Le cycle du combustible nucléaire 9782759801589

Les différents aspects du cycle du combustible nucléaire en 6 points : la stratégie industrielle, la préparation de la m

199 107 12MB

French Pages 224 Year 2002

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Table of contents :
Table des matières
Partie I Introduction et chimie de I'uranium
Chapitre 1: Cycle ouvert ou fermé ? Les outils industriels
Chapitre 2 : Éléments de chimie de I'uranium et des actinides
Partie II Préparation de la matière première
Chapitre 3 : Géologie de I'uranium et extraction minière
Chapitre 4 : Conversion de l'uranium : des concentrés à l'hexafluorure
Chapitre 5 : Enrichissement en uranium fissile
Partie III Combustible neuf et usé : fabrication, irradiation, refroidissement
Chapitre 6 : Fabrication de la céramique nucléaire et de l'assemblage
Chapitre 7: Effets de l'irradiation sur le combustible en réacteur
Chapitre 8 : Refroidissement et entreposage en piscine
Partie IV Gestion du combustible usé par le retraitement
Chapitre 9 : Éléments de chimie du retraitement
Chapitre 10 : Opérations de tête du retraitement
Chapitre 11: Opérations d'extraction
Chapitre 12 : Conditionnement final du plutonium
Chapitre 13 : Contrôles analytiques et mesures nucléaires au retraitement
Partie V Transports nucléaires, déchets et effluents du cycle, recyclage
Chapitre 14 : Transports nucléaires
Chapitre 15 : Aspects d'ensemble des déchets et effluents du cycle
Chapitre 16 : Conditionnement des déchets de retraitement
Chapitre 17: Recyclage de l'uranium et du plutonium
Partie VI Devenir des déchets ultimes
Chapitre 18 : Stockage définitif et entreposage
Chapitre 19 : Risque à très long terme des déchets de haute activité
Chapitre 20 : Le stockage géologique multibarrière, solution de référence
Chapitre 21 : Voies de recherche en France (loi de 1991)
Le cycle du combustible nucléaire Origine des illustrations
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Le cycle du combustible nucléaire
 9782759801589

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Le cycle du combustible nucleaire Louis Patarin

Avec la collaboration de Pascal Baron, Philippe Fournier et Dominique Ochem

17, avenue du Hoggar Pare d'activites de Courtabceuf, BP 112 91944 Les Ulis Cedex A, France

Illustration de couverture : Mineral d'autunite, phosphate d'uranium et calcium, forme frequente dans les gisements frangais - document COGEMA -

ISBN : 2-86883-620-8 Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction par tous precedes, reserves pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alineas 2 et 3 de I'article 41, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement reservees a I'usage prive du copiste et non destinees a une utilisation collective », et d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute representation integrale, ou partielle, faite sans le consentement de I'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinea 1er de I'article 40). Cette representation ou reproduction, par quelque procede que ce soit, constituerait done une contrefacon sanctionnee par les articles 425 et suivants du code penal. © EDP Sciences 2002

Table des matieres Partie I Introduction et chimie de I'uranium Chapitre 1: Cycle ouvert ou ferme ? Les outils industriels 1. Les donnees fondamentales

13

2. Les trois logiques du cycle

15

2.1. La logique physique 2.2. La logique economique 2.3. La logique ecologique 3. Une question polemique : le destin des dechets nucleates

15 15 15 15

4. Les outils industriels

17

4.1. L'amontdu cycle 4.2. L'aval du cycle 4.3. Les moyens de transport 5. La reussite eminente de I'industrie frangaise

18 18 19 19

6. Les aspects economiques du cycle

20

Chapitre 2 : Elements de chimie de I'uranium et des actinides 1. Rappels sur la liaison chimique

23

1.1. Configuration electronique des atomes et tableau periodique des elements 1.2. Reactions et liaison chimique 1.3. L'oxydo-reduction 2. La serie des actinides

23 24 24 25

2.1. La decouverte de I'uranium et sa place dans le tableau periodique 2.2. La radioactivite 3. L'uranium

25 26 27

3.1. Les proprietes nucleaires 3.2. Les proprietes chimiques 4. Les transuraniens (neptunium, plutonium, americium, curium)

27 28 29

4.1. Le plutonium 4.2. Les actinides mineurs

29 30

4

Table des matieres

Partie II Preparation de la matiere premiere Chapitre 3 : Geologic de I'uranium et extraction miniere 1. La geologic de I'uranium 1.1. Abondance 1.2. Les mineraux uraniferes 1.3. Les gisements 2. La recherche des gisements

33 33 33 34 35

3. L'exploitation miniere 3.1. Les exploitations a ciel ouvert 3.2. Les exploitations souterraines 4. Le traitement des minerais d'uranium 5. Les ressources en uranium 5.1. Les reserves 5.2. La production miniere 5.3. La position franchise 6. Le reamenagement des sites miniers apres exploitation 6.1. La mine 6.2. L'usine 6.3. Les residus miniers

35 35 36 37 39 39 40 41 41 41 42 42

Chapitre 4 : Conversion de l'uranium : des concentres a I'hexafluorure 1. Les concentres uraniferes : uranates et oxydes 2. Les produits finis recherches pour le combustible 2.1. U metal 2.2. U oxyde 3. Les precedes de la conversion de I'uranium

43 43 43 44 44

3.1. U metal 3.2. UF6 4. Les usines franchises de conversion : COMURHEX / groupe COGEMA

44 44 45

Chapitre 5 : Enrichissement en uranium fissile 1. Les besoins en uranium enrichi des reacteurs a eau 2. Les differentes possibilites de separation isotopique de I'uranium 3. La diffusion gazeuse 3.1. Principe 3.2. Le facteur de separation 3.3. Schema d'usine 3.4. Le travail de separation isotopique 4. L'usine EURODIF 5. L'ultracentrifugation 5.1. Principe 5.2. Developpement

47 48 49 49 50 50 51 53 54 54 56

Table des matieres

5.3. Resultats 6. Les precedes par laser 6.1. Principe 6.2. Developpement

5

56 57 57 58

Partie III Combustible neuf et use : fabrication, irradiation, refroidissement Chapitre 6 : Fabrication de la ceramique nucleaire et de ^assemblage 1. Les fonctions et les composantes du combustible nucleaire

63

1.1. Les fonctions 1.2. Les composantes 2. Rappel des conditions d'usage et du comportement du combustible

63 63 65

2.1. Les conditions d'usage 2.2. Le comportement en cours d'irradiation 3. Les exigences a satisfaire et les specifications de fabrication

65 65 66

4. La fabrication de la ceramique nucleaire (pastilles)

66

5. La fabrication de la gaine

67

6. La fabrication des crayons et de I'assemblage

68

6.1. Les crayons

68

6.2. L'assemblage

69

7. Les caracteristiques des usines de fabrication 7.1. Les contraintes imposees par la matiere nucleaire 7.2. Les fabrications annexes 7.3. Les usines franchises

69 69 70 70

Chapitre 7: Effets de ['irradiation sur le combustible en reacteur 1. Les conditions generales d'usage en reacteur

71

2. La composition apres irradiation et le bilan matiere

72

2.1. Les transformations induites par les neutrons 2.2. Le bilan des noyaux lourds 3. La puissance residuelle lors du refroidissement

72 74 75

4. La radioactivite et remission neutronique

76

5. La radioprotection vis-a-vis de I'activite du combustible use

77

Chapitre 8 : Refroidissement et entreposage en piscine 1. L'entreposage en piscine - Pourquoi ?

81

2. La conception des piscines d'entreposage

82

3. Les conditions d'entreposage des combustibles irradies en piscine

83

4. Un exemple de piscine d'entreposage : La Hague

84

6

Table des matieres

Partie IV Gestion du combustible use par le retraitement Chapitre 9 : Elements de chimie du retraitement 1. Le milieu nitrique 1.1. Les proprietes acide et complexante 1.2. Les reactions redox entre etats oxydes de I'azote 1.3. Les composes antinitrites 2. La chimie redox des elements U-Np-Pu-Am en milieu nitrique 2.1. Les formes ioniques 2.2. La stabilite en milieu acide nitrique 2.3. Les reactions d'oxydation 2.4. La reduction du plutonium tetravalent 2.5. La reduction du plutonium hexavalent 3. Le TBP et ('extraction liquide-liquide 3.1. Le tributylphosphate (TBP, masse molaire 323) 3.2. Le role du diluant 3.3. L'extraction liquide-liquide 4. La separation de U-Np-Pu-Am par extraction

89 89 89 90 90 90 91 91 92 92 93 93 94 95 96

5. Le comportement des principaux produits de fission

98

5.1. 5.2. 5.3. 5.4. 5.5.

Les produits de fission gazeux Les produits de fission alcalins et alcalino-terreux L'yttrium et les lanthanides Les platinoTdes Les metaux de transition : molybdene, zirconium et technetium

98 98 98 99 99

Chapitre 10 : Operations de tete du retraitement 1. Le cisaillage des assemblages combustibles

101

2. La dissolution nitrique 2.1. Les mecanismes de dissolution 2.2. Le bilan de la dissolution 2.3. Contraintes et aspects technologiques 3. La clarification de la solution de dissolution

102 102 104 104 106

4. Le traitement des gaz de dissolution

106

5. Le resultat des operations de tete

107

Chapitre 11: Operations detraction 1. Introduction : le precede PUREX

109

1.1. Lesobjectifs 1.2. Les performances de PUREX 1.3. Chimie et hydrodynamique 1.4. La solution d'entree 2. La conception generale des cycles d'extraction

109 109 110 110 111

3. La co-extraction uranium et plutonium au premier cycle

112

Table des matieres

1

4. La desextraction selective du plutonium (partition)

113

5. Le traitement du solvant

114

6. Les operations annexes 6.1. Le lavage des phases aqueuses par du diluant 6.2. Le traitement complementaire du solvant 6.3. Les cycles de purification uranium et plutonium 7. Les appareils d'extraction

115 115 115 115 116

7.1. Les melangeurs-decanteurs (M-D) 7.2. Les extracteurs centrifuges (EC) 7.3. Les colonnes pulsees (CP) 8. La modelisation

116 117 118 119

Chapitre 12 : Conditionnement final du plutonium 1. L'objectif

121

2. Le precede

121

2.1. La precipitation oxalique 2.2. La filtration 2.3. La calcination 2.4. La concentration des eaux meres oxaliques 3. Les caracteristiques du produit fini

121 122 122 123 123

4. Le colis de plutonium 5. La reprise du PuO2 hors norme

123 124

Chapitre 13 : Controles analytiques et mesures nucleaires au retraitement 1. Introduction

127

2. L'utilisation de mesures non destructives

127

2.1. Les mesures directes sur le precede 2.2. Les mesures indirectes sur prelevements 2.3. Exemples de mesures nucleaires utilisees dans le precede de retraitement . 3. Les differents controles 4. Les methodes analytiques

128 128 128 130 130

Partie V Transports nucleaires, dechets et effluents du cycle, recyclage Chapitre 14 : Transports nucleaires 1. 2. 3. 4.

Les transports du cycle du combustible Les matieres radioactives transporters La surete des transports Les colis

135 136 137 139

4.1. La classification des colis 4.2. Le colis et les epreuves reglementaires

140 142

8

Table des matieres

5. Les modes de transport 6. La reglementation applicable aux transports

142 142

Chapitre 15 : Aspects d'ensemble des dechets et effluents du cycle 1. Generalites 2. La classification des dechets solides nucleaires en France 3. Les types de dechets produits a chaque etape du cycle

145 146 147

3.1. Les dechets miniers et les dechets de I'amont du cycle 3.2. Les dechets generes par les reacteurs nucleaires 3.3. Les dechets de I'aval du cycle 4. Quantite de dechets solides produits par I'industrie nucleaire 5. Les dechets de demantelement des INB

148 149 150 150 151

6. L'ANDRA 7. Les effluents liquides et gazeux issus de I'industrie nucleaire en France 7.1. Les rejets des centrales nucleaires 7.2. Les effluents generes par les etapes du cycle 7.3. L'impact dosimetrique des rejets de I'industrie nucleaire

152 153 154 155 156

Chapitre 16.: Conditionnement des dechets de retraitement 1. Les dechets de procede (issus du combustible use) 2. Les dechets technologiques (maintenance et interventions)

159 163

2.1. Les dechets dus aux interventions et a la maintenance 2.2. Les resines echangeuses d'ions 2.3. Les residus de solvant 2.4. Les dechets solides issus du traitement chimique des effluents 3. Quelles matrices de conditionnement ?

164 164 164 164 165

4. Comment reduire les volumes de dechets du retraitement ?

167

Chapitre 17: Recyclage de I'uranium et du plutonium 1. Les donnees du recyclage 1.1. La composition isotopique des matieres recyclables 1.2. Comment recycler ? 2. Les conditions du recyclage dans les reacteurs a eau 2.1. La neutronique du recyclage du plutonium 2.2. La strategic du recyclage du plutonium 2.3. Le probleme de I'uranium 3. Le recyclage du plutonium avec le combustible MOX 3.1. Les caracteristiques et le comportement du MOX 3.2. La fabrication du MOX 3.3. Lebilandu recyclage MOX 4. Le recyclage en France 4.1. L'aspect politique 4.2. Les aspects industriels

169 169 1 70 1 71 171 1 71 1 72 1 72 172 1 74 174 1 75 175 176

Table des matieres

9

Partie VI Devenir des dechets ultimes Chapitre 18 : Stockage definitifet entreposage 1. Le stockage des dechets de faible activite 2. L'entreposage des dechets de haute activite 2.1. Les besoins frangais d'entreposage 2.2. Les criteres de conception des entreposages de dechets B et C 2.3. Exemples d'entreposage de dechets B et C

181 185 185 185 186

Chapitre 19 : Risque a tres long terme des dechets de haute activite 1. Les specificites du risque des dechets nucleaires 2. Le plan scientifique 2.1. La loi de decroissance radioactive 2.2. Activite et nocivite des radioelements de longue vie 2.3. Les facteurs fondamentaux du risque 2.4. Les solutions techniques 2.5. La radioprotection a tres long terme 3. Le plan economique 4. Le plan « societal »

189 190 190 193 195 195 198 199 199

Chapitre 20 : Le stockage geologique multibarriere, solution de reference 1. 2. 3. 4. 5.

Pourquoi le stockage geologique des dechets nucleaires de longue vie ? Le concept du stockage geologique a barrieres multiples L'avancement des projets de stockage geologique dans le monde et en Europe . Etude phenomenologique, recherches, analogues naturels Les modelisations de performance des stockages geologiques

201 201 203 204 206

Chapitre 21 : Voies de recherche en France (loi de 1991) 1. Introduction : pourquoi une loi de recherche ? 2. Les axes de recherche fixes par la loi 3. Les programmes de recherche de I'axe 1 : Separation-Transmutation 3.1. Les objectifs 3.2. Les etudes de separation 3.3. Les etudes de transmutation 4. Les programmes de recherche de I'axe 2 : Stockage en formation geologique profonde 5. Les programmes de recheche de I'axe 3 : Conditionnement et entreposage de longue duree 5.1. La structure des programmes 5.2. Le traitement et le conditionnement des dechets 5.3. Le comportennent a long terme des colis 5.4. La caracterisation des colis 5.5. L'entreposage de longue duree en surface ou en subsurface 6. Le rendez-vous de 2006

209 210 212 212 213 214 215 217 21 7 218 218 219 220 220

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Partie I

Introduction et chimie de I'uranium

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1

Cycle ouvert ou ferme ? Les outils industriels

1. Les donnees fondamentales Un combustible est par definition un corps se combinant avec I'oxygene, en degageant de la chaleur grace a une reaction chimique qui mobilise seulement les electrons peripheriques des elements se combinant. Par extension, on a appele combustible nucleaire une matiere qui produit aussi de la chaleur par transformation des noyaux des atomes, en pratique par fission d'atomes lourds, ceux de I'uranium, du plutonium, eventuellement ceux du thorium. Les processus physiques sont done tres differents pour les deux types de combustible. Les conditions de production continue de chaleur pour une application industrielle sont beaucoup plus difficiles a realiser avec le combustible nucleaire. Les imperatifs de controle des neutrons dans la reaction en chaine entretenue font du combustible nucleaire un produit hautement technique. Sa matiere premiere doit suivre une serie d'operations qui s'achevent par les precedes de haute technologic de la separation isotopique ou du recyclage, et sa fabrication demande une haute precision pour obtenir les caracteristiques specifiers de composition, structure et confinement. On appelle « cycle » I'ensemble des etapes industrielles qu'il faut suivre pour assurer les services du combustible nucleaire. Celles-ci constituent une chaine qui ne s'arrete pas a la fourniture du combustible neuf. En effet ce cycle est marque par quatre donnees fondamentales du combustible nucleaire : La densite d'energie est extraordinaire, des millions de fois superieure a celle d'un combustible chimique. L'energie de fission immediate s'accompagne d'une intense energie residuelle, qui ensuite va se manifester longtemps sous forme radioactive et secondairement thermique (la chaleur n'est qu'une manifestation de la radioactivite). La fission nucleaire produit toujours une certaine regeneration de la matiere « fissile », a partir de la matiere «fertile » associee dans le combustible (voir le rappel des proprietes nucleaires de I'uranium au chapitre 2). La fin de combustion ne correspond pas a I'epuisement du potentiel energetique de la matiere nucleaire chargee; elle est imposee par les imperatifs de la neutronique et ceux du confinement. L'evolution des atomes lourds et ('accumulation progressive des produits de fission neutrophages, plus I'endommagement conjoint par irradiation du confinement proche (le « gainage ») fixent les limites d'usage du combustible (Figure 1.1).

14

Le cycle du combustible nucleaire

Figure 1.1. Energie des liaisons chimiques et des phenomenes nucleaires.

Ainsi a toutes les etapes de son cycle industriel, le combustible nucleaire se caracterise par une masse manipulee extremement petite, c'est une caracteristique cle. Pour alimenter en combustible une centrale electrique de 1 000 MWe pendant un an, pour une production d'environ 8 TWh, il faut: • avec le petrole 2 millions de tonnes; • avec le charbon 3 millions de tonnes ; • avec le nucleaire 200 tonnes d'uranium naturel, devenant 25 tonnes d'uranium enrichi, dont seulement 1 tonne est effectivement fissionnee. Pour memoire une centrale electrique de 1 000 MWe fournit I'electricite necessaire a une ville d'environ 1 million d'habitants.

Quand la limite d'usage est atteinte, il demeure une matiere durablement chaude et tres radioactive, qui necessite un refroidissement et un confinement rigoureux, pendant tres longtemps. Mais comme seulement quelques % de la masse des noyaux lourds ont ete « brules », la fin de cycle est confronted a un probleme particulier au nucleaire. Que peuton /a/re du combustible use ? -

declarer que le combustible use est un dechet global, et choisir la voie du cycle « ouvert » ou direct;

-

ou bien le traiter pour recuperer et recycler les noyaux lourds restants, et choisir ainsi le cycle « ferme ».

1 - Cycle ouvert ou ferme ? Les out/Is industrials

15

2. Les trois logiques du cycle Le choix peut etre fait suivant trois logiques.

2.1. La logique physique Quand on retire le combustible des reacteurs, il contient encore des « allumettes » (atomes fissiles naturels de I'uranium 235, et artificiels des isotopes 239 et 241 du plutonium genere), ainsi que beaucoup de « gros bois » peu entame (atomes fertiles de ('uranium 238). Le recyclage de ces restes energetiques est done physiquement logique (voir Figure 7.3).

2.2. La logique economique Le cout du recyclage est a comparer au cout de la matiere vierge, extraite des mines d'uranium. A I'origine historique du nucleaire civil, les ressources en uranium etaient tres limitees et le recyclage s'imposait. On pensait meme que le developpement a grande echelle ne pouvait se faire que par conversion maximale de I'uranium 238 en plutonium. C'est ainsi que le premier reacteur electrogene dans le monde (1951) fut un « surgenerateur» a neutrons rapides (EBR1 aux Etats-Unis).

Aujourd'hui l'uranium naturel est abondant et surtout peu cher, si bien que le nonrecyclage est devenu la logique dominante. Mais jusqu'a quand ?

2.3. La logique ecologique Cette troisieme logique s'appuie sur le principe general d'economie de la matiere premiere et de I'energie, en recyclant meme a cout supplementaire et en separant puis conditionnant les dechets ultimes, ceux qui ne peuvent aucunement etre valorises. Curieusement la logique ecologique n'a pas beaucoup de soutien pour le combustible nucleaire.

3. Une question polemique : le destin des dechets nucleaires La radioactivite artificielle engendree par les reacteurs nucleaires provient de I'interaction des neutrons, qui y sont multiplies a haut niveau, avec la matiere. Cette interaction joue a fond dans le combustible, ce qui est recherche pour y entretenir la reaction en chatne, et secondairement touche la matiere au-dela. Les defauts d'etancheite du gainage du combustible et la circulation de I'eau primaire de refroidissement entrament une certaine dispersion des elements rendus radioactifs. Mais au total, environ 99 % de la radioactivite artificielle de I'industrie nucleaire proviennent du combustible use, et y restent confines, sauf accident grave, jusqu'a eventuellement son traitement ulterieur ou sa degradation par vieillissement.

16

Le cycle du combustible nucleaire

Dans I'option du cycle ouvert, le combustible use constitue la structure globale des dechets. C'est une politique de « tout a la decharge », qui conduit a envisager des stockages a radioactivite maximale. Les dechets nucleates veritables, ceux qui n'ont pas de valorisation possible par recyclage, sont tout d'abord les produits de fission et ensuite les noyaux lourds « degrades », crees par capture « sterile » de neutrons (uranium 236 et transuraniens mineurs). II s'y ajoute quelques produits d'activation dans les structures metalliques, le caloporteur et les impuretes.

Dans ('option du cycle ferme, on vise la separation des matieres recyclables (uranium et plutonium), et en complement le conditionnement specifique des dechets separes (par exemple par vitrification des residus de retraitement ou par compactage des structures metalliques cisaillees). C'est une politique de « dechets ultimes ». Le cycle ouvert tend a rester dans une pure logique economique, et le cycle ferme profile de sa logique physique pour etre ecologiquement « correct ». Mais aujourd'hui une polemique s'est installee, au-dela des orientations industrielles, car aucune des options de fin de cycle n'a encore mis en application la « solution finale » pour les dechets nucleates du combustible. Les autres dechets du nucleaire, bien moins actifs, ont une solution finale par depots en surface. Ceci se realise sur les sites miniers avec les residus de traitement du minerai, et dans des centres de stockage definitif avec les dechets de faible activite, industriels ou autres.

Quelle pourrait etre la « solution finale » des dechets issus du combustible use ? Le probleme pose est celui du risque lie a la radioactivite a long terme des radioelements de longue vie, ceux qui restent hautement toxiques apres des temps longs a I'echelle humaine, plusieurs siecles ou un millenaire. Ce risque d'impact par retour vers la vie, apres la ruine des dispositions humaines prises a I'origine, depend : -

de I'activite des radioelements restants a long terme, facteur « source » ; des voies de leur retour physique et biologique, facteur « transfert ».

Pour proteger durablement la biosphere, on peut agir sur ces deux facteurs separement ou ensemble. L'ideal c'est de detruire la source, par reirradiation neutronique des dechets de longue vie, solution transmutation. Une solution simple, qui paratt satisfaisante, est le confinement robuste dans une roche profonde, stable et isolee des eaux de surface, solution stockage profond. -

-

Le stockage profond vise a disposer de stockages definitifs installes en couches geologiques sol ides et etanches. Presentement la reference mondiale, cette solution est I'objet d'importants programmes de recherche. Elle est reconnue comme sure a tres long terme, ne devant avoir qu'un impact nul ou tres faible meme a des horizons de temps tres lointains, et aussi comme faisable a cout reduit, a cause des petits volumes a enfouir. Elle est envisagee pour les deux fins de cycle en competition (cycle ouvert et cycle ferme). La transmutation, idee egalement ancienne, est un concept scientifique dont le developpement industriel apparaTt incertain. Sa technologic, qui reste a definir dans un contexte de grande complication, et ses couts ne peuvent etre etudies avant de tres importants efforts de recherche. II est deja estime que ses performances pratiques ne seront pas suffisantes pour eliminer tout recours a un depot profond. On peut aussi craindre que son aspect de surete « active », necessaire avec la manipulation de tres

7 - Cycle ouvert ou ferme ? Les outils industries

17

hautes activites dues aux cycles speciaux de reirradiation, annule les avantages recherches en mettant en balance des risques reels a court terme avec des gains limites et hypothetiques a tres long terme. On reverra cette question plus en detail avec le chapitre 21, a propos des recherches entreprises en France. Le destin final des dechets de longue vie du combustible use est aujourd'hui au cceur de la polemique sur le nucleaire. L'enfouissement, assiege par les antinucleaires, est en situation de blocage ou au mieux de progres a pas comptes et la transmutation, qui fait I'objet d'une relance de la recherche, est loin de convaincre le monde scientifique et industriel de son interet. Heureusement le stockage provisoire, qu'on denomme entreposage, peut etre pratique sur une duree indefinie avec le combustible use des reacteurs a eau, puisque sa degradation par vieillissement est extremement lente, dans de bonnes conditions de refroidissement.

4. Les outils industriels L'irradiation du combustible nucleaire dans les reacteurs change considerablement sa composition et le niveau de sa radioactivite. Ceci fait que I'industrie du cycle est structuree par la transmutation des atonies irradies : elle est divisee naturellement en deux parties, I'amont du cycle qui prend en charge la matiere non irradiee exclusivement faite d'uranium (nature! et enrichi), et I'aval du cycle qui prend le relais en recueillant la matiere irradiee, le passage en reacteurs etant a leur frontiere (Figure 1.2). Entre les differents maillons des operations du cycle, il est necessaire de disposer de moyens de transport, qui sont speciaux pour ceux qui vehiculent une matiere a risque, et qui sont sous controle international strict.

Figure 1.2. Le cycle du combustible nucleaire.

18

Le cycle du combustible nucleaire

La sortie du cycle que constitute la gestion finale des dechets nucleaires quels qu'ils soient est le fait, dans la majorite des pays nucleaires, d'organismes etatiques n'appartenant pas a I'industrie.

4.1. L'amont du cycle La matiere mise en ceuvre pour le combustible neuf, produit final de I'amont, subit plusieurs transformations mais reste a base exclusive d'uranium 238 et 235, tres peu actif. II y a deux activites industrielles differentes dans Pamont: la preparation de la matiere premiere, et ensuite la fabrication de Pobjet combustible. La preparation de la matiere premiere commence par ('extraction de I'uranium dans les mines, a partir d'un mineral qui peut etre valorisable, a cause des faibles quantites requises, jusqu'a de faibles teneurs (quelques pour mille). Apres traitement du minerai, pres des mines, il est precede a une concentration par voie chimique qui aboutit a un produit marchand, dit « yellow cake », a 60-70 % d'uranium. Une seconde etape de preparation est engagee dans de grandes usines traitant des tonnages importants d'uranium (plusieurs milliers de tonnes par an), pour faire d'une part une conversion chimique des concentres (uranates et oxydes) vers I'hexafluorure d'uranium, avec une haute performance de purification, et d'autre part un enrichissement en uranium fissile 235, a la teneur requise par les reacteurs a eau, qui orientent largement la demande en uranium (la teneur doit passer de 0,7 a 3,5 ou 4 %, voire plus dans I'avenir jusqu'a 5 %). L'uranium appauvri est sorti du cycle et entrepose. La fabrication termine I'amont industriel. Elle se fait dans des usines fagonnant moins de 1 000 tonnes d'uranium enrichi par an. C'est alors une Industrie manufacturiere de precision, qui produit la ceramique oxyde UO2 et assemble les differents composants dans une structure que Ton appelle « assemblage combustible ». II s'y ajoute la fabrication des « grappes » servant au controle neutron ique.

4.2. L'aval du cycle L'industrie de cette partie du cycle regoit le combustible decharge des reacteurs. La matiere nucleaire est devenue des millions de fois plus radioactive que Puranium naturel, meme apres un certain temps de refroidissement dans les piscines. L'objectif de I'industrie de I'aval, c'est \agestion du combustible use, selon I'uneou I'autre des deux options disponibles. Dans le cycle ouvert les operations industrielles sont simplifiees puisque le combustible use est declare dechet global. La premiere phase, qui aujourd'hui n'a pas de duree definie, est I'entreposage, avec refroidissement par eau et eventuellement avec refroidissement a sec en relais apres decroissance suffisante. La seconde phase serait la mise en conteneurs robustes des assemblages refroidis, en vue de leur depot dans un stockage geologique. Mais il n'y a pas presentement de realisation industrielle de cette operation. L'Allemagne a construit a Gorleben (Basse Saxe), a grands frais, un pilote de mise en conteneurs d'assemblages irradies entiers ou sectionnes, dit PKA (capacite de 30 tonnes par an). Les difficultes actuelles du nucleaire dans ce pays n'ont pas permis de lui donner I'autorisation d'exploitation. La Suede et les Etats-Unis ont etudie des projets d'atelier et ont mene des essais de fabrication de conteneurs de haute integrite.

Dans I'option du cycle ferme toutes les operations industrielles ont ete deployees, dans deux pays qui ont une grande experience du retraitement, la France et le Royaume-Uni.

1 - Cycle ouvert ou ferme ? Les outils industrials

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On y realise dans de tres grandes usines, de haute activite, d'une part la separation et la purification de I'uranium et du plutonium, et d'autre part le conditionnement final des dechets ultimes, sous forme de conteneurs de verre pour les produits de fission et de conteneurs de dechets compactes ou immobilises dans du ciment pour les debris de structures. Contrairement au cycle ouvert, le cycle ferme peut faire valoir des resultats importants qui batissent sa maturite : plus de 20 000 tonnes de combustible oxyde retraite, essentiellement a La Hague en France, et des dizaines de milliers de tonnes de combustible metallique retraite au Royaume-Uni et en France. D'autres pays ont aussi choisi le cycle ferme, quelquefois en combinaison avec le cycle ouvert, mais ils sont clients des usines des deux pays ci-dessus. Le Japon a lance, apres une usine pilote, la construction d'une usine de la taille et de la technologie de celles de La Hague. Le cycle ferme a ete plus recemment complete par Industrialisation du recyclage du plutonium, grace a la mise en service d'ateliers de fabrication de combustible mixte (plutonium-uranium), dit MOX. Le re-enrichissement de ('uranium de retraitement est aussi pratique pour son recyclage, mais encore a echelle modeste.

4.3. Les moyens de transport La surete nucleaire a impose une reglementation internationale tres precise, visant: -

le conditionnement et les colis des matieres nucleaires a transporter, les conteneurs de transport, les modes de transport.

Dans I'amont, les modalites sont les plus simples : le mineral est transports dans les zones minieres par camions lourds, les concentres sont mis en futs metalliques banals ; des exigences specifiques sont fixees pour I'hexafluorure d'uranium (resistance des cylindres de conteneurage aux accidents, dont le feu), et pour le transport des assemblages neufs (risque de criticite, surveillance internationale des matieres fissiles). Pour cette partie, les conteneurs restent assez legers, et tous les modes de transport courant peuvent etre empruntes. Dans I'aval, un blindage lourd est indispensable pour les conteneurs, a cause des rayonnements emis et de la resistance exceptionnelle exigee du confinement (transport de combustible use et de dechets de haute activite). Les conteneurs appeles « chateaux » peuvent peser couramment une centaine de tonnes ce qui, ajoute au controle international tres strict, met en ceuvre une chame de moyens speciaux de transport (bateaux, wagons, camions, quais et grues...). A noter que, pour le combustible MOX, il y a un renforcement des dispositions utilisees pour le combustible a I'uranium, a cause du plutonium (risque de contamination et rayonnements gamma et neutrons).

5. La reussite eminente de I'industrie frangaise La mise en place du cycle Industrie! s'est faite en sequences, partout dans le monde. D'abord I'amont a ete lance dans de nombreux pays, sauf I'enrichissement qui demande des moyens techniques et financiers de haut niveau. En fait I'enrichissement a ete lie, au

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Le cycle du combustible nucleaire

depart et pendant assez longtemps, aux besoins militaires. La fabrication est generalement I'affaire des constructeurs de reacteurs, qui detiennent les connaissances du couplage coeur-combustible. L'aval a ete lance pour la recuperation du plutonium a des fins militaires, avec des combustibles metalliques peu irradies, et il a ete generalement neglige pour les combustibles civils, sauf dans le cas des combustibles metalliques a uranium nature!, instables apres irradiation, qui ont profile de ('experience militaire (filieres Magnox des Anglais et UNGG des Frangais). La position dominante du cycle ouvert dans de nombreux pays fait que I'aval n'est completement industrialise que dans les deux pays qui ont eu ce premier developpement avec les combustibles metalliques civils. Grace a une politique continue de recherche et de choix industriels, la France a acquis la position de leader mondial dans le cycle du combustible nucleaire. Elle a aujourd'hui la mattrise industrielle de 1'ensemble des maillons du cycle. Sa place est parmi les premiers dans I'amont (groupes COGEMA et FRAMATOME regroupes dans AREVA), et son leadership est total dans I'aval (groupe COGEMA), suite au renoncement des pionniers, les Etats-Unis, et egalement au retrait de I'Allemagne qui avait ebauche la mise en place de moyens de retraitement. Dans I'aval, le Royaume-Uni est a la seconde place (BNFL), et le Japon a la troisieme. La Russie a une importante Industrie du cycle, mais dans un etat perturbe d'exploitation. Prenant la position de la France en compte, les cours de Genie Atomique du cycle de combustible s'attachent a suivre les solutions techniques franchises.

6. Les aspects economiques du cycle L'avantage economique premier du nucleaire provient de la faible quantite de matiere premiere qu'il demande. Le cout uranium (yellow cake) represente moins de 10 % du cout total de production du kWh nucleaire, a comparer par exemple au cout gaz qui s'eleve a 60-70 % du kWh en centrale a cycle combine (turbine a gaz combinee a une turbine de recuperation a vapeur), ou encore au cout charbon qui represente 50 % du kWh en centrale thermique alimentee en charbon d'importation. La valeur ajoutee de ('Industrie du cycle, hors mines, est par ailleurs largement nationale (avantage emplois et independance). Elle represente a peu pres 20 % du cout total du kWh. Si I'on note que le reste de ce cout correspond a des activites aussi purement nationales (construction et exploitation des reacteurs), il en resulte que I'energie nucleaire est nationale a plus de 90 %. Le poids economique des differentes etapes du cycle est variable. La fin de cycle avec retraitement et conditionnement des dechets ultimes est le poste le plus important (environ 30 % du cout de cycle). L'enrichissement vient ensuite (environ 25 %), mais le cout des concentres depend du marche mondial de I'uranium, aujourd'hui deprime (environ 20 %). Le poste fabrication est modeste (moins de 15 %). Le stockage definitif des dechets n'a pas de reference « commerciale », faute de mise en ceuvre ; on estime qu'il devrait representer un poste assez mineur (moins de 10 %). II fait I'objet d'une provision de la part des electriciens nucleaires (Tableau 1.1).

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1 - Cycle ouvert ou ferme ? Les outils industrials

Tableau 1.1. Cout du cycle des reacteurs a eau (en 1997).

cF/kWh

%

Concentres uranium

1

22

Conversion hexafluorure

0,1

2

Enrichissement en 235U

1,1

24

Fabrication assemblage

0,6

13

Liaison transports

0,1

2

Gestion par retraitement

1,3

29

Stockage final des dechets

0,3

7

Cout total

4,5

Etape

Si on analyse le cout du cycle dans I'ensemble des postes du cout total du kWh nucleaire, il ressort qu'il est relativement faible (Tableau 1.11). Dans 1'estimation officielle de 1997 (calcul de la Direction Generale de I'Energie et des Matieres Premieres - DGEMP), il ne represente qu'un quart du total, soit en valeur actualisee 4,5 cF sur 17 cF (respectivement 0,69 et 2,59 centimes d'euro). Tableau 1.11. Cout actualise du kWh nucleaire (en 1997).

cF/kWh Investissement

8,7*

Exploitation

3,4

Combustible

4,5**

R&D

0,4

Cout total

17

* Dont demantelement 0,1. ** Y compris stockage des dechets. Source DGEMP 1997, actualisation 5%.

Ce resultat entrame la tres faible sensibilite de 1'electricite nucleaire aux cours mondiaux des matieres premieres, en ('occurrence de celui de Turanium. En terme d'activite economique, le groupe COGEMA donne une idee du volume du cycle : il emploie 19 000 agents et realise un chiffre d'affaires de 5 milliards d'euros, dont 40 % a ('exportation.

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Elements de chimie de I'uranium et des actinides

1. Rappels sur la liaison chimique 1.1. Configuration electronique des atomes et tableau periodique des elements La structure des atomes explique les proprietes des elements, en particulier leurs reactions chimiques. Un atome comporte : -

un noyau tres petit et tres dense forme par un amas de protons, portant chacun une charge electrique +, et de neutrons sans charge ;

-

une population d'electrons tres legers vis-a-vis des particules du noyau, portant chacun une charge -, et qui gravitent autour du noyau.

Le nombre A des particules du noyau est le « nombre de masse » de I'atome. L'atome est electriquement neutre, et done son nombre Z de protons est egal a son nombre d'electrons. Z est appele le « numero atomique ». II caracterise les atomes d'un element chimique donne, et il repere cet element dans le tableau periodique dit de MendeleTev. Ce tableau a ete etabli a I'origine en classant les elements connus par masse atomique croissante, et par rapprochement des proprietes chimiques qui se repetent periodiquement. II est aujourd'hui bati sur la configuration electronique de chaque type d'atome propre a un element. Pour cette configuration, on decrit I'etat de chaque electron attache a un noyau par quatre « nombres quantiques ». Les trois premiers nombres definissent son « orbitale » (sa position autour du noyau, caracterisee par son niveau d'energie), et le dernier nombre sa rotation sur lui-meme (« spin »). Ainsi le premier nombre designe la couche a laquelle appartient I'electron, le second la sous-couche (notee s, p, d, ou f), et le troisieme caracterise I'orbitale dans la sous-couche. Les sous-couches s, p, d, f comportent respectivement 1, 3, 5 et 7 orbitales, chaque orbitale pouvant recevoir 2 electrons au plus (exclusion de Pauli). La construction de la configuration electronique, a I'etat fondamental de Tatome non excite, obeit a des lois precises. D'apres le principe de construction, il y a un ordre de remplissage des orbitales quand on parcourt la serie croissante des numeros atomiques, ce qui impose la construction du tableau periodique.

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Le cycle du combustible nucleaire

Finalement il faut retenir que la configuration electronique d'un element (sauf I'hydrogene) comporte un ensemble d'electrons stables, a I'interieur de I'atome, correspondant a celle du gaz rare qui le precede dans le tableau et qui ne compte que des sous-couches completes, et un groupe limite d'electrons peripheriques, qui sont moins lies et peuvent « s'interesser » a d'autres atomes, creant ce qu'on appelle des liaisons chimiques. Les electrons de liaison sont dits electrons de valence. Les electrons de valence creent les proprietes chimiques particulieres de chaque element et leur nombre fixe le nombre de liaisons elementaires que cet element peut construire (jusqu'a 8 pour certains elements, comme par exemple le ruthenium, produit de fission dont la chimie est ainsi complexe et rend difficile son controle dans les precedes de retraitement). Ainsi la structure du tableau periodique, qui classe les proprietes chimiques, est determinee par les dernieres sous-couches des elements. Exemple de I'atome d'uranium, Z - 92 : • •

configuration interne celle du radon, notee en abrege [Rn] ; configuration externe a 6 electrons, notee 5f3 6d1 7s2 : - 3 electrons sous-couche f dans la couche 5, - 1 electron sous-couche d dans la couche 6, - 2 electrons sous-couche s dans la couche 7,

Remarque. Le nombre de masse A peut varier legerement, par le nombre de neutrons dans le noyau, sans que le numero atomique Z varie. Les atomes correspondants sont appeles isotopes de ['element caracterise par son Z.

1.2. Reactions et liaison chimique Les reactions entre les elements sont done gouvernees par les electrons les plus externes des atomes, ceux qui n'appartiennent pas au « cceur » de la population electronique constitue par une configuration de gaz rare. Le jeu des electrons de valence aboutit a un groupement des atomes en structures plus complexes, pour former des composes qui, schematiquement, sont de deux types : -

type ionique ; dans cette liaison, un atome cede un ou plusieurs electrons a un atome different, et ils se lient par force electrostatique (exemple le sel alcalin Na+ Cl~) ;

-

type moleculaire, dans une liaison dite « covalente » qui se fait par appariement electronique, c'est-a-dire par le partage d'une paire d'electrons (ou plusieurs paires) par deux atomes (exemple molecule diatomique O=O avec une liaison par deux doublets).

1.3. L'oxydo-reduction Quand un atome entre dans une liaison, il peut« perdre » ou « gagner » plus ou moins le controle d'un ou de plusieurs electrons. Comme la reaction entre un element et I'oxygene, qui est une reaction tres frequente, aboutit au transfert d'electrons de I'element a I'oxygene, on a appele reaction d'oxydation d'un element toute perte d'electrons, et a ['inverse reaction de reduction tout gain d'electrons, qu'il y ait ou non de I'oxygene dans la reaction.

2 - Elements de chimie de I'uranium et des actinides

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En pratique les deux phenomenes sont lies par le transfer! d'electrons, et on parle de reaction d'oxydo-reduction ou « redox ». Le nombre d'electrons echanges definit les nombres d'oxydation d'un element, ou encore ses etats de valence, notes en chiffres remains I, II, III ... VIII. On etend ce concept aussi aux composes non strictement ioniques. C'est une notion importante pour la chimie de I'industrie du cycle, car on y mobilise les differents degres d'oxydation de I'uranium et du plutonium.

2. La serie des actinides 2.1. La decouverte de I'uranium et sa place dans le tableau periodique L'uranium fut identifies en 1789 dans le mineral de pechblende par I'allemand Klaproth, et peu apres decouvert a Autun en France, soit a peine 15 ans apres ('identification de I'oxygene et le debut de la chimie scientifique par Lavoisier. Dans le tableau periodique, I'uranium est le dernier element naturel, celui qui a le plus grand numero atomique (Z = 92) et la plus grande masse atomique (A = 234, 235, 238). II appartient a une serie de 15 elements, dits actinides car commengant a I'actinium (Z = 89), serie qui se prolonge au-dela de ('uranium par des elements artificiels. Les premiers artificiels sont formes dans les reacteurs nucleaires a partir de I'uranium par des captures successives de neutrons (neptunium, plutonium, americium, curium, berkelium, californium), et les plus lourds, curiosites de laboratoire, sont obtenus dans des accelerateurs de particules (Figure 2.1).

Figure 2.1. Serie des actinides.

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Le cycle du combustible nucleaire

La serie des actinides (Z = 89 a 103) constitue dans le tableau periodique une serie de metaux de transition, comme la serie des lanthanides ou terres rares (Z = 57 a 71). Ces deux series sont caracterisees par le peuplement progressif des electrons dans les souscouches f : 4f pour les lanthanides, 5f pour les actinides. Par suite, les deux series ont des proprietes chimiques voisines, ce qui complique evidemment leur separation quand elles sont melangees, comme dans les solutions de retraitement, puisque ('irradiation de I'uraniuln engendre les deux series. Les lanthanides sont le resultat des fissions, et les actinides artificiels sont le resultat des captures de neutrons. Mais contrairement aux lanthanides dont le degre d'oxydation III est dominant, le degre d'oxydation dominant des premiers actinides (Z = 90 a 94), sauf I'actinium, est toujours plus eleve (IV, V, VI). Ceci facilite ('extraction de ces actinides-la, dont I'uranium (Z = 92) et le plutonium (Z = 94).

2.2. La radioactivite Tous les actinides sont radioactifs, c'est-a-dire qu'ils se transmutent spontanement, par rayonnement a et (3, en changeant de structure atomique ; ils finissent ainsi par regresser dans le tableau periodique. Comme tous les elements sont en fait radioactifs a partir du polonium (Z = 84), les actinides engendrent des chames de decroissance relativement longues, aboutissant aux atomes stables les plus lourds, plomb (Z = 82) et bismuth (Z = 83) (Figure 2.2).

Figure 2.2. Decroissance de I'uranium 238 - Famille 4n+2.

2 - Elements de chimie de I'uranium et des actinides

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Dans ces chames de decroissance radioactive, les atomes qui subsistent dans la nature sont ceux qui ont une « periode » de decroissance tres longue ou qui ont un ascendant de tres longue periode : -

thorium 232, periode : 14 milliards d'annees ;

-

uranium 235, periode : 0,7 milliard d'annees ;

-

uranium 238, periode : 4,5 milliards d'annees (c'est I'age de la Terre).

L'uranium 234, present en tres faible proportion dans le minerai, est un descendant de I'uranium 238, et a une periode de 0,25 million d'annees. Les trois atomes 232Th, 235 U et 238 U sont les ascendants de trois families radioactives naturelles, celle du 232Th a 10 descendants (dernier plomb 208), celle de I'uranium 235 a 11 descendants (dernier plomb 207), et celle de I'uranium 238, la plus longue, a 14 descendants (dernier plomb 206). Une quatrieme famille a totalement disparu, sauf son ultime descendant stable le bismuth 209. L'irradiation de I'uranium, en produisant le neptunium 237 (periode 2,14 millions d'annees), lui redonne naissance aujourd'hui, avec 11 descendants. A noter que, compte tenu des modes de decroissance des actinides, il ne peut pas y avoir plus de 4 families. Remarque. Les actinides artificiels «transuraniens » (Z > 92), prolongent en amont les memes families radioactives avec des atomes plus lourds et plus instables. Us ont done les memes descendants, par suite naturels a partir de Z = 92, sauf quand ils appartiennent a la famille du neptunium. C'est a retenir pour la question des dechets de longue vie.

3. L'uranium 3.1. Les proprietes nucleaires Les usages de I'uranium sont restes tres limites pendant 150 ans ; il n'etait qu'un pigment jaune vif pour la ceramique, la cristallerie ou la bijouterie. Mais la decouverte de ses proprietes nucleaires, a la fin des annees 1930, a change totalement son interet. L'uranium represente un miracle de la nature car il est le seul atome naturel qui permette « I'allumage » de I'energie de fission, grace a son isotope 235 (0,7 %) qui est tres fissile par des neutrons de faible energie. Mais son isotope le plus abondant, 238, est egalement precieux car, par capture neutronique, il donne naissance a un element artificiel tres fissile, le plutonium. L'uranium 238 est dit fertile, car il subit ainsi une conversion susceptible d'accrottre considerablement la ressource d'energie de fission, si la reaction en chaine dispose d'un exces de neutrons suffisant, ce qui est particulierement vrai dans les reacteurs a neutrons rapides. L'uranium a ete forme dans les etoiles « mourantes ». On sait que les elements legers, jusqu'au fer, sont crees par fusion dans les etoiles en activite, mais que par centre les elements lourds sont engendres par capture de neutrons, ce qui se produit grace au flux intense de neutrons lors de I'explosion en fin de vie des etoiles. L'uranium des cendres d'etoiles a ete recueilli lors de la formation du systeme solaire. L'activite specifique de I'uranium naturel est de 24,4 MBq kg~1, la moitie etant due a I'isotope 238 et I'autre moitie a I'isotope 234, la contribution du 235 etant negligeable.

28

Le cycle du combustible nucleaire

3.2. Les proprietes chimiques Rappel de la configuration electronique de I'uranium : [Rn] 5f3 6& 7s2. Les 6 electrons peripheriques de valence sont facilement extractibles. Le metal est done tres reducteur, il s'oxyde rapidement a I'air humide ou chaud. La chimie de I'uranium est complexe (electrons 5f). Ses principales proprietes sont: -

plusieurs degres d'oxydation, de III a VI, le dernier etant le plus stable sous forme d'ion uranyle UO^ en solution ; - formation d'especes complexes ioniques ou non ; - solubilite remarquable du nitrate d'uranyle dans de nombreux composes organiques. Ces proprietes sont utilisees dans les precedes industriels qui visent soit des produits, soit des extractions preliminaires.

3.2.1. Metal C'est un produit utilise dans les applications militaires et le combustible de reacteurs d'essais. Dans le passe, il a ete le produit du combustible des reacteurs a uranium naturel graphite et gaz (en abrege UNGG). Dans le futur, il pourrait servir dans I'enrichissement par laser sur vapeur atomique. C'est un metal cassant qui peut etre ameliore par alliage. Le metal est obtenu a partir du compose fluorure UF4 que I'on reduit par le calcium ou le magnesium.

3.2.2. Oxydes A partir du nitrate d'uranyle et du di-uranate d'ammonium qui sont des produits de base, on obtient par calcination a 350 °C I'oxyde UO 3 ; puis, par reduction de cet oxyde par I'hydrogene, on aboutit a I'oxyde UO2. Cet oxyde se prepare aussi par hydrolyse du fluorure UF6 qui provient des usines d'enrichissement. UO2 est un compose tres stable qui sert a fabriquer la ceramique des pastilles du combustible des reacteurs a eau. II conserve ses proprietes, en particulier mecaniques, jusqu'a proximite de son point de fusion (2 760 °C), et ne reagit pas avec Peau en cas de rupture de gaine du combustible, mais il a ('inconvenient d'etre peu conducteur de la chaleur. U3O8 est un oxyde naturel qu'on trouve par exemple dans le minerai de pechblende, produit d'oxydation de UO2. Tous les oxydes se dissolvent dans les acides plus ou moins rapidement, notamment dans I'acide sulfurique (traitement du minerai) ou I'acide nitrique (traitement du combustible irradie).

3.2.3. Fluorures UF4 est un intermediate utilise pour la production du metal ou celle du fluorure UF6 qui sert a la separation isotopique. L'attaque de I'oxyde UO2 par I'acide fluorhydrique HF donne UF4.

2 - Elements de chimie de I'uranium et des actinides

29

UF6 s'obtient par reaction du fluor sur le tetrafluorure, c'est le seul compose volatil de I'uranium, solide incolore a la temperature ordinaire, qui se sublime a 56 °C.

3.2.4. Extraction Les methodes d'extraction de ('uranium font appel a I'echange d'ions par resines ou par solvant, et surtout a la separation avec solvant organique. L'echange d'ions est pratique avec resines ou solvants cationiques sur les solutions d'attaque sulfurique des minerals d'uranium, il permet la separation vis-a-vis des nombreuses especes metalliques. La recuperation se fait par elution a partir des resines avec une solution de chlorure de sodium, et a partir d'un solvant cationique avec de I'ammoniaque ou du chlorure de sodium, en aboutissant apres precipitation par une base a un uranate de sodium, de magnesium ou d'ammonium, c'est ce qu'on appelle le « yellow cake ». Dans les etapes ulterieures du cycle, I'acide utilise est I'acide nitrique HNO3/ et le solvant industriel est un solvant neutre, complexant, le phosphate tributylique (TBP) : le nitrate d'uranyle en phase aqueuse est mis en contact avec le TBP dilue dans un hydrocarbure. Le transfer! se fait suivant ['equation : UO2(NO3)2 6H2O + 2 TBP organ. ^[UO2 (NO3)2, 2 TBP] organ. + 6 H2O L'equilibre de partage depend de la concentration en acide nitrique ; il est deplace vers la phase organique quand cette concentration augmente. Ce precede sert a purifier le nitrate d'uranyle dans les usines du cycle, et surtout il est la base du precede « PUREX » du retraitement dont on precisera la chimie ulterieurement.

4. Les transuraniens (neptunium, plutonium, americium, curium) 4.1. Le plutonium Le plus abondant des transuraniens resultant de I'irradiation de I'uranium (proportion de I'ordredu pour cent), il est un melange de plusieurs isotopes 238, 239, 240, 241, 242 dont les impairs sont fissiles. Le 239 domine d'autant plus que le taux d'irradiation est faible. Get element est la composante la plus interessante de la matiere recyclable, et il est une matiere strategique militaire quand il est riche en 239. II existe deux autres isotopes du plutonium, le 236Pu dont la periode est assez courte (2,85 ans), done peu abondant mais c'est le « pere » de I'232U dont les descendants a vie courte sont emetteurs y, et le 244Pu a vie tres longue (83 millions d'annees) qui est en quantite infinitesimale dans le combustible irradie.

