Les énergies renouvelables 9782759826919

Dans le monde d’aujourd’hui, l’énergie est nécessaire pour garantir un bon niveau de vie. Il est donc essentiel de dispo

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French Pages 172 [174] Year 2022

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Table of contents :
Sommaire
Remerciements
1. Qu’est-ce qu’on entend par les énergies « renouvelables » ?
2. Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?
3. La biomasse, la chaleur solaire et l’énergie hydraulique
4 L’énergie éolienne
5 Le photovoltaïque solaire
6 Autres technologies bas‑carbone
7 L’électricité renouvelable et le stockage de l’énergie
8 La chaleur décarbonée et les transports
9 La transition vers les « renouvelables »
Lectures complémentaires
Index
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Les énergies renouvelables
 9782759826919

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Les énergies renouvelables

Les énergies renouvelables Nick Jelley

Traduit de l’anglais par Alan Rodney

ChronoSciences Collection destinée à un large public qui invite le lecteur à découvrir de façon très complète mais de manière abordable un sujet ou une thématique précise. « Dans la même collection » L’Intelligence artificielle, Margaret A. Boden, mai 2021 La Théorie quantique, John Polkinghorne, mai 2021 Les Marées, David George Bowers et Emyr Martyn Roberts, juin 2021 L’Anthropocène, Erle C. Ellis, octobre 2021 L’Odorat, Matthew Cobb, novembre 2021 Le Changement climatique, mars 2022 Renewable energy: a very short introduction, first edition was originally published in English in 2020. This translation is published by arrangement with Oxford University Press. [Les Énergies renouvelables a été initialement publiée en anglais en 2020. Cette traduction est publiée avec l’autorisation d’Oxford University Press.] © Nick Jelley 2020 © Pour la traduction française, EDP sciences, 2022. Composition et mise en page : Desk (www.desk53.com.fr) Imprimé en France ISBN : 978-2-7598-2690-2 Ebook : 978-2-7598-2691-9

Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective », et d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.

  Sommaire Remerciements........................................................................................................

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1. Qu’est-ce qu’on entend par les énergies « renouvelables » ?..

9

2. Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?.........................

27

3. La biomasse, la chaleur solaire et l’énergie hydraulique............

45

4. L’énergie éolienne............................................................................................

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5. Le photovoltaïque solaire............................................................................

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6. Autres technologies bas‑carbone........................................................... 101 7. L’électricité renouvelable et le stockage de l’énergie................... 119 8. La chaleur décarbonée et les transports............................................ 137 9. La transition vers les « renouvelables »............................................... 151 Lectures complémentaires................................................................................. 167 Index............................................................................................................................... 169

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  Remerciements Je remercie infiniment les personnes suivantes pour les discussions que nous avons eues sur les énergies renouvelables : John Andrews, Conyers Davis et leurs collègues de l’Institut Schwarzenegger de Los Angeles, Nick Eyre, Chris Goodall, Mike Mason Goodall, Mike Mason, Moritz Riede, Gerard van Bussel, et Simon Watson. Je tiens également à remercier Latha Menon pour ses conseils, et tout les membres du personnel d’Oxford University Press qui ont aidé à préparer le manuscrit pour la publication. Mais par-dessus tout, j’aimerais remercier ici ma femme Jane, dont le soutien et les commentaires ont été inestimables, ainsi que John, Tessa et Piernicola pour leurs encouragements.

7

1 Qu’est-ce qu’on entend par les énergies « renouvelables » ? Nous consommons de l’énergie tout le temps dans notre vie quotidienne : lorsque nous passons un appel sur notre téléphone portable, faisons bouillir de l’eau ou conduisons une voiture. L’énergie est vitale pour une bonne qualité de vie : elle permet de se chauffer, de produire de la nourriture et d’alimenter les technologies. Au cours des 200 dernières années, nous nous sommes de plus en plus appuyés sur les combustibles fossiles. Or la combustion du charbon, du pétrole et du gaz naturel pour fournir de l’énergie rejette d’énormes quantités de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère et produit également des polluants nocifs pour notre santé et pour l’environnement. Il serait facile de continuer comme par le passé, et les gisements de combustibles fossiles sont suffisants pour durer encore plusieurs centaines d’années. Mais le niveau de dioxyde de carbone dans l’atmo­sphère – qui a déjà commencé à perturber sérieusement notre climat – provoquerait un changement climatique dangereux avant la fin de ce siècle en raison du réchauffement de la planète, et mettrait en danger plusieurs millions de vies. Et à l’heure actuelle, nous constatons que la pollution atmosphérique provoque déjà sept millions de décès prématurés chaque année. L’ÉNERGIE RENOUVELABLE

Heureusement, une partie de l’énergie que nous utilisons n’a pas ces conséquences néfastes, en particulier l’énergie générée par le 9

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solaire, l’éolien et l’hydroélectricité. Dans de nombreuses régions du monde, les générateurs solaires et éoliens sont en passe de devenir la source d’énergie la moins chère, et une alternative viable aux combustibles fossiles. De plus, ces sources d’énergie sont renouvelables, car elles se reconstituent naturellement en quelques jours ou décennies. Lorsque l’énergie produite est abordable et que sa production ne nuit pas à l’environnement ou aux personnes (comme cela peut se produire, par exemple, lorsque des forêts sont abattues pour des plantations de bioénergie), l’approvisionnement en énergie renouvelable est durable. Cette énergie durable pourrait offrir de nombreux avantages immédiats. Elle pourrait réduire la pollution atmosphérique qui sévit aujourd’hui dans de nombreuses villes, fournir une énergie moins chère et de nombreux nouveaux emplois, et assurer la sécurité énergétique de millions de personnes à un coût abordable. Il y a seulement quelques années, il aurait été très difficile de renoncer à notre dépendance à l’égard des combustibles fossiles pour lutter contre le réchauffement de la planète, car ils sont bien ancrés dans notre société et toute alternative se serait avérée très coûteuse. De plus, comme le changement climatique semblait n’être qu’une menace progressive et lointaine, qui ne suscitait pas de réaction émotionnelle et d’action immédiate, de nombreux individus et gouvernements étaient réticents à agir. Mais aujourd’hui, la menace est beaucoup plus proche et il est devenu essentiel de passer des combustibles fossiles aux énergies renouvelables. Le Soleil est notre principale source d’énergie renouvelable. Son rayonnement fournit de la lumière pour s’éclairer, de la chaleur pour se chauffer et cuisiner, et peut également être converti en électricité par des cellules photovoltaïques. Les variations de son absorption à la surface de la Terre génèrent des différences de températures de surface qui provoquent des vents, lesquels peuvent être utilisés pour actionner des éoliennes. Les rivières sont notre source d’énergie hydroélectrique et font partie du cycle naturel dans lequel les précipitations provenant  10 

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des nuages s’écoulent vers la mer via les rivières, et l’évaporation de l’eau dans l’atmosphère par le réchauffement solaire donne naissance aux nuages. Les plantes tirent leur énergie de la photosynthèse, au cours de laquelle le dioxyde de carbone et l’eau sont convertis en hydrates de carbone en présence de la lumière du soleil, et sont utilisés pour fournir de la nourriture, ainsi que des combustibles pour le chauffage et les moteurs. Les ressources éoliennes et solaires ont chacune le potentiel de fournir toute l’énergie dont le monde a besoin, et cela plusieurs fois. LES SOURCES ANCIENNES D’ÉNERGIE

Jusqu’au xviiie siècle, la quasi-totalité des sources d’énergie provenaient de sources renouvelables. Les plantes et les animaux fournissaient de la nourriture et des matériaux tels que le bois, les excréments, l’huile et la graisse pour cuisiner, se chauffer, s’éclairer et s’abriter ; c’est ce qu’on appelle aujourd’hui la biomasse traditionnelle. À l’Âge du bronze, le charbon de bois, produit par la combustion du bois dans une atmosphère pauvre en oxygène et qui brûle à une température plus élevée, permet d’extraire les métaux des minerais. Les animaux ont facilité de nombreuses tâches, les chevaux et les bœufs fournissant l’énergie de trait et le transport pendant de nombreux siècles. La principale utilisation de l’énergie solaire, outre son importance pour la culture des aliments, était le chauffage et l’éclairage des habitations. Les Grecs et les Chinois de l’Antiquité ont construit des maisons dont les pièces principales étaient orientées vers le sud pour capter le soleil, et les Romains ont également ajouté des fenêtres en verre, qui permettaient de conserver la chaleur. Dans les climats chauds et secs, les maisons avaient tendance à être construites avec des murs très épais pour empêcher la chaleur de pénétrer pendant la journée et fournir de la chaleur la nuit. La chaleur du soleil était également utilisée pour sécher les matériaux, comme la cuisson au four de l’argile pour les briques, et pour conserver les aliments.  11 

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On utilisait un peu de charbon, de tourbe et de pétrole brut pour se chauffer et s’éclairer, mais leur contribution était faible et tendait à se limiter aux régions où ce combustible était facile à obtenir. Dans quelques endroits, l’énergie géothermique était disponible sous forme de sources chaudes. Cette source d’énergie est renouvelable car elle provient de la chaleur dégagée par l’intérieur de la Terre. Les Romains utilisaient ces sources dans certains de leurs bains, comme on peut le voir à Pompéi. L’ÉNERGIE ÉOLIENNE

Il existe des archives de bateaux à voile voguant sur le Nil il y a 5 000 ans. Les premiers voiliers avaient un seul mât avec une voile carrée, et étaient propulsés par leur voile lorsqu’il y avait un vent arrière. Ces navires pouvaient également se déplacer de manière oblique face au vent en orientant leur voile de manière à attraper le vent. La voile se courbait et le vent créait une différence de pression qui poussait la voile dans une direction perpendiculaire à celle du vent, tout comme l’air qui s’écoule sur une aile d’avion donne de la portance. Les premiers galions méditerranéens, comme la trirème romaine ou les navires vikings, combinaient rames et voiles, mais la plupart des navires marchands étaient des voiliers. Les voiles triangulaires, appelées voiles latines – une alternative plus simple et moins chère aux voiles des gréements carrés – se sont imposées au ve siècle et permettent aux navires de virer de bord face au vent (cf. figure 1).

Fig. 1    Voiles latines.

 12 

  Qu’est-ce qu’on entend par les énergies «  renouvelables » ?  

Les navires à voile ont ouvert le commerce maritime dans le monde entier et ont évolué vers des navires à plusieurs mâts, équipés de voiles carrées et de voiles latines, qui pouvaient parcourir de grandes distances à une vitesse respectable. Les « clippers » transportant du thé au milieu du xixe siècle pouvaient se déplacer à plus de 15 nœuds (28 km/h) et avaient une vitesse moyenne d’environ 7,5 nœuds, similaire à celle des yachts de course modernes. Le transport de marchandises par voie maritime était généralement beaucoup moins cher et plus facile que par voie terrestre, car les routes étaient souvent peu praticables. La première utilisation connue de l’énergie éolienne sur terre remonte au xe siècle en Perse, où des moulins à vent à axe vertical étaient utilisés pour pomper l’eau et pour moudre le grain. Des moulins à vent similaires étaient utilisés en Chine, où ils sont peut-être apparus en premier. Ces machines étaient moins efficaces que les moulins à vent à axe horizontal qui sont apparus en Angleterre, en France et au Pays-Bas vers le xiie siècle. Ces moulins à vent se sont rapidement répandus vers l’est de l’Europe au cours du xiiie siècle, souvent, au départ, dans des endroits sans accès à des moulins à eau. Ils étaient principalement utilisés pour moudre le grain, pomper l’eau et scier le bois. Les premiers moulins étaient montés sur des poteaux et pouvaient être tournés manuellement pour faire face au vent. Dans les moulins plus grands et plus tardifs, introduits vers le xive siècle, seul le sommet avec les voiles et l’arbre à vent pouvait pivoter. L’utilisation de grands moulins à vent a atteint son apogée au xixe siècle, époque à laquelle les moteurs à vapeur au charbon, plus compacts et disponibles sur demande, ont pris le relais. LA PUISSANCE DE L’EAU

Les roues à aubes ont été développées en Égypte, en Chine et en Grèce il y a plus de 2 000 ans, dans les deux siècles précédant le  13 

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premier millénaire. Elles ont d’abord été utilisées pour l’irrigation et l’approvisionnement en eau potable puis, au début du premier millénaire, elles ont été modifiées pour actionner des machines telles que des meules et des scies. Une usine romaine équipée de seize roues à eau pour moudre le grain fonctionnait en Gaule au iie siècle de notre ère, et les moulins à eau étaient répandus dans les empires chinois et romain au ve siècle. Leur utilisation à des fins industrielles s’est répandue dans les pays musulmans au xe siècle et en Europe au xiie siècle, où les moines cisterciens, par exemple, s’en servaient pour forger des métaux et pour fabriquer de l’huile d’olive. Dans les roues à aubes utilisées pour élever l’eau, l’eau coulait sous une roue montée verticalement. Des seaux fixés à la jante de la roue étaient remplis et vidés au fur et à mesure que la roue tournait. On pense que certaines roues arabes pouvaient soulever l’eau de 30 m. On pouvait obtenir plus de puissance en faisant couler l’eau sur le sommet d’une roue, remplissant les compartiments fixés à sa jante. Le mouvement et le poids de l’eau faisaient tourner la roue. Les roues hydrauliques horizontales, avec un axe vertical et de l’eau se déversant d’un côté de la roue, étaient plus simples à construire et convenaient bien aux cours d’eau rapides. Le mouvement des marées était également utilisé à petite échelle à l’époque médiévale pour alimenter les moulins à eau sur la côte. L’énergie marémotrice est également renouvelable, car les pertes dues au mouvement des marées et à l’extraction de l’énergie des marées n’ont qu’un effet négligeable sur le mouvement relatif de la Lune, de la Terre et du Soleil. La révolution industrielle a d’abord été alimentée par l’eau. En 1771, Richard Arkwright a utilisé des roues hydrauliques pour actionner ses métiers à filer le coton dans la première usine textile, dans le Derbyshire, en Angleterre. Cette technologie a été considérablement améliorée en 1827 par l’ingénieur français Benoît Fourneyron qui a enfermé le flux d’eau dans un large tube cylindrique et l’a fait passer  14 

  Qu’est-ce qu’on entend par les énergies «  renouvelables » ?  

devant des lames fixes incurvées. Celles-ci dirigeaient l’eau horizontalement sur toutes les pales mobiles qui étaient fixées à un axe vertical (cf. figure 2). La turbine était compacte et permettait d’augmenter considérablement le débit et la pression de l’eau (et donc la puissance générée). Elle était également 80 % plus efficace que la roue à aube. Une machine en fonctionnement à Fraisans (France) en 1832 produisait environ 37 kW de puissance avec une petite chute d’eau (qui indique la pression) de 1,4 m et une turbine de 2,9 m de diamètre. Ce fut une avancée majeure qui annonça les turbines hydrauliques modernes. Alors que les moteurs à vapeur alimentés au charbon ont remplacé l’énergie hydraulique pour la filature du coton en Angleterre, les turbines hydrauliques sont restées importantes en France et aux États-Unis au cours du xixe siècle. À la fin de ce siècle, la production d’électricité à l’aide d’énormes turbines hydrauliques a été développée. La première grande centrale hydroélectrique aux États-Unis, construite par Nikola Tesla et George Westinghouse, en 1895, sur les chutes du Niagara, ont utilisé trois turbines Fourneyron capables de fournir chacune 3 700 kW.

(a)

(b)

Axe

Pales fixes Tube M

F F

Axe

M Pales mobiles

Fig. 2    (a) Schéma d’une turbine Fourneyron : les pales fixes (F) dirigent le flux d’eau à travers des fentes dans le tube sur les pales mobiles (M), attachées à un axe vertical. (b) Section horizontale à travers le logement de la roue de la turbine.

 15 

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LE DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES FOSSILES

En Grande-Bretagne, l’utilisation du charbon n’a cessé de croître après le xiie siècle en raison de la pénurie de combustible sous forme de bois et de charbon de bois. La pollution due à la combustion du charbon, un problème que nous connaissons bien aujourd’hui, a conduit à des tentatives infructueuses d’interdire son utilisation à Londres à partir du xiiie siècle. L’utilisation du charbon a réellement pris son essor lors de la révolution industrielle du xviiie siècle, le charbon remplaçant le charbon de bois dans la fonte des minerais de fer ; la demande a encore été alimentée par le développement de puissantes machines à vapeur par Watt et dans la seconde moitié du xviiie siècle. La révolution industrielle s’est étendue à l’Europe, à l’Amérique du Nord, puis au monde entier, et le commerce s’est développé massivement avec l’introduction de navires à vapeur alimentés au charbon et de trains à vapeur, ce qui a considérablement augmenté la demande mondiale de charbon. Le pétrole brut était utilisé en quantité relativement faible depuis des millénaires en Chine, en Arabie, en Asie centrale et ailleurs. L’exploration du pétrole pour les lampes et pour la lubrification était déjà en cours en Amérique du Nord et en Europe au milieu du xixe siècle. Le début de l’industrie pétrolière moderne est généralement attribué à Edwin Drake qui a conçu une méthode pour éviter l’effondrement des côtés d’un trou foré dans des graviers en installant un tube jusqu’à la roche-mère. En 1859, en Pennsylvanie, il a trouvé du pétrole à 21 m de profondeur pour un rendement de 20 à 40 barils par jour. Malheureusement pour lui, il n’a pas fait breveter son invention et n’a pas gagné d’argent. La demande en pétrole a augmenté avec le développement des voitures à moteur à combustion interne à la fin du xixe siècle. Les voitures et les camions sont désormais les principaux consommateurs de pétrole, raffiné en essence et en diesel. Le gaz a été produit pour la première fois à des fins commerciales par la gazéification du charbon au début du xixe siècle, et servait  16 

  Qu’est-ce qu’on entend par les énergies «  renouvelables » ?  

initialement à l’éclairage des rues. Avec l’introduction de l’éclairage électrique vers la fin du xixe, le gaz de houille a fini par être utilisé uniquement pour la cuisine et le chauffage. Le gaz naturel provenant des gisements de pétrole a complètement remplacé le gaz de houille à la fin du xxe siècle. Aujourd’hui, le gaz naturel est de plus en plus utilisé dans les centrales électriques pour produire de l’électricité, à la place du charbon plus polluant. LE RETOUR DES ÉNERGIES RENOUVELABLES

À l’exception de l’hydroélectricité, qui a connu une croissance constante au cours du xxe siècle et qui fournit aujourd’hui près d’un sixième de la demande mondiale d’électricité, les énergies renouvelables ont été une ressource négligée pour la production d’électricité pendant la majeure partie de cette période, car elles n’étaient pas compétitives sur le plan économique. Mais les crises des prix du pétrole des années 1970 ont incité les gouvernements occidentaux à parrainer des programmes de recherche sur diverses technologies d’énergie renouvelable, dans le but de réduire leur dépendance au pétrole. L’énergie éolienne, tirant parti des connaissances de l’industrie aéronautique en matière de conception de pales, a été la première technologie à devenir commercialement viable, bénéficiant de faibles coûts d’inves­ tissement et d’allégements fiscaux. Cependant, le développement de l’énergie éolienne dans les années 1970 et 1980 a fluctué en fonction du prix du pétrole. Malgré cela, certains pays ayant accès à des vents forts et préoccupés par la disponibilité d’une énergie abordable (pour leur sécurité énergétique) ont continué à la soutenir. La prise de conscience progressive des dangers du réchauffement climatique a aussi favorisé son développement. Aujourd’hui, le coût de l’énergie éolienne est compétitif par rapport à celui des combustibles fossiles dans de nombreuses régions. L’énergie marémotrice a également suscité beaucoup d’intérêt dans les années 1970, mais il a été rapidement reconnu que les coûts  17 

  Les énergies renouvelables  

d’investissement étaient élevés et que la plupart des dispositifs étaient incapables de résister à de violentes tempêtes en mer. Néanmoins, quelques modèles sont encore en cours de développement, notamment ceux qui sont immergés et placés au fond des mers. L’énergie marémotrice n’est économiquement viable que dans les régions où l’amplitude des marées est importante ou lorsque le flux moyen des marées est suffisamment rapide, quelques zones s’y prêtent, les meilleures étant au large des côtes d’Amérique du Nord et autour du Royaume-Uni. Les cellules photovoltaïques ont mis beaucoup plus de temps à s’imposer sur le marché de l’énergie. L’effet photovoltaïque génère une tension lorsque certains matériaux sont éclairés. Ce phénomène a été observé pour la première fois en 1839 par Edmond Becquerel. Mais ce n’est que dans les années 1950 que les Laboratoires Bell ont, pour la première fois, développé des cellules photovoltaïques en silicium, avec des rendements d’environ 6 %. Cependant, leur coût élevé les limitait à des applications de niche dans les satellites et le programme spatial. Les crises pétrolières des années 1970 ont stimulé l’intérêt pour les cellules photovoltaïques. Au cours des dernières décennies, les méthodes de production de masse ont permis de réduire considérablement le coût des cellules solaires. Nous en sommes maintenant au point où l’électricité produite par les fermes solaires est commercialement compétitive dans de nombreuses régions du monde. Dans un autre domaine, la croissance de l’industrie des biocarburants au cours de la seconde moitié du xxe siècle a ralenti en raison des préoccupations liées aux émissions de dioxyde de carbone associées au défrichement des terres et aux conflits qu’elle engendre avec la production alimentaire. Cependant, la biomasse est une source d’énergie importante dans les pays en développement. Et tant que les émissions liées à la plantation et à la récolte sont négligeables, elle reste neutre en carbone, dans la mesure où le dioxyde de carbone produit par la combustion de la matière est réabsorbé par les nouvelles cultures.  18 

  Qu’est-ce qu’on entend par les énergies «  renouvelables » ?  

LES POLITIQUES EN FAVEUR DES ÉNERGIES RENOUVELABLES

Les sources d’énergie renouvelable, autres que l’hydroélectricité, étaient initialement plus coûteux que les centrales à combustible fossile et avaient besoin de subventions pour être compétitifs, l’un des mécanismes les plus efficaces était lié aux tarifs de rachat. Il s’agit d’un prix garanti que recevra un producteur d’électricité renouvelable ; le prix est fixé de manière à ce qu’un bénéfice raisonnable puisse être réalisé, et la période à long terme du tarif réduit le risque pour les investisseurs. Le coût de production supplémentaire par rapport à celui de la production à partir de combustibles fossiles est généralement partagé par tous les consommateurs d’électricité de la province ou du pays. L’Allemagne, le Danemark, l’Espagne et les États-Unis ont été les premiers à créer des marchés pour les énergies renouvelables, ce qui a permis des avancées technologiques et des économies d’échelle. Mais la fabrication et l’installation des énergies renouvelables sont désormais dominées par la Chine. L’augmentation mondiale de la production a eu pour effet de rapprocher le coût de l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables de celui des combustibles fossiles, et les ventes aux enchères sont désormais un moyen de plus en plus populaire de promouvoir le déploiement des énergies renouvelables. Dans ces enchères, les sociétés productrices soumettent une offre avec un prix par kilowattheure (kWh) pour une certaine quantité d’électricité. Les ventes aux enchères concurrentielles font apparaître le prix réel de la production, souvent difficile à déterminer pour un régulateur, et les revenus de l’entreprise retenue sont garantis pendant une certaine période, ce qui est bon pour les investissements. Ces enchères ont permis de réduire considérablement les coûts au cours des dernières années. L’IMPORTANCE DE L’ÉNERGIE POUR LA SOCIÉTÉ

L’énergie fournie par les combustibles fossiles a permis à la révolution industrielle de se développer d’abord en Grande-Bretagne, puis  19 

  Les énergies renouvelables  

dans le monde entier. Ce qui a été à l’origine d’une si grande transformation de la société, c’est la puissance flexible et importante (disponible à la demande) que pouvaient produire les moteurs à charbon au départ, puis les moteurs à combustion interne. La mesure standard de la puissance est le kilowatt (kW), qui correspond à peu près à la puissance qu’un seul cheval peut produire de manière constante sur une longue période. Elle correspond au soulèvement d’un poids de 50 kg à une vitesse de 2 m/s. Pour augmenter la vitesse à 4 m/s, il faudrait 2 kW ; ainsi, l’utilisation d’une plus grande puissance permet d’accomplir des tâches plus rapidement. Les premières roues à eau de quelques mètres de diamètre pouvaient produire quelques kilowatts d’énergie, tout comme les moulins à vent hollandais du xviie siècle, mais la mise au point de moteurs à vapeur efficaces et puissants par James Watt et Matthew Boulton à la fin du xviiie siècle a ouvert la voie à l’énergie à vapeur. Les premiers moteurs produisaient environ 5 kW, mais l’utilisation de la vapeur à haute pression, introduite par Richard Trevithick en 1805 dans le premier train à vapeur, a permis de produire des moteurs beaucoup plus puissants et plus légers. Des moteurs d’une puissance supérieure à 50 kW étaient disponibles en 1850 et les trains pouvaient alors rouler à 80 km/h. Les trains et les bateaux à vapeur ont ouvert le commerce à travers le monde. Les moteurs à vapeur ont également permis aux usines et aux villes de se développer dans n’importe quelle région sans se soucier de la disponibilité de l’énergie hydraulique, et leur utilisation s’est développée au milieu du xixe siècle. Au tournant du siècle, l’électricité et le moteur à combustion interne sont devenus des éléments importants des sociétés industrialisées. L’accès considérablement accru à l’énergie a stimulé la production manufacturière et le commerce et, au fil du temps, a entraîné une hausse générale du niveau de vie, les salaires augmentant et faisant plus que doubler au Royaume-Uni entre 1840 et 1910. Les améliorations technologiques ont permis d’accroître la productivité, mais cette  20 

  Qu’est-ce qu’on entend par les énergies «  renouvelables » ?  

évolution rapide a d’abord causé des difficultés pour les nombreuses personnes obligées de travailler de longues heures dans des conditions difficiles et parfois dangereuses. En Angleterre, l’espérance de vie n’a commencé à augmenter qu’après 1860, lorsque des mesures de santé publique ont été introduites. Cependant, à la fin du xixe siècle, la révolution industrielle, alimentée par les combustibles fossiles, a permis d’améliorer considérablement les conditions de vie dans de nombreux pays : chauffage, éclairage et machines permettant d’économiser du travail dans les maisons, meilleurs équipements publics et transports beaucoup plus rapides, entre autres. L’accès à l’énergie est très important pour une bonne qualité de vie. Une mesure simple du niveau de vie dans un pays est l’indice de développement humain (cf. figure 3) qui combine des indicateurs du niveau d’éducation, de l’espérance de vie et du revenu. Bien qu’il ne comprenne aucune mesure de l’inégalité, il souligne que le développement ne se résume pas à la croissance économique. On constate une bonne corrélation entre les faibles valeurs de l’indice de développement humain d’un pays et sa consommation d’énergie. Cependant, on observe un écart important dans la consommation d’énergie par personne entre les différents pays hautement développés. Bien que cela reflète en partie les différences de climat, il existe une marge de manœuvre considérable pour la réduction de la consommation en améliorant l’efficacité et en modifiant le mode de vie. Les pays moins développés chercheront à améliorer leur niveau de vie en augmentant leur consommation moyenne d’énergie. Un peu moins d’un milliard de personnes (13 % de la population mondiale) étaient encore privées d’électricité en 2018. Or même une petite quantité d’électricité par personne peut permettre l’accès aux téléphones portables, aux ordinateurs, à l’Internet, à l’éclairage, à la télévision et à la réfrigération. Ainsi, le coût de l’énergie est un facteur important dans l’économie d’une société, c’est pourquoi, pendant de nombreuses décennies, les combustibles fossiles ont été le choix privilégié des pays.  21 

  Les énergies renouvelables  

1

Index de développement (HDI)

0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3

Suisse Australie États-Unis Allemagne Royaume-Uni Suède Espagne Canada France Italie Japon Corée du Sud Finlande Arabie saoudite Pologne Turquie Brésil Venezula Russie Égypte Mexique Chine Indonésie Inde Angola Nigeria Zimbabwe Soudan

0

25

50

75

100 125 150 175 200

225 250 275

Consommation (kWh/jour/personne)

Fig. 3     La dépendance de l’index de développement humain (HDI) par rapport à la consommation moyenne d’énergie en 2013. L’utilisation courante de l’énergie est la consommation électrique moyenne d’un pays, qui concerne principalement les bâtiments, l’industrie et les transports, divisée par sa population ; par exemple, une moyenne de 2 kW par personne équivaut à une utilisation de l’énergie de 48 kWh (kilowatt-heure) par jour et par personne.

CONSOMMATION MONDIALE D’ÉNERGIE

La demande mondiale annuelle d’énergie représente un nombre énorme de kWh, et peut être plus facilement appréhendée en termes de térawatt-heures (TWh), où un TWh est égal à 1 000 millions (un milliard) de kWh. En 1800, la demande mondiale était d’environ 6 000 TWh pour environ 1 milliard de personnes, et était presque entièrement satisfaite par la biomasse traditionnelle. En 2017, elle était vingt-cinq fois plus élevée (155 000 TWh) pour 7,6 milliards de personnes. La figure 4 montre les pourcentages de la consommation totale d’énergie dans le monde en 2017 issue des principales sources d’énergie, dont près de 80 % étaient des combustibles fossiles. Les autres énergies  22 

  Qu’est-ce qu’on entend par les énergies «  renouvelables » ?  

renouvelables comprennent l’énergie éolienne, solaire et géothermique, la croissance la plus rapide étant observée dans les parcs éoliens et solaires. La bioénergie est principalement l’énergie produite à partir de la biomasse traditionnelle. 6,1

4

3,2 30,8

10

Pétrole Charbon Gaz Bioénergie Hydraulique Nucléaire

21 24,9

Autres énergies renouvelables

Fig. 4     Consommation totale d’énergie en 2017 montrant la contribution en pourcentage fournie par les différentes sources.

Environ un tiers de la consommation totale d’énergie est utilisé pour la conversion des combustibles fossiles en électricité et en carburants raffinés. Le reste est appelé demande énergétique finale et correspond à l’énergie consommée par les utilisateurs : environ 100 000 TWh par an. Environ 10 % de cette énergie est utilisée sous forme de chaleur à partir de la biomasse traditionnelle dans les pays en développement, 22 % sous forme d’électricité, 38 % sous forme de chaleur principalement à partir de combustibles fossiles, et 30 % dans les transports. La chaleur et l’électricité sont principalement utilisées dans l’industrie et les bâtiments. L’essence et le diesel fournissent la quasi-totalité du carburant utilisé dans les transports. Nous constatons que la fourniture de chaleur est tout aussi importante que celle d’électricité. Les deux peuvent être mesurées en kWh, mais si l’électricité peut être entièrement transformée en chaleur, comme dans un four électrique, seule une fraction de l’énergie sous  23 

  Les énergies renouvelables  

forme de chaleur peut être convertie en électricité, car une partie est nécessairement perdue dans l’environnement. Dans une centrale thermique à vapeur, l’énergie chimique contenue dans un combustible fossile est transformée en énergie thermique lors de la combustion du combustible. Cette énergie chauffe l’eau pour générer de la vapeur, qui se répand dans les aubes de la turbine et fait tourner un générateur électrique. Seule une partie de la chaleur est transformée en électricité ; le reste de la chaleur est dissipé dans l’environnement sous forme de chaleur résiduelle lorsque la vapeur est condensée, ce qui boucle le cycle. La fraction convertie est augmentée en élevant la température de la vapeur à haute pression, mais cette augmentation est limitée par la résistance des tubes de la chaudière à haute température. Le pourcentage typique de chaleur convertie en électricité dans une centrale thermique à vapeur moderne est d’environ 40 %. Dans une centrale à turbine à gaz à cycle combiné (TGCC), qui fonctionne à une température plus élevée, ce pourcentage peut atteindre 60 %. De même, seule une fraction de la chaleur produite dans un moteur à combustion interne peut être transformée en énergie de mouvement (énergie cinétique) d’un véhicule ; le rendement moyen typique est de 25 % pour une voiture à essence et de 30 % pour une voiture diesel, tandis que pour les camions et les bus diesel, le rendement peut être d’environ 40 %. Les moteurs électriques, en revanche, ont un rendement d’environ 90 %, de sorte que l’électrification des transports réduirait considérablement la consommation d’énergie. C’est un exemple de la synergie entre l’amélioration de l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, ce qui contribuera à fournir l’énergie dont le monde a besoin. La ressource renouvelable qu’est l’hydroélectricité a contribué à initier la croissance des réseaux électriques à la fin du xixe siècle et, en 2018, elle a assuré 16 % de la production mondiale d’électricité. Les investissements dans les autres énergies renouvelables – éolienne, solaire, géothermique et bioénergétique – sont apparus beaucoup  24 

  Qu’est-ce qu’on entend par les énergies «  renouvelables » ?  

plus tard, au cours des dernières décennies du xxe siècle. Au début, la croissance a été lente, car les coûts de ces énergies renouvelables n’étaient pas compétitifs et des subventions étaient nécessaires. Mais à mesure que la production a augmenté, les coûts ont baissé et leur contribution a commencé à augmenter. Le pourcentage de la production d’électricité à partir de ces autres énergies renouvelables a maintenant atteint 9,7 % en 2018, contre 3,5 % en 2010, et, en incluant l’hydroélectricité, la contribution totale des énergies renouvelables est de 26 %. Mais en pourcentage de l’énergie globale consommée par les utilisateurs, les énergies renouvelables ne fournissent que 18 %, avec environ 10 % issus de la biomasse traditionnelle. Leur part devrait toutefois augmenter considérablement au cours des prochaines décennies, car les énergies solaire et éolienne deviennent moins chères que les combustibles fossiles dans de nombreux pays. Il a fallu beaucoup de temps pour que le monde réalise que les énergies renouvelables doivent désormais être la principale source d’énergie.

