons . ainsi démontré qu’il était possible de maintenir le VO2max 5 fois plus longtemps . en moyenne par rapport à un temps limite à VO2max quand on demande au sportif de tenir 100 % de sa PMA (25 minutes au lieu de 5 minutes en moyenne) (Billat et al., 2013). Dans ce premier chapitre, j’ai tout. simplement voulu attirer votre curiosité sur le fait que VO2max était atteint du sprint au marathon (Molinari et al, 2020a).

3.2.2 Temps limite à V·O2max

.

L’examen du temps limite à VO2max dans différentes épreuves de course est une . approche plus écologique du temps de plateau à VO2max par rapport au temps total de course du sprint au marathon. Les courses du monde réel ne sont pas courues à des vitesses constantes (Billat et al., 2020 ; di Prampero et al., 2015), et nous souhaitons inverser le . paradigme. de la puissance autour de la puissance à VO2max (PVO2max.) ou de V· O2 constant afin d’examiner le plateau à VO2max comme un facteur de performance commun lorsqu’il est exprimé en pourcentage du temps total de course. En effet, l’idée sous-jacente est que plus l’énergie à . VO2max (taux d’oxydation maximum) est importante, plus l’Adénosine Triphosphate resynthétisée à partir de la créatine et de l’acide lactique contribue aux performances de sprint et de marathon. . Par conséquent, plus le temps relatif de course à VO2max est élevé, meilleures sont les performances, indépendamment de la distance. .Le concept de temps relatif jusqu’à l’épuisement au VO2max pourrait être un concept énergétique

Chapitre 1

central, indépendamment du fait que le métabolisme dominant soit aérobie ou anaérobie. Nous supposons que ce concept pourrait conduire à une nouvelle méthode d’entraînement par intervalles de haute intensité qui utilise des sprints très courts autour de la vitesse moyenne du marathon en fonction de la distance cible (de 100 m à 42 195 m). Nous pouvons de façon surprenante, mais attendue selon notre introduction théorique, que, quelle que . soit la distance de compétition, VO2max est atteint en course par 87 % des coureurs (tableau 7b) Nous pouvons donc . constater que le temps relatif de course passé à VO2max est aussi important sur le sprint qu’en demi-fond court ou sur le fond (10 000 m et marathon). Seul le 3 000 m est à part puisque plus de la moitié du temps de course se déroule alors que le coureur est à 100 % de son . VO2max et on peut même aller plus loin en constatant que . plus le temps relatif de course est soutenu à VO2max , meilleure est la performance (tableau 7c). Mais il convient de rappeler que ces coureurs n’étaient pas de haut niveau (contrairement aux sprinteurs) et qu’il convient de vérifier que les coureurs élite ne . soient pas capables de soutenir leur VO2max sur les 7 tours et demi du 3 000 m. Cette distance de course que j’ai eu modestement à courir au niveau national espoir, m’a donné à souffrir et à me creuser la tête pour progresser par un entraînement intégratif utilisant aussi bien le sprint que les grands trails en montagne audessus de chez moi à Grenoble ! De ces intuitions, sensations de course est née la vocation de chercher à comprendre ce qui pouvait me faire souffrir ou parfois me sentir voler ! (Rarement mais j’en garde un souvenir magique !). En effet classiquement on pensait que ni le sprint ni le marathon ne permettaient d’atteindre . VO2max . Nous savions que dans le demi-fond court et long, le déficit maximal en oxygène était le prédicteur métabolique le plus indicatif de la performance dans les épreuves de 800, 1 500 et 5 000 m (Weyand . et al., 1993). Nos derniers résultats montrent que VO2max peut être déclenché et maintenu dans le sprint, le marathon et les épreuves de demi-fond.. De plus, nous avons constaté que le temps passé à VO2max représente une fraction élevée de la distance courue dans le sprint et les distances moyennes (800-3 000 m). . Cependant ce temps passé à VO2max n’était corrélé qu’avec l’épreuve de 3 000 m.

67

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

· V O2max UMTT (mL∙kg-1∙min-1)

Tableau 7b · Temps passé à 100 % de VO2max du sprint au marathon chez des coureurs sprinteurs de haut niveau (national et plus) par rapport aux autre athlètes (régional). Il est probable que les marathoniens de niveau supérieur puissent tenir 100 % · de V O2max plus longtemps ! à suivre dans une prochaine étude qui reste à · faire ! (Molinari et al., 2020a). V O2max · UMTT est le V O2max mesuré au cours du test sur piste de l’Université de Montréal (UMTT d’après Léger et Boucher 1980).

Distances

% Coureurs atteignant · V O2max

Temps de course en s

100 m

53.1 ± 5.5

76

11.3 ± 0.5 (s)

200 m

53.1 ± 5.5

85

23.0 ± 1.1

800 m

64.6 ± 3.4

100

3.0 ± 0.1 (min)

1 500 m

59.0 ± 10.5

94

4.6 ± 0.4

3 000 m

51.1 ± 5.3

89

10.1 ± 1.0

10 000 m

67.0 ± 6.5

100

36.3 ± 4.3

42 195 m

55.4 ± 4.7

83

10 817 ± 186.9

250

Vitesse de course du 100 m au marathon · · en % de la vitesse à V O2max (v V O2max) (Molinari et al., 2020a).

200

Pourcentage %

Figure 21c

150 100 50 0 42195

10000

1500

3000

800

200

100

Distance (m)

. Intensité de l’exercice (en pourcentage de la vitesse à VO2max)

Tableau 7c Performance (en IAAF est le score IAAF et temps de course), nombre de coureurs · (n) ayant atteint le V O2max et Tlim à · V O2max pendant la distance de course spécifique.

Coureurs

nombre de coureurs

IAAF Score

Temps de course (h, min, secondes)

Tlim à · · Tlim à V O2max V O2max en % en s du temps total de course

Lactate après course mmol.L–1

100 m

13

799.0 ± 143.5

11.3 ± 0.5 (s)

3 ± 2.1

25.6 ± 18.5

14.0 ± 2.8

200 m

13

795.5 ± 135.5

23.0 ± 1.1

6 ± 4.0

800 m

8

563.0

1 500 m

16

3000 m

28.5 ± 17.7

14.9 ± 1.5

3.0 ± 0.1 (min)

28

± 19.7 aef

22.0 ± 15.8

15.9 ± 1.7

474.6 ± 191.8 ab

4.6 ± 0.4

129 ± 92.2 abe

41.7 ± 28.6

12.4 ± 1.8 bc

9

472.2 ± 218.8 ab

10.1 ± 1.0

341 ± 103.3 abcd

51.4 ± 18.3 abc

11.7 ± 2.3 bc

10,000 m

7

522.4 ± 242.5 ab

36.3 ± 4.3

680 ± 590.6 abcd

30.6 ± 27.2 f

/

42,195 m

12

385.6 ± 190.7 ab

3h7’17” ± 18’41” abcd

479 ± 497.9 abc

4.1 ± 4.0 abcde

6.6 ± 2.1 abcde

± 131.0 ab

· IAAF, Association internationale des fédérations d’athlétisme ; V O2max, consommation maximale d’oxygène ; Tlim, temps limite. Remarque : a indique une différence significative (p < 0,05) par rapport au 100 m, b : 200 m, c : 800 m, d : 1 500 m, e : 3 000 m et f : marathon. Les données sont indiquées en tant que

68

Vers une nouvelle forme d’entraînement intégratif pour améliorer la synchronisation

3.2.3 Sollicitation de V·O2max dans le sprint Nous pensons qu’il s’agit de la première étude · O max pendant le sprint portant sur la sollicitation de V 2 · O max est brève, (100, 200 m). La sollicitation de V 2 étant donné que tant la cinétique de l’oxygène que le · O max dépendent fortement de la délai d’atteinte du V 2 phase d’accélération [Glaister 2005]. En effet les valeurs des constantes de temps de l’amplitude fondamentale du V· O2 de la réponse musculaire de la phosphocréatine · O cohabitent aussi à l’exercice et de la dynamique du V 2 bien pendant l’exercice d’intensité modérée que d’intensité élevée (Rossiter et al., 2002). · O max est sollicité Nous avons montré que V 2 lors du marathon, même si le temps passé à V· O max 2

n’est que de 5 %. Les résultats rapportés par Michael Maron (1976) sont en accord avec nos résultats. Le plus remarquable était en effet que le temps relatif que les coureurs ont passé à V· O2max n’était pas significativement différent (tableau 7c) entre le sprint et les épreuves courtes de demi-fond (800 et 1 500 m). Notre groupe de sprinters élite de niveau national possède une capacité aérobie maximale exceptionnellement élevée qui doit être prise en compte lors de l’examen de nos résultats (Volkov et al., 1975). En effet, · O max pencette capacité à atteindre rapidement le V 2 dant un sprint permet à l’athlète d’effectuer des répétitions de sprint pendant l’entraînement et la course (Bogdanis et al., 1996). D’autres auteurs ont étudié la contribution aérobie aux sprints isolés dans le cadre d’une course de sprints répétés impliquant 5 × 6 sprints (McGawley et Bishop, 2015). Leurs résultats ont en effet montré que la contribution aérobie au premier sprint est de 0 %, tandis que lors du cinquième sprint,

Chapitre 1

elle est de 40 %. La contribution aérobie au sprint final de chaque course était également liée de manière · O max ce qui est confirmé par le fait significative à V 2 · que le VO2 atteint lors du sprint final de chaque course · O max. Plus que n’était d’ailleurs pas différent du V 2 jamais il faut considérer LE métabolisme et non les métabolismes aérobie et anaérobie en raison des phénomènes de variation de puissance aussi bien dans l’exercice qu’entre les exercices (la fameuse période de récupération, Belfry et al., 2012). En effet, à l’entraînement notamment, en raison de la récupération incomplète entre les sprints, il est possible que les augmentations progressives de la dégradation de la phosphocréatine (PCr) et de l’accumulation de phosphate inorganique (Pi) au cours des sprints de 5 ×6 s · O du aient également entraîné l’augmentation de V 2 premier au dernier sprint. · O lors Ainsi, l’augmentation significative de V 2

du cinquième sprint de chaque série peut probablement être attribuée au fait que l’on partait d’une base élevée régulée par l’augmentation de l’Adénosine DiPhosphate (ADP) consécutive à chaque sprint (Bucheit et Ufland, 2011). Leurs résultats suggèrent que la contribution aérobie à l’exercice de sprint répété peut être limitée par le V· O2max. Ainsi, peut-on suggérer à tous les sportifs, de sport collectif et d’autres efforts · O max pour qu’en augrépétés, d’augmenter leur V 2 mentant cette capacité, une plus grande contribution aérobie peut être obtenue pendant les derniers sprints, améliorant potentiellement la performance. De façon classique, en ayant une approche séparée des métabolismes, il avait été démontré que le métabolisme aérobie fournissait 50 % de l’énergie pendant le deuxième sprint de 10 ou 30 s, alors que la disponibilité de la

T1im VO2max (S) % T1tot

Figure 21d 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 500

· Corrélation entre le Tlim V O2max sur la durée d’exercice relative (Tlim à · V O2max en pourcentage du temps de course totale (% Ttot) et la performance sur 3 000 m course en secondes (s). (D’après Molinari et al., 2020a)

550

600

650

700

750

Performance (s) Tlim VO2 max (s) en % du temps total de course

69

Chapitre 1

LA

PERFORMANCE SPORTIVE

phosphocréatine (PCr) est essentielle pour une puissance de sortie élevée pendant les 10 s initiales (Bogdanis et al., 1996). De la même façon, il est impératif de travailler TOUT le métabolisme en utilisant tous les registres de vitesses et puissance car le déficit maximal en oxygène est également un facteur important de la performance dans les épreuves de sprint et de demifond et à présent du marathon (pour revue Cf. Billat, Révolution Marathon, Editions De Boeck Supérieur, 2018). Nous avions déjà montré sur le recordman d’Europe de l’époque et ses collègues marathoniens de haut-niveau (les Portugais de la fin des années 90), qu’un pic de consommation d’oxygène élevé et la capacité de courir rapidement sur une section de 1 000 m du marathon déterminaient la différence entre une performance de marathon d’élite (2 h 6 min2 h 11 min) et un temps de marathon non élite (2 h 12 min-2 h 16 min) mais déjà de haut-niveau à l’époque (Billat et al., 2001a). V· O max et son temps limite ne sont pas des 2

facteurs discriminants de la performance sur le sprint, mais la capacité de tenir un 100 m sans perte de vitesse est certainement lié à cette énergie à V· O2max qui doit être le socle énergétique pour tous les sports, l’oxygène étant le catalyseur de la respiration mitochondriale dans la resynthèse de l’ATP par la navette créatine kinase, et l’oxydant du lactate.

3.2.4 Les coureurs d’élite Les coureurs d’élite qui réussissent possèdent la capacité de courir à des vitesses élevées pendant des périodes allant de quelques secondes à plusieurs minutes (Bundle et al., 2003). Cela est probablement dû à leur capacité à épuiser rapidement la phosphocréatine (PCr), à accélérer la cinétique de l’oxygène et à augmenter le temps relatif passé à V· O2max. En effet, les preuves suggèrent que la déplétion de la PCr est liée à la durée du sprint et au statut d’entraînement des sujets (Spencer et al., 2005). Les nordiques qui sont familiers des biopsies musculaires à l’entraînement, ont très tôt montré, comme Hirvonen et al. (1987), que la performance de sprint était liée à la déplétion d’une quantité plus importante de phosphates à haute énergie et à des taux plus rapides pendant les étapes initiales de l’exercice ; ils avaient démontré que la déplétion de PCr était plus importante dans un groupe de sprinters d’élite de niveau national sur 100 m (Hirvonen et al., 1987). Les sprinters d’élite avaient épuisé des quantités significativement plus élevées de PCr que les sprinters plus lents pendant les sprints de 80 et 100 m (76 et 71 %). La déplétion rapide de la PCr pourrait égale-

70

ment induire une cinétique de l’oxygène plus rapide et, · O max. par conséquent, un temps plus long passé à V 2 Korzeniewski et Zoladz (2004) (ce dernier étant un ancien coureur de 800 m de haut niveau) ont clairement démontré que le temps de demi-transition de la · O est déterminé par la quantité de PCr cinétique de V 2 qui a été transformée en créatine pendant la transition repos-travail. C’est pourquoi, un départ rapide pendant un effort de course à pied a été rapporté pour augmen· O et améliorer la tolérance à ter la cinétique de V 2 l’exercice (Bundle et al., 2003). Sahlin (2004) a mis en évidence que le taux de renouvellement de l’ATP pendant un sprint de 100 m était trois fois plus élevé que pendant un marathon et 50 fois plus élevé qu’au repos. Au-delà de la seule vitesse, il faut considérer la phase importante d’une course répétée qui est l’accélération qui correspond à environ 10 et 40 % de la demande énergétique totale pendant les courses de 400 et 100 m, respectivement (Sahlin et al., 2004). Lors d’une course de 5 000 m, Sahlin et al. (2004) montrent que la demande énergétique totale est importante et que la contribution de l’énergie cinétique devient négligeable. Si l’on considère que le temps pour atteindre · O max, V· O2max contribue au temps relatif passé à V 2 nos résultats montrent que jusqu’au 10 km, le temps passé à V· O2max n’est pas négligeable (51 % sur 3 000 m et 31 % sur 10 km Cf. tableau 7c). En effet, ce qu’il faut simplement retenir de notre dernière étude · sur le temps à V O2max (Molinari et al., 2020a), est que sur des distances de course du 100 m au 10 000 m, · une fois que VO2max est atteint il est maintenu jusqu’à la fin de la course, et cela contribue au temps relatif · d’épuisement à VO2max.

3.3

Vers une nouvelle définition de la performance énergétique : sa gestion et son optimisation

En conclusion de ce premier chapitre qui part de l’analyse énergétique de la performance pour aborder la notion de métabolisme intégré, ce que je veux vous transmettre ici dans ces pages et cet ouvrage, est l’idée qu’il faut parfois oser se décaler de quelques degrés pour reconsidérer des notions classiques qui étaient censées être acquises. Il n’y a pas de métabolisme aérobie séparé du métabolisme anaérobie, mais un seul métabolisme. Au-delà du simple chronomètre et du résultat en termes de temps sur une distance, nous devons considérer la qualité de la performance dans sa dimension de la gestion énergétique et de son optimisation. Revenons à la notion de performance pour envisager celle-ci comme l’optimisation énergé-

Vers une nouvelle forme d’entraînement intégratif pour améliorer la synchronisation

tique intégrée en jouant sur des variations de vitesse afin de tirer 100 % de notre énergie aérobie grâce à la mise en action du métabolisme de la phosphocréatine puis de l’acide lactique favorisant les oxydations. Il faut savoir ne pas aller trop loin dans la glycolyse anaérobie · O par un stand-by des afin de ne pas diminuer V 2 enzymes glycolytiques. Ces pourquoi ces enzymes sont très régulées afin d’éviter l’emballement du système, à l’instar des deux autres étapes irréversibles de la glycolyse. (Phosphofructokinase-1, Pyruvate kinase).

Chapitre 1

Nous pouvons donc comprendre combien il est important, encore une fois, nous ne le répéterons jamais assez, de s’entraîner, d’entraîner les sportifs sur toutes les plages de vitesse, même si cette plage est réduite. Ce qui compte est d’accélérer positivement et négativement (décélérer) pour enclencher les phases intégratives du métabolisme pouvant ainsi coopérer pour la plus grande production d’ATP possible. Là est la qualité de la performance, son chemin, au-delà du simple chronomètre.

71

Le muscle : transformateur d’énergie

2 1. Théorie de la contraction musculaire 2. Applications : fatigue musculaire et adaptations à l’exercice

Nous avons analysé la performance du point de vue du métabolisme en partant de la relation vitesse-temps. Nous devons à présent remonter cette chaine de transmission énergétique qui permet de passer de l’énergie chimique contenue dans les nutriments pour renouveler l’ATP qui va être directement utilisé pour la contraction (isométrique, concentrique ou excentrique) musculaire. Même si nous ne les ressentons pas tous à l’effort, ils sont tous à la manœuvre. En effet, le corps humain contient plus de 400 muscles squelettiques volontaires, appelés ainsi parce qu’ils peuvent être commandés volontairement par le sujet et permettent de mobiliser le squelette (par opposition aux muscles cardiaques ou aux muscles qui entourent les viscères). Les muscles striés squelettiques pèsent entre 25 et 40 % du poids corporel total selon le niveau d’entraînement (Johnson et Klueber, 1991). Ils assurent trois fonctions principales : (1) ils génèrent la force sur les extrémités osseuses, pour tendre à provoquer un mouvement ; (2) ils produisent la force nécessaire au maintien de la posture ; (3) ils produisent la chaleur pendant une période d’exposition au froid, assurant ainsi le maintien de la température interne (par le frisson, contraction qui se transforme à 100 % en chaleur, ce qui permet de réchauffer l’organisme).

1.

Théorie de la contraction musculaire

Étant donné le rôle primordial des muscles dans la performance sportive, la compréhension des mécanismes intimes de la contraction musculaire en liaison avec les métabolismes énergétiques que nous avons précédemment étudiés, sera envisagée dans ce chapitre. Pour ce faire, la connaissance préalable de la structure du muscle est nécessaire.

1.1

Le muscle

1.1.1 Structure macroscopique du muscle Le type, l’amplitude et la puissance d’un mouvement sont gouvernés par la dimension et la disposition des muscles agissant sur les leviers osseux du squelette. Un mouvement de forte amplitude met généralement en jeu des muscles dont les fibres ont une disposition fusiforme (ayant la forme d’un fuseau) comme le soléaire, alors qu’un mouvement réalisé à grande puissance va davantage solliciter des muscles penniformes comme les muscles jumeaux (figure 22a et 22b). Le muscle squelettique est composé de plusieurs sortes de tissus. Ceux-ci incluent les cellules musculaires ellesmêmes, le tissu nerveux, le sang et divers types de tissu conjonctif.

73

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

Figure 22a

conjonctif à l’intérieur même du muscle. La couche conjonctive qui entoure le muscle (située entre le fascia et le muscle lui-même) est appelée « épimysium ». La couche qui tapisse la face interne de l’épimysium est appelée l’intérieur, le « périmysium » entoure chaque paquet individuel de fibres musculaires. Précisons ici que le terme de « fibre » ou de « cellule » musculaire est équivalent, et indifféremment utilisé. Ces compartiments individuels de cellules musculaires sont appelés « fasciculi » (faisceaux). Chaque fibre musculaire à l’intérieur du fasciculus est entourée de tissu conjonctif appelé « l’endomysium ».

Muscles jumeaux.

1.1.2 Structure microscopique du muscle En dépit de cette forme unique, les cellules musculaires ont les mêmes organelles que les autres cellules et que nous avons décrits dans le chapitre I (voir 1. 4. 2 et figure 6). La figure 23 montre la structure d’une cellule musculaire qui a quelques particularités. Ainsi elle comprend notamment des mitochondries et des lysosomes.

Figure 22b Les tissus conjonctifs entourant le muscle squelettique.

De plus, les cellules musculaires, contrairement à de nombreuses cellules de l’organisme, sont polynuclées (c’est-à-dire qu’elles ont plusieurs noyaux). Une des caractéristiques les plus distinctives de la cellule musculaire est l’apparence striée des muscles squelettiques. Ces stries sont produites par l’alternance de bandes claires et sombres qui apparaissent tout au long de la fibre musculaire. Chaque fibre musculaire individuelle est un long et fin cylindre qui s’étend généralement sur toute la longueur du muscle. La membrane cellulaire qui entoure la cellule musculaire est appelée le « sarcolemme ». Au-dessous du sarcolemme, se trouve le « sarcoplasme » qui est le cytoplasme de la cellule musculaire, contenant les organelles et les « myofibrilles ». Ces dernières sont de nombreuses structures ressemblant à des fils. Les myofibrilles contiennent les protéines contractiles (figure 24), appelées ainsi pour leur capacité à se contracter (en concentrique, en excentrique et en isométrique (voir point suivant 1.2.1).

La figure 22b décrit la relation entre le muscle et les différents tissus conjonctifs entourant le muscle squelettique. Les muscles sont séparés les uns des autres et maintenus dans leur position par plusieurs couches de tissu conjonctif appelées « fascias ». En plus, des fascias, il y a trois couches séparées de tissu

74

En général, les myofibrilles contiennent deux principaux types de filaments protéiques, appelés des « myofilaments » : (1) des filaments épais composés de protéine de « myosine », (2) des filaments fins composés de protéine d’« actine ». C’est l’arrangement de ces deux myofilaments (ces deux types de protéine contractile) qui donne au muscle cette apparence striée (figure 24). Localisés sur la molécule d’actine ellemême, on peut considérer deux autres types de protéine : la troponine et la tropomyosine. Ces protéines

Théorie de la contraction musculaire

Chapitre 2

constituent une faible portion du muscle mais jouent un rôle important dans la régulation du processus de la contraction musculaire. Les myofibrilles peuvent être subdivisées en segments individuels appelés les « sarcomères ». Ceux-ci sont séparés les uns des autres par une fine feuille de tissu conjonctif appelée la « ligne Z ». Les filaments de myosine sont principalement situés à l’intérieur d’une portion sombre de sarcomère, qui est appelée la bande A, tandis que les filaments d’actine apparaissent essentiellement dans la région plus claire du sarcomère : « la bande I » (figure 24). Notons, cependant, que les filaments d’actine recouvrent les filaments de myosine. C’est pourquoi on trouve également des filaments d’actine dans la bande la plus sombre : la bande A. Au centre du sarcomère, on distingue au microscope, une portion de filament de myosine non recouvert de filaments d’actine, il s’agit de la « zone H ». À l’intérieur du sarcoplasme musculaire se trouve un réseau de canaux membranaires qui entourent de façon parallèle chaque myofibrille. L’ensemble de ces canaux forme une sorte de filet (reticulum en latin) d’où leur nom de « réticulum sarcoplasmique ». Les canaux de ce réticulum sarcoplasmique sont des sites de stockage du calcium puisqu’ils sont terminés par des saccules (sortes de petites poches). La figure 25 montre le rôle primordial du calcium dans la contraction musculaire. Une autre série de canaux est appelée les « tubules transverses » qui se déploient de la surface de la cellule musculaire à l’intérieur de celle-ci. En effet, ils traversent complètement la section de la cellule musculaire (perpendiculairement à sa surface). Ces tubules transverses passent entre deux portions élargies du réticulum sarcoplasmique appelées les citernes terminales. Toutes ces pièces, dont les noms peuvent sembler ardus, sont les acteurs principaux du film de la contraction musculaire dont le scénario, que nous allons vous présenter dans le point suivant, doit être bien compris lorsque l’on veut comprendre et évaluer les déterminants énergétiques et musculaires de la performance motrice.

1.2

La contraction musculaire

Lorsque le muscle squelettique est stimulé, il tend à se raccourcir autour d’un axe longitudinal et à développer une force : il s’agit de la contraction musculaire dont nous décrirons les mécanismes dans le point suivant.

1.2.1 Types de contraction musculaire

Figure 23

On distingue différents types de contraction musculaire en fonction 1) de la modification de sa longueur et 2) du caractère constant ou non de sa vitesse de contraction.

Les différents constituants du muscle.

1) Si un mouvement segmentaire (mouvement concernant un membre du corps) est observé comme, par exemple, lever le bras, le type général de l’activité musculaire est décrit comme étant dynamique dans sa nature. Le caractère spécifique du type de contraction musculaire doit être défini soit comme : a) concentrique : le muscle se raccourcit, exemple du biceps brachial qui trouve au bras de fer un opposant de force inférieure ou b) excentrique : le muscle s’allonge, cas du biceps brachial qui trouve au bras de fer un opposant de force supérieure. 2) Si le mouvement se déroule à une vitesse constante, impliquant une vitesse de changement de la longueur du muscle relativement constante, le mouvement et la contraction sont qualifiés a) d’isocinétique (iso signifiant « même » en grec, et « cinétique » signifiant « vitesse »). Lorsque le développement de la force musculaire ne provoque aucun changement de la longueur des muscles et aucun mouvement des segments, la contraction est qualifiée b) d’isométrique (cas du

75

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

e

Nous devons aborder la notion de contraction musculaire avant de considérer le résultat physique de l’activité musculaire. Lorsqu’un muscle est stimulé (nous allons ultérieurement envisager par quels mécanismes), il tend à se raccourcir et les extrémités du muscle se rapprochent (contraction concentrique pour le biceps du vainqueur au bras de fer). Si la résistance externe égale la force du muscle, aucune modification de sa longueur n’apparaît (contraction isométrique, c’est-à-dire de même longueur), ce qui est le cas d’une égalité au bras de fer lorsque les deux adversaires sont de force égale et que les bras ne bougent pas, même s’ils produisent un effort considérable (contraction isométrique). Enfin, si la résistance externe dépasse la force du muscle, un étirement de celui-ci se produit, ses extrémités s’éloignant (contraction excentrique). C’est pourquoi on peut considérer que le terme de « contraction musculaire » est souvent interprété de façon erronée en ne faisant référence qu’à la contraction concentrique, alors qu’en fait le muscle tend à se raccourcir, à l’initiation de sa contraction, le résultat dépendant des forces externes rencontrées.

Figure 24 Organisation du muscle squelettique : du muscle aux filaments musculaires

biceps brachial qui trouve au bras de fer un opposant de même force). Si la force générée par les muscles entraîne un raccourcissement (mouvement concentrique) et un mouvement segmentaire, on peut alors dire qu’un travail (W) a été produit par les muscles actifs selon la formule (chapitre I) : W=fd où « f » est une force appliquée sur une distance « d ». Simultanément, les muscles doivent résister à l’application de forces externes (soulever un poids à bout de bras par exemple). Les muscles actifs sont donc nécessairement étirés (contraction excentrique), là encore un travail est accompli. Dans ce cas, cependant, on considère qu’un travail a été accompli sur le muscle.

76

Le terme de « travail » ne peut donc être utilisé comme synonyme d’exercice physique puisqu’il renvoie uniquement à la contraction musculaire de type excentrique ou concentrique (où il y a bien l’application d’une force sur une distance) et ceci sans notion de temps. La contraction isométrique ne peut être assimilée à un travail mais s’avère être un exercice musculaire qui peut être intense (bras de fer indécis). Paradoxe de la bioénergétique par rapport aux notions de mécanique qui s’appliquent sur des objets et non au vivant, la contraction musculaire de type isométrique coûte de l’énergie qui va être identifiée par le dégagement de chaleur qu’elle induit. La contraction musculaire est un processus impliquant les cellules protéiques et le métabolisme de resynthèse de l’ATP. Le résultat final est le glissement des myofilaments d’actine (filaments fins) sur les myofilaments de myosine (filaments épais) (figure 26). Ceci est la cause du raccourcissement du muscle si la résistance à son extrémité libre n’est pas supérieure à la tension produite par les « ponts d’union » qui se sont constitués entre l’actine et la myosine. Bien que les détails de la contraction musculaire, à l’échelon moléculaire ne soient pas entièrement élucidés, l’essentiel est connu depuis le début des années 50 et les travaux de E.H. Huxley qui énonça la « théorie du glissement des filaments » les uns par rapport aux autres.

Théorie de la contraction musculaire

Chapitre 2

1.2.2 Déroulement de la contraction musculaire Le processus de la contraction musculaire est décrit pas à pas dans la figure 27. Les fibres musculaires se contractent par un raccourcissement de leurs myofibrilles, qui entraîne la diminution de la distance séparant deux lignes Z. Le sarcomère se rétrécit par la diminution des bandes I et H, la bande A ne modifiant pas sa longueur. Ainsi les filaments d’actine et de myosine se chevauchent de plus en plus. Quel est le mécanisme qui provoque ce glissement réciproque des myofilaments pendant la contraction musculaire ? Il s’agit de l’action de nombreux ponts d’union, sortes de « bras » ou de rames (avec un bras et des pales), qui s’étendent de la myosine pour aller s’attacher sur les filaments d’actine. La tête (la pale) de la myosine du pont d’union est orientée en direction opposée des extrémités du sarcomère. Cette orientation des ponts d’union est telle que, lorsqu’ils s’attachent sur l’actine de part et d’autre du sarcomère, ils peuvent tirer l’actine sur la molécule de myosine, avec pour conséquence le raccourcissement du muscle, et ainsi générer une force. Le terme « couple excitation-contraction » fait référence à la séquence d’événements pendant lesquels l’impulsion nerveuse (le potentiel nerveux ou potentiel d’action) atteint la membrane musculaire et entraîne le raccourcissement du muscle par l’activité des ponts d’union. Ce processus va être décrit étape par étape, au plan bioénergétique.

1.2.3 Énergie et contraction musculaire L’énergie pour la contraction musculaire vient de la cassure de l’ATP par l’enzyme « ATPase ». Les voies bioénergétiques responsables de la synthèse d’ATP ont été décrites dans le premier chapitre. La cassure de l’ATP en ADP + Pi (Adénosine diphosphate et phosphate inorganique) et l’énergie libérée par la rupture des liaisons phosphorées (7 kcal ou 29,2 kJ par transformation d’une molécule d’ATP en ADP + Pi) servent à la constitution des ponts d’acto-myosine. En effet, cette énergie libérée sert à « armer » la tête de la myosine qui va s’incliner et faire glisser le filament d’actine par rapport au filament de myosine (figure 27). Il faut noter qu’un seul cycle de contraction de tous les ponts d’actomyosine (ponts d’union) permettrait au muscle de se raccourcir de seulement 1 % de sa longueur de repos (longueur de référence). Sachant que certains muscles peuvent se raccourcir jusqu’à 60 % de leur longueur de repos, cela signifie que le cycle de la constitution et de la rupture des ponts d’union doit se répéter de nombreuses fois. En effet, un seul cycle de glissement raccourcit un sarcomère d’environ 16 nanomètres (10 -9 mètres), pour un muscle de 20 cm, formé de sarcomères disposés en série.

Ainsi, le cycle devra se renouveler 625 000 fois (20  10-2 m/16  10-9 m = 20  10-2. 1/16  109 = 107  625  10-2 = 625 000). C’est pourquoi les ponts d’union doivent se détacher de l’actine après chaque « coup de rame ».

Figure 25

z

La liaison de Ca 2+ avec la troponine crée un changement de conformation de cette protéine et un mouvement de l’hélice de la tropomyosine. La troponine, la tropomyosine avec le filament d’actine forment le filament fin.

Figure 26 Disposition des filaments d’actine et de myosine au repos au cours de la contraction.

77

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

non entre les deux, ceci grâce à une modification de leurs configurations spatiales (figure 28). Afin de comprendre comment, il est nécessaire de mieux appréhender la relation anatomique qui existe entre l’actine, la troponine et la tropomyosine (figures 29 et 30) ; Il faut noter que le filament d’actine est formé de plusieurs petites protéines, sous-unités agencées en une double rangée torsadée. La tropomyosine est une fine molécule qui est dans le sillon entre les deux rangées d’actine. La molécule de troponine est directement attachée à la tropomyosine. Cette configuration anatomique permet à la troponine et à la tropomyosine de réguler ensemble l’attachement et le détachement des ponts liant l’actine et la myosine. Lorsque le muscle est relâché, la tropomyosine bloque les sites actifs de la molécule d’actine sur lesquels la tête de la myosine peut s’attacher. Le déclenchement de la contraction dépend de la libération de calcium du réticulum sarcoplasmique situé dans les « citernes terminales ». Dans un muscle relâché, la concentration de calcium dans le sarcoplasme est très basse (0,01 mol/l).

Figure 27

1.2.4 ATP et contraction musculaire

Théorie du glissement des filaments.

Les muscles relâchés sont facilement étirés, ce qui démontre qu’au repos, l’actine et la myosine ne sont pas fermement attachées. Qu’est-ce qui régule l’interaction entre l’actine et la myosine ? La première étape de ce processus commence avec l’arrivée de l’influx nerveux à la jonction neuro-musculaire. Le potentiel d’action qui vient du motoneurone entraîne la libération de l’acétylcholine dans l’espace synaptique de la jonction neuromusculaire. L’acétylcholine se lie à ses récepteurs spécifiques situés sur le sarcolemme, produisant alors le potentiel de plaque qui dépasse le seuil d’excitabilité de la fibre musculaire et entraîne la dépolarisation de la cellule musculaire (Ruegg, 1988). Cette dépolarisation est conduite à l’intérieur même de la cellule musculaire par le tubule transverse. Lorsque le potentiel d’action atteint le réticulum sarcoplasmique, le calcium est libéré et diffuse alors à l’intérieur du muscle pour se lier à une protéine liée à l’actine : la « troponine ». Cette étape déclenche le contrôle de la contraction musculaire qui dépend de la régulation de deux protéines : la troponine et la tropomyosine (qui sont toutes les deux situées sur la molécule d’actine). Ces deux protéines contrôlent l’interaction entre l’actine et la tête de la myosine en s’intercalant ou

78

Cependant, lorsque l’influx nerveux arrive à la jonction neuromusculaire, il descend dans le tubule transverse jusqu’au réticulum sarcoplasmique et provoque la libération de calcium (par un changement de la perméabilité membranaire aux ions calcium). La concentration en calcium du réticulum sarcoplasmique va alors être multipliée de 100 à 1 000 (0,01 à 1-10 mol/l). La plupart des ions calcium libérés dans le réticulum sarcoplasmique vont alors se fixer à la troponine (sur une de ses sous-unités : la troponine C, « C » comme calcium, site prévu pour l’accueil de l’ion (figure 29). Cela provoque un changement de position de la tropomyosine découvrant ainsi, sur l’actine, les sites de fixation de la tête de la myosine (figure 28). Ce mouvement permet l’attache de la tête de la myosine sur la molécule d’actine. Ce pont d’union initie la libération de l’énergie stockée dans la molécule de myosine, l’ATP et son enzyme, l’ATPase qui, fixée sur la tête de la myosine, permet « l’hydrolyse » (cassure par l’eau) de l’ATP selon la réaction suivante : ATP + H2O  ADP + Pi (1) La baisse de l’ATP est tamponnée par la réaction suivante catalysée par l’enzyme Créatine Phosphate Kinase (CPK) selon la réaction : ADP + PC  ATP + C (2) ainsi la réaction nette est : PC  C + Pi

(3)

Le fait que la réaction catalysée par la CPK soit réversible indique que, pendant la récupération, la

Chapitre 2

Théorie de la contraction musculaire

resynthèse d’ATP peut reconstituer les réserves d’ATP (qui sont très faibles et ne représentent que l’énergie nécessaire à 13 contractions du muscle).

(a)

L’énergie libérée par l’ATP ( 30 kJ par mole d’ATP hydrolysée) permet l’inclinaison de la tête de la myosine (figure 26). Ce mouvement angulaire de chaque tête de myosine en contact avec l’actine par l’intermédiaire de la troponine C entraîne le raccourcissement du sarcomère. Rappelons que celui-ci ne sera effectif que si les forces appliquées aux extrémités des insertions tendineuses sont inférieures à la tension exercée par les multiples ponts d’actomyosine situés tout le long des sarcomères. L’attachement d’ATP (fraîchement resynthétisée par les métabolismes aérobie et/ou anaérobie) à la myosine casse les ponts d’union avec la molécule d’actine. L’ATPase activée va encore rompre l’ATP fixée sur la tête de la myosine et fournit ainsi l’énergie nécessaire pour permettre la constitution d’un nouveau pont avec un nouveau site sur la molécule. Ce cycle de constitutions et de détachements successifs de ponts d’union entre les têtes de myosine et les différentes molécules d’actine se déroule tant que du calcium est disponible pour se fixer à la troponine C qui dévoile le site d’actine à la tête de la myosine et tant que l’ATP est disponible c’est-à-dire resynthétisée suffisamment vite en fonction de la puissance produite par le muscle (force produite sur une distance/temps). Le signal d’arrêt de la contraction est donc donné par l’absence d’influx nerveux à la jonction neuromusculaire. De ce fait, une pompe à calcium (coûteuse en énergie donc en ATP) située à l’intérieur du réticulum sarcoplasmique commence à repomper le calcium dans les citernes terminales du réticulum sarcoplasmique. Cet enlèvement du calcium de la troponine entraîne le retour de la tropomyosine à sa position initiale, masquant ainsi la molécule d’actine et ne

Tropomyosine Troponine

Actine (b)

(c)

Pont d'union

CA2+ CA2+ CA2+

ADP+Pi Troponine

ATP

CA2+ Site de liaison du calcium à la troponine permettant pas la constitution des ponts d’union entre l’actine et la myosine. Le tableau 8 rappelle chaque étape de ce processus d’excitation-contraction.

1.3

Typologie musculaire

Le muscle est composé de différentes catégories de fibres musculaires : des fibres de type rapide et de type lent que nous allons décrire dans la perspective de leur contribution à la performance sportive.

Figure 28 Liaisons de conformation entre troponine, tropomyosine, ponts d’union avec la myosine et le calcium (a). Quand le calcium se lie avec la troponine (b), la tropomyosine est déplacée des sites actifs de l’actine et l’attachement des ponts d’union est rendu possible.

1.3.1 Classification des fibres musculaires (méthodes et caractérisation) Les muscles squelettiques humains peuvent être généralement classés en trois différentes catégories de fibres musculaires pouvant d’ailleurs faire partie d’un même muscle, le vaste externe de la cuisse par ~~ Ca C I

T TM C I

Ca

Figure 29

T

Représentation, en vue transversale, des relations entre l’actine, la tropomyosine et les sous-unités de troponine en l’absence de Ca2+.

TM

50° A

M

A

70°

M A

A I C TM T

70° TM T C

Ca

I

Ca

~

Figure 30 Représentation, en vue transversale, des relations entre actine, tropomyosine, troponine et myosine, lors de la libération de Ca2+.

79

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

Étapes de la contraction musculaire 1. L’influx nerveux entraîne la libération d’acétylcholine à la jonction neuromusculaire. 2. L’acétylcholine se lie à ses récepteurs sur la plaque motrice, ce qui va permettre à l’influx nerveux de se propager sur le sarcolemme puis à l’intérieur des tubules transverses au sein de la fibre musculaire. 3. Lorsque l’influx nerveux atteint le réticulum sarcoplasmique, les ions calcium (Ca++) sont libérés de leurs saccules sarcoplasmiques. Les ions Ca++ se lient à la troponine et causent ainsi un changement de position de la tropomyosine qui va alors découvrir les sites actifs de l’actine prêts à recevoir les têtes de la myosine porteuse de l’ATP et de son enzyme, l’ATPase. 4. Les têtes de la myosine s’attachant à la troponine forment alors un pont d’union qui va permettre le glissement réciproque des filaments fins et épais, les têtes de la myosine (filaments épais) tirant sur l’actine (filaments fins). 5. La fixation d’une nouvelle molécule d’ATP sur la tête de la myosine permet aux ponts d’union de se détacher et au calcium de retourner dans le réticulum sarcoplasmique. L’ATP est donc dégradée selon la réaction suivante : ATP  ADP + Pi + énergie. 6. Le cycle de la contraction est répété aussi longtemps que le calcium sort du sarcoplasme sous l’effet de l’influx nerveux qui arrive par le tubule transverse et qui rend la membrane du réticulum sarcoplasmique perméable aux ions calcium.

Tableau 8 La contraction musculaire en six étapes.

exemple. Ces classifications sont fondées sur les caractéristiques biochimiques et la force produite par ces différentes catégories de cellules musculaires isolées (voir encadré 4 concernant le typage des fibres musculaires). Bien qu’il existe quelque confusion concernant la nomenclature des fibres musculaires, trois groupes sont souvent référencés ainsi : (1) les fibres à « contraction rapide », (2) les fibres à « contraction lente » et enfin (3) les fibres « intermédiaires » (Buchtal et al., 1970). Bien que quelques groupes musculaires soient composés en majeure partie par un type de fibres musculaires (comme le soléaire qui est un muscle de la posture, essentiellement composé de fibres lentes), la plupart des muscles sont mixtes. Le pourcentage respectif des types de fibres musculaires est déterminé génétiquement et peut s’avérer essentiel dans la réussite de certaines disciplines sportives aux extrêmes de la relation intensité-durée (Bobbert et al., 1990). Nous allons préciser les caractéristiques biochimiques de ces fibres musculaires. 1° Les fibres à contraction rapide Elles sont également appelées les fibres rapides glycolytiques (Fast Glycolytic, FG) ou encore les fibres de type IIb tel que nous l’avions évoqué en chapitre I lors de l’étude des métabolismes aérobie et anaérobie. Elles ont un nombre relativement petit de mitochon-

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dries, un métabolisme aérobie faible et une moindre résistance à la fatigue que les fibres à contraction lente appelées pour plus de simplicité « fibres lentes » par opposition aux « fibres rapides » (Green, 1986). Cependant, les fibres rapides sont riches en glycogène, en enzymes glycolytiques, ce qui leur confère une large capacité anaérobie lactique (Pette, 1980) (« capacité » dans le sens de quantité d’énergie, en joules, produite par ce métabolisme). De plus, les fibres rapides contiennent davantage d’enzymes ATPase que les fibres lentes. L’activité ATPasique des fibres rapides serait à l’origine d’une contraction musculaire plus importante grâce à une vitesse de constitution et de rupture des ponts d’union plus rapide. Le nombre supérieur de myofibrilles signifie que la cellule contient beaucoup de ponts d’union d’acto-myosine et peut alors développer plus de force par rapport aux fibres lentes. En fait, la quantité de force générée par une fibre musculaire est due au nombre de ponts d’union d’actomyosine qui entrent en contact à chaque instant. 2° Les fibres à contraction lente Elles sont également appelées fibres lentes oxydatives (Slow Oxydative : SO, ou fibres de type I). Elles contiennent un grand nombre de mitochondries et sont entourées de davantage de « capillaires » (ramification des artères et des veines) que les autres types de fibres. De plus, les fibres à contraction lente contiennent un pigment rouge qui est la « myoglobine », protéine musculaire sur laquelle se fixe l’oxygène. La myoglobine est de structure similaire à celle de l’hémoglobine sanguine, dans le sens où elle se lie à l’oxygène, mais elle peut aussi agir, comme navette pour l’oxygène entre la membrane cellulaire et les mitochondries. La concentration élevée de myoglobine, le grand nombre de capillaires et de mitochondries favorisent l’apport de l’oxygène (par la myoglobine et les capillaires) et son utilisation (par les mitochondries dans lesquelles se déroulent le cycle de Krebs et la chaîne respiratoire). Cette grande capacité à métaboliser l’ATP par l’oxygène, confère à la fibre musculaire de type lent, une résistance à la fatigue. 3° Les fibres intermédiaires La dernière catégorie de fibres est celle de type « intermédiaire ». Ces fibres sont également appelées « rapides glycolytiques et oxydatives » (Fast Oxydative Glycolytic : FOG, selon l’abréviation anglaise, consacrée dans la littérature scientifique) ou encore les fibres IIa. Ainsi que le suggère cette dénomination, ces fibres ont des caractéristiques biochimiques et de résistance à la fatigue à mi-chemin entre les fibres lentes et rapides.

Théorie de la contraction musculaire

Chapitre 2

Encadré 4 Comment sont typées les fibres musculaires ? Le pourcentage relatif des différents types de fibres contenues dans un muscle en particulier peut être défini en prélevant un échantillon (une « carotte ») de ce muscle. Ce prélèvement s’appelle une biopsie musculaire et va laisser l’impression d’une « béquille » due à un coup de genou malencontreux en football ou en rugby, par exemple. La technique la plus couramment utilisée est celle de l’analyse du type d’enzyme ATPase contenue dans la cellule musculaire. Cette technique applique un colorant chimique qui va foncer les cellules musculaires qui contiennent beaucoup d’ATPase trouvée dans les fibres lentes. Par cette technique, les fibres lentes deviennent noires, tandis que les fibres intermédiaires restent claires. Les fibres rapides ont une coloration ni claire ni sombre, mais plutôt grise ou légèrement ombrée. Ainsi, cette technique fournit un moyen fiable de déterminer les trois types de fibres en même temps. Un moyen de déterminer la typologie d’une fibre musculaire est d’identifier le type de myosine appelé « les isoformes » de la myosine. En effet, il en existe plusieurs dans le muscle squelettique selon la typologie de la fibre (Pette et Staron, 1990). Les différences fonctionnelles existant entre ces isoformes de la myosine expliquent la différence de vitesse de raccourcissement des diverses fibres musculaires (Billeter et Hoppeler, 1992).

Conceptuellement, les fibres intermédiaires sont souvent considérées comme étant un « mélange » des caractéristiques des fibres lentes et rapides. Cependant, il apparaît que la fibre intermédiaire est un état transitoire entre fibres lentes et rapides en réponse à une nouvelle charge d’exercice (dans une phase dite d’adaptation). Les fibres intermédiaires recouvrent davantage la notion de continuum (continuité) entre les deux types de fibres lentes et rapides, étant donné la difficulté à opérer une classification stricte entre ces deux catégories.

1.3.2 Recrutement des fibres et intensité de l’exercice (tableau 9) On sait que la vitesse de conduction de l’influx nerveux parcourant une unité motrice, c’est-à-dire le motoneurone et les fibres musculaires correspondantes, innervant une fibre de type I (fibre lente), est plus lente (60 mètres/seconde) que celle parcourant une fibre de type IIb (fibre à contraction rapide avec 80 mètres/seconde) (Pette, 1980). En effet, c’est le motoneurone qui détermine finalement la caractéristique de la fibre musculaire.

Par exemple, l’isoforme de la myosine trouvée dans la fibre rapide a une activité ATPase plus élevée ; ceci favorise la cassure rapide de l’ATP et fournit alors l’énergie nécessaire pour assurer une vitesse de contraction rapide, au contraire des isoformes de la myosine caractérisant les fibres lentes. L’activité ATPasique de l’isoforme de la myosine des fibres intermédiaires se situe entre les activités des fibres rapides et lentes. Le lecteur qui serait intéressé par les différentes isoformes de la myosine peuvent se reporter à l’article de Pette et Staron (1990). Un des problèmes de la typologie des fibres musculaires chez l’humain est qu’elle n’est généralement effectuée que sur un seul groupe musculaire, non représentatif de l’ensemble du corps humain. De plus, les fibres forment des couches à l’intérieur du muscle, c’est pourquoi l’analyse d’une ou plusieurs d’entre elles n’est pas représentative de l’ensemble du muscle étudié. (Armstrong et al., 1983). Les analyses sont généralement faites sur le muscle vaste externe (face antérieure de la cuisse) dont on sait qu’il est mixte chez un sédentaire. Cela va permettre de faire un lien entre la typologie musculaire, le type de sport pratiqué et les performances réalisées par le sportif.

Lorsqu’on intervertit expérimentalement les motoneurones (innervation croisée), une fibre lente, alors commandée par un motoneurone rapide, va devenir une fibre à contraction rapide. Ses caractéristiques sont alors inversées avec moins de mitochondries, moins de capillaires entourant chaque fibre, moins de myoglobine, mais davantage de protéines contractiles (actine, moysine). C’est ainsi que toutes les fibres musculaires innervées par le même motoneurone ont la même typologie. Notons que le nombre de fibres musculaires par motoneurone va conditionner le degré de finesse et de précision d’un mouvement. On trouve, par exemple, cinq fibres musculaires par motoneurone dans les muscles oculaires externes contre mille ou plus dans les muscles temporaux. Les fibres musculaires d’une seule unité motrice peuvent être réparties sur tout l’ensemble du muscle. Pour les innerver, un motoneurone se scinde en de nombreuses collatérales. On distingue, tout comme pour les fibres musculaires, des unités motrices (motoneurone + fibres musculaires qu’il innerve) à contraction rapide et les unités motrices à contraction lente. Pour savoir si l’on a affaire à une

81

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

Tableau 9

Fibres à contraction lente (type I)

Fibres à contraction intermédiaire (type IIa)

Fibres à contraction rapide (type IIb)

Diamètre

petit

intermédiaire

grand

Épaisseur de la ligne Z

épaisse

intermédiaire

étroite

Contenu en glycogène

modéré

modéré à élevé

modéré à élevé

Résistance à la fatigue

élevée

intermédiaire

faible

Temps de contraction

< 30 ms

30-100 ms

100 ms et plus

Tétanos parfait

20 par seconde

50 par seconde

100 par seconde

Nombre de capillaires par fibre

beaucoup

beaucoup

peu

Contenu en myoglobine

élevé

élevé

faible

Rapidité de la contraction

lente

rapide

rapide

Activité ATPasique de la myofibrille

basse

élevée

élevée

Activité des enzymes glycogénolytiques

basse

élevée

élevée

Activité des enzymes miochondriales

élevée

basse

basse

Système énergétique prédominant

aérobie

combinaison

anaérobie

Caractéristiques

Les caractéristiques des types de fibres musculaires chez l’homme

unité motrice du premier ou du deuxième type, on observe l’origine de son motoneurone (notamment pour ce qui concerne la fréquence de ses impulsions). Les unités motrices à contraction lente sont plus sensibles au manque d’oxygène, puisque elles ont un métabolisme oxydatif plus intense. Tableau 10 La composition typique des fibres musculaires chez des athlètes élites de différentes spécialités, dans le muscle vaste externe (muscle quadriceps) qui est mixte.

Quoi qu’il en soit, il est conseillé de prélever plusieurs échantillons de muscle pour pouvoir cerner la typologie musculaire d’un sportif. On peut également étudier les propriétés du muscle par la résonance magnétique nucléaire (RMN) (encadré 5) et constater que la réussite dans une discipline sportive correspond à une typologie musculaire assez marquée.

Sports

% Fibres contraction lente (type I)

% Fibres contraction rapide (type IIb)

Coureurs de longue distance (> 5 000 m)

60-90

10-40

Sprinters (course à pied : 100-200 m)

25-45

55-75

Haltérophiles

45-55

45-55

Lanceurs de poids

25-40

60-75

Non sportifs

47-53

47-53

82

1.3.3 Typologie des fibres musculaires et performance sportive Des études descriptives ont montré plusieurs points intéressants concernant la relation entre la performance sportive et la typologie musculaire. Tout d’abord, il n’y pas de différence de répartition des fibres musculaires entre les sexes pour une même discipline sportive. Deuxièmement, le nonsportif (homme ou femme) possède une mixité de types de fibres musculaires. Enfin, les sprinters, lanceurs et sauteurs possèdent une majorité de fibres rapides alors que les coureurs de longues distances (5 000 m au marathon) ont une majorité de fibres lentes (Costill, 1976) (tableau 10). Ces données sont en rapport avec les caractéristiques des différentes fibres musculaires (tableau 9). Les coureurs de demi-fond court (800 m1 500 m) possèdent une mixité dans leur typologie musculaire, à l’image des sédentaires, mais avec une masse musculaire qui représente un plus grand pourcentage du poids de corps total (ne serait-ce que parce que la masse grasse est deux fois moins importante en valeur relative : 8-12 % du poids total contre 16-25 % chez un sédentaire non obèse).

Théorie de la contraction musculaire

Chapitre 2

Encadré 5 Les concentrations en composés phosphorés des types de fibres musculaires et la mesure de la concentration par résonance magnétique nucléaire (RMN) Il est bien établi chez les mammifères (dont l’humain) que les muscles squelettiques diffèrent dans leur contenu en phosphates riches en énergie. À la fois les analyses chimiques et la résonance magnétique nucléaire (RMN) l’ont démontré. La RMN est une technique « non invasive » c’est-à-dire ne nécessitant pas d’intervention à l’intérieur du muscle, à l’instar des biopsies musculaires, mais seulement le placement du membre actif dans un aimant géant. La RMN a été découverte en 1946 simultanément par Edward Purcell à l’Université de Harvard et par Felix Bloch à l’Université de Stanford. Ces deux chercheurs obtinrent ensemble le prix Nobel de physique en 1952. Ces physiciens ont découvert comment utiliser l’énergie électromagnétique pour interagir sélectivement avec le champ magnétique de noyaux atomiques spécifiques. Par l’application à l’être vivant, il est possible de mesurer les variations de concentration des composés phosphorés, les premières études relatives à l’homme ayant été réalisées notamment par Chance et al., 1980. Le phénomène de résonance magnétique nucléaire peut être induit dans un noyau atomique qui possède un nombre impair de protons ou de neutrons. En général, la RMN biologique analyse les composants contenant soit du H1, C13 soit du P31 (respectivement contenus dans 99,99, 1,10 et 100 % des matières naturelles). Les fondements physiques de cette technique sont décrits dans un article de Sapega et al., 1987, dans la perspective de l’application à l’étude des modifications des composés phosphorés chez l’homme. La plupart des physiologistes, comme Chance, utilisent le ratio entre les phosphates à haute et basse énergie c’est-àdire, PCr/Pi ou PCr/(PCr + Pi), comme indice de l’état bioénergétique de la cellule. La RMN peut également apprécier l’importance de la glycolyse mise en jeu, par la mesure du pH intracellulaire. La différence de fréquence de résonance magnétique entre le phosphate inorganique (Pi) intracellulaire et la phosphocréatine (PCr) sur le spectre de RMN du

Cela ne signifie pas que la typologie musculaire soit suffisante pour être un sportif de haut niveau, puisque la performance sportive dépend, nous l’avons évoqué, de l’interaction des facteurs psychologiques, bioénergétiques, biomécaniques, neurophysiologiques, cardio-pulmonaires (Wilmore et Costill, 1988). Malgré ce déterminisme de la typologie musculaire, peut-on espérer des modifications par l’entraînement ?

phosphore 31 est pH dépendante, cette relation étant utilisée pour déterminer le pH cellulaire interne. Il est également possible de suivre la resynthèse de phosphocréatine (PCr) à la récupération, après un exercice de sprint par exemple. C’est par cette technique qu’il a été possible de mieux discerner la différence entre fibres lentes et rapides, concernant la concentration et l’utilisation de la phosphocréatine et de la glycolyse (Meyer et al. 1990). Ces derniers ont montré que le biceps de chat au repos avait un rapport PCr/Pi plus grand (11,1) que dans le muscle soléaire, muscle postural composé majoritairement de fibres lentes (1,8). Par la suite, ils ont montré que les coureurs de fond (> 5000 m) avaient une capacité de resynthèse de leur phosphocréatine plus rapide après 50 % de l’épuisement des réserves par un mouvement de flexion-extension : 64,8 ± 8,6 mmol . min-1 . kg-1 ; 41,4 ± 11 mmol . min-1 . kg-1 pour les coureurs de demi-fond (800 m1 500 m) ; 32,0 ± 7,0 mmol . min-1 . kg-1 pour les sprinters. Le groupe contrôle composé de non sportifs avait sensiblement la même valeur que les coureurs de 400 m (38,6 ± 10 mmol . min-1 . kg-1) laissant supposer pour les deux groupes une mixité de leur typologie musculaire. Les auteurs concluent sur le fait que cette capacité de resynthèse de la phosphocréatine plus rapide chez les coureurs de fond est due à une plus grande concentration de fibres lentes. Chez un même sujet, le soléaire riche en fibres lentes a un rapport Pi/PCr supérieur à celui des jumeaux : 0,15 ± 0,01 contre 0,12 ± 0,01 et 0,10 respectivement pour le soléaire, le jumeau interne et externe. Cette proportion dénote des réserves initiales de phosphocréatine légèrement moins élevées dans les fibres lentes que dans les fibres rapides confirmant les résultats trouvés avec les techniques de coloration (Vandenborne et al., 1995). Cette différence est moindre que chez les animaux, faisant l’objet de la plupart des études précédentes.

1.3.4 Effets de l’entraînement sur la typologie musculaire Peut-on transformer une fibre rapide en fibre lente ? Les innervations croisées expérimentales le permettent mais – à moins d’entrevoir le scénario catastrophe d’un film de science-fiction – il n’est pas possible de transformer un marathonien en sprinter par un changement de ses motoneurones !

83

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

Encadré 6 Le muscle est un tissu plastique Le muscle squelettique est un tissu très plastique. En effet, sa composition est modulable en réponse aux modifications de l’activité physique (Powers et al., 1990). La réponse du muscle à l’exercice est très spécifique selon l’exercice réalisé (intensité-durée, continudiscontinu, isométrique, concentrique, excentrique…). Il est bien connu, par exemple, que les exercices de force (haltérophilie) développent la masse musculaire à la fois par la taille et la force de chaque fibre (Tesch, 1992). Cette augmentation du volume et du poids des muscles est d’abord due à l’épaississement (augmentation de la section) de la fibre musculaire (« hypertrophie »). Certains chercheurs ont apporté des éléments confortant l’hypothèse d’une augmentation du nombre de fibres musculaires (hyperplasie) (Sjoström et al., 1991). Cet entraînement est à la base de mouvements d’haltérophilie (épaulé-jeté ; squats et demi-squats, arrachés, …), composé de 1 à 5 répétitions maximales (1 à 5 RM, c’est-à-dire la charge qu’il est possible de mobiliser au maximum 1 ou 5 fois seulement, lourdes par opposition à des 12-20 RM, enchaînement plus rapide avec des

charges légères, mobilisable 12 à 20 fois d’affilée). Ce type d’entraînement à base de charges lourdes mobilisées un faible nombre de fois n’entraîne pas une augmentation des capacités oxydatives des groupes musculaires actifs, au contraire des sports de longue durée qui ne développent ni la taille ni la force des fibres musculaire, mais leur capacité oxydative. Le vieillissement n’enlève en rien la possibilité d’augmenter l’endurance ou la force des fibres musculaires. Bien que la force absolue ainsi que la consommation d’oxygène diminuent avec l’âge (surtout après 40 ans), il n’en demeure pas moins que, si une personne décide à 45 ans ou 70 ans de débuter une activité sportive, elle aura une transformation de sa masse musculaire (et graisseuse) (Powers et al., 1991). En revanche, le passage de l’activité à l’inactivité entraîne la perte de force et d’endurance des fibres musculaires à quelque âge que ce soit. La baisse extrêmement rapide des muscles d’une jambe cassée et plâtrée n’est qu’un exemple pris dans la vie courante et qui démontre la « plasticité » du tissu musculaire.

Plus sérieusement, les chercheurs restent divisés sur la question des modifications possibles par l’entraînement physique, même soutenu. Plusieurs études rapportent en effet que l’entraînement en endurance ne transforme pas les fibres rapides en fibres lentes (Gollnick, 1985 ; Hoppeler, 1986). Cependant, des recherches plus récentes par de nouvelles techniques permettant d’étudier les différentes isoformes de la myosine, ont montré que la stimulation électrique chronique du muscle, associée à un entraînement intense, modifiait la typologie musculaire (Pette et Staron, 1990). Ces nouvelles techniques d’analyse des fibres musculaires mettent en évidence que le muscle est « plastique », se modifiant par l’augmentation de l’activité physique (encadré 6). Nous rediscuterons en détail les effets de l’entraînement sur le muscle dans le dernier chapitre concernant les méthodes d’entraînement et leurs effets sur les fonctions physiologiques, puisque tel est l’objectif de cet ouvrage : la compréhension des possibles modifications selon les stimuli choisis.

84

1.4

Les limites musculo-tendineuses du record de vitesse

Il y a de nombreux facteurs anatomiques qui pourraient limiter la vitesse maximale de course chez les mammifères (Blanco et Gambini 2007). On a évoqué la force des os, des tendons, de la puissance métabolique anaérobie maximale. Deux chercheurs italiens ont proposé un modèle mettant en évidence que la force des tendons était la plus pertinente avec en cofacteur de la masse musculaire des extenseurs de la jambe et de la cuisse, et de ce fait leur longueur et le coût énergétique de la course. Cependant, il y a une contradiction entre le fait d’avoir de longs segments et un faible coût énergétique. En effet, un long tibia et fémur implique un bras de levier plus important, qui induit un coût mécanique (énergie cinétique de rotation) supérieur. Cela vaut aussi bien pour les sprinters que les demi-fondeurs. La logique est donc la même qu’elle que soit la course : le renforcement musculaire des extenseurs est fondamental pour atteindre une très haute vitesse de course (40 km.h-1) mais également pour maintenir la raideur du ressort musculaire (éléments contractiles et tendons) afin de résister à l’écrasement au sol au bout de 2 heures de course et continuer à rebondir. Il a été démontré que les mara-

Théorie de la contraction musculaire

thoniens rapides (2 h 20 min) par rapport aux lents (5 h) augmentaient moins leur temps d’appui au sol et maintenaient davantage leur flexion de genou que les plus lents qui « s’écrasent davantage » et restaient collés au sol entre le 8e et le 40e kilomètres (Chan-Roper et al, 2012). Il suffit d’observer la foulée de Haile Gebresselassié pour constater qu’elle est dynamique sur ses appuis. Les jeux de courses auxquels s’adonnent les coureurs kenyans, éthiopiens ainsi que leur habitude d’entraînement à vitesse et terrain variables sont des facteurs positifs d’amélioration de ces facteurs. Rappelons en effet, que l’être humain augmente sa vitesse de course par la longueur de sa foulée qui nécessite de la force, tout en maintenant sa fréquence de foulée jusqu’à 20 km.h-1 (une foulée = 2 pas) (soit pour une cadence de 45 foulées soit 90 pas, la fréquence de foulées est égale à 90/60 = 1,5 Hz), puis l’augmente par sa fréquence, le challenge étant, au-delà de 20 km.h-1, de maintenir son amplitude tout en augmentant son enchainement, sa cadence. Toutefois, il a été démontré que parmi l’élite du sprint, certains étaient dépendants de leur fréquence et d’autres de leur amplitude de foulées pour atteindre de très hautes vitesses (Salo et al., 2011). Par conséquent, il importe de maintenir chez les uns un entraînement de leur système neuronal sur des courtes distances et des départs répétés jusqu’à 20 m et chez les autres, un maintien de la force musculaire audelà des 60 m fatidiques. La fatigue neuronale au-delà de 60 m reste encore à étudier. La prédiction de la vitesse maximale de course d’un animal de 95 kg (comme Usain Bolt, l’Homme le plus rapide) par les meilleurs modèles biomécaniques est de 23 m.s-2 (80 km.h-1 pour les animaux à quatre pattes). Chez l’Homme, les meilleurs sprinters ont un très haut pourcentage de fibres rapides (75 %) comparé à la population moyenne (50 % de fibres rapides). Ce très haut pourcentage de fibres rapides peut générer une propulsion à une fréquence de foulée supérieure à 2,5 Hz ce qui est encore supérieur aux valeurs observées. Nous ne savons pas si l’augmentation de la force musculaire peut augmenter cette fréquence de propulsion limite (Beneke et Taylor, 2010). Actuellement (avril 2012), le recordman du monde, le jamaïcain Usain Bolt (1,96 m et 96 kg) est capable de courir le 100 m avec seulement 41 pas alors que ses concurrents le faisait en 45 soit en une foulée de longueur inférieure de 10 %. Par conséquent, il a pu gagner avec une fréquence de foulées de 2,14 contre 2,27 Hz chez ses concurrents. Cela lui permet de ne mobiliser que 75 % de ses fibres rapides contre 90 % chez ses concurrents. Or, les fibres rapides consomment des flux énormes d’énergie ce qui par conséquent va abais-

Chapitre 2

ser le stock de créatine phosphate des concurrents qui ne pourront maintenir leur vitesse maximale au-delà des 60 m. En outre, Usain Bolt, qui n’a commencé la course qu’à l’âge de 13 ans (détecté dans une course scolaire à 12 ans), pratiquait le football et le cricket et avait développé également des qualités de capacité anaérobie. Ce n’est qu’à l’âge de 15 ans qu’il a emporté ses premiers succès nationaux et très vite internationaux en établissant un record personnel avec 48 secondes 28 sur 400 m et 21 secondes 81 sur le 200. m. Nous n’avons pas de publications concernant le VO2max d’Usain Bolt mais il est probable qu’il soit supérieur à 65 ml.kg-1.min-1 avec une VMA de 18 km.h-1 afin que sa vitesse sur 100 m représente environ le double de sa vitesse maximale aérobie (données personnelles), et probablement plus (2,6 fois selon le rapport donné par Ward Smith (1999) pour des valeurs standards si on prend en compte le fait qu’audelà de 20 km.h-1, le coût énergétique de la course (en joules par mètre) augmente avec la résistance de l’air et le recrutement des fibres de type II (rapides) qui sont plus consommatrices d’énergie que les fibres de type I (lentes). Mais au-delà de la question de la quantité d’énergie, celle de la qualité de son apport à ces très hauts régimes de puissance (force x vitesse) de contraction musculaire, pour le maintien du rapport ATP/ADP par la navette de la phosphocréatine entre la mitochondrie et le sarcomère dans le cytosol (l’élément contractile du muscle, détaillé dans le chapitre II) est fondamentale. En effet, à ces prodigieuses vitesses de 40 km.h-1, l’énergie cinétique de rotation demeure un des facteurs essentiels du coût de la locomotion qui implique des flux énormes d’ATP à ces vitesses et force de contraction musculaire. Nous allons élucider la question de savoir s’il est possible de reconstituer sa phosphocréatine en courant et si oui, dans quelle condition.

