188 105 26MB
French Pages 464 Year 2007
UNIVERSIDAD COMPLUTENSE
IIIIIIIIIII~II~II~ ~1~11~llll ~lljl~ 1111111111111 .-
ETUDES Responsahle de publication:
PLATONICIENNES (l fniv('fsité dl' Paris X - Nanterre.
Institut Univcl'sitairc de France)
IV Les puissances de l'âme selon Platon
Comité de rédaf..'tion : L\IC
BriSS()!l
(P:lris). Mal'ic-I,:lurcIlCC 1)esc!povpa : garderie ou garnison? »), Revue de Philologie, de littérature et d'histoire ancienne 35, 1961, p. 207-210; P. Boyancé, «Note sur la cppoupâ platonicienne »), Revue de Philologie, de littérature et d'histoire ancienne 37 (89), 1963, p. 7-11 ; P. Courcelle, «Tradition platonicienne du corps-prison »), Revue des Études Latines 43, 1965, p. 406-443 ; R. Lodaux, ,« Note sur la cppoupâ platonicienne (Phédon 62 b~c) )1, Les Études Classiques 36, 1968, p. 28-36; J. C. G. Strachan, « Who did forbid suicide at Phaedo 62b?», C/assieal Quarterly 20, 1970, p. 216-220. 17. W. Burkert, op. cit. (voir note 14), p. 126, n. 33. Études platoniciennes IV
.
AUIERI'O IlEIINABÉ
30
y vivons séparés de la vraie vic, d'oi! leur t:onception du corps COlllllle une tombe. Celui de Platon, par contre, est centré sur les aspects politique et Illor,,1 ; le mythe comporte alors un enseignement sur la conduï'te correcte de l'honllne ell t:lnt llue citoyen, cette vie a ulle valeur reconnue, J'âme s'y retrollve, certes, " sous la sur~ veillance ) du corps, mais bien vival1te et agissante. Il y a aussi un mlfrc aspect intéressant lR • L.a question est traité dans le Pbédoll, au tnoment ot! Socrate est en train de mourir. Le message paradoxal de Socrate':1 ses disciples est que celui qui p', in A. Berllabé-E Cas,ldes{ls (éditt'tIl's), Orfio ... , op. dt. (voir n. 1H) ; cL A. Bernabé. 'Ff.\·/OS /hfi((JJ.Y jilo.f/lf!t1Im·Jo{Tfl/im, I11tul'rùdtJ l'am una compamârJn, Madrid 2004, p. IJ7-147. 22. D'autres conséquem:es d'une telle ern)',Hlce am,lient aussi hi en pli ~tre l'idée que l'âme s'en va ré.~ider parmi les dieux uu dans un autre end mit. Ifltules IJ/aIOIl/demles IV
MODÈLES OIlPIllQUES ET TllANSPOSrnON PLATONICIENNE
31
propre système doctrinal, en lui ajoutant une dimension morale qu'elle n'avait pas au début; mais il n'aurait pas souscrit pour autant aux causes mythiques à l'origine de cette idée, ni aux rituels initiatiques qui l'entouraient. C'est là la reconstruction de Casadesus) que je partage. Platon) en adoptant le principe de la transmigration, nous apparaît à nOUVéau comme l'adepte d'une théorie minoritaire, soutenue par les orphiques et les pythagoriciens, qui est d'ailleurs considérée par Hétodote comme exotique, ou propre à des fous, selon Diogène d'Œnoanda, comme que nous venons de le voir. Elle a évolué, cependant, dans le sens que nous venons de signaler et ainsi, une fois éliminée de l'origine la faute antécédente, c'est l'âme qui doit aff1'Onter toute seule les conséquences morales de sa propre conduite, car c'est une responsabilité qui lui incombe à elle seule, tout au long de chacune de ses vies.