 25 

2 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ? Nous dépendons des combustibles fossiles depuis plus de deux siècles, mais ce n’est qu’au cours des trente dernières années environ que l’on a vraiment commencé à prendre conscience des dangers liés à la combustion des combustibles fossiles. La plupart des pays admettent aujourd’hui que nous devons remplacer les combustibles fossiles, mais il est très difficile de le faire, car ils sont si pratiques, largement disponibles et, jusqu’à récemment, généralement la source d’énergie la moins chère. Le charbon et le gaz naturel sont largement utilisés pour le chauffage dans les centrales électriques, les industries et les habitations ; le pétrole et ses dérivés sont des sources d’énergie compactes, qui conviennent bien pour faire fonctionner les voitures, les camions, les bateaux et les avions. De plus, l’industrie et l’infrastructure des combustibles fossiles étant bien établies, il existe de puissants intérêts particuliers à maintenir notre dépendance à leur égard. Mais l’utilisation des combustibles fossiles provoque le réchauffement de la planète et le changement climatique. Cette situation suscite aujourd’hui une inquiétude généralisée, ainsi qu’une prise de conscience croissante des dommages causés par la pollution atmosphérique due à la combustion du charbon et aux moteurs à combustion interne des voitures et des camions. Ces menaces entraînent un abandon des combustibles fossiles au profit des énergies renouvelables, qui s’accélère avec la prise de conscience de l’intensité et de la fréquence accrues des phénomènes météorologiques extrêmes observés ces dernières années. Cette transition est également favorisée  27 

  Les énergies renouvelables  

par la baisse du prix de l’énergie propre issue des énergies renouvelables. Mais pourquoi a-t-il fallu attendre si longtemps pour prendre conscience des dangers de la dépendance aux combustibles fossiles ? LES DANGERS DES COMBUSTIBLES FOSSILES

Les centrales au charbon ont alimenté la révolution industrielle, d’abord en Angleterre, puis dans le monde entier et, plus récemment, en Chine et en Inde, où elles ont contribué de manière significative à la grave pollution des villes, les particules de poussière et de smog réduisant sérieusement la visibilité et affectant la santé des populations. La combustion du charbon émet également du dioxyde de soufre, qui provoque des pluies acides, endommageant les bâtiments et la végétation ; et l’extraction du charbon – nous le savons – peut entraîner une grave dégradation de l’environnement. Le pétrole conventionnel est de plus en plus inaccessible, et le forage en eaux profondes a augmenté le risque de marées noires majeures, comme celle de la plateforme Deepwater Horizon qui a explosé en 2010 dans le Golfe du Mexique. Si l’extraction de gaz et de pétrole à partir de gisements de schiste est devenue économiquement viable au cours de la dernière décennie – et si le pétrole et le gaz de schiste ont largement contribué à la production – leur impact sur l’environnement est préoccupant, notamment la pollution des eaux souterraines due à la fracturation. Mais c’est l’émission de CO2 qui représente le plus grand danger. En 1896 déjà, le scientifique suédois Svante Arrhenius avait souligné que le dioxyde de carbone produit par la combustion de combustibles fossiles pouvait faire augmenter les températures mondiales. Mais beaucoup pensaient que la quantité émise serait absorbée par les océans et les terres, et n’aurait pas d’effet significatif. L’inquiétude a été ravivée en 1938 lorsque Guy Callendar affirma que le réchauffement était déjà en cours, conclusion qui fut contestée. Cependant, les  28 

 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?  

mesures effectuées en 1960 par Charles Keeling ont montré que les niveaux de CO2 dans l’atmosphère étaient en nette augmentation, et ses expériences étaient suffisamment précises pour que l’effet sur la saison de culture soit visible. Notre compréhension a été brouillée par le refroidissement causé par les particules de poussière et de smog présentes dans l’atmosphère en raison de l’activité industrielle accrue après la Seconde Guerre mondiale. Cependant, en 1979, un groupe d’experts de l’Académie nationale des sciences des États-Unis (NAS) conclut qu’un doublement du niveau préindustriel de CO2 entraînerait une augmentation des températures mondiales d’environ 3 °C. Cette déduction a depuis été appuyée par des modélisations climatiques de plus en plus sophistiquées. La raison de cette hausse de température est que le CO2 est ce qu’on appelle un gaz à effet de serre. L’EFFET DE SERRE ET LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE

Le rayonnement solaire, composé de lumière visible, d’infrarouges et d’ultraviolets, traverse notre atmosphère et maintient la température de la Terre au point qu’elle perd de la chaleur au même rythme qu’elle en reçoit. La perte de chaleur dans l’espace se fait par l’émission de rayonnement infrarouge, et son taux de rayonnement est régi par la température près de la limite supérieure de l’atmosphère. En faisant correspondre cette perte de chaleur à la chaleur gagnée par le Soleil, on fixe la température à la hauteur de l’atmosphère où l’air est suffisamment peu dense pour que le rayonnement infrarouge s’échappe. La surface de la Terre est plus chaude qu’en haute altitude, car la basse atmosphère agit comme une couverture et bloque la majeure partie du rayonnement infrarouge émis par la Terre : l’atmosphère se réchauffe et réchauffe à son tour la Terre. Le rayonnement infrarouge de la Terre, qui a des longueurs d’onde beaucoup plus grandes que  29 

  Les énergies renouvelables  

le rayonnement du Soleil (puisque la température de la Terre est beaucoup plus basse), est absorbé par les gaz à effet de serre présents dans l’atmosphère, qui sont principalement la vapeur d’eau, le dioxyde de carbone et le méthane. Le piégeage du rayonnement infrarouge et l’augmentation de la température qui en résulte s’appellent l’effet de serre. En 1824, le grand mathématicien français Jean Fourier fut le premier scientifique à comprendre que l’atmosphère agit comme une serre. Toutefois, ce n’est qu’en 1859 que le scientifique irlandais John Tyndall identifia les principaux gaz de l’atmosphère qui absorbent le rayonnement infrarouge. Il se rendit notamment compte que nous avions besoin de l’effet de serre, car sinon « le soleil se lèverait sur une île tenue fermement dans la poigne de fer du gel ». Le principal gaz à effet de serre est le dioxyde de carbone, et sa quantité, avant la combustion de combustibles fossiles, était maintenue à un niveau à peu près constant par des processus naturels, dont la photosynthèse qui élimine le CO2, et la respiration et la décomposition qui génèrent du CO2. Cependant, l’augmentation de la concentration de gaz à effet de serre par la combustion de combustibles fossiles élève la hauteur à laquelle l’air est suffisamment peu dense pour que le rayonnement infrarouge puisse s’échapper. L’épaisseur de la basse atmosphère absorbante (la couverture isolante) augmente donc et, par conséquent, la température de surface de la Terre s’élève. Ce réchauffement a été commenté dans un article de journal datant de 1912 (cf. figure 5). Bien que l’estimation de la quantité brûlée ait été environ une fois et demie trop élevée, il s’agissait d’une observation très prémonitoire. Le réchauffement moyen depuis l’ère préindustrielle est maintenant d’environ + 1 °C et la figure 6 montre comment le réchauffement de la température moyenne de la planète a progressé depuis la fin du xixe siècle (époque à laquelle on disposait de mesures précises de la température).  30 

amount burnt was roughly one and a half times too large, it was a very prescient remark. The average warming since pre-industrial times is now about 1 oC, and how the average global temperature has changed since the end of the 19th century (when accurate temperature measurements were available) is shown in Figure 6. While some

 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?   Why do we need renewables?

LA CONSOMMATION DU CHARBON AFFECTE LE CLIMAT

Les fourneaux du monde brûlent aujourd’hui quelque 2  milliards de tonnes de charbon chaque année. En brûlant, le carbone s’unit avec l’oxygène, ajoutant environ 7 milliards de tonnes de dioxyde de carbone dans l’atmosphère chaque année. Cela rend l’air plus isolant et contribue ainsi à faire monter sa température. D’ici peu de temps (quelques siècles) cet effet de réchauffement pourrait augmenter considérablement.

Fig. 5    « The Rodney and Otamatea Times », Waitemata and Kaipara Gazette, 14 août 1912.

5. The Rodney and Otamatea Times, Waitemata and Kaipara Gazette, 14 August 1912. 19

1,2

Augmentation de la température (en °C)

1,0

mesurée estimée normale

0,8 0,6 0,4 0,2 0,0 – 0,2

1890

1920

1950

1980

2010

Fig. 6    Courbes montrant les températures mondiales de 1890 à 2018 : mesurées ; prévues (changements naturels plus changements induits par l’homme) ; et changements naturels estimés.

Alors que certains changements de température observés sont dus à des variations de l’intensité du rayonnement solaire et à des  31 

  Les énergies renouvelables  

phénomènes naturels tels que l’activité volcanique, l’augmentation observée au cours de la période 1970-2000 (et jusqu’en 2018) ne peut s’expliquer que par la modification, due à l’homme, de la concentration atmosphérique des gaz à effet de serre, en particulier du CO2 provenant de la combustion de combustibles fossiles. Si l’on n’avait tenu compte que des causes naturelles, la température de la Terre au cours de la période 1970-2000 (et jusqu’en 2018) serait restée à peu près la même que dans les années 1970. Les températures mesurées pour la période 2003-2013 étaient à peu près constantes et ont été utilisées par certains pour mettre en doute la réalité du réchauffement climatique. Pourtant, il était bien en cours puisque sur la période plus longue allant de 1990 à 2018 les observations confirment une augmentation générale et régulière de la température, en cohérence avec l’augmentation du niveau des gaz à effet de serre. Les fluctuations dues à des causes naturelles, telles que El Niño ou La Niña, qui représentent un réchauffement ou un refroidissement de la surface de la mer dans le Pacifique qui se produit certaines années, entraîneront des écarts qui peuvent masquer une augmentation régulière de la température. LE CHANGEMENT CLIMATIQUE

L’émission de gaz à effet de serre, notamment de CO2, provenant principalement de la combustion de combustibles fossiles, mais aussi de changements dans l’utilisation des sols (comme le remplacement des forêts par des cultures), provoque non seulement le réchauffement de la planète, mais aussi d’autres changements. La fonte des glaciers et des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique contribue à l’élévation du niveau de la mer, et la perte de glace affecte les habitats des animaux dans ces eaux-là. Dans le même temps, l’acidification des océans, due à l’augmentation du CO2 dissous, menace les mollusques et autres créatures marines et provoque la mort de grandes quantités de coraux dans le monde entier. De nombreuses espèces ont changé  32 

 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?  

d’emplacement géographique en raison des modifications du climat provoquées par le réchauffement de la planète. Une faible augmentation de la température peut accroître le risque de sécheresse et affecter le rendement des cultures : même un réchauffement de 1 °C réduit le rendement moyen du blé de 6 %. Dans l’Arctique, la fonte des glaces crée davantage d’eau, celle-ci est moins réfléchissante que la glace et absorbe donc davantage de rayons solaires, ce qui amplifie le réchauffement. La région est aujourd’hui plus chaude de plus de 2 °C par rapport aux années 1970, ce qui explique que d’importantes zones de l’Arctique soient dépourvues de glace. Cette amplification polaire augmente les chances de bloquer les schémas de haute pression associés aux vagues de chaleur extrêmes, comme celle qu’a connue l’Europe à l’été 2018. Elle entraîne également un risque accru de modification du jet-stream, qui peut, par exemple, provoquer le déplacement de l’air froid de l’Arctique et provoquer un temps très froid plus au sud. Maintenant que l’atmosphère est généralement plus chaude en raison du réchauffement climatique, les nuages peuvent contenir plus de vapeur d’eau. Cela signifie qu’en cas d’orages violents, les précipitations peuvent être beaucoup plus importantes et les inondations graves plus probables. Les chutes de neige peuvent également être beaucoup plus profondes. Ainsi, un seul degré de réchauffement de la planète peut sérieusement perturber notre climat et augmenter considérablement la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes. Les effets d’un réchauffement planétaire de plus de 2 °C pourraient être catastrophiques pour de nombreuses régions du monde. Il pourrait accélérer la fonte des glaciers dans les Andes et en Chine occidentale, menaçant ainsi l’approvisionnement en eau de millions de personnes, car les réserves saisonnières des glaciers, qui retiennent l’eau en hiver et la libèrent en été, disparaîtraient. L’élévation du niveau de la mer entraînerait l’inondation d’îles de faible altitude, comme les Maldives, et l’inondation de côtes, comme celles du Bangladesh et  33 

  Les énergies renouvelables  

de certaines parties de la côte est des États-Unis, ce qui entraînerait des déplacements massifs de populations. La santé humaine serait également davantage menacée par la hausse des températures, en particulier dans les régions tropicales et subtropicales. La biodiversité risque également d’être altérée de manière irréversible, avec l’extinc­ tion possible d’un pourcentage important d’espèces végétales et animales. Paradoxalement, certains des pays les plus pauvres, qui ont le moins contribué au changement climatique, seront les plus touchés par celui-ci. Les moyens de subsistance des populations autochtones et de plusieurs millions de personnes travaillant la terre sont déjà affectés par des sécheresses extrêmes, des inondations soudaines et des saisons irrégulières. Et ces conditions météorologiques extrêmes précipitent les migrations. Si le monde continue à utiliser de l’énergie produite principalement à partir de combustibles fossiles, le danger est considérable car avec l’augmentation de la température d’ici 2100 il deviendrait impossible d’éviter des effets dévastateurs. C’est pourquoi la communauté scientifique et certains responsables politiques s’accordent à dire que des mesures décisives doivent être prises dès maintenant pour réduire nos émissions de carbone. Dans l’Accord de Paris de 2015, les nations (Parties) ont accepté de limiter le réchauffement climatique à 2 °C, et si possible de se rapprocher d’une limite de 1,5 °C. Bien que le président Trump ait annoncé en 2017 son intention de retirer les États-Unis de l’accord, de nombreux États américains, notamment la Californie, s’engagent toujours à réduire leurs émissions. Un autre rapport publié en 2018 par le Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (le GIEC) a conclu que les risques étaient nettement moins élevés pour un réchauffement de 1,5 °C que pour 2 °C. Limiter la hausse à 1,5 °C pourrait épargner des centaines de millions de personnes des catastrophes liées au climat d’ici 2050 et réduire considérablement la perte de biodiversité. Mais s’il est clair qu’il est vital et urgent d’agir pour la santé à long terme du monde, puisque le réchauffement est  34 

 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?  

déjà de 1 °C, limiter les émissions présente de nombreux avantages immédiats pour la qualité de vie des communautés, et ce sont notamment ces avantages qui motivent les gens à développer les énergies renouvelables. LES ÉMISSIONS DE DIOXYDE DE CARBONE DOIVENT DIMINUER

Les concentrations de dioxyde de carbone dans l’atmosphère étaient d’environ 280 parties par million (ppm) en 1750 (juste avant la révolution industrielle) et ont d’abord augmenté lentement pour atteindre environ 310 ppm en 1950 puis à 407 ppm en 2018. La durée de vie du dioxyde de carbone ajouté à l’atmosphère est d’environ 200 ans, avant que la majeure partie ne soit absorbée. Les émissions d’autres gaz à effet de serre autres que le CO2, dont le méthane est le plus important, représentent environ un quart du total. Cependant, le méthane a une durée de vie beaucoup plus courte, d’environ dix ans, ce qui signifie que, bien qu’il s’agisse d’un gaz à effet de serre beaucoup plus puissant que le dioxyde de carbone, ce sont les émissions cumulées de dioxyde de carbone qui déterminent en grande partie le réchauffement moyen de la surface de la planète. Depuis l’ère préindustrielle, la quantité émise jusqu’en 2017 était d’environ 2 200 milliards de tonnes (gigatonnes) de dioxyde de carbone, ce qui a provoqué une augmentation de la température d’environ 1,1 °C. En tenant compte des effets non liés au CO2 , nous devons limiter les nouvelles émissions de CO2 à 580 gigatonnes pour restreindre le réchauffement climatique à environ 1,5 °C. Cela signifie qu’il faut réduire rapidement notre dépendance à l’égard des combustibles fossiles. Si nous continuons comme nous le faisons (en émettant environ 37 gigatonnes de CO2 par an à partir de combustibles fossiles), nous aurons dépassé cette température d’ici 2035, c’est-à-dire dans peu de temps. Cela correspond à l’augmentation de la température observée dans la figure 6.  35 

  Les énergies renouvelables  

Bien que les combustibles fossiles se soient formés à partir de la biomasse, le processus de fossilisation est beaucoup trop lent pour que les combustibles fossiles se reconstituent : nous brûlons en un an ce qui a mis environ un million d’années à se former. Mais nous ne pouvons pas compter sur l’épuisement des combustibles fossiles pour cesser de les utiliser ; brûler toutes les réserves de charbon, de pétrole et de gaz émettrait environ 3 000 GtCO2. En outre, il existe de grandes quantités de ressources non conventionnelles et non exploitées, comme le pétrole de schiste, le gaz de schiste et les sables bitumineux. Les combustibles fossiles sont donc limités par les émissions et non par les ressources : la plupart d’entre eux doivent rester dans le sol pour que le réchauffement de la planète soit inférieur à 1,5 °C ; ils doivent devenir, et rester, des « actifs gelés ». LES ÉNERGIES RENOUVELABLES COMME ALTERNATIVES AUX COMBUSTIBLES FOSSILES

Nous devons agir de toute urgence et nous avons besoin de sources d’énergie n’émettant pas de CO2 pour remplacer le charbon et le gaz dans la production d’électricité et de chaleur, et le pétrole dans les transports. Les énergies renouvelables doivent être aussi bon marché que les combustibles fossiles, car l’énergie est essentielle à un bon niveau de vie et peu de gens sont en mesure de s’offrir autre chose que les sources d’énergie les moins chères. Nous pouvons le faire parce que l’énergie solaire et l’énergie éolienne fournissent déjà de l’électricité à un coût compétitif dans de nombreuses régions et qu’à terme l’une ou l’autre pourrait répondre à la demande mondiale totale. Par conséquent, le solaire et l’éolien seront les formes dominantes de production renouvelable à l’avenir. L’hydroélectricité est également une énergie renouvelable économique, bien que les ressources soient beaucoup plus limitées, et sa contribution potentielle est d’environ 15 % de la demande mondiale actuelle.  36 

 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?  

Toutefois, si toutes ces énergies renouvelables peuvent désormais être aussi bon marché que les combustibles fossiles, elles ne constituent pas une source d’énergie aussi compacte. Les installations éoliennes, solaires photovoltaïques et hydroélectriques occupent toutes une surface beaucoup plus grande qu’une centrale équivalente fonctionnant aux combustibles fossiles. Pour de nombreuses applications, ce n’est pas un problème : les panneaux solaires peuvent être installés sur les toits, dans les champs ou dans les déserts, les éoliennes au sommet des collines et les turbines hydrauliques dans les rivières ; mais pour le transport, en particulier pour les voitures, une source compacte est essentielle. Comme ces énergies renouvelables produisent toutes de l’électricité, cette source peut désormais être une batterie lithium-ion, qui est légère et compacte. Les combustibles fossiles fournissent beaucoup de chaleur, notamment dans l’industrie, et l’utilisation des énergies renouvelables pour fournir de la chaleur, soit directement, comme dans un four électrique à arc, soit indirectement pour produire des combustibles sans carbone, comme l’hydrogène, augmentera considérablement la demande d’électricité. Bien que la biomasse soit potentiellement renouvelable et qu’elle puisse être une source de chaleur pour l’industrie et les centrales thermiques, les vastes superficies de terrain nécessaires pour produire des quantités importantes d’énergie suscitent des inquiétudes, notamment en ce qui concerne la concurrence avec la production à des fins alimentaire ; la recherche se concentre actuellement sur les plantes qui peuvent pousser sur des terres impropres aux cultures alimentaires. L’ÉCONOMIE DES CENTRALES ÉLECTRIQUES RENOUVELABLES

Il est essentiel que les énergies renouvelables soient rentables, ce qui dépend à la fois de l’efficacité de la centrale et de son coût d’investissement, ainsi que du taux d’intérêt sur le capital, de la durée de vie de la centrale et du coût de la maintenance et de l’exploitation.  37 

  Les énergies renouvelables  

Par exemple, une cellule solaire au silicium d’une efficacité de 20 % peut produire de l’électricité à un prix beaucoup plus bas qu’une cellule multi-jonctions d’une efficacité de 40 %, car cette dernière est actuellement beaucoup plus chère à produire. Si la taille d’une centrale solaire sera plus petite si son efficacité est plus grande, c’est le prix du kWh qui importe le plus sur le plan économique. La production maximale d’une centrale électrique est généralement appelée sa capacité, ou capacité nominale. La capacité est exprimée en mégawatts, MW, où un MW correspond à 1 000 kilowatts. Pour les centrales à combustibles fossiles, les capacités typiques sont d’environ 1 000 MW, tandis que les grands parcs éoliens et solaires photovoltaïques (PV) avoisinent souvent les 500 MW, et les grandes centrales hydroélectriques plusieurs milliers de MW. Les centrales électriques ne fonctionnent pas tout le temps, par exemple lorsque la demande d’électricité est insuffisante pendant la nuit et, dans le cas des centrales renouvelables, lorsque les ressources, telles que le vent ou le soleil, font défaut. Ainsi, la quantité produite au cours d’une année est une fraction de ce que la capacité produirait si elle fonctionnait en permanence, et cette fraction est appelée le facteur de capacité. Pour une centrale électrique au charbon, le facteur de capacité est d’environ 0,6. Comme la vitesse du vent varie et que le soleil ne brille que pendant la journée, les facteurs de capacité sont moindres pour les parcs éoliens et solaires : la moyenne se situe actuellement autour de 0,3 pour l’éolien terrestre et de 0,5 pour l’éolien offshore ; et autour de 0,10-0,25 pour le solaire, selon l’emplacement. Un parc éolien de 500 MW avec un facteur de capacité de 0,4 produirait environ 1 750 millions de kWh (1,75 TWh) d’électricité par an, soit la consommation d’un demi-million de foyers européens. Une estimation approximative du coût de l’électricité produite par une turbine moderne ayant une durée de vie de 20 ans serait de 5 centimes d’euro par kWh, ce qui est compétitif par rapport à la production à partir de combustibles fossiles. De meilleurs vents donnant un facteur de capacité de 0,5  38 

 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?  

réduiraient le coût à 4 centimes d’euro par kWh, et l’augmentation de la durée de vie de la turbine réduirait également le coût. Le coût du capital, qui dépend du taux d’intérêt (ou d’actualisation), a un effet certain ; par exemple, si le taux d’actualisation passait de 8 à 4 %, le coût de l’électricité diminuerait de 20 %. Ce taux dépend de nombreux facteurs, en particulier de la confiance dans le fait que le projet sera construit dans les temps et au coût prévu, ainsi que des taux d’intérêt du marché. SUPERFICIE TERRESTRE OU MARITIME REQUISE POUR LES ÉNERGIES RENOUVELABLES

Contrairement aux centrales à combustibles fossiles, les parcs éoliens et solaires nécessitent des surfaces considérables pour produire de grandes quantités d’énergie. En général, l’espace disponible est suffisant ; et dans le cas de l’éolien, les terres entre les turbines peuvent être utilisées pour le pâturage ou les cultures. Aux États-Unis, des parcs éoliens couvrant seulement 2 % de la superficie terrestre pourraient répondre à la demande totale d’électricité. Même lorsque la densité de population est élevée, comme dans certaines régions d’Europe, le vent peut apporter une contribution significative à l’abri des regards en plaçant les éoliennes en mer. Les ressources éoliennes de la mer du Nord sont parmi les meilleures au monde : un parc éolien couvrant une superficie d’environ 30 km2 produira mille millions de kWh (1 TWh) par an, soit suffisamment d’électricité pour environ un quart de million de foyers en Europe. La consommation annuelle totale d’énergie du Royaume-Uni est de 1 650 TWh, et pour fournir la moitié de cette énergie, il faudrait environ 3,5 % de la mer du Nord, une superficie environ 20 % plus grande que celle du pays de Galles. Des centres de distribution et des lignes de transmission sous-marines seraient nécessaires, mais des zones appropriées existent dans les eaux de moins de 50 m de profondeur au large du Royaume-Uni. Toutefois, lorsque cette estimation a été faite en 2009, le coût de l’éolien offshore était considéré comme prohibitif. Depuis lors, les coûts ont baissé très rapidement, de sorte  39 

  Les énergies renouvelables  

qu’au début des années 2020, les parcs éoliens en mer commencent à être aussi compétitifs que les nouvelles centrales électriques au gaz et seront, d’ici la fin des années 2020, aussi économiques que les centrales existantes. Dans le cas d’un pays en développement, ce n’est pas la demande énergétique actuelle qui importe, mais la quantité nécessaire pour assurer une bonne qualité de vie. En Inde, et plus encore en Afrique, des millions de personnes n’ont pas accès à l’électricité. La demande énergétique par personne pour un bon niveau de vie, telle que mesurée par l’indice de développement humain (cf. figure 3), est d’environ 80 kWh par jour. Mais cette demande inclut l’énergie utilisée pour la conversion des combustibles fossiles en électricité, ainsi que l’énergie fossile consommée dans les transports. L’électrification des transports et la production directe d’électricité à partir d’énergies renouvelables réduiraient cette demande d’énergie à environ 60 kWh par jour. Pour l’Inde et l’Afrique, avec leur forte intensité solaire, les fermes photovoltaïques pourraient fournir une fraction significative de cette demande. En Inde, l’espace nécessaire pour produire 1 TWh par an est d’environ 15 km2. Ainsi, avec une population de 1,35 milliard d’habitants et une superficie de 3,3 millions de km2, environ 7 % des terres seraient nécessaires pour répondre à la moitié de la demande énergétique totale ; en Afrique, le pourcentage correspondant est de 1 %. Les terres non arables pourraient quant à elles être utilisées pour éviter toute concurrence avec la production alimentaire. Potentiellement, l’Afrique pourrait être autosuffisante en production d’énergie grâce aux panneaux photovoltaïques, et pourrait même exporter de l’électricité, ce qui pourrait générer des richesses. VARIABILITÉ DE L’ÉNERGIE RENOUVELABLE

Contrairement aux générateurs à combustible fossile, dont le carburant peut être stocké prêt à l’emploi, ni le solaire ni le vent  40 

 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?  

ne sont toujours disponibles. Il ne s’agit pas d’un problème propre aux énergies renouvelables, car les générateurs classiques peuvent s’arrêter en cas de panne. Un approvisionnement de secours est alors nécessaire, comme c’est le cas lors des pics de la demande d’électricité ; il s’agit généralement de générateurs au gaz. Bien que l’énergie éolienne et l’énergie solaire puissent se compléter, la vitesse du vent étant généralement plus élevée en hiver qu’en été et l’ensoleillement plus important en été qu’en hiver, les écarts de disponibilité peuvent être importants. Plus la part de l’électricité produite par les énergies renouvelables augmente, plus cette variabilité de l’approvisionnement est importante. Pour y remédier, il est possible de disposer d’un plus grand nombre de générateurs de secours, qui devront être sans émissions importantes de CO2 (donc à faible teneur en carbone), ou d’utiliser des unités de stockage d’énergie, telles que des batteries. Ces unités stockent la production excédentaire qui pourra par conséquent être utilisée lorsque l’on a besoin de plus d’électricité. La demande peut également être modifiée (réponse à la demande) pour répondre à l’offre et peut être lissée, par exemple en déplaçant la consommation d’électricité du soir vers le jour, à l’aide de compteurs et de contrôles intelligents. Les interconnecteurs qui mettent à disposition des générateurs situés dans une grande région ou un certain nombre de pays peuvent également aider à répondre aux pics de demande. Même en l’absence de vent ou de soleil, les lumières peuvent rester allumées. LES SOURCES ALTERNATIVES BAS-CARBONE

Alors que les émissions des centrales électriques alimentées par des combustibles fossiles sont plus de dix fois supérieures à celles associées à la fabrication et à l’exploitation des énergies renouvelables, il existe des technologies qui permettraient de les réduire considérablement. Le CO2 émis peut être séquestré chimiquement, puis pompé dans des  41 

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réservoirs souterrains, tels que des champs de gaz désaffectés. Cette technologie pourrait également être appliquée aux processus industriels. Les coûts d’investissement du captage du carbone sont toutefois élevés et il n’y a pas eu de soutien pour rendre cette technologie compétitive. Mais l’intérêt pour l’application de cette technologie au captage du CO2 directement dans l’air est croissant. Ce captage dans l’air pourrait contribuer à réduire les émissions cumulées de CO2 si nous ne parvenons pas à arrêter de brûler les combustibles fossiles assez rapidement. Mais au vu des progrès réalisés jusqu’à présent, il semble peu probable que le piégeage du carbone permette de réduire les émissions de plus de 10 % d’ici à 2050. Les centrales nucléaires produisent de l’électricité sans émettre de dioxyde de carbone ; toutefois, il existe des inquiétudes quant à leur sécurité – notamment avec les très graves accidents de Tchernobyl en Ukraine et de Fukushima au Japon – et à leur coût, qui rend l’énergie nucléaire non compétitive dans certains pays. On craint également que la technologie ne soit utilisée pour enrichir de l’uranium destiné à la fabrication d’armes nucléaires, et l’on s’inquiète de l’élimination des déchets des réacteurs. Si ces craintes ont entraîné un abandon de l’énergie nucléaire en Europe et en Amérique du Nord, on observe une certaine expansion en Asie ; d’ici 2050, sa contribution aux besoins mondiaux en électricité devrait être relativement faible, de l’ordre de 10 %. Ainsi, même si ces technologies alternatives à faible émission de carbone seront utiles, elles ne suffiront pas à fournir l’énergie dont nous avons besoin sans aucune émission de dioxyde de carbone, ce qui devra se produire d’ici 2050 environ pour éviter un changement climatique dangereux. Nous devons nous demander dans quelle mesure les énergies renouvelables « traditionnelles » (biomasse, énergie solaire thermique et hydroélectrique) et plus modernes comme l’énergie éolienne (à l’aide de turbines) et solaire (à l’aide de panneaux photovoltaïques) pourraient chacune contribuer à éviter un réchauffement  42 

 Pourquoi avons-nous besoin des renouvelables ?  

d’ici 2050, et à quel prix ; nous devons nous demander aussi pourquoi les autres technologies renouvelables (énergie marémotrice, houlo-motrice et géothermique) ne devraient apporter qu’une faible contribution. Nous verrons que nous pouvons à la fois remplacer les combustibles fossiles et leurs émissions nocives, et répondre à la demande d’énergie nécessaire à l’élévation du niveau de vie des populations, mais que cela nécessite un énorme effort mondial pour y parvenir à temps.

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3 La biomasse, la chaleur solaire et l’énergie hydraulique LA BIOMASSE

Depuis les premières sédentarisations humaines, nous cultivons des plantes, nous chassons des animaux pour nous nourrir et brûlons du bois pour nous chauffer. Cette biomasse produit de l’énergie : dans la chaleur dégagée par sa combustion et dans la nourriture que nous et les animaux consommons. Cette énergie provient in fine du Soleil, car les plantes poussent en utilisant la photosynthèse pour capter la lumière du Soleil et transformer le dioxyde de carbone de l’air et l’eau du sol en hydrates de carbone. Avec l’augmentation de la population mondiale, les ressources en terre s’épuisent de façon dramatique. Une quantité considérable de terres arables est nécessaire pour cultiver ce dont nous avons besoin, et l’utilisation de la biomasse pour l’énergie peut entrer en conflit avec la culture de plantes pour l’alimentation et la préservation des écosystèmes. Aujourd’hui, la biomasse fournit environ 10 % de toute l’énergie que nous consommons – principalement sous forme de chaleur provenant de la combustion de bois, de charbon de bois, de fumier ou de résidus de cultures pour cuisiner et chauffer les maisons – et fournit à peu près la même quantité d’énergie que les aliments. Cette biomasse traditionnelle est la principale source d’énergie pour de nombreuses personnes dans le monde en développement.  45 

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Les pénuries de pétrole des années 1970 ont stimulé l’intérêt pour l’obtention de carburants à partir de cultures comme substituts aux carburants dérivés du pétrole : l’essence (gazole) et le diesel. Deux des principaux biocarburants sont l’éthanol, qui peut être produit par la fermentation provenant de plantes contenant du sucre, comme le maïs, et le biodiesel, qui peut être produit à partir d’huiles végétales, comme l’huile de palme. La biomasse, sous la forme de bois et de résidus agricoles, peut aussi être intéressante, elle peut être brûlée, à la place du charbon ou du gaz, soit dans des centrales électriques qui produisent de l’électricité, soit dans des processus industriels qui nécessitent de la chaleur. Ces cultures bioénergétiques sont potentiellement une source d’énergie durable à faible teneur en carbone, à condition que des quantités négligeables de CO2 soient libérées lors de la plantation et de la récolte de ces cultures. L’efficacité de la conversion de l’énergie solaire en biomasse lors de la photosynthèse est faible, de l’ordre de 1 %. Cela signifie que de grandes étendues de terre sont nécessaires pour cultiver des plantes bioénergétiques. Par exemple, l’utilisation de toutes les terres arables du Japon ne fournirait qu’une quantité de biocarburant égale à 30 % du volume de sa consommation d’essence chaque année. Ainsi, trouver des terres appropriées pour la biomasse peut s’avérer problématique. LA BIOMASSE TRADITIONNELLE

La biomasse traditionnelle fournit de l’énergie à environ 2,5 milliards de personnes dans le monde en développement, et 0,3 milliard de personnes dépend du charbon et du kérosène. Cependant, la fumée dégagée par la combustion de bois, de charbon de bois, de charbon ou de kérosène dans des poêles simples et des feux ouverts est très nocive. Elle provoque environ 3,8 millions de décès prématurés chaque année, qui touchent principalement les femmes et les enfants. Ce sont souvent eux qui passent des heures à ramasser du bois : un temps que  46 

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les enfants pourraient passer à l’école ou que les femmes pourraient consacrer à d’autres activités. Environ 85 % du milliard de personnes vivant en Afrique subsaharienne dépendent de la biomasse traditionnelle. Une grande partie de cette biomasse est utilisée sous forme de charbon de bois, en particulier dans les zones urbaines, en raison de sa compacité et de sa facilité d’utilisation – elle est fabriquée traditionnellement en chauffant le bois dans des fosses de terre ou des fours en forme de monticule avec un apport d’air limité. La demande devrait augmenter en raison de la croissance démographique et de l’augmentation du nombre de personnes vivant dans les villes. Cette situation a suscité des inquiétudes quant à la déforestation et à la dégradation des sols. L’exploitation non réglementée du bois peut avoir des effets dévastateurs sur l’environnement, comme nous pouvons le voir dans la déforestation en Haïti par rapport à la forêt préservée en République dominicaine (cf. figure 7).

Fig. 7     La frontière entre Haïti et la République dominicaine montre le contraste marqué entre les terres déboisées (Haïti) et les terres boisées (République dominicaine).