1.5

La resynthèse de la phosphocréatine à l’effort

La conversion énergétique aérobie-anaérobie est au centre de la question de la resynthèse de la phosphocréatine pour le maintien des hautes vitesses de course en sprint, par exemple. En théorie, la resynthèse de l’énergie anaérobie qui a une dimension finie équivalent à l’énergie fournie par une minute d’exercice à . VO2max pour des profils énergétiques équilibrés aérobie/anaérobie (soit DMOA = 50 ml.kg-1 pour un . VO2max de 50 ml.kg-1.min-1) (voir chapitre VI page 208) est seulement possible pour des exercice réalisés à des vitesses ou puissances inférieures à la

85

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

vitesse critique soit en moyenne 80 % de VMA ou PMA (voir chapitre VI page 209). La consommation d’oxygène atteint en théorie son maximum en 23 secondes alors que le métabolisme de la phosphocréatine (métabolisme anaérobie alactique) l’atteint en 2 à .3 secondes (avec flux d’ATP 3 fois supérieur à celui de VO2max ) et le métabolisme anaérobie lactique (à partir de la glycolyse non aérobie) en 10 secondes (production de flux d’ATP 1,5 à 2 fois supérieur). Si on persiste dans la production d’un effort maximal, on va subir une « mort lente » une baisse hyperbolique de flux d’ATP. En sprint, eu égard au coût aérodynamique de la course et à celui de l’accélération des masses musculaires, il est sans doute préférable de ne pas chercher à ralentir mais de se relâcher afin de ne pas mobiliser toutes ses fibres rapides consommatrices d’ATP. Il n’est pas possible dans les limites temporelles d’un sprint de resynthètiser de la phosphocréatine. La phosphocréatine est le substrat majeur pour un sprint de 10 secondes (Bogdanis et al. 1996). De plus, il est LE contrôleur de l’augmentation du métabolisme aérobie, de la phosphorylation oxydative (figure 17a) dans les 20 premières secondes de la course et probablement au-delà dès que l’on court à des vitesses supérieures à la vitesse associée à . . VO2max soit vVO2max (Francescato et al., 2008). Cela sous-tend la régulation décrite dans notre modèle énergétique de la variation de vitesse sur un 800 m et 1 500 m (Billat et al., 2009 b) présenté précédemment. La stratégie est plutôt de gérer son épuisement par un relâchement après les 30 premiers mètres et par le travail d’un temps de réaction permettant une certaine avance sans mobilisation maximale de ses fibres rapides dans la première. phase de course. L’autre stratégie est d’augmenter le VO2max du coureur ainsi que sa capacité anaérobie afin que même s’il ne mobilise que 70 % . de son VO2max dans les moins de 10 secondes de course (étant donné que la mobilisation à 100 % nécessite 20 secondes pour un effort de sprint soit atteinte dans un 200 m), ces 70. % représenteront une valeur absolue supérieure si le VO2max est élevé. À l’entraînement, après un sprint de 30 secondes, la resynthèse de l’ATP se fait de façon exponentielle croissante avec une réplétion à 50 % en 20 secondes et à 100 % en 100 secondes (Nevill et al. 1997). Lors d’un second sprint de 30 secondes enchainé après 4 minutes de récupération passive, le métabolisme aérobie contriburait pour 49 % à l’énergie requise.

. Au cours d’un exercice sollicitant 100 et 120 % de VO2max comme un 1 500 m, il est peut être possible de resynthétiser la phosphocréatine par le jeu de variation de vitesse qui permettrait de diminuer le recrutement des fibres musculaires de type II qui appa86

rait au-delà de la puissance critique (80 % de PMA) (Billat et al., 2009 b). En effet, nous avons montré en diminuant la puissance de pédalage tout en maintenant . le sujet à son VO2max que la puissance pouvait être diminuée jusqu’au seuil lactique (légèrement inférieure à leur puissance critique) soit 75 % de PMA pour le groupe de sujets étudiés (Billat et al., 2012 sous presse). Il est probablement .possible de resynthétiser la phosphocréatine alors que VO2max est soutenu et que le recrutement des fibres de type II est probablement réduit. Ces travaux doivent être confirmés par des mesures électromyographiques chez l’homme et des biopsies chez la souris. Pour cela, il importe d’étudier sur le modèle murin nos hypothèses consécutives aux expérimentations humaines non invasives. Cela est possible dans les nouveaux laboratoires qui ont une démarche intégrative homme-animal, et une approche de physiologie vers le moléculaire (Hoydal et al., 2007). L’activation de la glycolyse s’enclenche tout comme la consommation d’oxygène, immédiatement dès le début de l’exercice contrôlé par la baisse immédiate de la phosphocréatine. Il faut donc doser son départ pour stimuler efficacement ces enclenchements et atteindre rapidement la glycolyse à son. taux de production énergétique maximal ainsi que VO2max . Le glycogène est également un substrat absolument nécessaire pour la contraction musculaire, et ce, quelque soit le niveau de puissance global de l’exercice. Afin de propulser son corps, il faut déployer une accélération supérieure à 1 G et supporter 3 G à l’atterrissage du pied. Cela implique une bouffée de contractions musculaires qui utilisent un grand flux glycogénique (Shulman et Rothman, 2001).

1.6

Le contrôle énergétique par le glycogène

Nous savons que le haut niveau de glycogène intramusculaire augmente l’endurance (définie comme la capacité à soutenir une fraction, un pourcentage élevé de PMA), alors que leur déplétion la diminue. Une présence suffisante de glucose ne se substitue pas à la nécessité des taux de glycogène intramusculaire (300 g dans les muscles et 100 g dans le foie). Cette grande concentration de glycogène intramusculaire marque la supériorité des muscles équins et de ceux des lévriers par rapport à l’être humain. Chez le cheval, un excès de dégradation du glycogène, dont le stockage intramusculaire a été trop important pendant une phase de repos, induisant une acidose qui participe au fameux syndrome du « coup

Applications : fatigue musculaire et adaptations à l’exercice

de sang ». Chez l’Homme, pas de « coup de sang » mais un « coup de pompe » en raison de la nécessité de disposer d’un taux de glycogène important même pour courir à basse vitesse sous peine de devoir marcher. En effet, le modèle du shunt glycogénique est basé sur le constat expérimental que pour un exercice sollicitant 20 % de la force maximale volontaire (soit environ 100 % de PMA), on observait simultanément une déplétion et une resynthèse du glycogène pendant la phase d’état stable de l’exercice. Ainsi, il est probable lors d’un exercice à 100 % de PMA (entre 80 . et 100 % de VO2max ), si le sportif ne maintient pas . son VO2max notamment en raison d’une baisse de la saturation artérielle de l’hémoglobine en oxygène . (SaO2 qui est un facteur constitutif de VO2max , voir chapitre IV pages 144-145), que le glycogène est à la fois dépléti et produit selon un flux régulé par les enzymes phosphorylase et glycogensyntéthase, contrôlant respectivement la dégradation et la resynthèse du glycogène intramusculaire. Pendant la contraction, le glycogène est dépléti alors que pendant le relâchement il est resynthétisé à partir de l’oxydation de l’acide lactique. C’est pourquoi, pour le sprinter, il est fondamental pour épargner la phos. phocréatine, d’augmenter le VO2 très rapidement . jusqu’au VO2max afin de provoquer cette resynthèse de glycogène préservant les réserves de phosphocréatine. Le sprinter et le demi-fondeur doivent avoir les . plus hautes valeurs de VO2max compatibles avec les fibres rapides. La clé réside dans le développement de la force des fibres de ce type Ià (ces fibres à contraction lente ont une réponse dynamique à l’étirement musculaire puis une réponse statique pendant tout le temps d’étirement) par des exercices de renforcement musculaires sur plusieurs secondes mobilisant de 1 à 3 G. Monter et descendre des escaliers avec ou non un gilet lesté, est alors tout à fait indiqué. Ceci se produit pour chaque contraction musculaire quelque soit l’intensité de la course. Il est donc possible d’épargner la phosphocréatine par cette navette d’utilisation et de production du glycogène intramusculaire. Cela met en perspective l’effet de la variation de vitesse à l’échelle globale de l’organisme. La réplétion est alors déterminante et permet de prolonger les répétitions d’un interval training réalisé à des puissances supérieures à la puissance critique ainsi que nous le proposons par un modèle de puissance critique intermittente depuis les années 2000 (voir page 273).

2.

Applications : fatigue musculaire et adaptations à l’exercice

2.1

La plasticité musculaire

Chapitre 2

Deux aspects fondamentaux de cette question de l’adaptation du muscle à l’entraînement coexistent : savoir si le muscle augmente la taille de ses fibres (« hypertrophie ») ou s’il augmente le nombre de ses fibres (« hyperplasie »). Puis nous envisagerons les adaptations histochimiques et biochimiques du muscle à l’exercice, à court et à long terme.

2.1.1 Hypertrophie ou hyperplasie Le muscle squelettique est un tissu dynamique qui a une très forte capacité d’adaptation à la fois anatomique et physiologique à une grande variété de demandes fonctionnelles (notion de « plasticité musculaire »). Il est en effet connu que, lorsque les muscles adultes doivent répondre régulièrement à une intensité d’exercice qui dépasse 60-70 % de leur force maximale, un phénomène d’adaptation chronique apparaît qui a pour effet une augmentation de la force et de la taille du muscle entier (sa section transversale augmentant). Les deux aspects de cette adaptation (force et diamètre) sont effectivement corrélés. Théoriquement, une augmentation de la taille musculaire peut être due à une augmentation du nombre de fibres et/ou des tissus conjonctifs interstitiels séparant chaque fibre musculaire (MacDougall, 1992). En effet, de nombreux auteurs ont montré que l’accroissement de la taille des fibres musculaires, apparaissait sous l’effet d’un entraînement de force (MacDougall et al., 1979 ; McDonagh et Davis, 1984 ; Tesch, 1987). Bien que nous sachions que l’augmentation du nombre de fibres musculaires est la principale responsable du développement musculaire jusqu’à la première enfance (3 ans) (Goldspink, 1974), la possibilité que ce processus pourrait également intervenir lors d’un entraînement de force à l’âge adulte est sujette à controverse (McDougall, 1992). En effet, peu de recherches se sont intéressées aux effets de l’entraînement de force sur les tissus conjonctifs séparant chaque fibre musculaire. Mais, ces tissus ne représentant qu’une petite proportion du volume musculaire total, leur contribution à l’augmentation de celui-ci ne peut être que modeste. Plusieurs protocoles expérimentaux ont été utilisés pour stimuler une hypertrophie muscu-

87

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

laire, notamment sur des modèles animaux auxquels on a fait subir des ablations, ténotomie (section d’un tendon) et autre dénervation des muscles (Gollnick, 1981). Des étirements passifs répétitifs ont été également appliqués à des fibres musculaires isolées ou à des muscles entiers (Alway, 1989b). L’entraînement de force à base d’exercices dit « de musculation » (de 3 à 30 RM) a également été utilisé pour provoquer l’hypertrophie musculaire. Nous allons donc considérer ce qui concerne plus particulièrement l’entraîneur, le sportif et l’éducateur physique, à savoir les effets d’un entraînement de la force. 1° Concernant la surface des fibres musculaires Chez le sujet adulte, un entraînement de la force très soutenu entraîne une augmentation de la surface de section transversale à la fois des muscles de types I (lent) et II (rapide). L’importance de cette augmentation varie considérablement et dépend du type d’entraînement en interaction avec le potentiel physique du sujet et de son entraînement préalable à celui imposé par l’expérimentation. Toutes les études concernant les effets de l’entraînement se heurtent à cette question du bruitage des effets de l’entraînement contrôlé. Des augmentations de la surfaces des fibres de types lent et rapide de l’ordre de 30 % ont été observées après un entraînement de force pratiqué 2 à 3 fois par semaine pendant 2 à 6 mois (MacDougall, 1992). Ces constatations concernent tout particulièrement les sujets qui n’avaient pas d’entraînement préalable, ceci à tout âge de la vie de 9 à 70 ans selon les études. Les augmentations de la surface musculaire dues à l’entraînement de force accroissent donc de façon équivalente la surface des fibres lentes et rapides, avec, pour certaines expérimentations, une augmentation plus marquée pour les fibres rapides (Thorstensson, 1976 ; MacDougall et al., 1979 ; Tesch et al., 1985). Cette augmentation de la surface de l’ensemble des types de fibres musculaires est conforme à la logique du recrutement selon la loi de la taille. En effet, nous avons vu que les fibres lentes, dont les unités motrices sont plus petites, étaient recrutées d’abord quelle que soit la force de l’exercice, les fibres rapides n’intervenant qu’à partir d’environ 50 % de la force maximale. C’est pourquoi les entraînements expérimentaux de force s’adressent généralement à l’ensemble des types de fibres musculaires. L’hypertrophie plus marquée des fibres rapides, observée dans certaines études précitées, signifie que ces unités

88

motrices sont relativement plus sollicitées que lors des activités quotidiennes habituelles. 2° Conversion des types de fibres avec l’entraînement Le fait que la proportion de fibres I et II ne change pas sous l’effet d’un entraînement de force va dans le sens de l’absence « d’interconversion » (de transformation) des types de fibres entre elles. En effet, après 8 ans d’entraînement, des bodybuilders ont conservé leurs proportions de fibres lentes et rapides dans le muscle biceps brachial. Cette proportion équilibrée (50 % de fibres lentes et rapides) était similaire à celle de sédentaires de même âge, suivis dans la même période (MacDougall et al., 1982, 1984). 3° Modification des tissus conjonctifs et des capillaires La proportion de tissu interstitiel conjonctif (endomysium, périmysium, épimysium) séparant les fibres musculaires représente environ 13 % du volume musculaire total. C’est pourquoi une augmentation du volume musculaire s’accompagne de celle des tissus conjonctifs. Au contraire de l’entraînement en endurance, l’entraînement de la force n’entraîne pas d’augmentation de la densité capillaire. En effet, le nombre de capillaires par mm2 diminue après un entraînement de force ce qui peut s’expliquer par une augmentation de la surface de la fibre musculaire, ayant un effet diluant sur la densité capillaire (Tesch et al., 1984). Chez les bodybuilders qui réalisent des exercices avec des charges légères, Tesch et al. (1986) ont observé une augmentation de la densité capillaire du même ordre que celle des sujets s’étant entraînés en endurance. 4° Modification de l’ultrastructure du muscle L’augmentation de la surface des fibres est liée à celle de la surface et du nombre des myofibrilles. Cette augmentation proportionnelle explique que la densité myofibrillaire du muscle (nombre de myofibrilles par unité de surface myofibrillaire) ne soit pas modifiée (MacDougall et al., 1984). Avec l’entraînement, des myofilaments d’actine et de myosine s’ajoutent à la périphérie des myofibrilles, l’élargissant sans modifier la densité filamentaire musculaire ou l’espace séparant l’actine et la myosine d’avec ses ponts d’union. Puisque la surface totale des fibres musculaires augmente de façon aussi importante que ne le fait la surface des myofibrilles, la différence serait donc due à l’augmentation du nombre de myofibrilles (MacDougall et al., 1984). Il a été observé que, dans la phase de

Applications : fatigue musculaire et adaptations à l’exercice

croissance postnatale, l’animal augmentait le nombre de myofibrilles par une séparation de la fibre musculaire dans sa longueur (Goldspink, 1974). C’est là un processus mécanique provenant de la rupture par la force de contraction plus importante des tissus conjonctifs au niveau de la strie Z (Goldspink, 1974). La densité mitochondriale diminue après un entraînement de force, en raison de l’augmentation de la surface des myofilaments (Lüthi et al., 1986). À l’inverse, le volume du réticulum sarcoplasmique et du tubule transverse augmente en proportion de celui des myofilaments. Dès lors, la densité du réticulum sarcoplasmique et du tubule transverse reste identique au cours de l’accroissement du volume musculaire, préservant ainsi la possibilité de libérer du calcium pour permettre la constitution des ponts d’acto-myosine dans les meilleurs délais. Il en est de même pour les fibres musculaires lentes et rapides (Always et al., 1989 a). Le développement de la fibre musculaire lors du développement embryonnaire des muscles squelettiques des mammifères est fondé sur la « division mitotique » (la mitose étant le processus par lequel la cellule se divise de façon à obtenir deux cellules de contenu génétique identique). Ce processus conduit à la formation de millions de cellules mononuclées qui, en fusionnant, vont former des « myotubes » (fibres musculaires immatures) qui deviendront éventuellement des fibres musculaires à maturité. Ce processus continue jusqu’à la naissance et peut-être même quelques mois après. Puisque les noyaux des myotubes sont incapables d’opérer une division mitotique, il est généralement admis qu’à la naissance ou peu après, le nombre total de fibres musculaires est complètement établi (Mastaglia, 1981). Aussi, la croissance postnatale du volume musculaire est-elle due à l’augmentation de la surface et de la longueur des fibres musculaires, étirées par le squelette qui s’allonge. Le nombre de sarcomères en série et de myonuclei (noyaux des cellules musculaires) suit la croissance osseuse jusqu’à l’âge adulte. Ces noyaux seraient dérivés des cellules « satellites » (placées autour des fibres musculaires) qui seraient elles-mêmes dérivées d’une population de myoblastes (cellules embryonnaires) qui n’avaient pas fusionné pour former des myotubes. Plusieurs études ont rapporté une augmentation numérique des fibres musculaires pendant la phase de croissance néonatale chez des rats (MacDougall, 1992). Plusieurs mécanismes ont été proposés :

Chapitre 2

a) Une nouvelle formation de fibres à partir de myoblastes résiduels. b) Une séparation longitudinale des fibres musculaires à partir de fibres existantes c) Un allongement de fibres courtes qui n’auraient pas suivi complètement la croissance osseuse. d) La séparation et la croissance de fibres immatures incluses à la base des membranes des fibres musculaires à un âge plus avancé du développement (Mastaglia, 1981). Les deux derniers mécanismes ont été observés chez le rat et seraient retenus pour expliquer l’addition de fibres musculaires (hyperplasie) (Mastaglia, 1981). Est-ce le cas pour les muscles adultes ? Seulement 9 % d’augmentation du nombre de fibres musculaires ont été obtenus chez des chats adultes ayant suivi un entraînement de musculation (Gonyea, 1986) et 52 % dans les muscles dorsaux de cailles adultes auxquelles un poids avait été ajouté à une des ailes pendant 30 jours (Always et al., 1989b). La question de savoir s’il existe une hyperplasie chez l’homme suivant un entraînement de force reste très controversée. Il semblerait que des boldybuilders aient montré un nombre de fibres musculaires supérieur à celui de sujets non entraînés (Gonyea et al., 1986). Cette différence peut cependant être d’origine génétique et non le résultat de l’entraînement. En raison de la difficulté de compter précisément le nombre de fibres musculaires chez l’homme (pour des raisons éthiques évidentes) cette question de l’hyperplasie possible reste posée. Cependant, une augmentation du nombre de cellules satellites, ainsi qu’une prolifération des myotubes en développement, ont été observées après un entraînement à vélo chez l’homme (Appell et al., 1988). Ces résultats pourraient aller dans le sens d’une hyperplasie possible chez l’adulte entraîné. Ces cellules satellites pourraient être activées par les cellules endommagées par des forces de traction importantes, surtout dans le cas d’exercices excentriques (Friden et al., 1983). Il est difficile, dans ce cas, de faire la part des choses entre la régénération musculaire et une augmentation réelle du nombre de fibres musculaires (hyperplasie) (McDougall, 1992). En conclusion, il semblerait que l’augmentation du volume musculaire par l’entraînement de force soit due à l’augmentation des volumes de chaque fibre et du tissu conjonctif attenant.

89

Chapitre 2

LE

MUSCLE

:

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

2.1.2 Adaptations histochimiques et biochimiques du muscle à l’exercice, à court et à long terme Nous allons envisager les adaptations du muscle à l’entraînement en fonction du type d’exercice, à court et à long terme. 1° Concernant les adaptations à court terme aux exercices de force Les exercices de force sont toujours réalisés de façon intermittente, où une séquence d’actions musculaires concentriques et excentriques est répétée 2 à 6 fois pour de très lourdes charges et 10 à 12 fois (12 Répétitions maximales) pour les charges représentant 70 % de la charge maximale d’une seule répétition (1 RM) (tableau 11). Les périodes de récupération sont de 5 minutes pour les séries de 2 à 6 RM et de 2 minutes seulement entre les séries de 12 répétitions (12 RM). Un circuit d’entraînement de force (dit entraînement de « musculation » dans le langage sportif) est généralement composé d’une douzaine d’exercices différents pouvant s’adresser aux groupes musculaires agonistes et antagonistes d’un seul membre ou de plusieurs membres. Dans une séance d’entraînement, les bodybuilders travaillent un seul segment à la fois (bras, jambe, cuisse, tronc). La consommation d’oxygène mesurée lors d’exercices de squats ou à la presse, mobilisant des groupes musculaires importants, est de 50 à 60 % de la Tableau 11 Relation entre le nombre de répétitions possibles d’une charge (Répétitions maximales) et le pourcentage de la force à 1 RM.

90

Nombre maximal de répétitions

% de la charge maximale soulevée une seule fois

1 RM

100

2 RM

94

3 RM

91

4 RM

88

5 RM

86

6 RM

83

7 RM

81

8 RM

79

9 RM

77

10 RM

74

11 RM

71

12 RM

68

13 RM

65

14 RM

63

15 RM

60

.

consommation maximale d’oxygène (VO2max ) quel que soit le niveau d’entraînement (les charges étant différentes en fonction du niveau d’entraînement) (Tesch, 1987 ; Tesch et al., 1990). Dans le cas d’exercices de bras comme les développés-couchés, on peut estimer la . consommation d’oxygène à seulement 30-40 % de VO2max . En dépit de cette faible consommation d’oxygène, la majeure partie des ressources énergétiques est utilisée pour faire face à une charge importante. En effet, il est plausible qu’un exercice de force puisse être réalisé avec l’ATP disponible et les réserves de créatine-phosphate (Keul et al., 1978) à condition que le nombre de répétitions ne dépasse pas 5 à 6 et que les délais de récupération soient suffisamment longs, au moins 3 minutes, eu égard au demi-temps de récupération de la phosphocréatine. Les exercices de 10 RM, avec de faibles charges et un nombre de répétitions important (en série de 10 répétitions au moins) sont généralement séparés par de courtes durées de récupération (moins de 2 minutes). Ce type d’entraînement de l’endurance de la force (capacité à répéter un pourcentage important de la force maximale c’est-à-dire 74 % de 1 RM, voir tableau 10) sollicite davantage le métabolisme glycolytique et oxydatif. C’est pourquoi la lactatémie est plus élevée dans ce type d’exercice que dans ceux faisant appel à de lourdes charges (> 85 % de 1 RM) ne pouvant être soulevées que 5 fois de suite (Kraemer et al., 1987). L’influence propre du métabolisme sollicité sur les adaptations concernant la masse et la force musculaire n’est pas connue (Tesch, 1992). Une force inférieure à 20 % de la force isométrique maximale volontaire peut être soutenue par le seul recrutement des fibres musculaires de type I (oxydatives, à contraction lente) (Gollnick et al., 1974). Pour produire des forces plus importantes, les unités à contraction rapide sont mises en jeu ainsi qu’en témoigne la baisse de glycogène intramusculaire proportionelle à la force développée. En effet, Tesch et al. (1986) ont observé une plus grande déplétion en glycogène des fibres rapides par rapport aux fibres lentes après avoir effectué un exercice de 20 séries de 6 à 12 répétitions maximales d’exercice de quadriceps (sollicitant respectivement 83 % et 68 % d’une répétition maximale de 1 RM). (Tesch, 1992). En effet, à l’arrêt de l’exercice, aucune fibre musculaire de type lent n’était déplétie en glycogène alors que 15 % des fibres rapides l’étaient. Ce fait peut avoir une incidence sur la capacité de s’entraîner tous les jours avec des charges lourdes, tout au moins pour des exercices s’adressant au même groupe musculaire.

Applications : fatigue musculaire et adaptations à l’exercice

2° Les adaptations à long terme aux exercices de force Nous avons vu que la plupart des programmes d’entraînement de la force induisaient une augmentation de la surface de section transversale du muscle, principalement par l’accroissement du volume des fibres musculaires et du tissu conjonctif les enveloppant. Cependant, à l’issue d’un programme d’entraînement de musculation à court terme, il est possible d’observer une augmentation significative de la force maximale avec seulement parfois une petite hypertrophie musculaire, voire même aucune (Tesch, 1992). Il est en effet important de garder à l’esprit, concernant la discussion des adaptations métaboliques dues à l’entraînement de force, que certaines sont consécutives à l’hypertrophie musculaire.

Chapitre 2

entraînement de force (Komi, 1984). Cependant, ce fait reste très discuté, les résultats avérés dans ce sens étant peu nombreux (Tesch, 1992). Les enzymes du métabolisme anaérobie lactique intervenant donc dans la glycolyse (phosphofructokinase, lactate déhydrogenase) ne sont pas modifiées par un entraînement de force (Tesch, 1992). Les sportifs entraînés en force montrent une activité des enzymes lactate déhydrogénase de leurs fibres rapides plus importante que les sédentaires (Tesch et al., 1992). Cette différence reflète simplement l’utilisation peu courante des fibres rapides dans les activités quotidiennes d’une personne n’exerçant pas une profession ou une activité physique de force. En effet, ainsi que nous l’avons souligné, dans notre société mécanisée, la plupart des gestes courants de la vie quotidienne ne font pas appel aux fibres rapides.

3° Composition en type des fibres musculaires On peut s’interroger sur la possibilité qu’un entraînement à base d’exercices sollicitant une force proche de la force maximale, induise des transformations de fibres lentes en fibres rapides. 4° Densité mitochondriale et types d’enzymes Nous avons vu qu’en raison de l’augmentation de la masse musculaire due à celles des protéines contractiles (actine et myosine), la densité mitochondriale diminuait après un entraînement avec des charges lourdes (> 75 % de 1 RM). Le contenu des enzymes oxydatives (succinate déhydrogénase, citrate synthase ou 3-hydroxylacyl-CoA déhydrogénase ou HAD) suit la même évolution puisque ces enzymes se situent dans les mitochondries (Essen-Gustavsson et Tesch, 1990). La différence d’activité enzymatique typiquement observée entre les deux types de fibres (lentes et rapides), chez des sujets entraînés ou non en endurance, est la même que celle obtenue en comparant des athlètes entraînés à la force et en endurance. Les sportifs entraînés avec des exercices de force (3-10 RM) ont même une activité enzymatique de leurs fibres oxydatives plus faible que les sédentaires (enzymes citrate synthéthase et HAD). Cependant, les bodybuilders qui utilisent plutôt 15 voire 20 RM que 5 RM ont également une adaptation de leur métabolisme sur le versant aérobie, développant l’activité enzymatique mitochondriale (Tesch, 1992). Concernant les enzymes du métabolisme anaérobie alactique favorisant la contraction musculaire rapide par la scission de l’ATP en ADP + Pi, comme la créatine-kinase ou la myokinase, certaines études ont montré une augmentation de ces enzymes après un

5° Concentration en substrat musculaire Si le glycogène intramusculaire augmente en réponse à un entraînement d’endurance, il en est de même pour un entraînement de force. Le muscle triceps brachial voit son contenu en glycogène augmenter de 35 % après 5 mois d’entraînement de musculation (MacDougall et al., 1977). Les bodybuilders ont 50 % de concentration de glycogène de plus que les sujets non sportifs (Tesch et al., 1986). Le contenu en glycogène n’était cependant pas augmenté après 3 mois d’entraînement du quadriceps (Tesch, 1992). Le contenu en ATP et créatine-phosphate est abaissé immédiatement après un exercice de force (tableau 12) avec la possibilité de restaurer complètement ou partiellement les réserves pendant les périodes de récupération (Tesch, 1992). Cette réponse métabolique aiguë peut stimuler la constitution de réserves des composés phosphorés à condition que la charge d’entraînement (poids, fréquence hebdomadaire, tonnage global…) soit suffisamment importante pour provoquer l’augmentation de nouvelles protéines contractiles (Tesch et al., 1986). Le contenu en lipide est augmenté par l’entraînement en endurance (Saltin et Gollnick, 1983). Concernant les effets de l’entraînement en force, les résultats divergent en fonction du type de charge et du volume d’entraînement (voir pour synthèse les différentes divergences rappelées dans la revue de question de Tesch, 1992). 6° Le contenu en myoglobine La myoglobine est un transporteur d’oxygène à l’intérieur du muscle (de même que l’hémoglobine l’est

91

Chapitre 2

Variables métaboliques

LE

MUSCLE

:

Préexercice

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

Postexercice

Muscle

Différence *

ATP

5,9

4,7

*

Créatine-phosphate

21,3

10,9

*

Créatine

12,1

23,8

*

Glucose

0,35

3,98

*

Glucose-6-Phosphate

0,44

1,69

*

Glycérol-3-Phosphate

1,36

3,35

*

Lactate

3,5

17,2

*

Glycogène

160

118

*

Plasma Acides gras libres

0,21

0,19

NS

Glycérol

0,02

0,06

*

Glucose

6,1

6,1

*

Lactate

2

5,50

*

Tableau 12 Concentrations intramusculaires (mmol . kg-1  de muscle frais) et plasmatiques (mmol . l-1) des métabolites avant et après un circuit training de 30 minutes composé de 4 séries de 6 à 12 répétitions maximales d’exercice (6 à 12 RM) du quadriceps : squats, presse avec jambe et extension de la jambe. Les sujets étaient 9 bodybuilders. Les différences entre les valeurs pré et post exercices sont notées NS lorsqu’elles ne sont pas significatives (P > 0,05) et notées * lorsqu’elles le sont (P < 0,05). (D’après Tesch et al., 1986 et Essen-Gustavsson et Tesch, 1990).

92

dans le sang). Elle facilite l’extraction de l’oxygène amené par les artérioles et les capillaires jusqu’à la cellule musculaire. Les fibres lentes contiennent davantage de myoglobine que les fibres rapides, mais l’entraînement en endurance n’induit pas une augmentation de la myglobine dans une fibre musculaire (Saltin et Gollnick, 1983). L’hypertrophie musculaire due à un entraînement de force diminue la contenu en myoglobine du muscle, suggérant une capacité moindre à utiliser de l’oxygène (Tesch, 1992). En conclusion, selon la charge utilisée et l’intensité de la séance d’entraînement, les effets de l’entraînement de force peuvent varier, rendant très difficile l’établissement d’effets généraux tels qu’ils pourraient se dessiner plus facilement pour les exercices d’endurance faisant appel à une intensité d’exercice comprise entre 30 et 90 % de la consommation maximale d’oxygène et ce sur plusieurs heures ou minutes. En effet, les effets d’entraînement de force ne vont pas toujours dans le sens de l’augmentation du métabolisme anaérobie alors qu’un entraînement en endurance aboutit systématiquement à une orientation du métabolisme aérobie, les fibres lentes étant toujours recrutées en premier, même pendant des exercices de musculation supposés stimuler sélectivement les fibres rapides.

2.1.3 Effets de la croissance et du vieillissement sur la force musculaire La force, qu’elle soit statique ou dynamique, semble préservée jusqu’à l’âge de 45 ans, mais la performance se détériore ensuite de 5 % par décennie (Aoyagi et Shephard, 1992) en parallèle avec la perte de tissu maigre. Cette perte de force est aussi importante dans les bras que dans les jambes. À 70 ans, les hommes et les femmes en bonne santé, ont une déperdition de 20 à 40 % de leur force maximale isométrique par rapport à des adultes jeunes de même gabarit. En effet, la plupart des études ne sont pas longitudinales mais comparent des populations dans les mêmes tranches d’âge (Doherty et al., 1993). Cette perte est similaire pour les hommes et les femmes et le rapport de la force entre les hommes et les femmes (la force maximale isométrique de la femme étant égale à 70 % de celle de l’homme) n’est pas modifié avec l’âge (Aoyagi et Shephard, 1992). Cette diminution de la force maximale se confirme même lorsque les muscles sont sollicités électriquement, suggérant que le système nerveux central n’est pas en cause. Elle serait due à une baisse de la masse musculaire et de ses éléments contractiles, induisant d’abord une diminution du nombre des motoneurones  dans la moelle épinière, puis une dénervation des fibres musculaires. Des études réalisées chez l’homme et chez l’animal suggèrent que « l’hypotrophie » musculaire (diminution de la masse musculaire au contraire de l’hypertrophie), est causée par une perte d’unités motrices surtout parmi les plus grosses et les plus rapides qui sont de moins en moins sollicitées avec l’âge, de par les problèmes osseux et les habitudes sociales des personnes âgées. Cependant, on peut présager que ce processus peut se modifier dans le siècle à venir, considérant qu’aujourd’hui une personne de 60 ans n’est plus vieille alors que c’était un âge respectable, ne serait-ce qu’il y a un siècle. Le temps de contraction et de relâchement musculaire est notoirement augmenté chez la personne âgée. Des études soulignent que certaines unités motrices restantes semblent réagir à la perte des grosses unités motrices par une augmentation, avec l’âge, de leur taille moyenne. Les implications d’une réduction du nombre d’unités motrices et de l’augmentation de leur taille moyenne sur le contrôle neuromoteur chez la personne âgée sont certainement importantes et restent à explorer (Doherty et al., 1993).

Chapitre 2

Applications : fatigue musculaire et adaptations à l’exercice

Le muscle en action pour développer la force et la puissance

Sans attendre le chapitre 6 concernant l’évaluation, nous allons vous montrer la puissance développée par les muscles en courant un sprint au cours du test de Rabit® (Cf. chapitre 6 1.8) réalisé ici par un coureur et une coureuse de demi-fond alors qu’ils étaient en fin de préparation (période de pré-compétition). Nous lui avons demandé de courir une accélération maximale de 6 secondes (figure 30b) afin de mesurer sa puissance qui est le produit de la force et de la vitesse de course. Le Pr Jean Benoit Morin a conçu une application pour téléphone et iPad extrêmement pratique qui permet à tout entraîneur de disposer de cette courbe avec les valeurs calculées de puissance, de force et de vitesse maximale absolue. Nous verrons dans le chapitre 6 en détail, que ce test est né des physiologistes des années 60 pour les muscles des bras puis sur cyclo-ergomètre (Monod et Scherrer, 1965). Nous avons vu dans le premier chapitre que la force est le produit de l’accélération par la masse selon la seconde loi de Newton. Ainsi est-il facile de repérer sur la courbe l’instant où la vitesse plafonne et donc où l’accélération devient nulle d’où la relation hyperbolique force/temps de course. L’accélération est forte au départ et s’annule pour l’athlète masculin de la figure 30b au temps de 3 secondes. Le meilleur compromis entre la force et la vitesse qui va vous donner le pic de puissance : Puissance watts = force (Newton) × vitesse (m.s-1) est de 25 watts par kilogramme ce qui est excellent pour un athlète de demi-fond. Nous pouvons apprécier toutes ces qualités musculaires de façon intégrative grâce au fameux « test de Rabit® » (en haut dans la figure 30c) (Molinari et al., 2020b ; Giovanelli et al., 2020) dont nous reparlerons au chapitre 6.

Mesure de la force et de la puissance

20,0

15,0

5,0

0,0 0,0

Efficacité de la course en accélération.

En effet, il a été démontré que l’entraînement à haute intensité (HIT), qui inclut donc des phases d’accélération, améliore la capacité aérobie maximale

1,0

2,0

Temps

3,0

4,0

Figure 30b et la synthèse des protéines musculaires, mais il restait à valider leur efficacité pour, à la fois, synthétiser de nouvelles protéines musculaires et cardiaques et en plus de l’obtenir sur des rats sénescents (Launay et al., 2017). Nous avons émis l’hypothèse que le changement de vitesse (accélération) pendant chaque séance de HIT agit comme un stimulus responsable des adaptations de l’organisme à l’exercice. Des rats âgés de 24 mois (n = 14) ont été soumis à un court protocole d’accélération (20-30 min) d’exercice, comprenant 3 séries indépendantes d’accélération et comparés à un groupe sédentaire apparié à l’âge (n = 14). Le protocole a été répété deux fois par semaine pendant deux mois. Après le protocole, les performances, la fonction cardiaque, la mécanique musculaire et les

Courbe de force vitesse puissance de la course de sprint d’un coureur sur 6 secondes issue de l’application MySprint : https://jbmorin.net/tag/mysprint/

Figure 30c Le test de Rabit® a intégré un sprint après une phase courue à allure facile de 10 minutes (la coureuse s’est échauffée 30 minutes auparavant). Ici la coureuse de demi-fond, en phase de préparation, montre une valeur de puissance de 13 w/kg, une vitesse de pointe de 28 km/h ce qui correspond à la vitesse finale d’un 5 000 m olympique de Isabellah Ochichi médaille d’argent en 2004 que j’ai eu le bonheur de suivre.

Puissance

Test 30m 10,0 Force

2.3

Vitesse Puissance Force

10,0

L’entrainement de force le plus spécifique de la course en termes de contraction musculaire (tension-longueur et force-vitesse) est l’accélération. Nous avons démontré chez des rats sénescents (âge équivalent à plus de 70 ans chez les humains) qu’un entraînement en accélération permettait de muscler à la fois les muscles squelettiques et myocardique (Launay et al., 2017).

X

25,0

Force

2.2

Vitesse Puissance Force

5,0

0,0 0,0

1,0

2,0

Temps

3,0

Vmax (km/h) : 28,2 P max (W/kg) : 13.2 Endurance de Force : Bonne Mise en Action : Bonne Orientation de Force départ : Moyenne

4,0

93

Chapitre 2

LE

MUSCLE

TRANSFORMATEUR D’ÉNERGIE

200 bpm

240 m

15 km/h

150 bpm

10 km/h

100 bpm

80 m

5 km/h

50 bpm

0m

0 km/h

Vitesse

Altitude

20 km/h

00

 :

00

 :

15 Temps Fréquence Cardiaque

5,5 5

00

Fréquence Cardiaque

320 m

160 m

Vitesse (m.s-1)

:

À LA SENSATION

Échauffement

3 à 4 séries 6 min facile 1 min accélération facile à moyen 1 min accélération moyen à dur

0 bpm

00

 :

30

Vitesse

Altitude

2.4

Soft Acceleration Médium Acceleration Hard Acceleration

4,5 4 3,5 3 2,5 2 0

50

100

150

200

250 Time (s)

300

350

400

450

0

50

100

150

200

250 Temps (s)

300

350

400

450

Accélération (m.s-2)

0,4 0,3 0,2 0,1 0 – 0,1 – 0,2 – 0,3 – 0,4 – 0,5

Figure 30d Séance de fractionné en accélération autorythmée par le coureur lui-même. Tiré des séances proposées dans l’ouvrage « Révolution Trail » (Editions De Boeck Supérieur, Billat et Bazin, 2021).

Figure 30e Exemple de trois accélérations facile, moyenne et forte réalisée par un coureur de loisir sans apprentissage ! En haut nous avons en ordonnées les vitesses dont la pente d’accroissement en fonction du temps détermine l’accélération (m.s-2) et en bas nous avons directement les accélérations en abscisse avec même leur variation (là nous touchons du doigt l’unité du Jerk qui est la variation de l’accélération en fonction du temps, en m.s-3).

94

prend pas de temps et peut être adapté aux athlètes, aux personnes âgées ou aux patients atteints de maladies chroniques afin d’améliorer la force, la capacité oxydative et la qualité de vie. En seulement 8 semaines à raison de deux séances de 20-30 minutes par semaines. C’est ce type de séance que nous proposons dans la méthode BillaTraining® (www.billatraining.com) que ce soit pour affronter les pentes des courses de trail (Billat et Bazin, 2021) ou pour des courses sur du plat en vélo ou à pied. Tous les sports collectifs, et les jeux de raquette sont aussi concernés par ce type d’entraînement en accélération.

voies cellulaires et moléculaires qui sont impliquées dans les adaptations à l’exercice ont été étudiées. Ce nouvel entraînement, comprenant seulement 16 séances . a amélioré la consommation maximale d’oxygène (VO2peak ; + 6,6 %, p < 0,05), la distance de course (+ 95,2 % ; p < 0,001), la vitesse (+ 29,7 % ; p < 0,01) et la fonction musculaire de rats de 24 mois en seulement 8 semaines. Ce nouveau protocole d’entraînement a induit une hypertrophie cardiaque et amélioré le raccourcissement fractionnel (47,3 % contre 41,1 % dans le groupe témoin, p < 0,01) et la fraction d’éjection. De plus, il a également amélioré la mécanique des muscles squelettiques en augmentant la force développée (+ 31 % vs le groupe contrôle, p < 0,05) et l’efficacité mécanique maximale qui a activé la voie IGF1/ mTOR/Akt, et a réduit la voie Smad2/3. Nos résultats ont clairement montré que l’accélération est un stimulus efficace pour contrôler la masse musculaire cardiaque et squelettique. Cet entraînement basé sur l’accélération ne

L’entraînement en accélération auto régulé par le sportif.

Le plus. simple moyen d’améliorer à la fois sa force et son VO2max est de réaliser des répétitions sous la forme de pyramides parfaites de montée et baisse de vitesse. La figure 30d vous donne un exemple de séance réalisée par un coureur qui avait pour simple consigne d’accélérer entre deux zones de sensation. Il devait ne pas ralentir brutalement à la récupération, mais au contraire « freiner. » sa baisse de vitesse afin de bénéficier de l’excès de VO2 à la récupération ce qui favorise à la fois le recyclage de l’acide lactique et la resynthèse mitochondriale de la créatine phosphate. Ce type de séance peut être « corsé » en donnant une consigne alternative qui ne serait pas une consigne de durée de l’accélération, mais d’intensité de l’accélération. Cela est tout à fait possible car l’être humain, même pour un non spécialiste de la course à pied. En effet, nous avons publié (Billat et al., 2018) un article démontrant que l’humain est capable de doser précisément des accélérations différentes, sur une simple consigne « d’accélérations facile, moyenne ou forte ». La figure 30e illustre cette capacité avec un exemple de résultats sans avoir nullement lissé les données de vitesse. Nous pouvons remarquer que les durées d’accélération « facile », « moyenne » et « dure », qui étaient déterminées par l’impossibilité pour le coureur de continuer à accélérer, sont comprises respectivement entre 8 minutes (pour l’accélération facile ce qui est long si on pense que le coureur a été capable de doser finement son effort aussi longtemps), 4 minutes et 2 minutes pour les accélérations « moyenne » et « dure » avec à chaque fois une accélération du simple au double entre « facile », « moyen » et « dur ». Il y a donc un rapport de proportionnalité de 2 à la fois pour le temps limite (temps de maintien) de l’accélération et sa valeur. Il est donc intéressant de pouvoir exploiter cette grande qualité de dosage des accélérations à l’entraî-

Le système cardiovasculaire : élément clef de la performance sportive

3 1. Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif 2. Applications : sollicitation cardiaque à l’entraînement

1.

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

Dans ce chapitre, nous allons pouvoir comprendre comment le muscle cardiaque va pomper le sang et assurer une pression suffisante dans le système vasculaire alors que son lit augmente de telle sorte que le débit sanguin puisse augmenter de 5 fois (de 5 litres par minute au repos à 25-35 Litres.min-1 selon la taille du sujet). Le muscle cardiaque n’arrête jamais de se contracter, même quand nous dormons, nous verrons sa contribution dans la performance sportive. D’aucuns pensent qu’il est limitant en scrutant la « zone rouge » de fréquence cardiaque. A moins d’être cardiaque, il n’en est rien (Cf. Carré, Cardiologie du Sport, 2020, édition De Boeck Supérieur). Mais auparavant il importe de connaître le système cardiovasculaire afin de pouvoir interpréter les courbes de fréquences cardiaques et même de débit cardiaque à l’effort. L’activité cellulaire se traduit . ainsi par une consommation d’oxygène ( V . O2) et un rejet de dioxyde de carbone (V CO2). L’oxygène (O2) et le dioxyde de carbone (CO2) sont respectivement prélevés et rejetés dans le milieu interstitiel (séparant les cellules). La voie sanguine assure une liaison rapide entre les cellules, lieux de consommation et de production de l’oxy-

gène et du dioxyde de carbone, et les poumons, lieux d’échange avec le milieu extérieur. C’est pourquoi nous allons dans les deux chapitres suivants envisager successivement la fonction circulatoire et la fonction ventilatoire avec la perspective d’étudier leur rôle dans la limitation de la performance sportive. En effet, nous avons vu au chapitre I que les exercices courts et intenses n’utilisaient pas directement l’oxygène pour la resynthèse d’ATP. Mais il n’en demeure pas moins que la restauration de la phosphocréatine (pour le métabolisme anaérobie alactique) et la disparition de l’acide lactique du sang (pour le métabolisme anaérobie lactique, par la gluconéogenèse ou l’oxydation), nécessitent un apport suffisant d’oxygène en rapport avec les besoins énergétiques inhérents au type d’exercice (intensité-durée). L’activité cellulaire se traduit . ainsi par une consommation d’oxygène (V.O2) et un rejet de dioxyde de carbone (V CO2). L’oxygène (O2) et le dioxyde de carbone (CO2) sont respectivement prélevés et rejetés dans le milieu interstitiel (séparant les cellules). La voie sanguine assure une liaison rapide entre les cellules, lieux de consommation et de production de l’oxygène et du dioxyde de carbone, et les poumons, lieux d’échange avec le milieu extérieur. C’est pourquoi nous allons dans les deux chapitres suivants envisager successivement la fonction circulatoire et la fonc-

95

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

tion ventilatoire avec la perspective d’étudier leur rôle dans la limitation de la performance sportive. En effet, nous avons vu au chapitre I que les exercices courts et intenses n’utilisaient pas directement l’oxygène pour la resynthèse d’ATP. Mais il n’en demeure pas moins que la restauration de la phosphocréatine (pour le métabolisme anaérobie alactique) et la disparition de l’acide lactique du sang (pour le métabolisme anaérobie lactique, par la gluconéogénèse ou l’oxydation), nécessitent un apport suffisant d’oxygène en rapport avec les besoins énergétiques inhérents au type d’exercice (intensité-durée).

Figure 31 Circulation systémique et circulation pulmonaire : 2 circuits en série.

Le système cardiovasculaire contribue à répondre à la demande croissante d’oxygène avec la puissance de l’exercice, de 15 à 25 fois la valeur de repos lorsque le sujet atteint . sa consommation maximale d’oxygène (pour un VO2max respectivement de 53 à 88 ml . min-1 . kg-1 puisque la valeur de repos est similaire : 3,5 ml . min-1 . kg-1 pour tous). En effet, le but premier du système cardiovasculaire est d’apporter l’oxygène au muscle et aux organes par le système artériel, en quantité suffisante par unité de temps, et d’élimi-

ner en retour, par le système veineux, le CO2 produit par le métabolisme aérobie. En outre, le système circulatoire contribue à la régulation de la température interne, puisque, rappelonsle, pour 100 % d’énergie métabolique, 25 % sont transformés en énergie mécanique et 75 % en énergie calorifique. Afin de satisfaire aux besoins accrus d’oxygène, deux ajustements majeurs du « système vasculaire » (l’ensemble des vaisseaux de l’organisme contenant du sang) doivent être réalisés .: (1) une augmentation du « débit cardiaque » (noté Q c : une augmentation de la quantité de sang pompé chaque minute par le cœur) et (2) une redistribution du flux sanguin vers les organes les plus actifs (seul le cerveau conserve son débit cardiaque constant lors . d’un effort très intense comme un 3 000 m couru à VO2max ). L’objet de ce chapitre est donc de rappeler la structure, le fonctionnement et la régulation du système cardiovasculaire avec le souci d’examiner son incidence sur les adaptations aiguës (immédiates) et chroniques (différées et résultant de l’entraînement) à l’exercice.

1.1

Système cardiovasculaire

Le système cardiovasculaire humain est une boucle fermée dans laquelle circule le sang de tous les tissus. La circulation du sang requiert l’action d’une pompe musculaire, le cœur, qui crée la pression nécessaire pour pulser le sang dans tout l’organisme. Le sang passe du cœur vers les « artères » et retourne au cœur par des « veines » au niveau de la grande circulation (figure 31). Le système est considéré comme clos parce qu’artères et veines sont en continu par l’intermédiaire de plus petits vaisseaux. Les branches artérielles s’étendent en une arborescence de petits vaisseaux. Comme ceux-ci deviennent microscopiques, ils forment les « artérioles » qui se développent en un lit constitué de plusieurs vaisseaux plus petits qui vont notamment entourer la fibre musculaire, les « capillaires ». Ceux-ci sont les plus petits et les plus nombreux vaisseaux qui forment une ramification entre artères et veines. Tous les échanges d’oxygène, de dioxyde de carbone et des nutriments entre les tissus et le système vasculaire passent par le lit capillaire. Le sang passe des capillaires aux cellules qui y puisent leur oxygène et leurs nutriments (glucide, lipide, acides aminés, sels minéraux, vitamines et eau) pour aller ensuite (une fois en partie déchargé de l’oxygène et de nutriments) dans des petits vaisseaux appelés les « veinules ». Ici le sang vient de rentrer dans la partie veineuse du système vasculaire. Ensuite les vei-

96

Chapitre 3

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

1 Le cœur et sa structure Le cœur est divisé en quatre chambres (une oreillette et un ventricule, à droite et à gauche) et est souvent considéré comme étant deux pompes en une (figure 32). En effet, l’oreillette et le ventricule droits se combinent pour former la pompe droite, tandis que l’oreillette et le ventricule gauches se combinent pour former la pompe gauche. Le côté droit du cœur est séparé du côté gauche par un mur musculaire appelé « septum interventriculaire ». Ce septum empêche le sang droit (sang du retour veineux riche en CO2) et gauche (sang artériel riche en oxygène) de se mélanger. Le mouvement du sang dans le cœur va des oreillettes aux ventricules. Afin de prévenir les reflux du sang, le cœur a quatre voies à sens unique. Les valves « auriculo-ventriculaires » connectent l’oreillette et le ventricule, ceci à droite comme à gauche. Ces valves sont également appelées : « valves tricuspides » pour la valve auriculo-ventriculaire droite et la valve bicuspide (mitrale) pour la valve auriculo-ventriculaire gauche. Pendant que le ventricule droit se contracte, la valve tricuspide est fermée et empêche le sang de refluer vers l’oreillette droite. En même temps, la valve pulmonaire s’ouvre permettant ainsi le passage du sang du ventricule droit dans les artères pulmonaires. Pendant que le ventricule gauche se contracte, la valve mitrale se ferme pour empêcher un reflux du sang vers l’oreillette gauche, la valve aortique (semi-lunaire) s’ouvre pour laisser passer le sang dans l’aorte.

2 Les circuits systémiques et pulmonaires : la grande et la petite circulation

Ainsi que nous l’avons déjà souligné, le cœur peut être considéré comme deux pompes en une. En effet, le côté droit du cœur pompe le sang qui est en partie dépléti en oxygène et chargé de dioxyde de carbone, résultat du métabolisme et des échanges gazeux des différents tissus de l’organisme par leur métabolisme. Ce sang part du ventricule droit pour aller par l’artère pulmonaire et le circuit pulmonaire (petite circulation) dans les poumons afin de se décharger du CO2 et s’enrichir en O2. Ce sang oxygéné va alors passer dans le cœur gauche pour être expulsé vers les divers tissus de l’organisme en partant par une grosse artère : « l’aorte » pour aller ensuite dans le circuit systémique (ou grande circulation) formé par l’ensemble des vaisseaux sanguins pour boucler la boucle.

carotide commune gauche

tronc artériel bracho-céphalique

artère subclavière gauche

artères pulmonaires droites veines pulmonaires droites

aorte tronc pulmonaire veines pulmonaires gauches artères pulmonaires gauches oreillette gauche

veine cave supérieure oreillette droite

branches coronaires gauches

branches coronaires droites

ventricule gauche

veine cave inférieure Vue antérieure du coeur.

conjonctif des valvules

noeud sino-auriculaire noeud auriculoventriculaire

cordages fibreux d'une valvule

OG OD

pilier d'amarrage d'une valvule

faisceau de His réseau de Purkinje

VG VD

endothélium myocarde cellules nodales cavité péricardique péricarde

valvules pulmonaires valvules auriculoventriculaires droites (v. tricuspides)

Section longitudinale du coeur. localisation intramyocardique des cellules nodales OD: oreillette droite OG: oreillette gauche VD: ventricule droit VG: ventricule gauche

valvules aortiques (v. sigmoïdes) valvules auriculoventriculaires gauches (v. mitrales)

Figure 32 Schéma fonctionnel du cœur. Les flèches indiquent la direction du débit sanguin.

97

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

nules retournant au cœur se regroupent pour former de plus gros vaisseaux : les veines. Les veines les plus importantes : la « veine cave supérieure » et la « veine cave inférieure » (pour les parties du corps se trouvant respectivement au-dessus et au-dessous du cœur) se déversent directement dans la partie droite du cœur. Le mélange sanguin qui arrive dans le cœur droit est appelé « sang veineux mêlé ». Le cœur 1 est à l’interface entre la grande circulation2 chargée de drainer les organes et la petite circulation2 chargée d’envoyer le sang reçu des organes vers les poumons pour l’élimination du dioxyde de carbone et pour l’enrichissement en oxygène.

1.2

· Du débit cardiaque (Qc) Q à la. consommation d’oxygène (VO2)

1.2.1 Débit cardiaque 1° Le débit cardiaque

.

Le débit cardiaque (Q c) est défini comme la quantité de sang qui sort de l’aorte par minute. Il dépend du volume de sang éjecté à chaque contraction (« systole ») du cœur, ce volume étant appelé le « volume d’éjection systolique » et du nombre de battements cardiaques par minute, appelé la « fréquence cardiaque ». On peut illustrer ceci par l’équation suivante :

.

Q c(ml/min) = FC (bpm)  VES (ml/bt) où FC est la fréquence cardiaque en battements par minute (bpm) et VES est le volume d’éjection systolique en millilitres (ml par battement : ml/bt). 2° Le volume d’éjection systolique (VES) Le volume d’éjection systolique est le volume sanguin pompé à chaque battement cardiaque par le ventricule gauche, exprimé en ml de sang par battement cardiaque (bt).

98

puis reste en plateau, le débit cardiaque augmentant ensuite grâce à la fréquence cardiaque qui croît proportionnellement à la consommation d’oxygène jusqu’à . VO2max .

1.2.2 Débit cardiaque et exercice

.

1) Le débit cardiaque (Q c) augmente à l’exercice en proportion directe avec les besoins métaboliques de l’organisme selon l’équation de Fick (encadré 7). Cette relation entre le débit . cardiaque et la consommation d’oxygène (VO2) est essentiellement linéaire. 2) L’augmentation du débit cardiaque à l’exercice en position assise est réalisée par l’augmentation du volume d’éjection systolique jusqu’à . environ 40 % de VO2max (sauf pour les athlètes entraînés en endurance qui augmentent leur volume d’éjection systolique jusqu’à . VO2max ). Dans la construction cardiaque on distingue :

 Le volume de fin de « diastole » ou télédiastolique (VTD) : quantité de sang (ml) remplissant le ventricule gauche pendant la période de remplissage du cœur (la « diastole »). Sa valeur est de l’ordre de 120-160 ml de sang.

 Le volume de fin de systole ou télésystolique (VTS) : quantité de sang (en millilitres) restant dans le ventricule gauche après chaque battement cardiaque. Plus la fraction d’éjection est importante, plus le volume de fin de systole est réduit. Les valeurs normales sont de l’ordre de : 100 % (volume de sang total) – 60 % (pour FE) = 100 ml – 100 ml  0,6 = 100 – 60 = 40 ml de sang par battement cardiaque Le volume d’éjection systolique VES = VTD – VTS = 160 – 60 = 100 ml par battement.

 La fraction d’éjection (FE) : il s’agit de la quan-

Dans un cœur de sédentaire en bonne santé, l’étendue des valeurs normales du volume d’éjection systolique est de 70 à 90 ml de sang par battement. Il faut cependant souligner que des marathoniens, cyclistes sur route et autres sportifs spécialistes des sports d’endurance ont des volumes d’éjection systolique maximaux (VES) de l’ordre de 125 ml soit, pour mémoire, l’équivalent d’un pot de yaourt de sang qui serait expulsé du ventricule gauche à chaque battement cardiaque.

1.2.3 Fréquence cardiaque maximale

Le volume d’éjection systolique augmente . avec l’intensité de l’exercice jusqu’à 40-60 % de VO2max ,

L’augmentation du débit cardiaque est donc rendue possible par celle de la fréquence cardiaque

tité de sang expulsée à chaque systole depuis le ventricule gauche (c’est-à-dire le volume d’éjection systolique) mais exprimée en pourcentage du VTD. Les valeurs normales sont comprises entre 54 % et 64 % VES VTD – VTS FE = -------------------------------- = ------------- en % VTD VTD

Chapitre 3

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

qui est utilisée. comme repère de l’intensité de l’exercice (en % de VO2max ). La fréquence cardiaque maximale diminue de façon linéaire après 30 ans environ, et, par conséquent, le débit cardiaque également à moins que le volume d’éjection systolique (VES) maximal n’augmente avec l’entraînement en endurance. La baisse de la fréquence cardiaque maximale est calculée de façon théorique (pas toujours vérifiée chez le sportif) selon la formule d’Astrand et Rhyming (1954) : FC max = 220 battements par minute (bpm) – l’âge (années) Ainsi, selon cette formule, à 20 ans la fréquence cardiaque maximale est de 200 bpm, alors qu’à 40 ans elle ne serait plus que de 180 bpm. Ceci n’est pas toujours vérifié chez les sportifs régulièrement entraînés à une puissance d’exercice sollicitant leur consommation maximale d’oxygène et donc leur fréquence cardiaque maximale. En effet, il a été observé chez des cyclistes de 40-45 ans courant encore en compétition à un niveau régional que la fréquence cardiaque maximale pouvait être encore de 190-195 bpm au lieu des 175-180 bpm prévus par l’équation d’Astrand et Rhyming. Donc, cette équation basée sur une analyse statistique n’est utile que pour garder à l’esprit qu’une même fréquence cardiaque de 170 bpm par exemple, chez un adolescent ou un adulte de 45 ans ne signifiera pas la même intensité relative de l’exercice.

1.2.4 Réserve cardiaque La réserve cardiaque est définie comme la différence entre le débit cardiaque maximal et le débit cardiaque de repos. Ainsi plus la différence (la réserve) est grande, plus la consommation d’oxygène peut s’élever au-dessus de la valeur de repos, ce qui signifie que le sujet est capable de fournir une puissance d’exercice importante à son débit cardiaque maximal, correspondant alors à une consommation maximale d’oxygène importante. En considérant l’équation du débit cardiaque :

.

Q c = VES FC il est possible de noter que « la réserve cardiaque » est directement influencée par la fréquence cardiaque et le volume d’éjection systolique. Ainsi, afin d’assurer une réserve cardiaque importante, la fréquence cardiaque devra être la plus basse possible au repos et la plus élevée possible à sa valeur maximale, alors que le volume d’éjection systolique devra être le plus élevé possible à sa valeur maximale. Certains types d’entraînement, notamment l’enchaînement de trois à cinq répétitions de

Sujets

· Qc (l/min)

VES (ml/battement)

Fc (bpm)

Repos Hommes non entraînés

72

´

70

=

5,0

Femmes non entraînées

75

´

60

=

4,5

Hommes entraînés

50

´

100

=

5,0

Femmes entraînées

55

´

80

=

4,5

. Exercice maximal (à VO2max )

=

Hommes non entraînés

200

´

110

=

22,0

Femmes non entraînées

200

´

90

=

18,0

Hommes entraînés

190

´

180

=

34,2

Femmes entraînées

192

´

125

=

23,9

.

3 minutes à 90-100 % de VO2max , permettent d’améliorer le débit cardiaque maximal.

1.2.5 Entraînement et débit cardiaque

.

Le débit cardiaque (Q c), rappelons-le, est le produit du volume d’éjection systolique (VES) par la fréquence cardiaque (FC). Le tableau 13 donne les valeurs typiques du débit cardiaque, de la fréquence cardiaque, du volume d’éjection systolique chez des sujets non entraînés et des sportifs entraînés aux exercices de longues durées (on dit qu’ils sont « entraînés en endurance »). Les différences entre les sexes sont essentiellement dues (à niveau d’entraînement similaire) aux différences de taille (Astrand et Rodahl, 1986).

Tableau 13 Valeurs typiques au repos et à l’exercice, du volume d’éjection systolique (VES), de la fréquence cardiaque (FC) et du · débit cardiaque ( Q c ) pour des sujets âgés de 20 ans, entraînés et non entraînés en endurance (poids du corps : 70 kg pour les hommes et 50 kg pour les femmes). (D’après les travaux de Astrand et Rodahl, 1986 ; Rowell, 1986).

1.2.6 Équation de Fick (du nom du physiologiste allemand, 1870) L’équation de Fick permet de comprendre le lien entre les aspects énergétiques et circulatoires par l’intermédiaire de la notion de consommation d’oxygène (encadrés 7 et 8). En effet, l’équation de Fick est à la base de la compréhension de l’interaction entre les paramètres cardiovasculaires et la consommation d’oxygène

99

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

Encadré 7 L’équation de Fick liant le métabolisme, le débit cardiaque ainsi que l’utilisation périphérique de l’oxygène Selon le principe de Fick, il y a égalité entre la quantité d’oxygène captée par les poumons dans un temps donné et celle fixée par le sang dans le même temps. La quantité d’oxygène captée par les poumons en une minute corres. pond à la consommation d’oxygène ou VO2 (l/min). . La quantité d’oxygène fixée par le sang (Q O2) en une minute est égale au produit de la différence entre les contenus artériels. (CaO2) et veineux mêlés (C v O2) en oxygène, par le débit cardiaque Q c soit :

. Q O2 = O2 total/min – O2 restant/min . . Q O2 = Q c  CaO2 – C v O2 donc . . selon le principe de Fick Q O2 = VO2 . . donc VO2 (ml/min) = Q c  CaO2 – C v O2

cette dernière équation étant connue comme l’équation de Fick.

.

 Q c (ml/min) = FC (bpm)  VES (ml/bt) avec bpm pour battements par minute ; FC est la fréquence cardiaque en battements par minute (bpm) et VES est le volume d’éjection systolique en millilitres (ml par battement) et CaO2 – C v O2 (ml) est la différence artério-veineuse. Sachant que le volume d’éjection systolique, à son tour, est le produit du volume de fin de diastole (VFD) et de la fraction d’éjection (FE). On peut alors présenter et utiliser l’équation de Fick de plusieurs façons. Chacune des versions de l’équation de base permettra d’insister sur tel ou tel paramètre de la fonction cardiocirculatoire déterminant de la consommation d’oxygène. . . VO2 = Q c  CaO2 – C vO2

.

Q c = VES  FC

or donc :

.

VO2 = (VES  Fc)  CaO2 – C vO2 Comme

VES = VTD  FE on a :

ou bien

VO2 = (VTD  FE)  Fc  CaO2 – C vO2 . . VO2/Q c = CaO2 – C vO2

.

.

.

.

Q c = VO2/[CaO2 – C vO2

 VO2 (l/min) peut être exprimé en valeur absolue (en l/min) ou relative au poids de corps pour pouvoir comparer des sujets de différents gabarits (en mlO2/kg/min).

.

 VO2 (l) = volume (et non débit) . d’oxygène total consommé lors

d’une période connue : le VO2 d’un coureur ayant couru . 5 minutes à sa consommation maximale d’oxygène (VO2max ) =

100

4 l/min aura consommé un volume d’oxygène total de : 4 l/min  5 min = 20 litres soit, pour un équivalent énergétique d’un litre d’oxygène égal à 21 kjoules, le sportif aura dépensé 20  21 kjoules = 420 kjoules = 420/4,18  100 kcalories (lorsque le sportif utilise exclusivement des glucides). Le point inscrit au-dessus du Q ou du V indique qu’il s’agit de volumes rapportés au temps c’est-à-dire de débits.

 La différence artério-veineuse CaO2 – C vO2 est la différence de contenu en oxygène entre le sang artériel (20 ml pour 100 ml de sang) et le sang veineux (16 ml pour 100 ml de sang). Il s’agit de sang veineux mêlé (mélange des différents sangs veineux arrivant dans l’oreillette droite). Alors que le sportif accomplit un exercice de plus en plus intense, ses cellules musculaires extraient de plus en plus d’oxygène à partir du sang artériel, laissant moins d’oxygène dans le sang veineux. En effet, plus d’oxygène est extrait du lit capillaire, moins d’oxygène va rester dans le sang veineux. En . résumé, plus l’exercice est intense, jusqu’à 100 % de VO2max , plus le contenu veineux en oxygène (C vO2) est faible. Sachant que le contenu artériel en oxygène (CaO2) est toujours de 20 ml/100 ml, la différence artério-veineuse CaO2 – C vO2 augmente par la baisse de C vO2. qui peut s’abaisser jusqu’à 4 ml/100 ml, CaO2 – C vO2 = 20/100 – 4/100 = 16 ml/100 ml soit 16 ml d’O2 utilisé par 100 ml de sang apporté aux tissus (les plus grands utilisateurs étant, à l’exercice, les muscles). C’est pourquoi la différence de contenu artério-veineux en oxygène, qui augmente avec l’intensité de l’exercice, va être un élément déterminant de la consommation maximale d’oxygène. Une augmentation de la différence artérioveineuse signifie que davantage d’oxygène a été prélevé dans le sang artériel pour satisfaire au métabolisme accru des muscles à l’exercice. Ainsi, à l’exercice, le sang veineux est d’autant plus appauvri en oxygène et l’augmentation de la différence artérioveineuse est due à cette baisse.

 Le Pouls d’oxygène (Pouls d’O2) est le rapport entre la consommation d’oxygène et la fréquence cardiaque, ce qui correspond à la quantité d’oxygène consommé pour .chaque battement cardiaque : Pouls d’oxygène (ml d’O2/bt) = VO2/FC. Pour un sportif de 20 ans, les valeurs normales du pouls d’oxygène sont de 4-5 ml/bt au repos. La valeur maximale du pouls d’oxygène pour une fréquence cardiaque maximale de 200 bpm à une consommation maximale d’oxygène de 5 litres par minute sera de : . VO2/FC = 5 000/200 = 25 ml/bt (quantité d’oxygène consommée à chaque battement cardiaque).

Chapitre 3

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

Encadré 8 Application de l’équation de Fick .