Configuration electronique : [Rn] 5f6 6d° 7s2. Comme I'uranium, le plutonium est plurivalenciel. Ses degres d'oxydation vont de III a VII, et les quatre degres III a VI peuvent coexister. Sa chimie industrielle vise a jouer sur les degres III et IV. A noter que le plutonium forme facilement de nombreuses especes complexes ioniques et neutres.

30

Le cycle du combustible nucleaire

On renvoie au chapitre 9 sur la chimie du retraitement, puisque la partie la plus importante de la chimie du plutonium concerne cette etape du cycle. II suffit de noter ici qu'on mobilise les principaux degres d'oxydation du plutonium III et IV. Le compose industriel du plutonium est I'oxyde PuO2/ produit par les usines de retraitement. II est combine avec I'oxyde UO2 pour la fabrication des combustibles mixtes de recyclage, « MOX » des reacteurs a eau ou combustible des reacteurs rapides. Le metal n'est employe que dans les armes nucleaires. Effets radiolytiques. L'activite du plutonium est tres forte, d'autant plus que la proportion de 238 (emetteur a) est elevee (periode 88 ans). Cette activite cree une radiolyse importante, phenomene qui entrame la rupture de nombreuses liaisons chimiques et la formation de radicaux libres. II faut en tenir compte car la radiolyse degrade les solvants organiques comme le TBP, et produit des degagements gazeux dans les solutions, et meme dans les solides comme I'oxyde PuO2 quand ils ont un peu d'eau.

4.2. Les act/Hides mineurs Les isotopes les plus frequents sont: -

neptunium 237, periode : 2,14 millions d'annees ;

-

americium 241, periode : 433 ans ;

-

americium 243, periode : 7 400 ans ;

-

curium 244, periode : 18 ans.

Ces actinides transuraniens sont dits « mineurs » car ils sont presents en tres faible proportion dans I'uranium irradie (ordre du pour mille pour ('ensemble). Mais I'americium et le curium ont une tres forte activite ; et le 244Cm est en outre un tres intense emetteur de neutrons, ce qui rend sa manipulation tres risquee. Les usages de ces actinides mineurs ont toujours ete tres limites : -

237

Np pour produire par capture neutronique 238Pu destine a la thermoelectricite de I'espace;

-

241

-

244

Am pour la detection des fumees d'incendie par ionisation de I'air;

Cm pour des sources de neutrons intenses.

Mais surtout les actinides mineurs constituent un groupe de radioelements qui, une fois le plutonium et I'uranium recuperes du combustible use et les produits de fission tres actifs disparus apres quelques siecles, represente de loin la composante la plus active des dechets de longue vie du retraitement. Ceci justifie I'etude de leur separation et eventuellement de leur transmutation par reirradiation. Le neptunium peut etre extrait avec le TBP, presque aussi efficacement que I'uranium. Par centre, I'americium et le curium se comportent comme leurs homologues de la serie des lanthanides, ayant un degre d'oxydation stable de III. Leur separation des lanthanides largement representes dans les produits de fission entrame une recherche laborieuse, qui n'a pas encore abouti a un precede industriel.

Partie II

Preparation cfe la matiere premiere

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3

Geologic de I'uranium et extraction miniere

1. La geologie de I'uranium Rappelons que I'element uranium 92U a trois isotopes naturels : -

238 (99,28 %), periode : 4,5 milliards d'annees ;

-

235 (0,718 %), periode : 0,7 milliard d'annees ;

-

234 (0,0056 %), periode : 0,25 million d'annees.

Le dernier est le descendant par decroissance du premier. L'uranium est un metal, de masse volumique 19, dont la temperature de fusion est de 1 133 °C.

1.1. Abondance L'uranium est relativement repandu dans I'ecorce terrestre (2 a 3 g par tonne de roche), son abondance etant comparable a celles de I'etain, de I'arsenic, du tungstene, du molybdene, et superieure a celles du mercure, du bismuth, de I'antimoine, de I'argent et de Tor. Cependant I'uranium est plus abondant dans les granites (10 a 30 g par tonne), ce qui confere a ces roches une radioactivite naturelle aisement detectable. Au contraire, I'uranium a une teneur tres faible dans les roches basiques comme les basaltes ou les calcaires marins. Dans les eaux, la teneur en uranium est en general tres basse, 2 a 3 ppb (partie par billion ou milliard), y compris dans les oceans qui cependant, vu leur volume, piegent au total des milliards de tonnes.

1.2. Les mineraux u rani feres Us sont tres nombreux ; on en connaTt plus de 200. Us appartiennent a deux grands groupes, suivant que leur milieu est reducteur ou oxydant. Ce sont les groupes a U4+ ou U6+. On distingue : -

les mineraux « primaires », formes en profondeur, surtout a valence 4 (noirs); pechblende UO2, y UO3 ou uraninite UO2, x UO3, silicates et titanates divers. La pechblende est la forme la plus frequente dans les minerals d'interet industriel ; c'est une uraninite assez oxydee, de formule globale U3O8. Les mineraux primaires sont

34

Le cycle du combustible nucleaire

remontes de la profondeur par hydrothermalisme, et le plus souvent ils se sont deposes en filons, plus ou moins verticaux ; -

les mineraux « secondaires », derivant des primaires par leur alteration oxydante superficielle (teintes vives, vert, jaune, orange), tres varies ; par exemple I'autunite est un phosphate d'uranium et de calcium. Leurs cristaux sont particulierement spectaculaires (Figure 3.1).

Figure 3.1. Mineral d'uranium jaune.

1.3. Les gisements Le mecanisme de la formation des gisements est en general simple. L'uranium est assez facilement mis en solution par I'eau en milieu oxydant, puis il precipite en rencontrant apres transport un milieu reducteur. Le resultat est d'une part la mobilite de I'uranium et d'autre part la possibilite de concentration locale dans un gisement. Les sources d'uranium qui donnent des concentrations interessantes sur le plan minier sont des roches granitiques ou parfois volcaniques acides. Il y a en fait une tres grande variete de gisements economiquement exploitables, leur teneur pouvant s'etendre de quelques pour mille (parfois moins) a 10 % et plus. Selon les conditions de chaque projet d'exploitation (couts previsionnels d'extraction de la mine, transport et traitement), et aussi les conditions du marche, I'interet d'un gisement est caracterise par une « teneur de coupure » : on ne peut le mettre en exploitation que si le mineral y est a une teneur egale ou superieure a cette teneur de coupure. La teneur est donnee en kg t~1 de mineral. L'importance du potentiel total du gisement en uranium est aussi une donnee fondamentale. Les gisements les plus courants appartiennent a deux grands types : -

le type « filonien » qui a une mineralisation subverticale dans des failles (comme en Vendee, dans le Forez ou le Limousin, les trois plus anciennes provinces franchises d'extraction); on le trouve dans les roches cristallines comme le granite ;

3 - Geo/og/e cte /'uranium et extraction miniere

-

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le type « sedimentaire » en couches subhorizontales, souvent a faible profondeur (exemple frangais dans I'Herault); il se rencontre dans des roches d'alteration continentaie, par exemple des gres.

Lesgisementsfiloniensont souvent des lentilles « riches », mais leur potentiel, souvent tres divise, est ie plus souvent limite (moins de 10 000 tonnes). Leur exploitation peut etre laborieuse quand elle doit etre souterraine (voir plus loin). Les gisements sedimentaires sont faciles a exploiter, avec des ressources souvent importantes (des dizaines de milliers de tonnes), meme si leurs teneurs sont habituellement faibles. Us representent la source majeure de la production mondiale actuelle d'uranium. Assez recemment on a decouvert au Canada (Saskatchewan, bassin de I'Athabasca) de nouveaux gisements a la fois tres riches et tres importants (exemple Cigar Lake de 100 000 t, ou Mac Arthur River le plus gros gisement mondial). Ces gisements sont dans une zone de « discordance geologique », zone particuliere de separation de deux formations differentes, un socle cristallin et une formation d'alteration, comme le gres. L'exploitation de ces nouveaux gisements exige des protections particulieres en raison de leur radioactivite exceptionnelle. Notons enfin que I'uranium peut etre recupere comme « sous-produit » dans des gisements divers de phosphates, de cuivre et meme d'or (par exemple a I'immense mine de Rossing en Afrique du Sud).

2. La recherche des gisements Les methodes des geologues de I'uranium mettent a profit la radioactivite de I'element et de ses descendants, qui sont en equilibre de decroissance dans le minerai. Par exemple la prospection pedestre, portee ou meme aeroportee, utilise la detection du rayonnement j des descendants de I'uranium 238 (et plus precisement ceux du radon 222). La radiometrie permet la decouverte des gisements affleurants. Pour la recherche des gisements sous couverture sterile, des methodes complementaires sont mises en ceuvre, a partir des panoplies classiques de la geophysique, de la geochimie, de la paleogeographie. Elles permettent de reperer les structures geologiques et les accidents tectoniques, ce qui eclaire les geologues sur la genese des gisements. La recherche, quand les indices sont encourageants, mobilise enfin des moyens de sondage qui permettent d'etablir des series sedimentaires, de tracer les contours des gisements, etc.

3. L'exploitation miniere Le minerai d'uranium est generalement a faible teneur, sauf exception au Canada, mais sa radioactivite permet le tri, lot par lot. On fait de la selectivite a I'abattage, puis au chargement et finalement au traitement. II y a deux grands types d'exploitation miniere :

3.1. Les exploitations a del ouvert Ce sont de tres grandes carrieres, ou I'abattage se fait a I'explosif par gradins descendants. Ces mines offrent une grande productivite pour la recuperation d'uranium, avec de bonnes

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Le cycle du combustible nucleaire

conditions de securite du travail et de protection radiologique; mais elles entrament une grande perturbation de 1'environnement et obligent a faire une remise en etat du site tres etendue (Figure 3.2).

Figure 3.2. Mine d'uranium a ciel ouvert au Niger. L'extraction par excavation peut aller de 100 000 a 500 millions de tonnes de roche, la production d'uranium correspondante variant de quelques dizaines de tonnes a 100 000 tonnes et plus. La consommation d'explosif est assez modeste, de 50 a 150 g par tonne brute. 3.2.

Les exploitations souterraines

Pour les gisements les plus profonds, au-dela de 50-100 m et jusqu'a plusieurs centaines de metres, on ouvre des mines souterraines. Les pratiques d'abattage sont variees, car elles s'adaptent aux caracteristiques des gisements. L'acces au fond et la remontee au jour du minerai peut se faire par puits minier classique, ou par « descenderie », sorte de rampe en colimagon accessible aux vehicules (legers pour le personnel ou lourds pour le minerai). 3.2.1. Les gisements filoniens On y deploie une grande diversite de methodes, en utilisant presque toujours I'explosif, le choix se faisant en fonction de la selectivite cherchee. La disposition subverticale des filons permet ('evacuation par gravite des produits abattus (vers le fond ou le tri peut se faire avant la remontee). La progression se fait par tranches, montantes ou descendantes suivant la resistance de la roche. Dans la roche solide, on abat le gisement par tranches montantes, avec consolidation par « boulonnage » et, au fur et a mesure, par remblayage hydraulique avec le sable des residus du traitement. Dans la roche peu solide, on precede par tranches descendantes en disposant un remblai cimente de securite pour les chantiers successifs.

3 - Geologie de I'uranium et extraction miniere

37

3.2.2. Les gisements sedimentaires Etant subhorizontaux et reguliers, ils permettent une forte mecanisation. L'exploitation courante se fait par chambres et piliers (les piliers sont abandonnes ou repris, avec remblayage, selon la teneur). Dans le cas particulier des minerals tres riches du Canada (pays ou le groupe COGEMA est largement present), I'abattage doit etre robotise, a cause de la tres forte radioactivite de la mine.

3.2.3. Les problemes specifiques aux mines Les mines souterraines posent deux problemes particuliers. Le premier est lie a la remontee des minerals aujour. On precede au concassage prealable dans la mine et on fait un premier tri. La remontee utilise ou bien les puits equipes classiquement de « skips », ou bien les larges « descenderies » equipees de convoyeurs a bande ou de camions. Le second probleme est celui de la radioprotection des mineurs. L'irradiation externe |3 et Y fait I'objet d'une surveillance individuelle. Quant a ('irradiation interne (par le radon et les poussieres), elle est contrebattue par un aerage intense, un arrosage systematique. La surveillance est collective (par prelevement d'air) et individuelle. II est interessant de noter qu'il n'y a plus d'epidemiologie significative des mineurs, contrairement aux debuts de Sexploitation des mines d'uranium. L'extraction annuelle d'une mine souterraine est dans la fourchette de 50 000 a 1 million' de tonnes de mineral. On y emploie 300 a 600 g d'explosif par tonne brute.

4. Le traitement des minerals d'uranium Le traitement depend des caracteristiques generates des minerais : -

faible teneur en general, ce qui conduit a implanter les usines pres des sites miniers, et ce qui donne de volumineux residus solides ;

-

variete geochimique, qui couvre deux grandes families, celle des minerais acides a gangue siliceuse (filoniens et sedimentaires dans des granites ou des gres) et celle des minerais carbonates (sedimentaires).

Les principales etapes du traitement sont les suivantes (Figure 3.3) : -

Preparation mecanique, par concassage puis broyage, pour obtenir une pulpe (suspension a environ 60 % de mineral dans I'eau, avec une granulometrie de 150 a 450 urn).

-

Attaque, soit par I'acide sulfurique plus un oxydant (chlorate) pour les minerais acides, soit par le carbonate de soude, sous pression et a plus de 100 °C, pour les minerais basiques.

-

Separation liqueur uranifere / residus solides par lavage a contre-courant dans une batterie d'epaississeurs ou par filtration sur filtre a bande ou a tambour.

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Le cycle du combustible nucleaire Purification de la liqueur au moyen d'echangeurs d'ions (solides type resines ou liquides type solvants organiques) qui extraient preferentiellement I'uranium ; la purification est completee par une desextraction par solution saline, puis par une concentration et a ce stade on a un rendement d'extraction globale en uranium superieur a 90 %. Precipitation par une base, filtrage et sechage pour produire les concentres commerciaux « yellow cake » (Figure 3.4), generalement sous forme d'uranate a 707 75 % d'uranium (uranate de magnesie ou d'ammonium, ce dernier connu sous le nom d'ADU, ammonium diuranate).

Figure 3.3. Schema de principe du traitement du mineral. Pour la mise en solution, il faut amener I'uranium a la valence 6 (oxyde UO3 solide et en solution cation uranyle UO2+ ). Les precipites produits a la fin sont aussi a la valence 6. L'acide sulfurique H2SO4 est choisi, parmi les acides mineraux qui tous dissolvent I'uranium sans trop attaquer la gangue, car il est moins couteux et aussi moins polluant ou agressif pour les materiaux de precede. L'additif oxydant est le chlorate de sodium NaCIO3. Quand la gangue comporte trop de carbonates, elle entrame une trop grande consommation d'acide sulfurique; on choisit alors comme reactif d'attaque, insensible a ces carbonates, le carbonate de soude combine a I'oxygene. Mais le precede est plus difficile, exigeant pression et temperature elevees. C'est la propriete de former des complexes sulfates qui est utilisee pour separer I'uranium, au moyen d'echangeurs d'ions. Les resines sont employees pour des liqueurs pauvres, en premiere etape de concentration. Les solvants organiques sont des amines tertiaires (a trois radicaux) R3N diluees dans un hydrocarbure, qui ont une aptitude a donner des complexes amine-uranium s'extrayant de la liqueur. Pour la precipitation, trois bases sont employees : la soude NaOH, la magnesie MgO, et I'ammoniaque NH4OH. Les precipites sont les uranates Na2U2O7 ou MgU2O7 ou encore (NH^L^Oj.

3 - Geologie de I'uranium et extraction miniere

39

Figure 3.4. Yellow cake.

Des operations annexes sont mises en ceuvre dans les usines de traitement des minerals pour les residus solides, qui represented presque la totalite du mineral traite, et qui conservent le radium. On leur applique une decantation dans des bassins amenages, avec controle et surveillance de leur radioactivite. Parfois sur le site des usines se trouve aussi une aire de lixiviation par acide sulfurique, ou sont traites en tas et a I'air libre les minerals les plus pauvres. Enfin on connaTt des cas de « lixiviation in situ » ou de I'acide dilue est injecte directement dans le sol.

5. Les ressources en uranium 5.1. Les reserves Elles sont repertoriees periodiquement dans le livre rouge OCDE/AIEA (Agence internationale de Penergie atomique). En 1997, les reserves raisonnablement assurees et exploitables a moins de 80 $ kg-1 etaient estimees a 2,55 millions de tonnes pour le monde entier. Les pays les plus riches en reserves sont assez bien repartis sur tous les continents. L'Europe est cependant assez mal dotee, bien qu'elle ait eu des exploitations minieres importantes dans le passe recent, particulierement en France et en Allemagne de I'Est (Figure 3.5).

40

Le cycle du combustible nucleaire

Figure 3.5. Reserves d'uranium dans le monde en 1997 : total 2,55 MtU. (Ressources Raisonnablement Assurees exploitables a moins de 80 $/kU, source : d'apres OCDE/AIEA 1998). Au-dela de ces ressources relativement bien inventoriees, il est tres probable qu'une recherche nouvelle permettrait de decouvrir plusieurs autres millions de tonnes exploitables. Certains experts fixent les reserves ultimes exploitables au niveau de 10-15 millions de tonnes. On peut aussi rever de faire dans le lointain avenir la collecte de I'uranium des oceans ! Mais il ne faut jamais oublier que les societes futures pourront se tourner vers la surgeneration, deja bien demontree a Pechelle industrielle, qui pourra s'alimenter pendant des siecles a partir des stocks deja constitues d'uranium appauvri. Pour etre complet on cite aussi les ressources en thorium, matiere nucleaire fertile, ressources non repertoriees mais qui pourraient etre superieures a celles de I'uranium. Mais, devant les stocks en uranium appauvri et la tres faible consommation de la surgeneration, de I'ordre d'une a deux tonnes par an et par reacteur, on ne voit pas I'interet de lancer un cycle nouveau a base de thorium. 5.2.

La production miniere

Aujourd'hui elle est au niveau mondial a 35 000 tonnes d'uranium par an. I/evolution historique de cette production est passee par un maximum de 60 000 t an~1, autour de 1980, et elle manifeste une decrue sensible depuis dix ans (Figure 3.6).

Figure 3.6. Historique de la production et de la consommation d'uranium dans le monde.

3 - Geologie de I'uranium et extraction miniere

41

Les besoins se sont stabilises, faute de croissance de I'energie nucleaire, vers 60 000 t an'1. La difference avec la production courante actuelle est comblee par les stocks accumules pendant les annees de surproduction jusqu'en 1990, ainsi que par le « destockage strategique » russe et americain (uranium militaire en « exces »). La chute considerable des prix, depuis le tournant de 1990, de 40 a 8-10 $ par livre de U3O8 explique le repli de I'activite miniere, avec pour consequence le ralentissement de la prospection, la stagnation des investissements et la restructuration des acteurs miniers.

5.3. La position frangaise La France n'a plus qu'un operateur minier, le groupe COGEMA, apres un mouvement national de restructuration. Mais COGEMA, producteur diversifie, a une implantation mondiale. Les mines franchises, autrefois importantes (plus de 2 000 tonnes extraites par an), sont economiquement epuisees, la derniere a Jouac dans le Limousin venant de fermer en 2001. En terre, les reserves connues les plus importantes sont dans le nord Aquitaine. Avec 6 000 tonnes par an, COGEMA occupe le second rang mondial dans la production d'uranium, se classant un peu en dessous du canadien CAMECO. Les exploitations et participations minieres de COGEMA se situent au Niger, aux Etats-Unis, en Australie, en Asie centrale et au Canada (position premiere). Le portefeuille des reserves acquises par COGEMA est de 225 000 tonnes d'uranium, ce qui lui assure 35 ans de ventes au niveau actuel.

6. Le reamenagement des sites miniers apres exploitation Ce point est evidemment d'actualite en France. En fin d'exploitation, I'environnement doit etre reamenage pour effacer ou reduire I'impact laisse par I'activite miniere : -

excavations a ciel ouvert ou puits, descenderies et galeries souterraines ;

-

batiments d'usine de traitement et gros materiels sans usage ;

-

enfin tas de steriles et surtout decharge des residus de traitement, en millions de tonnes.

Rappelons que les residus miniers contiennent une grande part des radioelements naturels descendants de ['uranium, dont le radium et le radon gazeux. Le reamenagement est soumis a une reglementation precise, et il est finance par I'operateur minier. On distingue trois categories de travaux de fermeture. 6.1. La mine On precede au comblement par steriles des excavations de surface ou on les transforme en plans d'eau. Puis on remodele le paysage et on revegetalise. Les chantiers souterrains sont mis en securite durable par remblayage et stabilisation, puis obturation.

42 6.2.

Le cycle du combustible nucleaire L'usine

L'ICPE (installation classee pour I'environnement) de I'usine disparatt apres vidange, nettoyage et demontage. Les materiels contamines par 1'uranium sont mis en stockage avec les residus. Ensuite I'usine complete est generalement demolie, le terrain est nettoye et controle. 6.3. Les residus miniers Pendant la periode d'activite miniere le stockage des residus est ICPE (en excavation ou en bassin). A la fermeture, il faut assurer leur confinement durable, pour la salubrite du site dans sa configuration finale. Ceci engage toute une suite de travaux specifiques : - mise en place d'une couverture resistant a I'erosion, qui limite la sortie du radon et ('infiltration de la pluie ; - renforcement des digues de maintien du stockage et profilage des berges d'excavation ; - drainage des eaux, traitement et controle ; - revegetalisation. Le site enfin reamenage est dote de moyens de surveillance continue, pour maintenir le controle permanent de toutes les voies de transfer! de I'uranium et de ses descendants : eau, atmosphere, chame alimentaire locale. Quel est le destin du site reamenage ? Une partie peut etre revendue au public (mines a ciel ouvert, terrains nettoyes, plans d'eau...). Une partie reste sous la responsabilite de I'operateur minier, avec servitude d'usage (stockage des residus de traitement, traitement des eaux). Les annees passant, un certain retour« a la nature » se faittres progressivement, mais la surveillance doit etre maintenue sur une tres longue duree.

4

Conversion de I'uranium: des concentres a I'hexafluorure

1. Les concentres uraniferes : uranates et oxydes Les usines de traitement et concentration pres des mines delivrent: -

essentiellement des uranates (de magnesium, sodium, ammonium), contenant environ 70 % d'uranium. Exemple : diuranate d'ammonium (NH4)2 U2 O7. Les produits commerciaux sont globalement appeles « yellow cake », a cause de leur couleur jaune et de leur texture (aux Etats-Unis, on appelle « cake » le produit solide issu d'une filtration) ;

-

parfois des oxydes, pouvant contenir jusqu'a 80 % d'uranium, sous forme UO2 noir, UO3 orange ou U3O8 noir.

Les concentres sont livres en futs de 200 litres ou en conteneurs de 1 metre cube. La composition et la purete de ces produits miniers de base sont analysees a I'entree de la conversion chimique. Certaines impuretes sont limitees par des specifications severes. Par exemple le bore a « 0,02 % ou le vanadium et le molybdene a < 0,1 %. En outre il y a, a Tentree, une comptabilite precise de I'uranium.

2. Les produits finis recherches pour le combustible

2.1.

U metal

A I'origine, c'etait I'uranium metal qui etait demande pour les reacteurs plutonigenes militaires ou pour les reacteurs a uranium nature! graphite gaz (filiere frangaise UNGG par exemple). L'uranium metal ayant de mediocres proprietes, les combustibles etaient faits avec des alliages. C'est encore le cas pour les combustibles des reacteurs d'essai, qui exigent une grande densite d'uranium. Les quantites en cause sont tres limitees, et I'uranium y est enrichi a niveau eleve ou moyen. Le metal U pourrait revenir pour I'enrichissement par laser sur vapeur atomique.

44

Le cycle du combustible nucleaire

2.2. U oxyde Aujourd'hui c'est I'oxyde UO2 faibiement enrichi a 3-5 % qui constitue la matiere finale du combustible des reacteurs a eau. Dans les usines actuelles d'enrichissement, ('operation se fait sur le seul compose gazeux, a faible temperature, I'hexafluorure UF6. La conversion chimique des concentres miniers vise done a produire principalement I'hexafluorure.

3. Les precedes de la conversion de I'uranium 3.1, U metal Le precede « historique » utilise une premiere transformation de la matiere en tetrafluorure UF4, par attaque a I'acide fluorhydrique (voir infra), puis realise la production du metal par « magnesiothermie » en melangeant UF4 a de la grenaille de magnesium.

3.2.

UF6

Deux voies sont possibles, selon la place choisie pour la purification.

3.2.1. La vole seche La purification se fait a la fin. Le precede par voie seche s'applique aux concentres miniers sous forme d'oxyde U3O8 :

La purification se fait ensuite par distillation de Phexafluorure en colonnes. C'est un precede simple qui n'engendre pas d'effluent liquide. II est employe aux Etats-Unis, mais il est reserve a I'oxyde (I'oxyde U3O8 est obtenu par grillage de I'ADU, ammonium diuranate).

3.2.2. La voie humide La purification intervient au debut du precede. On commence par dissoudre les concentres et, aussitot apres, on realise une extraction purificatrice. C'est la voie dominante des usines de conversion. Elle a ete choisie par I'industriel frangais COMURHEX : Concentres -> dissolution HNO3 -> UO2 (NO3)2 impur Nitrate impur -> extraction TBP -» Nitrate purifie Nitrate purifie -> denitration chimique -> UO3 UO3 -> reduction NH3 et H2 -> UO2 -> Suite comme ci-dessus, aboutissant ici a UF6 pur L'hexafluorure est recueilli par cristallisation (cristaux incolores ; Figure 4.1).

4 - Conversion de I'uranium : des concentres a I'hexafluorure

45

Figure 4.1. UF6 cristallise. Voici quelques elements du genie chimique mis en oeuvre par COMURHEX : - Extraction. Elle se fait par le TBP dilue dans le dodecane, grace a un echange liquide/ liquide en colonnes agitees. L'uranium est reextrait sous forme de nitrate d'uranyle pur (< 100 ppm d'impuretes). - Denitration. La reaction du nitrate avec I'ammoniaque entrame la precipitation en diuranate d'ammonium (NH4)2 U2O7. Apres filtration et sechage, le diuranate est calcine et se transforme en UO3 tres reactif. - Reduction et hydrofluoration. Les deux reactions sont menees dans un meme reacteur, dit « four LC », a lit coulant. - Fluoration. Cette ultime etape a lieu dans un reacteur a flamrne, avec poudre UF4 et gaz fluor, en mode co-courant. - Cristallisation. Elle est realisee par refroidissement a -15 °C, puis a -25 °C.

4. Les usines frangaises de conversion :

COMURHEX / groupe COGEMA La France dispose de deux usines de grande capacite, travaillant en serie pour produire Tune UF 4 et I'autre UF6. A Malvesi pres de Narbonne, les concentres sont transformes en UF4/ et Turanium metal est produit dans une unite complementaire de magnesiothermie. A Pierrelatte, dans la vallee du Rhone, une seconde usine assure la conversion du tetrafluorure en hexafluorure.

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Le cycle du combustible nucleaire

Le fluor y est produit par electrolyse de HF en bain fondu de KF. Toute la chaTne de precede y est en depression, pour des raisons de securite severes vis-a-vis du fluor et de I'hexafluorure. Pierrelatte a un important stockage d'UF6 et un atelier de conditionnement pour le transport dans le monde entier (conteneurs cylindriques d'acier).

Figure 4.2. Capacites de conversion UF6 dans le monde.

COMURHEX est le leader mondial de la conversion. La capacite de ses usines est de 14 000 tonnes d'uranium par an. Ses concurrents sont au Canada, aux Etats-Unis, en Russie et au Royaume-Uni. La Russie a la plus grande capacite, mais ses installations ne sont plus pleinement operationnelles (Figure 4.2).

5

Enrichissement en uranium fissile

1. Les besoins en uranium enrich! des reacteurs

a eau L'utilisation de I'eau ordinaire comme moderateur des reacteurs a eau impose un combustible a uranium legerement enrichi. La teneur en 235U, qui est de 0,72 % dans I'uranium naturel, doit etre elevee a : - 2 % pour un cceur neuf ; - 3,5 a 5 % pour un rechargement, selon le taux de combustion vise. Un reacteur a eau de 1 000 MWe demande aujourd'hui environ 100 000 UTS (unites de travail de separation) pour son rechargement annuel. L'unite de travail de separation est precisee plus loin. La demande mondiale d'enrichissement, pour un pare d'environ 350 reacteurs a eau (en fonctionnement en 2000) est de 32 millions UTS par an. Elle est stable, faute d'accroissement sensible de I'energie nucleaire. L'offre d'enrichissement est bien superieure, elle serait au niveau de 56 millions UTS par an si des usines n'avaient pas ete arretees (Figure 5.1). Depuis 1995, le desarmement nucleaire de la Russieetdes Etats-Unis contribue, comme pour I'uranium naturel, a deprimer encore plus ce marche, en y introduisant, par dilution, I'uranium tres enrichi en provenance des armes demantelees (Figure 5.2). Cette conjoncture n'est pas favorable evidemment a de nouveaux investissements avant longtemps, malgre I'age des grandes usines actuelles (plus de 40 ans pour certains equipements des usines americaines). Cela n'incite pas non plus a pousser les recherches sur des precedes innovants.

Figure 5.1. Capacites d'enrlchissement d'uranium en 2000 (Monde: total environ 56 MUTS par an, source : COGEMA).

Le cycle du combustible nucleaire

48

Figure 5.2. Prix de I'enrichissement en euros courants.

2. Les differentes possibilites de separation isotopique de I'uranium Les atomes 235U et 238U different tres legerement: - par la masse atomique de leurs noyaux, - par les interactions de leur cortege electronique avec le milieu chimique ou les rayonnements electromagnetiques. Les possibilites de separation des deux atomes exploitent Tun ou I'autre de ces deux types de difference : - Difference de masse : separation par diffusion gazeuse a travers une paroi poreuse, ou par ultracentrifugation gazeuse, ou encore par effet aerodynamique dans une tuyere ou un vortex, en operant avec le gaz UF6. - Difference de cinetique chimique : separation par equilibres d'oxydoreduction. - Difference d'absorption d'energie electromagnetique: separation par ionisation selective atomique, ou par dissociation selective moleculaire. Ce classement correspond a des difficultes croissantes de realisation technique, mais a des performances particulierement grandes avec les derniers precedes qui font appel aux differences fondamentales des deux atomes ou molecules d'uranium. Les precedes de la premiere categoric ont seuls ete mis en ceuvre jusqu'a maintenant dans les usines. La concurrence commerciale se limite a la diffusion gazeuse et a I'ultracentrifugation gazeuse. Comme ces deux precedes sont fondes sur la petite difference de masse, qui est tres peu selective, ce sont des precedes « statistiques » qui demandent en consequence une grande repetition des operations, avec de nombreux etages dans les usines. Les ateliers sont ainsi gigantesques, mais avec de grandes series d'appareils identiques. L'hexafluorure reste gazeux, a pression atmospherique, au-dessus de 55 °C. Les precedes qui I'utilisent operent a faible pression, vers 65 °C. L'hexafluorure est un compose agressif qui exige des confinements en aluminium ou nickel (ou alliages). C'est aussi un corps toxique qui, en cas de fuite, se decompose a I'air humide en oxyde UO2F2 et acide fluorhydrique, lui-meme toxique.

5 - Enrichissement en uranium fissile

49

D'autres precedes de la premiere categoric ont connu un developpement limite. Les effets aerodynamiques ont ete exploites dans de petites installations, par exemple en Afrique du Sud ou ont ete utilisees un certain temps une petite capacite militaire et une petite capacite civile a base de I'effet vortex dans d'innombrables petits tubes. Ces voies se sont revelees peu performantes en investissement et consommation d'energie. Les effets des equilibres chimiques entre les valences diverses de 1'uranium ont ete testes sur des pilotes, en France avec le precede appele CHEMEX (precede CEA avec U3+ et U4+) et au Japon avec le precede ASAHI (avec U4+ et U6+). Leur application industrielle n'a pas ete engagee, faute d'attrait suffisant. Les precedes de la troisieme categoric qui cherchent a exploiter /'absorption differentielle d'energie electromagnetique, sont a priori tres selectifs a la condition de disposer d'excitations finement accordees. Une seule operation peut idealement donner un enrichissement de 5 %. On peut utiliser plusieurs moyens faisant appel au rayonnement laser, soit en accordant ce rayonnement sur une resonance de 1'atome 235U, en vapeur atomique pour produire une ionisation selective (precede « SILVA »), soit en accordant ce rayonnement sur une frequence de resonance de la molecule UF6 pour creer une dissociation selective (precede SILMO). Le precede laser en vapeur atomique a ete jusqu'a maintenant le plus explore (voir § 6). Pendant le projet MANHATTAN de recherche sur la « bombe atomique », les Etats-Unis ont deploye la spectrographie de masse (avec des appareils appeles Calutrons), precede tres selectif mais de faible capacite. Cette possibilite a ete revisitee avec le precede dit de « resonance cyclotron ionique », mais sans donner lieu a une realisation.

3. La diffusion gazeuse 3-1. Principe Dans toute installation de separation isotopique, on a un schema type (dans les dispositions les plus courantes) pour le flux de matiere, a I'entree et a la sortie. II y a une entree, generalement avec de I'uranium nature!, et une sortie double separant I'uranium enrichi de ['uranium appauvri. Sortie 1 Flux enrichi P (product) Teneur NP Entree Flux F (feed)< Teneur NF ^Sortie 2 Flux appauvri W (waste) Teneur Nw Dans le precede par diffusion gazeuse I'enrichissement se fait par difference de vitesse de diffusion moleculaire du gaz UF6 a travers une barriere a tres petits pores (0,01 urn). En equilibre thermique, toutes les molecules du gaz ont la meme energie cinetique moyenne : M etant la masse moleculaire.

50

^.e cycle du combustible nucleaire

Ce qui fait que la vitesse moyenne vm des molecules augmente quand la masse de ces molecules diminue. Les molecules a atome 235U, les plus legeres, ont done tendance a diffuser plus vite dans la barriere. Le fluor n'ayant qu'un isotope ne perturbe pas la difference de masse. On exerce une difference de pression entre les deux compartiments separes par la barriere, et ainsi on recueille le flux enrich! du cote de la basse pression.

3.2. Le facteur de separation On demontre qu'en diffusion dite de Knudsen (a pression assez basse pour eviter les collisions dans les pores), le facteur de separation oc0 s'ecrit selon la formule :

Les indices p, f se rapportent a une cellule elementaire a une seule barriere. Cette formule decrit le cas ideal, pour lequel le debit dans la barriere est purement moleculaire. La difference de masse entre 235 U et 238U etant petite, ,53(( est tres petit pour une barriere unique. Pour obtenir I'enrichissement recherche, il faut faire passer le flux de gaz dans une grande serie de barrieres. Par exemple pour atteindre un enrichissement de 5 % en 235U, il faut refaire ('operation elementaire jusqu'a avoir un facteur de separation global de 7. Le gain reel d'enrichissement e = a- 1 par etage est dans une installation industrielle bien inferieur a la valeur theorique. Par exemple dans Pusine EURODIF il est de 0,002 par etage.

3.3. Schema d'usine La mise en serie des etages dans une usine constitue une « cascade ». Le couplage entre les etages est particulier. L'al imentation d'un etage de rang n se fait a la fois par la sortie riche de I'etage n - 1, et la sortie pauvre de I'etage n + 1, car Pefficacite est maximale si les deux flux d'alimentation sont a peu pres de meme teneur, sans degradation par melange de teneurs differentes (Figure 5.3).

Figure 5.3. Schema de principe d'un etage de diffusion gazeuse.

5 - Enrichissement en uranium fissile

51

Le schema d'ensemble repond a une optimisation des flux, done des appareils et des circuits. Pour diminuer le flux d'alimentation d'une cascade, on la partage en deux sections : - une sous-cascade d'enrichissement, ou N > NF; - une sous-cascade d'appauvrissement, ou N < NF. L'alimentation d'entree (teneur NF) se fait a la frontiere entre les deux sous-cascades. La cascade ideale, ou cascade sans melange de flux a teneurs differentes, exige des debits variables selon le rang des etages dans la cascade. Elle a un debit maximal au niveau de ['alimentation en U naturel. Dans la pratique on fait un compromis entre I'efficacite (recherche d'une cascade ideale) et la simplicite, done le cout de realisation, ce qui se traduit par une standardisation des nombreux etages. Le diagramme des debits selon le rang des etages a idealement la forme du profil d'une toupie ; dans la pratique on choisit un diagramme a gradins, en repartissant les etages dans un petit nombre de tallies, par exemple a I'usine franchise EURODIF dans trois tallies differentes. Grace a un moyen de reglage du debit de chaque etage, on peut « lisser» la repartition des debits vers I'ideal et obtenir une bonne efficacite d'ensemble (98 %). La regulation se fait generalement par vanne sur le debit d'uranium appauvri entre etages (Figure 5.4).

Figure 5.4. Profits ideal et reel des debits d'etages en diffusion gazeuse.

3.4. Le travail de separation isotopique Le cout du travail de separation isotopique - travail que Ton cherche a definir pour des raisons de marche - doit refleter pour le service rendu d'enrichissement toutes les depenses engagees (investissement, energie, exploitation). Dans la diffusion gazeuse, les postes les plus lourds sont dus a I'investissement et a I'energie. L'investissement est marque par la repetition des operations qui entrame ^installation de tres nombreux etages (1 400 a EURODIF). Quant a I'energie, elle est necessaire au travail de compression du gaz UF6, travail egalement repete.

52

Le cycle du combustible nucleaire

On imagine a priori que le « travail » global lie a une fourniture sera d'autant plus eleve que : -

le niveau cTenrichissement specific sera grand,

-

le degre d'appauvrissement (ou d'epuisement) choisi sera plus important,

-

('alimentation sera moins riche en 235 U (cas de lots d'uranium recycle).

Ces trois facteurs sont en effet fondamentaux pour calibrer le « travail » fourni. Us ont ete relies par une formule qui sert a definir ce qu'on appelle le travail de separation. Celui-ci est I'accroissement AU d'une fonction de valeur V:

AU a la dimension de F, P, W et s'exprime en UTS, unite de travail de separation. Cette unite est utilisee dans tout contrat d'enrichissement et pour tout type de precede, bien que le travail ait ete formalise pour la diffusion gazeuse. Comme I'alimentation est tres generalement a base d'uranium naturel, et que la teneur de I'uranium enrichi est fixee par le reacteur a charger, le seul parametre libre pour I'optimisation du travail de separation est la teneur de rejet Nw. Cette teneur est choisie par le client, I'electricien, en fonction du cout de I'UTS note CA et du cout de I'uranium naturel note Cf. Si ce dernier est faible, I'electricien a interet a ne pas trop appauvrir, pour economiser en travail de separation. L'optimum actuel de Nw se situe vers 0,25 - 0,30 % 235 U (Figure 5.5). On peut ecrire pour le cout du produit Cp la formule :

Pour un combustible REP actuel, visant un taux de combustion d'environ 45 GWj r1, il faut enrichir a 3,7%, cequidemande AU/P = 5 UTS par kg d'U enrichi, etf/P = 8 kg d'U naturel (rejet a 0,25 %). Un reacteur de 1 000 MWe doit etre recharge chaque annee par 20 tonnes d'un tel combustible; ce qui correspond a un besoin d'enrichissement de 100 000 UTS et un besoin d'uranium naturel de 160 tonnes.

Figure 5.5. Teneur de rejet optimale de I'enrichissement. CF, cout de I'U naturel (F kg 1). C A , cout de I'UTS (F UTS'1). Nw, teneur de rejet.

5 - Enrichissement en uranium fissile

53

4. L'usine EURODIF Les Etats-Unis ont ete les premiers a construire de tres grandes usines de diffusion gazeuse, par extension de leurs capacites militaires (annees 1950-1960). En 2000, deux de ces usines assuraient encore la totalite de la production americaine, et representaient la plus grande capacite mondiale. L'une des deux vient d'etre arretee. La France a construit la premiere usine civile concurrente, a partir du precede de diffusion gazeuse developpe par le CEA pendant les annees 1960-1970. Pour ce faire a ete cree un consortium international groupant dans la societe EURODIF cinq pays : la France avec 59,7 %, la Belgique avec 11 %, I'Espagne avec 11 %, I'lran avec 10 %, I'ltalie avec 8,1 %. Les interets frangais sont representes par COGEMA. EURODIF a mis en service une tres grande usine en 1982 sur le site de Pierrelatte dans la vallee du Rhone. L'usine EURODIF possede 1 400 etages arranges dans une seule cascade pour reduire le nombre d'appareils. Pour assurer la capacite fixee a 10,8 millions d'UTS par an, ces appareils sont de grande taille (de capacite moyenne 8 000 UTS par an). De fagon a reduire les dimensions des tuyauteries de liaison, chaque etage est constitue d'une part d'un compresseur integre dans un module « diffuseur-compresseur-echangeur de chaleur », monte verticalement et d'autre part, d'un echangeur de chaleur et d'un diffuseur montes dans le module suivant (Figure 5.6).

Figure 5.6. Modules d'EURODIF.

Les modules, qui sont de trois tallies, sont assembles par groupes de 20, dans quatre immenses bailments. Les barrieres sont des tubes verticaux, en ceramique revetue d'une couche de diffusion. Pour avoir une bonne performance, la barriere de diffusion doit non seulement avoir de tres petits pores (0,01 um) mais aussi etre tres mince pour limiter la perte de pression. En pratique on dispose une couche de diffusion ultramince sur un support robuste a gros pores.

La diffusion gazeuse demande une forte consommation d'energie de compression, environ 2 400 kWh par UTS. Ainsi EURODIF, pour sa production maximale de 10,8 millions d'UTS par an repondant aux besoins de 100 reacteurs a eau de 1 000 MWe, appelle une

54

Le cycle du combustible nucleaire

puissance electrique maximale de 3 000 MW. C'est le site industriel le plus consommateur d'electricite en France. II est voisin de celui des 4 reacteurs de 900 MWe d'EDF du Tricastin. Un systeme de recuperation partielle de la chaleur rejetee permet d'alimenter les chauffages proches, urbain et agricole. EURODIF a un chiffre d'affaires de 1 milliard d'euros par an, dont un tiers a ('exportation. Dans le cout de I'UTS, en periode d'amortissement des investissements, I'energie compte pour 50 %, I'investissement pour 40 %,et I'exploitation pour 10 %. Ce type d'usine tourne comme une horloge, a «feu continu », avec modulation de la capacite entre I'ete et I'hiver pour profiter des tarifs saisonniers de I'electricite. EURODIF a deja environ 200 000 heures de fonctionnement, et a connu des programmes d'amelioration des performances et de perennisation. Son exploitation doit pouvoir se prolonger au-dela de 2010-2015. L'effet corrosif de I'hexafluorure d'uranium, qui se decompose facilement en UF5 (solide) et F, impose des contraintes severes sur les materiaux au contact (barrieres et circuits) et les etancheites. Pour les materiaux des barrieres, le choix se limite au nickel fritte (Etats-Unis) et a I'alumine frittee (France). Pour les circuits les alliages legers ou I'acier revetu de nickel ont ete mis en ceuvre. Les etancheites sont particulierement soignees, pour se proteger de I'eau (echangeurs) ou de Phuile (pivoterie des compresseurs).

II faut noter enfin que ce type d'usine a un impact extremement reduit et que ('exposition du personnel au rayonnement est a peu pres nul. Les seuls rejets, ceux d'uranium, sont insignifiants : moins de 5 kg par an dans I'air et moins de 1 kg par an dans I'eau a EURODIF.

5. L'ultracentrifugation 5.1. Principe Ce second precede « statistique » est egalement fonde sur la difference de masse atomique entre les isotopes, mais il fait la separation par le moyen d'une tres grande force centrifuge. Le gaz UF6 est envoye dans I'axe d'un bol cylindrique tournant a tres grande vitesse. Des ecopes, placees sur des rayons differents et aux deux extremites du bol, recueillent soit la fraction enrichie, soit la fraction appauvrie. L'ecope pour I'appauvri plus dense preleve sur un rayon r proche de celui du bol, I'ecope pour I'enrichi preleve sur un rayon r'~ 0,7 r (la densite serait trop faible sur un rayon plus petit). Une pompe moleculaire maintient le vide ou une tres faible pression entre le bol tournant et I'enveloppe externe de la machine pour reduire le frottement. L'hydrodynamique interne d'une centrifugeuse est complexe : des courants paralleles a I'axe s'etablissent qui sont augmentes par un gradient thermique axial ; un contre-courant est favorable a la performance de separation. Le facteur de separation OQ s'ecrit suivant la formule :

MUF6 etant la masse moleculaire, pour I'isotope 238 ou 235, co etant la vitesse angulaire, r le rayon, k la constante de Boltzmann et T la temperature absolue.

5 - Enrichissement en uranium fissile

55

Pour accrottre le facteur de separation, la vitesse doit etre poussee vers la limite du material! du bol. On a utilise des alliages legers, materiaux compatibles avec I'hexafluorure, puis un acier fortement allie Ni-Co-Mo (acier « maraging »); mais ces materiaux ne permettaient pas des vitesses tres elevees (moins de 400 ou 600 m s'1). Les generations actuelles de centrifugeuses (Figure 5.7) font appel aux materiaux nouveaux composites a fibres de carbone, qui autorisent de plus grandes vitesses (superieures probablement a 800 m s~1). Les principales caracteristiques de I'ultracentrifugation sont les suivantes : -

le facteur de separation theorique oc0 est relativement eleve ; parexemple il atteint 1,23 dans une machine tournant avec une vitesse peripherique de 800 m s"1 ; mais ('augmentation excessive du debit d'alimentation de la machine degrade ce facteur ;

-

une circulation a contre-courant du flux dans la machine, grace soit a un gradient thermique soit a Veffet de freinage du gaz par une ecope, augmente au contraire le facteur de separation ;

-

la capacite de separation d'une machine est peu dependante de son diametre, elle est surtout reliee a la vitesse peripherique (la vitesse peripherique est imposee par la resistance des meilleurs materiaux), et a sa hauteur (les frequences critiques et la stabilite lors de la mise en vitesse ne permettraient pas de depasser 6-10 m avec des bols a sections multiples, reunies par des jonctions).

Figure 5.7. Schema de principe d'une centrifugeuse.

Selon la technologic, rustique ou avancee, la capacite des machines existantes peut aller de 2 a 100 UTS par an maximum. II en resulte qu'une usine fonctionnant par ultracentrifugation possede un tres grand nombre de machines, et en outre demande la mise en parallele de plusieurs cascades pour assurer le flux total.

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Le cycle du combustible nucleaire

5.2. Developpement Le developpement de I'ultracentrifugation a ete confronte a un double defi : celui du cout elementaire des machines (pour un million d'UTS par an, il en faut des dizaines de milliers au moins); et celui de leur fiabilite pendant de nombreuses annees. (.'experience des pays qui ont tente I'aventure a ete diversement un succes ou un echec. La Russie a choisi de petites machines, courtes, a bol metallique, assemblies par groupes de base de quelques dizaines (environ 2 a 4 UTS par an par machine). A I'epoque sovietique, ce developpement a donne lieu a un important surinvestissement dans plusieurs grandes usines. II faut remarquer que I'ultracentrifugation se prete bien a la production d'uranium hautement enrichi, a cause de la valeur elevee de son facteur de separation, et qu'il y a la ('explication des stocks d'uranium militaire russes liberes par le desarmement nucleaire. En Europe occidentale un consortium a trois pays - Grande-Bretagne, Allemagne, PaysBas - a poursuivi methodiquement le developpement de plusieurs generations de machines, petites, moyennes puis grosses (10 a 50-100 UTS par an), en realisant par tranches des usines de capacite croissante dans les trois pays (total actuel de 4,4 millions d'UTS par an). Ce consortium, appele URENCO, a reussi la fabrication et Sexploitation fiable de machines performantes a materiaux composites (accroissement de vitesse et de hauteur). Le Japon s'est lance plus tardivement, avec bien des deboires techniques et surtout de mediocres resultats economiques, au point d'envisager de limiter son usine nationale a 1,5 million d'UTS par an. Les Etats-Unis, puis la France, ont renonce au debut des annees 1980. Les Americains ont etudie de tres grosses machines (300 UTS par an ou plus), qu'ils ont meme fabriquees en preserie. Les Frangais ont abandonne a un stade beaucoup plus precoce. Les deux pays, bien dotes en diffusion gazeuse, ont alors fait le par! strategique du precede laser sur vapeur atomique, avec I'objectif lointain de I'utiliser pour la releve de la diffusion gazeuse. Cette strategic est aujourd'hui revue, suite a I'arret des efforts de recherche sur les precedes laser.

5.3. Resultats L'ultracentrifugation a des avantages sur la diffusion gazeuse : - la consommation specifique d'energie est nettement plus faible, environ 100 kWh par UTS (ce qui ramene le poste energie dans le cout total de I'UTS a 5 %, les postes investissement et exploitation etant respectivement de 70 et 25 %); - le schema d'usine a cascades paralleles permet d'installer de petites unites (eventuellement, cela peut constituer un risque de proliferation de la production a fin militaire); - le reenrichissement de ['uranium de retraitement peut etre fait dans des cascades dediees, sans « contamination » de toute I'usine par les traces de produits de fission et par I'uranium 236. Les resultats obtenus par URENCO, et la surcapacite des usines russes d'ultracentrifugation font que ce precede a tendance presentement a orienter les prix du marche mondial de I'enrichissement. Ceci relance I'interet pour ce precede dans les pays comme les EtatsUnis ou la France qui avaient classe I'ultracentrifugation comme precede intermediate, sans avenir a long terme.

5 - Enrichissement en uranium fissile

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6. Les precedes par laser 6.1. Principe L'absorption atomique d'energie, specifique du cortege electronique de chaque isotope, offre I'attrait d'un precede a priori tres selectif et peu consommateur d'energie. La decouverte du rayonnement laser, qui a permis de disposer d'une source d'illumination d'energie bien definie, a donne le moyen d'une application a la separation industrielle des isotopes. Pour I'uranium deux voies sont possibles : -

I'illumination selective sur vapeur atomique d'uranium, precede appele SUVA en frangais (separation isotopique par laser sur vapeur atomique) et AVLIS en anglais ; I'illumination selective de molecules contenant I'uranium, precede appele SILMO en frangais (separation isotopique par laser sous forme moleculaire) et MLIS en anglais, avec le gaz UF6.

La premiere voie a ete I'objet de recherches tres poussees car sa physique paratt plus simple a comprendre et a modeliser. La seconde voie est plus attractive sur le plan industriel car elle utilise un produit bien connu, largement mis en ceuvre dans I'enrichissement actuel.

6.1.1.SILVA La difference d'excitation des electrons des deux isotopes, par le choix de la frequence du laser, permet de creer une ionisation selective, puis I'extraction des ions par un champ electrique (Figure 5.8).

Figure 5.8. Schema de principe de I'enrichissement laser en vapeur atomique.

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Le cycle du combustible nucleaire

Le resultat est que, malgre des rendements contraries par divers phenomenes secondaires, le facteur de separation peut depasser 5 et qu'un seul passage dans I'appareil separateur aboutit d'emblee a un enrichissement de 4 a 5 %. La technologic est cependant complexe. Elle demande deux sous-systemes de haute performance : -

-

La chaine des lasers doit delivrer trois longueurs d'onde, dans le rouge orange, parfaitement accordees avec les frequences de I'atome d'uranium, permettant d'aller jusqu'a I'ionisation (6 eV par atome) ; ceci se realise par deux etages de lasers, un premier etage (par exemple a base de lasers a vapeur de cuivre) servant de « pompe » au second etage accordable (lasers a colorants); bien des difficultes sont a resoudre, comme le multiplexage et le transport optique des longueurs d'onde, ou la cadence de repetition des eclairs (20 000 par seconde), et enfin la duree de service continu. L'appareil separateur doit confiner dans une enceinte sous vide la vapeur atomique produite dans un creuset par bombardement electronique. Dans I'enceinte se fait ['interaction laser-matiere puis le collectage separe des fractions riche et pauvre, avec recueil de I'uranium condense. Les conditions y sont tres severes (haute temperature, uranium liquide corrosff, tensions electriques elevees), ce qui pose, la aussi, un serieux probleme de duree de service de tous les internes.