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Des tentatives ont été faites dans le monde entier pour utiliser des fours de cuisson améliorés, la Chine en ayant introduit 130 millions dans les années 1980 et au début des années 1990. Mais la plupart n’ont que des avantages limités pour la santé, car la combustion du combustible produit encore des particules dans la fumée et un peu de monoxyde de carbone. Pour éliminer ces émissions nocives, il faut une combustion complète. On peut y parvenir en introduisant de l’air chaud au-dessus du combustible en combustion, mais cela tend à rendre le poêle complexe et coûteux et peu de personnes dans les communautés rurales peuvent s’en offrir un. Néanmoins, l’accès à des systèmes de crédit simples permet à certaines personnes à faibles revenus d’avoir accès à de bons fourneaux. Le coût de ces poêles à biomasse propres doit baisser, et une production industrielle centralisée permettrait de réaliser des économies d’échelle. En raison de la forte baisse du coût des panneaux solaires et des batteries, une autre solution pourrait bientôt être mise en œuvre : les poêles électriques. Mais de nombreuses personnes sont réticentes à utiliser de nouvelles méthodes de cuisson et ne sont pas conscientes de leurs avantages pour la santé. Et dans certains quartiers pauvres, la peur du vol peut freiner les investissements dans les nouvelles technologies. LES BIOCARBURANTS

L’intérêt pour les biocarburants remonte à la fin du xixe siècle, lorsque Rudolf Diesel présenta son premier moteur à Paris lors d’une exposition en utilisant de l’huile d’arachide, et lorsque Henry Ford imagina des tracteurs fonctionnant à l’éthanol produit à partir de cultures pouvant fermenter. Toutefois, l’intérêt est retombé après la Seconde Guerre mondiale avec la disponibilité de pétrole bon marché en provenance du Moyen-Orient. Il a connu un regain d’intérêt lorsque les approvisionnements en pétrole ont été menacés dans les  48 

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années 1970, des politiques ont alors été adoptées dans de nombreux pays pour encourager la croissance de production de biocarburants, initialement pour assurer la sécurité énergétique, mais aussi pour lutter contre le réchauffement climatique. L’un des programmes de biocarburants les plus réussis est celui du Brésil, où se trouvent de très grandes plantations de canne à sucre et où la production d’éthanol a débuté à la fin des années 1920. Le rendement énergétique est élevé, car relativement peu d’énergie est utilisée pour la culture et la récolte, ainsi que pour la production d’éthanol. De vastes zones de pâturages adaptées et de bonnes conditions climatiques sont disponibles pour la culture de la canne à sucre, et l’éthanol représente aujourd’hui environ un tiers du carburant utilisé par les voitures au Brésil. Cependant, d’autres programmes de biocarburants ont connu moins de succès. Aux États-Unis, les agriculteurs ont reçu des incitations pour produire de l’éthanol à partir de maïs, mais le rendement énergétique est faible car il faut beaucoup d’énergie pour produire le maïs. En outre, la quantité de bioéthanol produite aux États-Unis ne représente qu’environ 10 % du volume de l’essence consommée. Pour produire 10 % de plus, il faudrait environ 15 % de l’ensemble des terres cultivées aux États-Unis. En Europe, le biodiesel a été encouragé par la Commission européenne ce qui fit augmenter la production d’huile végétale, notamment au cours de la première décennie de ce siècle. Les huiles doivent d’abord être traitées chimiquement avant de pouvoir être utilisées dans les moteurs diesel modernes, car elles sont plus épaisses que le carburant diesel. La demande d’huile de palme pour le biodiesel a entraîné une augmentation de la déforestation en Indonésie et en Malaisie, ainsi que l’assèchement de vastes zones de tourbières. Cela a provoqué la décomposition de la tourbe et des incendies qui ont libéré d’énormes quantités de CO2. La déforestation tropicale a également résulté du défrichage des terres pour y faire paître du bétail, ou cultiver le soja et le bois, et est  49 

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responsable d’environ 10 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Elle a également contribué à une grave perte de biodiversité. Aujourd’hui, l’expansion de tous les biocarburants a ralenti, en raison des inquiétudes suscitées par les émissions de CO2 qui y sont liées, leur impact sur l’environnement et leur potentielle concurrence avec la production alimentaire ; par exemple, l’huile de palme et le maïs sont des aliments importants. IMPACT ENVIRONNEMENTAL ET BIOCARBURANTS AVANCÉS

Toutes ces préoccupations concernant l’impact sur l’environnement nous ont amené à nous concentrer sur les biocarburants avancés (également appelés de deuxième génération). Il s’agit de carburants produits à partir de plantes qui poussent dans des zones non-adaptées aux cultures alimentaires. Les plantes à base de cellulose, comme le panic érigé (ou millet vivace), survivent sur des terres pauvres. Mais briser la cellulose avec des acides pour obtenir du sucre qui peut être fermenté en éthanol est coûteux. Cependant, on a remarqué pendant la Seconde Guerre mondiale qu’un champignon décomposait les vêtements et les tentes en coton en sécrétant une enzyme. L’utilisation d’enzymes pour la production d’éthanol nécessite peu d’énergie ; toutefois, il s’est avéré beaucoup plus difficile que prévu de rendre cette méthode rentable. Les micro-algues ont également suscité beaucoup d’intérêt car elles ont une forte teneur en huile et peuvent pousser dans des eaux salines ou usées sur des terres arides. Mais après de nombreuses années de recherche, la production de biocarburants à partir de micro-algues n’est toujours pas compétitive sur le plan commercial. En général, le rendement élevé en huile se fait au détriment du taux de croissance et la culture des micro-algues et l’extraction de l’huile s’avèrent coûteuses. On envisage d’utiliser des souches génétiquement  50 

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modifiées, mais comme les micro-algues jouent un rôle très important dans la régulation des chaînes alimentaires marines, on craint qu’elles ne perturbent l’équilibre délicat des espèces dans l’environnement si elles sont libérées. La digestion anaérobie des plantes, des aliments et des déchets animaux dans des cuves spécialement conçues à cet effet produit du biogaz (principalement du méthane), qui peut être brûlé pour le chauffage et la cuisine, ou utilisé dans des centrales électriques (cf. figure 8). Ce processus se produit aussi naturellement dans des empilages de compost et dans l’estomac des vaches et d’autres ruminants ; on estime que le méthane est responsable d’environ 5 % du réchauffement de la planète. Les petits digesteurs sont largement utilisés dans les villages asiatiques ; et en Chine, plus de 30 millions de foyers utilisent le biogaz. Cependant, son adoption en Afrique subsaharienne a été faible, souvent parce qu’il est trop intensif en main-d’œuvre, et que l’énergie solaire répond de plus en plus à la demande d’énergie. La biomasse joue un rôle important en tant que source durable de carbone dans la fabrication de nombreux produits, remplaçant les produits pétroliers. Des plantes ont évolué et se sont bien adaptées aux conditions semi-arides, comme les cactus ; les pores de leurs feuilles restent fermés pendant la journée pour réduire la perte d’eau, et ne s’ouvrent que la nuit pour capter le CO2. À l’échelle mondiale, il existe environ 25 millions de km2 de zones semi-arides et de terres cultivées en friche, largement réparties dans les pays en développement et les pays développés, et environ 10 % de cette superficie pourraient être disponibles pour la culture de plantes bien adaptées. Celles-ci pourraient constituer une source importante de biomasse pour l’industrie chimique, ce qui permettrait d’éviter la concurrence avec la production alimentaire et les émissions liées à l’utilisation du pétrole.  51 

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Fig. 8    Une usine de digestion anaérobie de 1 MW au pays de Galles, qui transforme les déchets alimentaires en électricité

LE POTENTIEL DE LA BIOMASSE

À l’heure actuelle, la biomasse moderne est principalement utilisée comme culture bioénergétique pour le chauffage des bâtiments et de l’industrie et la production d’électricité, où elle contribue à environ 4 % de la demande mondiale. C’est là que réside un potentiel considérable, car les principales sources sont la sylviculture, les résidus agricoles et les déchets municipaux, qui présentent moins de risques environnementaux que les cultures bioénergétiques. De grandes quantités de ces ressources sont actuellement inexploitées. En général, pour être compétitif par rapport aux combustibles fossiles, l’offre de biomasse doit être facilement disponible, comme en Suède où elle fournit près d’un quart de l’approvisionnement énergétique. Dans la production d’électricité, la biomasse peut être utilisée très efficacement lorsque la production d’électricité est combinée au chauffage des bâtiments. Comme elle peut être disponible à la demande, la bioénergie est également un complément utile aux sources variables que sont l’éolien et le solaire. Mais à l’échelle mondiale, le manque de compétitivité  52 

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économique limite l’expansion. En outre, les grandes surfaces de terres appropriées et accessibles nécessaires ne sont pas disponibles partout : il faut 3 000 km2, c’est-à-dire un carré de 55 km de côté, pour faire pousser la biomasse nécessaire à une centrale thermique type de 1 000 MW, qui alimenterait environ 1,5 million de foyers en Europe. Les biocarburants, qui ont été présentés comme un substitut aux carburants dérivés du pétrole, ne contribuent qu’à environ 3 % de la demande. L’électricité produite à partir de sources renouvelables et stockée dans des batteries semble de plus en plus susceptible d’être le substitut à faible teneur en carbone préféré aux biocarburants dans les voitures. Toutefois, si les biocarburants avancés peuvent être produits de manière économique et durable, ils pourraient apporter une contribution importante dans l’aviation, en remplacement du kérosène, et dans le transport maritime, en remplacement du pétrole. La biomasse pourrait également constituer une source durable de carbone pour l’industrie chimique. Actuellement, la contribution de la biomasse, essentiellement traditionnelle, est de quelque 15 000 TWh par an. Les préoccupations relatives à la production durable signifient que d’ici 2050, une contribution similaire pourrait être apportée, principalement par la biomasse moderne, car l’accès croissant à l’électricité grâce aux panneaux solaires réduira considérablement la demande de biomasse traditionnelle. Une telle contribution nécessitera toutefois un soutien politique et une réglementation solides pour garantir que des émissions de CO2 négligeables soient associées à la plantation et à la récolte des cultures, et pour protéger la production alimentaire, la biodiversité et les droits fonciers. LA CHALEUR SOLAIRE

Le Soleil fournit de la chaleur à nos bâtiments depuis des millénaires, mais ce n’est qu’à la fin du xixe siècle, lorsque les maisons aux États-Unis ont été raccordées à des réseaux d’alimentation en eau,  53 

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qu’un chauffe-eau solaire commercial a été produit. Ces capteurs solaires étaient constitués d’un réservoir d’eau peint en noir, enfermé dans une boîte avec un panneau en verre devant. En reliant le capteur à un réservoir isolé situé au-dessus, l’eau chaude pouvait être stockée pour être utilisée la nuit. Pendant la journée, l’eau chauffée dans le capteur montait vers le réservoir de stockage et l’eau plus froide descendait (cf. figure 9). Ces systèmes de thermosiphon étaient populaires en Californie, jusqu’à ce qu’on trouve du gaz à Los Angeles dans les années 1920. Ils ont également prospéré en Floride jusqu’à ce que les chauffe-eaux électriques les supplantent après la Seconde Guerre mondiale. L’intérêt pour les énergies renouvelables dans les années 1970 a relancé la mode des chauffe-eaux dans de nombreux pays, Israël prenant l’initiative d’adopter une législation rendant obligatoire l’installation de chauffe-eau solaires sur les nouveaux bâtiments. De nombreuses maisons modernes sont désormais équipées de capteurs solaires thermiques sur leur toit. Deux types de capteurs prédominent : les capteurs plats, dont la conception est similaire à celle des capteurs antérieurs, et des bagues collectrices, qui réduisent les pertes de chaleur par convection grâce à la présence d’un tube d’acier, transparent, dont l’air a été retiré, enfermant les tuyaux d’eau noircis. La Chine représente aujourd’hui plus des deux tiers du marché mondial. L’introduction de cette technologie et d’une bonne isolation dans tous les nouveaux bâtiments lors de leur construction permettrait de réduire considérablement l’empreinte carbone des bâtiments, c’està-dire le dioxyde de carbone total émis par an. Le chauffage solaire est également de plus en plus utilisé dans les applications industrielles et pour le chauffage urbain. Mais la contribution totale à l’échelle mondiale est faible : environ 400 TWh en 2018.

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Eau chaude

(a) Rayons du Soleil Retour d’eau chaude

Eau froide Arrivée d’eau froide

(b)

Fig. 9    (a) Système de thermosiphon. (b) Chauffe-eaux solaires montés sur des toits en Chine.

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LA CHALEUR SOLAIRE POUR LA PRODUCTION D’ÉLECTRICITÉ

La chaleur solaire a été introduite pour la première fois à des fins commerciales pour produire de l’électricité en 1913 en Égypte par un ingénieur américain, Frank Schuman. Il a utilisé cinq miroirs paraboliques en forme d’auge pour concentrer la lumière du soleil sur des tuyaux transportant de l’eau, afin de générer de la vapeur pour faire fonctionner un moteur de pompage qui produisait plus de 40 kW. Les gouvernements britannique et allemand ont prévu des unités similaires pour fournir de l’énergie dans leurs colonies. Cependant, le besoin d’énergie sous une forme facilement transportable pendant la Première Guerre mondiale a entraîné une expansion rapide de l’exploration pétrolière, et l’énergie solaire « concentrée » a presque totalement disparu. Les pénuries de pétrole des années 1970 ont relancé l’intérêt, et les premières centrales commerciales, qui utilisaient des collecteurs cylindro-paraboliques, commencèrent à fonctionner dans le désert de Mojave en Californie dans les années 1980. Dans les années 1990, un système de tour solaire a été construit à Barstow en Californie et a démontré comment l’énergie solaire pouvait être stockée. Un grand réseau de miroirs a été utilisé pour diriger les rayons du soleil sur un réservoir de sel fondu au sommet d’une tour centrale. Le sel chauffé (à plus de 500 °C) était pompé dans une grande cuve de stockage, puis utilisé pour transférer la chaleur à une chaudière d’une centrale thermique classique qui produisait 10 MW d’électricité. Lorsqu’il n’y avait pas de soleil, le sel fondu chaud dans le réservoir de stockage pouvait être utilisé comme source de chaleur pour la centrale thermique pendant plusieurs heures (cf. figure 10). Cependant, la baisse du coût des combustibles fossiles dans les années 1990 et le retrait des incitations ont empêché tout développement significatif jusqu’en 2006, lorsque des initiatives gouvernementales et étatiques en Espagne et aux États-Unis ont à nouveau revitalisé le marché.  56 

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Dans les années 2000, on pensait que les centrales solaires thermiques à concentration seraient en mesure de produire de l’électricité à moindre coût que les systèmes photovoltaïques. Rayons du Soleil Réseau de transport Tour récepteur Réservoir tiède Sel fondu Miroirs

Générateur Échangeur de chaleur

Réservoir chaud Condensateur d’eau

Fig. 10     Schéma d’une centrale solaire thermodynamique à concentration. Le sel fondu est mis en circulation pour générer de la vapeur qui fait fonctionner un générateur à turbine. Lorsque le soleil est couché, le sel fondu contenu dans le réservoir chaud (565 °C) est pompé par le générateur de vapeur vers le réservoir tiède (maintenu à 285 °C, ce qui empêche le sel de se solidifier).

L’une des installations conçues à l’époque était la centrale solaire de Crescent Dunes dans le Nevada, aux États-Unis (cf. figure 11), qui comporte près de 10 000 miroirs qui dirigent la lumière du Soleil sur un récepteur situé au sommet d’une tour de 200 m de haut. Elle était prévue pour fournir une puissance maximale de 110 MW et 10 h de stockage à l’aide de sels fondus et était la première de ce type. Mais son coût d’investissement élevé signifiait que le prix de l’électricité était de 13,5 cents par kWh, ce qui n’était plus compétitif par rapport aux fermes solaires photovoltaïques, dont les coûts avaient très fortement baissé. De plus, elle connut des problèmes techniques qui nuisirent à ses performances.  57 

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Ainsi, au lieu de construire des centrales solaires à rayons concentrés, on a construit des fermes photovoltaïques. Depuis, des efforts ont été faits pour améliorer l’efficacité de la conversion de l’énergie solaire en énergie électrique en opérant à des températures plus élevées, tout en diminuant le coût des composants et du stockage. Aux États-Unis, le programme Sunshot vise à réduire le coût de l’électricité à 6 cents par kWh d’ici 2020.

Fig. 11    Centrale solaire thermique à concentration de 110 MW à Crescent Dunes.

PERSPECTIVES POUR LE CHAUFFAGE SOLAIRE

Le chauffage solaire des habitations et de l’industrie subit la concurrence des systèmes électriques, mais pourrait bien générer 2 000 TWh par an d’ici 2050. Les perspectives de l’énergie solaire concentrée sont encourageantes, car malgré les différences de coûts et une réduction des tarifs de rachat, la disponibilité de l’approvisionnement après le coucher du soleil offerte par les centrales solaires à  58 

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concentration avec stockage thermique peut constituer un avantage significatif par rapport aux fermes solaires photovoltaïques. En effet, le stockage de l’électricité dans des batteries est actuellement (2018) plus coûteux que l’utilisation de sels fondus pour stocker une quantité équivalente de chaleur. Cet avantage, qui lui permet d’agir comme un approvisionnement d’appoint efficace, lui confère une valeur ajoutée et fait que cette technologie suscite toujours un intérêt considérable. En 2019, au Maroc, une centrale solaire de 150 MW avec stockage a dépassé les objectifs de performance en matière de production et de stockage dès les premiers mois d’exploitation. La Chine investit massivement, et des projets sont prévus ou en cours de construction dans plusieurs autres pays où l’ensoleillement est bon et le ciel dégagé, par exemple en Afrique du Sud, au Chili, au Koweït, en Israël, en Inde et en Arabie saoudite. Leur impact sur l’environnement, notamment par rapport aux centrales à combustibles fossiles, est relativement bénin. Les politiques de recherche et de développement ont permis de faire baisser les coûts et, en 2018, des contrats ont été signés pour des centrales électriques avec stockage permettant de produire de l’électricité à moins de 7 cents US par kWh en Australie et à Dubaï. Si celles-ci fonctionnent comme prévu, alors ces centrales, puisqu’elles peuvent produire de l’électricité à la demande, pourraient contribuer de manière significative à l’intégration des parcs éoliens et solaires photovoltaïques dans un réseau, tout en maintenant un faible coût de l’électricité. En 2010, l’Agence internationale de l’énergie pensait que les centrales solaires pourraient fournir environ 5 000 TWh par an d’ici 2050 (10 % de la demande mondiale d’électricité prévue), avec les réductions de coûts constatées depuis, ce chiffre semble raisonnable. L’ÉNERGIE HYDRAULIQUE

Dans une centrale hydroélectrique, l’énergie de l’eau tombant d’une certaine hauteur est convertie en énergie électrique à l’aide d’une turbine (cf. figure 12a). De nombreuses grandes installations utilisent  59 

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un type de turbine conçu par James Francis en 1848. Dans cette turbine, l’eau est dirigée vers l’intérieur (et non vers l’extérieur comme dans la turbine Fourneyron illustrée à la figure 2) sur des pales fixées à la couronne d’un arbre, qui fait tourner un générateur électrique. La puissance est déterminée par la hauteur de la chute et le volume d’eau qui s’écoule. L’une des plus grandes installations hydroélectriques du monde est le barrage des Trois Gorges sur le fleuve Yangzi Jiang (le fleuve bleu) en Chine (cf. figure 12b). Le barrage a inondé une vallée et créé un réservoir d’une superficie d’environ 1 000 km². La hauteur de l’eau dans le barrage est d’environ 100 m au-dessus du fleuve en aval, et le débit d’environ 25 000 m3 par seconde peut produire une puissance maximale massive de 22 500 MW. En moyenne, environ 90 TWh sont produits chaque année. En Chine, cela suffit à alimenter environ 60 millions de foyers. En Europe, cette électricité alimenterait environ 25 millions de foyers, et en Amérique environ 7,5 millions, car la consommation d’énergie par foyer est plus élevée dans ces pays. L’hydroélectricité est désormais bien établie, avec des installations dans le monde entier qui ont produit environ 4 200 TWh d’électricité en 2018, soit quelque 16 % de la demande mondiale. Les émissions sont très faibles, et sont principalement liées au béton et à l’acier utilisés dans la construction, et de nombreuses centrales hydroélectriques fonctionnent depuis plus de cinquante ans avec des coûts de fonctionnement faibles. Elles constituent l’une des sources d’énergie les moins chères et sont utilisées pour des processus à forte intensité énergétique, comme la fusion de l’aluminium. Un réservoir, construit en haut d’une montagne à l’aide d’un barrage, permet de stocker l’électricité. L’eau est pompée et déversée dans le réservoir à partir d’une rivière située en contrebas, ce qui permet de stocker l’énergie électrique. L’énergie peut ensuite être produite lorsque cela est nécessaire en laissant l’eau s’écouler dans la rivière à travers une turbine. Les centrales à accumulation par pompage de ce type fournissent plus de 94 % de l’électricité stockée dans le  60 

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(a) Barrage

Réservoir

Générateur

Turbine fluviale

(b)

Fig. 12     (a) Une centrale hydroélectrique. (b) Le barrage des Trois Gorges (Chine).

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monde, et il serait possible d’en fournir davantage en adaptant certaines centrales hydroélectriques. Une centrale de pompage-turbinage d’eau de mer près de la pointe nord-ouest du golfe de Spencer, en Australie méridionale, est en projet, car les ressources en eau douce sont rares. Elle disposerait d’une capacité de stockage suffisante pour produire 225 MW pendant huit heures, ce qui permettrait d’atténuer les pressions exercées sur les pics de demande lorsque les températures montent en flèche. L’IMPACT ENVIRONNEMENTAL ET SOCIAL DE L’ÉNERGIE HYDRAULIQUE

Bien que les centrales hydro-électriques puissent fournir de grandes quantités d’électricité à faible coût et ont une faible émission de carbone, d’importants problèmes sociaux et environnementaux doivent être pris en compte pour décider si la construction d’un nouveau projet hydro-électrique est appropriée. Il s’agit notamment du déplacement de la population, des modifications de la qualité de l’eau, de l’impact sur les poissons et des inondations. En 1954, une inondation dévastatrice sur le fleuve Yangzi a tué 33 000 personnes et en a laissé plus d’un million sans abri. Le barrage des Trois Gorges sur le fleuve a réduit le risque d’inondations aussi désastreuses, mais a nécessité le déplacement de 1,3 million de personnes. On estime que 30 à 60 millions de personnes dans le monde ont dû être déplacées à cause de l’hydro-électricité. D’autres problèmes ont entravé les plans visant à exploiter l’une des plus grandes ressources hydroélectriques du monde, située en Afrique subsaharienne, où l’on estime que 600 millions de personnes sont privées d’électricité. Près de l’embouchure du fleuve Congo se trouvent les chutes d’Inga, une série de rapides au cours desquels le fleuve chute d’une grande hauteur – environ 100 m, soit la hauteur d’un immeuble de trente étages. Le fleuve possède le deuxième  62 

  La biomasse, la chaleur solaire et l’énergie hydraulique  

plus grand débit d’eau au monde, après l’Amazone, et sa production potentielle totale est presque deux fois supérieure à celle du barrage des Trois Gorges. Cela suffirait à alimenter une énorme croissance industrielle et à sortir des millions de personnes de la pauvreté. Mais la réalisation de ce potentiel a été gravement perturbée par les guerres, la corruption, des décennies de troubles sociaux et politiques et d’énormes dépassements de coût. Bien que les risques d’effondrement soient faibles avec les grands barrages, les conséquences peuvent être catastrophiques. En 1975, à la suite de précipitations extrêmes, le barrage de Banqiao, en Chine a cédé, provoquant de nombreux décès. Beaucoup de barrages ont également coûté plus cher que prévu. Les projets plus petits, tels que les projets au fil de l’eau, dans lesquels on profite de la baisse naturelle du niveau de l’eau pour éviter un grand barrage et un réservoir, sont moins coûteux. L’absence d’un grand réservoir signifie que leur production est plus sensible aux variations des précipitations, mais leur impact tend à être moins perturbant pour l’environnement. Le changement climatique provoque déjà des sécheresses et des variations plus importantes des précipitations dans certaines régions, et suscite des inquiétudes dans les pays qui dépendent de l’hydroélectricité. Pour les petites communautés ou les communautés isolées disposant d’un approvisionnement local en eau courante, les microcentrales hydro-électriques (généralement de 5 à 100 kW) peuvent constituer une source d’électricité économique et leur permettre d’être autonomes. Dans le monde en développement, les microcentrales hydroélectriques abondent, par exemple dans les communautés isolées des Andes et de l’Himalaya, ainsi que dans les régions vallonnées des Philippines, du Sri Lanka et de la Chine. Les microcentrales hydro-électriques telles que la turbine hydraulique Garman peuvent être fabriquées localement et peuvent également compléter l’énergie solaire, puisque le débit des rivières est généralement plus élevé en hiver, lorsque l’ensoleillement est le plus faible.  63 

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LE POTENTIEL DE L’ÉNERGIE HYDRAULIQUE

La ressource hydro-électrique en Europe est assez bien exploitée, mais le potentiel de croissance ailleurs est considérable, notamment en Asie, en Amérique du Nord et du Sud et en Afrique, et sera favorisé dans certaines de ces régions par le faible coût de la main-d’œuvre. Environ 25 % du potentiel mondial de 15 000 TWh avaient été réalisés en 2015 et l’Agence internationale de l’énergie estime que l’électricité d’origine hydraulique doublera pratiquement d’ici 2050, principalement dans les pays en développement, pour atteindre environ 7 000 TWh par an, soit environ 15 % de la demande mondiale d’électricité prévue. Comme elles peuvent être activées ou désactivées selon les besoins, les centrales hydro-électriques peuvent contribuer à compenser les variations de production des parcs éoliens et solaires, tout comme l’augmentation prévue du nombre d’installations de stockage par pompage. Des pays montagneux comme la Norvège et l’Islande produisent une grande partie de leur électricité à partir de l’hydro-électricité, tout comme le Brésil et le Paraguay, qui se partagent la production de 14 gigawatts (1 GW = 1 000 MW) de la deuxième plus grande centrale hydro-électrique du monde, le barrage d’Itaipu. Ce barrage se trouve sur le fleuve Parana, qui est situé à la frontière entre les deux pays. Cependant, dans les pays où la ressource est moins abondante, l’hydro-électricité est principalement utilisée pour satisfaire les pics de demande. La production de nombreux systèmes hydro-électriques pourrait être augmentée d’environ 20 % par la rénovation et la modernisation, ce qui peut être plus rentable et socialement acceptable que de nouveaux grands projets. Les recherches visant à minimiser l’impact environnemental et social de l’hydro-électricité sont particulièrement importantes. Mais ces préoccupations doivent être mises en balance avec la nécessité de fournir de l’énergie pour améliorer le niveau de vie.

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4 L’énergie éolienne L’origine du vent est l’énergie venant du Soleil. Le rayonnement solaire est principalement absorbé par les terres et les mers, qui à leur tour chauffent l’air environnant. L’air chaud s’élève, et lorsque le réchauffement est inégal, ce mouvement peut créer un vent. Près d’une côte, la mer retient mieux la chaleur du Soleil que les terres. Ainsi, la nuit, après une journée ensoleillée, l’air chaud qui s’élève au-dessus de la mer attire l’air plus frais de la terre et génère un vent qui souffle vers la mer (voir figure 13). À l’échelle mondiale, la forte intensité solaire à l’équateur provoque l’ascension de l’air chaud et l’arrivée de l’air plus froid en provenance du nord et du sud. La rotation de la Terre fait que dans l’hémisphère nord, les vents dominants viennent du nordest ; dans l’hémisphère sud, ces vents viennent du sud-est : ces alizés se produisent dans les latitudes 30°. Au-dessus de ces latitudes, qui englobent approximativement l’Afrique, le mouvement d’air à grande échelle donne naissance aux vents d’ouest. La distribution réelle des vents est considérablement affectée par la position des continents et des océans, ainsi que par les saisons. Les vents sont forts et fiables dans de nombreuses régions, et c’est dans celles-ci que l’énergie du vent peut être le mieux exploitée. L’exploitation des ressources éoliennes pour la production d’électricité s’est réellement accélérée lorsque les prix du pétrole ont décollé fortement dans les années 1970. Au départ, de nombreux modèles différents d’éoliennes modernes à axe horizontal et vertical ont été étudiés. Celles à axe vertical peuvent avoir leurs générateurs plus près du sol, ce qui facilite la maintenance, mais perdent alors l’avantage des vents plus forts qui se produisent à de plus grandes hauteurs.  65 

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air rafraîchi vent terre

mer

air réchauffé

Fig. 13   Vent offshore côtier la nuit.

Pour les grandes machines, leur rentabilité n’était pas aussi bonne que celles à axe horizontal : la forme de leurs pales était moins efficace et elles avaient tendance à être plus lourdes et donc plus coûteuses. Les machines à axe horizontal sont désormais le modèle dominant pour les grandes puissances. LES ÉOLIENNES MODERNES

Une éolienne moderne typique comporte trois pales montées sur un arbre à vent horizontal, chacune mesurant environ 60 m de long, qui entraînent un générateur d’électricité monté au sommet d’une tour. La tour mesurant environ 100 m de haut, soit plus ou moins la hauteur d’un immeuble de trente étages, la machine éolienne est donc énorme. Chaque pale a une section transversale en forme d’aile et, tout comme l’air qui s’écoule au-dessus d’une aile d’avion génère de la portance, les pales de l’éolienne subissent la force du vent qui passe au-dessus d’elles et les fait tourner. Le vent perd de la vitesse en poussant les pales, à mesure que l’énergie est extraite, ce qui rend le vent plus lent sous le vent du mât. Les pales sont suffisamment larges pour extraire une bonne partie de la puissance du vent, mais pas au point de constituer un obstacle important, car la plupart du vent serait alors dévié autour de l’éolienne par la pression de l’air devant les pales, au lieu de pousser les pales. Le fait d’avoir trois pales sur une turbine permet d’obtenir une rotation équilibrée et de bonnes performances.  66 

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On pourrait croire que les pales d’une éolienne se déplacent lentement, mais bien qu’elles ne tournent qu’à environ vingt tours par minute, leur longueur signifie que la vitesse des extrémités des pales est très rapide – environ 125 m par seconde, soit 450 km par heure (ou 280 miles par heure). À ces vitesses, la largeur d’une pale près de son extrémité ne doit être que de quelques mètres pour une bonne extraction d’énergie. Pour une partie de la pale plus proche de l’arbre à vent, sa vitesse est plus lente, c’est pourquoi cette section est plus large. La pale est également torsadée de l’extrémité à la racine de la pale pour attraper le vent au bon angle afin de maximiser la puissance générée, car la direction du flux d’air sur la pale varie sur sa longueur. En un point de la pale située à environ un dixième de son extrémité, la vitesse de la pale est égale à la vitesse du vent et le flux d’air est à 45° par rapport à la direction du vent ; encore plus loin le long de la pale, le flux d’air forme un angle plus important. Les pales sont orientées dans le vent par un système motorisé, et sont généralement fabriquées en matériaux composites en raison de leur légèreté et de leur résistance. Dans les premiers moulins à vent hollandais, les voiles étaient soutenues par du bois, qui est un composite naturel dans lequel les fibres de cellulose sont noyées dans la lignine. Siemens a produit des pales de 75 m de long pour des turbines offshore à partir de balsa et de fibres de verre renforcées par de la résine époxy. Les fibres de verre lui confèrent une grande résistance, car elles sont suffisamment fines pour ne pas présenter les défauts qui affaiblissent normalement le verre en vrac. Le polymère qui les entoure transfère les charges aux fibres et les protège. Outre leur solidité, les composites présentent une excellente résistance à la rupture par fatigue. La fatigue implique l’apparition et la croissance de fissures dans un matériau soumis à des cycles répétés de contraintes, à des niveaux qui peuvent être considérablement inférieurs au point de rupture du matériau. Lorsque les pales d’une turbine tournent, elles fléchissent sous leur poids, dans un sens puis  67 

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Fig. 14    Une éolienne de 8 MW avec des pales de 88 m de long en composite de fibres de carbone et de verre. Elle est installée à Bremerhaven, en Allemagne, où elle peut fournir de l’électricité à environ 10 000 foyers.

dans l’autre, et elles doivent pouvoir effectuer environ cent millions de révolutions au cours d’une durée de vie estimée à vingt ans, la résistance à la fatigue est donc essentielle. Les pales étant le composant le plus coûteux d’une éolienne, une grande partie de la recherche et du développement est consacrée à l’amélioration des composites ; par exemple, la combinaison de fibres de verre et de carbone dans une pale peut donner des performances suffisamment améliorées pour compenser largement l’augmentation du coût de la pale (cf. figure 14). L’énergie maximale est généralement générée lorsque l’éolienne est soumise à un vent d’environ 12 m par seconde (43 km/h), ce qui correspond à un « vent frais » sur l’échelle de Beaufort, c’est-à-dire, des conditions suffisamment venteuses pour qu’il soit difficile de tenir un parapluie. Une éolienne dotée de pales de 60 m de long produirait alors environ quatre mégawatts (4 000 kW), ce que l’on appelle la « capacité » de l’éolienne. La puissance d’un vent dépend du cube de sa vitesse, ainsi, lorsque la vitesse du vent est divisée par deux, seul  68 

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un huitième (½×½×½) de la puissance est généré, d’où l’importance de choisir des sites bien exposés aux vents. Les vents de la force d’un ouragan peuvent avoir des vitesses supérieures à 70 m par seconde et peuvent donc avoir une puissance 200 fois supérieure à celle d’un « vent frais », c’est pourquoi ils peuvent être si dévastateurs. Pour éviter d’endommager une éolienne en cas de coup de vent, les pales sont tournées de manière à ne pas attraper le vent, et des freins sont appliqués pour arrêter toute rotation des pales. DÉPLOIEMENT DES ÉOLIENNES

Les éoliennes individuelles, grandes et petites, peuvent être utilisées pour fournir de l’électricité aux foyers ou à une communauté. Un positionnement élevé est particulièrement important pour les petites éoliennes (une hauteur de 30 m ou plus est préférable) car, pour être économique, la vitesse moyenne du vent doit être d’au moins 5 m/s et les turbulences doivent être faibles pour que les pales soient efficaces. Le nombre de petites éoliennes d’une puissance inférieure à 50 kW est en augmentation, avec plus d’un million d’éoliennes estimées dans le monde à la fin de 2015 ; environ deux tiers d’entre elles se trouvent en Chine et un cinquième aux États-Unis. Elles peuvent être déployées dans les zones rurales hors réseau pour fournir de l’électricité ou pour pomper de l’eau ; et peuvent remplacer les générateurs diesel ; bien que la concurrence des panneaux photovoltaïques puisse affecter la croissance dans certains endroits. PARCS ÉOLIENS

Les éoliennes destinées à la production d’électricité à grande échelle sont généralement déployées dans des parcs éoliens, qui sont des réseaux de turbines. Ceux-ci sont situés dans des régions où les conditions de vent sont bonnes, comme les crêtes exposées, les plaines de haute altitude, les cols de montagne, les zones côtières  69 

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et en mer. Les turbines sont placées suffisamment loin les unes des autres pour ne pas se gêner mutuellement. Pour des turbines d’une capacité de 5 MW, cela signifie qu’elles doivent être espacées d’environ 1 km sous le vent et de 2 ou 3 km sous vent oblique. Les grands mâts sont favorables, car la vitesse du vent augmente avec la hauteur par rapport au sol (ou à la mer), et peut être 30 % plus rapide à 100 m de hauteur qu’à 10 m. La surface de terrain nécessaire pour un parc éolien d’une capacité de 1 000 MW est d’environ 125 km2, les terres situées entre les éoliennes restant disponibles pour le pâturage ou les cultures. En tout lieu, la vitesse du vent est variable, de sorte que la production d’un parc éolien est une fraction de ce que sa capacité est prévue comme production. Cette fraction, le « facteur de capacité », est plus élevée pour les parcs en mer, car les conditions de vent y sont généralement meilleures que sur terre ferme, et est généralement de l’ordre de la moitié, alors que pour les parcs terrestres, les facteurs de capacité sont d’environ un tiers. Un parc éolien couvrant environ 30 km2 de mer fournit 1 TWh d’électricité en un an, soit suffisamment d’électricité pour environ 300 000 foyers européens. Sur terre ferme, la surface correspondante est d’environ 50 km². LES ÉOLIENNES OFFSHORE

Dans les pays à forte densité de population, les sites en mer, s’ils sont disponibles, sont plus acceptables que ceux sur terre, car les turbines sont alors moins visibles. En outre, les éoliennes en mer peuvent être beaucoup plus grandes, les pales étant fabriquées suffisamment près d’un port pour que leur taille ne soit pas limitée par la largeur des routes lors de leur transport de l’usine au site (cf. figure 15). Des capacités allant jusqu’à 15 MW sont prévues pour les éoliennes offshore dans les années à venir. Les zones côtières ont été privilégiées pour les parcs éoliens en mer, car l’eau est moins profonde et les tours d’éoliennes sont moins chères.  70 

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Fig. 15    Transport d’une pale de 88,4 m de long pour une turbine offshore de 8 MW.