 Détermination du débit cardiaque (Q c) de repos Sylvain est un adulte mâle de 30 ans. Sa fréquence cardiaque est de 60 battements par minute (bpm) et son volume d’éjection systolique (VES) est de 70 ml/bt. Trouver le débit cardiaque. ÉTAPE 1 : poser l’équation du débit cardiaque : . Fc  VES = Q c ÉTAPE 2 : inscrire les valeurs correspondantes aux paramètres en supprimant les unités qui seraient à la fois en dessous et au-dessus de la barre de fraction afin d’homogénéiser les unités avec celles du débit cardiaque en ne laissant que des millilitres par minute. Il faut donc faire disparaître les battements : . 60 bt/min  70 ml de sang/bt = Q c ml/min ÉTAPE 3 : calculer . 4200 ml de sang/min = Q c ml/min Avec une fréquence cardiaque de 60 bt par minute et un volume d’éjection systolique de 70 ml/bt, Sylvain doit sûrement être au repos. Ainsi, 4,2 l/min est une valeur usuelle de débit cardiaque de repos. Nous verrons que ce débit cardiaque peut être augmenté de 5 à 10 fois (selon le niveau d’entraînement) pour un exercice sollicitant la consommation maximale d’oxygène. En effet, il a été observé des débits cardiaques de l’ordre de 40 l/min chez des athlètes de bon gabarit (185 cm, 78 kg) entraînés en endurance, à l’instar des cyclistes du Tour de France ou des skieurs de fond des équipes scandinaves.

 Calcul du contenu artériel et veineux en oxygène Le contenu artériel en oxygène dépend de l’hémoglobine (voir chapitre IV, 1.9 p. 143), protéine transporteuse d’oxygène dans le sang. Elle transporte 1,34 ml d’O2 par gramme d’hémoglobine. Nous avons 13 à 15 grammes d’hémoglobine par 100 ml de sang et environ 98 % de cette hémoglobine porte une molécule d’oxygène dans des conditions ambiantes non polluées, en plaine et pour un exercice sous-maximal. On considère alors que la saturation de l’hémoglobine pour l’oxygène dans les artères (SaO2) est de 98 %. Le contenu artériel et veineux en oxygène pourra alors être calculé avec ces paramètres selon l’équation : CaO2 = SaO2  Hb  O2/Hb = 98 %  15 gr  1,34 ml/gr = 0,98  20,1 = 19,6 ml d’O2/100 ml de sang. De même, la saturation de l’hémoglobine en oxygène (S vO2) dans les veines est de 75 % :

C vO2 = S vO2  Hb  O2/Hb = 75 %  15 gr  1,34 ml/gr = 0,75  20,1 = 15,75 ml d’O2/100 ml de sang On peut constater que la différence artério-veineuse en oxygène va être due à la diminution de la saturation du sang veineux en oxygène.

 Calcul de la consommation d’oxygène absolue et relative pour un débit cardiaque donné au repos Nous avons vu que Sylvain a un débit cardiaque de repos de 4,2 litre/min. Nous savons qu’il a une différence artério-veineuse de 7 mlO2/100ml de sang et qu’il pèse 70 kg. Quelle est la valeur de sa consommation d’oxygène absolue et relative au poids de corps ? ÉTAPE 1 : CaO2- C v O2= 19,6 - 15,75 = 3,85 ml d’O2/100 ml de sang

.

ÉTAPE 2 : poser l’équation de Fick : VO2 = QC  [CaCO2 – C v O2] entrer les valeurs données dans l’équation, supprimer les unités situées de part et d’autre de la barre de fraction et faire les calculs : = 4200 ml de sang/min  3,85 ml d’O2/100 ml de sang = 161,7 ml d’O2/min Si on veut calculer la consommation d’oxygène de repos en . valeur relative au poids de corps, il faut alors diviser le VO2 calculé précédemment par le. poids de Sylvain (70 kg) : on obtient alors la valeur relative du VO2 soit : . VO2 de repos = 161,7 ml d’O2/min/70 kg = 2,31 ml d’O2/min/kg

.

.

 Calculer la valeur absolue de VO2, Q c et de VES pour Sylvain pratiquant un exercice Sylvain court sur un tapis roulant et ses valeurs de consommation d’oxygène et de différence artério-veineuse sont évaluées par. un analyseur d’oxygène automatique (voir le mode de calcul de VO2 dans l’encadré 19). A 14 km/h sa consommation d’oxygène est de 49 ml d’O2/min/kg calculée comme suit : 3,5 ml/min (coût . énergétique de la course c’est-à-dire la pente de la relation VO2/vitesse (voir chapitre I)  14 km/h = 49 ml d’O2/min/kg. Nous savons, d’autre part, que la différence artério-veineuse, CaO2 – C v O2, est de 14 ml d’O2/100 ml de sang à l’exercice. Sa fréquence cardiaque enregistrée par un fréquencemètre portable (Sportester PE 4000 de Polar, Finlande, par exemple, que de nombreux sportifs d’endurance possèdent à présent) est de 150 bpm à cette vitesse de 14 km/h.

101

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

Suite Encadré 8 .

ÉTAPE 1 : Déterminer le VO2 absolu : 49 ml d’O2/min/kg  70 kg = 49  70 ml d’O2 = 3430 ml d’O2/min

.

.

ÉTAPE 2 : Déterminer Q c = VO2/CaO2- C v O2 = 3430 ml d’O2/min /14 ml d’O2/100 ml de sang ÉTAPE 3 : Inverser le dénominateur, supprimer et multiplier :

.

Q c = 3430 ml d’O2/min / 100 ml de sang/14 ml d’O2  = 3430  100 ---------- = 24500 ml/mn = 24,5 l/mn 14

ÉTAPE 4 : déterminer le volume d’éjection systolique (VES). Réarranger l’équation pour trouver VES

.

Nous avons vu que le cœur engendrait le débit cardiaque par le volume d’éjection systolique et la fréquence cardiaque. Nous allons étudier plus particulièrement le myocarde, partie musculaire du cœur qui permet à ce dernier de se contracter pour pomper le sang avec un débit qui, nous l’avons vu, peut atteindre 40 l/min pendant l’exercice physique chez des sujets entraînés.

débouchant sur les aspects métaboliques et énergétiques de l’exercice musculaire.

1.2.7 Utilisation de l’équation de Fick pour l’évaluation du volume d’éjection systolique du sportif La mesure du volume d’éjection systolique (VES) pendant l’exercice est d’un intérêt considérable pour les chercheurs et les médecins protagonistes de l’avancée des connaissances dans la science du sport. En effet, un des effets de l’entraînement en endurance est d’augmenter le débit cardiaque (voir partie 2 de ce chapitre) (Astrand et Rodahl, 1986). Les mesures directes du volume d’éjection systolique en laboratoire sont extrêmement difficiles à réaliser, comme la méthode (sanglante) directe de Fick. On préfère des méthodes indirectes dont la précision est souvent discutée. Ces techniques sont celle du « rebreathing CO2 », et celle de l’impédance électrique cardiographique. Les lecteurs désireux de connaître ces techniques et de les comparer se reporteront à la revue de question de Hatcher et Srb (1986). Notre propos ici est de montrer une troisième possibilité qui ne nécessite pas d’inhaler un mélange gazeux enrichi en dioxyde de carbone (de 5 à 15 %), ni de retenir sa respiration au cours de l’exercice physique, basée sur la mesure du Pouls d’oxygène (Bhambhani et al., 1994). Mathématiquement, le Pouls d’oxygène (ml d’O2 par battement cardiaque) est calculé par .le ratio (le rapport) entre la consommation d’oxygène (VO2 en l/min) et la fréquence cardiaque (bpm). Selon l’équation de Fick (encadré 7), le Pouls d’oxygène est également le produit entre le volume d’éjection systolique et la différence artério-veineuse (CaO2 – C v O2). Ainsi, plusieurs chercheurs ont suggéré que les changements du Pouls d’oxygène reflétaient la modification du

102

.

Q c = VES  Fc VES = Q c/Fc VES =  24,5 l/min/150 bt/min  = 163 ml/bt VES = 163 ml de sang par battement (bt).

volume d’éjection systolique pendant un exercice (Sagig et al., 1991). Bhambhani et al. (1994) ont appliqué cette hypothèse à des sujets entraînés effectuant un exercice de pédalage sous-maximal (à 60 % de . VO2max ) pendant 8 minutes. Cette intensité était choisie de telle manière qu’elle se . situait au-dessus de la limite supérieure (40 % de VO2max ) à laquelle le volume d’éjection systolique commence à plafonner. . Au-delà de 40 % de , l’augmentation du débit V O max 2 . cardiaque jusqu’à VO2max est uniquement due à celle de la fréquence cardiaque. Bhambhani et al. (1994) obtenaient les régressions multiples suivantes, permettant de prédire de façon précise l’évolution du volume d’éjection systolique au cours de l’exercice pour des sujets non entraînés et entraînés : –

.

Pour des sujets non entraînés (VO2max = 42,3 ml/min/kg) : VES (ml/bt) = 6,81  Pouls d’oxygène + 26,7

.

= 6,81  VO2/FC + 26,7 r = 0,71, p < 0,05, SE = 21,4 –

.

Pour des sujets entraînés (VO2max = 62,2 ml.min–1.kg–1) : VES (ml/bt) = 10,33  Pouls d’oxygène – 32,3

.

= 6,81  VO2/FC + 26,7 r = 0,84, p < 0,05, SE = 14,2 où le Pouls d’oxygène est exprimé en ml d’O2 par battement cardiaque, « r » est le coefficient de corrélation, « p » est la probabilité que le Pouls d’oxygène et le volume d’éjection systolique soient corrélés, c’est-à-dire qu’ils varient de façon proportionnelle. Une valeur de p < 0,05 signifie que la corrélation est significative sur un plan statistique. C’est pourquoi on peut prédire la valeur du volume d’éjection systolique à partir du Pouls d’oxygène. Appliquons les deux équations suivantes

Chapitre 3

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

pour le calcul du volume d’éjection systolique à un . exercice sous-maximal de 60 % VO2max (140 bpm de fréquence cardiaque) :

Exercice maximal

 pour un sujet non entraîné (86,3 kg et

Exercice pénible

177,6 cm) : on a les valeurs suivantes du Pouls d’oxygène = 17,3 ml/bt : on applique donc l’équation précédente : VES (ml/bt) = 6,81  Pouls d’oxygène + 26,7 = 6,81  17,3 + 26,7 = 144,51 ml/bt

 pour un sujet entraîné (72,1 kg et 174,6 cm) : on a les valeurs suivantes du Pouls d’oxygène = 18,9 ml/bt : on applique donc l’équation : VES (ml/bt) = 10,33  Pouls d’oxygène –32,3 = 10,33  18,9 –32,3 = 162,93 ml/bt Les sujets entraînés ont donc un volume d’éjection systolique supérieur à ceux des sujets non entraînés en dépit du fait qu’ils sont moins grands et moins lourds, . mais parce qu’à 60 % de VO2max , ils ont une consommation d’oxygène supérieure en raison de cette plus haute valeur (même absolue) de leur consommation maximale d’oxygène : 4,42 l/min contre 3,64 l/min).

1.2.8 Redistribution du flux sanguin à l’exercice Afin de satisfaire aux besoins accrus en oxygène des muscles à l’exercice, il est indispensable de répartir le débit sanguin vers les territoires actifs au détriment des organes moins actifs comme le foie, les reins et le tractus intestinal (intestins, estomac). Ainsi, à . 50 % de VO2max , le débit sanguin de l’estomac ne représente . que 80 % de sa valeur au repos et plus que 60 % à VO2max . On comprend qu’il soit difficile de grimper au sommet du mont Revard en vélo ou à la course après avoir avalé une fondue savoyarde (nonobstant le vin blanc qu’elle contient). Il faut noter que la diminution du débit sanguin de l’estomac est inversement proportionnelle à celle du débit cardiaque total et musculaire. . À VO2max , les muscles augmentent leur débit cardiaque de 22,5 fois. La figure 33 illustre le changement du débit sanguin. entre la situation de repos et lors d’un exercice à VO2max à travers les différents territoires plus ou moins actifs. Nous pouvons remarquer que :

 Au repos, 15 à 20 % du débit cardiaque total est directement orienté vers les muscles squelettiques. Pendant un exercice maximal, cette valeur s’élève jusqu’à 80-85 % du débit car-

Exercice léger

750 (3%) 1000 (4%)

750 (4%) 750 (4%)

750 (8%)

Repos

350 (3,5%)

27000 (88%) 12500 (72%)

Cerveau 750 (13%) Cœur 250 (4%) Muscle 1200 (21%)

4500 (47%)

Peau 500 (8,5%) Rein 1100 (15%)

Abdomen 1400 (24%) 1500 (16%) Autre 600 (10,5%) 900 (9,5%) Total 5800 (100%) 1900 (11%) 1100 (11,5%) 400 (0,5%)

600 (3,5%)

Total 9500 (100%)

600 (3,5%) 400 (2%) 600 (2,5%) Total 17500 (100%)

250 (1%) 300 (> 1%) 200 (< 1%)

Total 25000 (100%)

diaque total. Il est en effet nécessaire de pouvoir satisfaire les énormes besoins d’oxygène des masses musculaires à l’exercice (15 à 20 fois la valeur de repos soit 4-5 l/min contre de 0,3-0,4 l/min).

 Le débit sanguin relatif du cerveau diminue à l’exercice maximal jusqu’à 3 % du débit cardiaque total au lieu de 13 % (soit une réduction de 4 fois). Cependant, il faut garder à l’esprit (c’est le cas de le dire !) que le débit sanguin absolu du cerveau est en fait maintenu strictement constant dans la mesure où le débit cardiaque total est augmenté de 4-5 fois (1620 l/min au lieu de 4 l/min). Ainsi, courir, pédaler, nager ou les trois successivement, ne

Figure 33 Modèles de distribution du débit cardiaque à travers les différents organes de l’homme au repos et à l’exercice. Le débit cardiaque dans chaque case est exprimé en ml/mn et en pourcentage du flux sanguin total.

103

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

prive pas le cerveau d’oxygène, il vous sera donc possible d’apprendre et de méditer cela en faisant une séance d’entraînement fractionnée sollicitant votre consommation maximale d’oxygène (voir chapitre VI, 1.10.3). Nous allons envisager les processus de régulation des débits sanguins locaux.

1.2.9 Régulation des débits sanguins locaux Le muscle comme les autres tissus de l’organisme ont la capacité unique de réguler leur propre débit sanguin en proportion directe de leurs besoins métaboliques. Le débit sanguin du muscle squelettique est régulé de la façon suivante : Tout d’abord, les artérioles du muscle squelettique ont une grande résistance vasculaire au repos. Cela est dû à la stimulation « adrénergique » sympathique (adrénergique signifiant qu’elle va dans le sens de l’action de l’adrénaline). Cette stimulation sympathique contracte les muscles lisses qui entourent les artérioles arrivant aux muscles, ce qui, conformément à la loi de Poiseuille (voir chapitre III, 1.6.5 p. 113), augmente les résistances périphériques). L’effet en est de produire un faible débit cardiaque musculaire au repos : 4-5 ml pour 100 grammes de muscle. Cependant, la masse musculaire, soit 40 % de la masse totale du corps, va induire un débit musculaire qui représentera tout de même 20 % du débit cardiaque total. Bien que des controverses existent, il est avancé qu’au début d’un exercice, la vasodilatation qui apparaît est due à une levée de l’excitation sympathique des artérioles qui vont alors cesser de se vasoconstricter et vont s’ouvrir. Cette vasodilatation initiale permet le début de l’activité. Ensuite elle est maintenue (voire même augmentée) par les produits du métabolisme lui-même : le CO2, l’acide lactique, le potassium, et l’adénosine. Ce type de régulation des débits locaux relève donc d’une autorégulation. C’est ainsi que le débit musculaire local peut augmenter de 15 à 20 fois au-dessus de sa valeur de repos. Ensuite, la vasodilatation des artérioles est combinée avec le recrutement des capillaires entourant chaque fibre (cellule) musculaire. En effet, si au repos seulement 5-10 % des capillaires des muscles. squelettiques sont ouverts, pendant l’exercice à VO2max , presque tous les capillaires le sont. Alors que les résistances vasculaires du muscle squelettique baissent pendant l’exercice, au contraire, les résistances vasculaires des viscères augmentent.

104

.

C’est pourquoi le débit sanguin des viscères à VO2max ne représente plus que 20 % de la valeur de repos.

1.3

Cycle cardiaque et exercice

1.3.1 Le cycle cardiaque Le cycle cardiaque fait référence au modèle répétitif de la contraction et du relâchement du cœur. La phase de contraction est la « systole » et celle de relaxation la « diastole ». Généralement, lorsque ces termes sont utilisés seuls, ils s’appliquent à la contraction et à la relaxation (le remplissage) des ventricules. Cependant, il faut noter que les oreillettes se contractent aussi ; par conséquent, on distingue une systole auriculaire et une systole ventriculaire. Ainsi, le cœur a une action de pompage en deux temps : les oreillettes droite et gauche se contractent simultanément, ce qui vidange le sang des oreillettes vers les ventricules. Environ 0,1 seconde après la contraction auriculaire, les ventricules se contractent et délivrent le sang à la fois dans le circuit systémique (l’ensemble des vaisseaux de l’organisme dans la grande circulation) pour le ventricule gauche et dans le circuit pulmonaire pour le ventricule droit c’est-à-dire dans la petite circulation. Au repos, la contraction des ventricules pendant la systole éjecte seulement les 2/3 de leur contenu (il s’agit de la fraction d’éjection FE, voir encadrés 7 et 8 page 100 et 101). Le ventricule se remplit ensuite à nouveau pendant la période de relâchement (la diastole). Pour une jeune femme de 21 ans non sportive et en bonne santé ayant une fréquence cardiaque de repos de 75 battements par minute, le cycle cardiaque durera 60 s/75 bts = 0,8 seconde. Dans ces 0,8 seconde il y aura 0,5 seconde pour la diastole et les 0,3 seconde restant pour la systole (figure 34). Si la fréquence cardiaque s’élève de 75 battements/min à 180 battements par minute (lors d’un exercice à 90 % de la consommation d’oxygène à 21 ans), il y aura donc une réduction du temps pour la diastole (Guyton, 1986). Notons que l’augmentation de la fréquence cardiaque a pour conséquence une réduction du temps pour la diastole (-74 %), alors que la systole est moins affectée (-33 %).

1.3.2 Les variations de pression sanguine pendant le cycle cardiaque Pendant le cycle cardiaque, la pression qui règne à l’intérieur des chambres cardiaques augmente puis chute. Le flux sanguin provenant de la circulation veineuse pénètre dans les oreillettes lorsqu’elles sont

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

Chapitre 3

Figure 34 0

Temps (secondes) 0,2 0,4 0,6 0,8 Diastole

OG

Systole R T

P

Électrocardiogramme

VG

Représentation des événements électriques et mécaniques cardiaques pendant un cycle correspondant à une fréquence de 75 battements/minute. Les encarts représentent de façon schématique les variations observées. Le faible effet de la contraction auriculaire a été omis.

1 1 et 2 bruits du cœur (phonocardiogramme)

Diastole auriculaire et ventriculaire 120 Ouverture valve aortique

Pression 80 aortique et ventriculaire (mmHg) 40

Fermeture valve aortique Pression aortique

Pression ventriculaire gauche

0

2

Fermeture valve mitrale

Contraction ventriculaire isométrique

Ouverture valve mitrale

130

65 Volume ventriculaire (ml)

0

3 Éjection ventriculaire

4 Relaxation ventriculaire isométrique

1

2

3

4

relâchées. Alors que ces chambres se remplissent, la pression monte progressivement.

augmente et conduit les 30 % du volume sanguin restés dans l’oreillette vers le ventricule.

Environ 70 % du sang entrant dans les oreillettes pendant leur diastole va directement dans les ventricules, passant à travers les valves auriculoventriculaires avant la systole de l’oreillette. Une fois que l’oreillette s’est contractée, la pression auriculaire

La pression intraventriculaire est basse pendant que les ventricules se remplissent, mais lorsque l’oreillette se contracte, elle augmente légèrement. Puis les ventricules se contractent à leur tour et leur pression

105

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

Encadré 9 Les facteurs influençant la pression artérielle La. pression artérielle moyenne est le produit du débit cardiaque (Q c = VES  FC) et des résistances vasculaires périphériques. Par conséquent, une augmentation soit du débit cardiaque, soit des résistances vasculaires périphériques, entraîne une augmentation de la

pression artérielle moyenne. Celle-ci dépend d’une variété de facteurs physiologiques dont le : débit cardiaque, le volume sanguin, les résistances au flux sanguin et la viscosité sanguine. Ces interrelations peuvent se résumer par le diagramme suivant :

Augmentation du volume sanguin

Augmentation de FC

Augmentation de VES







Augmentation de la pression sanguine 



Augmentation de la viscosité sanguine

Augmentation des résistances périphériques

Inversement, la diminution procède du même schéma gouvernant les liens entre les différents facteurs de la pression artérielle moyenne.

augmente très rapidement, causant la fermeture des valves auriculo-ventriculaires et prévenant ainsi un éventuel reflux sanguin des ventricules vers les oreillettes. Dès que la pression ventriculaire dépasse la pression de l’artère pulmonaire (pour le ventricule droit) et de l’aorte (pour le ventricule gauche), les valves pulmonaires et aortiques s’ouvrent et le sang est conduit simultanément à droite et à gauche, respectivement vers les circulations pulmonaire et systémique (grande circulation). La figure 34 illustre les changements des pressions ventriculaires en fonction du temps pendant le cycle cardiaque au repos. Notons la présence de deux bruits du cœur causés par la fermeture des valves auriculo-ventriculaires (1er bruit du cœur) et des valves aortique et pulmonaire (2e bruit du cœur).

1.4

Pression sanguine artérielle

Le sang exerce une pression sur l’ensemble du système vasculaire, mais elle est la plus importante à

106

l’intérieur des artères où elle est généralement mesurée à des fins médicales. La pression sanguine est en fait la force exercée par le sang circulant contre les parois artérielles et elle est déterminée par le débit cardiaque (par la puissance du pompage) et la résistance des parois au flux sanguin. Les facteurs qui déterminent la pression sanguine sont discutés dans l’encadré 9. La pression artérielle peut être estimée par l’utilisation d’un sphygmomanomètre. La pression sanguine normale d’un adulte au repos est de 120/80 mm Hg pour les hommes et de 110/70 mm Hg pour les femmes, qui ont un débit cardiaque moins important. Le plus grand nombre correspond à la pression systolique alors que le plus petit indique la pression diastolique, les deux pressions étant exprimées en millimètres de mercure (mm Hg). La « pression systolique » est produite lorsque le sang est éjecté du cœur pendant la systole ventriculaire. Pendant la diastole ventriculaire (phase de relaxation), la pression artérielle décroît et représente la

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

« pression artérielle diastolique ». La différence entre les deux est appelée la « pression différentielle ». La pression moyenne d’un cycle cardiaque est appelée « pression artérielle moyenne ». Elle est importante parce qu’elle détermine le niveau du flux sanguin dans le circuit systémique (grande circulation). La détermination de la pression artérielle moyenne n’est pas aisée. Il ne s’agit pas en effet d’une simple moyenne des pressions systolique et diastolique puisqu’elles n’ont pas la même durée, la diastole étant généralement plus longue que la systole. Cependant, la pression artérielle moyenne peut être estimée par l’équation suivante : Pression artérielle moyenne = pression diastolique + 0,33  (pression du pouls) La pression du pouls est la différence entre la pression systolique et diastolique. Le coefficient de 0,33 représente le report de la durée d’une systole par rapport à la diastole. Par exemple, supposons qu’un sujet ait une pression sanguine de 120/80 mm Hg. La pression artérielle moyenne serait alors de : Pression artérielle moyenne = 80 mm Hg + 0,33  (120 – 80) = 80 + 13 = 93 mmHg Environ une personne sur cinq aux États-Unis a une hypertension artérielle. Cela signifie que leur pression sanguine est supérieure à une valeur de 140/90 mm Hg au repos strict (Guyton, 1986). Comment cette pression artérielle est-elle régulée ? La régulation à court terme se fait par l’influence du nerf dit « sympathique » alors qu’à plus long terme cette action de régulation dépend d’abord des reins. En effet, en contrôlant les volumes d’eau de l’organisme et en régulant le volume urinaire, le rein influence le volume sanguin et donc la pression artérielle. Des récepteurs de pression appelés des « barorécepteurs » situés dans l’artère carotide (logée dans le cou) détectent les modifications de la pression artérielle. Une augmentation de celle-ci déclenche les récepteurs barorécepteurs qui vont envoyer des impulsions électriques vers les centres de contrôle de l’activité cardiovasculaire lesquels réduiront alors l’activité du nerf sympathique et la fréquence cardiaque, autre composante du débit cardiaque. Cette réduction de l’activité du nerf sympathique va également agir sur le relâchement de la tension des vaisseaux et de ce fait

Chapitre 3

diminuer les résistances périphériques. Pour approfondir la discussion des mécanismes de régulation de la pression artérielle à long terme, se référer à l’article de Cowley (1992).

1.5

Myocarde et activité électrique cardiaque

1.5.1 Le myocarde La paroi du cœur est composée de trois couches : (1) une couche extérieure appelée « l’épicarde », (2) une couche intermédiaire, le « myocarde » et (3) une couche interne nommée « l’endocarde ». C’est le myocarde, le muscle du cœur, qui est responsable de la contraction et de l’expulsion du sang hors du cœur. Le myocarde reçoit son sang (pour son fonctionnement propre) par les artères coronaires droite et gauche. Ces vaisseaux sortent de l’aorte, d’où est expulsé le sang oxygéné en provenance du ventricule gauche, puis irriguent le cœur. Les veines coronaires succèdent aux artères et drainent tout le sang coronaire à travers une large veine qui s’appelle « le sinus coronaire ». Dans l’oreillette droite, le sinus coronaire conduit le sang veineux rejetant les métabolites et le CO2, consécutifs au métabolisme propre du cœur. Puis ce sang veineux va constituer le sang veineux mêlé dans l’artère pulmonaire en direction des poumons. Le muscle cardiaque est également un muscle strié. En effet, la composition du sarcomère cardiaque se rapproche de celle du sarcomère squelettique que nous avons décrit dans le premier chapitre. On décrit également un filament épais de myosine et un filament fin constitué par l’actine et les protéines du complexe troponine-tropomyosine. Actuellement, cinq types d’isomyosine cardiaque sont connus : trois ventriculaires et deux auriculaires (Carré, 1994). Elles se distinguent surtout par leur vitesse d’hydrolyse de l’ATP, c’est-à-dire leur vitesse maximale de contraction. L’isomyosine V1, qui a une faible affinité pour l’actine et une myosine ATPase très active, a la plus grande vitesse de contraction. L’isomyosine V3 se rapproche de ce que l’on observe dans le muscle lent squelettique. Toutes ces fibres myocardiques sont de type oxydatif. Le myocarde de l’homme a 100 % d’isomyosine de type V3 alors que le chien a entre 0 et 20 % de V1 et V2 (80-100 % de V3) ; le rongeur qui sert souvent de modèle expérimental animal a 70-80 % d’isomyosine de type V1 (Baldwin, 1985 dans Carré, 1994). Nous verrons qu’à l’image du muscle squelettique, la fibre myocardique s’adapte à l’entraîne-

107

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

Figure 35 L’influx électrique prend naissance dans le pace-maker situé dans le nœud sinoauriculaire autour de la veine cave supérieure et se propage dans les oreillettes, puis se concentre dans le nœud auriculo-ventriculaire. Il se propage ensuite dans le faisceau de His et ses branches pour diffuser dans tout le myocarde ventriculaire.

Veine cave supérieure nœud sinoauriculaire (NSA)

OG faisceau de His

OD VG

nœud auriculoventriculaire (NAV)

branche gauche et ses deux divisions

VD

branche droite

Figure 36 Genèse de l’électrocardiogramme. Oreillettes

Ventricules (VG >>> VD)

Potentiel d'action

Dérivée 1re par rapport au temps de tous les potentiels d'action

R Onde P

Complexe QRST

P

PR = 0,12 – 0,20 s : conduction auriculoventriculaire

108

Cependant le muscle cardiaque diffère du muscle squelettique par plusieurs aspects : 1) Les cellules du myocarde sont interconnectées par des « disques intercalés ». Ces connections cellulaires permettent la transmission des impulsions électriques d’une cellule à une autre. Les disques intercalaires ne sont rien de plus que des membranes liquides permettant aux ions d’aller d’une cellule à l’autre. Par conséquent, lorsqu’une cellule cardiaque est dépolarisée, toutes les cellules connectées dans ce réseau sont également stimulées et se contractent ensemble comme une unité. Cette disposition est appelée un « syncytium fonctionnel ». Dans l’oreillette, les cellules du muscle du cœur sont séparées des cellules musculaires du ventricule par une couche de tissu conjonctif qui ne permet pas la propagation de la stimulation électrique. Ainsi, l’oreillette et le ventricule se contractent séparément. 2) La seconde différence entre les cellules du muscle cardiaque et squelettique est que le muscle cardiaque humain ne peut être divisé en plusieurs types de fibres différentes (à contraction lente, intermédiaire ou rapide, voir chapitre II, 1.3 p. 79). Le myocarde ventriculaire est un muscle plutôt homogène qui ressemble aux fibres lentes du muscle squelettique. En effet, les cellules du myocarde ont un métabolisme aérobie riche en capillaires et en mitochondries.

Somme de tous les potentiels d'action

ECG

ment par une multiplication du nombre de sarcomères et une augmentation du volume des « myocites » (fibres musculaires myocardiques). De même, on note une hypertrophie en surface des tubules transverses qui sont relativement plus importants que ceux du sarcomère (Swynghedauw, 1990 dans Carré, 1994).

Q S T P = 0,8 – 0,10 s dépolarisation des oreillettes QRS = 0,06 – 0,10 s

Néanmoins, le muscle cardiaque est similaire au muscle squelettique par le fait qu’il est également un muscle strié (contenant des filaments d’actine et de myosine), qu’il requiert du calcium pour activer les myofilaments et permet la constitution des ponts d’union d’actomyosine (selon la théorie d’Huxley : voir chapitre II, 1.2.2 p. 77). Le myocarde peut modifier sa force de contraction en jouant sur le degré de recouvrement des ponts d’actomyosine. La relation tension- longueur du myocarde sera discutée ultérieurement dans ce chapitre.

1.5.2 L’activité électrique cardiaque QT = 0,3 – 04 s Durée du potentiel d'action ventriculaire

De nombreuses cellules myocardiques ont une activité électrique spontanée, chacune battant à un

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

Chapitre 3

Encadré 10 Utilisation diagnostique de l’ECG à l’exercice Les cardiologues et médecins du sport surveillent l’activité électrique cardiaque du sportif à l’exercice grâce à son électrocardiogramme. Le protocole d’exercice est généralement progressif, de 0,5 km/h toutes les minutes sur tapis roulant, de la marche à la course à la vitesse associée à la consommation maximale d’oxygène pour le sportif. La plupart des examens préliminaires se font cependant sur bicyclette ergométrique, celle-ci n’occasionnant pas des artéfacts (parasites du signal) de l’ECG et permettant également d’enregistrer la pression artérielle à l’effort. Ainsi un sujet qui souhaiterait se (re)mettre au sport après 35 ans doit, de préférence, passer une telle épreuve d’effort. La maladie cardiaque la plus courante est due à l’agrégation de plaques de graisse à l’intérieur des vaisseaux coronaires : il s’agit de

rythme intrinsèque. Cependant, dans un cœur normal, l’activité électrique spontanée est localisée dans une zone particulière de l’oreillette droite : « le nœud sinoauriculaire (NSA) », qui sert de rythmeur au cœur (ou « pacemaker », mot anglais étendu au rythmeur électrique artificiel se substituant au nœud sinusal chez les cardiaques). L’activité spontanée électrique du nœud sinusal auriculaire apparaît lors du déclin du potentiel de repos membranaire par la pénétration du sodium dans la cellule myocardique au moment de la diastole. Lorsque le potentiel d’action atteint le seuil de dépolarisation, la vague de dépolarisation ne peut traverser directement les ventricules mais doit être relayée par un tissu conductif spécialisé : le « nœud auriculoventriculaire » (NAV). Le NAV est situé dans le plancher de l’oreillette droite et connecte les oreillettes avec les ventricules par une paire de branches conductrices qui sont le faisceau conducteur appelé le faisceau de « His ». Lorsqu’elles atteignent les ventricules, ces voies conductrices se séparent en plusieurs petites fibres : les cellules de « Purkinje ». Celles-ci propagent l’onde de dépolarisation à travers les ventricules (figure 35). Un enregistrement de l’activité électrique du myocarde pendant le cycle cardiaque est appelé « électrocardiogramme » (ECG). L’analyse de la forme de l’onde électrocardiographique permet au médecin d’évaluer la capacité du cœur à conduire les impulsions nerveuses et, par conséquent, de détecter d’éventuelles anomalies de l’activité électrique du myocarde laquelle est fondamentale puisqu’elle détermine la vidange car-

« l’athérosclérose » (les plaques de graisses étant qualifiées « d’athéromes »). Cet athérome va progressivement boucher les vaisseaux coronaires et priver le cœur d’oxygène pour son propre fonctionnement. L’athérosclérose se détecte grâce à des signes caractéristiques de l’ECG. En effet, une privation de sang au niveau du cœur (« ischémie ») peut être décelée par une abaissement du segment ST de l’ECG. Des examens complémentaires peuvent alors être engagés pour affiner le diagnostic du médecin. Il faut entrevoir que certains sportifs confirmés peuvent développer des pathologies cardiaques et que « faire du sport » ne signifie pas nécessairement être en parfaite santé. La visite annuelle après l’âge de 35 ans, pour prendre une licence sportive, est donc loin d’être une simple formalité.

diaque et l’apport de sang à tout l’organisme. De plus, l’analyse de l’ECG à l’exercice permet de déceler les maladies artérielles coronaires, qui assurent le propre métabolisme du myocarde (encadré 10). La figure 36 illustre un ECG normal. Notons que la forme de l’ECG se caractérise par plusieurs ondes se déroulant successivement pendant le cycle cardiaque. Chacune forme de ces ondes est identifiée par une lettre : on parle de « l’onde P », du « complexe QRS », et de « l’onde T », (PQRST selon l’ordre alphabétique qui traduit leur ordre d’apparition dans le cycle cardiaque). En effet, l’onde P résulte de la dépolarisation des oreillettes, le complexe QRS traduit la dépolarisation des ventricules et l’onde T la repolarisation du ventricule.

1.6

Régulation de l’activité cardiaque

1.6.1 Régulation de la fréquence cardiaque Pendant l’exercice, la quantité de sang pompée doit être en rapport avec l’augmentation de la demande en oxygène, elle-même dépendante de l’accroissement très important des besoins énergétiques. Puisque le nœud sino-auriculaire (NSA) contrôle la fréquence cardiaque, les modifications de celle-ci impliquent l’existence d’autres facteurs influençant le fonctionnement du NSA. Les deux facteurs dominants de cette influence sont les systèmes nerveux sympathique et parasympathique, le premier ayant été évoqué pour le contrôle de la pression artérielle.

109

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

 Les fibres parasympathiques qui innervent le cœur proviennent de neurones situés dans le centre de contrôle cardiovasculaire du bulbe rachidien et forment une partie du nerf appelé le « nerf vague ». Une fois qu’elles ont atteint le cœur, ces fibres entrent en contact à la fois avec le NSA et le nœud auriculo-ventriculaire (NAV) (figure 35). Sitôt qu’elles sont stimulées, les terminaisons nerveuses de ces nerfs sécrètent le neuromédiateur acétylcholine (voir chapitre sur le muscle et glossaire) qui entraîne une baisse de l’activité du NSA et du NAV en raison de l’apparition d’une hyperpolarisation (c’est-à-dire maintenant le potentiel de membrane à un seuil plus élevé). Il en résulte une baisse de la fréquence cardiaque. Par conséquent, on peut dire que le système parasympathique (appelé le « nerf vague ») agit comme un « système frénateur » de la fréquence cardiaque. Même au repos, le nerf vague transporte les impulsions aux nœuds sino-auriculaire et auriculo-ventriculaire. Par conséquent, l’activité parasympathique peut entraîner une augmentation ou une diminution de la fréquence cardiaque. En effet, une baisse de l’influence parasympathique peut entraîner une élévation de la fréquence cardiaque, alors que l’augmentation de cette influence peut la diminuer. En effet, la fréquence cardiaque peut augmenter par la levée de l’inhibition du nerf vague sur les nœuds sino-auriculaire (SA) et auriculo-ventriculaire (AV). Des études ont montré que l’augmentation initiale de la fréquence cardiaque pendant l’exercice jusqu’à environ 100 battements par minute, était due à la levée de l’inhibition du nerf parasympathique (Rowell, 1986). À des intensités d’exercices supérieures (sollicitant un débit cardiaque plus important), la fréquence cardiaque augmente grâce à la stimulation des nœuds SA et AV par le système sympathique (Rowell, 1986).

 Les fibres sympathiques agissent sur le cœur par l’intermédiaire des « nerfs cardio-accélérateurs » qui innervent à la fois les nœuds sinusaux auriculaires et ventriculaires. Les terminaisons de ces fibres nerveuses libèrent, sur stimulation, « la noradrénaline » (appelée aussi la norépinéphrine dans la littérature anglo-saxonne). Cette libération de noradrénaline va causer une augmentation à la fois de la fréquence cardiaque et de la force de contraction du myocarde.

110

Au repos, l’équilibre entre l’influence parasympathique et sympathique sur le cœur est maintenu par le centre de contrôle cardiovasculaire du bulbe rachidien. Celui-ci reçoit les impulsions des différentes parties du système circulatoire, en fonction des modifications des paramètres importants comme la pression artérielle, la pression partielle du sang en oxygène, etc. Le centre de régulation cardiovasculaire va ensuite transmettre les impulsions nerveuses vers le cœur en fonction des modifications des besoins sanguins. Une augmentation de la pression artérielle au-dessus de la valeur de repos, par exemple, va activer les barorécepteurs carotidiens situés dans les artères carotides et ceux de la « crosse de l’aorte », coude formé par l’aorte peu après son départ du ventricule gauche. Les barorécepteurs vont stimuler les centres de contrôle cardiovasculaire. Ces derniers vont alors stimuler l’activité parasympathique en direction du cœur et ralentir la fréquence et le débit cardiaques. Rappelons que la pression artérielle est le produit du débit cardiaque par les résistances périphériques. En diminuant le débit cardiaque, l’activité parasympathique détermine alors un retour à la pression artérielle de repos.

 Un autre réflexe régulateur implique les barorécepteurs situés dans l’oreillette droite. Dans ce cas, une augmentation de la pression auriculaire droite signale au centre de contrôle cardiovasculaire une augmentation du retour veineux ; de là, afin de prévenir un reflux du sang de l’oreillette droite dans le système veineux, un accroissement du débit cardiaque doit rapidement se produire. Le centre de contrôle cardiovasculaire répond en envoyant une impulsion aux nerfs sympathiques cardioaccélérateurs, afin d’assurer l’augmentation du débit cardiaque par celle de la fréquence cardiaque (dans un premier temps, l’augmentation du volume d’éjection systolique intervient après que le sang est parvenu au ventricule gauche). Cette augmentation du débit cardiaque contribue alors à ramener la pression de l’oreillette droite à une valeur normale, et ce même pour un exercice intense.

 Enfin, une modification de la température peut influencer la fréquence cardiaque. Une augmentation de la température corporelle au-dessus ou en dessous de la valeur basale de 37 °C va respectivement augmenter ou diminuer la fréquence cardiaque. En effet, nous verrons dans le

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

Chapitre 3

Encadré 11 La loi de Frank-Starling La Loi de Frank-Starling décrit la régulation hétérométrique (changement de longueur de la fibre musculaires cardiaque) : la force de contraction de la fibre dépend de sa longueur au début de la contraction. Ainsi l’accroissement de la précharge (pression télédiastolique du ventricule gauche, voir 1.2.2 de ce chapitre) accroît l’énergie de contraction du ventricule et donc le volume d’éjection systolique, favorisant ainsi la vidange complète du ventricule gauche. Au-delà d’une certaine précharge, l’énergie de contraction diminue. Or, la longueur de la fibre dépend du retour veineux (c’est-à-dire du débit sanguin arrivant au cœur) qui est lui-même déterminé par : • la volémie, volume sanguin réparti entre les veines et les artères

chapitre V traitant de la thermorégulation à l’exercice, que le système cardiovasculaire joue un rôle extrêmement important dans le maintien de l’homéostasie (équilibre du milieu intérieur défini par Claude Bernard) par l’élimination de la chaleur « endogène » (c’est-à-dire, la chaleur générée à l’intérieur du corps par opposition à celle exogène générée par un élément extérieur comme la chaleur transmise par les radiations solaires) (Brengelmann, 1983).

1.6.2 Régulation du volume d’éjection systolique Le volume d’éjection systolique augmente, chez les sujets non entraînés jusqu’à 40 % de . VO2max . Cependant, récemment, Gledhill et al. (1994), ont montré que, chez les sportifs spécialistes des sports d’endurance (cyclistes de compétition), le volume d’éjection systolique continuait à augmenter jusqu’à des fréquences cardiaques de 190 bpm alors que les sujets de même âge et de même gabarit non entraînés, voyaient leur volume d’éjection systolique plafonner à partir de 120 bpm de fréquence cardiaque. Aucun plateau du volume d’éjection systolique n’était observé chez ces cyclistes. Le temps d’éjection (systole) et le temps de remplissage du ventricule gauche (diastole) étaient respectivement plus long et plus court chez les cyclistes. Ainsi, les sujets entraînés en endurance augmentent leur débit cardiaque non seulement grâce à la fréquence cardiaque mais également grâce à celui du volume d’éjection systolique et à l’augmentation du remplissage et de la vidange ventriculaires. En plus, ils sont capables d’avoir un taux de remplissage plus important que les

• • • •

la gravité terrestre la pompe musculaire la pompe respiratoire abdomino-thoracique la compliance du ventricule (ou la capacité d’étirement de la fibre myocardique) • « l’effet Laplace » : qui stipule que la tension « pariétale » (de la paroi), nécessaire pour entraîner une pression donnée dans une cavité, varie proportionnellement avec le rayon de cette cavité. L’épaississement secondaire des parois du cœur, conséquence de l’entraînement, serait du à l’effet Laplace, puisque le volume sanguin à mobiliser est plus important.

sujets non entraînés en endurance, et ce à la même fréquence cardiaque de 190 bpm. En effet, pendant la diastole, pour les cyclistes, le taux de remplissage du ventricule gauche était de 86 % plus grand que le taux de vidange (1880 ml . s-1 contre 1010 ml . s-1). Pour les non-entraînés, le taux de remplissage n’est que de 32 % supérieur à celui de la vidange (1 100 ml . s-1 contre 830 ml . s-1). Ainsi pour les cyclistes, la précharge ou mise en tension du ventricule gauche due à une plus grande compliance (c’est-à-dire la capacité de changer de longueur pour une force donnée, soit l’inverse de la raideur) était très supérieure à celle des non-entraînés. Cette mise en tension maximum des fibres musculaires du myocarde est extrêmement favorable à sa bonne vidange. Il semble que l’habitude de mobiliser à l’entraînement des débits cardiaques de l’ordre de 30 l. min-1 rende le cœur compliant, utilisant les propriétés d’élasticité de la fibre musculaire décrites par Frank-Starling (voir encadré 11), de façon efficace pour pouvoir mobiliser une masse de sang plus importante (Gledhill et al., 1994). Le volume d’éjection systolique (VES) est régulé, au repos tout comme à l’exercice, par trois variables : (1) le volume de fin de diastole appelé aussi le « volume télédiastolique » (VTD) ; (2) la pression sanguine aortique moyenne ; (3) la force de contraction du ventricule. Le volume télédiastolique est souvent considéré comme une précharge et influence le volume d’éjection systolique de la façon suivante. Deux physiologistes, Frank et Starling, ont démontré que la force de contraction du ventricule croissait avec l’augmentation

111

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

du volume télédiastolique (qui avait pour conséquence d’étirer les ventricules). Cette relation est « la loi de Frank-Starling » (encadré 11) appliquée au cœur. Cet accroissement du volume télédiastolique provoque donc un allongement des fibres cardiaques et augmente la force de contraction du myocarde. Une augmentation de la contractilité cardiaque provoque une augmentation de la quantité de sang pompée à chaque battement cardiaque et donc accroît le volume d’éjection systolique. La principale variable qui influence le volume télédiastolique est le niveau du retour veineux au cœur. Une augmentation du retour veineux entraîne celle du volume télédiastolique et par conséquent celle du volume d’éjection systolique.

1.6.3 Régulation du retour veineux pendant l’exercice Cinq mécanismes principaux permettent l’augmentation du retour veineux : (1) La constriction (rétrécissement) des veines (il s’agit alors d’une veinoconstriction, (2) l’action de pompage des muscles squelettiques se contractant (3) l’action de pompage du système respiratoire (pompe respiratoire), 4) la pression aortique, 5) les autres facteurs possibles. 1) La veinoconstriction : elle augmente le retour veineux en réduisant le volume de sang stocké dans les veines. La veinoconstriction apparaît par un réflexe de constriction sympathique des muscles lisses qui entourent les veines. Cette action est stimulée par le centre de contrôle cardiovasculaire (Rowell, 1986). Figure 37 Les facteurs qui régulent le débit cardiaque. Les variables qui stimulent le débit cardiaque ont une flèche associée à un signe plus (+) et celles qui le réduisent ont une flèche associée à un signe moins (–)

2) L’action de pompage des muscles squelettiques est le résulat de l’action mécanique de la contraction rythmique des muscles squelettiques. Lorsque les muscles se contractent, ils compriment les veines et repoussent le sang vers le cœur. Entre les contractions musculaires, le sang remplit les veines et le processus se répète. Le sang ne peut refluer grâce à une

Pression artérielle moyenne – Débit cardiaque   = fréquence  cardiaque   volume d’éjection  systolique – + + + Nerfs Nerfs Force Volume du parasympathiquessympathiques de contraction ventricule télédiastolique + + étirement (Frank-Starling)

112

valve à sens unique que possèdent les grosses veines. Pendant l’exercice de type isométrique, pour lequel la contraction musculaire se fait sans raccourcissement, la contraction soutenue sans modification de la longueur du muscle comprime les veines sans relâchement. Cet effet de garrot diminue le retour veineux. 3) L’action de pompage due à la ventilation : Le modèle du rythme de la ventilation fournit une pompe mécanique favorisant le retour veineux. La pompe « respiratoire » travaille de la façon suivante : Pendant l’inspiration, la pression intrathoracique décroît et la pression abdominale augmente. Cela crée un flux sanguin de la région abdominale vers le thorax et favorise donc le retour veineux. Ce phénomène, existant déjà au repos, est amplifié à l’exercice par l’augmentation des volumes ventilés par les variations des pressions intrathoracique et abdominale grâce au déplacement vertical et antéropostérieur du muscle diaphragme (que nous décrirons dans le prochain chapitre traitant de la ventilation). 4) La pression aortique (la pression artérielle moyenne). Afin d’éjecter le sang dans l’aorte, la pression générée par le ventricule doit être supérieure à celle de l’aorte. Par conséquent, la pression aortique ou pression artérielle moyenne (appelée la « postcharge ») représente un obstacle à l’éjection du sang des ventricules. Le volume d’éjection systolique est inversement proportionnel à la postcharge ; c’est ainsi qu’une augmentation de la pression aortique (la postcharge) entraîne une diminution du volume d’éjection systolique. Heureusement, pendant l’exercice, la postcharge est minimisée grâce à la vasodilatation des artérioles dans les muscles actifs qui réduit la postcharge et favorise l’augmentation du volume d’éjection systolique. Le débit cardiaque augmente alors pour satisfaire les besoins en oxygène et en nutriments du métabolisme accru des masses musculaires en action. 5) Les derniers facteurs qui influencent le volume d’éjection systolique sont la noradrénaline et l’adrénaline circulantes ainsi que la stimulation sympathique directe du cœur par le nerf cardioaccélérateur. Ces deux facteurs augmentent la contractilité cardiaque par l’accroissement de la quantité de calcium disponible pour la cellule myocardique. (Guyton, 1986).

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

En résumé, le débit cardiaque est le produit du volume d’éjection systolique et de la fréquence cardiaque. Cette dernière est déterminée par l’interaction des systèmes sympathique et parasympathique. Le système parasympathique a pour action de baisser la fréquence cardiaque alors que le système nerveux sympathique l’accélère. Le volume d’éjection systolique est

1 Les caractéristiques physiques du sang utiles

à la compréhension de la dynamique cardiovasculaire

Le sang est composé de deux principaux composants : (1) le plasma et (2) les « éléments figurés » du sang. Le plasma est la portion aqueuse du sang qui contient les ions, les protéines et les hormones. Les éléments figurés qui constituent le tissu sanguin sont : les « globules rouges », les « plaquettes » et les « globules blancs ». Les globules rouges contiennent l’hémoglobine utilisée pour le transport de l’oxygène. Les plaquettes jouent un rôle important dans la coagulation sanguine, et les globules blancs sont essentiels pour la prévention des infections. La fraction sanguine qui représente le rapport entre le volume des globules rouges et celui du plasma est appelée « l’hématocrite ». Si un individu a un hématocrite de 40  %, cela signifie que son sang est pour 40  % composé de globules. Étant donné que les globules rouges constituent la majeure partie des éléments figurés, l’hématocrite représente donc essentiellement le pourcentage de globules rouges contenus dans un volume sanguin donné. Ainsi, l’hématocrite normal d’un homme et d’une femme jeunes est respectivement de 42  % et 38  %. Ces valeurs fluctuent selon les individus et dépendent notamment de la spécialité sportive et des conditions environnementales physiques de cet entraînement. Nous verrons qu’en altitude (voir chapitre V, 1.7 p. 168), le sang soumis à la baisse de pression partielle en oxygène est le siège d’une augmentation des globules rouges permettant donc de fixer davantage d’oxygène par unité de volume sanguin (hématocrite pouvant alors s’élever jusqu’à 60  %) ce qui ne va pas sans altérer l’écoulement du sang en raison de l’augmentation de sa viscosité. Ceci constitue d’ailleurs un élément défavorable à l’efficacité du dopage sanguin, procédant par injection de ses propres globules rouges (« l’auto-transfusion »). Le sang étant plusieurs fois plus visqueux que l’eau, cette viscosité augmente la difficulté d’écoulement du sang à travers le système cardiovasculaire. Un des agents de cette viscosité est la concentration en globules rouges. Ainsi, en cas « d’anémie » où la concentration en globules rouges chute, la viscosité du sang est diminuée. Inversement, une augmentation de l’hématocrite, ainsi que nous l’avons évoqué pour l’altitude ou l’autotransfusion, va augmenter la viscosité sanguine.

Chapitre 3

déterminé par l’interaction du volume télédiastolique, de la stimulation sympathique du cœur et de la pression artérielle moyenne. On peut résumer l’action des variables influençant le débit cardiaque par le schéma de la figure 37.

1.6.4 Régulation de la pression sanguine Une des caractéristiques les plus importantes du système cardiovasculaire est cette configuration en boucle. Le débit sanguin qui circule à travers le système circulatoire résulte de la différence de pression entre les deux extrémités du système. Afin de comprendre la régulation physique du flux sanguin vers les tissus, il est nécessaire d’apprécier les relations entre la pression, le débit et les résistances, ces facteurs étant appelés les facteurs « hémodynamiques ». À cette fin, un rappel des composants du sang 1 est utile.

1.6.5 Relation entre pression, résistances et débit sanguin Ainsi que nous l’avons mentionné, la circulation sanguine dépend en partie de la différence de pression aux deux extrémités du système circulatoire. Si la pression à ces deux extrémités est égale, il n’y aura pas d’écoulement. Au contraire, si elle est supérieure à une des extrémités, le sang circulera alors de la région à haute pression vers celle à basse pression. Le débit sanguin sera alors proportionnel à la différence de pression entre les deux extrémités (P1-P2). La pression artérielle moyenne est de 100 mm Hg (il s’agit de la pression sanguine aortique), alors que la pression qui lui est opposée à l’autre bout du circuit est de 0 mm Hg (celle de l’oreillette droite). Par conséquent, la pression d’écoulement du sang à travers le circuit cardiovasculaire sera égale à 100 – 0 = 100 mm Hg. On doit noter que le débit sanguin est proportionnel à la différence de pression entre les deux extrémités du circuit, mais inversement proportionnel aux résistances. Cette proportionnalité inverse est mathématiquement transcrite par le fait que les résistances à l’écoulement sont sous la barre de fraction, en tant que dénominateur selon la formule : PressionDébit sanguin =  -------------------------Résistance

où  Pression est la différence de pression entre les deux extrémités du système circulatoire. Notons que le débit sanguin peut être accru soit par l’augmentation de la pression sanguine, soit par une diminution des résistances périphériques. Une augmentation par cinq du débit sanguin pourrait donc

113

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

rayon vasculaire selon la formule donnée par la « Loi de Poiseuille » :

Figure 38 Pression sanguine dans la circulation systémique. La baisse de pression est directement proportionnelle à la résistance de chaque portion de l’arbre vasculaire.

16

Pression systolique

L R = 8------------4 r

Pression sanguine (kPa)

12

où R est la résistance à l’écoulement du sang dans le circuit vasculaire, L est la longueur du vaisseau, est la viscosité sanguine, r le rayon vasculaire et  = 3,14.

Diamètre vasculaire Pression diastolique

En d’autres termes, une augmentation de la longueur du vaisseau ou de la viscosité du sang a pour effet une augmentation proportionnelle à la résistance de son écoulement alors qu’une réduction de moitié du rayon des vaisseaux augmenterait les résistances de 24 = 16 fois. Les résistances à l’écoulement du flot sanguin dépendent donc de la vasomotricité (capacité physiologique à augmenter ou diminuer le diamètre des vaisseaux).

8

4

Veines

Veinules

Capillaires

Artérioles

Artères

Aorte

0

être provoquée par une augmentation par cinq de la pression artérielle, ce qui serait préjudiciable pour la santé. Heureusement, l’augmentation du débit cardiaque pendant l’exercice est d’abord réalisée par l’abaissement des résistances périphériques.

Figure 39 Régulation cardiovasculaire à l’exercice : vue d’ensemble

Quels facteurs contribuent à la résistance du flux sanguin ? Celle-ci est directement proportionnelle à la longueur du vaisseau et à la viscosité du sang. Cependant, la variable la plus importante déterminant les résistances vasculaires est le diamètre du vaisseau sanguin, puisque la résistance vasculaire est inversement proportionnelle à la quatrième puissance du

Commande centrale (centres corticaux supérieurs)  Centre de contrôle cardiovasculaire  Barorécepteurs (dans le tronc cérébral)   Vaisseaux sanguins Cœur  dans le Muscle squelettique (Chémorécepteurs et Mécanorécepteurs)

114

Dans des circonstances ordinaires, la viscosité du sang et la longueur des vaisseaux ne sont pas modifiées. C’est pourquoi le premier facteur régulateur du flux sanguin à travers l’organisme est le rayon des vaisseaux. La modification de ce rayon est d’autant plus efficace qu’il agit à la puissance 4 dans la contribution de la résistance à l’écoulement du sang. Le sang va donc être distribué de façon plus ou moins importante à tel ou tel organe selon ses besoins, et ce grâce au jeu de vasoconstriction et vasodilatation des vaisseaux afférents à l’organe en question. Lors de l’exercice physique, le métabolisme accru des muscles sera satisfait (tout au moins pour les exercices d’intensités inférieures au seuil de début d’accumulation lactique) par l’élargissement de leurs artérioles, de leurs capillaires qui vont rendre possible l’augmentation du débit sanguin local. Nous envisagerons ultérieurement cette question importante de la redistribution du débit cardiaque en débits locaux en fonction du type d’activité physique. La figure 38 décrit les changements de pression sanguine dans les différents vaisseaux de l’organisme. La plus grande résistance vasculaire se situe au niveau des artérioles, ce qui permet de maintenir le niveau du débit sanguin en dépit de la baisse de pression artérielle, selon la formule vue précédemment : Pression Débit sanguin =  --------------------------Résistance

L’augmentation des résistances compense la variation de pression sanguine qui chute au niveau des artérioles où s’enregistrent 70 %-80 % de la chute de la pression artérielle. Lors de l’exercice, afin de satisfaire les besoins en oxygène, le flux sanguin du muscle

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

doit augmenter. Cette hausse est possible par deux mécanismes : à la fois (1) par l’augmentation du débit cardiaque et (2) par une redistribution du flux sanguin des territoires inactifs vers ceux qui sont actifs. Nous allons donc décrire ces mécanismes participant à la régulation de ces ajustements.

1.6.6 Régulation des ajustements cardiovasculaires à l’exercice Nous avons vu que les ajustements cardiovasculaires en début d’exercice étaient très rapides. Quel est le mécanisme qui contrôle ces ajustements ? La théorie actuelle qui prévaut est celle dite de « la commande centrale » (Mitchell, 1990). Cette théorie développe l’idée que les modifications initiales des paramètres cardiovasculaires enregistrées lors d’un exercice dynamique sont dues à une commande centrale c’est-à-dire par le système nerveux central. Cependant, l’activité cardiovasculaire peut être modifiée par les mécanorécepteurs musculaires et cardiaques (capteurs sensibles à l’étirement de la fibre musculaire cardiaque et squelettique), par les chémorécepteurs musculaires (sensibles à l’acidose musculaire), ainsi que par les barorécepteurs situés, comme nous l’avons vu, dans les artères carotides et l’aorte. Ainsi, certains récepteurs musculaires (appelés des chémorécepteurs) sont sensibles à l’augmentation des métabolites musculaires (le potassium, l’acide lactique, etc.) et envoient des messages aux centres cérébraux pour ajuster la réponse cardiovasculaire. Ce type de contrôle rétroactif (feed-back) du cortex sur le centre de contrôle cardiovasculaire, est appelé le « réflexe de la pression à l’exercice » (Mitchell, 1990). Les mécanorécepteurs musculaires (les fuseaux neuromusculaires, les organes tendineux de Golgi) sont sensibles à la force et à la vitesse du mouvement musculaire. Ces récepteurs, comme les chémorécepteurs musculaires envoient une information aux centres corticaux supérieurs pour renforcer la modification cardiovasculaire à un exercice donné (Rowell, 1986). Enfin, les barorécepteurs, qui sont sensibles aux changements de la pression sanguine artérielle, doivent également renvoyer des informations vers le centre de contrôle cardiovasculaire pour contribuer à rendre plus précis l’ajustement cardiovasculaire pendant l’exercice. Ces barorécepteurs sont importants puisqu’ils régulent la pression sanguine artérielle autour d’une pression systémique élevée. En résumé, la théorie de la commande centrale propose qu’au début de l’exercice, le signal initial vers le système cardiovasculaire provienne des centres corticaux supérieurs. Cependant, la réponse cardiovasculaire est ensuite affinée grâce à

Chapitre 3

une série de boucles rétroactives partant des chémorécepteurs, des mécanorécepteurs musculaires et des barorécepteurs artériels (figure 39). La part respective de ces boucles rétroactives reste encore à préciser en fonction de l’intensité de l’exercice.

1.7

Exercice et réponses circulatoires

1.7.1 Réponses circulatoires à l’exercice Les modifications de la fréquence cardiaque et de la pression sanguine qui apparaissent à l’exercice dépendent du type de l’intensité et de la durée de l’exercice et des conditions environnementales dans lesquelles s’est déroulé l’exercice. Par exemple, un exercice de bras sollicitant la même valeur absolue de consommation d’oxygène (1,5 l/min par exemple), entraînera une fréquence cardiaque plus élevée qu’un exercice de jambe.

.

Il faut noter que cette valeur de VO2 ne représentera pas la même valeur relative de la consommation maximale possible avec les bras ou les jambes, sauf pour les kayakistes de haut niveau qui sont capables de consommer autant d’oxygène avec leurs membres supérieurs, dont la masse est relativement importante par rapport aux jambes, qu’avec les membres inférieurs. La valeur de consommation maximale d’oxygène des membres supérieurs ne représente généralement que 70-80 % de la valeur obtenue en pédalant avec les jambes et un peu moins par rapport à la course ou la marche contre forte pente. chez un sujet non entraîné. Cette même valeur de VO2 n’est pas obtenue avec le même débit cardiaque. En effet, les exercices sollicitant de plus petites masses musculaires entraînent une plus haute valeur de fréquence cardiaque pour un même débit sanguin musculaire. La pression artérielle induite sera plus élevée en raison des résistances périphériques supérieures dans les bras, les diamètres de leurs artérioles étant plus réduits que ceux des membres inférieurs. De même, un exercice effectué dans des conditions chaudes et humides entraîne une augmentation de la fréquence cardiaque (ce que nous rediscuterons dans le chapitre V traitant des conditions particulières d’environnement et de leurs effets sur la réponse physiologique à l’exercice).

1.7.2 Émotions et fréquence cardiaque L’augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle due à un stress psychologique (comme une ambiance de violence en sport collectif) est négociée par l’activité du système sympathique.

115

4000 3000 2000

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

200

10 150

1000 0

4

100

180

Fréquence cardiaque (bpm)

Consommation d'oxygène (mlO2 . mn -1)

5000

Lactate mmol/l

Chapitre 3

Fréquence cardiaque (bpm)

140 120 80 110

Volume d'éjection systolique ml/contraction

100 90 80

100

Figure 40

z

Évolution de la consommation d’oxygène (●), fréquence cardiaque (▲) et lactatémie (❏) durant un test de performance sur bicyclette ergométrique jusqu’à épuisement.

200 300 Puissance (W)

400

Après le « trac » qui peut saisir une championne olympique du 400 m au départ de la finale où elle doit tenter de conserver son titre, l’effort maximal efface toute modification cardiovasculaire par rapport à un simple 400 m de série. Les valeurs maximales ne sont donc pas affectées par les facteurs émotionnels qui sont masqués par les stimulations dues à la puissance métabolique exigée, du moins pendant l’effort.

1.7.3 Fréquence cardiaque et transition du repos à l’exercice Au début d’un exercice se produit une augmentation rapide de la fréquence cardiaque, du volume d’éjection systolique et du débit cardiaque. Il a été montré que la fréquence cardiaque et le débit cardiaque commençaient à augmenter dans les premières secondes d’un exercice. Si l’exercice est effectué à puissance constante et en dessous du seuil de début d’accumulation lactique, on obtient alors en 2 à 3 minutes un plateau de la fréquence et du débit cardiaques (sauf en conditions chaudes et humides précisément). Cette réponse est parallèle à celle de la consommation d’oxygène. Nous examinerons ultérieurement ce qui se passe pour les exercices sévères dans le chapitre VI (point 1.4.6 et 1.4.10) traitant de la calibration de la charge d’un exercice, la composante lente d’ajustement de la consommation d‘oxygène se surajoutant à cette phase d’ajustement rapide lors d’un exercice dont la puissance est supérieure à celle de l’état stable maximal du lactate sanguin (Gaesser et Poole, 1996).

1.7.4 Fréquence cardiaque postexercice La récupération après un exercice bref ou un exercice de basse intensité est généralement rapide.

116

15

Débit cardiaque l/mn

10 5 200 ys on s ssi Pre

160 120

Pression sanguine mm Hg

tol yq

ar té Pression

ue

rielle

moyenne

Pression drast olique

80 2500 2000

Consommation d'oxygène ml/mn

1500 1000 500

Résistances périphériques totales mmHg/100ml/mn

0,015 0,0100,005 14 12

Différence d'oxygène artério-veineux

10 8

mlO2/100ml sang

6 4

.

Watts 0

%VO2 max

Figure 41

20

50 40

100 60

150 200 80

100

¹

Réponses cardiovasculaires pendant un exercice incrémenté. Les valeurs physiologiques typiques d’un sédentaire sont rapportées en fonction de . la puissance fournie (watts) et du pourcentage de V O2max. La zone hachurée représente le seuil lactique.

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

Les vitesses de récupération varient d’un individu à l’autre et sont fonction du niveau d’entraînement en endurance. La pente de diminution de la fréquence cardiaque postexercice est la même quel que soit le niveau d’entraînement. La différence réside dans le fait que, pour une même puissance absolue d’exercice, le sportif entraîné a une fréquence cardiaque inférieure à celle du non-entraîné, il revient donc plus rapidement à une valeur de 100 bpm. Celle-ci est encore largement au-dessus de sa fréquence cardiaque de repos, plus basse que celle du non-sportif d’endurance (4045 bpm pour le sportif d’endurance contre 55-65 bpm pour le sportif non endurant) . Les femmes ont des valeurs supérieures de 10 bpm à celles des hommes pour le même niveau d’entraînement. La récupération d’un exercice de longue durée (1 heure et plus) est beaucoup plus lente en raison de l’élévation de la température interne, ce qui s’accentue en cas de pratique en environnement chaud et humide.

Ainsi, le débit cardiaque et la fréquence . cardiaque atteignent un plateau à 100 % de VO2max (figure 41). Ce point détermine un plafonnement pour le transport de l’oxygène vers les muscles squelettiques et est contemporain du plafonnement de la consommation d’oxygène. Nous discuterons en point 2 de ce chapitre de l’importance du plafonnement du débit cardiaque dans la limitation de la performance aérobie.

1.7.5 Fréquence cardiaque et exercice d’intensité croissante

1.7.6 Fréquence cardiaque et exercices intermittents

La réponse cardiovasculaire d’un exercice par palier de puissance progressivement augmentée (incrémentée) est illustrée en figure 40. On peut constater que la fréquence cardiaque augmente de façon linéaire en fonction de la puissance de l’exercice tout comme la consommation d’oxygène. Ainsi il existe une relation linéaire entre la consommation d’oxygène, la puissance de l’exercice et la fréquence cardiaque et ce jusqu’au plafonnement de la fréquence cardiaque et de la consommation d’oxygène à leur valeurs maximales : . Fc max et VO. 2max . Cependant, cette linéarité de la relation FC – VO2 est actuellement remise en question (Gaesser et Poole, 1996).

Si l’exercice est discontinu (par « intervaltraining » , entraînement procédant par alternance de puissances élevées et faibles), la diminution de la fréquence cardiaque pendant la période de récupération dépend du niveau de condition physique du sujet. Du rapport entre la durée des répétitions à hautes et basses puissances, va dépendre l’évolution de la fréquence cardiaque.