2.6. La hiérarchie des réincarnations
Il existe toutefois un aspect de la théorie de la transmigration qui demande un peu d'attention, Platon expose dans le PhèdrCZ 3 une ({ hiérarchie des réincarnations ») d'après laquelle les philosophes en représentent le grade le plus élevé, à l'opposé des tyrans, lesquels y prendraient la dernière place. Quand une âme est tombée, elle doit attendre dix mille ans avant d'avoir à nouVeau la possibilité de rentrer dans le monde divin et supracéleste d'où elle provient. Tout au long de cette période, les âmes vont se réincarner dans des vies d'autant meilleures qu'elles ont vécu justement pendant l'existence antérieure, ou pires, au cas où elles autaient vécu injustement. Des idées semblables apparaissent aussi dans Empédocle, qui fait référence à-la dernière réincarnadon 24) de même que dans Pindare2s • Nous n'avons cependant aucun témoignage de cette hiérarchie dans les textes orphiques, Labsence de ce sujet dans les lamelles est significative. Faute de nouveaux éléments matériels, il paratt plus raisonnable de penser que cette hiérarchie des réincarnations est une innovation savante et aristocratique qui serait 23, PL
Phdr. 248d,
24. Emp. Fr. 132 Wright (31 B 146 D.~K.) El;- ûÈ TÉÀOS' l1aVTE_tS' TE_ KaL UIlVOTTÔÀol Kal LllTPOL / Kat. lTPOIlOt àv8pl, in]. A. Lopez Férez (éd,), Desde los poemas homéricos hasta la prosa griega dei siglo IV d. C Veintiséis estudios filolOgicos, Madrid 1999, p. 239-259 ; M.-A. Santamarfa Alvarez, $(ùVaEVTa avvETolŒtV, Pindaro y los misterios: edici6n y comentario de la OHmpica Segunda. Tesis Doctoral, Salamanca 20.0.4. Peu convainqmt et ignorant la bibliographie antérieure, J. Holzhausen, « Pindar und die Orphik. Zu frg. 133 Snell/Maeh1er ), Hermes 132, 20.0.4, p. 20.-36. Études platoniciennes IV
----------------
AUlERH) llERNABÉ
32
née dans des milieux sud-italiques, qui aurait été rqnésellléc pal- Ell1pédode ct Pindare et qui, en/in, aurait été largement développée et moralisée par Platon, e'est ainsi que Platon aurait volontiers accepté que l':îme, soumise il. Ull processus de purif-icatioll au cours de plusieurs vies, s'améliore jusqu'à parvenir à (a forme la plus achevée de cc progrès, qui serait la vie du philosophe, COllt;lIe alors comme une espèce de dernier (~.séjour)) avant d'atteindre la délivrance ddinitive. On s'eXpli(l'le bien, maintenant, pourquoi lorsqu'il parle de la doctrine orphique, dans le Alénon 81 b, il ne cite pas les orphiques, eux-mêmes, mai:.; lin autre auteur célèbre, lui aussi rompu à l'art de la transposition (encore que moins reconnu comme tcl), Pindare, Le fait que les philosophes représentent le degré le plus élevé de l'échelle, ju:.;te avant la délivrance dernière, situe ces savallts dam Ulle position supérieure, celle des vrais « initiés et puri/lés)) (cf. § 4.,1.) que les Tf ÀE-T(fl propOSCllt COlllllle call~ didats à la vie parmi les dieux,
2.7, Une libération à longue échéance Une autre question compliquée à résOlllfre est celle de déterminer si la peine qui cOl1traint l'âme à passer par des réincarnations successives expire ou 11011 il. tin moment donné et, ~'i1 en est ainsi, d'établi,' quelle est alors sa durée, Platon raconte (PhaN": 248e) que les âmes ayant perdu leur privilège doivent attendre dix mille ails pour pouvoir rentrer dans lem lieu d'origine, l'univers supracéleste, Il n'y a que quelques âmes, particulièrement bOllnes, qui auraient la possibilité de le Caire au bout de trois mille ans, Quant aux autres, elles seraient traduites en justice et devraient expier leur