6.1.2. SILMO Dans la molecule UF6, une vibration des liaisons U-F possede un effet isotopique quand la molecule est proche de I'etat fondamental. On peut I'exciter par un laser infrarouge, accorde sur 235U. Les molecules excitees selectivement sont ensuite dissociees par d'autres lasers en UF5 et F. UF5 apparaissant sous forme d'une poudre blanche est facilement separe par filtration du gaz intact appauvri UF6. La technologic de SILMO est plus simple que celle de SILVA. II suffit de faire une compression classique et une detente dans une tuyere, a basse temperature (100 K), d'un melange gaz porteur et hexafluorure et d'illuminer en sortie de tuyere. Cote laser, on part de lasers a CO2 et on fait I'accord par translation de longueur d'onde dans I'hydrogene. II est cependant apparu difficile de realiser I'accord entre longueur d'onde et frequence de resonance de la molecule, accord requis pour une performance d'enrichissement visant a eviter un precede en cascade.

6.2. Developpement II y a eu un tres gros effort de recherche pour SILVA dans la plupart des grands pays nucleaires. Les Etats-Unisont mene lesessaisjusqu'au niveau d'un grospilote integre(chamede lasers et separateur) mais, au moment de prendre la decision d'industrialisation, ils ont renonce a aller plus loin pour I'instant (1999). Raisons techniques ou economiques ? Le Japon arrete actuellement les recherches, URENCO les a arretees depuis plusieurs annees. La France s'est engagee dans la competition SILVA avec des moyens importants a son niveau (CEA puis association CEA-COGEMA). Des equipements d'essais technologiques ont etc realises a Pierrelatte (lasers et separateur) et plusieurs pilotes

5 - Enrichissement en uranium fissile

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d'echelle croissante ont ete monies a Saclay. Cependant I'etape d'industrialisation n'est pas encore a portee de main en France, la centrifugation presente probablement un plus fort potentiel ; ainsi faute d'incitation a poursuivre, une pause apparait necessaire dans I'immediat. SILMO a ete beaucoup moins developpe. L'Allemagne, lejapon puis I'Afrique du Sud ont eu les programmes de recherche les plus importants. Mais les experiences n'ont pas pu confirmer les performances visees. En conclusion les difficultes techniques des precedes laser n'ont pas ete surmontees et, dans le contexte d'offre surabondante de services d'enrichissement, le redoublement des efforts de recherche n'est pas d'actualite. L'interet fondamental de ces precedes pourrait reapparattre a long terme.

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Partie III

Combustible neufet use: fabrication, irradiation, refroidissement

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6

Fabrication de la ceramique nucleaire et de ('assemblage

1. Les fonctions et les composantes du combustible nucleaire 1.1. Les fonctions Le combustible nucleaire a fagonner doit repondre a deux fonctions de base : -

fournir la source nucleaire de chaleur dans le cceur des reacteurs pendant plusieurs annees;

-

confiner la radioactivite enorme engendree par les fissions (concept de reacteur propre ou le combustible doit assurer la premiere barriere de la surete).

II en decoule des caracteristiques fondamentales : -

maintien prolonge et stable de la reaction en chaine (performance);

-

integrite de la structure d'ensemble.

Ces deux caracteristiques se retrouvent dans le « taux de combustion » (ou limite d'usage), qui doit etre a priori aussi eleve que possible.

1.2. Les composantes La conception du combustible nucleaire decoule de la physique du cceur des reacteurs : -

matieres nucleaires respectant la proportion fissile-fertile ;

-

materiaux de structure (gaine, squelette) repondant aux conditions neutroniques et aux charges de service ;

-

geometrie fixee par la neutronique, la thermomecanique et la thermohydraulique.

Est aussi a prendre en compte la chimie du caloporteur (problemes de corrosion, interaction en cas de rupture du gainage). Les composantes du combustible REP sont: -

la matiere active, la ceramique nucleaire mise sous forme de « pastilles » ;

-

I'element de base, le « crayon » qui confine la ceramique dans une gaine metallique ;

Le cycle du combustible nucleaire

64

-

la structure d'ensemble qui, grace a des pieces de maintien, assure la cohesion de la geometrie.

Le tout a ete appele assemblage. Une composante annexe indispensable est celle des elements absorbants pour le controle des fissions. Dans les reacteurs a eau sous pression, ces elements, sous forme de longs crayons manoeuvrables a travers 1'assemblage, constituent ce qu'on appelle la grappe de commande. Chaque assemblage est muni de tubes guides pour le passage des absorbants. Dans le cceur, le nombre de grappes est plus restreint que le nombre d'assemblages (Figure 6.1).

Figure 6.1. Assemblage combustible REP 17 x 17, sa grappe de commande et crayon combustible.

6 - Fabrication de la ceramique nucleaire et de /'assemblage

65

2. Rappel des conditions d'usage et du comportement du combustible 2.1. Les conditions d'usage Les assemblages sont soumis pendant plusieurs annees (3, 4, 5) aux conditions du regime normal du cceur REP : - pression du caloporteur: 155 bar; - temperature du caloporteur: 285/325 °C ; - cycles d'exploitation : 12 a 18 mois ; - temps de sejour: 3 a 4 cycles (avec rearrangement); - puissance lineique moyenne crayon : 175 W cm"1 ; - temperature maximale de gaine : 350 °C ; - temperature centrale crayon : 1 000 °C ; - temperature au point chaud : 1 850 °C. Des conditions speciales peuvent aussi etre subies par le combustible : - lors de variations de puissance, dans des limites que doit respecter la conduite du reacteur ; - lors d'incidents et accidents occasionnels d'exploitation, qui doivent etre « encaisses » sans taux de rupture inacceptable des crayons (defauts de refroidissement, accident de reactivite...), la premiere barriere devant resister au mieux.

2.2. Le comportement en cours d'irradiation Les principaux phenomenes qui affectent le combustible dans le cceur peuvent se classer en examinant le comportement de chaque composante. Evolution de la ceramique nucleaire (pastilles) : - effets de la temperature : dilatation, fissuration, restructuration locale des grains, diffusion des elements ; -

effets de ('irradiation : transmutations engendrant des produits de fission tres divers, et tres actifs (3 et y, ainsi que des actinides artificiels dont des transuraniens tres actifs a, bouleversement de la structure fine (cascade de defauts) et de la physico-chimie interne.

Dommages crees dans la gaine : -

effets thermomecaniques ; corrosion, hydruration ; deplacement des atomes par les neutrons (croissance, gonflement, fluage, evolution des proprietes mecaniques). Crayons : - les dommages qui se developpent avec le temps dans les deux composantes ci-dessus font que les crayons ont tendance a se deformer, notamment a s'allonger ; - il se cree aussi une interaction pastil Ies/gaine qui, a la limite, peut menacer la premiere barriere et affecter la surete du cceur.

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Le cycle du combustible nucleaire

Assemblage : -

le squelette lui-meme est agresse, il connaTt des deformations et dommages (par vibration, irradiation, corrosion, corps migrants ...), les points les plus critiques concernant les grilles de maintien des crayons et les tubes guides des absorbants ;

-

les rearrangements du cceur a chaque fin de cycle sollicitent aussi la structure de ('assemblage.

En conclusion ('assemblage combustible des reacteurs doit etre un produit de tres haute technologie.

3. Les exigences a satisfaire et les specifications de fabrication Le combustible des reacteurs a eau est en progres constant, grace a un effort continu de recherche et au retour d'experience. [/augmentation du taux de combustion moyen marque ce progres : de 33 GWj r1 avant 1990 il est monte a 47 GWj t~1 en 2000, et il tend a depasser 50-55 GWj t~1 dans les prochaines annees. Sans indication particuliere, le taux de combustion est le taux moyen d'une charge. II est parfois rapporte au maximum moyen d'un assemblage, ou plus rarement au maximum du crayon le plus irradie. Ainsi en visant 55 GWj r1 par charge, on aura 62 pour le maximum moyen d'un assemblage et environ 78 pour le maximum du crayon le plus irradie.

II y a trois categories d'exigences : -

celles de la surete d'abord, puisque la gaine est la premiere barriere, et que les absorbants de commande passent dans les tubes guides des assemblages (garantie imperative de manoeuvre, et done conservation de la geometric);

-

celles de I'economie ensuite, car le cout de cycle est un poste non fixe des depenses de I'electricien ;

-

celles de la qualite technique de la fabrication, qui doit etre « totale » au sens de la demarche de qualite des productions, car elle conditionne le respect optimal des deux premieres categories d'exigences.

Les specifications imposees a la fabrication sont en consequence extremement detail lees et precises. Visant un compromis optimal entre les differentes exigences en garantissant un comportement previsible au moyen des codes de calcul, elles couvrent principalement: -

la purete des matieres nucleates et des matieres metalliques ;

-

les caracteristiques des produits intermediates (ceramique, gaine, pieces de structure);

-

les procedures de montage de ['assemblage et de manutention-transport;

-

les controles, souvent unitaires(exemple51 000 crayons par coeur REP de 1 300 MWe, comportant 16 millions de pastilles).

4. La fabrication de la ceramique nucleaire (pastilles) Rappelons que la forme chimique de I'uranium qui a ete retenue pour le combustible des reacteurs a eau est I'oxyde UO2, qui a une bonne compatibilite avec I'eau, en cas de

6 - Fabrication de la ceramique nucleaire et de /'assemblage

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rupture de gaine. Get oxyde permet de fabriquer une ceramique tres resistante a la chaleur (plus de 2 000 °C), mais qui a cependant une mauvaise conductibilite thermique. Le precede adopte par I'industrie frangaise, et aujourd'hui par la grande majorite des fabricants mondiaux, se decompose en 7 operations distinctes. 1. Conversion d'entree. L'uranium arrive enrichi sous forme d'hexafluorure UF6, qu'il faut convertir a I'entree en oxyde UO2. On fait un traitement dit a « voie seche » dans un four rotatif, en presence de vapeur d'eau et d'hydrogene pour assurer la reduction de I'UVI en UIV:

2. Ajustage de la densite par melange. On ajoute a I'UO2 de I'oxyde U3O8, ainsi qu'un corps organique « porogene » facilitant la formation de pores, pour limiter la densite a 95 % de la densite theorique. C'est un critere de conception. L'oxyde U3O8 est le resultat de I'oxydation de I'oxyde UO2 ; il provient d'une part du recyclage des rebuts, et d'autre part d'une poudre fine contribuant a la solidite des ebauches. 3. Pre-corn pactage, concassage et granulation. Ces trois traitements visent a faciliter le pastillage, qui vient apres, en ameliorant la « coulabilite » de la poudre. On fait un precompactage puis un concassage, et enfin une granulation. Un lubrifiant (0,3 % de stearate de zinc) est ajoute en fin de granulation pour faciliter le pastillage. 4. Pastillage. La poudre preparee a I'etape precedente est pressee dans des matrices, aux dimensions un peu superieures a celles des pastilles du combustible (diametre 8,2 mm, hauteur 13,5 mm) pour tenir compte du retrait au frittage. Les presses a haute pression peuvent etre rotatives ou alternatives multipoingons. 5. Frittage. La ceramique est densifiee par le passage des pastilles crues dans un four continu a nacelles circulantes, a 1700 °C, sous atmosphere reductrice avec hydrogene. 6. Rectification. II faut terminer la fabrication par un leger usinage des pastilles sur leur diametre (cote finale : 8,19 mm), afin de garantir un jeu tres strict entre les gaines et les pastilles. 7. Contra/e5. Chaque pastille est controlee soigneusement, notamment dans son aspect (pas d'eclat, trou, fissure...). Le produit final est une pastille qui doit etre conforme aux specifications, de geometric, densite, porosite, stabilite thermique... (Figure 6.2).

5. La fabrication de la gaine Parmi les metaux et alliages pouvant repondre aux contraintes mecaniques et chimiques (corrosion), il a ete choisi un alliage de zirconium, qui a I'avantage supplementaire de ne pas absorber les neutrons. C'est le « zircaloy 4 », alliage ou I'etain et I'oxygene apportent un gain en resistance mecanique, et le fer plus le chrome une bonne resistance a la corrosion. De nouveaux alliages de zirconium, dits avarices, voient le jour (par exemple le M5 avec niobium propose par Framatome pour les hauls taux de combustion)1.

L'elaboration de I'alliage et ensuite celle de la gaine mettent en ceuvre des precedes de metallurgie fine. 1. Les materiaux sont definis dans d'autres cours du GA, a paraTtre.

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Le cycle du combustible nucleaire

• L'evidement hemispherique est destine a compenser I'exces de dilatation du centre • Le chanfrein facilite ('introduction dans la gaine • La rectification de diametre permet I'ajustage du jeu pastille-game

Figure 6.2. La pastille UO2 REP.

1. Elaboration de I'alliage. Le point de depart est l'« eponge » de zirconium, livree par les producteurs de ce metal. Par traitement dans un four a arc, sous vide, on obtient des lingots. La microstructure adequate est donnee par une serie d'operations (forgeage, traitement thermique, trempe). L'alliage sort de cette etape sous forme de billettes cylindriques (diametre : 200 mm). 2. Ebauche du tube. Trois traitements sont necessaires : le filage a chaud de la billette force, le laminage a froid, et le traitement de recuit. 3. Tube de gaine. On poursuit I'elaboration par une serie de laminages de precision a froid, pour finalement avoir les dimensions requises (diametre externe : 9,5 mm, epaisseur : 0,57 mm). Et on fait des recuits sous vide. A la fin, le zircaloy 4 a la microstructure voulue (phase a), et il est detendu. Les controles en fin de fabrication des tubes sont unitaires et nombreux. On s'attache en particulier a verifier les dimensions et ('absence de defauts (par ultrasons).

6. La fabrication des crayons et de ('assemblage 6.1. Les crayons Les gaines sont tout d'abord equipees de leur bouchon inferieur qui est soude. Sur une table portant les tubes de zircaloy 4, les pastilles sont introduites dans la gaine par poussage d'une colonne de pastilles d'environ 4 m. Un ressort d'extremite complete la colonne, pour maintenir les pastilles en place dans le crayon termine, et le bouchon superieur (perce) est soude (Figure 6.1).

6 - Fabrication de la ceramique nucleaire et de /'assemblage

69

Avant de fermer par soudure le bouchon superieur du crayon, il est fait un remplissage par de I'helium a 25-30 bar, pour ameliorer le transfert thermique et limiter la vitesse de fluage de la gaine en service. Les crayons sont tous soumis en fin de montage a un controle automatique des soudures de bouchons, par camera video et rayons X.

6.2. L'assemblage La fabrication des pieces de structure comprend : -

les tubes guides pour les absorbants et ('instrumentation, en zircaloy 4 recristallise ;

-

les grilles (2 de maintien des crayons aux extremites et 6 ou 8 de melange du caloporteur), en zircaloy 4 detendu ;

-

les embouts (inferieur servant d'embase et assurant la distribution du caloporteur, superieur assurant la sortie du caloporteur et la prehension pour manutention), en inox et inconel.

Le montage est realise en atelier propre, mais sans protection specifique centre le rayonnement. II se fait dans I'ordre suivant: -

constitution du squelette de depart, avec I'embout inferieur, les tubes guides et les grilles;

-

montage des crayons a I'aide d'un equipement de tirage ;

-

fixation de I'embout superieur aux tubes guides. Les embouts sont demontables pour permettre de remplacer des crayons, en vue de reparer les assemblages avec defauts detectes, par exemple en fonctionnement. Ce genre de reparation se fait, apres irradiation, sous la protection de I'eau des piscines, par telemanipulation.

7. Les caracteristiques des usines de fabrication La capacite annuelle d'une usine de fabrication de combustible nucleaire est comprise entre 400 et 1 000 tonnes d'uranium enrichi.

7.1. Les contraintes imposees par la mat/ere nucleaire La fabrication de la ceramique nucleaire implique la manipulation de /'uranium enrichi, sous forme UF6 puis UO2. La matiere est a nu, souvent en poudre (elle est confinee dans les conteneurs UF6 ou manipulee dans des bottes a gants pour UO2). Les contraintes principales sont: -

la radioprotection vis-a-vis de la contamination par ('uranium (evidemment les dispositions sont renforcees quand il s'agit d'uranium de retraitement plus radiotoxique, voir le chapitre 17);

-

la surveillance du risque de criticite lie a I'enrichissement fissile ;

-

la comptabilite rigoureuse de la matiere fissile.

Le cycle du combustible nucleaire

70

7.2. Les fabrications annexes Les fabrications des composantes metalliques, gaine et pieces de structure, sont realisees dans des ateliers de metallurgie et de mecanique banals, si ce n'est qu'on y veille a la purete des matieres et a la qualite des productions.

7.3. Les usines frangaises II n'y a plus en France qu'un fournisseur de combustible des reacteurs a eau, la societe FBFC (Franco-Beige de Fabrication de Combustible). En amont, il y a un fournisseur de zirconium CEZUS, et un fournisseur de gaines ZIRCOTUBE. Toutes ces societes sont controlees par FRAMATOME (Tableau 6.1). Tableau 6.1 Caracteristiques des assemblages FRAMATOME 900 et 1 300 MWe.

Reacteur

900 MWe

1 300 MWe

Nombre d'assemblages 1 7x1 7

157

193

Nombre de crayons par assemblage

264

264

Gaine - diametre (mm) - epaisseur (mm)

9,5 0,57

9,5 0,57

Diametre pastilles (mm)

8 ,2T

8,2

3658 3852 4058

4267 4488 4796

8

10

Section de ('assemblage mm x mm

214x214

214x214

Masse de ('assemblage / dont U kg

670 / 460

765/538

24

24

Longueur (mm) - colonne combustible - crayon - assemblage Nombre de grilles

Nombre de tubes guides

Une filiale americaine de FRAMATOME (FCF) possede une usine aux Etats-Unis, qui a pour clients les electriciens locaux. Les principaux concurrents de FRAMATOME pour les combustibles REP sont americains (WESTINGHOUSE maintenant controle par I'anglais BNFL), allemands (SIEMENS maintenant integre dans FRAMATOME ANP), ou japonais (MHI). La Russie a des usines entierement dediees au combustible particulier des reacteurs REP de conception russe (reacteurs VVER). FRAMATOME detient environ un tiers du marche des combustibles REP, hors VVER, ce qui est autant que WESTINGHOUSE et SIEMENS reunis. Le dernier tiers est partage entre de nombreux fabricants japonais, coreens, chinois, anglais, espagnols...

7

Effets de ('irradiation stir le combustible en reacteur

1. Les conditions generates d'usage en reacteur On a rappele dans le chapitre 6 les conditions physiques et chimiques du coeur des reacteurs REP auxquelles est soumis le combustible. II s'agit de noter ici les conditions generales liees a I'exploitation de ces reacteurs. L'irradiation du combustible est conduite dans le cadre d'un compromis d'ensemble entre : -

['optimisation faite par I'electricien, tenant compte des aspects d'economie et de souplesse d'exploitation (« manceuvrabilite » qui permet a la centrale nucleaire de suivre au mieux le programme de production) ;

-

les exigences de la surete, particulierement celle de la defense de la premiere barriere (gaine), en fonctionnement normal et incidentel, exigences qui delimitent le domaine de pilotage autorise pour le combustible.

En outre des considerations plus vastes guident egalement I'usage du combustible nucleaire, par exemple : -

la strategie de gestion du pare des centrales nucleaires, qui integre les variations de puissance, les arrets periodiques pour rechargement et maintenance, la prolongation des campagnes, I'aval du cycle ...

-

('adaptation au progres du combustible, notamment pour le taux de combustion.

Prenons I'exemple du pare d'EDF en 2000. Les reacteurs de 900 MWe sont exploited de fagon diversified : 4 cycles d'un an ou 4 cycles en campagnes allongees, ou encore dans les tranches « moxees » 4 cycles pour I'uranium et 3 cycles pour le MOX (en cours d'uniformisation selon les progres du combustible au plutonium), enfin 4 cycles pour I'uranium recycle (dans la centrale de Cruas). Par contre les reacteurs de 1 300 MWe ont un regime homogene d'exploitation, a 4 cycles en campagnes allongees. Cette strategie pare n'est pas figee, car elle constitue un moyen important d'adaptation aux evolutions techniques et a la demande d'electricite. Quant au taux moyen de combustion du combustible EDF, il a progressivement evolue jusqu'a 47/48 GWj t~1 en 2000 (soit 52 pour le maximum moyen par assemblage). Si I'autorisation de surete est donnee, il pourrait depasser progressivement 50/55 GWj f1. Le taux de combustion est une caracteristique fondamentale pour la suite du cycle du combustible, puisque le niveau d'irradiation determine d'une part I'intensite de la

72

Le cycle du combustible nucleaire

radioactivite induite a manipuler dans les installations de I'aval, et d'autre part la composition de la matiere nucleaire dechargee.

2. La composition apres irradiation et le bilan matiere 2.1. Les transformations induites par les neutrons La « combustion » de la matiere nucleaire est le resultat de ['exposition du combustible au flux des neutrons, (.'interaction entre les neutrons et les differents atomes presents dans le cceur des reacteurs engendre des reactions nucleaires diverses (Figures 7.1 et 7.2) : - tout d'abord des noyaux lourds subissent une fission, essentiellement « thermique » en reacteur a eau, source de la chaleur recherchee, et ils se divisent en produits plus legers, les produits de fission, residus tres actifs (3 et y, et se distribuant dans une large gamme (de Z = 32 a 67); - d'autres noyaux lourds connaissent des captures de neutrons en serie, et ils se transmutent en actinides artificiels, uranium 236 et transuraniens, dont le plutonium qui est lui-meme fissionne en partie in situ (un tiers des fissions totales lui est du); ces nouveaux noyaux sont generalement des emetteurs tres actifs a, et parfois des emetteurs puissants de neutrons ; - certains autres atomes, qui se trouvent dans les parties metalliques du combustible, dans ses rares impuretes, ou dans le caloporteur deviennent des radioelements artificiels et constituent une grande variete de produits d'activation, emetteurs p et y.

Figure 7.1. Masse des produits de fission par element chimique. (Irradiation 47,5 CWj/t et refroidissement 4 ans).

7 - Effets de /'irradiation sur le combustible en reacteur

73

Figure 7.2. Principales chatnes de formation de noyaux lourds artificiels.

La plupart des produits de fission sont de « courte vie », c'est-a-dire qu'ils ont des periodes de decroissance inferieures a une trentaine d'annees, et que leur activite disparatt quasi totalement en quelques siecles au plus. Apres quelques annees de refroidissement, I'activite de ce groupe est dominee par deux radionucleides : -

cesium 137 (|3, periode 30 ans) —> baryum 137m (y, periode 2,5 minutes),

-

strontium 90 (P, periode 29 ans) -> yttrium 90 ((3, periode 64 heures).

Les actinides artificiels sont dans I'ensemble de longue vie. Le plutonium domine ce groupe, avec en second rang, par la masse, Turanium 236 qui est beaucoup moins actif. Ainsi 1'irradiation du combustible bouleverse sa composition elementaire. C'est I'origine de la coupure dans le cycle, entre I'amont qui n'a que de I'uranium et des metaux vierges, avec tres peu d'activite, et I'aval qui recueille plusieurs dizaines d'elements nouveaux, dont certains tres actifs. Cette transformation subie par le combustible irradie introduit trois complications considerables pour ('Industrie de I'aval du cycle : -

la chaleur residuelle due a la radioactivite, qui demande un refroidissement adapte, et prealable a tout traitement ou conditionnement;

-

la haute activite qui impose des protections lourdes et etanches ;

-

la chimie complexe compte tenu de la tres grande variete des produits de fission.

74

Le cycle du combustible nuclea/re

2.2.

Le bilan des noyaux lourds

Au depart, le combustible neuf n'a que des atomes d'uranium, en gros 4 % de I'isotope 235 et 96 % de I'isotope 238, pour un taux de combustion vise de 47,5 GWj t~1. Quand le combustible est use, au taux prevu, les atomes lourds sont devenus beaucoup plus diversifies. Dans le « vecteur » uranium est apparu I'isotope236U, au niveau d'environ 0,5 % du total des noyaux lourds. II vient par capture neutronique de P235U. Un vecteur plutonium, a plusieurs isotopes, a aussi ete cree par capture dans I'uranium, au niveau de 1 %. II s'est forme surtout a partir de I'238U. On peut qualifier de vecteur « actinides mineurs » I'ensemble des autres transuraniens formes (neptunium, americium, curium), au niveau de 0,1 %. Ces trois vecteurs d'actinides artificiels voient leur importance augmenter avec le taux de combustion.

Figure 7.3. Composition ponderale du combustible use (47,5 GWj t 1). Le bilan des atomes lourds apres irradiation est le suivant, pour 47,5 GWj r1 et apres 4 ans de refroidissement (Figure 7.3) : -

partie fissionnee : 4,87 % ( % de I'uranium initialement charge) partie degradee : 1,08 en236U : 0,54 en transuraniens non fissiles : 0,54 partie recuperable : 94,0 sous forme 238U : 92,5 sous forme 235U : 0,74 sous forme Pu fissile : 0,76.

7 - Effets de /'irradiation sur le combustible en reacteur

75

Dans les reacteurs a eau, a neutrons lents, I'uranium 236 est un isotope neutrophage genant, dont les captures sont « steriles » (elles donnent 237Np et 238Pu). Parmi les isotopes de plutonium formes, les pairs n'ont pas de valeur fissile en neutrons lents, et ils peuvent etre joints aux actinides mineurs comme transuraniens non fissiles. C'est ce bilan qui fixe largement les objectifs de la fin de cycle. En principe les « dechets ultimes » seraient les parties fissionnee et degradee, au total 6 % pour 47,5 GWj t~1. Le reste, soit 94 % pour ce meme taux, serait alors la partie recuperable pour un nouveau cycle. On y trouve 1,5 % de matiere fissile, a peu pres moitie pour I/235U et moitie pour les 239 Puet 241 Pu. Mais on ne sait pas separer completement les parties degradee et recuperable car, dans le retraitement avec le precede actuel, I'uranium 236 reste dans le vecteur U, et les isotopes pairs non fissiles du plutonium dans le vecteur Pu. Autrement dit, le retraitement extrait comme dechets les produits de fission et les actinides mineurs (environ 5 %). Ce qui fait que les hauls taux de combustion, qui aggravent les effets de melange entre parties degradee et recuperable dans la matiere nucleaire retraitee, diminuent I'interet du recyclage, en premier pour I'uranium. On obtient la meme consequence avec des recyclages repetes des noyaux lourds, ce qui revient a faire croTtre les taux de combustion par les passages successifs en reacteur. Pour un recyclage parfait, sans fin jusqu'a epuisement des atomes lourds recuperables et valorisables, il faudrait proceder a des separations isotopiques complementaires sur les vecteurs uranium et plutonium. Ce n'est pas envisageable dans les conditions industrielles et economiques d'aujourd'hui. On sait que la solution pratique est le recyclage dans les reacteurs a neutrons rapides. Ce type de reacteurs a des conditions neutroniques permettant potentiellement de fissionner presque tous les atomes lourds (aux pertes pres dans les operations industrielles de recyclage, et dans ['inevitable « scorie » due aux captures dans les transuraniens les plus lourds).

3. La puissance residuelle lors du ref roidissement A I'arret du reacteur, la radioactivite considerable du combustible continue d'emettre de la chaleur a un niveau significatif. Ce peut etre une source de risque d'accident grave si le refroidissement du cceur n'est pas assure correctement tant que le combustible demeure dans la cuve (voir celui de Three Mile Island aux Etats-Unis en 1979, qui s'est termine par la fusion tres etendue du combustible). Voici quelques reperes pour la situation regnant dans le cceur a I'arret: -

a + 5 secondes apres I'arret, les radioelements artificiels emettent encore 5 % de la puissance nominale du reacteur (le refroidissement a ce niveau se fait par les generateurs de vapeur) ; - a + 2 heures et demie, remission de chaleur est encore a 1 % de la puissance nominale; au-dela, elle peut etre evacuee par le systeme de refroidissement du reacteur a I'arret (RRA). Apres sortie du cceur, le combustible irradie connait deux phases de refroidissement externe : -

la phase de refroidissement dans la piscine jointive du reacteur, qui peut durer six mois, un an, voire plus longtemps ;

76

-

Le cycle du combustible nucleaire

la phase de refroidissement hors centrale, apres transport, qui se fait soit dans les piscines des usines de retraitement, soit dans les installations de sites d'entreposage centralise (piscines ou equipements sees tels des « chateaux », ou silos divers).

II peut arriver que le refroidissement se poursuive dans les piscines des reacteurs jusqu'a engorgement, ou encore dans des installations sur le site meme des centrales (par exemple aux Etats-Unis, et en principe demain en Allemagne). Apres un an, la puissance residuelle descend a moins de 0,5 pour mille de la puissance nominale, et typiquement a moins de 1 pour dix mille apres le delai minimal d'attente avant retraitement, environ 4 ans, Pour les combustibles d'EDF, cela correspond aux puissances unitaires donnees dans le tableau 7.1, quand ils sont irradies a 47,5 GWj t~1. Tableau 7.1. Decroissance de ('emission de chaleur des combustibles irradies (en kW). 1 an

4 ans

900 MWe

6,7

1,5

1 300 MWe

7,9

1,8

Les produits de fission sont le facteur preponderant de ('emission de chaleur a I'origine. A 4 ans, ils en represented encore plus de 80 %. Les actinides artificiels deviennent dominants apres 50 ans, terme envisage pour le stockage geologique des dechets de haute activite. A cause de leur longue vie, ces actinides ne donnent ensuite qu'une decroissance tres lente de la chaleur residuelle. II faut noter qu'a tout moment la contribution des produits d'activation est extremement faible.

4. La radioactivite et remission neutronique L'uranium du combustible neuf est tres peu actif (rayonnement a de 0,1 TBq t~1 a 4 % d'235U). Toutefois il faut retenir que I'enrichissement par precede « statistique », tel qu'il est fait aujourd'hui par diffusion gazeuse ou ultracentrifugation, enrichit aussi en 234U, isotope le plus actif de I'uranium nature!, ce qui multiplie par 4 la radioactivite de I'uranium enrichi du combustible par rapport a I'etat naturel. Par contre au moment ou le retraitement peut s'envisager, apres 4 ans de refroidissement, le combustible use est encore tres actif et irradiant (rayonnement y). Pour 47,5 GWj r1, on a les activites suivantes :

-

a : 600 TBq r1 ;

-

(5, Y : 34 000 TBq r1 (dont 5 700 pour le 241Pu, emetteur 0).

En outre il faut tenir compte d'une forte emission neutronique, due pour une large part au curium 244. L'emission qui n'est dans le combustible neuf qu'a 1,2 104 n s~1, est apres 4 ans de refroidissement a 109 n s-1 dans le combustible use de 47,5 GWj t~1 (Figure 7.4).

7 - Effets de /'irradiation sur le combustible en reacteur

Figure 7.4. Radioactivite du combustible REP use 47,5 GWj t

77

1

refroidi 4 ans.

5. La radioprotection vis-a-vis de I'activite du combustible use Autant la radioprotection est legere avec le combustible neuf, pratiquement non irradiant et comportant un risque faible de criticite ou de contamination en cas d'accident de manutention ou de transport, autant les mesures de radioprotection sont draconiennes avec le combustible use. Vu les activites rappelees ci-dessus, il faut systematiquement mettre en place des dispositifs de protection lourds et etanches contre les risques d'irradiation externe et les risques de contamination interne : -

Pour la protection contre I'irradiation externe, I'industrie de I'aval du cycle utilise des blindages tres epais ou bien dispose entre le combustible use et le personnel d'usine des ecrans d'eau (voir le chapitre 8 qui decrit les piscines). A ce stade, c'est le couple 137 Cs / 137m Ba qui contribue majoritairement a I'irradiation y.

-

Le risque de contamination interne est mattrise au moyen d'un confinement strict, double d'un controle permanent des voies possibles de dissemination.

Si Ton procede au retraitement, la matiere va etre mise a nu, apres destruction de la gaine, et dispersee dans les equipements de procede. Le principe de base de la protection, a ce

78

Le cycle du combustible nucleaire

niveau-la, est de respecter la philosophic de la defense en profondeur a barrieres multiples de la surete nucleaire, en divisant les ateliers en zones qui s'embottent, par exemple au nombre de 4 en haute activite. Les acces du personnel y sont reglementes, pour des travaux precis, et en haute activite la derniere zone n'est pas accessible. Les ventilations sont echelonnees des zones les moins actives vers les zones les plus actives, lesquelles sont mises en depression. Enfin toutes les sorties de matieres, y compris les gaz, sont controlees, eventuellement traitees et comptabilisees avec precision. Une usine de retraitement a une organisation plus complexe que celle d'une centrale nucleaire, a cause de la variete des precedes qui y sont mis en ceuvre (voir la partie 4). Dans une centrale, la haute activite est confinee dans seulement deux batiments lourds, celui du reacteur et celui du combustible, ou se trouve la piscine de desactivation du combustible use. Dans une usine moderne de retraitement, comme a La Hague, la haute activite se trouve repartie dans une serie d'ateliers ayant leurs propres batiments blindes, relies par des moyens de transferts (Figure 7.5).

Figure 7.5. Surete et radioprotection dans I'aval du cycle (usine de La Hague).

7 - Effets de I'irradiation sur le combustible en reacteur

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Par exemple, 1'usine UP3 de COGEMA comprend : - un atelier de tete, dit T1, ou se fait le cisaillage du combustible et la dissolution ; - un atelier d'extraction T2 ou I'uranium et le plutonium sont separes des produits de fission et des actinides mineurs ; - un atelier T3 pour la purification de I'uranium, et un atelier T4 pour la purification du plutonium ; - un atelier T7 pour la vitrification des dechets de haute activite ; - d'autres ateliers complementaires, pour le stockage de I'uranium et du plutonium. UP3 partage avec I'autre usine du site UP2-800 des ateliers communs pour le conditionnement des dechets de faible ou moyenne activite, le traitement des effluents liquides et les laboratoires d'analyse. Si la philosophic de surete est identique pour les centrales et les usines de I'aval, ou se trouve la haute activite du combustible irradie, les conditions y sont tres differentes. Par contraste avec les centrales, les usines de retraitement ne connaissent pas de phenomenes a cinetique tres rapide, n'ont pas de pression dans leurs circuits, et la temperature y est toujours faible. Par centre la liberation de la matiere nucleaire dans les precedes est une caracteristique qui marque les dispositions de confinement des usines. II faut bien comprendre que la totalite de la radioactivite du combustible use, aux rejets pres qui sont autorises a des niveaux sans risque d'impact, reste confinee dans les installations de I'aval du cycle, meme apres retraitement et separation des matieres recyclables des dechets. Ceci pendant longtemps, puisque les combustibles entreposes dans les piscines, silos, chateaux ou les dechets conditionnes du retraitement peuvent rester sur les sites de I'aval pendant des dizaines d'annees. Cela signifie que les risques ne concernent eventuellement que les travailleurs de ces sites, et pas du tout le public. La radioactivite artificielle du combustible use sera a terme reprise pour entrer dans I'etape de son destin definitif (decrite dans la partie 6). Le risque d'irradiation externe va progressivement disparattre, avant un millenaire Seul demeurera le risque de radiotoxicite par contamination interne liee aux radioelements de longue vie.

Cette page est laissée intentionnellement en blanc.

8

Refroidissement et entreposage en piscine

1. L'entreposage en piscine - Pourquoi ? L'entreposage des assemblages combustibles uses sous eau des leur sortie du reacteur est pratique universellement pour deux raisons. L'evacuation de la chaleur residuelle (due a la radioactivite). Un assemblage combustible standard, irradie a 40 GWj r1, provenant d'un reacteur REP de 1 000 MWe arrete depuis quelques jours, a une puissance residuelle d'environ 25 kW par tonne ; cette valeur decrott exponentiellement pour etre d'environ 7 kW apres deux annees de refroidissement et moins de 3 kW apres 4 ans. On comprend done que I'on va laisser refroidir cet assemblage pendant quelques mois dans une piscine adjacente au reacteur avant de le transporter vers I'usine de retraitement et qu'on le laissera refroidir quelques annees supplementaires avant de le retraiter. Grace a I'eau, la temperature a I'interieur de la gaine du combustible n'atteindra pas des valeurs susceptibles d'endommager I'integrite de la gaine (on rappelle que la gaine constitue la premiere barriere de confinement). La protection contre les radiations. L'intensite des radiations decroTt avec le temps, comme la chaleur residuelle (elles en sont d'ailleurs la cause). Apres environ 6 mois une epaisseur d'eau de 4 a 5 metres est suffisante pour arreter la totalite du rayonnement yemis (en terme de protection contre le rayonnement y, un ecran de 5 m d'eau est equivalent a 2 m de beton, a 70 cm d'acier ou a 40 cm de plomb) ; de plus avec I'eau, it n'y a pratiquement pas de rayonnement y secondaire reemis. L'eau est done particulierement bien adaptee aux necessites premieres de I'entreposage du combustible use : pour eviter que sa temperature ne s'eleve au-dessus de seuils fixes, il faudra evidemment evacuer la chaleur par des echangeurs thermiques. Le transfert d'un assemblage depuis le reacteur jusqu'a la piscine adjacente se fait en maintenant ['assemblage sous eau et en le deplagant a I'aide d'un pont. Pour effectuer son transfert vers une usine de retraitement, le transport par chateau est necessaire : on immerge alors le chateau dans la piscine du reacteur et on effectue done le remplissage entierement sous eau. Le dechargement a I'arrivee peut se faire de fagon similaire en immergeant le chateau dans la piscine de dechargement et en dechargeant les assemblages un par un a I'aide d'un pont. On peut aussi utiliser une methode de dechargement a sec en accostant le chateau sous une cellule blindee equipee d'un pont de dechargement qui permet de sortir les assemblages du chateau un par un, les controler individuellement avant de les placer dans des paniers d'entreposage.

82

Le cycle du combustible nucleaire

On trouve done des piscines de refroidissement d'une part sur chaque site de reacteur (capacite de quelques centaines d'assemblages) les combustibles etant en general places dans des racks, d'autre part dans les usines de retraitement de combustibles uses ou, selon les programmes et les clients, la capacite peut etre de plusieurs milliers d'assemblages (jusqu'a 30 000 a La Hague), les combustibles etant ranges dans des paniers (solution frangaise) pouvant contenir 9 assemblages REP ou 16 assemblages REB, ou dans des bouteilles (solution anglaise, les MEB) pouvant contenir 6 assemblages. Enfin dans les pays qui n'ont pas de programme de retraitement, des piscines d'entreposage de longue duree peuvent etre construites dans I'attente d'une solution definitive, comme cela a ete fait en Suede. Pour des assemblages suffisamment refroidis, par exemple dans les piscines des reacteurs, est aussi pratique un transfert vers des moyens d'entreposage a sec, chateaux ou silos, comme cela se fait aux Etats-Unis ou en Allemagne.

2. La conception des piscines d'entreposage Une piscine d'entreposage de combustibles uses est constitute d'une enveloppe en beton revetue d'une peau d'etancheite en acier inoxydable. Si la premiere barriere de confinement reste toujours la gaine du combustible, la deuxieme barriere est fournie par I'eau de la piscine ; aussi la piscine est-elle dimensionnee non seulement aux contraintes massiques et thermiques mais aussi aux contraintes sismiques. Ainsi par exemple a La Hague, toutes les piscines d'entreposage sont-elles montees sur des plots en neoprene pouvant absorber les contraintes en cas de seisme. Les manutentions sont assurees par un pont specifique dit « pont-perche » dont une perche munie de son systeme de prehension est immergee ; ceci permet de manutentionner les paniers tout en les gardant a quelques centimetres du sol de la piscine (ce qui est favorable pour la protection radiologique, mais aussi pour le cas d'une chute ou rupture d'un moyen de prehension). Ce pont est entierement automatise et connecte a un systeme informatique qui tient a jour la cartographic de la piscine. La sous-criticite de I'ensemble piscine + combustibles doit bien entendu etre assuree ; les hypotheses doivent etre suffisamment conservatrices pour pouvoir recevoir et entreposer des assemblages non standards (par exemple des assemblages avec des crayons manquants) ; les paniers d'entreposage sont par exemple chemises en acier inoxydable bore. Par ailleurs on doit etre capable de demontrer I'absence de probleme de criticite meme apres un incident (chute d'assemblage, renversement de panier, deformation, etc.). L'eau des piscines doit etre refroidie pour evacuer la puissance thermique residue!le des combustibles entreposes ; si la puissance a evacuer n'est pas trop importante, on peut travailler en eau perdue, c'est-a-dire que ('appoint d'eau fratche suffit a maintenir la temperature de la piscine aux valeurs souhaitees (aux alentours de 35 °C); mais dans la plupartdescas, la chaleur a evacuer est trop importante et il faut recourira des echangeurs de chaleur: ceux-ci peuvent etre exterieurs a la piscine ou, mieux, internes a la piscine ce qui evite d'envoyer de I'eau potentiellement contaminee a I'exterieur; cette derniere solution est utilisee a La Hague ou les echangeurs thermiques sont immerges dans la piscine elle-meme. Le circuit secondaire est en general relie a des refrigerants

8 - Refroidissement et entreposage en piscine

83

atmospheriques ou aerorefrigerants. A La Hague, a chaque piscine correspond une puissance a evacuer de I'ordre de plusieurs MW. L'eau des piscines doit egalement etre purifiee pour eliminer d'une part les traces de la radioactivite qui peut migrer dans I'eau (notamment des produits d'activation des structures comme le 60Co qui, par corrosion, peuvent passer dans I'eau, bien qu'en quantites infimes), et d'autre part des anions qui pourraient provoquer ou accelerer la corrosion de certaines parties des assemblages entreposes. Les resines echangeuses d'ions sont universellement utilisees pour cette application ; comme les echangeurs thermiques, les echangeurs ioniques peuvent etre soit exterieurs, soit internes a la piscine ; BNFL a Sellafield utilise la premiere methode tandis que COGEMA utilise la seconde a La Hague ; dans ce dernier cas, on melange des resines anioniques (qui fixent les anions genants, chlorures et sulfates) et des resines cationiques (qui fixent les cations radioactifs 60Co, 59Ni, 63 Ni, etc.) dans des echangeurs ioniques immerges.

3. Les conditions d'entreposage des combustibles irradies en piscine Les caracteristiques de I'eau de piscine sont surveillees en permanence et font I'objet de prescriptions par I'Autorite de Surete. Sont suivis (les valeurs citees sont celles applicables a I'usine de La Hague) : -

la radioactivite de I'eau (valeur maximale admise 37 kBq L~1, valeur couramment obtenue 10 a 20 kBq L~1) ;

-

le pH (valeur minimale admise 4,5, valeur courante 5 a 6);

-

la conductivite (valeur minimale 3,5 mS crrr1, valeur courante 1 a 1,5 mS cm"1 millisiemens par centimetre);

-

les anions chlorures, fluorures et sulfates (ils doivent etre inferieurs a 0,1 mg L"1) ;

-

les cations sodium et calcium (ils doivent etre inferieurs a 0,5 mg L"1);

-

la temperature de I'eau (valeur maximale 45 °C, valeurs courantes de 25 °C a 40 °C, les variations etant surtout dues aux variations de temperature exterieure).

De telles valeurs ne peuvent etre obtenues qu'en utilisant de I'eau demineralisee comme eau d'alimentation et en ayant un systeme efficace de piegeage sur resines des elements indesirables. Dans ces conditions, I'experience montre que le combustible use des reacteurs a eau peut rester plusieurs dizaines d'annees en piscine sans etre endommage ; on estime qu'au-dela de 50 ans, des verifications seraient cependant a faire pour s'assurer du maintien de I'integrite de la structure de ('assemblage. On notera a ce sujet que le suivi de I'activite de I'eau de piscine est un tres bon indicateur de la bonne tenue des assemblages puisqu'une montee meme minime de I'activite, en 137Cs par exemple, revelerait un relachement de produits de fission done une alteration de la gaine du combustible. A La Hague, les assemblages restent en moyenne 8 ans dans les piscines d'entreposage avant d'etre retraites.

84

Le cycle du combustible nucleaire

4. Un exemple de piscine d'entreposage : La Hague II y a, sur le site COGEMA de La Hague, quatre piscines, toutes reliees par des canaux de transfert, avec deux points communs d'entree (un dechargement sous eau (NPH) et un dechargement a sec (TO)). Les deux systemes sont reversibles, c'est-a-dire que I'on peut « desentreposer » les combustibles et les remettre en chateau de transport. II y a en fait une piscine de premiere generation dite NPH et trois piscines identiques « type », dont les caracteristiques sont les suivantes : -

longueur: 50 m ;

-

largeur: 16 m ;

-

profondeur: 9 m (soit un volume de 7 200 m3 d'eau) ;

-

puissance thermique maximale evacuable, 12 MW grace a 6 echangeurs thermiques immerges et un reseau secondaire refroidi par 12 aerorefrigerants de 1 MW de puissance unitaire ;

-

purete de I'eau maintenue grace a 6 echangeurs ioniques contenant chacun 0,8 m3 d'un melange de resines anioniques et cationiques, avec une duree de vie avant remplacement de plusieurs annees ;

Figure 8.1. Piscine d'entreposage de combustibles irradies (La Hague).

8 - Refroidissement et entreposage en piscine

85

Figure 8.2. Paniers d'entreposage de combustibles irradies (La Hague).

La capacite d'une telle piscine est d'environ 730 paniers, pouvant contenir chacun soit 9 assemblages REP, soit 16 assemblages REB, ce qui correspond a environ 4 000 tonnes de combustibles. Cette capacite correspond a environ 4 annees des dechargements annuels effectues par EDF ou encore a la moitie des dechargements annuels du pare mondial actuel des reacteurs nucleaires a eau (Figures 8.1 et 8.2).

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Partie IV

Gestion du combustible use par le retraitement

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9

Elements dechimie du retraitement

La chimie du retraitement utilise deux types de reactions, qui sont combines pour separer les elements recyclables, U et Pu, des autres elements considered comme dechets : - des reactions en milieu nitrique, en particulier les reactions redox de I'azote, - des reactions d'extraction selective des cations metalliques U et Pu par le tributylphosphate (TBP). Le premier groupe permet de donner aux elements a extraire les etats d'oxydation convenables, en fonction des proprietes extractantes du TBP.

1. Le milieu nitrique 1.1. Les proprietes acide et complexante L'acide nitrique est classe traditionnellement parmi les acides forts. Cependant, la fraction non dissociee est de 0,1 des [HNO3] = 3,5 M et atteint 0,5 pour [HNO3] = 10 M. L'acide nitrique est done un acide plus faible que I'acide perchlorique, I'acide sulfurique (premiere acidite) ainsi que la plupart des hydracides halogenes (par exemple HCI). L'acide nitrique est assez peu corrosif (compatible inox), et la majorite des nitrates metalliques sont solubles. Les complexes des cations metalliques avec les ions nitrates sont faibles mais leur constante de complexation est suffisante, pour certains cations, pour permettre la formation de complexes neutres a forte concentration nitrate (voir I'extraction par TBP au §3).

1.2. Les reactions redox entre etats oxydes de /'azote Les reactions entre les composes d'azote aux degres d'oxydation II a V sont relativement rapides et generalement equilibrees :

N2O3, NO, N2O4 (ou NO2) sont gazeux a temperature ambiante. N2O3, N2O4 (ou NO2) sont tres solubles en phase aqueuse, alors que NO Test tres peu (a peu pres autant que O2 et N2).

90

Le cycle du combustible nucleaire

NO est oxyde par I'oxygene de I'air suivant la reaction :

reaction fondamentale pour la recombinaison des vapeurs nitreuses en acide nitrique. En solution, I'acide nitreux HNO2 (azote III) joue un role preponderant. En effet, I'ion nitrate (azote V) tres oxydant du point de vue thermodynamique, est souvent « cinetiquement » quasi inerte en I'absence d'acide nitreux (sauf a ebullition). L'acide nitreux HNO2 est oxydant ou reducteur selon les cas; par exemple, il oxyde le fer II et reduit le cerium IV. Les mecanismes d'oxydation par le milieu nitrique sont complexes et souvent autocatalytiques (produisant de I'HNO2 et catalyses par I'HNO2). Sans ajout « d'antinitrite », I'acide nitrique contient toujours de I'HNO2 : - ~ 10~5 mol L"1 dans I'acide nitrique du commerce ; - ~ quelques 10~3 mol L-1 sous I'effet de la radiolyse de I'acide nitrique.

1.3. Les composes antinitrites Divers reactifs peuvent bloquer le caractere oxydant de I'acide nitrique par destruction de I'acide nitreux (par exemple, la famille des composes RNH2). L'ion hydrazinium NH 2 -NH 3 (sel de I'hydrazine NH2-NH2) est classiquement utilise dans le retraitement:

L'acide hydrazo'i'que (HN3), encore appele acide azothydrique, ainsi forme peut reagir aussi sur I'acide nitreux (cinetique plus lente), si ce dernier est present en exces :

Remarque. A forte concentration, I'acide hydrazo'i'que presente un caractere explosif. On suivra done avec attention sa concentration dans le precede, en fixant des valeurs maximales sures, a ne pas depasser.

2. La chimie redox des elements U-Np-Pu-Am en milieu nitrique 2.1. Les formes ioniques Les structures des ions metalliques ont une grande influence sur les cinetiques de leurs reactions d'oxydo-reduction. Ce sont:

Du point de vue cinetique, lorsqu'il y a un simple transfert d'electron les reactions sont rapides (ex.: M3+ - M4+ et MO2 - MO2+) alors qu'en cas de rupture ou formation de liaison metal-oxygene, les reactions sont generalement plus lentes (ex.: M4+ - MO2 ).

9 - Elements de chimie du retra/tement

91

Remarque. Les reactions entre ions d'un meme element (dismutation) entrament des creations ou des ruptures de liaisons metal-oxygene (voir les reactions ci-apres). Elles sont done « lentes ». Mais ce sont des reactions du second ordre, leur vitesse crott avec la concentration du cation metallique ; elles apparaissent done rapides en solution concentree.

2.2. La stabilite en milieu acide nitrique Le tableau 9.1 presente la stabilite des differents etats d'oxydation des actinides en milieu acide nitrique 1 M. Tableau 9.1. Stabilite des actinides en milieu HNO3 1 M.

Ill

Pu

Np

U

Am

-

-

X



X

X



+

V

O



O

VI







IV

+ +

+ instable (trop oxydant), " instable (trop reducteur). O instable (dismutation), • stable. X stable en presence d'un anti-nitrite.

En resume, les etats d'oxydation rencontres dans le precede de retraitement sont done les suivants : -

uranium VI (Ulv introduit comme reactif), neptunium V et VI (Nplv uniquement lors des operations reductrices), plutonium IV et VI (PuMI uniquement lors des operations reductrices), americium uniquement a I'etat d'oxydation III.

2.3. Les reactions d'oxydation Les principals reactions d'oxydation rencontrees dans le precede sont les suivantes : Sans rupture ou creation de liaison metal-oxygene : relativement rapides, catalysees par HNO2 : -

oxydation

92

Le cycle du combustible nucleaire

Remarque. Reaction utilisee pour I'ajustage du Pu en Pulv (reaction inverse uniquement a faible acidite).

- oxydation Npv en Npvl Avec creation liaison metal-oxygene : - oxydation UIV en U VI : Remarque. Reaction lente a froid et irreversible (depend de la concentration en HNO2 de maniere complexe).

-

oxydation Nplv en Npv : Remarque. Reaction lente et irreversible a [HNO3] < 1 M, conduit a Npvl pour une acidite superieure et devient alors equilibree.