Nous verrons que ces relations de proportionnalité sont largement exploitées pour l’estimation de la consommation maximale d’oxygène à partir de tests sous-maximaux pour lesquels on mesure la fréquence cardiaque. Ainsi l’épreuve indirecte de la mesure de la consommation maximale d’oxygène extrapole, à partir de deux ou trois valeurs de fréquences cardiaques et de puissances sous-maximales, la valeur de la consommation maximale d’oxygène correspondant à la fréquence cardiaque maximale théorique (selon la formule : 220 l’âge en années). Ce test mis au point par Astrand et Ryhming (1954) est encore largement utilisé car il ne nécessite qu’une bicyclette ergométrique (certes bien étalonnée) et un cardiofréquence-mètre. Cependant, son degré de précision est soumis à la validité de la fréquence cardiaque maximale théorique telle que nous l’avons envisagée pour les sujets de 40 ans.

Chapitre 3

L’augmentation du débit cardiaque pendant un exercice progressivement croissant est rendue possible par une diminution des résistances périphériques à l’écoulement du sang et par une augmentation de la pression artérielle moyenne. L’élévation de la pression artérielle moyenne pendant l’exercice à puissance incrémentée est due à l’augmentation de la pression systolique, puisque la pression diastolique reste quasiment constante pendant toute la durée de l’exercice incrémenté.

Nous verrons, dans le chapitre VI traitant de l’entraînement (point 1.10.3 en particulier), que des intervalles de 15 .secondes courus à 100 % de la . vitesse associée à VO2max (vVO2max ),. alternés avec 15 secondes courues à 40-50 % de vVO2max , vont conduire la fréquence cardiaque à sa valeur maximale dès la 5e répétition et ce jusqu’à la fin de la séance. Dans une perspective d’amélioration du débit cardiaque maximal, on peut donc considérer que ce type d’entraînement intermittent est efficace, d’autant que l’accumulation d’acide lactique est évitée. Au contraire, si la séance d’interval-training a pour objectif d’augmenter la capacité lactique, la vitesse de course . devra être supérieure à. 110 % de vVO2max (vitesse minimale qui sollicite VO2max ) et la durée de travail, de l’ordre de 45 secondes à 1 minute (où la glycolyse est le métabolisme le plus sollicité). La récupération est alors passive (marchée ou immobile), la fréquence cardiaque revenant à sa valeur proche de 90-100 bpm, le cœur ne consommant pas l’acide lactique accumulé pendant la répétition à haute vitesse. En effet, l’un des avantages de la récupération active est que le myo-

117

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

Figure 42 210

Diminution de la fréquence cardiaque FC en battements par min (bpm) à la même vitesse de course chez une athlète olympique de 5 000 m FC 2002 : fréquence cardiaque après une année d’entraînement en quantité FC 2003 : fréquence cardiaque après une saison qualitative d’exercice à base d’entraînement au volume d’éjection systolique maximale.

FC bpm

200

190

180

FC 2002

170

FC 2003 160

150

y = 6,2381x + 147,18 v

140 10

12

14

16

18

20

22 21,2 km/h

carde reste en activité pour une fréquence de 120-130 bpm. Or, il faut préciser ici que le myocarde est un muscle de type lent et qu’il a la particularité d’avoir des isoenzymes de la lacticodéhydrogénase (LDH), les isoenzymmes LDH-H, (H comme « heart« favorisant l’oxydation de l’acide lactique en acide pyruvique), alors que l’isoenzymme LDH-M (M comme muscle) favorise la réduction de l’acide pyruvique en acide lactique (voir la glycolyse présentée dans le premier chapitre).

1.7.7 Fréquence cardiaque et exercice prolongé Pendant un exercice de longue durée (1 heure et plus) donc réalisé à une intensité inférieure à celle du début d’accumulation lactique, le débit cardiaque est stable. Cependant, le volume d’éjection systolique diminue en raison de l’augmentation de la température interne du corps (40 °C à la fin d’un marathon couru à 25 °C est une température couramment rencontrée chez les coureurs). Cette augmentation de la température interne provoque une dérive du débit sanguin vers la peau avec en plus une baisse du volume plasmatique due à la déshydratation. Ce processus contribue à diminuer le retour veineux vers le cœur, ce qui va effectivement réduire le volume d’éjection systolique. Pour faire face à la

118

R2 = 0,9606 2002 y = 6,8214x + 138 R2 = 0,9756 2003

demande métabolique qui ne diminue pas au cours d’une épreuve à vitesse constante, le débit cardiaque est maintenu constant grâce à l’augmentation de la fréquence cardiaque. Ainsi une course sollicitant un débit cardiaque de 15 l/min pendant 1 h 30 avec une fréquence cardiaque de 130 bpm à la 30e minute (avec un volume d’éjection systolique de 115 ml/bt) va se terminer avec un débit cardiaque toujours égal à 15 l/min, mais avec une fréquence cardiaque de 160 bpm et un volume d’éjection systolique égal à 93 ml/bt. Un marathon se termine souvent à une fréquence cardiaque proche de la fréquence cardiaque maximale (FC max) alors que la vitesse n’est que de . 75-80 % de vVO2max dans les deux derniers kilomètres, sauf pour les sportifs de très haut niveau qui arrivent à conserver leur vitesse de course tout au long de l’épreuve (mais il faut remarquer qu’ils ne courent « que » 2 h 07 contre 3 h 00 et plus pour le coureur de loisir).

1.7.8 Le volume d’éjection systolique plafonne-til avant d’atteindre la fréquence cardiaque maximale ? Le volume d’éjection systolique est LE facteur central déterminant de l’augmentation de la consommation maximale d’oxygène. Nous avons tous observé un abaissement de la fréquence d’entraînement pour une même vitesse postentraînement et ce même chez

Chapitre 3

Théorie du système cardiovasculaire et entraînement sportif

.

85 80 75 70 65 60 55 50 4

8

12

16

20

24

28

32

36

40

Distance parcourue au marathon

maximal avec le produit du volume d’éjection systolique maximal et de la fréquence cardiaque maximale. De nouvelles perspectives s’offrent à nous, physiologistes de l’entraînement, désireux de comprendre la marge de progression d’un athlète en considérant le . décalage entre le VO2 au débit cardiaque maximal et le . VO2 à la fréquence cardiaque maximale. Un grand décalage doit donc nous orienter vers un entraînement à fréquence cardiaque maximale alterné avec un entraî. nement à VO2max . Nous avons développé une méthode d’entraînement dans ce sens que nous présenterons dans un . ouvrage spécifiquement dédié à l’amélioration de VO2max du sprint au Marathon.

Figure 43

Pour un effort à puissance constante de type 5000 m il importe d’avoir une augmentation rapide de . VO2 afin d’éviter l’aggravation d’un déficit en oxygène initial, préjudiciable aux variations de vitesse et au sprint final. Lorsque nous réalisons un effort épuisant de 12 min à une puissance intermédiaire, entre la puis-

Évolution du débit cardiaque (L.min-1) et de la vitesse de course au cours du marathon (en km.h-1) du même coureur à 3h30 en fonction de la distance parcouru au marathon (en km).

Évolution du . . % de la vitesse associée à V O2max(v V O2max ou VMA) en fonction de la distance parcourue (en km) au marathon chez un coureur à 3h30.

Figure 44

14

30

13

25

12 20 11 15 10

Débit cardiaque (L · min–1)

Sur un modèle d’exercice par paliers croissants, . protocole classique d’évaluation de VO2max et du seuil ventilatoire et lactique (voir chapitre VI 1.5.4 p. 224), nous avons démontré que la déflection de la fréquence cardiaque, décrite par Conconi et al. (1982), comme un moyen de détecter le seuil lactique, corres. pondait en réalité au VO2 (ou à la puissance, ou à la vitesse), à laquelle le volume d’éjection systolique plafonne (Lepretre et al. 2005). Ainsi cela consisterait en un mécanisme d’adaptation cardiaque favorable au temps de remplissage cardiaque pré-éjection ainsi qu’à celui nécessaire à son éjection. C’est pourquoi le fameux test de Conconi (voir chapitre VI, 1.5.8 p. 232) basé sur la détection de la déflection de la fréquence cardiaque en fonction de la vitesse de course, ne fonctionnait pas sur certains athlètes qui n’avaient pas ce phénomène de plafonnement tardif du volume d’éjection systolique. L’équation gagnante au plan cardiovasculaire est en fait de pouvoir le plus possible augmenter son débit cardiaque du repos à l’exercice et d’avoir un volume d’éjection systolique qui monte jusqu’à . VO2max sans plafonnement voire même de déflection (observé chez des insuffisants cardiaques). Étant donné que le débit cardiaque est le produit du volume d’éjection systolique et de la fréquence cardiaque, il est n’est pas toujours possible d’obtenir un débit cardiaque

Vitesse en % vVO2max

La validation d’un appareil de mesure du débit cardiaque par impédancemétrie (Physioflow, Manatec, Charloux et al. 2000) a permis de démontrer que le volume . d’éjection systolique ne plafonnait pas. à 50 % de VO2max mais bien autour de 100 % de VO2max chez des sportifs entraînés. Cet appareil français a été agréé aux États-Unis par la FDA (Food and Drug Administration) surtout grâce à nos recherches en conditions extrêmes (Mont blanc, marathon de Paris). En effet, nous avons pu investiguer sur des sportifs entraînés alors qu’auparavant toutes les mesures étaient réalisées par méthode de Fick (1870) (avec cathéter artériel) ou par l’inhalation d’un gaz enrichi en CO2 (méthode du rebreathing CO2 ; Franciosa, 1977). La technique par impédancemétrie repose sur la variation de la résistance électrique (impédance) des tissus du tronc en fonction de la variation du flux sanguin entre chaque battement cardiaque. En 2008, nous avons miniaturisé cet appareil qui nous a permis de réaliser les toutes premières mesures au cours d’un marathon (le marathon de Paris, 2010 et 2011). Nous vous présentons ici les surprenants résultats publiés depuis (Billat et al. 2012).

90

Vitesse (km · h–1)

des athlètes de niveau olympique après une seule année d’exercice basé sur la qualité plutôt que la quantité (figure 42).

10

9 8

5 4

8

12

16

20

24

28

32

36

40

Distance parcourue au marathon Vitesse

Débit cardiaque

119

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

sance au seuil lactique et la puissance maximale aérobie (soit 90 % de PMA pour ce groupe de 9 sujets hommes et femmes dont l’âge moyen est de 31 ans et . -1.min-1), nous le VO2max moyen est de 51 ml.kg . observons une augmentation de VO2 en moins de 3 min. Ceci est possible grâce à l’augmentation de l’extraction périphérique de l’oxygène par les muscles (différence artério-veineuse) et ce en moins de 2 min, ce qui est plus rapide que l’augmentation du débit cardiaque (4 min) en raison de la lente montée du volume d’éjection systolique (en 4 min). On observe même une augmentation continue du volume d’éjection systolique tout au long de l’épreuve alors que la fréquence cardiaque n’augmente que très légèrement. Cela témoigne d’une bonne adaptation à l’effort mais on peut considérer que la cinétique d’ajustement cardiaque ne peut être raccourcie que par un entraînement fractionné basé sur la connaissance de la cinétique d’ajustement cardiaque de l’athlète. Nous réalisons à présent en routine cet audit physiologique énergétique qui permet d’offrir à chaque personne un entraînement qualitatif relatif à l’ajustement cardiaque et ce avec le souci de moindre dépense énergétique. Mais que se passe-t-il sur le marathon ? Observe-t-on les mêmes cinétique lorsque que la déshydratation menace le coureur de malaise vagal (c'està-dire, d’une véritable désamorce de sa pompe cardiaque) ? Pour répondre à ces questions, entrons au cœur de notre débit cardiaque en course.

1.7.9 Le volume d’éjection systolique et le débit cardiaque sont-ils des facteurs limitants sur le marathon ? Le volume d’éjection systolique et le débit cardiaque ne sont pas des facteurs limitant sur le marathon. En effet, ainsi que nous pouvons le découvrir sur les figures 43 et 44, le débit cardiaque est stable ou augmente même au cours du marathon. En effet, le volume d’éjection systolique est stable et la fréquence cardiaque augmente légèrement en raison d’une adaptation thermique (voir chapitre V). En revanche, la vitesse de course baisse surtout au-delà du 15ème et 30e km. Par conséquent le coût cardiaque, c'est-à-dire, le débit cardiaque par mètre parcouru augmente de façon significative. C’est pourquoi, même si nos cardiofréquencemètres actuels ne mesurent pas encore le débit cardiaque, on peut avoir une bonne estimation de la variation de ce débit par la fréquence cardiaque, à condition que le volume d’éjection systolique soit stable. On peut supposer que dans les conditions d’hydratation normales il n’y aura pas de diminution de ce volume. Il arrive encore de voir des coureurs

120

allongés les jambes relevées, méthode utilisée pour vaincre un malaise vagal causé par un désamorçage de la pompe cardiaque et/ou par une déshydratation.

1.7.10 Concept de la vitesse de plafonnement du volume d’éjection systolique Nos avons vu précédemment dans le chapitre III (1.5.8) que la déflection de la fréquence cardiaque correspondait au début de plafonnement du volume d’éjection systolique et que nous devions tenir compte de cette vitesse de plafonnement du volume d’éjection systolique à l’entraînement. En effet nous allons aborder .la question des différentes combinaisons d’atteinte de VO2max au plan central ou périphérique en fonction de la vitesse de course (interval training courts ou longs entre 90 et 100% de VMA). La consommation maximale d’oxygène peut être atteinte avec différentes combinaisons de débit cardiaque et de différence artério-veineuse maximale. À l’entraînement, nous sollicitons souvent . VO2max sans distinction de sollicitation du facteur central ou périphérique de celui-ci. Nous avons vu que . la cinétique de ses deux composants de VO2 ne sont pas similaire et que la différence artério-veineuse s’ajustait plus rapidement que le débit. cardiaque participant ainsi à l’ajustement rapide de VO2 eu égard au besoin énergétique de la puissance imposée. En effet, nous avons montré (Leprêtre et al. 2004) que lors d’un exercice de temps limite (tlim) à la puissance intermédiaire entre le seuil lactique et PMA (delta 50) soit 88 % de PMA pour ce groupe de sportifs de 33 ans . ayant un VO2max moyen de 65 ml.kg.-1.min-1 (avec 13 h d’entraînement hebdomadaire), VO2max était atteint lors de l’exercice de temps limite (tlim c’est-àdire au temps de soutien) à 88 % de PMA (tlim = 12 min) alors que le débit cardiaque maximal n’était pas atteint en raison d’un volume d’éjection systolique qui n’avait pas encore atteint sa valeur maximale. Ce débit cardiaque maximal plus faible était composé par une plus grande différence arterioveineuse grâce à un maintien de la saturation artérielle de sang en oxygène (SaO2) qui peut baisser à PMA (hypoxémie induite par l’exercice que nous allons considérer dans le chapitre IV, 2.2). En effet, nous avons appris que chez les sujets entraînés, le volume d’éjection augmentait jusqu’à PMA. Par conséquent, il faut entraîner ces sportifs à PMA pour solliciter leur volume d’éjection systolique d’entraînement maximal. En revanche à PMA . sur un exercice de temps limite . (100 % VO2max ) (tlim = 5 à 12 min), VO2max était atteint avec un plus haut débit cardiaque. Mais les sportifs subissaient une hypoxémie induite par l’exer-

Applications : sollicitation cardiaque à l’entraînement

cice et de ce fait une diminution de leur SaO2 et donc des facteurs périphériques de la consommation d’oxygène. Il importe d’apprendre aux sportifs à ventiler durant l’exercice intense et de tenir compte de cette spécificité des entraînements à 90 % et 100 % de PMA en variant le type d’interval training.

2.

Applications : sollicitation cardiaque à l’entraînement

2.1

Fréquence cardiaque et intensité d’exercice

En enregistrant la fréquence cardiaque par télémétrie (cardiofréquence-mètre actuellement couramment vendu sur le marché) et en reportant la valeur moyenne à la fréquence cardiaque maximale du sujet (qui est de 220 – l’âge en années pour la valeur théorique selon Astrand et Rhyming, 1954), on peut connaître l’intensité relative de l’exercice. En effet, nous avons vu, selon l’équation de Fick, que la fréquence cardiaque augmente proportionnellement à la consommation d’oxygène jusqu’à la fréquence cardiaque maximale à l’atteinte de la consommation maximale d’oxygène. Nous verrons, dans le chapitre VI concernant l’évaluation de l’aptitude physique, que l’atteinte de FC max est un des critères d’atteinte de la consommation maximale d’oxygène. Ce rapport de proportionnalité est quelque peu modifié dans des conditions de chaleur et pour les exercices de longue durée où la fréquence cardiaque, prédite pendant un test à vitesse croissante procédant par paliers de 3 minutes, dérive, témoignant de la nécessaire augmentation des débits sanguins cutanés pour évacuer la chaleur endogène. Quoi qu’il en soit, la fréquence cardiaque donne une indication fiable de l’intensité relative de l’exercice, et ce pour les exercices d’au moins 2 minutes (durée minimale pour laquelle la fréquence cardiaque est le reflet du métabolisme aérobie). En accord avec Aunola et al. (1978) dans Karvonen et Vuorimaa (1988), les valeurs relatives de fréquence cardiaque et de consommation d’oxygène sont bien corrélées pour les exercices d’intensité modérée. Pour les exercices d’intensité supérieure (lactatémie  à 4 mmol/l), la fréquence cardiaque relative chez des athlètes entraînés en endurance avec . un seuil lactique au-dessus de 80 % de VO2max , se situe au seuil à 87 % de FC max (Karvonen, 1983). Ainsi, le pourcentage de FC max est calculé selon la formule de Karvonen (juin 1983) :

Chapitre 3

FC – FC FC maximale – FC repos

exercice repos % FC max = -----------------------------------------------------

Cette formule permet de calibrer l’exercice en fonction de « la réserve cardiaque » qui est la différence entre la valeur maximale de la fréquence cardiaque et celle de repos. En outre, la même fréquence cardiaque (170 bpm), enregistrée lors d’un exercice pour deux sportifs de même âge (20 ans) avec la même fréquence cardiaque maximale théorique (220 – l’âge = 200 bpm), mais avec des fréquences cardiaques de repos différentes (70 contre 45 bpm), révélera une intensité relative d’exercice différente : Pour le sportif dont la fréquence cardiaque de repos = 70 bpm, une fréquence cardiaque de 170 bpm représentera : % FC max = 170 – 70/200 – 70 = 100/130 = 77 % Pour le sportif dont la fréquence cardiaque de repos = 45 bpm, une fréquence cardiaque de 170 bpm représentera : % FC max = 170 – 45/200 – 45 = 125/155 = 81 % Même si la différence paraît ténue, elle doit être prise en compte, surtout dans cette zone d’intensité d’exercice pour laquelle la courbe d’accumulation d’acide lactique est d’allure exponentielle. Si l’on applique le simple rapport % FC max = FC travail/FC max, on obtient pour les deux sportifs les valeurs suivantes : % FC max = FC travail/FC max = 170/200 = 85 % ce qui surestime les valeurs précédentes. « L’American College of Sports Medicine » (ACSM), association américaine de chercheurs et de médecins spécialistes des activités physiques et sportives, a établi le consensus scientifique et médical concernant la zone d’intensité idéale pour s’entraîner, dans une perspective d’amélioration de l’endurance et de la santé de la population. La zone de fréquence cardiaque cible est de 60 à 90 % de la fréquence cardiaque maximale, calculée selon la méthode de Karvonen ci-dessus, et ce pendant 15 à 60 minutes par séance, 2 à 3 fois par semaine (ACSM, 1991). Cette charge d’entraînement serait optimale pour se maintenir en bonne santé sans objectif de compétition. Afin de prédire à quelle vitesse doit s’entraîner un coureur (par exemple) pour être à 80 % de sa fréquence cardiaque maximale, on peut utiliser l’équation suivante :

121

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

FC travail = (FC max – FC repos)  % FC max + FC repos Si FC max = 198 bpm et FC repos = 80 bpm on aura : FC travail = (198 bpm - 80 bpm)  80 % + 80 bpm = 118  0,80 + 80 = 174 bpm Ensuite, il suffit de savoir qu’à 12 km/h il était à 160 bpm et qu’à 15 km/h il était à FC max (198 bpm). (198 – 160)/(15 – 12) = 38/3 = 12,66 bpm Donc, pour 1 km/h d’augmentation de la vitesse de course, ce sujet augmente sa fréquence cardiaque de 12,66 bpm. Si on veut qu’il travaille à 174 bpm, ce qui représente 80 % de FC max, on devra donc le faire courir (en appliquant le rapport de proportionnalité entre la fréquence cardiaque et la vitesse de course) à : vitesse de course à 174 bpm de fréquence cardiaque = 12 km/h + (174 – 160)/12,66 = 12 + (14/12,66) = 12 + 1,10 = 13,1 km/h Ce calcul est applicable aux exercices continus, ainsi qu’à tous les sports au caractère intermittent, dans le cadre d’une préparation physique où les exercices continus sont encore utilisés en début de saison. Il faut noter que la fréquence cardiaque de repos peut s’élever en cas de fatigue due à une surcharge d’entraînement incompatible avec la capacité de récupération du sportif, car la fréquence cardiaque est sensible au surentraînement (Lehman, 1993).

2.2

Adaptations du cœur à l’exercice

La répétition d’exercices de longue durée entraîne une augmentation du volume d’éjection systolique qui est influencé par un accroissement de la contractilité du myocarde, le volume télédiastolique diminuant. En effet, le myocarde se contracte plus rapidement. Cette vitesse de contraction est la conséquence d’une activité accrue de l’enzyme ATPase, des flux calciques transsarcolémiaux (Dowell et al., 1976), à l’image de l’adaptation du muscle squelettique à l’entraînement. Encore faut-il distinguer les différents types d’entraînement. L’amélioration de la contractilité cardiaque à l’exercice est négociée par une augmentation du volume de fin de diastole qui étire davantage le myocarde et favorise sa contraction, selon la courbe tension-longueur de Frank-Starling qui intervient pour les exercices d’intensité soutenue (Weiss et al., 1979 dans Deligiannis et al., 1995). En effet, Morganroth et al. (1975 dans Deligiannis et al., 1995) ont mis en évidence qu’un entraînement à base d’exercice concentrique

122

(dynamique) amène une augmentation du volume du ventricule gauche sans épaississement de ses parois, alors que des exercices isométriques (statiques) avaient l’effet inverse. Pourtant, peu de données expérimentales ont corroboré cette tendance (Concu et Marcello, 1993). Ainsi, Ikaheimo et al. (1979) (dans Concu et Marcello, 1993) ont trouvé les deux types de modification (augmentation du volume et de l’épaisseur du cœur) après un entraînement en endurance. Anatomiquement, à l’instar de la fibre musculaire squelettique, l’hypertrophie cardiaque se définit comme un accroissement de la masse musculaire myocardique avec une augmentation du volume des fibres cardiaques musculaires (cardiomyocites) et du nombre de myofibrilles. Il n’y aurait donc pas d’hyperplasie. Afin de préciser l’influence d’un type d’entraînement spécifique, Deligiannis et al. (1995), ont comparé les réponses cardiaques de coureurs de longues distances, d’haltérophiles et d’un groupe contrôle de non-sportifs lors d’un exercice sousmaximal de type concentrique (dynamique) à une puissance d’exercice de pédalage assis sollicitant une fréquence cardiaque de 170 bpm. Notons que cette valeur de 170 bpm ne représentait pas le même pourcentage de fréquence cardiaque maximale puisque ces deux groupes de sportifs n’avaient pas la même fréquence cardiaque de repos (57 bpm et 66 bpm pour les coureurs de longue distance et les haltérophiles respectivement). Les dimensions du cœur étaient mesurées par échocardiographie et par des équations détaillées dans l’article de Deligiannis et al. (1995). Cette étude a effectivement montré une différence significative au repos et à l’exercice entre les deux groupes :

 au repos : une dilatation du ventricule gauche chez les coureurs de longues distances alors que les haltérophiles présentent une augmentation de l’épaisseur des parois. Les deux groupes de sportifs ont cependant augmenté la masse de leur ventricule gauche après entraînement.

 à l’exercice (170 bpm) : le volume du ventricule gauche de fin de diastole augmente pour les coureurs de longues distances, reste identique pour le groupe de non-sportifs (groupe contrôle) et diminue pour les haltérophiles. En fin de systole, le volume du ventricule gauche diminue dans les trois groupes. Les auteurs concluent que cette dilatation du ventricule gauche chez les coureurs de longues distances dépend de leurs caractéristiques cardiaques, avec l’allongement des fibres (appelée « hypertrophie excentrique»). Cette capacité du ventricule gauche à utiliser le

Applications : sollicitation cardiaque à l’entraînement mécanisme de Franck-Starling à 170 bpm est le principal facteur qui améliore la contractilité du ventricule gauche des athlètes entraînés en endurance. Cependant, cette hypertrophie cardiaque touche les quatre cavités cardiaques sans altération associée des fonctions systoliques et diastoliques (Carré, 1994). La part respective des facteurs déclenchants, hormonaux et génétiques de cette hypertrophie cardiaque, hémodynamique, reste encore discutée (Carré, 1994). La baisse de la fréquence cardiaque de repos, appelée la « bradycardie » de repos, serait secondaire à l’accroissement du volume d’éjection systolique, permettant ainsi de maintenir le même niveau basal du débit cardiaque sans augmenter la fréquence cardiaque (Colan et al., 1987 dans Carré, 1994). Cette bradycardie serait due simultanément à la stimulation du nerf parasympathique et à l’inhibition du sympathique, mais également à des adaptations cellulaires au niveau du nœud sino-auriculaire (Booth et Thomason dans Carré, 1994). Elle permet un meilleur remplissage diastolique et une perte d’énergie moindre lors de la contraction cardiaque. Le lecteur qui voudrait compléter ses connaissances concernant l’hypertrophie cardiaque d’adaptation du sportif peut se reporter à l’excellente revue de question écrite en langue française par François Carré (1994).

2.3

Cœur et performance

Voici une question encore largement débattue. Nous avons considéré, dans le premier chapitre et ultérieurement dans le chapitre VI (point 1.4) traitant de l’évaluation de l’aptitude physique et de l’entraînement, l’importance de la consommation maximale . d’oxygène VO2max dans l’accomplissement de la performance et de la relation intensité maximale - temps limite pour . les exercices durant plusieurs minutes. En effet, VO2max est la plus grande quantité d’oxygène consommée par les muscles par minute. À ce propos, la rigueur physiologique exige que l’on. distingue . la consommation d’oxygène musculaire (Q O2 = Q c  CaO2 – C v O2) du « prélèvement d’oxygène. dans l’air . ambiant échangé au niveau pulmonaire (VO2 = V E  FIO2 – FEO2) où FIO2 et FEO2 sont respectivement la fraction inspirée et expirée d’oxygène dans l’air ambiant. Les Anglo-saxons ont deux mots pour distinguer la consommation d’oxygène selon son mode de calcul : « oxygen uptake » au niveau pulmonaire et « oxygen consumption » au niveau musculaire, définie par l’équation de Fick. L’équation de . la consommation . d’oxygène au niveau pulmonaire (VO2 = V E  FIO2 –

Chapitre 3

FEO2), sera explicitée et développée dans l’encadré 19. Pour les exercices sous-maximaux réalisés en état stable (c’est-à-dire à vitesse ou puissance constante), on peut estimer qu’au bout de deux minutes, la consommation d’oxygène mesurée à la bouche est le reflet exact de la consommation d’oxygène telle que Fick l’aurait mesurée de façon invasive. Cependant, cette méthode pulmonaire non invasive est plus compatible avec une exploration chez l’homme sain effectuant un exercice maximal. Quelle que soit la méthode de mesure, la consommation d’oxygène fixe la quantité d’ATP qui peut être resynthétisée (à partir de l’ADP et du Pi, voir chapitre I, 1.4.5 p. 26) grâce à l’énergie de la combustion des nutriments par l’oxygène. Rappelons que chaque litre d’oxygène consommé représente une « mise à disposition » d’énergie égale à environ 5 kcalories (nous verrons que cela. dépend . du quotient respiratoire c’est-à-dire du rapport V CO2/VO2). Nous savons, depuis les travaux de Hill (1927), que la consommation maximale d’oxygène est un facteur déterminant de la performance pour toutes les épreuves de plus de deux minutes. Cette valeur diminue avec l’âge et est égale à 70 ans à 60 % de celle relevée à 20 ans. Revenons à la question de savoir si le système cardiovasculaire peut être responsable de la limite de la consommation d’oxygène maximale. La consommation d’oxygène de repos est similaire chez le sportif spécialiste des épreuves de longue durée (dit sportif « d’endurance ») et le non-sportif : 0,3 l/min. Cependant, la valeur maximale de la consommation d’oxygène est au moins deux à trois fois supérieure chez le sportif d’endurance. Reconsidérons l’équation de Fick (voir encadré 7 p. 100) :

.

.

.

VO2 (ou Q O2 strictement) = Q c  (CaO2 – C v O2) La consommation d’oxygène peut être limitée à plusieurs niveaux par : –

la ventilation pulmonaire

Population (âgée de 20 ans)

.

VO2max (ml/kg/min)

SaO2 ( %)

Tableau 14a Valeurs de la saturation de l’hémoglobine en oxygène (SaO2), de la quantité d’hémoglobine (Hb), du contenu artériel en oxygène (CaO2) lors d’un effort . réalisé à V O2max, pour trois populations . dont les valeurs de V O2max sont très différentes. D’après les données de Ekblöm (1969), de Ekblöm et Hermanssen (1968), de Saltin et al. (1976) dans Sutton (1992).

[Hb] (g/l)

CaO2 (ml/l)

Sédentaires

38

94,0 (92-96) 158 (149-169) 200 (188-218)

Sportifs non entraînés en endurance

52

94,5 (92-96) 159 (151-163) 201 (191-208)

Sportifs entraînés en endurance

74

93,0 (89-95) 151 (147-162) 188 (179-204)

123

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

la quantité d’hémoglobine (Hb), transporteur de l’oxygène dans le sang, et le niveau de saturation de l’hémoglobine par l’oxygène (SaO2 = HbO2/Hb) qui vont déterminer le contenu artériel en oxygène (CaO2) puisque CaO2 = SaO2  1,34  HbO2.

de VO2max entre les trois populations. Le volume des ventricules et la force de contraction du myocarde qui contribuent à pomper un volume sanguin ventriculaire important vont être déterminants dans l’augmentation du débit cardiaque pour satisfaire les besoins métaboliques accrus des muscles en activité.



le débit cardiaque (Q c) dépend, nous l’avons vu, du volume d’éjection systolique (VES) . et de la fréquence cardiaque (FC) ; en effet Q c = VES  FC.



la circulation périphérique qui dépend ellemême du flux sanguin intracapillaire, donc du nombre de capillaires qui entourent chaque fibre musculaire, de la diffusion de l’oxygène des capillaires à l’intérieur de la fibre musculaire et de l’extraction de l’oxygène du cytoplasme dans la mitochondrie, à l’intérieur même de la cellule musculaire.

L’autre point critique du transport d’O2 est la capacité de diminuer en aval les résistances périphériques permettant, par l‘ouverture de nombreuses artérioles et capillaires de recevoir cet important débit cardiaque. Cette ouverture des capillaires va en outre permettre d’augmenter le temps de contact du sang riche en oxygène avec les cellules musculaires, ce qui favorise l’extraction. En outre, l’entraînement en endurance augmente l’activité enzymatique oxydative, ce qui laisse supposer que cette adaptation va favoriser la balance anaérobie/aérobie dans le sens du métabolisme aérobie.



le métabolisme lui-même à l’intérieur de la mitochondrie par le cycle de Krebs et la chaîne respiratoire sur les crêtes mitochondriales. Le métabolisme dépend du rapport entre les enzymes cytoplasmiques de la glycolyse anaérobie et des enzymes oxydatives dans leur capacité à réoxyder les équivalents réducteurs, NADH et FADH (voir encadré 3a p. 35).

.

Si on considère la part de responsabilité de cha. cun de ces maillons déterminant VO2max , maillons qu’il n’est pas toujours aisé de distinguer, on peut attribuer au système cardiovasculaire une responsabilité non négligeable, dans la mesure où la baisse de la fréquence cardiaque maximale avec l’âge (0,7 battements/min par an) est proportionnelle à celle de . VO2max . Une autre façon d’apprécier l’importance du débit cardiaque dans la détermination interindividuelle de la valeur de la consommation d’oxygène est de considérer ces composantes pour des populations dont . les valeurs de VO2max sont très différentes (sédentaires, sportifs entraînés ou non en endurance). Le tableau 14a expose les différentes valeurs de . VO2max et de saturation de l’hémoglobine en oxygène, de la quantité d’hémoglobine et du contenu artériel en oxygène. On peut dès lors constater que le contenu artériel en oxygène (CaO2) n’est pas très différent entre ces populations, ce qui laisse supposer que le débit cardiaque, en particulier le volume d’éjection systolique, constitue l’élément essentiel de la différence

124

.



Concluons avec Sutton (1992), chercheur récemment disparu et qui fut l’un des plus grands physiologistes spécialistes de l’exercice en altitude, que la consommation maximale d’oxygène dépend du lien optimum entre tous les chaînons qui constituent le transport de l’oxygène des poumons vers les capillaires. De tous les déterminants de la consommation d’oxygène qui se modifient avec l’entraînement en endurance, le système cardiovasculaire semble le plus adaptable et, à l’intérieur de ce système, le volume d’éjection systolique paraît le plus important et le plus sensible à l’entraînement en endurance. Nous pouvons donc, à notre tour, conclure que le maillon cardiaque déterminant la consommation maximale d’oxygène, parce qu’il est adaptable, s’avère, dans une perspective dynamique de progression par l’entraînement, le facteur le moins limitatif de la performance aérobie. Nous verrons que ce n’est pas le cas de la fonction pulmonaire qui est beaucoup plus rigide et souffre d’un déterminisme génétique plus prégnant ; en effet, le système pulmonaire n’est que peu perfectible avec l’entraînement, ainsi que l’exposait au premier congrès du Collège Européen des Sciences du Sport, l’éminent Brian J. Whipp. (1996). La fonction pulmonaire, à l’image de celle des chevaux de course, peut s’avérer un facteur limitatif de la performance chez des athlètes de haut niveau mobilisant presque 200 litres d’air par minute à leur consommation maximale d’oxygène de près de 6 litres/minute (Dempsey et al., 1984).

Le système cardiovasculaire, second facteur limitant de la consommation maximale d’oxygène

3.

Le système cardiovasculaire, second facteur limitant de la consommation maximale d’oxygène

Nous avons considéré la fonction musculaire par la force de contraction comme étant le PREMIER . facteur limitant de VO2max chez les personnes désentraînées ou entraînés mais âgées de plus de 50 ans. Cependant, pour les autres sportifs, le système cardio vasculaire est considéré comme étant le facteur le plus déterminant de la consommation maximale d’oxygène . (VO2max ). Dans cette troisième partie de ce chapitre qui lui est consacré, nous allons examiner cette hypothèse.

3.1

Aspects centraux et périphériques de l’apport en oxygène

En effet, l’apport en oxygène (oxygen. delivery en Anglais) est le transport total d’oxygène . (Q O2) qui serait Le facteur limitant essentiel de VO2max après celui de la force musculaire. Ce transport est le produit de la concentration en hémoglobine (Hb) par le nombre de ml d’oxygène transporté pour chaque gramme d’hémoglobine multiplié par le taux de la saturation artérielle en oxygène (SaO2) c’est-à-dire la fraction de la quantité d’hémoglobine saturée en oxygène, une saturation de presque 100 % assurant un transport optimal multiplié par le flot sanguin.par unité de temps c’est-à-dire le débit cardiaque Q T selon l’équation suivante :

.

.

Q O2 = 1,34 × [Hb] × SaO2 ×Q T

.

Où Q O2 est en ml. min-1, Hb est le taux (concentration) sanguin d’hémoglobine (la même dans les artères et les veines), SaO2 est le pourcentage de . saturation du sang artériel en oxygène et Q T est le débit cardiaque en ml. min-1. L’équation ci-dessus est valable pour l’organisme en entier mais il faut bien avoir à l’esprit que chaque tissu a son propre débit sanguin et que la répartition des débits à l’exercice privilégie la masse musculaire et le cerveau au détriment de la sphère digestive. Cette équation ne tient pas compte d’une barrière qui peut être déterminante dans les apports d’oxygène : celle dans la microcirculation tissulaire c’est-à-dire les échanges de sang entre la mitochondrie d’un côté et les capillaires, les artérioles et les veinules de l’autre. L’entraînement contribue à non seulement augmenter le nombre de mitochondries mais à les faire migrer en périphérie. Il est certain que la modification spatiale des protéines musculaires avec

Chapitre 3

l’entraînement est la variable de demain et les techniques d’imagerie du petit animal (rat, souris) par résonnance magnétique nucléaire dont est équipé l’institut Curie à Paris et sera sans doute une piste à explorer état donné que l’action des protéines dépend de leur configuration dans l’espace. L’entraînement pourrait agir rapidement sur cette configuration avant d’en modifier la quantité. L’apport en oxygène n’est tout de même pas le seul facteur limitant de la consommation d’oxygène puisque la saturation du sang veineux . mêlé.en oxygène dans est encore d’environ 20 % (SV O2) .à VO2max avec un contenu du sang veineux mêlé CV O2 égal à 4 ml.100 ml de sang (voir encadrés 7 à 9 sur l’équation de Fick). C’est pourquoi l’extraction de l’oxygène c’est-àdire la différence artério-veineuse en oxygène . ne peut être négligée dans le gain potentiel de VO2max à l’entraînement. La figure 45a résume le transport de l’oxygène depuis l’air ambiant aux tissus musculaires. L’extraction peut se résumer à l’équation :

.

V O2 = DO2PCAPO2-PMITO2 Où, DO2 est un coefficient global de conductance (de diffusion) de l’oxygène depuis le globule rouge à la mitochondrie. PCAPO2 et PMITO2 sont les pressions moyennes en oxygène respectivement microvasculaire (capillaire) et mitochondriale. Prenons l’exemple de la diffusion de l’O2 de l’alvéole dans le sang capillaire. La pression partielle d’O2 dans l’alvéole (PAO2) est de 100 mm Hg, alors que la pression partielle d’O2 dans le sang qui entre dans le capillaire pulmonaire (PvO2) est de 40 mm Hg. Ce gradient de pression permet la diffusion de l’O2 de l’alvéole dans les globules rouges où la pression partielle d’O2 s’élève rapidement, même si une partie de l’oxygène qui a diffusé se lie à l’hémoglobine et ne participe donc pas à l’élévation de pression partielle. Dans des conditions de repos, les pressions partielles d’O2 dans l’alvéole et dans le globule rouge s’équilibrent alors que le globule rouge n’a parcouru qu’un tiers de la longueur du capillaire, et la pression partielle d’O2 à la fin du capillaire (PaO2) est donc peu différente de (PAO2) dans l’alvéole. Au cours d’un exercice musculaire intense, la diffusion est normale, même si le débit sanguin augmente et si le temps de passage des globules rouges dans les capillaires pulmonaires diminue passant par exemple de 0,75 sec à 0,25 sec. La diffusion ne devient alors anormale que si la barrière alvéolocapillaire est épaissie et qu’elle ralentit le passage de l’oxygène.

125

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

Figure 45a.

(= 1), la PAO2 est de 100 mm Hg et la PACO2 de 40 mmHg. Dans une unité pulmonaire qui a un rapport ventilation-perfusion diminué parce que la ventilation est altérée comme dans le cas d’un œdème pulmonaire (infiltration d’eau) en haute altitude par exemple. Dans ce cas alors que la perfusion est maintenue, la pression partielle des gaz dans l’alvéole s’équilibre avec la pression partielle dans le sang à l’entrée du capillaire : la PAO2 peut atteindre 40 mmHg et la PACO2 45 mmHg. Dans une unité pulmonaire qui a un rapport ventilation-perfusion augmenté parce que la perfusion est altérée alors que la ventilation est maintenue, la pression partielle des gaz (oxygène et gaz carbonique) dans l’alvéole se rapproche de celle des gaz inspirés : la PAO2 peut atteindre 150 mmHg et la PACO2 pratiquement 0 mm Hg. Il existe des différences régionales dans les rapports ventilation-perfusion. Chez un sujet assis ou debout, la ventilation alvéolaire est plus importante à la base du poumon qu’à son sommet. Cette différence est encore plus marquée pour la perfusion de sorte que le rapport ventilation-perfusion est beaucoup plus élevé. au sommet qu’à la base. Les facteurs limitants de VO2max sont principalement situés au niveau du transport de l’oxygène en particulier au niveau du volume d’éjection systolique, mais également au niveau du passage de l’alvéole pulmonaire au capillaire pulmonaire par une inadéquation entre le rapport ventilation perfusion, le poumon étant bien ventilé dans ses sommets (apex) et bien perfusé à la base ; le rapport ventilation/perfusion n’est donc pas optimal.

Environnement

Modèle simplifié du transport de. l’oxygène de l’air ambiant au muscle. V O2max Ventilation O2 Poumons Diffusion pulmonaire de l’oxygène Transport circulatoire de l’oxygène Sang

Diffusion musculaire de l’oxygène Fibre musculaire

ADP

ATP

Cr ADP

3.2

Utilisation musculaire de l’oxygène

PCr ATP

Turnover musculaire de l’ATP

Importance du bon rapport ventilation/perfusion

Les échanges gazeux entre alvéoles et capillaires nécessitent une adéquation entre ventilation et perfusion. Dans une unité pulmonaire (alvéole + capillaire) qui a un rapport ventilation-perfusion normal

Il est remarquable de constater que nous ventilons 30 litres d’air pour ne consommer que 1 litre

. VO2 en L.min-1 2700 2400

. VO2

2100

1800 kpm/min

4.0

1650 x

3.5

Figure 45b.

3.0

.

Atteinte de V O2max en moins de 3 minutes d’un effort épuisant (Astrand et Saltin, 1961)

2.5 subject 1 0

126

1

2

3

4

5

6

7 min

Temps en minute

Le système cardiovasculaire, second facteur limitant de la consommation maximale d’oxygène

d’oxygène. De plus, la ventilation ne plafonne pas. De là à conclure que le poumon n’est pas entraînable car surdimensionné, il n’y a qu’un pas largement admis dans la communauté scientifique qui considère même que les larges poumons des plongeurs est le résultat d’une sélection naturelle plutôt que celui de l’entraînement. Cela n’empêche pas de commercialiser des appareils pour renforcer les muscles ventilatoires en entretenant une confusion entre le phénomène de ventilation-perfusion qui peut induire une hypoxémie induite par l’exercice et celui du coût en oxygène des muscles respiratoire au-delà de 70 Litres par minute (où l’élasticité du mouvement de ventilation doit être assurée par un travail supplémentaires des muscles intercostaux). Les muscles de la respiration sont les muscles qui déplacent les côtes et modifient ainsi le volume de la cage thoracique. Les muscles qui soulèvent les côtes sont appelés muscles inspiratoires et les muscles qui abaissent les côtes sont appelés muscles

Conséquence de 50 % de réduction de chaque . variable sur la variation de VO2max

Chapitre 3

expiratoires. Les deux muscles principaux sont le diaphragme et les scalènes avec en plus, les muscles interosseux qui sont des muscles inspiratoires, insérés sur la paroi du thorax. Ces muscles ventilatoires peuvent consommer jusqu’à 25 % de la consommation d’oxy. gène totale du corps à VO2max surtout en altitude. La question est de savoir quels sont les facteurs limitants entre le cardiovasculaire (transport de l’oxygène) ou le métabolique (phosphorylation oxydative). Mais nous verrons ultérieurement que ces facteurs ne sont pas exclusifs mais sont tous déterminants de façon décalée dans le temps de l’effort. Le consensus principal est que la fourniture d’oxygène est, dans des conditions normales non pathologiques, le facteur limitant . principal. VO2max est généralement associé à un exercice épuisant, « sustained extreme physical exertion », (Wagner, 1996).

Variable de transport

Conséquence de 50 % d’augmentation de chaque variable Sur.la variation de VO2max

Au niveau de la Mer PIO2 = 149 mmHg – 48,4

Concentration de l’oxygène inspiré (FIO2 en %)

+ 11,1

– 18,0

Ventilation (litres par minute)

+ 4,2

– 33,8

Capacité de diffusion pulmonaire

+ 7,2

.

+ 2,3

– 37,8

Concentration en hémoglobine [Hb]

+ 4,3

– 33,7

Capacité de diffusion musculaire

+ 5,5

– 38,5

Débit cardiaque (Q en litres par minute)

Au sommet de l’Everest PIO2 = 43 mmHg

Tableau 14b

– 51,5

Concentration de l’oxygène inspiré (FIO2 en %)

+ 44,7

– 11,6

Ventilation (litres par minute)

+ 5,1

– 34,7

Capacité de diffusion pulmonaire

+ 19,7

– 1,2

.

Débit cardiaque (Q )

– 3,2

– 10,4

Concentration en hémoglobine [Hb]

+ 2,2

– 33.6

Capacité de diffusion musculaire

+ 14,9

Pourcentage . d’augmentation ou de réduction de V O2max pour 50 % d’augmentation ou de réduction de chaque variable du transport de l’oxygène en normoxie (au niveau de la mer) et en hypoxie extrême (au niveau de l’Everest) pour un athlète élite plutôt sensible aux hypoxémie induite par l’exercice jouant un rôle majeur en altitude en hypoxie (d’après Wagner, 1996).

127

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

Tout au long de ces 25 dernières années, nos travaux ont quelque peu battu en brèche cette vue classique. L’exercice est interrompu par le sujet qui ne peut plus supporter l’exercice qui est généralement fixé à une puissance donnée. En effet, l’approche classique est la même que celle de Hill car elle consiste à augmenter la puissance par paliers de 1 à 6 minutes ou par paliers de puissance indépendants. En 1961, Astrand et Saltin, les leaders de la prolifique école physiologique . suédoise, avaient mis en évidence que VO2max pouvait être atteint en passant du repos à une puissance d’exercice épuisant le sujet en moins de 3 minutes (fig. 45b d’après Astrand et Saltin B, 1961).

.

Cet arrêt volontaire de l’exercice à VO2max est causé par a) la perception d’un symptôme pénible comme celui d’un grand essoufflement, de pénibilité voire même de douleurs musculaires ; b) l’exercice qui doit être arrêté en raison d’une fatigue c’est-à-dire une incapacité à soutenir la puissance imposée en raison d’une baisse de cadence et/ou de force musculaire même avec une stimulation neuro-musculaire directe : l’effort ne peut être continué en raison d’une limitation de l’apport en oxygène et/ou d’une utilisation au sein de la mitochondrie. La solution pour lutter contre l’arrêt précoce de l’exercice est de varier la vitesse afin que tous les métabolismes aérobie et anaérobie puissent en quelque sorte être synchronisés afin que dans la phase de récupération de l’acide lactique puisse être éliminé et que la phosphocréatine resynthétisée à la façon d’une voiture hybride qui épuiserait sa batterie dans les phases d’accélération et la rechargerait dans la phase de décélération. La question à résoudre est de connaître la « signature de vitesse » ® de chaque personne en fonction de son profil énergétique, pour chaque durée d’exercice maximal (en compétition par exemple). À la lecture du tableau 14b on peut constater plusieurs éléments : a) En normoxie (au niveau de la mer) : l’ aug. mentation de VO2max est faible en fonction de la fraction inspirée en oxygène : en effet, une augmentation de 50 % de FIO2 (soit de 20 % de FIO2 à 40 % de FIO2 ne permet de gagner que 11,1 % de consommation maximale d’oxygène mais cette valeur est la plus élevée des augmentations par rapport à celle permise par 50 % d’augmentation de le ventilation, de la capacité de diffusion des poumon, du débit cardiaque, de la concentration en hémoglobine de la capacité de diffusion de l’oxygène dans les muscles.

128

b) Si l’augmentation des de.tous ces facteurs de 50 % ne permet pas d’augmenter VO2max que de très peu (bien que chez un athlète élite cela puisse être déterminant sur le classement final) au contraire leur diminution d’autant (– 50 %) a .des effets nettement plus marquées (délétères) sur VO2max : quasiment 4 fois supérieurs aux effets de l’ajout de 50 % de chacun d’entre eux. On remarque qu’une diminution de FIO2 de 50 % .(FIO2de 10 % au lieu de 20 %) entraîne une chute de VO2max de – 48 %. Tous les autres facteurs amputés. de 50 % entraînent également une forte baisse de VO2max de plus de 30 %. c) En hypoxie extrême au sommet de l’Everest où . l’on sait que VO2max est diminué par 5 par rapport à la normoxie, le facteur qui est le moins pénalisant quand on le . diminue de 50 % est le débit cardiaque (– 1,2 % de VO2max quand il est diminué de 50 %) Au contraire son . augmentation de 50 % entraîne une baisse de VO2max de 3,2 % en raison de la diminution du temps de contact alvéole-capillaire et capillaire-muscle.

3.3

Contribution du système cardiovascu. laire à l’augmentation de VO max 2

Jusque dans. les années 2000 et encore actuellement, la limite de VO2max admise est donc davantage · l’apport d’oxygène ( Q O2) que son utilisation au niveau musculaire.. Cependant il est admis que les facteurs limitants de VO2max dépendent du niveau d’aptitude physique de l’âge des sujets et du sexe et cela pas forcément dans les mêmes proportions. De plus nous verrons que pour les athlètes de. haut niveau, la ventilation est un facteur limitant de VO2max . Le cœur est le principal facteur limitant avec la contrainte d’assurer une pression sanguine élevée dans les territoires musculaires alors que le lit vasculaire augmente sous l’effet vasodilatateur des métabolites (un métabolite est un composé organique intermédiaire ou issu du métabolisme). De plus le point de consigne de la pression artérielle à laquelle va se référer le baro-réflexe va se décaler vers des valeurs plus élevées. Le facteur limitant cardiaque est le volume d’éjection systolique (ml de sang par battement cardiaque) qui dépend de la différence entre le volume ventriculaire gauche télé diastolique et celui télé systolique. Le volume d’éjection systolique plafonne à l’exercice à partir de 60 % de . VO2max chez.les sujets peu entraînés mais bien autour de 100 % de VO2max chez des sujets entraînés. On a récemment démontré que la déflection de la fréquence cardiaque interprétée dans les années 80 (test de Conconi d’après Conconi et al., 1982) comme étant

Le système cardiovasculaire, second facteur limitant de la consommation maximale d’oxygène

On peut donc réécrire l’équation de Fick selon l’équation suivante :

.

VO2max = (volume ventriculaire télé diastolique – volume ventriculaire télésystolique) × fréquence cardiaque × différence artério-veineuse en oxygène

.

.

Soit VO 2 = ves × FC × (CaO2-CVO 2) Puisque le volume ventriculaire télédiastolique – volume ventriculaire télésystolique est la définition du volume d’éjection systolique (VES) : volume de sang éjecté du cœur gauche par l’aorte à chaque battement cardiaque. Rappelons que le produit du volume d’éjection systolique (ves) et de la fréquence cardiaque (FC) est le débit cardiaque c’est-à-dire le volume de sang éjecté de l’aorte à chaque minute. La fraction d’éjection est une mesure de la capacité du cœur à se contracter efficacement. Elle se calcule en divisant le volume d'éjection systolique qui est la différence entre le volume télédiastolique (ventricule plein) et le volume télésystolique (volume du ventricule une fois vidée par la contraction de son muscle)) par le volume télédiastolique. A l’exercice à ves max, cette fraction d’éjection est de 60 % chez le sujet normal et jusqu’à 100 % chez un athlète mais peut descendre à 20 % chez un insuffisant cardiaque. L’entraînement en endurance dite « fondamentale » ou le LSD du training américain (Long Slow Distance Training) fut longtemps prôné en affirmant que cela permettait de s’entraîner à la fréquence cardiaque optimale permettant à la fois de s’exercer à la meilleure fraction d’éjection systolique et au volume d’éjection systolique maximal. Au-delà la fréquence cardiaque augmente et ne permet plus au myocarde de disposer suffisamment de temps pour se remplir entre les contractions et se vider. La mesure du volume d’éjection systolique par impédance (résistivité électrique des tissus) qui consiste à envoyer un courant électrique par une électrode placée au niveau de la carotide (cou) et de mesurer le temps mis à parcourir la distance la séparant d’une autre électrode placée sur la poitrine, permet de calculer par un algorithme un équivalent entre la variation d’impédance par unité de pulsations cardiaques et le flux sanguin. En effet, l’impédance est l’homologue de la résistance électrique des corps solides et elle est

modifiée par le passage d’un flux liquide dans le thorax, en l’occurrence le débit cardiaque. Depuis une quinzaine d’années nous utilisons un appareil (Physioflow®, Manatec, Petit Ebersviller, France) élaboré en France par une TPE (Très Petite Entreprise) familiale (cocorico). Nous pouvons mesurer le volume d’éjection systolique pour des effets supérieurs à ceux induisant une production supplémentaire de CO2 dû au tamponnement des ions H+ par les bicarbonates. En effet, HCO3 – réagit avec l’acide pour donner du CO2 (gaz) et de l’eau selon l’équation HCO3 – + H+ = > CO2 + H2O L’acide est un donneur de protons et une base comme le bicarbonate ou le NAD intervient dans la glycolyse comme un accepteur de protons). Grâce à cet outil (le Physioflow®) nous avons montré que le volume d’éjection systolique (ves) . . pouvait augmenter jusqu’à VO2max mais qu’à VO2max nous n’étions pas forcement à Vesmax. En effet, nous verrons que lors des intervalles training .long (plus de 3 minutes) il est possible de solliciter VO2max sans être . à Vesmax ni à FC max. Or nous avons vu que VO2max est un compromis, ou pour être plus positif, une optimisation des facteurs centraux (cardiaque) et périphérique (musculaire) de la consommation d’oxygène. Le challenge est . de trouver la stimulation qui permet de dépasser VO2max en repoussant ce compromis et en cherchant un autre état d’optimisation entre les facteurs musculaires et l’équation de Fick. Le tout est de savoir si ce changement d’état énergétique est un phénomène progressif procédant par des équa. tions différentielles partielles où VO2max change au cours de l’effort par un changement progressif de chacun de ses facteurs, ou par un effet seuil qui à un moment donné déclencherait une brusque augmentaFigure 45c

20

Pression capillaire pulmonaire (mmHg) en fonction du volume télédiastolique (ml) (d’après Levine 2008).

Pression capillaire pulmonaire

due à l’intervention accrue du métabolisme anaérobie avec le fameux seuil de 4 M (seuil dit anaérobie lac. tique) correspondait en fait au VO 2 (ou à la vitesse ou à la puissance) à laquelle le volume d’éjection systolique plafonne à l’exercice (Leprêtre et al., 2005).

Chapitre 3

ATHLÈTES NON-ATHLÈTES 0 150

200

250

Volume télédiastolique (mL)

129

Chapitre 3

LE

SYSTÈME CARDIOVASCULAIRE : ÉLÉMENT CLEF DE LA PERFORMANCE SPORTIVE

.

130

tion de VO2max par un changement simultané ou très important de plusieurs ou de l’un d’un de ses facteurs. Nous allons envisager cela dans les prochaines pages après avoir enquêté sur 25 années d’expérimentations sur le terrain et en laboratoire en faisant varier la situation de contrôle sur des personnes de profils énergétiques très différents. La mesure du volume d’éjection systolique et son suivi à l’entraînement est d’importance majeure car l’on a constaté qu’un entraînement à ves max chez les personnes seniors (50-80 ans) ou au contraire jeunes ( 0,5 est encore compatible avec des échanges gazeux optimaux entre poumon et sang capillaire (West et Wagner, 1991). Quel effet a l’exercice sur ce rapport ventilation/perfusion ? Nous avons déjà entrevu que l’exercice améliorait la perfusion de l’apex du poumon. Cependant, un exercice intense, réalisé à la consommation maximale d’oxygène ou à des intensités d’exercice . supramaximales (supérieures au débit d’énergie à VO2max ), détériore au contraire ce rapport ventilation/ perfusion dans le sens d’une moins bonne perfusion, ou ventilation, selon les auteurs (Hammond, 1986). Quoi qu’il en soit, les échanges gazeux à ces hautes valeurs de consommation d’oxygène et de débit ventilatoire seront affectés.

1.9

Transport d’O2 et de CO2 dans le sang

Bien qu’une partie d’O2 et de CO2 soit transportée dans le sang sous forme dissoute (moins de 1 % et 3 % respectivement), la plus grande partie de ces gaz est transportée dans le sang (à 99 %) par l’hémoglobine pour l’oxygène se transformant en oxyhémoglobine (HbO2), et sous forme de bicarbonate, HCO3pour 78 % du CO2.

1.9.1 L’hémoglobine L’hémoglobine (Hb) est une protéine contenue dans les globules rouges (voir chapitre III concernant le système cardiovasculaire) comprenant quatre sousunités composées de fer qui se combinent de façon réversible (pouvant se lier ou se libérer) avec une molécule d’oxygène. Un gramme d’Hb peut fixer 1,34 ml d’O2. Ainsi, la quantité d’oxygène qui peut être transportée par unité de volume du sang dépend de la concentration en hémoglobine. La concentration normale d’hémoglobine d’un homme et d’une femme en bonne santé est respectivement d’environ 150 et 130 grammes par litre de sang. Puisque qu’un gramme d’Hb peut fixer 1,34 ml d’O2, la capacité de transport de l’oxygène serait pour l’homme et la femme d’environ 200 ml et 174 ml par litre de sang. Cependant, l’hémoglobine n’est pas saturée à 100 % (mais à 98 % au repos ou pour des exercices légers accomplis au niveau de la mer). Il faut donc considérer ce que l’on appelle « la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine (HbO2) ».

143

Chapitre 4

LA

VENTILATION PENDANT L’EXERCICE

1.9.2 La courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine (HbO2) (figure 51) La combinaison de l’oxygène avec l’hémoglobine dans les capillaires alvéolaires (dans le poumon), est une forme de recharge du sang en oxygène, alors que la libération de l’oxygène depuis l’hémoglobine (dans les tissus actifs, comme les muscles) est appelée la décharge du sang en oxygène. Ces termes un peu imagés permettent de mieux entrevoir l’association et la dissociation de l’hémoglobine avec l’oxygène (oxyhémoglobine) selon le schéma suivant : Hb + O2  HbO2 où Hb est l’hémoglobine, et HbO2 l’hémoglobine liée avec une molécule d’oxygène ou oxyhémoglobine. Nous avons noté que cette réaction était réversible, ce qui est représenté par la flèche à double sens. Les facteurs qui déterminent le sens de cette flèche sont (1) la pression partielle en oxygène du sang (PaO2 pour le sang artériel ou P v O2 pour le sang veineux) et (2) l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène. Ainsi, une valeur élevée de PaO2 entraîne la réaction vers la droite, alors qu’une valeur basse de PaO2 ainsi qu’une baisse de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène l’entraînent vers la gauche, c’est-à-dire vers une dissociation de l’oxyhémoglobine en hémoglobine et oxygène, ce dernier étant libéré pour être utilisé dans les tissus par le métabolisme. L’effet de la valeur de PaO2 sur le sens de la réaction est parfaiteFigure 51 100

Courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine.

Différence art. vein. 5 vol. p. 100 ml

SaO2 (%)

80

Point artériel Courbe normale

Point veineux

60

40

20

0

20

40

60 PaO2 (mm Hg)

144

80

100

ment illustré par la fameuse courbe de « dissociation de l’oxyhémoglobine » représentée en figure 51. Cette courbe a la forme d’un « S » ; on dit d’ailleurs qu’elle est d’allure sigmoïde. Cela signifie que, dans la partie haute, plate du S, la baisse de PaO2 n’aura qu’un infime effet sur la diminution de HbO2 (dans le sens gauche de la flèche de la réaction décrite précédemment). Le second intérêt de cette forme sigmoïde est cette fois-ci représenté par la partie verticale du S qui montre que, pour une pression en oxygène de 0 à 40 mm Hg, le pourcentage de saturation en oxygène de l’hémoglobine va augmenter très rapidement. Or, nous avons vu que la pression veineuse en oxygène était de 40 mm Hg, après que l’oxygène avait été utilisé par les muscles. À 40 mm Hg de P v O2, pression en oxygène du sang veineux mêlé lorsqu’il arrivera (par les artères pulmonaires) aux alvéoles, l’hémoglobine sera « gourmande » d’oxygène favorisant la recharge du sang en oxygène. Lorsque la pression en oxygène PaO2 atteint 90-100 mm Hg, il n’est plus guère possible d’augmenter le pourcentage de saturation de l’hémoglobine en oxygène (SaO2). On arrive à une valeur de SaO2 d’environ 97-98 %. Au repos, les besoins de l’organisme étant 10 à 20 fois moins importants que lors d’une course à vitesse maximale sur .un 2 000 m (sollicitant spécifiquement le . VO2max ), le VO2 de repos étant de 0,3 l/min pour tous, seulement 25 % de l’oxygène transporté dans le sang est déchargé de l’oxyhémoglobine. Au contraire, lors du . 2 000 m, pour atteindre VO2max et faire face au débit d’énergie nécessaire pour courir à 20 km/h par exemple (6 minutes au 2 000 m), une consommation d’oxygène de 70 ml.min–1.kg–1 (pour un coût énergétique standard de 3,5 ml.min–1.kg–1 par km/h d’augmentation de la vitesse), soit 5 l/min environ pour un coureur de 70 kg, nécessitera un largage important, vers les muscles, de l’oxygène fixé sur l’oxyhémoglobine. Pour cette intensité d’exercice, 90 % de l’oxygène sont libérés par l’oxyhémoglobine. Le contenu veineux en oxygène peut alors chuter à 18-20 mm Hg, ce qui est plutôt favorable ensuite à la recharge du sang veineux en oxygène au contact des alvéoles pulmonaires, conformément à la partie verticale de la courbe sigmoïde. Nous pouvons donc constater que la forme de la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine est réellement adaptée aux besoins en oxygène de l’être humain. Ce fait prend toute son importance dans le cas de la baisse de la pression partielle en oxygène dans l’air ambiant, comme en altitude où avons vu en effet que l’air contenait toujours 20,9 % d’oxygène. Seule va baisser la pression barométrique totale soit 760 mmHg en plaine. Or, 20,9 % d’un élément moins important en valeur absolue, vont entraîner la baisse de

Théorie de la ventilation

la valeur de la pression partielle de l’oxygène. Nous considérerons ce point plus en détail dans le chapitre traitant de la pratique sportive en environnement physique particulier (voir chapitre V, 1.7 p. 168).

En plus des effets de la valeur de la pression sanguine en oxygène sur la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine, une modification de l’acidité du pH et de la température du sang ou encore de la teneur des globules rouges en un enzyme appelé « le 2-3 DPG » (2,3-diphosphoglycérate), peut affecter le sens de la réaction : Hb + O2  HbO2.

Figure 52

100

L’effet BOHR 80

SaO2 (%)

1.9.3 Effet du pH sanguin

Chapitre 4

pH 7,8

pH 7,4

Points artériels (100 mmHgPaO2 )

pH 7,1

60

Points veineux 40

20

0

20

40

60 80 PaO2 (mm Hg)

100

120

Envisageons maintenant les effets de l’acidité, du pH sur l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène.

pH = – log 10-7 = 7. Le pH sanguin est de 7,40 au repos. Lorsqu’il diminue et tend . vers 7, comme dans les exercices supérieurs à vVO2max , le sang « s’acidifie ». À l’inverse, lorsque le pH augmente, le sang s’alcalinise. Ainsi, la baisse du pH sanguin, (l’augmentation de l’acidité) favorise la libération de l’oxygène, réduisant l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène. Il s’agit d’un effet appelé l’effet « Bohr » (figure 52), du nom du physiologiste qui l’a mis en évidence en 1904. Cet effet Bohr déplace vers la droite la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine (SaO2) en fonction de la pression du sang en oxygène (PaO2). Lors d’un exercice entraînant l’accumulation d’acide lactique, témoin de l’augmentation du rapport NADH/ NAD et du nombre de protons H+ libres dans le cytosol de la cellule musculaire (le cytoplasme), l’effet Bohr entre alors en jeu. Il permet au tissu musculaire d’avoir une quantité d’oxygène supplémentaire à sa disposition, ce qui contribue à augmenter la consommation d’oxygène. En effet, rappelons qu’il existe une gamme d’intensités d’exercice pour lesquelles le métabolisme anaérobie joue une part croissante dans la fourniture énergétique, mais où la consommation d’oxygène aug. mente encore, et ce jusqu’à VO2max .

Le mécanisme qui explique l’effet Bohr est que les ions H+ se lient plus facilement à l’hémoglobine que l’oxygène, prenant ainsi sa place. On dit alors que « l’hémoglobine a une plus grande affinité pour les ions H+ que pour l’oxygène ».

1.9.4 Effet de la température (figure 53) À pH constant, l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène est en relation inverse avec la température du sang. Concrètement, l’augmentation de température du sang, dans le cas où l’exercice se prolonge, entraîne la libération de l’oxygène fixé sur l’hémoglobine ; la courbe de dissociation est alors déplacée vers la droite, comme pour l’effet Bohr. Il faudrait une pression par-

10 OC

100

25 OC

30 OC 37 OC 42 OC

80

Figure 53 Relation entre SaO2 (%) et PaO2 à différentes températures. Pour une même valeur de SaO2 (%) dans le sang artériel, PaO2 varie considérablement si la température s’abaisse de 37 °C à 25 °C.

SaO2 (%)

Précisons qu’une augmentation de l’affinité, c’est-à-dire de la fixation de l’oxygène sur l’hémoglobine, favorisera le sens vers la droite de la flèche, alors qu’une diminution de l’affinité, c’est-à-dire l’augmentation de la libération de l’oxygène depuis l’oxyhémoglobine vers les tissus, favorisera le sens gauche de la flèche. À propos du pH, la concentration de l’eau pure en ions H+ est de 10-7 mol/litre. Le pH de l’eau est, par définition, (voir rappel 1 sur le pH en chapitre I, 1.4.4 p. 26) :

60

40

20

0 20

40 60 PaO 2 mm Hg (ou torr)

80

100

145

Chapitre 4

LA

VENTILATION PENDANT L’EXERCICE

tielle d’oxygène (PaO2) plus importante pour avoir le même pourcentage de saturation de l’hémoglobine en oxygène (SaO2). Là encore, cela va dans le sens d’une plus grande mise à disposition de l’oxygène pour les tissus actifs, en rapport avec les besoins accrus par l’augmentation du métabolisme.