peine dans dcs endroits souterrains. Fil République 61 5e, ell revanche, il signale (lue le voyage soutenaill que If's âmes SOl1t obligées d'effectuer dure mille ans, La croyance orphique sur ce point n'est pas facile à dé/-lnir (il est bien possible qu'elle ait changé avec le temps ou encore qU'l'lie ait été différente selon les lieux). Empédocle signale que les démons «( doivent errer pendant des périodes trois fuis innolnbrablcs » ou bien II trcnte mille ans lI, car la phrase est ambigLlë u ,. I-Iérodote attribue aux Egyptiens la don-dne adoptée par {{ quelques (;l'ecs d'après laquelle le cycle des rC::p. 363d (OF 431 1 et' 434 1) MOlJUUlOÇ ... 1((11 {\ IJl{\e; UÎJTOÎl ... f lç "Â.lOOlJ (iyny.Jl'TI-Ç Twt À6ylùl (Sc. TOlJe; oLlwlovç) KàL l((lT(l!(Àll'(ll'Tt'S' I«li nUllm'lOLOl' TO)l' ÔULI'W lilrldl's pfatonicil!lllleS 11'
MODÈLES ORPHIQUES ET TRANSPOSmON PLATONICIENNE
37
du mythe, qu'il attribue à« un sicilien ou italiote qui joue avec les mots», c'està-dire à un interprète, qui ne serait probablement autre que lui-même, comme le remarque Casadesus49 . Nous avons vu qu'il connait aussi les récompenses qui attendent les initiés orphiques dans l' au~delà. Il y fait allusion, parfois de manière positive, lorsqu'il dit que l'initié jl habitera parmi les dieux »50, parfois de manière burlesque, comme lorsqu'il évoque le tableau d'un banquet de bienheureux en permanent état d'ivresseS!. La différence entre ces deux formes d'allusion semble dépendre du centre d'intérêt du philosophe dans chacun des cas. Dans le Phédon il présente une « eschatologie positive» et, comme il va conclure qU'e les initiés sont les véritables philosophes, il peut accepter sans difficulté l'idée qu'ils habiteront parmi les dieux, tandis que dans la République, il essaye de discréditer ceux qui affirment qu'il est possible de se délivrer des châtiments pat des moyens exclusivement rituels, dans la mesure où lU1 schéma si « commode » ne contribue pas à créer de bons citoyens. Il était donc plus convenable d'évoquer, pour ceux-là, une ridicule destinée d'ivrogne à perpétuité. Quant à fimaginaire infernal, le parallélisme entre Platon et la situation à laquelle on fait allusion (ce n'est pas une description) dans les lamelles n'est pas très étroit. Leurs {( géographies» ne coïncident qu'en partie: sur la source du Léthé, les chemins sur les deux rives et la plaine où l'on souffre de la soif. Mais il existe aussi de profondes différences. Dans Platon on ne parle pas du cyprès trompeur, caractéristique des lamelles, ni de la source de Mémoire. Par contre, dans celles-ci, on ne fait aucune mention des juges. Ceux-là apparaissent dans Pindare, peut-être à travers une tradition différente. Et Platon, à nouveau, aurait utilisé Pindare comme l'intermédiaire entre la tradition orphique et son propre système de pensée. KàTaŒKEvaaaVTEe; ÈaTEcpavwllÉvoue; TTOLOûaw TÙV aTfaVTa Xpovov ~OlJ ~kayElv
av
IlE8-UovTaS', ". TOÙS 8È avoaLove; Kat aOlKOUe; de; TflJÀÜv Twa KaTop-uTTOt!ŒLV Èv" AlOOU Kat KOŒKLVWl VO(ùP avaYKâ(oUŒL cpÉPELv.
49. Pl. Gorg. 493a (OF 434 III) Kat T(}ÛTO apa TLS Jlv80Àoywv KOI.U)JÔs àv~p, Law, Belles l.ettres, l ')RIJ). La \f;lductioll est t:ellt de L. Brisson (Paris, Carnier~[llalllmariol1, 1998). Étl/des jJltltonJâelJlle$ IV
16. Les termes utilisés sontE"YKWI-lLOV et ETTatVos. La définition faite par Atistote dans la Rhétorique, I, 9, 1367 b 28-36 précise qu'un éloge comporte nécessairement une définition de la nature de l'être qui fait l'objet de l'éloge, puis une description des bienfaits qui en découlent.