-

oxydation Pulv en Pu vl : Remarque. Reaction lente a froid et plus rapide a I'ebullition mais surtout a faible acidite.

2.4. La reduction du plutonium tetravalent Au cours de differentes operations du precede de retraitement, on est amene a reduire le plutonium a I'etat d'oxydation III. Dans ce but deux reducteurs sont utilises : -

reduction par le nitrate uraneux (UIV) :

Remarque. Reaction tres rapide meme a temperature ambiante.

-

reduction par le nitrate d'hydroxylammonium d'hydroxylamine :

(NHA), encore appele nitrate

Remarque. Deuxieme reaction preponderante en presence d'exces d'hydroxylamine, reaction relativement rapide a chaud mais tres defavorisee par I'augmentation de I'acidite.

2.5. La reduction du plutonium hexavalent Comme on le verra plus loin, le plutonium VI est moins extractible par le TBP que le plutonium IV. On peut done etre amene au cours du precede a reduire le Puvl. Si le nitrate uraneux reduit tres rapidement le Puvl en Pulv, sa presence en exces conduit a la formation de Pum (peu extractible). Pour I'ajustage de I'etat d'oxydation du plutonium en Pulv, I'etape de reduction est alors suivie par une oxydation par les vapeurs nitreuses (cycle de valence). Le nitrate d'hydroxylammonium presente les memes inconvenients, mais comme il reagit de surcroTt assez lentement avec le plutonium hexavalent, on evite de I'utiliser pour cet usage. Un autre reducteur peut etre aussi envisage pour cette reduction : le NO. La vitesse de cette reaction est assez lente, mais presente I'avantage de s'arreter a Pulv.

9 - Elements de chimie du retraitement

93

3. Le TBP at I'extraction liquide-liquide 3.1. Le tributylphosphate (TBP, masse molaire 323)

Bu : butyl C4H9 Le tributylphosphate (ou TBP, voir formule ci-dessus) fait partie de la famille des extractants neutres. II extrait les cations metalliques par solvatation de leurs complexes nitrate neutres (propriete liee au doublet electronique libre de I'oxygene).

En extraction liquide-liquide, la capacite d'un solvant a extraire une espece metallique /* est quantified par le coefficient de partage DM defini par le rapport de sa concentration e phase organique a sa concentration en phase aqueuse a I'equilibre: DM - [M]org/[M]aq. Les parametres principaux regissant les equilibres de partage sont (Figure 9.1) : - I'effet « relargant » des nitrates : NO3 71 =» DM 71; - et I'effet de saturation du TBP.

Figure 9.1. Equilibres de distribution phases aqueuse-organique.

Les principales caracteristiques qui ont conduit au choix du TBP, pour le developpement d'un precede de retraitement du combustible use, sont: -

-

son excellente selectivite, a savoir, une forte affinite pour elements d'interet UVI et Pulv sous leurs formes stables en milieu nitrique et une faible affinite pour d'autres elements; sa bonne resistance chimique a la radiolyse et a I'hydrolyse dans les milieux nitriques concentres ; son aptitude a la regeneration. Les principaux produits de degradation (Figure 9.2) sont formes par addition de H2O sur les liaisons O-Bu avec formation de I'acide

94

Le cycle du combustible nucleaire

phosphorique correspondant (HDBP puis H2MBP et enfin H3PO4,) et de butanol (butanol oxyde par le milieu en acide butanoTque). Ses principaux produits de degradation sont des acides et peuvent done etre aisement elimines par des lavages basiques ; -

et enfin des solubilites mutuelles eau/TBP convenables car tres faibles (par exemple, la solubilite TBP dans la phase aqueuse est d'environ 10~3 mol L~1).

Figure 9.2. Principaux modes de degradation du TBP.

3.2. Le role du diluant En fait, leTBP n'estpratiquementjamais utilise pur maisen dilution dans un hydrocarbure. Ce diluant, chimiquement inerte, ameliore la separation des phases par: -

('augmentation de I'ecart de densite entre la phase aqueuse et organique (TBP « pur » 0,97 kg L-1, TBP 30 % 0,83 kg L-1),

-

la diminution de la viscosite (d'un facteur 2 entre le TBP pur et le TBP dilue a 30 % dans le dodecane),

-

et enfin ('augmentation de la tension interfaciale entre les phases organique et aqueuse.

Le diluant permet de plus de limiter les pertes en TBP par solubilite en phase aqueuse. Le diluant classiquement retenu est un hydrocarbure sature plus ou moins ramifie a 12 carbones. Le choix frangais actuel est le « TPH » (tetrapropylene hydrogene, en fait un dodecane, C12 ramifies ~ 150 molecules). Le taux de dilution le plus utilise est 30 % volumique (soft [TBP] ~ 1,1 mol L~1) car il permet un bon compromis entre la capacite du solvant vis-a-vis de sa charge maximale en cations metalliques extraits et sa mise en ceuvre (separation des phases).

9 - Elements de chimie du retraitement

95

3.3. L'extract/on liquide-liquide L'extraction par solvant ou encore I'extraction liquide-liquide est basee sur le transfer! de matiere entre deux phases immiscibles (par exemple une phase aqueuse et une phase organique). Le transfert de matiere est obtenu par mise en contact des deux phases (creation d'une emulsion). Apres transfert, les deux phases sont separees par decantation ou par centrifugation (Figures 9.3 et 9.4).

Figure 9.4. Extraction liquide-liquide.

Pour quantifier le travail effectue au cours de cette operation, on utilise la notion d'etage theorique, definie de la maniere suivante : - atteinte de 1'equilibre thermodynamique de partage entre les phases effluentes (sortie), - phases effluentes parfaitement separees. Les equations caracteristiques permettant de decrire le travail de separation d'un etage theorique sont done les suivantes : -

equilibre thermodynamique : [Morg]s = F([Maq]s) ou [Morg]s = D [Maq]s operatoire (equation de bilan) : A x ([Maq]e - [Maq]s) = O x ([Morg]s - [Morg]e).

96

Le cycle du combustible nucleaire

Dans le cas d'un solvant exempt de solute avant contact ([Morg]e = 0), la relation reliant les concentrations en phase aqueuse a I'entree et a la sortie de I'etage theorique est done :

Pour augmenter le travail effectue par un etage theorique, on peut done soit agir sur les conditions chimiques de fagon a augmenter le coefficient de partage (D augmente), soit sur les parametres operatoires en augmentant le rapport O/A. [.'application a I'echelle industrielle (capacites de traitement elevees) de cette technique de separation par extraction liquide-liquide implique la mise en oeuvre d'operations continues. De plus dans le cadre du retraitement, la recherche de performances de separation elevees necessite une mise en ceuvre d'operations repetees a contre-courant (Figure 9.5).

Figure 9.5. Schema d'operations d'extraction liquide-liquide a contre-courant.

L'application des equations precedentes, avec les hypotheses suivantes : - extractant non charge a I'entree, - coefficients de partage constants, - variations de volume des phases negligees, permet d'obtenir la relation suivante (relation de Kremser):

Comme le montre cette equation, dans le cas d'un facteur d'extraction £ superieur a 1, cette mise en ceuvre a contre-courant permettra I'atteinte de performances elevees en extraction. Remarque. Dans le cas ou E est inferieur a 1, on pourra effectuer I'operation inverse, la desextraction (ou reextraction).

4. La separation de U-Np-Pu-Am par extraction Le TBP est un extractant neutre, il extrait done preferentiellement les cations metalliques formant des complexes neutres avec les ions nitrates (voir § 3.1). Parmi les especes presentes en milieu nitrique, les etats d'oxydations V et III, peu complexes par les ions nitrates, sont peu extractibles (coefficients de partage de I'ordre de quelque 10~3 a quelque 10~2). Par centre, la force des complexes des etats d'oxydations VI et IV est

9 - Elements de chimie du retraitement

97

suffisante pour former des complexes neutres et ils sont extractibles (coefficients de partage de UVI et de Pulv de I'ordre de quelques dizaines). II faut noter que la force des complexes decroTt de I'uranium a I'americium pour les etats d'oxydation VI et croTt pour les etats d'oxydation IV. De ce fait, les coefficients de partage de I'uranium IV et du plutonium VI sont peu eleves (de I'ordre de quelques unites, Tableau 9.11). Tableau 9.11. Coefficients de partage de U, Np et Pu dans le TBP 30 %, [HNO3] 2 M, a 25 °C Degre d'oxydation

Neptunium

Uranium

IV

1,2

VI

Plutonium

2,1

7,0

11

15

2,1

Ces considerations permettent d'expliquer, en premiere approximation, la selectivite du TBP vis-a-vis des especes d'interet dans le cadre du retraitement (notamment I'uranium et le plutonium). Les mecanismes d'extraction pour I'uranium VI et le plutonium IV sont representes ci-apres : U 022+ aq + 2 N03

aq

+ 2 TBPorg ^ (U02(N03)2, 2 TBP)org

Pu4+aq + 4 NOa

aq

+ 2 TBPorg ^ (Pu(NO3)4, 2 TBP)org

Le precede de separation est base sur: • la selectivite du TBP qui permet d'extraire preferentiellement les especes d'interet, • la mattrise de I'effet "relargant" du milieu au travers de la concentration en acide nitrique. A titre d'exemple (Tableau 9.Ill), pour extraire I'uranium VI et le plutonium IV, il suffira de se placer a une acidite nitrique de I'ordre de 2 a 3 mol L~1. De meme, pour desextraire I'uranium VI, on choisira une acidite nitrique de I'ordre de 0,02 mol L~1 (ou plus faible). • la maitrise de Petat d'oxydation (voir les exemples infra) : • separation U-Pu par reduction Pulv en Pu'" par U'v ou NHA ; • separation U-Np par ajustage de I'etat d'oxydation du Np en Npv. Am n'est pas extrait par le TBP car seul I'Am1" est stable en milieu nitrique. Tableau 9.111. Coefficients de partage de UVI, Pulv en fonction [HNO3]aq (TBP 30 % a 25 °C). [HNO3]aq mol L'1

0,02

0,5

1,0

DU VI

0,28

2,6

7,0

DPu lv

*

0,35

3,0

Pu'v pas stable en solution a faible acidite (hydrolyse).

2,0

15 7,0

3,0

4,0

26

33

14

21

98

Le cycle du combustible nucleain

5. Le comportement des principaux produits de fission Tableau 9.1V. Croupes chimiques des produits de fission

Combustible use REP 47,5 GWj/t

kg/t

*

*

refroidi 4 ans %

PF gazeux

KrXel

8,4

17

Alcalins et alcalino-terreux

Rb Cs Sr Ba

7,7

16

Yttrium et lanthanides

Y La Ce Pr Nd Pm Sm Eu Gd

14,5

30

PlatinoTdes

Ru Rh Pd

5,9

12

Metaux de transition

Mo Zr Tc

Divers

Se Br Ag Cd Sn Sb Te

11 1,2

22 3

PFZde32a67.

5.1. Les produits de fission gazeux Ces produits de fission ne posent pas de probleme quant aux specifications des produits finis, mais uniquement des problemes de radioprotection ou d'environnement. Le krypton et le xenon font partie de la famille des gaz « nobles» , chimiquement peu reactifs ; ils sont evacues avec les gaz de dissolution. L'iode pose essentiellement des problemes d'environnement du fait de I'existence d'un isotope a vie tres longue, I'iode 129. Comme son comportement chimique est tres complexe, on cherche a l'eliminer du retraitement des I'etape de dissolution (voir chapitre 10).

5.2. Les produits de fission alcalins et alcalino-terreux Le rubidium, le cesium, le strontium et le baryum ne sont pas extractibles. Seul le cesium peut poser des problemes du fait de son activite Py importante (137Cs) et sa propension a former des precipites avec les phosphomolybdates (precipitation au niveau de la concentration des produits de fission).

5.3. L'yttrium et les lanthanides Ces metaux sont presents a I'etat d'oxydation III en milieu nitrique et ne sont done pas extractibles.

9 - Elements de chimie du retraitement

99

Seul le cerium peut etre oxyde a I'etat d'oxydation IV, ou il est alors extractible par le TBP. Mais, dans les conditions du retraitement, on ne I'observe pratiquement jamais a ce degre d'oxydation (voir § 1.2, Celv est reduit par HNO2).

5.4. Les platinoi'des Le rhodium et le palladium sont partiellement solubles et peu ou pas extractibles. Le ruthenium est, sans doute, ['element qui a la chimie la plus complexe. II possede tous les degres d'oxydation de II a VIII : -

Ruvl" existe a I'etat RuO4 volatil en milieu nitrique > 8 M,

-

en milieu acide nitrique le Ru est present surtout aux etats d'oxydation III et IV : • Rulv donne un oxyde RuO2, solide noir pulverulent, tres divise, • Rum forme des complexes multiples en milieu nitrique avec NO, NO2 et NOj, complexes presentant des cinetiques lentes d'echanges entre eux (hors equilibre).

Le Ru est le principal responsable des contaminations py residuelles des produits finis U et Pu.

5.5. Les metaux de transition : molybdene, zirconium et technetium Le molybdene est peu ou pas extractible. II precipite notamment avec le zirconium (molybdates de zirconium) dans I'acide nitrique a chaud lors des etapes de dissolution et de concentration des produits de fission (avec en plus formation de phosphomolybdates de cesium insolubles). Le zirconium precipite partiellement avec le molybdene. II est present a I'etat d'oxydation IV et extractible en milieu HNO3 concentre. Ses coefficients de partage sont cependant faibles si le solvant est « sature ». Le technetium est present a I'etat d'oxydation VII (en ['absence de reducteur), et presente plusieurs mecanismes d'extraction : TBP] (coefficients de partage faibles)

Ce deuxieme mecanisme existe aussi avec le plutonium et le zirconium et peut conduire a une co-extraction de ce produit de fission avec I'uranium et le plutonium. S'il ne pose pas vraiment de probleme vis-a-vis de la contamination residuelle des produits finis U et Pu, son comportement redox en milieu reducteur est plus genant. En effet, le technetium catalyse I'oxydation de I'hydrazine et de I'uranium IV par I'acide nitrique. Ce comportement particulier du technetium necessite une attention particuliere lors de la definition des schemas de precede. Le Tc est potentiellement extractible et peut s 'averer genant pour la maftrise des operations de separation basees sur une reduction du Pulv en Pu111.

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10

Operations de tete du retraitement

1. Le cisaillage des assemblages combustibles La decision de proceder au retraitement appartient a I'electricien qui a mis en entreposage ses combustibles uses dans les piscines de I'usine, plusieurs annees auparavant (typiquement 4 a 8 ans). Les assemblages choisis pour etre retraites sont transferes, sous le controle international en place dans I'enceinte des piscines, vers I'atelier de cisaillage, premiere etape de la « tete » du retraitement dont la tache est de preparer la solution de depart pour les extractions et les purifications. Pour permettre I'attaque acide de la matiere des assemblages, il faut ouvrir les gaines des crayons. Comme ces assemblages sont tres actifs, ('operation, realisee dans une enceinte blindee, fait appel a un precede mecanique de decoupage particulierement rustique et robuste, capable d'assurer la cadence voulue (4 tonnes par jour dans chacune des deux usines de La Hague en cadence globale, ce qui correspond a 5,2 tonnes par jour pour la tete pour tenir compte d'un taux d'indisponibilite de cette partie), sans maintenance delicate ni frequente. Aussi trouve-t-on dans les usines de grande capacite une puissante cisaille, a commande hydraulique externe, qui decoupe des tranches de 3 a 4 cm environ dans ('assemblage, sans demontage prealable. La lame, la contre-lame et les galets sont les seules pieces d'usure. Une telle cisaille est polyvalente ; elle peut decouper aussi bien des assemblages REP que REB, de toutes les tail les. Elle precede a la separation des embouts par simple cisaillage entre eux et les crayons (Figure 10.1).

Figure 10.1. Principe du cisaillage.

102

Le cycle du combustible nudea/re

Les trongons obtenus, embouts ou fractions de crayons avec morceaux de grilles, doivent respecter evidemment les dimensions fixees par les appareils qui les recueillent, rinceurs a embouts ou « dissolveur ». Ces appareils, de I'etape suivante, sont directement relies a la cisaille par des goulottes. La cisaille est balayee par un debit d'azote, de fagon a eviter tout risque lie a la pyrophoricite de la limaille de zirconium provenant des gaines coupees, et a entramer vers I'aval les gaz actifs liberes ainsi que du combustible sous forme pulverulente pouvant se detacher des pastilles. Toutes les operations de tete sont groupees dans une meme vaste cellule, et leur confinement par les parois des appareils permet une ventilation independante de celle de la cellule, ventilation dite de « precede » qui, on le verra plus loin, debouche dans un systeme de traitement des gaz avant rejet atmospherique (Figure 10.2).

Figure 10.2. Schema de la cellule de dissolution continue.

2. La dissolution nitrique 2.1. Les mecanismes de dissolution Les embouts (ne contenant normalement pas de matiere nucleaire) sont ecartes de la dissolution ; ils sont diriges vers deux etages de ringage, le premier se faisant par une solution acide chaude et le second par de I'eau. Seules done les fractions de crayons sont envoyees vers I'operation de dissolution, operation dont le procede et la technologic peuvent etre congus suivant des principes varies. Par exemple le procede peut etre continu ou discontinu.

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Mais la chimie est la meme avec tous les schemas : il s'agit d'attaquer la matiere nucleaire irradiee pour obtenir une « liqueur » destinee au traitement de separation qui suivra, avec un excellent rendement de mise en solution des elements nobles (U et Pu) et une cinetique pas trop lente. L'attaque se fait par I'acide nitrique 3M, a I'ebullition, dont on a vu au chapitre 9 I'interet qu'il offre pour la chimie redox (changement de valence) des actinides, grace aux differents etats oxydes de I'azote. Dans cette attaque, les differents composes de la matiere nucleaire reagissent suivant les mecanismes de dissolution suivants. Oxyde d'uranium UO2. II subit des reactions redox qui dependent de la concentration de I'acide nitrique. On obtient en solution le nitrate d'uranyle :

Reactions rapides avec degagement de vapeurs nitreuses NOX. Remarque. Le neptunium a sensiblement le meme comportement que Puranium.

Oxyde de plutonium PuO2. Le Pu est en faible concentration dans le combustible irradie, et il est finement disperse dans I'oxyde d'uranium. Dans ces conditions il passe en solution en phase avec I'uranium. Le Pu est sous forme de dioxyde et sa dissolution se fait sans changement de valence, par reaction acido-basique : Une reaction lente d'oxydation peut cependant s'ajouter a la reaction principale : Cette reaction « parasite » (car elle gene ('extraction du plutonium) depend de la concentration en plutonium, et de la concentration des oxydes d'azote qui tendent a la bloquer. II peut etre necessaire de faire alors un ajustement valenciel avant I'extraction. Dans les conditions d'une dissolution continue, cette reaction est inhibee du fait de la presence constante de vapeurs nitreuses. Oxydes de produits de fission et d'actinides mineurs a la valence III (produits de fission alcalins, alcalino-terreux, lanthanides, americium et curium). Us sont mis en solution par une reaction acido-basique (facile): Autres produits de fission. Certains sont insolubles, ou sont solubles de fac.on incomplete (tels le molybdene et le zirconium, voir le bilan). Deux presentent des reactions redox particulieres : le technetium et I'iode (etats d'oxydation tres divers). Au total la dissolution du combustible irradie est complexe : - il y a imbrication des proprietes en solution nitrique (reactions acido-basiques et redox auxquelles s'ajoutent des reactions de complexation par les ions nitrates); - les reactions « primaires » se situent a I'interface solide/solution ; - il y a des couplages nombreux qui influencent la cinetique et I'etat final (par exemple la phase gaz et le degre d'oxydation du plutonium ou de I'iode); - la cinetique augmente avec I'acidite, la concentration en nitrates, la temperature et le taux d'irradiation qui rendent le combustible plus reactif; la duree de dissolution generalement retenue dans les usines est d'environ 2 heures.

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Le cycle du combustible nucleaire

2.2. Le bilan de la dissolution On retrouve en solution : -

la quasi-total ite de I'inventaire en uranium, plutonium, actinides mineurs ; environ 80 % des produits de fission.

Les 20 % des produits de fission restants se repartissent entre le flux gazeux (xenon, krypton et lode) et les solides residuels qui forment des composes intermetalliques en particules tres fines (platino'i'des - ruthenium, rhodium, palladium avec zirconium, molybdene, technetium). Ainsi a la sortie de la dissolution, il y a quatre flux a gerer et a trailer: -

la liqueur qui contient les matieres nucleates a recycler U et Pu ; les gaz qui sont charges en produits actifs et vapeurs nitreuses ; des particules solides, melange de limaille de zirconium et de «fines » insolubles ; enfin Jes debris metalliques des assemblages, les embouts separes et les fragments de grilles et de gaines (« coques »), non attaques par I'acide nitrique.

2.3. Co/ttra/nfe* et aspects technologiques Outre la tres grande activite des matieres soumises a la dissolution, I'operation doit etre conduite en garantissant, pour les types de combustible admis dans I'usine, la condition d'un etat sous-critique, en toute circonstance, ce qui est plus particulierement severe une fois la mise en solution obtenue. Bien qu'on puisse songer a ajouter dans la solution un poison neutronique (par exemple sous forme de gadolinium), on prefere assurer la souscriticite par la geometric et la limitation de concentration. Autre contrainte : la resistance des appareils a la corrosion par I'acide nitrique. L'acier inoxydable (nuance speciale) peut a la rigueur convenir. Pour les parties du materiel qu'il est extremement difficile, voire impossible, de pouvoir eventuellement reparer, dans les usines de La Hague on a choisi le zirconium qui resiste mieux, a condition qu'il n'y ait pas trace de fluor. Les appareils de dissolution, qu'on appelle dissolveurs, sont congus soit pour un fonctionnement discontinu (on dit en « batch »), soit pour un fonctionnement continu. Dans la premiere conception (exemple I'ancienne usine UP2-400 de La Hague ou encore I'usine anglaise de Sellafield), le dissolveur comporte un long tube, de section reduite carree, dans lequel est depose le chargement de trongons de combustible, par I'intermediaire d'un panier amovible. La solution d'attaque circule par thermosiphon entre le tube du dissolveur et un reservoir plat, le tout offrant une geometric sous-critique. Le chargement se fait a froid, puis la solution est portee a ebullition pendant quelques heures, et, a la fin, les coques sont retirees avec le panier. Le fonctionnement discontinu et le volume utile d'un tel appareil lui conferent une capacite assez faible. On y remedie en construisant une batterie de dissolveurs, alternativement charges par la cisaille. BNFL est reste fidele a cette conception pour sa grande usine recente. Par centre, I'equipement de dissolution des usines de COCEMA, UP3 et UP2-800, a ete developpe suivant la conception a fonctionnement continu, dans une technologic

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totalement nouvelle, avec comme objectif de trailer toute la capacite avec un seul appareil et d'avoir un precede plus facilement controlable grace a un niveau operatoire stable. Le dissolveur type La Hague comporte une roue a douze godets, mobile dans une cuve verticale plate, d'environ 35 cm d'ouverture. Le chargement se fait godet apres godet, la roue avance par douzieme de tour, permettant un trempage de chaque godet de 2 heures environ ; a la fin, les coques sont deversees dans une goulotte de sortie vers un rinceur. L'acide est alimente en permanence, et la solution est extraite aussi en continu (Figure 10.3).

Figure 10.3. Schema du dissolveur rotatif.

Pour le confinement de la ventilation du precede, la cuve etroite ou tourne la roue est munie d'un couvercle facilement relevable (etancheite par « garde hydraulique »), le dit couvercle portant accroches les galets de rotation. La maintenance d'un tel dissolveur est limitee au remplacement periodique des galets. Les depots en fond de cuve, notamment les fragments solides qui s'echappent des godets, sont repris par un « air lift » qui permet ainsi un auto-nettoyage. Un nettoyage complementaire a I'arret s'est cependant avere necessaire pour eliminer de temps en temps des depots adherents de zirconium-molybdene. Tout un systeme de mesures physiques et chimiques permet de suivre dans les operations de tete le devenir des matieres nucleaires. On commence par verifier, a I'entree, le contenu des lots de combustible, puis on suit la dissolution (controle precede et surete criticite) et, a la sortie, on determine avec le plus de precision possible la distribution du contenu charge dans les differents flux separes. Par exemple la surete criticite est controlee par des mesures neutroniques, ou bien I'epuisement de la matiere nucleaire solide est verifiee par mesure directe sur les coques rincees, en mesurant le 137Cs restant qui est un bon traceur d'une bonne dissolution. La comptabilite precise des matieres nucleaires, U et Pu, a I'entree du retraitement, apres dissolution, se fait dans une cuve « bilan », de volume etalonne, par analyse de la solution clarifiee. On controle aussi les matieres nucleaires restantes dans les coques rassemblees dans un fut par mesure neutronique active et passive (voir chapitre 13).

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Le cycle du combustible nucleaire

3. La clarification de la solution de dissolution On a vu que des particules sont presentes dans le bain de dissolution. II y a : -

3 a 4 kg de limaille par tonne traitee, resultant du cisaillage, avec un large spectre granulometrique (du mm au urn) ; - 3 a 5 kg par tonne de fines sub-microniques, resultant de la non-dissolution de certains produits de fission (platinoYdes), et de la dissolution partielle de certains autres (Mo, Zr, Tc); ces fines ont une puissance thermique elevee de I'ordre de 100 W kg"1. On ne peut pas laisser ces particules en suspension dans la liqueur destinee a I'extraction : elles encrasseraient les conduites et les appareils (risque de bouchage, de corrosion, de points chauds et actifs) et elles degraderaient le solvant de I'extraction, tout en produisant des composes interphase, intermediaires entre la phase aqueuse et la phase solvant. L'objectif de la filtration appliquee a ces particules, c'est done de produire une liqueur aussi « propre » que possible, tout en laissant le minimum de matiere nucleaire dans les fines separees. La technologic peut etre tres diversified. En France on a renonce aux filtres classiques, qui peuvent etre tres efficaces, mais qui presentent des difficultes liees a leur colmatage et produisent des dechets secondaires; on a developpe la clarification par centrifugation. On produit un gateau de fines dans un bol ou la solution a clarifier est mise en rotation rapide (acceleration d'environ 1 800 g). Le gateau est rince a I'acide nitrique, puis decolmate et envoye dans une cuve d'entreposage. Des centrifugeuses de plus en plus performantes ont ete mises au point. Pour faciliter ('intervention sur leur motorisation, leur partie active est montee en pendule dans I'enceinte blindee. Pour cette raison, on les a appelees « decanteuses pendulaires centrifuges » (DPC). Leur efficacite est limitee pour les insolubles tres fins, mais elle est suffisante comme I'a prouve ('experience de La Hague. Les fines sont entreposees en solution aqueuse acidulee. Elles seront ulterieurement melangees aux produits de fission pour etre immobilisees par vitrification.

4. Le traitement des gaz de dissolution Le flux gazeux qui balaie la cisaille et entrame les gaz rares de fission liberes de la gaine s'enrichit, en passant dans le dissolveur, d'autres gaz degages par la solution a I'ebullition (vapeurs nitreuses de I'attaque du combustible par I'acide nitrique, iode desorbe, composes volatils de certains produits de fission comme RuO4). Des aerosols et les gaz introduits dans le dissolveur pour Vair lift de reprise des sol ides en fond de dissolveur et le « bullage », ainsi que les entrees d'air provenant de la ventilation en surpression de la cellule, completent le flux gazeux sortant de la tete de I'usine. Ce flux ne peut pas etre rejete dans I'atmosphere directement. II est dirige vers un systeme de traitement qui a les fonctions suivantes : -

-

en premier lieu, il s'agit de « depoussierer » les gaz qui entrament toujours un peu de poussiere de combustible ; ceci est realise dans un appareil de tete du systeme par le passage des gaz a travers une nappe tombante de solution nitrique en milieu oxydant (apport d'oxygene gazeux) ; puis il faut « recombiner » les vapeurs nitreuses, c'est-a-dire les retransformer en acide nitrique pour recyclage ; ceci se fait dans un dispositif a condenseur et a colonnes ;

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-

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enfin le traitement vise a « pieger » I'iode, grace a un double dispositif comportant d'une part une colonne a lavage par la soude, et d'autre part, apres passage dans un filtre a haute efficacite, un ultime appareil a absorbant solide (genre sel d'argent).

Le rejet final dans la cheminee de la tete d'usine est evidemment controle en permanence : 11 ne doit rester que I'air de ventilation des procedes, les gaz rares de fission, une petite fraction du tritium sous forme d'eau tritiee, et des traces des autres radioelements volatils dans des limites strictes fixees par les autorisations de rejet. Le krypton 85, principal contributeur de I'activite rejetee (emetteur P mou), et le carbone 14 sont parfois sujets d'inquietude ; mais leur dispersion dans I'atmosphere n'est pas consideree comme un risque sanitaire par les autorites de surete. La recombinaison des vapeurs nitreuses consiste en leur oxydation par I'air et leur absorption par I'eau : 2 NO + O2 -^2 NO2 3 NO2 + H2O -* 2 HNO3 + NO L'iode fait I'objet du traitement le plus severe, bien qu'il ne reste apres plusieurs annees de refroidissement du combustible use qu'un seul isotope radioactif, le 129I, extremement peu actif (emetteur (5 mou de tres longue periode de 16 millions d'annees). Son rejet dans I'atmosphere doit etre tres Iimite selon les autorisations de rejet. On a pense a le pieger entierement sous forme solide, mais les autorites franchises de surete ont prefere jusqu'a maintenant son rejet dans la mer, avec les effluents liquides, car c'est un milieu qui permet a la fois une grande dispersion et une dilution isotopique tres importante par I'iode naturel. L'iode est extrait le plus completement possible au niveau de la dissolution, de fac.on a limiter sa dispersion dans le reste de I'usine. Pour cela, la solution sortant du dissolveur passe dans un appareil complementaire, appele « desorbeur a iode », ou la desorption par ebullition est completee ; I'iode presque totalement extrait est alors envoye vers les etages de piegeage. Le bilan de I'iode ainsi gere aboutit a un rejet dans les effluents liquides (rejetes en mer) d'au moins de 96 %, quelques pour-cents etant recuperes dans les sorbants solides, et le reste se repartit entre les « coques », les « fines » et le rejet gazeux a la cheminee.

5. Le resu I tat des operations de tete On a vu au paragraphe 2 qu'apres cisaillage et dissolution, le combustible traite donne naissance a quatre flux : le flux gazeux est gere en ligne, ce qui vient d'etre decrit au paragraphe 4, les trois autres flux, separes le plus possible a ce niveau, sont par centre transposes vers d'autres ateliers de I'usine, avec passage par des moyens de stockage temporaire. La liqueur, flux noble, est dirigee vers I'extraction U-Pu. Quant aux deux derniers flux, de nature solide, ils deviennent des dechets. Les coques et les embouts, entreposes sous eau dans des conteneurs, seront repris par un atelier de conditionnement qui, a La Hague, precede a leur compactage a haute densite pour en faire des colis type verre actif. Au debut de la mise en service des grandes usines franchises, leur conditionnement se faisait en ligne, par cimentation dans I'atelier de tete (c'est encore la solution retenue au Royaume-Uni). Les fines sont entreposees jusqu'au moment de leur incorporation, a teneur limitee, dans le verre des dechets de tres haute activite provenant de ['extraction.

Cette page est laissée intentionnellement en blanc.

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Operations d'extraction

1. Introduction : le precede PUREX On aborde ici le cceur du retraitement dont il faut d'abord rappeler les objectifs et le precede choisi pour son industrialisation a grande echelle.

1.1. Les objectifs On a vu que le retraitement s'inscrit dans la logique physique du combustible nucleaire, tout en repondantaussi a la logique ecologique, puisqu'il vise I'objectif de la recuperation pour recyclage des matieres nucleaires residuelles du combustible use, ainsi que I'objectif complementaire de la separation pour conditionnement des dechets de « combustion » (produits de fission et actinides mineurs). Ces deux objectifs peuvent etre atteints simultanement par le precede PUREX (plutonium uranium refining by extraction), dont la chimie a ete presentee au chapitre 9.

1.2. Les performances de PUREX PUREX est un precede d'extraction hydrometallurgique, decouvert et mis en ceuvre quand la decision de construire de grandes usines de retraitement a ete prise. C'est un precede relativement ancien qui a vu le jour aux Etats-Unis, puis en Europe, au moment du lancement des grands programmes militaires de production de plutonium : - 1950 : usines de Savannah et Hanford aux Etats-Unis, - 1953 : usine de Windscale (site de Sellafield) au Royaume-Uni, - 1958 : usine de Marcoule en France. On suppose que I'Union sovietique a suivi la meme voie a la meme epoque. PUREX a fait I'objet de recherches et de developpements pratiquement en continu depuis cinquante ans. Ses performances sont aujourd'hui incomparables, sur le plan de la separation des matieres nucleaires vis-a-vis des dechets de « combustion ». Des precedes par « voie seche », visant a eviter la relative complexite et les problemes de criticite de I'extraction liquide-liquide, ont ete imagines et meme essayes en laboratoire, mais il est encore douteux qu'ils puissent atteindre des performances de separation comparables a celles realisees par PUREX, et leur technologic pose detresdifficiles problemes (corrosion, maintenance, dechets par exemple, sans parler de la temperature elevee a laquelle ils doivent fonctionner).

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Le cycle du combustible nucleaire

Quelles sont les performances visees et obtenues en routine industrielle ? II y a tout d'abord le taux de recuperation des matieres nucleaires residuelles. II est exige en particulier de reduire au maximum la perte de plutonium. A La Hague, le taux de recuperation est de 99,88 % pour le plutonium. II y a aussi le niveau de decontamination du plutonium et de I'uranium, contrainte liee au recyclage. Pour ce niveau on introduit la notion de facteur de decontamination, defini comme il suit:

Les FD requis par les organismes industriels internationaux (par exemple UNIREP) sont particulierement severes, par exemple en decontamination (3, y: -

FD U: 1,5x10 6 ; FD Pu : 7 x 107.

PUREX permet de satisfaire ces specifications, mais au prix de plusieurs operations d'extraction, generalement deux pour ['uranium et deux pour le plutonium avec les progres recents realises a La Hague.

1.3. Chimie et hydrodynamique Pour obtenir avec le precede PUREX les performances imposees, deux aspects fondamentaux de ce precede doivent etre maitrises, d'une part les mecanismes chimiques exposes au chapitre 9, d'autre part I'hydrodynamique des phases liquides mises en contact. En effet c'est la combinaison des deux aspects dans le developpement du genie chimique le mieux adapte qui fixe les caracteristiques du procede industriel, en performance mais aussi en capacite et fiabilite. Le transfert de matiere recherche pour I'extraction s'effectue, en fonction des conditions chimiques, a la surface de contact entre les deux phases liquides non miscibles, ce qui demande la realisation d'une emulsion prealable a fines gouttelettes pour avoir la plus grande surface d'echange possible. La phase dispersee est dite « discontinue », et I'autre phase est dite « continue ». Ensuite il faut evidemment avoir une excellente demixtion des deux phases, ou « decantation ». La cinetique des deux phenomenes, chimie et hydrodynamique combinees, a de I'importance pour la capacite d'extraction de I'equipement utilise. Les resultats presentement obtenus sont la conclusion d'une tres importante et tres longue recherche en laboratoires, experimentale et theorique, et aussi d'une experience industrielle de plusieurs dizaines d'annees. On verra in fine qu'ils sont bien interpretes aujourd'hui par la modelisation du procede, en particulier par celle developpee par le CEA.

1.4. La solution d'entree Avant de voir plus en detail la mise en ceuvre de PUREX (structure des cycles d'extraction, operations elementaires, operations annexes, et appareillage), il faut noter les

11 - Operations d'extraction

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caracteristiques moyennes de la solution de dissolution qui est preparee en tete de I'usine (combustible des reacteurs a eau), et qui va done etre soumise a I'extraction : -

-

U : 200 a 250 g L~1 ; Pu : 2 a 3 g L"1 ; PF : 80 % de I'inventaire ; AM: -100%; activite specifique : 7,4 TBq L~1 (200 G L~1) ; acidite nitrique : 3 a 4 M ; etat d'oxydation des actinides : UVI composition :

Puiv

Npv

Am'" et Cmm Remarque. Le Puvi qui peut se former en concurrence dans certaines conditions de dissolution est ajuste avant extraction a I'etat d'oxydation + IV.

2. La conception generale des cycles d'extraction Les operations d'extraction se font selon un enchamement que I'on baptise « cycle » : -

-

on commence par extraire ('element a separer (ou les elements) dans une phase organique (TBP a 30% dans un diluant hydrocarbure), ce qui permet une decontamination vis-a-vis des autres elements de la solution traitee ; puis on reprend dans une phase aqueuse I'element extrait (ou les elements), en exergant une re-extraction (on dit aussi une « desextraction ») ; enfin le solvant est regenere par une operation de traitement solvant en vue de son recyclage en tete du cycle.

C'est la combinaison des trois operations qui constitue un cycle complet d'extraction. Les trois operations principales d'un cycle peuvent etre completees par des operations annexes : operations de « lavage » des flux sortants, ou operations d'ajustage des etats d'oxydation ou encore traitement complementaire du solvant. Bien qu'on puisse envisager d'extraire U et Pu sans separation entre eux (ce qui est parfois recommande pour eviter un detournement vers un usage militaire), les utilisateurs de matieres nucleaires recyclees preferent les recevoir separement. Les operations d'extraction visent done generalement la decontamination et la separation de I'uranium et du plutonium. Mais il y a un choix possible pour arranger ces deux fonctions dans les cycles d'extraction : -

soit les deux elements U et Pu peuvent etre extraits et desextraits simultanement lors d'un premier cycle (en « co-decontamination »), puis etre separes ulterieurement dans un second cycle; - soit U et Pu peuvent etre co-extraits puis desextraits successivement lors du premier cycle, ce qui produit leur separation des cette etape. On parle, selon le cas, de cycle sans (Figure 11.1) ou avec « partition » (Figure 11.2).

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Le cycle du combustible nucleaire

Figure 11.1. Cycle sans separation U-Pu.

Figure 11.2. Cycle avec separation U-Pu.

Le choix de la place de la partition determine la structure des ateliers d'extraction de I'usine. Les deux schemas ont des avantages et des inconvenients, dont I'ingenierie juge ('importance pour un projet donne. La partition au premier cycle par exemple permet de decoupler au plus tot les contraintes de la surete criticite due au plutonium de celles imposees par les flux d'uranium a trailer, et se prete bien a une grande capacite. La partition au second cycle offre I'avantage d'une mise en ceuvre de ['operation delicate de separation U/Pu sur solution « propre » ; cette option offre de plus la possibilite d'economiser un cycle d'extraction, puisque les deux elements U et Pu sont purifies simultanement.

3. La co-extraction uranium et plutonium au premier cycle Quelle que soit la place de la partition dans les cycles de purification, le processus commence toujours par la co-extraction de I'uranium et du plutonium.

11 - Operations d'extraction

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La co-extraction, qui se fait en tete du premier cycle, repose sur la selectivite du TBP entre PF et U-Pu. Pour une bonne mise en ceuvre, on precede dans les conditions suivantes : -

-

rapport des debits O/A eleve (O phase organ ique, A phase aqueuse)/ ajuste de fac.on a procurer une charge U+Pu assez elevee dans le solvant (favorable pour le FD par effet de competition); acidite assez forte (~ 3 M) ; temperature ambiante.

La co-extraction (Figure 11.3) est completee par une operation jointe de lavage du solvant charge U-Pu, faite a contre-courant par une solution nitrique, pour en retirer ies PF plus ou moins extraits par le solvant (ruthenium et zirconium en particulier).

Figure 11.3. Co-extraction U-Pu au premier cycle.

Le lavage est ajuste (acidite et debit aqueux) pour maximiser la desextraction des PF, tout en limitant le reflux U-Pu vers la phase aqueuse.

4. La desextraction selective du plutonium (partition) Soit le solvant charge U-Pu subit en ligne au cours du premier cycle la desextraction selective du plutonium, soit cette operation est reportee au second cycle apres desextraction conjointe U-Pu au premier cycle par une solution aqueuse nitrique faiblement acide. On a deja vu au chapitre 9 que la desextraction selective du plutonium utilise I'oxydoreduction entre le plutonium IV (fortement extractible par le solvant) et le plutonium III (peu extractible par le solvant). L'uranium, qui n'est pas affecte par les conditions reductrices utilisees, reste dans le solvant dont il sera reextrait ulterieurement par une solution aqueuse tres peu acide. Une fois reduit, le plutonium est recueilli par la phase aqueuse circulant a contre-courant. Un « lavage uranium » complementaire, par du solvant « frais » a contre-courant, sert a parfaire la separation (Figure 11.4).

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Le cycle du combustible nucleaire

Figure 11.4. Partition U-Pu.

Diverses reactions reductrices du plutonium peuvent etre envisagees. Dans les usines, on utilise les agents reducteurs suivants : -

le nitrate uraneux U(NO3)4 qui a I'avantage de ne pas introduire un element chimique etranger aux operations d'extraction ;

-

le nitrate d'hydroxylammonium NH3OHNO3 dont la molecule ne comporte que des elements legers et dont ('elimination ne donne pas de « sel » susceptible d'accrottre les dechets.

Le second est plutot reserve aux cycles de purification du plutonium, pour eviter I'uranium. Des reactions parasites d'oxydation Pu'" -» Pu lv ouU lv —> Uvl par I'acide nitreux HNO2 doivent etre controlees. Pour cela le reducteur est toujours « stabilise » par un reactif qui detruit I'acide nitreux. Le stabilisant utilise est le nitrate d'hydrazinium (compose obtenu a partir de I'hydrazine N2H4) : HNO2 + N2H5NO3 -> HNO3 + HN3 + 2 H2O Le technetium est la source de reactions parasites secondaires, le Tcv" detruisant le stabilisant. Pour eviter d'augmenter celui-ci, on precede a un lavage complementaire du solvant (complementaire a celui des produits de fission, ruthenium et zirconium), par une solution plus concentree en acide nitrique.

5. Le traitement du solvant Le solvant est recycle dans les extractions successives, mais il doit conserver ses proprietes. Comme il finit par accumuler des impuretes radioactives et qu'il se degrade, par hydrolyse acide et radiolyse, en donnant des composes phosphoriques acides perturbant les extractions, il est necessaire de lui faire subir un traitement de regeneration. Ce traitement comporte une serie de lavages alcalins et acides, suivie d'une filtration pour eliminer les impuretes.

11 - Operations d'extraction

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6. Les operations annexes 6.1. Le lavage des phases aqueuses par du diluant Pour eliminer des phases aqueuses de I'extraction les traces de TBP, entratne hydrodynamiquement ou dissous (sa soiubilite est tres faible mais non nulle), on met en place un contact de ces phases avec du diluant pur. On peut aussi entramer les traces de TBP par de la vapeur d'eau.

6.2. Le traitement complementaire du solvant Le lavage des phases aqueuses introduit une quantite croissante de diluant dans le procede, ce qui dilue le TBP encore plus et ce qui est corrige par un appoint de solvant. On fait circuler le solvant des cycles les moins agressifs (purification U) vers les cycles les plus agressifs (purification Pu, et ensuite premier cycle). L'excedent de solvant-diluant est preleve en continu au premier cycle ou la degradation est la plus forte, et il est soumis a une regeneration plus parfaite que celle appliquee globalement avec le traitement precedent. A La Hague, le prelevement subit une distillation sous pression reduite, dans un ensemble d'appareiMages dit TEO (traitement effluent organique), ce qui le debarrasse de toutes ses impuretes et separe le TBP du diluant. On reconstitue les deux composants d'origine de I'extractant organique. Cette gestion performante du solvant, introduite dans les dernieres usines franchises, a donne de grands progres dans la « proprete » du procede PUREX. Le meme solvant peut etre recycle pendant de nombreuses annees, sans diminution des performances et avec une production tres reduite d'effluents organiques, qui sont alors aisement destructibles.

6.3. Les cycles de purification uranium et plutonium Les specifications de decontamination vis-a-vis des produits de fission ne peuvent etre satisfaites qu'en completant I'extraction des matieres nucleates par un ou deux cycles dedies a la purification finale. Dans le retraitement avec separation U-Pu au premier cycle, pratique industrielle d'aujourd'hui, les ultimes operations de purification se font sur les flux separes, U d'une part et Pu d'autre part. Uranium. L'operation est simple avec cet element. Generalement il suffit d'appliquer un seul cycle de purification, apres la partition, et la stabilite du nitrate d'uranyle (UVI) permet la re-extraction directement par une solution nitrique diluee (a 50 °C environ). Une concentration est necessaire avant la seconde extraction, mais il n'y pas de probleme de criticite (I'uranium contient moins de 2 % de I'isotope 235). Plutonium. La purification de cet element est plus complexe, a cause de la necessite, une fois qu'il est separe en Pum, de le re-oxyder en Pulv, forme chimique extractible par le TBP. II faut generalement au total trois cycles de decontamination. Deux suffisent a UP2-800. La re-oxydation du plutonium est faite par les oxydes d'azote NO, NO2 agissant par I'intermediaire de I'acide nitreux, qui detruit aussi le stabilisant de I'etat d'oxydation +III : L'exces d'acide nitreux est ensuite detruit par oxydation a I'air.

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Le cycle du combustible nucleaire

Apres une nouvelle extraction par le solvant, la re-extraction aqueuse se fait a nouveau par changement d'etat d'oxydation comme a la partition (mais en utilisant cette fois le nitrate d'hydroxylamine pour ne pas reintroduire d'uranium).

7. Les appareils d'extraction Leur conception doit repondre avant tout aux conditions hydrodynamiques des cycles d'extraction : - melange efficace des phases ; - puis decantation aussi complete que possible. Les qualites attendues sont: -

Pefficacite (performance de I'extraction); la capacite (niveau de production) ; la flexibilite (adaptation aux variations des parametres chimiques, hydrodynamiques et aux perturbations); la stabilite de fonctionnement.

A ces conditions de base s'ajoutent d'une part des contraintes nucleaires (surete de criticite et degradation radioactive du solvant), d'autre part des problemes d'exploitation qui ne doivent pas entrainer de maintenance lourde. En particulier, il faut mattriser les problemes d'encrassement par les fines residuelles de la liqueur de dissolution, et les precipites d'interphase. L'ingenierie des appareils prend enfin en compte le cout d'installation en genie civil et tuyauteries, ainsi que les questions de conduite et d'instrumentation. Un appareil d'extraction est congu pour assurer tout le « travail » de ('operation elementaire du cycle auquel il est dedie : pour cela, il doit comporter le nombre d'etages theoriques necessaires (voir chapitre 9 pour la notion d'etage theorique), environ une dizaine. Le genie chimique applique a I'appareillage de I'extraction a permis de developper deux families d'appareils : -

les extracteurs compartimentes, qui se divisent en « melangeurs-decanteurs » et en « extracteurs centrifuges » ; les extracteurs a geometric continue qui comportent des « colonnes pulsees ».

Pour la premiere famille, I'extraction se fait dans des compartiments distincts de melange et de decantation au niveau de chaque etage. Par contre, pour la seconde famille, ['extraction se fait tout le long d'une colonne, sans separation geometrique du melange et de la decantation pour les differents etages. Dans les deux dispositions, les phases circulent a contre-courant.

7.1. Les melangeurs-decanteurs (M-D) Historiquement, ils ont ete les premiers appareils d'extraction installes dans le retraitement. Un appareil de cette conception comprend un compartiment melangeur avec une turbine d'agitation et un compartiment decanteur, les deux compartiments etant relies directement

11 - Operations d'extraction

117

Figure 11.5. Appareils d'extraction.

entre eux. II represente pratiquement un etage theorique et il faut done constituer une batterie de plusieurs M-D pour faire le travail d'une operation d'extraction (Figure 11.5). Les M-D possedent les qualites de base demandees, mais n'ont pas une geometric adaptee a I'exigence de sous-criticite des solutions riches en matiere fissile (il faudrait des M-D extra-plats), et ils tolerent mal les crasses. En outre, le temps de sejour du solvant se comptant en heures, celui-ci est particulierement expose a la radiolyse. Conclusion : on ecarte generaiement les M-D du premier cycle tres actif, ainsi que des cycles Pu.

7.2. Les extracteurs centrifuges (EC) La pesanteur est une force faible pour exploiter les differences physiques des deux phases non miscibles, notamment leur difference de densite (le diluant permettant d'accroTtre cet ecart et de reduire la viscosite du solvant). Grace a la force centrifuge, I'hydrodynamique devient beaucoup plus favorable, ce que Ton cherche a realiser dans un appareil a compartiments tournants. Les compartiments cylindriques d'un EC sont de taille beaucoup plus faible que ceux d'un M-D, mais ceci est compense par des durees de decantation fortement reduites (quelques secondes). Un extracteur centrifuge peut etre mono- ou multi-etages. II comporte un bol cylindrique compartimente en zones melange et en zones decantation, qui tourne autour d'un axe fixe portant des disques pour faire le melange et la circulation des phases. En somme, la force centrifuge de I'EC, perpendiculaire a I'axe de rotation, joue en plus intense le role de la pesanteur dans les M-D (Figure 11.5).

118

Le cycle du combustible nucleaire

Bien que possedant des avantages tres interessants pour la surete de criticite (geometrie compacte) et la radiolyse (temps de contact tres court) et qu'ayant une capacite suffisante, les EC ont des inconvenients qui les ont souvent ecartes des choix de I'ingenierie. En effet, ('experience acquise par leur emploi dans les premieres usines a montre qu'ils supportent mal les crasses, qu'ils conduisent a un echauffement des phases, et qu'ils exigent une conduite « nerveuse », ainsi qu'une maintenance d'appareil tournant complexe. Les EC trouvent plus particulierement leur place dans les cycles Pu, comme cela a ete decide pour Patelier Pu le plus recent de La Hague, a UP2-800.

7.3. Les colonnes pulsees (CP) Ce type d'appareil permet d'empiler dans une colonne verticale tous les etages necessaires a une operation donnee. II est fait d'un fut cylindrique ou est entretenu le melange des phases, circulant en sens contraire, I'une continue, I'autre dispersee en fines gouttelettes. Aux deux extremites, haute et basse, est disposee une chambre de decantation finale. La phase aqueuse, la plus lourde, est introduite en haut du fut, et la phase organique, la plus legere, I'est en bas. Une pulsation donnee par un systeme a air comprime, qui agit par une jambe inferieure, provoque la dispersion entre les phases, le melange etant favorise par un garnissage adequat du fut (plateaux perfores, plateaux a buses, chicanes de disques et de couronnes...). Pour La Hague, c'est le dernier garnissage qui a ete developpe par le CEA. La partie centrale de la colonne peut etre munie d'un noyau neutrophage pour controler le risque de criticite et, dans ce cas, la colonne offre une geometrie annulaire au melange des phases, ce qui est utile pour avoir une capacite suffisante meme avec un certain enrichissement de la solution a trailer (Figure 11.5). La phase organique sort en tete de la colonne par debordement, et la phase aqueuse est soutiree en pied. En regulant le niveau de I'interphase, grace au debit de soutirage de la phase aqueuse (par air lift), le fonctionnement se fait soit en phase aqueuse continue (interphase en haut), soit en phase organique continue (interphase en bas). Les colonnes pulsees, malgre leur encombrement vertical (8 a 9 m de hauteur), sont souvent choisies pour leurs avantages d'efficacite, de capacite, de temps de sejour du solvant (quelques minutes) et de tolerance des crasses (qui s'accumulent a I'interphase ou elles peuvent etre soutirees). Mais I'absence d'organe mecanique de melange et de circulation, disposition avantageuse pour la maintenance, se paie par une flexibilite limitee et surtout par une difficulte de conduite en comparaison des autres types d'appareil. Par ailleurs, les caracteristiques hydrodynamiques des CP ont tendance a evoluer, par vieillissement du garnissage (passant du caractere hydrophile au caractere hydrophobe par exemple). Le garnissage disques-couronnes est moins sensible a cette evolution. Les usines de La Hague sont equipees des trois types d'extracteur, car i'ingenierie a cherche a tirer profit de leurs caracteristiques specifiques, selon les besoins des differentes operations d'extraction. Cependant les choix ne sont pas strictement identiques pour UP3 et UP2-800, la seconde usine ayant la possibilite d'effectuer la partition soit au premier cycle soit au second cycle et ayant recu tardivement un atelier plutonium de conception toute nouvelle. Par exemple : - pour UP3 : CP pour le 1er cycle et pour la purification du Pu ; M-D pour la partition, la purification U et le traitement du solvant; - pour UP2-800 : differences avec CP pour la partition du premier cycle ; EC pour la purification du Pu.