1.9.5 Effet du 2-3 DPG (2-3 diphosphoglycérate) Un dernier facteur qui joue sur la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine est l’enzyme contenue dans les globules rouges : le 2-3 DPG. Les globules rouges sont des cellules particulières ne possédant ni noyau ni mitochondrie. C’est pourquoi ils doivent, pour satisfaire leur métabolisme, utiliser la glycolyse anaérobie dont une des enzymes intermédiaires est le 2-3 DPG. Cette enzyme peut se combiner avec l’hémoglobine et réduire l’affinité de celle-ci pour l’oxygène, de la même façon que l’a fait le proton H+. La courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine, dans ce cas, est repoussée vers la droite dans le sens d’une moins grande fixation d’oxygène pour une pression sanguine d’oxygène donnée, processus plutôt favorable à la mise à disposition de l’oxygène aux tissus musculaires lors d’une activité intense. De plus, ce rôle favorable du 2-3 DPG serait un des fondements théoriques de l’effet de l’entraînement en altitude puisque l’hématocrite (le % de globules rouges par rapport au volume sanguin total) augmente après un séjour en altitude, assorti d’un entraînement physique. La courbe de concentration du 2-3 DPG après le retour d’altitude, et notamment le rebond de cette concentration 10-12 jours après un stage de 3 semaines à plus de 2 000 m sert de base à la planification des stages en altitude avant les objectifs majeurs (compétitions importantes). Cependant, le réel effet de l’enzyme 2-3 DPG reste actuellement controversé (Levitzky, 1987), tout comme l’efficacité de l’entraînement en altitude d’ailleurs (voir le chapitre V sur l’environnement particulier de la pratique des activités physiques et sportives). Une étude de Mairbaul et al. (1986) a montré qu’une légère augmentation du 2-3 DPG n’apparaissait, lors d’un exercice, qu’au-dessus du seuil lactique ; il devient alors difficile de dissocier les effets de l’acidose et de l’augmentation de la température de celui du 2-3 DPG. L’effet Bohr (effet de l’acidose) est, en effet, certainement le facteur le plus déterminant de la diminution de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène.

146

1.9.6 Transport de l’oxygène dans le muscle Nous avions vu, dans le chapitre traitant du muscle (voir chapitre II, 2.1.2 p. 90), que la myoglobine (protéine) était le transporteur de l’oxygène dans les muscles squelettique et cardiaque, à l’image de l’hémoglobine dans le sang. En effet, la myoglobine agit comme une navette intracellulaire pour l’oxygène, le transportant de la membrane cellulaire musculaire jusqu’aux mitochondries qui l’utilisent dans la chaîne respiratoire sur les crêtes mitochondriales. Les fibres lentes, dont le métabolisme aérobie est élevé, contiennent davantage de myoglobine que les fibres rapides. La différence de structure entre la myoglobine (4 fois plus légère) et l’hémoglobine a pour effet une plus grande affinité de la myoglobine pour l’oxygène. C’est pourquoi la pente de courbe de dissociation de la myoglobine pour l’oxygène est plus raide pour les pressions du sang en oxygène inférieures à 20 mm Hg. Par conséquent, la myoglobine se décharge à de plus petites valeurs de la pression d’oxygène (PO2) que l’hémoglobine, ce qui va dans le sens d’une plus grande mise à disposition de l’oxygène pour la mitochondrie. Cette différence d’affinité pour l’oxygène entre l’hémoglobine et la myoglobine contribue à assurer le convoyage de l’oxygène dans le sang (l’oxygène est fixé à l’hémoglobine) pour le livrer ensuite aux cellules, par la myoglobine ; c’est pourquoi l’oxygène va facilement se détacher pour aller dans les mitochondries qui l’utiliseront comme accepteur final des ions H+. Il faut parfois être déterministe en physiologie de l’exercice, c’est-à-dire considérer en premier l’objectif final : la satisfaction des besoins énergétiques cellulaires, pour lier et comprendre tous les mécanismes cardiorespiratoires et métaboliques. Ainsi, la pression en oxygène intramitochondrial qui, lors d’un exercice, est seulement de 1-2 mm Hg, est encore compatible avec un largage de l’oxygène de la myoglobine vers la mitochondrie. Il sert en outre de « réserve d’oxygène » pendant la période de transition entre le repos et l’exercice ou lors de changement d’intensité d’exercice, ces deux situations induisant des phases transitoires d’ajustement cardiovasculaire. À la fin d’un exercice, cette réserve d’oxygène doit être reconstituée, contribuant ainsi à la « dette d’oxygène » occasionnée par la surconsommation d’oxygène dans les 3 minutes qui suivent l’arrêt de l’exercice, à ne pas confondre avec la lente diminution de la consommation d’oxygène jusqu’à la valeur de .repos. Cette composante ultralente de la baisse de VO2 nécessite, en effet, plusieurs heures sous l’effet conjoint de l’éléva-

Théorie de la ventilation

tion des catécholamines (adrénaline et noradrénaline) qui augmentent le métabolisme cellulaire, et de l’élévation de la température. Cette « surconsommation d’oxygène postexercice » est qualifiée d’EPOC, en anglais « Excess post exercise oxygen consumption ».

part et d’autre de la membrane cellulaire du globule rouge.

Le CO2 est transporté dans le sang sous trois formes : (1) dissoute (5-10 %), (2) liée à l’hémoglobine sous la forme de « carbamino-hémoglobine (5-20 %), (3) sous la forme de bicarbonate : HCO3- (environ 7080 %).

Ce problème est évité par le remplacement de l’anion chlore (Cl-), qui diffuse du plasma dans le globule rouge. Cet échange « anionique » (d’anions) apparaît alors que le sang circule dans les capillaires pulmonaires. Lorsqu’il les atteint, la pression partielle en CO2 (PCO2) du sang est supérieure à celle de l’alvéole, le CO2 diffuse alors à travers la barrière sanggaz. Au niveau du poumon, la liaison de l’oxygène à l’hémoglobine entraîne une libération des ions hydrogène liés à l’hémoglobine et favorise la formation d’acide carbonique :

1.10.1 Rôle du bicarbonate

H+ + HCO3- H2CO3

1.10 Transport du CO2 dans le sang et équilibre acido-basique

Puisque la majeure partie du CO2 est transportée sous la forme de bicarbonate, ce mécanisme va retenir notre attention. Le CO2 peut être converti en bicarbonate à l’intérieur du globule rouge de la façon suivante : CO2 + H2O  H2CO3  H+ + HCO3(1) (2) (1) anhydrase carbonique (2) acide carbonique (3) bicarbonate

(3)

Une haute pression sanguine en CO2 (PCO2) va entraîner une combinaison du CO2 avec de l’eau (partie gauche des réactions écrites ci-dessus), cette réaction étant catalysée (facilitée) par l’enzyme contenue dans les globules rouges : « l’anhydrase carbonique », pour former de l’acide carbonique (H2CO3-), partie centrale des réactions notées ci-dessus. L’anhydrase carbonique joue un rôle important car cette enzyme permet une accélération de la réaction, relativement lente normalement, pouvant assurer la transformation du CO2 en HCO3- dans le court laps de temps (inférieur à 1 seconde) où les globules rouges et les capillaires sont en contact. Après sa formation, l’acide carbonique est dissocié en ions hydrogène (H+) et en ions bicarbonate (HCO3-). L’ion hydrogène s’attache ensuite à l’hémoglobine (dans le globule rouge) ce qui tend, nous l’avons décrit comme étant l’effet Bohr, à diminuer l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène et à déplacer la courbe de dissociation de l’oxyhémoglobine vers la droite. L’ion bicarbonate va, quant à lui, diffuser dans le plasma sanguin. Puisque le bicarbonate transporte une charge négative (un anion), la sortie hors du globule rouge de cette molécule chargée négativement, et ce sans remplacement par une autre charge négative, devrait entraîner un déséquilibre électrochimique de

Chapitre 4

Dans les conditions de basse pression de CO2 qui existent dans les alvéoles, l’acide carbonique se dissocie en CO2 et H2O : H2CO3  CO2 + H2O

1.10.2 Rôle de la ventilation dans la balance acido-basique La ventilation pulmonaire peut jouer un rôle important dans l’équilibre acido-basique (permettant de maintenir le pH sanguin autour de 7,4) en éliminant les protons H+ hors du sang par la réaction avec l’anion bicarbonate que nous avons vue précédemment : H+ + HCO3- H2CO3 Ainsi, une augmentation de CO2 dans le sang ou dans les liquides de l’organisme entraîne une accumulation de protons H+ et diminue donc le pH. Au contraire, l’élimination de CO2 du sang ou des liquides de l’organisme diminue la concentration de protons et augmente le pH. Souvenons-nous que la réaction apparaît comme suit : CO2 + H2O  H2CO3  H+ + HCO3(1)

(2)

(3)

(1) anhydrase carbonique (2) acide carbonique (3) bicarbonate Par conséquent, une augmentation de la ventilation pulmonaire entraîne l’élimination de CO2 additionnel et diminue donc la concentration de protons H+. D’un autre coté, une réduction de la ventilation pulmonaire entraînerait une formation de CO2 et une augmentation de la concentration d’ions H+ (et donc une diminution du pH).

147

Chapitre 4

LA

VENTILATION PENDANT L’EXERCICE

Figure 54 Évolution du débit ventriculatoire, VE, aux différentes phases de l’exercice musculaire.

Les pressions artérielles partielles en O2 et CO2 sont peu modifiées pendant ce type d’exercice. Cependant, avant d’atteindre cet état stable des pressions artérielles en O2 et CO2 (PaO2 et PaCO2), l’on peut observer que, lors de la phase de transition reposexercice, PaO2 avait tendance à baisser alors que PaCO2 augmentait. Cette observation suggère que l’augmentation de la ventilation alvéolaire au début de l’exercice n’est pas aussi rapide que l’augmentation du métabolisme.

. VEl(BTPS)/mn

.

30

20

10

1.11.2 Exercice en conditions chaudes et humides Repos

0

0

Exercice

2

4

6

Récupération

12

14 0

2

4 6 temps (min)

1.11 Ventilation à l’exercice Avant d’envisager les processus de régulation de la ventilation à l’exercice, il est indispensable de décrire les différentes réponses de la ventilation et des gaz du sang selon les caractéristiques de l’exercice physique.

1.11.1 Transition du repos à l’exercice Les changements de la ventilation pulmonaire observés lors de la transition du repos à l’exercice d’intensité sous-maximale réalisé à vitesse constante (en-dessous du seuil de début d’accumulation lactique) sont représentés en figure 54. Il faut remarquer qu’en début d’exercice, la ventilation augmente rapidement. Cette phase rapide est suivie d’un ajustement plus lent vers l’atteinte d’un plateau où on obtient une valeur dite « d’état stable » (Dejours, 1964).

.

.

Ventilation V E (l/mn) à l’exercice chez un homme .entraîné et non entraîné en fonction du V O2 (l/mn).

VE (l/mn)

Figure 55 non entraînés entraînés

160

Les réponses ventilatoires d’un coureur d’élite de longue distance et d’un homme du même âge mais non entraîné sont représentées en figure 55. Pour les deux sujets, la ventilation augmente comme une fonction linéaire de la consommation d’oxygène jusqu’à 50-75 % de la consommation maximale d’oxygène, intensité pour laquelle la ventilation va . ensuite augmenter de façon exponentielle alors que VO2 continue à croître linéairement par rapport à la puissance de l’exercice.

140 120 100 80 60 400 20

.

VO2 l/min (STPD) Repos

148

Bien que la ventilation soit supérieure, la valeur de la pression partielle de CO2 n’est pas différente entre les deux conditions d’exercice. Cette stabilité suggère que l’augmentation de la ventilation observée pendant l’exercice en ambiance chaude et humide est due à l’augmentation de la fréquence respiratoire et de l’espace mort ventilé (Dempsey, 1986). Ce type de respiration courte fait penser à celle des chiens qui ne peuvent transpirer et donc éliminer leur chaleur endogène par évaporation de la sueur. C’est pourquoi ils l’éliminent par la bouche en hyperventilant.

1.11.3 Exercice progressivement accéléré

180

0

Un même exercice que décrit précédemment, réalisé dans des conditions favorables fraîches et dans un air non humide à 19 °C et 45 % d’humidité relative (100 % faisant référence à un air saturé en vapeur d’eau) aura des conséquences différentes sur les réponses ventilatoires par rapport à un même exercice réalisé en ambiance chaude et humide (30 °C et 85 % d’humidité relative). Dans le dernier cas, la ventilation tend à s’accroître par le jeu de l’augmentation de la température interne qui va agir sur l’hypothalamus à la base du cerveau, celui-ci informant les centres de contrôle respiratoire (Powers et al., 1982).

Exercice

Maximums

Ce point d’inflexion du débit ventilatoire est appelé « le seuil ventilatoire ». Un autre point intéressant de la comparaison entre un sujet entraîné en endurance et un sujet non entraîné, est l’évolution de la pression artérielle en oxygène (PaO2) pendant l’exercice intense.

Théorie de la ventilation

Le sujet non entraîné est capable de maintenir sa PaO2 dans une marge de 10-12 mm Hg en dessous de la valeur normale. Par contre, le sujet entraîné en endurance montre une diminution de sa PaO2 de 3040 mm Hg lors d’un exercice sollicitant sa consommation maximale d’oxygène (qui est, bien sûr, largement supérieure, de l’ordre de 1,5 fois, à celle d’un sujet non entraîné). si l’on prend en considération la valeur absolue de VO2max en litres par minute. Cette chute de la valeur de PaO2, souvent observée chez les sportifs qui . ont des valeurs de VO2max supérieures à 4,5 l/min ou 68 ml.min–1..kg–1, est d’autant plus marquée que la valeur de VO2max est importante (Williams, 1986). Cette baisse de PaO2 > à 15 mm Hg est appelée « hypoxémie induite par l’exercice » (HIE) (Powers et Williams, 1987). L’hypoxémie est observée chez un athlète de haut niveau sur deux (Powers et al., 1992). Nous envisagerons, dans la partie application de ce chapitre, dans quelle mesure l’hypoxémie est un facteur limitatif de la performance aérobie, sur le plan de. la puissance ou vitesse maximale aérobie (vVO2max ) et de l’endurance. à cette puissance . (temps limite à la vitesse associée à VO2max : tlim vVO2max ). Les raisons des variations interindividuelles observées chez des athlètes ne sont pas encore très claires. Sont évoquées comme possibles causes de l’HIE : la limitation de la diffusion causée par une diminution drastique du temps de contact entre les globules rouges du sang, qui passe plus vite dans les capillaires pulmonaires, et les alvéoles. Ce fait est dû à l’augmentation du débit cardiaque qui peut aller de 1 à 8 par rapport au repos pour certains athlètes ayant un débit cardiaque maximal de l’ordre de 40 l/min. Ce bref temps de contact entre alvéoles et globules rouges pourrait être insuffisant pour équilibrer les gaz du sang entre l’alvéole et le globule rouge, la valeur de PaO2 diminuant au fur et à mesure que l’exercice se prolonge.

Chapitre 4

motoneurones situés dans la moelle épinière. En retour, l’activité des motoneurones est directement contrôlée par les « centres de contrôle respiratoire » situés dans le tronc cérébral. 1° Les centres de contrôle respiratoire (appelés plus brièvement les centres respiratoires) Le contrôle de la respiration automatique par le système nerveux central est sous l’influence des centres respiratoires situés au niveau du pont (dans le bulbe rachidien du tronc cérébral) et de la moelle. Précisons que le tronc cérébral, qui est le prolongement de la moelle épinière après la première vertèbre cervicale, est formé de bas en haut par le bulbe et le pont, le mésencéphale. Le cerveau, au sens générique du terme, contient le tronc cérébral + le cervelet, le diencéphale et le télencéphale. Le thalamus et l’hypothalamus (situé en-dessous du thalamus) sont des formations du diencéphale. Les centres bulbaires modulent la profondeur de l’inspiration et le point de rupture à la fin de l’inspiration. Le centre médullaire est important pour établir l’activité rythmique respiratoire et inhibe l’inspiration lorsque le poumon est distendu. Les centres nerveux supérieurs (cortex, hypothalamus, téléencéphale) ont également une influence sur la respiration durant les émotions (anxiété, peur, douleur), Figure 56 Centres nerveux contrôlant la respiration dans le tronc cérébral (coupe sagittale).

1.12 Régulation de la ventilation Le contrôle de la ventilation va permettre les ajustements ventilatoires et le contrôle acido-basique que nous avons envisagés précédemment.

1.12.1 Contrôle de la ventilation au repos : les facteurs de régulation du débit ventilatoire Nous avons vu que l’inspiration et l’expiration au repos étaient produites par la contraction et la relaxation du diaphragme pendant une respiration tranquille et avec l’assistance des muscles intercostaux. La contraction et la relaxation des muscles respiratoires sont directement contrôlées par les corps des

149

Chapitre 4

LA

VENTILATION PENDANT L’EXERCICE

ou lors des réflexes tels que l’éternuement, le baîllement, etc. Quand on retient volontairement sa respiration, on peut inhiber la respiration automatique jusqu’au « point de rupture ». Ce point de rupture est atteint lorsque l’augmentation de PaCO2 et la diminution de PaO2 sont telles qu’elles dépassent l’inhibition volontaire. Les décharges du centre de la rythmicité ventilatoire (situé dans le bulbe rachidien) vont provoquer l’inspiration, alors que d’autres neurones vont provoquer l’expiration. Au repos, les cycles inspiratoire et expiratoire passifs sont coordonnés par l’activité du bulbe rachidien. Cependant, l’activité neurale du bulbe rachidien peut être modifiée par les neurones situés en dehors des centres de la rythmicité respiratoire. Deux zones supplémentaires situées dans le pont du tronc cérébral (figure 56) agissent sur le contrôle de la respiration. Ce sont (1) « l’aire apneustique » et (2) « l’aire pneumotaxique ».

 L’aire apneustique est en communication directe avec les neurones situés dans la zone de la rythmicité respiratoire afin de stopper l’activité neurale inspiratoire. Par conséquent, l’on pense que la fonction des centres apneustiques est de « couper l’inspiration » !

 L’autre groupe de neurones qui constituent l’aire pneumotaxique a pour fonction d’affiner l’activité de l’aire apneustique. La fonction pratique des centres apneustique/pneumotaxique est de travailler de concert pour réguler la profondeur de la respiration. 2° l’information en retour vers le centre de contrôle respiratoire Plusieurs types de récepteurs sont capables de modifier l’action des neurones contenus dans les centres de contrôle respiratoire. En général, l’information vers ceux-ci peut être classée en deux catégories : (1) « neurale » (par le système nerveux) et (2) « humorale » (régulée par les variables sanguines).

 Les informations neurales font référence à celles afférentes et efférentes aux centres du contrôle respiratoire et aux neurones stimulés par d’autres moyens que par le sang, en particulier par les hormones circulantes.

 les informations humorales véhiculent également vers le centre de contrôle respiratoire la teneur du sang en pressions partielles d’O2 et CO2 par l’intermédiaire de chémorécepteurs humoraux (humoral définit ce qui est propre au sang). Nous allons les examiner plus en détail.

150

3° Les chémorécepteurs humoraux Les chémorécepteurs sont des neurones capables de répondre aux changements du milieu interne. Usuellement, les chémorécepteurs sont classés, selon leur site, en deux catégories : les « chémorécepteurs centraux » et les « chémorécepteurs périphériques ». Les chémorécepteurs centraux sont situés dans le bulbe rachidien antérieur (figure 57) qui est séparé anatomiquement du centre respiratoire. Ils sont affectés par les modifications de la PCO2 et de la concentration en protons H+ du liquide céphalo-rachidien. Une augmentation de l’un de ces paramètres sanguins va entraîner de la part des chémorécepteurs centraux une commande vers le centre de contrôle respiratoire (par message nerveux) pour qu’il augmente la ventilation, afin d’éliminer le CO2 en excès par exemple, et de rétablir le pH de repos du liquide céphalo-rachidien. Les chémorécepteurs périphériques sont situés dans la « crosse » de l’aorte, grosse artère qui part du ventricule gauche pour conduire tout le sang oxygéné de l’organisme et le déverser ensuite dans les artères systémiques. L’aorte forme un coude juste à la sortie du cœur, ce coude étant appelé la crosse de l’aorte. Les chémorécepteurs périphériques placés dans la crosse de l’aorte sont appelés les « corpuscules aortiques ». Il en de même pour ceux qui sont placés dans l’artère carotide et qui sont dénommés les « corpuscules carotidiens ». Ces chémorécepteurs périphériques sont sensibles aux variations de PaO2 et également aux modifications de la concentration des protons H+ et de la pression en CO2 du sang artériel. De plus, les corpuscules carotidiens sont sensibles à l’augmentation de la concentration sanguine en potassium (K+) et à la baisse de la pression artérielle en oxygène (PaO2). C’est pourquoi les corpuscules carotidiens semblent être les chémorécepteurs périphériques les plus déterminants dans le contrôle de la respiration. 4° Les récepteurs pulmonaires au CO2 Il a été montré, chez le chien et le lapin, que les poumons avaient des récepteurs au CO2, permettant d’envoyer un message vers le centre de contrôle respiratoire dans l’éventualité d’une augmentation de la pression en CO2 dans les capillaires pulmonaires, provoquant ainsi celle du débit ventilatoire pour rejeter le CO2 (Green et al., 1986). De tels récepteurs existeraient ou non chez l’homme selon les auteurs, la question n’étant pas encore tranchée de façon définitive.

Théorie de la ventilation

5° Effet des pressions sanguines partielles en CO2 et O2 (PaCO2, PaO2 et PvCO2, PvO2) ainsi . que du potassium sur le débit ventilatoire (V E)

.

V E augmente de façon proportionnelle (linéaire) en fonction de PaCO2. Une augmentation.de 1 mm Hg de PaCO2 entraîne une augmentation de V E de 2 litres/ min (England et al., 1985). Cet ajustement provient probablement de l’action conjointe des chémorécepteurs périphériques carotidiens et centraux (Dempsey et al., 1985). Si l’on considère à présent l’effet des modifica. tions de PaO2 sur V E, on peut constater qu’elles en ont peu, tout au moins lorsque le sujet est au niveau de la mer. Cependant, en altitude où la pression barométrique et donc les pressions partielles en oxygène et dioxyde de carbone sont plus basses qu’en plaine, la PaO2 diminue, ce qui va stimuler les corpuscules carotidiens qui . déclencheront alors une augmentation de V E par leur influence sur le centre de contrôle respiratoire du . bulbe rachidien. . Le point sur la courbe liant PaO2 et V E, pour lequel V E augmente de façon exponentielle, est appelé le « seuil hypoxique » (le terme d’hypoxique signifiant une valeur basse de PO2). Ce seuil hypoxique apparaît généralement autour de 60-75 mm Hg de PaO2. Les seuls récepteurs sensibles à la modification de PaO2 et donc à ce seuil hypoxique sont les récepteurs carotidiens (Levitzky, 1987). Récemment, il a été mis en évidence que la concentration sanguine de potassium jouait un rôle important dans le déclenchement d’une hyperventilation (Dempsey et al., 1987). Nous envisagerons plus particulièrement cette question dans le point 1.12.3 de ce chapitre en examinant le lien entre l’hypoxémie, la concentration de potassium et la performance à la vitesse associée à la consommation maximale d’oxy. gène (vVO2max ), c’est-à-dire le temps maximal (ou la distance maximale) de soutien à la vitesse minimale . . associée à VO2max (tlim vVO2max ). 6° Informations (afférences) neuronales vers le centre de contrôle respiratoire Dans cette catégorie, nous considérons tous les messages qui ne sont pas déclenchés par les variations de concentration sanguine des paramètres sanguins. On peut alors considérer les organes tendineux de Golgi, capteurs qui renseignent sur l’état de tension du muscle. Ils vont provoquer la stimulation nerveuse du centre de contrôle respiratoire qui, à son tour, augmentera le débit ventilatoire. Ainsi, par exemple, en vélo, lorsque pour rouler à 30 km/h nous optons pour un petit (42  17) ou un grand braquet (52  14), nous

Chapitre 4

n’aurons pas le même débit ventilatoire, l’influence de la fréquence de pédalage étant très différente dans les deux cas. Il peut même avoir une influence sur la consommation d’oxygène et donc sur le rendement qui est, rappelons-le, le rapport entre la puissance mécanique et la puissance énergétique, représentée pour ces exercices sous-maximaux par la consommation d’oxygène. Le ventricule droit aurait également des mécanorécepteurs sensibles à l’étirement du myocarde qui dépend du débit cardiaque. Plus ce dernier est élevé, plus les mécanorécepteurs vont stimuler le centre de contrôle respiratoire qui augmentera à son tour le débit ventilatoire. Tout est alors en place pour accroître le débit alvéolaire qui sera en rapport avec l’augmentation de la perfusion des alvéoles pulmonaires « annoncée » par les mécanorécepteurs du ventricule droit. On ne peut s’empêcher d’admirer la finesse de ces régulations et de constater que l’organisme est réellement adapté à l’exercice, la situation de repos considérée comme « normale » dans beaucoup de manuels de physiologie, n’étant peut être qu’intermédiaire entre deux situations vitales d’exercice. Ceci nous conduit alors à un débat qui dépasse le simple cadre de cet ouvrage montrant simplement l’adaptation de l’organisme à l’exercice qui doit être ajusté au potentiel physique du sujet ; quelques éléments d’appréciation de ce potentiel sont envisagés dans le dernier chapitre traitant du potentiel physique, de son évaluation et de son amélioration.

1.12.2 Régulation de la ventilation pendant un exercice sous-maximal Pour cette catégorie d’exercices inférieurs au seuil de début d’accumulation lactique (< 60-80 % . VO2max ), trois écoles défendent trois hypothèses de mécanismes régulateurs du débit ventilatoire. 1) La première de ces hypothèses défendue . par Eldridge et al. (1981) propose que V E soit essentiellement contrôlé par des afférences (venant de la périphérie) ou des efférences (venant des centres supérieurs du cerveau) nerveuses informant en retour le centre de contrôle respiratoire situé dans le bulbe rachidien du tronc cérébral. 2) La seconde hypothèse émise par Wasserman (le père du concept de seuil ventilatoire que nous allons aborder dans la partie 2 de ce .chapitre), suggère que les modifications de V E soient médiées par les stimulations humorales de chémorécepteurs pulmonaires, sensibles à la pression en CO2 (Wasserman et al., 1977).

151

Chapitre 4

LA

VENTILATION PENDANT L’EXERCICE

Centres cérébraux supérieurs (télencéphale dans les hémisphères cérébraux)

 Centre du contrôle respiratoire (bulbe rachidien du tronc cérébral)

  Chémorécepteurs périphériques Figure 57 Résumé des facteurs responsables du contrôle respiratoire lors de l’exercice et de leur localisation.  ou  = agit sur en augmentant ou en diminuant.

 

 dans le muscle squelettique

Muscles respiratoires

Mécanorécepteurs et chémorécepteurs

3) Enfin, la troisième hypothèse, intermédiaire . entre les deux premières, propose que V E soit contrôlée par une action conjointe des stimulations nerveuses et humorales (Caiozzo et al., 1982). Il semblerait que cette hypothèse soit la plus fréquemment partagée par les physiologistes. En résumé, on peut donc dire que, lors d’un exercice sous-maximal, les mécanismes nerveux régulent la ventilation sitôt le début de l’exercice (on peut y voir notamment l’action des mécanorécepteurs sensibles à l’augmentation de la tension musculaire et cardiaque) ; les facteurs humoraux interviennent ensuite dès que la modification de PaCO2 est sensible.

1.12.3 Contrôle de la ventilation pendant un exercice intense . (> 80  % de la vitesse associée à VO2 max ) À partir de la vitesse au seuil de début d’accumulation lactique qui . est d’environ 60 à 80 % de la vitesse associée à VO2max suivant les sujets, le débit ventilatoire augmente de façon exponentielle et ne va cesser d’augmenter, même si l’on cesse d’augmenter la vitesse et que l’on se contente de la maintenir constante dans cette zone d’intensité. Cette croissance exponentielle est contemporaine de celle du lactate sanguin et musculaire. Certains auteurs (comme Wasserman notamment) ont vu une causalité dans cette coïncidence. En effet, ils ont stipulé que l’augmentation de . V E était due à celle des protons H+ (produits de l’accélération de la glycolyse) également responsables de l’accumulation d’acide lactique (par la baisse du rapport NAD/NADH) et par la baisse du pH musculaire et sanguin. Nous verrons dans la partie 2 que les seuils ventilatoire et lactique ont été alors considérés comme équivalents, le seuil ventilatoire étant évalué par une méthode non invasive, a contrario du seuil lactique (Wasserman et al., 1986).

152

Cependant, il a été montré que la coïncidence n’était pas évidente, ne serait-ce que parce que des sujets atteints du syndrome de Mac Ardle, c’est-à-dire incapables (par défaut d’enzyme musculaire phosphorylase) d’avoir une glycolyse et donc une production d’acide lactique, présentaient malgré tout un seuil ventilatoire qui apparaissait sensiblement aux mêmes intensités relatives que pour les sujets sains. Le facteur additionnel qui augmente avec l’intensité de l’exercice et qui est alors évoqué pour stimuler la ventilation est le potassium plasmatique (Busse et al., 1991). L’augmenta. tion du potassium extracellulaire [K+], et de V E avec l’intensité de l’exercice a posé le problème de l’évolution de la chémosensibilité lorsqu’interviennent des variations du potassium extracellulaire. En effet, Busse et al. (1991) ont montré une corrélation entre l’accroisse. ment de [K+] et V E au cours d’un exercice incrémenté. De plus, [K+] joue un rôle important dans le maintien du potentiel de membrane et de la fatigabilité musculaire (Lindinger et al. 1995). En effet, il a été montré que des entraînements en endurance ou de sprints réduisaient l’accroissement de potassium plasmatique (–27 %) et expliquaient une variance importante (écart important entre les sujets) de l’augmentation du pic de puissance et de l’index de fatigabilité au cours d’une épreuve exhaustive de 30 secondes (Mc Kenna et al. 1993). Cependant, Billat et al. (1995b) n’ont pas trouvé de corrélation entre l’augmentation . absolue et relative de [K+] et le temps de soutien à VO2max chez des cyclistes entraînés. D’autres facteurs secondaires, comme l’augmentation de la température (voir chapitre V traitant de l’exercice en ambiance chaude) et des catécholamines (hormones médullo-surrénaliennes) qui suivent la . même cinétique que V E avec l’augmentation de la puissance et/ou de la durée de l’exercice, peuvent être également considérés comme des stimulants du débit ventilatoire. En résumé, il semble logique de penser que l’augmentation du lactate sanguin et la réduction du pH sanguin observées lors d’exercices proches en intensité de la consommation maximale d’oxygène, soient les principaux . mécanismes responsables de l’augmentation de V E, d’autant que, dans cette gamme d’effort, seul le glucose est utilisé et la production de CO2 est égale ou supérieure à la consommation d’oxygène. Le CO2 produit par le métabolisme cellulaire doit alors être rejeté pour rétablir une valeur stable de PaCO2. Nous allons à présent examiner, dans la partie application, la question de la limitation de la performance par la fonction respiratoire.

Applications : ventilation et performance

2.

Applications : ventilation et performance

2.1

Fonction ventilatoire et consommation maximale d’oxygène

Bien que des controverses existent, le système pulmonaire n’est généralement pas considéré comme un facteur .limitatif de la consommation maximale d’oxygène (VO2max ) et .de l’aptitude à la soutenir longtemps (temps limite à VO2max ). En effet, nous avons vu dans le chapitre traitant de la fonction cardiovasculaire que le .débit cardiaque était le principal facteur limitatif de. VO2max bien que, concernant le temps limite à VO2max , l’on ne connaisse pas encore l’importance du débit cardiaque. . Cependant, pour les athlètes de haut niveau dont le VO2max est supérieur à 68 ml.min–1.kg–1, une hypoxémie induite par l’exercice, définie par une augmentation de la différence de pression en oxygène entre l’alvéole et le sang artériel, apparaît chez un sportif sur deux.

2.2

Hypoxémie induite par l’exercice et performance

C’est un souci déjà ancien de caractériser le mieux possible la charge d’entraînement en termes d’intensité-durée par rapport aux possibilités du sujet, depuis les travaux de Hill (1927) puis de Taylor et al. (1955) ou d’Astrand (1960). Les premiers, ils ont défini et montré l’importance de. la mesure de la consommation maximale aérobie (VO2max ) pour l’appréciation de l’aptitude aérobie des sujets. Hill (1927) puis d’autres (Monod et Scherrer, 1965 ; Gleser et Vogel 1973 ; Péronnet et Thibault 1987) ont modélisé la relation intensité-durée de l’exercice qui illustre la mise en jeu de différentes voies métaboliques pour la resynthèse d’ATP.

 Que connaît-on du temps d’épuisement à ? (voir méthodologie développée au chapitre VI, 1.4.10) 1) La reproductibilité intra-individuelle du temps . . limite à VO2max . (tlim VO2max ou tlim 100). On sait que, pour un sujet donné, le temps de maintien de sa consommation maximale d’oxy. gène (temps limite à 100 % de VO2max ) est reproductible d’une semaine à l’autre dans les mêmes conditions expérimentales (Billat et al, 1994 a). 2) La . variabilité interindividuelle du temps limite à VO2max

Chapitre 4

La variabilité interindividuelle de ce temps . limite à VO2max est grande puisque le temps limite est compris entre 4 et 11 minutes selon les sportifs qui ont tous une valeur de consommation d’oxygène élevée (75 ± 5 ml.mn-1.kg-1). 3) La relation inverse liant le temps limite à . . VO2max et VO2max . Il. a par ailleurs été montré que le temps limite à VO2max. avait tendance à être inversement corrélé au VO2max (Billat et al. 1994f). Ceci correspond à une notion intuitive selon laquelle les sportifs ayant une consommation maximale d’oxygène élevée sont ceux qui la maintiennent le moins longtemps. En outre, ce temps de . maintien à VO2max est positivement corrélé à la capacité d’utiliser une fraction importante de la . consommation maximale d’oxygène ( % VO2max ) sans accumuler d’acide lactique (Billat et .al, 1994b). Les sujets qui ont un temps limite à VO2max long présentent également un seuil d’accumulation d’acide lactique retardé lorsqu’ils accomplissent un exercice à intensité progressivement croissante.

 Qu’en est-il des causes d’arrêt d’un exercice dont l’intensité sollicite la consommation maximale d’oxygène ? Parmi les causes susceptibles d’être évoquées pour rendre compte de cette caractéristique, qu’elles soient cardiaques, ventilatoires, métaboliques, l’une est vraisemblablement au centre de tous les processus physiologiques conduisant à l’arrêt de l’exercice maximal, c’est l’évolution de l’oxygène artériel ; c’est à l’approche de celui-ci qu’ont été consacrés de nombreux travaux. 1) On sait depuis Dempsey et al. (1984) puis Williams et al. (1986) puis Powers et al. (1988) qu’une relative désaturation artérielle est susceptible de s’installer à l’exercice au niveau de . VO2max ; mais son importance varie avec les sujets puisque, dans l’étude du groupe de Dempsey par exemple, sur seize sujets sportifs de très haut niveau, huit présentaient des baisses de PaO2 allant de 20 à 35 mmHg, quatre des baisses plus modestes, alors qu’elles étaient absentes chez les quatre derniers sujets. Les auteurs attribuaient ces modifications, pour l’essentiel, aux réductions des temps de transit pulmonaire car peu d’éléments permettaient d’avancer d’autres hypothèses à l’origine des anomalies observées. D’autres travaux, dont certains plus récents (Caillaud et al., 1992),

153

Chapitre 4

LA

VENTILATION PENDANT L’EXERCICE

apportent des arguments favorables aux hypothèses avancées par Dempsey et al. qui soulèvent également l’éventualité d’une hypoventilation alvéolaire relative dans l’apparition de l’hypoxémie.

cyclistes entraînés. Dans la présente étude (Billat et al.,. 1995c) sur le temps de maintien à 100 % de VO2max (tlim 100) ont été étudiées en continu grâce à un cathéter huméral les mêmes variables artérielles d’O2 chez. neuf cyclistes entraînés (âge de 25,2 ± 3 ans, VO2max de 63 ± 6 ml . min-1 . kg-1, puissance associée à : 349 ± 43 watts). Le tlim 100, qui était de 6.51 ± 1.13 minutes, s’accompagnait d’une hypoxémie chez 8 sujets sur 9 (PaO2 = -9 ± 7 mm Hg, [P(A – a)O2 = 22,0 ± 11,0 mm Hg]), PaO2 étant la différence de valeur entre la PaO2 de repos et celle de la fin de l’exercice (dans le sang artériel), et PAO2 étant la différence de valeur entre la PAO2 de repos et celle de la fin de l’exercice (dans l’air alvéolaire). Cependant, à l’inverse des faits observés à tlim 90 (Billat et al., 1994e), ces grandeurs n’étaient pas corrélées à tlim100 (r = 0,40 ; p = 0,20 et r = 0,37 ; p = 0,33). Le CaO2 était stable entre le début et le milieu de l’épreuve de tlim 100 (20,1 ± 1,3 ml/100 vs 20,0 ± 1,1 ; p = 0,61), mais baissait légèrement entre le milieu et la fin de l’épreuve (20,0 ± 1,1 ml/100 vs 19,1 ± 1,2 ; p = 0,05) bien que l’hématocrite se soit élevée significativement (46,9 ± 2,5 % vs 49,0 ± 3,3 % ; p = 0,05). Cette baisse de CaO2 n’était pas corrélée à tlim 100 (p = 0,12). En conclusion, ni l’HIE, ni la baisse de CaO2 ne semblent liées de façon claire à la durée de tlim 100.

2) Dans une étude plus récente (Billat et al., 1994 e), l’hypoxémie induite par l’exercice (HIE appréciée comme une diminution d’au moins 15 mmHg de PaO2 par rapport à une valeur contrôle mesurée au début de la période de maintien de l’exercice) est confirmée pour des exercices à charges constantes réalisés à. 90, 100 et 105 % de la puissance que sollicite VO2max , mais avec une variabilité interindividuelle superposable à celle soulignée par les différents . auteurs. Rapportée au tlim à 90 % de VO2max , cette HIE était d’autant plus grande que le tlim 90 était long. Cette relation, la seule établie pour rendre compte de la variabilité interindividuelle signalée précédemment, semble indiquer que certains sujets seraient mieux adaptés que d’autres à tolérer des hypoxémies non négligeables sur un temps long. Cette corrélation n’est cependant pas mise en évidence aux autres temps limites (tlim 100 et tlim 105). Par ailleurs, aucun des autres paramètres circulatoires et ventilatoires étudiés ne se trouvaient corrélés pour chacun des tlim étudiés. Figure 58

 Une autre étude a montré que l’hypoxémie

Évolution de la concentration de l’acide lactique sanguin pendant un exercice incrémenté. L’augmentation soudaine du lactate est appelée « le seuil lactique ».

n’avait pas d’incidence sur le temps de soutien de la consommation maximale d’oxygène. Le contenu artériel en oxygène .(CaO2) ne varie pas avec le temps limite à VO2max chez des

Concentration de lactate sanguin (mmol/l)

10,0

6,0 4,0 Seuil lactique

25 Repos

154

50 75 Exercice incrémenté . (% VO2 max)

Seuils ventilatoire et lactique

Nous allons approfondir les notions de seuil lactique (figure 58) et ventilatoire évoqués précédemment pour appréhender leur signification physiologique et esquisser leur utilisation comme repères de l’aptitude physique du sportif. Il importe à présent, pour compléter l’évaluation de son potentiel énergétique aérobie, de connaître à partir de quelle fraction de la consommation maximale d’oxygène le sportif commence à accumuler de l’acide lactique. C’est le corollaire d’un flux glycolytique qui dépasse les possibilités de la phosphorylation oxydative du sportif et l’oblige à prendre en charge les ions H+ produits par la glycolyse, par l’acide pyruvique qui va être réduit en acide lactique.

8,0

2,0

2.3

100

Les méthodes d’évaluation des seuils de vitesse et du pourcentage de la consommation maximale d’oxygène pour lequel la glycolyse anaérobie joue une part prépondérante dans la fourniture d’énergie, par rapport au métabolisme aérobie (prise en charge des

Applications : ventilation et performance

ions H+ par l’oxygène pour former de l’eau et du dioxyde de carbone) sont fondées sur la mesure de la lactatémie – on parle alors de « seuil lactique » – ou, par la méthode des échanges gazeux, de « seuil ventilatoire ».

ventilatoires .par l’observation de l’évolution : du débit ventilatoire ventilatoire V E en l . min-1, .de l’équivalent . . . E/ CO , pour le CO2, de V E/V O2 pour l’oxygène et V V 2 . la valeur de CO2 .expiré.V CO2 en l . min-1, et du quotient respiratoire V CO2/V O2 dénommé R.

2.4

La fréquence cardiaque (Fc) elle-même s’est vue identifier un seuil de déflexion (voir chapitre VI, 1.5.8 p. 232). Considérons l’évolution de tous ces paramètres selon trois intensités caractéristiques pendant une course. Ceci nous aidera à comprendre la multitude des techniques proposées pour identifier les seuils anaérobies et autres valeurs repérant l’intensité maximale à partir de laquelle la production d’énergie aérobie est complétée puis remplacée progressivement par les mécanismes anaérobies (Wasserman, 1984).

Seuils lactique, ventilatoire et endurance

La consommation maximale d’oxygène est le témoin de l’aptitude du coureur à transporter et à utiliser de grandes quantités d’oxygène en favorisant la phosphorylation oxydative (voir figure 17a), grande fournisseuse d’A.T.P., et en permettant la transformation d’énergie potentielle chimique en énergie mécanique par les muscles qui. sont les agents du mouvement. Cependant, le VO2max ne permet pas chez le coureur de fond de désigner le vainqueur d’une compétition opposant des coureurs de même niveau de performance (temps sur une distance supérieure au 5 000 m). Ceci signifie donc que . la capacité d’utiliser un important pourcentage de VO2max sans accumuler de lactate est fondamentale pour soutenir une haute puissance sur de longues distances. De même, une faible économie de course détermine, elle aussi, la performance finale.

.

À l’inverse, deux coureurs dont VO2max est similaire, n’auront pas forcément la même performance sur longue distance ; Costill (1976) rapporte qu’un coureur de marathon possédant « seulement » un . VO2max de 69,7 ml . min-1 . kg-1, mais capable d’en utiliser 86 % sur les 42,195 km, pouvait rivaliser avec les meilleures performances en marathon, 2h08’33’’ (19,7 km/h) réalisées en 1967. La vitesse sur marathon est légèrement inférieure à la vitesse maximale de nonaccumulation lactique. En effet, d’autres limitations que l’accumulation du lactate, telles que la déplétion en glycogène et l’hyperthermie, imposent au coureur de ralentir son allure. En effet, lors d’une épreuve longue de plus d’une heure, la nécessité d’irriguer les territoires périphériques cutanés, aptes à dissiper la chaleur (par convection), peut provoquer une spoliation du débit sanguin au niveau des territoires en travail. Il y aurait donc là une limitation de la distribution sanguine, mais qui s’améliore avec l’entraînement en endurance.

2.4.1 Seuil de puissance et réponses physiologiques Ces méthodes s’appuient sur l’observation et la détection de points de rupture dans l’évolution des paramètres métaboliques (acide lactique, ammoniac)

Chapitre 4

1° Les trois phases remarquables d’une course d’intensité (vitesse et/ou pente) croissante (figure 59) : Il semble qu’il y ait trois phases typiques dans la transition progressive d’un exercice de faible intensité (footing lent.de « régénération ») à un exercice d’intensité égale à VO2max : vitesse de course correspondant, au maximum, à la vitesse moyenne maximale sur 1 500 à 2 000 m ou 5 minutes environ.

 Phase 1

.

.

V O2  40 % de VO2max ,

Il s’agit d’une allure de trot, en augmentant progressivement l’allure (jusqu’à environ 150 pulsations cardiaques par minute) : une quantité d’oxygène plus importante est extraite des tissus, entraînant une fraction d’oxygène plus petite dans l’air expiré (FEO2). Par contre, davantage de CO2 est produit et expiré, puisque l’oxygène est alors l’accepteur final de l’ion H+ au bout de la chaîne respiratoire : FECO2 augmente. On observe une augmentation linéaire . ), de la consommation d’oxygène ( CO V 2 de la . ventilation . . (V E), du volume de CO2 expiré (V CO2 = V E . FECO2) et de la fréquence cardiaque. Peu ou pas de lactate est formé, celui-ci étant aussitôt réoxydé dans les fibres lentes de type I et le myocarde. La lactatémie est basse · parce que « Ra», le débit d’apparition du lactate, est faible (R· a pour « rate of appearance », Brooks 1985). Le quotient respiratoire (R) est égal à 0,7-0,8, ce qui témoigne de l’utilisation majoritaire des lipides par rapport aux glucides et d’une sollicitation du seul métabolisme aérobie. Cette utilisation importante des acides gras libres (issus de la ß oxydation) a également un effet inhibiteur sur la glycolyse, par l’intermédiaire du citrate qui

155

Chapitre 4

LA

VENTILATION PENDANT L’EXERCICE

I

II

I

III

II

III

18

FEO2 (%)

4

2

.

FECO2 (%)

4

2

.

L’accumulation de ces métabolites diminue alors l’effet inhibiteur des citrates sur l’activité de la phosphofructokinase (PFK), favorisant une plus grande vitesse de dégradation du glucose et du glycogène dans la glycolyse ; cette carence augmente alors la production de pyruvate. Puisque l’oxydation des acides gras libres est élevée, une certaine inhibition du pyruvate est encore présente. Il y a donc un déséquilibre entre la production et l’oxydation du pyruvate dont une partie sera réduite en lactate (Brooks, 1985). Ce décolage expliquerait la légère élévation du lactate sanguin à environ 3 mmol . l-1 (la valeur de repos étant d’environ 1 mmol . l-1), ainsi due à un excès de pyruvate et non à l’hypoxie (insuffisance d’oxygène) des mitochondries des cellules de la fibre musculaire.

5

4

3

180

R

FC(bpm)

1,1

0,9

LA (mmol.l-1)

VE (l.min-1)

140

70

.

0

120

60

0,7

5

10 15 20 25 T (min )

10

 Phase 2 5

0

5

10 15 20 25 T (min)

inhibe l’oxydation du pyruvate et l’activité de deux enzymes glycolytiques : la déshydrogénase glycérol -3- phosphate et la phosphofructokinase (Essen 1978 a et b). Le résultat de cette inhibition glycolytique par le métabolisme des acides gras libres est une production moindre de lactate et une augmentation de son oxydation en pyruvate, favorisée par les isoenzymes H-LDH des fibres de type I. Ces dernières sont, nous l’avons vu dans le chapitre précédent, très sollicitées à ces basses vitesses en réponse à une fréquence de recrutement des unités motrices lentes. Ainsi, même lors d’un exercice léger, . une course lente à moins de 40 % de .VO2max ( 70 %) est la pire des contraintes imposée à l’organisme, pouvant réduire la performance de 10 à 15 % pour un marathon se déroulant à 35 °C et à 80 % d’hydrométrie (3 h 20 min au lieu de 3 h). Ainsi, la production de chaleur est très liée à l’intensité d’exercice. Lors d’une heure de pédalage à 300 watts entraînant une consommation d’oxygène de 3,9 l/min, compte tenu du rendement mécanique de 25 %, cela signifie que 300 watts ne représentent que le quart de la production d’énergie totale par unité de temps, l’éner-

161

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

gie calorifique représentant les 75 % restants soit : 3  300 = 900 Watts de chaleur à éliminer. Si nous n’avions aucun mécanisme thermorégulateur, cet exercice entraînerait une élévation de la température d’environ 12 °C. On imagine mal un thermomètre rectal afficher 49 °C, ce qui est bien au-delà de notre zone vitale. Quels sont les mécanismes qui permettent d’éviter « l’hyperthermie » (augmentation de la température au-delà de la zone de confort et de la zone vitale) ? Cela revient à échanger sa propre chaleur avec le milieu ambiant. On comprend dès lors que, si le milieu environnant a une température supérieure à celle de son propre corps, l’élimination de la chaleur endogène (produite par notre propre organisme) sera alors rendue extrêmement difficile, les échanges de chaleur s’effectuant du point le plus chaud vers le point le moins chaud : on parle alors de « gradient » (différence) de température. Un directeur sportif expliquait la défaillance due à une « fringale » (hypoglycémie) de son champion lors d’une étape du Tour de France de la façon suivante : « M. a mis et remis son imperméable pendant l’étape. Il a beaucoup transpiré et perdu des calories » (« Libération », 8 juillet 1996, p. 21). Cette explication n’est peut-être pas dénuée de fondement selon une nouvelle théorie considérant le gain de chaleur comme un stress énergétique au même titre qu’une puissance mécanique imposée (voir « le modèle de déplétion énergétique » proposé par Hubbard et Armstrong, 1989). Figure 60

1.2

Échanges de chaleur entre le corps et l’environnement externe

Ces échanges se font par la surface du corps, par la peau (se référer à l’équation permettant de calculer la surface corporelle, en chapitre I, à propos de la résistance à l’avancement dans l’air en cyclisme). Nous avons 4 moyens d’échanger la chaleur avec le milieu ambiant : (1) la radiation, (2) la conduction, (3) la convection et/ou (4) l’évaporation (figure 60). Ces 2 derniers moyens interviennent préférentiellement selon le taux d’humidité dans l’air puisqu’il est difficile d’évaporer sa sueur quand l’air est déjà chargé d’eau (un peu à l’image d’un linge qui ne voudrait pas sécher par temps orageux et humide). Une forte chaleur (60 °C et plus) est relativement bien supportée dans un sauna dont l’air est très sec alors que des températures ambiante supérieures à 33 °C sont rarement bien supportées en ambiance tropicale (humide). 1° La radiation (ou rayonnement) Les échanges thermiques se réalisent par rayonnement infrarouge. Ils consistent en un transfert de chaleur de la surface d’un objet vers un autre, sans aucun contact physique entre les deux corps ; ainsi le soleil émet des rayons qui nous réchauffent à distance. Lorsque nous sommes au repos dans une ambiance confortable (température de 21 °C), 60 % de nos pertes de chaleur se font par radiation. Nous réchauffons alors les objets environnants, les meubles de la pièce où

évaporation respiration

Echanges de chaleur entre le coureur et l’environnement.

radiation thermique du ciel

évaporation par la sueur

convection par le flux sanguin de la peau

radiation du soleil température et humidité de l'air

convection radiation

réflexion de la radiation solaire radiation thermique du sol

emmagasinement d'énergie

travail conduction

contraction musculaire

vitesse de la course

162

Théorie des effets de la température et de l’altitude

nous sommes, mais aussi les murs, le plafond…Une perte de chaleur par radiation ne peut se réaliser que si l’environnement est plus froid que notre propre corps, ce qui est difficile sous un soleil de plomb ou dans une pièce surchauffée. Bronzer ou être performant il faut choisir ! 2° La conduction La conduction est définie comme un transfert de chaleur entre deux corps, en contact cette fois-ci. Au contraire de la radiation, vous ne réchaufferez que les meubles que vous toucherez, à l’instar de la chaise où vous êtes assis, un échauffement entre la peau et la selle du vélo justifiant « les peaux de chamois » interposées sur les postérieurs d’hier et les cuissards sophistiqués d’aujourd’hui. Dans certains cas, c’est l’objet que nous allons toucher qui va conduire sa chaleur, comme un volant d’une voiture laissée en plein soleil, celle-ci ayant donc été réchauffée par radiation et le volant nous brûlant les mains, mais cette fois-ci par conduction. On n’est décidément jamais à l’abri d’un coup de soleil ! Toutefois, les échanges par conduction sont assez anecdotiques dans les conditions de la pratique sportive, eu égard aux autres mécanismes d’échange de chaleur. 3° La convection La convection est une forme conductive d’échange de chaleur (et de matière) mais, parmi les deux corps échangeurs, il y a l’air et l’eau. En effet, la convection caractérise la chaleur échangée au contact d’un fluide par l’intermédiaire d’un courant d’air ou d’eau. Les échanges convectifs (par convection) sont d’autant plus importants que le gradient (la différence) de température entre le corps et l’air ou l’eau est grand, mais dépendra également de la vitesse de déplacement du fluide : courant d’air ou courant d’eau. Un nageur qui nage vite, un cycliste qui pédale vite ont une production de chaleur endogène (produite par l’organisme) importante de par leur métabolisme énergétique, mais ont la consolation d’avoir des échanges convectifs possibles supérieurs à ceux qui se déplacent lentement. Nager et pédaler dans des courants ou des vents forts entraînent de plus grosses pertes de chaleur. En laboratoire, les ventilateurs permettent d’assurer (en partie) les échanges convectifs qui sont de très importants moyens d’évacuer la chaleur endogène. Notons que les échanges convectifs dans l’eau sont 25 fois plus importants à température égale que dans l’air ; c’est pourquoi la neutralité thermique qui est définie comme une température n’entraînant ni gain ni

Chapitre 5

perte de chaleur, le corps nu immobile, est de 25 °C dans l’air et de 34 °C dans l’eau. 4° L’évaporation Le dernier moyen d’échanger et, cette fois-ci, uniquement d’évacuer sa chaleur endogène dans le milieu environnant est l’évaporation. C’est la voie majeure de dissipation thermique chez l’homme. Nous avons déjà vu (dans le chapitre IV traitant de la ventilation), que les animaux à poils, dépourvus de ce mécanisme, évacuaient leur chaleur par la bouche, en hyperventilant très rapidement. L’homme élimine sa chaleur au repos pour 25 % par évaporation, mais bien davantage lorsque lors d’un exercice accompli dans un air chaud, sous un soleil radieux, les possibilités de convection étant faibles. L’évaporation est fondée sur le principe selon lequel chaque gramme de sueur ou d’eau sur la peau (dans le cas d’un épongeage dans une course à pied sur route) permet de dissiper 580 calories. Un litre de sueur évaporée, transpiration utile non ruisselante, permet d’éliminer quelque 580 kcal, ce qui est appréciable mais va avoir pour corollaire un risque de déshydratation. L’évaporation dépend du gradient (de la différence) de la pression en vapeur d’eau entre le corps et l’air. Ainsi, l’évaporation de la sueur sur la peau va dépendre de trois facteurs : a) de la température et de l’humidité relatives ; b) des courants convectifs entourant le corps ; c) de l’importance de la surface de la peau exposée à l’environnement. Dans un environnement très chaud, l’humidité relative est le facteur le plus important déterminant la quantité de chaleur éliminée par l’évaporation de la sueur. 100 % d’humidité dans l’air est synonyme de quasi-impossibilité d’évaporer sa sueur. Il est important de comprendre que ce n’est pas la sueur qui refroidit la peau, mais bien son évaporation. Une sueur ruisselante est parfaitement inutile puisqu’elle n’est pas évaporée ; la sueur utile est donc bien celle qui ne se voit pas. Il ne faut cependant pas oublier de compenser les pertes hydriques dues à cette discrète mais néanmoins réelle perte d’eau. Il est possible de calculer la quantité de sueur à évaporer (sueur utile) pour maintenir la température constante d’un sportif pédalant 20 minutes sur un cyclo-ergomètre à une puissance de 165 watts entraînant une consommation d’oxygène de 2 l/min (rappelons qu’un watt coûte environ 0,012 ml d’O2 par minute). La procédure de calcul est proposée dans l’encadré 12, en postulant que le rendement du coup de pédale est pour ce sujet de 20 %.

163

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

Encadré 12 Calcul de la sueur évaporée Sachant qu’un litre de sueur permet d’éliminer 580 kcal, si Camille pédale à 165 watts en consommant 2 l d’O2 par minute (soit une dépense énergétique de 5 kcal  2 = 10 kcal/min, puisque 1 l d’O2 équivaut à 5 kcal), avec un rendement sur bicyclette de 20 %, il devra évaporer sur 20 minutes d’exercice : Énergie totale dépensée pendant 20 min

= 20 min  10 kcalories/min = 200 kcalories

Chaleur totale produite (Rendement = 20 %) 80 % de l’énergie totale (100 % – 20 %)

= 200 kcal  0,80 = 160 kcal.

La quantité de sueur qu’il faudra évaporer afin d’éviter l’accumulation de chaleur et l’augmentation excessive de la température interne sera donc de : Quantité de sueur qu’il faudra évaporer (litres) = 160 kcal/580 kcal = 0,275 litres.

Le réchauffement de la selle est négligeable (sic). Le résultat pour ces 20 minutes d’exercice est de 0,275 litres de sueur à évaporer pour prévenir l’augmentation de la température interne dans des proportions exagérées. Une température de 38-38°,5C étant tout au contraire favorable à l’action des enzymes du métabolisme énergétique. La température rectale de 38 °C est un point remarquable car elle correspond à un exercice dont le niveau d’intensité est égal à 50 % de la consommation maximale d’oxygène. En résumé, pendant l’exercice, la perte de chaleur par évaporation est le mécanisme le plus important dans des conditions de température ambiante inférieure à celle du corps mais surtout lorsque la convection ne peut s’opérer en cas de forte chaleur (> 33 °C). Nous allons examiner les réactions aiguës (immédiates) à la chaleur (1.3), leur régulation (1.4) ainsi que la possibilité de s’entraîner à supporter la chaleur (1.5).

1.3

Réactions aiguës (immédiates) à la chaleur

Afin d’assurer l’équilibre thermique indispensable pour l’accomplissement de la meilleure performance thermique (représenté par l’équation de la balance thermique, en encadré 13), le débit sudoral augmente avec l’intensité de l’exercice et l’élévation consécutive de la température du corps.

164

1.4

Régulation de la température

Le rôle de la thermorégulation est de maintenir la température du « noyau interne » (le centre du corps) à une valeur proche de 37 °C, celle-ci étant la référence pour le thermostat de l’organisme, à l’image de la température d’une pièce contrôlée par des radiateurs thermostatiques. On note quelques variations de température pendant une journée (variation circadienne maximum à 18 h 00 et minimale à 15 h 00) ou pendant un mois lors de la période d’ovulation au 14e jour du cycle menstruel (28-30 jours) de la femme. Cependant, ces variations ne sont que de l’ordre de ± 0,5 °C. Cette valeur peut augmenter de façon plus importante lors de la fièvre qui déplace le point de consigne de 1 à 3 °C en raison de l’action de substances « pyrogènes » (génératrices de chaleur) dont la sécrétion dépend de l’action des macrophages (qui avalent les bactéries) activés par l’infection. Lorsque la fièvre apparaît, le « point de consigne » (point de référence de la variable à réguler) ayant été augmenté, le sujet a froid et les frissons qu’il ressent permettent de produire de la chaleur puisque le frisson est une contraction musculaire qui s’accompagne d’un dégagement important de chaleur. Lorsque l’infection disparaît, le point de consigne redescend de 1 à 3 °C, le sujet a alors trop chaud et élimine l’excès de température par évaporation de sueur. Le sujet convalescent transpire alors.

Théorie des effets de la température et de l’altitude

Chapitre 5

Encadré 13 La Balance thermique La mesure des effets d’un environnement sur l’organisme est dérivée de la première loi de la thermodynamique (qui énonce la conservation de l’énergie sous diverses formes) utilisée dans l’équation de la balance thermique : S = M – (± Wk) ± E ± R ± C ± K, en watts par mètre carré de surface corporelle Où S est la chaleur stockée ; M . est la production de chaleur endogène, produite par le métabolisme et qui peut être augmentée de 20 fois à VO2max et davantage pour des exercices supramaximaux mais qui durent trop peu longtemps pour que l’accumulation de chaleur n’ait le temps de s’opérer. Les échanges de chaleur se réalisent par l’évaporation (E), par la conduction (K), par la convection (C) ou la radiation (R). L’énergie restante est le travail (Wk) qui peut être positif (concentrique) ou négatif (excentrique, voir Glossaire). On peut scinder les échanges thermiques en deux catégories : ceux qui sont sensibles à l’humidité dans l’air (l’évaporation) et ceux qui sont insensibles à l’humidité de l’air (convection, conduction et radiation).

L’hypothalamus antérieur est le premier centre de régulation de la température interne. C’est dans l’hypothalamus en effet, que sont situés les récepteurs sensibles à la température (thermorécepteurs) qui enregistrent la température du noyau central. L’hypothalamus reçoit des informations complémentaires des thermorécepteurs de la peau et de la moelle épinière. Dans les centres thermorégulateurs de l’hypothalamus, la température effective du corps (valeur réelle) est comparée à la valeur de consigne. S’il existe une différence, l’organisme met en œuvre plusieurs mécanismes de régulation du bilan thermique. Si la température augmente au-dessus de la valeur de consigne, dans le cas d’un exercice physique par exemple, apparaissent une série de réactions physiologiques que nous allons envisager. L’hypothalamus stimule d’abord les glandes sudoripares qui vont favoriser le mécanisme de perte de chaleur par évaporation. Puis, le centre de contrôle vasomoteur va augmenter le débit sanguin cutané, permettant au flux sanguin « surchauffé » dans le noyau central d’aller se refroidir au niveau de la peau, favorisant ainsi les pertes de chaleur par convection, prévenant par là une déshydratation éventuelle par la mise en œuvre du seul mécanisme par évaporation. Il faut noter à ce propos que les femmes favorisent la perte de chaleur par convection grâce à leurs hormones femelles (dont les œstrogènes) qui permettent une plus

grande vasodilatation cutanées. Toutefois, il n’y aurait pas de différence significative entre les sexes, à même niveau de performance, dans l’adaptation à la chaleur. Toutefois, les enfants ayant un débit cardiaque moins important pour une même consommation d’oxygène en valeur absolue, ils seront plus sensibles à la chaleur (Bar Or, 1986). Lorsque la température revient à sa valeur de repos, ces deux mécanismes cessent. La température du sang qui passe par l’hypothalamus le renseigne avec précision. Rappelons que la diminution de la température provoque les effets inverses : vasoconstriction des vaisseaux sanguins cutanés. L’hypothalamus stimule la glande thyroïde ainsi que les glandes médullosurrénales qui vont respectivement sécréter dans le sang l’hormone thyroxine et les catécholamines (adrénaline et noradrénaline) (voir l’encadré 14 définissant ce qu’est une hormone). Par ailleurs, ainsi que nous l’avons vu dans le cas de la fièvre, les frissons producteurs de chaleur apparaissent et les poils se dressent sur la peau (piloérection) pour retenir la chaleur en évitant la perte par convection. Il va sans dire que ce mécanisme n’est pas très efficace au regard de la pilosité humaine, mais peut suggérer d’enfiler « une petite laine ». Mais là, nous entrons dans les mécanismes d’adaptation comportementaux qui sont les mécanismes essentiels de la réaction face au froid. Les figures 61 et 62 résument ces adaptations à la chaleur et au froid.

165

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

Récepteurs



Figure 61

zz

Réponses physiologiques à la chaleur.

z

Figure 62 Réponses physiologiques au froid.

Hypothalamus

Vasodilatation cutanée & Transpiration

Intégration

Effecteurs

Hypothalamus

Frissons Vasoconstriction cutanée Libération de catécholamines Libération de thyroxine

Peau

Diminution de la chaleur



Effecteurs

Noyau central

Récepteurs



Intégration

Peau

Augmentation de la chaleur



ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

Noyau central

1.5

Acclimatation à la chaleur

1.5.1 Peut-on s’acclimater à la chaleur ? Ce point est d’importance pour préparer les échéances sportives se déroulant en ambiance chaude, à l’instar des Jeux Olympiques d’Atlanta, d’autant plus que les impératifs télévisuels commandent parfois que le marathon soit couru aux heures les plus chaudes de la journée. Quand on sait que les droits de retransmission télévisuels ont triplé en quatre ans entre Barcelone et Atlanta, on peut imaginer que la tendance ne s’inversera pas, en dépit des considérations physiologiques, médicales et sportives. Hubbard et Armstrong (1989) estiment que l’hyperthermie renforce la déplétion énergétique ajoutant un surcoût énergétique pour faire face à l’augmentation des débits sanguins cutanés. Ceux-ci vont notamment réduire la pression en raison de la baisse des résistances périphériques, ce qui, pour

le maintien de la pression sanguine, nécessitera l’augmentation de la fréquence cardiaque permettant d’accroître le débit cardiaque (voir chapitre III). L’entraînement en milieu chaud permet une série d’ajustements physiologiques qui vont atténuer le stress dû à la chaleur. Pour habituer l’organisme à la chaleur, il importe déjà de s’entraîner à une intensité d’exercice induisant une surcharge thermique, soit à une intensité d’au moins 50 % de la consommation maximale d’oxygène (Pandolf, 1979). Les adaptations qui apparaissent lors de l’acclimatation à la chaleur sont : 1) l’augmentation de volume plasmatique de 1012 % par celle des protéines plasmatiques (Gisolfi et Cohen, 1979). Cet accroissement du volume plasmatique permet de maintenir la pression sanguine et le volume d’éjection systolique sans nécessiter l’augmentation du débit cardiaque par la fréquence cardiaque ; 2) le déclenchement plus rapide du seuil de sudation au début d’un exercice, diminuant ainsi le stockage initial de chaleur ; 3) l’augmentation du débit sudoral par trois pour la même charge relative d’exercice (le même pourcentage de la consommation maximale d’oxygène) (1 litre à l’heure au lieu de 0,3 l à l’heure pour un sujet entraîné. et acclimaté à l’ambiance chaude à 60 % de VO2max ) ; 4) la diminution de la concentration de la sueur en sels minéraux et notamment en sodium et chlore, ceci grâce à « l’hormone » (messager sanguin, encadré 14) aldostérone qui permet la réabsorption du sodium au niveau du rein ; 5) la réduction de la vasodilatation cutanée (Gisolfi et Cohen, 1979). Il est intéressant de

Encadré 14 Les hormones, mécanisme d’intégration de l’organisme Si les nerfs et le système nerveux sont spécialisés dans une transmission rapide de signaux, ainsi que nous l’avons décrit pour la contraction musculaire, le système « endocrinien » est spécialisé dans une transmission lente et continue des signaux. Il utilise le système circulatoire pour couvrir de plus grandes distances dans l’organisme. Les messagers du système endocrinien sont les hormones ; elles proviennent de cellules sécrétrices et ont comme « organe effecteur » ou organe « cible » une autre glande ou bien des cellules non endocriniennes (ne sécrétant pas d’hormones). Cela signifie que certaines

166

glandes vont sécréter des hormones qui, à leur tour, stimuleront d’autres glandes qui vont sécréter des hormones stimulant ou inhibant l’activité de certaines cellules de l’organisme. L’hypothalamus (situé dans le télencéphale) qui contrôle la température corporelle, sécrète des cellules neuro-endocriniennes qui vont stimuler la glande thyroïde située au niveau du cou et provoquer la sécrétion d’hormones thyroïdiennes augmentant le métabolisme énergétique et la production inhérente de chaleur endogène. L’hypothalamus est luimême influencé par des centres supérieurs du cerveau.