17. ~o~s ?o~mons parfois .l',histoire racontée par AtistQphane t< mythe YI, non pas parce qu Il s agIt d un mythe tradltlonnel grec que rapporte le personnage, mais parce que, par la parole, il fabrique de toutes pièces une histoire qui a l'apparence du mythe traditionnel et que, confotmément à l'usage que prescrira Platon pour les mythes, il l'utilise dans le cadre plus global d'un raisonnement dialectique, 18. Aristophane évoque la relation connue de Pausanias et d'Agathon en 193b. Sur ce point, cf. L. Brisson, ,( Le Banquet de Platon comme document sur les comportements sexuels et leur représentation sodale)) dans Tin L.-G. (éd.), Homosexualités. Expression! répression, Paris, Stock, 2000, p. 49-62. 19. Pat exemple, une phrase est une reprise quasi complète de la description par Aristophane de la catégorie issue de l'être androgyne (208e). Or, même si le discours de Diotime apparaît dans l'œuvre après celui d'Aristophane, cet échange que rapporte Socrate a eu lieu vingt ans environ avant la Soirée du Banquet. Par ces quelques remarques qui défient la vrais~mblance narrative (un personnage sait d'avance ce qu'un autre personnage - qui appartIent à un autre niveau narratif - va dire) ec chronologique (ces personnages font référence à des événements censés se dérouler après le moment où ils s'expriment), on s'aperçoit que les deux discours se font écho. 20. L. Brisson dans l'introduction à la traduction du Banquet (Platon, Le Banquet, Paris, Garnier-Flammarion, 1998, p. 39-47). ' Études platoniciennes IV
SANDRA 1I0EHlUNGER
50
pent par deux, divisant les orateurs en trois pôles: Phèdre et AgathonJ.1 \ Pausanias et Eryximaquc U et, cnflll, Aristophane ct Diotime L1 , Il existe tlne relation particu-
lière entre le discours d'Aristophane et l'idée platonicienne de l'amour développée par Socrate et Diotilllc. Ce lien consiste, dans une majeure partie. à faire cn sone que le discours de Diotilllt puisse, pour ainsi dire, s'appuyer sur le discours d'Aristophane pour ensuite le modifier partiellement ct développer une nouvelle thèse,
les quatre autres discours étant bien trop éloignés ou hétérogènes pou r même servir de repollssoir conSITtlctif. Aristophane n'est pas !'interlocutetlf d()111: Socrate, comme c'est sail habitude. réfute par étapes les propos, et il n'est dOI1C pas vain de chercher dans ce discours des éléments de la pensée de Platon.
Un erôs au-delà du sexuel Dans SOI1 discours tel que le tl'allsmet Socrate, Diotillle montre dans quelle mesure erôs est ce qui permet à l'homme de passer du niveau du sensible à celui de l'intelligible. La conception d'Aristophane est très dHl~rellte. Pour lui, aôs, dOllt il veut célébrer la puissance, est le désir de réaliser la réunion avec la moitié de soÎmême: « Aussi est-ce au souhah de retrouver cette totalité, à sa recherche, que nOLIs donnons le nom J'el'ôs »)2-1. Il est la divinité qui permet, lorsqu'une ( bonne distance »25 est établie entre les deux moitiés, une union provisoire (Jlli, elle-même, permet aux hommes de supporter la séparation et de se livrer ~llIX autres activités propres aux hum'lÎHs. . Cependant, ces deux points sont des conséquences d'erô.r et ne l'ont pas partie de sa nature: si la relation sexuelle est désirée paf les moitiés, ce qui est recherché n'est' pas la relation sexuelle en tant que telle mais l'union primitive. En ce sens, l'érôs d'Aristophane est hors du champ de la sexualité et du domaine physique; il est mouvement de l'âme. Aristophane, contrairement aux autres orateurs, n'intè-
21. Ils ont pour point commun le làit de considérer qu'illl'y a qu'un aôs. Pour Phèdre, il est le dieu le plus ancien et qui apporte le plus de hienli1its aux hOlllllles; pOUl' Agathon, en revanche, il est le plus jeune et le plus délicat, el il favorise certaines vertus l'he? l'homme. 22. Tous deux considèrent qu'il existe deux erôs, eux-mêmes dépendants de l'existence de deux Aphrodite (l'Aphrodite céleste et l'Aphrodite vulgaire). Pausanias IIJIlde sa justificltion de l'amour entre amants et aimés .~ur cette distinction, l'Aphrodite céleste s'intéressalll plus à l'âme qu'au corps. EI'Yximaquc étend cette distinction il. la totalité des être~ vival1ts. 23. Selon Aristophane, ai):; est le dieu qui permet de revenil' à "unil'é primordiale, mais son récit reste au niveau du .~ensible. Pmu Sonate, illStl'uit ~UL' ce sujet par l )iotime, l'J'ô" est un oa(jltllV, un être intermédiaire qui permet l'ascension vers le Heau et le Bien.