11 - Operations d'extraction

119

8. La modelisation Les connaissances acquises d'une part par les recherches et experimentations dans les laboratoires du CEA, d'autre part par 1'experience d'exploitation des ateliers d'extraction des usines de COGEMA, ont progressivement donne les moyens d'une modelisation de plus en plus precise et fiable, a la fois pour les mecanismes chimiques et pour les phenomenes hydrodynamiques. Les modeles crees et exploites sous forme informatique sont particulierement precieux a toutes les etapes de la mise en oeuvre de I'extraction industrielle : - pour la conception et I'etude des schemas de procede au moment de I'elaboration des projets ; - pour I'ingenierie des appareils (dimensionnement et fonctionnement); - pour les demonstrations de surete criticite (domaine ou la modelisation est indispensable pour pouvoir etudier les incidents d'exploitation dans leur diversite); - enfin pour la conduite des ateliers d'extraction (aide en cas de dysfonctionnement, et formation des operateurs par simulation). L'extraction liquide-liquide represente, pour le retraitement, le domaine ou I'effort theorique a ete le plus necessaire et le plus developpe avec succes.

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Conditionnement final du plutonium

1. L'objectif L'uranium et le plutonium, une fois extraits et purifies, sont sous forme de nitrate liquide. Le produit fini uranium, celui qui sort des usines de retraitement reste le nitrate d'uranyle. II est concentre par evaporation a 400-450 g L~1 et transported en reservoirs vers des sites de traitement, ou il est generalement transforme en oxyde en vue d'un entreposage de longue duree sous forme U3O8, pour faciliter I'attente avant recyclage, utilisation qui peut etre longtemps differee. Le produit fini plutonium est par centre solide, c'est I'oxyde PuO2 en poudre, car les contraintes de transport et d'entreposage sont plus severes que pour I'uranium. Les usines de retraitement sont done equipees avec un atelier de finition du plutonium relativement important et surtout complexe, notamment sur le plan de la surete et de la protection de la matiere. L'oxyde de plutonium produit doit etre apte au recyclage, et conditionne tres soigneusement. L'entreposage se fait dans I'usine, jusqu'au moment du recyclage, sous le controle international (AIEA ou EURATOM).

2. Le precede La transformation nitrate/oxyde comporte une suite d'operations : -

la precipitation du plutonium sous forme d'oxalate ; la filtration ; la calcination qui donne la poudre d'oxyde ; la concentration des eaux meres oxaliques avec la recuperation du plutonium residuel.

2.1. La precipitation oxalique Le nitrate de plutonium est melange avec I'acide oxalique H2C2O4, a la concentration 0,7 mol L~1 (leger exces), dans un « precipitateur » ou Ton entretient un vortex par un agitateur a entramement externe magnetique. L'oxalate que produit la reaction precipite sous forme Pu(C2O4)2, 6H2O. II faut environ 15 minutes de contact, a 55-60 °C, en presence d'un exces d'acide oxalique et d'acide nitrique 2 M (Figure 12.1).

122

Le cycle du combustible nucleaire

Figure 12.1. Schema de la precipitation oxaiique.

La precipitation oxaiique permet une decontamination supplementaire du plutonium, car I'uranium et certains produits de fission (encore presents a I'etat de traces) restent en solution.

2.2. La filtration Le precipite doit etre ensuite separe des « eaux meres », lave et finalement essore. Les trois traitements sont realises dans un appareil unique qui peut faire appel a differentes technologies. En France on a mis en ceuvre des filtres plats a disque tournant incline, ou des filtres a tambour a axe horizontal (usines de La Hague).

2.3. La calcination La destruction de I'oxalate de plutonium se fait, apres sechage a 250 °C, par calcination a 450 °C :

12 - Conditionnement final du plutonium

123

Les deux operations, sechage et calcination, se font dans un four unique qui comporte un systeme a vis pour le transfert du produit. L'oxyde est obtenu apres un temps de calcination de 15 minutes.

2.4. La concentration des eaux meres oxaliques Cette operation accessoire a pour but de recuperer le plutonium residuel des eaux meres et de detruire I'acide oxalique en exces. On precede a une concentration d'un facteur 100 par ebullition, avec acide nitrique 13M et en presence d'un catalyseur (Mn2+), ce qui donne les deux reactions suivantes :

3. Les caracteristiques du produit fini L'oxyde de plutonium qui sort de I'atelier de finition du plutonium doit avoir des caracteristiques physiques, chimiques et radiochimiques bien precises, pour etre compatible avec le recyclage dans le combustible nucleaire, sans traitement complementaire de la poudre. Les specifications physiques concernent essentiellement la taille des particules et leur surface specifique : -

95 % des particules doivent avoir un diametre inferieur a 44 urn : 100 % des particules doivent avoir un diametre inferieur a 100 urn ; la surface specifique doit etre comprise entre 6 et 24 m2 g~1.

Les specifications chimiques visent la teneur en impuretes non volatiles (apres calcination de 4 heures a 950 °C), impuretes dont la somme doit etre inferieure a 6 000 ug par g de PuO2 (hors americium 241, descendant du plutonium 241). Les specifications radiochimiques ont pour objectif de maintenir I'activite de I'oxyde de plutonium en dessous de valeurs acceptables pour son entreposage et ensuite son recyclage. On fixe : -

la somme de I'activite des PF residuels a moins de 1 uCi g"1 (0,37 105 Bq); la teneur limite en americium a 750 ppm a la sortie de I'usine ; la teneur limite pour les autres emetteurs cc a 5 000 ppm.

4. Le colis de plutonium Une contrainte generale s'applique a tous les elements du « colis plutonium », objet qui est prepare pour le transport hors usine : le respect de la non-criticite par la geometric et la masse. La poudre de PuO2 est tout d'abord disposee dans des petites bottes serties en acier inoxydable, genre bottes de conserve contenant chacune environ 3 kg de plutonium. L'activite pouvant mettre en pression les boTtes, par action sur I'eau residuel le, la teneur en eau est limitee a un maximum de 0,3 %.

124

Le cycle du combustible nucleaire

Figure 12.2. Colis de plutonium.

Les bottes sont empilees par cinq dans un etui ferme par soudure, qui est lui-meme glisse dans un conteneur longiligne a couvercle visse. Pour le transport, on ajoute un emballage plus massif, qui a la forme d'un fut resistant et blinde centre les emissions neutroniques (Figure 12.2). II va de soi que cette matiere nucleaire particuliere est sous strict controle de securite, dans son entreposage et son transport. Le retour du plutonium vers les pays lointains comme le Japon se fait par voie maritime, dans le cadre cooperations sous surveillance tres speciale, et sous le controle des gouvernements concernes.

5. La reprise du PuO2 hors norme Des lots d'oxyde de plutonium, d'origine tres diverse, peuvent ne pas satisfaire les specifications de la fabrication des combustibles au plutonium : - rebuts de la fin plutonium du retraitement ; - lots trop vieillis comportant trop d'americium 241 ; - rebuts de la fabrication du combustible de recyclage dit MOX ; - dechets riches en plutonium recueillis dans des installations le manipulant en grande quantite. La valeur du produit, et les problemes de radioprotection qu'il pose, incite a reprendre les lots hors norme pour les remettre dans le recyclage. Mais la reprise du PuO2 n'est pas facile, car il est pratiquement insoluble dans I'acide nitrique seul. Pour obtenir sa mise en solution nitrique, porte d'entree d'une nouvelle purification, il faut ajouter des ions tres oxydants. Apres bien des efforts de recherche pour mettre au point un precede Industrie!, le CEA a propose un reactif de dissolution utilisant des ions argentiques electrogeneres

72 - Conditionnement final du plutonium

125

(Ag2+), et COGEMA a dote UP3 d'une petite installation pilote, puis I'usine UP2-800 d'une installation d'une capacite de quelques tonnes par an, pour effectuer cette recuperation. L'usine MELOX, fabriquant le combustible MOX, y adresse ses rebuts de fabrication, riches en plutonium. L'electrogeneration des ions argentiques, dans une cellule electrochimique reliee a la cellule d'attaque de I'oxyde de plutonium, permet de recycler le reactif de dissolution, sans consommation d'argent. Le plutonium est oxyde a la valence VI et passe alors dans la solution nitrique. II faut ensuite le ramener a la valence IV pour proceder a une nouvelle extraction de purification ; I'eau oxygenee est utilisee pour cette reduction. Ce precede permet finalement de decoupler le retraitement et la fabrication des combustibles au plutonium, un delai important, si besoin est, pouvant les separer (5 ans et plus).

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13

Controles analytiques et mesures nucleates au retraitement

1. Introduction Le retraitement des combustibles uses, c'est d'abord une suite d'operations chimiques ; I'objectif des controles analytiques sera done, comme dans n'importe quel complexe chimique : -

de caracteriser les produits entrants (notamment les combustibles) et les produits sortants (U, Pu, dechets conditionnes) par rapport a des specifications agreees ;

-

de caracteriser et controler les rejets dans I'environnement (liquides et gazeux) ;

-

de controler, au fur et a mesure de leurs evolutions, les parametres physico-chimiques permettant de s'assurer du bon fonctionnement du procede.

Mais c'est aussi une usine qui vehicule des matieres nucleaires; I'objectif des controles sera done egalement: -

de s'assurer de la permanence de la surete de fonctionnement (par exemple la souscriticite) ;

-

de controler en permanence les niveaux d'irradiation et de contamination dans les locaux (protection du personnel);

-

de controler en permanence la radioactivite ajoutee dans I'environnement;

-

de garantir le suivi des matieres sous controle international (safeguards).

Ce deuxieme aspect implique un ensemble de controles analytiques et mesures physiques assez specifiques a ce type d'activite.

2. L'utilisation de mesures non destructives Afin de supprimer tout contact entre I'operateur (echantillonneur et analyste) et la matiere nucleaire, des methodes de mesures non destructives specifiques ont ete developpees ; si certaines d'entre elles existent dans d'autres industries (pH, conductivite, temperature, etc.), d'autres sont tres specifiques et peuvent etre utilisees soit directement sur I'equipement procede controle, soit sur un echantillon preleve et transporte automatiquement vers un laboratoire.

128

Le cycle du combustible nucleaire

2.1. Les mesures directes sur le precede On profite de ce que les matieres nucleaires emettent des rayonnements detectables pour les mesurer en ligne et controler ainsi : -

la sous-criticite des installations (mesures neutroniques, reseaux de criticite) ; ('evolution quasi instantanee de certains parametres precede (par exemple suivi neutronique des colonnes pulsees pour suivre le « front plutonium ») ; ['absence ou la non-accumulation de matieres nucleaires et fissiles en certains points sensibles du precede.

Les mesures nucleaires generalement utilisees sont basees soit sur la spectrometrie j , soit sur la mesure neutronique qui est generalement passive (on detecte et on compte les neutrons emis) mais peut etre egalement active (on excite par une source neutronique appropriee la matiere a controler et on compte les neutrons reemis apres arret de I'excitation).

2.2. Les mesures indirectes sur prelevements Des systemes de prelevement automatique d'echantillons de solutions dans des cuves ont ete developpes ; ils sont bases sur les moyens suivants : -

des air lifts (elevateurs a air) qui permettent d'amener un echantillon representatif de quelques cm3 dans un « banc-cuve » (un bane de prelevement qui peut se connecter a differentes cuves a controler); - des « cruchons » (petits flacons en plastique) identifies et mis prealablement sous vide qui permettent de recevoir les quelques cm3 preleves ; - un transfer! pneumatique des cruchons remplis pour acheminer I'echantillon jusqu'au laboratoire; - des chames d'analyse en boTtes a gants (eventuellement blindees) pour y effectuer les controles analytiques requis (et reliees au transfert pneumatique precedent); - des methodes analytiques particulieres dont certaines peuvent s'effectuer directement sur le cruchon de prelevement sans qu'il soit necessaire de I'ouvrir. L'ensemble d'une telle sequence peut etre entierement automatise, supprimant ainsi tout contact direct avec la matiere nucleaire, tout en fournissant les informations requises en moins d'une heure.

2.3. Exemples de mesures nucleaires utilisees dans le precede de retraitement 2.3.1. Caracterisation d'un dechet precede solide : les cogues ef embouts II s'agit de quantifier les matieres fissiles encore presentes dans le dechet et etablir sa fiche signaletique en radionucleides (pour I'etablissement du dossier qualite du colis de dechet).

13 - Controles analytiques et mesures nucleaires au retraitement

129

Une methode qui a ete developpee pour I'usine de La Hague fait appel a : -

-

une combinaison de mesures neutroniques actives et passives pour determiner les quantites d'U, Pu et autres actinides presents et de donner une evaluation des isotopes fissiles contenus; une spectrometrie 7 collimatee pour determination de I'activite contenue par tranche verticale.

Le colis a mesurer (contenant les coques et embouts compactes) est dispose sur une table elevatrice tournante, un generateur de neutrons fonctionne par pulse, une batterie de detecteurs a neutrons (detecteurs a 3He) permet de recueillir les neutrons emis, et des detecteurs au Ge hyper-pur permettent d'effectuer I'analyse spectrometrique y. Les informations recueillies permettent apres traitement de determiner les parametres requis. Certains radioelements n'etant pas detectables (certains emetteurs a et emetteurs P purs), on utilise des traceurs ou des spectres types pour en calculer la quantite presente. Environ 80 radioelements (produits de fission, produits d'activation et actinides) doivent etre determines pour satisfaire aux exigences des entites en charge de recevoir et stocker ces dechets.

2.3.2. Verification de /'absence de fuite sur un circuit de refroidissement de cuve PF Compte tenu de la puissance thermique qu'ils emettent, les produits de fission separes et entreposes en cuves sous forme de suspensions doivent etre refroidis en permanence ; on dispose done de serpentins de refroidissement en cuve ou de double enveloppe dont il convient de s'assurer de I'integrite (absence de fuite). Les circuits de refroidissement primaires (qui tournent en rond sur un echangeur, lui-meme refroidi par un circuit secondaire) sont done equipes d'une mesure d'activite y qui permet a tout instant de verifier ('absence d'activite y dans I'eau de refroidissement et done indirectement de s'assurer qu'il n'y a pas de fuite de produits de fission.

2.3.3. Verification de la bonne dissolution du combustible En fin d'etape de dissolution du combustible par I'acide nitrique, il convient de verifier que les quantites de matieres fissiles restantes sont inferieures a un seuil donne qui permet d'effectuer les operations aval tout en garantissant leur sous-criticite. La methode qui a ete miseau point fait appel a une spectrometrie ydu 137Cs restant et d'en deduire la masse du combustible residue! indissous (le 137Cs est en effet un produit de fission abondant et facile a mesurer en spectrometrie y; on compare done la quantite de 137 Cs en fin de dissolution avec celle presente avant dissolution, le rapport des deux donnant alors le rendement de dissolution). En collimatant soigneusement la partie du dissolveur qu'on veut mesurer pour ameliorer le rapport signal/bruit de fond, on peut verifier ainsi que le rendement de dissolution est superieur au seuil fixe ; ce n'est qu'apres cette verification que les automates de conduite peuvent donner I'ordre de poursuivre les operations. L'ensemble est automatique ; neanmoins une validation operateur est requise a reception de I'information « pourcentage d'indissous restant ».

130

Le cycle du combustible nucleaire

3. Les d iff e rents controles Dans une usine de retraitement de combustible use, on classe les controles en fonction de leurs objectifs. Suivi du precede (on parle alors de controle de marche). On trouvera par exemple ('evolution de I'acidite dans les evaporateurs de concentration des produits de fission, ou bien le suivi du front de plutonium dans la phase de separation U/Pu, etc. Controle de la qualite des productions (on parle alors d'analyses recettes pour les clients). On trouvera par exemple la verification de la conformite du nitrate d'uranyle produit aux specifications du convertisseur. Etablissement des bilans des matieres fissiles presentes ou transitant dans les installations. Ces mesures sont d'ailleurs faites egalement par les organismes internationaux de controle (EURATOM et AIEA) au titre du controle des Safeguards (pour eviter le detournement de matieres fissiles). Controle des rejets. Toute installation nucleaire (INB) est soumise a des autorisations de rejets accordes par les ministeres et autres autorites administratives competentes en fonction d'etudes d'impact des activites de I'industriel sur I'environnement et les populations. L'exploitant nucleaire doit controler en permanence que ses rejets sont bien dans les limites des autorisations accordees et en rendre compte aux autorites concernees ; ce controle est d'ailleurs souvent double d'une surveillance continue de I'OPRI (Office de Protection centre les Rayonnements lonisants) : pour les rejets liquides associes au retraitement, on controlera les emetteurs (3y (106Ru, 60 Co, 137Cs, 90Sr, etc.), les emetteurs oc (plutonium et autres actinides) et des isotopes particuliers (tritium, iode, 14C) et un certain nombre de composes chimiques caracteristiques du retraitement (par exemple TBP); - pour les rejets gazeux on controlera les aerosols radioactifs, les produits de fission gazeux (85Kr, 129I, tritium) et des isotopes particuliers (par exemple 14 C); - bien entendu ces controles des rejets sont associes a un controle de I'environnement dans toutes ses composantes (air, eaux, sols, aliments, etc.). Mesures necessaires a la radioprotection du personnel. La plupart de ces controles sont reglementaires. Dans les installations nucleaires franchises, on aura la dosimetrie individuelle (film dosimetre) et operationnelle, des mesures d'irradiation et de contamination dans les salles accessibles au personnel (exploitation et maintenance) et les controles obligatoires en sortie des zones a risques (personnel et materiel). -

Analyses de suivi medical du personnel. Parmi les controles specifiques a I'industrie nucleaire, on trouvera les mesures de spectrometrie sur corps entier, les recherches de radioelements dans les urines et bien entendu des mesures specifiques en cas d'incident de contamination.

4. Les methodes analytiques En sus des methodes habituellement utilisees dans I'industrie (absorption atomique, chromatographie, chalumeau a plasma, fluorescence X, etc.), des methodes specifiques a

13 - Controles analytiques et mesures nucleates au retraitement

131

I'industrie nucleaire ont ete developpees : - spectrometrie y et a utilisees en particulier pour les analyses sur les rejets, les dechets sol ides et autres materiels sortant des zones controlees ; - mesures d'absorption atomique couplees avec une fluorescence X pour les determinations de teneurs en U et Pu en methodes non destructives (tres utilisees pour le suivi du precede) ; - scintillation pour la determination des emetteurs (3 purs (90Sr, 14C, etc.); - chromatographie en phase liquide sur de tres petites quantites de solutions ; - chambres d'ionisation pour mesure de I'activite globale d'un dechet...

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Partie V

Transports nucleates, dechets et effluents du cycle, recyclage

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14

Transports nucleates

1. Les transports du cycle du combustible En France I'activite transport « marchandise » represente environ 4 % du PIB ; 235 milliards de tonnes km sont transporters chaque annee, reparties en : - 30 % pour I'agroalimentaire, - 30 % pour les matieres premieres, - 30 % pour les produits manufactures, - et seulement 5 % pour I'energie. Les « matieres dangereuses » represented 15 millions de colis transported par an ; sur ce nombre, 300 000 concernent des matieres radioactives, soit 2 %. Le transport des radio-isotopes (medecine 60 %, Industrie 30 %, centrales nucleaires 5 %, les laboratoires de recherche 2 %, ANDRA-CSA 3 %) represente a lui seul 200 000 colis par an soit les 2/3. Environ 60 % sont transported par route. La part des matieres du cycle du combustible represente 15 000 colis par an, soit environ 2 000 transports chaque annee ; ceci ne represente done que 0,1 % des matieres dangereuses transporters en France. Enfin, parmi ces 15 000 colis, 750 sont des colis de type B (activite transported elevee, voir § 4) dans lesquels on trouvera les combustibles uses en provenance des centrales, le plutonium, les combustibles MOX (Figure 14.1).

Figure 14.1. Transports dangereux et nucleaires en France.

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Le cycle du combustible nucleaire

Figure 14.2. Matieres radioactives transportees pour le cycle du combustible. Pour avoir des ordres de grandeur des besoins de transport pour la production d'electricite en France, on se rappellera qu'une centrale de 900 MWe produisant de 6 a 8 TWh chaque annee necessite soit 23 000 wagons de charbon, soit 15 petroliers de 100 000 tonnes, soit 6 camions de transport de combustibles uses, et ce chaque annee. La production frangaise d'electricite est d'environ 450 TWh an~1.

2. Les matieres radioactives transportees Le transport des matieres nucleaires s'effectue sur la voie publique; toutes les matieres radioactives sont concernees et tous les modes de transport peuvent etre utilises. Comme beaucoup de transports franchissent les frontieres, des reglementations internationales ont ete edictees, chaque pays se devant ensuite de les appliquer, eventuellement avec des exigences complementaires. En ce qui concerne le cycle du combustible en France (soit environ 2 000 transports par an ; Figure 14.2) : -

-

-

le « yellowcake » arrive generalement au port du Havre en provenance d'Afrique et du Canada ; il est ensuite transports vers I'usine de conversion de Malvesi (Aude) par rail ; I'enrichissement de I'UF6 est fait a Pierrelatte (Drome), d'ou un transport d'une part entre Malvesi et Pierrelatte du produit entrant UF4 et d'autre part, pour les produits sortants, I'U3O8 appauvri vers Bessines (Haute-Vienne) et I'UF6 enrichi vers les usines de fabrication de combustibles (par exemple a Romans dans la Drome); les combustibles neufs sont achemines vers les differents CNPE (Centres nucleaires de production d'electricite) d'EDF (58 reacteurs REP en fonctionnement repartis sur 19 sites) ; le transport des combustibles decharges des centrales est effectue vers La Hague (Manche) par combinaison rail/route ;

74 - Transports nucleaires

-

-

les matieres recyclees quittent La Hague et sont transporters vers Pierrelatt d'uranyle), vers Marcoule (Card) ou vers Cadarache (Bouches-du-Rhone) Pu02 ; les dechets conditionnes, en provenance de I'ensemble de Industrie nucle; envoyes a Soulaines (Aube) pour stockage definitif par I'ANDRA. Ceci ne co I'heure actuelle que les dechets compatibles avec les specifications d'un sto surface et correspond a environ 6 vehicules par jour.

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(nitrate pour le re, sont icerne a kage en

Certains transports ne font que transiter en France : par exemple les combustil les uses allemands qui sont retraites par BNFL en Angleterre sont transported par rai jusqu'a Dunkerque ou ils sont charges sur bateau. En France environ 60 % des matieres nucleaires du cycle sont transporters pa rail, les autres 40 % etant transported par route.

3. La surete des transports Le principe de base est le suivant: la reglementation de surete des transports c msidere qu'un accident est toujours possible et vise a en limiter les consequences. En part :ulier la dose maximale regue par un individu lors d'un accident doit etre inferieure I la dose maximale annuelle autorisee pour un travailleur nucleaire, soit 50 mSv. La valeur de 50 mSv resulte des recommandations de la CIPR 26 ; depuis mai 2000 les recommandations de la CIPR 60 sont applicables en France et la valeur de 50 mSv est reduite a 20 mSv ; les reglementations transport seront done prochainement adaptees a ces nouvelles valeurs qui sont deja utilisees dans la pratique.

On congoit done que la surete des transports reposera avant tout sur des emballages adaptes aux matieres transporters et cone,us de fagon a proteger le public et les travailleurs centre les risques associes aux matieres transporters quelles que soient les conditions (normales ou accidentelles). Ceci conduit en particulier a imposer: - une limitation du debit de dose (0,02 mSv an~1 au niveau de la cabine du conducteur, moins de 2 mSv an~1 a la surface du colis transporte et moins de 0,1 mSv an"1 a 2 m de cette surface) ; - une limitation de la contamination surfacique (moins de 4 Bq cnrr2 en contamination P et Y, moins de 0,4 Bq crrr2 en contamination a) ; - une limitation de la temperature a la surface du colis (85 °C); - un etiquetage du colis en fonction de I'activite transporter et du debit de dose mesure (avec le fameux « trefle ») ; - un suivi radiologique du personnel concerne par les transports. On definit un « indice de transport » IT egal au debit de dose mesure a 1 m de la surface du colis, exprime en millirem (rappel 1 mrem = 0,01 mSv); par exemple si le debit de dose a 1 m est egal a 4 mrem, I'indice transport sera egal a 4 : -

si IT < 10, il n'y a pas de restriction particuliere ;

-

si IT > 10, il doit y avoir utilisation exclusive (un seul expediteur pour le transport);

-

si IT > 200, le transport aerien est interdit.

La reglementation des transports de matieres radioactives depend en France de la DSIN (Direction de la Surete des Installations Nucleaires) ; c'est elle qui delivre les

138

Le cycle du combustible nucleaire

agrements des emballages en prenant en compte, non pas des dispositions specifiques operationnelles, mais les principes de confinement dans toutes les situations. Elle s'interesse a toutes les operations associees : -

a la conception et a la realisation des emballages,

-

aux operations de chargement et dechargement,

-

au transport proprement dit,

-

a Sexploitation et a la maintenance des emballages.

En outre c'est toujours I'expediteur qui est responsable de la surete d'un transport donne (choix de I'emballage, manutention, etablissement de la documentation associee, information des Autorites le cas echeant - c'est le ministere des Transports qui est responsable du declenchement du plan d'urgence en cas d'accident). En complement des risques d'exposition, de contamination, de criticite, de temperature, le concepteur doit egalement prendre en compte la « protection physique », le cas echeant, pour eviter les actes de malveillance, le detournement de matieres sensibles et le vol ou la perte de ces matieres. Le transport etant une ACQ (activite concernee par la qualite) au sens du decret d'aout 1984, I'ensemble de I'activite transports de matieres nucleaires est sous assurance de la qualite. En plus des risques lies a la radioactivite, le transport des matieres sensibles obeit a une classification specifique et depend du haul fonctionnaire de la Defense (HFD). Quatre categories sont definies avec des limites de quantites transporters qui dependent du type de matiere (on y trouve le tritium, le plutonium quelleque soft son isotopie-, I'uranium 235 et233, le lithium 6 et bien entendu les combustibles irradies). A titre d'exemple, un transport de 3 a 400 g de Pu appartiendra a la categorie III, de 400 g a 2 kg a la categorie II et au-dela de 2 kg a la categorie I. A chaque changement de categorie, les protections prises pour eviter vol ou detournement sont plus contraignantes de meme que le secret entourant ces transports (preavis aupres des Autorites competentes, accord prealable de I'Echelon operationnel des transports EOT, escorte, etc.).

En cas d'incident de transport, le transporteur est tenu de le declarer comme pour tout incident survenant dans une INB ; une echelle de gravite a ete mise en place sur le modele de Pechelle INES utilisee internationalement pour les incidents et accidents nucleaires. II existe une banque de donnees de tous les incidents de transport de matieres radioactives. On compte en moyenne une quinzaine d'incidents de transport par an en France ; la plupart sont benins et n'impliquent pas de consequences pour le public ou I'environnement. Quelques incidents ont eu une repercussion dans les medias : -

le naufrage du bateau Montlouis dans la Manche en 1984 (transport d'UF6, tous les conteneurs ont ete recuperes);

-

la contamination des chateaux de transport de combustibles irradies, notamment en provenance d'Allemagne (probleme de proprete et non de surete selon la DSIN franchise) ;

-

le naufrage d'un bateau en Atlantique Nord contenant des sources de 137Cs (environ 9 000 Ci) en 1997;

-

I'incendie d'un camion en Haute-Marne transportant des detecteurs de fumee a I'241 Am ;

-

le deraillement d'un train a Apach (Moselle) transportant des combustibles irradies pour Sellafield (sans consequence) en 1997.

74 - Transports nucleaires

139

Figure 14.3. Exemples de colis nucleaires du cycle du combustible.

4. Les colis Dans la reglementation Transport, on definit le colis comme etant le contenu radioactif conditionne dans son emballage ; ainsi par exemple pour I'UF6 transported dans un conteneur 48Y en acier inoxydable, c'est I'ensemble UF6 + emballage qui est le colis transporte (Figures 14.3 et 14.4).

Figure 14.4. Composantes d'un emballage pour combustible use (exemple TN 12/2).

140

Le cycle du combustible nucleaire

Compte tenu de la surete (voir ci-dessus) un colis devra repondre aux exigences reglementaires suivantes : -

confinement de la matiere (etancheite du conteneur); blindage adapte aux rayonnements emis (7 ou neutrons selon les cas et meme eventuellement les deux a la fois comme pour les combustibles MOX); protection thermique (si degagement de chaleur, exemple les combustibles uses) ; sous-criticite de la matiere transportee ; resistance mecanique des composants ; protection physique, le cas echeant (transport de matieres fissiles) ; programmes d'exploitation et de maintenance materialises sur une fiche descriptive de la vie de I'emballage (les performances du colis doivent etre garanties pendant toute sa duree d'utilisation).

4.1. La classification des colis Les colis sont classes selon le type de matieres transporters (activite totale, activite specifique, forme physico-chimique).

4.1.1. Les colis exemptes (ou exceptes) II y a trois types d'exemption : I'activite specifique du colis est inferieure a 70 Bq g~1 ; la somme des matieres fissiles contenues est inferieure a 15 g ; la contamination superficielle est inferieure a 0,4 Bq crrr2 en (3yet a 0,04 Bq cm~2 en a (ceci ne s'appliquant qu'aux SCO - superficially contaminated object). En pratique, on exempte si l'« activite transport» est inferieure a 10~3 A1 ou A2 pour les solides ou les gaz et inferieure a 10"4 A2 pour les liquides (voir infra pour les definitions de A1 et A2 qui sont des activites definies pour chaque type de radionucleide par la reglementation Internationale).

-

4.1.2. Les colis industriels Ms sont de type IP1, IP2, IP3, lorsque la matiere transportee est de faible activite specifique (typiquement moins de 10^4 A2 g"1 ou 2 10~3 A2 g-1), ce qui signifie que les consequences radiologiques d'un accident ne sont pas significatives. Exemples de matieres transporters en colis industriel : le mineral et les concentres d'uranium, les concentres d'UF6 (naturel), les combustibles neufs, les dechets en colis homogene, etc.

4.1.3. Les colis de type A L'activite totale transportee est limitee a A2 (ou A1 si la source est non dispersable, type source scellee). Ce colis n'est pas tenu de resister en cas d'accident mais il ne doit alors pas entramer de consequences inacceptables (< 50 mSv). Exemples de matieres transportees en colis type A : des residus non homogenes (colis de dechets), des sources seel lees (par exemple une source de 60Co inferieure ou egale a 400 GBq).

14 - Transports nucleates

141

4.1.4. Les co/is de type B L'activite totale transported est superieure a A2 : il s'agira des combustibles uses, des transports de plutonium, de combustibles MOX, de residus de haute activite, de sources medicales de radiotherapie, de sources industrielles de gammagraphie (4 000 GBq d/192lr), etc. Un nouveau type C va bientot voir le jour; il concernera les transports aeriens (derniere publication de I'AIEA). IP1, 1P2, IP3 (industrial packagings) sont les appellations correspondant aux activites transporters LSAI, LSA2, LSA3 (low specific activity). Ainsi par exemple, on trouvera dans LSA1 toutes les matieres pour lesquelles le A2 est illimite (uranium naturel, thorium, etc.) et on trouvera dans le LSA3 les matieres emprisonnees dans des Hants (c'est le cas des dechets enrobes dans du bitume, de la resine ou du ciment). A1, A2 sont des valeurs d'activite definies pour chaque radionucleide par la reglementation Internationale transport. Son calcul, donne dans les guides de I'AIEA, fait appel a tous les modes d'exposition possibles apres un accident et represente la valeur maximale de I'activite du radionucleide pouvant entramer une dose corps entier egale a 50 mSv pour un individu restant expose pendant une demi-heure a 1 m du colis detruit. Les valeurs de A1 et A2 sont evidemment d'autant plus faibles que le radionucleide est plus nocif. Le A1 s'applique pour une source non dispersable (exposition externe seulement) alors que le A2 s'applique si une possibilite de contamination existe egalement; A2 est done au plus egal a A T . Exemple. Une source scellee de 60Co aura un A1 egal a 106 LAI (limite annuelle d'incorporation, qui est la dose effective engagee, soit 20 mSv pour les travailleurs du nucleaire et 1 mSv pour le public) : ceci correspondra a une source de 400 GBq. Exemple. Une source de plutonium aura un A1 de 2 TBq et un A2 de 0,2 GBq (soit de 5 a 20 mg selon I'isotopie), la grande difference ici entre les valeurs A1 et A2 traduit le fait que le plutonium n'est que peu dangereux en irradiation mais I'est beaucoup en contamination. Dans le cas d'un melange d'isotopes, le A2 du melange sera egal a 1/ZF(i)/A2(i)), f(i) etant la fraction d'activite du radionucleide i dans le melange.

4.2. Le colis et les epreuves reglementaires Tout colis est soumis a des epreuves mecaniques et thermiques reglementaires representatives des conditions de transport et situations accidentelles previsibles ; ces epreuves qualificatives sont necessaires pour obtenir I'agrement du colis et sont generalement effectuees sur un prototype. Pour les colis Industrie! et de type A, les epreuves incluent: -

une aspersion d'eau pendant 1 h ; une chute libre de 0,3 a 1,2 m sur une surface indeformable ; un gerbage correspondant a 5 fois la masse du colis ; la penetration d'une barre de 6 kg lachee d'une hauteur de 1 m.

Dans tous ces cas, on doit montrer qu'il n'y a pas perte du contenu et que I'augmentation du debit de dose superficiel est inferieur a 20 %. En outre, on doit montrer que la destruction du colis n'entrame pas de risque de dose superieure a 50 mSv pour le public et les travailleurs. Pour les colis de type B les memes epreuves doivent induire un taux de relachement inferieur a 10~6 A2 h~1.

142

Le cycle du combustible nucleaire '

En complement pour les colis B des epreuves supplementaires sont requises pour simuler les conditions accidentelles : -

chute libre de 9 m sur une surface indeformable ; chute sur un objet perforant d'une hauteur de 1 m ; feu a 800 °C pendant une demi-heure ; immersion a 15 m de profondeur pendant 8 h (pour les combustibles uses, il y a en plus immersion a 200 m sans rupture de confinement).

Dans tous les cas, le relachement d'activite doit etre inferieur a 10~6A2 h"1 et le debit de dose doit rester inferieur a 10 mSv rr1 a 1 m.

5. Les modes de transport Tous les modes de transport sont acceptables, air, mer, rail, route. Le groupe COGEMA possede une filiale specialised dans les transports nucleaires, la societe Transnucleaire, qui est une des premieres entreprises mondiales dans ce secteur. Outre son activite de transporteur nucleaire, cette societe congoit et realise les emballages specifiques de ce genre de matieres. Transnucleaire a un reseau de fiMales dans les grands pays nucleaires (Etats-Unis, Japon, Allemagne, Belgique, Royaume-Uni, Espagne, Canada), ce qui lui permet d'etre presente dans le monde entier.

6. La reglementation applicable aux transports Une reglementation internationale, creee a I'initiative de I'ONU, encadre les activites de transport de matieres dangereuses notamment transfrontieres : 13 classes de matieres ont ete recensees, la classe 7 concernant les matieres radioactives. Des recommandations tres precises publiees par I'AIEA (Safety Series n° 6) a la demande de I'ONU sont a la base de la reglementation internationale du transport des matieres radioactives (1 re edition en 1961, on en est a la 5 e ). L'AIEA s'appuie sur les recommandations de la CIPR relatives aux doses d'exposition maximale annuelle retenue pour le public et les travailleurs. L'Union europeenne a fait siennes les recommandations de I'AIEA, I'application etant du ressort d'EURATOM, de la DC VII /Direction des Transports, et de la DC XVII /Direction de I'Energie, section Transport de matieres radioactives. Les reglementations applicables sont: -

I'ADR pour les transports routiers ; le RID pour les transports par rail ;

-

le code IMDG pour les transports maritimes (International Maritime Dangerous Good) et ADNR pour le transport par voie fluviale ;

-

les instructions techniques de I'OACI (Organisation de I'aviation civile internationale) pour les transports par air ;

-

celles de I'Union Postale Universelle pour les colis envoyes par la poste.

La France adhere a tous ces reglements internationaux.

14 - Transports nucleates

143

En France, jusqu'au 12 juin 1997, I'autorite competente pour la surete du transport des matieres radioactives etait le ministere des Transports. Depuis cette date, c'est la DSIN (Direction de la Surete des Installations Nucleates) qui assure ce role : - elle participe a ['elaboration de la reglementation nationale ; - elle met en oeuvre et controle la bonne application de cette reglementation (en particulier par des inspections, 64 en 1999); - elle organise ('information du public. Son champ de responsabilite inclut les agrements d'emballages, les approbations d'expeditions, les accords ou agrements multilateraux (91 certificats delivres en 1999). En cas d'accident pendant le transport, s'il y a necessite de declencher un PPI (plan particulier d'intervention), cela reste de la responsabilite du prefet (territorial ou maritime) comme dans les INB ; on I'appelle PSSA"MR (plan de secours specialise pour transport de matieres radioactives). L'assurance est obligatoire pour les exploitants de societes de transport, jusqu'a un maximum de 300 millions de DTS (Droits de Tirages Speciaux, 1 DTS est a peu pres equivalent a 1 dollar); au-dela, c'est I'Etat qui est en charge (conventions de Paris, Vienne et Bruxelles).

Cette page est laissée intentionnellement en blanc.

15

Aspects d'ensemble des dechets et effluents du cycle

1. Generalites Comme pour toute activite industrielle, ('Industrie nucleaire produit des dechets solides et rejette des effluents liquides etgazeux. Leur caracteristique principale est bien entendu liee a leur radioactivite; pour simplifier on retiendra que leur radioactivite est elle-meme caracterisee par deux grandeurs qu'il faut eviter de confondre : -

I'activite exprimee en Bq (becquerels, un Bq correspondant a une disintegration par seconde); la nocivite (on dit souvent radiotoxicite) qu'on peut exprimer en Sv (sieverts, un Sv correspondant a la dose engagee dans un organisme expose a un rayonnement d'energie de 1 joule par kilogramme avec un facteur de qualite de I)1.

L'activite est directement liee a la periode radioactive du ou des radioelements considered : plus sa periode est courte et plus son activite est grande (mais I'element durera moins longtemps) et inversement plus sa periode est longue et plus son activite est faible. La nocivite depend du type de rayonnement emis et de I'energie associee ; les rayonnements peuvent etre a, P, y / et neutrons (le rayonnement y etant souvent associe aux autres) et leur energie varie de quelques eV (electrons-volts) a des dizaines de MeV (millions d'electrons-volts). Rappels Le becquerel est I'unite legale qui a remplace I'ancienne unite, le curie (Ci) : 1 Ci = 37 GBq. Le becquerel etant une tres petite unite, on utilise ses multiples, MBq (mega), GBq (giga), TBq (tera). Quelques ordres de grandeur d'activite naturelle : -

la croute terrestre : 2 000 Bq kg"1 ;

-

le corps humain : 100 Bq kg~1 (essentiellement effet du potassium 40);

-

le lait 80 : Bq L~1 ;

-

I'eau demer: 12 Bq L~1.

Le gray est I'unite de dose exprimee en joule par kilogramme. Le sievert est I'unite legale de dose efficace qui a remplace I'ancienne unite, le rem (Roentgen equivalent man) : 1 Sv = 100 Rem ; cette unite derivee du gray prend en compte la qualite du rayonnement et la sensibilite des differents tissus vivants. Le sievert etant une tres grande unite, on utilise ses sousmultiples : mSv (milli), |aSv (micro). 1. Cette notion est definie dans d'autres cours du GA, a parattre.

146

Le cycle du combustible nucleaire Quelques ordres de grandeur de doses naturelles et artificielles : - dose naturelle moyenne en France : 2,4 mSv an"1 (sources cosmiques, croute terrestre, radon...); - une radio pulmonaire : 1 mSv ; une radio dentaire : 0,2 mSv ; - un aller et retour Paris-New York en avion : 0,02 mSv ; - impact annuel local des rejets liquides et gazeux de I'usine COGEMA de La Hague : 0,02 mSv . Facteur de qualite : pour passer de I'energie regue par un organisme expose aux rayonnements a la dose engagee dans I'organisme (c'est-a-dire pour passer des grays aux sieverts), on introduit un facteur multiplicatif, dit facteur de qualite, selon le type de rayonnements ; ce facteur est de 1 pour les electrons et photons (rayonnements (3 et y), de 20 pour les particules a (noyaux d'helium) et varie entre 5 et 20 pour les neutrons selon leur energie ; la nature du tissu vivant introduit aussi un facteur supplemental. Attention ! Le Systeme international d'unites (SI) fixe des regies d'ecriture qui sont trop souvent ignorees. Les noms des unites, meme constitutes par des noms de savants, sont grammaticalement des noms communs, et leur premiere lettre est une minuscule. Ms prennent generalement un s au pluriel (ex. becquerels). Exception le degre Celsius. Par centre les symboles des unites, s'ils sont derives de noms propres, ont leur premiere lettre en majuscule. On ecrit par exemple 10 Bq pour une dizaine de becquerels, et 5 m pour une longueur de 5 metres.

Pour plus de 99 %, la radioactivite generee par I'industrie nucleaire se retrouve dans les combustibles uses : elle est done confinee (voir chapitres 6 et 7). Lorsqu'on pratique le cycle ouvert (pas de retraitement), le combustible use constitue la structure des dechets : le depot des combustibles, transitoire ou definitif, possede la radioactivite maximale (produits de fission et d'activation, uranium, plutonium et actinides mineurs) et on comprend la difficulte de mettre au point un type de confinement acceptable et accepte pour un stockage definitif. Lorsqu'on pratique le cycle ferme (retraitement et recyclage), des conditionnements specifiques et adaptes sont pratiques sur les matieres separees : c'est en particulier le cas pour les produits de fission et les actinides mineurs qui sont incorpores dans une matrice de verre dont la tenue a tres long terme peut etre garantie. 2. La classification des dechets solides nucleaires en France La reglementation frangaise distingue quatre principaux types de dechets selon leur activite et nocivite : - Les dechets A de faible et moyenne activite, contenant essentiellement des radionucleides a vie courte. Ces dechets sont conditionnes en ligne avec leur production (en general par le producteur), sont pris en charge par I'ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Dechets Radioactifs) et stockes en surface (actuellement au CSA, Centre de stockage de I'Aube) ou ils seront surveilles pendant une periode de 300 ans. - Les dechets B de moyenne activite, contenant en particulier des radionucleides a vie longue (actinides emetteurs a et produits de fission a vie longue). Ces dechets sont conditionnes par les producteurs, entreposes dans des installations d'entreposage agreees et normalement destines au stockage en profondeur. - Les dechets C de haute et tres haute activite, a forte puissance thermique residuelle, et normalement destines au stockage profond. En France seuls les dechets vitrifies rentrent aujourd'hui dans la categoric des dechets C (et demain peut-etre les combustibles uses non retraites).

15 - Aspects d'ensemble des dechets et effluent du cycle -

147

Les dechets TFA de tres faible activite (typiquement moins de 10 Bq g^1) produits par ('Industrie nucleaire, mais aussi par certaines industries « classiques »(residus de terres rares, Industrie horlogere, paratonnerres, detecteurs de fumee, etc.) qui, moyennant des etudes appropriees, peuvent etre soit recycles hors de I'industrie nucleaire, soit stockes dans des decharges specifiques (projet en cours, un centre de stockage specialise devrait ouvrir en France prochainement).

En outre certains dechets n'entrant pas dans ces categories peuvent avoir des gestions specifiques existantes ou a creer: c'est le cas des dechets trities, des dechets de graphite issus des anciens reacteurs UNGG frangais, et des residus miniers produits sur le sol frangais. En France les dechets C (verres) represented en volume environ 2 % des dechets nucleates actuellement produits mais contiennent plus de 97 % de Tactivite (3y. Les dechets B compactes represented en volume environ 4 % des dechets nucleaires et moins de 3 % de I'activite : I'essentiei provient des dechets de structure des assemblages irradies. Les dechets A represented en volume, apres conditionnement, plus de 90 % des dechets nucleaires et moins de 0,1 %de I'activite : I'essentiei provient des dechets d'intervention dans les INB (moins de 20 000 tonnes par an). On entend par vie courte pour les elements contenus dans les dechets A une « vie » caracterisee par des periodes de decroissance radioactive inferieures ou egales a 30 ans. Quant aux dechets TFA, ils representent aujourd'hui des quantites minimes ; faute de filieres agreees, ils ne sont pas encore classes comme tels ou ils sont confondus avec les dechets A. On considere que I'essentiei des dechets TFA sera produit lors des operations de demantelement. Les appellations dechets A, B, C, sont franchises ; dans les publications Internationales, on parle de dechets LLW (low level waste), ILW (intermediate level waste) ou TRU waste (transuranides), et HLW (high level waste); les limites entre les diverses categories peuvent d'ailleurs varier d'un pays a I'autre. La frontiere entre les dechets B et les dechets C n'est pas nette ; en principe les dechets B ne doivent pas avoir de puissance thermique residuelle significative (quelques watts par colis tout au plus); par comparaison un colis de verre sortant des installations de vitrification de La Hague aura une puissance thermique residuelle de 2 kW environ. Pour les dechets de surface stockes en France, deux types de conditionnement sont pratiques conformement aux regies ANDRA : - le conditionnement par blocage, generalement par du ciment: ces dechets sont alors stockes dans des ouvrages cimentes au CSA; ils correspondent aux dechets les moins actifs (moins de 185 Bq g"1 en emetteurs a et moins de 37 kBq g~1 en emetteurs (3 a vie courte); - le conditionnement par enrobage dans une matrice, generalement en ciment ou en resine : ces dechets sont alors stockes en ouvrages gravillonnes ; I'ANDRA accepte une activite maximale de 3,7 kBq g~1 en emetteurs a et une activite (3 variable en fonction de la periode du radioelement et de sa radiotoxicite. Compte tenu des activites admissibles dans ce stockage, on comprend qu'a I'issue de la periode de surveillance (en principe 300 ans) la radioactivite residuelle (3 sera pratiquement nulle et la radioactivite a pas plus elevee qu'un granite naturel un peu riche en uranium (un granite moyen a une radioactivite naturelle a de 300 Bq kg"1 et une roche a 0,1 % d'uranium une activite de 12 000 Bq kg~1) ; il est d'ailleurs envisage qu'un tel stockage soit declasse a Tissue de cette periode.

3. Les types de dechets produits a chaque etape du cycle Chaque etape du cycle produit des dechets ; une difference essentielle entre I'amont et I'aval du cycle reside dans le fait que toutes les etapes de I'amont du cycle ne generent pas

148

Le cycle du combustible nucleaire

de radioactivite nouvelle : tous les dechets de I'amont ne contiennent que de I'activite naturelle provenant essentiellement de ['uranium et de ses descendants; on comprend done que les etapes de I'amont ne produiront au pire que des dechets A. Pour I'aval du cycle c'est different: le combustible en reacteurs a subi un bombardement neutronique qui a cree des produits de fission, des produits d'activation (certains elements dans les materiaux du reacteur ont absorbes des neutrons et se sont transformed en isotopes radioactifs) et des actinides artificiels, uranium 236 et transuraniens (egalement par absorptions neutroniques successives qui transforment I'uranium en neptunium, le neptunium en plutonium, le plutonium en americium, I'americium en curium, etc., chacun de ces elements obeissant ensuite aux lois de decroissance radioactive). On a done cree beaucoup de radioactivite artificielle et le niveau d'activite et de nocivite fait qu'on produira des dechets de type B et C dans les activites de I'aval du cycle (Figure 15.1).

Figure 15.1. Types de dechets solides a chaque etape du cycle du combustible.

3.1. Les dechets miniers et les dechets de I'amont du cycle En France la derniere mine d'uranium, celle de Jouac (Haute-Vienne), a ferme en 2001. Mais dans les annees 1970, la France etait le 4e producteur mondial d'uranium, avec plusieurs divisions minieres (Limousin, Forez, Vendee, Herault). Ce qu'on appelle dechets miniers recouvre en fait deux produits differents : -

-

les steriles, c'est-a-dire la quantite de terre ou roches qu'il faut deplacer pour atteindre les zones de minerai; par definition ces steriles n'ont que tres peu de radioactivite et sont en general utilises pour remblayer les galeries souterraines ou les carrieres ; ces produits ne posent pas de probleme particulier; les residus du traitement de minerais (en general des produits fins et divises d'une granulometrie de quelques centaines de um); ces produits contiennent la quasi-totalite de la radioactivite naturelle du minerai extrait, sauf celle de I'uranium separe, c'est-adire celle du radium 226 et ses descendants et notamment le radon 222 gazeux. Ces

15 - Aspects d'ensemble des dechets et effluent du cycle

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residus sont en general entreposes dans des bassins specialement amenages; en fin d'activite de la mine, I'abandon pur et simple de ces residus, qui se pratiquait dans le passe, n'est plus considere comme acceptable aujourd'hui, compte tenu du risque reel ou suppose de degagement du radon. Actuellement I'industriel doit proposer un plan de rehabilitation du site minier qui inclut le devenir de ces residus. Les solutions actuelles consistent soit a mettre une « couverture » sur ces residus par membrane impermeable recouverte de plusieurs couches vegetales de fagon a pieger le radon a I'interieur des residus (comme il ne peut migrer et que sa periode radioactive est de 3,7 jours, il se transforme jusqu'au bout de la chame radioactive, le plomb 206 stable, sur place), soit a remettre ces residus dans la carriere dont ils sont issus, puis a les recouvrir d'une epaisseur d'eau qui joue le meme role de piegeage du radon sur place (voir chapitre 3). Les quantites de residus miniers sont tres variables selon la teneur en uranium du mineral exploite ; en France ou les teneurs etaient de I'ordre de 0,2 a 0,4 % et ou on a extrait plus de 100 000 tonnes d'uranium sur plus de 40 ans, la quantite de residus miniers est estimee a 30-40 millions de tonnes ; la plupartsont maintenantgeresde maniere satisfaisante dans les sites miniers et font I'objet d'une surveillance. Comme on I'a vu au chapitre 3, la production mondiale d'uranium est actuellement de I'ordre de 30 000 tonnes ; la grande majorite est produite a partir des minerals riches et tres riches du Canada et de I'Australie (ou des teneurs de plus de 10 % sont courantes). II en resulte des quantites de residus plus faibles a production egale, mais aussi des teneurs en radium plus fortes ; les degagements de radon sont done potentiellement plus importants. Les sites d'extraction d'uranium a partir de minerai frangais (maintenant fermes) etaient situes a I'Escarpiere (Vendee), a Bessines (Haute-Vienne), a Lodeve (Herault) et a Gueugnon (Saone-et-Loire); la derniere usine francaise etait situee a Jouac dans le Limousin (fermee en 2001). Le radon lui-meme n'est pas reellement radiotoxique, mais certains descendants, tous a vie courte ou tres courte, sont des emetteurs a avec emission associee y puissante (par exemple le polonium 210); si on respire un air contenant du radon, ce dernier va partiellement decrottre radioactivement dans les poumons et, si lui est exhale, ses descendants solides restent dans les poumons, pouvant occasionner des lesions. En France, une concentration en radon dans I'air de 400 Bq m~3 est considered comme acceptable, le seuil d'alerte etant a 1 000 Bq m~3. Le reste de I'amont du cycle ne produit que tres peu de dechets (la conversion pratiquement pas et I'enrichissement n'en produit que si Ton considere I'uranium appauvri comme un dechet, ce qui n'est pas le cas actuellement puisqu'on I'entrepose pour une longue duree sous forme d'U3O8 stable (entreposage de Bessines).