Théorie des effets de la température et de l’altitude

Chapitre 5

Encadré 15 L’index global de température prédicteur des risques d’hyperthermie Haut risque d’hyperthermie

TG = 23-28 °C

Absence de risque d’hyperthermie

Risque modéré d’hyperthermie

TG = 18-23 °C

mais possibilité d’hypothermie

Bas risque d’hyperthermie

TG < 18 °C

noter que cette acclimatation s’instaure au bout d’une à deux semaines après la première exposition. L’American College of Sports Medicine (ACSM) (1991), société savante américaine rassemblant près de 10 000 scientifiques, médecins et entraîneurs de tous pays, recommande l’usage d’un index qui synthétise le degré d’hygrométrie pour la température humide, les rayonnements et la température sèche (encadré 15). Pour cela il faut mesurer : 1) la température sèche (classique sous abri et à l’ombre) = TS ; 2) la température rayonnante, température mesurée en plein soleil = TR ; 3) la température humide avec un thermomètre à mercure dont le bout est recouvert d’une mèche de coton humide. Ainsi la température mesurée dépendra de la sécheresse de l’air et donnera un indice concernant la possibilité d’évacuer sa chaleur = TH.

TG < 10 °C

La formule donnant l’index global de température (TG) = 0,7 TH + 0,2 TR + 0,1 TS. Le risque d’hyperthermie ou d’hypothermie sera le suivant en prenant pour repère l’index de température globale TG (encadré 15). Quoi qu’il en soit, afin de prévenir le « coup de chaleur », symptôme de l’augmentation de la température interne, en vertu de ce débit sudoral augmenté, il est conseillé de boire tous les quarts d’heure, l’équivalent de 20 cl de boisson « isotonique », c’est-à-dire ayant la même concentration que le plasma sanguin, une boisson trop concentrée risquant au contraire de déshydrater l’organisme en raison d’un appel d’eau des cellules vers l’estomac selon la loi du gradient de concentration qui fait que les liquides se déplacent toujours des milieux les plus hydratés vers les moins hydratés (encadré 16a). Une étude de Candas et al. (1986) a montré l’efficacité d’une boisson isotonique sur l’endurance (temps de maintien d’une intensité donnée). L’impor-

Encadré 16a Travaux pratiques pour l’élaboration d’une boisson isotonique (d’après Candas et al., 1986) Composition :

grammes/litre

Sucrose (ou saccharose c’est-à-dire le sucre de table) Glucose Fructose Na+ K+ Ca++ Mg++ P5+ Cl-

67,9 1,2 1,2 0,531 0,126 0,081 0,045 0,063 0,594

167

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

tance de l’hydratation pourrait être soulignée en donnant seulement le rapport illustrant la baisse de la performance et la perte hydrique : 2 % du poids de corps perdu par la déshydratation entraîne une diminution de 20 % de la performance définie comme le temps soutenu à une intensité donnée, ceci pour les exercices de plus de 30 minutes, c’est-à-dire sollicitant une intensité inférieure à 92 % de la consommation maximale d’oxygène.

1.6

Adaptation au froid

1.6.1 Peut-on s’acclimater au froid comme il est possible de le faire à la chaleur ? L’exercice en ambiance froide augmente la capacité de l’athlète à éliminer sa chaleur endogène, réduisant la possibilité de développer un coup de chaleur. Inversement, la production de chaleur endogène et les vêtements adéquats doivent éviter « l’hypothermie » (la baisse importante de la température du noyau central) lors d’un exercice de durée moyenne (< 1 heure) par temps froid. Cependant, pendant un exercice de longue durée (1h et plus) accompli par temps froid, comme la « Vasaloppet » en Suède, reine des épreuves de ski de fond, longue de 86 km, ou encore lors d’un 25 km à la nage en lac, le risque d’hypothermie est important. En effet, la perte de chaleur est supérieure à celle qui est produite par l’exercice. Ce fait est particulièrement crucial en natation où le milieu environnant, de par ses fortes caractéristiques convectives, favorise la perte de chaleur. Nager en eau très froide (< 15 °C) est dangereux eu égard aux risques d’hypothermie. Les sujets qui ont un fort pourcentage de masse grasse ont un avantage indéniable pour lutter contre le froid, puisque leur noyau interne est mieux protégé, de même ceux dont la surface corporelle est relativement moins importante que pour un sujet mince (Horvath, 1981). Les femmes, qui sont plus grasses que les hommes, sont donc avantagées par leur isolation naturelle, sur les traversées en eau froide. La participation aux épreuves sportives dans un environnement froid pose quelques problèmes comme la protection des extrémités moins bien irriguées en raison de la vasoconstriction périphérique, et comme la protection de la face, sans pour autant gêner la respiration (usage des masques par les skieurs québécois). Au Canada, il est d’usage que les pistes de ski de fond soient jalonnées tous les 5 km de cabanes où brûle en permanence un poêle, permettant aux skieurs

168

fatigués de se reposer tout au long des grands parcours. Ces pistes sont de plus surveillées par des « patrouilleurs » chargés de vérifier que personne ne risque de rester sur le bord de la piste par – 30 °C. Lorsque le vent souffle, il faut ajouter le « facteur vent » qui, en augmentant les pertes par convection, aggrave les conditions thermiques. L’acclimatation au froid se fait alors selon deux mécanismes physiologiques par : 1) une diminution du seuil de frisson, c’est-à-dire la température de la peau à laquelle le frisson sera déclenché (évitant à l’organisme de s’épuiser à frissonner) et donnant la possibilité de mieux dormir sans frissonner constamment. C’est important pour l’exercice en haute montagne où au froid s’ajoute une baisse de la pression totale et de la pression partielle en oxygène. 2) une augmentation de la circulation sanguine périphérique pour maintenir les extrémités réchauffées.

1.7

Adaptation aiguë (acclimatation) et à long terme (acclimatement) à l’altitude

Depuis les Jeux Olympiques de Mexico qui se sont déroulés en 1968 à 2 300 mètres d’altitude, le champ des connaissances en physiologie de l’exercice en altitude s’est développé. Les questions posées par l’environnement sportif aux scientifiques étaient : (1) dans quelle mesure l’altitude allait-elle affecter les performances olympiques ? (2) comment fallait-il préparer les compétitions en altitude, la conduite des stages, leur programmation avant l’événement sportif ? puis par la suite (3) comment maîtriser l’utilisation des stages en altitude pour préparer des objectifs se déroulant en plaine ? Nous allons répondre successivement à ces questions grâce à tous ces travaux réalisés depuis 30 ans. L’altitude induit une situation d’hypoxie qui provoque des mécanismes d’adaptation physiologique que nous allons rappeler.

1.7.1 L’hypoxie : définition L’hypoxie systémique est définie comme un apport d’oxygène (étapes convectives et diffusives) insuffisant pour satisfaire la demande tissulaire en ATP. Afin de poursuivre son métabolisme, la cellule met en œuvre des processus d’adaptation qui peuvent être en partie similaires à ceux observés lorsque le sportif s’entraîne (régulation du débit sanguin tissulaire, aug-

Théorie des effets de la température et de l’altitude

mentation de l’extraction de l’oxygène au niveau tissulaire grâce à l’augmentation de la densité de capillaires perfusées). L’hypoxie peut être, selon les causes, une hypoxie anémique (réduction de l’hématocrite), une hypoxie stagnante (s’appliquant à la limitation du flux sanguin tissulaire) ou hypoxie hypoxémique qui réfère à la baisse de la pression artérielle en oxygène. Les études concernant les effets de l’exposition intermittente à l’hypoxie rentrent dans cette dernière définition de l’hypoxie. La cause de cette diminution de la pression artérielle en oxygène est la baisse de la pression en oxygène de l’air ambiant due, soit à la baisse de la fraction en oxygène, soit à la baisse de la pression barométrique. Ce travail se situe dans le cadre de l’hypoxie induite par la baisse de la fraction de l’air en oxygène par l’augmentation de la fraction d’azote de l’air ambiant.

1.7.2 L’entraînement en altitude vraie ou simulée : des effets contradictoires et très individualisés Peu d’études ont été réalisées sur les athlètes de haut niveau. Depuis les années 80, l’utilisation des entraînements en altitude a pour finalité l’amélioration des performances se déroulant en plaine. L’hypoxie induit : 1) une augmentation du nombre de globules rouges et de la concentration en hémoglobine apparaît pendant les premières semaines de l’arrivée en altitude, cette augmentation étant plus graduelle au bout d’un à deux mois. Cette réponse favorise également le maintien de CaO2 ; 2) encore à plus long terme, ces modifications tissulaires comprennent : (a) une augmentation de la capillarisation des muscles notamment, (b) une augmentation de la myoglobine, c) une augmentation de la densité mitochondriale, et enfin (d) des modifications enzymatiques dans le sens d’une baisse des enzymes oxydatives. Lorsque le sportif retourne en plaine après 3 à 4 semaines de stage en altitude, ces modifications sont réversibles en 2 à 4 semaines sauf si des séances bi-hebdomadaires de 3 heures sont réintroduites dès la première semaine de retour en plaine (Beidleman et al., 1997 ; Lyons et al., 1995). Ces effets chroniques de l’altitude sont donc similaires à ceux d’un entraînement par des exercices de longue durée (supérieure à 1 heure). On comprend dès lors que les spécia-

Chapitre 5

listes des épreuves d’endurance aient pris en compte ce stimulus supplémentaire pour accélérer les effets de leur entraînement. Les athlètes spécialistes des sports explosifs s’entraînent également en altitude. En effet, la vitesse de resynthèse de la phosphocréatine serait accélérée après un séjour en entraînement en altitude à 2 000m (Kuno et al., 1994), ce qui peut permettre une meilleure récupération entre les séries intra et inter- entraînement. Cependant, les études scientifiques rapportent des résultats très divergents concernant cet effet additionnel de l’hypoxie à ceux de l’entraînement, surtout si les entraînements réalisés en plaine et en altitude sont similaires c’est à dire de même intensité et durée relatives. La formule, en vogue à l’heure actuelle, consistant à cumuler les effets d’un entraînement en plaine et d’une vie en hypoxie afin de bénéficier des adaptations chroniques évoquées précédemment. Les résultats des différentes études les plus pertinentes (334 articles indexés au Current Contents de 1968 à 2001) montrent des divergences dues : • à des méthodes d’entraînement non comparables d’une étude à l’autre ; • des populations très différentes avec une demi douzaines d’études seulement, réalisées avec des sportifs de haut niveau (voire en équipe par des chercheurs australiens en 1997 et en 1998) ; • des situations d’hypoxie différentes (altitude de 600 à 3 500m) ; • des entraînements réalisés en plaine ou en altitude ; • des critères de performances qui ne sont pas toujours spécifiques de l’entraînement considéré. À partir de 1 600 m, à chaque fois que l’on s’élève de 100 m, la consommation maximale d’oxygène va diminuer de 1 %. À 2 400 m d’altitude . VO2max sera altéré d’environ 10%. Cependant cette valeur varie d’un sujet à l’autre de 8 à 18 %.

. Certaines études montrent même que la baisse de VO2max est sensible à partir de 1 219 m (656 mmHg) (Squires et Buskirk, 1982). .

À 3 100 m d’altitude, le VO2max est encore de 80 % de la valeur de plaine. Le myocarde est sensible à l’hypoxie, et la limitation de la consommation maximale d’oxygène est non seulement périphérique (baisse de la capacité artérielle en oxygène, CaO2, par

169

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

la baisse de SaO2) mais également centrale par la baisse du débit cardiaque maximal. La saturation de l’hémoglobine en oxygène (SaO2) est une composante du contenu artériel en oxygène qui rentre dans le facteur périphérique de la consommation d’oxygène (le débit cardiaque étant le facteur central). À 3 000 m d’altitude, la saturation artérielle d’oxygène diminue de 98 à 93 % et le contenu artériel en oxygène (CaO2) est alors diminué de 1 ml (sur les 20 ml de référence). La forme sigmoïde de la courbe de dissociation de l’hémoglobine a un rôle « protecteur » sur la valeur de SaO2 en dépit de la baisse de PaO2 jusqu’à 2 500 m (voir figure 51 p. 144). Il faut rappeler que cette désaturation en oxygène due à l’altitude, s’ajoute à celle qui est induite par l’exercice intense proche de la consommation maximale d’oxygène qui apparaît surtout chez les sportifs qui ont une grande consommation maximale d’oxygène (> 65 ml.min-1.kg-1) (Powers et al., 1988). Par conséquent, ainsi que l’ont démontré des études récentes, l’hypoxie aggrave cette hypoxémie induite par l’exercice chez les sportifs qui ont une . haute valeur de VO2max (Chapman et al., 1999 ; Peltonen et al., 1999). Cependant cette désaturation provenant surtout d’un temps de contact trop bref entre le sang des capillaires pulmonaires et des alvéoles est réversible après l’exercice. Ainsi, même en moyenne altitude (2 000 m), la ventilation peut être un facteur limitant de l’exercice tout particulièrement chez l’athlète confirmé (Gore et al., 1996). Il faut également noter que cette hyperventilation permet, outre le maintien de PAO2 (pression partielle artérielle en oxygène), l’élimination de l’excès de CO2 produit par le métabolisme anaérobie. Par conséquent l’hyperventilation entraîne une baisse de PACO2, de la concentration en ions H+ et donc une augmentation du pH sanguin. Cette augmentation du pH sanguin est appelée « alcalose (augmentation du pH) respiratoire (due à l’hyperventilation) ». Cette alcalose respiratoire va être corrigée dans les 48 heures par une élimination de bicarbonates (HCO3-) dans les urines, le rein les réabsorbant en moins grande quantité. On appelle cette étape : « la crise urinaire des 48 heures ». Outre l’hyperventilation, la baisse de pression partielle en oxygène, consécutive à la prise d’altitude, entraîne la seconde adaptation (sanguine cette fois) qui intervient plus tardivement. Si l’entraînement en altitude pour préparer un objectif en altitude paraît justifié (Vallier et al., 1996 ; Sakai et al., 1994 ; Richalet et al., 1992), par contre les scientifiques sont loin d’être unanimes quant au bien fondé de l’entraînement en altitude pour pré-

170

parer une compétition qui doit se dérouler en plaine (Wolski et al. 1996 ; Emonson et al., 1997). En effet, du fait de la baisse de la consommation maximale d’oxygène, en course de fond et demifond par exemple, la vitesse associée à la consommation maximale d’oxygène est abaissée dans les mêmes . proportions que VO2max soit de 10 % environ à l’altitude de Font Romeu (Pyrénées Orientales) qui est le centre d’altitude couramment utilisé par les coureurs de fond. Il a été démontré que la baisse de la consommation maximale d’oxygène était plus importante chez le sportif entraîné que chez des sédentaires et. ce même en considérant la baisse en pourcentage de VO2max et non en valeur absolue (Koistinen et al., 1995). Il en est de même pour la consommation d’oxygène au seuil lactique. Par conséquent, les vitesses d’entraînement devront être abaissées de 10 % au risque de conduire l’athlète au surentraînement ou à l’arrêt précoces de séries programmées, ce qui serait loin de le rassurer avant une grande compétition. De plus, le coût énergétique de la course augmente en raison de l’hyperventilation et de son coût énergétique (Mognoni et al., 1982 ; Morgan et Craib, 1992, di Prampero, 1986b). En outre, courir à 20 km.h-1 à Font Romeu au lieu de 22 km.h-1 à Vittel (autre centre d’entraînement mais à une altitude négligeable), soit . dans les deux cas à 100 % de la vitesse associée à VO2max n’aura pas les mêmes conséquences sur la fréquence et l’amplitude de la foulée et par conséquent sur la force musculaire nécessaire (Bailey and Davies, 1997). Or à un haut niveau, on peut penser que la force déployée lors de la phase d’appui qui permet en un temps très court de produire une impulsion importante est un paramètre discriminant de la performance, tant les caractéristiques des athlètes élites sont proches. Une solution intermédiaire permettant de bénéficier des effets de l’altitude sur l’oxygénation du sang sans avoir à réduire les vitesses d’entraînement est cependant possible. En effet, une étude récente (Levine et Stray-Gundersen, 1997) a montré l’efficacité d’un entraînement à altitude moyenne (1 250 m) de 4 semaines, combiné à une vie à 2500 m sur la performance sur 5 000 m (– 13.4 s ± 10 s par rapport à 17 minutes). Auparavant les coureurs s’étaient entraînés 4 semaines en plaine (150 m) selon le même programme afin de bien mesurer les améliorations de paramètres physiologiques et de performance effectivement dues à l’altitude et non à l’entraînement. La base de l’entraînement en plaine. était effectuée à une vitesse sollicitant 71 % de VO2max à 85 % de la vitesse record personnel en plaine du 5 000 m et seulement à 80 et 75 % à 1 250 et 2 500 m et de telle sorte

Théorie des effets de la température et de l’altitude

que la fréquence cardiaque était similaire à toutes les altitudes. Les coureurs réalisaient une séance d’entraînement plus intense composée de répétitions de 4 fois 1 000 mètres à 110 % de la vitesse spécifique du 5 000 m record (en plaine) donnant une fréquence cardiaque de 96 % de la fréquence cardiaque maximale (en plaine). En altitude la vitesse des 1 000 m était réduite afin que le coureur soit toujours à la même fréquence cardiaque. Ainsi le stimulus d’entraînement était comparable en volume et intensité (et forme) pour les trois altitudes (150, 1 250 et 2 500m). Ce gain de performance était significativement supérieur à celui de deux groupes de coureurs de caractéristiques identiques concernant l’aptitude physiologique et la performance sur 5 000 m ayant suivi le même entraînement et ayant vécu en plaine ou à 2 500m. Seul le groupe ayant vécu en haute altitude (2 500m) et s’étant entraîné en altitude moyenne (1 250m) avait amélioré sa consommation maximale d’oxygène de façon significative (6 %), et son seuil anaérobie (8 %), toutes ces améliorations étaient corrélées à celle de la performance (augmentation de la vitesse sur 5 000 m). L’augmentation du volume de globules rouges par unité de poids musculaire (+1,5 ml.kg-1 soit + 5,3 %) était corrélée à l’amélioration de la consommation maximale d’oxygène et à l’amélioration de la performance sur 5 000 m. Les coureurs s’étant entraînés et ayant vécu à 2 500 m avaient augmenté significativement leur consommation maximale d’oxygène, leur volume de globule rouge par unité de masse musculaire et leur taux d’hémoglobine (de 13,8 à 15,0 mg/dl) mais avaient vu leurs performances diminuer sur 5 000 m. Ils avaient ressenti une grande lassitude à la fin de leurs 4 semaines à 2 500 m. La critique que nous pouvons formuler à l’endroit de cette étude est que les résultats de cette étude réalisée sur des athlètes de niveau médiocre (16 minutes 30 secondes au 5 000 m pour les hommes et 19 minutes pour les femmes) n’ont pas été confirmés par des études réalisées avec des athlètes de niveau national ou international. Or le changement des habitudes, le confort du sommeil qui n’est pas toujours idéal en altitude ou en chambre hypoxique, sont autant de facteurs déterminants de la récupération et donc de l’assimilation de l’entraînement pour optimiser la performance.

1.7.3 Une réponse individuelle à l’hypoxie Par ailleurs, il a été montré que l’entraînement en altitude selon la formule « vivre haut (2 500 m) s’entraîner bas (1 250 m) » (VHSB) serait efficace mais cependant de façon très variable individuellement

Chapitre 5

(Chapman et al., 1998). En effet, les « non répondeurs » classés comme tels n’avaient pas amélioré leurs performances sur 5 000 m de course après un entraînement de 28 jours selon cette formule VHSB et n’avaient pas augmenté leur concentration sanguine d’erythropoieitine (EPO) contrairement aux « répondeurs ». Or, chez les « répondeurs », l’augmentation de la concentration d’EPO était corrélée à l’augmentation de la masse sanguine totale (l’EPO sécrété par le rein stimulant la production de globules rouges) et à celle de la consommation maximale d’oxygène (Chapman et al., 1998). Les « non répondeurs » avaient dû diminuer fortement leur vitesse lors des séances qualitatives d’entraînement fractionné ce qui peut avoir eu pour effet d’ajouter un effet de désentraînement consécutif à ce manque d’adaptation à l’altitude. En conclusion, l’étude de Chapman et al. (1998) a montré que l’amélioration de la performance sur 5 000 m était conditionnée par i) la possibilité de vivre suffisamment haut (2 500 m) et longtemps (1 mois) pour stimuler l’érythropoieise et ii) l’entraînement à une altitude suffisamment basse pour maintenir . une vitesse d’entraînement fractionné (à vVO2max ) suffisamment élevée pour que la consommation d’oxygène soit à son maximum absolu grâce à un haut niveau de débit cardiaque (le myocarde étant sensible à l’hypoxie, la fréquence cardiaque maximale peut être très abaissée en altitude) et une grande différence artério-veineuse en oxygène. L’érythropeïse est stimulée à des altitudes très élevées (5 500 m) (Rodriguez et al., 1999 ; Berglund 1992) incompatibles avec des nuits sans risque d’insomnie ou d’apnée du sommeil. En effet, il a été rapporté qu’après un séjour (bref) de 7 jours d’entraînement en altitude (2 700 m) l’EPO augmentait mais de façon insuffisante pour augmenter . VO2max (Klausen et al., 1991). Une toute dernière étude concernant l’efficacité de cette formule « vivre haut s’entraîner bas » (Ashenden et al. 1999) conteste son efficacité à augmenter la masse de l’hémoglobine total (élément qui fixe l’oxygène dans le globule rouge). Les sujets spécialistes de sport d’endurance (cyclisme, triathlon, ski de fond) ont pendant 23 jours dormi 8 à 10 heures dans une chambre hypoxique (hypoxie normobare). Les sujets témoins dormaient à leur altitude d’entraînement (2 600 m). Les résultats de cette étude montrent que non seulement la masse totale d’hémoglobine n’était pas modifiée mais il en était de même concernant les paramètres témoins de la production de globules rouges. Ces résultats ont été confirmés cette année par la même équipe de chercheurs de l’Institut National des Sports Australien (Ashenden et al., 1999 ; Gore et al., 1998 ; Gore et al.,

171

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

1997) pour les membres des équipes nationales féminines et masculines cyclistes après 70 nuits passées à 2 650 m alternées avec des entraînement à 600 . m. En outre, ces sportifs qui avaient déjà des VO2max moyennes très élevées au départ (68 ml.min-1.kg-1pour -1.kg-1pour les hommes) n’ont les femmes et 81 ml.min . amélioré ni leurs VO2max ni leurs performances. L’entraînement en altitude (2 315 m) stimule davantage les sportifs de niveau moyen (Burtschler et al., 1996). Cette formule d’entraînement à basse altitude (au niveau de la mer) et de vie en moyenne altitude (12 heures par jours à 1 980 m) a cependant montré des effets positifs sur la fonction cardiaque puisqu’une échographie a mis en évidence, dans cette étude, une meilleure vidange systolique par une augmentation de la contractilité ventriculaire chez 10 triathlètes (Burtschler et al., 1996). Le volume d’éjection systolique était donc augmenté et la fréquence cardiaque pour une intensité donnée était abaissée. Le groupe témoin de même niveau ne présentait pas ces adaptations qui sont très proches de celles qu’il est possible d’obtenir par un entraînement en plaine bien conduit. Des chercheurs suédois (Svedenhag et al., 1997) avaient également démontré que l’entraînement en altitude (1 mois à 1 900 m) de l’équipe nationale de ski de fond, induisait une augmentation de la masse ventriculaire gauche avec les mêmes conséquences sur la fréquence cardiaque sous maximale que nous avons citées précédemment. Toutefois, une des (rares) études réalisées avec des sportifs de bon niveau (cyclistes) a montré que l’entraînement en altitude (2 300 m en chambre hypoxique hypobarique 574 mmHg) à raison de 5 séances hebdomadaires d’entraînement continu (intensité inférieure au seuil lactique) et intermittent (à . vVO2max ), permettait une amélioration significativement supérieure à l’entraînement en plaine concernant : le seuil lactique (diminution de l’activité enzymatique PFK), la densité capillaire des muscles vastes externes (Terrados et al., 1988 ; Terrados, 1992 ; Hoppeler et Desplanches, 1992 ; Desplanches et al., 1993 ; Green, 1992 ; Ingjer et Myhre, 1992). Cependant une étude toute récente de Melissa et al. (1997) a montré que 8 semaines d’entraînement en hypoxie (13,5 % soit une altitude équivalente de 3 500 m) augmente davantage l’activité maximale de l’enzyme citrate synthase, témoin de l’activité mitochondriale de la cellule qu’un entraînement similaire réalisé en normoxie mais diminue la concentration en de l’enzyme ATPase et des concentration musculaires en sodium et potassium (indispensables à la contraction musculaire).

172

En conclusion, cette diversité expérimentale a pour conséquence une méconnaissance des possibilités réelles d’améliorer la performance des sports d’endurance (dont la durée est supérieure à 3 minutes) qui dépend principalement du métabolisme aérobie. Le tableau 16 résume les principales études concernant l’effet de l’entraînement en altitude sur la performance sportive et les capacités physiques. Il faut noter que le délai de mesure post exposition à l’entraînement et/ou la vie en hypoxie est également très disparate d’une étude à l’autre et semble être un facteur déterminant de la variation de la performance et des réponses physiologiques.

2.

Application : altitude et performances sportives

L’altitude est synonyme de baisse de la pression atmosphérique (tableau 17a) et donc de la pression partielle en oxygène, ce qui implique une moindre résistance à l’air et nous avons vu son importance pour le cyclisme dans le premier chapitre de cet ouvrage traitant de la performance sportive. Cela peut donc être un avantage pour tous les sports de vitesse jusqu’au 200 m en course à pied, ou encore le saut en longueur, pour lequel la vitesse atteinte lors de la course d’élan est fondamentale. Le saut (en longueur) de légende de Beamon, datant précisément des Jeux Olympiques de Mexico, en témoigne puisqu’il a tenu plus d’un quart de siècle. Une étude de Howley (1980) souligne que les performances olympiques se sont détériorées entre Tokyo (1964) et Mexico (1968). Il est intéressant de constater que les performances se sont altérées à partir du 3 000 m, et ce malgré l’élévation du niveau mondial, puisque à cette époque, les athlètes commençaient à se préparer en parcourant davantage de kilomètres et de façon plus intensive. Ainsi, la perte de vitesse sur 3 000 m steeple, 5 000, 10 000 m et marathon était respectivement de -3,9 ; -1,9 ; -3,7 ; -6,2 % des temps records. Plus la distance s’allonge, plus la perte de vitesse est importante. Le 3 000 m steeple est une exception dans la mesure où la composante technique (franchissement des barrières et de 7 rivières) entre en ligne de compte. On peut donc énoncer que, plus la discipline a une forte composante énergétique dans la performance (le geste sportif et la tactique étant secondaires), plus cette composante énergétique est aérobie et plus la baisse de performance (de la vitesse) sera marquée en altitude. Cela vient directement de la baisse de la pression partielle en

Application : altitude et performances sportives

Chapitre 5

Tableau 16 Les principales études concernant l’entraînement en hypoxie 1a. Etudes concernant l’entraînement et la vie en altitude.

Temps de mesure post altitude ; Auteurs, date, Pays

.

Sujets, temps et altitude d’exposition

Résultats concernant VO2max et/ou la performance

Études avec groupe contrôle Gore et al., 1997 (Australie)

13 + 8 coureurs, 28 j à 1 740 m

idem

8 + 8 coureurs, 28 j à 1 300 m

Levine & Stray-Gundersen, 1997 (USA)

13 + 13 coureurs, 28 j à 2 500 m

.

? ; VO2max + 1,0 % ; 3 200 m course – 0,6 %

.

? ; VO2max + 1,1 % ; 3 200 m course + 0,2 %

.

4 j ; VO2max + 4.9 %* ; 3 et 21 j ; 5 000 m course + 2,5 %*

Burtscher et al., 1996

10 + 12 coureurs, 12 j à 2 300 m

Rusko et al., 1996 (Finlande)

14 + 7 skieurs de fond, 18-28j à 1 600-1 800 m

Telford et al., 1996

9 + 9 coureurs, 28 j à 1 800 m

Martino et al., 1995

20 + 13 nageurs, 21 j à 2 800 m

Jensen et al., 1993 (Norvège)

9 + 9 rameurs élites, 21 j à 1 800 m

Levine&stray Gundersen, 1992 (USA)

9 + 10 coureurs, 28 j à 2 500-3 000 m

Karvonen et al., 1986 (Finlande)

3 + 4-6 coureurs sprinters, 21j à 1 850 m

Rahkila & Rusko, 1982, (Finlande)

6 skieurs + 8 skieurs et coureurs, 11 j à 2 600 m

Adam et al., 1975 (USA)

6 + 6 coureurs, 20 j à 2 300-3 000 m

.

3 et 6 j ; VO2max + 1,4 % et + 8,7 %*

.

2 500 m) permette de progresser en garantissant l’amélioration des facteurs cardiovasculaires et musculaires aérobies sans induire de fatigue globale de l’organisme. Quoiqu’il en soit l’utilisation courante de l’exposition intermittente à l’hypoxie dans le contexte de la préparation sportive est une pratique de fait qui procède par empirisme. En effet, actuellement nous trouvons une quinzaine de sites internet qui proposent des dispositifs permettant de dormir ou s’entraîner en altitude. Ces pratiques commerciales s’appuient sur l’étude de Benjamin Lévine (Lévine et Stray-Gundersen, 1997) ayant mis en évidence une amélioration significative de la performance (13 secondes sur un 5 000 m couru en 18 minutes) par l’alternance de vie en altitude et d’entraînement en plaine. Ce protocole permet de conserver la puissance aérobie pour des vitesses d’entraînement proches de la compétition que ne permettrait pas un entraînement en altitude. En Scandinavie, les praticiens utilisaient déjà la maison finoise, chambre hypoxique dans laquelle dormaient les sportifs. On se souvient également du Marathonien Alberto

Chapitre 5

Salazar (2 h 08 au début des années 70) qui utilisait un mélange hypoxique et un masque pour regarder la télévision (article passé dans l’Equipe de l’époque). À présent il est possible d’acquérir pour 6 000 à 9 000 dollars, une tente hypoxique (option 2 500 m ou 4 500 m) qui se monte sur un matelas. La vie en altitude induit des adaptations avec une stimulation de l’erythropoeïse favorisant le transport de l’oxygène par l’augmentation de la concentration en hémoglobine pour un même débit cardiaque (Ferretti et al., 1992). L’alternative à l’utilisation d’une exposition intermittente à l’altitude est celle de l’entraînement en altitude qui induit des modifications structurelles musculaires. En effet, non seulement les cellules rénales mais également les cellules musculaires ont un détecteur cellulaire d’oxygène (Hypoxia Inducible Factor 1, ou HIF 1, Semanza et Wang, 1992 ; Wiener et al., 1996) qui repère l’état d’hypoxie et induit la production d’un facteur de transcription. Travaillant sur ce système d’adaptation cellulaire à l’hypoxie, l’équipe du Professeur Hoppeler collabore depuis plus d’une année avec la Fédération Suisse de ski. Leur protocole consiste à entraîner des skieurs alpins de haut niveau à la puissance au seuil lactique. Quatre skieurs munis de l’Altitrainer 200® (appareil qui permet de simuler les conditions hypoxiques en remplaçant l’oxygène par l’azote) se sont soumis 8 semaines à un entraînement hebdomadaire de 8 à 16 unités de 30 min à une altitude équivalente de 3 200 m. Ce travail en hypoxie a été intégré à l’entraînement habituel (sur neige et de condition physique). L’étude comprenait un groupe témoin de cinq autres skieurs de même niveau réalisant le même entraînement y compris les sessions de 30 minutes qui étaient alors effectuées en normoxie. Le groupe hypoxie a montré une amélioration significative de la puissance pic lors d’un protocole triangulaire par palier de puissance incrémenté réalisé en normoxie (+ 5,6 %, p = 0.02), de la ventilation maximale (+ 9,5 %, p < 0.04) et de la consommation maximale d’oxygène aux altitude de 500, 1 800, 2 500 et 3 200 mètres (+ 3,5% en moyenne, p < 0,01). Le groupe témoin n’avait amélioré ni la puissance ni les facteurs physiologiques associés à ce protocole d’effort. De plus, à 3 200 m, le seuil de début d’accumulation lactique apparaissait à une puissance supérieure chez les sujets entraînés en hypoxie intermittente pour un indice de l’échelle de perception de l’épuisement de Borg inférieur (encadré 21). L’alternative de l’utilisation d’une exposition intermittente à l’altitude est donc celle de l’entraînement en altitude intégré à un entraînement en normoxie. En effet, non seulement les cellules rénales mais également les cellules musculaires ont un détecteur

177

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

cellulaire d’oxygène (Hypoxia Inducible Factor 1, Semanza et Wang, 1992 ; Wiener et al., 1996) qui repère l’état d’hypoxie et induit la production d’un facteur de transcription. L’équipe du Professeur Hoppeler de l’Université de Berne, a montré que la production d’ARNm destiné à la sous-unité régulatrice de l’Hif-1 en activité n’apparaît que lors d’entraînements en état d’hypoxie (Vogt, 2001). Les taux de créatine-kinase et d’urée ne montraient pas de différence entre les deux groupes ce qui laissait supposer que les processus de récupération n’étaient pas affectés par l’entraînement en hypoxie. Les effets associés des stimuli d’entraînement et d’hypoxie permettraient des adaptations physiologiques allant dans le sens de l’amélioration de la capacité aérobie et d’une augmentation du taux de la myoglobine par une action sur l’ARNm de la myoglobine ou sur celui du « vascular endothelial growth factor » facteur de développement vasculaire induisant une augmentation de la densité capillaire (Hoppeler, 1999). En effet il a été déjà démontré que dormir en bas et s’entraîner haut permettait : • une augmentation du (Terrados et al., 1990) ;

taux

d’hémoglobine

• une augmentation des oxydases (Terrados, 1992) ; • une augmentation de la densité du réseau capillaire (Hoppeler, 1999) ; • une augmentation du volume des fibres musculaires (Desplanches et al., 1993). Une étude récente (Vogt et al., 2001) a montré qu’un entraînement réalisé en hypoxie de 5 séances hebdomadaires de 30 minutes à haute (induisant une lactatémie de 4-6 mM) ou basse intensité (induisant une lactatémie de 2-3 mM) augmentait le facteur de transcription Hif-1. En normoxie, la protéine Hif-1 est dégradée en quelques minutes mais pas en hypoxie (Kallio et al., 1999). Cette protéine se fixe sur la partie activatrice de la transcription du gène de l’érythropoïetine. L’augmentation ainsi induite de l’expression de ce gène permet d’augmenter la capacité de transport de l’O2. Il faut noter que l’entraînement réalisé à haute intensité relative, effectué en hypoxie correspondait à la même puissance absolue (provoquant donc le même stimulus quant au facteur flux d’ATP) que l’entraînement à basse intensité effectué en normoxie. Il faut souligner que ces résultats étaient obtenus en comparaison avec des groupes contrôles ayant réalisé les mêmes entraînements en normoxie. La combinaison de l’entraînement à haute intensité et de l’hypoxie s’avérait être la plus efficace dans l’induction des modifications de la fibre musculaire à l’échelon

178

moléculaire. Les valeurs de la consommation maximale étaient augmentées de 13 % dans le groupe entraînement en hypoxie à haute intensité contre 10 et 8 % dans le groupe entraînement à haute et basse intensité en normoxie (différences significatives au risque  = 5 %). Cependant, dans cette étude, les sujets . avaient seulement des VO2max de 50 ml.min-1.kg-1. Nous avons donc conduit une étude (Billat et al., données non encore publiées) qui avait pour objectif de vérifier l’efficacité de l’entraînement au seuil lactique réalisé en hypoxie en vivant en plaine et en réalisant les autres séances d’entraînement en normoxie. Les séances réalisées à la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie étaient donc réalisées en hypoxie alors. que celles courues à la vitesse sollicitant . VO2max (vVO2max ) étaient réalisées en normoxie ; Les athlètes ont donc effectué leurs séances de footing en normoxie dans leur contexte habituel. L’avantage de cet entraînement intégré est qu’il ne modifie pas la qualité du sommeil et la .vitesse de course puisque par exemple, la séance à vVO2max est réalisée en normoxie (séance la plus rapide). Nous avons formulé l’hypothèse que cet entraînement permettait d’augmen. ter VO2max par la stimulation du débit cardiaque à son maximum grâce . au maintien de la séance d’interval- training à vVO2max en normoxie, tout en bénéficiant de l’adaptation musculaire en hypoxie grâce à la séance à vitesse maximale d’état stable de la lactatémie en hypoxie. L’objectif de cette étude fut donc d’étudier l’effet d’un entraînement au seuil lactique en hypoxie chez des coureurs de fond élites hommes et femmes (l’altitude équivalente sera de 3 000 m avec l’Altitrainer). Les sujets étaient des coureurs de fond masculins et féminins (n = 8), spécialistes du 5 000 m au Marathon. Chaque coureur a réalisé en hypoxie (altitude équivalente à 3 000 m) et en normoxie selon un ordre aléatoire : 1) une épreuve triangulaire par paliers croissants de vitesse (+ 1 km/h toutes les 3 minutes) pour déterminer la consommation maximale d’oxygène et la vitesse minimale sollicitant cette consommation maximale d’oxygène (Billat et Koralsztein, 1996) ; 2) une épreuve de deux paliers de 20 minutes réalisée à 90 et 100 % de la vitesse au seuil lactique. Les deux paliers sont séparés de 40 minutes de repos complet. Des échantillons sanguins de 100l sont prélevés toutes les 5 min. Ce test permet de déterminer la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie (voir Chapitre VI, 1.5.6),

Application : altitude et performances sportives

c’est-à-dire la plus haute vitesse pour laquelle la lactatémie pourra encore se stabiliser ainsi que de caractériser la cinétique d’ajustement de la consommation maximale d’oxygène dans les 5 premières minutes de course à intensité modérée et sévère. Ensuite les sujets ont réalisé pendant 6 semaines leur entraînement calibré à la vitesse maximale d’état stable de. la lactatémie réalisée en hypoxie et la séance à vVO2max réalisée en normoxie. L’hypoxie est obtenue par l’inhalation d’un mélange hypoxique constitué de 15 % d’oxygène (par remplacement de l’oxygène par de l’azote). En effet, l’altitude choisie pour cette étude est celle encore compatible (3 000 m) avec des vitesses de course suffisamment hautes pour ne pas entraîner de baisse de force musculaire consécutive à une utilisation de vitesse trop faible et trop éloignée de la vitesse spécifique de compétition. L’altitude est obtenue par l’inhalation d’un mélange hypoxique grâce à Altitrainer qui est un réservoir mobile permettant d’incorporer de l’azote selon la pression inspirée en oxygène désiré (PIO2). Cette calibration de l’altitude en fonction de la pression inspirée en oxygène et non pas de la fraction inspirée en oxygène (FIO2) permet de tenir compte de l’importance croissante de la pression partielle de l’eau qui est toujours de 47 mmHg, alors que la pression partielle de l’oxygène dans l’air (PO2) diminue avec la prise d’altitude. La PO2 est définie selon l’équation : PO2 = FO2  Pb

(1)

Où FO2 est la fraction de d’oxygène dans l’air ambiant qui est de 0,2095 en plaine et en hypoxie hypobare. Pb est la pression barométrique dépendante de l’altitude (et de la météo) (en mmHg). Ainsi on peut écrire PIO2 selon l’équation : PIO2 = FO2  (Pb - 47)

(2)

Où PIO2 est la pression partielle d’oxygène inspirée en condition normobare, et 47 est la pression partielle de l’eau (en mmHg). Ainsi au niveau de la mer PIO2 = 0.2095  (760 - 47) = 159,22 mmHg Or PIO2 = (FO2  Pb) - (FO2  47)

(3)

Par conséquent le calcul de FO2 du mélange hypoxique sera calculé pour une PIO2 donnée. Par exemple, pour faire courir les sujets à 2 500 m, la pression barométrique Pb a une valeur de 560,36 mmHg (pour référence l’atmosphère standard de l’organisation de l’Aviation Civile Internationale). À

Chapitre 5

2 500 m on a une valeur de PO2 de 117,39 mmHg puisque : PO2 = FO2  Pb = 0,2095  560,36 = 117,39 mmHg

(1b)

PIO2 = 0,2095  (560,36 - 47) = 107,55 mmHg

(2b)

Pour obtenir au niveau de la mer une PO2 équivalente, la FO2 du mélange hypoxique doit être : FO2 = PO2/Pb = 117,39/760 = 15,44 % Pour obtenir au niveau de la mer une PIO2 équivalente, la FO2 du mélange hypoxique doit être : FIO2 = PIO2/Pb = 107,55/760 = 14,1 % Pour appliquer l’équation 2b, il faut connaître la pression barométrique Pb et la fraction FO2. FO2 est mesuré par un appareil de type Servomex modèle 612 (Genève, Suisse), qui calcule les variations de concentration d’oxygène par la mesure des variations du paramagnétisme de l’oxygène (à l’instar des analyseurs des échanges gazeux). Ce type d’appareil nécessite deux points de calibration. On prend le point 20,95 % en mesurant l’air ambiant d’une pièce bien ventilée et le 0 % en utilisant 100 % d’azote. La pression barométrique est mesurée avec un baromètre à mercure. On peut donc calculer la PIO2 pour chaque mélange hypoxique qui sera obtenu par la baisse de FO2 par la dilution de l’air par de l’azote. L’air est « rafraîchi » en azote cinq fois par seconde. Le simulateur d’aspiration permet de régler l’altitude désirée avant que le sujet ne respire dans l’embout. La résistance à l’inspiration du mélange est très faible puisque son simulateur d’aspiration est insuffisant pour lever une valve de Rudolph. Cet embout est connecté au masque de Rudolph de l’analyseur des échanges gazeux. . La consommation maximale d’oxygène (VO2max ) a augmenté significativement de 68 ml.min-1.kg-1 à 75 ml.min1.kg-1 soit de plus de 10  5 % (p < 0,001) ce qui est bien au delà des progrès relevés dans la littérature à niveau d’entraînement et de performance comparable (voir pour revue Billat, Sports Medicine, 2001c et d). La vitesse . associée à la consommation maximale d’oxygène (vVO2max ) de plaine a été significativement augmentée de 19,6  1,2 à 20,8  1,2 km.h-1 avant et après entraînement en hypoxie (+ 6  3 %) (p < 0,001). Les valeurs d’altitude de la consommation maximale d’oxygène ne se sont pas améliorées ce qui montre que l’entraînement en altitude réalisé à la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie n’a pas d’influence sur les adaptations cardiorespiratoires . aiguës à VO2max en hypoxie. Un tel entraînement ne peut donc être utilisé pour préparer les courses intenses en altitude (5, 10, 15 km en ski de fond). Il reste à explo-

179

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

rer les effets d’un entraînement en hypoxie avec l’Altitrainer qui prendrait en compte des temps limites allongés afin de recalculer les intensités mais également les durées des intervaltraining (Billat et al., 2003). Cependant, l’entraînement à vitesse maximale d’état stable de la lactatémie a permis d’augmenter la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie en altitude (de + 7,8  3,1 %, p = 0,03) ce qui est favorable aux exercices longs du type 30 et 50 km en ski de fond (femmes et hommes). Les progrès les plus importants sont observés pour la vitesse maximale d’état stable de plaine qui augmente de 11,3  6,1 % (p < 0,001), ce qui est deux fois supérieur aux augmentations données par la littérature pour ce type d’entraînement réalisé en plaine et pour des spécialistes de la course de fond qu’il est plus difficile de faire progresser sur ce plan. Il nous reste à explorer les adaptations cardiaques (fréquence cardiaque à une vitesse donnée), le pouls d’oxygène ainsi que l’économie de course). Les relevés de chaque séance d’entraînement qui furent réalisées en altitude nous permettent de suivre, séances après séances, les adaptations aiguës cardiorespiratoires au stimulus hypoxique. L’hypoxémie induite par l’exercice et par l’altitude s’est avérée modérée. Nous allons étudier les valeurs pour chaque séance d’entraînement afin de dégager les risques potentiels de ce type d’entraînement réalisé en situation d’exposition aiguës à l’hypoxie de façon répétée pour un entraînement réalisé à la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie. Les augmentations des deux facteurs de la performance aérobie que sont : la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie et la consommation maximale d’oxygène augmentent très significativement en 6 semaines dans des proportions deux fois supérieures à celles observées pour ce type de population et de protocole d’entraînement. Ces résultats préliminaires nous montrent le bien fondé d’une étude physiologique plus fondamentale en collaboration avec l’équipe du Pr Hans Hoppeler nous permettant d’analyser les modifications musculaires par des techniques de biologie moléculaires investiguant notamment les modifications des protéines HIF-1 (Vogt et al., 2001 ; Hoppeler et Vogt, 2001).

2.2

Les effets de l’expérience de la montagne sur les réponses physiologiques lors de l’ascension du Mont-Blanc

Nous avons conduit la première expédition scientifique avec la mesure en continu des paramètres cardiorespiratoires en utilisant un analyseur des échanges gazeux respiratoires portable de type K4b2 (Cosmed).

180

En effet, chaque année 20 000 personnes tentent l’ascension du Mont-Blanc et seulement la moitié réussit à atteindre le sommet. Au-delà des raisons inhérentes à la météorologie, nous avons examiné en début de saison les effets de l’expérience de la montagne chez deux groupes .de sujets non acclimatés, de même âge, de même VO2max et de même seuil lactique, se distinguant seulement par leur habitude de la haute montagne (Billat et al., 2010). Les sujets inexpérimentés étaient en bonne condition . physique (VO2max moyen de 52 ml.kg-1.min-1) tout comme les montagnards. Ils avaient tous entre 30 et 50 ans. Nous avons tout d’abord montré que le sexe n’avait pas d’influence sur ces variables, mais que l‘expérience de la haute montagne se répercutait sur le coût énergétique de l’ascension qui était 30 % supérieur chez les coureurs non montagnards. Cela est d’autant plus marquant que le coût énergétique augmente déjà en raison de l’augmentation du coût ventilatoire avec la prise d’altitude (Billat et al. 2010). Cela s’observe aussi bien chez les expérimentés que les non expérimentés. Il est donc primordial de penser à se préparer à la marche avec crampons, piolet et manipulations des cordes. Là encore il ne faut pas s’empêcher d’hyperventiler sous peine de subir une hypoxémie induite par l’exercice (voir chapitre IV, 2.2). De même, tel un coureur de 400 m, un alpiniste devrait pouvoir produire un effort en supportant un déficit d’oxygène important avec une accumulation lactique conséquente. Cependant, le paradoxe de l’exercice en altitude (on appelle, en Anglais, ce paradoxe le « lactate paradox » dans la littérature scientifique), est qu’on observe paradoxalement une baisse de la concentration en acide lactique alors que l’on pourrait s’attendre au contraire du fait du manque d’oxygène (hypoxie). Cela montre bien que l’accumulation d’acide lactique dépend d’abord de l’utilisation des glucides. Or en altitude, cette activation de la glycolyse (utilisation du glucose pour produire de l’ATP) dépend de la sécrétion des catécholamines (adrénaline et noardrénaline). La baisse de l’Adénosine DiPhosphate (ADP) intracellulaire en altitude diminue également la stimulation de la glycolyse. La baisse de la pression partielle en oxygène de l’environnement agit sur la consommation d’oxygène qui baisse et qui réduit la puissance moyenne d’un exercice mais également sur le fonctionnement du système nerveux central qui est responsable de la sécrétion de noradrénaline. Moins d’ADP sur la baisse de la puissance de l’exercice et moins de sécrétion de catécholamine qui stimule la glycolyse font que moins de sucres sont

Application : altitude et performances sportives

Chapitre 5

Encadré 16b - Focus sur les effets de l’altitude sur la fréquence cardiaque (voir aussi figure 63b) Si l’on est pas du tout acclimaté, l’altitude et son corollaire, l’hypoxie (baisse de la pression en oxygène), induit une augmentation de la fréquence cardiaque de repos de 10 % par élévation de 500m à partir de 2 500 m dans des conditions de non acclimatation. Ainsi pour une fréquence cardiaque de repos au niveau de la mer le matin au réveil de 50 bpm (battements par minute) on observera une valeur de 55 à 2 500 m, 60 bpm à 3 000 m ; 65 à 3 500 m. Au-delà de cette altitude il est bien rare de ne pas être acclimaté. Au bout de 2 semaines en altitude la fréquence cardiaque de repos baisse. On observe également une augmentation de la fréquence cardiaque sous maximale à une même puissance ascensionnelle donnée. Cela vient du fait que l’hypoxie entraîne une activation directe du système sympathique (accélérateur du cœur) renforcée par une inhibition du système nerveux ralentisseur : le système parasympathique. Cela serait dû à des interconnexions entre des fibres nerveuses afférentes du baroreflexe (réflexe responsable du maintien de la pression artérielle) et des chémorécepteurs (récepteurs qui contrôlent l’acidité du milieu intérieur en jouant sur la ventilation et le rejet du CO2). Ainsi lorsque la ventilation augmente en altitude, la fréquence cardiaque augmenterait également (Wagner, pages 199-234, 2001).

dégradés et donc que l’acide lactique qui est le produit de dégradation des sucres baisse. Hans Hoppeler un chercheur bernois qui est un des pionniers de l’étude des modifications structurelles et fonctionnelles du muscle soumis au double stress de l’exercice et de l’environnement hypoxique, évoque la possibilité que la protéine responsable du transport du lactate (assurant la navette du lactate entre les cellules musculaires qui produisent le plus de lactate (fibres rapides) et celles qui en produisent moins et qui le réoxydent (fibres lentes de type I) diminuerait (serait moins transcrite et donc moins exprimée). Les lecteurs intéressés pourront se reporter à l’ouvrage de Jacques Poortmans et Nathalie Boisseau (Biochimie des Activités Physiques, 2017).

2.3

Les adaptations physiologiques du corps face à l’altitude en fonction du degré d’hypoxie

Les effets de l’altitude sur le débit ventilatoire en fonction de la puissance de l’exercice (en watts sur

Lorsque vous êtes acclimaté, après avoir produit des globules rouges, la fréquence cardiaque de repos redescend à sa valeur du niveau de la mer (si vous êtes à moins de 3 000 m). Au contraire la fréquence cardiaque maximale diminue significativement (de 178 vs. 193 bpm à 3 800 m par exemple dans une étude de Benoit et al., 2003). En effet, chez des sujets entraînés, on observe à · V O 2 max que cette baisse de la fréquence cardiaque maximale est corrélée à la baisse de la saturation du sang artériel en oxygène (SaO2 qui descend à 62 % vs. 92 %) et à la baisse de V· O 2 max (de 64 à 36 ml. kg-1.min-1 soit une chute de 44 %). Cependant aussi bien la baisse de FC max que la baisse de la saturation artérielle en oxygène sont indépendamment corrélées à la baisse de la consommation maximale d’oxygène. Cela signifie que la chute de FCmax participe elle-même à la baisse de V· O 2 max en altitude. Cette baisse de · V O 2 max est de 1 % par 100 m d’élévation au-dessus de 1 500 m soit, par exemple, – 10 % à 2 500 m et de façon similaire pour la vitesse maximale aérobie associée à V· O 2 max , l’acclimatation ne rectifiant pas cette chute. On ne sait pas encore interpréter cette autolimitation cardiaque en hypoxie.

bicyclette ergométrique) sont illustrés par la figure 63c. On peut visualiser cette hyperventilation c’est à dire l’augmentation du débit ventilatoire à une puissance d’exercice donnée. Par exemple à 4 650 m (altitude proche de celle du sommet du Mont Blanc) le débit ventilatoire pour une puissance de 100 watts (soit environ un effort qui correspond à une vitesse ascensionnelle de 300 m. mn-1 pour un randonneur de 70 kilogrammes) est de 53 L. mn-1 contre 73 L. mn-1 à 5 800 m (proche de l’altitude du Kilimandjaro), 88 L. mn-1 à 6 400 m et 122 L. mn-1 à 7 440 m (proche du camp III de l’Everest). Cette hyperventilation est principalement due à l’augmentation de la fréquence respiratoire (nombre de mouvement respiratoire par minute) qui donne cette sensation d’halètement à la manière de nos amis les chiens. À 150 watts on respire deux fois plus vite à 7 400 m qu’à 4 640 m (50 cycles respiratoires contre 25 fois par minute) (figure 63d). À 100 et 150 watts, la consommation d’oxygène est supérieure à 5 800 m mais identique à toutes

181

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

Figure 63b Effet de l’altitude sur la fréquence cardiaque (FC) en fonction de l’altitude. On observe une diminution de la fréquence cardiaque maximale et une augmentation de la fréquence cardiaque sous-maximale pour une puissance d’exercice donnée (voir les différences de FC à 100 watts selon l’alignement de la flèche d’après Pugh et al., 1964).

200 Fréquence cardiaque (bpm) 180 160 140 120 FC bpm Fc 4650m Fc 5800m Fc 6400m Fc 7440m

100 80 60 40 20 0

0

50

100

150

200

250

300

Puissance de l’exercice de pédalage en watts

Figure 63c Effet de l’altitude sur le débit ventilatoire en fonction de l’altitude de 0 à 7 440 m (d’après Pugh et al., 1964).

Débit ventilatoire (L.mn–1)

200 180 160 140 120 100 80 Ve 0m (L/min) Ve 4650m Ve 5800m ve 6400m ve 7440m

60 40 20 0 0

50

100

150

200

250

300

Puissance de l’exercice de pédalage (watts)

182

Application : altitude et performances sportives

Chapitre 5

Figure 63d Fréquence 70 respiratoire (cycle par mn) 60

Effet de l’altitude sur la fréquence respiratoire (Fr) en fonction de l’altitude de 0 à 7 440 m (d’après Pugh et al., 1964).

50 40

Fr 0m Fr 4650m Fr 5800m Fr 6400m Fr 7440m

30 20 10 0 0

50

100

150

200

250

300

Puissance de l’exercice de pédalage (watts)

Figure 63e Consommation d’oxygène en L.MN–1

4

Effet de l’altitude sur la consommation d’oxygène en fonction de l’altitude de 0 à 7 440 m pour une puissance donnée. (d’après Pugh et al., 1964).

3,5 3 2,5 2 . VO2 L/min . VO2 4650m . VO2 5800m . VO2 6400m . VO2 7440m

1,5 1 0,5 0

0

50

100

150

200

250

300

Puissance de l’exercice de pédalage en watts

183

Chapitre 5

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

les autres altitudes et autres puissances (figure 63e). Cette démarcation qui traduit une augmentation du coût du watt pourrait être due à un délai d’ajustement du pattern de recrutement des fibres musculaires pour augmenter la force de pédalage alors que la fréquence de pédalage est imposée à 60 coups par minute. Cela n’explique pas pourquoi l’on observe de telles modifications à 5 800 m seulement. Gardons à l’esprit que ces données expérimentales collectées lors de l’expédition scientifique de 1961 (Pugh et al., 1964) l’étaient dans des conditions réelles de haute altitude et donc sans doute soumises à des variations des conditions ambiantes de pression dues aux modifications atmosphériques rapides en altitude.

.

Quoiqu’il en soit, V O2max subit une baisse importante avec l’altitude (figure 63 a) due à la baisse de la pression barométrique totale (tableau 17a). En effet, la . baisse de V O2 est inéluctable avec la baisse de pression partielle en oxygène due la baisse de la pression atmosphérique dans l’air ambiant étant donné qu’il y a toujours 20,9 % de l’air qui est occupé par l’oxygène (79 % par l’azote et 0,03 % par le dioxyde de carbone : le CO2). L’encadré 16c résume les effets de l’hypoxie sur chacun des paramètres contribuant à la consommation d’oxygène que nous avons abordée précédemment dans l’équation de Fick (Cf. Encadrés 7 et 8).

Encadré 16c. Les effets de l’altitude sur chacun des paramètres constitutifs de la consommation d’oxygène En résumé selon l’équation de Fick : l’influence de l’altitude est assez · importante sur les facteurs physiologiques de VO 2 max . Les valeurs . de V O2 pour une même puissance ou vitesse d’exercice ne changent pas en altitude. Seule la valeur maximale diminue. Cela signifie que si vous montez à 700 m.h–1 de 300 à .1 000 m ou de 2 000 à 2 700 m vous allez être à la même valeur de V O2 mais cela va représenter un · plus haut pourcentage de votre VO 2 max et FC max. Par conséquent, l’effort relatif va être plus difficile. A) Réponses immédiates à l’altitude avant acclimatement.

. · · V O 2 = Qc × (CaO2 – C V O 2) ➘







· · V O 2 = FC × ves × (SaO2 – S V O 2) × (Hb × 1,34)





=





=

B) Après acclimatement (au-delà de 3 semaines)

. · · V O 2 = Qc × (CaO2 – C V O 2) ➘

184







CaO2 remonte par rapport à la phase aiguë mais reste en dessous de la valeur du niveau de la mer ; C V· O 2 diminue car l’extraction cellulaire de l’oxygène est améliorée en raison d’une plus grande capillarisation de chaque fibre musculaire contribuant à délivrer plus d’oxygène pour un même diamètre de fibre musculaire. · · V O 2 = FC × ves × (SaO2 – S V O 2) × (Hb × 1,34)













. · V O 2 est la consommation d’oxygène (en L. min-1), Qc est le débit cardiaque, CaO2 et C V· O 2 sont les contenus artériel et veineux en oxygène (ml d’O2/100 ml de sang), ves est le volume d’éjection systolique c’est-à-dire le volume de sang éjecté par le ventricule gauche du coeur à chaque battement (ml/bt), SaO2 et S V· O 2 sont les saturations artérielle et veineuse de l’hémoglobine en oxygène (en %) par le taux d’hémoglobine (Hb) et 1,34 est la quantité d’oxygène fixée par gramme d’hémoglobine (1,34 ml O2/gHb).

Application : altitude et performances sportives

Tableau 17b

Altitude Moyenne de 1 000 à 2 000 m

.

Réponses immédiates du corps dès l’arrivée en altitude (les premières 48 h)

Modifications du corps en période d’acclimatation (quelques jours)

Sur le plan respiratoire

➚  ventilation

Ventilation rétablie

Sur le plan cardiaque

➚  FC repos ➘  FC max

FC repos normal FC max normal

La baisse de VO2max peut être de – 5 à – 15 % selon les personnes. Facteurs concourant au transport d’oxygène de l’air ambiant à la cellule musculaire

Sur le plan vasculaire

Sur le plan sanguin

Sur le plan musculaire intracellulaire

Chapitre 5

Non mesuré à cette altitude

Modifications du corps en Période d’acclimatement (quelques semaines)

Non décrit à cette altitude

Non décrit à cette altitude

Non décrit à cette altitude

Surtout au-delà de 1 800 m, la moelle osseuse se met à produire des globules rouges pour améliorer le transport de l’oxygène.

Non décrit à cette altitude

Non décrit à cette altitude

Modifications physiologiques induites par un séjour en moyenne altitude (1 000 à 2 000 m).

185

186

Sur le plan cardiaque

Sur le plan respiratoire

et sous maximal + 10 % ce qui compense en partie la baisse de la saturation du sang artériel en oxygène = Le volume d’éjection systolique (ves) reste constant ➘  FC max

même vitesse ascensionnelle. ➚  Débit cardiaque ( Q·C) de repos

➚  FC sous maximale pour une

➚  Pression artérielle au repos.

bpm) soit environ + 10 bpm.

➚  FC repos + 10-20 % (72 vs. 60

Le débit cardiaque sous-maximal diminue car le volume d’éjection systolique (ves) diminue

La pression artérielle de repos revient à sa valeur du niveau de la mer.

Les valeurs de FC repos, sous maximale et maximales sont les mêmes que en phase aigue d’arrivée en altitude.

· l’hyperventilation demeure ( VE = + 20 % pour une même vitesse absolue d’exercice).

Ventilation non rétablie :

Modifications du corps en Période d’acclimatement (quelques semaines)

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

Les personnes qui s’adaptent bien à l’altitude ont une augmentation immédiate et marquée du débit ventilatoire( V· E) à l’altitude. Il est possible de tester cette aptitude en laboratoire avant le départ.

Modifications du corps en Période d’acclimatation (quelques jours)

induites altitude. entre le dans le

➚  Ventilation

Réponses immédiates du corps dès l’arrivée en altitude (les premières 48 h)

Modifications physiologiques par un séjour en assez haute * L’hématocrite est le rapport volume des globules rouges sang et celui du plasma.

Facteurs concourant au transport d’oxygène de l’air ambiant à la cellule musculaire

Altitude Assez haute de . 2 000 à 3 000 m La baisse de VO2max peut être de – 15 à – 30 % selon les personnes.

Chapitre 5 ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

Tableau 17c

Sur le plan sanguin

Sur le plan vasculaire

Facteurs concourant au transport d’oxygène de l’air ambiant à la cellule musculaire

Altitude Assez haute de . 2 000 à 3 000 m La baisse de VO2max peut être de – 15 à – 30 % selon les personnes.

La concentration d’adrénaline revient à la normale en 4 jours mais pas celle de la noradrénaline qui a un pic à 7 jours et se maintient.

➚  Sécrétion d’adrénaline et de noradrénaline

L’excrétion de bicarbonate (bases) par les reins diminue les réserves alcalines et rétablit le pH du sang à une valeur normale de 7,4. De ce fait l’adaptation ventilatoire peut s’établir.

Modifications du corps en Période d’acclimatation (quelques jours)

Le sang devient plus alcalin (baisse de l’acidité) puisque l’hyperventilation élimine davantage de CO2 qui contribue à l’acidité du sang sous sa forme dissoute dans le sang en acide carbonique (H2CO3). L’hyperventilation est limitée par cette augmentation du pH sanguin pendant 48 h (crise urinaire des 48 h).

L’organisme réagit dès les premières heures de l’exposition à l’altitude par des récepteurs HIFa (Hypoxia Inducible Facteur) qui favorisent la concentration de VGEF (Vascular Growth Enthodelium Facteur) induisant une synthèse des vaisseaux et capillaires sanguins.

Réponses immédiates du corps dès l’arrivée en altitude (les premières 48 h)

Baisse du volume sanguin plasmatique de 10 % (sauf lors d’une rétention d’eau signe de mauvaise adaptation à l’altitude pouvant aboutir à la formation d’œdème du poumon ou du cerveau). Les liquides du corps vont de l’espace extra cellulaire à l’espace intracellulaire. Par conséquent la concentration du sang en globules rouges (hématocrite* : +5 % par exemple 44 au lieu de 39 %) augmente en raison également de cette baisse du volume plasmatique (le sang est plus concentré et plus épais). Cette fuite du liquide sanguin vers les cellules est contre-balancée par une augmentation de la diurèse qui rétablit l’équilibre de la pression osmotique (causée par la quantité d’eau) entre les compartiments intra et extra cellulaires. On urine plus en altitude et il faut plus boire (+ 1 litre par 1 000 m).

Surtout au-delà de 1 800 m, la moelle osseuse se met à produire des globules rouges pour améliorer le transport de l’oxygène. L’hormone erythropoietine (EPO), synthétisée par le rein en réponse à une hypoxie artérielle, initie la formation de globules rouges 15 heures après l’arrivée en altitude. Pour cela, il faut un apport en fer d’origine animal. Attention aux régimes végétariens en altitude. Il y a donc une augmentation de l’hémoglobine (+10 %) qui contribue à rétablir CaO2 voire même à l’augmenter (+ 20 %) en dépit de la baisse de SaO2 (voir équation de Fick dans le texte encadrés 7 et 8).

Modifications du corps en Période d’acclimatement (quelques semaines)

Application : altitude et performances sportives

Chapitre 5

187

188 Réponses immédiates du corps dès l’arrivée en altitude (les premières 48 h)

Augmentation de la mitochondrie, organite cellulaire au sein duquel la synthèse d’ATP avec utilisation d’oxygène (phosphorylation oxydative) peut s’effectuer.

Modifications du corps en Période d’acclimatation (quelques jours)

Augmentation de la quantité de myoglobine : + 15 % (fixant la l’oxygène dans le muscle et constituant des réserves d’oxygène d’environ 500 ml sorte de réserve d’urgence, soit la valeur nécessaire à une consommation d’oxygène pour un effort intense et bref de 10s en déficit d’oxygène pour gravir l’Everest par exemple

Modifications du corps en Période d’acclimatement (quelques semaines)

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

Sur le plan musculaire intracellulaire

Facteurs concourant au transport d’oxygène de l’air ambiant à la cellule musculaire

Altitude Assez haute de . 2 000 à 3 000 m La baisse de VO2max peut être de – 15 à – 30 % selon les personnes.

Chapitre 5 ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

Application : altitude et performances sportives

À ces modifications (tableau 17c) on peut ajouter les suivantes : –



La déshydratation : la baisse de la pression atmosphérique en altitude ne joue pas que sur la pression en oxygène mais également sur la pression en eau. L’air en altitude est donc sec et le corps se déshydrate plus rapidement si bien que nous ne voyons pas notre transpiration qui s’évapore plus vite. Il faut donc tout particulièrement veiller à boire. La baisse des fonctions sensorielles et mentales en altitude qui sont bien souvent responsables d’erreurs de jugement en altitude :

Sur ce plan sensoriel et mental, les modifications les plus marquantes en fonction de l’altitude sont les suivantes : –

1 525 m : la baisse de 5 % à la sensibilité à la lumière



3 048 m : la baisse de 25 % à la sensibilité à la lumière et de 30 % pour l’acuité visuelle



3 200m : la baisse de 25% de l’attention



4 572m : la baisse de 33% de la stabilité posturale (équilibre) ; baisse de 15% de la cognition



5 000m : la baisse de 20% de la mémoire à court terme



6 096m : la baisse de 25% du temps de réaction

2.4

L’effet de l’altitude sur la capacité lactique Observation des résultats obtenus lors des tests de Wingate

Deux tests de Wingate (Cf. page 206 en 1.4.4) ont été réalisés en condition de normoxie et d’hypoxie (Cf. page 168), afin de connaître l’influence de l’hypoxie sur la capacité anaérobie. D’après les résultats présentés dans le tableau 17d, nous pouvons observer qu’il n’apparaît aucune différence liée à la condition hypoxique. L’hypoxie n’influence ni la puissance pic ni la puissance moyenne du test. Cependant, nous pouvons observer que rapporté en pourcentage de P.M.A et de P.S.L (puissance au seuil lactique), une différence significative est observée (respectivement P = 0.017 et P = 0.034). En conclusion, la situation hypoxique confirme que l’hypoxie n’affecte pas la capacité lactique dans l’effort, mais il reste à bien quantifier ses effets sur les facultés de récupération. De plus, il a été démontré par l’équipe de l’INSERM de Grenoble de Samuel Verges, que l’hypoxie affecte l’oxygénation cérébrale (Verges et al.,

Chapitre 5

2012 ; Millet et Schmidt, S’entraîner en altitude, Édition De Boeck Supérieur, 2011).