24.193 a. 25, «( Toute disjollt:tiol1 ou t:onjonction excessives excluent son Î1uerventiol1 », écrit Luc Brisson à plUpOS d'n'tJs dans ce passage ( in modern idioms ), écrit-il en commentant sa traduction, Plato .' Symposium. Cambridge, Cambridge University Press, 1980), maintient son analyse dans un récent article: «( Whether we are hétel'Osexual or homosexual depends on which of the original three kinds (yÉJJTJ) we are 'from'. Thus, women who are from an original female-female are al ÉTaLPLCJTPWl (191 e) ) ((~ Two women ... » op. cit., p. 225). 37. D. M. Halperin, (~The Firsr Homosexuality? Response : Halperin on Brennan on Brooten », Bryn Mawr Classica! Review 97.12.03, repris sous le titre (~The First Homosexuality ? » dans How to Do the History ofHomosexuality, Chicago, University of Chicago Press. 2002, p. 48-80. 38. Remarquons en effet qu'Aristophane établit des distinctions à l'intérieur de la caté~ gorie des individus issus de l'être mâle: il y a un iTŒlofpaaTllt;' et un 14. Cf. E L. l.isi. ,( A alm;l tlo IHundo e a alma humana 110 T;l11ell. Apollt:lIl1entos p:lnl uma rei1Hel'pret;tI~::i(J dH pskologia plat6nÎca », l(vp"(}S 14 (2005), 57-69. lIli/des jJlalollicielU/es IV
INDMDUAL SOUL, WOIlLD SOUL AND THE FOIlM OF THE GOOD
111
case prior to the Forms, in the other to sensible bodies. As the passage of 36c4-5 shows, the idioms (( nature of the Sameness » and ({ nature of the Otherness » are actually the qualities of identity and difference that conrain the two kinds of entities; which make up the main mixture. The World Soul thererore appears as the combination of one indivisible and stable prindple with another, which changes and is divisible. Both are incorporeal. The fundamental characteristie of the product of the mixture of both elements is magnitude. As it is described, the World Soul is a line, which is curved in order ta form seven unequal drcles (36dl-6). If m)' analysis is correct, the substance which forms the World Soul Is made from elertlent5 that are ontologieally prior not only to body, but also to Forrns. If we now turn to rhe results of the analysis of the central books of the Republic, 1 believe it i5 clear that one of the components of the World Soul is essentially related to the Form of the Good and also to the Forms in general with whieh it shares at least one element. However, the World Sout 1s itself a mixture of this element with what is called ouata TrEpt TWV O\ùJlÙTWV; Yet the composition of the World Soul is only one aspect, since it also has an ordered rnovernent, whieh has been caused by the demi urge and whieh, according to the Statesman's myth, is preserved by his continuous intervention, since It falls into disorder when the demi urge deserts it. This movement, depicted as Q6VfJOlÇ (269dlf:), is what constirutes the virtue of the World Soul.
(b) Human soul Up until this point 1 have outlined the programme slœrched in the Republic at the cosmie plane. Timaeus' cosmologie account is the description of the union of mind with its opposed prlndple : chora, or necessity. In it, order is proportion and measure, which are the warranty for the immanence of mind and the transcendence of the demiurge. U5ually nous is identified with the demiurge, but Timaeus speaks also of the mind present in the world in the forffi of soul. However, the aim of the dialogue is not cosmology, but the description of the creation and incarnation of the human soul. Ir is clear that the central point of the myth is the bitrh of the soul in aIl areas, with the emphasis placed on the human soul, yet the theory of the human soul twice presented by the Pythagorean philosopher is, perhaps, one of the deal'est examples of the difIiculties the dialogue still presents. (i) The creation of the human soul in the first account (41d4-44d2) According to the letter of the Timaeus, there are six kinds of soul in the universe, four of which are immo;tal and two mortal : the World Soul, the star souts, the souls of the Infe1'Îor gods and human mind on one side and the thymos and the efithymêtikon on the other. Ir is indeed a system of surprising complexity. The creation of the World Sou! is described in detail (34blO-36d7), while the creation of the star and god souls are only mentioned (38e3-6). The first account of the creation of the human soul focuses, as is natural, on the creation of the noetic element, the divine origin of which is clearly stated, since it is composed with the l'est of the same substance that served for the making of the World Soul (~ld4-7 ; cf 4Ic6-dl). The na1'1'ative makes vety c1ear that the sou1 created by the 'demi urge has an, indeÉtudes platoniciennes IV