L’accès au réseau électrique est également plus facile. Ces dernières années, des progrès impressionnants ont été réalisés en matière de fondations pour les turbines offshore. Les « monopiles », qui sont des tubes d’acier enfoncés d’environ 10 m ou plus dans le fond marin, ont été largement utilisées en mer du Nord pour soutenir les turbines. Au début des années 2000, ces monopiles avaient généralement un diamètre de 2 à 4 m dans des eaux d’une profondeur de 15 m, en 2018, elles avaient atteint un diamètre de 10 m dans des eaux d’une profondeur de 40 m. Les turbines ne doivent pas obstruer les voies de navigation ni interférer avec les installations radar, mais même avec ces restrictions, des zones considérables de sites appropriés sont encore disponibles près de la côte. La totalité de la demande d’électricité du Royaume-Uni, soit 300 TWh par an, pourrait être satisfaite par des parcs éoliens en mer qui n’occuperaient qu’environ 5 % de la zone maritime située à moins de 50 km de la côte. Si les parcs éoliens étaient situés à terre, 15 000 km² seraient nécessaires, soit un peu plus de 6 % de la superficie du Royaume-Uni.  71 

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En plus de profiter des vents généralement meilleurs plus au large, les éoliennes montées sur des plateformes flottantes peuvent être ancrées en mer juste au-delà de l’horizon, donc hors de vue de la terre. Elles peuvent néanmoins être proches des centres de demande, puisque quelque 40 % de la population mondiale vit à moins de 100 km d’un littoral. Le premier parc éolien flottant au monde, le parc Hywind de Statoil, est situé dans des eaux de 90 à 120 m de profondeur à 25 km au large du port de Peterhead (Aberdeenshire) en Écosse, et se compose de cinq éoliennes de 6 MW pouvant fournir de l’électricité à plus de 20 000 foyers. Elle est entrée en production en octobre 2017 et un facteur de capacité de plus de 60 % a été atteint. Un tel pourcentage élevé signifie que l’électricité est plus susceptible d’être disponible lorsque la demande est élevée, et facilite l’intégration de la production des fermes dans un réseau. Couplé à ce parc, un magasin de batteries au lithium de 1,3 MWh (1 300 kWh), appelé Batwind, d’une puissance maximale de 1 MW, peut être utilisé pour aider à lisser la variabilité de la production éolienne, ajoutant ainsi de la valeur à l’électricité produite. La ferme Hywind utilise une plateforme de bouée à espar, développée d’abord pour l’extraction du pétrole en eaux profondes. Tirant son nom des rondins qui étaient amarrés et flottaient verticalement, une bouée-espar est un long cylindre vertical creux dont l’extrémité inférieure est chargée de lest, de sorte que l’autre extrémité se trouve juste au-dessus de l’eau. Une ailette en spirale est fixée à l’extérieur du cylindre pour réduire les vibrations induites par le courant d’eau, comme sur les grandes cheminées, installées pour la même raison. La longueur de l’espar la rend très résistante à l’inclinaison et la bouée à espar constitue une excellente base pour la plateforme supportant la tour d’une éolienne. La conception de la bouée à espar peut être utilisée jusqu’à 800 m de profondeur, ce qui ouvrirait une énorme ressource d’énergie éolienne dans le monde entier. Dans les eaux européennes, il y a suffisamment de vent pour répondre à la demande totale d’électricité en Europe, tandis qu’au large des États-Unis, dans  72 

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un rayon de 200 milles nautiques, il est possible de produire environ deux fois la demande américaine. IMPACT ENVIRONNEMENTAL

L’énergie éolienne n’entraîne pratiquement aucun réchauffement de la planète ni de pollution ; seule une petite quantité d’émissions de CO2 est associée aux combustibles fossiles utilisés pour la construction et l’exploitation des parcs éoliens. Et il faut moins d’un an à un parc éolien pour générer la même quantité d’énergie que celle utilisée pour sa fabrication. Le bruit des éoliennes n’est généralement gênant que lorsque les éoliennes sont proches des zones bâties. L’impact visuel des parcs éoliens sur le terrain suscite quelques inquiétudes au RoyaumeUni, alors qu’en Allemagne, où la densité de population est similaire, ce problème ne se pose pas. Cela s’explique probablement par le fait que la plupart des parcs éoliens sont détenus par des communautés, plutôt que par des sociétés commerciales, et que les résidents locaux bénéficient d’une fraction des revenus annuels du parc. Dans les pays plus vastes et moins peuplés, comme les États-Unis, il est plus facile de trouver des emplacements appropriés à l’abri des regards. En plus d’être plus rentables, il a été constaté que quelques grandes turbines sont plus acceptables visuellement que de nombreuses petites. Les éoliennes représentent une petite menace pour les oiseaux, mais une étude préliminaire menée aux États-Unis a montré que le nombre de décès d’oiseaux par TWh généré par les éoliennes était de 270, soit beaucoup moins que les 5 200 décès d’oiseaux par TWh d’électricité dus à la pollution émise par les centrales à combustibles fossiles. Si l’on extrapole pour le Royaume-Uni, environ 15 000 oiseaux sont tués par an par les parcs éoliens ; pour mettre ce chiffre en perspective, on estime que quelque 55 millions d’oiseaux sont tués par des chats au Royaume-Uni chaque année. Ainsi, même s’il est important de placer les parcs éoliens loin des voies de vol migratoires ou des habitats clés, les parcs éoliens ne représentent pas un danger  73 

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significatif pour les oiseaux. Le changement climatique constitue une menace à long terme bien plus importante pour les oiseaux. LE COÛT DE L’ÉNERGIE ÉOLIENNE

La croissance mondiale du nombre de turbines depuis les années 1980 a entraîné une baisse constante du coût de l’électricité d’origine éolienne. Cette baisse est due aux économies d’échelle et aux améliorations technologiques. En particulier, les facteurs de capacité ont été augmentés en utilisant des pales plus longues pour améliorer la production d’électricité à des vitesses de vent plus faibles. Cette baisse des coûts liée à l’augmentation de la capacité mondiale est un phénomène que l’on observe dans un large éventail de technologies. Pour les nouvelles technologies telles que les éoliennes, on constate que les coûts diminuent d’environ 20 % pour chaque doublement de la capacité totale ; ce pourcentage de réduction est appelé « taux d’apprentissage ». Ce phénomène a été identifié pour la première fois dans la fabrication des avions dans les années 1930. Pour l’énergie éolienne terrestre, le taux d’apprentissage était d’environ 19 % sur la période 1985-2014, et a vu les coûts passer d’environ 57 à 7 cents par kWh à mesure que la capacité cumulée passait d’environ 1 GW à 350 GW. En 2018, les offres commerciales faisaient état d’un chiffre de 3 à 5 cents par kWh dans plusieurs pays. L’éolien terrestre est donc désormais compétitif par rapport à la production à partir de combustibles fossiles dans de nombreuses régions du monde, une situation que l’on appelle la « parité réseau ». L’énergie éolienne en mer a connu une croissance très rapide dans les années 2010 – sur la période 2011-18, la capacité mondiale a été multipliée par six pour atteindre 23 GW, la plupart des nouvelles installations étant situées au large de l’Europe, dans la mer du Nord. Les turbines peuvent être plus hautes et plus grandes, ce qui permet de réaliser des économies d’échelle. L’Haliade-X de General  74 

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Electric, d’une capacité de 12 MW, avec des pales de 107 m de long, sera énorme, atteignant 260 m au-dessus de la mer, et sera opérationnel en 2022 (cf. figure 16). 324 m 260 m

160 m

Turbine 4 MW

Tour Eiffel

Turbine 12 MW Haliade-X

Fig. 16    La taille des éoliennes terrestres et offshore modernes.

Les coûts de construction en mer sont plus élevés que sur terre, car l’environnement marin peut être rude, et les lignes de transmission sous-marines sont coûteuses. Mais le développement et le déploiement significatif de très grandes turbines font baisser les coûts, grâce aux nouvelles technologies, comme l’impression 3D pour le prototypage des pièces, et l’utilisation de drones pour l’inspection des éoliennes. Grâce au soutien apporté aux raccordements au réseau, l’électricité produite par les parcs éoliens en mer situés à proximité des côtes devrait être aussi bon marché que celle produite par les générateurs à combustible fossile d’ici le début des années 2020, et par les parcs éoliens flottants d’ici 2030. Le prix de l’électricité dépend du coût du financement d’un parc éolien. Les revenus du parc doivent couvrir les coûts de construction, d’exploitation et de maintenance. Ils doivent également couvrir les intérêts qui auraient été perçus par le capital utilisé pour la  75 

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construction pendant la durée de vie des turbines, généralement vingt ans. Le taux d’intérêt, appelé « taux d’actualisation », a un effet marqué sur le prix de l’électricité ; par exemple, une baisse du taux de 12 à 4 % pourrait faire baisser le prix de près de 40 %. Une fois la parité réseau atteinte et l’énergie éolienne parvenue au même tarif que celle produite à partir de combustibles fossiles, les taux d’intérêt sont susceptibles d’être moins élevés, car le risque financier du projet est réduit, puisque aucune subvention n’est nécessaire. Avec la poursuite du déploiement en mer et sur terre, les prix devraient encore baisser. La production des parcs éoliens est variable et la gestion de cette variabilité entraîne des coûts. Ceux-ci dépendent de la combinaison des producteurs d’électricité, de l’interconnexion avec les différentes régions, de la quantité de stockage d’énergie disponible et de la capacité à faire varier la demande en fonction de l’offre. LE POTENTIEL ÉOLIEN MONDIAL

Quelle est l’énergie maximale que le vent pourrait produire en une année à partir de parcs éoliens situés dans toutes les zones appropriées sur terre et dans les eaux côtières ? Le National Renewable Energy Laboratory américain a calculé qu’elle serait d’environ 560 000 TWh pour les parcs terrestres et d’environ 315 000 TWh pour les parcs situés à moins de 200 milles nautiques des côtes. Dans ces estimations, il a été envisagé d’espacer les éoliennes pour obtenir une capacité de 5 MW par km². Cela convient à la taille et à l’espacement des parcs éoliens actuels, mais si les parcs éoliens couvraient une fraction substantielle des zones appropriées, l’espacement devrait être plus grand pour que les vents restent élevés dans les parcs éoliens. La quantité exacte dépend de leur déploiement et fait encore l’objet d’études, mais il se pourrait que la production totale soit réduite à environ 175 000 TWh, ce qui permettrait toutefois de répondre à la demande totale d’énergie finale dans le monde, soit environ 100 000 TWh par an.  76 

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Pour que les éoliennes produisent de l’électricité à un prix compétitif, la vitesse moyenne du vent doit être supérieure à environ 6 m par seconde (21 km/h) : une « jolie brise » qui soulève la poussière et déplace de petites branches. Les régions terrestres du monde où le vent est suffisamment fort pour installer des turbines sont illustrées à la figure 17. De nombreux pays ont des vents productifs, et les zones à fort potentiel sont les suivantes : l’Europe du Nord ; certaines parties du Moyen-Orient ; l’ouest et le nord de la Chine ; l’est et le nord-ouest de l’Afrique ; près de la pointe sud de l’Amérique du Sud ; et le centre de l’Amérique du Nord.

Carte des vents dans le monde (> 5 m/s) Vitesse moyenne du vent à une hauteur de 80 m 7 13 20 mph 3

6

9 m/s

Fig. 17    Carte mondiale de la vitesse du vent terrestre.

Les estimations des potentiels terrestres pour la Chine et les ÉtatsUnis satisfont très largement les besoins en électricité de chaque région, même si des ressources supplémentaires seraient nécessaires pour gérer la variabilité du vent. Les régions où les vents sont faibles comprennent l’Afrique centrale, la zone centrale nord de l’Amérique du Sud et certaines parties de l’Asie du Sud-Est.  77 

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PERSPECTIVES DE L’ÉNERGIE ÉOLIENNE

En 2018, la puissance mondiale installée des éoliennes était de 591 GW, ce qui a généré 4,6 % de la demande mondiale d’électricité (cf. figure 18). Dans certains pays, le pourcentage de la demande satisfaite par l’énergie éolienne est nettement plus élevé, comme au Danemark (43 %) et en Uruguay (33 %). Les quatre pays ayant les plus grandes capacités sont la Chine (207 GW), les États-Unis (97 GW), l’Allemagne (53 GW) et l’Inde (35 GW). La volonté de réduire la pollution due à la combustion du charbon a favorisé l’essor des parcs éoliens en Chine, mais la grande capacité éolienne surcharge le réseau de transport électrique et la capacité de transport affecte également la croissance en Inde. En Europe, l’installation de parcs éoliens en mer a connu une croissance rapide, et les parcs éoliens, sur terre et en mer, ont fourni 14 % de la demande d’électricité de l’UE en 2018. Ailleurs, l’énergie éolienne se développe rapidement. Capacité éolienne installée globale (en GW)

600 500 400 300 200 10 0

2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 Année Sur terre

Offshore (ou en mer)

Fig. 18    La capacité éolienne mondiale offshore en 2018 était de 23 GW, et augmente d’environ 25 % par an. Les quatre pays ayant les plus grandes capacités offshore en 2018 étaient le Royaume-Uni (8,3 GW), l’Allemagne (6,4 GW), la Chine (4,6 GW) et le Danemark (1,4 GW).

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La capacité éolienne mondiale augmente à un taux annuel de 15 % depuis 2010 (cf. figure 18). En 2016, le Conseil mondial de l’énergie éolienne a estimé un taux de croissance moyen de 7,5 % jusqu’en 2050, en supposant un engagement international fort pour atteindre les objectifs climatiques. Alors, environ 5 800 GW seraient installés, ce qui permettrait de générer environ 15 000 TWh par an. Cela constituerait une aide très importante pour réduire notre dépendance à l’égard des combustibles fossiles.

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5 Le photovoltaïque solaire En 1839, Edmond Becquerel a remarqué que l’illumination inégale par la lumière du Soleil d’électrodes plongées dans une solution générait un courant électrique. Mais ce n’est qu’en 1877 que cet effet, appelé photovoltaïque a été observé dans une cellule solide, fabriquée avec l’élément sélénium. Quelques années plus tard, en 1883, une cellule photoélectrique au sélénium en couche mince a été produite aux États-Unis par Charles Fritz. Mais elle était chère et son efficacité était très basse, avec seulement 1 % environ de l’énergie du Soleil convertie en électricité, ce qui n’était pas un moyen pratique de produire de l’énergie. Cet effet photovoltaïque a également été observé dans d’autres matériaux, mais les cellules photoélectriques qui ont été fabriquées à partir de ces matériaux avaient des rendements également très faibles. Ce n’est qu’après la découverte accidentelle d’un dispositif photovoltaïque en silicium par Russell Ohl en 1940 – dans les laboratoires Bell aux États-Unis – que des progrès significatifs ont commencé à être réalisés : la méthode de fabrication d’une barre de silicium par cristallisation lente a permis de trouver le bon type d’impuretés différentes aux deux extrémités d’une barre d’un pouce de long pour que l’action photovoltaïque soit observée, lorsque la barre était éclairée par une lampe de poche. Les améliorations apportées à la fabrication du silicium pour les transistors ont conduit en 1954 à une cellule dont le rendement était de 6 %, soit environ dix fois supérieur à celui des dispositifs antérieurs. Cette cellule, inventée par Daryl Chapin, Calvin Fuller et Gerald Pearson dans les laboratoires Bell, était considérée comme la première cellule solaire pratique.  81 

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Sa découverte a suscité un engouement considérable. Cependant, le coût de ces cellules ne les rendait pratiques que dans des applications de niche, comme les satellites. La recherche a permis de réduire les coûts dans les années 1980, favorisant l’application des panneaux photovoltaïques pour un usage terrestre. Les programmes encourageant l’installation de panneaux sur les toits dans les années 1990 et l’introduction de tarifs de rachat d’énergie dans les années 2000 ont généré une demande supplémentaire, le Japon et l’Allemagne ont d’ailleurs accéléré l’industrialisation de la production. La croissance annuelle moyenne depuis 2000 a été de près de 40 %, cette croissance a permis de réduire les coûts contribuant ainsi à augmenter la demande. La Chine a répondu à la croissance mondiale de la demande de panneaux solaires à la fin des années 1990 en commençant par fabriquer des panneaux pour le marché allemand. Puis, plus tard, son propre marché intérieur s’est développé, motivé par l’augmentation de la pollution causée par les centrales électriques au charbon et par les préoccupations relatives à la sécurité énergétique et au changement climatique. La Chine s’est concentrée sur la technologie dominante, le silicium cristallin, et le soutien du gouvernement, par le biais de prêts et d’incitations fiscales, a aidé les entreprises à construire de grandes usines semi-autonomes, ce qui a permis de réduire considérablement les coûts de fabrication. Au cours de la période 2006-2011 – qui a vu la production mondiale se déplacer du Japon, de l’Allemagne et des États-Unis vers la Chine – le coût des modules a été divisé par trois. Au cours des sept années 2011-2018, il a encore été divisé par 3,5. Depuis leur invention, il a fallu une soixantaine d’années pour que le rendement des cellules solaires au silicium passe à plus de 20 % et que leur coût soit divisé par plusieurs centaines, au point que l’électricité produite par les cellules photovoltaïques au silicium peut désormais être compétitive par rapport à celle produite par les combustibles fossiles. Il a fallu un développement considérable et une production  82 

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de masse pour y parvenir, car le traitement du silicium pour former une cellule solaire est complexe. Les cellules en silicium représentent aujourd’hui environ 95 % de toutes les cellules solaires. Les autres sont basées sur d’autres matériaux photovoltaïques, comme l’arséniure de gallium et le tellurure de cadmium. LA FABRICATION DE CELLULES SOLAIRES AU SILICIUM

Pour obtenir de bons niveaux de performance, il faut obtenir du silicium pur comme matière première. Jusqu’en 1997, le silicium utilisé dans les cellules solaires provenait des déchets de l’industrie électronique. Mais avec l’augmentation de la demande mondiale, cet approvisionnement était insuffisant. De plus, la pureté requise pour les cellules solaires n’est pas aussi poussée que pour les composants électroniques, c’est pourquoi des usines spécialisées adaptées aux exigences des cellules solaires ont été créées. La principale méthode utilisée consiste à réduire le quartz (dioxyde de silicium) avec du carbone dans un four électrique. Le silicium est purifié chimiquement puis fondu, et une très petite quantité de bore est ajoutée pour obtenir ce que l’on appelle le silicium de type P. Pour produire les plaquettes destinées aux cellules, une tige de silicium monocristallin de type P d’environ 200 mm de diamètre et de 2 à 3 m de long est produite en retirant un petit cristal de silicium, qui sert d’amorce, d’un creuset de silicium fondu. La méthode a été découverte par accident par le chimiste Jan Czochralski en 1916, lorsqu’il a plongé accidentellement son stylo dans un creuset d’étain fondu, plutôt que dans un pot d’encre, et qu’il en a retiré un seul fil de cristal d’étain. On peut également fabriquer des lingots de silicium multi-cristallins en cristallisant le silicium fondu ; ce procédé est moins coûteux, mais donne des cellules légèrement moins efficaces, car il y a plus de défauts.  83 

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Le barreau (ou lingot) de silicium de type P est ensuite découpé en fines tranches, d’une épaisseur d’environ 170 microns (2 feuilles de papier), à l’aide de fils imprégnés de diamant. Les surfaces avant des plaquettes sont texturées pour réduire la réflexion. Du phosphore est ensuite diffusé sur une très courte distance à l’intérieur de la plaquette pour y créer une très fine région superficielle de ce que l’on appelle le cdf. Ensuite, toutes les couches, à l’exception de la couche supérieure de type-n, sont gravées et un revêtement antireflet est appliqué. Enfin, des contacts sont ajoutés en sérigraphiant de la pâte d’argent sur la surface supérieure pour créer des électrodes à lignes fines, qui minimisent l’ombrage en ne couvrant qu’une petite fraction de la surface, et en appliquant une couche d’aluminium sur la surface arrière. Les surfaces sont également traitées pour optimiser la collecte des charges. Le défi de la fabrication des cellules a consisté à adapter les techniques qui nous permettent d’obtenir le meilleur rendement dans un laboratoire de recherche, à des méthodes peu coûteuses qui conviennent à la production de masse. FONCTIONNEMENT DES CELLULES SOLAIRES AU SILICIUM

Une cellule solaire au silicium est constituée d’une épaisse couche de type p, sur laquelle se trouve une très fine couche de type-n (cf. figure 19) où certains électrons sont libres de se déplacer à partir des atomes de phosphore de la région. Ces électrons se déplacent dans la région de type P où ils sont piégés par les atomes de bore. Cela crée un champ électrique interne à la jonction des deux régions – cette jonction p-n est cruciale pour le fonctionnement de la cellule. (Le p et le n font référence aux bornes positives et négatives dans les premières expériences). Lorsque la lumière du soleil tombe sur une cellule de silicium, certains électrons de la région de type P absorbent l’énergie de la lumière et deviennent libres de se déplacer dans la tranche. Lorsque ces  84 

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électrons entrent dans le champ électrique interne, ils sont entraînés dans la région de type n. L’accumulation d’électrons dans cette région produit un « effet de serre » local. L’accumulation d’électrons dans cette région produit une différence de potentiel qui, comme dans une batterie, peut faire passer un courant dans un appareil (cf. figure 19). Une énergie minimale, 1,1 électronvolt (eV), est nécessaire pour libérer les électrons, ce qui détermine la tension maximale que la cellule peut produire, soit environ 0,7 volt pour les cellules au silicium. Rayons du Soleil Contact en argent

Courant

Couche anti-reflet Couche type-n de 0,3 µm Appareil

Couche type-p de 170 µm Contact en aluminium Courant

Fig. 19    Schéma d’une cellule solaire au silicium alimentant un appareil.

En 1905, Albert Einstein a découvert que la lumière ne se comporte pas seulement comme une onde, mais aussi comme des particules, les photons, dont l’énergie est proportionnelle à la fréquence de la lumière incidente. Pour cette découverte, il fut récompensé par le prix Nobel de physique en 1921. La lumière du soleil est composée d’une gamme de fréquences. Lorsqu’elle illumine une cellule solaire en silicium, les photons – transportant environ 25 % de l’énergie solaire – n’ont pas assez d’énergie pour libérer des électrons. Ceux qui en ont suffisamment transfèrent toute leur énergie. Tout excédent d’énergie que possèdent les électrons, au-delà de celle nécessaire pour les libérer,  85 

  Les énergies renouvelables  

est perdu sous forme de chaleur, ce qui explique que les électrons ne puissent pas être libérés. Cette perte représente environ 30 % de l’énergie solaire. Une autre perte inévitable d’environ 15 % est due aux électrons qui perdent de l’énergie en émettant de la lumière ; en additionnant ces pertes, on obtient un rendement théorique maximal pour une cellule solaire au silicium d’environ 30 %. Le meilleur rendement obtenu en 2018 a été de 26,7 %, ce qui donne la mesure du développement réalisé. Le rendement le plus élevé pour une cellule solaire au silicium est proche du meilleur rendement que l’on pourrait obtenir avec une seule cellule à jonction p-n. Les matériaux photovoltaïques qui nécessitent plus d’énergie pour exciter les électrons donnent une tension plus élevée mais un courant plus faible, car seule une petite fraction des photons de la lumière solaire a suffisamment d’énergie pour libérer les électrons ; tandis que ceux qui nécessitent moins d’énergie donnent un courant plus élevé mais une tension plus faible. Comme la puissance de sortie est le produit de la tension et du courant, il existe une valeur optimale pour l’« énergie de séparation » qui est proche de celle du silicium. Les cellules solaires ont généralement une superficie d’environ 240 cm2 et, comme elles sont très fragiles, une soixantaine d’entre elles sont montées ensemble entre des feuilles de verre dans un cadre en aluminium pour former un module solaire. Les cellules sont connectées en série, ce qui donne une tension de fonctionnement d’environ 36 volts. Un ou plusieurs modules constituent un panneau solaire. Le rendement d’un panneau solaire est déterminé par l’intensité de la lumière du soleil. Par temps nuageux, il est réduit à environ un dixième ou un tiers de ce qu’il est par temps clair et ensoleillé. Sous les tropiques, l’intensité maximale est proche de 1 kilowatt par mètre carré ; les rendements typiques sont de 21 %, de sorte qu’un panneau ayant une surface de cellules de 1,44 m2 produirait 300 watts (1 000 × 0,21 × 1,44).  86 

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ÉVOLUTION DE LA TECHNOLOGIE DES CELLULES SOLAIRES

L’une des façons disponibles pour améliorer le rendement consiste à utiliser les deux surfaces d’une cellule solaire en silicium. Ces cellules bifaciales convertissent la lumière réfléchie sur la surface arrière en remplaçant le contact en aluminium par une grille en aluminium, ainsi que l’éclairage sur la surface supérieure de la cellule. En montant ces cellules à environ un mètre au-dessus d’une surface réfléchissante, comme des pierres de couleur claire ou du béton peint en blanc, on peut augmenter le rendement jusqu’à 30 % et produire potentiellement de l’électricité moins chère. Les cellules solaires peuvent également être fabriquées à partir de films très fins de certains matériaux photovoltaïques, potentiellement beaucoup moins chers que les cellules en silicium puisqu’ils utilisent beaucoup moins de matériaux. Ce type de cellules a pu être désavantagé par la chute rapide du coût des cellules en silicium, mais certaines pourraient s’avérer très efficaces. L’une d’entre elles est la cellule solaire en pérovskite, dont le rendement s’est considérablement amélioré, passant de moins de 5 % en 2009 à plus de 24 % en 2019. Les pérovskites sont des cristaux ayant la même structure que l’oxyde de calcium et de titane, et d’excellentes cellules ont été fabriquées avec la pérovskite et de la trihalogénure de plomb méthylammonium. Elle absorbe les photons avec une énergie supérieure à 1,6 électron-volt (eV) et ne doit avoir qu’un tiers de micron d’épaisseur, ce qui est beaucoup plus fin qu’une cellule en silicium. L’énergie d’absorption peut être modifiée en changeant la composition de la pérovskite. Le film mince de pérovskite peut être simplement appliqué, ce qui devrait permettre de réduire les coûts de production, que ce soit sur des surfaces solides ou flexibles, et il est déjà prévu de commercialiser ces cellules. Elles peuvent également être utilisées pour améliorer l’efficacité d’une cellule solaire au silicium, ce qui pourrait constituer une  87 

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application particulièrement rentable. Pour ce faire, on applique une couche de pérovskite sur la cellule en silicium. Dans une telle cellule à double jonction p-n (tandem), les photons dont l’énergie est comprise entre 1,1 eV et 1,6 eV sont absorbés par le silicium, tandis que ceux dont l’énergie est supérieure à 1,6 eV sont absorbés par la pérovskite. La cellule tandem fonctionne comme deux batteries en série, la jonction supérieure délivrant du courant à une tension de 1,2 volt, la jonction inférieure à 0,7 volt. Le courant est environ deux fois moins important que celui d’une seule cellule au silicium, mais la tension de 1,9 volt est plus de deux fois supérieure, donc le rendement pourrait passer d’environ 22 % à 30 %. En décembre 2018, une cellule solaire tandem pérovskite-silicium, fabriquée par la société Oxford PV, a atteint un rendement de 28 % – plus élevé que le rendement record du silicium à jonction unique de 26,7 %. Comme le gain d’efficacité devrait être bien supérieur à l’augmentation du coût de l’ajout de la couche de pérovskite, le coût de l’électricité produite par ces cellules tandem pourrait être nettement inférieur à celui de l’électricité produite par les cellules à jonction unique. La société, en collaboration avec l’université d’Oxford, étudie également la possibilité de fabriquer une cellule solaire à triple jonction à faible coût, avec trois couches de pérovskite différentes qui absorbent des photons d’énergies différentes, qui pourrait avoir un rendement de 37 %. Un autre domaine dans lequel des progrès sont réalisés est la fabrication de cellules solaires organiques à couche mince sur des substrats plastiques flexibles. Si la technologie d’impression peut être utilisée, de vastes zones de cellules solaires pourraient être produites rapidement et à moindre coût (comparables à l’impression des journaux). Ces cellules peuvent avoir un aspect coloré, ce qui peut être attrayant sur les bâtiments. À l’heure actuelle (2019), les cellules à jonction simple ont des rendements supérieurs à 16 %, et les cellules en tandem à 17,3 %. Les modules pèsent environ 0,5 kg, contre environ 11 kg par m² pour les panneaux en silicium. Avec les économies d’échelle, ils pourraient  88 

  Le photovoltaïque solaire  

s’avérer un complément précieux, par exemple pour les habitations fragiles des bidonvilles. L’IMPACT ENVIRONNEMENTAL

Les panneaux solaires photovoltaïques ne produisent aucun polluant, aucun gaz à effet de serre et constitue un moyen sûr de produire de l’électricité. Il n’y a pas de pièces mobiles, ce qui réduit l’entretien et n’entraîne pas non plus de pollution sonore, et aucune eau n’est nécessaire (sauf pour le nettoyage). Lors de la production, certaines matières dangereuses sont utilisées, mais les quantités sont faibles. Avec des mesures de protection et des réglementations efficaces, les risques liés à la fabrication de panneaux solaires peuvent être maintenus à un niveau très faible et acceptable. En Europe, il faut entre un an et deux ans et demi, selon le lieu, pour produire la même quantité d’énergie que celle utilisée pour fabriquer les panneaux. Pour l’instant, la production fait essentiellement appel à des combustibles fossiles ; mais comme les panneaux durent trente ans ou plus, l’empreinte carbone de leur production d’électricité ne représente qu’environ 10 % de celle des centrales à turbine à gaz, et ce pourcentage diminuera au fur et à mesure que l’énergie sera produite à partir de sources renouvelables. Toutefois, la plupart des panneaux sont aujourd’hui produits en Chine, où l’électricité provient encore principalement de centrales électriques au charbon, et ces dernières ont une empreinte carbone environ deux fois plus élevée que celles construites en Europe. Dans les régions bien ensoleillées, une superficie d’environ 15 km² de terrain est nécessaire pour produire un TWh par an, ce qui permettrait d’alimenter environ 300 000 foyers européens (à titre de comparaison, il faudrait environ 50 km² de terrain à un parc éolien pour produire cette même quantité d’électricité). Un parc de panneaux photovoltaïques couvrirait une bonne partie de cette superficie,  89 

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contrairement à un parc éolien où les turbines sont espacées. Toutefois, son impact sur la production agricole peut être réduit en utilisant des terres de moindre qualité, comme les friches industrielles ou les zones désertiques. Son impact visuel peut également être atténué par l’intégration de panneaux photovoltaïques dans les bâtiments, ce qui permet de réaliser des économies en réduisant les quantités de matériaux de construction classiques nécessaires : il existe désormais des modules ressemblant à des tuiles et certains peuvent être appliqués sur les fenêtres. Les parcs solaires ne doivent pas nécessairement être construits sur la terre ferme : des installations flottantes sont également en cours de développement. La Chine a construit un parc solaire photovoltaïque de 40 MW sur un lac. Cette solution présente l’avantage de ne pas avoir d’incidence sur l’utilisation des terres et de maintenir l’efficacité, car les panneaux ne surchauffent pas. Les sites côtiers pourraient également être utilisés. L’ÉCONOMIE DES CELLULES SOLAIRES EN SILICIUM

L’évolution la plus significative des cellules solaires au cours des douze années 2006-2018 a été la chute spectaculaire de leur coût, divisé par onze environ (cf. figure 20). Le coût est celui d’un module dont la surface en plein soleil (1 kilowatt/m²) produirait un watt de puissance, appelé un Watt-crête (Wc). Le coût est passé d’environ 3,50 dollars à 0,3 dollar par Watt-crête, de sorte qu’un module qui produit 300 watts en plein soleil aurait coûté environ 90 dollars en 2018. Environ 95 % des modules sont basés sur le silicium. Si les rendements sont passés de 15 % à 21 % au cours de la dernière décennie, les coûts ont principalement diminué grâce à l’utilisation de matériaux plus fins. L’utilisation de tranches plus minces, l’application d’une quantité moindre d’argent, le développement de processus à haut volume et  90 

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les économies d’échelle ont permis de réduire les coûts. Le taux d’apprentissage, c’est-à-dire le pourcentage de réduction des coûts pour chaque doublement de la capacité mondiale, a été de 24 %, comme le montre la figure 20. Ce chiffre est conforme à la loi de Swanson, qui prévoit une baisse en pourcentage de 20 %. Le coût d’un système de panneaux solaires dépend non seulement du coût des modules, mais aussi du coût des composants structurels et électriques, et de l’installation. Ces coûts d’équilibre du système sont aujourd’hui d’environ deux tiers pour les grands parcs photovoltaïques, où les coûts ont été réduits par l’utilisation de robots dans l’assemblage ; mais ils sont plus élevés pour les systèmes en zone résidentielle, mais où des économies peuvent, cependant, être réalisées en intégrant les panneaux aux bâtiments. 10

Prix du module (en €/Wp)

1985 10

1980

1990

1995 1

2005 2000

2010

Courbe d’apprentissage 24 % 2015

0,1 0,001

0,01

10 0,1 1 Production cumulée (en GWp)

100

1 000

Fig. 20    Courbe d’apprentissage des panneaux solaires 1980-2018.