3.2. Les dechets generes par les reacteurs nucleaires I/exploitation normale des reacteurs ne produit que tres peu de dechets solides : - Quelques dechets « precedes » toujours de type A sont generes par ('exploitation, par exemple les resines echangeuses d'ions utilisees dans le traitement de leau : ceci ne represente que quelques m3 de dechets par tranche et par an ; les resines sont soit enrobees dans une matrice de resine thermodurcissable, soit incinerees et les cendres en resultant sont cimentees. - Des dechets « technologiques » de type A sont dus aux interventions et a la maintenance : EDF a fait de gros efforts pour en reduire la quantite et produit

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Le cycle du combustible nucleaire actuellement moins de 100 m3 de dechets par tranche et par an centre environ 400 m3 il y a seulement 10 ans.

Quelques dechets B peuvent etre produits lors d'operations particulieres (remplacement de grappes de commande par exemple); d'autres necessitent un temps de decroissance de quelques annees pour que les produits d'activation a vie courte aient suffisamment decrus pour pouvoir etre conditionnes comme dechets A. Le concept de reacteur propre qui impose le confinement strict de la radioactivite considerable generee dans le combustible, grace a la barriere de la gaine, a I'avantage de transferer presque integralement cette radioactivite artificielle vers I'aval du cycle (a plus de 99%). L'electricien nucleaire garde la responsabilite de la gestion des dechets tres actifs pieges dans son combustible use, et I'industriel qui assure le service de Paval du cycle ne devient pas un producteur de dechets nucleaires stricto sensu. 3.3. Dechets de I'aval du cycle La protection de la premiere barriere, c'est-a-dire celle de la gaine du combustible, continue pendant le refroidissement du combustible use et peut durer de nombreuses annees, eventuellement plusieurs decennies. Dans la gestion sans retraitement, le combustible use devient ('unique forme de dechet de I'aval. C'est alors un dechet C dont le conditionnement lointain a pour but de prolonger le plus longtemps possible I'integrite de la gaine. Le conteneurage tres resistant qui serait realise pour ce faire pourrait representer, selon les etudes disponibles en Suede ou aux Etats-Unis, un volume global de 6 m3 par TWh d'electricite produite. Par centre dans la gestion avec retraitement, la barriere de la gaine est detruite des que Ton met le precede en ceuvre, et les dechets du combustible sont liberes, pour etre ensuite collectes dans differents flux de sortie : - PF gazeux ; - PF liquides et « fines » ; - Debris de structure (coques et embouts) ; - Flux secondaires lies au traitement des liquides ou a la contamination des equipements. Les differents flux ont leur propre conditionnement, qui est par suite diversified et adapte a leur nature (colis A, B, ou C). Le chapitre 16 presente de fagon detaillee le conditionnement des dechets de retraitement. 4. Quantite de dechets solides produits par I'industrie nucleaire Les quantites de dechets qui suivent correspondent a la production annuelle d'un reacteur nucleaire electrogene de 1 000 MWe produisant de 6 a 8 TWh chaque annee ; ces quantites sont exprimees en m3 de dechets conditionnes. - dechets et residus de traitement de mineral : 5 000 a 50 000 m3 selon la teneur en uranium ; - conversion et enrichissement: moins de 1 m3 de dechets A ; - fabrication du combustible : 2 m3 de dechets A (hors MOX);

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reacteur: moins de 100 m3 de dechets A ; retraitement: 2,5 m3 de dechets C (les verres) + 5 m3 de dechets B (les structures) + 12 m3 de dechets A ; non-retraitement (cycle ouvert) : 40 m3 de dechets C (les combustibles). Quelques chiffres des Production de dechets en France : - 180 millions de tonnes par an, soil 3 tonnes par an et par habitant; - dont 1 700 kg de dechets inertes, 700 kg de dechets industriels banals et 500 kg de dechets menagers, le restant, soil 100 kg par an et par habitant, etant des dechets toxiques; - parmi ces 100 kg de dechets toxiques, moins de 1 kg sont des dechets nucleaires ; - les dechets nucleaires de tous types (A, B, et C) represented done 0,03 % des dechets francais; - parmi les dechets nucleaires, les dechets C sont les seuls veritablement « serieux » ; - chaque Francais, consommateur d'electricite d'origine nucleaire, « produit » quelques grammes de dechets nucleaires de haute activite chaque annee. Comparaison de dechets produits entre plusieurs types de centrales electriques d'une capacite de 1 000 MWe (production annuelle) : - une centrale au charbon produit 350 000 tonnes de cendres, 6 000 tonnes de poussieres, et 7 millions de tonnes de CO2 (+ environ 20 000 tonnes de vapeurs nitreuses et 40 000 tonnes de SO 2 ); - une centrale au gaz produit 3,6 millions de tonnes de CO2 (et des quantites non negligeables de SO2 et Nox); - une centrale nucleaire produit 2,5 m3 de verres, 5 m3 de dechets de longue vie et 120 m de dechets A dont la radiotoxicite aura disparu en moins de 300 ans... et pas de CO2... La fabrication du combustible MOX, puisqu'il contient du plutonium, conduit a la production de dechets pollues en emetteurs a; une partie de ces dechets sont done des dechets B. Dans I'etat actuel de la technologic, ceci revient a generer environ 10 % des dechets B supplementaires par rapport a ceux produits par le retraitement.

5. Les dechets de demantelement des INB En fin de vie, les installations nucleaires doivent reglementairement entrer dans une phase de demantelement (on dit aussi de « deconstruction »). Ses couts en sont d'ailleurs provisionnes tout au long de la periode d'exploitation ; ainsi, au cas ou I'industriel viendrait a disparattre, I'Etat, avec les fonds constitues, pourrait prendre en charge les operations de demantelement sans que cela coute au contribuable. Trois niveaux de demantelement ont ete definis par I'AIEA (1982) : - Le niveau 1 correspond a ('elimination de I'activite residuelle par des operations relativement classiques de ringages, nettoyages, et demontage des equipements les plus actifs : il y a alors production de dechets de type A (surtout) et B (un peu); - Le niveau 2 correspond aux operations de decontamination de ('ensemble de I'INB jusqu'a la rendre apte a une autre utilisation dans le nucleaire : il y a alors production de dechets A et TFA (surtout); - Le niveau 3 correspond a un site entierement deconstruit et rendu au public : il y a alors production de dechets TFA (un peu) et banals (surtout). Les etudes faites par les differents acteurs de Industrie nucleaire (en particulier pour definir le montant des provisions a constituer annee apres annee) montrent que :

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Le cycle du combustible nucleaire

pour atteindre le niveau 1, une moyenne de 5 ans d'operations sont necessaires apres la cessation d'activite et, pour I'ensemble du pare nucleaire frangais, ceci produirait quelques milliers de tonnes de dechets (surtout A) ; pour atteindre le niveau 2, une moyenne de 25 annees apres I'atteinte du niveau 1 apparaissent necessaires et, pour I'ensemble du pare nucleaire frangais, ceci produirait de I'ordre de 5 millions de tonnes de dechets essentiellement TFA ; pour atteindre le niveau 3, il faut compter une moyenne de 30 annees supplementaires apres I'atteinte du niveau 2 et, toujours pour I'ensemble du pare actuel nucleaire frangais, ceci produirait environ 80 millions de tonnes de dechets pour I'essentiel inertes (dechets banals).

Les delais d'attente pour passer aux niveaux 2 et 3 sont fixes par la desactivation de materiaux de structure, de maniere a faciliter les travaux de rehabilitation ou de deconstruction. Ceci reduit les couts, meme si les frais de gardiennage et maintenance durent plus longtemps. Pour les premieres installations arretees en France, les autorites de surete demandent de reduire les delais, et c'est particulierement justifie pour un site comme Brennilis en Bretagne qui n'a plus aucune installation nucleaire en activite (le reacteur EL4 y est arrete depuis 1985). Dans ces totaux, les quantites de dechets de demantelement en provenance des reacteurs represented environ 60 % des dechets produits, les usines du cycle environ 35 % et les divers moins de 5 %.

6. L'ANDRA L'ANDRA (Agence Nationale pour la gestion des Dechets Radioactifs) est en France chargee : -

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de la gestion du centre de stockage des dechets de surface, le CSA de Soulaines (Aube); de la surveillance du centre, aujourd'hui ferme, de stockage de dechets de surface dit « Centre Manche » : 500 000 m3 de dechets conditionnes y sont stockes et en phase de surveillance active; de la R&D associee a un eventuel stockage profond pour les dechets B et C conformement a I'axe 2 de la loi de 1991 (voir chapitre 21).

Au titre de la premiere action, I'ANDRA delivre les certificats d'agrement des colis proposes par les producteurs, effectue enquete, examen et audit avant d'autoriser leur fabrication et expedition au CSA. A ce titre, elle emet des specifications d'acceptation de dechets incluant les seuils d'activite par radionucleide, la transportabilite, le debit de dose maximale acceptable, la qualite de la matrice..., auxquelles les producteurs sont tenus d'adherer. En outre, elle effectue des inspections et audits pour verifier que les producteurs produisent leurs colis conformement a leurs engagements. Le concept du stockage de Soulaines repose sur les principes habituels de confinement (avec la surveillance associee), le colis constituant la premiere barriere. La capacite aujourd'hui autorisee du CSA est de 1 million de m3,150 000 m3 environ etant deja stockes en fin 2000. Compte tenu des efforts constants des producteurs pour diminuer

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les volumes de dechets, le CSA devrait recevoir dans I'avenir moins de 20 000 m3 de dechets conditionnes chaque annee. Au titre de la deuxieme action, I'ANDRA surveille le Centre Manche et en particulier I'etat de sa couverture et la qualite des eaux ruisselantes et drainantes pour s'assurer de I'integrite de I'ensemble. Au titre de la troisieme action, I'ANDRA est en charge des travaux de percement du laboratoire souterrain de Bures (Meuse) et des tests associes. Un certain nombre de groupes de travail internationaux ont ete constitues avec les pays ayant deja des laboratoires souterrains pour partager techniquement et financierement les etudes visant a determiner les conditions dans lesquelles les dechets B et C pourraient etre stockes en profondeur (voir chapitre 20). Au titre de cette action I'ANDRA a aussi la responsabilite de prononcer les agrements des dechets B et C destines a etre stockes en profondeur. En plus de ces trois actions de base, I'ANDRA a egalement pour mission de dresser I'inventaire des dechets radioactifs en France (Observatoire des dechets radioactifs).

7. Les effluents liquides et gazeux issus de ('Industrie nucleaire en France Les rejets d'effluents liquides et gazeux de chaque INB (installation nucleaire de base) sont soumis a autorisations par les pouvoirs publics, ces autorisations etant donnees apres que le futur exploitant ait effectue une « etude d'impact » de ses rejets (et plus generalement de son activite) sur la population et I'environnement. Pour la population, I'etude porte en particulier sur un « groupe de reference », choisi en fonction de la proximite, les habitudes de vie, ['influence des vents, etc. Pour I'environnement, on etablit un « point zero » et on calcule I'impact des rejets sur la faune, la flore, les reseaux hydrologiques, etc. En cours d'exploitation, I'exploitant est tenu de controler que ses rejets sont toujours dans les limites de ses autorisations et de fournir des rapports periodiques aux autorites locales et nationales ; ces controles sont en general doubles par des controles independants effectues par I'OPRI (Office de Protection centre les Rayonnements lonisants qui depend du ministere de la Sante). Certaines mesures sont continues (par exemple la mesure de I'activite dans les cheminees de rejet des effluents gazeux), d'autres sont faites sur des aliquotes representatives des rejets. En outre, I'exploitant s'engage a faire tous les efforts possibles pour maintenir ses rejets au niveau le plus bas possible (principe ALARA, figure 15.2). L'ensemble de Industrie nucleaire en France a fait enormement d'efforts pour diminuer les quantites de radioactivite rejetee sous forme liquide et gazeuse ; ainsi par exemple EDF a divise par un facteur superieur a 10 la radioactivite contenue dans ses rejets liquides entre 1990 et 1998 ; egalement I'usine COGEMA de La Hague a divise les activites a et (3 de ses rejets liquides par un facteur superieur a 50 entre 1984 et 1998. A tel point que les pouvoirs publics ont juge bon de revoir a la baisse les autorisations donnees au moment de la creation de I'lNB. La nocivite radiologique des rejets s'evalue en impact dosimetrique sur les groupes de reference (en mSv an'1).

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Le cycle du combustible nucleaire

Figure 15.2. Exemple de controle de rejets actifs autour de la Hague. 7.1. Les rejets des centrales nucleates En France, une centrale nucleaire electrogene a des rejets liquides contenant tres peu d'activite : ceci resulte d'une politique volontariste de filtration, d'evaporation et de decontamination de tous les effluents liquides produits ; dans les rejets finaux, on trouvera pour un reacteur de 900 MWe : - de I'ordre de 1 GBq an~1 d'activite fty; - de I'ordre de 10 a 20 TBq an~1 de tritium ; - de I'ordre de 15 a 20 GBq an~1 de 14C. Les rejets gazeux sont egalement en tres faible quantite (valeurs donnees par reacteur de 900 MWe et par an): - environ 1 TBq de tritium ; - environ 200 GBq de 14C ; - des traces de 85Kr, 41Ar, 133Xe, 131I et 133I au niveau de quelques GBq par an. On notera que parmi ces derniers, l'41Ar a une periode de 2 heures, le 133Xe une periode de 5 jours, I'1311 une periode de 8 jours et le 133I une periode de 20 heures, tous ayant des descendants stables. Reperes Dans les rejets liquides, on trouve surtout des produits d'activation provenant essentiellement du circuit primaire ; a part le tritium, qui est un produit de fission ternaire et qui se retrouve partiellement dans le primaire a cause de sa grande mobilite (c'est un isotope de I'hydrogene), il n'y a que des traces de produits de fission (134Cs et 137Cs). Dans les rejets gazeux seul l'41Ar est un produit d'activation, les autres etant des produits de fission gazeux : les rejets ne representent qu'une infime fraction des produits de fission gazeux generes dans les crayons de combustible ce qui montre bien la bonne etancheite de la gaine.

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Tritium : I'isotope radioactif de I'hydrogene (3H) se forme naturellement dans la haute atmosphere ; il a une periode de 12,3 ans et I'inventaire naturel de tritium dans la biosphere est de 75 kg, soit environ 27 millions de TBq ; on voit done que les rejets de tritium des centrales ne changent pas significativement la concentration en tritium dans I'air et I'eau de mer (concentration naturelle environ 12 Bq L~1). II en est de meme pour le tritium degage lors des operations de retraitement (I'usine de La Hague, pour un retraitement correspondant aux combustibles decharges par 80 reacteurs, rejette environ 80 TBq an"1 dans ses effluents gazeux et environ 12 000 TBq an"1 dans ses effluents liquides). De plus, le tritium est un emetteur P pur done pratiquement inoffensif. 7.2. Les effluents generes par les etapes du cycle Les effluents generes par les differentes etapes de I'amont du cycle ne sont pas significatifs en terme de radioactivite rejetee, puisque ces etapes ne generent pas de radioactivite nouvelle. A titre d'exemple, I'usine d'enrichissement d'EURODIF rejette moins de 0,2 GBq d'activite dans ses effluents gazeux et moins de 0,04 GBq dans ses effluents liquides. II en est tout autrement pour I'etape du retraitement qui vehicule de la radioactivite artificielle en grande quantite : c'est done cette etape du cycle qui est concernee dans ce qui suit. 7.2.1. Les effluents liquides Les usines modernes de retraitement de combustibles uses ont mis au point au fil des annees un certain nombre de techniques permettant de diminuer considerablement I'activite contenue dans leurs effluents liquides : traitement chimique adapte, evaporation, filtrations et ultrafiltration, recyclage, sont des techniques courantes a La Hague et a Sellafield. Ceci a permis de reduire les activites rejetees (par exemple a La Hague) : -

a moins de 35 GBq an"1 en emetteurs a (soit moins de 1 Ci an"1) ; a moins de 40 TBq an"1 en emetteurs Py (environ 1 100 Ci an~ 1 ); cette valeur s'entend hors tritium (voir ci-dessus).

Pour mettre ces quantites en perspective, on se rappellera qu'en une annee I'usine de La Hague vehicule dans ses installations des activites de I'ordre de 15 millions de TBq (hors reception combustible) tandis que I'inventaire de la radioactivite entreposee est bon an mal an de I'ordre de 500 millions de TBq (Figure 15.3). 7.2.2. Les effluents gazeux C'est le krypton 85 qui de loin represents I'essentiel de I'activite rejetee (voir ci-dessous); a La Hague, environ 300 000 TBq de 8SKr sont rejetes annuellement. Ensuite vient le tritium avec environ 80 TBq an"1 puis le 14C avec 20 TBq an"1. Ces trois gaz sont des emetteurs (3 purs. Les autres gaz ou aerosols gazeux representant de I'ordre de 0,2 TBq an"1 dans lesquels le 106Ru et I'129I font I'objet d'un suivi particulier. Krypton 85. Lors des operations de decoupe de la gaine (le cisaillage), les produits de fission gazeux se degagent; la plupart sont arretes par les traitements effectues sur le flux gazeux sauf les gaz rares du fait de leur inertie chimique (essentiellement les isotopes du krypton et du xenon); un seul de ces gaz rares est radioactif, le 85Kr de periode 10,7 ans; c'est un emetteur (3 pur ayant un impact dosimetrique extremement faible (impact specifique de 1,1 10"16 Sv Bq~1 s~1 m"3). Le krypton 85 est d'ailleurs forme naturellement dans la haute atmosphere a raison de 0,4 TBq an"1, ce qui correspond a une concentration naturelle de 1,2 Bq rrT3. Caz rare et inerte, il ne se reconcentre pas dans la chame alimentaire.

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Le cycle du combustible nucleaire

Figure 15.3. Evolution des rejets actifs liquides du site de la Hague. Iode129. Produit de fission a vie longue (15,7 millions d'annees), il se degage egalement lors des operations de cisaillage et de dissolution ; la grande majorite est piegee sous forme liquide et rejetee dans les effluents liquides (environ 95 %). Une grande partie du reste est piegee dans des pieges solides ; moins de 1 % est rejete dans les effluents gazeux (une dizaine de GBq an"1). Le principe de minimisation des impacts recommande de rejeter en mer le maximum possible d'129l ; en effet il se trouve alors dilue (d'au moins un facteur 10 000) avec I'iode nature! 127I non radioactif; son impact par exemple sur la thyro'i'de est alors quasi nul (c'est le meme principe qui est applique avec la distribution de pastil les d'iodenaturel pourdiluer les isotopes radioactifs 131I et 133I en casd'accidentdans une centrale nucleaire). Carbone14. Isotope naturel du 12C (bien connu pour ses utilisations en datation car il a une periode de 5 730 ans), il se forme dans la haute atmosphere par reaction n,p sur les atomes d'azote 14. Il y a environ 140 000 TBq de 14C naturel dans ('atmosphere (11 millions de TBq dans la mer, les organismes et le sol); il s'en forme naturellement environ 1 000 TBq an"1 et ce 14C est responsable de 0,012 mSv de la dose naturelle. Dans les reacteurs, il se forme a partir du 14N (reaction n,p) et du 17O (reaction n,a) du combustible. Lors de I'etape de dissolution, une partie suit la phase liquide et se retrouve dans les effluents liquides, une autre partie (environ 50 %) se retrouvant dans les effluents gazeux ; environ 20 TBq an"1 sont ainsi rejetes a La Hague, ce qui represents 2 % de la production naturelle de cet isotope. 7.3. L'impact dosimetrique des rejets de I'industrie nucleaire De nombreuses etudes ont ete faites pour determiner I'impact de ces rejets en terme de radiocancers ou leucemies (rapport Viel autour de La Hague par exemple); aucune d'entre el les n'a pu mettre en evidence une quelconque relation entre les activites rejetees sous forme d'effluents liquides et gazeux par I'industrie nucleaire et la frequence d'apparition de ce type de maladies. La derniere en date, qui est aussi la plus complete, a concerne le Nord-Cotentin et dure plus de deux ans avec des experts internationaux et des representants d'associations pas particulierement favorables au nucleaire. Selon cette etude, 0,0014 cas de leucemie (supplementaire par rapport a la frequence attendue statistiquement) sur les 4 releves par

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I'etude anterieure du Pr Viel pourrait etre radio-induit (c'est-a-dire du a la radioactivite ajoutee). L'etude confirme egalement les valeurs de I'impact exprime en dose regue par les groupes de reference qui figurent dans les etudes d'impact de COGEMA, soit moins de 0,02 mSv air1 pour ('ensemble des effluents liquides et gazeux de I'usine de La Hague. Compte tenu des quantites d'activite rejetee par les centrales nucleates d'EDF, leur impact sur les populations de reference avoisinantes est encore plus faible, inferieur a 0,01 mSvan-1. Globalement sur ('ensemble de la population franchise, on peut dire que I'impact radiologique de I'industrie nucleaire frangaise est negligeable (0,008 mSv par an et par habitant) et largement inferieur aux fluctuations de la radioactivite naturelle sur le sol frangais (qui varie entre 2 et 6 mSv an~1 selon les regions et les altitudes). Pour avoir des ordres de grandeur en memoire, on notera que le « stock » de radioactivite naturelle de la Terre est de 85 millions de TBq, que I'apport annuel naturel est de 140 000 TBq, que les essais nucleaires atmospheriques ont apporte 220 000 TBq supplementaires, tandis que I'apport de I'industrie nucleaire mondiale est de 10 000 TBq an~1.

Cette page est laissée intentionnellement en blanc.

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•^ \^

Conditionnement desdechets deretraitement des dechets

deretraitement

1. Les dechets de precede (issus du combustible use) Le principe de base du retraitement des combustibles uses est de separer les matieres recyclables, c'est-a-dire I'uranium et le plutonium qui represented respectivement environ 95 % et 1 % du combustible use, des « cendres » produites par les reactions nucleates, c'est-a-dire les produits de fission qui represented 3 a 5 % du combustible initial et quelques actinides mineurs. Ces cendres, qui seront vitrifiees, constituent les dechets principaux du retraitement, que Ton appelle par suite « dechets de precede », et elles contiennent la presque totalite de la radioactivite artificielle engendree par les reacteurs, hormis celle qui est separee avec le plutonium et Puranium (236U notamment, figure 16.1).

Figure 16.1. Repartition des activites dans les dechets du retraitement. Pour effectuer la separation, on a vu au chapitre 10 que ('assemblage combustible est decoupe en petits trongons, de fagon a permettre la dissolution dans I'acide nitrique des pastilles qui se trouvent a Pinterieur des crayons constituant I'assemblage. Les trongons des gaines des crayons, en alliage de zirconium, de meme que les embouts de tete et de pied, en acier inoxydable, sont insolubles dans I'acide nitrique et constituent done un deuxieme type de dechet de precede. Leur quantite est variable selon le type d'assemblage (entre 250 et 400 kg par tonne d'uranium initial); ce sont des dechets B qui contiennent environ 3 % de la radioactivite des dechets du combustible.

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Le cycle du combustible nucleaire

Enfin, lors des operations de decoupe des trongons (le cisaillage), des petits debris appeles fines (un peu comme la sciure quand on coupe du bois) se trouvent en suspension dans les solutions nitriques de dissolution, auxquels se joignent certains produits de fission insolubles. Ces produits solides, qui represented moins de 10 kg par tonne d'uranium retraite, sont separes par centrifugation des solutions liquides de dissolution avant qu'elles ne passent vers les etapes d'extraction par solvant. Ces fines constituent un troisieme type de dechet de precede (Figure 16.2). Un des objectifs principaux du retraitement est de conditionner ces dechets issus du combustible use dans des matrices permettant de demontrer leur tenue a tres long terme. C'est dans ce but que, des les annees 1960, le CEA a etudie le precede de vitrification pour conditionner les produits de fission et les actinides mineurs (et plus recemment pour y incorporer en meme temps les fines). Aujourd'hui, trois ateliers de vitrification fonctionnent en France (I'AVM a Marcoule, les ateliers R7 et T7 a La Hague, ces deux derniers possedant chacun trois chames de vitrification) et un atelier avec deux chames fonctionne suivant le meme precede frangais a I'usine anglaise de Sellafield (Figure 16.3). Le principe de la vitrification des produits de fission peut se resumer comme suit: -

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Les produits de fission en solution ou en suspension dans une solution nitrique sont d'abord seches et calcines sous forme d'oxydes de PF dans un calcinateur vers 850 °C (tube tournant chauffe electriquement). A la sortie du calcinateur, on ajoute de la « fritte de verre », constitute essentiellement de borosilicate de sodium. Le « calcinat » et la fritte sont melanges dans un « pot de fusion » chauffe par induction a environ 1 100 °C; les oxydes de PF sont « digeres » par la fritte pendant quelques heures, ce qui permet de fabriquer un verre dans lequel les PF font partie integrante de la structure vitreuse (un peu comme un verre de cristal contenant des oxydes de plomb ou un verre de vitrail contenant des oxydes metalliques pour le colorer). Le verre liquide est ensuite coule dans un conteneur en acier inoxydable ou il se solidifie en se refroidissant; apres refroidissement on soude un couvercle pour assurer I'etancheite.

Chaque conteneur a un volume de 180 L et contient environ 400 kg de verre ; on produit 0,7 conteneur de verre pour chaque tonne d'uranium retraite, c'est-a-dire environ un conteneur de verre chaque fois que Ton retraite 3 assemblages combustibles REP type EOF (EOF decharge 1 500 a 1 800 assemblages chaque annee de ses 58 reacteurs REP en fonctionnement). Les dechets vitrifies sont des dechets C. A la production Pactivite moyenne d'un conteneur est de 16 000 TBq en Pyet de 230 TBq en a; sa puissance thermique est de I'ordre de 2 kW; il est done entrepose dans un batiment blinde comportant des puits ventiles pour assurer ('evacuation de la chaleur (Figure 16.4). Environ 10 000 conteneurs ont deja ete produits tant a La Hague qu'a Marcoule avec une activite conditionnee d'environ 150 millions de TBq (en 2001). Ce sont ces conteneurs qui sont retournes aux pays etrangers avec lesquels COGEMA a des contrats de retraitement, le transport etant effectue dans des chateaux contenant 28 conteneurs ; la loi de 1991 interdit de stacker en France des dechets nucleates en provenance de I'etranger. Comme ces conteneurs peuvent etre accueillis par differents pays, les specifications ont du etre approuvees par les Autorites ad hoc de chaque pays ; ce sont d'ailleurs les memes pour I'usine anglaise de BNFL.

Figure 16.2. Schema d'ensemble des dechets du retraitement.

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Le cycle du combustible nucleaire

Figure 16.3. Precede francais de vitrification des dechets de haute activite.

Figure 16.4. Dechet vitrifie. La puissance thermique et I'activite Py initiale etant essentiellement dues aux produits de fission a vie courte, elles diminuent rapidement au cours des premieres annees ; ainsi au bout de 30 ans la puissance thermique n'est plus que de 500 W environ et I'activite de moins de 4 000 TBq ; c'est apres ces delais d'entreposage que le stockage ultime en profondeur est envisage. Au-dela, la puissance thermique diminue beaucoup moins rapidement car elle est due alors aux emetteurs a qui sont presque tous a vie longue. Les verres borosilicates ont ete selectionnes par les chercheurs du CEA comme etant connus pour avoir une resistance particulierement bonne aux agressions hydrauliques (on considere qu'apres un certain

16 - Conditionnement des dechets de retraitement

163

temps, le stockage en profondeur pourra etre soumis au lechage des eaux souterraines); ces verres sont d'ailleurs voisins d'un verre naturel, I'obsidienne, dont certaines occurrences datent de plusieurs millions d'annees.

Les dechets de structure peuvent subir deux types de conditionnement: - soit ils sont cimentes, c'est-a-dire enrobes dans une matrice ciment; c'est le cas a Pusine anglaise de Sellafield et c'etait le cas a La Hague jusqu'en 1995 ; - soit ils sont compactes, eventuellement avec d'autres dechets metalliques, pour produire un residu compact de peu de volume, et places dans un conteneur qui, geometriquement, se presente de la meme fagon que les conteneurs de verre pour standardiser les manutentions, transports et entreposages ; c'est le cas a La Hague qui vient de mettre en service un atelier de compactage des coques et embouts (Figure 16.5).

Figure 16.5. Dechet compacte.

Les volumes generes par tonne retraitee dependent du type de conditionnement: de I'ordre de 0,65 m3 de dechets conditionnes dans le cas de la cimentation et seulement 0,15 m3 dans le cas d'un dechet compacte. L'activite moyenne d'un colis au moment de sa production est de I'ordre de 40 TBq en (3y et de 0,1 TBq en a. Les dechets conditionnes de structure sont des dechets B.

2. Les dechets technologiques (maintenance et interventions) On appelle « dechets technologiques » les dechets qui peuvent etre produits lors d'operations de maintenance et d'interventions dans les installations. Ce sont done d'une part les dechets produits par le remplacement de pieces usees et defectueuses, et d'autre part les tenues, gants et sas necessites par ['intervention elle-meme. On y ajoute egalement les dechets provenant des resines de traitement des eaux de piscines contenant les

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Le cycle du combustible nucleaire

assemblages en attente d'etre retraites ou des residus de solvant apres son traitement pour en eliminer le maximum d'activite. Enfin, si un traitement chimique des effluents liquides est pratique, les precipites solides produits devront etre conditionnes.

2.1. Les dec/lets dus aux interventions et a la maintenance Us sont par essence de faible et tres faible activite et conduisent done a des dechets de type A stockables en surface. Le mode de conditionnement de loin le plus utilise est la cimentation qui permet d'immobiliser le dechet. Depuis 1999, il existe en France a Marcoule une unite d'incineration et une unite de fusion (pour les dechets metalliques) qui permet de reduire les volumes avant cimentation. L'ensemble de I'industrie nucleaire franchise, mais aussi des hopitaux, universites et laboratoires, produit moins de 20 000 m3 par an de ce type de dechets (apres conditionnement, voir I'ANDRA au chapitre 15).

2.2. Les resines echangeuses d'ions Les resines sont utilisees tres largement dans I'industrie nucleaire, notamment pour traiter les eaux des piscines d'entreposage des combustibles. Les resines cationiques permettent de fixer les cations radioactifs qui sont relaches (en quantites tres faibles) par les assemblages (par exemple le 60Co) et les resines anioniques permettent de maintenir le niveau d'anions corrosifs (par exemple les chlorures) a des valeurs garantissant une corrosion minimale sur le long terme (done I'integrite des assemblages, 1 re barriere de confinement). Periodiquement ces resines doivent etre renouvelees et les resines anciennes constituent un dechet. Les conditionnements font appel soit a la cimentation (COGEMA, BNFL), soit a I'enrobage dans une matrice de resines thermodurcissables (EDF), soit encore a ('incineration. Dans tous les cas, les quantites restent tres faibles, typiquement de I'ordre de 20 litres pour un assemblage restant 10 ans en piscine.

2.3. Les residus de solvant Apres reextraction,le solvant passe dans une unite de traitement solvant ou il est debarrasse des produits de degradation par un traitement aux carbonates ; une fraction est envoyee dans une unite de distillation ou Ton separe le dodecane recycle, le TBP purifie egalement recycle et un residu organique compose essentiellement de produits de degradation du TBP. Ces produits constituent un dechet qui, a La Hague, est pyrolyse et les cendres resultantes cimentees ; environ 10 m3 de ce dechet est produit chaque annee et il s'agit d'un dechet A.

2.4. Les dechets solides issus du traitement chimique des effluents II s'agit de boues et precipites qui sont generes a chaque etape du cycle ; le conditionnement le plus frequemment pratique est la cimentation, eventuellement apres sechage. Dans le cas du retraitement, I'activite a contenue dans ces boues est incompatible avec les specifications des dechets A. Si BNFL continue a cimenter ces

16 - Conditionnement des dechets de retraitement

165

produits, a La Hague comme a Marcoule c'est la solution du bitumage qui avait ete retenue. Le col is de bitume est un dechet B qui peut contenir 1 a 2 TBq d'activite pty et 20 a 50 GBq d'activite a. De recentes ameliorations dans le precede a La Hague permettent de pratiquement supprimer ce dechet (voir § 4).

3. Quelles matrices de conditionnement ? Le choix de la matrice de conditionnement est effectue en fonction d'un certain nombre de criteres : - facilite de mise en ceuvre et cout; - acceptabilite par le « stockeur » (I'ANDRA en France); - tenue mecanique du residu conditionne pour les manutentions a court terme et la tenue generale des ouvrages de stockage ultime a long terme ; - tenue a long terme centre les agressions previsibles lors du stockage (lechage et lixiviation par I'eau, corrosion, etc.); - capacite de confinement des radionucleides, notamment pour les plus mobiles (par exemple le tritium ou I'iode129). Le choix dependra done du type de dechet, de I'activite contenue et du mode de stockage ultime (surface ou profond). Differentes matrices ont ete etudiees en France et sont utilisees industriellement (Figures 16.6, 16.7, 16.8). La matrice verre (en particulier les verres borosilicates proches des verres naturels) fait I'objet de I'experience industrielle frangaise depuis 1978 (AVM a Marcoule). Elle est aujourd'hui utilisee pour les produits de fission, mais aussi pour les fines de cisaillage et les concentrats d'effluents liquides ; sa tenue a long terme est particulierement interessante de meme que sa tenue a la temperature (voir ci-dessus § 1). La matrice ciment est tres largement utilisee de par sa simplicite de mise en ceuvre et avec des formulations de ciment plus ou moins adaptees au type de dechet (experience en France depuis 1960 au CEA); par exemple : - equipements uses ou defectueux avant ou apres compactage (COGEMA); - dechets d'intervention (tenues, gants, chiffonnettes) avant ou apres compactage et/ou incineration (EOF, CEA, COGEMA, ANDRA); - dechets precede sous forme de boues ou precipites seches (BNFL). Dans certains cas, la matrice ciment peut etre remplacee par une matrice resine epoxy thermodurcissable (resines EDF). La matrice bitume est particulierement bien adaptee pour des precipites solides seches (La Hague, Marcoule, mais egalement en Belgique et au Japon). En France, I'experience date de 1966 (CEA). Si elle est bien adaptee a des activites moyennes, il peut y avoir alteration du bitume en cas d'activites trop elevees (essentiellement due au phenomene de radiolyse). D'autres matrices sont evidemment imaginables et ont ete etudiees dans divers pays. Citons par exemple la matrice ceramique, prometteuse meme s'il n'y a pas encore de realisation industrielle la mettant en ceuvre, ou des « roches » synthetiques qui seraient bien adaptees pour pieger des radioelements separes (« synroc » propose par la recherche australienne, ou apatites etudiees par le CEA par exemple).

166

Le cycle du combustible nuc/eaire

Figure 16.6. Dechet enrobe dans le bitume.

Figure 16.7. Dechet enrobe en contenueur beton-fibre.

7 6 - Conditionnement des dechets de retraitement

167

Figure 16.8. Dechet cimente bloque.

4. Comment reduire les volumes de dechets du retraitement ? Les couts de conditionnement et de stockage incitent les industriels a reduire autant que faire se peut les volumes de dechets, notamment ceux du retraitement qui conduisent a des dechets C et B destines a un stockage en profondeur. Ainsi : - le cout actuel du stockage de surface ANDRA est d'environ 2 000 euros le m 3 ; - les couts estimes du stockage profond vont de 40 000 euros le m3 pour les dechets B a plus de 75 000 euros le m3 pour les dechets C ; - a titre de comparaison, 1 m3 de dechets industriels « classiques » a stocker en decharge de classe 1 est facture environ 23 euros, et le prix vise pour les dechets TFA est de I'ordre de 150 euros le m3. On comprend done que I'on cherche non seulement a diminuer les volumes a stocker, mais aussi a declasser les dechets produits (par exemple en decontaminant un dechet B avant conditionnement pour en faire un dechet A). Les efforts portent done en priorite sur les dechets non susceptibles de stockage en surface et en second lieu sur les dechets de surface. Par ailleurs, on cherche egalement a utiliser le meilleur conditionnement disponible chaque fois que possible (exemple conditionnement des fines dans les verres dont la tenue a long terme est plus grande que celle des ciments). On peut citer quelques exemples de ce qui a deja ete fait dans le retraitement: - Le traitement par evaporation et ultrafiltration des effluents liquides permet de concentrer I'activite et de la diriger vers la vitrification en meme temps que les produits de fission; ceci permet de supprimer un dechet B (les precipites chimiques conditionnes en matrice bitume).

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-

-

-

Le cycle du combustible nucleaire

La decontamination de dechets contamines en Pu et autres emetteurs oc permet d'en diminuer la radiotoxicite et de les declasser en dechets de type A. Pour les dechets de structure le remplacement de la cimentation par un compactage permet de diviser le volume du residu final par un facteur 3. L'incineration de certains dechets A (EDF, COGEMA) suivie d'une cimentation des cendres permet de diviser les volumes a stocker d'un facteur 12 environ ; ('incineration de dechets a de type B est possible egalement (CEA a Valduc). [.'amelioration constante des techniques et moyens de mesure de la radioactivite reellement contenue permet de mieux caracteriser les dechets bruts et done de selectionner le traitement le mieux adapte et le moins couteux (exemple : le dechet bloque CO a La Hague et a Marcoule). Enfin une gestion rigoureuse des produits entrants dans les installations et le tri a la source des dechets produits permet une reduction notable des dechets A a conditionner.

Tous ces efforts permettent aujourd'hui de produire moins de 0,5 m3 de dechets B et C conditionnes et moins de 0,8 m3 de dechets A par tonne d'uranium contenu dans les assemblages uses retraites dans I'usine de La Hague. Alors que le volume minimal du conditionnement du combustible use dans la gestion sans retraitement serait de 2 m3, soit 4 fois plus pour le stockage geologique (Figure 16.9).

Figure 16.9. Volume des dechets conditionnes du retraitement.

17

Recyclage de l'uranium

et etdu duplutonium plutonium

1. Les donnees du recyclage 1.1. La composition isotopique des matieres recyclables On a vu dans la partie 4 que le retraitement permet de recuperer, avec une grande purification, I'uranium et le plutonium du combustible use. Mais contrairement a Puranium du chargement initial, dont I'origine est naturelle, les atomes lourds recuperes dans les « vecteurs » uranium et plutonium du retraitement sont tres diversifies. Ces vecteurs sont des melanges d'isotopes a la fois naturels et artificiels. Les proprietes neutroniques dominantes sommairement indiquees dans le tableau 17.1 sont particulierement valables en reacteurs a neutrons lents, comme les reacteurs a eau. Tableau 17.1. Composition isotopique des matieres a recycler (REP 4%, 47,5 GWj/t). kg/tU

u

Pu

Avant irradiation

Apres retraitement et 10 ans de refroidissement

232

0

3 10~6

irradiant par ses descendants

233

0

410" 6

fissile mais negligeable

234

0,39

0,24

emetteur a, capturant

235

40

7,45

fissile valorisant le vecteur URT

236

0

5,37

capturant genant car abondant

238

959,61

925

convertible en 239Pu

238

0

0,36

fort emetteur a

239

0

6,10

fissile

240

0

2,81

capturant

241

0

1,13

fissile

242

0

0,90

capturant

170

Le cycle du combustible nucleaire

1.2. Comment recycler ? Le contenu fissile des matieres recyclables est interessant, mais il est assez faible dans I'uranium comme dans le plutonium. II diminue quand le taux de combustion augmente ; au total, il est d'environ 1,5 % pour 47,5 GWj t~1. D'un autre cote, certains isotopes artificiels sont genants (voir les proprietes ci-dessus) : -

pour la neutronique des reacteurs a neutrons lents, car ils sont particulierement capturants;

-

pour la manipulation de la matiere a recycler, car ils sont tres actifs.

La proportion de ces isotopes genants augmente quand le taux de combustion s'eleve. Ce double effet negatif de la croissance du taux de combustion - diminution du reste fissile et augmentation des atomes genants - tend evidemment a peser sur I'interet du recyclage. D'ou la question : comment recycler au mieux ? En theorie on peut songer a « purger » les vecteurs uranium et plutonium des atomes genants, en procedant a des separations isotopiques qui viendraient completer le retraitement. Les precedes tres selectifs par laser seraient ideaux pour cet objectif. Mais a quel prix ? En pratique il faut: -

adapter ou specialiser les reacteurs charges en matieres recyclees ;

-

dedier au recyclage certaines installations du cycle.

Pour le premier point, on sait que les reacteurs a neutrons rapides sont les plus aptes a recycler le plutonium (soit comme surgenerateurs, soit comme « incinerateurs nets » de plutonium). Les reacteurs a eau lourde peuvent aussi etre un bon moyen, car ils peuvent se contenter du contenu fissile des matieres retraitees. On verra ci-apres comment on peut faire avec les reacteurs a eau ordinaire. Pour le second point, il paratt en effet particulierement necessaire de disposer d'installations du cycle dediees a la manipulation des matieres recyclees. On evite de « contaminer » le cycle uranium naturel quand on precede au re-enrichissement de I'URT (Uranium de retraitement) a travers une usine (ou une partie d'usine) qui lui est reservee. Ceci est plus facile avec des equipements de taille unitaire reduite, comme les centrifugeuses. Quant a la fabrication du combustible comportant du plutonium, elle ne peut se realiser que dans des installations a protection renforcee. Au-dela du premier recyclage, la question se prolonge par les difficultes croissantes des cycles successifs, dues a I'amplification de la degradation des compositions isotopiques. Pratiquer le multirecyclage revient a augmenter considerablement la combustion nucleaire. Apres plusieurs cycles, un certain equilibre des compositions isotopiques pourrait etre atteint, mais ce n'est pas dans le domaine des possibilites courantes de marche des reacteurs a neutrons lents. Seuls les reacteurs rapides, beaucoup moins sensibles, peuvent I'envisager. Ce qu'il faut retenir c'est que I'uranium de retraitement ne se prete pas au multirecyclage, a cause de la croissance rapide de I'isotope 236U, et de la forte production concomitante de 238Pu. Meme en neutrons rapides I'URT n'a pas d'interet, car les stocks d'uranium appauvri seront plus que suffisants pendant tres longtemps.

7 7 - Recyclage de I'uranium et du plutonium

171

2. Les conditions du recyclage dans les reacteurs a eau 2.1. La neutronique du recyclage du plutonium Faute de developpement des reacteurs a neutrons rapides, le recyclage du plutonium se fait aujourd'hui dans les reacteurs a eau. Mais avec un combustible au plutonium, il y a perturbation de la neutronique de base, celle qui est fixee pour un combustible neuf a uranium. Cette perturbation vient de I'absorption neutronique des isotopes du plutonium, qui est superieure a celle des isotopes de ('uranium, en neutrons thermiques. II en resulte que le spectre neutronique est deplace vers des energies plus elevees (spectre plus « dur »), avec les consequences suivantes : -

accroissement des perturbations locales du flux neutronique (done de puissance) ; reduction de Pefficacite des absorbants de commande (barres et bore soluble); coefficient de temperature fortement negatif (besoins de controle accrus a froid) ; reduction de la fraction des neutrons retardes ; dommages accrus pour les materiaux metalliques (assemblages, structures internes, cuve de reacteur); - effet xenon tres attenue (facilite de pilotage); - conversion accrue de I'uranium 238, done decroissance plus lente de la reactivite. Les cinq premieres perturbations mettent en cause les conditions de surete du cceur, qui doivent etre revues pour un chargement significatif en plutonium. Les deux dernieres perturbations sont plutot favorables.

2.2. La strategic du recyclage du plutonium Plusieurs voies sont possibles : - avec les reacteurs a eau standards, en minimisant la perturbation neutronique liee au plutonium par limitation de la charge Pu (fissile U dominant) :

-

- soit avec une repartition heterogene des matieres fissiles (combustible MOX avec Pu dans une matrice d'U appauvri, en combinaison avec combustible a U enrichi) ; - soit avec une repartition homogene des matieres fissiles (combustible parfois denomme MIX, avec Pu dans une matrice d'U enrichi); avec des reacteurs a eau specialises, en maximisant la charge en Pu du cceur, jusqu'a 0 % en U enrichi.

Pour un pare etabli, comme celui d'EDF, seule la premiere voie est envisageable. La solution heterogene est a priori preferable, car elle limite la quantite de combustible avec plutonium a fabriquer. Le multirecyclage du plutonium dans les reacteurs a eau se heurte a la degradation croissante de la composition isotopique du plutonium. II y a cependant moyen de pratiquer quelques cycles par melange du plutonium provenant des cycles successifs, le

172

Le cycle du combustible nucleaire

plutonium le plus « frais » ameliorant la composition isotopique moyenne. En coeur homogene, il est eventuellement possible de recycler indefiniment le plutonium (support U enrichi), car un equilibre finit par s'etablir grace au melange permanent du plutonium. Comme un recyclage se fait sur une periode de 1 0 a 1 5 ans, comptee entre deux dechargements successifs, le probleme du multirecyclage n'est pas urgent. La strategic choisie a I'heure actuelle par les electriciens nucleaires correspond a un recyclage unique, le plutonium re-irradie une fois etant alors stocke dans le combustible de recyclage use, en attente d'un interet accru pour le plutonium qui pourrait entramer le developpement de reacteurs a eau specialises ou plus probablement de reacteurs rapides.

2.3. Le probleme de I'uranium Outre sa composition isotopique, I'uranium de retraitement (URT) se distingue de I'uranium naturel par sa contamination, faible, en produits de fission et transuraniens (dont Pu et Np). Sa valorisation dans les reacteurs a eau passe par le re-enrichissement, qui se fait par le procede a ultracentrifugation dans des cascades dediees (dans les usines URENCO ou russes). Le resultat est toutefois entache par la croissance des isotopes legers de I'uranium (232, 234, 236). Les precedes laser seraient mieux indiques, car ils auraient une meilleure selectivite pour I'uranium 235, ou ils permettraient de separer I'isotope 236 le plus genant. Le recyclage de I'uranium a un certain impact: -

cote reacteur: il faut sur-enrichir (d'environ 0,4 %), rnais par contre les performances neutroniques et les marges de surete sont peu affectees ; - cote cycle : en amont il faut des installations dediees, tenant compte des residus actifs laisses dans I'URT (ne pas contaminer le cycle a uranium naturel et se proteger des rayonnements residuels), mais en aval une simple dilution dans le retraitement standard permet d'attenuer les effets de chaleur et de radiolyse dus au 238Pu cree a partirdel' 236 U. Comme le multirecyclage de I'uranium dans les reacteurs a eau est exclu, et comme par ailleurs la tendance a ['augmentation du taux de combustion degrade de plus en plus I'URT, les electriciens pratiquent assez peu le recyclage de I'uranium. Finalement la politique de base c'est d'entreposer I'URT au titre de « reserve strategique », reserve qui pourrait trouver sa valeur en cas de tension sur I'approvisionnement en uranium naturel.

3. Le recyclage du plutonium avec le combustible MOX 3.1. Les caracteristiques et le comportement du MOX Actuellement le plutonium est recycle dans les reacteurs a eau standards en mode heterogene, grace a un combustible particulier dit MOX (Pu avec matrice U appauvri), charge dans un cceur comportant majoritairement le combustible standard a uranium enrichi (typiquement 25 a 30 % MOX, reste U enrichi).

17 - Recyclage de I'uranium et du plutonium

173

Figure 17.1. Zonage d'un assemblage MOX d'un coeur de reacteur de 900 MWe (teneur moyenne: 5,3%)-

Le chargement est complexe (Figure 17.1) : -

il y a un « zonage » a I'interieur des assemblages MOX (c'est-a-dire que les crayons ont 3 teneurs differences en Pu, pour faciliter Interface avec les assemblages a U enrichi); par exemple les teneurs s'echelonnent entre 2 et 6 % de Pu (a noter qu'on vise plus haut pour accrottre dans I'avenir le taux de combustion);

-

la place des assemblages MOX dans le cceur est parfaitement fixee.

Le combustible MOX, de developpement recent, se voit encore imposer un taux de combustion inferieur a celui du combustible standard, ce qui peut conduire a une gestion « hybride » du cceur « moxe », c'est-a-dire que le nombre de cycles d'irradiation peut etre different pour les deux types de combustible. La raison en est que ('experience de comportement du MOX n'est pas jugee suffisante par les autorites de surete. Le comportement particulier du MOX vient de sa composition mixte et de la microstructure de ses pastilles. La fabrication, malgre un soin particulier pour le melange des poudres PuO2 et UO2, confere une certaine heterogeneite a ce combustible. Parmi les differences de comportement, en comparaison avec le combustible standard, il faut noter un relachement plus important des PF gazeux, a taux de combustion eleve, a cause de la plus forte reactivite, done de la puissance, en fin d'irradiation et de la restructuration des amas de plutonium. Grace a des programmes methodiques de developpement, le combustible MOX est sur la voie de la demonstration d'un comportement au moins egal a celui du combustible standard. Dans quelques annees il doit etre reconnu comme ayant des performances identiques.

174

Le cycle du combustible nucleaire

3.2. La fabrication du MOX Cette fabrication demande des installations dediees, relativement lourdes a cause de la manipulation du plutonium, qui peut s'elever a 10 tan"1 comme dans I'usine frangaise MELOX a Marcoule. Les matieres a I'entree sont d'une part une poudre UO2 (U appauvri) apte au frittage, et d'autre part la poudre PuO2 provenant des usines de retraitement. La decroissance P du 241 Pu (periode 14 ans) donnant I'241 Am (periode 432 ans), emetteur a mais aussi y, la teneur en americium est bornee pour limiter les dispositifs de protection autour des equipements (problemes de maintenance par exemple). A MELOX, usine recente, cette limite en 241Am a pu etre relevee a 3 %. La fabrication des pastilles de combustible mixte est identique a celle des pastilles a uranium seul, sauf qu'en tete de precede on ne peut pas se contenter d'un simple melange des poudres des deux oxydes : la reduction imperative de la taille des amas riches en Pu conduit a une preparation particuliere du melange des deux poudres, qui passe par un cobroyage soigne. A MELOX on utilise le precede de tete dit MIMAS (Micronization/ Master blend), qui consiste a preparer un melange mere finement broye, riche en Pu (25 % et plus) puis a ajouter le reste de la poudre UO2. Ainsi la fabrication MOX differe de la fabrication du combustible a U enrichi essentiellement sur deux points : - le melange precis des poudres (precede de tete), pour avoir une matrice aussi homogene que possible (repartition des fissions et aussi solubilite au retraitement du Pu02); - le confinement absolu des matieres jusqu'au gainage, plus la protection centre le rayonnement de I'241 Am. Au total la fabrication MOX est devenue une technologie de haut niveau, bien plus exigeante meme que celle developpee anterieurement pour les combustibles au plutonium des reacteurs rapides.

3.3. Le bilan du recyclage MOX II s'agit du bilan en atomes lourds. Dans un reacteur a eau comportant un cceur 30 % MOX / 70 % UO2, le plutonium consomme dans la part MOX est a peu pres equivalent au plutonium forme a la fin du cycle dans la part UO2. Tout reacteur ainsi « moxe » a done un bilan nul en plutonium ajoute apres exploitation. Dans un reacteur a eau specialise qui serait « moxe » a 100 %, la consommation nette de plutonium serait de 70 kg par TWh d'electricite produite. Un electricien qui decide de retraiter et de recycler le plutonium a ainsi le moyen de controler son « inventaire » de plutonium. Plus son pare sera « moxe », plus il limitera la croissance de son inventaire. Par ailleurs il fait une economic en uranium naturel, qui est par exemple de 12 % pour un recyclage MOX 30/70. Autre resultat interessant a noter: par le recyclage MOX, le plutonium se « concentre » dans ce combustible use s'il n'est pas retraite, dans I'hypothese done ou seul le combustible UO2 est retraite. L'entreposage de tres longue duree en piscine ou a sec s'en trouve reduit d'un facteur 8 environ, par rapport a Poption du cycle ouvert.