l'RANCISCO US1
112
pendent identity and rhat il is the only one that is under the Iaws of destillY (l'ÙpOl oi ElIHtpIIÉ'VOl; e3-4). Il further shows that the other gods have to create the Illortal parts ofhul11an beillgs. Even ifit is not explicit at this point oflhe aCcollnt, it is clear thar Timaeus uses the word psyche to designate the superiol' Idnd of sotd in
particulaJ' (41 c6-d l , and espedally 42d7 -e2, where there is an allusion to the 11101"talldllds of soulthat will appear in the third ,lCcoUllt of the en effet est une part de nous, et vers lui nous montons » (13,7-8). Linflexion éthique de l'Alcibiade se trouve par-là accentuée: il ne s'agit pas seulement de savoir ce qu'est l'homme, mais ce qu'il doit et peut devenir, l'Intellect _ en quoi son humanité s'excède:en même temps qu'elle s'accomplit - étant posé en lui comme une puissance23 , Mais de ce fait, le Traité 53 est aussi en accord avec le projet même de l'Alcibiade, qui faisait du rVW9l aavT6v un moyen pour l'ETTlI-lÉÀELU aŒuToD, de la connaissance par l'homme de sa forme ou de son essence, un préalable à son effective transformation. 1(
Connaissance de soi et pensée de soi: le Traité 49 et la voie du Charmide Le Traité 49 commence à peu de choses près là où s'arrête le Traité 53 : s'il il a pour objet prlllclpalia connaissance de SOI en 1 Intellect. D'emblée, il articule le problème soc:atique de la connai~sance de soi à celui, platonicien, de l'un et du multiple. MaiS pour le formuler, 11 emprunte à Sextus Empiricus. Pour Plotin, on l'a vu, le « Connais-toi toi-même» ne s'adresse qy'à des êtres multiples. Or Sextus démontre l'impossibilité pour un être composé, et en particulier pour l'intellect, de se connaître lui-même: ou bien il se connaîtra par lui-même tout entier mais en ce cas sa cOl:1naissance n'aura pas d'objet, ou h,ien il se connaîtra par une partie de lui-même qui. dès lors, sera exclue de cette connaissance24 • La réponse de Plotin va consistr~te .lui aussi du ~roblème de l~ con~aissance de soi en la dianoia,
23. Résonne dès lors non plus seulement la question de l'Alcibiade, « qu'estce que l'homme? l>, mais aussi celle du Gorgias: « qu'est-ce que doit être un homme?» (487 el. 24. Voir Adversus Mathematicos VII, 310-312: «Si l'intellect se saisit luimême, soit il sera tout entier à se connaître lui-même, soit non pas tout entier, mais en utilisant pour ,cela une partie de lui-même. Mais il ne saurait être tout entier à se saisir lui-même. Car s'il est tout entier à se saisir lui-même il sera tout ac:e, de et qui et, est tout entier qui saisit, 1 o~}et saiSi se rédutra a rien; or il est tout a fait absurde qu'il y ait d'un côté le sUJet qui connait sans qu'i! y ait de l'autre l'objet dont il y a saisie. Et bien sûr l'intellect ne peut pas non plus utiliser pour cela une partie. Car la partie, elle, com~ m~nt se sa~si!a-t-elle elle-même? Car si c'est tout entière, l'objet cherché se réduira à fien et SI c est par une partie, cette partie, à son tour, comment se connaÎtra-teUe elle-même? Et ainsi de suite à l'infini ». Voir 49 (V, 3) 1,5-12; 5, 1-15. Ce texte, et la .réponse de Plotin, sont analysés par RT. Wallis dans« Sceptidsm and Neoplatomsm », Aufitieg und Niedergang der romischen \VeIt: Geschichte und Kultur Roms in Siegel der neueren Forschung II, 36.2., 1987, col. 911-954. Sur la présence, ,chez ~lotin, d'« une stratégie consistant à exploiter la critique sceptique de façon a la faue paradoxalement fonctionner comme fondement d'une philosophie
~nti~r
saisi~ ,su~et
Études platoniciennes IV
s~sit
pu~squ'il
suj~t
(,WENAClLh
172
ter à montrer que la connaissance de soi est, non seulement possible, mais nécessaire pour ces êtres diversement multiples que sont "âme ct l'Intellect, mais aussi qu'elle n'est en eux qu'un substitut à la simplicité ~ de sorte que, loin d'être seul à avoir accès
à la COll1laissance de soi, le simple est à l'inverse ce qui
n'ell a pas besoin,
D'emblée, donc, la perspective du 71Y1;té 49 est à la fois épistémiquc et ontologique: il s'agit d'appliquer le gllôthi Mulon aux différents degrés du réd pour en étudier les variations et les modalités. Mais le problème du CïJdJ'rnitle affleure lui aussi dès les premières lignes. Lapodc
de Sextus soulignait déjà que la connaissance de soi pellt être vide, sans objet; peu après, Plotin demande encore, à propos de l'ltttellect : Se COIlIl