Le coût de l’électricité dépend notamment de celui du système de panneaux solaires et de l’intensité solaire. Aux États-Unis, le coût de l’électricité à l’échelle du service public a été divisé par huit environ  91 

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au cours de la période 2009-2018 : les coûts sont passés d’environ 36 cents à 4,5 cents par kWh, et l’électricité est désormais moins chère que celle produite à partir du charbon, et à peu près la même que celle produite à partir du gaz ; les coûts de ces centrales à combustibles fossiles sont de l’ordre de 4 à 14 cents par kWh. Cependant, la production des parcs photovoltaïques est variable et la gestion de cette variabilité entraîne des coûts. Comme pour les parcs éoliens, ces coûts dépendent du mélange de producteurs d’électricité, de l’interconnexion avec les différentes régions, de la quantité de stockage d’énergie disponible et de la capacité à faire varier la demande en fonction de l’offre. Comme la quantité produite dépend de l’ensoleillement, le coût de l’électricité sera généralement plus élevé dans les régions et pays moins ensoleillés. Les subventions sont de moins en moins nécessaires pour promouvoir le photovoltaïque en raison de la baisse considérable de son coût, et les prix sont désormais fixés par le biais de ventes aux enchères. Grâce aux améliorations technologiques et à la concurrence que ces enchères encouragent, les prix sont tombés en 2018 à 2 ou 3 cents $US par kWh en Égypte, en Inde, en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis (Dubaï) et aux États-Unis (Texas). Les prix sont également favorisés par un faible coût d’emprunt et par des politiques de soutien favorables. Il semble tout à fait possible que d’ici 2030, des prix de 2 à 4 cents US par kWh soient répandus dans le monde entier. LE POTENTIEL GLOBAL DE L’ÉNERGIE SOLAIRE PHOTOVOLTAÏQUE

La figure 21 montre une carte mondiale de la quantité annuelle d’énergie solaire par m² qui tombe sur une surface fixe, inclinée à peu près au même angle que celui de la latitude du site pour capter au mieux la lumière directe du soleil, et orientée plein sud ou plein nord dans les hémisphères nord ou sud, respectivement. Pour les  92 

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installations fixes, les panneaux solaires sont orientés de manière similaire pour une collecte optimale de la lumière. Le photovoltaïque pourrait contribuer de manière significative à satisfaire la demande d’électricité dans presque toutes les régions peuplées. Comme on peut le constater, la variation de l’ensoleillement entre les pays des tropiques et ceux d’Europe centrale est d’un facteur sur deux environ. Dans le sud-ouest des États-Unis, les niveaux d’ensoleillement sont tels qu’environ 1 700 kWh pourraient être produits annuellement pour chaque kWc de panneaux ; au Bangladesh et au Nigeria, 1 400 kWh ; en Espagne et au Japon, 1 300 kWh, tandis qu’en Allemagne, ce chiffre est d’environ 925 kWh. Ces quantités sont souvent exprimées comme la fraction de ce qu’un panneau de 1 kWc produirait en un an s’il fonctionnait tout le temps (c’est-à-dire 8 760 kWh), et sont alors appelées « facteurs de capacité ». Ainsi, dans le sud-ouest des États-Unis, les facteurs de capacité sont d’environ 19 %, et en Allemagne de 11 %. Ces valeurs se reflètent dans le coût différent de l’électricité, qui était en 2018 d’environ 3 cents $US par kWh et 4,5 centimes d’euro par kWh, respectivement (1 € ≈ 1,1 $). Pour estimer la contribution potentielle du photovoltaïque à la demande énergétique d’un pays, il faut évaluer les zones appropriées. Pour les parcs solaires photovoltaïques, il faut exclure les zones urbaines, les forêts, les régions couvertes de glace, les zones protégées et les terrains montagneux. Seul un petit pourcentage de terres agricoles est approprié, avec des pourcentages de plus en plus importants de prairies, de zones stériles et de déserts. Une estimation récente du potentiel de production d’électricité des parcs couvrant ces zones est de 600 000 TWh par an, ce qui représente environ six fois la consommation finale d’énergie dans le monde. En outre, la quantité prévue de panneaux sur les toits pourrait être considérable : aux États-Unis, le National Renewable Energy Laboratory a estimé que 40 % de la demande actuelle d’électricité pourrait être satisfaite de cette manière.  93 

 94 

Fig. 21    Ensoleillement annuel moyen en kWh/m². La quantité est faible dans le centre-sud de la Chine où le temps est principalement nuageux et couvert.

500

1 000

1 500

2 000

2 500 kWh/m2

Total annuel d’ensoleillement

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LA CROISSANCE DES PANNEAUX SOLAIRES PHOTOVOLTAÏQUES

La capacité photovoltaïque est augmentée dans le monde entier par le biais de grands parcs, comme celle de la province de Qinghai en Chine (figure 22), qui peuvent avoir des capacités de plus de 500 MW. Les panneaux peuvent être montés sur des suiveurs solaires à axe unique, qui augmentent la production par rapport à une orientation fixe d’environ 20 %, (mais cela n’a pas d’intérêt lorsque les panneaux sont moins chers que les suiveurs). Une expansion régulière se produit également dans les systèmes résidentiels, où le coût de l’électricité produite par des installations domestiques en toiture est désormais souvent comparable aux tarifs de l’électricité du réseau aux États-Unis et en Allemagne.

Fig. 22    Panneaux photovoltaïques dans le parc solaire Qinghai Golmud en Chine.

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  Les énergies renouvelables  

Ces systèmes peuvent donner à leurs propriétaires la possibilité de revendre l’excédent de production au réseau, ce que l’on appelle la facturation nette, ou de le stocker dans des batteries pour l’utiliser le soir. Environ 40 % de la croissance de la capacité mondiale se fait dans des systèmes distribués, plutôt que dans des parcs solaires. Mais la facturation nette suscite des inquiétudes, car elle fait peser la charge de l’entretien du réseau sur ceux qui n’ont pas de panneaux solaires. Dans les pays en développement d’Asie et d’Afrique subsaharienne, les panneaux solaires ne se contentent pas de fournir de l’électricité aux réseaux. Ils permettent également de produire de l’électricité de manière décentralisée grâce à des installations solaires sur les toits et d’alimenter des mini-réseaux dans les régions où les réseaux sont inexistants ou de mauvaise qualité. Près d’un milliard de personnes (13 % de la population mondiale) n’ont toujours pas accès à l’électricité, principalement en Afrique subsaharienne (600 millions) et en Inde (200 millions). En Afrique subsaharienne les distances sont souvent si grandes que la construction d’un réseau serait très coûteuse, et même lorsqu’un village est raccordé à un réseau, le coût du raccordement pour un ménage est souvent inabordable. La chute rapide du coût des panneaux solaires a permis d’élargir l’accès à une électricité propre et abordable (cf. figure 23). De nombreux foyers disposent désormais de l’énergie solaire, avec des services énergétiques modernes fournis par des appareils et des éclairages LED de plus en plus efficaces et bon marché. Avec la baisse du coût des batteries, la cuisine à l’électricité sera de plus en plus accessible, et les générateurs diesel pour l’approvisionnement de nuit ne seront plus nécessaires. Le paiement de ces systèmes est facilité pour les personnes disposant de peu de capitaux par des systèmes de paiement à la consommation (PAYG) couplés à des services bancaires mobiles. Mais il n’est pas simple d’assurer le financement de ces initiatives, et l’électricité n’atteint pas encore les plus pauvres. Dans les pays où l’on procède à la fois à l’extension du réseau électrique et à l’extension hors réseau, il  96 

  Le photovoltaïque solaire  

convient d’assurer la complémentarité et la participation importantes des pouvoirs publics, comme c’est le cas, par exemple, au Nigeria. En Inde, les villes et la plupart des villages sont connectés à un réseau, qui leur fournit leur électricité.

Fig. 23    Panneau solaire rechargeant un téléphone portable au Malawi.

Si les villes et la plupart des villages indiens sont connectés à un réseau qui alimente en électricité leurs écoles et leurs institutions publiques, il y a souvent de nombreux foyers dans un village qui ne peuvent ou ne veulent pas être connectés, car l’approvisionnement est souvent peu fiable. Les foyers alimentés par l’énergie solaire et les mini-réseaux peuvent assurer un approvisionnement plus fiable dans de telles situations. Au Bangladesh, plusieurs millions de foyers disposent de systèmes solaires domestiques, dont beaucoup sur des  97 

  Les énergies renouvelables  

mini-réseaux qui permettent le commerce de l’électricité, en utilisant la blockchain pour assurer un échange sécurisé d’informations, ce qui contribue à équilibrer l’offre et la demande. PERSPECTIVES POUR LE SOLAIRE PHOTOVOLTAÏQUE

Le coût de la production d’électricité à partir de parcs photovoltaïques à l’échelle des services publics étant désormais moins élevé que celui des centrales à combustibles fossiles dans plusieurs régions du monde, les nouveaux générateurs sont de plus en plus photovoltaïques. En 2018, ceux-ci ont totalisé 100 GW, soit environ la même capacité que celle ajoutée par l’ensemble des générateurs non renouvelables. La Chine domine, avec environ un tiers de la capacité mondiale ; la Chine et l’Inde ont toutes deux des plans ambitieux d’expan­sion de la production photovoltaïque. Mais les deux pays doivent moderniser leurs réseaux pour accueillir leur production renouvelable croissante. La forte baisse du coût de la production solaire contribue déjà à déplacer la production au charbon, certains projets de centrales ayant été annulés, mais les deux pays continuent de construire des centrales au charbon, qui peuvent être plus faciles à mettre en service pour répondre à une demande locale accrue qu’un parc solaire, à moins que ce dernier ne dispose d’un stockage ou d’autres sources d’approvisionnement de secours. Dans d’autres pays, on assiste également à une expansion de l’énergie photovoltaïque (cf. figure 24), et comme le coût du stockage de l’énergie solaire a baissé, l’investissement dans les panneaux solaires et en parallèle dans le stockage va augmenter rapidement. En 2018, le solaire photovoltaïque a fourni 2,1 % de la demande mondiale d’électricité. Bien que ce chiffre soit encore faible, la production mondiale de panneaux solaires était d’environ 100 GW en 2018, et l’on estime qu’elle double tous les trois ans. L’Institut Fraunhofer a estimé en 2015 qu’il pourrait y avoir une capacité mondiale allant jusqu’à 15 000 GW générant 20 000 TWh par an d’ici 2050 ; et avec  98 

  Le photovoltaïque solaire  

des investissements massifs, ces quantités pourraient être doublées. Une telle croissance verrait le coût de l’énergie solaire photovoltaïque baisser encore plus et permettrait de fournir de l’électricité à des millions de personnes en Chine, en Inde, en Amérique du Nord et du Sud, en Afrique et ailleurs.

Capacité photovoltaïque installée dans le monde (en GWp)

500 450 400 350 300 250 200 150 100 50 0 2008

2010

2012 Année

Asie et Océanie Moyen Orient et Afrique

2014

2016

2018

Les Amériques Europe

Fig. 24    Capacité photovoltaïque installée dans le monde. En 2018, la Chine détenait 64 %, le Japon 20 % et l’Inde 10 % du marché de l’Asie et de l’Océanie, et les États-Unis 79 % du marché des Amériques.

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6 Autres technologies bas‑carbone Les énergies renouvelables traditionnelles (biomasse, chaleur solaire et hydroélectricité) pourraient fournir annuellement d’ici 2050 près de 30 000 TWh et, moyennant des investissements massifs, les éoliennes et les panneaux solaires pourraient générer respectivement 15 000 TWh et jusqu’à 40 000 TWh. Cela porterait l’offre totale d’énergie renouvelable à près de 85 000 TWh par an en 2050, soit environ 85 % de la consommation d’énergie aujourd’hui. Quelle pourrait être la contribution des autres énergies renouvelables, à savoir l’énergie marémotrice, l’énergie houlomotrice, l’énergie géothermique et les technologies à faible émission de carbone que sont l’énergie nucléaire et la capture du carbone ? L’ÉNERGIE MARÉMOTRICE

Les marées en mer sont dues à l’attraction gravitationnelle de la Lune sur les océans légèrement supérieure du côté le plus proche de la Terre et légèrement inférieure du côté le plus éloigné à l’attraction gravitationnelle nécessaire pour maintenir la Terre et la Lune en orbite l’une autour de l’autre. Par conséquent, le niveau de l’océan est un peu plus élevé de chaque côté (et un peu plus bas entre les deux), et le poids de l’eau soulevée compense la différence d’attraction. Lorsque la Terre tourne, ces renflements d’eau provoquent deux marées par jour, la variation du niveau de la mer, appelée amplitude de la marée, étant d’environ 0,5 m. L’attraction du Soleil augmente ou diminue l’amplitude d’environ 20 %, en fonction de sa position relative, pour donner les  101 

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marées de vives-eaux et de mortes-eaux. Cependant, lorsqu’une oscillation naturelle de l’eau de mer a une période correspondant à celle de la rotation de la Terre, l’amplitude peut être beaucoup plus grande. C’est le cas des marées dans le bassin atlantique, mais aussi dans certaines baies et estuaires. Si une baie a une forme d’entonnoir, cela augmente encore l’amplitude de la marée, car la largeur décroissante fait monter la marée montante et descendre la marée descendante. Les endroits où l’amplitude des marées est importante sont idéaux pour installer les centrales marémotrices. Les premières installations étaient des moulins à marée, dont certains datent d’avant le xe siècle. Au xviiie siècle, on en comptait plus de cinquante sur la Tamise, rivière à marée. D’autres étaient situés sur le littoral atlantique et on a pu en compter jusqu’à 750 en activité à un moment donné. Les moulins possédaient un bassin de stockage qui se remplissait lorsque la marée montait. À marée basse, l’eau était évacuée par une roue hydraulique qui actionnait généralement une meule de maïs ou une scie à bois. Ces moulins à marée produisaient environ 10 kilowatts, mais des puissances énormes sont possibles si un estuaire à forte amplitude de marée est bloqué pour former un énorme bassin de stockage. La première proposition de grande centrale électrique a été faite en 1920 dans la baie de Fundy, à la frontière entre les États-Unis et le Canada, où l’on trouve les plus grandes marées du monde, d’une amplitude d’environ 17 m. Une série de barrages bloquant la baie de Passamaquoddy aurait créé deux bassins séparés par une centrale électrique de 350 MW. Mais le grand krach de 1929 et l’inquiétude quant au coût et à l’effet sur l’environnement ont tué l’idée dans l’œuf. Cependant, un projet de barrage dans l’estuaire de La Rance, dans le nord de la France (cf. figure 25), où l’amplitude des marées est similaire, a été réalisé en 1966 et a produit depuis environ 240 MW. Il s’agissait de la plus grande usine marémotrice du monde jusqu’à la construction du barrage marémoteur de Sihwa (254 MW), en Corée du Sud, achevé en 2011.  102 

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Fig. 25    L’usine marémotrice de La Rance, dans le nord de la France.

Le Royaume-Uni dispose de ressources marémotrices considérables, la plus importante se trouvant dans l’estuaire de la Severn. L’amplitude de la marée y est d’environ 14 m et le flux de la marée est tel que quelque 8 600 MW pourraient être générés par un barrage. Cette idée a été discutée depuis les années 1920 et a été envisagée pour la dernière fois, mais rejetée, en 2010 en raison des inquiétudes concernant le coût très élevé du projet. Bien que le barrage réduise le débit de la rivière, augmentant ainsi la biodiversité, il affecterait la zone intertidale, qui est une importante aire d’alimentation pour les oiseaux. Une proposition de lagune à Swansea, dans l’estuaire de la Severn, avait été lancée et aurait pu produire environ 320 MW avec peu d’effets négatifs sur l’environnement, puisqu’elle ne bloque pas la totalité du flux de la marée. Toutefois, le gouvernement britannique a rejeté ce projet en 2018, le jugeant trop coûteux, notamment par rapport aux coûts des parcs éoliens offshore en mer du Nord. Désormais, les projets visant à exploiter le potentiel britannique se concentrent plutôt sur les projets de courant de marée.  103 

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Les centrales marémotrices sont moins coûteuses et potentiellement plus économiques que les barrages ou les lagons. Elles consistent en des réseaux de rotors sous-marins situés dans des eaux où les courants de marée sont forts ; les rotors sont essentiellement des versions sous-marines des éoliennes (cf. figure 26). Des projets sont en cours dans le passage de Minas, dans la baie de Fundy, ainsi qu’au nord de l’Écosse, dans le Pentland Firth. Dans le Firth, le courant de marée maximum est de 5 m/s et, lorsque les turbines seront entièrement installées, environ 1 000 MW pourraient être générés. L’environnement est rude, l’eau de mer corrosive, et de sérieux défis techniques se posent pour fabriquer de manière rentable des rotors capables de résister. Cependant, les turbines pourraient apporter une petite contribution à faible émission de carbone à la demande d’électricité.

Fig. 26    Une turbine marémotrice de 18 m de diamètre et de 1,5 MW est descendue dans le Pentland Firth en Écosse pour le projet MeyGen.

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POTENTIEL DE L’ÉNERGIE MARÉMOTRICE

La ressource mondiale d’énergie marémotrice près des côtes est d’environ un million de mégawatts, mais la quantité utile est bien moindre, car les emplacements pour l’énergie marémotrice sont très limités : l’amplitude des marées doit être supérieure à environ 7 m et les courants plus rapides que 2 m par seconde pour que les centrales soient rentables ; et seuls quelques pour cent (environ 500 TWh) de la demande annuelle d’électricité dans le monde pourraient être satisfaits par l’énergie marémotrice. Les courants marins océaniques, tels que le Gulf Stream, recèlent une quantité d’énergie bien plus importante, mais leur exploitation serait très difficile et coûteuse en raison de leur inaccessibilité. L’ÉNERGIE DES VAGUES

Les vagues sont principalement causées par le transfert d’énergie du vent à la surface de l’eau par le biais de la friction et de la pression de l’air. Une vague océanique typique a une longueur d’onde (c’est-àdire la distance entre les crêtes des vagues) d’environ 100 m, et une amplitude de 1 à 1,5 m. Sa puissance est élevée, de l’ordre de 30 à 70 kW par mètre de front de vague, la majeure partie de l’énergie se trouvant dans un quart de longueur d’onde sous la surface. La puissance dépend du carré de l’amplitude, ainsi une onde de 10 m a 100 fois la puissance d’une onde de 1 mètre. Il s’agit d’une « bénédiction » mitigée, car bien que l’on puisse extraire plus d’énergie, un dispositif houlomoteur doit être très solide pour survivre aux vagues extrêmes. Environ deux millions de mégawatts pourraient être extraits des vagues atteignant les côtes continentales, où quelque 40 % de la population mondiale vit à moins de 100 km d’un littoral. C’est assez d’énergie pour répondre à toute leur demande d’électricité, et ce potentiel a attiré de nombreux inventeurs, le premier brevet pour un dispositif ayant été accordé en 1799.  105 

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Une conception remarquable des années 1970 était le Salter Duck, qui flottait sur l’eau et se balançait d’avant en arrière avec les vagues incidentes. Sa section transversale était en forme de came, la surface circulaire étant située à l’arrière, de sorte qu’une faible partie des ondes incidentes était transmise par son mouvement de balancement. Le canard de Salter possède une bonne efficacité mais elle n’a jamais dépassé le stade d’essais à petite échelle dans les années 1980, lorsque l’intérêt pour les énergies renouvelables a diminué avec la chute des prix du pétrole et que les financements ont été abandonnés au profit de l’énergie éolienne et le nucléaire. PERSPECTIVES DE L’ÉNERGIE HOULOMOTRICE

À la fin des années 1990, la recherche sur la technologie de l’énergie houlomotrice a été relancée en raison des preuves croissantes du réchauffement climatique et de la nécessité de trouver des sources d’énergie à faible émission de carbone, ainsi que de la volatilité des prix du pétrole et du gaz. L’accent a été mis sur des dispositifs plus petits, mais il s’est avéré très difficile d’en concevoir qui soient suffisamment bon marché, et plusieurs projets n’ont pas réussi à réunir suffisamment de capitaux pour progresser. Submerger le convertisseur d’énergie des vagues, afin de le protéger des tempêtes, peut être une solution efficace. Près de la côte, à des profondeurs d’environ 10 à 20 m, la hauteur des vagues est limitée en raison de leur déferlement incessant et les conditions ne sont plus stables que loin au large, ce qui rend le déploiement près de la côte sûr pour les vagues extrêmes, tout en réduisant le coût de la transmission vers la côte. Le système CETO de Carnegie au large de l’Australie occidentale déploiera une série de grandes bouées à environ 2 ou 3 m sous la surface, chacune ayant la forme d’une sphère aplatie d’environ 20 m de diamètre et 5 m d’épaisseur (cf. figure 27). Lorsqu’une vague passe au-dessus de leur tête, les bouées se soulèvent et s’abaissent, et ce mouvement pompe un fluide qui alimente  106 

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un générateur électrique. Ce dernier peut récolter de l’énergie quelle que soit la direction dans laquelle la vague se déplace. Un principe similaire (mais avec les bouées à la surface et les générateurs au fond de la mer) est utilisé dans le réseau Seabased 1 MW à Sotenas, au large de la Suède, qui a commencé à fonctionner en 2016. Surface Actionneur flottant Générateurs

10 m Pompe

Câble électrique

Sangle d’attache

Fondations Fond de mer

Fig. 27    Le système d’énergie CETO (houlomotrice) de Carnegie.

Une autre méthode qui protège le convertisseur d’énergie des vagues des tempêtes consiste à loger un générateur en hauteur dans un conduit ouvert qui descend sous la surface de l’eau. Une vague fait monter et descendre l’eau à l’intérieur du conduit, forçant l’air à aller et venir dans un générateur à turbine. Dans une turbine Wells, les pales en forme d’ailette sont alignées de telle sorte qu’elles tournent de la même manière, quelle que soit la direction du flux d’air. Ces dispositifs d’oscillation de la colonne d’eau peuvent être incorporés  107 

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dans des brise-lames ; un exemple étant la centrale de 300 kW du port de Mukriku dans le nord de l’Espagne. Avec les dispositifs immergés, qui peuvent être déployés beaucoup plus largement, ces technologies semblent s’imposer comme l’approche privilégiée. Toutefois, il sera difficile de rivaliser avec la baisse rapide des coûts de l’énergie éolienne et de l’énergie solaire photovoltaïque, et il est peu probable que la production satisfasse plus de 2 % (500 TWh) de la demande mondiale actuelle d’électricité. L’ÉNERGIE GÉOTHERMIQUE

La température à l’intérieur de la Terre est d’environ 4 000 °C. Elle est maintenue par la génération de chaleur produite par la désintégration radioactive, principalement de l’uranium et du thorium, et par la chaleur de cristallisation due à la solidification de la roche fondue. La chaleur est conduite à travers le manteau et, à moins de 10 km de la surface, il existe un énorme volume de roches chaudes dont la température peut atteindre 300 °C, ce qui représente une vaste réserve d’énergie thermique. La ressource géothermique pourrait satisfaire durablement environ la moitié de la demande énergétique mondiale, mais il est très difficile d’exploiter cette énorme réserve située dans les profondeurs du sous-sol. Traditionnellement, les centrales géothermiques sont situées près des sources naturelles, mais comme il est difficile de transporter la chaleur sur de longues distances, l’utilisation de la chaleur géothermique est généralement limitée aux endroits où la source est proche de la demande. Les régions géologiquement actives du monde, comme l’Islande, la Californie, l’Italie et la Nouvelle-Zélande, sont proches des interfaces entre les plaques tectoniques. Ici, le magma est plus proche de la surface et la croûte peut être naturellement fracturée, ce qui permet à l’eau froide de s’infiltrer dans la roche chaude et de s’échapper sous forme de vapeur à haute pression ou d’un mélange  108 

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de vapeur et d’eau chaude, ou encore sous forme de sources chaudes. Ces jets de vapeur (geysers) et ces sources chaudes d’origine naturelle constituent une source immédiate d’énergie thermique – en Islande, neuf maisons sur dix en dépendent. L’énergie géothermique est utilisée pour le chauffage urbain, l’industrie et l’agriculture, mais elle peut également servir à produire de l’électricité. La figure 28 montre la centrale géothermique de Krafla en Islande, qui a une capacité de production d’environ 300 MW et une capacité d’environ 130 MW pour l’eau chaude.

Fig. 28    La centrale géothermique de Krafla en Islande.

PERSPECTIVES DE L’ÉNERGIE GÉOTHERMIQUE

Ces centrales géothermiques fournissent une petite quantité d’énergie, environ 0,25 % de la demande mondiale d’énergie finale à un prix économiquement compétitif, mais pourront peut-être atteindre 3 % (3 000 TWh par an) d’ici 2050. Une quantité bien plus  109 

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importante d’énergie thermique pourrait être « extraite » du sous-sol dans les régions où l’on trouve des roches à 250 °C à environ 5 km de profondeur, accessibles par forage. Pour les roches chaudes, les profondeurs doivent être inférieures à environ 10 km, sinon il est très difficile d’arrêter les trous ou les fissures qui se referment sous l’effet des pressions intenses et des températures élevées. Le potentiel de ressources aux États-Unis a été estimé à plus de 300 000 MW, soit environ un quart de la capacité de production totale actuelle. DÉVELOPPEMENTS DANS L’EXTRACTION DES ROCHES CHAUDES ET SÈCHES

La méthode d’extraction de l’énergie thermique consiste à fracturer la roche souterraine pour la rendre perméable, puis à extraire l’énergie d’une manière similaire aux autres sources géothermiques, en faisant passer de l’eau à travers la roche chaude. En général, il y aura un puits d’injection et un puits d’extraction séparés horizontalement, la région qui les sépare étant fracturée (cf. figure 29). La principale difficulté est que la roche a une faible conductivité thermique. Le défi consiste à créer un réseau de fractures dont la surface est suffisamment grande pour que la température de l’eau augmente de manière significative afin d’obtenir une bonne efficacité thermique. Les fractures doivent également présenter des interstices étroits, de sorte que le débit d’eau par canal soit limité, car c’est le rapport entre le taux de chauffage et le débit d’eau qui détermine l’augmentation de la température. Plusieurs fissures larges dans un réseau formeraient un by-pass thermique qui abaisserait la température de sortie et réduirait donc considérablement le rendement. La première centrale à roche sèche chaude, située à Fenton (Missouri) aux États-Unis, à une profondeur de 3 km et à une température de 195 °C, a été exploitée entre les années 1970 et 1990. Pendant cette période, elle a démontré le concept avec une puissance de quelques MW, et la recherche sur les systèmes géothermiques améliorés (EGS)  110 

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s’est développée. Des installations pilotes ont vu le jour en Europe, à Soultz-sous-Forêts en France, en Australie et ailleurs. Depuis 2010, sur le site de Newbury, aux États-Unis, AltaRock a créé un réseau de fissures souterraines en injectant de l’eau à haute pression. Un réseau de moniteurs souterrains a vérifié toute activité sismique afin de réduire le risque de tout événement sismique grave, tel que celui de Bâle qui a entraîné l’annulation d’un projet en 2009. Après quarante ans, l’extraction de la roche sèche à chaud est toujours en cours de développement et les coûts sont actuellement peu compétitifs. Turbine Vapeur organique

Générateur Tour de refroidissement

Condensateur

Échangeur de chaleur Chaud

Froid

Fractures hydrauliques

Réservoir géothermal

Fig. 29    Schéma d’une centrale géothermique en roche sèche chaude.

La principale dépense est le forage, généralement dans la roche dure, jusqu’aux profondeurs requises, qui peut représenter plus de 60 % du coût d’un projet. Les coûts de forage augmentent de façon presque exponentielle avec la profondeur, de sorte qu’une percée dans  111 

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la technologie de forage rendrait le coût plus compétitif – l’utilisation de rayons lasers pour ramollir la roche avant le forage pourrait être efficace. Il s’est également avéré difficile de fracturer la roche de manière fiable, des interférences se produisant parfois dans les fissures naturelles. Un projet de roche sèche chaude à Camborne en Cornouailles (Royaume-Uni) a finalement été abandonné en 1991 en raison de problèmes imprévus dans la formation rocheuse. Cependant, l’évaluation du sous-sol s’est considérablement améliorée depuis, et en 2018, les tentatives d’exploitation de cette ressource en Cornouailles ont été relancées. Pour rendre cette technologie plus compétitive par rapport aux énergies éolienne et solaire, la recherche se concentre désormais sur l’extraction de l’énergie thermique dans des roches très chaudes (plus de 400 °C) à des profondeurs supérieures à 5 km. En 2018, AltaRock a signé un partenariat avec China Coal pour évaluer le potentiel de la géothermie améliorée pour remplacer la production d’électricité à partir du charbon en Chine. Les défis sont importants, mais la vaste ressource géothermique, disponible à tout moment, fait qu’il est important que la recherche et le développement se poursuivent. L’ÉNERGIE NUCLÉAIRE

L’énergie nucléaire est une énergie à faible émission de carbone, car la centrale ne produit pas d’émissions de dioxyde de carbone. Les centrales commerciales sont des réacteurs à fission, dont la plupart utilisent de l’uranium comme combustible. L’énergie provient de la conversion d’une partie (m) de la masse de l’isotope le plus léger de l’uranium, le 235U, en énergie en le divisant en deux noyaux plus petits, l’énergie (E) libérée étant donnée par la relation d’Einstein E = mc2, soit quelques dizaines de millions de fois celle d’une réaction chimique. Cette fission s’accompagne de l’émission de neutrons rapides susceptibles d’initier une autre fission qui produira d’autres neutrons ; en d’autres termes, il peut se produire une réaction en chaîne qui doit  112 

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être contrôlée en toute sécurité dans un réacteur nucléaire. Cela se fait en équilibrant la perte de neutrons, qui se fait principalement par capture par l’isotope plus lourd de l’uranium 238U, avec le gain par la fission induite par les neutrons. L’ajustement se fait en déplaçant des barres de contrôle qui absorbent les neutrons dans et hors du cœur du réacteur. Dans un réacteur à eau pressurisée, l’eau est chauffée en circulant devant les barres de combustible remplies d’uranium dans le cœur du réacteur, où elle absorbe la chaleur générée par les fissions. L’eau devient très chaude, car elle est sous pression, et est utilisée pour générer de la vapeur afin de faire fonctionner un turbogénérateur. L’eau qui circule dans le cœur ralentit également les neutrons rapides, ce qui augmente la probabilité de fission induite par les neutrons et réduit le risque de perte par capture. Toutefois, pour obtenir une réaction en chaîne, il faut augmenter le pourcentage de l’isotope le plus léger de l’uranium par rapport à son abondance naturelle de 0,7 %, c’est-à-dire que l’uranium doit être enrichi, généralement de quelques pour cent. L’uranium est présent dans de nombreuses régions du monde, le Kazakhstan, le Canada et l’Australie étant actuellement les principaux producteurs. Comparées aux quantités de charbon, de pétrole ou de gaz nécessaires pour alimenter une centrale électrique classique, les quantités d’uranium nécessaires à un réacteur nucléaire sont remarquablement faibles : une tonne d’uranium fournit une quantité d’énergie équivalente à 25 000 tonnes de charbon. Les réserves d’uranium permettraient de produire de l’électricité pendant environ 100 ans au niveau actuel. RÉACTEURS MODERNES

Le premier réacteur a été construit sur un court de squash à Chicago en 1942 sous la direction d’Enrico Fermi. Il faisait partie du projet  113 

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Manhattan, qui a mis au point la première bombe à fission et montré qu’il était possible de contrôler une réaction nucléaire en chaîne. L’énergie nucléaire civile a débuté avec le réacteur de Calder Hall en Angleterre en 1956, suivi peu après en 1957 par le réacteur de Shippingport en Pennsylvanie, aux États-Unis. Ces premiers prototypes fabriqués au cours des années 1950 et 1960 ont été appelés réacteurs de génération I. La plupart des réacteurs en service aujourd’hui sont des modèles de génération II, construits dans les années 1970 et 1980. La capacité de production d’énergie nucléaire dans le monde a augmenté assez rapidement jusqu’à la fin des années 1980, mais depuis, elle a augmenté beaucoup plus lentement. Son expansion a été affectée par la libéralisation des marchés de l’électricité, qui a eu tendance à favoriser les centrales à moindre intensité de capital et celles dont les délais de construction sont plus courts. Trois accidents nucléaires majeurs ont également eu un effet significatif. En 1979, il y a eu un accident de perte de refroidissement dans un réacteur à Three Mile Island aux États-Unis, qui a entraîné une fusion du cœur à 20 %, mais heureusement une faible libération de radioactivité. Beaucoup plus grave, l’augmentation incontrôlée de la puissance d’un réacteur à Tchernobyl, en Ukraine, en 1986, a provoqué un énorme rejet de produits radioactifs. Bien que l’effet sur la santé ait été bien moindre que ce que l’on craignait, l’effet sur la confiance du public a été important. Plus récemment, l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi au Japon en 2011 a suscité un regain d’inquiétude quant à la sécurité des réacteurs et réduit le soutien à l’énergie nucléaire, ce qui a conduit certains pays à abandonner progressivement leurs programmes nucléaires. Les inquiétudes concernant la sécurité et le coût avaient incité à développer les réacteurs de génération III au début des années 1990, qui ont été conçus pour être plus simples à construire et pour inclure des systèmes de refroidissement d’urgence passifs supplémentaires. Le refroidissement passif dépend de la gravité ou des différences de  114 