17 - Recyclage de I'uranium et du plutonium

175

Un bilan complet en noyaux lourds doit aussi tenir compte de ['evolution des autres actinides artificiels, en particulier de celle des actinides mineurs. La, le resultat de la « moxification » est moins satisfaisant: les captures de neutrons dans les isotopes de plutonium font crottre considerablement I'americium et le curium par exemple. Ceci fait que la disparition d'une partie du plutonium par recyclage est en partie contrebalancee par la montee des actinides mineurs dans I'inventaire de la radiotoxicite des noyaux restants. C'est la raison du caractere peu performant de la transmutation par re-irradiation des noyaux lourds, les reactions parasites de capture neutronique reduisant fortement I'effet des reactions de fission quant a la diminution de la radioactivite a long terme. On reverra ce point dans la partie 6.

4. Le recyclage en France 4.1. L'aspect politique Jusqu'au debut des annees 1980, la France prevoyait de reserver le plutonium aux reacteurs rapides dont elle avait entrepris le developpement industriel. Deux coeurs commandes pour Superphenix mobilisaient 10 tonnes de plutonium, I'equivalent de la production annuelle du pare EDF d'une cinquantaine de REP. Les plans prevoyaient de construire un debut de serie de surgenerateurs en parallele avec la mise en service des grandes usines de retraitement. Quant a I'uranium de retraitement, il etait destine a la reserve strategique, ou il devait progressivement constituer I'equivalent d'une ressource miniere qui se serait accrue au rythme de 1 000 tonnes par an. Cette politique s'inscrivait dans le contexte energetique des annees 1970 : on pensait que tot ou tard une certaine tension frapperait I'uranium. Mais la detente sur I'energie vers le milieu des annees 1980 a change les donnees, et le mouvement s'est amplifie pour le nucleaire par I'abandon de tres nombreux projets de reacteurs, en premier lieu aux EtatsUnis. L'uranium naturel est devenu abondant et son cours s'est effondre (voir chapitre 3). Pour la France cela s'est traduit par I'abandon du projet Superphenix 2, qui devait ameliorer les couts d'investissement de la filiere rapide, et la reorientation de sa politique du cycle, sans abandon toutefois du retraitement pour lequel etaient en construction de nouvelles grandes usines a La Hague (le decret de creation datait de mai 1981). II a ete decide a cette epoque (1984) de recycler le Pu dans les REP 900 MWe. Pour I'URT, outre la poursuite du stockage strategique, EDF s'est donne I'objectif d'acquerir une certaine experience de son recyclage, en langant son usage dans deux reacteurs de 900 MWe, a la centrale de Cruas. Le recyclage du plutonium dans les reacteurs a eau, nouvel objectif en France, n'etait pas nouveau dans plusieurs grands pays nucleaires. Des le developpement du nucleaire civil a grande echelle aux Etats-Unis, cette possibilite avait ete etudiee (annees 1960-1970), au point que les reacteurs y ont ete conc,us en consequence. Les reacteurs d'EDF de conception americaine se pretaient done tout a fait au changement d'usage du plutonium (900 et 1 300 MWe), mais cela n'avait pas toujours ete retenu dans les possibilites au moment des procedures administratives ou des equipements de premiere installation (barres de commande). La « moxification » franchise a done ete engagee par etapes. Cote combustible une experience ancienne existait, en Allemagne et plus recemment en Suisse. L'Allemagne et la Belgique avaient installe des ateliers de fabrication. La France disposait evidemment de son experience de fabrication du combustible rapide.

176

Le cycle du combustible nucleaire

4.2. Les aspects industriels Depuis 2000, EOF exploite 20 reacteurs REP 900 MWe avec un chargement a 30 % MOX. Techniquement 8 autres reacteurs de cette categoric peuvent etre « moxes », apres une procedure passant par une enquete publique. Les besoins actuels en combustible MOX d'EDF sont d'environ 100 t an~1, ce qui demande le retraitement de 850 t an~1 de combustible UO2. Avec plus de 100 annees-reacteurs MOX au debut du siecle, I'experience d'EDF permet d'envisager des performances comparables pour le MOX et I'UO2 (taux de combustion, suivi de reseau et de charge) et le developpement du recyclage a tout le plutonium produit dans les centrales frangaises (done un retraitement complet au niveau de 1 000 t an~1 et une fabrication MOX de 130 t an~1). La decision des autorites politiques n'est cependant pas acquise... II faut repeter que la position d'EDF n'est pas isolee. En Europe, 35 reacteurs a eau sont « moxes », certains depuis longtemps (le premier en Allemagne I'a ete en 1972). Le Japon entreprend aussi de lancer le recyclage de son plutonium provenant du retraitement, largement fait en Europe (Figure 1 7.2).

Figure 17.2. Reacteurs europeens charges en combustible MOX (2000).

Cote cycle MOX, COGEMA dispose desormais de tous les moyens industriels pour repondre aux besoins d'EDF et de ses clients etrangers d'Europe et du Japon (a la fois pour reacteurs REP et REB). COGEMA dispose de trois usines de fabrication : -

usine MELOX de Marcoule, d'une capacite de 100 t an~1 ; usine de Cadarache (ancien atelier CEA pour le combustible rapide), d'une capacite de 40 t an~1, qui devra fermer prochainement suite a revision de sa tenue au seisme local ; usine beige de Dessel (associee), d'une capacite de 40 t an~1.

17 - Recyclage de I'uranium et du plutonium

177

L'usine MELOX qui est recente (1995) sert de reference a plusieurs projets internationaux, comme ceux qui ont pour objectif de recycler le plutonium demilitarise, aux Etats-Unis et en Russie. Le groupe COCEMA est ainsi implique dans des accords de transfer! de technologic. Le combustible MOX frangais irradie est entrepose dans les piscines de La Hague. Bien qu'il soit « retraitable » (specification de fabrication), il devrait y rester tres longtemps, mais rappelons qu'un assemblage MOX concentre le plutonium de 7 assemblages UO2 retraites, et qu'il en economise 1 supplemental. L'evolution du taux de combustion, pour I'UO2 et pour le MOX, se traduira par une augmentation ulterieure de la teneur en Pu du MOX (effets de la degradation de la composition isotopique et du besoin fissile plus important). La teneur moyenne pourrait evoluer de 5,3 % a 7,1 puis 8,65. Mais ce sera une evolution tres progressive, soumise a plusieurs examens de surete.

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Partie VI

Devenir ties dechets ultimes

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18

Stockage definitif et entreposage

Terminologie. II existe une tres officielle Commission specialised de terminologie et neologie de I'ingenierie nucleaire qui propose au Gouvernement la definition des termes repondant a un besoin precis, avec avis de I'Academie francaise. Pour la gestion des dechets nucleaires, I'entreposage a ete defini comme depot temporaire ; par contre le terme stockage est encore I'objet de debats, son caractere plus ou moins definitif faisant probleme.

1. Le stockage des dechets de faible activite En France, les dechets nucleaires de faible et moyenne activite a vie courte, de la classe A, une fois conditionnes par les producteurs, sont pris en charge par I'ANDRA (voir chapitre 15). Les colis ainsi constitues sont stockes (de maniere definitive) dans des centres de stockage dits centres de stockage de surface. II existe deux de ces centres de stockage en France. Le premier fut ouvert en 1966, par INFRATOME, une filiale du CEA, a cote de I'usine de retraitement de La Hague, dans la Manche, et gere ensuite par I'ANDRA. A sa creation en 1979 I'ANDRA etait un departement du CEA avant de devenir un EPIC (etablissement public d'interet commun) en 1991. Le Centre Manche a ete congu pour recevoir en surface seulement des dechets radioactifs conditionnes perdant en 300 ans leur nocivite, ce qui impose une certaine qualite des colis, et une activite contenue faible ou moyenne en radionucleides de courtes periodes (au plus egales a 30 ans). Ce centre a ete ferme en 1994 lorsqu'il fut plein, et il contient environ 500 000 m3 de dechets conditionnes. Les colis stockes sont soit des futs ou caissons metalliques, soit des coques ou caissons de beton (Figures 18.1 et 18.2). Le stockage repond a un double concept, d'une part avec des tumulus faits de colis entasses (colis de faible activite), d'autre part avec des monolithes de beton confinant les colis les plus actifs (moyenne activite). Apres la fermeture du Centre Manche, les travaux de couverture par membrane impermeable et plusieurs metres de terre - dont une couche vegetale - eurent lieu de 1994 a 1997, en parallele d'une enquete publique pour examiner les conditions de sa surveillance. Actuellement, le centre est dans une phase de surveillance dite active, c'esta-dire qu'on surveille en permanence I'etat de la couverture et I'etat radiologique des eaux de ruissellement et d'infiltration pour juger du bon etat de I'ouvrage. Au bout de quelques annees, il passera a I'etat de surveillance passive. Il reste ouvert aux visites. Le second centre de stockage en surface est ouvert depuis 1992 a Soulaines dans I'Aube, d'ou son nom CSA (Centre de stockage de I'Aube); sa capacite est de 1 million de m3 et, en 2002, il contient environ 150 000 m3 de dechets livres (Figure 18.3).

182

ie cycle du combustible nucleaire

Figure 18.1. Centre de stockage de la Manche.

Figure 18.2. Tumulus et monolithe au Centre de la Manche.

18 - Stockage definitif et entreposage

183

Son principe de fonctionnement repose sur le concept d'« ouvrages » : ce sont de grands cubes ouverts de beton arme, alignes, constituant des cases, dans lesquels on place les differents colis a stocker selon un plan de remplissage precis. L'installation d'un toit mobile au-dessus de la case en exploitation permet de travailler a I'abri des intemperies (Figure 18.4). On complete le remplissage des cases par un beton de calage si les colis stockes sont du type « bloques », ou par du gravillon si les colis stockes sont du type « enrobes » avec enveloppe durable et confinante (pour les definitions de colis bloques et enrobes, voir le chapitre 15). A la fin du remplissage, on acheve alors I'ouvrage avec un toit en beton qui, ulterieurement, sera recouvert comme le Centre Manche. Un reseau de galeries visitables sous les ouvrages permet de collecter les eaux d'infiltration, de les controler et de les traiter si necessaire avant de les rejeter dans I'environnement. On estime que la capacite actuelle de ce centre permettra de stocker les dechets de faible et moyenne activite a vie courte produits en France pendant encore au moins 50 ans. Y sont stockes principalement quatre types de dechets. -

Les dechets de faible activite issus de Industrie nucleaire (EOF, CEA, COGEMA) sont constitues des restes de travaux d'intervention, en general compactes afin d'en reduire les volumes et immobilises, soit par le producteur, soit par I'ANDRA. Par dechets de faible activite, on entend des dechets ayant une activite specifique inferieure a 185 Bq g-1 en contamination a et une activite totale en radioelements a vie courte (c'est-a-dire de periode inferieure ou egale a 30 ans) inferieure a 37 kBq g~1.

-

Les dechets de moyenne activite, a predominance activite (3 a vie courte, sont constitues de materiaux et materiels usages, en general enrobes dans une matrice appropriee et places dans des conteneurs dont on peut garantir I'integrite pour les 300 prochaines annees. Par dechets de moyenne activite on entend des dechets pouvant avoir une activite significative (par exemple plusieurs curies de 60Co) a condition que la qualite du colis permette de garantir sa decroissance radioactive alors que le confinement est toujours assure (c'est ce qui explique la surveillance prevue de 300 ans).

-

Les dechets en provenance des hopitaux, des universites et des laboratoires qui utilisent des produits radioactifs sont en general pris en charge par I'ANDRA directement chez le producteur et c'est I'ANDRA qui en assure le conditionnement avant stockage ; ceci represente aujourd'hui pres du quart des receptions de dechets par I'ANDRA.

-

Les residus d'incineration ou de fusion de dechets primaires sont issus de ('Industrie nucleaire qui utilise cette voie pour diminuer les volumes a stocker. II s'agit en general de cendres immobilisees dans un coulis de ciment ou de machefers egalement bloques.

Le CSA est une INB au meme titre que les autres installations nucleaires ; il fait done I'objet comme les autres INB d'une surveillance de la part de la DSIN et la DRIRE locale. De son cote, I'ANDRA exerce un controle rapproche sur les differents producteurs pour s'assurer de la conformite aux specifications et agrements, de la non-presence de produits interdits et plus generalement de la qualite des dechets conditionnes regus. La « trac,abilite » des colis mis en stockage repose sur un systeme de code a barres et un archivage perenne des donnees propres a chaque colis.

184

Le cycle du combustible nucleaire

Figure 18.3. Centre de stockage de I'Aube.

Figure 18.4. Cases et toits mobiles au Centre de I'Aube.

18 - Stockage definitif et entreposage

185

2. L'entreposage des dechets de haute activite 2.1. Les besoins frangais d'entreposage En attente d'une solution definitive (reversible ou non) pour les dechets ne pouvant pas etre admis au CSA, il faut disposer de moyens d'entreposage, autorises par les Autorites de surete, et susceptibles de proteger les dechets deposes pendant un temps probablement plus long que la contrainte thermique liee a la decroissance. Sur la base du pare actuel des reacteurs electrogenes en France (59 reacteurs dont le reacteur rapide Phenix), en tenant compte de la politique de recyclage du plutonium sous forme de combustibles MOX dans les tranches 900 MWe et du non-retraitement des combustibles MOX irradies (conformement a la politique actuelle d'EDF), les besoins annuels francais d'entreposage de dechets B et C conditionnes sont: -

environ 110 tonnes de combustibles MOX a entreposer en piscine (25 paniers d'entreposage type La Hague) ; - environ 750 conteneurs de dechets vitrifies (soit 115 m3 de verre ou 135 m3 de colis de verre); - environ 1 000 conteneurs de dechets compactes contenant essentiellement les structures des assemblages retraites, coques et embouts (soit 180 m3) ; - environ 100 m3 de dechets B cimentes (contenant des radioelements a vie longue). Ces dechets represented la grande majorite des dechets B et C de I'industrie nucleaire frangaise ; ilssonttousa I'heure actuel le entreposes sur lesiteCOGEMAde La Hague pour le compte d'EDF qui en est le proprietaire. D'autres dechets B et C existent egalement sur les sites COGEMA de La Hague et Marcoule (futs de bitume, conteneurs de verre de I'AVM Marcoule, et autres dechets B en cours de reprise pour conditionnement). Le CEA a egalement des dechets B entreposes sur ses sites, notamment a Cadarache.

2.2. Les criteres de conception des entreposages de dechets B et C Tous ces entreposages sont congus pour une duree de vie minimale de 30 ans et pouvant aller jusqu'a 50 ans. Au-dela, on parle d'« entreposage de tres longue duree » (ETLD, voir chapitre 21). Durant cette periode, les conditions d'entreposage sonttelles que Pintegrite des colis peut toujours etre garantie. Par conception les colis entreposes peuvent toujours etre repris, soit pour leur stockage definitif, soit pour des operations de controle ou de demenagement vers un autre entreposage. Les criteres habituels de surete sont pris en compte : -

confinement (protection biologique et contamination) ; criticite ; risques thermiques (surtout pour les dechets C, les dechets B n'ayant qu'une puissance thermique faible de I'ordre de quelques watts par colis); radiolyse pouvant conduire a des degagements d'hydrogene ; manutention (prise en compte des chutes de colis ou autres charges).

186

Le cycle du combustible nuclea/re

Dans la mesure du possible, la conception prend en compte une surete passive de fagon a limiter ('exploitation des entreposages a des taches de surveillance; par exemple on favorise le refroidissement par ventilation naturelle chaque fois que possible. Ces entreposages sont generalement congus de maniere modulaire, la construction des extensions n'etant faite qu'au moment des besoins ; le systeme de remplissage et de reprise des colis peut alors etre unique quel que soit le nombre d'extensions. Le devenir des combustibles MOX entreposes en piscine reste a definir par EOF. Actuellement aucun n'est retraite compte tenu, notamment, des besoins en plutonium pour la fabrication des combustibles MOX. On a vu que ceci necessite environ 25 paniers par an en piscine, ce qui signifie qu'une seule des quatre piscines de stockage de La Hague suffit pour entreposer les combustibles MOX de 40 annees de production EOF. Deux voies sont etudiees par EOF, soit le stockage en I'etat dans des conteneurs resistants comme devraient le faire les Suedois et les Americains pour leur combustible use, soit le retraitement avec ou non reutilisation du plutonium, en fonction des programmes a long terme d'utilisation du plutonium dans des combustibles MOX (par exemple programme EPR) ou dans des combustibles RNR.

2.3. Exemples d'entreposage de dechets B et C 2.3.1. L'entreposage de dechets vitrifies (dechets C) Les verres sont entreposes dans des puits ventiles (pour assurer le refroidissement) dans lesquels les conteneurs sont empiles les uns sur les autres - jusqu'a 12 dans un puits -, la manutention etant realisee par chateau vehicule par un pont transbordeur. Un module type contiendra 180 puits soit un maximum de 2 160 conteneurs, c'est-a-dire de quoi assurer les besoins frangais de trois annees d'exploitation des reacteurs; un tel module occupe une surface au sol de moins d'un hectare. La conception moderne permet d'assurer le refroidissement par convection naturelle des puits, ce qui supprime le besoin de gros ventilateurs. Des controles continus, en particulier de I'air de refroidissement, permettent de s'assurer de I'integrite des conteneurs (Figure 18.5).

Figure 18.5. Schema d'entreposage de dechets vitrifies.

7 8 - Stockage definitif et entreposage

187

2.3.2. L'entreposage de dechets compactes (dechets B) Comme la puissance thermique degagee est tres faible, il n'est pas besoin d'assurer une ventilation individuelle des conteneurs. On stockera done ce type de dechets dans des entrepots de conception classique, la manutention etant bien evidemment automatisee (par pont ou par chariot automoteur). La compacite de ['ensemble fait que sur une surface au sol d'un hectare, on peut entreposer I'equivalent des besoins frangais de 20 ans d'exploitation des reacteurs.

2.3.3. L'entreposage d'autres dechets B Les memes principes sont applicables aux autres dechets B ; ainsi par exemple, les dechets bitumes sont entreposes dans des casemates surveillees, ce qui permet de s'assurer du bon comportement du col is sur le moyen terme. Dans le cas des dechets cimentes, la resistance mecanique du colis autorise le gerbage sur plusieurs couches. Dans tous les cas, la surveillance active est requise ; par ailleurs la cartographic des entreposages est tenue a jour et comparee avec les dossiers individuels de chaque colis entrepose ; ceci permet de reconstituer I'historique du colis au cas ou un probleme quelconque apparattrait.

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19

Risque a tres long terme des dechets de haute activite

1. Les specificites du risque des dechets nucleaires L'approche commune, celle du public non averti, attribue aux dechets nucleaires, sans qualificatif, une serie de caracteres de risque qui leur seraient specifiques : - leur nocivite n'est pas detectable par les sens de rhomme (rayonnements sournois); - les effets biologiques sur I'individu (cancer) et I'humanite (mutation genetique) existeraient quelle que soit la dose (il n'y aurait pas de seuil); - enfin les dechets nucleaires ont une tres longue vie de nocivite, pouvant atteindre des millions d'annees. En realite ces attributs que I'on donne au risque lie aux dechets nucleaires, et qui les font tant craindre, ne sont pas specifiques : la nocivite de la majorite des toxiques courants, naturels ou chimiques (arsenic par exemple), et celle des poisons biologiques (bacteries et virus) est indetectable par les sens ; les effets des faibles doses sont mieux connus pour les rayonnements que pour la plupart des toxiques courants ; quant a la duree du risque, elle est sans limite pour bien des poisons chimiquement stables. On peut ajouter que les agressions de I'ADN pouvant conduire aux mutations et au cancer ont des sources multiples, et qu'elles sont bien plus nombreuses dans leur ensemble que eel les des faibles doses de rayons ionisants. Les vraies specificites du risque des dechets nucleaires ont deja ete presentees dans les chapitres precedents : - les masses et les volumes sont extremement reduits, notamment pour la haute activite ; - les elements radioactifs, qui sont la source du risque, sont par nature instables et disparaissent progressivement par decroissance, d'autant plus vite qu'ils sont plus actifs ; - les controles et mesures sont incomparablement sensibles, precisement a cause des rayonnements et grace aux appareils developpes depuis un siecle. Ces caracteristiques conferent a la gestion des dechets nucleaires des avantages remarquables : la tres faible masse permet d'investir dans des precedes de confinement et des dispositions de stockage tres raffines ; la decroissance autorise une gestion en plusieurs phases et incite a la separation des elements les plus actifs a long terme ; enfin la sensibilite de la detection est un outil fondamental pour la maitrise et la surete de ['ensemble des etapes.

190

Le cycle du combustible nucleaire

Cependant on ne peut pas se limiter a considerer ('aspect scientifique du risque des dechets nucleaires. Les temps tres longs des differentes operations de gestion, qui peuvent se succeder sur plusieurs decennies et meme sur un siecle ou deux, introduisent ('aspect economique d'une facon particuliere. Par ailleurs les inquietudes du public, relayees ou amplifiees par les medias et le monde politique, amenent a se soucier de I'aspect « societal » et a chercher des solutions egalement« acceptables » sur ce plan-la.

2. Le plan scientifique 2.1. La loi de decroissance radioactive Rappelons la loi de decroissance d'un radioelement (plus precisement d'un radioisotope) :

N et N0 etant le nombre des noyaux instables a I'instant f et a I'origine du decompte, T la « periode » caracteristique du radioelement considere. Apres un temps T, les noyaux d'origine sont desintegres pour la moitie. Suivant cette loi exponentielle, la « vie » d'un radioelement est eternelle a priori mais, apres un temps de decroissance egal a 10 ou 20 T, la fraction restante de noyaux instables est d'environ un millieme ou un millionieme de I'inventaire initial. En pratique c'est la reference a rhomme qui souvent sert de repere pour parler de la « vie » d'un radioelement, vie qui est alors limitee abusivement a 10 ou 20 T. Si 10 ou 20 7 est inferieur a la duree pendant laquelle on peut esperer le maintien du controle humain, on parle de « courte vie », et au-dela de « longue vie ». Si I'on admet que le controle humain peut s'exercer, en comparaison des grands cycles de I'histoire, pendant au moins 3 a 6 siecles par exemple, la periode des radioelements de longue vie peut etre fixee au-dela de 30 ans. Cette « coupure » offre I'interet d'eliminer de la categoric des dechets a prendre en compte pour le long terme presque tous les produits d'activation et de fission, et particulierement les radio-isotopes 137Cs, 90Sr qui constituent la part dominante de I'activite du combustible use apres les premiers temps de refroidissement. Seuls quelques produits de fission ont une longue vie, mais ils sont peu energetiques, emetteurs |3 pur, et tres peu actifs car leurs periodes sont tres longues ("Tc, 129I, 135Cs par exemple). Par centre les actinides du combustible use, qui ont des periodes souvent bien plus longues que 30 ans, et qui se transmutent dans de longues chames de decroissance constituent, au-dela de la premiere phase de 3 a 6 siecles, la composante majeure de I'activite a long terme. Le plutonium qui a plusieurs isotopes emetteurs a, dont les periodes s'echelonnent de 88 ans (238Pu) a 373 000 ans (242Pu), en passant par 24 000 ans pour le plus abondant (239Pu), est de loin Pelement dominant de la composante des actinides, au moment du retraitement. D'ou ('importance de sa separation eventuelle pour une gestion particuliere (Tableau 19.1 et Figure 19.1).

19 - Risque a tres long terms des dechets de haute activite

191

Tableau 19.1. Actinides artificials du combustible use. 47,5 GWj/t 4 ans Periode (ans)

*

Abandance (kg/t U)

U236

2,34 107

5,37

Np237

2,14 106

0,67

Pu 238*

87,7

0,37

a-> 234 U

239

2,42 104

6,10

a-» 235 U

240

6,55 103

2,80

a -> 236U

241*

14,3

1,50

p-> 241 Am

242

3,73 105

0,90

a^ 2 3 8 U

Am 241*

432

0,37

a-> 237 Np

243

7,36 103

0,26

a + p^ 2 3 9 Pu

Cm 244*

18

0,09

a -> 240Pu

Plus actifs 238Pu, 241Pu, 241Am, 244Cm.

Figure 19.1. Decroissance des transuraniens.

192

Le cycle du combustible nucleaire

Par decroissance, les isotopes de plutonium engendrent d'autres actinides artificiels qui ensuite peuvent dominer la radioactivite, plus ou moins temporairement. Le plutonium 240 donne I'uranium 236 ; le plutonium 241 I'americium 241 et apres le neptunium 237 ; quant au plutonium 239, le plus abondant, il donne I'uranium 235, lui naturel... En separant le plutonium des dechets par le retraitement, on retire toute sa descendance, et c'est d'autant plus efficace qu'on attend moins, puisque c'est le plutonium 241 (periode 14 ans) qui engendre la plus active descendance.

En examinant la decroissance des differentes categories d'elements actifs presents dans le combustible use, et en la comparant a I'activite naturelle dans le mineral de ('uranium qui a servi a le fabriquer (activite de I'uranium et de ses descendants, a raison de 8 tonnes pour 1 tonne de combustible), on constate que (Figure 19.2) : -

I'activite de I'ensemble des PF decline tres vite apres un siecle et devient inferieure a celle de depart de I'uranium dans le minerai en moins de 1 000 ans ;

-

I'activite de I'ensemble des actinides rejoint le niveau de I'uranium dans le minerai avant 1 million d'annees, et si on en retire le plutonium par le retraitement avant 10 000 ans (ce qui correspond a I'activite des actinides confines dans les verres produits en France).

Figure 19.2. Decroissance de I'activite du combustible use et des dechets vitrifies.

19 - Risque a tres long terme des dechets de haute activite

193

Au-dela des siecles pendant lesquels peut s'exercer le controle des dechets nucleaires, la perennite des protections mises en place peut s'etendre, sans surveillance ni intervention humaines, pendant une phase d'abandon sans risque relativement longue. Cela depend de la solidite des dispositifs de confinement. Cest cette consideration qui conduit a parler de risque a tres long terme, c'est-a-dire de risque entraine par la ruine des protections mises en place par rhomme. Generalement, on admet que ce risque differe ne peut se manifester qu'apres un ou plusieurs millenaires.

2.2. Activite et nocivite des radioelements de longue vie Rappelons la loi d'activite (disintegration) : avec : N0, M0 nombre de noyaux instables et masse a I'origine, T, t, periode et temps, NA, nombre d'Avogadro (6,022 1O23), A, masse atomique, Logarithme neperien In2 = 0,693. Ainsi, suivant cette loi, I'activite A d'un radioelement est inversementproportionnelle a sa periode T. Une difficulte apparaTt alors avec la classification habituelle en courte et longue vie comme il a ete rappele ci-dessus. Car, logiquement, un radioelement de longue periode a une faible activite. Mais I'echelle de temps de la physique de la radioactivite n'est pas en rapport avec I'echelle humaine qui caracterise la « vie » d'un radioelement: ce qui est long pour rhomme, des siecles ou des millenaires, est court pour la radioactivite. Prenons I'exemple du radium : sa periode est de 1 620 ans, ce qui le classe parmi les radioelements de longue vie ; mais elle est physiquement assez courte pour que son activite soit en fait considerable (1 curie par gramme, soit 37 GBq g"1). On connaTt les accidents graves qu'a entrames la manipulation sans precaution de quantites infimes de radium au debut de la decouverte de la radioactivite. C'est pourquoi il faut se mefier du qualificatif « longue vie », qui ne signifie pas forcement faible activite. Les actinides artificiels crees dans le combustible irradie, en premier le plutonium, appartiennent aux radioelements de haute activite, sauf I'uranium 236 et le neptunium 237, mais a I'echelle humaine ils sont consideres comme de longue vie. La nocivite des radioelements depend d'abord de leur activite et de I'energie de leur rayonnement, ensuite des modes d'agression de la matiere vivante1. Elle est definie en tenant compte d'une part de la nature (a, (3, y et neutrons) et de I'energie des rayonnements, ainsi que de la particularite des differents tissus vivants, et d'autre part des modes d'agression par irradiation externe ou contamination interne. 1. Cette notion est definie dans d'autres cours du CA, a paraltre.

194

Le cycle du combustible nucleaire

Le chapitre 15 a deceit, dans la revue d'ensemble des effluents et dechets de 1'industrie nucleaire, I'impact present de leur gestion sur les sites des installations. On se preoccupe ici de I'impact possible a long terme, c'est-a-dire de I'impact des radioelements artificiels dits de longue vie, qui se trouvent presque exclusivement dans le combustible use. Comme apres la premiere phase de quelques siecles, dite parfois phase « thermique » a cause du niveau de la chaleur degagee par les produits de fission de tres haute activite, les radioelements du combustible use qui subsistent ont des periodes relativement longues, et sont des emetteurs a et (3, le risque biologique a long terme ne peut resulter que d'une incorporation durable (faible debit de dose). La bio-cinetique (« metabolisme ») propre a chaque radioelement determine le niveau de sa nocivite specifique, qui se traduit par la dose delivree par I'activite incorporee et s'exprime par ce qu'on appelle ('equivalent de dose efficace sievert/becquerel. Parmi les radioelements du combustible use, les emetteurs a de la serie des actinides sont plus toxiques que les produits de fission de longue vie. Les equivalents de dose efficace pour ces a varient de 10~6 a 10~7, et pour les p de longue vie de 10~7 a 10~10, selon la CIPR (Tableau 19.11).

Tableau 19.11. Equivalent de dose efficace (en Sv/Bq) des produits de fission et des actinides

du combustible use. Isotope

Actinides

Produits de fission

(Sv/Bq)

plutonium239

2,5 x10'7

americium 241

2,0 x1Q- 7

neptunium 237

1,1 x 10~7

zirconium 93

1,1 x10~ 9

technetium " samarium 151

6,4x1Q-"> 9,8 xlO^ 1 1

En combinant I'activite et la nocivite specifique des differents radioelements de longue vie presents dans le combustible use, source essentielle du risque a long terme, on peut disposer d'une echelle permettant de suivre ['importance relative du risque attache a chaque radioelement (Figure 19.3). On fait generalement cet inventaire (parfois limite a I'activite) en classant les radioelements par leurs ascendants (par exemple le plutonium, tous isotopes confondus, et apres decroissance en lui attribuant I'activite de tous ses descendants). Le diagramme devolution temporelle de la nocivite (ou de I'activite) des composantes radioactives du combustible use met bien en evidence le role premier du plutonium, puis le role second des actinides mineurs. Celui des produits de fission devient negligeable apres quelques siecles. A tres long terme, apres un million d'annees, il demeure le seul risque de I'uranium.

19 - Risque a tres long terms des dechets de haute activite

195

Figure 19.3. Evolution de I'inventaire radiotoxique (ingestion) des composantes du combustible use (45 GWj t~1, ref. ascendants au moment du retraitement a 3 ans). 1 : Total; 2 : plutonium ; 3 : produits de fission ; 4 : actinides mineurs ; 5 : mineral d'uranium initial ; 6 : uranium ; 7 : produits d'activation des structures.

2.3. Les facteurs fondamentaux du risque On revient sur ce qui a ete dit dans le chapitre 1, a propos de la radiotoxicite des dechets nucleaires qui peuvent revenir au contact de la biosphere, apres degradation de leur confinement. II y a deux facteurs fondamentaux pour ce risque : -

la source elle-meme, constitute generalement d'un melange de radioelements avec plusieurs especes chimiques, qui est facile a mesurer a I'origine puis a calculer dans sa decroissance a partir de I'inventaire et des periodes (voir ce qui vient d'etre expose cidessus);

-

le transfert qui fait intervenir en premier lieu la physico-chimie des radioelements, celle des conditionnements et celle des milieux (roches et eaux de transport), puis en second lieu les mecanismes biologiques conduisant a I'incorporation par la cible finale. Ce transfert est complexe a evaluer, a cause des tres nombreux phenomenes qui le gouvernent.

La seule consideration de la source, comme risque dit « potentiel » evalue a partir de I'inventaire, est totalement insuffisante. Le transfert est le facteur cle du niveau de Timpact effectif d'une source de dechets disposee dans I'environnement avec des protections plus ou moins degradees.

2.4. Les solutions techniques Pour proteger durablement la biosphere, on peut agir sur les deux facteurs, source et transfert, separement ou ensemble.

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Le cycle du combustible nucleaire

2.4.1. La source Puisque la decroissance radioactive impose le niveau d'activite des radioelements abandonnes comme dechets, on peut penser a chercher les moyens physiques d'accelerer cette decroissance, en operant une transmutation artificielle, vers des radioelements de courte vie ou si possible des elements stables. Cette transmutation ne peut s'envisager que par re-irradiation neutronique, grace au recyclage dans les reacteurs industriels ou des reacteurs speciaux. Les accelerateurs de particules, qui offrent de multiples possibilites de reactions nucleaires, n'ont qu'un interet scientifique, car ils ne peuvent etre a la hauteur des quantites a transmuter. Par centre, le couplage accelerateur - reacteur sous-critique a ete avance (par exemple par le Prix Nobel Rubbia) comme moyen « hybride » d'augmenter I'efficacite de la transformation pour les noyaux peu fissiles (actinides mineurs et produits de fission), I'accelerateur injectant des protons dans une cible de spallation situee au coeur du reacteur. Dans la pratique, la transmutation au sens large (en y incluant par extension la fission) n'est pas un phenomene dont le resultat est toujours satisfaisant. Par exposition des noyaux lourds aux neutrons, on peut avoir des fissions mais aussi frequemment des captures. Les fissions vont bien dans le sens de I'objectif poursuivi, reduire le risque a long terme, meme si a court terme la radioactivite est augmentee. Avec les captures c'est plus ambigu, on peut augmenter durablement la radioactivite (exemple : le 237Np se fissionne assez peu en neutrons lents, mais il se transmute largement en 238Pu, tres actif et cependant de longue vie - periode superieure a 30 ans). En neutrons rapides, le rapport fissions / captures est plus favorable avec les noyaux lourds, ce qui fait que I'on prefere la reirradiation dans un cceur rapide. Pour les produits de fission de longue vie, dont on envisage aussi parfois la transmutation, les sections efficaces sont faibles et la consommation de neutrons est importante ; en outre la transmutation peut etre « parasitee » si plusieurs isotopes sont melanges (ainsi le cesium stable est active en meme temps que I'isotope 135 de longue vie est transmute ...). Le premier objectif d'une strategic de reduction de la source active des dechets est evidemment d'agir sur la composante majeure du risque a long terme du combustible use, le plutonium. Si celui-ci est recycle, c'est deja un gain important: -

le plutonium n'est plus abandonne dans les dechets de longue vie, ce qui reduit de 90 % environ leur radiotoxicite a long terme ;

-

la production de plutonium residue! des reacteurs qui recyclent est nettement reduite (on a vu qu'avec 30 % de MOX dans un reacteur la production nette est quasi nulle).

L'extension du recyclage aux actinides mineurs, recommandee par la commission Castaing au debut des annees 1980 pour porter a peut-etre 99 % la reduction d'activite des dechets de longue vie, est a priori beaucoup plus ardue. Tout d'abord leur separation d'avec les PF n'est pas facile, et ensuite leurs proprietes nucleaires sont mal adaptees a cet objectif, car ils ont des sections efficaces de capture neutronique nettement superieures a leurs sections efficaces de fission. Ces contraintes se traduiraient, en cas d'application systematique, par la mise en place d'un systeme industriel tres complexe, du cote des usines du cycle et du cote des reacteurs. II faudrait tres probablement recourir a des installations specifiques (usines de tres haute activite et reacteurs « incinerateurs »). En outre il faudrait gerer, dans ce systeme, un important inventaire « tournant » d'actinides mineurs, extremement actifs, qui creerait un tres serieux probleme de surete « active ».

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Les plus recentes etudes confirment ies problemes de la transmutation des dechets de longue vie, qui avaient ete evalues dans le passe. En effet, jusqu'en 1980, il y avait eu un courant d'etude sur le sujet, mais Ies conclusions avaient ete peu encourageantes a cette epoque. Les avantages potentiels en radioprotection a tres long terme paraissaient non seulement difficiles a developper au niveau industriel, mais encore contrebalances par Ies inconvenients a court terme, dus a I'exposition du personnel implique et aux dechets secondaires inevitables avec Ies nombreux recyclages necessaires. Par ailleurs, il etait devenu evident que Ies performances ne seraient pas suffisantes pour ramener le probleme des dechets de longue vie a celui des dechets de courte vie, et qu'il faudrait de toute fagon maintenir le stockage geologique. Les Etats-Unis avaient produit un rapport final negatif en 1980, suivi Pannee suivante par un rapport identique de I'Agence de PEnergie Nucleaire de I'OCDE. Remarque. Quand on connaTt le sort du developpement de la filiere rapide, dans le monde et en France, malgre ses realisations et ses avantages pour la transmutation elle-meme, on peut s'interroger sur la stabilite du recours a une voie aussi complexe, risquee et lente que la transmutation « poussee ».

L'industrie franchise a reussi la mise en ceuvre de la strategic de recyclage du plutonium, grace au retraitement du combustible use et a la fabrication du combustible au plutonium. La vitrification systematique des dechets de longue vie {100 % des produits de fission et des actinides mineurs) complete cette strategic, qui devient ainsi exemplaire, car le risque a long terme est largement reduit par la separation du plutonium et gere de fagon passive par un conditionnement de tres grande resistance : toute nouvelle strategic visant a reduire encore la source des dechets de longue vie devra y etre comparee pour en evaluer Ies progres eventuels, en tenant compte du second facteur fondamental, le transfert. Dans le futur, on peut aussi envisager la strategic qui consiste a repenser I'appareil industriel complet, Ies reacteurs et le cycle du combustible, en visant a modifier sensiblement la quantite et la nature des actinides restant dans Ies dechets de haute activite : -

soit en ayant recours a des reacteurs plus performants en rendement thermique que Ies reacteurs a eau, reacteurs a neutrons rapides ou reacteurs a haute temperature, soit en developpant le cycle thorium.

On peut combiner Ies reacteurs avances et le thorium. Le thorium (Z = 90, A = 232) est plus leger que I'uranium ; par irradiation et capture il aboutit a des noyaux moins lourds que Ies transuraniens (par exemple, il donne tres peu de plutonium). Le resultat serait avantageux sur le plan des dechets pendant Ies 20 000 a 30 000 premieres annees. Mais le cycle thorium ne peut etre lance qu'avec le recours a I'uranium 235. Ces orientations, recyclage des noyaux lourds, recours aux reacteurs avances et au thorium, qui tendent a reduire la source des dechets de longue vie, n'offrent finalement qu'un gain insuffisant par elles-memes, et laissent necessaire le confinement de tres longue duree.

2.4.2. Le transfert L'ideal est le transfert zero definitif que pourrait donner I'evacuation spatiale des dechets de haute activite, hors de notre planete. Mais c'est hors de portee de la technique spatiale telle que nous la connaissons.

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Le cycle du combustible nucleaire

Les solutions de stockage dans notre environnement, celui de la Terre au sens large, doivent en priorite s'appuyer sur les proprietes de transfer! des differentes especes radioactives laissees dans les dechets. Les produits de fission generalement sont facilement mobilises par les eaux et captes par la biosphere, mais leur solubilite entrame un effet important de dilution quand ils arriventen surface (nappe phreatique, riviere, mer...). Les actinides sont au contraire tres peu transferables dans la geosphere et la biosphere dans les conditions habituelles. Ils sont meme tres fortement pieges dans les conditions reductrices qui existent dans les milieux terrestres profonds. Un milieu nature! interessant, pour confiner les dechets nucleaires, est celui des oceans. D'ailleurs les oceans contiennent de fagon tres diluee environ 4 milliards de tonnes d'uranium. Mais les oceans sont sous controle international, ce qui rend impossible une decision au profit des pays nucleaires. Des recherches d'enfouissement dans les depots des grands fonds oceaniques ont cependant ete longtemps menees par I'OCDE-AEN. Reste le milieu naturel stable et isole de la vie qu'est la geosphere profonde. II existe en effet des zones tres importantes de la croute terrestre qui n'evoluent que tres lentement, sur des periodes geologiques se comptant en millions d'annees, et qui ne sont pas en communication avec la surface. Les effets de surface, comme les glaciations ou les recouvrements par les eaux ne peuvent alterer a long terme que 100 a 200 metres des roches solides. L'enfouissement dans de telles zones stables est devenu aujourd'hui la solution de reference pour tous les pays qui ont a resoudre industriellement le probleme des dechets nucleaires. Les recherches correspondantes ont pris une grande ampleur (voir plus loin les chapitres 20 et 21), et elles consolident progressivement la grande surete d'une telle solution. II faut noter enfin que ('ensemble des pays de I'OCDE a declare recemment irresponsable I'entreposage indefini en surface. Aucun ouvrage humain de surface ne peut avoir une perennite suffisante, et il ne faut pas laisser aux generations futures le soin d'y veiller.

2.5. La radioprotection a tres long terme L'ensemble des aspects scientifiques rappeles ci-dessus permet d'envisager une approche de la radioprotection a tres long terme vis-a-vis des dechets nucleaires. Le court terme couvre la phase d'entreposage, qui peut durer plusieurs decennies, un siecle peut-etre. Les dispositions couramment prises permettent de garantir un impact nul. Les moyen et long termes correspondent a la phase du stockage, reversible eventuellement au debut, dans ses periodes de controle puis de resistance passive aux agressions du temps (de quelques siecles a quelques millenaires au moins). II n'y aura aucun relachement d'activite, sauf intrusion humaine. Le tres long terme est celui de la phase de degradation puis de ruine du stockage, marque par la dissemination lente dans I'environnement de I'activite restante (celle des actinides essentiellement), et par la contamination de la biosphere. Si le stockage a ete particulierement bien realise, il peut resister jusqu'au moment ou son impact sur la vie (entre 30 000 et 100 000 ans) s'apparentera a celui du mineral d'uranium par un de ses gisements. L'etude de radioprotection a ces horizons-la est evidemment complexe, elle ne peut se contenter d'un calcul de la source, elle doit imperativement prendre en compte tous les phenomenes engendrant la contamination. On explique au chapitre 20 comment est menee I'analyse multibarriere, qui introduit le transfert dans toutes ses dimensions,

19 - Risque a tres long terms des dechets de haute activite

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avec les lois de la physico-chimie dans les milieux inertes et les lois de la biologie dans la chame de la vie qui aboutit a I'homme.

3. Le plan economique Le combustible use des reacteurs a eau offre une grande flexibilite pour la gestion economique de son devenir, notamment dans le calendrier des depenses a engager: -

il est indispensable de le laisser « refroidir» longtemps, avanttoute manipulation vers un etat final ; son integrite peut aisement etre maintenue sur une longue periode.

En vertu des avantages reconnus au report des depenses et a leur lissage suivant les recettes (« actualisation »), I'industriel qui exploite un pare nucleaire aura tendance a surseoir a toute reprise de son combustible use, en faisant appel a tous les degres de liberte que lui autoriseront les autorites de surete. Cette attitude conduit naturellement a declarer le combustible use comme un dechet global, pour un temps du moins. C'est toute I'ambiguYte de la gestion dite a cycle direct ou ouvert. II est certain que cette gestion de report a plus tard des operations de reprise, si elle se prolonge indefiniment, a un avantage de cout immediat, notamment sur le retraitement qui se fait apres 3 a 10 ans de refroidissement. Mais sur le plan du risque a tres long terme, I'approche purement economique, avec des criteres d'avantages a court terme, a beaucoup d'inconvenients : -

-

-

la responsabilite vis-a-vis de la societe future est minimale, car elle n'est souvent constitute que par une reserve financiere conventionnelle (par exemple aux Etats-Unis par un fonds alimente a raison d'un millieme de dollar par kWh nucleaire); le schema de reference est le stockage en I'etat du combustible use, sans aucune separation, done avec une source radioactive maximale (comportant tout le plutonium, tout I'iode par exemple), presentant I'attrait de devenir une mine de plutonium. Les difficultes de conception des conditionnements et des installations de stockage sont aussi maximales; I'attente indefinie d'une mise en ceuvre de I'etape finale, que cette approche laisse apparattre, renforce la conviction du public qu'il n'y a pas vraiment de solution disponible pour le probleme des dechets de I'industrie nucleaire.

4. Le plan « societal » Les opposants au nucleaire ont trouve le meilleur angle d'attaque dans le probleme du risque des dechets de haute activite, lies au combustible use. Au point qu'ils ont convaincu fermement une large fraction de I'opinion publique de son caractere inacceptable. Tout progres dans le developpement de I'energie nucleaire passe desormais par la consideration serieuse de cet aspect particulier, mais non familier aux scientifiques et aux techniciens. Le plan « societal » de la question des dechets nucleaires est encore extremement confus, malgre les efforts tentes dans tous les pays nucleaires, ou en Europe dans le cadre communautaire. En France, des avancees ont ete possibles au moment des debats

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parlementaires de la loi Bataille (1991), loi qui a fixe les axes de recherche pendant 15 ans (voir chapitre 21). Mais la rechute dans la cacophonie se manifeste dans notre pays depuis quelques annees, la contestation tirant profit de la moindre interrogation scientifique, par exemple sur les sites recherches pour des laboratoires souterrains, et egalement de la prudence des decisions politiques. II paraTt cependant possible d'apporter dans ('inevitable debat public de la methode et de la rigueur. II suffit de refuser la diffusion des idees recues et d'eclairer les principes auxquels adhere la majorite. Par exemple on peut reflechir aux points suivants : - relativiser obstinement le risque des dechets nucleaires, en le plagant dans ('ensemble des risques a long terme (il y a des toxiques nombreux qui sont stables, « eternels », et surtout qui sont disperses sans grande precaution) ; - rappeler que la vie s'est adaptee au niveau de la radioactivite naturelle, qui est un etalon comprehensible par le public ; - discuter de maniere serieuse le « droit» des generations futures qui, jusqu'a maintenant, n'est precisement pas defini en terme de droit, et cela dans le cadre general de la responsabilite de la societe presente vis-a-vis de I'avenir de I'humanite ; - relativiser aussi la vision que I'on a de la societe future (mode de vie, niveau economique, niveau de connaissance, notamment scientifique), et rester modeste dans la prevention de lui laisser un « paradis » terrestre; avoir conscience que revolution de la civilisation est imprevisible, et ne pas faire de pari sur le progres ; - rester prudent dans la prise en compte d'un principe de reversibilite, qui pourrait en fait deboucher sur le transfert des charges aux generations futures, en traduisant un refus de responsabilite de notre propre generation ; - enfin definir une application pragmatique du principe de precaution, dans tous les domaines ou existe un risque non totalement cerne, de fagon a ne pas bloquer I'action vers le progres. La reflexion s'etendrait facilement dans un debat serein et non partisan. Une telle demarche, qui suppose que la pensee se developpe sur ce genre de question parallelement aux besoins des debats, debarrasses des dogmes, merite un cadre international. En Europe, c'est une recommandation qui est souvent faite a la Communaute, car la sensibilite de la societe aux risques s'est elargie bien en dehors du nucleaire (pollutions diverses de I'environnement, gaz a effet de serre, OGM, ESB...).

^% ^\ Le stockage geologique JU • multibarriere, ^m\J solution de reference 1. Pourquoi le stockage geologique des dechets nucleaires de longue vie ? II a ete rappele dans les chapitres precedents, 18 et 19, d'une part que la protection vis-avis des dechets nucleaires est reglee dans le present par le stockage definitif des dechets de courte vie et par I'entreposage sur de ceux de longue vie et, d'autre part, que quelle que soit la reduction operable a la source, il demeure un probleme de protection a tres long terme pour les dechets de longue vie, qui peut trouver une solution dans I'enfouissement en roche profonde et stable. On sait que la nature elle-meme stocke dans les roches une grande quantite de metaux lourds radioactifs naturels, en donnant I'exemple de la performance possible d'un tel confinement. Toute autre solution pratique que le stockage geologique sur les continents a des inconvenients qui paraissent redhibitoires, meme si des conclusions favorables ont pu etre tirees des etudes sur les fonds marins, ou si la recherche se poursuit, notamment en France, sur le renforcement des confinements en surface ou pres de la surface, considered comme reversibles a priori. Le milieu maritime est international; quant au stockage eventuel en surface, il n'offre pas de garantie a tres long terme.

2. Le concept du stockage geologique a barrieres multiples On n'envisage pas de faire un depot en « vrac » des dechets de longue vie, dans des cavites simples creusees en profondeur (la Russie a precede cependant a des experimentations d'injection a grande profondeur de dechets liquides de haute activite). Le stockage geologique est congu avec la meme approche de surete que les installations industrielles nucleaires, en organisant une « defense en profondeur », grace a des barrieres multiples. II y a pour un stockage geologique deux types de barrieres, artificielles et naturelles, destinees a cooperer dans le temps a la protection centre la dispersion de la radioactivite des dechets de longue vie. Les deux types participent a deux fonctions essentielles du stockage (Figure 20.1) : -

retarder la migration des radioelements pour profiler de leur decroissance le plus longtemps possible ;

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Le cycle du combustible nucleaire

Figure 20.1. Concept du stockage profond a barrieres multiples.

-

filtrer in fine, quand la deterioration fait son ceuvre, le flux des radioelements restants vers Penvironnement de surface et la vie.

Les barrieres artificielles, qui sont construites par I'homme, comportent la matrice elementaire ou sont confines les dechets (le verre, le ciment ou encore le bitume, la resine), un conteneur metallique ou meme plusieurs embottes, enfin des materiaux de remplissage des cavites de stockage et des dispositifs de scellement des galeries et puits d'acces. Ces barrieres artificielles ont un role d'isolation absolue, sauf accident exceptionnel ou reprise/intrusion, pendant la premiere phase du stockage, celle ou existe le risque le plus important du aux produits de fission encore tres actifs apres le depot (137Cs et 90Sr). Dans une seconde phase, pendant laquelle une agression par I'eau souterraine peut lentement se faire jour, el les participent au filtrage du flux radioactif, par leur resistance prolongee (probablement plusieurs millenaires), et par leurs proprietes de piegeage physicochimique (grace au choix judicieux des materiaux de la barriere ouvragee autour des colis et dans les scellements). Voici quelques caracteristiques des differentes barrieres etudiees dans le monde pour des concepts et des geologies tres divers. Matrices. Outre celles citees ci-dessus, des laboratoires etudient des ceramiques ou des roches artificielles. Les matrices metalliques, un moment retenues pour certains dechets, comme les « fines » du retraitement, semblent abandonnees aujourd'hui. Conteneurs. Le conteneur qui rec.oit les matrices confinant les dechets n'est generalement pas choisi en fonction d'une specification precise des futurs stockages. Dans I'exemple du verre, le conteneur repond a

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des specifications de la vitrification, de la manutention, de I'entreposage de quelques dizaines d'annees, mais pas aux conditions des stockages geologiques, qui evidemment varient d'un pays client du retraitement a I'autre. C'est pourquoi on envisage d'ajouter un « surconteneur » adapte a chaque stockage. Ce second conteneur peut alors avoir des fonctions precises de barriere, comme la resistance mecanique a la poussee de la roche profonde, la resistance a la corrosion, des effets geochimiques favorables apres deterioration (le fer par exemple est reducteur). On trouve des propositions pour des surconteneurs epais en acier ou en fonte, ou des surconteneurs sandwich comportant des revetements de metaux nobles tres resistants a la corrosion. Barrieres dites ouvragees. II s'agit des barrieres construites in situ pour remplir I'espace des cavites creusees dans la roche. Naturellement elles sont choisies en fonction du type de roche d'accueil. Si la roche est du sel ou de I'argile, on choisit les memes materiaux ; si on est dans une roche dure, plus ou moins fissuree, comme le granite, on selectionne un materiau argileux, gonflant et impermeable. La fermeture des puits et galeries de service fait aussi appel a des scellements cimentes.