3. Notre impact sur l’homéostasie de notre environnement : l’empreinte carbone de notre entraînement en question L’environnement peut remettre en question l’homéostasie qui nous gouverne. En biologie et en systémique, l’homéostasie est un phénomène par lequel un facteur clé (par exemple, la température de l’organisme par exemple) est maintenu autour d’une valeur bénéfique pour le système considéré, grâce à un processus de régulation. Des exemples typiques d’homéostasie sont : la température d’une pièce grâce à un thermostat, la température du corps d’un animal homéotherme, le taux de sucre sanguin, le degré d’acidité d’un milieu, la pression interne d’un milieu... Plus globalement, on désigne aussi par homéostasie la capacité globale d’un système à maintenir constant tout un ensemble de tels facteurs clés, notamment chez un organisme vivant. Par exemple, pour la régulation du taux de sucre sanguin, toute une cascade de processus biochimiques impliquant plusieurs hormones participe à cet ajustement. Le concept d’homéostasie en biologie est critiqué par certains auteurs car de nombreuses quantités biologiques ne varient pas autour d’une moyenne cible, mais varient au contraire de manière complexe, et c’est ce que nous recherchons actuellement au sein du laboratoire BillaTraining®. En effet, nous essayons de comprendre les variations physiologiques et biomécaniques du coureur en fonction de son environnement et de son profil énergétique. Il est à prendre en compte que nous aussi nous modifions notre environnement et pouvons à notre tour affecter l’homéostasie de notre planète par exemple. Nous avons donc examiné l’empreinte carbone générée par la pratique du marathon. L’empreinte carbone d’une activité humaine représente la quantité de gaz à effet de serre générée par cette activité humaine. Certains sportifs de haut niveau en sont conscients au point de remettre en question leurs calendriers de déplacements lointains nécessitant de prendre le transport aérien. Examinons l’impact carbone de l’entraînement d’un coureur de marathon par rapport à l’empreinte carbone d’un non sportif et d’un sportif pratiquant d’autre sport (Castaignède et al., 2021).

189

Chapitre 5

Tableau 17d Comparaison des valeurs de temps limites ss@Vo2max en condition normoxique versus hypoxique (3 500 m d’altitude équivalent avec une fraction inspirée d’oxygène de 15,5 %.

ENVIRONNEMENT PHYSIQUE

ET PERFORMANCE SPORTIVE: TEMPÉRATURE ET ALTITUDE

Paramètres

Wingate Normoxie

Valeurs de P

P.Pic (W)

737 ± 121

725 ± 134

0.83

P.moyenne (W)

565 ± 91

554 ± 95

0.79

10.7 ± 1.2

10.5 ± 1.3

0.67

8.3 ± 1

8.1 ± 1

0.71

Indice fatigue (%)

13 ± 5

12 ± 7

0.72

· Max V O2 (ml.min–1.kg–1)

48.7 ± 9.7

45.9±8.5

0.5

· % V O2MAX

87 ± 11

91±10

0.5

% PMA

249 ± 25

289 ± 41

0.017*

P.S.L

321 ± 29

360 ± 45

0.034*

Lactate maximal à la fin du test mmol.L–1

11.5

11.1

0.65

Déficit O2 ((ml.kg–1)

37.4 ± 6.7

45.7 ± 13.2

0.1

Travail (J)

17075 ± 2773

16583 ± 2724

0.71

contribution Aérobie

35 ± 7

32 ± 8

0.48

contribution Anaérobie

65 ± 7

67 ± 7

0.48

P < 0.05 : *

P < 0.01 : **

P W · avec W 2 1 Détermination de L w · c par égalisation des deux relations « lactate-puissance » aux deux temps d’observation t1 et t2 ·  ; x  =  W ·  ; x  =  W · (W · =W x0 =  W ----- est une Puissance); y1 = L1 (0) CL 1 1 2 2 t a = L1t1 ; b = L1t2 ; c = L2t1 ; d = L2t2 ; e = L w ·c Lw · c (e) étant, par définition, la lactatémie (L) identique aux temps t1 et t2 quand la puissance d’exercice · , on peut écrire : est égale à W CL d – e- = ---------c – e- en effectuant ---------e–b e–a da – bc Lw · c = --------------------------------------d + a – c + b pour pour on aura

et

x1 y2 – x2 y1 · W CL = ---------------------------y2 – y1

a = 4 mM, b = 3 mM, c = 4 mM, d = 7 mM x1 = 12 km/h, x2 = 16 km/h · Lw W · c = 4 mM. CL = 13 km/h et

mM = mmol/l

Chassain est l’initiateur de cette méthode qui permet en un seul test d’évaluer de façon fiable cette vitesse maximale de course pour laquelle il est encore possible, après l’augmentation initiale du lactate sanguin, de stabiliser cette valeur au cours du temps (Billat et Chassain, 1986). Mise à part la phase initiale de l’exercice, ces vitesses de course sont entièrement accomplies en aérobie sur le plan de l’organisme entier, puisque le taux de la production et celui de l’élimination (le « turnover ») du lactate sont augmentés de façon égale et que l’élimination du lactate ne peut s’opérer que par métabolisation oxydative. Si ces conditions sont entièrement aérobies, elles peuvent néanmoins conduire à des modifications importantes de la ventilation, de l’équilibre acidobasique et de la durée de l’exercice. Il semblerait cependant qu’une hyperlactatémie induite par. un exercice supramaximal (2 minutes à 120 % de VO2max ), avant le début d’une épreuve réalisée au-dessus du seuil anaérobie (identifié comme l’intensité d’exercice correspondant à une lactatémie de 4 mmol . l -1), provoque une augmentation du taux de renouvellement (Rieu et al., 1990). L’augmentation de lactate sanguin au cours des 30 minutes d’un palier rectangulaire . d’intensité égale à 90 % de VO2max (puissance supérieure au seuil anaérobie) serait donc ralentie en raison d’une moindre inertie des métabolismes oxydatifs et d’un déficit en oxygène moins important en début d’exercice. C’est pourquoi la détermination de la vitesse critique de non-accumulation lactique n’est pas modifiée par la réalisation de deux paliers se succédant à 40 minutes d’intervalle. Or, la notion de vitesse critique prend en compte la dimension temporelle de l’exercice. Il est donc possible de déterminer avec précision la vitesse pour laquelle : lactate/temps = 0 ( = différence entre le temps t2 et t1, voir figure 75). On obtient alors deux évolutions de la lactatémie au cours du temps, selon que l’on se situe en dessous (lors du premier palier 1) ou au-dessus (lors. du second palier 2) de la vitesse critique recherchée (W cl) (figure 75). La lactatémie stabilisée correspond à cette puissance ou vitesse critique (L w· c ) comprise entre 2,2 et 6,8 mmol . l -1 suivant les sportifs (Billat et al., 1994 c). L w· c peut être aussi calculée très précisément grâce à l’expression des propriétés mathématiques du triangle rectangle (figure 75). Ainsi le protocole de deux paliers rectangulaires réalisés à vitesse ou puissance constante (« facile et difficile » à 60 et 80 % de VMA) maintenue 20 minutes,

228

Théorie de l’entraînement

Cependant, la principale critique méthodologique concerne l’hypothèse de la relation linéaire . qui sous-tend le calcul de cette vitesse critique : W cl. En effet, le concept initial de la puissance critique se réfère à une relation linéaire et définie de P = W . t -1 où P est la puissance de l’exercice (ici la vitesse), t est le temps et W est le travail (ici la distance puisque à une distance parcourue correspond une dépense d’énergie en joules). Or, ceci n’est pas applicable à la relation entre la puissance de l’exercice et la lactatémie (Hughson, 1987). En effet, celle-ci résulte à chaque instant de nombreux paramètres qui évoluent différemment au cours du temps. Nous l’avons évoqué, la lactatémie dépend de la production de lactate par la cellule musculaire, de son transport dans le compartiment extracellulaire (dont le sang), de sa consommation par divers organes. Au cours de l’exercice, la majeure partie (55 à 70 %) du lactate serait réoxydée par les fibres oxydatives (lentes) et le cœur. Cependant, le lactate peut être transporté par le sang efférent (qui part du cœur) puis capté par le foie (et le rein), pour y être transformé en glucose et peut être alors de nouveau utilisé par les muscles. Il s’agit du cycle de « Cori », du nom de celui qui l’a mis en évidence (figure 10). Les muscles squelettiques sont le siège d’une glycolyse importante (Jorfeldt et al., 1979). Le cœur, consommateur de lactate est riche en isoenzyme H de la LDH permettant d’oxyder le lactate. Le métabolisme du lactate ne répond certainement . pas à un simple modèle linéaire, le calcul de W cl ne garantit donc peut-être pas la détermination de l’état stable maximal de la lactatémie au cours du temps. Toutefois, il est préférable de sous-estimer légèrement la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie par cette méthode plutôt que de la surestimer notablement

par l’évaluation du seuil lactique au moyen des protocoles triangulaires (paliers de courte durée). Pour rendre plus précise cette méthode de détermination de la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie, les vitesses choisies ne doivent pas nécessairement encadrer la vitesse critique présumée (proche du record de l’heure du coureur), mais être assez proches l’une de l’autre (moins de 2 km/h de différence). Ainsi l’arc de la corde (ici de la courbe traduisant la relation exponentielle de la lactatémie en fonction de la puissance) peut être assimilé à une droite, l’interpolation . linéaire· étant utilisée pour la détermination de W . . cl et de L w c . Une relation positive entre VO . 2max , W cl. et le temps limite à la vitesse associée à VO2max (vVO2max ou VMA) a été démontrée (Billat et al., 1994f). Ainsi l’endurance maximale à VMA est corrélée positivement à l’endurance sousmaximale. Cependant, l’intérêt de la détermination chez un coureur de sa vitesse correspondant à une lactatémie de 4 mmol . l -1, évaluée selon un protocole triangulaire standardisé, est d’objectiver une progression (Jousselin et al., 1984). De plus, la vitesse à 4 mmol . l -1 est généralement mieux corrélée à la performance que . VO2max concernant la course de longue durée (Sjödin et Svedenhag, 1985). Bien entendu, ce paramètre ne suffit pas à lui seul à expliquer la performance dans un groupe de niveau homogène. En effet, cette corrélation entre la vitesse à 4 mmoles et la performance sur marathon (le temps mis à courir les 42,195 km) est significative pour un groupe de 36 sujets dont les temps varient Figure 76

y = 4,743x + 306,052 6000 distance (m)

considère les variations de la lactatémie en fonction du temps et non pas les valeurs absolues en fonction des vitesses enchaînées rapidement (1 à 4 min) en temps réel. En effet, la validation de cette méthode a procédé par l’observation de la lactatémie au cours d’un palier de 60 minutes réalisé à la vitesse critique déterminée par le protocole de Chassain. La lactatémie, L w· c , correspondant à la vitesse critique calculée, se stabilise bien au cours du temps : de 2,2 à 6,8 mmol . l -1 encadrant donc 4 mmol . l -1, valeur statistique de référence du seuil anaérobie de Kindermann et Keul (1979). Toutefois, il aurait fallu . placer les sportifs à des vitesses encore supérieures à W cl afin d’observer une éventuelle stabilisation de la lactatémie à un niveau supérieur.

Chapitre 6

Détermination de la vitesse critique par la pente de la relation distance-temps record. Ce coureur a une vitesse critique de 4,743 m . s-1 c’est-à-dire 17 km . h-1.

5000

4000

3000

2000

a 1000 200

400

600

800

1000 temps (s)

229

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

entre 2 h 12 et 4 h. Cependant, l’on peut penser que la détermination de la « vitesse 4 mmoles » par un protocole triangulaire ne laisse pas le temps à la lactatémie de se stabiliser et teste surtout l’inertie du métabolisme aérobie qui, certes, est également un critère de l’aptitude aérobie (Powers et al., 1985). Après avoir largement discuté des méthodes d’évaluation de la fraction maximale d’utilisation de . VO2max pour laquelle le coureur utilise (au niveau global de l’organisme) les métabolismes aérobies, abordons les protocoles de terrain qui tentent de mettre en évidence cette limite, sans les moyens sophistiqués du laboratoire.

1.5.7 Concept de vitesse critique La vitesse critique, qui est la pente de la droite exprimant l’évolution du temps limite en fonction de la distance limite (ce qui est en fait le record du coureur sur une distance allant du 1 500 au 5 000 m), est très proche de la vitesse à laquelle la . lactatémie du coureur est de 4 mmoles . l-1 et de W cl (Lechevalier et al., 1989). En effet, la vitesse (ou la puissance) critique est la pente de la relation linéaire entre le temps limite (temps record) et la distance limite (distance de compétition), relation linéaire entre le 1 500 m et le 5 000 m chez une même personne (Scherrer, 1989) (figure 76). Autrement dit, la perte de vitesse du 1 500 au 5 000 m est linéaire pour une même personne. Ce fait correspond à la sollicitation accrue du métabolisme aérobie avec l’allongement de la distance. Ainsi la figure 76 représente la relation distance-temps limite (temps record) sur les distances du 1 500 au 5 000 m avec pour records : 4 min 06 s au 1 500 m, 6 min 08 s au 2 000 m, 9 min 23 s au 3 000 m et 16 min 30 s au 5 000 m. La figure 76 représente la relation linéaire entre distance et temps limite selon l’équation suivante proposée par Ettema en 1966 : Dlim = a + btlim (1) où « a » est assimilé à une réserve de distance en mètres qu’il est possible de parcourir sur les réserves d’oxygène et l’énergie fournie par les métabolismes anaérobies (306 m dans l’exemple de la figure 76) et b est la vitesse critique c’est-à-dire la vitesse maximale (4,743 m . s -1 dans l’exemple de la figure 76) compatible avec la reconstitution de ces réserves par les métabolismes aérobies. Ettema rapporta la similitude de son équation avec celle élaborée par Scherrer et Monod (1960) pour le travail dynamique local d’un groupe musculaire. De l’équation (1) Ettema tire : V = a/tlim + b (2) ;

230

De l’équation (2) il vient : tlim = a/V – b

(3)

où V est la vitesse en m . s-1, tlim le temps limite en secondes, a, b des constantes dont la valeur diffère en fonction de la partie de la courbe étudiée, donc du temps limite considéré, des métabolismes énergétiques sollicités et du type de locomotion. Concernant la distance comprise entre 1 500 et 5 000 m pour des temps limites de 4 à 30 minutes, les coefficients a et b ont la signification évoquée ci-dessus. Ainsi, si on examine l’équation (3), le temps limite à une vitesse considérée dépend de la différence entre celle-ci et la vitesse maximale maintenue avec une reconstitution de l’énergie par la phosphorylation oxydative, appelée par Ettema, par extension aux travaux de Scherrer et Monod (1960) : « la vitesse critique ». Ettema calcula les vitesses critiques (mètres/seconde) pour la natation, la course, le patinage et le cyclisme à partir des records mondiaux à la date de 1965. Il obtint ainsi les valeurs respectives à chacune de ces locomotions humaines de : 1,43 ; 5,85 ; 10,6 ; 13,5 m . s -1, ce qui, en km . h -1 donne les valeurs de 21,06 et 48,6 pour la course et le cyclisme. Ces vitesses sont celles du record de l’heure pour la course, en 1994, alors que celle du cyclisme est très endeçà, Ettema n’ayant peut-être pas suffisamment pris en compte la composante aérodynamique du coût énergétique du cyclisme. En effet, si cette composante ne représente que 10 % du coût énergétique total de la course, en revanche, elle compte pour 90 % dans celui du cyclisme. Les progrès technologiques ont permis de dépasser les 48 km . h -1, tout comme la montée en altitude qui améliore la pénétration dans l’air. Ceci a été largement investi par di Prampero et al. (1986 a et b). Les valeurs du coefficient « a » calculées par Ettema pour la natation, la course, le patinage et le cyclisme à partir des records mondiaux sont respectivement de 40, 240, 180 et 200 mètres. Ces valeurs paraissent faibles en raison de la prise en compte des longues distances. Ettema ne s’était alors pas interrogé sur l’influence des distances choisies sur la valeur de a et de b. En prenant les intervalles de temps limite de 4 à 30 minutes ainsi que le recommande Scherrer (1989), à l’origine de ce concept de puissance critique qu’il a mis évidence dès 1954 pour un travail local de flexionextension du bras sur l’avant-bras avec des charges croissantes, il est possible de déterminer cette vitesse critique à partir des records des sportifs. Celle-ci est alors comparable à la vitesse au seuil lactique de 4 mmol . l -1 (V4) puisque d’après Lechevalier et al. (1989) :

Chapitre 6

Théorie de l’entraînement

V critique = 1,027  V4 – 0,190

En outre, il faut noter que cette vitesse critique est cependant bien corrélée . à la vitesse maximale d’état stable de la lactatémie (W cl) ainsi que l’ont montré Lechevalier et al. (1989) :

4 734 + 0 190 4 924 V4 = --------------------------------------  ---------------1 027

1 027

V4 = 4,75 m/s = 17,26 km/h avec V critique et V4 en m/s ; par exemple le coureur de la figure 76 ayant une vitesse critique de 4,734 m/s aura une vitesse au seuil lactique V4 de : V critique = 4,734 m/s = 1,027  V4 – 0,190. On peut constater une valeur supérieure de 0,22 km/h à celle de la vitesse critique soit 1,5 % de différence, ce qui rentre largement dans la précision de la mesure du seuil 4 mM qui est souvent aléatoire, même en utilisant une interpolation à partir de la relation vitesse-concentration en acide lactique. De plus, cette donnée concerne une population étudiée, très hétérogène, puisque constituée d’hommes et de femmes, d’âges et de spécialités différents (du coureur de fond au danseur). L’on peut supposer que leurs typologies musculaires, leurs distributions en fibres de type I oxydatives et de type II a et b glycolytiques, sont très différentes. Aussi la clairance métabolique du lactate qui est produit par les fibres glycolytiques et oxydé par les fibres oxydatives ne sera pas identique. Or, une même valeur de lactatémie, 4 mmoles/l, représentera peut-être une valeur intramusculaire plus importante chez un spécialiste d’endurance, capable de le réoxyder plus rapidement, alors que le non-spécialiste, qui pour une même vitesse recrute une proportion plus grande de fibres glycolytiques, produira davantage de lactate qu’il ne peut en réutiliser. Ainsi, le spécialiste des sports d’endurance a une lactatémie de 4 mmoles . l -1 pour une intensité relative moins importante, d’autant que ces coureurs n’ont pas tous la même économie de course.

.

V critique (km/h) = 1, 215  þ W cl – 2,2 ; en reprenant l’exemple du coureur de la figure 76, on peut donc calculer . une vitesse maximale d’état stable de la lactatémie (W cl) :

.

V critique (km/h) = 17 = 1,215  W cl – 2,2

. 17 + 2 2  W cl (km/h) = --------------------- = 15,8 km/h. 1 215

.On constate donc une différence. de 1,4 km/h entre W cl (km/h) et la vitesse critique, W cl étant inférieure d’environ 8 % à la vitesse critique, ce qui est confirmé par d’autres études plus récentes (Billat et al., 1994b). . L’intérêt de l’évaluation de la fraction maximale de VO2max utilisable pour un coureur sans accumulation de lactate est de comprendre l’un des composants de la performance, « amalgame » de cette qualité d’endurance (capacité maximale aérobie), mais aussi . de VO2max (la puissance maximale aérobie) et de l’économie de course. Or, si l’on essaye d’apprécier, à partir de la performance de terrain, la « vitesse 4 mmoles », l’on confond alors moyen et finalité. En effet, le but de toute évaluation est de comprendre les déterminants de la performance ou tout au moins d’en apprécier la progression. Ne prétendons pas évaluer par des performances, des valeurs biologiques, dont en plus nous n’avons pas cerné tous les mécanismes

.

Tableau 24 La palette de vitesses physiologiques clefs qui sous tendent un programme de marche chez une femme qui marche à 5,5 km/h sur tapis roulant. L’entraînement Cool est celui à Lipox max (oxydation maximale des lipides voir figure 14 page 33), celui de la zone ACTIVE est au seuil ventilatoire et la zone POWER dans . la zone à la valeur maximale de V O2 atteinte.

% Glucide utilisé dans la dépense énergétique

RPE

VES (ml/bat)

(ml.kg-1.min-1)

% maxVO2 Atteint dans ce test de marche

Dépense énergétique (kcal.min–1)

76

2,9

19

40



87

1,2

4,0

114

10,7

71

61

11

133

4,5

seuil ventilatoire (hyperventilation) (ACTIVE)

5,0

130

12,5

83

75

13

137

5,3

volume d'éjection systolique maximale (VES)

5,5

153

15,0

100

82

19

144

6,4

maxV O2 atteinte (POWER)

5,5

153

15,0

100

82

19

144

6,4

.

Zones Physiologiques

vitesse (km/h)

FC (bpm)

REPOS

0

Lipoxmax (COOL)

VO2

.

231

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

1.5.8 Concept de vitesse de déflexion de la fréquence cardiaque à l’exercice Nous décrirons avec prudence le test de terrain de Conconi qui apprécie la vitesse correspondant au point de déflexion de la courbe d’évolution de la fréquence cardiaque en fonction de la vitesse de course (Conconi et al., 1982). Le protocole du test consiste en une augmentation de la vitesse de course de 0,5 km/h tous les 200 m à partir de 9 à 12 km/h. Le début du plateau de la fréquence cardiaque constitue le critère retenu pour la détermination de la vitesse, dite de « déflexion » (d’infléchissement par rapport à la relation linéaire) (Vd : V comme vélocité en italien, Conconi étant un physiologiste italien). Le protocole est repris dans les logiciels d’analyse de la fréquence cardiaque. Cette épreuve peut représenter un attrait certain lorsque, effectivement, une déflexion de la fréquence . cardiaque apparaît, avant l’atteinte de VO2max . Cependant, des programmes informatiques utilisant des régressions polynomiales permettent de calculer une vitesse de déflexion. En course à pied, celle d’Alberto Cova par exemple était de 23 km/h, ce qui laisse présager une vitesse maximale aérobie d’au moins 24,5 à 25 km/h soit, pour un . coût énergétique moyen de 210 ml . kg-1 . km-1, un VO2max de 85 ml . min-1 . kg-1 (où tout simplement 23 km/h constituerait déjà presque sa vitesse maximale aérobie). Mais quelle serait alors la signification .de cette augmentation brutale du pouls d’oxygène (VO2/FC) . puisque VO2 continue à augmenter linéairement avec la vitesse pour atteindre plus tardivement son plateau de valeur maximale ? Ainsi, à chaque pulsation cardiaque, le coureur consommerait alors davantage d’oxygène, ce qui est pour le moins surprenant si le seuil de déflexion de la fréquence cardiaque est censé correspondre au seuil lactique de 4 mmoles (seuil anaérobie de Kindermann et Keul, 1979). La vitesse au seuil lactique était déterminée par six paliers successifs de 1 200 mètres et une augmentation de la vitesse de 1 km/h alors que Conconi déterminerait la vitesse de déflexion de la fréquence cardiaque par des paliers de 200 m et une augmentation de la vitesse de 0,5 km/h tous les 200 m (les paliers successifs de vitesse n’étant donc pas de durée similaire). Néanmoins, Conconi avait indiqué au cycliste Francesco Moser ce repère de vitesse de déflexion de la fréquence cardiaque pour préparer et battre le record de l’heure cycliste en 1984. Le tableau 24 (p. 231) résume le résultat d’un test de marche chez une femme. Elle arrête à 5.5 km/h en étant déjà fatiguée et en ressentant l’effort comme étant maximal (RPE = 19). Le niveau de consommation maximal d’oxy-

232

gène atteint (15 ml.kg-1.min-1) est très faible (< 30) et même inférieur à la valeur prédite de 27 ml.kg-1.min-1 selon la cotation 2 sur l’échelle de PAS : Personal Activity Status (tableau 26 page 238). VES est le Volume d’Éjection Systolique en ml par battement.

1.5.9 Le CAT test de Chanon Enfin, évoquons le test de Raymond Chanon, ancien conseiller régional d’athlétisme, qui l’utilise depuis plus de quinze ans (Chanon et Stephan, 1985). Cette épreuve de terrain, également dénommée le « CAT-test » (« Control Aerobic Training »), est présentée par ses auteurs comme « trois tests en un seul ». Aussi permet-il, en 20 minutes :

.



de déterminer un « indice de VO2max », vitesse de course spécifique du développement de la . puissance maximale aérobie (VO2max ) ;



d’établir une évaluation des seuils aérobies et anaérobies, ainsi que la vitesse de course avec le contrôle de la fréquence cardiaque pour développer la capacité aérobie ;



de tracer et d’apprécier une courbe de récupération cardiaque. Le protocole de l’épreuve est le suivant :

Après un échauffement « léger » de 10 minutes, le coureur effectue trois paliers de longueurs différentes suivant son niveau de performance : –

le premier palier est couru à une allure qui stabilise la fréquence cardiaque à 140 pulsations par minute, sur 800 mètres à 1 200 mètres suivant le niveau ;



le second est effectué à une fréquence cardiaque de 160 pulsations . min-1 sur 800 à 1 200 mètres ;



le troisième est couru à vitesse maximale sur 1 000 mètres pour les débutants, 1 500 mètres pour les non-coureurs mais sportifs, ainsi que les jeunes, sur 2 000 mètres pour les coureuses de fond et demi-fond et les sportifs dont la spécialité est du type aérobie et enfin, sur 3 000 mètres pour les coureurs de fond et de demi-fond.

Ces trois paliers sont enchaînés en moins d’une minute. La fréquence cardiaque maximale et la vitesse du dernier palier permettent, avec l’équation de Léger . et Mercier, d’estimer VO2max : = 3,5 . vitesse

.

où VO2max est exprimé en ml . min-1 . kg-1 et la vitesse en km/h.

Théorie de l’entraînement

Chapitre 6

Encadré 21 L’Échelle de perception de la difficulté de l’exercice Rating of Perceived Exertion (RPE) de Borg (1970)

Partant de l’hypothèse selon laquelle la perception de la difficulté de l’exercice (pénibilité) est proportionnelle à la fréquence cardiaque et à la lactatémie, Borg a mis au point une échelle de correspondance de la fréquence cardiaque allant de 6 à 20 ; il suffit alors de multiplier par 10 l’indice donné par l’échelle et désigné par le sportif en fonction de la pénibilité ressentie en effectuant l’exercice, pour retrouver sa valeur de fréquence cardiaque (en bpm).

Ce résultat constituerait donc un « indice de . VO2max » (Chanon et Stephan, 1985). Les seuils aérobies et anaérobies sont alors exprimés en pourcentage de la vitesse maximale aérobie, vitesse moyenne du troisième palier. On postule au départ que l’élite masculine et féminine de demifond et de fond a un « seuil de 4 mmoles » (anaérobie selon Keul et Kindermann, 1979) situé respectivement à 90 % et 88 % de la vitesse maximale aérobie (85 % pour les niveaux moyens et 80 % pour les débutants). Le seuil 2 mmol . l -1 (aérobie suivant Keul et Kindermann) se situerait, pour les mêmes catégories, aux pourcentages respectifs de 80, 78, 75, 70 % de VMA. Cette procédure semble surprenante dans la mesure où justement le but de ce test est, entre autres, d’évaluer les vitesses au seuil. On peut donc arguer qu’il suffit, à partir d’un test à vitesse maximale de 5 minutes (Brickci et Dekkar, 1989), de calculer ces seuils avec les pourcentages indiqués. Car il paraît ambigu de positionner le premier et le second palier de vitesse par rapport aux seuils calculés à partir des pourcentages prédéterminés de VMA, considérée comme la vitesse moyenne du troisième palier. De plus, on peut suggérer que tous les coureurs n’ont pas le même temps de soutien (temps limite) à VMA. De ce fait, même si l’on choisit des paliers de longueur différente (1 000 à 3 000 m) cela ne permet pas de connaître réellement ce temps de maintien. Quoi qu’il en soit, cette épreuve qui procède par des paliers d’environ 6 minutes, enchaînés en moins d’une minute d’intervalle, permet d’avoir des vitesses fiables à 140 et 160 de fréquence cardiaque par minute. Cependant, quelle est précisément la signification de ces allures de course ?

L’échelle est la suivante (traduit de l’anglais) : 6 aucun effort 13 et 14 effort un peu dur 7 et 8 effort extrêmement léger 15 et 16 effort dur 9 et 10 effort très léger 17 et 18 effort très dur 11 et 12 effort léger 19 effort extrêmement dur 20 épuisement maximal

Une autre version de cette épreuve consiste à prélever un échantillon sanguin entre chaque palier, réalisé à des fréquences cardiaques de 150, 160, 170, 180 et à fréquence cardiaque maximale, puis de tracer les courbes fréquence cardiaque-vitesse, lactatevitesse, pour repérer les seuils 2 mmoles et 4 mmoles. Ici s’appliquent donc les objections émises à l’égard de cette valeur de référence et l’inconvénient d’un enchaînement des paliers de vitesses au cours desquels la lactatémie s’accumule. Les auteurs de ce test, qui est avant tout un moyen de repérer des intensités d’entraînement, préconisent l’utilisation des vitesses repères de cette façon : « la vitesse au seuil aérobie représente celle d’une reprise d’entraînement ou de récupération. La vitesse au seuil anaérobie est la limite au-delà de laquelle il faut travailler en intervalles et non plus en continu pour éviter l’accumulation excessive du lactate sanguin » (qui limiterait donc l’utilisation des acides gras libres). Courir entre ces deux vitesses favoriserait donc la capacité . de l’athlète à soutenir une fraction importante de VO2max (de VMA) en reculant le début d’accumulation lactique.

.

« La puissance maximale aérobie (VO2max ) est développée en courant à une vitesse égale ou légèrement supérieure à la vitesse du troisième palier sur des distances de 300 à 1 000 m avec un type de récupération inférieure au temps d’effort et trottée à 40 % à 70 % de la vitesse maximale aérobie ». Raymond Chanon considère que les vitesses de course situées entre la vitesse au seuil anaérobie et la vitesse maximale aérobie, « zone de travail intermédiaire », est dans le secteur de la « puissance aérobie ». Cependant, d’après lui, cette « zone présente plus d’inconvénients que d’avantages car, en s’entraînant par course continue, l’allure trop élevée conduit l’athlète à réaliser une séance en anaérobie, alors que par entraînement par

233

Chapitre 6

Tableau 25 Choix du type de tests, de la fréquence et de la période en fonction de la spécialité sportive et du niveau de pratique.

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Types de sport (durée et forme) Sports continus de durée supérieure à 10 minutes Course de fond, cyclisme, triathlon, ski de fond, marche sportive, natation sur plus de 800 m, aviron.

Niveaux de pratique Moyen* Confirmé Avancé

Sports intermittents de durée supérieure à 10 minutes Tennis, golf, sports collectifs, boxe

Moyen*

Sports continus de durée comprise entre 3 et 10 minutes Course de demi-fond, cyclisme piste (poursuite), natation sur 400 à 800 m, aviron (1 000 à 2 000 m)

Moyen*

Sports intermittents de durée comprise entre 3 et 10 minutes Judo, lutte, escalade de compétition

Moyen*

Sports continus de durée inférieure à 3 minutes Natation (50 à 200 m), cyclisme (sprint), course (50-400 m), gymnastique

Moyen*

Sports intermittents de durée inférieure à 3 minutes Concours : lancers, sauts,…

Moyen*

Confirmé Avancé

Confirmé Avancé

Confirmé Avancé

Confirmé Avancé

Confirmé Avancé

Types de test

.

VO2max . VO2max , Seuil anaérobie . V. O2max , Seuil anaérobie, temps limite à VO2max

.

Fréquence annuelle 1 1 ou 2 2à4 octobre, janvier, avril, juillet

VO2max . VO2max , Charge-vitesse, Wingate . VO2max ., Charge-vitesse, Wingate, temps limite à VO2max

1 1 ou 2 2à4 octobre, janvier, avril, juillet

VO2max . VO2max , Charge-vitesse, Wingate . VO2max ., Charge-vitesse, Wingate, temps limite à VO2max

1 1 ou 2 2à4 octobre, janvier, avril, juillet

.

.

VO2max . VO2max , Charge-vitesse, Wingate . VO2max ., Charge-vitesse, Wingate, temps limite à VO2max

1 1 ou 2 2à4 octobre, janvier, avril, juillet

VO2max . VO2max , Charge-vitesse . VO2max , Charge-vitesse, Wingate

1 1 ou 2 2à4 octobre, janvier, avril, juillet

Détente verticale Détente verticale, test de Margaria, Détente verticale, test de Margaria, Charge-vitesse

1 1 ou 2 2à4 octobre, janvier, avril, juillet

.

* S’entraînant au moins 5 heures hebdomadaires en dehors des compétitions.

intervalles,. l’allure n’est pas assez élevée pour atteindre VO2max ». Cependant, si l’on se réfère aux pourcentages préconisés par l’auteur .qui considère d’emblée le seuil anaérobie à 90 % de VO2max , il est étonnant de constater qu’entre 90 % et 100 % de VMA, les vitesses . de course ne sont pas assez intenses pour solliciter VO2max au bout de 2 à 3 répétitions réalisées pendant la durée limite à VMA par exemple. Cela reste à vérifier par l’étude de la relation systématique des vitesse et temps limites de chaque coureur. Nous y reviendrons en considérant les procédures d’entraînement. Toutefois, si nous avons déjà présenté l’utilisation directe de ces épreuves de terrain, c’est, en quelque sorte, pour justifier la démarche qui consiste à rechercher des vitesses repères.

234

1.5.10 L’approche subjective de la difficulté de l’exercice (« Rating of Perceived Exertion », Borg, 1970) Pour clore cette partie concernant. l’évaluation de la fraction maximale d’utilisation de VO2max sans accumulation lactique, considérons l’approche que chacun d’entre nous peut en faire sur le terrain, par la perception et l’interprétation de ses sensations. Il a été mis en évidence par Demello et al. (1987) que toutes les personnes, entraînées en endurance ou non et quel que soit le sexe, perçoivent l’exercice comme étant « assez dur », 13 sur l’échelle de Borg (1970) (encadré 21), à la vitesse qui correspond au début d’accumulation du lactate sanguin et à quelque pourcentage . de VO2max que ce soit.

Théorie de l’entraînement

Une étude a montré que le seuil de perception de la difficulté de l’exercice, établi en utilisant un protocole triangulaire, n’était pas significativement différent de la vitesse au seuil lactique (entre 2,5 et 4 mM) maintenue 30 minutes au moins (Stoudemire et al., 1995). Il faut cependant souligner que l’utilisation de l’échelle de Borg est délicate chez les enfants dans la mesure où il peut y avoir un problème de compréhension de la nuance entre les notions « extrêmement, très, légèrement… ». De plus, pour . une même intensité relative d’exercice (en % de VO2max ), les enfants le perçoivent comme étant moins difficile. En effet, ceux-ci ont une accumulation tardive du lactate sanguin du fait de leur glycolyse anaérobie non performante (par insuffisance d’enzymes glycolytiques) et/ou d’une inertie moindre des ajustements circulatoires. Cependant, le fait que Demello et al. (1987) observent la forte dépendance des niveaux de perception de l’épuisement envers l’accumulation du lactate . sanguin, quelles que soient les valeurs absolues de V E, . VO2 et de la fréquence cardiaque, suggère bien que le seuil lactique représente un point d’ancrage physiologique important de la perception de l’effort pendant l’exercice. De même, le seuil ventilatoire et la dyspnée ressentie, constituent eux aussi un seuil de perception de l’exercice qui est bien corrélé avec celui du seuil lactique. L’abaissement du pH sanguin musculaire provoque une lourdeur dans les jambes qui apparaît parfois avant la sensation d’hyperventilation. Les effets de la ventilation, des ions hydrogènes et de l’acide lactique sur le seuil de perception de l’épuisement sont intimement liés. Ces correspondances suggèrent que l’indice de l’intensité d’entraînement peut être davantage la perception de ces seuils d’intensité qu’un pourcentage de . VO2max . Cependant,. il est clair que la connaissance du pourcentage de VO2max auquel correspond un déséquilibre entre l’apparition et la disparition du lactate sanguin résout ce problème. En effet, lorsque l’intensité de la course est prescrite, l’on se réfère aux incidences physiologiques qu’elle occasionne et l’on peut donc indiquer au coureur ce qu’il va ressentir sur le terrain. C’est pourquoi il importe de lui faire explorer ses sensations, de l’éduquer aux allures qui correspondent à une stabilisation du lactate au cours du temps. On peut évaluer la vitesse au seuil anaérobie en laboratoire (ou sur le terrain) avec le test de 2 fois 20 minutes de Chassain (voir figure 75 p. 228), puis la vérifier par une heure de course à cette vitesse, ce qui laissera au coureur le temps de l’assimiler et de l’identi-

Chapitre 6

fier par les sensations perçues. Ceci peut déboucher sur une meilleure gestion du potentiel physique, une plus grande régularité de l’allure qui s’acquiert avec « l’expérience ». En plus de la consommation maximale d’oxygène, de l’endurance à 100 % de la consommation maximale d’oxygène et de l’endurance sous-maximale, qui dépend de . la capacité d’utiliser un important pourcentage de VO2max sans accumuler de lactate, il faut tenir compte du coût énergétique de la course (et de la locomotion en général pour des sports d’endurance comme la natation, le cyclisme, l’aviron…) comme facteurs de la performance. Nous avons abordé le coût énergétique dans le premier chapitre.

1.5.11Tests de laboratoire et spécialités sportives Nous pouvons proposer les épreuves suivantes selon le sport pratiqué ou souhaité, le niveau et la fréquence des entraînements (tableau 25). Les débutants doivent subir une visite médicale d’aptitude à la pratique sportive, sans tests d’efforts maximaux préalables. Ils sont ensuite évalués à plus ou moins longue échéance selon la fréquence d’entraînements hebdomadaires et leur motivation.

1.6

Évaluation des sédentaires et des peu actifs

Le choix du programme est fondé sur la définition du niveau d’aptitude énergétique aérobie . (consommation maximale d’oxygène : VO2max ). Ce profil se mesure selon trois méthodes au choix : la première sur simple questionnaire (le PAS, tableau 26 page 238 et tableau 35 page 253) et les deux autres à partir d’un test basé sur la perception de l’effort (RPE) ou sur la fréquence cardiaque. Nous allons proposer ces trois méthodes qui peuvent être appliquées selon les possibilités et les goûts. Méthode 1 : Profil énergétique à partir d’un questionnaire d’activité. Ce questionnaire PAS peut donner une valeur surestimée du niveau d’aptitude le niveau d’activité physique hebdomadaire est surestimé par les réponses. Étant donné que tout le monde ne peut pas disposer d’un audit physiologique (avec des mesures de consommation d’oxygène), il faut donner la valeur la plus juste possible de l’activité physique hebdomadaire en demandant l’avis, par exemple, d’une personne proche qui, par exemple, partage notre quotidien. Il faut ensuite reporter le score du PAS à l’équation (1) qui permet de calculer la consommation d’oxy-

235

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

gène, fondée sur la valeur obtenue au PAS (voir tableau 26 page 238), sur l’âge, le poids et la taille avec un malus pour les femmes à qui l’on impute un facteur 0 contre 11.4 points supplémentaires pour les hommes. En effet, pour un même niveau d’activité hebdomadaire (score au PAS), la femme aura une consommation maximale d’oxygène inférieure à celle de l’homme en raison d’un poids mort (la masse grasse en proportion plus importante) dans son poids qui ne consomme pas d’oxygène. À présent, on peut rentrer les données personnelles dans l’équation (1) :

.

VO2max prédit (ml.kg-1.min-1) = 0,133  âge – 0,005  âge2 + 11,403  points selon le sexe + 1,463  PAS points + 9,17  taille -0,254  masse corporelle + 34,142 (1) Les paramètres de cette équation sont : –

l’âge en années ;



points attribués femelle 0) ;



PAS points obtenus d’après le questionnaire définissant votre PAS dans le tableau 26 ;



la taille en mètres ;



la masse en kilogrammes (poids corporel).

selon

le

sexe

(mâle

1,

Par exemple, Sabine, femme de 36 ans, qui mesure 1,60 m et pèse 87 kg, et a un score de 2 au questionnaire . PAS. Si on applique l’équation (1) à Sabine son VO2max prédit (ml.kg-1.min-1) est donc de : 0,133  (36) – 0,005  (362) + 11,403  (0) + 1,463  2 + 9,17  1,60 – 0,254  87 + 34,142 = 28,0 ml.kg-1.min-1 (2) On peut constater que. le poids du corps pèse énormément sur la valeur de VO2max dans cette équation puisque chaque kilogramme supplémentaire dimi. nue le VO2max de 1,46 ml.kg-1.min-1. Le poids mort est celui de la masse adipeuse. Le contrôle de cette masse adipeuse nécessite une pince appelée calliper, une balance affichant la masse adipeuse (selon le principe de la mesure par impédance) étant trop imprécise, surtout chez les sportifs. La masse adipeuse est un frein à toute activité nécessitant de déplacer son propre poids et surtout de façon verticale. En effet, monter sur des terrains à forte pente ou des escaliers constitue une charge de travail conséquence pour le système cardiorespiratoire et musculaire. Sans mesurer la masse grasse à la pince, on peut considérer comme nous l’avons vu précédemment, le BMI (Body Mass Index) ou IMC (Indice de Masse Corporelle) qui exprime le rapport poids/taille comme nous l’avons déjà évoqué.

236

L’IMC est égal au poids/taille2 (le poids en kg et la taille en m) (tableau 27 page 239). Sabine a donc un IMC qui est de : 87/1,602 = 34 kg.m-2. Cet IMC la classe effectivement dans la catégorie « obèse » à la frontière de la catégorie « très obèse » (catégorie fixée à des valeurs d’IMC > 35 kg.m-2) Ce questionnaire PAS (voir tableau 26 page 238) a été validé pour des hommes et des femmes de 19 ans à 79 ans (Jackson et al.1990). En effet,. cette équation (1) permet de prédire votre valeur de VO2max à plus ou moins 10 %. Ce qui est plus précis pour les valeurs de . VO2max < 60 ml.kg-1.min-1. Pour éviter d’avoir à faire les calculs, on peut également rentrer les données sur le site du laboratoire www.billat.net et remplir les cases indiquant l’âge, le poids, la taille, le niveau d’activité physique (le score au PAS). Afin d’affiner la précision de l’estimation de la . VO2max afin d’encore mieux choisir le programme il est possible de faire un test basé sur les sensations et l’échelle RPE ou alors un test de terrain basé sur la fréquence cardiaque atteinte pour un déplacement d’une distance choisie, en notant le temps mis pour l’accomplir. Avant de détailler ces méthodes d’estimation basées sur des tests physiques, nous devons insister sur le fait qu’il est fortement conseillé de s’assurer que l’on est apte à la pratique sportive, auprès d’un médecin traitant ou d’un cardiologue, surtout si on a un IMC > 30 kg m-2 . En effet, une valeur élevée de l’IMC est souvent associée à d’autres symptômes dont le tableau clinique est qualifié de « syndrome métabolique ». On déclare une personne atteinte du syndrome métabolique à partir du moment où elle présente deux facteurs de risques associés à l’obésité abdominale (périmètre abdominal > 80 cm pour les femmes et 94 cm pour les hommes). Conformément à la définition la plus récente de l’International Diabete Federation, (2005) : –

une hypertension artérielle avec une pression systolique > 130 mmHg et une pression diastolique > 85 mmHg ;



un taux de triglycérides sanguin (triglycéridémie) > 150 mg/dL (1.7 mmmol/L) ;



un taux de cholestérol HDL < 40 mg/dL (ou 1.03 mmol/L) pour les hommes et > 50 mg/dL (1.29 mmol/L) pour les femmes ;



un taux de glucide sanguin > 100 mg/dL (5-6 mmmol/L).

(glycémie)

Théorie de l’entraînement

D’autres définitions incluent un IMC > 30. Aux États-Unis en 2000, 30 % de la population adulte étaient obèse (IMC > 30) et plus de 60 % avaient une surcharge pondérale (IMC > 25). En France, 12 % des personnes sont obèses (IMC > 30) et on note une augmentation de 50 % en seulement 10 ans (passant de 8 à 12 % entre 1990 et 2000). Le syndrome métabolique affecte encore plus de personnes en France : en effet 22,5 % des hommes et 18,5 % des femmes en sont atteints. Des études récentes montrent que l’obésité diminue l’espérance de vie, ce qui place l’obésité au rang des risques majeurs dans notre pays. Les enfants et les adolescents sont de plus en plus touchés par l’obésité et nous avons vu que le taux d’adipocytes était fixé avant 18 ans (même à 16 ans et demi chez les jeunes obèses). Nous ne nous engageons pas ici dans une stratégie du « moins » mais du « plus » de plaisir. Il est en effet difficile de bouger et de se priver, étant donné que notre évolution et notre survie ont été conditionnées par notre capacité à stocker de l’énergie en prévision d’une éventuelle disette, inhérente aux aléas des récoltes et de la chasse, des périodes de grand froid et de la nécessité de se déplacer pour survivre. Nous sommes enclins à nous reposer et la majeure partie d’entre nous préfère une bonne sieste à un footing même en bonne compagnie. Si l’on s’affranchit de moyens de locomotions mécaniques, on découvre alors une nouvelle énergie qui croit à chaque séance même si parfois on a l’impression d’être fatigué avant de débuter. Surtout on aura des envies de plats différents de ceux que l’on a sans bouger, les mécanismes de régulations du comportement alimentaire restant encore à élucider. Méthode 2 : Estimation de votre consommation maximale d’oxygène en utilisant votre perception de la difficulté de l’effort (méthode que nous qualifierons de « méthode perception »). Tout d’abord, choisir un parcours dont on connait la distance dans un parc, une piste d’athlétisme (400 m pour les pistes en tartan et plus rarement 250 m ou 333 m pour les autres plus anciennes) ou un bien un terrain de football ou encore une petite route calme dont vous pouvez calibrer la distance avec le compteur d’un vélo. Puis marchez ou courez pendant au moins 15 min en notant vos sensations de difficulté dans la dernière minute de l’effort.

Chapitre 6

.

Enfin, calculez votre VO2max en appliquant l’équation (3) (calcul présenté sur le site www.billat.net). Cette équation est fondée sur la relation entre la vitesse de déplacement et la consommation d’oxygène et donc sur le coût en oxygène (estimant le coût énergétique) de la marche ou de la course.

.

VO2max prédit (ml.kg-1.min-1) = (Distance/temps) 3,6 CE100 / (FCmax – (70sexe10)/ (RPE10) – (70-sexe10) (3) Les paramètres de cette équation sont : – distance en mètres ; – le sexe (mâle 1, femelle 0) ; – le temps en secondes ; – RPE selon l’échelle score sans unité (tableau 34 page 205) ; – CE, le coût énergétique en ml.kg-1 min-1 km-1 h (valeur de coût énergétique de la marche déjà prédéfinie selon les données dans les publications scientifiques depuis un siècle déjà (voir chapitre précédent) ; – FCmax = 210-0,65 âge (en années) (formule de Karvonen, 1988). Par exemple Sabine est une femme (valeur 0) elle a 36 ans, mesure 1,60 m et pèse 87 kg. Elle a apprécié la difficulté perçue de l’effort de marche à 19/20 au sur l’échelle de Borg (RPE = 19, tableau 34 page 205). En 15 min, elle parcourt 1500 m (6 km/h) en marchant (CE = 2 ml.kg 1 min 1.km-1 .h) mais cette fois-ci elle ressent l’exercice comme étant . RPE = 13 soit une sensation « assez dure ». Son VO2max prédit est donc de 24 ml.kg-1.min-1 en appliquant l’équation (3). En effet :

.

VO2max prédit (ml.kg-1.min-1) = (1500/900)  3,6  2  100 / (FCmax – (70-010)/(1310)) – (70-010) = 24 ml.kg-1.min-1 (3) où FC max = 210-0.65  36 (formule de Karvonen, 1988 : FC = 210 -0,65 âge en années) On remarque. à nouveau, que Sabine a une meilleure valeur de VO2max que celle prédite en laboratoire car sa perception de la difficulté de l’effort est bien supérieure à celle sur le tapis roulant dans cet environnement particulier qu’est un laboratoire de l’exercice. C’est pourquoi nous développons en collaboration avec des entreprises, des capteurs physiologiques miniaturisés qui permettent des mesures ambulatoires dans l’environnement écologique familier à la personne. À présent il est possible de recevoir en temps réel sur un écran d’ordinateur, les réponses physiologiques de Sabine qui marche dans Paris alors

237

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

que nous sommes à Évry. Pour cela il faut être muni d’un téléphone portable qui par bluetooth communique avec des capteurs de fréquence cardiaque, de température (pastilles), de saturation du sang en oxygène (par mesure infrarouge au bout du doigt) et de l’électrocardiogramme (ECG). Au cours du marathon de Paris nous avons pu suivre un coureur : Pascal qui à 50 ans souhaitait à tout prix faire un marathon après 10 ans d’interruption pour des problèmes cardiaques. Le cardiologue avait donné son feu vert mais Pascal était rassuré de savoir qu’il était « surveillé » en temps réel par son médecin posté derrière son écran d’ordinateur. Il était à tout moment possible d’appeler Pascal sur son téléphone portable afin de lui signaler un problème éventuel (signal ECG douteux par exemple).

Tableau 26 Le questionnaire PAS (Physical Activity Status) d’après Jackson et al. (1990) pour . estimer V O2max en ml.kg-1.min-1.

La perception corporelle est souvent en décalage avec les réponses physiologiques réelles. Cette perception s’affine avec l’entraînement et se perd avec la prise d’amphétamine, de stimulants et autres produits dopants. Si vous demandez à un sportif dopé ou en cours de sevrage de réaliser une course à vitesse croissante en lui donnant pour simple consigne des sensations de difficulté en utilisant l’échelle de Borg, vous aurez la surprise de constater que la courbe d’évolution de la fréquence cardiaque et de la vitesse en fonction de la perception est anarchique. En effet on observera une fréquence cardiaque et une vitesse supérieure pour

la vitesse perçue comme étant facile par rapport à la perception de difficulté moyenne ou encore moyenne par rapport à assez difficile. Ce test perceptif n’est pas un test de contrôle antidopage mais reste utile pour constater la fiabilité des sensations corporelle d’une personne surtout si la variable d’entrée de l’intensité de l’exercice est celle de la sensation de la difficulté perçue. Avant de débuter un programme, il faut vérifier la fiabilité des sensations en faisant réaliser ce test RPE croissant, ce qui est vérifié lors des audits physiologiques en laboratoire et de plus en plus sur le terrain grâce aux appareils portables. Il est même à présent possible de suivre un sportif à partir de son téléphone portable connecté aux capteurs physiologique et qui envoie les données sur un serveur dédié à la communication sportif et physiologiste de l’entraînement. Pour les sédentaires qui veulent se mettre ou se remettre à l’exercice, l’approche combinée nutritionentraînement est indispensable pour débuter une remise en mouvement efficace dans le sens du gain de bien être (Billat et Colliot, Régal et Performance, Éditions De Boeck Supérieur, 2008).

Participation à une activité physique

Contenu

Ne réalise aucune activité physique

Evite toute marche ou activité physiquement fatigante

0

Ne participe pas régulièrement à une activité physique

Marche pour le plaisir ou pour les nécessités de la vie courante (dans le métro ou le RER par exemple). Utilise les escaliers de façon routinière.

1

Participe assez régulièrement à une activité physique peu intense qui ne provoque pas d’essoufflement

10 à 60 min d’activité hebdomadaire

2

Participe régulièrement à une activité physique peu intense qui ne provoque pas d’essoufflement

Plus de 60 min d’activité hebdomadaire

3

Participe assez régulièrement à une activité physique assez intense qui provoque un essoufflement

Court en moyenne sur 1 mois de 2 Km par semaine ou participe à une autre activité (vélo, roller, natation, danse, gym) 30 min à 1 heure par semaine

4

Participe régulièrement à une activité physique assez intense qui provoque un essoufflement

Court en moyenne sur 1 mois de 2 à 8 km par semaine ou participe à une autre activité (vélo, roller, natation, danse, gym) de 1 à 2 heures par semaine.

5

Suit un entraînement assidu incluant des séances assez intenses qui provoquent un essoufflement

Court en moyenne sur 1 mois moins de 10 à 30 km par semaine ou participe à une autre activité (vélo, roller, natation, danse, gym) de 2 à 4 heures par semaine.

6

Suit un entraînement très assidu incluant des séances assez intenses qui provoquent un essoufflement

Court en moyenne plus de 30 km par semaine ou participe à une autre activité (vélo, roller, natation, danse, gym) plus de 4 heures par semaine.

7

238

Score au Physical Activity Status (PAS)

Théorie de l’entraînement

1.7

Les tests d’évaluation de la condition physique pour les sports outdoor

BMI

Catégorie de poids

Tableau 27

< 18,5

En sous poids

Votre BMI et le poids idéal

18,5-24,9

Normal

25,0-29,9

Surpoids

30,0-34,9

Obèse

35,0-39,9

Obésité morbide

40,0 et plus

Obésité délétère

Avant de s’engager sur une quelconque épreuve il est important de faire le point sur sa condition physique en mesurant la consommation maximale d’oxygène de façon indirecte à l’aide de questionnaire ou de tests faciles et rapides à réaliser sur le terrain. Les méthodes à disposition sont très variées puisqu’il existe aussi bien des tests à faire dans un fauteuil avec un papier et un crayon que des épreuves exhaustives réalisées avec un cardio-altimètre. La précision des tests passifs est satisfaisante pour les débutants alors que les épreuves maximales sont indispensables aux sportifs aguerris. Si vous débutez, optez pour les tests sous maximaux qui impliquent de réaliser une épreuve sans aller au maximum de vos capacités. Nous proposons ici les différents tests de condition physique, en précisant à qui ils s’adressent de préférence.

VO2 prédit (ml.kg-1.min-1) = 0,133  (35) – 0,005  (352) + 1,403  (1) + 1,463  6 + 9,17  1,74 – 0,254  69 + 34,142 = 51,3 ml.kg-1.min-1.

1.7.1 Tests pour les sportifs débutants ou comment se tester sans effort (conseillés aux personnes en phase de reprise après plus de 2 ans d’arrêt).

On peut constater que le. poids de corps influence énormément la valeur de VO2max dans cette équation puisque chaque kilogramme supplémentaire . diminue le VO2max de 1,46 ml.kg-1.min-1.

Afin de connaître de façon objective sa condition physique de départ, il suffit de répondre au questionnaire PAS (Physical Activity Status) qui a été validé par des chercheurs américains (tableau 26). Ce questionnaire d’activité donne une estimation de la condition physique en appréciant la probable consommation . maximale d’oxygène appelée communément VO2max en reportant votre score du PAS à l’équation (1). En appliquant.cette équation à Christophe, on confirme la valeur du VO2max obtenue avec la mesure directe des échanges gazeux. On peut l’appliquer à chaque cas individuel. En effet, cette équation de base équation (1) permet de calculer la consommation d’oxygène qui est fondée sur la valeur obtenue au PAS, sur l’âge et sur le poids et la taille (avec un malus pour les femmes) :

.

VO2max prédit (ml.kg-1.min-1) = 0,133  âge – 0,005  âge2 + 11,403  points selon le sexe + 1,463  PAS points + 9,17  taille -0,254  masse corporelle + 34,142 (1) Les paramètres de cette équation sont : –

l’âge en années ;



le sexe (mâle 1, femelle 0) ;



PAS (Physical Activity Status) ;



la taille en mètres ;



la masse en kilogrammes (poids corporel).

Chapitre 6

Par exemple Christophe : homme de 35 ans, qui mesure 1,74 m et pèse . 69 kg et a un score de 6 au questionnaire PAS. Son VO2max prédit est donc de :

.

Comme nous l’avons vu plus tôt, le poids mort est celui de la masse adipeuse, dont le contrôle précis nécessite le recours à une pince (calliper). Dans les sports outdoor, la masse adipeuse est un frein à toute activité nécessitant de monter sur des terrains à forte pente. Sans mesurer la masse grasse à la pince, on peut considérer l’IMC (ou BMI), qui exprime le rapport poids/taille2. BMI = poids/taille2 (le poids en kg et la taille en m), voir tableau 27. Christophe a donc un BMI est de : 69/1,742 = 23 kg/m2. Christophe n’est pas en surpoids (tableau 27) puisqu'il a un BMI normal compris entre 18,5 et 24,9. Il ne sera donc pas pénalisé pour grimper les 1 000 m de dénivelé d’un col de montagne. Le questionnaire PAS (voir tableau 26 page 238) a été validé pour des hommes et des femmes de 19 à 79 ans (presque la même tranche d’âge que les lecteurs de Tintin) (Jackson et al. 1990). Cette . équation (1) permet de prédire votre valeur de VO2max à plus ou . moins 10 %. Cela est plus précis pour les valeurs de VO2max < 65 ml.kg-1.min-1. Par contre un sportif déjà entraîné devra faire un bilan de sa condition physique en utilisant un test de terrain et non plus un questionnaire. Nous verrons ces aspects à la rubrique suivante mais d’ores et déjà, vous êtes concerné si vous souhaitez estimer vos capacités phy-

239

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Tableau 28

Niveau d’activité

Description

Les niveaux d’activités selon le programme intégré Polar dans les cardiofréquences mètres Polar.

Bas (occasionnel)

Vous participez de façon occasionnelle à des activités outdoor ou à d’autres exercices qui entraînent une hyperventilation ou une transpiration

Modéré (régulier)

Vous passez 30 mn à 2 h par semaine à des activités outdoor ou à d’autres exercices ou bien votre travail nécessite une activité physique modeste (déplacement pédestre au travail).

Elevé (qui requiert un véritable engagement physique)

Vous passez 2-3 h par semaine à des activités outdoor vigoureuses ou à d’autres exercices intenses. Vous participez occasionnellement à de longues excursions outdoor (1 à 3 jours) ou à des compétitions en pleine nature (course de trail). Vous courez 20 km par semaine au minimum en tout terrain.

Très élevé (compétiteurs)

Vous participez à des activités outdoor vigoureuses au moins 5 fois par semaine. Vous vous entraînez véritablement dans l’objectif d’améliorer vos performances dans un but compétitif ou pour préparer de longues et difficiles expéditions.

siques sur le terrain même sans être un champion. Avant de s’engager dans ce type de test, il est fortement conseillé de s’assurer que vous êtes aptes à la pratique sportive auprès de votre médecin traitant et de réaliser une épreuve d’effort à visée cardiologique après 30 ans. À présent que vous connaissez votre condition physique aérobie (utilisant l’oxygène pour la production d’énergie), vous pouvez aller vous tester sur le terrain ou alors envisager les objectifs qui s’offrent à vous avant de débuter la phase de préparation.

1.7.2 Le Test au repos avec les cardiofréquencemètres Polar RS800

240

user information » (dans le menu « Watch set »). Ces indications sont les suivantes: le poids, taille, âge, sexe, niveau d’activité (faible, modéré, élevé et très élevé selon le tableau suivant (tableau 28), votre fréquence cardiaque maximale théorique (220 – l’âge en nombre d’années), ou la valeur réelle que vous avez observée en activité, et enfin la fréquence cardiaque de repos lorsque vous êtes assis (à mesurer de préférence le matin au réveil avant de boire votre café). Par défaut la valeur de 36 et 45 ml.kg-1.min-1 sera attribuée pour un individu féminin et masculin si le test n’est pas réalisé. Ce nombre par défaut renvoie à des valeurs de sujets non entraînés mais au BMI dans la norme (< 25).

La nouvelle génération de cardiofréquence mètre Polar estime automatiquement votre valeur de . VO2max dans sa fonction « fitness test ». Cette mesure est basée sur vos caractéristiques de poids, taille, âge, niveau d’activité (bas à top) et sur la valeur de votre fréquence cardiaque au repos alors que vous êtes couchés pendant 5 minutes, le matin au réveil de préférence. Il s’agit donc d’une régression multiple qui prend comme paramètres à la fois des éléments du questionnaire PAS mais également la fréquence cardiaque de repos. Cette procédure est donc plus onéreuse mais plus précise que la seule réponse à un questionnaire d’activité. Elle a l’avantage d’être évaluée au repos de manière automatique, à partir des données personnelles renseignées par l’utilisateur, ce qui la rend facile à mettre en oeuvre.

Ces tests s’adressent également aux néophytes curieux de se confronter au terrain. Pour les anciens sportifs attention à ne pas reprendre trop fort et trop vite en rêvant . du passé. Ce test vous permettra d’estimer votre VO2max du moment afin que les objectifs de pratiques soient raisonnables pour assurer une progression régulière. Il s’agit, cette fois-ci, de ne pas s’arrêter et d’intégrer la pratique de sports outdoor dans votre vie quotidienne avec un peu d’imagination.

La valeur . « OwnIndex » (Polar RS800) est une estimation de VO2max (index personnel en français) modulé par les éléments personnels que vous avez intégrés à votre montre dans le programme : « setting

Deux tests de marche ont été validés pour tester la condition physique aérobie des personnes non entraînés. Le premier d’entre eux s’appelle « Rockport Fitness Walking Test » (RFWT) du nom d’une compa-

1.7.3 Tests sous maximaux de marche à réaliser sur le terrain (conseillé pour les sportifs en phase de reprise après moins de 2 ans d’arrêt)

Théorie de l’entraînement

gnie fabricant des chaussures aux États-Unis où la recherche est principalement financée par des entreprises privées. Il s’agit de parcourir le plus rapidement possible en marchant 1 mile (1609 m) (Dolgener et al. 1994). Bien entendu cela limite le test à des personnes dont la condition physique est modeste puisque audelà de 7 km.h-1 l’être humain se met spontanément à courir (s’il le peut au plan cardiorespiratoire). Pour les plus entraînés ce test de marche sera frustrant et réellement sous maximal. En effet les plus entraînés auront la sensation de ne pas avoir pu exprimer leur condition physique en marchant, à moins d’être un marcheur de compétition avec toute la technique qui s’impose. Le temps mis sur ce mile est reporté en minutes et secondes (exprimées en valeurs décimales) dans l’équation (2) ci-dessous avec le poids en kilogrammes), l’âge (en années), le sexe (avec encore le malus de 0 pour les femmes et le bonus de 1 pour les hommes) ainsi que la fréquence cardiaque en battements par minute. Vous devez relever votre fréquence cardiaque (FC) dans les ultimes mètres de votre 1 609 m ou bien, si vous ne disposez pas d’un cardiofréquencemètre, prenez votre pouls à la carotide (au cou) avec l’index et comptez le nombre de battements sur 10 secondes. Attention dans ce cas, une erreur de 1 entraîne une erreur de 6 battements par minute. Ce type d’erreur peut . entraîner une sous- ou une sur- estimation de votre VO2max .

.

La formule (magique) est alors l’équation (2) :

VO2max = 132,853 – (0,0769  poids) – (0,3877  âge) + (6,315  sexe) – (3,2649  temps) – (0,1565  FC) (2) Ainsi, Christophe a accompli son test de 1,6 km en 12 min 04 s (8 km.h-1) à la vitesse maximale encore techniquement compatible avec la marche sans être un spécialiste de marche athlétique. Par conséquent selon l’équation (2) son RFWT . VO2max est de :

.

VO2max = 132,853 – (0,0769  69) – (0,3877  35) + (6,315  1) – (3,2649  12,66) – (0,1565  185)

.

VO2max = 132,853 – (5,3061) – (13,57) + (6,315) – (39,43) – (28,95) = 51,9 ml.kg-1.min-1 Cette valeur est proche de celle obtenue précédemment avec le questionnaire d’activité (PAS). Lorsque Christophe aura réalisé ce test avec une fréquence cardiaque finale plus basse (signifiant qu’il est plus à l’aise au plan cardiovasculaire et puisqu’il court à une valeur plus basse de sa consommation maximale d’oxygène), il aura donc progressé. Si par exemple, il a une fréquence cardiaque finale de 150 battements/minute (bt.min-1) à

Chapitre 6

.

la place de 185 bt.min-1 son VO2max est alors de 57,4 ml.kg-1.min-1 ce qui est bien meilleur. Le second test est réalisé sur 2 km selon le même principe ; il a été validé pour les adultes de 20 à 64 ans ainsi que pour les adultes obèses (Laukkanen et al. 1992, 2000).

.

L’équation permettant d’obtenir VO2max à partir du test de 2 km est de : Pour les hommes :

.

VO2max (ml.kg-1.min-1) = 184,0 – 4,65 (temps sur 2 km) -0,22 (FC) – 0,26 (âge) -1,05 (BMI) (3) Pour les femmes :

.

VO2max (ml.kg-1.min-1) = 116,2 – 2,98 (temps sur 2 km) -0,11 (FC) – 0,14 (age) -0,39 (BMI) (4) Christophe a accompli son 2 km de marche en 15 min 23 s c’est-à-dire 15,38 min, son BMI est de égal à 22,8 et sa fréquence. cardiaque (FC) de fin de test est de 148 bt.min-1, son VO2max estimé à partir de ce test de marche sous maximal est de 47 ml.kg-1.min-1.

.

VO2max (ml.kg-1.min-1) = 184,0 – 4,65 (15,38) -0,22 (148) – 0,26 (35) -1,05 (22,8)(5)

.

VO2max (ml.kg-1.min-1) = 47,4 ml.kg-1.min-1. Ce test sous maximal permet de mesurer vos progrès de façon très sensible. Toutefois il convient de distinguer le gain de vitesse maximale ascensionnelle s’il a lieu du à une baisse de votre masse adipeuse de celle de l’amélioration des adaptations cardiorespiratoires. À cet effet, ce test . rend très vite compte de l’augmentation de votre VO2max due à l’amélioration de votre capacité cardio-pulmonaire (augmentation de votre débit cardiaque) qui favorise l’acheminement de l’oxygène vers les muscles. Ce test de 2 km est intégré au logiciel Polar et vous permettra de suivre vos progrès pour envisager des activités outdoor plus osées. En effet, n’oublions pas que pour réaliser une belle descente en parapente ou en ski, il faut savoir grimper, la récompense étant à la mesure des mètres de dénivelé.

1.7.4 Tests sur le terrain : le test de marche ou course en montée (« Le test Mont Blanc ») ou dans les escaliers (« Le test  Tour Eiffel ») (conseillé pour les sportifs en activité). Un second test de marche consiste en une évaluation de votre condition physique par des efforts en montée.

.