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température, plutôt que des pompes ou de l’intervention humaine, et devrait donc être beaucoup plus fiable et plus proche d’un système à sécurité intégrée. Quelques-uns de ces réacteurs de génération III ont maintenant été construits. Cependant, certains réacteurs récents se sont avérés très coûteux, en raison des exigences réglementaires accrues et du manque d’expérience en matière de construction nucléaire, et plusieurs pays envisagent de construire des réacteurs modulaires plus petits afin de réduire les coûts. PERSPECTIVES DE L’ÉNERGIE NUCLÉAIRE

Il y avait environ 450 réacteurs en service en 2018, pour une capacité totale d’environ 400 000 MW, pour la plupart il s’agit de réacteurs à eau pressurisée, produisant environ 10 % de la demande mondiale d’électricité. La part de l’énergie nucléaire dans la production est en baisse depuis 1996, et elle est désormais plus chère dans de nombreux pays occidentaux que les énergies renouvelables, qui deviennent rapidement moins chères. En Asie, où il existe un soutien de l’État, le nucléaire est plus compétitif et une certaine expansion est prévue. Toutefois, la prolifération nucléaire et l’élimination des déchets nucléaires suscitent toujours des inquiétudes. Aucun pays n’a encore construit de site permanent en sous-sol pour stocker ces matières radioactives. L’Agence internationale de l’énergie prévoit que l’expansion mondiale d’ici 2040 ne permettra de maintenir la part de l’énergie nucléaire dans la production d’électricité qu’à environ 10 %, certains des nouveaux réacteurs ne faisant que remplacer ceux qui seront retirés du service. Sa contribution pourrait être d’environ 5 000 TWh par an en 2050. LE CAPTAGE DU CARBONE

Dans les années 1990, alors que les énergies éolienne et solaire n’étaient pas encore développées et que le changement climatique  115 

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suscitait de plus en plus d’inquiétudes, le captage et le stockage des émissions de CO2 des centrales électriques à combustibles fossiles ont été proposés comme moyen de fournir une électricité à faible teneur en carbone. Le CO2 contenu dans les gaz de combustion peut être isolé chimiquement, puis liquéfié par compression et pompé dans un réservoir souterrain, par exemple un aquifère ou un champ pétrolier et gazier désaffecté. Dans le même temps, les générateurs classiques seraient tenus de payer pour émettre du CO2. Cela encouragerait l’adoption de la technologie de captage du carbone, à condition que le prix du carbone soit plus que suffisant pour couvrir le coût du captage et du stockage. Toutefois, même sur le vaste marché de l’UE, le prix du carbone n’a jamais été assez élevé pour rendre le captage du carbone compétitif pour la production d’électricité, et très peu d’installations de capture du carbone sont en service. Malgré cela, le piégeage des émissions de CO2 pourrait être le moyen le plus rentable de décarboner certains processus à l’avenir. Un exemple est la conversion du gaz naturel en hydrogène, processus qui peut être utilisé pour le chauffage et dans les piles à combustible, ou dans la production de ciment et d’importants produits chimiques industriels, comme le méthanol et l’ammoniac. Le captage du dioxyde de carbone de l’air est également sérieusement envisagé, car il existe un danger très réel que les émissions de CO2 ne diminuent pas assez rapidement pour limiter le réchauffement à 1,5 °C. Planter davantage d’arbres peut sembler l’un des moyens les plus faciles et les moins coûteux, mais il faut d’abord mettre un terme à l’énorme perte annuelle d’arbres. Chaque année, environ dix millions d’hectares de forêts sont déjà défrichés pour la culture du soja, de l’huile de palme et d’autres plantes, ainsi que pour le pâturage du bétail. Cette perte est à l’origine d’environ un dixième des émissions annuelles de CO2 dans le monde et d’une perte importante de biodiversité. En outre, la superficie d’arbres nécessaire pour séquestrer une quantité importante de CO2 est énorme – environ un quart de la superficie  116 

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des États-Unis pour une moyenne annuelle de 10 % des émissions mondiales actuelles dues à la combustion de combustibles fossiles, pendant les quelque six décennies nécessaires pour que les arbres atteignent leur maturité. Après cette période, les arbres devraient être remplacés, le bois étant utilisé dans les bâtiments, par exemple. Il a été proposé que les résidus forestiers soient brûlés pour produire de l’énergie (chaleur ou électricité) et que le CO2 émis soit capté et stocké. Ce piégeage du carbone par la bioénergie est controversé, et il faudrait veiller à ce que le changement d’affectation des terres se traduise par des émissions nettes négatives, plutôt que positives. En outre, cette méthode n’est pas encore au point et pourrait entrer en concurrence avec d’autres demandes de terres arables et d’eau douce. Il est toutefois possible de capter le CO2 directement dans l’air à l’aide d’absorbeurs chimiques, ce qui est une méthode beaucoup plus compacte et sûre que l’utilisation de la biomasse, mais elle est actuellement coûteuse. Origen Power cherche à réduire les coûts en combinant le captage du carbone avec la production de chaux, qui a une valeur commerciale. Une autre méthode, en cours de développement par Carbon Engineering, utilise l’hydroxyde de potassium, qui forme du carbonate de potassium au contact du dioxyde de carbone. La chaux est utilisée pour régénérer l’hydroxyde de potassium et former du carbonate de calcium chauffé pour libérer le dioxyde de carbone en vue de sa compression et de son stockage – dans ce dernier processus, la chaux est régénérée. Ils estiment que le coût du piégeage du CO2 de cette manière pourrait être aussi bas que 100 dollars par tonne. LES PERSPECTIVES POUR LE CAPTAGE DE CARBONE

Pour apporter une valeur ajoutée, le CO2 capté pourrait être combiné à de l’hydrogène (obtenu, par exemple, en électrolysant de l’eau avec de l’électricité produite de façon renouvelable) pour fabriquer un  117 

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carburant synthétique à faible teneur en carbone qui pourrait remplacer l’essence, le diesel ou le carburant d’aviation, dont les émissions globales seraient bien inférieures à celles de certains biocarburants. Le captage et le stockage du dioxyde de carbone provenant d’une centrale électrique au charbon augmenteraient le coût de l’électricité d’environ 60 %, et l’utilisation des énergies renouvelables pour produire de l’électricité est beaucoup moins chère. Toutefois, grâce au développement et à des investissements considérables, le captage de l’air, ainsi que le captage du CO2 provenant de certains processus industriels et de la reforestation, pourraient bien représenter 10 % des émissions mondiales annuelles d’ici 2050. POTENTIEL TOTAL DE RÉDUCTION DES ÉMISSIONS DE CARBONE

D’ici à 2050, la production totale d’électricité à partir de sources renouvelables et d’énergie nucléaire pourrait atteindre près de 90 % de la demande mondiale actuelle et, avec le piégeage du carbone, les émissions nettes de CO2 pourraient être nulles à cette date. Mais pour gérer cette grande quantité d’électricité renouvelable, les réseaux de transmission et de distribution devront s’adapter à la production variable des parcs éoliens et solaires, et pour cela le développement du stockage de l’énergie est important.

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7 L’électricité renouvelable et le stockage de l’énergie L’électricité s’avère vitale pour assurer une bonne qualité de vie. Sa production par des parcs éoliens et solaires dans de nombreuses régions du monde devient de plus en plus la méthode de production la moins chère, et elle présente le grand avantage de ne pas émettre de pollution ni de dioxyde de carbone qui contribuerait au réchauffement de la planète. La demande d’électricité est appelée à croître avec l’électrification des transports et du chauffage dans le monde. Les énergies renouvelables peuvent fournir une énergie propre et abordable, et couvrent actuellement environ un quart de la demande mondiale d’électricité. L’énergie éolienne et l’énergie solaire ont le plus grand potentiel et pourraient fournir toute l’électricité nécessaire, mais en 2018, elles n’en ont fourni que 7 %, d’où la nécessité d’une expansion considérable de ces sources. Les parcs éoliens et solaires sont souvent éloignés des centres de demande, et de grandes quantités d’électricité doivent donc être transportées sur de longues distances. Pour éviter toute perte thermique importante dans les câbles de transmission, le courant qui y circule doit être faible, ce qui signifie que la tension doit être très élevée pour que la puissance soit significative. Par exemple, un courant de 10 ampères nécessite une tension de 100 kilovolts pour fournir une puissance de 1 000 kilowatts, soit un mégawatt. La tension et le courant dans un câble sont analogues à la pression et au débit de l’eau dans un tuyau. Pour une turbine hydraulique, c’est le débit et la pression de l’eau qui  119 

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déterminent la puissance ; ainsi, pour produire beaucoup de puissance avec un faible débit d’eau, il faut une pression très élevée. Le courant électrique et la tension dans un câble alternent en direction dans un courant alternatif (CA) ; ou restent dans une direction dans un courant continu (CC). Les premiers générateurs de la fin du xixe siècle pouvaient fournir du courant continu ou alternatif, mais il était difficile à l’époque, lors de la construction des réseaux électriques, d’élever la tension du courant continu aux valeurs élevées nécessaires à une transmission efficace. C’est pourquoi on a opté pour un courant alternatif à haute tension (CAHT), car les tensions d’un courant alternatif pouvaient être facilement modifiées à l’aide de transformateurs. La technologie a maintenant suffisamment progressé pour que les tensions continues puissent être modifiées relativement facilement à l’aide de dispositifs électroniques à l’état solide, et le courant continu à haute tension (CCHT) est la méthode la plus rentable pour les distances supérieures à environ 600 km, avec des pertes qui ne sont plus que de quelques pour cent. La principale raison est que, puisque la tension est constante pour le courant continu, elle peut être environ deux fois plus élevée que la tension effective pour le courant alternatif dans une ligne aérienne, avant d’être limitée par la décharge dans l’air. L’électricité du barrage des Trois Gorges est transmise sur 940 km à la région de Guangdong, dans le sud de la Chine, par une ligne CCHT fonctionnant à 500 kilovolts et d’une puissance nominale de 3 000 MW (millions de watts). Le CCHT est également préféré pour les câbles souterrains, où il présente des pertes électriques plus faibles que le CAHT, ce qui explique, par exemple, que la liaison électrique sous la Manche soit en CCHT. LES RÉSEAUX DE TRANSPORT

Si, au xixe siècle, l’électricité était produite à proximité des lieux de consommation, les économies d’échelle réalisées au xxe siècle ont conduit à la création de centrales électriques centralisées, de lignes électriques longue distance et de sous-stations locales. Aujourd’hui,  120 

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dans la plupart des pays du monde, l’électricité est acheminée par un tel réseau. Ce système est conçu pour que l’offre réponde à la demande, la demande minimale, appelée « charge de base », étant satisfaite par les générateurs les moins chers. Jusqu’à récemment, ces derniers étaient généralement alimentés au charbon (ou par des centrales nucléaires ou hydroélectriques, le cas échéant) et fonctionnaient presque sans discontinuité. Elles étaient complétées par d’autres centrales, généralement des centrales à turbine à gaz à cycle combiné, pour répondre aux variations quotidiennes de la charge, et par des générateurs à turbine à gaz ou diesel à action rapide pour répondre aux pics de demande ou aux pannes imprévues de centrales. L’interconnexion des lignes de transmission entre les centrales et les sous-stations permettait de maintenir l’approvisionnement en électricité même si une ligne ou une centrale tombait en panne. Les réseaux ont permis de fournir de l’électricité à des communautés éloignées et d’accéder à des sources d’électricité isolées. Les parcs solaires et éoliens fournissent désormais une part croissante de l’électricité sur de nombreux réseaux. Cela modifie les exigences imposées aux centrales électriques. En général, un mélange qui varie tout au long de la journée en utilisant des centrales renouvelables et conventionnelles permet de produire de l’électricité de la manière la plus économique, au lieu de recourir à de gros générateurs conventionnels. En plus de fournir de l’énergie propre, les parcs éoliens et solaires ont les coûts d’exploitation les plus bas, appelés coûts marginaux, car ils n’ont pas de coûts de combustible, et sont sollicités en premier. Pour s’assurer que la plus grande partie de la production des parcs éoliens et solaires puisse être prise en charge, il est préférable d’avoir des centrales supplémentaires capables de réagir rapidement aux changements de l’offre et de la demande ; de préférence, ces centrales devraient également fonctionner de manière économique à une petite fraction de leur charge maximale. En général, les centrales au charbon et les centrales nucléaires ne peuvent pas  121 

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monter ou descendre rapidement en charge, et les centrales au gaz et les centrales renouvelables sont préférables de ce point de vue. Selon le lieu, les centrales hydroélectriques, la biomasse, la géothermie et l’énergie solaire concentrée (avec stockage thermique) peuvent toutes être utilisées comme générateurs flexibles. Les centrales à combustibles fossiles peuvent stocker leur combustible et fournir de l’électricité à la demande. Contrairement à ces générateurs qui peuvent fournir de l’électricité à volonté, les parcs éoliens et solaires donnent une production variable qui dépend des conditions météorologiques. Cependant, contrairement à ce que certaines personnes imaginent, les réseaux dotés d’une importante production éolienne et solaire sont en mesure de fournir de l’électricité en cas de besoin, même si certains jours le vent est faible et le ciel couvert. Les variations de la production des parcs solaires et éoliens sont généralement bien anticipées, grâce à de bonnes prévisions météorologiques qui utilisent l’intelligence artificielle (IA) pour obtenir les meilleurs résultats. Lorsque l’offre renouvelable représente jusqu’à 30 % de la demande, ces variations peuvent être facilement satisfaites grâce aux centrales à réaction rapide déjà installées sur le réseau pour répondre aux variations de la demande. Faire face au délestage inopiné d’une grande centrale électrique de 1 000 MW (causé par un défaut d’équipement ou par une surcharge imprévue) peut s’avérer beaucoup plus difficile qu’une chute soudaine de l’énergie éolienne ou solaire. Les centrales de réserve doivent être mises en service rapidement, et les parcs éoliens et solaires, s’ils ne fonctionnent pas à pleine capacité, peuvent fournir un soutien supplémentaire précieux lorsque le temps est venteux et ensoleillé, en augmentant rapidement leur production. UNE ÉLECTRICITÉ PROVENANT PRINCIPALEMENT DES SOURCES D’ÉNERGIES RENOUVELABLES

Pour fournir une électricité propre, sûre et abordable, et réduire considérablement les émissions de carbone d’ici le milieu du siècle  122 

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afin d’éviter un changement climatique dangereux, nous devons alimenter les réseaux électriques principalement grâce aux énergies renouvelables. Le pourcentage d’électricité issue des énergies renouvelables peut être porté à environ 50 % sur un réseau en augmentant leur production, leur répartition géographique et les interconnexions avec d’autres réseaux. L’augmentation de leur capacité de production compense en partie les mauvaises conditions météorologiques, et la connexion de parcs solaires et éoliens sur une vaste zone permet une production plus régulière et plus fiable. En Europe, le Danemark contribue à équilibrer l’offre et la demande en échangeant de l’électricité avec la Norvège, la Suède ou l’Allemagne : il l’exporte lorsque sa propre production éolienne est élevée et l’importe lorsque la production est faible. Cependant, il n’est pas simple de construire un réseau intercontinental renouvelable. Il y a eu une proposition (appelée DESERTEC) qui visait à transmettre à l’Europe de l’énergie solaire produite en Afrique du Nord, mais elle a échoué en raison de l’instabilité politique et des objections soulevées par les demandes contradictoires des différents pays et régions du réseau proposé. En outre, la forte baisse du coût des panneaux solaires a rendu moins important l’avantage d’un ensoleillement plus important : il peut être plus économique d’augmenter la taille d’un champ solaire pour compenser un ensoleillement moindre que de payer pour une transmission sur une longue distance. La production locale assure également la sécurité de l’approvisionnement, car elle ne dépend pas des importations de combustibles fossiles. Toutefois, l’équilibre entre l’offre et la demande peut être considérablement facilité par un réseau étendu. La production locale assure également la sécurité de l’approvisionnement, en évitant de dépendre des importations de combustibles fossiles. Toutefois, l’équilibre entre l’offre et la demande peut être considérablement facilité par un réseau étendu. Le besoin de centrales de réserve peut être réduit en modifiant la demande pour l’adapter à l’offre, ce que l’on appelle la réponse à la  123 

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demande. Il s’agit de l’option la plus économique, car les centrales électriques à réaction rapide utilisées pour répondre aux pics de consommation sont les plus coûteuses à exploiter. L’ajustement de la charge en fonction de l’offre peut se faire à l’aide d’un réseau intelligent qui permet une communication bidirectionnelle entre le gestionnaire de réseau et l’utilisateur. Cela permet de retirer ou d’ajouter la bonne quantité de demande. Il existe de nombreuses opérations pour lesquelles il est possible d’interrompre ou de réduire l’approvisionnement en électricité pendant une courte période : les opérations à inertie thermique – comme le maintien de la fusion d’un objet, tel que du fer ou du bitume, ou du froid des aliments dans les réfrigérateurs des supermarchés, ou encore le chauffage ou le refroidissement d’un bâtiment – ou celles où l’on produit d’abord un stock d’articles avant de les assembler en produits. De même, la demande peut être augmentée en mettant en marche un four électrique, un grand électrolyseur ou (pour aider à faire face aux sécheresses dues au changement climatique) une usine de désalinisation. Nous ne sommes qu’au début de la révolution des réseaux intelligents, avec la technologie numérique, qui permettra d’apporter des modifications importantes à la charge ; cela facilitera la transition vers les énergies renouvelables et entraînera une baisse des coûts pour les clients. Encourager les clients à modifier leur demande peut se faire par le biais d’écarts de prix. En Italie, un système simple permet de récupérer le capital des centrales électriques et le coût de la distribution par le biais de charges fixes qui dépendent de la puissance maximale utilisée, et les coûts de production par un prix par kWh. En limitant la demande de puissance (ce qui rend l’électricité moins chère pour le consommateur), l’utilisation d’appareils tels qu’une bouilloire, une machine à laver et un four doit être espacée au cours de la journée ; s’ils sont tous utilisés en même temps, l’alimentation électrique s­ ’arrête. Cela réduit la charge de pointe pour laquelle le coût de production est  124 

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le plus élevé. Des prix plus avantageux pour l’utilisation en heures creuses (par exemple la nuit) constituent un autre moyen. Mais pour un meilleur ajustement, un réseau et des compteurs intelligents sont nécessaires. Les consommateurs peuvent alors voir les détails de leur consommation et choisir de n’utiliser certains appareils que lorsque les prix de l’électricité sont bas ou disposer d’un bouton permettant de passer outre les prix élevés. Les pourcentages élevés de production renouvelable sont grandement facilités par la disponibilité d’un stockage électrique. Un ensemble de parcs solaires et éoliens ayant la capacité de répondre à la demande en soirée aura tendance à surproduire pendant la journée, ce qui fera baisser les prix de l’électricité. Sans stockage, ce surplus doit être exporté si possible, ou perdu en réduisant l’offre. Le stockage à court terme peut déplacer une partie de la production de l’après-midi vers le soir, de sorte qu’une capacité plus faible puisse répondre à la demande quotidienne. Avec la forte baisse du coût des batteries, ce type de stockage devient de plus en plus disponible et commence également à remplacer les centrales à combustible fossile à réaction rapide. Le stockage peut être effectué soit par le producteur, soit par le consommateur. La figure 30 illustre de manière schématique comment le stockage, les interconnexions et un réseau intelligent peuvent contribuer à équilibrer l’offre et la demande. Le coût de la transition vers la production renouvelable provient non seulement de l’énorme investissement dans les parcs éoliens et solaires, mais aussi du coût du renforcement du réseau pour transporter l’électricité depuis des sites éloignés. En Allemagne, le taux de croissance de la production renouvelable variable a été ralenti tandis que les lignes de transmission ont été modernisées. En Chine, les installations de panneaux solaires sur les toits ont été encouragées, ce qui réduira le besoin de transmission sur de longues distances et la charge sur le réseau de transport d’électricité. Cela est intéressant notamment lorsqu’il n’existe pas de réseau, comme dans une grande  125 

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partie de l’Afrique subsaharienne, lorsque l’électricité du réseau est très chère, comme dans certaines parties de l’Australie, ou lorsque le réseau est médiocre, comme en Inde. Autres réseaux Interconnecteurs Fournisseur

Alimentation locale

Demande Réseau de transport « intelligent »

Stockage

Stockage

Fig. 30    Schéma montrant l’équilibre entre l’offre et la demande sur un réseau de transport moderne.

Si le coût de la production d’électricité à partir de parcs éoliens et solaires est aujourd’hui très compétitif par rapport à la production à partir de combustibles fossiles, la variabilité de l’énergie solaire et éolienne ajoute des coûts supplémentaires à l’exploitation d’un réseau. Cela s’explique par les dépenses liées aux générateurs de secours, pour les périodes où l’offre est faible, qui viennent s’ajouter au prix de l’électricité pour le consommateur. Mais avec des pourcentages plus élevés de production renouvelable, moins de grandes centrales conventionnelles sont nécessaires ; et comme les parcs éoliens et solaires deviennent moins chers, cela permet de compenser le coût des centrales de réserve supplémentaires qui doivent fonctionner occasionnellement pour équilibrer l’offre et la demande. De grandes quantités de production éolienne et solaire peuvent donner lieu à des excédents qui font baisser les revenus des parcs, ainsi que ceux des centrales de réserve qui fonctionnent moins longtemps. (Ce phénomène a été baptisé le dilemme de « l’argent qui manque »).  126 

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Les marchés de l’électricité, introduits dans de nombreux pays pour promouvoir la concurrence dans les années 1980 et 1990, doivent s’adapter pour soutenir la production à court terme. Mais les interconnexions entre différents réseaux, comme celles qui relient les réseaux aux États-Unis ou en Europe, peuvent utiliser la production excédentaire et fournir un approvisionnement plus sûr. La réponse à la demande et le stockage réduisent également le besoin de centrales de secours. Ces actions augmentent la valeur de l’électricité produite par les parcs solaires et éoliens et, avec la baisse de leur coût et les batteries moins chères, contribueront à faire baisser les prix de l’électricité. Afin de promouvoir la production d’énergie renouvelable dans les années 1990 et 2000, lorsque le prix de l’énergie éolienne et solaire n’était pas compétitif, des subventions ont été introduites. Le coût de celles-ci était généralement réparti sur la facture d’électricité de tous les utilisateurs, ce qui augmentait le prix de l’électricité d’un montant relativement faible. Ce soutien a entraîné une augmentation considérable de la production mondiale de générateurs éoliens et solaires et une forte baisse de leur coût. Dans certains pays, les investissements dans les énergies renouvelables ont connu un cycle d’expansion et de ralentissement, car les subventions ont été accordées puis réduites. Bon nombre de ces subventions seront remboursées pour les parcs existants d’ici la fin des années 2030, et les nouveaux parcs éoliens et solaires sont de plus en plus souvent construits sans subventions. Ces parcs sont désormais non seulement compétitifs par rapport aux centrales à combustibles fossiles, mais ils sont en passe de devenir l’option la plus économique. Toutefois, une comparaison équitable doit tenir compte des subventions considérables dont bénéficient les combustibles fossiles et, dans le cas des centrales nucléaires, des coûts de l’assurance responsabilité civile qui sont pris en charge par les gouvernements. En outre, les coûts de la pollution et du réchauffement de la planète causés par  127 

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les centrales à combustibles fossiles peuvent être considérables. Dans de nombreux pays, on commence à s’attaquer à ces « externalités » en appliquant un prix du carbone à toutes les sources d’émissions de CO2, mais ce prix n’est généralement pas assez élevé pour refléter le coût réel des dommages causés. Avec la réponse à la demande, la production distribuée, les interconnexions et le stockage à court terme, la fraction de la production renouvelable sur un réseau peut être très élevée. Une étude réalisée pour l’Europe sur les coûts de l’augmentation de la quantité d’énergie renouvelable variable sur le réseau de 20 à 80 % a montré que les prix du kWh passaient d’environ 5 à 8,5 centimes d’euro, la majeure partie de l’électricité étant produite par l’énergie éolienne ; avec un faible coût pour l’énergie solaire et les batteries, la fourchette descendait à environ 4 à 6 centimes d’euro. Les variations de l’offre seraient principalement gérées par l’importation et l’exportation d’électricité, ainsi que par des générateurs flexibles (alimentés au gaz). L’augmentation du coût serait bien inférieure à celle des dommages causés par la poursuite de la combustion des combustibles fossiles. Les émissions peuvent encore être réduites lorsque l’on a accès à des turbogénérateurs alimentés à la biomasse ou à l’hydrogène, à des centrales solaires thermiques à concentration avec stockage, ou à des centrales nucléaires ou hydroélectriques flexibles, qui peuvent réduire la dépendance à l’égard des générateurs alimentés au gaz naturel pour équilibrer le réseau. L’obtention d’un pourcentage élevé d’énergies renouvelables dans certaines régions serait facilitée par la présence d’un stockage à long terme (plusieurs mois) pour faire face à l’importante inadéquation inter-saisonnière entre l’offre et la demande qui peut se produire. Certains déséquilibres à court terme pourraient bientôt être comblés, à mesure que les coûts baissent, par des fermes solaires surcapacitaires dotées d’une batterie de stockage d’une journée. Aux États-Unis, un rapport de l’Institut des Montagnes Rocheuses de 2018 a conclu que les progrès des énergies renouvelables et des  128 

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ressources énergétiques distribuées, y compris les batteries, au cours de la dernière décennie signifient que celles-ci peuvent désormais fournir un niveau d’approvisionnement aussi fiable que les nouvelles centrales à gaz, à un coût comparable ou inférieur. Les solutions qui permettent à une grande fraction de la production renouvelable d’alimenter un réseau dépendront des ressources disponibles dans une région, mais le stockage de l’électricité est un domaine clé dans lequel une réduction des coûts aiderait considérablement. LE STOCKAGE DE L’ÉLECTRICITÉ

Bien que la majeure partie du stockage de l’électricité soit actuellement assurée par des centrales hydroélectriques de pompage, qui ne sont généralement disponibles que dans les régions vallonnées (cf. figure 31), c’est le développement de la batterie lithium-ion qui commence à avoir un impact très important. Il s’agit d’une batterie rechargeable à haute densité de puissance et d’énergie qui a d’abord contribué à la révolution de la téléphonie mobile, et qui est maintenant sur le point d’amorcer une expansion considérable dans les voitures électriques, à mesure que ses performances s’améliorent et que son coût diminue. Les batteries lithium-ion peuvent être utilisées partout, et commencent à être utilisées dans les maisons équipées de panneaux solaires, pour le stockage de l’électricité et pour équilibrer l’offre et la demande sur le réseau. Historiquement, quand on parle de batterie, on fait référence à quelque chose où plusieurs éléments fonctionnent ensemble. Dans un système électrique il s’agit au contraire d’une série de cellules reliées entre elles. La batterie au plomb, inventée en 1859, a été la première batterie rechargeable. Cette batterie se compose d’une série d’anodes en plomb et de cathodes en oxyde de plomb immergées dans de l’acide sulfurique. Lors de la décharge, chaque anode s’oxyde et chaque cathode se réduit en sulfate de plomb. Elle peut fournir de grands courants et  129 

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est encore utilisée aujourd’hui pour démarrer et faire fonctionner les voitures à essence et diesel, mais le rapport de l’énergie fournie par une batterie plomb-acide par kilogramme est trop faible pour être utile pour les téléphones mobiles ou pour les voitures électriques.

Fig. 31    La centrale de pompage-turbinage de Koepchenwerk sur la Ruhr en Allemagne.

Une percée majeure dans la fabrication d’une batterie rechargeable légère a eu lieu dans les années 1980 et 1990 avec le développement de la batterie lithium-ion. Le lithium produit une tension élevée dans une batterie et a une faible densité, ce qui en fait un matériau idéal ; cependant, il est chimiquement très réactif. Mais un moyen de contrôler sa réactivité a été trouvé lorsqu’on a découvert que les ions lithium (Li+) pouvaient être déplacés dans ou hors de certains matériaux sans briser leur structure – un processus réversible appelé intercalation. En particulier, le graphite pouvait être utilisé pour l’anode et l’oxyde de cobalt et de lithium (qui a une structure en couches comme le graphite) pour la cathode.  130 

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Ces découvertes de M.  S.  Whittingham, J.  B.  Goodenough et A.  Yoshino (lauréats du prix Nobel 2019) ont été à l’origine de la commercialisation de la batterie lithium-ion par Sony. La figure 32 présente le schéma d’une batterie lithium-ion. Lors de la charge, les ions lithium sortent de la cathode en oxyde de cobalt et de lithium, traversent un électrolyte et se combinent avec le graphite de l’anode pour former du graphite de lithium. Lorsqu’un dispositif est fixé, un courant d’électrons le traverse de l’anode à la cathode, car les électrons sont plus fortement attirés par l’oxyde de cobalt et de lithium que par le graphite de lithium. Ce courant est alimenté par une tension d’environ 3,7 volts et alimente le dispositif. Pendant la décharge, les ions de lithium sont libérés dans l’électrolyte à l’anode, et les électrons dans le circuit externe. À la cathode, les électrons du circuit externe se combinent aux ions de lithium, qui proviennent de l’anode, et à l’oxyde de cobalt pour former de l’oxyde de lithium et de cobalt. L’énergie électrique par kilogramme d’une batterie lithium-ion est d’environ un quart de kilowattheure par kilogramme, ce qui est environ dix fois supérieur à celle d’une batterie plomb-acide. C’est désormais la batterie de choix pour les véhicules électriques et, de plus en plus, pour le stockage à court terme. Les batteries lithium-ion dominent aujourd’hui le marché et, à mesure que la production mondiale augmente, leurs coûts baissent rapidement – environ 18 % chaque fois que la quantité fabriquée dans le monde double. Selon les prévisions, elles devraient coûter environ 100 dollars par kWh en 2024 et, à cette date, le coût des véhicules électriques sera compétitif par rapport à celui des voitures classiques. VÉHICULE-RÉSEAU

Un autre avantage viendrait du fait que les batteries des voitures électriques pourraient être connectées au réseau, lorsque les voitures  131 

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sont garées, et pourraient fournir de très grandes quantités de stockage pour équilibrer l’offre et la demande. Une étude réalisée pour la Californie a montré que plusieurs milliards de dollars pourraient être économisés si les véhicules électriques étaient utilisés à la place du stockage stationnaire. Mais pour le stockage à long terme sur le réseau (plusieurs jours), les batteries à flux peuvent être plus économiques que les batteries à plaques et constituent une avancée dans le domaine du stockage à grande échelle. e–

Dispositif

e–



+ charge Li+ Électrolyte

Anode

Cathode Li+

décharge Graphite de lithium

Oxyde de cobalt et de lithium

Fig. 32    Schéma d’une batterie lithium-ion.

LES BATTERIES À FLUX

Les batteries à écoulement stockent leur énergie électrique dans leurs électrolytes plutôt que dans leurs électrodes, de sorte que leur capacité n’est limitée que par le volume de leurs conteneurs d’électrolyte – la puissance et la capacité de la batterie sont donc découplées. Elles peuvent avoir un rendement élevé sur un très grand nombre de cycles de charge et de décharge. En général, la quantité d’énergie stockée par unité de masse se situe entre 10 et 50 W.h/kg (wattheures  132 

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par kilogramme), ce qui est faible par rapport à la quantité que l’on peut atteindre avec des batteries à plaques (environ 250 W.h/kg pour une batterie lithium-ion), mais elles pourraient être mises à l’échelle de manière plus rentable, et leurs capacités peuvent être très importantes. L’exemple le plus développé et déjà commercialisé est la batterie à flux à base de vanadium, un métal gris argenté dont des traces augmentent considérablement la résistance de l’acier. Dispositif

V2+/V3+

Anode



Pompe

e–

+

H+

Membrane

Cathode

e–

V5+/V4+

Pompe

Fig. 33    Schéma d’une batterie à flux de vanadium.