Les barrieres naturelles que presente le site selectionne pour le stockage sont constitutes par la roche hote et, au-dela, par les differentes couches de la geosphere jusqu'a I'environnement de surface. Ces barrieres, et tout particulierement la roche hote, ont un role de protection permanente, a I'origine du depot en s'opposant a toute agression vis-avis des barrieres artificielles, notamment en les tenant hors des courants hydrauliques, et ensuite a long terme en filtrant, piegeant, dispersant le flux radioactif qui finit par remonter du stockage. Pour I'avenir tres lointain, c'est evidemment cette dynamique des phenomenes geologiques qui peut seule assurer la protection. Roche d'accueil. Beaucoup de types de roche peuvent convenir, a condition que la stabilite a long terme soit assuree et qu'il n'y ait pas de circulation d'eau significative. II peut y avoir de I'eau, mais qui remonte en surface sur un temps tres long, se comptant en dizaines, centaines de milliers d'annees (cas des granites). En Europe les etudes sont centrees sur les grands domes de sel (Allemagne), I'argile (Belgique, France), ou les granites (Suede, Finlande, Suisse et de nombreux pays moins avances dans leur recherche).

On comprend qu'un stockage profond est en fait un systeme artificiel et naturel complexe qui, pour apprehender sa performance d'ensemble, demande de mobiliser a la fois les sciences de I'ingenieur, les sciences de la Terre et pour I'etude de ['impact les sciences de la vie.

3. L'avancement des projets de stockage geologique dans le monde et en Europe Bien que I'idee de cette solution soit deja ancienne, la complexite de son etude et aussi I'indecision des responsables industriels et politiques, « encourages » par ['inevitable delai de refroidissement des dechets de haute activite, font qu'aujourd'hui il n'existe pas encore de realisation de ce type dans le monde. Tout au plus y a-t-il aux Etats-Unis un debut recent de stockage profond de dechets militaires de moyenne activite (Nouveau-Mexique, dans le sel). Cependant depuis vingt ans environ, les projets ont ete activement menes dans les pays ayant recours a la production nucleaire d'electricite. Cela a commence dans les pays les premiers engages massivement, les Etats-Unis et I'Allemagne, ainsi qu'en Suede suite a sa decision de renoncer completement au nucleaire. D'enormes travaux, en etudes et sur le terrain, ont ete lances aux Etats-Unis et en Allemagne tout au long de ces vingt annees : en principe, en vue de qualifier les sites choisis a I'origine, Yucca Mountain dans le Nevada, ou Gorleben dans Test de I'Allemagne, le premier site ayant une roche

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volcanique ancienne dans le desert, le second etant forme par un dome de sel gigantesque sans eau. Mais ces deux projets, indubitablement les plus avances, sont aujourd'hui soit en panne (Allemagne par blocage politique) soit en procedure d'autorisation a stocker (Etats-Unis). La Suede se prepare a choisir un site mais, vu la nature de son sol profond, celui du bouclier granitique scandinave qui est relativement uniforme, elle a travaille activement sur le concept d'un stockage dans ce granite (qui est assez fissure). Ainsi la Suede a cherche a renforcer au maximum le role des barrieres artificielles, notamment en developpant un conteneur de cuivre pur susceptible de resister quasi indefiniment a I'agression par I'eau granitique, et en retenant en complement une barriere ouvragee tres etanche a base d'argile. La Finiande progresse a peu pres au meme rythme que la Suede, les deux pays nordiques visant une fin de cycle sans retraitement. La France pour sa part laisse encore ouverte I'option de la roche d'accueil, qu'elle se propose de selectionner apres des recherches in situ dans des laboratoires souterrains. La loi de 1991 a etabli le cadre de sa demarche (voir chapitre 21). Avec d'autres pays europeens la France a contribue a mettre sur pied un programme de recherche de I'Union europeenne. Pour les plans 3, 4, 5 (periode 1989-2002), le budget communautaire dedie a la recherche partagee, financee a 50 % par PUnion, est de 135 millions d'euros pour les dechets nucleaires, la part preponderante etant celle du stockage des dechets de haute activite. La Suisse s'est associee a ce programme communautaire, en ouvrant a la collaboration son laboratoire creuse dans le granite des Alpes bernoises (site de Grimsel). Grace a la mise en commun des efforts de recherche, I'Europe occupe maintenant la premiere place dans ('elaboration d'un concept de stockage geologique, avec les connaissances necessaires a I'etude de ses performances. Les acquis scientifiques et techniques de I'Europe permettent aux organismes charges de la gestion des dechets de longue vie et aux autorites de surete d'analyser de fagon approfondie les conditions de realisation des futurs centres de stockage profond, dans une variete de roches. Le partage des recherches dans un ensemble de laboratoires souterrains europeens contribue au premier chef aux progres communautaires : granite en Suede (site d'Aspo) et en Suisse (site de Grimsel), sel en Allemagne (sites d'Asse et Gorleben), argile en Belgique (site de Mol) et bientot en France (site de Bure dans la Meuse). Tous ces efforts de recherche, qui se developpent aussi aux Etats-Unis, au Canada, au Japon et ailleurs, doivent permettre d'aboutir a des debuts de realisation industrielle dans un delai de 15 a 20 ans, si les progres socio-politiques suivent le rythme evidemment (voir le plan « societal » au chapitre 19).

4. Etude phenomenologique, recherches, analogues naturels II faut revenir un peu en detail sur les phenomenes nombreux qu'il faut imperativement comprendre et pouvoir modeliser, en vue de faire des previsions de performance a tres long terme, qui soient non seulement scientifiquement solides mais aussi convaincantes pour le public. Les echelles de temps et I'enchamement des phenomenes servent de fil conducteur a I'etude. Par ailleurs des interactions entre les phenomenes sont souvent a considerer (par

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exemple les produits de corrosion des materiaux des conteneurs entrent en jeu dans la physico-chimie locale de la migration de la radioactivite). Ceci conduit a etudier les effets des couplages. L'etude est en fait divisee en trois grands domaines, qui jalonnent le parcours de la migration de la radioactivite au cours du temps. Le domaine des barrieres artificielles. Les col is de dechets sont tout d'abord soumis a leurs propres, phenomenes internes (chaleur et rayonnement) et a la pression externe exercee par le sol profond. Puis ils subissent tres lentement I'agression des eaux penetrant les barrieres ouvragees. La corrosion finit par marquer les conteneurs dont la perte d'etancheite entrame finalement la deterioration des dechets et la liberation de la radioactivite restante. Les barrieres ouvragees sont disposees entre les colis et la roche, et elles sont ainsi sollicitees des deux cotes. Elles peuvent avoir une certaine repercussion des effets thermiques et radiatifs venant des colis, tout en subissant les effets mecaniques de la roche (pression et mouvements eventuels) et surtout elles opposent une resistance a I'arrivee des eaux profondes. Le champ proche nature!. C'est le milieu qui entoure immediatement les colis et les barrieres ouvragees, et qui correspond a un etat perturbe de la roche d'accueil. Les phenomenes qui apparaissent dans le champ proche sont de plusieurs natures : -

les effets mecaniques (stabilite des galeries, fractures et convergence de la roche), les effets thermiques dus a la chaleur residuelle des dechets de haute activite, les effets hydrauliques (desaturation pendant les travaux, fracturation), les effets des reactions physico-chimiques.

L'ensemble de ces effets presente des couplages importants, et il y a interaction avec les barrieres artificielles. L'etude globale du champ proche aboutit a le caracteriser comme un « terme source » visa-vis du milieu geologique externe. On cherche a evaluer ['emission de radioactivite du champ proche vers I'exterieur, en fonction du temps. Les echanges a I'interface champ proche/exterieur sont evidemment fondamentaux, et il y a la aussi un couplage, car ['evolution du champ proche depend fortement de I'hydrologie qui I'entoure ainsi que de la stabilite environnante (seismes, erosion, evolution marine...). Le champ lointain nature!. C'est le milieu geologique non perturbe par la construction du stockage, qui s'etend de la zone profonde d'accueil jusqu'a I'interface avec la biosphere. Comme on I'a vu son role est tout a fait capital pour la protection du stockage a toute epoque. Ses fonctions de retard et de filtrage calibrent le retour vers la biosphere de la radioactivite a tres long terme qui demeure dans le stockage. Ses aspects principaux concernent: -

la stabilite geotectonique de la roche hote, I'hydrologie profonde, la geochimie des especes radioactives liberees par le terme source du champ proche, les exutoires vers I'environnement (la dilution dans les eaux de surface a une grande importance, car elle intervient au premier chef dans I'impact sur la biosphere).

Ainsi I'etendue des connaissances a rassembler pour evaluer la surete a tres long terme d'un stockage est tres vaste, et les programmes de recherche correspondants sont

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forcement de grande ampleur et de longue haleine (voir le chapitre 21 pour I'exemple de la France). Plusieurs remarques importantes sont cependant a faire. La diversite des disciplines scientifiques mises a I'epreuve a I'avantage de confier I'effort d'etude a une fraction tres large de la communaute scientifique, ce qui ne peut que contribuer a la confiance des decideurs et du public. Le probleme pris dans sa general ite, sur une base toute theorique, risque de rester ouvert indefiniment; il doit done le plus rapidement possible etre ramene a des cas precis d'etude, de maniere a limiter I'etendue des incertitudes et des hypotheses, ce qui veut dire qu'il faut choisir des sites et les explorer grace a des laboratoires souterrains. C'est d'ailleurs cette demarche qui a ete suivie par les pays les plus avances (les Etats-Unis, I'Allemagne, la Suede, la Belgique par exemple et bientot la France). La nature est une reference qu'il faut rigoureusement observer, grace aux « analogues naturels » des stockages que constituent les gisements d'uranium et de thorium ; on peut y lire ('evolution de la migration dans la geosphere et de la diffusion dans la biosphere sur des periodes geologiques tres longues (a Oklo au Gabon, des reacteurs naturels ont fonctionne il y a deux milliards d'annees).

5. Les modelisations de performance des stockages geologiques Ces vingt dernieres annees de travaux sur le probleme des stockages profonds de dechets nucleates, a I'echelle du monde, avec des moyens considerables et ['engagement de nombreuses equipes pluridisciplinaires, ont consolide enormement cette solution, qui est devenue desormais la reference indiscutable. Pour evaluer la performance de la protection a tres long terme, il est inevitable de passer par une modelisation de ('evolution du stockage. Cette modelisation est batie pas a pas, au fur et a mesure de ('acquisition des connaissances de base, et est confronted aux exemples naturels qui lui conferent une validite globale. Tous les acteurs, organismes responsables de la gestiqn des dechets et autorites de surete, ont compris I'interet d'echanger leurs approches et resultats de modelisation. En Europe, une veritable institution informelle s'est ainsi mise en place, sous I'egide de la Commission europeenne, qui dirige des « exercices » periodiques de modelisation a chaque etape de progres des etudes, exercices auxquels participent tous les acteurs qui desirent comparer leurs modeles. Trois grands exercices communautaires ont ete publics, PAGIS en 1988, EVEREST en 1996, SPA en 1999. Ces exercices utilisent des scenarios d'evolution, qui couvrent aussi bien une histoire normale du stockage que des perturbations diverses (scenarios dits alteres). Us cherchent aussi par des calculs de sensibilite a cerner I'effet potentiel des incertitudes qui demeurent sur les lois phenomenologiques et les parametres physiques ou chimiques. Us prennent en compte, selon le cas, les dechets de retraitement ou au contraire le combustible use sans traitement, couvrant ainsi la diversite des politiques de fin de cycle dans I'Union europeenne. L'evaluation de la protection va jusqu'au calcul de I'impact sur I'humanite lointaine, supposee figee dans ses caracteristiques actuelles. II y a cependant une tendance a

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s'arreter au calcul du niveau de contamination de I'environnement, notamment dans les eaux de surface au contact avec la biosphere. Les impacts radiologiques calcules par les exercices europeens successifs sont tout a fait inexistants pendant tres longtemps (plusieurs millenaires), et insignifiants pour les populations plus lointaines. Les niveaux d'impact seront 100 a 1 000 fois inferieurs a celui de 1'exposition naturelle moyenne. Meme dans les scenarios alteres, tenant compte de defauts structured de confinement artificiel ou geologique, d'intrusions humaines involontaires, I'impact serait acceptable (Figure 20.2).

Figure 20.2. Evaluation de ('impact d'un stockage geologique (granite). Exercice europeen "Spent fuel disposal Performance Assessment (SPA)" - Resultats IPSN. II est interessant de remarquer que la « signature » d'un stockage geologique ne se manifesterait, apres peut-etre des dizaines de millenaires de silence, que par des produits de fission de tres longue vie, mais a dose homeopathique a cause de la dilution par I'eau de transport de surface ; etqu'atres longtermeellecomporterait, aussi atresfaible niveau, des radioelements peu solubles, les actinides des chames de decroissance - redevenus naturels pour la plupart - et leurs descendants. In fine, on aurait bien un impact analogue a celui d'un gisement d'uranium, qui n'est qu'un depot nature! d'actinides provenant des « dechets stellaires radioactifs ». A noter que I'enfouissement eventuel de ('uranium rejete par I'industrie nucleaire, qu'il soit I'appauvri de I'enrichissement ou I'irradie du retraitement, ne ferait que renforcer la presence de I'uranium et de ses descendants dans le retour a la biosphere.

Cette page est laissée intentionnellement en blanc.

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Voies de recherche en France (loi de 1991)

1. Introduction : pourquoi une loi de recherche ? On a vu que le contenu radioactif des dechets du cycle electronucleaire presents un risque pour I'homme, et son environnement, particulierement difficile a cerner avec les radioelements de longue vie (voir chapitre 19). La definition des modalites de gestion de ces dechets de longue vie et I'ensemble des recherches qui s'y rapportent sont necessaires pour reduire le risque au niveau le plus faible raisonnablement possible. Cette question a ete abordee de longue date d'un point de vue scientifique et technique. Depuis lors, les interrogations et les inquietudes qui ont pu se faire jour au sein du public ont conduit le legislateur a se saisir de la question. Mais pour comprendre Devolution qui a conduit a legiferer sur la recherche, situation exceptionnelle parmi les pays nucleaires, il est interessant de resumer I'historique du probleme des dechets nucleaires en France. Pour simplifier on retient deux periodes : celle qui va des origines du CEA, apres 1945, et qui s'arrete a la mise en service du pare REP d'EDF, a la fin des annees 70 ; et celle qui a correspondu au changement d'echelle dans la production des dechets radioactifs apres le developpement de ce pare. Pendant la premiere periode, les dechets de faible activite sont entreposes dans les centres de recherche du CEA (exemple Saclay), puis transported au Centre de la Manche pour un stockage vu comme definitif. Quant aux combustibles des premieres centrales (UNGG), ils sont retraites systematiquement, mais les dechets resultant ne sont pas conditionnes pour la plus grande partie (les produits de fission liquides sont entreposes en I'etat dans des cuves refroidies, et des dechets de moyenne activite comportant des emetteurs a sont entreposes dans des silos). Cette periode connaTt cependant une recherche de qualite sur les dechets menee par le CEA, portant sur leur traitement et leur conditionnement: traitement des effluents liquides et gazeux, decontamination des dechets solides, incineration, cimentation, enrobage bitume ou resine, etc. A la fin de la periode, le CEA obtient un resultat mondialement reconnu, en mettant en service a Marcoule le precede industriel de vitrification des produits de fission separes par le retraitement (atelier AVM en 1978). En 1977-1978 s'ouvre la seconde periode avec la mise en service de la premiere grande centrale EOF a Fessenheim. La donne change pour les dechets produits par I'industrie nucleaire, puisque cette production suit le developpement de la generation de I'electricite

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Le cycle du combustible nucleaire

nucleaire, qui passe en 20 ans de moins de 20 a 400 TWh par an. Paral (element au pare des reacteurs se sont construites les usines du cycle, dont les deux grandes usines de retraitement de La Hague. Ce grand developpement du nucleaire entrame une gestion technique avancee des dechets, avec par exemple le conditionnement en ligne a La Hague, mais le public et le monde politique se sentent de plus en plus dephases, avec le sentiment croissant d'un manque de « transparence ». Le malaise ayant continue a grandir, le gouvernement met en place des commissions d'enquete et recommandation (commission Castaing pour le retraitement et ses dechets, commission Goguel pour le stockage geologique, au debut des annees 1980). Ces commissions recommandent d'une part de poursuivre le retraitement - recyclage en le poussant aux actinides mineurs, d'autre part d'etudier le stockage profond (a plus de 200 m) pour le depot definitif des dechets de longue vie dans une variete de roches du territoire national. Des actions sont alors lancees en suivant ces recommandations. Le CEA ebauche un programme de recherche sur le retraitement « pousse », portant sur la separation des actinides mineurs et leur transmutation. Les autorites de surete elaborent une regie fondamentale de surete des stockages profonds (referencee RFS lll.2f). L'ANDRA entreprend I'etude du stockage geologique et se met a la recherche de sites pour creer des laboratoires souterrains dans les roches les plus favorables. Cette action sur le terrain rassemble les oppositions les plus vives (et meme violentes) en 1989. Le Gouvernement decide de reprendre tout le probleme, avec ^implication du Parlement. Le depute Christian Bataille est charge de la mission de concertation, debats puis mediation qui s'acheve par la structuration des recherches sur les dechets nucleaires dans le cadre d'une loi.

2. Les axes de recherche fixes par la loi La loi du 30 decembre 1991 a precise les grandes orientations qui doivent etre eel les de la politique publique et les voies a explorer pour determiner des solutions operationnelles. Elle constitue le premier texte legislatif global concernant le domaine de la gestion des dechets radioactifs a haute activite et a vie longue. Elle identifie les principes que devront respecter les solutions de gestion des dechets radioactifs : respect de la protection de la nature, de I'environnement et de la sante, en prenant en consideration le droit des generations futures. Elle prevoit un important programme de recherche structure autour de trois axes : separation-transmutation, stockage en formation geologique profonde, conditionnement et entreposage de longue duree. Elle en fixe le calendrier avec un rendez-vous en 2006 pour le Parlement (Tableau 21.1). L'esprit de la loi est de permettre une large exploration des solutions possibles pour la gestion des dechets radioactifs. Les travaux de preparation de la loi et les analyses de ('Office parlementaire devaluation des choix scientifiques et technologiques ont souligne Pimportance des options qui permettraient de limiter le volume et I'activite des produits promis a un entreposage de longue duree ou a un stockage en formation geologique profonde et ont conclu que ces options constitueraient un element essentiel de ('acceptation des depots souterrains par les populations concernees.

27 - Voies de recherche en France (loi de 1991)

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Tableau 21.1. Les trois axes de recherche de la loi de 1991. AXE

Responsable Principal

Separation et transmutation des radioelements (HALV) de haute activite et longue vie

CEA

Stockage geologique (labos profonds)

ANDRA

Precedes de conditionnement et entreposage de surface

CEA

Les trois axes de recherche retenus par la loi repondent a cette logique : -

-

-

I'axe 1 etudie les solutions permettant de reduire substantiellement la quantite et la nocivite des dechets, pour une meme quantite d'energie produite, en les separant, et en les transmutant ; I'axe 2 etudie le stockage profond, solution apte a pouvoir devenir definitive sans intervention humaine, le milieu geologique permettant d'assurer le confinement a I'echelle des durees caracteristiques des radionucleides a vie longue, en maintenant pendant un certain temps une option de reversibilite permettant a nos descendants de retirer eventuellement les col is ; I'axe 3 etudie un mode de gestion sous la surveillance de la societe, dans des installations d'entreposage de longue duree en surface ou en subsurface, permettant de proteger les col is, en ayant prealablement effectue un conditionnement sous une forme garantissant un confinement durable et la possibilite de les reprendre dans des conditions sures et techniquement etablies.

Les pouvoirs publics ont designe un pilote pour chaque axe : le CEA pour les axes 1 et 3 et I'ANDRA pour I'axe 2. Ces recherches sont menees en cooperation avec les partenaires de I'industrie nucleaire, EOF, COGEMA et FRAMATOME ainsi qu'avec le CNRS et les Universites. Elles beneficient d'importantes collaborations europeennes et internationales. Elles sont continument evaluees par la Commission nationale devaluation, qui etablit et diffuse chaque annee un rapport devaluation. Les travaux de recherche ont pour objectif d'apporter une palette ouverte de briques technologiques, qui permettent d'evaluer, par families de produits a considerer dans la gestion des radionucleides, les cinq operations de base qui se deduisent des trois axes de recherche de la loi de 1991 : -

leur separation en vue d'une gestion plus specifique; elle est envisageable grace a ['existence de I'industrie du retraitement ;

-

leur transmutation, dans des reacteurs electrogenes ou specialises, pour les transformer en atomes non radioactifs ou a vie plus courte ;

-

leur conditionnement sous forme de colis visant a un confinement performant a long terme pour I'entreposage de longue duree ou pour le stockage ;

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-

Le cycle du combustible nucleaire

la mise au point d'une capacite d'entreposage de longue duree des colis pour disposer de flexibilite sur la strategic globale de gestion des dechets ; I'etude approfondie de solutions de stockage des colis en couche geologique profonde (axe 2 pilote par I'ANDRA), avec le maintien d'une logique de reversibilite, en vue d'isoler les radionucleides de la biosphere jusqu'a ce que leur radioactivite devienne negligeable.

La combinaison de ces operations elementaires permettrait de constituer des solutions de gestion des dechets de longue vie, qui seraient plus facilement acceptees. La structuration et la presentation des programmes sont donnees dans le document Strategic et programmes des recherches au litre de la loi de 1991, actualise annuellement, prepare conjointement par les deux pilotes, I'ANDRA et le CEA, avec les autres acteurs de la loi, sous I'egide du ministere charge de la Recherche. La position frangaise sur la recherche dans le domaine des dechets nucleates n'est pas isolee. Le Japon a lance un ambitieux projet (OMEGA) visant a faire des separations systematiques des radioelements presents dans les dechets de haute activite et de longue vie - non seulement les actinides, mais aussi une grande partie des produis de fission - en vue de leur appliquer des gestions specifiques. Cette remise a plat de la reflexion sur la gestion des dechets de longue vie a ete elargie au debut des annees 1990 dans le cadre international, a I'OCDE/AEN, et en Europe elle a ete soutenue par la Commission. Ce qui a donne lieu a des echanges (seminaires, publications) et a des propositions de recherche sur des concepts nouveaux ou « revisites ». Parmi les concepts les plus « remarques » figurent du cote des reacteurs les systemes dits hybrides et du cote du cycle les precedes dits pyrochimiques, les deux concepts ayant ete etudies a I'origine aux EtatsUnis, respectivement a Los Alamos et a Argonne. Un systeme hybride comporte un accelerateur de protons de haute intensite, produisant dans une cible les neutrons necessaires a la reaction en chaine dans un coeur sous-critique, multiplicateur de neutrons. Un tel coeur pourrait s'affranchir en principe des limites de surete, quand il est charge en actinides tres perturbateurs dans un coeur critique. Sa vocation serait celle d'un « incinerateur» nucleaire de transuraniens. Quant a la pyrochimie, elle vise a remplacer le precede d'extraction PUREX par des separations en sels fondus, a haute temperature, permettant en principe de separer tous les actinides des produits de fission. Le Prix Nobel Carlo Rubbia a ete ces dernieres annees le promoteur enthousiaste des hybrides, qu'il voit meme se substituer aux reacteurs actuels pour la production d'electricite, avec un cycle au thorium.

3. Les programmes de recherche de I'axe 1 : Separation-Transmutation 3.1. Les objectifs L'objectif general des recherches de I'axe 1 est d'etudier les solutions permettant de reduire substantiellement la masse et la toxicite des radionucleides a vie longue formes lors de la production d'energie nucleaire, en les separant (par des precedes de separation chimique en aval du retraitement des combustibles uses) des autres atomes contenus dans les dechets, puis en les transmutant (en les plagant sous flux neutronique, dans des reacteurs critiques, a spectre thermique ou rapide, ou des systemes hybrides avec accelerateurs), afin de les transformer en atomes non radioactifs, ou a vie plus courte. En complement a la strategic de reference Separation-Transmutation (ST), on examine aussi une voie alternative de Separation-Conditionnement (SC), avec I'etude et le

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developpement de nouvelles matrices de conditionnement specifiques pour les radionucleides separes. L'etude et le developpement de ces matrices, ainsi que la demonstration de leur performance de confinement a longterme, sont menesdans I'axe3. Les etudes de I'axe 1 portent sur: - les actinides mineurs (americium, curium, neptunium), qui represented I'essentiel de I'inventaire radiotoxique a long terme des dechets nucleaires, apres separation du plutonium et de ('uranium du combustible use, grace au retraitement ; - certains produits de fission presentant a la fois un isotope a vie tres longue, d'abondance relative importante dans le combustible use, et des proprietes chimiques les rendant potentiellement plus mobiles (solubilite plus elevee, moindre capacite a se fixer sur les materiaux solides environnants) : iode 129, cesium 135, technetium 99. Le plutonium etant a la fois une matiere energetique valorisable et le principal contributeur a la radiotoxicite potentielle a longterme, les etudes de scenarios s'articulent par rapport a celles qui concernent la gestion a long terme du plutonium. La strategic ST n'a en effet de sens que si en amont est regie le sort du plutonium, ce qui est entrepris en France grace au retraitement et au recyclage du plutonium. Mais on sail combien serait longue et difficile la reduction quasi complete du plutonium. Les reacteurs rapides type « incinerateur de Pu » pourraient en donner le moyen, mais ce n'est plus a I'ordre du jour apres I'arret de Superphenix. Cette difficulte deja eprouvee avec le plutonium, qui a cependant I'avantage d'avoir un contenu fissile important, laisse deviner que la transmutation des autres transuraniens devrait etre particulierement laborieuse.

3.2. Les etudes de separation Les voies de reference du programme sur la separation poussee sont basees sur ('extraction liquide, soit en adaptant le precede PUREX utilise industriellement pour le retraitement des combustibles, soit en developpant de nouveaux procedes complementaires d'extraction liquide, en aval du PUREX. Grace aux etudes menees, sous la direction du CEA, le schema de reference d'un precede avance de separation des principaux radionucleides a vie longue, presents dans les dechets, a ete defini : - le neptunium, I'iode et le technetium pourraient etre separes par des adaptations du precede PUREX utilise industriellement dans les usines de retraitement ; - pour separer ramericium, le curium et le cesium, il a fallu developper une nouvelle chimie de la separation, en concevant des molecules tres selectives capables de les separer; la separation du cesium se fait en une etape, celle de ramericium et du curium en trois etapes car ils ont une chimie tres proche de celle des lanthanides abondamment represented dans les produits de fission. Les families d'extractants ont ete definies, les principales molecules de reference ont ete synthetisees et leurs performances verifiees, ou sont en cours de verification, experimentalement sur solutions radioactives reelles, pour atteindre I'etape de la faisabilite scientifique. L'etape suivante sera celle de la faisabilite technique, en passant de la molecule au precede chimique d'ensemble, qui sera defini et valide dans I'installation Atalante du CEA a Marcoule. On etudie aussi, dans une demarche a plus long terme concernant les reacteurs et les cycles du futur, des procedes de retraitement et separation alternatifs aux procedes par voie hydrometallurgique, notamment les procedes pyrochimiques (dissolution des cibles et separation des especes chimiques en milieu sels fondus).

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Le cycle du combustible nucleaire

3.3. Les etudes de transmutation Remarque. On etend la definition de la transmutation en y ajoutant les reactions de fission (parfois appelees reactions « d'incinerations » quand il s'agit de detruire des actinides transuraniens).

Les programmes sur la transmutation evaluent le potentiel de transmutation des dechets a vie longue en reacteurs critiques ou dans des systemes hybrides. Sur les reacteurs critiques, les programmes se decomposent en deux grands domaines : -

-

les etudes de la neutronique de la transmutation et de scenarios, integrant les etudes de physique de base, pour completer et ameliorer les donnees nucleaires (valeurs de sections efficaces) et les schemas de calcul, avec quantification des incertitudes ; les etudes experimentales sur les combustibles et cibles, qui ont permis de definir des families de nouveaux types de combustibles adaptes a la transmutation, et de debuter les experiences d'irradiations dans le reacteur rapide Phenix a Marcoule, dont le programme experimental d'irradiations est consacre a ces etudes, et qui fait, a cette fin, I'objet de travaux d'inspection, renovation et maintenance.

Les programmes sur la transmutation en systemes hybrides sont menes notamment dans le cadre du Groupement de Recherche GEDEON regroupant le CEA, le CNRS, EOF et FRAMATOME, ainsi que I'ANDRA. Les performances potentiel les de la separation-transmutation sont evaluees globalement a travers des etudes de scenarios, qui prennent en compte des pares futurs de centrales nucleaires et des usines du cycle adaptees a I'objectif. Les etudes menees notamment depuis 1998 considerent cinq grandes families de scenarios : trois font appel aux technologies actuelles (pare tout REP avec combustible plutonium MOX ou MIX, ou tout RNR, ou encore mixte REP et RNR) et deux considerent des technologies innovantes (pare mixte REP [UOX] et systemes dedies incinerant le plutonium, les actinides mineurs et les produits de fission a vie longue, ou pare a « double strate » ou les REP et les RNR multirecyclent le plutonium et les hybrides purement « incinerateurs » transmutent les actinides mineurs et les produits de fission a vie longue). Dans une optique de reduction de I'inventaire de plutonium, et non de surgeneration, les reacteurs rapides pris en consideration dans les scenarios sont du type « CAPRA », avec consommation accrue de plutonium grace a un cceur tres charge en plutonium.

L'etude inclut aussi une prise en compte des options de separation-conditionnement (SC), recommandees par la CNE, et des gains respectifs qu'apportent les differents scenarios considered de separation-transmutation-conditionnement, en considerant la radiotoxicite potentielle apres conditionnement, prenant en compte la mobilisation potentielle des radionucleides a vie longue depuis leur forme conditionnee, et en quantifiant ainsi les gains des divers types de conditionnements. Cette contribution aux etudes de scenarios couples axe 1-axe 3 est effectuee dans le cadre de I'axe 3. Les performances de transmutation etant de toute fagon mediocres, tous les scenarios sont complexes et en outre demandent de nombreux recyclages, ce qui se traduit par un important inventaire de masses tres actives tournant dans le cycle, avec un risque accru a court terme. Globalement, avec les hypotheses de ces premieres etudes qui supposent une longue exploitation des systemes dans le cadre d'un nucleaire futur (car il faut de tres nombreux cycles), on pourrait obtenir des gains limites de I'ordre de 100 en inventaire de

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radiotoxicite, par rapport au cycle sans retraitement, pour les scenarios de multirecyclage du plutonium, associes a la strategic separation-transmutation specifique des radionucleides a vie longue, en reacteurs a eau legere ou a spectre rapide. II faut remarquer que la transmutation du curium, le plus difficile a separer et a manipuler, doit etre effective, sinon le gain en inventaire serait limite a 10 environ. Mais le gain essentiel provient du multirecyclage du plutonium (gain de 3 a 10, soit environ de 65 a 90 % du gain total possible ; Figure 21.1).

Figure 21.1. Gain sur la radioactivite des dechets de longue vie par la transmutation. 1 : RNR plutonium + actinides mineurs (1 %); 2 : REP (MIX) plutonium + actinides mineurs (1 %); 3 : REP-RNR plutonium + actinides mineurs (1 %); 4 : RNR plutonium ; 5 : REP-RNR plutonium ; 6 : REP (MIX) plutonium.

Ce que devront atteindre, pour 2006, les etudes en cours en France sur la transmutation c'est le reexamen des possibilites dans le contexte des progres identifies et de la strategic des pares nucleaires futurs. II est evident qu'une telle option ne peut s'inscrire que dans un deploiement large et durable de I'energie nucleaire.

4. Les programmes de recherche de I'axe 2 : Stockage en formation geologique profonde L'objectif de I'axe 2 est de fournir tous les elements permettant de decider eventuellement en 2006 la creation d'un centre de stockage en formation geologique profonde. Cela revient a confronter des concepts de stockage aux conditions particulieres rencontrees dans des sites geologiques bien definis et d'en demontrer la surete en analysant les diverses situations possibles (voir chapitre 20). Les caracteristiques des sites sont etudiees en premier lieu a partir de la surface, puis dans un second temps in situ dans des laboratoires souterrains. Le Gouvernement a autorise en

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1999 la creation et Sexploitation d'un laboratoire souterrain dans un site argileux en Meuse/Haute-Marne. En parallele, des recherches sont entreprises afin de proposer un second site en milieu granitique. Ces recherches font I'objet d'une concertation prealable organisee par le Gouvernement en application de Particle 6 de la loi du 30 decembre 1991. Les concepts de stockage reposent sur un principe de barrieres multiples comprenant le colis de dechets, les barrieres ouvragees et la barriere geologique. Le role de ces trois barrieres est d'assurer le confinement des radionucleides pendant assez longtemps pour que, s'ils venaient a migrer vers la biosphere, leur radioactivite ait suffisamment decru pour n'avoir plus d'impact sur la sante et I'environnement. Pour elaborer ces concepts et demontrer leur surete, il est necessaire d'acquerir un niveau suffisant de connaissance sur les caracteristiques des dechets a stocker, sur les proprietes des differentes barrieres et sur leurs couplages physico-chimiques, thermiques, mecaniques et hydrauliques. Nombre de ces questions relevent d'une problematique entierement nouvelle et requierent un ensemble de programmes de recherche et de developpement. Les besoins de caracterisations portent sur trois aspects. Les colis de dechets : - definir Pinventaire quantitatif des colis par nature ainsi que I'inventaire de leur contenu, en terme de radionucleides et de toxiques chimiques, en tenant compte des ecarts possibles entre les inventaires et la realite ; - definir les conteneurs et les matrices de confinement des radionucleides. Les barrieres ouvragees. Leurs caracteristiques dependent de la nature des materiaux proposes (argiles, liants hydrauliques) ainsi que des modalites de leur mise en forme et mise en place. Cette connaissance permet d'evaluer la stabilite des materiaux sur le long terme et done de selectionner ceux qui sont le mieux adaptes aux conditions du stockage. La barriere geologique. Elle doit presenter des caracteristiques particulieres au niveau de la teneur en eau et surtout de la mobilite de Peau. Devant assurer le confinement pendant des durees qui se comptent en dizaines, voire centaines de milliers d'annees, la barriere geologique doit etre stable a cette echelle de temps. Les etudes de caracterisation de Petat actuel visent a la comprehension du systeme nature! et a la prevision de ses evolutions possibles. Les programmes de recherche et developpement portent essentiellement sur le comportement a long terme de chacune des barrieres, dans le contexte du stockage. La specificite des programmes tient notamment au besoin de connaissances sur les phenomenes de faible amplitude sur de grandes echelles de temps, par exemple : - pour les colis : corrosion des aciers en milieu reducteur, mise en solution de traces de radionucleides a partir de matrices de conditionnements extremement stables ; - pour les barrieres ouvragees : evolution des fonctions recherchees et des performances sous faibles flux d'eau, couplages forts entre les comportements mecanique, thermique, hydraulique et geochimique ; - pour les barrieres geologiques : effet a long terme de petites deformations, transferts de matieres en milieu pauvre en eau libre, identification des phenomenes passes et analyse des conditions de leur reproduction dans le futur, et consequences ; effets de la perturbation du milieu geologique par Pouverture du chantier de stockage (decharge

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mecanique, oxydation, dessechement, echauffement); etude de la restauration de I'etancheite apres fermeture du stockage. Toutes ces connaissances permettent de consolider des concepts de stockage, c'est-a-dire, a chaque fois, un agencement de barrieres et une architecture generale efficaces et techniquement realisables. La surete des concepts est ensuite analysee a partir de differents scenarios d'evolution en verifiant: -

la robustesse de la conception, c'est-a-dire sa resistance aux differentes formes de sollicitations et meme d'incidents futurs ; I'absence d'impact sur I'environnement et sur rhomme au-dela des limites sanitaires reglementaires (reference la regie fondamentale de surete RFS lll.2f); la possibilite de reprendre les colis, pour repondre a une specification eventuelle de reversibilite du stockage.

Le schema d'enchamement general des etudes, pour le site argileux choisi dans Test de la France, illustre les etapes cles de la conception d'ici 2006. Elles s'organisent autour de trois dates cles correspondant aux differents stades de ('analyse de surete : 1 re et 2 e verifications de surete en 2001 et en 2004 et demonstration de surete en 2005. Un schema analogue sera etabli pour les recherches a engager sur un nouveau site granitique.

5. Les programmes de recherche de I'axe 3: Conditionnement et entreposage de longue duree 5.1. La structure des programmes L'objectif de I'axe 3 est, d'une part de developper le conditionnement des dechets radioactifs a vie longue pour assurer un confinement sur et durable, sous la forme d'objets « manutentionnables », les colis, et d'autre part, d'etudier des installations d'entreposage de longue duree en surface ou subsurface, permettant de proteger durablement ces colis et d'en garantir la possibilite de reprise a terme assez eloigne. Les programmes de recherche sont done structures selon deux volets : •

I'elaboration et la connaissance des colis : - etude des precedes de conditionnement (matrices et conteneurs), - etude du comportement a long terme des colis, - caracterisation des colis et soutien aux producteurs pour la realisation des dossiers de connaissances qui sont exiges par I'ANDRA et les autorites de surete ; • la definition des concepts d'installation d'entreposage de longue duree en surface ou subsurface et leur evaluation de surete. Les programmes prennent en compte ('ensemble des categories de colis suivantes : •

les colis resultant de la gestion industrielle presente du cycle du combustible : - dechets conditionnes au standard industriel, produits par les usines de retraitement de La Hague (dechets C vitrifies, colis B betonnes, compactes...),

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Le cycle du combustible nucleaire

- les combustibles irradies qui ne sont pas retraites a court terme, pour lesquels les recherches sont conduites en considerant I'ouverture des options a I'issue de la periode d'entreposage ; - les dechets du cycle industriel anterieur au palier des nouvelles usines de La Hague et les colis produits par les operations d'assainissement, notamment a Marcoule apres I'arret definitif de I'usine UP1 ; - les types de dechets pouvant repondre a un spectre large de scenarios de I'industrie nucleaire du moyen terme.

5.2. Le traitement et le conditionnement des dechets Les developpements dans le domaine des etudes de traitement et conditionnement ont pour objectif: - d'etudier la faisabilite scientifique et technique de modes de conditionnement specifiques des radionucleides a vie longue (Am, Cm, Np, Cs, I, Tc), en support technique a I'option separation-conditionnement de I'axe 1 ; - de proposer des precedes nouveaux de traitement et de conditionnement des dechets HAVL. Les developpements concernent principalement: -

la vitrification des dechets B et C en « creuset froid », technique qui devrait encore augmenter la qualite des verres nucleaires ; un precede de traitement et conditionnement par torche a plasma, permettant de conditionner un eventail tres large de types de dechets ; un precede alternatif a I'enrobage dans le bitume ; les conteneurs pour les combustibles irradies et pour les dechets B, et leur qualification.

D'autres precedes font I'objet d'une veille technologique active ou d'un soutien aux applications industrielles : precedes de decontamination, traitements amont. Les etudes sur le conditionnement specifique des radionucleides separes ont sensiblement progresse. On a notamment identifie des matrices candidates pour le conditionnement de I'iode (apatite) et des actinides (zirconolites...). Ce domaine beneficie des recherches en modelisation atomistique qui permettent de simuler sur ordinateur les structures des materiaux etudies, et d'en prevoir les proprietes.

5.3. Le comportement a long terme des colis L'objectif du conditionnement des dechets etant d'assurer un confinement performant et durable, pour toutes les phases de gestion ulterieure des colis, le programme Comportement a long terme des colis (CLTC) apporte le cadre et les moyens scientifiques qui permettront de statuer sur le comportement a long terme des colis du point de vue des fonctions qui leur sont demandees, notamment le confinement et la manutention, dans les conditions d'entreposage de longue duree et du point de vue de I'aptitude au stockage. Le plan de recherche et developpement est construit autour de trois rendez-vous principaux : en 1999, un etat des connaissances du comportement a long terme des colis connus ou envisages ; en 2001 une premiere synthese des connaissances sur le

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comportement a long terme des colis avec prise en compte des mecanismes couples ; en 2006 la synthese finale des connaissances, integrant les resultats experimentaux en actif. Les premiers modeles operationnels, presentes dans les Documents de Synthese de Connaissance CLTC, produits en 1999-2000 dans le cadre du projet CLTC, concernent ('alteration par I'eau des verres nucleaires, des enrobes bitume et des materiaux cimentes, ainsi que I'evacuation des gaz de radiolyse dans les enrobes bitume. Ces modeles ont deja permis d'obtenir des premieres estimations des caracteristiques de durabilite des differentes matrices. Le programme de recherche sur revolution a long terme du combustible irradie PRECCI est mene en etroite collaboration avec EOF. Les premiers resultats ont ete notamment la consolidation du terme de production d'helium, la determination d'une premiere loi de fluage de la gaine, et la revision -de la phenomenologie de base du comportement a long terme de la matrice d'oxyde d'uranium. Un important resultat a ete obtenu en 1999 sur le comportement a long terme des verres nucleaires (qui contiennent 97 % de I'activite des dechets que produit I'industrie electronucleaire), en produisant un modele devolution qui prend en compte le couplage entre les trois elements que constituent le verre sain, la couche de gel (verre altere), et I'element qui est a I'origine de ('alteration a long terme : I'eau. Ce modele est en accord avec I'ensemble du corpus experimental capitalisant la quinzaine d'annees de recherches dont beneficient les verres nucleaires. II rend compte de la faible sensibilite des taux d'alteration a diverses situations (fracturation du verre), et conduit a des fractions de verre altere de I'ordre de 10~7 an"1 dans des conditions d'environnement types (c'est-a-dire 99,9 % du verre toujours intact apres 10 000 ans d'interaction avec I'eau). La modelisation et la validation experimental des autres types de colis ont aussi progresse depuis ces dernieres annees : materiaux cimentes, enrobes bitumes, coques et embouts compacted, et sont menees en collaboration avec COGEMA.

5.4. La caracterisation des colis Pour assurer, avec des procedures de qualite et de tragabilite, la gestion des colis de dechets dans la duree, il faut disposer des connaissances sur ces colis. Ces connaissances contribuent a confirmer I'aptitude du colis a repondre d'une part aux specifications de stockage geologique de I'ANDRA et d'autre part aux caracteristiques necessaires pour ('acceptation dans une installation d'entreposage de longue duree. II importe aussi de pouvoir conserve/" la memoire des caracteristiques du colis, dans le cadre des modes de gestion a long terme a considerer, et en tenant compte de la reversibilite. La demarche du programme est centree sur la gestion (acquisition, maintenance et disponibilite) des connaissances attachees aux colis et sur I'acquisition par la mesure de ces connaissances, avec I'objectif: -

de justifier, a terme, qu'un colis Industrie! comcide bien avec le colis type considere dans les etudes de conception ; de garantir la disponibilite des moyens permettant la mattrise dans la duree des connaissances attachees aux colis nucleaires.

II importe en effet de disposer des installations et des moyens de mesure des colis (methodes analytiques de quantification des radionucleides a vie longue a considerer dans

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Le cycle du combustible nucleaire

les etudes de surete, mesures nucleaires pour le controle non destructif) afin d'en determiner le contenu ou d'en verifier la conformite (inventaire radioactif, etat physique du conteneur et de la matrice...). [.'installation Chicade du CEA a Cadarache, avec le nouveau bailment Moyenne Activite mis en actif en novembre 1997, et notamment la cellule Alceste d'examen sur colis, contribue utilement a la qualification de ces developpements.

5.5. L'entreposage de longue duree en surface ou en subsurface L'entreposage est un mode de gestion provisoire des colis de dechets assurant, par conception, leur conservation et leur reprise ulterieure, dans des conditions sures et techniquement etablies. L'objectif du programme est d'aboutir a des concepts d'entreposage de longue duree, qui se caracterisent par le fait que leur conception, leur realisation et leur mode d'exploitation permettent, des I'origine, d'envisager un entreposage d'une seule traite sur une duree seculaire, contribuant ainsi a accrottre I'ouverture et la flexibilite des solutions envisageables pour I'aval du cycle. Les programmes ont bout but de produire les elements scientifiques et techniques sur les modes de realisation et les regies de fonctionnement d'un entreposage de longue duree, ainsi que les bases de connaissance permettant d'etablir sa faisabilite, notamment du point de vue de la surete. Deux principes directeurs guident I'ensemble des etudes : -

ces entrepots sont par definition susceptibles de recevoir tous les colis connus ;

-

un entreposage, meme optimise pour une duree seculaire, presente par definition un caractere provisoire et n'est pas techniquement destine a devenir definitif pour des durees multimillenaires; il differe en cela du stockage en formations geologiques profondes qui peut etre reversible ou irreversible, mais qui doit par definition etre techniquement capable de devenir definitif pour de telles durees.

L'entreposage se distingue du stockage par le fait, qu'etant provisoire, il ne necessite pas de faire appel, meme pour des durees seculaires, aux proprietes de confinement du milieu constitutif du site d'implantation. A contrario, le stockage en formations geologiques profondes s'appuie sur le milieu geologique d'accueil pour etre techniquement capable de devenir definitif, le milieu apportant le confinement multimillenaire requis. Les caracteristiques de site requises pour une installation d'entreposage de longue duree ne faisant pas appel aux proprietes de confinement a long terme de ce site, il n'y a done pas, dans ce sens, de notion de « laboratoire de surface ou de subsurface » pour I'etude de I'entreposage de longue duree. Les caracteristiques sont suffisamment generales et permettent de considerer de nombreuses potentialites d'implantation sur le territoire metropolitain.

6. Le rendez-vous de 2006 La loi a prevu ('evaluation continue des recherches dont elle a fixe les axes, en mettant en place la Commission nationale devaluation (qui comporte quelques experts non

27 - Voies de recherche en France (loi de 1991)

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nationaux). Elle a en outre etabli un rendez-vous pour le Parlement, 15 ans apres sa publication done en 2006, en vue de prendre de nouvelles decisions politiques en fonction des resultats des recherches. II y a done une obligation pour les chercheurs a remettre a temps leurs resultats, avec des elements aussi clairs que possible. II est deja previsible que les trois axes ne donneront pas un choix de solutions alternatives, mais ouvriront une flexibilite grace a des solutions complementaires. Cette flexibilite sera utile a la fois pour la gestion des dechets du passe, celle des dechets du pare actuel de centrales et des usines du cycle, et enfin pour la strategic du futur de I'energie nucleaire.

Cette page est laissée intentionnellement en blanc.

Le cycle du combustible nucleaire Origine des illustrations

Chapitre 1. Cycle ouvert ou ferme ? Les outils industriels Fig. 1.2 : Le cycle du combustible nucleaire, doc. COGEMA Chapitre 3. Geologie de I'uranium et extraction miniere Fig. 3.1 : Mineral d'uranium jaune, doc. COGEMA Fig. 3.2 : Mine d'uranium a ciel ouvert au Niger, doc. COGEMA Fig. 3.4 : Yellow cake, doc. COGEMA Fig. 3.5 : Reserves d'uranium dans le monde, doc. COGEMA Fig. 3.6 : Historique de la production et de la consommation d'uranium, doc. COGEMA. Chapitre 4. Conversion de I'uranium : des concentres a I'hexafluorure Fig. 4.1 : UF6 cristallise, doc. COGEMA Fig. 4.2 : Capacites de conversion UF6 dans le monde, doc. COGEMA Chapitre Fig. 5.1 Fig. 5.2 Fig. 5.3 Fig. 5.4 Fig. 5.5 Fig. 5.6 Fig. 5.7 Fig. 5.8

5. Enrichissement en uranium fissile Capacites d'enrichissement d'uranium en 2000, source COGEMA Prix de I'enrichissement, doc. COGEMA Schema d'un etage de diffusion gazeuse, doc. INSTN Profil ideal et reel des debits d'etages en diffusion gazeuse, doc. INSTN Teneur de rejet optimale de I'enrichissement, doc. CEA Modules d'EURODIF, doc. COGEMA Schema de principe d'une centrifugeuse, doc. CEA Schema de principe de I'enrichissement laser en vapeur atomique, doc. CEA

Chapitre 6. Fabrication de la ceramique nucleaire et de I'assemblage Fig. 6.1 : Assemblage de combustible REP 17x1 7, sa grappe de commande et crayon combustible, doc. COGEMA Chapitre 7. Effets de I'irradiation sur le combustible en reacteur Fig. 7.1 : Masse des produits de fission par elements chimiques, doc. INSTN Fig. 7.2 : Principales chames de formation de noyaux lourds artificiels, doc. INSTN Fig. 7.5 : Surete et radioprotection dans I'aval du cycle, doc. COGEMA Chapitre 8. Refroidissement et entreposage en piscine Fig. 8.1 : Piscine d'entreposage de combustibles irradies (La Hague), doc. COGEMA Fig. 8.2 : Panier d'entreposage de combustibles irradies (La Hague), doc. COGEMA Chapitre Fig. 10.1 Fig. 10.2 Fig. 10.3

10. Operations de tete du retraitement : Principe du cisaillage, doc. COGEMA : Schema de la cellule de dissolution continue, doc. COGEMA : Schema du dissolveur rotatif, doc. CEA

Chapitre 11. Operations d' extraction Fig. 11.5 : Appareils d'extraction, doc. COGEMA

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Le cycle du combustible nucleaire - Origine des Illustrations

Chapitre 12. Conditionnement final du plutonium Fig. 12.1 : Schema de la precipitation oxalique, doc. COGEMA Fig. 12.2 : Colis de plutonium, doc. COGEMA Chapitre 14. Transports nucleaires Fig. 14.1 : Transports dangereux et nucleaires en France, doc. COGEMA Fig. 14.2 : Matieres radioactives transporters pour le cycle du combustible, doc. COGEMA Fig. 14.3 :Exemples de colis nucleaires du cycle du combustible, doc. COGEMA Fig. 14.4 :Composantes d'un emballage pour combustible use, doc. COGEMA Chapitre 15. Aspects d'ensemble des dechets et effluents du cycle Fig. 15.1: Type de dechets solides a chaque etapes du cycle du combustible, doc. COGEMA Fig. 15.2 : Exemple de controle de rejets actifs autour de La Hague, doc. COGEMA Fig. 15.3 : Evolution des rejets actifs liquides du site de La Hague, doc. COGEMA Chapitre Fig. 16.1 Fig. 16.2 Fig. 16.3 Fig. 16.4 Fig. 16.5 Fig. 16.6 Fig. 16.7 Fig. 16.8 Fig. 16.9

16. Conditionnement des dechets de retraitement Repartition des activites dans les dechets du retraitement, doc. COGEMA Schema d'ensemble des dechets du retraitement, doc. INSTN Precedes frangais de vitrification des dechets de haute activite, doc. COGEMA Dechet vitrifie, doc. COGEMA Dechet compacte, doc. COGEMA Dechet enrobe dans le bitume, doc. COGEMA Dechet enrobe en conteneur beton-fibre, doc. COGEMA Dechet cimente bloque, doc. COGEMA Volume des dechets conditionnes du retraitement, doc. COGEMA

Chapitre 17. Recyclage de I'uranium et du plutonium Fig. 17.1 : Zonage d'un assemblage MOX, doc. COGEMA Fig. 17.2 : Reacteurs europeens charges en combustible MOX, doc. COGEMA Chapitre 18. Stockage definitif et entreposage Fig. 18.1 : Centre de stockage de la Manche, doc. ANDRA

Fig. 18.2 : Tumulus et monolithe au Centre de le mache, doc. ANDRA Fig. 18.3 : Centre de stockage de I'Aube, doc. ANDRA Fig. 18.4 : Cases et toits mobiles au Centre de I'Aube, doc. ANDRA Fig. 18.5 : Schema d'entreposage de dechets vitrifies, doc. COGEMA Chapitre 19. Aspects du risque a tres long terme des dechets de haute activite Fig. 19.2 : Decroissance de I'activite du combustible use et des dechets vitrifies, doc. CEA Fig. 19.3 : Evolution de I'inventaire radiotoxique des composants du combustible use, doc. CEA Chapitre 20. Stockage geologique multibarriere solution de reference Fig. 20.2 : Evaluation de I'impact d'un stockage geologique (granite), doc. IPSN Chapitre 21. Voies de recherche en France (loi de 1991 ) Fig. 21.1: Gain sur la radioactivite des dechets de longue vie par transmutation ; diagr. CEA

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