Étant donné que le VO2max peut être soutenu à 100 % pendant 5 min, vous pouvez l’estimer sur un effort maximal de 5 min.

241

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Tableau 29 VO2max

VMA 0% (km/h)

VMAa ascensionnelle (m verticaux /h)

85

24.3

1962

80

22.9

1819

75

21.4

1676

70

20.0

1533

65

18.6

1390

60

17.1

1248

55

15.7

1105

50

14.3

962

45

12.9

819

40

11.4

676

35

10.0

533

30

8.6

390

.

Vitesse Maximale Aérobie ascensionnelle (VMAa) de Christophe sur un test d’escalier et sur une course en pente (comprise entre 10 et 15 %). La vitesse maximale aérobie ascensionnelle est le dénivelé en mètres parcourus chaque heure et peut être comparée à la vitesse maximale aérobie à plat (en km.h-1 à 0 %).

Pour réaliser ce type de test nous avons deux possibilités : en montée naturelle ou bien dans les escaliers. Pour chacune de ces versions nous allons donc découvrir les tests « Mont Blanc » et « Tour Eiffel ». En effet, nous avons deux magnifiques sommets en France : le Mont Blanc (toit de l’Europe avec ses 4 807 m) et la Tour Eiffel (sommet Parisien avec ses 330 mètres). Le terrain de l’outdoor signifie plein air sans que la qualité de l’air soit spécifiée. Alors ne dénigrons pas la cité et il est d’ailleurs possible que le XXIe siècle repense l’espace citadin comme un terrain de jeu de plein air. La traversée de Paris en rollers les vendredi soirs, balisée par la police et autres autorités garantes de la sécurité des baladeurs, sont la preuve de cette alternative outdoor pour les aficionados de la vie citadine ou tout simplement ceux qui n’ont pas le temps, la possibilité de rejoindre la mère nature. 1.7.4.1 « Le test Tour Eiffel » Avant de se tester sur le Mont Blanc, vous pouvez prendre un simple ticket pour la Tour Eiffel par le pilier (Nord, Sud, Est, Ouest) que vous préférez. Vous aurez accès au second étage. Nous y avons déjà réalisé des mesures de consommation directe d’oxygène avec le K4b2, appareil portatif de 700 grammes qui permet de s’affranchir des équations, des mesures en laboratoire mais coûte l’équivalent d’une belle automobile. Nous y avons cependant vérifié le rendement énergétique, c'est-à-dire le rapport entre l’énergie dépensée, mesurée via la consommation d’oxygène (chaque litre d’oxygène consommé correspond à environ 21 kilo-

242

joules kJ) d’énergie libérée à partir des glucides et 19 kJ à partir des lipides) et l’énergie mécanique produite (la puissance développée dans les escaliers qui dépend de votre poids de corps et de votre vitesse d’ascension). La connaissance de ce rendement qui de 20 % (proche de celui sur bicyclette ergométrique) permet d’estimer . VO2max sans avoir besoin de le mesurer en direct. Ce rendement énergétique signifie que 20 % de l’énergie totale produite est récupérée sous forme d’énergie mécanique (mouvement) alors que 80 % se dissipe en chaleur. Vous pouvez considérer votre dénivelé (élévation vertical en mètre) en 5 minutes et le ramener à l’heure (en multipliant par 12 pour aller de 5 à 60 minutes). Voici le mode d’emploi du test. Tout d’abord, la vitesse ascensionnelle s’exprime en mètres par heure, unité en usage pour planifier une activité en montagne. Ainsi, les topos guide des sentiers se réfèrent à une vitesse ascensionnelle de 400 m à l’heure avec un sac léger de 4-5 kg. Après cette présentation du concept du test, voici son protocole des étapes A à H .pour une bonne réalisation permettant d’estimer votre VO2max : A. échauffez vous 20 à 30 minutes à une fréquence cardiaque comprise entre 100 et 120 battements par minute (bpm) (marche et trot) ; B. finissez votre échauffement par trois accélérations progressives sur 80 mètres ; C. attachez vos lacets et vérifiez votre cardiofréquencemètre (Polar RS800) (avez-vous déclenché réellement votre enregistrement ? regardez si le chrono a bien démarré) ; D. mettez vous en bas des escaliers et sélectionner le menu « countdown » à partir du menu heure (flèche du haut à droite), sélectionnez 5 minutes dans le compte à rebours qui va se déclencher une fois votre sélection terminée. Lancez vous sans aller au maximum de vos possibilités d’emblée car vous avez 5 minutes à gérer. Enregistrer un point repère (« Marker ») en appuyant sur la touche « start » de votre cardiofréquence mètre. Vous devez finir épuisé au terme des 5 minutes ; E. lisez la valeur de votre vitesse ascensionnelle maximale ou encore mieux videz votre fichier sur l’ordinateur afin de lire votre courbe sur le logiciel Polar. Vous pourrez alors vérifier que vous avez atteint votre fréquence cardiaque maximale qui est calculée par la montre en fonction de votre âge selon la formule ; F. FC max (en battements par minute) = 220 – âge (en années) ; votre vitesse ascensionnelle est directement lisible sur la montre en regardant la pente de la courbe

Théorie de l’entraînement

altitude en fonction du temps. Plus la pente est raide plus votre vitesse ascensionnelle est rapide ; G. interprétez vos résultats. Prenons à nouveau pour exemple Christophe. Il a grimpé 80 mètres en 5 minutes (300 secondes).. Il a donc soutenu une vitesse ascensionnelle à VO2max de 80 m  12 = 960 m.h-1 (puisqu’il y a 12 fois 5 minutes en 60 . minutes). Il peut avoir une estimation de son VO2max (50 ml.kg-1.mn-1) ainsi que de sa vitesse maximale aérobie à plat, en se reportant au tableau 29. On peut constater que Christophe (valeurs en gras) a une vitesse ascensionnelle . de 962 mètres à l’heure lorsqu’il est à 100 % de son VO2max Sur le plat il aurait été capable de courir à 14,3 km.h-1, ce que nous avons par ailleurs vérifié en utilisant un test exhaustif de 5 minutes ou bien un test par paliers croissant de vitesse (accélération de 1 km.h-1 toutes les 2 minutes). Ce test de Vamax (ou VMA : vitesse maximale aérobie) est intégré dans le logiciel Polar (Polar RS800). Pour passer de la vitesse exprimée en mètres par seconde à celle en kilomètres par heure, il suffit de multipliez la vitesse exprimée en m/s par 3,6 étant donné que dans une heure il y a 3 600 secondes et que 1 mètre = 1/1 000 km puisque dans un kilomètre il y a 1 000 mètres. Par conséquent on multiplie par 3 600 pour passer des heures au secondes et on divise par 1 000 pour passer des mètres au kilomètre : 3 600/ 1 000 = 3,6. C’est pourquoi on peut simplifier selon la formule :

Chapitre 6

Vitesse (km/h) = vitesse (m/s)  3,6 Par exemple si vous courez à 12 km.h–1 cela correspond à du 12/3,6 = 3,33 m.s-1. 1.7.4.2 « Le test Mont Blanc » Vous pouvez réaliser ce test sans escalier en montant le plus vite possible, pendant 5 minutes, une pente que vous êtes encore capable de franchir à vélo (soit une pente de 10 à 15 %). Vous suivez exactement le même protocole que précédemment. La valeur de VMAa peut être légèrement meilleure ou inférieure selon votre habilité à monter les escaliers qui va déterminer votre rendement escalier. Il s’agit du test le plus facile à réaliser mais le plus pénible évidemment. Nous avons donc développé la notion de Vitesse Maximale Aérobie ascensionnelle (VMAa) qui est la référence pour les pratiquants de l’outdoor puisqu’il est bien rare qu’ils se déplacent à plat. N’oublions pas que cela correspond à une vitesse moyenne pendant un effort exhaustif de 5 minutes seulement. Il s’agit de sa puissance maximale aérobie, son endurance à soutenir un fort pourcentage de sa puissance maximale aérobie (PMA), qualité que l’on appelle « l’endurance », conditionnant sa capacité à soutenir un effort de plusieurs minutes à plusieurs heures. N’oublions pas, cependant, que . VO2max est la valeur plafond de référence sur laquelle bute votre endurance. Il faut sans cesse repousser

%FC réserve max 100 95 90 85 80

Figure 77

75

Estimation de VMAa en réalisant un exercice de 5 minutes à une vitesse ascensionnelle sous maximale. Lorsque vous montez à une vitesse horaire de 700 m/h à une fréquence cardiaque qui représente 57 et 75 % de votre FC maximale de réserve vous pouvez extrapoler votre FCmax (selon la ligne pointillée) grâce au rapport de proportionnalité entre le pourcentage de FC max de réserve et la vitesse ascensionnelle. Ce pourcentage de réserve . de FC équivaut au pourcentage de V O2max auquel vous réalisez votre effort.

y = 0,0819x + 16,387

70

2

R =1

65 60 55 50 500,00

700,00

900,00

1100,00

vitesse horaire ascensionnelle (m/h)

1300,00

1500,00

243

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Figure 78 Estimation de la vitesse maximale aérobie . ascensionnelle (VMAa) et de votre V O2max à partir de la fréquence cardiaque (FC) à la vitesse ascensionnelle de 500 m/h (échelle de gauche) et de 400 m/h (échelle de droite) valable pour les hommes et les femmes de 20 à 50 ans. Par exemple, Christophe a une fréquence cardiaque de 159 bpm à une vitesse ascensionnelle de 500m/h et de 143 bpm à 400 m/h. Par conséquent en prenant l’échelle de vitesse ascensionnelle de 500 m/h et de 400 m/h, la VMAa estimée de Christophe est de 825 m/h et 900 m/h en prenant en référence l’échelle de 500 et 400 m/h respectivement. Ces estimations sont proches et conformes à la valeur réellement mesurée par les analyseurs d’oxygène portables (51 ml.kg-1.min-1) puisque nous . obtenons une estimation de V O2max de 47.9 et 48.8 ml.kg–1.min–1 avec l’échelle de 500 et 400 m/h respectivement.

.

VO2max pour espérer aller plus vite (plus haut) et même plus longtemps. 1.7.4.3. Versions douces des tests « Tour Eiffel » et « Mont Blanc » Suivez le protocole précédent Tour Eiffel ou Mont Blanc jusqu’à la phase C puis allez à la phase D suivante : D. mettez-vous en bas des escaliers et sélectionner le menu « countdown » (Polar RS800) à partir du menu heure (flèche du haut à droite), sélectionnez 5 min dans le compte à rebours qui va se déclencher une fois votre sélection terminée. Lancez-vous de telle sorte que votre fréquence

244

cardiaque atteigne 50 % de votre FC max théorique ou connue. Cela représente un exercice plutôt facile et vous serez alors en mesure de prononcer deux phrases d’affilée sans être essoufflé. Vous devez finir frais au terme des 5 minutes ; E. lisez la valeur de votre vitesse ascensionnelle à 50 % de votre FC max (VA50) ou encore mieux videz votre fichier sur l’ordinateur afin de lire votre courbe sur le logiciel Polar ; F. redescendez en marchant tranquillement et récupérer 5 minutes ;

Théorie de l’entraînement

Chapitre 6

Tableaux 30 et 31 Fréquences cardiaques correspondant à . un pourcentage donné de V O2max en fonction de l’âge pour les femmes (tableau 30) et les hommes (tableau 31). Si vous êtes un homme de 35 ans et que vous avez une FC de 150 bpm pendant 6 minutes d’exercice cela correspond à un . effort qui sollicite 72 % de V O2max.

245

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

fc repos sédentaire homme 90 95 100 105 110 115 120 125 130 135 140 145 150 155 160 165 170 175 180 185 190 195 200 205 âge fcmax

246

10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48

210 209 208 207 206 205 204 203 202 201 200 199 198 197 196 195 194 193 192 191 190 189 188 187 186 185 184 183 182 181 180 179 178 177 176 175 174 173 172

70 69 68 67 66 65 64 63 62 61 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60

18 19 19 20 21 21 22 23 24 24 25 25 25 26 26 26 26 26 27 27 27 27 27 28 28 28 28 28 29 29 29 29 30 30 30 30 31 31 31

21 22 23 24 24 25 26 26 27 28 29 29 29 29 29 30 30 30 30 31 31 31 31 31 32 32 32 33 33 33 33 34 34 34 34 35 35 35 36

25 26 26 27 28 29 29 30 31 31 32 32 33 33 33 33 34 34 34 34 35 35 35 35 36 36 36 37 37 37 38 38 38 38 39 39 39 40 40

29 29 30 31 31 32 33 34 34 35 36 36 36 36 37 37 37 38 38 38 38 39 39 39 40 40 40 41 41 41 42 42 42 43 43 43 44 44 45

32 33 34 34 35 36 36 37 38 39 39 40 40 40 40 41 41 41 42 42 42 43 43 43 44 44 44 45 45 45 46 46 47 47 47 48 48 49 49

36 36 37 38 39 39 40 41 41 42 43 43 43 44 44 44 45 45 45 46 46 47 47 47 48 48 48 49 49 50 50 50 51 51 52 52 53 53 54

39 40 41 41 42 43 44 44 45 46 46 47 47 47 48 48 49 49 49 50 50 50 51 51 52 52 52 53 53 54 54 55 55 56 56 57 57 58 58

43 44 44 45 46 46 47 48 49 49 50 50 51 51 51 52 52 53 53 53 54 54 55 55 56 56 56 57 57 58 58 59 59 60 60 61 61 62 63

46 47 48 49 49 50 51 51 52 53 54 54 54 55 55 56 56 56 57 57 58 58 59 59 60 60 60 61 61 62 63 63 64 64 65 65 66 66 67

50 51 51 52 53 54 54 55 56 56 57 58 58 58 59 59 60 60 61 61 62 62 63 63 63 64 65 65 66 66 67 67 68 68 69 70 70 71 71

54 54 55 56 56 57 58 59 59 60 61 61 62 62 63 63 63 64 64 65 65 66 66 67 67 68 69 69 70 70 71 71 72 73 73 74 75 75 76

57 58 59 59 60 61 61 62 63 64 64 65 65 66 66 67 67 68 68 69 69 70 70 71 71 72 73 73 74 74 75 76 76 77 78 78 79 80 80

61 61 62 63 64 64 65 66 66 67 68 68 69 69 70 70 71 71 72 73 73 74 74 75 75 76 77 77 78 79 79 80 81 81 82 83 83 84 85

64 65 66 66 67 68 69 69 70 71 71 72 72 73 74 74 75 75 76 76 77 78 78 79 79 80 81 81 82 83 83 84 85 85 86 87 88 88 89

68 69 69 70 71 71 72 73 74 74 75 76 76 77 77 78 78 79 80 80 81 81 82 83 83 84 85 85 86 87 88 88 89 90 91 91 92 93 94

71 72 73 74 74 75 76 76 77 78 79 79 80 80 81 81 82 83 83 84 85 85 86 87 87 88 89 89 90 91 92 92 93 94 95 96 96 97 98

49

171

60 27 32

36

41

45

50

54

59

63

68

72

77

81

86

90

95

99

50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64

170 169 168 167 166 165 164 163 162 161 160 159 158 157 156

60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60

32 32 32 33 33 33 34 34 34 35 35 35 36 36 36

36 37 37 37 38 38 38 39 39 40 40 40 41 41 42

41 41 42 42 42 43 43 44 44 45 45 45 46 46 47

45 46 46 47 47 48 48 49 49 50 50 51 51 52 52

50 50 51 51 52 52 53 53 54 54 55 56 56 57 57

55 55 56 56 57 57 58 58 59 59 60 61 61 62 63

59 60 60 61 61 62 63 63 64 64 65 66 66 67 68

64 64 65 65 66 67 67 68 69 69 70 71 71 72 73

68 69 69 70 71 71 72 73 74 74 75 76 77 77 78

73 73 74 75 75 76 77 78 78 79 80 81 82 82 83

77 78 79 79 80 81 82 83 83 84 85 86 87 88 89

82 83 83 84 85 86 87 87 88 89 90 91 92 93 94

86 91 95 100 87 92 96 88 93 97 89 93 98 90 94 99 90 95 100 91 96 92 97 93 98 94 99 95 100 96 97 98 99

65

155

60 32 37

42

47

53

58

63

68

74

79

84

89

95 100

66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78

154 153 152 151 150 149 148 147 146 145 144 143 142

60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60 60

43 43 43 44 44 45 45 46 47 47 48 48 49

48 48 49 49 50 51 51 52 52 53 54 54 55

53 54 54 55 56 56 57 57 58 59 60 60 61

59 59 60 60 61 62 63 63 64 65 65 66 67

64 65 65 66 67 67 68 69 70 71 71 72 73

69 70 71 71 72 73 74 75 76 76 77 78 79

74 75 76 77 78 79 80 80 81 82 83 84 85

80 81 82 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91

85 90 96 86 91 97 87 92 98 88 93 99 89 94 100 90 96 91 97 92 98 93 99 94 100 95 96 98

14 15 16 16 17 18 19 19 20 21 21 22 22 22 22 22 22 23 23 23 23 23 23 24 24 24 24 24 25 25 25 25 25 26 26 26 26 27 27 27 28 28 28 28 29 29 29 29 30 30 30 31 31 31 32 32 33 33 33 34 34 34 35 35 36 36 37

37 38 38 38 39 39 40 40 41 41 42 42 43

75 76 76 77 78 79 79 80 81 81 82 83 83 84 85 85 86 86 87 88 88 89 90 91 91 92 93 93 94 95 96 97 97 98 99 100

79 79 80 81 81 82 83 84 84 85 86 86 87 88 88 89 90 90 91 92 92 93 94 94 95 96 97 98 98 99 100

82 83 84 84 85 86 86 87 88 89 89 90 91 91 92 93 93 94 95 95 96 97 98 98 99 100

86 86 87 88 89 89 90 91 91 92 93 94 94 95 96 96 97 98 98 99 100

89 90 91 91 92 93 94 94 95 96 96 97 98 99 99 100

93 94 94 95 96 96 97 98 99 99 100

96 97 98 99 99 100

Théorie de l’entraînement

G. répétez la phase F en soutenant un rythme ascensionnelle plus rapide qui vous conduise à l’essoufflement et à 70 % de votre FC Max. Lisez votre VA70. qui est votre vitesse ascensionnelle à 70 % de votre fréquence cardiaque maximale ;

milée à la vitesse ascensionnelle (les mètres de dénivelé gravis chaque heure), selon la relation linéaire illustrée par le tableau 32 (page 249).

Pour Christophe nous obtenons les valeurs suivantes :

La vitesse maximale aérobie ascensionnelle (VMAa en m/h) peut être maintenue entre 5 et 7 min. C’est pourquoi, il est possible de déterminer le . VO2max en grimpant le plus vite possible une pente pendant 5 min. Cependant, il faut savoir qu’il existe une pente optimale qui minimise le coût énergétique du mètre vertical [calories dépensées par mètre vertical parcouru] (voir Encadré 22 page 250).

VMAa = (690 – 450) + 690 = 930 m .h-1 ce qui est très proche de la valeur directe mesurée par la version exhaustve du test qui était de 960 m.h-1.

Cette pente optimale correspond à un pourcentage de pente compris entre 20 et 30 %, à la fois pour la marche et la course.

Vous pouvez réaliser la version douce du test « Mont Blanc » selon la même procédure.

Choisissez une pente de 20 %. Montez le plus vite possible pendant 5 min. Mesurez votre altitude de départ et celle d’arrivée avec votre cardio-outdoor. Si vous parvenez à monter de 164 m en 5 min, cela signifie que votre VMAa est exceptionnelle ; elle se calcule ainsi :

H. interprétez vos résultats : vous allez alors obtenir très simplement votre VMAa avec la formule suivante : VMAa = (VA70-VA50) + VA70.

D’une façon générale cette méthode est basée sur la relation considérée comme linéaire entre la vitesse ascensionnelle et la fréquence cardiaque (figure 77). Vous disposez de tableaux en fonction de votre sexe et votre âge (voir tableaux 30 et 31 page 245-246 et tableau 32 page 249) vous donnant directement la valeur de votre VMAa en fonction de votre fréquence cardiaque. Vous pouvez également visualiser vos progrès sur le nomogramme de la figure 78 donnant directement votre VMAa à partir de la fréquence cardiaque que vous avez sur une échelle de vitesse ascensionnelle de 400 ou 500 m/h selon votre choix. Il s’agit du test sous maximal de course ascensionnelle contre une pente de 20 %. Il s’agira, afin de vérifier l’efficacité de votre entraînement, de le réaliser à la même vitesse ascensionnelle avant et après entraînement, soit à 400 ou 500 m/h pour utiliser le nomogramme proposé en figure 78.

1.7.5 Détermination de la vitesse maximale aérobie ascensionnelle sur 5 minutes Ce test est conseillé pour les sportifs déjà entraînés, à raison de 3 fois par semaine depuis au moins 2 ans. Il est le plus difficile à réaliser du point de vue physique. Il constitue un véritable test d’entraînement puisqu’il nécessite un échauffement de 30 min à base de course facile pendant 20 à 25 min, et de 3 à 5 accélérations de 10 secondes séparées de 3 min marchées. Ce test mesure directement votre vitesse ascension. nelle maximale avec une estimation de votre VO2max à 5 % d’erreur (Billat V. et al., données non publiées). Nous avons vu que la consommation maximale d’oxygène augmentait proportionnellement à la vitesse de déplacement horizontale et verticale qui peut être assi-

Chapitre 6

VMAa = 164/5 x 60 = 1 968 m/h. Pour un dénivelé de 82 m en 5 min, vous aurez une VMAa deux fois moins élevée : VMAa = 82/5 x 60 = 984 m/h. Nous vous rappelons que la vitesse ascensionnelle de référence donnée dans les topos de randonnées présentant les chemins de petites et grande randonnées (GR et PR) est de 300 m/h avec un sac léger à la journée, et de 400 à 500 m/h à la descente. Les pauses ne sont bien entendues pas comptées. Cela signifie que pour soutenir un rythme de 300 m/h pour une ascension de 3 heures avec un dénivelé de 900 m (ascension typique des cols ou des montées en refuge dans les Alpes), il faudra au moins une vitesse ascensionnelle maximale de 600 m/h puisque pour soutenir une vitesse ascensionnelle pendant 3 .heures, celle-ci doit représenter un effort de 50 % du VO2max sollicitée à VMAa. La question de savoir s’il vaut mieux courir ou marcher en pente dépend de la condition physique de chacun. Le choix de la marche ou de la course sur de telles pentes dépend également de la vitesse de déplacement. Au-delà de 73 h km.h-1, l’être humain se met spontanément à courir afin de bénéficier de l’énergie élastique restituée à chaque impact du pied sur le sol. Il semblerait également que le « signal », le point de contrôle de cette transition de la marche à la course, soit corrélé au degré d’activation des muscles extenseurs des articulations du genou et de la hanche (muscles de la jambe et de la cuisse) : cela a été mis en

247

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

évidence par des mesures de l’activité électrique des muscles (Prilutsky et Gregor, 2001). Tout le monde n’est pas capable de courir à 8 km.h-1 dans une pente de 20 %, car cela équivaut à courir sur du plat, à la vitesse de 21 km.h-1 (voir tableau 32, page 249).

Sachant que 1 cal = 4,18 J (la calorie est l’unité du travail la plus connue mais elle n’appartient pas au système international), Christophe doit brûler 216 604/ 4,18 = 52 000 cal, soit 52 kcal (énergie fournie par la consommation d’une pomme).

Une fois le VMAa obtenu, se reporter au tableau . 29 (voir page 242) afin d’avoir une estimation du VO2max ou appliquer la formule développée dans l’encadré 22 (voir page 250).

Ce test de 5 min coûtera l’énergie fourni par l’ingestion d’une pomme ou, pour les plus gourmands, 10 g de chocolat (2 carrés). Rassurons-nous, nous verrons que sur une journée de randonnée sur un parcours et un GR comme le Tour du Mont-Blanc, le chocolat des étapes suisses pourra être goûté sans crainte pour la silhouette.

1.7.5.1 Les bases théoriques de la détermination de · VO2 max à partir de VMAa Christophe a gravi un dénivelé de 80 m en 5 min. Il a donc une vitesse ascensionnelle maximale . de 12  80 m = 960 m/h. Son VO2max est donc le suivant : Nous savons que l’énergie potentielle Ep dépend de la gravité g (nous sommes soumis à une accélération vers la Terre de g = 9,81 m.s-2) et de notre masse corporelle. L’accélération gravitaire appliquée à la masse donne notre poids qui est une force d’attraction. L’unité de la force est le Newton, soit la force nécessaire pour accélérer de 1 m.s-2 une masse de 1 kg. Dans le cas de l’accélération gravitaire il s’agit d’une accélération de 9,81 m.s-2. Cette force est appliquée sur la trajectoire verticale, ce qui donne un travail W (le travail W, comme work, travail en anglais) est l’énergie nécessaire pour appliquer une force de 1 Newton sur une distance de 1 m ; il est exprimé en Joules : (1 J = 1 kg x 9,81 m.s-2  1 m).

.

Afin d’extrapoler VO2max , calculons donc l’énergie potentielle nécessaire à l’ascension à VMAa (énergie biologique issue de la combustion des sucres pour fournir cette énergie mécanique) : Ep = m  g  1 m (m en kg et g = 9,81 m.s-2). Exemple : Christophe pèse 69 kg. Par conséquent, l’énergie mécanique nécessaire à Christophe pour s’élever de 80 m en 5 min est de : Ep = 69  9,81  80 = 54 151 J L’être humain, comme la plupart des animaux pour les locomotions terrestres, dépense 3 à 4 fois plus d’énergie biologique pour produire l’énergie mécanique nécessaire pour se déplacer. Dans notre exemple, Christophe devra donc brûler une énergie biologique de 54 151  4 = 216 604 J pour produire l’énergie mécanique nécessaire à son ascension.

248

En effet, si Christophe veut dépenser ces 51 kcal ou 216 kJ, il devra brûler ses sucres, (principalement stockés sous forme de glycogène dans les muscles et le foie) avec 1 l d’oxygène pour 21 kJ d’énergie biologique fournie. Ainsi pour 216 kJ d’énergie biologique fournie pendant les 5 min de test, Christophe aura brûlé ses . sucres avec 216/21 = 10,3 l d’oxygène. Son VO2max qui est son débit d’oxygène par minute ou sa consommation d’oxygène par minute et est considérée comme maximale sur 5 min de test, est de : 10,3/5 = 2,05 l.min-1 ou 2 050 ml.mn-1 Cela peut paraître faible. Il ne s’agit ici que de l’énergie dépensée pour le travail ascensionnel. Or, même si du point de vue purement mécanique, Christophe travaille contre la gravité au prorata de sa distance, il dépense également de l’énergie pour parcourir une distance horizontale. Chaque fois qu’il parcourt 1 m horizontal, il dépense 4 kJ par kilo de poids de corps. En 5 min, Christophe a grimpé 80 m verticalement sur une pente de 20 %, il a donc accompli 100 / 20 = 5 fois plus de distance horizontalement, soit 80  5 = 400 m. Cela représente, une dépense énergétique de 400  4  69 = 111 kJ, soit pour chaque minute, un débit d’énergie de 111/5 = 22 kJ, soit en équivalent oxygène environ 1 l (rappel : 1 l d’oxygène consommé permet de comburer des glucides libérant 21 kJ d’énergie).

.

Nous avons donc un VO2 de 2,05 l.mn-1 due au travail ascensionnel et 1 l.mn-1 dû au travail horizontal soit 3,05 l.mn-1 d’oxygène consommé par minute.

.

Afin de confronter les VO2max des individus indépendamment de leur morphologie, la consommation . d’oxygène est rapportée au poids de corps : le VO2max est exprimé en ml d’O2 consommé par . kg et par min. Pour Christophe, qui pèse 69 kg, son VO2max est donc :

Théorie de l’entraînement

Chapitre 6

Tableau 32

pente % 0 3 6 9 12 15 18 21 24 27

Vitesse de déplacement horizontal de 4 à 22 km/h 4 6 8 10 12 14 16 18 20 6 8 10 12 14 16 18 20 22

8 10 12 14 16 18 20 22

10 12 14 16 18 20 22

12 14 16 18 20 22

.

VO2max net = 3 050 / 69 = 44,2 ml.kg-1.min-1

.

À ce VO2max net qui ne tient . . compte que du VO2 d’exercice, il faut ajouter le VO2 de repos, celui qui sert à assurer le métabolisme, transfert d’énergie . utile au maintien des fonctions vitales de base. Le VO2 de repos, correspond au métabolisme de base au repos strict, est de 5 ml.kg-1.mn-1.

.

Au final le VO2max de Christophe est de :

.

VO2max = 44, 2 + 5 = 49,2

ml.kg-1.mn-1

La lecture du tableau 29 (voir page 242) est plus rapide que ce développement théorique mais il importe de savoir l’origine de ces valeurs qui peuvent sembler ésotériques, comme celles calculées par les cardiofréquencemètres Polar et qui sont issues des critères de fréquence cardiaque au repos, d’âge, de sexe, et de niveau d’activité physique hebdomadaire. Il est également possible, à partir . du VMAa d’estimer la vitesse sur le plat associée à VO2max (voir tableaux 30 et 31, pages 245 et 246 et encadré 22 page 250). Attention, certains coureurs sont de purs grimpeurs et ont une foulée très économique en montée mais, au contraire, très dispendieuse sur le plat. Le tableau 32 (page 235) donne une correspondance entre VMAa et VMA pour un coureur qui est aussi bien (moyennement) adapté sur le plat qu’en montée. Chaque 1,5 % de pente supplémentaire équivaut à un équivalent d’accroissement de vitesse de 1 km.h-1 si l’on estime la consommation d’oxygène supplémentaire requise pour courir contre une pente plus raide de 1,5.%. Si vous connaissez votre vitesse ascensionnelle à VO2max , vous pouvez estimer ce que vous êtes capable de réaliser sur le plat en prévision d’une randonnée sur les bords de Loire ou bien pour

14 16 18 20 22

16 18 20 22

18 20 22

20 22

22

22

Équivalence des valeurs de VMAa et de VMA en fonction de la pente. Par exemple, pour un déplacement à une vitesse horizontale de 8 km/h sur une pente nulle, le VMA sera de 8 km/h et si la pente est à 18 % la VMA sera équivalente à 20 km/h, ce qui requiert un . V O2max 2,5 fois supérieur.

Vitesse maximale aérobie équivalente pour un déplacement à 8 km/h selon la pente du terrain faire un semi marathon ou encore un marathon. Il est envisageable d’estimer le potentiel sur marathon d’un randonneur joggeur qui fait le Tour du Mont-Blanc en 4 jours tel que nous allons le montrer, en vous présentant dans le chapitre suivant les valeurs de fréquence cardiaque associées aux vitesses ascensionnelles sur le GR du Tour du Mont-Blanc. Ainsi, . une même vitesse ascensionnelle pour une même VO2max est impossible à atteindre pour les faibles pentes (< 10 %) car le coût du mètre ascensionnel reste élevé (encadré 22). En effet, il faut parcourir plus de distance pour s’élever de x mètres. Exemple : pour s’élever de 1 000 m avec une pente de 5 %, il faudra parcourir 20 km contre 10 km avec 10 % de pente. Grimper vite sur une faible pente nécessite une consommation maximale d’oxygène plus élevée que pour grimper sur une forte pente, à dénivelé horaire équivalent. C’est pourquoi, pour être performant sur les pentes faibles et moyennes (pente < 15 %) nécessitent de se préparer sur le plat pour améliorer la consommation maximale d’oxygène sur toutes les pentes, avec un entraînement de mode non seulement quantitatif . mais aussi qualitatif (hautes vitesses sollicitant VO2max ), même si l’on prépare le Tour du Mont-Blanc ou un trail de longue durée.

.

Tout sujet est donc limité par son VO2max . C’est pour cela que l’on . prévoit la VMAa (selon la pente) à partir de son VO2max selon la formule A de l’encadré 22 que nous rappelons ici :

.

VMAa = [(VO2max - 5) / (Cemv)] x 60

249

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Encadré 22 Formules pour l’estimation de V O2max et VMA à partir de VMAa intégrant un coût énergétique tenant compte de la pente

.

Il est possible d’appliquer la formule suivante qui lie la VMAa à la consommation maximale d’oxygène. En effet selon la formule (A) :

.

VO2max = (VMAa  CEmv /60) + 5 (A)

.

-1 Exemple : pour une VMAa de 960 m.h . dans une pente de 5 % avec -1 -1 CEmv = 4 ml d’O2.kg .min : alors VO2max = (960  [4 /60]) + 5 = 69 ml d’O2 kg-1.min-1.

Où VO2max est la consommation maximale d’oxygène (en ml.kg-1.min-1),

Cela donne en équivalent sur du plat une vitesse maximale aérobie calculée avec la formule (B) :

VMAa, la vitesse maximale aérobie ascensionnelle en m.h-1

VMA (km.h-1) = VO2max (ml.kg-1.min-1) /3,5 (ml.kg-1.min-1.km-1.h) = 69/3,5 = 19,7km.h-1 (B)

CEmv le coût énergétique par mètre vertical gravi, exprimé en ml d’O2 consommé par kg et par minute, 5 est la valeur de la consommation d’oxygène de repos, en ml.kg-1.min-1. Pente

CEmv

(%)

(ml.kg-1.m-1)

Voici une application de ces deux . formules à différentes pentes pour une VMAa de 960 m/h ou un VO2max de 50 ml.kg-1.min-1.

.

VO2max pour une VMAa de 960 m.h-1

Va max . pour une VO2max

(ml.kg-1.min-1)

de 50 ml.kg-1.min-1

(formule A)

(formule B)

5

4 (course)

69,0

675

10

3,3 (course)

57,8

819

15

2,9 (course)

51,4

931

20

2,4 (course)

43,0

1125

25

2,2 (marche)*

40,2

1227

30

2,0 (marche)

37,0

1350

35

2,0 (marche)

37,0

1350

40

2,1 (marche)

38,6

1285

45

2,5 (marche)

45,0

1080

* à partir d’une pente de 20 %, l’homme se met spontanément à marcher car en courant sur des pentes de tels pourcentages, le niveau de sollicitation musculaire est trop important. En outre, du point de vue

250

.

énergétique il ne peut plus récupérer l’énergie élastique de la phase d’atterrissage de la course, après la phase de suspension qui devient très brève dans une forte pente.

Théorie de l’entraînement

1.7.5.2 Estimation des vitesses de croisière sur les lon. gues durées à partir de VO2max et VMAa

VMAa (m/h)

dénivelé en 1 heure

dénivelé en 2 heures

dénivelé en 3 heures

À partir de la connaissance du VMAa il est possible d’estimer les vitesses ascensionnelles sur des durées d’effort plus longues (voir tableau 33 page 251) en s’attribuant une endurance moyenne : 75 % de votre VMAa pour une endurance soutenue de 1 h, 60 % pour 2 h et 50 % pour 3 h. Pour affiner ces estimations sur des moyennes et longues durées d’effort, ce facteur endurance doit être connu : il peut être déterminé à partir de la vitesse ascensionnelle lue sur le cardio outdoor directement pendant l’ascension de 1, 2 ou 3 h.

400

300

480

600

500

375

600

750

600

450

720

900

700

525

840

1050

800

600

960

1200

900

675

1080

1350

1000

750

1200

1500

1100

825

1320

1650

1200

900

1440

1800

1300

975

1560

1950

1400

1050

1680

2100

1500

1125

1800

2250

Quoiqu’il en soit, pour les exercices de longue durée, se pose la question de l’équivalence entre la distance parcourue sur le plat et les dénivelés accumulés sur une journée, du point de vue de la dépense énergétique dépensée (kcal totales).

1600

1200

1920

2400

1700

1275

2040

2550

1800

1350

2160

2700

1900

1425

2280

2850

Si l’on prévoit de marcher 10 km avec 1 000 m de dénivelé, cela reviendra à dépenser l’énergie requise pour marcher 20 km à plat, étant donné que chaque 1 000 m de dénivelé correspond à 10 km de marche à plat. Cela vient du fait qu’en moyenne pour des pentes comprises entre 10 et 30 %, chaque mètre vertical coûte entre 8 et 10 fois plus qu’un mètre horizontal : 8 J.kg-1 pour une pente de 20 % et 10 J.kg-1.m-1 pour une pente de 25 %, contre 2 J.kg-1.m-1 pour une marche sur terrain plat (voir tableau 34 page 252).

2000

1500

2400

3000

Exemple : si l’on reprend l’exemple de Christophe, il serait ainsi capable de monter un dénivelé de 750 m en 1 h, 1 200 m en 2 h et 1 500 m en 3 h. Ces chiffres théoriques peuvent l’aider à établir son tableau de marche lors de ses courses et de randonnées.

Lorsque le sujet court, la différence est moins marquée puisqu’un mètre vertical coûte 9,3 et 12 J.kg-1.m-1 s respectivement, sur des pentes de 20 % et 25 % contre 3,4 J.kg-1.m-1 pour la course sur terrain plat (voir tableau 34 page 252). Ces données sont à nuancer si l’on se réfère au tableau 34 (page 252). En marchant, la descente est moins coûteuse que le plat jusqu’à une pente de 25 % et de 45 % (20 °) en courant. Cela vient du fait qu’avec une pente négative, la restitution de l’énergie élastique consécutive à la charge de la jambe d’appui - qui est de 6 fois le poids de corps contre 3 sur le plat - donne un rendement de 80 % contre 18 % lors de l’ascension d’une pente de plus de 15 %. Le rendement intermédiaire est de 30 % sur des pentes comprises entre 10 et 20 %. Le rendement est le pourcentage de l’énergie mécanique produite par rapport à l’énergie biologique dépensée (à

dénivelé en 5 minutes

Chapitre 6

Tableau 33 Estimation de la distance horizontale et verticale (dénivelé) pouvant être parcourue sur le plat pendant 1, 2, ou 3 h (sans pause) d’après la VMAa individuelle.

dénivelé total parcouru sans pause

partir des glucides, lipides, protides brûlés par l’oxygène pour les efforts supérieurs à 3 min). Pour la course sur une pente de 15 %, ce rendement est de 30 % ; cela signifie qu’il faut dépenser 3 fois plus d’énergie au plan biologique pour produire de l’énergie mécanique. À partir de 20 % de pente, du point de vue du coût énergétique (coût en joule du mètre parcouru), il est plus intéressant de marcher en portant son VTT sur le dos que continuer à pédaler. Attention ! Il ne faut pas confondre rendement et vitesse (performance) puisque la vitesse est le produit du rendement par le débit d’énergie (mesuré par la consommation d’oxygène) selon l’équation : Puissance mécanique (joules/secondes ou watts) = puissance biologique (en watts, estimée par la consommation maximale d’oxygène)  rendement énergétique ( appelé Eta en %, chapitre I, 1.3.2).

251

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Pente % de la pente

MARCHE Coût du m parcouru en joules par kg de poids de corps J.kg-1.m-1

Coût du mètre parcouru en joules par kg de poids de corps J.kg-1.m-1

Coût du m parcouru en joules par kg de poids de corps J.kg-1.m-1

EN MONTÉE

EN DESCENTE

EN MONTÉE

Coût du m parcouru en joules par kg de poids de corps J.kg-1.m-1 EN DESCENTE

0

1,6

1,6

3,4

3,4

5

3,5

1,0

5,1

4,0

10

4,5

0,8*

6,3

2,5

15

6,5

1,0

7,0

2,5

20

8,0

1,0

9,3

1,7*

25

10,0

1,5

12,0

2,0

30

12,0

2,5

14,0

2,1

35

12,5

2,6

17,0

2,5

40

13,5

2,8

18,0

2,6

45

17,3

3,5

18,9

3,9

Tableau 34 Le coût énergétique horizontal et vertical de la marche et de la course en fonction de la pente (en Joules par mètre horizontal ou vertical, et par kilogramme de la marche). Le coût énergétique de la course augmente avec la pente mais le coût du mètre vertical est au plus bas avec une pente comprise entre 20 et 30 %. on peut remarquer qu’en descente, le coût énergétique de la marche s’élève à partir d’une pente négative de 25 %. *Le coût du mètre parcouru est minimal pour des pentes en descente de -10 % à la marche et - 20 % à la course sur un terrain stable sans difficulté technique pour un coureur habitué à descendre.

252

COURSE

1.7.6 Test de vérification des progrès réalisés par l’entraînement après 4 semaines de pratique régulière d’au moins deux fois par semaine : le « test à vitesse croissante » pour tester ses progrès en marchant ou en courant à plat Cette partie était consacrée au test en montée afin de choisir une activité adaptée aux goûts et aux conditions physiques de départ de chacun. La progression est possible grâce au programme optimisé décrit dans la suite du chapitre VI. Nous clôturons donc ce chapitre avec un test objectivant la progression au cours de la mise en condition physique. Ce test doit être réalisé sur une distance connue, idéalement 500 m. Pour cela, un parc, une route, une piste d’athlétisme sont idéaux. Concernant l’étalonnage de la route il est possible d’utiliser l’odomètre (le compteur) de son vélo et même de sa voiture. Toutes les étapes du protocole suivant sont à réaliser sur 500 m :

• marcher tranquillement 500 m (fréquence cardiaque (FC) comprise entre 80 et 100 battements par minutes [bpm]) ; • il y a une relation directe entre la fréquence cardiaque et la sensation de course (voir tableau 35 p. 253 donnant les correspondances entre fréquence cardiaque et perception de l’effort). L’intensité des efforts est progressivement contrôlée naturellement par les sensations ressenties ; • marcher activement ou trottiner 500 m (FC = 100 à 110 bpm) ; • marcher ou courir plus vite 500 m (FC = 120 bpm) ; • répétez la phase C afin d’augmenter la FC de 10 bpm à chaque palier, jusqu’à ce qu’un palier supplémentaire ne soit plus possible ; • il est possible de s’arrêter avant l’épuisement car, même dans ce cas, les progrès sont éva-

Théorie de l’entraînement

luables en examinant la relation entre la fréquence cardiaque et la vitesse de déplacement. En consultant les points repères enregistrés dans le cardiofréquencemètre il est possible de consulter à chaque palier d’effort croissant la FC et le temps mis au 500 m (marqueurs indiqués manuellement). Les marqueurs automatiques sont ceux qui indiquent que le chronomètre est démarré - l’altimètre ayant été calibré - ou que les limites de FC éventuellement programmées dans la montre sont atteintes. Calculer ensuite la vitesse à chaque palier selon la formule suivante : Vitesse = d / t, soit ici V (en m/s) = 500 / t Vitesse (km/h) = vitesse (m/s)  3,6 Il existe une correspondance entre l’échelle de perception du niveau d’effort et la fréquence cardiaque validée par Borg (1982), voir tableau 35). Cette échelle s’appelle l’échelle RPE (Rating of Perceived Exertion), l’échelle de perception de la difficulté de l’exercice de Borg. Partant de l’hypothèse selon laquelle la perception de la difficulté de l’exercice (pénibilité) est proportionnelle avec la fréquence cardiaque et la lactatémie, Borg a mis au point une échelle de correspondance entre la fréquence cardiaque allant de 6 à 20 et la perception du niveau d’effort (RPE); il suffit alors de multiplier par 10 l’indice donnée par l’échelle et désigné par le sportif en fonction de la pénibilité ressentie en effectuant l’exercice, pour retrouver sa valeur de fréquence cardiaque (en battements par minute ou bpm). Elle permet d’établir une correspondance entre les sensations d’effort (échelle d’intensité subjective) et les valeurs de fréquence cardiaque, l’indicateur objectif de l’intensité de l’effort. Vous pouvez affiner votre perception en établissant la correspondance FC et RPE. Si vous êtes « dans la norme », il suffit de diviser votre FC par 10 pour retrouver un niveau d'intensité donné. Lorsque Christophe à une FC de 160 il ressent son effort comme étant « difficile ». Cette correspondance FC – RPE permet d’affiner la perception de son corps et l’intensité relative à laquelle il est sollicité. Lorsque vous constatez un décalage brusque (d’une séance à l’autre) entre l’échelle RPE et FC il est possible que vous soyez un peu surentraîné. Il est alors conseillé de diminuer l’intensité et la durée des efforts. Cela peut être utile pour gérer des étapes de randonnées. Par exemple si Christophe ressent, comme étant « très difficile » un effort alors que son cœur bat à 150 bpm, cela signifie qu’il a probablement une fatigue musculaire due à une déplétion en glycogène

Score 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20

Échelle subjective de l’intensité de l’effort (traduit de Borg 1982) Très facile

Chapitre 6

Tableau 35 Correspondance entre l’échelle de perception du niveau d’effort et la fréquence cardiaque, validée par Borg (1982).

Facile Assez facile Un peu difficile Difficile Très difficile Extrêmement difficile

accrue par des chocs répétés et un manque de sommeil. Il veillera également à se réhydrater avec une boisson riche en polymères de glucose ou en morceaux de sucre de table dont l’index glycémique est idéal et qui peuvent être croqués en buvant deux gorgées d’eau plate. À la fin du test on peut se reporter au tableau 36 page 254 afin de vérifier les progrès réalisés au niveau cardiovasculaire. Ainsi, sans réaliser un effort maximal, il est possible de mettre en évidence l’amélioration de l’économie cardiaque avec le calcul du nombre de mètres parcourus pour un battement cardiaque (voir tableau 36). Si l’économie cardiaque qui indique la distance parcourue par battement cardiaque, augmente de 14 % à 7 % pour des vitesses faibles à élevées, cela signifie une nette amélioration de la capacité cardiopulmonaire : le sang est mieux pompé et davantage conduit aux muscles actifs. La masse musculaire augmente et consomme davantage d’oxygène : le sujet va donc plus vite et plus longtemps. Mais encore une fois, l’utilisation d’un cardiofréquencemètre ne dispense pas d’un test à l’effort avec un cardiologue. En effet, vous devez avoir réalisé une épreuve d’effort sous contrôle médical afin d’être certain que vous n’avez aucune contre indication à la pratique d’efforts intenses. Le fait de porter un cardiofréquencemètre ne vous donne aucune garantie de sécurité par rapport à une contre indication éventuelle. Le

253

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Tableau 36 Effet de l’entraînement sur l’augmentation de la vitesse pour une fréquence cardiaque donnée (voir commentaires sur cet exemple dans le texte).

AVANT ENTRAÎNEMENT

APRÈS 3 SEMAINES (6 séances) de préparation

FC (bpm) avant préparation

Vitesse (km/h) avant préparation

Économie cardiaque avant entraînement (mètres par battement cardiaque)

FC après 3 semaines de préparation

Vitesse après 3 semaines de préparation

Économie cardiaque après entraînement (mètres par battement cardiaque)

85 110 120 130 140 150 160 170

0 7 8 9 10 11 12 13

--

75 110 120 130 140 150 160 170

0 8 9 10 11 12 13 14

--

1,06 1,11 1,15

1,21 1,25 1,28

1,19

1,30

1,22

1,33

1,25

1,35

1,27

1,37

Figure 79 Profil de fréquence cardiaque (FC)vitesse de Christophe (avant entraînement : carrés noirs et après entraînement : ronds blancs). À une même vitesse de course, Christophe a une fréquence cardiaque inférieure après entraînement (par exemple à 12 km/h il bat à 168 bpm contre 175 bpm).

[

254

Théorie de l’entraînement

cardiofréquencemètre optimise votre activité dans le sens où il permet de gérer vos entraînements, votre mise en condition physique ainsi que votre pratique outdoor comme des courses, des randonnées d’un jour ou un trekking d’altitude. Il est complémentaire mais ne se substitue par à une évaluation médicale préalable. Le test de marche-course jusqu’à épuisement n’est pas obligatoire. Au terme de 3 semaines et 6 à 8 séances de préparation il est déjà possible de constater :

Tableau 37

.

dénivelé horaire 5 minutes: VMAa en m/h

PMA (watts.kg–1)

(ml.kg–1.min–1)

1900

7.04

84.5

1850

6.87

82.4

1800

6.69

80.3

1750

6.51

78.1

VO2max

1700

6.33

76.0



une diminution de 5 bpm de la FC au repos ;

1650

6.15

73.9



un gain d’environ 10 % de vitesse pour une même FC ;

1600

5.98

71.7



l’ensemble se traduisant par une augmentation de l’économie cardiaque de 10 %, environ.

1550

5.80

69.6

1500

5.62

67.5

1450

5.44

65.3

1400

5.27

63.2

1350

5.09

61.1

1300

4.91

58.9

1250

4.73

56.8

1200

4.56

54.7

1150

4.38

52.5

L’observation de la relation liant la FC et la vitesse de déplacement (soit linéaire à plat, soit ascensionnelle en m/h) permet de mesurer l’efficacité de l’entraînement. La figure 79 ci-dessous montre le profil FCvitesse de course de Christophe réalisant un test à vitesse accélérée toutes les 2 min avant (carré noir) et après (rond blanc) entraînement. On peut constater que pour une même vitesse, Christophe a une fréquence cardiaque plus basse après entraînement (- 9 bpm à 12 km/h). L’entraînement a été efficace et il se traduit par une amélioration de la performance (vitesse maximale atteinte : VMA + 1,5 km/h soit + 10 % de gain en 8 semaines à raison de séances qualitatives hebdomadaires.

1100

4.20

50.4

1050

4.02

48.3

1000

3.84

46.1

950

3.67

44.0

900

3.49

41.9

1.7.7 Correspondance entre . la puissance (en watts) atteinte à VO2 max (souvent appelée la « puissance maximale aérobie » ou PMA) obtenue lors de tests sur bicyclette ergométrique et la vitesse maximale aérobie ascensionnelle (VMAa)

850

3.31

39.7

800

3.13

37.6

750

2.96

35.5

700

2.78

33.3

650

2.60

31.2

Si vous passez un test en laboratoire avant de débuter votre pratique outdoor ou bien que vous êtes régulièrement testés en laboratoire dans le cadre d’un suivi de l’entraînement, vous avez en référence une puissance associée à votre consommation maximale d’oxygène. Cette puissance est couramment qualifiée de « puissance maximale aérobie » (PMA) lors des tests sur bicyclette ergométrique et elle est exprimée en watts/kg. Le tableau 37 donne la correspondance entre PMA et VMA qui est la vitesse maximale aérobie, l’homologue de PMA mais pour la course à pied.

600

2.42

29.1

550

2.24

26.9

500

2.07

24.8

450

1.89

22.7

400

1.71

20.5

350

1.53

18.4

300

1.36

16.3

250

1.18

14.1

200

1.00

12.0

Le tableau 38 donne la synthèse des correspon. dances entre VMA, VO2max et VMAa obtenues sur

Chapitre 6

Correspondance entre puissance maximale aérobie (PMA) et la vitesse maximale aérobie ascensionnelle (VMAa) mesurée sur 20 % de pente. On voit dans l’exemple surligné en gras, que Christophe a une VMAa ascension nette estimée à partir d’un test sur bicyclette ergométrique de 4 watts par kilogramme de poids de corps ce qui signifie que sur bicyclette ergométrique et pour un poids de 69 kg, il atteint sa consommation d’oxygène et sa fréquence cardiaque maximales à 280 watts. Par conséquent, sa puissance maximale aérobie (PMA) . est de 280 watts.V O2max

255

256

22,9

21,4

20,0

18,6

17,1

15,7

14,3

12,9

11,4

10,0

8,6

80

75

70

65

60

55

50

45

40

35

30

3,9

5,3

6,8

8,2

9,6

11,0

12,5

13,9

15,3

16,8

18,2

 

2,0

3,4

4,9

6,3

7,7

9,1

10,6

12,0

13,4

14,9

16,3

 

1,5

3,0

4,4

5,8

7,2

8,7

10,1

11,5

13,0

390

533

676

819

962

1105

1248

1390

1533

1676

1819

1962

 

300

514

729

943

1157

1371

1586

1800

2014

2229

2443

 

0

305

590

876

1162

1448

1733

2019

2305

2590

bonne

bonne

Excellente

Sportif endurance niveau régional a Sportif endurance niveau régional b

Sportif endurance niveau régional b sport loisir ou sport non endurance

très basse

basse

très moyenne

moyenne

basse

très moyenne

moyenne

assez bonne

promenade

promenade à plat

promenade à plat

randonnée

sport loisir ou sport non endurance

promenade

randonnée

sport loisir ou sportif non endurant

3:12:04

2:20:37

1:50:55

1:31:34

1:17:58

1:07:53

1:00:07

0:53:56

0:48:55

Elite endurance Elite endurance niveau national b niveau national a

Excellente

Elite endurance niveau national b

0:44:45

Elite endurance Exception- Elite endurance niveau internanelle niveau national a tional b

sport loisir ou sport loisir ou assez bonne assez bonne sport non endu- sport non endurance rance

assez bonne

bonne

bonne

Excellente

Excellente

Sportif endurance niveau régional a

0:41:14

Elite endurance niveau international a

Exceptionnelle

Exceptionnelle

Elite endurance niveau international b

N’existe pas

Exceptionnelle

 

4:10:00

2:25:50

1:42:56

1:19:33

1:04:49

0:54:41

0:47:18

0:41:40

0:37:14

0:33:39

0:30:42

 

2:07:01

1:25:36

1:04:33

0:51:49

0:43:16

0:37:09

0:32:32

0:28:57

Temps mis pour Temps mis pour Temps mis pour monter 1000m monter 1000m monter 1000m de dénivelé de dénivelé de dénivelé (min) avec 10% (min) avec 15% (min) avec 20%

0:38:14

Homme sportifs Femme sportives

Elite endurance niveau international a

· VO 2 max pour les femmes

.

19,6

· VO 2 max pour les hommes

Correspondances entre V O2max, VMA . (vitesse à V O2max sur du plat), et les VMAa selon le pourcentage de pente à laquelle se déplace le coureur. Christophe a une vitesse ascensionnelle à . V O2max (VMAa) de 950 m sur une pente de 15% ce qui donne une estimation de sa VMA (confirmée expérimentalement) . de 14,5 km/h et une V O2max de -1 -1 50 ml.kg .mn (en gras dans le tableau). Sa condition physique aérobie est celle d’un sportif de loisir ou de quelqu’un qui débute un entraînement sérieux depuis moins d’un an et qui n’a pas de passé sportif.

24,3

Vitesse de Vitesse de Vitesse de Vitesse de Vitesse de Vitesse de déplacement déplacement déplacement déplacement déplacement déplacement horizontale horizontale horizontale VMA 0% contre 10% de contre 15% de contre 20% de verticale contre verticale contre verticale contre 10% de pente 15% de pente 20% de pente pente pente pente (m/h) (m/h) (m/h) (km/h) (km/h) (km/h)

Tableau 38

85

· VO 2 max ml.min–1.kg–1

Chapitre 6 L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Théorie de l’entraînement

différentes pentes. Les appréciations concernant la condition physique aérobie apparaissent également sur ce tableau. À présent vous connaissez parfaitement . votre niveau de VO2max et donc votre condition physique.

.

Cette valeur de VO2max est maximale lorsqu’elle est mesurée à moins de 1 000 m d’altitude dans des conditions thermiques (10-25°C) et hygrométriques (pourcentage d’humidité dans l’air) inférieures à 30 %. À partir de 1 000 m, certains sujets; . en particulier les sportifs qui ont des valeurs de VO2max supérieures à 65-70 ml.kg-1.min-1, sont davantage sensibles aux effets induits par l’hypoxie (mot qui signifie défaut d’oxygène) inhérentes à l’altitude. Bien souvent, les sports outdoor se déroulent en altitude et sous des températures extrêmes de chaleur ou de froid, dont nous avons examiné les effets dans le chapitre V.

1.8

Test de Rabit®

Si on reprend toutes les vitesses associées aux concepts physiologiques classiques on peut avoir une échelle d’intensité en référence à la fois à des zones physiologiques et à des vitesses de compétition. Cela permet de se repérer avant d’oser se faire confiance en tant qu’être humain quant à notre capacité de balayer sur commande toutes ces zones au cours d’un entraînement en interval training avec des consignes d’accélération ainsi que nous l’avons présenté en chapitre 2, puisque la force musculaire est une condition d’amé· lioration de V O2max et réciproquement. Or le fractionné en accélération permet de peindre un merveilleux tableau avec toute sa palette métabolique. La Figure 79b vous donne ce tableau « repère » pour que vous puissiez, avec cette assurance, courir à la sensation en suivant, non pas le lapin d’Alice mais le test de RABIT® qui va vous faire rentrer dans le monde merveilleux des possibles en termes de connaissance de ses possibilités, de soi et donc, des progrès jusqu’à au-delà de 100 ans (voir la conférence Tedx « Ajouter de la vie à la vie » : https://www.youtube.com/watch? v=MRoi_LG0epI&ab_channel=TEDxTalks). Ce test qui fait partie de la nouvelle approche · · de la mesure du V O2max : le « self-paced V O2max » (SPV) de 20 minutes comprend trois paliers de course à pied, ajustés à des perceptions de l’effort (RPE Cf. encadré 21) équivalentes à « léger » (RPE 11) pendant 10 min, « ni léger, ni dur », (RPE 14) pendant 5 min et « très dur » (RPE 17) pendant 3 min (Figure 79c). Chaque palier est suivi d’une période de repos d’une minute. Les participants modifient leur vitesse de

Chapitre 6

course en fonction du RPE prescrit, afin que leur RPE (et non leur vitesse) reste constant pour chaque palier. Le test a été effectué à l’extérieur, sur un chemin de terre dure (Giovanelli et al., 2019). Afin de valider la possibilité de détecter les seuils ventilatoires 1 et 2 dans la zone moyenne et · V O2max dans la zone dure, les participants pouvaient consulter l’échelle RPE à des intervalles réguliers (c’està-dire tous les 100 m) car il/elle était suivi(e) par l’expérimentateur à vélo. Un test de vérification a été réalisé jusqu’à épuisement volontaire à une intensité de course perçue comme supérieure à la vitesse pic atteinte lors du dernier palier du RABIT® (Midgley et al., 2009). Les critères de vérification étaient un pic de consommation d’oxygène et de fréquence cardiaque de ± 2 % entre la phase de vérification et à la dernière phase incrémentielle du test (Midgley et al., 2007 ; Midgley et al., 2006). Nous avons démontré que l’être humain est capable de reproduire les mêmes réponses physiologiques à une intensité perçue dans deux les tests Rabit® RABIT®1 et RABIT®2 réalisés à 4 jours d’intervalle dans les même conditions (tableau 38b). Les trois paliers d’intensités perçues correspondaient respectivement à 59 %, 73 % et 89 % de la Vitesse Maximale pour RPE 11, 14 et 17 (et à 66-68 % (RPE 11), 83-85 % (RPE 14) · et 92 % (RPE 17) de VO2max observé lors des tests ® RABIT (figure 79d). Au-delà de la possibilité de déterminer de façon fiable et reproductible les réponses physiologiques de · VO2max par le test de Rabit®, il fallait vérifier que cette possibilité était avérée pour les seuils ventilatoire 1 et 2. Ce fut chose faite par nos amis italiens de l’équipe du Pr Lazer, successeur du fameux Pietro di Prampero de l’Université d’Udine. Giovanelli et al. (2019), des collègues italiens, ont vérifié cette possibilité en la resituant dans le contexte des tests d’efforts au seuil en rappelant qu’il est possible de détecter l’AerT (le seuil aérobique ~ 70· 75 % de V O2max) et AnT (le seuil anaérobqiue ~ 85· 90 % de VO2max) lors d’un test incrémental et d’établir des zones d’entraînement de base associées à la fréquence cardiaque, au rythme de course, à la puissance, etc. En particulier, la zone 1 (intensité modérée) est incluse entre le début de l’exercice et l’AerT. La zone 2 (intensité forte) est comprise entre AerT et AnT et la zone 3 (intensité sévère) se situe au-dessus de AnT (Poole & Jones, 2012 ; Rossiter, 2011). Chaque zone correspond à un effort spécifique perçu par l’athlète (Kraemer et al., 2012). En effet, le taux d’effort perçu

257

Chapitre 6

Figure 79b Représentation schématique du modèle à double entrée permettant de choisir sa · vitesse cible sur une course. vVO2max : · vitesse à VO2max. Vitesse SV2 : vitesse au seuil ventilatoire 2 (voir chapitre 4 2.4.2.) vMLSS : vitesse au maxima lactate steady state (voir chapitre 6 1.5.5.) Vitesse critique (voir chapitre 6 1.5.7.) Vitesse Lipox Max (voir chapitre 6 page 197 et tableau 18a)

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

Vitesses physiologiques . > vVO2max

. %vVO2max Distance Temps limite Non entraînés-entraînés

RPE

Effort perçu All-out

100 m 200 m 400 m 800 m

> 100

< 3'

20

1 500 m et 3 000 m

100

3' à 12'

18 à 20

Vitesse SV2

10 kilomètres

70-90

10' à 30'

17 à 19

Vitesse critique

Semi marathon

60-85

20' à 60'

16 à 18

. vVO2max

Inconfort

confort vMLSS

Marathon

Vitesse SV1

50-80

30' à 60'

14 à 17

40-non utilisé

45' à 10 h

13 à 16

Vitesse Lipox Max

300 km

30-60

2 h à 24 h

12 à 15

Repos



10-3

Toute une Vie

0

(RPE) est étroitement lié à la notion d’intensité de l’exercice et à la perception de l’effort. Étroitement liée au concept d’intensité de l’exercice, il s’agit, plus précisément, de « la sensation de la lourdeur et de la pénibilité d’une tâche physique » (Borg, 1998). Le RPE ne prend pas seulement en compte la charge de travail, mais inclut de nombreux autres facteurs qui affectent la performance (température, humidité, apport énergétique). De plus, c’est un médiateur clé dans la régulation du rythme de travail (Tucker & Noakes, 2009). L’importance du RPE dans la détermination de l’intensité d’exercice autosélectionné (c’est-à-dire le rythme) est soulignée par les auteurs. Abbiss et Laursen (2008) ont suggéré que le

258

cerveau traite un algorithme complexe comprenant le feedback périphérique, les expériences précédentes et la charge de travail restante. Ceci et Hassmen (1991) ont montré que les coureurs étaient capables d’auto-ajuster l’intensité de leur course à trois valeurs de RPE différentes. Ces sujets ont adapté la vitesse afin d’obtenir un RPE de 11 (« léger ») sur une échelle de Borg de 6 à 20 pendant 3 minutes, un RPE de 13 sur une échelle de Borg de 6 à 20 pendant 3 minutes (« quelque peu difficile ») un RPE de 15 pendant 11 minutes, et un RPE de 15 (« difficile ») pendant 5 minutes. En combinant les concepts AerT (Aerobic Threshold, seuil aérobique, voir tableau 23) et AnT

Théorie de l’entraînement

Chapitre 6

Figure 79c

RPE

20 19 18 17 16 15 14 13 12 11 10 9 8 7 6

TRÈS DUR 17

MOYEN 14 FACILE 11

1

2

3

4

5

6

7

8

En haut : Représentation schématique du protocole RABIT® (version allégée sans le sprint ni la phase maximale de 30 s (voir pour la version complète https://www.billatraining.com/). RPE Perception de l’effort En bas : Représentation du test de Rabit® complet avec en noir un exemple de variation de vitesse pour chaque palier de sensation constante (la variable « imposée » est la consigne de sensation).

9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 Temps (minutes)

0 min

5 min

10 min

15 min

Vitesse « Facile 1» pendant 10 min Sprint de 10 sec Vitesse « Dure » pendant 3 min Vitesse « Facile 2 » pendant 10 min

(Anaerobic Threshold, seuil anaérobique, voir tableau 23) et la stratégie de rythme, RABIT® (Running Advisor Billat) utilise un protocole comparable d’entraînement autonome qui exige des athlètes qu’ils courent en trois paliers séparés par une minute de récupération passive (Ceci et Hassmen, 1991).

20 min

25 min

30 min

1 min de récupération à très basse vitesse Vitesse « Moyenne » pendant 5 min 30 secondes de Sprint

mental. Les auteurs conclurent que le RABIT® était validé pour tous les paramètres maximaux et pour la plupart des paramètres liés à l’AnT et à l’AerT, et il pourrait donc être utilisé pour détecter les zones d’entraînement chez les athlètes. Cela est intéressant d’autant plus que, par la suite nous avons montré que la zone d’intensité moyenne encadrait pour sa limite basse, le seuil ventilatoire 1, et pour la zone haute, le seuil ventilatoire 2 (appelés respectivement AnT et AerT par les collègues italiens et dans la littérature internationale, pour « seuil aérobie » (AerT) et anaérobie (AnT) (Cf. le résumé sur les seuils ventilatoires à la fin du chapitre 4) (d’après Molinari et al., 2020b).

L’avantage de ce test est qu’une communication verbale permet de détecter les différentes zones d’entraînement. · Les paramètres V O2max, HRmax (Heart Rate Maximal ou Fréquence cardiaque maximale en français, RERmax (Respiratory Exchange Ratio ou quotient respiratoire en français) et la vitesse de course maxi- 1.8.1 L’allure du marathon est courue male mesurés pendant les 3 minutes de rythme souà une sensation globalement moyenne tenu du RABIT© n’étaient pas statistiquement différents et forte pour la ventilation des paramètres maximaux mesurés pendant le test dans les 5 derniers km. · incrémenté (p > 0.05). Les valeurs de V O2, de la FC et du RER mesurées pendant le rythme moyen et facile du L’examen des réponses physiologiques de maraRABIT® n’étaient pas significativement différentes des thoniens entièrement équipés de capteurs (mesures des paramètres AnT et AerT mesurés pendant le test incré- échanges gazeux, du débit cardiaque, de la fréquence

259

Chapitre 6

L’ENTRAÎNEMENT SPORTIF

A 65

B

Ŧ

*¤ ¥ §

60

170 150 *¤ ¥ §

* 130 VE (L·min−1)

VO2(ml·kg-1·min-1)

55 50 45

*¤ ¥ §

40

*¤ ¥ §

ƚŦ

110 90

*¤ ¥ §

70

35

50 T1

30 T1

T2 11

T3

T1

T2 14 RPE

T3

T1

T2 17

T2 11

T3

T1

T3

T3

T1

T2 17

T3

RPE ®

RABIT 1

RABIT®1

T2 14

RABIT®2

RABIT®2 C 1,20 1,15 1,10 1,05

RER

1,00 0,95 0,90 0,85 0,80 0,75 0,70 T1

T2 11

T3

T1

RABIT®1

T2 14 RPE

T3

T1

T2 17

T3

RABIT®2

Figure 79d · · Comparaisons (A) de la consommation d’oxygène ( VO2), (B)de la ventilation ( VE), (C) du quotient respiratoire (RER), dans les deux tests RABIT®1 et RABIT®2 avec des durées normalisées (T1, T2 et T3) pendant 3 paliers RPE (RPE 11, 14, et 17). Noter : * indique une différence significative (p