À l’époque des croisades déjà, cet élément a peut-être contribué aux performances légendaires des épées de Damas. Son utilisation dans une batterie à flux tire parti de sa capacité à se trouver dans plusieurs états de charge. La batterie comporte deux électrolytes séparés non chargés, chacun contenant des ions vanadium dans différents états de charge positive, ainsi que des ions sulfate chargés négativement dans l’acide sulfurique. Un schéma de cette batterie à écoulement est présenté à la figure 33. Lorsque les électrolytes sont pompés devant les électrodes, les ions vanadium V2+ sont oxydés en ions V3+ à l’anode avec la libération d’un électron, et les ions V5+ sont réduits en ions V4+ à la cathode par l’ajout d’un électron. Les électrolytes sont séparés  133 

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par une membrane, qui laisse passer les ions H+ pour maintenir la neutralité de la charge ; les électrodes sont dotées de catalyseurs à leur surface pour accélérer les réactions. Cependant, le vanadium est un matériau onéreux et plusieurs batteries à flux avec des chimies différentes sont actuellement en cours de développement. Les besoins en stockage d’énergie sur le réseau étant de plusieurs millions de kWh, des millions de tonnes de matériaux seront nécessaires, d’où la nécessité de matériaux moins chers. Un candidat prometteur est une batterie à flux de soufre développée par Form Energy et soutenue par Breakthrough Energy Ventures, un fonds d’un milliard de dollars présidé par Bill Gates pour financer les nouvelles technologies énergétiques. ÉNERGIE À GAZ ET AUTRES TECHNOLOGIES DE STOCKAGE

L’hydroélectricité obtenue par pompage représente plus de 94 % du stockage de l’électricité dans le monde. Les régions où ce type de stockage peut être utilisé pourraient être étendues en pompant l’eau entre des réservoirs souterrains, ou sous-marins, et des réservoirs de surface, mais son déploiement risque encore d’être limité. Une autre technologie capable de stocker de grandes quantités d’énergie utilise l’air comprimé. Dans ce cas, l’électricité est utilisée pour pomper l’air dans une énorme caverne, où il est stocké à haute pression. L’air est ensuite libéré par un générateur à turbine lorsqu’on a besoin d’électricité. Mais cette technologie n’est pas compétitive et il n’existe que deux grandes centrales opérationnelles, l’une à Huntdorf en Allemagne et l’autre en Alabama aux États-Unis. Il est toutefois prévu de construire des centrales plus efficaces, dont une aux Pays-Bas, qui sera utilisée avec des parcs éoliens. Au Royaume-Uni, il a été suggéré que l’utilisation de grès poreux sous la mer du Nord pour stocker l’air comprimé pourrait fournir un précieux stockage d’énergie inter-saisonnier.  134 

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Une innovation récente est une variation du stockage par pompage qui pourrait être utilisée à grande échelle. L’idée, proposée par la société Energy Vault, consiste à élever des blocs de béton bon marché pour stocker l’énergie, plutôt que l’eau, à l’aide d’une grue à six bras. Plusieurs milliers de blocs de 35 tonnes seraient empilés pour former une tour de la hauteur d’un immeuble de trente-cinq étages. Lorsqu’on a besoin d’énergie, les blocs sont attachés à la grue et lâchés, ce qui fait tourner le moteur de la grue en sens inverse, produisant ainsi de l’électricité. La société Tata Power, en Inde, a commandé un tel système de tour qui peut stocker 35 MWh avec une puissance de pointe de 4 MW et un temps de réponse rapide. Une autre solution consiste à utiliser l’électricité pour chauffer ou congeler de l’eau, l’eau chaude ou la glace étant ensuite stockée. Les bâtiments ont besoin d’eau chaude à tout moment, et la glace peut être utilisée pour les climatiseurs, la demande de climatisation devant augmenter, en particulier dans les pays en développement. Ces opérations de chauffage et de refroidissement peuvent être effectuées de manière plus efficace à l’aide de pompes à chaleur : en général, 1 kW d’énergie électrique peut fournir 3 kW de chauffage ou de refroidissement. Par ailleurs, la chaleur transférée à l’environnement dans une centrale thermique peut être utilisée pour chauffer l’eau dans ce que l’on appelle des centrales de production combinée de chaleur et d’électricité (PCCE). Au Danemark, plus de 60 % de la chaleur domestique provient de centrales de cogénération qui alimentent les réseaux locaux de chauffage urbain, lesquels comprennent de grands réservoirs d’eau comme réserves de chaleur. Les centrales de cogénération peuvent modifier la proportion d’électricité par rapport à la chaleur pour s’adapter aux variations de la production de leurs parcs éoliens. Bon nombre de ces centrales de cogénération brûlent de la biomasse, ce qui est important dans le cadre des plans danois visant à éliminer les centrales électriques au charbon d’ici 2030.  135 

  Les énergies renouvelables  

Cependant, le transport de la chaleur est coûteux et les distances sont généralement limitées à environ 30 km. Un moyen beaucoup plus polyvalent de stocker l’électricité consiste à l’utiliser pour générer un combustible comme l’hydrogène qui ne contient pas de carbone. Celui-ci peut être transporté dans des pipelines, puis stocké et utilisé en cas de besoin, par exemple, pour le chauffage dans l’industrie ou les ménages. L’hydrogène peut être produit par électrolyse de l’eau et, dans le commerce, des rendements de 80 % ont été atteints. Lorsque l’hydrogène est brûlé dans l’air, il ne produit que de la chaleur et de la vapeur d’eau, de sorte que sa combustion ne contribue pas au réchauffement de la planète. Son utilisation comme combustible dans un générateur à turbine à gaz ou dans une pile à combustible pourrait donc réduire les émissions liées à la production d’électricité. Une grande partie de la demande mondiale d’énergie est destinée au chauffage, dont la quasi-totalité est actuellement assurée par la combustion de combustibles fossiles, tandis que la chaleur stockée n’apporte qu’une très faible contribution. L’utilisation d’électricité renouvelable pour produire directement de la chaleur, ainsi que l’utilisation de combustibles, peut fournir de la « chaleur renouvelable », ce qui sera très important pour réduire l’utilisation de combustibles fossiles et les émissions de dioxyde de carbone. Ces technologies, associées aux véhicules électriques, permettront de décarboner à la fois le chauffage et les transports.

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8 La chaleur décarbonée et les transports Une grande partie du débat sur les énergies renouvelables est consacrée à la fourniture d’électricité, qui représente aujourd’hui environ un quart de la consommation finale d’énergie dans le monde et, étant donnée la relative inefficacité des centrales électriques à combustibles fossiles, environ un tiers des émissions mondiales de CO2 est lié à l’énergie. Toutefois, un autre tiers des émissions provient de la combustion du charbon, du gaz et du pétrole pour le chauffage de l’industrie et des bâtiments, et un dixième d’autres processus. Le dernier quart des émissions de CO2 provient de l’utilisation de carburants dérivés du pétrole dans les moteurs qui alimentent presque tous les moyens de transports. L’utilisation directe d’électricité renouvelable pour produire de la chaleur, comme dans un four électrique, est actuellement plus coûteuse que la combustion de gaz ou d’autres combustibles fossiles pour produire de la chaleur. Il sera donc très difficile de répondre à l’importante demande de chaleur avec de l’électricité renouvelable, en particulier pour les processus industriels qui nécessitent des températures élevées, comme dans la fabrication de l’acier et du ciment. Mais cela permettra d’éviter la pollution et les émissions de dioxyde de carbone. Dans de nombreuses régions du monde, il faut de l’énergie pour rendre les bâtiments agréables à vivre, et environ 20 % de la consommation mondiale d’énergie provient du chauffage et de la climatisation des locaux, ainsi que du chauffage de l’eau dans les bâtiments. La chaleur nécessaire se situe à des températures modérées, et la pompe à chaleur est une technologie à faible émission de carbone très efficace qui s’intègre bien à l’électricité renouvelable.  137 

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LES POMPES À CHALEUR

Une pompe à chaleur à air fonctionne comme un réfrigérateur. Elle est équipée d’un compresseur électrique qui fait circuler un fluide frigorigène dans une boucle qui passe par deux serpentins, l’un à l’intérieur de la pièce, l’autre à l’extérieur dans l’air. La compression et l’expansion subséquente du frigorigène à l’intérieur de l’unité entraîne le refroidissement d’un serpentin et le réchauffement de l’autre (cf. figure 34). Lorsque le serpentin froid est à l’intérieur, un ventilateur souffle de l’air à travers lui pour refroidir la pièce. C’est exactement comme dans un réfrigérateur, où le serpentin froid est à l’intérieur du réfrigérateur et le serpentin chaud est à l’extérieur dans l’air libre.

Compresseur Extérieur Serpentin et ventilateur

Intérieur Serpentin et ventilateur

Fig. 34    Pompe à chaleur aérothermique.

Avec cette pompe, la quantité d’énergie thermique qui peut être transférée est généralement deux fois et demie supérieure à l’énergie électrique utilisée par le compresseur. En inversant le flux dans le compresseur, le serpentin à l’intérieur de la pièce est plus chaud que celui à l’extérieur et la pompe à chaleur chauffe alors la pièce. Il s’agit d’un moyen de chauffage beaucoup plus efficace que l’utilisation d’une barre électrique (résistance), où le chauffage est seulement égal à l’énergie électrique consommée. Au lieu d’être à l’extérieur dans l’air, le serpentin de la source peut être placé sous terre, où la température sous une profondeur d’environ 10 m est relativement constante. Ces pompes à chaleur géothermiques  138 

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ont tendance à être plus efficaces que les pompes à air (elles chauffent 3 à 4 fois plus d’énergie électrique), car le sol est à une température plus stable et plus adaptée que la température de l’air en surface, étant généralement plus chaud en hiver et plus froid en été. Cependant, leur coût est généralement plus élevé, car des trous profonds doivent être percés. Les rivières qui coulent sous les villes, comme le Tyburn et le Fleet sous Londres, pourraient constituer de bonnes sources pour les pompes à chaleur dans les grands bâtiments urbains. Des serpentins pourraient être placés dans ces rivières souterraines, ce qui permettrait d’éviter le coût des forages. Cette technologie est déjà utilisée à Stuttgart pour chauffer le ministère du Bade-Wurtemberg en utilisant la rivière souterraine Nesenbach. Les pompes à chaleur sont un très bon moyen de chauffer ou de rafraîchir les bâtiments, mais leur installation peut s’avérer coûteuse, en particulier celle des pompes géothermiques dans les bâtiments existants. En outre, la tâche serait énorme : par exemple, plus de la moitié des bâtiments actuels de l’Union européenne, de la Russie et des États-Unis seront encore utilisés en 2050, et beaucoup d’entre eux ne sont pas bien isolés. Les pompes à air sont de plus en plus utilisées pour les nouveaux bâtiments domestiques, mais les pompes utilisant le sol comme source sont bien adaptées aux nouveaux grands bâtiments, où les serpentins peuvent être installés dans les fondations assez facilement. En isolant très bien les bâtiments et en éliminant les courants d’air, le chauffage nécessaire peut être minimal et l’électricité pour les pompes fournie sur place par des panneaux solaires. DES CARBURANTS PROPRES : LA BIOÉNERGIE ET L’HYDROGÈNE

Une solution plus économique dans certains endroits et certains pays peut consister à fournir de la chaleur en brûlant un combustible qui n’augmente pas les niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Cela peut se faire avec de la biomasse, comme les granulés de  139 

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bois, ou des biocarburants, comme le biométhane, mais les approvisionnements appropriés en matériaux durables sont limités. Lorsqu’ils sont disponibles, des systèmes de production combinée de chaleur et d’électricité peuvent être utilisés pour fournir de la chaleur et de l’électricité à des groupes de bâtiments, comme c’est le cas au Danemark. Les panneaux solaires thermiques installés sur les toits peuvent également compléter le chauffage de l’eau. La production d’hydrogène, qui peut être brûlé comme le gaz naturel, est une technologie en développement qui pourrait être largement disponible et remplacer le gaz à faible teneur en carbone. En France, un projet de démonstration visant à mélanger jusqu’à 20 % d’hydrogène dans un réseau de gaz est en cours, tandis qu’au Royaume-Uni, un programme pionnier visant à utiliser 100 % d’hydrogène est à l’étude. Au Royaume-Uni, plus de 30 % des émissions proviennent du chauffage et de la cuisson des aliments dans les foyers, et ces activités sont principalement assurées par le gaz naturel distribué par un réseau de gazoducs. Ces dernières années, les canalisations ont été remplacées par des tuyaux en polyéthylène soudés. Ceux-ci conviennent au transport de l’hydrogène et du gaz naturel, et le projet H21 étudie la possibilité de fournir du chauffage domestique à l’aide d’hydrogène, qui n’émet que de la vapeur lorsqu’il est brûlé. La décarbonation du secteur du chauffage domestique contribuerait de manière significative au respect des engagements pris par le Royaume-Uni dans le cadre de l’accord de Paris. Leeds a été choisie pour le site de l’étude de faisabilité car la ville est proche de l’endroit où le gaz naturel est amené sur le littoral et de celui où la technologie appropriée existe pour la production d’hydrogène à partir du méthane, qui est le principal composant du gaz naturel. La ville est également proche de cavernes de sel qui peuvent être utilisées pour stocker l’hydrogène car elles sont bien étanches. Le passage à l’hydrogène serait similaire à celui effectué dans les années 1970 lorsque le gaz de ville a été remplacé par le gaz naturel, après la  140 

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découverte d’importants gisements sous la mer du Nord. (Le gaz de ville est principalement de l’hydrogène et du monoxyde de carbone obtenus en faisant réagir de la vapeur avec du charbon.) Le projet consiste à faire réagir de la vapeur avec du méthane pour produire de l’hydrogène et du dioxyde de carbone, un processus appelé reformage à la vapeur. Le CO2 serait capté, comprimé et stocké sous la mer du Nord dans des sites similaires à celui situé sous le champ gazier de Sleipner, en mer du Nord, où le CO2 est stocké avec succès depuis de nombreuses années. Toute production d’hydrogène excédant les besoins pendant les mois d’été serait stockée dans les grandes cavernes de sel voisines et utilisée lorsque la demande est plus forte en hiver. Une autre façon de produire de l’hydrogène consiste à électrolyser de l’eau en utilisant de l’électricité produite de façon renouvelable. Actuellement, ce procédé est plus coûteux, mais son coût est en baisse. Il présente notamment l’avantage d’éviter le coût du piégeage du CO2 et de permettre d’utiliser l’électricité excédentaire produite par les parcs éoliens et solaires. En outre, la disponibilité d’hydrogène à faible coût pourrait favoriser le développement de véhicules fonctionnant à l’hydrogène. Les appareils ménagers (cuisinières et chaudières) devraient être modifiés pour brûler de l’hydrogène, mais la commodité d’utiliser le réseau de gaz existant et la possibilité de stocker de grandes quantités d’énergie pourraient rendre le coût global de la décarbonation de ce secteur intéressant. S’il est adopté, le réseau national peut être converti progressivement avec peu de perturbations pour les clients. Le coût pourrait être récupéré sur quarante ans par une légère augmentation des factures de tous les clients, ce qui aurait peu d’impact sur le coût du chauffage. L’hydrogène peut être utilisé de manière aussi sûre que le gaz naturel, et pourrait servir non seulement à chauffer les habitations, mais aussi à produire de la chaleur à haute température pour les processus industriels.  141 

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DE LA CHALEUR POUR L’INDUSTRIE

Il est essentiel de fournir de l’énergie à l’industrie avec des combustibles propres, car l’industrie consomme environ un tiers de la demande mondiale d’énergie, et une grande partie de cette énergie est de la chaleur provenant de la combustion de combustibles fossiles qui rejette du dioxyde de carbone et de la pollution dans l’atmosphère. L’électricité produite à partir de sources renouvelables peut être utilisée directement pour fournir de la chaleur sans émissions nocives, comme dans les fours à arc électrique, qui sont déjà utilisés dans la production d’acier à partir de la ferraille, ou pour produire de l’hydrogène. Cependant, le coût de la conversion d’un procédé pour utiliser l’électricité ou brûler de l’hydrogène, et le prix de l’électricité, peuvent rendre ces options coûteuses, bien qu’elles puissent être de bons choix pour les nouveaux sites industriels étant donné leur longue durée de vie. Une solution moins coûteuse pour produire de la chaleur à haute température pourrait consister à utiliser des briques réfractaires chauffées électriquement, comme le suggèrent des chercheurs du MIT, Cambridge, Mass. Cette solution est basée sur une technologie très ancienne. Les briques réfractaires, fabriquées à partir d’une argile capable de résister à de hautes températures, ont été utilisées pour la première fois par les Hittites il y a environ 3 000 ans dans leurs fours à fonte de fer. Une pile isolée de briques réfractaires pouvait servir d’accumulateur thermique et être chauffée jusqu’à environ 850 °C par résistance électrique. Pour des températures plus élevées, des briques réfractaires en carbure de silicium pourraient faire l’affaire. L’utilisation de la production excédentaire des parcs éoliens et solaires constituerait une source d’électricité bon marché et éviterait de réduire la production des parcs. Au besoin, de l’air pourrait être soufflé sur les briques pour fournir de la chaleur à haute température pour les fours industriels à un prix compétitif, car les matériaux et les souffleurs d’air sont peu coûteux.  142 

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Les pompes à chaleur ne sont pas efficaces pour fournir de la chaleur aux températures élevées requises pour les processus industriels, et si la biomasse ou les biocarburants peuvent parfois être utilisés comme combustible, les approvisionnements durables ne sont pas largement disponibles. L’amélioration des chaînes d’approvisionnement en résidus et déchets forestiers et agricoles ayant un faible impact environnemental (puisqu’ils n’impliquent pas de défrichage) serait d’une grande utilité. La production d’ammoniac à partir d’hydrogène généré de manière renouvelable est une alternative qui suscite l’intérêt. L’ammoniac est un produit industriel précieux en soi, puisqu’il est le principal composant des engrais, mais il peut également être utilisé dans un moteur à combustion interne, une turbine à gaz ou une pile à combustible pour fournir de l’énergie. Un avantage est que l’infrastructure de transport de l’ammoniac existe déjà. Lors de sa combustion, il produit de l’azote et de la vapeur d’eau. Certaines voitures ont été alimentées par de l’ammoniac, et il pourrait être possible d’alimenter des navires de cette façon également. L’ammoniac doit être manipulé avec précaution car il est toxique à forte concentration, mais pas faible niveau. La capacité de ce système, ou d’autres systèmes de conversion de l’énergie en gaz, à contribuer de manière significative à la fourniture de chaleur dépendra en grande partie de la réduction du coût de production. Un autre moyen de fournir de la chaleur avec de faibles émissions de dioxyde de carbone consiste à capturer le dioxyde de carbone émis par les processus industriels existants alimentés par des combustibles fossiles. Toutefois, la tâche est rendue difficile en raison de la diversité des procédés et du grand nombre de sites. Quelques projets pilotes sont en cours, qui peuvent capter jusqu’à 90 % des émissions. Le transport du dioxyde de carbone vers des réservoirs souterrains, tels que des gisements de pétrole et de gaz épuisés, semble assez simple et ne représente qu’une petite partie de l’important coût global. Mais tous les sites possibles ne sont pas à portée de main et leur sécurité à  143 

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long terme est encore à l’étude. Une bonne stratégie pourrait consister à concentrer les efforts sur la réduction des coûts pour quelques applications majeures, comme la capture du dioxyde de carbone lors de la fabrication d’hydrogène à partir de gaz naturel. La forte baisse du coût des énergies renouvelables rend le piégeage du carbone de moins en moins rentable pour la production d’électricité ; mais avec un prix du carbone suffisamment élevé, il pourrait s’agir d’un moyen précieux de décarboner certains processus. LA DÉCARBONATION DES TRANSPORTS : LES VÉHICULES ÉLECTRIQUES

Il est impossible de capter les énormes émissions de dioxyde de carbone provenant des millions de moteurs à combustion interne utilisés dans les véhicules et les navires. Une quantité massive de pétrole est brûlée sous forme d’essence et de diesel et cela représente environ un quart de la consommation mondiale d’énergie. Les substituts renouvelables sont les biocarburants, en particulier le bioéthanol et le biodiesel. Bien qu’un programme de production d’éthanol à partir de la canne à sucre ait été mis en place avec succès au Brésil, de nombreuses inquiétudes ont été exprimées ailleurs quant à la superficie des terres nécessaires et à la concurrence avec la production alimentaire, ainsi qu’aux émissions de dioxyde de carbone dues aux défrichements, comme dans le cas de la déforestation en Malaisie pour les plantations d’huile de palme destinées au biodiesel. L’un des moyens les plus efficaces de réduire ces émissions est d’éviter toute combustion en électrifiant les transports. Les émissions de dioxyde de carbone des voitures particulières et des camionnettes représentent environ 11 % des émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie, et environ 15 % des émissions de l’UE. Depuis 2016, plusieurs pays, dont la France, l’Inde, la Chine, l’Allemagne,  144 

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l’Irlande, les Pays-Bas, la Norvège et le Royaume-Uni, ont annoncé leur intention d’arrêter la vente de voitures à essence et diesel après 2030 ou 2040, et des taxes d’émission pour les voitures des centres-villes sont en cours d’introduction. Dans le monde entier, les voitures électriques sont présentées comme un moyen très efficace de réduire les émissions lorsque les énergies renouvelables fournissent une part importante de l’électricité, comme en Norvège. Au Royaume-Uni, les émissions de dioxyde de carbone par kilomètre sont déjà inférieures à la moitié de celles de la voiture conventionnelle européenne moyenne. Et ces émissions seront encore plus faibles au fur et à mesure que la production d’énergie renouvelable sera mise en ligne. En plus de contribuer à la réalisation des objectifs de réduction du changement climatique, le passage à la voiture électrique permet de réduire les particules nocives et les oxydes d’azote (NOx) émis par les moteurs, en particulier ceux fonctionnant au diesel. Ces émissions contribuent de manière significative à la pollution dans les villes du monde entier et sont à l’origine de problèmes de santé tels que l’asthme. Les voitures électriques émettent moins de particules par leurs plaquettes de frein, car elles freinent principalement en utilisant leurs moteurs comme générateurs. La contribution de l’usure des pneus est similaire pour toutes les voitures, mais si les voitures peuvent être rendues plus légères à l’avenir, et si l’accélération et la décélération sont réduites par les véhicules à conduite automatique (autonomes), alors cette situation s’améliorera. COÛT ET PERSPECTIVES DES VÉHICULES ÉLECTRIQUES

Les performances des voitures électriques sont bonnes, mais le principal obstacle à leur adoption est leur coût. Cependant, les constructeurs automobiles, nouveaux et traditionnels, investissent  145 

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déjà des sommes considérables dans le développement de voitures électriques. Celles-ci comportent beaucoup moins de composants que les voitures à essence et diesel, principalement en raison de la simplicité des moteurs électriques, et ont des coûts d’exploitation moins élevés, mais leur prix initial élevé est principalement dû au coût de la batterie de propulsion. On estime que la recherche et le développement permettront de faire baisser le coût des batteries d’environ 180 dollars par kWh en 2018 à moins de 100 dollars par kWh d’ici 2024, date à laquelle les véhicules électriques seront à peu près aussi bon marché que les voitures à moteur à combustion interne. Certaines nouvelles voitures électriques sont désormais équipées de batteries offrant une autonomie de 300 km, mais pour éliminer la crainte de manquer d’énergie au milieu d’un trajet (angoisse de l’auto­ nomie) et éviter des batteries coûteuses, il faut multiplier les points de recharge, un problème qui commence à être abordé. Aujourd’hui, les batteries ont généralement besoin d’une trentaine de minutes avec un chargeur rapide pour être remplies à 80 %, ce qui peut également être rebutant, mais des batteries à charge plus rapide visant à recharger en moins de cinq minutes sont en cours de développement. Des chercheurs de l’université de Cambridge ont découvert que le remplacement du graphite par de l’oxyde de niobium et de tungstène comme anode dans une batterie lithium-ion pouvait réduire considérablement les temps de charge. Il est également prévu de développer la recharge sans fil des batteries des voitures électriques en enterrant des bobines juste sous la surface de la route. Ces bobines pourraient recharger les batteries lorsque les voitures sont dans des parkings, au bord de la route ou même sur la route. Les ventes de véhicules électriques connaissent déjà une croissance significative : les voitures hybrides et hybrides rechargeables auront une part du marché dans un premier temps, mais leur complexité les rend coûteuses, et les voitures purement électriques domineront rapidement à mesure que le prix des batteries baissera. Selon une  146 

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estimation de la Bank of America Merrill Lynch, les ventes de voitures électriques devraient atteindre 12, 34 et 90 % du marché en 2025, 2030 et 2050, respectivement. Les transitions vers de nouvelles formes de transport ont été encore plus rapides dans le passé : en 1900, la 5e Avenue à New York était pleine de véhicules tirés par des chevaux ; en 1913, elle était pleine de voitures à moteur. Nombre de ces voitures électriques seront autopilotées et partagées : elles amélioreront la sécurité, réduiront les embouteillages et abaisseront le coût des déplacements. Elles annonceront une nouvelle ère du transport automobile. Mais les voitures ne sont pas les seules à être électrifiées : les bus, les motos, les cyclomoteurs, les vélos et les scooters le sont aussi, et leurs ventes sont en plein essor dans le monde entier. Ces véhicules contribueront à réduire la pollution et les embouteillages dans les villes, et permettront à de nombreuses personnes de se déplacer à un prix abordable. Cependant, l’électrification des camions, des navires et des avions est un autre problème. Toutefois, il est beaucoup plus difficile d’électrifier les camions, les navires et les avions, qui représentent près de la moitié de la demande d’énergie dans les transports, car le stockage par batterie est souvent insuffisant. Les biocarburants pourraient produire des émissions à faible teneur en carbone, et une partie de la demande pourrait être satisfaite de manière durable ; mais il semble actuellement très difficile de fournir un approvisionnement en biocarburants suffisamment important pour répondre à l’ensemble de la demande de transport lourd. Une alternative intéressante pourrait venir des piles à combustible. LES PILES À COMBUSTIBLE

La pile à combustible a été inventée en 1839 par William Grove, mais l’intérêt qu’elle suscitait est vite retombé lorsque les combustibles  147 

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fossiles bon marché sont devenus largement disponibles. Ce n’est que dans les années 1950 que des progrès significatifs ont été réalisés dans leur développement lorsque la NASA, à la recherche d’une source d’énergie légère, a décidé d’utiliser des piles à combustible pour fournir de l’électricité aux capsules spatiales Gemini et Apollo, et plus récemment à la navette spatiale. Dans une pile à combustible simple alimentant un moteur (cf. figure 35), l’hydrogène passe à travers une anode poreuse, où il est ionisé (perd son électron) : les ions d’hydrogène positifs passent à travers une membrane, et les électrons à travers le moteur. Les électrons et les ions se combinent à la surface de la cathode avec les atomes d’oxygène pour produire de l’eau, ce qui génère un peu de chaleur. Une pile à combustible produit donc de l’électricité et de l’eau à partir d’hydrogène et d’oxygène ; c’est l’inverse de l’électrolyse de l’eau où l’électricité passant à travers l’eau génère de l’hydrogène et de l’oxygène. Les piles à combustible produisent à peu près autant de chaleur que d’électricité, et peuvent être utilisées pour fournir de la chaleur et de l’électricité dans les bâtiments. Des pertes considérables se produisent lors de la fabrication de l’hydrogène, de son stockage, puis de sa reconversion en électricité. L’électricité produite ne représente qu’environ 35 % de l’énergie électrique d’entrée, contre environ 80 % pour les batteries. Moteur e–

e



Anode

H+

Cathode H2O O2

H2 Membrane

Fig. 35    Schéma d’une pile à combustible à hydrogène.

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Mais les avantages d’une pile à combustible par rapport à un véhicule alimenté par une batterie sont l’augmentation de l’autonomie et la rapidité du ravitaillement, en particulier pour les camions, les bus, les trains et les navires, qui disposent de l’espace nécessaire pour stocker l’hydrogène. Les premiers trains alimentés par une pile à hydrogène sont entrés en service commercial en Allemagne en 2018. Plus silencieux, moins coûteux à exploiter et sans les émissions polluantes d’un train diesel, ils peuvent constituer une alternative moins coûteuse à l’électrification de la voie ferrée. À mesure que la production mondiale de piles à combustible augmente, des réductions de coûts sont attendues, et leur utilisation à la place des générateurs à combustible fossile devrait augmenter. Avec de l’hydrogène produit de manière renouvelable, les piles à combustible peuvent fournir de l’électricité sans émissions. L’hydrogène peut être facilement transporté par pipeline ou par camion. Les autres utilisations de l’hydrogène, notamment en tant que réserve d’énergie et substitut du gaz naturel, pourraient bien conduire à la disponibilité d’hydrogène bon marché, ce qui favorisera l’expansion des piles à combustible. Nous pouvons constater que le remplacement des combustibles fossiles pour le chauffage ou l’alimentation des véhicules augmentera massivement la demande d’électricité, qui devra être fournie par des énergies renouvelables. La plupart proviendront de parcs éoliens et solaires, et le défi consistera à les construire assez rapidement, tout en assurant la transition d’un monde alimenté principalement par des combustibles fossiles vers un monde dominé par les énergies renouvelables.

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9 La transition vers les « renouvelables » Le monde devra limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C pour réduire considérablement les risques de phénomènes météorologiques extrêmes et la probabilité que des dommages irréversibles se produisent. Un réchauffement de 1,1 °C étant déjà constaté, le temps pour agir est donc compté. Pour respecter cette limite, il ne sera possible d’émettre qu’environ 580 gigatonnes (Gt) supplémentaires de CO2 dans l’atmosphère (après 2017), une valeur qui, au rythme actuel d’augmentation, sera dépassée au milieu des années 2030. ÉMISSIONS MONDIALES DE DIOXYDE DE CARBONE

Les émissions totales de CO2 chaque année dépendent de la demande annuelle d’énergie dans le monde et de la quantité de CO2 émise par unité d’énergie produite, ce que l’on appelle l’intensité carbonique, les centrales au charbon étant les pires avec environ un kilogramme de CO2 par kWh. Les projections de la demande totale d’énergie dépendent notamment de la croissance de l’économie mondiale au cours des prochaines décennies. La richesse mondiale, mesurée par le produit intérieur brut (PIB) de tous les pays, augmente d’environ 3 % par an, principalement dans le monde en développement, où elle reflète une augmentation de la population et une hausse du niveau de vie. Plus le PIB d’un pays augmente, plus la quantité d’énergie dont il a besoin augmente. Cette quantité d’énergie requise par unité d’augmentation  151 

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du PIB (son intensité énergétique) diminue au fil du temps, notamment grâce à l’amélioration de l’efficacité des processus d’utilisation de l’énergie et diminue actuellement dans le monde entier à un taux moyen de 1,8 %. Encart 1    L’identité Kaya montrant comment les émissions de dioxyde de carbone sont liées à la consommation d’énergie, à travers la population, la richesse personnelle, l’intensité énergétique et l’intensité carbonique. énergie PIB Émissions de co2 = population ×  ×  population PIB émissions de CO2   ×  énergie = population × richesse personnelle   × intensité énergétique × intensité carbonique.

En conséquence, la consommation d’énergie en 2050 devrait être supérieure d’environ 40 % à ce qu’elle était en 2015. La manière dont les émissions mondiales dépendent de la consommation d’énergie et de l’intensité de carbone est résumée de manière concise dans l’identité Kaya (voir encadré 1). Si les engagements pris par les pays à Paris en 2015 pour réduire le réchauffement de la planète étaient tous mis en œuvre (ainsi que les politiques actuelles et prévues), cela signifierait que seulement 70 % environ, au lieu de 80 %, de l’approvisionnement énergétique mondial proviendrait de combustibles fossiles en 2050, l’utilisation du charbon étant fortement réduite. Mais ce changement dans l’utilisation des combustibles fossiles, combiné à l’augmentation estimée de la demande d’énergie, ne ferait que rendre les émissions plus ou moins identiques à celles d’aujourd’hui, et la quantité cumulée de CO2 émise  152 

  La transition vers les « renouvelables »  

dans l’intervalle 2017-2050 serait supérieure à 1 200 gigatonnes, ce qui porterait probablement le réchauffement planétaire à près de 2 °C. Ce qu’il faut, c’est réduire les émissions à zéro d’ici 2050 environ. Cela peut se faire en réduisant davantage la demande d’énergie et en accélérant le passage aux énergies renouvelables, mais cela nécessitera un effort considérable dans le monde entier. RÉDUIRE LA DEMANDE D’ÉNERGIE

La majeure partie de la consommation d’énergie dans le monde est imputable aux bâtiments, aux transports et à l’industrie, dans des proportions à peu près égales, et il est possible de réduire considérablement la consommation d’énergie dans chacun de ces domaines. Il existe déjà des conceptions passives pour que les bâtiments consomment moins d’énergie, en fonction des conditions environnementales locales, en utilisant des matériaux appropriés, comme des surfaces réfléchissantes dans les climats chauds, pour aider à maintenir des températures confortables. Une bonne isolation, un bon vitrage et une réduction des courants d’air sont également importants, et le refroidissement d’une maison peut être obtenu par l’ombrage, l’orientation du bâtiment et la ventilation naturelle. Tout chauffage nécessaire peut être assuré par des pompes à chaleur, qui sont beaucoup plus efficaces que les combustibles fossiles. Le fait de ne chauffer que les pièces occupées (comme c’est souvent le cas au Japon), et non celles qui sont vides, permet également d’économiser de l’énergie. Il est essentiel que les nouveaux bâtiments soient construits selon des normes élevées, car ils durent plusieurs décennies, mais l’amélioration des performances thermiques des bâtiments existants peut être coûteuse et, jusqu’à présent, les progrès ont été lents. Dans le domaine de l’éclairage, les LED sont environ deux fois plus efficaces que les tubes fluorescents, et beaucoup plus que les ampoules à incandescence, et elles ont une très longue durée de vie.  153 

  Les énergies renouvelables  

L’éclairage représente environ 15 % de la consommation d’électricité dans le monde, et comme une grande partie de cette consommation pourrait être remplacée par des LED, il est possible de réduire considérablement la consommation d’électricité. L’amélioration de l’efficacité des appareils électroménagers est également utile – dans le cas des réfrigérateurs, par exemple, en utilisant une isolation thermique supplémentaire et de meilleurs compresseurs. Dans les transports, l’imposition de réglementations sur le rendement énergétique des véhicules à carburant fossile et de limitations de vitesse peut réduire la demande d’énergie. Des voitures plus légères et moins puissantes pourraient réduire la consommation de carburant de 50 %. Les voitures électriques permettent de réaliser des économies d’énergie encore plus importantes, car les moteurs électriques ont des rendements bien supérieurs à ceux des moteurs à combustion interne. Des réductions peuvent également être obtenues grâce à l’aménagement urbain et à des politiques favorisant les transports publics (à faible émission de carbone), le vélo, les véhicules électriques et la marche à pied, ainsi qu’en évitant les déplacements grâce à la vidéoconférence et aux achats par internet. Dans l’industrie, des économies peuvent être réalisées en améliorant la récupération de la chaleur, l’efficacité des processus et des moteurs, et en trouvant des alternatives, comme les structures en bois, au ciment et à l’acier dont la fabrication nécessite beaucoup d’énergie. L’électrification par les énergies renouvelables apporte une plus grande efficacité dans plusieurs domaines, notamment dans les transports et le chauffage. L’Agence internationale pour les énergies renouvelables a estimé que cette synergie, associée aux actions décrites ci-dessus, pourrait permettre de réduire l’intensité énergétique d’environ 2,8 % par an (ainsi que l’intensité carbonique), ce qui permettrait de maintenir la demande énergétique mondiale à peu près constante, à environ 100 000 TWh par an.  154 

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L’OBJECTIF EN MATIÈRE D’ÉNERGIES RENOUVELABLE

En 2015, la part de l’énergie provenant des énergies renouvelables était d’environ 18 %, principalement de la bioénergie et de l’hydroélectricité. Il faudra que cette part atteigne près de 60 % et que celle des combustibles fossiles soit ramenée à environ 35 % d’ici à 2037 pour être sur la voie de l’objectif zéro émission d’ici à 2050, date à laquelle environ 85 % de la demande énergétique devrait provenir des énergies renouvelables, 5 % du nucléaire, le piégeage du carbone éliminant les émissions restantes dues à l’utilisation de combustibles fossiles. La figure 36 montre à quoi la contribution des énergies renouvelables à la consommation finale d’énergie dans le monde pourrait ressembler en 2037 pour que le monde soit sur la bonne voie. La consommation de combustibles fossiles est limitée au pétrole pour le transport et au gaz pour le chauffage, le charbon n’étant plus utilisé. Si nous n’y parvenons pas avant 2060, avec des émissions nulles en 2090, le réchauffement sera limité à environ 2 °C, mais les conséquences du changement climatique seront nettement plus graves. La croissance des véhicules électriques, des pompes à chaleur et de la conversion de l’électricité en gaz double la demande d’électricité, qui atteindra 50 000 TWh par an en 2037. L’efficacité accrue des moteurs électriques maintient la demande de transport à peu près au même niveau. L’utilisation de la biomasse traditionnelle dans les pays en développement décroît de manière significative, les panneaux solaires donnant accès à l’électricité pour la cuisine et l’éclairage, tandis que la biomasse moderne pour le chauffage et le transport a augmenté sa part. Le nucléaire et l’hydroélectricité produisent un peu plus d’électricité, mais l’augmentation la plus importante est de loin celle de l’énergie éolienne et solaire, qui devra fournir quelque 35 000 TWh par an d’ici 2037. Mais quelles sont les chances que nous puissions construire à temps une capacité de production suffisante ? Et pouvons-nous  155 

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réduire notre dépendance à l’égard des combustibles fossiles assez rapidement ? Alimentation générale

Transport

Chauffage & Refroidissement

Constaté en 2015 0

25 000 Alimentation générale

50 000 75 000 Transport

100 000

Chauffage & Refroidissement

Cible pour 2037 0

25 000

50 000

75 000

100 000

Consommation d’énergie (en TWh) Énergies renouvelables

Nucléaire

Carburants fossiles

Fig. 36     L’augmentation d’ici 2037 de l’énergie renouvelable afin d’être en mesure de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C d’ici 2050. L’électricité – pour les machines, les appareils et l’éclairage –, a été fournie en 2015 par environ 80 % de l’électricité produite ; les 20 % restants ont été utilisés pour le chauffage et la climatisation.

RÉDUIRE LA PART DES COMBUSTIBLES FOSSILES

L’un des principaux défis immédiats consiste à réduire l’utilisation du charbon, car sa combustion est à l’origine d’un tiers des émissions mondiales de CO2. La capacité des centrales électriques au charbon a presque doublé au cours de la période 2000-2018 pour atteindre 2 000 GW, en grande partie à cause de la croissance rapide de l’économie chinoise. La Chine possède désormais près de la moitié de  156 

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la capacité mondiale totale, les États-Unis et l’Inde représentant un autre cinquième. L’utilisation du charbon s’est également développée rapidement en Inde, mais comme en Chine, son utilisation ralentit à mesure que les énergies renouvelables deviennent moins chères et aussi en raison des préoccupations liées à la pollution atmosphérique et au changement climatique. Cependant, les nouvelles centrales au charbon associées à l’initiative chinoise BRI Belt and Road sont une source de préoccupation. La demande de charbon aux États-Unis et en Europe diminue (doucement en Allemagne, en partie à cause de l’abandon progressif de l’énergie nucléaire), et les émissions dues à la combustion du charbon semblent avoir presque atteint leur maximum. Toutefois, à l’échelle mondiale, elles ne diminuent pas assez rapidement pour atteindre l’objectif de 1,5 °C : aucune nouvelle centrale au charbon ne devrait être construite et les centrales existantes devraient être fermées plus rapidement. La demande de pétrole doit également diminuer, ce qui commence à se produire avec le passage des voitures et camionnettes à essence et diesel (qui représentent environ 11 % des émissions mondiales de CO2) aux véhicules électriques ; il en va de même pour la demande de gaz, qui serait favorisée par l’arrêt de la fracturation (fracking). La vitesse de la transition vers les énergies renouvelables a été fortement entravée par les négationnistes du climat en position d’influence, notamment aux États-Unis. Ce refus de reconnaître que le changement climatique est causé par les émissions de dioxyde de carbone a été encouragé par les intérêts du statu quo, en particulier par l’industrie des combustibles fossiles. Des milliards de dollars sont immobilisés dans des entreprises possédant des gisements de combustibles fossiles qui doivent être laissés sous terre, et ces « actifs échoués » perdront toute valeur, tout comme de nombreuses centrales électriques à combustibles fossiles. De plus, de nombreux emplois dépendant de la combustion de combustibles fossiles seront perdus.  157 

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Ce coût social et ces bouleversements devront être pris en compte par le biais d’un soutien financier et d’une reconversion professionnelle. L’idée d’une « transition juste », selon laquelle ce coût devrait être supporté par les gouvernements plutôt que par les travailleurs du secteur des combustibles fossiles, a été reconnue dans l’accord de Paris. De nombreux emplois sont créés par les entreprises d’énergie renouvelable dans le monde entier, et le secteur nécessitera l’investissement de plusieurs milliards de dollars (dont une partie pourrait provenir du désinvestissement des entreprises de combustibles fossiles). Toutefois, le coût de la poursuite de notre dépendance à l’égard des combustibles fossiles serait beaucoup plus élevé que celui des énergies renouvelables, en raison des effets sur la santé et des dommages causés à l’environnement par le changement climatique. Ces externalités doivent être pleinement appréciées et chiffrées en imposant un prix du carbone. Actuellement, un prix sur les émissions de carbone est fixé par le biais de plusieurs systèmes, soit par des taxes sur le carbone, soit par des systèmes d’échange de droits d’émission. Les taxes basées sur la quantité de dioxyde de carbone émise incitent tout le monde à réduire les émissions et peuvent s’appliquer aux transports, ainsi qu’aux consommateurs domestiques et industriels. Mais le montant nécessaire pour atteindre une certaine réduction est incertain et peut avoir des répercussions négatives sur les personnes les moins bien loties. Les systèmes d’échange, en revanche, peuvent intégrer un plafond absolu sur la quantité d’émissions ; dans ces systèmes, les entreprises se voient attribuer un certain nombre de crédits, dont chacun permet d’émettre une certaine quantité de CO2, qui peuvent être achetés ou vendus. Dans le système de l’Union européenne, l’attri­ bution excessive de crédits a conduit à un prix trop bas (par tonne de CO2 émise) pour qu’il puisse freiner les combustibles fossiles ; en conséquence, le Royaume-Uni a introduit un prix minimum du carbone qui contribue à la fermeture anticipée de ses centrales au charbon. Aux  158 

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États-Unis, ce sont les États plutôt que le gouvernement fédéral qui prennent l’initiative, avec des systèmes déjà en place dans le nord-est et en Californie. La Chine prévoit de mettre en place un vaste système d’échange qui devrait l’aider à réduire ses émissions et à passer aux énergies renouvelables. Outre la fixation d’un prix pour les émissions de carbone, il convient de supprimer les importantes subventions accordées aux combustibles fossiles. Leur montant s’élève à plus de 370 milliards de dollars par an, contre 100 milliards pour les énergies renouvelables, alors que les pays du G20, qui représentent 85 % de la richesse mondiale (PIB brut), ont convenu, il y a dix ans, que ces subventions devaient être progressivement supprimées. Beaucoup sont des subventions à la consommation qui réduisent les prix par le biais d’un contrôle gouvernemental des prix des carburants ; ce sont des politiques populaires car elles peuvent rendre, par exemple, les déplacements en voiture moins chers. Mais souvent, seules les personnes aisées peuvent s’offrir ces carburants, et ces subventions détournent les fonds publics de l’aide aux pauvres et des dépenses consacrées à d’autres priorités, telles que l’éducation et la santé. Le seul coût annuel mondial de la santé causé par la combustion des combustibles fossiles a été estimé à au moins six fois ces subventions, ce qui montre à quel point il est important d’accélérer la transition vers les énergies renouvelables. Des poursuites judiciaires ont été engagées, sans succès jusqu’à présent, pour que les entreprises de combustibles fossiles paient les dommages liés au changement climatique. AUGMENTER LES ÉNERGIES RENOUVELABLES

Il faut augmenter de manière très significative la production de chaleur et d’électricité à partir de sources renouvelables. Une grande partie de la chaleur sera produite à partir de l’électricité, la chaleur issue de la biomasse restant probablement à environ 10-15 % de la demande totale d’énergie, un niveau qui semble pouvoir être maintenu.  159 

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En ce qui concerne l’électricité renouvelable, la chute spectaculaire des coûts des panneaux solaires et des éoliennes au cours de la dernière décennie fait que l’électricité produite par les parcs solaires et éoliens est désormais moins chère que les nouvelles centrales à charbon ou nucléaires dans de nombreuses régions du monde ; en 2018, ces parcs ont fourni 50 % des nouvelles capacités de production. La croissance des énergies éolienne et solaire a été telle que leur capacité mondiale combinée est désormais inférieure de moitié à celle des centrales à charbon, et devrait être comparable d’ici une décennie, à mesure que la production au charbon s’estompe. Récemment, la capacité solaire mondiale a doublé tous les trois ans, et la capacité éolienne tous les six ans. Les parcs éoliens en mer se développent encore plus rapidement et deviennent rapidement compétitifs par rapport à la production conventionnelle. Ces taux de croissance et les réductions de coûts associées suggèrent qu’avec des investissements massifs, la capacité mondiale d’énergie éolienne pourrait générer quelque 10 000 TWh et l’énergie solaire 25 000 TWh par an d’ici 2037, soit ensemble quelque 70 % de la consommation d’électricité visée. Cette évolution sera favorisée par un recours accru à la robotique pour accélérer la production et par la baisse rapide du coût du stockage des batteries. Le reste de la production d’électricité pourrait provenir principalement de centrales hydroélectriques, nucléaires et au gaz. Il s’agirait d’une expansion agressive de la production renouvelable qui, si elle est maintenue, permettrait de générer quelque 75 000 TWh d’électricité et de parvenir à des émissions nulles d’ici 2050. Une telle croissance est possible, à condition qu’il y ait une volonté politique. D’énormes investissements sont réalisés en Chine, dans l’Union européenne, aux États-Unis et en Inde, la Chine devant représenter plus de 40 % de l’augmentation des énergies renouvelables au cours de la période de cinq ans 2018-23. La croissance est considérable aux États-Unis, malgré l’attitude négative du président Trump, grâce aux initiatives des États, des villes et des entreprises. Les parcs éoliens et  160 

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solaires sont le secteur qui connaît la plus forte croissance, et mettent à rude épreuve les réseaux de transport. De nombreux réseaux sont en cours de modernisation ou d’extension ; par exemple, en 2018, quatre nouvelles interconnexions à travers l’Europe ont reçu des fonds pour faciliter l’intégration de davantage d’énergie renouvelable. Alors que le déploiement des énergies renouvelables a été lent en Russie, où il y a une abondance de gaz et de pétrole, une certaine croissance a eu lieu au Japon, où ils ont réduit leur dépendance à l’énergie nucléaire après l’accident de Fukushima, mais sont encore assez dépendants du charbon. Les investissements en Amérique latine, où il existe de bonnes ressources hydroélectriques et de biomasse, augmentent rapidement, mais le Brésil et, en particulier, le Venezuela disposent de ressources pétrolières considérables qui pourraient ralentir leur transition vers la production renouvelable. Dans les pays en développement, les investissements dans les énergies renouvelables augmentent rapidement et la production décentralisée au moyen de panneaux solaires permet à des millions de personnes d’avoir accès à l’électricité. MESURES À PRENDRE

La transition vers une production d’électricité essentiellement renouvelable, favorisée par l’amélioration constante des coûts et le rôle croissant de la technologie numérique, est en cours, mais pas encore assez rapidement. Une part encore plus importante de notre production d’énergie doit être constituée d’électricité à faible teneur en carbone pour les transports, le chauffage et la climatisation de nos bâtiments, ainsi que pour l’industrie. Il faut augmenter les investissements dans la production d’énergie renouvelable, améliorer les codes de construction et les réglementations en matière d’efficacité énergétique, et éliminer progressivement, dès que possible, l’utilisation du charbon et des voitures diesel et à essence. La décarbonation du chauffage de l’industrie par l’électrification des processus industriels est vitale et abordable. Elle peut être facilitée par l’utilisation de  161 

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l’électricité pour produire des carburants à faible teneur en carbone, comme l’hydrogène, ainsi que par la tarification du carbone. Surtout, les efforts internationaux pour accroître les engagements des pays en matière de réduction des émissions afin de respecter l’Accord de Paris sont cruciaux. Mais, malgré un rapport de l’ONU en 2019 avertissant que les émissions mondiales de CO2 continuaient à augmenter, aucun accord n’a été conclu sur un prix du carbone lors de la conférence sur le changement climatique COP25. Trouver les moyens de réduire la consommation et la demande d’énergie est essentiel car ils diminueront le rythme nécessaire à la décarbonation de l’alimentation électrique. Depuis 1970, la population mondiale a doublé et les émissions annuelles de dioxyde de carbone ont été multipliées par deux et demi ; la richesse mondiale (PIB) a également été multipliée par quatre. Ces changements ont entraîné un épuisement et une détérioration massifs des ressources de la planète. Au cours des quarante dernières années, les populations de vertébrés ont diminué de 60 % en moyenne et environ un million d’espèces végétales et animales sont aujourd’hui menacées d’extinction et de vastes zones forestières ont disparu. Par ailleurs, la forte pollution des océans et de l’atmosphère, ainsi que la chute vertigineuse du nombre d’insectes résultant de l’agriculture intensive (notamment des pesticides) et du réchauffement climatique, menacent de provoquer une perte catastrophique de la biodiversité. L’obsolescence intégrée, avec de nombreux produits jetés et non réutilisés, a créé des déchets massifs (notamment les plastiques). Il est essentiel que nous abandonnions le consumérisme pour adopter un mode de vie plus durable, en encourageant une économie circulaire avec recyclage et réutilisation. Il faut mettre fin aux défrichements et procéder à une importante reforestation. Et la limitation de la population, favorisée par l’urbanisation croissante dans le monde, les programmes de planning familial, l’éducation et l’autonomisation des femmes, permettra de réduire les émissions et la pression sur les ressources.  162 

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Par-dessus tout, nous devons cesser de brûler des combustibles fossiles aussi vite que possible, et il faut fixer un prix du carbone efficace et équitable. Ce sera extrêmement difficile sur le plan politique, car l’utilisation des combustibles fossiles est indissociable de nos sociétés. La poursuite de l’extraction des combustibles fossiles est déjà justifiée par le fait que l’on compte sur le piégeage du carbone pour une fraction importante des émissions mondiales de CO2. Mais ce serait très imprudent, car la technologie du piégeage du carbone n’est pas établie à cette échelle, et elle ne serait généralement pas aussi bon marché que l’utilisation d’un plus grand nombre d’énergies renouvelables ; elle pourrait bien n’être rentable que pour certains processus et ne supprimer que 10 % des émissions mondiales. Des projets visant à réduire le réchauffement de la planète, par exemple en augmentant artificiellement les aérosols atmosphériques, sont également envisagés, mais des recherches beaucoup plus approfondies sont nécessaires pour déterminer si les avantages de la géo-ingénierie l’emportent sur les risques liés à des phénomènes météorologiques extrêmes involontaires, et ils ne doivent pas détourner l’attention de la réduction des émissions de CO2. Les États, les villes et les particuliers peuvent apporter une contribution énorme en encourageant l’utilisation des énergies renouvelables, et ils le font déjà : par exemple en Californie et dans l’État de New York, à San Diego, à Jaipur, à Hambourg, à Toronto et à Bangalore. L’électrification des transports urbains (bus et trains), des voitures et des vélos accélérera la transition, tout comme les entreprises et les villes qui s’engagent à réduire leur empreinte carbone. Le changement des modes de transport des marchandises, de la route et de l’avion au rail et au transport maritime, serait également utile. Les particuliers peuvent choisir de recevoir leur électricité et leur gaz de la part de sociétés spécialisées dans les énergies renouvelables, ou de produire leur propre énergie renouvelable grâce à des panneaux solaires installés sur leur toit. Ils peuvent également réduire  163 

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leur consommation d’énergie et prendre les transports en commun, ou louer des véhicules électriques. L’implication de la communauté peut permettre de mieux faire accepter les parcs éoliens et solaires ; et des mouvements tels que « 1 million de femmes » et le « Mouvement du lever du soleil » peuvent inspirer les gens à agir contre le changement climatique, tout comme Greta Thunberg et son plaidoyer en faveur des grèves étudiantes pour l’action contre le changement climatique. La déclaration de la première urgence climatique nationale par le parlement britannique en mai 2019 a fait suite à des protestations très médiatisées du groupe d’activistes environnementaux Extinction Rebellion au cours des quinze jours précédents. Pour les activités pour lesquelles il n’existe actuellement aucune solution à faible émission de carbone, comme les vols longue distance, et qui ne peuvent être évitées, la compensation des émissions de carbone – par laquelle les émissions sont compensées en finançant une réduction des émissions ailleurs – est une solution transitoire. La meilleure façon d’y parvenir est de cotiser à un système certifié par un organisme indépendant qui capte le dioxyde de carbone, par exemple en permettant une reforestation efficace et durable, ou qui le remplace par une production d’énergie renouvelable. Il ne s’agit toutefois pas d’un substitut à la réduction de toutes les émissions personnelles possibles. La politique énergétique doit faciliter de toute urgence une transition énorme et rapide des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables, un bouleversement comparable à une entrée en guerre. Aux États-Unis, une proposition très ambitieuse prévoit un investissement massif dans la décarbonation de l’approvisionnement énergétique en l’espace d’une décennie, les emplois créés devant servir à lutter contre les inégalités. Cette proposition a été baptisée Green New Deal en raison de ses similitudes avec les mesures de relance économique du New Deal de Roosevelt dans les années 1930. Tout plan doit être à long terme pour donner des résultats et donner confiance  164 

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dans l’investissement. Le retour sur investissement peut être lent et entrer en conflit avec les bénéfices à court terme des entreprises privées pour leurs actionnaires, auquel cas une réglementation stricte ou une implication de l’État est nécessaire. Les émissions autres que le CO2, par exemple le méthane provenant du bétail, peuvent être réduites en utilisant des protéines végétales ou de culture. Manger moins de viande réduirait la superficie des terres nécessaires à l’alimentation, permettrait de restaurer les écosystèmes et aiderait à capturer le dioxyde de carbone par la reforestation. Dans le domaine de l’agriculture, le labourage de conservation, qui consiste à planter des graines sans labourer à nouveau la terre, peut réduire considérablement les émissions de CO2. L’étiquetage des denrées alimentaires et des produits de consommation en fonction de leur empreinte carbone permettrait aux gens de prendre conscience que certains produits ont des émissions associées élevées et contribuerait à rendre la consommation plus « verte ». Encart 2    Actions clés pour éviter un changement climatique dangereux. • Cesser de brûler des combustibles fossiles et utiliser des énergies renouvelables à la place. • Décarboner et augmenter l’approvisionnement en électricité en investissant dans des parcs éoliens et solaires. • Électrifier les transports et le chauffage. • Réduire la demande d’énergie – réutiliser et recycler. • Promouvoir l’expansion des énergies renouvelables et des technologies et infrastructures associées.

Les individus doivent discuter avec leur famille, leurs amis et leurs collègues de l’importance de soutenir les énergies renouvelables, de réduire les combustibles fossiles et de la nécessité d’une action  165 

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urgente. L’augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes, tels que les incendies de forêt et les graves inondations, fait prendre conscience aux gens qu’il faut faire quelque chose, mais les gouvernements ne réagissent pas assez vite. Nous disposons déjà de la technologie nécessaire pour résoudre le problème du réchauffement climatique, mais nous devons donner un élan à son déploiement. Les énergies renouvelables sont désormais abordables, car le coût de l’électricité produite par les parcs éoliens et solaires a chuté de façon spectaculaire, diminuant de moitié dans certains endroits au cours des dernières années. Un investissement énorme sera nécessaire, mais rien de comparable au coût de l’inaction. Et le fait de délaisser les combustibles fossiles au profit des énergies renouvelables devient rapidement le choix le plus économique et le plus durable. Le monde a besoin d’être alimenté par de l’électricité provenant principalement de parcs éoliens et solaires, et le rythme de leur expansion incite à l’optimisme. La croissance des réseaux électriques, la réponse à la demande et le stockage sur batterie à moindre coût peuvent permettre d’allumer les lumières et de fournir l’énergie dont nous avons besoin. Nous étions jadis dépendants des énergies renouvelables et nous devons le redevenir, afin que le monde puisse disposer d’une énergie qui n’endommage pas notre environnement et ne provoque pas un changement climatique qui affecterait profondément nos vies.

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  Lectures complémentaires Le domaine traité ici évolue si vite que les livres et les articles sont rapidement dépassés ; en particulier, ceux qui concernent l’énergie solaire et éolienne, où d’importants changements se sont produits depuis 2015. Vous trouverez ci-dessous quelques ouvrages pertinents, ainsi que des références où l’on peut trouver des informations actualisées. Aklin, M. et Urpelainen, J. Renewables: the politics of a global transition (MIT Press, 2018) Andrews, J. et Jelley, N. Energy Science, 3e éd. (Oxford University Press, 2017) Berry, S. 50 Ways to Help the Planet; easy ways to live a sustainable life (Kyle Books, 2018) Bloomberg, M. et Pope, C. Climate of Hope: how cities, businesses, and citizens can save the planet (St. Martin’s Press, 2017) Goodall, C. The Switch: how solar, storage, and new tech means cheap power for all (Profile Books, 2016) Hawken, P., éd. Drawdown: the most comprehensive plan ever proposed to reverse global warming (Penguin, 2017) IRENA. Global Energy Transformation: a roadmap to 2050 (International Renewable Energy Agency, 2018): www.irena.org/ publications Jelley, N. Dictionary of Energy Science (Oxford University Press, 2017) Klein, K. This Changes Everything: capitalism vs. the climate (Penguin Books, 2014) Klein, K. On Fire: the burning case for a green new deal (Allen Lane, 2019) Kolbert, E. The Sixth Extinction: an unnatural history (Bloomsbury, 2014) Lewis, L. L. et Maslin, M. A. The Human Planet: how we created the Anthropocene (Pelican Books, 2018)  167 

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Marshall, G. Don’t even Think about it: why our brains are wired to ignore climate change (Bloomsbury, 2014) Maslin, M. A. Climate Change: a very short introduction, 3e éd. (Oxford University Press, 2014) REN21, Advancing the Global Renewable Energy Transition (Renewable Energy Policy Network for the 21st Century, 2018): Robinson, M. Climate Justice: hope, resilience, and the fight for a sustainable future (Bloomsbury, 2018) Romm, J. Climate Change: what everyone needs to know, 2e éd. (Oxford University Press, 2018) Sivaram, V. Taming the Sun: innovations to harness solar energy and power the planet (MIT Press, 2018) Usher, B. Renewable Energy: a primer for the twenty-first century (Columbia University Press, 2019) Wallace-Wells, D. The Uninhabitable Earth: a story of the future (Allen Lane, 2019) Liens sur Internet Special report on Global Warming of 1,5 °C, International Panel on Climate Change, 2018: Affordable and clean energy: Standard of living, the human development index: UN Climate Change Conferences (CoP) https://unfccc.int/process/ bodies/supreme-bodies/conference-of-the-parties-cop

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  Index A Accidents nucléaires 114 Accord de Paris 140, 158 Afrique subsaharienne 47, 51, 62, 96, 126 Amplification polaire (température) 33 Arkwright, Richard 14

B Barrage des Trois Gorges 60, 62, 63, 120 Bas-carbone 41, 101 Bâtiments 22, 23, 28, 52, 53, 54, 88, 90, 91, 117, 135, 137, 139, 140, 148, 153, 161 Batterie lithium-ion 37, 129, 130, 131, 132, 133, 146 Batterie plomb-acide 130, 131 Batteries 41, 48, 53, 59, 72, 88, 96, 125, 127, 128, 129, 131, 132, 134, 146, 148, 160 Batteries à flux 132, 134 Beaufort, échelle de 68 Becquerel, Edmond 18, 81 Biocarburants 18, 46, 48, 49, 50, 53, 118, 140, 143, 144, 147 Biodiesel 46, 49, 144

Bioénergie 10, 23, 52, 117, 139, 155 Biogaz 51 Biomasse 11, 18, 22, 23, 25, 36, 37, 42, 45, 46, 47, 48, 51, 52, 53, 101, 117, 122, 128, 135, 139, 143, 155, 159, 161 Blockchain 98 BRI - Belt and Road Initiative 157 Briques réfractaires 142

C Canne à sucre 49, 144 Captage de CO2 42, 115, 116, 117, 118 Carbone 9, 11, 18, 31, 34, 35, 37, 41, 42, 45, 46, 48, 51, 53, 62, 68, 83, 89, 101, 104, 106, 112, 115, 116, 117, 118, 122, 128, 136, 137, 140, 141, 143, 147, 152, 154, 155, 158, 159, 161, 163, 164 Carburants propres 139 Cellule solaire en silicium 38, 81, 83, 84, 85, 86, 87 Cellules photovoltaïques 10, 18, 82 Centrale nucléaire 42, 114, 121, 127, 128 Centrale thermique 24, 53, 56, 135 Chaleur 10, 11, 12, 23, 24, 29, 33, 36, 37, 45, 46, 53, 54, 56, 59, 65,  169 

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86, 101, 108, 111, 113, 117, 135, 136, 137, 138, 139, 141, 142, 143, 148, 153, 154, 155, 159 Changement climatique 9, 10, 27, 32, 34, 42, 63, 74, 82, 115, 123, 124, 145, 155, 157, 158, 159, 162, 164, 165, 166 Charbon de bois 11, 16, 45, 46, 47 Charge de base 121 Chauffage /refroidissement 29, 32, 111, 114, 124, 135, 138, 153 Chauffe-eau solaire 54 Chauffe-eau 54 CO2 9, 28, 29, 30, 32, 35, 36, 41, 46, 49, 50, 51, 53, 73, 116, 117, 118, 128, 137, 141, 144, 151, 152, 156, 157, 158, 162, 163, 165 Combustibles fossiles 9, 10, 17, 19, 21, 22, 23, 25, 27, 28, 30, 32, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 43, 52, 56, 59, 73, 74, 76, 79, 82, 89, 92, 98, 116, 117, 122, 123, 126, 127, 128, 136, 137, 142, 143, 148, 149, 152, 153, 155, 156, 157, 158, 159, 163, 164, 165, 166 Compteurs intelligents 125 Conditions de vie 21 Consommation de viande 165 Coûts d’équilibre des systèmes 91 Coûts marginaux 121 Czochralski, Jan 83

D Déforestation 47, 49, 144 Désert de Mojave 56  170 

DESERTEC 123 Désinvestissement 158 Diesel, Rudolf 48 Dioxyde de carbone 9, 11, 18, 28, 30, 31, 35, 42, 45, 54, 112, 116, 117, 118, 119, 136, 137, 139, 141, 142, 143, 144, 145, 151, 152, 157, 158, 162, 164, 165 Drake, Edwin 16

E Éclairage, demande d’électricité 11, 17, 21, 87, 153, 155, 156 Écosystèmes 45, 165 Effet de serre 29, 30, 32, 35, 50, 85, 89 Effet photovoltaïque 18, 81 Einstein, Albert 85, 112 Électricité 10, 15, 17, 18, 19, 20, 21, 23, 24, 25, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 46, 52, 53, 56, 57, 58, 59, 60, 62, 63, 64, 65, 66, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78, 81, 82, 87, 88, 89, 91, 93, 95, 96, 97, 98, 104, 105, 108, 109, 112, 113, 114, 115, 116, 117, 118, 119, 120, 121, 122, 124, 125, 126, 127, 128, 129, 134, 135, 136, 137, 139, 140, 141, 142, 144, 145, 148, 149, 154, 155, 156, 159, 160, 161, 163, 165, 166 Electrification 24, 40, 119, 147, 149, 154, 161, 163 Électrolyse 136, 148 Élévation du niveau de la mer 32, 33

 Index 

El Niño 32 Émissions cumulées 35, 42 Émissions globales 118 Empreinte carbone 54, 89, 163, 165 Enchères (électricité) 19, 92 Énergie 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 27, 28, 34, 36, 37, 39, 40, 41, 42, 45, 46, 49, 50, 51, 56, 58, 59, 60, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 72, 73, 74, 76, 78, 79, 81, 82, 84, 85, 86, 87, 88, 89, 92, 93, 96, 97, 98, 99, 101, 105, 106, 107, 108, 109, 110, 112, 113, 114, 115, 117, 118, 119, 121, 122, 123, 126, 127, 128, 129, 130, 131, 132, 134, 135, 136, 137, 138, 139, 141, 142, 143, 144, 145, 146, 147, 148, 149, 151, 152, 153, 154, 155, 156, 157, 158, 159, 160, 161, 162, 163, 164, 165, 166, 167 Énergie des marées 14 Énergie houlomotrice 101, 106 Énergie hydraulique 15, 20, 45, 59, 62, 64 Énergie nucléaire 42, 101, 112, 114, 115, 118, 157, 161 Énergie solaire concentrée 58, 122 Énergies renouvelables 10, 17, 19, 23, 24, 25, 27, 35, 36, 37, 39, 40, 41, 42, 54, 101, 106, 115, 118, 119, 122, 123, 124, 127, 128, 137, 144, 145, 149, 153, 154, 155, 157, 158, 159, 160, 163, 164, 165, 166 Équilibrage demande/offre 98, 123, 125, 126, 128, 129, 132

Éthanol 46, 48, 49, 50, 144 Externalités 128, 158 Extinction Rebellion 164 Extraction de roches chaudes et sèches 110

F Ferme Hywind 72 Fourneyron (turbine) 14, 15, 60 Fours de cuisson 48 Francis (turbine) 60 Fukushima 42, 114, 161

G Garman (turbine à eau) 63 Gaz 9, 16, 24, 27, 28, 29, 30, 32, 35, 36, 40, 41, 42, 46, 50, 54, 89, 92, 106, 113, 116, 121, 122, 128, 134, 136, 137, 140, 141, 143, 149, 155, 157, 160, 161, 163 Générateurs flexibles 122, 128 Géo-ingénierie 163 Goodenough J.B. 131 Green New Deal 164 Groupe d’experts intergouvernementaux sur le climat (GIEC) 34 Grove, William 147

H Hittites 142 Huile de palme 46, 49, 50, 116, 144  171 

  Les énergies renouvelables  

Hydrogène 37, 116, 117, 128, 136, 139, 140, 141, 142, 143, 144, 148, 149, 162

I Index de développement humain 22 Industrie 16, 17, 18, 22, 23, 27, 37, 51, 52, 53, 58, 83, 109, 136, 137, 142, 153, 154, 157, 161 Inondations 33, 34, 62, 166 Installation hydroélectrique 10, 15, 42, 59, 60

J Jonction p-n 84, 86, 88

K Keeling, Charles 29 Koepchenwerk (stockage d’eau pompée) 130 Krafla (centrale), Islande 109

L La Niña 32 LEDs 96, 153 L’identité Kaya 152 Limites de la cible à 1.5°C 34, 35, 36, 116, 151, 156, 157

M Maïs 46, 49, 50, 102 Méthane 30, 35, 51, 140, 141, 165  172 

Mini-réseaux 96, 97 Moteur 16, 20, 24, 48, 56, 135, 143, 146, 147, 148 Moteur à combustion interne 16, 20, 24, 143, 146

N NASA 148 Niveau de vie 20, 21, 36, 40, 43, 64, 151

P Panneaux solaires 37, 48, 53, 82, 89, 91, 93, 95, 96, 98, 101, 123, 125, 129, 139, 140, 155, 160, 161, 163 Parcs solaires 90, 93, 96, 121, 122, 123, 125, 127, 160 Parité réseau 74, 76 PIB 151, 159, 162 Piles à combustible 116, 147, 148, 149 Plantation d’arbres 10, 18, 46, 49, 53, 144 Plantes à base de cellulose 50, 67 Pollution 9, 10, 16, 27, 28, 73, 78, 82, 89, 119, 127, 137, 142, 145, 147, 157, 162 Pompe à chaleur 137, 138 Population 21, 22, 39, 40, 45, 62, 70, 72, 73, 96, 105, 151, 152, 162 Prévisions météorologiques 122

 Index 

R Rayonnement infrarouge 29, 30 Réacteur à eau pressurisée 113 Réseau intelligent 124, 125 Réseau intercontinental 123 Ressources 11, 36, 38, 39, 45, 52, 62, 65, 77, 103, 110, 129, 161, 162 Révolution industrielle 14, 16, 19, 21, 28, 35 Roues à aube 13, 14

S Santé publique 21 Schuman, Frank 56 Sihwa, Corée du Sud 102 Silicium type-n 84, 85 Soufre 28, 134 Stockage d’air comprimé 134 Subventions 19, 25, 92, 127, 159 Sunshot (programme) 58 Swansea (proposition de lagune) 103 Swanson (loi de) 91

T Tchernobyl 42, 114 Thermosiphon 54, 55 Three Mile Island 114 Thunberg, Greta 164 Tour de blocs de béton 135

Transports 21, 22, 23, 24, 36, 40, 119, 136, 137, 144, 147, 153, 154, 158, 161, 163, 164, 165 Trump, Donald 34, 160 Turbine Wells 107

U Usine marémotrice 14, 17, 18, 43, 101, 102, 103, 104, 105 Usine marémotrice La Rance, France 102, 103 Utilisations de la terre 13, 18, 28, 34, 37, 39, 40, 45, 46, 47, 49, 50, 51, 53, 65, 66, 70, 71, 72, 75, 76, 78, 90, 93, 117, 138, 144, 157, 165

V Vanadium (batterie) 133, 134 Vapeur 13, 15, 16, 20, 24, 30, 33, 56, 57, 108, 113, 136, 140, 141, 143 Véhicules électriques 131, 132, 136, 144, 145, 146, 154, 155, 157, 164 Voiles latines 12, 13 Voitures 16, 27, 37, 49, 53, 129, 130, 131, 143, 144, 145, 146, 147, 154, 157, 161, 163 Voitures hybrides 146

W Watt-crête (Wp) 90 Watt, James 16, 20, 90

 173 